Library ( HALSTEAD PLACE SPF : LA PH Fa AAA h “ - ' . : " È ETAT ' 14 : 41 . » L 0" ï K ui 7" À t n) CEE = DT * f Ft ü " sd 7 ‘ ? , . r . 2 : + =. ù . * LI : 1 _ * Ê P . [el AQU à ANNALES DU MUSEUM D'HISTOIRE NATURELLE. ANNALES DU MUSÉUM D'HISTOIRE NATURELLE, PAR LES PROFESSEURS DE CET ÉTABLISSEMENT. OUVRAGE ORNÉ DE GRAVURES. TOME DIX-SEPTIÈME. LIBRARY NEW YORK BOTANICAL GARDEN. A PARIS, cHez G. DUFOUR £ET COMPAGNIE, LIBRAIRES, RUE DES MATHURINS-SAINT-JACQUES, N°. 7. 1811. NOMS DES PR OFESSEURS. Messieurs , HA Ne... Minéralosie, Fausas-Sarnr-Fonp . Géologie, où Histoire naturelle du globe. LAUGIER. .. .-. . ,.. Chimie. générale. VAUQUELIN. . . ._. Chimie des Arts. DESFONTAINES. . . . Botanique au Muséum. | . A. L. Jussieu . . . Botanique à la campagne. A. THourn. . . . . Culture et naturalisation des végétaux. Gsrorrroy-Sr.-HiLarre. Mammilères et oiseaux. . . . . LacépèDE . . . . . Reptiles et poissons. . . . . . . & Zoologie. Lamarcx. . . . . . Insectes, coquilles, madrépores, etc. PoRTAL. + . + . . Anatomie de l’homme, Cuvier. . . . . . Anatomie des animaux. VANSPAENDONCK. . . Iconographie, ou l’art de dessiner et de peindre les Ù productions de la nature. DETEDZE +. dm: Secrétaire de la Société des Annales. OCT 19 1910 ANNALES DU MUSEUM D'HISTOIRE NATURELLE. ANALYSE De la Pierre tombée à Charsonville près Beau- gency, le 25 novembre 1810. PAR M VAUQUELIN. Je crois devoir faire précéder cette analyse par la relation du phénomène, envoyée au Ministre de l'Intérieur par M. Pellieux aîné, médecin à Beaugency, et par la description de cette pierre que M. Haüy m'a communiquée. « Le vendredi 23 novembre, dit M. Pellieux, à une heure et demie après midi, le temps étant très-calme et serein, le vent au sud, le thermomètre de Réaumur à 12 degrés et le baromètre à 27 pouces 6 lignes, on a entendu dans la ville, et surtout à la campagne, une explosion quia duré quelques minutes et dans laquelle on a distingué trois fortes détona- tions qui se sont succédées et qui sembloient être l'effet d’une mine considérable, où plutôt l'explosion d’un magasin à poudre. Les gens de la campagne ont été d’autant plus ef- frayés, qu'indépendamment du bruit qui s'y étoit fait en- Ge ‘ ; ) 2 2 ANNALES DU MUSÉUM tendre plus distinctement, ils ont vu dans l’atmosphère un globe de feu qui se dirigeant du Nord au Sud avoit formé au moment de l'explosion une trainée de feu considérable dans toute sa direction. » Cet événement extraordinaire, et dont on ignoroit la cause, avoit jeté l’alarme parmi tous les citoyens. A huit heures du soir le bruit se répand tout à coup qu'il avoit été occasionné par l'explosion subite du pare d'artillerie de la garde impé- riale en garnison à Blois, et la nuit se passa dans des inquié- tudes affreuses sur le sort des habitans de cette ville. » Cette fâcheuse nouvelle s’étoit tellement acréditée le lendemain qu'on en expliquoit les circonstances et qu'on dé- signoit le nombre des victimes de ce malheureux accident; mais elle fut bientôt démentie par le rapport que vient de me faire à dix heures, le nommé Jean-Charles Hénault, fer- mier de la métairie de Mortelle, distante de quatre lieues de notre ville et située entre les bourgs d’'Espieds et de Char- sonville. « Voici le rapport que ce particulier m'a fait. » « Hier à une heure un quart après midi, étant sorti de la ferme avec le garçon charretier, nous avons vu en l’airun globe de feu considérable, venant du Nord, et qui, après avoir fait un long trajet, est venu crever au-dessus de notre tête, lan- cant de tous côtés feux et flammes. Nous avons entendu aussitôt trois coups qui se sont succédés à quelque distance les uns des autres, et nous ont paru semblables à trois forts coups de canons; à ce bruit a succédé un sifflement extraor- dinaire produit par une pierre accompagnée de fumée très- D'HISTOIRE NATURELLE. à épaisse qui a été lancée à très-peu de distance de nous et à fait jaillir la terre où elle est tombée à la hauteur de plus de einq pieds. » Revenus de notre frayeur, nous avons été à l'endroit mème où elle étoit tombée; mais craignant qu’elle ne se re- levèt, nous avons attendu quelque temps, d'autant plus que nous avions besoin d'outils pour la retirer de la terre où elle s'étoit enfouie à la profondeur de deux pieds ou environ; elle étoit encore chaude et pesoit vingt livres. Tous les häbi- tans du voisinage sont accourus au bruit, et chacun en à voulu avoir un morceau. » « Cette pierre, dont le sieur Hénault m'a apporté un frag- ment très-peu considérable, avoit avant d’être brisée la forme d’un carré long de six pouces sur cinq pouces d’épais- seur; elle éuncelle sous le briquet et produit un son mat lorsqu'elle est frappée avec un instrument de fer. » Voici actuellement ce que j'ai observé moi-mème, d’après l'examen du fragment que j'ai entre les mains. » Cette pierre est recouverte d’une croûte presque noire et enfumée, d’un gris cendré dans son intérieur et parsemée de points brillans qu'on prendroit pour du 77ca; mais vus au microscope, on reconnoit bientôt que ces points sont autant de globules métalliques de‘la nature du fer, puisque la pierre est en entier attirable à l’aimant. Son poids est assez considérable pour son volume, et elle ne présente à l’inté- rieur ni vide ni boursouflure. Lorsqu'elle est frottée contre un corps dur, elle se polit et acquiert dans cet endroit le brillant métallique, et elle ne m'a pas paru, lors du frotte- I * A ANNALES DU MUSÉUM ment, répandre aucune odeur de soufre, ce qui prouve qu'il a été détruit entièrement par l'action du feu; mais comment se fait-il que le fer lui-même, par cette action, n'ait pas passé à l’état de schortes. » Je laisse aux savans à expliquer ce phénomène; je dois seulement ajouter que ce météore a paru par un temps calme et serein; mais que ce beau temps avoit été précédé par plu- sieurs jours d'ouragan qui ontcausé des dégâts affreux, ainsi que des orages pendant lesquels la foudre est tombée en difté- rens endroits : ce qui prouve que le météore igné que je viens de décrire a un rapport intime avec la matière électrique répandue dans l'atmosphère, et que l’un et l’autre sont les effets d’une seule et même cause; ce qui le prouve encore, c’est que dans les nuits qui ont précédé la détonation qui s’est faite vendredi, une aurore boréale faisoit paroitre au Nord l’horison tout en feu, ce qui n’a plus lieu, dit-on, depuis la chute de cette pierre météorique, qui n’est peut- être pas la seule qui ait été jetée sur la terre, puisque ce phénomène ayant été vu en même temps à de grandes dis- tances et dans la même région du ciel, l'explosion a dù se faire à une hauteur considérable. » Baugency , le 24 novembre 1810. Description de la Pierre par M. Haïy. « L’aërolithe tombé à Charsonville, le 23 novembre 1810, et donné au Muséum par Son Excellence le Ministre de l'Inté- rieur, comte de Montalivet, est, comme tous les corps qui ont la même origine, recouvert d’une croûte très-mince D'HISTOIRE, NATURELLE. 5 d’une couleur noire. L'intérieur est d’un gris clair, traversé par une veine noirâtre, ce qui n'a été remarqué jusqu'ici dans aucune pierre de ce genre. Le tissu est granuleux, et plus serré que celui des aérolithes tombés à l'Aigle, à Einsisheim, et en général de tous ceux qui ont été observés au Muséum. Cette pierre renferme un grand nombre de grains de fer à l'état métallique, que l’on distingue facilement à la vue simple. On aperçoit aussi dans son intérieur quelques glo- bules blanchâtres, analogues à ceux que contiennent diverses autres pierres du même genre, et spécialement celles qui sont tombées à Bénarès, dans les Indes orientales, et à Wes- ton dans les Etats-Unis. Toutes les parties de l’aérolithe, même celles où l'œil ne découvre aucune trace de fer, exercent une action très-sensible sur l'aiguille aimantée, et cette action s'étend jusqu'aux moindres parcelles détachées de la masse. Cette pierre donne, à certains endroits, des éuncelles par le choc du briquet, et ses fragmens aigus raient légèrement le verre. Sa pesanteur spécifique s'accorde avec l'indication de son tissu et de sa consistance. Elle est de 3,51, c’est-à-dire, un peu plus forte que celles des autres aérolithes qui, jusqu'à présent, n'a pas été au delà de 3,5. On voit par la description précédente que la pierre tombée à Charson- ville ressemble beaucoup par son aspect et par ses princi- paux caractères à toutes le$autres qui étoient déjà connues, avec la différence que ses molécules paroissent avoir subi un rapprochement plus intime, soit originairement, soit pen- dant le refroidissement qui a suivi l’incandescence. » On sait aujourd’hui, par les analyses des différens chimistes, 6 ANNALES DU MUSÉUM que les pierres tombées de l'atmosphère, ou les aérolites , sont composées des substances suivantes : 10. de silice, qui forme la plus grande partie de leur masse; 20. de fer, qui en est ensuite lingrédient le plus abondant; 30. de magnésie , qui tient la troisième place dans l’ordre des quantités ; 4°. de chrôme; 50. de nikel; 6°. d’alumime; 50. de soufre; 8. de chaux. Ces cinq dernières substances ne s’y trouvent qu’en très-petite quantité. Quoique les moyens propres à séparer les unes des autres les huit matières dont je viens de parler, soient familiers à tous les chimistes de profession, et qu'il fût suflisant, si l’on. n'écrivoit que pour eux, d'exposer d’une manière générale la méthode qu'on auroit suivie pour qu'ils pussent juger si l’on a bien ou mal opéré, cependant comme il pourroit être agréable aux jeunes gens et aux amateurs de répéter ces ana- lyses, aujourd’hui que les pierres atmosphériques se multi- plient et qu'il est facile de s’en procurer, nous avons eru devoir entrer dans des détails suflisans pour les guider dans ce travail intéressant, mais assez compliqué, EXPÉRIENCE Î"°. Voulant savoir si cet aérolite contenoit du chrôme comme ceux qui ont été précédemment analysés, j'en ai fait fondre cinq grammes avec trois parties de potasse caustique, à la- quelle j'ai ajouté un peu d’eau pour faciliter le mélange. J'ai remarqué que ce mélange a pris une couleur verte, même avant d'éprouver l’action de la chaleur, phénomène qui an- nonce, comme on le verra plus bas, da présence du chrôme ; "] / D'HISTOIRE, NATURELLE. , « , \ « £. * J = N à » cette couleur a passe au Jaune légèrement veraatre pa la fu- sion de la matière. ExPÉRIENCE If. Après avoir chauffé cette matière avec la potasse, j'ai dé- layé dans l’eau la masse qui en est résultée, la liqueur a pris une couleur jaune-verdâtre; lorsque de nouvelles quantités d’eau ont cessé de se colorer en passant sur la masse, j'ai réuni tous les lavages et je les ai réduits sous un petit volume par l'éväboration. Pendant cette opération, l’oxide de man- ganèse s’est précipité sous la forme d’une poudre noire: alors la liqueur avoit une couleur jaune pure. EXPÉRIENCE III. Cette couleur jaune ne me laissoit aucun doute sur l’exis- tence du chrôme dans cet aérolite, mais la potasse devant avoir dissout quelques portions de silice et d’alumine, en même temps que le chrôme, j'ai saturé avec précaution, au moyen de l’acide- nitrique, lexcès d’alcali contenu dans la liqueur, et j'ai évaporé cette dernière avec ménagement jus- qu'à siccité. On conçoit que par cette opération la potasse qui tenoit la silice et l’'alumine en dissolution ayant été saturée par l'acide nitrique, ces deux terres se sont séparées par la. dessiccation de la liqueur, et que le chromate de potasse soluble par lui-même, n'étant pas dans ce cas décomposé par l'acide ni- trique, a pu être obtenu à l’état de pureté au moyen de la dissolution. Ainsi, après avoir desséché légèrement la matière 8 ANNALES DU MUSÉUM ci-dessus, je l'ai traitée avec de l’eau tiède, et j'ai obtenu une liqueur d’une couleur orangée très-belle. Pour m'assurer si véritablement la couleur de cette liqueur étoit produite par l'acide chrômique, j'y ai mêlé du nitrate de mercure au minimum d'oxidation, et j'ai obtenu un pré- cipité rouge-orangé qui, lavé, séché et ‘calciné, m'a fourni un bel oxide vert : ce qui démontre évidemment la présence du chrôme. M’étant ainsi convaincu de l’existence du chrôme et du manganèse dans la pierre du ciel, j'ai réuni à la masse, insoluble dans l’eau, la silice et l’alumine qui en avoient été enlevées par la potasse et séparées comme on l’a vu plus haut. EXPÉRIENCE IV°. J'ai traité par l'acide muriatique très-affoibli, la matière qui avoit été fondue avec la potasse, et qui n'avoit pas été dissoute par l’eau lors du lavage que je lui avois fait subir pour en séparer le chrôme et le manganèse : la dissolution s’en est opérée avec assez de facilité, il est resté seulement quelques atômes de poussière blanclre qui étoit de la silice : la dissolution avoit une couleur jaune-rougeàtre. La silice combinée avec une quantité suflisante d’alcali étant soluble dans les acides affoiblis, celle qui pouvoit être contenue dans la pierre devoit s'être unie en même temps que les autres matières à l'acide muriatique que j'ai employé ici, et cet acide abandonnant aisément la silice à une chaleur incapable de décomposer les autres combinaisons qui l’accom- pagnent, j'ai fait évaporer la liqueur ci-dessus jusqu'à siccité, en prenant les précautions convenables. D'HISTOIRE NATURELLE. 9 Cependant quelles que soient ces précautions, il est impos- sible d'éviter qu'une certaine quantité d’oxide de fer au maximum ne soit aussi abandonnée par l'acide muriatique et ne reste mêlée avec la silice, lorsqu'on vient à laver la masse pour dissoudre les matières qui sont susceptibles de l'être. Pour éviter ce mélange, j'ai aiguisé d'acide muriatique l’eau dont je me suis servi, et j'ai fait chauffer légèrement : par ce moyen, le peu de fer qui s’étoit précipité a été redissout, et j'ai obtenu la silice parfaitement pure. Cette manière d'opérer est fondée sur ce que la silice, une fois séparée de l’acide muriatique, reprend une aggrégation assez forte pour résister entièrement à une nouvelle action de la part de cet acide, tandis qu'il en est autrement à lé- gard _ fer. EXPÉRIENCE. V° La dissolution muriatique ci-dessus, dont il nous reste à isoler les élémens, devant encore contenir de la magnésie, du fer, du nikel, de la chaux, et peut-être de l’alumine, j'ai dirigé mes opérations de la manière suivante : sachant que les dissolutions de magnésie qui contiennent un excès d'acide suflisant ne sont pas précipitées par l’ammoniaque, que celles de la chaux lors même qu’elles ne contiennent point de sur- abondance d'acide ne le sont pas davantage par le même alcali, et que le nikel après avoir été précipité est redissout, re que le fer et l’alumine sont constamment précipités par Vammoniaque, quel que soit l’état de leurs dissolutions ; j'ai commencé par mettre dans ma liqueur une certaine quan- tité d'acide muriatique, et j'y ai ensuite versé de l’ammo- = te 2 17 !) 10 ANNALES DU MUSÉUM niaque en surabondance, en agitant rapidement le mélange pendant quelques minutes. Par cette manière d'agir j'ai obtenu l’oxide de fer au maxi- mum, et l'alumine qui pouvoit être contenue dans la liqueur; j'ai filtré celle-ci afin de la séparer du précipité, qui a été ensuite lavé avec une quantité suffisante d’eau pour le dé- pouiller de tout ce qu'il pouvoit retenir de matière soluble. La liqueur filtrée avoit une couleur légèrement bleue, ce qui annonce la présence du nikel. J’abandonne un instant cette liqueur pour m'occuper du précipité formé par Fammo- niaque. EXPÉRIENCE VI. Ce précipité pouvant contenir de l’alumine, je l'ai fait bouillir encore humide, par conséquent très-divisé, avec une » P I ? dissolution de potasse caustique qui a la propriété de dis- soudre cette terre, et après avoir étendu d’eau le mélange, DRE Ge MINE : É À j'ai filtré la liqueur, et jy ai mêlé du muriate d’ammoniaque en dissolution. Il s’est formé, en effet, un précipité blanc, floconneux, qui avoit toutes les propriétés de l’alumine. ) TOP L’oxide de fer débarrassé de l’alumine, comme on vient de le voir, fut lavé et séché. Ce fer examiné par différens moyens m'a paru assez pur; je n’y ai aperçu que des traces inappréciables de chaux et de manganèse. EXPÉRIENCE VII. Je reviens maintenant à la liqueur de l'expérience 5e., qui devoit contenir du nikel, de la chaux et de la magnésie. D'abord je l'ai fait chauffer pour en chasser la surabondance D'HISTOIRE NATURELLE. 11 d'alcali, j'y ai fait passer ensuite un courant de gaz hydrogène sulfuré, qui par sa combinaison avec l’ammoniaque acquiert la propriété de précipiter le nikel, sans produire le même effet sur les terres. Le sulfure de nikel obtenu dans cette opération étoit noir, assez volumineux. Les expériences aux- quelles je l'ai soumis n’ont pu m'y faire découvrir la moindre trace de cuivre; sa dissolution dans l'acide nitrique précipi- toit en jaune-verdàtre, par le prussiate de potasse, et une lame de fer qui y a été plongée ne s’est point recouverte de ce métal. EXPÉRIENCE VIIF. Pour savoir s'il y avoit de la chaux dans la liqueur, j'y ai mis de l’oxalate d'ammoniaque, qui, en effet, a bientôt oc- casionné un nuage dans toute son étendue : lorsque, par le repos, la matière qui formoit ce nuage a été déposée, j'ai mis de nouveau dans la liqueur quelques gouttes du même réactif; mais n'ayant produit aucun changement, j'ai jugé que j'en avois mis suffisamment la première fois : alors j'ai décanté la liqueur avec précaution, j'ai lavé le précipité avec de l’eau chaude. Il falloit m'assurer que ce précipité étoit bien véritable- ment de l’oxalate de chaux; pour cela, je l'ai chauffé forte- ment dans un creuset de platine, et j'ai obtenu une matière qui fusoit avec l’eau, qui avoit une saveur âcre, enfin qui donnoït à l’eau toutes les propriétés que la chaux lui com- munique ordinairement. EXPÉRIENCE IX°. Il ne me reste plus maintenant qu'à faire connoître la ma- DU F2 ANNALES DU MUSÉUM nière dont j'ai obtenu la magnésie qui devoit encore rester dans la liqueur. Après Favoir rapprochée par l’évaporation, jy ai mis du carbonate de potasse en quantité suflisante, non-seulement pour décomposer le sel triple dont elle faisoit un des élémens, mais encore le muriate d’ammoniaque pro- venant de la décomposition des autres sels, et j'ai fait bouillir dans un, ballon jusqu'à ce que Fodeur d’ammoniaque ait cessé de se faire sentir, parce que j'ai remarqué que tant qu'il reste des sels ammoniacaux quelconques dans une liqueur où il y a en même temps de la magnésie, cette dernière ne se précipite jamais entièrement. L'opération faite de cette manière m'a donné du carbonate de magnésie, qui a été lavé et calciné. Cette terre a pris par la chaleur une légère teinte grise qui y annonçoit quelques corps étrangers, et j'ai reconnu par la couleur verdâtre qu’a- voit le sulfate que j'en ai formé, qu'une trace de nikel en étoit la cause. Telle est la série des opérations qu'il a fallu faire pour séparer successivement les élémens qui composent l’aérolite tombé aux environs de Beaugency. Quoique ces expériences ne soient pas difficiles par elles-mêmes à exécuter, elles de- mandent cependant un certain raisonnement pour établir entre elles l’ordre le plus convenable à la séparation des ma- tières, pour le choix des réactifs qui conviennent le mieux dans telle ou telle circonstance, enfin pour prendre les pré- cautions nécessaires pour purifier chacun des corps à mesure qu'on les isole, etc. Je dois cependant avouer que dans une analyse aussi compliquée que celle-cr, il est difficile, pour ne pas dire im- D'HISTOIRE NATURELLE. * 13 possible, que chaque élément ne retienne pas quelques atômes de ceux qui l’accompagnent dans le composé, sur- tout lorsqu'on a pour objet principal dans son analyse de ne rien perdre. C'est ainsi qu'on retrouve quelquefois dans le fer et l’alu- mine des traces de magnésie, quand on n’a pas mis une quantité sufisante d'acide pour former le sel ammoniacal nécessaire à la saturation du sel magnésien. Si cela arrivoit, il faudroit dissoudre le tout dans l'acide sulfurique, évaporer à siccité, calciner fortement et lessiver; la magnésie seule se dissoudroit, parce que son sulfate ne se décompose pas aussi facilement que le sulfate de fer sur- oxidé. C’est encore ainsi que quelques traces de nikel sont pré- cipitées en même temps que le fer et l’alumine, si l’on n’a pas employé une assez grande quantité d’ammoniaque pour dis- soudre tout ce métal, etc. Voici en forme de tableau les proportions des principes composant l’aérolite sur 100 parties. LOUE. ee DÉC DS PBSCAREE en isenion etoile sise lie fe LE 38,4 20. Fer métallique........ etre SEEN DC CO EP HS RENNES 25,8 DÉRIMABTESIEe cette raie Me (ete ARRET DORE à 4 PR PA EE . 13,6 AI RITEN EME ER ME LEA MR RETIRE RARE ES 3,6 51 Chant SU tata een ete Sn htantas te ICO RGB RES Donc in GPACRrOMERE EN. Laste A Les ent an me TRS DE no TUE EN VE Ja ob bon bo 000 ne 1 encre 1-0 0:0 SINiR ele et ot cher hs CU SAUT ES ASE 6,» QANOUITES SA cecile Lie Stone anses AUHRENT TOTALE sienne ententes Local OUT 14 + ANNALES DU MUSÉUM Le soufre est démontré dans cette pierre par le gaz hydro- gène sulfuré qui s’en dégage lorsqu'on la traite par lacide muriatique, et par l'acide sulfurique qui se forme lorsqu'on la traite par l'acide nitrique. M OExPÉRIENCE XÙ Désirant connoiître l'effet d'une chaleur brusque sur laë- rolite, jen ai exposé un fragment dans un creuset chauffé au rouge blanc, et j'ai ensuite continué à le chauffer pendant une demi-heure : cette pierre n’a point éclaté, ni exhalé d’odeur sensible : sa couleur blanche grisètre est devenue noire, non-seulement à sa surface, mais encore dans son in- térieur : son poids a augmenté d’un 33e. Elle paroït avoir acquis une duretéencore.plus considérable que celle qui lui est naturelle; sa cohésion a surtout été très-augmentée. Lorsqu'on la frappe avec le marteau, elle lance beaucoup d’éuncelles, et cet instrument y laisse une trace brillante et métallique; la lime y découvre aussi une surface métallique. La couleur noire qu'acquiert la pierre par la chaleur est due sans doute à un commencement d’oxidation du fer, et sur- tout du manganèse. L'augmentation de sa tenacité paroït être produite par la liaison que les parties ferrugineuses auroiïent contractée, comme si elles avoient été soudées par la chaleur. La veine noire qu'on remarque dans cet aérolite, et qui le traverse, nous a paru plus attirable à aimant, et conte- nir plus de fer que le reste de la masse; mais la difficulté de s’en procurer une quantité suflisante pour en faire une ana- lyse exacte, ne nous permet pas de prononcer sur l'identité D'HISTOIRE NATURELLE. de] ou la différence entre la nature de cette veine, et celle de la matière. Il est probable que cette veine a été formée par une fêlure faite dans la pierre au moment de son incandescence, et que l'air en s'introduisant dans cette fente aura brûlé le fer, et qu'après cette combustion, les deux surfaces de cette félure se seront soudées. 16 ANNALES DU MUSEUM EXPÉRIENCES Pour déterminer la quantité de soufre que quelques mélaux peuvent absorber par la voie sèche. PAR M. VAUQUELIN. PF LUSIEURS chimistes se sont occupés à diverses époques de la détermination des quantités de soufre qui pouvoient s'unir aux métaux par la fusion; mais quand on compare les résultats que chacun d'eux a obtenus, on trouve une si grande différence qu'il est impossible de les employer avec sûreté pour servir de base aux calculs qu'on a souvent besoin de faire dans certains travaux. Ces différences ont sans doute eu pour cause la manière dont les chimistes qui se sont livrés à ce travail ont opéré, et le degré de chaleur auquel ils auront soumis leurs mé- langes. En effet, si l’on expose subitement à un feu très-vif un mélange de soufre, et d’un métal peu fusible, surtout s'il n’est pas extrêmement divisé, il est évident que la plus grande partie du soufre pourra s'échapper avant que la com- binaison ait pu se faire, et qu'il en résultera nécessairement un mélange de métal sulfuré, et de métal non sulfuré. D'une autre part, il peut arriver aussi, principalement avec les métaux très-fusibles, qu’à défaut d’une chaleur suffisante, D'HISTOIRE NATURELLE. 17 il reste avec le métal sulfuré, une certaine quantité de soufre simplement interposé entre les parties de la combinaison. Indépendamment de ces causes d’irrégularité , il ne paroit pas douteux que le même métal ne puisse se combiner à différentes quantités de soufre suivant les degrés de chaleur auxquels il se trouve exposé; et c’est sûrement là la source la plus commune des différences qui existent entre les ré- sultats des chimistes à cet égard. J'ai dans toutes mes opérations employé constamment, du moins autant qu'il m'a été possible, le degré de chaleur nécessaire pour fondre les combinaisons, et les tenir assez long-temps en fusion pour que le soufre surabondant s’en ‘séparat. Il est inutile d’avertir que dans toutes ces expériences le contact de l'air a été seigneusement écarté, en opérant dans des cornues, et quelquefois dans des creusets lorsque le cas l’exigeoit. Chaque combinaison d’un métal avec le soufre a été faite trois à quatre fois, et lorsqu'une d'elles, par son résultat, s’éloignoit trop des autres, je ne lemployois point pour en ürer la moyenne : celles dont j'ai fait usage n’ont jamais dif féré entre elles de plus de deux centièmes. Pour opérer plus facilement ces combinaisons, j'ai eu soin de diviser les métaux autant qu'il m'a été possible, et de les mêler avec trois fois autant de fleurs de soufre que je présumois qu'il en pouvoit entrer en combinaison; non-seu- lement je mélois le soufre avec le métal, mais j'en mettois dessous et dessus le mélange. Quant aux métaux dont les sulfures sont difficiles à fondre, tels que ceux de fer et de 17. 3 15 ANNALES DU MUSÉUM cuivre, par exemple, je les ai refondus jusqu’à trois fois, après les avoir pulvérisés, avec de nouvelles quantités de soufre. Je me félicite que les résultats desquels les miens se rap- prochent, en général, le plus, appartiennent à M. Proust, dont on connoit l'exactitude; je n’en diffère seulement que pour le fer, et je tâcherai d’en faire connoître la raison. Je n’ai pas besoin de dire que ce travail, en confirmant . celui de M. Proust, peut être très-utile aux chimistes et sur- tout aux métallurgistes dont les travaux s’exercent le plus souvent sur les métaux à l’état de sulfure. : VAUQUELIN. PROUST. KLAPROT. PELLETIER. Cuivre sulfuré. Cuivre...... 78,69 Cuivre......., 78 @ Soufre...... 21,31 Soufre.....:..:922 100,00 100 Etain sulfuré. Étant cl 85,9 SM Tor sl s ati te tte PITAIME 2 000 Soufre......4414,1 SVEME OU MEME OR See MROOUITES. 0-0 100,0 Plomb sulfuré. Plomb. ..:.. 86,23 Plomb......... 86 Soufre...... 13,77 Soufre...c.see. 14 100,00 Argent sulfuré. he Argent...... 87,27 + + . .« . : « . + Argent..... 85 Sonfre col. 4127008) LUN UE" SOUSoufre:: 45ltxs — 100,00 100 VAUQUELIN. Fer sulfuré. Bérard 78 Sonfre. is. Me 22 100 Antimoine sulfuré. Antimoine...., 75 SoOufreNs : ss 25 100 _ Bismuth sulfuré. Bismuth..... 68,25 Soufre:-. : ... 31,75 100,00 Manganèse sulfuré. Manganèse.... 74,5 SOUTE. see 129,0 100,0 D'HISTOIRE NATURELLE. *9 PROUST. KLAPROT. PELLETIER. 13922 168,5 Soufre...... 37,5 100,0 Antimoine.. 74,1 Soufress\1e54025;9 PAR WENZEL. PAR M. SACE. Bismuth..... . 85 Bismuth.... 60 DOUTE rte 15 Soufre... 40 100 100 Sulfire d'arsenic. Arsenique........…. CAE Dear ni] SOU ÉRE La a Id sie lies save LEON 100 NOTES SUR LES SULFURES DONT JE VIENS DE PARLER. Sulfure de manganèse. Voiei comment j'ai opéré pour obtenir ce sulfure. J'ai pris 7 grammes 25 centièmes de carbonate de manga- nèse sec et une quantité égale de fleurs de soufre que j'ai mêlés ensemble et que j’x fait chauffer dans un creuset au feu d’un fourneau ordinaire. Après avoir chauffé ce mélange pendant près d’une heure, j'ai reuré le creuset du feu, et jy ai trouvé une matière 9 DS 20 ANNALES DU MUSÉUM spongieuse, de couleur verdâtre , pesant 5 grammes 6 dixièmes. Ce sulfure ressembloit parfaitement au sulfure de manga- nèse naturel; il répandoit abondamment du gaz hydrogène sulfuré par l'acide nitrique affoibli. Huit grammes de carbonate de manganèse calcinés forte- ment dans un creuset, ont laissé quatre grammes 6 dixièmes d’un oxide vert grisètre qui ne se dissolvoit cependant pas en totalité dans lacide nitrique foible. Si au lieu de 7 grammes 25 centièmes de carbonate de manganèse que nous avons employés pour les combiner au soufre, nous en eussions pris 8 grammes, leur perte propor- tionnelle auroit été d’un gramme 82 centièmes. Or, comme il n’est pas douteux que le manganèse en se combinant au soufre éprouve une perte au moins aussi grande en eau et en acide carbonique que quand il est exposé seul au feu, il résulte que la différence des pertes vient de la quantité de soufre qui s’est combinée au métal. La perte des 8 grammes de carbonate de manganèse chauffé fortement étant d’un gramme 82 centièmes, il est évident qu'il y est resté un gramme 8 centièmes de soufre en combinaison. It suit de là que 100 parties de manganèse prennent 34 parties de soufre, ei qué 100 parties de sulfure en contiennent environ 25. Je suppose que le manganèse s’y trouve ici au minimum d’oxidation, et tel qu’il est dans le carbonate, car sa couleur est verte comme celle de Foxide au minimum; s'il étoit mé- tallique il contiendroit plus de soufre que je n’en annonce. . # Sulfure de cuivre. Le sulfure de cuivre, préparé conne je l'ai dit plus haut, D'HISTOIRE NATURELLE. 21 a été réduit en poudre, et calciné, pendant quelque temps, à une chaleur rouge dans un test à rôtir. Par cette opération le sulfure s'est fondu, et s’est attaché fortement aux parois du vase, mais il n’a exhalé aucune vapeur sulfureuse, et à pris une couleur grise verdàtre. Après cette calcination il a été mis en poudre et bouilli avec de l'eau qui n'a dissout qu’une très - petite quantité de sulfite de cuivre, mais il a été dissout en grande quantité par l'acide nitrique foible, sans dégagement sensible de gaz nitreux, et le résidu de cette dissolution étoit une matière pulvérulente d’un beau rouge, que j'ai reconnu pour du cuivre métallique. Le nitrate de baryte précipitoit abondamment cette dis- solution nitrique; l'acide sulfurique foible dissolvoit égale- ment cette substance, à l'exception du cuivre métallique, sans production de gaz sulfureux ; il en a été de même de l'acide muriatique, et le résidu qu'il laisse étoit formé d'un peu de sulfure non brülé, et de cuivre métallique. Cette dernière dissolution étoit précipitée abondamment aussi par les sels barytiques. Il résulte de ce que je viens de dire que le sulfate de cuivre calciné se convertit en sulfate avec excès d'oxide, tandis qu'une portion de cuivre métallique est mise à nu; ce qui est prouvé 10. parce que les acides sulfurique, nitri- que et muriatique très-foibles, l'ont dissout sans dégagement de gaz sulfureux, de gaz nitreux ni hydrogène sulfuré; 2°, parce que les deux dernières dissolutions ont été précipitées par les sels de baryte, et que le précipité ne s’est dissout dans aucun acide; 30. parce l’eau a dissout elle-mème une porüon, 22 ANNALES DU MUSÉUM très-petite à la vérité, de ce sulfate, qu’on y a démontré par les réacufs; 40. parce que le résidu rouge de la dissolution du sulfate dans les trois acides mentionnés ci-dessus, s’est dissout dans l'acide mitrique concentré avec dégagement de gaz nitreux, et sa dissolution a précipité le prussiate de po- tasse en rouge, et a coloré l'ammoniaque en bleu. On ne s’est pas rendu compte jusqu'à présent de la for- mation du sulfate de cuivre avec excès d’oxide qu'on a trouvé au Mexique et qui a été analysé par M. Proust; mais si les faits que je viens d'exposer ne démontrent pas d’une manière directe que le sulfate de cuivre avec excès d’oxide qu'on trouve dans la nature, est produit par la décomposi- üon du sulfure de cuivre, ils prouvent du moins qu'il peut se former ainsi, et il me semble que dans l’état actuel de nos connoissances, c’est l'hypothèse [a plus naturelle que l’on puisse faire. Il est vrai, autant que je puis me le rappeler, qu'on ne trouve pas de cuivre métallique dans le sulfate natif avec excès d’oxide, mais cela n’affoiblit en rien notre hypothèse, car il n’est pas douteux que si j'avois chauffé le sulfure assez long-temps pour convertr tout le cuivre en oxide, et que s'il avoit contenu une suflisante quantité de soufre pour sa- turer tout l’oxide formé, nous n’aurions pas obtenu de cuivre métallique. | Il faut observer aussi que le sulfate de cuivre du Mexique contient une assez grande quantité d’oxide de fer qui annonce qu'avec le sulfure de euivre, il y avoit sans doute du sulfure de fer dont le soufre converti en acide, puis en sulfate de D'HISTOIRE NATURELLE. >3 fer, se sera porté en définitif sur le cuivre, à mesure que le fer se sera suroxidé. Le sulfure de cuivre artificiel ressemble si parfaitement au sulfure naturel qu'il faut être très- exercé pour pouvoir les distinguer. Sulfure de fer. La différence qui se trouve entre les proportions du sul- fure de fer obtenu par M. Proust, et celles que j'ai trouvées dans le mien, provient de ce que ce chimiste a simplement exposé du fer très-divisé aux vapeurs du soufre, à une cha- leur qui n’a pas été assez élevée pour fondre le sulfure de fer; tandis que dans mon opération cette substance a été complétement fondue. Or, il est naturel de penser qu'à la haute température qu'exige le sulfure de fer pour fondre, il s’est combiné moins de soufre avec le métal que si la chaleur eût été plus modérée. Il y a cependant des métaux, tels que l'argent et le plomb, qui ne prennent pas plus de soufre par la voie humide que par la chaleur rouge qui fond leurs sul- fures : j'en ai fait l'expérience. Désirant m’assurer si la différence entre mon résultat et celui de M. Proust venoit véritablement du mode de l'opé- ration, comme je le présumois, j'ai répété l'expérience à sa manière et j'ai obtenu un sulfure qui contenoit 34,21 de soufre, ce qui se rapproche beaucoup de 37 trouvés par M. Proust. Ce composé n’est pas attirable à l’aimant comme celui qui est fait par la fusion. J’ai observé en faisant cette opé- ration dans une cornue qu'il s’est dégagé une petite quantité d'hydrogènesulfuré, quoique j'eusse fait dessécher fortement 24 ANNALES DU MUSÉUM la limaille de fer, et que j’eusse fait fondre le soufre, ce qui sembleroit annoncer la présence de l'hydrogène dans le fer ou dans le soufre où elle a été déjà annoncée par M. Ber- thollet fils. Essais pour décomposer les sulfures de cuire et d'argent par d'autres métaux. Le sulfure de cuivre mêlé avec partie égale d’oxide noir de manganèse, et chauffé au feu de forge pendant une demi- heure, est décomposé, et le cuivre isolé se montre avec sa couleur naturelle au fond du creuset. Le même effet a lieu avec le sulfure de cuivre traité avec les trois quarts de son poids de limaille de fer. Le sulfure d'argent est décomposé par les mêmes métaux ci-dessus, et aussi par le cuivre. Je dois observer que dans ces expériences, qui ne sont en- core qu'ébauchées, je n'ai pas obtenu la totalité des métaux qui étoient contenus dans les sulfures décomposés, et qu'il en est resté une partie dans les sulfures qui se forment, soit à l’état de mélange et peut-être de combinaison. Je ne donnerai point ici la description des différens sul- fures dont j'ai parlé, par la raison qu'ils ressemblent, la plu- part, aux sulfures naturels bien connus par la description qu’en ont donnée les minéralogistes. Le sulfure de fer seulement diffère beaucoup du naturel ; celui-ei contient 50 et quelques parties de soufre par quintal, et celui qui est fait par la fusion n’en contient que 22, aussi est-il encore attirable à l’aimant. Le sulfure naturel perd la D'HISTOIRE NATURELLE. 5 moitié de son soufre par la fusion et se trouve alors à peu près dans le même état que le sulfure artificiel, ce qui an- nonce que le sulfure de fer naturel a été formé par la voie humide, ce qui est d’ailleurs conforme aux observations que l'on fait journellement sur le git de ce minéral, et sur les substances combustibles qui les accompagnent. FR 26 ANNALES DU MUSÉUM MÉMOIRE Sur l'influence de l'oxidation dans les combinai- sons des oxides d'étain avec la couleur du campéche. Lu à la classe des Sciences Physiques et Mathématiques de l’Institut, le 11 juin 1810. PAR M. CHEVREUL. 1. DÉS un mémoire sur les bois de campêche et de fernam- bouc, -j'avois conclu de mes expériences que l’étain saturé d’oxigène formoit avec les couleurs de ces bois, des combi- naisons rouges analogues à celles que forment les acides mi- néraux ; tandis que l’étain oxidé au minimum sembloit agir à la manière des alcalis en faisant des combinaisons violettes ou cramoisies. Ces conclusions rapprochoïient l’étain des combustibles dont les oxides sont susceptibles de devenir acides en se saturant d’oxigène, et justifioient la dénomina- tion d'acide que M. Guyton a donnée à l’oxide d’étain au maximum. Depuis mon travail, on a pensé que les oxides d’étain se comportoient de la même manière avec les matières colorantes, et que les différences que j'avois observées ve- noient de l’impureté des oxides dont j'avois fait usage. Cette opinion me faisoit une loi de répéter mes expériences, et D'HISTOIRE NATURELLE. 37 d'entrer dans quelques détails sur la préparation des oxides d’étain. S Ier. De l'oxide au minimum. 2. Avant de décrire le procédé que j'ai employé pour pré- parer cet oxide, je parlerai de l’action des muriates d’étain au minimum, sur la couleur du campèche. 3. Pour faire le muriate d’étain avec excès de base, j'ai versé de l’ammomiaque dans du muriate d’étain sublimé (1), mais je n'en ai mis qu'une quantité insuflisante pour saturer tout l'acide; il s’est séparé un muriate insoluble que j'ai lavé à l'eau bouillie, jusqu'à ce que celle-ci n'ait plus enlevé d'acide. 4. J'ai pensé que je pouvois regarder ce précipité comme exempt d’alcali, puisque pour le faire je n’avois pas employé un excès d'ammoniaque, et que M. Berthollet fils a reconnu que les alcalis ne formoient pas de sels triples insolubles avec l’oxide d’étain au minimum; je lai mis en contact avec une infusion de campèche, et j'ai obtenu une combinaison bleue violette. Ce qui prouve maintenant que l'alcali ne concourt point à produire ce phénomène, c’est que le mu- riate d’étain acide donne un précipité de la même couleur, avec l'infusion de campèche. 5. Pour obtenir l’oxide d’étain au minimum, privé d’acide (1) M. Proust a fait voir que quand on distilloit du muriate d’étain qui con- tenoit du muriate au maximum, celui-ci passoit long-temps ayant le premier , ce qui donnoit un moyen de les séparer l’un de l’autre. k 4 28 ANNALES DU MUSÉUM muriatique, j ai mêlé du muriate sublimé et délayé dans l’eau avec de l’annoniaque foible : j'ai fait digérer la matière pendant cinq heures sur un bain de sable; ensuite j'ai fait bouillir; la plus grande partie du muriate avec excès de base, qui avoit été formé au moment du mélange des liqueurs, a été convertie en petites aiguilles (1) grises qui avoient le brillant métallique, quoiqu’elles ne fussent que de loxide au minimum. J’ai fini de purifier cet oxide d’acide muriati- que en le faisant bouillir avec de l’eau ammoniacale, et ensuite avec de l’eau pure. 6. L'’oxide d'étain cristallisé, réduit en‘poudre, est d’un jaune un peu verdâtre; plongé dans une infusion de cam- pèche, il se colore en violet au bout de quelques jours : lorsqu'on le distille dans la boule de verre que j'ai décrite dans mon Mémoire sur les amers de l’indigo, il perd son brillant et peut-être un peu d’eau, et ne laisse dégager ni acide muriatique ni alcali volatil (>) : il est dissous par la potasse caustique, sans qu'il y ait dégagement d’ammonia- que ; il est dissous par l’acide nitrique étendu d’eau; cette (1) M. Vauquelin a observé que l’oxide rouge de mercure résultant de la décom- position du nitrate par la chaleur, devoit sa forme cristalline au nitrate avec lequel il a été préparé; n'est-il pas vraisemblable que l’oxide d’étain au mini- mum emprunte sa forme au muriate avec excès de base qui se produit avant [ui? Ce qu'il y a de certain, c’est que si l’on verse du muriate d’étain trop concentré dans de lammoniaque forte, ou si la décomposition du muriate se fait trop ra- pidement ; on n’obtient point d’oxide cristallisé , mais une poudre grisätre; d’un autre côté, si l’on regarde au soleil le muriate d’étain avec excès de base qui se convertit en oxide cristallisé, on voit qu'il est formé de petits cristaux qui réflé- éhissent la lumière assez fortement. : * (2) Ce qui prouve que cet oxide ne contient pas d’alcali, c’est que je l'ai obtenu D'HISTOIRE NATURELLE. 29 dissolution forme avec le nitrate d'argent un précipité blanc soluble dans l'acide nitrique foible. Le mélange de ces deux nitrates devient brun au bout de quelques heures, et se couvre ensuite de pellicules qui paroissent être de l'argent métallique. 7. C'est ici le lieu de faire quelques remarques relatives à l’histoire de l’action des alcalis sur l’oxide d’étain. M. Proust parla le premier d’une substance qui se séparoit spontané- ment de la dissolution alcaline de lPoxide d’étain au mini- mum; il compara la forme de cette substance à celle du choufleur, et d’après l'examen qu’il en fit, il l’a reconnut pour être de l’étain métallique. M. Berthollet fils ayant observé que les alcalis donnoïent à l’oxide d’étain au minimum le Brillant métallique, crut que c’étoit cet oxide que M. Proust avoit pris pour de l’étain; mais M. Proust, dans son Mémoire sur les oxidations métalliques, objecta à M. Berthollet fils que la substance qu'il avoit décrite n’étoit point un oxide, puisqu'elle prenoit le brillant métallique par le frottement, et qu'elle étoit ductile. Ces résultats étoient trop opposés entre eux, et trop faciles à vérifier, pour qu’on püt supposer une erreur de la part des chimistes qui les avoient donnés; il étoit plus naturel de croire que les substances dont ils avoient parlé étoient réellement différentes : c’est au reste ce que j'ai été à portée de reconnoïître dans ces derniers de la manière suivante : j’ai précipité du muriate détain avec excès de base sans employer un excès d'ammoniaque , ainsi que je l'ai dit plus hæut[3}; j’ai lavé pen: dant plusieurs jours le précipité avec de l’eau bouillie, ensuite je l’ai fait digérer dans l’eau chaude, puis bouillir, etje suis parvenu à le convertir en grande partie eu oxide cristallisé, 30 ANNALES DU MUSÉUM temps. J'ai vu qu'il falloit plusieurs jours, et mème plusieurs mois pour que l’oxide au minimum se convertit en métal, et qu'il falloit que la potasse et l’oxide fussent privés du contact de Pair, ainsi que M. Proust l'a observé; tandis que pour convertir le muriate d’étain au minimum en oxide eris- tallisé, il ne falloit que quelques heures. S IL. De l'oxide au maximum. 8. Pour préparer un oxide au maximum qui ne contint pas d'acide, je fis caleiner l’étain , et par le lavage, je séparai loxide des parties métalliques. Cet oxide n'ayant pris au bout d’un mois qu'une foible couleur rougeñtre dans l'infusion de campéche, je résolus de le fondre avec la potasse afin de le diviser. J’employai quatre parties de potasse et une d’oxide. Je lessivai la matière fondue, et j'obtins une dissolution alealine d’oxide au maximum, et une quantité d’oxide assez consi- dérable, qui refusa de se dissoudre dans l’eau bouillante. Je versai dans la dissolution alcaline de l'acide acétique ; loxide au maximum, précipité par ce moyen et lavé jusqu'à ce que l’eau ne changeàt plus la teinture de tournesol et le sirop de violette, se colora en rouge par le campèche à la manière d'un acide minéral. 9. Ce qui prouve qu’on ne peut attribuer la coloration en rouge de l’oxide précédent à l'acide acétique qu’il peut re- tenir, e’est que 1°. cet oxide fortement chauffé (1) dans une (1) Dans cette distillation il se dégagea une eau légèrement acidule, et l’oxide 9 D'HISTOIRE NATURELLE. JI cornue de verre, prit toujours une couleur rouge par le campèche; 20. la portion d’oxide d’étain qui n’avoit point été dissoute par l'alcali dans l'opération [8], lavée jusqu'à ce que l'eau ne verdit plus le sirop de violette, se comporta de la même manière (1). 10. Quoique ces expériences suflisent pour ét tablir l'action différente des deux oxides d’étain sur le campèche, j'ai cru devoir l'appuyer par de nouveaux faits. L I, FAIT: 11. J'ai pris du muriate d’étain avec excès de base qui se coloroit en bleu par le campèche, je lai exposé à Pair dans un flacon recouvert d’une cloche; au bout de plusieurs mois, il s’est saturé d’oxigène, et alors il s’est coloré en rouge par le campèche. Or, si l’oxigène n’étoit pas la cause de cette propriété, pourquoi dans la première expérience le muriate se seroit-il coloré en bleu et non en rouge ? 2€. FAIT: 12. J’ai partagé une dissolution d’oxide d’étain au mint- mum dans l’acide nitrique foible en deux portions : l’une a donné un précipité bleu violet avec le campèche ; l’autre a été évaporée à siccité, l’oxide a passé au maximum , et a pris alors prit une couleur verdâtre assez prononcée. Il seroit possible que l'acidité du produit provint d’un peu d’acide acétique resté en combinaison avec l’oxide. Je n'ai point examiné si cet oxide retenoit de l’alcali. (1) H me paroît très-probable que cet oxide retient un peu d’alcali en combi- maison , car il m'a fallu beaucoup d’eau pour avoir un lavage qui ne verdit plus le sirop de violette. N'y auroit-il pas ici quelque chose d’analogue à ce qui se passe dans le lavage de l’antimoine diaphorétique ? 32 ANNALES DU MUSEUM avec la même matière colorante , une couleur rouge. Or, dans le premier cas il y avoit une quantité d'acide bien plus consi- dérable que dans le second. 3e, FAIT. 13. J'ai dissous dans la mème quantité de potasse deux quantités égales d’oxide d’étain au minimum et d’oxide au maximum par le feu; j'ai saturé ces deux dissolutions par les mêmes quantités d'acide acétique, ensuite jy ai versé de l'infusion de campèche; la première a donné un précipité bleu, la seconde un précipité rouge. 4e. FAIT. 14. J'ai pris deux portions égales d’oxide d’étain cristal- lisé; lune a été chauffée au rouge dans une boule de verre, afin d'éviter le contact de l'air: l'autre a été pulvérisée et projetée dans une capsule de platine placée sur des charbons ardens. À peine l’oxide at-il eu le contact de la chaleur et de l'air, qu'il s’est embrâsé (1) à la manière d’un pyrophore, et qu'il est devenu blanc dans les parties qui ont été brülées. Quoique cet oxide parut très-combustible et que je l’eusse long-temps tenu au feu, cependant'il contenoit encore une certaine quantité d'oxide au minimum. Cette difliculté de brûler complétement le rapproche de l’étain métallique. La portion d’'oxide qui avoit été chauffée sans le contact de l'air (1) Ce qu'il y a de remarquable, c’est que si l’on projette l’oxide cristallisé dans la capsule ïl ne s'embrase point, au moins à la température où s’embrase le même oxide réduit en poudre, et si l’on projette ensuite de ce dernier sur l’oxide cristallisé, celui-ci s'embrase très-bien. D'HISTOIRE NATURELLE. 33 a pris avec l’infusion de campêche une couleur violette après quelques heures de contact, et la portion d’oxide calcinée a pris, au bout d’un mois de séjour dans la mème infusion, une couleur d’un rouge jaunâtre. Ne seroit-il pas possible que l'absence de l’eau dans les oxides d’étain par le feu, fat une des causes prinçipales de la difficulté qu'on éprouve à les combiner à la matière colorante ? CONCLUSIONS. Des faits que je viens d’exposer, il résulte : -10, Qu'il est possible d'obtenir un oxide d’étain au mini- mum, privé d'acide et d’alcali. 20, Qüe les 6bservations de MM. Proust et Berthollet fils, relatives à l'action de la potasse sur l’oxide d’étain au mini- mum, sont parfaitement justes; que si ces chimistes se sont mutuellement contredits, c’est que chacun d’eux a décrit un corps différent, obtenu à la vérité avec les mêmes réactifs, mais dans des circonstances différentes; enfin que c’est à M. Berthollet fils que nous sommes redevables de l’oxide d’étain crystallisé. 30. Que l’oxide d’étain au minimum pur et ses dissolutions acides, forment avec le campèche des combinaisons d’un bleu violet, analogues à celles que les alcalis forment avec la mème couleur. 4°. Que l'oxide d’étain au minimum, dans lequel on ne peut soupçonner la présence d’un acide, se colore en rouge par le campèche à la manière d’un acide minéral, » 17 5 Î* 34 ANNALES DÜ MUSÉUM SUITE DE LA DESCRIPTION DES GREFFES. PAR PA. LTÉE OUAN, Pc FA g Il. Greffes par gemima. SECTION Che OEil, bouton ou gemma porté sur une plaque d’écorce plus ou moins grande, et de différentes formes, transporté d’une place à une autre sur lé mêmé ou sur d’autres individus. Comprosrriox. Dans cette section sont comprises les greffes en écusson, celles en flûte ,‘en sifflet, en chalumeau, en tuyau , en#luteau, en cornuchet, en anneau, el par juxta- position. Usacrs. Elles ont pour objet de multiplier des végétaux ligneux qu'il n’est pas sûr de pouvoir propager avec leurs qualités, par le moyen des semences ; de transformer en espèces rares où plus agréables et plus utiles, des espèces plus communes et de mérite inférieur ; d'avancer de plusieurs années les jouissances des cultivateurs; de naturaliser plus sûrement des végétaux étrangers, et de perfectionner la savêur des fruits dans beaucoup de variétés domestiques. Cette section de greffes est la plus employée dans la mul- tiplication, en grand, des arbres fruitiers. C’est presque la e D'HISTOIRE NATURELLE. 35 seule dont on fasse usage dans les grandes pépinières des: environs de Paris, parce qu’elle est la plus expéditive, et qu’elle exige rarement la mutilation des sujets. Rarrorrs er pIFFÉRENCES. Les greffes de cette section pour- roient être comparées aux semis pour la multiplication, puis- qu'il suflit de placer un corculum, un germe de bourgeon, dans la situation qui lui convient, et avec les précautions requises, pour propager les individus. Mais il y a cependant cette différence entre ces grefles et les semis, que les gemma ne font qu'augmenter le nombre des individus de leurs variétés, tandis que les graines, fé- condées souvent par le pollen des étamines de leurs congé- nères, font naître fréquemment de nouvelles variétés, sous- variétés et races différentes. Division. Comme cette section offre une assez grande quantité de sortes et de modes de greffes différens, on l’a divisée en deux séries. La première comprend toutes les greffes en écusson qui s'effectuent au moyen d’un gemma isolé ou de plusieurs, réunis en un seul bouton. La seconde rassemble toutes les greffes en flûte et par juxta-position, qui peuvent réunir plusieurs gemma écartés les uns des autres, sur un même tube d’écorce. SÉRIE lre, Greffes en écusson. Dérinirion. On donne le nom d’écusson à une plaque d'écorce sur laquelle se trouve un œil ou gemma. Ce nom h * 36 ANNALES DU MUSÉUM lui vient de sa figure qui a quelque ressemblance avec cette pièce d’armoirie. Empror. Cette greffe est plus particulièrement affectée aux jeunes plants de sauvageons depuis âge d’un an jusqu'à cinq ans et même au delà, lorsqu'ils ont l'écorce mince, saine, tendre et lisse. Éroques DE LA conrecriox. Les époques auxquelles on la pratique le plus ordinairement sont le printemps, lors de l'ascension de la première séve, et surtout à celle de la se- conde, vers le mois d'août. On choisit sur les arbres qu’on veut multiplier par cette série de greffes, des rameaux de la dernière pousse, munis d’yeux bien formés; s'ils ne l’étoient pas, on pinceroit l'extrémité des rameaux pour arrêter la séve, et la forcer de se porter vers les yeux, et l’on différeroit de les couper jusqu’à ce qu'ils fussent bien conformés et que le rameau fut aoûté complétement. Préparariox. Dès que les rameaux à greffer sont séparés de leurs arbres, on en supprime les feuilles, en ne réservant que quelques centimètres de leurs pétioles. Cette petite queue qui reste attachée au-dessous de chaque œil, sert à le tenir entre les doigts, et à le placer commodément dans l'incision, lorsqu'il s’agit de poser les écussons. Les rameaux ainsi dépouillés de leurs feuilles sont enveloppés d’herbes fraiches et d’un linge mouillé, si les greffes ne doivent être posées qu'un jour où deux après la coupe des rameaux. S'il est question de les faire voyager pendant quatre ou cinq jours, on les plante dans un concombre ou autre fruit aqueux. Pour D'HISTOIRE NATURELLE. 37 les transporter à des distances plus éloignées, on les met dans un bain de miel. Lorsqu'on a beaucoup d’écussons à faire dans le cours de la même journée, on place tous les rameaux qui les portent dans un vase rempli d’eau tenu constamment à l’ombre, et on ne les retire du vase que les uns après les autres, et lors- qu'on à épuisé tous les yeux que chacun d’eux peut fournir. Pose. L'incision destinée à les recevoir doit présenter la figure d’un T, et couper l'écorce du sujet depuis l’épiderme jusqu'à l’aubier. On écarte ensuite par le haut, avec la spa- tule du greffoir, les deux lèvres de l’écorce qui se trouve préparée pour recevoir l’écusson. … Celui-cisest levé avec la précaution nécessaire pour con- server l'œil intact , et est inséré dans l’incision. Les lèvres de l'écorce du sujet sont rapprochées par dessus, de manière . que les parties ne laissent aucun vide entre elles. On ligature ensuite la plaie pour empêcher qu'il ne s'y introduise des corps étrangers , et l'opération est finie. Coxsenvariox. Quelques semaines après, si l’on s'aperçoit que les ligatures donnent lieu à la formation de bourrelets ou d’étranglemens, il convient de les défaire et de les rétablir moins serrées. Ces greffes s'appliquent aux sujets, dans l’es- pace de quelques jours, et en raison de la saison, du but qu'on se propose et des diverses sortes, on les gouverne avec les modifications que chacune d’elles exige. SORTES. I. Greffe (Tillet) d’une plaque d’écorce sans yeux. Nouv. Cours d'Agr.,t. 6, pag. 524. 38 ANNALES DU MUSÉUM Synonymie. G. d’écorce d’un sujet sur un autre. Duwam., Phys. des Arb., t.2, pag. 72, alin. 4. Opération. Tailler sur un arbre inutile, une plaque d’écorce de dimension égale à celle d’un individu précieux, dont l’écorce de la tige a été enlevée par quelque accident ; Couper dans une forme régulière, l'écorce de la plaie de arbre utile, la remplacer par celle de l'arbre sauvageon, et couvrir exactement son aubier. Usages. Propre à prévenir les accidens occasionnés par les plaies de l’écorce des arbres; Et pour faire porter aux arbres des signes qui rappellent des souvenirs agréables ou chronologiques. Dénomination. À la mémoire de Tizzer, physicien, qui s’est occupé long- temps des maladies des végétaux et des moyens de les guérir. II. Greffe (Xénophon ) d’une plaque d’écorce munie d’un œil entouré d’un liseret d’écorce. Synonymie. G. d’un morceau d’écorce pourvu d’un œil, dans + excavatiora de même largeur. Nouv. Cours d’Agr., t. 6, pag. 524, n. 2. G. par Mrs ox ente en pièce rapportée. OL1v. DE SER., tom. 2, pag: 370, col. 1°°., alin. 1°. Opération. Cerner avec la pointe du grefloir un œil, ou bouton, dus toute sa circonférence , et le lever de sa place en conservant son coreulum ; « Faire à la place où l’on veut poser l’œil enlevé, une pareille plaie, et la remplir exactement par ce dernier, Usages. Pour transporter des boutons à fleurs d’une place où ils sont très- abondans, sur un arbre et à une autre place où ils manquent, Et pour multiplier des arbres très-rares, sur lesquels on ne pourroit lever des écussons, sans compromettre leur existence. Dénomination. À la mémoire de Xénorxon, citoyen d'Athènes, auteur d’ou- vrages sur les labours et sur différentes branches de l’économie rurale et domestique , dans l’un desquels il mentionne cette greffe. III. Greffe ( Poederlé ) en écusson dénué de bois. Nouv. Cours d'Agr., tom. 6, p. 524, n°. 3. Synonymie. G. en écusson à œil sans bois. Dumam., Phys. des Arb., tom. 2 pag. 73, alin. 4, PL 12, fig. 107. Opération. Lever sur un rameau un écusson à la manière ordinaire, ensuite D'HISTOIRE NATURELLE. 9 29 couper avec le greffoir, tout le bois qui se trouve sous l'écorce, excepté une légère couche d’aubier, sous Pœil ; Le poser ensuite dans l’incision faite sur le sujet. Usages. Propre à greller les arbres étrangers, et particulièrement ceux à bois dur, tels que les orangers, les myrtes, les houx, etc. Dénomination. En l'honneur de M. Pornerté l’ainé, auteur du Manuel de l’ar- boriste et du forestier belgiques, ouvrage estimable. IV. Greffe ( Lenormand ) ez écusson , sous l’œil duquel se trouve une légère couche d’aubier. Nouv. Cours d'Agr., t.6, p.524. Synonymie G.en écusson boisé. Oriv. DE Serres, tom. 2, pag. 364, col. 2, lig. 7. G. en écusson , 1°. sorte. C3. , Traité de la Gref., pag. 30. Opération, Laisser sous le milieu de l’écusson une légère lame de bois, dans le tiers de son étendue ; Le poser ensuite entre l’écorce et l’aubier du sujet. Usages. Les arbres fruitiers à noyaux et à pépins s’écussonnent de cette manière, dans les grandes pépinières de Paris et de ses environs. Dénomination. À la mémoire de lestimable famille Lexormanp qui a dirigé avec distinction la culture du jardin potager de Versailles, depuis Laquin- tinie jusqu’à la fin du règne de Louis XV. V. Greffe (Sickler ) en écusson, sur les racines et à œil pous- SAN a x; ñ sant. Nouv. Cours d’Agr., tom. 6, pag. 524. Syronymie. G.en écusson sur racines à la pousse. Cas., Essai sur la gref., pag. 51, alin. premier. Opération. Découvrir des racines traçantes , de la grosseur du doigt environ ; Les grefer en écusson au printemps, et laisser la place des yeux découverte. L'année suivante, lorsque les grefles ont poussé, séparer les racines de leurs souches; elles formentffle nouveaux individus. Usages. Propre à multiplier des arbres rares qui n’ont pas de congénères, sur lesquels on puisse les greffer, avec sûreté pour la réussite. Dénomination. En l'honneur de M. Srcxcer , auteur du journal des Jardiniers allemands ,en 22 vol. in-8°., ouvrage qui renferme beaucoup de faits utiles aux progrès du jardinage et de l’économie rurale. VI. Grefle (Jouette ) en écusson, avec suppression de la tête du sujet, pour faire pousser sur-le-champ, le gemma. Nou. Cours d’Agr., t. 6, pag. 524. 40 ANNALES DU MUSÉUM Synonymie. G. en écusson, à œil poussant. Duna., Phys. des Arb., tom. 2, page 72: G. en écusson à la pousse. Gas., Essai sur la gref., pag. 35. Opération. Tailler et poser un écusson , à la manière ordinaire ; Couper la tête du sujet, immédiatement après le placement de la greffe, et supprimer tous les bourgeons qui pourroient croitre sur sa tige. Usages. Propre, lorsqu'elle est exécutée au printemps, à hâter la jouissance, d’une année; Incertaine, dans les climats froids , lorsqu'elle est exécutée à la séve d’août. Dénomination. À la mémoire de Germain Jouerre, pépiniériste à Vitry-sur- Seine, où il s’est occupé, l’un des premiers, de la culture des arbres étran- gers qui s’y trouvent actuellement très-multipliés. VIL. Greffe ( Vitry ) ez écusson pratiquée avec un gemma, qui ne doit développer son bourgeon, qu’au printemps suivant. Nouv. Cours d’Agr., tom. 6, pag. 524, pl. IV , fig. 18, 19 et 20. Synonymie. G.en écusson à œil dormant. Dunaw., Phys. des Arb., tom, 2, pag. 73 et 75, pl. XIT, fig. 105, 106 et 107. Opération. Placer l’écusson à la manière ordinaire, mais à l’époque de la séve d’août ; Laisser au sujet sa tête, le reste de l’année, et ne la supprimer qu’au prin- temps suivant, si ia greffe est vivante. Usages. Retarde la jouissance ; mais l’assure davantage. Conserve les sujets dont la greffe n’a pas repris, et ne les empêche pas de recevoir des greffes à la saison suivante. Dénomination. Nom d’un village près Paris, où cette greffe est presque exclu- sivement employée pour la multiplication des arbres fruitiers, et où il s’en effectue, chaque année, plusieurs millions. VII. Greffe (Mustel) ez écusson, À moyen d’une plaque d’écorce de figure ronde, ovale, ou anguleuse, au milieu de laquelle se trouve un œil à bois. Nouv. Cours d’Agr., tom. 6, p. 524, pl. IV, fig. 2r. Synonymie. G. à emporte-pièce. Dunam., Traité des Arb. fruit., tom. 1, p.67, pl. 1°, fig. 4, let. sets. Opération. Enlever avec un ciseau, ou un emporte-pièce fait exprès, une plaque d’écorce sur un vieux sujet; D'HISTOIRE NATURELLE. 4x Se servir du même outil ou du greffoir pour lever le gemma à greffer ; le poser dans l’entaille du sujet, et fermer le bord de la plaie avec de la cire molle. d Usages. Pour placer des éeussons sur de vieilles tiges ou branches dont l'écorce gercée , boiseuse et épaisse, ne permet pas l’emploi de la pratique ordinaire. Dénomination. À la mémoire de feu M. Musrez, propriétaire cultivateur d'arbres étrangers, à Rouen, et auleur du Traité théorique et pratique de la végétation, publié en 1781 : ouvrage qui renferme d’utiles observations. IX. Greffe ( Descemet}) em écusson double, ou multiple, sur le méme sujet. Nouv. Cours d'Agr., tom. 6, pag. 924. Synonymie. G. en écusson à plusieurs entes. OLiv.ne SERRES, tom. 2, pag. 365, col. 2, lig. 38. Opération. Placer deux écussons opposés, où un plus grand nombre, à la cou- ronne d’un sujet, et par les mêmes procédés que pour les greffes Jouette et Vitry. Usages. Pour assurer les chances de la réussite, dans la multiplication des arbres étrangers délicats; Et pour produire des arbres d’un port très - pittoresque, dans les jardins paysagistes. Les frènes pleureux, des cytises, des robiniers se greffent ainsi. Dénomination. À la mémoire de Drsceuer, jardinier du jardin des apothicaires de Paris, vers le milieu du siècle dernier; homme habile dans son art, et père d’une nombreuse famille de cultivateurs et de botanistes distingués, qui ont contribué à la multiplication des arbres étrangers en France. X. Greffe (Schneewoogt) ex écusson, à incision faite en sens inverse de la manière ordinaire. Nouv. Cours d’Apr., t.6, pag. 924. | Synonymie. G. en écusson ; en sens inverse. Cas., Essai sur la gref., pag. 31, alin. 3. G. en écusson, en sens opposé. Er. Cazver, des Arbres pyramidaux, pag. 78, alin. 1°°., fig. 6, let. D,C. Opération. Donner à l’écusson la forme d’un triangle dont la pointe se trouve au-dessus de l’œil, tandis que le grand côté se trouve au-dessous /\. Faire l’incision transversale au-dessous de l’incision perpendiculaire, et ouvrir les lèvres de l'écorce, pour placer l’écusson, en remontant vers la tête du sujet. Elle doit avoir la figure d’un T renversé ( x ). 7. 6 {2 ANNALES DU MUSÈUM Usages. Propre à assurer la réussite des écussons d'arbres très-abondans en séve gommeuse. Employée à Hyères et à Gênes, pour les greffes des diverses espèces d’oræmagers. On pourroit l’essayer avec espérance de succès pour les arbres résineux. Dénomination. À la mémoire estimable de Scnxrewoocr, fleuriste à Harlem, auteur d’un Traité sur la jacinthe et sa culture. Ouvrage utile aux cultiva- teurs de ce beau genre de plante. XI. Greffe (Knoop}) en écusson, à œil tourné par la pointe, vers la terre. Nouv. Cours d’Agr., tom. 6, pag. 524. Synonymie. G. à rebours. Acricoza, Agric. parf., part. 1°°., pag. 182, fig. 6. G. en écusson renversé. Rocer ScuAsor,, Prat. du Jard., tom. 1, pag. 79. Opération, Faire sur le sujet, l’incision, comme pour la G. Schneewoogt, ou à la manière ordinaire. Poser l’écusson, la pointe de l’œil tourné vers la terre. Usages. Pour obliger les bourgeons à croître dans une direction différente de celle dans laquelle ils croissent ordinairement. Afin (dit-on ) d'accélérer la fructification des greffes, et de leur faire pro- duire de plus gros fruits qu’il n’est dans leur nature. D’un usage très-limité, parce qu’elle remplit mal sa destination. Dénomination. À la mémoire de Jean Herman Kxoor, jardinier hollandais, auteur d’une Pomologie ou Description des meilleurs fruits cultivés en Eu- rope, avec un grand nombre de figures exactes, publiée à Lemwarde, en 1765, ouvrage utile. XII. Greffe (Jansein) ez écusson, de plusieurs variétés diffé- rentes, sur le même arbre. Nouv. Cours d’Agr., tom. 6, pag. 924. * Synonymie. Entes au bout des branches. Oxxv. ne Ser., Théât. d’Agr., tom. 2; pag. 371, col. 1°. , alin. premier. Opération. Se pratique en fente, et le plus souvent en écusson : pour opérer la première, en emploie le procédé de la G. Atticus, et pour la seconde, celui de la G. Vitry ou Jouette, Usages. On l’emploie pour se procurer sur le même arbre, des fruits de dif- férentes formes, de diverses couleurs, et qui mürissent les uns après les autres, des prunes surtout. Dénomination. À la mémoire de feu M. de Janseïx, propriétaire, cultivateur D'HISTOIRE NATURELLE. 43 d'arbres étrangers de pleine terre, et qui en avoit réuni la collection la plus nombreuse qui existât alors (1778) dans son vaste jardin des Champs- Élysées , à Paris. ER ’ . . XII. Greffe (Duroy) en écussons, faits successivement; sur le même arbre, avec des gemma fournis par sa dernière pousse. ] - à 1 r < - E / Nouv. Cours d’Apr., tom. 6, pag. 524. Synonymie. Entes sur entes. Oxiv. Dr Ser., Théâtr. d’Agric., tom. 2, p. 338, col. 1"°., lig. 1°°. Vulgairerent greffes sur greffes. Opération. Se pratique de deux manières, en fente et en écusson, soit seule à seule, soit l’une après l’autre, sur le même sujet. La grefle en fente s'effectue au printemps; comme la G. Attieus. Celle en écusson à la séve d’août, de la même manière que la G. Vitry, et cela alternativement chaque année, et toujours avec des pousses de la der- nière formation, prises sur le haut du même arbre. , Lsages. Pour avoir une démonstration exacte, de l’opinion émise par les An- ciens , et depuis par Oliv: de Serres, Duhamel, Miller, Rozier et beaucoup d’autres cultivateurs modernes, que les greffes sur greffes hâtent la fructifi- cation , augmentent le volume de leurs fruits, et rendent ceux-ci plus suaves. Eu laissant des branches à fruits au-dessous de chaque grefte, il sera aisé d’avoir des points de comparaison irrécusables qui résoudront cette impor- tante question. Dénomination. En l'honneur de M Dunoy ; physiologiste, l’un des directeurs des forêts, en Prusse, et auteur de plusieurs ouvrages, dont quelques - uns traitent de l’économie forestière, XIV. Greffe ( Lambert) composée de celles en écusson, en ap- proche et en fente par scions. Nouv. Cours d'Agr., tom. 6, pag. 524. Synonymie. G. composée, DunAu:, Mémoires de l’Académie des Sciences de Paris, tom. 55, pag. 502. G. composée. Er. Carvez, Traité des Pépin., tom. 2, pag. 101, alin. 1°”., pl. 2, fig. 7. Opération. Planter à 6 décimètres lun de autre , deux sauyageons d’une longue vie; les greffer par gemma en espèee domestique, à fruit parfumé et très-sucré; Greller par approche longitudinale, les deux bourgeons qui naîtront des gemma des écussons; 6* xt 44 ANNALES DU MUSÉUM Les bourgeons bien soudés, leur couper la tête, les fendre en travers eë y poser le scion d’un arbre domestique à fruit d’un gros volume, insipide et sans parfum. Le procédé proposé par Duhamel offre quelque différence pour arriver au même but. C’est de greffer sur un poirier sauvageon, un coignassier; sur celui-ci une épine, sur celle-ci un néflier, et sur ce dernier un poirier de bon chrétien. à Usages. Pour savoir si le mélange des séves et des sucs propres de différens arbres ne modifieroit pas la saveur des fruits, et n’établiroit pas de nouvelles races domestiques, plus perfectionnées, pour les qualités de leurs fruits, que celles que nous possédons. L'expérience seule peut détruire cette opinion. Dénomination. En lhonneur de M. Lamserr, botaniste anglais, à qui la science est redevable d’une belle monographie de l’intéressante famille des arbres résineux à fruits en cônes. XV. Greffe (Magneville) en écusson, avec une double incision en manière de. cheyron brisé , au-dessus de la greffe. Nouv. Cours d’Agr., tom. 6, pag. 524. Synonymie. G. des arbres résineux. Mémoire de la Société d’Agr. de Paris, ann. 1785, trimestre d'été, pag. 39. G. des arbres verts. Er. Gauvez, Traité des Pépin., tom. 2, pag. 99, pl. 1, … fig. 7, let. B, C. p* Opération. Faire à la tige d’un jeune sujet, une incision en forme de T , comme pour la greffe Vitry; établir à 4 ou 5 millimètres au-dessus de la barre du T une double incision, en manière de chevron brisé À qui coupe l'écorce dans la largeur d’un millimètre, et jusqu’à l’aubier. Lever sur l'arbre qu’on veut multiplier, un jeune bourgeon d’un centi- mètré de long, comme un écusson ordinaire , l'introduire dans la plaie du sujet et ligaturer la greffe. Usages. Poar multiplier, plus sûrement, les arbres à séve résineuse, gom- meuse ou très-abondante. Dénomination. À la mémoire de Macnevicrr, cultivateur, propriétaire aux environs de Caen, lequel a naturalisé, dans ses possessions, beaucoup d’ar- bres étrangers, qui depuis se sont multipliés dans son département, et qui a été l'inventeur de eette greffe, en 1784. XVI. Greffe (Sintard) em écusson, couverte par une plaque d’écorce d’un autre arbre. Nouv. Cours d'Agr., t. 6, pe 924. D'HISTOIRE NATURELLE. 4 Synonyme. Ente en écusson couvert. Ovxv. ne Srr., tom. 2, p.366, col. 2, lig. 2. Opération. Faire au sujet deux incisions, comme dans la grefle Vitry, et y poser l’écusson de la même manière. Luter avec de la cire molle, toutes les scissures de l’incision, et couvrir la partie opérée d’une plaque d’écorce, prise sur un autre arbre, percée à l'endroit de Pœil et maintenue par une ligature. Usages. Trop minutieuse à effectuer , pour être pratiquée dans la multiplication en grand; mais pouŸant être employée pour des espèces rares et délicates. Dénomination. À la mémoire dé SinrarD, jardinier en chef du jardin des Plantes de Paris, au commencement du siècle dernier, lequel employoit utilement cette greffe, pour multiplier les rosiers d'Alexandrie. XVII. Greffe ( Aristote) ez écusson carré, placé sur un sujet dont l'écorce rabaissée le recouvre à moïtié. Synonymie. Ente en écusson, autre sorte. Ourv. ne Ser., Théât. d’Agr.,t. 2, pag. 366, col. 2, alin. 1°°.; et mème tome, pag. 599, col. 2,alin. premier. Opération. Faire trois incisions à l'écorce du sujet, l’une horizontale, et deux autres Jatérales et parallèles, qui commencent à la première et descendent perpendiculairement, dans la longueur de 2 centimètres et à 1 centimètre d’écartement entre elles ; Rabaisser l'écorce, ainsi coupée, vers le bas du sujet ; Tailler une plaque d’écorce munie d’un bon œil, et de même dimension que la plaie du sujet, et s’en servir à recouvrir exactement celle-ci. Ensuite relever l'écorce abaissée du sujet, en recouvrir l’écusson jusqu'au-dessous de son œil, luter les scissures, et ligaturer le tout. Usages. Fort en usage du temps d'Olivier de Serres, pour greller les bonnes espèces d’oliviers, sur le sauvage; Mais abandonnée depuis, parce qu’elle est minutieuse et prend beaucoup de temps pour leffectuer. Dénomination. À la mémoire d’Arisrore, philosophe macédonien, qui a traité de plusieurs branches de l’économie rurale, et particulièrement de la vigne et de l'olivier auquel cette greffe est plus particulièrement affectée. XVIIL Greffe (Sennebier) ex écusson, par portion d’yeux ter- MmInAUX. Opération. À défaut de gemma latéraux, on peut fendre en deux ou en quatre parties égales, des yeux terminaux, et grefler chacune de ces parties, su des sujets, dans des incisions en T, soit à œil poussant, soitàa œil dormant. 46 ANNALES DU MUSÉUM Usages. Addition utile aux, moyens de multiplication ordinaires pour des arbres rares, à gemma écailleux et à branches opposées surtout. Dénomination. À la mémoire de Sennesrer , physiologiste genevois, du siècle dernier, lequel a enrichi la physique végétale de plusieurs découvertes utiles aux progrès de l’agriculture. XIX. Greffe ( nébuleuse ) de plantes ligneuses et d’arbustes, sur des racines de plantes vivaces. Nouv. Cours d’Agr., tom. 6, p. 524, n°. 17. Synonymie. Autres plantes que arbres , escussonnables. Oxxv. De Ser., tom. 2, pag. 367, col. 1°°., alin. 1°*.; et même vol. , pag. 287, col. 2, alin. 1°°. Opération. Découvrir le collet de grosses racines de plantes vivaces, et y ap- poser des écussons ou des greffes par scions d’espèces congénères ou disgé- nères ; Recouvrir ces racines de terre, et ne laisser sortir que les yeux de l’extré- mité des rameaux greflés. Usages. Pour mélanger (dit -on) la couleur des fleurs, des œillets, violiers, passe-roses et passe-velours. Que ces plantes reprennent de bouture dans les racines enterrées sur lesquelles on les place, la chose est possible ; mais que leurs fleurs changent de couleur, rien n’est moins prouvé. Dénomination. Nom donné en raison du peu de confiance qu’on doit avoir dans le résultat de cette sorte de grefle. XX. Greffe (Butrel) ex écusson d’espèces de méme genre, ow de même famille, qui diffèrent par la durée du feuillage, ou les époques du mouvement de leur séve. Synonymie. G. Liebaut. Nouv. Cours d’Agr., tom. 6, p.525, n. 18. V’ulvaire- ment G. hétéroclites. , Opération. Sur un sujet qui perd ses feuilles chaque année, greffer un arbre du même genre dont le feuillage est permanent, ou faire servir le second de sujet au premier. . Ou placer sur un arbre dont la séve est tardive à se mettre en mouve- ment, une espèce de même genre qui entre en séve plutôt, ou l'inverse, Grefler sur une espèce à séve douce et insipide, une autre espèce dont le suc est âcre et corrosif. Usages. Pour prouver qu'il ne sufit pas de greffer l’un sur l’autre des arbres D'HISTOIRE NATURELLE. 47 de même famille, de même genre et de mème espèce, pour obtenir une réussite complète de l'opération; mais qu'il faut encore que les mouve- mens de la séve , dans son ascension et dans sa descente, ainsi que les qua- lités de sues propres, soient à peu près les mêmes, sans quoi ces grefles mal assorties périssent en peu d’années. Dénomination. À la mémoire de feu M. Borrez, cultivateur, philosophe, et auteur d’un Traité raisonné de la taille des arbres fruitiers, imprimé en 1795, ouvrage qui en 1804 étoit à sa 10°. éditition et qui devroit être le catéchisme de tous les jardiniers conducteurs d'arbres fruitiers. XXI. Greffe (Bonnet ) à /a manière des écussons , entre l'écorce et l’aubier, de semences ou de leurs germes séparés des cotylédons. Nouv. Cours d’Agr., tom. 6, p. 525. Synonymie. Vulsairement, G. de semences. Opération. Pratiquer dans l'écorce d’un sujet, soit de plante annuelle, ou vi- vace herbacée, soit d’un arbre ou arbuste, abondant en séve, une incision jusqu’à la profondeur des fibres ou des couches ligneuses; , Introduire dans cette plaie, soit une semence entière avec ses enveloppes ou dépourvue de ses tuniques, soit privée de ses cotylédons, et réduite à son seul germe; Recouvrir la plaie d’une emplâtre, et maintenir les parties à leur place, au moyen de ligatures qui ne puissent gêner le développement du germe. Usages. Pour savoir 1°. si ces germes se développeront ; 2°. si les plantes qui en naïtront, vivront à la manière des parasites ou des fausses parasites; 3°. et enfin quelle modification leur feront éprouver les sujets sur lesquels ils croitront : choses qui intéressent la physiologie végétale. Dénomination. À la mémoire respectable de CHanzrs Boxer, de Genève, physicien célèbre, qui s’est occupé de l’anatomie des feuilles, et de leur. usage dans la nutrition des végétaux. Ses découvertes en ce genre, ont donné lieu à l’établissement de principes qui dirigent les cultivateurs dans diffégentes opérations de cultures importantes. XXIL. Greffe ( Bosc } de feuilles en manière d’écusson. Opération. Choisir de jeunes sujets dans le plein de leur séve, et vieux repris dans des pots; faire à leurs tiges des incisions en T et proportionnées à la grosseur des pétioles qu’elles doivent recevoir; Prendre, sur des espèces congénères peu en séve, des feuilles au quart, au Liers, à la moitié de leur grandeur, ou sur le point d’y arriver ; les sépa- 48 ANNALES DU MUSÉUM rer de leurs arbres avec leur pédicule dans toute sa longueur, et son appen- dice, mais sens gemma; Poser ces grelles dans les incisions faites aux sujets, et placer ceux = ci sur une couche tiède couverte d’un chassis ombragé, et sous lequel sera etre- tenue une atmosphère vaporeuse , humide et chaude, pendant la reprise des greffes. Usages. Pour savoir, 1°. si les feuilles reprendront sur des espèces voisines, ce quiest probable ; 2°, si elles se refuseront à vivre sur des sujets disgénères; 3°. si ces feuilles produiront dans leurs aisselles des gemma, comme si elles eussent resté sur leur pied naturel; 4°. de quelle nature seront les bourgeons qui se développeront de ces gemma; 5°. et enfin si ces gemma existent dans la graine, et ne font que se développer par Pacte de la végétation, ou s'ils sont produits, chaque année, par les feuilles des végétaux. Ces faits bien constatés, soit que l'opération réussisse ou non, seront toujours des expériences utiles, Dénomination. En l'honneur de M. Bosc, voyageur, naturaliste et cultivateur distingué, l’un des principaux rédacteurs des Dictionnaires d'histoire na- turelle et d'agriculture. Ce savant se propose de faire cette utile, mais dé- licate expérience. Elle ne pouvoit tomber en meilleures mains, pour donner des résultats utiles aux progrès de la science. SÉRIE Ile. Greffes en flute. Caracrères. Un ou plusieurs yeux, portés sur un anneau d'écorce plus ou moins grand et sans aubier. Couposiriox. Elle est composée des sortes de greffes nom- mées vulgairement : en anneau, en sifflet, en tuyau, en canon, en cornuchet, en chalumeau, en flûte où fluteau. » LR) ‘Usacrs. Cette série est affectée, plus particulièrement, à lamultiplication des grands arbres fruitiers de vergers agrestes, dans plusieurs parties de la France; on l’emploie aussi pour quelques espèces d’arbres étrangers à bois dur, dans diverses pépinières. D'HISTOIRE NATURELLE. 9 OpéraTIONs. On pratique ces greffes au printemps, lors de l’ascension de la première séve, ou vers la fin de la des- cente de la seconde. La manière de les opérer consiste, 1°. à enlever sur les rameaux des arbres que l’on veut multiplier, des tubes d’écorce munis d’un ou plusieurs yeux bien constitués; 20. à choisir de jeunes sujets dont les tiges soient de même diamètre que les rameaux des greffes; 30. à couper la tête à la plupart d’entre eux, ou l'extrémité des branches aux places oùils doivent être greffés; 40. à enlever des anneaux d’écorce de mème longueur que ceux des greffes; 5°. à poser ceux-ci sur les sujets, en remplacement de ceux suprimés; 60. et enfin à luter les bords des scissures pour que l'air, l’eau, ni aucun autre corps étranger ne puissent s'y introduire. Cette opération doit être faite, autant que possible, par un temps doux, sans pluie, aux heures où les rayons du soleil ont peu de chaleur, et où le hâle ne peut enlever la séve visqueuse qui suinte des parties dépouillées d’écorce. Coxservariox. L’ébourgeonnage des tiges des sujets, au- dessus de la greffe, doit être sévèrement exécuté pendant tout le temps qui suit l'opération et la pousse des bourgeons des greffes. Dès que celles-ci commencent à pousser, on taille l'extrémité du sujet sur le bourgeon de la greffe qu'on réserve pour le remplacement de sa tête. De toutes les greffes de cette section, celles - ei sont les moins sujettes à être décollées par les vents, et les plus so- lides; mais aussi elles sont les plus longues à pratiquer. 1 ne paroït pas que ces greffes aient été connues dans l'antiquité. “PE 7 50 ANNALES DU MUSÉUM S'O'R!T'E'S; I. Greffe ( Jefferson ) ex flûte, sans couper la tête du sujet, à séve descendante, et à œil dormant. Nouv. Cours d’Agr., tom. 6, pag. 525. Synonymie. G. par anneau d’écorce. Dumam., Phys, des Arb., tom. 2, pag. 72, alin. 2. Operation. Enlever sur l'arbre qu’on veut multiplier, un anneau d’écorce muni d’un ou deux yeux, en le fendant perpendiculairement sur l’un de ses côtés ; Enlever au sujet un anneau d’écorce sans yeux et de pareille dimension; Poser l’anneau muni d’yeux sur le sauvageon , auquel on laisse sa têle et ses branches, et placer l'anneau retiré de celui-ci à Ja place de celui qui a fourni la greffe. Cette grefle s’effectue à la séve d'août, vers son déclin. Usages. Elle ne compromet pas l'existence des sujets, si la greffe ne reprend pas; et elle ne mutile pas le porte-grefle, puisque sa plaie est recouverte par l’écorce du sauvageon. ; Propre à multiplier des arbres rares à bois dur, dans les genres des chènes, des noyers et des châtaigniers américains. Dénomination. En l'honneur de M. Tuomas JEFFERsoN, ci - devant président des États-Unis de l'Amérique, savant agronome auquel Pagriculture doit Pun des plus utiles perfectionnemens de la charrue, dont il a repris le manche en quittant les rênes de l’état qu'il a gouverné avec tant de sagesse IL. Greffe (Sifflet) en flûte, pratiquée au moyen d’un anneau d’écorce, enlevé à un arbre et placé sur un autre, en cou- pant le sommet de la partie greffée. Nouv. Cours d’Acr., t. 6, pag. 525, pl. IV , fig. 17. Synonymie. G.en écusson en siflet. Dunam., Phys. des Arb., tom. 2, pag. 91, alin. 1%, pl. 12, fig. 101, 102, 103 et 104. G. par juxta-position ou en flûte. Rozrer, Dict. d’Agr., tom. 5, pag. 552, col. 2, alin. 1°°., pl. XI, fig. 22. Opération. Couper la tête au sujet ou l’extrémité de la branche qu’on veut greffer ; enlever au-dessous de la coupe, un anneau d’écorce muni d’yeux, - d’un à trois pouces de long ; Choïsir la branche qui doit fournir les greffes, de même diamètre que le D'HISTOIRE NATURELLE. 5x sujet; enlever par le gros bout un tuyau d'écorce un peu moins long que la plaie du sujet ; Ajuster ce tuyau à la place de l’anneau’enlevé, et Le faire joindre exacte- ment ;par le bas ayce l'écorce du sujet; réduire en charpie ce qui reste de bois dénué d’écorce au-dessus de la greffe, et luter les scissures. Usages. Presque uniquement employée dans quelques départemens de la France, pour grefler les noyers, châtaigniers, müriers, figuiers et autres arbres fruitiers à pépins et à noyaux. Dénomination. Nom sous lequel elle est connue dans une grande partie de la France. TITI. Greffe ( de Pan en flûte, par l’amputation de la tête ou des branches du sujet, et à œil dormant. Nouv. Cours d’Agr., tom. 6, pag. 525. Synonymie. G. en chalumeau. Ca5., Prince. de la gref., pag. 42 ;'alin. 4. Opération. Celle-ci ne se distingue de la précédente qu’en ce qu’elle s'effectue à la deuxième séve, avec des gemma produits par la première séve de la même année, tandis que la greffe en sifflet se pratique avec des yeux de l’année précédente. Usages. Rarement employée dans l’usage ordinaire, mais pouvant être utile pour varier les chances de réussite dans la multiplication des arbres étrangers à bois très-dur. Dénomination. Cette greffe imitant le chalumeau dont se servent les bergers dans leur musique champêtre, et dont les poëtes attribuent l'invention au dieu Pax, on lui a donné son nom. IV. Greffe (de Faune) en flute, à plusieurs yeux alternes, posée en supprimant la tête des parties greffées, et lacérant leurs écorces. Nouv. Cours d’Agr., tom. 6, pag. 525. Synonymie. G. en flâte. Dunam., Phys. des Arb., tom. 2, pag. 72, pl. XI, fig. 104. Opération. Cette sorte se distingue par la longueur de son tuyau qui peut être d’un décimètre et porter 4 ou 5 yeux, et en ce que l’écorce du sujet, au lieu d’être supprimée dans la longueur de la greffe , est divisée verticalement en quatre ou cinq lanières qu’on rabat vers la terre, et qu’on relève sur la grefle, lorsqu'elle a été placée; ensuite on coupe l'écorce et le bois du sujet en bec de flûte au-dessus du dernier œil de la greffe. - *% 4 Sa LA ANNALES DU MUSEUM Usages. Moins employée par les pépiniéristes que par les cultivateurs d’arbres étrangérs, pour diverses espèces de végétaux rares à bois dur. + ps Elle offre, par sa longueur, et le nombre de ses yeux, un plus grand nombre de chances pour la réussite, que les autres sortes de cette série mais elle est moins facile à exécuter. , . . + % . . . . Dénomination. Nom des dieux rustiques auxquels on attribue l'invention de la flûte des bergers, avec laquelle cette greffe a de la ressemblance, TABLEAU METHODIQUE DES SECTIONS. re I Parapproche.) Par scions. : Par gemma. JR branches. j ; SERIES. 1. Malesherbes. . Forsyth. . Michaux. . Cachoise. Bradeley. . Varron. Te ge Sur tiges. D GO # où pb Ps YA ; 1. Cabanis. Agricola. . Malpighi. Sur racines. ui PLUS 1. Pomone. Sur von . Adanson. mn De Lu et de fleurs. Atticus. En fentes. ju 3. Bertemboise. 4. Kuffner. . Dumont En couronne. Courset ). . Huard. En SS 2. Riedlé. . Richard. dr côté. 2. Térence. . Hall. 2. Saussure. HE racines. 1. Tillet. 2. Xénophon. 35. Poederlé, 4. Lenormand. 5. Sickler. 6. Jouette. En écusson. . Jefferson. " Ë f F: : : x 1 En RE ( de SORTES. CN 7. Sylvain. 8. Hymen. 9. Dumoutier. 10. Monceau. 11. Noël. 12. Vrigny. 3. Aiton. 4. Rozier. 2. Lemonnier. 2. Leberriays. 5. Maupas. 2. Olivier de Serres. 6. Ferrari, 7. Lee. 8. Miller. 2. Hervy. 58. Pline. Collignon, Riché. + Q o1 4, Grew. 3. Guettard, &. Cels. TANT Te 8. Mustel. 9. Descemet. 10. Schneewoogt. 11. Knoop. 12. Jansein. 2. Sifllet. Roger-Schabol. 13. Duhamel. 14. Denainvilliers. 15. Fougeroux. 16. Du Muséum, 17. En arc. 18, En berceau. 5. En lozange. 6. Egyptienne. GREFFES. 19. . Diane, É Magon. DE 24. " 7- 8. Par compression. . Chinoise. Columelle, Virgile. Buffon, Caton. : ES g. Anglaise, 10. Lenôtre. 11. Palladius. 12. De la vigne. Théophraste. + Liébault. . Varin, . Noisetie. DO or . Pepin. . Girardin. 5. Bourgdorff. 6. Chomel. - Duroy. . Lambert. . Magneville. . Sintard. Aristote. . Sennebier, 3. De Pan. 19: 14. Constantin-César. Laquintinie. 7. Palissy (Bernard }, 8. 20. 21. 22. Muzat. D oo 19. Nébuleuse. Butrel, Bonnet. Bosc. 4. De Faune. RE PL SE EU 102 Sorles, ToTAL GÉNÉRAL., Fin du genre des Greffes. 54 ANNALES DU MUSÉUM 4: À SUITE. De la détermination des espèces de Mollusques T'estacés. PAR M LAMARCRK: VOLUTE. (7ozuTA.) Ci ovale, plus où moins ventrue, à sommet obtus ou en mamelon, à base échancrée et sans canal. Columelle chargée de plis dont les inférieurs sont les plus gros, ou plus obliques que les autres. Point de bord gauche. Testa univalvis, ovata, subventricosa; apice papilla- rt; basi emarginatä. Columella plicata: plicis inferiori- bus majoribus , vel magis obliquis. Labrum columellare nullum. Gastéropode... à tête munie de deux tentacules pointus; les yeux à leur base extérieure. Bouche en trompe allongée, cylindrique, rétractile, garnie de petites dents crochues. Un tube pour conduire l'eau aux branchies, saïllant obliquement derrière la tête. Pied fort ample; point d’opercule. CT Qt D'HISTOIRE NATURELLE. OBSERVATIONS. Le genre voluta de Linné, quoique caractérisé d’une manière assez distincte, d’après la considération de Fexis- tence des plis sur la columelle de la coquille, est très-peu naturel; car il réunit des coquillages de familles différentes qu'il faut distinguer, séparer et écarter parce qu'elles ne s’avoisinent point. Il comprend effectivement des coquilles à ouverture entière, comme les auricules; des coquilles à ouverture canaliculée à la base, comme les fasciolaires et les {urbinelles qui avoisinent les zzurex; enfin des co- quilles dont l’ouverture est simplement échancrée comme celle des Buccins, etc. : ce qui lui donne une étendue extrè- mement considérable et nuisible à l'étude des espèces. BruGuiÈre avoit commencé la réforme de ce genre trop nombreux établi par Linné, en supprimant avec raison les espèces dont la coquille n’est pas échancrée à sa base. J'ai ensuite porté plus loin cette réforme, et j'ai séparé du genre voluta de Linné, les zatres, les colombelles, les Inargt- nelles , les cancellaires, les turbinelles, qui sont des genres distingués d’une manière remarquable des véritables vo/utes, et dont plusieurs sont d’une autre famille. Le genre des volutes , tel qu’il est ici caractérisé, est beau- coup plus circonscrit qu'il ne l’étoit, paroïit plus naturel, et n'offre plus d'association disparate, comme auparavant. Malgré cela, ce genre comprend ençore un grand nombre d'espèces, parmi lesquelles quantité sont très-précieuses par leur rareté, par la beauté, la vivacité et la diversité de leurs 56 ANNALES DU MUSÉUM couleurs. On peut dire que c’est un des plus beaux genres de la conchyliologie, et qu'il forme un des plus riches or- nemens des collections. Les espèces sont en général lisses, brillantes, et il ne paroît pas qu'aucune d'elles soit pourvue de drap-marin. Dans les unes, la coquille est très-ventrue et bombée, presque comme les tonnes; dans d’autres, elle est simple- ment ovale et chargée de tubercules plus ou moins piquans; enfin dans d’autres encore elle est ovale-conique, allongée, presque fusiforme ou turriculée et se rapproche de la forme des mitres. Ces considérations fournissent des moyens de diviser le genre, sans rompre les rapports qui lient entre elles les espèces, et en facilitent l'étude. Ces coquillages sont tous marins, et vivent en général dans les mers des pays chauds. Aucune des espèces connues de ce genre ne vit dans nos mers. C'est avec les mitres que les volutes ont le plus de rap- ports; mais elles en sont éminemment distinguées 10. par les plis de leur columelle dont les inférieurs sont les plus gros, ou sont plus obliques que les autres; 2°. par l’extré- mité de leur spire qui est obtuse ou en mamelon. L'animal des volutes est un gastéropode carnacier qui ne respire que l’eau. J'ai distingué les espèces de ce genre en quatre petites familles que les rapports indiquent assez bien, mais que l’on ne doit pas séparer, parce qu'elles sont liées entres elles de manière à devoir constituer un seul genre. D'HISTOIRE NATURELLE. 53 ESPÈCES. * Cog. ventrue, bombée. Les Gondolières. [ Cymbiolæ. ] 4. Volute diadème. Z’oluta diadema. T. Ventricosa, marmorata; spirä coronat& spinis fornicatis rectiusculis ; co- lumell& triplicatà. Mus., 0. 1. Encycl., pl. 388, f. 2. Gualt. ind., t. 29, fig. H. Séba, Mus. 3,t. 65,f.12, et t.66,f.1,2,3, 7, 8,10, 15. Martini, Conch. 3, t. 74, f. 780. B. Var Habite l'Océan asiatique. Cette belle volute , que Linné a confondue avec son V. œthiopica, constitue une espèce constamment distincte, et qui acquiert un très-grand volume. Elle est marbrée de blanc ou de taches blanches sur uu fond jaunâtre. Dans son plus grand accroissement, elle est très-bombée, peu marbrée, et a 2 à 3 décimètres de longueur. Ses épines sont des écailles concaves, voûlées, pointues, presque droites, et peu fréquentes sur le sommet du dernier tour. Cette espèce est recherchée pour l’ornement des collections. 2. Volute armée. V’oluta armata. Ÿ. Ventricosa, marmorata, supernè attenuata; spir& coronat& spinis rectis prælongis ; columell& triplicatä. Mus., n. 2. Encycl., pl. 388, f. 1. Martini, Conch. 3, t. 76, f. 787, 788. B. Var. à bandes. Séba, Mus. 3, t. 65, f. 1, 2. Habite les mers du Cap de Bonne-Espérance. Cette espèce est distincte de la précédente par les longues épines dont elle est couronnée, et parce qu’elle s’amincit davantage vers son sommet. Quoique fort grande encore, il paroît qu'elle n’acquiert pas un aussi grand volume que la première. Sur un fond jaunâtre, presqu’orangé , sa partie supérieure est marbrée de taches blanches irrégulières. Cette coquille n’est point commune; ses dernières épines sont les plus grandes. 3. Volute ducale. Voluta ducalis. 7. Cylindraceo-ventricosa, albida, castaneo-maculosa, venis rufis subreticu- lata ; spiræ spinis brevissimis tuberculiformibus ; columell& quadriplicatä. a. Volute ducale veinée. Mon Cabinet. 7: 8 > 56 ANNALES DU MUSÉUM B. La même? à linéoles sanguinolentes. Chemn. Conch. 10, p. 141, t. 148, f. 1385, 1386. C. La même ? ponctuée, Chemn. Conch. 10, p. 142, t. 148, f. 1387, 1388. Habite l'Océan indien. Parmi les volutes à spire couronnée, celle-ci est remar- quable par ses épines très-courtes, qui ressemblent à des dents où à des tu- hercules pointus, et qui sont toujours dépassées par le mamelon très -saillant de la spire. La coquille [a] est veinée, en réseau lâche et irrégulier, par des lignes rousses , et offre en outre des taches d’un brun marron, irrégulières, disposées en deux rangées transverses. La columelle a quatre plis. Longueur, 7 centi-. mètres. Quoique la coquille [B], selon Chemniz, n’ait que trois plis à la columelle, je ne la considère que comme une variété de cette espèce. Une différence d’âge en peut produire dans le nombre de ces plis, comme le prouve la volute éthiopienne qui n’a que trois plis dans la jeunesse des individus. La coquille [C] mériteroit plutôt d'être distinguée, ayant quatre plis à sa columelle, ce qui indique qu’elle ne vient pas beaucoup plus grande. 4. Volute mouchetée. Voluta tesselata. F. Ventricosa, albida ; zonis duabus fusco-tesselatis ; columellä quadriplicatä. Mus., n. 3. List. Conch., t. 797, f. 4. Bonanni, recr. 5, f. 1. Séba, Mus. 3, t. 65,f.10, et t. 66, f. 6. Martini, Conch. 3, tab. 74, f. 781. Habite... Cette volute paroît constamment distincte de la volute éthiopienne, en ce qu’elle est plus bombée, qu’elle ne devient jamais grande, et qu’elle est mouchetée, Les épines qui la couronnent sont moins nombreuses et plus inclinées vers l’axe de la spire. Sa couleur est blanchâtre, tirant un peu sur la couleur du soufre; enfin elle présente deux zônes composées de taches presque carrées, brunes ou noirètres. Longueur, environ huit centimètres. 5. Volute éthiopienne. Voluta æthiopica. F. Obovata , ventricosa , castanea , immaculata; spir@ coronat& spinis brevi= bus crebris rectiusculis ; columellé quadriplicata. Mus., n. 4, Encycel., pl. 387, f. 1. l List. Conch., t. 801, fig. 7, b. Gualt. ind. , t. 29, fig. 1. Martini, Conch. 3, t. 95, f. 784. Knorr. delic., tab. B, VI, f. 2. B. Var. à bande blanchätre. Argenv.,t.17, fig. F. Séba, Mus. 3, t. 65, f. 4, 11; et t. 66,f.9. Martini, Conch. 3,t.73,f. 777 à 779. C. Var. à deux bandes brunes. D'HISTOIRE NATURELLE. 59 Martini, Conch. 3, t. 74, f. 782. Encyel, pl. 388, f. 3. Habite l'Océan africain, la mer Persique, ete. Cetie volute, assez commune dans les collections où elle est connue sous le nonœ de couronne d’'Ethiopie, n’est jamais marbrée ni tachetée comme les précédentes. Elle est ovoïde, ventrue; et d'autant plus bombée quw’elle est moins jeune ou plus grande. Sa couleur est unie, d’un roux brun ou marron, et n’est interrompue que par une zône blanchâtre et transverse dans la variété B, où que par deux bandes brunes dans la variété C. Les jeunes individus n’ont que trois plis à la colu- melle; les autres en ont quatre. Sa couronne est formée par des écailles con- caves, spiniformes, petites, nombreuses, assez droites, et presqu'égales à la hauteur du mamelon de la spire. Longueur , 10 à 13 centimètres. . 6. Volute melon. J’o/uta melo, Sol. V. Ventricosa , apice coarctata, albido-lutescens ; maculis fuscis subtriseriatis ; spiré muticä obtectà ; columellä quadriplicatä. Mus., n.5. Encycl., pl. 389, f. 1. : Martini, Conch. 3,1. 72,f. 772, 773. Mus. Gottwald Bt. 10,f. 64. Knorr. Vergn.5,1.8,f. 1. Habite l'Océan indien. Espèce très- belle et constamment distincte de toutes celles que l’on connoit. Elle présente une coquille ovoïde, très-ventrue, bombée, et tellement resserrée au sommet qu’on voit à peine le mamelon de la spire. Sur un fond d’un blanc jaunâtre pur et lisse , elle offre deux ou trois rangées transverses de taches brunes ou noirâtres et inégales. Sa longueur est de 15 à 16 centimètres. Sans être très-commune, elle n’est point rare aetuel- lement dans les collections. . H 7. Volute de Neptune. V’oluta Neptuni. V. Obovata, ventricosa, rufo-fucescens ; spir& subtecté , carinatà& ; columellà quadriplicatt. Mus., n. 6. Encyel., pl. 386, f. 1. Yet., Adans., Sénég. ,t. 3, f. 1. List. Conch. 1. 802, f. 8. Gualt. ind., t. 27, fig. AA. Séba, Mus. 3, t. 64, f.3;t. 65, f.5; et t. 66, f. 4. Martini, Conch. 3, t. 71, f. 767 à mg. Habite l’océan africain, le golfe Persique. On donne à cette espèce le nom de tasse de Neptune. C’est une grosse coquille ovoide , bombée , et d’une couleur fauve où d’un roux-brun. Elle est resserrée sur la spire ,de manière que dans sa jeunesse on ne voit que le gros mamelon qui la termine, et que dans les vieux individus ce mamelon est tout-à- fait recouvert et caché ; mais le bord supérieur du dernier tour rend alors la spire carinée et enfoncée. Quoique la columelle ait quatre plis, il n’y en a que trois de bien apparens, le qua- trième étant caché derrière l’avant-dernier, Cette coquille est assez commune; SE 60 ANNALES DU MUSÉÜM elle a près de 2 décimètres de longueur ; elle a quelquefois de petites taches blanchâtres et inégales. 8. Volute gondole. Foluta cymbium. V. Ovata, rufo alboque marmorata; spir@ canaliculatä ,marginat&; colu- mellæ plicis variis. ‘ , Mus., n. 7. Encycl., pl. 386, f.3. Gualt. ind., t. 29, fig. B. Argenv.,t. 17, fig. G. Séba, Mus. 3,1. 65,f.8 , 9. Martini, Conch. 5, t 70, f. 762, 763. Habite l'Océan africain et américain. Cette espèce est agréablement marbrée ou panachée de blanc et de roux brun, et se distingue éminemment par sa spire canaliculée et carinée en spirale, ayant dans tous les âges son mamelon à découvert. Elle est moins élargie et moins ventrue que la précédente, et va- rie, selon l’âge, dans le nombre des plis de sa columelle. Les plus grands in- dividus en ont jusqu’à six; le plis supérieur et l’inférieur étant l’un et l’autre divisés en deux. Sa longueur est d’environ 15 centimètres. 9. Volute à mamelôn. Fo/uta olla. x PV. Ventricosa, immaculata, luteo-fulva ; spir& canaliculatä obtusa : mamillo glandiformi prominente ; columell& biplicatä. Mus., n. 8. Encyel., pl. 385, f. 2. Gualt. ind., t. 29, fig. A. Martini, Conch. 3, t. 71, f. 766. Schrott. einl., t. 1, f. 14. B. Var. à bord droit très-dilaté, muni d’un sillon transverse à Pextérieur. List. Conch., t. 794, f. 1. Cabinet de M. Dufrène. Habite FOcéan des grandes Indes. On ne peut confondre.cette volute avec au- cune des espèces connues, tant sa spire est remarquable. Le sommet de chaque tour est obtus, arrondiet se replie pour former un canal en spirale; et au centre de cette spirale, on voit saillir un gros mamelon glandiforme, qui à fait donner le nom de prépuce à la coquille. Sa couleur est d’un fauve pâle et jaunätre. Loñgueur, 11 centimètres. La variété B est plus grande, et fort singulière en ce que son ouverture est très-évasée , que son bord droit esi dilaté en aile, et que la coquille offre sur le dos un sillon transverse au-dessous de son milieu. 10. Volute proboscidale, Voluta proboscidalis. V. Elongata , ventricoso-cylindracea ; dorso lineis binis transversis obliquis ; spir& truncat@ carinatà. Mus., n. 9. Encycl., pl. 389, f. 2. List. Conch., t. 800, f. 7. Habite l'Océan des Philippines. Cette volute, quoique rapprochée de la sui- D'HISTOIRE NATURELLE, Gt varte par ses rapports, en est bien distincte et devient très-grande, surtout en longueur. Elle est allongée, cylindracée, un peu ventrue et comme tronquée au sommet où elle est bien carinée. Sa spire, quoiqu’un peu en- foncée, n’a point de canal, et le mamelon qui la termine est presqu’entière- ment recouvert. La columelle a trois plis en évidence et un quatrième ea- ché sous le dernier. Couleur d’un fauve pâle; longueur, au moins 3 déci- mètres. Des deux lignes dorsales, l’une est élevée et plus marquée que l’autre. 11, Volute porcine. Voluta porcina. V. Subcylindrica, apice truncata, albida; spir& subtect&, plano-concavé, maroine carinatà. Mus., n. 10. Encycl., pl. 386, f. 2. Séba, Mus. 3, 1. 65,f.5et 6, et t.66,f.5. Le philin. Adans., Séneg., pl. 3, f. 2. Knorr. delic., tab. B, VE, f. 3. Martini, Conch. 3, 1. 70, f. 764, 765. Ÿ Habite l'Océan africain. Linné a confondu cette espèce avec son voluta cym- bium qui en est constamment distinct. Celle dont il s’agit ici n’est jamais marbrée, n’a point sa spire canaliculée, et n’est point bombée comme la … volute gondole. C’est avec la volute proboscidale qu’elle a les plus grands rapports; mais cette dernière est toujours allongée, devient bien plus grande, et a deux lignes dorsales qui ne se montrent point dans la volute porcine. Longueur, 14 centimètres ou environ. Cette coquille est commune. ( Trois ou quatre plis à la columelle. ) 12. Volute pied-de-biche, Zo/uta scapha. F. Turbinato-ventricosa, crassa, albida , lineis angularibus rufis vel fusco- rubris undata ; labro subalato. Mus., n. 11. List. Conch. , t. 799, f. 6. Bonan., recr. 3, f. 10. Gualt. ind., t. 28, fig.S. Séba, Mus. 3, t. 64, f. 5, 6. Martini, Conch. 3, t. 72, f. 774 ,ett. 73, f. 975, 776. B. Var. rougeûtre, subnoduleuse. Volute de Java. Mus., n. 12. | Habite les mers du Cap de Bonne - Espérance; la variété B se trouve sur les côtes de Java. Belle et assez rare espèce, qui semble approcher des strombes par sa forme, et qui devient très-épaisse, pesante et presqu’ailée par le développement de son bord extérieur. Elle est courte, turbinée, va en s’élargissant jusqu’à V’augle de la spire, et offre sur un fond blanchätre , quantité de lignes an- guleuses, ondées en zigzag, et de couleur rousse, Quelquefois elle est mar- 62 ANNALES DU MUSÉUM brée de taches blanches et de taches rousses angulaires et irrégulières. La columelle a quatre gros plis et le bord droit de l'ouverture, qui devient fort épais , forme un pli et un sinus en canal dans sa partie supérieure, La variété B a le fond rosé ou couleur de chair, les lignes ondées et les taches d’un rouge-brun. On est tenté à son aspect de la distinguer comme une espèce. 13. Volute du Brésil. oluta Brasitiana. V. Obovata, inflata, pallidè lutea ; angulo spiræ noduloso ; spir& brevi ; co- lumellé triplicatà. Mus., n. 15. Poluta cocynthis. Chemn. Conch. XI, p. 10, t. 176, £. 1695, 1696. Habite l'Océan du Brésil. Cette volute, très-rare, a des rapports évidens avec la précédente, quoiqu’elle soit toujours plus petite, moins épaisse et unicolore. Elle est ovoide ou subturbinée, enflée, à spire courte, en cône surbaissé, terminé par un mamelon. L’angle de la spire présente une rangée transverse de nœuds ou tubercules arrondis. La coquille, sans raies et sans taches , est d’un jaune pâle ou ventre de biche. La columelle porte trois plis, dont l’inférieur est plus gros et plus oblique que les autres. Longueur, 86" millimètres. ** Cog. ovale, épineuse ou tuberculeuse. Les Muricines. [ Muricincæ. ] 14. Volute impériale. f’oluta imperialis. V. Turbinata, carnea, maculis lineisque angulatis rubro fuscis undata ; spirà spinis erectis subincurvis coronatà. Mus., n. 14. Encycl., pl. 382, f. 1. Martini, Conch. 3, t. 97, f. 934 , 955. Vulg. le foudre chinois, ou la couronne impériale chinoise. Habite l'Océan oriental des grandes fades. Volute rare, précieuse et l’une des plus belles de ce genre. Elle forme avec les suivantes une petite famille assez distincte dans le genre qui la comprend, et devient la plus grande et la plus élégamment couronnée de cette famille. C’est une coquille turbinée, à spire courte, couronnée, terminée par un mamelon. Sur un fond couleur de chair, elle est ornée de quantité de lignes en zigzag et de taches angu- laires, les unes et les autres d’un rouge-brun, avec une disposition dans les taches à former deux zônes plus colorées. Les épines du rang extérieur sont grandes , presque droites, un peu courbées vers la spire. La columelle a quatre plis. Longueur, 14 à 15 centimètres. Mon Gabinet. D'HISTOIRE NATURELLE. )3 15. Volute peau de serpent. V’oluta pellis serpentis. V. Ovato-oblonga, paillidè fulva, lineis maculisque rufis nebulosa ; spir& conicä , obsoletè muricat& ; labio non plicato. Mus., n. 15. Encycl., pl. 378, f. 1. Rumph., Mus., t. 32, f. 1. Séba, Mus. 3 , t. 67. Series infima. Habite l'Océan des grandes Indes. Cette volute, fort rare dans les collec- tions, est une des espèces assez nombreuses et constamment distinctes que Von a confondues avec le F, vespertilio. Elle est grande, allongée, et à tour extérieur presque mutique , la spire m’offrant que de petits tubercules sur ses tours intérieurs. Sur un fond d’un fauve elair ou pâle, elle est ornée de nébulosités fines et de taches rousses. Le bord droit de son ouverture ne forme point de pli ou d'angle dans sa partie supérieure, comme dans la suivante. La columelle a quatre plis. Longueur, 12 centimètres. Mon Cabinet. 16. Volute chauve-souris. Voluta vespertilio. V. Turbinata, tuberculis validis acutisque armata ; labio supernè plicato ; maculis lineisque angularibus subspadiceis. Mus., n. 16. Encyel., pl. 378, f. 2. FRumph., Mus., t. 32, fig. H. List. Conch., t. 808, f. 17. Bonan., recr. 3,f. 294. Gualt. ind., t. 28, fig. F. G. I. M. V. Séba, Mus. 3, 1. 67. Serie infimä demptä. Martini, Conch. 3, t. 98, f. 937-939. B. Var. raccourcie. Martini, Conch. 3, t. 97, £. 936. C. Var. à large bande. Chemn. Conch. 10 , t. 149, f. 1399, 1400. D. Var. à deux bandes tachetées. Chemn. Conch. XF, t. 176, f. 1699, 1700. E. Var. marron, non tachetée. Chemn. Conch. 10, t, 140; f. 1397, 1398. F. Var. à réseau arachnoïde. De la Nouv. Hall. Voluta arachnoïidea. Mus., n. 19. Petiv. Gaz. ,t. 70, f. 10. Habite l'Océan des grandes Indes, les mers de la Nouvelle -Hollande. Cette espèce, qui est très-commune , est difficile à circonscrire dans ses limites, parce qu’elle fait partie d’une petite famille qui offre quantité de races qui sé nuancent entre elles, qui chacune sont constantes dans les lieux qu’elles habitent, et que cependant l’on ne sauroit distinguer comme espèces, leurs caractères ne paroissant pas avoir assez d'importance, Cette petite famille, qui comprend les V. muricines, se distingue des V, musicales ,en ce que la columelle n’a qu'une seule sorte de plis, et toujours au nombre de quatre. La V. chauve-souris est turbinée, et muriquée par de gros tubercules 17. 18. ANNALES DU MUSÉCUM piquans, disposés sur l’angle de chaque tour. Elle présente, sur un fond tantôt blanchâtre, tantôt jaune ou fauve, des taches angulaires, et des lignes en zigzag, brunes ou rougeâtres, qui la rendent très-remarquable. Longueur, 7 à 10 centimètres. Ma Collection. Volute douce, Voluta mitis. PV. Ovato - oblonga, subturbinata, varia ; flammis angularibus spadiceis ; anfractibus primariis tuberculato-nodosis : ultimo mutico. A. PVoluta flammaria. Mus. 17. B. Var. à spire raccourcie, et à flammes subconfluentes. Séba , Mus. 3, t. 57, f. 4, 5. Martini, Conch. 3,t. 98, f. 940. Var. accidentelle Senestre. Chemn. Conch. 9, p. 53, 1. 104, f. 888, 889. C. Var. pyriforme. Séba, Mus. 3, t. 57, fig. a, d. Habite les mers de la Nouvelle-Hollande , et des grandes Indes. Cette volute, extrêmement rare et fort belle, se distingue principalement de la précé- dente en ce que son dernier tour n’est point tuberculeux. La coquille À est oblongue, presque cylindracée, néanmoins un peu ven- true, à spire conique , légèrement noduleuse en ses premiers tours. Sa cou- leur est d’un fauve jaunâtre, avec des flammes angulaires irrégulières et d’un rouge-brun, qui lui donnent un aspect très-agréable, Longueur, 8 centimètres. La variété B a sa spire plus raccourcie, ses flammes plus confluentes et plus brunes. Elle offre des individus qui tournent de gauche à droite. Ma collection. Je ne connois la variété € que par les figures citées de Seba. C’est peut- ètre une espèceà distinguer, Volute neigeuse. V’oluta nivosa. V. Ovata, pallidè fulva, maculis niveis adspersa ; fasciis duabus fusco- lineatis ; columellä quadriplicatä. Mus., n. 24. Annales du Mus., vol. 5, p. 158,t. 12,f.2,@, b. B. Var. raccourcie et tuberculeuse. Annales du Mus., vol. 5, pl. 12, f. 1. Habite les côtes de la Nouvelle - Hollande. Péron. C’est encore une espèce de la même famille que les précédentes, et que l’on ne sauroit cependant con- fondre avec aucune d’elles. Ce qui distingue essentiellement cette volute, c’est d'offrir sur un fond ventre de biche ou de couleur isabelle, parsemé de petites taches blanches ou neigeuses , deux fascies transverses, composées de quatité de lignes brunes verticales, plus ou moins interrompues. L'espèce se distingue en deux variétés remarquables : dans la première [ a], la co- D'HISTOIRE NATURELLE. G5 mutique, et à peine sensiblement tuberculée sur les premiers tours de la spire. Longueur, 75 millimètres. Dans la seconde , qui est plus raccourcie , la coquille est turbinée, anguleuse et tuberculeuse, même sur le dernier tour. 19. Volute serpentine. V’oluta serpentina. . Cylindraceo-fusiformis , obsoletè tuberculata , alba, lineis fulvis flexuosis longitudinalibus ; cingulà obliquâ granosé ad basim columellæ. Mon Cabinet. Habite l'Océan des grandes Indes. Quoiqu’encore de la petite famille des muricines, cette volute est très- distincte de toutes celles que je viens d’in- diquer. Elle est cylindracée, presque fusiforme, à peine tuberculeuse sur la spire, et moins ventrue que la volute douce, Sur un fond blanc ou blan- châtre, cette volute présente des lignes rousses longitudinales fléchies eu zigzag. Sa columelle n’a que quatre plis, et sur sa base on aperçoit une cordelette granuleuse qui monte obliquement du milieu de l’échancrure jusqu’au quatrième pli supérieur, Longueur, 6 centimètres. *** Coq. ovale, subtuberculeuse. , Les Musicales. [ Musicales. ] 20. Volute bois veiné. V’o/uta hebræa. PF. Ovato-conica, albida ; lineis fusco-rubris , transversis subundatis , fascia- tis ; anfractibus submuricatis ; columell& plicis quinque majoribus, inferio- , ribus. Mus. , n. 15. Encycl., pl. 380, f. 2. List. Conch. , t. 809, f. 18. Argenv. Conch., t. 14, fig. D. Bonan., recr. 3, f. 293. Séba, Mus. 3, t. 57, f. 1, 2, 3, 6. Martini, Conch. 3, t. 96, f. 924, 925. Habite l'Océan indien , les côtes de la Jamaïque. Les volutes musicales forment dans le genre qui les comprend une petite famille-distincte des V. muricines, quoiqu’elles soient aussi plus ou moins tuberculeuses. Leur columelle a des plis nombreux, dont les inférieurs sont grands, profonds, et les supérieurs petits, peu apparens. L'espèce dont il s’agit ici est la plus grande de cette famille : c’est une coquille fort belle, qui seroit précieuse si elle n’étoit commune. Sa moilié inférieure est turbinée, terminée par une rangée de grands tubercules non piquans. l’autre moitié constitue une spire conique, un peu tubercu- leuse. Sur un fond d’un blanc légèrement fauve, sa partie turbinée présente des lignes ou. veines transverses, ondées, d’un rouge brun, disposées par TR à 66 ANNALES DU MUSÉUM zônes. La spire est veinée longitudinalement sur un fond semblable. Cette coquille est solide, pesante, et acquiert 11 centimètres et plus de longueur. 21. Volute musique. foluta musica. V. Turbinato-ovata , albida; lineis transversis parallelis ; punctis maculis- que fuscis fasciatis ; spirâ tuberculis asperatä. Mus., n. 26. Encycl., pl. 380, f. 1. List. Conch.,.t. 805, f. 14. Argenv. Conch., t. 14, fig. F. Gualt. ind., t. 28, fig. x, z,z. Séba, Mus. 3, t.57,f. 7, 8, et 13 à 194 Martini, Conch.3,t. 96, f. 929. B. Var. violätre. V’oluta violacea. Mus., n. 27. Habite l'Océan américain. C’est avec raison que l’on a donné le nom de mu- sique à cette espèce; parce qu’elle est ornée de lignes transyerses et paral- lèles comme celles d’un papier de musique, et qu’elle offre une zône ponc- tuée dont les bords ont des taches noirätres et séparées, qui ressemblent à des notes musicales. Elle varie beaucoup, comme les autres volutes de la mème famille, ce qui eu rend les espèces difficiles à caractériser. Celle-ci est turbinée, large, un peu courte, et offre sur chaque tour de spire de gros tubercules non piquans, dont la base se prolonge en côtes obtuses. Les points de la zône non rayée sont épars, presque ramassés par groupes, et dans une variété on les voit rangés sur deux lignes transverses. Cette coquille est très-commune ; sa longueur est de 7 à 8 centimètres. Sa columelle présente cinq plis principaux, et au-dessus trois ou quatre autres très-petils. 22. Volute chlorosine. Voluta chlorosina. V. Turbinato-ovata , albo-lutescens, tuberculata ; fusciis fulvo -fuscis inter< ruptis ; guttis spadiceis raris ; columellà decemplicatä. Mus., n. 28. Habite.... On distingue cette volute de la précédente en ce qu’elle n’a point de zône ponctuée, que les lignes transverses fines et parallèles ne paroissent point ici, et que le fond de sa couleur est jaunâtre. Quant à la forme, c’est à peu-près celle de la V, musique; mais la coquille est moins grande. Lon- gueur , 55 millimètres. 23. Volute thiarelle. ’o/uta thiarella. . Ovato-oblonga, albida , subtuberculata ; lineis transversis parallelis ; fas- ci& punctaté , ad margines albo fuscoque articulatä. Mus. , n. 29. Encycl., pl. 380, f. 3. List. Conch., t. 806, f. 15. Chemn. Conch. 10, t. 149, f. 1401, 1402. Séba, Mus. 5 ,t. 57, f. 21. B, Var. à zône ondée et nébuleuse. 7’o/uta nebulosa. Mus., n. 32. D'HISTOIRE NATURELLE. 67 Habite... les mers d'Amérique? Cette espèce diffère éminemment des trois précédentes par sa forme allongée, par ses tubercules peu élevés, presque nodiformes, enfin par les dix ou douze plis de sa columelle. Elle est blan- châtre, ornée de lignes musicales transverses, et d’une zône étroite, semée de points rouge- bruns. Les deux bords de cette zône présentent chacun une cordelette articulée de blanc et de brun. Longueur, 7 centimètres. La variété B est nuée de traits angulaires violâtres dans sa bandé rayée. Sa spire n’est que noduleuse. 24. Volute carnéolée. f’o/uta carneolata. F. Ovata, mutica , albido lutea vel crocea ; lineis punctis maculisque fascix- tis ; costis longitudinalibus obtusis. j Mus., n. 30. Encyel., pl. 379, f. 4. B. Var. ridée transversalement, /’oluta rugifera. Mus., n. 31. C. Var, rouge. Mon Cabinet. Martini, Conch. 5, L 96, f. 930, 931. Habite... Cette espèce ne devient jamais grande comme la V. thiarelle, ni large comme la V. musique. On la réconnoit au premier aspect par ses côtes longitudinales obtuses, et par ses rides transverses. Elle varie du blanc pâle ou jaunâtre à la couleur de chair, à la couleur fauve orangée, et enfin au rouge brun. Sa columelle a 10 plis. Longueur, 46 à 48 millimètres. 25. Volute de Guinée. oluta guinaica. 7. Orata, subtuberculata , albida, violaceo nebulosa ; lineis fuscis decussa- tis; Jasciis punctatis ; columell& plicis quatuordecim. Mus., n. 33. Mon Cabinet. Chemn. Conch. XI, p. 23, t. 178, f. 1717, 1718. Habite... probablement les côtes de la Guinée, puisqu'elle en porte le nom. Quelque rapport qu’ait cette espèce avec la V. musique, n. 21, elle en est toujours très-distincle, par sa forme moins élargie, par ses lignes, ses poinis et ses couleurs particulières, enfin par les nombreux plis de sa co- lumelle. J'en ai vu au Muséum beaucoup d'individus qui tous se ressemblent essentiellement ,quoiqu'ils varient dans la grosseur des tubercules de chaque tour. Longueur, 62 millimètres. 26, Volute lisse. Zo/uta lœvigata. PV. Ovata, mutica, obsoletè nodulosa, albida, cinereo- violascens ;: fuscià dineis fuscis subdecussatis pict@ ; columellä octo-plicatä, Ma collection. Encyel., pl. 379, f. 2, a, b. Habite... Cette espèce semble se rapprocher un peu par ses rapports de la V. thiarelle nébuleuse; mais elle est moins grande, plus ventrue, plus lisse, et n’a que huit plis à sa columelle, dont les trois supérieurs sont très-petits 9* 9: » 65 ANNALES DU MUSÉUM et écartés. Quoique le fond de sa couleur soit blanchâtre, elle paroït d’un gris violet, ayant une zône violâtre, rayée et presque treillissée de brun- rougeâtre. Les nodulations de la spire sont peu sensibles, ét le sommet de chaque tour est orné de lignes rouges, verticales. Longueur , 48 millimètres. 27. Volute polyzonale. o/uta polyzonalis. Ÿ. Turbinato-ovata, cinereo-virescens , punctata ; cingulis pluribus lacteis ÿ; guttis fuscis raris ; angulo spiræ tuberculato. Mus., n. 35. Encycl., pl. 379, f. 1, &, à. Séba, Mus. 3, t. 57, f. 22. Martini, Conch. 3, L 97, f. 932, 933. La musique verte. B. Var. tres-pointillée. Habite l'Océan indien. Coquille rare, fort rechérchée dans les collections, et qui, dans ia famille des volutes music2lés, constitue urie espèce bien distincte. Elle est turbinée, à spire coniqüe, un peu tuberculeuse, surtout à l'angle de sa base, et ridée tranSyersalement aux deux extrémités. Ce qui la rend re- marquable, £’est d'offrir cinq ou six cordelettes transverses et d’un blanc de lait, sur un fond cendré ou verdätre, parsemé de points rouge-bruns, et de présenter en outre des taches brunes ou noirâtres, écartées, assez semblables à des notes de musique. La columelle a 12 plis inégaux, dont les supérieurs sont les plus petits. Longueur, environ 6 centimètres. 28, Volute fauve. 7oluta fulva. A V. Turbinato-ovata , fulvo-rubella , transversim rugosa ; cingulis albidis sub- ternis ; angulo spiræ tuberculato. ; Mon Cabinet. Encycl., pl. 382, f. 3, a, b. Habite... probablement l’Océan indien. Cette volute a évidemment les plus grands rapports avec la précédente, et néanmoins elle en est irès-distincte. Elle est plus petite, d’un fauve rougeûtre, partout ridée transversalement, et n’est pas ponctuée. Son dernier tour offre trois ou quatre cordelettes ou raies blanchâtres, et à l'angle où commence la spire une rangée de tubercules. Sa columelle est chargée de 12 à 14 plis inégaux, dont les supérieurs sont les plus petits. Elle est plus rare et moins connue que la précédente. 29. Volute sillonnée. V’oluta sulcata. * F. Ovata, transversè sulcata, albida, scabra ; costis longitudinalibus obtusis ; spir& nodulosä ; ore croceo. Chemn. Conch. 10,t.149,f. 1403, 1404. Habite... Cette volute est la dernière connue de la famille des musicales ; et quoique Gmelin Pait classée comme une variété du voluta musica, on sent qu’elle constitue une espèce bien différente, qui avoisine par ses rapports, D'HISTOIRE NATURELLE. | 69 celle qui précède. Ne la connoïssant pas elle-même, je renvoie à l'ouvrage cité de Chemniz qui en a publié la description et la figure. #*** Coq. allongée, ventrue, presqu’en fuseau. Les Fusoïdes. [ Fusoideæ. ] 30. Volute émaillée. PoZuta magnifica. V. Oblongo-ovata, ventricosa, pallidè fulva; fasciis tribus aurantio-castæ- neis , albo fuscoque maculatis ; columellé quadriplicatä, Mus. , n. 36. & V. magnifica. Chemn. Conch. XI, p. 8,t.174et 175, f. 1693, 1694. Habite les mers de la Nouvelle-Hollande (Péron); les côtes de l’ile de Nor- folk. Très-belle et grande coquille nouvellement découverte dans l'Océan austral, et fort remarquable par les vives couleurs dont elle est émaillée. Elle est oblongue-ovale, ventrue, rétrécie aux extrémités, et présente, sur un fond isabelle ou ventre de biche, trois ou quatre zônes transverses, larges, d’un orangé marron, ornées de taches blänches hastées ou triangu- laires, de différentes grandeurs, entremélées de taches brunes nébuleuses. Sa columelle est orangée, et offre quatre plis dont les deux inférieurs sont très-obliques. Longueur, 2 décimètres ou un peu plus. Ma collection. On l’a aussi nommée Ÿ. cucurbitine. 31. Volute ancille. V’o/uta ancilla. F. Oblongo-ovata , albida s. pallidè fulva; suturis anfractuum subplicatis ; columell& triplicatä. Mus., n.37. Encycl., pl. 385, f. 3. F. spectabilis Gmel. B. Var. à flammes rousses longitudinales. Habite au détroit de Magellan. Coquille voisine de la précédente par sa forme, mais moins grande, moins ventrue, et surtout beaucoup moins belle. Elle est blanchätre ou d’un fauve pâle, tantôt sans aucune tache, et tantôt ornée de flammes rousses ou ferrugineuses , étroites, ondées et longitudinales. Cette coquille n’est point rare dans les collections. Sa columelle qui ma que trois plis la distingue de la suivante. Longueur, 15 à 16 centimètres { environ 6 pouces ]. 32. Volute magellanique. 7oluta magellanica:. V. Oblongo-ovata, albida ; flammis longitudinalibus undatis ferrugineis ; columell& quadriplicatà. Mus. , n. 38. Encycl., pl. 385, f. 1. Chemn. Conch. 10, p. 139, t. 148, f. 1383, 1384. Habite au détroit de Magellan. Cette espèce est plus rare et moins grande que Lai 50 ANNALES DU MUSÉUM la précédente à laquelle elle ressemble par sa forme; mais sa columelle x quatre et quelquefois cinq plis tous rapprochés les uns des autres. D'ailleurs la base de sa columelle est comme tronquée obliquement, et elle est cons- tamment ornée de flammes rousses ou d’un roux-brun, plus ou moins en zigzag. Longueur, 8 centimètres. Ma collection. 33. Volute robe turque. Voluta pacifica. V. Ovato-fusiformis ; carnea s. fulva; venulis spadiceis ; fasciis tribus fusco maculalis ; anfractibus tuberculatis ; columell& quinqueplicatà. Mon Cabinet. Voluta pacifica. Chemn. Conch. XI; p. 21,t. 198, f. 1718, 1714. Martyn univ. Conch. 2, f. 52. #7 arabica, p. 3461. Habite les côtes de la Nouvelle - Zélande. "Frès-belle, très-rare, et très- précieuse volute de la division des fusoides, et qui constitue une espèce bien distincte, malgré:ses variations de couleur, selon lPâge de Panimal. Dans sa jeunesse, elle est d’un fauve clair couleur de chair presque rosé, avec des veinules d’un rouge-brun , ondées ou en zigzag; eL elle présente trois bandes iransverses, composées de taches irrégulières, brunes ou de couleur marron. Cet état. me paroit être celui de sa plus grande beauté, car, selon! la figure citée de Chemniz, la coquille vierlle est plus foncée en couleur, et n'offre plus ce fond couleur de chair tendre, sur lequel se détachent les veines ét les bandes dont elle est très-agréablement ornée. La columelle a cinq plis; les tubercules de chaque tour de spire sont simplement noduleux. Eon- gueur, g ceutimètres ou un peu plus. 3%. Volute foudroyée. Zo/uta fulminata. V. Jusiformis , transversè striata ; lineis longitydinalibus Jflexuoso-undatis , . -spadiceis ; spir& cosiaté ; columell& novemplicatà, Mus., n. 40. Encyel., pl 381, f. 2, Martini, Conch. 3, p. 252, t. 98, f. 941, 942. F. rupestris: Gmel., p. 3464. Habite... Coquilie rare, précieuse et fort recherchée dans les collections : elle estrallongée, fusiforme, striée transversalement , presque treillissée,, et à petites côtes longitudinales dans sa partie supérieure. Sur un fond d’un fauve un peu couleur de chair, elle offre des raies longitudinales ondées, en zigzag, d’un rouge brun, et qui représentent les traits de la foudre. Sa columelle a neuf plis éminens entre lesquels on en apercoit quelques-uns plus petits. Longueur, 84 millimètres. Mon Cabinet. 35. Volute queue de paon. Voluta junonia. An Var, Opaio-fiusi/ormis , lœvis , albo flavescens , maculis quadratis rubris fascia- D'HISTOIRE NATURELLE. 71 êim tessellala : spiré sub apice cancellat@ ; columellä subseptemplicatà. Mus., n. 39. Mon Cabinet. Favaune, Conch., t. 79, litt. A. Chemn. Conch. XL, p. 16, t. 177, f. 1705, 1704. j Habite... Volute très-précieuse, l’une des plus rares que l’on connoïisse, et singulièrement remarquable par sa coloration. Elle est ovale-allongée, sub- fusiforme, lisse, striée transversalement à sa base, et un peu treillissée sur les tours supérieurs de sa spire. Sa couleur est d’un blanc jaunâtre, et pré- sente une multitude destaches presque carrées, d’un rouge rembruni, dispo- sées par rangées longitudinales et transverses. La columelle est chargée de cinq plis épais dont les deux supérieurs sont doubles ou partagés en feux. Longueur, un décimètre (environ 3 pouces 8 lignes ). 36. Volute ondulée. fo/uta undulata. Ii F. Ovato-fusiformis , lævigata ; albido-flävescens , maculis fulvis aut subvio- laceis nebulata ; lineis fuscis longitudinalibus undatim flexuosts ; columell& >» quadriplicatä. Mus., n. 41. Mon Cabinet. Annales du Mus., vol. 5, p. 157, pl. 12, fig. 1,@, b: Habite les côtes de la Nouvelle-Hollande , au détroit de Basse, et à l’ile Maria. Cette volute est une espèce fort belle, très-distincte, singulièrement remar- quable par ses lignes onduleuses, ét qui étoit inédite et extrèmement rare dans les collections, lorsque M. Péron en a rapporté de beaux individus de son voyage à la Nouvelle-Hollande. Elle avoisine par sa forme le voluta ju- nonia ; mais elle est différemment ornée, et s’en distingue par plusieurs ca- ractères particuliers. C’est une coquille ovale-fusiforme, lisse, sans stries transverses et sans tubercules. Sur un fond blanchätre ou d’un blane jaunätre, nué de quelques taches fauves ou violâtres, elle présente quantité de ligues brunes longitudinales, très-onduleuses , et dont les sinuosités se correspon- dant forment presque des bandes transverses. La columelle a quatre plis principaux, et un ou deux autres plus petits entre les supérieurs. Lon- gueur, 8 à 9 centimètres. 37. Volute pointillée. Foluta lapponica. F. Ovata, subfusiformis , lœvis , fulvo nebulata ; punctis lineolisque spadiceis cingulatim dispositis ; columellä subquinque plicaté. Mus., n. 23. Encycl., pl. 381, f. 3. Rumph., Mus., t.37, f. 3. Séba, Mus. 3,t.57, f. 25, 26. Martini , Conch. 3, 1. 89, f. 872, 873; et . 95, f. 920, 921. Habite l'Océan des Indes orientales. Espèce peu commune, recherchée dans LS | ANNALES DU MUSÉUM les collections , voisine des précédentes par ses rapports, el qui en est parti- culièrement distinguée par sa coloration. Sa forme est à peu près la même que celle de la V.ondulée; mais au lieu de lignes longitudinales, elle pré- sente, sur un fond blanchâtre, nué de taches fauves, une multitude de points et de linéoles d’un rouge-brun disposés par cordelettes transverses. La colu- melle est chargée de cinq à sept plis dont les supérieurs sont les plus petits. Longueur, 70 à 75 millimètres. 38. Volute pavillon. Voluta vexillum,. PF. Ovata, subfusiformis, albida ; cinsulis aurantiis numerosis transversis ; anfractibus obsoletè tuberculatis. Mus., n. 25. Encycl., pl. 381, f. 1. Rumph., Mus., t. 37, f. 2. Knorr. vergn. 5,t,1,f1. Chemn. Conch. 10 , p. 136, vigu. fig. À, B. Habite l’Océan indien, Coquille très-rare, la plus belle et l’une des plus pré- cieuses de son genre. On la connoît sous le nom de pavillon d'orange , et lorsqu'elle est bien colorée et parfaitement conservée, elle fait le plus bel ornement des collections. Cette volute tient des précédentes par la forme; cependant elle est un peu plus ventrue, et légèrement tuberculeuse dans la partie supérieure de son dernier tour. Sa spire est conique, obscurément noduleuse , et n’est point reconnoissable dans la coquille figurée par Martini (:Conch. 3, t. 120, f. 1098 ). Sur un fond blanchâtre, cette belle coquille offre quantité de rubans ou bandelettes transverses, d’une belle couleur orangée. La columelle est blanchâtre ainsi que l’ouverture et présente cinq ou 6 plis dont les inférieurs sont les plus grands. Longueur, 8 centimètres, Mon Cabinet. 39. Volute volvacée. Volta volyacea. F Oblongo-ovata, subpyriformis, lœvis, albido flavescens ; spirä brevi Jusco nebulatä ; columellé quadriplicaté. Mus., 0. 42, Séba, Mus. 3, 1.67, fig. a, b. Martini, Conch. 3, t. 95, f, 922, 923. B. Var, plus allongée. Chemn. Conch. 10,1. 148, f. 1389, 1390. Habite l'Océan africain, les côtes de la Guinée. Cette volute est fort rare, mais n'offre rien de bien agréable dans son aspect. Elle a la forme générale d'une grande marginelle qui seroit privée de rebord. Les deux individus que pos- sède le Muséum sont, pour la forme, moyens entre la coquille figurée dans Séba et dans Martini, et celle représentée dans Chemniz ; ce qui indique que cette dernière n’en est qu'une variété. La couleur de cette coquille est D'HISTOIÏRE NATURELLE. 73 d'un blanc sale, un peu jaunâtre; elle est nuée de brun sous les sutures de chaque tour de spire, et près de la columelle jusqu’en bas. Longueur, 62 millimètres. 4o. Volute parée. Foluta festiva. V. Ventricosa, fusiformis , costata, carnea, fulvo maculata; lineolis guttis- que spadicets , raris, fasciatis ; columellä triplicatà. Mus., n. 43. , Habite... probablement les mers de l’Amérique méridionale. Très-belle ct très-rare coquille, qui avoisine la V. magellanique par ses rapports, mais qui en est très-distincte et plus ornée. Elle est ventrue, fusiforme , et munie de côtes longitudinales bien exprimées sur la spire, plus effacées dans la moitié inférieure du dernier tour. Sur un fond couleur de chair, nué de quelques taches d’un fauve brun, elle présente des linéoles verticales rouge- brun, disposées par zônes transverses, et des taches ou gouttelettes de même couleur, écarlées, rangées par cordelettes pareillement transverses. La base de sa columelle est chargée de trois plis serrés, dont le supérieur est le plus petit. Longueur, 71 millimètres. 41. Volute mitrée, Voluta mitræformis. V, Fusiformis, albida, fusco maculata ; costis longitudinalibus creberrimis, transversè lineatis ; columellä multiplicat& : -plicis inferioribus majoribus. Mus., n. 44. Mon Cabinet. Le : Habite les côtes de Java ( Laichenau ), et celles de la Nouvelle-Hollande ( Péron ). Jolie petite volute, très- distincte des autres espèces connues, et qui, par sa forme générale, présente l'aspect d’une mitre. Elle est fusiforme, et sa spire paroît pointue , le mamelon obtus qui la termine étant fort petit. Sa surface extérieure présente une multitude de côtes longitudinales serrées, ernées de linéoles rousses transverses et de taches rouge - brun sur un fond blanchätre. Sa base est striée transversalement; sa columelle offre inférieu- rement 2 ou 3 plis assez gros , et au-dessus beaucoup d’autres très-petits, ce qui caractérise son genre. Longueur , 46 millimètres. 42, Volute noyau. V’oluta nucleus. V. Ovata, longitudinaliter costata, fulva , albo castaneoque maculata ; colu- mell& plicis duabus inferioribus majoribus. Mon C:binet. Habite... Je l'ai acquise avec d’autres venant de la mer du Sud. Beaucoup plus petite que l'espèce ci-dessus, et ressemblant entièrement par ses cou- leurs et par ses côtes à une très- petite harpe, elle a de si grands rapports avec le 7. Aarpula qui se trouveen abondance fossile à Grignon , qu’on p@ur- 17. 10 SI ñ nl / ANNALES DU MUSÉUM roit la regarder comme en étant l’analogue vivant , quoique sa spire soit un peu plus raccourcie. Elle est ovale, rétrécie en pointe aux deux bouts, et munie de côtes longitudinales qui rendent les sutures un peu crénelées. Sa couleur est d’un fauve orangé, relevé de petites taches irrégulières, les unes blanches ou blanchâtres et les autres rouge-brun où marron. Quelques stries transverses très-fines s’observent sur la base de la coquille. Les plis de la columelle sont semblables à ceux de la volute petite harpe, n. 12 des espèces fossiles. Longueur , 22 millimètres. ESPÈCES FOSSILES. 1. Volute harpe. V’oluta harpa. 2. V. Turbinato-ventricosa, basi sulcata; costis longitudinalibus distantibus supernè bispinosis ; columell& quinqueplicatä. Annales du Mus., vol. 1, p. 476. Mus., n. 1. Encycl., pl. 384, f. 1, «, b. Citharædus. Chemn. Conch. XE, t. 212, f. 2098 , 2099. Habite... Se trouve à Grignon où elle est fort commune, et où l’on en ren- contre des individus de différens âges. Grande et belle volute fossile dont l’analogue vivant n’est pas encore connu. Elle est turbinée, ventrue dans sa partie supérieure, et terminée par une spire courte subépineuse, en cône assez pointu. Sa surface présente des côtes longitudinales qui s’effacent vers la base de la coquille, et qui, à l'angle de la spire , offrent sur chaque tour deux petites pointes un peu piquantes. La base de cette volute est sillonnée obliquement en travers ; enfin, des cinq plis de la columelle, les deux infé- rieurs sont assez grands et très-obliques, tandis que les autres sont fort petits. Cette coquille acquiert un décimètre de longueur (plus de 3 pouces et demi ); elle est alors très-ventrue. Quoique toute blanche, par son état fossile, cer- tains individus montrent qu’elle est rayée transversalement par des lignes jaunes ou orangées et un peu écartées entre elles. Mon Cabinet. Volute épineuse. Voluta spinosa. V. Turbinata, subcostata, basi sulcata ; spir& brevi, acuté , spinosé ; ultimo anfractu spinis peracutis coronalo. Mus., n. 5. Annales du Mus., vol. 1, p. 477, n. 2. Strombus spinosus. Lin. Brand. foss. hant., n. 65. Chemn. Conch. XI, p. 298, t. 212, f. 3003. List., t. 1033. Argenv. Conch., pl. 29, f, 10. Habite... Se trouve fossile et en abondance à Grignon. La V. épineuse n’est connue que dans l’état fossile, et cependant on en trouve encore des indivi- dus qui sont rayés transversalement par des lignes jaunes ou ferrugineuses. Cest une coquille turbinée, à spire courte, conique, pointue, presqu’épi- np D'HISTOIRE NATURELLE. 75 neuse et piquante, et dont le dernier tour présente des côtes longitudinales qui s’effacent vers la base de la coquille, et se terminent à l'angle de la spire par des pointes fort aiguës. Elle a quatre à six plis à la columelle, dont l'infériear est plus grand que les autres. La base de la coquille est sillonnée transversalement. Longueur, 36 à 38 millimètres. 3. Volute musicale. V’oluta musicalis. V. Ovato-acuta , longitudinaliter transversimque striata ; costis longitudinäli- bus apice spinosis ; columellæ plicis quatuor maximis. Mus., n. 2. Annales du Mus., vol. 1, p. 477, n.3; et vol. 6, pl. 43, f. 7. Strombus. Brand. foss., t. 5, f. 64. Chemn. Conch. XI, p. 302, t. 212, f. 3006, 3007. Argenv., t. 29, n. 9. l'éo. altera. Habite... Fossile de Courtagnon et de Grignon. Très-belle espèce qui avoi- sine par ses rapports la volute musique, n. 21 , mais qui, par sa forme par- ticulière, en paroît bien distincte. Elle est ovale-pointue, à spire conique et muriquée. Sa moitié inférieure, qui est turbinée, présente des côtes longi- tudinales qui se terminent à leur sommet par autant de tubercules épineux; en outre, cette moitié est finement striée longitudinalement et en même temps treillissée par des rides écartées et transverses. Le bord droit est si- nueux à son sommet, ehfin, des plis de la columelle, les quatre inférieurs sont beaucoup plus grands que les autres , et disposés comme dans la suiv ante. Longueur, 8 à 9 centimètres ( plus de 3 pouces ). : 4. Volute hétéroclite. Z'oluta heteroclita. V. Ovala, infernè lœvis ; spir4 costaté , subtuberculatà ; columellæ plicis in- Jerioribus ut in mitris , superioribus minimis. Mus., 0. 3. Habite... Fossile de Betz, près de Grigron. Cette espèce se distingue de la V. musicale, en ce qu’elle n’est point striée transversalement, que sa moitié inférieure est lisse, à côtes eflacées, que sa spire est plus courte, à peine tuberculeuse. Des plis.de sa columelle, les quatre inférieurs sont plus grands que leÿ autres, mais inégaux entre eux et disposés comme dans les mitres. Néanmoins les plis supérieurs très-petits, caractérisent son véritable genre. Longueur, 68 millimètres. 5. Volute muricine. Vo/uta muricina. : F. Ovato-fusiformis, infernè lœvis et subcaudata, supernè costato - spinosa ; columell& inter plicas sulco Lato exaratà. Mus., n. 4. Encycel., pl. 383, f.1,a, b. Annales du Mus., vol. 1, p. 477, n. 4. Favanne, Conch., pl. 66, fig. 1, à. Habite... Fossile de Courtagnon. Grande et belle espèce qui a extérieurement TO S nÔ ANNALES DU MUSÉUM =] l'aspect d’un murex, et qui néanmoins est voisine de la précédente par ses rapports et appartient aux V. musicales. Elle est allongée, ovale-fusiforme, lisse et à côtes presqu’effacées dans sa partie inférieure, tandis que sa spire élevée et pyramidale offre des côtes longitudinales qui se terminent par des tubercules pointus et piquans. Parmi les plis de la columelle, l’inférieur est grand et séparé des autres par un sillon assez large. Longueur, 90 à 92 mil- limètres (3 pouces, # à 5 lignes). Mon Cabinet. . Volute à côtes douces. ’oluta costaria, V. Fusiformi-elongata , subcaudata ; costis longitudinalibus submuticis. Mon Cabinet. Encycl., pl. 383, f. 9,a, b. Mus., n. 6. Cochlea mixta. Chemn. Conch. XE, p.303, t. 212, f. 3010, 3011. Annales du Mus., vol. 1, p. 477, n. 5. List. Conch., t. 1033, f. 6. B. Var. plus courte, ayant un tubercule obtus et comprimé sur chaque côte. Encycl., pl. 383, f. 7. . Habite... Fossile de Grignon et de Courtagnon. Cette coquille est allongée comme la plupart des mitres ; mais elle a les caractères des volutes. Elle est fusiforme, à tours convexes sans être très- renflés, et offre sur chaque tour huit côtes longitudinales séparées, un peu plus élevées et comme comprimées dans leur partie supérieure. La columelle a quatrè ou cinq plis, quelquefois six, et dont les inférieurs sont les plus grands. Les plus grands individus ont 65 millimètres ( près de 2 pouces et demi ) de longueur. M. Yenard en a s dans sa collection un exemplaire qui tourne à gauche. . Volute lyre. Voluta lyra. F. Oblongo-ovata, supernè subventricosa ; spir& brevi; costis longitudinali- bus crebris muticis, versüs apicem denticulatis. Annales du Mus., vol. 1, p. 478, n. 6. Encycl., pl. 383, f. 6, &, b. Favanne, Conch., pl. 66, f. 1, 10? Habite... Fossile, que je crois du banc de Courtagnon. Cette espèce, quoi- qu’allongée, est remarquable par le renflement de la partie supérieure de son dernier tour, et par ses côtes fines, longitudinales, fréquentes, légèrement dentelées près de leur sommet. La spire est courte, pointue, à petites côtes dentelées. On voit trois ou quatre plis à la columelle dont les inférieurs À les plus gros. Longueur, 50 à 55 millimètres. 8. Volute couronne double. Fo/uta bicorona. F. Ovato-acuta, transversim striata, longitudinaliter costata; costis superne dentatis ; spiræ anfractibus bicoronatis. Mus., n. 7. Encycl., pl. 384, f. 6. Annales du Mus., vol. 1, p. 478, n.7. Brand, foss. hant,, pl. 5, f. 69. Favanne, Conch., pl. 66, 6g., 1,4. D'HISTOIRE NATURELLE. 7 Habite... Fossile de Chaumont et de Courtagnon. Espèce remarquable par sa forme, ses côtes longitudinales dentées , et surtout par la double couronne de dents qui orne le sommet de chaque tour de spire. Elle est ovale-pointne, subfusiforme, un peu ventrue, légèrement striée transversalement, et munie de côtes longitudinales nombreuses. Ces côtes sont dentées dans leur partie supérieure, principalement sur la spire, et l'intervalle qui les sépare est finement strié en longueur. La columelle est chargée de trois ou quatre plis dont l’inférieur est le plus grand. Longueur, 55 millimètres (environ 2 pouces ). Mon Cabinet. 9. Volute côtes crénelées. Foluta crenulata. PF. Ovato-acuta,-transversim Striata, lonsitudinaliter costata ; "subeoronata ; costis crenalo-grantulatis. Mus., n. 8 Encycl., pl. 384, f. 5, Annales du Mus., vol. 1, p. 478, n.8. Brand. foss. hant., t. 5, f. 71? Habite... Fossile de Courtagnon. Cette volute est un peu moins grande que la précédente, et s’en rapproche par tant de rapports qu’elle semble n’en être qu'une variété. Cependant, outre qu’elle est entièrement granuleuse, les in- tervalles qui séparent ses côtes longitudinales sont étroits et n’offrent point de stries longitudinales comme dans la V. couronne double. Longueur des plus grands individus, 4 centimètres. Mon Cabinet. 10. Volute petit dé. Foluta disitalina. V. Ovata, decussata, suboranosa ; spiré brevi. Mus., n. 9. à ‘ Habite... Fossile de Courtagnon. Cette volute n’est peut-être qu’une variété du soluta crenulata. Mais elle est plus raccourcie, plus bombée , éminemment treillissée, et moins granuleuse. Sa spire est courte, presqu’obtuse. Le dernier tour forme un bourrelet en couronne à sa suture. Longueur, 26 millimètres, 11. Volute treillissée, F’oluta clathrata. PV. Ovato-acuta, subcoronata, transversè striata, costis longitudinalibus cancellata ; columell& muléiplicaté. Mon Cabinet. Brand. foss. hant., pl. 5, f. 70. Habite... Fossile de Courtagnon. C'est encore une voluté très-voisine des. précédentes par ses rapports, et surtout de l’espèce qui suit; néanmoins elle en paroît réellement distincte. Elle est éminemment treillissée, même entre ses côtes longitudinales qui sont bien séparées. Elle n’est point gra- nuleuse, et sa columelle porte des plis assez nombreux, dont les inférieurs sont les plus gros, Longueur , 4 centimètres. 12. Volute ambigué, Vo/uta ambigua. 78 ANNALES DU MUSÉUM 7. Oblongo-ovata, transyersè striata, longitudinaliter costata; spir& con- vexo-acut& , denticulis asperatà ; labro internè sulcato. Mus., n. 10. Mon Cabinet. S/rombus ambisuus. Brand. foss. hant., tab. 5, f. 69. Habite... Fossile de Courtagnon. Celle-ci tient encore aux trois précédentes par ses rapports; mais elle n’est point bicouronnée au sommet de ses tours de spire, et son bord droit est sillonné intérieurement. Elle est oblongue ovale, à spire un peu courte, conique , subdenticulée. Elle offre des côtes Jongitudinales, séparées, aiguës, et des stries transverses, nombreuses, qui paroissent ondulées en passant sur les côtes. Sa columelle présente trois ou quatre plis dont les inférieurs sont les plus gros. Longueur, environ #42 millimètres. à 13. Volute petite harpe. Volta harpula. F. Ovatio-fusiformis, longitudinaliter costata ; anfractibus supernè crenatis , subcanaliculatis ; columell& plicis duabus inferioribus majoribus. Mus., n. 11. Annales du Mus., vol. 1, p.478, n. 9. Encycl., pl. 383, f. 8. B. Var. à côtes dentelées vers leur sommet. . Habite... Fossile de Grignon et de la Touraine. Espèce remarquable par sa forme, ses côtes longitudinales, et surtout par le bord supérieur de ses tours de spire, qui est crénelé par lextrémité saillante des côtes, et creusé en canal plus ou moins distinct, selon les variétés des individus. La coquille est ovale, un peu fusiforme et a toutes ses côtes-lisses. Les deux plis infé- rieurs de sa columelle sont les plus gros. Les plus grands individus ont jusqu'a 45 millimètres de longueur. La variété Best petite, striée trans- versalement à sa base et au limbe intérieur de son bord drait, et offre de petites dents sur les côtes de sa Spire. Peut-être doit-on la distinguer comme espèce. Peut-être devra-t-on encore séparer, au moins comme variété, les individus dont le canal spiral est bien marqué, de ceux où il n’est plus apparent. OBS. La V. noyau, espèce n. 42, paroît être l’analôgue vivant de la va- riété du #7. karpula dont la suture spirale‘ m’est point canaliculée. 14 Volute labrelle. Fo/utaWabrella. =. + F. Turbinato-ventricosa, ad basim spiræ angulo carinata ; infernè suleis transversis ; spir@ denticulato-granosä. Mus., n. 12. Annales du Mns., v. 1 p.478, n. 10. Encycl., p. 384,f.3,&,04. Habite... Fossile de Grignon. Cette volute offre, en petit, quelque ressem- blance dans sa forme avec le soluta scapha, n. 12, mais elle en est for- tement distincte. Elle est courte, turbinée, ventrue, anguleuse et un peu D'HISTOIRE NATURELLE. 79 carinée à la base de la spire, et présente des stries transverses séparées, plus fortement prononcées sur la base de la coquille que sur le milieu de son tour extérieur. La spire est courte, pointue , dentelée et comme granuleuse. La columelle est calleuse dans sa partie supérieure et porte trois à cinq plis, dont les deux inférieurs sont les plus grands. Cette coquille est longue de 45 à 48 millimètres, et est assez épaisse. Mon Cabinet. 15. Volute ficuline. ’oluta ficulina. tri V. Turbinato-ovata, transversè striata; ultimo anfractu spinulis coronato ; labro submarginato , intüs striato, supernè arcuato. Mus., n. 13. Mon Cabinet. B. Var. un peu déprimée, et moins striée transversalement. Poluta depressa. Annales du Mus., vol. 1, p.479, n. 12. Habite... Fossile des environs de Bordeaux, communiqué par M. Rodrigues. Cest une espèce très-distincte, qui tient à la volute épineuse par quelques rapports, et à la suivante par sa columelle et son bord droit. Elle est tur- binée, ovale, à spire courte, mutique, et à tour extérieur couronné, un peu au-dessous de la suture, par une rangée de tubercules épineux. L’angle de la spire est obtus; le bord droit de l'ouverture est strié en dedans, un peu marginé en dehors, et s’arrondit à son sommet pour se réunir à la partie supérieure du bord columellaire. Des plis de la columelle, les quatre ou cinq inférieurs sont les plus grands. Longueur, 54 millimètres. La variété B est plus aplatie du côté de l'ouverture, et presque point striée transversalement, excepté à sa base; elle se trouve aussi dans les environs de Bordeaux. 16. Volute rare-épine. Voluta rarispina. V. Obovata ; spinis raris dorsalibus ; labro submarginato ; labio calloso de- presso ; spir& minim& mucroniforme. Mus., n.14., Encycl., pl. 384, f.2, a, b. Habite... Fossile des environs de Dax. C’est une espèce singulièrement re- marquable par sa forme, ses épines, et la petitesse de sa spire. Elle est ovoide , sillonnée transversalement à sa base, lisse sur la partie bombée de son dos, mais avec deux ou trois épines courtes et écartées. La spire, quoi- qu'extrèmement petite, présente cinq à six tours comme dentelés. Le bord droit, un peu marginé en dehors, se courbe au sommet avec un léger pli, pour se réunir au bord columellaire, Celui-ci est calleux , déprimé, et offre à son angle intérieur trois plis dont Pinférieur est le plus gros. Longueur, 38 à 4o millimètres. Mon Cabinet. 17. Volute à bourrelet. 7o/uta variculosa. 90 A NNÂLES:DU, MUSÉUM PV. Oblonga, subfusiformis, lœvivata ; varice marginaëi interdüimque dorsal: notatà ; plicis columellæ subquaternis. Mon Cabinet. Annales du Mus., vol. 1, p. 479, n. 13. Habite... Fossile de Grignon. Petite volute qui, par le bourrelet extérieur de son bord droit, tient aux marginelles , et par sa forme générale, ressemble à une mitre, mais dont le quatrième pli supérieur de la columelle est plus petit que les autres, comme dans les volutes. Quoique cette coquille paroisse lisse, examinée à la loupe, on voit qu’elle est finement striée transversale- ment. Sa longueur est de 16 millimètres. 18. Volute mitréole. V’oluta mitreola. PV. Ovato- acuta, lævis ; labro intès obsoletè bidentato. Annales du Mus., vol. 1, p. 478, n. 14. Habite... Fossile de Grignon. Cabinet de M. de France. OBSERVATION. Le Voluta bulbula, Annales du Mus., vol.1, p.478, n. 11, doit être rangé parmi les fasciolaires. D'HISTOIRE NATURELLE. 8r NOTICE Sur la V égélation de la Nourelle- Hollande. PAR M. LESCHENAULT. D. toutes les productions de la nature, les végétaux sont sans doute les plus immédiatement utiles à l’homme; les plantes céréales et les fruits forment généralement la base de sa nourriture; la nature, tant dans l’ancien que dans le nouveau monde, a prodigué ces précieuses productions; l'homme par la culture les a multipliées, les a améliorées; et partout où l’agriculture a été le plus perfectionnée, la ci- vilisation a fait le plus de progrès. La Nouvelle- Hollande offre une exception bien malheureuse pour ses habitans. Non-seulément ce pays sablonneux ne produit aucune plante céréale, mais encore aucun végétal propre à la nourriture de l'homme; car on ne peut regarder dignes d’être cultivées comme une ressource suflisante, l'espèce de fougère ( pteris esculenta ) dont les habitans de la terre de Diémen mangent les racines, les bulbes d’orchidées (r), et l'espèce de céleri (1) M. le capitaine Lewis, qui a traversé l'Amérique depuis les États-Unis jus- qu'à la côte occidentale, m’a dit que les habitans des bords de la rivière Colum- bia mangeoient aussi les bulbes d’une espèce de liliacée (*), qu'ils les manipu- (*) M. Lewis m'a donné quelques-uns de ces oignons , que j'ai déposés au Cabinet du Mu: séum d'Histoire naturelle. ie 31 52 ANNALES. DU MUSÉUM que mangent les habitans de la côte de Lewin, et les fruits du cycas riedlei qui ont besoin d’être torréfiés pour perdre leur qualité malfaisante. Si l’agriculture réunit les hommes par la nécessité où ils sont de s’entr’aider dans leurs travaux; si une société d’agri- culteur$ voit avec plaisir s’augmenter le nombre des membres qui la composent, parce qu’elle n’est jamais inquiète sur ses moyens de subsistance; si l'habitude du travail et l'absence du besoin adoucissent les mœurs et contribuent au bonheur, il en est tout autrement d’une société d'hommes qu'une terre ingrate refuse de nourrir; n'ayant d’autres moyens pour se procurer leur subsistance que leur adresse et le hasard, la crainte de partager une proie incertaine doit les isoler par très-petites sociétés, les tenir en garde contre leurs voisins, les rendre ennemis et jaloux par prudence, cruels et même anthropophages par besoin. Comment des hommes dont tous les instans sont employés péniblement à se procurer leur nourriture, qui en sont souvent plusieurs jours de suite pri- vés, ou réduits, par la famine, à se disputer les plus vils ali- mens, ne seroient-ils pas toujours prèts à se combattre et à se détruire ? Tels sont et tels doivent être les habitans de la Nouvelle-Hollande que la nature avoit destinés par l'absence des végétaux nourriciers à être toujours barbares, si les Européens en les leur apportant n’avoient introduit chez eux le germe de la civilisation. Lies mêmes causes naturelles qui ont empèché que lespèce loient en forme de pain: ce pain se conserve long -temps. M. Lewis m'en a montré plusieurs morceaux, et j'en ai goûté; il est noir et a un goût mielleux;, il n’est qu’un accessoire à la nourriture ordinaire des habitans. D'HISTOIRE NATURELLE. 83 humaine ne se multipliät beaucoup dans la Nouvelle-Hol- lande me font croire que l’intérieur de ce vaste pays est entièrement dépourvu d'habitans. Un peuple agriculteur est attiré dans l'intérieur des terres par l’espoir de rencontrer un sol plus ancien et plus fécond; mais celui qui n’est que pècheur et chasseur doit se presser sur les côtes qui lui offrent la double ressource du poisson et du gibier. Les côtes de la Nouvelle-Hollande ne sont pas assez peuplées pour donner lieu de penser que le surcroît de leurs habitans aient été forcés de s’enfoncer dans l’intérieur, où, du reste, ils se seroient anéantis ou tout au moins réduits à quelques misé- rables hordes sans cesse errantes. L'histoire de la végétation de la Nouvelle-Hollande, très- curieuse sous le rapport des dissertations botaniques aux- quelles elle peut donner lieu, et des plantes nouvelles qu’elle renferme, n'offre pas cet intérêt général qu'entraînent après elles les découvertes immédiatement utüles à la société; mais peut-être un jour ce pays, à peine connu, nous enrichira-t-il de quelques productions précieuses. Combien de plantes qui aujourd'hui servent à notre soulagement ou à notre sensua- lité ont été ignorées ou méprisées pendant une longue suite de siècles! Parmi les végétaux de la Nouvelle - Hollande, il est à croire que plusieurs seroient de quelque utilité dans les arts ou dans la médecine; mais les sauvages, dénués’ de toute industrie, n’ont aucune connoissance de leurs pro- priétés. Le hasard, le temps et l'expérience peuvent seuls nous éclairer. Déjà quelques-unes de ces plantes, en les ju- geant par leur analogie ou par leurs produits, méritent une attention particuhère, tels sont : TI 84 ANNALES DU MUSÉUM Les œanthoræa d’où découle très-abondamment une ré- sine odorante dont les naturels se servent pour boucher les sutures de leurs canots en écorce, et pour souder la hampe de leurs zagaies avec le morceau de bois dur qui leur sert de pointe. L'eucalyptus resinifera dont la gomme rouge est renom- mée par les Européens comme un très-bon remède contre les dyssenteries. L'Aibiscus heterophyllus qui croit sur les bords de ia ri- vière d'Hawksbury, et dont l’écorce peut servir à faire des cordages. Plusieurs z24n0sa qui donnent des gommes. Plusieurs plantes de la famille des myrthes et de celle des composées qui sont éminemment aromatiques. Une espèce d’indigotier que j'ai trouvé dans le détroit d'Entrecasteaux, duquel on obtiendroit peut-être une fécule colorante. Dans le même lieu, une plante voisine du cafier, qui par la culture parviendroit peut-être à remplacer ce précieux arbuste, si de ces deux dernières plantes on pouvoit tirer le parti que j'indique ici; elles deviendroient d'autant plus im- portantes, qu'à cause du lieu où elles croissent, qui est situé par le 43e. degré de latitude Sud, on pourroit espérer de les acclimater dans nos contrées tempérées d'Europe. Deux espèces de lin qui croissent sur la côte occidentale, Deux espèces de tabac, l’un le z2cotianaundulata , déerit par M. Ventenat et qui a fleuri à la Malmaison; l’autre que j'ai trouvé sur l'ile Decrès : celui-ci a le très-grand avantage de croître très-bien dans les sables arides des bords de la mer, D'HISTOIRE NATURELLE. 85 Un arbuste des bords des ruisseaux de la terre de Piemen, dont les fruits ont une saveur piquante et aromatique. Je dois aussi mettre au nombre des plantes intéressantes le casuarina torulosa et le xilomelum pyrifera, dont les bois sont propres à la marqueterie, l'a/erosperma mos- chata, de l'ile King, arbre dont le bois a une forte odeur d'anis. Je joindrois encore à ces plantes l’eucalyptus robuste, bel arbre qui parvient à une hauteur considérable, et four- nit un bon bois de construction, si par sa contexture il n’an- nonçoit une croissance trop lente pour ètre jamais introduit avec avantage dans nos forêts. Si le règne animal dans la: Nouvelle-Hollande offre des particularités remarquables qui l'isolent, pour ainsi dire, de celui des autres parties du monde, le règne végétal n’a pas un caractère moins distincuf. Ce caractère tient non-seule- ment aux différences botaniques, mais encore à une physio- nomie naturelle qui sera remarquée des yeux les moins ob- servateurs. Les parties méridionales de l'Afrique sont les seules avec lesquelles on puisse comparer la végétation de la Nouvelle-Hollande; par les mèmes parallèles, on retrouve ces innombrables légions de bruyères et de protées qui ren- ferment. plusieurs arbustes remarquables par leurs formes gracieuses et délicates qui parent la stérilité de l'un et de l'autre climat. Mais dans tous les eux que nous avons visités, et surtout sur la côte occidentale, nous n'avons retrouvé dans les grandes masses, ni la majesté des forêts vierges du nouveau monde, ni la variété et l'élégance de celles d'Asie, ni la dé 50 ANNALES DU MUSÉUM licatesse et la fraicheur des bois de nos contrées tempérées d'Europe; la végétation est généralement sombre et triste, elle a l'aspect de celle de nos arbres verts ou de nos bruyères; les fruits pour la plupart sont ligneux; les feuilles de presque toutes les plantes sontlinéaires, lancéolées, petites, coriaces et spinescentes. Cette contexture des végétaux est l'effet de laridité du sol et de la sécheresse du climat; c’est à ces mêmes causes qu'est due, sans doute, la rareté des plantes cryptogames (1) et des plantes herbacées. Les grammées, qui ailleurs sont généralement molles et flexibles, participent ici de la rigidité des autres plantes : on en voit des exemples remarquables dans l’wrzola destichophylla décrite par M. Labillardière, et dans une espèce de festuca que j'ai trouvé sur la côte occidentale, dont toutes les feuilles sont autant d’aiguillons. La plupart des plantes de la Nouvelle-Hollande appartien- nent à des genres nouveaux, et celles qui se rattachent à des genres déjà connus, sont presque autant d'espèces nou- velles. Les familles naturelles qui dominent sont celles des pro- tées, des bruyères, des composées, des légumineuses et des myrthoïdes, Les plus grands arbres appartiennent tous à cette dernière famille, et presqu'exclusivement au genre euca- lyptus. Les familles dont je viens de faire mention sont très-abon- damment répandues et se partagent une grande portion de (1) Les plantes eryptopames renferment : les champignons, les mousses, les x fougères. D'HISTOIRE NATURELLE. 87 la végétation. Cette observation prouve jusqu'à quel point le système des familles naturelles est d'accord avec la marche de la nature, qui rarement isole les espèces, mais au con- traire les réunit presque toujours en grand nombre sur un mème sol et dans un mème climat. Les plantes mème qui se rattachent aux familles les plus naturelles conservent dans la Nouvelle-Hollande des carac- ières qui leur sont propres; c’est ainsi qu'un grand nombre de légumineuses sont à corolles papillonnacées avec des éta- mines libres, que plusieurs sont à feuilles opposées, et qu'un grand nombre de mimosa offrent le singulier caractère d’avoir dans leur jeune âge des feuilles pennées, mélangées avec des feuilles simples. Après cet exposé rapide de l’état général de la végétation dans la Nouvelle-Hollande, je vais en présenter un tableau succinct et particulier pour les différens lieux que j'ai tour à tour parcouru. Les parties dela Nouvelle-Hollande où j'ai abordé, situées entre les tropiques ou dans leur voisinage, sont remarquables par leur affreuse stérilité. Sur les îles de Doores, sur la pres- qu'ile Perron, sur l'ile Depuch, je n'ai pas vu un arbre de 10 pieds de hauteur, je n'ai trouvé aucune trace des pal- miers si constamment et si abondamment répandus sur toutes les côtes de l'Asie situées entre les tropiques; quelques figuiers, quelques mimosa s’élevant avec peine à la hauteur de 4 à 5 pieds, quelques solanum hérissés d’épines, sont les seules plantes analogues à celles des autres régions équatoriales. Cependant dans ces tristes parages, et surtout sur les îles de Doores, plusieurs plantes, pour la plupart nouvelles, intéres- 58 ANNALES DU MUSÉUM sent le botaniste. Nos herbiers en réunissent une centaine d'espèces, parmi lesquelles je cite ici : Un rnelaleuca (x) et un /eptospermum dont les rameaux rampent sur les dunes de sable mouvant de la côte. Une espèce nouvelle de zygoplullum, plusieurs salsola et anabasts. Un sptifex, différent de celui décrit par M. Labillardière, sous le nom d’Arrsutus. La plante indiquée par Dampierre, sous le nom de damara. Une espèce de z71mnosa dont les rameaux tortueux s’entre- lacent et forment des touffes épaisses, sous lesquelles se retirent les kangouroos à bandes. Sur lile Depuch, j'ai trouvé le agellaria indica, un spondias et une fort jolie plante de la famille des ærna- ranthes, En s’avançant vers le Sud, la végétation est plus fraiche et plus vigoureuse; derrière les Dunes de sable qui encaissent la côte du golfe du Géographe, on trouve un terrain gras et fertile, composé des débris des végétaux que le temps y a accumulés; les forêts sont composées d’un eucalyptus qui parvient à une grosseur considérable , dont les troncs sont courts et couverts d’exostoses, d’un 72elaleuca dont l'écorce de plusieurs pouces d'épaisseur est composée de feuillets minces, flexibles et très-doux , qui se détachent facilement ; (1) Les plantes que jai rapportées étant pour la plupartnouvelles on non encore déterminées, je ne donnerai le plus souvent dans celte notice que leur nom gé- nérique. D'HISTOIRE NATURELLE. 89 c’est avec cette écorce (1) que les naturels garnissent l’in- térieur des abris où ils reposent. Parmi les plantes herbacées, on remarque une espèce de céleri que mangent, les naturels. Les lieux marécageux sont couverts de salicornes. Les plantes du genre protæa sont rares dans le golfe du Géographe , mais on rencontre le banksia nivea, et une autre espèce du même genre dont les cônes, longs d’un pied, sont chargés de fleurons jaunâtres et dont les feuilles sont profondément découpées. Parmi les autres plantes remarquables du golphe, je dois citer le calothamnus sanguinea , le xanthoræa hastile, le cycas ridler: Un très-beau graphaluun à fleurs blanches. Une espèce de /eptospermum, auquel ses rameaux flexi- bles donnent l'aspect du saule pleureur; le /eptospermum marginatun;Vanthocercis littorea. Une espèce nouvelle de corizema ; une espèce aussi nou- velle de lasiopetalum. Quoique la végétation soit assez active dans le golfe du Géographe, cette fertilité n’est qu’apparente; la couche de terre végétale peu profonde repose sur le sable et seroit bientôt épuisée par la culture. Le port du Roi George, sur la côte Sud-Ouest, offre une srande variété de plantes; les collections que M. Guichenot D et moi y avons réunies sont très-considérables. Le cap qui (1) J'ai vu à Timor une écorce semblable qui sert à garnir les coutures des em- barcations du pays. Cette écorce est un objet de commerce. On m'a dit qu’on la tiroit de l’Archipel des Moluques. 17. | 12 90 ANNALES DU MUSEUM est à l'Occident du port est composé de roches granitiques ; il est dépourvu de végétaux, ce qui lui a valu de la part de Vancouverr le nom de cap Chauve (bald hed ). Depuis ce cap jusqu'à l'entrée du havre de la Princessesroyale, la côte est composée en grande partie des mêmes roches, mais recou- vertes de sable blanc et d’une très-légère couche de terre végétale. Il ne croit point de grands arbres sur toute cette partie, mais une grande variété de petits arbustes. La végé- tation est excitée-par l'humidité qu'entretiennent les réser- voirs d’eau douce qui sont sous ces amas de roches, et dont l'existence se manifeste par l’eau qui sourd dans plusieurs endroits. Dans les lieux les plus humides on trouve en grande abondance la singulière plante décrite par M. Fabillardière, sous le nom de cephalotus folliculartis ; j'a remarqué que ses feuilles en godets sort toujours remplies d’eau et d’un grand nombre de petits moucherons. Sur la côte opposée au cap Chauve, et sur toute celle du havre de la Princesse royale, la végétation est belle, les forêts épaisses et élevées; plusieurs petits ruisseaux y entretiennent la vie et la fraicheur. Quoique le sol soit généralement sablonneux, cependant on rencontre plusieurs veines de bonne terre végétale, rougeàtre; dans les lieux un peu marécageux, j'ai trouvé un très-beau metrosideros, auquel je donne le nom spécifique de palu- dosa à cause des lieux où il croît. Les épis de fleurs de ce bel arbuste sont très-longs et du rouge le plus éclatant. Su# les bords de la mer croissent en grande abondance l'adenanthos cuneata, Vadenanthos sericea au feuillage ve- louté, et une espèce nouvelle du même genre dont les feuilles sont arrondies. D'HISTOIRE NATURELLE. O7 Parmi le grand nombre de plantes nouvelles du port du Roi George que j'ai recueillies, je citerai : Deux espèces de casuartna qui ne parviennent pas à plus de 18-pouces de hauteur. Un eucalyptus remarquable par la forme de ses fruits qui ressemblent à de petites urnes. Un bignonia, arbuste à feuilles épaisses, dont les fleurs blanches ont une forte odeur de tubéreuse. d Un bxllardiera , sous-arbrisseau qui vient en touffe buis- sonneuse. Une belle espèce de calorophus , dont les feuilles frisées forment d’agréables panaches. Une plante très-remarquable de la famille des asperges. Les iles St.-François sont sablonneuses et dépourvues d’eau douce; les plantes sèches et rabougries ne paroissent croître qu'avec regret sur ce sol stérile. On n'y voit point de grands arbres. : Plusieurs espèces nouvelles de sæ/so/a,bordent le rivage. Dans l’intérieur , j'ai‘ trouvé d’intéressant, un pitéosporum qui a le port et l'apparence d’un olivier. Une espèce nouvelle de danella, et un #estringia , dont le feuillage est d’un vert noirâtre. L'ile Decrès est sablonneuse, et nous n’y avons rencontré aucun ruisseau; cependant la végétation y est belle et les plantes très-variées. J'en ai recueilli un grand nombre de nouvelles: Jattribue la vigueur de la végétation, que n'arrête pas la stérilité du sol, aux roches qui servent de bases à ces sables, et qui arrêtant l’infiltration des eaux pluviales’ (1), en- (1) En creusant le sol on obtient de l’eau douce. 92 ANNALES DU MUSEUM tretiennent une humidité qui est très-salutaire aux plantes. Parmi les végétaux que j'ai observés sur l'ile Decrès, je cilerai : L'espèce de tabac dont j'ai déjà parlé et qui croit sur le sable des bords de la mer. Un nelaleuca à longues feuilles filiformes. Un autre 72elaleuca à fleurs jaunes. Plusièurs espèces nouvelles d’excalyptus. Une très-jolie espèce d'anthericum. Une plante de la famille des srrdées. Une espèce nouvelle de solanum. Un très-joli et très-singulier /seron sans uige, dont les fleurs purpurines et solitaires sortent immédiatement de terre et ne sont entourées que de quatre à cinq très-petites feuilles linéaires qu’elles cachent sous leur corolle. Aucun des lieux de la Nouvelle- Hollande où j'ai abordé ne m'a offert un aspect plus riant, une végétation plus forte et plus vigoureuse*que les côtes du port Western, et je crois aussi que le sol d’aucun n’est aussi généralement fertile. Le pays a peu d’élévation; et comme plusieurs endroits, tels que l'ile des Ænglais et l'île des Français, ne paroissent que très-passagèrement habités, les beaux massifs de verdure qui les couvrent ne sont pas autant détruits par les incendies qu'il est ordinaire de le voir dans d’autres lieux plus fré- quentés par les naturels qui ont soin de, se débarrasser par le feu des petits arbustes qui couvrent le sol, et qui gêne- roient leur marche dans les forêts. Je suis resté plusieurs jours dans le port Western , et me D'HISTOIRE NATURELLE 03 suis enfoncé sur plusieurs points dans l'intérieur du pays (1). Partout il est bien boisé; dans un grand nombre d’endroits j'ai trouvé un terrain excellent et profond, composé d'une grande quantité de débris de végétaux et d’une terre argi- leuse et rougeâtre, contenant, à ce que je pense, un peu de fer. Ce terrain a pour base des roches qui n'ont paru aussi ferrugineuses. Cependant, malgré cette fertilité, les plantes sont peu va- riées, parce que celles auxquelles le terrain convient davan- tage y croissent en grande abondance, végètent avec beau- coup de vigueur et étouflent les autres. Le nombre des plantes que j'y ai recueillies est peu con- sidérable ; il est vrai que l'époque où j’ai visité ce port n’étoit pas favorable à mes recherches; c’étoit à la fin d'avril, et par conséquent sur l'arrière saison de ces climats. J'ai remarqué que les eucalyptus étoient d'autant plus abondans que le sol étoit meilleur; mais dans les lieux sa- blonneux et secs, je n'ai rencontré que des bañksia et des casuarina; jai aussi observé dans ces mêmes lieux un /ep- tospermum à feuilles glauces. Parmi les plantes du port Western, je citerai : * Un 72z0phora qui croit sur les plages vaseuses et inondées des bords de la mer. Le loranthus floribunda, plante parasite qui s'attache à l'eucalyptus. Un très-joli petit sous-arbrisseau de 18 pouces de hauteur, ” î (1) Je donnerai dans le texte qui doit accompagner l’atlas géographique de Voyage aux terres australes une description détaillée du port 7Z’estern. 94 ANNALES DU MUSÉUM de la famille des rosacées, portant de belles fleurs jaunes : il croit dans les lieux sablonneux. Je trouvai aussi en grande abondance l’oxalis acetosella ; nous en ramassämes une très-grande quantité qui nous pro- cura un mets d'autant plus agréable que depuis cinq mois nous étions privés de végétaux. La Nouvelle-Galles, sur la côte orientale, est le seul lieu de la Nouvelle-Hollande où les Européens aient porté leur industrie et l’agriculture; mais jusqu'à présent ses produits n’ont pas été d'accord avec les espérances des Anglais, qui cependant n'ont rien négligé pour faire fleurir leur établisse- ment. Le cultivateur est encouragé par le gouvernement qui lui accorde toute espèce de secours, et quoiqu'il ne soit ja- mais inquiété dans ses travaux par le petit nombre de sau- vages qui peuplent les lieux voisins, cependant la colonie ne récolte pas encore assez de grains pour sa subsistance. Les environs de Sidney sont très-stériles : aussi n’y a-t-il aux en- virons de culture que dans les lieux où, par la disposition du terrain, les graisses et débris de végétaux ont été entrai- nés par les eaux pluviales ou par les débordemens. Dans toutes les parties de la Nouvelle-Galles, occupées jusqu’à présent par les Anglais, la fertilité est presque toujours due à de pareilles causes; rarement la terre y est fertile de son propre fond, et ce n’est jamais que sur de petites étendues. Les lieux fécondés par le débordement des rivières et par les inondations sont propres à la culture de toutes les plantes d'Europe, et quelquefois d’un produit dont les bords dela rivière d'Hawksbury offrent des exemples remarquables, D'HISTOIRE NATURELLE. Où ainsi que l'a fait voir M. Péron, dans le premier volume de la relatioh du Voyage aux terres australes. Mais lorsque des causes accidentelles n’ont pas engraissé le sol, le cultivateur est souvent déçu des espérances que lui donnoit un terrain couvert de belles forêts, ouvrage lent et progressif de plusieurs siècles de végétation, que navoit jamais troublé l’industrie des hommes; peu d'années suffisent pour épuiser une terre qu'il a péniblement défrichée. J'ai rencontré dans les environs de Poramatta nombre de ces cultures abandonnées. Le sol, après avoir été cultivé, ne se couvre plus, lorsqu'il est rendu à la nature, que d’arbustes chéufs et d’une espèce de sacharum, plante graminée, sèche et rude, qui n’est pas propre à la nourriture des bestiaux. Jusqu'à présent les Anglais n’ont introduit dans la Nou- velle-Galles que les plantes d'Europe; je n’ai vu aucune es- pèce de culture coloniale; cependant je pense que le coton y réussiroit. Cette plante n'exige ni arrosement ni terrain fertile, et la chaleur est assez grande pour Fy faire mürir. La vigne que l'on à cherché à naturaliser n’a pas réussi, quoiqu’on ait confié cette entreprise à des vignerons francais des environs de Bordeaux. M. Péron a donné dans le premier volume de la relation du Voyage aux terres australes les causes qui ont empêché le succès. Les environs de Sidney, si peu convenables aux plantes d'Europe, sont cependant couverts d'une grande quantité de plantes inaigènes. I n’est peut-être aucun pays où la vé- gétation offre une si grande variété et une réunion d'aussi jolis arbustes, dont plusieurs sont remarquables par l'élégance de leurs formes, la beauté et la suavité de leurs fleurs. Ces 96 ANNALES DU MUSÉUM plantes ont presque toutes été décrites par les botanistes anglais; celles de nos herbiers qui offrent le plus d'intérêt par leur nouveauté sont celles que j'ai rapportées d’un voyage que je fis dans les montagnes Bleues. Je recueillis plusieurs plantes nouvelles de la famille des légumineuses. Une espèce de laurier qui croit sur les bords de la rivière d'AHawksbury. Une très-jolie espèce de dranella. Plusieurs plantes de la famille des z2yrthes et de celle des composées. Une espèce d’exocarpos qui ne parvient pas à plus de deux pieds de hauteur. ‘ La végétation est sans cesse en activité dans la Nouvelle- Hollande, et aucune saison ne l’arrête entièrement. J’étois dans le port Western (qui est situé par le 39e. degré de latitude sud) à la fin du mois d'avril, mois qui correspond à celui d'octobre pour notre hémisphère. Dans cette saison, au- cune plante ne paroiïssoit disposée à quitter simultanément ses feuilles, et un grand nombre étoient encore en fleurs. A Sidney, pendant les mois de juillet et août, quoiqu'il fit assez froid pour avoir constamment du feu dans les appar- temens, cependant aucune plante ne s’est entièrement dé- pouillée; la végétation étoit ralentie, mais non pas interrom- pue. Au mois de septembre et octobre, les plantes annuelles ont paru et toutes les autres se sont couvertes de fleurs. Nulle région ne doit autant intéresser le naturaliste que la Nouvelle-Hollande; elle est un sujet nouveau de recherches et de méditations : par sa constitution physique et ses pro- ductions dans tous les règnes, elle diffère de tous les autres D'HISTOIRE NATURELLE. 97 pays, et le géographe moderne en la constituant cinquième partie du monde n’a fait que suivre les indications de la na- ture. ! J'ai fait voir dans le commencement de cette notice quelle influence la végétation a dû avoir sur sa population et la ei- vilisation de ses habitans; en effet, quelles heureuses disposi- tions morales et intellectuelles que l’on puisse supposer à ces sauvages , elles eussent été détruites parle besoinimpérieux de songer sans cesse à conserver et à défendre leur existence; mais la nature ne paroit les avoir doués que d’une somme d'intelligence en analogie avec le pays qu'ils habitent. Toutes les fois que nous avons eu occasion de communiquer avec les naturels, nous n’avons point remarqué ce degré de cu- riosité qui indique aptitude et désir de s’instruire. Quoique depuis plusieurs années les habitans des environs de Sidney fréquentent sans crainte et sans cesse les Anglais, ils ne sont cependant guères moins barbares qu'avant l’arrivée des Eu- ropéens. Quelle différence avec les autres habitans des mers du Sud! Les navigateurs européens qui ont abordé aux îles des Amis, aux iles de la Société, aux îles Sandwich , se sont vu entourés avec le plus grand intérêt et la plus vive curiosité; les présens qu'ils ont faits aux habitans ont été reçus avec enthousiasme, et appréciés avec discernement. Ici, au contraire , si après avoir indiqué aux habitans de la Nouvelle-Hollande l'usage de quelques objets qui devoient leur être de la plus grande utilité, nous leur en fusiong pré- sent, ils les recevoient sans réflexion, et les abandonnoient la plupart du temps avec indifférence. Les résultats de nos recherches en botanique sont : l'obser- 27: 13 ? 05 ANNALES DU MUSÉUM vation que j'ai faite de quelques plantes que je suppose et que j'indique comme pouvant être utiles. Nos herbiers renferment plus de mille espèces, dont un grand nombre nouvelles (1). Beaucoup de graines que nous avons rapportées ont multi- plié considérablement les plantes de la Nouvelle-Hollande, auparavant si rares en France. Ces plantes remarquables pour la plupart par l'élégance de leur forme et la délicatesse de leurs fleurs ornent, non-seulement les jardins de la Malmaison et du Muséum d'Histoire Naturelle, mais sont encore répan- dues en grand nombre dans les départemens, et quelques- unes donnent l'espérance de pouvoir y être naturalisées. (1) Lorsque j’écrivois cette Notice, l'excellent Ouvrage du célèbre et savant voyageur naturaliste M. Brown, sur les plantes de la Nouvelle-Hollande, n’avoit pes encore paru. D'HISTOIRE NATURELLE. 99 ÉLOGE HISTORIQUE De M. Le Comre FOURCROY, Prononcé à la séance publique de l’Institut, le mardi 7 janvier 1811, PAR M. CUVIER, Secrétaire-perpétuel pour les Sciences physiques. rot de cette longue suite d'hommes de mérite qui ont appartenu à l’Académie des sciences, pendant les cent trente années de son existence, est riche en instructions de plus d’un genre. Ce n’est pas seulement le spectacle impo- sant des travaux utiles, des grandes découvertes de ces hommes célèbres qui nous intéresse; nous prenons encore un plaisir particulier à faire avec eux ane connoissance in- üme; la simplicité de leurs mœurs, la sérénité de leur vie passée lom du monde et de ses agitations, ont quelque chose de touchant, et les sciences, déjà si respectables par leur 13° 100 ANNALES DU MUSÉUM utilité générale, le deviennent davantage encore quand on voit à quel point elles rendent heureux ceux qui ne vivent que pour elles. Les savans de notre âge n’ont pas tous joui de ce bonheur; de grands changemens dans l'Etat leur ont ouvert une nou- velle lice; il en est qui se sont laissés entrainer sur le théâtre tumultueux des affaires, séduits par l'espoir de rendre à leurs contemporains des services plus immédiats, et croyant qu'un esprit exercé à la recherche de la vérité leur sufliroit pour se diriger au milieu de cette foule sans cesse agitée en des sens divers par ses passions personnelles. Des malheurs cruels, les persécutions, la mort, ont été pour quelques-uns la peine de cette innocente erreur; ceux même dont les succès pour- roient en imposer n’ont eu que trop d'occasions, au milieu des soucis et des peines secrètes du cœur, de regretter le calme du cabinet, et ces travaux paisibles qui leur méritoient à coup sûr l'approbation et le respect, tandis que dans leur autre carrière les intentions les plus pures n’ont pu les mettre toujours à l'abri de la calomnie, ni la bienfaisance la plus active les préserver de l’ingratitude. L'homme illustre dont nous allons vous entretenir s’est livré plus d’une fois avec amertume à cette comparaison; et dans ses momens les plus prospères, où l’idée que l’on ‘se faisoit de son crédit l’entouroit de plus de flatteurs, aussi bien que dans ceux où quelque bruit opposé le rendoit à son isolement, il tournoit sans cesse ses regards en arrière vers ce temps où, sans autre influence que celle de son talent, il étoit sûr de voir accourir à lui des milliers d’auditeurs de tous les pays où l’on cultive les sciences, et de compter, D'HISTOIRE NATURELLE. 10Y pour ainsi dire, autant d'élèves reconnoissans qu'il existoit de chimistes éclairés. Sa vie, si instructive sous ce rapport, ne l’est pas moins dans ses autres détails : elle nous montre le pouvoir du tra- vail et de la volonté pour maitriser la fortune, aussi bien que l'impuissance de la fortune pour donner le bonheur; elle se rattache essentiellement à l’une des plus brillantes époques de l'histoire des sciences, et tient une place importante dans celle de notre régénération politique; enfin, sans avoir été longue, elle est tellement remplie, que le temps qui m'est accordé me suflira à peine pour en tracer sommairement les princi- paux actes, et que si j ai quelqu'indulgence à demander, ce ne sera point, commeil arrive si souvent dans les éloges, pour avoir appuyé avec trop de complaisance sur des faits de peu de valeur, mais pour avoir passé avec trop de rapidité sur des travaux qui tiendroient une grande place dans l'éloge d'un autre. Antoine-François de Fourcroy, comte de l'Empire, con- seiller-d’état, commandant de la Légion d'honneur, membre de l’Institut et de la plupart des Académies et sociétés sa- vantes de l'Europe, professeur de chimie au Muséum d'His- toire Naturelle, à la Faculté de Médecine de Paris et à l'Ecole Polytechnique, naquit à Paris, le 15 juin 1755, de Jean- Michel de Fourcroy et de Jeanne Laugier. Sa famille étoit ancienne dans la capitale, et plusieurs de ses parens s’étoient distingués au barreau. L'un d’eux, sous le règne de Charles IX , mérita que l’on fit de son nom cette anagramme, peu exacte à la vérité, quant aux lettres, mais juste quant au sens, fort decus. Un second, Bonaventure 102 ANNALES DU MUSÉUM de Fourcroy, auteur de plusieurs morceaux de jurisprudence et de littérature, fut particulièrement aimé du grand prési- dent de Lamoignon; c'est de lui qu'on rapporte cette plai- santerie d’avoir invité Boileau à un repas exactement sem- blable à celui que décrit ce poëte dans sa 3e. satire, plai- santerie que les conviés trouvèrent, dit-on, assez froide. Un troisième, Charles de Fourcroy, se rendit célèbre sous . Louis XV, et son fils, Charles-René de F'ourcroy de Rame- court, maréchal-de-camp et cordon rouge, siégea pendant plusieurs années à l'Académie des sciences avec celui dont nous faisons l’histoire. Antoine-F'rançois de Fourcroy , qui étoit destiné à faire revivre dans une autre carrière l’éloquence de ses ancêtres, appartenoit à une branche tombée par degrés dans la pau- vreté. Son père exerçoit à Paris l’état de pharmacien, mais seulement en vertu d’une charge qu’il avoit dans la maison du duc d'Orléans. La corporation des apothicaires obtint la suppression générale de ces sortes de charges, et cet événe- ment détruisit le peu de fortune qui restoit à M. de Four- croy le père, en sorte que son fils ne commença à se con- noître qu'au milieu des malheurs que le monopole des corps privilégiés avoit fait éprouver à sa famille. Il en conserva un souvenir d'autant plus vif, qu'un tem- pérament délicat lui avoit donné dès l’enfance une extrême sensibilité. Ayant perdu sa mère à l’âge de sept ans, il vouloit se jeter dans sa fosse. Les soins tendres d’une sœur ainée eurent peine à le conserver jusqu'à l’âge où l’on put le faire entrer au collége. Ici de nouvelles injustices durent encore ulcérer ce jeune D'HISTOIRE NATURELLE. 103 cœur contre la société. Le hasard le fit tomber sous un préfet brutal, qui le prit en aversion, et qui trouvoit quelque pré- texte pour le faire fustiger chaque fois qu'il réussissoit à avoir de bonnes places. Ce genre d'encouragement finit par lui, donner de l'horreur pour l'étude, et il quitta le collége à quatorze ans, un peu moins instruit qu'il ny étoit entré. S'il eût été riche, il en seroit probablement resté là, et le dégoût inspiré par un mauvais maitre, eût étouffé en lui les heureux germes que la nature y avoit placés; mais l’adversité lattendoit, et devint pour lui un maître plus utile, qui répara les torts de l’autre. On est effrayé quand on voit ce jeune homme, destiné à devenir l’un de nos savans les plus illustres, réduit pour vivre à une petite place de copiste, et à montrer à écrire à des enfans. On assure qu'il conçut jusqu’au projet de se faire comédien, et que peut-être il le fut devenu, si un de ses ca- marades, qui avoit tenté avant lui cette périlleuse carrière, n’eùt été impitoyablement sifflé en sa présence. Le jeune Fourcroy ne voulut plus d’un métier où l’on punit si dure- ment la mauvaise réussite. On diroit qu'il se sentoit déjà destiné à en prendre un dont le sort est tout opposé; et en effet, bientôt après, les conseils de Viq d’Azyr le décidèrent pour la médecine. Ce grand anatomiste voyoit et estimoit M. de Fourcroy le père; frappé de l’heureuse physionomie du fils, et du courage avec lequel il luttoit contre la mauvaise fortune, son peu d'instruction ne l’effraya point. Il le consola, lui promit de le diriger, de le soutenir, et il tint parole. Nous avons entendu 104 ANNALES DU MUSÉUM M. de Fourcroy jusqu'à ses derniers jours parler avec une tendre reconnoissance de ce protecteur de sa jeunesse. Devenir médecin métoit pas une chose aisée dans sa situa- tion. Cinq ou six années d’une étude assidue alloient lui de- venir nécessaires, et il n’avoit pas de quoi subsister six mois. A l’époque de sa plus grande fortune, on lui a entendu rap- peler des détails plaisans sur le degré de détresse où il se trouvoit quelquefois réduit. Logé dans un grenier, dont la lucarne étoit si étroite que sa tête, coëllée à la mode de ce temps-là, ne pouvoit y passer qu'en diagonale, il avoit à côté de lui un porteur d’eau, père de douze enfans. Cétoit le jeune étudiant qui traitoit les nombreuses maladies d’une si nombreuse famille : le voisin lui rendoit service pour service; ausst (disoitil) 7e 2e manquois jamais d'eau. Le reste, il se le procuroit chétivement, par des lecons à d’autres écoliers, par des recherches pour des écrivains plus riches que lui, et par quelques traductions, qu'il vendoit à un libraire; pauvre ressource, car il ne fut payé qu'à moitié: il est vrai, dit-on, que le consciencieux libraire voulut bien acquitter le reste de sa dette, trente ans après, quand son créancier fut devenu directeur-général de linstruction pu- blique. Cette résignation au besoin, cette ardeur au travail, purent bien réparer les défauts de la première éducation, et faire dé M. de Fourcroy un médecin instruit. Mais ce n’étoit pas tout; il falloit ètre encore un médecin patenté, et le brevet de docteur revenoit alors à plus de six mille francs. : Un ancien médecin, le Dr. Diest, avoit laissé des fonds à la Faculté pour qu'elle accordàt tous les deux ans des licences D'HISTOIRE NATURELLE. 10 gratuites à l’étudiant päuvre qui les mériteroit le mieux. M. de Fourcroy concourut en 1780 pour cette espèce de prix. Une grande facilité naturelle et les efforts auxquels sa position l’avoit obligé, le portèrent au premier rang; il alloit obtenir le seul moyen d'existence qui lui restät à espérer; l'esprit de corporation pensa lui faire encore autant de mal qu'à son père. Il y avoit alors je ne sais quelle querelle entre la Faculté chargée de l’enseignement de la médecine et de la collation des grades, et une société que le Gouvernement venoit d'établir, pour recueillir les observations propres à reculer les bornes de l’art. A cette époque heureuse où l'on s’occu- poit sérieusement des petites choses, un public malin avoit envenimé la dispute par l'attention qu'il y avoit donnée : on en étoit venu aux sarcasmes, aux injures, aux calomnies; des différends sans importance étoient dégénérés en fureur. L'animosité de la Faculté avoit!pris pour son objet prin- cipal Viq-d’'Azyr, secrétaire de la Société, et Fourcroy étoit le protégé connu de Viq-d'Azyr : on le rejeta par ce seul motif; et l’un des hommes qui ont fait le plus d'honneur à la médecine, celui qui, dans ces derniers temps, en a restauré l'enseignement, auroit été privé pour jamais du titre de mé- decin, si par un esprit de parti contraire, mais plus noble, la Société n’eût fait une collecte pour lui avancer les frais de sa réception. | I fallut donc le recevoir docteur puisqu'il paya; mais il y avoit encore au-dessus du simple doctorat le grade de doc- teur-régent; celui-là ne dépendoit que des suffrages de la Faculté ; il fut refusé à Fourcroy d’une voix unanime, ce qui 115 À 14 j 106 ANNALES DU MUSÉUM l'empêcha dans la suite d'enseigner aux Ecoles de médecine, et donna à cette compagnie le triste agrément de ne point avoir dans ses registres le nom de l'un des glus grands pro- fesseurs de l'Europe. En vérité il semble que l’on peut pardonner à un homme d’un caractère irritable, qui avoit passé toute sa jeunesse dans le malheur, et qui après l'avoir vaincu, à force de courage, pouvoit y être subitement replongé par de si misérables motifs, on peut lui pardonner, dis-je, d’avoir conservé des impressions vives contre des institutions dont l'abus avoit pensé lui être si funeste. Cependant les plus grands obstacles étoient surmontés; M. de Fourcroy une fois admis à exercer la médecine, son sort ne dépendait plus que de sa réputation ; il s'occupa de la faire; et comme il avoit besom d’aller vite, il choisit la voie des travaux scientifiques qui donnent d'ordinaire aux médecins une renommée plys prompte et moins dépendante des ca- prices de l’opinion. Ses premiers écrits montrèrent qu'il ne tenoit qu’à lui de choisir la branche de la physique où il voudroit se distinguer. Ils furent presque également remarquables en chimie, en anatomie, et en histoire naturelle. On reconnoit un digne élève de Geoffroy dans son Æbrégé de l'Histoire des in- sectes, et un homme formé à l’école de Viq-d’Azyr dans sa Description des bourses muqueuses des tendons; VAca- démie des sciences lui en rendit témoignage, car ce fut comme anatomiste qu’elle le recut en 1785. Néanmoins il donna de bonne heure la préférence à la chimie, entrainé par le talent D'HISTOIRE NATURELLE. 107 de Bucquet qui s'accordoit mieux avec celui que la nature commençoit à faire éclore en lui. Bucquet étoit alors le professeur le plus suivi de la capitale; de la méthode, des idées claires, une grande justesse d’ex- pression, de la chaleur et de la noblesse dans le langage, atuiroient mème les gens du monde à ses cours. Il apprécia bientôt un élève si digne de lui ; et un jour que des souffrances imprévues l’empêchèrent de faire sa lecon, il engagea Four- _croy à le remplacer. En vain Le jeune homme allègue son peu d'habitude du monde, et représente qu'il n’a encore parlé que pour quelques camarades; le maître insiste, lui garantit le succès, le presse au nom de l'amitié; Fourcroy vaincu monte en chaire, et la première fois qu’il parle en publie, il parle deux heures sans hésitation, sans désordre, comme sil eùt été un professeur consommé, Il a dit souvent depuis que dans cette étonnante épreuve, il ne vit rien, n’entendit rien, fut livré tout entier à l'entrainement de sa situation. Bucquet, que des maladies graves devoient bientôt con- duire au tombeau, vit dès-lors en Fourcroy, l'héritier de son talent; mais il ne le traita point comme tant de gens traitent leur héritier ; il mit au contraire du zèle à diriger vers lui la faveur du public; il lui prèta généreusement son amphithéâtre et son laboratoire. C’est chez Bucquet que Fourcroy fit ses premiers cours et composa ses premiers élémens de chimie. Un mariage avantageux, suite de l'accueil qu'il obtint, lui fournit les moyens d'acheter le cabinet de son maître après sa mort, et si la Faculté ne lui permit pas de succéder à la place de Bucquet, elle ne put l'empêcher de succéder promp- tement à sa réputation. re 108 ANNALES DU MUSÉUM Le Jardin du Roi n’étoit pas astreint dans le choix de ses professeurs aux règles établies dans l'Université, et M. de Buffon qui en étoit l’intendant, savoit se prévaloir d’un tel privilége. Macquer qui y remplissoit la chaire de chimie étant venu à mourir en 1754, la voix publique se prononca telle- ment pour Fourcroy, que M. de Buffon reçut plus de cent lettres en sa faveur, toutes écrites par des personnages con- sidérables dans le monde ou dans les sciences. M. de Buffon hésitoit cependant, car Fourcroy avoit pour rival un grand chimiste protégé par un grand prince; mais les recommandations les plus nombreuses lemportèrent, et l’homme de génie à qui un talent séduisant fut alors préféré s’est applaudi depuis, d’avoir, en perdant une place, gagné un si heureux propagateur de ses découvertes. Pendant plus de vingt-cinq ans l’amphithéâtre du Jardin des Plantes a été pour M. de Fourcroy le principal foyer de sa gloire. Les grands établissemens scientifiques de cette capitale, où des maîtres célèbres exposent à un public nombreux et digne d'être leur juge, les doctrines les plus profondes de nos sciences modernes, rappellent à notre souvenir ce que l’an- tiquité eut de plus noble. On croit y retrouver à la fois ces assemblées où tout un peuple étoit animé par la voix d’un orateur, et ces écoles où des hommes choisis venoient se pénétrer des oracles d’un sage; les lecons de M. de Fourcroy, du moins, répondoient complétement à cette double image. Platon et Démosthènes y sembloient réunis, et il faudroit être l'un ou l’autre pour en donner une idée. Enchainement dans la méthode, abondance dans l’élocution; noblesse, jus- D'HISTOIRE NATURELLE. 10{ tesse, élégance dans les termes comme s'ils eussent été lon- guement choisis; rapidité, éclat, nouveauté, comme s'ils eussent été subitement inspirés; organe flexible, sonore, argentin, se prêtant à tous les mouvemens, pénétrant dans tous les recoins du plus vaste auditoire; la nature lui avoit tout donné. Tantôt son discours couloit également et avec majesté ; il imposoit par la grandeur des images et la pompe du style; tantôt variant ses accens, il passoit insensiblement à la familiarité ingénieuse et rappeloit l'attention par des traits d’une gaité aimable. Vous eussiez vu des centaines d’auditeurs de toutes les classes, de toutes les nations passer des heures entières pressés les uns contre les autres, craignant presque de respirer, les yeux fixés sur les siens, suspendus à sa bouche comme dit un poëte ( perdent ab ore loquentis); son regard de feu parcouroïit cette foule; il savoit distinguer dans le rang le plus éloigné l'esprit diflicile qui doutoit en- core, l'esprit lent qui ne comprenoit pas; il redoubloit pour eux d’argumens et d'images ; il varioit ses expressions jus- qu'à ce qu'il eût rencontré celles qui pouvoient les frapper; la langue sembloit multiplier pour lui ses richesses ; il ne quit- toit une matière que quand il voyoit tout ce nombreux au- ditoire également satisfait. Et ce talent sans égal brilla de son éclat le plus vif, à l'époque où la science elle-même fit les progrès les plus inouis. Lorsque M. de Fourcroy commenca ses cours, Bergman venoit de donner une précision mathématique aux analyses de la chimie ; on venoit d'apprendre à recueillir et à distinguer les élémens aériformes des corps; Priestley faisoit connoître Y10 ANNALES%#DU MUSÉUM chaque jour de nouvelles sortes d’airs; la théorie de la cha- leur changeoïit de face dans les mains de Black et de Wilke ; Cavendish et Monge découvroient la composition de l'eau; le génie de Lavoisier enfin trouvoit à force de méditations le secret de la combustion qui est aussi celui de presque toute la chimie, et soumettoit aux lois de cette science les princi- paux phénomènes des corps organisés. Loin d’imiter ces savans orgueilleux qui repoussent avec obstination les découvertes qu'ils n’ont pas faites, M. de Foureroy se fit un honneur d'adopter et de propager avec une égale impartialité celles de tous ses contemporains. Ce wétoit pas seulement le plaisir de l'entendre qui attüroit à ses lecons; c’étoit encore la certitude d’y être aussitôt informé de toutes ces vérités merveilleuses que chaque jour sembloit voir éclore. Des pays les plus éloignés l’on accouroit à Paris s'instruire sous lui; les princes entretenoient des jeunes gens pour le suivre, qui, chaque année, comme des essaims de missionnaires, couroient répandre dans toute l'Europe, au Brésil, au Mexique, aux Etats-Unis cette doctrine dont un maitre si éloquent avoit pénétré leur esprit et leur imagination. Il à fallu élargir deux fois le grand amphithéätre du Jardin des Plantes parce que cette salle immense ne pouvoit con- tenir la foule de ceux qui venoient entendre M. de Fourcroy. Quelqu'un a eru le tourner en ridicule en l'appelant lapôtre «le la nouvelle chimie; e’étoit à ses yeux le plus beau titre de gloire ; il y a en des temps où il faisoit, pour le mieux mé- riter, trois ou quatre lecons par jour, et dans les intervalles il s’occupoit à mettre ces lecons par écrit, pour les répandre au-delà de son amphithéätre. D'HISTOIRE NATURELLG. IIf Les six éditions qu'il a données de son Cours en vingt ans, conservent toutes un égal intérêt comme monumens succes- sifs des incroyables progrès qu'une science à pu faire dans un si court espace; la première, qui date de 1781, n’a que deux volumes sans être trop concise, et la sixième, de 18or, en a dix sans contenir rien de trop. Sa philosophie chimique joint à ce mème intérêt historique le mérite d’une précision et d’une clarté qui en ont fait le livre élémentaire de presque toute l’Europe. L'on en a donné en peu d'années ( 1792, 1796, 1806) trois éditions francaises, et huit ou dix traductions. Elle vient d’être imprimée en grec moderne, et on l’enseigne à Athènes, à Smyrne et à Cons- tantuinople. Il à fait encore deux autres abrégés, l’un pour les écoles vétérinaires et le second pour les dames ; enfin, il s’est chargé en grande partie de la chimie dans l'£rcyclopédie métho- dique, et dans le Dictionnaire des sciences naturelles. Ainsi l’on peut dire avec justice, que sans l’activité éton- nante de M. de Fourcroy , la chimie moderne n’auroit pas obtenu à beaucoup près si vite l’assentiment presque universel dont elle jouit, et cependant ce seroit se faire une idée très- imparfaite des services qu'il lui a rendus, que de les réduire à son enseignement. Il l’a aussi prodigieusement enrichie; mais, ce qui est un caractère particulier de ses travaux, c’est presque toujours pour mieux l’enseigner qu'il l’a enrichie. Ses lecons étoient pour lui autant de sources de réflexions: le besoin de satisfaire les autres et lui-même lui faisoit aper- cevoir chaque fois qu'il parloït quelqu'’une des choses qui 112 ANNALES DU MUSEUM magquoient à la science sur chaque matière, et aussitôt il passoit de son amphithéätre à son laboratoire. Tel est en effet pour les professeurs d’un bon esprit, l’un des grands avan- tages de leurs fonctions; sans cesse en haleine, obligés de présenter sous toutes les formes les divers principes dont leur science se compose, il est presque impossible qu'ils n'aient souvent des aperçus nouveaux; aussi peut-on remarquer que depuis Aristote jusqu'à Newton, les hommes qui ont le plus avancé l’esprit humain enseignoient publiquement. M. de Fourcroy, plus empressé de faire jouir les chimistes des faits nouveaux qu'il découvroit, que de les étonner par des résultats profonds et long-temps médités, consignoit les détails de ses expériences, pour ainsi dire à mesure qu'il les faisoit, däns des Mémoires particuliers, et nous avons déjà trouvé qu'il a fait imprimer plus de cent soixante de ces Mé- ‘moires, quoiqu'il en manque sûrement encore quelques-uns dans notre liste. Les volumes de l’Académie des Sciences, de l’Insutut, des Sociétés de médecine et d'agriculture, la grande collection des Annales de Chimie, celles du Journal de Physique, et du Journal des Mines en sont remplies, Il avoit entrepris lui-mème un recueil périodique sur les ap- plications de la chimie à la médecine; il a dirigé pendant trois ans la rédaction du Journal des Pharmarciens, et les Annales du Muséum d'Histoire Naturelle dont il a conçu la premiere idée, contiennent beaucoup de ses articles. On conçoit que ce n’est pas en produisant avec une telle abondance qu’il est possible de donner à ses productions une perfection absolue, et nous avouerons que l’on remarque dans les Mémoires de M. de Fourcroy, des idées en général D'HISTOIRE NATURELLE. TS plus étendues que profondes; ses conclusions sont quelque- fois un peu précipitées; il a été assez souvent obligé de se réformer lui-même, et n'a pu toujours éviter de l'être par d’autres. Cependant on ne peut disconvenir aussi, que ses résultats ne soient toujours précis et sensibles; qu'il n’envi- sage son objet principal par ses diverses faces, et ne l'attaque par tous les agens que la chimie possède; qu’il ne mette beaucoup d'ordre dans la marche des expériences, et surtout une clarté admirable dans leur exposition, car il étoit encore grand professeur alors qu'il auroit pu se contenter du rôle plus élevé que ses découvertes lui donnoient; enfin, malgré tout ce que l’on a pu reprendre dans ses écrits, les vérités importantes qu'il a fait connoitre, sont encore tellement nombreuses, que nous sommes obligés, pour en rendre compte, d'y établir un certain ordre, et de les distribuer se- lon qu’elles se rapportent ou aux principes généraux de la chimie, ou à l’un des règnes de la nature en particulier. Je sens que l'exposé de cette multitude de travaux de dé- tail, ne peut intéresser autant que des événemens variés ou que ces découvertes d’une influence universelle et qui se laissent exprimer en peu de mots ; mais je sens aussi ce que je dois à ma place, et au corps devant lequel je parle. L'his- toire des sciences est notre fonction principale; et notre pre- mier devoir est précisément d'y consigner ces recherches nécessaires pour remplir les lacunes du système de nos con- noissances, mais qui ne se recommandent par rien de frap- pant à l’attention du vulgaire. La principale expérience de M. de Fourcroy , pour la chimie générale, est celle de la combustion de Pair inflammable 17. 15 114 ANNALES DU MUSÉUM nommé gaz hydrogène par les nouveaux chimistes. Cavendish et M. Monge avoient découvert que cette combustion pro- duit de l’eau, et l’on en avoit conclu que l’eau est composée d'hydrogène et d'oxigène; mais l'eau que l'on obtenoit, étoit toujours plus ou moins mélangée d'acide nitreux, ce qui four- nissoit aux antagonistes de la chimie moderne, une objec- ton qu'ils croyoient décisive. MM. de Fourcroy, Vauquelin et Séguin, parvinrent, en 1792, à obtenir de l’eau pure en opérant avec plus de lenteur, et montrèrent que l'acide ve- noit de quelques parcelles d'azote toujours mêlées à l’oxigène, et qui brûloient avec l'hydrogène quand la combustion étoit trop vive. Un chimiste allemand, M. Gœttling, avoit tiré une autre objection de ce que le phosphore luisoit dans du gaz azote que Ton croyoit pur; preuve, disoit-il, que certains corps peuvent brûler sans oxigène. MM. de Fourcroy et Vauquelin montrèrent que le phosphore se dissout dans l’azote et n’y brûle que par un peu d’oxigène qui y reste. On pourroit aussi rapporter à la chimie générale les expli- cations données par M. de Fourcroy de la détonation du nitre et des diverses poudres fulminantes, mais elles lui sont communes avec d’autres chimistes. Ce qui lui est plus particulier, c'est la découverte de plu- sieurs composés qui détonnent par la simple percussion, et qui ont tous pour base l'acide muriatique oxigéné mêlé à divers combustibles; un coup de marteau enflamme ces mé- langes avec un bruit violent. M. de Fourcroy a fait un grand nombre d'analyses, soit D'HISTOIRE NATURELLE. 115 de minéraux à l'état concret, soit d'eaux plus ou moins mi- néralisées, + Parmi ces dernières, on doit compter surtout celle de l'eau sulfureuse de Montmorency, faite en commun avec M. de la Porte, en 1787, et qui a servi long-temps de modèle à ces sortes d'analyses si importantes pour la médecine. Elle offroit des méthodes beaucoup plus exactes que celles de Bergman, parce que lon y avoit profité de tous les moyens indiqués par Priestley, pour retenir et pour examiner les fluides élas- tiques: L'un des phénomènes les plus curieux que l’on ait reconnus dans ces derniers temps, est celui des pierres qui tombent de l'atmosphère, et dont la composition, toujours semblable, ne ressemble à celle d'aucune des pierres connues sur la terre. M. de Fourcroy à travaillé avec M. Vauquelin à constater ce dernier caractère, qui fait l’une des preuves les plus es- sentielles du phénomène. C'est dans ses recherches sur les minéraux que M. de Fourcroy découvrit les moyens de distinguer et d'obtenir à l'état de pureté les deux terres nommées baryte et strontiane, si voisines des métaux par leur pesanteur, et des alcalis par leurs autres propriétés. Les procédés qu'il indiqua sont en- core ceux dont on se sert aujourd'hui. Le platine ou l'or blanc, substance qui nous vient du Pérou, et qui, plus pesante et aussi inaltérable que l'or, est en même temps dur et susceptible de poli comme l'acier, passoit pour un métal simple. Les travaux presque simultanés de MM. Descotils, Wollaston, Smithson-Tennant, ont découvert, il y a quelques années, qu'il s’y mêle quatre autres substances cl 116 A NNALES DU MUSÉUM métalliques auparavant inconnues. Une ou deux de ces sub- stances furent aperçues par MM. de Fourcroy et Vauquelin, qui s’occupoient du platine en même temps que les chimistes dont nous venons de parler. Ilexiste un minéral appelé arragonite qui est jusqu à ce jour la pierre d’achopement de la chimie et de la minéralo- gie, parce qu'avec des formes cristallines, une dureté, une densité et une force réfringente différentes de celles du spath calcaire, il offre les mêmes élémens que ce spath, et dans la même proportion. MM. de Foureroy et Vauquelin ont contribué à constater ce fait jusqu’à présent inexplicable. À l’époque où beaucoup d'églises perdirent leur destina- tion, une quantité immense de cloches fut livrée au commerce. Ces bruyans instrumens sont composés de cuivre et d’étain, mélange qui, dans cette proportion, n’est bon qu'à faire des cloches. Il falloit séparer ces métaux pour en tirer parti, et cela parut d'abord impossible. M. de Fourcroy imagina d’oxider, c’est-à-dire de calciner, une partie de l’alliage et de la mêler avec une autre partie non oxidée. L’oxide de cuivre de la première portion abandonne tout son oxigène à l’étain de la seconde, et la fusion livre le cuivre pur. Ce procédé a tenu momentanément lieu à la France de mines de cuivre, et a été employé par quantité de fabriquans qui n'en ont témoigné aucun gré à l’auteur. M. de Fourcroy a fait des recherches immenses sur les combinaisons salines; son histoire de l’aide sulfureux et des sels qu'il produit, est un ouvrage d’une grande patience et qui remplit une lacune importante dans la chimie. Il a appré- cié avec sagacité ce qui se passe quand on précipite les sels D'HISTOIRE NATURELLE. 117 de magnésie ou de mercure par l'ammoniaque, et la nature des sels à base double qu’on obtient par ces opérations. Le degré d’oxigénation du mercure et du fer dans leurs différens sels, ont aussi été l’objet de ses expériences; il a repris deux fois ses recherches sur le mercure, qu'il a terminées en 1804 avec l’aide de M. Thénard. Ces sortes de travaux semblent n’exiger que de l'assiduité; mais comme la science chimique en a un besoin indispensable pour devenir complète, on doit de la reconnoissance à ceux qui ont le courage de les entreprendre. M. de Foureroy portoit cet esprit d'ensemble et ce désir de compléter chaque genre de recherches dans tout ce dont il s'occupoit. Le ministère lui ayant donné à examiner une nouvelle espèce de quinquina apportée de Saint-Domingue : il en fit une analyse si détaillée, il y appliqua des moyens si nouveaux, que ce travail devint un modèle pour la chimie végétale. M. Vauquelin, M. de Saussure, M. Thénard, ont porté, depuis, cette branche de la science beaucoup plus loin; mais M. de Fourcroy leur avoit servi de guide comme Rouelle et Bucquet lui en avoient servi à lui-même; et il a pris part aussi vers la fin de sa vie à plusieurs analyses dans ce genre perfectionné, telles que celles des céréales et des légumineuses, qui a jeté beaucoup de lumière sur la théorie de la germi- nation, celle du blé carié, celle du suc d’oignon remarquable surtout par la manne qui se forme dans sa fermentation. Il est un des premiers qui ait reconnu dans les végétaux cette substance appelée albumine qui fait la base du blane d'œuf et dont le caractère est de se coaguler dans l’eau bouil- lante. 118 ANNALES DU MUSÉUM L'on admettoit avant lui, dans ce mème règne, un principe que l’on nommoïit aromne, et dont on dérivoit les odeurs des diverses parties des plantes. Il a montré que les corps n’agis- sent sur l’odorat que par leur propre substance volatilisée. On regardoit comme des acides particuliers ceux que l’on obtient de la distillation du bois et des gommes. MM. de Fourcroy et Vauquelin out prouvé qu'ils ne sont que de l'acide acéteux altéré par un mélange d'huile, et cette décou- verte à permis de substituer avec beaucoup d'économie ces acides au vinaigre dans une foule d'emplois. L'un des phénomènes les plus compliqués de la chimie est la formation de l’éther ou de cette substance, éminemment volatile, qui résulte de l’action de l'acide sulfurique concentré sur l'alcool. M. de Fourcroy s’en est occupé après beaucoup d’autres, et sa théorie est encore celle qui paroît la plus vrai- semblable; il a constaté que l’avidité de lacide pour l'eau contraint en quelque sorte les élémens de l’eau à se combiner, et de ce fait une fois prouvé, il a déduit tous les phénomènes ultérieurs. Mais de toutes les recherches qui ont occupé M. de Four- croy, celles qui ont été les plus fécondes et qui lui donneront la plus longue célébrité, ce sont ses recherches sur les sub- stances animales. Il y attachoit une importance toute parti- culière, parce qu’elles lui paroïssoient devoir lier plus inti- mement la chimie à la médecine, et il les considéroit comme un des devoirs de sa chaire à la Faculté. Sa détermination de la quantité d'azote extraite par l'acide nitrique de chaque substance animale, quantité d'autant plus B’HISTOIÏIRE NATURELLE. 119 considérable que ces substances sont plus animalisées, à achevé de constater la nature de l’animalisation. Il à contribué plas qu'aucun de ses contemporains à fixer les caractères des principes immédiats du corps animal ; de cette fibrire dépositaire des forces motrices; de cette ma- tière médullare plus merveilleuse encore qui transmet les sensations et la volonté; de cette gélatine qui, dans ses di- verses formes, a pour fonction générale de retenir ensemble tous les élémens du corps. Diverses humeurs particulières, comme le mucus des narines, les larmes, le chyle, le lait, la bile, le sang, l’eau des hydropiques ont été l’objet de ses analyses; il a examiné le tartre des dents; il n'est pas jusqu'à la composition chimique des os qui n'ait reçu un jour nou- veau de ses recherches; il y a découvert le phosphate de magnésie que personne n'y avoit trouvé avant lui. L'un des faits les plus curieux qu'il ait découverts, fut celui que lui offrit en 1786 le cimetière des Innocens. Le Gouvernement ayant résolu de supprimer ce foyer d’infec- tion, qui, depuis un grand nombre de siècles, recevoit les corps de la partie la plus peuplée de la capitale, défendit non-seulement d'y enterrer, mais ordonna de transférer ail- leurs les corps qui y étoient déposés, opération dangereuse qui fut exécutée avec autant d’habileté que de courage par MM. Thouret et de Fourcroy. Une grande partie de ces corps se trouva transformée en une substance blanche, grasse et combustible, semblable, pour lessentiel, à celle que l'on nomme blanc de baleine , et qui se tire de la tête du cachalot. L'examen approfondi des circonstances, le rapprochement de quelques faits analogues montra que cette métamorphose 120 ANNALES DU MUSÉUM a lieu pour toutes les matières animales préservées du contact de Fair dans des lieux humides, et l’on assure que l’on a tiré parti de cette découverte en Angleterre pour convertir en matière bonne à brüler les chairs des animaux que l’on ne mange pas, tant il est vrai qu'il n’est pas une de nos obser- vations en apparence les plus indifférentes qui ne puisse de- venir utile à la société. Cependant M. de Fourcroy estimoit ses découvertes sur les calculs urinaires et sur les divers bezoards, plus que toutes les autres, parce qu'il en prévoyoit une application plus im- médiate au bien public. . On ne connoissoit avant lui qu'une sorte de calcul dans la vessie, dont la nature acide avoit été déterminée par lillustre Schéele; M. de Fourcroy entrevit vers 1798, d’après cer- taines expériences de M. Pearson, chimiste anglais, qu'il pouvoit y en avoir de plusieurs espèces; que quelques-unes même ne seroient peut-être pas indissolubles. Il annonça aussitôt ses idées, et invita les médecins à lui envoyer les calculs dont ils pourroient disposer. Plus de cinq cents lui furent adressés. Il les examina et les compara aux calculs des animaux, aux bezoards et aux autres concrétions. Les calculs de la vessie lui offrirent cinq combinaisons différentes et il en trouva sept autres dans les différentes concrétions. Non content de les faire connoitre-par leur analyse, il leur assigna aussi des caractères extérieurs propres à les faire distinguer au premier coup d'œil, comme les naturalistes distinguent les minéraux. Il est déjà certain par ces recherches que le calcul des animaux herbivores peut se dissoudre par des injections de vinaigre affoibli, et l’on n’est pas entièrement sans espé- D'HISTOIRE NATURELLE. 1917 rance de produire le même effet sur quelques-uns des calculs humains. En même temps qu'il examinoit les calculs, M. de Four- croy faisoit un grand travail sur l'urine de l’homme et des animaux, dont les résultats ont été d’un égal intérêt pour la, chimie, pour la médecine et pour la physiologie. Les animaux herbivores ont une urine très-différente de celle de l'homme, mais les principes de celle-ci se retrouvent jusques dans Les excrémens des oiseaux. Un résultat non moins piquant pour la physiologie a été la ressemblance de composition observée par M. de Fourcroÿ entre le sperme de certains animaux et la poussière fécondante de quelques plantes. Telle est une légère esquisse de l'immense recueil de faits et d'expériences dont M. de Fourcroy a enrichi la chimie; s’il n’a pas eu le bonheur d’attacher son nom à quelqu’une de ces grandes vérités générales qui donnent une gloire popu- lire , il l'a inscrit en tant d’endroits et à tant d'articles parti- culiers que les savans seront toujours obligés de le citer parmi ceux des savans les plus dignes de la reconnoissance publique. Dans un grand nombre de ces travaux, le nom de M. de Fourcry est associé, comme on vient de l'entendre, à celui de M. Vauquelin, son élève etson ami; et l’envie a cru gagner beaucoup en se prévalant de cette association pour contester au premier de ces deux chimistes la meilleure partie de leurs découvertes communes; comme si d’avoir engagé un homme tel que M. Vauquelin à des recherches qui ont été siheureuses, n'étoit pas pour la science un service au moins équivalent à quelques expériences de plus. Qu'il nous soit du moins per- 17. 16 122 ANNALES DU MUSÉUM mis de voir dans la noble constance que M. Vauquelin a mise à travailler avec son maitre, une preuve des sentimens que M. de Fourcroy savoit inspirer, et de croire que l’homme qui a su choisir si bien son ami et le garder si long-temps méritoit d’être aimé. On a besoin de faire de telles remarques, dans ce temps où de longues discordes ont laissé tant de haines et où qui- conque à joui d’une parcelle de pouvoir, a été en butte à des outrages publics. M. de Fourcroy devoit être plus exposé que personne à ce malheur, à cause du moment où il fut appelé aux places supérieures, et à cause de l’espèce irritable d'hommes avec qui ses fonctions l'ont mis le plus en rapport. A cette époque où une nation entière s’avisant subitement de se trouver malheureuse, imagina de faire sur elle-même toutes les sortes d'expériences, lorsque l’on essaya tour-à-tour de tous les hommes qui avoient de la célébrité dans quelque genre que ce füt, il étoit presque impossible qu’il échappät aux choix populaires. Nommé suppléant à la Convention nationale, il n’y entra comme député que vers l'automne de 1793, c'est-à-dire, au moment où elle gémissoit et faisoit gémur la France sous la tyrannie la plus terrible. D'après ce que nous venons de rapporter de sa vie, il est aisé de juger avec quelles dispositions il y arrivoit. A cette ignorance presque absolue du monde etdes affaires, apanage ordinaire des savans de cabinet, se joignoit en lui une aigreur bien pardonnable contre un ordre de chose dont il n’avoit éprouvé long-temps que des injustices. Sa facilité D'HISTOIRE NATURELLE. 123 à exposer avec élégance ces vérités générales contre lesquelles aucun intérêt n’indispose, devoit lui paroïtre au moins bien voisine de cette éloquence persuasive qui maitrise à son gré tous les penchans du cœur. Que de sagesse il falloit pour se taire, avec des tentations si fortes pour parler! M. de Four- croy eut cette sagesse. Malgré les reproches publics qu'on lui en fit, il ne monta point à la tribune tant que l’on ne-put y paroïtre sans crainte ou sans déshonneur, et il se renferma dans quelques détails obscurs d'administration, se contentant, pour récompense, d'obtenir la grâce de quelques victimes. Darcet, l’un de nos confrères, lui a dù la vie, et l'a appris d'un autre long-temps après; il fit appeler près de la Con- vention des savans respectables, que la faux révolutionnaire auroit atteints partout ailleurs. Enfin, menacé lui-même, il lui devint impossible de servir personne, et des hommes affreux n'ont pas eu honte de travestir son impuissance en crime. Peut-être me blâme-t-on de rappeler ces tristes SOUVenirs; mais quand un homme célèbre a eu le malheur d’être ac- cusé comme M. de Fourcroy, lorsque cette accusation a fait le tourment de sa vie, ce seroit en vain que son historien essaieroit de la faire oublier en gardant le silence. Nous devons même le dire, si dans les sévères recherches que nous avons faites, nous avions trouvé la moindre preuve d’une si horrible atrocité , aucune puissance humaine ne nous auroit contraint de souiller notre bouche de son éloge, d’en faire retentir les voûtes de ce temple, qui ne doit pas ètre moins celui de l'honneur que celui du génie. M. de Fourcroy ne commença à prendre de l'influence que plusieurs mois après le 9 thermidor, lorsque les esprits F6 4 124 ANNALES. DU MUSEUM furent lassés de destruction, et dans cette longue suite de travaux qui ont relevé l’ordre social, on le voit dès les pre- miers momens occupé de l'instruction publique, et s’empres- sant toujours de faire suivre à sa restauration des progrès parallèles à ceux qu’il observoit dans les idées dominantes. On croiroit en effet, d’après la gradation de ses discours et des lois qu'il a proposées, qu'il portoit dans la politique la même flexibilité d'esprit que nous venons de lui voir dans les sciences, et la série de ses rapports et de ses actes aura pour l'histoire de l'opinion publique dans la seconde moitié de la révolution, un genre d'intérêt tout-à-fait comparable à celle de ses autres ouvrages pour l'histoire de la chimie. Je suis encore obligé de faire ici une longue énumération de travaux particuliers, mais j'ai au moins autant de raisons d'espérer de l'indulgence. I ne s’agit plus seulement de dé- couvertes isolées, mais d'institutions qui, en assurant la con- servation des sciences, en multiplieront à l'infini les progrès. Ce n’est plus un simple expérimentateur maitre de ses ma- üières et de ses instrumens; c’est un homme obligé de lutter contre tous les genres d'obstacles, et de fire du bien à ses concitoyens, en grande partie malgré eux. La Convention avoit détruit les Académës, les Colléges, les Universités; personne n’eût osé en demarder d'emblée le rétablissement; mais bientôt les effets de leur suppression se marquèrent par Fendroit le plus sensible; les armées vinrent à manquer de médecins et de chirurgiens, etl’on ne pouvoit en refaire sans écoles. Qui croiroit cependan qu'il fallut du temps pour qu'on eût la hardiesse de les apeler écoles de médecine? Médecin, chirurgien, étoient des titres trop D'HISTOIRE NATURELLE. 125 contraires à l'égalité, apparemment parce qu'il n’y a point de supériorité plus nécessaire que celle du médecin sur le ma- lade; on employa donc le mot bizarre d'écoles de santé, et il ne fut question pour les élèves ni d'examen ni de diplômes. Toutefois un esprit clairvoyant ne laisse pas que d’apercevoir dans les règlemens qui furent portés, les intentions de celui qui les rédigea. Les trois grandes écoles fondées à cette époque recurent une abondance de moyens dont on n'avoit eu jusqu'alors aucune idée en France, et qui font encore au- jourd'hui le plus bel ornement de l'Université. L'expérience apprit bientôt aussi que le courage ne suñlit pas à la guerre sans l'instruction, et que la science militaire est un poids considérable dans la balance des succès; on voulut que les écoles de l'artillerie, du génie et de la marine, recussent des sujets préparés par l'étude des mathématiques et de la physique, et l’on vit naître cetteÆcole polytechnique dont le plan primitif, dépassant de beaucoup le but, sembla destinée à rendre les hautes sciences, pour ainsi dire, aussi communes que l’avoient été jusques-là les connoissances les plus élémentaires. La conception des Écoles centrales n’étoit pasmoins grande dans son genre : peut-être l’étoit-elle trop. Il ne s’agissoit de rien moins que d'établir une sorte d’'Université dans chaque département, à laquelle la jeunesse devoit être préparée par des écoles inférieures placées dans chaque district; mais, comme il n'arrive que ‘trop souvent dans notre nation, ce projet ne fut exécuté qu'à demi. [ a toujours manqué aux Ecoles centrales ces écoles préparatoires : on n’a jamais placé auprès d'elles les pensionnats qui entroient essentiellement 126 ANNALES DU MUSÉUM dans leur plan. Ce qui leur a été plus funeste encore, on n’a pu leur fournir assez de bons maîtres, à une époque où il en avoit tant péri, et où l'esprit de parti ne permettoit pas même d'employer tous‘ceux qui restoient. Une Ecole normale placée à Paris devoit former ces maitres dont on avoit un si grand besoin; mais dans les temps ora- seux qui terminèrent le règne de la Convention l’on ne put donner qu'une existence éphémère à une institution qui au roit exigé plus qu'aucune autre une longue durée pour pro- duire de l'effet. M. de Fourcroy, soit comme membre du comité d’instruc- tion publique de la Convention nationale, soit comme membre du Conseil des Anciens, a pris une part plus ou moins active à toutes ces créations, et a fait dans ces deux assemblées une grande partie des rapports qui ont déterminé à les adopter. Nous devons nous souvenir aussi que M. de Fourcroy n’a pas été étranger à la formation de l'Institut qui, dans un plan primitif, devoit à la fois travailler aux progrès des sciences et régler la marche de l’enseignement public, en sorte que les lumières se seroient propagées par les mèmes hommes qui les auroïent fait naître; idée admirable, si une compagnie nombreuse, et surtout une compagnie studieuse, pouvoit s'occuper des détails infinis qu’exige toute branche d’admi- nistration. M. de F'ourcroy avoit eu enfin une grande influence, soit comme professeur, soit comme député, sur la rédaction de la loi qui a fait du Muséum d'Histoire naturelle le plus ma- gnifique établissement que les sciences aient possédé. D'HISTOIRE NATURELLE. 127 Toutes ces institutions portent un caractère de grandeur et de générosité qui entroit essentiellement dans ses vues. Le Gouvernement, selon lui, devoit l'instruction au peuple aux mêmes titres que la justice et la süreté; et il trouvoit d'autant plus convenable d'y consacrer une partie importante du revenu de l'Etat, qu'une instruction très-répandue lui paroissoit le moyen le plus sûr de rendre facile et le maintien de la sûreté et celui de la justice. Nous n'ignorons pas que les ennemis de M. de Fourcroy ont pu reprendre dans quelques-uns de ses discours poli- tiques le langage usité dans le temps où il les fit, mais c’est la faute du temps et non la sienne ; qui ne se souvient que les propositions les plus nécessaires auroient été rebutées, si on ne les eût revètues de ce grossier idiôme? Autant vaudroit donc blämer ceux qui traitent avec les sauvages du Canada, de ne pas leur parler dans-le mème style que l’on harangue les princes de l'Europe. M. de Fourcroy étant sorti, en 1798, du Conseil des A ciens, ses travaux législatifs furent interrompus, et il saisit ce moment pour rédiger son grand système des connoissances chimiques, ouvrage immense, fait en dix-huit mois, et dont le manuscrit tout entier de sa main et presque sans ratures, prouve à quel point il portoit la facilité. Mais ce temps de repos ne fut pas de longue durée; nommé Conseiller d'état, à l'époque du Gouvernement consulaire, il fut bientôt chargé de reprendre les travaux qu'il avoit commencés pour la res- tauration de l'instruction publique. Ici les opérations de M. Fourcroy prennent un autre ca- ractère, et avec plus d'ensemble et de vigueur elles lui 128 ANNALES DU MUSÉUM deviennent moins personnelles. Quand le prince, et un prince comme le nôtre gouverne par lui-même , lorsque le génie qui d’un signe peut ébranler la terre sait tout aussi aisément des- cendre jusqu'aux moindres détails de l'administration, il n’est pas aisé de faire la part des agens secondaires de lautorité ; nous pouvons dire cependant que si les vues que M. de Four- croy avoit à exécuter n'étoient plus entièrement les siennes, c’étoit toujours son activité qu'il mettoit à les faire réussir, et ce n’est pas une gloire médiocre, lorsqu'on songe que sous sa direction, et dans le court espace de cinq années, douze Écoles de droit ont été créées, plus de trente Lycées érigés, et plus de trois cents colléges relevés ou établis. Appelés pendant quelque temps à partager son travail, c’est pour nous un double devoir de lui rendre témoignage; car on ne peut, sans l'avoir vu, se faire une idée de ce que lui ont coûté de peines tant d’établissemens dans un pays où il falloit relever jusqu'aux édifices, recréer tous les genres de ressources, surmonter dans chaque lieu des résistances intéressées, chercher de tous côtés des maitres et jusqu'à des élèves, tant l'exemple du passé inspiroit de défiance. Aujour- d’hui toutes ces institutions réunies en un seul corps, sou- mises aux lois d’une discipline commune et gouvernées par in chef que la voix publique appeloit, promettent des fruits plus abondans et plus vigoureux; l'Université impériale, dans ce moment de splendeur, ne doit pas oublier la mémoire de celui qui a semé pour elle en des temps difficiles. Infatigable dans son cabinet comme dans son laboratoire, M. de Fourcroy passoit les jours et une grande partie des nuits au travail; il ne se reposoit en entier sur aucun de ses D'HISTOIRE NATURELLE. 129 subordonnés, et les moindres règlemens qui sortoient de ses bureaux avoient été conçus et muüris par lui-même. Il vouloit connoître personnellement les meilleurs instituteurs; et il a parcouru plusieurs parties de la France pour s'assurer des progrès des écoles, et juger de plusprès des talens des maitres. Dans les choix qu'il avoit à fire, il redoutoit surtout de consulter l'esprit de parti, et peut-être donna-t-il quelque- fois dans un autre excès, en méprisant trop des préventions qui pouvoient cependant rendre inutiles les talens de ceux qui en étoient les objets. Mais c’est surtout aux élèves qui recevoient du Gouver- nement le bienfait d’une éducation gratuite, que M. de Four- croy portoit toute son affection. Il sembloit toujours avoir présens à la mémoire les malheurs de sa propre jeunesse ; et se rappeler ce qu'il devoit aux personnes qui lavoient se- couru dans ses études. Combien d'hommes éprouveront un jour pour lui un sentiment semblable, et combien de parens se joignent sans doute dès ce moment à moi, pour bénir la mémoire de celui de qui leurs enfans tiennent le plus pré- cieux de tous les biens! Nous avons dù retracer en détail ce que M. de Foureroy a fait pour l'instruction publique; car, dans cette partie de ses travaux, le député et le conseiller-d’état étoit encore es- sentiellement membre de l'{nstitut. [nous conviendroit moins de le peindre dans ses autres rapports politiques, et nous w’aurions probablement pas des notions suflisantes pour le faire avec exactitude. Quelques-uns disent que, désirant invariablement le bien, son esprit toujours facile varioit peut-être trop sur les moyens 17. 17 190 ANNALES DU MUSÉUM de le faire, et que l'habitude de parler avec une chaleur égale pour chacune des opinions qui s’emparoïent suecessi- vement de lui, diminuoit un peu l’effet naturel que son élo- quence auroit dû avoir. C’est que, recherchant toujours vi- vement une approbation immédiate, il ne songeoit point que, dans la carrière de l'ambition comme dans toutes les autres, les succès n'imposent qu'autant qu'ils ne sont point trop ba- lancés par des échecs. I espéroit se faire pardonner une pro- position hasardée, par sa complaisance à la modifier jusqu’à ce qu’on l'adoptàt; mais c’étoit un mauvais calcul: et la ja- lousie compte avec plus de soin les défaites que les victoires. Il s’apercut à la fin que ce n’étoit pas d’après eelles-ci que ses émules le jugeoient, et cette découverte fut pour lui un grand malheur. Toute sa vie il avoit attaché à l'opinion des autres plus de prix qu'il ne convient peut-être à un savant et à un homme-d’état. Et que l’on ne croie pas que dans son besoin exagéré de ne pas déplaire, il fit acception des per- sonnes. Un mot dit sur son compte dans le moindre cercle, un article de journal avoient le droit de l’inquiéter presque autant qu'une grande espérance trompée. I s’afiligeoit même de la facilité avec laquelle de jeunes chimistes se permettoient de revenir sur ses travaux, et quelquefois de les critiquer, comme sil eût pu espérer de trouver un Vauquelin dans chacun de ses élèves dans un siècle où il est déjà si extraor- dinaire d’avoir vu ün exemple d’un pareil dévouement. Ce désir extrême d’oceuper sans cesse dans l'esprit des autres une place favorable, inspiroit à M. de Fourcroy des efforts qui redoubloient à mesure que le théâtre où ses talens le portoient étoit plus élevé, et qu'il se trouvoit plus de gens D'HISTOIRE NATURELLE. 131 intéressés à lui enlever cette jouissance. Son ardeur pour ses nouveaux devoirs ne refroidissoit en rien celle qu'il portoit aux anciens. Depuisplusieurs annéls conseiller-d’état, et chargé d’une administration compliquée, il ne faisoit guère moins d'expériences, de mémoires et de lecons, que lorsque tout son temps appartenoit aux sciences. A la fin des travaux si multipliés, et que ces dispositions de son caractère méloient de tant de soucis, attaquèrent son organisation. Des palpitations, sur lesquelles un médecin ne pouvoit se méprendre, lui annoncèrent son sort. Il le prévit avec plus de calme qu’il n’avoit supporté les contrariétés de sa double existence. A voir son assiduité au travail, à l'entendre parler, personne ne l’auroit cru malade; lui seul ne fut pas trompé un instant. Pendant près de deux années, il s’attendit, pour ainsi dire, chaque jour au coup fatal. Saisi enfin d’une atteinte subite, au moment où il signoit quelques dépêches, il s'écria : Je suis mort, et il l'étoit en effet. C'étoit le 16 décembre 1809, le matin d’une fête de famille. Ses parens, avec quiil vivoit dans l'union la plus tendre, avoient coutume de célébrer cette époque par les hommages de l'amitié : plusieurs des nombreux personnages qu'il s’étoit attachés par son empressement à rendre service; la saisissoient pour lui marquer leur reconnoiïssance. De toutes parts on accouroit la gaité sur le visage; chacun apportoit quelques fleurs, quelque présent, et ne trouvoit que ce corps inanimé et une famille dans l'effroi; triste réunion préparée pour la joie, qui ne fit que rendre plus affreuse cette scène de dés- espoir; et comme si tout ce qui pouvoit lui arriver d’heureux avoit dù se tourner en douleur, une preuve éclatante de la 15 © 7 132 ANNALES DU MUSÉUM satisfaction de son maitre, précieux témoignage long-temps désiré, et qui eût peut-être prolongé ses jours s’il avoit osé le prévoir, n’arriva que pôur être déposée sur sa tombe. C'est ainsi que les hommes les plus actifs sont trop souvent arrêtés au milieu de. leur carrière : heureux du moins ceux dont il peut rester quelques vérités nouvelles, quelques éta- blissemens utiles, le souvenir de quelque bien fait à leurs contemporains. M. de Fourcroy a laissé dans un haut degré ces trois genres de monumens; les fastes de la science sont remplis de ses recherches; l'Empire est couvert des insti- tutions qu'il a aidé à relever; un concours immense d'hommes qu’il avoit obligés a rendu ses funérailles aussi touchantes que pompeuses, et dans ce long temps où il a joui du pouvoir, en butte à tant de calomnies, fatigué par tant de contrariétés, ce seroit en vain que l’on chercheroiïit même parmi ses enne- mis les plus acharnés, quelqu'un à qui il auroit fait du mal. M. de Fourcroy laisse de son premier mariage avec ma- demoiselle Bettinger, M. le comte de Fourcroy, oflicier d’ar- üllerie, et Mme, Foucaud. Son second mariage avec madame Belleville, veuve de Vailly, ne lui a point donné d’enfans. Les places qu'il occupoit dans nos établissemens scientifi- ques ont été remplies par les plus dignes de ses élèves. M. Thé- nard lui a succédé à l'Institut; M. Laugier au Muséum d'Histoire Naturelle ; M. Gay-Lussac à l'Ecole Polytechnique. Sa chaire à la Faculté de Médecine est encore vacante. C9 Co D'HISTOIRE NATURELLE. 192 EXPÉRIENCES Sur une Matière rose que les urines déposent dans certaines maladies. PAR M. VAUQUELIN. El. une espèce de fièvre nerveuse dont j'ai été attaqué à différentes époques, j'ai constamment rendu des urines qui ont déposé, par le refroidissement, une matière d’une cou- leur rose très-vive et très-pure. Les médecins ayant souvent eu occasion d'observer cette matière, en ont parlé dans leurs ouvrages, mais je ne sache pas que les chimistes en aient jamais fait l’objet spécial de leurs recherches, au moins d’une manière bien suivie, faute sans doute d'occasions qui leur en aient fourni une quantité suflisante pour cet objet. Cependant M. Proust, dans un Mémoire sur l'urine, inséré dans les Ænnales de Chimie, après avoir indiqué une ma- nière d'isoler cette substance de celles qui l’accompagnent, a décrit quelques-unes de ses propriétés, mais ce savant n’a pas prononcé d’une manière aflirmative sur la nature de ce principe : il propose de l'appeler provisoirement substance rosacée. Dans la dernière fièvre que je viens d’éprouver j'ai pu 134 ANNALES DU MUSÉUM m'en procurer environ deux grammes en filtrant mes urines à mesure qu'elles ont déposé par le refroidissement. Jai eu soin de passer de l'eau froide sur le filtre pour enlever toutes les autres parties solubles qui pouvoient y rester adhérentes. J'ai rendu pendant quatre jours des urines qui ont ainsi précipité cette matière rose : ce phénomène a commencé avec la maladie et a fini avec elle; ce qui paroit prouver que cette matière est l'effet et non la cause de la maladie. Pendant toute la durée de la fièvre, les urines ont été très-acides, rares, mais extrèmement chargées durée et de sels. Comme il m'a paru intéressant pour la médecine, et spé- cialement pour la physiologie, de chercher à connoître la na- ture de cette singulière substance, je l'ai à cet effet soumise aux expériences suivantes : 10, Deux décigrammes de la poudre rosée ont été dissous en totalité dans 30 grammes d’eau bouillante : la liqueur étoit légèrement rosée. 20, Mise avec de la potasse en liqueur très- Hide, elle s’est dissoute sur-le-champ, et sa dissolution avoit une cou- leur verte sombre un peu rougeûtre, comme la couleur du vin où l’on a mis de l’alcali. Si l’on ajoute ensuite dans cette dissolution quelques gouttes d'acide, la matière se précipite avec sa couleur rose naturelle et la liqueur reste sans couleur. 30, L'acide nitrique à 320. dissout la matière rose sur-le- champ en produisant une écume épaisse, et la dissolution étendue d’eau n’a aucune couleur; mais comme celle de l'acide urique dans la même menstrue, elle prend par l’éva- poration au moment où elle va se dessécher une belle cou- D'HISTOIRE NATURELLE" 135 leur rouge d'œillet que Scheele a le premier remarquée. 4°. Mise sur les charbons ardens cette poudre noircit, exhale l'odeur de l'huile animale mêlée d’ammoniaque, et laisse pour résidu une trace de charbon. 5°, Un demi-gramme de cette substance traitée à l’aide de la chaleur par de l'alcool à 36°. a été entièrement dé- colorée en trois opérations successives; l'alcool a pris une couleur rose tirant légèrement sur le jaune, à peu près comme celle de la dissolution de rhodium : le résidu étoit d’un blanc grisàtre. Celui-ci desséché avoit perdu environ un cinquième de son poids; il étoit entièrement soluble dans la potasse, et en étoit alors précipité en blanc par les acides. Les différens essais auxquels je l'ai soumis m'ont prouvé qu'il se comportoit absolument comme l'acide urique pur. L'alcool qui tenoit la matière colorante en dissolution, a laissé, après l’évaporation sur les parois de la capsule, un en- duit d’un rouge de cinabre très-vif et dont je n’ai pu estimer exactement le poids, mais il y a lieu de croire qu'il corres- pondoit à peu près à la perte éprouvée par l'acide urique. Un peu de cette matière colorante, mise sur les charbons, répand d’abord une odeur d'urine et ensuite une vapeur pi- quante qui ne ressemble pas à celle qu’exhalent les matières animales en pareille circonstance. Cependant comme je n'ai fait cette expérience que sur une petite quantité de cette matière, je ne répondrois pas qu'il ne se formât aussi un peu d’ammoniaque. Cette matière colorante est soluble en entier dans une assez pelite quantité d'eau; elle paroit même déliquescente, car 136 MNNALES DU MUSÉUM après avoir été desséchée elle s’est ramollie par l'exposition à l'air. La dissolution de cette matière dans l'eau distillée, rougit très-sensiblement le papier de tournesol : en se combinant aux alealis, elle en émousse singulièrement la saveur : elle ne précipite point les terres alcalines de leur dissolution aqueuse, mais elle précipite lacétate de plomb en rosé léger. Il suit des expériences que nous avons rapportées dans cette note que la matière rose qui se dépose des urines dans certaines fièvres, n’est point un corps simple, pas même une modification de l'urine, au moins quant à la proportion des principes, mais une combinaison d'acide urique ordinaire avec une matière colorante rouge très-intense quand elle est pure et qui est un acide dont les propriétés paroissent se rapprocher plutôt des matières végétales que des substances animales. La combinaison de cette substance avec l'acide urique semble être très-intime, car quoique beaucoup plus soluble que ce dernier, elle ne Fabandonne point lorsqu'il se préci- pite de sa dissolution, et la liqueur ne conserve point de couleur quand l'acide urique est entièrement séparé. Cela est d’ailleurs démontré par l'urine elle-mème qui, quand eHe a déposé, ne fournit plus par lévaporation que de l'acide urique blane. Je présume que certains calculs d'acide urique qui ont une couleur rosée contiennent cette substance; c’est ce dont je m'assurerai incessamment. Je propose avec M. Proust d'appeler cette substance ‘acide rosacique. À l’occasion de ce travail j'ai fait une observation que D'HISTOIRE NATURELLE. 137 je crois devoir consigner ici : après avoir évaporé en consis- tance de syrop, au moyen d’une chaleur très-douce, l'urine qui avoit formé le dépôt rosé, jy ai mêlé de l'alcool à 36°. qui en a précipité du sulfate de potasse, des muriate et phos- phate de soude, ete. Cet alcool filtré a déposé au bout de quelques jours des cristaux que j'ai reconnus pour du phos- phate acide d’ammoniaque. Ce fait détruit le doute élevé avec quelque raison par M. Thénard sur la nature de l'acide qui communique ce caractère à l’urme des personnes en santé, et prouve que si l'acide acétique existe quelquefois libre dans cette liqueur animale, l'acide phosphorique peut y exister aussi. 17- 18 138 ANNALES DU MUSÉUM ESSAI D’'UNE NOUVELLE CLASSIFICATION DES DIPLOLEPAIRES. PAR MaAxiIMiILIEN SPINOLA, EL ne s’agit ici que de la seule nomenclature. Or, toute no- menclature est ennuyeuse, et je dois au lecteur de l'arrêter le moins detemps possible sur ce sujet ingrat : je vais donc exposer de la manière la plus laconique 1°. mes principes généraux pour l'établissement des genres; 2°. l'application de ces principes à la famille des Diplolépaires; 30. la classification des insectes de cette famille. Principes généraux. 10, Un genre n’est naturel que lorsque le caractère sur lequel il repose suppose à l’insecte des mœurs qui lui sont particulières. 20, L'importance de lorgane dont on emprunte les ca- ractères génériques ne suffit pas pour que tout mode de con- formation puisse être pris indifféremment comme type d’un genre naturel; il faut de plus que cette conformation suppose, D'HISTOIRE NATURELLE. 139 dans l'organe, une destination ou un mouvement particulier au genre qu'on veut établir. d 30. Les organes manducatoires donnent des divisions d’in- sectes qui sont très-naturelles, et en imposant à ces divisions le nom de genre, on a sans doute des genres naturels. Mais toutesdes différences légères que présentent leurs formes plus ou moins variées ne sont pas dans ce cas; elles s’allient souvent à un même système de manducation, et alors elles ne peuvent donner que des caractères spécifiques naturels, et des ca- ratères génériques artificiels. 4°. Les genres du docteur Fabricius qui ne reposent que sur ces différences légères des organes manducatoires ne sont donc, malgré l'autorité de ce grand maître, que des genres artificiels. 50. Toutes les autres parties du corps, et particulièrement les organes du mouvement, peuvent donner des genres aussi naturels que ceux qu'on a établis, d’après les parties de la bouche; la méthode qui néglige de si bons caractères est défectueuse dans ses principes, mais en les employant il ne faut pas se départir de notre principe n°. 2. 60. Le petit nombre de nos observations sur les mœurs des insectes et le grand nombre des espèces décrites ou à décrire ne permettent pas de s’en tenir aux genres naturels. Aucun méthodiste ne s’y est borné, pas même M. Latreille qui a suivi de plus près l’ordre natur el. 70. Les divisions artificielles sont donc non-seulement ad- missibles, mais même elles sont strictement nécessaires dans une infinité de cas. Gardons-nous cependant de les donner 19:* 140 ANNALES DU MUSÉUM pour ce qu’elles ne sont pas , et ne les considérons que comme des divisions des genres naturels. 90. Lorsque ces divisions artificielles sont nombreuses et étendues, ily a un certain avantage à les désigner par un nom générique : notre mémoire retient mieux un nom propre dérivé du grec ou du latin qu’une phrase spécifique plus ou moins compliquée. 9°. Toutes les parties du corps peuvent donner de bons caractères pour diviser artificiellement les genres naturels, mais les plus apparentes sont toujours les meilleures, et les organes manducatoires ne sont certainement pas de cenombre. L2 Î . Application de ces principes à la Classification des Diplolépaires. 10, Non-seulement tous les Diplolépaires, mais tous les Hyménoptères dont la langue est échancrée et repliée en dessous, et dont les palpes labiaux ne sont pas en demi-tube, ont le même système de manducation, comme je le prouverai dans mes observations sur la bouche des insectes, consi- dérée comme base systématique. Les caractères fabriciens ne fourniront donc aucune coupe naturelle de cette famille, et j'ai été condamné à les exclure de mon travail, parce que comme caractères artificiels, ils m'ont paru les plus mauvais de tous. 20, Mes observations m'ont paru prouver que les mêmes mœurs sont communes à tous les insectes de cétte famille. Il sont tous parasites et leurs larves vivent toutes aux dépens de celles d'espèces plus industrieuses : je suis même fondé D'HISTOIRE NATURELLE. 141 à croire que la diplolépaire mère dépose constamment ses œufs sur la larve d’un autre insecte, et qu’elle réussit à la trouver et à la blesser lorqu'elle se croit en sûreté au centre d’une galle. Cette famille répond donc, selon moi, à un genre très-naturel, et je nai rien à ajouter aux taractères que lui a assignés M. Latreïlle. Je regarde toutes les divisions subsé- quentes comme purement artificielles. 30. La faculté de sauter commune à tous les diplolépaires, les sépare naturellement des ichneumonides avec lesquels ils ont d’ailleurs tant de rapport. Les cuisses ne paroissent pas être ici le siége de cette faculté; car on la retrouve dans les espèces où ces pièces sont simples. Les ailes n’en seroient- elles pas les ‘organes? Je considère le vol comme une suc- cession de sauts, et je concois très-bien que des insectes dont les ailes sont très-foibles (les supérieures n'étant soutenues, en général, que par une côte qui n'arrive pas au bord postérieur et les inférieures ne présentant aucun indice de nervures), dont le corps est d’ailleurs court, ramassé, épais et prôpor- tionnellement très-pesant, manquent de force et de moyens pour répéter les élans successifs qui auroient changé le saut en un vol continu. Voilà pourquoi M. Latreille m'a paru saisir un caractère bien naturel lorsqu'il a marqué que nos diplolépaires n’ont point de nervures distinctes aux ailes in- férieures, tandis qu'on les observe dans les ichneumonmides, Ce caractère est peut-être préférable à celui qu’on peut ürer des antennes et du nombre de leurs articles. 4°. Puisque la grosseur des cuisses postérieures ne donne pas aux diplolépaires la faculté de sautér, ee caractère est purement artificiel. I est néanmoins très -apparent,. très- 1/42 ANNALES DU MUSÉUM simple et d’un usage très-facile. Je n’ai pas cru devoir l’éli- miner; mais ce caractère n'est employé qu'en sous-ordre, j'ai donné le pas à ceux que j'ai déduits des antennes et de l'abdomen. 50. Le nombre des articles des antennes varie depuis six jusqu'à douze ; ils sont aisés à compter, surtout avec le secours d’une loupe. J'ai cru devoir d'autant plus me servir de ce caractère que les antennes sont probablement le siége d’un sens principal, soit du tact, soit de l'odorat. Nous ignorons cependant si l’activité de ce sens à un rapport quelconque avec le nombre des articles, et voilà pourquoi je ne puis re- garder les divisions fondées sur ce caractère que comme ar- tificielles, jusqu'au moment où le rapport présumé sera prouvé et déterminé. 60. Les caractères à emprunter des antennes ne se bornent pas au nombre des articles, on peut considérer encore, 1°. leur insertion; 2°, la forme des articles; 30. la longueur res- pective de ces derniers. Chacun de ces caractères m’a donné des coupes bien nettes et bien tranchées. 79. La cavité abdominale renferme presque tous les viscères de nos diplolépaires; c'est sous l'enveloppe de ces anneaux que se passent la plupart des phénomènes de leur vie animale. Si on vouloit se contenter de conjectures, on pourroit se croire aussi fondé à regarder comme naturels les genres éta- blis d’après les anomalies de l'abdomen que ceux que les grands maîtres ont admis d’après de légères différences dans les parties de la bouche. Pour moi qui exige une preuve positive, avant de donner comme type d’un genre naturel la forme particulière d’une partie quelconque, je considérerai 4 J 2 D'HISTOIRE NATURELLE. I! provisoirement comme artificiels ceux que je proposerai d’après les formes abdominales. Mais je m'y arrèterai vo- lontiers, ne fut-ce que sur le simple soupcon qu'un examen ultérieur nous prouvera un jour qu’ils sont réellement naturels. 8°. Nous considérerons dans l'abdomen, 1°. l'abdomen proprement dit, c'est-à-dire sa connexion avec le corcelet, le nombre, la forme de ses anneaux et læ manière dont ils s'engrènent entre eux; 20, les parties sexuelles qui sont un appendice de l'abdomen. Celles du mâle sont couvertes par les derniers anneaux du ventre : elles ne sortent que dans l'acte de l’accouplement. Nous ne les emploierons pas, parce qu'elles nous offrent les mêmes inconvéniens que les organes manducatoires. Nous trouverons au contraire d’excellens ca- ractères en nous arrêtant sur la tarrière des femelles; sur sa direction et son point de départ. Quoique cet organe ait toujours la mème destination, son mouvement doit varier selon sa direction; et la position du corps relativement à la tarrière variera également selon le point de départ de cette dernière. Les genres qui reposeront sur d’aussi bons carac- tères seront donc bien près des genres naturels. 9°. Ma réponse à ceux qui m'objecteront que les carac- tères empruntés des parties génitales ne conviennent qu : à un sexe et ne sont pas spécifiques, est consignée dans l’ex- cellent ouvrage de mon respectable ami le savant M. Latreille. Voyez Gen. Crust.et Insect., tome HE, page 256. Les raisons qu'il allègue apportent la conviction avec elles et je les atté- nuerois en voulant les étendre. 10°. Les hyménoptères, en général, volent plus qu'ils ne 14% ANNALES DU MUSÉUM marchent. Leur marche dans les espèces ailées est si uniforme que leurs pattes ne donnent aucun caractère qu'on puisse employer avec succès. Les ailes sont ici le principal organe du mouvement, et c’est à elles qu'on peut avoir recours pour obtenir des divisions naturelles. Les ailes, pliées, chiffonnées ou étendues, velues ou lisses, surchargées ou dénuées de nervures proportionnellement à leur grandeur, sont des ca- ractères incontestablement naturels: leurs rapports avec les habitudes ‘de l’insecte sont aisés à deviner et à démontrer. Mais en est-il de même de toutes les combinaisons des ner- vures entre elles, du nombre et de la forme des cellules ra- diales ou cubitales? Je ne le pense pas. M. Jurine lui-même qui a rendu un si grand service à l’Entomologie, en l’enri- chissant d’une excellente méthode pour la description des ailes supérieures des hymenoptères, et qui a facilité d’une manière étonnante l'étude de cet ordre difficile et embrouillé, ne paroit pas s'être proposé cette difficulté. Content d'établir un système simple et facile, il ne s’est pas embarrassé de nous apprendre comment la cellule cubitale pétiolée influe sur les mœurs des cerceris, des 2yssons, pourquoi la cellule cubitale intermédiaire sépare en deux genres les aromalons et les zchneumons, ainsi de suite. Cette difliculté est pro- bablement insoluble. Les caractères jurinéens sont néanmoins d'un emploi très-facile. Ce mérite suflit pour ne pas les ex- clure; je ne les négligerai donc pas, mais on me pardonnera lorsque je les reléguerai à la dernière place. 110. Le lobe ou segment antérieur du corcelet a fourni à M. Latreille quelques caractères qu'il a employés dans la classification de ses cyzipsères qui sont nos diploléparres. D'HISTOIRE NATURELLE. 145 Ce caractère est évidemment artificiel, mais il vaut bien celui des cellules radiales et cubitales (1). Quant à la nomenclature, la priorité est ma loi. Elle est aussi celle de M. Latreille et des Entomologues français. Sou- venons-nous donc que limmortel Linné a donné le nom de cynips aux insectes qui produisent les galles. Il leur a réuni (1) Le corcelet des hyménoptères est composé de cinq lobes ou segments dont chacun supporte une paire d'organes du mouvement, pattes ou ailes. 1°. Le segment antérieur ou le co/ ( co//um ) qui supporte la première paire de pattes, 2°. Le second segment ou le disque ( discus thoracicus ) supporte la seconde paire de pattes. La plaque dorsale de ce segment est ordinairement divisée en trois pièces. 3°. Le troisième segment ou le segment scutellaire ( segmentum scutellare ) supporte les ailes supérieures. Ce segment ne consiste qu’en une plaque dorsale plus ou moins étroite et ordinairement courbe. La convexité de la courbe est tournée du côté de la tête. Les épaulettes des ailes supérieures bornent ses extré- mités latérales. Son milieu se relève souvent en bosse, et cette bosse dont la forme est variable constitue l'écusson ( scutellum ). L'espace situé de chaque côté est ordinairement une fosse étroite et transversale destinée à recevoir dans le repos la partie basilaire de l’aile supérieure qui ne s'étend que dans le vol. 4°, Le quatrième segment ou le subscutellaire ( segmentum subscutellare ) sup- porte les ailes inférieures. Il ne consiste également qu’en une plaque dorsale qui est à celle du segment scutellaire dans les proportions des ailes inférieures aux ailes supérieures. On y observe en petit les mêmes parties, les fosses latérales et la bosse du milieu. Celle -ci est même très-considérable dans quelques genres. Voyez les Oxybèles. 5°. Le cinquième segment enfin ou le métathorax qui supporte à la fois l’ab- domen et la troisieme paire de pattes. Les segments qui supportent une paire de pattes, sont les*seuls auxquels les Entomologues aient fait attention , apparemment parce qu’ils sont les seuls qu’on puisse compter en renversant l’insecte. Je pense cependant qu’on ne sauroit dé- crire exactement un corcelet sans faire mention des deux autres, et que ce détail est particulièrement nécessaire pour lever tout équivoque sur l’écusson. GE 19 146 ANNALES DU MUSÉUM à la vérité des parasites qui en sont très-distincts, tant par leur conformation que par leurs habitudes. Geoffroy les a séparés le premier, mais il a pris les parasites pour les pro- priétaires des galles e£ iceversa; il a transporté le nom de cynips aux parasites, et a donné aux propriétaires celui de cynips. Cette nomenclature reposoit sur une erreur, elle ne méritoit pas d’être suivie, et le docteur Fabricius a très-bien fait de rendre leur ancien nom aux insectes que Linné avoit ainsi désignés. Peut-être eut-il fait encore mieux en suppri- mant entièrement le nom de æplolepe, au lieu de le trans- porter aux cynips de Geoffroy. Il eut évité toute espèce de confusion en créant un nouveau nom. Je n’ai pas osé tenter cette innovation. Mais si on la juge nécessaire, la famille des diplolépaires sera celle des calcidies, nom qui lui convien- dra d'autant plus que cette famille répond presque entière- ment au genre chalcis de M. Jurine, et la coupe à laquelle j'ai conservé provisoirement le nom de @plolepe pourra prendre celui de callmome. CLASSIFICATION DES DIPLOLEPAIRES. Î. Antennes de douze articles. A. Abdomen attaché à l’extrémité postérieure et inférieure du métathorax ; de trois anneaux dans les mâles, de cinq - dans les femelles. Tarrière recourbée en dessus et couchée sur l’abdomen. . N°, 1, G. LEUCOSPIS. — Cuisses postérieures renflées, Une cellule radicale Fab, aux ailes supérieures complète , étroite et allongée; D'HISTOIRE NATURELLE. 147 une cellule cubitale incomplète, plus courte que la cellulé radiale, point de nerfs recurrents. Ex. Leuc. gigas, dorsigera, brevicauda, dispar Fab. — Leuc. biguettina Jur. seu intermedia [llig. — Leuc. intermedia mihi([ns. Lig.),unipunctata mibi.Inédite. Observation. N'ayant jamais pu observer les espèces dont l'abdomen est pétiolé,, les Leuc. atra et petiolata de Fab., j'ignore si elles peuvent donner lieu à une nouvelle coupe. B. Abdomen attaché au dos du métathorax et relevé comme dans les Evaniales, composé de sept anneaux dans les mâles, de six dans les femelles. Tarrière de ces dernières toujours dirigée horizontalement et ne remontant jamais au-dessus de l’abdomen. N°. 2. G. PODAGRION. — Cuisses postérieures renflées. Point de cellules mihi. radiales ou cubitales aux ailes supérieures. Ex. Podagrion splendens mihi. Espèce inédite. C. Abdomen attaché à l'extrémité postérieure et inférieure du métathorax, de sept anneaux dans les mâles, de six dans les femelles. Tarrière de ces dernières horizontale , ne re- montant jamais au-dessus de l’abdomen. a. Genou des antennes logé dans une fosse frontale. * Antennes insérées au milieu du front. N°.3. G. CHALCIS,. — Cuisses antérieures renflées. Abdomen subsessile. Fab. Ex. Cal. flavipes, podagrica , minuta , etc. Fab. N°.4, G. SMIER A. — Cuisses postérieures renflées. Abdomen pétiolé. mihi. Ex. CA. sispes, clavipes, Fab. etc. Smiera Peirolerii mihi. Inédite. N°. 5. G. PÉRILAMPUS.— Cuisses postérieures simples. Abdomen subsessile. Latr. Ex. Dipl. violacea, italica, chrysis Fab., aurata Panzer. N°. 6. G. CHR YSOLAMPUS. — Cuisses postérieures simples. Abdomen pé- mihi. tiolé, Ex. Dipl. splendidula mihi; Ins. Lig. 194 148 ANNALES DU MUSÉUM ** Antennes insérées au bord inférieur de la tête, prés de la bouche. N°. 7. G. HALTICHELLA. — Cuisses postérieures renflées. mihi. + Ecusson considérablement renflé et recouvrant presque entièrement le métathorax. Ex. CA. bispinosa, pusilla Fab. etc. Ch.armata, Panzer. CA. dargelasii, Latr. Haltichella san- guinipes mihi. Espèce inédite. + + Ecusson aplati et ne dépassant pas le bord pos- térieur du segment scutellaire. Ex. Æaltichella aterrima mihi. Espèce inédite. b. Antennes libres dans toute leur longueur, le genou n'étant point recu dans une fosse du front. * Antennes insérées au rnilieu du front. N°, 8. G. DIPLOLEPIS ( ou Callimome ). Abdomen plus ou moins comprimé Fab. latéralement , jamais déprimé en dessus. Fente ven- trale ouverte pour donner une issue à la tarriere, correspondant à la dernière, ou tout au plus à lavant- dernière plaque dorsale. Ex. Diplolepis bedeguaris , pupparum , purpurascens, nigricornis , obsoleta, juniperi, subcutanea , dorsalis Fab. etc. cuprea, annulata, fuliginosa mihi. Ins. Lig. spinipes, calcarata, crassipes , albicauda , bre- vicauda , longicauda mihi, etc. Espèces inédites. No, 9. HALTICOPTERA.— Abdomen déprimé. Fente ventrale correspon- mihi. dant aux anneaux antérieurs. Tarrière dépassant rarement l’extrémité de labdomen. Col aussi large ou plus large que le disque du corcelet. + Abdomen plus long que large. Es. Dipl. varians mihi, Ins. Lig. Halticoptera læta, bimanculata, cupreola ;ele., mihi. Espèces inédites. D'HISTOIRE NATURELLE. 149 ++ Abdomen plus large que long. Ex. Cleptes minuta , coccorum Fab. etc. Æalticoptera rotundata, umbraculata mihi.Inédites, Diplolepis flavicornis mihi, Ins. Lig. N°. 10, G, CLEON Y MUS. — Abdomen comprimé et même concaye en des- Latr. sus. Fente ventrale et tarrière comme dans les Halticoptera. Col acuminé, plus long et plus étroit que le disque. + Tarrière ne dépassant pas l'extrémité de l’abdomen. Ex. Cleonymus depressus, Latr. Diplolepis bico- lorata, mihi. Ins. Lig. C/eonymus cingulum , mihi, inédit. ++ Tarrière dépassant l’extrémité de l’abdomen. Ex. Cleonymus compressipes ; hemipterus mihi. Espèces inédites. N°.11.G. SPHEGIGASTER. — Abdomen pétiolé, grèle , allongé , et n'étant, mihi. après le pétiole, ni ascendant ni comprimé latéralement. Ex. Diplolepis pedunculiventris, pallicornismihi, Ins. Lig, N°. 12. G. EUCHARIS. — Abdomen fortement pétiolé , ascendant et com- mihi. primé latéralement, après le pétiole. Latr. Ex. ZEucharis adscendens Fab. ** Antennes insérées au bord antérieur de la tête, près de la bouche. No. 13. G. SPALANGIA. — Abdomen pétiolé, Col allongé, plus étroit que Latr. le disque du corcelet. Antennes filiformes. Ex. Spalangia nigra Latr. N°. 14, G ENCYRTUS.— Abdomen sessile , triangulaire, très-court, re- couvert à sa base par le prolongement de l’écusson. Col caché sous le bord postérieur de la tête. Antennes brisées. Point de cellule ra- dicale ou cubitale aux ailes supérieures, Ex. Encyrtus infidus Latr, 156 ANNALES DU MUSEUM N°. 15, G. SCELIO., — Abdomen sessile, arrondi, découvert dans toute sa Latr. longueur. Col également découvert. Antennes brisées. + Commencement d’une cellule radicale. Ex. Scelio rugosulus Latr. ++ Point de cellule radicale. Ex. Scedio ater mihi. Espèce inédite. N°. 16. G. TELEAS. — Adomen sessile. Antennes filiformes, finissant en massue. Ex. Teleas clavicornis Latr. Observations. 10. Le docteur Klug nous a averlis que plusieurs espèces exotiques, placées par le docteur Fabricius dans le genre chalcis, lui ont paru appartenir à de nouveaux genres. o 2°. Je n'ai jamais vu le chalcis pectinicornis Quoique je le regarde par intérim comme une haltichella , elte pourroit bien être le type d’un nouveau genre. M. Latreille est le premier à le soupçonner. 3°. Toutes les fois que j'ai écrit abdomen sessile, il faut entendre sub-sessile. Je n'ose pas affirmer que les leucospis aient réellement l'abdomen sessile, Quant aux autres diplolépaires, celte partie ne tient jamais aux métathorax que par une portion deson diamètre transversal, L’épithète sessile n’est donc ici que par opposition à pétiole et ne désigne que la longueur et la largeur du premier anneau relativement à ceux qui le suivent. 4°, L'expression d'antennes brisées que j'ai employée souvent pour abréger et parce que je suis sûr d’être entendu, est impropre et devroit être bannie de l’entomologie. L’angle qui brise l’antenne a toujours lieu après le genou (scapum), et provient du mouvement parliculier à cel article. Or , ce mouvement et l’angle qui en est la conséquence se retrouvent chez tous les insectes à antennes. Sous ce point de vue tous les insectes ont donc leurs an- tennes brisées. Mais l'angle qui brise l'antenne n’est pas toujours à égale distance de la tête, la différence tient à la longueur du genou proportionnellement à celle de l’antenne, C’est donc cette longueur que les entomologues devroient désormais décrire avec plus d’exacti- tude, et au lieu de l’expression vague d’antennæ infractæ , ils auroient bien fait d’ajouter guelquefois scapum ad dimidiam antennæ longitudinem accedens. II. Antennes de onze articles. N°.17. G. STILBULA. — Abdomen pétiolé, très-long ; segments après le pé- mihi. tiole comprimés latéralement. Ecusson épineux. Ex. Zchneumon cyniformis Rossi. D'HISTOIRE NATURELLE. 11 III. Antennes de dix articles. À. Antennes insérées au bord antérieur de la tête, près de la bouche. N°. 18. G. PLATYGASTER. — Abdomen pétiolé, déprimé, en spatule. Latr. Antennes brisées. Ex. Platygaster ruficornis Latr. Sept à huit espèces inédites. B. Antennes insérées au milieu du front. N°. 19. G. DECATOMA. — Abdomen pétiolé, comprimé latéralement. mihi. Ex. Chalcis adonidum Rossi. Diplolepis sphegum, stigma Fab., etc. Decatoma splendida, metallica, rufipes , albitarsis mihi. Inédites, etc. N°. 20. G. CALLITULA. — Abdomen sessile et déprimé. mihi, Ex. Callitula bicolor, mihi. Inédite. IV. Antennes de neuf articles. N°. 21. G. EUR Y TOMA. — Abdomen pétiolé, comprimé latéralement. Illiger. Ex. Eurytoma verticillata , abrotani, plumata Xli- ” ger. Crassinoda mihi. Inédite, T. Antennes de huit articles. N°. 22. G. PTEROMALUS. — Abdomen sessile, ou pour mieux dire, subses- Latr. = 4'sile: Ex. Pteromalus gallarum Latr. N°. 23. G. ELACHERTUS. — Abdomen pétiolé : pétiole épais, très- court, mihi, égal en longueur au segment qui le suit immé- diatement. Ex. Diplolepis lateralis mihi, Ins. Lig. Æ/acher- tus viridulus , albiventris, abdominalis, albipes , pilicornis mihi, etc. Espèces inédites. N°. 24. G. MICROTERUS. — Abdomen pétiolé : pétiole mince, allongé, fai- 152 ANNALES DU MUSÉUM sant à lui seul plus de la moitié de la longueur de l’abdomen. Ex. Diplolepis petiolata mihi, Ins. Lig. Micra- terus capreolus mihi. Inédites. VIT. Antennes de six à sept articles. N°. 25. G. EULOPHUS. — Zulophus ramicornis, Geoffroy. Qt Co D'HISTOIRE NATURELLE. I DESCRIPTION DU CHAILLETIA, NOUVEAU GENRE DE PLANTES. PAR M. DE CANDOLLE. J E donne au nouveau genre de plantes dont je vais présen- ter la description le nom de chailletia, pour rappeler celui de mon ami le capitaine Chaillet de Neufchàtel, qui a étudié avec une sagacité remarquable les plantes de la Suisse, qui m'a communiqué plusieurs observations nouvelles insérées dans la Flore Francaise, et qui n’est pas moins recomman- dable par sa modestie que par ses connoissances. Les chailletia sont des arbustes ou de petits arbres indigènes de Cayenne et particulièrement remarquables par la position de leurs fleurs qui naissent sur le pétiole des feuilles. Leurs jeunes rameaux sont un peu anguleux et revêtus d’un duvet si rare et si court qu'on a peine à l’apercevoir mème à la loupe. Les feuilles sont alternes, articulées sur la tige, portées sur un court pétiole, ovales ou elliptiques, prolongées en pointe, entières sur les bords, glabres sur les deux surfaces, et munies de nervures pennées. Les fleurs sont très-petites, 17. 20 154 ANNALES DU MUSÉUM et naissent presque toujours du sommet du pétiole, lequel est plus épais dans les feuilles qui portent des fleurs : celles-ci sont portées sur deux pédoncules rameux dans l’une des es- pèces que je nomme pour cette raison €. pedunculata; elles sont sessiles et en paquet dans l'autre espèce que j'ap- pelle €. sessiliflora. Chaque fleur est composée 1°. d’un périgone (ou calice) d’une seule pièce persistant sans grandir après la fleuraison, non adhérent à l’ovaire, profondément divisé en cinq lanières oblongues, blanchâtres et cotonneuses en dehors, glabres et colorées en dedans; 20. de la base de ce tégument externe naissent cinq lanières égales à la longueur de l'enveloppé ex- terne, alternes avec elles, bifurquées à leur sommet, un peu cohérentes ensemble par leur base et qu'on peut prendre au premier aspect, ou pour des pétales, ou plutôt pour des ap- pendices nectariformes; 30. cinq étamines alternes avec ces appendices naissent de la base du périgone dont elles n’at- teignent pas la longueur et portent chacune une anthère ar- rondie à deux loges; 4°. le pistil se compose d’un ovaire libre, velu, de deux styles courts un peu en tête à leurs ex- trémités ; il se change en un drupe dont le brou est presqu’en- tièrement sec et dont le noyau est divisé intérieurement en deux loges : quelquefois une des loges avorte : les graines sont solitaires dans chaque loge, adhérentes à son sommet et par conséquent pendantes, ovales-oblongues, sans périsperme; l'embryon se compose d’une radicule droite dirigée vers le haut, et de deux cotylédons épais. Ces caractères de la fleur et du fruit sont tous ürés du challetia pedunculata. La seconde espèce a dans mes échan- D'HISTOIRE NATURELLE. 155 üllons des fleurs trop peu développées pour que j'aie pu la disséquer avec soin, et je ne la rapporte à ce genre que par l’analogie extrème de son port. Dans le système sexuel, le chaïlletia se placera dans la pentandrie digynie, à la suite de lormeau ; mais sa place dans l'ordre naturel n’est point aussi facile à déterminer. L’incer- titude à cet égard naït principalement. de ce que la nature des tégumens de la fleur n’est pas bien claire : pour la dé- terminer il est nécessaire de comparer ce genre avec les fa- milles de plantes dicotylédones à périgone double et linté- rieur polypétale, et avec celles à périgone simple. Quant aux premières, plus généralement connues sous le nom de dicotylédones polypétales, il est évident que le chail- letia, par ses étamines périgynes, s'éloigne tout-à-fait des xrre. et xure. classes de Jussieu; et la xive., quoique fort nom- breuse, ne présente que la famille des térébinthacées à la- quelle il soit raisonnable de comparer le chaïlletia. Mais outre que son port diffère beaucoup de celui des térébinthacées, il s’en écarte par la présence des stipules, et surtout par sa radicule décidément droite et nullement repliée sur les lobes. Que si nous comparons le chailletia avec les dicotylédones à périgone simple qui comprennent les classes v, vi, vir et xv de Jussieu, nous éliminerons d’abord sans discussion les classes v et vir à cause des étamines périgynes du chailletia; l'absence du périsperme écarte de la comparaison un grand nombre des familles restantes, et les seules avec lesquelles on puisse réellement comparer le chailletia, sont les familles des laurinées et des amentacées. Il se rapproche des laurinées 20 * 156 ANNALES DU MUSÉUM par la structure de sa graine, par ses étamines opposées aux lobes du périgone, par les écailles pétaloïdes qui sont entre- mélées avec elles, et même un peu par l'aspect de ses fleurs; mais il me paroît en différer évidemment par la présence de deux stipules à la base de chaque feuille, par ses étamines qui sont au nombre de cinq, tandis que dans toutes les lau- rinées le nombre des étamines est de trois ou un multiple de trois, par ses anthères qui ne s'ouvrent point de bas en haut, par son pistil à deux loges et deux styles, tandis que celui de toutes les laurinées est à une loge et un style, enfin par ses cotylédons qui ne sont nullement peltés comme Brown l'aflirme des laurinées. Il ne reste donc que la famille des amentacées à laquelle le chailletia puisse être comparé. Cette famille présente en effet une section composée d'arbres qui, comme le chailletia, ont les fleurs hermaphrodites. Notre genre se rapproche des amentacées par sa tige ligneuse, par ses feuilles alternes à nervures pennées, par les deux stipules caduques qui sont à la base des feuilles, et par l'absence du périsperme; il se rapproche en particulier de l’ormeau et du celtis par ses feuilles souvent inégalement prolongées à leur base, par ses fleurs réellement axillaires, par la position des étamines devant les lobes de la fleur et attachées à leur base, par le nombre de ses étamines, de ses styles, des parties de son fruit, enfin par le point d’adhérence des graines dans leur loge. La comparaison du chailletia avec le celtis paroît très- contraire aux idées que présente le port des celtis d'Europe, qui ont tous des pédoncules uniflores; mais elle devient plus naturelle si l’on porte son attention sur les celtis à pédoncules mulüflores, tels que le cells ortentalis, une espèce inédite 2 D'HISTOIRE NATURELLE. 157 du Pérou, désignée dans l'herbier de M. de Jussieu sous le nom de cichilea, le celtis micranthus, le celtis Lima , etc. Foutes ces espèces ont, comme le chailletia, les pédoncules axillaires, divisés presque dès leur base en deux branches qui se bifurquent ensuite irrégulièrement, et portent plusieurs petites fleurs analogues à celles de notre nouveau genre; dans cette section des celtis à pédoncules multiflores se trouve en particulier le celtis integrifolia Lam., qui a les feuilles non dentées comme les autres celtis, mais entières sur les bords comme le chailletia. La nature drupacée du péricarpe de ce genre et le nombre binaire de ses loges semble le placer entre l’ulmus qui a une capsule à deux loges, et le celtis qui a un drupe uniloculaire probablement par un avortement constant. Le chailletia diffère cependant de ces deux genres 10, par l'épaisseur des cotylédons qui sont foliacés dans l'or- meau et le celtis, mais qui sont très-épais dans plusieurs autres genres d’amentacées; 20. par la présence des cinq appendices pétaliformes placés entre les étamines et qu'on auroit pu prendre pour des pétales. Maïs à cet égard, outre les raisons que l’analogie pourroit fournir, je ferai remarquer ici, 10, que l'enveloppe externe de la fleur du chailletia ne peut être considérée comme un ealice simple à cause de la diffé- rence notable qu'offrent ses deux surfaces, dont l’extérieure est calicinale et Fintérieur corolline; 20. que les appendices pétaliformes ne peuvent être pris pour de vrais pétales parce qu'ils sont trop exactement placés sur le même rang que les étamines, et non pas en dehors des étamines. Je crois donc, d’après ces considérations, que le chailletia doit dans l’ordre naturel, aussi bien que dans l’ordre sexuel, être rapproché 155 ANNALES DU MUSÉUM des amentacées hermaphrodites, et en particulier du genre celtis. La position des fleurs du chailletia mérite encore de nous arrèter un instant : ces fleurs paroiïssent naître du sommet du pétiole, mais parmi les échantillons de cette plante que je possède il s’en trouve un qui a servi de type à la figure ci- jointe, dont les pédoncules sont les uns axillaires, les autres portés sur le pétiole, de sorte que dans ce cas il est évident que tout le phénomène se réduit à ce que dans l'état ordinaire des choses le pédoncule du chailletia se soude naturellement par sa base avec le pétiole des feuilles. Lorsque cette sou- dure n’a pas lieu, le pétiole est très-court; quand elle s'opère, ce qui est le plus fréquent, le pétiole paroit plus long et les fleurs semblent naître sur deux pédoncules entièrement séparés. Cette manière de concevoir la position des feuilles sur les fleurs doit s'appliquer à un grand nombre d’autres cas de même genre, tels, par exemple, que les ruscus, etc., et n’étonnera que ceux qui n'ont point habitué leur esprit à ces greffes naturelles si fréquentes dans le règne végétal, et dont l'examen explique tant d’apparentes anomalies. Ïl ne me reste, pour terminer ce Mémoire, qu'à exposer la monographie du genre dans le langage habituel des bo- tanistes. 45 1 CHAILLETIA. Car. — Perigonium persistens, 1-phyllum, 5-partitum, lobis oblongis extus to- mentosis, intus glabris coloratis. Squamæ petaliformes 5, perigonii laciniis alternæ, earumdem basi insertæ, oblongæ, bifidæ. Stamina 5 cum squamis al- terna, perigonio inserta. Ovarium 1, liberum. Styli 2, apice subcapitati. Drupa exsucca, bilocularis, aut abortu 1-locularis. Semina solitaria in quoque loculo, >. prnnnramrrenst MERE 2 CHAILLE TIL sessibflora . Z - à CHAILLE T'LA pedunculate Fi FA F- d e N ’ F D HISTOIRE NATURELLE. 199 inversa, ovalo-oblonga, exalbuminosa; radicula supera, recta ; cotyledones crassæ. ‘ Os. Arbusculæ Cayenenses ; foliisalternis integris, basi bistipulatis, in petiolo sæpius floriferis, pennatim nervosis. 1. C. pedunculata. C. floribus pedunculatis, sabcorymbosis; foliis ovato-acumi- patis, basi inæqualiter subcordatis. Hab. in Cayenà. D. Peduneuli axillares, nunc liberi, sæpius cum petiolo basi coaliti, bifurcati, demunm trifidi aut trichotomi, ut rami tenuissimo tomento pubescentes. Flores erecti. Fructus ob inflexionem pedicellorum penduli. 2. C. sessiliflora. C. floribus in petiolis sessilibus, glomeratis; foliis elliptico- acuminatis, basi attenuatis. Hab, in Cayena. B.(v.s.) Flores 8-10 glomerati in parte superiore petioli, minimi, villosi, prioribus structura (ex immaturo ) simillimi. EXPLICATION DE LA PLANCHE. Fic. 1, Chailletia pedunculata. Un raméau réduit à la moitié de la grandeur na- turelle. a. La fleur grossie à la loupe et vue par devant, rs b. Lie périgone vu en dehors. ce. Une des cinq écailles pétaliformes. d. Un des lobes du périgone avec l’écaille et l’étamine qui adhèrent à sa base. e. Une étamine. J: Le pistil. g- Le fruit entier de grandeur naturelle. 2. Le même ayant une seule loge et portant le périgone persistant. i. Le même ouvert longitudinalement. £&. La graine. l. La même ayant les cotylédons séparés. Fic. 2. Un fragment du Chaïilletia sessiliflora. 160 ANNALES DU MUSÉUM NOTE Sur deux espèces d'EMISSOLE. PAR M. GEOFFROY-SAINT-HILAIRE. h ONDELET a décrit et figuré deux espèces d'Emissole qu'il a données sous les noms, l’une de galeus lævis, et l'autre de galeus asterias. Cette dernière n’ayant point reparue, on l’oublia, ou du moins on la confondit avec le galeus læ- vis , sous le nom unique d’émissole ou de squalus mustelus. fl paroit que M. Risso vient de la retrouver : du moins sa correspondance nous apprend qu'il est parvenu à distinguer dans la mer de Nice deux espèces à qui le nom d’émissole convient également. Iena déjà publié une dans son ouvrage. (L’émissole, y est- il dit, a le corps gris-de-perle sur sa partie supérieure : il est orné de deux rangées de points blancs dont une se prolonge en feston sur les côtés : les nageoires pectorales sont bordées par un liseret blanc : la première dorsale est noirâtre à son sommet, et la seconde est du double plus grande que la na- geoire de l'anus : enfin les nageoires ventrales ont leurs ap- pendices oblongs. » Aucun de ces traits n’est applicable au galeus lævis, dont alors M. Russo ne soupçonnoit pas l'existence, etilsne s’appli- 3 . D HISTOIRE NATURELLE. 101 quent pas tous au galeus asteries, Rondelet parlant d’une seule série d'étoiles et M. Rüisso de deux rangées de points blancs. Si ces différences sont constantes et qu’elles ne tien- nent pas à une différente manière de s'exprimer, il faudra en conclure que ce n’est pas seulement deux, mais trois espèces de squale qui se ressemblent par l'extrême petitesse des dents. Mais sans donner plus d'importance à cette conjecture, nous opposerons à la description que nous avons rapportée les caractères du galeus lævis, tels que nous les avons cons- tatés sur les individus du Muséum, et extraits de la corres- pondance de M. Risso. . Le galeus lævis, ou l'émiss, > des auteurs, a la peau lisse, translucide et comme vernissée : le dos est d’un gris-olivâtre et le ventre blanc : les flancs sont éclaircis par des lignes ou traits ondulés d’un jaune ocracé à reflets violets : toutes les nageoires présentent la même teinte : celle de l'anus n'est guère plus grande que la seconde dorsale. Ces deux squales different en outre par le nombre des ran- gées des petites dents qui couvrent les os maxillaires et par les plus grandes dimensions où il parviennent. L’émissole de licthyologie de Nice a les dents un peu plus aiguës que celles de l’émissole vulgaire : le premier par- venu à ses plus grandes dimensions ne pèse, au plus, que 10 kilogrammes, l’autre en pèse 30 et davantage; celui-ci n’arrive guère sur la côte qu'en mai, et pour y frayer, et l'autre s’y tient presque toute l’année : leur chair a un goût différent et l’on s'aperçoit aussi qu'ils diffèrent à quelques égards, soit dans l’habitus, soit dans les mœurs, si l'on est dans le cas de les comparer avec soin. 17. DE 162 ANNALES DU MUSEUM Leur ressemblance la plus grande est dans les dents qui sont si petites qu'il est venu à l'esprit de plusieurs personnes de ne voir en elles qu'une sorte de cristallisation dont les màchoires étoient recouvertes. Rondelet dit que son ge/eus lævis est sans dents, mais qu’en revanche il a la bouche âpre: M. Risso ne voyant aussi dans ces aspérités qu’une sorte de sculpture en traits rhomboïdaux, penchoit à placer sa se- conde espèce d’émissole parmi les aodons. C'est au temps à nous fixer sur la justesse de ce rapprochement, et pour cela il faudroit que nous vinssions à savoir que les deux squales édentés de Forskal et celui de Brunnich ont également (chose d’ailleurs assez vraisemblable } leurs os maxillaires recouverts par cette sorte de mosaïque régulière qui forme le pavage des mâchoires des raies. Quand dans une famille où la plupart des espèces sont de- puis long-temps devenues célèbres par l’épouvante qu'elles sèment sur leur passage, on vient à rencontrer un animal, qui au lieu de la bouche du requin si terrible par le nombre et les potes acérées de ses dents, ne présente plus que des machoires sans défense et dont la surface est comme sim- plement chagrinée, on est dans le cas de se demander (toutes choses dans le reste de l’organisation paroissant conservées de même), si un tel animal participe encore à cet instinct de voracité et de gloutonnerie qui fait le principal caractère de ses congénères. Cette question est restée sans réponse à l'égard des émis- soles; mais j’ai eu occasion de n’assurer que cela est en effet. L’inspection des alimens trouvés dans l'estomac de ce poisson m'a appris qu'il se nourrit de crabes. Il vit donc de proie, D'HISTOIRE NATURELLE. 163 mais subordonnant ses entreprises à ses moyens, il ne s'at- tache qu'à des individus d’un volume proportionnel à l'éten- due de sa bouche : celle-ci est simplement pour lui un moyen de préhension. En effet, comme le pavage de ses màchoires forme une sorte de rape; entre les denticules de laquelle il peut engager sa proie, il fait servir cet arrangement à la con- server au passage jusqu'à ce quil ait préparé son mouvement de déglutition, et qu'il se soit mis en état de l'avaler en son entier. Nous avons eu l'intention dans cette note, en nous aidant des renseignemens de M. Risso, de montrer que c’étoit avec raison que Rondelet avoit regardé comme distinctes les deux espèces de squale, auxquelles il a donné les noms d’émissole et de lentillat : galeus lœvis et galeus asterias. 21 164 ANNALES DU MUSÉUM ms SUR LES ESPÈCES DU GENRE LORIS, Mammifères de l'ordre des QuUADRUMANES. PAR M. GEOFFROY-SAINT-HILAIRE. Je m'étois borné dans ma monographie des Lemurs , publiée en 1796 et insérée dans le Magasin Encyclopédique, tome 7, à décrire les deux espèces de loris que nous possédions au Muséum, le /oris paresseux et le Loris grèle. Depuis, en 1804, M. le professeur Fischer, directeur du Muséum académique de Moscou, tant dans une lettre imprimée à Mayence qu’il me fit l'honneur de m'adresser que dans son bel ouvrage de l’Anatomie des Makis, en fit connoître une troisième espèce, le Zoris ceylonien. Il en est une quatrième, le porto, qui a mème sur les autres l'avantage d’une publication plus ancienne : je l’avois omis dans mon travail des lemurs, dans Ja crainte d'en mal apprécier les rapports. En effet, tout ce qu'il m’étoit possible * d’en savoir à cette époque, c'est que le potto paroissoit ressembler aux makis par sa longue queue, et aux loris par son port, sa physionomie et ses habitudes : le voyant sur la limite de ces deux sous-genres, je ne pouvois que désirer qu'il fut mieux connu. En outre, ce loris n’avoit encore été vu ( ce qui même remon- toit à plus d’un siècle) que par un marchand héllandois, Guillaume Bosman ; lequel au surplus l’avoit assez bien fixé au moyen d’une figure. (Voyez son Voyage de Guinée, édit. franç., page 252, fig. 4.) Ma réserve au sujet du potto fut cause qu’on le raya définitivement de la liste des êtres : je l'ai retrouvé dans les collections de Lisbonne et je me hâte de le rétablir dans son rang. Ce quadrumane est un vrai loris, malgré sa longue queue. Sa tête est ronde et D'HISTOIRE NATURELLE. 165 son museau très-court : ses yeux sont tout aussi grands et tout aussi rapprochés que ceux du galago, à qui il ressemble en outre par l’ampleur et le nu des oreilles : comme dans tous les animaux du sous-ordre des makis, son second doigt des pieds est court et muni d’un ongle allongé, étroit et subulé : ses membres et sa queue sont pour la longueur et les proportions ce qu’ils sont dans les makis. Le potto est enfin couvert d’une laine épaisse , cendrée en dedans et d’un gris roux, uniforme à l'extérieur. Voici quelques-unes de ses dimensions. Le corps 0,47; la queue 0,34; la tête longue de 0,09 et large de 0,07; le bras 0,17 ; l’extrémité inférieure 0,24; les oreilles hautes de 0,05 et larges de 0,03. J’observerai à l'égard de cette dernière dimension que Bosman a figuré son potto avec des oreilles très-courtes : si ce n’est pas là une erreur de son dessina- teur, j'aurois donné une nouvelle espèce pour l'animal décrit par ce voyageur. Enfin il est un autre loris qui a déjà exercé la sagacité des naturalistes, c’est le tardigrade de Séba, figuré pl. 47. Klein et Brisson l’ont admis comme espèce distincte du loris grèle, figuré dans le même ouvrage, pl. 35; opinion dans la- quelle Buffon (13, p.210) a vu un double emploi qu’il a attribué, on ne sait pourquoi , à l'éditeur du Cabinet de Séba. Le sentiment de Buffon a prévalu, tandis que la seule incertitude qu’on puisse à cet égard raisonnablement conce- voir aujourd'hui, c’est si le loris de Séba, pl. 47, se rapporte au loris paresseux, ou s’il donne lieu à la détermination d’une cinquième espèce. La taille et les proportions de ce quadrumane le feroient prendre pour Panimat décrit par Vosmaër ; mais il a, dit Séba, sa lèvre supérieure fendue : il est abso- lument sans queue : il ne paroît pas qu’il ait de ligne dorsale et ses couleurs sont différentes, brunes noirâtres en dessus, et tout-à-fait noires sur Le dos. Séba l’avoit recu de Ceylan : le loris paresseux ne s’est encore trouvé qu’au Bengale, suivant Vosmaër , et à Java; nous n’en doutons pas pour ce dernier lieu, M. Leschenauls nous en ayant rapporté un fort hel individu de ce pays. 166 ANNALES DU MUSEUM EXAMEN CHIMIQUE DES CRAYONS LITHOGRAPHIQUES. PAR M. LAUGIER. Le n'ai eu à ma disposition qu’un gramme de cette matière; cette petite quantité ne m'a pas permis de varier assez mes expériences, pour que leurs résultats soient d’une grande exactitude, et si elle m'a suffi pour reconnoître toutes les substances qui la composent, je ne suis pas aussi certain d’être parvenu à en déterminer les proportions d’une manière précise. La matière qui constitue les crayons dont il s’agit, a une couleur noire, elle est grasse au toucher, elle a une odeur de cire jaune ,'se fond à une douce chaleur, se ramollit sous le pilon et se réduit en une pâte qui adhère au mortier où on la triture, L'alcool que l’on fait bouillir sur cette matière la divise en deux portions; l’une qui est la plus abondante est dissoute par ce menstrue, l’autre résiste à son action dissolvante. Sur 160 parties chaulffées. avec l’alcool , 64 ont été dissoutes, puisque le résidu ne pesoit plus que 36. Examen de la portion insoluble dans l’alcool. Ce résidu insoluble dans Palcool, avoit une couleur noire plus intense que celle de la matière des crayons, elle avoit une fusibilité plus grande, et très-sem- blable à celle du suif, elle s’étendoit sur le papier qu’elle imbiboit, comme auroit pu le faire cette matière graisseuse. J'ai employé l’essence de térébenthine pour séparer cette graisse du charbon qui y étoit mêlé. A l’aide de la chaleur, l'essence a dissous la matière grasse , j'ai filtré le mélange encore chaud , et le charbon est resté sur le filtre, L’essence ainsi chargée de la matière grasse a été évaporée à une douce cha- leur jusqu’à siccité , le résidu de l’évaporation étoit un mélange de graisse et de Jusq ? 5 Nota. Celte malière m’a été remise par M. Marcel de Serre, qui m'a prié de l’examiner. » Pp e à LA 4 D'HISTOIRE NATURELLE. 167 la résine fournie par l’essence; j'ai facilement séparé ces deux substances par l'alcool froid qui a dissous la résine ; le suif sous la forme de flocons se séparoit à mesure que la dissolution de la résine s’opéroit. Ces flocons graisseux recueillis sur un filtre, avoient les propriétés du suif et représentoient 25 parties; le charbon que j’en avois précédemment isolé ne pesoit que 6 parties. Ainsi la portion des crayons insoluble dans Palcool dont le poids étoit d’abord de 36 parties a été réduite à 31, et elle étoit formée de suif et de charbon. nl LI : Examen de la portion soluble dans l’alcool. La portion des crayons qui avoit été dissoute par l’alcool dans la première ex- périence, étoit composée d’autres substances que je vais indiquer. D'abord l’alcool en se refroidissant a déposé une matière blanche jaunâtre que j'ai séparée du liquide par le filtre, cette matière séchée à l'air se détachoit par lames du papier. Elle avoit l’odeur de la cire jaune, elle se ramollissoit sous les doigts comme cette substance, y adhéroïit et avoit sa tenacité. Son poids repré- sentoit 15 parties. L'alcool d’où elle s’étoit déposée avoit une couleur jaune verdätre, il devenoit louche par l’addition de l’eau, et sa saveur étoit sensiblement amère. Je l’ai éva- poré à siccité, et j'ai obtenu pour résidu une matière jaunätre que j'ai traitée par de nouvel alcool. Celui-ci à dissous le résidu assez complétement, mais par le refroidissement il s’est déposé une matière jaune qui m'a paru un mélange de cire et d’une petite quantité de graisse. Elle avoit l’odeur de la cire, mais moins de consistance que la première portion de cire obtenue, elle se ramollissoit plus promptement soûs les doigts, et se fondoit plus facilement ; ce mélange étoit du poids de 21 parties. I est vraisemblable que ce mélange de cire et de suif étoit resté dissous dans l'alcool, en raison de l’affinité que la résine soluble à froid dans ce menstrue avoit exercée sur lui. En effet, l’évaporation de l'alcool qui avoit dissous le précédent mélange a donné pour résidu une substance d'un jaune brun qui a présenté les caractères d’une résine. é Ces expériences prouvent assez évidemment que la matière des crayons litho- graphiques est formée de quatre substances différentes, de cire, de suif ou graisse, de résine et de charbon, qui toutes sont de nature à ne point se mêler à l’eau, propriété importante et dont on tire un parti avantageux dans le procédé de gravure pour lequel on emploie la matière dont il s’agit. 168 ANNALES DU MUSÉUM Voici, autant que j'ai pu les déterminer par les raisons indiquées plus haut, les proportions dans lesquelles jy ai trouvé ces substances. 100 parties sont formées de Mélange delcire etidefgrnisses... eee obtenue bc 21 D ULÉ OU IETIISSE estloleliss elesele sie cine oies slae sectes miel ciete es. 120 RÉSIne SR nteremiemerteretieneccsscisemtlelbiise 5 no EI GHarDON ac ee a See led side oies one le ble Diet tetes vise e! HO 93 La perte de 7 parties que ce résultat indique est indispensable dans ces sortes d'analyses, et vraisemblablement j'en aurois éprouvé une bien plus grande encore, si je n’avois eu la précaution de peser exactement tous les filires dont j'ai fait nsage. Pia SOREX Remifer. V2 SOREX francus. LP SOREX Tèkagonurus. Zom . 17. TÉ V4 7.1 MY CALE lyrenat 4. Le SOREX Capensts : T Musee (24/4 Mygale pyrenaca , Z'4 JO pièd de c var: 76 dort pièd de derrière LA { D'HISTOIRE NATURELLE. 169 MÉMOIRE Sur les espèces des Genres MUSARAIGNE et Myc41L21E. PAR M GEOFFROY-SAINT-HILAIRE. O, a connu de tout temps en Europe un petit quadrupède que la petitesse et la maigreur de ses membres ont fait com- parer à une araignée : cette ressemblance a paru former un de ses traits tellement distinctifs qu’elle a décidé de son nom : c'est en effet sous la dénomination de 77us araneus qu'en parle Pline, et de ce nom on a fait en français zzusaragne, muserain, et finalement zrusaraigne. Sa première partie, zzus , à laquelle dans quelques contrées de la France on a aussi donné une terminaison française, muset et musette, annonce qu'on a d’abord considéré la musaraigne comme faisant partie du groupe nombreux de nos petits rongeurs : aussi, jusqu'à ce qu’on fut revenu sur cette idée, ne vit-on varier que son nom spécifique; araneus, qui lui fut donné par le plus grand nombre des naturalistes, cæœcus par quelques Italiens et z20schias par Gessner, à cause de l'odeur de muse qu’elle exhale. On ne tarda pas à savoir que la musaraigne est un étre 17 re 22 170 ANNALES DU MUSÉUM isolé : on crut devoir fonder pour elle le nouveau genre sorex et on en reconnut surtout la nécessité, dès que Daubenton eut mieux apprécié les caractères de ce genre dans un Mé- moire qu'il inséra parmi ceux de l'Académie des sciences, pour l’année 1756, et qu'il en eut fait connoître deux espèces distinctes. Les musaraignes n’ont en effet aucun rapport avec les ron- geurs : leurs mächoires sont entièrement garnies de dents : elles sont privées de cæcum et mème de gros intestins : leurs os pubis ne sont pas réunis et leur tête qui est excessivement allongée et terminée par une sorte de boutoir, leur donne une toute autre physionomie. I est diflicile de compter leurs dents en en distinguant avec précision les espèces, puisque tout ce qu'un examen même attentif apprend à cet égard, c’est que les dents antérieures, où si l’on veut les incisives sont les plus longues, que les latérales sont les plus courtes, et que toutes celles de l'arrière bouche sont hérissées de pointes. Il n’avoit été question jusqu'en 1756 que d’une seule mu- saraigne, la plus commune, dont le pelage est gris- roux : Daubenton découvrit alors une des espèces qui vivent auprès des eaux et à laquelle Erxleben et Blumenbach donnèrent son nom, sorex Daubentonu. D'autres espèces furent aussi trouvées en France, mais beaucoup plus tard, en 1778. Le célèbre professeur Hermann (de Strasbourg } les tint d’un de ses élèves qu’un goût pas- sionné pour l'histoire naturelle entrainoiït sans cesse alors à la recherche des petits animaux : cet élève, à qui depuis de plus grands services rendus aux sciences ont procuré une D'HISTOIRE NATURELLE. 171 grande et honorable célébrité, est le docteur Gall. Le disciple fit connoitre à son professeur trois nouvelles musaraignes sans se permettre de faire davantage : Hermann resta chargé de les publier, et malheureusement ne le fit que long-temps après, toujours d’une manière incomplète et en s'y reprenant à plusieurs fois : ainsi il commenca par en confier les figures à Schreber qui les donna sans aucune explication. Boddaert n’a pas puisé dans une autre source, quand il introduisit ces trois musaraignes dans son Æ/enchus antmaliun : ce n’est que dans l’ouvrage posthume d'Hermann, daté de 1804, qu'on trouve enfin quelques détails sur ces singuliers animaux. Aïnsi averti de l'existence de plusieurs musaraignes en France, j'ai désiré en enrichir la collection du Muséum d’his- toire naturelle : mes correspondans ont répondu à mon appel, et men ont en outre procuré plusieurs autres qui avoient jusqu'à présent échappé aux recherches des naturalistes. Je me propose de les publier dans ce Mémoire, et je vais profiter de cette occasion pour revoir tout ce qui a été écrit sur toutes les musaraignes : j’assignerai à chaque espèce des caractères plus précis, puisqu'ils seront comparatifs. $S L Des Musaroignes proprement dites. . Je remarquerai d’abord qu'il n'y a de vraies musaraignes que dans l’ancien Continent : celles que Gmelin place en Amérique, ou font partie de genres différens, ou sont dans le cas d’être entièrement rayées de la liste des êtres. Aüïnsi le sorex aquaticus forme présentement le nouveau genre scalope. 179% ANNALES DU MUSÉUM Le sorex cristatus est une taupe. Le sorex Brasiliensis me paroït devoir être renvoyé au genre didelphe (x). Le sorex Surinamensis pourra bien être totalement sup- primé. Et parmi les espèces de l’ancien Continent, il en est encore qu'il faut retirer du genre sorex, comme le sorex auratus devenue la chrysoclore de M. le comte de Lacépède, et le sorex moschatus dont nous traiterons plus bas, sous le nom de mrygale. Moyennant ce départ d'espèces anomales, les musaraignes forment une famille très-naturelle : nous verrons plus bas qu’elle est encore assez nombreuse. Les musaraignes se reconnoissent à la forme allongée et conique de leur tête, et principalement à la longueur ex- trême de leurs narines : leurs oreilles sont plus larges que hautes : la brièveté de leurs jambes vient de ce qu’elles po- sent sur toute la plante du pied, et celle du cou de ce que leurs clavicules contribuent par leur longueur et leur dis- position à rapprocher de la tête les extrémités antérieures. Pour se faire une idée de la longueur de leur tête, il faut la considérer dépouillée de ses parties molles. Elle ne laisse pas cependant que d'offrir une assez grande capacité pour (1) Cet animal, qui a le museau pointu et les dents très-fines, porte, dit Marc- Grave, ses testicules dans une bourse qui lui pend entre les jambes de derrière. Or, il n’y a que les didelphes qui soient dans ce cas, tandis que les musaraignes n’ont aucune apparence de scrotum. De plus, la taille attribuée à l'individu de Marc - Grave (5 pouces de long et 2 pouces de queue ) convient, ainsi que ses trois bandes dorsales , assez bien au touan, dédelphis tricolor. D'HISTOIRE NATURELLE. 173 loger les masses cérébrales : elle a surtout de la largeur entre les fosses temporales, résultat auquel en la voyant avec ses tégumens on ne s'attendroit pas, et qui est dû à ce qu'elle est privée d’arcade zigomatique. Les mächoires des musaraignes sont entièrement garnies de dents : voici dans quel ordre. Mâch. sup. 2 incisives : 6 ou 8 canines : 8 molaires. ie 28 ou 30. Mâch. inf. 2 4 6 Les incisives sont les plus grandes et les plus fortes : les supérieures sont à double crochet, au moyen d’un éperon situé à leur talon, tandis que les inférieures sortent droites de l’alvéole et ne se courbent que vers l'extrémité. Quant aux canines, elles sont d’une petitesse extrême, particulière- ment les supérieures, et d’une anomalie à faire douter que ce nom de canines leur convienne. Les dernières dents sont de véritables molaires d'insectivores : ce qu’on en aperçoit est une couronne large toute hérissée de pointes : elles sont plus larges et ont leur tranche oblique à la mâchoire supé- rieure. Nous ne pouvons guère appeler l'attention sur les pieds des musaraignes que pour rappeler qu'ils sont entièrement fendus, quand ceux des desmans sont palmés : les doigts sont 5—5, et les ongles courts, arqués, pointus et relevés. I nous restera pour distinguer les espèces d’un genre aussi naturel des caractères d’un ordre peu relevé, mais cependant des caractères certains, comme nous allons nous en con- vaincre par ce qui suit. 174 ANNALES DU MUSÉUM I. LA MUSARAIGNE VULGAIRE. SOrex araneus. Depuis que l'on est informé que ce petit genre d'animaux est composé de plusieurs espèces, on est, pour ainsi dire, dans le cas de se demander quelle est la musaraigne vulgaire, et de considérer comme non encore déterminée, le sorex araneus des auteurs. Il seroit naturel d'en chercher les ca- ractères dans Hermann qui les a donnés comparativement aux espèces qu'il a découvertes; mais 1l est arrivé qu’en con- sacrant un article, dans ses Observationes Zoologicæ, à la musaraigne commune, il a conçu à son sujet des doutes au point de déclarer qu'il ne sait au juste de quel animal il parle. Le Trésor de Fabre, qui donne un pelage rouge à cette espèce, le jeta dans une perplexité dont il ne sut pas sortir : il eut fallu écarter la description de Fabre qui s'applique à une autre musaraigne, comme nous le verrons par la suite, pour s’en tenir à ce qui avoit été déposé dans l'Ærstorre naturelle générale, tome 8, pag. 60, et plus anciennement dans le Mémoire de Daubenton sur les musaraignes, Voyez Académie des Sciences, année 1756, page 203. C’est là qu'on trouve une description exacte et une bonne figure de notre musaraigne commune, Un caractère pour la distinguer de ses congénères qui ha- bitent en Europe, est l'ampleur et le nu de ses oreilles : elles décrivent un assez grand circuit autour du trou auriculaire, et si elles ne forment pas en dehors une saillie proportion- nelle à leur largeur, elles sont du moins remarquables par deux replis ou lobes, placés l’un au-dessus de l’autre. Le lobe inférieur correspond à l'entrée du méat auditif et a visible- J SI D'HISTOIRE NATURELLE. I ment pour usage de fermer entièrement cette ouverture quand il convient à l'animal de se soustraire aux inconvé- niens d’un son incommode : ce lobe ressemble à une porte qui seroit placée au-devant de sa baie, à juger de la manière dont il elôt le fond de la conque. Le poil est gris-de-souris, plus pâle en dessous, tirant sur le fauve dans des individus un peu plus petits et cependant parfaitement adultes, et sur le brun dans d’autres un peu plus forts. Je suppose que le premier pelage est le caractère des màles et le second celui des femelles. Le poil est cendré dans sa longueur à l'exception de la pointe, où il est roux. La petite pointe du poil est blanche sous le ventre. La queue est couleur de chair dans les premiers et brune dans les se- conds. Il se pourroïit que ces différences appartinssent à des races ou mème à des espèces distinctes : c'est ce que je ne puis présentement décider. J'ai vu une troisième variété avec une queue d’un quart plus longue que celle des deux animaux précédens. Enfin on trouve des individus bruns, dépouillés sur les flancs et offrant sur les côtés au lieu de poils uné tache blanche de forme elliptique : ces circonstances distingueroient-elles les mères allaitant leurs petits ? La queue est couverte de poils courts, elle est assez ren- flée, demi-arrondie ou plutôt légèrement carrée : les quatre faces en sont bombées, mais comme on eprerçoit en même temps les lignes en angle qui les séparent, on ne peut ad- mettre que la queue soit entièrement ronde : elle l’est sans doute davantage dans des individus vivans ou dans des sujets fraichement morts : je me suis aperçu de quelque différence 176 ANNALES DU MUSÉUM sous ce rapport. J’insiste sur ces observations, quelque mi- nutieuses qu'elles paroissent, parce que la détermination ri- goureuse d’une espèce que nous verrons plus bas repose sur beaucoup d’exactitude à cet égard. Les lèvres et les pieds sont de couleur de chair et simple- ment parsemés de quelques poils courts et blanchâtres. Enfin les dents incisives sont entièrement blanches : on sait que c’est aussi la couleur de toutes les autres. Dimensions des trois Variétés. De A. présumé le mâie. corps 70 millimètres, queue 35. De B. présumé la femelle. corps 74 queue 38. De C. corps 65 queue 38, Il existe au Muséum une quatrième variété de la musa- raigne vulgaire, entièrement bianche. 2. LA MUSARAIGNE DE DAUBENTON. Sorex Daubentonu. Sa longueur totale est de 76 millimètres; celle de la queue de 44. Cette musaraigne est plus grande que la précédente : sa queue est aussi en proportion plus longue : la queue ainsi que les jambes sont plus garnies de poils : le museau est aussi un peu plus gros. On la trouve à portée des petits ruisseaux, d’où Dauben- ton, qui l'a le premier décrite, avoit pris occasion de l'ap- peler musaraigne d’eau. Nous verrons plus bas qu'il en est d’autres qui vivent aussi dans des lieux fangeux et aquatiques, et ce motif nous a engagé à préférer le nom que lui ont donné Erxleben et Blumenbach, celui de sorex Daubentonii : D'HISTOIRE NATURELLE. 1797 Hermann le changea en celui de sorex carinatus, ayant remarqué que le dessus de la queue forme un peu la carène, et Pallas y avoit précédemment substitué celui de fodiens, qui est aussi le nom sous lequel la musaraigne de Daubenton est inscrite dans le catalogue de Gmelin. La couleur de son pelage noirâtre en dessus et blanc pur en dessous lui est particulière : le blanc des parties inférieures s'étend sur les flancs en s’élevant presque par-dessus les cuisses, On peut aussi facilement la xeconnoitre à une tache, blanche située derrière l'œil et à la couleur ferrugineuse de l'extrémité de ses dents. M. Marchand, magistrat à Chartres et naturaliste très- distingué, à la générosité duquel je dois l'individu de la col- lection du Muséum, l’a trouvé dans des eaux dormantes en pleine Beauce : il Va vu combattre, pendant plus d’une demi- heure, une grenouille qu’elle avoit saisie à la patte. 3. LA MUSARAIGNE CARELET. Sorex lelragonurTus. C’est une des nouvelles espèces décrites par Hermann. Daubenton ayant eu en 1791 connoissance du travail de ce dernier par l'£/enchus antmalium de Boddaert, inséra toutes les, musaraignes connues à cette époque dans un tableau sys- tématique qu'il avoit rédigé pour l'Encyclopédie méthodique, et qu'on trouve imprimé dans ce recueil, en tête du Système anatomique des Animaux, par Vicq-d’Azir. Je rapporte ces circonstances pour indiquer la source où j'ai puisé les déno- minations françaises des musaraignes d'Hermann. J'ai été quelque temps à penser que le £etragonurus ne 17: 23 178 ANNALES DU MUSÉUM se distinguoit que comme offrant une variété du sorex ara- neus : Ÿen ai présentement une autre opinion, et voici sur quoi je me fonde pour suivre à son sujet le sentiment d'Hermann. Le Zetragonurus ou le carelet est un peu plus petit et sa queue est beaucoup plus longue : c’est ce qui suit de ses dimensions que je rapporte ici. Longueur du corps 60 millimètres : celle de la queue 40. Sa tête est plus large et son museau moins fin : ses dents sont brunes à leur extrémité. Il a deux canines de plus à la mâchoire supérieure et toutes ses canines plus petites et d’un égal volume : ses oreilles, sans être entièrement cachées dans les poils, sont plus courtes et moins apparentes que dans la musaraigne commune : son pelage est noirâtre en dessus, et cendré brun en dessous : enfin sa queue est très- décidément carrée, chaque face étant tout-à-fait plane; se terminant subitement en une pointe fine, elle ressemble assez bien à ces carelets dont certains ouvriers font usage. La face inférieure offre un léger sillon. Cette espèce vit à peu près dans les mêmes lieux que la commune; on la trouve dans des grangès, particulièrement dans les campagnes, et quelquefois dans des jardins clos de murs. 4. LA MUSARAIGNE PLARON. So7ex constriclus. Constrictus par Hermann; Plaron par Daubenton. Hermann n'eut jamais de cette espèce qu'une nichée de sept petits à qui les dents n’étoient pas encore venues. Ayant cessé d’être secondé par le docteur Gall, il ne put parvenir D'HISTOIRE NATURELLE. 179 à se procurer un individu adulte, en sorte qu'il lui resta des doutes sur la réalité de cette espèce. Comme nous avons au Muséum d'Histoire naturelle plusieurs individus semblables à ceux de la nichée que décrivit Hermann, je suis en état, non-seulement de confirmer les premiers aperçus du profes- seur de Strasbourg, mais en outre de compléter la description de l’espèce qu'il n’avoit fait qu'esquisser. Mon attention s'est particulièrement portée sur deux in- dividus, tous deux morts dans la mue, l’un pour n'avoir pu se dépouiller et l'autre qui fut pris après avoir revêtu pres- qu’en entier son nouveau poil. Celui-ci me fut donné à Chartres par M. Marchand qui le surprit en gagnant sa retraite au pied d’un mur, et l’autre m’avoit précédemment été en- voyé d’Abbeville par M. Baillon : il paroiït que cette musa- raigne est également répandue en Allemagne. Je l'ai trouvée décrite, figurée et très-bien coloriée par M. Bechstein, dans sa Zoologie, imprimée à Leiïpsick en 1801. Nous ne lui con- servons pas le nom de cwricularius que lui a donné ce sa- vant, d’une part parce qu'elle n’est pas nouvelle, et de l’autre parce que l'habitude que ce nom retrace convient à presque toutes les musaraignes qui se creusent en effet un terrier, quand elles n’en trouvent pas de tout fait. La musaraigne plaron est de la taille de la mus. vulgaire (75 millimètres ) : sa queue ( 40 mil. ) est un peu plus longue. Son museau est plus fort : des poils droits répandus sur les cartilages du nez font paroïtre son boutoir plus gros et plus court: les oreilles sont entièrement cachées dans les poils, parce que tout leur extérieur en est garni. J'ai sous les yeux les crànes de cette espèce et de la pré- ex GES LES 180 ANNALES DU MUSÉUM cédente. La boîte cérébrale est sensiblement plus large et moins bombée dans le constrictus, et le chanfrem plus ar- qué dans l’autre, le £etragonurus : d’ailleurs les dents sont semblables : le constrictus a pareïllement deux canines de plus à la mâchoire supérieure. Toutes ces différences sont autant de traits caractéristiques, ayant été constatées sur des individus pris dans le même âge. La forme de sa queue est ce qui a valu à la musaraigne plaron son nom de constrictus : elle est à lorigine plate, étroite et comme étranglée, tandis que dans le reste, spécia- lement au milieu, elle est épaisse, comme renflée, et ronde, excepté à son extrémité, où on la retrouve aplatie et où les poils se réunissent en pointe comme ceux d’un pinceau. Le poil est assez long et doux au toncher; il est noirâtre dans sa plus grande longueur et roux à sa pointe : le ventre est gris brun et la gorge cendrée. Le poil naissant estun peu plus clair que l’ancien : la pointe par laquelle il est terminé sous le ventre est grise dans le premier poil et rousse dans celui qui est prêt à tomber. Cette musaraigne est aussi remarquable par le fourni et l'égalité du poil, dispositions assez singulières et qui donnent à sa pelleterie une apparence veloutée, et une uniformité de tons fort agréable. Le plaron a ses pieds aussi velus que ceux de lespèce pré- cédente : la disposition de sa queue me persuade qu'il vit dans des lieux élevés : cependant le docteur Gall trouva la nichée des sept petits dans une prairie qu'on venoit de fau- cher à peu de distance d’un ruisseau. (ee) _m D'HISTOIRE NATURELLE. 1 5. LA MUSAPAIGNE LEUCODE. Sorex leucodon. Leucodon par Hermann; Leucode par Daubenton. Je possède cette espèce dans deux âges différens : les ea- ractères qu'Hermann lui assigne me font croire qu'il n’en avoit vu qu’un jeune àge. Ses dimensions, qui sont les sui- vantes : (longueur du corps 76 millimètres — de la queue 38), sont les mêmes que celles de la musaraigne de Daubenton, sauf la queue qui est plus courte. Les doigts du leucode sont un peu plus épais, les ongles plus courts et les yeux plus grands : sa queue n’est pas exac- tement arrondie, mais tient un peu de celle de la musaraigne vulgaire. Ses dents incisives ne sont entièrement blanches que dans le premier âge : leur petite pointe est colorée en brun dans les adultes : il est d’après cela fâcheux que ce soit cette considération qui ait fourni son nom spécifique. Le pelage de cette espèce la distingue beaucoup mieux que tous les traits que nous venons d'offrir. Son dos est brun : son ventre et, ce qui ne se voit dans aucune autre musa- raigne, ses flancs sont blancs. Il n’y a d’ailleurs, comme dans toutes, que la pointe des poils qui soient de cette couleur : le reste est cendré, La queue est en dessus de la coûleur du dos et de celle du ventre en dessous. G. MUSARAIGNE RAYÉE. Sorex lineatus. Sa longueur totale 76 millimètres : celle de la queue 40. Cette espèce trouvée aux environs de Paris n’a point en- core été décrite : sa forme est plus élancée, et son museau 182 ANNALES DU MUSÉUM plus long et plus fin que dans les espèces précédentes : sa queue est ronde et fortement carénée en dessous : tout son pelage est d’un brun noirâtre, le ventre n’est qu'un peu plus pâle et la gorge est cendrée. Deux autres caractères la feront aisément reconnoiître au milieu du petit groupe des musa- raignes, c’est d’abord une ligne étroite et blanche qui s'étend sur le chanfrein et qui partant du front va se perdre sur les narines, et en second lieu une tachie blanche aux oreilles. Les poils qui forment cette tache naissent de l'intérieur de la conque auriculaire : ce sont eux qui bordent les deux petits lobes qui y existent et que nous avons décrits en traitant de la première espèce. De semblables poils se voient, mais plus courts et plus rares, dans toutes les autres musaraignes. Les incisives sont brunes vers leur extrémité. Je suppose d’après la forme de sa queue que cette espèce va à l’eau et ne s'éloigne pas des lieux humides. 7. MUSARAIGNE PORTE- RAME. Sorex rerruifer. Sa longueur, 108 millimètres : celle de la queue 70. Nous ne connoissions pas en France jusqu'ici de musaraigne de cette dimension : je la regarde comme une espèce dis- tincte. J’en ai vu deux individus parfaitement semblables, un à Chartres, chez M. Marchand qui l’avoit pris dans un ruisseau d’eau vive formé aux dépens de la rivière d'Eure, et un autre que M. Baillon m’envoya d’'Abbeville, sous le nom de musaraigne d’eau. J’en conserve en outre dans la liqueur un individu plus petit, dont une eau-de-vie trop forte aura sans doute altéré les couleurs. Cette musaraigne diffère de la précédente par les propor- D'HISTOIRE NATURELLE. 183 tons de ses parties, et particulièrement par celles de son museau fort gros et court : elle est généralement plus trapue : mais elle lui ressemble d’ailleurs par les couleurs de sa robe: - son pelage est pourtant d’un brun-noiràtre plus foncé : le ventre est brun cendré et la gorge cendrée claire, La même tache se voit à l'oreille, mais non la rayure du chanfrein. Les extrémités des dents sont d’un brun ferrugineux. Ce qui, entre autres caractères, distingue cette nouvelle espèce, tant de la musaraigne rayée que de toutes les autres, est la forme singulière de sa queue : elle est carrée dans sa première moitié, ayant chaque face parfaitement plane, hors celle du dessous qui est sillonnée : de la fin de ce sillon naît dans l’autre moitié une carène qui se prolonge d'autant plus en dessous que la queue s’amincit davantage : celle-ci finit par être comprimée et tout-à-fait plate, en sorte qu’elle rap- pelle assez bien dans cet état la forme de certains avirons de chaloupe. Il paroïit que toutes les musaraignes qui vont à l’eau par- ticipent plus ou moins de cette organisation, et que c’est cette conformation plutôt qu'une certaine disposition des poils des doigts, comme on l’'avoit cru jusqu'ici, qui détermine les habitudes de ces petits animaux et la préférence qu'ils donnent aux lieux marécageux. S. MUSARAIGNE DE L'INDE. $07eX 12ndICUS. Longueur du corps 140 millimètres — de la queue 42. Buffon l'a décrite tome 7 de ses Supplémens, page 287, et figurée planche 71. J'ai cette musaraigne sous les yeux : sa grande dimension 154 ANNALES DU MUSÉUM n'empêche pas qu'elle ne ressemble parfaitement à nos mu- saraignes quant aux caractères essentiels, comme les dents, les doigts et la longueur du museau : son poil est partout ex- trêémement court et gris-brun, teint en dessus de roussâtre, parce que la pointe de chaque poil est de cette couleur : toutes les dents sont blanches. Sa queue ronde annonce un animal terrestre, et Buflon nous dit en effet qu’elle habite dans les champs, d’où elle se épand quelquefois dans les maisons : elle y trahit bientôt sa présence par l'odeur de muse qu'elle exhale. L'individu que nous possédons fut rapporté de Pondichéri par Sonnerat. Le sorex nuirinus me paroit devoir être rapporté à cette espèce. 9. LA MUSARAIGNE pu cap. Sorex Capensis. Longueur du corps 100 millimètres — de la queue 48. On ne pourroit confondre cette musaraigne qu'avec la pré- cédente ; elle. s’en rapproche par la taille, la couleur des dents, la forme arrondie et épaisse de la queue, la grandeur et le nu des oreilles et l'odeur de musc qu'elle exhale: mais elle paroït cependant en différer essentiellement. Au- cune musaraigne n’a le museau plus long et plus eflilé, et sa queue, qui n’est que moitié plus courte que le corps, est proporüonnellement beaucoup plus longue que dans la mu- saraigne de l'Inde : elle est aussi d’une toute autre couleur, rousse, qui tranche avec celle du pelage : sa surface est cou- verte de poils ras, et de quelques soies répandues çà et là, Tout le pelage est cendré; il est sur le dos lavé d’une lé- D'HISTOIRE NATURELLE. 185 gère teinte de fauve. Les côtés de la bouche sont roussitres. Cette espèce n’est pas entièrement nouvelle : c’est elle que Petiver a désignée par la phrase suivante : Sorex araneus mmaximus capensts ; il en a donné une fort mauvaise figure, planche 23, fig. 9, laquelle a été reproduite par Valentin, dans le Musée des Musées, vol. 2, fol. 27, fig. >, de l’éd. allemande. Burmann n’a pas oublié d’en faire mention dans son livre consacré aux animaux du Cap. Nous tenons cette musaraigne de MM. Péron et Lesueur, de qui nous-avons appris qu'elle habite dans les caves : on se donne au Cap beaucoup de soins pour la détruire, parce qu'elle y est extrêmement incommode tant pour le dégät qu'elle y fait que pour l'odeur qu’elle exhale, 10. LA MUSARAIGNE À QUEUE DE RAT. Sorex INYOSUTUS. Longueur de son corps 102 millimètres —de la queue 62. J'ai long-temps balancé si je ne rapporteroïis pas cette espèce comme variété albine à la musaraigne du Cap, dont elle se rapproche par la taille, la grandeur et le nu des oreilles : mais elle m'a paru décidément différente. La queue est plus longue et surtout beaucoup plus épaisse : le museau est au contraire bien plus court et singulièrement renflé sur les côtés, les membres sont forts, les pieds épais, les oreilles fort grandes, les poils de la queue moins rappro- chés et les soies plus nombreuses et plus longues. Elle est entièrement blanche. Je ne fais que reproduire le sorex myosurus qui est dé- 17e 2, 186 ANNALES DU MUSÉUM crit sous ce nom par Pallas, dans les actes de Pétersbourg, pour l’année 1781, tome 2, page 337, pl. 4, fig. r. La même planche donne la figure d’une autre musaraigne ‘que Pallas, qui l’a observée au Cabinet de Leyde, regarde comme le mâle de son r2yosurus. Ilest à remarquer que le port de ce prétendu mâle est différent, sa tête plus trapue, sa queue plus courte et que son pelage est d’un brun noirûtre. J'ai fait accompagner la figure du 7?yosurus de celle de son squelette qui est en tout une copie grossie du squelette de la musaraigne vulgaire, si ce n’est qu'il a deux vertèbres dorsales, et deux côtes de plus; 14. La musaraigne de Dau- benton n’en a qu'une de moins; 13. La patrie du sorex myosurus nous est inconnue. NOT'À. Jen’ai point vu les musaraignes dont :l me reste à parler, aussi me bonnerai-je à n’en présenter qu’une simple liste. Sorèx murinus. Espèce douteuse, décrite trop brièvement, donnée comme de Java et que j'ai plus haut proposé de rapporter au sorex indicus. Sorex minimus, espèce aussi douteuse que la précédente, quoiqu’établie sur l'autorité d’un grand naturaliste. Pallas en citant dans ses Voyages (tome 2, page, 664 ) la rencontre qu'il fit d’une musaraigne brune à queue ronde et étran- glée à sa base, ne prévit sûrement pas que ce simple énoncé deviendroit le fon- dement d’une nouvelle espèce. Sorex cæcutiens. Laxmann a donné ce nom à une musaraigne de Sibérie qui est probablement différente de nos musaraignes de France : mais la description qu’il en donne, très-complète en apparence ( voyez Mémoires de l’Académie de Pétersbourg, année 1785, p.285), ne nous fournit pas les moyens de la distin- guer de la musaraigne de Daubenton. Sorex exilis, musaraïgne des mêmes contrées que la précédente : elle est donnée comme la plus petite espèce du genre sorex, et conséquemment comme le plus petit des mammifères : sa queue ronde et très-épaisse en est en outre le principal trait distinctif. Sorex pusillus. Ce n’est vraisemblablement pas une musaraigne, selon que nous venons d’en restreindre les caractères, mais il nes’en éloigne pas beaucoup: D'HISTOIRE NATURELLE. 187 le nombre de ses incisives le rapproche davantage du desman. Gmelin a trouvé celte espèce dans des déserts au nord de la Perse , et l’a décrite dans son Voyage, tome 3, page 499. Sorex minutus. Autre espèce qu’il faudra sans doute aussi rejeter de notre nouveau genre sorex : la petitesse, sa longueur excessive de ses narines et son défaut absolu de queue en font un être tout-à-fait singulier : Laxmann qui l’a trouvé en Sibérie, et qui l’a le premier décrit, l’avoit donné sous le nom de sorex Pygmœus. 1 $ IL. Du genre DESMAN, mygale. Le desman est dans le mème cas, par rapport aux musa- raignes, que l’ondatra à l'égard des campagnols; il est plus grand et plus obligé à la vie aquatique. ‘Connu dès 1605, il n’est pas de classification de mammi- fères où il nait été employé d’une manière différente. H le fut d’abord sous la dénomination de us aquaticus exoticus qui lui avoit été donnée dans le principe par Clusius (x). Aldrovande réduisit bientôt cette phrase à un seul nom de genre et d'espèce, zzus aquatilis (2). Klein rangea ensuite le desman parmi les loirs, gls moscluferus (3). Hill (4) et Brisson (5) s’en tinrent au nom sous lequel il a été ‘quelque temps confondu avec l’ondatra, à celui de rat musqué. Enfin ce qui n’avoit été qu'une conjecture de la part de Brisson, qui avoit donné une attention trop exclusive à la forme de la queue, fut décidément adopté par Linneus : le desman (1) Clus. Exot., p. 375, avec figure. (2) Digit., pag. 447. (3) Klein, Quad., pag. 57. (4) Hill, Anim., pag. 518. (5) Briss., Regn. anim., p.135, n°. 3. D Es > + 188 ANNALES DU MUSÉUM passa parmi les castors, avec lesquels il est resté en effet con- fondu dans la 10e. édition et la 12e. du Systema naturæ, sous le nom de castor moschatus. Quelques travaux originaux parurent bientôt après : telles sontles Descriptions de cette espèce par Buffon (1), Gmelin (2) et Guldenstaest (3); mais ils n’eurent guère d'autre résultat que d'enrichir l'histoire du desman de figures meilleures que celles qu'on en avoit déjà publiées. Ce ne fut qu'en 17981 qu'on fut enfin fixé sur les vraies affinités de cette espèce : Pallas (4), après en avoir établi et discuté tous les caractères, la replaca dans le genre des mu- saraignes : son sorex mnoschatus fut adopté de tous les natu- ralistes qui écrivirent depuis. Mais ce résultat que Pallas a donné comme nouveau avoit tout äu moins été soupconné, puisqu'en 1677 Charleton avoit déjà désigné notre animal sous le nom de sorex moscopiticus. En appelant de nouveau l'attention des savans sur cette espèce, nous n'avons pas la prétention de revenir sur le tra- vail de Pallas : ce qui a été aperçu et établi par un natura- liste d’un aussi grand savoir n’est sans doute pas susceptible de réforme : le desman, dans l’ordre naturel, suit en effet de très-près les musaraignes. Mais il convient seulement qu'il les suive ou les précède et non qu'il soit confondu avec elles, comme Gmelin et Shaw en ont donné l'exemple dans la rédaction de leurs catalogues : (1) Buff., Hlist. nat., X,p. 1, pl. 1. (2) Nov. Comm. petrop., 4, p.383, et voy. 1, p. 28, pl. 3 et 4. (3) Besch. Naturfors, 3, p. 107, pl. 2. (4) Act. petrop., 1781, 2, p. 314, pl. 3 et 5. (ee) D'HISTOIRE NATURELLE. 189 les rapports généraux qui lient ces êtres n'empèchent pas qu'ils ne diffèrent dans des parties essentielles : leurs dents ne présentent ni le même aspect, ni le même rombre : leurs doigts sont libres dans les uns et palmés dans les autres, et leurs narines sont assez dissemblables pour qu'on doive le nom de trompe à celles du desman. Ces différences laissent donc entre ces deux groupes un intervalle qu'il falloit faire sentir en isolant le desman, et c'est ce qu'a déjà indiqué M. Cuvier dans une liste de genre et d'espèce qui termine le premier volume de lAnatomie comparée : mon savant confrère y propose le nom de z2rgale pour le nouveau genre desman : j'adopte toutes ses vues, d'autant mieux que j'ai à faire valoir en leur faveur les con- sidérations suivantes. D'une part, le nombre des véritables musaraignes est de- venu assez considérable, pour qu'on soit forcé de rejeter de ce groupe tous les êtres qui s’en éloignent à plusieurs égards, et de l’autre, le desman, au moyen de l'acquisition d’une nouvelle espèce qui s’est trouvée en France, se montre comme le centre d’une petite tribu, à laquelle peut-être, pour qu'elle soit plus considérable, il n’a manqué que d’avoir eu le soupcon de son existence, que d’avoir cru à la pluralité d'espèces dans ce genre et d’avoir donné plus d'attention aux traits caractéristiques de chacune. En effet, cette circonstance de l'acquisition d’une espèce donne à notre nouveau genre la dernière sanction qu'il lui restoit à recevoir. Il eut sufli d’ailleurs pour motiver son établissement des principaux traits que nous allons faire connoître. Le crâne du desman tient autant du crâne de la taupe que 190 ANNALES DU MUSÉUM de celui des musaraignes : il n’est pas terminé en pointe aussi fine que dans celles-ci. Ses os du nez sont plus prolongés : il n’est pas privé d'arcade zigomatique : les branches montantes des maxillaires inférieurs s'élèvent davantage : il a en bas deux incisives de plus : ses incisives supérieures ont une toute autre forme et sont larges et taillées en biseaux : ses petites canines sont coniques et en nombre double, 6 de chaque côté : il a enfin 44 dents, ainsi que la taupe, lesquelles sont distribuées de la manière suivante : Li M nee dl ur Ru La fosse orbitaire n’est pas plus apparente que dans la taupe, parce que l'œil est tout aussi petit. Les conques nasales sont enfin prolongées au point de, pouvoir passer pour une trompe : leur longueur est égale à la moitié du crâne : elles décroissent insensiblement à partir du museau pour s’élargir ensuite vers les naseaux : cette trompe est toute aussi mobile que celle de l'éléphant : Pallas parle de sa souplesse et de son agilité, en même temps qu'il décrit les muscles qui en règlent et précipitent les mouve- inens. Une autre différence non moins importante et qui résulte, comme la précédente modification, de la nécessité oùse trouve le desman de ne pouvoir vivre hors de l'eau, est la privation de toute conque auriculaire : les musaraignes en sont pour- vues, comme nous l'avons vu plus haut. Enfin ce qui complète ce système d'organisation en vertu duquel le desman, renonçant, pour ainsi dire, aux attributs des quadrupèdes, vient partager avec les poissons l'élément D'HISTOIRE NATURELLE. 191 qui leur est propre, est la transformation de ses organes du mouvement en véritables rames : sesmmembres sont fort courts et en partie engagés sous les tégumens dutronc etles[5] doigts qui les terminent sont réunis par des membranes : enfin la queue est, tout aussi bien que le reste, accommodée à ce système, étant aplatie de côté et contribuant sous cette forme à faciliter la natation de ces animaux. Cette corrélation de toutes les parties des desmans, cet ae- cord de leurs formes pour en faire des animaux nageurs com- mandent trop impérieusement leurs habitudes pour qu’elles ne découlent pas de toutes ces circonstances. Les desmans, en effet, passent la plus grande partie de leur vie dans l'eau et sous l’eau : ce n’est jamais de leur propre mouvement qu'ils gagnent un lieu sec, et s'ils communiquent d’un étang à un autre, ce n'est que dans le cas où ils rencontrent des ca- naux souterrains ou bien des rigoles remplies d’eau qui y conduisent. Ils préfèrent le séjour des étangs, des lacs et de toutes eaux dormantes, et en particulier les lieux inondés, encais- sés par des bords élevés. Ils se font alors un terrier dont l'entrée est sous l’eau : cette entrée est leur point de départ: ils fouillent en gagnant peu à peu en hauteur et s'élèvent par des contours multipliés et assez .prolongés pour embrasser une étendue de 5, 6 et 7 mètres. Il n’y à ainsi qu'une partie de leur terrier qui soit sous l’eau. C’est à qu'ils vivent ou seuls où en monogamie, suivant les saisons. Ils ne sont pas l’hiver sujets à l’engourdissement; ce qui les expose à un malheur inévitable. La glace qui se forme alors à la surface des étangs les emprisonne sous l’eau et dans 102 ANNALES DU MUSEUM leur terrier, et il paroit qu'ils en sont bien cruellement tour- mentés. Car s’il existe encore quelques fissures ou trous où ils puissent venir respirér, ils y accourent et y viennent dis- puter une petite place à fleur d’eau pour l'extrémité de leur trompe; privés de cette ressource, ils ne vivent plus qu’en consommant l'air de leur terrier : un petit nombre y réussit, comme on le pense bien : les autres périssent sufloqués : il y en à d'autant plus d’atteints que la saison rigoureuse dure plus long-temps. Les desmans n'arrivent à fleur d’eau que dans la saison de l'amour; alors ils s'enhardissent, ou ils marchent à fond de rivière, ou ils s’essaient autour des plantes riveraines, ou ils cherchent à grimper le long des roseaux. On est dans l'opinion qu'ils se nourrissent de racines de nymphæa et dacores, et qu'ils en font des provisions; mais Pallas n'a jamais trouvé dans leur estomac que des débris de larves et de vers. Enfin l’épithète de z20schatus leur a été donnée à cause de la forte odeur de muse qu'ils exhalent, odeur qui est si pénétrante qu’elle se répand et se conserve dans Ja chair des brochets et des silures à qui il arrive de manger des desmans. I. DESMAN DE MOSCOVIE. ygale moscoyitica. Cette espèce a été décrite en dernier lieu avec tant de soin et figurée sous tant d’aspects différens que je ne crains pas de me compromettre en lui comparant le desman qu'on vient de trouver en France. Sa taille est de 0,23 : sa queue (0,18) plus courte que le COrps. il. D'HISTOIRE NATURELLE. 193 La forme de celle-ci est de plus très-remarquable : elle est comme étranglée à sa base : bientôt après elle devient cylin- drique, renflée et croit rapidement à la manière des bulbes : c’est pour décroitre à peu de distance; ce qui a lieu insensible- ment et jusqu'à son extrémité : plus elle diminue et plus elle devient verticalementleomprimée : elle est enfin comme la queue du castor, toute parsemée d’éeailles entre les inter- valles desquelles sont des poils courts et isolés. Quelques écailles sont aussi répandues sur le dessus des doigts. La pelleterie de ce desman est estimée : elle est formée, comme celle des castors, de longues soies et d’un feutre doux et moelleux caché en dessous. Le pelage est brun, plus pàle en dessus et plus foncé sur les flancs : le ventre est d’un blanc argentin. 2. LE DESMAN DES PYRÉNÉES. Mygale pyrenaica. Cette nouvelle espèce, dont nous sommes redevables à M. Desrouais, ci-devant professeur d'histoire naturelle à l'Ecole centrale de Tarbes, est de moitié plus petite que le desman décrit par Pallas. La longueur de son corps est de 0,110, et (ce en quoi elle diffère le plus de l'espèce précédente ) sa queue est plus longue : 0,125. Celle-ci n’est ni étranglée à son origine, ni renflée au delà; mais toute d’une venue et diminuant insen- siblement jusqu'à l'extrémité, elle est cylindrique dans les trois quarts de sa longueur, et verticalement comprimée dans le reste : elle est enfin couverte de poils courts, couchés et presqu’entièrement adhérens. 17. 29 194 ANNALES DU MUSÉUM Ses ongles sont du double plus longs que dans l'espèce précédente : les doigts de devant ne sont qu'à demi-enve- loppés : le doigt extérieur des pieds de derrière est aussi beaucoup plus libre. Sa pelleterie est la même quant à la nature du poil, ses longues soies et son feutre : mais 86s couleurs présentent des différences. Tout*le dessus est d’un brun marron, les flancs gris-bruns et le ventre gris argentin : aucune partie blanche n’est répandue sur la face, comme Pallas le rapporte du desman de Moscovie. On n’a encore trouvé cette espèce qu'aux pieds des Py- rénées, dans le voisinage de Tarbes : la grande distance des lieux où se trouvent ces deux desmans est un moûf de plus de croire à la diversité de leurs espèces. D'HISTOIRE NATURELLE. 19) SUITE , - Ê “ De la détermination des espèces de Mollusques T'estacés. PAR M LAMARCK. MITRE. (M1ITRrA.) se turriculée, ou fusiforme, à spire pointue au sommet, à base échancrée et sans canal. Columelle chargée de plis pa- rallèles entre eux, et dont les inférieurs. sont les plus petits. Bord columellaire, mince et appliqué. * T'esta univalyis, turrita, subfusiformis, apice acute, basi emarginata; canali nullo. Columella plicata : plicis omnibus parallelis, transversis ; inferioribus nunortbus. Labrum columellare tenue, adnatum. Gastéropode. . . . inconnu. Probablement il est voisin de l'animal des volutes par ses rapports, mais distinct. OBSERVATIONS. Les mitres forment un genre très-naturel, nombreux en espèces, et qui est bien distingué des volutes. Non-seule- ment elles en diffèrent par une forme générale plus allongée, 200 196 ANNALES DU MUSÉUM la plupart étant turriculées ou fusiformes, mais en outre par des caractères précis. En effet, les znitres diffèrent constamment des volutes, 19, parce que le sommet de leur spire est véritablement pointu et non terminé en mamelon; 20. parce que les plis de leur columelle vont insensiblement en diminuant de gran- deur vers le bas, de manière que les inférieurs sont toujours plus petits que les autres. Ges plis sont transverses et tous parallèles entre eux. Ici, le bord columellaire existe : il est mince, appliqué, et quelquefois ne paroïît que vers la base de la columelle. Le drap marin n’est pas non plus entièrement nul dans les mitres, car j'en possède plusieurs qui en sont encore munies. Quoique le gastéropode qui produit ces coquillages ne soit pas encore connu, ses rapports prochains avec celui qui forme les volutes, indiquent qu'il doit être aussi privé d’opercule. Les zaitres sont très-nombreuses en espèces, et très-agréa- blement variées dans leurs couleurs. Elles vivent, comme les volutes, dans les mers des pays chauds. Parmi les espèces connues de ce genre, plusieurs sont rares, précieuses et fort recherchées des amateurs de conchyliologie. En France, ils donnent le nom de zzinarets aux espèces grèles, allongées, fort pointues. On connoïit un assez grand nombre d’espèces dans l’état fossile et même dont les analogues vivans n’ont pas encore été observés. D'HISTOIRE NATURELLE. I ESPÈCES. © = | 1. Mitre épiscopale. Mitra episcopalis. M. Turrita, lœvis ; anfractuum margine integro ; labro denticulato ; columell& quadriplicatà. Mus., n. 1. Encycl., pl. 369, f. 2. j Rumpb. Mus., t. 29, fig. &. List. Conch., t. 839, f. 66. Gualt. ind., t. 53, fig. G, 1. D’Argeuv., Conch., t. 9, fig. C. Séba, Mus. 3, t OL 7j 19. B. Var. plus courte. Encycl., pl 369, f. 4. Regenf.,1,t.3,f. 33. Martini, Conch. 4, t. 147, f. 1360. Habite l'Océan des grandes Indes. Cette mitre, à laquelle Linné donna le nom de voluta episcopalis , et la suivante, qui l’avoisine par ses rapports, sont les plus grandes et les plus belles des espèces connues de ce genre; elles sont très-remarquables par la vivacité de leurs couleurs, font l’ornement des col- lections, et seroient précieuses si elles étoient moins communes. L'une et l’autre sont des coquilles allongées, turriculées, pointues au sommet, et qui offrent sur un fond blanc, quantité de taches d’un rouge éclatant , inégales, disposées par rangées transverses. Celle-ci (la M. épiscopale) ale bord supérieur de ses tours entier, ce qui la distingue de la suivante. Ses derniers tours sont très-lisses; mais les supérieurs présentent des stries transverses ponctuées, très-fines. On observe quelques dentelures vers la base du bord droit. Lon- gueur, 10 à 12 centimètres ( plus de 4 pouces ). 2. Mitre papale. Witra papalis. M. Turrita, transversim striata; anfractuum margine plicis dentiformibus coronato ; labro denticulato ; columell& quadriplicatà. Mus., n. 2. Encycl., pl. 370, f.1, «, b. Rumph. Mus., t. 29, fig. I. Last. Conch., t. 839, f. 67. D’Argenv., Conch., t. 9, fig. E. Gualt. ind. ,t. 53, fig. I, 1. Séba , Mus. 3, 1. 51, f. 1 à 5. Regenf. 1,t. 1, f. 1. Martini, Conch, #,t. 147, f. 1353, 1354. Habite POcéan des grandes Indes, les côtes des Moluques. Cette belle mitre, que l’on nomme vulg. ja Aiare , ne le cède ni en grandeur ni en beauté à la précédente. Elle offre aussi, sur un fond blanc, quantité de taches d’un rouge de sang très-vif, disposées par rangées transverses. Ces 1aches néan- moins sont plus petites et plus serrées que dans la M. épiscopale. Le bord supérieur de chaque tour est plissé et denté d’une manière remarquable. Enfin des stries transverses un peu distantes, dans lesquelles on aperçoit des points 198 ANNALES -DU. -MUSÉUM enfoncés , se font remarquer sur tous les tours, quoique plus fortement sur les supérieurs. Longueur, 126 millimètres. Mon Cabinet. 3. Mitre pontificale. Witra pontificalis. M. Ovato-turrita , transversim sulcata, punctis majusculis perforata ; anfrac- tuum margine elevato , tuberculis crassis coronato ; columellä subquadriplicat&. Mus., n. 3. Encycl., pl. 370, f. 2. List. Conch., t. 840, f. 68. Güalt. ind, t. 53, fig. L,2, Séba, Mus.3,t.51,n.3, fig. 5. Martini , Conch. 4,t. 147, f. 1355, 1356. Habite l'Océan des grandes Indes. Cette espèce, que l’on nomme vulg. la petite thiare , diffère constamment de la précédente par sa taille; par ses couleurs moins éclatantes ; par l'élévation du bord supérieur de chaque tour qui rend les tours plus séparés, plus étagés; par les tubercules épais qui les couronnent; enfin par les trous plus grands qu’on observe dans ses sillons transverses. Les taches, assez grandes, dont elle est ornée sur un fond blanc, sont d’un rouge orangé, et non de couleur de sang. Les plus grands individus n’ont que 57 millimètres de longueur. Mon cabinet. On trouve une variété plus lisse sur le dernier tour, 4. Mitre poiutillée. Witra puncticulata. : M. Ovato-acuta, transversim sulcata ; sulcis punctatis, subdenticulaiis ; an- fractibus coronatis ; columellä quadriplicatà. Encyel., pl. 370, f. 5. Séba, Mus. 3, L 50, f. 29, 30. Favanne ,-Conch., t.31, fig. D, 3. Habite l'Océan indien. Colorée différemment que les précédentes , cette mitre, que l’on a confondue avec celle qui suit, est ovale-allongée, pointue, d’un jaune roussâlre , avec quelques, flammes brunes longitudinales et une zùne blanchälre. Elle est sillonnée transyersalement, et piquetée dans ses sillons de manière que l’un de leurs bords en est denticulé. Les tours de spire sont éta- gés et couronnés de petits tubercules comme dans les thiares. La columelle n’a que quatre plis. Longueur, 37 ou 38 millimètres. Mon Cabinet. Obs. Linné, pour synonymes de:son . pertusa , cite une coquille de Gual- tieri (1. 54, fig. H ) dont les tours de spire ne sont point couronnés , et deux coquilles de Séha dont l’une est couronnée et l’autre ne l’est pas, Quelle est donc son espèce? Voyez son Systema naturæ, édit. de Vienne, vol: 2, P- 1193. 5. Mitre millepore. Jitra millepora. M. Ovato-acuta, transversim sulcata : sulcis excavato-punctatis ; anfractibus coronatis ; columellä quinqueplicatä. 6, 7° D'HISTOIRE NATURELLE. 199 M. pertusa. Mus., n. 4. Séba, Mus. 3, t. 50, f. 28. Chemn. Conch. 10, t. 151, f. 1432, 1433. Habite l'Océan indien. Cette mitre est peut-être la même coquille que le soZuta pertusa de Linné; mais comme ses tours de spire sont couronnés de dents, la coquille qu’il cite dé Gualtieri ne s’y rapporte pas, non plus que celle de Séba ( vol. 3, t. 50, f. 47 et 48). L'espèce dont il s’agit ici est variée de brun, de fauve et de blanc, et a moins de jaune que la précédente. Ses sillons traus- verses sont plus serrés , régulièrement piquetés, et ses tours de spire , quoique couronnés de dents, ne sont point étagés; d’ailleurs les cinq plis de la colu- melle la distinguent bien de la mitre pointillée. Longueur, 50 millimètres. Mon Cabinet. Mitre cardinale. Mitra cardinalis. M. Ovato-acuta, transversim striata, alba; maculis spadiceis ut plurimun tessellatis seriatis ; columell& quinqueplicaté. Mus. , n. 5. Encycl., pl. 369, f. 3. List. Conch., t. 838, f. 65. Crualt. ind., t. 53, fig. G, 2 Séba, Mus. 3, t..50, f. 50,51. Born, Mus., t. 9, f. 11, 12. Martini , Conch. 4, t. 147, f. 1358. Habite l'Océan indien. Plus grande et moins rare que les deux mitres qui . précèdent, cette espèce est éminemment distinguée par ses petites taches carrées et d’un rouge-brun, disposées par rangées transverses, sur un fond blanc, avec quelques nébulosités brunes. Elle est ovale-pointue, un peu fu- siforme, striée transversalement, et finement pointillée dans ses stries. La columelle a cinq plis dont l’inférieur fort petit est quelquefois peu apparent. Longueur, 54 millimètres. Mon Cabinet. Mitre archiépiscopale. Mitra archiepiscopalis. I. Ovato-acuta , fulva ; maculis rufis inœqualibus subseriatis ; striis trans- versis puncticulatis ; labro crenulato. Mon Cabinet. Encyel., pl. 369, f. 1. Séba, Mus. 3, t. 50, f. 47. Gualt. ind., t. 54, fig. H, et t. 53, fig. L. Favanne, Conch., t. za, fig. CG, 5. Habite l'Océan indien. Voisine de la M. cardinale par ses rapports, mais plus petite et moins belle, cette espèce en est constamment distin guée par ses stries transverses plus serrées, régulièrement pointillées ; par sa Mur sombre, blanc-fauve, nué de brun, avec des taches rousses inégales, subsériales; en- fin par le bord droit de son ouverture crénelé dans toute sa longueur. On voit cinq plis à la columelle. Longueur, 5 centimètres. 8. Mitre fleurie. Witra versicolor. , 200 ANNALES DU MUSEUM M. Subfusiformis, lutescens , albo rufo fuscoque maculata et nebulosa ; striis transversis puncliculatis ; labro crenulato ; columellé quadriplicatà. Mitra nubila. Mus., n. 6. M. versicolor. Martyn, Conch. univ. 1, t, 23. Habite les mers de la Nouvelle-Hollande ( Péron ), les côtes des iles des Amis. Cette espèce, que Chemniz n’a point connue puisqu'il l’a confondue avec son voluta nubila qui est bien différente , tient par ses rapports aux deux mitres qui précèdent, mais en est très-distincte. C’est une coquille ovale-allongée, subfusiforme, jaunätre, variée et comme fleurie par des taches et des nébu- losités les unes blanches, les autres rousses, et quelques autres brunes. Elle est munie transversalement de stries transverses ,un peu distantes, et finement pointillées. Les interstices de ces stries forment des rides aplaties qui sont tra- versées par des stries longitudinales extrêmement fines, Ouverture blanchätre; quatre plis à la columelle. Longueur , 51 millimètres. Mon Cabinet. g. Mitre sanguinolente. Mitra sanguinolenta. MT. Ovato-fusiformis, alba, maculis flammulisque sanguineis picla; sulcis transversis excavato-punctatis ; columellé quinqueplicatà. Mus. , n. 9. V. nubila. Chemn. Conch. XI, p. 17,t. 177, f. 1705, 1706. Habite... probablement l'Océan austral. Cette mitre, dont le Muséum possède un exemplaire, mais plus petit que celui de Chemniz, est fort différente de l'espèce qui précède : elle est blanche et ornée de taches et de petites flammes longitudinales d’un rouge éclatant, qui la rendent comme sanguinolente. Sa superficie offre des sillons transverses munis de gros points enfoncés, et des rides ou très-petites côtes longitudinales, qui la font paroïitre un peu granu- leuse. Cette espèce est fort jolie et très-rare. L’exemplaire du Muséum n’a que 33 millimètres de longueur. 10. Mitre ferrugineuse. Witra ferruginea. IW. Ovato-fusiformis, alba, aurantio vel ferrugineo maculata ; sulcis trans- versis elevatis ; columell& subquadriplicatà. Mus., n. 10. À = An Martini, Conch. 4, t. 149, f. 1380, 1381 ? BIVar allongée, presque turriculée. Chemn. Conch. XI, t 177, f.1709, 1710. Habite... La M. ferrugineuse paroit varier beaucoup dans sa figure selon l’âge de la coquille. C’est néanmoins une espèce distincte par ses sillons transverses et élevés, et par son défaut de points enfoncés. Elle est ovale, D'HISTOIRE: NATURELLE. 201 subfusiforme, blanche, et ornée de taches grandes, un peu nébuleuses, d’un rouge orangé ou d’une couleur ferrugineuse. L’échancrure de sa base est médiocre, et la columelle, dans les individus que j’ai sous les yeux ; n’a que quatre plis. Longueur, 46 millimètres. La coquille B tient davantage à la suivante par sa figure; mais Chemniz n’attribue que quatre plis à sa columelle, 11. Mitre térébrale. Mitra terebradis. M. Turrita, prælonga, lutescens, flammulis spadiceis longitudinalibus ornata ; sulcis transversis elevatis subdecussatis ; columellä& sexplicaté. Mon Cabinet. Habite... Cette mitre très-remarquable semble tenir le milieu entre l’espèce précédente et celle qui suit. Elle est allongée, turriculée, Jaunâtre, pres- qu’orangée, et ornée de flammes ou taches longitudinales d’un rouge brun, presque de la couleur du sang. Sa surface présente quantité de sillons trans- verses ; élevés, et en outre des côtes longitudinales nombreuses, petites, inégales et qui se croisent avec les sillons. Ouverture blanche; six plis à la columelle; huit tours de spire. Longueur, 8 centimètres (3 pouces). 32, Mitre rotie. WMitra adusta. Pa I. Fusiformi-turrita , albido lutescens, maculis fusco-rufis longitudinalibus ornala ; striis transversis subpunctatis ; suturis crenulatis ; columell& quin- queplicatà. Mus., n. 7. Encycl., pl. 369, f.5, a, b. List. Conch., t. 822, f. 40. Séba, Mus. 3, t. 50, f. 49. Martini, Conch. 4, t. 147, f. 1361. B. Var. en fuseau court. MWitra flavo-fusca. Mus., n°. 8. Habite les côtes de Timor. La M. rotie, que l’on a confondue avec le 7. pertusa de Linné, est une espèce remarquable et bien distincte de celles ci- dessus indiquées. Elle est allongée, presque turriculée, d’un blanc jaunätre, avec de grandes taches allongées et rouge-brun. Elle est striée transversale- ment, pointillée dans ses stries, crénelée aux sutures, c’est-à-dire au bord supérieur de chaque tour, et sa columelle a cinq plis. Longueur, 7 centim. Je réunis ici, comme variété, la coquille B à cause de ses grands rapports; cependant elle est toujours plus raccourcie, plus ventrue, plus en fuseau, à fond jaune avec des taches plus brunes. M. Péron l’a recueillie sur les côtes de Timor. Longueur, 5 centimètres. 13. Mitre granulée. Mitra sranulosa. IT. Subturrita, fusco-rufa, decussata, granosa ; columellé quadriplicaté. F3 26 202 ANNALES DU MUSEUM Mus., n. 11. Encycl., pl. 370, f. 6. Martini, Conch. #4, t. 149, f. 1390. Mitra tessellata. Martyn, Conch. univ. 1, t. 19. Habite l'Océan des grandes Indes. La M. granuleuse se distingue au premier aspect à sa couleur uniforme, et aux granulations grossières et assez égales de toute sa surface extérieure. C’est une coquille allongée, subturriculée, d’un roux rembruni, treillissée, granulease, et à tours légèrement étagés. Sa columelle est blanche, et chargée de quatre plis. Longueur, 46 à 50 mil- limètres, Mon Cabinet. 14. Mitre safrannée. Mitra crocata. M. Ovato-turritæ, crocea, deéussate, granulosa ; anfractuum angulo granis eminentioribus coronato ; columellé quadriplicatä. Mon Cabinet. #7 Guall. ind., t. 52, fig G. Habite... On la dit des Indes orientales. Cette mitre, plus petite, mais plus élégante que celle qui précède, est très-rare, paroît même inédite, et pro- vient de la riche collection de M. Saulier. Elle est ovale-turriculée, d’un orangé roussâtre ou couleur de safran, avec une cordelette blanchätre sur chaque tour. Sa surface est treillissée, sabgranuleuse, surtout sur la spire; celle-ci est bien étagée, à tours anguleux près de leur bord supérieur, et l’avgle de chaque tour est couronné par une rangée de grains orangés plus gros que les autres. Longueur, 35 millimètres, 15. Mitre bicolore. Mitra casta. * - M. Turrita, lœvis, Brunnea, albo fasciata ; spiræ fasciis serialim punctatis, suübplicatis ; columellä sexplicati. M. fasciata. Martyn, Conch. univ. 1, t. 20. V. casta. Chemn: Conch. 10, p. 174. Vign. 20, p. 136, fig. C, D. Gmel., p. 3453, n. 137. Habite bes côtes septentrionales de l’île d’'Amboine. 16. Mitre rayée. Witra nexilis. * M. Subfusiformis , transversim fusco lineata , punetis albis cincta. Martyn, Conch. univ.1,t. 22. F. leucosticta. Var. 8. Gmel. ; p. 3457, n. 85. Habite aux îles des Amis. Cette mitre et la précédente offrent tant d'intérêt par leurs caractères, que j'ai dû les mentionner, quoique je ne les connoisse pas. 17. Mitre olivaire. Mitra olivaria. M. Ovato-fusiformis, læviuscula, albida , Juseo fasciata ; striis transversie - obsoletis ; columell& quinqueplicatä. So D'HISTOIRE NATURELLE. 20 Mus., n. 33. Encycl., pl. 371,f.3, &, b. An List. Conch., t. 813, f. 23, a. Habite... Espèce rare, ayant un peu la forme d’une olive, qui tient de la M. dactyle par quelques rapports, mais qui est plus grande et à spire plus allongée. Elle est ovale-fusiforme , blanchâtre, presque lisse, à stries trans- verses en partie effacées, et remarquable par deux zônes brunes et écartées, dont une au bord supérieur de chaque tour, et l’autre vers sa base. Ouverture blanche; columelle à cinq plis. Longueur, 49 à 50 millimètres. Mon Cabinet. 18. Mitre scabriuscule. Mitra scabriuscula. M. Fusiformis, longitudinaliter striata, transversè rugosa ; rugis ut pluri- mum albo fuscoque articulatis ; columellé quadriplicatä, perforatd. Mon Cabinet. Encycl., pl 371,f.5, a, b. Voluta scabriuscula. Gmel., p. 3450 ,n. 48. Mitra sphærulata. Martyn, Conch. univ. 1,t.21. Habite l'Océan des grandes Indes , les côtes des îles des Amis. Très-belle et très - rare espèce, et qui paroit plus ou moins perfectionnée dans ses carac- tères, selon qu’elle vit ou dans l'Océan pacifique ou dans les mers de l'Inde. Elle est allongée, fusiforme, finement striée dans toute sa longueur, et garnie de rides transverses, alternativement un peu élevées, planulées, tra- versées par les stries. On voit par la figure de la coquille de Hartyn, que dans les individus de la mer pacifique, ces rides transverses sont toutes arti- culées de blanc. et de brun ; mais dans ceux des Indes, la moitié supérieure de la coquille est grisätre, légèrement tachée ou nuée de fauve; et ce n’est que sur le dernier tour , et principalement sur la zône du milieu, qui est plus vivement colorée, que ces mêmes rides sont alternativement blanches et rouge-brun. Dans la coquille de Martyn, l'ouverture est rousse; tandis que dans celle des Indes, elle n’est que blanchätre. Longueur, 55 millimètres. Obs. La coq. de Martyn me semble n’avoir rien de commun avec le vo/uta exasperata de Chemniz dont Gmelin a fait une variété. 19. Mitre granatine. Witra granatina. M. Fusiformis, albida, subfasciata, longitudinaliter striata ; cingulis transversis, elevatis, granulatis, albo spadiceoque articulatis ; columell& subquinqueplicatä. Mus., n. 23. Encycel., pl. 371, f. 4. Rumph., Mus., t. 29, fig. T. Habite l'Océan des grandes Indes. Voisine de la précédente par ses rapports, cette mitre est en général moins grande, moins vivement colorée, et s’en distingue éminemment par ses cordeletiés lransverses qui, au lieu d’être 20° ANNALES DU MUSÉUM © + aplaties, comme dans la M, scabriuscule, sont distinctement granuleuses, Dans les jeunes individus, les cordelettes de cette mitre présentent des lignes d’un rouge -brun interrompues et comme articulées , ce que montre la figure citée de Rumphe. Les vieux individus sont blanchätres et fauves, et présentent deux zônes foiblement exprimées’sur le dernier tour. La colu- melle des grands individus a cinq plis. Longueur, 48 millimètres. Mon Cabinet. Dans ses différens âges, cette coquille semble présenter autant de variétés diverses. 20. Mitre à créneaux. Mitra crenifera. W. Fusiformis , alba , spadiceo s. fusco fasciata ; fasciis margine superiore lobatis ; rugis transversis granulatis ; columellä quadriplicatä. Mus., n. 25. Encycl., pl. 370, f. 3, a, à. Séba, Mus. 3, t. 49, f. 19 et 20. Habite la mer de l’Inde. Petite mitre fort jolie, vivement colorée, et qui se rapproche des précédentes par ses rapports. Elle est fusiforme, peu ventrue, à tours médiocrement étagés, et garnie d’une multitude de rides ou corde- lettes transverses, serrées et granuleuses. Elle est ornée, sur un fond blanc, de zônes transverses, très-fauves ou d’un rouge - brun, dont chacune a le bord supérieur lobé comme les créneaux des anciennes fortifications. Dans ces zônes, les cordelettes sont tachetées de blanc tt comme articulées. Ou- verture blanche; columelle à quatre plis. Longueur, 32 millimètres. Mon Cabinet. Coq. rare. jé 21. Mitre serpentine. Mitra serpentina. M. Subfusiformis, alba, aurantio fasciata ; lineis spadiceis undatis longitu- dinalibus ; striis transversis excavato-punctatis ; columellé quinque s. sex- - plicatä. Mon Cabinet. Encycl., pl. 370, f. #, @, b. Habite... probablement l'Océan indien. Plus jolie encore , et au moins aussi rare que la précédente, cette mitre constitue une espèce particulière biea distincte. Elle est ovalé-fusiforme , munie de stries transverses puncticulées, et les interstices de ces stries offrent des cordelettes lisses, un peu aplaties. Elle est ornée, sur un fond blanc, d’une ou deux zônes orangées, et de lignes longitudinales, très-ondées, d’un rouge - brun, accompagnées de taches blanches, comme écailleuses, situées d’un seul côté de ces lignes. Six ou sept tours à la spire; cinq ou six plis à la columelle. Longueur, 34 mil- limètres. 22. Mitre rubanée. Hitra 1œnrata. — D'HISTOIRE NATURELLE. 05 M. Elongata, fusiformis, angusta, lutea, albo fuscoque fasciata; striis transversis ; costis longitudinalibus obsoletis ; labro internè striato. Mus., n. 12. Encycl.;, pl 373,.f 7 ,.@, b. Chemn. Conch. 10, p. 173,t. 151 ,f, 1444, 1445. Habite l'Océan indien. Parmi les espèces auxquelles on donne vulgairement le nom de minarets ; celle-ci est une des plus agréablement ornées et des plus jolies. C’est une coquille allongée, étroite, fusiforme, munie de petites côtes longitudinales obtuses, fréquentes, peu élevées, et de stries transverses qui ne paroissent bien qu'entre les côtes. Elle est jaune, ornée sur chaque tour d’une bande blanche assez large et d’une ou deux cordelettes ou raies étroites et très-brunes. La columelle a quatre plis. Longueur , 50 à 54 milli- mètres. Mon Cabinet. 23. Mitre plicaire. Mitra plicaria. M. Ovato-fusiformis, angulosa, longitudinaliter plicata; plicis anticè sub- spinosis ; fascià lividä ; cingulis fuscis interruptis. Mus., n. 13. Encycl., pl. 373, f. 6. List. Conch., 1. 820, f. 37. Gualt. ind., t. 54, fig. F. Séba, Mus., 3, t. 49, f. 23, 24. Dargenv.; t. 9, fig. g. Petiv. Gaz., t, 56, f. 1. Bonan. recreat. 3, f. 65. Martini, Conch. 4,t. 148, f. 1362, 1363. Habite l'Océan indien. Cette mitre est une des moins effilées et des plus communes parmi les minarets. Elle est ovale-fusiforme, anguleuse près du sommet de chaque tour, et plissée lingitudinalement, Chaque pli se ter- mine antérieurement, ou dans l’angle transversal de chique tour, par une saillie pointue, presque piquante. La base du dernier tour est ridée trans- versalement. Cette coquille est blanche, munie d’une zône livide ou rem- brunie assez large et de raies très-brunes interrompues et transverses; quatre plis à la columelle. Longueur, 52 millimètres. Mon Cabinet. 24. Mitre ridée, Witra corrugata. y) M. Ovato-fusiformis ; albida, angulosa, longitudinaliter plicata , transversè rugosa; fasciis cingulisquer fuscis; angulo infimo submuricato. Mus., n. 14. Encycl., pl: 373,8, à, b. Rumph., Mus., t 29, fig. S. Gualt. ind., t.54, fig. A, E. Séba, Mus. 3,1. 49, f. 3, 32, 35, 36, 38,43, 44. B. Var. rougeâtre, à zônes blanches. Martini, Conch. 4,1.148, f. 1364. p': Habite POcéan indien. La mitre ridée n’est pas moins commune que la pré cédente, s’en rapproche beaucoup par ses rapports, et néanmoins s’en dis- 200 ANNALES DU MUSEUM tingue constamment par ses rides transverses et par sa coloration. Elle ne devient jamais aussi grande, et offre sur un fond blanc, des zônes brunes et des cordelettes ou raies de même couleur, qui ne sont point interrompues. Quatre plis à la columelle. Longueur , 4 centimètres. Mon Cabinet. 25. Mitre costellaire. Mitra costellaris. M. Fusiformis, transversè striata, fuscata, cingulo albo picta ; coslis cre- bris longitudinalibus ; anfractibus supernè angulatis , crenato-muricatis. Mus., n. 16. Encycl., pl. 373, f. 3. Gualt. ind., t. 54, fig. D. Chemn. Conch. 10, t. 151, f. 1436, 1437. B. Var. à côtes moins fréquentes. M. nigrina. Mus., n. 15. Habite l'Océan indien. On ne sauroit douter que cette mitre ne doive être distinguée des précédentes, quoiqu’elle s’en rapproche par beaucoup de rap- ports. Elle est fusiforme, étroite, quelquefois roussätre comme dans la co- quille de Chemniz, plus souvent brune et même presque noire, avec une ou _deux lignes blanches transversales. Ses côtes longitudinales sont nombreu- ses, menues, et offrent des stries transverses dans leurs interstices. Elles forment à l’angle de chaque tonr une rangée de crénelures presque piquantes. La spire est bien étagée; la columelle a quatre plis dont l’inférieur est à peine apparent. Longueur , #4 millimètres. Mon Cabinet. ÿ La coquille B paroît n’être qu’une variété moins prononcée dans les ca- ractères de l’espèce. 26. Mitre en lyre. Mitra subdivisa. M. Fusiformis , angusta, mutica , albida, spadiceo cingulata ; costis longitu- dinalibus creberrimis. Mus. , n. 17. Encycel., pl. 373, f. 1, a, b. Chemn. Conch. 10,t.151,f. 1434, 1435, Habite l'Océan indien. Celle-ci, très- voisine de la M. costellaire par ses rapports, n'en a pas moins des caractères bien prononcés qui la distinguent. Elle est fusiforme, étroite ou effilée, à spire à peine étagée, l’angle de chaque tour étant très-obtus et sans aspérités. Elle offre dans toute sa longueur une multitude de côtes étroites, qui ressemblent aux cordes d’une lyre, et entre lesquelles on apercoit des stries transverses. Sur un fond blanchâtre, cette mitre présente plusieurs lignes ou raies transverses d’un rouge-brun , qui l’ornent agréablement ; quatre plis à la columelle. Longueur, 43 à 45 mil- liimètres. Mon Cabinet. 27. Mitre mélongène. Mira melongena. D'HISTOIRE NATURELLE. 207 M. Fusiformis, albida, fusco rufescente fasciata; costellis longitudinalibus creberrimis ; striis transversis , infræ suturas profundioribus ; spir& peracutd. Mus., n. 67. Encycl., pl. 373, f. 9. Habite... probablement l'Océan indien. Plus ventrue au milieu et autrement colorée que la M. en lyre, bien distinguée de la M. costellaire par son dé- faut d’angles et d’aspérités, cette mitre constitue une espèce particulière, rare , et très-distincte. Elle est fusiforme, ventrue au milieu, pointue aux extrémités, et remarquable par une multitude de petites côtes longitudinales qui la font paroïître cannelée dans sa longueur. Sur un fond blanchätre, elle est ornée de plusieurs zônes transverses, les unes d’un roux très-brun, les autres d’un fauve livide. Elle offre en outre une ligne jaune transver- sale, dans Ja partie claire ou blanche de chaque tour ; quatre plis à la colu- melle. Longueur, 38 à 40 millimètres. Mon Cabinet, 28. Mitre sanglée, Mira cingulata. M. Fusiformis , transversè striata, albida, subfasciaia, rubro cingulata, mutica ; costis longitudinalibus infernè obsoletis. Mus. , n. 18. Encycl., pl. 373, f. 5? L Habite... probablement l'Océan indien, C’est avec l’espèce suivante que cette mitre a le plus de rapports, et elle paroît devoir en être distinguée, Elle est allongée, fusiforme , blanche avec quelques bandes livides, rousses ou brunes, et une ou deux lignes rouges et transverses qui l’embellissent. Ses stries transverses sont nombreuses et serrées. Le bord droit de l’ouver- ture n’offre poiut de stries intérieurement; quatre plis à la columelle. Lon- gueur, 54 millimètres. Mon Cabinet. 29. Mitre renardine. Mitra vulpecula. M. Fusiformis, mutica, transversè striata, fulva vel rufa, fusco fasciate ; apice basique nigricantibus ; fauce striatä. Mus., n. 19. Encycl., pl. 373, f. 2. Rumph. Mus., 1. 29, fig. R. Gualt. ind., t. 54, fig. B. Séba, Mus. 3,t.49, f. 27,28, 29,30, 39, 4o. Martini, Conch. 4,t. 148, f. 1366. B. Var. tricolor, fasciée, plus ridée inférieurement, Martini, Conch. 4, t. 148, f. 1364. Habite l'Océan indien. Cette mitre, assez commune dans les collections, fait encore partie de celles qu'on nomme minarets. Elle offre beaucoup de variétés dans ses couleurs, ses bandes, ses côtes obtuses ; néanmoins on la distingue aisément à ses côtes longitudinales obtuses, qui sont presque * nulles sur Le dernier tour; à sa couleur d’un jaune roussâtre, tantôt avec 208 ANNALES DU MUSÉUM des bandes brunes et tantôt sans bandes; à sa columelle toujours tachée de roux ou de brun entre les plis; aux stries de la face interne du bord droit de son ouverture ; enfin à ses deux extrémités teintes de brun ou noi- râtres. Le jaune-fauve, le brun et le blanc disposés par zônes rendent cer- taines de ses variétés très-agréables ; quatre plis à la columelle. Longueur, 48 à 50 millimètres. Mon Cabinet. 30. Mitre nègre. Mitra caffra. M. Fusiformis, rufo-fuscata, albo fasciata, lævis ; spirä plicato-striatà ; basi rugosä ; columellà quadriplicatà. Mus., n. 20. Encycl., pl. 375, f. 4. Gualt. ind., t. 53, fig. E. Séba, Mus. 3, t. 49, f. 21, 22, 41. Martini, Conch. 4,t. 148, f. 1569, 1370. Habite les mers de l'Asie. Celle-ci est -une espèce facile à reconnoître au pre- mier aspect. C’est une coquille fusiforme, d’un roux ou d’un rouge très- brun, presque noirâtre, coupé par plusieurs zônes blanches transversales. Elle est lisse dans sa partie moyenne, mais la partie supérieure de sa spire est striée transversalement avec de petits plis longitudinaux, et sa base offre des rides transverses. Longueur, 44 millimètres. Mon Cabinet. 31. Mitre sangsue. Mitra sanguisuga. M. Fusiformis, fulva, albo fasciata; striis transversis ; costellis longitudi- nalibus granulatis sanguines. Mus. , n. 27: Encycl., pl. 373, f. 10. Rumph. Mus., 1. 29, fig. V. List. Conch., t. 821, f. 38. ” Gualt. ind., t. 53, fig. F? Séba, Mus. 3, t. 49, f. 11. D’Argenv. Conch., pl. 9, fev Martini, Conch. 4,t,148, f. 1373, 1374. Habite l'Océan indien. Espèce jolie et très-remarquable, mais imparfaitement figurée dans la plupart des ouvrages, ce qui l’a fait confondre avec la sui- vante, qui en est très-distincle. Cette mitre est fusiforme, peu ventrue, d’an roux brun ou marron, avec quelques zônes blanches, et rembrunie aux extrémités. Elle est partout striée transversalement, et en outre, elle présente quantité de petites côtes longitudinales, un peu granuleuses et d'un rouge de sang; quatre plis à la columelle, dont l’inférieur est très-petit. Longueur, 37 ou 88 millimètres. Mon Cabinet. 32. Mitre stigmataire. WMitra stigmataria. M. Fusiformis, cinerea,: lineis punctatis sanguineis transversim- cincta ; striis transyersis ; costellis longitudinalibus granosis ; columell& triplicatà. Mus., n, 24. D'HISTOIRE NATURELLE. 209 Regenf. Conch. 1,t.1,f. 5. An voluta granosa. Gmel., p. 3453. Habite l'Océan indien. Sans doute cette mitre est très-voisine de la précé- dente par ses rapports; néanmoins elle en est bien distincte. L'une et Pautre sont fusiformes , étroites, peu ventrues, et offrent de petites côtes longitudi- males nombreuses, que des stries transverses rendent granuleuses; mais dans la première les raies d’un rouge de sang sont longitudinales, disposées sur un fond roussâtre ou marron, et dans celle-ci le fond d’un cendré glauque, présente des raies sanguines transversales, composées d’une double rangée de points rouges. Dans la première, le bord supérieur de chaque tour s’écarte de la suture; dans celle-ci, ce bord est appliqué sur la suture et se confond avec elle. Celle-ci d’ailleurs est plus petite, plus grêle et n’offre que trois plis à la columelle. Longueur , 34 à 35 millimètres. Mon Cabinet. Le voluta de Chemniz ( Conch. 10, t. 151, f. 1442, 1443) ne lui ressemble presque point. 33. Mitre filifere. Mitra filosa. M. Fusiformis , albida, tenuissimè cancellata ; cingulis elevatis , transversis rubris ; columell& quadriplicatä. Mus., n. 26. Gualt. ind., t. 53, fig. H. Favanne , pl. 31, f. C, 7. Born., Mus., t. 9, f.9, 10. Habite... Jolie espèce, bien facile à reconnoître-par son aspect, et qui, sur un fond blanc où blanchâtre, est rayée transversalement de rouge-brun , comme la M. rayée, n. 16. Cette coquille est fusiforme, très-finement treil- lissée par des siries qui se croisent, et présente des cordelettes transverses, élevées, purpurines, qui l’entourent et l’ornert agréablement. L'ouverture est blanche; la columelle, qui a quatre plis, tourne de manière à laisser un vide à la place de l’axe, comme si la coquille étoit ombiliquée. Longueur, 36 millimètres. Mon Cabinet. 34. Mitre fendillée. Mitra fissurata. M. Fusiformis, pallida , lævissima ; lineis albis obliquis reliculaiim cancel- latis ; columellé quadriplicatà. Mus., n. 28. Encycl., pl. 371,f.1,a, b. Habite... Espèce rare, très-singulière, et dont la surface, quoique fort lisse, ressemble par ses lignes en réseau, à de la faïence légèrement fendillée. Elle est fusiforme , comme les minarets , d’une couleur pâle, à réseau blanc, irré- gulièrement treillissé. Bord supérieur des tours serré contre les sutures; huit tours; quatre plis à la columelle, Longueur, 39 ou 40 millimètres. Mon 17. 217 2T0 ANNALES DU MUSÉUM Cabinet. Près de l’extrémité de la spire, on aperçoit des stries transverses, et d’autres plus petites qui se croisent avec elles. 35. Mitre lactée. Mitra lactea. M. Fusiformis, alba, sublævigata; striis transversis obsoletis subpuncticu- latis ; columell& quadriplicatà. Mus. , n. 29. Eucycl., pl. 371,f.2, &, d. Chemn. Conch. XE, t. 179, f. 1735, 1736. Habite... probablement l'Océan africain. Cette mitre, que Chemniz regarde comme une variété de la M. cornicule, n. 36, me paroit en être bien dis- tincte. Non-seulement elle devient beaucoup plus grande, mais elle est très-blanche, et lorsque les individus ne sont pas usés ou roulés, on aper- coit des stries transverses un peu pointillées que l’autre coquille n'offre pas. Six tours à la spire; quatre plis à la columelle. Longueur, 32 ou 33 millimètres. Mon Cabinet. Ù 36. Mitre cornicule. Mitra cornicula. à M. Subturrita, lævis, cornea, albo fulvoque nebulata , basi vix emarginata ; columellä quaüriplicatà. Mon Cabinet. Schroet. Einl. 1, p. 221, t. 1, f. 13. Chemn. Conch. XI, t. 170, f. 1733, 1734? Habite les côtes occidentales de l'Afrique. Petite coquille allongée, subturri- culée, lisse, d’un fauve pâle, tacheté de blane, et à peine échancrée à la base. Six ou sept tours à la spire dont la pointe est émoussée; quatre plis à la columelle. Longueur, 23 à 25 millimètres. 37. Mitre jaunâtre. Witra lutescens. M. Subturrita, lœvis, cornea, pallidè fulva, immaculata, basi vix emar- ginata ; columell& triplicat. Mus., n. 32. Encycl., pl. 372, f. 1? Habite les côtes occidentales de l'Afrique. Cette mitre n’est probablement qu'une variété de la précédente; cependant elle est unicolore, partout jau- nâtre ou d’un fauve roussätre, et n’a que trois plis à la columelle. Longueur, 20 à 24 millimètres. Mon Cabinet. Cette coquille n’est point rare. 38. Mitre striatule. Mitra striatula. M. Subturrita, acuta, albido-fulva; striis transversis elegantissimis ; colu- mellä quinque s. sexplicatä. Mus., n. 30. Encycl., pl. 372, f. 6. List. Conch., t. 819, f. 33. Habite, .. probablement les côtes d'Afrique. Celle-ci tient aux deux précé- D'HISTOIRE NATURELLE. 217 dentes par sa forme générale , et n’est de même que médiacrement échancrée à sa base. Mais elle est élégamment striée en travers, à spire plus pointue, et sa columelle a cinq plis et quelquefois six. Sa couleur est d’un blanc fauve, quelquefois d’un fauve-brun. On en voit beaucoup de petits indivi- dus et de moyens dans les collections, et j'en ai qui ont 44 millimètres de longueur. Dans les plus petits comme dans les plus grands, les stries sont toujours remarquables. 39. Mitre subulée. Witra subulata. M. Turrita, peracuta, albido-carnea, longitudinaliter sulcata, transverse striata ; columell& quadriplicatä ; caudä subreflexé. Mon Cabinet. : Schroet. Einl. 1,p. 302,t.1, f. 17. Habite... Cette mitre est allongée, étroite, subulée ou en forme d’alène, et a Paspect d’une vis. Elle est d’un blanc couleur de chair, nué d’un peu de fauve, et sa surface présente quantité de sillons longitudinaux qui ressem- blent à de petites côtes, et en outre des stries transverses, dont une au-des- sous de chaque suture est plus profonde que les autres. La base s’allonge en un petit canal un peu réfléchi et échancré; quatre plis à la columelle. Lon- gueur, 36 millimètres. 4o. Mitre cornée. Mitra cornea. ‘ DM. Ovato-fusiformis, acuta , lævigata, cornea, fuscata, apice basique trans- versim striata ; columellä quadriplicatä. Mus., n. 31. Q Habite les côtes occidentales d'Afrique. Celle-ci est toute brune, ou d’un roux très-brun et corné. Son dernier tour est ventru, lisse, mais ridé transversalement à sa base qui est à peine échancrée. Des stries transver- sales s’observent aussi près de la spire, Dans une variété, l’on aperçoit de petites taches blanches sous les sutures. Longueur, 26 à 28 millimètres. Mon Cabinet. 41. Mitre bigarrée. Aitra tringa. M. Ovato-acuta, lævis , basi rugosa, alba ; maculis ferrugineis inæqualibus ; labro internè striato, gibbosulo. Mon Cabinet. Encycl., pl. 374, f. 10,@, b. Schroet. Einl. 1, p. 220, t. 1, f. 12. Habite la Méditerranée, les côtes d'Afrique. La coquille que j'ai sous les yeux, et qui est très-bien représentée dans l'Encyclopédie, n’est peut-être pas réellement la même que le vo/uta tringa de Schroeter ; car les trois plis de sa columelle sont à peine apparens, et elle semble même appartenir au 27% 2) D12 ANNALES DU MUSÉUM A genre des colombelles. Elle est blanche, et ornée de taches ferrugineuses et inégales. Longueur, 24 à 25 millimètres. 42. Mitre mélanienne. Mitra melaniana. D. Ovato-fusiformis, lævigata, fusco -nigricans ; spiré acuté ; columellä quadriplicatà. Mus., n. 21. Poluta nigra. Chemn. Conch. 10, p. 168, t. 151, f. 1430, 1431. Gmel., p- 3452, n. 132. Habite les côtes de la Guinée et de l'Inde. Espèce bien remarquable, partout brune ou noirâtre, et ayant l'aspect d’une mélanie. Elle est ovale-fusiforme, peu ventrue, à tours médiocrement convexes, lisses; mais le dernier est un peu strié à sa base dont l’échancrure est médiocre. La columelle est blanchätre et a quatre plis. Longueur, 46 ou 47 millimètres. 43. Mitre pie. Mitra scutulata. * M. Ovato-acuta, transversim striata, fusco-nigricans , albo maculata ; colu- mell& quadriplicatä. PVoluta scutulata. Chemn. Conch. 10, p. 168, t. 151,f. 1428, 1429. Gmel., p: 3452; n. 131. Habite l'Océan indien. I paroît que cette mitre a de grands rapports avec la précédente; mais elle est plus ventrue , striée transversalement, et tachetée de blanc sur un fond d’un roux brun ou noirâtre. 44. Mitre dactyle. Mytra dactylus. M. Ovato-turbinata, transversim striata, albida Julvo nebulosa ; spir& brevi obtusé subdecussat& ; columellé sexplicatä. Mus., n. 34. Encycl., pl. 372, f. 5, a, b. List. Conch., t. 813, f. 23. Séba, Mus. 3, t. 53, fig. S. Chemn. Conch. 10, t. 150, f. 1411, 1412. Habite les mers de l'Inde. Cette mitre, peu commune, est épaisse, ovale, un peu turbinée comme un cône, à spire fort courte et convexe. Elle est blan- chätre, nuée ou tachetée de fauve pâle, striée transversalement, et treillissée principalement sur la spire, quelquefois même sur son dernier tour. Colu- meile à six plis. Longueur, 36 ou 37 millimètres. Mon Cabinet. 45. Mitre gauffrée. Mitra fenestrata. M. Ovato -cylindracea, albida, clathrata ; cingulis transversis acutioribus, Jusco maculatis ; columell& octoplicatà. Mon Cabinet. Encycl., pl. 372, f. 3, a, b. Gual. ind. , t. 28, fig. P. Habite les mers de l'Inde. Espèce très-rare, plus petite, moins turbinée et D'HISTOIRE NATURELLE. 213 moins épaisse que la précédente. Elle est ovale-cylindracée, blanchätre, et gauffrée ou grossièrement treillissée par des stries élevées, les unes longitu- dinales et obtuses, les autres transverses, plus aiguës, et agréablement mou- chetées de brun. La spire est courte et conique; huit plis à la columelle. Longueur, 28 à 30 millimètres. 46. Mitre crénelée. Witra crenulata. M. Cylindracea, alba, luteo nebulosa, transversim striata; striis impresso punctatis ; suturis labroque crenulatis. Mus., n. 35. Encycl., pl. 372, f. 4,4, b. Chemn. Conch. 10, p. 162, t. 150, f. 1413, 1414. Habite l'Océan des grandes Indes. Quoique voisine de la précédente par ses rapports, celle mitre en est très- distincte. Elle est plus cylindracée, plus finement striée et treillissée, et offre, sur un fond blanc, des nébulosités jaunâtres, un peu fauves, et qui forment des ondes longitudinales. Ses stries transverses sont plus remarquables que les autres, et finement pointillées. La spire est courte, conique, à sutures marginées et crénelées. Ouverture blanche; bord droit erénelé; huit plis à la columelle. Longueur, 30 à 32 millimètres. Mon Cabinet. Cette coq. est peu commune. 47. Mitre tricotée. WMitra texturata. M. Ovato-acuta, transversè sulcata, longitudinaliter striata, granosa , albo ferrugineoque variegata ; columell& quadriplicaté. Mus., n. 39. Encyel., pl. 372, f. 2. List. Conch., t. 819, f. 36. An Gualt. ind., t. 28, fig. O. Habite, .. Celle-ci s’éloigue un peu des précédentes par sa forme et sa colu- melle. C’est une coquille ovale-pointue, ventrue, grossièrement subgranu- leuse, ayant des sillons transverses pointillés et des stries longitudinales qui se croisent avec les sillons. Elle est panachée de blanc et d’un fauve ferrugi- neux, échancrée à sa base, et n’a que quatre plis à la columelle. Longueur, environ 30 millimètres. Mon Cabinet. Cette espèce est peu commune. 48. Mitre petit cône. WMitre conulus. D. Obversè conica, albida; striis transversis puncticulatis ; spirä crenulaté et granosä ; columell& sexplicatä. Mus., n. 36. Encycl., pl. 382,f.2,a, b. Chemn. Conch. 10, p. 163, 1. 150, f. 1415, 1416, List. Conch., t. 814, f. 13, b. Habite... Cette mitre a effectivement la forme et l’aspect d’un petit cône, mais les plis de sa columelle caractérisent son genre. C’est une pelite coquille turbinée, à spire courte, conique, pointue. Elle est munie de stries trans- 21/4 ANNALES DU MUSÉUM verses pointillées, et sa spire, légèrement crénelée à sa base, offre deux rangées de grains sous chaque suture. La couleur de cette coquille est un blanc nué de vert un peu rembruni par places, Six plis à la columelle, Lon- gueur, 32 millimètres. Mon Cabinet. 9. Mitre limbifère. Mitra limbifera. M. Ovato-fusiformis, lœvigata, basi rugosa, aurantio-fulva ; anfractuum limbo albo planiuseulo ; columellä quadriplicatd. Mus., n. 22. An V. aurantia. Gmel., p. 3454, n. 60. Martini, Conch. 4, t. 150, f. 1393, 1394? Habite... Espèce remarquable par sa moitié supérieure presqu’entièrement blanche, tandis que l’inférieure est d’un fauve orangé. Cette mitre est ovale- fusiforme, lisse, ridée transversalement à sa base, et à limbe des trois ou quatre derniers tours aplati en dehors , appliqué, et orné d’une large zône blanche. L’échancrure de la base est médiocre; la columelle a quatre plis dont l’inférieur est peu apparent. Longueur, 38 millimètres. 50. Mitre orangée. Mitra aurantiaca. M. Ovata, transversim sulcata , aurantia ; anfractuum limbo albo ; labro cre- nulato ; columellé quadriplicatä. Mus., n. 38. Encycl., pl. 375, f. 5. Habite... Quoique voisine de la précédente par ses rapports, cette mitre en paroït tres-distincte. Elle est plus petite, simplement ovale, à spire propor- tionnellement plus courte, et partout sillonnée transversalement. Sa couleur est orangée, et le limbe de chaque tour est orné d’une zône blanche. Le bord de l'ouverture est crénelé, et les quatre plis de la columelle sont tous bien apparens. Longueur , 21 à 22 millimètres. Mon Cabinet, 51. Mitre amphorelle. WMitra amphorella. M. Ovato - acuta, lævigata, basi sulcata, fusca ; anfractuum limbo lutescente albido ; columellé quadriplicaté , supernè callosä,. Mus., 0. 37. Habite... Petite mitre d’un brun livide, presque noir, ornée d'une zône d’un jaune blanchätre sous la suture de chaque tour. Elle est ovale, pointue aux extrémités, lisse en sa partie bombée, et sillonnée transversalement à sa base , ainsi que vers son sommet. On voit une callosité blanchâtre au sommet de la columelle , et au-dessous, quatre plis blancs, disposés comme dans. le caractère du genre. Longueur, 26 millimètres. Mon Cabinet. 52. Mitre couronnée. Witra coronata. D'HISTOIRE NATURELLE. 215 M.. Ovato-fusiformis , fulva vel spadicea; anfractuum limbo albo.subcrenato ; striis transversis excavato punètatis ; columellä quinqueplicatà. Mus., n. 56. Encycl., pl 371,f.6, @, b. Chemn. Conch. XI, p. 24, t. 178, f. 1719, 1720. Habite... Encore une espèce bien distincte, à tours bordés de blanc sous les sutures. Celle-ci est ovale-fusiforme, moins bombhée que la précédente, et d’une couleur rousse, presque rouge-brun. Sa surface présente partout des stries transverses , muuies de points enfoncés, et chaque tour paroît cou- ronné, son bord supérieur étant un peu crénelé et blanc; cinq plis blancs à la columelle. Longueur, 25 à 26 millimètres. Mon Cabinet. 53. Mitre zèbre. Mitra zebra. M. Ovato-oblonga, læviuscula, basi striata, spadicea ; lineis albis longitudi- nalibus ; labro sinuoso ; columellä quadriplicatä. Mus., n. 48. Encycl., pl. 372, f.8, a, b. List. Conch., t. 819, f. 35. Gualt. ind., t. 54, fig. L. Martini, Conch. 4,1. 149, f. 1386 , 1387. Voluta paupercula. Lin. B. Var. striée, à bord droit non sinué, Encycl., pl. 372, f. 7. Chemn. Conch. XI, t. 178, f. 1721, 1722? Habite l'Océan indien. Jolie espèce, bien remarquable par les lignes blanches, ondées et longitudinales dont elle est ornée et qui tranchent sur le fond rouge-brun de la coquille. Le bord droit de son ouverture est un pen épais et offre un sinus vers sa base. La coquille est ovale-oblongne, lisse, et seule- ment sillonnée à sa base. La longueur des plus grands individus est de 35 millimètres. Mon Cabinet. La coquille B pourroit être distinguée comme espèce : elle est partout striée transversalement, à raies blanchâtres plus étroites, et à bord droit non sinué. 54. Mitre cucumérine. Mitra cucumerina. M. Ovuta, ventricosa, aurantia vel castanea, sulcis elevatis, cincéa; Jascig aib@ subinterrupté& ; columell& quadriplicatà. Mus., n. 43. Encycl., pl. 375, f. 1. Martini, Conch. 4, t. 150, f. 1398, 1399. Habite... Cette mitre ressemble à un. petit barillet ventru, bien cerclé, Elle est ovale , bombée presque dans le milieu, rétrécie en pointe aux extré- mités, et munie de sillons élevéset transverses, qui Ja font paroitre comme cerclée. Sur un fond d’un rouge orangé ou d’un rouge brun, elle offre une 216 ANNALES DU“#MUSÉUM zône blanche, plus ou moins interrompue. Quatre plis à la columelle. Lon- gueur, 26 millimètres. Mon Cabinet. 55. Mitre patriarchale. Mitra patriarchalis. DT. Ovala, transversè striatæ, fulva s. spadicea ; anfractibus supernè angula- tis, plicatis, nodulosis , albo fasciatis ; basi granosä ; columellé quadriplicatä. Mus., n. 51. Encycel., pl. 374; f. 1, a, b. Specimen junius. Chemn. Conch. 10, t. 150, f. 1425, 1426. Habite l'Océan indien. Quoique petite, cette mitre est fort jolie et à caractères bien prononcés. Sa moitié supérieure ressemble à une thiare blanche, étagée, et couronnée de tubercules. Le fond rouge-brun de cette coquille ne se montre que comme une large zône sous la dernière rangée de tubercules, et au-dessous l’on retrouve une zône blanche qui recouvre la base granu- leuse de la coquille; quatre plis à la columelle. Longueur, 2 centimètres. Mon Cabinet. Nota. Les sutures sont distinctement crénelées. 56. Mitre muriculée. Mitra muriculata. M. Ovata, aurantia , transversè sulcata; sulcis granosis ; spiré brevi angu- latä, coronatä ; columell& quadriplicatä. Mon Cabinet. Chemn.. Conch. 10, t. 150, f. 1427. Habite... probablement l'Océan indien. Moins ornée et plus raccourcie que la précédente, cette mitre doit être distinguée comme espèce. Elle difière constamment de la M. patriarchale en ce qu’elle est partout d’une couleur orangée ou roussâtre et sans zône blanche; que sa spire est courte, bien étagée, éminemment couronnée de tubercules ; enfin que les sillons granu- leux de son dernier tour sont tons égaux. Longueur, 18 millimètres. 57. Mitre toruleuse. HWitra iorulosa. DT. Ovalo-turrita, tenuissimè decussata , cinerea ; anfractibus longitudinali- ter plicalis; plicis spadiceis, in ullimo anfractu supernè eminentioribus , compressis. Mus., n. 41. - e Habite... l’Océan indien ? Petite coquille ovale-turriculée, à spire allongée, pointue, bien étagée, composée de huit ou neuf tours. Elle est finement treillissée, et munie de plis longitudinaux, cemprimés, rouge-bruns. Sur le dernier tour, ces plis, plus élevés dans leur partie supéricure, y formert des tubercules colorés et comprimés. La coquille est faseiée de gris blanchätre et de fauve-brun. Bord droit strié intérieurement; quatre plis à la columelle. Longueur, 24 à 28 millimètres. Mon Cabinet. 58. Mitre bois d’'ébène. Yiira ebenus. D'HISTOIRE NATURELLE. ST 37. Ovato-acuta, lævis, basi subrugosa, nigra; anfractibus supra planula- tis ; line4 albidà transversali obsoletü. Mon Cabinet. Habite... Pétite coquille ovale-pointue, lisse, ayant seulement à la base deux ou trois rides transverses et obliques. Elle est d’un noir d’ébène; mais on aperçoit un peu au-dessous de chaque suture, une ligne blanche transverse, qui n’est bien apparente que dans les jeunes individus. Le bord supérieur de chaque tour s’aplatit un peu, et forme une petite rampe spirale; quatre plis à la columelle, dont l’inférieur est très-petit. Longueur, 19 millimètres. 59. Mitre harpifère. Mitra harpifera. . M. Ovato-turrita, aurantia, albo fasciata ; costellis longitudinalibus in sum- mitate nodulosis ; interstitiis transversè striatis ; columell& subquadriplicatä. Mus. , n. 53. An voluta cruentata. Chemn. Conch. 10, p. 171,t. 151, f. 1438, 1439 8. Var. rembrunie, moins turriculée, Habite l'Océan indien. Cette petite mitre est jolie, très- peu commune, et re- marquable par ses petites côtes longitudinales qui, sur chaque tour, ressem- blent à des cordes de harpe. On diroit que les différens tours de la spire sont autant de petites harpes empilées. La coq. est ovale- turriculée, d’un rouge orangé, fasciné de blanc, striée transversalement surtout entre les côtes. Quant aux petites côtes longitudinales, elles sont blanchâtres, et ont cela de singulier que près de leur sommet elles s’épaississent chacune en un petit nœud couleur de chair, quelquefois pourpré. La columelle à quatre plis. Longueur, 20 à 23 millimètres. Mon Cabinet. Dans la variété 8 qui est plus brune et plus raccourcie, la columelle n’a que trois plis. Mon Cabinet. 60. Mitre semifasciée. Mitra semi/asciata. M. Ovato-acuta, longitudinaliter costata, supernè alba, basi Julva; cos- tellis in summitate crassulatis ; columell& subtriplicatä. Mus., n. 40. Habite l'Océan indien. Voisine de la précédente par ses rapports, mais dis- tincte, moins jolie et plus petite, cette mitre est remarquable en ce qu’elle est blanche dans sa moitié supérieure, et fauve ou d’un roux brun inférieu- rement. Une ligne brune transverse et interrompue, se remarque dans la partie blanche de chaque tour. Longueur, 16 à 18 millimètres. Mon Cabinet. Gi. Mitre rétuse. Mitra retusa. M. Obovata, spadiceo-nigra; lineis albis longitudinalibus fasciam albam decussantibus ; spir& brevi, obtusiusculä, Mus., n. 49. 17. »S 218 ANNALES DU MUSEUM Schroët. Einl. 1, t. 1 fig. 11. Chemn. Conch. 10,t. 150, f. 1417, 1418? B. Var. rouge. Habite l'Océan indien. Constamment distincte de la M. rayée, n. 53, celte espèce est élégamment ornée, et remarquable par sa spire courte, presque rétuse. Sur un fond très-brun ou noirâtre, elle offre dans le milieu une zône blanche et étroite, qui disparoïit sur les vieux individus, et quantité de lignes blanches et longitudinales qui croisent cette zône. La moitié inférieure de cette coquille est sillonnée transversalément; son bord droit est épaissi et un peu renflé en sa face interne; la columelle a quatre plis. Longueur des plus grands individus, 22 à 24 millimètres. Mon Cabinet. La variété rouge est fort jolie. 62. Mitre à petites zônes. Mitra microzonias. M. Ovata, obtusè costata, basi transversè rugosa, fusco-nigricans ; fasciis albis angustis subinterruptis ; columell& triplicaté. Mus., n. 50. Encyel., pl. 374, f.8, a, b. Habite l'Océan indien. Petite coquille assez jolie, d’un roux très-brun presque noir, et ornée de zônes blanches, étroites, quelquefois interrompues, ne formant alors que des rangées transverses de petites taches blanches. On observe sur la coquille des côtes longitudinales obtuses, quelques rides trans- verses sur sa base, et trois plis sur la columelle. Longueur, 17 ou 18 milli- mètres. Mon Cabinet. 63. Mitre ficuline. Mitra ficulina. M. Ovata, transversè striata, rufo-fuscæ s. nigra; costis longitudinalibus supernè incrassalis, obtusis ; columellé subquadriplicatä. Mus., n. 47. Habite l'Océan indien. Celle-ci, d’un aspect moins agréable que la précédente, paroît s’en rapprocher, mais en est très-distincte. C’est une coquille ovale, d’un roux très-brun, quelquefois tout-à-fait noire, partout striée transver- salement ,et munie de côtes longitudinales obtuses, qui vont en s’épaissis- sant vers leur sommet. Ouverture blanchâtre; le plus souvent quatre plis à la columelle. Longueur des plus grands individus, 19 à 20 millimètres. Mon Cabinet. 64. Mitre nucléole, Mitra nucleola. M. Ovata, obsolelè costata, transversim striata, luteo - fulva ; columellé subquadriplicatä. Mus., n.44. Habite... Petite mitre qui ressemble par sa taille et son aspect à une colom- 65. 68. D'HISTOIRE NATURELLE. 219 belle. Elle est unicolore, jaunätre ou fauve, à stries transverses, avec des côtes longitudinales, plus ou moins effacées. Longueur, 15 ou 16 millimètres, Mitre unifasciale. Witre unifascialis. M. Ovato-acuta, transversim striata , obsoletè costata, aurantia ; anfracti- bus fasciä albid& cinctis. Mus., n. 45. Habite. ... Elle semble se rapprocher un peu par ses rapports de la M. oran- gée ; mais elle est moins ventrue, et un peu treillissée par des côtes longitu- dinales ; quatre ou cinq plis à la columelle. Longueur, 17 à 18 millimètres. . Mitre batonnet. Witra baccillum. M. Fusiformis , fusca , transversè sulcata ; columell& sexplicaté. Mus., n. 54. Habite... Espèce remarquable et bien distincte. Elle est allongée, presque cylindracée, fusiforme, brune, avec des ondes blanchätres, et sillonnée transversalement. Son ouverture est étroite et plus longue que la moitié de la coquille; six plis à la columelle. Longueur, 16 à 20 millimètres. Mon Cabinet. 7. Mitre conulaire. Mitra conularis. M. Angusto -turbinata , albo fuscoque marmorata ; striis transversis remotis ; spirä acuminaté. Mus., n. 55. Habite... Sa forme est celle d'un cône étroit et renversé, qui se termine par une spire acuminée. Cette coquille est marbrée de blane et debruu, et présente des stries distantes, transverses et une surface lisse entre les stries ; quatre plis à la columelle. Longueur 19 à 20 millimètres. Mitre sablée. Mitra arenosa. M. Ovato-turrita, decussata , subgranosa , alba; anfractibus fascié pallidè Julvä distinctis. Mus., n. 46. 4n vol. costata. Gmel., p. 3458. Habite... probablement l'Océan des grandes Indes. Elle se rapproche de la M. granuleuse, n. 13, par ses rapports ; mais elle en est très-distincte par ses granulations plus fines , par sa couleur blanche, par sa taille et sa forme particulière; quatre plis à la columelle. Longueur, 2 centimètres : queue un peu ascendante, . Mitre petit clou. Mitra clavulus. M. Turrita, lœvis, albido-lutescens ; lineis nigris transversis remotis ; an fractibus -complanatis. Mus., n. 52. 28 * 220 ANNALES DU MUSÉUM Habite... C’est une coquille turriculée, lisse, d’un blanc sale ou jaunâtre, ornée de lignes noires distantes et transverses, et dont les tours, au nombre de sept, ne sont point convexes; trois ou quatre plis serrés à la columelle. Longueur, 25 à 26 millimètres. 70. Mitre écrite. Mitra litterala. M. Ovata, ventricosa , albida ; striis transversis puncticulatis ; maculis fus- cis oblongis characteriformibus fasciatis. Mus., n, 42. Habite l'Océan indien. Je présume que cette coquille n’est qu’une colom- belle dont le bord droit de l’ouverture se trouve sans renflement intérieur. Longueur, 2 centimètres. 71, Mitre de Péron. WMitra Peronii. M. Ovato-conica, transversè sulcata, fusca vel aurantia ; anfractibus infra marginem albo fasciatis. Mus., n. 68. B. Var. plus courte. A7. limacina. Mus., n. 57. Habite l'Océan austral ou des grandes Indes. Péron. Cette coquille a un peu l'aspect de la M. couronnée, n.52; mais elle n’est point treillissée , n’a que quatre plis à la columelle, et sa zône blanche est à quelque distance au- dessous du bord de chaque tour. Longueur, 26 ou 27 millimètres. 72. Mitre côtes-obliques. Witra obliquata. M. Ovato-conica , fulva ; costis longitudinalibus subgranosis ; columellä qua- driplicatä. Mus., n. 58. Habite... Petite mitre ovale-conique, roussâtre, à côtes longitudinales nom- breuses, légèrement granuleuses , un peu obliques: Longueur, 15 ou 16 mil- limètres. 73. Mitre plombée. Mitra plumbea. M. Ovato-conica , lævis , nitida , cornea ; line& albidä transversali ; columellé triplicaté. | Mus. , n. 59. Habite... Cette petite mitre est lisse, luisante, d’un brun corné et comme plombé. Elle offre un peu au-dessous du bord de chaque tour une ligne transverse et blanchätre. Longueur, 16 millimètres. Cette espèce est bien distincte. 74. Mitre larve. Mitra larva. M. Ovato-conica, grisea, subfulva; costellis longitudinalibus supernè gra- nosis ; striis transversis. W ri D'HISTOIRE NATURELLE. 2 Mus., n. 60. Habite l'Océan des grandes Indes. Celle-ci est couleur de feuille morte ou d’un fauve grisätre. Elle est ridée transversalement sur la base du dernier tour. Le bord droit de son ouverture est strié intérieurement ; deux ou trois plis à la columelle. Longueur, 17 ou 18 millimètres. 75. Mitre pisoline. Müitra pisolina. M. Ovata, obtusè costata, lutescens, nigro maculata ; striis transversis in- tercostalibus ; columell& 2 s. 3-plicatä. Mus., n. 61. 8. Var. orangée, à taches blanches. Habite l'Océan indien. Petite coquille ovale, ventrue, presque globuleuse, et qui se rapproche par sa forme de la M. à petites zônes, n. 62. Elle est assez jolie, vivement colorée, et offre sur un fond jaunâtre clair, des taches noires et irrégulières. Elle a des stries transverses entre ses côtes ; des deux ou trois plis de sa columelle, le supérieur est fort grand. Longueur, 14 à 16 milli- mètres. 76. Mitre dermestine. Mitra dermestina. M. Ovata, costellata , inter costas transversè striata , castaneo et albo varie- gata; plicis columellæ quaternis. Habite l'Océan des grandes Indes. On prendroit au premier aspect cette petile coquille pour une variété de la M. à petites zônes, n. 62; mais ses stries transverses l’en distinguent, et la rapprochent davantage de la précédente, dont elle est néanmoins bien distinguée. Longueur 14 ou 35 millimètres. Mon Cabinet. 77. Mitre granulifère. Mitra granulifera. M. Minima, ovata; costis longitudinalibus granosis fulvis; labio intus dentato ; columell& obsoletè plicatä. Mus., n. 62. Habite POcéan des grandes Indes. Très- petite coquille dont la grandeur n’excède pas celle d’un grain de blé, et qu’il faudra peut-être placer parmi les colombelles. Elle est roussätre et garnie de petits grains disposés par rangées longitudinales. Longueur, 8 millimètres. Mon Cabinet. 78. Mitre cloportine. Witra oniscina. M. Ovato-acuta, decussata, granosa, fusco alboque fasciata ; columelié quadriplicatà. Mus., n. 63. Habite l’Océan des grandes Indes. Elle n’est guère plus grande que celle qui 229 ANNALES DU MUSÉUM précède, et constitue une espèce très-distincte. Sa surface est ornée de fas- cies alternativement blanches et d’un brun cendré. Elie est treillissée et granuleuse. Longueur des plus grandes, 15 millimètres. Mon Cabinet. 79. Mitre petit taon. Mitra tabanula. M. Ovatlo-acuta, fulva; cingulis elevatis transversis ; interstitiis longitudi- naliter striatis. Dlus., n. 64. Habite l'Océan des grandes Indes. Encore aussi petite que la précédente, cette mitre est rousse, ovale-pointue, et cerclée par une multitude de corde- lettes élevées, entre lesquelles on voit des stries fines et longitudinales. Bord droit crénelé; trois ou quatre plis à la columelle. Longueur, 13 milli- mètres. Mon Cabinet. 80. Mitre pou. Mitra pediculus. M. Ovata, spadicea , lineis albis elevatis transversis cincta ; labio crenulato. Mus., n. 65. Habite l'Océan des grandes Indes. Cette mitre, ainsi que les six précédentes, sont de la collection de Péron faite aux grandes Indes et à la Nouvelle-Hol- lande. Celle-ci est ovale, d’un rouge - brun, et cerclée par une multitude de cordelettes blanches et élevées; trois plis à la columelle. Longueur, 9 à 11 millimètres. Mon Cabinet. PL. S. | 4 Tr Th | LR DE] am) fu + £. Zom .17. s endorhizes . yon 1 Embr Zea Mavs. PL 6: à ñ ne) nm er De Tom 17. ne it À | a NA ) “TN = a DL $ 5 SU | ; (LL di | || Triticum Re Zom 2 PL. dé. SALE - GE E | Macrel se. E mbryons Ma cropodes EE —— ré Ru EE — Avena. Steiner ll 0 — = = 7 è EE Danthonia. Zomt .17. LUS Ds us 27 Danthonia. | Aven a. PL:8. fichard del.” Pharus. W4. Oryza. Zornr.17. Richard del. Embrvons Macropodes. Mes. fi 1) | Um ù à tl VA | ul W) th 41 | [| Il Ji j' } LU } ALU Le ll LG [Les ùse CS a \ fe) (a 2 D'HISTOIRE NATURELLE. 223 ANALYSE BOTANIQUE Des embryons Endorhizes ou monocotylédonés, et particulièrement de celui des Graminées. PAR M RICHARD. | px Botanique n'a été très-long-temps que la science qui apprenoit à nommer les plantes. Ainsi définie par les hommes les plus célèbres des siècles précédens, elle a dû borner ses vues au choix des caractères suffisans pour parvenir à distin- guer un végétal de ceux qui ont avec lui quelques rapports. De là ces divers systèmes arbitraires qui alors formoient la base de la science, et suivant lesquels on rangeoit et on range encore toutes les espèces anciennes ou nouvellement découvertes, dont le nombre s’est accru considérablement depuis quelques années. On doit beaucoup de reconnoissance à ceux qui dans leurs courses savantes ont ainsi-multiplié les matériaux de la science. On en doit encore à ceux qui, com- parant ensemble tous ces matériaux, les ont rassemblés sui- vant un ordre de convention pour qu'on puisse les recon- noitre facilement, et qui ont de plus simplifié leur nomen- clature et leur description. Il ne faut pas cependant oublier que ces distributions systématiques et arbitraires présentent 22% ANNALES DU MUSÉUM une science artificielle et factice; que la science véritable consiste, non à nommer les plantes, mais à connoître leur nature où leur organisation entière; que cette connoissance ne peut s'obtenir qu'en étudiant à fond toutes les parties de chaque végétal, leur structure interne et externe, leur déve- l'oppement, leur rapport avec les parties correspondantes des autres végétaux. Déjà un très-petit nombre de savans a dirigé ses travaux vers ce genre d'étude, et quelques-uns même ont tiré de leurs découvertes ou de leurs méditations des conséqnences générales. Is ont rassemblé les végétaux en groupes naturels sous le nom de familles, dont ils ont tracé les caractères com- muns. En présentant ce résultat, ils ont reconnu eux-mêmes qu'il étoit suscepüble d'amélioration et de nouveaux déve- loppemens. Ils ont pensé que plusieurs organes n’étoient pas éncore suffisamment connus, et que de leur examen compa- rauf on pouvoit tirer de nouvelles conséquences générales qui donneroient plus de précision aux caractères des familles. Enfin ils ont invité les amis de la vraie science à s'occuper particulièrement de ce genre utile de recherches. Nous croyons donc remplir leurs vues, qui ont aussi tou- jours été les nôtres, en présentant ici des observations sur embryon végétal et ses divers développemens. Plusieurs sont déjà très-anciennes et remontent à notre voyage en Amérique de 1781 à 1789; mais elles ne sont rassemblées que depuis une année dans le Mémoire actuel dont les dessins ont été déposés en mai 1810 au secrétariat de l’Ins- itut. Différentes circonstances en ont retardé la publication jusqu’à présent. L'exposition de ces faits suflira pour nous D'HISTOIRE NATURELLE. 295 mettre à l'abri de toute inculpation de plagiat, si plusieurs de ces observations présentent quelque conformité avec d’autres sur le même organe publiées récemment. D'ailleurs ce que nous dirons ici ne sera qu'un développement des principes déjà énoncés dans notre petit ouvrage sur l’exalyse du fruit, publié en-1808, et un supplément de preuves pour l'établissement de ces mêmes principes. Il sera question particulièrement d’embryons monocotylédonés, que nous préférons de nommer exdorhizes, parce que la partie nom- mée radicule ne devient point elle-mème la racine, mais ren- ferme le rudiment de la partie qui doit le devenir : ainsi les plantes erdorhizes sont les mêmes que lesmonocotylédonées, mais caractérisées autrement. Nous avons aussi appelé e2dos- perme le corps nommé par d’autres «lbumen où périsperme, existant dans plusieurs graines, formant Famande du fruit conjointement avec l'embryon qu'il entoure ou dont plus rarement il est entouré, et toujours recouvert avec lui de la même peau ou du mème tégument membraneux que nous désignons sous le nom d’épisperme (1). Les embryons munis de ce corps sont ezdospermiques; ceux qui en sont dépour- vus, n'étant alors recouverts que d’un épisperme, prendront le nom d’épispermiques. Ces définitions sont nécessaires pour l'intelligence de ce mémoire qui sera partagé en deux parties. La première contiendra les observations et descriptions ren- (1) Dans l’ouvrage cité nous avons nommé ce tégument périsperme ; mais ce nom ayant jusqu'à présent servi à désigner l’endosperme, ne doit plus être ap- pliqué à un autre organe, pour éviter la confusion des mots, et par suite celle des idées. à 17. 20 226 ANNALES DU MUSÉUM dues sensibles par des figures (1). Dans la seconde seront présentés les raisonnemens suivis des conséquences qui doi- vent en être déduites. PREMIÈRE PARTIE. Description de plusieurs Embryons endorhizes et de la gernunalion de quelques-uns. I. EMBRYONS ENDOSPERMIQUES. Anum dracunculus, Linn.(PLI, fig. 1.) Une graine, coupée longitudinalement, offre pour amande un endosperme (a) très-blanc, dur, farinacé, dont la sub- stance , endurcie vers la périphérie, semble y former une croûte comme cornée, qui adhère de toutes parts à l’épisperme. L’embryon (b) occupe l’axe de l’endos- perme et en touche avec adhérence la croûte superficielle par son bout radicu- laire ; il est droit, oblong, obtus par les deux bouts, et il présente , dans sa coupe longitudinale, une petite plumule, mieux nommée gemmule (g) presque demi- ovale, placée vers le quart inférieur de sa longueur. Carra palustris, Li (PI. I, fig. 2.) L’embryon (b) est aussi situé dans l’axe d’un endosperme (a) fermement charnu et presque corné, dont il n’atteint pas tout - à- fait la longueur. Il est linéaire, cylindracé, un peu atténué de bas en haut : sa radicule est courte, arrondie -obtuse, et sa gemmule (3) demi -ovale et un peu conique est manifestement composée de deux rudimens de feuilles em- boîtés l’un dans l’autre. Gaxwa indica 8, Linn., Lam. (PI. I, fig. 3, 4, 5,6.) Dans l’axe d’un gros en- dosperme sphérique, d’un blanc farineux et d’une dureté cornée , est renfermé un embryon (fig.3, a) oblong, plus ou moins en massue, dont l'extrémité in- férieure ou la radicule est un peu turbinée et emboîïtée dans une cavité particu- (1) Toutes les figures sont grossies dans les PI. 1, V, VI, et la leitre.g indique toujours la gemmule. Dans les autres, les petites lettres désignent les objets de grandeur naturelle, et les majuscules ceux qui sont grossis, D'HISTOIRE NATURELLE. 227 lière formée par une saillie interne de l’épisperme. La gemmule, inclinée vers le côté qu’elle avoisine, paroît d’abord conoïde {3 ,g): mais en fendant l’em- bryon dans le sens des faces de cette gemmule, on voit qu’elle est arrondie (4,g) et composée de deux rudimens de feuilles. Elle est placée si près de l'extrémité radiculaire, que le cotylédon (4, &) a cinq à six fois la longueur de la radicule (4,6). Germination. Par la germination, la partie de l'épisperme, répondant à la ca- vité qui recevoit l'extrémité radiculaire de l’embryon, se rompt circulairement et est rejetée sur le côté par la radicule qui saillit au dehors. Peu de temps après la sortie de celle-ci, l’épiderme ou la partie corticale de son extrémité se dé- chire; un tubereule conique se montre et forme en s’allongeant le rudiment de la première racine. Dès le premier développement de cette radicelle primaire, d’autres petits tubercules, perçant pareillement la partie corticale au pourtour de l'origine de la première, deviennent des radicelles secondaires ou latérales. Bien- tôt la partie inférieure du cotylédon, poussée au dehors de la graine par la ger- mination , se renfle et forme une bosse latérale. Tandis que la radicelle primaire (5, d) et les latérales s’allongent, cette bosse (5, c) grossit par l’effet de l’accrois- sement de la gemmule (5,2) qu’elle renferme et se rompt enfin par le sommet. Alors la gemmule sort et s'élève librement sous la forme d’un cône allongé(6,g) et composé de quatre à cinq rudimens de feuilles roulés les uns dans les autres. La bosse cotylédonnaire est devenue un tube (6, b, b) qui engaiîne le bas de la gemmule, Peu à peu les radicelles secondaires prennent un tel accroissement qu'on ne distingue plus guères la primaire (6, c) que par sa position : elles sont ioutes finement pubescentes, excepté vers leur sommet. Pendant que ces diverses parties se développent au dehors, la tête solide du cotylédon ( 5, a, 6,a ) reste incluse dans la graine, et acquiert, en pressant les parois de sa cavité, à peu près le double de grosseur. L’endosperme, seulement un peu humecté, ne présente aucun changement notable. Déjà la plantule a développé ses premières feuilles et les restes de la grainé lui sont encore adhé- rens; l’épisperme s’est ridé; l’endosperme s’est desséché en devenant blanc-mat, et tout le cotylédon sphacélé s’est converti en une membrane aride. SparGANIUM erecéum, Lin. (PI. I, fig. 7). La graine , attachée au sommet per- foré de sa loge osseuse, est obovée - oblongue et revêtue d’un épisperme entière- ment distinet de la membrane formant Pintérieur de la loge que nous nommons endocarpe. Elle contient , dans l'axe d’an endosperm® (7 ,«), farinacé très-blane, un embryon (7, b) étroitement cylindrique ou filiforme, un peu plus court que lui et renversé comme la graine. L’extrémité radiculaire de cet embryon est im- 20 298 ANNALES DU. MUSÉUM médiatement recouverte par lépisperme et renferme un très-petit tubereule radicellaire. Tout près de cette extrémité est une gemmule (7,g) très-menue, très-courte, convexe-obtuse et un peu latérale. Ty latifolia, Lin. (PL I, fig. 8, 9.) Un endocarpe jaunâtre, oblong-ové, hérissé extérieurement de petites aspérités et coriace, contient avec adhérence une graine à peu près de même forme. L’endosperme (8, & ), dont la surface est jaunâtre et l’intérieur blanc et durement charnu, renferme entièrement un embryon (8, b)semblable en position , direction, forme et structure à celui de la plante précédente. Germination. On uouve dans les marécages, au mois d’avril, des amas de fruits germant spontanément. Ils ont encore (9) leur stipes garni de ses poils et sont terminés par le style et le stigmate qui persistent. Embarrassés les uns dans les autres par ces parties, ils restent, quoiqu’en germination, diversement cou- chés soit sur l’eau, soit sur d’autres corps, soit sur le sol humide. Leur germi- nation se fait de la manière suivante. L’épicarpe ou épiderme du fruit (9, æ),se fendant longitudinalement d’un côté , se détache de l’endocarpe (9, }, qui par là est mis en partie à découvert. La radicule perce le sommet de celui-ci : la radicelle croît, se renfle près de son origine en’ manière de petit tubercule, et, poussée loin du fruit par le cotylé- don (9,c) qui s’allonge sous la forme d’un fil cylindrique et vert, elle se fixe et se charge d’un chevelu très-délié, plus serré et plus remarquable sur.son renfle- ment. Enfin, l'extrémité du cotylédon se dégage de ses enveloppes où elle n'est retenue par aucun renflement; elle tend à se redresser ; et la gemmule sort latéra- lement un peu au-dessus de l’origine de la radicelle. Azrium cepa, Lin. (PI. I, fig. 10, 11.) Une graine coupée longitudinalement fait voir un embryon (10, &)courbé en cercle irrégulier autour du centre so- lide d’un endosperme, dans lequel il est complétement inclus. Près de son extré- mité radiculaire, qui est la plus voisine du stile, on aperçoit diflicilement , dans son intérieur, un petit point à peine saillant qui indique la gemmule (10, g). Mais lorsque, par la germination, la radicelle (11 , &) et le cotylédon ( 11,8) ont acquis un peu de longueur hors de la graine, la gemmule (11,45) se manifeste un peu au-dessus du collet renflé de la radicelle, sous la forme d’un petit cône oblique. Carex depauperata, Good. (PI I, fig. 12, 13.) La forme turbinée, générale dans l'embryon du genre @urex, est susceptible de varier par Pabsence ou la présence d’angles ; par la compression et par le sommet, Celui de cette espèce (12), dégagé ici de son endosperme , est sans angles, un peu renflé vers son extrémité D'HISTOIRE NATURELLE. 229 supérieure qui est manifestement convexe. En le coupant longitudinalement (13) ou en le disséquant, on aperçoit, un peu au-dessus de sa base radiculaire, une gemmule (13,g) courte et conoïde , très-rapprochée d’un des côtés de la surface. Sczerra gracilis, Sw. (PII, fig. 14, 15.) La graine sphéroïde des Se/eria est terminée inférieurement par un rétrécissement subit en forme de petit mamelon, qui est emboité dans une cavité particulière da péricarpe. L’embryon (14,b) est en partie enfoncé dans ce mamelon où une lame mince de l’endosperme le re- couvre et en majeure partie renfermé dans le corps sphéroïde (14, &) de celui-ci. L’embryon de cette espèce est (15 ) turbiné inférieurement et sa partie supé- rieure est un peu dilatée en manière de petit disque orbiculé et presque plane dont le centre est relevé d’une petite bosse mamillaire. La gemmule ( 14, g ) est située et conformée comme celle de la plante précédente. Scrreus supinus, Lin.( PI.T, fig. 16, 17, 18, 19.) L’endosperme (16, a) ren- ferme dans sa base même (16, ) un très-petit embryon fongilliforme (18), c’est-à-dire, en forme de petit champignon, rétréci à sa partie inférieure en ma- nière de pivot cylindracé et dilaté subitement à son sommet comme en un petit chapeau un peu épais, presqu’orbiculé, un peu concave par sa face inférieure et légèrement convexe en dessus avec une très- petite pointe centrale. Un peu au- dessus du bout inférieur, qui constitue une radicule (18, «) courte et obtuse, est une bosse latérale (18,b) inclinée et appuyée sur la radicule dont elle a presque la direction. Gest dans cette bosse qu’est renfermée une très-petite gem- mule (19, ), qui en suit la direction et en imite la forme. Germination. La radicule, sortant par la base du péricarpe, paroïit entrainer avec elle la petite bosse; et le reste de embryon demeure inclus. A peine la ra- dicule est-elle dehors, que son bout semble s’écorcher pour mettre à découvert le tubercule radicellaire : celui-ci, d’abord convexe puis conoïdal, se prolonge enfin en une radicelle (17,f) presque capillaire et finement pubescente; autour de la base de laquelle on reconnoît pendant quelque temps le vestige annulaire ( 17,e) de l’excoriation de la radicule. La petite bosse gemmulifère s’allonge et grossit plus promptement que la radicelle, varie dans sa direction selon la posi- tion de la graine ou les obstacles qu’elle rencontre, et devient un prolongement filiforme du cotylédon qui saillit enfin hors de terre. Si on coupe longitudinale- ment ce prolongement, lorsqu'il a acquis deux ou trois fois la longueur de la graine, on voit (17, d) qu'il est solide dans le quart ou le tiers inférieur de la longueur, et que du reste il forme un tube qui n’offre aucune issue et dans lequel (17,c) est renfermé le rudiment presque plane et non roulé de la première 230 ANNALES DU MUSEUM feuille. Enfin celui-ci perce le tube près de son sommet pour en sortir et prendre son accroissement ultérieur. Durant cette germination, la partie du cotylédon supérieure à la bosse a consi- dérablement changé de forme et de volume, en restant dans le fruit. (Comparez les fig. 16 et 17.) Elle s’est enfoncée ( 17, b ) jusqu'aux trois quarts de la longueur de l’endosperme (17, @& ); etelle a pris la forme d’un cylindroide oblong et un peu en massue, qui S’unit à la partie dégagée de la graine par un rétrécissement subit et notable de sa base. Serrpus maritimus, Lin. (PI. 1, fig. 20, 21.) L’embryon (20 ) de cette espèce est un peu en massue courte, dont la tête est grossie en sphéroïde déprimé. Au lieu d'une seule bosse latérale, comme dans le précédent, on en trouve deux su- perposées , dont l’inférieure (21 ,g) plus grosse renferme Ja gemmule, Hyprorezris purpurea, Mich. (PI. I, fig. 22.) Chaque graine est renversée dans sa loge nuculaire , dont elle prend la forme courte et ovée. L’embryon, fort petit, est situé al’ombilic de la graine et de son endosperme blanchätre, dur, un peu fa- rinacé. Cet embryon (22), conformé en lentille épaisse , est recu par une de ses faces dans une légère concavité de l’endosperme; l’autre, un peu moins convexe et munie d’une très-petite pointe centrale , est immédiatement recouverte par l’épis- perme qui y adhère. La gemmule ( 22,9) est presque globuleuse et fort grosse relativement à l’embryon : elle indique par sa direction que celui-ci est renyersé comme la graine. © 1:45 5 Caromsa aguatica, Aubl. (PL, fig. 23. ) Inséparable de la précédente dausila coordination naturelle des genres, cette plante n'offre, dans la structure de sa graine, d’autre différence notable que la forme de son embryon. Celui-ci (23) est lenticulaire plus aplati; et la face qui regarde l’endosperme a dans son milieu une protubérance courte, turbinée et obtuse. Cette modification dans la forme de l'embryon en a nécessité une dans celle de la gemmule ( 23, g ), qui ressemble à un petit mamelon. é Nymrnozanrucs vulgaris, Nympuæa lutea, Lin. (PL. V, fig. 51, 52.) L’em- bryon de cette plante est un petit sphéroïde un peu turbiné , blanchätre ; situé à l'extrémité la plus étroite d’un endosperme ovoide-oblong, farinacé. Il est en partie enfoncé par son bout convexe dans celui-ci; et le reste est immédiatement recouvert par le tégument séminal. Sa surface est parfaitement indivise et con- tinue. En le disséquant , on voit d’abord une sorte de tunique extérieure( 51,c), mince, charnue et un peu coriace, dans laquelle est renfermé un corpuscule (57, b) de même forme et attaché à celle-Ià seulement par le bout (51, a) opposé à l’endosperme. La tunique est le cotyZédon : le bout par lequel elle s’unit au cor- D'HISTOIRE NATURELLE. 231 puscule est la radicule : ce corpuscule est la gemmule. Cette genrmule (51,8) est profondément divisée en deux pièces charnues et épaisses; entre lesquelles est cachée une troisième pièce (52, à) ovale, lenticulaire, ayant à l’un de ses bords une espèce de petite dent (52, c). - IL EMBRYONS ÉPISPERMIQUES. Tricrocmix maritimum, Lin. (PI. I, fig. 24.) La graine, fixée au fond de chaque akène par un petit pivot, renferme, sous un épisperme un peu épais et coriace, un embryon (24, a) oblong et un peu triangulaire. En le fendant selon sa longueur ; on trouve facilement dans son intérieur une gemmule (24,9 )qui est peu distante de son extrémité inférieure et très-rapprochée de sa face dorsale. Si on coupe transversalement l’embryon autour de la base de la gemmaule, on dégage celle-ci (24, gg), et on voit que sa forme est demi-elliptique et aplatie dans le sens de la face dorsale : sa direction ascendante indique que l’embryon est dressé comme la graine. SoueucuzertA palustris. (PI. I, fig. 25, 26, 27.) Chacune des capsules, qui ne s'ouvrent point, renferme deux graines ( 25) fixées distinctement au fond de sa cavité qu’elles ne remplissent pas. Chaque graine contient pour amande, dans un épisperme fort épais et comme nuciforme, un embryon ( 26, a) obové et un peu comprimé. Sur une des faces de celui-ci , on aperçoit près de sa base une cer- taine petite marque qui indique la place de la gemmule. En enlevant vers cet endroit un lambeau mince de l’embryon, on met à découvert une très-petite gemmule (26, 3) conique-aiguë ; qui par conséquent est très-voisine de la sur- face. Germination. Je n’ai observé que des plantules déjà un peu avancées, telles que celle que j'ai dessinée (fig. 27). L’épisperme vide et fendu en partie comme en deux valves, ou étoit entièrement détaché, ou adhéroit par sa fente à l’une ou à l’autre des radicelles et rarement au cotylédon. Celui-ci (27, &),ayant ac- quis à peu près le double de sa longueur primitive, étoit dressé, un peu fané, linéaire-oblong,aminci en pointe, un peu creusé et comme déchiré du côté de la gemmule. Déjà celle - ci avoit développé plusieurs feuilles d’inégale grandeur, dont les bases engainantes s’embrassoient alternativement sans former de tige proprement dite. Ces feuilles étoient sétacées, cylindracées et marquées d’un sillon très-étroit sur leur face interne. La radicelle primaire ( 27, b)étoit déjà flétrie : sa base offroit un petit renflement, autour duquel on apercevoit encore la trace de rupture de la radicule. Quelques radicelles latérales , ordinairement deux (27, c), plus grosses et beaucoup plus longues que la primaire un peu 239 ANNALES DU MUSÉUM au-dessus de laquelle elles prenoient naissance, s’étoient emparées des fonctions que celle-ci ne pouvoit plus remplir. Buromus wmbellatus, Lin. (PI. I, Gg. 28.) Un épisperme porté sur un pivot, oblong-cylindracé, strié longitudinalement, épais et presque cartilagineux , re- couvre immédiatement un embryon (28, «) pareillement cylindracé et arrondi- obtus par les deux bouts. On y trouve intérieurement, par la dissection, une pe- tite gemmule ( 28, s ) demi-ovée, située yers le tiers inférieur de sa longueur, et obliquement rapprochée de la surface : on juge par sa direction ascendante, que l'embryon a celle de la graine. VazzisxeniA spiralis, L. (PI. I, fig. 29.) Uneenveloppeparticulière( commune à toutes les HypxocnAripÉEs, mais variable par sa forme et sa surface ) ren- ferme chaque graine, qui en prend la forme oblongue-cylindracée et un peu en massue. Cette enveloppe, qui est peu épaisse et coriace, devient extérieurement comme filamenteuse; et elle est terminée supérieurement par une longue pointe mousse, inférieurement par un support qui l’attache plus particulièrement au sarcocarpe. La graine, revêlue de son épisperme membraneux et transparent, est fixée au fond (29, & ) de sa loge. L’embryon (29, b , e), que celui-ci recouvre immédiatement et sans adhérence, a sa petite gemmule (29, g)située vers le tiers supérieur de sa longueur et rapprochée d’un des côtés. Cette gemmule, étant dirigée inférieurement, démontre que l’embryon a une direction contraire à celle de la graine. Eropra guyañnensis, Rich. (PI. I, fig. 30.) Les différences entre les graines de celte plante et celles de la précédente ne consistent qu’en légères modifications dans la forme et la surface de l'enveloppe extérieure. Leur embryon (30, 2, c) offre exactement les mêmes caractères; seulement, la gemmule {30, g)est située vers le milieu de sa longueur. Axrisma? damasonium. (PI. I, fig. 31.) Chaque graine, fixée au fond de son akène par un podosperme (cordon ombilical ) oblique, est oblongue, arrondie- obtuse par les deux bouts et marquée sur l’une et l’autre face d’un sillon longitudi- nal qui n’atleint pas l’estrémité supérieure. L’embryon, qui en constitue seul toute l'amarde, est fléchi en fer-à-cheval, dont les deux branches { a, b ) dirigées par en bas sont rapprochées lune de l’autre et séparées seulement par une sorte de cloison. On trouve dans la plus grosse (a), à peu près àla hauteur de cette cloison, une gemmule ( g) conoïdale rapprochée du côté externe et dirigée par en baut. Il est évident que la partie la plus grosse de l'embryon, étant située au- dessous de la gemmule , forme la radicule ( 31 , & ) et que tout le reste appartient eu cotylédon (31, &). Mais la direction de l'embryon, relativement à celle de la D'HISTOIRE NATURELLE. 23: graine, n’est pas aussi facile à établir que la dénomination de ses parties. Cepen- dant, en remarquant que le podosperme se porte plus du côté du bout cotylédo- maire( 31,b) et y contracte une connexion particulière, on reconnoît que le sommet du cotylédon répond mieux au podesperme que celui de la radicule , et que par conséquent l’embryon est renversé; c’est-à-dire, qu'il a une direction contraire à celle de la graine. Nasas fluvialis, Lin. (PI I, Gg. 32, 33.) La graine (32, a) est oblongre-ovée comme le péricarpe indéhiscent qui la renferme. Elle est attachée à celui-ci par un hile latéral (32, b) situé à une certaine distance de son extrémité supé- rieure; de manière que les cinq sixièmes à peu près de sa masse sont inférieurs à son point d’attache : elle est donc vraiment pendante. Son épisperme, membra- néux très-mince et transparent, recouvre immédiatement un embryon de même forme qu’elle. Vis-à-vis du hile (33 ,c ), mais du côté opposé, est renfermée une gemmule ( 33,5) courte, conique et dirigée supérieurement. Ce dernier caractère prouve que l’embryon a une direction contraire à celle de la graine, c’est-à-dire qu'il est dressé. On voit aussi que la radicule (33, a) est cinq à six fois plus grosse que le cotylédon ( 33, b). Poramocrrox natans, Lin. (PI. I, fig. 34, 35.) La noix de cette espèce est à peu prèsovoide, comprimée, très-dure et épaisse : son processus intérieur est aussi fort épais. La graine , en forme de massue allongée, est fixée par son petit bout(3#, a) à la base de la face supérieure du processus, autour duquel elle se recourbe en anneau incomplet et irrégulier. Puisque la graine dans sa courbure dirige son extrémité libre (34, b ) vers la base du péricarpe et que son sommet avoisine plus cette base que son point d’attache; il convient de la regarder comme pendante. L’embryon recouvert par un épisperme membraneux et transparent , a la même forme que la graine : par sa section longitudinale on découvre vers le milieu de sa longueur une gemmule (35, >) oblongue et ligulée, voisine de la surface de la grande courbure et dirigée supérieurement, c’est-à-dire, vers le point d’attache de la graine. On voit donc clairement que l'embryon a une direction contraire à celle de cette dernière; et que sa plus grosse extrémité (35, & ) est la radiculaire et sa plus menue (35, 2) la cotylédonaire. Poramocrron densum, Lin. (Pl.T, fig. 36,37.) La noix, dont le brou se sépare spontanément, est à peu près orbiculée-reniforme, fort mince et fermement car- tilagineuse : son processus interne a aussi fort peu d’épaisseur, et s’amincit de plus en plus vers son sommet. La graine, courbée comme celle de la précédente espèce a néanmoins une forme bien différente : l'extrémité supérieure qui dans l’autre s’amincit, se dilate dans celle-ci et s’arrondit comme pour se rouler en spirale, 17. 30 234 ANNALES DU MUSÉUM Sur la face de cet arrondissement qui s'appuie sur le processus, est une aréole (56, a ) orbiculée et rousse; par laquelle la graine est attachée à la partie supé- rieure de celui-ci : elle est donc aussi révoluto - pendante. L’embryon, dénué de son enveloppe épispermique , ressemble assez à certaines espèces de coquilles du genre planorbe. Conformé en massue grèle, il roule son extrémité supérieure, qui devient graduellement déliée comme un fil, en volute ou spire à plusieurs tours. À un peu moins de moitié de sa longueur totale, en mesurant du gros bout (37, a ), on trouve dans son intérieur une gemmule (37 , g ) oblongue, ligu- lée , qui suit la direction de la spire dans le sens de extrémité grèle (37, D); ce qui établit entre l'embryon et la graine le même rapport de direction qui a été remarqué dans l'espèce précédente, Zanicnerria palustris, Lin. (PI. I, fig. 38, 39, 40, 41.) Chaque akëne est ob- long, un peu arqué, assez longuement stipité et stylifère: son endocarpe est mince, fermement coriace et garni sur son bord dorsal d’un rang de petites pointes. La graine (38 , «) qu’il renferme est oblongue , obtuse par les deux bouts, attachée (38,8) un peu obliquement par son extrémité supérieure au haut du bord interne du péricarpe, et par conséquent pendante. Son périsperme est tel- lement mince et transparent, qu'il laisse apercevoir l’embryon qu’il revêt im- médiatement. Du fond du péricarpe, que son bout inférieur notablement renflé (39, a) rem- plit seul , l'embryon monte vers le point d'attache de la graine; de là il s’inflé- chit brusquement , descend jusqu’à sa tubérositè basilaire , s’infléchit de nouveau pour remonter et redescendre et former ainsi un second tour de volate, et quel- quefois en commencer un troisième. Dans ce trajet , il diminue graduellement de grosseur et devient délié comme un fil dans son dernier tour. On peut done le considérer comme une massue renversée, menue et roulée sur elle-même en spire allongée. La tubérosité basilaire de l'embryon est terminée comme par une petite aréole (39, a) orbiculée, formée par le sommet du tubercule radicellaire qui, vers ce point, n’est recouvert que par un épiderme extrêmement mince. En coupant lon- gitudinalement l’embryon vers son premier pli supérieur, on aperçoit une gem- mule oblongue (39, g), qui, située un peu au delà de ce pli, suit la direction de la spire, et indique que l'embryon est dressé , tandis que la graine est ren- versée. ; - Germination. Le péricarpe se fend par le haut du dos; le pli supérieur de Pembryon, ayant rompu l’épisperme, sort par la fente ; une partie du cotylé- don saillit au dehors sous la forme d’un arc, et bientôt toute la partie roulée se / D'HISTOIRE NATURELLE. 23 dégage : l’extrémité radiculaire reste enfermée dans le péricarpe jusqu’à ce que la radicelle croissant repousse celui-ci et s’en débarrasse complétement; ce qui n’a ordinairement lieu qu'après le développement de la première feuille et quelque- fois même après celui de la seconde. Sur la courbure du cotylédon nouvellement sorti se fait une fente longitudi- nale, dans laquelle on apercoit (40,3) le rudiment linéaire de la première feuille. Pendant que le cotylédon tend à se développer, l'extrémité radiculaire, quoiqu'incluse, éprouve aussi les effets de la germination. L’épiderme de l’aréole basilaire (39, a) s’oblitère ; celle-ci devient un trou rond, par lequel on aperçoit le sommet d’un tubercule interne : bientôt, par l’aggrandissement graduel de ce trou, la partie de la radicule qui recouvroit le tubercule s’épanouit sous la forme d’un disque orbiculé (40 , a), au centre duquel celui-là forme une saillie( 40,b) conique-obtuse. Par suite de la germination, ce tubercule devient une radicelle (41, b) filiforme; la tubérosité basilaire ( 40, c) diminuant de grosseur à mesure que la zigelle ou rudiment de tige (41, c ) et le cotylédon (41, Z)s'allongent, le petit disque radiculaire (40, a) deyient plus sensible (41 , & ) et paroit comme une expansion perfoliée de la base de la tigelle. La première feuille développée (41,2) est engaïnée par la moitié inférieure du cotylédon dont la partie supérieure prend la couleur verte de celle-là. III. EMBRYONS MACROPODES (1). * Graminées. Daxruonra decumbens, Cand. ( PI. IV.) La glume fructifère (a) , entièrement close, renferme une caryopse (2) une fois plus courte qu’elle (b). Cette caryopse est ovée (C, D), obtuse avec deux petites pointes stylaires, portée sur un pivot très-fort à sa base et obscurémenti carénéesur les côtés. Sa face interne (C), très- légèrement déprimée dans son milieu, est marquée sur la moitié inférieure d’une petite bande discolore étroitement linéaire. L’aréole embryonale (D, 1) atteint presque la demi-longueur de sa face externe ou dorsale, qui est plus convexe que l’autre. Le péricarpe est jaunâtre, très-lisse, membraneux-très - mince et offre, vers la base de l’aréole embryonale, un point roussätre. L’épisperme, qui ne peut être distingué du péricarpe que vers celte aréole, est adhérent de toutes (1) Ce sont des embryons endorhizes dont la base est fermée par un corps plus volumi- neux ou une expansion plus ample que le reste de l'embryon. (2) Fruit supre ou libre monosperme et ne s’ouvrant point, dont lépisperme se confond avec l’endocarpe ou membrane interne du péricarpe, 30 * 236 ANNALES DU MUSÉUM “parts à l’endosperme et revêt immédiatement toute la face antérieure de embryon, et toute-son extrémité inférieure même postérieurement. L'embryon, dans cette plante comme dans toutes les Graminées, fait corps avec un disque dorsal , épais charnu, presque plane extérieurement, convexe posté- rieurement, et non susceptible de développement dans la germination, que nous proposons de nommer 2ypoblaste , en réservant le nom de b/aste pour la portion de l'embryon, seule susceptible de développement et composée du cotylédon et de la tigelle. Cet hypoblaste ( E, 1 }est creusé antérieurement dans son milieu d’une fossette longitudinale échancrée à la base, dans laquelle est couché Île blaste (E, 2) de forme cylindroïde, obtus par les deux bouts dont le supérieur (E,3) plus large surmonte un peu la fossette, et l'inférieur (E, 4) déborde un peu lPéchancrure. Toute la face antérieure du blaste est à découvert; seule- ment les bords de la fossette couvrent une portion de ses côtés, en Pembrassant un peu au-dessous de son extrémité supérieure, comme pour le mieux contenir. En coupant longitudinalement an fruit par le milieu de l’aréole embryonale, on voit que l'hypoblaste (F, 1 ) est appliqué obliquement sur la base d’un gros endosperme { F,5), très-blanc-farineux; que le blaste est immédiatement fixé et continu à l’hypoblaste par le milieu (F,4) de sa longueur et libre par ses deux extrémités. L’inférieure (F, 2 ) de celles-ci contient à l’intérieur de sa base un tubercule comme médullaire, beaucoup plus court qu’elle : la supérieure (F,3) forme un conoïde creux intérieurement qui renferme dans sa cavité deux rudimens de feuilles. Germination. La germination se faisant dans la glume, la radicelle (T, 2) perce la base dorsale de la paillette extérieure (LE, 1} : lestrémité supérieure (1,5} sort latéralement de la glume. En séparant la paillette intérieure (K,1)etle fruit ainsi germant (K,2), on voit que le bot inférieur ( K, 3) du blaste s’est un peu accru et s’est fendu pour laisser sortir la radicelle (K , 4 ): que son extré- mité supérieure s’est prolongée en un long tube cylindrique (K, 5), membra- neux un peu charnu, dont le sommet se fend enfin latéralement pour donner issue au rudiment (K, 6 ) de la première feuille. Quelquefois aussi c’est le bout mème du blaste qui perce la glume; alors il s’allonge davantage (G,1)et la radicelle (G, 2 }en sort par une ouverture la- térale et éloignée du sommet. Si la partie supérieure du blaste monte directement (G,3), elle sort alors par le sommet de la glume. La coupe longitudinale d’un embryon germé démontre , que la seule partie du prolongement basilaire(H, 1 } d’où est sortie la radicelle (H, 2), est cave, et que tout le reste en est solide; que D'HISTOIRE NATURELLE. 237 la partie inférieure (H,3) du prolongement supérieur (H, #4) du blaste est s0< lide et forme un principe de tige , dont l'embryon n’offroit aucun indice avant la germination. ZxA mays, Lin. ( PI. II.) La portion du péricarpe , qui revêt la base de la face interne ( a ) de chaque caryopse, est décolorée et comme ridée : en l’enlevant, on découvre une aréole (G, 1 )orbiculée, brune, qui se prolonge un peu (F,7) sous l'extrémité inférieure (D, 5 ) de l’hypoblaste, T'aréole embryonale (b,1) occupe une grande partie de la face externe, qu’elle égale presque en longueur; etelle est circonserite à une petite distance de ses bords par deux lignes (b,2,3) extrêmement déliées et formées par deux vaisseaux (D,2) qui, naissant de la cicatrice stylaire ( 2, 4), rampent sous l’épicarpe transparent. Celui-ci, qui est mince et semblable à du parchemin , est comme doublé intérieurement par une sorte de lame blanchätre un peu charnue, provenant de la réunion du paren- chyme du fruit ou sarcocarpe et de l’épisperme , et adhérente à toute la surface de l’amande. Par la coupe transversale (E ) et longitudinale ( F) d’un fruitentier, on voit que l'embryon (E, 2. F,1) est fort gros relativement à l’endosperme (E,1. F,2)et qu'il constitue plus du quart de la masse totale de l’amande. La face antérieure (D, 3 ) de l’hypoblaste, mise à découvert par le dépouille- ment (D, 1) de l’aréole embryonale, est généralement ovale et un peu plane: elle offre dans son milieu une fente longitudinale (D, 6) totalement close par le rapprochement des bords, ou un peu entr'ouverte à son bout supérieur. Aminci et un peu recourbé par son extrémité supérieure (F, 9), il s’épaissit beaucoup inférieurement et devient fortement convexe par sa face postérieure (E, 2. F,1). En retranchant (G, 1 ) les bords de la fente de lhypoblaste (G, 2), on découvre le blaste qu’elle renfermoit. Il paroït comme un corps à peu près fusiforme , fixé vers le milieu par sa face postérieure et ses côtés (G, 3) et libre par ses deux ex- trémités ; dont l’inférieure (G,5) est conique et la supérieure (G,6 ) oblongue et obtuse. Par la coupe transversale de embryon, on voit que les deux bords (E,3) de la fente ne sont que contigus l’un à l’autre, et que la portion moyenne (G, 7 )du blaste restée libre égale à peu près le quart (E, 4) de sa circonférence; quelque- fois même la connexion se fait par les neuf dixièmes de celle-ci. La section longitudinale de l’embryon démontre; que le blaste (F, 3)et l’hy- poblaste (F', 1) font intimement corps par le lieu de leur connexion (F, 8 ); que l'extrémité inférieure (F, #) du premier contient le rudiment assez grand d’une radicelle ; et que la supérieure (FE, 6 ), formant comme un conoïde creux, renferme deux ou trois rudimens de feuilles. On trouve presque toujours, à la 238 ANNALES DU MUSÉUM base postérieure de cette extrémité supérieure du blaste, un très-petit tubercule (F,5) convexe, qui recèle l'indice déjà sensible d’une radicelle. Germination. Le péricarpe se rompt diversement vers l’aréole embryonale: les bords de la fente de l’hypoblaste s’entr'ouvrent sans cesser d’embrasser en partie les côtés du blaste. L’extrémité inférieure de celui-ci acquiert le double, ou un peu plus, de sa longueur primitive; se fend obliquement près de son sommet, pour laisser sortir le rudiment de radicelle qu’elle contenoit, et devient une petite gaine qui ne prend plus d’accroissement. L’extrémité supérieure du blaste grossitet s’allonsge plus lentement que la radicelle : le corps même du blaste augmente de grosseur; mais l’hypoblaste ne subit aucun développement. La ra- dicelle principale (H, 3. 1,4), munie à sa base de sa gaine (1,3) radiculaire, croit rapidement : le blaste s’allonge ( H, 4 ) supérieurement en un long tube un peu conique ( I, 5 ); dont la base solide (1,6 ) forme déjà une tigelle évidente. Le tubereule postérieur (F,5) du blaste a fourni une seconde radicelle (H,5.1,7) près de laquelle il s'en est développé une troisième (H, 6) : quelquefois aussi une (H,7. [, 9) ou deux autres sortent plus tard de la face antérieure de la partie moyenne du blaste. Toutes ces radicelles secondaires, dont le nombre et la position varient, sont, comme la principale, engainées à leur base par le tubercule ou la bosse qui les renfermoit. Cox Zachryma, Liu. (PL IL ) Un involucre presque globuleux (a), analogue à la gaine des feuilles, très-lisse, dur-osseux, épais( D, 1 )et ayant à son sommet rétréci un orifice oblique, renferme étroitement la glume fructifère (db, 2), et avec elle les deux corps (2,4) claviformes qui naissent de sa base et sont cou- chés dans la profonde cannelure d'une de ses faces, ainsi que le support (b,3) des fleurs mâles. La caryopse, dégagée (ce. d.) des cinq paillettes membranenses qui l’enveloppoient, est à peu près globuleuse et terminée par une longue pointe stylaire : sa face externe (c) a dans son milieu une cannelure répondant à celle de la glume; et la base de sa face (d) interne , qui est convexe et lisse, est marquée d’une tache (4, 1) brune lunulée. Le péricarpe membraneux et roux extérieure- ment, montre dans la face intérieure une substance blanche un peu charnue et mince, par laquelle il adhère à toute la surface de l’amande. L’amande (E), dépouillée de ses tégumens , conserve la forme de la caryopse. L’embryon (E, 1), occupant la face cannelée, est presqu’aussi long que l’en- dosperme (E, 2) et sa circonscription est à peu près ovale. Par la section trans- versale de Flamande, on voit que le fond et les bords de la cannelure (G,1) sont formés par la face antérieure de lhypoblaste; dont le dos (G,4), très-épais et bombé, s'enfonce profondément dans la substance de l’endosperme ( G, 3 ). D'HISTOIRE NATURELLE. 230 Une fente longitudinale (E, 3) complétement close parcourt le milieu de la face cannelée de l'hypoblaste, sans en atteindre les deux bouts. En retranchant les deux bords de cette fente, on voit qu’elle renferme un blaste; qui par sa forme générale, ses deux extrémités (F, 2, 3 ) et sa connexion avec l'hypoblaste (F, 1 ) ressemble à celui du mais. Par la coupe longitudinale d’un fruit, d’autres ressemblances se font encore remarquer; dans la proportion de volame entre l’embryon ( H, 4) et l’endoperme (H, 3); dans l’épaississement considérable de la partie inférieure (H, 4) de lhypoblaste, et l’extrémité su- périeure (H, 6) du blaste. Mais l'extrémité inférieure de celui-ci forme un cône creux et mince, dans lequel (H, 5 ) sont renfermés trois tubercules radicellaires, distincts, contigus, ovoide-obtus, disposés sur un seul rang longitudinal et diri- rigés obliquement en avant. Horpeu distichum. (PI. IIE.) La glume fructifère ( a) renferme étroitement le fruit auquel elle est çà et là agglutinée. Ce fruit (b) est un akène oblong-ové, marqué sur sa face interne d’un sillon profond et légèrement pubescent à son sommet. Les deux valves ou patéoles de la glumelle (C, 1, 2), membraneuses très-minces, spathulées et longuement ciliées, persistent sur le support (C,3 ) de la paillette intérieure et embrassent obliquement les côtés de la partie inférieure de laréole embryonale (C, 4). Le péricarpe est blanchâtre, très- mince mem- braneux, transparent et facilement séparable de la graine, avec laquelle il ne contracte aucune adhérence. Un épisperme blanchätre extrêmement mince adhère étroitement et totalement à lamande : il est marqué d’une ligne étroite d’un roux-chatain, qui parcourt le fond du sillon du sommet à la base de la graine. L’aréole embryonale (C, 4) occupe un peu plus du quart de la longueur de celle-ci. L'embryon, dégagé (D) de ses annexes, a pour hypoblaste un disque pres- qu'orbiculé (D, 1 ), presque plane et peu épais(F, 1}. Le blaste est entièrement à découvert : son extrémité supérieure (D, 3), parabolique un peu oblongue, est appliquée (F,4) dans une légère concavité de l'hypoblaste (F,1): sa partie moyenne élargie (D,4)est adnée (F, 5) dans toute sa longueur à la partie in- férieure de l’hypoblaste (D, 1. F,1) jusqu’au bord même(F ,2) de celui-ci : son extrémité inférieure (D, 2), terminée en conoïde-obtus, se dirige oblique- ment (F,3) un peu en ayant. Le blaste étant coupé fongitudinalement et paral- lélement à ses faces, on voit dans la cavité interne de son extrémité supérieure (E, 3) deux rudimens de feuilles; et dans celle de Finférieure (E, 2) trois tuber- cules radicellaires , cylindracés, obtus, pendans de la partie moyenne du blaste, contigus et disposés sur un rang transversal ; de manière, cependant, que l’inter- 240 ANNALES DU MUSÉUM médiaire un peu plus long, est aussi un peu postérieur aux latéraux. S'il y a quatre ou cinq tubercules, alors ceux-ci sont disposés et rapprochés comme en rond. Germination. La graine germant dans la glume, l'extrémité inférieure du blaste perce la base de la paillette extérieure et saillit au dehors sous la forme d’un mamelon conique. Bientôt celui-ci se rompt (G,4) en plusieurs lanières inégales; les tubercules en sortent ensemble’et croissent promptement en radi- celles (G, 3 ) filiformes et pubescentes. En même temps l’extrémité supérieure du blaste se prolonge directement (G, 1), en rampant sur le dos du fruit, pour sortir par le haut de la glume: elle est creuse dans toute sa longueur; en sorte que , même après l'émission du premier rudiment de feuille, on distingue à peine à sa base un commencement de caulescence. AvexA sativa : mutica. ( PI. IV.) La glume fructifère (a ) est fusiforme-oblon- gue, brune ou pâle, coriace, un peu äpre (C)et elle enveloppe un fruit (2) de même forme, mais un peu plus court et plus obtus. La base de celui-ci est em- brassée par une glumelle à une seule valve ou paléole sous-orbiculée, une fois plus large que longue , finement membraneuse, déchiquetée et ciliée à son bord, Ce fruit est un akène marqué sur sa face interne d’un étroit sillon; son péri- carpe est très-mince membraneux, un peu plus épais vers son sommet (E, 1. 1,6), tout couvert de poils (D, 1 ) dressés, et il n’adhère nullement à la graine qui (E, 2.1,7) ne remplit pas tout-à-fait le haut de sa loge. La graine, dépouillée du péricarpe, est ( F) linéaire-oblongue, très-glabre : son sillon (G,1)est pro- fond et fermé par le rapprochement des côtés. L’épisperme est excessivement mince et tellement transparent qu’il laisse apercevoir toute la face antérieure (F,1) de l'embryon: il adhère à toute la surface de l’amande, excepté vers le blaste : son sommet (F, 3) arrondi-obtus est marqué un peu en relief d’une ligne de couleur de rouille, arquée et terminée par une pointe très-menue, On aperçoit aussi à son extrémilé intérieure (F,2)un très-petit point roux, qui répond au sommet de la partie descendante du blaste, L’bypoblaste (H, 1) de l'embryon séparé se présente comme un rhomboïde, dont les angles latéraux et l’inférieur sont très-mousses et le supérieur (H,1) prolongé comme en languette demi-lancéolée, qui atteint tantôt Je tiers tantôt les trois quarts de la longueur de lendosperme sur lequel il est appliqué. Mince dans son prolongement supérieur (E, 4), il s’épaissit vers sa partie inférieure (E, 3); et sa face postérieure est obtusément carénée. La moitié inférieure de sa face externe a vers son milieu une fossette dans laquelle est couché un blaste cy- lindroïde-oblong, dont les côtés sont pressés par les bords légèrement saillans + D'HISTOIRE NATURELLE. 24 x de celle-là. IL y est attaché postérieurement par sa partie moyenne, où il est un peu ventru, jusqu’au bord inférieur de l’hypoblaste. Son extrémité inférieure (H, 2) conique dépasse ce bord en se portant obliquement un peu en avant : s supérieure ( H, 3 )est arrondie-obtuse. Vers la partie moyenne de sa face anté- rieure est un petit appendice (H,4)en forme d’ongle, appliqué sur la base de la partie supérieure (H,3) dont il suit la direction. J'ai donné à cet appendice le nom d’épriblaste. La coupe longitudinale d’un fruit entier (1) démontre que la face postérieure (1;3)"de Vhypoblaste est continue à celle (TL, 4) de l'extrémité inférieure du blaste; en sorte que, postérieurement, la substance de celle-ci paroït n'être qu'un prolongement de eelle de lhypoblaste. On voit encore par cette coupe ; que l'extrémité inférieure ({, 1) du blaste contient un rudiment de radicelle et quelquefois plusieurs; que la supérieure ( F, 2) renferme une gemmule; et que l’épiblaste (1, 5) est une dépendance de la substance même du blaste. Germination. Le bout inférieur du blaste perce (C, 1) la base de la plas grande paillette de la glume; et, après s'être un peu allongé, il s’ouvre obli- quement par son sommet, pour donner issue au tubercule radicellaire (€, 2). Le fruit ainsi germant et étant dégagé de la glume, on voit que l’extrémité infé- rieure( D, 2. G,2) du blaste forme comme un étui à orifice oblique qui engaine (E, 6) la radicelle naissante (E, 7. G,53 ): que son extrémité supérieure ( G, 4), renfermant (E, 8) la gemmule, s’est aussi prolongée; mais que la germination n’a produit sur l'hypoblaste (E, 3, 4 ) et l’épiblaste (E , 9. G,5) aucun effet de développement. } Dans une autre graine, dont la germination est plus avancée, on voit que l’ex- trémité inférieure ( K, 1 ) du blaste a fourni une gaine commune à deux rati- celles (K, 2); que d’autres radicelles (K, 3, #) sont sorties du corps moyen du blaste ; que les unes et les autres sont à peu près de même grosseur et pubescentes. On voit aussi que la partie supérieure de celui-ci est devenue un long tube (K, 5) cylindrique blanc, qui s’est ouvert obliquement près de son sommet, pouf laisser sorür le rudiment (K,6) vert, convoluté, aigu et souvent un peu tors de la première feuille. L’hypoblaste et l’épiblaste ont gardé leur forme et leur gran- deur primitives, Trinicum Aybernum , Lin. (PI. IT.) Le fruit (&) est une caryopse ovoïde-ob- longue, arrondie-obtuse et barbue à son extrémité supérieure : sa face interne (A) est aplatie et un peu creusée en gouttière dont les bords sont carénés et lemilieu marqué dun profond sillon : l’externe (GC) est obtusément carénée et on voit à sa base l’aréole embryonale (C; 1}, qui est orbiculée ; ridée, et qui forme à peu 17. 31 4 2/,2 ANNALES DU MUSÉUM près le quart de la longueur du fruit. La caryopse parfaitement humectée (8) acquiert plus du double de son volume d’exsiccation (a) : ce reaflement arrondit (E, 1} les deux carènes de la gouttièreet celle du dos, et efface les rides de Paréole; qui alors exprime mieux la forme de l’embryon (D, 2 ). Cette humectation rend aussi Fanalyse plus faeile. L'épicarpe est une membrane comme finement papyracée, blonde et assez facilement séparable du sarcocarpe ; dont la substance, presqu’aussi miuce et roussätre-claire, adhère tellement à la surface de l'amande qu’elle ne permet mulle part la distinction nette de Fépisperme. Vers la base (D ,2) de l’aréole embryonale est un point roux, dont la substance et la couleur traversent l’épi- carpe, de manière qu'en dépouillant de celui-ci (E, 2) l'embryon (E, 3), on voit encore l'impression de ce petit point sur l'extrémité inférieure (E, 4) du blas te. On trouve aussi au fond du sillon une ligne rousse ( I, 7) qui rampe sous l’épicarpe, depuis le sommet de la graine jusque sous la base postérieure (TI, 2) de l'embryon. L’embryon étant entièrement dépouillé et séparé, l’hypoblaste(F, 1) paroit . comme un disque orbiculé un peu elliptique, peu épais (H,3.1,4. K,1,2,3), presque plane sur les deux faces; dont la postérieure est comme un peu carénée (H,1);etil est légèrement arqué (1,1.K,1,2,3) de l’arrière en avant. Le blaste (F,3), entièrement à découvert, occupe la grande majorité de la face antérieure de l’hypoblaste (F,1)etil est beaucoup plus épais (H, 2. K, 4, 5) quel (H,3.K,2,3). Sa masse est généralement convexe ou comprimée et son volume environ double de celui de lhypoblaste. Sa circonscription est à peu près deltoïde, ou, si l’on veut, un triangle presqu’équilatéral, dont les angles sont obtus et dont le côté inférieur forme dans son milieu un prolongement court et conoïde ou presque demi-ové. Un épiblaste (F, 6), trois fois plus large que long et comme lunulé, est appliqué (K, 6) sur la base de la partie montante du blaste, Le blaste (H, 2) adhère par une large attache à l'hypoblaste(H,3), depuis le milieu de la longueur de celui-ci, jusqu'a son bord inférieur, qui fait seulement une légère saillie (F, 2. K, 2). Cette connexion s'opère immédiate- ment et de manière que tout le contour du blaste est distinct par sa convexité marginale; qu’il est libre (K, 5) par le tiers supérieur de sa longueur ; et que son extrémité inférieure (F , 2. K, 4) déborde un peu l’hypoblaste (K, 2) en se di- rigeant um peu obliquement en avant. Déjà différent de celui des autres Graminées par plasieurs caractères extérieurs, Vembryon du /roment nous eu offre encore d’autres qui lui sont propres dans sa structure interne. Deux coupes longitudinales de lembryon, l’une (G) paral- lèle à ses faces, l'autre (1) faite par le milieu de celles-ci, démontrent ce qui D'HISTOIRE NATURELLE. 243 suit. L’extrémité supérieure (F, 3 )etilibre (K, 5,) du blaste est creuse intérieu- rement (G, 6. 1, 5) et renferme trois à quatre rudimens (G, 7.1, 6 )de feuilles convolutés : son extrémité inférieure (F,2) contient étroitement (G, 11,3) un tubercule comme médullacé, court , .cylindracé et arrondi-obtus , qui, nais- sant de la partie moyenne et solide du blaste, suit la direction un peu oblique de sa partie contenante. Les deux bosses latérales( F, 4,5), qui forment les deux angles inférieurs du triangle, contiennent aussi (G,2, 3) un tuberecule semblable au précédent, mais plas petit, c’est-à-dire, proportionné à la grosseur relative des bosses. Un peu au-dessus de ces deux tubercules latéraux , entre eux et la base des rudimens de feuilles, on en trouve encore deux autres ( G, 4,5), mais extrêmement petits et sans proéminence extérieure. Ces cinq tubereules in- ternes sont donc logés dans autant de cavités particulières et naïssent tous de la partie moyenne et sulide du blaste. Suivons maintenant le développement des parlies de cet embryon par la germination. Germination. L’extrémité supérieure ( E, 3) du blaste, en croissant (L,1)}, s’est tuméfiée à sa base : l’inférieure(ÆE, 4) S’est aussi beaucoup accrue ( L, 2 jen grosseur et en longueur : maïs la partie moyenne, portant Vépiblaste (L,8), n'étant pas sensiblement augmentée, forme conune uue contraction qui sépare les deux premières. Un trou s’est ouvert sur la face antérieure du prolongement inférieur (L, 2) du blaste, pour la sortie ‘du tubercule interne qui s’est pro- longé ‘en radicelle prmeipale (L, 3 ). Presque en même temps, les deux bosses latérales (E, 5,:6 )ont formé deux petits tubescyhndriques, qui, s'étant ouverts obliquement par le bout, ontlaissé leurs tubercules internes s’allonger eu rati- celles (L,4, 5) semblables à la première. Bientôt après, les deux menus tuber- cules internes (G,4,5), situés au-dessus, ont aussi donné naïssance par leur développement à deux aütres radicelles(L, 6, 7) en toùt conformes aux pré- cédentes. Toutes ces radicelles sont filiformes, à peu près d'égale grosseur et pu- bescentes excepté vers leur sommet : toutes sont distinctement engainées à leur base par les prolongemens du‘blaste qui les renfermoient d’abord. 11 arrive assez souvent que les deux radicelles:supérieures (M, 4, 5 )se déve- loppent beaucoup plus tard que les autres et seulement après l'émission de la première feuille. Quelquefois aussi ‘une sixième radicélle ( M, 6) sort de l'ais- selle de l’épiblaste , et par conséquent de la face antérieure de la partie moyenne et fixe da blaste. La partie supérieure de celui - ei prend dans sa croissance la forme d’un tube (M, 1 ) cylindrique, mince et presque membraneux, ayant une longueur ‘triple, quadruple, étc., de celle de la graine : en s’ouvrant obli- quement (M,2) près de son sommet, il permet au rudiment de la première feuille de.se prolonger au dehors ( M, 3) pour y dérouler l'extrémité supérieure TL 244 ANNALES DU MUSÉUM de sa partie foliacée. En coupant Jlongitudinalement ce’ tube (N,1); on vort qu'il est creux jusqu’à sa base; qu’un principe solide et assez long (N,2) de tige, naissant de son fond, porte (N, 3) le premier rudiment (N, 4 ) de feuille; que celui-ci est roulé en cylindre, de: manière que le bord, qui recouvre les convolutions, se contourne un peu en spirale. Puarus atifolius, Lin. ( PI.IV.) La glume fructifére (a. A), ou plutôt sa paillette extérieure (L'intérieure élant totalement incluse) est linéaire-ohlongue, obtusément acuminée au sommet, presque cylindrique, pubescente et hérissée, ex- cepté vers son extrémité inférieure, de poils à crochet, au moyen desquels elle adhère aux divers corps qu’elle touche. Elle est dure et comme cartilagineuse : ses deux bords sont roulés en dedans ( C, 1) et rapprochés de manière à y former une saillie, qui presse le milieu du dos de la paillette intérieure (C, 2) dans le sillon du fruit (C, 3 ), sur lequel est appliquée celle-ci qui est membraneuse. Le fruit (2. B) est une caryopse presqu'aussi longue que la glume, mais beau- coup plus étroite (G, 3 ) que la cavité qui la renferme. Elle est très-étroitement linéaire (db) ou aciculaire , terminée par une partie du style, presque cylindrique et creusée antérieurement (B) d’un sillon (E, 1) profond et ouvert. L’aréole embryonale (D, 1) est extrêmement courte et peu distincte. Le péricarpe et l’épisperme forment un seul tégument, qui adhère fortement à l’amande. Ce- pendant, vers l’aréole, on distingue assez facilement deux tégumens: l’extérieur est membraneux très-mince et grisätre ; l’intérieur plus épais, un peu charnu en dedans et roussâtre. La substance de ce dernier se prolonge en s’épaississant au-dessous de Pembryon et y forme un cône aigu (E, 2); qui, par sa couleur et sa nature, se distingue de la portion du péricarpe ( E, 3) qui le revêt et indique son analogie avec la tache basilaire de la graine de quelques autres Graminées. L’embryon étant mis à découvert par le dépouillement de Paréole, l’hypo- blaste (E, 4) paroïît comme un disque presqu'orbiculé un peu obovale, blan- châtre, peu épais, demi-transparent, charnu, postérieurement (F, 4) un peu convexe et à peine concave antérieurement. Le blaste, beaucoup plus étroit et plus court d’un tiers par le haut, est généralement oblong-cylindracé. Son extré- mité inférieure (E,5:F,2), un peu plus grosse, est comme une bosse, qui déborde l’hypoblaste et se porte un peu en avant, de manière à faire voir au centre de sa convexité une très-pelite pointe qui en indique le bout. La sub- stance superficielle de cette partie inférieure (E, 5 ) du blaste se termine brus- quement vers la partie moyenne de celui-ci par un sinus à bord peu saillant, au delà duquel elle forme deux prolongemens latéraux, qui, adnés à l’hypo- blaste, pressent les côtés de l'extrémité supérieure (E, 6) du blaste : en sorte “ K' D'HISTOIRE NATURELLE. 245 que cette extrémité libre( E, 6. F,3) est comme obliquement embrassée à sa base par ce sinus et ces prolongemens, qui constituent une espèce particulière d’épiblaste. OcxrA Zatifolia, Lin. (PH II.) La glume fructifere (æ,3), beaucoup plus courte que les deux paillettes (a, 1,2) membraneuses de la /épicène ( glume extérieure des auteurs}, est étroitement close (B), ovée, obluse aux deux bouts, de couleur de paille, très-lisse, cartilagineuse très-dure, et épaisse. La caryopse qu’elle renferme est également ovée (C}, légèrement comprimée dans le sens de ses faces; dont l’externe plus convexe porte à sa base une très-petite aréole em- bryonale (C, 1 ) orbiculée-et six à sept fois plus courte qu’elle. Une ligne{D,1)} brunâtre parcourt le milieu de la face interne du sommet à la base; et on voit encore sur cette même face deux autres lignes (D, 2, 3) latérales excessivement déliées. Ces trois lignes paroiïssent dues à des vaisseaux qui rampent sous ur épicarpe roussâtre. L’hypoblaste (E, ?) est parfaitement orbiculé, lésèrement concave antérieure- ment et convexe par le dos, un peu épais (G, 1 ), fermement charnu et blanc. Le blaste, près d’une fois plus court, a une structure particulière à ce genre de Graminée. Un disque (E, 2) lenticulaire(F ,1}), en orbe un peu raccourci et très-légèrement sinué à son bord supérieur, constitue plus des trois quarts de son volume. Ce disque est fixé (F, 1) à l'hypoblaste par le centre de-sa face pos- térieure et libre du reste. Près de son bord inférieur ( E, 4)est une très-petite pointe couique, qui indique Fextrémité inférieure du blaste : son bord supérieur recouvre en partie un corps (E,3) beaucoup plus étroit et parabolique, qui est l’extrémité supérieure libre du blaste. On découvre, par la dissection de celui-ci, que l'extrémité inférieure (E, 4. G, 2) de son disque contient intérieu- rement un très- petit tubercule radicellaire (F, 3. G, 5) convexe; et que sou extrémité supérieure (E, 3) renferme(F,2. G,#)} un seul rudiment sensible de feuille. L’endosperme est comme corné. La partie discoide (E, 2) du blaste est donc un épiblaste extraordinairement dilaté, qui se confond tellement avec l'extrémité inférieure de ce blaste, qu’elle n’est plus indiquée que par la petite pointe extérieure ( E, 4) et le tubercule interne(F,3.G,5). Ozxra axillaris, O. pauciflora, Sw.( PI. IE) La glume fructifère (a,1 }est aussi beaucoup plus courte que les paillettes (&, 2,3) membraneuses et verdätres- pâles de la lépicène - elle est également trèes-lisse et fort dure. Mais sa couleur est blanche et sa forme, qui approche de celle de la glume du ris, est fort difé- rente, Sa paillette extérieure (B, 1) esten nacelle verticale, comprimée, très 246 ANNALES DU MUSÉUM profonde, plus concave et comme bossue vers son extrémité supérieure terminée en avant par un petit bee. Son orifice est exactement fermé par la paillette inté- rieure (B,2) dont les bords Sont rentrans et le dos un peu convexe. La caryopse, qui y est étroitement renfermée, est courte et irrégulièrement obovée (C), fortement comprimée{ D) par les côtés ; en sonte que les faces sem- blent être des bords convexes. Elle est jaunâtre et lisse : sa face interne est marquée d’une ligne brane (C, 1), qui, se prolongeant en partie sur le haut de l’autre face (D, 1 }), semble parcourir les deux tiers de sa circonférence. Elle se prolonge ainsi pour arriver à lacicatrice stylaire (D,3), qui par conséquent est latérale et située presqu'au milieu de la face externe ou embryonifère. L’aréole embryonale (CG, 2. D, 2) est aussi très-petite et presqu'orbiculée, L’embryon (E) a la même structure externe et interne que celui de la première espèce; seule- ment, l’hypoblaste (E, 1 )‘estun pea plus large du bas que du haut; et l’épiblaste (E, 2), au lieu d’être comme tronqué à son bord supérieur, est au contraire un peu saillant en pointe. L’endosperme est blanc, farinacé un peu charnu. Oryza sativa, Lin. (PI. IV.) La glume fructifère (&) est obovée, notable- ment comprimée par les côtés, sillonnée, un peu hérissée , dure-testacée : de ses deux paillettes, -qui sont naviculaires et closes l’une par l’autre, l’extérieure est ou mulique- ou plus souvent terminée brusquement par une arête variable en lon- gueur. Cette glume est remplie par une caryopse (4) un peu irrégulièrement obovée ( B), pareillement comprimée (C ) et portant de légères empreintes des mêmes sillons. Le péricarpe ne forme avec l’épisperme qu’un seul tégument mince-membraneux, blanchätre ou rougeätre et adhérent avec tenacité à l’a- mande, excepté vers l’aréole embryonale. Une ligne médiaire et deux vaisseaux latéraux beaucoup plus déliés, parcourent distinctement la face interne de la graine : ceux-ci rampent sous l'épicarpe depuis la cicatrice stylaire jusqu’à la base. L’aréole embryonale (B, 1 ) est peu apparente, ovale (C, 1) et forme en- viron le cinquième de la longueur de la face externe, Le volume de l'embryon (D, 1) est extrêmement petit relativement à celui de l’endosperme (D, 2), qui est blanc-lacté, durement farinacé, demi-trans- parent et devient comme un peu charnu par l’humectation, L’embryon mis à nu (C,u1 se présente sous la forme d’un disque ovale, dont la face postérieure (F ,2 ) est ttrès-bombée et comme bossue à sa-partie supérieure, et l’antérieure (CG, 1) presque plane et complétement indivise comme la première. Cette par-' faite continuité superficielle de la face antérieure est un caractère propre à l'embryon d’un très- petit nombre de Graminées, qui ont une grande aflinité D'HISTOIRE NATURELLE. 247 avec le genre oryza. Sa dissection et sa comparaison aux autres embryons épi- blastés indiquent la structure suivante. L’hypoblaste (E, 1 }est ovale, épais (F,2,5), et constitue, comme dans les autres Graminées , toute la face postérieure et une partie de l’antérieure de FPem- bryon. Un épiblaste (E, 2 ) également ovale, mais plus étroit, est tellement soudé par tout son pourtour à l'hypoblaste , qu'il ne peut en être distingué ex- térieurement que par une légère dépression ( E, 2 ) à la circonférence et un peu de convexité. Son extrémité inférieure se lie postérieurement (F, à ) avec l'hy- poblaste (F, 2) sans interruption de surface. En disséquant lPépiblaste, on voit que sa majeure partie supérieure forme, avec celle de lhypoblaste qui lui cor- respond , une cavité dans laquelle est étroitement logé uu corps (E, 4) demi- ové, fixé obliquement par sa base au fond de celle-là; et que son extrémité inférieure a aussi une cavité ( E, 5 } située un peu au-dessous de Pautre et beau- coup plus petite; dans laquelle on distingue moins facilement un corpuseule conoïde-obtus et dirigé en sens contraire du premier, Par la section longitudi- nale d’un embryon entier, on reconnoît ; que le corps(E , 4) inclus dans la ca- vité supérieure est creux intérieurement (F, 4) et renferme deux rudimens de feuilles; et que le corpuscule inférieur (E, 5) est un tubercule radicellaire(F , 3 ). Il devient donc évident , que le corps creux gemmulifère représente l'extrémité supérieure libre du blaste des autres Graminées, On peut aussi remarquer l’obli- quité extraordinaire du tubercule radicellaire (F,3) et du corps supérieur (EF, 4), qui est telle que lorsque la germination a poussé l’un et l’autre au dehors , ils forment par leur direction relative un angle à peu près droit et quelquefois même aigu. — ** Non-grarmninées. Rupria maritima, Lin. (PL V,fig.42,43, 58). Dans un akène drupacé court et irrégulièrement ovoide est suspendu obliquement une graine ovoide-globu- leuse, un peu ventrue d’un côté; dont l’épisperme membraneux revêt immé- diatement un embryon de même forme. Cet embryon est presqu'entièrement composé par un gros corps (42, &) sphéroïde, un peu comprimé à sa partie su- périeure, amygdalin-charnu, solide (453, «); dont le sommet est comme tron- qué un peu obliquement et légèrement creusé en gouitière. Un très - petit corps (42, ) cylindracé-oblong, naissant près d’un des bouts de la gouttière , s’infte- chit brusquement dès sa base pour se coucher dans celle-ci, en se dirigeant vers le point d’attache de la graine. La coupe longitudinale de Pembryon démontre l’intime continuité de substance Q LA 248 ANNALES DU MUSEUM entre le gros corps (43, a) et le petit (43, b ). Par la dissection de ce dernier, on découvre, dans son intérieur, un peu au-dessus de sa base et du côté opposé à son inclinaison, une petite gemmule (43,2) en forme de languette, ferme et très-courte, qui, suivant la direction du corps vers le hile, indique que l’em- bryon est antitrope, c’est-à-dire, qu'il a une direction contraire à celle de la graine. Germination. L’endocarpe se fendant à la partie supérieure d’une de ses faces, le petit corps de l'embryon sort latéralement par la fente, et se prolonge sous la forme d’un fil aminci insensiblement par haut et un peu renflé au-dessus de la base. Lorsqu'il a acquis une certaine longueur, la gemmule le perce laté- ralement vers ce renflement et la première feuille (58, c) se développe en res- tant engainée par la partie inférieure du petit corps (58, b ). La base de celui-ci forme un commencement de tige (58 » d) cylindrique; à la surface duquel on aperçoit, après l’émission de la premiére feuille, de très-petites éminences con- vexes (58,e,e), dont chacune recèle intérieurement un petit point comme médullacé qui est un rudiment de radicelle. Pendant la germination, le gros corps (56, a ) de l'embryon reste dans l’endocarpe sans subir aucun changement apparent. Hyprocnaris morsus-ranæ , Lin. (PI. V , fig. 44, 45, 46.) Chaque graine est renfermée dans une enveloppe particulière, qui lui sert de loge et au fond de la- quelle elle est immédiatement attachée. Cette enveloppe (44, &) consiste en une membrane coriace un peu charnue, dont toute la surface est couverte de nom- breuses vésicules cylindracées, serrées les unes contre les autres et réunies entre elles par leurs bases sans interruption de leur cavité. La graine est ovée (44, b): son épisperme est une membrane excessivement mince , transparente, aréolée au sommet qui revêt sans adhérence une amande de même forme, fermement charnue. Cette amande est un embryon épispermi- que, qui paroît d’abord entièrement solide, Mais il est percé sur le côté à peu près vers le milieu de sa longueur, d’un petit trou (44, d), qui pénètre presque jusqu'au centre de sa masse, Ce trou est exactement rempli par un petit corps (45, a) fixé dans son fond au corps principal, Ce corps est fortement comprimé par les deux faces, dont la supérieure est un peu convexe et l’inférieure un peu concave : sa forme (46, & } est à peu près celle d’un coin raccourei. Par sa dis- seclion on y découvre très -difficilement près de sa base une gemmule (45, g) presqu'imperceptible, qui a la mème direction que lui. Cette direction, ne ré- pondant pas à celle de la graine, Pembryon est kétérotrope, c’est-à -dire, disposé obliquement qu transversalement dans la graine et ne se dirigeant pas vers son ombilic. D'HISTOIRE NATURELLE. 249 Zosrera marina, Lin. (PI. V, fig. 47, 48.) Chaque fruit est oblong-ové et terminé par une longue pointe provenant de la persistance du style. Près de la base postérieure de cette pointe est une cicatrice, par laquelle il étoit suspendu au réceptacle commun. La graine prend la forme cylindroïde-ovée de l’'endocarpe carlilagineux, ausommet perforé duquel elle est attachée : elle est äonc ren- versée où pendante comme le péricarpe. P’épisperme est blanc, d’une ténuité extrême, transparent: il forme, au point d’attache de la graine, un tubercule conoïde, qui s’emboîte dans une cavité basilaire (47, c ) de lamande qu’il revêt sans adhérence. Cette amande, qui a la même forme que la graine, est un embryon (47 ) d’une structure singulière, Un gros corps oblong-ové, d'un blanc-lacté et d’une dureté presque cornée, en conslitue presque toute la masse. IL est fendu longitudinale- ment par sa face postérieure environ jusqu'à l'axe. La fente est close (47, a) in- férieurement par le rapprochement de ses bords et entr’ouverte( #7, b ) du reste: prolongée un peu au delà du sommet, elle est fermée vers celui-ci par une petite. languette arrondie, qui n’est qu'un prolongement libre de la substance de l’autre face. En coupant ce corps longitudinalement selon sa fente, on voit un autre corps filiforme, qui, fxé au premier (48, a) vers le milieu (48, 4) de la fente, s'incline (43, b) d’abord dans celle-ci du côté du sommet de la graine, et se fléchit ensuite par une courbure brusque, pour diriger son extrémité libre (48,c) vers la face supérieure de la graine, en suivant les bords de la fente, entre lesquels elle est en partie visible (47, b). La dissection de ce corps filiforme fait voir, que sa partie inférieure (48,0) est solide jusqu’à la courbure; qu’il a vers cette courbure une cavité interne, aplatie et arquée parallélement à la face extérieure dont elle est plus proche ; que celte cavité renferme une gemmule (48, g) ovale, arrondi-obtuse, plane, mince, et qui suit la direction de ce corps; enfin, que toute la partie supérieure (48, ce) est solide comme linférieure. Il n’est pas aisé d'établir avec évidence la direction de l'embryon du zostera relativement à celle de sa graine. Elle paroît tenir à la fois de-celles des deux genres précédens. Cependant, en remarquant que la majeure partie du corps filiforme est dirigée vers la partie supère de la graine; et que son bout libre est plus voisin de cette partie que son bout fixe; on préférera sans doute rapporter la direction spermique de cet embryon à celle de l'embryon du ruppia ; c’est-à- dire qu’il sera aussi regardé comme antitrope. Nezumerom asiaticum, NympnæA nelumbo, Tin. (PI. V, fig. 49, 50,57.) Le péricarpe de ce genre, attaché au fond de l’alvéole du réceptalce, renferme IT 32 250 ANNALES DU MUSÉUM un embryon qui,tenant à son sommet, a conséquemment une direction contraire, c’est-à-dire, renversée relatifement à lui. Cet embryon est épispermique; sa forme est sphéroïdale, tendant plus ou moins vers l’ovoïde. De sa pointe presque jusqu’à sa base restée indivise , il est fendu (49) longitudinalement en deux pièces égales et exactement rapprochées face à face : elles sont blanches, dune substance dure amygdaline, et extrémement épaisses. En retranchant une de ces pièces , on voit, par la plaie qui en résulte (50, b,c), que la déhiscence de ces pièces n’éloit pas complète, que la réunion de leurs bases s’étend beaucoup plus en largeur qu'en épaisseur, et qu’elle s'opère par continuité de leur substance sans interruption superficielle et sans cavité interne. Entre ces deux pièces est caché un corps presqu’aussi long, mais beaucoup plus étroit; qui imprime sa forme sur le milieu de la face interne ( 50, & ) de chacune d'elles , et est fixé à la partie moyenne de leur base commune. Une membrane (50, d) blanchätre, indivise et charnue lorsqu'elle est fraiche, très- mince et friable par l’exsicea- tion, enveloppe entièrement ce corps (50,g#), près de la base duquel elle prend naissance. Ce corps intérieur est vert, comme pointillé ou poruleux sur toute sa surface : il est formé , inférieurement, d’un principe de tige (50,g) court et cylindrique, supérieurement , de deux rudimens de feuilles fort inégaux dont les pétioles sont infléchis sur eux - mêmes l’un vers l’autre. Chaque petit disque foliaire est énvoluté (57,1), c’est-à-dire, roulé en dedans par les deux bords en cylindroïde; et il suit la direction de son pétiole, auquel il est fixé par le milieu du dos. Le plus grand pétiole ( 50, e) est nu à son origine : Pautre (50, f) porte à sa base interne un bourgeon (57, f) ovoide-conoidal, formé par une gaîne fendue longitudinalement et dans laquelle est renfermé un troi- sième rudiment de feuille également gemmifère à sa base, Germination. Par la submersion, chaque fruit desséché acquiert un volume à peu près double et proportionné à l’alvéole de son réceptacle. Le péricarpe se fend à son point d'attache ou extrémité inférieure, en même temps que la mem- brane intérieure (50, d) : par letrou basilaire du premier sort le rudiment de la première feuille, qui reste plié en manière d’anse allongée jusqu’à ce que son disque foliaire soit dégagé et puisse se dresser. Alors son pétiole (57, 4) croit promptement en longueur et celle-ci est proportionnée à la profondeur de l’eau. Pendant cet accroissement de la première feuille, le petit tronc du corps ger- mant ou de la gemmule forme une petite tige ( 57, ce), qui pousse aussi au dehors la deuxième feuille (57, e ): celle-ci reste ordinairement long-temps appliquée sur le premier pétiole, L’enveloppe (50, Z) de la gemmule, que l’humectation a ramollie en manière de pulpe blanche et transparente, s’est détruite, et elle n’a D'HISTOIRE NATURELLE, 251 Jaissé à la base de la petite tige qu'une légère trace (57, b) annulaire de son existence. Le gros corps ( 57, a ) fendu de l'embryon, ou l’hypoblaste, ne prend aucun développement et reste recouvert par le péricarpe, jusqu'à ce qu’enfin celui-ci tout-à-fait partagé l’abandonne. Vers l’époque du déroulement du disque de la première feuille, ou peu de temps après, on voit se former, à la partie supérieure de la tige, de très-petites éminences corticales, convexes; dans chacune desquelles (57, 2, 2) est renfermé le principe presque ponctiforme d’une radicelle. D'un assez grand nombre de graines que j'ai soumises à la germination, deux seulement se sont développées de la manière que je viens de décrire. Mais elles ont péri, après deux mois de submersion, sans donner d’autre signe de forma- lion de radicelles que les: petites éminences corticales dont j'ai parlé. ( La seconde partie de ce Mémoire, à laquelle se rapportent quelques figures de la cinquième planche et toutes celles de la sixième , renfermera les raisonnemens et les conséquences des faits présentés dans cette première partie.) 252 . ANNALES DU; MUSÉUM NOTICE HISTORIQUE SUR M. PÉRON. PAR J. ,P. FE DELEUZE. | SRE une vieillesse honorée disparoïissent du mi- lieu de nous des hommes qui ont étendu la sphère des con- noissances, notre douleur est tempérée par ladmiration : nous sommes accoutumés à les respecter comme nos maitres, à les associer à ceux dont le nom vit depuis des siècles dans des ouvrages classiques. Si leurs premiers pas ont été pénibles; s'ils ont eu des sacrifices à faire, des obstacles à vaincre, ils ont atteint le but, et pendant leurs dernières années ils ont joui paisiblement de leurs succès. La nature a été juste à leur égard, et la mort ne fait que mettre le sceau à leur gloire. Le sort de ces hommes illustres paroit digne d'envie : ce sont des lauriers et non des cyprès que nous placons sur leur tombeau; et si nous faisons leur éloge, nous cédons au besoin d'exprimer notre reconnoissance, sans prétendre ajouter à leur célébrité. D'autres pensées, d’autres sentimens s'emparent de notre äme lorsqu'un jeune homme, que son génie destinoit aux grandes choses:, est moissonné au milieu de sa carrière, au moment qu'il venoit de mettre en ordre des matériaux pé- niblement amassés, et qu'il commencoit à publier le résultat D'HISTOIRE NATURELLE. 253 de ses recherches et de ses méditations. En regrettant la perte que font les sciences, nous plaignons la destinée de celui qui s’étoit dévoué pour elles; nous regardons comme un devoir d’honorer sa mémoire et d’attacher son nom aux découvertes qu'il a faites, en recueillant les fragmens qu'il n’a pas eu le temps de publier. . Ces réflexions nous sont suggérées par la mort prématurée du naturaliste dont nous venons vous entretenir. Ses travaux suflisent sans doute pour lui assurer un rang distingué dans les séiences; ils étonnent si l’on considère les circonstances dans lesquelles il s’est trouvé; mais ils ne sont rien en com- paraison de ceux qu'il avoit préparés; et les collections qu'il a faites, les notes qu'il a rassemblées, faciliteront les moyens d'étendre une partie de l'histoire naturelle négligée jusqu'à nos jours. En traçant le tableau de sa vie nous aurons l’oc- casion de montrer ce que peuvent l’activité de l'esprit et la force du caractère, dans un homme qui, sans secours et sans guide, se passionne pour les sciences, et n’a d'autre but que l'utilité qui doit résulter de leur progrès. François Péron, correspondant de l'Institut Impérial, membre de la Société de Médecine ; de la Société Philomatique et de plusieurs autres Sociétés savantes, naquit à Cerilly, département de lAllier, le 52 août 1750. Son intelligence s’'annonça dès ses premières années par une extrème curiosité et par un vif désir de s’instruire. A peine lui eut-on appris à épeler qu'il prit pour la lecture une passion telle que pour la satisfaire 1l avoit recours à toutes les ruses que les autres enfans emploient pour se livrer au 254 ANNALES DU MUSÉUM jeu. La mort de son père l'ayant laissé sans fortune, ses pa- rens étoient d'avis de lui faire apprendre un métier lucratif. Désolé qu'on voulut l’arracher à ses goûts, il obtint de sa mère qu'elle le placät au collége de Cerilly. Le principal de ce collége (1), enchanté des dispositions de son élève, s’at- tacha à lui et donna des soins particuliers à son instruction. Lorsqu'il eut fini sa rhétorique, on lui conseilla d’embrasser l'état ecclésiastique, etle euré de la ville consentit à le prendre dans sa maison pour lui enseigner la philosophie et la théologie. Jusqu’alors Péron, uniquement occupé de l'étude des au- teurs classiques, avoit été étranger aux événemens qui se passoient dans le monde, Il les apprit avec étonnement; et séduit par les principes de liberté qui servoient de prétexte à la révolution, enflammé de patriotisme, exalté par les traits qu'il avoit lus dans l’histoire ancienne, il voulut entrer dans la carrière militaire. El quitta donc son instituteur, pour lequel il a toujours conservé de la reconnoissance, et il se rendit à Moulins où il s’enrôla dans le bataillon de l'Allier à la fin de l’année 1792. Ce bataillon fut envoyé à l’armée du Rhin, et de là à Lan- deau qui étoit alors assiégé, et dont la garnison fit des pro- diges de valeur. Après la levée du siége il rejoignit l’armée qui combattit les Prussiens à Wissembourg et qui éprouva ensuite un échec à Kaïsers lautern. A cette affaire Péron ayant été blessé il fut fait prisonnier, et on le conduisit d’abord à Wesel, puis à la citadelle de Magdebourg. (1) M. Baron. Nous avons souvent entendu Péron rappeler avec attendrissement les obligations qu’il avoit à ce respectable vieillard. _ D'HISTOÏRE NATURELLE. 0. 50 Cette captivité ne fut point inutile à son instruction. Il avoit toujours donné à la lecture le temps que n’exigeoit pas son service : ici, n'ayant plus d'occupation, il employa l'ar- gent qu'il avoit heureusement conservé à se procurer des livres ; il inspira de l’intérét à plusieurs personnes qui lui en prètèrent, et il se livra sans distraction à l'étude des histo- riens et des voyageurs, ne se détournant de son travail que lorsqu'il y étoit forcé par le besoin du sommeil. A la fin de 1794 ayant été échangé il se rendit à Thionville où il eut un congé de réforme, motivé sur ce que, à la suite de ses blessures, il avoit perdu l'œil droit. Au mois d'août 1795 il revint dans sa ville natale : il étoit alors âgé de vingt ans. Après avoir donné quelques mois à la tendresse de sa mère et de ses sœurs, il désira prendre un état dans lequel il put réussir par son application, et il sollicita dn Ministre de l'n- térieur une place d'élève à l'École de médecine. Cette place lui ayant été accordée il se rendit à Paris où, pendant trois ans, il suivit non-seulement les cours de l'Ecole, mais encore ceux de zoologie et d'anatomie comparée du Muséum. Comme l'étude des mathématiques élémentaires, celle de plusieurs langues, celle des meilleurs ouvrages de philosophie, et sur- tout ses propres méditations, lui avoient fait acquérir les- prit de méthode, il saisit et classa les objets avec une facilité surprenante, et ses progrès étonnèrent ses condisciples. El alloit enfin être recu docteur, et nous le compterions peut- être aujourd’hui parmi les médecins les plus distingués, si une circonstance singulière re l’eut fait renoncer à son projet. Péron avoit une imagination vive, une àme ardente, une extrème sensibilité. Ces qualités sont les compagnes du génie: 290 ANNALES DU. MUSÉUM elles portent à surmonter les diflicultés, mais elles sont aussi le germe des grandes passions. Dans la jeunesse il en est une dont on n’est garanti ni par l'amour de l’étude, ni par. le désir de la gloire. Il n’y échappa point, et elle prit chez lui toute l'énergie de son caractère. Elle s’associoit avec le projet qu'il avoit de se fixer à Paris, d'y acquérir par ses travaux de la réputation et de la fortune. C'étoit même: un aiguillon de plus. Les biens auxquels on aspire augmentent de prix lorsqu'on a l'espoir de les faire partager à un ètre sur qui lon a réuni ses affections. Des obstacles que son inexpérience l'avoit empêché de prévoir vinrent détruire les espérances auxquelles il se livroit. La personne à laquelle il étoit attaché lui fut refusée, parce qu'il n’étoit point assez riche : alors réduit au désespoir il fut dégotté d’un pays où tout lui rap- peloit des souvenirs cruels, où tous les genres de bonheur lui paroissoient désormais inaccessibles. Une passion violente n’a de remède que dans une passion de nature différente. F’äme épuisée par un premier sentiment ne peut trouver de distraction que dans des-objets entière- ment étrangers à ceux dont elle étoit d’abord remplie. La carrière militaire auroit convenu à Péron. Avec des talens, de l'intrépidité, une volonté forte, on peut se flatter d'y parvenir à tout; mais la privation d’un œil lui interdisoit d'y rentrer. Les sciences pouvoient encore enflammer son . ambition, mais comment les cultiver tranquillement dans des lieux dont l'aspect réveilloit les sentimens de son cœur? Il lui falloit des distractions fortes, des dangers, et une succes- sion d’événemens qui, l'occupant sans cesse, l’arrachassent D'HISTOIRE NATURELLE. 227 LU insensiblement aux pensées qui le dominoient : il résolut de voyager. Le Gouvernement français avoit ordonné une expédition pour les terres australes. Deux vaisseaux, le Géographe ea le Naturaliste, commandés par le capitaine Baudin, étoient déjà préparés dans le port du Havre, et n’attendoient pour partir que les dernières instructions du ministre. Péron de- mande à y être employé; mais le nombre des savans étant complet il ne peut d’abord se faire accueillir. Il s'adresse à M. de Jussieu, l’un des commissaires chargés du choix des naturalistes, et le prie de solliciter pour lui. € Qu'on m'em- barque, dit-il, vous verrez ce que je ferai. » Et, pour justifier cette présomption, il développe son plan, ses vues, ses moyens avec une chaleur qui prouvoit évidemment qu'il se sentoit capable de tenir plus qu’il ne promettoit. M. de Jussieu qui n’a pu l'écouter sans étonnement et sans émotion, lui con- seille de faire un mémoire dans lequel il exposera ses motifs. Il va ensuite rendre compte à ses collègues de la conversa- tion qu'il avoit eue avec Péron, et de concert avec M. de Lacépède il les détermine à ne pas repousser un jeune homme qui joignoit une ardeur extraordinaire à une étendue de connoissances bien rare à son àge. Quelques jours après Péron lit à l’Institut un mémoire sur l'utilité de joindre aux autres savans de l'expédition un médecin naturaliste, spécialement chargé de faire des recherches sur l'anthropologie ou histoire de l’homme ; il réunit tous les suffrages et l’on obtient du ministre sa nomination à une place de zoologiste. Il s’arrache à des affections qui pour être pénibles n’en sont pas moins chères, et il va dans un autre hémisphère chercher un genre ue SE 258 ANNÂLES DU MUSÉUM de gloire qui puisse le dédommager du bonheur paisible au- quel il aspiroit. : Le peu de jours qui lui restent il les emploie à obtenir de M. de Lacépède, de M. Cuvier et de M. Degerando des ins- tructions qui puissent le diriger dans ses recherches : il se destine principalement à la zoologie, comme à la partie de l'histoire naturelle qui offre le champ le plus vaste et le plus neuf. Il se procure quelques livres et quelques instrumens ; il va à Cerilly embrasser ses sœurs et recevoir la bénédiction de sa mère, et il se rend au Havre. Le 19 octobre 1800, les deux frégates mettent à la voile: il est sur le Géographe : i se lie avec la plupart de ceux que Famour des sciences a déterminés à courir les mêmes hasards, et surtout avec M. Lesueur qui devient son collaborateur et son ami (1). Quoique plusieurs campagnes de guerre eussent habitué Péron à toutes les privations il se trouva sur le vaisseau dans un état de gène qu'il n’avoit pas encore éprouvé. Arrivé le dernier il n'eut pas un petit coin où il put se retirer ; mais au milieu du bruit et de l'agitation il savoit se recueillir et à ne perdoit pas un moment. Du jour même de son arrivée à bord il commença des observations météorologiques qu'il répétoit constamment de six en six heures, et qui ne furent jamais interrompues pendant la durée de son voyage. Peu de temps après il fit sur la température de Océan ces belles (1) Les personnes avec qui Péron fut plus particulièrement lié sont MM. Louis Freycinet, Henry Freycinet, Ransonnet et Monthazin, ofliciers de marine, Boullanger géographe, Leschenault botaniste, Bernier astronome, et Depuch minéralogiste. Les deux derniers sont morts avant leur retour. D'HISTOIRE NATURELLE. 259 expériences qui démontrent que les eaux sont plus froides dans le fond qu’à la surface, et qu'elles le sont d'autant plus qu'on descend à une plus grande profondeur. Résultat qui, réuni à ceux que Forster et Irwing avoient obtenus sous d’autres latitudes, conduit à des conséquences importantes pour la physique générale. En approchant de l'équateur un spectacle étonnant vint exciter l'admiration de l'équipage. Le ciel étoit couvert de nuages qui redoubloient lobscurité de la nuit, lorsqu'on découvre à l'horison comme une écharpe de phosphore qui s'étend sur les eaux : bientôt l'Océan paroit embrasé et des jets de lumière s’élancent de sa surface. Nos voyageurs avoient vu souvent lamerphosphorescente, maisils ne Pavoient point encore vue présenter l'aspect du ciel pendant une aurore boréale : on avance et l’on reconnoït que cette lumière ex- traordinaire est due à une multitude innombrable d'animaux qui ressemblent à des charbons ardens. On pêche plusieurs de ces animaux : Péron les examine : il les voit prendre suc-: cessivement toutes les couleurs de arc-en-ciel et briller de l'éclat le plus vif, jusqu'à ce que l'irritabilité dont ils sont doués s'étant affoiblie, ces couleurs deviennent moins écla- tantes et finissent par disparoitre entièrement. L'impression que ce phénomène fit sur Péron, et les sin- sularités que lui présenta l’organisation de ce zoophyte, le déterminèrent à étudier plus particulièrement les animaux de cette classe : et pendant tout le voyage, lui et son ami Lesueur furent tour à tour penchés sur le côté du vaisseau pour recueillir les espèces qu'ils pouvoient apercevoir. Les objets nouveaux en histoire naturelle ne’ sauroient JE 260 ANNALES DU MUSÉUM être bien connus que par le secours des figures, et c'est pourquoi l’art de dessiner est si utile au naturaliste. Péron s’étoit peu exercé en ce genre, mais son ami Lesueur, très- bon observateur lui-même, peignoit sous ses yeux ces ani- maux gélatinenx dont les formes et les couleurs s’altèrent lorsqu'on les retire de l'eau. Les deux amis mettoient leurs travaux en commun, l’un dessinoit ce que l’autre décrivoit : ils s'entendoient sur tout comme s'ils n’avoient eu qu'une même àme, et jamais l’un d'eux n’a cherché à se faire valoir aux dépens de l’autre. Après une traversée de cinq mois, on arriva à l’Isle-de- France. C’étoit là qu'on devoit prendre ce dont on avoit besoin pour aller aux terres australes. Plusieurs des natura- listes voyant qu'ils n’auroient point les secours auxquels ils s’étoient attendus, et mécontens des traitemens qu'ils avoient éprouvés, restèrent dans la colonie. Péron crut devoir tenir aux engagemens qu'il avoit pris. Nous ne le suivrons point dans les détails de son voyage. Mais nous croyons devoir nous arrêter un moment dans les lieux qui furent le principal théâtre de ses observations. En partant de l’'Isie-de-France on se dirigea vers la pointe la plus occidentale de la Nouvelle-Hollande, et l'on mouilla dans une baïe qui, du nom du vaisseau qui y entroit le pre- mier, reçut le nom de Baie du GŒéographe. On remonta ensuite la côte occidentale où l’on fit plusieurs relèches, et l’on se rendit à Timor. C'est principalement au séjour que Péron fit dans cette ile, si peu connue des naturalistes, qu'on doit son travail sur les mollusques et les zoophytes. La mer est peu profonde D'HISTOIRE NATURELLE. 261 sur cette côte : la chaleur excessive du soleil y multiplie à l'infini ces animaux singuliers et les peint des plus vives cou- leurs. Péron passoit la plupart des journées sur le rivage ,al s’'enfonçoit dans l'eau au milieu des rescifs, toujours au péril de sa santé et même de sa vie, et il ne rentroit que le soir, chargé d’une nombreuse collection qu'il examinoit et dont son ami dessinoit les individus les plus remarquables. Ni le malheur de plusieurs naturalistes, ni les dangers dont il étoit menacé lui-mème, ne purent rallentir son zèle. Le soin qu'il mettoit à recueillir les innombrables productions de la na- ture ne l’empéchoit pas de trouver du temps pour se livrer àdes observations d’un autre genre. [alla passer plusieursjours dans l’intérieur des terres pour étudier les naturels du pays. Quoiqu'il n’entendit point la langue malaie, il avoit dans le geste une telle expression et tant de sagacité à saisir ce qu'on vouloit lui dire qu'il parvenoïit à se faire entendre des natu- rels, et qu'il eut encore le même avantage avec les sauvages de la Nouvelle-Hollande, et avec ceux de la terre de Diemen. Frappé de voir que le séjour de Timor avoit été funeste à ses compagnons, presque tous malades, tandis que les ha- bitans échappoient à l'influence du climat, il rechercha la cause de cette différence, et il la trouva dans l'usage que ceux-ci font du betel. En quittant Timor on alla, sans approcher des côtes, jus- qu'au cap sud de la terre de Diemen. Après avoir reconnu la partie orientale de cette terre, on entra dans le détroit de Bass, et l’on suivit la côte méridionale de la Nouvelle-Hol- lande. Nous ne tracerons point le tableau de ce qu'on eut à souffrir : il nous suflira de dire que lorsqu'on vint au port G2 ANNALES DU MUSÉUM [Ce Jackson, l’état de détresse et de maladie de l'équipage étoit tel qu'il n'y avoit plus que quatre hommes capables de ser- vice, et qu'on eut infailliblement péri si on eut été forcé de tenir la mer quelques jours de plus. En arrivant au port Jackson, Péron se trouve au milieu d'une société -civilisée : il y recoit des marques de bienveil- lance et de considération; mais au lieu de se reposer de ses fatigues, il étend l’objet de ses travaux. En continuant ses recherches de physique et d'histoire naturelle, il étudie le régime civil et politique de cette colonie, où des lois à la fois sages et sévères et la nécessité du travail ont changé des brigands, chassés de leur patrie, en utiles cultivateurs; où, ce qui est plus étonnant encore, des femmes jadis perdues de débauche, ont oublié leur ancien avilissement et sont devenues de laborieuses mères de famille. Après le départ du port Jackson, d’où le vaisseau le AVa- turaliste fut renvoyé en France, une navigation non moins périlleuse restoit à exécuter. Il falloit examiner les iles si- tuées à l'entrée occidentale du détroit de Bass, suivre de nouveau les côtes de la Nouvelle-Hollande et en faire le tour pour entrer dans le golfe de Carpentarie. Les dangers se multiplioient à chaque instant sur ces côtes inconnues et hérissées de rescifs. Ils étoient plus grands encore pour les naturabstes qui saisissoient toutes les occasions de s’enfoncer dans l’intérieur des terres. Péron déploya un courage et une activité inconcevables. Il alloit chercher les sauvages sans s’effrayer de leur perfidie et de leur férocité; il recueilloit un grand nombre d'animaux de toutes les classes; il ne né- slgeoit rien pour examiner leurs habitudes, pour reconnoitre D'HISTOIRE NATURELLE. 263 ceux qui offrent une ressource aux navigateurs sur cette terre stérile, ceux qui sont susceptibles d’être rendus domes- tiques et naturalisés en Europe, ceux enfin qui peuvent de- venir un objet de commerce par leur fourrure ou par lhuile dont leur chair est remplie. Des cinq zoologistes nommés par le gouvernement, deux étant restés à l’Isle-de-France et les deux autres étant morts au commencement de la se- conde campagne, il se trouvoit seul chargé de cet immense travail, et il suflisoit à tout. Uniquement occupé du but qu'il se proposoit, il ne comp- toit pour rien les privations. Peu de temps après le départ de Timor, le capitaine lui ayant refusé des liqueurs spiritueuses absolument nécessaires pour conserver les mollusques qu'il ramassoit, il se priva pendant tout le voyage de la portion d’arack qui lui étoit accordée pour sa boisson; et, ce qui est plus remarquable , il fit partager son enthousiasme à plu- sieurs de ses amis qui consentirent à faire le même sacrifice. ‘ C’étoit surtout au milieu des dangers que Péron montroit l'énergie de son caractère; sa force redoubloit en raison des obstacles. Pendant les tempêtes, aidant aux manœuvres comme un simple matelot, il observoit aussi paisiblement que sil eût été sur le rivage. Aucun événement ne détournoit son attention de ce qui offroit un résultat utile, et il savoit mettre à profit toutes les circonstances. Étant os à l'ile King avec quelques naturalistes (1 ne un coup de vent chassa le vaisseau en mer, et pendant quinze jours ils ne l’apercurent _ (1) MM. Bailly, Lesueur, Leschenault et Guichenault, 264 ANNALES DU MUSÉUM plus. Péron ne perdit pas un moment le calme; il continuoit patiemment ses recherches sans s'inquiéter de l'avenir dont il étoit menacé. Pendant le séjour qu'il fit dans cette île, -où la plus magnifique végétation n'offre rien qui puisse servir à la nourriture de l'homme, malgré le défaut d’abri, malgré la violence des pluies et des vents, il recueillit plus de 180 espèces de mollusques et de zoophytes, il étudia l’histoire de ces phoques gigantesques qui se rassemblent par milliers sur le rivage, il examina la manière de vivre d’une colonie de onze misérables pêcheurs, qui séparés du reste du monde, préparent dans cette ile l'huile et les peaux de phoque que les Anglais viennent y chercher à de longs intervalles. Ces pauvres gens vivent sous des huttes : ils se nourrissent de casoars et de kanguroos pris par des chiens qu'ils ont dressés à la chasse, et de wombats qu'ils ont rendus domestiques. Hs partagèrent avec nos naturalistes leurs chétives provisions et leur offrirent cette hospitalité touchante, qui se montre bien plus chez les peuplades grossières et peu nombreuses qu'au milieu de nos sociétés civilisées, où la variété des im- pressions et le choc des intérêts affoiblissent dans les hommes le sentiment naturel de la pitié. Lors de sa dernière relâche à Timor, Péron compléta les observations qu'il avoit d’abord faites dans cette ile. Il eut de fréquentes relations avec les naturels dont il étudia mieux les mœurs, le gouvernement et le caractère, parce qu'il enten- doit alors la langue malaie, Seul avec son ami Lesueur, il osa aller à la chasse de ces énormes crocodiles qui pour les habi- tans sont à la fois un objet de terreur et de vénération. Sans être aidés de personne ils tuèrent un crocodile, le dépouil- D'HISTOIRE NATURELLE. 265 lèrent et préparèrent le squelette qui est aujourd'hui dans les galeries du Muséum. Les vents s'étant opposés à ‘ce qu’on put aborder à la Nouvelle-Guinée et entrer dans le golfe de Carpentarie, on revint à l'Isle-de-France où lon resta cinq mois. Là, Péron, après avoir revu ses collections, étudia les poissons et les mollusques, et malgré les recherches des naturalistes qui lavoient précédé, il recueillit dans cette ile beaucoup d’es- pèces nouvelles. On fit encore une relâche d’un mois au Cap; et il en profita pour examiner la conformation singulière d'une tribu de Hottentots, connue sous le nom de Boschis- mans, dont plusieurs individus se trouvoient par hasard au Cap. Enfin, après une absence de trois ans et six mois, il dé- barqua à l'Orient le 7 avril 1804, et il se rendit à Paris. Quelques mois furent employés à mettre en ordre les col- lections, à en dresser le catalogue, et elles furent remises au Muséum. Alors Péron alla à Cerilly auprès de sa mère et de ses sœurs. L'état de sa santé affoiblie par de longues fa- ügues et surtout par le germe de la maladie qui s’est déve- loppée depuis, lui rendoit le repos absolument nécessaire; heureux de se retrouver dans le sein de sa famille , sûr d’avoir rendu de grands services, il ne songeoit point à venir re= cueillir la récompense de ses travaux. Bientôt il fut informé qu'on avoit cherché à persuader au gouvernement que le but de l'expédition étoit manqué, et il revint à Paris pour réfuter ces imputations calomnieuses. [l se rend chez le ministre de la marine où se trouvoient M. de Fleurieu et plusieurs sa- vans. Là, avec un ton modeste et respectueux, mais avec une 2, Nuge 34 266 ANNALES DU MUSÉUM noble liberté, il expose ce que ses compagnons avoient fait pour la géographie, pour la minéralogie, pour la botanique ; il présente lénumération des objets qu'il avoit rapportés, des dessins exécutés par son ami Lesueur, des observations et des descriptions qu'il avoit rassemblées; il ne parle qu'en passant des dangers qu'il avoit courus et des sacrifices qu'il avoit faits pour augmenter la collection. On lui fit des ques- tions auxquelles il répondit avec netteté; et l'impression qu'il produisit fut telle que le ministre, après lavoir engagé à venir chez lui à toute heure et toutes les fois qu'il le pour- roit, lui promit de faire rédiger la partie nautique du voyage par M. L. Freycinet (1), et l’adressa à M. de Champagny, mi- uistre de l’intérieur, pour la partie historique. Le même succès l’attendoit chez ce dernier : il y fut ac- cueilli de la manière la plus flatteuse, et il fut chargé de publier la relation du voyage, et la description des objets nouvéaux en histoire naturelle de concert avec son ami Lesueur. Voilà Péron devenu tout à coup un homme célèbre. On le recherchoit, on l’entouroit; il prenoit plaisir à raconter ce qu'il avoit vu dans ses voyages, et l’intérêt avec lequel il étoit écouté l’engageoit à entrer dans les moindres détails. I disoit naïvement ce qui étoit à son avantage : ce n'étoit jamais de la jactance, mais une franchise qui ne lui laissoit pas calculer les formes. (1) M. Louis Freycinet, officier de la marine impériale, commandant de la goëlette le Casuarina, construite et armée à la Nouvelle-Hollande , avoit été l’un des principaux auteurs des travaux géographiques exécutés pendant le voyage. D'HISTOIRE NATURELLE. 267 Cependant la collection déposée au Muséum est examinée, et une commission nommée par l’Institut est chargée d'en faire un rapport au Gouvernement (1). Il résulte de ce rap- port, rédigé par M. Cuvier, qu'elle contient plus de cent mille échantillons d'animaux , parmi lesquels on a découvert plusieurs genres; que le nombre «les espèces nouvelles s’é- lève à plus de 2500, et que MM. Péron et Lesueur ont eux seuls fait connoitre plus d'animaux que tous les naturalistes voyageurs de ces derniers temps; enfin que les descriptions de M. Péron, rédigées sur un plan uniforme, embrassant tous les détails de l’organisation extérieure des animaux, éta- blissant leurs caractères d’une manière absolue, et faisant connoiître leurs habitudes et l'usage qu'on en peut faire, sur- vivront à toutes les révolutions des systèmes et des méthodes. Quoique Péron s'occupàt principalement de la relation du voyage, il crut devoir détacher de son travail général quelques mémoires qu'il lut soit à l’Institut, soit au Muséum, soit à la Société de médecine. Tels sont ceux sur le genre pyrosoma, cezoophyte éminemment phosphorique dont nous avons parlé; sur la température de la mer; sur le tablier des femmes hottentotes ou boschismans; sur les zoophytes pétri- liés trouvés dans les montagnes de Timor; sur la dyssenterie des pays chauds et sur l'usage du betel; sur Fhygienne na- vale; sur l'habitation des phoques; sur la force des sauvages comparée à celle des peuples civilisés. Enfin il entreprit l'his- toire complète des méduses sur lesquelles il avoit fait beau- (1) Cette commission étoit com posée de MM. Laplace, Bougainville, Fleurieu, Lacépède et Cuvier. Le Rapport est imprimé à la tête du Voyage de Péron. 34 * 268 ANNALES DU MUSÉUM coup d'observations et dont il avoit recueil! une multitude d'espèces jusqu'alors inconnues. Le premier volume du voyage parut il y a quatre ans, après avoir été long-temps retardé par les gravures, et dès lors on püt juger de tout le mérite de Péron. Nous ne nous étendrons point sur cet ouvrage qui est gé- néralement connu; nous nous permettrons seulement quel- ques réflexions sur les qualités qui le distinguent et sur les imperfections qu'on peut y remarquer. La relation des faits est d’une exactitude qui est le premier mérite des ouvrages de ce genre : la description du sol, du climat, des météores offre des phénomènes extrêmement re- marquables, et la comparaison des observations de l’auteur avec celle des navigateurs qui Pont précédé conduit à des résultats généraux. Le tableau des peuplades qui errent à la Nouvelle- Hollande, et de celles qui habitent la terre de Diemen nous fait connoiître deux races de sauvages d’une horrible férocité, et nous présente le dernier degré de mi- sère et de dégradation de l'espèce humaine. Aucun voyageur, si l’on excepte Georges Forster, ne s’est autant appliqué à saisir les caractères physiques et moraux qui distinguent les diverses peuplades ; à marquer le rapport qui se trouve entre leur organisation, leurs mœurs, leur in- telligence, le nombre plus où moins considérable des indi- vidus qui les composent, et les ressources que leur offre le sol qu’elles habitent. Et, si Forster n’a point été égalé pour l'agrément de la narration, notre voyageur a sur lui l'avan- tage de s'être garanti de tout esprit de système et de n’avoir pas cherché à répandre unintérèt romanesque sur ses tableaux. D'HISTOIRE NATURELLE. 269 Il seroit à désirer que Péron eut peint avec le même soin la physionomie particulière que l'aspect de la végétation donne aux diverses contrées; on voit qu'il s'étoit plus attaché à la zoologie qu'à la botanique. On peut lui reprocher encore d’avoir employé quelquefois un luxe de style qui ne convient point à la simplicité d’une narration. Ce défaut étoit la suite nécessaire d’une imagination très-vive et peut-être aussi des formes de style que plusieurs écrivains ont adoptées aujour- d'hui. Il s’en seroit corrigé lorsque l’âge et l'habitude d'écrire auroient perfectionné son goût : et les traits vigoureux que lui offroit la force de son génie se seroient montrés dans toute leur pureté. Au reste, si ce luxe d'expression est déplacé dans quelques-endroits, il est aussi dans Fouvrage des mor- ceaux descriptifs qui sont d’une beauté remarquable. Rien de plus élégant et de plus gracieux que la peinture de l'ile de Timor : le tableau des sauvages de la terre de Diemen est digne de la plume de Buflon : et l’on citeroit difficilement quelque chose de plus sage et de mieux pensé que le mor- ceau dans lequel comparant les divers peuples il montre les avantages de la civilisation. Ce sujet qui sembloit épuisé de- vient neuf par le choix et le rapprochement des faits, par la profondeur des observations et par la manière dont elles sont exprimées, Le second volume du voyage est imprimé à moitié et cette partie n’est point inférieure à la première. Péron n’a pu la terminer, mais sa maladie ne l'a pas empèché d'y apporter le ‘même soin. ” En publiant des Mémoires sur divers objets de zoologie, . Péron s’occupoit d’un ouvrage plus considérable, C'étoit une 270 ANNALES DU MUSEUM comparaison des diverses races de l'espèce humaine. Il avoit recueilli sur cet objet les observations de tous les voyageurs et de tous les physiologistes : il avoit examiné lui-même les naturels du cap de Bonne-Espérance, les indigènes de Timor, les sauvages de la Nouvelle-Hollande et ceux de la terre de Diemen, et il préparoit une histoire philosophique des di- vers peuples considérés sous les rapports physiques et mo- raux. {l se proposoit de ne publier cet ouvrage, qui depuis son départ étoit l’objet de ses méditations, qu'après avoir fait encore trois voyages, le premier dans le nord de l'Eu- rope et de l'Asie, le second dans l'Inde, et le troisième en Amérique : quinze ans à consacrer à ce travail ne lui parois- soient point un trop grand sacrifice. Le plan de l'ouvrage étoit fait, il avoit posé toutes les questions, et il s’occupoit sans cesse à chercher les réponses aux divers problèmes qu'il s’étoit proposés. Il avoit sur cet objet un grand nombre de mémoires qu'il a condamnés à l'oubli parce qu'il y reconnoissoit des erreurs. Cependant le fragment qui contenoit l'histoire des peuples de Timor est à peu près achevé, les figures qui devoient l’ac- GO EnE ont été dessinées sur les lieux, et les avances a exige la gravure sont le seul obstacle qui s RARE à ce qu’on le donne incessamment au public. Ses porte-feuilles renferment aussi la description des oïseaux, des quadrupèdes, des poissons qu'il avoit vus : celle surtout des animaux sans vertèbres dont il avoit entrepris l'histoire et dont son ami avoit fait plus de mille dessins. Nous espérons que cette partie de ses travaux sera publiée par M. Lesueur de concert avec les professeurs du Muséum. Les animaux D'HISTOIRE NATURELLE. 271 existent dans l’esprit-de-vin, les dessins sont exécutés d’après les individus vivans, et M. Lesueur qui a aidé son ami à re- cueillir ces animaux peut donner les renseignemens les plus exacts sur leur manière de vivre et sur leur habitation. Ce seroit ici le lieu de donner une analyse raisonnée des divers mémoires que Péron a lus à l’Institut, au Muséum, à la Société de Médecine et à lai Société Philomatique, de si- gnaler les faits nouveaux, les résultats posiufs, les vues lumi- neuses que renferment ces mémoires, et de faire remarquer le soin qu'a toujours pris l’auteur de comparer ses observa- üons à celles des naturalistes et des physiciens qui l'ont pré- cédé : mais dans un éloge placé à la tète du Vite. volume des Mémoires de la Société d'Emulation médicale, M. Alard a rempli cette tâche d’une manière si distinguée, que nous serions obligés de le transcrire ou de faire moins bien. Nous nous bornerons done ici à parler du caractère moral de Péron. Comme nous l'avons connu personnellement, comme nous avons eu des relations avec tous ses amis, nous croyons pou- voir en donner une juste idée. Nous ne dissimulerons pas plus ses défauts que ses qualités : il est des hommes qui gagnént à ce qu'on les peigne sans flatterie. Péron avoit un ardent désir, non-seulement d’orner son esprit de nouvelles connoiïssances, mais encore de corriger ses défauts et de perfectionner ses qualités morales : il s’étu- dioit lui-mème sous ce point de vue, et il mettoit par écrit les observations qu'il faisoit sur son caractère. Ces entretiens qu'il avoit avec lui-même n’étoient destinés à être commu- niqués à personne, et il ne mettoit pas plus de réserve dans les éloges qu'il se donnoit que dans les reproches qu'il se 279 ANNALES DU MUSÉUM ] faisoit. Nous croyons ne pouvoir mieux le peindre qu'en donnant ici l'extrait d’une de ces notes trouvées dans ses papiers, et qui est datée du mois de novembre 1800, époque à laquelle il ne pensoit sûrement pas quil seroit un jour assez célèbre pour qu'on dut la publier. « Inconséquent, étourdi, disputeur, indiscret, trop entier dans mes opinions, incapable de céder jamais à aucune raison de convenance, je puis me faire des ennemis et m'aliéner mes meilleurs amis. Ces défauts sont la suite de mon éduca- tion et de l’état d'indépendance dans lequel j'ai vécu. Je sais qu'ils ternisssent les qualités que je puis avoir, mais tel est l'empire de l'habitude que mes efforts pour m'en corriger ont été inutiles jusqu’à ce jour. Cependant en me les reprochant je n’en rougis point. Je sens que mon cœur est étranger au mal que j'ai pu faire, et le regret que j'en ai m'excuse au tribunal de ma conscience. Ces travers d'esprit sont rachetés par les qualités du cœur. Bon, sensible, généreux, je ne fis jamais sciemment de la peine à personne. Mes amis ont eu. souvent à souffrir de mes vivacités, souvent ils ont eu à se plaindre de mes indiscrétions, souvent ils m'ont repro- ché mon étourderie, mon entêtement, ils se sont toujours loués de ma délicatesse, de mon attachement, de ma bonté. » « Cette dernière qualité me distingua toujours. Au collége, à l'armée, elle me concilia l'estime et l'amitié de ceux avec qui j'eus des rapports : elle me fit chérir de ces hommes in- fortunés qui, victimes des fureurs de leurs princes, devinrent la proie des armées françaises. Oh! de combien d'excès et de brigandages n'ont pas été souillés les glorieux trophées de nos soldats! combien de fois mon cœur en a gémi! Ne pou- D'HISTOIRE NATURELLE. 273 vant les empêcher, du moinsje ne les partageai jamais. Jeune, enthousiaste, le malheur eut toujours des droits sacrés sur moi : malgré les préventions qu'on eut contre mes compa- iriotes, on m'aima, On m estima toujours. » « Respectable Kiner! que je me rappelle avec plaisir les soins que vous me prodiguàtes lorsque je fus malade dans votre habitation (1). » « Et toi surtout, à mon malheureux hôte d’Oschspeire (2), avec quelle sollicitude tu me présageas plusieurs jours d’a- vance les malheurs qui nous étoient réservés... avec quelle émotion tu vins m'éveiller aux premiers coups de canon... Fuyez, bon Français, me disois-tu, déjà votre armée est surprise sur tous les points par les troupes prussiennes; en- tendez le bruit du canon se rapprocher à chaque instant : fuyez avec moi, hätez-vous, ne craignez rien. » « Commandé par le devoir et l'honneur j'avois pris mes armes, je courois au combat. Hôtes sensibles, des larmes de compassion et d’attendrissement s’échappoient de vos yeux. » « Surpris de ces marques d'intérêt, je me demandai ce que j'avois fait pour les mériter. Ce que tu as fait, me répondis- je : tu as vu cette famille malheureuse et tu t'es attendni sur son sort; tu as quelquefois partagé avec elle ta foible ration de pain; tu as inspiré tes sentimens à ceux qui t'étoient sub- ordonnés, et la maison que tu habitois a été paisible: aujour- d'hui des êtres reconnoissans te comblent de bénédictions. » « Cette réflexion sur moi-mème me fit éprouvér une douce (1) A Dutten-Hoffen, village près de Spire. (2) Village entre Frakerstein et Kaïserslautern où le bataillon dans lequel servoit Péron fut enveloppé par les armées prussiennes, le 4 prairial an 2. LT 35 274 ANNALES DU MUSÉUM jouissance : je me dis, si ma bonté a pu faire une telle im- pression à des hommes irrités, je dois cultiver toujours cette qualité, il faudra qu'elle fasse oublier les défauts de mon ca- ractère. Je serai toujours, bon, honnète, généreux même envers mes ennemis. » « J'ai suivi cette résolution. Etranger au ton et aux usages de la société, ayant une imagination impétueuse que l'autorité ne commanda jamais, d’une franchise imprudente et quelque- fois malhonnète, trop entier dans mes opinions que je sou- üens sans réserve, plein d’étourderie et d’inconséquence, j'ai souvent aliéné mes amis; mais sitôt que la passion cède à la raison je rougis de mon emportement : je viens trouver ceux que j'ai offensés : mes regrets, mes excuses sont trop sincères pour qu'ils ne me pardonnent pas mes torts : aussi tous Îles amis que j'ai eus, soit au collége, soit aux armées, soit à Paris, me restent encore : il en est peu qui n'aient eu à se plaindre de moi, tous cependant me sont aussi attachés que je le leur suis moi-même... » Il nous semble que la naïveté de cet écrit en fait aimer l'auteur. Tous ceux qui ont vécu avec lui reconnaissent la vérité de ce portrait : ils disent seulement que Péron s'est trompé en attribuant uniquement à sa bonté naturelle l’atta- chement qu'il inspiroit. Si cette qualité étoit si recomman- dable chez lui, c’est qu'au lieu d’être, comme il arrive sou- vent, accompagnée d’une sorte de foiblesse, elle étoit réunie à une activité, à un courage, à un zèle qui la rendoit tou- jours utile aux autres. Non-seulement Péron avoit gagné l'estime et l'amitié de tous ceux avec qui il vivoit, il avoit mème pris sur eux un D'HISTOIRE NATURELLE. 275 ascendant extraordinaire et d'autant plus étonnant qu'ayant peu de connoissance du monde il n'avoit jamais réfléchi sur les moyens d’entrainer les autres et de se faire des partisans : ce phénomène n’étoit pas dû à la supériorité de son esprit et à la force de son caractère, il avoit sa cause dans une réunion de qualités qui se tempéroient réciproquement. Simple et sans aucune prétention dans l'habitude de la vie, dans les circonstances essentielles Péron devenoit un être nouveau; son àme s’exaltoit; ses discours, son geste, avoient quelque chose d’imposant; il commandoit à ses égaux comme sil eut cru qu'on n'avoit pas le droit de lui résister : calme dans le danger il prescrivoit à chacun ce qu'il avoit à faire; étoit-il occupé d’une recherche impor- tante pour les sciences, il disposoit de ceux qui pouvoient l'aider comme s'ils eussent été à ses ordres; discutoit-il une grande question, il subjuguoit les opinions par la force de sa logique, par l'étendue de ses conceptions, par la vivacité des images, et par une persuasion qui entrainoit celle des autres; s'agissoit-il de s’exposer pour rendre un service, il marchoit le premier et commandoit de le suivre, n'imaginant pas qu'on püt balancer; dans les conjonctures embarrassantes, un coup d'œil rapide lui indiquoit le parti qu'il falloit prendre, il étoit décidé tandis que les autres délibéroient, et sa décision déterminoit la leur. Ces circons- tances, qui enflammoient son courage ou son génie, étant passées, il devenoit d’une gaité, d’une naïveté d'enfant, d’une complaisance à toute épreuve; toujours modeste, il consul- toit tout le monde, il convenoit de ses travers, il ne s’offen- soit point de la raillerie : il avoit une extrême indulgence 20 276 ANNALES DU MUSÉUM pour les défauts de ses compagnons et ne remarquoit que leurs bonnes qualités. Jamais il ne lui vint en pensée de se vanter d’avoir donné un avis utile, ni de rappeler que dans telle ou telle occasion on s’étoit repenti de n'avoir pas suivi ses conseils. Si quelquefois il disoit ce qu'il avoit fait, s’il se donnoit des éloges, c’étoit naïveté et non point orgueil. Jamais il ne se comparoit aux autres, et il louoit ses rivaux avec plus de plaisir qu'il ne se louoit lui-même. On avoit dit dans un journal que notre admiration pour les voyageurs étrangers nous empéchoit de sentir tout le mérite des voyageurs français, et on l’avoit mis au-dessus d’un homme justement célèbre : il en fut extrêmement blessé, et il alla chez le journaliste lui demander de se ré- tracter : « Je ne crains point, disoit-il, qu’on m’accuse d’ap- prouver une telle exagération, mais c’est une injustice, et il sufiit qu'il soit question de moi pour que j’exige qu’elle soit réparée. » Quant à son désintéressement, à sa générosité, il eut dans: ses voyages de fréquentes occasions d’en donner des preuves. Ayant rencontré des Français qui, pendant la révolution, avoient été forcés à s’exiler de leur patrie, et qui depuis plu- sieurs années n’avoient pu recevoir de leurs parens aucun se- cours, il leur offrit tout ce dont il pouvoit disposer, en leur assurant que les troubles ayant cessé, ils pourroient facilement s'acquitter envers lu. À l'Isle-de-France on lui proposa de lui vendre divers objets dont il eroyoit utile d’enrichir la col- lection destinée au Muséum : ilne balança point, et ce qu'il avoit épargné sur ses appointemens ne lui suflisant pas pour ‘ en faire l’acquisition, il emprunta une somme assez considé- D'HISTOIRE NATURELLE. 377 rable. La première chose qu'il fit à son retour fut de se pro- eurer des fonds pour payer les dettes qu'il avoit contractées. Le ministre, jugeant que la petite pension qui lui avoit été accordée suflisoit à peine à ses besoins, voulut le nommer à une place honorable et lucrative : « Monseigneur, lui ré- pondit-il, j'ai consacré ma vie aux sciences : aucune fortune ne sauroit me déterminer à donner mon temps à d’autres objets. Sij'avois une place, je voudrois en remplir les devoirs, et je ne pourrois plus disposer de moi, » Aussitôt que Péron eut été chargé de la rédaction du voyage, il se fixa à Paris dans un petit appartement voisin du Muséum, avec son ami Lesueur. Il ne se permettoit que les dépenses nécessaires pour ses travaux. Il avoit demandé au ministre la permission de se présenter chez lui avec Fhabit le plus simple : ce n’étoit point mépris pour les usages ; c’é- toit pour ne pas priver ses sœurs des économies qu’il pouvoit faire. Cependant la maladie de poitrine dont il étoit attaqué fai- soit des progrès effrayans :: elle fut encore aggravée par le chagrin que lui causa la mort de sa mère : il souffroit beau- coup, la fièvre et la toux ne le quittoient plus, les remèdes ne produisoient aucun effet. Bientôt il jugea que son mal étoit incurable, et regardant comme inutile de s'occuper de sa santé, il sut vaincre la douleur pour terminer quelques- uns de ses travaux. MM. Corvisart et Kéraudren lui ayant conseillé d'aller passer un hiver à Nice, il crut devoir céder à leur conseil; le voyage lui fit du bien et la douceur du climat parut le rétablir. Dès-lors il se livra au travail avec une nouvelle ardeur. 11 passoit les journées dans un bateau pour 278 ANNALES, DU MUSÉUM recueillir des mollusques et des poissons, et pour continuer toutes les observations auxquelles il s’éteit livré, C'étoit seu- lement pour ne pas afliger son cher et inséparable Lesueur qu'il consentoit à rentrer lorsque le froid ou la pluie Fexposoit à des dangers dont il ne s'apercevoit pas. Les lettres qu'il écrivit à ses amis pendant son séjour à Nice portent un ca- ractère d'enthousiasme :1l y peint les jouissances que donne l'étude de la nature et il paroït enivré du bonheur d’avoir fait quelques découvertes. Cependant le bien-être qu'il éprouvoit ne le portoit pas à se faire illusion sur sa santé. Il s’applaudissoit seulement d’avoir quelques mois de plus à travailler, et il mettoit si bien le temps à profit, que la collection qu'il fit à Nice est extrêmement précieuse. Lorsque Péron fut de retour à Paris, il retomba bientôt dans une situation pire que celle où il étoit avant son départ. Je le voyois fréquemment : je cherchois à lui donner des espérances : il n'en conservoit aucune : il parloit de sa fin avec une tranquillité surprenante : il voyoit approcher la mort avec le même courage qu'il Pavoit bravée dans les combats, au milieu des tempêtes, et parmi les sauvages. Il voulut aller finir ses jours dans le lieu de sa naissance, auprès de deux sœurs qui avoient été les premiers objets de sa ten- dresse, me dit, et à ses amis de Paris, un éternel adieu; ét cette.séparation fut cruelle. Arrivé à Cerilly il s’abandonne aux conseils qu'on lui donne et dont il sent l’inutilité. On placeson lit dans une étable que son ancien camarade d’études, M. Bonnet, avoit disposée pour cela : chaque fois qu'il sen- toit le besoin de prendre quelque nourriture, ses sœurs ou son ami Lesueur alloient traire les vaches et lui présentoient D'HISTOIRE NATURELLE. 259 du lait qu'il prenoit avec plaisir. Toujours il étoit environné des êtres les plus chers à son cœur. Désabusé de toute idée de réputation, il disoit souvent que les derniers jours de sa vie étoient ceux où il goûtoit les jouissances les plus pures: les sentimens qui rembplissoient son âme calmoient ses souf- frances. Comme on craignoit de le laisser parler, tandis que ses sœurs penchées sur son lit épioient tous ses mouvemens, son ami lui faisoit constamment la lecture et necessoit que lorsqu'il le voyoit s’endormir. Il conserva jusqu’à son dernier moment ce goût de l'instruction qui s’étoit annoncé dès sa plus tendre enfance. L’impatience, la vivacité qu’il avoit jadis s'étoient calmées; s’il prenoit intérêt à l'avenir, ce n’étoit plus que pour les objets de ses affections : il avoit la même sensibilité, et les soins’ qu'on lui prodiguoit lui, paroïssoient devoir prolonger son existence. Cependant ses forces s’épui- soient, il s’éteignoit insensiblement, et dans la nuit du 14 décembre, ayant reçu de son ami une goutte de lait qu'il lui avoit demandée, il lui serra la main et tourna sur lui son dernier regard. Sa perte, quoïque prévue depuis iong-temps, n’en fut pas moins douloureuse à ceux qui s’étoient dévoués à le servir. Depuis ce moment son ami Lesueur est comme isolé dans le monde : ses sœurs restent sans consolation; elles ont perdu celui dont le nom faisoit leur gloire, dont l'amitié faisoit leur bonheur, dont les soins attentifs suppléoient à la modicité de leur fortune. Nous espérons que la bienveillance du gouvernement, en leur assurant une honnête aisance, remplira les derniers vœux d’un frère à qui les sciences ont de si grandes obligations. 260 ANNALES DU MUSÉUM RECHERCHES CHIMIQUES Sur le Bois de Campéche et sur la nature de son principe colorant, Présentées à l’Institut le 5 novembre 1810, PAR M CHEVREUL, 1. | HR réfléchit sur les progrès que la chimie à faits depuis plusieurs années, on est étonné du peu de connois- sances exactes que nous avons sur les matières colorantes des végétaux, et du peu d'attention que lon a donné à leur étude. Cependant quand on considère les variétés de leurs nuances, de leur siége et de leur développement, quand on considère les avantages que l’on tire de plusieurs d’entre elles pour reconnoitre lanature acide ou alcaline des corps, enfin quand on considère que l'art de les fixer sur les étofles n’est qu’une suite d'opérations chimiques, on est forcé de convenir que tous les genres d'intérêt se réunissent, pour engager les chi- mistes à soumettre ces matières à un examen approfondi. 2. Les matières colorantes, comme toutes les substances qui jouissent d’aflinités énergiques, se rencontrent rarement à l’état de pureté; presque toujours elles sont combinées à des corps qui en modifient les propriétés ou qui les déguisent D'HISTOIRE NATURELLE. 281 infiniment. Ces corps sont de deux sortes : ou ils sont doués de la propriété colorante, ou ils en sont dépourvus, comme les huiles, la gomme, les sels, etc. Dans le premier cas un végétal présente plusieurs substances colorantes qu'il faut isoler les unes des autres, afin de distinguer les propriétés qui appartiennent à chacune d'elles en particulier, de celles qui résultent de leur union. 3. Pour éviter la confusion qui pourroit naître de l'emploi de ces expressions, principe colorant, couleur, matière colorante, extrait colorant, j avertüs que je me servirai des deux premières pour désigner fouf principe colorant coloré par lui-même; et des deux dernières pour désigner #7 prin- cipe colorant uni naturellement à des corps quelconques. Ces définitions me conduisent à diviser mes recherches sur les matières colorantes en deux parties : dans la première, j examine ces matières sous le rapport analytique; dans la seconde, je m'occupe des principes colorans. 4. Les substances tinctoriales étudiées sous ces deux rap- ports peuvent l’ètre encore sous celui de l'art qui les em- ploie. Ce dernier examen est sans doute un des plus intéres- sans à cause de son utilité immédiate; mais pour l’entreprendre avec succès, il faut avant tout, avoir déterminé la nature des matières colorantes et celle des principes qui les forment. Le but qu’on se propose dans cette recherche est de reconnoïître l'action des corps qui sont en contact, de simplifier des re- cettes, et de découvrir de nouvelles teintures ou de donner plus de fixité à celles qui sont connues. Pour remplir cette tâche, il faut reprendre les recettes que l’on suit dans les ate- liers, les répéter fidèlement et ensuite en éliminant telle on Te 36 289 ANNALES DU MUSEUM telle substance; par ce moÿen on arrive à distinguer les in- grédiens qui sont essentiels aux succès d’une opération de ceux qui lui sont inutiles. Îl faut ensuite comparer les résul- tats que lon obtient en se servant d'un principe colorant pur, et de celui-ct, uni aux corps avec lesquels il est natu- rellement combiné; il faut observer si les teintures obtenues dans le premier cas sont aussi solides que celles obtenues dans le second ; de cette matière, on juge s’il est plus avantageux d'employer un principe colorant qu'une matière colorante, et l’on peut apprécier en même temps l’action que les élé- mens d’une matière colorante exercent les uns sur les autres. Il n’est pas douteux que de pareils travaux ne conduisent à d’utiles résultats. 5. Je vais faire l'application d’une partie de ces vues à l'examen du bois dé campèche : je parlerai d’abord de son analyse, et ensuite du principe colorant qui lui imprime ses propriétés caractéristiques. PREMIÈRE PARTIE. EXAMEN ANALYTIQUE DU BOIS DE CAMPÉCHE ET DE SON EXTRAIT. S Er. EXAMEN ANALYTIQUE DU BOIS. 6. Le bois de campèche est compacte; il a une odeur assez forte de violette; la couleur de sa surface est d’un brun rou- D'HISTOIRE NATURELLE. 283 geätre, mais lorsqu'on le divise parallélement à ses fibres, on voit quelles parties mises à découvert sont d’un rouge- orangé : il a une saveur sucrée, amère et un peu astringente, il colore la salive en violet. ARTICLE Jer, Action de. l’eau. 7. Je fis infuser plusieurs fois de suite dans l’eau disullée, du bois de campèche réduit en copéaux minces. Quand je m'apercus que les infusions n'étoient plus que légèrement colorées, je soumis le boïs à l’action de l'eau bouillante, et je continua le traitement jusqu’à ce que l'eau cessàt d'agir. Pour épuiser un gramme de bois, il fallut 2 litres d’eau bouillante, Ce lavage donna 3 décig. 5 cent. d’extrait sec. Un gramme d'une autre variété de bois réduit en poudre, n’exi- gea que 1 litre 3'décilitres d’eau, et le lavage donna 3 dé- cigrammes d'extrait sec. Le bois de campèche qui avoit été épuisé par Veau étoit d’un gris-rosé. 8. Les premières infusions de campèche étoient d’un rouge- orangé, les secondes d’un orangé-brun, et les dernières dé- coctions étoient absolument incolores. Toutes ces liqueurs furent réunies et distillées; par la concentration elles devin- rent plus rouges et se couvrirent de pellicules irisées. Ces pellicules se rassemblèrent peu à peu sous la forme d’un sédi- ment visqueux. On finit d'évaporer l'extrait dans une capsule de platine. sn: 9. Le produit de la distillation étoit incolore (r); il con- (1) Quelquefois il arrive que ce produit est coloré en rose; cela me paroit dû 307 284 ANNALES DU MUSÉUM tenoit de l’Awzle volatile , car il avoit une odeur analogue à celle du bois, et il réduisoit la dissolution d’or; pour séparer Pacide qu'il pouvoit contenir, on le méla à de la barite bien cristallisée, et on le distilla. Le liquide qui passa dans le récipient avoit une odeur de champignon; on y trouva des traces d’ammoniaque. 10. Ce qui restoit dans la cornue, fut mis dans une capsule, évaporé à siccité, puis redissous dans l’eau. La dissolution étoit jaune; pour précipiter un léger excès de barite qu'elle contenoit, on l’exposa à l'air pendant 24 heures, on sépara ensuite par le filtre du carbonate de barite mêlé de silice (1). La liqueur filtrée fut concentrée, puis abandonnée à elle- même, au bout de plusieurs jours, elle donna des aiguilles jaunâtres d’acétate de barite : lorsqu'on versoit sur ces cris- taux de l'acide sulfurique étendu, il se dégageoit une odeur très-forte d’acide acétique, mais cette odeur n'étoit pas franche, elle étoit altérée vraisemblablement par un peu d'huile volatile qui s’étoit combinée avec l'acide. 11. Il suit de là qu'il y avoit dans le produit de la distil- lation de l'extrait aqueux de campèche, de l’hurle volatile et de l'acide acétique. à la cause suivante: la vapeur qui se forme au centre de la liqueur contenue dans la cornue, pousse vers les parois du vaisseau la matière colorante qui se précipite sous la forme de pellicules irisées : des atomes de ces pellicules passent dans le récipient au moyen de l'attraction capillaire et de l'impulsion de la vapeur, ils se dissolvent dans l’eau et ‘a colorent. L’ammoniaque contenue dans ce produit et qui fait passer la matière colorante au rose est accidentelle, ainsi que je le dirai dans la suite. (1) La barite que j’avois employée ‘étoit parfaitement pure; il faut que cette silice provint du vaisseau de verre dont je m’étois servi. D'HISTOIRE NATURELLE. 285 12. Cent parties d'extrait aqueux de campèche bien des- séché, lauissèrent 5o parties de charbon. Ce charbon, incinéré avec toutes les précautions nécessaires pour l'exactitude des opérations de ce genre, dégagea beaucoup de gaz hydrogène huileux, et donna une cendre blanche qui pesoit 3,53. Cette cendre, chauffée fortement, prit un consistance pâteuse et uve couleur un peu verdâtre, qui m'y fit soupconner la pré- sence du manganèse. L'eau avec laquelle on la fit bouillir lui enleva beaucoup de carbonate de potasse, un peu de muriate, et du sulfate. Le résidu insoluble dans l’eau fut dissous avec effervescence par l'acide nitrique foible, à l’ex- cepüon cependant de quelques flocons blancs. Cette disso- lution se prit en gelée par la concentration. Certain d’après ce phénomène qu’elle contenoit de la silice, je la fis évaporer à siccité, je versai de l’eau acidulée sur le résidu et j'obtins de la terre siliceuse sous la forme d’une poudre blanche légère. La dissolution des matières qui accompagnoient la silice, fut précipitée par l’ammoniaque en flocons, d’un blanc jaunâtre. Ce précipité, traité encore humide par la potasse, donna à cet alcali de l’alumine : ce qui ne fut pas dissous par la po- tasse étoit formé d’oxides de fer et de manganèse. On trouva dans la dissolution précipitée par l’ammoniaque, de Ze chaux et de l’acide sulfurique. 13. La cendre de charbon de campèche étoit donc formée, de carbonate de sulfate de potasse, de muriate de chaux. d'acide sulfurique. d’alumine. d’oxide de fer. d’oxide de manganèse, 286 ANNALES DU MUSÉUM 1/. La silice trouvée dans cette cendre étoit accidentelle, ainsi que je le prouverai dans la suite. ARTICLE IL Action de l'alcool sur le bois épuisé par l’eau. 15. Le bois épuisé par l’eau teignit en jaune l'alcool avec lequel on le fit bouillir. Il ne fallut pas une très-grande quantité d'alcool pour enlever au bois tout ce qu'il conte- noit de soluble dans ce menstrue ; toutes les liqueurs furent réunies et concentrées dans une cornue, le résidu fut ensuite évaporé à siccité dans une capsule de porcelaine. L'eau mise en digestion sur ce résidu, en dissolvit une très-petite quan- uté, elle prit une teinte rosée qui fut avivée par l'acide mu- riatique et qui passa au violet par le contact des alcalis. La matière insoluble dans l’eau étoit évidemment de zature hut- leuse ou résineuse, elle contenoit encore de la zzatière co- lorante, et peut-être un peu de matière animale. Lorsqu'on la projetoit sur un charbon, elle se fondoit et exhaloit une odeur balsamique mêlée d'empyreume, elle, étoit dissoute par l'alcool chaud, une partie s’en précipitoit par le refroi- dissement à la manière de la cire. L'eau troubloit abondam- ment cette dissolution. 16. Il suit de là que l'alcool avoit dissous de Za matière colorante , et une substance résineuse ou hurleuse qui étoit en véritable combinaison avec la première. Comme cette combinaison est insoluble dans l’eau quand elle est fixée sur le bois, il faut en conclure que la substance huileuse ou rési- neuse fait l'office de mordant pour une partie de la matière colorante. D'HISTOIRE NATURELLE. 287 ArTIcLE III. Action de l'acide muriatique sur le bois épuisé par l'eau et l'alcool. 17. Quoique le bois eût été traité par l'alcool, cependant il étoit encore odorant; sa teinte étoit singulièrement affoiblie; mais dès qu'il eut le contact de l'acide muriatique à roe, il prit une belle couleur rose. L'acide, après quatre jours de digestion, ne s'étoit pas coloré d’une manière sensible (1), il fut séparé du bois et remplacé par de nouvel acide. Lorsque le bois fut épuisé, on réunit tous les lavagés acides et on les satura par l’ammoniaque ; ils devinrent jaunes et déposèrent une poudre grenue qui ne paroissoit pas sensiblement colo- rée, mais quand on vint à la redissoudre dans un peu d’acide muriatique (afin de la détacher du vase où elle s’étoit préci- pitée ), elle teignit cet acide en beau rose. Cette poudre, pré- cipitée de nouveau par lammoniaque et décomposée ensuite par le carbonate de potasse, donna du carbonate de chaux et de l’oxalate de potasse; elle étoit donc formée d’oxalate de chaux (>); mais une chose qu'il faut remarquer, c’est l’af finité de ce sel terreux pour la matière colorante, aflimté qui doit nécessairement contribuer à fixer une partie de la couleur sur le ligneux du campêèche. () Un acide plus concentré, à 15° par exemple, se seroit coloré en rose, 2) Il est probable qu’elle contenoit aussi un peuide phosphate de chaux, P a P paosp 288 ANNALES DU MUSÉUM ARTICLE IV. Action du calorique sur le bois épuisé par l’eau, l'alcool et l'acide muriatique. 18. Le bois qui avoit été traité par l'acide muriatique fut lavé avec de l'eau bouillante, les premiers lavages étoient jaunes, les derniers étoient incolores et ne précipitoient pas le nitrate d'argent. Ce bois n’avoit plus qu'une couleur rosée presque imperceptible; je serois assez disposé à croire que la petite quantité de matière colorante qu'il retenoit étoit combinée à cette matière végéto-animale qui existe dans presque toutes les parties ligneuses des végétaux : les alcalis avec lesquels on le mit en digestion ne parurent pas lui en- lever de couleur. Ils prirent seulement une teinte légère de jaune. 19. Je distillai le bois qui avoit séjourné dans l'acide mu- riatique pour savoir sil contenoit de l'acide en combinaison; mais malgré les soins que j'aie pris pour rechercher cet acide dans les produits de l'opération, je n'ai pu y en découvrir de traces sensibles : 100 parties de bois bien sec ont donné re. de l’eau incolore; 20. une liquide jaune-citrin; 30. une huile orangée ; 4°. une huile brune plus pesante que l’eau; 5°. une huile noire concrète; tous ces produits étoient acides; ils dé- gageoient un peu d’alcali volatil lorsqu'on les méloit avec la potasse; 60. un charbon ayant la forme du bois que l’on avoit distillé, et qui pesoit 18, :. 0. S'il est vrai, comme l'ont dit MM. Fourcroy et Vau- quelin, que le carbonate de chaux des cendres du bois flotté D'HISTOIRE NATURELLE. 389 provient de la décomposition de l’oxalate calcaire, on ne doit plus retrouver de chaux dans la cendre d’un bois qui aura digéré pendant long-temps dans un acide; or, c’est le résul- tat que j'ai obtenu du bois de campèche épuisé par l'acide muriatique ; le peu de cendre qu'il a donné étoit formée de silice, d'un atôme de potasse et d’une trace presque insen- sible de chaux. S II. EXAMEN ANALYTIQUE DE L'EXTRAIT AQUEUX DE CAMPÈCHE. 21. Les expériences précédentes ne n'avoient point fait connoitre tous les corps qui pouvoient se dissoudre avec la matière colorante, lorsqu'on appliquoit l’eau au bois de cam- pèche : elles avoient eu pour but principal de déterminer la nature des substances qui fixent une partie de la couleur sur le bois et qui la défendent par l’aflinité qu’elles exercent sur elle, de l’action dissolvante de l’eau. Pour achever le travail analytique que j'avois commencé, il falloit isoler le principe colorant des corps auxquels il étoit uni dans l'extrait aqueux de campèche. AnTiIcLe Ier. Action de l’oxide de plomb sur l’infusion aqueuse de campéche. 22. Je fis bouillir plusieurs litres d’eau sur 6o grammes de litharge réduite en poudre fine, afin de lui enlever tout ce qu’elle pouvoïit contenir de soluble. Le lavage ne me pré- senta que des traces de carbonate de plomb, dont la présence 17e 37 200 ANNALES DU MUSÉUM étoit réndue beaucoup plus sensible par l'infusion de cam- pêche que par l'hydrogène sulfuré. L’oxide de plomb ainsi lavé fut mis en contact avec des infusions de campèche, jus- qu'à ce qu'il refusät d’en décolorer, de nouvelle ; dans cet état on pouvoit le considérer comme étant saturé de matière colorante; toutes les infusions qui avoient été décolorées avoient la même odeur que le bois; elles furent réumies et distillées, le principe odorant passa dans le récipient, celui qui distilla sur la fin de l’opération avoit l'odeur de cham- pignon. Il est vraisemblable que ce produit contenoit de l'acide acétique, mais je n’en recherchai pas l'existence. 23. Le liquide concentré dans la cornue avoit une légère ouleur citrine, une saveur fade; il n’étoit pas sensiblement acide au papier de tournesol; il étoit épais; il contenoiït quel- ques flocons blancs : par l’oxalate d’ammoniaque il précipi- toit de l’oxalate de chaux, et par le muriate de platine du mnuriate triple de potasse. Ces deux bases étoient combi- nées à l’acide acétique, ‘car lorsqu'on versoit de l'acide sul- furique étendu dans le liquide qui les contenoit, 1l se déga- geoit une légère odeur de vinaigre. Le liquide, concentré de nouveau dans une capsule de porcelaine, déposa quelques flocons, et des cercles blancs comme terreux sur les parois du vaisseau : on l'abandonna ensuite. à lui-même pendant plusieurs jours. Il ne donna pas de cristaux 1l se recouvrit d’une pellicule élastique, et finit par enduire le fond de la capsule d'üné matière laisante qui attira l'humidité de l'air. Ce résidu repris par l’eau fut dissous en partie; la dissolution filtrée précipitoit parlanoix de galle(r), par l'aléoollet l'acétate (1) Ce précipité étoit dù en partie à l’acétate de chaux. D'HISTOIRE, NATURELLE. 291 dé plomb; par l’évaporation elle donnoit de nouveaux flo- cons. D’après ces propriétés je pense qu’elle contenoit de la matière végéto-animale et peut-être un peu de gomme. Il suit de ces faits, que la liqueur décolorée par la Htharge, contenoit de l'Aurle volatile, des acétates de potasse et de chaux, et de la matière régéto-antimale. ARTICLE IL Action des dissolvans sur l'extrait aqueux de campêche. À. ESSAIS ANALYTIQUES. 24. L'expérience précédente ne prouvoit pas qu'il n’y eut eu que le principe colorant à se fixer à la litharge, il étoit mème plus naturel de soupconner le contraire, attendu l’af- finité de cet oxide pour un grand nombre de corps. Il me sembloit, si cette opinion étoit fondée, que les dissolvans étoient les seuls réactifs propres à isoler de principe colorant, par la raison que les oxides métalliques et les autres bases qui forment avec lui des combinaisons peu solubles, devoient se comporter à la manière de l’oxide de plomb. L'alcool! fut le premier dissolvant que j'employai. Par l'alcool. 25. (a) Je mis 5 grammes d'extrait sec avec 100 grammes d’alcool. Après quatre jours de macération, je décantai le li- quide et je le fis évaporer dans une capsule de platine parfai- tement propre. Lorsque la liqueur fut à consistance de sirop clair, j y aperçus en la regardant au soleil de petites paillettes cristallisées. Je versai de l’eau dans la liqueur, il se fit un Ds » 202 ANNALES DU MUSÉUM précipité qui fut redissous à l’aide de la chaleur. Je fis éva- porer : par la concentration, il se forma beaucoup de cris- taux qu réfléchissoient la lumière du soleil avec beau- coup de force. Quand je jugeai l’évaporation assez avancée, j'essayai de séparer la substance cristallisée de l’eau-mère. Ce fut en vain que pour y parvenir, je me servis d’eau : lorsque je versois ce liquide dans la liqueur concentrée, il se faisoit sur-le-champ un précipité qui se méloit aux cristaux et qui empèchoit d'obtenir ceux-ci à l’état de pureté. L'alcool au contraire me réussit parfaitement; j'en versai sur la liqueur concentrée, je délayai et ensuite je mis le tout sur un filtre : il passa une eau-mère brune que j’examinerai plus tard. (&) Je remis 100 grammes d'alcool sur le résidu qui n’avoit pas été dissous par l'alcool (&) : après six jours de macération, je décantai. Quoique cette liqueur contint beaucoup moins de matière en dissolution que la précédente, elle avoit une couleur plus foncée, elle étoit plus brune : l'extrait qu’on en obtint, traité par l’eau, fut en partie dissous par ce menstrue. La dissolution évaporée se couvrit de pellicules brunes, se troubla par refroidissement et déposa une matière tenace, comme grasse, d’une couleur orangée brune; ce qui restoit en dissolution étoit d’un orangé clair. La partie de l'extrait qui ne s'étoit pas dissoute dans l’eau étoit beaucoup plus brune que celle qui s'y étoit dissoute. (4) Je remis 50 grammes d'alcool sur le résidu insoluble dans l'alcool (4). Après trois jours, je filtrai; j’obtins une liqueur analogue à la précédente, seulement la couleur orangée alloit toujours en diminuant, et elle étoit remplacée par une couleur brune. D'HISTOIRE NATURELLE. 203 (e) Un 4me. , 5me, lavage alcoolique présentèrtnt les mêmes résultats. (f) Le résidu insoluble dans lalcool, fut dissous pour la plus grande partie par Feau chaude et par l'alcool bouillant, employé en très-grande quantité. Ces dissolutions avoient une couleur brune. 26. I résultoit de cet essai que l'extrait aqueux de cam- pèche paroïssoit contenir deux substances colorantes, l’une soluble qui teignoit l'eau et l'alcool en orangé rougeûtre, et l'autre brune qui n'étoit que très - peu soluble : mais lorsqu'on travaille sur les composés organisés dont la nature peut changer facilement par les agens qui servent à les ana- lyser, il faut, pour apprécier les changemenrs qui peuvent arriver, essayer la mème analyse par différens corps : si alors les résultats coincident entre eux, on peut être à peu près certain que les réactifs n’ont pu apporter de changement notable dans la nature des composés que l’on examine, et que par conséquent les corps que l’on a séparés sont tels qu'ils existoient dans la substance analysée. Ces réflexions me conduisirent à analyser l'extrait de campèche par l'éther sulfurique et par l’eau. Par l'éther sulfurique. 27. 5 grammes d'extrait de campèche traités par 80 gram. d’éther donnèrent, après deux jours de macération, une liqueur d’une couleur orangée plus claire que celle de l'alcool employé dans l'opération (55, a). Cette liqueur évaporée donna de beaux cristaux, et l’eau-mère qui les avoit fournis 204 ANNALES DU MUSÉUM étoit beaucowh moins foncée que celle dont j'ai parlé (25). L’éther se comporta d’une manière analogue à l'alcool, seu- lement il paroïssoit avoir moins d'action que ‘lui sur la ma- tière brune. par l'eau. >8. Une expérience que je fis me convainquit que l’eau se comportoit à la manière de l'alcool et de l’éther; car ayant appliqué ce liquide à un extrait qui n'avoit pas donné de cristaux dans une première évaporation, j'en séparai de la matière brune, et j'obtins une dissolution qui donna beau- coup de cristaux par la concentration. $ B. ANALYSE DE L'EXTRAIT DE CAMPÈÊCHE. 29. D’après les essais précédens, je ne pouvois plus douter que l'extrait de campèche étoit principalement formé d’une substance cristallisable, soluble dans l’eau, et d’une substance qui n'étoit dissoute par ce liquide qu'à la faveur de la pre- mière, puisqu'elle perdoit de sa solubilité en raison de la substance cristallisable qu'on lui enlevoit. Ce fait une fois constaté, je crus devoir traiter le bois de campèche à une douce chaleur afin de dissoudre le moins possible de matière peu soluble; en conséquence je fis digérer ce bois avec de l'eau à une température de 5o à 550, Après huit heures, je filtrai la liqueur : celle-ci étoit d’un rouge orangé; quand on la regardoit au soleil on apercevoit de petits cristaux qui flottoient dans son sein. Fe 30: La liqueur précédente se couvrit par Févaporation de D'HISTOIRE NATURELLE. 205 petites plaques qui n’étoient pas brillantes, mais qui cepen- dant paroissoient cristallisées; quand elle fat réduite à consis- tance de sirop elle donna beaucoup de cristaux ; je la fis concentrer davantage et je mis le résidu desséché dans Pal- cool à 360, Après 48 heures, je filtrai; il resta sur le papier wre matière d'un rouge rnarron , sur laquelle je passai de l'alcool afin de lui enlever tout le liquide qui avoit macéré avec elle. La liqueur filtrée fut évaporée : quand elle commença à s’épaissir, je versai dessus une petite quantité d’eau, sur-le- champ il se forma une multitude de petits cristaux qui ; recouvrirent la hqueur d’une pellicule dorée. [/eau peut contribuer de trois manières à favoriser la cristallisation du principe soluble, d’abord en se combinant avec lui, ensuite en diminuant l’action dissolvante de l'alcool, et enfin en per- mettant_à celui-ci de se dégager par évaporation. Je fis éva- porer doucement la liqueur et je FPabandonnai à elle-même. Après vingt-quatre heures, je décantai l’eau-mère, je mis de Falcool sur £es cristaux, je versai ceux-ci sur un filtre et je les lavai à l'alcool jusqu’à ce que le lavage passât d’une couû- leur orangée franche; l’eau-mère évaporée donna des cris- taux et une Zqueur qui refusa de cristalliser. 3r. Je vais examiner successivement la 2atrère d’un rouge marron, et l’eau-mère où les cristaux s’étotent formés ; quant à ceux-ci, je n’en parlerai qu’en passant parce qu'ils doivent être le sujet de la seconde partie de ce Mémoire. Exarnen de la matière d’un rouge marron. 32. 12 décigrammes de cette matière furent mis en diges- - 206 ANNALES DU MUSÉUM tion avecun demi-litre d’eau. Après plusieurs heures, je versai le tout sur un filtre; j’obtins un liquide brun-rougeàtre. Je fis passer sur la substance qui ne s’étoit pas dissoute, un demi- litre d'eau bouillante divisé en cinq portions; ensuite je dé- tachai la substance du filtre et je la fis bouillir successivement avec un litre et demi d’eau divisé en quinze portions. Les der- nières eaux étoient incolores après dix minutes d’ébullition. Le premier demi-litre sera examiné sous le nom de premier lavage ; le second, sous le nom de deuxième lavage, et enfin le litre et demi, sous celui de troisième lavage. 33. La matière insoluble dans l’eau pesoit 7 centigrammes environ; elle étoit d’un noir-brun brillant; quand on la dé- layoit avec un peu d’eau sur une lame de verre, elle paroissoit d'un jaune rougeûtre par réfraction. Dès qu’on versoit dessus une goutte d'acide sulfurique, elle devenoit rouge. Elle étoit dissoute à froid par l'acide nitrique à 320, et la dissolution étoit rousse. L'eau froide n’avoit aucune action sur elle; l’al- cool froid en dissolvoit une petite quantité et se coloroit en jaune brun. J'aurois bien désiré de la soumettre à un plus grand nombre d'expériences, mais la petite quantité que j’avois à ma dis- position m'a forcé de borner mes essais à ceux que je viens de rapporter; ils suflisent, au reste, pour prouver la grande affinité de cette matière pour le principe colorant cristallisa- ble, puisque malgré les nombreux lavages auxquels on lavoit soumise, elle en retenoit toujours une portion qui y étoit démontrée par la couleur rose que l’acide sulfurique lui faisoit prendre. Je suis très-porté à croire qu'elle contenoit aussi de la matière animale, mais en petite quantité, La D'HISTOIRE NATURELLE. 207 34. Je reviens aux lavages de la matière d’un rouge marron. 1er, lavage. Saveur un peu astringente.et amère; précipitant très-bien la gélatine (1); ne se troublant pas sensiblement par refroidissement, mais se troublant beaucoup après avoir été concentré et se recouvrant de pellicules qui réfléchissoient la lumière du soleil avec assez de force. Je le fis évaporer à siccité; je mis le résidu en macération dans l’éther. Celui-ci prit une couleur orangée un peu brune; je le fis évaporer. Sur la fin de l'évaporation j'ajoutai un peu d’eau; il se forma une pellicule comme huileuse, et par refroidissement, il se sépara une 72a{ière rouge-oranÿgée; ce qui restoit en dis- solution ne différoit de celle-ci que par plus de principe soluble, et se rapprochoit beaucoup de l’eau-mère dont je parlerai dans la suite. 35. Le résidu insoluble dans l’éther, successivement traité par plusieurs demi-litres d’eau, donna des lavages bruns qui contenoient du principe soluble et de la matière brune inso- Zluble semblable à celle que j'ai décrite précédemment (35). Les derniers lavages contenoient proportionnellement au principe soluble, plus de matière brune que les premiers. 36. 2e. lapage. 1'e. portion. Brune rougetre, troublant la colle et la précipitant au bout de quelque temps. (1) La dissolution de gélatine que j’ai constamment employée avoit été faiie avec 1 gramme de colle de poisson et 40 grammes d’eau. Dans les analyses végé- tales, il faut bien se donner de garde d'employer la dissolution de colle-forte du commerce, parce que celle-ci contient presque toujours des sels alcalins qui peu- vent empêcher la combinaison de gélatine et de matière astringente de se pré- cipiter. : qe 38 298 ANNALES DU MUSÉUM se, portion. Moins colorée que la précédente, un peu plus rougeàtre, troublant à peine la gélatine. 3e. portion. Moins colorée que la précédente; n’agissant pas sur la gélatine. 4e. et 5e. portions. Beaucoup moins colorée que la 3e.; pas d'action sur la gélatine. Au bout de vingt-quatre heures la couleur rougeàtre de ces lavages passa au brun et il se déposa un sédiment brun qui ne différoit de la matière brune insoluble que parce qu'elle contenoit plus de principe soluble; ce qui restoit en dissolution ne différoit du $édiment que par une plus grande quantité de ce dernier.... Ce second lavage avoit la plus grande analogie avec ceux du résidu insoluble dans l’éther (35). 37. Le 3e. lapage présenta les mèmes phénomènes que le précédent, seulement la matière brune s’y trouvoit en beau- coup plus grande quantité que le principe soluble. Examen de l’eau-mère. 38. L’eau-mère, de laquelle on avoit obtenu le principe soluble cristallisé (30), et de laquelle on ne pouvoit séparer de cristaux (1) par l'évaporation et par l'alcool, étoit d'un rouge-brun : elle avoit une saveur sucrée, astringente et amère : elle se prenoit en masse quand on y versoit de la gélatine. Regardant les cristaux comme le principe colorant et l’eau-mère contenant évidemment beaucoup de ce dernier, je devois naturellement penser que l'eau-mère ne donnoit (1) On obtenoit bien des cristaux par l’évaporation , mais ils étoient en si petite quantité que l'alcool les dissolvoit , en quelque proportion qu’on l’employäi. D'HISTOIRE NATURELLE. 399 pas de cristaux, parce que le principe colorant étoit engagé dans une combinaison qui s'opposoit à ce que ses molécules obéissent à leur force de cristallisation, et je devois en même temps m'appliquer à trouver un procédé propre à détruire cette combinaison. Ce fut en vain que pour y parvenir je fis évaporer l’eau-mère à siccité, et que je traitai le résidu par l'alcool à 40°; j'obtins une dissolution complète; j'en conclus que l'alcool exerçoit une action trop forte sur les élémens de la combinaison pour qu'il fût possible de les séparer par son intermède, et qu'il falloit employer des dissolvans qui eussent une action très-différente sur chacun des élémens en particulier. L'expérience m'ayant appris que l’eau froide ne dissolvoit pas la matière brune (33), j'employai ce liquide et ensuite l'éther. Par l’eau. 39. 3 grammes d’eau-mère, évaporée à siccité et réduite en poudre, furent mis pendant 30 heures en macération avec 165 grammes d’eau. Le liquide décanté et filtré étoit d’un rouge orangé-brun, d’une saveur sucrée, astringente et amère ; il fut évaporé. Quand il fut concentré au tiers de son volume primiuif, il se forma à sa surface une pellicule dorée. On fit concentrer davantage et on abandonna la matière à elle- même pendant vingt-quatre heures : on lui appliqua ensuite l'alcool, et on sépara un grand nombre de cristaux qui s'étoient formés dans une eau-mère analogue à celle qui avoit été soumise à l'examen. Il suit de là que l’eau avoit séparé de l'eau-mère une matière peu soluble qui empéchoit le prin- cipe colorant de cristalliser, et qu'une portion de cette matière 10 300 ANNALES DU MUSKUM ayant été dissoute par l’eau à la faveur de ce principe s'op- soit à ce que celui-ci cristallisa en totalité. 4o. Le résidu qui n’avoit pas été dissous par l’eau froide étoit orangé brun; il pesoit 12 décig.; il fut mis sur un filtre et lavé avec un demi-litre d’eau bouillante, divisé en six portions. sre, portion. Couleur orangée brune, se troublant légère- ment par refroidissement , saveur astringente, sucrée etamère, précipitant sur-le-champ la gélatine. 2e. portion: Présentant les mêmes propriétés que la précé- dente, mas dans un degré moins marqué. 3e. portion. Plus brune que la seconde, troublant la géla- tine et ne la précipitant qu’au bout de quelques minutes. Ces trois lavages réunis et mis sur un bain de sable chaud s'éclaircirent, et par l'évaporation se couvrirent de pellicules et déposèrent par refroidissement une matière d’une couleur orangée brune. 4e. portion. Quoique contenant moins de matière que la troisième, elle étoit plus foncée en couleur; elle troubloit légèrement la gélatine. be, portion. La même propriété dans un degré moins marqué, seulement la couleur un peu plus brune. Ge. portion. Plus brune que la précédente, ne troublant la gélatine que très-légèrement. Ces lavages évaporés donnèrent une liqueur qui ne diffé- roit des trois premiers lavages évaporés que par une couleur plus brune, elle précipitoit très-bien la gélatine et devenoit rose par l'acide sulfurique. 4r. Le résidu insoluble dans le demi-litre d’eau précédent, D'HISTOIRE NATURELLE. 3o1 fut bouilli avec deux litres d’eau divisés en plusieurs portions. Ces lavages étoient un peu rougeûtres, le résidu pesoit moins de 5 centig. ; il étoit couleur de terre d'ombre. L’ayant fait bouillir avec un litre d’eau, il la colora très-légèrement; dans cet état il m'a paru semblable à la matière brune obtenue de la matière rouge marron (33). 42. La matière qui avoit été séparée de l’eau-mère par l'eau froide (39) ne n'a paru différer de la matière d’an rouge marron que par plus de principe colorant soluble (et peut-être par moins de matière alcaline ) (1). Les trois pre- mières portions du lavage (40) donnèrent un extrait qui res- sembloit beaucoup à celui que l’on avoit obtenu de la matière d'un rouge marron, au moyen de l’éther. Par l’éther. 43. 3 grammes d’eau-mère évaporée à siccité, absolument semblables à ceux que lon avoit traités par l'eau, furent mis en macération avec 115 grammes d'’éther. Après 30 heures, on filtra; on fit évaporer; sur la fin de l’évaporation, on ajouta un peu d’eau. On obtint une liqueur qui donna moins de cristaux que l’eau-mère traitée par l’eau; on ne put séparer ces cristaux de l’eau-mère au moyen de l'alcool; on fit éva- porer alors à siccité et on obtint un extrait pesant 19 décig.; on le mit avec 78 grammes d’éther. Après 24 heures de ma- cération, on décanta l’éther de dessus un léger résidu qui n’étoit que de la matière brune retenant de la matière colo- (1) C’est ce que j'ai reconnu par l’expérience : 5 décig. de cette matière ne m'ont pas donné 2 centig. de cendre, au lieu de 5 que m'a donné la matière marron. 302 ANNALES DU MUSÉUM rante soluble. La liqueur éthérée ayant refusé de donner des cristaux, fut évaporée à siccité. On ne put obtenir de cristaux du résidu qu'après l'avoir traité deux fois par l’eau; dans chaque traitement il se sépara un peu de matière brune. La quantité d’eau employée étoit à celle de l'extrait dans le rapport de 50 à r. 44. On remit sur le résidu insoluble dans l’éther 115 grammes de nouvel éther. Après 24 heures de macération, on le décanta et on le fit évaporer; on n’obtint que 2 décig. d'extrait sec. Pendant l’évaporation, la liqueur se couvrit d’une pellicule d'apparence huileuse, se troubla beaucoup par refroidissement et déposa une matière rouge orangée qui ressembloit à la partie soluble dans léther de la matière d’un rouge marron. 45. La partie insoluble dans l’éther se comporta comme une combinaison de principe soluble avec excès de matière brune. 46. Après avoir déterminé les élémens de lextrait de campèche , il me restoit à voir auquel de ces élémens les bases salifiables que j’avois reconnues précédemment s'étoient combinées lors de la séparation de ces élémens au moyen de l'alcool. Vingt décigrammes de matière marron se réduisirent à 2 décig. de cendre : laquelle donna à l’eau 10. de la potasse carbonatée ; 2°. du sulfate de potasse ; 3°. une petite quan- üté de chaux caustique : à l'acide muriatique, 1°. de la chaux ; 2°. du sulfate de chaux; 30. de l'alumune ; 4°. de l’oxide de fer; 5°. de l’oxide de manganèse. I n’y eut D'HISTOIRE NATURELLE. 303 qu'un très-léger résidu insoluble dans l'acide muriatique; je n'oserois assurer qu'il fut de la sz/ce. D'après cela, 100 parties de matière marron donnent 0,10 de cendre. Vingt décigrammes d’eau-mère desséchée ont donné une quantité de cendre que je n’ai pu apprécier à cause de sa petite quantité. Cette cendre m'a paru contenir de la pozasse , de la chaux, du fer et de l’alumine. Il suit de là que les bases salifiables sont unies dans l'ex- irait au principe insoluble, ou bien qu’elles s’y unissent au moment où l’on vient à séparer celui-ci du principe soluble. Explication des procédés employés dans l'analyse précédente. 48. L’extrait coloré de campêche est formé de deux sub- stances, l’une soluble dans Peau, susceptible de cristalliser, l'autre qui ne doit sa solubilité qu’à la première, et qu'on ne peut jamais séparer entièrement du principe soluble. Tant que le premier principe domine dans l'extrait de campèche, il lui imprime toutes les propriétés qui dérivent de la couleur orangée, la dissolution de l'extrait donne alors des cristaux : elle ne se trouble point par refroidissement. Si au contraire c'est le principe insoluble, alors la dissolution ne donne pas de cristaux : elle se trouble par refroidissement et elle se rapproche beaucoup des extraits astringens. 49. L'unpuissance où l’on est d'enlever au moyen de l'eau le principe soluble au principe insoluble (33), prouve la grande aflinité de ces substances l’une pour l’autre. Cette affinité et la disposition dans laquelle se trouve le principe colorant 304 ANNALES DU MUSÉUM pour former des combinaisons insolubles expliquent pour- quoi ces substances se combinent simultanément avec oxide de plomb et probablement avec les autres bases, et pourquoi elles agissent alors comme un seul corps; ces deux causes rendent l'analyse de l’extrait de campèche par voie de pré- cipitation extrèmement diflcile, pour ne pas dire impossible, car dans ce cas le principe insoluble ne devant sa solubilité qu'au principe soluble, doit nécessairement accompagner celui-ci dans ses combinaisons. Quand, au contraire, on traite l'extrait par les dissolvans, les forces des élémens ne cons- pirent plus pour produire un résultat unique, le dissolvant exerce une affinité différente sur les deux principes, alors celui qui a le plus d’aflinité pour le liquide se dissout. Mais la force du liquide n'étant pas suffisante pour détruire lafli- nité des deux principes l'un pour l'autre , il s'établit deux combinaisons : l’une qui se dissout, qui est avec excès de prin- cipe soluble, l’autre qui ne se dissout pas, et qui contient ün excès de principe insoluble. L'alcool, l'éther et l'eau déter- minent cette séparation; mais chacun ayant une aflinité paru- culière pour les élémens, la séparation n’est pas absolument la même suivant qu'on opère avec tel ou tel dissolvant. Ce qui peut favoriser cette séparation c’est la combinaison de la plus grande partie des bases salifiables avec la partie inso- luble, et la présence d’une certaine quantité de matière ani- male qui peut s'unir avec celle-ci. 5o. Si l’on fait évaporer la liqueur dans laquelle on a fait macérer l'extrait de campèche, la force de cohésion détermine une portion du principe eristallisable à se séparer; mais il ar- rive un terme où l’autre portion ne peut obéir à cette force D'HISTOIRE NATURELLE. 305 par la raison qu’elle reste combinée avec un peu de matière insoluble, et que cette combinaison est telle que l’aflinité réciproque des élémens, surmonte l’insolubilité de l’un et la force de cristallisation de l’autre. 51. Il semble au premier coup d'œil que la combinaison dont on ne peut plus séparer de principe cristallisable, devroit être dans le même cas que l'extrait de campèche, que par conséquent elle devroit se comporter comme celui-ci avec les dissolvans; mais l'expérience fait voir que l'alcool n’en peut plus séparer de matière insoluble. Il faut nécessairement que dans le premier traitement il se soit séparé proportion- nellement plus de matière insoluble que de principe soluble, de manière que l’eau-mère doit contenir une plus grande quantité de ce dernier que l'extrait aqueux. D’après cette considération, on sent que le principe insoluble y étant en moins grande quantité doit y être plus fortement combiné; par conséquent pour le séparer il faut employer le réactif qui ait action la plus différente possible sur les deux élémens; que par conséquent l'alcool qui dissout le principe insoluble et le principe soluble est beaucoup moins propre que l’eau, qui ne dissout pas le premier, pour opérer cette séparation (x). 52. Puisque l'alcool dissout la combinaison incristallisable de principe soluble et de principe insoluble, et qu'il les dis- sout en plus grande proportion que le principe cristallisable, on voit comment on parvient à séparer par son intermède ce dernier de la première combinaison (25, &) (30), et com- (1) Ce qui contribue à rendre cette séparation moins facile, c’est peut-être l'absence des bases salifiables. 17: 39 306 ANNALES DU MUSÉUM ment l’eau ne pourroit servir à opérer cette séparation parce qu'alors il se précipiteroitavec le principe cristallisable beau coup de principe insoluble, et que si lon mettoit beaucoup d’eau pour redissoudre le premier on redissoudroit beaucoup du second. 53. Je crois en avoir dit assez sur l’action des dissolvans pour faire voir que l'analyse d’un composé ne dépend pas tant du nombre des réactifs que lon peut employer, que de l'usage qu'on peut en faire , et que si jusqu'ici on n’a pu ana- lyser plusieurs substances végétales, il faut s’en prendre plu- tôt à la manière d’opérer qu'à la nature des réactifs dont on s'est servi. 54. Les faits précédens bien établis, je me suis assuré par l'expérience que je vais rapporter que les deux substances qui constituent l'extrait de campèche ne subissent pas de change- ment de composition en se combinant avec l’oxide de plomb et probablement avec les autres bases métalliques. J'ai pris la combinaison de litharge et de matière colorante formée dans l'expérience décrite plus haut (22). Je l'ai mise avec de l'acide sulfurique très-étendu d’eau. Il a fallu quatre mois pour faire disparoître tout l'excès d'acide. Après ce temps, j'ai décanté le liquide et jai vu qu'il s'étoit formé une croûte noire sur les parois du vase, et quelques flocons mucilagineux, qui flottoient dans le liquide; il m'a paru que le sulfate de plomb s’étoit teint en rouge par une combinaison d’acide sulfurique et de matière colorante. J'ai fait évaporer le liquide, il s’est formé à sa surface des pellicules de matière peu soluble, mais par la concentration elles ont été redisssoutes. Sur la fin de l’évaporation il s’est formé des cristaux de matière colorante D'HISTOIRE NATURELLE. 307 orangée, qui ont été séparés d’une eau-mère brune au moyen de l’alcool. Ces cristaux étoient semblables à ceux qui avoient été obtenus directement de l'extrait de campêèche traité par l'alcool : ils n’en différoient que par une teinte un peu plus rougeàtre. L’eau-mère, évaporée et traitée par l'eau, donna de la matière brune. Il suit de cette expérience que la matière cristallisée se combine avec la litharge et probablement avec les autres bases métalliques sans subir de changement remar- quable (r), et que par conséquent nous sommes en droit de regarder cette matière comme un principe immédiate des végétaux, que l’on peut obtenir toujours dans le même état avec des dissolvans de nature différente, et que l’on peut ensuite séparer au moyen d’un acide des combinaisons qu'il a formées avec des bases. 55. L’eau-mère, séparée d’une partie de la matière insolu- ble au moyen de l’eau, donnoit avec la barite un précipité bleu soluble en totalité dans l'acide nitrique; cela indiquoit qu'elle ne contenoit pas d'acide sulfurique sensible à la barite. Ce précipité, chauffé au rouge dans une cornue de verre, a donné un résidu qui a dégagé une légère odeur d'acide prus- sique par l'acide sulfurique, et une petite quantité d’hydro- gène sulfuré parl’acide muriatique pur. Je suis tenté, d’après cela, de croire qu'un atôme d’acide sulfurique s'étoit com- biné avec la matière colorante (2). (1)Je fais abstraction de la quantité qui s’étoit décomposée et qui avoit donné naissance à une malière floconneuse. (2) Je me suis aperçu dans ces derniers temps que l’extrait de campèche don- noit le même résultat; d’où il suit que l’expérience que je viens de rapporter (55) est insuffisante pour prouver la combinaison de l'acide sulfurique avec l'extrait. 39” 308 ANNALES DU MUSÉUM 56. Dans ces derniers temps, M. Thomson a désigné plu- sieurs principes immédiats des végétaux, par un nom dérivé de celui du végétal, dans lequel on les a trouvés pour la première fois. Sans prétendre que ce principe de nomenclature soit à l'abri de tout reproche, je crois que dans l’état actuel des connoissances, c’est le plus naturel que l’on puisse ad- mettre, pour désigner ces sortes de substances dont la com- position trop compliquée se refuse à un nom tiré de la nature de leurs élémens. Outre que ce nom ne donne pas d'idée fausse, il a cet avantage de dériver d’un nom déjà connu, et de rappeler à la mémoire le végétal qui présenta le premier à l’analyse le principe qu'il désigne. Je propose donc d'appeler hématine, la substance qui donne ses propriétés caractéris- tiques au bois de campèche. ADDITION. J'ai fait dernièrement l'examen d’un bois de campèche qui m'a présenté quelques résultats différens de ceux du bois dont je viens de parler. Ce bois n'avoit pas d’odeur, et sous ce rapport, on pou- voit aisément le confondre avec le bois de Brésil. 15 gram, d'extrait aqueux ( obtenu par macération ), traités par demi-litre d’eau, ont laissé 6 décig. de matière marron. La partie qui s’étoit dissoute dans l’eau, a donné par éva- ‘ poration beaucoup d’hématine cristallisée. La matière marron a donné 4 pour 100 d’une cendre for- mée de chaux pour la plus grande partie; la portion de lex- trait qui s'étoit dissoute dans l’eau n’a donné que 1,4 de cendre très-alcaline. D'HISTOIRE NATURELLE. 309 Le bois épuisé par-l'eau a été-traité par l'alcool bouillant. Ce liquide distillé a déposé par la concentration des gouttes huileuses qui sont devenues concrètes en refroidissant. L’al- cool a été évaporé à siccité, et le résidu qu'il a laissé à été traité à plusieurs reprises par l'alcool froid. .Les premiers lavages étoient plus colorés que les derniers. Lorsque l'alcool froid n’a plus eu d'action, on à fait agir l'alcool bouillant ; celui-ci a dissous une matière grasse qui s'est précipitée par refroidissement à la manière de la cire. Ce qui ne fut pas dissous par l'alcool na paru une combinaison de matière colorante, de matière animale et de matière huileuse. Je ne déciderai pas si la matière qui se précipite par re- froidissement de l'alcool, est différente de celle quise dissout dans l'alcool froid, parce qu'il est possible que ce soit l'excès de la matière colorante qui empêche la seconde de se:préci: piter comme la première. 310 ANNALES DUÜ MUSÉUM ANALYSE De lPUrine d'Autruche et Expériences sur les excrémens de quelques autres familles d'oiseaux. PAR MM. FOURCROY ET VAUQUELIN (1). J usqu’icr l’analyse des urines des animaux herbivores n’a démontré aucune trace de la présence de l’acide urique ni de Pacide phosphorique, et l’on en a conclu que ces produc- tions étoient exclusivement réservées aux animaux carnivores : cependant M. Vauquelin a annoncé, il y a environ 16 à 17 ans, l'existence de l'acide urique dans une concrétion trouvée dans la vessie d’une tortue par M. Vicq-d’Azir ; mais la quan- tité de cette substance étant fort petite, il ne put multiplier suffisamment ses expériences pour démontrer ce fait d’une manière évidente, en sorte qu'on est resté à cet égard dans le doute depuis cette époque. Nous étant procurés ces jours derniers, au Muséum d'His- toire naturelle, de l'urine d’autruche, nous l’avons soumise à quelques expériences pour en connoitre les élémens les plus caractéristiques. (1) Ce travail à été fait en 1806; mais comme il n’a été imprimé dans aucun ouvrage, et qu’il présente quelqu’intérêt pour la physique végétale, j'ai cru devoir le publier. D'HISTOIRE NATURELLE. 311 Nous commencerons par en décrire lespropriétés.physiques qui diffèrent sensiblement de celles des wrines des autres classes d'animaux. Cette urine est blanche comme du lait; ellé est ordinaire: ment mêlée à une quantité plus ou moins grande-d’excrémens. Quand elle est séparée de ces corps étrangers, elle dépose la matière qui la rendoit laiteuse, devient transparente et est peu colorée d’abord, mais elle prend une teinte brune aësez foncée à la longue. Elle contient aussi une assez grande quan- tité de matière muqueuse qui lui donne beaucoup de con- sistance, et qui peut en être séparée par la filtration, n'étant pas en véritable combinaison avec les autres principes: _ Cette urine a une saveur piquante et fraiche comme celle d'une dissolution légère de nitrate de potasse. Nous allons maintenant examiner successivement le dépôt, la partie liquide et le mucus de ces urines. La matière qui forme le dépôt, lorsqu'elle a été lavée et séchée, est blanche et pulvérulente comme de la craie; elle a au toucher la douceur et le gras de l'argile; n’a aucune sa- veur et brûle comme une matière animale. Les acides étendus d’une certaine quantité d’eau ne lui font éprouver aucune altération, ce qui exclut lidée que cette substance soit formée de craie ou d'argile. Les alcalis caustiques la dissolvent, promptement, ils ne laissent qu’une très-pette quantité de mucilage animal. La dissolution alca- line de cette substance n’est pas sensiblement colorée; les acides la précipitent abondamment, et le précipité prend une 319 ANNALES DU MUSÉUM forme cristalline, si le mélange assez étendu d’eau est agité pendant quelque temps. Le précipité formé par les acides dans la dissolution ne line, lavé et séché, nous a présenté toutes les propriétés de l'acide urique, c’est-à-dire, qu’il se dissout dans l’eau bouil- lante, que sa dissolution rougit la teinture de tournesol, et que la substance elle-même, en s’unissant aux alcalis, en neu- tralise la causticité; d’ailleurs il se compose au feu absolument comme l'acide urique. Il résulte donc déjà de cette première connoïssance que l'autruche, qui ne se nourrit que de végétaux, fournit une urine qui contient de l'acide urique comme celle des animaux carnivores, et particulièrement celle de l’homme, avec la- quelle elle a, comme nous le verrons plus bas, la plus grande analogie. Ce fait est d'autant plus curieux que les urines des autres classes d’animaux herbivores n’ont fourni, jusqu'ici, aucun vestige de cette substance. Passons maintenant à la partie liquide séparée des excré- mens, du mucus et de l'acide urique. D'abord pour avoir un aperçu des substances contenues dans cette urine, nous l'avons soumise à quelques épreuves par les réactifs. 10, Elle a une couleur rougeàtre qui a singulièrement aug- menté d'intensité par l’exposition à l'air. 20, Elle rougit fortement la teinture de tournesol. 30. L'infusion de noix de galles y forme un précipité flo- conneux, jaunâtre, ce qui añnonce la présence d’une matière animale. 9 D'HISTOIRE NATURELLE. 13 4°. L'acide muriatique oxigéné la rend laiteuse, effet qui s'accorde avec celui de la noix de galles. 50. L'’ammoniaque y forme un dépôt floconneux et coloré. 60, La potasse caustique en produisant le même effet dans cette urine en dégage de plus de l'ammoniaque. 7°. L'oxalate d’ammoniaque y produit un précipité qui a toutes les propriétés de l’oxalate de chaux. 80. Le nitrate d'argent en donnant avec cette urine un précipité insoluble dans l'acide nitrique, démontre l'existence d'un muriate. 9°. Le nitrate de baryte a prouvé par un précipité msoluble dans l'acide muriatique que cette urine contient un sulfate. 100, Enfin, l'eau de chaux formant encore dans la portion d'urine déjà précipitée par l’'ammoniaque, un dépôt flocon- neux assez abondant, nous en avons conclu qu'il y a de l'acide phosphorique dans l'urine d’autruche. Après ces premiers essais par lesquels nous avons reconnu dans cette urine la présence d’une substance animale, de l'acide phosphorique "des sulfates de chaux et de potasse, du muriate d’ammoniaque, et du phosphate de chaux, nous avons fait évaporer avec précaution la liqueur qui nous res- toit, et nous avons traité par l'alcool lé résidu qu’elle a fourni. Par ce moyen nous avons séparé le muriate d’ammoniaque d'avec les sulfates de chaux et de potasse, le mucilage ani- mal et le phosphate acidule de chaux qui ne sont pas solubles dans Palcool. Ces derniers ont été traités par l’eau froide pour dissoudre le sulfate de potasse; les sulfate et phosphate de chaux sont JE 8 40 314 ANNALES DU MUSÉUM restés sous forme de poussière blanche; mais comme l'acide libre a rendu soluble dans l’eau une portion du phosphate de chaux, on a versé de l’ammoniaque dans la dissolution pour précipiter ce sel. Ensuite cette liqueur a été mêlée avec de Peau de chaux pour avoir l'acide phosphorique libre. Nous avons séparé le phosphate de chaux du sulfate de la même base par de l'eau aiguisée d'acide muriatique, et nous l'avons ensuite précipité par l’ammoniaque. Les matières de l'urine d’autruche qui ne sont pas solubles dans l'alcool sont donc, le sulfate de potasse, le sulfate de chaux, le phosphate acidule de chaux, et la matière animale. Les substances dissoutes par l'alcool lui ont communiqué une couleur rouge brune assez intense : l'alcool évaporé a laissé une liqueur brune épaisse, au fond de laquelle il y avoit une petite quantité d'huile noire. L’eau mêlée à cette liqueur la trouble, et en sépare une plus grande quantité d'huile qui prend l'aspect et la consistance de la poix noire en se rassemblant. La liqueur séparée de cette huile conservoit encore une légère couleur rouge; elle étoit très-acide, mais n’étoit pas précipitée par l’eau de chaux, ce qui prouve que cette pro- priété n’est pas due à l’acide phosphorique. La potasse et le nitrate d'argent nous ayant démontré, la première lammoniaque, et le second l'acide muriatique, nous en avons conclu l'existence du muriate d’ammoniaque dans la liqueur dont il s’agit, ce que la saveur indiquoit d’ailleurs suflisamment. Quant à l'acide contenu dans la même liqueur, nous pensons, quoique nous ne l’ayons pas isolé, que c’est l'acide D'HISTOIRE NATURELLE. 315 acétique , lequel étoit combiné à l'huile et provenoit peut-être, ainsi que l'huile elle-même, de la décomposition de Purée, décomposition qui peut avoir été opérée en partie avant que l'urine ne nous ait été remise, et en partie aussi par l'effet des nombreuses opérations auxquelles nous avons soumis cette liqueur animale; il seroit possible cependant que cette huile eût une autre origine et qu’elle füt toute formée dans l'urine. En examinant les dépôts qui se forment successivement pendant l’évaporation de l’urine d’autruche, on trouve que celui qui a lieu au commencement est composé de sulfate et de phosphate de chaux, le premier est plus abondant que le second; que le deuxième dépôt qui se forme par le refroi- dissement de la liqueur concentrée, est un mélange de sul- fate de chaux et de potasse et d’un peu de phosphate de chaux; que le troisième dépôt est encore formé des mêmes substances que le second, mais il contient du muriate d’am- moniaque, et plus de sulfate de potasse. En supposant qu'on eût évaporé lurine à siccité, comme nous lPavons fait plus haut, on pourroit séparer le muriate d’ammoniaque et la matière colorante par l'alcool; le sulfate cle potasse par une petite quantité d’eau chaude, le sulfate de chaux avec beaucoup d’eau bouillante, et le phosphate de chaux resteroit; mais comme celui-ci contient un excès d’a- cide phosphorique, une partie se dissout dans l’eau qu’on emploie pour enlever le sulfate de potasse d’où on pourroit le précipiter par l’eau de chaux. L’on peut aussi séparer le sulfate de chaux du phosphate en dissolvant le mélange dans l'acide nitrique et en précipitant 4o * æÆ 316 ANNALES DU MUSÉUM par lammoniaque, la dissolution suffisamment étendue d’eau. Les sels que l'urine d’autruche fournit par des cristallisations successives sont toujours colorés, et on ne peut les obtenir blanes qu’en détruisant par le feu la susbtance animale qui en est la cause. Cependant la plus grande partie de cette substance colorante reste en combinaison avec le muriate d’ammoniaque et l'acide acéteux, se dissolvant ensemble soit dans l’eau, soit dans l'alcool : sa dissolution dans l’eau est précipitée par les acides minéraux sous la forme d'une hüile grasse et comme bitumineuse : cette huile colore en rose les papiers et les linges. L'urine d’autruche est donc composée : 10, D’acide urique. 0, De sulfate de potasse. 30. De sulfate de chaux. 4°. De muriate d’ammoniaque. 5o, D'une matière animale. 6°. D'une substance huileuse. L’acide urique et les sels sont en proportions plus grandes dans l'urine d’autruche que dans les urines humaines : l'acide urique en fait au moins la 6oe. partie; le sulfate de potasse, environ la 150e.; le sulfate de chaux, la 500. : le sel am- moniaque y est aussi très-abondant. L’urine d’autruche conserve son acidité jusqu’à la fin d’une évaporation bien ménagée, ce qui n'arrive pas aux urines humaines, parce que probablement la matière animale que les premières contiennent ne se change pas aussi facilement en ammoniaque, ou qu’elles n’en contiennent pas suflisamment pour neutraliser l'acide phosphorique. D'HISTOIRE NATURELLE. 317 L'on voit par les résultats qui précèdent que lmrine d’autruche est, à l’urée près, parfaitement semblable à celle de l'homme, au moins quant à la nature des principes, mais elle en diffère par les proportions de ces mèmes principes: nous nous sommes assurés que l’acide.urique particulièrement y est incomparablement plus abondant que dans l'urine hu- maine. Le résultat le plus remarquable et le plus intéressant de ce travail, c’est d'avoir trouvé dans l'urine d’un animal qui ne se nourrit que de végétaux, de l'acide urique, de l'acide phosphorique, etc., matières qui ne se retrouvent pas dans les urines des autres classes d'animaux herbivores; mais celles- ci contiennent de l'acide benzoïque qui manque dans l'urine des oiseaux. Celà doit nous apprendre à ne pas tirer de nos résultats particuliers des corrollaires trop généraux. La découverte de l'acide urique dans l'urine d’autruche nous a conduits à rechercher cette substance dans les excré- mens des autres genres d'oiseaux, espérant’ que dans ce cas l’analogie ne seroïit pas trompeuse, et nous avons eu la sa- üsfaction de la voir se réaliser. La fiente des poules contient une quantité notable de cet acide, c'est lui qui forme l’enduit blanc qui recouvre ces excrémens. Pour l'en séparer et l'obtenir pur, il suflit de les laisser macérer pendant quelques minutes dans une légère dissolution de potasse, et de méler ensuite la liqueur filtrée avec de l'acide muriatique; il se forme un précipité blanc qui prend une forme cristalline, et une légère couleur jaune : ce précipité jouit de toutes les propriétés de l'acide urique. La fiente de tourterelle nous a fourni aussi, en suivant J18 ANNALES DU MUSÉUM le mème procédé, une quantité assez considérable de cet acide. La fiente des oiseaux carnivores, et particulièrement celle des vautours et des aigles, sort de leur cloaque liquide comme de l’eau et blanche comme du lait : elle ne contient qu'une quantité infiniment petite de matière solide qui a une couleur noire. g Ces excrémens liquides que lon doit regarder comme de véritables urines, laissent précipiter par le repos, une matière blanche et pulvérulente comme de la craie, qui n’est autre chose que de l'acide urique : la liqueur qui surnage ce dépôt est. peu colorée, acide et donne par l’eau de chaux un préci- pité qui a toute l'apparence du phosphate calcaire. La potasse caustique y développe une forte odeur d’am- moniaque. La raison qui nous fait penser que les excrémens liquides des oiseaux carnivores n’est que de l'urine qui se rassemble pendant quelque temps dans leur cloaque , c’est que ces animaux en rendent souvent trois à quatre onces à la fois sans mélange d’excrémens solides. De là il suit que l'acide urique que l’on trouve mème dans les excrémens solides appartient à l'urine. I seroit possible que la coquille de l'œuf qui, comme on sait, se forme dans le cloaque des oïseaux, contint de l'acide urique mêlé au carbonate de chaux qui fait la princi- pale partie de la coquille. L’acide urique contenu dans la fiente des oiseaux aqua- tiques ressemble par ses propriétés physiques, telles que la couleur, la forme, à l'acide urique du gouano, espèce de . terreau que M. de Humbolt a rapporté de ses voyages; tous D'HISTOIRE NATURELLE. 319 les deux donnent à leur dissolution dans l’eau et dans les alcalis une couleur brune : ils précipitent les dissolutions de plomb, d'argent et de mercure sous les mêmes formes et les mêmes couleurs. De là on peut conclure que le gouano a été formé par la fiente d'oiseaux aquatiques. L’acide urique des oiseaux aquatiques est comme celui du gouano modifié par une substance colorante qu'on n’en peut séparer, et qui l'empêche de cristalliser comme l'acide urique ordinaire en se précipitant. D'après ces expériences, il devient très-probable que toutes les classes d'oiseaux ont les urines de la mème nature que celle de l’homme, à l'exception de l’urée, et que la grande différence qui existe entre les urines des quadrupèdes her- bivores et celles de l’homme et des oiseaux, dépend moins de la nature des alimens qu’ils prennent que de l’organisation des reins et peut-être des autres viscères. 320 ANNALES DU MUSEUM MÉMOIRE SUR LES CHAMEAUX DE PISE. PAR M. SANTI, Professeur d'Histoire naturelle à Pise. 1e gouvernement de Toscane entretient depuis long-temps à Pise, et précisément dans le domaine de San Rossore, un baras de chameaux. On ignore l'époque où ce haras a été établi, et mes re- cherches pour en avoir connoissance ont été presque infruc- tueuses. J'ai cependant des raisons de croire que cet établis- sement est dû au grand duc Ferdinand IF de Médicis ; prince - qu'un esprit cultivé portoit à favoriser tout ce qui pouvoit être utile au pays qu'il gouvernoit avec tant de sagesse. En effet, une chronique de la Cour, rédigée par César Tinghi, rapporte qu'en 1622, première année du règne de ce grand duc, les princes allèrent voir un chameau arrivé de Sorie à Florence. C’étoit donc un animal rare et curieux : d’où l’on peut conclure qu'à cette époque il n’y avoit pas de chameaux en Toscane. Une tradition établie parmi les cameliers ou gardiens des chameaux, veut que le haras ait été établi ici avant le milieu du dix-septième siècle, ce qui répond au temps du règne de Ferdinand IE. Un camelier âgé de 88 ans, dont le père et le grand-père D'HISTOIRE NATURELLE. 3or ont été aussi cameliers, m'a assuré que le haras introduit d'abord avoit duré cent ans, et qu'on l’avoit rétabli pendant sa première jeunesse. Une note trouvée au bureau des pos- sessions ou domaines impériaux de Pise, porte que le premier haras s'étant réduit à six femelles seulement, le gouverne- ment toscan, en 1730, fit venir de Tunis treize chameaux mâles et sept femelles : ce qui formatreize couples complets. Le haras se multiplia ainsi, et s’est fort bien conservé jusqu'à nos jours. Un pays plat : un sol sablonneux : un climat doux : des arbres, des broussailles, des ronces, des herbes grossières; voilà ce qui convient au chameau, et c’est précisément ce que la vaste plaine de Sax Rossore lui offre de tout côté. Aussi cette race y a-t-elle bien prospéré. En 1789, ayant été voir les chameaux de San-Rossore, je trouvai qu'il y en avoit 196, mâles et femelles. Le nombre en est un peu diminué, car cette année 1810, on n'y en compte que 170 environ, comme mon vieux chef camelier et autres personnes me l'ont assuré. Les chameaux de Pise n’ont qu'une bosse fort relevée, placée un peu sur le derrière du dos. Ils appartiennent donc à l'espèce nommée dromadaire, répandue en Arabie, en Egypte, en Barbarie, et surtout parmi les Arabes Bedouins. Leur corps maigre et décharné est couvert d’un poil très- court sur le devant du museau : plus long sur le sommet de la tête presque houppée, sur le cou, au haut et an dehors des jambes du devant jusqu'au coude, sur le dos et surtout sur la bosse qui en est, pour ainsi dire, couronnée tout autour. La queue est aussi revètue d’un long poil qui se prolonge bien au delà des vertèbres. PTS 4 LS] bot 322 ANNALES DU MUSÉUM La couleur du poil varie. Il est blanc avec une nuance légère de rose, ou gris, ou baï, ou bai foncé et presque noir. Ce poil tombe et se renouvelle tous les ans sur la fin du printemps et au commencement de l'été. J'ai mesuré un dromadaire mâle âgé de 12 ans; en voici les dimensions. mètres. Longueur de la tète........ Settiereleis lets iegeiate DAC 0 0 » _54& Longueur du cou..... SEE Meta niet asie Nue eine ee 1 041 Longueur du tronc au corps....................... DEA AE Longueur de la queue osseuse... .......,....:...... 0 505 Longueur de la queue, le poil compris.................. » 876 Hauteur au sommet de la bosse... 0... se etes oo e eee # 2 TO Hauteur au-dessus des épaules. .......... M SR ALCELEE 7 : DITES 668 Les dromadaires de Pise sont en amour ou en rut, depuis la fin dé janvier jusqu'à la fin de mars; les mâles à l’âge de quatre ans, les femelles à trois ans. Cependant on contient les mâles jusqu’à six ans pour leur laisser le temps de prendre la force et l’accroissement convenables. Les mâles et les fe- melles sont propres à la génération pendant environ 12 ans. Le rut rend les dromadaires màles, inquiets, criards et même capables de mordre leurs gardiens. Pendant ces accès d'amour brutal ils ouvrent souvent la bouche, et poussent au-dehors de la gueule une vessie membraneuse rouge qui rentre et disparoît par l'inspiration. Les femelles passent le temps du rut avec plus de tranquillité. Un étalon suflit pour vingt et mème pour trente femelles. Il ne supporte:pas un rival, et deux étalons se trouvant réunis au même troupeau pendant le rut, se battent à outrance à coup de dents et à coups de pieds. L’accouplement a lieu chez les dromadaires à peu près comme chez les autres mammifères. D'HISTOIRE NATURELLE. 323 La femelle se couche ventre contre terre, selon sa manière ordinaire : le mâle s'accroupit sur ses jambes de derrière, et embrasse la femelle avec $es jambes de devant. La verge qui est tournée en arrière, et pousse aussi en arrière l'urine, sort de son fourreau pendant l’érecti6n, et tend en avant. Il n’est pas vrai que ces animaux aient une sorte de répugnance à s'accoupler à la vue de l'homme : mais ils sont bien loin de cette vivacité et de cette vigueur qu'on remarque en pareille occasion chez beaucoup d'autres quadrupèdes , et surtout chez les chevaux. La femelle porte pendant onze ou douze mois, au bout desquels elle met bas un seul petit. Il n’y a pas d'exemple d’une double portée. Le nouveau-né ne pouvant pas d’abord se soutenir sur ses jambes pour atteindre les mamelles de sa mère, qui ne daigne pas s'abaisser jusqu'à lui, mourroit de faim sans le gardien qui le prend dans ses bras et le met à portée de téter. Cette cérémonie se continue pendant einq où six jours : ce qui donne au petit chameau le temps de prendre la force de se tenir debout. Pour mettre les femelles des dromadaires à l'abri de tout accident et pour les mieux soigner, on les réunit pendant le premier mois de leur gros- sesse et un mois avant leur accouchement dans une grande cabane qu'on a disposée pour cela et où l’on a mis le foin nécessaire à leur nourriture. On nourrit aussi avec du foin dans de grandes écuries tous les dromadairés de travail, mais seulement pendant l'hiver, car ils passent le reste de l’année à la campagne avec les autres qui y trouvent toujours leur päture. Là ils mangent de préférence des feuilles de chène, de liége, de chène vert, Te 324 ANNALES DU MUSÉUM d’aulne et d’autres arbres : des broussailles, des ronces, des chardons, des bruyères, et d’autres plantes dures et sèches, laissant, sans y toucher, l'herbe verte et tendre dont les autres troupeaux sont si friands. Nos dromadaires ne boivent qu’une fois par jour, et ils pourroient rester bien plus long-temps sans boire si cela étoit nécessaire. On dompte le dromadaire destiné au travail à quatre ans. Pour y parvenir on lui replie une jambe de devant qu'on attache avec une corde : on tire ensuite cette corde, et on oblige ainsi le dromadaire à tomber sur le genou fléchi. Si cela ne réussit pas, on en fait autant à l’autre jambe, et il tombe sur les deux genoux, et sur la callosité qu'il a à la poitrine. On accompagne souvent cette opération d'un cri particulier, même de quelques légers coups de fouet. C’est ainsi qu'à ce cri, à un coup de fouet, à une secousse de licou en bas, le dromadaire s’habitue à se coucher sur le ventre, les genoux repliés, au gré du conducteur. On lui met ensuite un bât, on le charge d’un fardeau d’abord léger, mais qu'on augmente peu à peu, et on le force à se lever au cri du conducteur, et à marcher. La charge d’un dromadaire de quatre ou cinq ans est de mille à douze cents livres de Toscane, ou de 340 à 400 ki- logrammes : les plus forts portent jusqu'à quinze cents livres ou 5oo kilogrammes. C’est à tort qu'on a dit que les cha- meaux annoncent par un cri qu'ils sont assez chargés. C’est expérience et la discrétion du conducteur qui en décide. Une charge excessive mettroit le pauvre dromadaire dans l'impossibilité de se relever, et l'exposeroit à succomber sous D'HISTOIRE NATURELLE. 325 le poids de son fardeau. On lhabitue aussi par les mêmes moyens à se laisser monter par le conducteur et à obéir en marchant à ses ordres et à ses impulsions. Ce n'est pas une chose bien longue ni bien difficile que de dompter un animal timide, doux, sans défense, et dont la race est avilie par un ancien esclavage. Une callosité au sternum; deux aux jambes de devant; une aux jambes de derrière : voilà sept points sur lesquels les dro- madaires s'appuient, soit qu'ils se couchent, soit qu'ils se lèvent de terre. Ces callosités existent aussi au nombre de sept dans le dromadaire nouveau-né, comme je m'en suis assuré par mes propres yeux. J'ai peine à croire que ces corps durs et calleux, ainsi que la bosse du dos, soient, comme plusieurs auteurs l'ont prétendu, un effet du travail et de la pression, et qu'ils soient ainsi devenus héréditaires. Pourquoi la bosse et les callosités ne seroient-elles pas plutôt une conformation naturelle à ces animaux ? Au reste, comme on ne connoit le chameau ou le dromadaire que dans l'état de domesticité, on ne peut pas décider sans réplique cette ques- tion sur laquelle les plus célèbres naturalistes ne sont pas d'accord. La marche du dromadaire est dure et pesante. Il a le pas lent, mais allongé, et il fait trois milles par heure et trente milles par jour. Sa marche est bien plus rapide , lorsqu'il va au trot; mais ici on ne le met pas à cette épreuve qui, sous un climat étranger et dans l’état de dégénération où il se trouve, lui pourroit être très-nuisible. Les Arabes d'Asie et d'Afrique ont l'usage de châtrer les dromadaires destinés à la monture et à la charge. C’est pour 320 ANNALES DU MUSÉUM les rendre plus doux et plus dociles, surtout pendant le rut, qui dure environ soixante jours; auquel temps ceux qui sont entiers deviennent tellement rétifs et capricieux qu'on n’en peut faire aucun usage. Mais au haras de Pise on ne châtre pas les dromadaires, parce qu'on a reconnu par l'expérience, que les hongres perdent leur vigueur à tel point qu'ils ne sont plus propres au service, et qu'ils périssent facilement. Les maladies principales qui attaquent nos dromadaires sont au nombre de quatre : 10, L'anticore; c'est un dépôt d'humeurs qui paroit au dehors avec un tremblement universel, et une forte inflam- mation. Cette maladie est mortelle et de courte durée. Une saignée abondante au commencement est le meilleur remède à employer. 0, L’acetone a beaucoup de rapport avec l’anticore, et est aussi fort dangereux : mais il n’est pas si funeste que ce dernier. 3. La ventrina est une constipation des estomacs : le dromadaire qui en est attaqué s’agite, il ne mange, ne boit, ni ne rumine, et ordinairement il meurt. On traite cette ma- ladie par la saignée, et par des purgatifs melés d'huile d'olive. 4o. La rogna ou galle est formée de boutons écailleux, ronds, larges et plats. C'est une maladie contagieuse pour le haras. On la traite par des frictions faites avec un onguent composé d'huile d'olive, de soufre et de goudron fondus et mélés au feu. L'effet de ce remède est ordinairement heureux. La durée ordinaire de la vie de nos dromadaires n’est pas bien longue. Les femelles, et ceux des mäles qui ne sont pas soumis au travail, peuvent quelquefois vivre jusqu'à 25 et D'HISTOIRE NATURELLE. 327 même jusqu'à 30 ans : mais les dromadaires qui servent à la charge et à la monture, vont diflicilement au delà de 20 ans. Pline et quelques voyageurs ont assuré qu'il existe une antipathie bien déclarée entre les chameaux etles chevaux. La plupart des naturalistes et des voyageurs modernes rejettent un peu trop légèrement cette assertion. A la vérité je n'ai pu m'apercevoir que nos dromadaires aient été effrayés à l'aspect des chevaux; mais il n’en est pas de mème de ces derniers : dès qu'ils apercoivent les dromadaires, on les voit d’abord hérisser leurs crins, roidir les oreilles, frémir, frapper la terre et bien souvent prendre le mors aux dents et se jeter à tra- vers les champs et les fossés, au grand danger du cavalier ou des voitures. Pour éviter de pareils accidens on tàche d’habi- tuer peu à peu les chevaux à voir des dromadaires, et même à se trouver dans leurs écuries au milieu d’eux : ce qui s’ob- tient en peu de temps et sans beaucoup de peine. C’est une précaution nécessaire à Pise, où l’on est exposé souvent à ren- contrer des dremadaires, soit à la ville, soit à la campagne. * Le haras des dromadaires de Pise n’est pas un objet de simple curiosité. Des personnes employées dans cette admi- nistration m'ont assuré que l'entretien des dromadaires est très-avantageux au domaine par tous les services qu'il en retire. Il seroit d’ailleurs impossible d’avoir ici des animaux aussi dociles, aussi laborieux et aussi sobres que ces pauvres dromadaires. Cependant il s’en faut beaucoup qu’ontire d’eux tout le parti qu'on pourroit. On les emploie surtout à trans- porter à la ville et ailleurs le bois, le foin, la paille, ete., des forêts et du domaine de San Rossore. Le transport du foin, de la paille et du chaume de ce domaine à la ville et dans les 328 ANNALES DU MUSÉUM divers lieux où l’on en demande, est un objet considérable. Le transport est payé à part du prix d'achat. Le poil de nos dromadaires sert à remplir des matelas communs. On en fait aussi des tricots grossiers. Mais je suis d'avis qu’en le triant, où en le mêlant à d'autre poil, ou à cle la laine fine, il seroit bon pour des tricots d’une meiïlleure qualité, pour des étoffes et pour des feutres. Les peaux des dromadaires morts de maladie ou de vieil- lesse, se vendent cinq ou six livres de Toscane. Tannées, elles fournissent un cuir assez bon, dont on se sert pour faire des valises, pour couvrir des malles et pour d’autres usages analogues. “Le lait qui sert aux Arabes de nourriture et de boisson, et dont le fromage est pour eux un mets délicieux , n’a ici d'autre usage que celui d’allaiter les petits. La chair du jeune dromadaire doit être tendre et bonne à manger, puisqu'on la trouve telle dans des pays arides où ces pauvres animaux ne trouvent pas une nourriture sufli- sante; mais ici on n’oseroit pas en faire l'essai. Nos dromadaires porteroient aisément deux personnes as- sises chacune dans une corbeille, comme cela se pratique en Perse et en Egygte : mais on ne les a point encore employés à cet usage. Il arrive très-rarement qu'on vende des dromadaires. Quelques propriétaires ont cru pouvoir en tirer parti en les introduisant dans leurs terres; dans ce cas le prix d’un jeune dromadaire a été de quarante à cinquante sequins (1). Mais, (1) De 450 à 560 francs environ, D'HISTOIRE NATURELLE. 329 soit par la nature du pays peu favorable à cette espèce d'ani- maux, soit à cause du dégàt que le dromadaire fait aux arbres et aux arbrisseaux, en rongeant leur écorce, ce genre de spé- culation n’a pas eu le succès qu’on en espéroit. On ne doit pas compter pour un objet de quelque importance, le cas qui se présente bien rarement de vendre un dromadaire de rebut aux charlatans qui vont de ville en ville le faire voir pour de l'argent. Ces dromadaires se vendent de vingt à trente sequins (1); mais, je le répète, ces ventes sont si rares qu’elles ne doivent pas être comptées comme un produit pour le haras. Maintenant si on compare notre dromadaire de Pise avec celui d'Arabie, d'Egypte et de Barbarie, on verra que le premier est bien inférieur, et bien moins utile à son maitre. Le dromadaire arabe a une marche prompte, rapide, infati- gable : le nôtre n’a guère qu'un pas lent et pesant. L’arabe parcourt sans effort, malgré un lourd fardeau, vingt et trente lieues par jour, et davantage encore, si on l'anime : pendant que le nôtre ne fait pas au delà de trois milles par heure et de trente milles par jour. :L’arabe vit jusqu'à quarante et mème cinquante ans : le cours de la vie du nôtre n’outrepasse pas vingt ans, surtout chez ceux qui sont dévoués au travail; les autres pouvant vivre jusqu à vingt cinq, ou tout au plus jusqu'à trente ans. Je pense qu'on peut conclure de tout cela, que le droma- daire de Pise est ou une variété inférieure et plus foible du dromadaire arabe, tel peut-être que le /02k des Persans, ou bien une race détériorée et dégénérée par la différence de (1) De 223 à 336 francs environ. 17. 42 330 ANNALES DU MUSÉUM climat, par la diversité d’alimens, et par un genre de vie moins dur, moins actif et plus délicat que celui auquel on l'habitue dans son pays natal. Mes observations sur nos dromadaires, sur leurs mœurs et sur leur conformation m'ont convaincu que ces animaux ont été formés par la nature avec une économie telle qu'ils n’eus- sent besoin que d’une nourriture très-modique et très-maigre pourentretenir leur existence. En effet le dromadaire a la tête singulièrement petite; le cou grêle; le corps maigre; les jambes décharnées; ses màchoires et ses dents sont assez fortes pour mâcher des ronces, des broussailles, de jeunes branches d'arbres, et même des noyaux de dattes : sa panse petite et resserrée, se remplit facilement, ce qui l’oblige à ruminer : il est pourvu d’un sac ou réservoir dans lequel il peut faire une ample provision d’eau pour s’en servir au besoin, en la faisant remonter jusqu’à la panse et même jusqu’à la bouche pour appaiser sa soif et pour ramollir par la rumination sa maigre et sèche pâture : la grande bosse qu'il a sur le dos est un vrai amas de graisse destiné à suppléer par la résorption au défaut de nourriture. C’est à l’aide de cette structure que le dromadaire a pu devenir habitant de pays plats, sablonneux, stériles, secs et arides. Doux, pacifique, sans défense, il a dû chercher un asile contre les attaques et les embüches des bêtes carnassières, dans les déserts où elles ne sauroient subsister. Mais c’est homme surtout qui le protège et le dé- fend. Sans sa puissante protection, et le dromadaire et le chameau seroïent peut-être au nombre de ces quadrupèdes jadis existans sur la terre, maintenant tout-à-fait perdus, et que M. Cuvier a su tirer de l'oubli et de lanéantissement. D'HISTOIRE NATURELLE. 331 NOTE Surunpetit Coquillage de la Méditerranée quiest analogue à des fossiles des environs de Paris et de Bordeaux. PAR M. F. J. B. MENARD-DE-LA-GROYE. E, parcourant une collection de coquillages recueillis dans le golfe de Tarente, j'ai distingué au milieu d’un mélange de nasses, de phasianelles et de buceins du moindre volume, quelques coquilles qui quoique blanches et très-petites se faisoient remarquer par une forme et des caractères particuliers. Je les ai exa- minées avec d’autant plus d'intérêt que jai cru voir en elles les analogues vivans de deux autres coquilles qui se trouvent fossiles , lune à Grignon près de Paris, l’autre dans les environs de Bordeaux. Ces coquilles fossiles ont été décrites par M. de Lamarck, dans ses Mémoires sur les fossiles des environs de Paris ( Annales du Mus., tom. 4, pag. 435, et tom. 8, pl. 60, fig. 11 ), et l’analogie de la coquille de Tarente est telle qu'il est inutile d’en donner une nouvelle description. On pourra remarquer seulement -que la coquille marine a ses stries transversales moins marquées et sa spire un peu plus raccourcie. Mais ces différences ne me paroïssent d'aucune importance, et l’on en voit de presque aussi fortes entre les deux fossiles que M. de Lamarck n’a point hésité à regarder comme identiques. Cest avec la coquille de Bordeaux que celle de Tarente offre le plus de ressemblance. M. de Lamarck termine son article en disant que l’auricule grimaçante esé très-voisine par ses rapports du bulime piétin de l'Encyclopédie, n°. 73, qui doit êtré aussi, selon lui, une auricule. Jai eu recours à l'Encyclopédie pour savoir si ce bulime piétin n’étoit pas la coquille de Tarente; et j’ai vu tout de suite dans cet ouvrage, que Bruguière n’a point connu par lui-même le piétin, et que tout ce qu'il en dit et le nom mème est emprunté d’Adanson. Allons donc directe- ment à Adanson. C’est à la page 11 et à la planche 1, fig. 4 de sa Corchyliologie du Sénégal, qu’on trouve le coquillage dont il s'agit, appelé piétin d’après des motifs qu’il est inutile que je rapporte. L'auteur commence par dire ce qu’a ré- pété Bruguière, que ce coquillage n’est figuré nulle part et qu’il ne l’a vu que dans les Cabinets où il l’a envoyé. Ainsi ce n’est que d’après lui qu’on peut le connoître. Jai comparé la description et la figure que M. Adanson donne du piétin avec la coquille de Tarente , el je suis convaincu que ces deux coquilles ne sont pas du même genre. On en peut juger sur le simple résumé des différences principales. 10, Le piétin a 3 lignes de longueur et 2 lignes un quart de largeur. La plus 339 ANNALES DU-MUSÉUM grande de nos coquilles de Tarente, quoique bien terminée et munie d'un bour- relet marginal fort gros , n’a guère plus de la moitié de ces dimensions. 2°. On ne voit point de bourrelet semblable sur le bord droit de ouverture du piétin, et la description ne donne point à entendre qu'il y en ait un. Cette diffé- rence est déjà un caractère de genre. 3°. La coquille de Tarente est échancrée à la base de son ouverture, à peu près comme une nasse. Rien n'indique une pareille conformation dans la description ni dans la figure du piétin. Autre caractère de genre, et celui-ci du premier ordre. 4°. Les dents qui se voient sur les côtés de cette ouverture, ou pour mieux dire, sur le seul côté gauche, ne sont ni conformées ni disposées comme celles du piétin qui d’ailleurs en a à droite et à gauche, et en plus grand nombre. 5°. Enfin la coquille d’Adanson est souvent colorée en jaune clair, ou du moins elle n’est que d’un blanc sale; la nôtre est totalement blanche et n'offre qu’un léger reflet bleuâtre ou grisâtre avec une demi-transparence de cire. Le piétin de M. Adanson (et il faut remarquer qu’il connoissoit l'animal aussi bien que le test }, regardé par lui comme un genre particulier qu'il placoit entre son coret ( planorbe) et le limaçon (belice ), rapporté ensuite par Bruguière au genre bulime où il figure également entre des espèces terrestres et fluviatiles, placé maintenant parmi les auricules, nouveau genre que M. de Lamarck a encore établi au milieu de coquilles en partie étrangères à la mer; le piétin, dis-je, a été toujours ainsi assujéti aux mêmes idées à peu près; et ilest bien probable qu'il est en effet une auricule. Mais notre coquille de Tarente, et par suite les fossiles de Paris et de Bordeaux qui s’y rapportent, sont dans un tout autre cas. La première chose qu’il y ait à faire à leur égard, est de les ôter d’entre les auricules; je lai déjà fait remarquer à-M. de Lamarck qui en est demeuré d’accord. A près cela, l’échancrure que pré- sentent ces petites coquilles, leur forme renflée, les font reporter du premier coup d'œil aux nasses ou congénères; épais bourrelet, qui reborde en dehors leur lèvre droite , décide enfin que parmi les genres actuellement établis, ce ne peuvent être que des marginelles. Néanmoins, comme elles diffèrent des autres marginelles, et conservent par la forme et la disposition de leurs dents unrap- port très-marqué avec les auricules, rapport qui même est cause de la méprise commise sur leur détermination, je propose au lieu du nom spécifique de gri- macante imposé aux fossiles par M. de Lamarck, d’appeler toute ceite espèce: marginelle auriculée : marginella auriculata. Au reste, qu’on adopte ou non cette dénomination, toujours est-il certain que voilà une coquille vivante de plus à rapprocher des coquilles fossiles auxquelles on ne connoissoit encore point d’analogue. Le fait est d'autant plus remarquable que celte coquille vit dans la Méditerranée, et que le nombre de celles qu’on a trouvées dans ce cas ne s’élève pas à vingt. L'objet de cette note est minutieux en apparence, mais il intéresse et la conchyliologie et la géologie. D'HISTOIRE NATURELLE. 3539 SUR DEUX ESPÈCES DE ROCHES Qui se trourent dans les Etats-Unis. PAR M VAUQUELIN. M. Maclure, minéralogiste d’un mérite distingué, ayant rapporté des États-Unis une suite intéressante de morceaux de roches qu'il avoit recueillis dans cette contrée, n’en a remis deux dont il m'a prié de faire l’analyse. L'une renferme une substance lamelleuse, d’une couleur brune, qui avoit été prise pour du titane oxidé, par les mi- néralogistes qui en ont fait la découverte , mais que l'analyse a fait reconnoitre pour du zinc oxidé. Elle est engagée dans un fer oligiste, agissant sur l’aiguille aimantée, et dont l’es- pèce est indiquée par le résultat de sa division mécanique, qui donne un rhomboïde un peu aigu, et par la couleur rou- geatre de sa poussière, lorsqu'on l'a broyée (1). Dans cer- taines parties de la roche, les deux substances dont on vient de parler sont entremèlées de chaux carbonatée laminaire, D’après les indications données par M. Maclure, qui a disposé d’un très-bel échanullon de cette roche en faveur de la collec- (1) La plus grande partie des détails contenus dans cette description et dans la suivante ont été fournis par M. Haüy. 17e ; 43 33/4 ANNALES DU MUSÉUM üon du Muséum, on la trouve en couches au New-Jersey, dans les terrains primitifs. L'autre roche contient du fer oligiste, qui a les mêmes pro- priétés que celui qui fait partie de la première, et qui est mêlé de manganèse oxidé, conformément à l'analyse dont le résultat sera exposé ci-dessous. La base de la roche est une pierre d’un vert-noirâtre, qui dans quelques endroits passe au brunâtre, et qui présente tous les caractères d’un grenat amorphe. Elle est entremélée de talc et de chaux car- bonatée, que lon y distingue l'un et l’autre à la vue simple. La matière du grenat renferme des particules imperceptibles de la dernière substance, qui sont indiquées par l’efferves- cence que la poussière de ce grenat excite dans l’acide ni- trique. Le gissement de cette roche est le même que celui de la première. Analyse de la substance brune que contient la première des deux roches décrites ci-dessus. Cinq grammes du minéral pulvérisé mis avec de l'acide muriatique, se sont en partie dissous en développant une chaleur assez intense qui a duré long-temps. La couleur rouge de la poussière a disparu, et ce qui est resté étoit d’un noir brillant : par cette opération faite à froid, la matière a perdu la moitié de son poids. L'autre moitié pulvérisée de nouveau et remise avec de l'acide muriatique concentré s’est dissoute en totalité à l’aide de la chaleur : la couleur de sa dissolution étoit d’un jaune rougeâtre très-intense. La saveur de ces deux dissolutions, et surtout celle de la D'HISTOIRE NATURELLE. 335 première, avoit beaucoup de ressemblance avec celle des dissolutions de zinc mêlées de fer. Ces dissolutions mèlées ensemble et évaporées en consis- tance syrupeuse ont cristallisé en masse confuse qui attiroit l'humidité de l'air. Soupconnant qu'il y avoit du zinc dans cette dissolution, je l’ai étendue d’eau et y ai mêlé de lammoniaque en excès; le précipité qui s’est formé par ce mélange ressembloit à de l'oxide de fer mêlé de manganèse. La liqueur d’où la matière ci-dessus avoit été précipitée n’avoit point de couleur; elle donnoit un précipité blanc abondant par le gaz hydrogène sulfuré. | Cette liqueur soumise à la chaleur a fourni un précipité blanc à mesure que l’ammoniaque s’évaporoit; mais quand cette dernière a été entièrement dissipée, le précipité s’est redissous. J’ai mis dans cette liqueur concentrée de l'acide sulfuri- que, et j'ai fait évaporer l'acide muriatique et le sulfate d’ammoniaque par le moyen d’une chaleur suflisante. J'ai dissous le résidu dans l’eau, et j'ai fait évaporer la liqueur pour la faire cristalliser, s’il étoit possible; le lende- main cette liqueur étoit en effet cristallisée en petits prismes carrés sans pyramides terminales. L'examen que j'ai fait de ce sel m'a convaincu que c’étoit du sulfate de zinc, conte- nant une petite quantité de sulfate de manganèse : ce sel pesoit 7 grammes et demi. Pour savoir si le fer précipité par l’ammoniaque contenoit du manganèse, je l'ai dissous dans l'acide muriatique, auquel j'ai ajouté ensuite de l’acide sulfurique quand la dissolution 13" " 336 ANNALES DU MUSÉUM ., a été faite; j'ai ensuite calciné au rouge pour décomposer le sulfate de fer, et j'ai traité le résidu par l’eau chaude. J’ai obtenu par ce procédé une petite quantité de sulfate de man- ganèse que j'ai reconnu par le précipité blanc qu'il a donné, par le sous-carbonate de soude et par la couleur noire que ce précipité a prise par la calcination, etc. Le fer dépouillé de manganèse, bien lavé et séché, pesoit 1 gramme 68 centièmes. D'après ces expériences, le minéral dont il s’agit est com- posé de fer oxidé au maximum, de zinc également oxidé, et «le manganèse au minimum. Traitement du minéral par l'acide sulfurique. Quatre grammes de la mème mine pulvérisée ont été vi- vement attaqués par l’acide sulfurique étendu d’eau; le mé- lange s’est échauffé, la couleur rouge de la poudre a disparu, et cette dernière est devenue d’un noir brillant. Quand l'acide a paru ne plus agir, on l'a décanté, et on a lavé le résidu; celui-ci ne pesoit plus que 2 grammes : la dissolution n’avoit point de couleur, sa saveur ressembloit à celle du sulfate de zinc : il ne contenoit qu’une très- petite quantité de fer; mais il contenoit du sulfate de manganèse, car le précipité blanc qu'il a fourni par le sous-carbonate de soude a noirci légèrement par la calcination. Le résidu pul- vérisé de nouveau, et mis en digestion dans l'acide sulfurique affoibli, a encore fourni du sulfate de zinc, mais en très-petite quantité. Ce même résidu traité en troisième lieu par l'acide muria- D'HISTOIRE NATURELLE. 337 ’ tique, s’est dissous en totalité, et a fourni de l'oxide de fer, de l’oxide de manganèse, et de légères traces de zinc. Il paroït que le zinc fait environ la moitié de ce minéral; c’est lui qui forme les lames rouges et demi-transparentes qui se remarquent dans la mine : le manganèse yÿ est au mi- nimum d’oxidation, et ne fait guère que la 20e. partie de la masse. Analyse de la seconde roche décrite précédemment. La matière a fourni par l'analyse les principes suivans, savoir : sur à grammes, LA SUCER a ed io sea a lee te eV aa Fioia sos RL FRERE bel 700 DA CRAUS ES see nine nice ee ne Det ere isa eme L 000 33MEenoxidéanmaxtmnnn telle ser eelse Miele cale *0a:000 4°. Manganèse au minimum........... Pbaobue SéColbe “11,200 5°. Alumine...... SHIEEo RU OO GORE L'ÉAOE ONE SALES »,150 (67 Mapnésie.sscemeresnes se es so saiemecsesse 2e: se 03000 4,800 Cette pierre subtilement pulvérisée est facilement attaquée et complétement dissoute par l'acide muriatique à l’aide de la chaleur : sa dissolution à une couleur verdätre. Quoiqu'’elle contienne une quantité notable de manganèse, environ un quatorzième, elle ne produit point en se dissolvant d’acide muriatique oxigéné parce qu'elle contient ce métal au mini- mum d’oxidation. Mais ce qu'il y a de remarquable, c’est que cette pierre qui contient plus d’un tiers de son poids de silice, se dissolve entièrement dans l'acide muriatique. Ce fat prouve clairement que la silice s’y trouve en combinai- son intime avec les autres principes, sans quoi elle ne se seroit pas dissoute, 338 ANNALES DU MUSÉUM Aussi sa dissolution muriatique s’est-elle prise en gelée par l'évaporation comme celle des pierres qui ont d’abord été traitées par les alcalis. Si le manganèse existe au minimum dans cette pierre, le fer paroït au contraire y être au maximum, au moins pour Ja plus grande partie, car les carbonates alcalins forment dans sa dissolution un précipité rouge. Cela prouve que dans certaines circonstances l’oxide de manganèse au minimum peut exister en combinaison avec loxide de fer au maximum sans agir l’un sur l’autre. On remarquera que cette pierre est une de celles qui ont été analysées jusqu’à présent où il y a le plus de matière métallique. Je n'indique point les moyens que j'ai employés pour sé- parer les élémens de cette pierre, ils sont trop connus de tous les chimistes. Analyse de la partie noire du même minéral. Cette portion s’est presqu’entièrement dissoute dans l'acide muriatique, elle n’a laissé qu’une très-petite quantité de silice. Avant qu'on ne fasse chauffer sa dissolution elle a une couleur verte, mais elle devient jaune par la chaleur. L'examen le plus attentif n’a pu faire découvrir dans la dissolution que du fer et de très-petites quantités de chaux, d’alumine et de manganèse; ce dernier est un peu plus abon- dant que les autres. | Ce fossile doit être considéré comme une véritable mine de fer, contenant à la vérité les mêmes principes que la por- üon dont nous avons donné plus haut l’analyse, mais dans des rapports très-différens. D'HISTOIRE NATURELLE. 339 RECHERCHES CHIMIQUES Sur Le Bois de Campéche et sur la nature de son principe colorant. Présentées à l’Institut le 5 novembre 1810. PAR M CHEVREUL. SECONDE PARTIE. EXAMEN DES PROPRIÉTÉS DE L'HÉMATINE. S Er. PROPRIÉTÉS PHYSIQUES. 57. Laine qui a cristallisé lentement est d’un blane rosé qui a quelque chose du reflet de l'argent légèrement coloré par les vapeurs sulfureuses, ou de l'or musif pâle. Lorsqu'on la broie avec une baguette de verre sur une glace, elle paroït d’un jaune rougeûtre par réfraction et d’un blane Brillant par réflexion. Si on laisse tomber une goutte d’alcoot sur cette poussière, la couleur est rouge de carmin par réfrae- ion, et jaune d’or par réflexion quand l'alcool est évaporé. 340 ANNALES DU MUSÉUM Exposée au soleil et regardée à la loupe, lhématine paroït formée d’écailles, et de petits globules extrêmement brillans. L'hématine a très-peu de saveur, cependant on lui en trouve une légèrement astringente, amère et àcre, quand on la garde quelque temps dans la bouche. SIL ACTION DE LA CHALEUR. 58. 5 décigrammes d’hématine ont été distillés dans une petite cornue de verre. À la première impression de la cha- leur, il s'est dégagé un peu d’Awmnidité, laquelle a pris une teinte rougeàtre, parce qu'il étoit resté un peu de poussière d'hématine sur les parois de la cornue; à un degré de chaleur plus élevé, il'est passé un acide qui m'a paru être de la mème nature que celui du bois; cet acide a changé en jaune la couleur rougetre du premier produit : enfin à une tempéra- ture plus élevée il s’est dégagé de l’'ammoniaque. 59. Le charbon resté dans la cornue étoit demi-fondu, brillant comme celui du sucre, dans les parties qui avoient eu le contact du verre. Ce charbon pesoit 2 décig. 7 centig.; ilne donna qu'un atôme de cendre formée de chaux et d'oxide de fer principalement, J’estime que cette cendre n’alloit pas au centième de la substance. Go. La petite quantité de substance soumise à l’action de la chaleur, ne n’a pas permis de reconnoitre tous les produits de l'opération; cependant elle a été suflisante pour me faire conclure que l’Aématine est formée de carbone, d’ox) gène, d'hydrogène et d'azote; qu'elle contient beaucoup de car- D'HISTOIRE NATURELLE, 341 bone, puisqu'elle donne 0,54 de charbon, et qu’en cela elle se rapproche de l'indigo. S IIL ACTION DE L'EAU. 61. Pour connoiître la solubilité de l’hématine dans l’eau, jen mis 5 centigrammes dans une fiole avec 55 grammes d'eau; dès que le liquide commença à bouillir, tout fut dis- sous, à l'exception de quelques cristaux; cette dissolution étoit d’un rouge orangé quand on la voyoit en ma$&%e, et d’un jaune orangé quand on la voyoit en couche mince; elle pa- roissoit rouge quand on mettoit le vase qui la contenoit sur un papier blanc et qu'on la regardoit perpendiculairement. Cette dissolution évaporée peut être très-concentrée sans donner de cristaux, mais par le refroidissement elle se fige et semble cristalliser confusément (7 ). G2. L'eau de Seine distillée présenta plusieurs faits inté- ressans que je dois exposer avec quelque détail. Cette eau ne précipitoit point le nitrate d’argent ni le nitrate de barite, mas elle rougissoit assez fortement le tournesol et un peu le sirop de violette ; elle jaunissoit la dissolution de l'hématine à la manière d’un acide foible; pour apercevoir ces change- (2) Je n’ai jamais obtenu de cristaux de cette solution semblables à ceux que j'ai retirés de l'extrait de campèche par les procédés que j’ai décrits plus haut. Cela est dû à ce que dans cet extrait l’hématine se trouve dans un tel état de so- lubilité que ses molécules ont le temps de se réunir en cristaux, au lieu que dans l’eau ses molécules se déposent trop rapidement par l’évaporation. F7: 14 349 ANNALES DU MUSÉUM mens il falloit verser quelques gouttes de ces réactifs dans un verre d’eau distillée : ces expériences annoncoiïent positi- vement la présence d'u acide volatil dans l'eau, et la teinte un peu rougetre que prenoitl’hématine au bout de 24 heures, prouvoit en même temps que l'acide étoit en partie combiné à un alcali. Pour reconnoître la nature de ces corps, je dis- uüllui cette eau dans une cornue de verre parfaitement propre, à laquelle étoit adapté un récipient à long col. Lorsque l’eau de la cornue fut réduite au quart de son volume primitif, j'arrêtai l'opération. Le produit de cette disullation ne rou- gissoit plus le tournesol; il changeoit la couleur du sirop de violette en verdâtre; mais pour apprécier ce changement, il falloit faire une expérience comparative avec de l’eau distillée ordinaire ; il faisoit passer sur-le-champ la couleur de l'héma- tine au pourpre; je me convainquis qu'il devoit ces proprié- tés à de l’alcali volatil, car l'ayant saturé d’acide sulfurique, j'obtins en l'évaporant à siccité une trace de sulfate d’ammo- niaque. Il étoit naturel de penser que l'acide indiqué par les réactifs devoit se trouver dans le résidu de la distillation, mais je fus bien étonné de trouver le liquide beaucoup plus alcalin que celui qui avoit passé dans le récipient; je le sa- turai par l'acide sulfurique et je le fis évaporer à siccité; je repris ensuite le résidu par l’eau; il y eut séparation d’une poudre blanche qui avoit toutes les propriétés de la silice, et dissolution d’un sulfate à base d’alcali fixe. Cette silice et cet alcali provenoient manifestement des vaisseaux de verre dans lesquels on avoit fait la distillation, et je m'en assurai en fai- sant évaporer de l’eau saturée d'acide dans une capsule de platine, je n’obtins pas de silice. ee D'HISTOIRE NATURELLE. 34 a] my 63. Scheele (1) et Lavoisier (2) ont démontré les premiers que la terre obtenue de l'eau pure par Borichius, Boyle et Margraff, étoit due à la dissolution des vaisseaux dans les- quels cette eau avoit été évaporée ou distillée. Depuis la pu- blication de leur travail jusqu'à ce jour, les chimistes n'ont point donné à ce fait toute l’attention qu'il mérite, sans doute parce qu'ils ont cru que le verre ne se décomposoit que dif- ficilement : mais l'expérience que je viens de citer fait voir que cette décomposition n’est ni longue ni diflicile, et le fait qui suit prouvera de plus qu’elle n’est point à négliger dans la pratique ordinaire des analyses. Pour connoître la nature des bases qui se trouvent dans l'extrait de campèche, j'avois préparé celui-ci dans des cornues de verre, afin d’éviter la présence des corps qui voltigent dans l'atmosphère; je retirai de la cendre de cet extrait une quantité assez considérable de silice, de ce résultat je concluai que cette terre n’avoit pu se dissoudre dans l’eau que par lintermède de la matière colorante à laquelle elle étoit combinée. Mais la décomposi- tion du verre par l’eau m'ayant depuis donné des doutes sur cette conclusion, je fis concentrer l'infusion de campèche dans une capsule de platine et je n’obtins que des traces de silice extrêmement petites, lesquelles provenoient probable- ment du matras dans lequel j'avois fait l’infusion. 64. J'ai tout lieu de penser que acide contenu dans l’eau de Seine disüllée étoit de l'acide carbonique , car ce liquide précipitoit l'acétate de plomb avec excès de base, et ne con- (1) Préface du Traité de l'air et du feu. (2) Mémoires de l'Académie des Sciences, année 1770. - 344 ANNALES DU MUSÉUM tenoit pas d'acides sulfurique, nitrique, muriatique et acé- tique. Il est vraisemblable d’après cela, que quand on distille de l’eau de Seine ( dansles mêmes circonstances que celles où j'ai opéré }), il passe à la dissolution un carbonate acide d’am= moniaque, lequel se décompose en sous-carbonate lorsqu'on soumet cette eau à une nouvelle distillation. $S I V. ACTION DES ACIDES SUR L'HÉMATINE. 65. Une goutte d'acide sulfurique fait passer au jaune fa couleur rouge orangée de l’eau saturée d'hématine; un grand excès d'acide la fait passer au rouge. Les phénomènes sont ‘à peu près les mêmes, quand on opère avec l'infusion de campèche; il se forme alors des flocons rouges qui ne sont jamais très-abondans si l'infusion n'est très-concentrée. Ce précipité est une combinaison d'acide, d’hématine et de la matière insoluble à laquelle cette dernière est combinée. 66. L’acide muriatique se comporte à la manière de l'acide sulfurique , seulement la couleur au bout de quelque temps üre un peu plus sur le jaune. 67. L’acide nitrique à 320 agit comme les précédens, mais la couleur rouge qu'il avoit développée d’abord finit par passer au jaune. Dans ce cas le principe colorant se décom- pose, car en saturant l'acide par la barite il ne se forme qu'une teinte jeaune rougeàtre au lieu de la couleur bleue qui se formeroit si il n'y avoit pas eu de décomposition. 68. Les acides phosphorique et phosphoreux font passer l'hématine au rouge jaunâtre. D'HISTOIRE NATURELLE. 345 60. L'acide boracique pur, préparé par la voie humide, rougit lhématine; une petite quantité de cet acide ne paroiît pas la jaunir comme le font les acides sulfurique, nitrique et mu- riatique. L'acide boracique, parfaitement pur et sublimé qui ne changeoït pas le sirop de violette, a également rougi l'hé- matine ; mais ce qui ma beaucoup surpris, c'est qu'une goutte d'acide sulfurique versée dans lhématine rougi par l'acide boracique la fait passer au jaune : la couleur rouge a reparu par un excès d'acide sulfurique et boracique. Ce phénomène peut être expliqué de deux manières : ou l'acide sulfurique forme avec l'acide boracique ure combinaison neutre qui n'a plus d'action sur le principe colorant, de sorte que l'acide boracique agiroit à la manière d'un alcali : ou bien l'acide sulfurique exerçant une action plus énergique sur la couleur que ne le fait l'acide boracique, annulle l’action de celui-ci. Quoi qu'il soit difficile de concevoir comment l'action d'une petite quantité d'acide sulfurique puisse surmonter l'action d'une quantité beaucoup plus grande d'acide boracique, ce- pendant la seconde explication est plus admissible que la première. 70. Cette expérience et l'explication que j'en donne con- duisent à reconnoître deux combinaisons de l'hématine avec lesacides sulfurique, muriatique et nitrique : lune au minimum d'acide qui est jaune , et l’autre au maximum qui est rouge (1); elles démontrent en mème temps que la couleurrouge orangée (:) Je ne prétends pas comparer ces combinaisons à celles des sels qui sont sus- ceptibles d’un minimum et d’un maximum d'acide, je me sers de ces mots pour exprimer ce résultat, qu’un peu d’acide produit une couleur jaune, et un excès une couleur rouge. ‘ 346 ANNALES DU MUSÉUM de la dissolution d’hématine dans l’eau de Seine distillée, n’est pas entièrement due à l'ammoniaque contenue dans cette eau, car s'il en étoit ainsi, une fois que l'acide bora- cique auroit saturé cette ammoniaque, l'acide sulfurique ne pourroit plus faire revenir au jaune lhématine rougi par l'acide boracique, il devroit au contraire concourir à donner plus d'intensité à la couleur ronge. 71. Une dissolution d’hématine saturée de gaz sulfureux est jaune; si on la conserve plusieurs mois dans un flacon fermé, la réaction de l'acide paroit décomposer le principe colorant. 72. L'acide carbonique gazeux que l’on fait passer dans une solution d’hématine fait tourner la couleur au jaune. 73. L'acide acétique et l’acide tartareux se conduisent à la manière des acides sulfurique, nitrique et muriatique; une petite quantité de ces acides fait tourner la couleur de l'hé- matine au jaune, une plus grande la rose légèrement, mais c’est d’une teinte infiniment plus foible que celle qui est déve- loppée par les acides minéraux. Pour apprécier l'action de ces acides j'ai fait ces expériences : j’ai mis dans trois verres > grammes de dissolution saturée d'hématine, j'ai versé dans l'un 10 gram. d’eau, dans l’autre 10 gr. d’acide acétique, et dans le troisième 10 gram. d’une dissolution saturée d’acide oxalique sublimé et bien pur. La couleur des deux derniers est devenue d’un jaune plus clair que celle du premier, et a pris en même temps une teinte d’écarlate. [acide oxalique a rosé plus fortement que l'acide acétique, car pour faire disparoître la nuance rosée du second verre, il a fallu y ajou- ter 30 gram. d’eau, tandis qu'il en a fallu près de 80 pour D'HISTOIRE NATURELLE. 347 faire disparoitre celle qui avoit été développée par l'acide oxalique. On peut roser de nouveau le mélange d’hématine et d'acide oxalique qui est devenu jaune par l'addition d’eau, en y mettant un grand excès d'acide oxalique. Les acides citrique et tartareux m'ont paru avoir la même action que les précédens. L’acide benzoïque ne fait que de jaunir l'hé- matine sans y développer de teinte rose appréciable, S Y. ACTION DES ALCALIS ET DES TERRES SUR L'HÉMATINE, 74. Quelques gouttes de potasse versées dans 10 grammes de dissolution saturée d'hématine la font passer à un rouge pourpre qui a quelque chose de jaune. Cette dissolution gardée dans un flacon bouché, devient au bout de quelques heures d’un rouge jaunàtre. Si l’on met dans la mème disso- lution un excès de potasse, la couleur devient bleue violette sur-le-champ, après quelques minutes d’un rouge brun, et après quelques heures d’un jaune brun : dans cet état l'hé- matine paroit être décomposée, car on ne peut plus faire reparoître de couleur rouge au moyen des acides sulfurique , nitrique et muriatique. 75. Les eaux de barite, de strontiane et de chaux produi- sent avec la dissolution d'hématine des changemens analogues à ceux dont je viens de parler; quelques gouttes de ces eaux font passer la couleur au pourpre, et un excès y détermine un précipité bleu qui est une combinaison d'hématine et de la base que l'on a employée. Un excès de ces bases conservé sur le précipité bleu finit par le décomposer. 2 À TN rm Ce 4 345 ANNALES DU MUSÉUM 56. Quelques gouttes d’ammoniaque font passer lasolution d’'hématine au rouge pourpre, une plus grande quantité y développe une couleur violette. Ces changemens sont les mêmes que ceux que l’on observe avec la potasse. 77. C’est ici le Heu de parler d’un fait que j'ai observé avec l'hématine dissoute dans l'eau qui contenoit des traces d’alcali volatil. J’avois remarqué que cette dissolution: avoit une cou- leur beaucoup plus rouge quand elle étoit chaude, que quand elle étoit refroidie; pour bien apprécier cette différence, je fis les expériences que je vais rapporter : dans deux verres à patte, je mis deux quantités égales de solution d'hématine: je recus dans l’un d’eux l’eau qui sortoit d’un alambic muni de son réfrigérent, la couleur devint jaune : lorsque le verre fut plein, je le mis de côté, afin de pouvoir le comparer avec celui dans lequel j'allois recevoir l’eau chaude. Je sup- primaile réfrigérent, et lorsque le serpentin fut bien échauflé, je recus le liquide qui en distilloit dans le second verre, la couleur passa au pourpre. Je mis les deux verres sous une cloche et je remarquai au bout de 24 heures que la couleur pourpre du second étoit devenue d’un jaune à très-peu près semblable à celui du premier verre. En faisant chauffer la liqueur qui s’étoit décolorée, la couleur pourpre reparut. Je répétai cette expérience un grand nombre de fois avec la même dissolution d’hématine, mais à la longue le principe colorant se décomposa. 78. On peut attribuer ce phénomène à trois causes, 1°. à la décomposition du verre qui a lieu à chaud et qui n'a pas lieu à froid ; 20. à la décomposition du carbonate acide d’am- moniaque contenu dans l’eau; on diroit en admettant cette 9-F D'HISTOIRE NATURELLE. 349 opinion, qu’à froid l’affinité de l'hématine pour l’ammoniaque étant insuffisante pour décomposer le carbonate acide, il faut le concours de la chaleur pour opérer cette décomposition; qu'alors l'ammoniaque réduite à l’état de pureté ou de sous- carbonate rougit la couleur, et que par refroidissement l'acide carbonique étant. absorbé fait disparoitre la couleur en se combinant à l’'ammoniaque; 39. à la chaleur qui change la dimension des molécules de l'hématine. 79. Ce phénomène n'est pas di à la decomposition du verre; car il se produit lorsqu'on recoit l’eau qui sort de l'alambic dans des vaisseaux de platine, et il faut moins de temps pour que la liqueur se décolore par le refroidissement que quand on opère dans le verre, ce qui peut tenir à la faculté conductrice du platine pour le calorique, ou bien à ce qu'il y a un peu de verre de décomposé; mais cette dé- composition n'est pas, je le répète, la cause du phénomène. Il n'est pas dé à la décomposition du carbonate acide d'ammoniaque, ainsi que le prouve l'expérience qui suit : On fait réduire 400 grammes d’eau à 10 grammes; par ce moyen on doit chasser la plus grande partie du carbonate acide d’ammoniaque; on jette dans le résidu encore bouillant un atôme d'hématine (1). On enferme sur-le-champ cette dis- solution dans un tube de verre de 5 décimètres de longueur qui est rempli de mercure et qui repose dans un bain de ce métal. Après 24 heures la couleur rouge de l’hématine est LL (1) J'ai observé plusieurs fois la présence du plomb ou de l’étain dans ce ré- sidu; alors l’hématine devenoit rouge, et au bout d’un certain temps il se préci- pitoit une combinaison d’oxide métallique et de principe colorant. 7 ur 45 350 ANNALES DU MUSÉUM tout-à-fait évanouie : on peut la faire reparoitre à l’aide de la chaleur; pour cela on approche du tube un fer chaud re- courbé en fer à cheval (1); une partie de la liqueur se réduit en vapeur; à cette époque on retire le fer, la vapeur se con- dense et abandonne en même temps du calorique à l’eau qui est restée liquide, la surface de cette dernière qui est immé- diatement en contact avec la vapeur et qui par conséquent est la première à s’échauffer, est aussi la première à se colorer en pourpre. Ce résultat me porte à croire qu'il est très- probable que la chaleur est la cause du phénomène que je viens de décrire, et que le changement de dimension des molécules de l’hématine produit un changement de couleur analogue à celui qu'on remarque dans lexpérience des an- neaux colorés. Au reste, je ne présente cette opinion qu'avec défiance, et si dans ce moment elle me paroît la plus admis- sible, j'avouerai qu’elle ne satisfait pas complétement à toutes les objections que je lui ai faites : c’est pourquoi je ne déduirai pour le présent aucune conséquence de ce fait remarquable, et j'ajouterai de plus que j'ignore si la dissolution pure d’hé- matine jouit de cette propriété (2), comme la combinaison de ce corps avec un alcali (3). 80. L’alumine pure agitée avec l’hématine s’est teinte en (1) Cet ingénieux appareil est dù à M. Proust qui s’en servoit dans ses leçons pour démontrer la vaporisation de l’eau. (2) Cependant c’est très-probable si l’on considère la petite quantité d’alcali qui se trouve dans 10 gram. d’eau provenant de lévaporation de 400 gram. (3) L'expérience prouve que la combinaison de potasse et d’hématine a cette propriété ; car si l’on met une goutte de potasse dans une dissolution d’hématine, et si l'on attend que la dissolution ait passé au roux, on pourra faire reparoître la couleur pourpre par l'intermède de la chaleur, D'HISTOIRE NATURELLE. 3951 bleu en se combinant avec elle. De la glucine et de l'yttria, toutes les deux préparées par M. Vauquelin, ont formé des combinaisons analogues. Ces terres agissent donc à la manière des alcalis; avec cette différence cependant qu’elles ne dé- composent pas l’'hématine comme ces derniers. SIVE ACTION DE L'HYDROGÈNE SULFURÉ SUR L'HÉMATINE. 81. On fait passer du gaz hydrogène sulfuré dans une dis- solution d'hématine, la couleur devient jaune. Dès que le liquide est situré de gaz, on bouche le flacon, et au bout de quelques jours on remarque que l'hématine a perdu sa couleur. 82. La décoloration de l'hématine par l'hydrogène sulfuré est le résultat de la combinaison de ces deux corps, et les expériences suivantes, en démontrant que cette décoloration n'est pas produite par une désoxigénation, mettent cette opinion hors de doute. ire, expérience. On fait passer dans une petite cloche rem- plie de mercure une certaine quantité d'hématine décolorée, ensuite on y met un morceau de potasse pure bien sèche; dès que Falcali a le contact de la liqueur, il se fond; l'hydro- gène sulfuré est absorbé, et il se forme une combinaison vio- lette de principe colorant et d’alcali : dans ce cas la potasse fait reparoitre la couleur sans le contact de l’oxigène. e, expérience. On chauffe dans l'appareil décrit plus haut (79) l'hématine décolorée; l'hydrogène sulfuré se dé- gage, et la liqueur passe au jaune : par le refroidissement la liqueur redevient incolore. Si l'on ne met que peu de ENXk 45 352 ANNALES DU MUSÉUM liqueur dans le tube, on fait devenir l’hématine aussi rouge que quand elle est simplement dissoute dans l’eau, et cette cou- leur rouge disparoit complétement, et dans l’espace de quel- ques minutes, lorsque l'hydrogène sulfuré qui avoit été séparé par la chaleur vient à se recombiner à l’hématine. Il résulte de cêtte expérience que si l'hydrogène sulfuré avoit décoloré lhématine en la désoxigénant, la couleur ne pourroit repa- roitre qu'autant qu'on lui rendroit l’oxigène qu’elle a perdu; or, la couleur revenant sans le contact de l’oxigène, il faut bien en conclure que l'hydrogène sulfuré s’est seulement combiné avec le principe colorant. 83. La couleur du bois de Brésil, et celle du tournesol se conduisent comme l'hématine avec l'hydrogène sulfuré, ainsi que je l'ai démontré ailleurs. S VIL ACTION DE PLUSIEURS SELS NEUTRES A BASE DE -POTASSE ET DE SOUDE SUR L'INFUSION DE BOIS DE CAMPÈCHE. 84. L'hiver dernier , lorsque j'examinai l’action des sels neutres sur la couleur du campèche, je ne connoïissois point cette matière à l’état de pureté, je fis mes expériences avec l’infusion de bois de campèche; j'aurois bien voulu cet été les répéter avec l'hématine, mais l'impossibilité où j'ai été d'obtenir de l’eau distillée privée d’alcali, me force à renvoyer ce travail à un autre temps : ce que je dirai donc dans ce paragraphe ne sera applicable qu'à l’infusion de campèche faite avec de l’eau distillée en hiver : j'ajoute cette circons- tance, parce quil est vraisemblable que dans cette saison D'HISTOIRE NATURELLE. 353 Veau contient beaucoup moins de carbonate d’ammoniaque que dans tout autre temps. Quoi qu'il en soit, si les résultats que je donne ne sont point absolus, ils seront toujours com- parables entre eux, parce que en même temps que j’examinois le mélange de l’infusion de campèche et d’un sel, je faisois un mélange semblable avec le campèche et l’eau distillée dont je nv'étois servie pour ma dissolution, et je répétois des expériences analogues avec le sirop de violette (r). Sulfate de soude. 85. Du sulfate de soude qui avoit été cristallisé deux fois, donna une dissolution qui ne verdissoit pas sensiblement le sirop de violette et qui ne rougissoit pas le tournesol. Assuré d’après ces résultats que le sulfate de soude étoit neutre, au moins d’après l'indication des réactifs que l'on emploie or- dinairement pour reconnoître la neutralisation des sels, je fis les expériences suivantes : Je mis dans deux verres, deux vo- lumes égaux d'infusion de campêche; je versai dans lun quatre volumes de dissolution concentrée de sulfate de soude, dans l’autre quatre volumes d’eau : le premier mélange devint rose sur-le-champ, le second ne changea pas de couleur. 86. Le changement de couleur du campêche pouvoit être attribué à deux causes : ou le sel agissoit en cédant une portion de sa base à la matière colorante, ou le sel contenoit un excès (1) Le sirop de violette que j’employai étoit étendu de douze fois son volume d’eau. Toutes les expériences que je vais rapporter ont été faites de la même ma- nière sur un volume de sirop de violette étendu, et sur un volume d’infusion de campêche très-foible. J’employois quatre volumes et quelquefois huit volumes de dissolution saline, 1 354 ANNALES DU MUSÉUM d’aleali dont la petite quantité rendue sensible par le cam- pèche, échappoit à l’action du sirop de violette. Dans ce der- nier cas, je pensai que le sulfate de soude pouvoit être privé de cet excès d’alcali par plusieurs cristallisations succes- sives; et c'est ce qui arriva. Le sel cristallisé quatre fois et séparé exactement de son eau-mère, donna une dissolution qui ne rosoit plus le campêche, seulement au bout de vingt- quatre heures il en fonçoit la nuance, mais ce changement étoit presque inappréciable ; d’où je conclus que le sulfate de soude bien pur ne rose pas le campèche, et que le sirop de violette n’est pas un aussi bon réactif que le campèche pour indiquer de petites quantités d’alcali. 87. Le sulfate de soude acide fondu dans un creuset de platine devint un peu alcalin, car il rosoit le campèche et verdissoit même un peu le sirop de violette. J’ignore si un autre agent que le calorique a déterminé la séparation de l'acide sulfurique : pour s’en assurer il faudroit faire l’expé- rience dans un tube de platine. Au reste, je suis bien certain que cette décomposition n’avoit point été opérée par des particules de charbon qui auroient pénétré dans le creuset, : Sulfate de potasse. ; 88. J'ai obtenu des cristaux de ce sel qui ne faisoient éprouver aucun changement au tournesol, au sirop de vio- lette et au campèche. J’ai vu que le sulfate de potasse du commerce étoit toujours alcalin, même au sirop de violette; et qu'au bout de quatre cristallisations on obtenoit des cris- taux qui ne verdissoient plus le sirop de violette, maïs qui ro- soient le campêèche. Le sulfate acide de potasse, calciné dans D'HISTOIRE NATURELLE. 55 un-creuset de platine, m'a donné le même résultat que le sulfate acide de soude. Nitrate de potasse. 89. Le nitrate de potasse raffiné et cristallisé deux fois donna une dissolution qui ne produisoit pas le moindre chan- gement avec le sirop de violette et le campèche, même au bout de vingt-quatre heures. Acétates de potasse et de soude. 90. Des acétates de potasse et de soude bien purs, et qui ne verdissoient point le sirop de violette, rosoient sensible ment le campèche. Ces sels agissent autrement que les sulfates et nitrates alcalins, car j'ai vu qu'une dissolution de ces acé- tates dans laquelle j'avois mis assez d'acide acétique pour que celui-ci fut sensible au tournesol, rougissoit le campèche. Ce résultat prouve la foible aflinité de l'acide acétique pour les bases, et un fait qui le confirme, c’est qu'il suflit d’évaporer une dissolution d’acétate de potasse ou de soude à une très- douce chaleur, pour que le résidu soit alcalin. S VIEIL ACTION DE PLUSIEURS SELS À BASE D ALCALI TERREUX ET DE L'ALUN EN PARTICULIER SUR L'INFUSION DE CAMPÈCHE. gt. Du sulfate de magnésie bien cristallisé, dont la disso- lution n’éprouvoit aucun changement de la part du sirop de violette, du prussiate de potasse et de lhydrosulfure d’am- moniaque, a rosé le campèche assez fortement. 350 . ANNALES DU MUSÉUM 92. Du sulfate de chaux agité avec du campêche, s'est teint en violet. Il a donc agi par sa base, comme le sulfate de magnésie. 93. Du nitrate de barite cristallisé plusieurs fois pour le séparer d’un léger excès d’acide que j'y avois mis exprès, ne lit éprouver aucun changement au sirop de violette et au campêche même après quatre heures de contact; mais au bout de 24 heures la température s'étant abaissée, une partie du sel cristallisa. Ces cristaux redissous dans l’eau rosèrent le campèche. 94. Du muriate de chaux acide cristallisé plusieurs fois a rosé le campèche et a fini même par verdir le sirop de vio- lette. Je crois, au reste, que la cristallisation de plusieurs solutions salines, peut changer la proportion des élémens, ainsi que M. Thenard l’a observé pour le phosphate de soude, et M. Berthollet pour le sulfate acide de potasse. 92. Les acétates de barite, de strontiane et de chaux ont rosé le campèche, et ce qui prouve qu'ils agissoient par leur base, c’est que quelques gouttes de vinaigre faisoient passer la couleur au jaune. Action de l'alun. 96. Je mêlai à une infusion de campèche concentrée, 5 gram. d'alun parfaitement pur et dissous dans l’eau. L’extrait colo-. rant passa au violet rouge, il se fit un précipité (A) assez abondant que je séparai au bout de 24 heures par la filtration. Examen du précipité À. 97. étoit d’un violet rougeûtre. Je passai premièrement D'HISTOIRE NATURELLE. 357 sur lui un litre d’eau froide, que je réunis à la liqueur de la- quelle il s'étoit séparé ; ensuite, je le lavai à l’eau bouillante, jusqu à ce que celle-ci ne parut plus dissoudre que des atômes de matière colorante. J’obtins de cette manière trois espèces de lavages. 08. rers, Zapages. Us étoient d’un rouge foncé; ils précipi- toient la barite en sulfate. Par l’évaporation ils se couvrirent de pellicules cuivrées semblables au précipité A. Par la con- centration et le refroidissement ils déposèrent une substance visqueuse et astringente, qui éloit analogue à la matière d’un rouge marron dont j'ai parlé précédemment (32). La liqueur d’où cette substance s’étoit séparée donna, après avoir été concentrée de nouveau, de beaux cristaux d’alun, et beau- coup d'extrait colorant. On sépara ce dernier par alcool et on obtint par ce moyen 2 décigrammes d’alun retenant un peu de matière colorante. 09. 2. lapages. Vs étoient jaunes, et rougeàtres après avoir été concentrés. [ls précipitoient la barite en sulfate. Ils ne se couvrirent pas de pellicules cuivrées par lévaporation. Ils contenoient plus d'acide sulfurique que d’alumine. 100. 365, /apages. Concentrés ils étoient d’un jaune roux, ils précipitoient sur-le-champ la gélatine. Ils devenoient jaune par un peu d'acide sulfurique foible, et rose par un excès de cet acide concentré. L'eau de barite les faisoit passer au rouge brun, et y formoit un précipité floconneux qui étoit soluble dans l'acide nitrique. Ce précipité chauffé dans un tube de verre donnoit du sulfure. Je n’examinerai pas dans le moment si le soufre provenoit de la combinaison de l'acide sulfurique de l’alun avec la matière colorante, ou bien s’il étoit contenu 17. 46 358 ANNALES DU MUSEUM dans cette dernière. Je dirai seulement en passant que la calcination d’une substance végétale avec la barite, est un des meilleurs moyens que l’on puisse employer pour reconnoitre la présence du soufre ou de son acide dans les composés vé- gétaux. 101. Le précipité A lavé, avoit perdu une partie de sa couleur rougeûtre, il étoit d’un violet qui ressembloit beau- coup à celui de lindigo purifié par la voie humide. Il pesoit 18 décigrammes. Il fut distillé : le produit qu'il donna ne sentoit ni l'acide sulfureux ni l'hydrogène sulfuré. Cependant il paroissoit contenir du soufre, car il noircissoit le papier imprégné d’acétate de plomb. Je suis porté à croire que ce soufre provenoit plutôt de la matière colorante que d’un reste d'acide sulfurique qui auroit échappé au lavage, et je me fonde sur ce que l'extrait de campèche distillé donne un produit qui agit sur les papiers imprégnés de nitrate d’étain, d’acétate de plomb et de sulfate de cuivre, et sur ce que le soufre obtenu du précipité A n’étoit que dans une proportion extrêmement petite. Le charbon provenant des 18 décigram. laissa 12 centigrammes d’une cendre blanche qui étoit formée d’alumine et d’une trace de chaux; il est évident d’après ces faits que Ze précipité bleu lavé étoit une combinaison d’alu- mine et de matière colorante, et que les 12 centig. d’alu- mine qu'il contenoït indiquoient qu'il y avoit eu 1 gramme d’alun de décomposé. Examen de la liqueur qui avoit donné le précipité A. 102. Elle étoit d’un rouge foncé. Après avoir été concen- trée elle donna beaucoup de cristaux d’alun colorés en rouge D'HISTOIRE NATURELLE. 359 violet. L’eau-mère de ces cristaux, évaporée à siccité, fut traitée par l’alcool à 400 : par ce moyen on sépara encore de l’alun; je crus d’abord que ce dernier contenoit du sulfate acide de potasse, mais je ne pus en séparer par la cristalli- sation. 103. Ce dernier résultat me fit penser que s’il y avoit eu de l’acide sulfurique de mis à nu lors du mélange de l'extrait de campèche avec l’alun, je devois retrouver cet acide dans la portion d'extrait qui avoit été dissoute par l'alcool. Mais par la barite je n’eus pas de sulfate, et par la distillation j'ob- üns un produit semblable à celui de l’extrait de campêche ; d'où je conclus qu'il n’y avoit pas de quantité notable d’acide sulfurique dans la matière qui avoit été dissoute par l'alcool. J’ajouterai que cette matière étoit dans le cas de l’eau-mère dont j'ai parlé à l’article de l'analyse de l’extrait de campèche, et que par conséquent la matière brune (1) de ce dernier s'étoit séparée avec le précipité bleu A. 104. Les cristaux d’alun obtenus des opérations précé- dentes, redissous et cristallisés, donnèrent un total de 4 gramm. 1 décig. Cette quantité s'accorde assez bien avec l'expérience (ror) qui indique la décomposition de 1 gramme d’alun. J'obtins avec les cristaux de ce sel, une quantité notable de sulfate de chaux cristallisé en petites aiguilles soyeuses; ce résultat démontre que l’acide sulfurique provenant de la décomposition du sulfate d’alumine ( et probablement encore celui du sulfate de potasse ) s’étoit combiné avec la base de (1) C'est cette matière brune qui formoit en grande partie la substance vis- tueuse obtenue par l’évaporation des premiers lavages du précipité A (98). 4GY 360 ANNALES DU MUSÉUM l'acétate de chaux qui existe dans l’extrait de campèche, et explique par conséquent pourquoi on n’obüint ni sulfate acide de potasse, ni acide sulfurique libre dans les expériences 102 et 103. 105. Les 4,1 gr. d’alun redissous dans l’eau donnèrent des octaëdres d’un beau rouge de grenat. La transparence de ces cristaux, l'égalité de leur couleur, me fit d’abord penser que la matière colorante étoit également répandue dans toutes les parties du sel : mais ensuite je m’assurai qu’elle n'étoit que superficielle, car ayant humecté d’eau plusieurs de ces cristaux, je parvins à les décolorer en les frottant entre les doigts : malgré ce résultat, il n’est pas douteux que la portion d'acide de l’alun qui étoit immédiatement en contact avec la matière colorante réagissoit sur celle-ci et lui donnoit une teinte rouge. Quand on vint à dissoudre les cristaux rouges de grenat dans beaucoup d’eau et quand on évapora la dissolution, ce liquide se couvrit de pellicules bleues, et par le refroidissement et le repos il se forma des cristaux qui étoient colorés par les pellicules bleues qui s’étoient pré- cipitées à leur surface. Il suit de ces faits que dans les cris- taux rouges de grenat c'est principalement l'acide qui réagit sur la couleur, et dans la dissolution de ces cristaux, c’est au contraire la base qui agit, parce qu’elle tend à former une combinaison insoluble avec la matière colorante. 106. Il résulte de tout ce que je viens de dire de l’action de l'extrait de campêche sur l’alun : 10, Que quand on mêle les dissolutions de ces deux sub- stances, elles se décomposent réciproquement, le précipité violet rougeâtre qui se sépare est formé d’un sel avec excès D'HISTOIRE NATURELLE. 361 d’alumine (1) et d'extrait colorant qui contient un excès de matière brune. 29, Que l’eau bouillante réduit ce précipité à une combi- naison d’alumine et de matière colorante. 30, Que l'acide sulfurique qui a été séparé de l’alumine, et vraisemblablement celui du sulfate de potasse, ne devient pas libre, par la raison qu'il décompose l’acétate de chaux de l'extrait et forme du sulfate de chaux. Il n’est pas douteux que si l’on opéroit avec l’hématine, on obtiendroit du sulfate acide de potasse ou de l'acide sulfurique libre. 4°. Qu'il ne paroït pas y avoir d'union bien intime entre la matière colorante et l’alun cristallisé; seulement on re- LE que l'acide de ce sel agit sur la couleur et la rougit, et qu'ensuite lorsqu'on vient à dissoudre ces cristaux la couleur passe au cramoisi ou au bleu, parce que la couleur tend à se précipiter avec l’alumine. S IX. ACTION DE PLUSIEURS OXIDES MÉTALLIQUES SUR L'HÉMATINE 107. L’oxide vitreux de plomb, l’oxide d’étain au mini- mum, l’hydrate de fer au maximum, l'hydrate de cuivre, l'hydrate de nickel frais, loxide de zinc par le feu et son hydrate, l’oxide d’antimoine par le feu et celui du muriate avec excès de base, l’oxide de bismuth par le feu s'unissent (1) Je n’oserois assurer qu'il y eût de la potasse en combinaison dans ce préci- pité, parce que l’on peut dire que l’alun que j’en ai retiré par nv bouillante y éloit simplement mélangé. 362 ANNALES DU MUSÉUM plus ou moins facilement avec l'hématine et forment des combinaisons d'un bleu tirant plus on moins au violet; tous ces oxides se rapprochent donc des bases alcalines. Le car- bonate de cobalt paroït également agir comme ces derniers; mais quand il est desséché, il faut plusieurs jours pour qu’il se combine au principe colorant. L’oxide de mercure au ma- ximum par le feu a décomposé Fhématine en lui cédant de loxigène. 108. L’oxide d’étain au maximum et l'acide arsenique ont sur l’hématine une action analogue à celle des acides minéraux. L’oxide d’arsenic ne n’a pas paru s'unir avec elle; au moins j'ai fait dissoudre de l’oxide d’arsenic dans une dis- solution d’hématine, et je n'ai pas apercu de changement notable et dans la liqueur et dans la portion de l’oxide qui s’étoit précipitée par le refroidissement. SX: ACTION DU MURIATE D'ÉTAIN AU MINIMUM ET DE L'ACÉTATE DE PLOMB SUR L'INFUSION DE CAMPÈCHE. Muriate d'élain. 109. Lorsqu'on verse dans une infusion de campêche une dissolution de muriate d’étain au minimum sublimé, il se forme un précipité bleu. Si l’on filtre et si l’on a mis une quantité suflisante de matière colorante, la liqueur filtrée est colorée. Cette liqueur abandonnée à elle-même dans un vase bouché, dépose peu à peu de nouveau précipité bleu, et enfin il arrive une époque où la liqueur est tout-à-fait décolorée : D'HISTOIRE NATURELLE. 363 si alors on l'examine, on trouve qu’elle contient un grand excès d'acide, qu'on peut en précipiter de nouvelle matière bleue en y versant de l'extrait de campèche, et enfin qu’en mettant un excès de ce dernier, on parvient à séparer presque tout l'oxide métallique, car on n'obtient qu’une trace d’hy- drosulfure d’étain lorsqu'on fait passer un courant d’hydro- gène sulfuré dans la liqueur; cette dernière ne contient qu’une combinaison d'acide muriatique et de matière colorante. 110. Le précipité bleu donne à l’eau avec laquelle on le fait bouillir de l'acide muriatique, de l’oxide d’étain et de la matière colorante. Enfin lorsque le lavage ne précipite plus le nitrate d'argent en muriate, l’eau ne paroït plus dis- soudre que la matière colorante; le précipité bleu ainsi lavé, est une combinaison d’oxide d’étain et de matière colo- rante, car le carbonate de potasse saturé et la chaleur ne peuvent en séparer un atôme d'acide. 111. Il résulte de là, que quand on verse de l'extrait de campêche dans du muriate d’étain au minimum : r0, il s’éta- blit deux combinaisons, l’une qui reste en dissolution et qui est avec excès d'acide, l’autre qui se précipite et qui est avec excès d'oxide; 20, que la première combinaison se décompose spontanément, lorsque les molécules de loxide d’étain et de la matière colorante se sont assez rapprochées pour vaincre la force dissolvante de l'acide; 30. qu’en mettant un grand excès d'extrait de campèche on peut précipiter la totalité ou la presque totalité de l’oxide d’étain combiné à l'acide muria- tique; 4°. que la combinaison de matière colorante et de muriate d’étain avec excès de base qui se précipite, est réduite 364 ANNALES DU MUSÉUM par l’eau bouillante en muriate acide et en oxide pur qui retiennent tous les deux de la matière colorante. Acétate de plomb. 112. Je fis une dissolution de 5 grammes d’acétate de plomb parfaitement pur, et j'y versai de l'infusion de cam- pêche jusqu’à ce que la liqueur résultant du mélange étant filtrée passa colorée en pourpre léger. Il resta sur le filtre une matière d'un bleu un peu violet, que j'examinerai plus bas, et que j'appellerai précipité A. Liqueur d'où le précipité À avoit été séparé. 113. Cette liqueur filtrée donnoit avec de nouvelle infu- sion de campèche un précipité bleu plus foncé que celui qui étoit resté sur le filtre (112); elle précipitoit également l’acé- tate de plomb, quoiqu’elle contint déjà un excès de ce sel; ce précipité étoit beaucoup moins foncé en couleur que le premier. Elle donna à la distillation de l'acide acétique mêlé d'huile volatile. En le combinant avec la barite on obünt un acétate bien cristallisé. La liqueur restant dans la cornue avoit déposé beaucoup de flocons d’un brun bleuâtre qui étoient principalement formés d’oxide de plomb et de matière colorante. Ce résidu fut étendu d’eau et filtré. L'acétate de plomb versé dans cette liqueur n’y produisit plus de préai- pité ni de changement de couleur, ce qui indiquoit qu’elle ne contenoit plus de matière colorante. 114. Il suit de ces expériences, 1°. que quand on verse de l'extrait de campèche dans de l’acétate de plomb, la matière colorante en se précipitant avec l’oxide dérermine la sépa- (l D'HISTOIRE NATURELLE. 365 ration d’une partie de l'acide acétique; que cette précipitation s'arrête lorsque la force dissolvante de l'acide mis à nu est supérieure à l’action que la matière colorante exerce sur le plomb. 20, Que cette liqueur précipite de nouveau quand on la distille, par la raison que l'acide acétique se vaporisant ne peut plus balancer l’action de la matière colorante. 30. Qu'il semble que quand on verse dans cette liqueur contenant un excès d'acide, 1°. de la matière colorante, il se fait un précipité qui retient plus de couleur que le précipité À; 20, de l’acétate de plomb, il se forme une combinaison avec excès d’oxide qui est également moins soluble que le préci- pité A. 119. La liqueur (113) qui avoit été distillée et privée par la concentration de toute sa matière colorante, fut passée à l'hydrogène sulfuré pour séparer le plomb qu’elle contenoit. Filtrée et évaporée, elle se conduisit à très-peu près comme l'infusion décolorée par la litharge (22); elle donna de l’acé- tate de potasse et de l’acétate de chaux cristallisé. Je crois qu’elle tenoit un peu de matière animale en dissolution, car le résidu de son évaporation chauffé dans un tube de verre dégagea de lammoniaque; j'y trouvai également de loxide de fer et de la silice, mais cette terre provenoit sans doute des vaisseaux. Examen du précipité À. 116. Le précipité À, resté sur le filtre (112), fut lavé avec de l’eau chaude, afin de lui enlever toute la liqueur qu'il retenoit, et ensuite délayé dans 4 litres d'eau bouillante. Qi 47 366 ANNALES DU MUSÉUM Après quatre jours, je décantai un liquide jaune tirant Jégé- rement au verdûtre. Je remis litres d’eau bouillante sur le précipité, et après quatre jours de contact, je décantai. 117. Ces huit litres de lavages furent concentrés ; lorsque le liquide commença à s’évaporer il devint rougeûtre, et bientôt après il se précipita des flocons bleus. Sur la fin de l'évapo- ration qui fut poussée à siccité, il y eut dégagement d’acide acétique sensible à lodorat et au papier de tournesol. Ces lavages contenoient donc de l’aëêide acétique, de l’oxide de plomb et de la matière colorante. 118. Le résidu de cette évaporation repris par l’eau froide, donna à ce liquide de l'acide, de l’oxide et de la couleur, et laissa une combinaison bleue formée principalement d’oxide et de matière colorante, à laquelle Peau bouillante enleva encore de l'acide, de l’oxide et de la matière colorante : mais cette dernière étoit décomposée, elle n’étoit plus rosée par l'acide sulfurique, elle devenoit rousse par les alcalis et elle précipitoit le muriate d’étain au minimum en un beau jaune serin. La couleur du campèche peut donc devenir matière colorante jaune. 119. On remit sur le précipité À qui avoit été lavé avec huit litres d’eau, 4 nouveaux litres de ce liquide. Ce lavage évaporé donna de l'acide, de l’oxide et de la matière colorante altérée. 120. Voyant la difficulté qu'il y avoit à épuiser le préci- pité À de tout ce qu'il contenoit de soluble, j'en pris un tiers environ et je le lavai avec une quantité d’eau bouillante con- sidérable ; lorsque ce liquide ne parut plus enlever que des atômes de matière colorante, je distillai Le résidu avec de D'HISTOIRE NATURELLE. 367 l'acide sulfurique et je n'ebtins pas une trace d’acide acétique dans le récipient; il paroit d’après cela que ce résidu étoit une combinaison d’oxide et de mauère colorante. 121. Îl suit de là que le précipité qui se forme quand on mêle de l'infusion de campèche avec de l’acétate de plomb, est une combinaison d’acétate de plomb avec excès d’oxide et de matière colorante, à laquelle l'eau bouillante enlève l'acide acétique et en mème temps une petite quantité d’oxide et de matière colorante. L'action de l’eau sur ce précipité est la même que celle qu’elle exerce sur le précipité obtenu avec le muriate d’étain. S,XE..s ACTION DE L'HÉMATINE SUR LA GÉLATINE ET RÉFLEXIONS SUR LE TANNIN. Expériences. 192. On met dans un petit matras 5 centig. d’hématine et 40 grammes d’eau. On'chauffe le vaisseau sur un bain de sable, jusqu'à ge que le liquide commence à bouillir. D'un autre côté on fait dissoudre 5 décigr. de colle de poisson dans 0 gr. d'eau. On prend 10 grammes de la dissolution d’hématine filtrée, on y fait tomber, à l’aide d’un tube tiré en pointe, huit gouttes de dissolution de colle. Il ne se fait pas de pré- cipité d'abord, mais, au bout de 24 heures, il se dépose des flocons rougeûtres qui sont formés d’hématine et de gélatine. En faisant réduire 10 grammes de la dissolution d’hématine à la moitié du volume qu'ils occupoient, on obtient sur-le- champ un précipité abondant avec la colle. FIEMR à 47 368 ANNALES DU MUSÉUM 123. [l résulte de ces expériences, 1°. que l’hématine et la gélatine ont de l’affinité l’une pour l’autre, mais que cette affinité est très-foible, puisqu'elle ne peut vaincre la force dissolvante de l’eau qui tient ces corps à l'état liquide qu’au bout de plusieurs heures; 20. que si l’on admet dans les végétaux une espèce de principe immédiat qui soit caracté- risé par la propriété de précipiter la gélatine, il est évident que l’hématine appartiendra à cette espèce. 124. Mais la précipitation de la gélatine est-elle un carac- ière suflisant pour établir une espèce de corps? Je ne le crois pas, puisqu'il y a un grand nombre de substances qui jouis- sent de cette propriété et qui ne peuvent être réunies, vu l'extrême différence de leur nature : ainsi l’amer de Welther, le charbon dissous par l'acide nitrique, le muriate d’iridium précipitent la colle. Examinons maintenant si les substances végétales naturelles qui ont cette propriété peuvent être réu- nies dans une même espèce, et bornons-nous pour l'instant à comparer l’hématine avec le tannin de la noix de galle. 125. Si la faculté qu'ont ces deux corps de précipiter la gélatine les rapprochent l’un de l’autre, il existe tant d’autres caractères qui les distinguent qu'il est impossible de les confondre, et la manière dont ils se comportent avec l'acide sulfurique et la potasse met cela hors de doute. Il suit de là que l’on ne peut ranger ces corps dans la même espèce, et que si l'on veut conserver le tannin parmi les principes immédiats des végétaux, il faudra en faire non pas une espèce divisée en simples variétés, mais un genre divisé en espèces aussi différentes entre elles que Le sont les matières colorantes. 126. Jusqu'ici j'a considéré l’action de l'hématine sur la D'HISTOIRE NATURELLE. 369 gélatine; je l'ai mise par cette propriété en parallèle avec la matière astringente de la noix de galle, et j'ai admis avec presque tous les chimistes l’existence d’un principe immédiat appelé tannin. Il me reste à examiner combien l’aflinité de l'hématine pour la gélatine est accrue par la combinaison de ce corps avec la matière brune qui lui est unie dans l'extrait de campèche. Cet examen me conduira à faire de nouvelles réflexions sur le tannin. Expérience. 127. On fait dissoudre dans l’eau de la matière rouge mar- ron qui est, comme je l'ai dit plus haut, une combinaison d'hématine et d’une matière brune insoluble. On fait cette dissolution absolument de la mème manière que celle de l'hématine (122); on en mèle 10 grammes avec 8 gouttes de gélatine, sur-le-champ il se produit un précipité abondant formé de gélatine, de matière brune et d'hématine. En mêlant 5o grammes d'eau à 10 grammes de dissolution de matière rouge marron, on obtient encore avec la gélatine un précipité assez considérable. 128. S'il y a une expérience propre à démontrer combien la précipitation de la gélatine est insuffisante pour caractériser un principe immédiat, c’est sans doute celle que je viens de rapporter : elle prouve clairement que si cette propriété étoit l'apanage exclusif d’un corps, la combinaison de ce corps avec un autre, loin d'augmenter son intensité devroit au contraire la diminuer; or, il arrive le contraire, et l'hématine qui dans son état de pureté ne jouissoit de la propriété tannante qu'à 370 ANNALES DU MUSÉUM un foible degré, acquiert l'énergie d’un véritable tannin par son union avec un corps qui diminue sa solubilité, 129. Si l’on considère ce résultat et l'impuissance où lon a été Jusqu'ici d'obtenir un tannin privé d’acide gallique, et d'un autre côté si l'on considère l’analogie qu'il ÿ a entre la matière d’un rouge marron et les extraits astringens, il sera permis d'élever des doutes sur l'existence du tannin comme corps particulier, et cela jusqu’à ce qu’on puisse obtenir de la noix de galle, une substance soluble dans l’eau, qui pré- cipite la gélatine et qui ne contienne pas d’acide gallique. $S XIL RÉSUMÉ DES FAITS EXPOSÉS DANS CES RECHERCHES. 130. J’ai cherché d’abord à reconnoître les corps qui ac- compagnoient la matière colorante dans le bois de campèche. Pour arriver à ce but, j’ai soumis ce dernier: 10. À l’action de l’eau; ce liquide lui a enlevé, outre la matüêre colorante, de l'huile volatile, de l'acide acétique, du muriate de potasse, des sels végétaux à base de potasse et de chaux, du sulfate de chaux, de l’alumine, des oxides de fer et de manganèse. 20, À l’action de l'alcool; celui-ci a dissous une combinai- son de matière colorante et de matière résineuse ou huileuse. 30. À l’action de l'acide muriatique; cet acide a enlevé de la matière colorante, de l’oxalate de chaux, et peut-être du phosphate. Le bois qui avoit été successivement épuisé par les agens que je viens de nommer, retenoit un peu de matière colorante, D'HISTOIRE NATURELLE. 37r ] iquelle y étoit fixée par l’aflinité qu’elle a pour le ligneux et probablement encore par un peu de matière animale et un reste de résine qui avoit échappé à l'alcool. à 131. La difficulté qu'on éprouve à enlever la matière co- lorante au bois de campèche, me conduit à regarder ce bois et la plupart de ceux qui sont colorés, comme des combi- naisons de principes colorans et de ligneux, qui se rapprochent de celles que nous formons dans les ateliers de teinture : en effet on peut considérer la résine, loxalate de chaux et la matière animalé comme autant de mordans qui fixent la couleur sur le ligneux; il y a cette différence cependant, que le bois de campèêche contient un excès de matière colorante et qu'il n’est point saturé de sels comme le sont les étoffes que l'on veut teindre. D'après cette considération on conçoit comment l’action de l’eau doit s'arrêter sur ce bois, lorsqu'elle a dissous une certaine quantité de matière colorante, puisque la couleur qui reste est retenue par des corps insolubles dans l’eau : par la même raison on conçoit comment le ligneux, l’oxalate de chaux et probablement un peu de matière animale s'opposent à ce que l'alcool enlève toute la matière colorante avec la résine; il est probable mème que l’aflinité des premières sub- stances défend une portion de la résine, de l'action de l'alcool. Ces faits reconnus, j'ai cherché à déterminer à quel acide végétal étoient combinées la potasse et la chaux que j'avois obtenues à l’état de carbonate de l’ineinération de l'extrait de campèche, et en second lieu les matières qui constituoient prin- cipalement cet extrait. J’ai employé l’oxide de plomb qui 379 ANNALES DU MUSEUM 7 précipité toute la matière colorante et a laissé dans l’eau qui tenoit celle-ci en dissolution, des acétates de potasse et de chaux et un atôme de matière animale. Ayant soupconné que plusieurs corps avoient pu se combiner avec loxide de plomb, j'ai suivi une autre marche d'analyse et j'ai eu recours aux dissolvans. L'alcool, l’éther et l’eau successivement employés ont donné pour dernier résultat, que l'extrait de campêche étoit essentiellement formé de deux substances l’une que j'ai nommée Lématine , soluble dans l'eau, l'alcool et l’éther, et susceptible de cristalliser; Pautre (1) insoluble dans l’eau et l’éther, mais pouvant s’y dissoudre par linter- mède de l’hématine. Cette analyse de l'extrait de campèche, par les dissolvans, conduit à des résultats intéressans sous le rapport de la séparation des matériaux immédiats des végé- taux; elle prouve que deux principes en se combinant en différentes proportions forment des mixtes que l’on ne peut analyser précisément de la même manière. Ainsi l'alcool, léther et l’eau ont une manière analogue d'agir sur l’extrait de campèêche, ils tendent tous les trois à dissôudre une plus grande quantité d'hématine que du principe insoluble, mais cette action générale est ensuite modifiée par la nature de chacun d'eux : d’après cela, lorsqu'on applique ces dissolvans à l'extrait de campèche, il se forme deux combinaisons, l’une qui se dissout, qui est avec excès d’hématine, l’autre qui ne se dissout pas, qui est avec excès de principe insoluble. Ce qui paroît favoriser cette séparation est l’union des bases in- solubles avec cette dernière combinaison, et peut-être la (1) Cette substance est peut-être de nature animale. D'HISTOIRE NATURELLE. 3978 présence d’un peu de matière animale; lorsqu'on vient à évaporer la dissolution qui est avec excès d’hématine, une partie de celle-ci cristallise, et l'autre reste combinée à du principe insoluble sous la forme d’eau-mère. Cette combi- naison est plus diflicile à décomposer que l'extrait de cam- pèche, parlaraison que le principe insoluble y esten moindre quantité, et qu'il n'y a plus autant de bases terreuses et peut- être de matière animale qui favorisent cette séparation. Pour arriver à isoler l'hématine de l’eau-mère, il faut se servir de réactifs qui aient la moindre action possible sur le principe insoluble; or, l’éther et l’eau qui ne dissolvent pas celui-ci comme le fait l'alcool, peuvent seuls ètre employés. La combinaison de principe insoluble et d’hématine que j ai désignée par le nom de rnatière d’un rouge marron, a des rapports frappans avec les extraits astringens; comme eux, sa dissolution précipite la gélatine et se trouble par refroi- dissement; si on la traite successivement par des quantités d’eau insuffisantes pour la dissoudre, on finit par obtenir une matière insoluble dans l'eau. Il me semble qu'il y a dans les végétaux un grand nombre de tannins analogues à celui-ci, qui sont formés d’une substance insoluble et d’une matière colorante qui leur donne de la solubilité. Il est probable qu'on parviendroit à y démontrer ces deux corps par des moyens analogues à ceux dont je me suis servi : cependant si la matière colorante n'y étoit qu'en petite quantité et si elle avoit une grande aflinité pour la matière insoluble à la- quelle elle seroïit unie, cette séparation présenteroit de grandes difficultés, et ce qui pourroit encore les augmenter ee seroit la présence d'une matière animale. 7e 48 374 ANNALES DU MUSÉUM elles sont les recherches qui m'ont occupé dans la pre- mière partie de mon Mémoire. Dans la seconde, j'ai examiné les propriétés de l’hématine. Ce corps est formé de carbone, d'hydrogène, d'azote et d’oxigène. Il est peu soluble dans l'eau, sa dissolution est d’un beau rouge orangé : il forme avec les acides sulfurique, nitrique, muriatique, phospho- reux, phosphorique des combinaisons jaunes ou rouges sui- vant la quantité d'acide employée. Il ne paroit former qu’une combinaison rouge avec l'acide boracique. Il se combine ésalement aux acides végétaux, et il forme avec les acides acétique, oxalique, citrique et tartareux des combinaisons jaunes qui sont légèrement rosées par un excès d'acide. Les bases alcalines forment avec l'hématine des combinai- sons bleues violettes qui se décomposent rapidement quand il y'a un excès d'alcali. Les acides, au contraire, donnent beaucoup plus de fixité à l'hématine en s’y combinant. Les terres agissent à la manière des alcalis, elles forment des combinaisons qui sont d’un bleu moins violet que les combinaisons alcalines. J'ai remarqué en général que la cou- leur bleue étoit beaucoup moins violette quand les molé- cules étoient râpprochées que quand elles étoient divisées dans un liquide. : J'ai fait connoître ensuite l'action de l'hydrogène sulfuré sur lhématine. J'ai prouvé qu'il se combinoiït simplement à la couleur et qu'il ne la désoxigénoit pas. Cet effet semble éloigner l'hydrogène sulfuré des acides avec lesquels cepen- dant il a tant d’analogies. J'ai fait quelques essais sur les sels neutres à base de potasse et de soude, mais j'ai exposé mes résultats avec D'HISTOIRE NATURELLE. 375 ] circonspection, par la raison que je n'ai point opéré avec l'hématine et que j'ai employé une eau distillée de la pureté de laquelle je n'étois pas certain. Les conclusions que j'ai déduites de cette action sont les suivantes : les sels neutres à base de potasse et de soude n'ont pas d'action sur l’héma- tine, mais l’hématine étant infiniment plus sensible au contact des alcalis que le sirop de violette, indique dans des sels qui n'altèrent pas la couleur de ce dernier des traces d’aleali qui sont étrangères à la composition du sel. Les sels formés d’une terre ou d’un alcali terreux, agissent sur l’hématine par leur base. Ainsi l’alun est en partie dé- composé par linfusion de campèche; il paroït se former une combinaison d’alun avec excès de base et de matière colo- rante, laquelle paroïit être ramenée par l'eau bouillante à l'état d’une simple combinaison d'alumine et de matière co- lorante. Les oxides métalliques que j'ai examinés se sont comportés À la manière des alcalis et des terres, à l exception cependant de l’oxide d’étain au maximum qui a formé une combinaison rouge, en sorte que cette base a encore une analogie de plus avec les acides. J'ai vu que les précipités formés par une infusion de cam- pêche versée dans du muriate d’étain au minimum et de l’acé- tate de plomb, étoient des combinaisons de matière colorante et de sels avec excès de base, que l’on pouvoit dépouiller d'acide au moyen de l'eau bouillante; mais j'ai remarqué qu'il falloit une très-grande quantité de ce liquide. L’hématine étant très-sensible au contact des acides et des alcalis peut être employée utilement comme réactif, mais 48* 376 ANNALES DU MUSÉUM comme elle n’agit pas sur toutes les combinaisons salines, à la manière du tournesol et du sirop de violette, il Sen suit qu'elle ne peut suppléer à ces corps dans certaines cireons- tances, quoique cependant elle soit infiniment plus sensible qu'eux. Je reviendrai sur cet objet dans un mémoire où je compte examiner les rapports des acides et des alcalis avec les principes colorans. J'ai terminé la seconde partie de mes recherches par l'exa- men de l’action de l'hématine sur la gélatine. J’ai voulu prouver que la précipitation de la gélatine ne pouvoit suflire pour caractériser une espèce de principe immédiat, puisque cette propriété appartenoit à des corps qui étoient d’une na- ture très-différente : j'ai fat voir ensuite que l'hématine qui ne précipite que très-légèrement la gélatine acquéroit l’éner- gie d’un véritable tannin par sa combinaison avec le principe insoluble qui l'accompagne dans l'extrait de campèche ; j'ai conclu de là que si la propriété de*précipiter la colle appar- tenoit exclusivement à un corps, l'union de ce corps avec un autre, loin d'augmenter cette propriété, devroit au contraire la diminuer. Dans d’autres Mémoires je me propose de faire l'examen de plusieurs substances astringentes, et en particulier de celles qui sont employées dans les arts. D'HISTOIRE NATURELLE. 377 OBSERVATIONS ZOOLOGIQUES Sur les facultés physiques et intellectuelles du Phoque commun. (Phoca vitulina, L.) PAR M. FRÉDÉRIC CUVIER. AnrT. IL Drs ORGANES. Cl: animal, habitant nos mers, est depuis long-temps connu des naturalistes : car quoiqu'on ne le voie paroitre qu'accidentellement sur nos côtes, il n’est pas rare de l'y rencontrer : c’est dans la Manche, et dans le courant de la même année, qu'ont été pris les trois individus que la Mé- nagerie a possédés et qui ont fait le sujet de mes observa- tions (1). Cependant quoique ce phoque soit connu, il est très-vraisemblable qu'on a confondu avec lui des individus d'espèces différentes : c'est ce que mon ami Péron se pro- posoit de démontrer dans un travail fort étendu, lorsqu'une (1) On a déja publié un assez grand nombre de remarques sur ces animaux; mais elles formeroient plutôt un recueil de notes qu’une histoire. Le plan que nous suivons dans nos recherches sur les facultés physiques et intellectuelles des mammifères nous conduira nécessairement à observer ce que d’autres ont déja observé et à répéter ce qu’ils auront dit; mais nous nous efforcerons d'appuyer les faits que nous rapporterons des faits qui auront été rapportés avant nous : nous craindrions, en supprimant les remarques qui ne seroient point nouvelles, de laisser des lacunes dans un travail qui est surtout fondé sur les rapports des phé- nomènes, 378 ANNALES DU MUSÉUM 7 mort prématurée est venue l'enlever au milieu des travaux les plus importans, et à l’âge où les méditations, nourries par le temps, commencent à acquérir toute leur maturité. Je ne serois même point étonné que, par une autre erreur on eut formé du phoque commun plusieurs espèces en le considérant à différens âges; car ses couleurs paroissent varier à des intervalles très-rapprochés. En général on s’est assez peu attaché aux changemens que l’âge amène dans les carac- ières spéciliques, et il y a peut-être autant de découvertes à faire aujourd'hui, dans certaines parties de la zoologie, en diminuant le nombre des espèces qu'en le multipliant. Les trois phoques que j'ai observés étoient très-jeunes et différoient peu par leur taille : ils avoient r mètre du bout du museau à l'extrémité des pattes de derrière. La tête avoit deux décimètres , la queue r, les pattes antérieures 12 cen- ümètres et les postérieures 20. Lorsqu'ils étoient mouillés ils n’avoient pas la même cou- leur que lorsqu'ils ne l’étoient point. Dans le premier cas les taches noires du dos étoient beaucoup plus visibles que dans le second, et le fond du pelage, gris jaunätre quand lanimal sortoit de l’eau, étoit d’un jaune fauve quand il étoit sec. Le plus grand de ces animaux avoit le poil d’un fauve plus vif que les deux autres sur lesquels le gris dominoit. Ceux-ci se distinguoient en outre du troisième par les taches du dos qui couvroient une plus grande surface et par la teinte de la partie inférieure du corps plus pàle que celle de la partie supérieure. Chez tous, les taches du dos se réunissoient le long de l’épine et formoient une large ligne dorsale qui s’éten- doit de la partie postérieure de la tête jusqu’à la queue. D'HISTOIRE NATURELLE. 379 Les deux individus gris restèrent, à de très-légers chan- gemens près, avec les couleurs dont nous venons de parler; mais environ deux mois après l’arrivée de l'individu fauve, au commencement de l'automne, on vit une ligne transver- sale noire en forme de croissant se développer sur son cou, et l'intensité de cette tache, ou plutôt la manière dont le noir qui la formoit coloroit les pois, la laissoit voir très-distinc- tement, que l'animal fut sec ou mouillé. Ce dernier avoit encore une particularité que je n’ai point observée aux autres: sa tét&étoit continuellement entourée d’un cercle de poils huilés qui annoncoient, dans cette partie, quelque organe glanduleux analogue à celui qu'on trouve dans les mêmes parües, chez les chamois, chez les dromadaires ou chez les chameaux. Ces différences paroissent appartenir au sexe : car l'individu fauve avec une tache noire en forme de croissant sur le cou, et un cercle de poils huilés autour de la tête, étoit un male, et les deux individus gris étoient des femelles ; ce qui se rapporte assez exactement aux observations très-curieuses de M. Lepechin sur cette espèce de phoque (r). Les poils ont un caractère particulier ; ils sont tous soyeux plats, pointus, durs, très-serrés les uns contre les autres, et leur longueur sur passe à peine 6 ou 7 millimètres. La peau sécrète en outre un matière grasse qui, avec l'épaisseur des poils, garantit l'animal des effets de l'humidité, On sait que les phoques ont cinq doigts libres aux pieds de devant et cinq à ceux de derrière; que ceux-ci sont (1) Nov. Comment. A. S. Petropolit,, t. 11, p. 287. Journal de Physique, iom, XXVI, p. 192. 380 ANNALES DU MUSÉUM réunis par une membrane qui en fait de véritables nageoires, et que les uns et les-autres sont armés d’ongles ; que les mains sont les seules parties des membres antérieurs qui paroïssent au dehors; que les membres postérieurs suivent des lignes parallèles à celle du tronc, et qu'ils ne sortent au dehors que depuis le calcaneum; que les pieds se touchant par la plante, sont placés sur le côté le pouce en bas; qu’à ceux de derrière, le premier et le dernier doigt sont les plus grands; enfin qu'au pied de devant le plus grand des doigts est le premier et que les autres vont en diminuant graduel- lement. En effet, les phoques dont je parle réunissoient tous ces caratères, Ces animaux , très-remarquables par la forme de leur corps et de leurs membres, le sont aussi par celle de leurs sens. Un museau court, des orbites sans sourcils, un front large , un crâne vaste et arrondi leur donnent une physionomie qu'on ne retrouve point chez les autres mammifères. Leurs yeux grands, ronds et à fleur de tête ont une pupille sem- blable à celle des chats domestiques : elle se dilate et prend la forme d’un disque à une foible lumière, et elle se rétrécit au grand jour. Les paupières sont étroites et se rapprochent très-rarement : l'animal ne paroît pas avoir besoin de nettoyer la surface de ses yeux aussi souvent que les autres mammi- fères, et lorsque ces organes se meuvent on voit la peau du front et des joues former des rides qui annoncent que le pa- nicule charnu prend une assez grande part à ce mouvement, La troisième paupière est assez développée; elle s'aperçoit, mais je n’ai jamais vu l'animal en faire usage. Les narines situées en arrière du bout du museau présen- D’HISTOIRE-NATURELLE. 381 tent deux ouvertures longitudinales qui forment entre elles à peu près un angle droit. Ordinairement elles sont fermées ; l'animal ne les ouvre que lorsqu'il veut faire sortir l'air de ses poumons ou y en introduire de nouveau. Alors elles devien- nent circulaires. Cette manière de respirer donne un moyen facile d'apprécier la vitesse de la respiration, et il est à remar- quer que le phoque respire d'une manière très-inégale et souvent à des intervalles fort éloignés; habituellement il se passe huit à dix secondes entre chaque inspiration, et j'ai souvent vu eette fonction, être suspendue pendant une demi-minute sans que l'animal y fut obligé. Il semble que les narines sont dans leur état naturel lorsqu'elles sont fermées et que ce n'est que par un effort que l'animal par- vient à les ouvrir. Mais la quantité d'air qui entre dans le” poumon est assez considérable, à en juger par le mouvement des côtes et par l'air chassé à chaque expiration. Il faut en effet que la masse d'air inspirée supplée la rareté des inspi- rations, car peu de mammifères m'ont paru avoir une chaleur naturelle aussi grande que les phoques. Je n’ai pu fixer en- üèrement mon opinion sur ce point : les animaux que j'ai examinés n’étoient point assez privés pour me laisser faire des expériences délicates et je n’aurois pu compter sur celles qui auroient été accompagnées de violence. C’est, au reste, le cas de remaïquer que ces animaux ont une très-grande quantité de sang, comme plusieurs voyageurs l'ont constaté. Les oreilles externes ne consistent qu'en un rudiment dont la forme est triangulaire et dont les dimensions, tant en hauteur qu’en largeur, vont à peine à deux ou trois mil- limètres. Elles sont placées au-dessus de l'œil un peu en ar- 17- 49 382 ANNALES DU MUSÉUM rière; mais quoique cette situation soit toute particuhère , la partie osseuse n'en est pas moins à la même place que chez les autres mammifères, ce qui oblige le conduit auditif de ramper obliquement sous la peau pour rejoindre l’ouver- ture du timpan. Ce rudiment de pavillon se ferme lorsque l'animal pénètre dans l’eau. La langue est.douce, un peu écho à sa pointe et je n'ai jamais vu aucun phoque la faire sortir hors de sa bouche. Les lèvres sont minces, mais extensibles. Avec une conformation des membres aussi peu favorable aux mouvemens, on conçoit que le sens du toucher n’a pu se développer sur ces organes, chez le phoque, comme il s’est développé dans les mains chez quelques mammifères et surtout chez l'homme. Les moustaches sont, je crois, chez ce singulier animal une des parties où le toucher a le plus de sensibilité. Ces poils placés de chaque côté de la bouche et au coin de l'œil communiquent avec des nerfs, remarquables par leur grosseur et auxquels le plus léger mouvement im- prime une sensation, comme je m'en suis convaincu plusieurs fois. Les dents des phoques ont des caractères particuliers qui seuls distinguent ces animaux de tous les autres mammifères. Les incisives sont au nombre de six à la mâchoire supérieure et au nombre de quatre à l'inférieure. Les canines sont sem- blables pour la: forme et pour le nombre à celles des carnas- siers; et les molaires, au nombre de cinq de chaque côté des deux mâchoires, sont tranchantes, triangulaires et analogues aux premières molaires des carnassiers que nous avons nommées fausses molüres; seulement elles sont un peu plus D'HISTOIRE NATURELLE. 383 épaisses à leur base et leur tranchant est plus découpé; du reste elles ont les mêmes relations de mâchoire à màchoire: celles de la mâchoire inférieure correspondent aux vides que laissent entre elles celles de la màchoire opposée. Toutes ces dents qui se ressemblent pour la forme, diffèrent pour la grandeur; la première est plus petite que les autres, et elle est placée immédiatement à la base de la canine. Telles étoient les dents des jeunes phoques que j'ai pos- sédés ; mais leurs molaires étoient vraisemblablement en plus, petit nombre que chez les phoques adultes; en effet Lepechinf donne quatre molaires de plus à ces animaux (1). ART. IL Des Foncrions rHYsiQues. Il est évident, d’après ce que nous avons dit de la struc- ture de ses membres, que le phoque est essentiellement destiné à vivre dans l’eau et que tous ses mouvemens sur terre doivent être lents et pénibles. Il ne se sert guère de ses pattes que pour nager, et à moins qu'il ne veuille grimper il ne les emploie pas pour se transporter d’un lieu dans un autre : lorsqu'il veut marcher il applique alternativement sur le sol la partie antérieure et la partie postérieure de son corps en reployant son dos à peu près comme les chenilles arpenteuses : ce qui contredit absolument le récit que fait Buffon de la marche de ces animaux (2), et ce qui confirme ce que Dampierre (3) avoit dit depuis long - temps assez (1) Nov. Comm. A. S. Petrop., tom. 11,p. 287. (2) Buffon, édit. in-12, t. 11, p. 278. (3) Dampierre, Voyage, tom.1, p. 117: , 49 * 384 ANNALES DU MUSÉUM clairement pour qu'on soit étonné que Buffon ait cité ce voyageur et ne l'ait point suivi. Dans ce genre de mouvement les pattes du phoque sont inactives : quelquefois on voit celles de devant étendues, immobiles de chaque côté de son corps, et d'autrefois elles sont reployées sous sa poitrine, surtout lorsque sa marche est pressée. Cependant quand il veut grimper il s’en sert très-utilement pour s’accrocher avec ses ongles, etil en fait usage aussi pour se défendre et frapper. Celles de derrière ne lui sont utiles que pour nager, encore ne Ken sert-il pas toujours. Alors les pattes antérieures pressent l’eau de toute leur largeur en s’abaissant, et elles se relèvent en se rapprochant du corps et en tournant le poignet de manière à ne présenter à l’eau que le tranchant de la main, du côté du pouce; les pieds de derrière ne font que s’écarter et se rap- procher; car ce sont les seuls mouvemens dont ils sont sus- ceptibles : mais lorsqu'ils s’éloignent, leurs doigts se rappro- chent, ét au contraire lorsqu'ils se rapprochent leurs doigts s’écartent, ce qui fait que la membrane qui réunit ces doigts présente où non sa surface à l’eau. En général, les doigts des pieds de devant comme ceux des pieds de derrière ne peuvent se mouvoir séparément. Avec des pattes fellement conformées il est impossible de croire ce que Dampierre dit (1) et ce que Buffon répète que les femelles s’asseyent pour allaiter leurs petits : jamais mes phoques n’ont pu s'élever que sur le bout de leurs pattes antérieures pour tâcher d'atteindre la proie que je tenois élevée hors de leur portée et dont ils avoient le plus grand (1) Voyage, tom. 1, p. 117. D'HISTOIRE NATURELLE, 385 besoin. Il est pour moi hors de doute que ees animaux n’allai- tent leurs petits sur terre qu’en se couchant à côté d'eux. Lorsque les phoques se reposent et dorment, ils s'étendent sur l’un ou l’autre côté de leur corps. Habituellement leur tête est retirée entre les deux épaules ; mais le cou peut très- aisément s’allonger de toute sa longueur. Les sens n'ont point chez ces animaux toute la délicatesse que leur attribue Buffon (1), comme mes expériences me Font démontré et comme on auroit pu le conclure du genre de vie de ces animaux qui consiste dans un repos presque continuel. La vue est peut-être le moins grossier; ils distinguent à quelques distances, mais ils voient mieux dans un jour foible que dans une vive lumière et ds ne paroïissent pas distinguer aisément les formes; je crois pouvoir tirer cette conséquence de ce que ces phoques n’ont jamais manqué de venir prendre une nourriture qu'ils rejettoient constamment quoiqu'elle eût une forme très-différente de la seule dont ils voulüssent goûter. Si l’on connoissoit mieux les modifications que l'œil éprouve dans la vision, on seroit dans le cas de se faire une idée très- exacte de l'étendue des facultés de cet organe; mais on peut déjà conclure de ce que le phoque n’a la faculté de recevoir dans son œil, sans souffrir, qu'une très-petite quantité de lumière, et seulement les rayons les plus directs, puisque sa pupille se rétrécit à une vive lumière jusqu'à ne plus pré- senter qu'un point presque imperceptible, on peut conclure, dis-je, que la vue de cet animal est beaucoup moins parfaite que celle de la plupart des autres mammifères qui, ayant PE I TO Re Er (1) Tome x1, p. 275, édit. in-12. 356 ANNALES DU MUSÉUM une excitabilité moins vive, peuvent embrasser un champ lumineux plus vaste, multiplier leurs sensations et perfec- tionner leurs facultés visuelles par un exercice absolument nécessaire au développement des sens. L'ignorance absolue où l’on est encore des mouvemens qui s’opèrent dans les différentes parties de l'œil pour qu'un animal aperçoive distinctement un même objet à des distances trés-différentes, ne nous permet point de donner les raisons qui font que le phoque peut voir dans des milieux de diffé- rente densité; parce que toutes ces différences dans la faculté de voir peuvent tenir à lamème cause et que la structure de l'œil du phoque n'offre rien qui en annonce une nouvelle. En effet, tous les animaux terrestres peut-être pourroient discerner très-clairement les objets dans l'air et dans l’eau s'ils en contractoient l'habitude. La condition essentielle pour qu'un objet se grave distinctement dans notre œil, c’est que les rayons qui y portent son image se réunissent à un point déterminé à la surface de la rétine; or ce point, sur terre, est susceptible de varier, et varie en effet à chaque instant par la distance, c’est-à-dire, par la différence d’'obliquité suivant laquelle les rayons lumineux arrivent à notre œil; et comme nous avons là faculté de distinguer fort exactement les objets à des distances très-différentes, on ne peut douter que la nature n’ait pourvu l'œil de la faculté de proportionner les dimensions de quelques-unes de ces parties au degré d’éloignement des objets et de manière que la surface de la réune soit toujours en rapport avec le point auquel les rayons doivent se réunir au fond de l'œil. L'influence de la densité des milieux sur les rayons par D'HISTOIRE NATURELLE. 387 rapport à la vue, est la même que celle de la distance; en supposant naturellement que la densité des milieux au travers desquels la lumière passe pour arriver à l'œil n’est pas plus grande que celle des liqueurs de cet organe. Elle tend à faire varier le point de réunion des rayons lumineux, d’où l’on conçoit que le moyen employé par la nature pour corriger l'inconvénient de la distance peut servir à corriger les incon- véniens de la densité et conséquemment que l'animal qui vit dans l'air et voit de loin comme de près, peut voir dans l'air et dans l’eau si la faculté qu’a son œil de se modifier dans quelques-unes de ses parties a recu une certaine étendue. Dans l'air les rayons qui arrivent à l'œil du phoque com- mencent à éprouver une réfraction en traversant l'humeur aqueuse. Dans l’eau les rayons qui arrivent à cet œil tra- versent cette humeur sans changer de direction et ne com- mencent à convergér qu’en entrant dans le cristallin : d’où il suit qu'à égale distance des objets les rayons qui les pei- gnent se réuniront plutôt au fond de Fœil sur terre que dans l'eau et que l'animal voit dans l’eau les objets de plus près que dans Pair. L’ouïe est proportionnellement beaucoup plus imparfaite encore que la vue; aucun organe ne sé trouve à l'extérieur pour recueillir les sons, et l'animal, passant la plus grande partie de sa vie au fond des eaux, obligé de fermer l'entrée de ses oreilles, reste presque étranger à toutes les vibra- tions sonores; de sorte que le peu d'exercice de ces organes sufliroit seul pour entretenir en eux le peu de délicatesse qui les caractérise. J'étois dans l'habitude, chaque fois que je donnoiïs un 388 ANNALES DU MUSEUM poisson à un des phoques dont je parle, de l'appeler par un nom; mais lorsqu'il ne me voyoit pas, ce nom ne lui rappe- loit pas la présence de sa nourriture. Il n’est pas douteux qu'en continuant cette expérience plus long-temps, je n’eusse obtenu des résultats différens et que je ne fusse parvenu, comme beaucoup d’autres l'ont fait (1), à apprendre à cet animal le nom que je Jui donnois; mais elle a duré bien assez long-temps pour justifier la conséquence que j'en tire. À enjuger seulement par les organes extérieurs, lodorat ne sembleroit pas devoir être pour ces animaux d’un secours plus grand que-les sens dont il vient d’être question : ainsi que les oreilles, les narines sont obligées de rester fermées pen- dant tout le temps que l’animal vit loin de l'air, et comme c’est au milieu des eaux qu’il poursuit et s'empare de sa proie, il ne peut consulter son odorat, du moins à la manière or- dinaire pour la choisir et pour la juger Cependant si les cornets du nez ont quelqu'influence sur l'étendue de Podorat, le phoque doit percevoir très-facilement les odeurs les plus foibles; car aucun animal, peut-être, n’a des cornets dont les circonvolutions soient plus nombreuses. Il ne lui resteroit donc qu'un seul moyen de sentir : ce seroit de mettre les émanations odorantes des corps renfermés dans sa bouche, en contact avec la membrane pituitaire , en les introduisant dans le nez par le palais. Cette conjecture ne paroïitra peut-être pas sans fondement si l’on considère à quel point le goût sert peu à ces animaux. Ils se contentent pour toute mastication de réduire les pois- (1) Pline, Histoire naturelle, L. IX, Ch. 13, D'HISTOIRE NATURELLE. 389 sons à des dimensions telles qu'ils puissent traverser le pha- rinx et l’œsophage; et pour cet eflet ils se bornent ordinai- rement à presser ces poissons entre leurs dents de manière à les rétrécir et à les ramener à des mesures convenables, D’autres fois cependant ils déchirent leur proie avec leurs ongles; mais +très-souvent ils l’avalent toute entière quoi- quelle soit, pour ainsi dire, plus grande que leur bouche; aussi sont-ils obligés, pour que la déglutition s'opère, d'élever leur tête afin que le poids des alimens contribue à les faire glisser dans l’œsophage et dans l'estomac, et favorise les efforts des muscles. " Avec une voracité aussi grande qui ne croiroit que le phoque est de tous les animaux le plus indifférent sur le choix de sa nourriture ? Le fait est cependant que je n'ai jamais pu faire manger aux individus que j'ai observés que l'espèce de poisson avec laquelle on avoit commencé à les nourrir. L'un n’a jamais voulu manger que des harengs et um autre que des limandes : le premier préféroit même des harengs salés aux autres espèces fraiches, et le second est véritablement mort de faim parce qu'on n’a pu lui fournir des limandes à 4 cause des tempêtes de l'équinoxe qui avoient momentané- ment suspendu la pèche. Cette disposition à contracter des habitudes s’est encore montrée dans les conditions que ces animaux exigeoient pour prendre leur nourriture: L'un ne saisissoit son poisson et ne le mangeoït qu'au fond de l’eau, tandis que l’autre au contraire n’a jamais voulu le manger que sur terre. Nous avons peu de chose à ajouter à ce que nous avons dit du sens du toucher : il est évident que le phoque doit UE 50 390 ANNALES DU MUSÉUM avoir des idées très-bornées sur les qualités des corps qui sont transmis à notre entendement par ce sens, et il est très-vrai- semblable qu'il le met plus en usage pour juger de la pré- _sence des objets que pour apprécier leur forme, leur dimen- sion ou leur dureté; ses moustaches doivent remplir cet objet de la manière la plus convenable pour un animal car- nassier qui le plus souvent ne peut pas être averti de la pré- sence de sa proie ou de son ennemi par sa vue, par son ouie ou par son odorat. Nous avons déjà dit un mot de la mastication en parlant du sens du goût et nous avonswu qu'elle étoit très-imparfaite, et que l'animal avaloit les corps sans les broyer. Pour cet effet la nature ne lui a pas seulement donné les moyens de distendre extrêmement toutes les parties au travers desquelles les alimens doivent passer; elle la en outre pourvu abon- damment d’une salive visqueuse qui remplit tellement sa bouche que, pendant la déglutition, elle s’écoule au dehors en longs filets; et il est à remarquer que ce dernier phéno- mène se présente dans toute sa force, mème lorsque le ‘phoque ne fait encore qu'apercevoir sa proie. Il éprouve done très-vivement la sensation du plaisir aux organes du goût par le seul effet du rapport des nerfs, par la seule in- fluence de la sympathie; et je serois assez porté à penser que ce sentiment peut suppléer, jusqu'à un certain point, le véri- table sentiment du goût pour porter les animaux qui ne mâchent point à choisir leurs alimens. Cette conjecture ex- pliqueroit d’une manière fort simple et fort naturelle le plaisir que tant d'animaux trouvent, outre celui de satisfaire leur faim, à prendre une nourriture qui ne peut affecter que mé- D'HISTOIRE NATURELLE. 391 caniquement les papilles de leur langue; tels sont entre autres les oiseaux qui composent la nombreuse famille des granivores. Tant que la mastication et la déglutition se passent sur terre, elles ne doivent éprouver aucun obstacle; mais le phoque mange souvent au fond des eaux la proie qu'il y a saisie et il n’est pas possible de supposer que dans cette cir- constance ileprenne sa nourriture et l’avale de la mème ma- nière que dans l’autre. En effet, lorsque le poisson est sur la terre il le saisit avec ses dents, le brise et l’engloutit en le faisant tomber, pour ainsi dire, dans son estomac plutôt qu'en y poussant. Lorsque cette proie est dans l’eau il s'en empare par une sorte de succion : il n'ouvre point sa bouche entièrement; il n'écarte que l'extrémité de ses lèvres en abais- sant en même temps un peu sa màächoire inférieure; alors, comme le vide a été fait dans la bouche. auparavant, le poisson est attiré et saisi s'il se présente d’une manière con- venable : par la tête, par la queue ou par un point des na- geoires; car s'il présente quelque surface large qui surpasse la petite ouverture de la bouche, le phoque est obligé de prendre de nouvelles mesures et de l'attaquer de nouveau. Ce n’est pas tout : il faut avaler cette proie après s’en être emparé; et l’on conçoit que si le phoque n’agissoïit pas autre- ment, pour cet effet, dans l’eau que sur la terre son estomac seroit rempli de liquide avant que les alimens y soient des- cendus. Sur ce point je n'ai pu encore satisfaire ma curiosité, et c'est une question qui reste jusqu'ici sans réponse. La voix la plus forte que mes jeunes phoques aient fait entendre étoit une sorte d’aboiement un peu plus foible Bo 302 ANNALES DU MUSÉUM que celui du chien. C’étoit le soir et lorsque le temps se dis- posoit à changer qu’ils aboyoient. Quand ils étoient en colère ils ne le témoignoient que par une sorte de siflement assez semblable à celui d’un chat qui menace. ArT. TILL Des FoNGTIONS INTELLECTUELLES. $ 1. Phénomènes qui ont pour objet de défendre l'animal contre les dangers. Une des idées les plus généralement admises c’est que la perfection de l'intelligence est en raison directe de celle des sens. Nous avons déjà combattu ce principe dans notre mémoire sur l’orang-outang; d’autres observateurs l’avoient fait avant nous, mais particulièrement M. le docteur Gall dans son important ouvrage sur la physiologie et l'anatomie du système nerveux. ‘Ce que j'ai dit des organes du phoque dans la première partie de ce mémoire ne doit, à ce qu'il me semble, laisser aucun doute sur leur imperfection; et en ne jugeant l’in- telligence de ces animaux que d’après ces faits seuls, on seroit conduit à les regarder comme les plus brutes des mammifères terrestres. Cependant ces phoques pourvus de membres si imparfaits, de sens si grossiers savent tirer du petit nombre de leurs sensations des résultats infiniment supérieurs à ceux qu’obtiennent des leurs des animaux en apparence plus favo- rablement organisés : ce qui est une nouvelle preuve en fa- veur de l'opinion qui donne au cerveau la principale influence sur les idées. D'HISTOIRE NATURELLE. 393 L’orang-outang nous a montré des sens à peu près aussi délicats que ceux de l’homme avec un entendement beaucoup plus borné; le phoque-nous montre au contraire , avec des sens très-obtus, un entendement à proportion très-développé. On sait que les phoques vivent en famille et qu'ils $e retirent sur les côtes inhabitées où ils jouissent d’une paix profonde: ils n’ont ordinairement à sy défendre que contre un petit nombre d’ennemis, et ils y trouvent sans peine et en abon- dance la nourriture qui leur convient. Il résulte de ce genre de vie que ces animaux connoissent peu les dangers et qu'ils montrent ordinairement une confiance qui leur est presque toujours funeste. C’est ce que s'accordent à rapporter tous les voyageurs qui ont abordé ces côtes désertes, refuge ordi- naire des phoques. On auroit tort de conclure de là que ces animaux manquent du jugement nécessaire pour apprécier le danger : car ceux qui ont des petits à défendre (1) ou qui se trouvent dans les parages souvent fréquentés par leshommes, n’ont plus cette ignorance et cette confiance aveugle qui ex- posoit leur vie; ils ont appris à reconnoître leur ennemi, à le fuir et quelquefois mème à l’attaquer : c’est encore ce que tous les voyageurs confirment ; et comme l'expérience prouve aussi d’une manière incontestable que les facultés intellec- tuelles développées accidentellement se communiquent avec le temps par la génération et deviennent héréditaires, on doit sentir que des individus d’une même espèce, pris dans des parages différens, présenteroïent des différences dans leurs dispositions intellectuelles analogues à celles des circonstances (1) Voy. de Woodes - Rogers, tom. 1, p. 206, 394 ANNALES DU MUSÉUM au milieu desquelles eux ou leur race auroient vécu. Ces considérations me portent à croire que les phoques qui ont fait le sujet de mes observations, avoient passé leur vie, ainsi que la race dont ils provenoient, dans des retraites cachées, car la présence de l’homme ni celle des animaux ne leur a jamais causé aucune frayeur; on ne parvenoit même à les faire fuir qu’en s’approchant assez d’eux pour leur donner la crainte d’être foulés aux pieds et, dans ce cas-là, ils n’évitoient jamais le danger qu’en s’en éloignant. Un seul menacçoit de la voix et frappoit quelquefois de la patte, mais il ne mordoit qu'à la dernière extrémité. Il en étoit de mème pour conser- ver leur nourriture : quoiqu'ils fussent très-voraces, ils ne témoignoient aucune crainte de se la voir enlever par d’autres que par leurs semblables; plusieurs fois j'ai repris le poisson que je venois de donner à l’animal qui en avoit le plus grand besoin, sans qu'il ait opposé d’obstacle à'ma volonté, et j'ai vu des jeunes chiens auxquels un de ces phoques s’étoit atta- ché, s'amuser, pendant qu'il mangeoïit, à lui arracher de la bouche le poisson qu'il étoit prêt à avaler, sans qu'il eut té- moigné la moindre colère. Mais lorsqu'on donnoit à manger à deux phoques réunis dans le mème bassin il en résultoit presque toujours un combat à coup de pattes, et comme à l'ordinaire le plus foible ou le plus timide laissoit le champ libre au plus fort ou au plus hardi. L'état de société est ordinairement un moyen de défense pour les animaux, et l’on sait, en eflet, que les phoques se défendent mutuellement lorsqu'ils sont attaqués; mais je n'ai jamais pu remarquer cette disposition dans les individus que j'ai examinés, ce qu'il faut peut-être attribuer à leur extrème D'HISTOIRE NATURELLE. 305 jeunesse, comme la plupart des autres faits que je viens de rapporter; car je ne les ai attribués à une autre cause qu'avec beaucoup de doute. $ 2. Phénomènes dont le but est de procurer à l'animal Les choses qui lux sont nécessaires. On peut mettre au premier rang ceux qui naissent du besoin de vivre en société. Excepté quelqués espèces de singes, je ne connois aucun animal sauvage qui s’apprivoise avec plus de facilité que le phoque, et qui s'attache plus fortement. Dans les premiers jours de son arrivée, un des individus gris me fuyoit lorsque je le flattois de la main, mais quelques jours après toute sa crainte avoit cessé : 1} avoit reconnu la nature du mouvement de ma main sur son dos, et sa çon- fiance étoit entière. Ce mème phoque étoit renfermé avec deux petits chiens qui s’amusoient souvent à lui monter sur le dos, à l’aboyer, à le mordre même; et quoique tous ces jeux et la vivacité des mouvemens qui en résultoient fussent peu en harmonie avec ses habitudes et ses mouvemens, il en apprécioit le motif, car il paroiïssoit s’y plaire : jamais il n’y répondit que par de légers coups de pattes qui avoient plu- tôt pour objet de les exciter que de les réprimer. Si ces jeunes chiens s'échappoientil les suivoit, quelque pénible que fut pour lui une marche forcée dans un chemin couvert de pierres et de boue; et lorsque le froid se faisoit sentir, tous ces animaux se couchoient très-rapprochés les uns des autres afin de se tenir chaud mutuellement. L'individu fauve s’étoit surtout attaché à la personne qui 306 ANNALES DU‘MUSÉUM avoit soin de lui; après un certain temps il apprit à la recon- noitre d'aussi loin qu'il pouvoit l'apercevoir; il tenoit les Yeux fixés sur elle jusqu’à ce qu'il ne la voyoit plus, et accouroit dès qu'elle sapprochoiït du pare où il étoit renfermé. La faim, au reste, entroit aussi pour quelque chose dans laffecuon qu'il témoignoit à ses gardiens : ce besoin continuel et l'at- tention qu'il donnoit à tous les mouvemens qui pouvoient l'in- téresser sous ce rapport lui avoienit fait remarquer, à une dis- tance de soixante pas, le lieu qui contenoit sa nourriture, quoiqu'il fut tout-à-fait étranger à son pare, qu'il servit à une foule d’autres usages et que pour y chercher son poisson on n’y entrât que deux fois chaque jour. S'il-étoit libre lors- qu'on approchoit de ce lieu il accouroit et sollicitoit vive- ment sa nourriture per les mouvemens de sa tête et surtout par l'expression de son regard. I m'est arrivé souvent de placer le poisson: que je donnois à l'individu qui refusoit d’aller à l’eau dans un baquet du côté opposé à celui où cet individu se trouvoit : d'abord il faisoit quelques tentatives, en montant sur le bord du baquet et en allongeant son cou pour atteindre sa proie; mais dès qu'il s’apercevoit qu’elle étoit trop éloignée, il descendoit, faisoit le tour du baquet et venoit remonter précisément où le pois- son se trouvoit quoiqu'il Peût tout-à-fait perdu de vue pen- dant le trajet, et qu'il n’eût pu conserver que dans son en- tendement l’image de cette proie et de la place qu’elle oc- cupoit. " C'étoit, à ce qu'il me semble, juger des objets avec assez de pénétration, et certainement c’étoit surpasser SOUS ce rap- port la moitié des autres mammifères qui perdent la cons- D'HISTOIRE NATURELLE. 397 cience de la présence des objets immédiatement après que leurs sens n’en sont plus frappés. On possédoit déjà sur les phoques des observations qui avoient donné une assez haute idée de leurs facultés intellec- tuelles (1), mais elles n'avoient point été faites comparative- ment avec l'étendue de leurs facultés organiques. C’est ce rapport que j'avois pour but d'établir; malheureusement la jeunesse des individus que j'ai examinés, la difficulté de les nourrir, l'impossibilité de les faire vivre pendant le temps nécessaire à des expériences suivies, ont été autant d'obstacles qui se sont réunis pour m'empêcher de rendre mon travail complet ; aussi je ne regarde mes observations que comme des notes préliminaires qui pourront quelque jour servir de base à un plan de recherches nouvelles. Je pense toutefois qu'elles doivent être ajoutées aux faits qui prouvent que les facultés intellectuelles ne dépendent point essentiellement de la perfection des sens : elles mon- trent en outre que l'intelligence des phoques se caractérise plus par son étendue que par sa promptitude, et elles con- duisent à faire penser que la nature, pour arriver à son but, à la conservation des individus, peut suppléer le nombre des sensations par l'étendue du jugement, et réciproquement l'étendue jugement par le nombre des sensations. (1) Pline, Histoire naturelle, L. vx, ch. 32, et L. 1x, ch. 13. Voyages de Mission., tom. 111, p. 113. Gomera , Mém. pour servir à l’Hist. nat. des Animaux, p. 201. Ælien, L. x11, ch. 56. Belon, de Piscibus, L. xvr, cb. 6, p. 456. Aldro- vende, Piscibus, p. 725 et 726. Diodore, Bibl., L. zur. 17. JT 398 ‘ ANNALES DU MUSÉUM MONOGRAPHIE DES OCHNACÉES ET DES SIMAROUBÉES. PAR M. DE CANDOLLE. Lue à la 1°. classe de l'Institut, le 26 novembre 1810. D'évitne les Ochnacées sont originaires des pays situés sous la zône torride, et ont été totalement inconnues aux Anciens. La première mention, mais obscure et incertaine, s’en trouve dans Marcgrave qui en a désigné une espèce sous le nom bré- silien de 7abotapita; Plumier, ayant retrouvé aux Antilles la plante de Marcgrave, en a le premier constitué un genre distinct auquel il a conservé le nom du Brésil, Burman bien- tôt après ajouta une seconde espèce de Ceylan à ce même genre. Linné ayant trouvé parmi les plantes recueillies à Ceylan par Herman une espèce qui s’y trouvoit désignée sous le nom de #2alkira ou malktra (nom qui est aussi cité par Burman) reconnut avec sa sagacité ordinaire les rapports réels de cette plante avec les jabotapita; mais poussant trop loin cette analogie et négligeant trop le témoignage de Bur- man, il les assimila l’une à l’autre, et établit dans sa Flore de Ceylan une seule espèce dans laquelle il confondit les deux indiquées par Burman, celle de Plumier et celle figurée par D'HISTOIRE NATURELLE. 399 Plukenet. Il donna à cette espèce le nom d’ochna, qu'il tra de celui de oyvn par lequel Aristote désignoit le poirier sau- vage. Quelqu'inconvenant que fût un pareil nom, il à été généralement adopté, et je continuerai à m'en servir, per- suadé que s'il est juste d'admettre toujours le nom le plus ancien, il est convenable cependant de ne pas remonter, quant à cette partie de la nomenclature, au delà de l’époque où Linné a le premier établi une terminologie rigoureuse. Ce célèbre naturaliste reconnut, bientôt après la publication de la Flore de Ceylan, que son ochna différoit du jabotapita par la position des fleurs, et dans la seconde édition du Spectes il les décrivit comme deux espèces. Schreber remarquant que l’ochna de Linné a plus de vingt étamines, et que le jabota- pita de Plumier n’en à que dix, les considéra comme deux genres distincts, laissa au premier le nom Linnéen et donna au second le nom de gomphuia qui provient de yougios, dens mnolaris , et qui exprime assez bien la manière dont les fruits adhèrent au réceptacle. Cette classification a été admise par presque tous les botanistes; le nombre des espèces s’est aug- menté, mais comme leurs descriptions étoient fort insufli- santes, que la plupart n’étoient point accompagnées de figures, que ces plantes sont rares même dans les plus riches herbiers, il s’est élevé de tels doutes relativement aux espèces de ce groupe que quoique les ouvrages existans donnent déjà l’in- dication de seize espèces d'Ochnacées, les spectres les plus récens n’ont osé en admettre que huit. Mon but dans ce Mé- moire est de constater l'existence de plus de trente espèces d’Ochnacées, d'en donner la description et la figure, de les distribuer en genres, de donner les caractères de la nouvelle € LS 400 ANNALES DU MUSÉUM famille que ces genres constituent, d'indiquer enfin les rap- ports de cette famille avec celle des Simaroubées dont je joindrai ici une courte notice pour servir de point de com- paraison. Linné ne connoissant qu'une seule espèce polyan- dre, a classé le genre ochna dans la polyandrie monogynie de son système sexuel; dans ses fragmens d'ordre naturel il l'a laissé parmi ceux dont il ignoroit les rapports. Bernard de Jussieu la placé dans sa famille des Anones; Adanson la aussi placé dans sa famille des Anones, mais comme il réu- nissoit sous ce nom les magnoliers et les dillenia , il paroît être le premier qui ait rapproché les ochna des magnoliers. M. Ant. Laurent de Jussieu a adopté la même opinion lors- qu'il a placé le genre ochna à la suite des magnoliers et avant les anones; mais les notes critiques jointes à son caractère générique indiquent le doute légitime qu'on doit encore conserver sur la place de ce genre. Les vraies Magnofiacées qu’on doit réduire à la premiére section de Jussieu présentent des caractères tranchés et fa- ciles; la présence et surtout le mode d’enroulement des jeunes stipules ; la pluralité des ovaires surmontés chacun d'un style, le mode d’adhérence des péricarpes à un récep- tacle de la nature de ceux qui ont recu le nom de polyphores, la caducité des folioles du calice, sont des caractères qui suflisent pour distinguer ces plantes des Ochnacées; les Dille- niacées (1) s’en écartent aussi par la caducité des folioles de leur calice, par la pluralité de leurs ovaires surmontés chacun (1) Sous ce nom je comprends les genres dillenia , hibbertia, candollea, vor- mia, etc., sur les limites desquels il reste beaucoup de recherches à faire, D'HISTOIRE NATURELLE. Aot d’un style, par leurs péricarpes aggrégés, un peu réunis à leur base, contenant plus d’une graine et s’ouvrant spontanément, par la pulpe ou l'arille dont les graines sont souvent entou- rées, par la présence au moins probable d'un périsperme, et par l'absence de toute stipule. Les Ochnacées n'ont donc de rapports intimes qu'avec le genre guassia de Linné et quel- ques genres encore peu connus, inais qui en sont très-Voisins. Je désignerai ce groupe sous le nom de Simaroubées et j'en donnerai ci-après une courte description. Mais il est néces- saire auparavant de décrire le fruit et le pistil de ces plantes, afin de faire séntir leurs véritables rapports. On distingue avec raison dans la earpologie les fruits aggré- gés qui proviennent de l’aggrégation des ovaires de plusieurs fleurs, les fruits multiples qui sont ceux formés par plusieurs ovaires appartenans à la même fleur , et enfin les fruits simples qui succèdent à des ovaires solitaires. C’est dans cette dernière classe qu'il faut ranger les fruits des Ochnacées et des Sima- roubées, mais on est forcé de convenir qu'ils se présentent sous une forme extraordinaire. Le pisul de ces plantes se renfle à sa base en une espèce de disque charnu sur lequel sont articulées plusieurs loges entièrement distinctes les unes des autres. Au premier coup d'œil on est tenté de prendre, avec tous les auteurs, ces loges pour autant de péricarpes et le disque charnu pour une sorte de réceptacle; mais il est évident que ce disque fait partie du pistil etnon du réceptacle, puisqu'il est nécessairement traversé par les vaisseaux qui vont du stigmate aux ovules. Je désigne sous le nom de gy- nobase*cet organe singulier qui n'existe que dans un petit nombre de familles, savoir : parmi les polypétales dans les ho ANNALES DU MUSÉUM ;l Ochnacées, les Simaroubées, le castela et quelques Malva- cées; parmi les monopétales dans les Labiées et la plupart des Borraginées où il est petit et peu apparent. Sa grandeur est au contraire très-considérable dans certaines Ochnacées; presque toutes ont les loges tout-à-fait saillantes; il en est au contraire, telles que le gomphia jabotapita, où la base de chaque loge est enfoncée dans le gynobase. Supposons par la pensée (et peut-être un jour la nature nous présentera-t-elle cette hy- pothèsé réalisée), supposons, dis-je, que le gynobase de quelques Ochnacées grandisse davantage et qu'il enveloppe la totalité des loges; alors on auroit un früit simple assez analogue à la poire et à la pomme. Le gynobase n’est donc, sous ce point de vue, qu'un péricarpe charnu qui au lieu d’entourer les loges du fruit se trouve placé au-dessous d'elles comme un support : les fruits gynobasiques peuvent être changés en fruits simples ordinaires par an autre procédé; ainsi supposons que les loges soient tellement rapprochées qu’elles viennent à se greffer naturellement ensemble ; alors sans autre modification on auroit un fruit qui, sous ce point de vue, ressembleroit à celui des mauves où du hura; car dans cés fruits le tubercule central qui se trouve au bas des styles est un véritable gynobase. Au reste, le gynobase ne doit point être confondu avec le Zorus ; Salisbury a désigné sous ce nom le support ou pédicelle du pistil qu'on observe dans certaines fleurs; le torus est un prolongement du pédoncule et ne fait pas partie du pisül, comme le gynobase. Il est si vrai que le gynobase ne doit point être confondu avec le torus qu'on pourroit trouver ces deux organes dans la même fléur ; si le cercle, où les étamines des ochna sont attachées, D'HISTOIRE NATURELLE. 403 au lieu d’être fort court se trouvoit prolongé en forme de cylindre, ce seroit un torus analogue à celui des œillets, et on auroit ainsi un gynobase porté sur un torus. Le torus ne porte qu'un pistil dans les dianthus, il en porte plusieurs dans la fraise; dans le premier eas il a été nommé thécaphore par Ebrhart, et basigyne par M. Richard; dans le second , polyphore par M. Richard. Mais il est hors de mon sujet d'entrer dans aucun détail à cet égard; je me contente de faire remarquer la singulière structure des fruits des Ochnacées et des Simaroubées où les loges sont placées sur un gynobase. Outre cette structure du fruit semblable dans ces deux fa- milles, elles ont encore plusieurs caractères communs, savoir : un calice persistant divisé en un nombre déterminé de par- ties; des pétales hypogynes caduques et en nombre déter- miné; des étamines insérées sur un disque hypogyne, quel- quefois au nombre de dix dans les deux groupes; un ovaire partagé ordinairement en autant de loges qu'il y a de pétales; un style simple; des loges monospermes ; des graines dépour- vues de périsperme, à embryon droit et à deux cotylédons épais. De plus ces deux groupes sont composés d'arbres ou d’arbustes indigènes des pays les plus chauds du globe. Ces caractères semblent exiger impérieusement la formation d’une famille nouvelle dont M. Richard a indiqué la formation par un seul mot glissé dans son analyse du fruit et dont les Ochnacées et les Simaroubées seroient les deux tribus; mais le doute commence à naître lorsqu'on examine les différences de ces deux groupes. 10. Les Ochnacées ont jusqu'ici les fleurs toujours herma- 404 ANNALES DU MUSÉUM phrodites; elles sont souvent unisexuelles par avortement dans les Simaroubées. 20, Les pétales sont étalés dans les premières, dressés dans les secondes. 30. On trouve dans l'intérieur de la fleur des Simaroubées certains appendices nectariformes qui manquent dans toutes les Ochnacées connues. 4°. Les loges qui sont placées sur le gynobase sont un peu charnues à l'extérieur et ne s'ouvrent point naturelle- ment dans les Ochnacées; elles sont sèches et peuvent s’ou- vrir en deux valves dans les Simaroubées; cette différence doit faire penser que les Ochnacées ont les loges essentielle- ment monospermes, tandis qu'on en pourra trouver de po- lyspermes dans les Simaroubées. 50. Les Ochnacées ont l'embryon dressé, tandis qu'il est inverse dans les Simaroubées (x). ; 60. Les Ochnacées ont toutes des feuilles simples, entières ou dentées ; celles des Simaroubées sont toujours composées. 7°. Les Ochnacées ont toutes les pédicelles de la fleur ar- üculés dans leur longueur, ce qui n’arrive dans aucune Simaroubée. 80, Les premières ont deux stipules à la base de chaque feuille et les secondes en sont privées. 9°. Enfin les Ochnacées ont une écorce qui est peu ou point amère et un suc propre aqueux; les Simaroubées ont l'écorce très-amère et le suc propre laiteux. (1) La manière dont Gærtner décrit le fruit du walkera tendroit à diminuer l'importance de ce caractère, mais je crois que sa description n’est pas entière- ment exacte. D'HISTOIRE NATURELLE. 4o5 J'avoue que dans l'état actuel de la science je ne vois aucun moyen de décider affirmativement si ces deux groupes sont des tribus ou des familles. Je me décide à les considérer comme deux familles, en présumant que puisque les diffé- rences tirées des organes nutritifs sont si prononcées, on en trouvera de correspondantes dans les organes reproductifs lorsque ceux-ci seront plus complétement connus. Les Ochnacées, à cause de leur port, du nombre et de la forme des étamines de plusieurs d’entre elles, sont un peu plus voisines des Magnoliacées et même des Rosacées; mais elles n'ont de rapports réels qu'avec les Simaroubées, et celles-ci se rapprochent davantage des Rutacées comme Linné et Jus- sieu l’avoient déjà pensé. Qu'on suppose en effet par la pen- sée ‘que le gynobase des Simaroubées (lequel est déjà plus petit que dans les Ochnacées ) vienne à diminuer au point d'être peu visible, que les loges se trouvent en partie sou- : dées entre elles et au stile par leur côté interne, et d’une simaroubée on feroit presque une rutacée. Le genre Castela de Turpin ressemble aux deux familles dont je viens de parler par la structure de son fruit; mais il diffère de l’une et de l’autre par ses fleurs périgyniques, par ses graines munies de périsperme et par son port tout entier. Je le crois plus voisin des Frangulacées, auprès desquelles il formera un jour une famille particulière distinguée des Ner- pruns comme les Simaroubées des Rutacées. Nous commen- cons seulement depuis trente ans l'étude raisonnée des végé- taux, et à chaque pas nous nous trouvons arrêtés par le vide et le vague des anciennes descriptions. Les"Ochnacées ont done pour caractères : des fleurs her- pe 17. 22 406 ANNALES DU MUSÉUM maphrodites; un calice persistant à quatre ou plus ordinaire- ment cinq parties ; des pétales hypogynes, caduques, étalés, en nombre déterminé; des étamines en nombre fixe ou variable, insérées sur un disque hypogyne ; un stile unique, filiforme, persistant, qui après la fleuraison se renfle à sa base en un corps globuleux (gynobase ) sur lequel sont articulées cinq loges monospermes, drupacées, non déhiscentes; des graines droites, sans périsperme, à deux cotylédons épais. Toutes les Ochnacées sont des arbres ou arbustes glabres dans leur sur- face entière, dont le suc est aqueux, et l’écorce un peu amère, surtout vers la racine; leurs feuilles sont alternes, simples, articulées sur la tige, à nervures pennées, entières ou dentées sur les bords, munies à leur base de deux petites sti- pules; leurs fleurs sont en grappes simples ou rameuses; les pédicelles sont toujours articulés dans le cours de leur lon- gueur, comme dans les asperges : cette articulation est vers le milieu ou vers la base, et la partie inférieure persiste sur l'axe de la grappe après la chute de la fleur. Cette famille se divise en deux sections; les Ochnacées po- lyandres qui ont de vingt à trente étamines, et les Ochnacées oligandres qui en ont de cinq à dix. Dans la première section on ne compte aujourd'hui que le seul genre Ochna qui se distingue à des caractères marqués; tous les Ochna sont des arbres ou arbustes qui, quoiqu'indigènes des pays les plus chauds de l’ancien continent, sont munis de feuilles caduques, de fleurs qui, comme dans les cerisiers, naissent en grappes séparées des feuilles, et de bourgeons écailleux quirenferment les uns les feuilles et les autres les fleurs; cette structure leur donne des rapports de végétation avec les Rosacées et doit à D'HISTOIRE NATURELLE. 4o7 faire espérer que nous les cultiverons un jour en pleine terre dans nos climats. Les Ochna offrent des diversités assez grandes dans la structure de leur fleur; les uns ont cinq pé- tales, d’autres en ont dix; on trouve des différences analogues dans le nombre des parties du fruit; leurs anthères sont tan- tôt linéaires, tantôt ovales; leur stigmate tantôt simple, tan- tôt divisé en plusieurs lobes. Peut-être un jour ce genre devra-t-il être divisé en plusieurs autres; mais comme ces différences se trouvent réparties entre diverses espèces qui d’ailleurs ont de grands rapports, j'ai cru plus convenable de conserver en un seul genre les huit espèces que je décris ci-après. Parmi les Ochnacées oligandres, je compte trois genres; le plus nombreux en espèces est le Gomphia de Schreber, le- quel est le même que le Jabotapita de Plumier, le @orreia de Vellozo , l'Ouratea d’Aublet et le Philomeda de Petit-Thouars. Il offre pour caractère d’avoir toutes les parties de la fleur et du fruit au nombre de cinq, excepté les étamines qui sont en nombre double des pétales; ces étamines ont les filets très-courts, presque nuls, les anthères longues dressées autour du pistil et s’ouvrant au sommet par deux pores à la manière des Solanum. Je décris ci-après vingt-deux espèces de Gom- phia; celles du nouveau monde ont toutes deux stipules axillaires distinctes caduques; celles de Madagascar ont les deux stipules placées un peu au-dessus de l’aisselle et soudées en une seule qui est persistante et intra-axillaire. Les Mé- lianthes qui appartiennent aux Rutacées offrent les mêmes variations. Le Walkera de Schreber, qui n’est autre chose que le Meesia de Gærtner ou le Tsjocatti de Rheede, ne difière du Fr 59 k D 408 ANNALES DU MUSÉUM genre précédent que par le nombre des étamines qui est de cinq au lieu de dix, caractère qui n’a été vu que par Gærtner; j'ajoute à ces deux genres déjà connus un troisième qui se distingue parce que toutes les parties de la fleur et du fruit y sont au nombre de quatre, excepté les étamires qui sont en nombre double des pétales; ces étamines ont les filets longs, les anthères ovales s’ouvrant par deux fentes longitu- dinales : la plante a un peu le port d'un Calophyllum : comme je n'ai pas vu le fruit parvenu à maturité, je ne présente ce genre qu'avec quelque doute. La seule espèce qui en soit connue est indigène du Brésil, et pour cette raison je lui donne le nom d'Elvasia en l'honneur de François-Manuel d'Elvas, jésuite portugais qui le premier a écrit sur histoire naturelle du Brésil, et a servi de guide à Marcgrave et à Pison; son ouvrage a été réimprimé dans la collection des voyages de Purchas et est souvent cité honorablement par Sloane. Les Simaroubées qu'on peut, je le répète, considérer à volonté comme une famille où comme une tribu des Ochna- cées, les Simaroubées, dis-je, ont les fleurs hermaphrodites ou unisexuelles par avortement ; le calice à cinq parties per- sistantes ; les pétales hypogynes, au nombre de cinq, cadues, droits; les étamines au nombre de cinq ou de dix attachées à un disque hypogyne, munies soit à leur base interne soit à côté d'elles d’appendices nectariformes dont la structure varie dans les différens genres; le pistil a l'ovaire à cinq tuber- cules , et le stile simple à stigmate entier ou divisé; le fruit se compose d’un gynobase moins charnu et moins développé que dans les Ochnacées, chargé de plusieurs loges articulées sur leur base; ces loges ont la forme de capsules bivalves; elles peuvent D'HISTOIRE NATURELLE. 409 s'ouvrir d’elles-mèmes à la maturité, et renferment une seule graine attachée au point supérieur de la loge et par consé- quent pendante dans son intérieur; cette graine est dépour- vue de périsperme, et munie de deux cotylédons épais. Les Simaroubées sont des arbres tous indigènes de J’Amérique méridionale, dépourvus de stipules, à feuilles pennées et à fleurs en grappe dont les pédicelles ne sont pas articulés; leur suc propre est laiteux; leur écorce est très-amère et un peu aromatique. de On doit rapporter à cette famille les genres Quassia de Linné, Simaruba d’Aublet qui mérite d’être distingué du pré- cédent, et Simaba d'Aublet qui pourra bien au contraire lui être un jour réuni. Ainsi quoique ce groupe soit peu nom- Preux, il a déjà le droit de nous intéresser puisqu'il renferme deux des remèdes les plus actifs de la médecine, savoir : le Quassia et le Simarouba (7). Après ces considérations préliminaires je vais exposer la monographie des plantes que j'ai mentionnées, en suivant l'ordre et le style adopté par les botanistes. (1) Favois cru, d’après la description de M. Willdenow, qu’on devoit rappor- ter à cette famille je borplandia de cet auteur, mais M. Richard a montré par une analyse exacte de la fleur de cette plante qu’elle se rapproche des méliacées et particulièrement du #corea d’Aublet, Ce genre ne peut conserver le nom de bonplandia déja donné antérieurement par Cavanilles à une autre plante; celui d'angustura qui estle nom d’un pays ne peut être pris pour nom de genre. On doit lui conserver celui de Cusparia febrifuga que M. de Humboldt lui a donné dans son Tableau de la géographie des plantes équinoxiales. 410 ANNALES DU MUSEUM OCHNACEZÆ. Magnoliis aff. Juss. — Anonarum gen. Ædans. — Jncertæ sedis Lin. Frucr. Flores hermaphroditi. Calyx 5-partitus persistens. Petala hypogyna, caduca, patula , numero definita (5-10). Stamina numero definila aut indefinita, disco hypogyno inserta. Filamenta sæpiüs persistentia. Ovarium partitum sæpiüs in tot parties quot sunt petala. Stylus unicus, filiformis, persistens, basi ampliatus in discum subglobosum. Pericarpii loculamenta tot quot petala, disco pistillari (gynobasi} carnoso et grandefacto articulatim inserta, monosperma, indehiscen- tia, subdrupacea. Semina exalhbnminosa, corculo erecto instructa : cotyledones duæ, crassæ. Vec. Arbores aut frutices e tropicis regionibus ortæ, in omnibus partibus glaberrimæ, succo aqueo; folia alterna, simplicia, super caulem articulata , pen- natim nervosa, integra aut dentata; stipulæ binæ minimæ ad basin foliorum; flores racemosi; pedicello medio aut infra medium articulati, articulo infero persistente. Arr. Ordo Magnoliaceis et etiam Dilleniaceis et Anonaceis primo adspectu similis, sed unitate styli abundè ab is distinctus. Solo Simarubearum ordini verè adfinis, sed distinctus floribus semper hermaphroditis, petalis patentibus, pericarpii loculis baccatis non dehiscentibus, et habitu toto. Genus Castela Ochna- ceis videtur affine, sed a nostro ordine differt floribus perigynis, et seminibus albuminosis et habitu, ideo prope Frangulaceas repellendum. $ L. Ochnaceæ polyandræ. I OCHNA. Ochnæ sp. Lin,, gen. 266. Lam., Dict. 4, p. 510. — Ochna. Schreb., gen. 354. Car. Calyx 5-partitus; petala 5-10; stamina numerosa, filamentis filiformi- bus persistentibus, antheris linearibus aut ovatis caducis, rimis duabus ab apice ad basin dehiscentibus. Pericarpii loculamenta 5-10. Has. Arbores aut frutices e veteris orbis regionibus tropicis ortæ, cerasos habitu et florescentia æmulantes. Gemmæ florales et foliosæ squamosæ; turiones basi yestigiis squamarum gemmalium notati ; undè nomen Ochnæ squarrosæ priori speciei datum et omnibuscommune, Folia caduca( an in omnibns?}), ovalia, mar- gine plus minusve serrata. Racemi peduneulati, infra folia ex præcedentis anni ligno orti : pedicelli medio aut infra medium articulati, basi persistente : antheræ lineares aut ovatæ, rima duplici, in lincaribus terminali brevissima, in ovatis D'HISTOIRE NATURELLE. 411 longa laterali, dehiscentes. Stylus filiformis apice capitatus aut multipartitus. No. Ab o»1 voce græca qua Aristoteles pyrum silvestrem designat. 1. Ocuxa oBTusATA. Tab. 1. O. stigmate capitato, floribus 8-10-petalis, foliis ohovatis obtusissimis ser- ratis. , ©. squarrosa. Lin. sp. pl. 531? Wild. sp. 2, p.1158 ,excl. syr, Hab. in India orientali. B.(v.s.) Cortex cinereus. Turiones basi squamulis gemmaceis persistentibus mini mis acutis squarrosi; stipulæ subulatæ, petioli longitudine; folia ut videtur caduca, oboyata, obtusa et quasi truncata, dentibus acutis minimis raris serra- ta , nervis lateralibus prominulis ad apicem confluentibus. Racemi infra folia ex anni prioris ligno orti, ramosi, nudi, basi squamarum vestigiis notati ; pedicelli longi, medio circiter articulati ; flores 10-20 in quoque racemo , præ aliis magni, lutei ;calyx 5-partitus, lobisovali-oblongis, obtusis ,exterioribus paulo majoribus. Petala 8-10 oblonga, calyce paulo longiora. Filamenta innumera , brevia, per- sistentia; antheræ lineares , tetragonæ, filamento iriplo longiores, rimulis dua- bus ab apice ad basin dehiscentibus. Stylus staminibus longior, filiformis ; stigma capitatum. Pericarpii lôculamenta numero petalorum æqualia, sed sæpiùs quædam abortiva. Semen erectum. Cotyledones 2 crassæ. — Hæc species videtur Ochua squarrosa herb. Linn. sed descriptionibus et synonymis Linnæanis non convenit. Nomen mutavi cum sit incertum, multis aliis pari jure adaptatum. 2. OcHxA LucipaA. ©. stigmate capitato, floribus 7-10 petalis, foliis obovatis aut oblong o-ovatis acutis serratis. &. Ochna lucida. Zam., Dict. 4, p. 510.* Excl. syn. Illustr., t. 472 , f. 1. 8. Ochna squarrosa. Rottb. act. dan. 2, p. 545, £. 6. * Excl. syn. Hab. in India orientali. B.(v.s.) : Species priori aHinis, sed distincta videtur foliis magis coriaceis, nervos minus proeminentes gerentibus, apice acuminatis aut acütis. Var. # quam siccam in herbario Lamarckii vidi est distincta foliis obovatis apice in mucronem acuminatum abeuntibus. Petalis antherisque specimen est destitutum et ergo incaute a pictore delineatæ fuerunt; probabiliter hæ partes prioris speciei formas æmulant. Pericarpii loculamenta 8-10. Var. 8 huc refero ex icone et descriptione Rottholliana. Ex isto rami stricti , patentes; folia oblongo-ovata , acuta, nitida, venis obliquis exarata, reticulata, 3-4 poli. longa , 1 + lata, margine subundulata, acutè serrata , serraturis mini- mis acutis adpressis. Racemi divaricati, audi, infra folia orti; pedicelli uneiales, 412 ANNALES DU MUSÉUM Calycis lobi concavi, patentes. Petala 7-10, oblonga, patentia, flava, basi an: gustiora. Filamenta brevissima ; antheræ lineares , tetragonæ, triplo quadruploye longiores, deciduæ, pollen in clauso flore demittentes. Stylus longus, flexuosus, apice subcapitatus; drupæ ovales nigræ; cotyledones 2, crassæ, quas binos nucleos vocat Rottholl. ‘ 3. OcHxa NiripA. Tab. 2. O. stigmate capitato, floribus pentapetalis, foliis oblongis acutis serratis, ra- cemis brevibus confertis. Ochna nitida. Thumb. prod. 67. Hab. in India orientali, prob. in Ceylona. B.(v.s. herb. Delessert. ) Ramorum cortex subfuseus; folia oblonga, aut ovali-oblonga, basi et apice altenuata, acuta, évidenter serrata, serraturis acutis adpressis duriuseulis, nervis supernè subprominulis, nitida, 3-4 poll. longa, 1 + lata. Peduneuli florales nudi infra folia orti, apice racemum brevem confertum gerentes; pedicelli uniflori, floribus vix longiores; gemmæ ovato -globosæ. Petala 5 in gemmis vidi, calyci æqualia juxta Thunbergium. Folia videntur persistentia; gemmæ foliaceæ quas video simul cum floribus nascentibus sunt squamosæ; nempe squamis mem branaceis concavis fuscis conflatæ. 4. OcaxA MULTIFLORA. Tab. 3. O. stigmate capitato, floribus pentapetalis, foliis ovali-oblongis acuminalis subintegerrimis, racemis pedicellisque longissimis. Hab. in Sierra Leona Smeathman. B.(v.s.) Cortex griseus; turiones, basi cicatricibus squamarum gemmalium notati; folia ovali-oblonga, utrinque acuta, vix ac ne vix denticulata, breviter petiolata, duriuscula, nervis vix prominulis; rami florales infra folia orti , racemum elon- gatum laxum simplicem gerentes; pedicelli graciles, basi articulati, flore qua- druplo et ultra longiores. Calycis lobi ovales obtusi ; petala caducissima, quinque in unico flore observavi, et ut videtur flava: filamenta persistentia; antheræ ovatæ, filamentis breviores; stylus filiformis, apice subcapitatus. Ovula 8-10; drupæ plurimæ abortivæ, non obovatæ ut in aliis sed mulio latiores quam longiores, undè quasi transversim præ aliis adfixa videntur. Hine species distinclissima et forsan ut genus proprium in posterum consideranda. 5. OcHNA ATRO PURPUREA. ©. stigmate simplici, floribus pentapetalis, foliis ovalibus obtusis serratis. Arbor africana, subrotundo folio margine denticulis acutis aspero, floribus pentapetalis atropurpureis. Put. alm. 41,1. 265;f11; 2: Hab. ad prom. Bonæ spel. B« D'HISTOIRE NATUREMLE | 413 6. OcxxaA crLraATA. Tab. 4. . O.stigmate capitato breviter lobato, floribus pentapetalis, foliis ovali-oblongis ciliato-serratis , racemis brevibus paucifloris. Ochna ciliata. Lam., Dict, 4, p. 511. * Hab. in insula Madagascar. Commerson. du Petit-Tlhouars. F. Frutex foliis caducis, gemmis conicis squamosis, Rosaceas æmulans. Folia ovali-oblonga, acuta, dentibus raris selaceis apice glandulosis ornata, bipollica- ria; petiolus brevis; stipulæ acutissimæ, membranaceæ, caducæ. Flores pallide flavi cum foliis nascentes; racemi breves, 3-6 flori, simplices, basi squamarum vestigiis notati; bracteæ lineares, membranaceæ, caducæ; pedicelli paulo infra medium articulati. Calyx 5-partitus, lobis ovatis, concavis, obtusis. Petala 5- oblonga , caduca, obtusa, calyei circiter æqualia. Stamina 20-25; filamenta fili- formia, persistentia; antheræ filamenti longitudine, caducæ, lineares, apice poro duplici sublaterali dehiscentes. Gynobasis complanata; stylus filiformis, staminibus duplo ferè longior; stigma 8-10 lobis brevissimis subcoadunatis. Pe- ricarpii loculamenta 8-10, interdum plurima abortiva. 7. OCHNA MADAGASCARIENSIS. £ O. stigmate multipartito , floribus pentapetalis, foliis oblongis nitidis subser- ralis, petalis calyci æqualibus. . Hab. in insula Madagascar. Petit-Thouars. F.(v.s.) Arbor habitu Ochnam mauritianam æmulans, sed floribus luteis distincta. Cortex cinereo-fuscus, punctulatus; gemmæ squamosæ ; turiones basi cicalrici- bus gemmalium squamarum notati; stipulæ caducæ, acutæ; folia caduca, oblonga, utrinque attenuata, acutiuscula aut subobtusa, subserrata, juniora membranacea, adulta nitida, coriacea, forma consistentia et magnitudine va- riabilia. Racemi infra folia orti, pedunculo proprio et gemma squamosa caduca instructi, simplices, multiflori; pedicelli graciles flore duplo tripiove longiores, infra medium articulati. Calyeis lobi oblongo-ovales , obtusi, concavi. Petala 5, lutea, caducissima, unguiculata, calycis circiter longitudine. Filamenta tenuia persistentia; antheræ oblongæ, filamentis breviores. Ovula 12, gynobasi .bre- vi adfixa. Stylus filiformis calyce brevior ; stigma multipartitum , lobis gracilibus expansis. Drupæ plurimæ abortivæ, ovatæ, erectæ. 8. Ocuxa maurirraxa. Tab. 5. O. stigmate multipartito, floribus 5-6-petalis, foliis oblongo-ovalibus acutis denticulatis, petalis calyce triplo longioribus. Ochna mauritiana. Lam., Dict. 4, p. 512. * Hab. in insula Mauritii. p.(v.s.) 414 ANNALES DU MUSEUM Frutex elegans, vulgo dictus bois de jasmin, ob florum alborum copiam et cum jasmino similitudinem.- Cortex griseus; gemmæ squamosæ; folia cum floribus nascentia, oblonga aut ovalia, acuta, denticulata, caduca, juniora membranacea, adulta majora coriacea nitidula, Racemi de more generis; pedi- celli longi supra basin articulati. Calycis lobi ovales. Petala alba , caduca, obovata, basi attenuata, calyee duplo triplove longiora,obtusa. Filamenta tenuia, antheris ovatis longiora. Ovarium 5-6 sulcatum ; stylus filiformis, stigmatibus 5-6 paten- tibus terminatus. Drupæ ovatæ. 9. OcuNA PARvIrOLIA. Tab. 19. O. pedunculis unifloris, foliis ovatis serrulatis. O.parvifolia. Vakl. symb. 1, p. 33. Wild. spec. 2, p: 1158. — Evonymus inermis. Forsk. Æo. Arab. 204. Hab. in Arabia felici. p (v.fl.s.) Quoad descriptionem fruticis vide Vahl loc. cit. et iconem huc adjunctam ex ipso Forskalii specimine depromptam et nobis a cel. Horneman communicatam. Quoad florescentiam (ex floris specimine mihi ab amico supra dicto humanissi- mè misso } addo notas sequentes. Pedunculus teres, filiformis, uniflorus, ferè ad basin articulatus, Calycis lobi quinque ovales, suboblongi, obtusi, persistentes, longitudinaliter venosi. Petala nulla aut potius in specimine evanida. Stamina numerosa, hypogyna, filamentis persistentibus, Gynobasis globosa, subdepressa; perigarpii loculamenta 5, quorum 3 evanida; stylus unicus, filiformis, in medie laceratus, undè stigma mihi ignotum. $ IT. Ochnaceæ oligandræ. IL GOMPHIA. Gomphia. Schreb. gen., p. 291. Willd. spec. 2, p. 569. — Jahotapita. P/um. gen., p. 41, t.32.—Ochnæ. sp. Lin.gen. 266. Gærtn. fruct. 1, p. 341, 1. 70,f. 2. — Ouratea. Aubl. guian. 1 ,p.397.— Correia. Fellozo in Ræm. script. lus. et bras. , p-106,t.6, f. 11.— Philomeda. Norog. ex Aub. Petit-Th. sen. mad. , p.17. — Soplisteques. Comm. ined. Can. Calyx 5-partitus. Petala 5; stamina 10, filamentis subnullis, antheris longis pyramidatis erectis, apice poro duplici dehiscentibus. Pericarpii locula- menta 5. Has. Arbores aut frutices ex utriusque orbis regionibus tropicis indigenæ; folia persistentia, nitida, ovalia aut oblonga, serrata aut subintegra; racemi ex apice ramorum folia gerentium orti; stipulæ nunc binæ distinctæ axillares sæpits caducæ, nune in Madagascariensibus speciebus persistentes , intra folia- D'HISTOIRE NATURELLE. 415 ceæ, in unicam coalitæ; florum pedicelli prope basin articulati; flores lutei. Stylus semper apice simplex. Nom. À pougios dens molaris, sic dictus a yougos clavus, quod dens maxillæ clavi instar inseritur, et in nostro genere eodem modo drupæ gynobasi insident. 1. GOMPHIA ZEYLANICA. . G. foliis oblongis utrinque acuminatis subdenticulatis, racemis elongatis, baccis globosis. Ochna zeylanica. Lam. Dict. 4, p. 512. — Ochna squarrosa. Lin. spec. 731, var. æ. — Ochna. Lin. fl. zeyl p.209, var. a. — Jabotapita cinnamomi folio, iloribus spieatis. Burm. fr. zeyl. 1925, t. 56. Hab. in Ceylona. Burman. F.(v.s.) Species distinetissima ramis floralibus basi foliosis et apice in racemos elon- gatos abeuntibus. Folia ovali oblonga, utrinque attenuata, acuta, rarius integra, hine iude denticulis miniatis serrata, quod video in specimine ipso a Burmanno depicto et descripto et in herbario amicissimi Delessert servato. Calyces parvuli. Petala non vidi, verosimiliter caduca ut stamina ipsa. Stigma videtur simplex. Baccæ 5, nitidæ, basi subfalcatæ. Stamina ipsa non vidi, sed ad Gomphiam refero ob racemos terminales basi foliatos, quod nunquam in Ochnis veris reperii , et imprimis ob cicatriculas denas quas in disco hypogyno observavi. Racemus valdè elongatus, hine indè ramulos brevissimos emittens; pedicelli 3-5 in quoque ramulo, ima basi articulati. Süipulæ lanceolatæ, acutissimæ, sublaterales, caducæ. 2. Gompaia pePexDExSs. Tab. 6. G. foliis oblongo-lanceolatis subdentatis utrinque acuminatis, stipulis intra- axillaribus persistentibus, racemis longissimis simplicibus dependentibus. Hab. in insula Madagascar. Petit-Thouars. F,.(v.s.) Frutex ramis cicatricibus squamarum squarrosis; turiones squamis membra- uaceo-scariosis, lanceolatis, magnis, acutissimis onusti; folia alterpa, disticha, stipula supra-axillari persistenté munita, petiolo brevi suffulta, oblongo-lanceolata, decim. longa, 5 centim. lata, nitida, coriacea, utrinque attenuata , margine le- viter et irregulariter dentata. Racemi longissimi, ferè 3-4 decim. adæquantes, simplices, dependentes ; pedunculi graciles, nudi in dimidia parte inferiore ; pe- dicelli breves 2-3 simul nascentes, basi articulati. Gemmæ florales ovatæ:Calycis Jobi ovati, oblusi, persistentes. Petala lutea, obavata, calyce vix longiora. Reliqua de more generis. ( Descr. ex sicco et éx Mss. Petit-Thouars. ) In icone stamina nimis expansa et racemi pedunculus basi nimis adscendens. 3. Gomprra ANGuLATA. Tab. 7. G. foliis rariter serralis brevissimè petiolatis oblongo-suhcuneatis basi angus- rt 416 ANNALES DU MUSÉUM tatis subcordatis, slipulis intra-axillaribus persistentibus, racemi paniculati ramis angulatis, Hab. in insula Madagascar. Petit-Thouars. ( v.s.) Frutex erectus; romi fuscescentes; stipulæ breves, acutæ, basi latæ, persis- tentes intra-axillares. Petioli brevissimi vix ulli; folia 2 decim. longa, oblongo- subcuneata; apice acutiuscula, a medio angustata, basi subcordata, undè ob pelioli brevitatem amplexicaulia primo intuitu videntur, coriacea, margine serraturis raris brevibus acutis onusta, ad basin subintegra. Racemi terminales, erecli, ramosi, paniculati; rami angulati, elongati; ramuli breves 5-6 pedicellos unifloros basi articulatos bracteolis stipatos gerentes. Calveis lobi ovali-oblongi, obtusiusculi. Petala lutea, obovato-cuneata, calyce pauld longiora. Reliqua ut in aliis. ( Descr. ex spec. sicco et notis ineditis a cel. Petit-Thouars communicatis. ) 4. GomuprurA ogrusirozra. Tab. 8. G. foliis lanceolatis integerrimis apice obtusissimis aut emarginatis, hasi aitenuatis, stipulis intra-axillaribus persistentibus, racemi paniculati ramis bre- vibus subangulatis. Gomphia lævigata. Vahl. symb. 2, p. 49. * Filld. spec. 2, p. 570. — Ochna ob- tusifolia. Lam. , Dict. 4, p. 510. * — Vauerome. Flacourt. mad., p. 122, ex herb. Vaill. Hab. in Madagascar. Commerson. F.(v.s.) Nomen Lamarckii retinuietiamsi paulo posterius, cum omnes species habeant folia lævigata et cum Vabhlii species a nostra sit forsan paululum diversa. Cortex cinereus. Folia nitida 6-10 centim. longa , 2-4 lata, reticulatim subner- vosa; stipulæ intra-axillares persistentes et bracteolæ breves acutæ basi latæ. Ra- cemi terminales, ramosi; pedicelli nunc solitarii nunc 2-4 in quoque ramulo_ nascentes, longi, ferè ad basin articulati. Calycis lobi oblongi, subacuti. Petala filamentaque caduca. Pericarpii loculamenta nitida ovato-subfalcata ( ex sicco ): Gemmæ ovato-oblongæ. Calycis lobi oblongi. Petala lutea, obovata, calyce paulo longiora. 5. GOMPHIA MALABARICA. G. foliis ovali-oblongis utrinque acutis denticulatis enerviis nitidis, racemis paniculatis. Puatsjetti. Æheed. mal. 5, p. 103, t. 52. * Hab. cirea Kandenate locis montosis petrosis. Arbuscula 10 pedes alta, sempervirens, bis in anno florens, caudice albicante, cortice rubicundo , ramulis viridibus; folia alterna, g-10 centim. longa, 3 lata, splendentia, amara, nervis lateralibus invisibilibus. Racemi terminales ramosi; D'HISTOIRE NATURELLE. 417 flores lutei, ante explicationem acuminati. Calycis foliola viridia. Stamina noyem? lutea, subcurva. Stylus candidus. Baccæ 5 rubentes, 6. GompniA ANGUSTIFOLIA G. foliis lanceolatis subsessilibus apice serratis utrinque acutis, petalis calyc= longioribus, calyeis lobis subrotundis. Gomphia angustifolia. Z’aAl. symb. 2, p. 40. * ilid. spec. 2, p. 569. Hab. in India orientali. { Vabl.) FH. Folia bipollicaria, venis subtilissimis reticulata , membranacea. Panicula bi- pollicaris. Flores ante explicationem globosi. ( Vahl.) 7. Gompnia GurANENSIS. Tab. 9. G. foliis ovato-oblongis latis subserratis utrinque subobtusis ; baccis globosis, petalis calyce paulo longioribus, floribus confertis. Gomphia guianensis, Rich. Act, soc. hist. nat. par. 1, p. 168.— Ouratea guia- nensis. Aubl. Guian. 1,p. 397, t 152?—Ochnaguianensis. Lam. Dict. 4, p. 511. Hab. in Guiana et in Rio Negro Brasiliæ. p.(v.s.) Icon Aubletii a nostra planta tantum recedit foliis angustioribus acutis, sed interdum folia superiora, quæ sola in icone apparent, hanc formam adipiscunt. Cæterum species primo adspectu distinguitur floribus in panicula confertis. 8. GomPHtA LonNciroztA. Tab. 10. G. foliis lanceolatis acutis basi cordatis vix apice subdentatis longissimis, bac- cis globosis, floribus confertis. Ochna longifolia. Lam. Dict. 4, p. 511. Hab. in Guadalupä. Badier. F5. (v.s.) G. guianensi aMnis habitu et florescentià; sed differt foliis longioribus, acutio- ribus, basi cordatis nec attenuatis. Species pulcherrima. Folia superne, 4-5 decim. longa, 15 centim. lata. Petioli crassi, brevissimi. Flores flavi, in paniculam ter- minalem dispositi. Calycis lobi oblongi, margine membranacei. Petala ovata, obtusa, calyce paulo longiora. Baccæ globosæ, pisi minoris magnitudine. 9. GoMPpHIA casrANEÆroLIA. Tab. 11. G. foliis ovali-oblongis acuminatis serratis, serraturis regularibus acutissimis, floribus confertis. Correia , n. 1. J’ellozo in Ræm. script. lus. et bras, p.106? Hab. in Brasilia. p.(v.s.) . Pulchra species guianensem et longifoliam florescentià æmulans, sed distince- tissima foliis minoribus, ovali-oblongis, basi et imprimis apice acuminatis, per totam ambitum serraturas acutas regulares gerentibus. Cortex cinereus; petioli ultra 1 centim. longi; folia venis impressis notata, coriacea, 1 decim, 418 ANNALES DU MUSÉUM longa, 4 centim. lata. Racemus, compositus paniculatus; rami longi, ramulos brevissimos hinc indè gerentes; bracteæ membranaceæ oblongæ ad ramulos con- fertæ; pedicelli 1-4 in quoque ramulo, flore vix longiores, basi articulati. Calycis lobi ovato-lanceolati, margine membranaceï. Petala obovata calycis lon- gitudine. Stamina caduca. — In icone stamina nimis expansa. 10. GOMPHIA 1LICIFOLIA. G. foliis ovali-oblongis, dentes raros exsertos magnos acuto spinosos margine gerentibus. Û Hab. in Sancto-Domingo. f,.(v.s. in herb. Juss.) Folia oblonga aut subovalia, petiolo brevissimo, dura, coriacea , glaberrima , superne imprimis reticulatim subnervosa, margine dentibus duris remotis mag- nis acuto-spinosis, ut in Aquifolio nune exserlis nunc subevanidis onusta. Racemus terminalis, basi ramosus, pyramidatus; ramuli breves 3-4 flori; pedi- celli basi articulati: Gynobasis obovatus aut truncatus. 11. GOMPHIA JABOTAPITA, G. foliis ovalo-lanceolatis utrinque attenuatis a basi ad apicem serratis, petalis calyce triplo longioribus, baccis receptaculo basi immersis. Gomphia jabotapita. Sswartz. fl. nd. occ. 2, p. 740. Wild. spec. 2, p. 570. — Ochna jabotapita. Lin. spec. 732. Geœærtn. fruct. 1, p.341 ,t 70, f. 92. Lam. Dict. 4,p.511. Zllustr., t. 472, f. 2.— Jabotapita. Marco. bras. 101. — Jabotapita pyra- midato flore luteo, fructu rubro. Plum. amer. 42. Icon. 153. Burm. 147. — Arbor baccifera racemosa brasiliana, bacca trigona prolifera. Rai, hist. 1632. Pison. hist. ind. 166. Hab. in insulis americanis( Pr. ), in Brasilia ( Warcg. Pis. ). B:(vs) Florum pedicelli simplices, infra medium articulati, brevissimi. Arbor cerasi facie, floribus luteis. - 12. GompHiA sQuaAMosA. Tab. 12. G. foliis ovali-lauceolatis utrinque attenuatis subserratis, stipulis basi latis aristato-acutis persistentibus, petalis suborbiculatis calycis longitudine, baccis subglobosis. Hab. in Tabago ? H.(v.s.) Rami sæpius squamis siccis, quæ sunt slipulæ persistentes, apice tecti. Stipulæ binæ, ferè intra-axillares, interdum coalitæ, breves, basi latæ, apice aristalo-acutæ. Folia ovalia, utrinque attenuata, acuta , margine vix subserrata, 2 decim. longa, 5 centim. lata. Panicula terminalis, ramosa, laxa; pedicelli vix 1 centimetri longi- tudine, fere ad basin articulati, simplices aut basi ramosi; flores flavi. Calycis D'HISTOIRE NATURELLE. 419 foliola oblonga subobtusa. Petala breviter unguiculata, orbiculata, calycem paulo superantia. Stamina 10 erecta. Ovarium 5-gonum; stylus simplex. Bacciæ subglobosæ, pisi minoris magnitudine. Habitu aflinis G. jabotapitæ. 13. Gomenta niripa. Tab. 13. GC. Foliis ovato-lanceolatis acuminatis apice serratis, calycibus corollæ æqua- libus, baccis ovatis. Gomphia nitida. Swartz. fl. Ind.occ. 2, p. 739. Fall. symb. 2, p.49.* Wild. spec. 2, p. 570. Hab. in sylvis Jamaicæ{ Swartz. ), St. Thomas. Leudru. Riedlei. F.(v.s.) Specimina mea apprimè respondent descriptionibus Swartzii et Vahlii, etiamsi Vabhlius Willdenowio scripserit suam a Swartziana diversam. 14. GomPHiA ACUMINATA. Tab. 14. *G. Foliis ovali-oblongis abruptè acuminatis a medio ad apicem serralis, ca- lycibus corollæ æqualibus. Hab. in Brasilia. 5.(v.s.) Species valdèe afüinis G. nitidæ sed certo distineta, foliis superne vix lucidis subtus pallidioribus nec nitidissimis concoloribus, ovali - oblongis apice longe et abruptè acuminatis nec ovato-lanceolatis sensim acuminatis, multo magis a medio ad apicem serratis. Racemi paniculati, pice quadam flavescente ut videtur illiniti; bracteæ ante florescentiam caducæ; pedicelli ad basin articulati. Calycis lobi lanceolati acuti. Petala flava obovata calyce paulo longiora. Reliqua ex more generis. Fructum non vidi. 15. GompPura LAURIFOLIA. Tab. 15. G. foliis integerrimis oblongis utrinque acuminalis nitidis subenerviis. Gomphia laurifolia. Sw. fl. Ind. occ. 2, p. 741. * Hab. in montibus Jamaicæ (Swartz) in Cayennä. (Martin), F.(v.s.) Nostra apprime convenit cum descriptione Swartzii, sed habet folia utrinque acuminata apice acuto, nec acuminata apice obtuso ut vult Swartzius. Cel. auctor flores non vidit ; ego in gemmis caracteres genericos confirmavi. 16. GOMPHIA RETICULATA. G. Foliis lanceolato -ohlongis serratis acutis reticulatim nervosis, floribus paniculatis. G. reticulata. Beauv. fl. owar. 2, p.22,t.72. Hab. in Africa propè Oware. Beauvois. 5. (v.s.) Racemi graciles terminales; pedicelli 2-3 aggregati imà basi articulati. Calycis foliola lanceolata acuta. Petala obtusa , calycis longitudine. 420 ANNALES DU MUSEUM 17. GOMPHIA MEXICANA. G. Foliis ovali-lanceolatis serratis basi et apice attenuatis, racemis brevibus confertifloris, petalis orbiculatis unguiculatis calycis longitudine. Gomphia mexicana. Z/umb. et Bonpl. pl. æquin. 2,p.21,t.74.* Hab. in nova Hispania frequens inter Acapulco et Chilpancingo ad littora Oceani australis, 5. D 18. GompuiA PARVIFLORA. Tab. 16. G. foliis integris oblongis utrinque acuminatis acutis, petalis oblongis calyci æqualibus. Hab. in Brasilia. B.(v.s.) Raimi tenues, grisei. Folia alterna , 15-20 centim. longa, 2 centim. lata, superne nilida, vix petiolata, nempè basi-longe attenuata , apice acuminata; vix ac nevix hine indè serrata. Panicula terminalis, laxa. Pedicelli distantes, uniflori ; flores favi, præ aliis specichus parvi. Calycis lobi oblongi acutiusculi margine mem- branacei, Petala oblonga, obtusa, calyei longitudine et ferè latitudine æqualia. Slamina 10, erecta, petalis paulo breviora. Ovarium pentagonum stipitatum. Stylus filiformis; stigma simplex. Fructus ignotus, sed ex ovario nullum adest de genere stirpis dubium. 19. GOMPRIA GRANDIFLORA. Tab. 17. G. foliis integriusculis Janceolatis basi obtusis longe acuminatis, petalis magnis suborbiculatis calyce paulo longioribus. Correia, n. 2. Fellozo in Ræm. script. lus. et bras., p. 106? Hab. in Rio Negro Brasiliæ. F.(v.s.) Cortex cinerascens, in turionibus obscurus. Folia lævigata, petiolo vix 1 centim. longo, lanceolata, vix ac nevix dentata, 8-12 centim. longa, 3-4 lata, basi obtusa nec attenuata, apice acuta longe acuminata. Stipulæ acutæ, saubmem- branaccæ; racemus compositus, terminalis, subebracteatus; pedicelli longi ad basin articulati. Flores flavi ex sicco videntur, aliis majores. Calycis foliola oblonga subacuta, margine magis membranacea. Petala suborbiculata, basi atte- nuata, calyce paululum Aongiora. Antheræ erectæ , crassæ, Receptaculum fructüs obconieum. Loculamenta ( ex immaturo ) ovata. 20. GOMPHIA GLABERRIMA. G. foliis lanceolato-oblongis acutissimis nitidis subenerviis a medio ad apicem sepratis, racemis simplicibus. G. glaberrima. Beauv. fl. owar. 2, p.22, t. 71. Hab, in regno Ovwariensi. Beauvois. F.(v.s.) Frutex elegans affinis G. grandifloræ; flores splendide lutei; racemi simpli- D'HISTOIRE NATURELLT. 4x ces; pedicelli longi , propè basin articulati; calycis lobi oblongi, obtusi ; petala calyce dupld longiora. 21. Gompura CAssiNrroLrA. Tab. 18. G. foliis integriusculis ovatis basi subcordatis apice obtusis, racemo simplici. Hab. in Brasilia. p.(v.s.) Folia nitida, Andromedæ cassinefoliæ foliationem æmulantia, concolora, ju- niora ovala, seniora basi subcordata, 5 centim. longa, 4 lata. Racemus terminalis simplex. Pedicelli solitarii, uniflori, basi articulati. Flores non vidi; receptacu- lum globosum, subdepressum ; loculamenta ovato-oblonga. 22. GoMPHIA cARDIOsPERMA. Tab. 19. G. foliis ovalibus acutis tenuiter serratis, baccis obcordato-bilobis. Ochna cardiosperma. Zam., Dict. 4, p. 511. * | Hab. in paludosis Cayennæ. Richard. 5.( v.s.) Rami cinerei. Folia ovalia, acuta, tenuiter serrata ; veuis pennatim dispositis arcuatis impressis notala, bi aut tripollicaria. Petioli canaliculati, 3 lin. longi. Panicula terminalis, mulliflora. Flores ignoti. Receptaculum fructiferum semi- globosum. Baccæ 5 flavæ, apice bilobæ et obcordatæ, quà fructus formä hæc species ab omnibus differt et forsan novi generis signum præ se fert. III WALKER A. Meesia. Gærtn.1, p.344, non Hedw.— Walkera. Schreb. gen. , p. 150. Car. Calyx 5-partitus. Petala 5. Stamina 5. Pericarpii loculamenta 5. Os. Genus a solo Gærtnero observatum, prioribus multo affine videtur. Dif- fert tantum staminibus quinis, nec non drupis ( baccis ?) obovato-reniformibus, funiculo brevi e basi putaminis oriundo atque medio seminis lateri interiore inserto, coreulo inverso uncinato-rostellato (? ). 1. WALKERA SERRATA. Meesia serrata. Gærtn. fruct. 1, p. 344, t. 790, f. 6. — Tsjocatti. Rheed. hort. - Mal.5, p.95,t.48.— Walkera zeylonensis. Ex Coll. sem. hort. Lugdb.—W alkera serrata./Villd. spec. 1, p. 1145. Hab. in Malabaria (Rheed ) Ceylona ( Coll. Lugd. ). 5. Calycis lobi lanceolati. Petala lanceolata, patentia, calÿce paulo longiora. Sta- mina petalis dimidio breviora. Stylus setaceus, longitudine staminum. Pericar- piarubra, demum fusca, baccata , distantia ; emhryo uncinato-rostellatus. (Gærtn.) Folia alterna; corymbi terminales; flores parvi flavescentes ( Willd.) = À 17. J4 422 ANNALES DU MUSÉUM IV. ELV ASIA. Frucr. Calyx 4-partitus. Petala 4, Stamina 8, filamentis longiusculis, antheris ovatis, per rimas duas dehiscentibus. Pericarpii loculamenta 4. Vrc. Frutex racemis terminalibus, ramosis; foliis ut in Calophyllo pennatim et regulariter venosis. Nom. À Franc. Manoel d’Elvas, Lusitano, qui primus Brasiliæ historiam na- turalem illustravit. Os. Genus adhucdum paulo dubium, cum fructus maturus nondum sit cognitus. 1. EzvasrA cacopuyzLeA. Tab, 20. Hab. in Brasilia. F.(v.s.) Frutex cortice cinerascente, inæquali. Folia alterna, petiolo brevissimo , oblon- ga, apice paululum attenuata, nervo medio subtus lato et complanato, venis lateralibus pennatim et regulariter more Calophylli dispositis, margine integrius- culo aut lente subdenticulato. Stipulæ parvæ, aristato-acuminatæ. Racemi-termi- nales, paniculati, foliis ferè breviores; rami elongati ; pedicelli uniflori, graciles, basi articulati. Flores parvi. Calyx 4-partitus, lobis ovalibus obtusis. Petala 4 oboyata aut cuneata, obtusa, calyce vix.Jongiora. Stamina 8, filamentis gracilibus persistentibus, antheris ovatis. Ovarium quadrituberculatum ; stylus filiformis, longus; stigma simplex , subcapitatum. Fructum non vidi. SIMARUBEÆ, Simarubaceæ. Rich. Anal., p. 21. — Magnoliis et Terebinthaceis A, Juss. — Gruinalium Gen. ZLin. Fnucr. Flores hermaphroditi, aut abortu diclini. Calyx 4-5-partitus, persis- tens. Petala hypogyna, caduca, erecta, numero definito (4-5). Stamina 5-10, disco hypogyno inserta. Ovarium partitum in tot partes quot sunt petala. Stylus uni- eus, filiformis. Pericarpia tot quot petala, disco ( gynobasi ) carnoso articulatim inserta, capsularia, bivalvia, intus dehiscentia, monosperma. Semina exalbu- minosa, corculo inverso; cotyledones duæ erassæ. Vre. Arhores aut frutices e tropicis Noyi Orbis regionibus ortæ, glabræ aut subtomentosæ, cortice amarissimo succo lacteo fœto donatæ. Folia alterna, pin- nata, exstipulata. Arr. Ordo unico verbo a Cl. Richard indicatus, inter Ochnaceas et Rutaceas medius, sed ab utroque merito distinctus ob pericarpia seu potius pericarpii loculamenta discreta , gynobasi carnoso inserta, bivalvia, dehiscentia et semi- nibus exalbuminosis inversis. D'HISTOIRE NATURELLE. 423 QUASSIA. Quassiæ sp. Lin. amæn. 6, p. 421. Gærtn.,t. 90, f. 1. Schreb. gens, p. 288. Willd. spec. 2, p. 567. Lam. IIl., t. 343. Car. Calyx parvus, 5-partitus. Petala 5 erecta, calyce triplo longiora. Flores hermaphroditi. Stamina 10. Filameuta basi interiore squamulà aucta. Stylus simplex. Has. Arbor glabra, foliis impari-pinnatis, petiolis alatis, racemis termina- libus, floribus magnis. 1. QuassrA 4AMAkA, * Q. amara. Lin. supl. 235. Willd. spec. 2, p. 567. Poir. Dict. enc. 6, p. 24. Lam. illustr., t. 343, f. 1. benè. JJoodv. med. bot. 2, p. 215, t. 97, benë. — Quassia. Lin. mat. med. 114. Amæn. acad. 6, p. 421, t.4, rmalè quoad folia. Patris gaz. sal. 1777, n: 41-42. Rosier. Journ. phys. 1777, p. 140. — Nux americana foliis alatis bifidis. Comm. Hort. amst. 1, p. 149, t. 77? Hab. iu Surinamo.( Lin.) p.(v-s.) Folia glabra, subcoriacea, impari-pinnata, foliolis oppositis, sessilibus, petiolo arliculato , alato. Racemi terminales, simplices, erecti ; bracteæ oblongæ, foliaceæ; pedicelli simplices, non articulati, bracteolas minimas 2-3 gerentes. Flores magni, rubicundi. Calyx minimus, 5-partitus, lobis obtusis. Petala 5 erecta, oblonga,subobtusa, 2 centim. longa, 4 millim. lata. Stamina 10, petalorum lon- gitudine, receptaculo inserta; filamenta filiformia, basi interiori in squamas ovatas, villis albis hispidas et ovaria tegentes aucta. Gynobasis etiam in fructu maturo parva, parum carnosa, Capsulæovatæ, nervis anastomosantibus reticulatæ. SIMARUBA. Simarouba. Aubl. Guian. 2, p. 856. — Quassiæ sp. Lin. etc. Car. Flores abortu monoici aut polygami. Calyx parvus, 5-partitus. Petala 5, calyce paulo majora. Stamina 5-10, basi squamulis aucta. Stylus apice partitus. Hs. Arbores foliis abruptè pinnatis, petiolis nudis, foliolis sæpe alternis, racemis terminalibus. 1. SIMARUBA OFFICINALIS. S. floribus monoicis, masculis decandris, sligmate 5-partito, foliis abruptè pinnatis, foliolis alternis subpetiolatis subtus pubescentibus. Quassia simaruba. Lin. suppl. 234. Filld. spec. 2, p.568. Poir. Dict. enc. 6, ° p.25. Lam. illustr., t. 343, f. 2. oodv. med. bof. 2, p. 211, t. 76. — Simarouba. Aubl, act. Paris., 1776. — Simarouba amara. Aubl, Guyan. 2, p. 859, FL *% 24 424 ANNALES DU MUSÉUM t. 331, 332. — Barrere, France equin., p. 50. Desmarchais, Voy. en Guinee et Cayenne, 2, p. 124. Bancroft. nat. hist, of Guiana, p. 8#. Wright. trans, reg. soc. Edimb. 2, p. 73. Hab. in locis arenosis Cayenæ et Guianæ Aubler, Carolinæ (Lin.)? Santi Dominici Aubles : Jamaicæ (Lin.). F.(v.s.) 2. SIMARUBA GIAUCA. S. floribus monoicis (masculis decandris ? }, stigmate 5 partito, foliis abruptè pinoatis, foliolis alternis subpetiolatis subtus glabris glaucis. Hab. in Havanæ maritimis, Ælumbold et Bonpland, et probabiliter in aliis Americæ meridionalis insularum locis. F. A Simarouba cayenensi, quacum sæpius confusa adest in descriplionibus et herbariis, differt foliolis subtus glabris, albo-glaucis, nec villis brevibus pubes- centibus. 3. SIMARUBA EXCELSA. S. floribus polygamis pentandris paniculatis, stigmate trifido, foliis impari- pinnatis, foliolis oppositis petiolatis. Quassia excelsa. Swartz. Act. Holm. 1788, p. 302, t.8, Prod. 67, FT. Ind. occid, 2, p. 742. * Wüilld. spec. 2, p. 569. Poir. Dict. enc. 6,p. 24.— Quassia polygama. Wright. Act. Edimb. 3. Lund. skrivter af nat. hist, Slærkapat. 1, p. 2 et 68. Hab, in sylvis sabmontosis Jamaicæ et Caribæarum. ( Sw.) B. SIMABA. Simaba. Aubl. Guian. 1, p. 400. Juss. gen. 373. — Zwingera. ScAreb. gen. n, 1752. Car. Stamina 8-10, basi squamis destituta. Ons. Genus Quassiæ prosimum habitu, corlice amaro et characteribus, cum eo forsan conjungendum. Differt tantum defectw squamarum floris , et pericarpiis magis siccis, et inflorescentia axillari. Jussiæus incautè retulit ad Terebin- thaceas. ! 1. SIMABA GUIANENSIS. Simaba guianensis. Aubl. Guian. 1, p. 400, t. 153. * Pers. ench. 1, p. 465. — Zwingera amara. Wild. spec. 2, p. 569. Hab. in sylvis Guianæ dictis Orapui (Aubl.) F. Frutex orgyalis et ultra. Folia impari - pinnata, foliolis 3 aut 5 oblongis, acu- minatis autemarginatis, integerrimis, venosis. Pedunculi triflori, axillares. Flores albidi; floraum partes quinarii aut quaternarii. Petala ovali-lanceolata, calyce , e Pr " . “ [I | _ LL . _— —— — ne Ve 4 : > D A fl: 2 ' L : % A e 2 s 5 = 3 » LE + . [ f M _ ; © A : 7/7 EYE OCANA SALAFT ONE Jab.Z. Fferan del * VAE Zom 17. OCANA nihida Tab 1. Fran del KA Jéran del OCANA multflora Zab./1. Jom 17. PL KNUY >» $ Fran dif OCANA chate. Tab... ù N7 #2 OCANA maurihana Tab. T7. PI A Jon 27. HN dr nn eo pe ù ER Î — é a) Om CO) SA) en acr CSL EANUSS EU Me AR OCANA maurikana Tab. T À Zom Are Lu urpin del. COMPHLA dpendens. Tab. PI. ont -17. Zarpés dd COMPHIA angulate. Tab JU. { 42 A e “ F À ge ON AT. | ss) L AS Lui NE L ® NS . ea ] \y ÿ “4 SNL ® <«® Te 4 ER NU ER 70 de /p COHIE< #4 UD PA | 7 RS SS NN \ 7 SA } | AA cd / / em dtt COMPHIA quiariensis Tab. IX. ’ di F. +" 408 ' p, - = . LL . » | , k A : . 7 SU. L = 6 5 Fe " | : . . n ei ' ‘ j : d à _ . à . - ra ' , LU à # + } LL Li » n “ . Y « . : LL < L n 1 s K L2 : ; | : F Q . Ï LA { 1 i { | Î Co 1 ge = p L $h Fan : Û x 2 : vod + ; ET È FU } ‘ à 2 : AT, & L | | ’ \ =. 1 P { < Le s | 2 D » “ mr, A | " 1 _ .. . 1 : : .. À “ > ES — . r CL . L] L p IL À ‘ Û Le. Li L * Li = \ à , » > # / . L . «1 y cs 2 LL L _ $ um" à : : Pa = . ce : a HT L * «à : ; = = . - Pl L ST # Tr A is 0 e NE l à NE Lé ; ns à un É Le = arr À - î ; É : &d s 4 ÿ # < ne à F. d . 4 d nr Ep L . LA ANNE COMPHIA bngfôlir. Tab. X LDE2 2 S PF ND , C7 N SN RY ÿ AL Sal PSS NT XX u we A | SY | K AS ( NL 27 | 1 UN Ÿ o KZ UN VS MS Ÿ SEINE * JG \ 4 NN VIRE MS WE ge NRNU VÉRQUV TE . NE DE NC ) () NE VX AS SS K SALE ND) © ASS è D) g, KR FIL? À 1@) = HD (Z QT y | AN Z ; \ SU CEù N) 9 RITES à > Turpin delt COMPHILA caslaneæ fol. Tab. X1. PS \ EL COMPHIL squamosa.. Tab: X11. Tan del! D \/ | (te HE & Cr CA "NX Lux * it At Fr Zom.. 27: k NS pur EL , 4 DT EVA X AT 4 IN 1 Na Poibar del GOMPIIIA acuranatz Tab. X1T. ont ‘27: PL 24 ISLE riei Q NS Fe / s Va | PTAL AL K Ave) Fran delt =: - CGOMPHIA laurfèla. Tab:AF. ANSS VU aù \ Tr \er2 } NS 1 NE N | S 1 Poiteau del COMPHIA L grandflora . Zabë.XV11. # ©72E : TR PL ® 0 | Sin tie Jap del COMPTA cassinefola . Tab. XT711. LL CE, ; a \ . LE : De + Ci . ï î L À ' CE : J À . . = #0 à Q » * l- + \ | r : Le r - : le Æ Ÿ « ‘ s 0 . ol , « « cd # h 2 Co . = » L 0] * # t n as : « * \ L a + # Las ri \ L - ( . À [' D à 4 " , Pau x } : { « : ; L “ l s ù Fr " ’ + : “ os : : , “ u ‘ A LP — PL Fe C9) re Q Font. 17: C2 ec Ne c& Figz. COMPH1IA car diosperma . Fig 2 OCHNA parvifè la. Tab. X IX. del /0/n.. 17. Poitou dl ELVASIA calophyllea. Tab XX. ‘4 D'HISTOIRE NATURELLE.* 425 multo longiora. Filamenta basi villosa. Stigma 4-5 fidum. Pericarpia flava ovalia. (Aubl.) ICONUM EXPLICATIO GENERALIS. _N. B. Plantæ omnes ex sicco et magnitudine naturali depictæ suut? Litteræ minusculæ partibus segregatis adjectæ indicant partem magnitudine uaturali delineatam; majusculæ magnitudine auctam. Eædem litteræ in omnibus tabulis easdem designant partes, nempe : a. Flos integer intüs visus. a’. Idem extüs. D. Calyx intüs. db’. Calyx extuüs. c. Flos petalis delapsis. d. Idem staminibus delapsis. . e. Idem staminibus petalisque delapsis. f: Idem staminibus delapsis et calycibus avulsis. £g. Petalum segregatum. A. Stamen. h. Stamen anthera delapsa. Pistillum. &. Gynobasis. | 1. Fructus integer calyce avulso. m. Idem calyce persistente. . n. Calyx cum gynobasi loculamentis delapsis. n. Gynobasis loculamentis delapsis. o. Fructüs loculamentum segregatum. p. Idem longitudinaliter sectum ut seminis insertio videatur. g. Idem transversè sectum ut cotyledones videantur. r. Semen. s. Corculum cum cotyledonibus duabus. t Süpula. 426 ANNALES DU MUSEUM DE L’ODORAT, ET DES ORGANES QUI PAROISSENT EN ÊTRE LE SIÉGE, CHEZ LES ORTHOPTÈRES. PAR MARCEL DE SERRES. O N ne peut guère nier que les insectes n'aient le sentiment de l’odorat : e’est même, à ce qu'il paroït, à cette sensation que diverses espèces, soit carnassières, soit herbivores, doi- vent de pouvoir se guider dans le choix de leurs alimens. Cette sensation semble seulement être plus délicate dans les espèces carnassières, puisqu'on les voit attirées à de très- grandes distances par l'odeur des corps en putréfaction, ou souvent trompées par l'odeur de certaines fleurs, comme par exemple, de celle de l'arwmn dracunculus. Les faits qui démontrent ce que nous avançons sont si connus, qu'il nous paroît superflu de les citer ici; mais pour en citer ceperdant des exemples pris dans l’ordre d'insectes dont nous nous occupons, nous ferons mention de la finesse de lodorat que les naturalistes ont reconnu aux Ülattes et aux forficules. Ues seuls faits indiquent que les insectes ont la sensation de l'odorat; mais s'il est facile de reconnoître l'existence de cette sensation chez cet ordre d'animaux invertébrés, il n’en est pas de mème pour en reconnoître le siége. D'HISTOIRE NATURELLE, 427 7 Dans nos recherches anatomiques sur les organes des sens des insectes, nous avons cherché à reconnoïtre quel pouvoit être l'organe de l’odorat chez cet ordre d'animaux, et comme ces recherches nous ont fait naître des doutes sur la position que l’on a donnée à cet organe, nous nous empressons de les soumettre au jugement des anatomistes. On n’a guère émis que deux opinions sur le siége de l’or- gane de l’odorat des insectes; le plus grand nombre des natu- ralistes modernes a pensé qu'il devoit résider dans les ou- vertures extérieures des trachées, et ce n’est qu'un très-petit nombre qui a cru que les antennes pouvoïent en être le siége. La première opinion soutenue par les plus habiles anato- mistes, plus conforme à cette idée vraie que les animaux qui respirent l'air ont l'organe de l'odorat placé à l'entrée des organes de la respiration, quoique beaucoup plus probable que la seconde, présente cependant quelques difficultés, qui peuvent faire douter qu'elle soit bien fondée. En effet, les sensations sont en général perçues, à l'excep- tion du tact, dans des organes peu nombreux , et si l’on ad- met que la sensation de l’odorat s'opère par les trachées, il faut aussi admettre qu’elle s'exerce par toutes celles qui com- muniquent d’une manière immédiate avec l'air extérieur. Ce- pendant le nombre de ces ouvertures est si considérable qu'il est difficile de l’admettre; nous ajouterons mème que le nom- bre de ces ouvertures est bien plus nombreux qu’on ne l'a cru jusqu'à présent, ainsi que nous le prouverons en décri- vant l’appareil si compliqué et si admirable des organes res- piratoires des insectes. On ne voit pas trop en effet que la sen- sation de l’odorat demande une aussi grande complication 425 ANNALES DU MUSEUM de moyens. D'ailleurs ces ouvertures sont pour la plupart si éloignées de la bouche, que l’on ne conçoit pas trop comment l'organe de l’odorat pourroit servir aux insectes pour recon- noitre leurs alimens, et cependant c’est là le but le plus essen- liel que cet organe ait à remplir. En outre le sentiment paroit résider dans les nerfs, au moins dans les animaux qui en sont pourvus, et si les trachées devoient servir à exercer une sen- sation, il devroit ce semble y avoir des nerfs qui s’y rendis- sent. Cependant malgré lexamen le plus scrupuleux, et quoi- que j'aie pu suivre des nerfs d’une finesse extrème , comme sont ceux de l'organe du goût, et des organes masticateurs, je n’aijamais pu y en rencontrer, On pourroit remarquer que le bord des ouvertures des trachées paroït assez sensible, et que pour si peu qu'on irrite les parties environnantes elles se contractent presque toujours; cet effet paroit du à l’état de tension dans lequel les fibres musculaires abdominales maintiennent la peau de labdomen vers les points où se trouvent l'ouverture des trachées, car si l’on irrite les trachées elles-mêmes on ne voit pas qu'elles jouissent d’une grande sensibilité. . Si les trachées étoient les organes de l’odorat, les genres qui présentent un appareil pneumatique très-développé, comme, par exemple, les gryllus de Fabricius (acrydium de M. Latreille ), devroient avoir lodorat le plus fin, et cepen- dant aucune observation ne le prouve. Cependant on a cru pouvoir remarquer en faveur de cette opmion que certains genres qui sembloient exceller par l'odorat, avoient aussi des vésicules nombreuses et considérables, comme les scara- bés, les mouches et les abeïlles; mais toute cette complication D'HISTOIRE NATURELLE. 429 de l'appareil respiratoire dépend plutôt d’autres causes aux- quelles on a, ce me semble, fait jusqu'ici peu d'attention. L'air est chez les insectes le seul fluide qui ait une espèce de circulation, aussi l'appareil respiratoire est-il chez cet ordre d'animaux invertébrés, toujours en rapport avec l’éner- ge de leurs forces motrices, ainsi qu'avec la contractilité plus ou moins grande de leurs muscles. En considérant ce même objet sous un point de vue encore plus général, il semble que l'air est chez cet ordre d'animaux la cause de la force de leurs mouvemens, de leur vitesse d'action, de la rapidité de leur digestion, comme il l’est de la finesse des sens, de la violence des passions des animaux à sang rouge qui consom- ment le plus d'air, c'est-à-dire, des oiseaux. Il semble, en effet, que sous ce rapport les insectes sont parmi les animaux invertébrés, ce que sont les oiseaux parmi les animaux ver- tébrés. Ainsi, si certains genres présentent un appareil respiratoire très-compliqué, et un appareil de poches pneumatiques d'un grand volume, en sorte que leur corps peut être regardé comme un grand réservoir d'air, ce n’est point parce qu'ils présentent leur odorat plus perfectionné, mais bién parce que devant franchir de grands espaces, l'énergie de leurs forces motrices devoient être aussi en rapport avec l’action qu’elles devoient pouvoir exercer. Ainsi, par exemple, les gryllus de Fabricius (acrydium de Geoffroy ), fameux par leurs migrations lointaines, sont aussi de tous les insectes ceux qui offrent l'appareil de poches pneumatiques le plus com- pliqué. Mais cet appareil devient mème dans les espèces du même genre beaucoup moins considérable, lorsqu'elles sont 17: 55 30 ANNALES DU MUSÉUM privées d’ailes; c’est ce qu'on peut remarquer en comparant l'appareil pneumatique du gryllus migratorius avec le gry£ lus pedestris qui est toujours aptère. L'air joue même encore chez les insectes, comme chez les oiseaux, un rôle secondaire, c'est-à-dire, qu’en remplissant les poches pneumatiques, il rend le corps de l’insecte spécifiquement plus léger et facilite par conséquent son ascension. Nous observerons en outre que les trachées semblent en quelque sorte chez les insectes remplacer les vaisseaux vas- culaires des animaux à sang rouge, et que toutes les parties qui offrent chez les animaux à sang rouge une grande quan- üté de vaisseaux vasculaires, sont aussi celles qui chez les insectes recoivent le plus grand nombre de trachées. Nous espérons mettre ce fait hors de doute dans notre travail sur les trachées, mais maintenant nous nous bornerons à en citer pour preuve les tuniques du tube intestinal, la choroïde, et les muscles qui produisent une grande action, eomme sont par exemple les muscles moteurs des ailes et des pattes. Il paroït même au sujet des muscles que leur contractilité et leur force motrice sont toujours en rapport avec le nombre des trachées qu'ils recoivent, et ce rapport est mème bien plus direct que relativement aux nerfs qui s’y rendent. Ces derniers étant plus nombreux et ayant une prépondérance plus marquée dans les organes qui ont une grande sensibilité, ce qu'on peut chserver d’une manière bien remarquable dans les muscles adducteurs des mandibules et dans les ex- tenseurs des pattes qui doivent exécuter des sauts assez pro- longés. s , Il en est donc des trachées chez les insectes, comme des D'HISTOIRE NATURELLE. 435 vaisseaux vasculaires chez les animaux à sang rouge, qu'on observe toujours en rapport avee le degré de contractilité et de force de leurs muscles. Cette contractilité est beaucoup moins évidente, en les comparant avec les nerfs que ces parties reçoivent; en effet, les nerfs sont en si petit nombre dans certains muscles d'animaux vertébrés, qu'on avoit même douté que certains muscles involontaires, comme le cœur par exemple, en présentassent dans leur tissu. Les trachées paroïissant des parties entièrement privées de nerfs et dans lesquelles il n'y en a aucun qui s’y rende di- rectement, et comme il est assez difficile de concevoir qu'une sensation s'effectue sans qu'elle soit transmise à un centre commun par les organes, commetles nerfs destinés à l’effec- tuer, on peut, ce me semble, douter avec fondement que les trachées soient l'organe de l’odorat chez les insectes. Avant de décrire l'organe qui nous a paru pouvoir être chez les Grthoptères celui de l’odorat, nous ferons connoître lopinion de MM. Latreille et Jurine (1) qui tend à faire regarder les antennes comme le siége de cette sensation. La preuve que le premier de ces naturalistes rapporte en faveur de son opinion seroit assez forte, si elle étoit généralement vraie, c'est l’état de stupeur,dans lequel sont tombés les in- sectes auxquels il avoit arraché les antennes. Malgré toutes les expériences que jai faites sur un assez grand nombre d'individus, soit carnassiers, soit herbivores, je n'ai jamais observé qu'ils parussent en être aflectés. Les uns et les autres (1) M. Huber de Genève paroit croire que les antennes sont à la fois les organes du tact et de l’odorat. Jurine, Zn#rod., p. 8 et 9. ( Nouvelle méthode de classer les Hyménoptères.) Ge 432 ANNALES DU MUSÉUM prenoient leur nourriture comme s'ils n'avoient été privés d'aucune de leurs parties et remplissoient toutes leurs fonc- tions comme auparavant. J'ai dù à cette privation des antennes que j'avois opérées sur un grand nombre d'individus, Foccasion de m'éclairer sur ces parties remarquables. Une quinzaine de jours après avoir arraché les antennes à un gryllus lineola, je le portai subitement à la clarté d’une lampe très-vive, et dès qu'il aperçut la clarté, il déploya ses ailes pour voler, mais arrêté par le verre du vase dans lequel il étoit placé, il retomba dans le fond de ce même vase. Bientôt après, toujours frappé par la clarté, il voulut reprendre son vol, mais de nouveau arrêté par Fobstacle qui étoit devant lui, il y portàt ses deux premières pattes, le täta à plusieurs reprises avec une sorte d'attention, et ne voulut plus ensuite reprendre son vol, quoique j'augmentai de beaucoup la clarté dont il étoit frappé. Ce fait, qui pourroit au premier aperçu paroître en quelque sorte indifférent, est une preuve assez directe de l’usage des antennes, car elles auroient pu, si l’insecte n’en avoit pas été privé, l’éclairer sur l'obstacle que le verre présentoit à son vol, ce que les tarses lui ont ensuite indiqué. On peut se convaincre facilement de la vérité de ce que nous avançons: pour cela on n'a qu'à mettre un insecte quelconque dans un vase un peu élevé et recouvert d’un verre, tant que l'in- secte le touchera avec ses antennes, il ne tentera jamais ni de voler ni de s’élancer, le tact pouvant seul alors l’éclairer sur l'obstacle qu'il a devant lui. Le naturaliste que nous avons déjà cité ajoute que si les antennes présentoient un tissu ayant beaucoup de nerfs, D'HISTOIRE NATURELLE. 433 pourquoi ne supposeroit-on pas que ce tissu est olfactif? Mais l'anatomie de ces parties prouve que les antennes ne reçoivent jamais qu'un seul nerf qui lui est fourni le plus souvent par la quatrième paire qui part du ganglion supérieur ou du cerveau etavec une trachée ; ce sont les seuls vaisseaux qu'on observe dans cet organe. Il est même à remarquer que. ce nerf, qui est le plus souvent cylindrique, ne donne que très-peu de ramifications, et qu'il va se terminer sans s'épa- nouir beaucoup sur la membrane molle de l'extrémité des antennes. On peut se convaincre facilement qu'il n'y a qu'un seul nerf pour chaque antenne, en üraillant un peu par côté le cerveau, de cette manière on voit distinctement le nerf qui se redresse, et qui reste un peu libre avant d'entrer dans la cavité de l’antenne. La grande mobilité des antennes, la force des muscles des- tinés à les mouvoir, leur position toujours en avant et presque toujours au sommet de la tête semblent nous éclairer sur leurs usages. I paroit en effet que les antennes sont des or- ganes du tact destinés à éclairer l'insecte sur l'obstacle qu'il peut rencontrer dans. sa marche, tandis que les tarses pa- roissent dans de certaines familles propres à éclairer les in- sectes sur les formes des corps. Quant aux formes variées que présentent leurs antennes, elles paroiïssent dépendre de certaines considérations que nous développerons en traitant en particulier de l'usage de ces parties. Enfin, si les antennes (x) étoient le siége de lodorat elles (1) I faut bien remarquer que tout ce que nous disons des divers organes dont nous parlons dans ce Mémoire, ne s'applique qu'aux organes des Orthoptères, et 434 ANNALES DU MUSÉUM communiqueroient d’une manière immédiate avec l'air ex- térieur ou du moins offriroient une espèce de réservoir d'air dans leur intérieur. Leur disposition s'oppose entièrement qu'il en soit ainsi, car plusieurs espèces et même des genres entiers offrent leurs antennes à peine de la largeur d’un fil. D'ailleurs elles sont revêtues d’une enveloppe trop épaisse pour être assez poreuse pour laisser pénétrer l'air à travers leur tissu, et elles n’en recoivent guère d'autre que celui qui leur est apporté par la seule trachée qui s’y rend sans jamais s'y dilater. Enfin, le nerf qui se rend dans les antennes s'y étend en ligne droite pour se terminer sur la membrane plus molle de leur dernier article, et sans y donner des ramifica- tions d’une manière sensible. M. Latreille à fondé principalement son opinion sur ce que généralement les mâles avoient les antennes plus déve- loppées que les femelles. Cette disposition pourroit être fa- vorable pour recevoir plus facilement l'impression des corps odorans flottans dans l'air, si les antennes pouvoient donner accès à l'air dans leur intérieur. Mais leurs membranes au lieu de devenir molles et poreuses sont alors le plus souvent formées par une substance coriacée et dure, ou recouvertes par un duvet très-épais ou par de petites écailles qui les ta- pissent presque entièrement. Les formes plus larges des an- tennes des males ne paroiïssent point avoir aucun rapport avec la finesse qu'on peut, si l’on veut, supposer dans leur odorat, mais dépend le plus souvent du genre de vie de lespèce les dissections que nous avons faites des insectes des autres familles nous ont déjà fait reconnoître tant de différences, qu'il se pourrait que ce qui fut vrai pour une famille ne le fut pas pour l’autre. D'HISTOIRE NATURELLE. 435 mème. C'est sous ce rapport que l’on peut concevoir comment les formes des antennes devoient être si variées; paurquoi les geotrupes , les ateuchus, les Lister, etc., devoient avoir leurs antennes courtes, lamelleuses et faciles à reployer: enfin pourquoi la famille des capricornes et celle des locustaires devoient avoir au contraire des antennes très-allongées, etc. Ceux qui ont regardé les antennes comme l'organe de lodorat chez les insectes ont avancé pour preuve de leur Opinion, qu'en mutilant ces parties on en voyoit sortir une liqueur, ce qui indiquoit qu'elles étoient creuses. Ce fait exact, ne semble absolument rien prouver, car toutes les parties quelconques d’un insecte qu'on mutile laissent suinter une liqueur analogue à la Iymphe par ses propriétés chimi- ques, tout comme celles d’un animal vertébré laissent suinter un peu de sang. La lymphe augmentée sans cesse par le chyle, est chez les insectes ce qu'est le sang dans les animaux ver- tébrés, et aussi pour empêcher de confondre cette humeur à celle nommée lymphe dans un autre ordre d'animaux, nous proposerons dans notre travail général sur les fonctions des insectes, de la désigner sous le nom de reusts. Plusieurs naturalistes ont pensé que les palpes pourroient bien être l'organe de l’odorat, et à cause de la conformation de ces parties dans l’ordre des Orthoptères, nous regardons cette opinion comme assez probable, quoique ce soit celle à laquelle on a fait le moins d'attention. Seulement il est cer- tain que presque tous les observateurs ont remarqué qu'avant que les insectes se déterminent à prendre la nourriture qui leur est offerte, ils y portent leurs palpes, pour reconnoitre apparemment par leur odeur, s'ils peuvent leur convenir. 436 ANNALES DU MUSÉUM Quelques-uns trompés même par cette observation avoient cru que ces-parties pourroient bien être aussi l'organe du goût, mais il est évident que cette sensation ne peut guère s'opérer que lorsque l'aliment est déja dans la bouche. D'ailleurs nous prouverons plus tard que cette sensation s’o- père dans certains ordres d'insectes par un organe en quelque sorte analogue à ce qu'on a appelé langue dans les grands animaux , organe qui offre en effet un appareil de muscles assez compliqué, toujours au moins une paire de nerfs, et enfin des villosités nombreuses qui le recouvrent, afin d'ar- rèter plus long-temps dans la bouche les alimens triturés par l'action des dents des mandibules. - Les palpes, dans l’ordre d'insectes dont nous nous occu- pons, ne peuvent servir nullement à la mastication; leur position au dehors de la bouche, leur peu de mobilité n'ayant guère qu'un léger mouvement d'extension qui leur soit propre, empêche de les considérer comme des organes du tact, et s'ils transmettent cette-sensation, ils rentrent en cela dans cette considération vraie en général, que le tact est partout. Mais pour faire concevoir l'usage des palpes, nous allons les décrire avec détail. Les palpes (dans l’ordre des Orthoptères (1) ) sont des parties articulées et mobiles, soit par un mouvement propre, (1) Nous observerons que tout ce que nous disons des palpes se rapporte seu- lement à ceux des Orthoptères, et que non-seulement ce qu’on a appelé ainsi dans d’autres ordres d'insectes n’ont pas les mêmes usages, puisque souvent ils n’ont pas même les moindres rapports avec ceux-ci dans leurs conformations; aussi pro- bablement serons nous obligés de créer des noms particuliers pour éviter l’espèce de confusion qui règne daus la distinction que l’on doit faire de ces parties. ; D'HISTOIRE NATURELLE. 437 comme celui d'extension, soit par un mouvement d'abduc- üon et d’adduction qui leur est communiqué par les mem- branes des mâchoires ou de la lèvre sur laquelle ils sont attachés. Ces partiessont très-variables quant à leur longueur, parce qu'effectivement elle paroît fort peu importante pour les fonctions qu'elles ont à remplir. Elles sont toujours pla- cées ou sur les mâchoires ou sur la lèvre inférieure au dehors et près de la bouche, pouvant ainsi facilement servir à l'in- secte à reconnoitre par l'odeur les corps qui peuvent lui convenir pour aliment. Ces parties sont formées à leur base et à l'extérieur par une substance assez dure, et en quelque sorte analogue à la membrane coriacée qui recouvre les autres parues de l’insecte. Mais la membrane qui forme lextrémité de leur dernier artucle est une membrane molle vésiculeuse, et comme eri- blée par un très-grand nombre d'ouvertures destinées pro- bablement à donner accès à l'air extérieur dans l’intérieur du palpe. C’est sur cette membrane vésiculeuse que se ré- pandent les ramifications des deux nerfs qui se rendent dans les palpes. Cette membrane d’une nature bien différente de celle qui recouvre les autres parties, y est disposée en quel- que sorte comme une espèce de boutoñ très-convexe en dehors et concave en dedans, ou présentant quelquefois une disposition inverse. Si l’on fend les palpes longitudinalement, on observe dans leur intérieur deux nerfs qui se divisent à leurs extrémités en un très-grand nombre de filets qui vont se répandre sur la membrane vésiculeuse de leur dernier article. Probable- ment ils donnent à la membrane vésiculeuse la sensibilité Te 56 438 ANNALES DU MUSÉUM convenable pour qu'elle puisse être affectée par l'impression des corps odorans qui amenés avec l'air flottent dans la ca- vité qu'elle recouvre. Ces nerfs peuvent peut-être transmettre ensuite au cerveau la sensation qu'ils ont perçue, en sorte que s’il en étoit ainsi on pourroit en quelque sorte regarder ces nerfs comme de véritables nerfs olfactifs. Ces deux nerfs sont fournis, l’un par la cinquième paire qui part des faces inférieures du cerveau, et l’autre par la première paire des faces latérales et supérieures du premier ganglion situé dans la tête : entre ces deux nerfs dont la grosseur varie beaucoup suivant les genres (les locusta les offrent assez gros ainsi que les gryllus, les derniers cependant un peu moins), on observe une trachée qui avant d'arriver à la membrane vésiculeuse, commence par former une poche pneumatique qui se déve- loppe entièrement lorsqu'elle arrive dans la cavité du palpe. De cette poche pneumatique partent des ramifications nom- breuses de trachées qui vont se répandre et se distribuer dans l'intérieur de la cavité du palpe, et y verser l'air qu'elles contiennent, Ces trachées communiquent peut-être avec l'air extérieur par des trachées qui vont s'ouvrir dans la bouche, ce dont nous n'avons pu nous assurer encore d’une manière bien certaine; mais toujours elles peuvent le recevoir par une ouverture située à la partie supérieure du corcelet, et qui communique directement avec l'air extérieur. Dans la supposition que l'air versé par les trachées dans la cavité des palpes fut apporté par la trachée qui communique avec l'air extérieur par l'ouverture du corcelet, il est plus que probable qu'il y arrive auparavant d’être décomposé, puis- qu'il s’y rend directement. Cette disposition est bien évidente D'HISTOIRE NATURELLE. 439 dans les #antes ; mais si, comme je le souconne (n’osant pas encore l’assurer }, les trachées qui s'ouvrent dans la bouche versent l'air dans la grosse trachée des palpes, on ne pourroït plus avoir le moindre doute sur ce point important. Nous avons mème observé dans certaines espèces un mécanisme parüculier qui nous paroît très-propre à rendre la commu- nication continuelle des palpes avec l'air'extérieur. Nous dé- crirons ce petit mécanisme composé d'une ouverture et de deux pièces mobiles mues par un appareil musculaire paru- culier, dans un second mémoire sur l’odorat des Orthoptères, où nous rapporterons quelques expériences entreprises dans le but de mieux éclaircir encore l'usage des palpes. La poche pneumatique que forme la grosse trachée des palpes est plus où moins développée suivant les genres; les gryllus les présentent plus développées que les /ocusta et les m#antes. Enfin on observe que la membrane vésiculeuse du dernier article des palpes est toujours humide par sa partie interne et paroit douée d’une grande sensibilité. Elle est en outre toujours gonflée et probablement par Pair qui y afilue, soit par les ouvertures dont nous avons parlé, soit par celui qui y est apporté par la grosse trachée qui va s'y distribuer après y avoir formé une espèce de poche pneu- matique. On peut mème facilement juger que ce gonflement est en grande partie occasionné par l'air, parce qu’en apla- tissant les palpes avec un instrument quelconque, on ebserve qu'après que de nouvelles inspirations ont fait afiluer Pair dans ces parties, elles se gonflent peu à peu et redeviennent au point où elles étoient d’abord. Les palpes ne servent nullement aux Orthoptères en au- BG * J 4/40 ANNALES DU MUSÉUM cune manière à amener ni à opérer aucune action sur les ali- mens, si ce nest celle de les palper, de les flairer pour en reconnoitre apparemment les qualités par celle de leur odeur. Cette considération les sépare, dans l’ordre dont nous nous occupons, des galètes qu'on avoit voulu regarder comme des palpes non articulés. En effet, les galètes ne paroiïssent guères avoir d'autre usage que celui de ramener et de rap- procher les alimens vers les màchoires, afin qu'ils puissent subir ensuite l’action triturante des mandibules.= D'après ce que nous venons de rapporter sur l’organisa- üon des palpes, on pourroit peut-être en apprécier les usages. La membrane vésiculeuse de leurs derniers articles ne pour- roit-elle pas, à cause de sa nature molle et humide intérieu- rement et des nombreux filets qui s’y répandent, être affectée par l'impression des corps odorans mêlés avec l'air qui y arrive directement, soit par leurs ouvertures propres, soit encore par la grosse trachée et les ramifications nombreuses qu'elle fournit. Si les filets nombreux qui se distribuent sur la membrane poreuse du dernier article des palpes peuvent rendre le tissu de cette membrane olfactif, on pourroit con- cevoir que la sensation de l'odorat püt s'effectuer puisque l'air y étant sans cesse renouvelé pourroit par son action ébranler les fibriles nerveuses qui transmettroïent ensuite au cerveau l'effet de limpression qu'elles auroient éprouvée. Nous n’osons cependant proposer encore cette opinion qu'avec beaucoup de doutes, et nous ne la regarderons que comme très-probable, lorsque nous aurons terminé les expériences que nous tentons à ce sujet. La discussion que nous nous sommes proposé d'éclaireir est d'autant plus diflicile, que ni Le D'HISTOIRE NATURELLE. hr la comparaison ni l'analogie ne peuvent être d'aucun secours pour juger de l'usage d’un organe chez les insectes, et surtout lorsqu'il s’agit des organes des sens. C’est même ce qui nous empèche de décrire encore ce’ que nous avons cru recon- noître dans trois genres différens pour pouvoir être un organe de l’ouie. Nous ajouterons enfin que les insectes bien différens de la plupart des animaux qui respirent l'air, le respirent non par un seul point de leur corps, mais bien par une infinité de parties; ainsi il y entre par la bouche, par le corcelet, par la poitrine et enfin par l'abdomen. Les palpes ayant donc de deux manières une communication avec l'air extérieur, l'opinion qui y établit le siége de l’odorat ne contredit pas cet axiôme, vrai en général, que les animaux qui respirent l'air ont l’or- gane de l'odorat placé à l'entrée de ceux de la respiration. 442 ANNALES DU MUSÉUM SUITE DE L’ANALYSE BOTANIQUE Des embryons Endorhizes où monocotylédonés , et particulièrement de celui des Graminées (1). PARLM RICHARD. * SECONDE PARTIE. Raisonnemens et discussions sur les fails mentionnés dans la première partie. $ I”. NOTIONS PRÉLIMINAIRES. Cu qui introduisit le premier la considération de l'embryon dans la distribution méthodique des végétaux, a aussi indiqué, -quoiqu'obscurément, leur partition en trois grandes classes. En effet, il en a caractérisé quelques-uns par le défaut de fleur et de fruit; et il a remarqué que parmi ceux qui étoient pourvus de ces parties, les uns avoient dans leurs graines un embryon indivis et les autres un embryon bivalve. On peut donc reconnoitre ici une ébauche im- parfaite de la division plus moderne des plantes en acotylédones , monocotylé- dones et dicotylédones. Cette division primaire, que les travaux d’Adanson, des Jussieu et de Gærtner ont rendu précieuse, est aujourd’hui généralement adoptée par les botanistes de l'Europe. Si c’est une témérité d’oser en proposer une autre, j'espère du moins que l’amour de la science qui me Pa inspirée la rendra excusable. J'ai dit dans mon opuscule sur le fruit, que les plantes pouvoient être distri- buées en deux divisions primaires, les Zrembryonées et les Embryonées ; et que ces dernières étoient susceptibles d’etre rangées en deux séries au divisions se- condaires, les Zrdorhizes et les Exorhises. Ce n’est pas ici le lieu de donner à cette (1) Les Planches n°. 1, 2, 3, 4, 5et6 du lexte de la première et de la seconde partie de ce mémoire, sont placées dans ce volume sous les numéros 5, 6, 7, 8,Q et 10. D'HISTOIRE NATURELLE. 443 proposition tout le développement que sa nouveauté et son importance exige- roient. Voulant attendre du temps et de l'expérience des autres botanistes son admission ou son rejet , je me bornerai en ce moment à exposer quelques-unes des raisons qui peuvent motiver le changement de l’ancienne distribution et les caractères distinctifs de mes nouvelles divisions. Je tâcherai néanmoins de donner à mes lecteurs des éclaircissemens suffisans, pour qu'ils puissent concevair avec netteté et juger sainement les idées émises dans ce Mémoire. J’ajouterai aussi une troisième série, celle des Synorhizes qui sera définie plus bas. La nalure n’a doné les plantes d'organes sexuels que pour que ceux-ci exercent en leur faveur cet acte propagateur nommé fécondation. Le résultat principal de la fécondation est la formation d’un embryon, qui caractérise la graine parfaite et la rend propre à la reproduction de lespèce. L’embryon est celte partie essen- tielie d’une graine, qui, renfermée dans une enveloppe actuellement dénuée de fonctions organiques, tend dans certaines circonstances à s'en dégager pour dé- velopper son corps ou ses parties en deux sens opposés et devenir un nouveau végétal. Puisque la formation d’an embryors nécessite seule l'existence des sexes dans les plantes, celles-là seules doivent en être pourvues, qui produisent des graines proprement dites. Des observations et des expériences très-multipliées m'ont démontré que toutes les cryptogames de Linné sont dénuées d'organes sexuels et par conséquent vé- ritablement agames. Les corpuscules, par lesquels ces plantes se reproduisent, n'ayant point d'embryon, ne sont pas graines : il convient donc de les distinguer par le nom propre de sporules qu'Hedwig, cet exact et laborieux observateur, leur a donné. Parce que la sporule peut former un nouveau végétal, doit-on pour cela la considérer comme une graine? La conséquence d’un pareil raisonnement seroit que certaines particules de plantes, les bulbilles succédant à quelques fleurs , les tubercules caulinaires de quelques endorhizes, un segment de pomme- de-terre, etc., devroient être aussi regardés comme des graines. Un court examen comparatif du mode de formation de la graine et de la sporule sufina,peut-être pour conduire à la solution d’un problème si long-temps controversé. Un ovule ou rudiment de graine est un corps isolé de ses semblables ou de ses voisins par un tégument propre; et il n’a de communication alimentaire avec son réceptacle, que par une portion déterminée de sa surface, au moyen d’un faisceau de vaisseaux qui le pénètrent et le font croître à l’état de graine. La graine par- venue à son degré de perfection contient le rudiment d’un nouveau végétal; qui, n'ayant aucune continuilé vasculaire avec l’épisperme, poussera hors de celui-ci par la germination quelqu’une de ses parties, préalablement à toute procréation. Le rüdiment d’une sporule est une des cellules ox une portion cellulaire de la 444 ANNALES DU MUSEUM substance même de son réceptacle : cette cellule se dilate en se remplissant peu à peu d’une matière particulière qui lui adhère de plus en plus. Lorsque cette matière a acquis la nature et le volume convenables à la perfection de la sporule, la cellule tend à se détacher de ses voisines ou de son réceptacle. La substance interne de ce réceptacle peut être composée de cellules unies immédiatement et en tous sens les unes aux autres : si toutes se sont également remplies, toute la sub- sance se trouve convertie en sporules par la maturité.: si quelques-unes seule- ment ont recu la matière sporulaire, lesautres resteront cohérentes entre elles ou à leur réceptacle, avec les interruptions ou les vides que l’émission des cellules sporulées y occasionnera. Si la matière superficielle ou tégumentale du réceptacle est fort mince, elle pourra se détruire par parcelles ou tomber avec les sporules les plus extérieures. Mais lorsque la substance cellulaire interne du réceptacle est traversée par des vaisseaux distincts des cellules, ces vaisseaux, qu’on a pris pour des placenta, tombent ayec les sporules, ou bien persistent sous la forme de filamens ou d’un tissu quelconque. Tel est, en général, le mode de formation des sporules, auquel on pourra aisément rapporter les diverses modifications que ce court aperçu n’auroit pas atteintes. La sporule est done une partie intégrante de son réceptacle : son parenchyme est simplement revêtu d'un épiderme : ses pre miers produits par la germination sont dus, ou à une simple expansion de sa masse , ou à une procréation de parties par conséquent non préexistantes à cet acte. Après cette légère esquisse des caractères distinctifs des #rembryonées et des embryonées, je passe aux deux séries qui composent ces dernières. Une troisième série intermédiaire fera l’objet d'un-mémoire particulier, L’embryon étant le produit le plus essentiel des plantes sexiferes, devoit aussi offrir dans sa structure les caractères les plus constans, les plus conformes aux rapports naturels, et par conséquent les plus propres à servir de base à leur pre- mière division. Les botanistes philosophes, qui l'ont examiné sous ce point de vue, ayant remarqué qu’une de ses extrémités étoit indivise dans certaines plantes et fendue dans d’autres, ont fondé leur division primaire sur ces deux caractères; et ils ont désigné les premières par le nom général de monocotylédones et les secondes par celui de dicotylédones. Ils se sont d'autant plus attachés à cette division qu'elle s’accordoit mieux que toute autre avec les aflinités naturelles des geures. Sa prééminence étoit aussi confirmée par plusieurs signes extérieurs et iatérieurs propres aux plantes adultes de chacune de ces deux classes. Comme ces signes symbolisent généralement assez bien avec l'embryon, ils sont ordinairement substitués dans la pratique à lPexamen souvent difficile et quelquefois impossible de celui-ci. Mais ils présentent deux inconvéniens : le premier, de n'être pas réductibles en caractère technique; le second, d’être quel- D'HISTOIRE NATURELLE. 445 quefois ambigus. En effet, la plupart de ces signes ne se prètent point à une ex- pression claire, précise et transmissible par des mots : ils ne peuvent donc être saisis que par la pratique, c’est-à-dire, par l'inspection habituelle des objets mêmes. Tous sont insuflisans pour décider avec certitude à laquelle des deux classes certaines plantes doivent être rapportées. IL n’y en a pas un seul qui soit tellement généralisé qu'il puisse équivaloir au caractère immédiatement tiré de l'embryon. Une grande difficulté s’est présentée aux fondateurs de cette bipartition géné- rale des végétaux sexifères. La nature, qui paroît se plaire à exercer la sagacité des méthodistes en la contrariant, a voulu qu'il y eut des embryons à plus de deux cotylédons. Dès lors le nombre de ceux - ci ne pouvoit plus servir de base aux classes primaires, qu'autant qu’on auroit multiplié ces dernières en raison de ce nombre. Mais cette division relative rompoit des affinités si bien prononcées pardensemble des autres signes, qu’il a fallu chercher à rattacher ces embryons à la seconde classe. Quand il s’agit de lutter contre la nature, le triomphe ne peut être que très-diffcile et presque toujours faux. On les a donc considérés comme n'ayant que deux cotylédons plus ou moins subdivisés. Mais cette asserlion, produite d’abord par Adanson, et adoptée ensuite par Jussieu, a été combattue et bien infirmée par les observations judicieuses de Gærtner, de l’auteur infortuné d’un des plus précieux ouvrages de botanique. C’est une vérité incontestable, pour quiconque examinera sans prévention l’em bryon du ceratophyllum , de plusieurs Conifères et Rhizophorées, qu'il y a des embryons polycotyledonés. J'ai aussi trouvé plusieurs fois trois cotylédons dans quelques plantes ordinairement dicotylédonées. Ce dernier fait, quoique dû à une monstruosité, tend néanmoins à prouver la possibilité d’un nombre plus que binaire. Une exception d’une autre sorte concourt encore à infirmer la valeur du caractère général tiré du nombre des cotylédons. Les genres /ecythis , berthot- detia, pinguicula, utricularia, cyclamen, cuscuta, etc. , qui appartiennent évi- demment à la classe des Dicotylédonées, ont un embryon dont les deux extrémités sont également indivises et dont toute la surface est parfaitement continue. Il résulte de ce qui précède, que le nombre des cotylédons, quoique devant ètre rangé pari les caractères les plas généraux, admet néanmoins des excep- tions; et qu ’aucun des signes tirés des autres parties des végétaux développés ou adultes ne peut suppléer toujours ayec certitude à l’observation immédiate de ce nombre. On distingue dans tout embryon deux extrémités; l’une radiculaire, l’autre cotylédonaire : elles sont opposées en direction. La première est toujours indivise par son bout; la seconde peut être ou indivise ou diversement fendue. La limite LA 57 446 ANNALES DU MUSÉUM de ces deux portions de l'embryon est le point d’où naît ou naïîtra le rudiment inclus ou caché de ses parties intermédiaires. Ce rudiment a été appelé plumule : j'ai cru à propos de substituer à ce nom qui convient à peine à la centièine partie des genres, celui de gemmule, qui est plus général en ce qu’il est indépendant de la forme de ce corps et qu’il en indique la nature. ; Ayant suffisamment fait connoître ci-dessus ce qui distingue essentiellement les inembryonées , les endorhizes et les exorhizes ; je vais me restreindre à ce qui concerne la série à laquelle appartiennent toutes les plantes dont il est directe- ment question dans ce mémoire. L’embryon des endorkizes est toujours indivis par le sommet de ses deux ex- trémités dont l’une forme la radicule et l’autre le cotylédon. Comme la surface extérieure de ces deux parties, formant celle de tout l'embryon, est parfaitement continue, la gemmule est nécessairement interne et complétement incluse. Lors- que celle-ci est notable ou visible, la eavité dans laquelle elle est fixée appartient au cotylédon , ainsi que toute la partie de l'embryon qui surmonte cette cavité dans le sens de Pextrémité libre de la gemmule : le reste de l'embryon, c’est-à-dire, toute la partie inférieure au point d’origine de la gemmule, constitue la radicule. Maisil est plusordinaire , comme cela s’observe aussi dansles exorhizes, que la gem- mule soit imperceptible, ou seulement indiquée par un point vers lequel certains vaisseaux sont interrompus et d’autres déviés. Dans ce cas, un commencement de germination peut caractériser avec certitude les extrémités de l'embryon. J'ai nommé radicelle chaque petite racine que la germination fait sortir, soit de l’extrémité même de la radicule, soit des côtés de celle-ci ou de la tigelle, soit enfin du rudiment de la tige d’une plantule. J'ai appelé radicelle primaire, celle qui sort du sommet de la radicule. Les botanistes judicieux sentiront aisément la raison pour laquelle j’ai introduit cette dernière dénomination. \ $ IL. DISCUSSIONS SUR LES EMBRYONS BRACHYPODES ET RADICULEUX, FIGURÉS DANS LA PREMIÈRE PLANCHE. * Direction de lEmbryon. Cæsalpin , Adanson, Jussieu et Gærtner ont toujours considéré la direction de Fembryon relativement au péricarpe. Cette méthode me paroïit fautive : 1°. parce qu’elle n'indique pas avec précision la direction de la graine qui est très- importante à connoître : 2°. parce que la direction péricarpique de l'embryon est souvent très-difficile à établir, et quelquefois variable où même opposée dans les graines d'un même fruit. Je crois avoir prouvé par des exemples, dans mon D'HISTOIRE NATURELLE. 447 Analyse du fruit, qu’il étoit plus convenable et plus utile de rapporter la direc- tion de la graine au péricarpe et celle de l’embryon à la graine. Mais cette direction spermique de l'embryon est bien plus difficile à détermi- ner dans les endorhizes que dans les exorhizes. Elle ne peut être fixée, qu’on n'ait préalablement reconnu les deux extrémités de Pembryon. Or, comment les dénommer lorsqu’elles sont également indivises et surtout presque conformes l’une à l’autre? La dissection paroit être le seul moyen d’y parvenir; et la ques- tion est bientôt décidée, si la gemmule est notablement distincte. Mais lorsque celle-ci est imperceptible, il faut pour prononcer être éclairé par une longue ex- périence et quelquefois même on reste dans le doute. C’est une chose vraiment digne de remarque, que tous les embryons endorhizes épispermiques soient pourvus d’une gemmule bien distincte; tandis que la plu- part deffendospermiques en paroissent privés. La grande difficulté que j'éprouvois dans l’analyse de ceux-ci, pour y reconnoître la radicule et le cotylédon, m’a porté à rechercher si l’endosperme, qui sembloit en être la cause , ne me fourniroit pas le moyen de la surmonter ou de l’éluder. Enfin , à force d'analyses et d’expé- riences de germination très-multipliées, je suis parvenu à découvrir une loi (oa un principe général ) qui, dans toutes les circonstances où elleest applicable, dispénse avec sûreté de la dissection de’embryon dont on cherche à dénommer les deux extrémités. Voici cette loi, à peu près telle qu’elle est déjà énoncée dans mon opuscule : Lorsqu'une des deux extrémités de l'embryon endospermique est manifestement plus voisine de lépisperme par son sommet, c’est cette extrémité qui est la radiculaire. Afin de mieux démontrer la sûre application de cette loi ou de ce principe gé- néral, j’ai choisi pour exemples, dans cet écrit, des embryons dont la dénomi- nation dés parties, indiquée par elle, put être en même temps certifiée par la -gemmule elle-même. # ? L’arum (PI. E, fig. 1 }et le caZZa ( 2 ) ont un embryon endospermique , dont le cotylédon (b ), indiqué par la direction de la gemmule ( g), a son sommet distant de l’épisperme; tandis que celui de la radicule en est très-rapproché. Dans la. première plante, c’est le cotylédon qui est dirigé vers le point d’annexion de la graine : dans la seconde, c’est au contraire la radicule. Un examen plus approfon- di, qui m’engageroit dans une discussion étrangère à mon objet, tendroit à dé- montrer que cette opposition de direction entre deux embryons du mème ordre naturel, n’est qu'apparente; mais il sera mieux placé dans un autre ouvrage. L’embryon du canna (3) offre le. mème rapport avec l’endosperme. Mais sa direction est manifestement la même que celle de la graine. Le sparganium ( PL. I, fig. ?) et le ypha(8) ont un embryon (b) filiforme, eu Dre 448 ANNALES DU MUSÉUM dont la gemmule (z), quoique bien distincte, est si petite qu'il seroit très-dificile de dénommer les parties de cet embryon,sans le secours du principe général mentionné ci-dessus. Celui-ci indique, et la gemmule confirme, que la radicule regarde le sommet du péricarpe, et que par conséquent l'embryon est renversé relativement à celui-ci. Mais en remarquant que la graine, étant attachée au som- met de sa loge, subit le même renversement, on décide que l’embryon et la graine ont la même direction et que cette direction est contraire à celle du péricarpe,. Aussi voit-on dans la germination du £ypha (9) la radicule sortir par le sommet du périgarpe. Nota. La grande ressemblance de structure interne entre les fruits de ces deux genres prouve.qu'ils ont été justement rapprochés dans l’ordre imparfaitement caractérisé des Typhinées. Ce seroit mal à propos qu’on chercheroit à les séparer, parce que la noix du spärganium est quelquefois biloculaire. Cette bilocularité est due à la soudure de deux noix en une seule : ce qui est démontré par les deux trous apicilaires distinets qui répondent aux loges, dans chacune desquelles est suspendue une graine parfaitement semblable à celle de la noix uniloculaire. D'ailleurs le pandanus, qui paroît appartenir au même ordre, n’offre-t-il pas un exemple encore plus étonnant de la soudure de plusieurs noix en un seul corps! Trois difficultés concourent à obscureir la dénomination des parties de lem- bryon (10, &) de l’a/lium cepa : il est filiforme, amphitrope et sa gemmule n’est qu'un point. L'application du principe devient done ici d’une grande utilité, en signalant la radicule par l'extrémité dont le sommet avoisine le plus Pépisperme vers le style. 11 arrive quelquefois dans les sciences physiques qu’un principe , rangé dans l'ordre général parmi les secondaires, devient préférable en certaine cireons- tance à celui dont il n’est ordinairement que le subordonné ou l'auxiliaire. Cette remarque va trouver son application-dans la famille des Cypéracées. La gemmule (z) et la position de l'embryon relativement à l’épisperme s’ac- cordent dans le carex (13) et le scleria ( 14) pour l'indication des parties et de La direction spermique de cet embryon. La direction de l’extrémité libre de la pre- mière fait connoître son cotylédon : l’extrémité inférieure est désignée comme sa radicule par sa proximité de l’épisperme : dès lors il devient facile de décider que cette direction spermique est la même que celle de la graine. La direction de la gemmule est un principe de première valeur pour recon= noître le cotylédon, la radicule et la direction de l'embryon. Le rapprochement d’un des deux bouts de celui-ci vers l’épisperme est un principe du second rang pour désigner les mêmes choses. La différence de valeur entre ces deux principes vient de ce que La gemmule est une partie toujours existante dans l'embryon, D'HISTOIRE NATURELLE. 449. soit ayant soit après la germination , et que la proximité du périsperme ne tire sa valeur que de la présence de l’endosperme, qui n’accompagne pas toujours l'embryon. L’embryon du scirpus supinus ( PI. I, fig. 19) et celui du S. maritimus (21) ont une gemmule (g) dont la direction se rapproche, quoiqu’obliquement, de celle de la radicule. Le principe de première valeur est donc ici en défaut, puisque la base fixe de la gemmule, au lieu de regarder la radicule, est au contraire tournée vers le cotylédon. Mais ce défaut est réparé par le principe du second rang qui indique avec certitude que l'extrémité inférieure de l’embryon est la radicule, et que par conséquent là supérieure est le cotylédon. n L’embryon lenticulaire de l’Aydropeltis (PI. I, fig. 22) et du cabomba (23) ayant sa face supérieure immédiatement recouverte par le périsperme, le prin- cipe fondé sur la proximité de celui-ci indique nettement que cette face appar- tient à la radicule : c’est en effet ce que la direction déorsive de la gemmule(z) démontre avec évidence. Comme les autres plantes dontles embryons sont figurés dans la même planche I n’ont point d’endosperme, le principe ci-dessus mentionné ne leur est pas appli- cable. La direction de ces embryons et la dénomination de leurs parties ayant été fixées, au moyen de la gemmule, dans leurs descriptions respectives, je vais passer à d’autres considérations plus directement relatives à mon sujeL. Je dois cependant faire remarquer ici que l'embryon des graminées refuse, cause de sa structure extraordinaire , de se soumettre à cette loi. ** Examen comparatif de tous ces Embryons. En jetant un coup-d’œil général sur la planche première, on voit que les em- bryons qui y sont figurés aflectent des formes très-variées. La forme de l'embryon endospermique est indépendante de celle de la graine. L'épispermique, au con- traire, est soumis à celle de cette dernière; en observant cependant qu’il peut avoir des convolutions ou des inflexions que son épisperme n’imite point : c’est ce dont le sanichellia et quelques espèces de potamogeton fournissent des exemples. La forme et la grosseur relative des deux extrémités de l'embryon ne peuvent jamais servir seules à leur distinction nominale. Une grande disproportion de longueur entre la radicule et le cotylédon est une note constante dans l'embryon endospermique. La première est toujours beau- coup plus courte que le second; c’est-à-dire que la gemmule est toujours rap- prochée du bout radiculaire. Cette proportion de longueur est au contraire variable L.1 450 ANNALES DU MUSÉUM dans l'embryon épispermiqée. Tantôt sa gemmule avoisine de très-près le bout radiculaire, comme dans le #riglochin (24), le scheuchzeria (26), etc.; tantôt elle est placée vers le tiers inférieur de la longueur de l'embryon, comme dans le butomus (28), le vallisneria (29). Assez souvent elle occupe à peu près le milieu de cette même longueur, comme dans l’eZodea (30), l'alisma (31), le potamogetôn (35, 37), le zanichellia (39), etc. Très-rarement la gemmule, située beaucoup plüs près du bout supérieur de l'embryon, donne à la radicule une longueur quadruple de celle du cotylédon : cette sorte d’inversion de proportion entre ces deux parties ne s’est encore présentée à moi que dans le seul genre naias (33). Le plus souvent la gemmule paroît comme un corps uniformément solide ou simple : quelquefois elle est composée de plusieurs rudimens discernibles de feuilles. La grande disproportion entre le premier rudiment et le second ne per- met pas que leur nombre excède quatre; encore est-il rare que le quatrième puisse être distingué. Une analyse plus approfondie de la gemmule, quoiqw’utile sous certains rapports physiologiques, ne me paroit pas nécessaire ici. Je ferai seulement remarquer que lorsque les rudimens de feuilles sont convolutés, il ne faut pas toujours en supputer le nombre par celui des segmens que présente la coupe longitudinale de la gemmule, parce que le même peut avoir été coupé plusieurs fois. Après cet examen rapide des notes variables de l'embryon endorhize, appli- quons-nous à connoître celles qui sont constantes. Ce sont en effet les seules qui puissent prouver l'identité réelle des parties analogues de tous les embryons en- dorhizes. » La radicule renferme constamment le rudiment toujours unique, convexe ou conoïde de la radicelle primaire. A la vérité il est rare qu’il soit netteméhnt dis- cernible dans l'embryon en état de repos: mais il se montre clairement dès le commencement de la germination. La gemmule , soit préexistante à la germination, soit formée par celle-ci , n’est jamais dans l’axe longitudinal de l'embryon : elle se porte constamment vers un de ses côtés, dont elle avoisine la surface. Elle est toujours plus ou moins com- primée, de manière qu’une de ses faces regarde la partie de la Surface dont elle est plus rapprochée. Cette position de la gemmule hors du centre distingue essen- tiellement les endorhizes des exorhizes où elle n’a lieu que dans le cas de l’iné- galité très-manifeste des deux cotylédons. Quoique la réflexion suivante puisse naître du raisonnement seul dans l'esprit d’un observateur judicieux , je crois cependant utile de le prémunir contre une erreur dans laquelle il lui seroit facile de donner. La gemmule est, comme je viens de le dire, réellement située hors ‘ D'HISTOIRE NATURELLE. 451 de l’axe : elle peut néanmoins quelquefois paroître occuper celui-ci ( voy. fig. 1, 2, 3); c’est ce qui arrive lorsque la coupe longitudinale de Pembryon est faite parallélement aux faces de la gemmule. C'est une loi générale pour toutes les erdorhises , que jamais un rudiment gem- mulaire de feville n’a de cavité interne tellement close qu’il doive être percé ou rompu par la germination pour l’émission de celui qu'il enveloppe. Et si le pé- tiole vaginant des Polygonées ne s’y opposoit, cette loi serait également générale pour les exorhizes. Il est essentiel au cotylédon des endorhizes d’avoir une cavité interne, propor- tionnée à la grosseur de la gemmule qu’il renferme immédiatement ; en sorte que celle-ci est obligée de le perforer ou de le déchirer pour en sortir. Observons maintenant en général le développement de toutes ces parties par la germination. ; La radicule fournit ordinairement le premier signe extérieur du commence- ment de la germination. Si le rudiment de radicellé primaire fait éruption subi- tement, c’est-à-dire, sans prendre préalablement un certain accroissement, le sommégt de la radiculéqui le renfermoit semble disparoître, ou ne laisse qu’une très-légère trace annulaire de son existence. Gette sorte d'évanescence du bout de la radicule est très-fréquente et peut jeter de l’obscurité sur l’origine interne de la radicelle ; parce qu’alors la surface de celle-ci paroït continue à celle de la tigelle ou du cotylédon. Mais en examinant de très-près cette surface, on voit que celle de la radicelle naïssante n’a pas le poli de la partie qui la surmonte; ce qui donne pendant quelque temps le moyen de découvrir la limite qui la sépare du reste de l'embryon. Souvent aussi le rudiment radicellaire se rend bien distinct avant son émission, et alors la radicelle est ceinte à sa base par quelque saillie qui atteste manifestement son origine. J’appelle radicellation nue, celle qui fait disparoître la partie de la radicule qui couvroit le rudiment de radicelle; et ra- dicellation circonscrite , celle qui laisse subsister autour de Ja base de la radicelle au moins une partie notable de son enveloppe. Les radicelles sont toujours simples d’ahord ; et lorsqu’elles se ramifient, leurs rameaux naissent comme elles de la sitbstance interne. Si elles sont pubescentes, leur sommité reste néanmoins toujours glabre. Le développement du cotylédon est moins uniforme que celui de la radicule, c’est lui particulièrement quidiversifie la germination des endorhizes. Cependant - cette germination paroîit pouvoir être réduite à deux modes principaux : 1°. ou Pépisperme, renfermant l'extuémité plus ou moins tuméfiée du cotylédon, reste fixé latéralement près de la gaïne de celui-ci (LH fig. 6 ),ou de son prolongement yaginifère (fig. 17), et alors la germination est admotive : 2°, ou bien l’épisperme 492 ANNALES DU MUSÉUM est éloigné de cette même partie par l'allongement du cotylédon dont il enve- loppe le sommet , et dans ce cas la germination est rémotive. Comme dans la germination admotive. la gaine cotylédonaire n’est terminée par aucun prolongement distinct, eetie germination paroiît n’admettre que deux subdivisions : subterranée , lorsque l’épisperme (avec les parties qu’il renferme) reste sous terre : exterranée, lorsqu'il est poussé hors de celle-ci : cette dernière est beaucoup plus rare. La germination rémotive peut èLre subdivisée : 1°, en foliaire; lorsque la partie du cotylédon qui surmonte la gaîne s’allonge et se développe uniformément pour prendre l’apparence d’une feuille : 2°. en filaire , cette partie du cotylédon devenant comme un filament plus ou moins flasque et à sommet simple : 5°, en aciculaire , mème caractère, le sommet détenu dans les enveloppes seminales étant subitement tuméfé : 4°. en clavulaire, quand l'extrémité du co- tylédon grossit graduellement en massue. Ne cherchant en ce moment dans la germination des endorhizes que le moyen de pouvoir lui comparer celle des embryons macropodes, je crois devoir me borner à cet apercu sur un sujet que je me propose de développer ailleurs. Le cotylédon prend ordinairement un accroissement remarquable par la ger- mination. Tantôt cet accroissement cesse vers l'émission de la gemmule : tantôt il se continue manifestement après celle-ci. Mais sa végétation ne paroît pas se prolonger au delà de l’époque du développement parfait de la première feuilie. La gemmule sort toujours latéralement du cotylédon. Trois causes semblent concourir à rendre celte latéralité constante: sa position extraaxile ou hors du centre , son obliquité et la résistance de l’extrémité solide du cotylédon. S IIT. DISCUSSIONS SUR LES EMBRYONS MACROPODES. * Dénomination des parties. L’embryon macropode, considéré dans son ensemble, est composé de deux corps distincts : l’un, beaucoup plus gros, constitue presque toujours la grande majorité de son volume et lui donne la forme générale : l’autre est fixé au premier avec continuité patenchymale et de matière qu’une de ses extrémités est tou- jours libre. Le nom d’Aypoblaste m’a paru convenir au premier, qui sert comme de support au second que j’ai nommé D'aste. 3 Eu comparant entre eux les hypoblastes des différens embryons qui en sont pourvus, la diversité de leurs formes se fait d’abord remarquer. Celui du ruppiæ (PL V, fig. 42) est sphéroïdal avec une légère raiuure au sommet : il est réguliè- rement ové et percé d’un trou latéral dans l’hydrocharis (44): son corps ovoïde- oblong dansle zoséera (47 ) est fendu d’un côté dans toute sa longueur: le ne/umbo D'HISTOIRE NATURELLE. 453 (49) en à un à peu près globuleux et divisé profondément du sommet vers la base eu deux parties égales : sa forme est variable dans les Graminées (53, 55), quoique plus souvent discoïde. Mais, diront quelques-uns, ce corps est-il bien identique dans les divers embryons auxquels vous venez de l’attribuer? La légère cannelure du sommet du ruppia ; le trou latéral de l’Aydrocharis ; la scissure longitudinale du sostera ; la bipartition du ne/umbo ; enfin la concavité ou la fente des Graminées, peuvent ètre considérées comme des incisions plus ou moins profondes, plus ou moins prolongées de l’Aypoblaste. Elles ont toutes la même destination, de recevoir ou de cacher le blaste. FL est, dans toutes ces plantes, entièrement solide, c’est-à- dire, sans aucune cavité interne. Sa substance est plus ferme que celle du blaste et incapable de flexion ; et sa forme est immuable par la germination. Cette der= nière propriété, qui équivaut à toutes les autres prises ensemble, le caractérise essentiellement et prouve si évidemment son identité dans tous les embryons macropodes , que je ne crois pas devoir insister davantage sur ce point. En soumettant à un examen comparatif tous les blastes de ces mêmes em bryons, on voit que leur forme n’est pas moins variée que celle des hypoblastes. C’est un filet cylindracé; court et incliné dans le rwppia (42, b); fort long et replié sur lui-même dans le sostera (48, c ). Celui de l’Aydrocharis (46 , a) ressemble à un petit cône enfoncé dans le trou (44, d) de l’hypoblaste. Il forme un corps dressé et oblong dans le nelumbo (52, b). Enfin il est à peu près fusiforme ct couché dans les Graminées (53, b). Il conimunique avec le corps de lhypoblaste par sa base, que celui-ei excède toujours en tous sens. Il a pour caractère général d’avoir toujours une cavité interne, soit avant soit dans le commencement de la germination; et d’être seul susceptible de développement par celle-ci. Après avoir comparé ces embryons macropodes entre eux, il convient de cher- cher, dans leur comparaison avec les autres endorhizes, le moyen de parvenir à la dénomination uniforme et exacte des parties communes aux uns et aux autres. Le bas de l’incision qui distingue les cotylédons des exorhises, où mieux encore, le point d’où naît la gemmule marque la limite entre les cotylédons et Ja radicule. En sorte que toute la partie du corps total de l’embryon qui sur- monte ce point en suivant l'incision appartient aux premiers; et que toute la partie qui lui est inférieure forme la seconde. Ce principe, d’une application fa- cile et claire, est tellement naturel et exempt arbitraire, que tous les botanistes V’ont adopté. Le prince de la carpologie ne s’en est lui-même écarté qu’à l'égard des embryons auxquels il a attribué un vitellus, c’est-à-dire, un hypoblaste. En &xant, pour les endorhizes, cette limite distinctive du cotylédon et de la radicule 19, 58 454 . ANNALES DU MUSÉUM au fond de la cavité gemmulaire, je ne fais done autre chose que donner à ce même principe une extension simple et naturelle. La dénomination des parties des embryons figurés dans la planche première et décrits dans la première partie est parfaitement conforme à ce principe. Sans doute nul botaniste ne contestera les noms de radicule, de cotylédon et de gem- mule donnés à ces parties. La germination, juge infaillible dans des questions de celte nature , les a elle-même confirmés. Dans les discussions suivantes, relatives aux embryons macropodes, je requerrai d’abord laide du principe limitateur; et je profiterai ensuite de la lumière de la germination pour éclairer les décisions de celui-ci. Pour rendre plus facile la comparaison des parties des divers embryons ma- cropades et démontrer plus clairement leur identité, je donnerai aux analogues la même position, en plaçant tous les hypoblastes horizontalement, et dressant perpendiculairement les blastes, de même que les uns et les autres offrent leur coupe longitudinale. | Je choisis pour objet de comparaison l’embryon du zanichellia( PI. VI. fig. 68), auquel je donne une position relative à celle des embryons qui lui sont comparés. Il présente, vers le milieu de sa longueur, une cavité qui renferme la gemmule ( g) et indique par son fond où celle-ci est fixée la limite entre la radicule et le co- tylédon. Cette cavité appartient donc à ce dernier, ainsi que tout ce qui la sur- monte; et tout ce qui se trouve au-dessous constitue la radicule. Cette cavité gemmulaire , qui caractérise essentiellement le cotylédon de tout embryon en- dorhize en état de repos où de germination, se trouve aussi dans tous les blastes. Celui du zostera (69) a non-seulement la même gemmule (g) que le zanichellia, mais encore une telle conformité avec l'embryon de celui-ci, que leurs cotylédons (b,b et leurs tigelles (ce, e }sont évidemment identiques ; en sorte que leur dif- férence se borne à la terminaison de leurs radicules (a, a). Le blaste du rppia {70 ) a aussi sa gemmule (g), son cotylédon (à) et sa tigelle( ce); et ilest mani- feste qu'il ne diffère de celui du zostera que par sa briéveté; briéveté qui nous conduit à reconnoître les mêmes parties dans l’Aydrocharis (71 ). Examinons maintenant le blaste des Graminées en général. Celui du danthonia (53,6) est couché dars une fossette de l'hypoblaste («), à peu près comme celui du ruppia (42, b). Dans le maïs (55, b) il est presqu’entièrement caché par le rapprochement de; bords (a) de la fossette qui le recoit; et il s’assimile par là À celui du -ostera (47, a ,b). Voilà donc entre ces divers blastes une ressemblance de position qui fournit déjà un premier degré d’analogie: tâchons de la compléter par la comparaison de leurs parties. La tigelle du zosera (48, b) est simplement appliquée sur l’hypoblaste : celle D'HISTOIRE NATURELLE. * 455 du mais (et autres Graminées ) lui est adnée(72,c) par la majeure partie de sa longueur; et cette adhérence en marque l'existence. Mais si on la suppose déta- chée et dressée (73,c), elle devient manifeste et son analogie ayec celle des blastes précités n’est plus douteuse. Il convient de faire, pour le moment, abstraction du tubercule radiculoïde (73, d) qui est propre aux Graminées et dont je parlerai au f suivant. L’extrémité supérieure du blaste offre une cavité interne (72. 73,9 qui renferme une gemmule. Or, nous avons vu ci-dessus que la cavité gemmu- laire appartenoit au cotylédon et que celui-ci étoit la seule partie de l'embryon endorhize pourvue d’une cavité interne close de toutes parts : donc le conoiïde creux (72. 75, b ) contenant la gemmule est un vrai cotylédon. En effet, celui-ci ne differe des précédens que par la forme et des proportions métriques que l’on sait ne pouvoir fournir des notes ou des qualités essentiellement caractéristiques. Le cotylédon des Graminées ne formant point à son sommet un prolongement solide, et ayant moins d'épaisseur relative et une gemmule plus grande, oflre en quelque sorte une transition des autres blastes à celui du nelumbo. En relran- chant une portion d’une des divisions (66, &) de l’hypoblaste du re/xmbo, on met à découvert l’extrémité supérieure de son blaste (66,0), qui par cette simple opération s’assimile déjà à celui (67, b) de lolyra. Mais sa coupe longitudi- nale démontre évidemment que l'enveloppe (7#,b) de la gemmule (74, x), étant la seule partie creuse et close de toutes parts, est réellement analogue au conoide creux (72, b ) du maïs. Cette enveloppe à cavité gemmulifère est donc un coty- lédon , qui ne diffère de celui des Graminées que par une plus grande ténuité; ténuité qui paroit due à la grosseur et à la composition extraordinaires de la gemmule. Comme ce cotylédon naît presqu’immédiatement de l’hypoblaste, il n'y a pas de tigelle sensible. Mais la nature semble avoir suppléé à ce défaut de tigelle par un principe intracotylédonaire de tige (7%, c ); c’est ce qu'on observe aussi dans quelques Graminées. * Après avoir tâché de démontrer que lextrémité supérieure du blaste répond à la cotylédonaire des autres embryons endorhizes, je vais essayer de rapporter à l'extrémité radiculaire de ceux-ci tout ce qui, dans celui-là, se trouve au-dessous de la gemmule. La même loi qui, sanctionnée par la nature, veut que le botaniste regarde le renflément basilaire (68, a ) du zanichellia comme sa radicule, et sa tigelle (ec) comme un prolongement de celle-ci; cette mème loi, dis-je, le porte à reconnoître ces mêmes parties dans l’hypoblaste et la tigelle du zostera (69, «, ce), duruppia (70, a, ce), etc. Si le sommet renflé de l'extrémité radiculaire du zanichellia est celui de sa radicule , n’est-il pas raisonnable de regarder l’hypo- blaste des embryons macropodes comme un renflement ou une expansion parti- culière de leur radicule ? Or, si le bout de l’hypoblaste est celui de la radicule, 2 > * 456 ANNALES DU MUSÉUM le sommet du blaste comme opposé au premier sera celui du cotylédon. Seroit-ce la disproportion considérable entre le cotylédon et l’hypoblaste, qui nuiroit à la véritable dénomination de ce dernier? Mais la radicule (33, a )du naïas est énorme relativement à son cotylédon (b). La nature nous offre aussi dans les exorhizes des exemples d’une disproportion analogue. IL n’est peut-être pas hors de propos d’en citer ici quelques-uns. La graine réniforme du pekea tuberculosa coupée longitudinalement ( PI. V, fig. 60 ) offre, sous un épisperme coriace, une amande ( à) charnue et oléagineuse, qui paroît d’abord ne consister qu’en un gros corps solide (61, a) et homoïde. Son extrémité inférieure se termine brusquement en un petit cylindre (60, a), qui se courbe et remonte vers le stile (c) pour s'appliquer sur le bord intérieur de lPamande , où il est recu dans une légère cannelure (61, d) Ce petit cylindre (61,c)est une tigelle terminée par deux cotylédons (61, c) fort petits, ovales, appliqués face à face et à peine plus larges qu’elle. Le gros corps nucléaire est donc une radicule d’un volume énorme relativement aux cotylédons. Une dis- proportion encore plus grande entre ces deux organes va nous être offerte par le clusia. Les graines du c/usia palmicida (PI. VI, Gg. 64, a ) de Cayenne (et de plusieurs autres espèces ) sont cylindracées et convexe-obtuses par les deux bouts. Chacune d'elles a deux tégumens : l’un extérieur, un peu coriace et fragile par exsiceation, adhère à la pulpe qui l'enveloppe et est percé d’un très-peit trou à son extrémité inférieare : l’autre intérieur, extrêmement mince, est agglutiné à l’extérieur , vers le trou duquel il contracte une adhérence particulière. Le premier appartient au péricarpe et forme, comme dans les Nymphéacées, les Hydrocharidées , les Cucurbitacées, ete., la véritable loge de la graine : le second est l’épisperme. En dépouillant de leurs tégumens.( 64, b ) les deux extrémités (c, d) de l'amande, on la reconnoit aux signes suivans pour éug un embryon épispermique antitrope. Son bout supérieur est marqué d’une aréole roussâtre (e), dont le centre est comme tronqué. On remarque au bout inférieur une légère dépression circulaire qui circonscrit une très-pelite éminence convexe fendue en deux parties (f, 2} égales et rapprochées. Par la coupe longitudinale de l'embryon (65), on voit que la fente (a ) de l’éminence a très-peu de profondeur et que tout le reste de l'embryon est solide. Les deux petites pièces (64, f, 2 ) de la protubérance sont donc deux cotylédons d’une petitesse excessive en raison de la radicule. Cet embryon peut servir de transition à ceux du /ecythis et du bertholletia, dans lesquels les cotylédons cessent d’être visibles. Ces exemples de grosses radicules doivent diminuer la répugnance des botanistes à donner ce nom aux hypoblastes. Mais, dira-t-on, ces deux organes ne sont pas D'HISTOIRE NATURELLE. , 457 identiques; puisque les premières s’allongent par la germination et que les hypo- blastes ne forment par celle-ci aucun prolongement radiculaire ! Cette objection est la seule qui puisse raisonnablement élever quelque doute sur mon assertion : je tâcherai d'y répondre plus bas en traitant de la germination des embryons macropodes. ** Germinatior. Tout embryon encore totalement renfermé dans Vépisperme n’a point com- mencé sa germination. Admettre dans certaines plantes une germination intras- permique, c’est attribuer à leur embryon une propriété oceulte et perturbatrice de toute comparaison exacte. En effet, un pareil embryon ne pourroit plus être comparé qu’à d’autres qui auroient subi un degré équivalent de germination. Or, comment fixer ce degré ? Comment comparer deux termes dont l’un est inconnu ? Mais, on a un principe certain et toujours identique, en prenant pour premier _ signe d’une germination commencée la rupture ou la perforation de l'épisperme ou du péricarpe opérée par lembryon. L’embryon peut bien croître en même temps que la graine et sa proportion relative à l’endosperme augmenter quelquefois aux dépens de celui-ci; mais cette croissance n’est nullement Peffet d’une vraie germination. Si un embryon avoit subi un degré quelconque de germination dans.la graine, lPexsiccation de celle-ci par la maturité ou le contact de l’air, Pinterromproit. Or, expérience démontre que si l'aréfaction ou exsiccation suspend la germination commencée d’une graine, l'embryon perd sa faculté germinative. Souvent aussi, surtout dans les endorhizes, il peut perdre cette faculté dès le moment où des excitans se sont introduits dans son tissu, même avant d’avoir donné des signes extérieurs du mouvement de ses organes. On peut donc conclure de ces observations que nul embryon ne doit à une germination intraséminale la composition ou le dévelop- pement apparent de sa gemmule. Les asserlions de quelques betanistes sur ce sujet paroissent done devoir être regardées comme erronées. La radicule des embryons endorhizes non-macropodes ne croît point par sa partie superficielle; seulement elle émet par son sommet la radicelle primaire qui est toujours unique. Ils signalent ordinairement le commencement de leur germination par la sortie de leur bout radiculaire. L’hypoblaste étant incapable d'aucun développement, s’oppose à ee que le bout radiculaire des embryons macropodes fournisse le premier signe de leur germi- nation. Le mouvement germinatif une fois établi dans Phypoblaste se communi- que au blaste, qui l'annonce au dehors par l'émission de quelque partie. Ainsi le blaste remplit ici une des fonctions-ordinaires du sommet radiculaire, La végéte- 458 __ ANNALES DU MUSÉUM tion de l'embryon macropode étant bornée inférieurement par l’hypoblaste, ne peut s'exercer qu’au-dessus de celui-ci. Si le bas du blaste ou la tigelle est pourvu d’un ou de plusieurs tubercules radicellaires préexistans à la germination, celle- ci les développera à peu près en même temps que le reste du blaste. C’est ce qui arrive dans les Graminées , dont il sera particulièrement question dans le Ç sui- vant. Mais, si ces tubercules manquent, le blaste prendra un certain accroisse- ment, avant qu'il puisse s’en former , soit sur la tigelle, soit sur le rudiment in- tracotylédonaire de tige qui la remplace, Je ne puis encore citer, pour exemples de cette tardive formation de tubercules radicellaires, que le ruppia( V,58) et le nelumbium (57). Voyez leurs descriptions dans la première partie. Voilà donc dans les endorhises deux modes de radicellation , Vune terminale, l’autre latérale. Ces deux radicellations sont - elles réellement très-diflérentes ? Je ferai d’abord remarquer que la germination les réunit souvent sur le même em- bryon, à plus ou moins d'intervalle de temps et de lieu. J'observerai ensuite que si la tigelle n’est qu’un prolongement de la radicule, la radicellation latérale ne diffère plus de la terminale que par le point de la radicuie où elle se fait. A la vérité celle du 2e/umbo a lieu sur le rudiment de tige que renfermoit le cotylé- don, et non sur la tigelle; mais cela vient du défaut de celle-ci, D'ailleurs, il n’est pas démontré que dans les graines de cette plante semées par la nature, La radicellation tigellaire ne puisse exister. Je vais essayer d’atténuer encore cette différence par quelques réflexions que mes observations m'ont suggérées et qui sont en partie confirmées par celles de M. Poiteau. La nature paroît vouloir que les endorhizes w’aient point de racine pivotante. En effet, je n’ai jamais vu, soit dans mes voyages soit en Europe, une de ces plantes qui en fut pourvue. Elle manifeste son intention dès la germination; et elle paroît employer trois moyens pour parveuir à son but, 1°. Elle fait périr la radicelle primaire, dès que les latérales peuvent alimenter la plantule: 2°. si elle laisse subsister long-temps la première, elle fait en sorte que les secondes l’égalent promptement en force et lui ôtent sa prééminence : 3°. elle substitue à la radi- cule un gros corps, qui force la radicellation d’être primitivement latérale et qui périt enfin comme celle qu’il remplace. Il devient donc évident que Pimpuis- sance de l’hypoblaste à procréer une radicelle, loin d’être contraire au but de la nature, raccourcit au contraire la route par laquelle elle veut y parvenir. De même qu'il a plu à la nature de donner à quelques embryons endorhizes un gros corps radiculaire incapable de développement par la germination ; de même aussi, et comme par inversion, elle a doué quelques embryons exorhizes d’un gros corps cotylédonaire également inapte à croître lui-même, Cest ce qu'on peut D'HISTOIRE NATURELLE. 459 observer dans les embryons que j'ai désignés dans mon opuscule par l’épithète de macrocéphales. Ce gros corps cotylédonaire empêche le développement as- cendant des cotylédons, comme l’hypoblaste s'oppose au prolongement descen- dant de la radicule. Et quoique ces deux corps agissent en sens opposé, les fonc- tions qu’ils remplissent dans la germination ont néanmoins le même résultat ; c’est-à-dire que lun et l’autre fournissent d’abord les sucs alimentaires nécessaires au premier développement des autres parties de l'embryon. Le célèbre Gærtner, préoccupé de la comparaison de la graine avec l’œuf ani- mal, a donné à l'hypoblaste le nom impropre de vitellus. I ne le regardoit pas comme une parlie intégrante de Pembryÿon; mais comme un corps d’une na- ture intermédiaire-æntre la cotylédonaire et l’albaminaire. [| prétendoit que l’em- bryon croissant absorboit à son profit toute la substance de ce corps et le dé- truisoit ainsi totalement. C’est principalement cette opinion purement conjecturale qui le guida et le confirma dans le choix de cette dénomination. L'hypoblaste, après avoir rempli des fonctions analogues à celles d’une radi- cule, ne se trouve point vidé; mais il se flétrit, parce que des radicelles latérales ont annulé son commerce vasculaire avec son nourrisson. Il persiste ordinaire- ment long-temps attaché à la plantule; et il en est enfin séparé par la destruction de la portion de la tigelle qui se trouve inférieure aux radicelles. Cette séparation paroît avoir quelqu’analogie avec la manière dont les rejetons de certaines plantes, telles que le va/lisneria, le stratiotes , ete., sont détachés de leur mère. La tigelle , le cotylédon et la gemmule qui composent le blaste, sont soumis au mode général de développement de leurs analogues dans les autres embryons endorhizes. Cependant le cotylédon du nelumbo paroît, par sa ténuité et sa fra- gilité, n’être susceptible d'aucun accroissement. Mais ces deux qualités sont mani- festement dues au desséchement des graines de cette plante aquatique transportée en Europe. On peut donc attribuer à leur émersion iong - temps prolongée contre le vœu de la nature, l'espèce d’atrophie de leur cotylédon, et regarder le défaut complet d'accroissement de celui-ci comme non prouvé, Puisque, dans les embryons macropodes, les tégumens séminaux restent fixés au bas de la plantule par l'extrémité immobile de leur radicule, ils présentent donc un troisième mode de germination, que je nomme germination immotive. Elle pourroit être divisée en basilaire et en latérale : cette dernière est particulière aux Graminées. 46o ANNALES DU MUSÉUM $ IV. DES GRAMINÉES EN PARTICULIER. * Notions préliminaires. Les Graminées forment une famille ou un ordre de plantes si naturel , que tous les botanistes modernes sont d'accord sur ce fait. Cependant aucun auteur n'a encore tracé l’ensemble complet et exact des signes qui les caractérisent. Gærtner, en écrivant sur ces plantes, a éclairei ou fait connoitre plusieurs points obscurs ou négligés avant la publication de son important ouvrage. Mais leur caractère essentiel, celui qui leur appartient généralement et exclusivement n’a pas encore été solidement établi. Le mésaccord des botanistes sur la dénomination des par- iies; Pimperfection des descriptions; l’omission de certaines circonstances et de eertaines petiles parties qu'on appelle communément et mal à propos des minuties : telles sont en général les obstacles qui s'opposent aux progrès réels de l’agrosto- graphie. Devant traiter ici du fruit des Graminées en particulier, je ne remontrai point à l’examen de leurs fleurs. Je me bornerai à quelques observations sur certaines parties, qui, accessoires de celles-ci, le sont aussi du fruit, puisqu'elles laccom- pagnent jusqu’à sa maturité. J'ai rangé depuis long-temps la g/ume des Graminées au nombre des bractées, et j'ai indiqué par là aux botanistes qu'il n’y avoit, dans cette sorte d’involucre, ni calyce ni corolle. Assujélis au joug de l'usage, ils ont continué, les uns d’y ad- meltre ces deux organes, les autres de le distinguer en glume et en cal yce. Quelques modernes ont aussi divisé la glume en extérieure et en intérieure. Voyons rapide- ment si ces trois opinions peuvent se soutenir. L’alternité des valves, leur imbrication distique, la variabilité désordonnée de leur proportion et de leur figure, la discordance de leur nature, ete., ne permettent pas de les prendre pour des divisions calycinales et encore moins pétalines. Il me paroit plus convenable de les regarder comme des écailles florales, analogues aux spathilles de beaucoup d’endorhizes. Je n’essayerai pas inutilement de troubler les Linnéistes dans leur adhésion religieuse aux principes de leur maître : mais Je crois utile de faire quelques remarques sur les deux dernières opinions, qui, à l'abri de quelques noms célèbres ;eommencent à s’accréditer. En admettant la distinction des écailles florales en g/ume et en calyce, il est clair que la première est considérée comme linvolucre immédiate du second. Or, dans le cas de pluralité de calyces, auquel d’entre eux appartient linvolucre ? A aucun. Dès lors il devient isolé et les calyces solitaires sont les seuls involucrés. Car cet involucre, n’augmentant point le nombre de ses parties en raison de celui D'HISTOIRE NATURELLE. 4Gx des calyces, ne sauroit être comparé aux involucres connus des fleurs de cer- taines plantes. Mais la plus forte objection qu'on puisse faire à cette seconde œpinion et qui suffit pour la détruire, c’est que bien certainement ce qu’on appelle calyce ne mérite pas ce nom. La troisième opinion, comme n’admeltant point de calyce, seroit plus soute- nable; si elle ne partageoït un des inconvéniens de la précédente. Les expressions de glume extérieure et glume intérieure ne sont applicables qu'aux Graminées uni- ftores. Car, dans les pluriflores, chaque fleur auroit toujours une glume intérieure et jamais d’extérieure : or, cette disparate ne paroît pas naturelle. En cherchant dans les opérations de la nature les moyens d'interpréter ses vues, on est porté à faire les réflexions suivantes. 1°. Puisque chaque fleur des Graminées pluriflores est dépourvue d’involuere extérieur, celui des fleurs solitaires peut être présumé indépendant de leur glume. 2°. La persistence de cet involuere, après la chute de la glume, soit solitaire soit sociétaire, semble revêtir la pré- somption ci-dessus du caractère de la vérité. 3°. Cette même persistence tend aussi à démontrer l'identité des involucres uniflores et pluriflores. Il résulte de ces réflexions, qu’il conviendroit de laisser le nom ancien de g/wme aux écailles qui environnent toujours et de plus près les organes sexuels, et que celles qui lui sont extérieures ou étrangères devroient être désignées par un nom propre et applicable à toutes les Graminées. Je propose celui de Zépicène, que j'ai déjà em- ployé dans mes leçons publiques. Mais cetle distinction nominale n’éclaircit point la difficulté qu'on éprouve quelquefois à établir la limite entre ces deux enveloppes. Par exemple, dans quelques Graminées uniflores, la nature n'offre aucun moyen de les distinguer; et dans d’autres , elle paroit n’en admettre qu’une seule. Tächons de nous tirer de cet embarras par le raisonnement suivant. Chaque glume des Graminées plu- riflores est toujours composée de deux écailles : ce nombre est manifestement le même dans celle de la plupart des uniflores. ILest donc probable que le vœu de la nature est que toutes les glumes soient regardées comme bipaléacees. Si tous les botanistes convenoient de ce principe, la difliculté se trouveroit réduite àsune simple énumération des écailles. A cette convention, que la glume doit toujours être bipaléacée , il seroit utile d'en ajouter une autre; savoir, quelle doit toujours exister. En sorte que, si une fleur de Graminée ne présentoit que deux’ paillettes , elles appartiendroient à la glume; et alors il n’y auroit pas de /épicène. La léprcène, soit uniflore soit plu- riflore, peut être wni-bi-pluripaléacée ; et le nombre de ses paillettes, celles de la glume étant toujours déterminées , seroit facile à établir. Cependant, il n’est peut-être pas hors de propos de signaler au botaniste peu = / 17. 29 462 ANNALES DU MUSÉUM exercé trois causes d’erreur qu’il peut rencontrer dans la supputation des pail- lettes, savoir , la connexion de deux paillettes ; la présence d’une fleur neutre ; la grandeur des appendices. 1°. Deux paillettes, soit de la lépicène, soit de la glume, peuvent être unies par leurs bords, de manière à paroïître n’en former qu'une seule plus ou moins bifide ou fendue par un de ses bords. 2°. Une fleur neutre est quelquefois tellement appliquée sur une fleur hermaphrodite, que sa glume, surtout si elle est wnipaléacée, pourroit sembler appartenir à la lépicène. Le moyen d'éviter l'erreur en cette circonstance, est de se rappeler que dans un assemblage de paillettes véritablement uniflore, elles sont toutes tournées face à face ; de sorte que, si on en trouve une qui tourne le dos aux autres ,on en conclut la présence de deux fleurs. 3°. Quelquefois les appendices intraglumaires sont si manifestes, qu’ils pourroient être confondus avec la glume. Mais leur tendance constante à se rapprocher par un de leurs bords et à s’écarter par l’autre les fait aisément reconnoître. Il est bon de savoir aussi que rarement la paillette inté- rieure de la glume fait corps avec les deux appendices. On trouvera peut-être que je me suis trop étendu sur des objets qui ne sont qu’accessoires à mon sujet. Je voudrois cependant profiter de cette digression, pour dire encore quelques mots sur ces appendices. On trouve dans les fleurs hermaphrodites ou purement mâles de la plupart des Graminées, deux petits corps placés aux deux côtés du réceptacle des étamines. Ils sont quelquefois soudés en un seul. Leur forme est variable et cependant assez constante dans les espèces congénères. M. Schreber, à qui l’agrostographie est très-redevable, en a fait le premier un usage technique, que ses successeurs ont eu la blâmable négligence de ne-.pas imiter. Mais, il les a désignés par le nom de nectaire, nom appliqué à tant de choses essentiellement différentes, qu'il doit enfin être éliminé de la science. Je propose de substituer à ce nom celui de g/u- melle, qui, sans être très-bon, me paroît néanmoins préférable. Ces corps porte- roient celui de paléoles ; parce qu’ils ressemblent le plus souvent à de très-petites paillettes. On diroit alors g/umelle uni-bipaléolée, etc. Avant,de rentrer dans mon sujet, je ne puis me dispenser de faire remarquer que cetteglumelle a ses analogues dans les Cypéracées. Les soies à crochets ren- versés du dulichium et des vrais scirpus ; celles du machærina, du schænus, ete.: les paléoles, au nombre de deux dans l’Aypælytrum ; de trois dans le Jüuirena, où elles sont quelquefois entrecou pées par autant de soies ; de quatre dans le diplasia ; de six dans le mapania ; de seize dans le Zepironia, qui n’est peut-être qu’une es- pèce de chrysitrix : l'espèce de cupule du scleria : Vutricule du carex : tous ces . corps si dissemblables ne sont cependant qu’un même organe diversement ma- difié et véritablement analogue à la g/umelle des Graminées, D'HISTOIRE NATURELLE. 463 ** Du Fruit des Graminées. Le fruit des Graminées reste le -plus souvent renfermé dans la glume; qui est étroitement close ,-a pris ordinairement une dureté remarquable et tombé néces- sairement avec lui. Quelquefois aussi il n’est que lächement environné ou enve- loppé par elle; et alors l peut librement en sortir ou en être facilement séparé. Très-rarement il est en’ partie à découvert, la glume étant trop petite pour le contenir. Si la glume fructifère est manifestement comprimée, il est utile d’ob- server si la compression se fait par les côtés ou par les faces. Le fruit est toujours attaché un peu obliquement à son support ; c’est-à-dire que son point d’attache ne répond pas exactement au centre de sa base. Cette obliquité est une conséquence de l’alternité successive des parties accessoires et constituantes de la fleur. Sa forme est ordinairement modifiée par celle de la glame. Ce fruit est le plus souvent une earyopse et rarement un akène ; c’est-à-dire qu’ordinaire- ment le péricarpe fait tellement corps avec l’épisperme, qu’ils semblent ne for- mer qu’un seul tégument, et que rarement ils ne sont point cohérens. Comme il importe de distinguer ses deux faces, voici sur quoi j’ai fondé leur distinction. L'axe commun des parties accessoires et intégrantes de [a fleur étant censé pro- longé entre la dernière paillette et le fruit, il est évident que la face de celui-ci qui regarderoit cet axe seroit l’interne. J'appellerai donc face interne celle qui regarde la paillette terminale ou intérieure et face externe celle qui est tournée vers la paillette pénultième ou extérieure. Sur la face externe du fruit est une sorte d'impression aréoliforme, indiquée par une petite différence de couleur et une légère rugosité ou flaccidité du pé- ricarpe : c'est l’aréole embryonale , ainsi nommée parce qu’elle indique le lieu où est placé Pembryon. Elle est située à la base de cette face, et fort rarement elle lui est presqu’égale en longueur, comme dans le zea et le coix. Cette mème face est ordinairement unie; excepté vers l’aréole embryonale, où elle peut offrir diverses protubérances ou dépressions provenant de l’embryon lui-même. Assez souvent la face interné est marquée dans son milieu d’un sillon: longitudinal fort étroit et fermé dans les genres avena , hordeum , triticum, etc.; ouvert et ca- naliculé dans le pharus ; de la largeur de la face dans l’elymus ? hystrix. Mais ce sillon est nul ou très-légerement indiqué dans la plupart des Graminées, Quoique je n’aie pas l'intention de donner ici l'anatomie complète et micros- copique des deux tégumens de la graine, j’indiquerai néanmoins quelques ob- servations qu’on peut faire sur eux à l’aide des loupes simples. Le péricarpe est ordinairement fort mince, sec et membraneux : quelquefois aussi il a une épaisseur notable, et alors son sarcocarpe ou parenchyme est bien DO 464 ANNALES DU MUSÉUM distinct et rarement un peu charnu. On trouve constamment, vers la base de l’aréole embryonale de certaines Craminées, un petit point roux, qui correspond au sommet de ce qu’on nomme la radicule et n’offre aucun orifice. En enlevant lépi- carpe avec précaution , on voit deux vaisseaux qui descendent distinctement de la cicatrice stylaire vers la base du péricarpe en traversant sa substance. La transpa- rence de l’épicarpe permet quelquefois de les apercevoir sans dissection. Leur po- sition et leur écartement sont variables. Dans le mais (11.4, 2,3), ces deux vaisseaux circonscrivent de près l’aréole embryonale et sont par conséquent sur la face externe du fruit, Dans le coëx ( LL. d } et l’olyra latifolia (WI. D, 2,3), on les voit au contraire sur la face interne. Ils sont encore sur cette même face dans l'oryza et l’olyra axillaris ; mais plus proches l’un de l’autre, à cause de la com- pression latérale de leur fruit. Dans une nouvelle espèce d'o/yra de la Guyane, que je nomme O. pusilla , ils rampent sur la face externe, comme dans le mais. Je ne cite ces trois espèces d’un même genre que pour mieux faire sentir-la variation de position de ces vaisseaux. Dans le plus grand nombre des plantes de cette fa- mille, ils avoisinent les bords ou côtés du fruit : c’est aussi leur position ordi- naire dans l’ovaire. » Les genres avena, hordeum, zizania, ete., ont leur périéarpe distinct de Pépis- perme ; ou du moins il s’en sépare très-facilement et même spontanément. Alors, l’épisperme paroît si mince et est tellement adhérent à l’endosperme , qu'on pourroit le prendre pour lépiderme de celui-ci. Mais la substance rousse ou brunâtre, par laquelle il adhère au péricarpe et dont je vais parler plus bas, en facilite la distinction. On peut encore le distinguer par deux lignes roussâtres qui tracent un are sur le sommet de la graine, comme dans l’avena (AV.F, 3): ces deux lignes indiquent aussi l’origine et le commencement du trajet des deux vaisseaux dont j'ai parlé ci-dessus. Sous le parenchyme ou sarcocarpe du fruit de toutes les Graminées, on trouve une substance rousse ou brunâtre plus dure que:le reste des tégumens et quel- quefois testacée ou cornée. Elle forme entre les deux tégumens une sorte de tache dont la figure-et l’étendue sont variables dans les divers genres et constantes dans les espèces congénères. Elle est presque toujours visible à travers l'épicarpe, qui en reçoit une certaine modification dans sa couleur et sa surface. Cette tache, qu'on pourroit appeler le spile, est placée à la base de la face interne du fruit; ou du moins, elle tire toujours son origine de ce lieu. Le spile est arrondi dans le maïs (HE. C, à ) etautres genres à fruit non couvert; lunulé dans le coix (IL. d, 1 ); linéaire et de la moitié de la longueur du fruit dans le danthonia (IV.C). Celui de la plupart des genres ressemble à une ligne ou banderolle très-étroite, qui parcourt le milieu de la face interne de la graine, de- D'HISTOIRE NATURELLE. 465 puis sa base jusqu’à son sommet et se termine un peu en decà du point corres- pondant à la cicatrice stylaire. Si cette face est creusée d’un sillon, c’est dans le sillon que ce spile linéiforme est logé. Le spile, quelle que soit sa figure, indique le véritable point d’attache de la graine; c’est-à-dire, le lieu où l’épisperme contracte une union principale avec le péricarpe. Cette connexion particulière entre ces deux tégumens est ma- nifeste dans les fruits dont le péricarpe est distinct. Ce singulier mode d’adnexion de la graine tend à rapprocher Fhypoblaste de l’horizontalité et par conséquent à démontrer qu'il est réellement la base de l'embryon. L’épisperme de toutes les Graminées est toujours extrêmement mince et étroitement adhérent de toutes parts à l’endosperme. Son adhérence à l'embryon est généralement moindre et rarement nulle. Quelquefois aussi ilest assez faci- ment discernible du péricarpe vers l’aréole embryonale, quoique du reste il lui soit intimement uni. L’endosperme est toujours farinacé et blanc; mais sujet à quelques modifica- J ? J 1 tions dans la dureté et la couleur. Il forme toujours la majeure partie de l’amande et par conséquent celle de la farine qu’on tire des céréales. Il est, ainsi que celui de toutes les autres plantes, entièrement dénué de syslème vasculaire et formé > y par une simple congestion de la matière superflue à la formation de l’embryon. Aussi n’acquiert-il sa parfaite solidité, que lorsque la graine est parvenue à son dernier développement et que l'embryon, s’il y'existe, a atteint sa perfection. PP DE àe P L’embryon est constamment appliqué obliquement au bas de la face externe de l’endosperme ; de manière que son extrémité inférieure forme toujours celle de l’amande et que toute sa face antérieure est immédiatement recouverte par les tégumens séminaux. [l est donc extérieur et latéral ; c’est-à-dire, qu’il est adossé extérieurement et latéralement à l’endosperme. De ces deux qualités de l'embryon des Graminées la première lui est commune avec celui de quelques autres e2do- rhises, telles que les Eriocaulées, les Saururées et leurs affines cabomba ; hydro peltis : la seconde, ou l'application latérale-basilaire est un de ses attributs exclu- sifs. On peut mettre encore au nombre de ceux-ci sa forte agglulination à la substance endospermique ; en remarquant toutefois que cette dernière propriété lui est procurée par l’hypoblaste. Le volume de l'embryon, relativement à celui de l’endosperme , est variable dans les diflérens genres et néanmoins constant dans chacun d’eux. Dans la très- grande majorité de ceux-ci, celui de l'embryon est considérablement plus petit. On ne sauroit douter que la proportion relative de ces deux corps des Graminées doit influer sur la qualité de leur farine. Il est probable que la difieile 466 ANNALES DU MUSÉUM conservation de celle du maïs doit être attribuée à la grosseur extraordinaire de son embryon. Ce seroit à quelqu’habile chimiste d’éclaircir cet objet intéressant; en isolant patiemment une certaine quantité de la matière de chacun de ces deux corps; en l'analysant avec soin; en fixant exactement le rapport naturel de leurs masses; en recherchant ce qui pourroit résulter de la variation artificielle de leur pro- portion , elc. L’embryon est composé d’un Aypoblaste qui constitue sa face postérieure et la majorité de son volume, et d’un b/aste attaché à la face antérieure de celui-là. La circonscription de l’hypoblaste, qui forme celle de l'embryon, varie depuis la figure orbiculaire jusqu’à la linéaire et même fort étroite : mais’ l’ovale diverse- ment modifiée est la plus fréquente. Sa face antérieure est généralement aplatie, ei la postérieure d’autant plus convexe ou saillante dans son milieu qu’il a plus d'épaisseur ; ses bords sont toujours obtus; sa substance est charnue et ordinaire- ment assez tendre. Le blaste paroît généralement comme un cylindroïde couché longitudinalement sur le milieu de la face antérieure de l’hypoblaste. IL est fixé comme postérieurement à celui-ci par sa partie moyenne, de manière que ses deux extrémités sont libres. La supérieure, ordinairement plus longue et plus ou moins comprimée par ses faces , est toujours notablement .plus courte que l'hypoblaste : l’inférieure, conoïde ou turbinée,excède assez souvent le bord inférieur decetorgane. Quelquefois le blaste paroït simplement appliqué sur l'hypoblaste; de manière que tout son contour et sa face antérieure sont entièrement à découvert : dans ce cas, il est large et aplati; tel est celui du à/é (ILE. F ), de l'orge (MI. D'), etc. Le plus souvent il est reçu dans une fossette, par les bords plus ou moins saillans de laquelle ses côtés sont pressés ou en partie recouverts; c’est ce qu'on peut voir dans l’avena (IV. H), le danthonia (IV.E ), etc. Plus rarement les deux bords de la fossette blastifère se dilatent et se rapprochent l’un de l’autre jusqu’à conti- guité et de manière à recouvrir complétement le blaste : les exemples de cette ré- clusion peuvent être tirés des genres sea, coix et sorghum. Le pennisetum typhoi- deum , etc., semble offrir une transition de la fossette ouverte à la fossette close. En efet, la sienne est fermée du milieu et béante par les deux bouts. Les bords de la fossette la mieux close ne sont jamais soudés ou continus l’un à l’autre : il reste toujours entre eux une fente qui est quelquefois entr'ouverte par son extré- iité supérieure. Mais il arriwe fréquemment que lorsqu'on a enlevé l’épicarpe, une portion du sarcocarpe et de l’épisperme reste agglutinée à l'embryon et masque tellement cette fente, qu’elle ne devient évidente que par le dégagement. Avant de passer à un examen plus approfondi du blaste, je dois parler d’une partie externe et accessoire de celui-ci, à laquelle j’ai donné le nom d’épiblaste, D'HISTOIRE NATURELLE. 467 J'appelle ainsi toute substance qui, interrompant transversalement la face anté- rieure du blaste, sépare sa partie ascendante, qu’elle recouvre plus ou moins, de son extrémité inférieure à laquelle elle s’unit, L’épiblaste de Pavena(IV.H,4) et du é#riticum (WI. F, 6) consiste en un petit bord libre, qui, paroissant n'être qu’un processus de la substance superficielle de la partie inférieure du blaste, s'applique sur la base de la partie supérieure ou ascendante. Dans ces deux genres, la forme conoiïdale ou turbinée de l’extrémité inférieure du blaste ne paroït nullement altérée par la présence de cet appendice. L’épiblaste du parus (IV. E, 5) ressemble au premier coup-d’œil à une petite bourse, dont le bord supérieur échancré en fer-à-cheval embrasse obliquement la base de la partie ascendante du blaste. Cette petite bourse forme elle-même l'extrémité inférieure de celui-ci ; ou si l’on veut, se confond tellement avec elle, que la présence d’un épiblaste n’est indiquée que par le petit bord qui ceint obli- quement le milieu du blaste, Cet appendice commence donc iei à modifier la forme de l'extrémité inférieure de celui-ci. Une sorte de disque irrégulièrement arrondi et presque lenticulaire constitue Fépiblaste de l’o/yra (HE, 2). Ce disque, fixé à l’hypoblaste par le centre de sa face postérieure et libre par tout son contour, a une largeur triple de celle de la pamfiämontante du blaste et la couvre à moitié par son bord supérieur. Confondu avec le conoïde basilaire du blaste, il donne à celui-ci une configuration extraordinaire. Mais l'embryon de l’oryza va nous offrir une structure encore plus surprenante. L'épiblaste de l’oryza (IV. E, 2) a la figure ovale et presque la grandeur de l'hypoblaste (E, 1°). IL est tellement soudé à celui-ci par tout son contour qu'il ne peut en être distingué extérieurement que par une légère dépression qui eu marque la circonscription. Son extrémité inférieure se confond entièrement avec celle de l’hypoblaste, Il résulte de ce qui précède, que la face antérieure de lem- bryon est complétement indivise et que nulle trace de blaste n’apparoît au dehors. Enincisant la partie supérieure de l’épiblaste, on voit qu’elle forme avec la partie correspondante de l’hypoblaste une cavité; dans laquelle est inclus un corps(E, 4), qu’on reconnoil bientôt pour être la partie ascendante du blaste. Voilà donc le blaste contenu par sa partie supérieure dans une cavité hermétiquement fermée, et nullenient distinct par sa partie inférieure. Cette structure véritablement éton- nante de l'embryon du riz nécessite quelques raisonnemens qui puissent prému- nir l'observateur contre quelques erreurs, dans lesquelles il pourroit se laisser facilement entrainer. En comparant l'embryon du riz avec celui du mais (II. D, 3), leur différence paroit d’abord se borner à ce que la face antérieure du premier est indivise et celle du second fendue longitudinalement dans son milieu. En sorte que, em 468 ANNALES DU MUSÉUM supposant les bords de la fente du mais soudés l’un à l’autre, on croiroit le rendre semblable à celui du riz. Mais cette ressemblance, fondée sur une considération extérieure, est bientôt détruite par la comparaison des blastes. L’analogie de leurs extrémités supérieures se soutient bien; mais leurs extrémités inférieures pré- sentent une différence essentielle. Le conoïde basilaire du blaste dunaës (HE. G:,5), renfermant son rudiment de radicelle (F, #), est parfaitement distinct de la substance qui recouvre le blaste. La partie supérieure de la fossette blastifère communique antérieurement avec l’inférieure ; de sorte que les deux extrémités du blaste sont logées dans la même excavation. Dans le riz, au contraire, nul conoïde basilaire , et le rudiment de radicelle (IV. E, 5) paroît immédiatement renfermé dans l’extrémité inférieure de la substance qui recouvre le blaste, La cavité qui contient la partie ascendante (E, 4 ) de celui-ci n’a inférieurement aucune issue, , Mais, dira-t-on, à quelle partie de l'embryon appartient la substance qui re- couvre le blaste entièrement et sans aucune ouverture? Qu'est devenu le conoïde “basilaire ou l'extrémité inférieure de ce même blaste? Si la natureeut passé brusquement de l'embryon du mais à celui du riz, la solution de ces deux ques- tions seroit extrémeme iMicile et peut-être impossible. Mais elle a créé des embryons intermédiaires, qui, en éclairant mutuellement leur structure, jettent du jour sur celle que nous cherchons à connoître. Comme j'ai déjà parlé de ces embryons en décrivant leurs épiblastes, j’en choïsirai un seul auquel je compa- rerai celui dont nous nous occupons. Les épiblastes de l’avena (IV. H, 4), du #riticum (I. F,6 ) et du pharus (IV.E, 5 ) nous conduisent graduellement à reconnoître la même partie dans le petit disque orbiculé (IL E, 2) qui est fixé à la face antérieure de l'hypoblaste de l’olyra. Si ce disque prolongeoit un peu son bord supérieur pour couvrir toute la partie ascendante (E, 3) du blaste, il deviendroit plns analogue à la-sub- stance qui, dans le 71:, couvre totalement cette même partie. Mais, sans rien sup- poser, les disques épiblastiques de ces deux genres ont une ressemblance évidente dans le reste de leür structure. L’extrémité inférieure de celui de l’o/yra contient intérieurement un petit rudiment (I. F, 3) de radicelle, qui’ésiste aussi et éga- lement placé (IV.E, 5) dans le 73. Dans les autres Gramninées ; ce principe interne de radicelle est logé dans le conoïde basilaire du blaste. I’extrémité inférieure des deux épiblastes que nous comparons ici paroït donc former celle du blaste et remplacer ce conoïde basilaire. | Quelques observations énoncées un peu plus haut me portent à expliquer ce remplacement de la manière suivante. La substance de l’extrémité inférieure de Vépiblaste s’unit, se confond avec celle du conoïde, Cette union modifie tellement D'HISTOIRE NATURELLE. 469 Ja forme de ce dernier, qu’il ne peut plus être distingué. Mais néanmoins son existence est attestée par le rudiment radicellaire. Tous les raisonnemens précé- dens tendent donc à démontrer, que c’est à la présence d’un épiblaste qu'il convient d'attribuer les singularités qu’on remarque dans la structure de l'embryon du riz. Sa différence essentielle se trouve réduite à la réclusion totale de la partie su- périeure du blaste et à la cavité complétement close qui la renferme. Cette cavilé, qui fait une exceptiongbien remarquable à la loi qui n’en admet point d'autre que la cotylédonaire, peut devenir une source de raisonnemens spécieux dont je ne crois pas devoir m'occuper. : Si je recherche l’origine de l’épiblaste, je crois l’entrevoir dans un prolonge- ment de l’hypoblaste. La substance du premier paroît être une continuation de ceile du second. Cette continuité de substance se manifeste plus clairement dans lembryon du riz que dans les autres épiblastes. En effet, sa coupe longitudinale (IV, F) ne présente inférieurement aucune interruption entre ces deux corps. Mais ce qui rend cette origine de l’épiblaste plus probable, c’est son défaut de développement dans la germination. Il me paroit utile de prévoir une question qu’un lecteur clairvoyant pourroit me faire. Vous avez annoncé, me diroit-il, que le conoïde creux terminant su- périeurement le blaste des Graminées étoit le cotylédon : vous regardez l'hypo- blaste comme une radicule et vous venez de dire que l’épiblaste n'étoit qu'un prolongement de celui-ci : le cotylédon de l’embryon du riz est donc renfermé dans sa radicule ? La meilleure réponse que je puisse faire à cette question aussi embarrassante que judicieuse, c’est de citer un exemple d’une pareille exception dans les exo- rhizes. | 1 L'embryon du pekea butyrosa ( V ,62)a en général la même structure que celui du P. tuberculosa ( V , 60) dont j’ai donné ci-dessus la description. Mais la tigelle et les cotylédons du premier (62, ) sont recouverts par un prolongement mince de la substance radiculaire; au lieu d’être comme ceux du second (60, a) revêtus immédiatement par le périsperme. En sorte que la tigelle et les cotylé- dons du 2. butyrosa (63, b ) sont réellement renfermés dans une cavité interne de la radicule (653, &). Or, ce fait est bien analogue à celui que nous avons observé dans le riz. : L’embryon de l’Aydrocharis nous offre encore un autre fait, qui, sans être par- faitement semblable, mérite cependant d'en être rapproché. Son cotylédon (V,45,a) est entièrement plongé et étroitement contenu dans la radicule : il n’y a que la nudité de son sommet qui l’empèche d’être comparable à ceux dont je viens de parler. ny. 60 470 ANNALES DU MUSÉUM Je vais maintenant exposer plus en détail la structure du blaste des Graminées. Tous les blastes que nous avons considérés dans le $ précédent sont fixés à l’hy- poblaste par leur extrémité inférieure : le plan de leur adnexion est égal au dia- mètre de la tigelle : et on peut leur donner (VE) une direction perpendiculaire relativement à l’hypoblaste, sans altérer leur forme. Il n’en est pas de même du blaste des Graminées. I est terminé inférieurement par un conoïde ( V,54, 4.56,e) qui semble le prolonger au delà de son adnexion (54, &56, d). Celle-ci paroît donc latérale et son étendue n’est point en rapport avec le diamètre de la base de sa partie ascendante, Enfin, il ne peut être dressé sans déformation. Un examen plus approfondi du blaste des Graminées fait naître les réflexions suivantes. Puisque l’observation démontre que tout blaste doit être fixé à l’hypo- blaste par sa base même, la base de celui des Graminées doit se trouver dans la partie par laquelle il est attaché (72, e )et le bout du conoïde ( 72, 4) ne saurait être son extrémité inférieure ou sa base. Si je réduis le plan de l’adnexion du blaste au diamètre de sa tigelle et que je le suppose dressé (75,c), il devient tellement ressemblant à celui des autres macropodes , qu’il n’en diffère plus nota- blement que par la présence de son conoïde basilaire (73, 4). Ne trouvant dans les autres blastes aucune partie à laquelle je puisse rapporter ce conoïde, j’en conclus qu'il est exclusivement propre à celui des Graminées. Lorsque je consi- dère attentivement ce blaste ainsi dressé (73, c), le conoïde (73, 4) me paroît n'être qu'une bosse latérale du bas de la tigelle. L’embryon du maïs surtout me confirme dans cette idée, en m'offrant sur le côté opposé de sa tigelle une autre petite bosse (72,e.73,e), qui, renfermant comme la première un rudiment de radicelle, n’en diffère réellement que par sa petitesse. Mais avant de déduire des observations précédentes aucune assertion, il est convenable d'examiner aussi le blaste de quelques autres Graminées. Si je sou- mettois celui du b/6 (IT, K ) aux mèmes opérations que j'ai appliquées à celui du maïs (AV ,73), il est évident que le bas de sa tigelle auroit trois bosses laté- rales; savoir , une principale formée par le conoïde commun à toutes les Grami- nées , et deux collatérales ( K, 7) moins grosses. Ces trois bosses sont bien cer- tainement de la même nature, puisque chacune d’elles (G, 1,2, 3) renferme distinctement un rudiment de radicelle. En procédant de la même manière à l’examen de ceux du coix et de l'orge, leur tigelle n’aura que la seule bosse prin- cipale : mais en la disséquant, on trouvera qu’elle contient ; dans une seule cavité, trois rudimens de radiceiles dans le premier genre (11, H,5) et depuis trois jus- qu’à six dans le second (IE, E, 2) La tigelle de presque tous les aiftres genres n’offriroit également que la bosse principale, mais ne renfermant constamment qu’un seul rudiment radicellaire. D'HISTOIRE NATURELLE. 4gù Comme le conoïde basilaire du blaste ou sa bosse tigellaire appartient généra- lement et exclusivement à l’ordre des Graminées , il convient de lui donner un nom propre, Je le nomme radiculode , parce qu’il simule tellement la radicule des embryons endorhizes non - macropodes , que tous les botanistes l’ont pris pour celle-ci. Je crois avoir démontré dans le $ précédent : 1°. que l’hypoblaste des Graminées est identique à celui des autres embryons macropodes, et qu’il constitue égale- ment l'extrémité radiculaire : 2°. que , nonobstant l’assertion presqu’unanime des botanistes, la partie ascendante et libre de leur blaste ne pouvoit être regardée comme la gemmule, parce qu’il étoit essentiel à celle de tous les embryons en- dorhizes d’être renfermée dans une cavité cotylédonaire exactement close de toutes parts : 3°. que, puisque l’extrémité supérieure du blaste offroit une pareille cavité renfermant des rudimens de feuilles, il étoit plus convenable à l’unifor- mité du plan de la nature de regarder la partie cave de cette extrémité comme le vrai colylédon : 4°. enfin, que la tigelle des Graminées étoit peu manifeste, non- seulement à cause de sa brièveté, mais encore parce qu’elle adhère par une partie de sa longueur à l’hypoblaste, sur lequel elle est brusquement réfléchie et couchée. J'essayerai maintenant , en m’appuyant sur les observations quifviennent de précéder, de prouver que la radiculode n’est réellement qu’une bosse de la tigelle et non pas une radicule. Si on retranche, avec la précaution et la dextérité convenables, le sommet de la radiculode et de son tubercule radicellaire : si on ôte à cette partie sa faculté végétative par une légère contusion , une incision, etc., toujours sans déplacement ou autre altération de l'embryon; celui-ci pourra néanmoins se développer par la germination. Lorsqu'on applique un de ces moyens d'annulation à la radicule de toute autre endorhize, la germination devient impossible. J'ajouterai aussi que la résection de l’hypoblaste tue l'embryon. Ces faits tendent à prouver que la radiculode n’est point une radicule, et que l’hypoblaste remplit des fonctions analogues à celles de la radicule. ; En considérant la radiculode comme une bosse latérale de la tigelle, la plu- ralité de pareilles bosses devient moins surprenante. En effet, nous en voyons également se former par la germination sur la tigelle des embryons macropodes et même sur celle de quelques autres endorhizes. Il n'y a plus alors de différence que dans l’époque de la formation de ces bosses. L’embryon des Graminées auroit pour caractère particulier d’avoir sur sa tigelle une ou plusieurs bosses radicel- laires préexistantes à la germination; tandis qu'elles ne se forment que par celle- ci sur celle des autres macropodes. La pluralité de tubercules radicellaires, sor- tant ensemble d’une même cavité de la tigelle, paroïîtroit aussi moins extraordi- Go * 472 ANNALES DU MUSEUM naire ; lorsqu'on remarqueroit que plusieurs radicelles sortent quelquefois de la même manière du bas de la tige de certaines plantules endorhizes et surtout de celles qui sont tubéreuses où bulbeuses. Mais c’est principalement à la germination qu’il appartient de dissiper les doutes qui pourroient suspendre le jugement des hotanistes sur mes diverses propositions relatives aux Graminées. *** De la germination des Graminées. Lorsque l’humidité a convenablement pénétré et gonflé toutes les parties du fruit soumis à la germination, les tégamens séminaux se rompent diversement vers l’aréole embryonale. La radiculode se montre d’abord au dehors sous la forme d’un conaide, qui s’ouvre bientôt latéralement, plus ou moins près de sou sommet, pour laisser sortir un petit tubercule qui y étoit renfermé. Ce tubercule s’allonge pour devenir la première radicelle, et sa base est engaïnée par le reste du conoïde , qui a cessé de croître dès sa perforation. En sorte que la longueur de la gaîne radicellaire, qui est toujours plusieurs fois moindre que celle de la graine, dépend de l’aceroissement que la radiculode a pris avant l'émission de son tu- bercule interne. Si la radiculode renferme plusieurs tubercules, leur éruption et leur croissance sont simultanées; et alors on ne peut accorder la primauté à au- cune des radicelles qui en proviennent. En même temps que la radiculode com- mence ainsi à se développer, la partie supérieure du blaste croît aussi et s’allonge de plus'en plus en sens opposé de la radicelle principale. Si la graine germe dans la glume, comme cela arrive fréquemment, la radi- culode perce la base de la paillette extérieure pour saillir au dehors et exécuter son développement. Mais lorsque l’effort qu’elle fait pour opérer la perforation est anéanti par la facile rétrogression de la graine ou du fruit, elle se courbe et remonte pour sortir, comme le cotylédon, par le haut ou les côtés de la glume. Quelquefois aussi c’est la radicelle seule qui, malgré sa ténérité, perce la pail- leite; et alors le reste de la radiculode demeure inclus dans la glume, où il est diversement défornié par la pression qu'il éprouve. Les bosses radicellaires qui existent sur la tigelle se développent presqu’en même temps que la radiculode, si elles sont notablement grosses, comme dans le blé, le seigle, etce., ou bien elles augmentent d’abord et n’émettent leur radi- celle qu’à des intervalles de temps variables en raison de lenr grosseur primitive. La germination peut aussi en produire de nouvelles sur différens ponts de la tigelle. Toutes ces bosses radicellaires sont soumises au même mode de dévelop- pement que la radiculode. MTandis que les radicelles croissent et affermissent la plantule, la partie supé- D'HISTOIRE NATURELLE. 473 rieure du blaste s’allonge et forme un tube cylindracé, qui s’amineit de plus en plus et devient presque, membraneux. Lorsque ce tube a acquis une longueur double, triple, etc., de celle de la graine, le rudiment de la première feuille, qui a cru en même proportion, le perce latéralement près de son sommet pour sc prolonger au dehors. Alors ce tube devient une gaîne qui, incapable d’acroisse- ment ultérieur en longueur , enveloppe la gemmule, Les rudimens de feuilles que celle-ci émet successivement sont convolutés et commencent à se teindre de leur couleur verte avant leur sortie de la gaine cotylédonaire. Pendant tout le temps de la germination, l'hypoblaste reste immuable, mais non pas dans l’inertie. Car son tissu cellulaire et ses vaisseaux sont baignés et remplis de sucs qu'ils transmetteni pendant quelque temps au reste de embryon, Mais dès que l'abondance de la substance nutritive fournie par les radicelles rend inutile sa communication avec le blaste, il se flétrit, se ride et s’atrophie, comme fait tout corps organisé dont on suspend ou détruit les fonctions. Il per- siste néanmoins attaché à la plantule, jusqu’à sa destruction, qui ordinairement ne s'opère que fort lentement. A mesure que lembryon s’imbibe des fluides propres à exciter son premier mouvementgerminatif, la matière farinacée de l’endosperme s’amollit et prend ordinairement l’apparence d'une pulpe amylacée. Elle devient plus où moins molle, plus ou moins liquide, selon sa nature primitive et l'humidité du lieu où se fait la germination. Cette matière est agglutinée à l’épisperme et à la face postérieure de lhypoblaste qu’elle paroit humecter : mais peu à peu elle se vicie et se dessèche, en laissant dans les tégumens séminaux un résidu qu'ils entrainent enfin dans leur destruction. Parler de la germination des Graminées sans citer Malpighi, ce seroit com- mettre une injustice blämable envers un savant distingué, dont les écrits sont pleins d'observations curieuses et neuves pour l’époque où il écrivoit. Aujourd’hui même, le botaniste ne sauroit lire sans intérêt la description de la germination du blé, qui se trouve dans son Axar. D. PL., part. IL, p.8, tab. V. Elle est si exacte et tellement circonstanciée, qu’en changeant quelques dénominations et en sup- pléant de légères omissions, on l’assimileroit aisément à ce que les hotanistes modernes peuvent écrire sur cet objet. Puisque tous les effets évoiutifs de la germination se manifestent au-dessus de l'hypoblaste, sans que son volume et sa forme en paroissent changés, il est évi- dent qu'on ne peut le rapporter qu’au gros corps radiculaire auquel j'ai donné le même nom dans les embryons macropodes. Il est donc convenable de le re- garder aussi comme la radicule ou au moins comme une expansion extraordi- Le] naire de l'extrémité de celle-ci : dès-lors il constitue La base ou la partie la plus P } 74 ANNALES DU MUSÉUM ve inférieure de l'embryon des Graminées. Cette dernière position, que sa compa- raison avec les autres hypoblastes lui assigne avec certitude, repousse suffisam- ment le nom de cotylédon qu’on lui a donné. Un cotylédon, au-dessus duquel la radicelle primaire se développeroit, seroit sans exemple dans toute la série des en dorhizes. La même désignation de la vraie base de lPembryon démontre aussi la latéralité de la radiculode : or, cette situation n’est jamais celle d’une radicule, Ilest donc plus naturel de la considérer comme une bosse radicellaire de la tigelle et d'établir son analogie avec les tubercules radicellaires que la germina- tion développe sur celle des autres embryons macropodes. Le conoïde creux formant l'extrémité supérieure du blaste est devenu, par la germination, un tube(zea, ,1,5. Zriticum, UX, L, 1), dans lequel la gem- mule, qui a cru comme luï en longueur, est étroitement renfermée. Par suite de la germination, ce tube est percé près de son sommet par le rudiment de la première feuille (IV , avena , K, 6. Danthonia, K, 6 }et devient une gaine tu- buleuse. Si on compare le tube du sea à celui du scirpus (X, 17,0), on les trou- vera parfaitement semblables. On peut voir aussi le même tube dans le canna (1,6,b ); mais proportionnellement plus court et déjà converti en gaine par l'émission de sa gemmule, dont les rudimens de feuilles sont convolutés comme ceux des Graminées. Or, il est incontestable que le tube du scirpus et du canna appartient au cotylédon : donc celui des Graminées précitées est aussi formé par le cotylédon. La dénomination des parties de l'embryon des Graminées que j'ai établie me paroît si bien confirmée par la germination, que je doute qu'aucun botaniste ju- dicieux soit désormais tenté de la contester. $ V. CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES SUR LES ENDORHIZES MENTIONNÉES DANS CE MÉMOIRE. En développant dans cet écrit quelques-uns des principes qui n’avoient été que brièvement énoncés dans mon opuscule sur le Fruit, je crois avoir dissipé, ou du moins éclairei, les nuages qui obscurcissoient l’analyse des embryons en- dorhizes. Tous les faits et toutes les réflexions que j’ai produites tendent à raf- fermir ces principes contre les attaques de ceux qui ont émis des opinions con- aires, En vain ils s’efforceroient de défendre ces opinions : la nature paroît lutter contre leur admission. Elle récuse des dénominations qui troubleroient la liaison de ses opérations : elle ne peut approuver que celles qui sont fondées sur l’ana- logie des parties indiquée par elle-même. Gæriner a eu raison de regarder l’hypoblaste comme un organe particulier, D'HISTOIRE NATURELLE. 475 en le désignant par le nom impropre de vitellus ; mais il s’est trompé lorsqu'il l’a pris pour un corps distinct de l'embryon. Jussieu et ses sectateurs me parois- sent s'être plus écartés de la vérité en faisant de ce corps le cotylédon des Graminées. N'étant pas guidés par l’analogie, ils n’ont pu remarquer qu’on ne pouvoit pas donner ce nom à une expansion charnue, qui, servant de support à toutes les autres parties de l’embryon, en constituoit*évidemment l’extrémité inférieure. Mais cette position, qui entraine la dénomination de radicule, ne pouvoit leur être indiquée que par la comparaison des divers hypoblastes qui leur étaient inconnus. Maintenant que j'ai fait connoître ceux-ci plus en détail que dans mon opuscule, il est probable qu'aucun botaniste ne révoquera en doute leur nature radiculaire. Si leur grosseur excessive, relativement aux autres parties de l'embryon, réveilloit encore un sentiment contraire dans l'esprit d’un ob- servateur, qu’il se rappelle le renflement basilaire de l'embryon du zanichellia, et la disproportion de la radicule de quelques-unes de ses affines : qu’il réfléchisse sur les exemples de grosses radicules que j’ai cités dans les exorkizes. Il ne doit pas chercher entre ces dernières et les hypoblastes une identité parfaite, mais une simple analogie. Car, un hypoblaste seroit aussi déplacé dans un embryon exorhize, que son existence est peu surprenante dans un embryon endorhize. En effet, le premier doit prolonger sa radicule même en racine primordiale et lhypoblaste y mettroit obstacle; tandis que ce même corps favorise dans le se- cond la radication latérale, qui est un de ses attributs particuliers. Pour établir et maintenir dans les endorhizes cette sorte de radication, non- seulement la nature met empêchement à la formation primitive d’un pivot, mais encore elle fait périr l'extrémité inférieure de la tige ou, de la souche, à mesure que de nouvelles racines se forment et se développent plus haut. De là l'espèce de troncature radicale qu'on remarque toujours dans ces plantes. La mort de l’hypoblaste, en occasionnant celle du bas de la tige qu’il a d’abord nourrie, rentre donc encore dans le plan général des opérations de la nature. - En comparant une graine germante de Grarminées avec celle d’une autre en- dorhize en germination admotive, d’une Cypéracée, par exemple, on pourroit être tenté de trouver une certaine analogie entre l’hypoblaste de la première et Ja tête incluse du cotylédon de la seconde. Mais l'illusion cesse dès qu'on re- marque que l’un est resté immuable et que l'autre a changé très-manifestement de volume et de forme. Cette réssemblance apparente entre ces deux corps pour- roit bien avoir été une des causes de l’erreur de ceux qui ont regardé Phypoblaste comme un cotylédon. Cette erreur devoit nécessairement les détourner de la recherche du vrai co- » , , tylédon. Personne n’ayant encore cherché, dans l'analyse comparée des embryons 476 ANNALES DU MUSÉUM endorhizes, le moyen de caractériser leurs parties constituantes, la dénomination de celles-ci ne pouvoit être qu’arbitraire. Gærtner, préoccupé des formes que les embryons endorhizes lui avoient offertes, vit tout l'embryon dans le blaste des macropodes et n’en désigna point les parties. Jussieu, éclairé par la germina- tion, décrivit le vrai cotylédon des Graminées comme une gaîne primaire envi- ronnant la gemmule. Il l’aüroit sans doute reconnu à ce dernier caractère, si lhypoblaste ne l’avoit pas induit en erreur. Quelques botanographes plus mo- dernes, dont les écrits sont postérieurs à la publication de mon opuscule, ont commis une méprise moins excusable, en prenant toute la partie supérieure du blaste pour la gemmule, Jussieu avoit bien distingué la véritable gemmule de son enveloppe; ceux-ci ont confondu l’une et l’autre sous le même nom. Ils se sout empressés de publier quelques observalions détachées, sans se donner la peine de voir si elles pourroient se rapporter aux autres objets du même ordre que ceux dont ils traitoient. Mais comme je me propose de répondre en particu- lier à leurs Mémoires, je ne crois pas devoir nv’occuper ici de l’examen de leurs opinions. L’énoncé précédent des sentimens des auteurs sur les embryons endorhizes, et notamment sur celui des Graminées, sufit pour faire voir qu’ils ont procédé arbi- trairement dans l’exposition de leur structure. En suivant leur marche, on seroit conduit à établir, dans divers ordres de la même série, une dénomination des parties de l'embryon particulière à chacun d’eux. Celle que j'ai proposée, en ré- duisant la diflérence des parties analogues à une simple modification de forme, tend à ramener les différens ordres à un accord parfait. Elle a même l’avantage d’obvier à |la désunion que] la dissonance de structure extérieure pourroit occa- sionner entre des embryons de la même famille naturelle. On pourra unir sans répugnance, par le mème nom ordinal, des embryons macropodes à d’autres qui ne le sont pas. C’est ainsi, par exemple, que le rzppia et le zostera ; le naïas, le potamogeton et le sanichellia se rallieront sans peine sous l’étendard commun des Potamophiles. Mais ce qui paroît devoir donner une grande stabilité aux dé- nominations que jai établies, c’est qu’elles sont fondées sur la considération de la position respective des parties, de leur structure interne et de leurs fonctions dans la germination. Quoique je pense avoir suflisamment démontré que le ne/umbo et le rymphæa ont un embryon véritablement monocotylédoné ou endorhize, je crois néanmoins utile de confirmer encore celte asserLion par quelques observations sur ces plantes. M. Salisbury, botaniste auglais, a publié sur les Nymphéacées une dissertation que je viens de lire avec beaucoup d’intérêt dans les Annales botaniques de Londres. Ce savant divise cet ordre naturel en deux sections, en raison de l’unité D'HISTOIRE NATURELLE. 477 et de la pluralité de pistils. IL range dans la seconde section des Po/ygynes le genre kydropeltis à côté du nelumbium qu’il appelle cyamus. IL attribue aux DNymphéacées en général un embryon dicotylédoné. Je ne saurois douter qu’il a été entraîné dans cette dernière erreur par les bota- nistes francais qui l’ont d’abord commise; et je suis porté à croire qu’il n’a point analysé lui-même l’embryon de ces plantes. S'il eut examiné celui de l’Aydro- peltis, que j'ai décrit dans le premier article de ce Mémoire, #l eut au moins élevé quelque doute sur opinion qu’il embrassoit. Mais je ne puis que louer la sagacité de ce botaniste dans la découverte qu'il a faite de l’aflinité d’un genre encore peu connu. Car, quoique l’Aydropeltis n’appartienne pas exactement à la famille des Nymphéacées , il est néanmoins certain que celle qu’il doit former avec le cabomba s'en rapprochera beaucoup et peut-être davantage que le re/umbo lui-même. Sans m’arrèler à une coordination qui n’a point de rapport avec mon sujet, je vais essayer d’affermir ces diverses plantes dans la place que leur embryon leur assigne parmi les erdorhizes. Ne voulant pas répéter ce que j'ai dit sur celui- ci, j'aurai recours à des considérations qui lui sont étrangères. Le nelumbo et le nymphæa ont un port particulier dont on ne trouve aucun exemple dans les exorkizes aquatiles. C’est probablement pour cette raison qu'Adanson et Jussieu, très-versés dans l’art de rapporter les plantes à leur Série sans le secours de l'embryon, n’ont pas jugé à propos de placer ces deux genres dans celle des dicotylédones. En cherchant à prouver qu'ils n’ont au- cune affinité naturelle avec ceux dont quelques modernes veulent les rappro- cher, je me trouverois entrainé dans des discussions aussi peu avantageuses pour la science qu’elles seroïient étrangères au but que je me propose ici. Je reviens donc au port des Nymphéacées. Si, au lieu de chercher inutilement ses analogues dans les exorkizes, je dirige mes recherches vers les erdorhizes, j'apercois parmi celles-ci des plantes aquatiques, dont les unes m’offrent le mème port, et les autres des analogies dans la structure et le développement de certaines parties. En effet, l’Aydrocharis , le cabomba et V’Aydropeltis ont exactement le port des plantes dont il s’agit : les feuilles du premier s’assimilent à celles du »ymphæa et celles des autres sont peliées comme dans le »e//mbo. Non-seulement les pé- tioles de tous ces genres ont la même organisation interne, mais encore ils ont à leur base une gaîne d’une structure propre aux endorhizes. Les jeunes feuilles du cabomba, de l’Aydropeltis et des Saururées sont involutées, c'est-à-dire roulées en dedans par les deux bords, exactement comme celles du re/wmbo et du rymphæaj Mais la foliation de l’Aydrocharis est couvolutive, et se rappomle par conséquent à celle des Graminées, des Musacées, des Zingiberacées, des LU | 61 4) 478 ANNALES DU MUSÉUM Aroidées, etc. Je pourrois étendre davantage cette comparaison du nelumbo et des vraies Nymphéacées avec les endorhizes. Mais je pense que la réunion de toutes mes observations suffira pour indiquer aux botanistes que le ze/umbo et les Nymphéacées doivent être définitivement rangées parmi les endorhises. S VI. REVUE ET APPLICATION DES PRINCIPES DÉVELOPPÉS DANS CE N MÉMOIRE. L'exposé que j'ai fait de la division générale des végétaux en acotylédons, mo- nocotylédons , dicotylédons , m°a paru suflire pour en démontrer l’imperfection. I’absence, la présence et le nombre de certains organes de l'embryon, n’offrant point un caractère de première valeur, ne sauroient être la base d’une division primaire. Le mot acotylédons suppose son opposé cotylédonés : de ces deux mots mis ainsi en opposition, le premier n'exclut point la présence d’un embryon; mais seule- ment celle de cotylédon. D'où il suit que les plantes dites acotylédones sont cen- sées avoir un embryon dépourvu de cotylédon. Je crois avoir prouvé que les corpuscules reproductifs ou les sporules de ces plantes différoient essentielle- ment des graines par le mode de leur formation, leur structure interne et le dé- faut d’embryon. Si jai pu convaincre les botanistes que le défaut d’embryon entraînoit nécessairement celui d’organes sexuels; ils trouveront que le mot cryptogames est aussi impropre que celui d’acotylédons. L'’incertitude et la variabilité du nombre des cotylédons font aussi chanceler les deux autres classes. Nous avons vu les dicotylédones forcées d'admettre parmi elles des embryons sans cotylédon apparent; quelques-uns à deux cotylédons soudés en un seul corps; d’autres enfiu à trois, quatre, ou un plus grand nombre de cotylédons. Nous avons aussi remarqué que les plantes développéës ou adultes de ces deux classes n’offroient aucun signe qui put toujours équivaloir à l’obser- vation immédiate du nombre des cotylédons. Le diagnostic justement le plus accrédité, celui qui est fondé sur l’organisation ou le tissu de la tige, est non- seulement loin d’être généralisé, mais encore par fois incertain. Les vices évidens de cette division générale n'ont enhardi à en proposer une nouvelle, qui, si elle n’a pas plus de succès, pourra du moins mettre sur la voie d’une autre meilleure. Le temps pourra la rectifier, la modifier et peut-être lui en substituer une autre. Mais il est certain que la structure interne de l’em- bryon doitoffrir, pour la distribution primaire des plantes, une base plus solide que le nombre de ses parties constituantes. Voici l’exposilion sommaire de la division que je soumets au jugement des botanistes. D'HISTOIRE NATURELLE. 479 INEMBRYONÉES. Nul sexe : sporules : nul embryon. ENDORHIZES. Radicule (ou tigelle ) perfo- rée ou rompue, dans la germination, par un (ou plusieurs) tubercule interne, qui devient la racine de la plantule, Un seul PLANTES cotylédon, renfermant d’abord la gemmule dans une cavité close de toutes parts. EMBRYONÉES. sexes : graines : embryon. SYNORHIZES, Sommet de la radicule atta- ché à une substance endospermique, qu'il déchire en émettant, par la germination, un tubercule interne, qui devient la racine de la plantule. Deux ou plusieurs cotylé- dons, entre les bases desquels est située ou naît la gemmule, EXORHIZES. Radicule devenant elle- même la racine primordiale de la plantule. Plu- sieurs cotylédons, le plus souvent deux, cachant entre leurs bases le point d’origine de la gemmule : très-rarement nul cotylé- don distinct. . La sporule, séparée de son réceptacle, est un corpuscule simple, d’un tissu uniformément continu , comme nu ou revêtu d’une cuticule inorgarnisée et qui est lui-même le rudiment d’une nouvelle plante. Peut-être qu’un jour la diver- sité de germination des sporules fournira des divisions dans les Zrembryonées. La graine est un corps composé, renfermant, sous son tégument organisé, un embryon, qui n'ayant aucune continuilé vasculaire avec ce tégument est le ru- . diment d’un nouveau végétal. Les Cycadées et les Conifères forment seules jusqu’à présent la classe véritable- ment intermédiaire des Synorhizes. Les signes habituels ou organiques ne sont nullement exclus par la nouvelle division : seulement ils se trouvent augmentés d’un nouveau signe, tiré de l’ori- gine des racines. Je n’oserois cependant assurer que ce moyen de distinction sera toujours exempt d'incertitude, surtout à l’égard des herbes aquatiques. Le nombre des cotylédons deviendra ce qu’il doit être, un caractère secondaire dans la division générale des plantes embryonées ou sexifères. La structure de 6x!" 480 ANNALES DU MUSÉUM l'embryon et par conséquent son développement par la germination fourniront le caractère primaire. L'unité de cotylédon sera générale pour les endorhizes : le nombre, la connexion et le manque des cotylédons étant subordonnés au ca- ractère principal des synorhizes et des exorhizes, ne troubleront plus dans ces elasses la marche des aflinités naturelles. Mon sujet ne me permettant une plus grande extension que sur les exorhizes, je vais reprendre sommairement ce qui les concerne. La direction de l'embryon est ou propre ou relative. La première est celle de sa masse considérée abstractivement : il peut être droit, ou diversement courbé, fléchi, etc. La seconde indique le rapport de position entre son bout radiculaire et la base de la graine ou du péricarpe. J'ai nommé direction spermique de Vem- bryon, celle qui se rapporte à la graine; et péricarpique, celle qui est relative au péricarpe. Quand on a établi la direction de la graine relativement au péricarpe , la di- rection péricarpique de l'embryon n'offre plus d'intérêt. Mais la considération de sa direction spermique est toujours utile : elle est mème la seule qui puisse fournir quelque caractère important. Nous avons vu l'embryon des genres #riglochin (PI.I, fig. 24), scheuchzeria { 26) et butomus (28), avoir la même direction que le péricarpe; celui des genres najas (33), potamogeton (35. 37 ) et santchellia (39), nous a offert la même direc- tion. La direction péricarpique de l'embryon nedonnedonc aucune différence entre ces deux séries de genres. Mais si nous considérons sa direction spermique, nous remarquons bientôt que l’embryon est Aomotrope dans la première et anfitrope dans la seconde; c’est-à-dire, que celui des trois premiers genres a la même di- rection que la graine; et qu’au contraire, sa direction est opposée à celle-ci dans les trois derniers. Dans les genres sparganiumn (7), typha (8), kydropeltis (22), cabomba ( 23), vallisneria (29), elodea (30), l'embryon est renversé relative- ment au péricarpe : cependant , il est homotrope dans les quatre premiers et an- titrope dans les deux’ autres. Ces observations, jointes à celles que j'ai produites dans mon opuscule, prouvent évidemment que les botanistes ont tort de persis- ter, même depuis la publication de mes principes carpologiques, à ne s'attacher qu’à la direction péricarpique de l'embryon. Pour déterminer la direction spermique de Pembryon endorbize, il faut préa- lablement en avoir reconnu le bout radiculaire. Il peut être assez facilement indiqué par la gemmule des embryons épispermiques. Mais la petitesse de celle des endospermiques, quelquefois même non visible, nécessiloit un autre moyen de reconnoître leur bout radiculaire. J’ai indiqué ce moyen, en annonçant que celui des deux bouts de l'embryon qui étoit le plus voisin de l'épisperme étoit Le radi- D'HISTOIRE NATURELLE. 487 culaire. Plusieurs exemples, cités dans ce mémoire, ont prouvé l’utülité et la certitude de ce principe. J'ai distingué des embryons endorhizes ordinaires ceux dont l'extrémité radi- culaire étoit brusquement grossie ou dilatée en un corps particulier, plus volu- mineux que le reste de l'embryon : ils ont été nommés macropodes. Puisqu'ils paroissent composés de deux corps bien distincts, il étoit à propos de désigner ceux-ci par des noms particuliers : j'ai appelé blaste le plus petit et donné le nom d’ypoblaste au plus gros, dont je viens de parler. Comme le blaste est composé du cotylédon et d’une portion de la radicule et que l’hypoblaste n'est que l’extrémité de celle-ci, il devenoit impossible de décrire les embryons ma- cropodes sans périphrase , en employant les mots radiculeet cotylédon. D'ailleurs, lhypoblaste est trop différent de la radicule ordinaire pour ne pas mériter d’être désigné par un nom propre. Il étoit d'autant plus important de prouver l'identité de l’hypoblaste dans les diversembryons macropodes, qu’elle devenoit un moyen de rattacher le nelumbo et par conséquent les Nymphéacées et les Graminées aux autres endorhizes. Jy suis parvenu principalement en démontrant que ce corps a dans tous la même position et y remplit les mêmes fonctions par la germination. Mais il falloit aussi prouver que les plantes pourvues d’un hypoblaste ne formoient pas un groupe tellement isolé qu'on ne pût les lier aux autres endorhizes à radicule simple. La famille des Potamophiles nous a offert un exemple de cette liaison; et les Æydrocharidées pourront en présenter un second. J'ai fait remarquer qu’il étoit essentiel au cotylédon des endorhizes d’avoir, ou d'acquérir par un commencement de germination, une cavité close de toutes parts, qui renfermoit la gemmule, jusqu’à ce que celle-ci la percät ou la rompit pour en sortir. C’est à l’aide de ce principe général que j'ai fait reconnoître le cotylédon de certains embryons macropodes, entr'autres celui des Graminées. Le point d’où naît la gemmule marque dans les endorhizes, comme dans les exorhizes, la limite entre la partie radiculaire et la partie cotylédonaire de l’em- bryon. Cette limite incontestable a servi de base à plusieurs de mes assertions. Elle a contribué à la dénomination de la nature radiculaire de l’hypoblaste que les botanistes ont pris pour un cotylédon. En indiquant que la partie inférieure du blaste appartenoïit à la radicule, elle a diminué la différence qu'il paroissoit y avoir entre la radicellation latérale propre aux macropodes , et la radicellation terminale ordinaire aux endorhizes. J'ai fait voir que la germination des. endorhizes différoit essentiellement de celle des exorhizes, et que cette différence dérivoit de la structure de l'embryon des unes et des autres. Pour reconnoitre à laquelle des deux séries appartient une 482 ANNALES DU MUSÉUM plantule, il suffira de se rappeler que le cotylédon des premières forme toujours, autour de la base de la gemmule développée, une gaine, rarement cylindrique et le plus souvent latérale. J'ai réfuté l’opinion de ceux qui ont prétendu que l’embryon de quelques en- dorhizes devoit à une germination intraséminale la composition ou la grosseur de leur gemmule. Fai dit que le premier signe du commencement de la germi- nation devoit se tirer de la rupture de l’épisperme opérée par l'embryon tendant à se développer. J'ai fait remarquer que l’hypoblaste s'opposoit à ce que le bout radiculaire des embryons macropodes sortit le premier, comme cela a lieu dans les autres endorhizes. J'ai tenté de réduire à trois sortes principales les divers modes de germination qu'on observe dans les endorhizes : germination , 1°. immotive, 2°. admotive, 8°. remotive. Leur caractère a été déduit du défaut ou du mode de déplacement de l'épisperme. La radication latérale des endorhises m'a suggéré plusieurs raisonnemens, à l’aide desquels il a été prouvé que la nature employoit divers moyens, d’abord pour l’établir, ensuite pour la maintenir. Si on examine avec atteution ce qui se passe dans le plateau d’un bulbe, qui n’est qu'une espèce de tige ou de souche très-raccourcie, on pourra prendre une idée assez nette de la manière dont la ra- dication de ces plantes se détruit et se renouvelle successivement; de la raison pour laquelle cette partie est toujours tronquée, et enfin de la cause qui force cette radication d’être toujours latérale. } L’embryon des Graminées nous a cependant présenté deux parties qu’on ne trouve point dans celui des autres endorhizes; savoir, la radiculode et l'épiblaste. La comparaison de cet embryon avec les autres macropodes, nous a conduit à reconnoître que la radiculode n’étoit qu’une protubérance radicellaire de la tigelle; et que sa position au-dessus de l’hypoblaste rejetoit le nom de radicule, que les botanistes lui ont donné. Nous avons vu que lépiblaste pouvoit telle- ment modifier la structure de Pembryon , que celle de celui du riz, du zisania, ete. seroit inexplicable , sans la connoissance et la comparaison de cet organe dans le petit nombre de genres qui en sont pourvus. Dans une digression sur les parties accessoires du fruit des Graminées, j'ai cherché à établir pour ces parties des noms qui leur fussent applicables dans tous les genres de cette famille, La discordance des botanistes, dans la dénomina- tion des écailles florales, m’a porté à rechercher dans les opérations de la nature le moyen d’en trouver une plus convenable et plus fixe. Ces recherches m'ont d’abord conduit à rejeter les noms de ca/yce et de corolle, improprement appli- qués à de véritables bractées squamiformes, J'ai ensuite restreint l’ancien nom D'HISTOIRE NATURELLE. 483 de glume aux deux écailles les plus voisines des organes sexuels. À cette fixation du nombre binaire des écailles de cette euveloppe, j'ai proposé d’ajouter un autre principe non moins utile; savoir, que la glume devoit toujours exister. J’ai donné le nom collectif de /épicène aux écailles étrangères, soit à la glume solitaire soît à des glames réunies en petit épi. Le nom de paillettes m'a paru devoir être substitué à celui de valves, dont l'impropriélé est évidente. La dénomination des paillettes des fleurs neutres ne peut-être déduite que de leur comparaison avec celles des fleurs sexifères de la même plante. Le manque de sexe entraine celui de glumelle et souvent celui de glume. Toute paillette qui, enveloppant les organes sexuels, fait gaine ou tube à sa partie inférieure constitue seule une glume entière. En eflet, cette glume, que j'appelle vaginante , est réellement composée de deux paillettes soudées ensemble par les deux bords : l’une est indivise; l’autre est fendue et c’est cette fissure qui forme l'ouverture latérale de la glume. Les appendices intraglumaires, nommés rectaire par les Linnéistes, m'ont paru mériter une autre dénomination. J'ai proposé de leur donner pour nom collectif celui de g/umelle, et pour nom particulier celui de paléoles. On à pu aussi remarquer que je considérois les divers appendices placés sous chaque écaille florale des Cypéracées comme étant analogues à la glumelle des Graminées. Au sommet du petit support de la glume de plusieurs Graminées, on trouve deux petits faisceaux de poils qui quelquefois semblent former un verticille, ou deux petites éminences rarement prolongées en manière de menues paillettes : je les désigne par le nom commun de exæme ( exæmium ). Piliceum, fasciculare. verticillare. Bigibbulare. Acerellatum. EXŒMIUM... Les glumes florifères et fructifères de certaines Graminées ont un involucre commun , qui le plus souvent est analogue à la gaîne des feuilles et paroît pou- voir être rapporté à la spathe des autres endorhizes. La spathe du Zygeum est membraneuse, convolutée : celle de l’anthistiria qu’on à pris pour une glume commune est verticillée-quadripartie, est membraneuse et hispide comme la gaine des feuilles : elle est campanulée, coriace dans le cornucopiæ cucullatum : celle du coix est presqu'osseuse , etc. Tous ces principes relatifs aux parties accessoires de la fleur et du fruit des Graminées exigeroient de plus grands développemens, qui ne peuvent appartenir qu'à un ouvrage spécial sur l’Agrostographie. Cependant, voulant mettre les bo- 484 ANNALES DU MUSÉUM tanistes à portée de faire l'essai de ces principes agrostographiques, je vais pré senter quelques exemples de leur application. LEERSIA... OR YZA... SORGHUM. ANTHISTIRIA hispida. À. ciliata. Linn. Nullomodociliataest A. GRAMINA UNIFLORA. a. Digyna. Lepicena nulla. Gluma compressissima... paleis..... Glumella : paleola vix visibilr. Lepic. minuta, bipaleacea : pal... G1L. mullo major... pal... GIL. paleolis cuneatis , oblique truncatis. ... GL. eadem ; arista nulla : pal. GIL. eadem. F1, neutri. ’ GL. nulla. Spatha quadripartita, plerumque triflora... F1. pedicel- latis ; hermaphrodito et neutris. F1. hermaphr. Lepic. bipaleacea...... pal. exteriore interiorem multoties : < angustrorem amplexante. 80 GL. inclusa , minuta... pal. singulatim stipitatis; altera in aristam ipsa crassiorem longissimam desinente, GIl. pall, o4/ongo-cuneatis , lunulato-truncatis. , F1. neutri. Lepic. bipaleacea. .,.... FT. hermaphr Lepic. tripaleacea..... pale ere GI pal. exteriore ex apice emarginato aristata teriore paleolas glumellæ hinc connectente.... GIL. pall. srapezoideis, barbatis. .... FT, masc. Lepic. itidem 3-paleacea... pal... Lepic. ut in mascul, ; GL. et GI]. nullæ. se PHALARIS.. ALOPECURUS. ) CORNUCOPIÆ | cucullatum. | D'HISTOIRE NATURELLE, 435 b. Monogyna. Lepic. bipaleacea... pal... GL. multo minor... pale. Exœmium acerellatum : acerelæ (in variis speciebus variiæ). GIL. pall. /ineari-lanceolatis. ...... Lepic. pal. ima parte connatis bipartita.... GL. vaginans ; hinc subsemifissa ; indè suprà basim aristata.. GI. nulla. Spatha campanulata, crenata , coriacea; spicam ovatam , im- bricatari semicomplectens. Lepic. pal. connatis subsemibifida, obtusa..... «Gil. vaginans ; hinc semifissa, mutica, obtusa. ... GIL, rulla. B. GRAMINA PLURIFLORA. LYGEUM.... UNTOLA. ... | LT. a. Monogyna ! Spatha fusiformi-convoluta. .., À Lepic. bipaleacea : pal. inferne in tubum coriaceum, villo- SiSSLMmUmMm CONNALLS « . GI. binæ ; basibus connatæ in tubum bilocularem tubo Le- picenæ intus adnatum. — singula apice bifida , extorsum usque ad tubum Jissa..…. GIl. nulla. ( Lepic. interdum trifida, triglumis , ete.) b. Digyna. Lepic. bipaleacea ; biflora ; pellucido-membranacea.… pal. Glumessee pale. GI1. pall. subsemilanceolatis. ….. Lepic. unipaleacea ; multiflora : palea..... Spicula..... Glumæ..... Dal rien GIL. pall. sxbsemilanceolatis...., Lepic. tri-multipaleacea : pal..... Spicula distichè imbricato-multiflora, compressissima. ... Glumættapali sr Gil. pall, oblongo-cuneatis, lunato-truncatis. ... 62 ai 486 ANNALES DU MUSÉUM Je terminerai ce Mémoire par une esquisse du caractère général et du caractère abrégé de l’ordre naturel des Graminées; en me bornant, comme mon sujet l'exige, à la seule considération du fruit. GRAMINUM Caracter generalis. : Caryopsis (raro Akenium ) glumd persistente cincta aut intrà eamdem indura- tam inclusa. Pericarpium fenue, carthaceo-membranaceum : Epispermium £e- nuissimum, nucleo pertinaciter adhærens : Spilus (ili loco ) instar maculæ basilaris s. lineæ longitudinalis, hinc utrumque seminis integumentum peculia- riter connectens. Embryo imæ parti Endospermi mullos majoris et farinacei oblique et sublateraliter applicitus , tlli adglutinatus , macropodus. Hypoblastus carnosus ; plus minus postice convexus gibbosusve; antice planiusculus. Blastus priori longitudinaliter incumbens , eo brevior ; infernè productus in gibbum radi- culiformem et inde Radiculodam dicéum : raro antice auctus Epiblasto et propter istum variationi formæ obnoxius. Cotyledo conspicue cava ; in vaginam tubulo- sam, fere ex apice rudimenta foliorum convoluta exerentem, actu germinationis convertenda. Radicellæ manifeste vaginalæ. Caracter compendiosus. I. : Caryopsis (raro Akenium ) membranaceo-carthacea. Sem, suberectum s. ascen- dens. Emb. extrarius, oblique basilari-lateralis, macropodus , heterotropus. En commencant ce Mémoire, je n’avois pour but que de développer et d’éclair- cir quelques passages de mon opuscule sur le Fruit, et seulement ceux qui ont été contestés, Mais, il est si difficile d'écrire isolément sur certains objets aux- quels beaucoup d’autres viennent naturellement se rattacher , que jai trouvé plus commode de rassembler ici toutes les idées que la méditation sur mon sujet principal m'a suggérées. Ilest résulté de là, comme je m'en aperçois maintenant, que j'ai composé une sorte de petit traité général sur les embryons endorhizes. N'ayant pas eu d’abord le dessein de donner ce caractère à mon Mémoire, je peux craindre qu'il n'offre quelques lacunes. On trouvera peut-être aussi que j'ai été trop prolixe et qu’en divers endroits je me suis jeté trop loin hors des bornes de mon sujet. Quelques botanistes me croiront encore trop prodigue de mots nouveaux. Mais ils reconnoitront bientôt que ces mots ou d’autres analogues sont nécessaires, soit pour établir avec plus de concision les caractères techniques, soit pour exprimer des parties ou des idées nouvelles. D'HISTOIRE NATURELLE. 187 Malgré les défauts et peut-être les erreurs qui peuvent se trouver dans ce Mé- moire , j'ose espérer qu'il méritera l’attention de quelques botanistes philosophes ; non-seulement parce qu’il défriche quelques parties incultes du vaste champ de la botanique, mais encore parce qu’il présente des principes nouveaux, qui peuvent être utiles à ceux qui cultivent cette science. Je n’ignore pas que c’est au temps d’anéantir la résistance que l’usage et l'habitude opposent ordinairement à l’adoption de certaines vérités, surtout dans le pays où elles ont été découvertes. C’est pourquoi je n’ai pas la prétention de voir adopter promptement mes prin- cipes : je borne en ce moment mes désirs à ce que cet écrit puisse frayer une route plus sûre et plus facile aux botanistes qui voudront examiner des objets analogues à ceux dont il traite. J’aurois tort, en effet, d'attendre un plus grand résultat d’un Mémoire qui ne doit être considéré que comme un démembrement d’un ouvrage général sur la botanique fondamentale. Ce n’est même que d’après le conseil de quelques amis, que j’ai pu me résoudre à entreprendre un travail, qui, par son isolation du corps d'ouvrage auquel il appartient, perd nécessaire- ment de son utilité el par conséquent de sa valeur. 62 * TABLE DES MÉMOIRES ET NOTICES Contenus dans ce dix-septième Volume. M. LAUGIER. : EE same chimique des Crayons lithographiques. 166— 168 MM. FOURCROY ET VAUQUELIN. Analyse de l’'Urine d'Autruche et Expériences sur les excrémens de quelques autres familles d'oiseaux. 310—319 M VAUQUELIN. Analyse de la Pierre tombée à Charsonville près Beau- gency, le 23 novembre 1810. RE Expériences pour déterminer la quantité de soufre que quelques métaux peuvent absorber par la voix sèche. 16—25 Expériences sur une Matière rose que les urines déposent dans certaines maladies. 133—137 Sur deux Espèces de Roches qui se trouvent dans les États-Unis. 333—338 TABLE DES MÉMOIRES ET NOTICES,. 489 M. A. THOUIN. Suite de la Description des Greffes. 34—53 M. GEOFFROY-SAINT-HILAIRE. Note sur deux espèces & Emussole. 160—163 Sur les espèces du Genre Loris, Mammifères de l’ordre des Quadrumanes. 164—165 Mémoires sur les espèces des Genres Musaraigne et Mygale. 169—194 M. LAMARCXK. Suite de la détermination des espèces de Mollusques testacés. Genre Volute. 54—80 Genre Mitre. 102—2°22 M. CU VIER. É loge historique de M. le Comte Fourcroy. 99—132 M. FRÉDERIC CUVIER. Observations zoologiques sur les facultés physiques et intellectuelles du Phoque commun. (Phoca vitulina, L.) 377—397 M. DELEUZE. Notice historique sur M. Péron. 232—279 M. DE CANDOLLE. Description du Chailletia, nouveau genre de Plantes. 133—159 492 TABLE DES MÉMOIRES ET NOTICES. Monographie des Ochnacées et des Sinaroubées. 398— 425 M. CHEVREUL. Mémoire sur l'influence de l'oxidation dans les combr- naisons des oxides d'étain avec la couleur du Cam- pêche. 36 —35 Recherches chimiques sur le Bois de Campéche et sur la nature de son principe colorant. Première Partie. 280—309 Seconde Partie. 339—370 M. LESCHENAULT. Notice sur la Végétation de la Nouvelle - Hollande. S1—098 M. MARCEL DE SERRES. De l'Odorat, et des Organes qui paroissent en étre le siège, chez Les Orthoptères. 426—/44r M. F.J. B. MENARD-DE-LA-GROYE. Note sur un petit Coquillage de la Méditerranée qu est analogue à des Fossiles des environs de Paris et de Bordeaux. III 992 M. RICHARD. Analyse botanique des embryons Endorhizes ou mono- cotylédonés, et particulièrement de celui des Gra- minées. Première Partie. 223—251 Seconde Partie. 442—487 TABLE DES MÉMOIRES ET NOTICES, 491 M. SANTE. Mémoire sur les Chameaux de Pise. 320—330 M. MAXIMILIEN SPINOLA. Essai d'une Nouvelle Classification des Diplolépaires. 139—19° INDICATION DES PLANCHES DU XVIIe. VOLUME. Planche I. Chaïlletia pedunculata et C. sessiliflora. page 159 IL. Sorex remifer , $. araneus , $. tetragonurus. 169 IL. Sorex constrictus, S.myosurus , squelette du Sorex TLYOSUTUS. ibid. IV. Mygale pyrenaïca, Sorex capensis. ibid. V. Embryons endorhizes. 223 VI. Zea maïs; Olyra, Coix. ibid. VII. Hordeum, Triticum. ibid. VIIL Æ£mbryons macropodes. ibid. IX. Danihonia, Pharus, Avena, Oryza. ibid. X. Comparaison de divers Embryons. ibid. XI Ochna squarrosa. 429 XI Ochna nilida. ibid. XII. Ochna multiflora. ibid. XIV. Ochna ciliata. ibid. XV. Ochna mauritiana. ibid. XVI Ochna mauritiana. ibid, XVII Gomphia dependens. ibid, XVI Gomphia angulata. ibid. XIX. Gomphia obtusifolia. ÿ ibid; XX. Gomphia guianensis. ibid, XXI. Gomphia longifolia. ibid. XXIL Gomphia castaneæfolia. ibid. XXII Gomphia squamosa. ibid. XXIV. Gomphia nitida. ibid, XXV. Gomphia acuminalta. ibid, XXVI. Gomphia laurifolia. ibid. XXVIL Gomphia parviflora. ibid. XXVIIL Gomphia grandiflora. ibid, XXIX. Gomphia cassinefolia. ibid, XXX. Fig. 1. Gomphia cardiosperma. Fig. 2. Ochna par- vifolia. ibid. XXXI £Elvasia calophyllea. ibid, TABLE ALPHABÉTIQUE DEStT ARTICLES - Contenus dans ce dix-septième Volume. A. LA: ROSACIQUE, Substance par- -ticulière, de couleur rose, que les urines déposent dans certaines maladies. Expériences pour dé- terminer la nature de cette sub- stance, 133 et suiv. Aërolithe. Description de la pierre tombée à Charsonville, le 23 no- vembre 1810, et des circonstances qui en ont accompagné la chute, 1 et suiv. Analyse chimique de cette pierre et détails des opéra- tions qui ont été failes pour l’ana- lyser, 5 et suiv. Alisma damasonium. Description de la graine de cette plante, 232. Allium cepa. Description de la graine de cette plante, 2928 et 448. Analyse chimique d’un aërolithe, 5 et suiy. ( Voy. ce mot); — d’une ma- tiére rose que les urines déposent dans certaines maladies, 133ets.; — de la matière dont sont compo- sés les crayons lithographiques, 166 et suiv.; — du bois de cam- pèche et de son extrait, 280 ets.; — de l’hématine ou principe co- 17. lorant du campêche, 339 et s.; — de deux roches de l'Amérique sep- tentrionale qui contiennent beau- coup de matière métallique, 333 et suiv. L'analyse d’un composé dépend moins du nombre des réac- tifs qu'on emploie que de l'usage qu’on en fait, 306. V. Campéche. Anatomie végétale. Voy. Carpologie. Antennes. Observations sur les An- tennes des insectes et sur leur usage, 431 et suiv. Voy. Orthop- téres. Arum dracunculus. Description de la graine de cette plante, 226 et 447. Ayena sativa. Description de la graine d'avoine et de sa germination, 240. Autruche ( analyse chimique de l'urine d), 310 et suiv. Voy. Urine des oiseaux. B. Blaste. Définition de cet organe, et considérations sur la diversité de ses formes, sur sa situation et ses usages, 452 et suiv. Botanique. Notice sur la végétation de la Nouvelle-Hollande, 81 et suiv. + 05 494 Butomus umbellatus. Description dela graine de cette plante, 232. C. Cabomba aquatica. Description de la graine de cette plante, 230 et 449. Calla palustris. Description dela graine de cette plante, 226 et 447. Campéche. De l'influence différente qu’exerce sur la couleur du cam- pèche l’oxide d’étain, selon qu'il est au minimum, où au maximum d’oxidation, 26 etsuiv. Recherches chimiques sur le bois de campèche et sur la nature de son principe colorant, 280 et suiv. Examen ana- lytique de ce bois, 282 et suiv. — de son extrait, 289 et suiv. L’ex- trait coloré de campèche est com- posé de deux principes, l’un so- luble.et cristallisable, l’autre qui ne doit sa solubilité qu’au premier, 303 et suiv. Explication des pro- cédés employés dans cette analyse, et principes généraux qui en ré- ibid. Canna indica. Description de la graine sultent, de cette plante et de sa germina- tion, 226 et 447. Carex depauperata. Description de la 228. Carpologie. Analyse botanique des em- graine de cette plante, bryons endorhizes ou monocoty- lédonés, 223 et suiv.; 442 et suiv. Description anatomique de plu- sieurs embryons endorhizes et de la germination de quelques-uns, 226 et suiv. Raisonnemens et dis- TABLE ALPHABÉTIQUE cussions sur le même sujet, suivis de l’examen comparatif desdivers embryons, 442 et suiv. Examen particulier de graines des Grami- nées et de leur germination, 460 et suiv. Observations sur le fruit des Ochnacées, 4o1. Définition du Gynobase et du Torus, deux or- ganes des fruits qui se trouvent dans quelques familles de plantes. Différence de ces deux organes, 4o1 et suiv. Castela, Observations sur les affinités 405. Chailletia. Nouveau genre de plantes. de ce genre de plantes 5 p ; Sa description, observations sur la place qu'il doit occuper dans l’ordre naturel, et sur ses rapports avec d’autres végétaux, 153 et suiv. Caractère des deux arbrisseaux qui composent ce genre , 158. Chameaux. Voy. Dromadaire. Chimie. Progrès que M. de Fourcroy a fait faire à cette science, par ses découvertes et par ses lecons. Voy. l'Éloge de ce savant, 99 et suiv. Classification des végétaux. NV. Plantes. Clusia palmicida. Description anato- mique de sa graine, 456. Coix lachryma.Description dela graine de cette plante, 238. Coquillages et Coquilles fossiles. Voy. Marginelle, Mitre, Volute. Cotylédon. Sa situation dans les Gra- minées, 455. Voy. Æmbryons, Graminées. Du nembre des coty- Jédons et de la division des végé- taux en Monocotylédons et Dico- D'EYSE ARUTIICL ES. tylédons , 444. Du développement du cotylédon dans la germination des endorhizes, 451. Crayons lithographiques (Examen chi- mique des }, 166 et suiv. Cryptogames. Voy. Inembryonées. Cypéracées. Observation sur l'embryon des plantes de cette famille, 448, Voy: Graminées. D. Danthonia decumbens. Description de la graine de cette plante et de sa germination, 235. Desman. ( Mygale). Mémoire sur ce genre qui doit être séparé des Mu- saraignes , et description de deux espèces, 187 et suiv. Voy. Musa- raignes. Diplolépaires. Observations sur cette famille d'insectes, classification et caractère des genres qui la com- posent, 140 et suiv. Dromadaire. Mémoire sur le haras de dromadaires établi à Pise, sur la conformation de ces animaux, sur les maladies auxquelles ils sont sujets, sur l'éducation qu’on lear donne , sur les usages qu’on en re- tire, et sur la différence qu’on ob- serve entre les dromadaires élevés à Pise et ceux qui viventen Arabie, 320 et sui. RE Ecusson. Voy. Greffes par gemma. Elodea guyanensis. Description de la graine de cette plante, 232! 495 Llsasia. Caractère de ce nouveau genre de la famille des Simaroubées, et description de l’espèce, 422. Embryons des graines. Analyse bota- nique des embryons endorhizes, 223 et suiv.; 442 et suiv. — Ces embryows se divisent en endosper- miques, épispermiques, et macro- podes, 225. Description anato- mique de ces divers embryons examinés dans plusieurs graines, et de la germination de quelques- unes de ces graines, 226 et suiv. Raïsonnemens, discussionset prin- cipes qui sont la conséquence des faits observés, 442 et suiv. Exa- men comparatif des divers Em- bryons endorhizes, 449 et suiv. Examen anatomique de l'embryon des Graminées et de son dévelop- pement dans la germination, 463 et suiv. De la direction de l’em- bryon , 446 et suiv. Elle doit être considérée relativement à la graine, et non relativement au péricarpe, 446 et 480. Règle pour déterminer la direction des em- bryons, 447 et 480. Discussion sur les Em bryons macropodes, 452 et suiv. Distinction des embryons en endorhizes, exorhizes et synorhi- zes, et caractère de ces trois sortes 443 et 478. Ermbryonées et Inembryonées. Nom d’embryons, donné aux deux divisions pri- maires des plantes. Leur caractère, 443 et 479. Emissole. Note sur deux espèces de ce Cr 496 poisson que Rondelet avoit eu raison de distinguer, 160 et suiv. Zndorhizes ou monocotylédonés (Em- bryons). Voy. Carpologie. Endosperme, nom donné par M. Ri- Chard au périsperme de Jussieu ou albumen de Gærtner , 2925. Endospermiques ( Embryons. ) Voy. Embryons. ÆEntomologie. Voy. Diplolépaires. Epiblaste. Définition et description de cet organe, 467. Examen de son origine et de sa situation dans les Graminées, 467 et suiv. Lpisperme. Tégument membraneux des graines, 225. Epispermiques ( Embryons). Voyez Embryons. ; Exæme. Définition de cet organe qui se trouve dans les Graminées, 483. Exorhises (Embryons). Voy. Carpolo- gie. 19e Facultés intellectuelles. Leur perfection n’est point en raison de celle des sens, 392. Observations sur les facultés intellectuelles du phoque commun et comparaison de ces facultés avec leurs facultés orga- niques, 392 et suiy. Tlüte (greffes en ). Voy. Greffes par gemma. . Fourcroy. Éloge historique decesavant, 99 et suiv. Froment. Voy. Triticum. Fruits. Voy. Carpologie, TABLE ALPHABÉTIQUE G. Galeus. Voy. Emissole. Gemmule. Sa situation dans les em- 450. Genres. Principes sur l'établissement bryons endorhizes, des genres en histoire naturelle, et particulièrement en entomolo- gie, Germination. Description de la germi- 138 et suiv. nation de plusieurs plantes mono- cotylédonées, 226 et suiv. Voy. Carpologie. Développement de la gemmule et de la radicule dans la germination, 451. Tableau du développement des divers organes dans la germination, 457 et suiv. De la germination des Graminées, 472 et suiv. Glumes des Graminées. Sont de vraies 460. Gomphia. Caractère de ce genre et des- bractées, cription de 22 espèces, 414 et suiv. Graines. Anatomie de plusieurs graines prises dans la série des endorhizes, et description de la germination de quelques-unes d’entre elles, 226 et suiv. Voy. Carpologie, Em- bryons , Endorhizes. — Ce qui ca- ractérise les graines, et en quoi elles diffèrent des sporules, 443. Examen comparatif de la forme et de la direction des embryons dans les diverses graines, 446 et suiv. Observations anatomiques el phy- siologiques sur le fruit des Gra- minées et sur leur germination, 463 et suiv. DES Graminées. Anatomie de la graine de plusieurs Graminées, et descrip- tion de la germination de quel- ques-unes, 223 et suiv. Voy. Car- pologie. Considérations générales sur la famille des Graminées, sur les caractères qui la distinguent, sur leurs rapports avec les Cypé- roïdes; examen détaillé des parties de la fructification et particulière- ment de la graine de ces plantes, et description de la manière dont s'opère chez elles la germination, &6o et suiv. Caractère essentiel de la famille des Graminées, 486. Greffes. Tableau méthodique des Gref- fes, 93: Greffes par gemma. Se divisent en Grefles en écusson et en Grehes en flûte, 34 et suiv. Description et usages de 17 sortes de Greffes en écusson, 37 et suiv. Description et usages de quatre sortes de Grefles en flûte, 48 et suiv. Ta- bleau méthodique des Grelles, 53. Gynobase. Organe particulier qui ap- partient au fruit de plusieurs plantes. En quoi cet organe diffère du Zorus , 4o1 et suiv. H. Habitude. Exemple singulier de l’em- pire que l’habitude exerce sur les animaux, 389. Voy. Phoque. Hématine. Substance à laquelle le bois de campêche doit ses propriétés caractéristiques ou le principe co- lorant de son bois, 308. Examen ARTICLES. . 497 chimique de l’hématine dans le- quel on expose les propriétés de cette substance, les effets que la chaleur produit sur elle, les com- binaisons qu’elle forme avec les acides, les alcalis, les terres, les oxides métalliques, les sels, l’hy- drogène sulphuré, les muriates métalliques, etc. Enfin l’action qu'elle exerce sur la gélatine, 339 et suiv. Hollande (Nouvelle). Notice sur la végétation de ce Continent, 81 et suiv.— Du voyage de M, Péron à la Nouvelle - Hollande. Voyez Péron. Hordeum disticum. Description de la graine de cette plante et de sa ger- mination, 239. Hydrocharis morsus ranæ. Description de la graine de cette plante, 248. Hydropeltis purpurea. Description de la graine de cette plante, 230 et 449. Hypoblaste. Ce que c’est, 452. Consi- dérations sur sa forme, sa situa- tion et son usage, 452 et suiv. LE Nom donné aux deux divisions pri- TInembryonées et Embryonées. maires des plantes: leur caractère, 442 et 479. Mode de propagation 442. Insectes. De l’odorat des Insectes, et des Inembryonées, des organes qui paroissent en être le siége chez les Orthoptères, 426 etsuiy. Voy. Orthoptères. Obserya- tionssur les Trachées, les Antennes 101, Intelligence. Noy. Facultés intellec- tuelles. et les Palpes des insectes, L. Loris. Note sur les espèces de ce genre de mammifères de l’ordre des Qua- drumanes , et particulièrement sur le Potto, 164 et suiv. M. Maïs. Voy. Zea. Marginelle. Note sur une espèce de ce genre trouvée vivante dans le golfe de Tarente, et qui est ana- logue à deux coquilles fossiles, l’une de Grignon, l’autre de Bor- SSL: Méthodes pour la classification des vé- deaux, gétaux. Observations sur les mé- thodes artificielles et sur la mé- thode naturelle, 223 et suiv. Voy. Plantes. MWitre. Observations sur ce gênre de Coquilles, et description de 80 es- pèces, 195 et suiy. Voy. Volute, Mitre, Marginelle. Aonocotylédons. Anatomie de la graine ]Mollusques testacés. de plusieurs plantes monocotylé- donées ou endorhizes, et descrip- tion de leur germination, 223 et suiv. Voy. Carpologie. Musaraigne. Mémoire sur ce genre de quadrupèdes, et description de dix espèces, 169 et suiv. Note sur six espèces moins connues , 186, TABLE ALPHABÉTIQUE Les Desmans ou Z/ysales doivent faire un genre séparé des Musa- raignes : établissement de ce genre et description de deux espèces, 187 el suiv. Mygale. Voy. Desmon. N. Najas fluvialis. Descripüon delagraine 233% Nelumbium asiaticun ou Nymphæa de cette plante, nelumbo. Description de la graine du Nelumbo et de sa germination, 249. Observations qui prouvent que cette plante doit être rangée 476. Nymphæa lutea où Nymphosanthus parmi les Endorhizes, vuloaris. Description de la graine de cette plante, 230. Preuve qu’elle doit être placée parmi les Endo- &76. Nymphæa nelumbo. Voy. Nelumbium. rhizes, 0. Ochna. Caractère de ce genre de plantes, et description de neuf espèces, #10 et suiv. Ochnacées. Monographie des Ochnacées et des Simaroubées, 398 et suiv. Observations sur la famille des Ochnacées, ibid. Caractères qui la distinguent, 403 et suiv. Sa divi- sion en deux sections, 406. Des- cription des genres et des espèces qui la composent, 410 et suiv. Odorat. De lOdorat et des organes qui paroissent en être le siége dans les insectes, et particulièrement dans DES les Orthoptères. Examen des di- verses opinions à ce sujet, 426ets. Oiseaux. Leurs excrémens liquides doivent être regardés comme des urines, et contiennent de l’acide urique, 317. Voy. Urine. Olyra latifolia et Olyra axillaris. Des- cription de la graine de ces Gra- minées, 245. Orthoptères. De l’odorat de ces insectes et des organes qui paroissent en être le siège, 426 et suiv. Examen de l'opinion qui suppose que les trachées sont l'organe de l’odorat, 427 et suiv.; — de celle qui place celte sensation dans les antennes, 431 et suiv. — Raisons de croire que dans les Orthoptères les palpes sont l’organe de l’odorat , et des- cripüon des palpes de ces insectes, 435 et suiv. Oryza sativa. Description anatomique de la graine du riz, 246. Oxide d'étain. De la préparation de cet oxide au minimum, et au maxi- mum , et de l’influence différente qu’il exerce dans ces deux états sur la couleur du campèche, 26 et suiv. De l’action des alcalis sur l’oxide d’étain, 29. TE Palpes. Description de cet organe dans les Orthoptères,et raisons decroire qu'il est le siége de l’odorat, 435 et suiv. Voy. Orthoptères. Pekæa tuberculosa et butirosa. Des- ARTICLES, 499 cription anatomique de cesgraines, 456 et 469. Périsperme: Voy. Endosperme. Pros (François). Notice historique sur la vie, les travaux et les voyages de ce savant naturaliste, 252 ets. Pharus latifolius. Description de la graine de cette Graminée, 244. Phoque. Description du Phoque com- mun, 377 et suiv. Observations sur ses facultés physiques et sur l'imperfection de ses organes, 383 et suiv.; — sur ses facultés intel- lectuelles, son goût pour lasociété, ses mœurs et ses habitudes, et sur l'empire que l'habitude exerce sur lui, 392 et suiv. Pierre tombée de l'atmosphère. Voyez Aérolithe. Plantes. Les'plantes peuvent être dis- tribuées en trois séries, savoir : les Inembryonées , les Embryonées en- dorhizses, et les Embryonées exo- rhises ; à ces trois séries on peut en ajouter une quatrième sous le nom de Synorhises, 442 et sui. Voy. Embryons. Plaron. Voy. Musaraigne. Potamogeton natans et P. densum. Description de la graine de ces plantes, 253. Potto. Voy. Loris. Q. Quassia amara, L. Forme un genre particulier. Caractère de ce genre et description de lespèce, 423. 500 R. Radicelle. En quoi les Radicelles dif- fèrent de la Radicule, 446. Radicule. Noy. Germination. Riz. Voy. Oryza. Roches. Examen chimique de deux J, . . roches des Etats-Unis, qui con- tiennent beaucoup de matiere mé- 333 et suiv. Ruppia maritima. Description de la tallique, graine de cette plante et de sa ger- minalion , 247. S. Scheuchzeria palustris. Description de la graine de cette plante et de sa germination, 231. Scirpus supinus et S. maritimus. Des- cription de la graine de ces deux plantes et de la germination de la première, 229-230 et 44q. Description de la 229. Sens. Leur perfection n'indique pas Scleria gracilis. graine de cette plante, celle de l'intelligence, 392 et 397. Examen des sens du Fhoque et de ses facultés intellectuelles, 585 et suiv. Organes des Sens dans les insectes. Voy. Odorat. Simaba. Caractère de ce genre et des- cription de lespèce, 404%. Simaroubées, Peuvent être considérées comme une tribu des Ochnacées ou commeune famille particulière, 408. Voy. Orhnacées. Caractère de cette famille et des genres qui la composent, 422 et suiv. TABLE ALPHABÉTIQUE Simaruba. Caractère de ce genre qui étoit auparavant réuni au Quassia, et description des trois espèces qui le composent, 423. Sorex. Voy. Musaraigne. Sorex moschatus. Voy. Desman. Soufre. Voy. Sulfures. Sparganium erectum. Description de la graine de, cette plante, 227 et 447, Sporules. Corpuscules par lesquels se reproduisent les Cryptogames : en quoi elles diffèrent des graines, 443 et 449. Squalus mustelus. Voy. Emissole. Sulfures métalliques. Expériences pour déterminer la quantité de soufre que quelques métaux peuvent ab- sorber par la voie sèche, 16 et suiv. Pourquoi les divers chimistes ont obtenu à cet égard des résultats très - différens, :bid. Notes sur les sulfures de manganèse, de cuivre et de fer, 19 et suiv. Essais pour décomposer ies sulfures de cuivre et d'argent par d’autres métaux, 24. Synorhizes. Les Cycadées et les Coni- fères forment cette division des végétaux intermédiaire entre les Endorhizes et les Exorhizes. Leur caractère, 479. T. Teinture. Voy. Campéche. Torus. En quoi cet organe diffère du Gynobase, 402, Trachées. De l'usage de ces organes DES “ARTICLES. dans les Insectes, et particulière ment dans les Orthoptères, 427 et suiv. Voy. Orthoptères. Triglochin maritimum. Description de la graine de cette plante, 231. Triticum lybernum. Anatomie de la graine du froment et description de sa germination, 241 et suiv. Typha latifolia. Description de la graine de cette plante et de sa ger- mination , 228 et 447. \E Vallisneria spiralis. Description de la graine de cette plante, 239% Végétaux ( classification des). Voyez Plantes. Volute. Observations sur ce genre de coquillages, et description de 42 espèces vivantes, et de 18 espèces fossiles, 54 et suiv. LÉ Urine. Analyse chimique d’une ma- tière rose que les urines déposent dans certaines maladies, et qui est bot d’une nature particulière, 133 et suiv. Voy. Acide rosacique. Urine des oiseaux. Analyse chimique de Purine d’autruche , 310 et suiv. Elle contient de l'acide urique et de l’acide phosphorique, qui ne se trouvent pas dans l'urine des ani- maux herbivores appartenans à d’autres classes, 317. Il est pro- bable que les urines des oiseaux sont de la même nature que celles de l’homme, 319. Z. Zanichellia palustris. Description de la graine de cette planté et de sa germination, 235 et 454. Zea mays. Description de la graine de cette plante et de sa germination, 237. Zostera marina. Description de la graine de cette plante, 249. Av WMalkera. Caractère de ce genre et des- cription de l’espèce, 421, Fautes essentielles à corriger dans ce Volume et dans le Volume précédent. Tow. XVI. Page 241, ligne 23 , après les mots à l'ordinaire, ajoutez, dans leur aisselle. Page 25, ligne 28 ou avant-dernière , au lieu de l’écaille exté- rieure , lisez l’écaille intérieure. Tom, XVII, Page 33, ligne 2#, au lieu de 4°. que l’oxide d'étain au minimum , lisez 4°. que l’oxide d’étain au maximum. Page 449, ligne 12, au lieu de périsperme , lisez épisperme. + re _ ; . * - ù . e L s$ pi L e 0 L - ! _ LA n : “ ÿ . 1 ‘ _ : » z : ; û “ » - 0 +» L * a ‘ Ca 0 . ñ = | } 1 à + ; = L = 1 1 ; | - ‘ La 4 ? . » ’ ! . = ! r = L 5 1 ‘4 pr Û = ‘ “ ï ni L = ‘ (4 \ ; x se). : » 2 : [l Ê | h Re? ") ; ï 1h te A # Ê l d | Lu | ae AL TT k W Me - _'; D dt KT LENS SO e NÉS. LE RUN ET LIN À é: t Fate DOBrILC Ir. A PP TS " TH TUTR 8 22