I TR re ie A M OR LR QT NE ST, ns LE me 0" 2e Ses Ÿ Fe ASC A Are: Ps. Fur ns F pe 4 Fe és se, ci RÉ pop a (2 re Ce RS PAT Res RE AD Be SAR PTT Po LR ET NE Pr RL Re GE GS Sn OS Re NN TD I ESS ar qu” UT TS Re) ren sers. der F4 ë TE ; EN ET er nn ao NS = SPA pue rite D APS ES em Ce An Es D D ROME TO ESS Er RE Re D AT Se ONE EE RS ET SR SES PTS ET SRE SA SR = £ A a f RE te phoi Rod : SR : ï TP PR PT | + ". NT SU US FE « _ KE LS RO RE É R R T Pa RAC ADS PT R À ju Ps er LR F7 PE A à Le as, 7 2 LC 9 AE One es R RE dv Car C ap Ma qe ES Eee ER GE RS RTE re S ne e s ras RÉ RTS LE RS TR ne La FN PRES rh ur TS 5 DR RG ET D nn On D RO RO PSS RS D ge : ARR EE RE Re ZE PACE Rd) CE RP TN ge à Poe. RD ÈS ain DEEE Eat 4” Cd on APE or pe 6 me TN ne AE “ che? £ EEE De RC ETS @ om RP A ue bed ME GE. et: PRE OR. S 2. ONE RTS Ho rte re ». rene re EE à 0e, Vert: ANS STE F2 K ” à HT 7 À : : A 5e à a ; Si : u * s %, 5 à a a NE a # : + x.” D ER he” Se. A 2% Ë ns) RER à CESR RAR TE PT PS ne VE nf RS AT LS OR de D Ée op R RS PV Ge I ne EE RE Su AE MTS SE TRS : 2 Are Pa re para 2 sr de % Ds pee D me Va A dr Aer SEA De, Sr QT RE res es ES 2 gl A, a CPR pars tort Jen ge ge A cé, ER ae QU Tr PES bn Re 2e fic ES LE 96 Por Pot En me QD ? RS RE s ae É Reg dr or EE PR RES ES RE A TR RS PT PER mr PR AR EE en rt RP SE A È k RE de SE pe PR Te RS TE ARE \ 7 s D, > " _ Ep. Eu Th ÉAEX e AP" > “+ à ee Cut Art SE RRR P Te AE, PTun te PS DE NE RTE NT TRIO D RTS PT CRT CLR SR RÉ PR PR ET ob Con ÉD ben SR TS TR ET TE Re RAR er A, a pe Dh oi Pepe RR RS CR rate GR PSE. À Mon e-S APE LEE + F4 | hf" + + A sos ru rs gr ser CT es Nan 7 use tn LE ous) RS A Ke 4 Pr Re AA Zi a ] ON. À es pe SES SEX S'ÉL RS ii ASS k Ra 2 LR ER RTS PE PR RS PR PORT PS RS SR PT 1 PT PS ot ON S RON SN RE SE PS 9 rt PR RER MS Ë qu gr RS DU IQ TRS PS RER TS SR UT) Aa RP mme MS DE DES aie z. Es 2 Ps « RS ns < : > à nb RE E Ent PE LE Re PER RT n ENT Ga AP 75 EE qe EL mr M A BE x. DE É ss à ## 7 , £ dé ec, à & PTS CRIE es CP GE eng dm hic ; ‘ é Set *, Re", AG PT PE ter LE À. hong PMR A M, FL SR Pare OS Re 2e a D RS ER M ae on RE MOT ER Are AR PR ET NÉ on 3 at OA ANNUAIRE DE L'INSTITUT DES PROVINCES. ANNUAIRE DE L'INSTITUT DES PROVINCES ET DES CONGRÈS SCIENTIFIQUES. TOME WVITX Paraît tous les ans, du 1°". au IS février. | Srmsrrtr x) NQ S PROVINCES à EL DERACHE, RUE DU BOULOY,, 7: $ Dev PALAIS-ROYAL ; CAEN, A. HARDEL, RUE FROIDE, 2. PARIS 7, HOIURE VA AUA : 04 * YO - Pia, TA. 4 * | a #1 icTOÿT AA T7 PERSONNEL DE L'INSTITUT DES PROVINCES. L'Institut des provinces a perdu trois de ses membres dans le cours de l’année 1855 : M. Succ, à Nantes; M. Pellerin, à Caen; et M. Schulz, membre étranger, à Dresde. M. Suce , de Nantes, était un des sculpteurs les plus recommandables de France; ses œuvres avaient figuré avec honneur à plusieurs de nos expositions nationales ; il avait été chargé de divers travaux pour le Gouverne- ment. Nommé membre de l'Institut des provinces en 1849 , après avoir été un des lauréats de l’exposition ré- gionale artistique organisée, la même année, à Rennes , M. Succ avait assisté aux réunions générales de l’Institut des provinces toutes les fois qu’elles se tenaient à Paris, et, quelques jours avant la dernière session du Congrès des délégués, M. Succ, à son lit de mort, faisait écrire à M. de Caumont, par un de ses amis, qu’il espérait encore s’y rendre ; malheureusement, l'artiste éminent, qui an- nonçait en même temps plusieurs ouvrages pour l’expo- sition artistique du mois de juin 1855 , à Caen, se faisait une illusion complète sur son état, et, quelques jours après, les journaux nous apprenaient sa mort, Les œuvres de M. Succ ont donné lieu, à diverses époques, à des VI PERSONNEL DE L'INSTITUT DES PROVINCES. articles dans les journaux et les revues. En 1843, M. de la Sicotière , organe du Congrès scientifique de France, qui tenait à Nantes une partie de sa session, rendit hom- mage aux œuvres de M. Succ. | M. PELLERIN , professeur en médecine , trésorier de la Société des Antiquaires, membre d’un grand nombre d’Académies, secrétaire-général-adjoint de l’Association normande, a été enlevé inopinément à sa famille , au moment où il se trouvait avec elle à l'exposition univer- selle, M. PELLERIN était un de ces caractères fermes et doux, qui ne transigent jamais avec les principes et qui suivent invariablement la ligne de l'honneur et de la jus- tice. Dans toutes les fonctions qu’il a remplies, M. PEL- LERIN a déployé un dévouement, une impartialité, un désintéressement qui rendent bien difficile le choix de ceux qui sont appelés à le remplacer dans ces différentes fonctions. M. PELLERIN s'était allié à une des anciennes familles de Caen, là famille Dan de La Vauterie, dont lun des membres est inspecteur-général des ponts et chaussées , et l’autre, le père de M, Pellerin, un des médecins les plus honorables et les plus distingués de Caen, qui, pendant long-temps, a siégé au Conseil municipal de la ville, et que la Société française d’ar- PERSONNEL DE L'INSTITUT DES PROVINCES. VII chéologie s’honore de compter parmi les membres de son Conseil administratif. M. PELLERIN laisse deux fils, dont il avait surveillé les études avec une grande sollicitude. M. SCHULZ, conseiller d'État et une des lumières du royaume de Saxe, l’ami de S. M. le roi Jean , grand pro- tecteur des sciences et des lettres, et lui-même un des sa- vants les plus éminents de l’Allemagne, est mort à Dresde en 1855. M. Scauzz était d’un âge peu avancé et rien ne pouvait faire craindre une perte si regrettable. Il avait été nommé membre étranger de l’Institut des pro- vinces, en 1853, après la session du Congrès archéolo- gique de l’Allemagne , ténu en septembre dans la ville de Nuremberg. Ce Congrès , qui eut l’insigne honneur d’être présidé par S. M. le roi de Saxe, comptait M. Schulz au nombre des membres qui composaient son bureau. Sept membres titulaires nouveaux et trois membres étrangers ont été admis en 4855; ce sont MM. : Gustave DE LORIÈRE, docteur en droit, auteur de tra- vaux botaniques et géologiques sur l'Espagne , Chevalier de l’ordre d’Isabelle-la-Catholique , au Mans, et à Paris, rue de l'Est, n°. 7; CALEMARD DE La FAYETTE, membre de plusieurs AcCa- démies , au Puy (Haute-Loire) ; VIII PERSONNEL DE L'INSTITUT DES PROVINCES. Le comte Georges DE SOULTRAIT ook, inspecteur des monuments de l’Allier, membre, du Conseil général de la Nièvre, à Lyon ; MABIRE, maîre de Neufchâtel, inspecteur.de lAssoeia- tion normande, à Neufchâtel ; SELLIER 3€ , membre du Conseil général de la Marne, président de la Société d'agriculture , sciences et arts de Châlons ; | Le vicomte pE GENOUILHAC, membre de plusieurs So- ciétés savantes, à Rennes ; Albert be Brives %#, secrétaire général de la XXIF°, session du Congrès scientifique de France. Les membres étrangers sont MM. : KERWIN DE LETTENHOWE, membre de plusieurs aca- démies , à Bruges ; FoRrSTER %#, professeur à l’Académie des beaux-arts de Vienne, président de la vingt-sixième classe du Jury international ; Le baron DE MAYENFISCH Xock% , chambellan de S, M. le roi de Prusse et de S. A. R. le prince de Holin- zoltein-Sigmaringen , à Sigmaringen. IX COMPOSITION DU BUREAU. \ Directeur-genéral : M. pe Caumonr 3 O X C X, fondateur des Congrès scientifiques de France. Pour la classe des sciences, M. Eunes-DesLonc- cHAMes Ÿ€, doyen de la Faculté des sciences, Secrétaires- Rare généraux. Pour la classe des lettres, M. Borpeaux, docteur en droit, à Evreux. Trésorier : M. GauGcaix %, inspecteur de l'Association nor- mande. Sous-directeurs régionaux : MM. Le Gazz ÿ£, conseiller à la Cour impériale, sous-directeur pour le Nord-Ouest, à Rennes. Des Mouzins, inspecteur-divisionnaire des monuments, sous-directeur pour la région du Sud-Ouest, à Bor- deaux. P.-M. Roux % C 5%, membre de l’Académie, sous- directeur pour la région du Sud-Est, à Marseille. Victor Simon %#, sous-directeur pour la région du Nord- Est, à Metz. CHazze %, sous-directeur pour la région du Centre, à Auxerre. | , LISTE DES MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES {1}. S. M. NAPOLÉON III, G. % 3%, Empereur des Français. MM. Le prince Lucien Bonaparte Ÿ#£, sénateur, membre de plusieurs Académies. Le prince Charles BonAPARTE. J. GirarniN Ÿ£, correspondant de l’Institut de France, à Rouen. Le vicomte De Cussy O Xk, C %, membre de plusieurs Académies, à Paris, et à Vouilly (Calvados). Le Grano Ye, D.-M., ancien maire de St.-Pierre-sur- Dives. LamBerT, conservateur de la Bibliothèque publique de Bayeux, Baron pe La FResnaye #£, membre de plusieurs Acadé- mies, à Falaise. L Eroc-DEmazy, ancien secrétaire-général de l’Institut, au Mans. L’abbé Lotrix, ancien trésorier de l’Institut, id. L'abbé Bouver, ancien membre du Conseil, id. DE Marseur, chef d'institution, à Laval. Auger , chanoine titulaire de Poitiers. BourLLer #, membre de plusieurs Sociétés savantes, à Clermont-Ferrand. | Lecoo #, secrétaire perpétuel de l’Académie, à Cler- mont-Ferrand. Léon pe LA SICOTIÈRE, avocat, à Alençon. TarzzarD #, conseiller à la Cour impériale de Douai. Guerrier pe Dumastr XX, membre de l'Académie, à Nancy. (1) On a suivi pour cette liste l’ordre chronologique des nominations. LISTE DES MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES. XI MM. Bonnet %, professeur d'agriculture , à Besançon. Buvienier 3%, membre de plusieurs Académies, à Verdun. CoumarmonD %, bibliothécaire du Palais des Arts, à Lyon. D’'Housres-Finmas %, à Alais (Gard), correspondant de l’Académie des sciences, Soyer-WiLLemer €, trésorier-archiviste de l’Académie, à Nancy. Croizer #, curé de Neschers, près Issoire. Marcel pe Serres #<, professeur à la Faculté des sciences, à Montpellier. Weiss O %, bibliothécaire , à Besançon. GérAULT, curé de Laval (Mayenne). Mizcer, naturaliste, président de la Société d’agriculture, à Angers. Bonnet #, D.-M., chirurgien en chef de l’Hôtel-Dieu, à Lyon. * Viricez %, ancien médecin en chef des Hospices de Lyon, Monix , professeur d'histoire à la Faculté des lettres de Besançon. Fourner #, professeur d'histoire naturelle à la Faculté des sciences, à Lyon. SeRINGE, professeur de botanique à la même Faculté. Victor Simon €, ancien secrétaire-général du Congrès, conseiller à la Cour impériale, à Metz. Mocezor O , naturaliste , à Bruyères ( Vosges). Herpp <, professeur à la Faculté de Droit, à Strasbourg. CoururaT X, ingénieur en chef du cours du Rhin, à Strasbourg. Mg". Donner O %£, cardinal-archevêque de Bordeaux. Mg, Gousser O , cardinal-archevêque de Reims, BarREAU, historiographe et chanoine de Beauvais. FereT, Conservateur de la Bibliothèque, à Dieppe. XII LISTE MM. Mg'. Cousseau SX, évêque d'Angoulême, De LA Fareze %, ancien représentant du Gard, à Nîmes. L'abbé Desrocues, curé d’Isigny (Manche ). De Cayroz #, ancien député, à Compiègne, Biseuz, à Blain (Loire-Inférieure ). Drouer, inspecteur divisionnaire de la Société française d'archéologie, au Mans. Marquis pe VigrayEe, géologue , à Cheverny, près Blois. Le R, P. Arthur Martw,membre de plusieurs académies, à Paris. Le R. P. Camier, membre de plusieurs Académies, à Paris. | | DucATELLIER, ancien secrétaire-général de l'Association bretonne , à Quimper. DE La Baume %, conseiller à la Cour d'appel, à - Nimes. Comte pe MonTALEMBERT Ÿ£, ancien pair de France, inspecteur divisionnaire de dla Société française d’ar- chéologie pour la conservation des monuments, à Paris. RerderT, conservateur des Archives de la Vienne, à Poitiers, Gopanp , graveur, membre de plusieurs Académies, à Alençon (Orne). V. Hucaer, membre de plusieurs Sociétés savantes, au Mans ( Sarthe). ! Comte ne Tocquevizze O 3%, ancien ministre, membre de l’Académie française, à Tocqueville (Manche). Tessier , membre de plusieurs Académies , à Anduse. Comte A. pe Goureues, membre de plusieurs Sociétés savantes , à Lanquais (Dordogne ). Vazz #, directeur de l'Observatoire , à Marseille, Goeuez %, membre de plusieurs Académies , à Boux- veiller (Bas-Rhin ). DES MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES. XIIT MM. L'abbé Vois, membre de plusieurs Académies , au Mans. Le Gray €, conservateur des Archives, correspondant de l’Académie des inscriptions , à Lille (Nord ). Kunzman O #, directeur de la monnaie, membre du Conseil général du commerce, à Lille.( Nord). Herman, membre de plusieurs Académies, de la So-. ciété des antiquaires , etc. , à St.-Omer ( Pas-de- Calais ). Jourpain , chanoine de la cathédrale, à Amiens. L'abbé Duvaz, membre de la Société française d’archéo- logie pour la conservation des monuments, à Amiens. F. Woïrizez, membre de plusieurs Académies, à St.- Quentin, Baron pu Taya 3€, président de la Société d’agriculture des Côtes-du-Nord , à St.-Brieux. Desnoyers, vicaire-général d'Orléans, inspecteu les monuments du Loiret. \ MaLuerge, juge , président de la Société d'histoire natu- relle, à Metz. Bazin 3, archiviste de l’Académie des sciences, arts et belles-lettres de Rouen. Bazzx O #£, ancien président de l’Académie de méde- cine , à Villeneuve-le-Roy (Yonne). | Vizmoris €, correspondant de l’Institut, aux Barres (Loiret ). BEzLA O £, ancien directeur de l’Institut agronomique de Grignon, Perir, proviseur du lycée de Rennes. Comte pe Tristan 3, membre de plusieurs Académies, à Orléans, | Comte ne Locnarr 2%, directeur du musée d'histoire naturelle, à Orléans. Bayze-MouizLar O 5%, membre de l’Académie de: Clermont, conseiller à la Cour de cassation, XIV LISTE MM. Beauper La Farce XK, ancien sous-préfet, membre de l’Académie de Clermont. Perit-LariTre, membre de l’Académie de Bordeaux. L'abbé BLararrou, chanoine, professeur à la Faculté de théologie de Bordeaux. BARTHÉLEMY %#, conservateur du musée d'histoire natu- relle, à Marseille. Dreuzer 3€, ex-président de la Société de statistique de Marseille, BertuLus X, médecin de la marine, à Marseille, membre de plusieurs Académies. Coquanp, ingénieur des mines, orties de géologie, à Besançon. CasrTez, agent-voyer chef, à St.-Lo. L'abbé Devoucoux, secrétaire perpétuel de la Société académique, et vicaire-général d’Autun. Niepce , procureur impérial, à Brignoles ( Var). Baron pe Conrencun O %, directeur général de l'admi- nistration des cultes , à Paris. ReNauLT, inspecteur divisionnaire de l'Association nor- mande, vice-président du tribunal, à Coutances. Comte Ozivrer DE SEsmaisons, ancien directeur de l’As- sociation bretonne, à Nantes. Carrier, directeur de la Revue numismatique, à Amboise. LAMBRON DE Licnim, capitaine de cavalerie, secrétaire- général de la XV® session. du Congrès scientifique , à Tours. CHampoiseau %, secrétaire-général de la même session, à Tours, De Sourpevaz %£, id., juge d'instruction , à Tours. J. ne Fontenay, membre de plusieurs Académies, à Autun. Mgr. Parisis O X, évêque d'Arras, ancien représentant du Morbihan. De GLanviLce, inspecteur des monuments de la Seine- Inférieure , à Rouen, DES MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES. XV MM. L'abbé Le Perir, chanoine honoraire de Bayeux, secré- taire-général de la Société française d'archéologie pour la conservation des monuments, à Tilly (Calvados). E. pe BLois, ancien représentant du Finistère, président de la classe d’histoire de l’Association bretonne, à Quimper. L'abbé Lacurte, chanoine honoraire de La Rochelle, inspecteur divisionnaire des monuments historiques , à Saintes. MaATHERON , Ph. %£, ingénieur, membre de plusieurs Sociétés savantes, à Marseille. De La Terrape, directeur de la Société Linnéenne , à Bordeaux. De Buzonnière, secrétaire-général de la XVIIIe. session du Congrès scientifique de France, membre de plu- sieurs Académies , à Orléans. La Crosse C € Ÿ, sénateur, ancien ministre des travaux publics, à Paris, Duraur De MonrrorTt #, ex-président de la Société de statistique des Bouches-du-Rhône , à Marseille. Général Rémonn G O #, ancien député, membre de plusieurs Académies , près Gisors. GopeLze X%, membre de me Académies, conseiller d'État, Morière, secrétaire-général de l’Association normande, directeur des Cours spéciaux du lycée, à Caen. Leresvre Du RurrLé C %, sénateur, inspecteur divi- sionnaire de l’Association normande, ancien ministre , à Pont-Authou. | Le NormanD, ancien sous-préfet, membre de plusieurs Sociétés savantes , à Vire. Vicomte ne FazLoux #, ancien ministre de l’Instruction publique, à Segré (Maine-et-Loire }). De KERDREL, ancien représentant d'Ille-et-Vilaine, an- cien élève de l’École des chartes, à Rennes. XVI LISTE MM. Alp. Le FLaGuais, membre des Académies de Caen et de Rouen , à Caen. nt L’abbé Crosnier, protonotaire apostolique du Saint- Siége, vicaire-général de Nevers, inspecteur des monu- ments de la Nièvre, à Nevers. Mg’. Duponr C #£, cardinal-archevêque Fi Bourges, à Bourges. AvssanT , membre de plusieurs Académies, professeur en médecine, à Rennes. Tarot #£, président de chambre à la Cour d’appel de Rennes, secrétaire-généralde la XVIe, session du Congrès. Comte Louis pe Kercorzay, ancien directeur de la Revue provinciale , secrétaire-général:de l'Association bretonne , à Fossieux (Seine-et-Oise ). A, Taszé #2, conseiller à la Cour d’appel de Rennes. Barré, sculpteur , lauréat: de l'exposition régionale de l'Ouest, à Rennes. Baron pe Girarpor %£, membre de plusieurs Académies, sous-préfet, à Nantes. Guérancer, ancien président de la Société académique de la Sarthe , au Mans. L, DE La Morre, membre de l’Académie, inspec- teur des établissements de bienfaisance, à Bordeaux. Marécuar %, ingénieur des ponts-et-chaussées, à Bourges. Macuarp €, ingénieur en chef, id, Berrranp %, maire de Caen, doyen de la Faculté des lettres, à Caen. VALLAT , ancién recteur de l’Académie du Lot, membre de l’Académie, à Bordeaux. Boucner DE Pertues #€, président de la Société d’ému- lation , à Abbeville, Rawnaz 3€, avocat-général près la Cour de cassation. De La Monneraye, président du Conseil général du Morbihan, à Rennes. Porrier conservateur de la Bibliot, publique de Rouen. DES MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES. XVII MM. Nicias Garizanp O 3%, avocat-général à la Cour de cassation # membre de plusieurs Sociétés savantes. Taévenoz, chef d’escadron , secrétaire de section à Ja VIe. session du Congrès scientifique de France, à Clermont-Ferrand. : Cæavin De MazLan >X, ancien conservateur de la Biblio- thèque du palais du Luxembourg , à Dole. Marquis De CHENNEVIÈRES-POINTEL %c, membre de plusieurs ‘Académies, inspecteur-général des musées de province, à Paris. Guizsory aîné 3€, secrétaire-général de la X°. session du Congrès scientifique de France, président de la Société _ industrielle, à Angers. Baron Cuaizzou pes Barres O €, GX, ancien préfet, président de la Société académique d’Auxerre. De VerneiLu-Purrazeau , inspecteur divisionnaire de la Société française d’archéologie pour la conservation des monuments, à Nontron ( Dordogne ). De Surienx, membre de l’Académie de Mâcon, à Mâcon ( Saône-et-Loire ). FLecaer , architecte, à Lyon. M. CanaT, président de la Société académique de Chäâlons-sur-Saône. BLonvor, secrétaire-général de la XVIIe, session du Congrès scientifique de France, professeur à l’École secondaire de médecine de Nancy. ; BOULANGÉ, ingénieur des ponts-et-chaussées, membre de l’Académie, à Metz. SIMONIN , docteur-médecin , secrétaire de l’Académie Stanislas, à Nancy, secrétaire de section à la XVIIe, session du Congrès. Le Pace, membre de l’Académie de Nancy, archivisle du département de la Meurthe, à Nancy. ‘Comte nr Mecrer, inspecteur divisionnaire des monu- XVIII LISTE ments, membre de plusieurs Académies, à Chaltrait (Marne). MM. Victor Perir, membre de plusieurs Sociétés archéolo- giques, à Sens ( Yonne). Travers , professeur de littérature latine à la Faculté des lettres de Caen, secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences , arts et belles-lettres, à Caen. Dupré La Manérræ, docteur en Droit, secrétaire de section à la XVIe, session du Congrès scientifique de France, substitut, à Caen. Rosran, inspecteur des monuments historiques , maire de St.-Maximin (Var). Harpez, imprimeur de l’Institut, membre du Conseil de la Société française d’archéologie pour la conserva- tion des monuments, à Caen. DE QuarrerAces £, ancien professeur d’histoire naturelle à la Faculté de Toulouse, membre de l’Institut, à Paris. Paurrin, ancien magistrat, membre de plusieurs Acadé- mies, à Paris. Mauuz , ancien préfet, membre de plusieurs Sociétés savantes , à Carcassonne, Comte ne Monrzaur YX, membre de plusieurs. Acadé- mies, à Moulins ( Allier). L'abbé Boupanr, curé de Chantelle (Allier ). Le Pezcerier-SAUTELET, docteur-médecin , à Orléans. Comte pe VicNeraL, président du Comice agricole, à Ry (Orne). De Benacue O Ye, membre du Conseil sn de l’agri- culture, à Dampierre (Loiret ). Le Vor, bibliothécaire de la marine , à Brest. L'abbé Crror pe Lavizce, membre de l’Académie de Bordeaux. Comte Acawer »'Héricourr #, membre de l’Académie d'Arras, DES MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES. XIX MM. Baron ne Monrreuiz #£, député, à Gisors. Comte ne Niewerkerke O #£, C XKk, directeur-général des musées , à Paris. Quanrin, archiviste du département de l’Yonne, membre de plusieurs Sociétés savantes, à Auxerre. D'EspauLarp, président de la Société académique du Mans , adjoint au maire de la même ville. GomarTr, membre de plusieurs Académies, secrétaire du Comice agricole de St.-Quentin (Aisne). De Verneuiz O 6, C , membre de l’Institut de France, à Paris, Baron James pe Roruscnizp C %K, membre de plusieurs Académies , à Paris, Ricarn, secrétaire de la Société archéologique, à Mont- pellier. ARRONDEAU , professeur de physique au lycée de Rennes, Du Bois O #£, de la Loire-Inférieure, inspecteur-général de l’Université, Comte pe VauBLanc #£, membre de plusieurs Acadé- mies, à Paris et à Munich (Bavière). Gayor, ancien député, secrétaire de la Société d’agri- culture, sciences et arts de l'Aube, L'abbé Tripon, inspecteur des monuments de l’Aube, chanoine honoraire , à Troyes. ALLuaAuD aîné XX, membre du Conseil général de l’agri- culture , président des Sociétés savantes de Limoges. Mossezman, membre de plusieurs Sociétés savantes, à Paris, passage Cendrié, A. Ramé, inspecteur divisionnaire des monuments, à Rennes. Vicomte Du Moncez , à Caen. PrrTeau membre de plusieurs Sociétés savantes, à Toulouse. Bouer , membre de plusieurs Académies, à Caen, XX LISTE MM. Mg'. River %, évêque de Dijon, président de la XXIe. session du Congrès scientifique de France. Henry Beauvor, secrétaire-général de la même session , président de la Commission archéologique de la Côte- d'Or. Le marquis DE SarnT-Seine, vice-président général de la même session du Congrès. De La Gnrèze X, chevalier de l’Étoile-Polaire de Suède et de. Charles III d'Espagne, conseiller à la Cour im- périale de Pau. FRANTIN, membre de l’Académie de Dijon. Besnou X, pharmacien en chef de la :marine,à Cherbourg. Forsser , conseiller à la Cour impériale de Dijon. Le vicomte DE JuiLzac, inspecteur divisionnaire de la Société française d'archéologie pour la conservation des monuments, à Toulouse, Comte De PoxreisauzT, membre de plusieurs académies, à Fontenay (Manche). - Denis aîné, membre de la Société française d’archéologie pour la conservation des monuments, à Fontaine- Daniel (Mayenne). Gustave pe Lorière, docteur en droit, auteur des travaux botaniques et géologiques. de l'Espagne, chevalier de l’ordre d’Isabelle-la-Catholique, au Mans, et à Paris, rue de l'Est, 7. CALEMARD DE LAPAYETTE , membre de plusieurs aca- démies, au Puy (Haute-Loire ), Le comte Georges pe SouLrrair Xe, inspecteur des monuments de l’Allier, membre du Conseil général de la Nièvre, à Lyon. Masrre, maire de Neufchâtel, inspecteur de l'Association normande, à Neufchâtel. SeLLier %, membre du Conseil général de la: Marne, président de la Société d'agriculture , sciences et arts de Châlons. DES MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES. XXI MM. Le vicomte pe GENouiLHAG, membre de À apres Sociétés savantes, à Rennes. Albert pe Brives #, secrétaire-général de la XXIIe. session du Congrès scientifique de France, président de la Société d’agriculture, sciences et arts, au Puy. Membres Étrangers. S. M. le ROÏI DE SAXE, président des Sociétés académiques de Dresde et du Congrès archéologique allemand. MM. Comte pe Mérone C Sc XX, ministre d’État de Belgique, inspecteur divisionnaire de la Société française d’ar- chéologie, au château de Trelon, près d’Avesnes, et à Bruxelles. Lopez C % , conservateur en chef du usé! à Parme. Gazzera X, secrétaire de l’Académie, à Turin. Mg’. RenDu >, évêque d'Annecy. Marquis Parerro C %X, à Gênes, Marquis De Rinozri C XX, ancien ministre, à Florence. Pasteur Dusy, à Genève. Baron pe Seuis-LonecHamP #£, à Liége. W&EewkEL, professeur, à Cambridge. Jawes IaATEs, à Londres. SAN QuinTiNo >X, conservateur honoraire du musée, à Turin. Despines C >, directeur-général des mines du Piémont , à Turin. VarNKoOENIG €, professeur à l’Université de Tubingue. Baeur, professeur à l’Université de Heidelberg. SCHADOW %X, directeur de l’école des Beaux-Arts, à Dusseldorf, Kurrer X, professeur de physique, à St.-Pétersbourg. XXII LISTE MM. Knriec pe HOcureLpEN O >, ancien directeur des fortifi- cations du grand-duché de Baden, à Baden, De Hammer-Puresrazz G 3 %, membre de l’Académie impériale, à Vienne, De Brinckeu, conseiller d'État, à Brunswick, D'Homazius-D'Hazzoy C >, correspondant de l'Institut de France, à Namur et à Paris, rue Mondovi, 6. Maraviena, professeur d'histoire naturelle, à Catane ( Sicile ). Duc Serra D1 Farco G , prince de St.-Piétro, à Flo- rence (Toscane). BerTint O %£, membre de la Chambre législative de Sardaigne, conseiller à la Faculté de médecine, membre de plusieurs Académies, vice-président-général du Congrès scientifique de France , à Turin, Baron pe Roisin X, au château de Kurens, près Trèves (Prusse Rhénane). Bucxcanp, professeur à l’Université d'Oxford. Marquis DE SanNTO-ANGELO G X, ministre de S, M. le roi des Deux-Siciles, à Naples. Comte ve FurstTemBerG X, chambellan de S. M. le roi de Prusse, à Stammheim , près Cologne. Baron pe Quasr %X, inspecteur-général des monuments historiques de Prusse, chevalier de l'Ordre de St.- Jean de Jérusalem, à Berlin. | Rouzez >, professeur d'archéologie à l’Université de Gand. Sismonna >X, professeur de géologie à l’Université de Turin, membre de l’Académie de la même ville, Comie ne Sezmour €, gentilhomme de la Chambre du roi de Sardaigne, président de l’Association agricole de Piémont. Jacquemonr %, membre du Sénat et président de la So- ciété académique de Chambéry. DÉS MEMBRES DE L'INSTITUT DES PROVINCES. XXII! MM. Mg’. Muicer, évêque de Munster, RelCHENSPERGER, conseiller à la Cour royale et membre de plusieurs Académies, à Cologne, vice-président de la Chambre législative de Berlin. Mg'. Gerssez X, cardinal-archevêque de Cologne. Borowski, ancien secrétaire de l'ambassade russe, à Paris. | Comte ne La Marmora C 5%, directeur de l’école de marine, à Gênes. DonazstTon, secrétaire de l’Institut des architectes, à Londres. - Le MaistRe-D'ANSTAING X, président de la Société ar- chéologique ; à Tournay. Quérezer O Ÿ, secrétaire perpétuel de l’Académie royale de Belgique, à Bruxelles. Josaro #<, membre de plusieurs Académies, à Bruxelles. De Wizmoski, chanoine de la cathédrale de Trèves, à Trèves, Taurman, membre de plusieurs Académies, à Poren- tru y. Baron pe PLancker , docteur en Droit, membre de plu- sieurs Académies, à Bruxelles. Murcaison, membre de la Société royale de Londres, correspondant de l’Institut de France, à Londres. Parckxer, membre de la. Société des Antiquaires de : Londres , à Oxford, Comte Ernest pe Beusr C %X, directeur-général des mines, à Berlin. L'abbé Barurr: €, professeur de géométrie à l’Univer- sité de Turin. Comte AvoYARDO DE QuarEGxY C X, professeur de phy- sique à l’Université de Turin, Comte César Bazso C X, député, ex-président du conseil des ministres, à Turin. Cisrario C >, sénateur de Piémont, professeur de chimie à l’Université de Turin, XXIV MM. LISTE. Racozinr Roc, secrétaire perpétuel de l’Académie pue d'agriculture de Turin. Baron Joseph Mano C X, président du Sénat du royaume de Sardaigne et de la Cour d’appel de Turin, membre de l'Académie, J. Morris, sénateur du royaume de Sardaigne, professeur de botanique à l’Université de Turin, Professeur CanrTu >, sénateur du royaume de Sar- daigne , à Turin, Le comte Joseph Tezexr G XX, membre de l’Académie impériale d'Autriche, à Szerach. Joseph Arnerx, directeur du cabinet impérial des Anti- ques, à Vienne. Davinson , membre de la Société géologique , à Londres. »'Ozrers C >%, directeur-général des musées , comman- deur de plusieurs ordres, à Berlin. Le Rév. Perir, membre de plusieurs Académies, à Londres. Tuomsen C %X%, directeur du cabinet des éd com- mandeur de l’ordre de Danebroc ; à Copenhague. Baron STiLFRieD, grand-maître des cérémonies du pa- lai$, commandeur de l’Aigle-Rouge , à Berlin. Namur, secrétaire-général de la Société archéologique du grand-duché de Luxembourg. KerwiN ne LEeTTENHOwE , membre de plusieurs aca- _ démies, à Bruges. Forster %, professeur à l’Académie des beaux-arts de Vienne, président de la vingt-sixième classe du Jury international à l'Exposition universelle de Paris. Le baron pe Mayenriscn %>%%Xk, chambellan de S. M. le roi de Prusse et de S. A. R. le prince de Holin- zoltein-Sigmaringen ; à Sigmaringen. CONGRES DES DÉLÉGUÉS DES SOCIÉTÉS SAVANTES DES DÉPARTEMENTS, SOUS LA DIRECTION DE L'INSTITUT DES PROVINGES DE FRANCE, SESSION DE 1855. SÉANCE GÉNÉRALE DU 20 MARS. (Présidence de M. pe Caumowr, directeur de l'Institut des provinces. ) La séance est ouverte à deux heures et demie, dans la salle de la Société d'encouragement pour l'industrie nationale. On remarque dans la salle, à cette séance et aux séances suivantes, les membres dont les noms suivent : MM. ABADIE, architecte, délégué de la Charente. ALBIGNY DE VILLENEUVE (Paul d”), délégué de la So- ciété des sciences naturelles et arts de St.-Étienne. ALVIMARE (d°’), de Dreux, délégué de la Société pour la conservation des monuments. ANCELON, délégué de la Meurthe. ANISSON DU PERRON, délégué de l'arrondissement de Louviers. AVRIL DE LA VERGNÉE, délégué de la Société de Statistique des Deux-Sèvres. 2 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. MM. BALLEROY (le marquis de), membre du Conseil général du Calvados. BARTHÉLEMY (Ed. de), délégué de la Société acadé- mique de Châlons. BAUDRILLARD, professeur - suppléant d’économie politique au Collége de France , délégué des Vosges. BAULNY ( Camille de), membre de la Société pour la conservation des monuments. BAUSSET-ROQUEFORT (le marquis de ), délégué de la Société de Statistique de Marseille. | BEAUDOIN , président du Comice de l’arrondisse- ment de Rouen. BEAUFORT (le comte Charles de), délégué de Lille. BEAUFORT (Roger de), délégué de l’Association normande. BEAULIEU, Correspondant de l’Institut, vice-prési- dent et délégué de la Société de Statistique des Deux-Sèvres. BERTRAND (Ernest), délégué de la Société acadé- mique de l’Aube,. BérTHisy (le marquis de), délégué des Bouches-du- Rhône. BIGOTTIÈRE (de La), délégué de l'Eure. BizeuL , délégué de la Société archéologique de Nantes. Boxanp (de), délégué de la Société d'agriculture de l'Allier. BoxneuL (de ), délégué de Seine-et-Marne, BORDEAUX (Raymond), d’Évreux. BOUCHER DE'MOLANDON , délégué de la Société pour la conservation des monuments (Loiret ). CONGRÈS DES ACADÉMIES. 3 MM. Bouis (de), délégué de la Société pour la conser- | vation des monuments (Seine). Bure (de), délégué de la Société d’émulation de l'Allier. BuTEux (Joseph), délégué de la Société d’émulalion d’Abbeville. CALEMARD DE LAFAYETTE, délégué de la Société du Puy. CANAT (Paul), délégué de la Société d'histoire et d'archéologie de Châlons-sur-Saône. CAULAINCOURT (le comte de), délégué de la So- ciété des sciences de Lille. CAUMONT (de), directeur de l’Institut des provinces. CHALLE, président et délégué dela Société d'Auxerre. CHANDON DE ROMONT, délégué du Comice agri- cole de Reims. CHAUBRY D£ TRONCENORD (le baron), délégué de la Société d'agriculture, commerce, sciences et arts de la Marne. CHAUVINIÈRE (de La), délégué du Comice agricole de Sauniur et de la Société industrielle d'Angers. CLÉMENT-MULLET, délégué de la Société d’agri- culture , sciences et arts de l’Aube. CLOCHEVILLE (le comte de), délégué de la Société de Boulogne. COURCELLES (le comte de), délégué de la Société des sciences de Lille. Gussy (le vicomte de), délégué de Bayeux. DarCEL, délégué de la Société pour la conservation des monuments ( Seine-Inférieure ). DAvip (Ferdinand),membre du Corps législatif, pré- sident de la Société de Statistique des Deux-Sèvres. A INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. MM, DELANOUE , délégué de la Société de Valenciennes. DESORMEAUX (le docteur), délégué de la Société de Statistique de Marseille. DESTOURBET, délégué du Comice agricole de la Côte-d'Or, DRÉOLLE, délégué de Libourne. DuHAMEL, délégué de l'Association normande. Dumow, ancien ministre des travaux publics et des finances, délégué du Lot, Du MoncezL (le vicomte) , délégué de la Société de Cherbourg. DurAND (Paul), délégué de la Société pour la conser- vation des monuments (Eure-et-Loir). DuvAL DE FRAVILLE, délégué de la Haute-Marne. ÊLIE DE BEAUMONT , sénateur, membre de l’Aca- démie des sciences. ERCEVILLE (Gabriel d’), délégué de la Société pour la conservation des monuments. ErNOUF (le baron), délégué de l'Eure. ESPAULART (d’), délégué de la Société des sciences et arts de la Sarthe. | FONTENAY (Joseph de}, d’Autun, délégué de la Société Éduenne. FRAPPIER (Alfred), délégué de la Société de Sta- tistique des Deux-Sèvres. GADEBLED, délégué de la Société de l'Eure. GALEMBERT ( le comte de), délégué de Tours. GAUGAIN , de Bayeux, délégué de la Société acadé- mique de Bayeux. | GEOFFROY SAINT-HILAIRE , membre de l’Institut. GLANVILLE (Léonce de}, délégué de l’Académie de Rouen. © CONGRÈS DES ACADÉMIES. | 5 MM. GODEFROY DE MÉNILGLAISE (le marquis de), dé- légué de la Société des Antiquaires de la Morinie. GomarT (Charles), délégué du Comice deSt.-Quentin. Gosse (Hippolyte), délégué de la Société d'histoire et d'archéologie de Genève. GUÉRIN-MÉNEVILLE , délégué de la Société d’accli- malation. HARPIGNIES, peintre , délégué de la Nièvre. HENNOGQUE ({ le colonel ), député au Corps législatif, délégué de l’Académie et de la Société d'histoire naturelle de Metz. HÉRON DE VILLEFOSSE, archiviste et délégué de la Nièvre. JoLY (le docteur), délégué de l'Association normande. JumILHAC (le comte ee délégué de PAssociation normande. ; KÉRIDEC (de), délégué de l’Association bretonne. LanGsporrr (le baron de), délégué de la Société d'agriculture, sciences et arts d'Agen. LEBRUN, ancien directeur de l’École de Châlons. LECADRE (le docteur), délégué de la Société Ha- vraise d’études diverses. LECOMTE (de la Sarthe), greffier en chef du par- quet de la Cour des comptes. LEQUIEN , député au Corps législatif, délégué de la Société centrale de Douai. LEsrANG (de), délégué de la Sarthe. LE VAVASSEUR (Gustave), d’Argentan, délégué de la Société pour la conservation des monuments (Orne). LoriÈRE (de), délégué de la Société des sciences et arts du Mans. MABIRE, président du Comice agricole de NeufchâteL 6 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, MM. Mauuz, délégué de la Société de Carcassonne. MaïzLY (le comte de), délégué de la Société d’agri- culture , sciences et arts du Mans. MANOIR DE JUAYE (le comte du), délégué de la Société de Bayeux. MAURENQ, délégué de l'Indre. MÊLIER (le docteur), délégué de la Société de Marseille. MELLET (le comte de), délégué de la Société d’agri- culture, sciences et arts de la Marne, MiLLARD, délégué de la Société d'agriculture , sciences et arts de l'Aube. | MizeT, inspecteur des forêts, délégué de la So- ciété d’acclimatation, MonrTLaUR (le comte de), délégué de la Société d’'émulation de l'Allier. MonTREUIL (le baron de), de l’Institut des provinces, député, président du Comice agricole de Gisors. MORISSURE (de), délégué du Comice de Nogent-le- Rotrou. MossELMANN, membre de l’Institut des provinces, délégué de St.-Lo. NÉDONCHEL (le comte de), délégué de l'Association normande. OiLLIAMSON ( le vicomte de), délégué de la Société pour la conservation des monuments. OILLIAMSON (le marquis d’}, délégué de PAssocia- tion normande, Osmoy (le comte d’), délégué de l'Eure. OUDINOT DE LA: FAVERIE (Eugène), peintre ver- rier , délégué de la Société pour la conservation des monuments ( Seine ). CONGRÈS DES ACADÉMIES. 7 MM. OuLuonr ( le docteur), délégué des Vosges. Paris (Louis), délégué de l’Académie de Reims. PAYEN , de l’Académie des sciences , délégué de la Société centrale d'agriculture. PErnoT, délégué de la Société archéologique et historique de Langres. Perir (Victor), de l'Institut des provinces, délégué de la Société archéologique de l'Yonne. Ponsarp, de la Société d’agriculture de la Marne. PoNTGIBAULT (de), de l’Institut des provinces. PoriQuET, de l’Orne, délégué de l'Association nor- mande. QUATREFAGES (de), membre de l’Institut. QUENARD , délégué du Loiret. QUENTIN-DURAND, directeur de la fabrique centrale d'instruments aratoires, vice-président du Comité d'agriculture. RémonpD (le général), de l’Institut des provinces. RéPécAUD (le colonel de), délégué d'Arras. ROMANET (le vicomte de), délégué de la Société d'agriculture du Cher. ROQUETTE ( de La), délégué de la Société de géo- graphie. Rossey, délégué de la Société d'agriculture de l'Eure. ROUGÉ (le comte de), délégué du département de l'Aisne. SAILLET , président honoraire de la Société d’agri- culture de Montmédy. SAINT-GERMAIN (de), député, délégué de la Société d’Avranches. SAINTE-HERMINE (le comte de), député au Corps 8 MM. INSTITUT. DES PROVINCES DE FRANCE. législatif, président du Conseil de direction des Congrès agricoles de l'Ouest. SAINTE-TULLE (Robert de), membre du Conseil général de l’agriculture. SAINT-SEINE (le marquis de), délégué de Ja Com- mission archéologique de la Côte-d'Or. SOULTRAIT (le comte Georges de), délégué de la Société nivernaise des lettres, sciences et arts. TANLAY (le marquis de), président de la Société d'agriculture de Tonnerre, membre du Conseil général de l'Yonne. TARGET (Paul), délégué de la Société d’émulation de Lisieux, TESTE-D'OUET, de la Souiété pour la conservation des monuments. THIOLLET , dessinateur du musée d'artillerie. TousTaiN (le vicomte de) délégué de la Société française pour la conservation des monuments (Calvados). VAN-DER-STRATEN PONTHOZ (le comte), délégué de Metz. | VAUQUELIN , délégué de Pont-l’Évêque. VENDEUVRE ( Anatole de), délégué de la Société de Falaise. VERNEUIL (de),de l’Institut (Académie desSciences). ViBRAYE (le marquis de), de Cheverny (Loire-et- Cher), membre de l'Institut des provinces. VIGNERAL (le comte de), de l’Institut des provinces (Orne). VOGuÉ (le marquis de), délégué de la Société d'agriculture du Cher. CONGRÈS DES ACADÉMIÉS, 9 NM. VRoIL (Jules de), délégué du Gomice agricole de Reims. Winr (Paul de), délégué de la Société française pour la conservation des monuments. Sont appelés au bureau : MM. le marquis de Tanlay, président de la Société d'agriculture de Tonnerre ; le comte de Sainte-Hermine , député au Corps législatif; le comte de Vigneral, de l’Orne ; de La Bigottière, délégué de l'Eure ; le comte de Mellet, délégué de la Marne ; de La Chauvinière, de Paris. MM. Raymond Bordeaux, d'Évreux; Ch. Gomart, de St.-Quentin; le comte Georges de Soultrait, de la Nièvre : Calemard de Lafayette , délégué de la Société du Puy; le docteur de Bouis, secrétaires-généraux du Congrès. M. de Caumont prononce le discours suivant : « MESSIEURS, « La réunion des délégués des Sociétés savantes, qui ouvre aujourd’hui sa septième session , est devenue pour les hommes studieux de nos provinces, d’une nécessité absolue ; désormais l’avenir en est assuré. « C'était, en effet, une bonne pensée que celle qui pré- sidait, il y a dix ans, à la fondation de nos conférences. « Établir un lien entre les Sociétés savantes, pour les déterminer à travailler sur un plan uniforme ; les mettre plus intimement en rapport avec les sommités scienti- fiques ; telle était cette pensée qui a reçu la sanction de l'immense majorité des corps savants. « Cette adhésion des Sociétés savantes des départe- ments est d’un bon augure, elle doit produire les plus heureux fruits dans l'avenir. « Notre Congrès offre ainsi aux délégués des Sociétés {6 INSTITUT DÉS PROVINCES DE FRANCE. savantes une occasion de se réunir, de se connaître , de se donner la main : il sera toujours fier de pouvoir ser- vir de trait-d’union à ces compagnies dont il proclame avec bonheur les nombreux services, le désintéresse- ment et le dévouement au développement intellectuel dans nos divers départements. « Depuis la session du mois de mars 1854, l’adminis- tration du Congrès a mis à exécution les recommanda- tions que vous aviez faites; les vœux émis dans les pré- cédentes sessions ont été réunis et imprimés ; le compte- rendu de la dernière session a paru dans l'Annuaire, dont le septième volume vous a été distribué. « Cet Annuaire obtient un succès toujours croissant et se recominande non-seulement parce qu'il renferme le compte-rendu du Congrès des délégués des Sociétés savantes, mais aussi parce qu'il offre le résumé des pro- cès-verbaux des assises scientifiques convoquées dans plusieurs provinces, « Les assises scientifiques sont évidemment une de vos conceptions les plus grandes et les plus fécondes. Quand, à votre signal, sur votre ordre, au jour fixé, les ques- tions choïsies par vous sont étudiées sur différents points de la France , sous la direction de présidents que vous avez désignés ; quand ces questions vous reviennent élabo- rées dans des procès-verbaux rédigés avec talent, n’est- il pas évident que nous avons créé, par ces réunions dans lesquelles on n’admet que des hommes qui ont fait leurs preuves, une force académique nouvelle, rapide , considérable ? Il y a dans ce seul fait un avenir immense , une puissance d'action incalculable, « Cette force que nous avons créée, nous saurons la développer ; les assises scientifiques seront bientôt pour + CONGRES DES ACADÉMIES. ÂÀ l'excitation intellectuelle et la direction des études dans les départements, ce que sont pour d’autres in- térêts les fils métalliques qui rayonnent dans toutes les directions pour transmettre partout la pensée humaine. « Nous avons publié dans l'Annuaire de 1855 le ré- sumé des procès-verbaux des assises scientifiques de la Picardie, de la Champagne, de l'Alsace et du pays Messin, de la Saintonge et du Poitou. Le cadre de l’An- nuaire n'a pas permis d'en publier d’autres, à notre grand regret ; mais nous aviserons l’année prochaine aux moyens de donner satisfaction à un plus grand nombre de départements, et de ne laisser en arrière aucun des compies-rendus d'assises scientifiques. « En vertu des pouvoirs que nos statuts et plusieurs délibérations m'ont attribués, j’ai pris divers arrêtés dont on peut espérer de bons résultats. « Le CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE Se tient chaque année dans une ville, souvent très-éloignée du centre qui avait reçu le Congrès l’année précédente. Par suite de cette migration , il y avait dans l'administration du Congrès un défaut d'unité qu’il importait de faire cesser, et auquel le Congrès lui-même désirait depuis long-temps remédier. « Ainsi, pour ne citer qu’un fait, le règlement du Con- grès porte que cent exemplaires du compte-rendu de chaque session seront adressés gratuitement aux Sociétés savantes et aux établissements littéraires et scientifiques des départements. « Or, on avait bien, chaque année, rempli cette con- dition ; mais les cent corps savants étaient choisis d’après les préférences des secrétaires-généraux , sans qu’ils tinssent compte des choix faits par leurs prédécesseurs ; de sorte que très-peu de Sociétés possèdent les 34 volu- 149 INSTITUT : DES PROVINCES DE FRANCE. mes in-8°. de nos comptes-rendus. 11 y en a qui ont reçu les cinq premiers; telle autre société possède la série comprise entre le 5°. volume et le 10°, ; d’autres enfin n'ont reçu que les comptes-rendus des dernières ses- sions. « Par l'arrêté que j'ai pris, après l’avoir fait sanc- tionner par le Congrès scientifique réuni à Toulouse, en 1852 , j'ai désigné les Sociétés savantes qui devront à l'avenir recevoir les comptes-rendus du Congrès scien- tifique , et il y aura désormais plus d'ordre et d’uniformité dans la distribution. | | « L’année académique qui vient, de s'écouler est-elle plus riche en travaux que l’année précédente ? Telle est une des premières questions que nous aurons à ré- soudre , après avoir, selon nos usages, écouté les rap- ports que présenteront sur leurs académies respectives les délégués réunis dans cette enceinte. Mais déjà, d’après les documents qui nous sont transmis, nous pou- vons répondre négativement. La France académique a moins produit, en 1854, qu’elle n'avait produit en 1853. Nous aurons à en rechercher les causes. — La principale, sans doute , c’est l'indifférence toujours crois- sante pour les recherches el les études sérieuses et le peu de compte tenu aux hommes laborieux des peines qu’ils se donnent pour produire des travaux intéressants. « Le Congrès peut, dans une certaine mesure, remé- dier au mal, opposer à l'indifférence , cette paralysie des âmes , ses encouragements et ses exhortations. « Il ne faillira pas à sa tâche et si , au milieu du posi- livisme qui envahit la société, il ne peut arrêter la dé- çadence académique , il aura la conscience de l'avoir re- tardée et d’avoir contribué à maintenir le goùt.de l'étude L CONGRÈS DES ACADÉMIES. 13 dans un grand nombre de centres où son action s'exerce et s’exercera long-temps encore. « Je déclare ouverte la VII®. session du Congrès des délégués des Sociétés savantes. » Cette allocution est accueillie par les témoignages unanimes d'approbation de l’Assemblée. M. le Président fait ensuite le dépouillement de la correspondance : | Lettre de la Société impériale et centrale d’agri- culture , qui délègue trois de ses membres pour la repré- senter au Congrès : MM. Huzard, Valenciennes et Payen. M. Payen annonce qu'il traitera, les 24 et 23 mars, les ques- tions indiquées au programme sous les n*. 2et9,et passera en revue les progrès de la chimie pendant l’année 1854; | Lettre de M. Geoffroy Saint-Hilaire qui, dans la séance générale du jeudi 22 mars, examinera quels ont été les résultats obtenus, en 1854, par l’acclimatation, soit dans le règne animal, soit dans le règne végétal ; M. Duchatellier s'excuse de ne pouvoir assister au Congrès et demande une réunion ultérieure du Congrès des Sociétés savantes, au moment le plus solennel de lexposition universelle, soit en juillet, soit en août. — Renvoi de cette proposition aux commissaires-géné- raux du Congrès ; Lettres de M. Philippe Beaulieux , de Nantes ; M. l'abbé Arbellot , chanoine honoraire de la cathédrale de Limoges ;: M. de La Gonivière, de Saint-Ény, près Coutances ; M. William Wardel, architecte, membre de l'Institut des architectes d'Angleterre ; M. William Borges, de Londres ; 14 INSTITUT DES: PROVINCES DE FRANCH. Lettres de M. Chaillou-des-Barres, président de la So- ciété des sciences historiques et naturelles de l'Yonne ; M. Ramé, de Rennes; M. Ballin, directeur du Mont-de-Piété de Rouen ; M. l'abbé Cochet, de Dieppe ; M. À. Dupont, de Fontenay-les-Montbard : M. Deligand , statuaire , de Sens : M. le comte de Robiano, de Bruxelles : M. le vicomte Gustave de Juillac, de Toulouse. Tous ces honorables membres, empêchés par des motifs divers, expriment de vifs regrets de ne pouvoir prendre part aux travaux du Congrès. | Lettres de M. de La Roquette, de Paris, qui présente M. Pocy, de l’île de Cuba, qui a déjà soumis une partie de ses travaux à l’Académie des Sciences ; M. le comte de Galembert, de Tours , annonce qu’il présentera un aperçu des travaux de la Société archéo- logique de Touraine, pour l’année 1854 ; | M. Naudet Saint-Rémy, peintre, à Nantes , exprime les regrets de M. Suc, qui ne pourra se rendre au Congrès : M. A. d'Espaulart, de la Société d'agriculture de la Sarthe, annonce l’arrivée de M. de l’Estang, le second délégué de cette Société ; M. le président de l’Académie de Stanislas de Nancy annonce que cette Société a délégué au Congrès des Sociétés savantes MM. Beaulieu, Gérardin et Monnier ; M. le président de l'Association normande délègue au Congrès MM. le vicomte Du Moncel, le vicomte de Beaufort, le comte de Pontgibaud , le marquis de Granval et Mosselmann ; M. le président de la Société de Statistique de Mar- seille délègue MM. A. Legoyt, le marquis de Bausset- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 15 Roquefort , et les docteurs Boudin-Desormeaux et Mêlier ; M. le président de la Société d'agriculture , commerce, sciences et arts du département de la Marne, délègue au Congrès M. V. Lebrun, ancien directeur des arts-et- métiers de Châlons ; M. le président de la Société havraise d’études diverses annonce que la Société a délégué au Congrès M. A. Le- cadre , du Havre ; M, le président de la Société d'archéologie de la Loire- inférieure délègue au Congrès M. Bizeul, qui fera un rapport sur les travaux de la Société pendant l’année 1854 ; M. Bourassé, président de la Société archéologique de Tours , délègue, pour la représenter au Congrès, M. le comte de Galembert ; M. le président de la Société zoologique d’acclimatation délègue MM. Geoffroy Saint-Hilaire, Guérin-Méneville , Quatrefages, Valserre et Millet ; M. le président de la Société d'histoire et d’archéo- logie de Genève délègue au Congrès M. Hippolyte Gosse ; M. le président de la Société impériale d’émulation d’Abbeville délègue au Congrès MM. de Chennevières- Pointel et Buteux ; M. le président de la Société des sciences naturelles de St.-Étienne délègue M. d’Albigny ; M. le président de la Société de Troyes délègue au Congrès MM. Millard et Clément Mullet ; M. A. de Brives, président de la Societé du Puy, délègue au Congrès M. Calemard de Lafayette ; M. le président de la Société d'agriculture, commerce , sciences et arts de la Marne , délègue au Congrès 16 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. MM. lé comte de Mellet, le baron de Chaubry, Rhnpprii Ed. de Barthélemy. Plusieurs autres délégations ont été snbmittiente is rieurement au bureau du Congrès ; il n’en est pas donné lecture. M. le Président passe ensuite au dépouillement des ouvrages offerts au Congrès et sur lesquels M. Georges de Soultrait est chargé de faire un rapport. Ces ouvrages sonl : Programme du concours pour laconstruction, dans la ville de Lille, d’une église dédiée sous le titre de Notre- Dame-dc-la-Treille et de St-Pierre. — In-4°., plân; Recherches sur les sépultures des premiers ducs de La maison de Lorraine dans l’abbaye de Sturzelbronn , par G. Boulangé. — Metz, 1854, in-8°. avec figures : Une visite à la mosaique romaine de Nennig, par G. Boulangé.—Metz,1854, in-8°., vignettes dans le texte : Notes pour servir à la Statistique monumentale du département de la Moselle, par G. Boulangé. — Metz, 1854 , in 8°. , fig.; Essais historiques sur les jardins, par Paul de Wint. — Paris, 4855 , in-8°. ; | Les chäteaux de la Moselle, notes ‘archéologiques , par M. G. Boulangé. — Metz, 1855, 2 broch. in-8°.; Comice agricole central et du canton de Blain, réu- nion du 21 septembre 1852, pour la distribution des prix. — Nantes , 1852 (offert par M. Bizeul ); Extraits originaux d’un manuscrit de Quentin de: La Fons, intitulé : Histoire particulière de l’église de St:- Quentin, publiés par M. Gomart, — Tome [°". ; St.-Quen- tin, 1854, in-8°., fig.; CONGRÈS DES ACADÉMIES. 17 Monographie de la chapelle et du prieuré au village de Bois-Garand, en Sautron, par M. Pbilippe Beaulieux. — Nantes, 1853, in-8°.; Bulletins des Sociétés savantes et littéraires de Belgique, sous la direction de M. F. Hennebert.—1"°, an- née (1855), n°. 3, in-8°. (offert par M. de Caumont ); Le Cabinet historique , revue trimestrielle, contenant, avec un texte et des pièces inédits, le catalogue général des manuscrits des bibliothèques publiques de Paris et des départements, etc., sous la direction de M. Louis Paris. — Paris, 1854, les deux premiers cahiers, in-8°.; Dissertation sur l’apostolat de saint Martial el sur Pantiquité des églises de France, par M. l'abbé Arbellot. — Limoges , 1855, in-8°. : Des instruments en silex trouvés dans le diluvium du bassin de la Somme, par P. Briez ( extrait du jour- nal local ) ; Notice sur la Société archéologique de Nantes et du département de la Loire-Inférieure, par M. Vandier. — Nantes, 1854, in-8°.; Rapport verbal, fait au Conseil de la Société française pour la conservation des monuments, sur plusieurs ex- cursions en France, en Hollande et en Allemagne , par M. de Caumont. — Paris, 1854, in-8°., fig, ; | Mémoire historique sur l’abbaye de l'Ile-Chauvet , dans le diocèse de Luçon; par le P. Arsène Cochois, pu- blié ét annoté par M. A. Guéraud.—Nantes, 1854, in-8°.; Des monnaies de Charlemagne, et particulièrement de celles qui portent, avec son monogramme, la légende CARLVS REX FR.; par M. E. Cartier, directeur de la Revue numismatique. — Blois, 1853, in-8°. , fig. ; Revue des provinces de l'Ouest (Bretagne et Poitou }, 48 . INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. publiée par A. Guéraud:— Nantes, L°, et XEI°. liv. (hom- mage de M. A. Guéraud.) ; Observations recueillies dans le Chartrier de l’ab- baye de Gisoing, et présentées à la Commission histo- rique du département du Nord; par le marquis de Gode- froy de Ménilglaise. — Lille, 1854, in-8°. ; Note:sur quelques manuscrits, par Julien Travers. — Caen, Hardel, 1855, in-8°.; Notice sur les trois frères Jean Eudes, François Eudes de Mézeray, et Charles Eudes d’Houay ; par Gustave Le Vavasseur, — Argentan, 1855, in-8°., vignettes dans le texte (se vend au profit de l’œuvre. du monument Mézeray ) ; offert par M. Le Vavasseur ; Mémoire sur les fouilles faites. en 1852 et en 1853, dans le champ des Bésirais, en Sautron (arrondisse- . ment de Nantes), par Philippe Beaulieux. — Nantes, 1854, in-8°., fig.; ; Traduction des discours d’Eumène, par les abhés Landriot et Rochet ; accompagnée du texte, précédée d’une notice historique et suivie de notes critiques et philologiques, par l'abbé Rochet (publication de la Société Éduenne). — Autun, 1854, in-8°. (offert au Congrès par M. de Fontenay, au nom de la Société Éduenne ) ; Répertoire des travaux de la Société de Statistique de Marseille, publié sous la direction de P. M. Roux. —Marseille, t. XV, XVI et XVII, in-8°., fig. (hommage de M.Roux, au nom de la Société de Statistique de Marseille); Assises scientifiques de l’Institut des provinces pour le sud-est de la France. Actes de la première session tenue à Aix, en 1853, recueillis et publiés par le docteur P. M. Roux. — Marseille , 1854, in-8°, (hommage de M, le docteur Roux) ; CONGRÈS DES ACADÉMIES. 19 Bulletin de la Société des sciences naturelles et des arts de St.-Étienne (Loire). — St.-Étienne , 1850, 1852 et 1854, les trois premières livraisons , in-8°. , fig. ; Annuaire des cinq départements de l’ancienne Nor- mandie, publié par l'Association normande. — 1855, 21°. année, Caen, Hardel, in-8°. (hommage de M. de Caumont ); Polygraphie des volières, des ménageries et autres asiles d'animaux ; par P.-A. Millet de La Turteaudière. — Angers, 1851, in-8°. ; De l’abus des cultures épuisantes, origine et progrès de la culture du colza dans la plaine de Caen; par M. Mo- rière. — Caen, 1855 , in-8°. ; Société impériale et centrale d'agriculture, pro- gramme général du concours de 1855. — Paris, 1855, in-8°.; Société impériale et centrale d'agriculture , séance publique de rentrée de 1854, sous la présidence de M. Chevreul. — Paris, 1854, in-8°. ; Bulletin du Comice agricole de l'arrondissement de St.-Quentin. — t. III, 1854, St.-Quentin, in-8°., fig. (offert par M. Gomart }; Exposition artistique organisée à Avranches, par l'Institut des provinces et la Société francaise pour la conservation des monuments, livret. — 1854, in-18 (offert par M. de Caumont) ; L’Heptaméron ou les fêtes d’Avranches en 1854 , par M. Édouard Le Héricher. — Avranches , in-42 ; Installation des Facultés des Sciences et des Lettres et de l'École de médecine et de pharmacie de Nancy en 1854. — Nancy, 1855 , in-8°. : De la propriété littéraire en matière de nomen- ‘ 20 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. clature scientifique , par M. Charles Des Moulins. — Bordeaux , 1854, in-8°. ; Première Olympique de Pindare, par M. J. Travers. — Caen,1855, in-8°. ; Société des Frères-Ouvriers de saint François Régis, et orphelinat du Puy, séance de 1855. — Le Puy, in-8°. (offert par M. Calemard de Lafayette) ; Almanach-Annuaire de St.-Quentin et de lar- rondissement, par M. Charles Gomart. — 1°. année, in-8°. ; Résumé des conférences agricoles sur les fumiers, faites dans les cantons ruraux, par ordre des Conseils généraux de la Seine-Inférieure et du Calvados; par MM. Girardin et Morière. —2°, éd., Rouen, Péron, 1854, in-8°. ; Les Veillées de la ferme, histoire du petit Pierron, par M. Calemard de Lafayetie. — Le Puy, 41855, in-18 ; Tableaux de statistique quinquennale des sept can- tons de l’arrondissement de St.-Quentin, année 1852, publiés sous les auspices des Comices de St.-Quentin. — 1854, in-4°. ; par M. Gomart. | M. le Président donne ensuite lecture du programme dés questions qui seront discutées au Congrès des délé- gués des Sociétés savantes des départements, en invitant MM. les membres présents à se faire inscrire pour traiter ces différentes questions. On inscrit successivement : Sur les questions 4, MM. Du Moncel. —— 2, Payen et Descharmes. — 8, De Verneuil. CONGRÈS DES ACADÉMIES. 1 Sur les questions h, MM. le marquis Ch. de Vibraye et Mosselmann. nos 5, De Caumont. — 6et7, Gomart, de Vigneral, de Caumont. au 8, Delanoue.' — 5 “@, Payen, D’. de Bouis. — 10, De Romanet, Ponsard, de _ Vigneral. — 16, Calemard de Lafayette , Gomart. —— A7, Geoffroy Saint-Hilaire. — 27 et 28, R. Bordeaux, Louis Paris. — 29 et 30, Pernot, Darcel, le marquis de Chennevières, Gosse, de Genêve. — 81 à 34, R, Bordeaux, Pernot. _— 35 à 38, De Caumont, R. Bordeaux. er 2, De La Bigottière. — L3 et 44, De Caumont. — 49 à 52, De l’Estang. Sur la proposition de M. le Président, l’Assemblée dé- cide que la section d'agriculture et des sciences physiques et naturelles se réunira tous les jours, de 40 heures du matin à midi. La section d'histoire, littérature, philologie, se réunira tous les jours, de 4 à 3 heures. La séance genérale aura lieu à 3 heures delaprès-midi. M, Charles Gomart donne lecture d’un travail de M. Du Moncel sur le progrès des sciences physiques , pendant l'année 1854, 22 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, RAPPORT DE M. DU MONCEL. L'année 1854, tant à cause des préoccupations de la guerre que des réserves faites par les industriels pour l'exposition prochaine, a été moins fertile en découvertes importantes que l’année 14853. Nous aurons même à en- registrer plusieurs cas de non-réussite, que nous avions, il est vrai, un peu prévus dès l’année dernière , mais sur lesquels nous n’avons pas dit entièrement notre façon de penser en raison de l'engouement général. Au nombre de ces inventions que le succès n’a pas couronnées , nous Signalerons d’abord , à cause de l’im- mense retentissement qu'a eu cette découverte, les mo- teurs à air chaud. L'expérience a démontré, en effet, que non-seulement ils ne pouvaient pas rivaliser avec les machines à vapeur, quant à l’économie du combustible , mais encore qu’ils se détérioraient avec une si grande facilité, que leur emploi pourrait être très-compromettant. Toutefois , je dois faire ici une réserve et n’appliquer cette condamnation qu’au système Éricson , le seul qui ait été jusqu’à présent expérimenté. Au nombre des cas de non-réussite, je dois citer la fameuse pile hydrodynamique du docteur Carosro, de Gênes, que tous les journaux, et surtout le Moniteur , avaient présentée comme une découverte des plus extraor- dinaires et des plus importantes et qui, comme il était facile de le prévoir, n’était possible qu’en théorie. C'était, en quelque sorte, une réminiscence du mouvement per- pétuel. Les métiers électro-magnétiques , également tant van- tés par les journaux , n’ont pas non plus réalisé les espé- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 23 rances qu'on avait conçues, et tous les hommes prati- ques ont fini par reconnaître qu’industriellement cette invention n’était pas réalisable. Ce qui, du reste, a tou- jours été notre manière de voir. La production magnéto-électrique du gaz, malgré les immenses appareils qu’on a installés, semble être encore à l’état de problème, du moins au point de vue industriel, car elle n’est pas encore sortie de l’Hôtel-des-Invalides. Si les encouragements n’ont pas manqué pour des découvertes impossibles ou peu fructueuses , il faut dire aussi que d’autres inventions, qui n’ont d’autre défaut que d’être trop simples dans leurs applications , n’ont pu réussir à être mises en expérimentation. De ce nombre, sont les appareils pour prévenir les accidents des chemins de fer, dont nous avons parlé longuement l’année der- nière, et qui, certes, doivent nous intéresser tous au plus haut point. Il est vrai que MM. les administrateurs des chemins de fer prétendent qu’il n’arrive pas d'accidents (sic) ou que ces moyens provoqueraient encore plus d'accidents en endormant la vigilance des employés, comme si deux moyens de contrôle et d'avertissement ne valaient pas mieux qu'un seul. Mais que rapporterait aux compagnies l’installation d'appareils, qui ne servi- raient qu’à préserver la vie des voyageurs et à faire perdre les sociétés d'assurance, fondées pour l'exploitation de ces accidents ? | En Italie eten Espagne, la philosophie pécuniaire est moins avancée et l’on essaie, en ce moment, des moyens de sécurité tout-à-fait analogues à ceux que j'ai proposés il y a deux ans. Si ces essais réussissent, ce qui est pro- bable, nous viendrons hardiment emprunter aux autres nations un système inventé primitivement en France , et 2/ INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, nous aurons la triste gloire d’avoir été en cela, comme pour la télégraphie électrique , à la remorque de tous les autres pays. Nul n’est prophète dans son pags ! A ce sujet, je ne dois pas omettre ici une petite anec- dote qui peut avoir son à-propos et son intérêt. On travaille depuis plus de soixante ans au creusement du port militaire de Cherbourg. Ce travail gigantesque , opéré dans le roc vif, a nécessité l'emploi des mines. Or , les mines, telles qu’on les pratique ordinairement , non-seulement ne produisent que très-peu d'effet, en raison de leur défaut de simultanéité d’action, mais encore sont l’occasion de nombreux accidents pour les ouvriers qui y sont employés. Depuis plus de quatre ans, j'avais en vain attiré l’attention des ingénieurs sur les avantages que présenteraient, pour l’inflammation de ces mines, les moyens électriques; on me répondait toujours que ces moyens n'étaient nullement pratiques et que c'était un rêve des physiciens (sic). Enfin le Gouvernement, en- nuyé de voir que ces travaux n’avançaient pas davantage, s’adressa aux intérêts particuliers, en les mettant en ad- judication, et deux entrepreneurs fort habiles de Valence, MM. Dussaud et Rabatta, en prirent l’entreprise avec un délai fixé pour leur terminaison. Ces entrepreneurs , qui avaient déjà exécuté d'importants travaux , à Alger et à Marseille, changèrent immédiatement le système des mines, et au lieu des trous burinés à coups de marteau dans le rocher, ils crurent avoir beaucoup plus d’avan- tages à construire des mines monstres, renfermant cha- eune jusqu’à 2,000 kilog. de poudre. Pour exécuter une mine de ce genre, on pratique dans le roc un puits d’en- viron 45%. de profondeur , et, de l’extrémité de ce puits, on fait partir deux galeries horizontales d'environ 5°. de CONGRÈS DES ACADÉMIES. 25 longueur , qui se terminent par une chambre carrée de la contenance d'environ 2 ou 3". cubes, dans laquelle on introduit un sac en gutta-percha, renfermant de 1,000 à 2,000 kilog. de poudre. Quand la mine est terminée, on maçonne à pierre et à plâtre les galeries et on remplit de terre le puits de descente, de sorte que la poudre n’est plus en rapport avec l'extérieur que par les sau- cissons. La difficulté pour ces sortes de mines était l’inflamma- tion; car, en employant les moyens ordinaires, il arrivait souvent que le feu ne parvenait pas au cœur de la mine, parce que la poudre du saucisson ne s’enflammait pas en- tièrement. D'ailleurs , il était impossible d’obtenir la si- multanéité d’action , si nécessaire à l'effet de ces mines. MM. Dussaud et Rabatta, se souvenant alors des moyens électriques que j'avais si souvent décrits depuis quatre ans, vinrent me demander de leur organiser un système d’explosion, ce que je m’empressai de faire, à leur grande satisfaction ; les résultats de cette opération ont été réel- lement merveilleux, et les entrepreneurs y ont gagné, non-seulement une économie considérable sur la ma- nière d’opérer l’inflammation, mais un bénéfice de force d’un sixième , en admettant, dans les deux cas, une égale réussite , et, de plus, la certitude du résultat d’in- flammation. Les ouvriers, de leur côté, ont gagné à ce procédé une sécurité parfaite qui, à elle seule, eût dû faire prendre, depuis long-temps, en considération, le moyen que j'avais proposé. Ainsi, comme on le voit, l'intérêt particulier de deux hommes éclairés a triomphé d’une routine déplorable, qui existe malheureusement dans une foule d’administrations , notamment dans celles des chemins de fer. Mais ‘restons-en là avec les récrimi- 2 26 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. nations , et voyons ce que les sciences physiques nous ont rapporté, cette année, de véritablement important, Dépêches transmises en sens contraire. — Depuis long-temps , les correspondances télégraphiques étaient soumises à certaines exigences physiques qui en paraly- saient considérablement l'accélération, Ces exigences étaient dues principalement à l'impossibilité dans laquelle on était de correspondre à la fois des deux stations op- posées, Il fallait, en conséquence , attendre la fin de la correspondance de la station qui parlait, avant que de demander des éclaircissements, et ces éclaircissements, dans beaucoup de cas, eussent abrégé considérablement cette correspondance. Dernièrement, à Vienne, M. Gentil a eu l’idée de faire agir deux courants en sens contraire , sur le même fil, afin que les dépêches puissent être en- voyées à la fois de deux stations opposées. Mais pour ob- tenir, avec ce système de double courant, des indications, les appareils télégraphiques doivent être spéciaux et fondés sur les actions électro-chimiques, car il n’y a qu’elles qui soient assez sensibles pour correspondre aux différences de temps infiniment petites, en rapport avec les interruptions opérées sur les manipulateurs. Ce sys- tème a parfaitement réussi; mais je dois faire observer que j'ai, le premier, constaté, en 1852 , que deux cou- rants pouvaient circuler en senscontraire dans le même fil. Machine à graver électro-magnétique. — Cette ma- chine, inventée par M. Hausen, de Gotha , a pour but de faire agir, sur un burin mu mécaniquement , d’une ma- nière analogue à la pointe d’un pantographe, deux électro-aimants assez puissants pour produire l’incision du CONGRÈS DES ACADÉMIES. 97 métal, La pointe libre de l'instrument , qu'on doit faire passer sur les différents traits du dessin que lon veut graver , est disposée de manière à jouer le rôle de com- mutateur et de directeur du burin ; mais il faut que le dessin soit fait sur du papier rendu conducteur ou du papier métallique. Comme on le voit, cette marche a une certaine analogie de principe avec les métiers élec- triques de M. Bonelli, Régulateur électrique de température.—J'avais ima- giné , en 1852, un système de régulateur électrique pour maintenir constante latempérature d’un espace limité assez restreint. Depuis, je l’ai fait exécuter de manière à pouvoir être appliqué à des appartements assez vastes. Pour cela, je-fais agir, sur deux bouches de chaleur d’environ 30°. de diamètre , deux courants électriques issus d’une pile de Daniel, qui sont dirigés sous la seule influence d’un thermomètre. Quand la température est trop élevée, le courant est envoyé dans la bouche réfrigérante. Quand, au contraire, elle ne l’est pas assez, le courant fait agir la bouche du calorifère, de sorte que la température ne peut guère varier de plus d’un demi-degré. Cette appli- cation est fort importante pour des magnanneries, cer- taines étuves et minoteries , enfin pour la fabrication de certains produits chimiques qui ne peuvent s’obtenir qu’à une température donnée. Application de la photographie à la gravure sur bois. —La gravure sur bois, depuis quelques années , a pris une telle extension, que dans les ouvrages scienti- fiques eux-mêmes on l'a préférée à la gravure sur métal, en raison du plus grand rapprochement que l’on peut 28 INSTITUT DES PROVINCÉS DE FRANCE, faire entre le texte et le dessin qui lui correspond. On # donc cherché à obtenir des dessins photographiés directe- ment sur bois , afin que le graveur n’ait plus qu’à l’in- ciser. Déjà , depuis long-temps, M. Martin, à Versailles, avait tenté de résoudre ce problème diffieile ; mais le pro- cédé n’est devenu réellement pratique qu'entre les mains du révérend Saint-Vincent Beechey , en Angleterre ; les dessins sur bois qu’il a obtenus ont pu être gravés avec la plus grande facilité par le graveur. A ce sujet, je ferai remarquer que la gravure photo- graphique sur métal a reçu, depuis un an, de notables perfectionnements, du moins quant à la pureté de l’exé- cution , de sorte que cette immense question peut être considérée actuellement comme résolue. Il n’en est pas de même de la photographie chromatique, et j'ai bien peur que les articles si pompeux des journaux américains sur cette découverte, que nous avions an- noncée l’année dernière, ne soit du genre de ces palmi- pèdes désignés maintenant sous le nom de Tartares. Quoi qu’il en soit, M. Bequerel continue ses recherches sur cette matière, et ses recherches Pont conduit à dé- couvrir un nouvel instrument fort curieux, auquel il a donné le nom d’actinomètre , et qui peut mesurer, non- seulement l'intensité de la lumière, mais encore l'intensité relative des différents rayons du spectre. C’est, en un mot, une rétine artificielle dont la sensibilité est accusée sur un galvanomètre , par l'énergie du courant électrique auquel l’action décomposante de la lumière sur les sub- stances photographiques donne naissance. | Expériences avec la machine de Rumkoff. — Nous avons longuement parlé, l’année dernière , de la machine CONGRÈS DES ACADÉMIÉS. 99 de Rumkoff , en faisant ressortir l'importance de ses ap- plications, tant scientifiques qu'industrielles. — Les ex- périences que nous avons citées des mines monstres de Cherbourg sont déjà une confirmation de cette impor- tance. Mais, sous ke rapport scientifique, les résultats qu’on a obtenus depuis un an sont merveilleux. Actuel- lement , on peut faire plus de quatre-vingts expériences fort curieuses avec cet instrument. I en résulte : 1°. que le verre, la gomme-laque, etc. , et autres corps réputés isolants, ne suffisent pas pour isoler le genre d’électricité qui se trouve produite par cette machine , et que sa ten- sion peut être augmentée indéfiniment par l’interposition d’un large condensateur dans le circuit enduit et en aug- mentant le nombre des éléments de la pile. H serait beau- coup trop long d’énumérer ici ces diverses expériences , qui sont excessivement curieuses , et je prends le parti de renvoyer ceux que cette question intéresse, au travail que je publie en ce moment sur cette machine. Extraction des métaux du corps humain. — On sait que, pour dorer ou argenter un métal quelconque, on le trempe dans un bain préparé avec un sel d’or ou d'argent et dans lequel se trouve immergée une plaque d’or ou d’ar- gent. Cette plaque s’attache au pôle positif d’une pile et constitue ce que l’on appelle l’anode soluble, tandis que la pièce à dorer ou à argenter est attachée à l’autre pôle. Alors le métal de l’anode soluble se dissout successive- ment sous l'influence du courant, à mesure que la disso- lution ou le bain s’affaiblit et vient se déposer sur l’objet placé à l’autre pôle. M. Poey, se fondant sur cette pro= priété, a pensé que si le corps de l’homme se trouve im- prégné de substances métalliques, en le mettant en rap- 30 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. port dans un bain avec le pôle positif d’une pile, et met- tant vis-à-vis de lui une surface métallique , on ferait de son corps une anode soluble quant aux parties métalliques incrustées, et que celles-ci viendraient se déposer sur la surface métallique du pôle négatif. C’est, en effet, ce qui a lieu ; de sorte que des ouvriers empoisonnés par le mer- cure ou d’autres substances de ce genre , pourraient être soumis avec avantage à ce traitement , qui constitue une nouvelle branche pour la thérapeutique. Cette communication est accueillie par le Congrès avec le plus vif intérêt. M. de Vibraye lit la notice suivante sur la pisciculture : J'aurai, dit-il, tout d’abord à déplorer les accidents indépendants de la marche régulière des expérimenta- tions, et de la destruction d’une partie du frai par les cygnes, par des canards intrus, par les bondrées, les martins-pêcheurs et les truites elles-mêmes d’un âge dif- férent, introduites, je ne sais comment, peut-être en franchissant les barrages métalliques, dans les bassins destinés aux plus jeunes poissons; enfin les inondations résultant de la fonte d’une couche de neige d’une puis- sance inusitée dans nos contrées. Toutefois, la quantité restreinte des sujets restants ne saurait atténuer la valeur des expériences et des résultats acquis. Malgré la ten- dance au dénigrement , il faut accepter le fait accompli ; et la science, qui ne saurait faire cause commune avec lamour-propre , appréciera les qualités et non les quan- tités. Les faits les plus saillants, constatés pendant l’année qui vient de s’écouler, sont des garanfies pour lavenir, CONGRÈS DES ACADÉMIES. | 341 des jalons placés, pouvant dès aujourd’hui diriger dans la voie définitivement tracée du progrès et de la pratique ; je vais exposer ces faits brièvement. Le grossissement des jeunes poissons éclos au mois de mars 1853 était plus remarquable pour les truites que pour les saumons : les premières avaient atteint au mois de décembre dernier, c’est-à-dire en 21 mois, jusqu’à 35 centimètres de longueur sur plus de 500 grammes de pesanteur; les saumons de même âge n'avaient que 2/4 centimètres ; peut-être dans des eaux moins vives leur accroissement eût-il été plus considérable , je le consta- terai plus tard ; enfin, les ombres chevaliers, éclos vers le 14 avril de l’année courante (1854), mesuraient 41 centi- mètres 1/2 dans le courant de décembre, c’est-à-dire en huit mois. Ces résultats ont été constatés par plusieurs vbserva- teurs et notamment par le sieur Géhin, en mission dans le département de Loir-et-Cher. Dans le courant de l’été, un voyage sur les bords du Rhin m'ayant permis de visiter les piscines du Wolfs- brunn , aux portes d’'Heidelberg, j’ai reconnu tout d’abord que j'avais plus d’espace, des eaux plus abondantes et tout aussi limpides, à la condition d’entreprendre un travail pour les isoler et en alimenter des bassins spé- ciaux ; voici mon travail de fin d’année, travail qui n’est pourtant pas encore achevé; mais au lieu de me contenter, | comme aux environs d’Heidelberg, d'obtenir le grossisse- ment des poissons, j'ai prétendu pousser les expériences jusqu'aux corollaires de la pisciculture : j’ai voulu con- stater jusqu’à quel point, à l’état de quasi-domesticité, les truites suivaient leurs instincts naturels de repro- duction, obéissaient aux lois de la nature, 82 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. J'avais déjà remarqué les pérégrinations inaccoutumées des saumons et leurs efforts pour s'échapper à l'époque naturelle de leurs migrations, efforts malheureusement couronnés de succès pour quelques-uns, malgré de minu- tieuses précautions pour les retenir dans mes bassins. J’en avais conelu que cet instinct devait appartenir également à la truite ; dès-lors, avec mes seules éclosions de moins de deux années, je résolus de tenter Fexpérience. Je ne m’étendrai pas en ce moment sur la construc- tion d’une frayère artificielle, non plus que sur la néces- sité de varier le volume d’eau pour simuler des crues naturelles et exciter, par ce moyen, les truites à re- monter pour frayer, comme à l’état de liberté naturelle : ie dirai seulement que mes prévisions ont été couronnées de succès ; les truites sont remontées dans mon ruis- seau tout artificiel ; les truites ont frayé , les œufs ont été recueillis à l’époque de leur maturité, de leur émission naturelle ; nous avons opéré la fécondation artificielle sur plus de 4,000 œufs, seulement les œufs n’ont pas produit, parce qu’ils appartiennent à des individus trop jeunes qui ne sont pas féconds, parce qu'ils ne sont pas adultes. Nous avons pu constater que les œufs étaient sensible- ment plus petits que dans les individus ayant acquis un plus grand développement, et que la sphéricité des œufs n’était pas complète. L’impuissance des mâles pourrait bien, d'autre part, s’être opposée à la fécondation. Dans leur semence, quoique parfaitement mûre en apparence, les spermatozoaires semblaient privés de vitalité, ils se sont montrés à nous , dans le microscope, privés de toute espèce de sentiment , et cela dans la laitance pure’ aussi “bien que dans la laitance étendue d’eau. Je construis, en ce moment, une piscine où le jeune frai CONGRÈS DES ACADÉMIES. 33 trouvera toute espèce de défense contre ses ennemis. La réunion d’un grand nombre d'individus dans un espace relativement assez restreint nuira sans doute au dévelop- pement de la première année, mais sera, quoi qu’on en ait pu dire, un gage de sécurité pour l'avenir. Du reste, mes grandes piscines, sur un développement de 540 mètres, seront très-prochainement entourées d’obstacles et pourvues de nombreuses retraites. La piscine pour l’éclosion de l’année courante sera recouverte en entier d’un grillage en fil de fer galvanisé , sans oublier des retraites en briques et tuiles où pourront s’abriter les tout jeunes poissons; car l’éclosion de l’an dernier, dé- truite en partie par tant d’ennemis, sans compter les épinochettes dont j'avais oublié de faire mention , a été préservée en bien plus grand nombre dans les bassins où se sont trouvées des retraites, et a presque complètement disparu dans un bassin où les herbes seules offraient un abri aux jeunes poissons. Je ne tarirais pas, si je voulais entrer dans tous les mi- nutieux détails des observations journalières que néces- site la pisciculture. Je veux donc simplement rendre compte, en quelques mots, de l’éclosion qui s’opère en ce moment; elle a été bien compromise par une crue subite, ayant pour cause la fonte d’une couche de neige tellement épaisse, comme je l’ai dit plus haut, que de mémoire d'homme on n'avait rien vu de semblable dans nos contrées ; j'ai pourtant, à quelques centaines près , sauvé mes jeunes poissons, consistant en 8,000 saumons que je dois à l’obligeance de M. Coste ; quelques milliers de truites et d’ombres chevaliers : une partie des œufs, appar- tenant à la première espèce, m'avaient été fournis par le sieur Géhin. 5h INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Mais ce qu’il est utile de faire connaître, c'est un cu- rieux accident , qui pouvait devenir un désastre pour mes éclosions , si je n’y aÿais remédié tout d’abord. Je veux parler de l'emploi des toiles métalliques et de leur effet galvanique sur les organes des jeunes embryons. Ne pou- vant régler, comme je l’entendais le volume et surtout la température des eaux beaucoup trop chaudes dans mon établissement de pisciculture, température qui accélère trop lincubation, et nuit souvent, surtout quant aux ombres chevaliers, au développement normal de l’em- bryon, j'avais fait construire un appareil pouvant être di- rigé dans un appartement au moyen d’eaux ramenées à une température facultative. Ces appareils, en terre cuite vernissée , étaient garnis intérieurement de plaques de zinc perforé , de la fabrique de M. Collard ; mais, comme ces plaques n'étaient pas sou- tenues , javais chargé, pendant mon absence, un ouvrier trop intelligent et aimant trop la perfection du travail, de confectionner des supports. Voulant bien et trop bien faire , cet ouvrier fit beaucoup plus que je n’avais désiré : des châssis en fil de laiton furent mis en contact avec le zinc, dans des vases isolés par leur vitrification intérieure ; les différents bassins se trouvèrent en communication, peut-être, par le courant continu de l’eau qui les traversait; j'ignore la force et même quelques-uns des détails de cons- truction de la pile construite de cette manière ; mais ce que je ne puis malheureusement ignorer, c’est son désastreux résultat. Pendant la nuit, plus de 6,000 œufs de saumons ont été frappés presque instantanément, les uns de mort, et je le craignais pour tous; les autres d’une simple lé- thargie présentant tous les caractères de la mort : les yeux ternes , tout le système nerveux devenu blanc, car LS CONGRÈS DES ACADÉMIËS 35 l'œuf n’était pas complètement opaque , mais seulement la région avoisinant la colonne vertébrale. Je fis immé- diatement porter ces œufs frappés de mort dans mon éta- blissement de pisciculture , où ils reposent sans grillage sur une couche de ciment romain, et je pus voir, pour la moitié de ces œufs, c’est-à-dire pour environ 3,000, la partie blanche diminuer progressivement et complète- ment disparaître. Ces œufs ont éclos, mais irrégulière- ment, et l’éclosion avait été singulièrement retardée pour ces jeunes êtres foudroyés par la puissance électro-ma- gnétique. J’ajouterai que, dans un bassin d’éclosion , les œufs placés sur des claies en toile métallique galvanisée ne réussissent pas à beaucoup près aussi bien que les œufs déposés dans mes bassins de chaux hydraulique : j'attribue donc au développement de l'électricité produite par le métal cette influence délétère. J'avais précédemment indiqué des observations faites sur la reproduction des lamproies ( Petromyzon marinus; L. ). Je désirais surprendre les secrets de la nature à l’en- droit de leur propagation : je crois être de plus en plus sur la voie, grâce à l’assistance de M. Coste qui vient de faire opérer l’autopsie de trois individus amenés par moi jusqu’au moment de la ponte pour les femelles et d’une fécondation problématique pour les mâles. Nous pouvons, dès aujourd’hui connaître la conformation des organes de ces êtres extraordinaires, et, j'ose presque le dire, pré- juger un accouplement. Ne pouvant, sans risquer de léser les organes, entreprendre par moi-même une dissection au moment favorable, je n’eus d’autre moyen que de faire périr instantanément dans l’alcool une lamproie femelle, au moment de l'émission des premiers œufs, et deux mâles sur lesquels les organes générateurs me semblèrent 36 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. le plus développés. Sans doute, il eût mieux valu pouvoir opérer immédiatement l’autopsie, mais j'ai pensé que Palcool conserverait les organes dans une intégrité qui permettrait encore des observations utiles. En effet, on a pu constater premièrement : que l’abdomen de la fe- melle est garni d’une longue et double série d’ovaires s'étendant le long de la région des reins ; que ces ovaires s’ouvrent simultanément et permettent l'émission, la ponte en quelque sorte instantanée de l'immense quan- tité d'œufs contenus dans le corps de la femelle ; que, chez les mâles , la longue et double série des ovaires est remplacée par un système de nombreux testicules rangés en double série symétrique , occupant la même place que les ovaires chez la femelle le long de la région des reins. Ces nombreux testicules aboutissent tous à un long canal terminé par un organe générateur externe, qui n'apparaît toutefois extérieurement qu’à l’époque du @éveloppement et de la maturité des œufs chez la fe- melle. Enfin les spermatozoaires renfermés dans la se- mence extraite des testicules présentent assez d’analogie avec ceux de certains reptiles; une sorte de tête ob- longue et pointue, suivie d’un pédoncule, d’un appen- dice caudal ayant de six à dix fois sa longueur. Peut-être aurais-je dû, Messieurs, attendre le retour de M. Coste pour lui laisser le soin d'exposer plus scien- tifiquement le résultat d’une première investigation , mais vous comprendrez et vous excuserez l’empressement d’un expérimentateur qui se hâte de publier en quel- que sorte à son de trompe un résultat, lorsqu'il a fallu des mois d’attente pour arriver à pouvoir le constater, je devrais dire avec plus de vérité, à l’entrevoir. Je viens d'apprendre, avec une vive contrariété, que la CONGRÈS DES ACADÉMIES. 37 fonte des neiges, en faisant un vaste lac de toute la val- lée, a fait disparaître, en l’entrainant, mon jeune pois- son, à l’exception des truites conservées dans le bassin aboutissant à la frayère, et d’un très-petit nombre de saumons ; j'espère encore que quelques-uns de ces der- niers seront, en suivant le fil de l’eau, descendus dans un bassin qu’ils n’auront pu franchir ; mais les ombres chevaliers , les jeunes truites et les saumons éclos de lan passé ont été probablement peupler des pièces d’eau trop vastes pour pouvoir les y retrouver, avant qu’ils n’aient atteint un assez grand volume pour permettre à nos filets de les ramener à bord. L’éclosion de cette année, se composant d'environ douze à quinze mille poissons, viendra réparer ce désastre , et j'aurai soin d’obvier à tous les inconvénients que j'ai pu constater pendant mes premières études pratiques sur là pisciculture, M. Quenard annonce qu’il fera une communication sur la pisciculture pratique, lorsque cette question sera traitée dans le sein du Congrès. M. Ch. Calemard de Lafayette remarque qu'il est trop étranger à la question scientifique que soulève la pisci- culture, mais que le côté économique le touche vivement comme tout le monde. It tient donc à constater que, dans la Haute-Loire, les essais tentés par M. de Causans, et dont on avait dès l’année dernière entretenu le Congrès, ont parfaitement réussi. Sur les pressantes instances de la Société académique du Puy , le Gouvernement avait envoyé le sieur Rémy, fils du regrettable pêcheur des Vosges, qui a opéré la fé- condation sur une très-grande échelle, non-seulement 98 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. sur le lac de St.-Front où M. de Causans a son établisse- ment et ses bassins d’éclosion , mais encore sur tous les cours d’eau les plus importants du département, M. de Léguille, sous-inspecteur des eaux-et-forêts, a prêté à ces opérations le concours le plus utile et le plus éclairé. L’éclosion s’est faite, notamment à St.-Front, dans les conditions les plus heureuses. Plus de trente mille œufs pris sur des truites pêchées dans le pays ou apportées par le sieur Rémy sont arrivés à bien, et le jeune poisson se comporte jusqu’à ce jour comme on pourrait le désirer. Le Congrès scientifique du Puy, au 10 septembre pro- chain, sera une occasion pour les savants qu’intéresse la pisciculture de recevoir d’intéressantes communica- tions sur ce qui aura été fait dans la Haute-Loire. La séance est levée à 5 heures. L'un des Secrétaires-généraux , Ch. GOMART. “2 © —— SECTION D'HISTOIRE NATURELLE. SÉANCE DU 2! MARS. (Présidence de M. DE VERNEUIL. ) La séance est ouverie à 10 heures 172. Siégent au bureau : MM. Robert (de Sainte-Tulle), de Sainte-Hermine, et G. de Lorière, secrétaire de la section. M. de Verneuil présente, aux noms de MM. Collomb et de Lorière et au sien , la note suivante : CONGRÈS DES ACADÉMIES. 39 PROGRÈS DE LA GÉOLOGIE EN ESPAGNE PENDANT L'ANNÉE 1954, L'Espagne, ce pays des arts et de la littérature, est entrée fort tard, on le sait, dans la voie scientifique. Les nobles efforts qu’elle avait faits sous le règne éclairé d’un de ses plus grands souverains ont été de courte durée, et cependant l’éclat en a été assez vif pour que les sou- venirs de Charles III soient restés chers à la nation. Des circonstances malheureuses, des guerres étrangères et intestines ont produit un temps d’arrêt temporaire, après lequel aujourd’hui semble se réveiller , plus ardent que jamais, malgré un ébranlement passager , le goût des sciences et des études qui les développent. L'abondance des minerais métalliques pour lesquels , depuis le temps des Romains , l'Espagne est renommée, a de tous temps fixé les regards des hommes pratiques ; mais la minéralogie et la géologie en ont peu profité, et l’on peut dire que la culture de ces sciences n’y date que d’une époque récente. C’est à la fondation de l’École des mines de Madrid, qui compte environ vingt années d’exis- tence, qu’il faut faire remonter le principe du mouve- ment qui s’est déclaré depuis et auquel on doit attribuer en 1847 la création d’une Académie des sciences et plus tard celle d’une Commission chargée d’exécuter une carte géographique et géologique de la province de Madrid. L'Académie des sciences a déjà publié un volume, dans lequel on remarque un mémoire du général don Franciseo de Lujan sur la géographie et la géologie d’une partie des provinces de Badajoz, de Séville, Tolède et Ciudad- h0 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Real. L'auteur de ce travail, aujourd’hui l’un des ministres les plus distingués de la Reine, est le protecteur zélé et libéral des sciences et surtout de celle qu'il a cultivée lui- même avec succès. Ce même volume contient aussi un essai d’une description générale de la structure géologique de l'Espagne, par M. Joachim Ezquerra del Bayo , inspecteur- général des mines, un des hommes qui ont le plus con- tribué à introduire dans son pays le goût de la géologie que dans sa jeunesse, il y a vingt-un ans, il était venu étudier en Allemagne, Pendant le cours de cette année a dû paraître, àMadrid, un nouveau volume de l’Académie des sciences, dans lequel M. Ezquerra del Bayo à fait insérer un tableau général des êtres organisés fossiles découverts en Espagne jusqu’à ce jour. Quelqu’incomplet que soit ce tableau, qui nous a été communiqué par l’auteur, c’est un signe du besoin qu'éprouvent les géologues espagnols de connaître quelles sont les lois qui règlent chez eux la distribution des êtres organisés à travers les dépôts sédimentaires et de s'assurer que ces ‘lois sont conformes aux principes que proclame la paléon- tologie , principes dont chaque jour accroît l'importance en en étendant l'application à des régions nouvelles. - Il est assez singulier que, sous ce rapport, l'Espagne ait produit un ouvrage remarquable à une époque qu’on pourrait appeler les temps fabuleux de la paléon- tologie. L'ouvrage du Père Torrubia, publié en 1745 sous le titre de : Apparato para la historia natural espanola , accompagné de 14 planches de fossiles , est certainement fort curieux pour son temps, et par les Trilobites, les Ammonites , Bélemnites et Pholadomies qu’il renferme ; il donne une idée de la constitution géologique des environs de Molina de Aragon où nous CONGRÈS DES ACADÉMIES. hi avons été plusieurs fois, et où était situé le couvent du bon moine. Il faut croire toutefois que les esprits furent peu frappés de l’apparition de cet ouvrage , car il ne fut suivi d’aucun autre et, depuis lors jusqu’à nos jours, il se fait à cet égard le plus profond silence. C’est en grande partie à MM. Ez- querra del Bayo, Paillette et Casiano de Prado qu’on doit le réveil de la paléontologie en Espagne. Le premier appela l’attention des savants sur les ossements fossiles du terrain miocène de Madrid, et les deux autres, ayant découvert, dans les Asturies et dans le royaume de Léon, des fossiles dévoniens d’une très-belle conservation, donnèrent occasion à M. d’Archiac et à l’un de nous de faire deux mémoires sur la paléontologie de ces terrains. Ces mémoires qui font suite à des publications géologiques des deux savants que nous venons de citer, parurent dans le Bulletin de la Société géologique de France, en 1845 et1850 (1). Depuis lors, nous publiâmes dans un travail Sur la constitution géologique de plusieurs pro- vinces de l’Espagne (2), quelques listes des fossiles que nous avions découverts dans les terrains secondaires. C’est en partie à l’aide de ces travaux et en partie à la suite de ses propres recherches, que M. Ezquerra del Bayo a rédigé le tableau dont nous venons de vous en- tretenir. Il restait encore toutefois à cet égard une lacune con- sidérable à remplir. Si nous possédions des listes déjà assez nombreuses des fossiles des terrains paléozoïques (1) Bullet. de la Soc. géol, de France , 2°, série, vol, IF, p. 458, et vol. VIT, p. 155. (2) Joid, , vol, X, p. 661. L42 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. de l'Espagne, ainsi que des terrains jurassique et crétacé, nous ne savions rien absolument des animaux qui avaient vécu entre ces deux grandes époques. Des géologues tels que MM, Hausmann , Ezquerra del Bayo et Casiano de Prado avaient bien signalé l'existence du trias , repré- senté par des dépôts considérables de grès rouge, d’ar- giles et marnes bigarrées, de calcaires et de dolomies accompagnés de gypse et de sel; mais personne n’y avait découvert de fossiles déterminables , en sorte que l'existence du muschelkalk manquait encore de ces preuves paléontologiques après lesquelles le doute n’est plus permis. Nous avions, nous-mêmes, dans les années précédentes, beaucoup étendu le domaine du trias , sans y trouver de fossiles. Ce n’est que dans le cours de l’année dernière et de cette année que nous avons enfin découvert des coquilles caractéristiques du muschelkalk, telles que des Cératites voisines du C. nodosus, le Nautilus bidor- satus, les Myophoria lævigata et curvirostris. Ces espèces si intéressantes proviennent d’'Hombrados, à l’est de Molina de Aragon, et des environs de Mora et de Tivisa, non loin de embouchure de l'Ebre. Nous vous avons dit que la fondation de l’Académie des Sciences avait presque coïncidé avec la nomination d’une commission chargée de faire une carte géographi- que et géologique de la province de Madrid. M. le général Fr. de Lujan en fut le président; M Casiano de Prado, comme vice-président, eut la direction de la partie géolo- gique et travailla avec un zèle qu’on ne saurait trop louer. La géographie fut confiée à M. Subercase, et l’his- toire naturelle à M. Graells. Nous devons au zèle de cette commission plusieurs rapports très-intéressants de M. Fr. de Lujan, et deux è CONGRÈS DES ACADÉMIES. 3 essais de cartes géologiques, l’une de la province de Ma- drid , et l’autre de celle de Ségovie. Convaincu que, pour être bien comprise, la géologie d’une province ne peut s'arrêter aux limites politiques, M. C. de Prado a fait une série d’excursions dans les provinces limitrophes de celles dont la géologie lui était confiée ; et c’est à son zèle in- fatigable que nous devons les deux esquisses dont nous venons de parler, esquisses dans lesquelles la géogra- phie , grâce aux travaux de la Commission et à la carte de M. Coello, offre une exactitude à laquelle on est peu accoutumé en Espagne. Pendant le cours de cette année, M. Casiano de Prado a été chargé de faire une carte to- pographique détaillée des divers gisements de combus- tibles de la province de Palencia. Personne n’ignore que au pied sud et dans les premiers plis de la chaîne Canta- brique , il existe des dépôts de houille d’une haute im- portance. Deux d’entre eux sont déjà exploités sur une grande échelle, à Sabero dans la province de Léon, et à Barruelo, près d'Orbo, dans celle de Palencia. Le Gouver- nement , intéressé à connaîfre, pour l’avenir des chemins de fer, l'étendue des richesses de l'Espagne à cet égard, a nommé au printemps dernier trois commissions. L’une , composée de MM. Casiano de Prado et Aldana , a été en- voyée dans la province de Palencia; l’autre, sous la direc- tion de M. Ramon Pellico, a dû faire une carte du bassin houiller d'Espiel et de Belmez, dans la province de Cor- doue, et la troisième , à la tête de laquelle était M. Amalio Maestre, a eu à étudier les dépôts de combustibles de San Juan de las Abadesas, en Catalogne. Nous ne pouvons vous donner de renseignements que sur les travaux de la première. Malgré les troubles poli- tiques, M. Casiano de Prado a poursuivi sans relâche ll INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, l'étude géologique qui lui avait été confiée, et y a con- sacré tout l'été. Il a reconnu trois îlots de granit dans la chaîne Cantabrique qui, en général, en est presque dépourvue. Les terrains dévoniens et carbonifères sem- blent y être disposés de telle manière que le premier s’élargit aux dépens du second, à mesure que lon s’avance vers l’ouest. Aussi, dans la province de Léon, on trouve peu de fossiles carbonifères et beaucoup de fossiles dévoniens ; tandis qu’au contraire, dans celle de Palencia, les fossiles carbonifères sont plus abondants que les dévoniens. M. Casiano de Prado paraît avoir beau- coup ajouté à la faune carbonifère de l'Espagne, car il nous écrit qu'il a trouvé plus de cent espèces dans la seule province de Palencia. Tout en s’occupant de son travail spécial, M. Casiano de Prado a fait des excursions qui lui ont permis de préparer une carte géologique de toute la province de Palencia et de celle de Valladolid. Nous ne savons rien des travaux de M. Ramon Pellico, si ce n’est qu'après avoir terminé son exploration du riche bassin houiller des montagnes de Cordoue, il a été, avec M. Aldhama , faire une excursion géologique en Portugal et visiter le terrain silurien de Bussaco, près de Coimbre, si bien décrit par MM. D. Sharpe et C. Ribeiro. Une publication, qui intéresse la géologie et qui, depuis quatreannées, marche avec une parfaite régularité, est celle qu'ont entreprise à leurs frais, sous le nom de Revista minera, des ingénieurs des mines, animés du désir d’être utiles à leur pays et aux sciences, qui en font la véritable richesse. On ne saurait trop louer le zèle de MM. Ramon Pellico et Naranjo y Garza , qui en sont les principaux éditeurs. Nous signalerons, parmi les mémoi- res intéressants publiés cette année , dans cette Revue , CONGRÈS DES ACADÉMIES. U5 le travail de M. F. de Botella sur la géologie du royaume de Valence (1). Nous sommes d'autant plus disposés à vous recommander la carte géologique qui accompagne ce mémoire, que nous en avons jeté les bases , avec notre jeune et savant ami, dans un voyage que nous avons fait ensemble il y a deux ans , et que c’est dans un second voyage que nons en avons, cette année , arrêté les principaux contours. Le Gouvernement a saisi cette occasion de manifester l'intérêt qu’il porte à la géologie, en donnant à M. de Botella la récompense qu’il désirait, c’est-à-dire, en le chargeant de faire, en trois années, une carte géologique détaillée de ce même royaume de Valence , qui comprend aujourd’hui trois provinces dont les chefs-lieux sont Alicante, Valence et Casteilon de la Plana. Dans ce même recueil, nous pouvons encore vous si- gnaler une petite notice de M. Lasala, sur les exploita- tions de sulfate de soude dans les environs de Cala- tayud (2). Cette ville, que nous avons visitée l’an dernier avec M. de Lorière , est au pied d’une chaîne silu- rienne que baignaient, à l’époque miocène, les eaux d’un lac où se sont déposées des marnes et des masses considérables de gypse. L'existence de sulfate de soude est un fait assez fréquent en Espagne, dans les dépôts de cet âge. Nous en connaissons à Tauste, près de l'Ebre, en amont de Saragosse ; à Zerezo entre Haro et Burgos ; à Espartinas, dans la vallée du Tage , au-dessus d’Aranjuez , etc. M. Casiano de Prado, dont nous vous avons déjà beau- (1) Revista minera, vol, V, p. 562 et 675, (2) Ibid. , vol, V, p. 724. — 46 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. coup parlé, a lu aussi devant la Société géologique de France deux mémoires , l’un relatif à la province de Ségovie, dont il offrait la carte, et l’autre sur la Sierra- Morena, les environs d’Almaden et les montagnes de Tolède. Cette région avait été en partie visitée, il y a vingt ans, par un de nos ingénieurs les plus distingués, M. Leplay, qui en avait publié une description accom- pagnée d’une carte géologique. Dans ce travail excellent, qui a été traduit en espagnol , M. Leplay ne pouvait avoir pour but de décrire avec détail les divers étages de ce qu’on appelait alors le terrain de transition. Le grand ou- vrage de sir Roderick Murchison sur le système silurien n'avait pas encore vu le jour. Ce travail restait donc à faire. Dans un voyage à Almaden ei à travers la Sierra- Morena, entrepris en 1850, l’un de nous avait déjà reconnu que cette région présentait deux des divisions admises aujourd’hui dans le terrain paléozoïque, savoir : le système silurien inférieur et le système dévonien. Depuis lors, M. Casiano de Prado y a fait des voyages fréquents et est parvenu à circonscrire sur une carte, et à séparer du terrain silurien qui recouvre la plus grande partie du pays, plusieurs lambeaux dévoniens. C’est à lui qu’on doit de savoir que le mercure d’Almaden est compris dans le système silurien, car il a eu la chance heureuse de découvrir des Graptolithes à l’entrée même des galeries de mine. On sait que le minerai d’Almaden ne se présente pas en filons, mais qu’il a imprégné des couches de schistes et de quartzites. On remarque que le mercure n’y est associé avec aucune substance métallique, mais qu'il montre une-sorte de prédilection pour les matières charbonneuses ; car à Almaden les schistes qui les con- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 17 tiennent sont noirs et ampéliteux, et dans les Asturies on trouve du mercure jusque dans des couches de houille. Le mémoire de M. C de Prado, qui s’imprime en ce moment dans le Bulletin de la Société géologique, sera suivi d’une description des espèces ‘nouvelles, tant siluriennes que dévoniennes, par M. Barrande et l’un de nous. La liste des fossiles déjà connus dans la Sierra- Morena s'élève à plus de cent , parmi lesquels on compte une vingtaine de Trilobites. Nous devons vous parler maintenant d’une carte dont la gravure vient d’être terminée en 1854, celle de la principauté des Asturies, par M. G. Schulz, inspecteur- général des mines et directeur de l’école des mines de Madrid. Ce travail, qui a coûté à son auteur plus de quinze années d’études et de voyages, dotera une province de l'Espagne de ce qui manque principalement à la péninsule et de ce que le pays attend avec impatience : une bonne carte géographique. L'auteur compte y ajouter les cou- leurs géologiques et l'envoyer à l'exposition universelle de Paris. Disons, à ce sujet, que ce grand congrès industriel semble avoir un certain retentissement chez nos voisins et que, par ordre royal du 44 août dernier, les inspecteurs de district ont été invités à réunir des collections par provinces de tous les minéraux, métaux et combustibles qu’on y trouve pour être envoyés à Paris. Puisque nous avons parlé de cartes , nous serions in- justes envers deux hommes très-remarquables, si nous passions sous silence les cartes de M. Coello. Cette œuvre, qui fait partie du grand dictionnaire statistique, publié par M. Madoz, aujourd’hui ministre des finances, ne saurait être trop encouragée. Bien que ces cartes man- 48 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. quent d’une première grande triangulation, on doit cependant reconnaître qu’elles valent beaucoup mieux que les cartes anciennes. Cinq à six provinces ont déjà paru, et celle de Castellon de la Plana a été publiée dans le cours de l’année qui nous occupe. Nous ne pouvons pas douter que le Gouvernement ne donne un grand essor à la construction d’une carte tri- gonométrique de l'Espagne, quand nous le voyons pro- céder avec libéralité à l'établissement d’observatoires mé- téorologiques, qui seront si utiles pour connaître le relief du pays d’où dépend son climat si varié. Jusqu’à l’année 1853, il ne se faisait guère , excepté chez le professeur Léon Salmean, à Oviédo, d'observations barométriques suivies qui permissent d'arriver à des moyennes de hau- teur, et qui pussent servir de termes de comparaison à des voyageurs qui, munis de bons instruments , auraient voulu déterminer la hauteur des principaux accidents du sol. En 1853, M. Casiano de Prado fut chargé d’acheter à Paris un baromètre de fort calibre , fait et comparé avec soin, et de le rapporter à Madrid où il fut placé dans le local de la commission de la carte géologique. Aujourd’hui et à partir du 41°. janvier 1854, M. Rico y Sinobas, connu par un travail Sur les sécheresses de Murcie, que l’Aca- démie des sciences de Madrid avait couronné, a été nommé directeur de lobservatoire météorologique de Madrid et y a commencé une sérié d'observations faites avec de bons instruments. Mais là ne s’est pas arrêtée l'initiative du Gouvernement. A partir du 1°. janvier 1855, vingt-deux autres observatoires du même genre ont été institués savoir : dans la région du Nord, ou région Cantabrique, ceux de Vergara , Bilbao, Santander, Oviédo et Santiago ; dans la zône méditerranéenne, ceux CONGRÈS DES ACADÉMIES h9 . de Malaga, Alicante, Tarragona , Barcelone et Girone , et un spécial dans les îles Baléares. Dans le bassin de l’Ebre, on compte ceux de Tudela de Navarra et de Saragosse; dans le bassin du Duero, ceux de Soria, Valladolid et Salamanque ; dans le bassin du Guadiana, ceux d’Albacete, de Ciudad-Real et Badajoz; enfin, dans le bassin du Guadalquivir , ceux de Grenade, Jaen et Séville. Tous ces observatoires, munis de bons instruments faits et comparés en Angleterre, ont été placés sous la haute surveillance de M. Rico y Sinobas. Quand , en 1853, on commença à faire des observa- tions régulières à Madrid , nous nous décidâmes à em- porter des baromètres et à prendre la hauteur de tous les lieux que nous devions parcourir. Nous avons con- tinué , celte année, ce genre d'observations, et publié dans le Bulletin de la Société géologique de France et dans les Comptes-rendus de l’Académie des sciences, une partie de nos résultats (1). Nous avons ainsi déterminé la hauteur des principales chaînes dans l’est de l'Espagne, et reconnu que le ter- rain tertiaire d’eau douce, avec Planorbes et Lymnées, s’élève sur des plateaux qui n’ont pas moins de 1,122 mè- tres à Barahona , au point de partage des eaux du Duero et du Tage , sur la nouvelle route de Bayonne à Madrid, par Soria ; qu’il atteint 1,472 mètres au nord de Teruel et à l’est d’Alfambra, et 1,458 sur les pentes de la Sierra de San-Just , au sud de Montalban. Les principaux pics que nous avons mesurés sont le Moncayo, 2,349 mètres; le pic d’'Urbion, 2,240 ; le pic San Lorenzo , 2,297: tous (1) Bulletin de la Soc, géolog. de France, vol. XI, p. 664. Comptes-rendus , vol, XL, Séance du 2 et 9 avril. 50 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. trois dans la chaîne Ibérique, qui va de Burgos à Sara- gosse; puis la Torre de Salinas, 2,500 mètres, un des sommets les plus élevés de ces célèbres pics d'Europe , d’où Pélasge s’est élancé pour disputer aux Maures son pays natal, et commencer cette glorieuse série de con- quêtes qui devait se terminer, au bout de sept cents ans, par la prise de Grenade. Cette année-ci, nous avons mesuré le Montcabrer dans la Sierra-Mariola, au nord d'Alcoy, qui n’a pas moins de 1,388 mètres; puis, au sud de Teruel, le pic Javalambre dans la Sierra-Cama- rena , qui atteint environ 2,000 mètres. C’est une des plus hautes montagnes, sinon la plus haute, de toute la partie orientale de lEspagne entre Madrid et Castellon de la Plana au bord de la Méditerranée, La seconde en hauteur, à l’est de la Sierra-Camarena, est la Pena-Golosa (4,810 mètres), point le plus élevé de ce haut massif qui règne entre Tortose et Teruel, et qui est en général composé de terrain néocomien. Les voyages que nous avons faits en Espagne, tas six années, nous ont inspiré la pensée de tracer sur une carte les contours des principaux terrains qui constituent le sol de cette péninsule, Cette carte, pour laquelle nous nous sommes aidés des travaux antérieurs , tels que ceux de MM. Francisco de Lujan, Casiano de Prado, G. Schulz, R. Pellico, Ezquerra del Bayo, F. de Botella, A. Paillette, Leplay , Elie de Beaumont, Dufrenoy, etc., n'est sans doute: encore qu’une ébauche ; mais quelque imparfaite qu’elle soit , elle figurera , réduite à une petite échelle, dans deux cartes géologiques d'Europe que préparent en Angleterre et en Belgique nos amis, MM. Murchison, Nicol et Dumont, et qui ne tarderont pas à paraitre. Pendant le cours de l’année 1854, l'Allemagne n'est CONGRÈS DES ACADÉMIES. 54 pas restée étrangère aux progrès de la géologie en Es- pagne. Le D’. Moritz Wilkomm, connu déjà par diverses publications faites à la suite d’un séjour de deux années dans la péninsule, et par une belle carte botanique, vient de publier un volume intitulé : Die Halbinsel der Pyre- naen, eine geographische statistische monographie. Dans cet ouvrage, dont une partie est consacrée à la géographie physique, l’auteur donne quelquefois des renseignements sur la géologie des pays qu’il a visités. - La Société géologique de Berlin vient aussi de publier deux mémoires qui nous intéressent (1). L'un, sur les environs de Santander, par M. A. Erman, est accompagné d’une planche, sur laquelle sont figurés quelques fossiles du terrain crétacé qui entoure la ville. Nous regrettons que l’auteur n’ait pas consulté ce que nous avions déjà écrit à ce sujet (2), et ce que M. d’Archiac en à dit aussi dans son Histoire des progrès de la géologie. Le V°. volume de ce bel ouvrage qui vient de paraître, résume de la manière la plus intéressante tout ce qui a été publié sur la craie de l'Espagne. L'autre mémoire allemand est dû à M. Scharenberg (de Breslau). Il est intitulé : Bemerkungen, etc. Re- marques sur la géologie de la cite sud de l’Andalousie. L'auteur y donne deux coupes intéressantes : l’une, de Malaga à Antequera, et l’autre, de Velez-Malaga à Alhama. Mais, à l'exception des fossiles déjà connus dans le terrain tertiaire de Malaga, il n’en a trouvé aucun (1) Zeütschrift der Deutscher geologischen Gesellschaft , vol. VI, p. 578 et 596 (Berlin, 1854 ), (2; Del terreno cretaceo en Espana. Mémoire publié dans le Ile, vol. de la Revista minera. 52 INSTITUT DÉS PROVINCES DE FRANCE. dans les roches qu'il rapporte au Jura, au trias et at terrain silurien. A l’époque miocène, l'Espagne était couverte de lacs d'eau douce ou saumâtre, dont les dépôts forment les plateaux de l’intérieur et s'étendent même, quoiqu’assez rarement, jusqu’au bord de la mer, Les coquilles terrestres ou fluviatiles que renferment ces dépôts ont été assez peu étudiées jusqu’à ce jour , et il serait très- intéressant, sans doute, de les comparer avec les co+ quilles aujourd’hui vivantes sur les mêmes lieux. Nous croyons donc devoir comprendre dans notre résumé géologique l'ouvrage que M. Rossmaessler vient de pu- blier : Sur Les coquilles fluviatiles et terrestres du sud de l'Espagne, région qu’il à visitée lui-même durant l'été de 1853. Cet ouvrage fait suite à son Fconographie des mollusques d’eau douce el terrestres d'Europe, et en forme les 13°. et 14°, livraisons. L’Angleterre n’a rien publié sur l'Espagne dépuis la notice de M. Pratt : Sur la géologie d’une partie de la Catalogne, qui date de 1852 (1). C’est l’année suivante, en 1853, qu'a paru le mémoire si intéressant de M. Carlos Ribeiro : Sur les formations siluriennes et carbonifères de Bussaco en Portugal , avec les notes de MM. Sharpe, Salter et Banbury (2). Ce n’est pas seulement par des écrits que se propagent et se popularisent les vérités scientifiques, c’est plus encore peut-être par l’enseignement public dans les grands établissements de l’État. Aussi est-ce avec un vé- (4) On the geology of Catalonia. Quat. Journ. of the geol. Soc. of London, vol. VIII, p. 268. (2) Ibid. , vol. IX, p. 135. CONGRÈS DES ACADÉMIES. 53 ritable plaisir que nous avons vu fonder à Madrid une chaire de géologie au Musée des sciences naturelles , di- rigé par M. Graells dont le nom vous est déjà connu. Cette chaire a été confiée à un de nos amis , M. Vilanova, qui s’est préparé à la remplir par trois ou quatre années de résidence à Paris et de voyages en Europe, où il a re- cueilli de belles collections paléontologiques. C'est cette année qu'ila dû commencer son cours. En vous présentant, Messieurs, ce rapide résumé des travaux publiés en Espagne sur la géologie , pendant l’an- née qui vient de s’écouler , nous avons voulu appeler votre attention sur une nation qui en général attire moins nos regards par les progrès de ses sciences que par l’instable mobilité de sesinstitutions politiques. Puissions- nous, tout en n'étant que juste, avoir laissé dans vos es- prits une impression favorable , et vous avoir convaincus qu’il s'opère depuis quelques années , chez cette nation, un mouvement scientifique véritable que la dernière ré- volution ne semble pas avoir arrêté. M. le Président invite M. de Lanoue à présenter au Congrès le résultat de ses recherches sur l’emploi du phosphate de chaux en agriculture. M. de Lanoue répond qu'ayant eu occasion de signaler dans le département du Nord un banc puissant de phos- phate de chaux qui appartiendrait à l’étage sénonien ou partie supérieure de la craie , il avait été amené à se de- mander quelle serait la manière la plus avantageuse d'en tirer parti dans l'intérêt de l’agriculture. Cette question lui avait semblé elle-même devoir être précédée de la solution de cette autre : « Quel est l'effet des phosphates dans la végétation ? » Or, après un grand 54 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. nombre d'analyses, M. de Lanoue a reconnu que si, pour la croissance des plantes , les sels de soude , de potasse, les silicates, les carbonates sont nécessaires, pour la formation de la graine, la présences des phosphates dans les amendements estune chose indispensable. I] résulte, en effet, de l’analyse des graines des céréales , par exemple, que sur 1400 de sels minéraux les phosphates y figurent pour près de 95. Le phosphore joue donc un rôle de la plus haute im- portance dans la fructification , c’est-à-dire, dans l'acte de la transmission de la vie, et cela non-seulement dans le règne végétal, mais encore dans le règne animal lui-même, partout où est le siége de la vie; et, pour n’en citer qu’un exemple, la matière cérébrale, le sperme des animaux supérieurs , la laitance des poissons, en contiennent des proportions extrêmement considérables. Aussi, une nomenclature nouvelle serait-elle à faire, on devrait changer le nom de phosphore, qui veut dire : porter la lumière ; et lui donner celui de zoophore, qui voudrait dire : porter la vie. Mais pour en revenir à nos phosphates , il tombe sous les sens qu’une terre, qui n’en a pas ou qu’une insuffi- sante quantité, pourra bien donner une végétation luxu- riante , si, d’ailleurs, toutes les conditions de la germi- nation et du développement de la Lige s’y rencontrent, mais qu'elle ne pourra fournir ce qu’elle n’a pas et qui est indispensable pour la formation du fruit. C’est à cela que l’on doit certainement attribuer ces magnifiques expériences déçues, et que les cultivateurs savent si bien exprimer en disant : cela pousse bien, mais cela pe graine pas, Il serait donc de la plus haute importance d'étudier, CONGRÈS DES ACADÉMIES. 55 d’une manière plus approfondie qu’on ne l’a fait jusqu’à ce jour , le rôle des phosphates en agriculture. N'est-ce pas à leur présence, en effet, que l’on devrait, non moins qu’à celles des substances charbonneuses et albu- minées, ces si remarquables effets produits, dans les provinces de l'Ouest, par le noir-animal, composé sur- tout du produit de la carbonisation des os et de la chair musculaire des animaux ? Dans les départements du Nord où existent des raffineries de sucre , le noir-animal qui y a servi pourrait y être livré à l’agriculture à des prix très-modérés. Néanmoins, on ne s’en sert pas : les agri- culteurs ont reconnu qu’il ne produisait pas d’effet sen- sible, tandis que transporté à Nantes, pour de là se répandre dans les départements voisins et surtout en Bretagne , il y trouve un débouché facile , quoique à un prix de vente beaucoup plus élevé. C’est que, sans doute , les terres des départements du Nord contiennent déjà une quantité suffisante de phosphates, tandis que, dans les schistes et les granites de la Bretagne, on est obligé d’en introduire artificiellement une certaine quan- tité. De ces faits, il résulte qu’on ne saurait trop engager les personnes qui s'occupent d'analyses chimiques, à donner exactement la composition des différents terrains, non pas tels que les entendent les géologues, mais bien tels que les entendent les agriculteurs , indiquant, d’une manière facile à comprendre pour tous, quels sont les éléments constituants de tels sols et quels sont ceux des plantes; de sorte que, du rapprochement de ces deux tableaux , l’agriculteur , à coup sûr , püt dire : le sol que je cultive contient tels principes; ce sont ceux qui con- viennent à telles plantes, ce sont celles-là que je dois C1 56 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. cultiver de préférence ; où il y a tel élément qui manque je vais l’introduire pour avoir mon sol normal. Le phosphate, toutefois, ne doit pas être considéré comme un engrais. Celte distinction est importante ; car, bien que passant dans la plante au moyen de la circu- lation de la sève pour former , lors de la maturation, la graine, il lui faut être allié à des substances azotées, ou, pour parler moins scientifiquement , à des fumiers, pour qu’il puisse produire les excellents résultats qu’on doit en attendre. C’est comme la chaux, la marne, un amendement , un stimulant, qui à besoin de rencontrer une terre contenant des principes de fécondité qu’il mette en activité. | Après avoir démontré l’avantage que l’agriculture peut retirer de l’emploi des phosphates, M. de Lanoue signale, dans le département du Nord , un banc calcaire contenant 80 à 35 pour 100 de phosphate et ayant 60 cent. d'épaisseur. Ce banc appartiendrait, comme il l’a déjà dit, à l'étage sénonien. Il est d’une exploitation facile : la roche supérieure est peu dure; celle sur laquelle il re- pose est très-tendre, puisque ce sont presque partout des sables glauconieux. Pour être livré à l’agriculture, ce phosphate aurait besoin d’être pulvérisé; rien ne serait plus facile, car, indépendamment de la cuisson, qui permettrait de livrer cette substance comme un mélange de chaux et de phosphate, on pourrait aussi uti- liser la force motrice de moulins à vent pour broyer cette roche, qui est très-caverneuse, et, par conséquent, susceptible d’être facilement concassée. En Angleterre, où on a trouvé aussi, sur plusieurs points, de ces phosphates de chaux, on les a exploités pour l’agriculture, quelquefois même dans le seul but CONGRÈS DES ACADÉMIES. 57 d'en extraire l’acide phosphorique. C’est que , dans ces localités, la roche, si.je puis parler ainsi, est presque exclusivement formée de phosphate : je dis si je puis parler ainsi, car, en Angleterre, ces gisements sont dans le crag , c'est-à-dire dans des sortes d’alluvions tertiaires con- tenant de nombreux galets. C’est au milieu de ces galets que se trouve une quantité énorme de débris d’ossements appartenant, pour la plupart, à des animaux de races perdues, mais d’une taille colossale , et ce sont: ces ossements mêmes qui sont recueillis et broyés pour être livrés comme phosphales. IL est de ces ‘riches exploitations, dont on a analysé plusieurs fois des échan- tillons, qui contenaient jusqu’à 95 pour 100 de phos- phates. M. de Montreuil s'associe pleinement à l’idée émise par M. de Lanoue, quand il dit qu’on ne saurait trop engager les personnes qui s'occupent d'analyses chi- miques à donner exactement la composition des différents terrains qui se rencontrent dans un pays. Déjà, depuis long-temps, le Congrès a émis le vœu que des cartes agronomiques fussent faites. Elles doivent être le point de départ, la première chose à faire, pour toute personne qui s'occupe sérieusement d'agriculture. Si la science ne vient pas la première nous dire ce dont est composé le sol que nous cultivons, l'expérience viendra nous l’apprendre ; mais après combien de ten- tatives infructueuses, de temps perdu et d’argent dépensé! Ce que nous réclamons' de Ja science actuellement, c'est qu'elle vienne, avec ses moyens si précis, nous dresser un inventaire exact des matériaux qui composent notre sol arable, non pas avec des moyennes, mais indi- quant localité par. localité , champ par-champ, : la 28 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. nature du sol et les éléments qui le composent. De Ja sorte, les sciences et la chimie en particulier nous auront rendu, à nous autres cultivateurs , un service véritable et auront atteint le but que tous ceux qui travaillent doivent se proposer : procurer une plus grande masse de bien-être, en un mot, être utile à tous. Cette étude que la chimie ferait du sol sur lequel nous travaillons, nous serait non-seulement utile à nous, mais lui servirait peut-être à elle-même et lui ferait apprécier , à leur plus juste valeur, les fumiers d’étable qu’elle semble traiter si légèrement maintenant. Habitant la Normandie, je fais beaucoup de fumiers d’étable, parce que je trouve qu’en en mettant comme engrais, je produis un quart, un tiers plus que je ne produisais autrefois. Est-ce à dire pour cela que ailleurs qu’en Normandie, et ailleurs que dans la partie que j'habite, la même proportion se soutiendrait? je n’en sais rien, parce que je ne sais si les éléments du sol seraient les mêmes. Pour le savoir , il faut faire les cartes dont je parlais , alors réellement les essais, les tentatives, faits chez mon voisin, pourront m'être réellement utiles et ne pas, comme c’est arrivé souvent, n'être que l’oc- casion de déceptions. Pour en revenir aux fumiers, je me suis parfaitement trouvé de leur emploi; j'ai donc cherché à en produire la plus grande quantité possible. Pour cela, j'ai consi- dérablement augmenté le nombre de mes bestiaux : j'ai donc pu livrer , sur le marché, un bien plus grand nombre de bêtes pour la boucherie ; de sorte que, en augmentant mes profits par la vente d’un plus grand nombre de bestiaux, j'augmentais aussi la production de mes céréales. Mais, si je crois la méthode que j'ai adoptée la meilleure pour la nature du terrain que je cul- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 5ù tive, je suis loin de prétendre qu’elle doive être unifor- mément appliquée partout ; je répète, comme je le disais en commençant, qu'avant de rien décider sur ce sujet il faut d’abord savoir sur quel sol on travaille, Je deman- derais donc que le Congrès émiît le vœu que les Sociétés savantes des provinces et les chambres d'agriculture , les comices et les cultivateurs se préoccupassent de faire exécuter des cartes agronomiques établissant la nature des sols et leur appropriation à la culture. M. de Lanoue fait remarquer que plusieurs personnes considèrent à tort les cartes géologiques comme la base des cartes agronomiques. Dans les cartes géologiques , on ne s'occupe nullement de la composition minéralo- gique de la roche , mais bien de son âge par rapport à la série des terrains. On peut donc avoir compris sous la même teinte et sous la même dénomination des sols , qui agronomiquement devraient être distingués. Bien plus , ce qu’il importe surtout de connaître à l’agriculteur, c’est le sol arable, l’humus. Or, souvent, pour ne pas dire presque toujours, le géologue, lui, n'indique que le sous-sol, que la partie dont il importe moins de con- naître la composition. M, de Lanoue ajoute que, si l’on veut que des tentatives soient faites pour composer des cartes agronomiques , il serait très-utile de dresser une instruction destinée à ser- vir de guide pour ceux qui voudraient bien s’en occuper. M. de Caumont dit que M. Elie de Beaumont a adressé une circulaire pour la confection de cartes agronomiques à MM. les ingénieurs des mines, dans laquelle illeur laisse la plus grande latitude. 11 leur indique les faits les plus intéressants à recueillir , laissant à leur appréciation les moyens à prendre pour arriver au meilleur résultat, Déjà 60 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. M. Belgrand a fait paraître la carte du département de l'Yonne , et plusieurs autres se préparent pour différents départements. Dans le but d'encourager des études dont les résultats devront être d'une si grande utilité pour l’agriculture, M. Calemard de Lafayette demande qu’un prixsoit décerné au premier qui, dans chaque département, fera une carte agronomique , ne fût-ce que d’un canton, La proposition de M. Calemard est adoptée à l’unani- mité. Au sujet des différentes cultures propres à chaque sol, M. Quentin-Durand fait remarquer que, en Bretagne comme en Sologne, on pourrait cultiver avec avantages l’ajonc épineux , que l’on détruit, au contraire, avec tant de soin dans d’autres parties de la France. L’ajonc épineux, une fois broyé, peut parfaitement servir de fourrage. Il a lui-même construit des machines pour en broyer qui ont parfaitement réussi. Un membre fait remarquer que, depuis long-temps, on à reconnu, en Bretagne, tout le parti qu'on pouvait tirer de l’ajonc épineux, et que, depuis long-temps aussi, on le récolte pour la nourriture des bestiaux ; que, toutefois, les préparations qu’on est obligé de lui faire subir pour lemployer ont toujours empêché sa culture de se ré- pandre; peut-être n’en sera-t-il plus de même, ajoute l'honorable membre, depuis que M. Vilmorin vient de irouver une variété de lajonc qui n’a pas d’épines et qu’alors les bestiaux pourraient manger sans trituration préalable. M. Quenard insiste pour que l’on propage la culture de l’ajonc comme nourriture excellente pour préserver les moutons d’une maladie qui semble prendre, chaque CONGRÈS DES ACADÉMIES. 64 année, des proportions considérables, en Berry surtout, la cachexie aqueuse, et contre laquelle tous les amers, tels que l’ajonc et le genêt, ont été reconnus par l’École vétérinaire d’Alfort, comme produisant les meilleurs effets. L'ordre du jour étant épuisé, la séance est close à midi et demi. Le Secrétaire , G. DE LORIÈRE. 2 Q De——— SÉANCE GÉNÉRALE DU 24 MARS. (Présidence de M. PAYEN.) M. le Président appelle au bureau : MM. le colonel de tépécaud , le général Rémond ;, le marquis de Vibraye , le marquis de Saint-Seine , le vicomte de Cussy , Walalson. M. Ch. Calemard de Lafayette remplit les fonctions de secrétaire. M. de Caumont signale les ouvrages dont il est fait hommage au Congrès : Le cabinet historique, revue trimestrielle destinée à faire connaître les manuscrits historiques renfermés dans les bibliothèques , par M. Louis Paris ; Dissertation sur l’apostolat de, saint Martial, par M. l'abbé Arbelot ; . Plusieurs publications de la Société impériale et cen- trale d'agriculture , der bo par M. Payen, FRCRUIAITE perpétuel de cette société ; Bulletin de la Société des sciences natur elles de, St. Étienne, déposé par M. d’Albigny de Villeneuve, délégué. 62 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. L'ordre du jour appelle la discussion de Part. 2 du programme ainsi conçu: « Quels ont été, en 1854, les progrès de la chimie, principalement dans ses applica- tions à l’industrie et à l’agriculture ? » M. Payen a la parole. Le savant académicien expose que les questions de chimie appliquée lui paraissent avoir pour le Gongrès un intérêt spécial, et que néanmoins il croit pouvoir faire connaître, en peu de mots, quelques faits intéressants qui se sont produits dans la marche générale de Ja science. Toute grande découverte, qui paraît d’abord n’appar- tenir qu’à la théorie pure, trouve rapidement des appli- cations souvent considérables et tout-à-fait inattendues. Quand les magnifiques travaux de M.. Chevreul sur les corps gras ont été mis en lumière, ils ne parais- saient pouvoir donner lieu à aucune application immé- diate. Le savant, qui y avait consacré une partie de sa vie, a pu cependant voir ses découvertes porter leurs fruits dans l’industrie. L'industrie s’en est emparée avec un immense avantage ; et les révélations de la théorie pure ont eu bientôt de grands résultats pratiques. Cette année, encore à propos des corps gras, il s’est produit un fait scientifique qui a les proportions d'un véritable événement. Les corps gras se composent de substances faciles à séparer, Mais ces corps séparés, jusqu’à ce jour la science pouvait paraître impuissante à les combiner de nouveau. On arrivait presque à nier la possibilité de reconstituer un corps gras. Eh bien, cette impossibilité apparente est vaincue. M. Berthelot vient de trouver récem- ment le moyen de combiner de nouveau, après leur CONGRÈS DES ACADÉMIES. 63 séparation par l’analyse, la glycerine et les acides ; il a reconstitué un corps gras. C'est là un fait chimique du plus haut intérêt. Dans l’industrie du moulage des bronzes, on se servait jusqu’à ce jour de poussières de charbon dont l'usage avait, à la longue, sur les ouvriers la plus funeste influence. Il en résultait des affections quelquefois mortelles. Et c'était un fait douloureux que la France, dont les œuvres d’art et de goût se répandent avec un si grand succès dans le monde entier, dût espérer le privilége de sa supériorité, dans l’industrie des bronzes, pour les dangers auxquels cette industrie exposait lou- vriér habile, qui lui consacrait une mis souvent distinguée. De plus , les poussières adhérant à la peau, obstruant tous les pores, pouvaient encore avoir de cette manière de graves inconvénients pour la santé. Enfin, comme presque toutes les questions d'hygiène et de propreté ont une corrélation presque constante avec les faits de moralité, il arrivait encore que la diffi- culté d’atteindre à un degré de propreté extérieure convenable faisait perdre peu à peu à l’ouvrier le goût d’une tenue décente. Le peu de sympathie qu’un extérieur fâcheux ren- contre dans les foules, dans les réunions publiques, dans les promenades, reléguait l’ouvrier dans l'asile funeste que lui ouvre le cabaret. De là à l'oubli de tout respect de soi-même il n’y avait qu’un pas. Tant il est vrai que la propreté de l'homme est un des éléments de sa dignité. — On comprend combien tout cela était re- grettable, On avait objecté, il est vrai, qu’en certaines autres 6h INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. industries les contacts permanents avec la poussière des charbons n'avaient pas au même degré les mêmes in- convénients. On disait que les mineurs dans les houillères, ou les fabricants de charbon dans les forêts, n’étaient pas atteints , en général, des mêmes affections graves que les mouleurs de bronze, L'analyse démontre à M. Payen. que les poussiers employés à la fonte du bronze étaient loin d’être aussi purs que ceux pris sur le lieu même de la fabrication. Soit par le fait de quelques sophistications, soit par le mélange fortuit de poussières étrangères , il fut pos- sible de constater que tous les poussiers servant à l’in- dustrie contenaient , en général, de 10 à 30 pour cent de matières siliceuses, argileuses , et évidemment délé- tères. Restaient, d’ailleurs, toujours les questions de pro- preté et d'hygiène. C’est en de telles conditions qu’un ancien militaire , M, Roux, a imaginé de substituer au poussier de char- bon la fécule de pomme de terre. La fécule est blanche, elle: n’altère donc pas, comme le charbon, la propreté extérieure ; les grains, ne sont ni durs, ni anguleux ; ils sont même digestifs. La fécule était donc un agent d’une innocuité parfaite. Ge bienfait scientifique a, en conséquence, été reçu avec bonheur dans la pratique. La succès a été complet et général. . L’ingénieux auteur de la découverte a-trouvé tout de suite la: juste rémunération de son heureuse pensée. Sa. position a grandement gagné. Le gouvernement a accordé au nouveau procédé toute son approbation. Un des grands-prix Monthyon a été dé- cerné à M. Roux. C’est donc un grand fait chimique, une heureuse découverte acquise à la science. et à l’in- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 65 dustrie. Et, on le voit, le succès ne s’est pas fait at- tendre. Dans la photographie, il y a lieu maintenant de si- gnaler de nombreuses et remarquables améliorations. Le progrès accompli, au point de vue de la valeur artistique des œuvres, est surtout considérable. On sait combien le miroitage était, dans le principe , d’un effet fâcheux et quelle insuffisance il en résultait pour la valeur d’art des épreuves photographiques. Ce grave inconvénient a pu être évité. L'emploi d’un agent nouveau, l’emploi du collodion, en donnant le moyen d’obtenir une image graphique sur un corps très-mince et transparent, a permis de réussir incomparablement mieux que par le passé. Et on peut voir aujourd’hui, chez M. Bisson no- tamment , des épreuves magnifiques susceptibles d’être multipliées comme les épreuves daguerriennes, qui sem- blent ne laisser plus rien à désirer et répondre aux plus rigoureuses exigences de l’art. C’est donc là, pour 1854, un très-grand et très-certain succès. Pendant ce même temps, M. Niepce , le neveu de Pil- lustre inventeur , s’occupe, avec des chances à peu près sûres , d'importantes et avantageuses modifications qui, par leur point de départ au moins, appartiennent aussi à l’année 1854 , et fourniront très-probablement matière, l’année prochaine, à d’intéressantes communications. Le Congrès entendra maintenant avec plaisir, sans doute, quelques mots sur une conquête de la chimie , qui a eu un grand retentissement, mais dont l'historique est tou- jours bon à enregistrer et qui doit entrer, à coup sûr, dans l'inventaire annuel des progrès accomplis par la science. Il s’agit de la découverte d’un nouveau métal. Tout le monde a entendu parler de ce métal, tout le 66 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. monde sait ce que c’est que l’aluminium. Voici succinc- tement les faits. L’aluminium avait été découvert par Boelher , mais ce savant ne lui avait trouvé aucune pro- priété applicable. Le corps obtenu était plutôt, d’ailleurs, un mélange pulvérulent qu'un métal pur. Un jeune sa- vant français, M. Sainte-Claire-Deville , a repris le pre- mier cette étude, et il lui a été donné de réaliser les tenta- tives les plus heureuses. Les résultats obtenus ont été tout-à-fait surprenants , et il'est permis de croire, dès à présent , à d'immenses conséquences. M. Payen produit sur le bureau un fragment d’alumi- nium, et signale dans le nouveau métal les propriétés sui- vantes : extrême légèreté ; l’aluminium pèse la huitième partie seulement du poids du platine, à peu près le poids du verre. Il est brillant comme l'argent, inaltérable à l'air. Sa densité est de 2,56°. Dès son apparition dans le monde scientifique, l’alumi- nium a produit, par le fait des études consacrées à sa découverte, un résultat très-considérable, On a inci- demment accompli un progrès très-remarquable dans la préparation d’un agent chimique qui sert précisément lui- même à la préparation de l'aluminium. Avant les travaux de M. Deville, le sodium valait 1,000 fr. le kilog.; il en résultait que les opérations où le sodium était employé devenaient très-dispendieuses ; l'aluminium , par consé- quent, plus cher encore que le sodium, fût resté à des prix inaccessibles. Aujourd’hui, le prix du sodium a baissé de 4,000 à 450 fr. C’est déjà, comme on voit, un pas immense, et on n’en restera pas là. C’est ainsi qu’on peut espérer voir prochainement disparaître la seule dif- ficulté qui pût s'opposer à l'emploi usuel de Palumi- nium, CONGRÈS DES ACADÉMIES. 67 Ce métal , lors des premiers essais , était plus cher que l'or ; le voici déjà d’un prix à peine supérieur à celui de l'argent. Il baissera certainement beaucoup encore. Dès- lors, son emploi peut se généraliser rapidement , et voici quelques-uns de ses avantages : Il peut être laminé , étiré en fil; il est inaltérable à l'air , à l'eau chaude, à l’eau froide , à toutes les éma- nations sulfureuses ; inaltérable , enfin, à tous les acides faibles. On lui reproche de manquer de dureté. Reste à étudier, à son profit, la question nouvelle encore pour lui des alliages. Il pourra peut-être atteindre , par certains alliages, à un haut degré de dureté. Combien avec le cuivre , par exemple, il deviendrait peut-être dur. Il y a donc à espérer de cette découverte des applications prochaines et infinies. Toutes les découvertes n’arrivent pas, du premier coup, au but d'utilité pratique qu’il leur est donné d'atteindre plus tard. Si la fabrication économique de la soude artificielle, si utile à toutes les préparations chimiques, est sortie complète et irréprochable de la première pensée de son inventeur ; si le procédé Le Blanc, qui, du reste, a la plus grande analogie avec le procédé nouveau qui a permis d’obtenir le sodium à un prix six fois moindre que sa valeur antérieure, si le procédé Le Blanc s’est répandu immédiatement et sans avoir besoin d’aucune modification , dans l’Europe entière , il est, par contre, une foule de découvertes précieuses qui n’ont pas dit leur dernier mot , dès leur apparition. Au début de la fabrication du sucre de betterave , on distinguait celui-ci du sucre de canne par sa couleur jaunâtre. Aujourd’hui, on distingue le sucre de canne 68 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. parce qu'il est moins blanc, et le sucre indigène reste plus cher que le sucre colonial , parce que le premier est le plus beau. Le sucre indigène, avec des apparences inférieures , valait 12 fr. le kilog. , à son apparition. Aujourd’hui, il vaut 4 fr. 25 ou L'fr, 50. Il est meilleur et plus beau qu’autrefois, el, au prix actuel, les fabriques gagnent plus aujourd’hui qu’elles ne gagnaient aux prix énormes des premiers temps. C’est l’histoire de toutes les nouveautés, et il en sera ainsi pour l’aluminium. Ses propriétés permettent de lui assigner une foule de destinations utiles, dès que les prix auront baissé ,.et ils baisseront. Qu'on voie l’histoire du zinc : Vauquelin, à ses premiers examens, l’a trouvé l’un des métaux les plus altérables à l’air, aux acides, etc. ; l’un des plus fragiles , cassant à chaud, à froid. — On n’en fera rien, disait-on; ce n’est pas là un métal du- rable , et, sous ce dernier rapport, on disait vrai. Qui ne connaît cependant aujourd’hui les applications infinies du zinc ? Pour ce métal , si fragile en apparence et même en réa- lité , on a trouvé un degré de température où il devient essentiellement ductile, Il reste cassant à toute autre tem- pérature ; mais de 60 à 100 degrés il est ductile. C'était le métal incontestablement le plus oxydable ; mais l’oxyde qu’il produit est le plus inattaquable , au contraire, et son altération le rend inaltérable. L’oxy- dation naturelle ou artificiellement produite lui devient une défense, une cuirasse qui le protège invinciblement. On niait encore la possibilité d’y appliquer la pein- ture,-On avait raison. Mais sur l'oxydation qui se produit CONCRES DÉS ACADÉMIES. 69 par le fait même de son altérabilité , la peinture est plus adhérente, plus durable que sur tout autre métal. Qui voudrait donc nier, après cet exemple l’avenir, de l'aluminium ? La mine est inépuisable ; elle est partout: c’est l'argile : que les prix soient réduits , et l’industrie s'emparera bientôt de ce nouveau produit de la science. La maladie de la vigne a conduit à demander la pro- duction de l’alcool à des matières nouvelles. Tout le monde a entendu parler de lalcool d’aspho- dèle. L’asphodèle est une liliacée à racine tuberculeuse qui donne l'alcool en quantités qui seraient considé- tables, au moins pour les régions méridionales ; car l’asphodèle des régions du Nord paraît ne contenir que peu ou point d'alcool. On a pensé à la cultiver en grand pour cette destination. Mais, comme il faudrait trois ans de culture ; que les produits ne seraient pas suffisants pour “payer la valeur des terrains de bonne qualité qu’on lui consacrerait, M. Payen pense que la culture, si elle a lieu, restera circonscrite en de certaines localités spé- ciales et sur les sols de peu de valeur. L’extraction de l'alcool contenu dans les racines de l'asphodèle a produit un fait qu’il faut enregistrer, Dans cette racine, qui donne en alcool le double de la betterave , l’analyse chimique n’a pas laissé voir le sucre. M. Payen, lui-même, n’a trouvé dans les tubercules qu’il a analysés aucune trace d’amidon. L’analyse chimique immédiate permettra donc seule de découvrir le prin- cipe sucré qui peut seul donner naissance à l’alcoo!l. Il y a lieu maintenant d'espérer que la maladie de la vigne cessera ; mais dût-elle ne pas cesser , la production de l'alcool par le grain, la betterave, la canne ou les melasses, suffira aux besoins de la consommation et 70 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. fera redescendre les prix à des proportions normales. Il sera, dès-lors , désirable que, sila vigne guérit, le raisin soit employé à produire du vin et non plus de l’eau- de-vie. L’extraction de l'alcool de la canne à sucre doit prendre prochainement des proportions considérables. IL y a eu des applications très-heureuses et très-nouvelles. D'autre part, MM. Dubrunfaud et Le Clay extraient l’alcool de la betterave par un procédé inappliqué jusqu’à présent , qui paraît réussir. Ces Messieurs obtiennent la fermentation sans ex- traction préalable du jus. La fermentation s’accomplit dans l’intérieur des cellules. Le sucre se change en glucose, puis en alcool, sans opération extérieure , sans déplacement, sans déchirure des tranches de la betterave. Ici commence une diffé- rence dans la manière de faire des deux patriciens, M. Leplay agit à l’aide de l’eau bouillante : l'alcool va- porisé arrive dans des récipients, et l’opération est faite. M. Dubrunfaud, l’auteur primitif de la nouvelle inven- tion , a cependant modifié dans sa pratique son idée pre- mière, Il extrait l'alcool formé par le fermentation à l’aide du lavage méthodique des tranches de betterave. Il obtient ainsi un suc vineux, qu'il distille ensuite par les procédés ordinaires. Les-tranches de betterave restent intactes. . Enfin, untroisième procédé d'amélioration a été mis en pratique par M. Champonnoïs. Ce praticien a pensé à employer dans l'extraction, non de l’eau, pour la ma- cération, mais bien. le vinasse, On introduisait ainsi, il est vrai, une substance étrangère pleine de matières azo- tées qui produisent une fermentation vicieuse, On voulut CONGRÈS DES ACADÉMIES. 71 obvier d’abord par l'addition de certains acides. Mais un résultat plus sûr a été oblenu par une augmentation presque de moitié, dans la quantité des vinasses ; et loin que cette augmentation ait diminué la production quoti- dienne de sa fabrique, cette production a été plus con- sidérable qu’antérieurement. Les fermentations sont beaucoup plus rapides et elles sont affranchies de leurs défectuosités. Dans la même fabrique, dans les mêmes appareils dont la contenance reste la même , on obtient donc beaucoup plus d’alcool, en opérant néanmoins sur des jus beaucoup plus étendus. Les résidus, tranches de betteraves épui- sées, ou matières contenues dans les vinasses, peuvent être utilisés à la nourriture des bestiaux, Ce fait est surabondamment justifié, non-seulement dans la fa- brique même, mais par des nourrisseurs qui viennent s’y approvisionner de résidus. Enfin, pour la rectification des alcools, M. Payen si- gnale aussi de grands progrès accomplis par la pratique , l'appareil Derosne a été amélioré , avec un plein succès, par M. Dubrunfaud. M. Payen donne ici des renseigne- ments pleins d'intérêt sur les pratiques nouvelles d’épu- ration. En somme, aujourd’hui les alcools de betterave, de mélasse et de grain, parfaitement affinés, mélangés avec les alcools de Montpellier, prennent le goût irré- prochable des alcools de deux ans, et l’alcool de vin gagne lui-même à ce mélange. Un dernier mot sur l'emploi du bois pour fabriquer de l'alcool. Il y a évidemment possibilité d'opérer ainsi, mais la nécessité de consacrer à cette opération: une quantité considérable d’acide sulfurique, la rendra tou- 72 INSTITUT DÉS PROVINCES DE FRANCE. jours peu économique , partant impraticable à la spécu- lation. La garance fournirait aussi, par les débris de ses raci- nes, de l’alcool, Mais c’est là une fabrication accidentelle qui ne peut pas devenir régulière. D’ailleurs , l'alcool ob- tenu est d’une odeur fétide. Les huiles empyreumatiques essentielles leur donnent un goût détestable. M. Valenciennes, membre de l’Institut, entre en ce moment en séance, et est invité à prendre place au bureau. M. Payen termine ici son premier exposé sur les pro- grès de la chimie industrielle; dans une seconde com- munication, il exposera les progrès de la chimie dans ses applications spéciales à l’agriculture. | M. Maurenq voudrait savoir , de M. Payen, combien d'alcool on obtient de la betterave et combien du bois. Il lui a semblé que M. Payen avait dit que la betterave pouvait donner de 3 172 à 5 172 de son poids en alcool, et la sciure de bois 45 ‘, de son poids. Ce résultat de l'extraction du bois lui semblerait très-remarquable et devoir faire étudier encore la question de la production de-l’alcoo!l par le bois. M. Payen confirme les chiffres indiqués par M. Maurenq. M. de Saint-Seine signale l’exorbitante augmentation du prix du tartre qu’on enlève autour des tonneaux et des fûts qui ont contenu du vin. Il craint d’avoir à en conclure qu'on tente , à l’aide du tartre , de fabriquer des vins falsifiés. M. Payen répond que l'acide tartrique a de nombreuses applications industrielles. Le haut prix dépend donc de la multiplicité de ces applications, et, à ce prix, il n’y au- rait aucun profit à fabriquer du mauvais vin. M, de Caumont remercie le savant académicien de la CONGRÈS DES ACADÉMIES. 73 lumineuse exposition qu’il vient de faire. L'Assemblée s'associe, par d’unanimes applaudissements , aux paroles de M. de Caumont. Au Congrès scientifique qui S’est tenu à Dijon, au mois d'août 1854, M. Gosse fils avait présenté des plaques de ceinturons en fer, trouvées dans un cimetière de l’époque mérovingienne, à la surface desquelles se voient des ob- jets ayant l'apparence de coquilles , et , d’après l'avis de quelques naturalistes , il les présenta comme des coquil- lages marins. M. Nodot, invité à donner son opinion, ne vit dans ces objets que des boursouflures de fer sulfuré. M. Gosse s’engagea alors à présenter les pièces à plu- sieurs savants, pour tâcher de faire cesser l'incertitude dans laquelle on se trouvait. Il rend compte du résultat de ses recherches. D'un côté, MM. Deshayes et Alcide d’Orbigny se sont joints à l’opinion de M. Nodot; de l’autre , MM. Moquin-Tandon, Valenciennes, Dufresnoy, Bayle , de Senarmont, Rousseau et Gervais , croient que ces boursouflures ne sont autre chose que des coquilles. M. Dumas, consulté comme chimiste, ne pense pas que l’on puisse voir là un oxyde de fer, et penche pour l’avis des derniers naturalistes. M. Gervais a, en outre, découvert sur une plaque une coquille univalve, qui, selon la détermination faite par M. Valenciennes, se rapproche de l'Eulyma glaberrima. Ce fait vient forte- ment à l’appui de leur opinion. Pour élucider les questions qu'on vient de poser, M. Valenciennes répond que les corps sont incontesta- blement des coquilles , maïs changées en fer hydraté. On peut donc s'expliquer parfaitement les doutes des personnes qui les ont éxaminées; mais, en somme, il est évident qu’on s’est généralement rangé à l'opinion li 74 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. déjà exprimée par M. Valenciennes, que les coquilles emportées dans les croûtes oxydées sont bien des co- quilles marines oxydées. Elles sont curieuses en ce qu’elles sont essentiellement marines. Elles peuvent servir à des discussions archéolo- giques , puisqu’il est très-probable qu’elles ont été mises dans des tombes en hommage à quelque voyageur dé- funt; mais la géologie n’a rien à y gagner. En somme, ces corps ne peuvent pas être autre chose que des co- quilles marines, les unes bivalves, du genre huitre , les autres des gastéropodes marins du genre Eulyme. M. de Caumont invite M. Valenciennes à choisir une séance ultérieure pour faire connaître au Congrès ses der- niers travaux de pisciculture. La séance est levée. L’un des Secrétaires-généraux , Ch. CALEMARD DE LAFAYETTE. SECTION DES SCIENCES PHYSIQUES. . SÉANCE DU 22 MARS. (Présidence de M. le comte De VIGNERAL ). La séance est ouverte à 40 heures. M. le Président annonce que la question à l’ordre du jour est celle des améliorations introduites dans le sol agricole , par l’ameublissement ou par les amendeme nts. CONGRÈS DES ACADÉMIES. 75 M. de Caumont signale la progression croissante de la consommation des amendements calcaires. Les fourneau x établis par MM. Bunel et Mosselmann , dans le départe - ment de la Manche, suffisent à peine aux demandes qui leur en sont faites pour l’exportation en Angleterre et par nos propriétaires nationaux. Il n’a pas de renseignements suffisants pour traiter des progrès obtenus dans l’ame u- blissement du sol, par des instruments plus puissants que la charrue ordinaire. M. de Clocheville ne traite également que la première partie de la question. Le Boulonnois , qu’il habite, ver- sant dans le commerce, pour les besoins de l’agriculture, comme pour ceux de l’industrie , d'énormes quantités de chaux, dont la qualité supérieure et hydraulique est universellement reconnue partout , les ingénieurs du gouvernement lui accordent la préférence. Aussi son ex- ploitation va sans cesse en augmentant ; grâce aux che- mins de fer et aux prix réduits de transport qui en sont l'effet , elle arrive à très-bon marché à Paris et jusque dans le centre de la France. Dans la composition chi- mique de ce calcaire, il entre une proportion notable , 2 ou 3 centièmes de sels de potasse, qui exercent une heureuse influence dans l’action de l’amendement mêlé au sol araire. Par une harmonie en quelque sorte providentielle, la contrée possède, à une très-faible profondeur, la marne , dont les qualités sont les plus propres à améliorer le sol sous lequel elle est située. Il s'arrête pour ne pas aborder la question si importante du marnage dans toute sa généralité, et dont on conteste l’utilité par la raison qu'il appauvrirait le sol par la suite, en forçant ses ré- coltes. 76 INSTITUT DES: PROVINCES DE FRANCE, Dans la Seine-Inférieure, dit M. Mabire , nous amélio- rons nos herbages situés dans des vallées humides par le marnage ; cette pratique , à peine connue naguère , $e répand de plus en plus. Le même département accomplit un autre progrès agricole par l’adoption de la charrue fouilleuse , dont on apprécie l'importance pour ameublir la couche inférieure du sol, qu’elle rend très-propre aux cultures des légumes, carottes , navets, etc. M. de Montreuil ne croit pas que le département de l’Eure possède encore beaucoup de charrues fouilleuses ; c'est un progrès qui commence. Son avantageux travail d’ameublir le sous-sol, sans le ramener à la surface, est trop utile pour n'être pas appréciée; elle exécute , dans les terres fortes, argileuses , une sorte de drainage su- perficiel , favorable à toutes les cultures, et principale- ment à celles des céréales. M. Charles Gomart expose les bons effets qu’on a re- tirés , dans la Picardie, de l’emploi de la charrue fouil- leuse pour la culture de la betterave et des céréales. Cet instrument , qui fouille le sol à une profondeur de 30 à L0°., dans le sillon même ouvert par le braban, a le double avantage de rendre le sous-sol perméable, sans le mélanger avec la tranche de terre amendée. Les bons effets de la charrue fouilleuse sont depuis long-temps appréciés dans la culture des racines, mais on a re- marqué également que les céréales cultivées dans les terres où la charrue fouilleuse avait été employée étaient plus vigoureuses , moins sujettes à verser et à se taper au blanc , que celles placées dans les circonstances ordi- naires. En effet, les terres ainsi fouillées ont deux avantages : 4°. pendant les grandes sécheresses d'été, les racines du blé trouvent encore une humidité qui sou- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 77 tient la tige et nourrit le blé; 2°, pendant les fontes de neiges de l'hiver , l’eau descend dans le sous-sol ameubli et laisse libre la surface de la terre, de sorte que la tige du blé pousse plus tôt et plus vigoureuse. M. Robert de Sainte-Tulle croit devoir signaler à l’at- tention du Congrès la charrue à défoncement d’un mé- canicien de sa contrée, où les inventions et les perfec- tionnements agricoles sont rares. Cette charrue ramène, il est vrai, le sous-sol à la surface, et exigerait, par con- séquent, d'énormes quantités d’amendements et d’en- grais. Il faudrait faire de grandes dépenses et attendre long-temps pour enrichir le sol, et cet inconvénient est tel qu’il peut nuire à son adoption dans d’autres con- trées. Cependant, comme le fait observer judicieusement M. de Montreuil, il est possible que la nature et les exigences du sol en rendent l'emploi utile dans le pays de l'inventeur, M. de Vigneral, à l’appui de cette opinion, raconte qu’il a fait défoncer , à 19 pouces de profondeur, des terres situées en Normandie ; que, par ce défoncement , il ramenait à la surface des sables grossiers qui ont rendu ces terres d’une fertilité si remarquable, qu’il a pu louer 80 fr. l’hectare les mêmes terres dont on ne lui offrait que 15 fr. auparavant. | M. de Morissure pense que les agriculteurs du Midi, qui, jusqu'à présent, disposent de peu d'engrais, se trouveront bien de donner la préférence à la charrue fouilleuse sur la charrue à défoncement, On a fait quel- ques essais de cette charrue dans son département (Eure- et-Loir). Il ne connaît pas qu’il y ait eu d’autres progrès accomplis dans l’agriculture du pays. M. de Montreuil demande la permission d’entretenir 78 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. l’Assemblée des améliorations entreprises par lui dans des prairies très-mauvaises et couvertes de la végétation la plus détestable ; il les défriche par la charrue ordinaire, puis par la charrue fouilleuse. Le sol, ainsi amélioré, sera cultivé en avoine, etc.. etc.; au bout de trois ans, il sera converti de nouveau en prairies. M. Mabire conseille d’ajouter le marnage aux amélio- rations déjà exécutées. Dans la presqu'île du Cotentin , il tombe peu de neige, peu de pluie; le sol n’y est jamais trop humide. La charrue fouilleuse y a été peu employée , probablement parce qu'elle y est peu nécessaire. M. Calemard de Lafayette pense qu’une des pratiques les plus utiles employées depuis peu, dans son départe- ment de la Haute-Loire , consiste dans l’habitude prise par les propriétaires d'occuper, lors de la cessation des travaux agricoles , les ouvriers de leurs contrées à l’ex- traction des pierres, à l’aide du bident , espèce de bêche à deux dents, par laquelle cette extraction est rendue prompte et facile. Les ouvriers de l’agriculture se trou- vent ainsi retenus dans le pays, et il y a lieu d’espérer qu’on ne sera plus exposé à les voir émigrer et rendre la main-d'œuvre si chère , qu’on a été obligé, dans les der- nières années, d’accorder aux moisonneurs le prix de 3 fr. et la nourriture par chaque journée de travail. Les terres, débarrassées des pierres , deviennent propres à la culture du lin et des plantes sarclées. Sur la question des amendements , il fait observer que leur administra- tion devrait être réglée et dirigée par des connaissances exactes, sur la composition et sur la nature des sols, qui varient, pour ainsi dire, à chaque pas dans sa contrée. CONGRÈS DES ACADÉMIES. 79 M. de Montreuil demande si la science est arrivée à connaître et à fixer cette théorie de l'amélioration des terres les unes par les autres. Il ne pense pas que la ques- tion soit résolue, et il est nécessaire que de nombréuses expériences viennent l’éclairer, pour que la pratique con- firme. C’est elle qui éclairera la science. M. Mabire croit qu’il faut poser en principe l’améliora- tion par les contraires, l'argile par la craie, et vice versa. M. de Morissure fait observer que les frais de trans- port rendent souvent de telles améliorations impossibles. M. Calemard de Lafayette conclut de tout ce qu’on vient de dire, que la question est loin d’être résolue ; que la science ne s’en est pas suffisamment occupée. Le Con- grès aura servi à faire faire un pas en avant en signalant cette lacune. Il faut que la pratique et la science se rencontrent souvent. Le meilleur moyen, selon lui, se- rait de demander que le gouvernement cherchât à encourager de tout son pouvoir ce contact si utile au dé- veloppement de la richesse du pays. M. de Vigneral ne connaît pas de meilleur moyen, de moyen plus profitable, que les conférences nomades; les conférences de ce genre, successivement établies par MM. Petit, Girardin, Bonnet, Morière , dans leurs dé- partements, ont eu les meilleurs résultats. Partout, l'essor a été remarquable. Comment se fait-il que, loin d’en- courager l’enseignement agricole , on lui ait créé des obstacles, dans quelques départements ; que les institu- teurs primaires , par exemple, aient reçu de leurs con- seils académiques l’ordre de cesser tout enseignement agricole, sous peine de destitution, c’est-à-dire sous peine de mort? Au moins devrait-on établir des confé- rences agricoles dans tous les départements. 80 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. M. de Montreuil admet que les conférences nomades soient provoquées par les comices agricoles et par les s0- ciétés d'agriculture , par les conseils généraux ;, lorsqu'ils en reconnaissent l'utilité ; mais ilne les veut pas impo- sées par le gouvernement; il ne‘ veut pas augmenter le nombre des fonctionnaires. Le Conseil académique dont a parlé M, de Vigneral a pu avoir ses raisons de ne vouloir pas dégoûter de l’agriculture des enfants qui lui sont destinés , en les forçant à l’appréndre comme le calcul, comme le catéchisme, M. de Vigneral regrette de dire que le département de l'Orne n’a pas tenu compte de l'offre qu’il: avait faite dans son Gomice de mettre la charrue fouilleuse à la dis- position de ses compatriotes. Personne n’a été tenté de s’en servir. Mais ce département à suivi sa voie dans les amendements par la chaux. Aujourd’hui, un seul ar- rondissement compte quarante-deux fours destinés à sa production. M. Calemard de Lafayette désirerait qu’on püût lui dire dans quelle proportion on répand cet amendement sur le sol, et dans quelles circonstances il est plus particu- lièrement employé. M. de Vigneral répond que, dans le département de l'Orne, on s’en est principalement servi dans les défriche- ments de bruyères. La ferme-école-du Sault-Gaultier , di- rigée par M. Louvel , a donné l'exemple , et cette ferme a eu un tel succès de pays, qu'il faut s’y faire inscrire trois années d'avance. pour y être admis. Dans le département de la Somme , l’abus a suivi la pratique , et il est devenu proverbial de dire que si la marne enrichit le père, elle ruine les enfants. Mais la charrue fouilleuse y a eu le plus grand succès dans les cultures de blé et de colza. 1] CONGRÈS DES ACADÉMIES: 81 a employé le plantoir Ledopt pour planter en quin- conce le colza, et il a pu faire ainsi une économie no- table sur la semence. Dans un département voisin, le Pas-de-Calais , M. Lhermite, mécanicien à Berlincourt, a eu la pensée d'adapter à la charrue ordinaire un ferre- ment qui défonce le sol en même temps que le labourage se fait; on pense voir cette modification nouvelle au prochain concours agricole. M. de Lanoue pense que, pour répondre à M. Calemard de Lafayette sur la quantité de calcaire à répandre sur un sol qu’on veut amender, il faut tenir grand compte de la division de cette matière. Une des premières conditions paraît de laisser sur la marnière deux ou trois années le calcaire qui en a été extrait. L’atmosphère le fait passer à l’état de carbonate, et le rend plus soluble par conséquent. Il y a peu de temps encore que nous ne faisions aucune aitention aux sels de soude et de potasse contenus dans ces calcaires, et qui nous ont été démontrés par MM. Kulmann et Beziers. C’est la potasse qui paraît donner au calcaire bleu de Tournai ses heureuses propriétes hy- drauliques , et ce qui rend l'addition des calcaires mé- langés de sels de soude et de potasse très-utiles, néces- saires même, sur les sols où l’on veut cultiver les plantes qui en contiennent beaucoup, comme le tabac, la betterave. M. Calemard de Lafayette dit qu’il résulte, suivant l’orateur précédent, que les analyses chimiques des vé- gétaux cultivés devrait précéder la science des amen- dements. Il regrette que MM. de Sussex et Gomart n'aient pu salisfaire à la mission donnée par une précé- dente session du Congrès, de rassembler ces RES et de les publier. 82 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Le Congrès s'occupe ensuite de la seconde partie de la question, celle de l'amélioration des terres par le drainage. Dans le département de l'Oise, selon M. de Montreuil, il y a eu une grande impulsion donnée par une compa- gnie puissante. M. Ch. Gomart dit que le drainage a été mis en pratique, pendant l’année 1854, sur une grande échelle, dans l’ar- rondissement de St.-Quentin. Sous les auspices du Co- mice, qui a introduit une machine à fabriquer les tuyaux de drainage , trois propriétaires de l’arrondissement de St.-Quentin : MM. Théry, de Grugis ; Dollé, de Giber- court ; du Chatelet, d'Hinacourt, ont drainé plus de 400 hectares, avec le secours d'ouvriers draineurs fournis par la Société agricole de drainage de l'Oise. Les résultats ont été remarquables. M. Quentin-Durand peut assurer qu’on révients au drai- nage par la perforation des couches de la terre. Les uns préfèrent de petites sondes de 35°. de diamètre, et lorsque le trou à travers la couche imperméable est opéré, on retire la sonde et on la remplace par une perche en bois, dont la présence suffit pour faciliter l’écoulement des eaux. Pour contenter ses pratiques, il fait construire six grosseurs de mèches. Un délégué du département de la Loire raconte les difficultés considérables dont il a fallu triompher , avant de pouvoir opérer le drainage dans la plaine du Forez, dont les étangs poissonneux sont pour les propriétaires une source importante de revenu. Il a fallu procéder au nom de l'intérêt public pour apporter cette amélioration non-seulement agricole, mais encore hygiénique , dans la contrée. CONGRÈS DES ACADÉMIES. 83 Le département de la Haute-Loire , dit M. Calemard de Lafayette, sous l'inspiration de M. de Brives, président de la Société d’agriculture , est entré dans la pratique du drainage. Les élèves de la ferme-école ont dirigé partout, avec succès , les travaux. M. Mabire rappelle les services rendus par les con- ducteurs des ponts-et-chaussées dans le département de la Seine-Inférieure. L’ingénieur en chef du département, animé des meilleurs sentiments, avait convoqué précé- demment et instruit tous ses subordonnés, qui ont pu répandre partout les bonnes méthodes de drainage. M. de Vigneral croit que le drainage rencontre encore des difficultés ; les tuyaux sont chers ; ils coûtent 27 fr. le mille; si on avait pu obtenir dans son département une subvention pour l’achat d’une machine propre à leur fabrication , ils eussent pu être livrés au prix de 15 fr., prix qui en eût rendu possible l'acquisition aux petits propriétaires qui couvrent le département, dont le sol est très-divisé. Une des difficultés du drainage consiste dans l’obstruc- tion des tuyaux. On a eu l’occasion d'observer qu'un de ceux-ci, destiné à l'écoulement d'eaux ferrugineuses, avait été bouché par une concrétion. M. de Morissure croit que la pénétration de l'air de- vrait surtout être évilée dans les drains que de telles eaux doivent parcourir. Les carbonates ferriques se for- ment, se déposent surtout par le contact de l’atmosphère. M. Calemard de Lafayetle croit qu’un obstacle à l’adop- tion du drainage , pour les prairies , se trouve dans l’opi- nion arrêtée chez les gens de la campagne, que les prai- ries n’ont jamais trop d’eau. M. Quenard, dans le département du Loiret, a drainé 8h INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. avec des tuiles creuses, préférables, selon lui, aux tuyaux. Pour prévenir l'introduction des racines dans les drains, il suffit de faire un fossé à distance des plantations des arbres de haute tige. Les arbres fruitiers, n’ayant pas leurs racines profondément enfoncées sous terre , ne pré- sentent pas les mêmes inconvénients. M. Mabire croit le drainage tout-à-fait inapplicable dans les terrains plantés, M. de Caumont explique la question 7°, posée en ces termes : « Par quels moyens mécaniques pourrait-on :« rendre productives les terres rocheuses un peu pro- « fondes? » Il voudrait que la mécanique, qui a fait tant de choses utiles, livrât à l’agriculteur un instrument contondant , propre à réduire en poudre des matériaux qui seraient très-fertiles ou fertilisants sans leur cohé- sion : ce sont les roches que la géologie range sous le nom de la grande oolithe. M. Destourbet applaudit à cette pensée de M. de Cau- mont. Dans la Côte-d'Or, on casse et on brise en poudre, pour les répandre sur les champs, des pierres qu’on en extrayait avec soin, pour les porter sur les routes, etc. Cette méthode a été très-profitable ; les cul- tures ont mieux réussi, les sainfoins y durent maintenant trois années. Ce département appartient au même étage géologique. M. de Vigneral , dans le département de l'Orne; où de telles roches se rencontrent, avait pensé que la charrue fouilleuse rendrait des services ; mais il fallait, tous les deux jours , la conduire à la forge et avoir à payer 6 fr. de frais; elle n’est donc applicable que lorsque le sous- sol est moins consistant, et M. de Vauquelin s’en est très-bien trouvé dans son application à son domaine. CONGRÈS DES ACADÉMIES. 85 La 8°, question : « Est-il vrai que les terres ancien- « nement cultivées perdent leur fertilité, etc.? » est mise en discussion. | M. de Montreuil ne connaît de terres anciennement cultivées, ayant perdu leur fertilité , que celles qui sont mal cultivées. La terre n’est pas une bourse où l’on puisse toujours prendre sans rien mettre. M. de Vigneral pense également que les cultures abu- sives, comme celles du blé, dans le Santerre, où on le récolte tous les deux ans, est propre à épuiser le sol, et on arrive à n’avoir que des céréales de médiocre qualité. Le poids du sac de blé, récolté dans cette contrée varie de 130 à 143 kilog.; dans l'Orne, le même sac pèse 455 et même 160 kilog. Il en est de même des avoines, qui ne sont nullement comparables, pour le poids et pour la qualité , aux avoines de Bretagne. M. Mabire préférerait une terre qui se serait reposée pendant neuf années à la terre la mieux cultivée. Souvent la jachère est le fumier qui coûte le meilleur marché, La Bretagne à de très-belles récoltes sur ses défrichements, et généralement on récolte, pendant trois années, de bonnes moissons sur les terres vierges. M. de Clocheville se range à l’avis de M. de Montreuil et il croit que la fertilité du sol s’accroît par la culture , si celle-ci est intelligente. Dans la Flandre, la même pièce de terre donne deux et même trois récoltes, quel- quefois même une quatrième. M. de Caumont rappelle qu’il avait posé cette question, pour savoir si des éléments absolument indispensables ne disparaissent pas du sol à la longue. Le Calvados, dans ces trois dernières années, a récolté pour 40,000,000 de colza, et le sol ne paraît pas en avoir été rendu 86 INSTITUT DES PROVYVINCES DE FRANCE. moins propre à cette culture. On lui rend, il est vrai, tout ce qu’on peut lui rendre des détritus de cette plante, tourteaux et tiges. Il croit devoir signaler cette coïnci- dence remarquable, que c’est dans les lieux qu'il avait reconnus comme ayant été le siége des habitations ro- maines qu’il a trouvé cette culture plus répandue. M. de Montreuil fait remarquer que. la question s’est beaucoup éloignée de son point de départ. On a dit que le repos de la terre était la meilleure condition pour des récoltes abondantes. Il ne peut admettre cette opinion ; ce qui lui paraît convenable, c’est de substituer une ré- colte à une autre, qui fournisse au sol les matériaux enlevés par la récolte précédente, et qui ne demande rien des matériaux enlevés. Il s’appuie sur l’exemple des cultures potagères. Il y trouve des exemples que l’agri- culture s’efforcera de plus en plus d’imiter par des ré- coltes variées et continues , lorsque la population plus nombreuse, plus instruite , le rendra possible. Il cite, sous ce rapport , le comté de Norfolk comme la contrée qui lui paraît la plus avancée, sous ce rapport. La terre y a été rendue fertile à une grande profondeur, elle s’y montre plus amoureuse, comme on dit dans le pays. M. de Lanoue ne croit pas qu’on puisse répondre à la question par une règle générale. Il y a des sols qui ne s’épuisent pas : le limon du Nil, celui qui couvre le nord de la France. Il y a des terres qui, dans d’autrés conditions, sont néanmoins d’une fertilité aussi remar- quable. Dans le Midi, il connaît une grande terre , pos- sédée par un de ses voisins, qui présenterait, suivant l’assertion de celui-ci, cette remarquable contradiction, qu'elle produirait moins quand on la fume; aussi le propriétaire se borne à un simple labour. Cette terre est CONGRÈS DES ACADÉMIES. 87 placée sur le sommet d’un côteau. La fertilité, d’ailleurs, n’a pas également été excitée partout par la même quan- tité de fumier : 1000 kilog. de fumier ne jouiront pas par- tout de la même puissance productrice. Cela tient évi- demment à la différence du sol. Mais lorsqu'on parle de la composition du sol, il faut bien s'entendre. Il faut donc savoir la composition minéralogique et la composi- tion chimique. Le Limousin a un sol où l’on trouve le ‘ calcaire, mais à l’état de silicate, par conséquent inso- luble ; les céréales y viennent mal et ne donnent au cul- tivateur que de maigres récoltes, Quoi qu’il en soit, pour rendre un service, nous savons qu'il faut y nourrir les végétaux qu’on veut y faire pousser et pour cela qu’il faut ajouter au sol la nourriture appropriée à ces végé- taux, des matériaux organiques dont les éléments se résolvent en eau, carbone, azote, l’acide carbonique , qui rendent les calcaires solubles. L’orateur développe ses opinions sur les améliorations chimiques dont le sol est susceptible. | M. de Vigneral a compris aussi la question en ce sens qu'il n’est pas vrai que les terres convenablement cultivées s’épuisent : il cite la terre de Gavrus, près Caen, dans laquelle il a vu faire trois récoltes suc- cessives de colza, dans lesquelles les produits se sont montrés de plus en plus beaux. Il connaît dans la paroisse de Vendeuvre (Somme ), telle parcelle de terre où l’on cultive constamment la betterave depuis trente-cinq ans. Le sol est calcaire , et la pauvre famille qui le cultive n’emploie pas d’autre engrais que celui des nombreux porcs qu’elle élève. Dans le même pays, M. de Renneville a établi ses récoltes d’après un système qui lui paraît très-avantageux; le blé ne revient que tous 88 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, les sept ans, sur la même pièce; il en conclut que, dans les terres calcaires , plus on éloigne les récoltes de cé- réales , plus on a de succès. M. Calemard de Lafayette, en entendant des hommes de valeur soutenir la jachère, dit qu’il faut admettre qu’il ya,en effet, des circonstances où elle peut être utile; mais lorsqu'on pourrait rendre chimiquement au sol les ma- tériaux qui lui manquent comme plus tard les légumi- neuses aspireront dans latmosphère certains principes qui lui sont indispensables , on se dispenserait de toute jachère; car on ne peut admettre que la terre ait des caprices. La culture potagère, invoquée par M. de Mon- treuil, prouve précisément la nécessité de rendre au sol les matériaux qui lui ont été enlevés , ceux qu’on fait par les engrais multiples, comme par les variations suc- cessives des cultures. Il a reconnu aussi que les lieux où l’on trouve des traces des habitations romaines ont les terres d’une fertilité remarquable. Donc , la terre ne s’épuise pas par la prolongation des cultures. Les pluies rendent, en partie, au sol les matériaux azotés enlevés par les récoltes , comme Font prouvé les observations de M. Barral. M. le général Rémond est frappé de tout ce qu'il entend. Il lui semble qu'au fond tout le monde est d'accord. La terre retrouve sa fertilité par l’action de l'atmosphère, par les engrais ; maïs il faut varier les as- solements. Tel est le résultat de toutes les opinions. M. Mabire objecte à ceux qui lui disent qu’en Flandre on a de. belles récoltes sans jachère, qu'on en aurait probablement de plus belles avec la jachère d’une année, après une période de septou huit ans, Il regarde cette pratique comme excellente. 11 n’admet pas d’assolement CONGRÈS DES ACADÉMIES. 89 déterminé ; seulement on peut dire : avec les prairies artificielles , il est indispensable de nettoyer le sol par des cultures sarclées. Quand la terre vierge est bonne, elle est préférable sans doute; mais il faut qu'elle soit bonne , autrement il préférerait une terre qui aurait été cultivée ; en résumé, il croit la jachère bonne pour cer- taines terres. M. Destourbet croit que la fertilité de la terre est en raison directe de la prolongation de sa culture, si elle a été bien conduite. ; M. Quenard fait observer que ses expériences l'ont conduit à regarder l'excès du marnage comme nuisible aux céréales. Les prairies artificielles corrigent ce défaut. Les engrais animaux sont tout-à-fait indispensables ; ils rendent au sol les phosphates dont la présence est in- dispensable à la culture du blé. La séance est levée à midi et demi. Le Secrétaire, CH. DE BOUIS. SÉANCE GÉNÉRALE DU JEUDI 22 V'ARS. ( Présidence de M. PAYEN. ) Sont appelés à siéger au bureau : MM. le docteur Mes- lier, délégué de la Société de Statistique de Marseille ; Camille de Beaulny, président du Comice de Rouen; Millard, ancien député, délégué de la Société d’agricul- ture, sciences et arts de l’Aube ; le colonel Répécaud, délégué de l'académie d’Arras ; le général Rémond , 90 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. délégué de Seine-et-Oise; Destourbet , président du Co- mice agricole de la Côte-d'Or. Le procès-verbal de la séance générale du 21 mars est lu et adopté. M. Payen continue d’exposer les progrès de la chimie, dans son application à l’agriculture, durant l’année 1854. Il cite l'introduction en France du procédé Shutzemback pour l'extraction du jus de la betterave , à l’aide du lavage de la pulpe à froid , procédé mis en usage depuis cinq mois, chez M. Périer, à Flavy-le-Martel ( Aisne ). Ordinairement, dit-il, les betteraves, divisées en pul- pes par la râpe , sont soumises à une presse hydraulique, pour en extraire le jus. Sous l'influence de cette pression assez forte, puisqu'elle représente un poids de 500 mille à 900 mille kilog., agissant sur la surface d’un piston de 25 à 30 centimètres de diamètre, on retire environ 80 pour ‘%, de jus, maximum des produits obtenus. M. Pelletan avait, il y a quelques années, inventé un procédé très-ingénieux d'extraire le jus de la bette- rave de la pulpe , au moyen de lévigation. Le lévigateur- Pelletan, qui est encore au Conservatoire, se compose : d’une série d’auges, placées en étages, et dans chacune desquelles se trouvait une vis sans fin pour faire remonter la pulpe d’un vase dans un autre, tandis que le jus descen- dait d’une auge dans une autre. Ce procédé, d’une théorie irréprochable, a donné d’abord les meilleurs résultats dans la pratique, puisqu'on obtenait des jus plus purs que par l’ancien procédé, au moyen d’une addition de 20 pour ‘7, d’eau; mais au bout d’une semaine, il n’a plus fourni que des résultats très-défavorables. En effet, dans cet appareil continu, on a remarqué un grave incon- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 94 vénient, qui provenait de l'impossibilité où l’on était d'empêcher qu’une petite quantité de pulpe ne séjournât au fond du lavoir. Or, cette pulpe, au bout d’un certain temps de séjour, formait un levain, un ferment, qui, agissant sur le jus, transformait le sucre en un produit sans valeur. En 1853, M. Shutzemback a rendu manufacturier le procédé du lavage à froid de la pulpe. Voici en quoi consistent les innovations qu’il a introduites : il dispose en étages dix vases cylindriques , à deux fonds , séparés par une toile métallique percée de rainures circulaires, Chacun de ces vases est muni d’un agitateur mu par la vapeur. L’eau arrive dans le vase supérieur et, après avoir lavé la pulpe qui s’y trouve, descend dans le double fond, d’où elle est conduite, à l’aide d’un tube siphon , dans la parlie supérieure d’un second vase, dans lequel se trouve également de la pulpe à laver ; du second vase, l’eau, déjà chargée de sucre , passe par les mêmes moyens dans un troisième vase ; elle lave ainsi successivement la pulpe contenue dans les dix vases. L'eau s’est alors chargée des principes sucrés contenus dans les cellules saccarifères de la pulpe déchirée, et elle se trouve transformée en un jus parfaitement pur et bon pour être envoyé à la chau- dière. La pulpe, sur laquelle l’eau pure a été jetée, étant complètement épuisée, est retirée du vase et égouttée, au moyen d’une presse, pour être donnée aux animaux. Le vase , après avoir été bien nettoyé et rincé à l’eau claire, est rechargé de nouvelles pulpes sortant de la râpe, et, de premier qu’il était, il devient dixième, c’est-à-dire celui dans lequel le jus des neuf autres arri- vera, avant d'aller à la chaudière. On comprend ainsi que l'inconvénient signalé dans le 92 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. lévigateur-Pelletan ne peut avoir lieu et qu'aucun fer- ment n’a le temps de se développer. Ce procédé , mis en usage depuis cinq mois, chez M. A. Périer , à Flavy-le- Martel (Aisne ), est très-remarquable et a donné d’ex- cellents résultats, puisqu'il a obtenu plus de sucre que par les moyens ordinaires et des produits magnifiques. En ajoutant environ 10 %, d’eau, on extrait la totalité du jus contenu dans la pulpe , c’est-à-dire 98 kilog. de jus pour 400 kilog. de betteraves, tandis que par l’ancien procédé on ne retirait que 70 à 80 kilog. de jus pour 100 kilog. de betteraves. Ce procédé a été adopté également par MM. Baillet et Gouvion-Deroy, de Denain, pour la fabrication de l’alcool avec le jus de la betterave , et il a donné également les meilleurs résultats. M. Gomart demande à M. Payen s’il croit que la pulpe lavée soit aussi nutritive, pour le bétail que la pulpe pressée , et si l’addition de 40 ‘7, d’eau au jus de la bette- rave ne doit pas nécessiter une plus grande dépense de combustible pour l’évaporation. M. Payen répond que la pulpe lavée contient à peu près les mêmes substances nutritives que la pulpe pressée, la différence n’est pas aussi grande que quelques personnes se l’imaginent. En effet, les résidus ont con- servé toutes les matières azotées insolubles et n’ont plus les sels solubles qui avaient l’inconvénient de rendre la nourriture purgative. 11 cite des lettres de MM. Baillet et Gouvion , qui préfèrent la pulpe lavée à la pulpe pressée dans l’alimentation du bétail. Quant à la dépense nécessitée par l’évaporation des 10 °, d’eau ajoutés au jus de la betterave, elle est insi- gnifiante, si l’on compare la quantité de charbon employée cette année et l’année passée, chez M. Périer , pour éva- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 93 porer le même poids de betteraves ràpées; car un peu d’eau était également nécessaire pour l’extraction du jus avec la presse hydraulique. M. Maurenq demande si le principe sucré encore con- tenu dans la betterave pressée n’est pas favorable à la nourriture des bestiaux, M. Payen répond que le sucre joue dans l’alimentation le rôle de l’'amidon, qu’il fournit la chaleur , mais que ce sont les substances azotées qui sont la base de la nourri- ture ; que la pulpe pressée qui n’est donnée au bétail qu'après avoir été mise en silos , ne contient plus alors beaucoup de sucre, et qu’elle est donnée aux animaux avec d’autres aliments. M. Payen passe ensuite à l’examen de la 9°, question, ainsi formulée : « Quelles données nouvelles a-t-on ac- quises sur la valeur relative des engrais? » Les données nouvelles acquises en 4854, dit-il, con- firment les expériences faites précédemment. Cependant il signale un fait capital, c’est que l'Angleterre et la France sont aujourd’hui d'accord sur la théorie des engrais. La théorie primitivement adoptée en Angleterre consistait à croire que les plantes pouvaient puiser dans l'air les composés azotés utiles à la nutrition des plantes, de façon qu’il suffisait de mettre des substances minérales sur les terres. En France, au contraire, on considérait que les matières azotées jouaient un grand rôle dans la nutrition des plantes, et qu’il était nécessaire de répandre sur le sol des engrais minéraux pulvérulents, Les choses en étaient là, lorsqu’en 1849, un grand agriculteur anglais , M, Laws de Rothamstedt , établit un laboratoire magnifique, dans lequel il fit brûler jusqu’à quarante voitures de fumier , des bœufs, des moutons 94 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. entiers , afin de trouver la moyenne de la composition de ces corps et d'analyser les cendres obtenues de la com- bustion , soit des animaux, soit des végétaux. Puis il fit en grand des expériences comparatives entre du noir- animal , du fumier de ferme ou tout autre engrais, et les cendres,produits de la combustion. A la suite de ces expé- riences , il a été constaté complètement que les cendres seules donnaient moins de produits que les matières ani- males mélangées avec des matières organiques ; les cen- dres n'avaient donc pas remplacé les matières organiques. Aujourd’hui, par suite de ces faits parfaitement constatés, on est d'accord , des deux côtés du détroit, que les ma- tières organiques les plus riches en azote , telles que les déjections animales , la chair musculaire , sont plus pro- ductives que les matières accessoires minérales qui en- trent dans la composition des végétaux, on est d’accord également que les composés les plus utiles à l’agriculture sont les matières riches en azote , avec les phosphates : quand on donne à la terre assez de ces deux genres de matières, tout le reste s’y trouve en général surabondant. Aujourd’hui, en Angleterre, on n’achète que des engrais qui ont pour base les azotes et les phosphates; en agis- sant différemment , on n’a éprouvé que des déceptions. Les engrais sont maintenant analysés presque partout en Angleterre ; dans les centres agricoles, les fermiers se sont associés pour créer un laboratoire, fixer le prix des analyses qui ne reviennent pas à plus de 2 ou 3 shellings. On obtient ainsi, à peu de frais, des garanties pour un marché considérable. M. Payen termine cette intéressante communication, en signalant ce grand progrès survenu en 1854, par l'accord entre la théorie et la pratique. M. de Caumont, à propos de la 40°. question du CONGRÈS DES ACADÉMIES. 95 programme, ainsi conçue : « Les engrais pulvérulents « peuvent-ils complètement remplacer les fumiers dans « les cultures ? Le système qui consisterait à employer « presque exclusivement lesengrais pulvérulents offre-t-il « de grands avantages ? » , signale ce qui se passe en Normandie , où , depuis deux ans, quelques cultivateurs se sont débarrassés de leur bétail et ont substitué, au fumier, des engrais pulvérulents. Cet état de choses a soulevé les inquiétudes des propriétaires, et il demande l'avis de M. Payen sur cette innovation. M. Payen ne voit que le guano qui pourrait remplacer le fumier; les fermiers de la Normandie ont-ils le moyen de se procurer du guano en quantité suffisante? Il ne croit ce système praticable que dans des cas exceptionnels et au moyen de contrôle et d’analyse qui donneraient, d’une manière sûre, la valeur des engrais pulvérulents employés. Supposez, ajoute-t-il, emploi du sang des- séché , avec addition de sels ammoniacaux , sulfate d’am- moniaque, on aura, pendant un certain nombre d’années, dix années par exemple, dix belles récoltes; mais il arrivera après que toutes les matières minérales que ne contient pas le sang auront été enlevées au sol, celui-ci ne donnera plus que de mauvaises récoltes, les frais ne seront plus couverts, et la terre ruinée. Il regarde donc l'innovation pratiquée par les fermiers de la Normandie comme une mauvaise méthode. M. le général Rémond demande à M. Payen si les progrès de la chimie sont arrivés à pouvoir utiliser faci- lement les matières fécales des grandes villes. M. Payen répond que le système de solidifier les engrais dont il était question , il y a deux ans, paraît être aban- donné, parce que les frais de transport nécessités par 96 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. l'augmentation du poids se trouvaient hors de proportion avec la valeur de la matière. La question paraît prendre aujourd’hui une autre tournure , c’est de répandre la matière rendue liquide par des procédés économiques , comme l’a pratiqué M. Kennedy. Le problème lui semble possible à résoudre: Il cite le transport des vidanges, opéré actuellement à Paris, par les: procédés de M. Ma- rie , ingénieur , avec des tubes souterrains de 25 à 30°. intérieurement , qui conduisent ainsi les vidanges, à raison de 3 centimes par mètre cube de matière , qui représente 10 hectolitres.: Si on apppliquait ce procédé au transport des déjections des‘ grandes villes, on pour- rait conduire les eaux dans des réservoirs établis dans des vallées, à une certaine distance du centre de popu- lation, où ces eaux seraient rendues aux rivières , après qu’on aurait utilisé la plus grande partie des sels con- tenus dans les liquides. Cette méthode est la seule voie dans laquelle on puisse s'engager , et ce serait le seul procédé qui rendrait applicables les produits des vi- danges de Paris. Les liquides pourraient être employés, avec. avantages , à développer la fertilité du sol, et les maiières de vidanges contiennent des matières minérales azotées, nécessaires à l’agriculture , qui rapporteraient dix fois le prix coûtant. M. Calemard de Lafayette dit que ces grands projets ne sont applicables qu’à Paris, ou dans quelques grandes villes, et seulement pour de grands établissements agri- coles ; il voudrait qu’on indiquât , pour la petite culture , des moyens, même défectueux ou incomplets , d'utiliser les engrais humains, qui sont perdus le plus souvent. M. Payen pense qu’on pourrait employer, dans beaucoup de cas, des moyens analogues à ceux qu’il vient d'indiquer. CONGRÈS DES ACADÉMIES. 97 Il y aurait cependant une méthode plus générale qui consisterait à enlever à la matière cette odeur tellement rebutante qu’on éprouve de la répugnance à vider une fosse. Dans la Flandre, on ne prend pas cette peine, et les matières sont directement répandues sur le sol ; aussi elles exhalent des gaz infects à l'entour du champ où elles sont répandues. C’est une méthode qu’il ne conseille pas, mais il préférerait de beaucoup qu’on enlevât à la matière son odeur repoussante , en la mélangeant avec de la terre desséchée et carbonisée par ‘le procédé de l’écobuage. C’est là un excellent agent, désinfectant à peu près com- plètement les matières fécales, et qui produit des résultats très-remarquables. En résumé, trois procédés peuvent être employés pour l’utilisation des matières fécales : 1°. l'irrigation ; 2°. le procédé flamand ; 3°. la désinfection par des terres carbonisées. M. de Vigneral demande quelques renseignements sur l'emploi du sulfate de fer. M. Payen répond que le sulfate de fer désinfecte les matières temporairement , mais non pas aussi complète- ment que la terre carbonisée ; il conseille 5 de sulfate de fer , en dissolution saturée , pour 100 de matières fécales. M. Calemard de Lafayette demande si le plâtre ne pourrait pas être employé avec avantage. M. Payen répond que le plâtre est un agent qu'on pourrait employer, si le prix n’était pas un obstacle, le plâtre employé généralement étant du plâtre cuit, le seul qui puisse se diviser facilement en poudre. C'est un agent désinfectant , qui agit en décomposant le carbo- nate d’ammoniaque; il est parfait et d’un grand effet sur les prairies artificielles, répandu Pa la rosée à raison d’un hectolitre à l’hectare. Lu 5 98 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. M. Destourbet dit. qu’on a remarqué, dans le dépar- tement de la Côte-d'Or, que le plâtre répandu sur les prairies artificielles nuit essentiellement à la culture de la vigne. M. Payen répond que c’est possible, et qu’il faudrait tenir compte de la quantité de. plâtre employée. M. de Vigneral demande à M. Payen s’il conseillerait Farrosage de l’acide sulfurique étendu d’eau dans les terrains calcaires argileux. ‘ M. Payen croit que ce serait une assez mauvaise mé- thode; il faudrait, dans tous les cas, que l’acide sulfu- rique fût très-étendu d’eau, et répandu en l’absence de toute végétation. Il conseille d'étendre l’acide dans 4 ou 500 parties d’eau. A la suite de ces communications si. intéressantes, M. Payen se retire au milieu des témoignages unanimes de gratitude de l’Assemblée, La séance est suspendue un quart d'heure. 29°, SÉANCE DU 22 MARS. (Présidence Ge M. le comte De Maïzzy, ancien pair de France, délégué de la Sarthe). A la reprise de la séance, l'Assemblée est présidée par M. le comte de Mailly. Sont appelés à siéger au bureau: MM. Geoffroy de Saint-Hilaire ; Guérin-Méneville; le comte de Montlaur, délégué de la Société d’émulation de l’Allier ; le comte de Pontgibaud ; Porriquet, de l'Orne. Il s’agit de la 17°. question ainsi conçue : « A-t-on obtenu par l’acclimatation, en 1854, des CONGRÈS DES ACADÉMIES 99 « résultats importants dans le règne animal ou dans le « règne végétal? » M. Geoffroy de Saint-Hilaire , dans une brillante im- provisation , passe en revue tout ce qui a été fait, en 4854, pour l'introduction ou l’acclimatation de végétaux nouveaux ou d'animaux domestiques, les plus précieuses conquêtes de l’homme. Parmi les végétaux, il signale l'introduction du sorgho, du pois oléagineux, et de l’'igname de la Chine. Les essais de culture du sorgho, pratiqués en grand à Toulon , sous les auspices du Comice , ont parfaitement réussi. Cette plante, qui ren- ferme du sucre cristallisable , peut encore être utilisée pour la teinture, et ses feuilles peuvent servir à la fa- brication du papier. L’igname de la Chine , Dioscorea-Batatas , cultivé avec succès par M. Decaisne , au Jardin-des-Plantes , doit constituer une révolution en agriculture; car le travail de M. Frémy vient de signaler un fait important, c'est la présence d’un principe azoté dans l’igname, ce qui tendrait à placer ce tubercule bien au-dessus de la pomme de terre. | M. Geoffroy signale au Congrès les divers envois faits par M. de Montigny, consul de France, véritable trésor pour le règne animal, Dans la classe des mammifères, un animal très-rare , provenant de l’extrême Orient, a été introduit, c'est l'yack, ou bœuf à queue de cheval. Avant l’envoi de M. de Montigny , il n’y avait en Europe qu’un seul ani- mal de cette classe, dans la ménagerie de lord Derby, en Angleterre. M. de Montigny, en Chine, n’a reculé devant aucune difficulté pour se procurer ce précieux animal , et après cinq ans, il est arrivé en France , de 400 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. la région la plus éloignée de la Tartarie, un troupeau de 42 yacks de trois variétés différentes: la première semblable à celle de lord Derby ; — la seconde blanche, sans cornes ; — la troisième noire, sans cornes. L’yack a été le sujet d’un travail de M. Duvernoy, et il résulte de ses observations que cet animal peut être auxiliaire , alimentaire et industriel. Comme auxiliaire, il a la eroupe du cheval, mais elle est plus musclée et disposée de manière à procurer une grande agilité, comme monture légère. La taille de l’yack est petite, mais elle pourra être développée. Comme alimentaire , la chair de lyack est très- bonne, et il fournit du lait , qui en qualité ne le cède en rien au lait de la vache, puisqu'il contient plus de sucre et de beurre. Si le lait est moins abondant chez l'yack que chez la vache , sa production pourra être développée par une bonne culture. Comme industriel, il fournit trois produits , sans parler de son cuir et de ses os : 4°. Il porte une toison des plus intenses , pour le mettre à l’abri des froids, toison de longs poils qu’on pourrait comparer aux poils des chèvres orientales, 2°. 11 fournit un second produit plus précieux: le erin de sa queue, qui tient le milieu entre. le crin et la laine et qui est, en Orient, l’objet d’un commerce très- important. 3, Enfin, un poil-duvet se développe sur sa peau, seulement pendant l'hiver, sous l’influence des froids intenses, et ce produit a la qualité du duvet des chèvres de Cachemire, Le troupeau d’yacks introduit en France devra être placé dans les régions abruptes des Alpes ou des Pyré- CONGRÈS DES ACADÉMIES. A0 nées. Quel sera son avenir ? M. Geoffroy pense que ces animaux vivront parfaitement en Europe, Quel rôle joue- ront-ils dans l’industrie ? Ceci est plus difficile à déter- miner , et l'expérience seule pourra prononcer sur cette question. Il a encore été introduit en France, pendant l’an- née 1854, des parties les plus élevées de l’Asie-Mineure , des chèvres d’Angora , revêtues d’une laine très-fine et soyeuse, qui à un caractère particulier. On sait que la culture de la chèvre est abandonnée dans certains pays où elle ne présente pas d'avantages, tandis qu’elle s’ést maintenue dans les pays montagneux où elle est d’une utilité extrême; il y aurait donc avantage à substituer , dans ces pays, aux chèvres ordinaires, des chèvres de choix et qui donneraient , en plus de leur produit ordi- naire , une toison très-précieuse. Après la fondation de la Société zoologique d’accli- matation, en février 1854, M. Sax a pensé que les cir- constances de la guerre en Orient pourraient être l’occa- sion d’un progrès pour l’agriculture par l’introduetion en France des chèvres d’Angora. Des commissions d'achat ont été en effet transmises en Orient, et l’émir Abd-el- Kader s’est empressé, dans cette occasion , d’être utile à la France en achetant un petit troupeau de chèvres d’An- gora dont il a fait don au ministre de la guerre. Aujour- d’hui la moitié de ce troupeau est placé dans les montagnes de l'Isère, et l’autre moitié va être envoyée à M. Sax dans les Vosges. Des échantillons de tissus les plus magnifiques fabriqués en Angleterre, avec les poils des chèvres d’Angora, montreront à la prochaine exposition tout le parti qu’on peut tirer de leur toison. Déjà, l'Espagne est dotée de 192 INSTITUT DES: PROVINCES DE FRANCE. deux à trois troupeaux de chèvres d’Angora qui sont dans le meilleur état, et M. Geoffroy ne doute pas de leur acclimatation en France. M, Geoffroy donne encore quelques détails fort inté- ressants sur plusieurs autres animaux, en voie d’accli- matation : |. Ab 7109118 L’agouti, quadrupède du Brésil, de la famille des rongeurs. Cet animal dont la chairest excellente, a déjà multiplié chez M. Chenu; L’hémione, intermédiaire entre le cheval et l’âne, introduit en France, .en 1835. Le jardin des plantes pos- sède aujourd’hui un certain nombre de ces individus tous élevés à la ménagerie, comme des poulains dans une ferme ; Le lama et l’alpaka, animaux. prisen Angleterre il ya dix ans, vivant parfaitement à la ménagerie, sans avoir besoin d'aucun soin particulier, quoique placés dans des circonstances peu favorables, puisqu'ils ont été élevés dans des parcs sans herbes, constamment entourés du public. Ce sont des animaux très-robustes, puisque, depuis dix ans, on n’en a perdu que deux, dont un par accident. M. Geoffroy de Saint-Hilaire passe ensuite en revue les oiseaux qui ont présenté des faits certains. Il cite, dans les oiseaux d'agrément, la perruche ondulée qui reproduit comme leserin. Un fait curieux s'est présenté pendant l'incubation ; les œufs pondus successivement sont éclos successivement aussi , et le premier petit, sorti de l’œuf, est venu aider sa mère dans l’incubation ; L’oie d'Égypte; le canard de la Chine, nommé aussi canard mandarin ou canard éventail. Cet oiseau , autrefois très-rare, puisqu'on en payait une paire 4,000 fr. , a beaucoup diminué depuis que la Chine est ouverte ;; CONGRÈS DES ACADÉMIES, _403 Le cañnard de la Caroline , espèce américaine, oiseau qui se multiplie parfaitement bien ; Le cygne noir qui vient de la ra animal tellement robuste qu’il peut reproduire en toute saison. C’est là un magnifique oiseau dont la conquête nous est acquise dans un espace ‘de temps peu éloigné. Dans le groupe des gallinacées, M. Geoffroy cite le colin, inter- médiaire entre la caille et la perdrix ; oiseau d’une fécon- dité extraordinaireet qui sera fort recherchédeschasseurs, puisque M. Saunier a obtenu, année passée, jusqu'à 54 petits d’une seule femelle. M. Geoffroy de Saint-Hilaire , laissant de côté la classe des poissons , sujet qu’il laisse à traiter à M. Coste et à M. Millet, signale les espèces de vers à soie au mombre de six, qui ont été introduites en France, depuis quel- que temps, et dont plusieurs se nourrissent de plantes que nous avons dans le pays, savoir: 2 espèces de la la Chine,— 2 de la Louisiane, — 1 de la république de l'Équateur et 4 du Sénégal. Ces espèces , qu’il passe en revue , paraissent présenter de grands avantages pour l'industrie. Le savant orateur est convaincu que, dans cinquante ans, on sera aussi étonné d'apprendre que la France ne possédait, en 1853, qu'une seule espèce de vers à soie, que si on nous disait aujourd’hui que nos pères, il y a cinquante ans , ne connaissaient qu’un seul mammifère. M. Geoffroy termine ainsi ces curieux détails, trop courts au désir de l’Assemblée : Nous sommes riches comparativement à nos pères, mais nous ne sommes pas véritablement riches relative- ment à d’autres peuples. Le peuple français est-il bien nourri, bien vêtu? je ne le crois pas. On sait qu’il y a 104 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. des millions de Français qui ne mangent point de viande ou qui en mangent très-peu. — Les habits de nos ou- vriers sont faits contre toutes les règles de l'hygiène; ils pèchent par la solidité et ne peuvent conserver la cou- leur. Les Chinois, que nous traitons de barbares, sont habillés de soie, jusque dans les classes les plus basses. Que les hommes de progrès réfléchissent sur ces points où il y a tant à faire. Notre but est d'augmenter le nom- bre de nos animaux domestiques pour accroître les res- sources alimentaires , et de créer des produits industriels précieux pour la société. Cette brillante improvisation , écoutée avec un reli- gieux silence , est accueillie par d’unanimes applaudis- sements, | Sur la proposition de M. de Caumont, l’Assemblée décide que, demain vendredi, la section d'agriculture tiendra sa séance à dix heures du matin. Les rapports des délégués sur les travaux des Sociétés de la province seront entendus à midi , et la section des beaux-arts tiendra sa séance à deux heures ; elle sera suivie de la séance générale, L'Un des Secrétaires généraux , Ch. GOMART. CONGRÈS DES ACADÉMIES. 406 SECTION D'HISTOIRE NATURELLE, AGRICUL- TURE ET INDUSTRIE. SÉANCE DU 23 MARS. (Présidence de M. le comte pe VIGNERAL, ) La séance est ouverte à 41 heures. Siégent au bureau : MM. de Vigneral, président ; de Caumont ; de Cussy ; de Clocheville; Mosselman; Mabire; de Lanoue , et G. de Lorière, secrétaire. La discussion est ouverte sur la 4°. question, ainsi formulée : | « Les richesses métallurgiques de la France sont-elles « partout connues? Quelles recherches pourrait-on en- « treprendre encore avec chances de succès dans nos « différentes formations géologiques ? » M. Mosselman pense que la France a beaucoup de gi- sements à exploiter : l'esprit industriel n’existe chez nous que depuis peu de temps; on est timide encore pour toutes les entreprises qui nécessitent des avances, et l’exploita- tion des métaux, qui offre toujours de l’incertitude quant aux résultats, a peut-être moins que les autres entreprises excité l'attention des capitalistes. M, Mosselman, qui a déjà, par sa volonté ferme et son esprit d'initiative, doté le pays, notamment le département de la Manche, de plu- sieurs établissements d’une grande importance, n'avait pas vules rapports qu'offre le département de la Manche avec le pays de Cornouailles sans s'étonner qu'onn'’eüût pas fait plus 106 INSTITUT DES: PROVINCES DE. FRANCE. d’explorations sérieuses pour y découvrir des métaux; il exploite en grand les calcaires marbres pour en faire de la chaux, à La Maulfe, près de St.-Lo, et là il a décou- vert un filon de cuivre et de plomb qui donne de belles espérances. Il a fait venir des ingénieurs allemands pour explorer les environs, et des travaux d'exploitation se- ront entrepris et. dirigés régulièrement. avec la mise de fonds nécessaire. L'ancienne mine de cinabre exploitée momentanément à: la Chapelle:-en-Juger pourra aussi donner lieu à des résultats meilleurs que lors de sa pre- mière entreprise, car. on manquait d'argent pour exploiter convenablement. Enfin M. Mosselman ne reculera pas devant les obstacles, pour utiliser les matières diverses que renferme le département de la Manche. M. de Caumont, qui a esquissé la carte géologique de la Manche et qui connaît mieux que personne toute cette partie de la Normandie , répond à M. Mosselman , que de nombreuses tentatives ont été faites pour doter cette partie de la Normandie d’un second Cornouailles, mais que les recherches ont toujours dû s'arrêter devant les dépenses nécessaires pour le foncement des puits, com- parées à la petite quantité de matières extraites. La présence du minerai n’est point une question, elle a été reconnue par les savants les plus distingués : MM. Du- hamel, d’Omalius, Brongniart, Cordier, ete. Ge qui manque , c’est, il est vrai, des capitaux en quantité suffisante pour rendre une exploitation profitable. Avant 1800 , trente-six tentatives d'exploitations de divers mi- nerais ou de houille ont été constatées, tandis que depuis c'est à peine si on cite quelques travaux faits dans ce but. Faut-il en déduire que la science ne s’occupe plus de faire des recherches. Nous ne le pensons pas. La science CONGRÈS DES ACADÉMIES: | 407 plus éclairée, sans faire ces excavations profondes que, là où l’on trouvait quelque indice on faisait toujours an- ciennement, la science aujourd’hui peut avec une grande probabililé dire si dans une recherché de minerais on peut espérer quelque chance de succès à l'aspect seul d’un pays. L’honorable orateur fait remarquer qu’il est loin de vouloir décourager, dans la recherche des substances minérales, les personnes qui veulent bien y consacrer leur temps , leur science et leurs capitaux. On doit sur- tout les plus grands éloges à M. Mosselman qui, avec un désintéressement incontestable et des mises de fonds considérables, veut approfondir des questions qui inté- réssent vivement le département de la Manche. Des mi- nerais de plomb, semblables à ceux dont vient de parler M. Mosselman, ont été découverts dans les marbres de Carteret et de Surtainville. Des échantillons peuvent s’en voir encore dans quelques cabinets. Ces minerais étaient associés comme ceux dont vient de parler M. Mosselman, soit à des spaths calcaires , soit à des sulfates de baryte. M. de Caumont signale aussi comme ne devant point être oubliés dans l’énumération des gîtes métallifères, ces bancs puissants de minerais de fer que l’on trouve, dans le département de la Manche, associés au grès schisteux intermédaire , et qui, maintenant surtout que l’industrie des fers à pris une si grande extension, pour- raient être l’objet d’exploitations importantes. On les ex- ploite déjà depuis quelque temps à mer basse près de Carteret. Il rappelle aussi les tentatives qui ont été faites pour employer, comme couverte de poterie, les roches très-feldspathiqués , probablement des diorites , qui se trouvent nôn loin de St.-Sauveur-le-Vicomte. 108 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. M. de Lanoue présente quelques observations au sujet de la communication de M. Mosselman, M. Mabire fait remarquer qu'il devait exister ancien- nement, dans tout le département de la Manche, de nombreuses usines à fer, On voit encore, dans beaucoup de localités dont le nom même rappelle celui de l’exploi- tation qui a été l’origine du village, de nombreux amas de scories. Jadis, quand le combustible se prenait sur les lieux mêmes , au sein des forêts, il était possible d'utiliser des minerais dont le transport ne peut avoir lieu sans des frais énormes. M. Mosselman dit qu'en effet il y a eu. un grand nombre de tentatives de faites, pour utiliser les diffé- rents minerais et surtout les minerais de fer qui existent dans le département; mais il croit que, si toujours les essais ont été infructueux, c’est qu’ils ont été entrepris sans capitaux, sans données que peut fournir la science , sans industrie. Il ne se dissimule pas que, peut-être aussi quelquefois, le prix exorbitant du transport a dû arrêter plusieurs fois l'extraction des minerais. Maintenant il n’en saurait être de même. On a partout des moyens de trans- port qui anciennement n’existaient pas. M. de Caumont croit devoir appeler tout spécialement l'attention de M. Mosselman, dans ses recherches de minerais, sur le point important de savoir s’il ne serait pas possible de trouver des couches de gypse dans les marnes irisées du trias. Ce serait une précieuse décou- verte pour les arts et l’agriculture, car, dans toute cette partie de la Normandie, on ne peut se procurer de plâtre qu’à des prix très-élevés. M. de Lanoue insiste sur ce que vient de dire M. de Caumont, et ajoute qu’il serait assez extraordinaire qu'il CONGRÈS DES ACADÉMIES. 4109 ne se trouvât pas quelques lambeaux de plâtre dans le trias, quand on en rencontre dans le même bassin, dans l’est de la France, en Belgique et en Angleterre. M. de Lanoue prend ensuite la parole pour présenter quelques considérations sur la fertilité de la terre, Nous connaissons, à peu près, dit-il, l'influence de l’eau et de l’atmosphère sur la végétation. Nous commençons à savoir que la petite quantité de nitrogène (1) nécessaire aux plantes leur arrive, soit à l’état de dissolution, soit à l'état de carbonate ammoniac gazeux. Nous avons appris récemment que l’énorme quantité de carbone nécessaire à leur constitution provient non-seulement de quelques dix-millièmes d'acide carbonique répandus dans l'atmosphère, mais aussi des deux à trois centièmes contenus dans toutes les eaux (2) et surtout de cette source incessante de gaz que les engrais fournissent au sol arable (3), en s’oxydant au contact de l’airet de l’eau pluviale, Mais , ce que nous ignorons à peu près complètement c'est le rôle considérable que jouent les substances miné- rales dans l’acte de la végétation. Nous voyons l'habitat de certaines espèces végétales déterminé par la présence dans le sol de telle ou telle substance minérale; telle (4) Plutôt que d'adopter le nom d'azote, j'aimerais encore mieux celui plus laconique et plus expressif de zote , puisque c’est le corps qui constitue les organes les plus vitaux et les substances les plus animalisées, (2) Mémoire de M. Péligot à l’Académie des Sciences en mai 4855. | (3) Travaux de M. Boussingault, 410 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. plante a besoin de soufre, telle autre de calcaire, ou de soude , ou de potasse, Enfin, et c'est là un fait qui se rattache aux plus hautes questions de physiologie, nulle semence végé- tale ou animale n’a encore été trouvée dépourvue de phosphore. Ce corps paraît indispensable à la fonction la plus nécessaire et la plus mystérieuse de la nature, à la repro- duction des êtres (1). Les graines et surtout les céréales n'empruntent guère au sol que des phosphates (2). Il devient donc extrêmement important pour l’agronome de savoir si le sol ou les engrais en fournissent assez à se cultures, 309 On se contentait naguère de doser les engrais sous le rapport de l'azote; désormais, on tiendra compte aussi des phosphates, Les engrais qui contiennent ces deux substances à hautes doses (le guano, les tourteaux, etc.), possèdent une puissance fertilisante qui justifie suffisam- ment cette assertion. Il faudrait cependant bien se garder d’en faire une règle génerale. Aïnsi, les engrais azotés peuvent toujours accroître la fertilité des meilleures terres, tandis que l’addition des phosphates sera superflue, toutes les fois que le sol sera assez phosphaté pour fournir aux graines la petite quantité d’acide phosphorique qui leur est indispensable. Dans le Nord, par exemple , où le sol est naturellement phosphaté, l'abondance des fumiers et de l’engrais flamand lui rend incessamment ce qu’il perd sous ce rapport : le phosphatage y serait à peu près inu- (1) On devrait dès-lors l'appeler zôphore plutôt que phos- phore. (2) Analyses de cendres et de terres, par P. Berthier, 1854. CONGRÈS DES ACADÉMIES - 414 tile. Voilà pourquoi on y dédaigne les résidus de’ noir- animal que la Bretagne, au contraire, vient chercher et enlever à grands frais. Gela explique peut-être aussi le peu de faveur dont y jouissent (malgré leur azote) le guano et les tourteaux que les étrangers consentent à payer un bien plus haut prix. L'emploi des engrais et des amendements phosphatés doit donc être fait avec discernement. Une étude préli- minaire du sol est indispensable. Et de même qu'il faut s'assurer de l’absence du calcaire dans un terrain, avant de le chauler, il faudra aussi y constater l'absence de l'acide phosphorique avant de le phosphater. Cette espèce de monographie du phosphore des terres arables semble, au premier abord, une œuvre impossible enraison de son étendue et surtout de l’état d’imperfec- tion où sont sur ce point nos procédés dosinasiques (4). Mais la constitution géologique de la France, du dépar- tement du Nord et de la Belgique simplifient beaucoup ce travail en offrant à l'observateur de vastes régions où le sol arable est de composition à peu près iden- tique. La plaine immense qui s’étend depuis Breteuil jusqu’à Aix-la-Chapelle et de Calais jusqu’à Bavay, est un terrain diluvien ( d’après M. de Beaumont) ; mais il faut admettre aussi que des eaux douces sont venues le remanier , car on n'y trouve jamais de coquilles marines, mais des fossiles lacustres (rats d’eau, paludines, etc.). Ce qui fortifie cette opinion, c'est qu’on trouve généralement au-dessous le dilivium proprement dit, composé d’abord (A) Tous les anciens dosages d'acide D shit et bon nombre de nouveaux sont à refaire, 112 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. de sables mouvants stériles (1) et plus bas d’un dépôt de gravier et de cailloux roulés (2). Nous appellerons Læss (Loss) (3), cornite (voir la carte géologique de France), ce dépôt de limon qui occupe presque toute l’ancienne Gaule-Belgique et lui procure sa fertilité immémoriale, car elle a formé le sol et constitue encore aujourd’hui le sous-sol de cette contrée , avec une épaisseur qui dépasse souvent 12 mètres. Ce limon est comme un manteau immense qui se moule sur les on- dulations du sol inférieur, mais qui est troué par les monticules (anciens îlots du grand lac) ou déchiré par les alluvions modernes des grandes vallées. M. le Président exprime le regret que M. Payen n’ait pu traiter les 41°. et 42°. questions du programme , ainsi conçues : « Quelles notions nouvelles a-t-on obtenues sur la « valeur nutritive comparée des différentes racines em- « ployées à la nourriture du bétail ? Présenter le tableau -« complet et synoptique de ces valeurs comparées. » « Même question pour les fourrages. » Quelques personnes font observer que, dans la pra- tique agricole, le but de ceux qui s’en occupent étant d’en retirer des bénéfices et non de suivre une expéri- mentation toujours plus ou moins dispendieuse, il est rare que, dans une exploitation, on puisse, avec quelque précision , doser la nourriture des bestiaux et se rendre (4) Le sable campinien de M. Dumont. (2) Ce diluvium caillouteux est aussi très-stérile quand il est seul, à nu, sur les hauteurs, comme aux environs de St.-Omer. (3) M. Dumont l'appelle limon kesbayen. CONGRÈS DES ACADÉMIES. 413 compte de la quantité exacte d'aliments qu'il a fallu à tel animal, pour arriver à tel point de croissance ou de graisse. Chaque animal, d’ailleurs , suivant sa race, suivant sa constitution, en exigera plus ou moins. M. Mabire fait observer que l’agriculteur consultera toujours bien plus les résultats que lui donnera la pra- tique que ceux que lui fournira la théorie. M. Calemard de Lafayette exprime la même opinion et cite plusieurs localités où des produits très-beaux sont obtenus avec des méthodes toutes différentes. Dans la Haute-Loire , par exemple , les navets, si préconisés dans certains endroits, ne sont jamais employés pour engraisser les bestiaux. Dans la partie montagneuse, c’est avec du foin seulement , tandis que dans les parties basses il ne suffit pas ; il n’a point les principes nutritifs de ces herbes courtes que l’on récolte sur la montagne. En disant donc que le foin a tant de matière nutritive, ce ne peut être vrai que pour celui de la localité dont l'échantillon a été analysé ; mais cela ne saurait ses pliquer à d’autres pays. M. de Vigneral dit que l’engraissement des pores, auquel il apporte un soin tout particulier depuis plusieurs années, lui réussit parfaitement en leur donnant les proportions suivantes : pour ceux de quatre à six mois, deux livres de farine d’orge par jour et pendant l'été, ou toutes les fois qu’il peut s’en procurer, du trèfle vert. A dix mois, il leur donne quatre livres de farine et de même du trèfle, des vesces ou de l'herbe, Ge sont les seules choses qu’il leur donne : l’engraissement et la croissance se font ensemble : il a calculé que en moyenne leur poids augmentait de 40 livres par mois, jamais moins de 35 livres ni plus de 45. Ordinairement, il les vend au 114 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. bout d’un an ou même moins, et leur poids varie de 480 à 200 livres. Comme hygiène, ilest important de les placer dans de vastes cours, où ils puissént prendre beaucoup de mouvement. C’est à cela surtout qu'est dû le maintien de leur santé , comme aussi le nombre assez considérable de petits (8 à 40 ) que donnent les races anglaises réputées pour être peu fécondes. : M. Quenard rappelle, à cette occasion, que les porcs étant omnivores , on a essayé plusieurs fois de les nourrir avec des animaux morts. Il considère cette question comme de la plus haute importance, On pourrait ainsi utiliser les débris des animaux que l’on abat à ‘la voirie et cela sans distinction, c’est-à-dire que les animaux soient malades ou non. Il cite même des animaux affectés du : charbon qui auraient été mangés par des porcs et qui ne leur auraient fait aucun mal. Bien plus, il paraîtrait qu’en Lorraine il n’est pas rare que des animaux morts de cette maladie, réputée contagieuse, ne soient dépecés et préparés comme des animaux bien portants pour les besoins du ménage. M. Mabire ne pense pas que l’on puisse manger. des animaux morts du charbon, sans de graves inconvénients. Il cite, à l’appui de son opinion, deux exemples qui sem- blent la confirmer. L'un , c'était un bœuf mort du charbon et qui avait été transporté dans un champ voisin pour être enterré. Quelques jours après, une chasse étant venue à passer par ce même endroit, une meute d’une vingtaine de chiens d’un de ses amis , qui n’avait point été prévenu que ce bœuf était mort du charbon, dévora cet animal ; TOUS LES CHIENS SANS EXCEPTION EN SONT MORTS. Une autre fois, c'était un cultivateur qui avait perdu cinq ou six jeunes porcs également du charbon, et qui, CONGRÈS: DES ACADÉMIES. 415 pour se donner moins de peine, les avait jetés simplement dans le fossé d’un bois. Les chiens du voisinage les trou- vèrent, en mangèrent, ainsi que des renards , et en sont morts. Un membre fait remarquer que. les exemples que cite M. Mabire semblent concluants; que toutefois M. Mabire ne cite que des cas dans lesquels les animaux morts du charbon avaient été mangés sans être cuits, tandis que, à l’école d’Alfort, où des expériences ont élé faites, la chair de ces animaux avait préalablement été soumise à la cuisson. C’est très-probablement à cela qu’il faut attri- buer la différence des résultats. Quant à la 12°. question, relative aux fourrages, M. Mabire dit que les foins et généralement tous les fourrages doivent ête coupés et récoltés au moment. de la floraison , c’est le moment où ils ont le plus de parfum et ce sont toujours ceux-là que les bestiaux mangent le mieux, avec le plus de plaisir et qui leur profitent le mieux. Il conseille aussi de placer les fourrages en tas, d’en faire des meules pour les conserver, mais de ne pas les mettre en bottes. Le foin bottelé perd une partie de son parfum et de son goût. La séance est levée à midi et demi, Le Secrétaire , G. DE LORIÈRE. 116 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. SECTION DE LITTÉRATURE, BEAUX-ARTS ET ARCHÉOLOGIE. SÉANCE DU 23 MARS. (Présidence de M, le comte de Meet}. M. le comte de Mellet, président, invite à prendre place au bureau MM. Louis Paris, le vicomte de Bon- neuil , de La Bigottière et Challe (d’Auxerre). Ilest fait hommage au Congrès des ouvrages suivants : Par M. Charpentier-Courtin : Pin noir d'Autriche, son introduction en Champagne, Reims, in-12, 4855; Par M. Teste-d'Ouet : Jacquemin bi dns nou- velle ; Par M. Paul de Wint : Essais historiques sur les jardins , en réponse à l’une des questions du É du Congrès ; Par M. le baron de Vigan : Mémoires du président Hénault, écrits par lui-même et publiés par M. de Te. Un vol. in-8°., 1854. M. de Caumont analyse la dorée said MM. le vicomte d’Archiac, de la Société géologique de France ; Buteux ; le R. P. Arthur Martin, de l’Institut des pro- vinces , s’excusent de ne pouvoir assister aux séances. M. le comte de Galembert, de Tours, annonce qu’il est obligé de quitter le Congrès pour retourner en Touraine. M. le Président ouvre la discussion sur les 31°, , 32°., 33°. et 34°. questions qui sont connexes. Ces questions sont ainsi conçues : CONGRÈS DES ACADÉMIES. 117 «w Quels services doit s’efforcer de rendre la presse « locale, au point de vue de l’instruction générale et de « la diffusion des connaissances utiles, dans les dépar- « tements? » … « La presse départementale a-t-elle compris sa mission? « Qu’a-t-elle fait jusqu'ici dans les diverses localités, « pour raviver l'esprit public qui s’affaiblit ? » « Les Sociétés savantes ont-elles secondé la presse, « dans le développement de ces tendances? N’était-il pas « de leur devoir de seconder et de diriger la presse « locale qui, dans les départements , doit s’occuper bien « moins de politique que d’intérêts locaux et de recherches « statistiques ? » « Quels moyens peut-on indiquer, pour associer les « efforts des Sociétés savantes à ceux de la presse dépar- « tementale, dans le but d'occuper les esprits de choses « utiles et sérieuses? » M. de Caumont ouvre la discussion par l'exposé suivant : Dans la plupart des départements, la rédaction des jour- naux laisse à désirer. Les questions locales y sont négli- gées et ces journaux perdent ainsi une grande ressource pour remplir leurs colonnes d’une manière intéressante. Les rédacteurs, ordinairement peu rétribués, se bornent habituellement à des articles de politique générale, répé- tition de ce que l’on voit dans les journaux de Paris que tout le monde lit. Les articles locaux se réduisent à de menues nouvelles tirées, pour la plupart, du chapitre des accidents et de la chronique scandaleuse. Les nouvelles scientifiques, les découvertes d'histoire provinciale, les travaux des sociétés savantes y sont trop généralement négligés. M. Duval de Fraville voudrait que l’on envoyât 118 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. l'Annuaire de l'Institut des provinces aux rédaeteurs de journaux, afin que ceux-ci prissent connaissance des idées et des travaux du Congrès. Les journaux ne demandent pas mieux que de suivre cette impulsion, mais il faut qu’elle leur soit transmise. Les journaux n’acheteront pas l'Annuaire; il serait bon de les en gratifier. Dans le départemeut de la Haute-Marne, le rédacteur du journal publié à Chaumont marche dans les tendances préconisées par le Congrès. M. Dréolle trouve qu’il faudrait que les Sociétés savantes publiassent des analyses des procès-verbaux de leurs séances dans les journaux. Ces articles devraient être faits par les secrétaires des Sociétés : il suffirait de les adresser aux rédacteurs pour que ceux-ci leur donnassent place dans leurs colonnes, mais la rédaction des journaux ne peut prendre la peine de faire des articles sur les travaux des Sociétés savantes ; les rédac- teurs ne s’astreindront jamais à aller aux séances des Sociétés. | M. Calemard de Lafayette rend compte de la manière dont un journal qui paraît au Puy-en-Velay est rédigé : il donne une grande place aux études locales et aux travaux des Sociétés savantes. M. Bordeaux croit que, dans un grand nombre de localités, il faudrait relever le niveau intellectuel des petits journaux : beaucoup sont rédigés par des hommes à études incomplètes, souvent par l’imprimeur lui-même ou l’un de ses employés. T1 en résulte que de pareilles feuilles ne peuvent exercer une influence salutaire sur l'esprit public. Les rédacteurs n’étendent guères leur instruction dans l'exercice de leur profession, ils ne lisent rien autre chose que les journaux de leurs con- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 449 frères et les correspondances lithographiées qu’ils re- çoivent de Paris, et qui leur apportent des articles tous faits. Il faudrait que les journalistes se missent à étudier par eux-mêmes les questions nouvelles, afin que les articles sérieux ne fissent pas disparate au milieu de la rédaction habituelle du journal qui trop souvent se compose d'idées rebattues. Les journaux, il faut bien le dire, suivent le cours de l'opinion plutôt qu'ils ne la dirigent: ils consultent le goût de leurs lecteurs plutôt qu’ils ne le forment. Voilà pourquoi ils préfèrent les menues nouvelles et les articles frivoles aux articles sérieux. Les journaux de Paris, sous ce rapport, ne diffèrent pas de ceux des départements. Si un journal départemenial publie une nouvelle scientifique , on ne la lui empruntera pas; s’il publie quelque fait bizarre, peu sérieux, tous les journaux parisiens lui feront l'honneur d’une reproduction immédiate. Les journaux d’ailleurs semblent avoir peur des idées neuves, de tout ce qui sort des opinions reçues et bourgeoises. Si vous. leur portez un article un peu hardi, qui ne respecte pas les doctrines en crédit sur l'art, la littérature, l’histoire (il ne s’agit pas, bien entendu, de la politique), ils vous prieront de lui donner un peu plus de vulgarité. . Enfin, les membres de Sociétés savantes ne peuvent point approvisionner suffisamment les journaux : ils peuvent bien envoyer. à un rédacteur bienveillant un article de temps à autre , mais cela ne suffit pas. Les journaux devraient avoir pour les études locales une collaboration régulière , assurée , comme ils en ont pour les théâtres, les faits judiciaires, la police correction- nelle, etc. Ce serait exiger beaucoup du dévouement 120 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. des littérateurs de département que de les obliger à aller implorer la publicité des petits journaux. Quelle que soit la politesse actuelle des journaux, c’est évidemment à eux de réclamer le concours des hommes sérieux, et non à ceux-ci d’aller frapper à la porte de Pimpri- meur. | … D'ailleurs, on aurait grand tort de donner aux journaux des procès-verbaux de séances qui ennuieraient les lecteurs, et surtout des mémoires étendus qui ne peuvent convenir à la composition nécessairement variée d’un journal. Ce qu'il faudrait, ce sont de menus articles, des entre-filets, mêlés aux nouvelles locales, souvent répétés et destinés à populariser, sous une forme légère et brève, les bonnes idées, les faits nouveaux, le résumé en un mot des études locales. Mais cette catégorie d'articles qui devrait tenir sa place dans chaque numéro, ne peut émaner que de la rédaction elle-même , non de collaborateurs accidentels et passagers. M, Boucher de Molandon n'est pas aussi sévère pour les journaux, il croit qu'ils ont les meilleurs intentions, que le tort vient des Sociétés qui ne profitent pas de cette bonne disposition et qui restent dans l'obscurité parce qu’elles n’ont pas recours à une publicité qui populariserait leurs travaux. N’établissons pas, dit M. de Caumont de susceptibilités entre les rédacteurs et les littérateurs : il ne s’agit pas de savoir à qui de faire des avances. C’est une question de dévouement, non d’étiquette. Les journaux accueillent généralement les articles qu’on leur porte, dès que ces articles sont courts, clairs et intéressants : seulement ils ne viennent pas les chercher, et les Sociétés savantes ont souvent tort de se tenir à l'écart, CONGRÈS DES ACADÉMIES. | 19 : M. le comte de Vigneral ne veut pas que l’on dise de mal des journaux; il déclare que, toutes les fois qu’il s’est adressé aux rédacteurs de journaux de l'Orne et de la Somme, céux-ci ont accueilli ses communications avec la:politesse la plus bienveillante. | M. Target repousse le reproche de frivolité adlesé par M. Bordeaux même aux journaux de Paris. Il réclame pour le journal des Débats, qu’il déclare rédigé d’une manière supérieure, et dans lequel on rencontre à chaque numéro la signature de littérateurs éminents. ; Si les journaux ne méritent aucune critique, reprend M, Bordeaux , alors il faut changer la rédaction même de la question, dont l'énoncé implique un certain blàme,, puisqu'on demande si la presse départementale a com- pris sa mission. 11 faut se hâter dans ce cas de pro- clamer que les journaux ont raison et que les Sociétés doivent faire leur mea culpa, puisqu'elles sont en tort. - M. le comte de Baussel-Roquefort, délégué de la So- ciété de Statistique des Bouches-du-Rhône , pense que généralement du moins les journalistes de département onf un talent vraiment sérieux. A Marseille, la rédaction des journaux est excellente , lumineuse , progressive, à la hauteur de toutes les questions. M. de Bausset voudrait que le Congrès s’empressât, par une déclaration collective, de recon: naître que la presse. départementale a, en général, compris sa mission, en accueillant toutes les communi- cations sérieuses qui ont pu lui être faites dans l'intérêt de Pinstruction et de la diffusion des connaissances utiles. Les Sociétés. savantes ont toujours trouvé , pour l'insertion de leurs communications une grande bonne G 199 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. volonté chez les directeurs de journaux de département, et le Congrès leur recommande de nouveau de s'entendre avec eux sur les sujets qu’il serait bon de traiter ét de vulgariser. Les journaux de Marseille, dit M. Bordeaux, puis- qu’ils sont cités ici, ont-ils, par exemple, dit un seul mot, fait une seule observation à l’occasion de la dé- molition de l’antique cathédrale de la Major? Ont-ils tenté de lutter contre un entraînement fâcheux, et de rectifier les idées de leurs lecteurs ? M. Challes fait observer que la question, très-actuelle, très-intéressante , d’ailleurs , ne saurait. être résolue d’une manière générale. 11 faut tenir compte d’une foule de circonstances , d’influences , au nombre desquelles on doit compter l'éloignement des rédacteurs pour un tra- vail nouveau et de surcroît, par le défaut d’espace, et surtout, quant aux collaborateurs bénévoles, par la répu- gnance que beaucoup de personnes éprouvent à livrer leur nom au public. Des écrivains qui placent volontiers leur nom en tête d’un mémoire destiné au seul monde savant , hésiteraient à prendre place à côté des collabo- rateurs de la feuille de larrondissement. Mais il serait important de fournir des éléments utiles à ces journaux, afin de populariser les connaissances scientifiques ; et c’est une bonne œuvre pour les hommes dévoués et qui ont suffisamment de loisirs, d'écrire de courts articles à la portée du public ordinaire. En un mot, il faut seconder la presse locale, sans prétendre toutefois la diriger. M. Duval de Fraville voudrait que le Congrès décidât que le compte-rendu de ses travaux sera mis, chaque année , à la disposition de M. le Président , pour CONGRÈS DES ACADÉMIES. 193 être adressés à l’un des journaux les plus répandus, surtout dans les ae où il n'existe pas de société savante. M. Travers, professeur à la Faculté des lettres de Caen, n’ayant pu se rendre au Congrès, a adressé en réponse à ces questions des notes dont voici quelques pas- sages : « Les questions de presse , dit M. Travers, ont l’incon- vénient de paraître toujours des questions de circonstance et de parti. Par cela même elles ont toujours un grand intérêt, et, du moment même où elles sont soulevées, il faut qu’elles soient résolues par la raison ou Aa les passions. Aujourd'hui l’Institut des provinces semble provoquer, dans les questions qu’il a posées, une sorte d'enquête sur la presse départementale. Il voudrait que les Com- pagnies savantes eussent une action sensible sur les feuilles de localité. Il demande s’il n’y aurait pas moyen de réveiller la torpeur de l'esprit public, etc. , etc. Ces questions et ces vœux ont un intérêt véritable, ajoute M. Travers, et nous désirons qu'ils soient l’objet de discussions lumineuses et de mémoires indépendants. Peut-être entreprendrons-nous de les traiter amplement, quelque jour. Qu'est la presse dans les départements? Si nous en jugeons par les journaux que nous connaissons , son état est misérable et précaire. Triste reflet de feuilles quo- tidiennes de la capitale ,elle vit d’un choix de nouvelles politiques, d’anecdotes propres à amuser les oisifs, de comptes-rendus des cours d’assises départementales , et de quelques variétés, scientifiques ou littéraires, par exception. Leur but principal , c’est de plaire au pouvoir, 124 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. afin de ne pas être dépouillées des; annonces légales qui les font vivre, et si quelque article un peu hardi leur est communiqué, elles s’empressent de le soumettre à: la censure préfectorale. Qu’attendre de: cet asservissement volontaire ? Est-ce ainsi que se relèvera l'esprit public dont on déplore l’abaissement ? On a demandé si les Académies, si les Sociétés savantes de toute espèce, ne pourraient pas avoir une influence heureuse sur la presse locale ? Nous en désespérons. Que. pourraient-elles communiquer aux journaux de leurs localités respectives? Des comptes-rendus de leurs séances? Le public n’y tient pas, et les gérants le savent bien. Aussi n’admettent-ils que par complaisance pour leurs auteurs, quelques articles de science et de litté- rature, dont ils fontparfois attendre l'insertion péndant TOUT UN SEMESTRE Ce qu'illeur faut, ce qu’ils demandent, ce qu’ils achètent, c’est encore le roman-feuilleton. Leur clientèle ne tient pas à ce qu’on linstruise ; elle: veut qu'on l’'amuse.(très-bien). Le genre d'utilité qu’elle re- cherche, c’est le cours de la bourse, les actions des che- mins de fer, et les articles qui peuvent éclairer sur le placement avantageux des fonds disponibles. La jeunesse du moins fait-elle concevoir des espé- rances ? Est-ce par elle que se relèvera l'esprit public ? Pour le moment il n’y a nulle apparence. Elle ne semble :point partager les goûts litiéraires des générations aux- quelles elle a succédé. Elle boit, elle fume, elle joue; où bien. aspire aux places, et, solliciteuse :empressée,, elle se fait prématurément aux habitudes de la flatterie et d’une rampante soumission; ou bien elle se jette dans les spéculations de l’industrie, avide de lucre pour arriver promptement aux jouissances matérielles, et digne CONGRÈS DES ACADÉMIES. 195 àson tour de l’indignation d’Horace contre les jeunes Romains de son temps : | An, hæc animos ærugo et cura peculi Quum semel imbuerit, speramus carmina fingi Posse linenda cedro et levi servanda cupresso ? » L'Assemblée reconnaît la justesse de ces observations. - La 35°. , la 36°. et la 37°. question sont mises en dis- cussion : elles sont ainsi conçues : « Quelle part les Sociétés savantes doivent-elles légi- « timement prendre dans la direction du goût, en ce « qui touche à l'architecture , la sculpture et la peinture « décorative? Ne devraient-elles pas, dans certaines cir- « constances, publier de courtes instructions FAPPRPE «-aux besoins des localités ? » « Cette mission que les Sociétés -savantes pourraient « entreprendre, dans le but de contribuer à l’assainis- « sement du goût.; ne serait-elle pas un moyen d'obtenir « une plus grande popularité et de nouveaux titres à la « reconnaissance publique ? » -« Toute institution devant, pour être aurablé) offrir « des résultats utiles, et exercer une action appréciée de « tous les hommes sérieux, quelles seraient les attri- « butions qui pourraient donner aux Sociétés savantes « des départements une autorité et une action nouvelles? « Comment pourraient-elles fonctionner avec ces nou « velles attributions? » , : M; de Caumont se plaint de la nou: de l’apathie de la plupart des Sociétés, qui restent chez elles , ne se mêlant de rien, se renfermant dans une abstention persistante , dans une inertie déplorable, qui ne ré- pondent pas même aux questions qui leur sont: sou- 126 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. mises, et ne donnent point de solutions quand on les consulte sur des questions de goût, d’art, de style , toutes choses essentiellement de leur compétence, et où leur opinion devrait être une autorité décisive. M. Calemard de Lafayette se plaint également du défaut d’assiduité des membres de la plupart des Sociétés. Sans assiduité, il ne peut pas y avoir de travaux suivis, de séances fructueuses. Beaucoup deSociétés ont été obligées de revenir à l'usage des jetons de présence , l’un des plus puissants moyens d'attirer les membres et de les rendre assidus. Il ne suffit pas, dit M. de Caumont, d’avoir de l’assiduité; il faut surtout de l'initiative. Or , la plupart des Sociétés n’en ont pas. Les idées neuves leur sont inconnues ; elles n’ont que de vieux programmes; elles s’obstinent à rester sur un terrain épuisé. M. de Lafayette voudrait que les Sociétés introduisissent de nouveaux éléments dans leur sein. Il y a dans la plupart de nos villes des jeunes gens dont l’admission pourrait raviver les Sociétés. Il ne faut pas toujours demander aux nouveaux membres ce qu’ils ont déjà fait, mais ce qu’ils pourront faire. La 38°. question, mise ensuite en discussion, est ainsi formulée : « La répartition des Sociétés savantes sur les divers « points du territoire est-elle satisfaisante ? Devrait-is « être plus uniforme ? » M. Bordeaux, pour répondre sinon à la question tout entière, au moins à uné partie de cette question , signale la singulière manière dont les Sociétés sont réparties sur le territoire français. Si l'on jette, par exemple, un coup- d'œil sur une carte de France , et que l’on considère les CONGRÈS DES ACADÉMIES. 197 départements du Nord-Ouest, on remarquera que, tandis que la Normandie possède un grand nombre d’académies et de sociétés scientifiques de divers degrés, le Perche, au contraire, n’en possède aucune. Les Sociétés forment un groupe compacte sur le bord de la mer, dans les départements de la Seine-Inférieure, du Calvados et de la Manche, tandis que leur nombre diminue à mesure que l’on avance dans les terres. Dans le Calvados il y a huit et même neuf Sociétés savantes dans la seule ville chef-lieu, :et une ou deux Sociétés dans chacun des arrondissements, au lieu que le département de l’Orne ne compte pas .une seule Société au-dessus des simples comices agricoles. L'Eure , très-pauvre en établissements intellectuels comparativement aux trois départements du Calvados, de la Seine-Inférieure et de la Manche, n’a qu’une seule Société mixte, à Évreux; et aucun de ses chefs-lieux d'arrondissement n’en possède. En poursuivant cet examen,on remarquera que le département d’Eure-et- Loir, contigu à l'Eure, qui n’a qu’une seule Société, et à l'Orne qui n’en a pas, ne possède non plus que des comices agricoles. Chartres n’est le siége d’aucune com- pagnie académique. Il en résulte que , tandis que sur les côtes on trouve un centre scientifique dans la plupart des villes, et à peu près de dix lieues en dix lieues, en s’enfonçant dans le Perche et la Beauce, on parcourt une région entièrement déshéritée de ces établissements. Falaise, du côté du Perche, et Évreux, du côté de l’Ile- de-France, sont les points extrêmes de la région aca- démique.. De Falaise au Mans, on traverse une assez vaste lacune; d’Évreux à Paris, il n’y a rien, mais cet espace dégarni a sa plus grande largeur entre Évreux et la Loire. 128 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. : Cette ‘inégalité dans la répartition des Sociétés sa- vantes coïncide, en outre , avec l’inégale répartition des autres établissements d'instruction publique. Le Calva- dos, la Mañche, la Seine-Inférieure!, où abondent lés Sociétés académiques, possèdent aussi un grand nombre de colléges universitaires et ecclésiastiques. L’Eure , au contraire , n’a qu'un seul collége de plein exercice , assez peu suivi et de tout temps fort obscur. Les bibliothèques publiques et les musées sont répartis de même : abon- dants dans les trois départements du littoral, il font à peu près défaut dans l'Eure et l'Orne. Le nombre d'hommes lettrés , de personnes ayant des grades scien- tifiques et littéraires diminuant à proportion, explique sans doute le peu de propension de ces régions à for- mer des Sociétés savantes. Et cet état de choses paraît remonter fort loin : Caen , en outre de son Université , possédait autrefois un collége où les Jésuites entrete- naient des professeurs célèbres. Les Jésuites avaient encore des colléges à Rouen et à Dieppe ; les Orato- riens , des établissements à Rouen, à Caen et à Dieppe ; la bibliothèque du Chapitre de Rouen était publique dès le siècle dernier. On pourrait donc faire une carte litté- raire ét académique, qu’il serait curieux de comparer ensuite avec la fameuse carte où M. Charles Dupin avait marqué en noir certaines régions peu éclairées. M. Pernot annonce qu’il avait eu , depuis long-temps , la pensée que l’on pourrait dresser une carte indicative des musées existants dans les départements , et échange avec M. Victor Petit quelques idées sur la meilleure manière de dresser une carte académique. Pour qu’une carte pareille fût bonne , il ne suflirait pas d'indiquer par un signe conventionnel le point où siégent les di- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 199 verses Sociétés : il faudrait encore, par une teinte plus ou moins forte, indiquer l’étendue de la zone où s’exerce son influence , et le degré d’intensité de cette influence. M. Darcel étant présent , la 30°. question, pour la- quelle il est inscrit, est mise en discussion : « Quelle a été la forme des tombeaux érigés dans « les cimetières , aux différents siècles du moyen- « âge ? » M. Darcel expose que, jusqu'ici, on n’a guère étudié que les tombeaux de grands personnages , ornés de statues ou de pierres richement décorées , mais que l’on s’est moins occupé des tombeaux secondaires, surtout de ceux placés en dehors des églises. Or, ce sont ces tombeaux des cimetières qui sont les plus intéressants, comme pouvant servir de modèles pour les tombeaux de notre époque. Ils sont aussi aujourd’hui les plus rares. Les tombes placées à l’intérieur, dans le pavage , étaient souvent recouvertes d’une herse, grille de-fer destinée à empêcher de marcher sur le monument et à recevoir des tapis précieux. Beaucoup de tombes se trouvaient ve les murs, sous des arcades spéciales , qui, très-répanduëes dans les églises de la Bretagne, sont désignées dans cette province sous le nom d’enfeus. Ge n’est qu’à partir du XIII°. siècle, que nous com- mençons à trouver en bon nombre des tombeaux venus jusqu’à nous. M. de Caumont cite une tombe du XII°, siècle , qui existe à Poitiers; il pense que les herses en fer dont parlent quelques anciens auteurs, recouvraient surtout les tombes dont le dessus formait un relief peu considé- 130 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. rable au milieu du pavage. Il cite celle qui existait autre- fois dans la cathédrale d'Angers, et dont il présente le dessin ( v, la page suivante ). La continuation de la discussion sur cette question est renvoyée à la séance du lendemain. L'un des Secrélaires-généraux , Raymond BORDEAUX. SECTION DES SCIENCES NATURELLES, AGRI- CULTURE ET INDUSTRIE. SÉANCE DU 24 MARS. ( Présidence de M. DE ViIcneraL. ) Siégent au bureau : MM. de Caumont , de Montreuil, Mabire et de Beaufort. La 43°, question ainsi conçue, est l'objet de la dis- cussion : « Quelle est liiporteth de la nature variée des « aliments au point de vue de l’engraissement des ani- « MaAUX ? » M. de Caumont prend le premier la parole : M. de Béhague , dit-il, a observé qu’un animal mange davan- tage, si les substances sont variées, et il arrive à avancer de plusieurs jours l’engraissement des animaux. Il im- porte d’acquérir des notions plus précises sur les combi- 154 FA | —"# L r ——— | he = — 2 #1 = —2 _ | | = \i A d TOMBE RECOUVERTE D’UNE HERSE. 139 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. naisons des substances alimentaires qui peuvent être em- ployées. M. de Montreuil prétend que l'emploi des substances alimentaires doit surtout être comparé à la dépense. C’est là le point essentiel. — Des agriculteurs, se contentant de . théories, négligent d’opposer les produits aux frais, il leur suffit de montrer des résultats magnifiques sans in- diquer le prix de revient. C’est là une fausse marche qui ne peut être préconisée. M. de Vigneral croit qu’il serait plus simple de tenir, dans les exploitations , une comptabilité régulière , ce qui est ordinairement négligé et ce qui serait on ne peut plus facile cependant, On a souvent dressé des tableaux de consommation ; mais tous les pays n’ont pas les mêmes exigences, ce qui restreint l'application de ces théories. M. de Montreuil ne veut pas l’art pour l’art, mais Part pour le profit; la pratique, et non pas la pure théorie ; il demande que l’on tienne une comptabilité avec des colonnes de doit et avoir. Ge qui empêche les agricul- teurs d’avoir une comptabilité régulière , c’est que les tableaux qu’on leur a offerts sont trop compliqués et pas assez clairs. | M. Calemard de Lafayette pense qu’en demandant trop on s’expose à ne rien obtenir. Si un agronome ha- bile veut dire : tel aliment donne tel résultat , il lui faut ajouter : cet aliment revient à tant, et se produit de telle manière. Il est à désirer que des hommes spéciaux fassent en particulier ces recherches, difficiles à faire dans l’ensemble , mais dont chaque agronome pourrait traiter une partie. M. Mabire insisté sur le point de vue pratique : ne dites pas: je produis des bestiaux de tel poids, mais je pro- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 133 duis des bestiaux offrant la viande à tel prix. Pour en- courager les producteurs, il faut leur faciliter le moyen de se rendre compte de ce qu’ils emploient. L’agri- culture est une chose de localité ; les résultats pratiques doivent donc être cherchés. M. de Caumont ramène à la question et dit que, J dune la vallée d’Auge , on croit que l’engraissement des bœufs est d'autant plus rapide qu’ils sont placés dans des her- bages d’une certaine étendue et où ils peuvent choisir leurs aliments ; cela pourrait être expliqué par la va- riété de la nourriture qu’y trouvent ces animaux. M. Mabire ramène la question aux termes du pro- gramme. Il y répond par l’affirmative: Pour engraisser, il faut faire manger beaucoup en peu de Lente et pour cela la variété est très-utile. La demande de M. de Montreuil est utile, mais difficile, les petits éleveurs ne pouvant tenir cette comptabilité comme les grands agriculteurs. L’agronome normand dira : J’ai tant d'hectares de pâturages où j’engraisse tant de bœufs, en tant de jours, ce qui met leur nourri- ture, par jour, à tant. Evaluer la nourriture d’un indi- vidu, par jour, est chose difficile pour des paysans qui souvent ne savent pas lire; on ne peut exiger d'eux une pareille comptabilité. On pourrait seulement de- mander aux Comices à combien revient le bœuf, Fa exemple. M. de Montreuil répond qu’il ne demande cette comp- tabilité simplifiée que pour les grandes cultures : de là, par limitation, cette comptabilité passerait, de proche en proche, dans les. autres cultures , et cette imita- tion serait à l'avantage de la comptabilité qu'il de- mande. Souvent des gens se lancent dans l’agriculture 134: INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. et adoptent des pratiques qui sont de mauvais exemple ; ils se. corrigeront , si on leur met sous la main ces comptabilités.. Sans elles, les éleveurs établissent leurs prix de revient sur celui du marché, ce qui est une base très-fausse. Si on les établissait sérieusement pour calculer ensuite les produits, on obtiendrait des résultats positifs. C’est ce que ne fait pas chez lui l’orateur qui dit: J'ai dépensé tant de foin, etc., pour produire tant de beurre; sachant le prix du beurre, j'en déduis celui du foin. 2 SÉANCE DU 24 MARS. ( Présidence de M. ne MONTREUIL. ) M. le général Rémond prend place au bureau. Sur la 44°. question, dont voici le texte : « Quelles sont, dans la nourriture des vaches, les conditions les plus favorables à la production du lait? » M. Mabire dit que le mieux , sans doute, serait de conduire constamment les animaux dans de bons pâtu- rages ; mais c’est une mesure impraticable en hiver. Dans cette saison, les bestiaux restent à l’étable, et les fourrages dont on les nourrit leur font donner du lait en abondance. Dans le pays de Bray, on a des prairies hautes dont on fauche les herbes avant la maturité, pour en faire un fourrage que l’on mélange avec du son. Le son semble moins nutritif que l’avoine ou l'orge et revient au même prix, 7 à 8 fr, les 400 kilog. , mais c’est une erreur. Sur le port de Bordeaux , il a vu des bœufs nourris de son, dont l’embonpoint est pro- ES CONGRÈS DES ACADÉMIES. 135 digieux et qui sont.les plus solides travailleurs qu’il ait jamais rencontrés. Il a fait manger du son à ses bestiaux, et s’en est très-bien trouvé : on obtient plus de lait avec 2 kilog. de son qu'avec le même poids d'orge. Dans le pays de Bray, on a adopté le son, qui donne, d’ailleurs, du lait et du beurre de meilleure qualité que l’orge ou l’avoine. Le beurre se vend 4 fr. 70 c. le 172 kilog. ; le son coûte 30 c. ; l’orge et l’avoine, 25 c.: le beurre re- vient au 173 ou au 174 de son prix de vente. Quand on veut engraisser , il faut de l'orge; toutefois, mélangée avec du son, elle donne encore de très-bons résultats. Pour l’engraissement du porc l’orge vaut mieux que le son, l’estomac de cet animal étant très-petit et réclamant une nourriture d’un moindre volume. La qualité du lait varie selon les aliments: avec quel- ques-uns, il paraîtra falsifié. L’honorable membre a vu d’honnètes laitiers obligés de cesser la vente de leur lait, accusés de le falsifier. Une femme, sous le poids d’une semblable accusation, a prouvé, en trayant publiquement son lait, qu’il était parfaitement identique à celui que l’on avait jugé falsifié : cet incident met les laitiers dans une position grave, au point de vue judiciaire. Il eroit qu’il y a des fraudeurs, mais il faut savoir les distinguer des honnêtes marchands. M. le général Rémond dit qu’il y a des moyens certains de reconnaître la fraude. M. de Bouis croit devoir appeler l'attention de l’Assem- blée sur l'importance de la question qui vient de se poser incidemment , celle de la vérification des falsifications du lait. L'autorité, animée des meilleures intentions pour protéger les consommateurs, a cru devoir, dans beaucoup de villes, créer un service tout particulier pour surveiller 136 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. à la fois et punir la fraude. Il croit que cette mesure pro- tectrice est à la fois favorable au producteur comme au consommateur , puisqu'elle a pour but d'empêcher de substituer à ce produit naturel, des matières étrangères. Il désirerait que l’on ne s’en rapportât pas au lacto- densi-mètre dont les indications conduisent à des con- clusions que la science ne peut adopter; il voudrait que, pour punir les contraventions, il fût fait des analyses exactes par des experts, dont lé rapport signé établirait ces contraventions d’une manière solide. Les moyens phy- siques, comme l'inspection microscopique, fournissent le moyen de reconnaître les infusions , les productions vé- gétales confervoïdes, la coupable addition de l’eau: La chimie apprend à constater la présence des fécules, dis- soutes par l'addition de quelques gouttes d’une solution iodée. On sait également recueillir les huiles émulsion- nées qui auraient été mélangées , etc. ; mais la mesure de la densité du lait n’est pas, par elle-même, une base suffisante pour poursuivre , pour punir d’amendes le vendeur d’un lait qui n’aurait pas la densité réglemen- taire. On sait combien cette densité varie par l’âge, la nourriture , la quantité de boisson, l’époque plus ou moins éloignée du vêlement. Les petits cultivateurs qui se livrent à l’industrie laitière , ne peuvent et ne savent pas se défendre ; le Congrès fera une: bonne action en mettant au rôle des questions à résoudre, celles des moyens de constater la pureté du lait. M. Mabire demande qu’on prenne des mesures pour empêcher de confondre la fraude et l'innocence. M. de Clocheville dit que, dans cértaines localités, on prend ces mesures ; que , dans d’autres, on se con- tente du lactomètre. CONGRÈS DES ACADÉMIES. | 137 :M. Quentin-Durand répond que les lactomètres sont souvent inexacts. : M. de Montreuil, ramenant la question à ses premiers termes, explique les causes de la densité inégale du lait. - M. Ancelon dit qu’il y à trois moyens d’opérer la vérification : 4°. par le lactomètre ,. mais ce moyen est très-délicat et réclame des connaissances en physique et en chimie: pour peser le lait, il faut qu’il soit soumis à une température de 45°, et il donne alors une densité moyenne ; 2°. en écrémant le lait; 3°. et en retirant le beurre du lait : ayant les quantités relatives du beurre, on a, d’après les tables, les quantités relatives du lait. Mais cette mesure ne peut être employée par la police ; il faudrait pour cela des hommes spéciaux. M. de Bouis pense que ce que l’on vient de dire se rattache aux moyens d'apprécier la richesse du lait plutôt qu’à ceux d’en vérifier la pureté. Peut-être ce qu’il y aurait de mieux à faire serait-il de doser la quantité de phosphate et d'acide sulfurique que le lait doit contenir. Des travaux d'analyse chimique auxquels on s’est livré en Amérique , il résulte que chaque litre de lait contient en moyenne 5 centigrammes de phosphate. : Les moyens actuels de découvrir la fraude sont insuf- fisants ; il serait bon de proposer la question comme sujet d’études , et d'appeler sur elle l'attention du gouverne- ment et celle de la science. | - Un membre du Congrès dit qu’à Dijon on a tenté la vérification avec le lactomètre. On s’est plaint de :cette mesure, et on a abandonné le lactomètre. Les chimistes ont avancé que la science pouvait élucider la question. On ramène la question aux aliments les plus propres à la production du lait. 138 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. M. Beaudoin demande si rien ne peut remplacer le foin coupé jeune pour les vaches. M. Mabire répond qu'il ne connaît rien de meilleur que le regain des prairies hautes, c'est le plus productif. L'animal qui aura résisté aux plus fortes herbes, ne ré- sistera pas au regain. Si on ne fauche ce regain qu'après maturité, on en fait encore une excellente nourriture. M. de Montreuil confirme cette assertion , et ajoute que dans l'hiver de 1854, où le son était très-cher, il en a fait manger pour 2,000 fr. environ à ses vaches et en a obtenu les meilleurs résultats. En leur donnant des ca- rottes, dans la proportion d’un cinquième, avec un filet de son seulement , il a eu encore d'excellents résultats, mais le beurre était un peu plus cassant. Cet essai a été fait avec 40 vaches laitières. M. Mabire dit qu’en effet la carotte est le plus lactifère des légumes , ce qui permet de ne donner avec elle qu'un cinquième de son; avec d’autres légumes il en fau- drait davantage. Le maïs vert est aussi un excellent four- rage. M. de Bouis cite, à l’appui de ce qui vient d’être dit, plusieurs expériences ayant parfaitement réussi. M. le général Rémond dit avoir nourri, pendant quatre ans, ses chevaux avec le maïs, et s’en être très-bien trouvé. Chez lui, ajoute-t-il, le regain ne vaut rien pour le cheval. | M. Mabire convient de cela; mais il dit qu’il n’enten- dait parler que des vaches. M. de Bouis lit un rapport sur un mémoire de M. Des- charmes , d'Amiens , relatif à l’extraction de lopium du pavot : CONGRÈS DES ACADÉMIES. 139 MESSIEURS, « Devant toute autre assemblée, on pourrait craindre de soulever une question de la nature: de celle dont vous m'avez chargé. J'ai besoin, je l’avouerai, de savoir com- bien est vif et vivant le sentiment du bien public qui vous amène dans cette enceinte pour oser vous entretenir de la question de la production de l’opium indigène. Votre zèle est de ceux que rien ne saurait engourdir ni para- lyser. J'espère donc que votre attention ne me manquera pas et que vous voudrez bien me suivre dans l'exposé de cette question. Je regarde comme inutile de vous entre- tenir de l’historique des essais tentés antérieurement soit par les botanistes, soit par les médecins pour substituer l’opium extrait de nos pavots à celui importé par le commerce. Le problème n’était pas mûr : aujourd’hui, le temps de la solution est proche , s’il n’est pas complètement résolu, il ya lieu de croire que l’expérience permettra de pro- noncer d’une façon définitive; toute la question de l’opium indigène est réduite désormais à celle du prix de revient de la main-d'œuvre. M. Descharmes s'appuyant des essais tentés par M. Bé- nard , pharmacien, son compatriote , dans lesquels il a lui-même incisé, en 44 heures, 2,752 capsules, a recueilli 409 grammes de suc opiacé. Remplacé par un ouvrier, celui-ci a incisé 42,000 capsules et ramassé 322 grammes seulement de suc:en cinq journées de travail , de douze heures de travail chacune. Ainsi de 44,752 capsules, on a extrait 434 grammes de 140 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. suc laiteux qui se sont réduits, par la dessiccation, à 205 grammes d’opium indigène, dont M. Bénard , en élève habile du savant professeur Girardin, de Rouen, a extrait 46 ‘, de morphine. L’opium du commerce , en moyenne, ne rend que 8 %,, si on consent à évaluer la valeur de l’opium indigène , plus riche en morphine , au prix moyen de 50 fr. le kilogr., prix de l’opium ‘du commerce , il en résulte que la valeur des 205 grammes sera de 10 fr. 25 c. Les six jours d'ouvriers pour les ob- tenir ayant coûté 7 fr. 75, on a un bénéfice de 2 fr. 50. Un hectare de terre peut contenir environ 1,000,000 têtes de pavots dont on pourrait extraire 28 kilogr. de suc, en nombre rond 13 kilogr. 501 gr. par une première opération à l’aide de 408 journées d'ouvriers. On peut doubler cette production par une seconde opération qui ne nuira pas à la graine : d’un hectare de terre on peut. donc retirer 27 kilogr. d’opium d’une valeur de 4,350 fr. pour'une dépense de 1,020 fr., c’est-à-dire 330 fr., bénéfice net qui pourrait s’augmenter, si on employait des femmes et des enfants dont le prix de journées serait moindre. D'un autre côté, l’habileté acquise par l'exécution répétée de la manœuvre nécessaire pour l’incision amènera à l’'opérer plus rapidement, et, par suite, il en résultera une réduction dans le prix de revient de journées pour l'exploitation. : M. Aubergier, de Clermont, a pu faire opérer quatre incisions sur chaque. capsule : on doublerait ainsi les bénéfices. | L'auteur du mémoire indique un instrument armé de cinq lances saillantes de 3 à 5 millimètres, disposées cir- culairement et obliquement de façon à pouvoir faire des incisions transversales. Une figure en fait très-bien com- : CONGRÈS DES ACADÉMIES. Al prendre la construction et l'usage. Il ne nous resterait plus qu’à demander comment il arrive que notre opium indigène se montre plus riche en morphine que l’opium exotique, récolté dans des climats dont la température plus élevée paraîtrait, a priori, plus favorable à l’élabo- ration des sucs dans les végétaux dont on l'extrait. Qu'on nous permette de faire quelques remarques sur ce point. Nous ferons observer d’abord que nous ne recevons guères en Europe que l’opium de seconde qualité. Ge n’est pas la première fois d’ailleurs que l’industrie euro- péenne lutte avec succès contre l’industrie plus primitive d’autres contrées où les produits naturels sont plus riches que leurs analogues de notre pays. Tant il est vrai que partout et en toutes choses la science doit l'emporter sur l’incurie et l'ignorance. | Différentes personnes ont fait une objection fondée sur ce que la valeur d’un opium ne doit pas être appréciée uniquement par la proportion de morphine , puisqu'on y trouve aussi la narcotine, la codéine, la méconine et la thébaïne. Sans aucun doute, ces alcalis végétaux commu- niquent leurs vertus à l’opium. Mais en attendant une analyse complète , il nous suffira de proclamer que: les bons résultats de ladministration thérapeutique de l’opium indigène ont été reconnus par les juges les plus compétents de l’Académie des sciences et dans l’Académie de médecine. La proportion de ces derniers principes immédiats étant de beaucoup moins grande dans l’opium, il en résulte nécessairement qu’on est fondé à classer les qualités de l’opium d’après les quantités de morphine qu'on y rencontre. Ne serait-il pas possible que la culture dans des terres améliorées, comme les terres du nord de la France, 142 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. donnât des plantes plus développéés, plus fortes et ca- pables de donner des sucs plus élaborés, müries dans leur fructification avec une température même plus faible ? Ce qui nous paraît bien évident , c'est que notre climat est tout-à-fait propre à la culture du pavot ; que sa tem- pérature étant suffisante pour müûrir ses graines, on peut être certain que les sucs de la plante sont parfai- tement élaborés. La production de l’opium indigène nous paraît donc intéressante pour tout le monde, pour le producteur, pour les populations ouvrières auxquelles elle offre une nouvelle source de travail et de richesse , et aussi pour les consommateurs dont le nombre augmente sans cesse depuis que la chimie et la pharmacie ont pu fournir des médicaments d’une exactitude mathématique telle que le médecin peut être certain des effets qu’il veut obtenir pour le soulagement des douleurs. Le Congrès me semble donc, dit en terminant M. de Bouis , devoir applaudir complètement aux tentatives en- courageantes, déjà entreprises en plusieurs points de la France, pour introduire dans les régions où cela sera pos- sible cette production de l’opium indigène. » Le Secrétaire, G. DE BEAUFORT. CONGRÈS DES ACADÉMIES. 41438 SECTION DES SCIENCES NATURELLES , AGRI- CULTURE ET INDUSTRIE. SÉANCE DU 25 MARS. ( Présidence de M. le colonel Répécaun. ) Siégent au bureau : MM. de Montreuil, Beaulieu et de Beaufort , secrétaire de la section. M. le baron de Montreuil répète après la lecture du procès-verbal de la séance précédente que l’un des princi- paux moyens pour arriver au progrès agricole, est d’amener les cultivateurs intelligents à tenir une comptabilité. Sans comptabilité, dit-il, on peut sans doute faire faire des progrès à l’agriculture : produire de plus beaux bes- tiaux, obtenir de plus riches récoltes que par le passé ,— des croisements judicieux , le choix des reproducteurs sans sortir de leur race, d’abondantes fumures, voilà les moyens d’avoir des succès. Mais, à quel prix les a-t-on obtenus ? voilà ce que le praticien demande aussi bien que l’économiste. Si je remporte les prix, au concours, par la beauté des élèves, l'engraissement des animaux de bou- cherie, j'ai satisfait à l’un des termes du problème , mais je ne l’aurai résolu entièrement que si le prix de revient est dépassé par le prix de vente , ou du moins s’il est at- teint. Comment veut-on que le cultivateur, qui travaille pour le gain , se fasse purement artiste et se contente de la beauté de la forme, si sa ruine et non l’aisance en sort pour lui ? Or, pour que les agriculteurs sérieux accueillent avec faveur les faits qu’on leur signale , il faut nécessaire- A4 INSTITUT : DES PROVINCES DE FRANCE. ment qu’ils reconnaissent que les améliorations obtenues donnent des bénéfices, et qu’elles profitent à ceux qui les entreprennent d’abord, et ensuite au’pays tout entier. Comment peut-on prouver les bénéfices, sinon par une comptabilité régulière, jele demande? — On me répond: les agriculteurs n’ont pas le temps de la tenir, c’est bon pour une exploitation exceptionnelle ; il faut des connais- sances qui ne se rencontrent pas chez la plupart des cul- tivateurs.… | . M. de Montreuil est le premier à reconnaître qu’on ne peut exiger la tenue d’une comptabilité rurale dans toutes les exploitations; mais on peut en tenir une dans. les principales , et lorsque des fermes bien conduites pour- ront justifier des profits qu'elles tirent d’une culture améliorée, il en sortira cet avantage notable : on prendra confiance dans leurs pratiques agricoles, on s’ingéniera à les imiter de proche en proche, et le progrès, si lent en agriculture , quoique , si l’on en croit le proverbe , il faut dix ans pour qu’une découverte en ce genre fasse dix lieues, marchera désormais avec moins de lenteur. La comptabilité rurale, suivant M. de Montreuil, ne doit pas être compliquée. Sans doute, un résultat agri- cole ressort de faits multiples qu’il est bon de constater ; toutefois, il faut simplifier tout, afin d'éviter une trop grande perte de temps, la simplification de la compta- bilité est ce à quoi surtout il faut tendre. L’honorable membre recommande ce sujet à l'attention du Congrès. Il désire qu’on en fasse une étude spéciale, 11 présente à l’appui de ce vœu plusieurs tableaux résumés qui lui servent à lui-même dans son exploitation, et qui per- mettent, en un instant, de se rendre compte du prix de revient des denrées et produits de culture. Il espère, CONGRÈS DES ACADÉMIES. 145 l’année prochaine, pouvoir soumettre des tableaux plus complets à l’appréciation de ses collègues, M. Calemard de Lafayette félicite l’auteur, mais dit qu’il sera difficile pour le cultivateur, de donner ainsi l'évaluation de ses frais. | M. Calemard de Lafayette parle du procédé de la plantation des céréales en quinconce par un plantoir mécanique, et de l’instrument de M. Mangou, avec le- quel il a obtenu des résultats qu’il dit être de 150 pour 1. Il a ensemencé ainsi 40 hectares cette année. Il croit utile de substituer l’ensemencement en ligne et en quinconce à l’ensemencement à la volée, M. de Caumont rappelle que l'instrument Le Docte doit être présenté demain. | M. Lecomte dit que ces résultats ont déjà été si beaux, que M. le Ministre de l’agriculture a chargé un associé de M. Le Docte d'aller ensemencer à La Saussaye, à Grignon et à Grandjouan, où une commission comparera et jugera les résultats. M. de Montreuil demande si cet instrument s’applique à l’ensemencement des céréales ? Réponse affirmative. — M. de Montreuil cite un fait personnel : il a semé à la volée, avec soin, 4 hectolitre 492, et 273 d’hectolitre avec un semoir anglais. La volée lui a donné 35 hectolitres pour 4 hectare, et le semoir a moins bien réussi. Ajou- tant que parfois, du reste, les chiffres de rendement sont trompeurs, quand on donne le rendement dans un petit espace ou dans une grande culture. M. Ch. Gomart signale la supériorité des semis en ligne sur le semis à la volée; mais à la condition ex- presse de faire sarcler entre les lignes; car, sans le binage , les herbes parasites étoufferaient bien plus 7 146 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. facilement le bon grain dans les semis en lignes que dans les semis à la volée. Dans le nord du département de l’Aisne, on pulse à la main, depuis quelques années, le blé en lignes; et, avec de bons binages, on a obtenu des résultats supé- rieurs même aux semis en lignes. Le Comice de St.- Quentin a fait venir, il y a un an, le plantoir de M. Mangou. Cet instrument a été essayé dans le canton du Catelet; et, soit qu'il ait été mal manié, soit pour toute autre cause , l'expérience n’en a pas consacré l’usage. On est retourné à la plantation à la main, au moyen d’un instrument faisant deux trous dans lesquels un enfant met quelques grains de blé. M. Lecomite dit que le plus grand avantage du plantoir Le Docte et le plus grand service qu’il puisse rendre, est de répandre de l’engrais pulvérulent autour de la se- mence. Il signale plusieurs localités où ce plantoir est employé. M. Beaulieu répète ce qu’il a dit, il y a quelques jours, sur l’anglais Bull, qui avait inventé uw instrument introduit en France par Duhamel, cité, en 1751, par l'Encyclopédie, et en 1779, par l’abbé Poncelet, qui, du reste, le voulait changer; ce qui prouve que la méthode de planter le blé en ligne était fort ancienne. M. Calemärd de Lafayette convient de tout cela ; mais il insiste sur cet avantage de M. Mangou, qu’il est peut- être le seul en France à avoir ensemencé 10 hectares par un procédé peu usité et qui produit beaucoup. M. de Caumont dit que, dans la partie du Calvados qui produit les colzas, la mécanique aurait de grands avan- tages sur la main de l’homme. Le plantoir, s’il pouvait être appliqué au eolza , offrirait peut-être des avantages CONGRÈS DES ACADÉMIES 1/47 pour cette culture, quoique le travail fait à la main aille assez vite et soit très-satisfaisant ; il mentionne un jeune mécanicien normand, qui avait essayé de faire un instru- ment de ce genre, qui aurait planté plusieurs rangs de colza à la fois. M. Quénard cite le pays limitrophe de la Beauce, sol calcaire peu rude, où le blé est excellent et se paie au marché 5fr. de plus qu'ailleurs. Le blé y est planté en lignes, au moyen d’une houe à deux dents, par des femmes ou des enfants : on paie 40 ou 50 sous par arpent. Les semoirs perfectionnés ont été abandonnés, vu leur peu d’appropriation aux usages du pays. - Sur une demande de M. de Montreuil, M. Quénard dit que l’on récolte ainsi 174 de plus qu’on n’obtiendrait en semant à la volée. Ce pays est Courcelles, près de Pecquigny. M. Beaulieu déclare se joindre à M. de Lafayette pour rendre justice à l’instrument de M. Mangou. M. de Lafayette dit que, cette année, en Auvergne, le plantage a pris plus d'extension. M. de Lavergnée se joint à M. Beaulieu pour honorer M. Mangou , en exprimant ainsi l'opinion du Comice de Niort. M. de Cussy dit qu’en Basse-Normandie le plantoir a paru l'an dernier. Ce plantoir dépose la semence à 2 pouces de profondeur , et, pour la forme, se rapproche du plantoir à colza. M. de Montreuil dit qu’en effet, comme l’a dit M. Qué- nard , le plantoir est un perfectionnement dans certains pays, mais qu’il en est d’autres où il entraînerait des frais plus grands que les produits, ce qui rendrait alors le plantoir plus nuisible qu’utile. Il demande qu’on exa- 148 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. mine le plantoir pour les céréales comme ayant un avan- tage agricultural, comme donnant de l’ouvrage à plus d'ouvriers, et comme donnant plus de produits sans frais plus grands. A l’occasion de la XVI°, question, ainsi conçue : « Quels « résultats doit amener dans l’avenir l’association de l’in- « dustrie à l’agriculture? Quelles modifications pourront « être par là apportées dans les habitudes des cultiva- « teurs ? », M. Ch. Gomart cite les faits suivants, pour démontrer les avantages de l'association de l’industrie à l’agriculture. Dans l’arrondissement de St.-Quentin, où la fabrication du sucre de betteraves a été introduite en 1827, les fa- briques de sucre sont aujourd’hui au nombre de vingt- trois , indépendamment de deux distilleries et de trois nouvelles fabriques importantes en voie de construction. Quels ont été les résultats, pour l’agriculture , de l’intro- duction et du développement de la culture de la betterave dans cet arrondissement ? 4°. L'introduction, l'usage plus répandu d’instruments perfectionnés : le braban double , la charrue fouilleuse, l’extirpateur, le rouleau Croskill, les semoirs perfec- tionnés , tous indispensables à la bonne culture de la bet- terave. Ces instruments ne sont plus seulement fabriqués par des consiructeurs-mécaniciens; on trouve aujour- d’hui, dans nos campagnes, des maréchaux de village qui, comprenant le mécanisme des instruments aratoires per- fectionnés, sont en état de les réparer et même d'en construire d'excellents. 2°. La production de la betterave a forcé nos cultiva- teurs à améliorer leur culture par des labours plus pro- fonds, par le défoncement du sous-sol , par le marnage , CONGRÈS DES ACADÉMIES. 149 le drainage. Les terres, mieux nettoyées par le binage, ont donné de meilleurs produits en céréales ; par exemple , la moyenne de la production du blé, qui, dans les statistiques précédentes , n’était, dans l’arrondisse- ment de St.-Quentin, que de 44 hectolitres de blé à l’hec- tare , vient d’être constatée par le résumé des travaux des commissions de la statistique agricole de St.-Quentin, à une moyenne de 48 hectolitres de blé à l’hectare. 8°. Les produits de la culture de la betterave, après qu’on en a retiré le jus pour la fabrication du sucre , don- nentencore, dans la pulpe, une très-grande ressource pour la nourriture et l’engraissement du bétail ; il résulte , en effet, de l'expérience de plusieurs années , que la pulpe fournie par un hectare de betteraves, équivaut, pour la nourriture du bétail, au produit en foin de 4 hectare de terre. Ainsi, la betterave fournit non-seulement un pro- duit très-riche par son jus, mais encore elle donne par sa pulpe le moyen d’engraisser un grand nombre d’ani- maux qui donnent, par leurs fumiers, les moyens d'entretenir la fertilité de la terre ; et ces engrais sont d'autant meilleurs qu’ils proviennent de bestiaux en- graissés avec de la pulpe mélangée de tourteaux. Enfin, Messieurs, au moment où l’on se plaint généra- lement de la propension des populations des campagnes à affluer dans les villes, nous vous signalerons que , dans l'arrondissement de St.-Quentin, la population des cam- pagnes n’a pas diminué depuis dix ans, et dans les villages où se trouvent les fabriques de sucre, les ouvriers se nourrissent mieux, ont plus d’aisance que dans les com- munes purement agricoles ; ils ont de l'ouvrage pendant tout l’hiver et dans le moment où les travaux des champs sont suspendus partout. 450 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, M. Ch. Gomart conclut des faits qu’il vient de citer que l'association intelligente de l’industrie à l’agriculture sera , suivant la nature du sol, le climat et les circon- stances, la source d’un progrès réel pour Pagriculture. M. de Caumont dit que le colza, qui est aussi une plante industrielle, a produit dans le Calvados un bien immense. Il approuve tout-à-fait les vues de M. Gomart. M. Quentin-Durand dit avoir apporté des notes sur le drainage , dont il désire donner connaissance. M. le baron Ivan Bratel est le premier, dit-il, qui, à ma connaissance, nous ait fait connaître le drainage par perforation, pratiqué dans la Gueldre hollandaise en toutes saisons , en perçant des trous perpendiculaires de 1 mètre 50 centimètres, à l’aide d’une sonde et d’ou- vriers ordinaires , et sans endommager les cultures. Ces trous sont ensuite remplis par des bâtons ou perches dont le nombre peut s’élever, suivant le baron Ivan Bratel à 6,000 par hectare. Ce drainage perpendiculaire , si facile à exécuter, pré- sente, comme on le voit, une grande économie sur le drainage à tuyaux placés horizontalement ; si l’on réflé- chit ensuite que la couche imperméable peut être une glaise plastique , ne serait-il pas naturel de croire que la perche, au lieu de remplir le trou, devrait être plus petite, afin de laisser de suite filtrer les eaux, sans atten- dre que cette perche se pourrisse pour leur livrer passage. Cette première réflexion m'a conduit à une seconde : je me suis dit, toujours en supposant de la glaise plas- tique qui ne se délaiera jamais avant d’avoir été desséchée à l'air libre, je me suis dit : à quoi bon des perches ? les trous formés par une extraction de glaise ne pourront se refermer du moins pendant long-temps; ils pourraient CONGRÈS DES ACADÉMIES. 151 se remplir de terre arable, perméable, à travers la- quelle filtreraient les eaux surabondantes, et on économi- serait 6,000 perches par hectare. J'ai communiqué cette idée à un cultivateur de Seine- et-Marne, M. Desbiroux, qui a acheté une sonde de 4 mètres, et va drainer 100 perches de ses terres. M. de Caumont dit que largile viendra toujours bou- cher les trous, ce qui rend ce système impraticable dans bien des terrains. Il ne peut, d’ailleurs, sous bien des rapports , produire le même effet que le système ordi- naire. M. de Bouis ne prétend pas parler de la Hollande, qu’il ne connaît pas, ni, par conséquent, se placer au point de vue de l’auteur hollandais cité par M. Quentin-Durand. Il demande dans quelles communes on a employé ce sys- tème, qu’il croit inapplicable en général, quoique pos- sible dans certaines localités. M. de Montreuil dit que ce drainage est dispendieux , si l’on met des perches perpendiculaires dans le sol; nul, si l’on n’en met pas, vu que les trous se bouchent. M. Quentin-Durand maintient son opinion première. M. le Président parle d’un moyen employé à défaut de drainage : forer des trous remplis ensuite de matières terreuses perméables, mais il conclut à préférer le drai- nage dans la plus grande partie des cas. Il dit que , du reste , la profondeur du forage permet de diminuer le nombre des trous. Il ajoute que le drainage ne peut s’appliquer également à tous les pays ni à toutes les natures de sol. M. de Cussy demande à M. de Caumont quels résultats lui a fournis le drainage de terrains argilo-plastiques. 152 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, M. de Caumont n'a fait drainer que 3 hectares dans de l'argile d'Oxford , et a obtenu un ruisseau d’eau lim- pide résultant de ses drains. Ces résultats datent de la seconde année de drainage ; les terres ont porté d’assez bonnes récoltes. M. Rondeaux-Pouchet a eu de beaux ré- sultats sur une grande étendue de terrain; MM. Binet et de Bonvouloir également ; aussi les antagonistes du drainage ont-ils commencé à lui rendre pleine justice. M. de Cussy cite aussi MM. Mosselman et Du Moncel, dans la Manche. | M. de Caumont dit que les prix n’ont pas encore diminué et restent à 25 fr. les mille tuyaux de 30 centimètres. R. DE BEAUFORT. of vVY SÉANCE GÉNÉRALE DU DIMANCHE 25 MARS. (Présidence de M. DarcEL). DISTRIBUTION DE MÉDAILLES. M. de Caumont appelle au bureau MM. Darcel, Mabire, de Cussy et Gaugain. M. de Caumont expose au Congrès que la Société fran- çaise d'archéologie pour la conservation des monuments a jugé bon de provoquer une exposition artistique à Avran- ches. Sous cette dénomination, la Société entendait une exposition comprenant tout ce qui se rattache à l'art: peintures, sculptures, etc.; et, en même temps, meubles, orfévrerie, tissus , ornementation religieuse , etc. CONGRÈS DES ACADÉMIES. 155 M. le Directeur général se hâte de proclamer que l’ex- position a été extrêmement brillante. De nombreuses récompenses, soixante-deux médailles, ont été distri- buées sur les lieux: mais il restait à rémunérer un certain nombre d’exposants de Paris et de quelques autres lo- calités éloignées d’Avranches. Ce sont les médailles des- tinées à ces exposants qui vont être distribuées aujour- d’hui. M. de Chennevières avait bien voulu promettre de faire lui-même, aux lauréats, la remise des médailles. En l’absence de M. de Chennevières, empêché par ses travaux multipliés, son ami et collègue, M. Darcel, pré- sidera à cette solennité. M. de Caumont appelle les noms jé lauréats dans lordre suivant : Médaille de vermeil. — À M. Lefebure, fabricant de dentelles, à Paris et à Bayeux. — A M. Hubert-Ménage : tissus et ornements d'église, exécutés sous la direction du R, P, Arthur Martin. — A M. Poussielgue : orfévrerie re- ligieuse, toujours sous la direction du R, P. Arthur Martin. PEINTURE. Médaille d'argent. —A M", Louise de Gui- mard, de Paris (un tableau qui a été immédiatement acheté par le musée d’Avranches). — A M. de Montzey : travaux de sculpture. — A M. Victor Petit : travaux d’ar- chitecture. (Plusieurs publications importantes. ) — A M. Bataille, peintre à Versailles : dessins, vos etc. — À M. Thierry : orfévrerie religieuse. Par l’Association normande pour les progrès de l’agri- culture et de l’industrie : Médailles d’argent, — A M. le marquis D'Argent , pour son exposition de produits agricoles. — A M. Fleury, fermier dans l'Eure : bonne tenue des cultures. 4 154 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Cette proclamation de médailles est accueillie par d’unanimes applaudissements. Plusieurs des lauréats sont venus les recevoir, au milieu des marques de lævive sym- pathie de l’Assemblée, des mains de M. Darcel et des au- tres membres du bureau. M. le Directeur général prend ensuite la parole pour annoncer que l’exposition qui a si bien réussi à Avran- ches, sera renouvelée, cette année , à Caen. L'exposition des objets d'art devra durer 25 jours, elle ne durera que 4 jours pour les objets agricoles. Les produits artistiques devront être arrivés avant le terme fatal du 10 juin. Les produits agricoles devront être parvenus à Caen, avant le 3 juillet. M. Raymond Bordeaux tient à ce que lesexposants soient bien prévenus que l'exposition artistique devra être com- prise dans toute l'extension du mot. Ainsi, on voudrait y voir représenter les produits de l’art du lapidaire, la statuaire coloriée , dorée , etc. ; l’orfévrerie, les émaux, les tissus et ornements de luxe, la typographie même ; en un mot, toutes les industries qui relèvent de l’art du dessin et des lois de l& forme. En un mot, il est fait appel à toutes les industries où le goût et l'imagination tiennent la plus grande part. M, de Caumont ajoute que la ville de Caen mettra à la disposition des exposants des locaux très-considérables. La Préfecture offre aussi l'hospitalité à quelques-uns des produits. Les vitraux, par exemple, qui seront très- remarquables en nombre et en beauté, seront très-con- venablement placés. + M. le Directeur général recommande chaleureusement Pidée de pareilles expositions au patronage éclairé du Congrès et des Sociétés savantes. ME D CONGRÈS DES ACADÉMIES. 155 Le Congrès se forme en séance générale sous la prés - dence de M. le général Rémond. | M. le général Rémond, président, appelle au bureau MM. le marquis de Beausset-Roquefort, Bizeul et de La Chauvinière. L'ordre du jour appelle la discussion de Particle du programme ainsi conçu : « Quels ont été les progrès « de la pisciculture en 1854? » M. Quénard a la parole. Son intention n’est pas d'aborder la question de la fécondation artificielle, qui n’est qu’un des côtés, et même un côlé secondaire de la pisciculture; ce qui lui semblerait important, ce serait surtout l'élevage et l’aménagement du jeune poisson. M. Quénard fait ici une rapide analyse d’un mémoire présenté, par lui, à la Société centrale d'agriculture, et dont il sera heureux de faire prochainement hommage au Congrès. Dans ce mémoire, le zélé praticien donne les indi- cations sur la manière de multiplier le poisson, à l’aide de frayères naturelles. Il montre ensuite dans quelles conditions il est possible d'amener les jeunes produits à un développement rapide: et fructueux pour le pisci- culteur. M. Quénard conclut que , sans dédaigner les tentatives nouvelles qui ont été faites pour l’acclimatation et la multiplication des poissons de haute valeur, en laissant, par exemple, à la fécondation artificielle, un rôle important pour certaines circonstances , il faut re- connaître qu’il y a surtout énormément à faire pour tirer tout le parti le plus avantageux du poisson plus commun des étangs et cours d’eau circonscrits. La carpe, la tanche et le brochet donneront de beaux résül- tats, partout où on les traitera par des procédés rationnels. \ 156 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. La parole est à M. Millet pour indiquer les perfection- nements introduits dans la pratique, depuis ses commu- nications au Congrès de 185/. M. Millet rappelle qu’il a fait, l’année dernière, l’ex- posé des méthodes existantes. Cette année , il se bornera donc à faire connaître quels progrès ont été accomplis. Qu'est-ce que la pisciculture ? Au point de vue le plus général , c’est la culture , toute la culture des eaux, en ce qui concerne tous les produits de la pêche. La fécondation n’est donc pas la pisciculture. Les points les plus importants à étudier tout d’abord, ce sont les mœurs , les habitudes des poissons, lorsqu'ils procèdent à la ponte. Pour bien s'entendre , il faut commencer par préciser le sens des mots. La frairie naturelle, c’est l’acte de la reproduction du poisson ; le frai est le produit de cet acte, c’est-à-dire l’œuf fécondé; la frayère est l'endroit où s’accomplissent la ponte et la fécondation. Une première observation : La fraie est presqu’entière- ment subordonnée à la température des eaux ; leur com- position chimique n’a qu’une influence secondaire. — Lorsque le poisson est en pleine fraie , si la température s’abaisse brusquement, le poisson cesse aussitôt de frayer. Les carpes commencent à frayer à la température moyenne de 25°; que la température descende à 16 ou 47°, la fraie s'arrête immédiatement. Pour d’autres poissons , tels que le saumon, la truite, l'ombre, etc. , la chaleur au con- traire est funeste. Au-delà de 22 à 23°, ils ne fraient plus. — L'insuccès dañis la fécondation a souvent tenu à cela : pour la truite, s’il fait trop chaud , et pour la carpe, s’il fait trop froid, les œufs périssent. Il faut donc tenir grand compte de la température. Dans la ponte, les poissons se comportent diversement, CONGRÈS DES ACADÉMIES. 157 suivant la famille à laquelle ils appartiennent. On sait qu’il faut distinguer les poissons en deux classes, les migrateurs et les non migrateurs. Le saumon et la truite de mer quittent les eaux de la mer pour la ponte. Ils s'engagent dans les fleuves et remontent jusqu’à leur source pour chercher des eaux suffisamment fraîches et cependant qui soient exemptes de la congélation. Ces poissons ne pourraient frayer dans l’eau salée ; le sel détruit le germe de l’œuf et entrave le mouventdes spermatozoïdes. Or,ce mouvement des sper- matozoïdes , d’après les observations de MM. de Quatre- fages et Millet , ne dure qu’une trentaine de secondes. La laitance, ou principe fécondant, n’a de puissance qu’autant que les spermatozoïdes sont encore en mouvement. Il faut donc, que dans la fécondation, il y ait un contact presqu’immédiat entre la laitance et les œufs. Ainsi, l’eau salée tuant les œufs et entravant les mou- vements des spermatozoïdes, la truite, le saumon, ne pourraient frayer dans l’eau de mer, de là leur émigration. La famille des salmoneides recherche, de plus, des eaux douées de certaines conditions particulières. L'eau trouble et vaseuse rend la fécondation difficile et l’éclosion incertaine. La chaleur, comme on l’a vu, nuit aussi à l'œuf de la truite et du saumon; il faut donc pour cette famille rechercher, comme elle le fait elle-même, la limpidité et la fraîcheur des eaux. Il convient, pour obtenir une éclosion satisfaisante , de rester même au-dessous de 10°, soit de 4 à 6. : Les migrateurs , pour atteindre ces eaux à leur conve- nance , recherchent la proximité des sources ; il leur faut de plus un lit composé de cailloux, de pierres, ou de gros graviers. Les femelles y creusent des trous qu’elles . 158 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. débarrassent de toutes les matières nuisibles , animales ou végétales : elles enterrent ensuite leurs œufs par le procédé que voici : la femelle se place en avant du nid, plus ou moins loin , suivant que le courant est plus ou moins rapide, Elle se frotte contre le gravier, les œufs s’épanchent et vont tomber, entraînés par le courant, dans le nid creux. Le mâle, qui se tient derrière la femelle, se hâte de les arroser par quelques gouttes de laitance, dont le contact les féconde instantanément ; la femelle alors recouvre le nid avec du sable, des graviers, etc. Jamais tous les œufs ne sont placés dans un même nid: plusieurs nids, et à plusieurs jours d’intervalle, reçoivent la ponte d’une même femelle. Dans la frayère artificielle, il est facile d’imiter ces procédés naturels. Pour arriver à de sérieux résultats dans l’empoissonne- ment en grand, il faudrait obtenir la fraie naturelle dans des frayères artificielles. La fécondation artificielle doit rester une ressource secondaire , utile surtout pour transporter les œufs fé- condés à distance, lorsqu'on ne peut se les procurer sur les lieux. Rien de plus simple à organiser qu’une frayère artificielle. En jetant des graviers dans les eaux , si elles n’en ont pas et en y introduisant la truite mâle et femelle en peut espérer le succès, pourvu que les eaux aient les conditions convenables de limpidité et de température. M. Millet a parfaitement réussi à faire frayer des truites dans des fossés de tourbières , en y jetant quel- ques brouettées de graviers. M. de Vibraye a opéré de même. Voilà pour les poissons qui enterrent leurs œufs, en les produisant à l’état libre. Pour ceux-là il faut du sable, des graviers, etc. ; pour ceux, au contraire, dont les L CONGRÈS DES ACADÉMIES. 159 œufs vont se fixer en adhérant quelque part, il faut des lits de gazon , des brindilles , etc. Des faits observés pour la première catégorie, on a été _ amené à une conclusion de la plus haute importance : puisque la truite enterre ses œufs, la lumière ne leur est pas utile; eh bien ! l'observation a prouvé qu’elle était non-seulement inutile, mais nuisible. Le soleil tue les œufs de la truite et du saumon; c’est là un fait acquis. Les expériences de M. de Tocqueville ont récemment confirmé celles de M. Millet : 4,000 œufs d’une même truite ont été fécondés avec succès, 2,000 ont été vus sur la surface de l’eau en pleine lumière. Il en a péri 1,463, et M. Millet prédit qu’il n’en survivra pas un. Les 2,000 autres ont été mis à l’abri de l’action de la lumière; il n’en a péri que 832; ce n'est pas la chaleur qui a pu agir et il faut remarquer que le temps est resté constam- ment obscur dans la période où on a opéré; ce n’est pas la chaleur qui a pu exercer une influence funeste, c’est évidemment la lumière, elle seule.—I1 s’agit toujours ici, comme on la dit, des poissons qui enterrent leurs œufs, tels que le saumon , la truite, l’ombre-chevalier. M. Millet indique ensuite que, comme préservatif de ja lumière, il suffit de recouvrir les tamis avec des herbes aquatiques ou de toute autre façon ; on peut aussi orga- niser les tamis de manière à ce qu’ils soient un peu sub- mergés : pendant l’incubation surtout, le tamis doit enfoncer davantage ; après l’éclosion, il faut rapprocher les jeunes poissons de la surface de l’eau. M. Millet explique alors au Congrès, en lui présentant les appareils dont il se sert, en quoi ils ont été perfec- tionnés depuis l’année dernière. Passant à la question de l'alimentation du poisson, =. 160 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. M. Millet constate que sa manière de voir diffère en ce point de celle de la plupart des pisciculteurs. On croit trop généralement qu'il faut se préoccuper de très-bonne heure de la nourriture à donner au jeune poisson , et qu'avant de le disséminer dans les eaux, il est nécessaire de lui procurer artificiellement un aliment quelconque ; on a conseillé les viandes hachées ou pilées, le sang cuit, etc.; tout cela occasionne des dépenses et surtoutdes soins, des manuténtions difficiles. M. Millet estime qu’on donne rarement à l’alevin ce qui conviendrait le mieux à la période où il se trouve encore, et, quant à lui, il croit tout espèce de nourriture artificielle à peu près inutile. Il y à en suffisance dans les eaux des larves, des ma- tières tenues, des matières organiques, végétales ou animales très-appropriées aux besoins du jeune poisson. Une nourriture trop substantielle est mauvaise : le poisson prend d’ailleurs, quand on fait trop pour lui, des habi- tudes d’incurie et de paresse avec lesquelles il devient facilement la proie de ses ennemis. En somme et tout bien pesé, M. Millet croit inutile de nourrir le jeune poisson. Ce qu’il y a de mieux, c’est de le disséminer dans les eaux dès que la vésicule ombilicale, qui sert à l’alimenter dans les premiers temps, a à peu près com- plètement disparu. Pour le transport des œufs, il y aurait encore un mot à dire : en alternant, dans les boîtes, un lit de linge ou de mousse humide et un lit d'œufs, on peut les faire voyager à de très-grandes distances sans inconvénient, et quand cet emballage a été porté assez loin, non-seulement les œufs ne souffrent pas d’un transport de trente à quarante jours, mais une partie du travail d’incubation s’accom- plit dans de bonnes conditions. CONGRÈS DES ACADÉMIES. 4161 Une dernière observation doit être faite, à propos des appareils. Le cuivre et le zinc surtout ne doivent pas se rencontrer simultanément dans les tamis. Ils font, par le fait des influences électriques, un effet fâcheux sur les œufs. Des tamis en bois, avec toiles métalliques en zinc, méritent la préférence. — Quand les œufs sont dans les tamis, il importe encore de ne pas les déplacer, de ne pas chercher à les nettoyer ni avec une plume, ni avec un pinceau. Les œufs déplacés donnent des poissons difformes ou contrefaits. Abordant la question de l’acclimatation d’espèces nou- velles, M. Millet pense que ce qu’il y a de mieux à faire, c’est de multiplier nos meilleures espèces indigènes, sans aller chercher, sans certitude de succès, des poissons qui ne valent pas les nôtres. On parle du sau- mon du Danube, dont les dimensions sont énormes ; mais sa chair est blanche, par conséquent inférieure ; de plus, il n’atteint ses proportions ordinaires qu’au prix d’une dévastation considérable. Nous avons les meilleures espèces de saumons, de truites ; nous avons l’ombre, l’ombre-chevalier , ce sont là des poissons excellents. Dans un ordre moins recherché, nous avons la carpe, le brochet, le barbot, l’anguille : multiplions-les en don- nant toujours la préférence à ce qu’il y a de mieux, et nous arriverons à repeupler de poissons de grand prix tous nos cours d’eau, sans importation de nouveautés douteuses. Fournissons ensuite, pour leur alimentation naturelle, ce qui leur convient le mieux, le véron, la loche, le goujon, qu’on peut faire pulluler en des pro- portions énormes , à l’aide de frayères artificielles. Ily aura encore le frai de grenouilles, si abondant partout, et tant d'espèces de coquillages; tout cela constituera 162 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. une abondante nourriture naturelle, bien préférable à toute autre. Reste la question de réglementation des eaux. Les réglements sont incomplets, insuffisants; on n’a rien ou presque rien fait de bon pour la conservation, pour la préservation des poissons. Ici, M. Millet emprunte à une brochure , récemment publiée par lui, un ensemble de mesures qu’il engage les Sociétés savantes à recommander à l'attention des conseils généraux , el qui auraient pour but de parer à la dévastation des eaux. La discussion s'établit sur les diverses indications. M. Destourbet demande s’il est possible de déterminer exactement les époques de la fraie, pour chaque espèce de poissons, et pour chaque cours d’eau. M. Millet répond que cette détermination est essen- tiellement variable. La fraie dépend surtout de la tem- pérature ; et, dans la même rivière, elle ne s’opère pas simultanément sur tous les points et pour toutes les espèces. Il y aurait lieu, selon lui, de favoriser toujours , par la réglementation , la multiplication des espèces les plus méritantes. M. Mabire est plein de sympathie pour les efforts de la pisciculture. Maïs, dans l'intérêt du repeuplement , il ne voit rien de supérieur à une bonne garde. Les moyens de destruction augmentent tous les jours; les moyens de police semblent diminuer. On vient de nous dire que la truite enterre ses œufs dans la frayère ; le braconnier vient les prendre au moment de la fraie, et ses engins dérangent et détruisent les œufs après avoir saisi la mère. M, Mabire s'associe donc au vœu exprimé par M. Millet pour l'interdiction de la vente du poisson en témps de fraie. Au voisinage des usines, il se produit des faits qui sont CONGRÈS DES ACADÉMIES. 463 un véritable brigandage. Les usiniers font curer les cours d’eau, les braconniers sont à la piste et dépeuplent tout. M. Mabire voudrait que, sur l'initiative du Congrès, on s’occupât enfin des usiniers. En somme, il demande que l’on fasse ou que l’on applique une réglementation sévère pour la pêche. Il insiste aussi sur les modifications des curages des cours d’eau. M. de Caumont appuie l'opinion de M. Mabire. On ne sait pas assez combien c’est un immense malheur d’être dans le voisinage des usines. Le propriétaire riverain se trouve grevé des plus dures servitudes. M. Bordeaux signale aussi des faits très-graves dans le même sens. Il se plaint énergiquement de l'abus des curages. Mais il voit bien des difficultés pour établir de nouveaux réglements, capables de sauvegarder tous les. intérêts. Le général Rémond fait observer que les cours d’eau tendent toujours, par le fait de l’envasement , à hausser. Les usiniers et les ponts-et-chaussées voudraient main- tenir les niveaux. Mais il admet que les curages devraient se faire sous une surveillance sévère et avec des pré- cautions convenables. Il signale ensuite, comme une autre cause grave de dépeuplement, les résidus des établisse- ments industriels, qui empoisonnent bien souvent les rivières. Les résidus ne devraient pas être déversés dans les eaux; l’agriculture profiterait souvent ainsi de irès-bons engrais, et le poisson s’en trouverait mieux. | En somme, l’honorable général demande, avec les préopinants, qu’on tienne la main aux réglements , s'ils existent; qu’on en fasse , s’ils n’existent pas. M, Duval de Fraville pense que les faits signalés ont 164 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. trop de gravité, pour qu’il soit possible de laisser la dis cussion sans conclusion. . Il propose au Congrès d’émettre un vœu en faveur des mesures suivantes : Prohibilion de la pêche, laissée à la discrétion des pré- fets ; Poursuite sévère de la vente du poisson en temps pro- hibé. M. de Fraville demande l'assimilation du poisson au gibier, et qu’en conséquence on né puisse plus pêcher sans un permis de pêche. En élevant le prix du permis de chasse au profit des communes , on a intéressé les habitants à la répression des délits qui avaient pour objet la destruction du gibier, Avec un permis de pêche, on réprimera de. même le braconnage qui s'exerce impudemment sur les cours d’eau. M. Mabire appuie l’idée d’astreindre tout pêcheur à l'obligation d’un permis. M. R. Bordeaux ne saurait admettre l'assimilation du poisson au gibier. 11 redoute d’ailleurs tous les empiète- ments qui peuvent conduire à dénaturer les droits de la propriété. M. Ch. Calemard de Lafayette se demande si, en cette matière comme en beaucoup d’autres, c’est bien réelle- ment au défaut ou à l'insuffisance de la législation qu’il faut s’en prendre. On a cité dans la discussion des faits très-graves de braconnage sur des propriétés privées; est-ce que, dans ces cas, les propriétaires n'étaient pas protégés par un droit, plus fort et plus incontesté que tous les réglements administratifs? On a parlé de l'empoison- nement du poisson à l’aide de la coque ou de la chaux, CONGRÈS DES ACADÉMIES. 165 est-ce que ce n’est pas là un délit bien caractérisé et suffisamment prévu par la législation? Ce ne sont donc ni les lois ni les réglements qui nous manquent; mais bien la ferme et constante application des réglements et des lois ; c’est surtout la surveillance sévère ; il est donc moins nécessaire de demander une bonne loi que d’ar- river à avoir de bons gardes. Le tricorne du gendarme est respecté ; mais la plaque du garde ne l’est pas. Comment veut-on obtenir une surveillance et une répression efi- caces, lorsqu'on peut craindre, à bon droit, la connivence du garde et du délinquant? et il en sera toujours ainsi, tant que le garde, avec un salaire insuffisant, sera, dans la commune, le timide camarade ou le très-humble ser- viteur de tout le monde. Qu'on surveille et qu’on garde convenablement les cours d’eau; qu’on réprime les infractions aux lois et aux réglements existants, à peine aura-t-on besoin de la pis- ciculture pour repeupler les rivières. Quand on n’em- poisonnera plus le poisson, quand on ne détournera plus les cours d’eau pour pêcher à sec , ce ne seront pas quelques pêcheurs à la ligne de plus ou de moins, avec ou sans permis de pêche, qui feront de bien grands dom- mages. En résumé, application sévère des lois et réglements existants, répression efficace des délits du braconrage , voilà ee que le Congrès doit demander avec instance ; et, pour atteindre ce but , l'embrigadement des gardes-cham- pêtres semble la condition indispensable , l'amélioration sérieuse , vers laquelle il faudrait pousser énergiquement les Conseils généraux. Ces conclusions reçoivent l'adhésion du Congrès , qui tient surtout à mettre en évidence les faits de dévastation 166 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. déplorable et les grands inconvénients des curages , si- gnalés dans le cours de la discussion. La séance est levée. Le Secrétaire , G. DE Bours. SECTION D’AGRICULTURE. SÉANCE DU 26 MARS 1855. ( Présidence de M. pe MonrreuIz. ) La section entend la communication suivante , de M. Lecomte, de la Sarthe, greffier en chef de la Cour des comples. NOTICE SUR LA CULTURE EN QUINCONCE AU MOYEN DES INSTRUMENTS INVENTÉS PAR M. LE DOCTE. Ces instruments consistent dans : 4°, Un plantoir mécanique déposant simultanément (et c'est un des principaux mérites de l'invention) avec une quantité de semence déterminée à l’avance pour chaque pochet, un engrais pulvérulent approprié à la nature du sol et de la plante ; 2%, Un rayonneur-sarcloir, servant encore à biner et même à butter et à rouler au besoin, lequel n’est composé que d’un seul corps de brouette auquel s’adaptent diverses pièces de rechange , suivant l’usage spécial Lie ’on veul faire de cet instrument. CONGRÈS DES ACADÉMIES, 467 Ces deux instruments sont d’un maniement facile et d’un prix modéré : des femmes, des enfants même, peu- vent les faire fonctionner. Ils économisent à la fois la main-d'œuvre , la semence et l’engrais dans d'assez fortes proportions; et, par une meilleure distribution de l’air, de la lumière et de l’en- grais, ils assurent infailliblement la bonne végétation des plantes et une augmentation de produits qui s’élève gé- néralement du quart à la moitié, et quelquefois plus par hectare. Ces instruments ont été l’objet de brevets pris en Bel- gique, en Angleterre, en France, en Hollande et en Prusse. De nombreux essais ont été faits en Belgique depuis quelques années, et tous ont donné des résultats très- satisfaisants , ainsi qu’on le peut voir dans la brochure dont M. Van Langenhove a fait hommage au Congrès, qui renferme en outre des détails statistiques très-inté- ressants pour les hommes pratiques. ( Voir notamment, pages 43 et 26, deux rapports, l’un de M. le chevalier Peers, membre de la Chambre des représentants de Bel- gique, et l’autre de M. le marquis de Renneville, d'Amiens, qui s’est rendu tout exprès en Belgique pour apprécier l'application du système Le Docte). Les Annales de l’agriculture française, n°. du 45 décembre 1854 , et le Journal d'agriculture pratique, _n°. de décembre 1854 , ont aussi publié des articles très- détailléssur les instruments de M. Le Docte, et ce qui aura surtout une grande valeur aux yeux du Congrès, c’est Pextrait que ces journaux donnent d’une lettre par la- quelle M. Dailly , l’un de ses membres , et si connu par le soin intelligent qu’il apporte à la culture de sa pro- 168 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. priété de Trappes, constate la notable augmentation des produits en betteraves qu’il a obtenue par l'emploi de la méthode de M. Le Docte, augmentation qui s’élève à près de moitié en sus du rendement ordinaire (de 33,500 kilog. par hectare à 47,500 kilog.) et qui l’a déterminé à planter cette année toutes ses betteraves au moyen des instru- ments Le Docte. | On voit aussi, par un article inséré dans l'Indépendance belge (n°. du 13 janvier 1855), que des résultats très- avantageux ont élé obtenus chez M. le comte Visart, à Ste.-Croix , Sur le colza, et chez M. le baron Woelmont, à Oplieux, sur la culture des navets ; que de plus le Gou- vernement belge a nommé une commission, présidée par un inspecteur général d'agriculture, pour faire faire, dans le cours de l’année dernière, des expériences sur les cé- réales et beaucoup d’autres plantes dans les exploitations de MM. Letellier , à Ath (Hainaut ) et Jadoul , à Frésin (Hesbaye). Le journal ajoute qu’il croit savoir que les résultats obtenus sont des plus surprenants. Cette année , ces Messieurs ont entrepris à forfait des ensemencements considérables, tant en Belgique qu’en Hollande. M. Van Langenhove, qui est en France le représentant de M. Le Docte et se dévoue, avec une ardeur infatigable, à la propagation de ce nouveau mode de culture , quoique fort des succès déjà obtenus et bien constatés , a encore désiré que le Gouvernement français fit faire, de son côté, des expériences de même nature, et surtout qu’elles fussent l’objet d’une constatation officielle, M. le Ministre de l’agriculture, appréciant les avantages que la France pourrait retirer de ce nouveau et ingénieux mode de cul- ture , s’est empressé de déférer à ce vœu en décidant que CONGRÈS DES ACADÉMIES, 169 des expériences comparatives auraient lieu dans les écoles impériales de Grignon (Seine-et-Oise) , Grandjouan (Loire-Inférieure } et la Saulsaie (Ain), ainsi qu’à la bergerie impériale de Gevrolles (Côte-d'Or ). D'un autre côté, de grands propriétaires, de grands industriels, parmi lesquels on peut citer MM. de Cromb- becq, à Lens (Pas-de-Calais) : Lanet et Charbomeur , à Tournus (Saône-et-Loire), qui dirigent chacun une im- portante fabrique de sucre indigène , se sont entendus avec M. Van Langenhove, pour faire une large applica- tion de la méthode Le Docte à la culture des betteraves. En ce moment même , M. Van Langenhove est occupé à préparer de nombreuses cultures à la colonie agricole de Mettray (Indre-et-Loire) et à y organiser une fabrique de ses instruments. M. Lecomte , convaincu de l'intérêt avec lequel le Con- grès, si justement préoccupé des améliorations agricoles, verrait les instruments inventés par M. Le Docte, aengagé M. Van Langenhove à venir les lui présenter et à donner les explications propres à les bien faire apprécier. Malheureusement M. Van Langenhove a été obligé de partir immédiatement pour Mettray. Il a alors chargé M. Lecomte d'exprimer au Congrès le vif regret qu’il éprouvait de ne pouvoir paraître devant cette honorable assemblée , et il a autorisé M. Lecomite à présenter , en son lieu et place, les instruments de M. Le Docte. M. Lecomte, quoique peu compétent à cet égard, a cru devoir rédiger à la hâte la notice ci-dessus, qu’il aeu l’hon- peur de remettre au Congrès, et pour laquelle il réclame toute son indulgence. M. de Montreuil pense qu’il faut d’abord soumettre à 8 170 INSTITUT. DES PROVINCES DE FRANCE. la discussion l'instrument en lui-même, puis il restera à savoir quels seront les avantages de son application ; comment il modifiera les frais de culture; si l’augmen- tation des produits dédommagera de son acquisition. M. Mabire admire les efforts de la mécanique pour satisfaire aux besoins de l’agriculture et les avances, si pleines de séduction, que leur font les constructeurs de machines. Il craint que l’instrument de M. Le Docte ne soit pas aussi généralement applicable dans la grande cul- ture que paraissent le croire son inventeur et l’honorable membre qui a bien voulu en entretenir l’Assemblée; il lui semble que c’est plutôt un meuble dejardin, bon pour les terres qui se trouveront situées en plaine ; il sera difficile de le faire manœuvrer dans les terres en pente. La moindre humidité empêchera l’action du petit rouleau de sente, destiné à rouler, à tasser la terre, donton a recouvert la semence. L'opération du semis en place, qui serait une conséquence de l'adoption de linstru- ment, lui paraît une opération toujours faite trop tôt; il croit la pratique des semis et des repiquages préfé- rable. A l’époque de ces semis, il ne fait pas toujours beau temps. Lorsqu'on fait ces semis en couche, on a tout le temps nécessaire pour bien labourer sa terre, pour la nettoyer de toutes les mauvaises herbes, ce qui est certainement un des points les plus importants pour assurer le succès des cultures des plantes sarclées, betteraves ou autres. Il a vu cultiver les betteraves plan- tées en quinconce, mais assez grandement espacées pour qu’on pût, avec une petite charrue ordinaire , labourer dans les deux sens pour ameublir, nettoyer le sol, etc. Ce moyen simple de sarclage lui paraît d’une exécution plus facile que celui qu’on voudrait opérer à l’aide d’un CONGRÈS DES ACADÉMIÉS. 471 cheval trainant derrière lui trois brouettes de ce genre qu’il sera impossible de maintenir dans l'alignement qu’elles doivent parcourir. Il faut faire biner de bonne heure, et il ne sera pas facile de distinguer alors les lignes de betteraves qui se trouveront confondues avec les mau- vaises herbes. Pour aller droit, il faudra une bien grande attention. Si l’on veut opérer à bras d’hommes poussant devant eux l'instrument, pour peu que la terre soit compacte , ils éprouveront une telle fatigue qu’on sera obligé de renoncer bientôt à son emploi. M. de Caumont fait remarquer que, malgré les obser- vations judicieuses qu’il vient d'entendre, il regarde l'in- strument proposé comme utile dans quelques circon- stances. Il sait qu’on l’a expérimenté; qu'on s’en est servi avec avantage ; il serait porté à croire qu’il trouve- rait une application utile dans le Calvados, près de Caen, où, dans les terres légères divisées en petites exploitations, on se livre avec beaucoup d’activité à la culture des bette- raves, des carottes et des autres plantes sarclées. Il pense que ses industrieux compatriotes apprécieraient un instrument à main de ce genre. Il se propose d’en donner l'exemple sur son exploitation. il engage donc l’inventeur à exposer son instrument au concours agricole , qui aura lieu le 4 juillet prochain, dans la ville de Caen. Il sait que M. Dailly s’en est servi avec un grand profit dans sa ferme de Trappes, et cela seul doit rassurer sur son emploi. M. Mabire ayant dit que les semis en place pour le colza se faisaient en même temps que les semis faits en vue de repiquage, M. de Bouis a relevé cet oubli de sa part, en disant que les semis en place se faisaient vingt ou trente jours plus tard. | 172 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. M. de Bouis pense que le colza, replanté au moyen du piquet arrangé à cet effet, réussit beaucoup mieux dans le département de la Seine-Inférieure que les semis en place, ces semis ayant souvent beaucoup à souffrir des rigueurs de l'hiver et de l'humidité. M. Lecomte regrette que l'inventeur n'ait pas pu se rendre au congrès : il eût été, sans doute, beaucoup plus capable de répondre aux critiques qu’on vient de faire ; sa parole eût eu plus d’autorité. Cependant, il lui semble qu’il suffit de répondre que tous les inconvénients dont on vient de parler ne se sont pas rencontrés dans la pratique ; que l'instrument a été employé dans les grandes comme dans les petites exploitations, etc.; qu'ilyaen Hollande et en Belgique plus de 3,000 hectares cultivés en quinconce, suivant la méthode indiquée par M. Le Docte, avec les instruments qu’il a inventés pour cette culture : le rayonneur-sarcloir mobile et le plantoir à deux compartiments. Dans l’un, on place les graines qui s'en échappent à travers des trous d’un diamètre appro- prié à l’aide d’un mécanisme fort simple. Dans l’autre, on place un engrais pulvérulent, destiné à entourer la graine et à en assurer le développement dans la jeunesse. Get engrais pulvérulent sera du guano, du tourteau de colza, du noir-animal, suivant la nature du sol. M. Le Docte attache une grande importance au mécanisme de son plantoir, par lequel la graine se trouve entourée et non recouverte de la poudre fertilisante , parce qu’alors la graine trop activée dans sa première germination, pousse une première végétation on rapide; bientôt elle pourrit et avorte. M. de Montreuil se range à l'avis que le système de culture avec ces instruments peut s’employer avec avan- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 473 tage dans les terres plates, sableuses, bien cultivées, où les herbes adventices ne sont qu’en petite proportion. Ailleurs, il le croit inapplicable : la nécessité de se servir d'engrais pulvérulents sera un obstacle à son adoption : le cultivateur n’est pas riche, ilne pourra faire cette dépense ; il préférera se servir des engrais qu’il possède. Les en- grais un peu longs ont leurs avantages dans les terres fortes. Un membre regarde comme démontré que l'instrument n’est pas applicable partout. En substituant les engrais pulvérulents aux engrais ordinaires, on arriverait à dis- penser le cultivateur de la production de ceux-ci, et, par suite, de l’élevage et de l’engraissement du bétail, si indispensable à la nourriture des populations. M. Lecomte répond que l’orateur précédent ne con- naît pas suffisamment le système Le Docte ; que celui-ci ne dispense pas de fumer la terre, comme à l’ordinaire ; que dans chaque pochet disposé en quinconce lon ajoute l’engrais pulvérulent. M. Calemard de La Fayette admet que l’instrument est bon dans certaines conditions; l’emploi a justifié déjà son admission dans la pratique. Il est de ceux qui favo- risent la culture par espacement, qui a beaucoup d’avan- tage par l’économie de la semence. Elle laisse à la con- sommation un quart ou un cinquième du blé. Il est pos- sible que, pour le colza, la replantation soit favorable. Si on n’emploie pas l'instrument pour cette culture, on l’emploiera pour d’autres. M. Quentin -Durand regarde les duitures espacées comme des jachères dans la partie non cultivée. Le Congrès , sur la demande de M. de La Bigottière, vote des remerciments à l’auteur de la communication. 4174 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. M. de Caumont appelle l'attention de l’Assemblée sur la question relative au meilleur aménagement des laiteries et des divers procédés de fabrication du beurre. Jusqu’à présent, dit-il, on n’a pas fait aussi bien qu’on a pu; ce- pendant la science n’a pas suffisamment éclairé la pratique. On fait d'excellents beurres dans le Bessin, dans le pays de Bray ; mais les procédés, les méthodes dont on s’y sert, ne sont pas généralement connus; d’ailleurs, ils sont plutôt empiriques que raisonnés. Il y a donc intérêt à appeler lattention sur ce point. M. Mabire peut nous communiquer ce qu'il sait de la pratique dans sa con- trée. | L’honorable membre, interpellé, expose que l’on s’oc- cupe beaucoup de perfectionner ces produits, qui ac- quièrent un prix double du prix ordinaire par les soins apportés dans la fabrication. On est bien convaincu au- jourd’hui qu’il faut opérer sur les produits dans toute leur fraîcheur, parce qu’ils ont alors le parfum et la sa- veur qui les feront apprécier. Aussi, au lieu d’écrêmer le lait au bout de 24 heures, on écrême le lait au bout de 12 heures, et l’on se sert, soit pour l’engrais des porcs , soit pour la fabrication du fromage, du lait doux ainsi écrêmé. Jadis on ne battait le beurre dans les fermes que tous les sept ou huit jours; à présent on fait son beurre tous les trois ou quatre jours, et on lexpédie à Paris deux ou trois fois par semaine. 1] sait qu’en Bretagne ce n’est pas la crême qu’on bat, mais c’est le lait du jour. Le fameux beurre de la Prévalaye paraît devoir sa supé- riorité à ce mode d’opérer ; c’est là ce qui lui donne cet aspect friand et son goût, si apprécié des consomma- teurs. Sans répondre à la demande qui lui a été faite sur les barattes employées dans le pays de Bray, il dit que CONGRÈS DES ACADÉMIES. 175 l'usage de grandes barattes en bois, pouvant contenir 40 à 50 kilog. de crême mues par un manège à cheval, est généralement le système employé. Tous les instruments, _ comme la laiterie, doivent être tenus avec la plus exquise propreté. En général , sur le marché, on fait en quelque sorte apprécier la qualité du beurre par la propreté de la personne, de la fermière qui le fabrique et qui le vient vendre. C’est un des plus grands secrets de la fabrication du beurre. Dans le Bessin , il sait que l’on met des gants pour intercepter toutes les émanations impures. Avec des soins et des crêmes récentes, on fera toujours de bon beurre, On sait, depuis long-temps, que le beurre se fait moins facilement, et qu’il est d'autant moins bon que la crême est plus ancienne. Lorsque le battage est long, il y a fermentation et le beurre est de moins bonne qua- lité. | M. Quentin-Durand a vendu, depuis quelque temps, beaucoup de barattes cylindriques et en métal, plon- geant à demi dans de l’eau chauffée de manière à donner à la crème placée à l’intérieur une température de 14° c., reconnue nécessaire pour que la crême prenne en beurre, au lieu de battre 192 heure, comme cela était ordinaire ; on arrive à produire son beurre en 15 minutes environ, à l’aide de la baratte réchauffeuse, M. de Beaufort demande ce qu'il faut penser des con- serves de lait. M. de Bouis voudrait savoir l'opinion de M. Mabire sur la nature des vases où l’on place le laït pour le faire crèmer. Ÿ a-t-il avantage dans l'emploi des uns de pré- férence aux autres? En général, on se sert dans les fermes de vases en grès ou de vases en terre cuite, . couverte d’un vernis. 176 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. M. Mabire répond qu'on préfère les terrines en grès. On a essayé des vases en zinc; mais on les a rejetés bien vite. M. de Caumont croit que, dans la fabrication du beurre d’Isigny et dans les fermes qui vendent leur beurre jusqu'à 6 fr. le kilogr. , il y a des pratiques encore igno- rées, qui donnent au beurre cette supériorité qui lui mérite l'honneur de figurer sur les tables impériales. M. Gosse , de Genève, croit devoir instruire le Congrès que, dans les petits cantons de la Suisse, lorsqu'on a ap- pris qu’il y avait des moyens de fabriquer vite le beurre, on s’est empressé d'acheter les barattes perfectionnées , mais qu’on a bientôt reconnu que c'était une déception. M. Quénard entretient l’Assemblée de ses expériences pour faire le beurre. M. Quénard dit qu’il s’est livré à de nombreuses ex- périences pour arriver à la prompte formation du beurre et pour rechercher les motifs qui y donnent lieu. Il a reconnu que les globules butireux se forment et se réunissent sous l'influence d’un degré déterminé de la température de la crême, et que cette œuvre n’est pas due aux dispositions d’établissement des barattes qui, selon lui, sont toutes bonnes , qu’elles soient d’une con- fection ancienne ou modérne,. En effet, dit M. Quénard, dans le barattage ordinaire, lorsqu’à plusieurs reprises on interroge, à l’aide du thermomètre , la température du liquide crèmeux, on s'aperçoit qu'à 17° c. le beurre commence à prendre et qu'à 20° il'est fait. C’est donc sur ce point qu’il convenait de s’appesantir. M. Quénard opère alors ainsi : préliminairement, il met dans la baratte de l’eau chaude, qu’il y laisse pendant 5 CONGRÈS DES ACADÉMIES. 477 minutes environ; après avoir retiré cette eau, il y verse la crême ; il mêle à la crême un quart de sa quantité en eau chaude , remuant à mesure, de manière que la cha- leur pénètre le mélange d’une manière égale. Il s'assure que la température a atteint 20° c. Il ne reste plus qu’à agiter la masse pendant 4, 5 ou 6 minutes au plus, et le beurre est fait. Ge résultat a lieu , qu’on agisse sur de grandes comme sur de petites quantités de crême.En été, comme en hiver, les choses se passent de même, c’est-à-dire qu’il faut que le liquide crêmeux ait toujours 20° c. Après le beurre formé, il reste, comme dordisiise: le lavage à opérer. On sait que c’est particulièrement du soin mis à cetle besogne que dépend la durée de conser- vation du beurre. Le beurre obtenu par la manière qui vient d’être indi- quée, est d’un goût excellent; il peut être servi sur la table, pendant deux et trois jours, et être employé dans la cuisine; on le fond , si l’on veut, au bain-marie pour la durée de sa conservation ; seulement, lorsque le beurre n’est pas bien fait, dans ce cas, la pâte en est courte et moins liante que celle du beurre ordinaire. M. Quénard ajoute, enfin, que l'opération demande quelque habitude, et ici (ainsi que dans bien d’autres œuvres ) le succès dépend toujours du modus faciendi, de la manière acquise de bien faire, Le Secrélaire , DE Bouis. — hpQ 00e 178 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. SÉANCE GÉNÉRALE DU LUNDI 26 MARS: ( Présidence de M. Dumon, ancien m'nistre, ) MM. Challe, de Caumont , Mabire, comte de Mellet, de Morissure et d’Espaulart composent le bureau. M. Ray- mond Bordeaux , secrétaire-général, rédige le procès- verbal. | “M. de Caumont dépouille la correspondance et lit des lettres de MM. Travers , Cartier et Pernot. La discussion est ouverte sur la question, ainsi formulée : Signaler les départements où la tenue des assises scientifiques aurait à la fois le plus d'utilité et les plus grandes chances de succès. M. Bordeaux croit que M. de Caumont peut seul en- tamer convenablement la discussion sur Cette question. M. de Caumont : Puisque vous m'interpellez, je dirai que l'institution la plus efficace pour l'excitation intel- lectuelle se trouve dans les assises scientifiques, dont les résultats sont excellents. Si on avait voulu publier tous les mémoires lus aux diverses assises scientifiques de 1854, on aurait eu la matière de plus de six volumes; mais il fallait se res- treindre. D'ailleurs, un bon nombre de ces mémoires étaient d'intérêt local, et ils pourront être publiés dans les recueils des localités qu’ils concernent. Quant au mécanisme des assises seientifiques , il est éminemment simple. Cependant, la tenue des assises est difficile à implanter là où il n'existe pas de sociétés scientifiques pour préparer les voies; toutefois, elle exige CONGRÈS DES ACADÉMIES. 179 moins d'appareil que les congrès. Il suffit, en effet, de deux ou trois séances, où l’on réunit seulement des hommes spéciaux et préparés à l'avance. On groupe ainsi d'ordinaire 30 ou 40 membres. — A Metz, où a eu lieu la plus nombreuse assise que l’on ait vue, il n’y avait pas plus de 60 membres. — Dans la Marne, M. de Mellet; à Amiens , M. de Vigneral, ont organisé avec fruit ces utiles réunions. L'effet de ces assises est de secouer les sociétés lo- cales, de les faire sortir de leur cercle habituel, et de leur communiquer une impulsion nouvelle, qui vient du dehors avec les présidents, choisis toujours au loin. M. Maurenq voit là une question d’une grande gravité. Là où les sociétés manquent, on l’a très-bien dit, il est difficile de tenir des assises avec éclat. Mais ne serait-il pas utile de les assembler précisément là où manque un foyer intellectuel , puisque l'esprit de notre institution est de produire l’excitation là où elie n’est pas? Dans les. pays où il n’y a pas d'associations , il y a des hommes de mérite , mais ils sont isolés : la bonne volonté ne manquerait pas; mais on a peur de se mettre en avant, et on se fait une grosse affaire de choses qui, en résumé, sont fort simples, lorsqu'on prend le parti de les at- iaquer. M. Maurenq propose, en conséquence , de nommer une commission pour rédiger une sorte de manuel indiquant le mécanisme, l’usage , la manière de diriger ces assises. M. de Mellet : C’est unechose singulière et qu’on a peine à comprendre, qu’il y ait dans notre pays de vastes ré- gions où il n’y a aucune association littéraire ou scien- üfique, et où l’où vit dans l’isolement comme à deux mille lieues du monde civilisé. 130 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. - Compulsez les recueils spéciaux pour l'archéologie, par exemple , lisez les listes de la Société française, celles du Comité du ministère et des rédacteurs où abonnés du Bulletin monumental et des Annales archéologiques. Eh bien! vous verrez que des départements ont des colla- borateurs à cestrois choses, tandis que d’autres sont sé- parés comme par un Cordon sanitaire, par une ligne de circonvallation. — Que ferait donc un manuel là où il n’y a pas de centre, là où les assises ne peuvent avoir lieu? M. d'Héricourt se demande aussi ce que ferait un manuel. En général, les manuels ont peu d’efficacité.… On en a fait énormément sur l’agriculture, sans résultat proportionné. Pour notre propagande, nommons des membres sur la frontière des départements intellectuels , ce Sera ce que nous aurons de mieux à faire. M. Maurenq ne croit pas qu’il y ait un seul département sans hommes lettrés ;:mais on n’aime pas à se remuer, on reste dans son cabinet, on craint de se mettre en quelque sorte sur un piédestal., On a envie d’une réunion, mais on n’ose ; c’est à qui ne commencera pas. Qui convoquera ? qui recevra les cotisations ? Il n’y a rien d’indigne à nous d’essayer la proposition d’une commission; €’est une idée acceptable et réalisable. 11 s’agit tout uniment d’un simple exposé des moyens à employer. M. de Gaumont: Y vds des membres qui demandent des assises ? M. de FOMenAy"e M. Challe devait présider une session à Autun. | M, Challe : C’est mon ami, M. le baron Chaïllou des Barres, quidevait les présider : ïl n'ya pas renoncé ; l’an prochain , je ly si ré | FD CONGRÈS DES ACADÉMIES. 181 M. Paul d’Albigny, secrétaire et délégué de Ta Société des sciencesnaturelles etdes arts de la ville de St.-Étienne (Loire), émet l’opinion qu’une tenue d’assises scientifiques ne pourrait avoir qu’un effet très-utile , très-efficace , et imprimerait un très-heureux élan aux Sociétés de cette ville, en attirant sur elles l'attention et Pintérêt de l’administration locale , et en établissant entre elles et d’autres savants des relations du plus satisfaisant résultat. St.-Étienne offre, par l'importance de sa population , et surtout par son importance industrielle , un milieu palpitant de questions et d’intérêts de la plus haute portée; son bassin houiller, si propre aux études géologiques et minéralogiques, ses usines métallurgiques, ses teintu- reries, son arquebuserie , son industrie rubannière , sont autant de points et de sujets dont peuvent surgir de très-curieux et de très-utiles documents. Les hommes instruits, spéciaux, ne manquent pas et répondraient avec empressement à l'appel qui leur serait fait par le président des assises. La Société des sciences naturelles entr’autres, en témoignerait sa satisfaction, et répon- drait avec bonheur à toutes les questions scientifiques et artistiques, qui pourraient lui être faites dans cette occur- rence. M. d’Albigny demande donc que lon veuille bien prendre note du vœu qui exprime, au nom de la So- ciété qu’il représente, de voir siéger des assises à St.- Étienne. | La question relative à l’histoire des jardins et de l'hor- ticulture avant 1789, posée au congrès de 4854 et réservée pour être traitée de nouveau à celui de 1855, est remise en discussion. 182 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, M. Darcel annonce l'absence de M. Alfred Ramé, qui a réuni une masse de documents et de dessins sur cette question. M. Ramé, n’ayant pu se rendre au congrès, a résumé ses recherches dans les conclusions suivantes, dont M. Darcel donne lecture : « Les recherches que j'ai faites, écrit M. Ramé, relativement à l’histoire des jardins en France, avant le règne de Louis XIII, m'ont conduit aux conclusions suivantes : « En ce qui concerne les genres de plantes cultivées : « Que, du V°. au XVIL°. siècle, ces plantes sont de- meurées les mêmes; que l'importation des espèces américaines n’a commencé à devenir un peu active que vers la fin du XVII°, siècle et surtout au XVIII. ; qu'entre les dernières années du XV°‘. siècle et la première moitié du XVII‘, on ne peut placer l'intro- duction en France que d’un très-petit nombre de plantes, presque toutes originaires d'Orient; que , par conséquent, toutes les espèces que nous rencontrons dans les jardins de Louis XIIL, dont l'existence n’esl pas contestée, ont dû se retrouver et se retrouvent en effet dans les jardins du moyen-âge. « En ce qui concerne la décoration et la distribution des jardins : « Que tous les ornements dont nous remarquons l’em- ploi dans les jardins contemporains de Louis XIIL : rochers factices, fontaines, tonnelles, labyrinthes, galeries, arbres et plantes soumis à une taille régulière , etc., ont été en usage dès les premières années du XVI°. siècle, motamment dans les jardins de Gaillon, etc.; que des textes et des miniatures de manuscrits nous apprennent que ces ornements étaient connus aux XIIL°, et XIV°. 17 AIN CONGRÈS DES ACADÉMIFE, 483 siècles; que la décoration des jardins ne s’est donc pas plus modifiée que leur composition ; mais qu’à partir du milieu du XVI°, siècle, ils ont pris un développement en surface inconnue jusque-là ; « Que la principale différence, quant au plan, qui distingue les jardins de la fin du XVI°. siècle de ceux des époques antérieures, c’est la réunion en un ensemble unique des diverses parties qui avaient jusque-là été divisées entre plusieurs enclos différents, savoir : le préau, réservé à la culture des gazons et des fleurs; le verger, à la culture des arbres fruitiers; le parc, à la culture des espèces forestières ; « Que les jardins des monastères offraient , indépen- damment du préau, une quadruple division : verger , potagers , futaies pour la promenade, jardin des plantes médicinales À « En ce qui touche l'existence des jardiniers, anté- rieurement au règne de Louis XIII : « Que les jardiniers du roi Louis XII et du cardinal d’Amboise nous sont connus; que nous possédons, pour le château de Fontainebleau, la liste des maîtres-jar- diniers du roi pendant tout le XVI°. et le XVII°. siècles ; qu’il en serait de même pour les autres résidences royales dont les archives seraient explorées. » M. Darcel ajoute qu’à l’aide des anciennes miniatures de manuscrits, pour le XV°. siècle, on pourrait masser le plan habituel d’un jardin de ce temps. Pour les XIE, et XIII°. siècles, la chose serait impossible, parce que les peintures n’ont pas de paysage à enfonce- ment : elles sont toutes à fonds d’or; on n’admettait pas de perspective. Les arbres, placés comme .acces- soires, jouent le simple rôle d’hiéroglyphes, — En Italie, 184 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. dans les manuscrits du XIV*. siècle , on voit déjà de la perspective et on pourrait s’en aider pour l’étude de la question. A ces époques le caractère artistique des jardins se résume à ceci : on use d’une taille très-rigoureuse ; on aime des arbres figurant des monstres. Les murs sont unis ou crénelés et garnis d’espaliers. Une tonnelle fait le tour avec des vignes palissées aux treillages , qui d’autres fois sont garnis de fleurs. Les allées sont payées; les plates-bandes sont limitées par des entourages de briques où de pierres plates, pour empêcher les limaçons et les mans de commüniquer de l’une à l’autre : ce que lon propose aujourd’hui de renouveler. M Darcel communique ensuite ce passage d’un écrivain du VIE, siècle, où il est question d’un jardin : « Inter nemorosa pomarii sistunt infra biquadrum claustra gémina munitione, crebrisque arcuum maceriæ foraminibus manent : columnarum capitibus sculpta depictis variaque pictura Superficies nitet; arboribusque generis diversi suo in tempore poma magnitudine virgæ dependent ; vite frondes detritæ , veluti sérta par- ticulæ haud densissimæ manent. Odora lilia cum rosis rubentibus candent, necnon et reliqui florum aurea luce spléndent. » (Vie de saint Bonitus, évêque d’'Au- vergne, en 709; par un anonyme contemporain. Acta sanctorum Ordinis S. Benedicti, t. IT, p. 94). M. de La Bigottière esquisse à grands traits ce que nous savons des jardins de l'antiquité, des jardins fameux de Sémiramis, puis de Lucullus , de Salluste, etc. Arrivant au XVI. siècle , il rappelle les îles Borromées , dont le nom n’a pas encore été prononcé dans la discussion , et que le célèbre Lenôtre fut visiter afin d’y puiser des mo- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 185 dèles, mais dont il revint , en blâämant la petitesse des dessins ,-l’abus des statues et la continuité des parallélo- grammes, M. de La Bigottière continue ainsi : « Au temps de Louis XIV, le poète Dufresny, émule des Kent, des Browes, artistes anglais, présenta au roi un plan qui rappelait les formes du parc de Bleinheim ; il ne fut pas goûté, et fut trouvé peu digne d’embellir une résidence royale : Lenôtre fut préféré. Il réunissait en quelque façon les deux genres, en ménageant, au-delà de ses lignes symétriques , des horizons variés et d’heu- reuses perspectives. En effet, cet ensemble est saisissant et d’un grandiose inimitable. Ajoutez que, pour brillanter ses créations, Lenôtre avait à ses ordres les talents des Coisevox, des Coustou , des Girardon. Quand il s'empare des eaux, Armide semble lui prêter sa baguette ; elles ne coulent pas, elles bondissent. Mais, Messieurs, après avoir payé le tribut à cette merveille, pourquoi se fait-on conduire aux bains d’Apollon, au bosquet de la reine , à ce petit Trianon qui lui fut si reproché ? C’est que l'ennui naît de l’uniformité, et que les avenues rectilignes finissent par fatiguer les yeux et l’imagination, Aimez-vous les sites sauvages, linattendu, les surprises ? Allez à Ermenonville, à Mor- fontaine , au Raincy : là, vos rêves prendront un corps. Plus d'arbres sculptés , décapités, plus d’architecture, de buis , plus de ces parallélismes, où chaque allée a sa sœur et chaque berceau son frère. Nous admirons les toiles des Berghem, des Woüvei- mans , des Claude Lorrain; nous allons vous les repro- duire sur une bien plus grande échelle. Les eaux, les rochers , les gazons , les forêts sont à nous, le sol est notre chevalet, les couleurs je vous les nomme. 186 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Heureux encore qui peut associer à ses compositions quelques ruines du moyen-âge! En Angleterre , les ducs de Talbot, d’Argyle, de Warwich, et bien d’autres ont fait renaître de leur cendre les antiques demeures de leurs ancêtres , ils en ont paré leurs vastes domaines. « En Normandie , M. de Radepont s’est servi de la ma- nière la plus pittoresque des débris d’une forteresse, attaquée et prise sur ses pères par Louis-le-Gros. Ju- miége paraîtra bientôt entouré d’une ceinture ombreuse, qui fera ressortir ses ruines sans les voiler. Plusieurs d’entre vous, Messieurs, ont visité, l’été dernier, les tra- vaux de notrecollègue, M. Mosselman, à sa terre de Gondé; ils y ont applaudi à l’intelligence de l’agronome et admiré les créations du châtelain. » Répondant aux observations de l'honorable préopinant et aux critiques que l’on dirige , depuis près d’un siècle, contre l'usage de tailler certains arbres de manière à leur faire revêtir des formes artificielles , et à leur donner l'apparence de colonnes, d’édifices, de statues, etc., M. Paul Durand se demande si cet usage , aujourd’hui abandonné, n’avait point cependant quelque raison d’être, et s’il était aussi peu rationnel qu’on le répète sans cesse. « La régularité des anciens jardins, a dit M. Paul Du- rand, et la symétrie de la taille des arbres qui les déco- raient , sont tombés dans un discrédit immérité et exa- géré. Au premier abord, aujourd'hui, tout le monde s’accorde à trouver ridicule et absurde un usage qui a été regardé pendant long-temps sous un aspect tout op- posé, etqui remonte à une haute antiquité. Il nous semble, au contraire, que si l’on y faisait un peu d’attention , on CONGRÈS DES ACADÉMIES. 487 ne devrait pas trouver mauvais que la main de l’homme et les arts que crée l’imagination, fissent ressentir leur influence à tous les objels , aux êtres animés et inanimés qui entourent l’homme et son habitation, et leur fissent subir quelque modification régie par le bon goût. « L'homme civilisé n’habite plus les grottes rustiques et naturelles des rochers, ni des trous creusés grossière- ment dans la terre. Il se bâtit, suivant les règles arbi- traires de l'architecture, des demeures régulières qui ne ressemblent à rien de ce qui est dans la nature. Les vête- ments ne sont plus, comme chez les Sauvages, des feuilles ou des peaux de bêtes avec leur forme naturelle. Des tissus que l’art a inventés et arrangés suivant cer- taines lois, couvrent et ornent notre corps. Quelques ani- maux au service de l’homme portent aussi l’empreinte du caprice et de la fantaisie de notre imagination. Ce ne sont pas seulement des harnais que nous mettons sur le dos des chevaux, cela est indispensable, mais parfois nous tressons leur crinière , nous formons des ornements singuliers par l’arrangement des crins de la queue, entre- lacés avec des rubans, etc., etc.; et tous ces usages, loin de déplaire à l'œil, indiquent, au contraire , le soin , le goût et l'imagination de l’homme. « Les peuples de l'antiquité et ceux qui habitent encore aujourd’hui le Levant, nous fournissent, sous ce rapport, une foule de renseignements sur la manière dont ils sa- vent orner les chevaux, les mules , les chameaux et les éléphants... « Pourquoi donc vouloir restreindre tous ces usages, si agréables à la vue ? Pourquoi blâmer et proscrire l'usage d'orner , de façonner et de diriger les plantes qui déco- 188 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. rent les abords de la demeure de l’homme ? Il nous semble qu’il n’y à aucun inconvénient à modifier les arbres et arbustes qui sont en contact presqu’immédiat avec l’ar- chitecture, et que c’est plutôt un avantage qu’un incon- vénient de voir la partie des jardins qui touche les pro- duits de l’art de bâtir se ressentir de ces belles créations, sorties complètement de l’invention de son intelligence. Il y a des arbres qui semblent être créés pour subir ainsi tout le caprice de cette intelligence. L’if, le buis, l’ar- bousier , modifiés ainsi par une taille artistique, accom- pagneént parfaitement la régularité des lignes droites des édifices , et servent, pour ainsi dire, d’intermédiaire entre l’architecture et la sculpture , entre les œuvres d’art et les produits de la nature. » M. R. Bordeaux croit que la question a dévié ; en effet, l’histoire des jardins ne doit pas être confondue avec celle de l’horticulture. L’horticulture est une science pratique et utilitaire : à son point de vue le plus élevé, comme science, elle est une application de la botanique. La configuration des jardins est, au contraire, une question d'art, non de science : leur forme, leur arrangement mo- numental est une branche de l’architecture ; les anciens jardins d'ornement sont de véritables monuments , tout comme les châteaux qu’ils environnent ; leur description est une dépendance naturelle et inexplorée de l’archéo- logie , de l’histoire de l’art. Il est donc bon de considérer les jardins comme monu- ments de la civilisation, comme œuvres d'art, comme productions du goût, et même comme l'expression des idées dominantes , des passions et des préjugés de cer- taines époques. CONGRÈS DES ACADÉMIES. 189 Pour se tenir dans la question, les plantes qu’on y cultive sont moins à considérer que leur distribution. A Versailles, c’est le parc, sa distribution, ses eaux artifi- cielles , ses statues que l’on va voir, non les plantes. Il faut donc étudier, dans nos anciens jardins , les fa- briques que l’on y avait élevées pour leur décoration : les terrasses, les fossés, les escaliers , les. balustrades, les grilles de fer forgé et de tôle ouvragée , les bassins, les jets d’eau, les cascades, les ponts, les avenues régulières, les palissades, charmilles, tonnelles , labyrinthes et cabi- nets de verdure ; tous les produits de l’art du treillageur: lportiques , Volières, etc.; les pavillons, les kiosques , les grottes, les serres-chaudes, les collections d’orangers, les ruines artificielles, les statues, vases, etc. Toutes ces choses, ouvrage des artistes du temps passé, disparaissent devant la mode universelle des jardins an- glais , devant le vandalisme des architectes et des dessi- nateurs en vogue, qui, chaque année, sont appelés de Paris, par nos riches propriétaires, pour bouleverser et remettre au goût du jour les nobles et monumentales créations des XVI°, et XVII°, siècles. Ilest donc grand temps de figurer et de décrire ceux de ces jardins qui subsistent, ou dont le souvenir est en- core dans les esprits. Ce doit être désormais une annexe indispensable des statistiques monumentales. Il ne suffit plus de décrire les églises, les châteaux, les maisons go- thiques ; il faut y ajouter les vieux jardins, comme un des traits les plus intéressants de la physionomie de l’an- cienne France, et comme une. des reliques de ce passé qui s’en va de toutes parts , et que l’archéologie s'occupe de retracer , de fixer, de photographier, pour ainsi dire, pendant qu'il en est encore temps. 190 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Mais pour cela, il faut procéder avec méthode et user de classifications. 11 faut bien distinguer trois sortes de créations en ce genre : les parcs , les simples jardins , les parterres. Les parterres, avec leurs allées garnies de buis et de petites plantes de bordures, avec leurs broderies et leurs festons compassés , avec leurs vases de faïence , etc. , ont presque tous disparu du voisinage des anciennes maisons. Ce ne serait que dans des villes peu peuplées et oubliées, que l'on pourrait espérer d’en rencontrer. Les vieux hôtels des XVI°. et XVII, siècles sont aujourd'hui trop défigurés, pour qu'on puisse espérer de retrouver des traces des parterres qui en décoraient les abords, et dont l'emplacement, lorsqu'il n’est pas occupé par un jardin moderne, s’est trouvé envahi par des constructions, ou changé en cours, en magasins, etc., lorsque les riches familles qui habitaient ces hôtels les ont abandonnés, et ont fait place à des ateliers, à des commerçants, ou à des familles d'ouvriers, hôtes ordinaires des vieux logis seigneuriaux, dans la plupart de nos grandes villes. Les grands parcs étaient venus jusqu’à nous; mais la division des fortunes , le morcellement des grandes pro- priétés , l'extinction qui frappe les unes après les autres nos anciennes familles, fait tomber de tous côtés les hautes futaies et les nobles plantations des habitations seigneuriales. C’est ainsi que nous avons vu, depuis peu d'années , détruire les grands jardins de Navarre , près d'Évreux , dessinés par Lenôtre, au XVII°, siècle, et où l'on avait introduit , au siècle dernier , quelques parties à l’anglaise ; le grand parc de Courteille, près de Verneuil, habitation des Rochechouart et des Richelieu, dessiné à l'anglaise dans la seconde moitié du siècle dernier , mais CONGRÈS DES ACADÉMIES. 491 auquel d'immenses avenues régulières donnaient encore un grand style. L’an dernier, c'était le tour du parc de la Mailleraie, cette merveille des bords de la Basse-Seine, dont les futaies séculaires sont aujourd’hui tombées sous la hache : M. de Pomereu a étudié ce grand parc où le style anglais , tracé dans de vastes proportions, se mariait au style français de la meilleure époque. A Bizy, près de Vernon, domaine dont la famille d'Orléans a hérité de Penthièvre, des cascades monu- mentales, restes du jardin primitif, s'élèvent encore derrière le château, dans le jardin arrangé à l'anglaise, et tomberont peut-être bientôt à leur tour. Dans le dé- partement de l'Eure, nous avons encore le parc de Condé, dont M. de La Bigottière vous parlait tout-à-l'heure, et dont j'ai dit un mot dans l’Annuaire de l'Association nor- mande de cette année ; mais c’est un jardin tout moderne. On voit, par cette énumération, combien les jardins pure- ment français sont devenus rares. J’ai visité, il y a trois ans, avec M. de Caumont , le beau parc de Canon, dans le Calvados, qui appartient à M. Elie de Beaumont, et qui garde intact le caractère du milieu du XVEII°, siècle. fl est du style Pompadour le moins mélangé : le genre anglais n'y est pas encore mêlé ; les longues allées, les charmilles rectilignes ou contournées abritent de longues files de bustes placés sur leurs gaînes, de vases rococo, élevés sur des piédestaux à enroulements et à chicorées ; çà et là des vers de La Harpe, de Voltaire, etc., compo- sent des inscriptions à l'entrée des bosquets. Mais ce n’est que du XVIII. siècle. Dans la plaine du Roumois, . un château, inhabité depuis de longues années, doità cette circonstance d'être encore entouré d’un parc du XVIF, sivcle, C’est le château de la Mesangère , à Marcouville 192 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, en Roumois. M. Beaucantin, directeur du jardin bota- nique à Évreux, qui me l’a signalé, m’a assuré que le beau style de Lenôtre s’y retrouvait encore dans toute sa pureté et'sa magnificence. Non loin de là , le château de Graveron est encore entouré d'immenses avenues de chênes , de hêtres et de sapins, et M. le comte de Sal- vandy possède d’anciens plans où sont retracées au vif toutes les dispositions premières. de ces superbes plan- tations. N'oublions pas, aux environs d’Elbeuf, le curieux parc de la Saussaie , attribué à Lenôtre, et que M. de Bostenney conserve dans son intégrité, avec ses lignes d’ifs taillés comme au temps où Ia Saussaie était la rési- dence des ducs d’Elbeuf. Mais la contemplation de ces beaux jardins donne na- turellement un autre aliment à la curiosité, et bientôt l’on est curieux de connaître les noms de ceux qui les ont tracés. Le nom de Lenôtre est le seul populaire ; mais Lenôtre a eu cependant des précurseurs et des émules. L'étude des anciens papiers peut fournir en ce genre une infinité de découvertes. L’autre jour, les Archives de l'Art francais , cet intéressant recueil dirigé par notre collègue , M. le marquis de Chennevières-Pointel , laissait là momentanément les peintres et les sculpteurs pour donner place aux dessinateurs de jardins, et nous y lisions de curieux documents inédits sur Claude Mollet, Michel Le Bouteux, Claude Des Gots, Charles Dufresny de Rivière et sur André Lenôtre lui-même. L’impulsion donnée par le Congrès s’est propagée jusque danslesrégions officielles, et voici qu’à son tour le Bulletin des Comités du ministère, quittant aussi les autres branches de lar- chéologie, nous donne, d’après les registres dé l’état civil d’Avon et de Fontainebleau , dépouillés avec grand CONGRÈS DES ACADÉMIES. 193 soin par M. l’abbé Tisserand, des renseignements piquants _sur les architectes de jardins et les jardiniers-ingénieurs qui sont nés, qui ont travaillé ou séjourné , ou qui sont morts à Fontainebleau , depuis 14542 jusqu’à 1661. En 1561, c’est maître Georges Vaulnaige, qui est jardinier du grand jardin du roi à Fontainebleau; en 1600, c’est maître Desbouts, auquel succèdent, dans le courant du XVII. siècle, Claude et Louis Desbouts. De 1600 à 1650, Alexandre Francini ajoute à son titre d'ingénieur ordinaire du roi, celui d’intendant des fontaines. En 1612, Nicolas Le Roux, jardinier du roi, se qualifie d’appareilleur des palissades. La même année, François de Caen a le titre de maître-jardinier et de garde des oiseaux du roi, en son château de Fontainebleau ; et, en épousant sa fille, Martin Jamin, fils du célèbre commis des bâtiments royaux, revêt la même qualité. Tous ces jardiniers jouissent d’une certaine considération sociale , et leurs mariages attestent le rang qu'ils occupent. Antoine Tabouret, fils du jar- dinier Abraham Tabouret, épouse, en 1596, Antoinette de Rogery, fille du maître-peintre Roger de Rogery, et la fille née de ce mariage épousera plus tard Claude de Hoëy, fils de noble homme Jean de Hoëy, peintre du roi. Antoine Tabouret se qualifie, en 1646, de valet de chambre du Roy, maître-jardinier du grand jardin et du jardin des Pins. Ces documents nous révèlent encore les noms de quelques jardiniers-artistes, tels que Outrebon, Claude Nivelon, Jacques Maunay et maître Dubril, Ce fut André Lenôtre, contrôleur-général des bâtiments qui dessina le grand parterre , que tous les écrits du temps célébrèrentcomme l’unedes plus belleschoses du monde, mais dès le temps de François 1‘., ces jardins étaient somptueusement décorés : ce fut alors que l’on planta le 9 19/4 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. jardin des Buis et le parterre du Tibre. Partout on creusa des bassins , on éleva des fontaines; il est dès-lors question du Pavillon de Pomone, du Pavillon de l’Étang, de la grotte du jardin des Pins. Sous Henri 1V, nous trouvons a mention d’une volière, près de la galerie des Chevreuils. Tous les anciens écrits, tous les anciens monuments font foi du luxe déployé autrefois dans les jardins. Il y a notamment au musée de Cluny une ancienne tapisserie où l’on voit comment, à l’aide de tonnelles et de berceaux de feuillages , on reliait entr’eux des bâtiments, des tou- relles, qui semblent aujourd’hui fort décousus. C’est sans doute par des galeries de cette sorte qu’à Caen les divers corps de l’hôtel de Mondrainville , aujourd’hui séparés d’une manière inexplicable, étaient reliés lors de la splen- deur de cette curieuse demeure du XVI°. siècle. Il suffit de parcourir, au cabinet des estampes, quelques volumes des œuvres des anciens graveurs du temps d'Henri IV et de Louis XIIL, pour.trouver dans les fonds de perspective de curieuses vues de jardins. La bibliographie fournit des documents de toute espèce. Quel nombre infini de vieux livres, de manuscrits , por- tent le titre d’'Hortus, de Jardin, de Verger. Le Jardin de plaisance , tel est le titre d’un écrit du XIV°, siècle. Une foule de livres de dévotion s’offraient à la lecture des âmes pieuses sous cet intitulé attrayant, C’est à l’aide d’un même artifice qu’en plein XVII°, siècle, les solitaires de Port-Royal tâchent de dissimuler l’aridité de leur Jardin des racines grecques. Maïs si ces ouvrages ne se rattachent que par leur titre à notre sujet, le nombre des ouvrages sur les jardins n’en est pas moins grand. Dépuis le P. Rapin, qui, dans un curieux poème latin, célébra , sous Louis XIV, les jardins réguliers , jusqu’au poème CONGRÈS: DES : ACADÉMIES. 495 des Jardins de Delille ; jusqu’à Fontanés, qui chanta les vergers , le nombre des écrits plus ou moins poétiques sur le jardinage est énorme : ce fut le thème favori du XVIII*. siècle. Sous cette apparence pastorale , les idées nouvelles se produisirent, et sous prétexte d’élaguer les charmilles , on s’attaqua surtout aux traditions des aïeux, traitées par les beaux-esprits d’alors de préjugés gothi- ques. L’anglomanie, mise à la mode, propagea les jardins anglais, qui firent fureur dans le monde philosophique. C’est une question de savoir si l’idée première de ces jar- dins irréguliers, comme l’on disait alors, vient dela Chine, ou si elle fut puisée dans la description du paradis terrestre de Milton et dans quelques morceaux deSpencer. Quoi qu’il en soit , l’analogie des jardins paysagistes avec les jardins chinois ne put que leur être favorable, à une époque où les porcelaines, les étoffes, les tentures, les petits meubles de la Chine faisaient fureur. Cependant, quelques tentatives de résistance se firent parfois en- tendre , et un M. de Chabanon, qui paraît avoir eu des instincts archéologiques dans un temps où tout le monde à l’envi était pressé de rompre avec le passé, écrivit une épiître fort agréable , au dire de Delille lui-même , en fa- veur des jardins du genre régulier, où il remarqua que les vieux monuments réveillaient des souvenirs qui de- vaient en recommander la conservation dans un pare ar- rangé avec goût. Mais les idées révolutionnaires bouil- lonnaient dans la tête de tous les gens qui voulaient se produire et qui donnaient le ton. Aussi, aux approches de la Révolution, parurent une foule de menus pamphlets, où l’on célébrait les jardins avec beaucoup de choses moins inoffensives —L’autre jour, à la suite de la vente de la bibliothèque de M. le vicomte Héricart de Thury, riche 196 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. en opuscules horticoles, les quais étaient couverts d’écrits de ce temps-là, relatifs aux jardins, et farcis parfois d’idées fort peu bucoliques. J’ai ouvert au hasard quel- ques-unes des pages jaunies de ces rimeurs oubliés, et dans l’un de ces écrits, ridicules aujourd’hui, mais qui échauffaient alors les cerveaux, je suis tombé sur ce vers, au moins singulièrement placé dans une apologie des jar- dins anglais : Je déteste l’encensoir !!! J'ai ici sous la main une « Épître en vers irréguliers », où il est à la fois question « des jardins, de l’agriculture, des assemblées provinciales, des ministres, des parle- ments, de la tolérance, etc. » (Hilarité). Le tout fut dédié , en 4787 , à M. de Marnesia, « auteur du poème de la Nature champêtre , et désigné alors président du district du mont Jura. » Mais l’auteur, Cérutti, ne le livra à l’impression qu’en 1790. Après avoir dit : Un bien à cultiver, voilà le bien suprême! Du père des Humains, Dieu fit un jardinier : Le monde était alors un jardin printannier : Le monde, hélas ! n’est plus le même ! Fidèle, cependant, à son instinct premier, Il n’est point de mortel qui n’aime, Et la fleur odorante, et le fruit nourricier ; Et plus d’un souverain voudrait être fermier ! il prend soin de mettre en note que le fameux Lenître semble n’avoir fait les jardins de Versailles que pour mettre la Nature et les Dieux aux genoux de Louis XIV ; puis il continue ainsi : L’Anglais fit ses jardins pour la mélancolie. CONGRÈS DES ACADÉMIES. 197 {1 aime un parc indépendant, Un paysage sans limite, Un fleuve qui serpente et s'échappe en grondant, Un bois inspirateur, un antre confident, Des rocs épars , confus, dont le cahos imite Le désordre pensif de son génie ardent : C’est un palais de fée où s'égare un hermite. Là, sa philosophie assemble avec orgueil, Les ruines du monde et de la race humaine. Sur les débris, près d’un cercueil, Avec délice il se promène : Tous ses plaisirs portent le deuil, Mais ils ne portent point de chaîne, etc. Bientôt les opinions de notre amateur de jardins se font jour et il s’écrie : Des oisifs de la cour l’essaim léger s'envole Vers les hameaux abandonnés. L'agriculture se console : Elle entrevoit, de loin, des jours plus fortunés : Au lieu du noble, au lieu du prêtre, Au lieu des proconsuls qui ravageaient ses bords, { Les bords de l’agriculture 1) Elle aura son conseil champêtre : La source des talents, le fleuve des trésors, Dans les déserts vont reparaître. Puis emporté par un délire qu’il croyait sans doute poétique, il termine par cette tirade, assez peu horticole :, Sorbonne ! Bélisaire a ri de tes injures. Pontife des Ultramontains ! Jette dans les marais Pontins 198 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Tes Brefs, tes Bulles, tes Censures. Esprit français ! triomphe. . . . . Je vous fais grâce du reste; mais cet échantillon suffit pour démontrer ce que j'avançais , én commen- çant , que la forme des jardins a été l'expression des idées dominantes, et a reflété les passions et les préjugés de certaines époques. Au XVII. siècle, majestueux et solennels comme les mœurs aristocratiques des temps de Louis XIII et de Louis XIV, les jardins offrent des lignes immenses , de magnifiques allées. Les dessinateurs du temps ont relié leurs jardins aux châteaux qu'ils entourent et dont ils ont dû ménager les tourelles, les fossés, les terrasses, le colombier, la chapelle. Comme Va dit un écrivain moderne, la main des artistes de l’époque « a , d’un compas austère , ménagé ces espaces, régularisé cette profusion, distribué comme des haies de courtisans tous ces beaux arbres; de la nature même, elle a fait un salon royal, où l'étiquette , plus forte: que la sève, mesure aux branches la longueur qu’elles doivent avoir , assigne aux fleurs la place où elles doivent s’épa- nouir. » Mais le XVIII. siècle devait changer tout cela : épris de la nature qu’il ne sentait pas, il fit de la pastorale dans ses jardins , comme Boucher et, Watteau en faisaient dans leurs trumeaux, et il. fallait Erme- nonville pour que Rousseau püût y faire l’étalage de ses goûts campagnards. » | . M. Paul de Wint fait hommage au Congrès des Essais historiques sur les jardins (1) qu’il vient de. publier et (4) In-8°, ; à la librairie archéologique de V. Didron. \ CONGRÈS DES ACADÉMIES. 199 qu’il à composé pour répondre à la question en dis- cussion. | M. d’Espaulart remarque que l’on a oublié de citer Bernard Palissy, dont les écrits sont très-importants pour l’histoire des jardins au XVI. siècle. Il ne faut pas omettre non plus les jardins de Bélon, au château de Touvoye où M. d’Espaulart est né, et qui appartenait aux évêques du Mans. Sous l’episcopat de Claude d’Angennes, Bélon peupla ce jardin de plantes exotiques dont il existe un catalogue. M. Gadebled cite, de son côté, les œuvres de Conrad Gessner, auteur très-important qui donne le catalogue complet de toutes les plantes cultivées alors en Europe. Il faut noter aussi les écrits de Charles Étienne, ainsi que les gravures de certains livres publiés en Hollande, par les Janson. M. d’Albigny signale le discours d'introduction de la Flore du Centre, par M. Boreau, comme contenant des notes fort intéressantes sur les jardins royaux de Blois aux XV°. et XVI°. siècles. M. de Bouis constate que, de la discussion , il résulte que nous sommes plus avancés sur l’histoire de l’hor- ticulture proprement dite, que sur celle de lhistoire de la disposition artistique des jardins, et de leur archi- tecture. A ce sujet, il lit une note développée sur la serre qu’Albert Legrand avait au couvent des Dominicains, et où déjà il cultivait des plantes des pays chauds. Un membre rappelle que M. Vitet a consacré aux jardins un chapitre de ses Études sur les beaux-arts. M. Bordeaux cite le chapitre que M. Léopold Delisle a réservé aux jardins, dans ses savantes Études sur l’état de l'agriculture en Normandie au moyen-äge. I indique 200 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. aussi des articles de MM. Naudet et Raoul-Rochette, publiés dans la Revue archéologique sur certains pro- cédés horticoles des Romains, et surtout un charmant article, très-spirituel et très-caustique, lu par M. A. Blanchet aux Assises scientifiques de Picardie, et intitulé : Origine des. jardins anglais Ce piquant tableau du ridicule engouement du siècle dernier pour la nature, l’homme primitif et la rêverie sentimentale, a paru dans l'Annuaire de l'Association normande pour 41855,et serait très-digne d’être inséré dans l’Annuaire de l’In- stilut des provinces. M. Dréolle remarque que l’on s'accorde généralement, en Angleterre, à attribuer à l'amiral Anson l'introduction des jardins dits anglais, à son retour de la Chine. Anson revint de ce pays enthousiaste de tout ce qu’il y avait vu, des mœurs des habitants, de leur agri- culture et de leur horticulture. Il traça les plans des jardins chinois qu’il avait visités et en répandit le goût en Angleterre. Lorsque les Anglais prirent Honkkong, il y a une douzaine d’années , ils furent émerveillés des jardins de cette île qu’ils visitèrent , et dans plusieurs lettres , publiées dans les journaux anglais, que j'ai publiées en français , dit M. Dréolle, ils parlent de ces jardins avec le plus vif étonnement ; ils vantent la beauté, le charme, l'agrément de leurs dispositions. Ce genre de jardins se répandit en France, vers la fin du dernier siècle. Le plus beau , à Paris , fut celui de Beaumarchais, fréquenté par la belle compagnie, les gens de bon ton de son temps. Le peuple en était exclu. On sait, qu’en 1792 ou 93, craignant de le voir saccager par la populece , il mit cette inscription à l'entrée : Ce petit jardin fut planté En l’an deux de la liberté. Li an CONGRÈS DES ACADÉMIES. 201 et les émeutiers respectèrent ce petit jardin. Depuis, on a eu les jardins Beaujon, Rivoli, etc. Ce que doit re- chercher le Congrès, c’est d’amasser le plus tôt possible les plans des anciens jardins français, menacés de dis- paraître pour faire place aux jardins à l'anglaise, M. Darcel signale , à ce sujet , une carte d’entrée aux jardins de Beaumarchais dont il possède un exemplaire et qui est fort curieuse , à cause du dessin gravé dont elle est ornée. L'un des Secrétaires-généraux, Raymond BORDEAUX. SÉANCE GÉNÉRALE DU MARDI 27 MARS. ( Présidence de M. CuaLce, ) Le bureau est composé de MM. Bougeot-Saint-Hilaire , le baron Chaubry de Troncenord , le comte d’Héricourt, le baron Ernouf et le vicomte de Bonneuil. Le procès-verbal est rédigé par M. Raymond Bordeaux, secrélaire-général, M. de Caumont fait distribuer, aux membres du Con- grès, une lettre autographiée , accompagnée d’un plan, par laquelle la Société libre d'agriculture de l'Eure invite les autres Sociétés savantes à souscrire pour l'érection d’une pyramide que la Société de l’Eure se propose d’élever en lhonneur de Duguesclin dans la plaine où l’illustre connétable gagna la bataille de Cocherel, aux environs de Vernon. 202 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. M. Guérin-Méneville a la parole et: fait la commu- nication suivante : La Société zoologique d’acclimatation ne s'occupe pas seulement de l'introduction d'espèces exotiques ; elle veut aussi porter d’un pays à un autre , mêmeen Europe, les meilleures races domestiques. Elle veut même accli- mater les races d’un département dans un autre départe- ment. Elle veut aussi améliorer les races domestiques , rendre les cocons de notre ver à soie plus riches en matière soyeuse. Notre ver à soie domestique a toujours été lobjet de prédilection de mes études, soit dans le cabinet, soit dans la grande culture. Les travaux poursuivis depuis près de 10 ans à la magnanerie expérimentale de S'e.-Tulle avec M. E. Robert en font foi. C’est la France qui possède les meilleures races. Vient ensuite l'Italie qui nous est supérieure , dans quelques localités, pour l'éducation en grand. Quelques races d'Italie, quand on parvient à les acclimater, sont susceptibles d'amélioration. Ea race de S'°,-Tulle est dans ce cas, et elle est devenue très- riche en soie, comme je l'ai démontré dans divers mémoires approuvés par linstitut. Sans l’épidémie de la gattine , dont les causes pro- bables se rattachent aux causes météorologiques des maladies des végétaux, les travaux d'amélioration de la race S'*,-Tulle n'auraient pas été interrompus. Depuis l'invasion de cette épizootie, nous avons été obligés de conserver et les travaux d'amélioration ont été suspendus. À S®-Tulle, nous obtenons des soies aussi belles que dans les Cévennes ; des blancs aussi beaux que ceux de M. Brunski. CONGRÈS DES ACADÉMIES. 203 M. Guérin-Méneville soumet à l’Assemblée des échan- tillons de ces soies et continue ainsi : Si nous devons nous préoccuper d’abord de notre ver à soie domestique, source de richesse pour le pays, nous devons aussi chercher à en acquérir d’autres, qui donnent des produits non moins importants dans d’autres pays. G’est pour cela que la Société zoologique d’acclimatation a fait des démarches qui ont été cou- ronnées d’un plein succès. Il y a plus de 10 ans que je demande l'introduction des bombyx Indiens , Chinois et Américains , soit domes- tiques, soit sauvages, dont la soie habille des popu- lations entières. | Dans une série de leçons faites, en 1850 et 1851, au collége de France, j'ai démontré, comme je lai fait dans divers mémoires, que cette introduction était possible , mais jamais je n’ai pu leffectuer parce que je n’avais aucun moyen d’action. Grâce à la vaste association de la pratique et de la science, effectuée par la constitution de la Société zoologique d’acclimatation , tout ce que je n’ai cessé de demander en vain devient possible et s’effectue. Nous avons enfin ce Bombyx Cynthia et ce Bombyx de chêne, que j'ai demandés si souvent en vain. Nous en avons d’autres espèces propres à l'Amérique et à l’Afrique et nous ne nous arrêterons pas là ; nous essaierons beaucoup d’autres espèces qui semblent présenter aussi des con- ditions de succès. Le Bombyx Cynthia a été donné à l'Europe par deux savants Piémontais, MM. Baruñfi et Bargonzi. C’est une acquisition accomplie et ilne s’agit plus que de chercher 204 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. les meilleurs moyens d'utiliser ses cocons. M. E. Robert a fait des semis de ricin à la magnanerie expérimentale de S'*.-Tulle pour nos expériences sur ce bombyx. Le Bombyx du chêne, qui vit en Chine dans des contrées plus froides que le Nord de la France , est vr le point de nous être acquis, grâce au zèle de M. äe Montigny, secondé par de vénérables missionnaires français en Chine. Déjà, en 1851, un de ces hommes dévoués, le père Perny, avait envoyé quelques cocons vivants à Lyon, et c’est en passant dans cette ville, vers la fin d’avril 1851 , que j'ai pu dessiner et décrire, d’après le vivant, le dernier des papillons provenant de cet envoi et dont on ne put obtenir d'œufs. Ce bombyx, qui portera le nom de Bombyx Perny, en mémoire du missionnaire qui a le premier envoyé ses cocons vivants en Krance, est très-voisin du Bombyx assamensis, que j'ai vu et dessiné à l’exposition uni- verselle de Londres , et des études entomologiques seront nécessaires pour nous fixer sur la question de savoir s'il y a des différences spécifiques entre ces bombyx appartenant à deux contrées si différentes. La Société a également reçu des cocons vivants des Bombyx Cecropia et Po‘'yphemus (le vrai Paphia de Linnée) qui vivent dans FAmérique du Nord sur divers arbres très-rapprochés de nos saules, des ormes , du noyer , etc.; et elle va essayer aussi leur introduction. Elle a aussi des cocons vivants d’une magnifique espèce du Brésil, le Bombyx aurala. Je dois le répéter, en terminant cet aperçu trop rapide, ces tentatives d'introduction d’espèces étrangères ne sauraient me détourner des études scientifiques et CONGRÈS DES ACADÉMIES. 205 pratiques nécessaires à la conservation et à l’amélioration de nos races françaises du ver à soie ordinaire, et je ne cesserai de demander à notre agriculture, comme je le fais dans un Calendrier du magnanier qui paraît chaque mois dans l’Agriculteur praticien, de se décider . enfin à faire quelque chose de sérieux et d’efficace pour que notre pays conserve la supériorité séricicole qu’il doit aux belles races que l’épidémie actuelle menace de nous faire perdre. M. Guérin-Méneville fait circuler de nombreux échan- tillons de papillons , de cocons , de soies filées et de tissus de l'Inde. Ces tissus sont inusables : un même habit sert à plusieurs générations. M. Guérin exhibe des tissus de soie cardée, tels que les filoselles, et des tissus de soie dévidée, comme le sont les foulards. Voici un spécimen de certains grands cocons qui atteignent jusqu'à un mètre de grandeur, et qui ont été rapportés de Madagascar par M. Coquerel, fils du pasteur protestant et officier de marine. Voici les tissus Malgaches qui en proviennent : ils sont grossiers, ce sont des filoselles, mais très-solides. Ces bombyx vivant sur les Mimosa seraient convenables dans le Midi de la France. M. Guérin-Méneville termine par lexhibition d’un cocon gigantesque du Mexique, qui ne pourra être introduit en France , à cause du climat, mais qui réussirait dans nos colonies. M. Dréolle a demandé à M. Guérin-Méneville s’il avait eu connaissance des échantillons de soie d’une blancheur admirable, exposés en 1844 et 1849, par M. Brunski, 206 INSTITUT DES PROVINCES DÉ FRANCE. de la Bréde, près de Bordeaux. On trouva alors la soie de M. Brunski la plus belle qu’on ait jamais vue en France. M, Brunski fut récompensé de ses soins , de ses travaux par le Gouvernement qui le créa chevalier de la Légion-d’Honneur. M. Dréolle voudrait bien savoir ce qu'est devenue la soie de M. Brunski qui avait offert de vendre au Gouvernement son système d'éducation ? M. Guérin-Méneville a répondu qu’il avait eu con- naissance de la soie de M. Brunski. C'était bien, en effet, une très-belle soie que la sienne, d’une blancheur éblouissante ; mais M. Brunski n’a jamais pu en exposer de grandes quantités pour le commerce, pour l’indus- trie ; il n’a présenté jamais que de faibles échantillons. La soie de M. Brunski est, en quelque sorte, un tour de force. C’est ce qui a empêché le Gouvernemént d'acheter à M. Brunski son secret. M. Guérin a présenté un échantillon de la soie de M. Brunskiet, à côté, il en a montré d’autres en gros écheveaux qui ne cèdent en rien en qualité et en blancheur à l'échantillon de M. Brunski. M. Eugène Robert lit le travail suivant : NOTE SUR LES TRAVAUX D'AMÉLIORATION DE DI- VERSES RACES DE VERS A SOIE À la magnanerie expérimentale de S'e,-Tulle { Basses-Alpes ). Toutes les personnes qui s'occupent de sériciculture savent aujourd’hui que la dégénérescence et l’abâtardis- sement des races de vers à soie sont le principal obstacle aux progrès et au développement de l’industrie séricicole. Ce fait est suffisamment établi, par les plaintes unanimes CONGRÈS DES ACADÉMIES. 207 dont sont remplis les journaux spéciaux , par les enquêtes faites dans les principales contrées séricicoles, par les rapports de l'inspecteur général de la sériciculture et enfin, par lés nombreuses pétitions adressées au Ministre de l’agriculture et du commerce , par les sériciculteurs, les filateurs et les négociants en soie les plus connus. Deux effets très-fâcheux résultent de l’appauvrisse- ment et de la dégénérescence de nos races : 4°. L’affaiblissement de la santé des vers, ce qui augmente beaucoup les difficultés de l’éducation , et en diminue considérablement le produit ; 2°. L’infériorité du brin de la soie qui résulte des cocons informes , satinés , faibles et donnant des soies bouchonneuses, duvêteuses, sans nerf, ni élasticité, et manquant de presque toutes les qualités indispensables à la filature et à la bonne fabrication des tissus. Dans certaines régions séricicoles et principalement dans la partie inférieure de la vallée du Rhône et en Provence , les races des vers à soie sont plus parti- culièrement frappées de cet abâtardissement. Les soies qui en proviennent sont d’un placement plus difficile, et beaucoup moins avantageux. La régénération des races est donc une chose très- essentielle. Par cette régénération on se propose de corriger les défectuosités qui viennent d’être signalées, en introduisant, en acclimatant , ou en créant même des races plus pures, plus robustes, plus faciles à élever, produisant des récoltes de cocons plus abondantes, et des soies supérieures en qualité. Il faut trouver les moyens d’assurer les produits de la récolte des vers à soie, autant qu’on peut raisonna- blement lespérer, en cherchant les procédés les plus 208 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. rationnels pour prévenir les nombreuses maladies que l’abâtardissement des races et beaucoup d’autres causes que nous avons eu l’occasion de signaler souvent, introduisent dans les éducations ordinaires. | Il faut continuer le perfectionnement des méthodes d'éducation, qui sont susceptibles, on le comprend bien, de s'enrichir comme la pratique de toutes les autres industries , des découvertes de la science moderne et de la pratique réunie, Il faut les faire pénétrer peu à peu dans les contrées séricicoles où l’empirisme domine encore. Il faut augmenter la richesse en soie des cocons , par le perfectionnement dont les races types de vers à soie sont susceptibles, afin de pouvoir obtenir le plus grand produit possible en soie, d’une quantité de feuilles de müûrier donnée. Au perfectionnement des types se rattache une question dont les conséquences sont incalculables. Nos expériences ont mis hors de doute que telles ou telles contrées donnent des qualités de soie qui conviennent plus particulièrement à tel ou tel ordre de produits de l’indus- trie. 11 ne s’agit donc de rien moins que de déterminer les types qui conviennent le mieux à chaque contrée sérici- cole , d'amener ces types une fois trouvés à leur état de développement le plus complet, d'établir les propriétés particulières de la soie fournie par chaque type , afin de spécialiser les races , s’il est permis de s'exprimer ainsi. On arrivera nécessairement ainsi, en appliquant par analogie les méthodes de perfectionnement du bétail et des espèces domestiques qui ont donné de si beaux résul- tats en Angleterre , à l'établissement de la Classification industrielle des races de vers à soie. C’est à cette œuvre de progrès qu’a été consacré, de- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 209 puis bientôt vingt ans, la magnanerie expérimentale de Ste.-Tulle , qui est devenue en même temps une école de sériciculture , depuis que l'honorable M. Guérin-Méne- ville, sur l'invitation qui lui en avait été faite en 1846, par le Congrès scientifique de France, a bien voulu se charger de faire , chaque année , un cours d’entomologie séricicole. Nous possédons aujourd’hui un certain nombre de races françaises perfectionnées, et de races étrangères en bonne voie d’acclimatation, dont on verra les produits à l'exposition universelle. Nos travaux seraient bien plus avancés, si, depuis trois ou quatre ans, nos campagnes n'étaient pas désolées par des maladies, par des épidé- mies, qui pèsent bien cruellement sur le règne végétal et sur le règne animal tout à la fois; tous nos efforts, en ce moment, tendent exclusivement à conserver les races que nous avons perfectionnées ou acclimatées par des efforts si permanents. 11 s’agit avant tout , on le comprend aisément , de les empêcher de périr. Ce n’est évidemment que lorsque nous n’aurons plus cette lutte à soutenir que nous pourrons reprendre convenablement nos travaux d'amélioration et d’acclimatation des races de vers à soie, but constant de nos soins et de nos légitimes espérances. M. Guérin-Méneville offre au Congrès et analyse ver- balement un curieux mémoire publié dans sa Revue et Magasin de zoologie , sur les métamorphoses inconnues jusqu'ici du Cebrio Gigas, insecte coléoptère dont le mâle et la femelle présentent de si grandes différences que Latreille crut devoir créer pour la femelle un genre distinct, le genre Hammonia. C’est aux patientes ob- servations de M. Lefebure de Cerisy, ingénieur de la M0 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. marine à Toulon que l’on a dû de connaître enfin la vérité sur cet insecte singulier, dont la femelle reste toujours sous terre, tandis que les mâles se montrent en temps d'orage. MM. Chapuy et Candèze, auteurs d’une Histoire des larves des coléoptères qui va paraître en Belgique , ont décrit le premier état du Gebrio Gigas, qui offre des ressemblances avec la larve du Tenebrio molitor. Désireux de faire connaître aux membres du Congrès les découvertes les plus récentes en entomologie, M. Guérin-Méneville analyse également, avant de le déposer sur le bureau , un second mémoire publié aussi dans sa Revue de zoologie, et où il fait connaitre les mœurs singulières d’un crabe très-curieux, sorte de faux Bernard l’ermite qui protège la partie molle de son corps en se réfugiant sous la moitié d’une coquille bivalve, et dont l'honorable savant a formé un nouveau genre, qu'à raison de cette circonstance il nomme Hypoconcha, M. Guérin-Méneville offre également au Congrès ses Recherches sur les vers à: soie sauvages et domestiques et son travail sur les Maladies des vé- gélaux et particulièrement sur la maladie de la vigne. M. Charles Gomart, à l’occasion de la lettre de M. Duchatellier qui propose que le Congrès tienne extraordinairement quelques séances pendant l'exposition universelle, afin d'étudier, au point de vue de Part, de l’industrie et de l’agriculture, les objets exposés par la province , demande que la proposition de M. Ducha- tellier soit accueillie par le Congrès et que la tenue de ces séances soit fixée au 25 août, époque déjà choisie pour une autre réunion. Il ajoute que, pour rendre fructueuse cette session ex- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 211 traordinaire, il faudrait qu’un certain nombre de membres voulût bien se faire inscrire, et acc°pter la mission d'étudier soit un groupe, soit une section, soit une classe des objets exposés, afin de présenter des docu- ments, des aperçus, pour être examinés par le Congrès le 25 août. M. le président Challe fait une objection à cause de la session des Conseils généraux. M. Paris propose d'adopter au lieu du 25 août le 27 septembre à raison des vacances. Le 25 août est préféré par la majorité des membres. Cette séance étant la dernière du Congrès des délé- gués, M. Calemard de Lafayette en profite pour convo- quer, dans une allocution chaleureuse , les délégués des Sociétés savantes à assister au Congrès du Puy. Il rappelle tous les titres de cette ville à l’intérêt et à la curiosité des étrangers : ses illustres souvenirs; la visite que les rois de France faisaient à Notre-Dame du Puy , comme pour faire ratifier la consécration qu’ils avaient reçue à Reims ; les grands pélerinages dont cette église fut l’objet ; son jubilé particulier qui attirait des foules immenses; l’Université ; les cours d'Amour , et une série de grands événements qui ont laissé tant de traces. M. de Lafayette termine cette vive improvisation, en esquissant l’histoire biogra- phique du fondeur en bronze Croizatier , né aux environs du Puy. Il rappelle le legs qu’il fit à la ville avant de mourir, son testament donnant : 200,000 fr. pour une fontaine en marbre et bronze; 100,000 » pour le Musée, afin de l’enrichir d’une façade monumentale ainsi que d’addi- tions uliles ; 212 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. 40,000 fr. pour faire l'éducation d’un jeune homme apte aux beaux-arts ; 8,000 » pour fonder quatre lits à l’hospice du Puy pour les pauvres du village où M. Croizatier est né. En présence d’un si noble emploi d’une grande fortune, acquise dans les arts, l’Académie a voté une adresse à la veuve de M. Croïzatier qui n’est pas frustrée, car il lui reste encore un million. { Applaudissements. ) De telles marques de sympathie pour une ville, reprend M. de Lafayette, dénotent sa valeur ! Je vous dis donc non pas adieu, mais au revoir au Puy , en septembre 1855 !! (Nouveaux bravos. ) M. Guérin-Méneville prend la parole en ces termes : En remerciant M. le Directeur-général de l'honneur qu’il a bien voulu me faire, en m’invitant au banquet du Congrès et en y conviant aussi mon ami, M. E. Robert, je le prie de vouloir bien m’autoriser à y faire figurer un ami très-distingué , qui a suivi les travaux de la Compagnie, M. Andrè Poey, savant physicien de la Havane ( Cuba ). M. Poey a fait une des découvertes les plus consi- dérables de notre époque, en démontrant qu’on peut rétirer par l'électricité , les métaux introduits dans le corps humain. Cette découverte excite l'intérêt universel et mériterait à son auteur l’honneur que je sollicite pour lui, en ce moment. Le Congrès entend M. Poey avec le plus vif intérêt. M. Poey expose comment il s’y prend pour ôter les substances métalliques du corps humain. Il a ainsi répété ses expériences sur un batracien. Il a introduit une pièce de 20 sous dans l’estomac d’une grenouille. Au bout d’une heure, il ne restait de la pièce qu’une mince plaque d’ar- CONGRÈS DES ACADÉMIES. 213 gent. Cette pièce ainsi amincie passe sous les yeux de l'Assemblée ; elle est presque détruite. L'argent a été en- levé par molécules , et la pièce a été se reformer au pôle positif de la pile. M. de Saint-Hilaire ajoute que des médecins ont pensé à suggérer une idée à M. Poey pour que, par le même procédé, il introduise des métaux dans le corps humain, aussi à l’aide des courants. M. Poey répond qu’il a déjà eu cette idée, et certainement on pourra métalliser le corps et rendre ainsi des services à la médecine. M. Gomart : Tout le métal est-il enlevé? s’en perd-il ? M. Poey déclare qu'il ne s’est pas préoccupé jusqu'ici des quantités. M. le docteur Lecadre s’informe si, par ce procédé on peut décomposer et enlever les métaux organiques du corps humain, métaux organiques qu’il faut distinguer des métaux introduits d’une manière étrangère ? Non , répond M. Poey: le fer du sang est retenu par la force vitale: il faudrait tuer l’homme, pour détruire cette puissante affinité. M. Lecadre: Mais en cas d’empoisonnement, le métal destructeur pourrait-il être retiré ? Oui certainement , répond l’auteur de la communica- tion, les corps étrangers à l’état normal, au système orga- nique disparaissent par ce procédé, et on pourrait enlever ainsi l’intoxication : c’est précisément un des côtés inté- ressants de la découverte , au point de vue pratique. M. de Caumont lit une lettre de M. Vincent, de l’Aca- démie des inscriptions et belles-lettres, dans laquelle cet honorable membre de l’Institut expose au Congrès les causes qui l'ont empêché de prendre part à ses tra- vaux , et où il invite les délégués qui s’occupent de l’his- 14 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. toire et des perfectionnements de la musique, à venir entendre chez lui, iue St.-Jacques, 236, son orgue à quarts de tons , qu’un artiste habile touche tous les jeudis soirs, Enfin, pour clore cette septième session du Congrès des délégués des Sociétés savantes , M. Challe, président de la séance , se lève et prononce le discours suivant : « Parvenus au terme de nos.travaux , nous allons nous séparer pour rapporter dans,nos départements les fruits de cette réunion si féconde, où les:maîtres de la science sont venus nous tenir au courant. des progrès qu'elle a accomplis , depuis notre dernier Congrès, où nous nous sommes tous retrempés à ces communications confrater- nelles dans lesquelles nous avons trouvé tant à profiter , pour apprendre et pour aller répandre et propager dans nos contrées respectives. Le contact des hommes de savoir et de dévouement est, en-effet, le plus précieux sti- mulant pour alimenter et développer le feu de la science; et je ne veux pas laisser passer cette dernière occasion de vous rappeler les nouveaux moyens que cette année nous présentera, de nous éclairer et de nous encourager réciproquement. « Le Congrès archéologique de Châlons-sur-Marne , où nous trouverons de grands souvenirs et des monu- ments célèbres , et où nous pourrons honorer chez lui notre collègue, M. de Mellet, dont la parole vive et animée nous est à tous si sympathique et si chère. « Et, s’il m’est permis d’en parler, après M. Calemard de Lafayette, qui vient d’en parler si bien, le grand Congrès du Puy, qui offrira tant d'intérêt aux naturalistes pour visiter cette contrée si curieuse, aux archéologues CONGRÈS DES ACADÉMIES. 9215 etaux artistes pour étudier ces monuments et ces paysages si remarquables, cet intéressant Musée de dentelles, création si digne d'être imitée ; et cette ville heureuse, qui inspire à ses nobles enfants de si généreuses fonda- tions (4) ; à tous les savants pour resserrer leurs commu- nications avec cette société scientifique si éminente, dont M. Calemard de Lafayette est parmi nous un si honorable et si digne représentant. È «Ilest une autre réunion qui offrira aussi un bien vifin- térêt aux amis du progrès scientifique, c’est le concours provincial de Caen, cette capitale intellectuelle de la Nor- mandie, où il nous sera permis de voir fonctionner cette Association normande, si puissante et si féconde, dont je voudrais voir imiter l'exemple dans les autres provinces. L’isolement est une grande cause d’alanguissement pour les sociétés départementales, et quel profit ne trouve- raient-elles pas à se grouper dans des grandes affiliations provinciales qui, en offrant à toutes un point d'appui, stimuleraient leur activité, en même temps qu’elles ac- croitraient, dans une si grande proportion, leurs moyens d'action et d'influence ? « Nous pouvons déjà nous enorgueillir légitimement , Messieurs, du bien que nos Sociétés diverses ont ac- compli, en tournant vers l'étude tant d'activités aupara- vant stériles; en propageant le goût des arts; en substituant à l'esprit barbare qui détruisait, dégradait ou dénaturait les monuments de l'art, l'esprit éclairé qui les respecte, les conserye et les glorifie; en popularisant la science; (4) « Un fabricant a donné l'année dernière, à cette ville, 20,000 francs, pour fonder le Musée de dentelles, Un artiste distingué, M. Crozatier, vient de lui léguer 400,000 francs pour diverses fondations utiles. 216 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. en développant le progrès agricole, artistique et'indus- triel ; en fécondant le champ inépuisable de l’histoire; en apprenant à nos concitoyens à mieux aimer leur pays, dont nous leur faisons connaître les vicissitudes passées et les ressources présentes! Mais nous serions bien in- grats si, en jetant un coup-d’œil sur les résultats déjà acquis el sur ceux auxquels nous pouvons encore parvenir, nous ne reportions lé bienfait à sa source ,:et si nous n’en faisions remonter la reconnaissance à son auteur. « Notre illustre directeur-général n’est pas seulement le créateur de plusieurs de nos sociétés et le lien puissant et durable de nos communications; il est le guide, le chef et le maître de chacun de nous; et tous, tant que nous sommes, archéologues de France présents et absents, agronomes , arlistes et savants de province, nous pouvons lui dire comme le Dante à Virgile : « Tu duca, tu signor et tu maestro ! « Qu'il sache bien qu’il n’a pas affaire à des cœurs oublieux , et que dans tous nos départements, et jus- qu'aux points les plus reculés de la France, nous ne prononçons son nom qu’en nous découvrant avec amour et vénération. -« Je propose au Congrès de clore sa session, en votant à M. de Caumont les remerciments les plus reconnais- sants et les plus affectueux. « J’ai l'honneur de lui proposer de voter de semblables remerciments à MM. les Secrétaires-généraux, pour le zèle si empressé et si obligeant qu'ils ont montré dans l'exercice de leurs fonctions, et la manière si distinguée dont ils s’en sont acquittés. » CONGRÈS DES ACADÉMIES 217 M. de Caumont remercie à son tour M. Challe et les membres du Congrès. Le Secrétaire, Raymond BORDEAUX. Nora. Les séances du Congrès des délégués des Sociétés savantes ont duré cette année un peu moins long-temps que l'année précédente , par suite du désir témoigné par plusieurs membres de tenir une seconde session en août pendant la durée de l’exposition universelle. Cette seconde partie de la session a été purement adminis- trative, et il a été convenu que les rapports, sur les résultats de l'exposition, ne seraient présentés que dans la session du mois de mars 1856. 40 RAPPORT suR LES TRAVAUX ET LES PUBLICATIONS ACADÉMIQUES DES PROVINCES pendant l’année 1854, D'APRÈS LES RENSEIGNEMENTS COMMUNIQUÉS AU CONGRÈS DES DÉLÉGUÉS DES SOCIÉTÉS SAVANTES, PENDANT LA SESSION DE MARS 4855; Par MM, le comte Georges de SOULTRAIT et le comte de BEAUFORT, MESSIEURS , Chargés de vous rendre compte du mouvement scienti- fique des provinces pendant l’année 1854, ce n’est pas sans un grand embarras que nous entreprenons ce rap port. En effet, comme vons le disait M. Bordeaux au dernier congrès, pour bien juger les nombreuses publi- cations qui vous ont été envoyées, pour analyser d’une manière exacte et eomplète les divers rapports qui vous ont été soumis par MM. les Délégués des Sociétés savante des provinces , il faudrait un long travail et une érudition encyclopédique dont nous sommes bien loin. Il faudrait aussi un espace plus eonsidérable que eelui qui nous est donné dans l'Annuaire de l’Institut des provinces. Notre défiance augmente quand nous. nous rappelons les rap- ports analogues si intéressants et si remplis de faits qui vous ont été présentés les années précédentes. Nous allons PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 219 faire de notre mieux pour ne pas rester trop au-dessous de ces excellents modèles. Nous suivrons un plan diffé- rent de celui que M. Bordeaux avait adopté pour son travail si remarquable de l'Annuaire de 4854. En effet, il nous a semblé qu’il serait peut-être plus commode, pour les recherches, de prendre les départements par ordre alphabétique , et de passer en revue tout ce qui se rapporte à chacune de ces subdivisions, ou du moins tout ce dont nous avons eu connaissance; car il est à regretter que les Sociétés savantes des départements n'aient pas mis plus d’empressement jusqu’à ce jour à seconder les intentions de M. de Caumont, à se mettre en rapport avec l’Institut des provinces, à envoyer des délégués ou, tout au moins, des rapports au congrès annuel des académies. Nous n’avons pas besoin de dé- montrer de quelle utilité serait un travail du genre de celui que nous entreprenons , s’il était complet. Le nôtre sera bien loin de l'être. Nous désirons vivement que les secrétaires qui seront chargés des rapports des années suivantes aient à leur disposition un plus grand nombre de renseignements et puissent faire mieux que nous ne faisons aujourd’hui. Nous allons commencer notre revue des départements. AIN. La Société d’émulation de Bourg s’occupe d'agriculture, des sciences et des arts. Voici, d’après M. Jules Baux, le savant et laborieux archiviste du département, les travaux qui ont été publiés dans l'Ain pendant l’année 1854. Polémique religieuse. — 4°, M. l'abbé Gorini, curé de St-Denis, près Bourg, a publié un ouvrage remar- 220 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. quable, intitulé : Défense de l’Église contre les erreurs historiques de MM. Guizot, Thierry, Ampère, Mi- chelet , etc. , etc. 2 volumes in-8°. , Girard et Josseran , éditeurs , Lyon. | 2°, MM. les Professeurs du grand séminaire de Brou ont fait imprimer un compte-rendu des conférences du clergé du diocèse de Belley, traitant plusieurs sujets de l'Écriture-Sainte et de l’histoire ecclésiastique. In-8°., Bourg, imprimerie Milliet-Bottier. Archéologie.—A1°, volume des Courses archéologiques dans le département de l’Ain, par M. Sirand, juge, ouvräge qui a pour but d’enregistrer toutes les décou- vertes d'objets antiques, médailles, sceaux, poteries, statuettes, avec planches lithographiées. In-8°., impri- merie Milliet-Bottier. Histoire, —. édition de l’Hisloire de l’église de Brou, par M. Jules Baux, archiviste du département de l'Ain , notes nouvelles, planches chromo“lithographiées. Grand in-8°., Bauchu , éditeur, Lyon. Liltérature. — Jeanne Hachette, petit poème par M. le comte Emmanuel de Coëtlogon , préfet de l’Ain. Des sœurs de charité et plus Spécialement des salles d'asile, par M. le vicomte de La Boulaye, autre petit poëme. Sortis l’un et l’autre des presses de Milliet-Bottier. Économie. — De la valeur progressive du sol com- parée aux fortunes mobilières, par M. Perrault de Jotemps, receveur des finances à Belley, suivi de la réimpression de lAnti-Desmon de Mascon, ouvrage d’un ancêtre de l’auteur précité, In-12, imprimerie de Milliet-Bottier. PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 4854. 294 Statistique. — Annuaire de l’Ain pour l'année 1854, publié et imprimé par Milliet-Bottier. In-8°, , 14 feuilles. Agriculture. — Exposé de la question des étangs et de l'assainissement de la Dombe, par M. Lamairesse, ingénieur hydraulique. In-12, imprimerie Milliet-Bottier. Manuel de drainage, par le Même. In-12, imprimerie Milliet-Bottier. M. d’Assier de Valinches, de Lyon, vient de faire paraître sous le titre de Mémorial de Dombe, un ma- gnifique volume orné de planches et d’armoiries, con- sacré à donner l’histoire du Parlement de l’ancienne principauté de Dombes et un armorial de cette cour. Le volume est sorti des presses de M. Louis Perrin, l’habile imprimeur Lyonnais, dont nous parlerons à l’article de Lyon. M. Valentin-Smith, conseiller à la cour impériale de Lyon, s'occupe de colliger une bibliothèque Domboise et de réunir tous les documents historiques relatifs à cette contrée, Nous ne savons rien de la Société d’émulation de Nantua. AISNE. M. Charles Gomart, l’un des secrétaires-généraux du Congrès, vous a rendu compte des travaux du Comice de St.-Quentin. Après avoir parlé des concours annuels de bestiaux, des prix de moralité décernés chaque année aux ouvriers agricoles, il ajoute que le Comice continue ses efforts pour introduire dans les usages de la ferme le livret agricole 222 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. qui, tout en sauvegardant les intérêts du maître aussi bien que ceux de l’ouvrier, les amène tous deux à rester fidèles à leur contrat. — Il cite les résultats qu’on a obtenus pour le drainage dans l'arrondissement de St.- Quentin. Il y a deux ans on produisait seulement quelques tuyaux ; en l’année 1854, on a drainé plus de 80 hectares. Le Comice a encouragé par des médailles MM. Théry de - Grugin et Dollé de Gibercourt, qui les premiers sont entrés dans cette voie. La cherté des grains a fait multiplier, avec un admi- rable entrain, les machines à battre dans Flarrondis- sement de St.-Quentin , et au mois d'août 4854, après l'épuisement des blés anciens, les machines à battre ont été d'excellents auxiliaires pour aider à fournir des blé s nouveaux nécessaires à la consommation, Quelques cul- tivateurs et propriétaires ne se sont pas bornés à intro- duire dans leurs fermes des batteuses à manège, quelques-uns ont fait établir, dans leurs exploitations, des machines à vapeur fixes pour battre leurs grains. Ces machines fixes, une fois installées dans la ferme n’ont pas servi uniquement à battre, mais encore à broyer les grains, à hacher la paille, concasser les tourteaux, couper les racines et fournir de l’eau pour le bétail. II cite encore un cultivateur du Catelet, M. Lemaire-Journel, qui, à l’exemple du mécanicien Bruney, de la Loire- Inférieure , fait construire une machine à vapeur loco- mobile, et une machine à battre portative pour aller battre les récoltes de village en village. En même temps les semis en lignes et même la plan- tation du blé se développent sur une certaine échelle. Ces innovations ont l’avantage de donner, avec moins de semence , des récoltes plus abondantes, de moins fatiguer PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 4185/1 293 le sol et d'offrir, par les sarclages qu’elles rendent obli- gatoires, une augmentation de travail bien précieuse pour la portion la plus faible des populations rurales. Jusqu’alors l'introduction des blés anglais en France a été faite plutôt comme changement de semence que comme choix des espèces et variétés les plus productives. Le Comice de St.-Quentin, pour arriver à ce but, a fait venir directement, de la maison Peters Lawson and son d'Edimbourg, les deux espèces de blé les plus productives de l'Écosse : blés blancs, Hunter et blés rouges, Bed lammas. Ces blés, grâce à la facilité accordée cette année de les faire entrer en France au faible droit de 25 cent. par 100 kilos au lieu de 8 fr., ont pu être livrés aux cultivateurs dans les meilleures conditions. Cet essai a parfaitement réussi et le Comice compte l'appliquer cette année à la régénération de la semence des vesces d'hiver, des pois blancs et des pois gris, qui, en Angleterre, sont d’un grain plus gros, très- pesant, et qui fournissent un fourrage abondant. Puis il a déposé les ouvrages suivants auxquels il a la plus grande part : Bulletins du Comice agricole de l'arrondissement de St.-Quentin, tome IIL°., 1854. In-8°. de 256 pages, avec un plan de drains et 12 gravures sur bois. | Almanach-annuaire de St.-Quentin et de l’arron- dissement , 1", année. St.-Quentin, Hourdequin. In-18. Tableaux de statistiqu2 quinquennale de larron- dissement de St.-Quentin, publiés sous les auspices du Comice de St.-Quentin. 1854, in-4°. Extraits originaux d’un manuscrit de Quentin de La Fons, intitulé : Histoire particulière de l’église de 29h INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. St.-Quentin, publiés pour la première fois par Ch. Gomart ,t. I. St.-Quentin, Doloy, 1854; in-8°. de 31 feuilles 492. — Cette histoire fort intéressante est précé- dée d’un avant-propos et d’une notice biograpbique sur Quentin de La Fons, dus à M. Gomart. Le volume est orné d’un plan et de diverses gravures. ALLIER. M. le comte de Montlaur, délégué de la Société d’ému- lation de l'Allier, vous a fait le rapport suivant sur les Sociétés savantes de ce département : Le département de l'Allier compte trois Sociétés qui rivalisent de zèle pour répandre le goût des sciences , des lettres et des arts autour d'elles : La Société d'agriculture , La Société d’émulation, La Société d’horticulture. La première de ces Sociétés, qui existe depuis de longues années et qui a rendu d’éminenis services au pays, en- courage de tous ses efforts le progrès en agriculture ; elle s'occupe avec dévouement de répandre les nouvelles découvertes , d'améliorer les races de bestiaux ; elle fait vendre chaque année des taureaux charolais venus des meilleures écuries , ainsi que des béliers , qui sont ache- tés avec empressement et deviennent une ressource pré- cieuse pour le petit fermier qui, sans ce concours intel- ligent, verrait son cheptel diminuer chaque année de va- leur. Aussi plusieurs agriculteurs de l’Allier ont-ils ob- tenu de brillants succès aux divers concours généraux. La Société d’émulation, dont j'avais l’honneur d’entre- tenir le Congrès à la session précédente , n’est pas restée / PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 41855. 295 inactive pendant l’année 1855. — Elle a redoublé d'et- forts. Elle continue la publication de son bulletin, qui a pris même plus d'importance. Des planches gravées ou lithographiées avec talent accompagnent plusieurs des travaux que contiennent ses pages. Elle porte avec raison son attention sur les hommes qui ont honoré le départe- ment, comme le programme de cette année, dans sa 42°. question, en exprime le vœu. Les biographies provin- ciales que quelques-uns de ses membres ont publiées sont déjà nombreuses ; des travaux du même genre sont en préparation. Le Congrês archéologique s’est tenu , en 1854, à Mou- lins ; nous regrettons de ne pouvoir dès aujourd’hui pré- senter le volume qui en est le fruit au Congrès de Paris ; mais l’impression de ce volume , assez fort, n’est pas en- core terminée. Au reste, sous peu de temps, il sera dis- tribué aux membres de l’Institut des provinces. Pendant la session du Congrès de Moulins , la Société d’émulation a décerné le prix qu’elle avait fondé pour l’éloge du natu- raliste Francois Perron (de Cérilly). Deux mémoires, tous deux fort remarquables, avaient été présentés au concours , l’un d'eux avait été composé par un studieux écrivain de l'Allier, membre de la Société d’émulation, M. Louis Audiat. Le musée de la Société , si récent encore, prend une rapide et heureuse extension ; ses richesses s’accroissent plus vite qu’on n’aurait osé l’espérer. Depuis le Congrès de cet été, les dons ont été nombreux, et pour répondre au vote bienveillant émis alors, des moulages précieux ont été effectués. Le Conseil-général , de son coté, en- courage chaque année, par une allocation, les efforts de la Société d’émulation. 226 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Une troisième Société, nous l’avons nommée plus haut, la Société d’horticulture, sœur cadette des deux premiè- res, existe depuis deux années dans l'Allier. Presque tous les propriétaires du département ont tenu à honneur de figurer parmi ses membres : les services qu’elle a déjà rendus sont incontestables, ses expositions de fleurs, qui se renouvellent chaque année à l’époque des courses, sont des fêtes charmantes auxquelles on s’empresse d’as- sister, Les Annales qu’elle publie sont lues attentive- ment et consultées avec fruit. La culture maraîchère, très-arriérée parmi nous , aura, grâce à ce recueil, fait avant peu d’années de larges progrès. L'arboriculture, cette branche si importante de l’économie domestique, lui devra d’être mieux étudiée ; enfin, l’ornementation des jardins sera plus brillante. Le département de l’Allier pourra lutter sans trop de désavantage contre les mer- veilles des horticulteurs parisiens. Telle est la situation des diverses Sociétés dans le département qui m'a fait l'honneur de me déléguer au Congrès central. Cette situation est bonne, elle tend à devenir meilleure encore. Ces Sociéfés seraient heureu- ses d'obtenir l'approbation du Congrès. M. le comte Georges de Soultrait a ajouté quelques détails sur le musée de la Société d’émulalion de l'Allier ; il annonce que la Société d’émulation a commencé la collection des ouvrages écrits sur le Bourbonnais ou par des auteurs originaires de cette province. Il entretient aussi le Congrès des importantes constructions en style du moyen-àge qui s'élèvent et vont s'élever à Moulins; ce sont : l’église du Sacré-Cœur , en style ogival primaire, dont la construction est fort avancée ; la nef de la cathé- drale, dont on pose les fondations et la chapelle du Cœur- PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 4854. 297 immaculé de Marie, de style roman. Les travaux sont dus à MM. Lassus et Esmonnot, AUBE, Nous n’avons eu, cette année, aucun renseignement sur la Société d'agriculture, sciences, arts et belles-lettres de Troyes. AUDE. M. Mahul, délégué des Sociétés de Carcassonne, vous a fait les rapports suivants : La Société de Carcassonne vous a déjà été signalée comme ayant pour attribut principal l’administration du Musée et de la Bibliothèque , beaucoup plus que la dis- sertation académique. Ce rôle modeste, mais utile dans une ville d’une importance moyenne particulièrement , n'exclut pas le patronage intelligent et la surveillance attentive de tout ce qui, dans le rayon d’action de la Société, intéresse la science et l’art. C’est pourquoi je ne croirai pas sortir de la question en comprenant dans cet exposé succinct les divers symptômes de vie ou de pro- grès qui se sont manifestés, cette année, dans notre dépar- tement, et auxquels elle n’est jamais restée étrangère soit collectivement, soit par l’action individuelle de ses membres. Le siége épiscopal de Carcassonne fut occupé depuis 1780 jusqu’en 1778, par Armand Bazin de Bezons, fils du maréchal de Bezons , vieux capitaine illustre du règne de Louis XIV, et neveu de l’archevèque de Rouen, du même nom de Bezons, membre du Conseil de régence, 298 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. pour les affaires ecclésiastiques. C’est assez dire que si M. de Bezons resta évêque de Carcassonne durant près d’un demi-siècle, c’est qu’il ne voulut pas consentir à quitter ce siége reculé, pour des évêchés riches et plus rapprochés de la Cour. M. de Bezons s'était attaché à nous par ses propres bienfaits. Il employa ses revenus considérables à bâtir le palais épiscopal, à ouvrir des routes, à construire des ponts, à planter des prome- nades publiques , à élever des halles, à doter les hôpi- taux de bureaux de bienfaisance, d'écoles de Frères de la Doctrine Chrétienne, Enfin , il voulut être enterré au milieu des pauvres qu’il inslitua héritiers du peu qu'il n’avait pu leur distribuer de son vivant, Le nom et l’ef- figie de ce pieux évêque , lequel, comme tous les évêques du Languedoc, fut un habile administrateur, ne se voyaient nulle part, dans la ville qu’il avait si long- temps comblée de ses bienfaits; le peuple, qu'il avait tant aimé, commençait à l'oublier. 1l a suffi d'appeler sur cet état de choses l’attention de la Société des arts de Carcassonne : elle a immédiatement adopté avec cha- leur le dessein d'élever, par voie de souscription publi- que , un modeste monument à la mémoire de M. de Bezons. En attendant, la Société a voté l'exécution de son portrait pour la galerie iconologique locale de notre muséum , ét elle a bien voulu me choisir pour rédiger une notice biographique de notre illustre évêque. M. l'abbé Vergnet, missionnaire apostolique, a publié, dans notre ville dont il est natif, la relation de son apostolat dans la Nouvelle-Calédonie , en 2 vol. in-8° accompagnés de gravures dont il a lui aussi donné les dessins. Immédiatement après la publication de cet ou- vrage , dont elle ne pouvait manquer d’apprécier le mé- PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 4854. 299 rite , la Sociéte s’est empressée d'admettre M. l'abbé Vergnet au nombre de ses membres résidents. On a recommencé , cette année 1854, la publication de l'Annuaire statistique du département de l’Aude , sus- pendue depuis 1848. Ce volume, resserré dans des bornes trop étroites par les exigences de l’imprimeur qui l’a édité, ne peut manquer d'acquérir par la suite tout l’in- térêt dont il est susceptible, si la publication continue d’être placée sous la direction intelligente de celui des membres de la Société, qui a bien voulu s’en charger celte année. Le Congrès a paru écouter avec intérêt une discussion élevée dans son sein sur la rédaction des journaux de département. J’ajouterai mon témoignage à ceux que le Congrès a déjà reçus touchant la facilité d'accès que les hommes lettrés de nos provinces sont habitués à trouver auprès des éditeurs des feuilles périodiques des départements. Voici l’indication de celles qui ont paru cette. année dans le département de l’Aude. A Carcassonne, chef-lieu du département : Le Courrier de l’Aude, journal cautionné, paraît le mercredi et le samedi. — La Société des sciences et arts lui permet de prendre communication de ses. procès- verbaux, qu’il püblie par extraits. L'Écho de l’Aude, journal cautionné, paraît le samedi. | | Journal de la Société d'agriculture de l'Aude, un cahier in-8°. Chaque mois la Société y publie le texte des procès-verbaux de ses assemblées. A Limoux, chef-lieu d'arrondissement, le Comice agricole publie un Bulletin mensuel. Hormis les affiches judiciaires, il n'existe aucune 230 INSTITUT DES PROVINCÉS DE FRANCE. publication périodique, dans les deux autres arron- dissements de Narbonne et de Castelnaudary. Cette année a vu ériger en lycée impérial , le collége municipal de Carcassonne. Les avis ont été partagés sur l'opportunité de cette transformation : du moins, elle a attiré dans nos murs une colonie universitaire dont la présence paraît devoir réveiller jusque dans les rangs des hommes faits, la culture trop généralement délaissée des belles-lettres anciennes. A cette occasion, et pour faire la part de l'éducation du peuple, l'administration municipale a ouvert à l'hôtel-de-ville, des cours gratuits de chimie et de géométrie appliquées aux arts. La liturgie romaine a été introduite, cette année, dans le diocèse de Carcassonne. On a publié addition- nellement un propre des saints du diocèse, qui doit être noté pour prendre son rang dans les bibliothèques liturgiques. La Société d’agriculture de l’Aude continue d’exercer une active et utile influence sur le progrès agricole dans le département : 4° par la publication de son journal mensuel, parvenu à son 34°. vol. ; 2°. par l'exhibition publique, les jours de marché, des musées agricoles qu’elle a institués ; 3°. par les concours qu’elle ouvre et les primes qu’elle distribue; savoir : 4°. au domaine rural le mieux tenu, alternativement dans chacun des arrondissements ; 2°, primes diverses a l’édu-. cation du cheval, du bœuf et de la vache, des bêtes à laine, du porc, des vers à soie. Le drainage, encore peu pratiqué en Languedoc, a aussi fixé l'attention de la Société d'agriculture de l'Aude. PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 185/. 231 S'apercevant que la propagation de cette utile méthode était arrêtée, soit par la difficulté de se procurer des tuyaux à drainer, soit par le défaut d'opérateurs intelligents et exercés, la Société a ouvert une liste où elle invite à s'inscrire les personnes qui auraient l'intention de soumettre au drainage un ou plusieurs hectares de leurs terres. Elle a en même temps informé les souscrip- teurs, qu'aussitôt que la liste atteindrait le chiffre de 100 hectares à drainer (ce qui suppose une somme moyenne de 25,000 fr. à 30,000 fr. à dépenser, à raison de 250 fr. à 300 fr. de dépense par hectare à drainer), elle s’adresserait soit au Ministre de l’Agriculture , soit à l’industrie privée, afin d'attirer dans le département un ingénieur expérimenté qui consentirait à se charger, à forfait , du drainage de 100 hectares portées sur la liste de souscription, dans lequel marché à forfait de- vraient être compris, soit l’embrigadement d’une es- couade d'ouvriers draineurs habiles , soit la fourniture des tuyaux et manchons nécessaires pour l’accom- plissement de l'opération. Cette souscription , accueillie avec faveur par les agriculteurs du département de l'Aude, paraît devoir aboutir à une prochaine réalisa- tion. | M. Casimir Courtejaire, l’un des membres les plus actifs et les plus intelligents de la Société d’agriculture de l’Aude, a obtenu au concours régional, ouvert l’été dernier à Valence en Dauphiné, entre les départements du Sud-Est de la France, la grande médaille d’or, pour les garances et les chardons à brosser les draps (cardère), cultivés sur ses terres. Les produits de M. Courtejaire ont donc été jugés supérieurs aux garances de Vaucluse et aux chardons de St.-Remy , que 232 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. l'opinion générale et les prix courants du commerce classent au premier rang. Enfin un progrès qui s’est manifesté sensiblement cette année dans le département de l'Aude, et auquel la Société d'agriculture n’a pas été étrangère, c’est l'adoption assez étendue de la machine à battre les blés, laquelle se substitue aux anciennes méthodes du fléau et du haras, et à la méthode plus récente du rouleau. Les opinions comme les préférences se trouvent partagées entre les machines connues sous le nom de leurs constructeurs, MM. Lotz, à Nantes, et Bonnet, à Toulouse, L’abais- sement sensible du prix de ces manèges qui exigent, avant de fonctionner, une‘mise de fonds, 4,200 fr. environ, serait un moyen décisif de généraliser l'usage de ces procédés. Il ne nous est venu aucun renseignement sur le mouvement scientifique et littéraire dans le département de l'Aveyron. BOUCHES-DU-RHONE. La ville de Marseille compte plusieurs Sociétés savantes, mais nous n’avons eu d'envoi que de la Société de sta- tistique, dont les trois derniers volumes vous ont été adressés par le savant et infatigable docteur P.-M. Roux, secrétaire de la Société. Ces volumes, contenant les travaux de la Société de statistique pendant les années 1852, 1853 et 1854, sont les 45°, , 16°. et 17°. de la collection, publiés sous la direction de M. Roux; ils sont remplis de faits curieux et de documents du plus haut intérêt pour les diverses branches de la statistique. PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 4855. 233 Nous devons aussi à M. le docteur Roux les Actes de la première session des assises scientifiques du Sud-Est de la France, tenue à Aix, en 1853 (sous la présidence de M. le docteur Roux) ; 1 volume in-8°, de 10 feuilles. Cette première session a été des plus remplies: on y a discuté des questions fort intéressantes. CALVADOS. M. Travers, secrétaire de l’Académie de Caen, vous a envoyé la communication suivante sur cette Académie : L'Académie des sciences, arts et belles-lettres de Caen avait mis sous presse un volume de Mémoires, à la fin de 4853. Ce volume ne paraîtra que dans le courant d'avril 4855. A moins que la Compagnie ne s’endettât, elle ne pouvait le faire paraître plus tôt, Ses publications, du reste, semblent devoir être désormais plus régulières. Elle vient, en janvier dernier, de s’imposer une cotisation annuelle, qui produira près de 500 fr. Le Conseil général du Calvados et le Gou- vernement continuant de lui venir en aide, elle donnera . un volume tous les dix-huit mois, ou du moins tous les deux ans. Reconnue Société d'utilité publique , le 40 août 1858, elle a pu accepter deux legs : l’un de 12,000 francs, fait par M. le docteur Le Sauvage; l’autre de pareille somme (mais dont la jouissance, partagée avec la Société d'agriculture de Caen, n'aura lieu que tous les deux ans), fait par M. Lair, ancien conseiller de pré- fecture. Les formalités relatives à l'autorisation de toucher les fonds n’étant obtenues présentement que pour le premier de ces legs, l’Académie s’est empressée 23! INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. de répondre au vœu du testateur, et elle a mis au concours le sujet suivant : « Action de l'électricité sur l’organisation humaine, dans l’état de santé et dans l’état de maladie. » Voici les termes du programme : « Les concurrents exposeront d’abord, dans une rapide introduction, l’état actuel de la science. « Quant au fond même de leur travail , ils ne devront pas se borner à une simple exposition des faits anté- rieurement constatés ; ils seront tenus de présenter des résultats qui leur soient propres, soit pour appuyer ou infirmer des théories déjà émises, soit pour en établir de nouvelles. « L'Académie, pour laisser plus de liberté aux con- currents, ne détermine pas tel ou tel point de vue spécial sur lequel leurs recherches pourraient se con- centrer; mais elle désire qu'ils circonscrivent eux- mêmes leur question et s’attachent plus particulièrement à une de ses faces. « Le prix consiste en une médaille de la valeur de 800 francs, qui sera décernée dans la séance publique de 1856. « Les concurrents devront adresser leurs mémoires franco à M. Julien Travers, secrétaire de l’Académie, avant le 1°. juillet 1856. ro, H4 « Les mémoires devront être écrits en français ou en latin. « Les membres titulaires ou associés-résidants sont exclus du concours. » Le volume que l’Académie de Caen va publier contient un choix de morceaux qui ont été lus dans ses réunions, à la fin de 1853 et dans les neuf séances de 1854. Nous PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 4854. 235 disons neuf, afin que l’on remarque le peu de temps dont dispose cette Compagnie et surtout l'étroite cir- conscription de ses matières. Avant 1790, ses réunions étaient plus fréquentes, et, bien que son titre semblât embrasser moins de matières, en réalité son champ était beaucoup plus vaste que de nos jours. Alors, en effet, l’agriculture et le commerce , la médecine, l’histoire naturelle, les recherches archéologiques étaient de son domaine, et ce sont autant de branches détachées du vieux tronc qui fleurissent aujourd’hui en Compagnies spéciales, On dirait qu’elles n’auraient laissé à la Compagnie- mère que ce dont le monde se détourne aujourd’hui, la littérature proprement dite ; n’eût-elle pas quelques sciences réservées, ce lot, ingrat en apparence , serait encore assez riche ; il répond à la plus noble partie de nous-mêmes, et seule, dans les âmes d'élite, il » tient lieu de tout le reste. Le nouveau volume de l’Académie de Caen n’a pas vu le jour; il appartiendra donc à la revue de l’année 4855. Qu'il nous suffise de dire qu’il contiendra des articles de MM. Pierre, Chauvin et Girault, de la Faculté des sciences; Charma , Hippeau , Travers, de la Faculté des lettres; Le Cerf, de la Faculté de droit ; Théry , aujourd’hui recteur de Clermont ; de Gournay, inspecteur d'académie; A. Le Flaguais, le chantre des gloires normandes; Vicillard, bibliothécaire du Sénat; Alleaume, de l’École des chartes, etc. Grâce à la munificence de MM. Lair et Le Sauvage, l’Académie aura des prix à décerner régulièrement, et les mémoires couronnés seront imprimés par ses soins, s'ils ne le sont point dans ses Mémoires. 236 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. M. le docteur Le Sauvage , décédé le 40 décembre 1852, a légué à l’Académie des sciences, arts et belles-lettres de Caen, une somme de 42,000 francs, « dont l'intérêt « accumulé, dit le testateur, servira à établir tous les « deux ans un prix : le sujet dü concours sera choisi « plus particulièrement dans les sciences physiques, « d'histoire naturelle et médicales. » Les dernières for- malités relatives à la délivrañce du legs n’ayant été remplies que dans les premiers mois de 4854, le sujet du premier concours n’a pu être adopté par l’Académie que dans sa séance du 20 mai. M. de Caumont vous a fait hommage, au nom de l'As- sociation normande , du 25°. volume de l'Annuaire des cinq départements de l’ancienne Normandie. Caen, Hardel , in-8°. de trente-sept feuilles. Le mérite de cette intéressante publication et les services rendus par l’Asso- ciation normande sont trop connus pour qu'il soit néces- saire de vous en entretenir. Le même membre vous a fait connaître les travaux de la Société française d’archéo- logie consignés dans le XX°, volume du Bulletin monu- mental, M. le vicomte de Cussy, délégué de Bayeux, à fait le rapport suivant sur la Société des sciences et des arts de cette ville : La Société des sciences et des arts de Bayeux continue ses travaux avec un zèle soutenu. Ses réunions , plus ou moins fréquentes , sont assez nombreuses , surtout celles qui ont pour objet les questions agricoles. La section spé- ciale organise des concours d'animaux dans les divers cantons de l'arrondissement, et comprend dans ses ré- compenses les serviteurs des deux sexes qui, par leur dé- vouement, leur moralité, leurs longs services, se sont PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 997 particulièrement distingués ; et déjà l’effet de cette ému- lation dans le bien est sensible et ne peut manquer de s'étendre d’une manière heureuse. De son côté, la section historique et littéraire ne reste pas inactive et vient se joindre aux nombreux travaux que j'ai eu l’honneur de vous signaler, Messieurs, lors de nos précédentes réunions , une notice fort remarquable sur le beau et imposant château de Creully, élevé à peu de dis- tance de Bayeux et encore debout. On sait que les barons de Creully, venus des ducs de Normandie , rois d’Angle- terre , ont joué un rôle, on peut dire de premier ordre, dans cette partie de la France, au commencement du XII°, siècle jusqu’au début du XVII°. Jamais encore M. le président Pezet, à qui la Société bayeusaine doit déjà tant de travaux d'élite, n’a déployé plus d’habileté dans les détails, d'intérêt dans le récit des faits et leur agencement, de conscience, de zèle et de succès dans les recherches. La bibliothèqne de Bayeux, toujours sous l’heureuse direction du savant et dévoué M. Lambert, a obtenu, pendant l’année qui vient de s’écouler, un certain nombre d'ouvrages plus ou moins importants et de prix, les uns dus à la munificence de l’État, les autres à la générosité privée. Le cabinet d’antiquités, qui en réunit déjà beaucoup, d'autant plus intéressantes qu’elles ont été généralement recueillies dans la localité et servent à en illustrer l’his- toire , pour me servir de l'expression à l’ordre du jour, le cabinet d’antiquités s’est encore enrichi de quelques nouveaux spécimens. ; Enfin , Messieurs, comme durant le cours de nos dé- bats et selon la teneur du programme de cette session , 238 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, on s’est entretenu des journaux de province , j’ajouterai que la ville de Bayeux compte deux feuilles publiques, três-sagement et intelligemment rédigées par MM. De- launey et Pfistre Duvant. Je dirai à cette occasion que ja- mais les personnes qui ont désiré faire connaître les tra- vaux dont elles se sont occupées, n’ont trouvé près de ces messieurs une hospitalité douteuse, encore moins un refus peu bienveillant, Les brochures suivantes, offertes au Congrès par les auteurs , ont été publiées à Caen : De l'abus des cultures épuisantes. Origine et progrès de la cuiture du colza dans la plaine de Caen. Comptes de culture comparée du colza, du blé et de la bette- rave, par M. Morière. Caen, Hardel, 1855. In-8°. de une feuille. Première Olympique de Pindare et note sur quel- ques manuscrits, par M. J. Travers. Caen, 1855. [n-8°. Les départements du Cantal, de la Charente et de la Charente-Inférieure, qui renferment cependant plusieurs Sociétés savantes , ne nous ont adressé aucune commu- nication. CÔTE-D'OR. La commission des antiquités de ce département, re- présentée au Congrès par M. le marquis de Saint-Seine , continue ses intéressantes et belles publications. La pre- mière livraison du t. IV de ses Mémoires, qui a paru l’année dernière, renferme une longue notice sur les fouilles de Landunum, accompagnée de plans et de nombreux dessins, par M. Mignard et Coutant; un PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 239 mémoire sur Espoisses, par M. l'abbé Brouillard ; une notice sur les fragments romains, découverts dans les substructions de l’ancien palais ducal de Dijon, par M. Franlin. M. Destourbet, délégué du Comité central agricole de la Côte-d'Or, vous a entretenus des travaux de cette Société qui continue la publication de son journal mensuel: le Comité central distribue des récompenses agricoles, il encourage la culture de la vigne et l'élève des bestiaux; 45 étalons ont été amenés dans le département depuis 1819, et ont été donnés aux cultivateurs qui offraient le plus de garanties. Le Conseil général a consacré, l'an dernier , une somme de 3,000 fr. à l’achat de taureaux reproducteurs, qui seront vendus ensuite par le Comité central à des cultivateurs ; on espère ainsi doter chaque canton, d’un de ces animaux. Une douzaine ont déjà été introduits l'an dernier. M, de La Voyère, membre du Comité central, a inventé un plantoir pour les pesceaux de la vigne. M. Apparutti a présenté un trieur pour enlever au blé les grainerons ; ce trieur l'emporte sur celui de M. Vaizon. On s’est occupé aussi de la maladie de la vigne sans avoir obtenu de résultats bien évidents, mais ayec l’oïdium, on a trouvé deux autres maladies : l’une consiste en des taches circulaires noires, placées sur les ceps, dans leur longueur; on les attribue soit à des insectes, soit à une maladie; mais on n’en a encore trouvé au juste ni la cause ni les remèdes. Une autre maladie, très-apparente, plie sur elle-même les feuilles de la vigne et rend l'arbre improductif. La Sociéte a publié encore une enquête sur la vigne et la vinification, d’un haut intérêt, où l’on s'occupe de la culture de la vigne et de ses 240 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. pratiques. Le Comité s'occupe aussi d’une enquête pa- reille sur les fourrages, les racines et les arbres fruitiers. CÔTES-Du-NORD. Nous ne connaissons point de nouvelle publication de la Société archéologique de St.-Brieuc, mais nous avons lu avec intérêt le premier volume de l’histoire des évêchés de Bretagne par MM. de Barthélemy et Geslin de Bourgogne. Ce volume commence par une introduction offrant de curieuses recherches sur la Bretagne , depuis la période gauloise, jusqu’au moyen- âge, Un point intéressant de cette introduction est la discussion sur les origines gauloises. Selon MM. Geslin et de Barthélemy, les Gals auraient été les premiers habitants du pays antérieurement aux Celtes, qui ne seraient entrés dans l’Armorique que six siècles avant Jésus-Christ , et c’est aux Gals qu'il faudrait attribuer ces énormes monuments nommés druidiques , les Druides n’ayant vu naître leur religion et leur pouvoir que 400 ans avant l’ère chrétienne. Arrivés à la période gallo-romaine , les auteurs disent quelques mots de la géographie armoricaine d’alors , au consciencieux travail de M. Bizeul de Blain, qui, du reste, reçoit dans ce livre un éloge mérité. Les époques Armorico-Bretonne et Bretonne offrent aussi des parties intéressantes ; les auteurs parcourent ensuite les divisions ecclésiastiques des diocèses de Dol, Porgoët, Alet, et St.-Malo, St.- Brieuc et Treguier, puis les divisions politiques des châtellenies de Jugon, Cesson, Pontgièvre, Montcontour , Goëllo, Guingamp, Minibriac et Lannion, indiquant rapidement les traits principaux de leur histoire et PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 41854. 241 énumérant les communes qu’elles comprenaient. Cette introduction est pleine de détails curieux et offre un coup-d’œil d'ensemble intéressant. Le premier volume, le seul qui ait encore paru, concerne le diocèse de St:-Brieuc. En tête se trouve la suite des évêques de St.-Brieuc, depuis Adam, évêque en 1023, jusqu’à l’évêque actuel Mg’. Le Met. L'administration religieuse y est ensuite traitée, toujours avec une égale conscience. Les deux chapitres suivants, 2° et 3°. de l'ouvrage, sont d’un grand intérêt. Les auteurs y examinent quels furent les droits féodaux des évêques, tel que celui de nommer le roi des poissonniers et celui des boulangers, et la suzeraineté directe sur les coquins, serfs de l'église, sorte de parias, dont la position sociale offrait une question curieuse que les auteurs projettent de traiter plus tard. Au sujet de la milice épiscopale , les auteurs étudient la question des milices féodales dans la Bretagne, où le système féodal, y compris l’hérédité des fiefs, existaient bien avant la mort de Charlemagne. Revenant ensuite à la partie religieuse, nous étudions la constitution du chapitre de la cathédrale, dont les statuts capitulaires sont fort détaillés. Ce chapitre ne craignait point de se présenter au parlement de Bre- tagne , quand , ainsi qu'une fois cela advint , un chantre soutenait un sous-chantre contre les chanoines. Viennent ensuite des recherches sur les fiefs du chapitre, ses revenus généraux, ceux du trésorier, l’administration et les diverses dignités capitulaires ; enfin quelques mots sont ajoutés sur les commencements de la révolution française dans ce diocèse. 11 242. INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Les auteurs étudient ensuite au point de vue archi- tectonique la cathédrale de St.-Brieuc, qu’ils font remonter au XIII, siècle, décrivant le monument et les tombes qu’il renferme, parlant de son histoire et des fondations qui y furent attachées. La dernière partie du 1‘, volume est consacrée à des études ana- logues à celles qui viennent d’être faites sur la cathé- drale : elles regardent les diverses paroisses et couvents de la ville. | A l'ouvrage est joint un atlas renfermant une carte de l’ancien St.-Brieuc, et douze belles planches litho- graphiées d’après des photographies. Quelques gravures offrent les sceaux de plusieurs évêques et couvents. Nous ne pouvons rien dire des travaux des Sociétés savantes des départements de la Creuse, de la Dordogne , du Doubs et de la Drôme. EURE. M. Bordeaux vous a parlé, en ces termes, du mouve- ment scientifique et littéraire dans ce département : « Le département de l'Eure n’a vu produire , pendant l’année 1854, qu’un très-petit nombre d’écrits. M”. Phi- lippe-Lemaître a donné, dans le Bulletin monumental , deux bonnes monographies relatives à des paroisses de ce département. M. Alphonse Chassant à publié la 4°. édition de sa Paléographie élémentaire , qu’il a augmentée d’un chapitre consacré à la sphragistique ou sigillographie. Dans les premiers mois de l’année, M. Raymond Bordeaux a terminé les dernières feuilles de sa description histo- rique et pittoresque du département de l'Eure, dont la PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 2453 publication avait été commencée dès l’année 1853, par l'éditeur Charpentier , de Nantes , et qui fait partie de la Normandie illustrée, ouvrage formant deux volumes in-folio. La Société libre d’agriculture , sciences et arts de l'Eure qui, d'ordinaire, envoyait deux délégués au Congrès, n’y a pas été représentée cette année. Cette Société, dont l’action paraît s'être ralentie, a cependant fait paraître un volume imprimé avec goût à Evreux, dans les ateliers de M. Hérissey. En laissant de côté les trop nombreuses pages de ce recueil consacrées à des discours de circonstance et à d’autres pièces qui ne peuvent avoir d'intérêt que pour les membres mêmes de cette société, nous trouvons à signaler dans ce nouveau volume un article sur le drainage, par un membre de l’Institut des provinces , M. le baron de Montreuil; un travail sur la vaine-pâture, par M. de Vatimesnil ; un inventaire dressé après la mort de Thomas Corneille et où l’on voit quel modeste mobilier garnissait la maison où cet écrivain célèbre passa ses dernières années et que l’on montre encore sur la grande place des Andelys. Viennent ensuite un document curieux envoyé à la Société de l’Eure par M. Léopold Delisle, les statuts de la léproserie des Andelys, en 1380 ,et une biographie étendue et complète d’un navigateur célèbre, Jules de Blosseville, dont la fin mys- térieuse sous les glaces du pôle, paraît avoir été semblable à celle de sir John Francklin et du lieutenant Bellot. Cette biographie, écrite avec des documents inédits, par le frère même de cet intrépide marin, M. le marquis de Blosseville, a fourni les matériaux des nombreux articles publiés depuis quelque temps, dans les journaux quoti- diens, sur Jules de Blosseville. C’est le travail le plus étendu et le plus piquant qui soit renfermé dans le vo- 24 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. lume de la Société de l'Eure, dont il forme environ le tiers. M. le marquis de Blosseville a récemment été élu vice-président de cette Société, et c’est lui qui aura à supporter désormais tout le poids de sa direction, car la présidence titulaire renouvelée chaque année n’est qu’une charge honorifique qui n’a guère d'influence sur les des- tinées de cette compagnie. FINISTÈRE. M. le vicomte de Kéridec vous a parlé des travaux importants qui s’exécutent en Bretagne où on élève en ce moment deux belles flèches sur les tours de la cathé- drale de Quimper ; pour subvenir aux dépenses de ces nouvelles constructions, Mg'. Le Graverend, dont la perte récente est si vivement sentie, avait eu l’heureuse pensée de s'adresser à la charité des habitants de son diocèse , et de proposer une cotisation annuelle de 10 centimes par personne; chacun s’est empressé de ré- pondre à l’appel du vénérable prélat, et les plus pauvres, même les mendiants , ont apporté leur offrande. Ce mode si simple, si populaire et si éminemment chrétien de réparer et de compléter les anciens monuments de la foi et de la piété de nos pères, sera sans doute apprécié par le Congrès. A Hennebont, on restaure aussiles tours de Péglise; les travaux sont dirigés avec beaucoup de soin par M. Lam- bert. M. de Caumont avait bien voulu signaler, dans le Bulletin monumental, ce beau monument du XVII. siècle, et attirer ainsi Fattention de MM. Mérimée et Lassus ; grâce à leur bienveillante intervention, ce grand travail sera bientôt terminé, PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 245 Les départements du Gard et de la Haute-Garonne n’ont adressé aucune com munication au Congrès. GIRONDE. M. Des Moukns, l’un des sous-directeurs de l’Institut des provinces, vous a envoyé l’excellent rapport suivant sur le mouvement scientifique, archéologique et littéraire dans son département : 4°. Architecture religieuse. — La Société française est toujours condamnée à l’inaction , parce que tous les monuments de quelque importance sont classés ou dans la main de la Commission départementale, présidée ad- ministrativement par le sous-préfet de Bordeaux. Sur la demande de M. le comte de Kercado et du propriétaire des ruines précieuses du prieuré de Cayac {visité par une commission du Congrès archéologique de 1852), j'avais écrit au préfet pour lui demander de retirer un arrêté rendu par lui pour la démolition d’un angle de ces ruines (que MM. les ingénieurs voudraient voir disparaître, afin d’aligner la route, et que, par conséquent, ils disent menaçantes pour la sûreté pu- blique : c’est toute l’histoire de la tour de St.-Porchaire de Poitiers, et j'avais cru devoir citer ce fait dans ma lettre au préfet). Dans une autre circonstance , j'avais demandé à l’au- torité municipale de Bordeaux que la ville achetât, pour une salle d'élections, d’assemblées , ou pour un musée, l’ancienne église paroissiale St.-Siméon , dont le clocher et la partie occidentale, du XIII*. siècle, offraient un excellent modèle d'église très-simple pour la campagne ou pour une petite ville , et dont la nef était recou- 246 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, verte d’une très-belle et très-rare charpente du XIV°, où du XV°, siècle. On ne l’a pas fait, mais un par- ticulier l’a achetée, et toute la partie intéressante de l'église vient d’être démolie, et remplacée par une maison d'habitation : voilà un monument perdu. Il n’en est pas de même, heureusement, des monu- ments qui servent encore au culte; on y dépense des sommes très-fortes. Mg’. le Cardinal-archevêque voit, comme il le désire si vivement , son diocèse se hérisser de clochers neufs, souvent fort jolis. Il a fondé une nouvelle paroisse à Bordeaux même, St.-Ferdinand. Le curé et ses vicaires sont nommés et installés dans une petite chapelle, mais on n’est pas encore fixé sur l'emplacement où sera construite l’église dont les plans me sont inconnus. La restauration de la nef de l’église primatiale est terminée en dedans , et l’échaffaudage ( du prix de près de 40,000 fr. ) en est retiré : l’arc triomphal et toute la voûte ont été refaits, et admirablement refaits , comme on en pouvait être assuré d’avance, sous la direction de M. Danjoy, et sous la conduite immédiate de M. Auguste Labbé , architecte des monuments diocésains, — On a même commencé la restauration des combles et achevé celle de la tour de Peyberland ( moins sa flèche) où le bourdon (le Ferdinand-André , 25,000 kilog. fondu au Mans, 49,000 fr. ) a été placé en 1853. — 1,100,000 fr. sont accordés pour tous les travaux de la primatiale , et on assure que Mg’. le Cardinal a obtenu la promesse de 500,000 fr. de plus pour faire un portail à l’ouest. Les églises paroissiales St.-Michel et St°.-Eulalie sont réparées et isolées. On a remis à jour leurs absides : les vitraux de celle de St.-Michel sont de M. Maréchal, PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 217 ceux de St°.-Eulalie de M. Villiet , élève de M. Thibaut, et je préfère ce dernier, comme vitrerie religieuse. Une querelle des plus vives se poursuit, à La Teste de Buch, pour l'agrandissement de la chapelle de N.-D. d'Arcachon, si vénérée des marins, ou pour la construc- tion d’une église nouvelle, nécessaire à l’immense po- pulation de baigneurs. MM. les Ministres de la marine et des travaux publics se sont, avec toute raison, très- énergiquement prononcés pour qu’on ne se permette pas de modifier l’ancienne chapelle, et qu’on bâtisse, à un ou deux kilomètres de là, une église nouvelle. 2°, Monuments civils. — Le grand théâtre de Bor- deaux a été complètement regratté et restauré, et la salle restituée telle qu’elle était du temps de l’archi- tecte Louis. On la dit d’une splendeur Decnpenue Cela a coûté 450,000 fr. à la ville. Les immenses travaux nécessaires à l'établissement des fontaines se continuent avec activité : plusieurs des grands réservoirs sont terminés, et d’ici à un ou deux ans, la plus pauvre des grandes villes de l’Europe, sous le rapport hydraulique , deviendra la plus riche. La ville en sera quitte pour 2,000,000 et demi ou 3,000,000, et se fera un fort beau revenu par la concession, à chaque propriétaire qui le désirera, d’un robinet susceptible de s'élever à tous les étages, et qui donnera pour 20 fr. par an , deux hectolitres d’eau excellente par 2/4 heures. Le quai vertical, en granite dans sa partie centrale, est presque terminé, et de l’aspect le plus grandiose. Les projets, grandioses aussi, ne manquent pas pour la construction d’une bibliothèque monumentale, de bà- timents pour les académies , sociétés savantes , facultés, 218 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. musées, expositions, fêtes publiques, etc.; mais la guerre, au moment où la ville venait de faire un emprunt de 4,800,000 fr. , est venue retarder un second emprunt de 5,000,000, au moyen duquel la ville se proposait de mener de front tous ces embellissements et d’autres en- core. Parmi ceux-ci, je ne puis omettre la translation du jardin des plantes au jardin public, pour laquelle le premier emprunt ne met à la disposition de la ville que 260,000fr., tandis qu’elle voudrait y consacrer 1,000,000. Aussi rien n'avance pour cet objet, et comme il y a un côté scientifique et intellectuel, je ne puis m'empêcher de craindre qu’il n’ait le dessous dans sa lutte contre les embellissements utilitaires ou purement matériels. 3°. Sociétés savantes ou industrielles. — Les fa- cultés continuent leurs cours, mais ne font point de publication spéciale. Quelques professeurs publient leurs travaux séparément, ou à Paris; un plus petit nombre, que je ne saurais assez louer, les dépose dans les pu- blications des Sociétés locales. Parmi ces derniers , on doit distinguer particulièrement M. Raulin pour le dé- vouement avec lequel il enrichit, de ses beaux et con- sciencieux travaux, les recueils de la province qu’il a reçu mission d'étudier et d'illustrer sous le rapport de la géologie principalement (sa chaire comprend aussi la minéralogie et la botanique ). Les sociétés qui publient continuent leurs recueils ( Académie , Société Linnéenne , Société de médecine ). Une nouvelle société composée de jeunes gens et formée depuis peu d'années, d’abord sous le patronage de quelques professeurs de la Faculté des sciences ( Société des sciences physiques et naturelles) a commencé une publication (2 livraisons ) enrichies de quelques thèses PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 4854. 919 Tort remarquables soit pour le doctorat ès-sciences, soit pour des concours académiques. La Société d’horticulture publie aussi un recueil et se rend très-utile. En 14827 , quand la Société Linnéenne obtint de la ville un marché aux fleurs, il y avait à Bordeaux cinq ou six familles de jardiniers-pépiniéristes : il y a maintenant plus de deux cents familles qui vivent de cet art utile dans le potager, délicieux dans le par- terre. La Société d'agriculture enfin , publie aussi, mais elle n’est pas dans une aussi belle voie d’activité et de pros- périté. Néanmoins, le drainage fait des progrès notables et obtient de beaux succès dans le département de la Gironde. La Commission départementale pour la maladie de la vigne a beaucoup travaillé, beaucoup parlé, beaucoup discuté, beaucoup écrit, et, comme partout, n’est arrivée à aucun résultat positif, Nous y avons tous employé beaucoup de temps, et le vœu de notre conscience de- mande que nous ne soyions pas appelés à en perdre da- vantage , car le fléau est hors de notre portée ! Divers signes consolants font espérer que Dieu , dans sa bonté, le retirera peu à peu de nous, comme la maladie des pommes de terre, qui tend à disparaître. La Société philomatique de Bordeaux a fait, en 1854, une exposition régionale d’une remarquable richesse , et il est à espérer que les départements du Sud-Ouest seront honorablement représentés à l'exposition uni- verselle de mai 1855. 4°. Publications individuelles. — Depuis mon der- nier rapport, elles n’ont pas été très-nombreuses, en dehors des recueils des Sociétés locales. Je dois citer : 250 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Description physique , géologique et minéralogique de la Charente-Inférieure, par M. W. Manès, ingé- nieur en chef des mines (en retraite maintenant), membre de l’Académie de Bordeaux. Du principe général de la philosophie naturelle, par M. F. de Boucheporn (1 vol. grand in-8°. de 468 pages, imprimé à Paris). Je ne puis citer cet ouvrage du célèbre géologue et physicien, que parce que son auteur est en ce moment Bordelais, puisqu'il a rem- placé M. Manès, comme ingénieur en chef des mines. Éléments de logique, de psychologie , de théodicée et de morale, par M. Lodevi-Roche, professeur de philosophie à la Faculté des lettres. Un grand ouvrage de pathologie ( dont le titre exact m'échappe), en cinq ou six volumes, par M. le docteur E. Gintrac père, directeur de l’école secondaire de médecine, président de l’Académie de Bordeaux. L'Homéopathie dans les faits, par le comte Henri de Bonneval, licencié en droit, docteur en médecine, et diverses brochures de polémique médicale sur le même sujet, publiées par divers. J'ajoute que le Congrès homéopathique de France a tenu, à Bordeaux, sa session de 1854, et que ses comptes-rendus, qui sont annoncés , n’ont pas encore paru. Recueil d’Éloges, par M. l'abbé Gaussens, chanoine honoraire , préfet des classes au petit séminaire. L’un de ces éloges; celui de Mg’. le cardinal de Cheverus, a été couronné par l’Académie de Bordeaux , qui a admis l’auteur au nombre de ses membres résidants. Essais sur la vie et les écrits de saint Paulin, par M. l'abbé Souiry, chanoine honoraire, curé de St°,-Eulalie de Bordeaux. Cet ouvrage, en deux volumes PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 954 in-8°., contient la traduction complète des œuvres de saint Paulin, et a reçu de l’Académie de Bordeaux une médaille d’argent grand module. La culture des vignes , la vinification et les vins dans le Médoc, par M. A. d’Armailhacq, ancien ma- gistrat, correspondant de l’Académie de Bordeaux ( un volume in-8°. , de 566 pages). Divers écrits polémiques sur la maladie de la vigne, publiés le plus souvent dans les journaux quotidiens , mais qui doivent être mentionnés ici comme afférents à une étude scientifique. Quelques petits recueils de poésies , entr’autres Les Hirondelles, par le vicomte Jules de Gères, membre de l’Académie de Bordeaux. Souvenirs d'un voyage en Italie, par le Même. Compte-rendu des travaux de la Commission des monuments historiques de la Gironde , pour 1853. L’Ami des champs, dirigé par M. Laterrade père, membre de l’Institut des provinces, et l'Agriculture, di- rigé par M. Auguste Petit-Lafitte, membre de l’Institut des provinces, ont continué à paraître par cahiers mensuels. Le Musée du Midi, recueil littéraire et biographique, se publie à Libourne (Gironde), sous la direction de M. Célestin Gragnon. Le Chroniqueur du Périgord et du Limousin, recueil semi-périodique , littéraire et historique prin- cipalement, imprimé à Périgueux sous la direction de M. de Siorac, vient de terminer sa 2°. année. Une Revue de la Gircnde , recueil littéraire, etc., est née, puis morte depuis mon dernier rapport. Histoire maritime de Bordeaux. Histoire de Bordeaux pendant le règne de Louis XVI, 259 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Ces deux brochures sont dues à M. H, Ribadieu, l’un des rédacteurs de la Guienne, qui livrera prochai- nement trois autres ouvrages du même format : Histoire des châteaux de la Gironde , — de la révolution à Bordeaux , — de la bourgeoisie Bordelaise. Ces divers travaux paraissent d’abord dans la Guienne, journal quotidien, par articles séparés, M. Des Moulins vous a fait hommage, en outre, d'une brochure dont il est l’auteur, intitulée : De la propriété littéraire, en matière de nomenclature scientifique. In-8°. de une feuille et demie. Nous n’avons rien reçu des départements de l'Hérault et d’Ille-et-Vilaine. INDRE-ET-LOIRE. M. le comte de Galembert, délégué de Tours, vous a fait, sur les travaux archéologiques en Touraine, un excellent rapport écrit, qui passe en revue tout ce qui a été fait d’important en archéologie dans le département, en 1854. Ce rapport mérite d’être publié in extenso, et il a été réclamé par la Société française d’archéologie , qui compte lui donner place dans le Bulletin monu- mental. M. Cartier , l’un des savants directeurs de la Revue numismatique, dont vous avez regretté l’absence au Congrès, avait écrit à M. de Caumont la lettre suivante : MONSIEUR LE DIRECTEUR, J'ai reçu la circulaire par laquelle vous invitez les mem- bres de l’Institut des provinces à se trouver à Paris, le 20 PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 41854. 253 du mois prochain, pour assister au Congrès annuel des Sociétés savantes. Je regrette que la saison, mon âge et ma santé m'interdisent de faire ce voyage qui me pro- curerait l’avantage de me rencontrer avec des savants, devenus mes confrères, grâce à l’insigne honneur, bien peu mérité que je vous dois de faire partie de l’Institut des provinces. | Je vous avais avoué, dans le temps, que je serais un membre bien oisif , le fruit de mes modestes études étant nécessairement destiné à la Revue numismatique ; de- puis, les années se sont accumulées, et je deviens de plus en plus incapable de prendre part à vos doctes travaux. Si le nombre desmembres de l’Institut était limité de manière à ce que mon inscription parmi eux füt un obstacle à l'entrée de quelque savant plus actif et plus capable que moi, je serais tout disposé, sur votre avis, à faire agréer ma démission d’un titre que je justifie si mal. Dans l'isolement où je vis, je ne puis remettre mes pouvoirs à aucun délégué; si mon fils avait dû être à Paris le 20 mars, il m'eût bien représenté; mais, fixé désormais auprès de moi, et occupé à faire imprimer à Tours un volume de sa Bibliothèque dominicaine , il lui sera impossible de s’absenter à l’époque fixée. Je profite cependant de sa courte apparition dans la capitale, pour vous envoyer et offrir au Congrès quelques brochures que j'ai publiées dernièrement et pour vous soumettre quelques observations qui peuvent intéresser votre zèle pour les arts et pour les monuments. Il paraît que l’année dernière, au Congrès des Sociétés savantes , il fut fait par M. de Chennevières la proposition d'élever un monument à la mémoire de Léonard de Vinci, dans une église d’Amboise où il avait dû être enterré. 954 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Vous aviez accueilli cette proposition et promis votre con- cours pour l'érection de ce monument. La Commission nommée à cet effet avait à décider , d’abord dans quel en- droit il serait placé. M. de Chennevières, dans une lettre insérée dans l’Afhæneum français, invite les archivistes de Tours et d’Amboise à rechercher l’endroit précis de la sépulture de Léonard. J’ai répondu à M. de Chennevières, dans lAthæneum du 25 novembre, et, pour vous en éviter la recherche, je vous adresse ce numéro.— Vous y verrez que, par le rapprochement des dates, jusqu’à présent mal comprises, il y a certitude que Léonard de Vinci est mort à Amboise, neuf jours après y avoir fait son testament qui est parvenu jusqu’à nous; mais que l’église dans laquelle il a été enterré n'existe plus. Ce n’est pas une raison, à mon avis, pour que le sou- venir historique de la mort de ce grand artiste ne soit pas placé dans la seule église d’Amboise qui puisse le rece- voir , celle de St.-Denis , que vous connaissez et qui, de- puis quelques années, a eté fort embellie. Je prendrai donc la liberté d’insister auprès de vous pour que ce projet ne soit pas abandonné , et pour vous prier d’exercer toute votre influence sur la Commission et, au besoin, sur le Congrès et même sur l’autorité supérieure, afin d’obtenir cette faveur pour notre ville et pour notre belle église de St.-Denis. 4 Vous verrez, dans ma lettre à M. de Chennevières, que j'ouvre un avis peut-être plus important, puisqu'il s’agit d’un monument de l’art existant et qu’il serait urgent de transporter dans la même église de St.-Denis, pour le préserver d’une destruction imminente. Placé, depuis cinquante ans, dans une triste chapelle sans la moindre PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 255 valeur artistique , niché dans une cavité pratiquée dans l'épaisseur d’un mur attaqué par le salpêtre, encadré dans une ignoble maçonnerie peinte par un mauvais vitrier, le beau Saint-Sépulcre, ouvrage de Michel Co- lombe , se détériore chaque jour et devient l’objet des regrets de tous ceux qui le voient se perdre. Il serait , sans doute, bientôt transporté à St.-Denis , mais sa translation coûterait un peu; il faudrait le replacer dans une sorte de grotte ou de portique, décoré en har- monie avec la scène religieuse qu’il représente, et nous aurions besoin d’un secours du gouvernement ou des amis des arts. J'ose espérer, Monsieur le Directeur, que vous aurez l'extrême bonté de prendre en considération ces deux affaires , si importantes pour notre ville et qui se ratta- chent essentiellement au but constant de vos travaux. Vous chercherez les moyens d'arriver à la réussite de nos projets, en faisant placer honorablement à St.-Denis d’Amboise la pierre commémorative de Léonard de Vinci, devenu habitant d’Amboise dans ses derniers jours, et en assurant la conservation d’un monument qui est l’ou- _vrage d’un artiste Tourangeau, auteur des beaux tom- beaux de Philibert de Savoie et de François, duc de Bretagne. Etant depuis long-temps correspondant du ministère pour les travaux hisioriques, je pourrais adresser au ministre et au comité un rapport sur ces deux projets ; mais il faudrait que je fusse assuré d’être appuyé de votre haute protection; car les demandes de ce genre sont telle- ment répétées que je n’aurais aucun espoir de réussir avec ma seule et faible voix. Pardonnez-moi de vous avoir ainsi occupé de nos inté- 256 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, rêts locaux ; la bienveillance dont vous avez bien voult me donner souvent des témoignages flatteurs m’a encou- ragé ; je serai heureux, si je reçois, en cette circonstance, votre approbation, votre concours et vos conseils. Nous sommes fâchés que M. Cartier ne vous ait point fait connaître les divers travaux qui ont été publiés dans le département d’Indre-et-Loire; nous parlerons plus loin des brochures qu’il vous a adressées. Nous n’avons rien à vous dire des départements de l'Isère, du Jura, des Landes et de Loir-et-Cher, LOIRE. Nous insérons in extenso dans notre compte-rendu, l’intéressant rapport que M. Paul d’Albigny de Ville- neuve vous a adressé sur l’état et les travaux de la Société des sciences naturelles et des arts de la ville de St.-Étienne ; ce rapport sur le mouvement scientifique dans la première ville manufacturière de France, ne pourra manquer d’intéresser les lecteurs de l'Annuaire , et nous adressons en votre nom des remerciments au laborieux secrétaire de la Société Stephanoise. MESSIEURS , J'aurais garde de manquer à la très-juste et très-judi- cieuse invitation faite, par M. le Président du Congrès , à chaque délégué des provinces de présenter un mémoire sur la situation et les travaux de la Société à laquelle il appartient, Ces confidences publiques , solennelles et gé- nérales , ne peuvent amener que d’heureuses relations , de puissantes et fécondes améliorations , et fixer l’atten- tion du Gouvernement sur les points vicieux, faibles et PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 257 maladifs de l’ensemble des Sociétés savantes, dont les services rendus ou à rendre sont incontestables et dignes d'attention. Si la bonne volonté , la persévérance et le courage incompris, isolé et malheureux, ont quelque droit à l’in- dulgence de tous , aux encouragements sérieux, à l’inté- rêt non stérile et bienveillant des hommes qui ont dans les mains les moyens puissants de répandre avec justice et efficacité l’un et l’autre, j’espère , Messieurs, vous convaincre de la valeur des titres de notre Société à les mériter et à les invoquer dans cette occasion. La Société des sciences naturelles et des arts de la ville de St.-Étienne-en-Forez, dont j'ai l'honneur d’être l’in- terprète auprès de cette honorable et savante Assemblée, est une société jeune encore. Elle n’a point acquis cette importance qui attire néces- sairement l’attention de tous les hommes dont l’admirable patience et le très-louable dévouement aux sciences con- sultent les mille travaux épars peu connus , souvent complètement ignorés , et bien dignes d’intérêt cependant pour la plupart, et qui éclosent plus ou moins silencieu- sement dans les annales et dans les séances de nos sociétés de province. Née, comme le plus grand nombre de ses sœurs, de la bonne volonté et du zèle de quelques amateurs des sciences et des arts, frappés des richesses locales et de importance des services à rendre au pays , la Société des sciences naturelles de St.-Étienne semblait devoir prendre bientôt de larges et brillantes proportions , au milieu des éléments si nombreux d'étude que présente le bassin de la Loire et, en particulier, le sol si fécond pourtant en industries variées de la ville de St.-Étienne. 258 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Une population nombreuse , s’augmentant dans des proportions insolites , au milieu d’un bien-être incontes- table , concourait à donner la conviction qu'il devait y avoir là, plus qu'ailleurs peut-être, une œuvre d’intel- ligence et de progrès à créer , avec mille chances de suc- cès, sinon pour le présent le plus rapproché , au moins dans un avenir peu éloigné. Mais il est pénible de le dire, l'erreur était celle d'hommes aveuglés ou trompés par la générosité de leurs vœux, et animés d’une foi robuste dans la valeur des sciences et des beaux-arts, et pleins de zèle pour en répandre la semence, avec une libéralité bien digne d’un meilleur sort. Mais, il faut le dire, aucune cité en Europe, le fait est irrécusable , ne s’est développée plus vite, n’a vécu et ne vit plus que St.-Étienne ; mais aussi aucune n’est plus jeune , plus illétrée , plus antipathique ou indifférente à tout ce qui porte le nom de science, de littérature, de poésie, d’art ; et voici pourquoi : Comme l’a fort bien dit un savant économiste français, M. Blanqui, dans son Tableau des populations rurales de la France en 1850 , St.-Étienne n’est, à proprement parler, qu’un immense rassemblement de populations rurales, qui ont conservé le caractère distinctif de leur origine. Ce sont des paysans agglomérés , qui ont bâti un immense village en blocs de grès , et qui ont conservé, sous la tuile qui couvre leurs hautes maisons , les habi- tudes simples et rustiques de leur point de départ. Ils n’ont pas plus souci de la poussière en été , que de la boue en hiver. Ils sont presque tous devenus riches, et ils ne s'accordent que depuis quelque temps quelques- unes des fantaisies de la richesse. Ils ont, moins que les autres habitants du Midi, le goût des arts, des plaisirs PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 259 de l'esprit ou des distractions d’une société policée. Leur ville ressemble à un vaste atelier , ou à une suite de ca- sernes , séparées par des rues tirées au cordeau. Telle est, en effet, Messieurs, la peinture saisissante et toute pleine d’actualité, pour long-temps encore peut- être , de cette curieuse cité. Aussi l'espérance d’y voir une Société scientifique réus- sir et porter d’heureux fruits, au milieu du XIX°. siècle, fut-elle un peu deçue, malgré tout ce qui semblait la justifier au premier abord. Ce milieu , si défavorable aux plus étranges développements industriels, aux grandes et lucratives transactions commerciales ; ce milieu où s’agitent, avec une prospérité inouie et toute particu- lière des industries nombreuses , opposées, discordantes au dernier point , telles que la métallurgie et la ruban- nerie ; ce milieu, dis-je , devait être sinon mortel , tout au moins trés-indifférent au développement et à l’in- fluence des sciences et des arts. St.-Étienne n’a pas fait un grand pas sous ce rapport. En 1760 , une Académie des belles-lettres et arts existait dans cette ville, tout aussi brillante par le nombre que par les talents de ses membres, et qui plus est, infini- ment plus poétique qu'il ne serait possible de la créer aujourd’hui. Cette académie a disparu d’une manière si complète et depuis si long-temps, qu’il n’en reste pas même de souvenir ni de trace, si ce n’est dans la mé- moire d’un très-petit nombre d'hommes qui, par un extrême hasard, en ont vu l'existence mentionnée dans quelque vieille chronique manuscrite. Depuis la disparition de cette fugitive association, le vide fut complet dans ce sens. Jusqu’en 1821, époque à laquelle remonte la fondation de la Société industrielle 260 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, et agricole, qui se soutient encore de nos jours, grâce aux allocations départementales et ministérielles qui la favorisent. Ces résultats n’étonnent pas , du reste, lorsque l’on sait aussi que ce ne fut guères qu’en l’an 1833 que St.- Étienne , ville de plus de 40,000 âmes alors, eut un musée et une bibliothèque publique. Voilà dans quel milieu s’est fondée , durant le mois de décembre 1847 , la Société que j'ai l'honneur de repré- senter. Cette Société a marché cependant, seule, sans le se- cours d’une municipalité inintelligente et exclusivement préoccupée des intérêts matériels de la cité. Nous n’avons jamais rencontré auprès de cette même municipalité que des procédés bien moins qu’encourageants et empreints d’un mauvais vouloir qu'il serait pénible de qualifier , et qui semblait prendre le caractère de vexations de mau- vais goût. C’est cependant à l'initiative et aux efforts de notre Société, traitée avec si peu de ménagements, que la ville de St.-Étienne est redevable aujourd’hui de la créa- tion d’un jardin des plantes, qui aurait pu donner les meilleurs résultats , si nos efforts eussent été secondés. C’est à la même initiative et à la même persévérance que la ville doit la création d’un musée d'artillerie (4), que l’on s’étonnait justement de ne point voir, et même dans un état brillant, dans les collections d’une ville qui, depuis trois siècles et demi, est célèbre par ses fabriques d’armes de tous genres. Encore est-il pénible de rappeler que la Ville a laissé , faute de générosité et de zèle, (1) Composé d’une partie du musée du Maréchal Oudinot. PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 4864. 261 échapper l’occasion de l’enrichir d’une collection d'armes d'autant plus précieuse qu’elle se composait d’une façon remarquable de chefs-d’œuvre d’arquebuserie , confec- tionnés à St.-Étienne et rassemblés avec soin et talent par un amateur de la localité. Cette collection fait au- jourd’hui l’ornement du musée d'artillerie de Bordeaux. Il est facile de comprendre tout ce qu’il a fallu de persévérance et de zèle pour poursuivre cette œuvre civilisatrice et utile, au milieu des conditions si réfrac- taires, qu’une Société scientifique doit rencontrer in- dubitablement à St.-Étienne, si elle n’est plus soigneu- sement protégée et secondée par ceux qui ont mission et conscience d’un si beau devoir. Je ne sais si l’on ne doit pas admirer cette constance, au milieu de semblables conditions, à l’égal d’une marche rapide et d’un essor merveilleux évidemment plus faciles à des Sociétés qui ont l’insigne bonheur de rencontrer plus de sympathique concours et d'obtenir d’efficaces allocations des administrations locales, départementales et ministérielles. Notre Société n’a pas moins travaillé hardiment à l’accomplissement lent, mais progressif, du programme qu’elle s'était proposé, savoir : de répandre dans une ville neuve encore, le goût et les bienfaits des études scientifiques et artistiques ; de collectionner et mettre au jour les richesses du bassin de la Loire et de la localité, car telle est la mission spéciale et intéressante qu'elle a constamment eu en vue. Je vais donc, après cette exposition suffisamment justifiée, je crois, par l'absence d’un représentant de notre Société aux Congrès précédents, mettre sous vos 262 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. yeux, en le recommandant de rechef à votre indul- gence, Messieurs, le tableau rapide, mais complet, des travaux accomplis pendant l’année 1854 au sein de notre Société. La plupart de ces travaux ont été publiés dans notre Bulletin de l’année passée , dont je m'empresserai de mettre des exemplaires à la dis- position des délégués qui pourraient y trouver quelque intérêt. L’on ne saurait trop multiplier et étendre, en effet, ces relations et ces échanges de publications qui entretiennent réciproquement un sentiment fort -profi- table d’émulation , introduisent à de grandes distances des améliorations sensibles au sein des Sociétés dépar- tementales et établissent ces intéressantes communica- tions intellectuelles qu’il est utile de favoriser, J'ai pensé que le meilleur mode d'exposition de nos travaux pouvait se puiser dans la division et répartition naturelle et simple des sections qui concourent à l’en- semble des études de l’histoire naturelle et des arts, savoir : la minéralogie, la géologie, la botanique, la zoologie, puis l’histoire et larchéologie, enfin les travaux spécialement applicables aux arts en soirs dits, voire même à l’industrie. Les études géologiques et minéralogiques auxquelles se prête si largement le bassin de la Loire, n’eût fourni qu’une notice assez complète, du reste, sur des cristaux de zircon, recueillis dans le lit du Riou-Piziliou, près du Puy, par l’un de nos membres, M. Auguste Blanc, ingénieur et minéralogiste fort distingué. Les zircons ont attiré depuis peu l'attention de quelques habiles chimistes à la suite de la découverte, si remarquable de M. Saint-Clair-Deville, des propriétés particulières de Plaluminium qu'il a extrait par le traitement de PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 4854. 263 l'argile. Des essais du même genre ont, en effet, été tentés depuis sur le zirconium extrait des cristaux ou zircons qui abondent dans les attérissements d’Espaly. Il faudrait se garder de conclure de ce travail isolé et pour ainsi dire unique dans la section minéralogique, que cette branche ait été: tristement délaissée; car il est un travail non moins méritoire, et cependant plus ingrat en ce qu’il n’occupe qu’une place plus modeste dans lénumération de nos travaux. C’est celui qui a pour but l'agrandissement de nos collections. C’est là qu’il est facile de voir , Messieurs , que chaque jour porte son fruit, pour ainsi parler, et que rien n’est négligé pour former une collection sérieuse et la plus complète possible des richesses propres à nos terrains houillers, et aux formations diverses qui les accompagnent et s’y mêlent, sans négliger, bien entendu, la collection générale et universelle des produits du même ordre. Je crois devoir profiter de l’occasion qui m'est offerte par le résumé de nos travaux en géologie et minéralogie, pour inviter les Sociétés qui désireraient enrichir leurs collections minéralogique et géologique, des curieux et intéressants échantillons de-nétre bassin, à nous exprimer ou remettre leurs desiderata que nous serons heureux de satisfaire, à titre d'échange, contre des produits naturels de leur localité, ou autres échantu!ions de la collection générale, Ces échanges entre des Sociétés éloignées ne sauraient assez, je crois, attirer l'attention, par les résultats si incontestablement féconds qu'ils produiraient, en s’ar- pliquant surtout aux produits spéciaux et propres de chaque département et de chaque localité, lesquels ont 264 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. pour la plupart, souvent à peu de distance, des caractères différents et originaux pour un même genre, une même espèce, un même groupe au moins, L'étude de la botanique a eu, Dieu merci , une part fort intéressante dans l’ensemble des travaux de notre Société , pendant l’année 1854. Notre Bulletin renferme une notice tout-à-fait ori- ginale sur la nature, la structure intime et les déve- loppements de l’oïdium Tuckeri, ce petit et funeste cryptogame, sur lequel de nombreuses recherches ont été faites par suite de l’envahissement de la maladie de la vigne et du rôle qu’il paraît y jouer comme cause selon les uns, comme conséquence suivant d’autres. Il m'est permis d’aflirmer ici, que ce travail est assu- rément un des premiers et des plus complets sur l’oïdium , et il est fort à regretter, pour son estimable auteur , M. le docteur Blancsulié, qu’il n’ait pu voir le jour à une époque où il eût joui de toute sa valeur d'originalité ; mais l’impression lui a fait délaut en temps opportun. Il n'en reste pas moins un travail consciencieux et érudit. C’est au même membre que la botanique et notre Société sont redevables de nom- breuses études mycologiques et microscopiques , semées de traits de lumière et de découvertes originales dans le domaine des infiniment petits et de la structure intime d’une foule de cryptogames. Ajoutons à cela, Messieurs , un travail très-inté- ressant sur le cousso d’Abyssinie, Brayera anthelmin- tica (Linnée), travail qui tire principalement sa valeur des détails anatomiques et d’une planche exéculée avec patience et talent par son auteur, qui a reconstitué tous les caractères physiques, d’après un échantillon PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 265 desséché de: cette plante ‘peu: connue et dont aucun ouvrage n’a fourni l'analyse aussi complète , et.le dessin aussi scrupuleux:(4).: J'ai pour ma faible part contribué aux études botaniques, par ‘un! assez long travail sur la science pleine : d’avenir et; d'intérêt ; inaugurée par M.: deHuïinboltd: sous la dénomination si juste: de: géo- graphie: botanique, science immense; vaste problème auquel ill manque encore plus d’une, donnéé;,:et qui “semble devoir être le: couronnement superbe. de la botanique en général: | Je-ne puis ‘non plus terminer la revue: dés travaux accomplis dans cette. section, sans mentionner: les soins ét le zèle employés à créer une collection. universelle de fruits, qui promet d'atteindre une importance: sérieuse, sans analogue ‘peut-être dans les, musées ; par la beauté et:la rareté de plusieurs de,ses échantillons. Le moulage n’a point été! négligé pour concourir à. la reproduction exacte de fruits rares ou difficiles à conserver. d’une façon satisfaisante. ‘La flore locale est! à peu! près intégralement: repré- sentée dans ‘notre ‘herbier, et les! botanistes savent qu’elle n'est pas dépourvue d’intérêtet: de richesse. De fort bons travaux ont été faits dans laïsection z00- logique; la tératologie surtout, cette science, depuis peu ‘d'années’ inaugurée par! un savant français des plus distingués ,; M. Isidore Geoffroy-Saint-Hilaire, s’est en- richie”de nombreuses et: importantes observations ,set (1) Un dessin donné ‘par M D'Rochet-d'Héricourt dans son Second” voyage en Abys$inié, à concouru à rappeler un ae le faciés du panicuïe fleuri dé cette plante. 12 266 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. de scrupuleuses dissections , rues à M. le docteur Maurice. | Ces observations sont venues confirmer et développer la doctrine du savant dont je viens de rappeler le nom:, si plein d’autorité scientifique déjà, et, comme résultat essentiel , énoncer une loi nouvelle dans cette seience , celle de l’union médiane dans les monstres doubles, Ces observations, au nombre de quatorze , sont développées avec érudition ét n’ont pas manqué d'attirer l’attention flatteuse de M. Geoffroy-Saint-Hilaire. M. le docteur Rimaud, notre: honorable nasaidieti a également publié dans notre Butletin une intéressante notice scientifique et hygiénique sur les poissons de mer qui se vendent à la criée à St.-Étienne.: Cette notice remplit familièrement le but principal des Sociétés savantes des provinces, en vulgarisant les sciénces natu- ‘relles comme toutes les sauve hais des sciences en général. | 19 : Ba: section: des arts, qui «embrasse. aussi les) études archéologiques et historiques locales ; n’a, pas..été stérile. L'un de; ses, membres..les plus-érudits et les plus actifs, M. de Latour-Varan, a publié tout récemment une série -de:chroniques et d’études historiques sur les châteaux et sur Jes abbayes dont notre vieille province-offre à.chaque päs debrillants vestiges.-Rien n’est plus émouvant, plus délicieusement écrit que ces chroniques féodales, pleines de. récits guerriers, de bruits d’armures , de chocs d’ar- mées, de siéges terribles, de portraits fidèles évoqués par la magie des.études historiques,et patientes, dans le,cos- tume de leur époque, parlant le langage de leur.époque , ressuscitées, enfin, malgré, l’éloignement.des siècles.écou- PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854, 267 lés. C’est encore à M. de Latour-Varan qu’on doit la bibliographie la plus complète de cette même province, ouvrage de plus de quinze années et dont la publication prochaine: fera le bonheur des bibliophiles et facilitera considérablement les recherches historiques sur le Forez. La section des arts appliqués à l’industrie , revendique, comme. appartenant à l’un de ses membres , une de ces applications heureuses et utiles qui démontrent assez que la science est sœur de l’industrie, M. Peyrot , horloger de notre ville, homme aux persévérantes et laborieuses recherches, viént d'appliquer l’électro-magnétisme aux métiers à tisser , d’abord à titre de mécanisme destiné à avertir l’ouvrier des fautes de son travail, puis encore comme force motrice. Voici, en quelques mots, l'exposition de son invention, et l’utilité évidente. jointe à l’économie qu'il est facile d’y constater, «Dans la fabrication des rubans brochés , velours , etc. , qui a dieu sur des métiers à la Jacquart et à plusieurs navettes ; il arrivé que, malgré l’active surveillance de l’ouvrier ; qui doit se porter sur toutes les navettes et les pièces de son métier , la trame d’une des canettes venant à manquer ou à se détendre ,; et à se dérouler avec peine, par cétte même cause ou toute autre ; telle encore que la présence de bouchons dans une trame de filatier moins irréprochable, il se produit dans le tissu une faute que l’on nommeétranglure ; dans ce cas, l’ouvrier est obligé de détravailler-toute la portion du tissu fabriquée à la suite de ce défaut. IL arrive encore que le fil de trame , par suite d’une trop grande tension, se rompt, ou bien que la canette 268 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. de l’une des navettes, finissant trop tôt le dessin qui se fait au ruban, reste en retard sur celui des autres pièces; dans ce cas, l’ouvrier est obligé de laisser chômer la pièce et d'attendre le retour du carton et du mes qui doit faire le raccord. Dans la fabrication des rubans de vhs deux tissus se forment l’un sur l’autre, et un rasoir les sépare en formant le: poil. Deux navettes concourent: au travail de ces deux ‘tissus formés, en effet, par le travail de deux chaînes : elles sont superposées'et marchent ensemble, Les difficultés deviennent plus grandes, la surveillance est plus souvent mise en défaut; de là aussi des fautes multi- pliées, dont la réparation n’a pas lieu sans une perte de temps assez. considérable, dont il est nécessaire de tenir bon compte. L'invention heureuse de M; Peyrot a pour but et résultat constaté de prévenir: instantanément la production de ces divers accidents, et d’en avertir l’ou- vrier , avant qu’il ait pu poursuivre son travail'et perdre ainsi .un temps précieux; lé moniteur électrique; lap- pliqué ‘aux métiers à la Jacquart mus à bras d'hommes , a complètement résolu ce problème. d'économie. 1}: Ce système ingénieux , appliqué: aux métiers de même genre, mus soit par l’eau soit par la vapeur ,'outout autre agent aveuglément mécanique , donne un auxiliaire précieux, en ce qu’il rend pour ainsi dire ‘intelligente cette: force aveugle , par Faddition du moniteur: élec- trique, qui, dans ce cas, produit son effet, en arrêtant complètement le mouvement du métier , au moyen d’une détente lâchée par l’électro-aimant. Ce système, si visi- blement appelé à de larges et fécondes applications, se compose d’une pile de Paniel ; formée de 4 à'8 éléments PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 269 (renfermée dans une petite caisse), selon la force: de l’électro-aimant. | Un des fils conducteurs va toucher un système de petits ressorts qui communique avec toutes: les navettes, puis passe, en retournant à la pile, dans un électro-aimant qui fait vibrer soit un timbre, soit une détente destinée à arrêter le mouvement de l’engrenage. Chaque navette est munie d’un: petit appareil qui permet, lorsque la trame est en défaut, de fermer le circuit électrique et, par suite, fait fonctionner le signal ou la détente. La ques- tion d'économie est positivement résolue, L'entretien de la pile ne demande qu’une dépense de 5 fr. par an, en moyenne. Un battant muni de son appareil moniteur a été mis à Pexposition industrielle de 1853, et, quoique bien moins parfait qu’il ne le serait aujourd’hui, l’utilité de cette ingénieuse invention n’a pas moins vivement frappé le Jury, qui a décerné une médaille d’argent à son inven- teur. M. Peyrot ne s’est pas borné à ce. premier et important résultat , il construit actuellement un moteur électrique épicycloïdal, dont la force sera de nature à faire mouvoir un ou plusieurs métiers, sans le secours de bras. La ques- tion d'économie reste seule à résoudre et ne le sera que par une expérience de quelque temps. Il serait à désirer que &es encouragements sérieux vinssent seconder ces laborieux et utiles essais, dont l’industrie retirera des fruits incontestables. Voilà, Messieurs, l’esquisse de nos modestes travaux accomplis ; si j’avais à vous exposer le plus grand nombre de ceux que nous aurions voulu accomplir, ma tâche serait infiniment plusétendue ; mais, je ne puis assez le ré- péter, nous avons la conscience de notre faiblesse, en face 270 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. de l'isolement et d’un mauvais vouloir inqualifiable de la part de beaucoup d’hommes qui sacrifient à d’autres dieux. | Nous avons le désir qui anime , le zèle qui mène à bonne fin, l’union qui donne la force ; il ne nous manque que la protection qui aide et encourage. Si notre fervent appel à l’Institut et à la bienveïllance de ceux qui peuvent y répondre avec fruit est entendu , si de bonnes et frater- nelles relations surgissent de cette communication toute naïve et toute simple et de cette favorable réunion , il ne nous restera rien à désirer. | S M. de Villeneuve vous a transmis, en même temps, les trois premiers. cahiers du. Bulletin. de la Société .des sciences et des.arts de.Sl.-Étienne., in-8°.. avec. figu- res (1850, 1852, 1854 ). HAUTE-LOIRE. M. Charles Calemard de Lafayette, délégué de la Société d'agriculture , sciences, arts et commerce du Puy , après avoir parlé en peu de mots des travaux de cette Société, vous à fait hommage de son Rapport sur la Société des Frères-Ouvriers de saint François-Régis et Orpheli- nat, œuvre fondée par le P. de Bussy, et d’un petit livre in-18 , intitulé: La veillée de la ferme, dont il est également l’auteur, LOIRE-INFÉRIEURE. Nous devons à M. Bizeul, délégué de la Société archéo- logique de Nantes, le rapport suivant sur les travaux de cette Société pendant l’année 1854: PUBLICATIONS ACADÉMIQUES :EN 1854. 274. ‘Le ‘Congrès des délégués des Sociétés savantes sait déjà par les rapports des années précédentes et surtout par le rapport général fait, en 1853, par M. le comte d’Héricourt, qu’en conséquence de lAssociation bre- tonne établie par notre illustre directeur, M. de Caumont, à l'exemple de l'Association normande, äl s’est formé, dans chacun des cinq départements dela province de Bretagne , une Société archéologique , et que ces Sociétés fonctionnent depuis onze ans. Celle de Nantes dépasse le nombre de‘120 membres. IH est à regretter que’ le nombre des travailleurs archéologiques ne soit pas, dans cette cité d’ailleurs si indusirieuse et si commerçante, en proportion avec le chiffre que nous venons dénoncer, Quoi qu’il en soit, les travaux auxquels cette Société s’est livrée, en 1854, ne sont ni sans importance ni sans intérêt. Époque celtique. — M. Bizeul, de Blain, a essayé de décrire et de bien topographier tous les monuments de cette époque qui se trouvent sur le territoire des anciens Nannètes ; alors resserrés entre la Loire et la Vilaine, et ne dépassant pas encore la Loire au midi. Pierres tombales, haches de pierre et de bronze, armes de toutes sortes, médailles celtiques, restes du langage breton dans le’ pays, tel a été l’objet des recherches de M. Bizeul. Une partie de ce travail , lue à la Société archéologique , est déjà publiée dans la Revue de l'Ouest, éditée par l’un de nos confrères , M. Armand Guéraud. Époque romaine. — 14. La Société a nommé une Commission pour visiter le camp de la Motte-de- Bougon, commune de Bouguenais , à 2 lieues de Nantes, sur la rive gauche de la Loire, à l’occasion duquel la Société française a voté une somme de 400 fr., destinée 272 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCÉ. àly pratiquer des fouilles, provoquées: par d'espoir d’y faire des découvertes importantes , en suivant la direction d’un ur romain , à petit appareil et cordon:de briques:; : encore fortapparent sur une longueur de 42 à 15 mètres. Laä:Commission ‘a de nouveau reconnues lieux-et s’est mise en rapport avec les propriétaires : du «s0ob7fôrt éténdu de ce «camp, divisé en umassez grand nombre de parcelles. Ces arrangements ont un peu retardé les travaux, mais’ on pènse que ‘cette - intéressante. opé- ration pourra:se, commencer aû::mois) d'avril. 2, L'ouverture d’un chemin vicinal traversant le bourg de Rezay,à-une lieue de! Nantes: saussi Sur la rive, gauche de la Loire , et coupant l’ancien-cimetière près de l’église, a mis au jour une immense. quantité de débris romains de toutes sortes, poterie de tout genre, dont une vingtaine de beaux vases ont été trouvés entiers; des briques de. carrelage et-de maçonnerie, des tuiles à rebord , des fragments de mosaïques peu Con-. servés, des tronçons de colonnes , des-chapiteaux , une sorte d’architrave chargée! d’un bas-relief très-curieux dont l’estampage vous sera présenté ; des fragments-très- frustes de statues ;! enfin, dans ce même. cimetière, des cercueils en pierre calcaire coquillière de deux espèces , mais dont la majeure partie. provient évidemment des carrières de Doué, en Anjou. Ces cercueils étaient dis- posés en deux étages , les uns à côté des autres , sans une grande régularité dans l'agencement. Quelques-uns, de, l'étage inférieur, sont. restés. engagés sous .le mur méridional dé labside:; tous ces cercueils avaient un couvercle et contenaient encore des, squelettes humains. La Société a:suivi ses fouilles avec, zèle, puissamment aidée du concours, dévoué. et:intelligent-deM: Sabo , PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 273 agent-voyer, qui a recueilli, avec une admirable per- sévérance, tous les -objets antiques exhumés dans les travaux qu'il dirigeait. Ges’ objets sont venus enrichir notre musée Nantais. 3. D’autres fouilles faites à Santeron, par M. Phelippes- Beaulieu , ont fait croire que le manoir des Croix avait remplacé une villa romaine. Époque moyen-âge. — 1. La présence , à Nantes, d’un jeune et savant élève de l’École des chartes tend à imprimer à la Société archéologique une louable et forte impulsion vers les recherches historiques puisées à leur vraie source. M. de La Borderie, chargé par le Ministre de linstruction publique. du classement méthodique des archives ducales de Bretagne, et de celles de la Chambre des comptes de la même province, a com- mencé un inventaire analytique de. ce riche dépôt , et en a tiré déjà de curieux et intéressants renseignements, entièrement inédits, et dont.il fait part de temps en temps à la Société archéologique de Nantes. C’est ainsi qu’il nous a donné, cette année, une liste: d'artistes bretons dont les noms, restés enfouis dans des docu- ments non consullés, étaient complètement inconnus , bien que quelques-uns méritassent d’être inscrits à une . place honorable sur, les monuments - qu’ils ont élevés. Je crois devoir donner ici ces noms et leur date : 1. — Vers 950. — Goëder , architecte de la cathédrale de Treguisr. ia 2, — 4150-1194. — Robert de Kerchehou , orfévre, à Fougères, 3. — 1237, — Raoul Lemaçon, de Lan-Meur, archi- tecte des Jacobins de Morlaix. 274 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. h. — 1306. — Derien Lemaçon et ses compagnons, architectes des Carmes de Ploerme} 9.— 1306,— Laurent Le Vitrier , de Redon, travaille pour les Carmes de Ploermel. 6.— 1306. — Jouhan Lemaçon, de Sarzan, recon- struit une partie du château de Succinio. 7. — 1318. — Pierre Le Bordiec, fèvre, favre, ou forgeron , fit la grille du tombeau de Jean II, ou d'Arthur I à Ploermel. : 8. —1884. -— Thomas Meïdon ; orfévre de Jean IV; duc: de Bretagne. 9. — 1410. — Pierre Picart, ie cle fit l'autel de la cathédrale de Dol. | 10. — 14420. — Raoul de Cerisay, était écrivain à Vitré. 11. — 1437. — Raoulet Le Charpentier, ingénieur du duc Jean V, architecte du château de Plaisance , près de Vannes. 12. — 1435. — Eun Bigarré, rcaié du duc Fran- çois 17, 13. — 1446. — Jean Gaïignart, répareur et maistre d'œuvre des châteaux et forteresses du sire de Montauban. 44. 4456-1471. — Mathurin Rodier, architecte dé la cathédrale de Nantes. 45. — 1469-1472. — Geppetin Julin, orfévre , fit la crosse du trésor ducal. 16. — 1469-1472. — Jean Hux, orfévre du duc. 47. — 1469-1472.— Jean Champion, dit de Vannes, autre orfévre du duc. 18. — 41484. — Pierre du Moulin, peintre-verrier , travaille à Notre-Dame de Guingamp, 49. — XV°. et XVI‘. siècles. — Les Carmonets, ar- PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 4854. 275 muriers héréditaires à Lamballe, sont anoblis pour ce fait. Ces recherches curieuses ne sont point les seules communications que M. de La Borderie ait faites à notre Société archéologique. Elle a écouté avec un grand intérêt deux dissertations, remplies de considérations neuves et de cette érudition sérieuse autant que pro- fonde, puisée par notre confrère à l’illustre école d’où il ést sorti. Dans la première, il examine les divers mérites de nos grands historiens de Bretagne : Lobineau, Morice, Taillandier, Gallet, et justifie parfaitement la haute préférence accordée aujourd’hui à dom Lobineau. La seconde traite de la guerre de la succession de Bretagne au XIV°, siècle et de la politique de Jean IV, qui usurpa le duché de Bretagne sur Jeanne-La-Boîteuse , femme de Charles de Blois, et fut jusqu’à la fin le servile allié de l'Angleterre. 2, La partie du département de la Vendée qui touche la Loire-Inférieure, renferme un assez grand nombre de monuments inédits, de toutes les époques. La Société archéologique de Nantes considère ce pays comme étant de son domaine et se permet d’y faire quelques excur- sions. M. Armand Guéraud nous a lu d’abord une histoire du monastère de Camaldules de l’île Chauvet, écrite, en 1763, par le P. Cochois, son prieur; puis ii a fait suivre cette communication, d’une notice archéologique sur ce monastère, situé au milieu du marais. Vendéen , commune de Bois-de-Cené, arron- dissement des Sables. M. Guéraud m’a chargé de déposer sur votre bureau. un exemplaire de celte notice. 3. M. Blanchard-Mervaux s’est jeti beaucoup plus en dehors de nos limites naturelles, en nous ‘donnant 276 INSTITUT. DÉS PROVINCES DE: FRANCE: la description de l’église de S'*.-Cécile. d’Alby. M.:Blan- chard voyage en observateur sérieux et habile, en archéologue aussi zélé qu'intelligent ,et:sa plume facile etélégante nous reproduit à merveille «ce qu’il asobservé. Nous-regrettons tous que: M; Blanchard: né voyage pas en: Bretagne. | | &.Un:autre-de nos-confrères, mi Doin obbtes NOUS à CoMMU: niqué un album rempli de fort beaux dessins d’un nombre considérable de ces admirables églises dont la Normandie estcsi richement dotée. Nous avons tous pensé que le crayon dé M. Benoist n’était ge resté au-dessous de son sujet. | Musée’ archéologique. 2h rsotnlshe d'objets recueillis et offerts, qui forment ce musée , devient considérablé; et rend déjà trop petite la vaste salle que la Mairie de Nantes lui a provisoirement accordée. M, Vandier , lun de nos confrères les plus zélés, a bien voulu dévenir le conservateur du musée, ‘appliquer tous ses soins à son «arrangement ;-mais c'est avec grande: raison qu’il a dit dans dla notice qu’il lui a. consacrée; que ‘ces objets n'étaient point encore classés / mais en quelque sorte ‘entassés dans l'enceinte qu’ils rendent de plus en plus trop étroite. J'ai l'honneur de déposer sur le bureau quelques exemplaires de la notice de M. Vandier. Il vous a été adressé ‘également ‘de . Nantes les bro: chures suivantes : Notice sur la Société archéologique de Nantes et dudépartement de la Loire“Inféricure, par M, Vandier. Nantes, 4854, in-8°. de 4: feuille 472: Mémoire historique ‘sur l’abbaye de: l'Ile-Chauvet, ordre de St.-Benott, dans :le diocèse de Luçon; par lé P, Cochois; prieur de cette maison ; publié et annoté PUBLICATIONS ACÂDÉMIQUES EN 185/. 977 par Armand Guéraud. Nantes , 1854 , in-8°, de 4 feuilles. Monographie de la chapelle et du prieuré, au village de Bois-Garaud, en Sautron, par M. Philippe-Beaulieu. Nantes, 1853, in-8°. de; 4 feuille 472. Mémoire sur les fouilles faites en 1852 et 1853 dans le champ des Bésirais, en Sautron (arrondis- sement de Nantes), du même auteur Nantes, 1854, in-8°. de 1 feuille avec plan des fouilles, Revue des provinces de l'Ouest (Bretagne et Poitou). Histoire littérature, sciences et arts, 1". et 19e. livraisons. Nantes, Cette revue, publiée avec la. colla- boration de MM. Fillon, de La Borderie, Guéraud ; Duchatellier. Marchegay, etc., renferme de curieux articles intéressant les provinces de l'Ouest : elle paraît le 1°, de chaque mois, par livraisons de 4 feuilles , ornées de planches. Le Conseil général du départéement de la Loire-Inférieure, appréciant son importance, l’a honorée d’une souscription, à 20 exemplaires. Comice agricole central et du. canton de Blain, Distribution des prix en 1852 -In-8°. de # feuille 172. Loire’, La Société archéologique de l’Orléanais, continue : la publication de. son Bulletin. qui rend compte de ses séances et des faits qui peuvent intéresser le pays, au point de vue, de l’histoire et de. l'archéologie ; elle publie , en outre, de temps en; temps des. volumes de mémoires. Il est à regretter qu’elle ne se soit: point fait représenter, cette année, par un délégué qui aurait pu donner quelques. détails sur ses nouveaux. travaux. 278 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, Les départements de Lot-et-Garonne et de la Lozère n'ont rien envoyé au Gongrès, MAINE-ET-LOIRE. 2 M. de La Chauvinièré a communiqué au Congrès une lettre de M. Guillory, président de la Société industrielle d’Angers, qui exprime son regret de n'avoir pu venir à Paris représenter la Société qu'il préside, ni même adresser au Congrès une note sur les travaux de ladite Société. Il a fait hommage du 5°. volume de la 2°, série du Bulletin de cette Compagnie ( Angers, 1854, in-8° de 20 feuilles), qui renferme des notices relatives en général à l’agriculture, à l’industrie et à l’économie politique. M. de La Chauvinièré à parlé, en ces térmes, du Comice agricole de Saumur : « M. Persac, qui présidait le Comice, à quitté ce monde ; je mé trouve, par cet événement, privé des renseignements qu'il m'adressait pour être remis au Congrès. Voici les seuls détails qui me sont parvenus : « La.contrée a été très-favorisée dans ses récoltes de blé en 1854 Si le prix en est trop élevé pour les pauvres des villes qui n’ont pas ou ont peu de travaux en hiver, les gens de la campagne profitent des ventes avantageuses de leurs récoltes actuelles pour réparer le déficit de l’année précédente. Quant aux vignobles , ils sont dans le plus triste état. La récolte du vin a été complètement nulle ; aussi la gène est grande parmi les vignerons. On arrache les vignes, dans beaucoup de communes, pour obtenir d’autres produits des terrains qu’elles occupent. » M. Millet de La Turteaudière vous a fait hommage de PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 4854. 279 sa brochure dont voici le titre: Polyphagie des volie- res, des ménageries et autres asiles d'animaux, ou de la nourriture qu'il est convenable de donner aux animaux que l’on tient en captivité ou que l’on élève en domesticité. Angers , 1855. In-8°. de 5 feuilles. MANCHE. L'Annuaire a rendu compte de l'exposition qui a eu lieu à Avranches, en 1854; nous n’avons donc point à nous en occuper ; mentionnons seulement les deux pe- tites brochures relatives à cette exposition, qui ont été offertes au Congrès : Le Livret de l'exposition artistique d' Avranches et l’'Heptaméron ou les Fétes d’Avranches, en 1854; par E. Le Héricher, Il ne nous est parvenu aucun rapport sur les Sociétés savantes du département de la Manche. MARNE. M. le comte de Mellet , délégué de la Société d’agricul- ture , sciences et arts de la Marne , a présenté le rapport suivant : La Société d'agriculture , commerce, sciences et arts du département de la Marne a continué , pendant l’année 1854, à donner une vive impulsion aux progrès de l’agriculture , de l’horticulture , à ceux de l’industrie et aux Sciences archéologique et historique. Une riche ex- position horticole , organisée sous les auspices de la Société, à provoqué un rapport très-remarquable , de M. le comte de Lambertye , sur les mérites des exposants et sur les récompenses nombreuses qui dévaient leur 280 INSTITUT. DES PROVINCES DE FRANCE. être décernées. Des médailles ont été également distri- buées par la Société aux communes qui, dans l’année précédente. ;. avaient donné les.soinsldes plus actifs etiles plus intelligents au développement de leurs chemins vici- naux. Les courses de chevaux , organisées depuis peu d’années dans le département de la Marne , sous les auspices de la Société d’agriculture , etc. , avaient attiré à Châlons , au mois d'août 1854, un très-grand concours d'habitants du pays et des environs. Enfin, une mono- graphie historique et monumentale de la béllé église de Nôtre-Dame de Chàlons:sur-Marne a été mise au ü concours pour l'année prochaine 1855. Jé terminerai cette très-courte et très-incomplète es- quisse des travaux et des mérites de la Société d’agri- culture , Commerce , sciences et arts du département de la Marne, en faisant observer que, lors des assises scien- tifiques tenues à Reims , en juillet 1854. cette Société avait envoyé, par l'intermédiaire de. son honorable pré- sident, M. Sellier, dés mémoires sur la plupart des questions qui étaient portées au programme de la ses- sion. Le, Congrès. archéologique: .de : France, qui doit s'ouvrir à Châlons-sur:Marne, le 20 mai 1855:,- a trouvé dans tous les membres de la Société l’accueil. le.plus favorable et.le concours le plus empressé, M..le.baron Chaubry de Troncenord, délégué dela Marne. a fait. hommage au Congrès d’une brochure in: titulée. :, Rapport sur les monuments. historiques dé- partementaux. Châlons, 1854..In-8°., de 4 feuille. Le même délégué a fait la communication suivante : A l'approche. du moment où le Congrès archéologique doit s’ouvrir à Châlons, .ilin’est peut-être pas sans intérêt PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 4854, 284 de mettre sous les veux de l’Assemblée la représentation de quelques-uns des monuments que possède notre ville. C’est d’ailleurs un devoir pour un délégué, de faire con- naître les travaux artistiques qui s’exécutent dans la ville dont il est le représentant. Nous avons donc l’honneur de placer sous vos yeux les deux premières livraisons d’un ouvrage intitulé: Histoire de Chälons-sSuùr-Marne ét de ses monuments, Cet ouvrage} accompagné de plans , ‘de cartes et de gravures, se divise en quatre par- ties + l'histoire monumentale ;--l’histoire topographique ; == la biographie de ses 93 évêques; enfin, l’abrégé chronologique de l’histoire commerciale et militaire, etc. L'auteur est M. Barbot, membre dela Société académique dela Marne ; qui a°fait d’autres ‘travaux dont il donnera connaissance , sans doute, au Congrès archéologique : M. Paris a parlé ensuite , en ces termes , de l’Académie de Reims : À Jé n'ai point à vous entretenir , Messieurs , des travaux qui, dès son début, ont fait prendre à l’Académie de Reims un rang distingué parmi les corps savants de notre France provinciale. Ses annales , dont la publication s’est continuée sans interruption depuis l’époque de sa création, justifieraient au besoin de la persévérance de ses efforts et de la continuité de ses succès. ‘Après l’importante et dispendieuse édition du Marlot' Français (4 gros vol. in-4°.)., la voici qui nous donne, et toujours à ses risques et périls , les OEuvres complètes de Flodoard, texte et traduction. L'année dernière , dans un de ces spirituels rapports, comme il sait les faire, M. Dérodé, président et délégué de l’Académie de Reims, vous a dit quelques mots de 282 INSTITUT. DES: PROVINCES -DE : FRANCE; cette publication que commençait alors la, docte: Com- pagnie. Aujourd’hui que les tomes IIL-et IV sont à la veille d’être livrés au public, je puis vous parler avec confiance de cette publication qui me semble devoir.prendre place dans.la bibliothèque de tous les amis des études :his- toriques,. Je ne reviendrai pas sur l'Histoire de l’église de Reims (Historia ecclesiæ Remensis) qui forme les volumes 4 et2 de la collection et dont M. Dérodé vous a suffisamment entretenus. Vous. vous rappelez.que la traduction enest due, à M. Lejeune, de ‘l'Académie , et professeur! au Lycée impérial. de Reims. Les. notes , . éclaircissements et scholies qui l’accompagnent, font de cet ouvrage un livre tout-à-fait nouveau et qui? mérite d’estime du monde savant. | La Chronique proprement dile, est sur le point de paraître et doit former les tomes 3 et 4 des Œuvres com- plètes de Flodoard., Vous savez de quel intérêt elle est pour l’histoire nationale :: commencée en l’an 949, et finie avec l'an 966, c’est par elle que nous-avons appris à peu. près tout ce que nous connaissons des règnes de Charles-le-Simple, de. Louis d'Outre-mer, et d’une partie du règne de Lothaire, Peu de discours ‘offrent plus de faits, et sont, écrits avec plus d’exactitude et de sincérité. La Chronique de Flodoard avait été déjà l’objet. de trois éditions. P. Pittiou le premier lavait insérée dans le recueil de ses Historiens. Paris, 1588, et Francfort, 1594. André ,Duchesne avait imprimé son texte dans le 2°, volume de ses Historiens de France et l'avait, fait suivre d’un supplément qui commençait à 966, année sur laquelle Flodoard n’avait marqué que deux événements, ayant cessé de vivre cette année- PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 4854. 283 la même. Enfin M. Guizot avait inséré une première traduction de cette Chronique dans la Collection des Mémoires relatifs à l’histoire de France. Mais ce document n’en était pas moins assez peu connu, perdu qu’il était dans ses trois grands recueils, d’un prix élevé , et à la portée de peu de bibliothèqués. L’Aca- démie a cru rendre service aux amis de notre histoire nationale en rééditant cette Chronique, revue sur dif- férents manuscrits et en accompagnant son texte d’une nouvelle traduction et de toutes les élucidations né- cessaires à une pareille publication. Le nouvel éditeur ajoute à la Chronique , les opuscules, les légendes, les petits poêmes et pièces diverses de l’auteur ; le tout à peu près inédit jusqu’à ce jour. Vous dire que cette importante partie de l'édition académique ést due en totalité aux études de M. l'abbé Bandeville, de regret- table mémoire, c’est vous attester qu'elle est irréprochable. Chanoïne de la cathédrale, aumônier du Lycée impérial et l’un des membres fondateurs de l’Académie dont il était le secrétaire-général , M. Bandeville, Messieurs, se trouvait votre collègue à plus d’un titre. L’un des or- ganisateurs , en 1845, du Congrès scientifique de Reims, qui à quelque peu marqué dans cette brillante suite de congrès , il avait été, à l’issue de la séance de clôture, unanimement proclamé membre de l’Institut des pro- vinces. M. l'abbé Bandeville, plus que personne, avait contribué par ses utiles et nombreux travaux à la juste estime que conquit, dès sa première période d'existence, la naissante Académie. Les Actes de la province ecclé- siastique , publication toute bénédictine, étaient l’œuvre à peu près exclusive de M. Bandeville, qui précédem- ment avait porté presque seul tout le travail de l'édition 28/4 INSTITUT DES PROVINCES DE : FRANCE. du Marlot Français. On le voit, M. l'abbé: Bandewville s'était placé au premier rang parmi ces habiles mis- sionnaires de la science, appelés à réveiller en-province le goût des fortes et bonnes études. C'était un homme des anciens jours -par sa profonde piété, par la bonté de son. cœur et l'étendue :de sés Connaissances ; un homme de.son époque par l’aménité de son caractère, la finesse, la, grâce et le liant de son esprit ; aussi n’hésitons-nous. point à dire. que l’Académie :de Reims, la République des lettres et le cercle nombreux de ses amis ontifait à sa mort. une irréparable ‘perte, L’Aca- démie a témoigné de son estime et de ses regrets , en: donnant ;à. son, secrétaire-général actuel ,; M. l'abbé. Tourneur, là mission de préparer et de: publier: sous ses auspices les œuvres de feu M. l'abbé Bandeville, Et c’est encore Jà: un travail d’un haut ‘intérêt qui doit être porté à l'actif littéraire de la Compagnie. Après les œuvres de Flodoard, l’Académie publie, ainsi qu’on vous l’a également annoncé l’année dernière, la Chronique de Richer, qui, vous le savez, Messieurs, complète et continue la Chronique du chanoïne de Reims. Cette édition, faite d’après le texte autographe ; avec une traduction nouvelle: ;en regard (par M. Ponsignon, docteur. ès-lettres et membre de: l’Académie ) , accom- pagnée de notes et d’un index, comblera dans la bibliothèque des gens de Jettres.et des amis-des sciences historiques-une véritable Jacume ; car on ne peut se dissimuler :que l'édition qu’en a donnée la Société de l'Histoire de. France, édition coûteuse et tirée: à petit nombre ,; n'ait, qu rt UE répondu: à l'attente publique, L'Académie de Reims, tout. en continuant d’ailleurs PUBLICATIONS. ACADÉMIQUES EN 485/. 285 sasympathie etses encouragements aux études d'économie agricole , industriellé et ‘sociale, ne perd point de vue non plus la mission qu’elle.s’est donnée de doter le pays d’une monographie complète sur lariche cathédrale qui fait l'honneur du sol Vimois. Des: médailles d’or .sont an- nuellement, décernées à l’auteur: du meilleur mémoire sur,une .des, parties de. ce somptueux édifice. Inces- samment la réunion de. ces divers travaux couronnés, formera un ensemble de: matériaux ‘tout disposés pour l’histoire, et. la description de l’énsemble du monument, Déjà des artistes d’un talent éprouvé ont reproduit, dans des dessins d’une admirable exécution, les parties principales de l’édifice;,:et grâce au concours académique et à la puissante et chaleureuse impulsion du savant Cardinal qui préside aux destinées de l’église de Reims, nous. avons la ferme espérance de voir bientôt se réaliser la publication de la nee onpius de la pres basilique, :: “Aprèsvous avoir entretenus réminetti des travaux et publications du corps académique , je pourrais pro- longer : ce :rapport;1en y faisant ‘entrer l'analyse’ des travaux individuels de quelques-uns ‘de ‘ses'-membres ; mais éloigné de Reims, depuis quelques annéëés ; il m'est donné; moins qu'à personne, de’vous en parler con- grûment. Je me ‘bornerai à vous‘ dire quelques mots d’un livre fort remarquable que vient de publier M. Lo: riquet , secrétaire-archiviste : de ” Académie, ‘ sous le titre d'Essai sur l'éclairage chez les Romains.’ Cest un traité à ‘peu près complet sur la matière’ et que l’Académie des inscriptions a déjà su distinguer par uné mention honorable , bien que ce travail ne soit qu'une sorte d'introduction à l'Histoire ‘du luminaire 286 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. dans l’église; ouvrage que termine én ce moment Pauteur, et qui, souffrez que je le dise, est. destiné à jeter un véritable jour sur cette partie ere nos pal nationales, Enfin , nous dévons mentionner ; parmi les travaux importants publiés dans le département , pendant l’année qui vient de s’écouler: l'Histoire de la ville de Chä- lons-sur-Marne, et de ses institutions, depuis son origine jusqu’en 1789; par M. Edouard de Barthélemy. Châlons, 1854 , in-8°. de 23 deslien, avec un ar de la ville. de vi lag HA RRESMIR HE La ville de Langres. ae à une Société historique et archéologique: M.:Pernot, son délégué, a exprimé le regret de n'avoir pas reçu de lettre du secrétaire de la Société ; il pense que cette Compagnie n’a rien fait pa- raître de nouveau, mais il mentionne les ouvrages sui- yants : | | Notice sur le.sire de Loinvillas par M. Fériel : Jeanne-d’'Arcow la fille du peuple au XV®. siècle; par. M;: Renard , ancien, député.de la Haute-Marne ; : Souvenirs du :Bassigny Champenois : Jeanne-d'Arc et Donrémy; Du:nom de Jeanne-d’Arc: Examen pate opinion de M. Vallet de Viriville. oui + M. Pernot. annonce entoutre:qu’il s'occupe de totminir plusieurs. travaux : une: Statistique de la France ; au point, de vue. des arts ; du dessin, de l'histonr'e et de l'archéologie ; , Une carte, à l’imitation de celle.de M. C. Dupin, indi- quant par des teintes les départements qui-ont. des mu- PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 41854. 287 sées, qui s'occupent des beaux-arts, et qui ont des aca- démies ou sociétés savantes ; Influence du génie de Saint Bernard , abbé de Glair- vaux, sur $on siècle ; ouvrage orné de figures, dédié au clergé de France. | Recherches sur les saints Patrons des corporations d'ouvriers, depuis le moyen-äâge jusqu'à nos Jours ; Notice historique sur le château et sur les: sires ” Joinville. je, M. Pernot fait aussi savoir au Congrès que M. Duval de Fraville s'occupe, à Chaumont, de reconstituer l'anciénne Société d’agriculture et des arts de la Haute-Marne. : MEURTHE. I a été fait hommage au Congrès d’une. brochure intitulée : Installation des Facultés des sciences et des lettres, et de l’École de. médecine et de, pharmacie de. Nancy,..le 7, décembre 1854. Nancy, 1854, in-8°. de 4 feuilles. éd MOSELLE. M. le colonel Hennocque , délégué de l'Académie et de la Société d'histoire naturelle de Metz, vous à fait savoir que l’Académie de Metz a publié un travail sur la constitution géologique du département, et sur la découverte d’une mine de houille qu’un habile ingénieur, M. Jacquot, y a faite dans un riche bassin d’où l’on pourra extraire la houille à bas prix. La section, d’ar- chéologie a publié un travail sur la mosaique trouvée à Nennig , près, de Trèves ; : ce travail vous a été offert, _ 288 INSTITUT DES PROVINCES DE: FRANCE. M. Hennocque vous a dit de plus que laSociété d'Histoire naturelle de Metz n’a pu encore publier. son volume, qui est sous presse. Elle. a réussi, par ses efforts, à conserver le jardin, botanique de. Metz , qui a. pris..de l'importance. Elle a aussi augmenté les collections du muséum, qui devient considérable. Mentionnons diverses brochures relatives à l’histoire et à l'archéologie de ce département, qui vous ont, été offertes : . Note pour servir, à la statistique monumentale du département de la, Moselle; par; Georges. Boulangé. Metz ,-485/4, -in-8°. de, 2: feuilles, 472, planches. R Cette notice donne la description monumentale des communes de Mont-St;-Martin, d’Aube, de Baronville, de Walmunster , de PR de durs pe de Gravelotie et de Doncourt, ‘” Les châteaux de la Moselle, notes archéolog yiques, par G. Boulangé, Metz, "1853, in-8°. de 2 feuilles. Histoiré et description accompagnée de nombreux dessins des châteaux de Cons-la-Grandville et -d’Ancerville, Recherche sur les sépultures des premiers ducs de la maison de Lorraine, dans l’abbaye de Sturzelbronn, par G. Boulangé. Metz, 1854, in-8°. de 1 feuille 172, accompagnée de planches. — Nous avons lu : avec beaucoup d'intérêt cette notice , mais nous demandons à M. Bou- langé a} permission ‘de ne pas partager son opinion au an des dates en chiffres arabes dont il parle (P 16). L'inscription du calice ne nous paraît pas devoir être rapportée : à une époque antérieure aux premières années du XVI. siècle, d'autant mieux que la forme et l'orne- méptation de ce vase Sacré se rapportent tout-à-fait à cétte époque. 11 serait à désirer que M. Boulangé en- PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854, 289 voyât à la Société française, ou au Comité des arts du ministère de l'instruction publique, des estampages de cette inscription et de sa date gravée sur la tour de l’église de Schorbach. Pour notre compte , nous ne pensons pas qu’on puisse trouver l'emploi des chiffres arabes, dans l’épigraphie, avant le milieu du XV°. siècle. M. Boulangé, dont les excellentes publications nous ont d'autant plus vivement intéressé, que nous nous occupons aussi de statistiques monumentales, nous pardonnera, nous lespérons, notre observation. Une visite à la mosaïque romaine de Nenning, par M. Boulangé. Metz, 1854, in-8°. de 1 feuille, avec vignettes dans le texte. Cette mosaïque , qui représente des jeux du Cirque, se trouve dans le petit village prussien de Nenning, sur la rive droite de la Moselle. NIÈVRE, MM. de Villefosse et le comte George de Soultrait ont parlé de la Société Nivernaise des lettres, sciences et arts qui, fondée en 1851, n’a cessé depuis cette époque de publier des annales renfermant les procès- verbaux de ses séances et diverses notices historiques et archéologiques intéressant le pays. Elle vient en outre de faire paraître un magnifique volume orné de nombreuses planches : la Monographie de la cathé- drale de Nevers (Nevers, 1854, grand in-8°. ), due à la plume de son président , le savant abbé Crosnier, vicaire-général du diocèse. L'histoire et la description archéologique de la cathédrale sont suivies d’une notice historique sur les évêques, et d’un pouillé du diocèse. L’Almanach et l'Annuaire de la Nièvre publient, 13 290 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. tous les ans, des documents historiques d'intérêt local ; l’Institut des Provinces a hautement félicité , en 1849, l'éditeur de la première de ces deux petites publications, M. Bégat. L’Almanach pour 1855 renferme , dans sa seconde partie, les articles suivants : Statistique mo- numentale de la Nièvre (canton de Fours), par M. G. de Soultrait. Littérature Nivernaise : Les Bocages, de Cotignon de la Gharnays , par E. Cougny ; Géographie de la France (en vers mmémotechniques) , par L. Vincent. Éphémérides Nivernaises : Le château ducal (extrait d’un ouvrage inédit sur les duchesses de Nevers), par M'°. Chevalier. L'Annuaire pour 1855 a donné, dans sa seconde partie , une Notice historique sur l’administration de la province du Nivernais et du département de la Nièvre de 1787 à 1852. M. le comte de Berthier-Bizy a fait le rapport suivant sur la Société d'agriculture de la Nièvre : Dans la Nièvre, on s’est principalement occupé des bestiaux et d'améliorer leur race. Le mélange du sang anglais n’a pas réussi ; l’on en est revenu complètement à l'espèce Charolaise. On s'occupe un peu de drainage , un peu de perfectionnements agricoles, très-lents jusqu'à présent, mais que le chemin de fer va faire avancer. La ferme-école de Poussery va finir ; le bail premier expire, et M. Salomon va prendre sur un autre pied la direction de la ferme , qui d’ailleurs est mal située. M. le comte George de Soultrait a publié, en 1854, un Essai sur la numismatique Nivernaise (Paris, Rol- lin, 1854 ; in-8°. de 14 feuilles 172, fig.), dans lequel il a décrit et reproduit tous les monuments numismatiques qui se rapportent à cette province, depuis les tiers de sol] PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 291 imérovingiens jusqu'aux médaillles modernes et aux bil- lets de confiance. Il ne nous appartient pas de juger ce travail, qui a été honoré d’une mention de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres au concours des antiquités nationales de l’année dernière. Mentionnons aussi Le Morvand, où essai géogra- phique, topographique et historique sur cette contrée, par l'abbé D.-K. Baudiau (2 vol. in-8°.). Cet ouvrage vient de paraître, et nous n’avons point encore pu l’appré- cier par nous-même. ; NoRp. Nous n’avons eu aucun rapport sur les travaux de la Commission historique du département du Nord. M. le marquis de Godefroy-Menilglaise vous a fait hommage de la brochure dont voici le titre : Observations recueillies dans le chartrier de l’abbaye de Gisoing et présentées à la Gommission historique du département du Nord. Lille, 1854 , in-8°. , 2 feuilles 472. M. Carlier , délégué de là Société Dunkerquoise et du Comité Flamand de Dunkerque, vous a présenté les rap- ports suivants sur ces deux Sociétés : Les travaux de la Société Dunkerquoise pour l’encou- ragement desseiences, des lettres et des arts, pendant l’an- née 4854, ont marché activement dans la voie qu’elle s'est tracée. Un volume de Mémoires, actuellement sous presse , témoigne du zèle qu'ont mis les Sociétaires , sous la cha- leureuse impulsion de leur président, M. Victor Dérodé, à remplir leur tâche dans le but que s’est proposé l’Insti- tution. Ce volume renfermera des discours et des rapports 292 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. entendus dans les séances de la Société, et en outre de quelques remarquables pièces de poésie, les notices suivantes : Observations météorologiques, faites à Dunkerque, en 1853, par le docteur Bobillier ; Des faits et des doctrines en médecine, par le doc- teur Ad. Lebleu; Probléme sur les propr'iétes de l’ellipse , par M. Fla- ment, architecte ; De l’élat actuel du port de Dunkerque , par le capi- taine Conseil ; ë Réflexions sur l'insuffisance de notre législation à l'égard des sourds-muets, par M. Ed. Hovelt, notaire ; Notice historique sur le scel communal, les armoi- ries et les cachets municipaux de Dunkerque, par M. J.-J. Carlier. L'auteur réfute l'opinion accréditée par l’historien Faulconnier,que les armoiries de Dunkerque lui viendraient de celles des comtes de Bar, seigneurs de Dunkerque en 1340; ilfait voir l’origine de ces armoiries dans des anciens scels communaux des XII°, et XILI°, siècles, qu’il a trou- vés aux archives de l’Empire. Notice historique sur Zuydcote, par Raymond de Bertrand. Cette notice est accompagnée de la reproduction du Testament d'Adam de Mardike. Ce curieux document est dû à M. V. Gaillard, préposé aux Archives du Con- seil de Flandre, à Gand (carton E, n°. 97); Mémoire sur les archives du chapitre des chanoi- nesses de Bourbourg, par M. Leglay, archiviste du dé- partement du Nord , à Lille. La Société Dunkerquoise a adopté l’usage académique PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 293 : des discours de réception pour ses nouveaux membres. Cette innovation a été accueillie avec un vif intérêt par une population qui a conservé précieusement de ses traditions communales flamandes l'amour du sol et des faits qui le glorifient. Le Comité Flamand de France, à Dunkerque, institution historique et littéraire, qui a déjà été signalée au Congrès, dans sa session de 1854, répond à un besoin impérieux des deux arrondissements considérables qui formaient jadis la Flandre maritime. Dans ces riches et belles con- trées, le peuple n’a rien désappris de sa langue originaire, malgré les proscriptions légales prononcées par les ordon- nances de 1663 et de 1684, lors de l’annexion du pays à la France. Le clergé, en contact chaque jour avec le peuple des cantons agricoles, éprouvait le plus grand obstacle à le moraliser par la proscription de l’enseignement de son langage familier. Des sollicitations instantes ont enfin obtenu , en 1853, que, dans les écoles primaires de ces arrondissements , la langue flamande fût enseignée , afin que les enfants pussent apprendre le catéchisme dans leur langue maternelle. Le premier soin du Comité Flamand de France a été de faire éditer, pour le peuple des campagnes , un almanach flamand qu’il était obligé d'aller acheter en fraude, par milliers d'exemplaires, dans la Belgique. Enfin, tout le passé dunkerquois avait éte flamand pendant des siècles, il était utile d'étudier son histoire dans sa langue et dans ses archives flamandes. C’est la même pensée qui a fait recueillir ailleurs les 294 INSTITUT DES FROVINCES DE FRANCE. écrits et les poésies des langues bourguignonne, proven- çale , bretonne et autres. | La langue flamande prétend toutefois avoir plus de titres nationaux à être étudiée, en ce qu’elle a conservé presqu'intacte la trace du langage des peuples francs , ces anciens fondateurs de la monarchie française. À peine était-il constitué, que le Comité Flamand a donné un éclatant signe de vie, en faisant paraître un premier volume de ses Annales. Cette publication a eu un grand retentissement en Belgique. Ce volume renferme entr’autres, en outre de curieux documents bibliographiques sur les œuvres des poètes flamands (français), le Kribbetje (la crèche) , espèce de Noël, ou poème lyrique sur la Nativité du Christ, qui se chantait de temps immémorial à l’hospice St.-Julien de Dunkerque. Cette pastorale a été recueillie d’une très- vieille femme aveugle , habitante de l’hospice, par les soins de l’abbé Caruel , et pour la musique , par le. pré- sident du Comité M. Ed. De Coussemaker, savant musico- graphe, qui prépare la publication d’un Racugil de chants populaires du pays flamand. La devise du Comité Flamand est : Moedertael en vaderland (langue maternelle et sol de nos pères). En outre du volume des Annales, le Comité a fait encore hommage au Congrès des Sociétés scientifiques du premier numéro qui a paru d’une publication des OEuvres littéraires des Flamands de France et d’un recueil qui se continuera sous le titre : La petite ruche, lectures destinées aux enfants du peuple. Enfin, M. de Caumont a déposé sur votre bureau le Programme du concow’'s pour la construction, dans la ville de Lille, d’une église dédiée sous le titre de PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 185/. 295 Notre-Dame-de-la-Treille et de St.-Pierre. in-4°, de 2 feuilles et plans. Vous n'avez eu aucune communication des Sociétés savantes du département de l'Oise. ORNE. M. le comte de Vigneral a parlé, en ces termes, du Comice de Putanges (arrondissement d’Argentan), dont il est à la fois le fondateur et le président : Le drainage commence, dit-il, à être compris dans le canton. Passant à ses propres travaux, M. de Vigneral dit qu’il a employé l’an dernier le plantoir Le Docte , in- strument peu connu et très-bon pour la plantation du colza et les semailles du blé. Cet instrument consiste en une brouette légère, surmontée d’une barre transver- sale, à laquelle on adapte plusieurs dents servant de rayon- neur et à laquelle on peut substituer une houe , un sar- cloir et un butoir. Complet, cet instrument revient à 145 fr. ; le plantoir seul coûte 45 fr. — Le semoir est formé de deux tubes contenant l’un des semences, et l’autre des engrais, dont un seul coup de piston fort léger suffit pour déterminer la chute. — Ne s’en étant servi que l'an der- nier, M. de Vigneral ne peut préciser les résultats qu’il en a obtenus; mais, malgré la rigueur de l'hiver, l’aspect de ses récoltes est des plus satisfaisants. Le grand avan- tage du plantoir Le Docte est son économie ; il écomomise, par hectare , environ 40 à 45 litres de blé et pour une cinquantaine de francs d'engrais pulvérulent. Un autre avantage ressort de la remarque suivante : Les col- zas nouvellement plantés sont très-souvent dévastés par 296 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. les ramiers ; qui en mangent les feuilles et souvent per- cent ta tige qui est penchée vers le sol. Cette année, les colzas plantés avec cet instrument n’ont perdu que leurs feuilles, et leurs tiges étant à peu près droites ont échappé ‘aux ramiers. M. de Vigneral dit, en terminant, que, dans le canton de Putanges , les races animales sont bien soi- gnées et les perfectionnements se portent maintenant sur les instruments aratoires. M. Baudouin demande combien de terre peut être ensemencée, en un jour, par le plantoir Le Docte. M. de Vtgneral répond que deux enfants suffisent pour faire fonctionner cet instrument, et, qu'avec leur aide , l’on peut distribuer en un jour les semences sur une éten- due de 35 à A5 ares. Sur la demande de M. de Lafayette, qui sindtalé savoir quelle économie on trouve dans l'emploi du plantoir Le Docte, et quel espacement on doit observer dans la planta- tion des semences, M. de Vigneral répond que, par les méthodes anciennes, il fallait à peu près mettre un hecto- litre de blé par hectare, quantité du reste modifiée par la nature du sol ou le temps de la plantation. Avec le plantoir Le Docte, au contraire, pour un hectare , il suffit de 40 à 60 litres de froment, de 7 à 9 kilos de betteraves, 4 kilo de carottes, le double de colzas et 180 livres de féverolles. Quant à l’espacement, on peut, dans les fortes terres, laisser entre les touffes une distance de 48 à 22 centimètres ; dans les terres légères, on peut rapprocher davantage , mais cependant avec modération : il n’est jamais avantageux de rapprocher trop les touffes, dans les terrains calcaires et les terres franches. Plusieurs semences tombant quelquefois ensemble, il faut ne laisser dans chaque pochet ou touffe, que 3 plants de carotte et PUBLICATIONS ACADÉMIQUES EN 1854. 297 un seul plan de navet de chou, de rutabaga ou de colza. — M. de Vigneral dit, en finissant, que, près de St.-Quen- tin, M. Sauvais de Sézincourt emploie, pour le blé, la plantation à la main ; il met de 25 à 36 litres, par hec- tare, et obtient un rendement de 4 hectolitres , ce qui lui donne un bénéfice de 200 fr. , par hectare; il est vrai qu’il emploie 250 ouvriers. M. de Lafayette parle d’un plantoir à la main de M. Mangou, dont il promet de donner plus tard une connaissance plus ample. -— M. de Cussy signale M. de Laborde, qui est arrivé, par des moyens analogues à ceux de M. Sauvais, à des résultats comparables. — M. Quen- tin-Durand, qui trouve trop compliqué le semoir de M. Mangou, en mentionne un plus simple; enfin, M. Beaulieu remarque que la méthode de M. Mangou n’est pas nouvelle ; on trouve une méthode analogue (bien que l’instrument soit tout différent) , inventée par l'anglais Bull et indiquée par l'Encyclopédie, en 1751, et par l'abbé Poncelet, en 1779, — Cette question , du reste, n’est pas épuisée, et la fin de la discussion est ren- voyée à la prochaine séance. M. de Gussy ayant demandé quel rendement a été ob- tenu par les cultivateurs du canton de Putanges qui ont employé le drainage, M. de Vigneral répond que le drai- nage a été seulement appliqué aux herbages et aux prai- ries. Avant le drainage , l’hectare de prairie donnait 4 à 500 bottes , du poids de 8 kilos, que l’on vendait, comme fourrages , au prix de 44 à 15 fr. , le cent. Maintenant, le même hectare donne 6 à 700 bottes , que l’on vend de 25 à 30 fr., le cent ; et les prairies qu’on louait de 20 à 25 fr. l'hectare, se louent maintenant de 60 à 70 fr. M. d’Angleville, qui a drainé sur une grande échelle, y 298 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCÉ: trouve un bénéfice de 415 °7.. Dans certaines parties du canton de Putanges , le sol est si humide et si mou, que l’on a dû poser les tuyaux de drainage, non pas sur le sol même, mais sur des gazons ; aujourd’hui , dans les terrains drainés , le sol est devenu assez sec et peut se passer des engrais qu’il exigeait auparavant. M. Gustave Le Vavasseur vous a fait hommage de sa Notice sur les trois frères, Jean Eudes, François Eudes de Mézeray et Charles Eudes d’'Houay. Paris , Dumoulin, 1855, in-8°., 5 feuilles, figures et table gé- néalogique de la famille Eudes. Cette brochure se vend au profit de l’œuvre du monument de Mézeray. PAS-DE- =» = NN À Plusieurs de ces empreintes sont fort confuses ; et quel- ques-unes des attributions que je propose peuvent être regardées comme douteuses. ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 169 Les bétulinées sont représentées par une feuille entière et très-nettement caractérisée, que j'ai nommée Alnus Betulæfolia ; les cupulifères, par une feuille de chêne, une de châtaignier et un involucre de charme, tous trois très- mutilés ; les acérinées montrent une feuille d’une conser- vation parfaite et dont l'attribution ne peut être douteuse. L'espèce la plus remarquable de Manosque est une*nyim- phæacée de la plus grande taille ; les débris en sont très- nombreux , et certaines couches très-bitumineuses ne paraissent composées que des débris accumulés de ses tiges et de ses feuilles. J’en possède plusieurs feuilles presqu’entières, à peine peltées , profondément fendues inférieurement , orbiculaires , larges de 30 centimètres environ, dentelées sur les bords, et assez bien conservées pour permettre d’en étudier la nervation. Elle se com- pose de 30 à 35 nervures rayonnantes du centre, et d’une nervure médiane très-fortement prononcée. Des frag- ments de tiges, des cicatrices laissées par les pétioles après leur chute , attestent combien cette espèce an- cienne, comparable aux plus grandes de l’ancien con- tinent et très-voisine du genre Lotus, était multipliée à cette époque dans les eaux lacustres qui recouvraient les vallées de Manosque. Aïinsi.que je lai dit plus haut, cette plante existait aussi à Aix, quoique les débris v soient beaucoup plus rares. J'ai nommé cette belle es- pèce Nymphæa eocenica. Une espèce de graminée, digne d'attention, a aussi mêlé aux restes de ce Nymphæa, les débris épars de ses épillets; elle est bien reconnaissable, et la forme de ses glumes la range naturellement dans le genre Panicum , à côté du Panicum lineare (Burm.) et de plusieurs autres espèces indiennes. Les empreintes que j'ai recueillies en assez grand 470 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. nombre dans les plâtrières de Gargas , près d’Apt, com- posent une flore bien peu complète, mais distincte de celles d’Aix et de Manosque. Ici, plus de conifères, comme à Manosque, mais des ‘traces d’érables , d’or- meaux, de châtaigniers, de charmes ; la composition de cette végétation indique une Station plutôt sèche , et exposée à une influence méridionale. En voici le tableau résumé par ordre de familles : Rhamnées, , . + + Graminées, , +, «1. Amygdalinées. . :. :. Conifères. 4. + Myrtacées. +0 Potamées. . . .,, 2 2 4 Myricées. : rate nan Apocynées.. « +... 1 2 A = QG = NN Cupulifères... … . + Empreintes peu recon- Laurinées, . +. +. naissables ou indé- Protéacées. , , . . terminées, , , ::,.09 Les graminées sont représentées, à Apt, par des espèces à larges feuilles, analogues à celles d’Aix. Les conifères sont réduits à quelques fragments de Callitris Brong- niartii. Les laurinées ét les protéacées sont les mêmes qu'à Aix. Ce qui distingue surtout cette petite flore et la rend intéressante , c’est la: présence de plusieurs espèces de myrtacées , parfaitement reconnaissables à cause du tissu ponctué de leurs feuilles. Les cupulifères sont représen- tées par une seule espèce , très-remarquable, il est vrai, et dont j'ai recueilli plusieurs empreintes. C’est un chêne que j'ai nommé Quercus cuneata, et dont les feuilles , à trois ou à cinq lobes, coriaces et cunéiformes à la base, se rapprochent de certaines espèces améri- caines, comme le Quercus Banisteri. J'ai attribué à la famille des apocynées une espèce de cette localité, dont ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 474 les empreintes, assez communes , présentent des feuilles étroites , linéaires, très-allongées, entières sur les bords, et marquées de nervures ramifiées en réseau. J'arrêterai ici ces observations, déjà trop longues ; elles suffisent pour montrer combien de questions inté- ressantes sont soulevées par l'étude de notre flore ter- tiaire ; la variété des espèces, le mélange des formes , le grand nombre de formes éteintes, contribuent à donner à la végétation de cette époque un attrait tout particu- lier. L'étude approfondie des couches des terrains anciens , de leur soulèvement, est nécessaire pour com- pléter ces recherches, en indiquant d’une manière ap- proximative la configuration du sol à l’époque éocène;, la direction et la position des chaînes de montagnes qui existaient alors; c’est ainsi qu'il sera possible d'arriver enfin à connaitre d’une manière exacte les causes qui présidaient à l’organisation de la flore tertiaire et à la distribution des essences végétales qui la composaient. Au sujet de la 5°, question, M. de Caumont donne quelques détails fort intéressants sur la présence du phosphate de chaux dans les terrains crétacés du nord de la France et sur l'emploi qu’on en pourrait faire. Il est constaté, à la suite de ces réflexions, que cet amen- dement ne se trouve probablement pas en Provence, puisqu'on ne l'y a jamais signalé. A propos de la 8°. question , M. Gibert, directeur du musée d’Aix et d’une école spéciale de dessin qui compte 200 élèves, donne des renseignements sur le musée -d’AÏx. | M. Rimaud de Fouvert, secrétaire de la commission 72 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. administrative du musée , interpellé sur le même sujet , donne des explications satisfaisantes. On ouvre la discussion sur la 41°, question. M. de Cau- mont demande quelle forme, quelles dimensions, quelle disposition intérieure on doit préférer pour les musées de: province ? Faut-il préférer les musées collectifs ou bien former des musées spéciaux? M. Gibert donne quelques explications au sujet des projets à venir pour le musée d’Aïx. Les objets d’anti- quité (bas-reliefs , inscriptions) , qui depuis long-temps sont exposés à la pluie dans le jardin du musée, état de choses contre lequel M, de Caumont a déjà pro- testé , il y a 15 ans, au nom de la Société française d’ar- chéologie, doivent être recouverts d’un hangar ou galerie ; la Ville a le projet aussi d'acquérir des terrains voisins pour agrandir le jardin. M. de Caumont approuve lé projet d’un hangar fait avec goût, pour mettre à l’abri les fragments d’architec- ture et de sculpture , si négligés aujourd’hui. M. Autheman, de Cassis, indique un système nouveau de classification pour les musées. M. Balthazar, d'Arles, se prononce pour les musées spéciaux, il motive son opinion par d'excellentes raisons, et présente quelques observations sur le musée de Mont- pellier et sur l’abandon dans lequel sont laissées de pré- cieuses inscriptions lapidaires qui en font partie. A propos de la 41°. question, M. de Caumont donne des explications sur l’origine et la confection des cartes agronomiques. ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 478 Il avait, en 4846, publié un mémoire considérable, indiquant ce que l’on doit entendre par une carte agro- nomique ; il donnait des explications suffisantes sur la marche à suivre et sur l’objet qui devait occuper surtout les: explorateurs , l'étude des terrains meubles et culti- vables. Ce mémoire a été mis à la disposition de toutes les Académies de France, dès l’année où il a été imprimé (1846) ;:et pourtant beaucoup de personnes, même des ingénieurs , chargés de dresser des cartes agronomiques , depuis que la pensée de M. de Caumont a été enfin com- prise (1), ne paraissent pas avoir compris ce que doit être une carte agronomique. Il y en a qui, après avoir reçu des subventions des Conseils généraux pour une carte agronomique , recommencent une carte purement et absolument géologique. Des malentendus de ce genre ne peuvent être tolérés. Le vœu est émis que l’Académie d’Aix s'occupe dé faire dresser une carte agronomique de la circonscription. M. Roux fait connaître que la carte géologique de Mar- seille a été publiée par les soins de la Société de Statis- tique de Marseille. Des fonds ont été accordés par le Conseil général pour dresser la carte agronomique ; mais l’ingénieur qui est chargé de ce travail, éprouve des obstacles qui en rendent l'exécution fort difficile. Sur la 6°. question, M. de Caumont fait la description d’une machine anglaise propre à triturer le sol et les (1) Près de dix ans auparavant, M. de Caumont avait pré- conisé ces cartes agronomiques et indiqué en quoi elles seraient utiles à l’agriculture. 474 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. rochers, et d’un cylindre à dents pour enlever les pierres dans les terrains. M. de Caumont pense que, dans le Midisurtout où tant de terrains pierreux entravent la culture, de pareilles ma- chines auraient une grande utilité. Il parle de la machine Guibal, mais il voudrait autre chose encore, une machine triturante , mue par une machine à vapeur, et qui, au moyen de pilons en fonte, viendrait, par un mouve- ment analogue à celui de nos anciens moulins à huile, triturer les roches calcaires et les transformer en terres meubles et susceptibles d’être cultivées. Ce que l’on fait en petit à bras, à l’aide de marteaux, peut évidemment se faire en grand, au moyen de la vapeur. M. de Caumont ne doute pas que l’on ne réalise bientôt le vœu qu’il forme à cet égard. Après quelques communications assez étendues, on traite de l'irrigation, qui serait d’une importance vitale pour notre agriculture, Un projet de canal d'irrigation a été étudié par les ingénieurs d’Aix. Le plan, qui donne lieu à un exposé intéressant, sera, il faut l’espérer, mis tôt ou tard à exécution. La séance est levée. Le Secrétaire, GAUT. ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 475 SÉANCE DU 2 SEPTEMBRE. ( Présidence de M. pe CAUMONT. ) La séance est ouverte à 2 heures, sous la présidence de M. de Caumont, assisté de M. le docteur P.-M. Roux. Prennent place au bureau : MM. Payan, L. de Garidel, d’Amoreux, Henri Talon, L. Gaugain , trésorier, de lIn- stitut des provinces; J.-B. Gaut et L. Berluc de Pérussis, secrétaires, ce dernier tenant la plume. M. P.-M. Roux dépose sur le bureau un exemplaire des Actes de la première session des Assises scientifi- ques , qu’il a recueillis, mis en ordre et publiés récem- ment. L'Assemblée reçoit également communication des actes des Congrès scientifiques d'Orléans et de Toulouse. M. Roux, au nom de M. Bompar , secrétaire de la Chambre d’agriculture du Var, fait hommage d’un ta- bleau résumant les procédés usités pour cultiver les terres. M. Gaut offre , de la part de M. Orange, agro- nome d'Aix, plusieurs exemplaires d’une Notice sur emploi, comme engrais, des eaux ammoniacales provenant des usines à gaz; ces brochures sont distri- buées aux membres des Assises. M. le docteur P.-M. Roux fait un rapport dont il avait été chargé à la séance précédente, surune brochure de M. le docteur Nourrit, intitulée : Des améliorations sanitaires et agricoles du littoral du département du Gard et des départements limitrophes. M. le Rapporteur jette un rapide coup-d’œil analytique sur ce travail qu’il con- sidère « comme un bon livre contenant, en peu de mots, 476 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, « sur l’amélioration de la santé publique et de l’agricul- « ture, des idées que l’on ne saurait trop propager ; « celle, par exemple, de regarder les maladies produites «_ par une atmosphère viciée, dans la contrée dont il s’agit, « comme une endémie, c'est-à-dire comme le résultat « de causes locales et non comme une épidémie impor- « tée de pays lointains par la contagion. » M. le Rapporteur conclut à ce que des remerciments soient votés à l’auteur pour son intéressante communi- cation. | L'ordre du jour appelle la discussion des questions du programme relatives à l’histoire, aux beaux-arts et à la littérature. | M. L. Berluc de Pérussis répond à la question. ainsi conçue : « Quelles ont été, en 1854, les publications les « plus importantes dans la circonscription? » En nous posant cette question, que je n’aurai pas la témérité d’embrasser dans son ensemble, l’Institut des provinces a voulu sans doute, Messieurs, nous demander une sorte de statistique intellectuelle de nos contrées méridionales. 1l a voulu savoir si la Provence, cette terre classique où viennent expirer les haleines de l'Italie, s’est associée au mouvement littéraire et scientifique qui, d’une extrémité de la France à l’autre , vivifie toute une ardente génération. Notre pays, soyons fiers de le dire, a su relever le gant que Paris jetait à la face de chaque province : une phalange serrée a secoué le vieux man- teau de l'indifférence; elle s’est précipitée dans larène , et on l’a vue , avec une joie étonnée, suivre et presque dirigér le courant rapide de la décentralisation. L’exem- ple de quelques-uns a été fécond et ses fruits ont müri : ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. {477 de tous côtés surgissent des poètes qui chantent la pa- trie, et des savants qui soulèvent pieusement la pous- sière de ses traditions ; la pléiade, qui grandit sans cesse, ranime un pays que l’on croyait mort aux nobles travaux de l'intelligence, et, chaque jour, amour du sol natal fait éclore des chants et des souvenirs, Nous n’en voulons pour preuve que ces œuvres col- lectives élevées à la Provence par l'élite de nos écri- vains , et qui réunissent en une pacifique panoplie toutes ces plumes naguères timides, dispersées , rivales peut- être. Nous avons voulu, laissant à d’autres de plus sa- vantes recherches, vous dire un mot de ces travaux fra- ternels et de ces communes créations, qui témoignent, bien mieux que les publications individuelles et isolées , de la force du mouvement qui nous entraîne. Déjà, dans maintes circonstances, nous avons épuisé toutes les for- mules de l’éloge pour ces entreprises dictées par le pa- triotisme local : mais peut-on se lasser d’applaudir ses maîtres et d’aimer son pays ? La courte période d’une année a vu naître autour de nous bien des tentalives généreuses, qui toutes ont obtenu un succès presque populaire : l'histoire de nos aïeux, leurs œuvres, leur langue surtout, touta semblé revivre à la fois. Le Plutarque provençal, la Bibliographie provençale, le Roumavagi des Troubaires, l'Armana prouvençais, rien de cela n’existait il y a deux ans, tout cela est au- jourd’hui dans les mains de tous. Le Plutarque provençal, son titre l'indique assez, est un recueil biographique où viennent se peindre suc- cessivement toutes les grandes figures de l’ancienne Provence. A l’appel du fondateur de cet ouvrage, l’in- fatigable M. Alexandre Gueidon, nos littérateurs les 478 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. plus appréciés ont répondu avec une sorte d’enthou- siasme, Nous retrouvons ici, non-seulement les noms des modestes écrivains du Midi, mais ceux, plus illus- tres et non moins aimés, des enfants prodigues de la littérature marseillaise : Méry , Poujoulat , Amédée Achard , Gozlan sont au nombre des collaborateurs du Plutarque:et ont voulu, du sein du tourbillon parisien , rendre hommage à la terre natale et à ceux qui les ont précédés dans l’histoire. A côté de ces travaux biographiques est venu se placer un ouvrage qui doit mettre en relief les monuments les plus importants de notre littérature oubliée. Fondé tout récemment sous le titre de Bibliographie provençale , ce nouveau recueil, qui a le rare mérite d’être sans de- vanciers, sera, s’il recueille sur sa route difficile les mêmes sympathies, un digne complément du Plutarque. Certes, voilà pour ceux qui nient les battements de notre cœur un démenti vraiment provençal. Mais tout n’est pas dit encore. Il appartenait à notre vieille capitale, à cette bonne cité d'Aix, dont chaque pierre est comme la tombe d’un troubadour , de tenter un dernier effort en faveur de cet idiôme que l'Allemagne, balbutie quand on cherche ici même à l'oublier. Le Roumavagi deis Trou- taires, publié sous la direction de M. Gaut, est, lui aussi, un vibrant écho des âges qui ne sont plus; il a réuni en un faisceau compact toutes ces imaginations doublées d’un cœur , qui bouillonnent sous notre ciel. Le Roumavagi et les Provençcales , qui sont pour lui des sœurs aînées, seront, dans l’histoire de la langue d'Oc, comme cette éclatante et trop rapide lueur que jette un flambeau mourant. D'ailleurs, disons-le bien vite, les Troubaires, comme ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 479 les antiques athlètes , sont chaque jour prêts.au combat. Roumanille, notre cygne Lamartinien, qui restera comme une personification du génie sans orgueil, a eu la pensée, tardive hélas ! de lancer , chaque année, dans les cam- pagnes , comme un incessant contre-poison, un A/ma- nach provençal. Ce petit livre , qui parle au peuple son langage parfois poétique et toujours. incisif, le moralise en l’instruisant, et chasse de la chaumière, ce temple du pauvre, les vendeurs éhontés qui colportent partout leurs immondices au rabais. Voilà l’œuvre provinciale et populaire par excellence , qui doit régénérer les cœurs avec les esprits; voilà le bon à coté du beau. La Provence retrouve encore chaque esprit dévoué , chaque nom connu, dans quelques revues périodiques d’Aix et de Marseïile. Ce sont, à Marseille : l’Athénée de Provence, qui résume toutes les fleurs de notre double poésie ; la Revue de Marseille ; le Journal des sciences et autres. journaux littéraires qui ont su trouver deux choses introuvables, de l’esprit et des abonnés. A Aïx : le Gay saber, organe des Troubaires, dirigé par M. Gaut ; et une feuille plus modeste, qu'il ne m’appartient pas de nommer. Chose étrange, la province trouve un appui jusque dans la capitale. Paris se ligue contre lui-même et ali- mente le foyer qui doit consumer son monopole. Des écrivains, dont le cœur égale le mérite, ont fondé , en faveur des provinces, une œuvre que l’on ne saurait trop encourager. Cette œuvre, qui s'appelle l'Union des poètes, vient en aide aux talents pauvres et ignorés, en ouvrant aux uns la bourse commune de l'Association, aux autres le champ, parfois clos et inabordable, de la publicité. Un conseil provincial de l’Union vient d’être L80 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. établi à Aïx. Bientôt, nous l’espérons avec foi, les écri- vains provençaux seront tous unis par dés liens étroits , et marcheront plus sûrement encore , sous l’égide d’une création durable, à la conquête de leur littérature. Vous aussi, Messieurs, vous surtout, vous avez com- pris et encouragé ce mouvement, qui doit faire prospérer la science et le pays. Le congrès qui vous réunit aujour- d’hui est la consécration la plus désirée et la manifestation la plus belle de notre nouvelle unité. Puissent ces réu- nions, où l’on accueille avec tant de bienveillance les essais, — j'allais dire les illusions, — de la jeunesse, devenir comme un trait-d’union entre ceux qui savent et ceux qui veulent savoir. M, de Caumont applaudit à tous ces travaux de la Pro- vence et aux progrès de l’Union des poètes. La parole est donnée ensuite à M. J.-B. Gaut, pour la solution des 42°,, 43°. , 44°, et 15°, questions , posées en ces termes : « Quels services doit s’efforcer de rendre la presse « locale, au point de vue de l'instruction générale et de « la diffusion des connaissances utiles , dans la circon- « scription ? « La presse départementale a-t-elle compris sa mis- « sion? Qu'a-t-elle fait jusqu'ici pour occuper l'esprit « public de choses sérieuses ? « Les Sociétés savantes ont-elles secondé la presse «dans le développement de ces tendances ? « Quels moyens peut-on indiquer pour associer les « efforts des Sociétés savantes à ceux de la presse dépar- « tementale ? ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. L81 MESSIEURS, Les questions 12, 43, 14 et 15 du programme des As- sises scientifiques pour 1855 ont une connexilé qui les rend, en quelque sorte, indivisibles. J’essaierai donc de les aborder simultanément , non pas pour les traiter à fond, mes occupations multiples ne m’ayant pas permis un travail aussi complet , mais pour essayer d’y répondre en peu de mots, et de formuler quelques idées improvi- sées, ce matin, au courant de la plume. Permettez-moi de circonscriré encore plus ces ques- tions et de les localiser complètement, Beaucoup d’écri- vains procèdent , par induction, du connu à l'inconnu; je n’ai l'habitude de m’arrêter qu’à ce qui m’est connu. J'ai lieu de penser que mes attenances, pendant de lon- gues années, avec les journaux d'Aix, ont suffisamment formé mon expérience à leur sujet, et m'autorisent à parler sciemment de leur constitution vicieuse et des conséquences qui découlent de leurs vices organiques. Mes réflexions pourront s’appliquer , avec la même jus- tesse, à toutes les publications hebdomadaires ou bis- hebdomadaires qui s’éditent dans les villes du même ordre que la nôtre. La presse de Marseille échappe natu- rellement à mon appréciation, parce qu’elle est établie sur des bases différentes sous le rapport de l'utilité et de la périodicité. Les avis commerciaux de la quatrième page la rendent indispensable à une population éminem- ment mercantile ; son apparition quotidienne lui permet des développements considérables consacrés à la défense des intérêts locaux. Cependant , j'ajoute, pour être com- plètement vrai, que, malgré ce dernier avantage dont dispose leur rédaction, les feuilles marseillaises, sauf des 21 482 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, : cas exceptionnels, ne sont que de grands satellites , gra- vitant autour des astres de publicité qui font leurs révo- lutions périodiques dans le ciel parisien , et qu’elles re- çoivent , de ces planètes fixes ou de ces comètes écheve- lées, le reflet des idées et des opinions, des vérités et des erreurs qu’elles renvoient ensuite, par réfraction , à leurs lecteurs. | Quels services doit s’efforcer de rendre la presse locale, au point de vue de l'instruction générale et de la diffu- sion des connaissances utiles ? | Le simple bon sens répond à cette question. Les ser- vices que les journaux pourraient rendre seraient im- menses, s'ils comprenaient leur mission civilisatrice. — O fortunati nimium, sua si bona norint ! — La presse a pour but constant la recherche et la propagation de la vérité dans toutes les branches des connaissances hu- maines. 11 faut qu’elle émiette , en quelque sorte, les sciences , les lettres et les arts à ces Lazares trop nom- breux auxquels leur naissance, les nécessités de la vie et l'insuffisance de l’enseignement n’ont pas permis de s'asseoir à l’agape intellectuelle. Le journal de province doit être l’ami de la maison, le compagnon du foyer et de l'atelier, l’instituteur privé destiné surtout à l’in- struction et à l’éducation des adultes. IL est obligé de verser régulièrement sa manne à tous ceux qui marchent encore vers la Terre-Promise, Les intérêts généraux du pays sollicitent d'abord toutes ses préoccupations. Éclairer l'opinion et l'administration, s’il y a lieu, sur les besoins de la localité ; rechercher, étudier et faire connaître tout ce qui peut lui être utile, telle estsa mis- sion principale. Qu'il prenne garde, avant tout, de se laisser tromper par les mirages décevants de la politique, ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. L85 qui dénaturent les objets et les perspectives d’une étrange manière. Les partis voient tout à travers un prisme mul- ticolore qui donne des tons, des nuances et des reflets faux ou exagérés aux images qui viennent se reproduire sur la rétine de leur appareil visuel. Chacun choisit la couleur qu’il préfère , et en teint ses visions. Ce qui fait que, passez-moi cette expression de plaisanterie fami- lière, les journaux nous en font voir de toutes les couleurs. J'ai toujours considéré les fonctions des journalistes comme une espèce de sacerdoce qui compte beaucoup d’appelés et peu d’élus! La presse oblige ; mais, hélas! que de gens ne connaissent point ou méconnaissent ses obligations! A notre époque de mouvement et de progrès indéfini, où l’on voudrait que la pensée fût entraînée avec la vitesse de la vapeur ou se laissàt emporter par l'éclair de l'électricité , lon voit se produire et se perpé- tuer de curieuses anomalies. Des écrivains, ou se croyant tels, qui ne savent pas seulement tenir une plume, s’arrogent le droit d’instruire et de moraliser les masses. Tous ces Pics de la Mirandole improvisés et incompris tranchent les questions les plus ardues du haut de leur _ omniscience, et noient l'opinion et leur faconde ridicule dans des flots d’encre indélébile, mais qui n’est pas tou- jours incorruptible. Il faut faire sérieusement les choses sérieuses, et ne pas abandonner l'opinion à toutes les im- pressions fâcheuses qui peuvent résulter des rêveries ou des études auxquelles se livrent ces imaginatives en tra- vail. Le public fait justice , m’affirmera-t-on, des produc- tions prétentieuses ou avortées. Cela est vrai dans une certaine mesure. Mais on peut dire aussi, avec une va- riante de Beaumarchais : Écrivez, écrivez, il en reste toujours quelque chose. 84 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Pour que le journalisme rende réellement des services, il faut le ramener au but réel de cette institution , dont iltend, chaque jour, à s’écarter davantage, Il est indis- pensable que les feuilles locales s'occupent, surtout et avant tout, de la localité ; qu’elles s’identifient avec elle , et en soient l’organe et l’expression vraie et sincère en toute circonstance. Sentinelles avancées de ses besoins, elles doivent veiller sans cesse, signaler, évoquer , as- pirer , en quelque sorte, tout ce qui peut lui être utile, tout ce qui peut répandre et vulgariser les éléments du bien-être matériel et intellectuel, public et privé, se faire, en un mot, les véhicules de la pensée initiatrice , les apôtres de la civilisation ! Elles ont le mandat impé- ratif de mettre les sciences , les arts et les lettres à la portée de tout le monde. En traduisant‘les sciences en langue vulgaire, et en en déduisant surtout les applica- tions usuelles , elles feront la vie plus facile à tous, et tendront au perfectionnement de toutes les industries. En distribuant la sportule des lettres à leurs nombreux clients , elles donneront une satisfaction heureuse à l’es- prit, adouciront et poliront les mœurs et les rapports so- ciaux, et rendront les hommes meilleurs. Enfin, en ini- tiant les populations aux arts , elles élèveront la pensée, entretiendront le goût public et rempliront d’agréments les sentiers trop souvent arides de la carrière humaine. La presse départementale a-t-elle compris cette mission ? Qu’a-t-elle fait jusqu'ici, dans les diverses localités , pour occuper l'esprit public des choses sérieuses ? La réponse à celte question est triste. La presse n’a rien fait, n’a rien pu faire ou n’a rien voulu faire. Le rôle négatif de nos feuilles n’a pas besoin d’être démontré. Il suffit de les lire pour être édifié. Elles n’ont ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 85 rien. pu faire, parce que les éléments leur manquent. Elles n’ont rien voulu faire, en général, si ce n’est de la spéculation. Je suis pessimiste , dira-t-on. J'en appelle au jugement et à la bonne foi de lauditoire. Qu'est-ce que nos mille publications de province, prises au hasard, sinon une insipide compilation de nouvelles parisiennes , une espèce de lanterne-magique où lon montre , en rac- courci, ce que la grande presse développe dans une phra- séologie souvent aussi vide que luxuriante? Nos journaux divagueront avec superfétation sur la guerre d'Orient , et reproduiront gravement les dépêches électriques huit jours après leur arrivée. Ils vous annonceront que l'Empereur vient de partir pour St.-Cloud, alors que.depuis quatre ou cinq jours le chemin de fer l’a amené et ramené de Biar- ritz. Ne leur demandez pas s’il est vrai que la maladie de la vigne fait des ravages dans la contrée, si on aurait besoin d’un canal pour irriguer les terres desséchées, ou de tuyaux de drainage pour l'écoulement des eaux stagnantes dans les terrains trop humides. N’y cherchez pas des discussions sérieuses sur les abus à réformer , les améliorations à introduire, les perfectionnements à adopter dans l’administration , le commerce ou l’indus- trie du pays. — De minimis non curat prætor ! — ls ne peuvent pas descendre à ces détails indignes de leur prose prétentieuse. Cela n’est pas leur affaire, et s'ils daignent s'occuper parfois de la localité, ce sera pour nous apprendre, à grand renfort de phrases ampoulées, que la première chanteuse du théâtre a un petit pied et une grosse voix , et que la dugazon a une petite voix et un grand pied. C’est ainsi qu'ils entendent l’art ; ils le mesurent au pied ! Voilà toute la satisfaction qu'ils vou- dront bien accorder à votre patriotisme, Comme au 186 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. peuple romain, il leur suffit d’avoir : panem et circenses, les annonces et les coulisses ! Quant à l’encouragement aux lettres, nous en trouvons des échantillons fort cu- rieux dans les excentricités de grammaire et de style de certaines rédactions. Faut-il dire ma pensée sur leur ma- nière de comprendre les sciences? En arithmétique , on l'exprimerait par la position d’un zéro à la gauche d’un chiffre. Quelques personnes optismistes ou intéressées me fe- ront peut-être l’honneur de prendre l'exposé qui pré- cède pour une satire, et mon tableau pour une carica- ture. Je dois prévenir ces esprits trop bénévoles que je ne dévoile pas tout. S'ils pouvaient descendre avec moi dans les arcanes, je leur ferais voir et toucher du doigt des mystères dont ils sont loin de se douter, et dont je serai heureux qu'ils ne se doutent jamais. 11 vaut mieux laisser de telles vérités dans leur puits que de les mon- trer dans leur trop simple appareil. Les Sociétés savantes ont-elles secondé la presse dans le développement des tendances à propager les idées sérieuses? Cela leur aurait été fort difficile. Les Sociétés savantes et les journaux sont deux électricilés de même nature, qui ont une éternelle répulsion lune pour l’autre. Est-ce que les Sociétés savantes savent s’il y a des jour- naux ? Est-ce que les journaux savent s’il y a des Sociétés savantes ? Je vois ici des académiciens, j'ignore s’il y a des journalistes ; je mets les uns et les autres au défi de me contredire. Je n’ai pas hésité à divulguer les vices de la presse périodique, dont je suis issu et qui a toujours eu mes sympathies; qui aime bien , châtie bien ! Je dirai avec la même franchise et la même indépendance, ceux des Sociétés savantes. Amica academia, sed magis ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 187 amica veritas. Je proteste d’avance de mes bonnes in- tentions , et j’adjure l'honorable président de l’Académie d'Aix, et les autres membres ici présents, de croire que je ne veux faire ni personnalités, ni allusions malignes. Honni soit qui mal y pense! Les Sociétés savantes en général, et celles d’Aïx en particulier, entretiennent leur feu sacré dans un sanctuaire impénétrable aux yeux des profanes. Il faut être au moins vestale pour approcher de l'autel; les initiés seuls pénètrent aux nouveaux mystères d’Isis. Comme des alchimistes du moyen-âge, les académiciens ne fabriquent de l'or (du moins il faut supposer que c’est de l'or) et ne font de la science que pour eux ei leurs amis; hors de leur église point de salut! La publicité fatiguerait leurs yeux habitués à l'obscurité. C’est trop de modestie ou de timidité , vraiment. Aussi, lorsqu'il se présente une occasion solennelle, comme celle-ci, de répandre la science acquise et de Parborer comme un fleuron à sa couronne, on voit des Sociétés savantes mettre la lumière sous le boisseau, et, abdi- quant leur rôle d'initiative, déserter le champ de bataille à l'heure du combat. — C’est le moment de se montrer ; sauvons-nous ! — Il y a séparation complète, de corps et de biens, divorce dans toute Ja force de l’expression, entre l’Académie et la presse. Jamais les journalistes n'ont eu l’insigne honneur de siéger sur les doctes fau- teuils. J'ai connu pourtant ici des publicistes qui ne manquaient pas de talent ; les uns avaient remporté plu- sieurs fois les prix académiques ; les autres , après s'être fait un nom par leur plume , occupent aujourd’hui des positions élevées dans l'administration , les arts, la lit- térature ou le journalisme. L’infusion du sang actif de la presse dans les artères glacées de l’Académie eût pu lui 188 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. rendre quelque chaleur. Peut-être serait-il résulté de ce rapprochement un mariage de raison, sinon d'amour , qui aurait porté d’heureux fruits. Mais le dieu bienfai- sant qui préside à ces hymens , ordinairement féconds, n’a pas encore soufflé son influence , et il nous est pé- nible de constater que léloignement et la démarcation sont aussi prononcés que jamais. Les académiciens persé- vèrent à rester enfermés dans leur chrysalide, et les journalistes , légers comme de vrais papillons qu’ils sont pour la plupart, piquants comme des guêpes ou pla- giaires comme des frelons , continuent à voleter de çà de là, composant rarement du miel avec les sucs qu’ils bu- tinent dans toutes sortes de fleurs. Cet isolement réci- proque, préjudiciable aux deux institutions, fait que leurs efforts sont stériles. L'union, que nous appelons de tous nos vœux, rendrait des services importants ; elle donnerait, sans doute, de la science aux journalistes, de l'initiative, de l’impulsion, de la publicité enfin aux travaux des académiciens. Quel moyen peut-on indiquer pour associer les ef- forts des Sociétés savantes et ceux de la presse dépar- tementale ? Je ne garantis pas la solution que je vais avoir l'honneur de proposer comme infaillible ; mais elle serait du moins l’acheminement vers une solution meilleure , le trait-d’union jeté, comme un pont, entre ces deux ré- pulsions sans cause, qui paralysent d'excellentes inten- tions et des tentatives dignes d’un meilleur sort. Que l'Académie donne la main à la presse, et la presse à l’Académie. Jusqu'à présent, les plumes savantes ont dédaigné de verser une goutte d’encre sur le papier tou- jours avide du journal, Elles ont semblé craindre de pro- diguer leurs connaissances en les popularisant par la voix » ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 489 de la publicité. Les mémoires, les notices, sont les seules bulles par lesquelles leur quasi-infaillibilité fait connaître à la république des lettres (il y a encore une république des lettres pour elles) que l’oracle a parlé et que des pa- roles fatidiques sont sorties du. trépied sacré. Pourquoi cette obstination à se faire brocher tout vif et à se con- damner à la réclusion de l’in-8°, ou de l’in-12 ? Pourquoi ne pas répandre, urbi et orbi, comme une véritable bénédiction, toutes les belles choses que vous savez ? Pourquoi ne pas franchir l’enceinte du sacro-sanctum académique, pour vous mêler au mouvement de l’époque, pour faire fraterniser votre érudition solitaire avec les improvisateurs et les vulgarisateurs de la presse ? Brisez donc les bandelettes égyptiennes retenant les aromates qui embaument vos œuvres ; ouvrez les pyramides , afin que notre siècle vous y contemple ! Tout le monde ga- gnerait à cette heureuse révolution. La science y trouve- rait son avantage, et l'instruction des masses en tirerait le plus grand profit. Votre Californie serait moins inhos- pitalière, et votre Australie deviendrait plus accessible aux explorateurs qui cherchent les filons aurifères dont vous vous êtes constitués les génies souterrains. Les journalistes, pouvant mettre le pied dans le profond sanctuaire où vous brûülez un encens perpétuel, essaie- raient, en présence de l’arche d'alliance, de cimenter une union durable. Arborant votre blason traditionnel de la science sur leur bannière toujours flottante , ils mar- cheraient en avant, sous ce nouveau labarum, où chacun verrait briller la devise triomphante : Hoc signo vinces ! Cette lecture donne lieu à quelques observations de M. P.-M. Roux, qui déclare que, comme secrétaire de la 490 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Société de statistique et comme organisateur des Congrès Aixois, il a rencontré, chez tous les journaux du Midi, l'accueil le plus sympathique et le plus prévenant. Il rend surtout hommage à la Gazette du Midi, de Marseille, et à Abeille du Midi, d'Aix, qui est le journal officiel de toutes les Sociétés savantes et artistiques de la Provence. M. le Président coñstate qu’en thèse générale, et à part quelques heureuses exceptions, les Sociétés sont moins empressées que les journaux de propager d’utiles con- naissances. Il adhère aux idées de M. Gaut et appelle de tous ses vœux une union qui serait féconde en excellents résultats, autant en province qu’à Paris. Abordant ensuite les questions 16, 17, 18 et 19, M. de Caumont demande , avec le programme : « Quelle part les Sociétés savantes ont-elles prise dans « la direction du goût, en ce qui touche à l’architecture, « à la sculpture et à la peinture décorative? Ont-elles « publié de courtes instructions, appropriées aux besoins « des localités? | « Cette mission des Sociétés savantes, dans le but de « contribuer à l'assainissement du goût, ne serait-elle « pas un moyen d'obtenir une plus grande popularité et « de nouveaux titres à la reconnaissance publique ? « Les Sociétés de la circonscription se sont-elles pré- « occupées des questions relatives aux moyens de relever « les études littéraires et d’assurer les corrections de la « forme ? « Quels efforts ont été faits, dans la circonscription, « pour augmenter la mise en circulation des publications « académiques ? » | M. le docteur Payan, président de l’Académie d'Aix, ASSISES SCIÉNTIFIQUES DE LA PROVENCE. A9 répond que le corps qu'il représente s'occupe aves solli- citude de toutes les œuvres d’art qui lui sont signalées, et nomme souvent des commissions chargées de présider à des fouilles archéologiques. M. de Caumont voudrait que chaque Académie encou- rageât les artistes du pays et ne laissàt dresser aucun plan, commencer aucun travail considérable, sans l'avoir contrôlé. Quand les intérêts artistiques d’une contrée sont en jeu, les corps savants doivent , avant même d’en avoir été saisis, prendre l'initiative pour approuver le bon et critiquer le mauvais. Si les Académies s’occupaient ainsi du bien général, elles remonteraient dans l'opinion et seraient considérées partout comme des associations utiles ; une sorte de popularité s’attacherait à leur exis- tence, comme cela est arrivé dans plusieurs villes, dont les académiciens ont cessé de s’occuper exclusivement d’études spéculatives pour entrer dans les détails pra- tiques de la science et de l’art. M. de Garidel prend la parole en ces termes : L'Académie des sciences, agriculture, arts et belles- lettres d’Aix publie tous les ans, après sa séance pu- blique , le compte-rendu de ses travaux qui est répandu dans le pays et envoyé aux diverses Sociétés savantes qui sont en correspondance avec elle. Elle publie, de temps en temps , un volume de 400 à 500 pages , contenant des mémoires sur des sujets histo- riques, d'archéologie, d'agriculture, d'histoire natu- | relle, de littérature. Ces volumes sont actuellement au nombre de six. | | Parmi les articles qu’ils renferment , nous citerons : 1°. Une dissertation sur'les reliques des anciens 492 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Provençaux, par M. l'abbé Castellan, professeur d’his- toire ecclésiastique à la Faculté de théologie ; 2°. Une notice sur l’église de Notre-Dame de la Feds, ancienne métropole d'Aix, par le Même; 3°. Plusieurs Mémoires archéologiques de M. de Saint- Vincens; L°. Une notice sur la constitution géologique du bassin houillier du département des Bouches-du- Rhône, par M. Blavier ; 5°, Recherches sur une inscription romaine muti- lée, rétablie par M. Marcellin de Fonscolombe ; 6°. Recherches historiques sur les fêtes de la Ta- rasque à Tarascon, par M. Porte ; 7°. Un mémoire sur les insectes nuisibles à l’agri- culture, principalement dans le midi de la France, par M. Hippolyte de Fonscolombe ; 8°. Un mémoire sur la position de la ville d'Aix, avant sa destruction par les Sarrasins, par M. Rou- chon-Guignes , conseiller à la Cour impériale ; 9°. Recherches sur les limites terriloriaies d'Arles, d'Aix et de Marseille, sous la période romaine, par M. Michel de Logui ; | 10°. Une notice sur l’église de St.-Jean de Malte à Aix, par M. l’abbé Maurin ; Ac. Calendrier de flore et de faune pour les en- virons d'Aix, par M. Hippolyte de Fonscolombe ; 49°. Un mémoire sur les bas-reliefs gaulois trouvés à Putremont, par M. Rouard, bibliothécaire de la ville; 13°. Observations sur le reboisement des montagnes et des terrains vagues dans le département des Bouches-du-RRône , par M. Castagne. L'Académie d’Aix a accordé des primes d’encourage- ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 493 ment pour l'invention et le perfectionnement des instru- ments aratoires. Une commission nommée par elle a suivi diverses expériences et étudié plusieurs questions relatives à agriculture dans nos contrées. M. Vallet, conseiller à la Cour impériale, membre de cette commission, fit, en 1847, sous un nouveau mode d'irrigation, un rapport dont l’Académie vota l'impression pour le propager. Elle offrit une prime d'encouragement à ceux qui voudraient en faire l'essai, M. Vallet a fait, dans la séance du 28 mars 1854, un autre rapport sur la pratique du drainage que l’on pou- vait appliquer à diverses localités de nos contrées, et no- tamment dans la commune de Foz. La commission s’est occupée de la maladie de la vigne et de celle des pommes de terre. M. Vallet a fait encore des rapports à ce sujet. Plusieurs de ses membres ont dirigé et suivi les fouilles faites, il y a quelques années, sur divers points de l’em- placement de l’ancienne ville romaine, où l’on a découvert des débris d’antiquités, qui ont donné lieu à d’excellents rapports par M. Rouard. Quand il y a eu dans une commune peu riche des répa- rations à faire à un monument qui mérite d’être conservé, elle y a contribué dans les limites de ses faibles ressources. C’est ainsi qu’elle a fait dernièrement pour la chapelle de St.-Blaise, dans la commune de St.-Mittro, monument remarquable du moyen-âge. L'Académie a mis au concours beaucoup de questions très-intéressantes pour le pays. Sans remonter plus haut que quinze années, nous indiquerons divers sujets de prix proposés par elle. h94 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. 4°. De l’art chrétien en Provence, pendant le moyen- âge. 2°, De l'administration des communes en Provence, pendant le moyen-âge. 3°. Quel est, en Provence, le bail le plus avantageux ; est-ce le bail à ferme ou le baïl à mégerie ? &°. Quel est le mode le plus propre à employer pour que les travaux d'intérêt public soient perfectionnés sans détourner les bras de l’agriculture et du commerce ? 5°. L’éloge de Gassendi. 6°. Étudier les meilleurs moyens qu'il y aurait à em- ployer pour procurer, dans un bref délai, à la ville d'Aix une plus grande quantité d’eau que celle dont elle jouit. 7°. Rechercher quelles sont les variétés de vignes ac- tuellement cultivées en Provence; déterminer celles qu’il serait utile d'introduire et de propager. L'Académie a presque toujours été assez heureuse pour pouvoir accorder le prix ou tout au moins un encoura- gement. M. Gibert demande la parole pour présenter quelques renseignements relatifs à l’école de dessin d’Aix, qu’il dirige. | Cette école, dit M. Gibert, a été fondée par Honoré Armand , duc de Villars, gouverneur de Provence, en 1771. Les cours que l’on y faisait eurent à subir une interruption depuis les premières années de la Révolution jusqu’en 1803, époque à laquelle elle fut réouverte sous la dénomination d’école centrale, et, plus tard, d'école spéciale , pendant administration municipale de M. Lal- lier, maire de la ville. Depuis, cet établissement n’a pas cessé de prospérer ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 1195 et s’est toujours soutenu à la hauteur qu'exigent les arts du dessin, appliqués principalement à l’industrie. Le Gouvernement n’a pas cessé de La patronner d’une ma- nière toute spéciale, et récemment, son Excellence le Ministre d’État l’a dotée d’une série de beaux plâtres, qui est un complément de la riche collection qu’elle devait déjà , ainsi qu’un grand nombre d’autres modèles, à la munifieence du Gouvernement. Le nombre des jeunes gens qui en suivent les cours’ a toujours été en progrès depuis un certain temps, et environ deux cents inscriptions sont portées annuelle- ment au registre des élèves de l’école. La population ouvrière de la ville et des communes environnantes y trouve les ressources nécessaires au per- fectionnement des professions qu’elle exerce. Quelques intelligences, plus aptes aux arts libéraux, y reçoivent les principes de la peinture et de la sculpture : sous ce rapport, c’est une des écoles de France qui fournissent le plus d'artistes, et un grand nombre d’entr'eux occupe en ce moment un rang distingué dans les arts. L’Administration municipale patronne et encourage tous les élèves de cette école ; et, tous les deux ans, elle leur distribue libéralement des récompenses. Elle accorde même des gratifications obtenues par des concours pour le complément de l'étude des beaux-arts , à Paris, dans quelques organisations d'élite qui lui sont signalées. | Cette école est régie, sous la surveillance d’une com- mission administrative, par un directeur, premier pro- fesseur chargé de l’enseignement en général, par un professeur de sculpture et modelage et par un professeur d'architecture et dessin linéaire. 4196 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, L'enseignement est divisé, pour le dessin élémentaire proprement dit, en étude de la figure et de l’ornemen- tation en tous genres, et, pour les classes élevées , en études d’après l'antique et le modèle vivant. Pour le dessin linéaire, en tracés simples, lavis et principes d'architecture. Un enseignement particulier, où rentrent la perspective et l'anatomie appliquées , est donné au petitnombre d’élè- ves qui s’adonnent à la peinture et à la sculpture. La 18°, question du programme , relative aux moyens de relever les études littéraires, est traitée par M. Masse dans un savant mémoire. L’honorable membre recom- mande beaucoup les recherches surles origines du langage comme devant faciliter les études classiques. Son travail fort étendu se termine par d'excellentes considérations sur la littérature populaire de nos jours et sur la néces- sité de revenir à la moralité des traditions d'autrefois. M. le Président appelle ensuite l’attention de l’Assem- blée sur la 20°. question : « A-t-on étudié les anciennes « coutumes de la circonscription ? » il pense que ce point de l’histoire locale a dû être élucidé par les professeurs de l'École de droit de cette ville, M. le docteur Payan signale les travaux de M. le con- seiller Rouchon-Guignes, sur l’ancienne constitution provençale. M. de Garidel dit un mot d’un livre publié par M. Charles de Ribbe sur le même sujet. ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 4197 SÉANCE DU 3 SEPTEMBRE. (Présidence de M. Léon De GARILEL.) La séance de clôture des Assises scientifiques à Aix, est tenue à l’issue de la séance du Congrès archéologique. M. de Caumont prie d'occuper le fauteuil de la prési- dence M. L. de Garidel, membre de l’administration municipale, qui représente aux Assises M. le Maire d’Aix, retenu au Conseil général, Sont présents en outre au bureau : MM, d’Amoureux, Henri Talon, Gaugain, trésorier ; Gaut et Berluc de Pérussis, secrétaires, ce dernier tenant la plume. Les procès-verbaux des deux précédentes séances sont lus et adoptés. M. Jauffret, agronome aixois et inventeur d’un guano artificiel, produit des échantillons de son engrais et des ré- sultats qu’il en a obtenus. M. Gaut, secrétaire, donne lec- ture d’un exposé soumis par M. Jauffret à l’examen de l’As- semblée. Voici quelques-unes des formules de M. Jauffret : Composition du quano-poudrette pour fumer un hectare de terre, : Mettez dans une cornue : DIE à € 0e e « y + «OU HUCE OU NON. Engrais fabriqué par M. Jauffret 5 kilogr. Remuez cette composition, avec laquelle vous arroserez 100 kilogr. de crottin de cheval. Réduisez en poudre : 50 kilogr. de sel de cuisine; 10 kilogr. de sulfate de fer; et 100 kilogr. de chaux. 1198 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Faites absorber ces deux compositions à 400 kilogr. de terre de grand chemin ou autre, et, dès qu’elle sera sèche, on pourra s’en servir. Cette poudrette est préférable à tous les meilleurs en- grais ; l'avantage immense qu’elle a sur tous les autres fumiers, c’est que l’agriculteur peut la fabriquer lui- même et sur place ; il y a pour lui économie d’achat et de transport. Cet engrais peut servir à fumer non-seulement les terres destinées à porter du blé, des légumes, etc. ; mais, en poudrette, les prairies, les oliviers , les vignes et les arbres fruitiers. | Pour fumer 1 hectare de terre, le prix de revient de la poudrette Jauffret n’est que de 40 fr. M. le Président adresse des remerciments à M. Jauffret, pour sa communication. M. de Caumont, en accueillant le projet de M. Jauffret sous toutes réserves, l’encourage dans ses utiles travaux. M. de Caumont résume les travaux de la session ; il fait ensuite ses adieux, avec sa bienveillance ordi- naire, à tous les membres de la réunion, et leur donne rendez-vous, soit aux séances qui vont être continuées à Avignon , soit aux différents congrès qui se réunissent chaque année sur divers points de la France. M. de Garidel, comme représentant de la ville et de l'Académie , remercie avec chaleur M. de Caumont de sa visite au milieu de nous, et de l’impulsion active que sa parole a donnée aux travaux de la session. L'Assemblée se sépare sous l’impression de ces senti- ments, et témoigne tout entière à M. de Caumont combien elle a été touchée de son zèle et de son affabilité. Les Secrélaires, GaurT et Ch°", BERLUC DE PÉRUSSIS. ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 199 ASSISES SCIENTIFIQUES TENUES A AVIGNON, Les 4, 5 et G septembre 1855. SÉANCE DU 4 SEPTEMBRE. ( Présidence de M. le docteur P.-M. Roux, sous-directeur de l’Institut des provinces. ) Le 4 septembre 1855, à 2 heures. après midi, a été tenue la première séance des Assises scientifiques d’Avi- gnon, dans une des grandes salles de l’'Hôtel-de-Ville, que M. Pamard, maire d'Avignon, en témoignage de ses sympa- thies pour les arts et les sciences, s’est empressé de mettre à la disposition des membres de l’Institut des pro- vinces. Ge beau palais, tout nouvellement bâti, conserve toujours au milieu des splendides constructions moder- nes, son élégant beffroi du XV°, siècle ( voir p. 500), qui semble protéger la ville et proclamer la puissance de cette cité , encore entourée de ses murailles crénelées. La séance s’est ouverte sous la présidence de M. le docteur P,.-M. Roux, de Marseille, sous-directeur de l’Institut des provinces pour le sud-est de la France. M. Roux a cédé vers la fin de la séance les honneurs du fauteuil à M. de Sales , proviseur du lycée d'Avignon. A cette docte assemblée ont assisté, entr’autres nota- bilités, M. de Caumont, directeur-général de lInstitut des provinces ; M. Charpenne , conseiller de préfecture ; M. le docteur Yvaren ; M. Jules Courtet, qui ont pris place au bureau. M. le Président, après avoir désigné pour secrétaires < = ju SE 16 4 A OAIITLUT TS ur À ane An MIT PES ES) us era Il | AN AXE rt ï nt = : qe 3 TILL ENS r vY dl dial ll ï au 4 Æ \ RL AE L mx r- qu M on — J ser x es PARTIE SUPÉRIE ! J Ve Petit di URE DU BEFFROI D'AYIGNON. ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE, 501 MM. Valère Martin et le docteur Michel, dépose sur le bureau une lettre de M. le comte de Montlaur, membre du Conseil général de l’Allier, dans laquelle cet honorable membre regrette de ne pouvoir participer aux Assises scientifiques de la bonne ville d'Avignon, où, dit-il, tant d’intérêtset tant de précieux souvenirs lerattachent encore. M. 1 Président témoigne la satisfaction qu’il éprouve de voir dans cette enceinte une réunion d’élite, qui daigne apporter son concours de lumières et d'expérience à cette solennité. | | M. Valère Martin, de Cavaillon, demande la parole et s'exprime ainsi : | MESSIEURS, « I ya bien long-temps que notre département n'avait été témoin d’un spectacle si imposant ; et, l’on se de- mande pourquoi une réunion scientifique est chose si rare dans sa capitale, pourquoi elle paraît presque étrange dans la Rome française. H serait difficile d’ex- pliquer cette apparente anomalie, sans jeter préalable- ment un coup-d’æil rétrospectif sur la situation toute exceptionnelle de notre pays. —Ce coup-d’œil sera rapide. « On sait de quelle réputation jouit , dans le cours du moyen-âge , l’université d'Avignon, qui attirait auprès d’elle les célébrités françaises et étrangères. La science y était tellement encouragée que des titres de noblesse étaient attachés au doctorat, Vers la même époque, Orange eut aussi son université avec ses immunilés et priviléges. Au milieu du XVII. siècle, Avignon vit se fonder, sous les auspices du vice-légat Conti, PAcadémie des Émulateurs, laquelle comptait parmi ses membres le docte évêque Suarès, le jurisconsulte Benoît , le saty- rique Sorbière ; mais Pémulation lui manquant avant un 502 “INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. quart de siècle , l'Académie s’éteignit avec elle. Honteux de cette déchéance , quelques amis des sciences et des lettres tentèrent , à diverses reprises, de ressusciter des associations qui n’augmentaient pas peu la gloire du pays. Leur zèle ne rencontra que des velléités ; rien ne prospéra. «Au commencement de ce siècle , quelques hommes se rencontrèrent dans cette ville, qui, pleins d’une noble ardeur, et secondés par M. Pelet, préfet du dé- partement , parvinrent à constituer l’Athénée de Vau- cluse. Au nombre des fondateurs figuraient le savant Calvet, l’abbé de Saint-Séran, H. Morel, Sabatier de Cavaillon, les docteurs Guérin, Voulorme et Faucard (dont le nom s'associe en tout temps au mouvement scientifique). Le poète Alfiéri voulut compter sur le catalogue de cette association; et ce ne fut pas le moindre honneur de celle-ci. En quinze ans, l'Athénée était à bout d’haleine. Avant qu'il expirât, on essaya de le vivifier en le baptisant d’un nouveau nom, l’Académie de Vaucluse. Nous ne pensons pas que l'expédient ait réussi parfaitement; en effet, si l'Académie existe, elle ne respire que par les poumons de son honorable secrétaire qui, toujours la plume au poing , attend tou- jours pour agir une manifestation du corps dont il est l'organe. Nous régretions que cet organe, si intelligent et si dévoué, ne soit pas au service d’un corps plus animé. « Un jour aussi, se souvenant de son université, Orange vit ses hommes d'étude répondre à un appel généreux et former une société académique. | « L'Annuaire de 4840 nous apprit son existence, son silence nous fait présumer sa mort. | « Déjà, avant la chûte de l’Afhénée, Cavaillon, fière de son glorieux passé , réunissant ses littérateurs et ses artistes, avait fondé, sous la poétique impulsion de M. de ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 503 Sigoyer , l’Académie montcavienne, dont les séances pétillantes de gay-saber se. tenaient sur cette colline du Caveau que gravit plus d’une fois le chantré de Vaucluse, lorsqu'il venait visiter son illustre ami, Philippe de Cabassole, et où s’inspira Lhospital...: Que sont devenues toutes ces associations, et d’autres peut-être, dont la réputation n'est pas venue jusqu’à moi ? Toutes ont passé comme un éclair plus ou moins vif. Une seule chose reste, ce sont les efforts si souvent renouvelés pour leur résurrection , lesquels protestent contre l’injuste reproche que l’on pourrait élever contre nos goûts et nos tendances. Cependant à quelle cause faut-il attribuer la brièveté de ces existences? Voulez-vous connaître mon opinion sur ce point, Messieurs, la voici: Nous aimons la science ; cela est certain. Mais, avouons-le sans détour , cet amour est trop souvent enrayé par un autre , celui du far-niente, ou, si vous me permettez de formuler ma pensée d’une manière plus crue, nous sommes trop paresseux. Ce que nous n’avons pas honte de faire, n’ayons pas honte de le dire. Nous sommes “en face de juges trop généreux pour que la franchise ne nous soit pas profitable, pour qu’une confession sincère ne provoque pas de leur part une sincère absolution. Oui, Messieurs, c’est la paresse qui a tué toutes nos utiles associations; c’est elle qui a étouffé toutes nos nobles résolutions. Au reste, toute la faute ne doit pas être imputée à nous seuls. Nos pères nous ont transmis le mal; et, les accuserions-nous trop sévèrement si nous considérions dans quel milieu ils ont vécu ? « En effet, quoi de plus propre à favoriser la paresse que cette forme paternelle qui régissait le Comtat? La paix, la paix c'était le but du gouvernement papal; et 504 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, ce but, il l’atteignit,. La conquête et l'oppression lui répugnaient , et cet exemple portait ses fruits... Aussi, la cupidité, cette mère des révolutions, et la guerre, cette fille de la discorde , étaient-elles proscrites du sol pontifical.. Le comtadin, à l'esprit ambitieux ou à l’hu- meur belliqueuse , allait chercher fortune en France où il était , du reste, traité comme régnicole..… Les produits d'un sol richeet béni, d’une industrie douce et facile, suffisaient aux besoins de la population... L’impôt ne prélevant presque rien sur les ressources des sujets, ne venait point altérer leur amour pour le souverain. Nulle conscription ne provoquait les larmes de la famille unie en arrachant le fils au toit paternel. La disette pesait-elle une fois sans conséquence sur le pays, le Père commun des fidèles ouvrait ses trésors à ses enfants; sa bourse était, pour ainsi parler, la bourse commune. Un pareil système d'administration ne pouvait qu’enfanter des mœurs douces... Dix hommes de maréchaussée suffisaient à la capitale pour prêter main forte à une justice peu laborieuse. Cent-cinquante hommes, tant d'infanterie que de cavalerie, composaient l’armée papale, armée toujours prête à se porter sur tous les points de la fron- tière menacés au-dehors, et à comprimer toute insurrec- tion au dedans; mais ne se portant nulle part, parce que nulle révolte et nulle invasion n’était à craindre. Cette milice était tellement convaincue qu'elle n’était pas faite pour le bivouac, que ses officiers usaient plus de fourreaux de parapluies que de fourreaux d’épées , ‘et que les soldats ne quittaient guère leur lit de camp que pour présenter les armes sur le passage de quelque cardinal , d’où cette locution proverbiale : c’est un soldat du pape ! inventée par les Français, dont le service militaire ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 505 élait infiniment moins commode... Ce serait abuser de votre patience, Messieurs , que d'étendre ce tableau. II vous expliquera suffisamment sous quelles influences s’est développée, outre mesure , chez les Comtadins, la tendance méridionale au far-niente. C'est cette puis- sance qui a contre-balancé toujours nos efforts vers le travail ; c'est elle qui nous a rejetés tant de fois dans l’ornière d’où, tant de fois, un louable élan nous avait fait sortir. Il est bien constaté que nos hommes d’intelli- gence ne sont pas des hommes d'étude, et c’est à peine si, parmi les nombreuses célébrités comtadines, l’on pourrait citer quelques travailleurs d'exception. Parmi eux , il en est un dont je ne puis taire le nom : acadé- micien, polyglotte, archéologue , littérateur , il était en relation avec la plupart des notabilités scientifiques de l'Europe : c’est Joseph de Caumont. Qui eût pensé que: ce nom cher à la république des lettres, dans le siècle dernier , brillerait aujourd’hui d’un nouvel éclat dans le monde intellectuel, et qu’il serait porté par l’un des princes de la pensée qui vient hâter, pour nous, les progrès de la science en général et activer le goût de cette science en particulier dont la connaissance a déjà donné une base de certitude absolue aux récits de l’histoire, et dont les conquêtes précieuses sont autant d'arguments nouveaux en faveur de la véracité des écri- tures bibliques. « J'en reviens à notre péché mignon, mais briève- ment, car j'ai l'intention de faire son épitaphe. IL y a près de deux mois, M. le Président des Assises scienti- fiques vint annoncer qu’une session aurait lieu dans cette cité. Il comptait, avec raison, sur le concours de son collègue, le docteur [varen. Mais il était difficile, pour | 22 506 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. le secrétaire perpétuel de la défunte académie de Vau- cluse, de faire un appel au bon vouloir de ses membres décimés, errants et dispersés. La presse locale lui offrit, toutefois, sa publicité. Les programmes furent répandus. . Mais on était aux eaux, on était aux champs, on était à l'exposition , je n’ose dire que l’on ….., parce que le mot non académique n’est encore qu’à la hauteur du feuilleton. La nouvelle fut accueillie avec une joie secrète, mais la paresse exerçait toujours son empire. L’on n’était pas en haleine, il faut le dire, et l’on manquait d’un centre. Dans ces derniers jours enfin, l’on s’est cherché et l’on s’est trouvé au dépourvu. C'était mal répondre à la faveur et à la bienveillance qui venaient à notre ren- contre : on l’a senti , le rouge a gagné les fronts, et l’on a voulu se mettre à l’œuvre ; mais il était tard. | « À l’activité infatigable, au savoir étendu de M, le Président des Assises scientifiques, le délai accordé pour la solution des questions posées paraissait plus que suffi- sant; mais il comptait sans ce désarroi complet, que nous venons d’étaler à notre honte, et sans ce mal invétéré que nous avons découvert à vos yeux. Je ne sais ce que nous réservent les ressources de mes com- patriotes, — sans doute plus que je ne crois ; — mais, quoi qu’il en soit , la mission des apôtres de la science aura produit un immense résultat parmi nous. Elle nous aura lavés , je l'espère , de cette inertie que j’appel- lerais presque le péché originel des Comtadins ; elle aura établi des relations fécondes entre les hommes qui ont le courage de l’étude; elle aura posé les bases d’un avenir plus heureux et plus profitable à la société. « Qu'ils reçoivent donc ici l'hommage de notre recon- naissance ces hommes qui, non contents d’avoir rendu ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 507 droite et facile une route naguère si ardue, sont venus encourager nos travaux par leur présence, nous exciter de la voix et soutenir nos pas chancelants. Répondons à leur aimable dévouement, suivons-les avec ardeur et confiance sur la montagne où ils nous guident , et là, inclinons nos têtes sous l’onde qu’ils ont puisée aux plus hautes, aux plus pures sources, et qui doit nous régénérer. Et, après cela, laissons le vulgaire sourire de pitié en nous voyant préférer une vieille médaille à l’or qu’il empile avec avidité, en nous voyant recueillir reli- gieusement quelques caractères à demi-effacés sur un fragment de stèle; et, consolons-nous en pensant que ce bronze oxydé servira peut-être à remplir une page demeurée blanche dans les annales indéchiffrables du monde ; que ce débris informe , avec ses hiéroglyphes, comblera peut-être une lacune dans ce grand jeu de palience, qu'on appelle lhistoire, et dont les archéo- logues cherchent avec persévérance à compléter le tableau. » Ce discours est vivement applaudi. L'attention de l'auditoire est ensuite ramenée , par M. le Président , sur toutes les questions qui ont été suivies d’après l’ordre indiqué au programme. M. Laur , ingénieur des mines, prend la parole, Con- duit par ses études et ses nombreuses recherches sur la géologie , il a constaté bon nombre de faits nouveaux ; il annonce que, dans les calcaires d’eau douce des terrains tertiaires des environs d’Apt, on a constaté l'existence d’une couche de soufre d’une épaisseur de 0". 50°, et d’une grande importance au point de vue industriel. 508 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Le soufre , dit-il, est subordonné à des veines de lignite qui appartiennent à un calcaire d’eau douce renfermant des rognons de silex. Le soufre a encore été trouvé dans d’autres localités , à Manosque principalement , subordonné à du plâtre , et à Ste.-Croix , dans les argiles. | Dans le bassin de Manosque , ajoute M. Laur , on a dé- couvert des couches schisteuses renfermant des débris de poissons et d’ossements divers , qui, traitées par la distil- lation, produisent des huiles pour léclairage , mais d’une odeur fétide. Ces couches sont en rapport avec des grès bitumineux et des calcaires très-bons pour la fabri- cation du bitume et des asphaltes. M. l'Ingénieur est entré, à ce sujet, dans des considéra- tions très-importantes relativement à ces divers gise- ments, et pense que la nouvelle huile obtenue sera peu coûteuse et pourra être utilisée avec avantage pour l'éclairage, non-seulement sous forme liquide, mais en- core à l’état stéarique. Les bitumes qu’on retire des cou- ches bitumineuses sont de qualité supérieure. M. Olivier, fabricant de produits chimiques, à Avignon, et ses associés, MM. Perret, père et fils, ont introduit dans le département de Vaucluse la fabrication de l’acide sulfurique , avec des pyrites cuivreuses provenant des mines de Chessy et de St.-Bel. Cette innovation, suivant M. Olivier , a permis de livrer à l’industrie des garancines d'Avignon, l'acide sulfurique à un prix beaucoup plus bas que celui auquel on pouvait se le procurer , lorsque le soufre seul était utilisé. L'emploi de l'acide sulfurique se faisait aussi dans de vastes proportions pour la fabrication des allumettes chi- miques ; il était donc avantageux d’en réduire le prix. ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 509 M. Olivier apprend que les mines de Chessy et de St.- Bel, appartenant à MM. Perret, de Lyon, fournissent depuis long-temps de grandes quantités de minerai pour la fabrication de l’acide fait dans leurs usines de Chessy, de St.-Fons, près Lyon, et de Loséroie , près Avignon. Les pyrites’, dit-il, après avoir été traitées comme mine de cuivre, sont traitées comme mine de soufre’, el, par ce moyen, on peut utiliser de grandes quantités de mine- rais qui auraient été perdues , sans le nouveau procédé * introduit par MM. Perret et ses coassociés. M. le docteur Roux demande à l’Assemblée si quelques observations météorologiques ont été faites dans le dé- partement de Vaucluse. M. le docteur Cade répond que M. de Gasparin s’en occupe depuis plusieurs années à Orange , et M. le docteur Yvaren ajoute que M. de Gas- parin serait parvenu à constater, assez long-temps à l'avance , les jours et heures où la pluie doit tomber, Sous le rapport botanique, M. Athénosy, administra- teur du musée d’Avignon , après avoir payé un juste tri- but d’éloges à la mémoire de M. Requien, constate que ce savant a fait faire un grand pas à la flore française , et que M. Palun , Son successeur par intérim, est à la veille de publier, dans l’Historique de la flore d'Avignon , _ quelques nouvelles plantes trouvées sur les collines du département et dans les contrées voisines. M. de Caumont pose la question relative aux cartes agronomiques et donne des explications à ce sujet. M. l'ingénieur Laur espère que la carte agronomique du département de Vaucluse pourra être terminée dans un an ou dix-huit mois; il dit que ce travail a dû être retardé par l’analyse préalable des différentes terres arables , et que cette étude est indispensable pour arriver à bien dé- 510 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. terminer la nature du sol et son genre de culture. M. de Caumont félicite M. l'Ingénieur d’un résultat aussi satis- faisant ; il y a bien peu de départements où le travail soit aussi avancé. M. Cade rapporte que le drainage commence à peine à être connu dans les environs d'Avignon : et que M. Fabre vient de l’introduire depuis quelques mois, à titre d'essai. M. Yvaren annonce que plusieurs fossés d'écoulement pratiqués dans les propriétés de M. Thomas ont trans- formé des terrains jadis incultes et marécageux en ter- rains aujourd'hui très-fertiles , et que, par suite de ces dessèchements salutaires , les habitants du voisinage, auparavant presque toujours atteints de fièvres intermit- tentes, sont actuellement dispensés de recourir au sulfate de quinine. Aussi espère-t-on les plus heureux résultats de l'établissement du canal de Carpentras , tant sous le rapport du sol que sous celui de la santé publique. M. le docteur Martin-Moricely propose l’usage de haies vives et l’emploi des palissades en bois morts et rappro- chés, pour garantir les terrains de l'invasion fatale du sable apporté par les crues d’eau des rivières, Rhône et Durance, et surtout par le vent qui règne si souvent dans nos localités. Cette proposition n’a pas été généralement approuvée ; et M. Valère Martin a fait observer que ces sortes d’abris , loin d’être un obstacle aux sables apportés par les vents, les retiennent en monticules en-deçà même des haies. | . MM. Cade et Athénosy fixent ensuite l'attention sur l'emploi des divers engrais appliqués aux plantes fourra- gères, et disent que, jusqu’à ce jour, le plâtre serait sans effet dans le territoire de Cavaillon. Pourtant quelques ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 11 membres assurent l'avoir vu employer avec succès, à la culture des vignes et des oliviers, en Provence, et quel- ques agriculteurs pensent que son usage préserve la vigne de l’oïdium. Cette assertion provoque des réclamations dans l'assemblée, M. de Caumont ne comprendrait pas comment le plâtre serait d’un effet nul sur les terrains d'Avignon, quand on signale d'autre part l’effet des ar- rosements avec l’eau saturée d’acide sulfurique, car cet arrosement doit avoir pour résultat de transformer des particules de chaux disséminés dans la terre, en gypse ou sulfate de chaux. | | M. de Caumont , auteur de la première carte agrono- mique en France, aborde une foule de détails très- intéressants sur l’étude du sol arable et de sa capacité productive ; il parle ensuite de la mécanique agricole, et donne la description de plusieurs machines employées en France pour battre les grains, avec lesquelles il y a facilité et économie d’argent et de temps , regrettant et faisant regretter que le département de Vaucluse soit encore privé de ces utiles inventions. L'heure avancée obligeant l'honorable orateur à sus- pendre cette importante question du programme, M. Roux fait hommage aux Assises scientifiques d'Avignon des ouvrages suivants, qui seront déposés à la Bibliothèque publique de la ville, savoir : Congrès scientifiques de France, 2 vol., année 1847; Congrès scientifiques de France, 2 vol. , année 1852; Annuaire de l’Institut des provinces, 1 vol. , année 18/6 ; | Essai sur la multiplication des poissons, 4 vol. ; Actes de la première session tenue à Aix en 1855 ; Réflexions sur l’ichtyogénie , 4 vol., 1851 ; 512 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Annuaire des cinq départements de l’ancienne Nor- mandie ; Réverie d’un solitaire sur les bords de la Meuse ou essai de tablettes liégeoises. La séance est levée à 4 heures 472. L'un des Secrétaires, D’, MICHEL. SÉANCE DU 5 SEPTEMBRE. (Présidence de M. pe CaumoxT. ) A deux heures après midi a été tenue la seconde séance des Assises scientifiques. M. de Caumont occupe le fauteuil de la présidence. M. le docteur P.-M. Roux, de Marseille , et M. Char- peinne, conseiller de préfecture de Vaucluse, siégent au bureau. MM. les docteurs Martin et Michel remplissent les fonc- tions de secrétaires. M. le docteur Michel tient la plume. M. de Sales, proviseur du lycée d'Avignon, adresse une lettre à M. le Président pour excuser son absence. M. de Caumont entre dans de nouvelles considéra- tions sur l’amendement des terres les unes par les autres, et sur la théorie des amendements appliqués aux ter- rains du département de Vaucluse. Il s'étend ensuite sur les résultats obtenus, dans diverses contrées , des arro- sages et des engrais de tout genre, que l’industrie agri- cole a le bon esprit d'utiliser depuis quelques années surtout. ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 543 M. Olivier constate, pour les terres cultivées en garances et en prairies, l'utilité de l’eau saturée d’acide sulfurique ; il conseille d'employer deux parties d’acide sur cent d’eau. M. Laur pense que, par les eaux ammoniacales retirées des schistes et inutilement perdues , on pourrait aussi obtenir un arrosage utile. M. de Caumont partage cette opinion. M. de Caumont pose ensuite les questions relatives à la silviculture ; il demande quels sont les conifères et les arbres nouveaux introduits en Provence. On répond que la plupart des espèces nouvelles (cèdre Déodora , pins divers , etc.) ont été introduites dans quelques parcs seulement ou dans des jardins , mais que les pins d'Alep et les chènes verts sont les espèces qui croissent le mieux sur les collines dénudées de la Provence. MM. Olivier et Athénosy attirent l'attention sur le sor- gho, qui s’acclimate parfaitement dans plusieurs départe- ments où on le cultive. Le sorgho ou sorghum est une plante du genre des Houlques, de la famille des grami- nées. On extrait de cette plante précieuse du sucre, de l'alcool et, dit-on, une matière colorante rouge ayant quelque analogie avec la cochenille. M. le docteur P.-M. Roux dit que c’est à Marseille que l’on a commencé les essais d’acclimatation du sorgho en France ; et que M. le docteur A. Sicard , secrétaire de la Société d’horticulture de cette ville, a communiqué le résultat satisfaisant des essais dont il s’est occupé le premier à cet égard. M. de Caumont ayant demandé des renseignements sur les nouveaux vers à soie apportés de la Chine et édu- qués à Marseille, M. Roux répond que M. Barthélemy, 514 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. conservaleur du muséum d'histoire naturelle de Marseille, pourra répondre à cette question, et qu’il a tenté avec succès l’acclimatation d’une espèce nouvelle du genre Bombix , qui se nourrit des feuilles du Palma-Christi et même de laitue. La Société d’acclimatation a, du reste, publié plusieurs renseignements à ce sujet. M. Guérin- Méneville a réuni des documents précieux sur ces expé- riences. M. le Curé d'Orange croit que , des branches et des rameaux des müriers , on pourrait retirer de la soie on du moins des fils semblables à ceux du lin. Un autre membre annonce que, dans l’Ardèche, on en a confec- tionné des tissus et fabriqué du papier. | M. l’abbé Paulet propose, pour remédier à la séche- resse des oliviers, de disposer sur la terre des couches, ou lits de petits cailloux, que l’on sait propres à entre- tenir Ja fraîcheur pendant l'été ; mais cette assertion est combattue comme pouvant contribuer à la mortalité de ces arbres pendant l'hiver ; et, à cette occasion, M. Athénosy apprend que l'olivier de Crimée, introduit en France par M. Requien, supporte facilement le froid ri- goureux auquel les autres succombent, et qu’il serait très- utile d'en propager l'espèce qui paraît très-productive en fruits et en huile. On passe ensuite à la question relative à l’éfat de la presse dans les départements. On répond qu’il serait dé- sirable que les journaux de province s’occupassent plus d'intérêts locaux , agricoles et scientifiques , afin d’éclai- rer et de diriger l'opinion publique. Ces idées sont parta- gées par l’Assemblée , et M. Yvaren cite deux journaux de la localité, la Kevuc des bibliothèques paroissiales et le Bulletin d'agriculture , qui sont entrés dans cette voie, ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 5Â5 déjà heureusement indiquée par un autre journal de mérite qui à cessé de paraître. Plusieurs membres manifestent le désir de voir res- susciter l’ancienne Académie de Vaucluse, dont les bien- faits seraient immenses pour donner l'impulsion aux sciences et aux arts; et, à défaut d’une Faculté des sciences, que l’on voudrait voir siéger à Avignon, PAs- semblée , d’après Pavis de M. de Caumont, émet à l’una- nimité le vœu que l’on crée à Avignon une école prépa- ratoire des sciences physiques et naturelles. M. Yvaren demande s’il n’y aurait pas avantage à réu- nir, dans un seul local, toutes les collections éparses dans la ville ? Les avis sont partagés. M. Jules Courtet voudrait les voir toutes classées dans l’ancien palais des Papes, pour former, dans ce beau monument, le plus beau musée de France, au lieu d’en faire une caserne d'infanterie. M. d’Anselme, président du muséum Calvet, exprime la pensée de voir la bibliothèque publique, qui est ex- posée aux inondations du Rhône , et, en tout temps, aux effets désastreux de l'humidité, transférée à St.-Martial, où le jardin, outre son agrément comme promenade, offrirait encore tout ce qu’on peut désirer pour l'étude de la botanique; mais l’honorable membre regrette de voir son projet entravé par la construction de la nouvelle rue de la Gare, qui menace de couper en deux l'édifice de St.-Martial ou muséum Requien. M. le docteur Martin-Moricelly prend la parole, et, dans une patriotique allocution, demande grâce pour St.-Martial et grâce pour le Jardin-des-Plantes qui , dit- il, au lieu d’être coupés par une ligne droite, pourraient être facilement contournés par deux lignes courbes, ainsi que cela s’est pratiqué dans plusieurs villes. Le Jardin 516 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. des-Plantes, par cette facile et heureuse modification, resterait au milieu du cercle comme une corbeille de fleurs, et cette oasis, agréable aux voyageurs, serait pour le citadin le plus délicieux prado. M. Moricelly publiera, à cet égard, une notice qui sera lue avec plaisir et pourra opérer quelques changements dans les projets de la ville. MM. Yvaren, Jules Courtet, citent MM. Imbert, Astruc, l’abbé Bonand , comme compositeurs distingués de musique religieuse à Avignon ; M. Valère-Martin pro- pose de supprimer l’épithète de religieuse. La séance est close à 4 heures. L’un des Secrétaires-généraux , D’. MICHEL. SÉANCE DU 6 SEPTEMRRE. ( Présidence de M, PAmarD, maire d'Avignon. ) La troisième séance des Assises scientifiques a été tenue, le 6 eptembre 1855 , à 2 heures d’après-midi, à l’hôtel-de-ville d'Avignon. À M. Pamard, maire de la ville d'Avignon, est prié par M. de Caumont d'occuper le fauteuil de la présidence. Siégent à ses côtés : MM. de Caumont, directeur de l'Institut ; Martin, vicaire-général à l’archevêché ; Athé- nosy , administrateur du musée, et Yvaren, secrétaire- perpétuel de l’Académie de Vaucluse. M. le docteur Michel, chargé de remplir les fonctions de secrétaire , tient de nouveau la plume. ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 517 Le procès-verbal est lu et adopté. | Grossie des notabilités des environs, la réunion est encore plus brillante et plus nombreuse qu'aux séances précédentes. Au milieu de cette assemblée d'élite, où règne un reli- gieux silence, M. le Maire prend la parole et, dans une chaleureuse allocution , fait ressortir toute l'importance et tous les bienfaits des Congrès et des Assises dirigés par l’Institut des provinces de France ; ces réunions éta- blissent des communications fructueuses entre tous les hommes de bien et de progrès qui répondent à cet _ appel patriotique. Il exprime ses regrets de n’avoir pu assister aux premières réunions , qu’il a encouragées de ses vœux et de ses sympathies (1). MM. Yvaren, Courtet, Canzon, Athénosy , et le doc- teur Michel, sont nommés membres d’une Commission chargée de la poursuite de l'exécution du vœu émis, à la demande de M. de Caumont, pour la création, à Avi- gnon , d’une école préparatoire des sciences physiques et naturelles , ainsi que de l’examen du plan proposé par M. Martin-Moricelly, au sujet de la conservation de St.- Martial et du Jardin-des-Plantes. M. Yvaren demande qu’il soit fait mention , au procès- verbal de ce jour, des progrès de la peinture sur verre à Avignon. L'assemblée s’empresse de réparer cet oubli et d'accorder à l'artiste, M. Frédéric Martin, des éloges bien mérités. M. Autheman (de Cassis) lit un mémoire et dépose sur le bureau un projet de plan tendant à introduire de (1) M, le Maire, membre du Conseil général, avait été obligé de faire un voyage à Lyon, à l'issue des séances du Conseil. 518 INSTITUT DÈS PROVINCES DE FRANCE. grandes améliorations dans les musées de France, et à les enrichir, par la photographie, de copies fidèles des originaux précieux que possède chaque musée. M. le docteur Martin donne lecture d’un article inti- tulé : Nouvelle théorie de la vision, sous le rapport physique et physiologique. MÉMOIRE DE M. MARTIN-MORICELLY. Deux théories sont en présence sur la manière dont s'opère la vision. L'une, plus ancienne et plus univer- sellement accréditée, admet que les rayons lumineux viennent se peindre sur la rétine ; l’autre, plus moderne et moins connue, qu'ils se peignent sur la choroïde. Quoique proposée par des auteurs d’un grand mérite, cette seconde théorie est la moins suivie, ou, si l’on paraît l'admettre , c’est plutôt comme une idée ingénieuse que comme l'expression d’une vérité démontrée. Entre ces deux hypothèses, j'adopte exclusivement la dernière. Je vais essayer de l’appuyer de preuves qui me semblent de nature à la mettre hors de doute; mais, avant d'aborder ce sujet, je crois nécessaire de pré- senter , sur les fonctions des nerfs , quelques considéra- tions générales. Les anatomistes et les physiologistes définissent les nerfs : les organes conducteurs du sentiment et du mou- vement. D’après cette définition, il s’ensuivrait que les nerfs n’ont pas d’autres fonctions , et cependant , lorsque les auteurs parlent de la vision, ils l’attribuent à l’ac- tion de la lumière sur la rétine ; s’il en était ainsi, le nerf optique , dont la rétine n’est qu'un prolongement, ne ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 519 serait plus simplement conducteur , il serait aussi ré- cepleur: ; il ferait exception aux autres nerfs , car aucun ne reçoit immédiatement la sensation du dehors, elle ne lui parvient que d’une manière médiate. Le nerf acoustique , par exemple, n’est pas en contact avec les ondes sonores; elles sont interceptées par une série d'organes tels que la membrane du tympan, les osselets de l’ouïe, le limaçon et autres. C’est dans les profondeurs de cet appareil si compliqué que s’accomplit le phénomène de l'audition; ou, pour parler un langage plus exact, le nerf acoustique, après avoir senti les ébranlements fibrillaires causés par le son et propagés jusqu'aux parois de l'oreille interne, transmet au cer- veau une sensation de laquelle résulte enfin l'audition, car c’est là et non ailleurs qu’elle s'opère. Donc le nerf acoustique n’est pas en communication immédiate avec l'air; on peut dire sans exagération qu’il est sourd ; il n’est qu’un simple agent de transmission. Le nerf olfactif ne charrie pas au cerveau les émana- tions corpusculaires des corps odorants ; leurs atomes impressionnent la membrane pituitaire, le nerf recueille la sensation et la transmet au cerveau. Les nerfs de la langue : glosso-pharyngien , hypoglosse et maxillaire inférieur, ne sont pas excités directement par les corps sapides ; ils en sont séparés par une mem- brane muqueuse et par l’épithélium pavimenteux , qui se détache parfois de la langue , à la suite d’affections mor- bides. Dans ce cas, la pulpe nerveuse se trouve presque en contact avec les substances sapides introduites dans la bouche, et néanmoins elle ne transmet plus que des sensations confuses et toujours douloureuses. On pour- rait en dire autant de tous les autres nerfs. 520 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Ces réflexions préliminaires bien comprises, je vais en faire l'application au nerf optique et à la vision, pour corroborer , par un ensemble de preuves , la théorie de Mariotte , de Brewster , de Strum et de Pouillet. La rétine est une sorte de lacis nerveux placé entre l’hu- meur vitrée en avant et la choroïde en arrière. Durant la vie , elle est transparente ; elle reste encore translucide , même après la mort. L'opinion généralement admise, ainsi que je l’ai dit en commençant, est que l’image vi- suelle venant se Et sur sa surface, donne la sensation de la vision. Je vais d'abord faire remarquer que la transparence de la rétine ne lui permet pas de servir de tableau aux faisceaux lumineux, et que ceux-ci doivent la traverser pour aller se peindre au-delà, Au fond de l'œil, un peu au-dessous et en dedans de l’axe visuel , les physiciens ont remarqué qu’il existe un point insensible, aveugle, qu’ils ont nommé punctum cæcum. Ge n’est pas un point sans étendue , ainsi que ce nom semble l'indiquer, mais un petit espace circu- laire, d’un diamètre égal à celui du nerf optique à son passage à travers la sclérotique ; à cet endroit , une sec- tion du nerf, perpendiculaire à son axe, donnerait exacte- ment la surface de ce petit eercle. On s’assure de sa po- sition, de son étendue et de son insensibilité à la lu- mière , par une expérience décrite dans tous les traités d’optique. Elle est concluante ; nous croyons inutile de la répéter ici. Nous devons donc admettre qu’au fond de œil ily a un espace sur lequel la lumière ne fait aucune impres- sion, et comme il n’y a pas un seul point sur lequel tombent les rayons lumineux qui ne soit tapissé par la ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 521 choroïde , excepté à l'ouverture qui donne passage au nerf optique, et que c’est là que se rencontre le cercle insensible de la rétine , il ne faut pas se presser de con- clure que cette expansion nerveuse n’est pas sensible dans ce point seulement , tandis qu’elle l’est partout ail- leurs. Cette explicalion rappellerait involontairement celle que Galilée, pris au dépourvu, donna évasivement aux fontainiers de Florence, lorsqu'il leur dit que la nature n'avait horreur du vide que jusqu’à 32 pieds seulement. On conclura, au contraire, que le nerf optique n'étant, comme tous les autres nerfs, qu’un simple agent de transmission , n’est pas doué de la faculté de recevoir l'impression des rayons lumineux sans l’intervention de la choroïde; d’où on sera conduit à admettre que ce dernier organe est l’agent immédiat de la vision; en un mot , les images se peignent sur la choroïde. Qui ne voit d’ailleurs que sa couleur et sa structure sont merveilleusement appropriés à cet usage. Semblable à l’étamage d’une glace sur lequel viennent se refléter les images des corps éclairés, la choroïde arrête parfaitement les rayons lumineux à l’aide de son pigmentum ; et si la théorie des ondulations de la lumière doit prévaloir, comme tout le prouve, sur celle de l'émission, nous dirons que les ondes lumineuses, réfléchies par la choroïde , y donnent naissance à des vibrations qui sont senties par la rétine d’où elles sont transmises au cerveau par le nerf optique. Ainsi sans la choroïde point d'image, c’est-à-dire point d'impression; sans le nerf optique et la rétine, point de transmission ; sans le cerveau, point de percep- tion. Partout , en effet, nous trouvons la rétine doublée, étamée par la choroïde , excepté à l'ouverture de la selé- rotique; mais aussi, nous l’avons fait remarquer, la vision 522 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. a lieu partout, excepté sur le point aveugle. L'absence de l’un des éléments de la vue fait ressortir l’impuissance de l’autre. Comme il ne peut se former d'image sur la petite surface du punctum cœcum , le nerf ne peut rien transmettre. Peut-on soutenir que, dans l’état normal, une portion de nerf soit paralysée et cela précisément à son centre, où la sensibilité doit être plus exquise qu'ailleurs? Si je ne me fais illusion, la non-existence de l’image sur la rétine au point correspondant au nerf optique , où elle est dépourvue de choroïde , prouve que l'impression ne peut avoir lieu que sur cette membrane; que, pour l’ac- complissement de ses fonctions, la rétine est sous sa dépendance, et que, par conséquent elle n’est, ainsi que le nerf optique , qu’un agent de transmission. Cest donc par sa face postérieure que la rétine sent, palpe les images photographiques de la choroïde, comme la main, pour me servir de la comparaison de M. Pouillet, sent les contours, le degré de poli des corps qu’elle touche. Pour compléter cette démonstration, j'ajouterai quelques faits qui se rattachent à la physiologie et à la pathologie. Quelques naturalistes ont observé que les albinos n’ont qu’une choroïde imparfaite et insuffisamment colorée en noir. Ils ont , avec raison, attribué à cette cause la défectuosité de la vue qui existe dans cette variété de l'espèce humaine. Blumenbach a remarqué que la vue devient plus faible, toutes choses égales d’ailleurs , chez les personnes dont les cheveux blanchissent , parce que la choroïde perd beaucoup de sa teinte foncée. Béer, Devalet d’autres ophthalmologistes attribuent , dans un grand nombre de cas, la perte de la vue à une ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 993 décroissance dans la sécrétion, ou à une altération du pigment choroïdien qu’on rencontre dans les personnes âgées dont les yeux affectent une teinte nébuleuse profonde que l’on a souvent prise pour la cataracte. L’amaurose , attribuée jusqu’à ce jour à la paralysie du nerf optique, peut donc également reconnaître pour cause l’insensibilité de la choroïde. On conçoit que, dans le premier cas, l'électricité puisse réveiller la sensibilité engourdie du nerf; cette modification devra échouer dans le second. On n’a pas donné, jusqu’à présent, une explication satisfaisante des contractions de l'iris, de l’achroma- topsie, des phosphènes, des éclairs qui jaillissent dans l'œil , en l’absence de toute lumière extérieure, par des compressions ou des chocs du globe oculaire. Je pense qu’on ne peut concevoir ces phénomènes qu’en admet- tant l’ébranlement des cylindres microscopiques de la choroïde, dont les vibrations ciliaires peuvent se com- parer aux ondulations des plaques sonores , rendues per- ceptibles à la vue par les belles expériences de Savart. RÉSUMÉ. — 1°. Les nerfs ne reçoivent pas directement _Pimpression des agents extérieurs ; 2°, Ils ne sont que des cordons de transmission ; 3°. Le nerf optique ne fait pas exception à cette loi générale ; 4°. La choroïde reçoit l'impression de l’image formée par les ondes lumineuses, et entre en vibration sous leur influence ; 5°. Le nerf optique palpe ces vibrations par son ex- pansion intrà-oculaire et transmet une sensation au cerveau ; 524 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. 6°. C’est dans le cerveau qu'a lieu la perception, c'est-à-dire, la vision ; 7°. Ce que nous disons de la vision peut s’appliquer aux autres sens ; 8°. Pour qu’une sensation soit complète, trois appa- reils sont indispensables : celui de réception ou impres- sion, celui de transmission et celui de perception ; 9°. Aucun de ces appareils ne peut se substituer à un autre , ni le suppléer ; 10°. Le punctum cæcum qui existe au fond de l'œil , est dû à l'absence de la choroïde en ce point ; la vision y est nulle, malgré la présence de la rétine. Après cette instructive lecture, M. d’Anselme revient sur le travail de M. Autheman, dont il saisit, pour ainsi dire , l’idée mère à vol d'oiseau ; il ne pense pas que la photographie qui, du reste, est appelée à de grands succès, puisse parfaitement reproduire tous les objets. Suivant lui, ceux en reliefs, les fonds obscurs des ta- bleaux, des gravures, et même les statues ne seront jamais bien imités, et la théorie de M. Autheman, quoique très-séduisante , ne saurait être admise en pratique. M. Pamard , embrassant la défense de la photographie à son enfance, qui mérite d’être soutenue, poursuivie , encouragée , lui prédit un avenir, peut-être lointain, mais très-prospère et très-brillant. M. Valère-Martin exprime le regret de voir se perdre, chaque année, les traces des anciennes coutumes locales. Autrefois, dit-il, nos pères étaient plus sages et faisaient imprimer chaque année , dans des livres publics, les us et coutumes de leur pays pour les transmettre à la posté- ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 595 rité; maintenant on les délaisse, on les laisse perdre, et bientôt même, privé de leur noble origine, le sièele futur les traitera de chimères. M. d’Anselme parle dans le même sens et déplore la négligence de notre époque, qui laisse perdre les an- ciennes légendes, des inscriptions importantes, de vieilles complaintes en divers idiômes qui, sans doute, tiennent à des faits importants, quoique éloignés. Chaque département, s’écrie-t-il, devrait se hâter de recueillir les anciennes traditions, car bien des témoins disparais- sent chaque jour de nos rangs. Les légendes jetteraient un grand jour sur l’histoire locale, et je crois pouvoir avancer, sans être paradoxal, que la plupart de nos vieilles chansons que les bonnes nourrices chantent au berceau de leurs enfants, nous arrivent des fils de Noé à la sortie de l’Arche , sauf le langage qui a pu se modifier à l'infini depuis le déluge. M. Pamard, président, est d’avis de colliger les lé- gendes , les complaintes et les vieux Noëls. M. Valère-Martin prend la parole pour appuyer la proposition de M. d’Anselme , et ajoute qu'elle a reçu un commencement d'exécution par la publication que prépare M. Séguin, avec le concours intelligent de M, Roumanille. C’est un recueil de Noëls, avec les airs originaux recueillis et gravés pour la première fois. Cette publication ne peut qu'être très-intéressante, au double point de vue de la littérature provençale et de l’archéo- logie musicale. Un fils de la Provence, M. Adolphe Dumas, envoyé par le Ministre de l’Instruction publique , se lève, et, avec une émotion bien visible, remercie l’honorable Assemblée au sujet des belles, bonnes et consolantes 526 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. paroles qu’il vient d'entendre relativement à la conser- vation des traditions, des légendes et des vieilles poésies populaires. « La noble mission qui w’est confiée , dit-il , a pour but de puiser dans vos musées, dans toutes vos bibliothèques et dans la tradition populaire , tous les chants populaires, toutes les poésies des baptêmes, des noces , des funérailles. » M. Dumas déclare que c’est l’in- tention du Gouvernement de montrer, en publiant ces documents précieux, le cœur et l’esprit de la Provence, berceau primitif des sciences, terre classique de la reli- gion du Christ , apportée dans ces belles contrées par saint Lazare et sainte Marte. A l’occasion d’une communication incidente, M. de Caumont réclame de nouveau au sein des Assises, comme il l’avait fait le matin au sein du Congrès archéo- logique, pour que les murs d’Avignon soient conservés et que l’administration n’autorise la destruction d'aucune de leurs parties. M. Pamard, maire d'Avignon, répond qu’il conservera les remparts et qu’il ne cessera de poursuivre son œuvre et ses efforts qui tendent à les faire classer sur la liste des monuménts historiques par le Ministre d’État de l'intérieur, afin d'obtenir des fonds pour leur entretien. M. Athénosy souhaiterait que la Mairie fit dresser un plan des envahissements opérés par les propriétaires des murs adossés contre les murailles de la cité. Il paraît certain que les propriétaires manquent de titres et qu'ils ont construit sans autorisation aucune. M. de Caumont prend la parole et renouvelle ses compliments à toutes les autorités de la ville, pour leur bonne hospitalité et pour leur concours si dévoué et si sympathique ; à tous les membres de l’Assemblée, accou- ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 527 rus du dehors pour assister à ces conférences; à M. le secrétaire du Congrès archéologique, Jules Courtet ; au secrétaire des Assises scientifiques, le docteur Michel, d'Avignon, et à M. le docteur P.-M. Roux, de Marseille, âme des grandes réunions scientifiques du midi de la France, parti le matin pour le Puy; à M.le docteur Yvaren et à M. Deloye, pour les soins qu’ils ont pris d'organiser les Assises. L’honorable membre termine, en faisant espérer que le Congrès scientifique de France pourra se réunir à Avignon, dans quelques années. L'Assemblée applaudit à ce vœu du Directeur de l’Institut des provinces de France: M. le docteur Yvaren, à son tour, prie MM. de Cau- mont, Roux, Gaugain, et tous les membres présents de vouloir bien agréer la faible expression de ses remer- ciments, pour le puissant concours qu’ils ont bien voulu apporter dans les travaux scientifiques de ces trois mé- morables journées, dont le souvenir restera gravé dans les esprits et les cœurs. La séance est levée à 4 heures et demie. Le Secrétaire, D'. MICHEL. Voici la liste des principaux membres qui ont assisté aux Assises scientifiques de Provence , soit à Aix, soit à Avignon : MM. AUTHEMAN (François-Victor ) , géologue à Cassis. ALBRAND. BEUF (Jean-Baptiste-François-Alban), membre ho- 528 MM. INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. noraire de la Société de statistique de Marseille , à Alger. BARTHÉLEMY-LAPOMMERAYE, directeur du muséum, à Marseille. BousquET, bibliothécaire de la Société de statistique de Marseille. BosQ (Paul-Jacques), antiquaire et géologue, à Auriol. BALTHASAR , antiquaire, à Arles. BERLUC DE PÉRUSSIS (Léon), à Aix. CHAPPLAIN , docteur en médecine. CAYOL (Stanislas), avocat. CosTE (Pascal), architecte. CLOT-BEY. CAUVIÈRE. CARPENTIER. D’AsTRos , à Marseille. DE PRAT (Jean), à Marseille. Le comte Auguste DE BRUNELLO, place des Car- mélites, à Aix. DE MONTAUBIN POUSSINEAU D’ESCARTS ( Gustave ), au château d’Abin. FLAvARD, docteur en médecine. FABRE (Augustin), juge de paix. FEAUTRIER,. HuBac, docteur-médecin, JULIANY (Jules), à Marseille. Lucy , receveur général, à Marseille. MARCOTTE, directeur des douanes et des contri- butions indirectes , id. MORTREUIL juge de paix, président de l’Aca- démie , id. ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 529 MARTIN DE ROQUEBRUNE , à Marseille. Masse (Étienne-Michel), à la Ciotat. NATTE, OLIVE MEINADIER (J.-E.-Auguste), membre de l’Académie du Gard. PROU-GAILLARD, négociant. PLANCHE, PIROUDY. SEGOND (Cresp. ). SAKAKINI, TEMPIER. L'abbé Timon DAvioL. TOULOUZAN. THIÉBAUT. Vazz (Benjamin), directeur de l'Observatoire, à Marseille. MOUAN , à Aix. ALPHANDÉRY, id. BARGÈS, adjoint, id. DE GARIDEL, id, Marquis DE LAGoY, id. DE SAPORTA , id. D’AMOREUX , id. DESVOYES , id, GAUT, id. GIBERT, id. GOYRAND , id. JIARD (Ph.), id. PAYAN, id, TAGUSSEL, id. Tassy, id. DE CAPDEVILLE , id. 23 280 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. YVAREN (Prosper), docteur en médecine , à Avi- gnon. DE SALES, proviseur du Lycée, id. MARTIN (Valère ), à Cavaillon (Vaucluse ). BASTET (Joseph), négociant , à Avignon. COURTET, ancien sous-préfet, id. ATHÉNOSY, docteur en médecine , id. CHARPENNE, secrétaire général de la Préfecture, id. MICHEL (Alexandre ), docteur en médecine , id. Touzer, docteur en médecine, médecin en chef de l’hospice civil et militaire, id. Boupin (Augustin), id. MARTIN-MORICELLY , docteur-médecin , id. LAUR, ingénieur au corps des mines, id. BERTON (Henri) , négociant , id, CADE, docteur-médecin , id. | GOUDAREAU (Émile) , administrateur du musée, id. OLIVIER (Jules), fabricant de produits chi- miques , id. DELOYE (Augustin), conservateur de la biblio- thèque et du musée, id. SEYMARD (Éléazar) , avocat, à Apt (Vaucluse). LAMBERT , Conservateur de la bibliothèque , à Car- pentras. SARDON, avocat, à Avignon. AYME, administrateur du musée , id. L'abbé POLETTE , curé d'Orange. . Davip, trésorier de la caisse d'épargne, à Car- pentras. BECHET , docteur en médecine , à Avignon. CLÉMENT (Adolphe), docteur-médecin, id. D’ANSELME , vice-président du musée , id. ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE. 531 ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA SAINTONGE , TENUES A ROCHEFORT-SUR-MER , Les 16, 17, 18 et 20 août 1855. SÉANCE DU 16 AOUT. (Présidence de M. l’abbé Lacurte, chanoïne honoraire, membre de l’Institut des provinces, etc.) La séance s'ouvre à 8 heures du soir, dans la salle dite du Salon. Sont appelés à prendre place au bureau : MM. le Sous- Préfet de l'arrondissement ; le Maire de Rochefort ; Auriol, sous-directeur des constructions navales, prési- dent de la Société d'agriculture , belles-lettres, sciences et arts de Rochefort; Boffinet père, lauréat de l’Académie de Bordeaux; l’abbé Person, secrétaire-général-adjoint de la XXIII°*.'session du Congrès scientifique de France: Dubois, docteur-médecin, secrétaire de la Société d’agri- culture, belles-lettres, sciences et arts de Rochefort. MM. Person et Dubois remplissent les fonctions de secrétaires. On remarque, dans la salle, MM. les directeurs du génie maritime et du service de santé; M. le Procureur impérial ; MM. les Membres de la Société d’agriculture, belles-lettres, sciences et arts de Rochefort; MM. les Professeurs et Médecin en chef de l’École de Médecine; M. l’Inspecteur-général de la marine; les membres du clergé et du barreau; des médecins, pharmaciens , né- gociants de la ville , etc. , etc. 552 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. M. le Président déclare la séance ouverte , et dans une courte allocution il s’applaudit d’avoir choisi la ville de Rochefort pour siége des Assises scientifiques de la Saintonge; l’Institut des provinces de France devait y trouver , dans les diverses administrations , des hommes graves et comprenant la mission qu’impose le savoir ; cette mesure permettant en outre à beaucoup d’hommes éclairés de prendre part aux Assises scientifiques dont un devoir impérieux les eût tenus éloignés. Il fait remarquer que, si les questions soumises, cette année, à l’étude des hommes spéciaux, paraissent moins brillantes, peut-être, que celles du dernier programme, elles n’en sont pas moins d’une haute portée, l’agriculture étant le plus solide fondement de la prospérité générale. Le concours de tant d’hommes éclairés , et la bienveillance de ladmi- nistration locale lui font espérer que la session de 1855 ne le cédera pas en résultats utiles à la session der- nière. Après cette allocution, M. le Président rappelle les questions portées au programme, et invite chacun à s'inscrire pour celle qu’il voudra traiter. M. Auriol s’inscrit pour la 41", question. MM. Boffinet père et Auriol parleront sur la seconde. Sur la 3°, M. Auriol présentera quelques observa- tions. | MM. Maher et Viaud s'inscrivent pour la 4°. M. Boffinet fils lira une note sur la 5°. M. l’abbé Lacurie donnera des éclaircissements sur toutes les questions qui n’auront pas été traitées, et prendra part aux discussions , s’il y a lieu. M. le Président donne la parole à M. Auriol. Le savant ingénieur lit un mémoire sur les machines à ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA SAINTONGE. 533 panification, établies à Rochefort, et sur leurs produits en biscuit de mer et en pain frais. Il décrit d’abord les machines qui ont été faites dès l’année 1834 par M. Aubouin, maître mécanicien dans l'arsenal maritime de Rochefort , et qui fonctionnait dans les trois grands ports de Toulon, Brest et Rochefort. Ces machines se composent d’un pétrin mécanique et d’un coupe-pâte. Le mouvement imprimé par la tangente au bord de la caisse qui sert de pétrin la fait tourner sur elle- même , pendant que deux agitateurs en fer et deux rou- Teaux cannelés , situés dans une position verticale, tour- nent, à la manière des laminoirs, en sens contraire l’un de l’autre dans le mélange de farine et d’eau chaude. Une fois le frasage et le pétrissage opérés , la pâte passe entre deux cylindres dégrossisseurs, puis entre deux cylindres finisseurs , qui règlent l'épaisseur de la nappe conve- nable pour la fabrication du biscuit. Le coupe-pâte est un cylindre particulier , dont la sur- face est divisée en seize compartiments ayant chacun la grandeur d’une galette de biscuit, et disposés sur deux rangs. Ces compartiments sont formés par des lames tran- chantes, et il existe, à l’intérieur , des broches pour per- cer la nappe à mesure qu’elle est divisée par les lames, dans son passage sous le coupe-pâte. Celui-ci peut suffire à trois pétrins et à douze fours contenant chacun cinq cents galettes de biscuit, qui pèsent 65 kilogrammes. Huit fournées de ces douze fours , par jour, produiraient donc 6,240 kilogrammes, résultat qui dépasse les besoins de la marine française. Mais il y a plus : un seul homme tournant la manivelle du coupe-pâte peut fournir trois galettes par seconde, et, par conséquent, cent huit mille par journée composée 53! INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. de dix heures. Chaque fournée étant de cinq cents ga- lettes, on voit que le coupe-pâte suffirait à deux cent seize fournées par jour de dix heures. En restant dans les ter- mes ordinaires, on obtient, par les machines inventées par M. Arbouin, une économie de main-d'œuvre de 70 °7.. En un mois et demi, on peut confectionner , dans chaque port, 8,760 quintaux métriques de biscuit, quantité suf- fisante pour dix vaisseaux de 1420 canons armés pour la guerre , pendant 430 jours, et qui, avec la complément réglementaire de farine, suffirait pour une campagne de six mois. | M. Auriol décrit une petite machine , de l'invention de M. Cacault, maître serrurier-mécanicien , à Rochefort. M. Cacault suppose le frasage fait, à l’ancienne méthode, par la force musculaire des ouvriers. Il reçoit la pâte fra- sée sur une plate-forme circulaire , qui tourne de gauche à droite pendant que deux rouleaux pétrisseurs tournent de droite à gauche. M. Auriol fait ressortir ce qui manque aux précédentes machines pour former un appareil complet de panification, et vient au système de M. Rolland qui a été établi, il y a environ un an, à Rochefort, par MM. Luc et Aisance. Il fait connaître l’origine et la préparation des levains, et donne tous les renseignements techniques sur le frasage, lecontre-frasage, le soufflage, la fermentation et la cuisson. Le pétrin à 16 lames de MM. Luc et Aisance, est mu par un homme placé à une manivelle ; pendant que la pâte s'écoule entre les grandes lames qui tiennent aux deux côtés du cadre, elle est étirée par les petites lames qui ne tiennent qu’au côté extérieur du cadre ; et ces petites lames, dit M. Auriol , forment la partie la plus ingénieuse et la plus neuve du nouveau pétrin. La dépense en com- ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA SAINTONGE. 535 bustible, dans le four à sole tournante, est de 65 cen- times de houille pour la première fournée, 40 centimes pour la seconde , 25 centimes pour la troisième , 20 cen- times pour la quatrième , 15 centimes pour la cinquième, en terme moyen 33 centimes. Dans les anciens modes de boulangerie, on consomme pour 4 fr. 70 c. de bois ou de fagots à la première fournée, 90 centimes à la se- conde , 70 centimes à la troisième , 70 centimes à la quatrième ; terme moyen : 4 fr. Le rapport composé des économies faites sur le combustible et sur la main- d'œuvre, entre le système Rolland et l’ancien procédé, est celui de 6 1472 à 4. M. Auriol fait la remarque que, si l’on cuisait d’une manière continue, le nombre des fournées , par 24 heures, s’élèverait à plus de 30 qui pro- duiraient 5,250 kilogrammes de pain. Quatre fours et quatre pétrins du procédé Rolland donneraient donc par jour 21,000 kilogrammes de pain, c’est-à-dire plus qu’il ne faudrait pour nourrir toute la ville de Rochefort. Un seul établissement suffirait pour chaque ville de France, et en y réunissant toutes les opérations de la meunerie et de la boulangerie, l’économie serait telle, qu’on ne paierait plus le pain dit de 4"°, qualité que 45 centimes, et le pain dit de 2°. qualité 10 centimes le demi-kilegramme. Cette 2e, qualité, qui renferme une partie de son, est, comme on le sait, la plus nutritive. Le repas d’un homme s’abais- serait de 40 centimes. C’est le prix de la ration en bouillie d'avoine telle qu’on la fait en Bretagne. M, Auriol indique la préparation de cette bouillie, qui est une nourriture saine , fortifiante et de facile digestion. C’est bien là assu- rément la vie à bon marché. Le mémoire se termine par des considérations sur la fabrication et la qualité du pain anglais , et sur la propo= N 536 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. sition faite par le célèbre chimiste Liébiz, d'employer au pétrissage du pain de l’eau de chaux , au lieu d’eau pure , pour fournir à notre système osseux le calcaire dont il à besoin. | Sur la 2°. question, M. Boflinet père constate quelques améliorations dans l’agriculture. Malheureuse- ment l’amendement des terres les unes par les autres est trop coûteux pour nos populations vinicoles : point de vin, point d'argent. L'usage si avantageux de la herse s’est étendu ; la charrue de M. Duseutre , de Saintes, pouvant agir comme araire, où s’adaptant à un avant-train , jouit de faveur, et il est permis d’espérer que, sous peu d’années, l'usage en deviendra général. Peu de personnes osent pratiquer le drainage; il ne suffit pas de faire, il faut savoir faire, et, aussi long-temps qu'on n’aura pas de nombreux exemples et des succès indubitables sous les yeux, on s’abstiendra. M. Boflinet ne craint pas de se tromper en affirmant que plusieurs milliers d'hectares, stériles aujourd’hui, convenablement assainis doubleraient à peu près nos moyens de subsistance. Dans sa pratique personnelle, une pièce de 3 hectares 50 ares qui, par les infiltrations, ne permettait que quelques cultures tardives et casuelles de printemps, drainés en 4853, d’une ma- nière incomplète cependant , lui a donné, cette année, 27 hectolitres de froment à l’hectare. Un fort rouleau en pierre, traîné. par des bœufs, remplace tous les jours davantage le fléau pour le dépicage des grains, ce qui est un progrès réel; un autre progrès se manifeste dans la plantation des boutures de la vigne, que l’on couvre de terre près de 2 mois avant de les mettre en place, ce qui, à l’aide d’un arrosement, au moment de lopération, assure leur reprise. ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA SAINTONGE. 537 M. Boffinet cite une espèce de froment sans barbe, à paille courte et raide, désignée par les cultivateurs sous le nom de Bausseron ou Bordelais, propagé , en 1854, comme par enchantement dans presque toute la contrée, et dont les produits ont été infiniment supérieurs à ceux des autres variétés, Sur la 1. question, M. l'abbé Lacurie signale les progrès de la chimie dans ses applications à l’industrie et à l’agriculture. Il parle surtout de la découverte de M. d’Herlincourt, qui a doté l’agriculture d’un guano arti- ficiel parfait, aussi efficace et moins coûteux que celui du Pérou. Ce guano s'obtient par l'argile brûlée humide que l’on emploie saturée d'engrais liquide, ou à l’état de poudre sèche. Six hectolitres saturés d'engrais liquide coûtent L fr. ; à l’étal de poudre sèche, ils ne coûtent que 2 fr. 40. Sur la 2°. question, M. l’abbé Lacurie rappelle les principes qui servent de base à l’agriculture bien entendue, et fait connaître ce qui se pratique ailleurs et dont : lapplication peut être profitable chez nous. Il croit que les améliorations les plus réalisables en Saintonge peuvent se résumer ainsi : 4, Substitution de la culture alterne à tout autre système ; Ë 2. Irrigation des prairies par des procédés applicables aux eaux de toute espèce ; 3°. Adoption des instruments aratoires ou servant à l’économie rurale, propres à simplifier les travaux, à dimi- nuer les fatigues et les dépenses; L° Suppression complète des jachères-pâiures ; 5°. Création de prairies temporaires. La séance est levée à 9 heures 172. Les Secrétaires, PERSON , DUBOIS, 538 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. SÉANCE DU 17 AOUT. (Présidence de M. l’abbé Lacurte, membre de l'Institut des provinces). La séance est ouverte à huit heures. Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. M. le Président donne la parole à M. Auriol, sous-di- recteur des constructions navales, président de la Société d'agriculture, sciences et belles-lettres. L’orateur lit un mémoire sur les progrès faits, en 14854, dans le dessèchement des terres au moyen du drainage, et dans l'emploi des engrais. Après diverses considérations sur l’utilité du drainage, dans l’arrondissement de Rochefort, M. Auriol rappelle qu’une loi adoptée par le Corps législatif, il y a environ un an, autorise les propriétaires à s'associer , à se con- stituer en syndicat , et à recourir au Conseil d’État, afin d'obtenir contre les opposants , s’il en est besoin , l’ex- propriation pour cause d'utilité publique. Les blés sur les terres drainées , indépendamment de leurs produits supérieurs , sont plus sains et -exempts de maladie ; la paille en est plus forte, et moins sujette à verser. Les terres drainées et assainies sont plus faciles à cultiver ; on pourrait y supprimer les sillons ou raies d'écoulement et, par conséquent, augmenter l’étendue productive en céréales. Le prix des tuyaux, par mètre courant, est environ le tiers du prix total du drainage, qui varie de 400 à 250 fr. par hectare. M. Auriol donne le détail des opérations pratiquées dans l’arrondissement, ceux relatifs à la dimension des drains, à leur écartement, à leur profondeur et à leur ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA SAINTONGE. 539 pente. Il indique les instruments nécessaires et le fonc- tionnement de la machine dont la Société d’agriculture a fait l'acquisition : M. Benizeau, à qui elle est confiée actuellement, a livré, en 1853, environ 3,000 tuyaux ; en 1854, 20,000 ; et, en 1855, plus de 50,000. Nous sommes donc en progrès. Le canton de Charente est celui qui a le plus de terres infiltrées, particulièrement la commune de Lussan; puis vient le canton de Rochefort, particulièrement la com- mune du Breuil-Magné. Les cantons de Surgères et d’Ai- grefeuille ne doivent avoir des terres infiltrées que sur les penchants des côteaux qui bordent les marais. On estime, par approximation, à plus de 2,000 hectares l'étendue superficielle qui peut être utilement drainée, dans l’arron- dissement de Rochefort. M. Auriol pense que, pour pro- pager l'opération , il nous manque encore l’envoi gratuit et officieux d’inspecteurs spéciaux et d'ingénieurs drai- neurs, sur le plus de points possible. Peut-être aussi il serait à propos d’allouer quelques primes de 100 à 450 fr. par hectare aux dix ou douze premiers hectares conve- nablement drainés par chaque propriétaire; mais ce qu’il importerait avant tout, ce serait la confection d’une carte indiquant la composition du sous-sol. 11 n’y a pas d’exa- gération à affirmer que, pour la France entière, plus de 40 millions d'hectares , presque improductifs, auraient une valeur triple ou quadruple, s'ils étaient convenable- ment assainis. Ne serait-il pas possible, continue l’ora- teur, d'appliquer aux terres infiltrées, lorsqu'elles au- raient été officiellement reconnues, les principes posés par la loi du 46 septembre 1807 sur le dessèchement des marais ? Les propriétaires seraient mis, par le Gouverne- ment, en demeure d’assainir; et, s'ils résistaient, on 540 INSTITUT DES PROVINGES DE FRANCE. aurait la faculté de confier l'opération à des tiers auxquels, après estimation préalable, les propriétaires seraient tenus de payer la plus-value résultant des travaux des concessionnaires. | ‘ En ce qui touche les engrais, M. Auriolrappelle ce qui se pratique en Angleterre et en Flandre pour augmenter la quantité de fumier dans les étables , et pour l'utiliser le mieux possible sur les terres. Il fait observer que , dans ces pays à culture perfectionnée , la terre n’est jamais oisive; on y passe la charrue aussitôt que la moisson est faite, et l’on détruit ainsi toutes les mauvaises herbes avant qu’elles n’aient pris de la force; on remplace avan- tageusement les maigres pâturages de la jachère par des pâturages artificiels où les moutons prospèrent. Les engrais n’ont pas tous la même valeur. Le bœuf donne plus de fumier que le cheval, mais il est moins bon; celui du cheval ne vaut pas celui du mouton, qui est surpassé par les excréments des oiseaux, et parmi ceux- ci, on connaît la force de la fiente du pigeon et l’excel- Jence du guano. M. Auriol donne l’analyse du guano fait par M. Jouvin, sur un échantillon fourni par M. Pel- letreau, qui s’en sert avec succès sur sa propriété de la Bernauderie, près Jaujan. Ce guano est de la meil- leure qualité, et provient du Pérou. Celui du Mexique contient beaucoup plus de phosphate de chaux et moins d’ammoniaque. L'auteur du méroire donne l'explication de cette différence de composition, On conçoit, dit-il, que le guano du Mexique est préférable pour les terres froides , argileuses , déjà riches en humus et en azote, et que le guano du Pérou est particulièrement applicable aux terres calcaires, qui ont plus besoin d’ammoniaque que de phosphate de chaux. Mais, l'ammoniaque, dit ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA SAINTONGE. 54 Liébig, ne favorise la grainaison qu’à condition d’être aidée par les alcalis, les sulfates et les phosphates. Il faut donc ajouter à l’engrais des cendres de bois pour les plantes à potasse, des cendres de tourbes pour les céréales, du plâtre ou de la marne pour les plantes calcaires. On ferait un bon engrais pulvérulent, en versant sur des plâtres les eaux ammoniacales de notre usine à gaz. M. Auriol indique les publications de M: Beau, dès l’année 1847, lorsqu'il a pris la direction de l'éclairage de la ville de Rochefort, et ses efforts pour engager les propriétaires à amender leurs champs et leurs prairies, en mêlant la chaux des épurateurs avec le fumier des étables, ou en arrosant les terres avec l’eau ammo- niacale, mélangée d’eau ordinaire dans la proportion de 4 à 5. M. Auriol rappelle dans quelles conditions on devrait employer la marne qui est beaucoup trop négligée dans cet arrondissement. Il examine également l'utilité qu’on peut retirer du sel, considéré comme engrais, et des résidus de poissons salés, - Il arrive trop souvent que les graines des semences sont en parlie gâtées par les larves de l’alucite et du charançon. L'auteur du mémoire désire fixer l'attention sur les belles expériences de M. Doyère etsur le tarare de M. le docteur Herpin , dans le but de détruire les larves qui attaquent l'embryon du grain. Il termine en rappelant que le plus grand obstacle aux progrès , en agriculture, dans l’arron- dissement , se trouve dans la trop courte durée des baux qui dépasse très-rarement neuf ans, et dans le mode vicieux d’assolement qui, dans les cantons de Rochefort et de Charente, met trois céréales consécutives, et une année de repos seulement. Les. baux à long terme ne 542 INSTITUT DÉS PROVINCES DE FRANCE paraissent possibles que dans la grande culture, et 13,000 personnes $se partagent le sol de l'arrondissement de Rochefort, dont l'étendue est très-peu considérable, Le : mal est grand de toute manière, et pour y remédier, il faudrait procéder , à partir de l’enfance , changer nos habitudes et nos mœurs, en créant un enseignement professionnel. Cet important sujet a préoccupé M. Touret, ex-ministre de l’agriculture; mais le succès ne pouvait venir que par desefforts énergiques et persévérants qui ont fait défaut. M. Maher, directeur du service de santé, lit un travail sur l’état sanitaire de Rochefort, pendant le premier semestre de 1855 ; et il résulte d’une comparaison qu’il établit avec l’époque correspondante de l’année 1854, que l’état sanitaire proprement dit s’est fort amélioré. Les fièvres intermittentes , qui régnaient autrefois dans nos contrées , se montrent à peine aujourd’hui sous forme endémique, grâces aux améliorations hygiéniques dues à nos devanciers, et à celles qui signalent encore au- jourd’ui le zèle d’une administration éclairée et pré- voyante, M. Boffinet père succède à M. Maher, et parle du déboisement et de ses conséquences pour les générations futures. | Dans le cours ordinaire des choses, dit le savant agro- nome, on ne déboise qu’à mesure que la nécessité d’éten- dre les terres arables se fait sentir, mais en France, depuis 1790, le déboisement a marché à pas de géant, Les grands domaines sont conservateurs des bois, parce que leurs possesseurs, par vanité, ou pour prouver qu’ils sont au-dessus de telles ressources, respectent leurs futaies ; la féodalité favorisait cette utile manie, ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA SAINTONGE. 543 D'un autre côté, les gens d'église, qui n’étaient qu’usu- fruitiers de leurs vastes terres, les laissaient se couvrir d'arbres. La vente des biens d’émigrés et des corporations religieuses opéra une rafle de cette richesse végétale, qui ne s’est plus renouvelée depuis, car aujourd’hui tout con- court au déboisement et c’est la conséquence toute na- turelle de nos mœurs; le luxe et les nouveaux besoins qu’il a créés, ne permettent pas aux propriétaires non cultivateurs de conserver un capital foncier, qui donne à peine deux et demi pour cent, quand on peut se livrer, sans travail, à une foule de spéculations qui ont tout l'attrait du jeu, et qui réellement offrent des chances plus favorables. Par le morcellement , on doit nécessaire- ment arriver au déboisement. Nos forêts domaniales elles- mêmes , notre dernière ressource arrivent aussi peu à peu à la petite propriété. Et ces belles forêts sont souvent aliénées avec des permissions de défrichement. Qu'importe la destruction de nos bois, disent certains économistes ? nous avons pour les remplacer la houille, l’'anthracite , le lignite, voire même la tourbe. Quelle que soit l’importance de ces substances, il est incontestable que la nature est désormais impuissante à les reproduire. En usant des ressources qu’elles offrent, c’est un capital que l’on dévore. Plus l’usage des combustibles minéraux se généralise, plus nos bois perdent de leur importance. Nos bois taillis sont aujourd’hui à 50 et 60 pour ‘7, au-dessus du prix d’un hectare de terre arable, Il n’y a point de digues contre les besoins réels ou factices de notre époque ; point de danger qui puisse faire faire un pas rétrograde, Notre fiévreuse activité industrielle peut être comparée à la locomotive échappée au chauffeur; si elle ne se brise en = 5h INSTITUT DES PROVINCÉS DE FRANCE. chemin , elle court jusqu’à épuisement complet de vapeur. Nous sommes condamnés à voir, dans un temps relative- ment prochain, tous nos combustibles nous manquer à la fois. Quels remèdes à tant de maux? Notre code forestier essentiellement conservateur, n’est pas exécuté : on accorde trop facilement les permissions de défrichement sous le spécieux prétexte d'augmenter les terres arables. Mais au lieu de demander aux bois de nouvelles super- ficies cultivables, demandez-les à 7 ou 8 millions d’hec- tares de landes, et aux merveilleux effets du drainage. Les bois, comme tous les autres produits agricoles, usent le sol qu'ils occupent trop long-temps ; mais tout aménagement irrationnel hâte cette ruine. Il conviendrait que tout aménagement au-dessous de dix ans, qui ne peut être sagement appliqué qu'aux plus mauvais taillis, fût précédé de la visite des lieux. Je voudrais qu’on ne permit de défricher un bois qu’à celui qui justifierait d’un semis d’une étendue au moins égale ; qu’on encourageàt les semis par une dispense d'impôts pour la surface semée, dispense de cinquante ans au moins, pour que le semis soit un pro- duit utile. Je voudrais que, dans l'amélioration de la vici- nalité, parfaite en soi, on eût plus d’égard aux arbres qui bordent les anciens chemins ruraux , où ils causent le moins de préjudice à l’agriculture et où ils offrent d’ailleurs les meilleures ressources pour tous les genres de construction. j L’orateur , en terminant, émet le vœu que les allu- mettes chimiques soient soumises aux réglements de po- lice les plus sévères. Elles offrent plus d’un danger réel. Sur dix sinistres supportés par une compagnie d’assu- rance contre l'incendie , huit sont occasionnés par les al- ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA SAINTONGE. 545 lumettes chimiques. Le Code pénal prononce une amende de 15 fr, contre le cultivateur qui néglige d’ôter le coutre de sa charrue qui passe la nuit dans un champ, parce que ce coutre peut devenir une arme dangereuse dans les mains d’un malfaiteur: on entoure des plus minutieuses précautions la vente des toxiques dans les pharmacies ; on défend aux épiciers le débit des substances véné- neuses , et, pour cinq centimes, l’incendiaire, l’empoi- sonneur trouvent, dans les foires, dans les marchés, partout en un mot, de quoi mettre le feu à cinq eents bois ou à cinq cents habitations! M. Boffinet termine par ces mots : « Avec le plus « grand désir de me tromper, je livre, Messieurs, à vos « savantes méditations, ce bien faible, et sans doute, « dans la recherche de ce qui peut intéresser l’humanité, « le dernier effort d’un vieillard qui sent que la bonne « volonté ne peut plus lui suffire. » Le bureau rassure M. Boffinet, et il espère profiter long-temps encore de la longue expérience du savant agronome. M. Boffinet fils a la parole sur le paupérisme et la pos- sibilité d’éteindre la mendicité. Partant de ce principe que le mendiant valide est un criminel , la loi civile, par trop de sévérité d’abord, puis, par un excès contraire, n’a pu obvier au mal... C’est que le législateur n’a pas compris qu’il aurait fallu offrir la possibilité d'éviter la faute et le châtiment; que surtout il valait mieux prévenir que réprimer. Le génie chrétien a donné naissance à trois institutions qui constituent, en France, le système de la prévoyance publique , et les caisses d'épargne, la caisse de retraites, les Sociétés de secours mutuels sont venues recueillir 546 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. l'économie et garantir du besoin la vieillesse et la maladie. Ces institutions tendent au soulagement du travailleur , elles ne peuvent rien contre la mendicité qui, consom- mant sans rien produire , ne peut rien économiser. La loi anglaise sur le paupérisme a développé le mal au lieu de le faire disparaître. Les nombreuses institutions de charité qui se sont fondées dans nos villes ont eu le même résultat, l’homme compte sur autre chose que sur ses efforts et son énergie pour subvenir à ses besoins. La religion définit l'humanité une grande famille : là se trouve lé nœud de la question. Il faut simplement élargir le cercle de la famille et des devoirs qu’elle impose. Le Code Napoléon oblige les ascendants, les descendants et les époux à se fournir réciproquement des aliments : cette obligation donne ouverture à une action judiciaire. Voilà pour le devoir. Au titre : Des successions, le même Code ouvre un droit qui n’a pas de devoir correspondant, il admet l’hérédité au douzième degré. Pourquoi ne pas étendre aux degrés successibles l'obligation de fournir des ali- ments ? Ce principe admis, le pauvre ne serait plus isolé, une famille entière lui tendrait la main:et lui procurerait, soit par ses propres ressources, soit par son influence, les moyens de se sustenter. Il peut arriver que la famille n’existe pas, on est dans l'impuissance d’accorder l'existence réclamée; dans ce cas, je remplace la famille, d’abord par la commune ; ensuite par l'État qui, lui aussi, comme héritier appelé, doit supporter les charges que j'attribue à cette qualité. La commune occuperait les pauvres valides à des travaux proportionnés à leurs forces. Quant aux incurables, l'État ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA SAINTONGE. 547 les recevrait, non dans des dépôts de mendicité, mais dans des établissements que nous nommerions Invalides civils, par respect pour la pauvreté non méritée. Il n’est pas de famille qui ne prélève, chaque année, sur son revenu un impôt considérable pour la bienfaisance et qui ne s’empressät de doter ces établissements ; des quêtes, des loteries mettraient bientôt ces asiles à l’abri du besoin. La séance est levée à 10 heures. Les Secrétaires, PERSON, DUBOIs. SÉANCE DU 18 AOUT. ( Présidence de M. l’abbé Lacurte , chanoine honoraire, membre de l’Institut des provinces. ) La séance est ouverte à huit heures. Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. Sur la 3°, question, ainsi conçue: « Quelle est l’im- « portance de la nature variée des aliments, au point de « vue de l’engraissement des animaux ? », M. Auriol fait remarquer qu’une certaine dose de pommes de terre crues ou cuites, mêlées avec les autres aliments , pousse promptement à la graisse. Un autre avantage, ajoute-t- il, a été constaté dans nos fromageries, dont les produits acquièrent , par ce genre d'alimentation, une qualité supérieure. M. l’abbé Lacurie cite, à propos de l’engraissement des vaches laitières, les expériences faites dans le dé- partement de la Marne, On y pratique la castration sur 518 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. les vaches laitières déjà âgées. Il résulte de cette opéra- tion , très-facile et nullement dangereuse , que la vache donne , pendant une plus longue période de temps , un lait plus abondant et de meilleure qualité, et qu’elle en- graisse très-vite. Cette pratique offre encore l'avantage d'améliorer sensiblement la race bovine, qui ne peut que perdre par des produits dus à des sujets affaiblis par l’âge. M. le Maire fait observer que , dans nos contrées, un de nos compatriotes , M. Pellerin, a tenté l’opération de la castration sans succès. M. l’abbé Lacurie s'engage à envoyer tous les renseignements fournis par l'inventeur de ce procédé , dont on se trouve bien dans le dépar- tement de la Marne. Les succès obtenus par la Société des sciences naturelles de la Rochelle, en fait de pisciculture; les travaux incessants de MM. les Professeurs de botanique et des pépiniéristes de la marine; la culture du sorgho par M. Boffinet père, à St.-Savinien, répondent en partie à la 4°. question du programme ainsi conçue : « A-t-on obtenu dans le pays «par l’acclimatation , en 1854, des résultats importants _« dans le règne animal et dans le règne végétal ? » M. Montaut regretie que les personnes qui ont reçu du ministre différentes plantes pour l’acclimatation , ne fassent pas connaître les résultats qu’elles ont obtenus; il désire surtout que l’on sache que la Société d’agri- culture de Rochefort s'occupe d’acclimatation. M. Jouvin cite les succès obtenus dans le Midi, de la culture en grand du sorgho, Holcus saccharatus, et après avoir signalé la propriété de cette graminée, il exprime le désir de la voir introduire dans notre dépar- tement, où elle lui semble devoir réussir parfaitement à ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA SAINTONGE. 549 côté du maïs. Le savant professeur fait ensuite connaître qu'il a eu la pensée d'introduire au jardin botanique de la marine, dont il est directeur, la culture de l’igname de la Chine. Il a écrit à M. Decaisne , professeur de cul- ture au Muséum , à Paris, pour avoir quelques tuber- cules de cette plante ; mais il lui a été répondu que la provision du Muséum étant complètement épuisée, il lui faudrait attendre à la fin de la saison. Je compte renou- veler ma demande, en temps opportun, poursuit M. Jou- vin, et j'ai l'espoir que l’igname de la Chine réussira très-bien dans les terrains légers de la Charente-Infé- rieure. Le tubercule de cette plante est volumineux, enflé à sa partie inférieure, ce qui en rend larrachement un peu difficile. Non-seulement il est riche en fécule, comme les tubercules de la pomme de terre , mais il offre sur ceux-ci ce grand avantage, qu’il renferme un prin- cipe azoté. Ce principe azolé fait du tubercule de l’igname de la Chine un aliment complet, analogue aux fruits des” céréales. Sur la 5°. question, ainsi conçue: « Quelles sont, à « l'heure qu’il est, les expériences les plus utiles à en- « treprendre sous ce rapport (l’acclimatation), dans la « circonscription ? » , M. lPabbé Lacurie fait connaître les expériences faites, depuis quelques années, en Pi- cerdie , dans le département de la Haute-Loire, et par la Société zoologique d’acclimatation fondée à Paris , le 10 février 1854; et il conclut que nous pouvons tenter les mêmes essais , dans le département. M. Jouvin demande la parole pour présenter quelques observations, à propos du mémoire de M. Boffinet père, Su: le déboisement et la consommation toujours crois- sante des combustibles minéraux. La préoceupation qui 0 550 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, a dicté le remarquable travail de M. Boffinet père, dit M, Jouvin , date déjà de fort loin pour les économistes et les physiciens. Quelles que soient, en effet, la puissance et l'étendue des dépôts houillers, tant de ceux que nous connaissons que de ceux, qui nous restent encore à dé- couvrir, ilest certain que l’on peut prévoir une époque où, à force d’y puiser, on les aura taris. Que ce résultat arrive dans vingt, quarante siècles ou davantage , il n'importe : les conclusions de M. Boffinet sont donc très-légitimes à ce point de vue ; mais l'humanité est-elle bien réservée à ce lugubre avenir qu’il lui présage, et nos arrière-petits- neveux sont-ils donc destinés à périr par le froid ? C’est ce que M. Jouvin ne pense pas, et il espère rassurer ceux que les craintes de M. Boffinet auraient gagnées. Depuis 25 ans surtout, l’on s’est occupé activement de rechercher tous les moyens d'économiser le combustible par la construction d'appareils mieux entendus, et cepen- - dant, comme il faut ioujours un tirage proportionné à l’activité de la combustion que l’on veut produire, il en résulte forcément une énorme déperdition de chaleur qu’entraîne le courant d’air. Rien de primitif comme les procédés le plus habituellement mis en pratique dans nos ménages. C’est tout au plus si l’on y utilise, dans les cheminées les mieux construites, 178 de la chaleur pro- duite; tandis que dans les cheminées ordinaires la déper- dition s’élève aux 15716. Il reste donc à réaliser d'énormes progrès, et M. Jouvin ne doute pas que l’on n’y par- vienne. D'ailleurs, La chaleur étant un mouvement vibratoire de la matière impondérable et des dernières molécules des corps , l’on réussira certainement à produire écono- miquement ce mouvement vibratoire, sans employer les ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA SAINTONGE. 051 combustibles actuels. Déjà, la chaleur développée par friction, —ce moyen tout primitif dont se sert le Sauvage pour avoir du feu ,—est presque devenu d’une application industrielle entre les mains de MM. Beaumont et Mayer, dont l'appareil figure à af universelle , par ordre exprès de l'Empereur. Mais tout cela n’est rien en comparaison de la bonne nouvelle que je viens vous annoncer , poursuit M. Jouvin. Nous avons autour de nous une source inépuisable de combustible et cette source n’est autre que l’eau elle- même. L'un des éléments de ce liquide, l’hydrogène, est, vous le savez, un combustible de premier ordre; c’est celui qui, en brûlant, développe une chaleur assez intense pour opérer la fusion du platine , métal qui résiste au feu de forge le plus violent. Toute la question se réduit à extraire cet hydrogène avec économie et en grande abondance, et ce problème a déjà reçu un heureux commencement de solution, grâce à un savant belge des plus distingués, M. Jobard. Tout récemment M. Jobard rappelait à la Société d'encouragement que c'était à lui que l’on devait l'éclairage par le gaz extrait de l’eau, et indiquait quelques-unes des applications économiques et industrielles de ce gaz. On peut le brûler dans un foyer, au milieu d’un appartement sans dégager autre chose qu’un peu de vapeur d’eau. L’on est donc ainsi débarrassé de la fumée de charbon qui salit les meubles, le linge, etc. ; et des gaz sulfureux qui ternissent les métaux précieux et vicient l’atmos- phère. Veut-on rendre le gaz hydrogène éclairant? Il suffit de le faire traverser, avant de l’enflammer, une boîte ou un vase contenant un carbure hydrique liquide, soit naphte, pétrole, ou essence de térébenthine , et il 552 INSTITUT DES PROVINCES DÉ FRANCE. fournit alors une lumière aussi brillante que celle du meilleur gaz-light. Ce nouveau mode d'éclairage et de chauffage serait moins dispendieux que le mode au- jourd’hui en usage, car il nous délivrerait de l’emma- gasinage et du transport journalier du bois , du charbon, de l’huile; il nous débarrasserait des domestiques et des fréquents nettoyages des appareils de chauffage et d'éclairage , si sujets aux réparations. Il permettrait de faire la cuisine, avec iufiniment plus de propreté et d'économie qu’on ne la fait maintenant. L’électricité nous offre aussi une source de lumière et de chaleur sans égales. Le temps n’est peut-être pas éloigné où l’on produira économiquement de la lumière et de la chaleur , au moyen d’appareils électriques. En terminant, M. Jouvin signale la préparation de l'aluminium exécutée par M. Saint-Clair-Deville sur une assez grande échelle. Ce métal, qui se trouve à Pétat d'oxyde (alumine) dans toutes les argiles; qui, par conséquent, n’est pas moins répandu que le fer, possède une grande inaltérabilité à lair et une sonorité remar- quable , fait exceptionnel jusqu’à présent dans l’histoire des métaux. Sa densité est à peu près celle du verre. Déjà, l’on a substitué avec succès l'aluminium au platine dans la composition de la pile. M. le Président remercie M. Jouvin des détails si pleins d'intérêt qu’il vient de donner, et le prie de les consigner dans une note pour le procès-verbal, MM. les Secrétaires craignant de ne l’avoir pas bien suivi dans son improvisation. Réunissant les 7°.,8°. et 9°. questions, M. V'abbé Lacurie pense que la presse départementale fait franchement ce qu’elle peut, en Saintonge , pour occuper les esprits de ASSISES SCIÉNTIFIQUES DE LA SAINTONGE. 553 choses sérieuses. Dans nos villes, il n’est pas de journal qui n’ouvre avec empressement ses colonnes aux diverses Sociétés scientifiques ou littéraires. M. l'abbé Lacurie voudrait voir les Sociétés savantes user plus largement de la faculté qui leur est offerte par la presse départementale. Il émet le vœu que l’on ne se contente pas de l'insertion d'articles qui ne sont lus que par les abonnés, plus ou moins nombreux, à la feuille hebdomadaire, mais que l’on fasse un tirage à part de tout mémoire offrant des choses pratiques, que l’on répandrait gratuitement dans la petite culture. M. Auriol adopterait ce mode de publication, sans doute fort avantageux pour les agronomes , si les Sociétés savantes avaient plus de ressources pécuniaires pour sub- venir aux frais de ces publications. M. l'abbé Lacurie fait remarquer à l’honorable préo- pinant qu’il ne s’agit pas de nombreuses ni de longues publications : quelques notes, claires et concises , pu- bliées chaque année, n’appauvriraient pas les Sociétés savantes : les articles ayant déjà été publiés par le journal de la localité, la Société n’aurait à supporter que les frais du tirage et le coût du papier. M. le Maire et M. Thèze, imprimeur des Tablettes, prennent part à la discussion. M. Thèze regrette en effet que la Société d’agriculture, belles-lettres, sciences et arts de Rochefort ne recoure pas plus souvent à son journal , dont les colonnes lui sont ouvertes. M. Deshermeaux fait connaître à l’Assemblée la cir- culaire de la Société qui s'occupe d’un nouvel engrais , dit de Javelle. Cette Société offre d’envoyer gratuite- ment, à chaque Comice agricole, 400 kilogrammes de cet engrais pour en faire l'essai. M. Deshermeaux fait > || Re 554 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. remarquer que le. désintéressement de cette Société témoigne en faveur de sa bonne foi. M. le Président ajourne la séance à lundi 20 courant, à l'heure accoutumée. La séance est levée à 10 heures, Les Secrétaires, PERSON , DUBOIs. SÉANCE DU 20 AOUT 1855. { Présidence de M. l’abbé Lacume, chanoïne honoraire , membre de l’Institut des provinees. ) La séance est ouverte à 8 heures. Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. On remarque dans la salle un grand nombre d'ouvriers de l’arsenal. La parole est à M. Deshermeaux , pour une commu- nication importante d'économie politique. Dans une brillante improvisation, et avec une conviction profonde, l'orateur fait remarquer que la classe ouvrière sent, plus que personne , le poids de la cherté des substances ali- mentaires. IL-appelle l'attention sur les essais tentés par la ville de Grenoble pour fournir les aliments les plus nécessaires et de meilleure qualité au plus bas prix possible. L'’ouvrier est obligé de s’approvisionner au petit -détail qui est forcé , pour se couvrir, de vendre au plus haut prix. En position de constater, à Rochefort, le -prix de consommation du vin, à une époque où cette boisson valait 9 fr. l’hectolitre, l'honorable orateur a pu se convaincre que, pour le consommateur , le prix ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA SAINTONGE. 555 s'élevait à trois fois la valeur primitive , et que les frais de débit et autres étaient aussi très-élevés. Pareil état de choses avait frappé M. le Maire de Grenoble et le Conseil municipal. Député à Genève, pour étudier les résultats obtenus par la Société alimentaire établie dans cette ville, M. le Maire de Grenoble tenta, et exécuta avec succès dans sa ville, après des luttes prolongées, ce qu'il. avait vu pratiquer heureusement à Genève, et aujourd’hui l’œuvre marche à grands pas et à:la satisfaction, de tous. M. Deshermeaux donne les détails les plus circonstanciés sur cette institution entièrement en dehors des œuvres de bienfaisance, et il exprime le désir que le Congrès scientifique de France, qui doit tenir, l’an prochain, sa XXIII*. session dans le dépar- tement, veuille bien s'occuper de cette question, si in- téressante pour la classe ouvrière. Il exprime aussi le vœu de voir la Société d'agriculture étudier cette question, pour aviser aux moyens de doter la ville de Rochefort d’une si utile institution. M. le Président prie M. l'abbé Person, qui se propose de ‘visiter prochainement le sud-est de la France, de prendre sur cette œuvre tous les renseignements qui seront en son pouvoir. M. l'abbé Person promet d’y mettre tout le zèle qui dépendra de lui, en allant étudier, à Grenoble même, la manière dont fonctionne la Société alimentaire de cette ville. M. Moutant donne communication d’un mémoire fort intéressant sur la question des enfants trouvés. L’orateur puise, dans son contact officiel et ses connaissances obligées de l’administration. des hospices, des aperçus d’une haute portée. Après avoir rappelé la législation actuelle, depuis la suppression de la majeure partie 556 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. des tours, il voudrait que l’État ne payât les nour- riciers des enfants trouvés que jusqu’à dix ans seule- ment. A cet âge, et jusqu'à leur majorité, ces enfants seraient confiés , par engagement sérieux avec l’admi- nistration , à leurs nourriciers , d’après des témoignages favorables rendus sur leur compte par les inspecteurs de ce service. Les contractants seraient encouragés à ces engagements par le paiement d’une prime de 40 ou 50 fr. sur les fonds départementaux, et la fourniture, par l’hospice , d’un trousseau convenu. L’hospice de Bayonne est entré dans cette voie, il emploie avec un plein succès le moyen des engagements avec prime. Dès l’âge de 7 ans, tous ses enfants sont placés sans que l'administration ait ensuite à s’en occuper. M. l’abbé Lacurie réunit en une seule les deux der- nières queslions du programme touchant les coutumes, les pouillés des diocèses et les aveux des biens et droits dés temporalités. Il explique ce que l’on doit entendre par pouillés, et ilen fait ressortir l'utilité, au point de vue de la topographie et de l’histoire locale. Entrant en- suite dans le détail de ce qui touche le département de la Charente-Inférieure , M. l'abbé Lacurie fait remarquer que les coutumes , le costume et le langage varient parmi les habitants des diverses parties du département. Ces diversités sont le cachet indélébile des anciennes races qui formaient la cité. 11 cite quelques exemples de ces diversités dans les coutumes et le langage, qui excitent l’hilarité de l’Assemblée. On ne saurait trop engager les hommes d’étude à observer avec soin ces diversités dans les coutumes, les habillements et le langage; on peut arriver par là à constater le nombre des tribus anciennes renfermées dans la circonscription de la juridiction civile ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA SAINTONGE. 557 de la cité, puis dans la circonscription de la juridiction ecclésiastique, bâtie sur celle de la cité. La parole est ensuite à M..le Maire sur les taxes en général, et en particulier sur celle du pain. 11 démontre que les taxes arbitraires auraient pour résultat immédiat l’absence de production , le producteur voulant, .et c’est de toute justice, rentrer dans ses frais d'exploitation. Le bénéfice de l'intermédiaire entre le producteur et le consommateur n’est pas autre chose qu’un salaire réduit. L'orateur s'attache à prouver que le gain du producteur est légitime, et qu’il y a double raison pour que , dans les temps de rareté des substances de première nécessité, ces substances soient d’un prix plus élevé. Le prix des farines pourrait servir peut-être de meilleure base de taxe dans les grandes villes. La ville de Rochefort a bénéficié, dans ces derniers temps, de l'introduction, par l'autorité municipale, d’une, troisième espèce de pain; d’autres améliorations pourront encore être apportées, sans que l’on puisse cependant espérer un abaissement bien sensible dans les prix, ear il faut toujours que le producteur rentre dans, ses frais , et le fabricant ne peut pas donner gra- tuitement son temps et sa peine : il faut qu'il vive de son état, qu'il ait un salaire, Rien n’étant plus à l’ordre du jour , M, l’abbé Lacurie prend la parole et s’exprime en ces termes : « MESSIEURS, « Le programme des questions qui nous avaient été posées est épuisé ; la session des Assises scientifiques pour 1855 est terminée. « Nous allons nous séparer bientôt, pour nous re- 558 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. trouver, l’an prochain, avec le même concours , le même zèle. « Estimons-nous heureux, Messieurs, d’obéir à ce mouvément providentiel qui entraîne aujourd’hui dans la sphère d'activité des réunions savantes; car c’est par le bienveillant échange de la pensée « que les forces « intellectuelles du pays se développent, se soutiennent « mutuellement, el vont porter partout la lumière et « là vie. » Le Congrès scientifique de France tiendra, l’année prochaine, $a XXIII°. session au chef-lieu du départe- ment, et il siégera deux jours à Rochefort. Les travaux des diverses sections seront pour nous un utile enseigne- ment : notre route sera désormais tracée, notre mission mieux comprise ; et chacun, dans sa spécialité , apportera dans nos réunions de famille le fruit d’études sages et réfléchies. C’est ainsi, Messieurs, que nous pourrons seconder les efforts du savant généreux et modeste dont s’honore la France, et « marcher à sa suite dans la « voie de la réhabilitation du travail dans la province... » « Veuillez, Messieurs dé la Société d'agriculture, belles-lettres , sciences et arts, et vous tous qui vous êtes associés à nos travaux, el vous surtout, magistrats de la cité , veuillez recevoir l'expression de toute ma gra- titude pour voire gracieux accueil, et le concours que vous avez bien voulu me prêter pour la tenue de ces assises scientifiques. Resserrons, tous les jours, de plus en plus les liens qui nous unissent pour marcher à Ja conquête du bien-être intellectuel, moral et physique de nos concitoyens. » M. Auriol, président de la Société d'agriculture, belles- ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA SAINTONGE. 559 lettres, sciences et arts de Rochefort, se lève et, s’adres- sant à l’Assemblée, s'exprime ainsi : « MESSIEURS, « C’est pour nous un devoir de sentiment d’adressér un témoignage de publique reconnaissance à M. l’abbé Lacurie qui, après avoir tenu , l’an dernier, à pareille époque, Îles assises scientifiques de la Saintonge à Ro- chefort, les a maintenues cette année dans la même ville, en nous faisant accorder pour 1856 le partage du Congrès général avec la Rochelle. C’est une marque d’estime qui nous honore et que nous tâcherons de mériter. » Les Secrétaires, PERSON , DUBoïs. Le Président des Assises, LACURIE, Vu par le Directeur-général de l’Institut des provinces de France, A. DE CAUMONT. 2 mn Q AE — DU DÉBOISEMENT ET DE SES CONSÉQUENCES POUR LES GÉNÉRATIONS FUTURES, Lu aux Assises scientifiques de la Saintonge , le 19 août, Par M. BOFFINET père. nee (mes me «Le bois, qui était autrefois très- « commun, en France, maintenant a (4775) suflit à peine aux usages indis- « pensables, ét l'on est menacé pour « l'avenir d’en manquer absolument. » Encyclopédie. MESSIEURS , A moins de circonstances extraordinaires , il n’y a de contrées suffisamment fertiles, pour les grandes associa- tions humaines, que celles où de vastes forêts existent ou ont autrefois existé. C’est ainsi que l’histoire nous repré- sente l’ancienne Europe, et c’est sans doute ce à quoi elle doit sa prépondérance dans le monde. Nous savons aussi que les plus riches parties de l'Amérique sont celles où règnent les plus grands végétaux. Signes de fertilité de la terre, ils sont aussi d’indispensables ressources pour les hommes qui, quelle que soit la latitude, ne peu- vent pas plus se passer de feu, et, par conséquent, de ce qui est susceptible de l’alimenter, que de l'air qu’ils res- pirent. Si le feu a pour nous une si haute importance, n’est-il pas de la plus impérieuse nécessité que ce qui nous CONSIDÉRATIONS SUR LE DÉBOISEMENT. 561 permet d’en jouir soit constamment et précieusement maintenu à la hauteur de nos besoins ? L’affirmative, ici, est incontestable, et cependant, entraînés par un essor industriel inouï, fascinés par les magiques effets de la vapeur, notre imprévoyance sous le rapport du combustible végétal est incroyable. Cette situation, Messieurs, me parait si grave , que je me fais un devoir de la signaler à votre haute sagesse, en vous invitant, si vous partagez ma conviction, à chercher avec moi s’il nous reste quelques moyens, sinon d’en conjurer le danger , du moins de l’atténuer. On sait qu’en général les forêts reculent devant les progrès de la civilisation, ou, ce qui est la même chose, devant le développement de la population; témoin ce qui se passe aux États-Unis d'Amérique et ce qui s’est passé chez nous depuis les Gaules. Dans le cours ordinaire des choses , on ne déboise qu’à mesure que la nécessité d’étendre les terres arables se fait sentir; mais, en France, depuis 1790 , le déboise- ment a marché de telle sorte qu’il excède probablement celui de dix siècles antérieurs, L'effet du grand bouleversement social de cette époque sur la sylviculture est chose si étrange qu’il mérite qu'on essaie de s’en rendre raison, et voici comment je l’ex- plique : Les grands domaines sont conservateurs des bois, parce que leurs posesseurs, par vanité ou pour prouver qu’ils sont au-dessus de telles ressources, respectent leurs futaies. La féodalité favorisait cette utile manie , et, d’un autre côté, les gens d’Église, qui n'étaient qu’usufruitiers de leurs vastes terres, les laissaient se couvrir d'arbres. La vente des biens des émigrés et des corporations reli- 562 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. gieuses opéra une rafle de cette richesse végétale qui sérvit à payer le fonds et qui ne $’est plus renouvelée de- puis ; en effet, tout à concouru et tout concourt encore au déboisement , .et, du train dont on y va , dans moins d’un demi-siècle peut-être , par la seule force des choses, tous les immeubles ruraux passeront à ceux qui les culti- vent, c’est-à-dire à des propriétaires qui, ne visant qu'aux produits annuels qu’ils réalisent , détruisent leurs arbres au moindre besoin d'argent, et souvent, seule- mént pour l’ombrage nuisible qu’ils projettent. La force des choses dont je viens de parler n’a pas sans doute besoin de longs commentaires pour être com- prise ; elle est la conséquence toute naturelle de nos mœurs actuelles : le luxe et les nouveaux besoins qu’il a créés ne permettent pas aux propriétaires non cultiva- teurs de conserver un capital foncier qui donne à peine deux et demi pour cent , quand on peut se livrer, sans travail (ce qui va très-bien à notre temps), à une foule de spéculations qui ont tout l'attrait du jeu et qui, réel- lement, offrent des chances plus favorables. Donc , les propriétés de quelqu’importance sont desti- nées à passer tout entières et en détail (ce qui est le plus avantageux au vendeur ) dans les mains des agriculteurs, qui semblent avoir pris pour devise : La terre à qui la cultive , coûte que coûte. Et, par la raison que lé mor- cellément conduit infailliblement au déboisement, on voit que nous ne pouvons pas l’éviter. | Les forêts domaniales, notre dernière ressource en ce genre , par uné nécessité que je suis loin de contester, arrivént aussi peu à peu à la petite propriété, par lin- termédiaire d’avides spéculateurs, désignés autrefois sous lé nom de Bande-Noire, Et, ce qui aggrave encore le CONSIDÉRATIONS SUR LE DÉBOISÉMENT. 563 mal, ces belles forêts sont souvent aliénées avec des per- missions de défrichement. Et pendant cette dévastation de nos grands et indis- pensables végétaux, que plante-t-on ? Que sème-t-on ? Quelques misérables ormes ou frênes dans l’intérieur des grandes routes , ce qui prouve l'excès de leur largeur: quelques peupliers sur les cours d’eau et quelques pins dans les dunes et dans les landes. Voilà tout... Je ne crois pas ces faits contestables. Cependant il me semble entendre quelques inconsé- quents économistes me dire : « Qu'importe la destruction de nos bois ? N'avons-nous pas la houille pour les rem- placer, et avec un incontestable avantage ? » Oui, puis-je répondre à cette objection, nous avons la houille, l’anthracite, le lignite, voire même la tourbe ; mais qu'est-ce que tout cela pour nos successeurs ? Voilà ce que la raison veut qu’on examine. Et d’abord, qu'est-ce que l’anthracite ? (je prends ces minéraux dans l’ordre de leur ancienneté). L’anthracite paraît appartenir en général aux premiers végétaux apparus sur le globe. Son gisement, sauf quelques cas accidentels, dépend des plus anciennesfondations sédi- mentaires, Privé de bitume et ne contenant que très-peu de parties volatiles, par l’excès sans doute de sa carboni- sation, il ne s’enflamme que difficilement. Cependant, depuis quelques années, on est parvenu à l’utiliser dans certaines industries et dans les foyers domestiques , spé- cialement dans l'Amérique du Nord. | Qu'est-ce que la houille ? La houille a incontestablement la même origine que l’anthracite, seulement, elle est plus récente et, ayant subi une moindre action du feu central, elle se trouve 64 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. plus heureusement disposée pour la combustion, Elle oc- cupe d'anciennes dépressions, :au-dessus desquelles , pense-t-on, l’eau aurait charrié des masses de débris plus ou moins puissantes; et son épaisseur générale et moyenne, d’après les gisements connus jusqu'ici, serait probablement de 1°. 50°. à 1°, 80°, ; on est d’ailleurs fondé à croire qu'elle n'existe que dans les zones tempérées. Qu'est-ce que le lignite ? | Le lignite, plus nouveau que la houille, se trouve, selon l’âge des dépôts, soit en charbon très-compact (jayet), soit friable et se délitant en petits fragments dès qu'il prend l’air, soit terreux comme le bois pourri, soit enfin fibreux et d’une certaine consistance. | Qu'est-ce enfin que la tourbe ? Ce dernier minéral est tout-à-fait moderne , ce qui fait qu’il gît à peu de profondeur. Il est dû aux détritus suc- cessifs des plantes marécageuses, Quelle que soit l’importance de l’anthracite, de la houille et du lignite pour l’utilité des hommes, il est in- contestable que la nature est désormais impuissante à les reproduire ; d’où il suit que, en usant des ressources qu’ils offrent, c’est un capital qu’on dévore. Si l’on en croit les Hollandais, qui brûülent beaucoup de tourbe, elle serait susceptible de se renouveler où on l’a déjà ex- traite, ce qui lui donnerait un intérêt bien supérieur à celui qu’on lui accorde, Voilà quelles sont nos ressources en combustibles miné- raux ; Voilà ce qui, à défaut de bois, doit pourvoir à toutes les nécessités industrielles, de plusen plus exigeantes; nous préserver des rigueurs du froid dans nos domiciles, nous transporter par terre et par eau avec une magique célé- rité, et nous fournir du gaz oxygène pour nous éclairer. CONSIDÉRATIONS SUR LE DÉBOISEMENT. 565 Sans doute, nous appartenons à une belle et grande époque ; sans doute nous avons le droit d’être fiers de nos magnifiques conquêtes ; mais toute médaille a un re- vers, et le revers, ici, c’est l’image de la postérité mau- dissant la prodigalité égoïste de ses ancêtres, prodigalité qui borne les ressources sur lesquelles elle a certainement autant de droits que nous, à une simple question de temps. Comme l’amour désordonné du confortable et de tout ce qui flatte la vanité aveugle sur ses conséquences , je m’alitends à voir nier celles que je prévois ; je m’attends même à ce qu’on ne voie en moi qu’un vieillard alar- miste et frondeur , et je réponds d’avance : Incrédules ! savez-vous, avec l'incroyable consommation qu’on en fait, pour combien d’années il nous reste de houille ? Vous n’en savez rien, n’est-ce pas ; c’est le moindre de vos soucis ? Je dois convenir que je ne puis non plus pré- ciser l’époque de son épuisement ; cependant , je me sou- viens qu’il y a une quarantaine d’années , un savant in- génieur, basant ses calculs sur la quantité de houille qui sortait chaque année des mines de l’Angleterre, les plus riches du monde, trouva qu’elles étaient encore appro- visionnées pour environ deux mille ans. Je me souviens aussi que cette prévision fut favorablement accueillie ; en effet, vingt siècles devant soi, c’est magnifique ! Mais ce calcul , plus ou moins approximatif , n’a-t-il pas été dé- rangé depuis ? Si, par.exemple, on démontrait , ce qui n’est pas difficile, que l’on consomme dans ce moment au moins dix fois plus de houille qu'il y a quarante ans, et que cette consommation ne peut que s’accroître, n’en résulterait-il pas que les deux mille ans se trouveraient réduits à moins de deux cents ans ? | 566 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Dans l’incommensurabilité des temps probablement ré- servés encore à notre monde, qu'est-ce que l’espace de deux siècles ; et de quel droit, sans mesure et trop sou- vent sans nécessité, dissipons-nous le patrimoine de la postérité? Peut-on croire que ce soit pour cinq à six géné- rations humaines que la Providence ait déposé et si soi- gneusement conservé, dans les entrailles de la terre, tant de richesses ?..…. Si nos prédécesseurs avaient agi avec notre imprévoyante prodigalité, l’Europe, depuis bien des: siècles, ne serait plus habitable que par quelques hordes. Un certain D. Bernard, l’un des maîtres de Gilblas, avait fait ce raisonnement : « J’ai cinquante ans, et je possède « 50,000 ducats; en supposant que je vive cent ans, ce « que je ne puis espérer, une dépense de 1,000 ducats « par an complétera agréablement ma vie et, moi, « le déluge! » Nous faisons, pour la houille, une vérité de ce jeu d'imagination de Le Sage, avec celte différence, en faveur de son D. Bernard, qu'il laissait son capital dans la cir- culation et que nous dissipons le nôtre en fumée. * Je sais que l’on peut m’objecter les fréquentes décou- vertes de nouveaux dépôts de charbon de terre, et que, probablement, il nous en reste beaucoup d’autres à découvrir : j'admets tout cela ; mais il est sage de n’y voir que le court ajournement d’un épuisement absolu. Il faut donc autant que possible pourvoir à cet épui- sement ou, tout au moins, chercher les moyens d’en éloigner le terme. Maïs il convient pour cela d'étudier notre situation ou de nous en rendre un compte Nr peu exact , et c’est ce que je vais faire. Il est certain que, plus l’usage des combustibles miné- CONSIDÉRATIONS SUR LE DÉBOISEMENT. 567 raux se généralise, plus les bois perdent de leur impor- tance : leur dépréciation est telle , dans ce moment, que la valeur vénale d’un hectare de bois taillis est de 50 à 60 %, au-dessous de celle d’un hectare de terre arable, à égalité de classe cadastrale. Voilà; sans doute, ce qui explique l’ardeur de nos cultivateurs , toujours régis par l'intérêt du moment, à convertir leurs bois en terre labourable ; et cette conversion, qui n’a pour ainsi dire aucun frein, s'accroît tous les jours. Il est certain, d’un autre côté, que, au point où nous en sommes, on ne peut, pour relever les boïs, interdire l’usage de la houille, dont la consommation annuelle est actuellement de plus de 100 millions de tonneaux (les mines anglaises y entrent, seules, pour 85 millions), car comment obtenir, pour la navigation , qu’on en revienne aux caprices du vent ; pour les voyages de terre , au simple roulage et aux lourdes messageries, et pour nos fabriques et nos usines, aux manèges ou aux bras des bommes ? Il n’y a point de digues contre les besoins réels ou factices, profondément enracinés dans les mœurs des peuples ; point de danger en pareil cas, qui puisse faire faire un pas rétrograde. On peut comparer notre fiévreuse activité industrielle à la loco- motive échappée au chauffeur: si elle ne se brise en che- min, elle court jusqu’à épuisement complet de vapeur. Donc, si j'apprécie bien notre situation, nous sommes fatalement condamnés à voir, dans un temps relativement prochain , tous nos combustibles nous manquer à la fois, et par conséquent nous serions condamnés aussi à la plus désastreuse décadence , sinon à la barbarie, car point de civilisation sans la masse de combustible nécessaire à son développement. 568 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCF: C’est avec un sentiment pénible, Messieurs , que, dans le moment même où nous étalons si orgueilleusement nos richesses industrielles , j'ose vous entretenir de si noires idées ; mais ce n’est point en détournant les yeux d’un précipice qu’on l’évite , il faut au contraire avoir le cou- rage de le sonder , guidé par la prudence. Cherchons donc ensemble, Messieurs, si vous par- tagez mes craintes, les moyens d’atténuer ou d’éloigner le plus possible la catastrophe que je prévois. Voici pour cela les réflexions que j'ai l'honneur de vous soumettre : Nous avons un Code forestier, conçu au point de vue de la conservation des bois; il n’est point convenablement exécuté : en effet, on accorde avec un laisser-aller in- croyable les permissions de défrichement, sans doute dans le but spécieux d’augmenter les terres arables ; mais ce n’est point aux bois qu'il faut demander de nouvelles surfaces cultivables, c’est à nos 7 à 8 millions d'hectares de landes et aux merveilleux effets du drainage, Le même code est très-sévère contre les dégradations des bois; cependant le maraudage est tel qu’on pourrait croire cette sorte de propriété soumise au communisme, Sous ce dernier rapport, et contre la dent des animaux, une surveillance beaucoup plus active que celle qui existe est indispensable, Il est bien que la loi laisse le plus de liberté possible, à celui qui possède ; mais cette liberté ne doit pas aller jusqu’à compromettre , en même temps, les intérêts de la société et ceux du propriétaire. Or, voici ce, qui se passe : les bois, comme tous les autres produits agricoles, usent le sol qu'ils occupent trop long-temps; mais tout aménagement irrationnel hâte cette ruine. Il faudrait que ces aménagements fussent basés sur la richesse du. sol, CONSIDÉRATIONS SUR LE DÉBOISEMENT. 569 on les fixe, dans cette contrée du moins, presque géné- ralement à huit, neuf et dix ans. Ce mode est fatal, en ce sens que, par ce trop fréquent recepage, le bois en fonds substantiel s’use aussi vite qu’en terre pauvre et peu pro- fonde. De là la double perte dont je viens de parler, car il y a un immense avantage à une plus longue croissance des bons bois. Il conviendrait donc que tout aménagement au-dessous de dix ans, qui ne peut sagement être ap- pliqué qu'aux plus mauvais taillis, fût soumis à une per- mission raisonnée, c’est-à-dire précédée de la visite des lieux. Je voudrais aussi qu’on ne permît de défricher un bois qu’à celui qui justifierait d’un semis d’une étendue au moins égale, Je voudrais qu’on encourageât les semis par une dis- pense d'impôt pour la surface semée de cinquante ans , temps nécessaire pour que les bois soient un produit utile. Je voudrais que quiconque abat des arbres des pre- mières essences fût assujetti à en planter deux pour un, et que le propriétaire qui serait reconnu donner les soins les plus intelligents à la sylviculture en général, reçût un encouragement honorifique. Je ne connais pas de sujet de prix plus riche en conséquences. Je voudrais que, dans l’amélioration de la vicinalité, parfaite en soi, on eût plus d’égard aux arbres qui bor- dent les anciens chemins ruraux où ils causent le moins de préjudice à l’agrieulture et où ils offrent d’ailleurs les meilleures ressources pour tous les genres de construction. C’est bien assez des ravages des chemins de fer qui ne respectent rien, il faut subir ces derniers chemins: toutes les villes en veulent et finiront sans doute par en avoir: mais pourquoi ce luxe de largeur dans les voies simple- 570 INSTITUT DES PROYINCES DE FRANCE. ment vicinales (4) ? Ne suffirait-il pas que , bien ferrées, bien entretenues, deux voitures s’y évitassent aisément ? Le luxe n’est permis qu'aux riches, et nous sommes pauvres en surface cultivée et surtout en bois de con- struction. Le jardinier qui, manquant de surface sufli- sante , mettrait la dixième partie de son jardin en belles et vastes allées, en arrachant les arbres fruitiers en bon rapport qui bordent les anciennes, serait à juste titre taxé de folie. Cependant, c’est précisément ce que nous faisons pour nos chemins vicinaux : lors du cadastre, les voies publiques employaient 1,325,005 hectares du sol de la France , je ne crois point exagérer en élevant ce chiffre à plus de 2,000,000 depuis 1836. Ce qui équivaut à peu près au douzième de toutes nos terres arables. Dès que la tourbe paraît susceptible de se renouveler, je voudrais qu’il füt défendu de faire usage de la houille partout où le bois et la tourbe peuvent la remplacer, Je viens de lire qu’en Angleterre on avait heureusement substitué la tourbe à la houille pour le gaz d'éclairage: s’il en est ainsi, ce brillant, mais peut-être inutile éclai- rage, pourrait perdre l’un de ses graves inconvénients : il ne lui resterait plus que le danger des explosions. Je voudrais enfin que les allumettes chimiques fussent soumises aux réglements de police les plus sévères. Une explication est nécessaire ici, car on ne voit pas de prime abord ce que ces allumettes ont de commun avec le déboisement ; le voici : (1) Les chemins de celte nature, dits d'intérêt communal, reçoivent dans notre département une largeur de plus de 10 mètres ; en Angleterre, les routes Une de 4re, classe n’en ont pas d'avantage, CONSIDÉRATIONS SUR LE DÉBOISEMENT. 574 Ces allumettes, colportées par une foule. de gens sans aveu , placées dans les habitations, à la campagne sur- tout, à la portée même des plus jeunes enfants ; dans les poches de tous les fumeurs; sont, on peut l’affirmer , la cause la plus désastreuse du déboiséement. Qui peut nier que les si nombreux incendies dés bois et des forêts qui ont lieu, chaque hiver, par imprudence et trop souvent par malveillance, :ne soient dus à cette invention véritable- ment diabolique ? Et s’ilest vrai , ainsi que je l'ai appris d’un membre d’une Société d'assurance contre l’incendie , que, sur dix sinistres supportés par cette société, il y en a au moins huit qui appartiennent aux allumettes chimiques, ilest de la dernière évidence, par l'énorme quantité de bois consumé qu’il faut remplacer , que ces fatales allu- mettes sont le plus grand fléau de la sylviculture. Si on pouvait récapituler les pertes qu’elles ont occasionnées depuis qu’on en fait usage ; je ne doute point qu’on ne trouvât des milliards... Mais qu'est-ce que cela , quand on peut allumer sa pipe ou sa bougie par le plus léger frottement ?.… Chose dirait le Code pénal , par un excès de précau- tion, prononce une amende de 45 fr. contre le cultivateur qui néglige d’ôter le coutre de la charrue qui passe la nuit dans un champ, parce que ce coutre peut devenir une arme dangereuse dans les mains d’un malfaiteur; on entoure des plus minutieuses précautions la vente des toxiques dans les pharmacies; on défend aux épiciers le débit des substances vénéneusés , et pour cinq centimes, l’incendiaire, l’empoisonneur trouvent dans les foires, dans les marchés, partout en un mot, de quoi mettre le feu à 500 bois ou à 500 habitations et à Mie dal autant d'humains ! 572 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. S'il n’est pas possible de proscrire les allumettes chi- miques , toujours par la raison qu’elles sont entrées dans les mœurs, je ne connais rien de plus digne de la solli- citude du Gouvernement, de MM. les Préfets et Maires que la recherche des moyens de mettre, autant que possible , la société à l’abri de telles menaces. . Les mesures auxquelles les chiens viennent de donner lieu, sous le prétexte qu’ils sont sujets à la rage et qu’ils privent les hommes du pain qui les nourrit (mesures peut-être plus favorables aux voleurs et aux loups qu'aux honnêtes gens, pour la campagne du moins), me donnent l'espérance que le danger bien autrement grave que je viens de signaler sera prochainement atténué. Messieurs, j'ai essayé de démontrer que , par la force des choses, nos combustibles végétaux se trouvaient dans la plus funeste décadence; que nous usions et abusions, dans des proportions prochainement fatales , des combustibles minéraux et surtout de la houille : Qu'il y avait, dans une telle situation , danger de mort imminent pour la civilisation; Enfin , que, privés d’un remède radical ; il ne nous restait que de faibles palliatifs ; que l'espoir de prolonger quelque peu la vie d’une lumière, bien éclatante sans doute, puisqu'elle éblouit tout. le monde, mais certai- nement prête à s’éteindre faute d’aliment. Ce cri d'alarme , Messieurs, n’est pas nouveau ; ‘un profond penseur , dont j'ai oublié le nom, prédit, il y a bien des années , que la France périrait faute de bois. Qu’eût-il dit, s’il eût été témoin de ce qui s’est passé depuis notre première révolution , et surtout de ce qui se passe en ce moment ? Si la civilisation, ainsi qu’on l’a remarqué depuis long- -CONSIDÉRATIONS SUR LE DÉBOISEMENT. 573 temps , fait le tour du monde, ne serait-ce point parce que arrivée, ou pour arriver à une certaine hauteur, elle mine ses bases ? Pour moi, je reste dans la conviction bien profonde que, s’il ne surgit pas du génie humain, si fécond en merveilles en ce moment, un moteur à aliment iné- puisable, susceptible de remplacer la houille, nous cou- rons , à toute. vapeur , vers une grande catastrophe sociale. Avec le plus grand désir de me tromper, j'ai voulu livrer , Messieurs , à vos savantes méditations ce bien faible et sans doute dernier effort, dans la recherche de ce qui peut intéresser l'humanité, d’un vieillard qui sent que sa bonne volonté ne peut plus lui suffire, NOTICE SUR LES MACHINES A PANIFICATION ÉTABLIES A ROCHEFORT, | et sur LEURS PRODUITS EN BISCUIT DE MER ET EN PAIN FRAIS, Lue aux Assises scientifiques du 16 août 1955, Par M. AURIOL, Ingénieur de la marine , président de la Société d'agriculture de Rochefort. ; MESSIEURS, Vous savez que, depuis trois ans, on s’occupe presque partout en France d'améliorer les moyens de fabriquer le pain. En rendant hommage aux heureux efforts dont nous sommes témoins, pour le perfectionnement de l'art de la boulangerie, n’est-il pas juste de reconnaître d’abord les progrès qui remontent à vingt ans de date et qui sont dus à nos compatriotes de-Rochefort ? Dès l’année 1834, M. Aubouin, maître mécanicien dans notre arsenal maritime, a construit, avec l’approbation de M. le Ministre de la Marine, un pétrin-mécanique et un coupe-pâte pour la fabrication du biscuit de mer. Ces ingénieuses machines ont été établies dans les trois grands ports de Toulon, Brest et Rochefort. Permettez-moi de les décrire succinctement. Pétrin.— Étant données certaines quantités de farine et d’eau, dans la proportion convenable pour faire du _SUR LES MACHINES A PANIFICATION. 975 pain sans levain, à peu près comme 3 est à 4, la mani- pulation ordinaire se divise en deux actes essentiels qu’on distingue sous les dénominations de frasage et de pétrissage, Le frasage a pour but d'agiter la farine avec l’eau jusqu’à ce qu’elle prenne corps et soit amenée à l’état de grumeaux; On le fait dans les boulangeries ordinaires à bras d'hommes, C’est un travail de force musculaire, dont la difficulté augmente à mesure que les forces de l’homme s’épuisent. Quelquelois la pâte est molle et le pain est de qualité inférieure, parce que le frasage n’a pas été poussé assez loin, Le pétrissage a pour but de lier les grumeaux pour former la pâte, de malaxer celle-ci jusqu’à ce que toute trace de farine ait disparu, de l’affermir et de la faire prendre en masse parfaitement homogène. Il se fait avec les pieds. Deux ouvriers montent dans le pétrin, pressent avec les talons, abaissent, relèvent et corroient la pâte en tous sens. Voyons maintenant comment M. Aubouin exécute le frasage et le pétrissage dans son pétrin-mécanique. Sup- posons une cuve de 55°, de hauteur, ayant pour diamètre inférieur 1", 50°,, et pour diamètre supérieur 2”,, avec un noyau cylindrique de 50°. fixé sur la cuve, en sorte que l’espace soit réduit sur le fond à un chemin circulaire de 50°, de largeur. Une barre en bois est jetée au-dessus de la cuve , suivant un de ses diamètres et établie solide- ment sans la toucher, — Cette barre porte les agitateurs et les rouleaux cannelés dont les pignons sont mus par les roues d'angle d’un arbre horizontal en fer forgé, placé près de la barre et également indépendant de la cuve. 576 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Le mouvement imprimé par la tangente au bord de la euve la fait tourner sur elle-même en même temps que les deux agitateurs et les deux rouleaux cannelés tour- nent, à la manière des laminoirs, en sens contraire l’un de l’autre. Pendant que la cuve fait quatre tours, les agitateurs et les rouleaux en font sept. Les agitateurs sont composés l’un et l’autre de quatre tringles verticales en fer plat, placées autour d’un axe commun et de rayons différents. Ils opèrent l’agglomé- ration de la farine sur toute la largeur, 50°. du chemin circulaire. — Écartement des axes 21°. Les rouleaux cannelés, situés à l’autre bout de la barre transversale , sont dans une position verticale et ont les dimensions suivantes : Diamètre de chaque rouleau, avec les cannelures , 48°. Écartement des axes, 25°. Écartement des surfaces, 7°. Profondeur des cannelures , au nombre de quatre, 8°. Les axes sont reliés par le bas pour ‘assurer leur parallélisme pendant le travail. — La traverse supporte 1e renfort en bois ou frottoir, qui empêche la pâte de se loger entre le premier rouleau et le noyau. Lorsque le frasage est terminé, on procède au pétris- sage en élevant les agitateurs et en les remplaçant par une deuxième paire de rouleaux cannelés, dont les dia- mètres sont de 15°, L’écartement des surfaces exté- rieures est de 6°., et la profondeur des cannelures , au nombre de six, est de 25°. Ce pétrin-mécanique opère sur une quantité double de ce qu’on met dans les pétrins ordinaires , 460 kilog. de farine au lieu de 80. — Le mélange est environ 160 SUR LES MACHINES :A PANIFICATION. 577 kilog. de farine et 52 kilog. d’eau à 36° où 40° de tem- pérature , ensemble 212 kilog. - Temps employé pour le frasage avec cette machine, 10 minutes. Temps employé pour pétrir la moitié ou 106 kilog. , 5 minutes. | Temps employé pour pétrir l’autre moitié , 5 minutes. Par l’ancienne méthode, le pétrissage de 80 kilog. prend plus de 30 minutes, ou huit fois plus de temps qu'avec le pétrin de M. Aubouin. — Le même avantage se trouve dans le frasage. Coupe-päte. — La pâte pétrie est présentée en masse sur un chemin à rouleaux, inclinée vers une trémie, et elle passe entre deux laminoirs ou cylindres dégros- sisseurs, puis entre les deux cylindres finisseurs qui règlent l’épaisseur de la nappe. — Les deux paires de cylindres ont la même longueur 38°., et le même diamètre 09°. ; leurs vitesses relatives, dans le rapport de 4 à 2, sont déterminées par des roues d’engrenage, d’après la différence de leurs écartements, de manière que les finisseurs consomment exactement la pâte fournie par les dégrossisseurs. — Écartement des premiers cy- lindres, 20°. ; écartement des seconds cylindres, 7°, ; ces écartements ne sont pas dans le même rapport que les vitesses, parce que la nappe de pâte acquiert plus de largeur en passant des premiers aux seconds cylindres. La nappe est reçue sur une table horizontale, composée de planchettes entraînées avec une vitesse égale à celle de la circonférence des finisseurs, et elle se présente au coupe-pâte. Celui-ci se compose d’un cylindre dont la surface est divisée en seize compartiments, ayant chacun 25 578 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. la grandeur d’une galette de biscuit et disposés sur deux rangs. Ces compartiments sont. formés par des lames tranchantes perpendiculaires à la surface du cy- lindre , et il existe à l’intérieur des broches aussi perpen- diculaires à la surface , et devant marquer sur les galettes les trous qui les empêchent de se gonfler. — Les lames tranchantes et les broches divisent et percent la nappe à mesure qu’elle passe sous le coupe-pâte , entraînée par le mouvement de rotation de celui-ci. Pour empêcher adhérence des galettes au coupe-pâte, chaque paire de plaques mobiles, correspondant aux compartiments, est liée au moyen de deux tiges rigides à une 'tringle longitudinale qui chemine à l'intérieur du coupe-pâte, en appuyant ses extrémités sur deux conduits excentriques placés aux deux bouts du cylindre. Un arbre à cames, dont l'axe est situé au centre du coupe-pâte, presse sur le bout d’un levier coudé établi à chaque excentrique, pendant que les huit tringles tournent en suivant les conduits. Après une révolution complète , les tringles tombent successivement en pressant les plaques mobiles jusqu'aux bouts des broches, et les galettes se détachent., — Le diamètre du coupe-pâte est 0", 36°. et sa longueur 0". 38°. On peut voir le pétrin- mécanique de M. Aubouin et son coupe-pâte à la Direction des subsistances de la marine; le mouvement de rotation leur est imprimé par un manège de deux chevaux. Le pétrin entretient 4 fours à la fois, contenant chacun 500 galettes de biscuit, ensemble 2,000 , pesant 260 kil. Le coupe-pâte suffit à trois pétrins , et si l’on voulait ne point perdre de temps, il faudrait avoir un coupe-pâte, trois pétrins et douze fours, où cuiraient 780 kilog. de biscuit par fournée ‘et 6,240 kilog. pour huit fournées ou SUR LES MACHINES A PANIFICATION. 579 par jour. Un pareil établissement, tout simple qu'il paraît, dépasserait les besoins de toute la marine fran- çaise. Un seul homme , tournant la manivelle du coupe-pâte, peut produire trois galettes par seconde, et par consé- quent 108,000 par journée de dix beures. Chaque fournée élant de 500, on voit que le-coupe-pâte suffirait à 216 fournées par jour de dix heures ; résultat prodigieux ! En chauffant seulement quatre fois et en faisant huit fournées par jour, pour n’obtenir que la quantité de biscuit nécessaire au port de Rochefort, on trouve par le prix de revient de la main-d'œuvre , avec les ingé- nieuses machines de M. Aubouin, 0 fr. 93°. par 100 kil. de biscuit, et d’après l’ancien procédé 2 fr. 36°. M. Au- bouin a donc procuré dans la fabrication du biscuit de mer une économie de main-d'œuvre de 60 ‘7, La vitesse, quipourrait être accrue considérablement, a été seulement doublée parce que cela suffit à nos besoins. En ce moment, lé pétrin ne fonctionne point à Ro- chefort, | L'économie de main-d'œuvre aux ports de Brest et de Toulon, où l’on emploie un plus grand nombre de fours, dépasse 70 *.. En un mois et demi, on peut confectionner dans chacun de ces ports 8,760 quintaux métriques , quantité de biscuit suffisante pour dix vaisseaux de 120 canons, armés en guerre pendant cent trente jours , et qui, avec le complément de farine , suffirait pour plus de six mois de campagne. Après M. Aubouin, nous devons citer un autre de nos compatriotes, M. Cacault, maître serrurier-méca- nicien à Rochefort, — En novembre 1854, une com- mission prise dans le sein de la Société d’agriculture a 580 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. examiné une petite machine dont la destination se rapporte seulement au pétrissage. M. Cacault suppose que le frasage soit fait à l’ancienne méthode par la force musculaire des ouvriers ayant leurs bras dans la pâte ; il reçoit la pâte frasée sur une plate-forme circulaire qui tourne de gauche à droite, pendant que lés deux rouleaux pétrisseurs tournent de droite à gauche. Ceux- ci, longs de 0", 45°. affectent une forme conique et sont entourés d’alluchons sur toute leur longueur. — Ces rouleaux ont 0". 35°. de diamètre à la grande base et 0". 10°. à la petite base; l’écartement entre la plate- forme et l’extrémité des alluchons est de 0", 35°, — Le bâtis, la plate-forme et les rouleaux sont en bois, Le mouvement est imprimé. à l'arbre vertical de la plate-forme par un engrenage conique correspondant à une manivelle. — La Commission a pensé que ce pétrin, qui peut rendre de très-bons services , était suscep- tible d'améliorations, en diminuant lécartement qui sépare les rouleaux de la plate-forme et en remplaçant l’un d’eux par un rouleau plein, sans alluchons. : Ces diverses inventions, quel qu’en soit le mérite, ne forment point un système complet, et il a fallu en venir à Rochefort, comme dans plusieurs autres villes, au système Rolland qui résout de la manière la plus heureuse, comme vous le savez, Messieurs, le problème d’une bonne préparation et d’une bonne cuisson du biscuit de mer et du pain. — M. Rolland est un bou- langer de Paris , rue Descartes , n°. 8, qui, ayant obtenu à l’adjudication , la fourniture du, pain à l’école poly- technique , à un prix onéreux pour lui , et qui éprouvant sans cesse. des difficultés à l’admission de ses produits, que la commission , composée de jeunes. élèves, trouvait SUR LES MACHINES A PANIFICATION. 581 ou trop cuits, ou pas assez cuits , ou pas assez propres, réfléchit long-temps sur les moyens de réparer ses pertes et de mettre fin à toutes les plaintes. — Ces réflexions le conduisirent à inventer les machines que vous con- naissez , et dont il fit mystère pendant plusieurs années. M. Ménard, qui un peu plus tard est devenu son gendre , le décida enfin à prendre un brevet d'invention, et fit pour lui les plans, les notes explicatives et toutes les démarches nécessaires. — L’assôciation aujourd’hui connue sous la raison Rolland et Gie,, se compose des divers membres de la famille de l’inventeur. Cette association a une maison de banque à Amiens, et le nombre des appareils qu’elle a mis en activité, depuis 1852, dépasse 300. Il y en aura bientôt partout. MM. Luc et Cuisance sont venus de la Franche-Comté s'établir à Rochefort pour nous faire jouir du bénéfice des nouveaux procédés de fabrication. Vous savez, Messieurs, qu'ils ont un pétrin-méca- nique en bois, doublé de tôle étamée , ayant 16 lames en fer (8 grandes et 8 petites). Ge pétrin, de forme cylindrique, à 1°. 12°. de longueur, 0”. 90°. de diamètre ; les grandes lames qui alternent avec les petites sont disposées en double courbe formant l’& autour d’un arbre horizontal en fer, carré de 0”. 04°. et cet arbre porte une roue d’engrenage de 0”. 75°., mue par un pignon de 0". 75°., concentrique à la manivelle et au volant, dont le diamètre est 0". 95° et le poids 75 kilogrammes, | La pâte s'écoule entre les grandes lames quitiennent aux deux côtés du cadre, tandis qu’elle est étirée par les petites lames qui ne tiennent qu’au côté extérieur du cadre, c’est la plus ingénieuse partie du nouveau pétrin, 582 INSTITUT. DES PROVINCES DE FRANCE. La fabrication du pain frais est plus compliquée que celle des galettes de biscuit et lon y distingue plusieurs opérations. 1°. Des levains.— Le ferment qui sert à préparer de levain, doit être {rès-jeune | c’est-à-dire très-nouveau , afin d'éviter que la fermentation, panaire ou alcoolique ne se change en fermentation putride ; on émploie primi- tivement pour ferment la levure de bière. Le choix du ferment est d’une haute importance; sa pureté.exerce une grande influence sur la bonne qualité du pain, On prépare d’abord à la main une très-petite quantité de levain, puis, en ajoutant de la fariné et de l’eau dans le rapport de 2 à 4 ; on en augmente la quantité et l’on peut opérer le mélange dans le pétrin. L'application de la levure de bière à la panification ne remonte pas plus haut que le règne de Louis XIV ; la le- vure de bière , recommandée aux boulangers de Paris , en 1663; par le médecin Claude Perrault ; auteur de: la Colonnade du Louvre ; et par Guy-Patin , ne fut géné- ralement mise en usage qu'après un arrêt du Parlement, du 21 mars. 1670. On vend quelquefois des levures , falsifiées par un mélange de la fécule de pomme de terre , qui donne naïs- sance à une fermentation putride et peut troublerles fonc- tions digestives. Telle est la levure sèche ou levure hollan- daise. Il appartient à l'autorité d'empêcher cet abus, en faisant l’application des dispositions de la loi du:27 maïs 1854, qui punit la mise. en vente des substances falsifiées. Quand on a fait 90 kilog. de levain , comme il a été expliqué , il faut. le saler en y mettant 1 kilog. 474 ou 477 de son poids de sel, soit en grains, soit à l’état de SUR LES MACHINES A PANIFICATION. 589 dissolution. La préparation de 90 kilog. de levain , par l’ancien procédé, dure ‘au moins trente-six minutes ; en se servant du pétrin-mécanique, on n'y emploie pas plus de dix-huit minutes. Il s’agit ensuite de délayer ce levain , on ajoute, pour les 90 kilog., énviron 60 litres d’eau dont la tempéra- ture est d'environ 36°. On tourne la manivelle le plus vite possible, et l'opération est faite en deux minutes. Nous avons donc 30 litres d’eau pour la préparation du levain, et 60 litres pour le délayage ; en tout , 90 litres dans le mélange qui pèse, en ce moment, 150 kilog. ou exactement 151 kilog. 25 centig. 20, Pétrissage.—\] se décompose en deux opérations, le frasage et le contre-frasage. Il s’agit d’ajouter au mélange 120 kilog. de farine sans eau. On met d’abord dans le pétrin 90 kilog. et l’on tourne la manivelle deux minutes dans un sens, puis deux minutes dans l’autre et ainsi de suite; le frasage dure environ six minutes. Le complément de 30 kilog. de farine forme ce qu’on appelle le contre-frasage, le mouvement devient plus pénible ,et par conséquent il se ralentit, On tourne la manivelle trois minutes dans un sens, puis trois minutes dans l’autre, et ainsi de suite. La durée totale du contre-frasage qui se fait sur toute la masse-est d'environ douze minutes. Le soufllage se fait ensuite , en continuant à tourner et en changeant brus- quement, de, sens, de manière à comprimer l'air dans la pâte, lorsque celle-ei est au fond du pétrin.. Cette opé- ration, répétée plusieurs fois, dure environ trois minutes. Nous avons donc dix-huit minutes pour la préparation du 584 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. levain, puis vingt-trois minutes pour le délayagé, le pétrissage et le soufflage : ensemble quarante-une minutes. Le poids total de la pâte est 150-120 ou 270 kilog, , ren- fermant 33 ‘7, d’eau. On laisse fermenter cette pâte pendant vingt minutes dans le pétrin, puis on en emploie 180 kilog. à faire les pains de la première fournée , et il reste 90 kilog. pour servir de levain à la fournée suivante. La cuisson diminuant le poids des pains d'environ 477, quand on confectionne les pains, on met 477 de plus, aussi pour le pain de 2 kilog. 500 gr. , on ajoute 350 gr., et chaque pâton est de 2 kilog. 850 gr. pour faire un pain du poids de 2 kilog. 500 gr. , sortant du four. La sole du four est en tôle avec un carrelage par-dessus. L’axe vertical qui la supporte, descend à 2 ou 3 mètres et repose sur une crapaudine qui peut être élevée ou abaissée, pour proportionner la hauteur du four au volume des pains à cuire. Le foyer, chauffé au charbon de terre, au-dessous de la sole mobile, communique avec des tuyaux horizontaux, divergeant et conduisant la fumée par des tubes verticaux autour du four et débouchant dans un espace libre entre la sole tournante et le plancher qui est également en tôle de fer et recouvert de cendres pour empêcher la déperdition de la chaleur. MM. Luc et Cuisance commencent leur travail à dix heures du soir et le finissent à sept où huit heures du matin ; dans cet intervalle de temps, ils font cinq ou six fournées. La sole tournante du four à 3", 40°. de dia- mètre. Le degré de chaleur nécessaire pour la cuisson du pain est de 240°. — Le thermomètre , appliqué contre la porte du four, tombe à environ 140° pendant le repos de huit heures du matin à dix heures du soir, SUR LES MACHINES À PANIFICATION. 585 1 y a donc lieu de chauffer le four pour ramener la température à 240°. La dépense en combustible.est de 0 fr. 65 c. de houille pour la première fournée; Q fr. 0 c. pour la deuxième ; 0 fr. 25 c. pour la troisième ; 0 fr, 20 c. pour la quatrième ; 0 fr. 45 c. pour la cinquième ; terme moyen, 0 fr. 33 c. Dans l’ancien procédé, il faut consommer en bois ou fagots à la première fournée pour 1 fr. 70 c.; à la seconde, 0 fr. 90 c. ; à la troisième, 0 fr. 70.c, ; à la quatrième, O fr. 70 c.; terme moyen, 1 fr. La valeur de la braise est à peu près la moitié de celle du bois, c’est-à-dire 0 fr. 50 c., mais on en consomme pour chauffer l’eau au moins 0 fr.25 c. C’est donc 0 fr. 25 c. seulement à déduire et le terme moyen de la dépense pour chauffage est 0 fr. 75 c. dans l’ancien procédé. Après le pain, on cuit la pâtisserie, puis les viandes, sans addition de calorique, _Le four de MM. Luc et Cuisance est muni d’une chau- dière où l’eau est chauffée sur la plate-forme supérieure. La hauteur du four entre la sole et le plancher est ordi- nairement 0", 22°, : mais on peut l’augmenter en faisant varier la distance entre le plancher et la sole. Quand la pâte a fermenté dans le pétrin pendant vingt minutes , on forme les pâtons. Ceux-ci fermentent ensuite dans des corbeilles, sans qu’il soit besoin de les couvrir, la température de la chambre étant suffisamment élevée. Cette opération dure environ trente minutes. Pendant ce temps, on chauffe le four. L’enfournement prend dix minutes ; pendant la cuisson, on tourne la sole toutes les huit ou dix minutes. | | Le temps nécessaire pour la cuisson est de trois quarts d'heure pour les, petites couronnes, une heure. pour les 586 INSTITUT DES. PROVINCES DE FRANCE. pains de 2 kilog. 500 gr., et une heure et demie pour les pains de 5 kilog. et pour les gros pains bis. Le thermo- mètre ne baisse pas pendant l’enfournement , parce qu’on entretient le feu ; sinon la température diminuerait de 20° à 30°. — Quand on a fini d'enfourner, on cesse d'activer le feu et l’on ferme le registre. Après la cuisson, le thermomètre ne marque plus que 160° ; après lé défournement qui, pour soixante-dix pains de 2 kilog. 500 gr. , dure huït à dix minutes, on ferme la porte du four et le thermomètre remonte à 200°. Cette reprise de chaleur provient de celle de l’enveloppe du four et de la sole tournante, qui ne sont plus alors ra- fraîchis par la vapeur aqueuse qui se dégageait des pains. Mais ce n’est pas une chaleur qui se soutienne , et il n’en faut pas moins chauffer le four pour la fournée suivante : c’est ce dont on commence à s'occuper pendant le défour- nement. Il y a une cheminée de 0", 30°. de diamètre, pour le dégagement de la fumée du foyer ; lorsqu'elle a produit son effet pour chauffer le dessus du four, elle s'élève jusqu'au-dessus du toit d’une maison à deux étages , une autre cheminée sert à l’évacuation de la vapeur. Le personnel, indépendamment du maître, se compose de deux hommes. Avec l’ancien procédé, il faut six ouvriers boulangers, qui ne font que quatre fournées par jour. La dépense de combustible est réduite dans la pro- portion de 0 fr. 75°. à O0 fr. 33°. ou de 2,3 à 4. : Celle de main-d'œuvre est réduite dans le rapport * approximatif de 2,82 à 4. Rapport composé : 2,82 x 2,3 à 1 ou 6 172 à 1. L'économie serait bien plus considérable encore, si Pon SUR LES MACHINES À PANIFICATION. 587 cuisait d’une manière continue. En pareil cas, le nombre de fournées, par vingt-quatre heures, s’élèverait à plus de trente. — Trente fois 475 kilogr. font 5,250 kilogr. par jour, — Quatre fours et quatre pétrins-mécaniques pro- duiraient donc 21,000 kilogr. de pain; c’est plus qu’il n’en faudrait pour nourrir toute la ville de Rochefort. L'absence d’évaporation de la farine, son mélange plus intime avec l’eau et la parfaite égalité de cuisson assurent un rendement un peu plus considérable et une meilleure qualité de pain. MM. Luc et Cuisance, pendant plusieurs mois, ont fait une remise de 4 centime par 172 kilogramme ou de 10- centimes sur chaque pain de 5. kilogrammes; nous pensons qu’ils auraient pu maintenir cette réduction sans compromettre leurs interêts, comme on le pratiqué à Fontainebleau, à Lyon, à Marseille, au Havre, mais ils objectent qu'ils sont arrivés depuis peu de temps à Rochefort et qu'ils ont été obligés d’acheter à des prix très-élevés les farines, ce qui les a mis, sous ce point de vue, dans un état d’infériorité vis-à-vis des autres maîtres boulangers qui ont fait dés approvision- nements dans de meilleures conditions. On sait que les nouveaux appareils ont été établis à Trieste, pour la fabrication du biscuit de mer; et qu’on y a trouvé beaucoup d'avantages, Ce qui importerait surtout, pour avoir le pain au plus . bas prix possible, ce serait de réunir, dans le même établissement, toutes les opérations de la meûnerie et de la boulangerie, et de travailler. jour et nuit, à brigades relevées, sans interruption. On éviterait les fraudes qui nuisent à la qualité des farines , on sup- primerait beaucoup de pertes de temps et des. frais 588 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. intermédiaires entre le marchand de blé et le boulanger, et cette réduction profiterait au consommateur. — Un seul établissement suffirait pour Chaque ville ; on aurait une machine à vapeur pour faire tourner tous les pétrins mécaniques et exécuter tous les mouvements de haut en bas, dans les diverses parties de la minoterie. Dans ces termes, la diminution au-dessous du prix de la taxe pourrait être de plus de 5 centimes par 172 kilogramme. Un autre économie se trouve dans l’emploi du son. On sait qu’il contient sur 400 parties en poids : 54 de dextrine, amidon et sucre, 15 de gluten, 7 de sels et matières grasses , 40 de ligneux et 14 d’eau. La farine de, froment donne à l'analyse 73 d'amidon, 40 de gluten, 7 de matières sucrées. et albumine, 10 d’eau. La com- paraison de ces résultats fait bien comprendre pourquoi le pain bis nourrit mieux que le pain blanc, la pro- priélé nutritive étant due principalement au gluten qui renferme Pazote. | La comparaison du pain français, particulièrement celui qu'on obtient par les nouveaux procédés ; avec le pain änglais , démontre une grande supériorité dans notre manutention et dans la qualité de nos produits. Le pain anglais, qui n’est soumis à aucune taxe réglemen- taire et à aucun contrôle de l’autorité administrative , est mal: pétri et mal cuit; et lorsque le cours: dés farines est élevé, les meüûniers et les boulangers y mettent des farines inférieures de seigle ; riz, orge, maïs, quelquefois même des fécules de pommes de terre, de fèves ou de haricots. 7? #0 40 k, 8 | | Rendons justice à l'autorité , qui veille sans cesse ‘en France, pour que la fraude ou la concurrence ne vienne SUR LES MACHINES A PANIFICATION. 589 jamais mêler aux aliments essentiels, aucune substance nuisible à la santé. Ceux d’entre nous, Messieurs, qui ont servi dans les ports de Bretagne , ont vu comment se nourrissent les paysans de cette contrée, qui en tra- vaillant beaucoup , ne trouvent pas toujours les moyens d'acheter du pain de froment. Lorsque le blé est trop cher, le bas-breton mange de la bouillie d'avoine. C’est une nourriture saine, fortifiante et peu coûteuse, dont la préparation est facile. On fait sécher l’avoine dans un four, après qu’on a retiré le pain, puis on la ventile , on la porte au moulin pour la réduire en farine. Un kilogramme de cette farine est jeté dans 2 litres d’eau à 60° de température, et on l’y laisse fermenter pendant 40 à 12 heures, On ajoute de l’eau froide, et on verse le mélange dans un autre vase à travers un tamis de crin. — On recueille la fécule qui se dépose au fond d’un vase. On la fait cuire à petit feu avec un peu d’eau ou de lait, en y mettant du sel-et en agitant avec une spatule de bois pendant une heure. On mange cette, bouillie à la gamelle, en trempant chaque cuillerée dans du lait dont on a ôté la crème, ou dans du beurre fondu. L’avoine contient beaucoup plus de matière nutritive que la pomme de terre, sous le même poids. Le repas d’un homme revient à peu près à 10-centimes, c’est bien là assurément la vie à bon marché, et c’est de plus un aliment de bon goût et de facile digestion. Mais, Messieurs, si l’on créait dans chaque ville un grand établissement réunissant toutes les opérations de meüûünerie et de boulangerie, de telle sorte que le blé entrant par une porte, sortit par l’autre à l’état de pain , sans aueun intermédiaire entre le cultivateur ou 590 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. le marchand et le boulanger , le prix du 472 kilogramme , qui est en ce moment de 20 centimes pour la 4°, qualité, et 16 centimes pour la 2°, , que l’on considère comme la plus nutritive, s’abaisserait à 45 et 10 centimes environ. Le pain de froment parfaitement préparé, très- bien cuit , et d'excellente qualité ne serait donc pas plus cher que la bouillie d'avoine, Enfin le célèbre chimiste Liébig , dans une note très- intéressante qu’il a publiée récemment sur la panification, annonce qu’il à trouvé le moyen d'augmenter de 4712 la quantité de pain fabriqué avec une quantité donnée de farine ; il suffit de remplacer l’eau ordinaire par l'eau de chaux, en mettant 54 litres d’eau de chaux pour 100 kilogrammes de farine ; la portion de chaux introduite est très-peu considérable, puisque 900 litres d’eau n’en peuvent prendre qu’un 172 kilogramme ; mais M. Liébig affirme que cette addition rend le pain meilleur et plus substantiel. Un homme qui se nourrirait uniquement de pain de froment, dit-il, ne recevrait point assez de chaux pour son système osseux et deviendrait bientôt rachitique.— Mais comment expliquer l'accroissement de la quantité de.pain ? C’est sans doute, dit M. Liébig, parce que, sous la présence de la chaux, la farine fixe un plus grand poids d’eau. «Aide-toi, le ciel t’aidéra ! » La Providence n’a jamais fait défaut à ceux qui l’invoquent et qui observent la loi du travail. NOTICE SUR LES DIVISIONS TERRITORIALES ANCIENNES , CONSIDÉRÉES COMME ORIGINE DES PAROISSES RURALES ET DES FIEFS:; Par M. l’abbé A. VOISIN, Membre de l'Institut des provinces et de plusieurs Académies. Notre illustre directeur , M. de Caumont , le proclame avec raison : dans l’état actuel de la science archéologique rien n’est plus important que d'établir en chaque province la statistique des voies romaines et des localités habitées dans les quatre premiers siècles de notre ère; car bientôt il ne restera plus de témoins des anciens temps. A cette double question, d’ailleurs, selon nous, se rattachent la fondation des paroisses rurales et celle de nos fiefs primitifs. Dans sa séance du 23 janvier 1853, le Congrès des académies s’est demandé : Quelle a été l’origine de ces paroisses ? Les villæ gallo-romaines ont-elles servi de noyau aux fiefs ? (1) Envisagée au point de vue général, une réponse a paru difficile; on a reconnu que ce sujet devait être étudié dans chaque province, et c'est là justement un des immenses avantages de notre Institut et des assises scientifiques, qu'il dirige; les (1) Voyez les procès-verbaux du Congrès de 1853, dans l'Annuaire de l'Institut des provinces pour 4854. 592 INSTITUT DES-PROVINCES DE FRANCE. mêmes questions chaque jour sont proposées à l’examen de tous côtés et envisagées au point de vue local. Celles dont nous venons de parler, se trouvent entièrement élucidées : dans le Maine et les provinces limitrophes ; c’est pourquoi nous supplions les lecteurs de l'Annuaire de vouloir bien attacher quelqu’intérêt à la publication de notre carte archéologique, et de vouloir bien se de- mander maintenant : « Les divisions territoriales par condita et par vici, mentionnées fréquemment dans les documents historiques , antérieurs au X°. siècle, n’ont- elles pas été l’origine des fiefs et des paroisses primitives ? Les baronnies ne représentaient-elles pas les condita ou pagi minores, et les archiprêtrés; les châtellenies , au contraire , les vicairies et les doyennés ? » Il y a deux siècles et demi, Filesac publiait un excel- lent traité sur l’origine des paroisses. Les Epiîtres de saint Clément, de saint Anaclet, etc., prouvent que, dès le principe du christianisme, elles furent établies dans les cités et leur banlieue suburbium; mais que les évêchés ne devaient être fondés que dans les civitates majores, ou chefs-lieux d’une province notable. Défense formelle de placer des évêques dans les civitates minores, les castella et les villæ; c’est pour cela, sans doute, que les trois civitates du Maine ayant été réunies, les deux cités de Jublains et des Erviens n’eurent jamais de siége épiscopal. Il en fut de même probablement à l'égard de Corseuil et de plusieurs autres cités minores de l'Armo- rique. Anastase affirme qu'avant la fin du Ill, siècle, les paroisses avaient des bornes exactement déterminées et des cimetières spéciaux ; en outre, que, dès le second siècle, à Rome et dans les autres cités, on trouvait déjà des archiprêtres ou curés-cardinaux. Pour ce qui nous DIVISIONS TERRITORIALES ANCIENNES. 593 regarde en particulier, les premiers conciles de la Gaule et surtout ceux d'Orléans et de Tours; Sidoine Apolli- naire, saint Grégoire de Tours , Sulpice Sévère, etc., ne laissent aucun doute sur là fondation des paroisses rurales, dès les premiers siècles, et Pexistence des archi- presbyleri vicarii, presbyteri vicarii, diaconi, sub- diaconi vicarii et presbyteri villani, plebani. Sidoine écrit à l’évêque Bazile quelles ont été les suites de la persécution d’Eurick : Nulla in desolatis cura diæce- sibus parochiisque . . .., sed jam nec per rusticanas solum soliludo parochias, ipsa insuper urbanarum ecclesiarum conventicula rarescunt. Grégoire de Tours cite plusieurs archiprêtres ruraux de son diocèse et les fondateurs de bon nombre de ses paroïsses rurales ; rien de plus facile à croire que son récit. Le premier évêque de Tours, saint Gatien, reste cinq ans dans la cité; il convertit quelques idolâtres, et les réunit dans un oratoire souterrain, au-delà de la Loire. Cinquante années se passent, sous les fils de Constantin. Saint Lidoire transforme en église une maison qu'il obtient d'un sénateur; ce n’est qu'au temps de Gratien, que saint Martin fonde une paroisse et un monastère à Amboise, la seconde ville de son diocèse ; une paroisse à Chisseau- sur-le-Cher, pour la partie orientale du diocèse ; une troisième paroisse rurale à Candes, pour la partie occi- dentale; une quatrième à Sonnay, pour le nord; enfin, une cinquième à Tournon, pour le midi de la Touraine. Ces quatre points sont aux extrémités, sur les voies prin- cipales, et n’ont jamais manqué d’une assez grande impor- tance, particulièrement Amboise et Candes-sur-la-Loire. Les premiers successeurs de saint Martin fondent quelques paroisses moins éloignées de la ville principale, et 594 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. M. Bourassé s'imagine retrouver encore une partie des constructions primitives. Saint Brice construit sur le corps de saint Gatien un oratoire in publico poliandro; saint Vo- lusien fonde l’archiprêtré de Mantélomagus; enfin, Grégoire attribue le titre de vici ou même celui de chef- \ lieu de condita à une foule de localités érigées en pa- roisses : Mont-Louis, Mantelan, Joué, Neuilly, dans la Toùraine; le Loroux , en Berry; Gennes, Cré , etc., dans l’Anjou..Il fait allusion aux actes , anciens déjà de saint Ursin de Pourges, par lesquels nous apprenons que cet apôtre établit des paroisses dans les aulas ou basiliques de tous les vici du Berry. Les actes antiques de saint Julien du Mans sont entièrement conformes à ces derniers , et nous prouvent que notre premier évêque, protégé par l'Administration municipale, fonda des paroisses dans tous les vici du Maine; la charte de fondation de St.- Calais, donnée par. Childebert 1°. ; le testament de saint Bertrand; des chartes de Charlemagne, de son fils et beaucoup d’autres documents , antérieurs au X°. siècle , ne nous laissent aucun doute sur les assertions sui- vantes : | - 1°. La cité du Mans, comme celles d'Angers et de Tours demeura libre après la conquête. 2, Ces trois cités furent partagées selon le mode in- troduit par l’empereur Auguste , selon le témoignage de Suétone : quatorze condita ou regiones, appelées assez souvent pagi minores, arrondissements subdivisés en trois cantons ou vici, comprenant un nombre plus ou moins considérable de villæ. La banlieue ou condita de la ca- pitale de la province portait spécialement le nom de quinte, parce qu’elle s’étendait jusqu’à la cinquième pierre ou borne milliaire. DIVISIONS TERRITORIALES ANCIENNES. 595. 3°. Ce système de. divisions territoriales existait assu- rément sous la domination romaine , et persista jusqu’à la destruction des vici parles Scandinaves; les capitulaires des Carlovingiens rappellent encore qu'il n’était permis de célébrer les fêtes, de baptiser hors du cas de nécessité, et même d’inhumer que dans les églises cathédrales , les églises des cités et celles des vici publici : Festivitates præclaræ nonnisi in civitatibus :aut in vicis publicis teneantur ; aliubi non baptizetur nist in vicis publicis. Ce que, confirme Grégoire de Tours, en parlant du curé de Mantelan , vicus publicus important. De là ces églises rurales qui, si long-temps, ont joui d’une manière spéciale des droits de baptême et de sépulture. 8°. Non-seulement l'existence des quatorze dite du Maine et des quarante et un vici forains est démontrée par des textes nombreux et précis, que nous avons rassemblés, mais par des substructions, des débris de mo- numents gallo-romains ; par le passage des voies ferrées , une tradition locale positive et même par un site choisi. Les distances respeclives paraissent d’ailleurs: avoir été soigneusement calculées entre ces points qui marquent des stations sur les voies, et le plus souvent, enfin, les noms restent significatifs, comme : Vic, Neuf-vic, Vieu- vic, Vic-Braye, Noyen, Nogent, etc. Une douzaine de localités dans le Berry seulement conservèrent cette dénomination, que l’on rencontre à chaque pas en Tou- raine, en Poitou, dans l'Auvergne, au nord comme au midi, à l’ouest comme à l’est de la Gaule, et même au milieu des noms pris dans des langues très-diverses ; par exemple, en Bretagne, en Lorraine, en Provence, en Languedoc. 5°. Suétone nous apprend que les regiones où pagi se 596 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. choisissaient un baron patronus pour les protéger et les conduire; tandis que des juges ou vicaires, élus par le sort, administraient chaque vicairie : instituitque ut illas annui magistratus sortilo tuerentur ; hos Ma- gistri a plebe cujusque viciniæ electi. Les quatorze régions de Rome subsistent jusqu’à nos jours, administrées par leur puissant patron, comme au temps d’Auguste, Nos documents les plus anciens, relatifs au Maine, dési- gnent nos barons par les mêmes expressions : patroni regionum, et leurs lieutenants ou châtelains par les noms de curialis, vicarius, decurio, cités indistincte- ment; les assesseurs du comte ont le titre de prud'hommes, boni homines, honorati. Nous distinguons ainsi dans nos provinces les civitates majores et les civitates mi- nores réunies par Auguste; les pagi majores ou cités et les pagi minores ou baronnies; les vici majores _ chefs-lieux de la région , les vici minores chefs-lieux de la vicairie; les villæ majores ou paroisses, communes régies par un villicus major ou maire , et les villæ mi- nores ou villages, habitations particulières. Nos pagi minores où condita du Maine répondent justement à nos - baronnies primitives; ainsi le Sonnois, le Fertois, le Bas- Vendômois, le Passais, le pays de Sillé, de Laval, de Mayenne , de Sablé, de Château-du-Loir, etc. D’après notre Coutume , chaque baron devait commander à trois lieutenants châtelains, de même qu'auparavant le pa- tronus regionis a trois vicarii. 6°. Les actes de nos évêques nous font connaître par lesquels d’entr’eux furent fondées la plupart de nos pa- roisses rurales; l’acte de fondation de St.-Calais, les testaments de saintBertrand et saint Aldric, nousmontrent les villæ majores où communes rurales ayant dès le DIVISIONS TERRITORIALES ANCIENNES. 597 principe des limites exactement tracées , et comprenant , avant le VI°, siècle, la plupart des villæ minores et des métairies principales, que l’on retrouve de nos jours avec des noms très-peu défigurés. Ces mêmes documents nous attestent l'existence des doyens ruraux et des archiprêtres des pagi minores, Saint Aldric statue que chaque doyen rural aura soin d'apporter au synode la liste des curés décédés dans son doyenné, pendant l’année; bientôt après , les archiprêtres sont appelés archidiacres et remplissent les mêmes fonctions. Au VI°, siècle, saint Céneré , archidiacre romain , devient archiprêtre des Erviens, à Sauge; lorsque la Gaule prend la liturgie de Rome , elle prend aussi les titres de ses dignitaires. 7°. Les pièces historiques dont nous parlons, nous révèlent enfin que, dès le principe, les vici du Maine furent partagés entre le pouvoir civil et le pouvoir ecclésiastique ; plusieurs même restèrent indivis; les uns sont qualifiés de vici canonici, les autres de vici publici; quelques-uns sont tout à la fois canonici et publici. Dans ces derniers nous trouvons deux églises paroissiales : celle qui dépend du seigneur ecclésiastique, et celle qui dépend du seigneur laïque. Dans la quinte ou condita de la capitale de la province les seigneuries sont partagées : l’évêque a sa cathédrale et sa baronnie, son fief seigneurial long-temps uni avec celui du chapitre; le comte a sa paroisse, sa chapelle de souverain et son fief privé. Au moyen-âge, tous les deux ont leur château, leur cour féodale; dans les baronnies, il n’y a pas d’évêque , mais il y faut un chapitre, .une abbaye avec son prélat, en même temps que les marques de Ja haute-justice , la châtellenie a plusieurs paroisses et une chapelle seigneuriale, où l’on conserve l’étendard par- 598 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. ticulier ; elle a sa cour et les marques de la basse-justice. Depuis les temps primitifs les deux administrations civile et ecclésiastique marchent aussi de front, et adoptent le plus souvent les mêmes divisions territoriales. Au reste, le même système paraît se reproduire dans toutes nos provinces : à Bourges , le comte a son donjon dans les murs de la cité, l’évêque a le sien à Méhun Magdunum , hors des murs; il en est de même au Mans, à see à Tours , à Orléans , etc. Nous concluons en disant : Jules César trouve la Gaule partagée en un grand nombre de petites provinces; l’an 28 avant notre ère , Auguste organise cette partie de l'empire d’après le système qu'il vient d'établir à Rome même. Un cadastre ou dénombrement exact des per- sonnes et des biens s’opère ; plusieurs petites cités se réunissent pour former une province; plusieurs petites provinces, pour former une grande province. On voit alors jusqu’à soixante-quatre capitales qui abandonnent leur antique nom, pour prendre celui de l’empereur. Chaque petite province est divisée en quatorze districts, appelés dans la suite tantôt condita, tantôt pagi, re- giones , parochiæ, et enfin baronnies , du patronus qui les gouvernait. Chaque district se subdivise en trois cantons désignés sous le nom de vicus, vicinia, vicaria, du lieutenant ou vicarius, appelé seigneur-châtelain , lorsqu'après les ravages des Normands ces officiers se retirèrent dans des forteresses. La capitale de la province elle-même, le Mans en particulier, comptait quatorze vici urbani ou quartiers, dont les noms sont parvenus jusqu’à nous. Ce système de divisions territoriales subsiste sans changements notables jusqu’au X°. siècle et devient l'origine de nos fiefs et de nos paroisses rurales. Les DIVISIONS TERRITORIALES ANCIENNES. 599 Romains montrent le plus grand respect pour les bornes, dont ils font des divinités ; les provinces ont leurs limites exactement tracées ; les baronnies et leurs subdivisions également. Les chartes des premiers Mérovingiens entrent dans les plus minimes détails sur les bornes qu’elles fixent aux domaines, aux communes rurales, et cette démarcation paraît certainement observée fidèlement jusqu’à nous, comme limite des paroisses. Les voies anciennes servent surtout à partager les territoires, qui comprennent un nombre déterminé de bornes milliaires: ainsi la quinte ou banlieue en comprenait cinq, et la simple paroisse deux ou trois, au plus. Les documents relatifs à l’histoire du Maine sont si nombreux, si précis sur les questions que nous venons de traiter, qu’ils méritent toute l’attention des archéo- logues, et qu'ils nous permettent de dresser des statis- tiques complètes de nos voies et des localités habitées pendant la domination romaine. 600 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE, LES CONGRÈS EN 1855. Congrès scientifique de France. MIE TSE La XXII°. session du Congrès scientifique, qui a eu lieu au Puy, a justifié l'espoir qu’on avait conçu ; malgré plu- sieurs coïncidences fâcheuses, notamment la convocation pour le. même jour (10 septembre) du Congrès interna- tional de statistique ; quatre cent soixante membres ad- hérents étaient inscrits sur la liste qui a été distribuée à l'ouverture de la session, et si tous n’ont pu prendre part aux travaux, les séances ont toutes été très-suivies_et bien nourries. La section d'histoire naturelle et celle d’agriculture ont réuni le plus de membres ; venaient ensuite, dans l’ordre numérique des membres, la section d'archéologie et d'histoire , la section des beaux-arts, et enfin la section de médecine. : Sept membres de l’Institut des provinces : MM. de Caumont, directeur ; Bouillet, de Clermont ; l’abbé Croizet, de Neschers: Roux, de Marseille ; Le Gall, conseiller à la. Cour impériale de Rennes; Ricard, de Montpellier ; Challes, sous-directeur, à Auxerre, ont siégé cette année au Congrès. ; La Société française d'archéologie pour la conservation CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE. 601 des monuments comptait vingt membres présents au Congrès. -L’excellent résultat obtenu par le Congrès scientifique est dû particulièrement à l’habileté et au dévouement des secrétaires-généraux, MM. A. de Brive, Ch. Calemard de Lafayette, Aymard, et à celui du trésorier-archiviste , M. le docteur Martel. Il faut aussi rendre justice au talent de MM. les Secrétaires de section: ils ont rivalisé de zèle, et la rédaction des procès-verbaux était plus satisfaisante que dans la plupart des Congrès antérieurs. Voici la composition des bureaux : Président général, M. de Chèvremont. préfet de la Haute-Loire , commandeur de l’ordre de Saint-Grégoire- le-Grand, chevalier de la Légion-d’Honneur, président honoraire de la Société académique du Puy. Vices-présidents généraux, MM, de Caumont , membre correspondant de l’Institut de France; Le Gall, conseiller à la Cour impériale de Rennes; le docteur Roux, sous- directeur de l’Institut des provinces, à Marseille; Ber- trand de Doüe, membre de la Société géologique de France, au Puy. 1e, et 6°. sections réunies : président, M. l’abbé Croizet, curé de Neschers (Puy-de-Dôme), membre de l’Institut des provinces. Vice-présidents, MM. Bouillet, membre de linstitut des provinces; à Clermont; Félix Robert, conservateur du musée du Puy. 2°, section : président, M. le vicomte de Genouilhac, de Rennes. Vice-présidents, MM. le comte de Gourcy, de Paris; Bailly de Merlieux , de Paris; le marquis de Ruolz, d’Alleret (Haute-Loire); le baron de Chappelain, de la Lozère. 3°. section : président, M. le docteur Calemard de 26 602 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE; Lafayette , chirurgien de l’Hôtel-Dieu du Puy, Vice-pré- sidents, MM. Bertrand de Saint-Germain , à Paris ; Pailhoux, de Saône-et-Loire. h°. section : président, M. Bretagne, directeur des contributions directes, au Puy: Vice-présidents , MM. le comte Georges de Soultrait, de la Nièvre ; l'abbé Sauzet, chanoine du Puy; l'abbé Demiau, directeur du Grând- Séminaire , au Puy; Ricard, de Montpellier. 5°, section : président, M; le marquis de Miramon, membre du Conseil général du Cantal, Vice-présidents , MM. le comte de Croze, de Briouze ; l'abbé Coupe, chanoine et vicaire-général du Puy; l'abbé Montlezun , chanoine d’Auch ; Beliben , professeur au Lycée du Puy. Les séances étaient si bien nourries que l’on n’a pas fait toutes les excursions indiquées sur le programme, ce qui eût nécessairement entravé les travaux des sections. La section d'histoire naturelle a fait deux excursions très-courtes aux environs de la ville; la section d’archéo- logie , à laquelle s'était joint le Congrès tout entier, a visité en deux séances: les monuments ‘du Puy; la plu- part des membres du Congrès sont allés visiter aussi le château de Polignac. Les séances générales ont constamment attiré un grand nombre de dames : la salle était comble et Pon voyait avec plaisir la population sympathiser avec la réunion et s’énor- gueilir du choïx fait de la ville du Puy, Pas le = pour y tenir sa XXII°. session. M. de Chèvremont a fait un: discours fort applandf, le jour: de son installation comme président. M. le secrétaire- général de Brive a également pris la parole et a été écouté avec beaucoup de faveur; des morceaux très-intéres- | sants ont ensuite été lus par M. Ch. Calemard de Lafayette XXII: SESSION. 603 et par plusieurs autres membres. Les autres séances gé- nérales ont toujours été intéressantes par les communi- cations et les lectures qu’on y a faites. Mg”. de Morlhon a prononcé deux discours très-remar- quables, qui sera imprimé dans les actes. de la XXI°. session du Congrès. Sa Grandeur a offert au Congrès une brillante soirée; l'évêché et le:jardin étaient illuminés. Monseigneur a fait les honneurs de celte soirée avec la bonté, l’amabilité , qui’ lui sont familières. M. de Chèvremont: avait précédemment offert, aux membres du Congrès , un splendide banquet, à la pré- fecture. Le secrétaire-général de Brives a reçu de son côté , chez lui, les membres du Congrès. L’hospitalité la plus cordiale a ‘été exercée par MM. les secrétaires- généraux-adjoints et par plusieurs habitants du Puy; nulle part, les étrangers n’ont ‘été mieux accueillis. Mg. l'Évêque du Puy avait eu l’heureuse idée d’en- gager toutes les fabriques de son diocèse qui possédaient des objets d’arts anciens et remarquables, à les envoyer ‘au Puy , pendant un mois, afin d'en faire l’objet d’une exposition; cette collection a été beaucoup plus considé- rable qu’on ne lavait espéré : elle occupait la Salle des États, communiquant à la cathédrale; Ces objets avaient été disposés avec beaucoup de goût autour de la salle et sur une table qui en occupait le centre et divisait ainsi la galerie en deux, dans le sens de la longueur. Un rapportsur les principaux objets de cette exposition a été lu au Con- grès, On a demandé qu’un catalogue complet et raisonné des objets exposés, avec l'indication de leurs provenances, fût dressé avant leur renvoi, afin qu’il restât un rensei- gnement statistique qui permit de recourir, s’il en était besoin , aux localités auxquelles les objets appartiennent. 604 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE. 1] y avait aussi au Musée une exposition industrieHe intéressante : une grande salle était presqu’exclusivement occupée par les dentelles. Le dimanche 17 octobre, a eu lieu un concours agricole fort remarquable, et auquel tous les membres de la sec- tion d'agriculture et beaucoup d’autres membres du Congrès ont assisté. On a pu voir, dans tout son déve- loppement, la race bovine des montagnes volcaniques du Mezenc. C’est une race à robe, couleur nankin, très-sobre, très-laborieuse et bonne laitière, qui rend les plus grands services dans le pays. L’usage est de faire labourer les vaches dans la Haute-Loire, où l’on ne se sert presque pas de chevaux pour l’agriculture. La race Mezine, qui remplit à peu près toutes les conditions désirables pour le pays, est d’une taille convenable , et, avec quelques améliorations dans les formes , elle ne laisserait que bien peu de chose à désirer, Le concours se composait de quatre-vingts taureaux, de plus de deux cent vaches et génisses, et de quelques lots de moutons et de cochons; il commença à 9 heures : ce n’est qu’à 6 heures que les primes ont été proclamées. ELEU * Le 18, M. de Caumont a fait le rapport relatif au choix de la ville où devra se tenir le Congrès, en 1857 (on sait que ce sera à La Rochelle en 14856). Il a proposé la ville de Grenoble et présenté des lettres du Maire de cette ville, qui demandait la XXIV*. session du Congrès et as- surait de la sympathie de la ville pour cette réunion. La ville de Grenoble a été choisie pour $iége du Congrès en 1857. | | Tout porte à croire que la session de 1856 ne le cédera pas à celle de 4855. M. l'abbé Lacurie, secrétaire-général, a reçu des habitants de La Rochelle, Rochefort, Saintes, XXII*, SESSION. 605 et de toutes les villes de l'Ouest, les promesses les plus rassurantes. Le programme de la session ne tardera pas à paraitre. Congrès archéologique de France. La session du Congrès arehéologique de France, qu'avait préparée à Châlons M. Sellier, secrétaire-général, s’est ouverte le 24 mai, dans la grande salle de l’Hôtel-de- Ville. MM. de Caumont, directeur ; comte de Mellet , inspec- teur divisionnaire de la Champagne ; l’abbé Le Petit, se- crétaire-général de la Société française ; Gaugain, tréso- rier; Marcel Canat, de Châlons, membre de l’Institut des provinces ; Gayot, de Troyes, id.; Dérodé, prési- dent de l’Académie de Reims; l’abbé De Latour, de Reims ; Givelet, inspecteur de la Marne ; J. de Buyer, inspecteur des monuments de la Haute-Saône; Thiollet, de Paris ; baron de Troncenord, membre du Conseil gé- néral de la Marne ; Ponsart, id.; Garinet, de Châlons: de Granrut, architecte, à Châlons, et environ cent membres de Châlons et des villes du département de la Marne, ont répondu à l’appel de la Société française, Les questions du programme ont été successivement traitées. Diverses questions supplémentaires , ayant trait à la géographie des styles architectoniques et à certaines parties peu connues de l’histoire de l’art au moyen-âge, avaient fait l’objet d’un placard illustré, qui avait été distribué à l'ouverture du Congrès, Ces dernières ques- 606 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE. tions ont en partie été résolues par M. ‘de Gaumont, qui, toutefois, a voulu plutôt les mettre à l'étude pour l'avenir que les discuter à fond. Une excursion des plus intéressantes a été faite, le 26 , à Notre-Dame-de-Lépine et au camp dit d’Attila. Rien de plus important que le camp qu’on désigne , on ne sait pourquoi, sous cette dénomination. Évidemment, cette enceinte rétranchée du premier ordre, dont le vallum colossal est encore très-bien con- servé , malgré les dégradations des riverains qui le ro- gnent pour cultiver un peu plus de terrain, remonte à une époque bien antérieure à celle d’Attila. On y trouve beaucoup de médailles romaines et de médailles celti- ques en potin , dont plusieurs furent remises à la Société, lors de sa visite, par les laboureurs qui les avaient dé- couvertes, | | | Le plan est tellement bien tracé par le vallumet.les fossés profonds qui entourent ce retranchement, qu'il est très-facile d'en saisir d’un coup-d’œil la forme et l'étendue. M. de Caumont a fait sur place diverses obser- vations qu'il a communiquées à ses confrères; il a com- paré l'enceinte de la Cheppe aux camps romains qu’il avait observés et étudiés dans d’autres localités, et il n’hésite pas à déclarer que celui-là est un monument plus impor- tant que tous les autres ; il enclôt.effectivement environ 23 hectares. La rivière voisine , qui baignait d’un côté le pied de ces retranchements, alimentait d’eau les fossés profonds qui entouraient les autres parties de l’enceinte ; un barrage suffisait pour faire monter l’eau dans le fossé, La voie romaine de Reims à Metz passait à 200", du camp. La seconde partie du Congrès de la Société française ‘+ SESSION DE 4855. 607 s’est ouverte à Aix, le 4%, septembre. M. Roux, de l’Institut des provinces, inspecteur-divisionnaire de la Société , a été invité à présider la séance. MM. de Cau- mont; L. Gaugain ; Mg’. Rey, ancien évêque de Dijon, chanoine de St-Denis ; de Garidel, membre de l'Aca- démie ; docteur Talon , siégeaient au bureau , aussi bien que MM. les grands-vicaires du diocèse , chargés ,‘par Mg”. l’Archevêque , d'exprimer au Congrès les regrets de Sa Grandeur, que d'importantes affaires ont retenue hors de son diocèse plus long-temps qu’elle ne l’avait prévu. On remarquait dans la salle environ 50 membres, parmi lesquels nous citerons M. le marquis de Lagoy, membre de l’Institut de France ; le directeur du musée, divers membres de l’Académie et du Corps enseignant, plusieurs architectes. La municipalité avait donné une preuve de sa bienveil- lance éclairée, en offrant la grande salle de la Mairie, qu'elle avait. fait décorer avec autant de goût que d’à- propos. Un immense trophée s'élevait au-dessus de l’estrade et ‘occupait tout le fond, encadrant le buste de l'Empereur, surmonté d’un grand aigle aux ailes éployées, étouffant un serpent dans ses serres. Des faisceaux et des banderolles flottaient tout autour des parois. Les blasons des principales villes du Midi et de la Provence étaient placés dans les petits panneaux à cadres dorés. On re- marquait ceux d'Aix, Marseille, Avignon , Montpellier , Nîmes, Toulon, Digne , Draguignan , Grasse, Brignoles, Arles, Tarascon, Beaucaire, Pertuis, Manosque, For- calquier , Fréjus, St.-Remy, Lambesc, Pelissanne, Mar- tigues, Salon, etc. Dans les grands panneaux qui décorent le pourtour , des écussons ceints de branches de laurier: portaient en légende les noms des principales illustrations 608 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE. provençales. On y lisait ceux de Gallas, Pétroné , Réy- mond-Beranger, Arnauld Daniel, Bertrand d’Allamanon, René d'Anjou, Pellegrin , Esmenard , Désorgues, parmi les poètes ; de Campra, Gilles, Floquet, parmi les musi- ciens ; de Puget, Mignard, Vanloo, Chastel, Toro, Daret, Dandré-Bardon, Fauchier, Levieux , Constantin, Granet, parmi les peintres et les sculpteurs ; de Cundier , Beisson, parmi les graveurs. Cassien, Salvien, Saint-Césaire, re- présentaient les écrivains chrétiens ; Mascaron, l’orateur sacré; Mirabeau, Sieyès, Maury, Barbaroux, Manuel, les orateurs politiques ; Dumarsais, la grammaire; d'Ho- zier , la généalogie ; Gassendi, Vauvenargues, d’Argens, les philosophes; Euthymèmes , Pythéas, Adam de Cra- ponne, Cassini, les mathématiciens, géographes et in- génieurs. On remarquait encore les historiens Trogue- Pompée, Alberic d’Aïix, Le Mouge des îles d’or, César Nostradamus, Pitton, Bouthe, Papon, de Haïtze ; les jurisconsultes Fabrot, Thômassin , du Perrier, Monclar, Dubreuil, Siméon, Portalis; les savants, médecins et naturalistes Saint-Hermentairé, Arnaud de Villeneuve, Michel Nostradamus, Tournefort , Garidel, Darluc, Fusée Aublet, Adanson , Lacépède, Fonscolombe ; et enfin les érudits Peyresc, Galaup de Châsteuil, Barthélemy , de Méjanes, Baumier, Fauris de Saint-Vincens, de Lantier , Emeric David, Estrangin. Des bustes placés derrière les- trade faisaient revivre l’image d’autres célébrités locales. A Avignon, les séances du Congrès archéologique n’ont pas été moins fécondes qu’à Aix. MM. les curés d'Orange, d'Avignon , de Carpentras ; les vicaires-généraux ; plusieurs jeunes ecclésiastiques écoutaient avec avidité les aperçus présentés par le bureau et répondaient avec empressement à toutes les questions. | -SESSION DE 1855. | 609 M, Deloye , ancien élève de l’École des Chartes et con- sérvateur du’musée Calvet; a fait les honneurs. du musée lapidaire, très-riche et très-bien classé, auquel il ne manque plus qu’un catalogue imprimé. | Au palais des Papes, M. de Caumont a réfuté les asser- tions qui, avant la visite du Congrès, trouvaient encore créance à Avignon. En voyantau bout d’une grande galerie, qui n’est autre que l’ancienne salle à manger, une tour octogone terminée par un ancien clocheton , on en avait, sans plus d'examen , fait la salle de tortures et d'auto- da-fé de l’Inquisition, et l’on allait répétant à tous les voyageurs que là on brûlait les hérétiques. Le grand toit de pierre pyramidal octogone couvrait , en effet , comme au palais des dues de Bourgogne, à Dijon, comme aux abbayes de Fontevrault, de Marmoutiers , de Pontlevoy (V. l’Abécédaire d'archéologie de M. de Caumont , p. 56 et 196), les fourneaux et les tables destinés à préparer et à dresser les mets. La cuisine, d’ailleurs, communi- quait avec la grande salle à manger, et tout était dans l'ordre le plus naturel ; mais, à la Révolution, ces cui- sines étaient abandonnées, depuislong-temps on en avait oublié la destination, on aimait à évoquer les souvenirs fantasmagoriques de l’Inquisition, et les savants du temps avaient fait un lieu de supplice du laboratoire des cor- dons-bleus de la cour papale, Ils avaient même prétendu * que les malheureux étaient jetés, après leurs tortures, dans une salle souterraine munie d’une trape et qui communiquait avec la, cuisine. Cette salle voûtée a tou- jours été appelée glacière, dans les plus anciens plans du palais, et cette, destination s'explique très-bien par sa position sous la cuisine, La visite de la métropole a été faite le même jour, par 610 CONGRÈS DE L'ASSOCIATION NORMANDE. un temps magnifique, qui a permis au Congrès de monter sur les plates-formes de la grande tour, d'admirer le majestueux panorama qui se développe de tous côtés. En ce moment, le gros bourdon, nouvellement fondu , a été mis en branle , en l'honneur du Congrès et de la Société française d'archéologie pour la conservation des monu- ments. | Le fauteuil de la présidence du Congrès a été tour à tour occupé par M. le docteur P.-M. Roux, sous-directeur de l’Institut des provinces pour le Sud-Est, par Mg”, l’Ar- chevèque d'Avignon et par M. de Caumont. La plume des secrétaires était tenue par MM. Payan ; président de l'Académie d'Aix; Talon, J.-B. Gaut, Berluc de Pérussis et de Courtet, ancien sous-préfet. On a remarqué au bureau M. le chevalier Bertini, membre du parlement de Turin , et d’autres notabilités. Congrès provincial de l'Association normande. Dans le Congrès tenu par l'Association normande , à Avranches, en 1854, la ville de Caen fut choisie pour : siége du Congrès agricole, industriel et artistique, qui devait, d’après les statuts de l'Association ; s'ouvrir en juillet 4855. | Il fut, dès cette époque, arrêté en principe qu’une Exposition artistique aurait lieu à Caen, à la même époque, et qu’un appel serait fait à tous les fabricants de machines SESSION. DE: 4855. 611 agricoles , afin. de donner plus d’importance au Concours d'instruments aratoires. D’autres délibérations portèrent que le concours pro- vincial de bestiaux aurait lieu à Bayeux, pendant la ses- sion, MM. Despallières, maire, et. G. de Villers, adjoint de la ville de Bayeux , s'engagèrent à tout préparer pour donner à cette fête un grand éclat, Ges dispositions arrêtées, le bureau de l'Association normande n’a rien négligé pour donner au Congrès nor- mand la plus grande publicité. Les affiches des concours ont-été apposées dans toutes les villes et chefs-lieux de canton de la province : le concours d’instruments ara- toires et de machines a été annoncé dans 20 départements, en même temps que l'Exposition artistique recevait aussi une grande publicité. M. Morière , secrétaire-général, adressa le programme suivant à tous les membres de l’Association : 1. Quels progrès a-t-on faits depuis dix ans en Nor- mandie, dans le traitement du sol arable, dans l’amen- dement des terres les unes par les autres, dans l’ameu- blissement du sol par les moyens mécaniques ? Quels travaux doit-on entreprendre encore pour l'amélioration des terres , dans les différentes régions agronomiques de la Basse-Normandie ? 2. Est-il vrai que, toutes choses égales d’ailleurs, la fer- ilité des terrains soit en raison de leur ancienne mise en culture ? Certains terrains ont-ils perdu , par une culture prolongée, les éléments nécessaires à la production des récoltes ? 3. Quels ont été, depuis dix ans, les principaux pro- grès agricoles opérés dans la plaine de Caen ? Quels en 612. CONGRÈS DE:L'ASSOCIATION NORMANDE. sont les produits actuels ? Quel assolement à ste dans les exploitations les plus avancées? h. Même question pour l’agriculture du Déssins 5. Les engrais pulvérulents peuvent-ils remplacer com- plètement les fumiers ? Le système qui consisterait à employer presqu'exclusivement les engrais pulvérulents offre-t-il des inconvénients graves ? 6. Où en est la zootechnie dans nos contrées agricoles? Y a-t-il amélioration dans les races bovine , ovine et por- cine ? Quels sont les faits et les tendances dignes d’être notés sous ce rapport ? A-t-on tenté quelques essais d’acclimatation qui puissent enrichir nos, basses-cours de nouvelles espèces ? 7. Quelles notions nouvelles a-t-on obtenues sur la valeur nutritive comparée des différentes racines. em- ployées à la nourriture du bétail ? Présenter le tableau complet et synoptique de ces valeurs comparées ? 8. Même question pour les fourrages. 9. Quelle est limporlance de la nature variée des aliments, au point de vue de l’engraissement des ani- maux ? Peut-on, à ce sujet, indiquer des formules qui puissent être régulièrement observées dans la pratique ? 10. Quel est le meilleur aménagement des laiteries , au point de vue de la production de la Crême et du beurre ? | 11. Quel est le rapport en poids du beurre à celui de la crème; en d’autres termes, combien en moyenne faut-il de crême pour obtenir un kilogramme de beurre ? 42. Par quels moyens pourrait-on développer, dans nos campagnes, une véritable vocation agricole ; l’édu- cation agricole n’a-t-elle pas été oubliée en France ? Quels seraient les moyens dela créer, afin d'obtenir des résultats LSESSION DE 1855, 613 que l’on appelle de tous ses vœux et qu’on ne peut attendre de l’enseignement agricole actuel ? 13. Le fer peut-il être substitué avec avantage au bois pour le cerclage des tonneaux et des tonnes? 14. Par quels moyens pourrait-on remédier à l’incerti- tude et à l’imperfection du bornage, dans les pays de plaine ? -45. Quelles seraient les mesures administratives à prendre relativement à la police de la pêche et au régime des eaux? 16. Quels seraient les moyens à employer pour déve- lopper lés idées industrielles dans notre département? 17. Quelle est, dans la Normandie, l’industrie la plus profitable aux intérêts agricoles? 18. Quels sont les meilleurs systèmes de foyers, au point de vue de l’économie du combustible et de la com- bustion du gaz? 19. Quels sont les Hbitienté systèmes de chauffage et de ventilation des édifices publics et des ateliers indus- triels, au point de vue hygiénique ? 20. Quelles modifications peut-on introduire dans l’ar- chitecture privée de nos maisons urbaines, au point de vue de l’ornementation extérieure et intérieure , du a général et de la distribution ? 21. Quels changements doit-on introduire dans l’archi- tecture rurale? Les progrès de l'agriculture n’ont-ils pas rendu nécessaires des modifications importantes dans la disposition des fermes ? | 22. Quelles sont ces principales modifications? Indi- quer les changements qui peuvent être faits dans les con- structions existantes. 23. Quelles sont, indépendamment de ces change- 614 CONGRÈS DE L'ASSOCIATION NORMANDE. ments, les additions les plus Wen à faire dans nos fermes ordinaires ? 24. Quelle est la meilleure disposition à adopter pour les fermes que l’on construit à neuf? 25. Quelest le plan le plus convenable pour l'accès et les grandes entrées des établissements agricoles (arrivée, forme et dimensions des portes, etc., etc.)? N’est-il pas temps d'appliquer à cette partie importante des propor- tions et des formes moins défectueuses que celles ss on y voit trop souvent ? 26. N’est-il pas temps d’embellir , par quelques plan- tations peu coûteuses, les abords de nos constructions rurales ? En quoi ces plantations devraient-elles consister ? 27. En considérant l'absence complète de goût qui se révèle à chaque pas dans nos campagnes, ne devrait-on pas donner à ce sujet, aux instituteurs primaires, des no- tions qu’ils pussent transmeltre dans les communes ru- rales ? 28. Quel est le plan le meilleur pour les mairies des communes rurales ? 29. Même question pour les mairies et justices-de-paix des chefs-lieux de canton ? 30. Quelle surveillance l'autorité départementale peut- elle exercer sur les constructions d'utilité générale? Com- ment pourrait-elle obtenir que les travaux fussent irré- prochables, soussle rapport des formes et de la disposition intérieure et extérieure ? 31. Quelles dispositions doit-on recommander pour les cimetières des villes et des campagnes? 32. Quelle serait la réforme à introduire dans les mo- numents funèbres, le plus souvent d’un goût si déplo- rable ? SESSION DE’ 1855. ! F 615 33. Quels sont les embellissements dont la ville de Caen est susceptible et quels travaux sont les plus urgents et le plus immédiatement réalisables? 34. Quels services doit s’efforcer de rendre la presse locale, au point de vue de l'instruction générale et de la diffusion des connaissances utiles ? Congrès de l'Association bretonne. . L'Association bretonne a tenu, en 1855 , son. Congrès provincial à Brest; les discussions ont été intéressantes. M. de Caffarelly, député, ancien préfet d’Ille-et-Vilaine , a élé nommé directeur , en remplacement de M. le comte Olivier de Sesmaisons. EXPOSITION. ARTISTIQUE | A CAEN, en juin | 1855, SOUS LE PATRONAGE DE L'INSTITUT DES PROVINCES. L'Institut des provinces a organisé sur plusieurs points de la France des expositions régionales; les unes ont eu lieu sous son patronage direct, d’autres ont eu lieu à son instigation ou d’après ses conseils, sous le patronage des Sociétés savantes des divers départements. Au congrès scientifique de France, qui se tint à Rennes en septembre 1849, l’Institut présenta un projet de division de la France qui fut adopté. Depuis lors, des expositions régionales ont eu lieu dans plusieurs provinces, et si elles n’ont pas abso- lument suivi les circonscriptions indiquées, elles ont du moins adopté le principe de l’Institut, consistant à pe plus, comme on l’avait fait auparavant, se borner aux produits d’un département exclusivement, La réunion générale de l'Association normande pour les progrès de l’agriculture , de l’industrie et des arts, à Avranches en 1854, fit provoquer, dans cette ville, une exposition artistique, et cette idée fut irrévocable- ment adoptée dans les conférences particulières aux- quelles assista , dans cette ville, M. de Caumont , en avril 1854. L'exposition artistique d’Avranches fut organisée par l’Institut des provinces et par la Société française pour EXPOSITION ARTISTIQUE , À CAEN. 617 la conservation des monuments. Cette dernière Société consentit à se charger de tous les frais; elle confia la direction de l’expoosition à M. E. de Beaurepaire , un de ses membres, juge au tribunal d’Avranches. Le Congrès agricole, industriel et artistique de l’Asso- ciation normande , dans sa séance du 22 juillet 1854, à Avranches, choisit la ville de Caen pour siége de sa session de 14855. Il arrêta, après une longue discussion, à laquelle prirent part MM. Bordeaux, Durécu (de l'Eure), Mabire ( de la Seine-Inférieure) , que l’Insfilut des pro- vinces et la Société francaise seraient priés d'organiser, à Caen, vers l’époque du congrès, une EXPOSITION AR- TISTIQUE. M, de Caumont, président de ces deux Sociétés, con- sentit à se charger d'organiser cette exposition. C’est en vertu de cette décision du Congrès que l’Institut des provinces publia l'affiche suivante : EXPOSITION ARTISTIQUE A CAEN, EN 1855. Conformément à l'autorisation du Conseil municipal de Caen , à la décision prise à Avranches, en juillet 1854, et à l’arrêté pris par l’Institut des provinces, une exposition de Peinture , de Sculpture, de Dentelles, de Broderies, de Meubles de luxe , etc., etc., etc. , aura lieu à Caen, à l’occasion du Congrès régional, agricole , industriel, artistique de l'Association normande. Cette exposition s'ouvrira le 15 juin 1855 , elle com- prendra les ouvrages des artistes de tous les départe- ments sans exception. | 618 INSTITUT DES PROVINCES DE. FRANCE. É. 1 i Commissaires pour la réception des objets. MM. ; Marquis de CHENNEVIÈRES, inspecteur-gé- néral des musées de province ; OUDINOT, peintre, membre de la Société. française d'archéologie ; A. DARGEL, inspecteur de la Société fran- çaise d'archéologie ; Rouen. Porier et de GLANVILLE , membres de l’In- stitut des provinces ; Évreux. ;. R. BORDEAUX , docteur en droit ; | Alençon. DE LA SICOTIÈRE , membre de l’Institut des provinces ; Avranches. À. de BEAUREPAIRE, juge suppléant ; Rennes.: . Alfred RAMÉ, membre Ge l’Institut des pro- vinces ; Auxerre, CHALLES, membre du Conseil général; Coutances. RENAULT , Membre de l’Institut des pro- vinces ; Le Mans... HUCHER , id. | GuizLorx aîné, président de la Société in- Paris. Angers. dustrielle ; GODARD-FAULTRIER,COnservateur du musée; Tours. LAMBRON DE LiGNim , membre de l’Institut; Moulins. À. de BurE, président de la Société acadé- mique de l'Allier ; | Poitiers: L'abbé Auger, chanoine, membre de l’In- stitut des provinces ; Nantes. Succ, membre de l’Institut des provinces ; S1,-Brieux. GESLIN DE BOURGOGNE, inspecteur des mo- numents historiques ; EXPOSITION ARTISTIQUE, A CAEN. 619 Troyes. GAYoT , secrétaire de la Société d'agricul- ture , sciences et arts ; Châlons. De BARTHÉLEMY, inspecteur des monu- ments ; Amiens. GARNIER, Conservateur du. musée. Une commission spéciale sera formée, à Caen, pour: la réception des ouvrages présentés directement. dans cette ville. | Tous les objets devront être parvenus à l’Hôtel-de- Ville de Caen avant le 40. juin, sous peine d’être refusés. Le Directeur.général de l’In- Vu par le Maire de Caen, chevalier de la Légion- stitut des provinces, d'Honneur, membre de l'Institut des provinces, À. DE CAUMONT. | F.-G. BERTRAND. L'Institut des provinces, dans une séance générale tenue à Paris le 26 mars, détermina, sur le rapport de M. R. Bordeaux , quels devront être, à l'avenir, les objets admis dans les expositions artistiques , et adopta l'arrêté suivant applicable à celle de Caen : ‘A. Peinture dans toutes ses variétés : à l'huile, à la cire, aquarelles, miniatures, dessins, etc. 2. Sculpture, statuaire , bas-relief, ornement , etc. ‘ 8. Statuaire coloriée, peintures murales, à fond d’or , etc. h. Architecture , études archéologiques, jardins , etc. 5. Gravure et lithographie dans toutes leurs branches. 6. Photographie, 7. Glyptique , gravure de médailles , intailles, camées, gravure héraldique. 8. Peinture sur verre. 9. Mosaïque. 620 INSTITUT DRS PROVINCES DE FRANCE. 40. Émaux, 11. Produits de art du lapidaire. 12. Verrerie artistique. 13. Céramique, terres cuites , porcelaines, faïences et grès d'ornement, imitations des poteries de Palissy et d'Italie. 14, Ivoires. 15. Orfévrerie. 16. Ciselure et damasquinure ; art du monteur en bronze et du fondeur. A7. Ébénisterie et hucherie artistique, incrustations, bois sculptés. : 18. Tissus historiés et ouvrés ; tapisseries et étoffes à sujets dans le style du moyen-âge. 19. Guipures et dentelles ornementées; points coupés. .:20. Broderies , art du chasublier et du filigraneur. 21, Typographie de luxe, impression sur vélin et en couleur. 22. Reliure d'art. En un mot, tous les ouvrages qui relèvent des arts du dessin et qui dépendent du sentiment artistique plutôt que des procédés simplement industriels. L'avis suivant fut inséré dans les journaux : MM. les exposants sont invités à joindre à leurs envois, outre leurs noms et adresses , toutes les indications utiles pour la rédaction du livret détaillé et illustré qui sera publié. Pour les ouvrages qui sont l’objet d’une fabrication in- dustrielle , tels que les tissus, l’ébénisterie, les vitraux , les reliures, on devra aussi ajouter le prix de chaque objet exposé. Quelques copies pourront être admises, surtout si elles EN 1 EXPOSITION ARTISTIQUE, À CAEN. 621 reproduisent d'anciennes œuvres d’art, mais dans ce cas, les exposants sont expressément invités à déclarer qu’il s’agit d’une copie et à indiquer le musée ou la collection où se trouve l'original. La durée de l'exposition sera de vingt-cinq jours ; elle s’ouvrira le 15 juin et sera close le 10 juillet, Tous les ouvrages devront parvenir à l’adresse de M. de Caumont , à l’Hôtel-de-Ville de Caen, avant le 40 juin, terme fatal. Arrété de l'Institut des provinces du 26 mars 1855. Dans cette séance , l’Institut arrêta que le jury , chargé de décerner les récompenses à l’Exposition artistique de Caen , serait ainsi composé : 4°. Des membres de l’Institut des provinces qui rési- dent à Caen, et de ceux qui se trouveront dans cette ville pendant l'Exposition ; 2°, Des commissaires chargés de recevoir les envois dans ‘les différentes villes, conformément au tableau publié sur les affiches (v. la p. 618); 3°. Des commissaires spéciaux formant à Paris la Com- mission d'admission ; Le. Des hauts fonctionnaires de Caen et du département du Calvados ; Mg". l'Évêque , M. le premier Président, M. le Procureur-général, M. le Recteur , M. le Général commandant le département, M. le Préfet et M. le Maire ; 5°. De sept membres de la Société française pour la conservation des monuments et de sept membres de l’As- sociation normande , sociétés qui ont déclaré, à Avran- ches, en juillet 1854, prendre l'Exposition ee sous leur patronage, 622 INSTITUT. DES ménanies DE FRANCE. Les membres de la Société française désignés sont: «: MM. le comte d’Hondetot, membre de l’Académie des beaux-arts; Guy , architecte; de Nozan ; Bazin; G. Guil- bert ; Guillard ; de Brébisson. Les membres de l’Association normande désignés sont : MM. Abel. Vautier, député ; Maïnfroy, commissaire- priseur ; Auvray , architecte; Levavasseur ; G. Rupalley ; Verrolles , architecte du département; Valette, fabricant de dentelles. | L'Institut des provinces a désigné pour président du Jury M. lé comte d’Houdetot, membre de l'Académie des beaux-arts. AT OR D Le déballage des tableaux a commencé le 8 juin, MM. Oudinot et Le Harivel du Rocher ont bien voulu s’adjoindre à M. de Caumont pour diriger le classement ; et le 44 juin tout était terminé. OUVERTURE DE L’EXPOSITION. Le 15 juin 1855, à midi, M. de Caumont, directeur de l’Institut des provinces, accompagné des membres du Jury, a ouvert le salon d'exposition , en présence de M. le Préfet. de M. le Maire, de M. le premier Président , de M. le Procureur général, des autres autorités de la ville et des membres du Conseil municipal ; il a prononcé lal- locution suivante :. MONSIEUR LE MAIRE, L'exposition artistique que nous ouvrons aujourd’hui ne doit être considérée, pour notre wille de Caen, que comme un essai, comme un premier pas dans une voie EXPOSITION ARTISTIQUE , À CAEN, 623 qui peut être féconde en bons résultats pour les progrès de l’art et du got. | Nous avions, avant tout , songé à intéresser le Conseil municipal à la réalisation du projet conçu par l’Institut des provinces , recommandé par l'Association normande et la Société pour la conservation des monuments, l’année dernière , au Congrès provincial tenu à Avranches. Mais les dépenses extraordinaires faites par la ville , en 4855, ne lui ayant permis de voter aucune subvention pour nous venir en aide, nous nous sommes borné à garnir les murs de la salle des Réunions publiques, en fai- sant quelques dispositions peu coûteuses pour la distribu- tion de la lumière. Ainsi préparé, le local, que nous devons à notre habile architecte, M, Guy, n'avait qu’un défaut, celui d’être trop petit ; et , au lieu d’appeler un grand HObre d’ar- tistes, nous avons dû nous arrêter dans la publicité donnée d’abord à notre projet d'exposition, Deux mille tableaux auraient pu, en effet, arriver à Caen, si l’In- stitut des provinces avait donné l’ordre à ses membres de les envoyer, et si les frais de transport eussent pu être mis à la charge de l’Administration municipale. Or, il eüt été difficile d’en recevoir un pareil nombre, sans des dispositions spéciales , qui auraient entraîné des dé- penses que nous voulions éviter. Il était nécessaire de mieux définir qu’on ne l'avait fait précédemment, en quoi doit consister une exposition artistique ; l'Institut des provinces a publié une instruc- tion à ce sujet, et rangé dans vingt-deux catégories les ob- jets qui peuvent y figurer. Vousallez voir, Monsieur le Maire, que toutes ces caté- gories nesont pas représentées ; l’exiguité du local n'aurait 624 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. pas permis de donner à chaque spécialité l’espace qu’elle aurait pu légitimement réclamer ; toutefois, on peut dire que , par la quantité des tableaux et par la variété des objets , l'Exposition artistique de Caen mérite l'attention des étrangers qui viendront assister au congrès de l’As- sociation normande, le 4 juillet prochain, et qu’elle offre beaucoup d’intérêt pour tout le monde. Nous avons élé puissamment secondé dans le classe- ment des objets par MM. les membres du Jury, surtout par les deux artistes éminents qui sont venus de Paris nous aider de leur coopération dévouée : MM. Le Harivel et Oudinot ; qu'ils reçoivent nos remerciments.. Que M. le comte d'Houdetot les reçoive aussi , pour l'empressement avec lequel il s’est rendu au milieu de nous pour présider le jury d'admission. Il ne nous appartient pas, Messieurs, de déterminer le rang que doit prendre l'exposition artistique de 1855, parmi celles du même genre qui ont eu lieu sous la direc- tion de l’Institut des provinces, à Rennes , à Bourges , à Lisieux , à Clermont-Ferrand, à Avranches et dans plu- sieurs autres localités ; mais nous espérons qu’elle fera honneur à notre ville de Caen ; que l’art y gagnera et que tout le monde s’applaudira d’avoir pris part à la réalisa- tion du projet conçu par les hommes éclairés que le Con- grès provincial réunissait à Avranches, l’année dernière. Nous vous remercions, Messieurs d'être venus pro- clamer avec nous l'ouverture de ce palais des arts et nous vous invitons, au nom de l’Institut des provinces, à jeter un coup-d’œil sur. les collections qu'il renferme, avant que le public y soit admis. M. Bertrand, maire de Caen, a répondu au nom du “EXPOSITION ARTISTIQUE, À GAEN. 695 Conseil münicipal et rémercié M. de Caumont, le Jury et l'Institut des provinces, des soins qu'ils ont bien voulu prendre pour l’organisation dé l'Exposition artistique. . Voici la liste des récompenses que le savant rapporteur du Jury, M. Duchatellier, a proclamées en séance pu- blique , le lundi 9 juillet, devant un nombreux auditoire, et qui ont été remises aux exposants par M. le Préfet du Calvados : | PEINTURE. © Médaille 4°, classe : M. J.É. Leman, né à Laïgle (Orne), ahcien pensionnaire de la ville de Caen. Médailles %. classe : M. Morin, professeur de peinture à l’école de Rouen ; — M"*. Pigault, née Faucon (de Caen) ; — M. A. Guillard, conservateur du Musée de Caen, né à Caen; — M. P. Le Chevalier, hôtel de la Vic- toire, à Caen. Médailles 3°, classe : M", L. Eudes de Guimard, née à Argentan (Orne); MM. Charles Cotard, à Caen : — Baptiste Quesnel , à Caen ;— Lavieille , à Caen ;— Monin, à Caen ; — Ed. Legrain, à Vire. Médailles 4°. classe : MM. Lottin de Laval, d’Orbec : —E, Julien, à Caen; — P, Malenson,, à Roue: —- Au- guste Jémard , capitaine au 3°, de Te) Vire }. | Peintres hors-la Normandie. Médailles 4°, classe : MM. Paul Huet (Paris );—H.-P. Picou (Paris }; — J.-F, Hamon (Paris) ; — nié de Long- champ (Paris). Médailles 2°, classe : MM. Drouyn, d'Eon (Gironde ) ; — À. de Curzon (Paris ); — Mazeroll e (Paris) 5 — ‘4 Mathieu (Paris). 27 626 INSTITUT DES PROVINCES DE FRANCE. Médailles 3°. classe : MM. H. Harpignies (Paris ); — Sorieul (Paris); —L.-A. Souplet (Paris); —E. Goe- thats (Bordeaux) ; Battaille, de Granville ;— Darcy, de Paris. Rappel de médailles : MM. Jobbé-Duval et A. Chalot, à Rennes. SCULPTURE, Médaille 4", classe : M. Le Harivel-du-Rocher, de Chanu (Orne). Médaille 2°, classe : M. Lefebvre-Deumier (Orne ). Médaille 3°. classe : MM. Bourdel et Hernot. Médaille 3°. classe : M. Douin, pour son tombeau de Pabbé Jamet. Mention honorable : M. Deligand, de Sens (Yonne). SCULPTURE SUR BOIS, Médaille 2°. classe : M. le comte de Bougy , au chà- teau de Botügy, près Caen. DESSIN. Médailles 2°. classe : MM. le comte Du Moncel, à Caen ; — Georges Bouet , à Caen. Médaille 3°. classe : M. Thiollet, de Paris, pour ses dessins de sculptures gallo-romaines. Médaille 8°, classe : M. Bazin, à Caen. Médaille 4°. classe : M. Geslin de Bourgogne , pour ses vues de Bretagne (lithographies d’après la photographie). Médaille 4°. classe : M. Foubert, du Finistère, DESSINS ET HAUX-FORTES, Médaille 3°, classe : M. Richard , d'Alençon. EXPOSITION ARTISTIQUE, À CAEN. 627 C'HROMO- LITHOGRAPHIE. Médaille 2. classe : MM. Engelmann et Graf, de Paris, pour leur collection de lithochromies. PHOTOGRAPHIE. Médaille 4"°. classe : MM. Bisson frères , à Paris. Médaille 3°. classe : M. de Brébisson , à Falaise. Mentions honorables : MM. Bacot, à Caen; — A. Ville- neuve , à Caen ; — Autin, à Caen. ÉLECTROTYPIE. Médaille 3°. classe : M. Fauque, vérificateur des poids et mesures, à Caen , pour son exposition d’électrotypie. ARCHITECTURE. Médaille 8°. classe : M. Pelfresne , à Caen. Médaille 4°. classe : M. Mallay, à Clermont-Ferrand. Médaille L°, classe : M. Penon, architecte, à Paris, pour son projet de tronc, style XIIT°. siècle. VERRIÈRES. Médailles 2°, classe : Les Dames Carmélites, au Mans; — M. Oudinot, de Paris. TYPOGRAPHIE. Médaille 1"°, classe : M. Hardel, à Caen. Médaille 2°. classe : M. E. Poisson , à Caen. Médaille 3°. classe : M. Fougeray , du Finistère. CÉRAMIQUE. Médaille 2°, classe : M. Gosse , fabricant, à Bayeux. 628 INSTITUT DES PROVINGES DE FRANCE. . Médaille 3°, classe : M. Lespart, peintre sur porcelaine, à Caen. Médaille h°. classe : M. Barbizet, fabricant de ss à Paris. [8 DENTELLES. Médaille "°, classe : M. Valette , à Caen. Médaille 2°. classe : M". Barbrel, à Alençon. FLEURS ARTIFICIELLES, Médaille 3°. classe : M. Francis à Caen. Rappel de médailles : M. Thierry, à Caen. : PIANOS. “Rappel de médaille de vermeil : M. Cordier, pour ses pianos à table voûtée. - CADRES ET GLACES. Médaille 2. classe : M. Boursier , de Caen , pour ses cadres et son exposition de glaces. Mention honorable : M. Pommereuil , de Caen. à MEUBLES. Médaille 2. classe : M. Gannel, x émis. _. un guéridon mosaique. Médailles 4°. classe : MM. Sansrefus aîné, pour l'en- semble de son exposition ; — Sansrefus AS son fauteuil mécanique. Mentions honorables : MM. Baverel, de te pour l'ensemble de son exposition ; — Tréhardy, de Caen, pour ses meubles d’acajou moucheté ; — Lefranc, de Caen, pour un coffret en racine d’orme ; — M. Hébert- Prézé, de Dozulé, pour différents vases en bois. EXPOSITION ARTISTIQUE , A CAEN. 629 OUVRAGES DE PASSEMENTERIE. Médaille 3°. classe : M. Ménager, de Caen, pour son exposition de passementerie. CIERGES ORNÉS DE MOULURES EN CIRE. Mention honorable : M. Lécaudey-Lamer , de Caen, pour sa collection de cierges garnis de moulures en cire. GRANIT TRAVAILLÉ. Mention honorable : M. Le Pelletier, pour une table en très-beau granit de l’Orne , parfaitement travaillé. OUVRAGES EN CHEVEUX. Rappel de médaille de bronze : M. Bitterlin, née Lemonnier. TABLE DES MATIÈRES. << Pre mn Composition du Bureau de l'Institut dés FAIRE Liste des Membres de l’Institut des Provinces . Congrès des Délégués des Sociétés savantes des dé- partements, sous la direction de l’Institut des provinces de France. ( Session de 1855). Ouverture de la session sous la présidence de M. de CADIRONL.. .. ut. Der lide EU Lecture de la correspondance par M. le Président , Dépouillement des ouvrages offerts au Congrès, par M. le Président. . . . . k ve Lecture des questions du soda iii: mn liste des Membres qui se proposent d'y répondre. . Rapport de M. Du Moncel sur les inventions faites on 1854. 47 , . Lecture d’une notes sur la DHdnitite. en 1855: Dar AE. dé VIDA AA. 7 JO . IX 22 30 SECTION D'HISTOIRE NATURELLE , SCIENCES PHY- SIQUES ET AGRICULTURE, SÉANCE DU 24 Mars. Progrès de la géologie en Espagne pendant l’année 1854; par M. de Verneuil. Cartes géographiques et géologiques de M. pe re Recherches sur l'emploi du phosphate de chaux en agriculture; par M. de Lanoue . À Culture de l’ajonc épineux comme nourriture de moutons, pour les préserver de la cachexie ROUEN ONE EX PAL LEURS 38 47 93 60 TABLE DES MATIÈRES. SÉANCE GÉNÉRALE DU 21 MARS. Discussion de l’article 2 du programme, ainsi conçu : Quels ont été, en 1854, les progrès de la chimie, principalement dans ses applica- tions à l’industrie et à l’agriculture? . . Communication de M. Payen sur la première partie de cette question.—Reconstitution des corps gras, par M. Chevrel. — Substitution de la fécule de pommes de terre au poussier de charbon employé dans la fonte des bronzes, par M. Roux.— Découverte de l’aluminium, par M. Sainte-Claire-Deville.— Baisse de prix du sodium, par suite de la découverte de l'aluminium. — Comparaison du prix du sucre indigène à son apparition avec celui des colonies.—Histoire du zinc.—Avantages qu’en retire la peinture par le fait même de l'oxydation.— Découverte de l’alcool contenu dans les racines de l’asphodèle.—Extraclion de l’alcool de la canne à sucre et de la bet- terave 0 0 . + e e . ° e Id. Communication de M. Gosse sur des plaques de ceinturon en fer,trouvées dans des tombeaux MIÉPOVINHIONS M TEST Ne TT -SECTION DES SCIENCES PHYSIQUES. Séance pu 22 Mans. Améliorations introduites dans le sol agricole par l’ameublissement ou les amendements . Prennent successivement la parole sur cette ques- tion : MM. de Caumont, de Clocheville, 631 62 et S. 73 75 632 TABLE DES MATIÈRES. Mabire, de Montreuil, Charles Gomart, de Sainte-Tulle, de Vigneral, de Morissure, Calemard de Lafayette et Quenard. . . 76ets. Amélioration des terres par le drainage. Discussion. Explication de la 7°. question : Par quels moyens mécaniques pourrait-on rendre productives les terres rocheuses un peu BEREPR RAR par M. de Caumont .. . ‘ ducinitenters Discussion de la 8°. DsnES , ainsi raser Est-il vrai que les terres anciennement cultivées perdent leur fertilité? .… . SÉANCE GÉNÉRALE DU 22 MARS. Communication de M. Payen sur les progrès de la chimie, dans son application à l'agriculture. :— Procédés Shutzemback et Pelletan pour 82 84 l'extraction du jus de la betterave. . . 90ets. Examen de la 9°. question : Quelles données nou- velles a-t-on acquises sur la valeur relative des engrais? — Réponse de M. Payen — Expérience Rothamstedt . ue Réponse de M. Payen à la question : Les engrais pulvérulents peuvent-ils complètement rem- is les fumiers dans les cultures ?. . . “tiers DU 29 Mars. Discussion de la 22°. question, c£nçue en ces termes : * A-t-on obtenu par l’acclimatation, en 1854, des résultats importants dans le règne animal ou dans le règne végétal? . Re Curieuse improvisation dé M. Geoffroy:St. Hilaire sur célle question, : °. . . : . 93 95 99 100 TABLE DES MATIÈRES. 633 SECTION D'HISTOIRE NATURELLE , AGRICULTURE ET INDUSTRIE. SÉANCE pu 23 Mars. Discussion de la 4°. question, ainsi conçue : Les ri- chesses métallurgiques de la France sont- elles partout connues? Quelles recherches pourrait-on entreprendre encore avec chan- ces de succès dans nos formations géolo- DUO TEL De de het ete var lente de Réponse de M. Mosselman à cette question . . Discussion à laquellé prennent part MM. de Cau- 195 14. mont, Mabire, de Lanoue. . . . . . 107 ets. Considérations de M. de Lanoue sur la fertilité de LM de à 1: APE TO OLA 45 VALLE EX OP CSA LISA OURS Examen des questions : Quelles notions nouvelles a-t-on obtenues sur la valeur nutritive com- parée des différentes racines employées à la nourriture du bétail? Présenter le tableau complet et synoptique de ces valeurs com- parées. Même question pour les fourrages. SECTION DE LITTÉRATURE , BEAUX- ARTS ET ARCHÉOLOGIE. SÉANCE DU 23 Mars. Examen des 31°.,32°., 33°. et 34°, questions, qui sont connexes et relalives aux services à attendre de la presse départementale . . . . . . Discussion des 35°., 36°. et 37°. questions , relatives à la part à prendre par les Sociétés savantes dans la direction du goût, en ce qui touche l'architecture, la sculpture et la peinture DOCOTANTE Elie ivre 109 112 116 125 634 TABLE DES MATIÈRES, Examen de la 38°, question, ainsi formulée : La ré- partition des Sociétés savantes sur les divers points du territoire est-elle satisfaisante ? devrait-elle être plus uniforme? . . . . 126 Discussion de la 30°. question, ainsi conçue : Quelle a été la forme des tombeaux erigés dans les cimetières, aux différents siècles du moyen- ABUT: sente POP PANHIONL EUIS, , 129 SECTION DES SCIENCES NATURELLES , AGRICULTURE ET INDUSTRIE. SÉANCE DU 24 Mars. Discussion de la 13°. question, ainsi formulée : Quelle est l'importance de la nature variée des aliments au point de vue de l'engrais- sement. des.animaux.?..5,.4:%me me xie de + 130 2e, SÉANCE DU 24 Mars, L'ordre du jour est la 14°. question : Quelles sont, dans la nourriture des vaches, les condi- tions les plus favorables à la production dual Dave it ja dires : Lie 2nejuts 194 Lecture d’un mémoire de M. Decharmes , relatif à l'extraction de l'opium du pavot, par M. de Bouis . api 8e de aireï «+ 7e © : . 139 SECTION DES SCIENCES NATURELLES, AGRICULTURE ET INDUSTRIE. SÉANCE DU 25 Mars, Principaux moyens pour arriver au progrès agri- coles ; par M. de Montreuil . , . . . . 143 TABLE DES MATIÈRES. Faits cités par M. Gomart en réponse à la 16°. ques- tion, conçue en ces termes : Quels résultats doit amener dans l'avenir l’association de l'industrie à l’agriculture? Quelles modifi- cations pourront être par là apportées dans les habitudes des cultivateurs?. . . . . SÉANCE GÉNÉRALE DU 25 MARS. Distribution des médailles obtenues à l'exposition artistique d’Avranches. . . . . . : Discussion de l’article du programme ainsi Conçu : Quels ont été les progrès de la pisciculture CHRIST as on à AN AITS ENTe Observations diverses sur la RU daron artificielle du poisson; par M. Millet. . 3 Vœux émis sur les mesures à prendre pour la déche et la vente du poisson. , . . . . SECTION D’AGRICULTURE, SÉANCE DU 26 Mars. Notice de M. Lecomte sur la culture en quinconce au moyen des instruments inventés par M. Le Docte. . . , . “re Du meilleur aménagement des 1dértes: é ‘à Des différents moyens de faire le beurre. . . SÉANCE GÉNÉRALE DU 26 MARS. Discussion de la question : Signaler les départe- ments où la tenue des Assises scientifiques aurait à la fois le plus d'utilité et les plus grandes chances de succès. . . . . . . Nouvel examen de la question relative à l’histoire 635 152 155 156 164 166 174 175 178 636 TABLE DES MATIÈRES. des jardins , déjà posée au x es de 1854 : par M. Ramé . … . sd Observations de M. Paul Biradei sur k réguütarité symétrique des anciens jardins comparée à la formation artificielle des nouveaux, dits DNOIS. + ee ke: . De l'archéologie des anciens Hiratus qui toi tendëne à disparaître ; par M. R. Bordeaux. SÉANCE GÉNÉRALE DU 27 MARS. De l'acclimatation de différentes espèces de vers à soie; par M. Guérin-Méneville . . . . . Note de M. Eugène Robert, sur les travaux d'amé- lioration de diverses races de vers à soie à la magnannerie de Ste.-Tulle . . . . . . Testament du fondeur Croizatier . . . . . + Expériences électriques par lesquelles M. Poey, phy-. sicien, démontre la possibilité d'enlever les substances métalliques du corps humain. Allocution de M. Challe annonçant la clôture du CRE St Rapport sur les travaux el les publications acadé- miques des provinces pendant l’année 1854, d'après les renseignements communiqués au Congrès des délégués des Sociétés sa- vantes pendant la session de mars 1855; par MM. le comte Georges de Soultrait et le comte de Beaufort. Revue par départements . At r ST Aisne; « ee + + « + 182 186 188 202 219 1d, 221 TABLE DES MATIÈRES. 637 Aer RUE RE RE RS UE RE LT 5 M AUDE ST COMPTE QUE MAN EMMA. 297 Aude: :° 0070 PÉRMRGNENUE, ns ds ion. Id, Bouches-du-Rhône . . . . . . . . . . 232 Galvadds ui" hs DUR IPEMMAUS 1 1 ee 1988 Côte-d'Or: 4 te 2e eV Ne Mare + + + 238 CO NONR Sr CS nr nt) ss 0e << 0 Eure 0 à PER AR A ru aidons te 368 POSE en: dite à 02 407) Sue Oite CAO MO EEE à a D JA LM SC ON re DER AE ROLE 22 5 ui ei oc DU ST SUCER RE COR AO EE SUR OR EC 2 D CDN RS D SR TS MANIERE CN EU LOTO INIOFIQURE à 4 à. so. «à id: PT PORN RE PRO A Re SR M SE Tes dE MOiBO 6 LORS 5e 2 Le à 5. ee 4 se D MAD RES Le dieu S nitié a le AR SUR DRE DO LR SUD UT er SU RS PEL 0e et CE Marie DHAUIOR UN at et er Me VC rot PET dt ON RS De OT RL DR 6 A DE Ed ce PET CE PA ENTER EUX TR OR RP re A ER ER VS NO 2 ee Re LE AU MN cou D RE CRD RP D Ur TD DES PROD ST M are Do LU LOS RD DES ae D let in LA NV 00 Saône-et-Loire. A be RS UD 0 LEUR RIDE AN ler aile Vita ie RU re DER MOTO ERICTIOUTO 4 ne OS RON ee ED ÉTÉ Eee à la TRE ER RO PR à OR TE EU IN NE A UNE LA CEE LONNE us DT NES DANS OMR de 314 Ouvrages offerts au Congrès. . . . , . , . 322 638 TABLE DES MATIÈRES. ASSISES SCIENTIFIQUES TENUES EN 1855. ASSISES SCIENTIFIQUES TENUES A CHALONS-S.-MARNE, Sous la présidence de M, le comte de Mellet. SÉANCE DU MATIN. Ouverture de la session. . . . ir d CL à Discussion de la 1". question, ainsi conçue : Quels ont été, en 1854, les progrès de la chimie, principalement dans ses applications à l’in- dustrie et à l’agriculture, dans la circon- scription ? par M. Faure ,. Culture du sorgho ; Du chaulage et de la carie de bléé ; mémoire Le M::Mathieu. si “5 6-4 Travail de chimie analylique sur F AM 1 même docteur . ERIC LUC Observations de M. Ponsard sur la curtare, üe Ur y. Li CAEN QUES EPA TERRES à è Réponse de M. Drouet sur les œ, et ge. “ts: ainsi rédigées : Quels sont les nouveaux faits relatifs à la géologie, constatés dans la même année ? Quelles recherches métal- lurgiques pourrait-on entreprendre encore, avec chances de succès, dans les différentes formations géologiques de la circonscriplion? Examen de la 4°. question : Quels progrès la confec- tion des cartes agronomiques a-t-elle faits, en 1854, dans la circonscription ? Remarques de M. de Caumont sur cette queslion Réponse de M. Lamairesse à la 5°. question, ainsi conçue : Quels progrès a-t-on faits, en 1854, dans le traitement du sol arable, dans 328 329 331 333 . .394 336 338 345 TABLE DES MATIÈRES. l'amendement des terres les unes par les autres, dans l’ameublissement du sol par les moyens mécaniques, dans le dessèche- ment au moyen du drainage? . . Note de M. Périnet sur l'assainissement des sèrres par le drainage et l’emploi de la chaux comme amendement. 431994 Lecture de deux notes de MM. Remy a: Memart sur la 6°, question : Par quels moyens mé- caniques pourrait on rendre productives les terres rocheuses ou peu profondes de la cir- CONSCTAUON TO sus 2h 2e rovsAs Renseignements confirmatifs recueillis auprès de la Société d'agriculture de la Marne sur la 7°. question : Quelle est l'importance de la nature variée des aliments, au point de vue de l’engraissement des animaux ? . SÉANCE DU SOIR. Opinion de M. Chevillion sur la 8°. question : Quels résultats doit amener, dans la circonscrip- tion , l'association de l’industrie à l’agricul- ture? Quelles modifications pourraient être par-là apportées dans les habitudes des cul- tivateurs ? EE Examen des 9°. et 10°, questions : a t. on nn dans le pays, par l’acclimatation, en 185%, des résultats importants dans le règne animal ou le règne végétal ? Quelles sont les expériences les plus utiles à entrepren- dre, sous ce rapport, dans la circonscrip- 1,0: 5 Êc st SPORT RS CR RE Sur la 11°. question : Quelles ont ue tés publica- tions les plus importantes dans la circon- scriplion en 1854 ? 3 639 346 349 398 399 363 640 TABLE DES MATIÈRES. Revue des 11°., 12°., 19°., 14°., 15°, 16°., 17°, 18°. et 19°. questions, relatives aux rapports des Sociétés savantes avec la presse départe- mentale. .tascsrlss tente tte duerir 866 Examen de la 20°. question et de la ge. j sie aux anciennes coutumes et aux pouillés de la circonscription ? Tableau des biens et re- venus ecclésiastiques dans le bailliage de Ghâlans:: tiers tnt s raitanno 44 ét sua. . 368 ASSISES SCIENTIFIQUES DE PICARDIE , TENUES A AMIENS. Sous la présidence de M. le comte de Vigneral. Are, SÉANCE DU 22 Juin. Discours d'ouverture, par M. de Vigneral . . . ,. 379 Programme des questions. 1°. partie. . . . . . 383 dparlle...:s ji . 384 Communication de M. Decharmes sur la 1"°. je tion , ayant pour objet l'application des sciences physiques et chimiques à l’industrie et.à l'agriculinre: rs sien ce jé ne . 387 Mémoire de M. Marsilly sur les causes de l’ pa du prix du charbon de terre, et les moyens d'y.metltre un. terme... .:e:. # 389 Discussion des questions 6, 7, 8 et 9, er à lagrieullinheuns: our él aitetreiaige. + 600 Notice de M. Caron, sur la piscicullure _. . . . 405 SÉANCE DU 23 JUIN, Collection de vues et dessins, présentée par M. Du- sevel et exécutés par MM. Duthoit frères, d'Amiensisicsson: tétitnntahiatiséiouuse 644 TABLE DES MATIÈRES. Lecture d’une analyse des travaux des Sociétés sa- vantes de la circonscription . . . F Nouvel examen des questions 12, 13, 14 et 5, tels. tives aux servicés que pourrait rendre la presse I0Cale. ”. :. UT S EE PE Lecture, par M. Vion, d’un mémoire en réponse à la 18°. question , sur les moyens de relever étude des sciences. et. des lettres dans la circonscription. . . . 1180 « Communications diverses de MM. Janvier, Corblet, Dusevel et Salmon sur la 22°, question, relative aux traditions, légendes, jeux, fêtes sacrées et profanes qui se sont con- servés dans la campagne . . . . . Mémoire de M. Goze , sur les armoiries de Picardie (29°. question du programme); communi- cation sur la langue d’Oil, par M. l'abbé COPINE nue cnl/dant AR on rude SÉANCE DE CLOTURE, De la réhabilitation de Charles Dallery ; par M. de ROBE SU AD dre el it Ve pie Réserves de M. Vion'en faveur de Frédéric Sauvage. Allocution de M. Follet, sur la réhabilitation de CDATIES HAMPENS 5 Se er dus ns Appareil nouveau pour la marine à vapeur. . . Discussion de la 27°. question, ainsi conçue ; Les grandes associations jurées de la paix et de la trève de Dieu ont-elles eu quelque part au mouvement communal et consulaire ? . Lecture d'un travail sur l'invasion du réalisme dans l'éducation (29°. question ); par M. Tissier. Pièce de vers par laquelle l’auteur, M. Yvert, donne la solution à la question relative à la presse DEONIPDOIAIET UT RS Res SR QT 417 419 421 425 Id, 427 428 431 437 441 612 TABLE DES MATIÈRES. ASSISES SCIENTIFIQUES DU SUD-EST , TENUES Sous la présidence de M, de Caumont. SÉANCE DU 1°", SEPTEMBRE. Ouverture de la séance. . . 1, 4. , 4 « Liste des ouvrages offerts aux Asitiet SHÉAOPUS . Mémoire de M. de Saporta, Sur la flore fossile d'Aix, d’Apt et de Manosque . , . . +14 Coup-d'æil rapide sur les questions 5, 6, 7 et 8 du programmer. Sai0ne. ie movie a , SÉANCE DU 2 SEPTEMBRE, Communication de M. P. M. Roux. . . Discussion de la question : Quelles ont été, en 4854, les publications les plus importantes dans la circonscription ? . . . . . . Réponse de M. Gaut aux questions 12, 13, 14 ét: 15, relatives aux services à rendre par la presse locale ; indication des moyens à employer. . Réponse de M. de Garidel aux questions 16, 17, 18 et 19, relatives à la part que les Sociétés sa- vantes ont prise dans la direction du goût, en ce qui touche à l'architecture, à la sculp- ture et à la peinture décorative, . . . . Renseignements donnés par M. Gibert sur l’école D SO nn en te à à de SÉANCE DU 8 SEPTEMBRE. Lecture, par. M. Gaut, d’un mémoire soumis par M. Jauffret sur un guano artificiel de son PO nu ns le 8e + 0 90% 450 475 476 480 490 494 497 TABLE DES MATIÈRES. 643 ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA PROVENCE , TENUES A AVIGNON, Sous la présidence de M, P.-M, Roux. SÉANCE DU A SEPTEMBRE, Ouverture de la séance. . . . . . . Vue de la partie supérieure du beffroi ‘d'A Mighon. Discours de M. Valère Martin. . . . . . « . . Recherches de M. Laur sur la géologie. Utilité du drainage ; salutaires effets du déistène: ment de terrains marécageux ; emploi de divers engrais appliqués aux plantes fourra- gères ; de la mécanique agricole. . . . . SÉANCE DU 5 SEPTEMBRE. Amendement des terres les utes par les autres. . De la syivicartare. : 1. "4" * ; Continuation de la discussion rehitive à à l'état " la presse dans les départements. . . . . . Vœux à l’occasion de l’ancienne Académie de Vau-: cluse et le muséum Calvet. : Allocution de M. Martin- ir à au sujet de St. - Martial et du Jardin-des-Plantes. . SÉANCE DU 6 SEPTEMBRE. Ouverture de la séance par une allocution de M. Pa- TU HAE ce + à . Mémoire de M. Martin-Moricelly, sur la Nouvelle théorie de la vision, sous le rapport phr- sique et physiologique. + . . . Sur les anciennes inscriptions , légendes, tradftiotis et coutumes, au point de vue de l’histoire locale, par M. Adolphe Dumas, délégué du Ministre de l'instruction publique. 510 917 518 525 LL 6Gll TABLE DES MATIÈRES. ASSISES SCIENTIFIQUES DE LA SAINTONGE, TENUES A ROCHEFORT, Sous la présidence de M, l'abbé Lacurie, SÉANCE DU 46 AOUT. | | Ouverture de la séance. .: . . alta Communication de M. Auriol sur es bn à + nification établies à Rochefort. ... . . Communication de M. Boffinet sur quelques amé- liorations.opérées dans l’agriculture . . . SÉANCE pu 47 AOUT. Mémoire de M. Auriol sur les progrès faits, en 1854, dans le dessèchement des terres par le drai- nage et l'emploi des engrais. . . De l’état sanitaire de Rochefort, par M. A et du déboisement, par M. Boffinet . Vœu émis au sujet des allumettes chimiques. Sur le paupérisme ; par M. Boffinet fils. SÉANCE DU 48 Aovur. Examen de la 3°. question : Quelle est l'importance de la nature variée des aliments, au point de vue de l’engraissement des animaux? . De l’acclimatation (4°. et 5°. questions). . . . Opinion de M. Lacurie sur les services de la presse départementale (7°., 8°, et 9°, questions ). Séance pu 20 Aour. Communication d'économie politique; par M. Des- HertReauL 5.1 es ds Ve. Autre communication d’un mémoire de M. “Montant sur la question des enfants trouvés, . . . 531 933 936 9338 542 544 545 54% 048 252 254 995 TABLE DES MATIÈRES. Sur les coutumes, les pouillés des diocèses et les aveux des droits des temporalités, dernières questions du programme. Clôture des Assises, par M. l'abbé Lacurie. MÉMOIRES. Du déboisement et de ses conséquences pour les gé- nérations futures ; par M. Boffinet père. . Notice sur les machines à panification établies à Ro- chefort , et sur leurs produits en biscuit et en pain frais; par M. Auriol, Notice sur les divisions territoriales anciennes con- sidérées comme origine des paroisses ru- rales et des fiefs ; par M. l'abbé A. Voisin. LES CONGRÈS EN 1855. Congrès scientifique de France. . . , . . . . Congrès archéologique de France. . . . . . Congrès de l’Association normande, . +. . . . Congrès de l’Association bretonne. , . , , . Exposition artistique, à Caen , en juin 1855, sous le patronage de l’Institut des provinces. FIN DE LA TABLE, 645 556 997 560 574 591 600 605 610 615 616 Caen, imp. de A. Hardel, Mars 1856, estate ds la oi RUUTUS PR ut FU be ug ogg da ak He "HE do AS i ee “". 2 MOMAS Mme misq ne : “(#69 aousbns CUS EE LUVEU en 10e HO . e Me or Bo Vu der nids Ag nn. au! TT de A St Jr Lie Pants #4 L VEN Li da ce. je dr + D. 4” ’ 1 ET | 4 é ps à #4 sue des re! as PTS kr Rob, amplis sie dors je DU 0 . . : soit ot “anpigélobtsre eSrgn0) MERE sd amenant : ete F5 era Bon ta ques NERO A A0 = de Le nature vartie-des tilinents . : soiut NS en A MAÉ Nate it b FhtienÉES8 Sous se 2" tes ser rites du à pra Mo:17".. 4, RE Huostlens ;. F7. " . i cg . Fanette A s Dal ny GR er. Ai % : omnanieation ice one à eue. pat hf. les. os | RRPEARURE LS à MU: à + 686 D 48 aire cree nor An csérigure. de #. Mes ne à Pur Là quesiibm das re cer à 80 on # ne atratl À sb jui nn) Re Pas ee 7 gs ve x. Sgen d he en, 0e Et EC re Ne vs 4 ; : DS rente J pe ë d RÉ eRT < Lac € 1% Ù VE per Ets - Er ef 0 ER CRE | A 5 M, ÿ Léon Ja. Se + à PPT L me At. AE RE ES A RCE ee EG PE ED RE eee EE ET SR SE EN RSS de D pre EE Tab: Sr : 7 re PTS BST DRE SL Dr ses Sr RSS nt Er .< Rp CRE ER re RE rte PEN D dE re RC DE re Vs Lu Come LS me CE RE ee RC La de age ne TE. AE RENE RUES me Ne ie ON MS Sn RE ne Re AE NE SN De CE A nt EE Ve ge 2 Ce NS Le ve VA ge 05708 à SE OU ERA SRE 4 2 Ag Se ARTS ER ae Too M taie LAS RE En eo Ernie D D A I NE pe PP er Pi RO PE PR ES RG ed RE D DRE Le ES ue nr re ra ST 8 os > . . à % Eee re” > CAE CE ONE es A ms ne pee Ro EN k DR ang ne D ra us D Re TT nn Se RE Re One NE 5 nat he CA nn ny LR Ÿ < RE AE eg, ne 287 PQ EN ET SP EM Dee ee TRE QT ee AE Se “ Dot ET TS PE ee PE DO QE GR DÉS come SR DS a se, Fax RAR EN Eee mA : , s PER 1 VE Apec RERO nt à : a ser à Sen US 5 er A, = Do ES ON Gr ‘+ 8" he war où © Lee OR US à RES CT POP ENT À » 'ene T ni TC PR RS Se a PT Tr er NE ES ARE EE se M m7 EE NSE R PART Be QE NRA TR ne ES ne See RS re ee RE GENRES 4 $ = SE ; î Ë 4 ‘8, y] fl “ Save ar “a eee A Ve gs" D ge er, ee + ” ls ape PAAUNE Re Le SR ps SES ee nf RS RS LS Te EN pa GE ee NE eg PORN S Met J 2 L 4 FR. © LT D 4 4 rt Co # AE ST on RE 244 PAR ce pen Pin = Æ =: £ à - è ETS RE pe ae er RE RER 2% DR gen ES re PTE 4e ee A ge : »;; 2 fs AC Rs BC, 9.204 Per ET 7 Fe D Le RS es RE PLTR Te nr te ù u D du “is : RE NAT 127 7 + CT PS TRES Er rates RE mt te dE GR, ENS RATS ee ie k Le De re re SET ge , ; AT RE TE RDS: eg 1% SAT Lee a. 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