I Ili iiiiii Si ivim\>': liili. 1 ili li; hi-' HARVARD UNIVERSITY mm LIBRARY OF THE Museum of Comparative Zoology ARCHIVES DE BIOLOGIE rUllMEES PAU Edouard VAN BENEDEN, PROFESSEUR A l/UN 1 V E K S I TÉ DE I.IÉGE. et Charles VAN BAMBEKE, PROFESSEUR A l>'UMVERSITÉ DE G A NU. Tome HL. (MNI) & LEIPZIG, Librairie CLEMM, II. ENGELCKE, Suoc^ PARK, G. MASSON, éditeur, 120, Boulevard S'-Germiiin, Lif'içc, \in\)r. H. Vaillant-Ciiriiianne, rue St-Adalbcrt, 8. ^' 1890 TABLE DES MATIERES, 'l'«»me X. Recherches sur le cartilage articulaire des Oiseaux, par le Dr Orner Van der Stricht (pi. I et II) 1 Monadines et Chytridiacées, parasite^i des algues du Golfe de Naples, par G. De Bruyne (pi. III à V) 43 La réplique de M. Guignard à ma note relative au dédouble- ment des anses chromatiques, par Edouard VAN Beneden. 105 Sur la circulation céphalique croisée, ou échange du sang caro- tidien entre deux animaux, par Léon FrederiCQ .... 127 L'anémie expérimentale comme procédé de dissociation des propriétés motrices et sensitives de la moelle épinière, par Léon Fredericq 131 Recherches sur le rythme respiratoire, par BlENEAIT et HOGGE. 189 La mort par le refroidissement. Contribution à l'étude de la respiration et de la circulation, par George Ansiaux . . . 151 La pulsation cardio - œsophagienne chez l'homme, par le Dr Ernest Sarolea 187 Recherches sur la circulation et la respiration. — La pulsation du cœur chez le chien (suite), par Léon FREDERICQ. . . . 211 De l'endothélium de la chambre antérieure de l'œil, particuliè- rement de celui de la cornée, par les Drs J..p. NUEL et Fern. CORNIL (pi. VI et VII) , . . . 235 Recherches sur l'organisation de Monobrachium parasiticum Méréjk., par Jules WAGNER (pi. VIII et IX) 273 Nouvelle contribution à la faune pélagique du Golfe de Mar- seille, par Paul GOURRET (pi. X) 311 Recherches sur le système cutané et sur le système musculaire du Lombric terrestre, par Paul Cerfontaine (pi. XI à XIV). 327 Sur la conservation de l'oxyhémoglobine à l'abri des germes atmosphériques, par Léon FREDERICQ 429 Recherches physiologiques sur l'occlusion de l'aorte thoracique, par le Dr COLSON 431 — IV — Les Anthozoaires pélagiques recueillis par M. le professeur Hensen dans son expédition du Plankton. — I. Une Larve voisine de la Larve de Semper, par Edouard VAN Beneden (pi. XV) 485 Contribution à l'étude des yeux de quelques Crustacés et recherches sur les mouvements du pigment granuleux et des cellules pigmentaires sous l'influence de la lumière et de l'obscurité dans les yeux des Crustacés et des Arachnides, par Vanda SZOZAWINSKA (pi. XVI et XVII) 523 Recherches sur la marche des Insectes et des Arachnides, étude expérimentale d'anatomie et de physiologie comparées, par Jean Demoor (pi. XVIII à XX) 567 Sur la kératinisation du poil et les altérations des follicules causées par l'épilation, par Sébastien GlOVANNINI (pi. XXI à XXIV) 609 Contribution à l'étude des Rotateurs, par Jean Masius (pi. XXV et XXVI) 651 Itcclierclies sur le cartilage articulaire des Oiseaux, Le Dr Omer van DER STEICHT, Assistant à ITnivcrsilé de Gand. Travail du laboratoire d'Histologie de l'Université de Garni. (Pi, ANCHES 1 et li.) Avant d'aborder l'étude du cartilage articulaire des oiseaux, nous tâcherons de donner un court aperçu des nombreux tra- vaux concernant le cartilage liyalin. Un exposé historique plus ou moins complet nous paraît superflu ; des mémoires récents comblent suffisamment cette lacune. Nous nous contenterons donc de résumer en quelques mots l'état actuel de la question, en insistant surtout sur les points en discussion. Nous ferons suivre cet aperçu historique de nos recherches personnelles et des conclusions auxquelles nous aboutissons. La plupart des controverses touchant la structure du car- tilage hyalin ont porté sur les points suivants : a) La structure fibrillaire du cartilage hyalin. h) L'existence de prolongements cellulaires. c) La présence de canalicules nourriciers. d) La structure lamellaire, l'apparition de fentes, etc. Chose curieuse, des éléments identiques ont été considérés, par des histologistes de valeur, tantôt comme prolongements cellulaires, tantôt comme canalicules nourriciers, tantôt comme librilles ou faisceaux fibrillaires, tantôt enfin comme productions artificielles. 1 2 OMER VAN DEE STEICHT. Ainsi Heitzmann (1) représente les cellules caitilagineuses munies de prolongements nombreux, ramifiés, anastomosés entre eux et avec ceux des cellules voisines. Ce riche réseau protoplasmique serait, d'après cet auteur, en rapport avec un réseau analogue répandu dans tous les tissus de l'organisme. Stricker (2) admet la manière de voir de Heitzmann. Lowe (3) décrit des prolongements cellulaires semblables dans le car- tilage d'embryons de mammifères. Spina (4) a trouvé dans l'alcool un réactif précieux pour faire apparaître ces mêmes détails de structure dans le car- tilage li3^alin. Elsberg (5) se rallie à cette manière de voir de Spina. Ses reclierclies portent sur le cartilage aryténoïde humain et sont basées sur l'action de l'alcool. Plusieurs histologistes ont tenté de vérifier ces données. Les uns ont obtenu des résultats négatifs, les autres ont vu des prolongements cellulaires. Seulement ils ne généralisent point des observations isolées. Ils n'attribuent point au car- tilage hyalin en général des caractères rencontrés dans des cas exceptionnels. D'ailleurs, ils sont loin d'admettre un réseau protoplasmique aussi riche et aussi serré que celui décrit par Heitzmann. Signalons ici Reiviak (6), Heidenhain (7), Broder (8), Hasse (9), 0. Hertwig (10), Retzius (11), Thin (12), Tizzoni (13), Prudden (14), Flesch (15), Leydig (16), Pétrone (17), etc. En faveur de l'existence d'un système canaliculaire reliant les cellules, se prononcèrent surtout : Bubnoff (18), Henocque (19), O. Hertwto (10), Budge (20), Orth (21), etc. Budge est parvenu à le dilater en le remplissant d'air. Arnold (22), Budge (20), Nykamp (23), ont eu recours à difterents procédés d'injection de substances colorantes, pour faire apparaître ces mêmes canalicules et pour démontrer leur rapport avec le système sanguin général. Avant d'aller plus lom, remarquons que plusieurs auteurs, s' occupant de l'étude des canalicules nourriciers et des prolon- gements cellulaires, laissent de côté l'examen de la substance fondamentale. Nykamp (23) fait exception. Se servant du RECHERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 3 cliromate neutre d'ammoniaque à 5 "/o, il parvint à l'aide de ce réactif à faire apparaître les tibrilles de la substance fondamentale à côté des canalicules nourriciers. La plupart des autres auteurs, au contraire, décrivent des prolongements protoplasmiques ou des canalicules nourriciers en rapport avec les cellules, sans se demander quels rapports ces mêmes éléments présentent avec les fibrilles, plongées dans la substance intercel- lulaire. Loin de nous l'idée de critiquer les méthodes employées par des histologistes de valeur. Leurs reciierches ont contribué beaucoup à l'étude de la structure du cartilage. Il n'en est pas moins vrai, cependant, que l'interprétation donnée de certains détails, rendus apparents par des réactifs aussi ingénieux qu'in- faillibles, a beaucoup souffert de cette omission. En fixant à la fois les prolongements cellulaires ou les canalicules nourriciers et les fibrilles de la substance fondamentale, il est facile de comparer les deux, et il est aisé de différencier des fibrilles voisines, un prolongement cellulaire en continuité avec le protoplasma cellulaire. La structure fibrillaire de la substance fondamentale hyaline a été démontrée par plusieurs liistologistes. KoLLiKER (24), après lui Nykamp (23), signalent la striation de la substance intercellulaire du cartilage des céphalopodes. DoNDERS (25) décrit dans le cartilage costal des fibres dirigées parallèlement à la surface. Langhans (26) trouve dans le car- tilage hyalin scleral de poisson des fibrilles s' entrecroisant dans différentes directions. Gegenbaur (27) constate l'existence de fibrilles disposées en réseau dans le cartilage céphalique des sélaciens. C'est surtout à Tillmanns (28) que nous devons la description de la structure fibrillaire du cartilage hyalin. Ses recherches portèrent sur le cartilage articulaire du Chien et du Lapin, traité par l'hypermanganate de K et par le chlorure de Na à 10 "/o. n considère la substance fondamentale hyaline comme formée par de fines fibrilles reliées par un ciment intermédiaire, masquant à l'état frais la structure fibrillaire. Les conclusions de Tillmanns furent adoptées par Baber(29), Genzmer (30), Eeeves (31), Nykamp (23), Flesch (15), Bicfalvi (32), VoGEL (33), moi (34), Spronck (35), etc. 4 OMER VAN DEE STEICHT. Eemarqiions enfin en passant que certains liistologistes sig-nalent, an sein de la substance fondamentale fibrillaire, des fibres ou faisceaux fibrillaires spéciaux, reliant les capsules cartilagineuses. Zuckerkandl (36), étudiant le cartilage de la cloison nasale du Tapir, y trouve un réseau caractéristique sur le trajet duquel sont intercalés les éléments cellulaires. Il se demande si ce réseau est de nature fibrillaire. Nous (34) avons décrit un réseau semblable dans le cartilage liyalin de plusieurs animaux et nous nous sommes prononcé en faveur de la nature fibrillaire de ces " faisceaux intercapsulaires „. Spronck (35) a confirmé nos recherches. En résumé, on voit que les figures décrites par Heitzmann, Lowe, Stricker, Elsberg, Spina, comme prolongements cellu- laires, ont été considérées comme canalicules nourriciers par BuBNOFF, Pétrone, Hertwict, Budge, Nykamp, Orth, etc., comme faisceaux intercapsulaires fibrillaires par Zuckerkandl, moi et Spronck. De plus B. SoLOER (37), après avoir contrôlé très soigneuse- ment les recherches de Spina, en employant à peu près le même réactif, préconisé également par Spronck, considère les figures en question comme des phénomènes de plissement (Schrump- fungsplianomen). Dans son dernier mémoire, Solger (38) main- tient cette opinion. Vogel se servit du même réactif, pour étudier le cartilage de la Grenouille et des mammifères. 11 attribua aussi une nature fibrillaire aux éléments que l'alcool rend apparents dans la substance intercellulaire. Spina (39), dans son dernier travail sur le cartilage aryténoïde du Cheval, représente les cellules de ce tissu, munies de prolongements analogues à ceux signalés dans le cartilage hyalin. En présence de toutes ces divergences, l'étude du cartilage articulaire des oiseaux nous paraît très intéressante et parti- culièrement propre à élucider cette question tant controversée. Chose étonnante, ce cartilage diarthrodial, si facile à se procu- rer, a été très peu étudié jusqu'ici. En fait de recherches sur ce tissu chez les oiseaux, nous n'avons trouvé que des RECHERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 5 notions très succinctes et données d'une façon accessoire à propos d'études sur le tissu osseux. Nous signalerons les tra- vaux de Eenaut (40) et de L. Schoney (41). Renaut repré- sente la coupe longitudinale du tibia d'un embryon de poulet au 20e jour d'incubation (vo^'ez sa fîg. 3). Il n'insiste pas beaucoup sur la succession des différentes couches du cartilage. Il touche cependant à deux points dignes d'attention. Tout d'abord à l'existence d'une couche tout à fait superticielle. Renaut n'en parle guère, il se contente de la reproduire dans sa ligure. Cette couche se continue latéralement avec le périchondre. En second lieu, il signale la persistance, à l'inté- rieur de la diapliyse, d'un cône cartilagineux très volumineux, qu'il désigne sous le nom de cartilage primitif. L. Schoney, en décrivant le cartilage diarthrodial de jeunes oiseaux, distingue quatre zones. Une première près du péri- chondre constituée par des corpuscules cartilagineux fusiformes, qui engendrent une seconde couche de cellules arrondies à noyau évident. Celle-ci très épaisse est traversée par des canaux médullaires vasculaires de diverses formes. Une troi- sième zone à corpuscules cartilagineux très petits et aplatis, succède à cette dernière. Elle est toujours colorée en jaune rougeâtre. Enfin vient le cartilage calcifié auquel fait suite directement le tissu osseux. Voilà tout ce que nous avons trouvé concernant la description du cartilage diarthrodial des oiseaux. Objets de recherches. — Nous avons utilisé le cartilage diar- throdial d'oiseaux domestiques : le Poulet, le Canard, l'Oie, le Dindon, le Pigeon. Nous avons examiné ensuite celui de la Perdrix, de la Bécassine Gallinago media (Gray)) et d'un pal- mipède : le Fidigula marilcc. Tous fournissent des résultats identiques. Le cartilage embryonnaire n'a pas été négligé. Les os d'un Poulet et d'un Dindon nouveau-nés ont été fixés . pendant 24 heures dans un mélange à parties égales d'eau et de liqueur de Flemming, puis lavés dans l'eau distillée. Le cartilage de tous les autres oiseaux, que nous venons de citer, a été examiné à l'état frais, sans addition de réactifs fixateurs, 6 OJIER VAN DER STRICHT. dans des liquides neutres tels qu'une solution d'iode, du sérum, du sérum iodé, etc. Des fragments des mêmes individus ont été portés dans la liqueur de Flemming pure ou mêlée d'eau à parties égales, dans l'alcool, etc. Les diverses préparations ont été colorées par l'iode, le picrocarmin, la fuchsine, la safranine, l'éosine, l'iiématoxyline, le vert de métliyle, etc. Carth^age articulaire adulte. En comparant le cartilage diartlirodial des oiseaux à celui des mammifères ou autres vertébrés, on s'aperçoit rapidement qu'il doit exister une différence notable entre les deux. Déjà à l'œil nu, on remarque, à la surface des epiphyses recouvertes d'une couche cartilagineuse relativement mince, des détails macroscopiques, des différenciations à l'intérieur de la substance hyaline. Ainsi sur l'épiphyse inférieure du tibiotarse d'un canard adulte, au niveau de la partie antérieure de la surface articulaire, on constate même à l'état frais, un fin strié nacré, à direction transversale, reliant les parties latérales des surfaces articulaires. Les différents liquides fixateurs rendent ce strié encore plus apparent. Ceci est surtout vrai pour l'alcool. L'épiphyse traitée pendant quelque temps par ce réactif, présente à certains endroits des lignes alternativement claires et nacrées. Ces particularités se remarquent encore au niveau de l'attache des ligaments intra-articulaires : à la surface de la tête fémorale, dans l'espace intercondylien de l'épiphyse inférieure du fémur, etc.. Cet aspect strié présuppose évidemment une structure histologicpie non homogène, conforme à ces données macroscopiques. Ranvier (42) et plusieurs autres auteurs insistent sur la texture fibrillaire du cartilage au niveau du point d'implantation des tendons, des ligaments et du périchondre. Seulement jusqu'ici on n'a constaté que des particularités microscopiques, et encore sur une étendue excessivement restreinte (comparez la figure 126 de Eanvier). Chez les oiseaux, il en est autrement. Comme ces quelques IIÏÏOI-IERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 7 détails macroscopiques le font prévoir, on doit s'attendre à trouver à ces endroits des détails de structure beaucoup plus intéressants qu'au niveau de l'implantation des ligaments et du péricliondre chez les autres vertébrés. D'ailleurs cette striation, visible à l'œil nu, existe chez les oiseaux en dehors du voisi- nage des insertions tendineuses ou ligamenteuses. Nous nous abstiendrons cependant de donner des indications précises, car il nous semble que cela varie beaucoup d'un individu à l'autre et avec l'âge des oiseaux. Quoi qu'il en soit, examinons au microscope ce cartilage diarthrodial. A cet effet, il sufïït de faire à l'aide d'un rasoir des coupes très minces. On peut les pratiquer dans un os tout frais, non fixé et examiner les coupes dans des liquides indiffé- rents. Ceux-ci montrent la structure du cartilage avec la même netteté que tous les autres réactifs employés dans nos recherches. Il ne faut donc aucun liquide additiomiel pour fixer les éléments constituants de ce tissu. Seulement pour en faire une étude plus parfaite, pour avoir toujours à sa disposition des matériaux convenables, en bon état de conservation, il est indispensable de fixer de petits fragments d'épiphyses, soit par une solution d'acide osmique à 1 "/o; •'^oit par la liqueur de Memming, soit par une solution d'acide chromique à Yg % — 1 "/o, soit par l'alcool à 90". Après l'action des liquides fixa- teurs on lave à l'eau distillée et on conserve dans l'alcool. L'action durcissante de l'alcool a le grand avantage de per- mettre de faire des coupes suffisamment minces. En effet, à l'état frais, les couches superficielles du cartilage diarthrodial sont de nature à ne pas se laisser diviser en coupes très minces ; elles n'ont pas la consistance ferme du cartilage hyalin ordinaire. Elles sont plus flasques, un peu molles, elles se dépriment sous la pression du tranchant du rasoir. Sans doute, là où ces couches superficielles n'atteignent qu'une faible épaisseur, on parvient à les diviser en tranches suffisament minces, parce qu'elles recouvrent un tissu essentiellement dur et résistant. Mais là où cette épaisseur est plus grande on atteint ce but plus difficilement. Dans tous les cas, l'action 8 OMER VAN DER STRICHT. durcissante de l'alcool, soit directe, soit après fixation par d'autres réactifs, facilite beaucoup les préparations microsco- piques. Sur des coupes faites dans les conditions précitées, on distingue deux éléments différents : Ijes cellules et la substance intercellulaire. Nous commencerons par l'étude des cellules. A. — Cellules cartilagineuses. Les cellules varient beaucoup d'aspect. Etudiées sous le rapport des caractères propres aux éléments cellulaires hyalins, on peut dire en général qu'elles possèdent une capsule. Leur protoplasma présente une structure granuleuse manifeste, n est riche en granulations graisseuses se colorant en noir sous l'influence de l'acide osmique. L'action de l'eau produit un retrait du corps protoplasmique. Le noyau volumineux, plus ou moins arrondi ou ovalaire, possède une structure réticulée. La substance chromatique montre des épaississements nom- breux. L'iode colore les cellules d'une façon intense. Leur volume égale à peu près celui des cellules du cartilage articu- laire des mammifères. Le contour et la limite des capsules cartilagineuses sont nets, réguliers et on n'y constate absolument pas de prolongements protoplasmiques. Pas la ûioindre trace de canalicules, à parois propres, reliant deux capsules voisines. La forme varie beaucoup. A la surface du cartilage, les éléments sont plus ou moins lenticulaires, à grand axe parallèle à la surface. Plus profondément ils deviennent plus sphé- riques, ou du moins leur diamètre vertical parallèle à l'axe de l'os augmente sensiblement. On peut donc distinguer chez les oiseaux, comme chez les mammifères, une couche superficielle à capsules lenticulaires, et une couche plus profonde à capsules sphériques. Mais disons-le de suite, cette disposition est loin d'être la règle. A des endroits divers, on trouve toute espèce de cellules, dont la forme varie d'après leur arrangement et leur distribution. D'ailleurs d'autres caractères sont également RECHERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. U sujets à varier. Ainsi à la surface du cartilage, à aspect tendineux, de la partie antérieure de l'épipliyse inférieure du tibiotarse d'une Oie adulte, on rencontre des éléments cellulaires dépourvus de capsule, à corps protoplasmique à peu près homogène, peu coloré (voyez flg. 1). Le noyau présente un aspect uniformément chromatique. Le contour cellulaire est elliptique. A un examen superficiel, ces éléments ressemblent assez bien à de jeunes corpuscules rouges, non chargés d'hémo- globine, mais d'un volume considérable. Dans leur protoplasma on trouve quelques granulations graisseuses, devenant noirâtres sous l'influence de l'acide osmique. Ces cellules nous semblent établir des stades de transition entre les corpuscules hyalins typiques et ceux dont nous parlerons plus loin (voyez fig. 2). Comme nous venons de le dire, la forme et l'aspect des cellules varient beaucoup d'après leur disposition et leur agence- ment. Voici ce que nous apprend l'étude du cartilage diarthrodial. D'une manière générale on peut dire que les cellules ont une tendance à se grouper en séries linéaires. Plusieurs coupes donnent des images identiques, à peu près, à celles fournies par une préparation des tendons d'une queue de Souris ou de Rat (voyez fig. 2). Toutes les cellules y sont distribuées en séries linéaires, serrées les unes contre les autres, adoptant la forme que la pression réciproque leur communique. Ici comme dans la queue de Souris, les rangées cellulaires sont parallèles les unes aux autres. Seulement ceci n'est vrai que lorsque la section entame un seul plan cellulaire. Si la prépara- tion est plus épaisse, en changeant la distance focale, on peut distinguer plusieurs plans cellulaires. Toutes les rangées d'un même plan sont parallèles entre elles, mais les colonnes d'un plan voisin s'entrecroisent avec celles du premier, de façon à former un angle variant depuis l'angle aigu le plus petit, jusqu'à l'angle droit. Sous le rapport de l'entrecroisement des éléments constituants, cette structure du cartilage arti- culaire des oiseaux ressemblerait davantage à celle décrite par Eanvier (-12) dans l'aponévrose d'enveloppe de la cuisse d'une grenouille (comparez la figure 123 de Eanvier, page 359). 10 OMER VAN DER STRICHT. Les fibres s'y entrecroisent à angle droit (voyez nos fig. 3 et 4). Si on examine de plus près ces colonnes cellulaires, en fixant l'attention sur chaque corpuscule en particulier, on remarque plusieurs particularités intéressantes. Tout d'abord leur noyau arrondi ou ovalaire est uniformément chromatique (voyez fig. 2). Ses limites sont nettement accentuées. Sa situation est souvent excentrique ; il est reporté quelquefois vers la périphérie de la colonne cellulaire, plus souvent du côté de la cellule voisine. Le protoplasma plus ou moins homogène ou finement granuleux se colore faiblement. Souvent il est chargé de granu- lations graisseuses. Quant à l'existence d'une capsule, on est fréquemment embarrassé de se prononcer. La cellule présente une limite nette, une membrane à double contour, plus dense et plus résistante que le protoplasma lui-même. Celui-ci se rétracte peu sous l'influence des divers réactifs fixateurs. Il reste en contact immédiat avec la surface interne de la couche limitante. Du côté extérieur, la délimitation de la membrane à double contour également nette, ne se confond absolument pas avec la substance fondamentale. Là où la cellule est libre, dégagée complètement de la matière intercellulaire, elle reste munie de cette couche limitante périphérique. Celle-ci semble donc faire corps avec la cellule. Nous sommes par conséquent porté à la considérer comme étant une véritable membrane et non une capsule cartilagineuse. Ce serait toutefois une erreur de croire que cette capsule manque toujours. Cela est vrai pour le cartilage à aspect tendineux. Le plus souvent la capsule existe, même là où l'arrangement des corpuscules en séries linéaires est idéal. En effet, la rétraction protoplasmique, la présence entre le protoplasma et la capsule d'un espace clair corres- pondant au vide laissé par le retrait, l'adhérence intime entre la couche limite et la substance fondamentale environnante, enfin la persistance de la capsule au sein de cette matière après la chute du corps protoplasmique, par suite de manipulations diverses, sont autant de preuves de l'existence d'une couche limitante faisant plus ou moins corps avec la substance inter- cellulaire, c'est-à-dire d'une capsule véritable. RECHERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 1 1 Cette interprétation difficile ne doit étonner personne. Il suffit de quelques préparations microscopiques d'un cartilage diartlirodial d'oiseau adulte pour se convaincre des aspects variés que présente ce tissu. Le point essentiel pour nous c'est la constatation de ces éléments différents au sein de ce cartilage, c'est-à-dire la présence de cellules hyalines tjT)iques, à côté de cellules ressemblant beaucoup à celles du tissu conjonctif tendineux. Entre ces deux variétés on rencontre d'ailleurs toutes les formes intermédiaires. Cependant les éléments cellulaires du cartilage articulaire qui ont le plus de res- semblance avec ceux du tissu tendineux, s'en éloignent par des caractères importants. Ainsi ils ne possèdent jamais les expansions membraneuses en forme d'ailes ou les prolon- gements latéraux décrits par Ranvier (43). Ils ne montrent jamais de crête d'empreinte, particularité désignée par Boll (-11) sous le nom de strie élastique. Au point de vue de leur forme, les cellules ne sont pas aussi aplaties que celles du tissu tendineux. Plusieurs sont lenticulaires, d'autres s'aplatissent davantage et présentent un diamètre beaucoup plus court que les deux autres. Dans ce cas, les deux grands diamètres sont plus ou moins parallèles à la surface articulaire. Le plus court est plutôt parallèle à l'axe de l'épiplij'se. En d'autres termes, si les cellules tendent à s'aplatir, l'aplatisse- ment se fait d'ordinaire parallèlement à la surface articulaire. Aussi les coupes horizontales qui lui sont parallèles, montrent les cellules à plat ou de face, et les coupes verticales montrent les cellules de profil ou en section transversale. Le noyau se présente alors sous forme de strie allongée, entourée par un corps protoplasmiquetrès peu abondant. Toutefois les exceptions à cette règle sont nombreuses. Dans les deux espèces de préparations on rencontre toujours des corpuscules qui se présentent de face et des corpuscules qui se présentent de profil (voyez fig. 2 et 3). Enfin mi dernier caractère propre à toutes ces cellules, est leur richesse en granulations graisseuses, devenant noirâtres par l'action de l'acide osmique. Tantôt ces granulations rem- 12 OMER VAN DEIi STRICHT. plissent tout le corps protoplasmique ; d'autres fois, on en trouve seulement quelques-unes éparpillées vers la périphérie, ou dans le voisinage du noyau, ou disposées d'une façon irrégulière. Cette tendance que présentent ces éléments cellulaires de se charger de graisse, offre une grande importance au point de vue de leur nature. Ranvier insiste sur ce caractère des cellules carti- lagineuses. Dans le cartilage diarthrodial des oiseaux toutes les cellules indistinctement possèdent cette propriété, même celles dont l'aspect se rapproche le moins de celui des cellules cartilagineuses t3^piques. En résumé, l'étude des éléments cellulaires du cartilage arti- culaire des oiseaux nous apprend que la plupart de ces éléments présentent les caractères d'une cellule hyaline typique et que d'autres se rapprochent beaucoup des corpuscules conjonctifs du tissu tendineux. Ce dernier rapprochement se manifeste : 1» Par leur distribution en rangées cellulaires. 2° Par leur forme plus ou moins irrégulière, résultant de leur pression réciproque. 3» Par la structure et la situation du noyau. 4» Le protoplasma, d'ailleurs lui-même à aspect plus clair, moins granuleux, fixant peu l'iode et les matières colorantes, ressemble plus ou moins à celui des corpuscules tendineux. 5*' Enfin quelquefois la capsule hyaline semble faire défaut. D'un autre côté, l'absence d'expansions membraneuses et de crêtes d'empreinte, la propriété du corps protoplasmique de se charger de granulations graisseuses, distinguent les cellules hyalines les moins typiques des corpuscules tendineux. Enfin les cellules cartilagineuses présentent des contours nets. On n'y observe pas de trace de prolongements cellulaires ou de canalicules nourriciers. Quand on se borne à étudier superficiellement les cellules sous le rapport des prolongements, là surtout où ce cartilage recouvre en couche très mince la surface épiphysaire, par exemple au niveau des epiphyses des phalanges des oiseaux adultes, on s'expose beaucoup à donner dans des erreurs que nous tenons à prévenir. Après avoir fait dans ce cartilage RECHRRCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 13 quelques sections parallèles à la surface, on tombe rapidement dans la couche calcifiée. Chez les oiseaux, il existe une grande tendance aux dépôts calcaires; un grand nombre de tissus possèdent cette propriété à un haut degré. Le tissu tendineux en offre un exemple frappant. Le cartilage articulaire aussi s'in- filtre rapidement de sels calcaires. C'est au niveau de cette couche calcifiée que des erreurs se commettent facilement. Des préparations faites, soit à l'état frais, sois après fixation de fragments épiphysaires par des liquides préconisés, donnent des résultats identiques, à la condition qu'on ne décalcifie point par des solutions acides. Il n'est pas difficile de faire des coupes suffisamment minces de la couche calcifiée. Les préparations de la zone où le dépôt calcaire commence sont les plus instructives. Même sans addition de matières colorantes, on distingue nettement les parties infiltrées de sels calcaii^es. Ceux-ci ne se déposent pas d'une façon diffuse dans toutes les parties constituantes du cartilage. Ils respectent certains endroits et affectent une préférence pour d'autres, c'est-à-dire pour le voisinage des cellules. Là on voit apparaître des zones plus ou moins étendueS; circonscrivant les capsules. L'épaisseur de ces zones atteint à peu près la moitié de la distance entre deux cellules voisines. Elles se reconnaissent facilement à leur aspect brillant, à leur réfringence spéciale. La substance fonda- mentale non infiltrée conserve plus ou moins sa teinte normale. Examinée de plus près à un fort grossissement, la couche bril- lante ne se montre pas continue; elle est interrompue et parcourue par des lignes nombreuses, s'irradiant autour de la cellule pour aller rejoindre l'espace situé entre les parties infiltrées. Cet espace est plus ou moins large, les lignes sont beaucoup plus étroites. Quand on met ces dernières exactement au point, .elles présentent un aspect hjalin, clair comme la substance fondamentale normale. Mais du moment qu'on élève ou (iu'on abaisse l'objectif, elles prennent un aspect tout parti- culier. On dirait alors des stries foncées, opaques presque noires, tranchant sur les parties brillantes voisines. Nous avons tâché de rendre dans la fig. 5 ce qu'on observe en éloignant l'objectif. 14 OMER VAN DER RTRICHT. Comme on le voit, toute la substance fondamentale est par- courue par un réseau à mailles serrées et nombreuses. Il est d'ailleurs sujet à varier. Les mailles sont quelquefois larges, les ramifications moins nombreuses ; d'autres fois les trabecules se multiplient et se rapprochent davantage. Remarquons aussi l'inégalité des parties constituantes de ce réseau ; les stries s'irradiant autour des cellules sont très fines. Comme nous l'avons dit tantôt, les travées situées entre deux territoires voisins sont plus épaisses. On y distingue donc des travées principales formant un réseau continu à travers toute la substance fondamentale et dans les mailles duquel sont comprises les cellules entourées de leur territoire respectif. Ce dernier est subdivisé par des trabecules secondaires réunissant la capsule cellulaire aux travées principales. L'interprétation de ces faits, qu'on observe sans peine, n'est certes pas des plus faciles. Au premier abord les lignes foncées (h) aiïectant des rapports si intimes avec les cellules cartilagi- neuses, en imposent pour des prolongements protoplasmiques. C'était là notre première impression, toute naturelle d'ailleurs. Après avoir clierclié vainement le riche réseau protoplasmique décrit par Heitzmann, à l'aide des réactifs préconisés, dans le cartilage articulaire des mammifères, nous éprouvions une véritable satisfaction de le trouver si facilement dans celui des oiseaux. Heureusement notre première idée fut de rendre ces ramifications encore plus évidentes en dissolvant les sels cal- caires déposés dans les mailles du reticulum. A cet ettet, nous laissions pénétrer sous la lamelle couvrante une solution d'acide nitrique à 5 o/o. Or sous l'influence du réactif, le réseau en question disparaît comme par enchantement et il reste un cartilage hyalin typique, c'est-à-dire des cellules dépourvues de tout prolongement à limites nettes et régulières, au milieu d'une substance fondamentale parfaitement homogène. Nous devons donc conclure à l'absence de tout prolongement cellulaire à cet endroit du cartilage articulaire. Une seconde interprétation erronée reste encore possible. Ces lignes opaques et foncées, qui disparaissent si rapidement EECHERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 1 5 par l'acide nitrique, ne sont-elles pas elles-mêmes formées par des sels calcaires ? Cette hypothèse est inadmissible. L'aspect brillant même des parties, siège de dépôts calcaires, est tout à fait caractéristique et propre à des infiltrations de cette esjièce seulement. Il suffit d'ailleurs de recourir à quelques matières colorantes pour avoir tous ses apaisements. Si les lignes foncées {b) ne sont pas modifiées au point de vue chimique, si elles sont de même nature que la substance fondamentale hyaline, elles doivent se colorer de la même manière. Sous ce rapport, la fuchsine et la safranine donnent des préparations démonstratives. La substance intercellulaire fixe ces matières d'une façon intense. Il en est de même des trabecules principaux et secondaires en question (voyez fig. 6). Ils se colorent de la même manière que le cartilage non ca,lcifié. Donc ces réseaux ne sont constitués ni par des prolongements cellulaires, ni par des dépôts calcaires, mais par de la substance fondamentale non modifiée. Heitzmann a décrit dans le cartilage hyalin un réseau semblable, rendu apparent sous l'influence du chlorure d'or et du nitrate d'argent. Pour lui, ce réseau correspond aux ramifi- cations protoplasmiques. Ces dernières seraient visibles sans le concours de réactif dans le cartilage calcifié à l'état frais. D'autres histologistes ont discuté l'interprétation donnée par Heitzmann du réseau obtenu grâce aux réactifs préconisés. Quant à celui signalé dans le cartilage calcifié, nous venons de démontrer qu'on ne peut nullement lui attribuer la valeur de prolongements cellulaires. Un examen attentif ])rouve que ce réseau est constitué pcir de la substance fondamentale non imiirégnée de sels ccdcaires. B. — Substance fondamentale inter cellulaire. Après avoir étudié les cellules cartilagineuses, nous abordons la question la plus importante, celle de la substance fondamentale intercellulaire. Des coupes verticales, c'est-à-dire perpendicu- laires à la surface du cartilage diarthrodial, examinées au 16 OMER VAN DER STRICHT. microscope dans le sérum sanguin ou dans des liquides neutres, montrent trois couches nettement distinctes. Une première super- ficielle, à substance fondamentale fibrillaire ; une seconde à substance intercellulaire homogène, sans structure apparente, et une troisième, siège de dépôts calcaires, la zone calcifiée. Nous ne nous occuperons que de la couche superficielle. Couche superficielle à substance fondamentale fibrillaire. — Ainsi qu'on l'a vu plus haut, dans le court aperçu historique, nous n'avons pu trouver la moindre description relatant l'existence d'une zone semblable. On ne trouve guère de mémoire, parmi les travaux récents, traitant du cartilage articulaire des oiseaux adultes. Les traités anciens n'en disent pas davantage. Leydig (45) dans son cours d'Histologie comparée, figure " la coupe à travers le cartilage articulaire du genou du Coq de bruyère „. D ne parle pas de la structure de la matière inter- cellulaire ; il insiste seulement sur l'existence, dans ce tissu, de canaux vasculaires (voyez p. 180, fig. 88). Or rien n'est plus facile que de constater l'existence d'une couche fibrillaire dans le cartilage diarthrodial. Celui-ci examiné à l'état frais dans des liquides indiff'érents, ou bien fixé préala- blement par des réactifs préconisés et durci ensuite par l'alcool, domie toujours des préparations très démonstratives. En général, il est préférable de s'adresser à des individus adultes, âgés au moins de quelques mois. En effet, chez des sujets jeunes, la couche fibrillaire est relativement mince ; elle existe toujours, mais la zone homogène l'emporte de beaucoup en diamètre. A mesure que l'oiseau avance en âge, elle gagne en épaisseur, se développe davantage et finalement peut acquérir la même épaisseur que la couche située immédiatement en dessous d'elle. Pour l'étudier convenablement, il est donc préférable de choisir des oiseaux d'un certain âge. Chez ceux-ci on rencontre des articulations où le cartilage présente une structure fibrillaire dans toute son étendue. La couche calcifiée même montre quelquefois cette texture. Des coupes horizontales très minces, parallèles à la surface du milieu de la partie antérieure de l'épiphyse inférieure du RECHERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 17 fémur ou du tibiotarse, présentent une grande ressemblance avec des préparations d'un tendon de la queue de Souris ou de Rat. La substance intercellulaire y est manifestement iibrillaire. Les fibrilles exactement parallèles les unes aux autres, sont parallèles aux rangées cellulaires qu'elles séparent. Tous les éléments présentent à peu près la même direction, et celle-ci est également parallèle à la suiface articulaire, car sur des coupes horizontales, on obtient rarement la section transver- sale de fibres. Enfin ces dernières semblent unir les parties laté- rales de l'épiphyse ; en effet, à part quelques-unes toutes super- ficielles, à direction antéro-postérieure, la plupart courent dans le sens frontal. Aussi sur des coupes parallèles au sens sagittal, verticales, presque tous les éléments flbrillaires sont entamés transversalement, exception faite pour quelques faisceaux super- ficiels, visibles dans le sens de la longueur. Toutes les fibres n'ont cependant pas la même direction. Nous avons vu que les colonnes cellulaires d'un même plan sont parallèles entre elles, mais s'entrecroisent avec celles d'un plan sous-jacent. Il en est de même pour les fibres. Celles-ci forment plusieurs plans, plusieurs lamelles, et quand la coupe atteint une certaine épaisseur, on voit les éléments de deux, trois, quatre lamelles différentes, s'entrecroiser dans divers sens, sous des angles variant depuis l'angle aigu le plus petit jusqu'à l'angle di^oit. Sous ce rapport, l'agencement des parties constituantes de ce cartilage est tout à fait spécial. Aucun tissu ne présente une textm-e pareille. Le tissu tendineux s'en rapproche, mais dans aucun organe il ne montre, dans la dis- tribution de ses éléments, un entrecroisement ou un entrelace- ment semblable. La fig. 7 montre la section verticale, paral- lèle à l'axe, faite au milieu de l'épiphyse inférieure du tibio- tarse de poulet dans le sens sagittal. La plus grande partie du cartilage à ce niveau est constituée par des faisceaux frontaux, coupés ici transversalement. La figure 8 montre le même car- tilage sectionné dans le sens frontal. En dehors des faisceaux parallèles à la surface, on en voit quelques-uns situés dans les interstices laissés par ces derniers et coupés transversalement. 2 18 OMER VAN DER STRICHT. La figure 7 donne en plus un réseau manifeste, constitué par des faisceaux fibrillaires plus ou moins épais à direction irré- gulière et prenant leur origine à la surface articulaire. A ce niveau, ils forment une mince couche de fibres parallèles à la surface, à direction sagittale. Ils pénètrent ensuite plus pro- fondément, se ramifient, s'anastomosent et forment un reticu- lum dans les mailles duquel sont situés les faisceaux frontaux ; ils se perdent finalement dans la couche à substance fondamen- tale homogène. La direction générale des fibres est k peu près la même dans les condyles de l'épiphyse inférieure du fémur et du tibiotarse. Les sections verticales sagittales montrent un grand nombre de faisceaux coupés transversalement ; superficiellement il existe encore une mince couche de fibres sagittales. Les faisceaux verticaux, plus ou moins perpendiculaires à la sur- face, sont encore plus nombreux et leurs ramifications sont très abondantes. Les coupes faites parallèlement à la surface articulaire, les plus superficielles surtout, présentent un aspect tout diiîérent. Au lieu de former des lamelles à faisceaux plus ou moins parallèles, les fibres se groupent en travées de lar- geur variable, s' entrecroisant et s' entrelaçant dans tous les sens. Les figures 9 et 10 montrent combien la distribution de ces éléments est sujette à varier. Tantôt ils forment un reticulum, dont les mailles renferment les cellules, tantôt celles-ci se trouvent sur le parcours des trabecules, ou bien au niveau de l'entrecroisement des travées. Nous reviendrons plus loin sur ces particularités. Ajoutons seulement que ces données concer- nant la direction des fibres, ne sont pas toujours rigoureuses, elles ont seulement une valeur générale. De plus, le nombre des faisceaux verticaux parallèles à l'axe de l'os, peut être considérable, leurs anastomoses peuvent se multiplier. Dans ce cas, l'aspect des sections frontales et sagittales varie avec le nombre, la grandeur des faisceaux verticaux et de leurs rami- fications anastomotiques. Ces résultats concordent à peu près avec les conclusions auxquelles est arrivé Sprongk dans son étude surla direction des EECHERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 10 fibres dans le cartilag-e diarthrodial de la Grenouille. Il distingue une couche superficielle et une couche profonde plus tard calcifiée où les faisceaux fibrillaires sont plus ou moins perpen- diculaires à la surface libre. Dans la zone intermédiaire, corres- pondant à la partie la plus épaisse du cartilage, les fibres sont en général parallèles à la surface articulaire incurvée. Dans le cartilage diarthrodial des oiseaux, la couche superficielle à fibres perpendiculaires à la surface n'existe pas. Elle est rem- placée par des fibres sagittales pai-allèles à la surface. On rencontre ensuite la zone à fibres frontales également parallèles à la surface; elle est très épaisse et correspond à la couche intermédiaire de Spronck. Les faisceaux fibrillaires y unissent les parties latérales du périchondre épiphysaire. Enfin la troi- sième zone de Spronck à fibres perpendiculaires, s'observe rarement à l'état frais chez les oiseaux. La couche à substance fondamentale homogène lui correspond très probablement. En eifet, les faisceaux verticaux delà couche intermédiaire viennent se perdre dans la substance intercellulaire et présentent, à ce niveau, une direction franchement perpendiculaire à la surface. Voilà tout ce que nous pouvons dire concernant la direction prédominante des fibres et des faisceaux fibrillaires. Insistons encore cependant sur la fréquence des exceptions. A certains endroits l'arrangement des faisceaux est des plus complexes. C'est surtout le voisinage de l'insertion des ligaments intra- articulaires qui modifie leur distribution. Souvent aussi les faisceaux sagittaux de la couche superficielle deviennent compactes et nombreux, de façon que cette dernière présente l'épaisseur de la zone moyenne. D'autres fois celle-ci est très riche en faisceaux verticaux. Ces derniers l'emportent quelque- fois sur les éléments horizontaux parallèles à la surface libre. Après cet examen de la direction générale des éléments fibrillaires, disons quelques mots de leur distribution et de leur arrangement intime. Très souvent les fibrilles sont réunies en faisceaux. Le diamètre de ceux-ci varie depuis l'épaisseur d'une grosse fibre jusqu'à celle des faisceaux les plus volumineux. Leur structure est manifestement fibrillaire. Les fibrilles y 20 OMER VAN DER STRICHT. courent plus ou moins parallèlement à l'axe, d'autres s'entre- croisent, s'entrelacent et décrivent des flexuosités. Souvent elles quittent le faisceau primitif et vont s'adjoindre à celles d'un faisceau voisin, en figurant des anastomoses quelquefois multiples entre deux faisceaux. Les faisceaux sont donc constitués par une agglomération de fibrilles, séparées par une substance interâbrillaire moins dense, moins compacte, ayant moins d'affinité pour les matières colorantes que la substance fibrillaire. Elle semble être de même nature que la matière interfasciculaire. Cette dernière est d'ailleurs souvent parcourue par des fibrilles isolées, non réunies en faisceau. Quant aux rapports des faisceaux entre eux : sur une coupe très mince, ils sont plus ou moins parallèles les uns aux autres, quelquefois réunis par des anastomoses. Si la préparation est plus épaisse, on parvient à énumérer deux, trois, quatre jjZans ou lamelles fascicidaires ; les divers faisceaux d'mi même plan sont parallèles les uns aux autres, mais ils s'entrecroisent avec ceux d'un plan voisin. Ils se comportent par conséquent comme les rangées cellulaires qu'ils séparent. Souvent même, il existe un entrelacement entre les faisceaux de deux lamelles adjacentes. Ce serait une erreur de croire que les fibrilles se réunissent toujours en faisceaux. Très souvent la substance intercellulaire présente un aspect fibrillaire tout à fait régulier, l'espace interfibrillaire est à peu près partout de même largeur. Ici encore les fibrilles sont plus ou moins parallèles les unes aux autres ; quelquefois cependant elles se superposent, s'entre- croisent et même s'entrelacent. Elles forment ordinairement des espèces de plans ou lamelles fibrillaires, et les fibrilles de deux plans voisins s'entrecroisent sous des angles divers (voyez fig. 3). Parfois les fibrilles d'un même plan, tout en étant parallèles les unes aux autres, décrivent des flexuosités, des ondulations comme en montre la fig. 11. Enfin en dehors de la disposition en plans ou lamelles fasciculaires, c'est-à-dire constituées par la réunion de faisceaux, en dehors de la disposition en plans ou lamelles fibrillaires, il existe la disposition réticulaire ou trahéculaire, consistant en RECHERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 2 1 des amas de fibrilles ou de faisceaux fibrillaires, s' entrecroisant dans tous les sens, de façon à former un reticulum (fig. 9, 10). TiLLMANNs (46) décrit des dispositions semblables dans le cartilage hyalin traité par la tiypsine. Il signale trois types différents : un premier où les fibrilles forment des lamelles ; un second où les fibrilles de deux lamelles voisines s'entrecroisent ; un troisième où elles forment un feutrage, une espèce de réseau. Chez les oiseaux, on rencontre donc en plus la disposition fasciculaire. Quant à la question de savoir si les fibrilles sont ramifiées, nous ne pouvons nous prononcer d'une façon catégorique. Il faudrait avoir recours à des réactifs spéciaux, propres à dissoudre tout le ciment interfibrillaire. Or pour donner plus de valeur à nos recherches, nous avons exclu ce genre d'examen. Des préparations de cartilage frais, dissocié, montrent souvent des faisceaux à structure fibrillaire manifeste de l'extrémité desquels naissent un grand nombre de petites fibrilles (voyez fig. 12). Ceci ne constitue certainement pas une ramification. Ce sont autant de fibrilles réunies d'abord en faisceau par un ciment interfibrillaire suffisamment compacte et se dissociant plus loin en autant de parties isolées. D'autres faisceaux beaucoup plus minces, ayant le diamètre d'une fibre épaisse, mais à l'intérieur de laquelle on constate encore, à l'aide d'un fort grossissement, une striation longitudinale, se terminent aussi par un certain nombre de fibrilles libres. Dans ce cas non plus, il ne s'agit d'une ramification véritable. Mais on constate l'existence de fibres dans lesquelles, à l'aide des grossis- sements les plus considérables, on ne parvient pas à reconnaître l'existence d'une striation et dont une extrémité se termine néanmoins par deux ou trois fibrilles, plus minces et plus fines (]ue la fibre dont elles naissent. Ici l'on peut se demander si l'on se trouve réellement en présence de ramifications. Tillmanks répond affirmativement pour ce qui concerne le cartilage hyalin des mammifères (Chien et Mouton) (voyez ses fig. 6 et 7). D'après Spronck, les fibrilles seraient, au contraire, " unver- zweigt „. Nous n'admettons pas que chez les oiseaux les fibrilles 22 OMER VAN DER STRICHT. se divisent comme des fibres élastiques, c'est-à-dire qu'une fibrille se partage en deux parties de même grandeur à peu près. S'il y a division, les éléments qui en résultent sont toujours plus petits que l'élément générateur. Dès lors, on peut se demander si le ciment interfibrillaire ne masque pas la striation de la fibre génératrice et si celle-ci n'est pas en réalité constituée par deux, trois fibrilles. On peut se demander encore si les grossissements dont on dispose sont suffisants pour démontrer la striation d'éléments déjà excessivement ténus. Une étude de la plus haute importance est celle des rapports qui existent entre les fibrilles et les cellules cartilagineuses. L'intérêt de cette question ressort de ce qui a été dit dans notre apei-çu historique. Plusieurs histologistes ont signalé des rapports intimes entre des parties constituantes de la substance fondamentale et les cellules. Des images présentant plus ou moins de ressemblance ont été observées et interprétées de la manière la plus diverse. Ce sont tantôt des prolongements cellulaires, tantôt des canalicules nourriciers, tantôt des faisceaux iutercapsulaires fibrillaires. Enfin Solger les considère comme des productions artificielles. Que nous apprend à ce sujet, examiné à l'état frais dans des liquides indifférents, le cartilage articulaire des oiseaux? Nous distinguerons trois cas d'après les trois types d'arrangements fibrillaires. Dans les lamelles fasciculaires, les cellules sont alignées en séries parallèles, séparées par des fibres et des faisceaux fibrillaires. S'il est vrai que l'on rencontre parfois des faisceaux obliques, s' entrecroisant avec les colonnes cellu- laires, il ne viendra jamais à l'idée de quelqu'un d'attri- buer à ces faisceaux, plus ou moins en rapport avec les cellules, une nature autre qu'aux éléments situés entre les colonnes. Leur aspect est tout à fait le même, et de plus très souvent on s'aperçoit que ce sont des faisceaux plus ou moins déviés, primitivement réunis aux autres. Là où deux ou plusieurs lamelles fasciculaires sont superposées, les choses se com- pliquent un peu. Seulement en mettant exactement au point, RECHERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 23 on parvient à discerner ce qui appartient à chaque plan et l'erreur est encore impossible. Des travées fibrillaires unissent souvent, il est vrai, des lamelles plus ou moins éloignées et aiîectent dans leur parcours des rapports avec les cellules. Toutefois après un examen minutieux, la valeur réelle de ces éléments est évidente. Les mêmes considérations s'appliquent aux lamelles fibril- laires. Enfin c'est au niveau de la disposition réticulaire des travées fibrillaires, qu'on rencontre les images les plus variées et en même temps les plus analogues à celles si diversement inter- prétées. Souvent les cellules sont situées dans les mailles du reticulum. Dans ce cas, les images sont les moins intéressantes. D'autres fois les cellules se trouvent sur le trajet des travées fibrillaires, passant au-dessus ou au-dessous d'elles, ou bien plus ou moins à côté d'elles (voyez fig. 13). Quelquefois les travées s'attachent en partie aux capsules hyalines. En un mot, ces images se rapprochent beaucoup de celles figurées par BuBNOFF, Budge, Nykamp, Orth, Fûrbringer, Elesch, Spina, etc. et, dans ces derniers temps, par Spina, Zuckerkandl, B. SoLGER, moi, Spronck. Là où l'entrecroisement des fibres devient encore plus complexe, où à côté de travées fibril- laires, interviennent un grand nombre d'autres fibrilles pour former une espèce de feutrage, on obtient facilement des figures ressemblant à celles de Heitzmann, Hasse, Stricker, Spina, etc. Quant à ces figures aussi variées que multiples, aucune erreur d'interprétation n'est possible. A l'état frais, sans addition de réactif fixateur ou de matière colorante, la nature fibrillaire de tous ces éléments est à peu près aussi manifeste que dans un tissu conjonctif quelconque. Vouloir attribuer à ces éléments fibrillaires la valeur de prolongements cellulaires, serait aussi illogique que d'attribuer à ces mêmes parties constituantes du tissu tendineux la signification de ramifications cellulaires, par exemple. Quant à l'existence de canalicules nourriciers dans le sens de Budge, aucun détail de structure ne nous permet de soupçonner ici leur présence. Tout 24 OMER VAN DER STRICHT. ce que nous avons dit jusqu'à présent tend à prouver une nature identique de tous ces éléments fibrillaires. Nous pouvons donc considérer toutes ces iigures, si controversées, comme étant l'expression d'une structure propre de la substance fondamen- tale intercellulaire. Zuckerkândl (36) a soupçonné le premier leur nature fibrillaire en 1885 dans le cartilage de la cloison nasale de Tapir. La même année, nous (47) démontrions cette manière de voir pour le cartilage liyalin des Céphalo- podes, des Sélaciens et pour le cartilage articulaire de Veau et de Grenouille. Nous avons désigné ces éléments sous le nom de faisceaux inter capsulair es. En 1887, Spronck (35) a confirmé ces résultats pour le cartilage de la tête fémorale de Grenouille {Rana esculenta). Dans son dernier travail, traitant du cartilage aryténoïde de Cheval, Spina (89) maintient toujours sa première manière de voir (voyez ses fig. 1, 2, 3, 4, 6). Il y distingue un cartilage jaune et un cartilage blanc. Ce dernier forme des travées radiaires (radiare Bâlkchen) autour des cellules, et il renferme les prolongements cellulaires. Weichselbaum (48) décrit dans le condyle du tibia des lignes, formées par de très fins espaces vides (feinste Spaltrâume). Il les désigne sous le nom de " Zerkltiftungslinien „. Il trouve ces mêmes lignes dans le cartilage articulaire allant subir des modifications seniles. Là, elles présentent une disposition radiaire autour des cellules et forment souvent des anastomoses entre des cellules voisines. Flesch (15) et Bicfalvi ont signalé des particularités analogues. Dans son dernier travail, B. Solger (38) se rallie à la manière de voir de Flesch et considère les lignes de Bubnoff comme des espèces de fentes. Plus loin il ajoute " Ich selbst môchte in den Budge'schen Linien ebenso wie in den Biibnoli'schen, Ver- dichtungsstreifen sehen, die allerdings die Folge von Schrump- fungs-Vorgângen sind „ (v. p. 328). L'étude du cartilage articulaire des oiseaux, examiné à l'état frais, permet d'élucider cette question tant controversée. Bans ce cartilage, on trouve dans la couche superficielle, la substance fondameiîtale nettement fibrillaire. Les fibrilles y affectent les dispositions les plus variées, mais parmi elles, il existe des RECHERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 25 travées, des faisceaux flhrillaires à direction spéciale. La dési- gnation de faisceaux inter capsulair es leur convient parfai- tement. Nous venons de dire que pour l'interprétation de ces images, le doute n'est guère possible. Il existe cependant des cas où il faut être sur ses gardes, et où certains éléments peuvent en imposer au premier abord pour des prolongements cellulaires. Les fig. 14 et 15 en offrent des exemples. On obtient ces images fréquemment sur les coupes sagittales entamant transversale- ment les faisceaux de la zone fibrillaire à direction frontale. A certains niveaux, le reticulum formé par les faisceaux verti- caux est très développé et présente des mailles très nombreuses. Les cellules sont situées sur le trajet des travées trabéculaires et autour de ces cellules comme centre, s'irradient souvent plusieurs fibres isolées pour former une espèce de reticulum secondaire, au sein des faisceaux fibrillaires frontaux. Les figures 14 et 15 font comprendre mieux que toute explication ce dont il est question. A un examen superficiel, les éléments (h) s'irradiant autour de (a) en imposent pour des prolongements protoplasraiques. Les préparations faites après coloration par la fuchsine ou la safranine rendent surtout cette erreur possible. En effet, les cellules et les parties rayonnant autour d'elles prennent une coloration rouge franche. Les faisceaux fibril- laires coupés transversalement sont beaucoup moins colorés et plus clairs. En laissant pénétrer sous la lamelle couvrante un peu de glycérine, l'aspect pointillé correspondant à la coupe optique des fibrilles disparaît, à cause de leur gonflement, tandis que les stries plus colorées {h) persistent nettement. Un examen plus attentif prévient cependant toute erreur. La conti- nuité de ces stries avec le protoplasma cellulaire n'existe pas. Par contre, on constate leur union intime avec les faisceaux intercapsulaires plus grossiers, dont elles sont des prolonge- ments. De plus, on n'obtient ces images que sur des coupes verticales parallèles à l'axe de l'os, entamant transversalement les faisceaux horizontaux de la couche fibrillaire moyenne. Nous pouvons donc dire qu'à côté des faisceaux intercapsulaires 26 OMER VAN DKK STPJCKT. sur le trajet desquels sont situées les cellules, il existe des fibres ou des fibrilles, s'irradicmf autour des capsides entre les faisceaux fibriUaires, Nous les désignerons sous le nom de fibres inter fascicidair es. Nous venons de parler de la confusion possible de ces élé- ments avec des prolongements cellulaires. Virchow décrit des figures stellaires semblables dans le tissu conjonctif et il les prend pour des cellules plasmatiques analogues aux corpuscules osseux. Henle considère ces stries comme simplement produites par les bords de faisceaux coupés en travers. Ranvier (-12) appuie la manière de voir de Henle (comparez les figures 120 et 121 de Ranvier, p. 355, avec nos figures 1-1 et 15). Caetilage articulaire de Poulet et de Dindon nouveau-nés. Des fragments de l'épipliyse et de la diapliyse ont été traités comme nous l'avons dit plus haut, par la liqueur de Flemming et colorés par le picrocarmin. Des coupes verticales, parallèles à l'axe de l'os, ont été faites dans les extrémités inférieure et supérieure du fémur d'un Poulet encore dans l'œuf mais sur le point d'éclore. Elles montrent dans le cartilage la succession des couches suivantes : 1° Une couche superficielle colorée en rouge intense par le carmin, recouvrant toute la surface articulaire et se continuant latéralement avec le périchondre. Les capsules cartilagineuses y sont lenticulaires, aplaties, parallèles à la surface (voyez fig. 18 (a)). 20 Une couche à cellules sphériques, prenant une légère teinte rose sous l'influence du picrocarmin (b). 30 Un cOne cartilagineux coloré plus ou moins en jaune par l'acide picrique, se fixant par le carmin. L'éosine hématoxylique y fait apparaître deux couches bien distiuctives : a) Une couche calcifiée (en grande partie), b) Une couche non calcifiée. La première faisant suite à la zone des capsules sphériques, fixe l'hématoxyline d'une façon très intense. Elle se subdivise également en deux parties : une première la plus superficielle (c) où les capsules sont lenticulaires, aplaties, à grand axe parallèle à la surface. Elles sont serrées les unes contre les RECIIEKCIIES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 27 autres de manière à former des colonnes cellulaires verticales, perpendiculaires à la surface articulaire. Elle correspond au cartilage sérié de Ranvier. Une seconde partie plus profonde (d) où la disposition des éléments en séries linéaires est moins accentuée. Les cellules y sont volumineuses. Elle correspond à la couche calcifiée de Ranvier. La couche non calcifiée (e) se présente sous forme de cône cartilagineux et s'étend à une grande profondeur dans la dia- physe de l'os. Elle fixe faiblement l'hématoxyline. La moelle osseuse y fait suite directement. Par conséquent si on compare ce cartilage diarthrodial à celui des autres vertébrés, on voit que la plus grande différence réside dans la présence d'un cône cartilagineux très volumineux dans la diaphyse de l'os des oiseaux nouveau-nés. Examinons de plus près ces diverses couches et voyons comment elles se présentent quand on les étudie à des grossis- sements convenables. I. — Couche superficielle à capsules lenticulaires. Elle recouvre toute la surface articulaire, et se continue latérale- ment avec le périchondre. Renaut ne parle point de cette zone. Dans sa fig. 3, il dessine cependant quelque chose d'analogue sous forme de bordure foncée. Schôney parle d'une couche à capsules lenticulaires faisant suite au périchondre, mais il ne représente rien de semblable. Cette couche correspond à celle des capsules lenticulaires des mammifères. Seulement elle présente dans sa texture des particularités intéressantes sur lesquelles nous devons attirer l'attention. Pour juger de son épaisseur, il suffit de faire des coupes perpendiculaires à la surface articulaire ; elle constitue la couche la plus mince du cartilage. Son diamètre varie cependant. Vers les parties latérales de l'épiphyse, où elle se continue avec le périchondre, elle atteint parfois l'épaisseur de la zone à capsules sphériques. Au point de vue de sa structure, on y distingue des cellules cartilagineuses et une substance intermédiaire peu abondante, avide de matières colorantes. Des coupes parallèles à la surface 28 OMER VAN DER STRIGHI. articulaire, examinees à l'état frais dans des liquides indiiférents, montrent des cellules plus ou moins arrondies, à protoplasma granuleux, se colorant en jaune intense sous l'influence de l'iode. Le noyau est central, arrondi, plus ou moins allongé. La cellule remplit complètement la capsule cartilagineuse. Sur des coupes perpendiculaires à la surface, les éléments cellulaires présentent une forme lenticulaire. Leur grand axe est parallèle à la surface. Quant à la substance intercellulaire, au lieu d'être homogène, elle possède une structure manifestement fibrillaire. Celle-ci se voit aussi bien sur des cartilages examinés à l'état frais dans des liquides neutres, que sur des cartilages traités par des réactifs fixateurs, tels que l'alcool, l'acide osmique à 1 o/o, la liqueur de Flemming, etc. Quant aux caractères, la distribution et l'arrangement de ces éléments fibrillaires, nous pourrions répéter tout ce qui a été dit à propos de l'étude de ces mêmes éléments dans le car- tilage adulte. La distribution en réseau constitue cependant la règle (voj^ez fig. 16). D'autres fois, les cellules forment des rangées linéaires parallèles à la surface, et ces séries sont séparées par des faisceaux ou des amas fibrillaires plus ou moins épais. Ici encore on rencontre des images rappelant plus ou moins les figures' de Budge, Flesch, Spina, Nykamp, ZucKERKANDL, moi, etc, figures interprétées tantôt comme prolongements cellulaires, tantôt comme canalicules nourri- ciers, tantôt comme faisceaux intercapsulaires et considérés par SoLGER comme productions artificielles. De même ici toute confusion est impossible, la nature de ces éléments situés au sein d'un substratum fibrillaire tout à fait identique, n'est pas discutable. Ce sont donc des fibres ou des faisceaux fibrillaires à trajet spécial, reliant des capsules voisines. n. — La couche à capsules spliériques présente peu de particularités. Ses cellules sont plus ou moins spliériques et présentent leur maximum d'activité près de la couche à capsules lenticulaires et sur les parties latérales près du périchondre. Là surtout on distingue bien la transition entre la couche fibrillaire et le cartilage hyalin complètement développé. A ce RECHERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 29 niveau, on voit des cellules volumineuses, arrondies, à proto- plasma granuleux et abondant, à noyau volumineux. Très souvent on distingue deux noyaux dans une cellule, ou bien deux cellules dans une capsule. Cette même activité formative existe autour des canaux médullaires contenus dans la couche à capsules spliériques. Ces canaux relativement rares à ce niveau renferment des vaisseaux sanguins au même titre que le péri- cliondre. La nutrition des éléments avoisinants s'y fait donc facilement. Nous n'avons pas essayé le réactif préconisé par Neu- mann (49), Ranvier (42), Leboucq (50), pour déceler dans ces cellules la présence du glycogène se colorant en brun acajou sous l'influence de l'iode. L'existence de cette substance au sein des cellules cartilagineuses témoigne d'une activité orga- nique considérable. Quant à la substance fondamentale, elle est hyaline, homo- gène à l'état frais, se colore faiblement sous l'influence du carmin et de l'hématoxyline. Sur un grand nombre de prépa- rations de cartilage de Poulet nouveau-né et de Dindon âgé de trois jours, fixé par la liqueur de Flemming mêlée d'eau à parties égales, nous avons obtenu des images tout à fait analogues à celles représentées dans notre mémoire déjà cité (voyez nos figures 6, 11, 14, 20, 21, etc.). De sorte que chez les oiseaux la zone à capsules sphériques du cartilage diarthrodial posséderait, du moins à certains niveaux, une structure lamellaire. m. — A la seconde couche succède d'une facon brusque la troisième, celle du cartilage sérié, ou à capsules empilées. Les préparations colorées par l'éosine hématoxylique sont les plus instructives. Le picrocarmin la colore en jaune et non en rouge, comme il le fait pour la seconde zone. Mais comme ces deux teintes sont très faibles, la diiférence quoique appréciable, n'est pas aussi manifeste que pour l'hématoxyline ou le vert de méthyle. Ces substances colorent peu la seconde couche, mais d'une façon très intense la troisième. Cette grande affinité pour l'hématoxyline prouve en faveur de modifications chimiques 30 OMER VAN DER STRICHT. spéciales, survenues au sein de la substance fondamentale. Au premier abord, on serait tenté d'admettre une infiltration de sels calcaires. Mais l'examen d'une coupe microscopique faite à l'état frais, perpendiculairement à la surface de l'épiphyse, écarte cette idée ; cette couche se montre exempte de dépôts calcaires. De plus, si on laisse pénétrer doucement sous la lamelle une solution faible d'un acide minéral, c'est uniquement au niveau de la quatrième couche (calcifiée) qu'on voit se former les bulles d'anhydride carbonique. Ceci prouve que cette dernière seule est le siège de carbonates, l'autre a seulement subi des modifications chimiques précédant la calcification. IV. — La quatrième couche, correspondant à là zone de calci- fication de Banvier, est constituée de cellules volumineuses à noyau arrondi. La substance intercellulaire est peu abondante et homogène. Elle se colore en bleu foncé sous l'influence de l'hématoxyline. On y trouve des canaux médullaires nombreux. A ce niveau, on remarque les premières traces de l'os endochondral. Comme dit Schoney, le tissu osseux de formation récente touche directement au réseau de substance fondamentale chargée de sels calcaires. De plus, ici, du moins chez le Dindon âgé de trois jours, il n'y a pas de travées directrices plongeant librement dans la moelle osseuse diaphysaire. Il persiste à cet âge un cylindre cartilagineux volumineux, séparant la moelle osseuse de la couche de calcification. Au reste, l'ossification s'y fait toujours de la même manière, c'est-à-dire aux dépens de cellules spéciales ostéoblastiques, occupant la périphérie des espaces médullaires et tapissant leurs parois. Ces cellules prennent, de même que les bordures osseuses, auxquelles elles donnent naissance, une teinte rose foncée sous l'influence de l'éosine hématoxylique. Les cellules de la couche de calcification se colorent très peu et si elles fixent de la matière colorante, c'est à l'hématoxy- line qu'elles donnent la préférence, prenant alors une teinte faiblement bleuâtre. Cependant certaines cellules se conduisent d'une autre façon. Sous ce rapport, nous avons observé des particularités intéressantes au point de vue de l'intervention RECHERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 31 active ou passive de la part de ce cartilage, dans la formation de l'os endochondral. (Pour l'historique de cette question, voir Lebougq (50), p. 1-7.) Pour les uns, le cartilage se comporterait d'une façon passive dans la genèse de l'os endochondral, il subirait la destruction complète. Pour d'autres, il jouerait un rôle actif, les cellules cartilagineuses persisteraient au niveau de la limite d'ossilication et donneraient naissance à certaines parties constituantes de la moelle. Lebougq (50) a démontré ce fait pour le cartilage des mammifères (Homme et ruminants). Dans un mémoire tout récent, E. Léser (51) arrive à des résultats opposés. Voici comment il s'exprime à ce propos : " In der Nahe der Markriiume gehen mit den neugebildeten Zellen Verânderungen vor, welche ihren thatsàchlichen Ilntergang einzuleiten scheinen. „ Au point de vue de cette étude, le cartilage des oiseaux est très favorable. A certains endroits de la couche calcitiée, on voit des espaces médullaires, dont les bords sont encore dépour- vus de toute trace de substance osseuse. C'est le moment de l'apparition des cellules ostéfiblastiques. Celles-ci tapissent les trabecules du cartilage calcifié. A ce niveau, ces travées de substance intercellulaire tantôt encore chargées de sels cal- caires, prenant une belle nuance bleuâtre sous l'influence de l'hématoxyline, perdent maintenant cette propriété, elles restent plus ou moins incolores, ou plutôt bleu pâle (voyez fig. 19). La substance fondamentale y subit donc des modifications chimiques importantes, les dépôts calcaires y disparaissent. Les cellules ne restent pas étrangères à ces changements. Tantôt encore bleuâtres, elles acquièrent une teinte rose, caractéristique pour les éléments médullaires. Comme la fig. 19 le montre, on constate parfois dans l'intérieur du système tra- béculaire en partie ouvert ou détruit, la présence de cellules qu'on est forcé de considérer comme ostéoblastes. D'autres fois on est embarrassé de dire si l'élément qu'on a sous les yeux, est une cellule cartilagineuse ou un ostéoblaste. Il est donc possible de trouver tous les stades intermédiaires entre le corpuscule hyalin et l' ostéoblaste. Nous croyons pouvoir en 32 OMER VAN DER STRICHT. conclure que chez les oiseaux, des ostéohlastes naissent aux dépens de cellules cartilagineuses et que celles-ci jouent 2)ar coiiséquent un rôle actif dans la formation de Vos endochon- dral. ScHONEY est arrivé aux mêmes résultats en examinant des préparations traitées par l'acide chromique. Il n'indique aucun réactif capable de faire apparaître les stades de transition entre les éléments cartilagineux et les éléments médullaires. L'éosine liématoxylique les rend tout à fait manifestes. V. — Nous arrivons à la cinquième zone du cartilage diar- throdial embryonnaire : la couche non calcifiée. Chez le Dindon âgé de trois jours, elle est très épaisse. Elle constitue à peu près les 4/5 du cône cartilagineux total. Renaut représente ce cône (voyez sa fig. 3) chez un embryon de Poulet de vingt jours. A ce moment, l'infiltration calcaire doit déjà exister. Cependant il n'insiste pas sur la présence de couches différentes. Au point de vue de la texture, cette couche ressemble un peu à sa voisine calcifiée. La substance fondamentale paraît homogène et est plus abondante que dans cette dernière. L'aspect trabéculaire y est moins prononcé. Les cellules sont également volumineuses, à noyau arrondi bien marqué et à protoplasma granuleux clair; mais elles présentent une forme plus arrondie. Des canaux médullaires parcourent ce cartilage. Chez un Poulet nouveau-né, la richesse en espaces médullaires est à peu près la même dans les deux couches, la calcifiée et la non calcifiée. Entre les deux, il existe une espèce d'intersection. Le tissu médullaire en rongeant le cartilage à ce niveau établit une cloison incomplète entre les deux couches. C'est là, dans la partie inférieure de la zone calcifiée, qu'apparaissent les pre- mières traces de l'os endochondral. Le cartilage y est envahi de plus en plus, les espaces médullaires s'y multiplient, tandis que dans la couche non calcifiée, leur nombre reste à peu près stationnaire. Cette différence au point de vue du nombre de canaux médullaires est visible à l'œil nu. En examinant, sans le concours du microscope, des coupes longitudinales d'un os long d'un Dindon âgé de trois jours, on parvient à délimiter à RECHERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAUIE DES OISEAUX. 33 peu près ces deux couches en question, grâce à leur aspect différent. Sous ce rapport, les préparations à l'éosine hématoxj'- lique sont encore beaucoup plus instructives. Le cartilage épi- pliysaire se colore en bleu intense, le cartilage diapliysaire en bleu pâle. Entre les deux existe une couche constituée par des îlots colorés en rose. Ceux-ci correspondent aux espaces médul- laires et aux premières traces de l'os endochondral. Le passage entre les deux zones l'une bleu foncé, l'autre bleu pâle, est net et brusque, c'est-à-dire qu'il n'existe aucune transition de teinte. La ligne de démarcation est cependant très irrégulière. Des travées colorées en bleu intense, pénètrent plus ou moins profondément dans le cartilage voisin bleu pâle. Ces prolon- gements irréguliers existent surtout sur les parties latérales dans le voisinage de l'os périostique. Ajoutons que le vert de méthyle et d'autres réactifs donnent des résultats identiques. Il nous reste une dernière question à poser, relativement à la destinée de ce cône cartilagineux non calcifié. Joue-t-il un rôle dans la formation de l'os endochondral ? Nous devons répondre affirmativement. En effet, à côté d'im nombre excessi- vement considérable de cellules à noyaux multiples, il existe sur les parois latérales de ce cône des ostéoblastes véritables, des bordures de tissu osseux endochondral. Ces travées osseuses sont plus rares vers les régions centrales. Elles y existent cepen- dant, et elles s'y développent dans les mêmes conditions, c'est-à-dire aux dépens d' ostéoblastes tapissant les bords des anfractuosités situées au sein d'un cartilage libre de tout dépôt calcaire. Ici encore on constate des formes intermédiaires entre les corpuscules hyalins et les éléments médullaires. Enfin insistons encore sur l'aspect tout à fait embryonnaire de ces cellules cartilagineuses : leur forme est arrondie, leur proto- plasma abondant, leur noyau souvent double. Tout cela prouve en faveur d'une intervention essentiellement active de la part de ces éléments dans la formation de l'os endochondral et d'une partie de la moelle osseuse. En résumé, l'étude du cartilage diarthrodial nous a démontré : 1°) L'existence d'une couche cartilagineuse superficielle à substance intercellulaire fibrillaire. 3 34 OMER VAN DER STRICHT. 2") Une structure lamellaire de la substance fondamentale de la couche à capsules spliéiiques. 30) Des modiflcations chimiques précédant la calcification au niveau de la zone du cartilage à capsules empilées, correspon- dant au cartilage sérié de Ranvier. 40) L'existence à côté d'une couche de cartilage calcifié, d'un cône cartilagineux non calcifié diaphysaire. Celui-ci ne correspond ni à la couche ostéoïde de Eanvier (couche calcifiée exempte de tissu osseux), ni à la couche osseuse (celle où le tissu osseux tapisse les travées directrices calcifiées). Nous nommerons ce cône, faisant suite à la couche osseuse, cône cartilagineux médullaire. Il plonge en effet directement dans la moelle. 50) La participation active du cartilage calcifié et du carti- lage médullaire à la formation de l'os endochondral. En d'autres termes, la transformation graduelle des cellules cartilagineuses en éléments médullaires, notamment en ostéoblastes. G and, le 30 décembre 1888. RECHERCHES SUR LE CARTH^AGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 35 LISTE DES OUVRAGES CITES. (1) Heitzmann. Studien am Knochen unci Knorpel. (Wien. med. Jahrb. 1872, 4 Heft.) (2) Stricker. Vorlesungen ilbcr allgemeitie unci experimentelle Patho- locjie. (II Abtli. Wien. Braumiiller.) (o) LôWE. Ueber cine eigenthumliche Zeichnung im Hi/alinknorpel. (Wien. med. Jalirb. p. 257-258, 1874.) (4) Spina. TJebcr die Snftbahnen des hynUnen Knorpels. (Sitzungsb. der Acad. d. Wiss. in Wien. Bd. 80.) (5) Elsberg. Contributions to the normal and patliological Histology of the cartilages of the Larynx. (Arch, of Laryngol., vol. II, 1881.) (6) Remak. TJeber die Entstehung des Bindegeioebes und des Knorpels. (Arch. f. Anat. 1852, p. 63.) (7) Heidenhain. Zur Kenntniss des hyalinen Knorpels. (Studien des phys. Instit. za Breslau, 1863, II Heft.) (8) Broder. Ein Beitrag zur Histologie des Knorpels. (Diss. Zurich. 1865.) (9) ITasse. Ueber den Bau unci iiber die Entivicklung des Knorpels bei den Elasmobranchiern. (Zool. Anzeiger, 1879, n» 31, p. 323 et no 32, p. 325.) (10) 0. Hertwig. Ueber die EiitwicMung und den Bau des elastischen Geivebes im Netzknorpel. (Arch. f. mikr. Anat. Bd. IX, 1872, p. 80.) (11) Retzius. Beitrag zur Kenntniss des Knorpelgeivebes. (Bidrag till kannedomen om bruskvafnaden. Nord. med. Ark. Bd. IV, 1872.) (12) Thin. On the Structure of hyaline Cartilage. (Quart. Journ. of microscop. Science. Vol. XVI, 1876, p. 1-22, 2 pi.) (13)_TlZZ0NI Guido. Sulla istologia normale e patologica delle cartila- gini ialini. (Archivio per le scienze mediche, II fase. p. 27-102, Ipl.) 36 OMER VAN DER STRIOHT. (14) Prudden. Beobachtiingen am lebenden Knorpel. (Virch. Arch. Ed. 75, p. 158-198, 1 pi. 1879.) (15) Flesch, M. Untersuchungen ilher die Grundsuhstanz des hyalinen Knorpels. (Wurzburg. A.. Stuber, 5 pi. 1880.) (IG) Leydig, Fr.Zclle und Gewcbc. (Neue Beitràge zur Histologie des Thierkôrpers 1885. Knorpelzellen, p. 4 et Knorpelgewebe, p. 73.) (17) PeteONE. Sitila Structura delle cartilagine. (Giornale interna- zionale delle scienze mediche. Nuova serie, 6 tavole, 1879.) (18) BUBNOFF. Beiirdge zur Keuntniss dcr Slruciur des Knorpels. (Wiener Sitzungsb. Bd. 57, 1868 ) (19) Henocque. Structure des cartilages. (Gaz. medicale. Paris 187.3.) (20) BUDCtE, a. Die Saftbahnen ini liyalincn Knorpel. (Archiv. f. mikr. Anat. Bd. 14, p. 65-73, 1877.) Id. Weitere Mittheilung iiber die Saftbahnen ini hyallnen Knorpel. (Arch. f. mikr. Anat. Bd. 16, p. 1-15, 1 pi. 1879.) (21) Orth. J. Cursus der normalen Histologie. (Berlin 1881.) (22) Arnold. Zur Kenntniss der Saftbahnen des Bindegewches. (Virch. Arch. Bd. 68, p. 465-506, 2 pi.) (23) Nykamp. Beitrag zur Kenntniss der Strnctur des Knorpels. (Arch. f. mikr. Anat. 1877, Bd. 15.) (24) KôLLIKER. EntiviclcelungsgescAichte der Cephalopoden. (Zùricli. 1844.) (26) Bonders. Mlkroskopische und niikrochemische Untersuchungen thierischer Geivebe. (Hollàndische Beitràge, p. 39, p. 252.) (26) LANGHANS. (Zeitschrift flir Wissench.. Zool. Bd. 15, Heft 3, p. 249, 1865.) (27) GegenbaUR. Untersuchungen zur vergleichenden Anatomie der Wirbelthiere. (Heft. 3, p. 237-249. Leipzig. Engelmann 1872.) (28) TiLLMANNS. Ueber die fibrillare Structur des Hyalinknorpels. (Centralblatt fur Chirurgie. Nr. 11, p. 161-163, 1877.) Id. Ueber die fibrillare Structur des Hyalinknorpels. (Arch. f. Anat. und Physiol. Anat. Abtheil., p. 9-20, 1 pi. 1877.) (29) BABER. E. CresWELL. On the structure of hyaline cartilage. (.Tournai of Anat. and Physiol. Vol. X, p. 113-126, 1 pi. 1875.) (30) Genzmer, a. Untersuchungen iiber den Hyalinknorpel. (Centralbl. fiir Chirurgie. Nr. 17, p. 257-260, 1875.) Id. Ueber die Reaction des hyalinen Knorpels auf Entzilndungsreize und die Vernarbung von Knorpelwundcn nebst einigen Berner- RECHERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 37 kungen znr Histologie des Hyalinknorpels. (Vircli. Arch. Bd. 67, p. 75-92, 2 pL 1876.) (31) Reeves. The matrix of articular cartilage. (British medic, jour- nal. II, Novemb. 1876, p. 616.) (32) BlCF ALYI. Beitrage zur Striicttir der Grimdsnbstanz des hyalinen Knot-pels. (Orvostermészettndomauyi. Erksito 1883, p. 13-30, 1 pi. Nacli dem Referai von King im med. Centralbl. Nr. 25, 1883.) (33) A. VOGEL. Die Saftbahncn des Hyalinknorpels. (Dissertation. Bern. 1883.) (34) Van DER Stricht, 0. Recherches sur le cartilage hyalin. (Arch. de Biologie publiées par Ed. VanBeneden et Ch. Van Bambeke. Tome VII, 1886. PL I-III.) (35) C.-H.-H. SpronCK. Zur Kenntniss der Struciur des Hyalinknor- pels. (Vorlaufige Mittheiluug.) Anatomischer Anzeiger II. Jahrg. 1887. Nr. 9, p. 259-269.) (36) ZUCKERKANDL. Beitrag zur Lehre von dem Baue des hyalinen Knorpels. (Sitzungsb. d. kais. Acad. d. Wiss. Wien. Bd. 91, III, Abth. Marz Heft. 1885.) (37) B. SOLGER. Die Wirkimg des Alcohols auf den hyalinen Knorpel. (Festschrift f. A. von Kôlliker, 1877 ) (38) B. SOLGER. Ueber Schriunpfiingserscheimmgen am hyalinen Knorpelgeivebe des Menschen und deren Beziehungen zu den Fibrillen. (Arch, fur mikr. Anat. Bd. 31, p. 303-333, 1 pi.) (39) Spina. Beitrdge zur Histologie des hyalinen Knorpels. (Medic. Jahrbùch. Jahrg. 1886, p. 447-462, 2 pi.) (40) Renaut. Becherches anatomiques sur le tissu élastique des os. (Laboratoire d'histol. du Coli .de France, 1875, p. 148-162, 1 pi.) (41) L. SCHÔNEY. Ueber den Ossificaiionsprocess bei Vogeln. (Arch. f. mikr. Anat. Bd. 12, 1875.) (42) RANVIER. Traité technique d'Histologie, 1875. (43) RANVIER. Nouvelles recherches sur la structure et le développement des tendons. (Laboratoire d'Histol. du Collège de France, 1874, p. 56.) (44) BOLL, F. Untersuchungen iiber den Bau und die Entivickhing der Geivebe. (Arch, de M. Schultze, 1871, p. 275.) (45) Leydig. Traité d'histologie de l'homme et des animaux. (Traduit par Lahilonne.) 38 OMER VAN DER STRICHT. (46) TiLLMANNS. JJeher die fibrillare Structur des Hyalinkyiorpels. (Arch. f. Anat. u. Physiol. Anat. Abth. 1877, p. 9-20.) (47) Van DER Stricht, 0. Recherches sur le cartilage hyalin. (Comma- nication préliminaire). Annales de la Société de médecine de Gand, 1885, p. 1-12.) (48) WeicHSELBAUM. Die senilen Verdnderungen der Gelenke und deren Zusammenhang mit der Arthritis deformans. ("Sitzungsb. d. Kais. Acad. d. Wiss. Wien. 3 Abth. Bd. 57, p. 193, 4 pi. 1877.) (19j Neumann. Die lodreaction der Knorpel und Chordazellen. (Arch, f. mikr. Anat. Bd. 14, p. 54, 1877.) (50) Leboucq. Etudes sur l'ossification. (Académie royale de Bel- gique. Extrait des bull. 2e série, tome 44, n» 11. Nov. 1877.) (51) E. Léser. Ueber histologische Vorgdnge an der Ossificationsgrenze mit besonderer Beriicksichtigung desVerhaltens der Knorpelzellen. (Archiv. f. mikrosk. Anat. Bd. 32, 1 Heft.) RECHERCHES SUR LE CARTE^AGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. 39 EXPLICATION DES PLANCHES (i). PLANCHES I ET II. Fig. 1. Coupe parallèle à la surface de la partie antérieure de l'épi- physe inférieure du tibiotarse d'une oie adulte. Liqueur de Flemming mélangée d'eau à parties égales. Eosine. Hartn. obj. 9. oc. 3. Fig. 2. Coupe parallèle à la surface de la partie antérieure de l'épi- physe inférieure du tibiotarse d'une oie adulte. Liqueur de Flemming mélangée d'eau à parties égales. Safranine. Tlartn. obj. 9. oc. 3. Fig. 3. Coupe parallèle à la surface de la partie antérieure de l'épi- pbyse inférieure du tibiotarse d'un poulet adulte. Liqueur de Flemming mélangée d'eau à parties égales. Vert de métliyle. Hart. obj. 9. oc. 3. Fig. 4. Coupe perpendiculaire à la surface, sagittale, de l'épipbyse supérieure du tibiotarse. Poulet adulte. Alcool du com- merce. Eosine. Hartn. obj. 9. oc. 3. Fig. .5. Coupe à travers l'épiplij'se inférieure de la phalange d'une patte de canard adulte. Examen à l'état frais dans une solution de cblorui'e de sodium à 1 "/o. Hartn. obj. 9. immersion, oc. 3. Fig. 6. La même coupe, colorée par la fuchsine et examinée dans Teau distillée, (a) Parties claires non colorées, siège de dépôts calcaires. (6) Réseau coloré de la même manière substance fondamentale (c) non infiltrée. Hartn. obj. 9. immers. oc. 3. Fig. 7. Coupe sagittale faite au milieu de la partie antérieure de l'épiphyse inférieure du tibiotarse. Poulet adulte, (a) La couche toute superficielle, (b) Couche plus profonde. Alcool. Fuchsijie. Hartn. obj. 9. oc. 3. (') N.-B. La plupart de ces figures ont été dessinées à la chambre claire. 40 OMER VAN DER STRICHT. Fig. 8. Coupe frontale perpendiculaire à la surface, faite au milieu de la partie antérieure de l'épiphyse inférieure du tibio- tarse. Poulet adulte. Alcool. Eosine. Hartn. obj. 9 im. oc. 3. Fig. 9. Coupe parallèle à la surface du milieu d'un des condj'les de l'épiphyse inférieure du tibiotarse. Fuligula marila. Liqueur Flemming mélangée d'eau à parties égales. Vert méthylique. Hartn. obj. 9. oc. 3. Fig. 10. Coupe parallèle à la surface du milieu d'un des condyles de l'épiphyse inférieure du tibiotarse. Canard. Liqueur Flemming et eau à parties égales. Vert méthylique. Hax'tn. obj. 9. oc. 3. Fig. 11. Coupe parallèle à la surface du milieu de l'épiphyse inférieure du tibiotarse d'un poulet adulte. Cartilage frais. Coloré par la safranine. Hartn. obj. 9. oc. 3. Fig. 12. Dissociation de faisceaux fibrillaires empruntés à une coupe horizontale de la partie antérieure de l'épiphyse inférieure du fémur. Oie. Liqueur de Flemming et eau à parties égales. Eosine. Hartn. obj. Homogène '/^g. Praz. oc. 3. Fig. 13. Coupe oblique par rapport à la surface, de l'épiphyse infé- rieure du fémur. Fuligula marila. Liqueur de Flemming et eau à parties égales. Fuchsine. Hartn. obj. 9. oc. 3. Fig. 14. Coupe sagittale perpendiculaire à la surface de l'épiphyse inférieure du fémur. Oie adulte. Alcool. Fuchsine. Hartn. obj. 9. oc. 3. Fig. 15. Coupe sagittale perpendiculaire à la surface de l'épiphyse inférieure du tibiotarse. Poulet adulte. Alcool. Fuchsine, (a) Cellules, (b) Fibres intercapsulaires. (c) Faisceaux intercapsulaires. Hartn. obj. 9. immersion, oc. 3. Fig. 16. Coupe parallèle à la surface du condyle de l'épiphyse infé- rieure du fémur. Dindon âgé de 3 jours. Liqueur de Flemming et eau à parties égales. Eosine. Hartn. obj. 9. oc. 3. Fig. 17. Coupe du condyle de l'épiphyse inférieure du tibiotarse d'un dindon adulte. Liqueur de Flemming et eau à parties égales. Eosine. Hartn. obj. 9. oc. 3. Fig. 18. Coupe verticale parallèle à l'axe de l'extrémité inférieure du fémur d'un dindon âgé de trois jours. Liqueur de Flem- KECHERCHES SUR LE CARTILAGE ARTICULAIRE DES OISEAUX. -11 ming et eau parties égales pendant 24 heures. Eosine liématox3^1ique. Grossissement de 10 diamètres. (a) Couche superficielle fibrillaire. (b) Couche à capsules sphériques. (c) Couche de cartilage sérié. {(l) Couche de cartilage calcifié. (e) Couche de cartilage médullaire non calcifié. (/") Premières traces de l'os endochondral. (g) Os périostique. (Il) Espaces médullaires. Fig. 19. Coupe [an même individu, au niveau de la couche calcifiée Liqueur Flemming et eau à parties égales. Eosii:e héma- toxylique. Hartn. obj. 9 immersion, oc. 3. (a) Espace médullaire. {h) Trabecules de substance fondamentale infiltrée de sels calcaires. (c) Trabecules non infilti'és de sels calcaires. (d) Ostéoblaste. (/■) Leucoblastes. (g) Erytroblastes. Monadines et Chytridiacées, parasites des algues du Golfe de Naples, PAR C. DE BRUYNE, Assistant à l'Université, Professeur à l'École normale de l'Etat à Gand. (Planches III à V. INTRODUCTION. Les recherches dont le présent travail constitue le compte rendu, ont été faites à la Station zoologique de Naples, où j'ai résidé pendant les mois de février, mars, avril et mai derniers. Je me proposais, en demandant l'autorisation d'aller y occuper la table belge, de continuer mes études au sujet des protozoaires vivant en parasites sur les algues. Mes résultats présentent certaines lacunes, inévitables quand on ne peut pas disposer d'un temps relativement long : à mon avis, pour pouvoir mener à bien la question du parasitisme|chez les algues marines, il faut pouvoir s'en occuper sur place pen- dant une année entière. Tout d'abord, de même que pour toutes autres recherches au bord de la mer, il faut compter avec les intempéries du climat, qui peuvent, pendant plusieurs semaines, empêcher le renouvellement des matériaux. Au témoignage de MIVI. les Assistants de la Station zoologique, le temps a été exceptionnellement défavorable pendant le mois 4:i C. DE BRUYNE. de février et une partie du mois de mars de cette année. Malgré la meilleure volonté, les pêclieurs attachés à l'établis- sement, étaient dans l'impossibilité de me procurer une bonne moisson d'algues : la mer était continuellement et fortement agitée. La seconde moitié de mars, ainsi que les mois d'avril et de mai, au contraire, ont été très favorables, et je rends volon- tiers hommage au zèle de M. Salvatore Lo Bianco, pour me dédommager de mes premières privations. D'un autre côté, les modes de multiplication des organismes inférieurs varient beaucoup avec l'époque de l'année et les conditions climatériques. C'est ainsi qu'à tels mois de l'année ils évoluent avec une rapidité étonnante, tandis qu'ils passent tels autres dans un état de repos, sorte de léthargie, dont il est quasi impossible de les réveiller. Il en résulte qu'en pareil cas le matériel peut devenir, pour le naturaliste dont le séjour est limité, absolument improductif et, à raison de sa torpeur, entraî- ner une perte de temps précieux : ceci a été mon cas à plusieurs reprises, ainsi que j'aurai l'occasion de le montrer en maints endroits de ce mémoire. Si, au contraire, on travaille à ce sujet pendant l'époque favorable à la multiplication, on voit sous le microscope se succéder un grand nombre de générations, mais malheureusement toutes présentent invariablement le même cycle : à toutes manquent, presque toujours, le ou les stades de repos tels que ci/stes, spores de conservation, etc. Quant à les provoquer artificiellement, je ne crois pas qu'il soit bon d'y procéder, car dans ce cas on ne parvient d'ordinaire qu'à pro- duire des formes anormales et qui ne méritent aucune con- fiance, ou, bien pis encore, on voit ces cultures s'altérer et se perdre complètement. C'est là l'inconvénient principal que j'ai rencontré au cours de mes observations. L'unique moyen de l'éviter eût été de pouvoir séjourner encore davantage au bord du Golfe de Naples, mais une prolongation de congé m'avait déjà été accordée et j'ai cru devoir m'en contenter. La nature même de mon travail exige des matériaux toujours frais, renouvelés tous les jours et étudiés sur place : l'étude par les réactifs histologiques ne peut se faire que plus tard et doit MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 45 toujours être considérée comme un complément, un achèvement. C'est pourquoi je n'ai pas fait une bien grande collection de matériaux conservés : ceux que j'ai rapportés ne m'ont servi qu'à élucider certains détails de structure histologique. Je n'ai certainement pas songé à rapporter des algues à l'état frais ; celles-ci, en effet, auraient pu, pendant deux, trois jours, parfois quelques heures seulement, ne pas s'altérer, mais certainement elles auraient perdu toute valeur avant leur arrivée à Gand, où les moj^ens de pourvoir à leurs besoins les plus urgents me devaient certainement faire défaut. S'il s'agit, au contraire, de plantes fluviales ou lacustres, leur transport est de beaucoup facilité et on peut conserver dans un laboratoire quelconque et dans d'excellentes conditions toute espèce d'algues de cette pro- venance : on peut même s'en faire envoyer de très loin ; il suffit pour cela que l'eau soit renouvelée de temps à autre. Je reviens donc à ce que je disais en commençant : pour étudier la morpho- logie et la biologie de ces êtres inférieurs si délicats, il faut absolument s'établir au bord de la mer pendant une année entière : alors seulement on peut les cueillir sur les algues, les choisir, les observer dans toutes leurs conditions hahituelles : lumière, température, milieu naturel, etc. Dans ce cas encore, on se heurte à une autre diiïiculté qui occasionne des déboires sans nombre au cours des recherches. Quand l'observation microscopique d'une même préparation fraîche doit durer des jours, des semaines, 1' evaporation entraîne une condensation de chlorure de sodium au sein du liquide et altère complètement les conditions d'existence des parasites et de leurs hôtes. Les chambres humides de toute nature (la goutte pendante peut être seule exceptée) quelque perfec- tionnées qu'elles soient, ne suffisent point à éviter ce grave inconvénient. A cela vient encore se joindre le fait que souvent les algues ont de grandes dimensions et qu'il faut se contenter d'introduire un petit fragment dans la chambre humide. Celui-ci, séparé de la plante-mère, s'altère plus ou moins rapidement et finit même par se détruire complètement. Plusieurs causes d'insuccès se présentent alors en même temps : le parasite ne 46 e. DE BRUYNE. trouve plus de quoi pourvoir à sa subsistance, les échanges gazeux, primitivement réglés par l'algue, ne pouiTont plus s'effectuer normalement et les germes bactériens, toujours présents en plus ou moins grand nombre, trouveront d'excellentes conditions pour se développer. J'ai réussi plus tard à éviter ceux-ci en me servant d'eau marine primitivement stérilisée ; mais il m'est avis que mieux vaut ne pas devoir recourir à ce moyen artificiel et autant que faire se peut, maintenir toutes les conditions naturelles. A cet eifet, je me suis servi de l'appareil que L. Rhumbler a imaginé et décrit (^) : toutefois je l'ai rendu beaucoup plus maniable en supprimant le système de l'entonnoir et du flacon destiné à aérer le liquide, et en le remplaçant d'un côté par un siphon plongeant dans l'éprouvette, et de l'autre en plaçant sur le trajet du tube capillaire un renflement où, en tombant goutte à goutte, le liquide pouvait de nouveau se charger d'une quantité d'oxygène {^). Ce qui me semble aussi très recommandable, c'est l'introduction d'algues vertes unicellulaires dans la culture ; il est vrai que dans ce cas on obtient parfois une émigration du parasite sur cette algue nouvellement introduite : il y trouve, en eifet, une nourriture fraîche et abondante, qui, sauf les inconvénients del' evaporation, apporte toutes les conditions requises à son existence et à son accroissement, mais l'observation des phases évolutives du parasite n'en est rendue que plus facile. Dans les pages qui vont suivi'e, je me propose de traiter successivement des Monadines, (zoosporées et azoosporées) et des Cliytridiées dont les phases évolutives me sont entièrement ou presque entièrement connues. Je ferai suivre un appendice où j'exposerai brièvement les résultats incomplets au sujet de la morphologie et de la biologie de quelques parasites qui me semblent également être des"formes non encore connues. Gand, 8 novembre 1889. (») Zeiuchr.f. iv. ZooL Ud. XLVI, 4 Eleft. 1888. (-J Uotanisch Jaarboek, 2'^jaargang, -1889. MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 47 I. — MONADINES. I. — MONADINES Z003P0RÉES. Pseudospora Beyiedeni, n. sp. (Planche III, fig. \-{\.) Les algues du genre CladojjJiora, dont la baie de Naples abonde, présentent quelquefois des filaments décolorés et qu'à l'œil nu déjà on peut distinguer de leurs voisines : la belle cou- leur verte naturelle, en effet, est remplacée par un blanc sale ou un gris plus ou moins foncé. On reconnaît immédiatement que l'algue est malade en ces endroits, et l'observation au microscope en révèle la cause : des protozoaires en plus ou moins grand nombre y parasitent ; ils dévorent le contenu féculent et cliloro- phyllien et les résidus de leur digestion se présentent comme des masses informes d'un brun noirâtre. Il ne reste ordinairement que la paroi des cellules, ce qui donne cet aspect décoloré. H arrive parfois que les filaments d'algues sont pour ainsi dire bourrés de parasites ; d'autres fois, des individus isolés y par- courent leur cycle évolutif complet et, dans ce cas, on peut poursuivre dans un même filament la succession de plusieurs générations dont le nombre dépendra de l'étendue du filament mince et de sa richesse en substances nutritives. J'ai surtout porté mon attention sur Cladophora gracilis, Kiitz. 11 n'y a pas qu'une seule forme parasitaire à l'intérieur de cette algue, mais bien souvent, au contraire, on en distingue plusieurs dont deux surtout sont fréquentes. Leurs caractères respectifs, quoique présentant parfois quelque ressemblance, diffèrent néanmoins suffisamment pour permettre une diffé- renciation parfaite. A l'effet de pouvoir observer les divers stades successifs, ce qui demande parfois plusieurs jours, on isole dans une chambre humide ordinaire ou dans la goutte pendante, un ou plusieui^s fragments malades; il est bon d'en ajouter quelques autres 48 e. DE BRUYNE. encore intacts à l'eifet de parer aii manque de nourriture et d'oxygène pour le parasite, etc. Cette algue résiste assez bien à la mutilation et, à moins de bactéries introduites en même temps, aucune cause de destruction ne se manifeste d'or- dinaire pendant deux ou trois jours, surtout si l'on a pris soin de stériliser l'eau marine employée dans la culture. Le principal et le plus fréquent des parasites de Cladophora gracilis, est celui auquel je propose d'attacher le nom de M. le professeur Edouard Van Beneden. Il appartient sans aucun doute aux Monadines Zoosporées, Cienk. à raison de ses 4 phases évolutives : Zoospore, amibe (plasmode?), ci/ste zoosporipare et Sjiorocyste ; sa place est marquée dans la famille des Pseudo- sporées et dans le genre Pseudospora. Je dois néanmoins faire remarquer que le stade amibe ne possède point les pseudopodes efïilés et pointus, rappelant par leur aspect ceux ^' Adinophrys. Malgré cela et quoique Cienkowsky, créateur du genre, les considère comme caractéristiques, je crois que tous les autres caractères concordant, il n'y a pas lieu de créer un genre nouveau. Pseudospora Benedeni est un grand parasite très fréquent dans mes cultures à l'intérieur des iilaments de Cladophora. La zoospore à l'état de repos est d'ordinaire régulièrement sphé- rique(fig. 1 et 2), parfois légèrement ovoïde; cette forme change néanmoins beaucoup pendant les mouvements : à ce stade, en effet, la Monadine est très amiboïde. Une membrane mince et nette limite extérieurement le protoplasme où se distinguent nettement une partie hyaline et une partie granuleuse. Comme toujours l'hyaloplasme se trouve border extérieurement la partie granuleuse. Une ou plusieurs vacuoles, de dimensions variables, rarement situées contre la surface, sont d'ordinaire noyées dans le protoplasme (fig. 1). A l'état frais on ne peut guère distinguer d'autre différenciation; les réactifs, au contraire, révèlent la présence d'un noyau. Un cil unique, très long (2-2 Yg fois le diamètre de la zoospore) bat continuellement l'eau ou les sucs environnants et détermine la progression de la zoospore. Celle- ci est très lente et il faut parfois observer un même individu MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 49 pendant un temps relativement long avant de constater un déplacement appréciable. La zoospore est néanmoins en proie à un mouvement total saccadé sur place, mais qui n'intervient point dans la progression. Le cil ne discontinue pas de batti e dans tous les sens à l'instar d'un fouet. Quant à la structure intime du cil, on peut dire qu'elle est régulièrement hyaline; l'organe va en s'amincissant depuis son origine dans la zoo- spore, pour se terminer en pointe très effilée. Il n'est pas rare de voir que tout à coup le cil a disparu et l'on a en ce moment devant soi une masse spliérique sans mouvements notables, si ce n'est ceux provenant de l'amiboïdité. Ce phéno- mène peut se répéter plusieurs fois, car toujours il est bientôt suivi de la réapparition du cil au même endroit et d'ordinaire avec les mêmes caractères. On distingue les jeunes zoospores des autres, plus anciennes, en ce que celles-ci renferment, en dehors des vacuoles, un ou plusieurs fragments de chlorophylle : la zoospore, en effet, se nourrit en englobant les chromatophores de l'algue hospitalière, qu'elle digère dans son protoplasme granuleux. Cette digestion est rendue très appréciable par le changement de coloration des chromatophores : leur vert cède progressivement la place à une teinte pâle, jaunâtre, passe au brim et quelquefois au rouge (fig. 1 et 2). Bientôt après on voit quelques résidus ainsi transformés et rendus complètement méconnaissables, se grou- per à plusieurs : ils sont comme refoulés vers certains endroits par le mouvement intérieur du protoplasme, refoulement auquel on peut parfaitement assister. Il arrive aussi de voir que ces détritus sont expulsés par le protoplasme et viennent flotter dans le liquide de l'algue (fig. 1); dans ce cas, la zoospore agit comme une véritable amibe: le protoplasme se retire tout autour de la masse excrémentitielle et l'abandonne sur place. Je parlais tantôt d'une membrane limitant le corps de la zoo- spore : il va sans dire que j'entends par là une mince couche limite formée au contact du liquide envii'onnant (membrane de contact de Max Schultze). S'il s'agissait, au contraire, d'une membrane proprement dite, il ne pourrait point être question 3 50 e. DE BRUYNE. ici d'englobement des chromatophores et de l'expulsion des détritus qui en proviennent. La nutrition de la zoospore entraîne naturellement un accrois- sement du protoplasme ; aussi l'on voit le diamètre augmenter progressivement et les mouvements de progression diminuer encore d'énergie et de fréquence. C'est surtout à ce moment que le cil disparaît plusieurs fois. Le protoplasme est devenu plus granuleux et il renferme maintenant quelques gouttelettes graisseuses. L'organisme en est arrivé à la transition du stade zoospore à celui (]j amibe : le cil ne réapparaît plus et la pro- gression provient uniquement des mouvements amiboïdes. L'amibe (fig. 1, 2, 13 et li), ainsi que je le disais déjà plus haut, n'a pas de pseudopodes fins (TAcfinopJirys, caractéristiques chez tous les représentants connus du genre Pseudos])ora : seules quelques ondulations pseudopodiformes se produisent à la surface de l'amibe. Celle-ci est même très souvent complète- ment ramassée sur elle-même, aftectant la forme sphérique (fig. 1 et 2) de façon qu'il n'est pas toujours aisé de constater si on a aifaire à une zoospore dont le cil est rentré ou à une amibe au repos. La membrane-limite et le protoplasme ne présentent guère de différence d'avec ce qu'ils étaient dans le stade précé- dent ; seules les granulations du dernier sont peut-être plus nom- breuses et plus grossières. Le noyau à l'état frais reste presque toujours invisible, caché qu'il est par les granulations et les enclaves du protoplasme : les réactifs peuvent toujours le faire apparaître. Les jeunes amibes peuvent se frôler, se heurter au passage : on les voit alors se moulant l'une sur l'autre, mais dans aucun cas je n'ai observé de fusion; il n'y a donc point de stade plasmodique. EUes continuent à englober et à digérer le contenu de l'algue qui finit i ar se vider visiblement si le nombre de parasites est quelque peu considérable. Leurs dimensions augmentent progressivement et bientôt on observe des amibes ayant atteint des diamètres doubles, triples et même quadruples. Chez celles-ci, les aliments semblent beau- coup mieux digérés : en effet, leurs détritus passent au brun foncé et même au noir. Ils ne sont plus éparpillés par petits MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 51 groupes, mais, an contraire, accumulés en une masse informe qui occupe le centre du protoplasme (fig. 2). Celui-ci devient alors le plus souvent très vacuolaire. Les vacuoles sont de di- mensions bien différentes qui peuvent varier du simple au triple ; j'ai assisté à la contraction de quelques-unes d'entre elles, mais jamais je n'ai pu constater l'existence d'une communication avec l'extérieur. Leur nombre ni leur position ne sont constants et dans aucun cas je n'ai pu découvrir de membrane propre : le proto- plasme environnant semble limiter directement le liquide qu'elles contiennent et s'écarter au fur et à mesure qu'elles s'accroissent. Les mouvements de progression sont devenus très rares, mais l'amiboïdité n'a en rien diminué jusqu'ici. La membrane limite devient maintenant très évidente, et on constate chez elle un acheminement vers le double contour : la phase de repos approche. Ainsi que je le disais tantôt, il n'y a point de formation plasmodique par fusion ; il n'y a pas davantage de pseudo- plasmodie. C'est là un fait caractéristique pour toutes les Pseudospora décrites jusqu'aujourd'hui : elles le partagent avec le genre Diplophysalis parmi les Pseudosporées. Les grandes masses amiboïdes résultent uniquement de l'accroissement progressif des petites par suite de la nutiition aux dépens du contenu de l'algue. Après que la membrane a acquis son double contour, on voit encore bien souvent dans son intérieur l'amibe changer de forme et animée de mouvements totaux sur elle-même. Les vacuoles se maintiennent et on peut parfaitement encore observer le déplacement des granulations protoplasmiques. Toutefois les divers mouvements, dont je viens de parler, ralentissent progressivement pour cesser enfin complètement. Alors le protoplasme prend un aspect plus ou moins uniformé- ment granuleux et reste dans cet état pendant un temps plus on moins long: c'est le stade de cyste précédant immédiatement la multiplication. Les dimensions du zoocyste dépendent naturellement de celles de l'amibe dont il dérive ; le diamètre atteint ordinaire- 52 e. DE BRUYNE. ment de 20 à 25 y.. L'acheminement vers la multiplication devient bientôt manifeste : nn fractionnement du protoplasme s'ébauche et devient avec le temps de plus en plus net (fig. 1, 3 et 4). Les fractions du protoplasme sont sphériques, en nombre variable, mais toutes sensiblement de mêmes dimensions, 4 à 5 [j.. Quelquefois, par suite de compression mutuelle, leur forme arrondie typique est quelque peu altérée ; une fois la séparation des fragments accomphe, chacun acquiert des mouvements amiboïdes individuels lents, mais parfaitement appréciables. Le reste de la lumière du cyste est occupé par un liquide, et je ne suis pas très éloigné d'admettre que celui-ci provient des vacuoles signalées tantôt dans le protoplasme de la grande amibe. Si le fractionnement débute le matin, on pourra dans les conditions ordinaires suivre pas à pas avant la fin du jour toutes les phases de développement des zoospores, car ces fragments de protoplasme constituent leur premier stade évolutif: dans le liquide qui les baigne et où elles se meuvent à la façon de jeunes amibes, on voit tout à coup un mouvement que l'on reconnaît aussitôt comme produit par des appendices ciliaires, même avant que l'on ait pu constater l'existence de ceux-ci : mais bientôt ils deviennent manifestes et leurs battements énergiques et fréquents amènent à l'intérieur de la paroi cystique le déplacement rapide des spores. Ce fourmillement peut durer un temps variable. Pendant ces mouvements, la forme générale de la zoospore change : de sphérique qu'elle était, elle devient ovoïde et le cil se trouve à la partie antérieure plus ou moins effilée dont sur certains exemplaires il est manifestement la continuation. Certains de mes dessins (fig. 9) montrent à l'évi- dence qu'il ne s'agit point d'un organe imitante dans le protoplasme, mais d'un simple prolongement de celui-ci, qui, plus agile et plus constant qu'un pseudopode, amène par ses mouvements propres, le déplacement du corps entier. Les zoospores quittent le cyste sans qu'aucune cause extérieure apparente intervienne. Cette cause doit être exclu- sivement intérieure. Tout d'un coup, les zoospores sortent sans MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 53 ordre apparent : une première traverse lentement la paroi en un endroit et grâce à son amiboïdité, elle s'effile aux deux pointes de l'ovoïde, tandis que le cil bat énergiquement l'espace environnant. Une seconde ne suit pas toujours immédiatement ; au contraire, elles continuent toutes leur course rapide à l'inté- rieur en passant même plusieurs fois chacune devant la brèche faite par la première. Il arrive parfois que des fragments de protoplasme restent à l'intérieur du cyste et n'y manifestent même aucun mouvement : ils ne possèdent pas de cil (flg. 7). Je présume que ce sont des avortons qui, non armés en vue de la lutte pour l'existence, périront sur place. La masse de détritus que j'ai signalée au milieu du protoplasme cystique avant son fractionnement n'a plus subi de changements. Heurtée constamment par les zoospores, elle est parfois refoulée excen- triquement. Lors de leur sortie, elles l'abandonnent ainsi que certains autres corps expulsés (flg. 8). La zoospore libérée commence aussitôt sa vie errante à travers la lumière de l'algue. Son agilité est très grande au début : il faut surtout l'attribuer à la puissance de son cil, véritable flagellum. Mais lentement celui-ci devient beaucoup moins épais pour descendre aux dimensions décrites au début de l'étude de Pseudospora Benedeni. Les déplacements dimi- nuent aussi considérablement. L' amiboïdité est très grande pendant tout le stade de zoospore : l'organisme moule son corps sur les obstacles de toute nature qu'il rencontre. Avec le temps la forme ovoïde disparaît pour faire place à la forme sphérique dont j'ai parlé plus haut. La zoospore peut rester dans le filament d'algue qui l'a vue naître, et le fait d'ordinaire quand la nourriture y est suffisam- ment abondante. Si, au contraire, cela n'est pas le cas, elle en sortira par un orifice ou l'autre à la recherche d'un terrain plus propice. C'est ainsi que plusieurs fois il m'est arrivé de rencontrer dans un filament sain une seule ou un petit nombre de zoospores ou d'amibes. Comment y avaient-elles pénétré, je l'ignore. Je présume toutefois qu'à l'instar de beaucoup d'autres parasites, elles possèdent un pouvoir dissolvant de la paroi 54 e. DE BRUYNE. d'algue et qu'elles passent à l'intérieur par l'orifice ainsi pra- tiqué. Elles n'y pouvaient point être nées puisque pour cela il aurait fallu rencontrer dans le même filament un cyste vide dont elles fussent provenues. Observant ce ou ces parasites ainsi isolés dans une algue saine, je réussissais chaque fois à pour- suivre le^cycle évolutif complet, parfois de plusieurs générations successives. Le stade sporocyste ne se rencontrait que fort rarement dans mes cultures. J'en ai représenté 3 exemplaires dans les fig. 10, 11 et 12. Voici comment il se produit. Le protoplasme se contracte vivement mais reste régulièrement arrondi ; les détritus sont expulsés et refoulés en même temps contre la paroi qui s'est épaissie légèrement. Une membrane nouvelle se sécrète à la surface'du protoplasme qui le plus souvent devient mainte- nant grossièrement granuleux. Je n'ai pas clierclié à déterminer la nature chimique de ces granulations; serait-ce ici, comme chez Pseiidospora parasitica Cienk., une formation de matériaux graisseux de réserve qui servira plus tard lors de la reprise de l'évolution ? De tout le temps que j'ai résidé à Naples, et malgré une observation presque continue, je n'ai pas réussi à voir le sporo- cyste mettre son contenu en liberté. Pseudospora edax, n. sp. (Planche III, Hg. 23-20.) Second parasite monadinien de Cladophora. Il y est beau- coup moins fréquent que le précédent et je ne l'ai que très rarement rencontré dans le même filament, plus souvent dans des filaments voisins qu'il épuise encore plus complètement. Dans une algue abandonnée par ce parasite, il ne reste d'ordi- naire absolument plus rien que des résidus alimentaires. A raison de cette grande voracité, je propose de lui donner le nom spécifique edax. Au même titre que le précédent, il appar- tient à la famille des Psendosporées et au genre Pseudospora. J'ai pu observer les stades suivants : zoospore, amibe {plas- modie ?) et cyste zoosporipare. MONADINES ET CHYTEIDIACÉES. 55 La zoospore en mouvement (fig-. 23) est de forme allongée, finement granuleuse et amiboïde à un degré très élevé. Elle traverse le cliamp du microscope avec une rapidité considérable au point que, pour l'observateur, c'est un travail franchement fatigant de poursuivre un exemplaire pendant un temps un peu long. Contrairement à ce que j'ai pu signaler pour Ps. Benedeni, le noyau est bien visible à l'état frais, mais les réactifs viennent naturellement encore mieux révéler sa pré- sence. Comme je ne disposais pas de grossissements suffisants, je n'ai pas été en état d'observer si ce noyau, si distinct à l'état frais, présentait des mouvements amiboïdes, ou non. Sa forme générale était d'ordinaire celle d'un ovoïde allongé. Je n'ai rencontré aucune vacuole pulsatile ; sur certains individus se présentaient au sein du protoplasme de petites lacunes splié- riques qui auraient bien pu être des vacuoles. Le protoplasme de la zoospore, disais-je tantôt, est finement granuleux; c'est le cas général ; cependant il y a des granulations, peu nombreuses il est vrai, mais assez grosses et répandues irrégulièrement dans la masse. Plus d'un exemplaire même était fortement granuleux et j'ai constaté qu'en général les granulations augmentent d'importance avec l'âge de la zoospore. Il est quasi impossible d'y distinguer un hyoloplasme, même en ayant recours à l'action des réactifs : cela semble tenir à l'extrême finesse de la plupart des granulations répandues par tout le corps de la zoospore. Un cil unique long et mince est- porté par la partie antérieure ; aucune structure n'y est manifeste : il semble constitué de protoplasme hyalin : aucune démarca- tion nette ne se montre entre le cil et le corps de l'organisme. Les mouvements du cil ne sont point énergiques, tant s'en faut, bien souvent même il semble ne pas produire le déplacement de la zoospore, mais le diriger simplement. En eifet, il arrive que l'organisme, changeant de direction, traîne derrière lui cet organe qui dans ce cas n'exécute aucun mouvement propre et joue plutôt le rôle de gouvernail. Dans ce stade, de même que dans le suivant, le parasite semble vivre surtout de grains de fécule. Chez aucun exem- 56 e. DE BRUYNE. plaire je n'ai vu à l'intérieur un grain de chlorophylle ou une masse décolorée en provenant. Quand la nourriture manque dans l'habitat, il n'hésite pas à le quitter et à aller chercher ailleurs dans l'eau environnante, un hôte sain que bientôt lui et ses générations ont fini d'épuiser. La limite extérieure de la zoospore est nette ; il n'y a ici, comme chez le même stade de Pseudosimra Benedeni, qu'une simple couche-limite qui suffit déjà pour empêcher la fusion de deux individus au contact. Je n'ai jamais vu l'entrée des aliments à l'intérieur de la zoospore, ni la sortie des détritus ; la lumière de l'algue se remplit cependant de ceux-ci qui se présentent sous forme de granulations, bâtonnets, etc. (fig. 24). La transition au stade amibe s'annonce ici comme chez Ps. Benedeni, c'est-à-dire que le corps de la zoospore s'accroît et s'arrondit progressivement, les mouvements se ralentissent et le cil finit par rentrer définitivement. L'organisme arrivé à ce stade afî'ecte d'ordinaire la forme sphérique, surtout quand il se tient au repos (fig. 25). Ses mou- vements, du reste, sont fort peu appréciables, de même que sa progression. Le protoplasme est devenu plus grossièrement gra- nuleux et son aspect général plus sombre ; des spherules très réfringentes apparaissent les unes après les autres : elles sont de nature graisseuse et proviennent probablement de la digestion. La zone hyaline ne devient manifeste que lors d'un déplace- ment amiboïde. 11 est très peu abondant, mais son existence ne saurait être contestée. Le noyau ne devient généralement bien distinct qu'à la suite de l'action des réactifs : les granu- lations avec lesquels on pourrait parfois le confondre à un simple examen à l'état frais, le cachent souvent à la vue. Ici comme chez l'amibe du précédent, il n'y a point de ces pseudo- podes à' Actino2)hrys hérissant la surface extérieure : les pseu- dopodes sont rares et très obtus et dans tous les cas ne se maintiennent pas longtemps. Mais, pour les mêmes motifs, malgré cette absence, je n'hésite pas à ranger le parasite en question dans le genre Pseudospora. L'accroissement de l'amibe est fort lent et les dimensions ne deviennent jamais MONADINES ET. CHYTRIDIACÉES. 57 considérables : elles atteignent au plus un diamètre double et n'y parviennent même pas dans le cas le plus général. Leur nombre à l'intérieur du filament d'algue peut devenir très grand et alors plusieurs se touchent et se compriment même mutuellement. Il n'en résulte néanmoins jamais une fusion pas même de pseudoplasmodie. Chacune conserve son indivi- dualité propre et poursuit isolément son évolution. J'ai constaté souvent que des amibes de même âge n'en étaient pas toujours au même point de leur cycle : des diiférences individuelles se manifestent dans chaque série d'observations. L'amibe se nour- rit du contenu de l'algue : les grains de chlorophylle digèrent lentement à l'intérieur du protoplasme et leur teinte devient bientôt jaune brunâtre. Les granulations de détritus alimen- taires, en grande partie incolores, se groupent d'ordinaire et s'entourent d'une sorte de membrane, ainsi que je le dirai plus loin à propos du cyste zoosporipare. La progression dans la lumière de l'hôte cesse bientôt com- plètement; seuls les mouvements amiboïdes se maintiennent tout en restant très faibles. Pendant tout ce stade, comme pendant le précédent, il ne peut être question que d'une couche limite à la surface du corps de lamonadine. En ce moment, apparaît une membrane proprement dite, nette et à double contour; on peut parfaitement assister à sa formation et à son épaississement progressif. Elle enveloppe complètement le pro- toplasme qui s'est régulièrement arrondi et qui a conservé son aspect général et ses mouvements propres : le cyste en voie de formation. Les résidus alimentaires se sont tous groupés déjà depuis le stade amibe en une sorte de vacuole toujours excen- trique et dont les dimensions varient avec leur nombre. Cette vésicule a ime paroi propre manifeste et se maintient, ainsi que je le montrerai plus loin, même après que la membrane cystique se sera vidée. Presque toujours les résidus alimentaires étaient incolores (fig. 24 et 25) ; je dois à la vérité de dire que les algues, où j'ai eu l'occasion d'étudier Ps. edax, en étaient tellement infectées que les fragments ne contenaient presque plus de chlorophylle et que, par conséquent, il devait se nourrir des autres aliments féculents qui tous sont incolores. 58 e. DE BRUYNE. Le cyste est zoosporqKire. Son protoplasme est devenu d'un aspect plus régulièrement granuleux et a perdu progressivement ses mouvements amibo'ides. Dans certains cas, il remplit avec la vacuole à détritus toute la lumière du cyste ; dans d'autres, au contraire, il semble s'être rétracté et s'isoler davantage. Ce sont là encore des différences individuelles qui ne me semblent pas avoir une bien grande importance. Le protoplasme, venu au repos, ne tarde pas à se diviser. Cette division se fait suivant deux plans diamétraux perpen- diculaires entre eux : il en résulte quatre fragments qui, par pression réciproque, conservent, pendant quelque temps, l'aspect de quarts de sphère (fig. 24). Il n'est pas rare de voir la division se faire suivant un seul plan diamétral; il ne se forme ainsi que deux fragments : c'est souvent le cas pour les petits cystes (flg. 24 et 25). Ces fragments manifestent bientôt une amiboïdité propre et acquièrent une forme générale ovoïde; un battement de cils devient évident : les zoospores sont formées. Elles se meuvent d'abord d'une façon très lente puis progressivement énergique : elles se heurtent et s'entrecroisent mutuellement à l'intérieur du cyste, se moulent les unes sur les autres, etc. et ce pendant un temps plus ou moins long. La sortie des zoospores se fait, comme chez Ps. Benedeni, sans ordre appréciable. On voit tout à coup, sans cause exté- rieure apparente, l'une d'elles se frayer un passage à travers la paroi du cyste et en sortir en s' allongeant et s'effilant, grâce à sa grande amiboïdité (flg. 25, zc). D'ordinaire, la zoospore, au moment de sa sortie, traîne derrière elle, et ce pendant plusieurs secondes ou même une minute, un appendice sans forme déter- minée, amiboïde et qui disparait par absorption : il semble qu'il s'agit là d'une déformation de la partie postérieure se produisant par l'enserrement entre les bords de la brèche de sortie. Les zoospores se libèrent ainsi toutes successivement et à des inter- valles très variables : la paroi cystique reste là abandonnée renfermant encore la vésicule à résidus et parfois quelques fragments également expulsés. Le sx)orocyste ne m'est point connu à moins que la fig. 25 MON'ADINES ET CHYTRIDIACÉES. 59 n'en représente un en sj). En effet, il y a là non seulement une paroi optique ordinaire, mais une formation membraneuse nouvelle autour du protoplasme contracté. Quoi qu'il en soit, je n'ai pas réussi à poursuivre pour ce cas unique, une évolution subséquente. Les éléments me manquent donc pour émettre une opinion au sujet de ce stade décrit chez toutes les autres formes du genre Pseudospora. Gymnococcus Cladopiiorae, n. sp. (l'iancho V, fig. 16-20.) Parmi les nombreux protozoaires parasitant sur Cladophora gracilis, il en est un qui attaque particulièrement et de préfé- rence l'article terminal des tilaments. Si les conditions sont favorables, il y parcourt complètement son évolution au bout de laquelle il en a totalement détruit le contenu. Les parties atteintes se distinguent déjà à un faible grossissement : elles sont considérablement hypertrophiées et leur belle couleur verte est remplacée par une pâleur dont l'intensité varie avec le degré de destruction. La partie chlorophyllienne et féculente est dévorée lentement et les parties non assimilables sont abandonnées à l'état de masses informes dont la teinte varie du brun clair au noir foncé. Le parasite en question présente des caractères d'une grande netteté ; il appartient aux Gymno- coccacées, Zopf, genre Gymnococcus, Zopf. Je ne l'ai rencontré que sur Cladophora gracilis et n'ai pas réussi à le faire changer d'hôte dans mes cultures rendues pauvres en Cladophores, riches, au contraire, en autres algues vertes. L'observation de l'évolution de ce parasite en chambre humide, exige plusieurs semaines et pendant ce temps-là on voit plusieurs d'une culture dépérir dans ces conditions. Quelques-uns des nombreux essais ont réussi et j'ai eu ainsi, à plusieurs reprises, l'occasion de poursuivre tous les stades successifs de zoospore, amibe, plasmode, zoocyste. Les spores durables caractéristiques pour les Gymnococcacées me sont inconnues jusqu'à présent. 60 e. DE BRUYNE. La zoospore, à sa sortie du eyste, se présente sous la forme d'un petit ovoide, peu réfringent, finement granuleux, amiboïde et muni de 2 cils (flg. 19). Son liyaloplasme n'est pas toujours nettement distinct, mais par une observation continue on découvre son existence particulièrement aux endroits d'implan- tation des cils. Une vacuole est constante ; elle est nettement limitée et ne change guère de position : je n'ai pas non plus constaté qu'elle fût contractile. Les limites de la zoospore sont bien tranchées et les cils implantés asymétriquement : l'un se trouve à l'extrémité du grand axe, le second de l'autre côté est placé plus latéralement (fig. 19). Leur longueur est à peu près la même et sensiblement égale ou un peu supérieure à celle du grand axe (3 à 4 u). Le premier surtout bat énergiquement le milieu liquide et détermine le déplacement delà zoospore; l'autre m'a semblé beaucoup moins actif dans ce phénomène et entraînée comme un gouvernail. Les déplacements de la zoospore ne sont point énergiques et surtout pas très rapides; on peut en observer se mouvant sur place par saccades pendant des journées en- tières : les deux cils prennent une part égale à ces mouvements. Les zoospores finissent cependant par se transporter vers un hôte encore intact pour y commencer leur évolution. Il m'est arrivé une seule fois de constater sur le milieu d'une zoospore un étranglement qui allait en s'accentuant. Le phénomène marchait assez rapidement, déjà les deux moitiés, conservant chacune un cil, s'agitaient isolément et le pont qui les unissait encore allait se rompre, quand par malheur un grand infusoire vint à traverser le champ de vision en cet endroit et entraîna l'objet de cette intéressante observation. Il s'agissait sans aucun doute d'une division de zoospore en deux zoospores-filles, ce qui aurait constitué un 'chaînon important du cycle évolutif du parasite en question. Je n'ai jamais réussi à observer la nutrition de la zoospore : ni entrée des aliments, ni sortie des détritus. L'organisme possède à ce stade une amiboïdité suffisante pour permettre de supposer que cette fonction se passe par englobement de substances solides et par abandon de leurs résidus. MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 61 Arrivée à un filament à cellule terminale intacte, la zoospore y pénètre (probablement par dissolution de la paroi). Plus rarement elle s'attaque à ravant-dernière cellule et ce presque uniquement quand la terminale est déjà entamée par un autre individu. Elle perd bientôt ses cils et se transforme ainsi en amibe qui aussitôt se met en devoir de dévorer le contenu. Au début, le protoplasme de l'amibe est finement granuleux, tran- chant peu, à cause de ce caractère, sur celui de la cellule hos- pitalière. Ses limites sont assez nettes quoiqu'il ne puisse pas être question de membrane (fig*. 17). L'amiboïdité est très pro- noncée : c'est par englobement que le contenu cellulaire entre dans le corps du parasite. (3n voit la chlorophjdle subir la trans- formation déjà signalée en masse brunâtre d'abord, foncée et noire ensuite. Le résidu granuleux se groupe d'ordinaire en plusieurs masses que les mouvements du protoplasme entraînent et déplacent. L'amibe ne rampe guère à l'intérieur de l'algue. Si on cesse l'observation pour la reprendre quelques heures après, on la retrouve à la même place; seules les dirjensions ont changé : elles se sont accrues parfois d'une façon considérable. Tantôt une seule amibe parasite dans un article terminal de Cladopliora; d'autres fois il peut y en avoir deux ou même davantage encore. Dans le premier cas, l'amibe unique se nourrit du contenu de son hôte pour ainsi dire, jusqu'à épuise- ment complet et forme finalement une amibe considérable, remplissant avec ses détritus toute la lumière cellulaire. Dans le second cas, après digestion des substances nutritives, ou même déjà avant, les parasites qui se sont déjà heurtées mu- tuellement à plusieurs reprises, finissent par se fusionner en une plasmodie unique, dont les dimensions varient avec celles de la cellule. Au cours de cet épuisement, les parois s'écartent considéra- blement dans toutes les directions, de façon à doubler même les dimensions de l'article (fig. 16, 18 et 20). Pendant cette phase importante, le protoplasme de la Monadine acquiert de fortes granulations de diverse nature et entre autres des corpuscules graisseux. L'hyaloplasme devient 62 e. DE IBRUYNE. de moins en moins distinct (ûg. 16). Il ne se produit pas de vacuoles contractiles ou autres, pas plus que chez la jeune amibe. A l'état frais, on ne distingue point de noyau. Comme il était toujours difficile de mener à bien une culture de la monadine en question, je me suis surtout occupé de l'examen à l'état frais et j'ai négligé de vérifier l'existence du noyau au moyen des réactifs microcliimiques. Lentement, mais progressivement, les résidus alimentaires sont refoulés vers le milieu de la cellule où ils se groupent suivant le grand axe (fig. 18, 19 et 20). Leur digestion est achevée : en effet, ils sont devenus d'un brun foncé allant jusqu'au noir. C'est là un indice certain que le protoplasme se prépare à la division ; mais cet état peut durer bien longtemps: ainsi, je l'ai conservé pendant plus d'un mois dans un même article d'algue. Il ne se produit pendant ce laps de temps aucun changement appréciable : détritus, protoplasme et algue conservent leur aspect. Quand l'époque de la division approche, on voit des groupe- ments se produire à l'intérieur du protoplasme, d'abord d'une façon indécise, bientôt fort nette au contraire. Chaque fraction de protoplasme isolée par suite d'une sorte d'étranglement constitue l'ébauche d'un cyste zoosporipare. Le nombre de ceux-ci varie avec les dimensions qu'a pu acquérir l'amibe ou la plasmodie; leur diamètre et leur forme sont également sujets à des variations. J'en ai observé de 5 a, de 11 p. et del2,u; ils sont presque tous parfaitement sphériques (fig. 18 et 19), mais peuvent se déformer et devenir angulaires par pression mutuelle : il y en a même de fusiformes (fig. 20). Le cyste n'est formé qu'après que s'est produite la membrane à double contour. Le protoplasme y renfermé ne présente rien de bien particulier : il est grossièrement granuleux et renferme quelques globules grais- seux. Sous ce rapport, deux cystes voisins ne sont pas toujours complètement identiques : on constate des différences individuel- les qui me semblent cependant toutes d'importance secondaire. Le protoplasme ainsi fractionné semble entré dans une phase de repos. En effet, cet état, qui ne présente rien de bien MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 63 saillant et qui surtout ne subit aucun chang-ement, peut durer pendant un temps plus ou moins long, des semaines, même un ou deux mois. A des époques donc variables, le contenu cystique se fractionne à son tour en un nombre plus ou moins grand de parties spliériques où un mouvement amiboïde individuel ne tarde pas à apparaître ; chaque fraction s'individualise : la zoospore se forme ; il ne lui manque plus que les cils qui se dessinent pour ainsi dire à la même époque chez tous les individus d'un même cyste. Aussitôt commence à l'intérieur le fourmillement caractéristique de zoospores enfermées, four- millement qui peut durer plusieurs jours. Il ne se fait jamais que les cystes provenant d'une même plasmodie arrivent tous en même temps à ce stade : le plus souvent les zoospores ont déjà quitté tel cyste, alors que dans tel autre, le protoplasme ne s'est même pas encore fractionné. Quand le mouvement des zoospores à l'intérieur de la capsule cystique a duré ainsi quelque temps, il se produit tout à coup en un point une rupture par laquelle elles soitent les unes après les autres, mais sans ordre apparent. Quelques-unes y restent encore longtemps après les autres, même deux ou trois jours. Une fois libérée, la zoospore ne quitte pas immé- diatement l'algue : elle peut y rester longtemps encore. La cellule hospitalière est complètement détruite. Ses voisines, au contraire, continuent à vivre sans avoir subi aucun dommage. J'ai rencontré un seul cas où l' avant-dernière cellule était attaquée par une amibe, ainsi que la terminale qui en logeait deux. Les cystes abandonnés restent dans la cellule. Il n'est pas rare de voir qu'ils renferment encore après plu- sieurs jours, des zoospores en mouvement à côté de fragments amorphes de protoplasme. Il s'agissait ici de nouveau de zoospores non complètement formées. Oymnococcus Gomphonemarum, n. sp. (Planche IV, fig. 2:2-29.) FocKE a signalé dans certaines diatomées des corpuscules par- ticuliers, que, sans les étudier davantage, il considérait comme 64 e. DE BRUYNE. des organes de multiplication (^). Pfitzner(2), en 1870, découvrit que, sur certaines formes de Baccilariées, ces corpuscules repré- sentaient un stade évolutif d'un parasite qu'il nomma Padochy- trium. En 1871, le professeur Walz (^) décrivit cliez des diato- mées la formation de zoospores qu'il soupçonnait avoir été considérées par des naturalistes comme des parasites. Zopf (*), reprenant ce sujet d'une importance biologique capitale, trouva cliez des diatomées telles que Synedra, Pinnularia, Cocconema, Snrirella, Oompiionema, un parasite qu'il a nommé Oymnococms Fockei et dont il a pu poursuivre tout le cycle évolutif. Plus tard, il en découvrit un autre, G. j^erniciosus, dans des cellules de cladophora, et un troisième, G. spermopMliis, dans les spores d'une algue du genre Cylindrospermum. J'ai eu l'occasion de m'occuper d'un sujet analogue : il s'agit d'une monadine parasitant à l'intérieur d'une Gomphoyiema où elle parcourt le cycle suivant : zoospore, amibe, zoocyste. Il n'y a pas de doute possible au sujet de la nature de cet organisme et dans aucun cas il n'y a moyen de le confondre avec un mode de reproduction de la diatomée. Jj amibe a des dimensions qui varient d'un individu à l'autre et également avec l'âge. Son protoplasme est primitivement très linement granuleux, assez liomogène. On la distingue néan- moins parfois très difficilement dans le protoplasme de la dia- tomée. On la retrouve plus aisément quand elle s'est déjà nourrie du contenu de son hôte. En effet, elle dévore assez rapi- dement l'endoclirome dont elle transforme les parties non assi- milables en des masses d'un brun rougeâtre (fig. 22 à 29). Ces masses, comme toujours, se groupent pour en former de plus grosses. Quelques granulations protoplasmiques deviennent plus volumineuses avec le temps. Jamais je n'ai constaté la présence de vacuoles soit contractiles, soit autres. Les réactifs semblent affectionner plus particulièrement certaines granulations plus (') Phijsiolofjisclie Studien, Band 2. (-) Vcrliandl. d. natiuh. Ver. Pr. IVicin. WePtphalen, s. 02. {^) Huas, natuif. Ver. Kiew. [^) Zur Morphologie iiud Biologie der niedcren Pilzthiere. Leipzig, i8So. MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 65 fortes que les antres; sont-ce des noyaux multiples? A l'état trais, on ne distingue point de noj^au. Pendant les mouvements (reptation lente),on peut parfaitement distinguer un hyaloplasme (fig. 22 et 24). L'amibe abandonne les granulations de détritus pendant qu'elle se déplace : le protoplasme se retire tout autour; d'autres fois, on peut voir une véritable expulsion effectuée avec une certaine force. A ce stade, différents individus peuvent se frôler, se heurter, sans se fusionner : ils se moulent l'im sur r autre comme sur un autre obstacle rencontré en chemin; d'autres fois, au contraire, ils se fusionnent jusqu'à former de très grandes plasmodies (tig. 24 et 2 G). S'il n'y a qu'une seule amibe dans une Gompiwnema, elle se nourrit et grandit jusqu'à atteindre des dimensions égales à celles d'une plasmodie. D'un autre coté, dans une même diatomée, il peut se former deux plasmodies séparées (fig. 27) qui pourront évoluer plus tard chacune séparément (fig. 29). Quand tout le contenu de l'algue est devenu la proie du parasite, celui-ci roule son protoplasme en boule qui n'en continue pas moins la digestion. Celle-ci avance avec la trans- formation de la teinte de l'endochrome avalé et on peut la considérer comme achevée quand cette teinte est devenue d'un brun très foncé, presque rouge. Dans ce cas, on assiste presque toujours immédiatement à l'expulsion des résidus alimentaires ; le protoplasme se contracte et on voit se foi'mer lentement à sa surface une membrane à double contour (fig. 24 et 28). Cet état de choses peut durer plus ou moins longtemps. La phase suivante s'annonce par un fractionnement du contenu protoplasmique. Nous avons donc un cyste. Sa forme et ses dimensions sont variables avec celles de l'hôte. Il peut mesurer jusque 20 |j- de diamètre; d'ordinaire sphérique et complètement dégagé de toutes parts, il peut aussi être enserré entre les valves de la diatomée (fig. 29). Les fragments provenant de la division du protoplasme ne tardent pas à s'individualiser et à s'arrondir : ils sont disposés très régulièrement d'une façon concentrique; leur nombre est très variable (fig. 25 et 29) avec les dimensions du cyste. 66 e. DE BRUYNE. Celui-ci est un zoocyste dont on obtient les spores ordinairement endéans les 24 lieures. Celles-ci sont sphériques, nncléées, munies d'un cil et manifestent bientôt, par leur fourmillement à l'intérieur du cyste, leur intention de quitter. A un moment donné se produit une brèche par où s'eifectuera leur sortie. Quelquefois le lendemain du jour où j'avais observé le commen- cement de la sortie, j'en trouvais encore errant dans le cyste. Il en est même qui ne quittent jamais et qui meurent sur place : ce sont probablement des avortons. La zoospore après sa sortie du cyste ne quitte pas toujours immédiatement la diatomée. Quelquefois elle y nage encore assez longtemps battant l'eau énergiquement de son cil. Les valves de l'hôte, ordinairement endommagées, ne lui offrent pas de résistance et elle trouve plus d'une brèche pour se lancer au large. Arrivée dans l'eau extérieure, elle y erre à la recherche d'une victime. J'ignore de quelle façon elle pénètre dans une Oomiihonema encore intacte ': jamais, en effet, je n'ai pu l'observer. Ce détail ne présente pas un intérêt bien grand au point de vue biologique. J'ai plus d'une fois rencontré des zoospores de Oymnococcus Gomphonemanim à l'intérieur de diatomées et je me suis plutôt inquiété de leur évolution. Elle se nourrit de l'endochrome de la diatomée qu'elle digère tout comme les autres stades ; elle expulse aussi les détritus. Le parasite, néanmoins, une fois pénétré ne reste pas longtemps à l'état de zoospore : les déplacements qui n'étaient déjà plus très rapides, s'affaiblissent encore; l'amiboïdité augmente, tandis que le cil ne tarde pas à disparaître par résorption : le parasite passe à la phase suivante, celle d'amibe, par laquelle j'ai commencé la description de son évolution. De même que pour le précédent, je n'ai pas eu l'occasion d'étudier la spore de conservation. Quant à la place qui lui revient dans la systématique, d'après tout ce que je viens d'exposer, elle est marquée dans la famille des Gymnococcacées, genre Gymnococcus. Vu son habitat, je propose pour lui le nom spécifique de Gomplionemarum. MONADINES ET CHYTRDDUCEES. 67 Gymnococcus Bryopsidis. '.Planche III, figures 27 et 28.) Monadine parasitaire relativement rare de Bryopsis piu- mosa; j'en ai pu observer 3 stades dans l'ordre suivant : V amibe, le zoocyste et la zoospore. \j amibe se présente sous la forme d'une masse protoplas- mique de dimensions et d'aspect très divers (fig. 28) : spliérique ou ovoïde d'une façon générale, elle s'étire, se rétrécit, se moule sur les obstacles, etc., de façon à acquérir les formes les plus changeantes. Son protoplasme sombre, granuleux au centre, plus liyalin vers les bords, tranche nettement sur celui de l'hôte. Il y a presque toujours des granulations graisseuses qui ne se produisent cependant que vers l'âge mûr, c'est-à-dire vers l'époque de la multiplication ; une ou deux vacuoles se tiennent le plus souvent dans la partie granuleuse. Les limites extérieures de l'amibe sont très nettes, mais on ne saurait y distinguer de membrane. L'organisme se nourrit aux dépens du contenu de la plante hospitalière et probablement uniquement du protoplasme, car je n'ai jamais assisté à l'englobement de parties chlorophylliennes et à leur digestion ultérieure. Son accroissement ne se fait que d'une manière bien lente et dure parfois plusieurs jours. Arrivé à une certaine limite, cet accroissement cesse tandis que l'amibe continue sa progression ou mieux sa reptation dans la lumière de la cellule hospitalière. A un moment donné, elle s'arrête, se roule en boule et se couvre lentement d'une mince membrane : elle se transforme en cyste. Le protoplasme n'a guère subi de changements à part l'acquisition de granulations graisseuses très réfringentes vers la fin du stade précédent. Quelque temps après l'apparition de la membrane cystiqiie, le protoplasme devient très vacuolaire (fig. 27). Les vacuoles diffèrent beaucoup entre elles : il y en a de 5 à 10 [j- de diamètre, elles ne sont pas pulsatiles et sont déplacées dans leur ensemble grâce aux mouvements du protoplasme lui-même. Pendant leur déplacement, il n'est pas rare de voir leur forme s'altérer. 68 e. DE BEUYNE. L'état enkysté peut durer un temps très variable, mais le plus souvent endéans des 2i heures déjà, la segmentation s'annonce par un groupement du protoplasme en autant de points qu'il se formera de zoospores : ce nombre dépend des dimensions acquises par le cyste lui-même. Les fragments de protoplasme ne tardent pas à acquérir leur cil : le fourmillement caractéristique apparaît immédiatement et annonce l'évacuation prochaine du cyste. La zoospore au moment de sa sortie est légèrement ovale, manifestement nucléée (on s'en assure facilement même à l'état frais) et d'ordinaire pourvue d'une vacuole. Son protoplasme, de même que celui de l'amibe et du cyste, est sombre et fine- ment granuleux. Le cil est implanté à l'une des extrémités du grand axe et peut atteindre la longueur de celui-ci, c'est-à-dire environ 10 p-. Les mouvements de progression sont relativement lents quoique le cil batte énergiquement le milieu. La surface du corps n'est point protégée par une membrane et conserve une grande amiboïdité. Toutes les zoospores quittent successi- vement le cyste dont bientôt il ne reste plus que la paroi. Elles n'abandonnent pas toujours immédiatement l'hôte, et quand elles le font, c'est que la paroi est trouée ou que la nourriture manque. D'ordinaire, elles pérégrinent, vont et viennent dans tous les sens pendant un temps plus ou moins long sur un espace relativement restreint, se heuitant aux obstacles, se bousculant entre elles, etc. La plante hospitalière n'étant qu'une immense cellule, les zoospores trouveront plus loin de quoi pourvoir à leur subsistance et à leur évolution ultérieure. Après quelque temps, en effet, on les trouve répandues dans différents rameaux où elles vont à leur tour porter la dévastation et où, s' agrandissant puis perdant leur cil, elles se transformeront en amibes pour donner ensuite le jour à une génération nouvelle. La Monadine en question est donc une zoosporée ; elle s'écarte de la famille des Pseudosporées en ce que les détritus de la digestion quittent le corps avant la formation du cyste, et elle se rapproche par là des Gymnococcacêes dont un caractère essentiel cependant, la formation de spores de conservation à MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 69 nu, n'a pas été constaté chez elle. Je propose provisoirement l'appellation Gymnococcus Bryopsidis en attendant que lors d'un séjour que je compte faire sur la côte occidentale de la France, je puisse reprendre la question et la mener à bien. Gymnococcus Licmophorae, n. sp. (Planche IV, fi^'. 14—21 et 30—33.) Cette monadine se rencontre parfois en grande quantité chez certaines baccilariées, telles que Gomphonema et surtout Licmoiiliora. Les stades observés sont : la zoospore, Y amibe et le {zoo ?-) cyste. Elle se nourrit de l'endochrome de ces algues et elle rend ses résidus alimentaires sous formes de balles ou de granulations brunâtres. La zoospore est d'ordinaire de forme ovoïde et ne possède qu'un cil unique porté à l'une des extrémités du grand axe (tig. 14, 16 et 17). Il peut atteindre une longueur de 7 — 8 jj.; il est assez puissant et va en s'effilant depuis la base jusqu'à l'extrémité. Jamais je ne l'ai vu disparaître pour réapparaître après. Ses battements énergiques déterminent les mouvements saccadés et rapides et la progression, jamais très considérable, de la zoo- spore. Celle-ci est nettement limitée, amiboïde et nucléée et, pendant ses mouvements, on peut distinguer un hyaloplasma sur les bords (fig. 14 et 16). Le plasma granuleux est très sombre et renferme d'ordinaire beaucoup de granulations endochro- miques qu'elle digère lentement. Il y a presque toujours une vacuole qui, de même que le noyau, est souvent soustrait à la vue, grâce aux granulations et enclaves du protoplasme. Les résidus alimentaires, réunis en des amas parfois considérables, d'autres fois restés à l'état poussié- reux, sont expulsés et vont nager dans le liquide ambiant : il ne peut donc ici non plus être question d'une véritable mem- brane, mais uniquement d'une couche limite. Bientôt, les batte- ments du cil diminuent et il rentre par absorption dans le protoplasme de la zoospore : V amibe s'est formée sans que tous les détritus formés pendant le stade précédent soient expulsés. 70 e. DE BRUYNE. La zoospore grandit assez rapidement ; ses dimensions peuvent devenir 2 — 2 1/2 fois plus grandes. La vacuole a considérablement augmenté de volume et est restée contractile comme chez la zoospore (fig. 14). Quand elle se contracte, son contenu est expulsé et le corps de l'amibe s'affaisse jusqu'à devenir d'un tiers moindi^e (fig. 15). L'amibe à l'état de repos est parfaitement sphérique et ne montre en aucun de ses points du plasma liyalin ; celui-ci apparaît, au contraire, pendant qu'elle rampe : alors les pseudopodes sont or- dinairement obtus et les mouvements lents. Parfois, cependant, il se produit un prolongement plus fin, mais qui ne tarde pas à grossir aux dépens du protoplasme affluent. Le noyau reste presque toujours masqué par les fortes granulations du proto- plasme et par les nombreuses enclaves que celui-ci peut ren- fermer. L'endoclirome de la plante hospitalière est englobé par fragments et y digère plus ou moins rapidement ; les détritus, comme toujours, sont expulsés : à cet effet, le protoplasme les abandonne tout autour et semble s'ouvrir pour leur livrer passage (fig. 32). Ces détritus finissent par obstruer la lumière de la diatomée (fig. 18). Quand il n'y a eu qu'une seule zoospore, il n'y a non plus qu'une seule amibe qui, une fois rassasiée, arrondit sa surface et reste au repos (fig. 20). Il arrive aussi qu'une zoospore s'attaque à une diatomée presqu' épuisée ; dans ce cas, elle et l'amibe à laquelle elle donne lieu, dévoreront ce qui reste encore (fig. 21). Il se peut aussi qu'une amibe quitte la Licmophore quand celle-ci est complètement épuisée et se rend vers une autre pour y parachever son alimentation (fig. 19 et 30). Arrivée au repos, l'amibe peut conserver sa vacuole ou non. Dans tous les cas, elle finit par s'arrondir complètement et sécrète à sa surface une mince membrane protectrice après avoir manifesté encore quelques mouvements amiboïdes (fig. 32 à 35) et avoir expulsé tout ou partie de ses résidus alimentaires. J'ai tout lieu de croire qu'il s'est formé ainsi un cyste qui semble devoir être zoosporipare. Toutefois, je n'ai jamais réussi à voir éclore ces masses arrondies qui, sans doute, constituaient un stade de multiplication. Quoi qu'il en soit, j'ai cru utile de MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 71 signaler également ces résultats incomplets pour que d'autres plus heureux puissent les reprendre et les continuer. EdoUélla Plateaui, n. g. n. sp. (Planche lY, fig. 1-13.) Dès les premiers jours de ma résidence à Naples, je me suis procuré une grande quantité de diatomées, surtout des Licmo- 2)hora qui me semblaient particulièrement favorables à l'étude du parasitisme. Ce genre, en effet, est très répandu dans le Golfe où il couvre de grandes surfaces rocheuses sous-marines et les individus peuvent atteindre des dimensions assez considé- rables. Il est rare de rencontrer un pied qui ne porte un ou deux individus lacérés et dont l'endochrome a disparu ou est remplacé par des masses brunes rougeâtres représentant les résidus ali- mentaires d'un parasite. Il arrivera, mais moins souvent, que l'on parcourra toute une préparation et plus d'une sans faire un pas dans la voie de la découverte de l'évolution de ce parasite; d'autres fois, au contraire, une seule préparation y suffira. Ainsi, quoique dès mon arrivée j'eusse installé des cultures, ce n'est que vers le terme de ma mission que j'ai pu recueillir les données suivantes. Un organisme bicilié, que les recherches ultérieures ont démontré être une zoosjjore, peregrine entre les diatomées avec une rapidité plus ou moins grande. Il est pyriforme et porte ses deux cils implantés à sa partie gonflée, tantôt dans une sorte d'enfoncement (fig. 1'), tantôt comme sur une proéminence (flg. 1). Ces deux cils sont sensiblement de même longueur et se recourbent au repos, de façon à s'éloigner depuis leur implantation commune. La partie effilée de la zoospore ne porte point d'appendice et semble complètement passive dans les déplacements de la zoospore. Celle-ci est nettement limitée à la surface extérieure et accuse parfois des mouvements ami- boïdes très appréciables. Le protoplasme est finement granuleux, surtout vers le centre ; il est plus hyalin sur les bords. Des vacuoles, presque toujours au nombre de deux, se maintiennent 72 e. DE BRUYNE. d'ordinaire en place et je n'ai pas pu remarquer qu'elles fussent contractiles. La zoospore est nucléée, ce dont on ne peut s'as- surer que par l'action des réactifs. A ce stade, l'animal ne semble guère s'inquiéter des nom- breuses diatomées au milieu desquelles il vit. Il passe et repasse pendant bien longtemps d'un groupe à l'autre sans s'attaquer à aucun d'eux; d'autres fois il s'arrête sur un indi\adu, la pointe effilée appliquée sur la valve, mais bientôt il reprend sa course. Cependant, on ne voit s'accomplir en lui aucun changement appréciable : ses deux cils se maintiennent battant l'eau tou- jours avec la même énergie; le protoplasme conserve son aspect finement granuleux et les vacuoles n'ont point augmenté de dimensions. On peut, après une observation parfois très longue, voir qu'une zoospore se fixe définitivement contre la valve de la diatomée (fig. 2). Alors les cils rentrent avec une rapidité très variable : le protozoaire vient d'entrer dans la phase amibe. Ceci devient bientôt manifeste : il pousse à travers la capsule silicique un prolongement pseudopodiforme d'abord mince puis beaucoup plus épais. Y a-t-il là une dissolution de la paroi ou bien le prolongement passe-t-il à travers un des nombreux pores qu'il agrandit après ? Dès que le pseudopode a pénétré (fig. 2), le contenu de la diatomée est régulièrement et uniformément repoussé en cet endroit. Le corps du parasite reste à l'extérieur de la Licmophora, tandis que le pseudopode se forme et s'agrandit à ses dépens : il s'étend en forme de faux ou en forme de T (fig. 3 et 11) à son extrémité. Après une demi-heure, ou moins encore, on constate déjà les ravages qu'il exerce à l'intérieur du corps de la diatomée. A sa surface et tout autour on voit le contenu endochromique se creuser davantage et les résidus alimentaires s'accumuler et se grouper de façon à former des masses quelquefois considérables (fig. 3, 4 et 5). Cependant le corps de l'amibe et le pseudopode s'ac- croissent progressivement; leur protoplasme à tous deux devient grossièrement granuleux et sur beaucoup d'exemplaires on voit les vacuoles augmenter en dimensions et parfois en nombre. A un très fort grossissement, on distingue un courant finement MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 73 granuleux du pseudopode au corps de l'amibe ; ce sont là natu- rellement des produits assimilables de la digestion, mais je n'ai pu observer qu'ils fussent englobés par le pseudopode, ils y enti-ent probablement par une sorte de diffusion. Voici donc un exemple de digestion à la surface même de l'organisme. Son protoplasme doit posséder, tout au moins dans la partie pseudo- podique, une propriété dissolvante. Je puis certifier de la façon la plus formelle, que jamais je n'ai constaté la préhension d'une parcelle d'endochrome par le pseudopode, son transport vers et sa digestion ultérieure daiis le corps, ainsi que cela se fait chez toutes les monadines décrites jusqu'à présent. Nécessairement les détritus ne sont pas refoulés après l'assimilation des parties nutritives, elles sont formées et abandonnées sur place. Cepen- dant la destruction de la diatomée continue et l'excavation creusée dans son contenu augmente toujours (fig. 3, 4 et 5). A un moment donné, le pseudopode constamment agrandi, dimi- nue tout à coup : il rentre dans l'amibe et abandonne dans la valve, les masses de détritus groupés dans une sorte de vésicule qui, déjà apparente auparavant, est devenue parfaitement mani- •feste (fig. 4 à 8 et 12). Cette vésicule affecte une forme ordi- nairement ovoïde et prend des dimensions variables d'après la quantité et la grosseur des résidus alimentaires. Dans une Licmophora épuisée par 3 individus, j'ai rencontré 3 de ces vésicules avec leur contenu caractéristique (fig. 13) ; 2 dans une autre (fig. 12) (^). Ainsi que je le disais tantôt, l'amibe a vu augmenter consi- dérablement ses dimensions pendant la nutrition et surtout quand le pseudopode, déjà grand par lui-même, y est rentré. Le protoplasme tout en conservant sa partie liy aline s'est chargé de granulations très grossières (fig. 6, 7, 8, 9 et 10). Les vacuoles devenues assez nombreuses peuvent se fusionner jusqu'à en former une seule ou deux volumineuses. Pendant quelque temps encore, le parasite reste en place, contre la paroi (•) W. Wahrlich signale le refoulement de substances nutritives à l'intérieur d'une vésicule centrale chez une Vampyrella [Berichie der deutuchen boiauixdien Gcscll- scliiijt. Jahrg. 7, Hefl7, i Juli 1889). J'y reviendrai dans mes conclunioiix rjénérulci. 74 e. DE BRUYNE. de son hôte et y manifeste des mouvements amiboïdes : c'est ainsi qu'il se forme un ou deux pseudopodes hyalins (fig. 7 et 8) ; ceux-ci se meuvent lentement, augmentent, diminuent, rentrent et sortent de nouveau pour rentrer enfin définitivement. Ensuite l'amibe quitte son emplacement pour aller errer dans le milieu ambiant. Pendant ce temps, je n'ai jamais pu constater de contraction des vacuoles. Bientôt le parasite s'arrête, et après avoir encore présenté quelques déformations amiboïdes, il s'entoure d'une membrane très évidente. Il a repris sa forme ovoïde qu'il ne quitte plus. Je suppose qu'il est entré ainsi dans une phase de repos précé- dant la multiplication : soit donc ou un zoocyste, ou un sporo- cyste dont proviendra la zoospore d'une génération nouvelle. Je dois le reconnaître, je n'ai pas réussi à poursuivre l'évolution de ce stade, mais d'après ce qui précède, je suis certainement autorisé à faire cette hypothèse qui même me semble s'imposer. Je connais donc pour le parasite en question : 1° la zoospore, 2» l'amibe, 3° un stade de repos précédant la multiplication. Il s'ensuit qu'il trouve sa place systématique parmi les Mona- dmes zoosporées. De l'ensemble des caractères, il résulte qu'on ne pourrait le classer dans aucune des 3 familles Pseudosporées, Oymnococcacées et Plasmodiopliorées ; tout au moins, ce que j'en connais ne permet pas une classification déterminée. A raison de son mode spécial et caractéristique de nutrition, il me semble utile de créer un genre nouveau. Comme le corps de l'amibe reste à l'extérieur de l'hôte et qu'elle digère ses aliments à la surface, ce qui constitue deux particularités dont une nouvelle parmi les monadines zoosporées, je propose de lui donnner le nom générique à' Edohiella. Quant au nom spéci- fique, j'ai choisi celui de Plateaui comme hommage d'estime à mon ancien professeur M. Félix Plateau. Aphelidium lacerans, n. sp. (Planche V, fig 28 ^i 32.) Sur Viva laduca se présentent souvent des cellules complètement vides, ou ne renfermant plus que des restes MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 75 informes d'une couleur jaune brunâtre. Les parois sont forte- ment écartées et d'ordinaire lacérées. A première vue déjà on reconnaît qu'il s'agit d'une destruction causée par un parasite. Aussi ayant installé des cultures je ne fus pas longtemps sans voir mon idée se confirmer. Une zoospore très caractéristique se rencontrait beaucoup pérégrinant à la surface de l'algue ; quelques cellules en ren- fermaient une ou même deux. Les observant pendant quelque temps je voyais qu'elles s'attaquaient aux chromatopliores dont elles s'emparaient à la façon des amibes, c'est-à-dire par englobement. Un cil unique implanté à la partie antérieure produit le déplacement assez lent de la zoospore entre les grains de chlorophylle (flg. 28). Le corps de l'organisme est allongé, nettement limité à l'extérieur; une couche-limite en recouvre la surface. Le protoplasme est très réfringent et tranche nette- ment sur celui de la cellule hospitalière (flg. 29) : on y distingue une partie hyaline sur les bords et une partie granuleuse plus centrale ; il renferme encore une certaine quantité de fragments chlorophylliens tout ou partie digérés et qui lui ont communiqué une légère coloration plus ou moins verdâtre. Quelques granulations graisseuses font lentement leur appari- tion. Jamais dans ce stade je n'ai constaté la présence d'une vacuole pulsatile ou autre. Un noyau devient manifeste après l'action des matières colorantes. De temps en temps on voit que le parasite expulse de son corps quelques résidus alimentaires à l'état de grosses masses compactes ou de minces granulations. Cette alimentation amène naturellement un accroissement de la zoospore dont les mouvements aussi commencent à ralentir. Après que le cil a disparu par absorption, V amibe est formée. Dans ce second stade, les principaux caractères structuraux se sont maintenus (flg. 29) : amiboïdité, plasmas granuleux et hyalin, noyau, granulations graisseuses ; le plus souvent une vacuole s'est formée, mais ne se contracte point. L'amibe se nourrit très activement et a bientôt flni d'englober tous les chromatophores encore intacts. Elle s'accroît rapidement et remplit bientôt toute la lumière de la cellule. Elle manifeste une 76 e. DE BRUYNE. grande amiboïdité et son aspect cliange constamment. Au fur et à mesure qu'avance la digestion, les détritus sont expulsés de son corps mais ne quittent pas la cellule de l'algue : la coloration que j'ai décrite chez la zoospore n'était qu'apparente ; en eifet, l'aspect nacré du protoplasme revient progressivement à mesure que les détritus disparaissent. Enfin on constate que les parois de la cellule hospitalière s'écartent et se froissent : elle est épuisée et morte. Après une amiboïdité très franche et dont la durée peut varier considérablement, le parasite prépare manifestement une phase nouvelle : il y a repos absolu ; seules les granulations protoplasmiques trahissent encore une cer- taine activité à l'intérieur du corps. Sans se munir d'une membrane, le protoplasme commence à se fractionner, d'ordi- naire en 8 parties. Ce fractionnement s'annonce par des étranglements régulièrement espacés et qui se parachevant forment des masses sphériques de protoplasme. Dans chacune de celles-ci, apparaît un mouvement amiboïde propre, jusqu'à ce qu'enfin toutes acquièrent un cil, né manifestement du proto- plasme. Cependant il n'est pas rare que le cil se forme assez lentement ; mais comme à cet état primitif acilié l'organisme ne semble que traverser une période d'attente, je ne crois pas qu'il faille y voir un stade amibe précédant celui de zoospore. Je n'ai pas observé de stade de conservation. Quant à la place systématique qui revient à ce parasite, il me semble réunir les caractères du genre Aphelidium, Zopf, dans la famille des Gymnococcacées. Comme son parasitisme entraîne le déchirement de la cellule hospitalière, je lui ai donné le nom spécifique de A. lacerans. II. — MONADINES AZOOSPORÊES. Leptophrys villosa, n. sp. (Planche III, fig. 1 V-'J'l ) Ce parasite se rencontrait en assez grandes quantités dans mes cultures de diatomées et dans les impuretés recouvrant des plantes aquatiques, surtout Pahnopliyllum crassum, et ses MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 77 caractères étaient d'une netteté telle qu'il n'y avait pas lieu d'hésiter sur sa nouveauté. C'est une amibe appartenant au genre Leptophrys (Hertwig et Lesser) (^) ; je lui ai donné le nom spécifique de Villosa à raison d'une houppe de fins pseudopodes qu'elle traîne derrière elle (fig. 14' et 15, vìi). Après avoir exposé ce que je connais de son évolution je la rapprocherai de formes analogues décrites par d'autres auteurs et motiverai l'appellation nouvelle. Leptophrys villosa peut atteindre des dimensions parfois considérables ; d'autres fois, au contraire, elle est plus petite. Elle a d'ordinaire une teinte rosée, sujette à beaucoup de variations toutefois, tantôt pâle, tantôt plus foncée. Il n'est pas rare de rencontrer des exemplaires, surtout des jeunes, absolument incolores. La coloration, quand elle existe, provient, ainsi que pour beaucoup d'autres Monadines, de la digestion des sub- stances nutritives empruntées aux algues et aux diatomées. Les pseudopodes sont très obtus et se produisent un peu sur tout le pourtour de l'amibe et entraînent des courants de gra- nulations dans toutes les directions. Jamais je n'ai constaté la présence de pseudopodes fins tels que ceux décrits pour Leptophrys vorax, Cienk. L'existence d'un hj^aloplasma est absolument évidente : il se manifeste sur toute la surface aux endroits où s'ébauche un pseudopode et sa largeur peut devenir parfois considérable (fig. 14' et 15). Les granulations du plasma granuleux s'y précipitent bientôt et le font aussitôt disparaître à l'œil de l'observateur. De fins pseudopodes disposés en houppe et traînés à la partie postérieure, restent hyalins; ils sont mobiles et rétiactiles chacun isolément. Au lieu d'une seule houppe, on en trouve parfois deux coiffant chacune un lobopode non encore rentré. L'étendue couverte par ces villosités protoplasmatiques varie constamment sur un même individu de même que leur nombre, leurs dimensions, etc., elles sont toutefois assez constantes chez (•) Ueber Rhizopoden iind densclben naliestehenden Oiganismen, A. f. m. A. B. X. 78 e. DE BRUYNE. L. Villosa en mouvement. Cependant on rencontre parfois des exemplaires qui momentanément en sont privés, mais par une observation continue on finit par les voir apparaître. Elles m'ont semblé naître aux dépens de pseudopodes obtus dont les parties rentrent irrégulièrement; elles-mêmes ne disparaissent pas toutes en même temps mais séparément et sont bientôt rem- placées par d'autres, nouvelles. Je ne pourrais donner aucun détail décisif quant à leur rôle, mais il me serait impossible d'ad- mettre, comme Wallicli l'a fait pour une autre forme, qu'elles servent de point d'appui à l'amibe en mouvement. Elles me semblent, au contraire, jouer un rôle absolument passif : jamais je ne les ai vues contribuer soit aux mouvements de progression, soit à la préhension d'aliments. L'aspect général du protoplasme est vacuolaire et il est absolument nu ; seule une membrane de contact peut exister, ou plutôt se forme et se reforme constamment au fur et à mesure que change la surface même, c'est-à-dire pendant tout le temps du déplacement. Ce qui à l'intérieur en impose pour des vacuoles, sont les nombreuses granulations paramyliques (fig. l^', 15 et 16). Elles sont absolument constantes et le protoplasme dans lequel elles baignent, s'est réduit à des fila- ments épais ou ténus qui les enserrent : il forme comme un réseau dont les mailles seraient occupées par les granulations de paramylum. La forme de celles-ci est sphérique, mais elle varie considérablement par suite de compression mutuelle; leur nombre aussi est variable avec les individus et avec la taille. Les réactions chimiques sont absolument caractéristiques : l'acide sulfurique concentré et la potasse caustique à 10 % les dissolvent instantanément; l'iodure de potassium iodé et la solution de chlorure de zinc iodé ne les colorent que faiblement. Par pression exercée sur le couvre-objet d'une préparation fraîche, on écrase l'amibe et son contenu s'écoule dans le milieu où on peut alors poursuivre l'étude de la structure de ces granulations. Le protoplasme lui-même renferme dans sa partie granuleuse, des corpuscules graisseux de dimensions très variables; les MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 79 granulations protoplasmiques sont dans le même cas. Une vacuole peut exister ou non : elle atteint parfois un diamètre considéiable. Je n'ai pas réussi à y découvrir une membrane et jamais je n'ai assisté à une contraction. Sa situation dans le corps de l'amibe est assez constante : elle se tient presque toujours dans le voisinage de la surface (fig. 15 et 16, v). A l'état frais on ne distingue pas de noyau et j'avoue avoir négligé les réactions chimiques afin de déceler sa présence. Il est probable qu'après avoir fait disparaître les grains de para- mylum, la recherche de cet élément (peut-être y en a-t-il plusieurs comme chez L. vorax) doit être très aisée. Klein (^) et Zopf (^) ont signalé la fusion de Leptophrys ( Vamjjyrella) vorax à l'état amiboïde. Jamais je n'ai pu assister à ce phéno- mène chez Leptophrys villosa malgré le nombre considérable d'observations que j'ai eu l'occasion de faire. J'en ai vu qui, pendant leur pérégrination, venaient à se heurter, mais elles s'éloignaient aussitôt sans s'être fusionnées en aucun de leurs points de contact. Leptophrys villosa s'attaque de préférence aux diatomées, mais sans manifester de prédilection pour des formes données; même je l'ai rencontré parfois à l'intérieur des fragments d'algues polycellulaires. Les aliments enti-ent dans le corps de l'amibe par englobement : le protoplasme se moule pour ainsi dire sur ses victimes, les englobe complètement et les entraîne dans sa progression ultérieure. Souvent dans un même individu se ren- contrent plusieurs diatomées de formes très différentes (fig. IJt' et 15). Leur digestion s'annonce d'ordinaire par une décoloration lente et quand le parasite les a épuisées, le protoplasme se retire tout autour et les abandonne sur place ; quelquefois il y a véritable expulsion : le détritus est repoussé. Ce détritus se compose invariablement de la valve siliceuse renfermant les parties. non assimilables. Au fur et à mesure qu'avance la diorestion de la diatomée, se manifeste et s'accentue la teinte (') Vaìnptjìclla, Hire Eidwickdkìig ttiid .system. StellhìKj, Hoc. Cenir. Raiid. II. ('^) Zuv Morphologie uud Biologie der niederen Pilzlhiere. Leipzig, i88ì>. 80 G. DE BRUYNE. rosée qui se répand assez uniformément sur tout le corps de la monadine. Souvent celle-ci englobe une diatomée et l'aban- donne intacte presqu'immédiatement. Serait-ce parce que l'aliment ne lui convient pas? Tantôt elle continue sa progression tout en digérant le contenu de ses victimes, tantôt, au contraire, elle reste plu- sieurs heures successives immobile en place, épuisant lentement une diatomée. Seul parfois un changement de forme se mani- feste à la surface; à l'intérieur, néanmoins, on continue à observer le mouvement lent du protoplasme et parfois, comme conséquence, un déplacement de la diatomée. Entin, souvent sans expulser les résidus alimentaires, elle s'arrondit et se tient au repos. L'aspect de son contenu n'a pas changé : grains de paramylum, vacuole, granulations proto- plasmiques, etc., se maintiennent ; seul l'hyaloplasme ne se distingue plus. Toute la surface de la monadine se hérisse maintenant de filaments étroits, à bords parallèles et nets, la plupart se terminant en boule (fig. 16 et 17). On les voit, d'abord très petits, s'allonger progressivement jusqu'au moment de la formation de la boule terminale. Le vert de méthyle acide les colore de même que le protoplasme du corps (fig. 20) : ils sont donc de nature protoplasmique. La boule ne se colore point. Ces filaments sont les uns rectilignes, les autres, au con- traire, courbés dans différentes directions ; leur implantation aussi est irrégulière et elles s'entrecroisent à différentes hau- teurs et dans tous les sens. Ils sont absolument hyalins, on n'y rencontre aucune granulation. La boule terminale, après un temps plus ou moins long, rompt son attache sur le filament, se libère ainsi et se maintient d'ordinaire dans le voisinage iuimé- ^'at de l'amibe arrondie. Elle est très réfringente, mais comme ^ Jle ne se colore pas en noir par l'acide osmique, elle ne peut Hi.re de nature graisseuse. Si, d'un autre côté, cette boule était constituée uniquement d'eau, elle devrait aussitôt se mélanger au milieu. Or cela n'est jamais le cas : toutes se main- tiennent intactes et il m'est arrivé de les retrouver encore en place après 24 heures. Il est question ici, me semble-t-il, d'une MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 81 excrétion précédant l'enlvj^stement, quoique les résidus alimen- taires ne quittent pas le corps de la Monadine. Parfois, après la libération de ces spherules hyalines, les filaments ténus se maintiennent encore très longtemps, puis rentrent lentement les uns après les autres dans le protoplasme avec lequel ils n'ont pas cessé d'être en continuité. Ce sont donc une manière de pseudopodes chargés d'une mission spéciale. Le zoocyste (fig. 21 et 22) se forme comme suit : la surface se couvre d'une membrane à double contour. Le protoplasme perd de son aspect ou plutôt devient moins distinct : cela résulte probablement de la présence de cette membrane cystique. On n'y constate plus la présence des granulations paramyliques, mais bien celle de diatomées complètement épuisées ou non ainsi que des corpuscules de résidus provenant de la digestion de fragments d'algues vertes, etc. Malgré le nombre considérable d'observations et les soins les plus minutieux, je n'ai pas réussi à voir le protoplasme cystique se diviser et donner lieu à des jeunes Leptophrys. Il est pro- bable que le phénomène se passe surtout pendant la nuit à la faveur de l'obscurité. Toujours est-il qu'à deux reprises, j'ai trouvé, à l'endroit où la veille s'était formé un zoocyste, la paroi cystique abandonnée et renfermant encore des résidus alimentaires (fig. 22). Jamais dans ma culture je n'ai rencontré des zoospores qui, dans la série de leurs phases évolutives, aient donné lieu à des jeunes amibes de Leptophrys villosa. Je me crois donc fondé à admettre comme probable que la multiplication de la Monadine en question ne compte pas ce stade. Dans un travail intéressant publié en 1863 {}), Wallich décrit une amibe d'eau douce stagnante de Hampstead Heath. Il la nomme Amœha villosa et la caractérise par la présence de villosités à la partie postérieure. Il signale l'existence de (') O/i n/j undescribcd imligeneouf: form of Amœba. G. -G. Wallich. Ann. a. mag. oj Nat. History 18(53, p. 287 avec planche. 6 82 e. DE BRUYNE. plusieurs vacuoles pulsatiles avec un beau reticulum à la surface ; il décrit les villosités pseudopodiques comme servant à la préhension d'aliments et la houppe (toujours unique) qu'elles forment comme reliée par une sorte de tigelle hyaline et étroite. Cet auteur ne fait aucune allusion à une coloration rosée si caractéristique chez la forme dont je viens de donner la description, ni aux granulations paramyliques, l'arrondissement et l'encystement de l'organisme, ni enfin à la formation de ces filaments pseudopodiques étroits terminés en boule. Je crois pouvoir conclure que le protozoaire d'eau douce décrit par le savant anglais, n'est point identique à Leptophrys villosa. Carter (^), dans sa critique du travail de de Bary sur les myxomycètes, parle assez longuement de l'amibe étudiée par Wallich ; pas plus que lui, il ne signale les différents caractères sur lesquels j'ai insisté assez longuement et qui chez Leptoplirys vorax sont aussi frappants. En 1879, Leydy (^) décrivit une amibe d'eau douce qu'il rapprocha à'Ainœba villosa Wallich. Je n'ai pas eu l'occasion de lire ce travail, mais Mobius, qui le cite (^), n'aurait certainement pas omis de signaler ces carac- tères si l'auteur américain y avait fait aUiision. Lui-même figure et décrit un parasite rhizopodaire à houppe postérieure de pseudopodes, rencontré dans la baie de Kiel. Ses dessins renseignent très peu sur la structure intime de l'organisme, et dans le texte il ne parle, pas plus que les trois autres, de ces détails importants. Mobius n'a rencontré cette amibe qu'une seule fois et il la rapproche de la forme décrite par Wallich. Quant à Leptoplirys villosa, j'ai eu l'occasion d'en observer des centaines et j'ai chaque fois pu constater et vérifier les différents points sur lesquels j'ai insisté dans la description précédente. Je me crois donc autorisé à admettre qu'il s'agit dûment d'une forme nouvelle qui trouve sa place parmi les Monadines azoosporées, famille des Vampyréllacées, genre Leptoplirys. («) 1(1. 3<^ série, vol. XII, p. 30, etc. (-) Frcshwaier Rhizopods, N. Am. Ì819. (5) Bruchslùcke einer Rhizopodenfauna der Kieler Buchtvon K. i)/o/'i«x (6 planches;. Berlin, -1889. MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 83 Vampyrella incolor, n. sp. (Planche V, flg. 21—27.) J'ai rencontré cette forme sur Valonia utricularis, Derhesia marina etCladopJwra (sp ?). Elle se présente d' ordinale en très grande quantité et recouvre la surface de l'algue avec beaucoup d'autres organismes. Si on soumet celle-ci à un lavage au pinceau, seul le parasite en question s'y maintient : beaucoup d'individus n'ayant plus aucune adhérence avec elle, sont enlevés avec les autres corps étrangers; d'autres, au contraire, y sont restés, grâce à un prolongement très épais qui a traversé la paroi : ils représentent la Monadine au stade à'' amibe. Celle-ci est d'ordinaire de forme ovale (fig. 21 et 24), quelque- fois presque spliérique, tantôt finement granuleuse, tantôt chargée de granulations épaisses. Ses bords sont très nets et on n'y rencontre jamais unprotoplasme hyalin évident. A l'intérieur, au contraire, souvent plus d'un endroit est vierge de granula- tions. Ces dernières sont très variables de dimensions et d'aspect : les plus grandes tranchent par la netteté de leurs limites et affectent, parfois à s'y tromper, l'aspect de petites vacuoles ou de corpuscules graisseux. Elles masquent d'ordinaii^e le noyau que l'on ne retrouve dans ce cas qu'après la fixation et la coloration. Il existe chez presque tous les exemplaires une vacuole, souvent même deux (fig. 21,t;), que les granulations peuvent aussi cacher en tout ou en partie à la vue de l'obseiTateur. La vacuole peut même atteindre des dimensions égales à la moitié de celles de l'amibe elle-même. Jamais je ne l'ai vue se contracter. Il n'est pas rare de rencontrer dans ces vacuoles des fragments de grains de fécule, de chlorophylle, etc., complètement digérés ou non. L'amibe pousse un pseudopode parfois très profondément à l'intérieur de l'algue où elle puise tous ses aliments. Le proto- plasme de ce pseudopode est tantôt finement granuleux, même à peu près hyalin et peut renfermer une ou deux lacunes qui en imposent pour des vacuoles (fig. 24); d'autres fois, il n'est point différent de celui de l'amibe. Ses limites sont très nettes et sa 84 e. DE BRUYNE. forme générale ne varie jamais chez un même individu ; chez presque tous il se courbe en faucille. Je n'ai pas eu l'oc- casion d'assister à l'entrée des aliments dans le corps de l'amibe ; il ne pourrait néanmoins y avoir aucun doute à cet égard : le chemin suivi est naturellement le pseudopode. Après quelque temps, on voit irrégulièrement répandus dans le proto- plasme, des granulations chlorophylliennes ou leurs fragments déchiquetés et accumulés en une masse informe suivant assez sensiblement le grand axe de l'amibe. En observant celle-ci pendant un temps de longueur variable, on assiste à la diges- tion lente de ces masses clilorophylliennes : elle s'accuse par un changement progressif de leur coloration qui, finalement, passe au brun jaunâtre. La masse change lentement de position à la suite du mouvement intérieur du protoplasme dans lequel elle se trouve noyée, et il n'est pas rare de la voir se frac- tionner en deux ou trois parties (fig. 21). Elle reste néanmoins sensiblement au centre, quoique j'aie vu des exemples (fig. 21) où elle fut refoulée contre la surface extérieure de l'amibe. Cependant le pseudopode est rentré et l'amibe s'entoure d'une membrane protectrice, plus ou moins épaisse. C'est le stade de cyste qui s'annonce. Je dois le reconnaître, jamais je n'ai pu assister à la sortie de jeunes Vampyrelles et même je n'ai pas constaté de division dans le protoplasme cystique. Plusieurs fois j'ai retrouvé dans mes cultures des cystes vides, ne renfermant plus des résidus alimentaires. Ce stade est donc à n'en pas douter un Zoocyste. Sur certains exemplaires j'ai observé que le protoplasme de l'amibe, après s'être entouré d'une membrane d'épaisseur va- riable, se contractait en boule laissant un espace tout autour de lui, puis sécrétait une membrane nouvelle. C'était probable- ment une manière de sporocyste dont pas plus que pour le zoocyste je n'ai pu poursuivre l'éclosion. Ce parasite ressemble en plus d'un point à V. pedata que Klein a décrite sur des algues œdogoniées. De même qu'elle, V. incolor perce la paroi de l'hôte d'un gros pseudopode qui se maintient souvent (fig. 25) comme un pédoncule fixateur MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 85 {pedata) après que le cyste s'est formé et même vidé. Les mouvements de progression sont très peu appréciables ; elle manque aussi de pseudopodes tins lui donnant l'aspect di^Acti- nophrys. Klein n'a pas constaté de formation plasmodique ni de sporocyste. Elle en diifère toutefois profondément par l'absence constante d'une large bordure hyaline unilatérale et par l'absence de toute coloration du protoplasme provenant de la digestion du contenu de l'algue. A raison de cette dernière caractéristique, j'ai créé le nom spécifique F. incolor. Ce parasite afitecte parfois, à première vue, surtout si on le rencontre fixé perpendiculairement sur la membrane d'un fila- ment de Derhesia, l'aspect d'un zoosporange de cette algue. Mais l'examen permet immédiatement de l'en distinguer par la présence de substances chlorophylliennes dont on peut pour- suivre la digestion progressiA^e, et par le pseudopode épais qui traverse la paroi de l'hôte. n. — CHYTRIDIACÉES. Olpidium Bryopsidis, n. sp. (Planche V, fig. l-lo.) Les colonies de Bryopsis piumosa (Huds) sont souvent consi- dérablement ravagées par la Chytridiacée en question. Ses ramifications en sont parfois bourrées et leur contenu est dévoré au point qu'on n'en trouve souvent plus que les détritus déco- lorés. Quelques-uns de ses stades le font beaucoup ressembler à Olpidiopsis schenkiana, Zopf (^), mais son évolution la rap- proche plutôt de Olpidium sapolegniae, Fischer (^). Je la trouvai d'abord sous forme de grosses masses isolées, presque toutes sphériques, quelques-unes plus ou moins ovoïdes (') Nova Acta der ksi. Leop. Citrol. Deutschen Akademie dcr Naturforsclier. Bd. XLVII, no4, -1884. (-) Untentitcliiargen iiber die Parasiien dcr Suprolerjiiiecn., llitbilitalioitsschrifc. Leipzig, 1882. 86 e. DE BRUYNE. (flg. 1). Elles étaient très serrées les unes contre les autres ; de là quelques déformations qui disparaissaient aussitôt que par la rupture des parois de l'algue hospitalière, on les mettait en liberté. Quelques-unes alors s'allongeaient très fort et manifes- taient même quelque amiboïdité à la surface (fig. 4 et 5) ; leur contenu protoplasmique était d'ordinaire caclié par des enclaves telles que granulations, résidus alimentaires, etc., soit encore par le protoplasme de l'algue et son contenu chlorophyllien (fig. 1). Avais-je, au contraire, sous les yeux un exemplaire libéré et non rempli de substances étrangères, je voyais un pro- toplasme fortement réfringent, renfermant des granulations, des corpuscules graisseux et parfois des vacuoles, le tout de nombre et de dimensions très variables. Aucune difi'érenciation du protoplasme n'est manifeste à ce stade. Une membrane mince recouvre la surface. Olpidium Bryojisidis reste dans cet état parfois pendant un temps assez long : 2, 3 jours, ou seu- lement pendant quelques heures. Une observation continue permet de constater les changements qui se produisent : la membrane très mince s'épaissit lentement; le protoplasme est devenu plus granuleux, les corpuscules graisseux et les vacuoles quand elles existent s'amplifient. Jamais je n'ai remarqué chez celles-ci une contraction quelconque ni chez celles-là de fusion des unes avec les autres. Pendant la formation de la membrane apparaît un renfle- ment en un point de la surface (fig. 2) : ce point ne semble pas être quelconque ; en effet, sur les masses protoplasmiques de forme ovoïde, ce renflement naît presque toujours à une extrémité du grand axe (fig. 12); il y a cependant quelques exceptions (fig. 11 en bas, p. ex.). Ce renflement est plein : son protoplasme est très réfringent, et hyalin malgré quelques fines granulations qui y flottent ; il est également limité par une fine membrane. Sa direction est très variable : il semble néanmoins se rendre à la recherche de la paroi de l'algue ; en effet, il s'accroît lentement en conservant son diamètre et l'aspect de son contenu, où néanmoins se dessinent d'ordinaire quelques lacunes (vacuoles '?) nettement limitées. Cet accroissement est MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 87 très lent; il m'est arrivé de devoir attendre 24 heures et davantage encore, pour le voir atteindre ses dimensions défini- tives. Avant cela, son extrémité a touché la paroi de l'algue et la transperce (flg. 2, 3, 11 et 15) ; il arrive que ce dernier point ne s'accomplit pas, c'est-à-dire que le renflement ne perce pas la paroi de l'algue : toujours, dans ce cas, j'ai trouvé la lumière de l'algue ne renfermant pas beaucoup de parasites (fig. 11). Sa forme, au moment de son achèvement, varie d'un individu à l'autre : tantôt rectiligne (fig. 3 et 15), tantôt serpentiforme (fig. 11 et 13). Sa longueur peut être de 60 (^ et plus encore, sa largeur de 3 u-. Jusqu'en ce moment je pouvais avoir quelques doutes au sujet de l'organisme en question ; mais bientôt s'annonce un phénomène décisif: le fractionnement de la masse sphérique et de son prolongement ; c'était un sporange à boyau de sortie, ces fragments étaient des organes de la multiplication, des spores. Celles-ci ne tardèrent pas à se mouvoir d'une façon caractéristique : elles fourmillaient à l'intérieur. Enfin la partie terminale du boyau se rompt et les spores sortent les unes après les autres, sans ordre cependant parce que sur le trajet du boyau on en voyait souvent qui étaient devancées par d'autres. Chacune était munie d'un cil, disposition surtout évi- dente sur les individus déjà libérés (fig. 13). Tant qu'elles sont encore enfermées dans le sporange on ne distingue pas le cil (fig. 12) ou du moins assez imparfaitement (fig. 11 à droite). Pendant ce temps encore, la paroi sporangique de même que celle du boyau s'est considérablement épaissie. Après l'action des réactifs, elle manifeste faiblement une nature cellulosique. La zoospore au moment de sa sortie ne s'élance pas immé- diatement au loin ; elle reste d'ordinaire encore pendant quelques instants dans le voisinage de l'orifice de sortie puis quitte enfin définitivement. Elle est de forme ovoïde et mani- festement amiboïde. Son cil est implanté sur le pôle antérieur plus atténué que le postérieur. Son protoplasme est nettement limité à la surface et sa réfringence est très grande : il est très finement granuleux et renferme toujours ou presque toujours un corpuscule graisseux situé invariablement vers le centre. Les 88 e. DE BRUTNE. mouvements de progression sont fort rapides, surtout au com- mencement de ce stade ; le cil, qui peut atteindre 1 à 1 V2 f*^is celle du corps, bat énergiquement le liquide environnant. Je n'ai pas observé de mes yeux la pénétration de la zoospore à l'intérieur de Bryopsis, mais souvent il m'est arrivé d'entrouver une ou deux dans un rameau encore en parfait état : elles ne pouvaient donc pas s'y trouver par droit de naissance puisque pour cela il aurait fallu y constater encore la présence de sporanges-mères vides et abandonnées. Ceci, au contraire, arrivait (fig. 1 1 en haut) dans le cas où le boyau du sporange, n'ayant pas perforé la paroi de l'algue, déversait ses zoospores dans la lumière de celle-ci : alors les zoospores n'avaient pas besoin de quitter l'algue, il leur suffisait de se déplacer dans le sens de l'axe et de cherclier un rameau riche et favorable de l'hôte unicellulaire. J'ai observé deux fois la division de la zoospore en deux. Vers le petit diamètre apparaît un étranglement qui va en s'accentuant : de là, l'apparition d'un mince filament naissant. En même temps apparaît un cil sur la moitié qui n'en possédait pas jusqu'à présent. Le filament unissant se rompt et leurs fragments disparaissent par absorption dans leur corps (fig. 7). Le protoplasma de la zoospore devient maintenant régulière- ment granuleux, les déplacements deviennent moindres, le cil ralentit ses battements dont aussi l'énergie diminue : la zoospore passe à l'état de jeune Chytridiacée : le protoplasme se gonfle et on obtient une masse muqueuse arrondie dont les dimensions augmenteront maintenant progressivement. J'ignore comment se fait la nutrition : toutefois elle se fait certainement aux dépens du contenu de l'algue qui y pénètre, par osmose probablement, après une digestion à la surface. Il ne m'est pas arrivé souvent, en effet, de voir des fragments de chlorophylle à l'intérieur de la zoospore ou de la cellule, mais l'intérieur de Bryopsis se remplissait lentement de résidus alimentaires. Fischer {}) décrit chez Olpidium saprolegniae la formation [}) Loco citalo. MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 89 d'une sphère épineuse (Staclielkugel) entourant le sporange dans le cas où les conditions d'existence deviennent défavo- rables. Je n'ai pas constaté pareil phénomène chez Oljndium Bryopsidis ; mais peut-être faut-il en rapprocher les espèces de cystes que j'ai obtenues dans mes cultures sur des exemplaires isolés de toute substance nutritive. Voici ce qui se passe : le protoplasme se contracte et il se forme tout autour de lui une membrane épaisse laissant encore un espace lacunaire tout autour. Fischer en a vu naître des spores qui, trouvant des conditions favorables, évoluaient normalement et donnaient lieu à un sporange ordinaire. Ce serait donc une sorte de cyste de conservation. Les fig. 7, 8 et 8' représentent quelques formes anormales : en 7, il se forme un boyau sur un sporange en forme de biscuit à l'extrémité du grand axe. Le protoplasme de ce boyau oifre ici un aspect très différent de celui du sporange et semble être hyalin. Se formerait-il aux dépens d'un hyaloplasme resté invisible dans le sporangium à cause des granulations et des enclaves ? 8 et 8 ' figurent des déformations amiboïdes qui peuvent se produire très lentement. CONCLUSIONS. Un grand nombre de maladies des algues tant marines que d'eau douce sont occasionnées par la présence d'organismes parasitant dans leur intérieur. Ceux-ci appartiennent en grand nombre aux Chytridiacées, aux Monadines et aux Lifusoires : on les rencontre pour ainsi dire avec certitude aux endroits décolorés. Beaucoup d'auteurs ont objecté aux travaux du genre de celui-ci que les observateurs se laissaient souvent induire en erreur et considéraient comme parasites, des organes de multiplication entrant dans le cycle évolutif même de la plante. Cette erreur est rendue tout à fait impossible : 1° par la succession des phases évolutives; 2» par l'absorption du contenu de l'algue et sa digestion à l'intérieur de ces orga- 90 e. DE BRUYNE. nismes en question et l'expulsion subséquente de leurs résidus ; 3° par le dépérissement progressif de là plante ou de la partie où s'observe le phénomène. Tous les organismes unicellulaires décrits dans les pages qui précèdent,accusent une différenciation quelquefois très prononcée qui empêche de les classer parmi les Monères de Haeckel. Il est vrai que j'ai reconnu avoir néghgé chez quelques formes, la re- cherche du noyau ; mais partout où je me suis servi des réactions microchimiques, j'ai constaté sa présence, même quand celle-ci était cachée à l'état frais par les granulations, enclaves et inclusions du protoplasme, les résidus alimentaires, etc. Il est donc assez probable que l'élément nucléaire est toujours pré- sent chez chacune des formes décrites. De plus, il y a aussi presque toujours une vacuole et j'en ai même signalé quelques- unes de contractiles. Les cils de certaines zoospores sont épais et puissants : ce sont de véritables flagella ; leur continuité avec le protoplasme cellulaire est évidente. Dujardin, Haeckel, Zaccharias et d'autres encore admettent une étroite parenté entre les pseudopodes et les cils. Dans ces derniers temps, Kùnstler, professeur à la Faculté des sciences de Bordeaux, abonde dans ce sens et il voit même, " en apparence du moins, „ diverses gradations entre les cils vibratils, les pseudopodes et les prolongements artificiels morbides qu'il propose de nommer Nosopseudopodes. J'ai acquis à mon tour la conviction intime de l'analogie anatomique des pseudopodes et cils, et je considère ceux-ci comme des j^seiido- podes transformés, à imsition constante, à forme peu variable et à fonction déterminée. Plusieurs considérations plaident en faveur de cette manière de voir : a) En parcourant les diverses formes que revêtent les pseu- dopodes dans la série des Protozoaires, on constate qu'il existe des transitions à tous les degrés, depuis les plus puissants jus- qu'aux plus ténus. Ceux des genres Actinosphaerium, Actino- pJirys, Tlicdassicola, Miliola, Vampyrella, etc., etc., sont d'une MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 91 grande finesse et leurs dimensions sont surpassées par les flagels, les soies rigides, les pieds en crochets des grands Infu- soires et par les cils de certaines zoospores : comme chez eux, les mouvements semblent dépendi-e de la volonté. Leur flexibilité est certes aussi grande que celle des cils et la constance de leur emplacement et de leur nombre ne diffère guère de celle des cils, surtout pour certaines formes. Certains pseudopodes forment une sorte de houppe et par leur ténuité en imposent à première vue pour un groupement de cils. b) Comme les pseudopodes de toutes les formes rhizopodaires, les cils peuvent souvent rentrer dans le protoplasme pour réap- paraître aux mêmes endroits, égaux, moindres ou plus grands. c) Il sont toujours constitués d'un protoplasme hyalin, ce qui est le cas pour tous les pseudopodes, sauf pour les lobopodes qui constituent le dernier terme dans la succession des formes pseu- dopodiques. Encore, même chez ceux-ci la partie hyaline semble la base même de l'organe, le plasma granuleux n'y arrivant que par entraînement. d) Toujours] comme pour les pseudopodes typiques, on ne distingue aucune structure particulière, aucune membrane. e) Deux fins pseudopodes d'organismes de même espèce peuvent se fusionner en se rencontrant. Cela n'est point le cas pour deux cils. Mais quand on poursuit la division en deux d'une zoospore munie de deux cils implantés respectivement aux extrémités du grand axe, on constate que quand l'étrangle- ment est presque achevé, le pont, unissant encore les deux moitiés, se rompt à un certain moment à peu près vers son milieu. Les deux lambeaux constituent dans la règle un cil pour chacune des deux nouvelles zoospores ; ceux implantés aux extrémités du grand axe se sont maintenus. Avant la rupture du pont unissant, on peut dire qu'il constituait une fusion de deux cils. Si, par la suite, au simple contact, il ne se produit plus de fusion nouvelle, c'est que leurs mouvements sont devenus d'une rapidité telle qu'on peut à elle seule imputer cette impossibilité. Le cil d'un protozoaire semble donc être un prolongement 92 e. DE BRUYNE. protoplasmique que Vorganlsme meut plus facilement qu'uji pseudo2)ode à cause de ses dimensions et d'une disposition ]}lus favoraUe. La nutrition d'un organisme amiboïde a toujours été consi- dérée comme devant se faire exclusivement par engiobement de substances solides et leur digestion à l'intérieur du protoplasme. Le cas d' Ectoh iella Flateaui constitue une exception à cette règle : les aliments ne pénètrent pas à l'intérieur du protoplasme ; seules les matières rendues assimilables (par digestion à la surface) y pénètrent ; les détritus restent abandonnés sur place à l'endroit même de leur formation renfermés dans une vésicule. Il semblerait qu'il faut rapprocher ce cas de ce que présentent Pseudospora edax (p. 57) et une Vampyrella décrite par "Walir- licli (^). En effet, chez ces deux protozoaires, les substances alimentaires sont enfermées dans une sorte de vésicule située dans le jn'otojjlasiue, il est vrai, mais limitée par une paroi véritable au travers de laquelle doit donc se faire l'assimilation par le protoplasme. AVahrlich admet même pour le cas de sa Vam- pyrelle la présence de ferments peptonisants. Il y aurait donc là aussi une digestion à la surface d'une couche de protoplasme et notamment celle qui entoure immédiatement la vésicule. . Les protozoaires parasitant sur les algues ont presque tous une prédilection pour un ou des hôtes. On peut cependant réussir à les faire changer en prenant quelques précautions particulières. S'ils se trouvent à l'état de zoospore ou d'amibe, il faut éviter la dessiccation, le changement trop brusque de température, choisir une algue qui, dans la série, ne soit pas trop éloignée de celles librement choisies, etc. Les liquides des cultures ne peuvent non plus avoir une composition trop différente : ainsi le transport trop brusque de l'eau de mer dans l'eau douce ou vice versa peut amener la mort du parasite. Les précautions à prendre sont beaucoup moins nombreuses et sur- (') Loco citato. MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 93 tout moins délicates quand on a affaire à des stades de repos : les cystes de conservation peuvent résister à des changements de conditions qui infailliblement tueraient les autres stades : le froid, la chaleur, la dessiccation, etc., ont beaucoup moins de prise sur eux et ils pourront s'y maintenir jusqu'à ce que cer- taines conditions aient réapparu. Dans mes transplantations je réussissais presque toujours avec des cystes, moins souvent avec d'autres stades. Le parasite en présence de l'hôte nouveau et ne trouvant plus celui auquel il puisait auparavant sa nourriture, l'attaque à son tour et y évolue normalement. Si néanmoins j'introduis de nouveau des algues sur lesquelles je l'ai cueilli, je le vois s'y porter, lui ou ses générations, et abandonner complètement l'hôte que je lui avais imposé d'abord. Ce cas est pour ainsi dire général et l'expérience réussit régulièrement quand on y procède minu- tieusement (^). (') Cette facilité de transiilantation, surtout quand il s'agit de kystes, me semble pésenter un grand danger de contagion. Un marais, par exemple, dont les algues sont infectées par des protozoaires parasites pourra, lors d'une inondation, répandre aux environs avec les eaux, des cystes qui, s'adaptant à leur vie nouvelle, évolueront sur des algues d'une autre forme. Le long des côtes et môme à l'intérieur des terres, on a l'habitude d'amender les champs au moyen d'algues cueillies en grande quan- tité. En même temps que les algues on transporte leurs parasites enkystés y adhé- rant ou y renfermés. Geux-ci. après une pluie abondante, par exemple, peuvent trouver les conditions nécessaires à leur éclosion d'autant plus que les premières eaux se chargent des sels renfermés dans les résidus d'algues et constituent ainsi une sorte de milieu de transition. Les plantes cultivées pourront leur fournir, faute de mieux, un terrain favorable, peut-être excellent pour leur évolution et pourront ainsi dans certaines conditions se produire de ces fléaux tels que les ravages des champs de choux par Plasmodiophora Brassicœ. Il ne serait pas sans exemple dans la nature que ce parasite s'adaptanl à ces conditions nouvelles, ne subisse des changements morphologiques et biologiques tels que son origine première en soil cachée. 94 e. DE BRUYNE. APPENDICE. Je conserve en portefeuille un grand nombre de notes et de figures concernant le parasitisme d'organismes inférieurs sur les algues marines. Toutefois les lacunes qu'elles présentent sont trop nombreuses et les données que j'ai pu recueillir encore trop incohérentes pour me permettre de les publier sous la forme d'un travail achevé. J'en ferai suivre ici im comt aperçu à l'effet de compléter le compte rendu de mes recherches à la Station zoologique de Naples. I. — MONADINES. A. — Monadines eoosporées. 1. Les racines de Caulerpa prolifera sont parfois infestées d'un parasite qui y provoque des ravages considérables. Il en dévore le contenu féculent dans ses stades de zoospore et ^ amibe. La zoospore de grande taille est allongée, extrêmement amiboïde, et munie de deux cils implantés dans une sorte d'en- foncement. Cette dernière disposition rappelle un infusoire décrit par Stein {}) sous le nom de Bodo globosus, par Dujardin (^) sous celui à' Amphimonas et par Saville Kent (^) sous la déno- mination de Diplômastix. Il en diffère essentiellement par ses stades évolutifs suivants. Par retrait des cils, la zoospore devient une amibe qui se meut très activement sur place et continue à dévorer les matières féculentes. J'ai eu l'occasion d'observer et de dessiner des fu- sions de 2, 3 amibes {de véritables plasmodies), ce qui constitue un chaînon très important dans l'évolution de l'organisme. Après s'être fusionnée à d'autres ou non, l'amibe s'enkyste. Je n'ai pas pu assister à l'éclosion du cyste et il me manque par (*) Stein. Dcr OiganUmus cler Infusionstliicie, lU AbihcihuKj, Tufel 11 et IH. (-) DuJARIilN l'ixtoue tinUirelle des infnsoires. ('') Saville Kent. A Mctnnnl of the infusoria. MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 95 conséquent des données exactes pour classer le parasite dont s'agit, surtout parce qu'il présente certains points de commun avec le suivant. A l'effet d'insister sur les différences qu'il présente d'avec l'infusoire dont je parlais tantôt, je lui donne le nom générique de Pseudamphimonas. 2. Derhesia marina renferme souvent en très grand nombre dans ses filaments un organisme cilié, très amiboïde, à proto- plasma granuleux qui englobe les grains de chlorophylle et les digère dans son intérieur. Le cil unique implanté dans un enfoncement, constitue pour ainsi dire le seul caractère diffé- rentiel d'avec le précédent avec lequel on le confondrait aisé- ment dans les autres stades. Est-ce une monadine différente, il faudra la dénommer P. unicïliatus par opposition à P. hiciliatus qui deviendrait l'appellation du premier. Ici non plus je n'ai pu tirer au clair l'éclosion du cyste que j'ai vu se former sous mes yeux, mais qui s'est obstiné à ne pas évoluer davantage malgré les conditions favorables dans lesquelles je tenais mes cultures. 3. Un parasite presque constant dans mes cultures de Diatomées, mais que j'ai rencontré maintes fois sur d'autres algues, présente un stade particulier dans son évolution dont je connais la zoospore, V amibe et deux formes de cystes zoospori- pares. La zoospore est fusiforme, uniciliéC; nettement nucléée et amiboïde. L'amibe peut atteindre des dimensions très variables, parfois assez grandes. Lors de sa maturité, elle peut ou non s'entourer d'une membrane (cyste) et donner par fractionnement im nombre variable de zoospores qui recom- mencent le cyste évolutif. D'autres fois, après avoir sécrété une membrane, elle refoule dans son intérieur une grosse masse sphérique (détritus ?) et le protoplasme qui la recouvre, ainsi qu'une calotte, se fractionne. Je n'ai jamais pu assister à la sortie des masses (zoospores?) provenant de ce fractionnement; serait-ce un cyste de conservation ? 4. J'ai rencontré une forme de protozoaire chez Cladopiiora gracilis, Cauleriia xirolifera et Alaria (sp ?). Le stade zoospore surtout était fréquent : le corps avait la forme de fuseau avec un cil implanté à chacune des deux pointes ; parfois l'un des deux 96 e. DE BRUYNE. disparaissait et le corps s' allongeant, devenait serpentiforme et d'une amiboïdité très prononcée. Par retrait des cils et l'avan- cement de pseudopodes hyalin, l'organisme passe au stade amibe : dans ces deux stades, il se nourrit du contenu de l'algue hospitalière et les résidus alimentaires s'accumulent autour de lui. J'ignore la destinée de l'amibe. B. — Monadines azoosporées. 1. Dans mes cultures de Diatomées, se trouvait bien sou- vent une Vampyrelle typique qui, dans ses phases évolutives, présente bien des détails caractéristiques. A cause de sa forme je l'appellerais volontiers V. radiosa. Elle s'attaque de préfé- rence aux Diatomées et plonge dans leur intérieur un pseudo- pode fin par lequel elle absorbe le contenu. Elle se colore en rose tendre pendant la digestion des chromatophores de la Diatomée. Au cours de ses pérégrinations, elle change souvent sa forme sphérique caractéristique pour devenir pyri ou fusiforme. Souvent les pseudopodes fins qui hérissent sa surface disparaissent tous et en un point il en apparaît un ou deux épais qui se ramifient. J'ai observé la fusion de deux individus, formant ainsi un plasmode. Vampyrélla radiosa s'enkyste au dedans d'une double paroi et après quelques mouvements et déformations amiboïdes, elle revient au repos. Observant plusieurs fois un exemplaire dans son évolution depuis le matin jusqu'au soir sans discontinuer, il ne m'a jamais été donné de pouvoir poursuivre le développement plus loin : le lendemain matin je ne retrouvais plus avec certitude l'individu de la veille : j'observais dans la goutte pendante où il était bien difficile d'isoler complètement des individus à cause de leur petite taille. 2. En dehors des parasites monadiniens et chytridiés précé- demment décrits, j'ai rencontré dans les rameaux de Bryopsis un beau protozoaire à caractères très nets. Il s'agit d'une amibe n'ayant, en apparence du moins, absolument rien de commmi avec toutes celles que j'ai eu l'occasion d'étudier. Elle se MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 97 trouvait à foison surtout dans un rameau tenninal où j'ai pu l'étudier pendant trois jours. Grossièrement granuleux, son protoplasme sombre tranchait sur le contenu de l'algue et envoyait dans toutes les directions des pseudopodes tantôt fins, tantôt plus obtus, toujours hyalins ; ceux-ci englobaient les grains de chlorophjdle et abandonnaient les résidus en provenant. Quoiqu'elles se heurtassent mutuellement, je n'ai jamais constaté de fusion. Après quelque temps elles avaient dévoré presque tout le contenu de la cellule et remplissaient sa lumière de détritus granuleux, tandis que leur corps s'était considéra- blement accru. Finalement une membrane nette apparaît : phase de repos précédant probablement la multiplication. Je n'ai pas eu l'occasion de la voir. II. — Chytmdiacées. Cohn (^) a publié ses observations sur l'évolution Chytridium entosphaeriiim et j'ai pu contrôler ses résultats qui me semblent en tous points exacts. J'ai cherché à plusieurs reprises à entreprendre des re- cherches analogues entre autres pour deux belles Chytridiacées; mais j'ai dû y renoncer à cause des insuccès de mes cultures. m. — Labyrinthulées. Cienkowsky a créé le genre de ces organismes énigmatiques que personne ne connaissait avant lui (-) ; je les ai rencontrés très souvent dans mes cultures de diatomées, et j'ai pu contrôler les belles recherches de ce grand naturaliste. A ma coimaissance, il n'a jamais signalé que ces organismes fussent parasitaires. J'ai, au contraire, rencontré de nombreuses valves siliciques de diatomées dont les chromatophores avaient complètement disparu, et qui se trouvaient remplies de fuseaux de Ldbyrin- (*) Ferd. Cohn. Beitr. z. Pliys. da- Pliycochr. u. Iloiid. A. f. M. A. B. III. (^) Ueber den Bau iind die Entwickelumj der Labijrinthuleen. A. f. M. A. B. III. 7 98 e. DE BRUYNE. tJiula macrocystis. En dehors de ce détail je n'ai rieri a ajouter aux résultats de Cienkuwsk}^ IV. — Infdsoires. Dans les racines de Caulerpa prolifera vit parfois un infu- soire liolotriche de forme ovoïde. Il se nourrit de granulations féculentes au milieu desquelles il se meut très rapidement. Son aspect extérieur le rapproche de Nassula ornata Ehr. mais je n'ai pas eu l'occasion de l'étudier suffisamment de même que pour un autre infusoire holotriche paramœcéforme rencontré en parasite dans des rameaux de Bryopsis piumosa . Il en dévore les grains de chlorophylle et rejette les détritus d'un jaune brunâtre. Je signale particulièrement cet Appendice à ceux qui dési- reraient s'occuper de la question du parasitisme des organismes inférieurs sur les algues, mais je me réserve de compléter mes recherches et d'y revenir dans un autre travail. MONADINES ET f'HYTRIDIACÉES. 99 EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE III. Figures 1-14. — Fseiidospora Benedeni. De Br. Fig. 1 et 2. Deux filaments d'algues renfermant le pai'asite à différents stades de développement : r, zoospore; a, amibe jeune; a', amibe adulte ; r, résidu alimentaire; s' c, zoocyste ; c. ?', cyste vide , V, vacuole. Fig. 3, 4, 5 et 9. Trois stades successifs d'un même zoocyste. En 4, les spores n'ont pas encore acquis leur flagellum ; en 5, les zoo- spores sont formées; quelques-unes d'entre elles ont un flagellum extraordinairement puissant; 9, figure la sortie des zoospores. L'aspect du résidu alimentaire varie parce qu'à la suite des déplacements que lui impriment les zoospores, il ne présente pas toujour:^ la même surface à l'œil de l'obser- vateur. Fig. 6. Autre grande amibe formant sa paroi cystique. Fig. 7v Cyste lenfermant quelques spores qui n'acquièrent pas de cil. Fig. 8. Cyste abandonné renfermant encore les détritus et 3 vacuoles. Fig. 10, 11 et 12. Trois sporocystes dont l'un a sécrété une 2e mem- brane depuis l'expulsion des détritus. Fig. 13 et 14. Deux jeunes amibes dessinées au cours de leurs dépla- cements. Figures 14' -22. Leptophrys Villosa. De Br. 'Fig. 14' et 15. Deux amibes dessinées pendant leur captation ; no 15 surtout présente une belle houppe de villosités pseudo- podiques, h. v. Lie protoplasme liyalin est nettement indiqué en p. h. Les deux amibes renferment chacune plusieui's Dia- tomées, les unes déjà en partie digérées, les autres non encore entamées; no 14' vient d'en expulser une. 100 e. DE BRUYNE. Fig. 16. Amibe 15 qui s'est arrondie; la vacuole o s'est maintenue et même agrandie, de même que les granulations paramyliques. La surface entière s'est hérissée de pseudopodes fins qui se terminent en boules; quelques-unes de celles-ci se sont déjà détachées, sp. Fig. 17. Même individu dessiné en partie seulement : le contenu s'as- sombrit; les grains de paramylum ne se distinguent plus et toutes les boules ne sont pas encore détachées. Fig. 18. Même individu dont le dessin ne rejDrésente que la forme des prolongements pseudopodiques après la rupture de toutes les boules. Fig. 20. Encore le même après l'action des réactifs colorants et fixateurs. Fig. 19. Des spherules sp restent dans le voisinage de la surface après leur rupture (autre exemplaire). Fig. 2J . Cyste formé récemment. Il renferme des enclaves de tonte nature : cristaux de sels minéraux, aliments totalement digé- rés, d'autres encore intacts, etc. Fig. 22. Auti'e cyste abandonné : il renferme encore une diatomée épuisée en partie. Figures 23-36. Pseudospora edax. De Br. Fl . 23. Cinq zoospores dessinées pendant leurs mouvements. Le noyau est partout net. Une figure indique surtout clairement que le cil est un prolongement protoplasmique. L'aspect extérieur de ces cinq zoospores est très différent : les unes sont contractées et les autres, au contraire, très étirées. Fig. 24 et 25. Deux filaments d'algues renfermant le parasite à plu- sieurs stades de développement : z, zoospore ; a, amibe ; zc, zoocyste; c.v, cyste abandonné; r, résidu alimentaire. Plusieurs zoocystes sont en voie de division : dans les uns, les spores n'ont pas encore acquis leurs cils, tandis qu'elles sont complètes dans d'autres. Dans un dessin de la fig. 24, la division en 4 est nette ; elle se fait en 2 dans un dessin de fig. 25. Cette figure-ci représente aussi en sp une sorte de sporocyste (?) en voie de formation. Fig. 26. Cyste vide de forme un peu particulière. MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 101 Figures 27 et 3S. Gymnococcus Bryopsides. De Br. Fig. 27. Fragment de rameau de Bryopsis piumosa contenant une jeune amibe, 4 cystes dont le protoplasme est encore indivis et un cyste en éclosion : une zoospore en est déjà sortie. Fig. 28. Id. renfermant 7 amibes de forme et de dimensions diffé- rentes ; le protoplasme hyalin est très net en certains endroits. PLANCHE IV. Figures 1-13. Ectohiella Plateaui. De Br. Fig. 1 et 1'. Deux zoospores dont l'une vient de s'arrêter contre une diatomée. Fig. 2-8. Différentes phases d'un même individu pendant la perfora- tion de la valve de la diatomée, sa nutrition et sa matu- ration. Les résidus alimentaires augmentent en quantité venant se grouper dans la vésicule v, la diatomée conservant la brèche que le parasite y a faite. Fig. 9 et 10. Deux autres parasites dessinés pour montrer leur struc- ture vacuolaire. Fig. 11. Un individu dessiné pendant sa pénétration dans la valve : son pseudopode est falciforme, non en T comme l'exemple des figures de la série 3, 4, 5. Fig. 12. Diatomée attaquée par deux parasites qui ont déjà atteint leur maturité. La vésicule à détritus est très nette. Fig. 13. Licmophora presque totalement vidée : il ne reste plus qu'ime petite masse d'endochrome e, l'autre a été dévoré par 3 individus dont les détritus sont accumulés dans les 3 vési- cules V. Figures 14-31 et 30-35. Gymnococcus Licmophorœ. De Br. Fig. 14. Licmophora renfermant le parasite à l'état de zoospores et d'amibe. La plus grande des deux amibes renferme une grande vacuole contractile. Les deux stades renferment des résidus alimentaires. Fig. 15. La grande amibe après contraction de sa vacuole. Fig. IG. Autre Licmophora renfermant 2 zoospores grandes surtout à cause des gi'os fragments alimentaires. La diatomée est presque vide et de même que plusieurs des autres figures. 102 e. DE BRUYNE. Fig. 14, 16, 30 et 31. La valve e.st endommagée. Fig. 19. Les deux zoo.spores de la fìgm-e 16 après l'expulsion des gros détritus. Fig. 18. Licmophora bourrée de parasites et de granulations excré- mentitielles, grosses et petites. Fig. 19. Gomphonema épuisée par 4 amibes gorgées d'endochrome ; l'une d'elles s'en est débarrassée complètement et a quitté la diatomée. Fig. 20 et 21. Deux amibes se préparant à l'encystement. Fig. 30. L'amibe a expulsé tous ses détritus et a quitté la diatomée. Fig. 31. Licmophora épuisée par 4 individus qui se sont arrondis; trois possèdent une grande vacuole. Fig. 32 à 35. Représentent les 4 mêmes amibes A, B, C et D après 24 heures : 32, A expulsant ses détritus; 33, D épurée; 34, C encore amiboïde ; 35, B devenu plus vacuolaire. (L'obser- vation fut interrompue par suite d'un accident de prépa- ration.) Figures 22-29. Gymnococcus GompJionemarum. De Br. Fig. 22. Gomphonema envahie par plusieurs parasites amiboïdes : quelques-uns renferment des granulations de matières nutri- tives, d'autres les ont déjà expulsées. Fig. 23. Autre G. dont tout le contenu a été dévoré par une plas- modie p (résultant de toutes les amibes y parasitant sauf une a). Fig. 24. Encore une autre G. à une plasmodie expulsant ses derniers détritus. Fig. 25. Zoocyste formé : son contenu se fractionne. Fig. 26 et 27. Les zoospores sortent successivement toutes jusqu'à la dernière. Ces 3 derniers dessins forment série. Fig. 28. Grande G. vue de côté, 1 plasmode, 2 amibes, 1 zoospore. Fig. id. où se sont formées 2 zoocystes un peu oblongues à cause de leur pression mutuelle et leur enserrement entre les valves. PLANCHE V. Figures l-lo. Olpidium Bryopsidis. De Br. Fig. 1. Terminaison de rameau de Br3^opsis piumosa bourrée de sporanges presque mûrs. Le contenu chlorophyllien est déjà en grande partie digéré. MONADINES ET CHYTRIDIACÉES. 103 Fig. 2 et 3. Formation successive du boyau de sortie, sur 3 des spo- ranges de tantôt : l'ébauche de l'un d'eux est dessinée en 2. Fig. 4 et 5. Deux sporanges isolés par dilacération de l'algue hospi- talière. Fig. 6. Ébauche d'un boyau sur un autre sporange également ainsi isolé. Fig. 7. Deux zoospores en voie de division en deux. Fig. 8 et 8'. Déformations amiboïdes de cellules non encore transfor- mées en sporanges. Fig. 9 et 10. Deux cystes de conservation (?). Fig. 11. Terminaison de rameau de Bryopsis renfermant -l sporanges qui laissent échapper leurs zoospores : l'un d'eux n'a pas prolongé son boyau jusqu'au dehors de la lumière de l'algue. Dans celle-ci s'accumulent aussi beaucoup de détritus. Sur un des cystes, notamment l'ovoïde, le boyau n'est pas implanté à l'extrémité du grand axe, comme chez les autres. Fig. 12. Sporange isolé par dilacération des parois de son hôte. Toute sa lumière et celle de son boyau sont remplies de zoospores en voie de formation. Fig. 13. Dans la lumière de l'algue fourmillent les zoospores sorties probablement d'un cyste à boyau qui n'a pas perforé la paroi. Fig. 14 et 15. Sporanges vides. Figures 16-20. Gymnococcus Cladophorae. De Br. Fig. 16. Cellule terminale de Cladophora gracilis en proie à une plasmodie p qui dévore son contenu. Une partie, en effet, de ses chromatophores est déjà réduite à l'état de résidus brunâtres r. Fig. 17. Cellule terminale attaquée par 2 amibes qui chacune de son côté ont entamé la chlorophylle. Fig. 18. Tout le protoplasme du parasite s'est divisé en un certain nombre de zoocystes zc, dont quelques-uns même zcv ont déjà laissé échapper leurs zoospores. Les résidus r sont devenus d'un noir foncé et accumulés sur le grand axe de la cellule. Fig. 10. Deux zoocystes dans une cellule terminale. L'un d'eux s'est ouve et ses zoospores z s'échappent. 10-4 e. DE BRUYNE. Fig. 20. Cellule terminale de Cladophore ne renfermant plus que les parois cystiques abandonnées zc.v. et les résidus alimen- taires r. Les figures 18 et 20 montrent combien la cellule avait augmenté ses dimensions par suite de ce parasitisme. Figures 21-27. Vampyrella incolor. De Br, Fig. 21. Fragment de Derbesia marina attaquée par 13 vampyrelles dont 3 seulement ne renferment ".s de détritus. Plusieurs possèdent 1 ou 2 vacuoles. Fig. 22. Une amibe isolée. Fig. 23. Une autre qui s'est entourée d'une membrane. Fig. 24. Amibe ayant poussé un pseudopode j^s à travers la paroi de l'algue. Fig. 25. LaVampyrelle s'est entourée d'une membrane mais elle reste encore fixée comme un pédoncule jj sur la paroi de sa victime. Fig. 26. Autre amibe avec pseudopode passant à travers la paroi cellulaire de l'algue. Fig. 27. Cyste vide : il y reste encore une vacuole et quelques bâton- nets hyalins probablement de nature féculente. Figures 28-31. Oîpidium lacerans. De Br. Fig. 28. Deux zoospores renfermant de la Chlorophylle encore intacte. Fig 29. Trois cellules voisines d'algue : l'une envahie par une zoo- spore, l'autre par une amibe, une 3e par 2 zoospores passant à l'état d'amibe. Fig. 30. Amibe isolée par dissociation de son hôte. Un protoplasme hyalin /*, un granuleux et une vacuole v, sont nettement distincts. Fig. 31. Une cellule d'algue renfermant 8 zoospores en voie de for- mation. Les parois cellulaires sont encore intactes. Fig. 32. Sept jeunes parasites évoluant à l'intérieur de la cellule hospitalière dont les parois sont complètement lacérées. La réplique de M. Guignard à ma note relative au dédoublement des anses chromatique^, Edouard VAN BENEDEN. Dans une note intitulée " Quelques remarques à propos d'un récent travail de MM. Edouard Van Beneden et Ad. Neyt sur l'Ascaris megalocephala „ (^), M. Guignard m'a gratuitement accusé d'avoir voulu m'approprier la découverte faite par Flemming et confirmée tout d'abord par Pfitzner et Retzius, du dédoublement longitudinal des anses chromatiques. Pour établir cette grave imputation, M. Guignard a invoqué notamment un texte tiré de l'un de mes écrits. J'ai cru devoir répondre à cette note (^). Pour mettre à néant les affirmations inconsidérées de mon contradicteur, il m'a suffi de reproduire quelques citations de mon Mémoire sur la fécondation. Il en ressort que , loin d'avoir eu la prétention que m'a prêtée M. Guignard, j'ai pleinement et itérative- ment reconnu les droits de priorité de Flemming, sans négliger toutefois de rendre justice à Pfitzner et à Retzius. Ces deux auteurs ont été les premiers à vérifier l'importante découverte du dédoublement longitudinal ; mais celle-ci n'en appartient pas moins tout entière et exclusivement en tant que découverte à r eminent cytologue de l'Université de Kiel : une vérification (') Bulletin de In Société Botanique de France. Tome XXXIV (2'' série, tome IX). (-) Archives de Bioloijie. Tome IX, 1889. 106 EDOUARD VAN BENEDEN. n'est jamais une découverte. J'ai cité en outre, dans ma réponse, l'extrait d'une lettre que Flemming m'adressait après la récep- tion de mon Mémoire ; il m'y exprime tous ses remerciements " pour la bienveillance et l'exactitude que j'ai apportées dans l'appréciation de ses travaux „. Comment donc M. Guignard a-t-il pu, pour établir son accusation, se fonder sur une citation. Me serais-je mis en contradiction avec moi-même au point d'avoir reconnu d'une part que la division longitudinale des anses chromatiques a été découverte par Flemming, puis, vérifiée par Pfitzner et Retzius, et de m' être attribué d'autre part le mérite de cette même découverte. Vérification faite de la citation que M. Guignard a reproduite entre guillemets, il s'est trouvé que le texte qui m'est attribué a été tronqué et modifié par mon savant contradicteur; par suite de cette altération, le sens des phrases citées a été totalement transformé. Il m'a suffi de mettre en regard de la citation faite par M. Guignard, le texte original pour mettre en évidence le procédé peu recommandable auquel l'on a cru devoir recourir : la découverte que je revendique dans la citation incomplètement et inexactement reproduite n'est pas le dédou- blement des anses primaires, mais bien le cheminement en sens opposés des anses jumelles résultant de ce dédoublement M. Guignard vient de publier, dans les Comptes rendus de la Société de Biologie (séance du 4 janvier 1890), une réplique à ma note. Je tiens à la reproduire ici afin de réunir, dans un même recueil, tous les éléments du débat. Voici donc cette réponse : A M. Van Beneden fils, au sujet de ses découvertes sur la division nucléaire, par M. Léon Guignard. M. Van Beneden fils vient de faire paraître dans ses Archives de Biologie (^), au sujet d'une note présentée par moi en 1887 à la Société botanique de France (^), sur une question (') Tome IX, 1880. (-) Quelques remiivqucit à propos iVuu récent irarail de MM. Ed. Van Heneden et Ad. Neijt sur VAscaris metjalocephala ; nov. 1887. LA RÉPLK^UE DE M. GUIGXARD A MA NOTE. 107 de priorité relative à la division nucléaire^ un article contenant une réponse quele Comité derèdaction de la Société n avait pas cru, en raison de la forme, devoir insérer dans so7i Bulletin. Dans cet article intitulé : Monsieur Guignard et la division longitudinale des anses chromatiques, le zoologiste belge tient à réfuter les accusations portées contre lui par un botaniste " qui, dit-il, à raison de ses travaux sur la division indirecte des cellules végétales, jouit jjrobablement en France d'une certaine renommée „. Je n'ai malheureusement pas, comme M. Edouard Van Beneden, l'avantage de porter le nom d'un savant fort connu, ni le mérite d'en avoir rehaussé la notoriété par des reven- dications incessantes et des p)olémiques dont le ton seul a déjà suf[i à le rendre aussi célèbre en France qu'à l'étranger. L'honorable zoologiste ne p>ourra pourtant qu*être flatté de me voir appeler encore l'attention sur ses propres travaiix et l'aider à éclairer le lecteur, auquel il est bien permis d'ignorer les détails de certains phénomènes de la division nucléaire. Je ne saurais, en tout cas, imiter 7ii le langage, ni les iwocédés de M. Van Beneden fils, ni m' attarder à montrer à un contra- dicteur qui, entre autres aménités, m^adresse le reproche de mauvaise foi, que je n'ai nullement manqué de courtoisie à son égard. Il oublie que je l'ai remercié par lettre de l'envoi de son travail de 1887 sur la fécondation. Je n'ai pas omis no7i plus de lui envoyer ma Note du Bulletin de la Société botanique, note dans laquelle je rétablissais l'exactitude des faits. Si, comme il s'en p>laint, il ne l'apas reçue, je ne puis que le regretter. Dans cette Note, je commençais par préciser le point en discussion dans les termes suivants : " On sait que les éléments chromatiques du noyau, après avoir pris la forme de bâtonnets ou de segments 2)lus ou moins incurvés, se rassemblent, à un moment donné, à Véquateur du fuseau nucléaire, pour former la " plaque ou étoile micléaire „. Puis, chacun de ces bâtonnets ou segments chromatiques se dédouble suivant sa longueur en deux moitiés égales qui s^ écartent l'une de Vautre et se rendent en sens opposé à chacun des pôles du fuseau 2>0Mr y constituer les deux nouveaux noyaux. „ 108 ÉDOUAKD VAN BENEDEN. Je mets à dessein en italique les mots qui se raiiportent au 'phénomène dont M. Van Beneden fils m'accuse de n'avoir rien dit : (^) je n'aurais, d'après lui, voulu parler que du dédouble- ment longitudinal, envisagé sans le cheminement aux pôles des moitiés qui en provienyient. Cest ce transport aux pôles qu'il prétend avoir découvert chez ^Ascaris, en même temps que Heuser dans les celhdes végétales. J'aurais confondu deux choses totalement différentes : d'une partie dédoublement longitudinal; d'autre part, le cheminement aux pôles des anses qui en résultent. Je n'aurais mdlement compris la raison d'être du dédoublement, dont M. Vari Beneden fils ne peut d'ailleurs me contester la découverte chez les fiantes ; j'aurais poussé la légèreté et l'injustice jusqu'à l'accuser d'un désir immodéré de s'apjiroprier les résultats de ses devanciers, et, par un procédé inqualifable, j'aurais altéré et tronqué son texte, etc Je ne crois puB devoir répondre en détail à de pareilles accusations. Toute la question est de savoir si, oui ou non, M. Van Beneden fils et M. Heuser ont été les premiers à faire connaître le cheminement, le transport aux pôles des segments secondaires. Il est de toute évidence que le dédoublement longitudinal des segments primaires et le transport des segments secondaires, en sens inverses, aux deux pôles du fuseau, sont si étroitement liés l'un à l'autre dans la marche normale de la division que, sans le second, le premier n\iurait pas déraison d'être. En effet, le dédoublement lo^igitudinal ayant pour but la répartition égale des éléments chromatiques du noyau primaire entre les deux noyaux secondaires, implique forcément le cheminement vers les deux pôles, en sens opposés, de chacune des moitiés d'un (*) Pardon : J"ai dit que, dans son mémoire de 1884, Monsieur Guignard n'a constaté que le dédoublement, qu'il n'a fait aucune observation relative au chemine- ment en sens opposé; tandis que, dans sa note à la Société Botanique de trance, confondant dédoublement et cheminement en un seul et même phénomène, il reven- dique la découverte du cheminement en sens opposés sans l'avoir constaté. EDOUARD Van Bekeden. LA RÉPLIQUE DE M. GUIGNARD A MA NOTE. 109 sefjment primaire. Sans cela, à quoi servirait ce dédoubleinent et quel serait, en outre, la raison d'etre de la plaque nucléaire si les deux moitiés d'un même segment, au lieu de cheminer en sens opposés vers les]iôles, devaient, par exemple, se rendre l'une et l'autre au même pôle et entrer dans la coìistitution d'un même noyau secondaire ? A moins de discuter uniquement sur des mots, parler de dédoublement, c'est parler du fait essentiel avec ses conséquences forcées. Si, dans les cellules animales surtout, le dédoublement est souvent visible assez longtemps avant la séparation des moitiés de segments auxquelles il donne naissance, dans les cellules végétales le cheminement a souvent lieu en même temps que le dédoublement, et, au stade de la plaque nucléaire, les deux moitiés d'un même segment sont déjà séparées et se dirigent vers les pôles, à l'extrémité qui regarde le centre de la plaque, tandis que, à l'autre extrémité du segment, le dédoublement est à peine apparent. Le passage de ma Note, reproduit en italique, montre bien, d'ailleurs, que je n' entendais pas séparer les deux choses. (^) Mais ce 7i' est pas ainsi que M. Van Beneden fils comprend les faits, et, qui pdus est, personne avant lui n'a ni démontré, ni même soupçonné la raison d'être du dédoublement longitu- dhicd. Qu'on en juge plutôt par le passage siiivant de sa réponse : " Quant à M. Guignard, il n'a pas même soupçonné qu'il importait de rechercher ce que deviennent les anses jumelles; et de fait, ses obser- vations manquent totalement de laprécision et de la continuité nécessaires pour Vétude du problème si fondamental de la destinée des anses secon- daires.... Il a Vil des éléments chromatiques en voie de division longitudi- nale dans des cellules végétales, confirmant en cela les données de Flemming, de Pfitzner et de Retzius dans les cellules animales. Mais il n'a pas cherché à résoudre la question de savoir ce que deviennent les anses jumelles. C'est cette question que j'ai résolue concurremment avec Heuscr ; c'est cette découverte que j'ai revendiquée et dont je continue à réclamer la priorité. „ (') C'est précisément ce que je reproche à Monsieur Guignard. Il fallait séparer les deux choses : avant d'adlrmer le cheminement en sens opposés il importait de rechercher par l'observation si réellement il se produit. Edouard Van Beneden. 110 EDOUARD VAN BENEDEN. Même affirmation dans les lignes qui suivent : " SI Pfitzner et Refzhis ont confirmé l'importante découverte de Flemming, si M. Guignnrd a constaté le même dédoublement dans les cellules végétales aune époque où Strasburger niait encore son existence, ni Flemming, ni Pfitzner, ni Eetziiis. ni M. Guignard, n'ont réussi à établir que les anses secondaires, résultant du dédoublement d'une anse primaire, se rendent l'une à l'un des pôles, l'autre à l'autre pole de la figure dicentrique. „ Telle est l'idée que M. Van Beneden fils a de la perspicacité de ses devanciers. En opposant à mon tour, à une négation aussi catégorique, un démenti formel, je me demande en quels termes il faut s'exprimer pour être compris, si les passages suivants de mes jniblicatioiis n'indiquent pas clairement ce cheminement des anses jumelles, que M. Van Beneden fils veut absolument ■: avoir découvert. Tout d' abord, dans ma Note pjréliminaire à l'Académie des sciences du 23 septembre 1883, on pteut lire Vindication ■ suivante : " Chaque m,oitié des segments, devant concourir à la formation des deux noyaux-filles, tourne l'une de ses extrémités plus ou moins recourbée, Oil l'angle formé par ses deux branches si la cotirbure se fait au milieu, . dans la direction des pôles qui constituent deux nouveaux centres d'attraction autour desquels les segments dédoublés affectent une dispo- sition rayonnante. „ Il me semble qu'il s'agit déjà, dans cette citation, du sort des anses jumelles. Mais admettons qu'elle ne soit pas suffisamment explicite. Dans mon mémoire détaillé, paru le l^r février 1884 {^),par conséquent avant celui de M. Van Beneden fils (^), je décris, à la page 26, le dédoublement longitudinal des segments primaires (') Recherches sur la strncliire et la diuision du noyau cellulaire. (Ann. des se. "nat. Bot., 6e série, t. XVII, 1884, cahier n" I.) (') « Le premier exemplaire de mon mémoire, dit l'auteur, fut remis à Dubois- Raymond, lors de son passage à Liège, le 4 avril 1884. Le travail de Hauser parut dans le courant de mars -1881. » LA RÉPLIQUE DE M. GUIGNARD A MA NOTE. 111 dans le noyau du sac emhryonnaire du Lilium, et je dis formel- lement qu'ils se séparent " en deux moitiés destinées chacune à l'un des noyaux-filles „. Oui ou non, s' agit-il ici du sort des anses jumelles? Si, dans d'autres passages, je n'ai pas constamment répéié que les deux moitiés d'un même segment se dirigent vers les pôles opposés, le sens n'en est pas pihis douteux, je piense, que dans cette phrase de la j^cige 11, concernant la division des cellules-mères du pollen : " Les deux moitiés s'isolent complètement. Dès lors, le nombre de bâtonnets est doublé : au lieti de douze, on en compte vingt-quatre. Chacune des deux moitiés entrera dans la formation d'un des noyaux- filles. „ U importe peu, d'ailleurs, au point de vue de la destinée et du transport des segments dédoublés, que, dans le cas particidier des cellules-mères du pollen, les phénomènes antérieurs au dédoublement n'aient pas été, jusqu'en 1884, exactement inter- prétés. A ces citations, je pourrais en ajouter d'autres p)our montrer que la généralité du phéìioìiiène ne m'avait mdlement échappé. Quant à son importance, je l'ai suffisamment fait ressortir dans mes conclusions générales, xmge 29 : ." Il est évident, disais-je alors, que ce dédoublement constitue un phénomène très important dans la division du noyau. „ Or, comment aurais-je pu m'exprimefr ainsi, si je n'avais eu la preuve qu'il servait à répartir, d'une façon égale, la substance des segments primaires entre les deux nouveaux noyaux, en fournissant à l'un et l'autre une moitié de ces segments '^ (}) C'est pourquoi, dans une Note rectificative qui a si fort exaspéré M.VanBeneden fils, après avoir nettement précisé la question dans les termes qui ont été reproduits plus haut, j'ai pu simplement faire mention du dédoublement longitudÌ7ial, jìarce f) Est-ce que par tiasard Flemming qui n'a rien affirmé, en ce qui concerne le sort (les anses jumelles, n'aurait pas considéré le dédoublement comme un fait important? Ed. Van Beneden. 112 EDOUARD VAN BENEDEN. que c'est, en somme, le fait important, nié jusqu'en 1884 par Strashurger etdoiit Vidéeynême du cheminement est inséparahle. D'ailleurs, en 1884, dans le mémoire oit il rendait compte des récentes découvertes sur la division nucléaire {^), Strashurger n'a ])as élevé la moindre objection contre mes résultats, ni fait observer que, si j'avais vu le dédoublement, je n'avais pas aperçu le cheminement. Et pourtant il exposait en même temps les recherches de Heuser. D'autre part, l'honorable zoologiste me reproche de l'avoir accusé de n'avoir yas cité ses devanciers, afin de pouvoir s'ajjproprier la découverte du dédoublement longitudinal. H oublie que, dans mon travail de 1885 {^), j'empruntais à son mémoire de 1884 sur TAscaris la citation suivante, qui fait suite aux 2)assages où il mentionne la découverte de ce 2)héno- mène par Flemming et d'autres : C'est, à mon avis, l'un des faits les plus importants de la karyo- kinèse. „ Cette citation ptrouve deux choses : d'abord, que je n'ignorais pas en 1885 qu'il eût piarle de ses devanciers et que je ne pouvais l'accuser en 1887 de vouloir s'approprier la découverte du dédoublement longitudinal ; ensuite, que le dédoublement longitudinal, parce qu'il V envisageait évidemment avec ses con- séquences et qu'il le considérait alors comme inséparable du che- minement, avait en 1884,p)our M. Van Beneden fis, un intérêt considérable. Mais aujourd'hui ce même dédoublement perd de son importance, c'est le cheminement qui est le fait capital, comme si ces deux choses piouvaient aller l'une sans l'autre ! L'intérêt des faits change pour les besoins de la cause, et V au- teur en arrive à dire que personne avant lui, ni Flemming, ni aucun autre, n'a soupçonné la raison d'être du dédoublement ! Si Flemming n'a pas réussi à fournir la preuve directe du transport aux^ìoles des segments secondaires, il a pourtant écrit ce qui suit (^) ; (*) Die Controverseti dcr indirecien Kerntheilung, 1884. (-) Nouvelles recherches sur le noyau cellulaire^ p. 313, 1883. (S) Zelhubstanz, Kern-und ZelUhcllung, p. 238, 1882 LA RÉPLIQUE DE M. GUIGNARD A MA NOTE. 113 " On i^eut donc penser que, des deux anses jumelles de chaque segment^ l'une est destinée à l'un des noyaux- filles et l'autre à l'autre noyau. „ En x>résence de cette opinion et des schémas que ce savant a im donner avec raison du phénomène dans une des planches de son mémoire, je n'ai jamais songé un seul instant à diminuer le mérite de ses observations, au point de dire, comme M. Van Beneden fils, que personne n'avait soupçonné la raison d'être du dédoublement {^). C est pourquoi j' ai pu faire remarquer en toute justice, je crois, qu'on eût aimé à retrouver dans cette discussion les no7ns de Flemming et d'autres qui avaient pré- paré les voies aux découvertes idtérieures. En résumé, il résulte des textes et des dates que M. Van BeJieden fils n' a ]}as plus de droit de prétendre à la découverte du cheminement qu'à celle du dédoublement ; je pense avoir montré avant lui leur existence générale chez les végétaux, cdors que Strasburger ne l'admettait pas encore x^our les cellules végétales et qu'il croyait pouvoir rejeter en même temps les conclusions de Flemming pour les cellules animales. M. Van Beneden fils a découvert en 1884 ce que j' avais fait connaître dès 1883. Il me semble inutile d'insister davantage : je crois n'avoir méconnu, dans cette controverse, ni la vérité, ni la justice, et je pourrais peut-être retourner au zoologiste de Liège son reproche de légèreté. Il me sera peruiis de constater : 1'^ Que M. Guignard abandonne complètement l'accusation qu'il avait cru pouvoir formuler en m'attribuant l'intention de revendiquer pour mon compte personnel une découverte qui appartient à Flemming ; 2» Qu'il ne conteste pas l'altération de texte que je lui ai reprochée. Monsieur Guignard porte la discussion sur un autre terrain (') M. Van Beneden fils involine, à l'appui de ses revendications, un passage d'une ronff^rence de Waldeyer où la découverte du cheminement lui est attribuée ainsi qu'à Heuser. Ce passage ne prouve qu'une chose : c'est que Waldeyer, qui avait d'abord dit que Rabl en était l'auteur, n'était pas suffisamment renseigné 8 114 EDOUARD VAN BENEDEN. sans renoncer toutefois aux procédés de polémique dont il a fait usage dans sa première note. Il revendique pour son compte personnel, nous allons voir par quels moyens, non seulement la découverte du dédouble- ment longitudinal des chromosomes primaires dans les cellules végétales, mais aussi celle du cheminement en sens opposés des anses jumelles résultant de ce dédoublement ; il aurait été le premier à affirmer la répartition égale entre noyaux secondaires de la chromatine d'un noyau primaire. A ses yeux, le dédoublement longitudinal et le cheminement en sens opposés des produits de la divison se confondent en un seul et même phénomène, en ce sens que l'un est la conséquence nécessaire de l'autre; la découverte du dédoublement implique donc forcé- ment celle de la répartition égale entre noyaux dérivés. Avant d'entrer dans la discussion relative à la question de priorité, je dois exprimer le profond regret que j'éprouve de voir M. Guignard persister dans ce déplorable système qui consiste à prêter à ceux que l'on combat des idées qu'ils n'ont jamais eues, à leur attribuer des affirmations qu'ils n'ont pas for- mulées. 1° Il me fait dire qu'avant moi personne, ni Flemming, ni aucun autre auteur, n'a soupçonné la raison d'être du dédou- blement longitudinal. Voici ce qu'il écrit : " Mais ce n'est pas ainsi que M. Van Beneden fils com- " prend les faits et, qui plus est, personne avant lui n'a ni " démontré, ni même soupçonné la raison d'être du dédouble- " ment longitudinal. „ Et plus loin : " L'intérêt des faits change pour les besoins de la cause et " l'auteur (M. Van Beneden fils) en arrive à dire que personne " avant lui, ni Flemming, ni aucun autre n'a soupçonné la " raison d'être du dédoublement! „ Je suppose que M. Guignard tiendra à honneur de justifier cette affirmation en citant le texte sur lequel il se fonde pour LA RÉPLIQUE DE M. GUIGNARD A MA NOTE. 115 m'attribuer cette pensée. En attendant, je le prie de vouloir bien lire la page 544 de mon mémoire de 1884; il y trouvera au 3e alinéa : " La raison du dédoublement des cordons chromatiques, lors " de la dimsion des noyaux, a été soupçonnée par Flemming ; " il s'est demandé si chaque anse primaire ne foui-nit pas une " anse secondaire à chacun des noyaux-filles. Quelque probable " que lui paraissait cette hypothèse, qui était de nature à faire " comprendre le pourquoi du dédoublement, il ne pouvait Tap- " puyer sur aucun fait d'observation; le nombre considérable " des anses que l'on observe dans les noyaux de la salamandre " ne permet pas de suivre chacune des anses et de voir ce " qu'elle devient. ,, Voilà comment j'aurais affirmé que personne avant moi, ni Flemming, ni aucun autre auteur, n'a soupçonné la raison du dédoublement. Je n'ai pas écrit davantage que M. Guignard n'aurait pas soupçonné la raison du dédoublement, mais bien ceci : " Flemming, grâce à l'esprit de critique et au talent d'ana- " lyse qui le distinguent, a parfaitement compris que la question " de savoir ce qu'il advient des anses secondaires est entière- " ment distincte de celle du dédoublement; il reconnaît avec " franchise et loyauté que ses observations ne lui permettent " pas de la résoudre. Quant à M. Ouignard, il n'a pas même " soupçonné qu'il importait de rechercher ce que deviennent " les anses jumelles. „ Ce qui veut dire, si je ne me trompe, que Flemming a parfai- tement distingué entre l'hypothèse et le fait, entre la possibilité et la réalité : il n'a rien affirmé quant à la destinée des anses jumelles, parce que ses observations ne l'autorisaient pas à rien affirmer à cet égard. Mais M. Guignard, lui, n'a pas l'air de se douter que le fait du dédoublement n'entraîne pas nécessaire- ment le cheminement en sens opposés et que dès lors avant d'affirmer il importe d'observer. A-t-il constaté objectivement le fait qu'il affirme? C'est là un point que j'examinerai plus loin. J'ai voulu montrer seulement lie EDOUARD VAN BENEDEN. ici que pour m'attribuer l'idée que personne avant moi n'aurait soupçonné la raison d'être du dédoublement, il faut que M. Guignard n'ait pas lu mes travaux ou qu'il les ait parcourus trop superficiellement, pour avoir pu se rendre compte de ce qu'ils renferment. 2" Monsieur Guignard me fait dire encore que le fait essentiel de la karyokinèse ne serait plus aujourd'hui le dédoublement, mais bien le cheminement en sens opposés des anses jumeUes : " .... Mais aujourd'hui le même dédoublement perd de son " importance, c'est le cheminement qui est le fait capital, " comme si les deux choses pouvaient aller l'une sans l'autre. „ Je prie mon savant contradicteur de vouloir bien signaler une phrase quelconque de l'un quelconque de mes écrits d'où l'on pourrait conclure que le dédoublement ne serait pas, à mes yeux, le fait capital de la mitose. La pensée qui m'est attribuée est un véritable non sens. J'en viens à la question de priorité. Pour établir qu'il aurait été le premier à faire connaître le cheminement en sens opposés des anses jumelles et la répar- tition égale de la chromatine d'un noyau en division entre les deux noyaux secondaires, M. Guignard s'appuie dans sa réplique : 1» sur sa note préliminaire à l'Académie des Sciences du 23 septembre 1883 ; 2» sur le mémoire détaillé inséré dans les Annales des Sciences naturelles botaniques, 6^ série, t. XVIIe, 1er février 1884, cahier n» 1. Je me permettrai tout d'abord de poser une question. A quelle date est sorti des presses, c'est-à-dire quand a été distribué le cahier n» 1, tome XVII, 1881, des Annales des Sciences naturelles botaniques? Est-ce le l^r février, comme l'indique M. Guignard dans sa réplique, est-ce en janvier, comme il le certifie dans une autre de ses publications, ou est- ce postérieurement au 1er février, comme il résulte des rensei- gnements que j'ai recueillis. Le libraire Thomas, 6, place de la Sorbonne, à Paris, qui fournit les Annales à la bibliothèque de LA RÉPLIQUE DE M. GUIGNARD A MA NOTE. 117 notre Université, écrit, à la date du 24 janvier 1890, à M. Grandjean, bibliothécaire à Liège : " Les fascicules des Annales des Sciences naturelles paraissent généralement un ou deux mois après la date indiquée sur la couverture. J'en ai fait très souvent la remarque depuis vingt ans que ce recueil me passe par les mains et je suis allé moi-même m'en assurer chez l'éditeur. „ M. Guignard voudra bien, je l'espère, nous renseigner sur le point de savoir si le fascicule qui contient son mémoire in- extenso a réellement paru à la date du ler février. Je suis tout prêt d'ailleurs à accorder qu'il en est ainsi et que, par conséquent, non seulement la communication prélimi- naire insérée aux Comptes Rendus, mais aussi le travail détaillé, ont été publiés l'un et l'autre avant le mémoire de Heuser et avant mes recherches sur la fécondation. La question se pose donc comme suit : Qu'est-ce que Monsieur Guignard a fait comiaître en matière de cheminement des anses jumelles ? Pour se rendre compte de ce que l'auteur a observé, il con- vient de recourir à son mémoire détaillé. Sa note à l'Institut ne formule que des conclusions et il est difficile, à raison de la concision inévitable d'une communication préliminaire, de juger de la portée de ces conclusions, voire même du sens que l'auteur a voulu y attacher. Les observations de M. Guignard se rapportent à deux caté- gories d'objets : il a étudié 1» la division des cellules-mères polli- niques dans une série de plantes, monocotylédones et àicotylé- donés{Lilmmma)iagon, Allium ursinum,Alstrœmer in 2)elegrhia, Listera ovata, Agapanthus umhellatus, Tricyrtis hirta, Fmi- Tiia, TJrojietalum, Hemerocallis, Camiianida, etc.) ; 2° la multipli- cation nucléaire dans le sac embryonnaire, préalablement et postérieurement à la fécondation et dans l'albumen en voie de formation, chez lÂlium martagon, Lilimn candidimi, et autres espèces voisines, chez Tradescantia, Pedicidaris, Viola Koppii, Clematis maritima, Alstrœmeria 2>elegrina et A. versicolor. Les phénomènes essentiels de la mitose ne s'accompliraient pas de la même manière dans tous les cas. 118 EDOUARD VAN BENEDEN. Dans la mitose des cellules polliniques, la division longitudi- nale des chromosomes primaires ferait défaut; il se produirait au contraire deux segmentations transversales successives et, dans les objets étudiés par M. Guignard, tout se passerait conformément à la description que Strasburger a donnée de la division des cellules-mères du Pollen chez Fritillaria, etc. Chez Lilimn martagon, les segments résultant d'une première divi- sion transversale des cordons chromatiques deviennent peu à peu plus courts et plus épais. " Chacun d'eux se courbant vers " le milieu de sa longueur rapproche ses deux extrémités l'une '' de l'autre; il se fait peu à peu entre elles un accolement " longitudinal. „ A ces segments plies et formés de deux moitiés plus ou moins complètement accolées l'une à l'autre, M. Guignard donne le nom de hCdonnets. '' On observe bientôt " une division de chaque bâtonnet en ses deux moitiés consti- " tutives. Les branches qui s'étaient rapprochées et soudées se " séparent l'une de l'autre en offrant des dispositions variées, " dont la plus commune est représentée dans la fig. 1 1 ; une " autre est indiquée dans la figure 12, vue par le pôle, comme la " précédente. Les deux moitiés s'isolent ensuite complètement. " Dès lors, le nombre des bâtonnets est doublé : au lieu de " douze, on en compte vingt-quatre. Chacune des moitiés " entrera dans la formation d'un des noyaux-filles. „ Il résulte clairement de la description donnée par M. Gui- gnard et notamment des passages reproduits ci-dessus, qu'il ne se produirait pas ici, pas plus d'ailleurs que dans les cellules- filles polliniques, non seulement du Lilium martagon, mais de toutes les formes de monocotylédones et de dicotylédones étudiées par lui, de dédoublement longitudinal des chromosomes pri- maires, mais bien une seconde segmentation transversale. Il ne peut donc être question ici d'anses secondaires et jumelles. La phrase reproduite plus haut : " Dès lors le nombre des bâton- " nets est doublé : au lieu de douze on en compte vingt-quatre. " Chacune des moitiés entrera dans la formation des noyaux- " filles „, cette phrase que M. Guignard invoque dans sa i-éplique pour établir qu'il aurait affirmé le premier le cheminement LA RÉPLIQUE DE M. GUIGNARD A MA NOTE. 119 en sens inverses des anses jumelles, n'est pas même relative à la division longitudinale des chromosomes primaires. De deux choses l'une, ou M. Guignard confond cette seconde segmentation transversale avec le dédoublement longitudinal découvert par Flamming, ou il cherche, en vue d'établir ses prétendus droits de priorité, à faire croire que dans la phrase citée il a eu en vue les anses jumelles, alors qu'en réalité elle vise les éléments résultant d'une seconde segmentation trans- versale. M. Guignard donne, il est vrai, à cette seconde segmentation transversale, le nom de " dédoublement longitudinal „. En partant de la division des cellules-mères polliniques de V Allium ìirsinum L., qui s'accomplit essentiellement de la même manière que chez Lilinm martagon, il dit, en effet : " La division de la " plaque nucléaire se fait comme dans le Lilium : Les nouveaux •' éléments chromatiques provenant du dédoublement longi- " tudinal de ses huit bâtonnets prennent la forme d'U ou de Y " en se transportant aux pôles. „ Dès le moment où il appelle dédoublement longitudinal, ce qui n'est en fait qu'une seconde segmentation transversale et où, par conséquent, il ne peut plus être question ni d'anses secondaires ni de cheminement en sens opposés de ces anses, pour cette raison que ces anses n'exis- teraient point, je demande en quoi la seule phrase de la note du 23 septembre 1883, qui soit relative au dédoublement, pourrait établir que l'auteur aurait visé le cheminement en sens opposés des anses jumelles ! Voici cette phrase que M. Guignard invoque à l'appui de sa réclamation : " Chaque moitié des segments, devant concourir à la formation " des deux noyaux-filles, tourne l'une de ses extrémités plus ou " moins recourbée, ou l'angle formé par ses deux branches, si la " courbure se fait au milieu, dans la direction des pôles qui con- " stituent deux nouveaux centres d'attraction, autour desquels " les segments dédoublés affectent une disposition rayonnante. „ La division longitudinale des chromosomes primaires ferait défaut dans toute mitose de cellules polliniques. L'auteur nous 120 EDOUARD VAN BENEDEN. apprend, en effet, dans ses conclusions : " Dans les noyaux des " cellules-mères polliniques, les deux moitiés qui forment par " leur soudure longitudinale un bâtonnet se séparent l'une de " l'autre par dédoublement longitudinal et par une rupture (pii " se produit à l'endroit de la courbure du segment chromatique. " Il en résulte deux nouveaux bâtonnets, moitié moins épais, " qui doivent appartenir chacun à l'un des noj^aux-filles. Tel " est le cas du Liliura, de 1' Allium, de l'Alstraemeria, etc., qui " ressemblent complètement sous ce rapport au Fritillaria " étudié par Strasburger. „ Ainsi donc, il en convient lui-même, M. Guignard n'a fait que confirmer, en ce qui concerne la mitose des cellules-mères polliniques, les données de Strasburger, qui contestait, contre Flemming, l'existence du dédoublement longitudinal. Et après cela, il invoque des observations sur cet objet pour soutenir qu'il aurait été le premier à signaler l'existence d'un phénomène qui présuppose ce même dédoublement longitudinal. Si M. Guignard a méconnu l'existence de la division longitu- dinale des anses primaires dans les cellules-mères du pollen, il n'en est pas de môme pour les mitoses observées par lui dans le sac embryonnaire préalablement et consécutivement à la fécondation. Les descriptions et les figures qu'il publie ne peuvent laisser aucun doute à cet égard. Il a très nettement observé, décrit et figuré dans ces noyaux en cinése, le dédou- blement longitudinal. Mais il aurait tort de s'attribuer la priorité de cette découverte dans les cellules végétales. Dès 1880, Flemming a constaté le fait chez Nothoscordon (^). Dans son grand ouvrage " Zellsubstanz, Kern und Zelltheilung „ publié en 1882, le même auteur a représenté Planche IV b, figure 70 une cellule de Lilium tigrlnum démontrant la division longitudinale des chromosomes primaires aussi distinctement (*) Flemming. BeUi-rKje ziir Keiiiiiiiisa der Zelle. Th. II. Archiv fur mikrosk. Anatomie. 1880 Tab. II fig. 21. Reproduite dans Sachs : Vorlesungen ujjcr Pflanzenphysiologie, p. d23. Fig. 4. LA RÉPLIQUE DE M. GUIGNARD A MA NOTE. 121 et aussi indiscutablement que n'importe quelle figure du mémoire de M. Guignard. Flemming dit avoir eu sous les yeux de nombreuses cellules végétales, démontrant le dédoublement, dans des préparations de Lilium tif/riniifii et de NotJioscorchn fragans. Il évalue à deux ou trois douzaines le nombre des cellules dans lesquelles les chromosomes étaient manifestement en voie de dédoublement. (Ibidem, page 311.) Il en conclut que le phénomène qu'il a découvert chez la Salamandre se produit également chez les végétaux et il attribue à l'action des réactifs, qui déterminent fréquemment une soudure artificielle des anses jumelles, l'opposition de Strasburger. Flemming a constaté en outre que dans les anses secondaires des cellules végétales (Lilium croceum) (^), les anses sont moitié moins épaisses que les anses primaires, tout comme chez la Salamandre et que le nombre total des anses du dyaster est double environ de celui de l'aster primaire. C'est donc à Flemming et non à M. Guignard, dont les publi- cations datent de 1883 et de 188.1, que revient le mérite de la découverte du dédoublement longitudinal, non seulement chez les animaux, mais aussi chez les végétaux. M. Guignard a confirmé par de nombreuses observations la découverte de Flemming et ce à une époque où Strasburger contestait encore la réalité des faits. Mais l'opposition de Strasburger ne peut faire qu'une découverte qui appartient à Flemming devienne la propriété de M. Guignard. Il me reste à examiner un dernier point. M. Guignard a-t-il fait connaître le premier, comme il le prétend, le cheminement en sens opposés des anses jumelles résultant du dédoublement longitudinal des chromosomes primaires. Dans sa réplique, il fonde sa revendication sur trois citations. Voici la première. " Les deux moitiés s'isolent complètement. Dès lors le (') Flemming. Zclhubstmiz, Kern uud ZelUlicilianj. 1882, page 3M. Tab. IVO, fig. 70. 122 EDOUARD VAN BENEDEN. " nombre des bâtonnets est doublé : au lieu de douze on en •' compte vingt-quatre. Chacune des moitiés entrera dans la " formation d'un des noyaux-filles. „ J'ai montré plus haut que l'auteur a en vue ici non des anses jumelles, mais bien les éléments provenant d'une seconde segmentation transversale. Simon contradicteur était justifié à appuyer sa réclamation sur cette affirmation, par laquelle il ne fait que reproduire les données de Strasburger, ce n'est pas à M. Guignard, mais à Strasburger que reviendi-ait la décou- verte du sort des anses jumelles. Cari' eminent cytologue de Bonn a soutenu longtemps avant M. Guignard que chacune des moitiés d'un segment primaire, résultant d'une seconde segmentation transversale, entre dans la formation d'un des noyaux-filles. Il se trouverait ainsi que celui qui niait contre Flemming la réalité du dédoublement longitudinal aurait décou- vert le sort des anses jumelles dont il contestait l'existence ! Voici la seconde phrase qu'invoque M. Guignard pour établir ses droits de priorité. " Chaque moitié des segments, devant concourir à la formation " des deux noyaux-filles, tourne une de ses extrémités plus ou " moins recourbée ou l'angle formé par ses deux branches, si •' la courbure se fait au milieu, dans la direction des pôles qui " constituent deux nouveaux centres d'attraction autour " desquels les segments dédoublés affectent une disposition " rayonnante. „ Qu'est-ce que M. Guignard entend par " chaque moitié des segments „ et par " segments dédoublés „ ? Nous avons vu qu'il confond sous une même dénomination (de dédoublement longitudinal) la seconde segmentation transversale signalée dans les cellules polliniques et la vraie division longitudinale des anses primaires. Comment mon savant contradicteui' s'y prendrait-il pour établir qu'il avait en vue, en formulant cette proposition, les anses jumelles et non les bâtonnets segmentés ? M l'une ni l'autre de ces deux premières citations ne prouve donc que M. Guignard aurait eu l'idée du cheminement en sens inverses des anses jumelles. LA RÉPLIQUE DE M. GEIGNARD A MA NOTE. 123 Il n'en est pas de même de la troisième. A la page 26 de son Mémoire détaillé, l'auteur, après avoir nettement décrit le dédoublement longitudinal dans les noyaux du sac embryonnaire du Lilimn candidum, dit formellement que les segments primaires se dédoublent " en deux moitiés destinées chacune à l'un des noyaux-filles „. Ici le doute n'est pas possible ; ce sont bien les anses jumelles que M. Guignard avait en vue. Il a donc affirmé le cheminement en sens inverses des anses secondaires résultant du dédoublement longitudinal. La seule conclusion à tirer de cette affirmation, c'est que l'auteur a eu l'idée du cheminement en sens inverses. Mais cette idée, Flemming l'avait eue avant M. Guignard. Celui-ci a-t-il été plus loin que Flemming? A t-il tranché par l'observation une question que Flemming n'a pas résolue ? A-t-il démontré ce que Flemming n'a fait que supposer ? Pour répondre à ces questions, il importe de lire attentivement le Mémoire détaillé de M. Guignard. Il ressort avec la dernière évidence de cet examen, non seulement que M. Guignard n'apporte aucune OBSERVATION à l'appui dc cette idée, mais qu'il n'a pas même soupçonné qu'il importait de diriger son attention sur cette question et de chercher à la résoudre objectivement. Après avoir écrit cette phrase sur laquelle il fonde sa revendication : " Dans la figure 108, ils (les bâtonnets) sont manifestement sur le point de subir un dédoublement longitu- dinal et de se séparer ainsi en deux moitiés destinées chacune à l'un des noyaux-filles „, il ajoute quelques lignes plus bas : "je regrette de n'avoir pu suivre dans les détails toutes les phases de la division du noyau primaire ; c'est chose difficile quand il s'agit de cet organe ; mais il n'est pas douteux qu'elles ne ressemblent entièrement à celles que nous connais- sons déjà.,, M. Guignard dira-t-il que ses observations en ce qui con- cerne la division des noyaux primaires du sac embryonnaire du Lilimn, auquel s'appliquent les déclarations que j'ai rappelées, l'autorisaient à affirmer le cheminement en sens inverses de chacune des anses jumelles ? 12-1 EDOUARD VAN BENEDEN. Ces observations les a-t-il faites sur un autre objet ? Dans aucune des descriptions de la mitose relatives à d'autres noyaux, il n'est plus même question ni de cheminement des anses secon- daires vers les pôles, ni de répartition égale de la cliromatine primaire. A la fin du mémoire, l'auteur résume ses conclusions. L'on n'y trouve pas une allusion, pas un mot qui soit relatif à ces phénomènes. Or, tous ceux qui connaissent pour l'avoir étudiée par eux-mêmes la question de la mitose savent que de tous les phénomènes l'un des plus difficiles à constater, sinon le plus difficile de tous, c'est précisément la marche des anses jumelles. Flemming reconnaît que ses observations ne l'autorisent pas à rien affirmer à cet égard. Pour résoudre la question au moyen d'un matériel aussi défavorable à cette étude que celui au(iuel M. Guignard a eu recours, défavorable à raison du nombre considérable des chromosomes primaires et de leur mode de groupement, il aurait dû tout au moins en faire l'objet d'un examen spécial et y consacrer par conséquent du temps et de la peine. MM. Heuser, Strasburger et Rabl ne me contre- diront certainement pas sur ce point. Dès lors, je le demande, si ces observations il les avait faites, M. Guignard se serait-il abstenu de les relater, eût-il oublié de formuler dans ses conclu- sions les résultats de ses recherches? eût-il négligé de figurer quelques-unes au moins des figures établissant le cheminement en sens opposés ? Dans le cours de l'année 1884, M, Guignard a publié de nouvelles observations sur la division cellulaire Ç). Il ne s'y trouve mentionné, pas plus que dans le mémoire publié dans les Annales des sciences naturelles, au début de la même année, aucune observation relative au cheminement en sens opposés. L'auteur rectifie ses observations antérieures sur la mitose des cellules-mères polliniques ; l'incurvation des segments primaires, suivie de l'accolement des deux moitiés d'un même segment (*) Nouvelles nb.teri'atioììs snr la atructure el la divisiun du noijdu-cclliilaire^ ISSi. Jiulleliii de la Société botanique de Lyon. LA RÉPLIQUE DE M. GUIGNARD A MA NOTE. 125 n'existerait point; mais il s'opérerait ici, comme dans les noyaux de l'albumen, du parenchyme des ovules, des ovaires, etc., un fendillement longitudinal. Je ferai remarquer que ce résultat avait été prévu par Flemming {Zellsiibstam, Kern und Zell- theihmg, page 314) et que moi-même, discutant les observations de Strasburger, j'ai exprimé l'idée que ses figures pouvaient être interprétées comme indiquant l'existence d'une division longitudinale chez les végétaux {Eeclierclies sur la fécondation, p. 5UG). Néanmoins je crois-pouvoir certifier que jamais Flem- ming ne revendiquera, pas plus que moi-même, la découverte du dédoublement longitudinal dans les cellules même Polliniques des végétaux. Autre chose l'hypothèse, autre chose l'observa- tion. Ce phénomène serait donc général chez les végétaux, comme chez les animaux. Quant au sort des anses jumelles, elle ne préoccupe pas M. Guignard : son attention est toujours et exclusivement dirigée sur le fait du dédoublement longitudinal. Et cependant, au moment où il écrivait cette nouvelle brochure, les travaux de Heuser et de Strasburger établissant la réalité du transport en sens opposés avaient paru ; ces travaux M. Guignard les connaissait ; mais il n'avait pas encore saisi la haute portée de la démonstration fournie par Heuser. Mon savant contradicteur n'a donc fourni aucune observa- tion, aucune contribution à la démonstration du fait dont je revendique la priorité et pour Heuser et pour moi-même. Comme Flemming, il a eu l'idée du cheminement en sens opposés. Mais en matière de sciences d'observation l'hypothèse ne suffit pas : un fait n'est acquis comme réel que quand il a été établi par l'observation. Si quelque botaniste, après la publication du mémoire dans lequel Flemming signalait pour la première fois le dédouble- ment longitudinal chez la Salamandre, s'était avisé d'affirmer la réalité de ce même dédoublement dans les cellules végétales, sans l'avoir objectivement constaté au préalable, serait-il fondé à prétendre à la découverte de ce dédoublement chez les plantes? Là est toute la question. J'abandonne à ceux qui ont autorité pour se prononcer dans le débat soulevé par M. Guignard, le soin de la résoudre. 126 EDOUARD VAN BENEDEN. Je conclus : Monsieur Guignard a admis à priori sans y être autorisé par aucune observation, l'hypothèse du cheminement en sens opposés des anses jumelles. Si la découverte de ce fait doit être attribuée à celui qui a le premier soupçonné son existence, cette découverte appartient à Flemming, non à M. Guignard. Et si, comme le prétend M. Guignard, la division longi- tudinale impliquait nécessairement le cheminement en sens opposés, ce qui est absolument insoutenable, la découverte du cheminement appartiendrait une fois de plus à Flemming. Car c'est Flemming et non M. Guignard qui a le premier démontré l'existence du dédoublement non seulement chez les animaux, mais aussi chez les végétaux. L'on sait aujourd'hui, grâce à mes recherches, à celles de Heuser et de Rabl, que le dédoublement longitudinal a pour résultat de répartir également la chromatine d'un noyau primaire entre les noyaux qui en dérivent. M. Guignard n'a pas compris la portée du phénomène, pour avoir confondu sous un même nom de "' dédoublement longitudial „ le fendillement des anses découvert par Flemming et une seconde segmentation transversale admise par Strasburger, pour avoir admis en outre que chez les végétaux tantôt l'un, tantôt l'autre phénomène s'accomplit à l'exclusion de l'autre. La première démonstration du cheminement en sens opposés des anses jumelles et de la répartition égale de la chromatine primaire entre les noyaux secondaires a été fournie par Heuser pour des cellules végétales, par moi pour des cellules animales. Sur la circulation céphalique croisée, ou échange de sang carotidien entre deux animaux, Léon FEEDERICQ. Je prends deux chiens ou deux très grands lapins A et B, convenablement anestliésiés. Sur tous deux, je lie les vertébrales et je prépare les carotides. Sur tous deux, l'une des carotides, celle de droite, par exemple, est coupée en travers; puis je relie le bout central, cardiaque de la carotide droite du lapin A, avec le bout périphérique ou céphalique de la carotide droite du lapin B, au moyen d'un court tube de verre effilé en canule à ses deux extrémités, et rempli au préalable de la solution physiologique (Na Cl à 0.6 o/o). Un second tube établit pareillement la communication entre le bout central de la carotide droite de B et le bout périphérique de la carotide de A. La carotide gauche est ensuite liée chez les deux lapins. Dans ces conditions, la tête du lapin A ne reçoit que du sang venant du corps de B, et la tête du lapin B ne reçoit plus que du sang venant de A. Il y a chez les deux animaux échange de sang carotidien ou circulation céphalique croisée par les canules placées dans les deux carotides droites. Les animaux supportent parfaitement cette opération et ne présentent aucun trouble des mouvements respiratoires, ni des 128 LÉON FREDERICQ. battements du cœur. L'expérience pourra être prolongée d'autant plus longtemps que les canules de verre qui relient les artères seront plus larges et plus courtes, ce qui retarde la coagulation du sang dans leur intérieur. Il arrivera cependant un moment où cet accident se produira fatalement, entraînant comme conséquence l'arrêt de la circulation commune et l'obstruction du dernier gros vaisseau nourricier de la tête. Les lapins ne survivent généralement pas à cette oblitération et meurent en présentant les symptômes de l'anémie aiguë du cerveau, c'est-à-dire les phénomènes de dyspnée et de convulsions décrits poui' la première fois par Kussmaul et Tenner. Chez les chiens, au contraire, il y a de larges anastomoses entre les vaisseaux encéphaliques et les vaisseaux spinaux : aussi l'oblitération simultanée des vertébrales et des carotides n'arrête pas la circulation encéphalique et ne présente pas les mêmes dangers que chez le lapin. Le fait a été signalé depuis longtemps. Mais reprenons nos animaux au début de l'expérience, c'est-à-dire alors que la circulation commune fonctionne norma- lement, sans formation de caillots dans les canules. A ce moment , les deux lapins à circulation céphalique croisée permettent de réaliser une expérience que je considère comme très importante au point de vue de la théorie de la respiration. Si l'on cherche à produire de la dyspnée chez le lapin A par l'un des moyens usuels (oblitération complète ou partielle de la trachée, respiration d'un mélange gazeux pauvre en 0, ou riche en CO2), c'est B, l'autre lapin, celui dont la tête reçoit le sang de A, qui présentera les symptômes de la dyspnée (mouvements respiratoires exagérés, profonds ; expirations actives pouvant dégénérer en convulsions, etc.), tandis que A pourra, tout au moins au début, présenter plutôt une tendance à V aimée, c'est-à-dire une diminution dans l'amplitude des mouvements respiratoires. Ces faits trouvent une explication des plus satisfaisantes, si l'on se place au point de vue de la théorie de Rosenthal sur la régulation des mouvements respiratoires. SUR LA CIRCULATION CÉPHÀLIQLTE CROISÉE. 129 Les muscles respiratoires reçoivent, comme on sait, leurs impulsions motrices de centres nerveux situés clans la moelle allongée ( nœud vital de Flourens , centres respiratoires ). Rosenthal admet que le degré d'activité de ces centres et l'énergie de la ventilation pulmonaire qui en est la conséquence, sont réglés à chaque instant par les besoins respiratoires de l'organisme ; et que c'est la qualité du sang (teneur en 0 et en CO2) qui circule dans la moelle allongée, qui sert ici de régulateur : excitation exagérée des centres respiratoires {dyspnée), quand il y a pénurie d'oxygène ou excès de CO2 dans le sang qui baigne la moelle allongée ; ralentissement ou arrêt momentané de la respiration {apnèe), quand il y a excès d'oxygène ou déficit de CO., dans le sang de la circulation céphalique ; enfin respiration ordinaire ou eupnee, quand il y a une proportion moyenne de COo et d'O dans le sang artériel de la tête. Appliquons ces données à l'interprétation de notre expérience de circulation croisée. Au moment où l'on ferme la trachée du lapin A, l'air qui reste dans ses poumons se vicie en peu d'instants et le sang veineux qui revient aux poumons ne peut plus s'y charger d'oxygène ni s'y débarrasser de son excès de COo. C'est ce sang veineux non revivifié, non artérialisé, que le cœur lance ensuite dans tout le corps de A, sauf la tête, qui reçoit du sang normal venant de B. Les centres respiratoires de A, étant convenablement nourris et fournis de gaz vivifiant, ignorent la pénurie d'oxygène du reste du corps, et n'inter- viennent pas pour la corriger; le lapin A ne montre aucun signe de dyspnée. Chez le lapin B, au contraire, les centres respiratoires et la tête entière reçoivent du sang noir, veineux, venant de la carotide de A ; ils réagissent immédiatement comme si tout l'organisme de B était menacé d'asphyxie, en exagérant les mouvements respiratoires du thorax. Le lapin B présentera donc un accès de dyspnée, quoique tout le corps, sauf la tête, reçoive un sang artériel suroxygéné par les efforts respira- toires exagérés du thorax. 9 130 LÉON 'FREDERICQ. On peut doue modifier à volonté le rythme et le type des mouvements respiratoires en agissant uniquement sur la composition du sang- qui circule dans la tête d'un animal. En effet, le seul lien physiologique qui existe entre la tête du lapin B et le corps du lapin A est constitué par le sang qui circule dans les canules de verre qui relient les deux animaux. L'expérience telle que je viens de la décrire me paraît donner une démonstration simple et élégante de la théoiie de Rosenthal, qui voit dans la composition du sang qui circule dans la tête le régulateur des mouvements respiratoires. Cette théorie a eu la fortune assez commune d'avoir été acceptée presque sans discussion pendant fort longtemps, et d'être, depuis plusieurs années, combattue avec acharnement par plusieurs des physio- logistes qui se sont occupés de l'innervation de la respiration (Hoppe-Seyler, Marckwald, Mosso, etc.). L'anémie expérimentale comme procédé de dissociation des propriétés motrices et sensitives de la moelle épinière. Léon FREDERICQ. § I. Lorsqu'on pratique sur le lapin la ligature de l'aorte abdomi- nale, on observe presque immédiatement la suppression de la motili'é et de la sensibilité dans F arrière-train de l'animal (expérience dite de Sténon (^)). Schiffer {^) a montré que la paralysie et l'anestliésie sont ici d'origine médullaire et que les organes périphériques, nerfs, muscles, etc., supportent beaucoup plus longtemps que la moelle lombaire la privation de sang artériel. Parmi ces organes péri- phériques, les plaques terminales des nerfs moteurs ainsi que (') Il vaudrait mieux, me scmble-t-il, donner à l'occlusion de l'aorle des Mammi- fères, le nom A'expib-ience de Sirmuiiicnlam, puisque Swammerdam a le premier r(^alisé cette opération sur un Mammifère, tandis que Sténon expérimentait sur des Poissons. Tous les deux ont publié leurs reclierches la même année : Johannis'Swammkiuiami. Tractatnx de nespiraUoiie, Lugd. Batav., \G(J1, pp. G1-G2. — Nicolai Stf.nonis. Element, myologiœ sperimcii, cui ncccdiiut catiix carcliariœ dissectiiin caput et dissec- tiis piscis ex cavuin rjeneic. Amstelodamiae, -1007, p. -109. (Cités par Spronck.) (-) ScHlFFcn. Uebcr die Bcdeittuixj des Steusnn'scheii Ver.\iiclic.i. Centralbiall fiir die medicinischen Wissenschafle. 18G9, n"*^ 37 cl 38, p. inO et u93. 132 LÉON "FREDERICQ. les terminaisons des nerfs sensibles sont atteintes en premier lieu, bien avant les muscles ; et ceux-ci, à leur tour, résistent moins longtemps que les troncs nerveux (Brown-Séquard). Si l'expérience est faite chez le cliien ou le chat, la paralysie motrice de la moelle peut être précédée d'une phase d'excitation de cet organe, se traduisant par des convulsions passagères (convulsions anémiques) dans les muscles de l' arrière-train (Haller, Vulpian, Luchsinger, etc. (^) ). Si on relâche la ligature aortique, les symptômes de paralysie et d'anesthésie de l' arrière-train se dissipent ultérieurement, à condition que l'occlusion de l'aorte n'ait pas duré trop long- temps (oblitcîration de l'aorte par le procédé de du Bois-Iiey- mond (")). La restitution peut encore se faire après une interruption de la circulation d'un quai't d'heure, d'une demi- heure ou même de plus d'une heure, d'après Stannius et Brown- Séquard (^). Cependant, d'après Ehrlich et Brieger, Spronck, après une heure d'anémie, la mort de la moelle lombaire est, en général, irrévocable. Ceci n'empêche nullement l'animal de continuer à vivre et permet d'étudier les effets de la nécrose anémique sur les éléments histologiques de la moelle lombaire et des nerfs périphériques (*). (') Ai.miECHT VON Haller. Deux ìncnìoirca sur le innnvemeni du samj. Lausanne, dlSO, pp. 43 et 203. (Cild par Luchsinger.) S. Mayer. Znr Leitre von de.r Anàntie des Itiìckcninaikcs. Zeitsclirift fiir Ueilkundc, 4883, IV, p. 2G. Ll'CHSINGER. Ziir Keììiitiìi.is dcr Fnnclioncn des Rïiclicnmarkcs. Archiv fur die gesammle l'hysiologie, 'I8'8, XVI, p. SIO. (-) E. DU Bois-Reymond. Abmdcnimj des Siensoit'sclien Ycrsucliesfïir VoilcsiDigcn. Archiv fiir Anatomie und Physiologie, 4800, p. G39. (^) Stannius. Uulersucluingen 'ûher Leistunrjsfàhigkcit derMuskeln und Todtcnsiarre, Archiv fur physiologische Heilkunde, dSoS, XI, p. \. (Cité par Spronck.) Brown-Séquard. Ancdijse des rcchcrdies de Kussmaul et Tenner. Journal de la physiologie de l'homme et des animaux, 1838, I, p. 201. Sur la persistance de la vie dam les membres- atteints de rigidité qu'on appelle cadavérique. Comptes rendus, 1831, t. XXXII, p. 833 et 897. (*) Ehrlich et Brieger. Ueber die Ausschaltung des Lendenmarkgrau. Zeilschrift fijr klinischc Medicin, 18Sk VII Suiìplementheft, p. 133. C.-H.-D. Spronck. Over iscbaemie van bel ruggcinerk. Akademisch proefschrift. Amsterdam, -1886. l'anémie expérimentale. 133 §n. Le défaut de presque toutes les expériences dont il vient d'être question, c'est qu'elles ont été pratiquées sur le lapin. Or, cet animal se prête fort mal à l'étude des fonctions de la moelle épinière. Luclisinger avait déjà insisté sur le fait. J'ai repris ces recherches sur le chien et je suis arrivé à quelques résultats intéressants et nouveaux que je formulerai de la façon suivante : 1» Sous l'influence de l'anémie aiguë, due à l'occlusion de l'aorte, la sphère d'activité sensitive de la moelle lombaire du chien passe, comme la sphère motrice, par une période de vive excitation qui précède immédiatement la phase d'anesthésie et qui se traduit par des manifestations douloureuses ; 2" Les sphères motrice et sensitive de la moelle ne sont pas atteintes en même temps dans l'expérience de Sténon-Swam- merdam. Il s'écoule un intervalle d'environ deux minutes entre le début de la paralysie motrice et la suppression de la sensibi- lité de la moelle; 3'^ Si l'occlusion de l'aorte n'a duré que quelques minutes, la restitution de la sensibilité, complète au bout de peu de temps, se montre bien avant que les premiers signes de motilité repa- raissent. En réglant convenablement les périodes d'occlusion et d'ou- verture de l'aorte, on pourrait arriver à supprimer les fonctions motrices de la moelle, tout en conservant presque intactes les fonctions sensibles. L'anémie de la moelle nous fournit donc un procédé curieux de dissociation physiologique des propriétés motrices et sensitives de ce centre nerveux. Contribution à l'élude expérimentale des lésions de In moelle épinière déterminées par Vanémie passagère de cet organe. Archives de physiologie normale et patholo- gique, 4888, p. \. J. Singer. Veber die Vcrànderungen des Hi'ichenmarkcs nacli :eiii('ciscr Verschlies- sunrj der Baucltaortn. Sitzungsbcrichle dcr Wiener Akadeinie, o. Ahth. XCVI, pp. 43(i-lo8, 2 Taf. el Prager medicinischeWochenschrift, 1887, XII, u" 4o, p. 382. 13i LÉON FREDERICQ. § ni. Voici comment j'opère : Un grand cliien non anesthésié (^) est maintenu sur le dos, dans la gouttière d'opération, par deux aides. On évite de lier les pattes, surtout les pattes de derrière, alin que l'animal ne présente aucun trouble de la sensibilité ni de la motilité au moment de l'occlusion de l'aorte. La carotide droite est mise à nu à la région inférieure du cou. On lie le bout périphérique, on pratique au bout central du vaisseau une boutomiière par laquelle on glisse, dans la direc- tion de la poitrine, un tube en laiton, long de 30 à 40 centi- mètres et de 3 millimètres de diamètre (ou mieux une sonde en gomme, n» 5) coiffé, à son extrémité obtuse, d'un petit doigt de gant en caoutchouc extensible. On pousse le tube en l'inclinant, de manière qu'il pénètre, non dans la direction du ventricule gauche, mais dans l'aorte thoracique descendante, où on l'arrête. On fixe à la carotide, au moyen d'un fil à ligature, l'extrémité du tube qui reste à l'extérieur. Cette extrémité est munie d'un robinet et porte un bout de tube de caoutchouc épais, permettant d'y raccorder la canule d'une petite seringue chargée d'eau. On peut alors détacher complètement l'animal et le laisser libre de tous ses mouvements. Dans ces conditions, il suffit d'injecter dans le tube 10 à 15 ce. d'eau et de refermer immé- diatement le robinet pour gonfler le doigt de gant qui coiffe l'extrémité de la sonde aortique et la transformer en ampoule. Cette ampoule produit l'occlusion complète de l'aorte thora- (•) Il n'est pas necessaire d'anesth(?sier l'animal pour metire la carotide à nu. Le premier coup de scalpel dans la peau du cou produit par inhibition une espèce d'anes- Iht^sie qui permet souvent de terminer l'opération sans que l'animal pousse le moindre gémissement. Voir : Brown-SÉQUARD. Sur dii'crs effets d'irritation de la partie antérieure du cou et en particulier la perte de semibilité et la mort subite. Comptes rendus, 4 887, t. CIV, pp. 9o 1-934. — Sur une espèce d' anesthésié artificielle sans sommeil et avec conservation parfaite de l'intellUjence, des mouvements volontaires, des sens et de la sensibilité tactile. Comptes rendus, 4885, t. G, pp. 1300-1309. L ANÉMIE EXPÉRIMENTALE. 135 cique: les pulsations disparaissent à l'instant dans les crurales (^). Pour rétablir le cours du sang dans l' arrière-train, on ouvre le robinet; l'eau s'écoule et l'ampoule aortique s'affaisse. Il est facile, au moyen de ce dispositif expérimental, d'observer, à la suite de l'oblitération de l'aorte, les quatre phases suivantes : 1° Période d'excitation motrice de la moelle ; 2» Période de paralysie motrice de la moelle ; 3» Période d'excitation sensible de la moelle ; 4" Période d'anesthésie de la moelle. De même, après rétablissement de la circulation, on pourra distinguer successivement : l» Le rétablissement de la sensibilité de la moelle ; 2» Le rétablissement de la motilité de la moelle (-). Excitation motrice. — La période d'excitation motrice survient 15, 20 ou tout au plus 25 secondes après l'occlusion de l'aorte. Elle se traduit par un accès de contractions (') Pawlow a employé au laboratoire de Ludwig un procédé analogue pour pro- duire l'occlusion de l'aorte Ihoracique au moyen d'une ampoule et d'une sonde intro- duites par la sous-clavicre gauche. Ch. Bohr s'est également servi d'une sonde introduite par la sous-clavière gauche. Voir . l'AWl.ow. ì'AììjlunH dea Va(jaii ciuf de liiil.e lliji-zlidiiniicr. Arcliiv fur Physio- logie, Ì887, p. 4o2. — Christian Bohr. Vcbcr die Ilespiraiioìì narh Injection von Pepton nnd liliitcf/clinfiinK und iïber die licdeutnwj ciiizcbicr Onjaiie ft\r die Gerinn- barkcii des Dlute-t. Centralblatt fiir Physiologie, 1888, p. ^(j1. (-) Les résultats des expériences de lirown-Séijuard et de Spronck sont ici en contradiction directe avec ceux dos miennes. Voir: ItnowN-SiioiiARii, G. U. Acad. dSol, t. XXXIII, p. 8oG. « J'ai lié l'aorte immédiatement au-dessous de l'origine des rénales sur des lapins vigoureux. La sensibilité a été perdue en six, huit ou dix minutes dans le train postérieur ; deux minutes après, les mouvements volontaires ont cessé; l'irritabilité a duré prés d'une heure », etc Spronck, Ak. Proefs., p. 24. « Wannecr de ligatuur den bloedstroom langs de aorla niei volkomen ophief, konden de dieren nog geruimen tijd eenige willekeurige bcwegingen maken, de sensibiliteit was dan reeds vroeger totasl verlorcn gegaan, en wanneer ook al nade ophedlngder ligatuur de moliliteit gedeellelijk terugkecrde, bleven anœsthesie en analgesie meestal voorbestaan. Het is dus als of de sensible gangliénccllen voor aiucmie gevoeliger zijn dan de motorische. » 136 LÉON FREDERICQ. tétaniques, envahissant tous les muscles de l' arrière-train : la queue est raicle ; les pattes, dans l'extension forcée, sont prises d'un tremblement convulsif. Si l'on a pratiqué l'occlusion de l'aorte alors que l'animal était libre de ses mouvements et se promenait à quatre pattes, on le voit s'arrêter et s'arcbouter pour ainsi dire sur ses pattes postérieures raidies et étendues en arrière. Cet accès tétanique ne dure guère qu'un quart de minute et fait bientôt place au relâchement musculaire de ] 'arrière-train. La période d'excitation motrice ne se montre pas chez le lapin. Elle peut, d'ailleurs, manquer également chez le chien. Paralysie motrice. — La paralysie motrice est complète moins d'une minute (au bout de 30 à 40 secondes environ) après k suppression de la circulation dans la moelle lombaire. Elle atteint les muscles des pattes et de la queue. L'anus est large- ment ouvert et laisse échapper à l'extérieur le contenu de l'intestin. Dans plusieurs cas, j'ai noté également un suintement continu d'urine, s' écoulant goutte à goutte. L'arrière-train du chien s'aifaisse brusquement et l'animal, traînant derrière lui ses membres postérieurs inertes, présente une allure rappelant celle du phoque. Parfois, il cherche à s'asseoir sur son train postérieur paralysé. Le tronc se penche alors trop fortement en arrière et le chien tombe fréquemment à la renverse. C'est en prévision de ces chutes qu'il est bon, lorsqu'on ne fixe pas l'animal sur la table d'opération, de faire usage comme obturateur d'une sonde en gomme flexible au lieu du tube en métal. L'emploi du tube rigide expose à mie perforation de l'aorte et à la mort foudroyante par hémorrhagie interne. A ce moment, la sensibilité de l' arrière-train est encore intacte. L'animal crie si on lui marche sur la queue ou sur mie patte de derrière, mais ne retire pas le membre paralysé. L'excitation électrique du nerf sciatique provoque des cris et des gémissements, outre des mouvements locaux dans la patte innervée par le nerf. La portion motrice de la moelle lombaire est donc seule atteinte jusqu'à présent. l'anéme expérimentale. 137 Excitation sensitive. — La période d'excitation de la portion sensible de la moelle lombaire débute une minute et demie, deux minutes ou même deux minutes et demie après l'occlusion de l'aorte. La respiration devient plus profonde et plus fréquente, les expirations s'accompagnent de gémissements qui bientôt se transforment en hurlements. La pression artérielle subit en même temps une hausse considérable. Cette excitation douloureuse de la moelle m"a paru plus accentuée chez les animaux attachés sur le dos dans la gouttière d'opération que chez ceux que je laissais se promener librement. A la période d'excitation douloureuse de la moelle, succède l'anesthésie complète de l' arrière-train. Anesthésie. — Si l'on examine de temps en temps, au moj^en du courant électrique, l'excitabilité du nerf sciatique, on constate que l'anesthésie ne se montre généralement que trois minutes au moins (parfois trois minutes et demie) après l'occlu- sion de l'aorte. A partir de ce moment, les fonctions sensibles et motrices de la moelle sont suspendues. Les organes périphériiiues, nerfs et muscles, conservent leur irritabilité beaucoup plus longtemps. L'excitation électrique du sciatique provoque des mouvements dans les muscles de la patte correspondante pendant plus d'une demi-heure après occlusion de l'aorte. Au bout de trois quarts d'heure, les plaques terminales paraissent atteintes à leur tour : les muscles ne se contractent plus par l'intermédiaire du sciatique, mais leur excitabilité directe persiste encore pendant longtemps. Eetour de la sensibilité. — Il suffit d'ouvrir le robinet de la sonde pour laisser écouler à l'extérieur l'eau dont elle était chargée. Les pulsations reparaissent immédiatement dans les crurales. Si la suspension de la circulation n'a pas duré plus de cinq à dix minutes, on verra la sensibilité (essai de l'excitation électrique du sciatique, compression de la queue ou de la patte) reparaître au bout de quelques minutes. Retour de la motilité. — La motilité reparaît longtemps (un grand nombre de minutes) après le retour de la sensibilité. 138 LÉON FEEDERICQ. Les mouvements volontaires se rétablissent peu à peu et présentent pendant assez longtemps un certain degré d'in- certitude. L'animal marche souvent en s'appnyant, des pattes de derrière ou d'une des pattes, sur le dos du pied replié et non sur la plante. Je n'ai pas observé chez le chien, lors du retour de la motilité et de la sensibilité, les phénomènes d'excitation signalés par Ehrlich et Brieger chez le lapin. Je me réserve de publier ultérieurement mes recherches sur la pression sanguine, le rythme respiratoire, la distribution du sang et la coagulabilité de ce liquide au cours de l'expérience de Sténon-Swammerdam. Recherches sur le rythme respiratoire, l'AU IVBL BIENFAIT et HOGGE, Ëluiliaiils en nuMecine, ;i Liùge. Les muscles respiratoires reçoivent, comme on le sait, leurs impulsions motrices de centres nerveux situés dans la moelle allongée (nœud vital de Flourens, centres respiratoires). Rosenthal et Pfliiger admettent que le degré d'activité de ces centres et l'énergie de la ventilation pulmonaire, qui en est la conséquence, sont réglés, à chaque instant, par les besoins respiratoires de l'organisme, et que c'est la qualité du sang (teneur en oxygène et en acide carbonique) qui sert ici de régulateur : excitation exagérée des centres respiratoires et dyspnée, quand il y a pénurie d'oxygène ou excès de CO^ dans le sang qui baigne la moelle allongée ; ralentissement, ou arrêt momentané de la respiration (cqméé), quand il y a excès d'oxygène ou déficit de CO^ dans le sang de la circulation céphalique ; enfin, respiration ordinaire ou eiqmée, quand il y a une proportion moyenne de CO^ et d'O dans le sang artériel de la tête. C'est donc la composition du sang circulant dans la tête qui sert de régulateur aux mouvements respiratoires. Cette théorie, acceptée presque sans discussion par la plu- part des physiologistes au moment de son apparition, a été depuis quelques années l'objet de critiques nombreuses. L'explication de l'apnée, telle que l'avaient formulée Ro- 140 BIENFAIT ET HOGGE. sentlial et Pfliiger, a été remise en question par P. Hering, Ewald, Filelme, Knoll, Brown-Séquard, Hoppe-Seyler, Marck- wald, etc. Cette explication de l'apnée compte peut-être au- jourd'hui plus d'adversaires que de ^partisans. Les autres points de la théorie de la respiration formulée par Rosenthal ont également été soumis à des attaques, plus ou moins directes, de la part de Hoppe-Sejder, Mosso, Markwald, etc. Hoppe-Seyler (^), après avoir exposé les grandes lignes de la théorie de Rosenthal et de Ptliiger sur l'innervation respi- (') Hoppk-Seyleu. Uebei- die (Jrsntlie dcr Atlteinbewefjiaiijen. (Zeilschrift fur pliysioloy. Chemie, Bd. p. 105.) « Solche Hypolhesen in's Unbestimmte sind meiner Ansicht nach nicht allein nutzlos, soridern nachlheilig, weil sie so hâufig in das Gewaud ermillelter Thatsacliea gekleidet werden, ohne dass der Autor selbst, wie das auch Iiier der Fall ist, irgend daran die Scliuld Iragt. « Die nachslen AiigrifTspunkte zur Unlersuciiung der Ursacheii der Alhembewe- gungen liegeii wohl niciit auf dein Gebiele der cheniischen Piiysiologic. Da die physikalische Untersuchung tiber die Yorgiinge in den Nervencenlren, so viel mir bekannt, noch gar nichts eriniUelt bat, ist der Begriff dieser Ceatren nur ein ana- tomiîcber. Der einzige Vergleich, den ich inir iiinsichllich der Funktion als Laie zu macben weiss, wiirde die Enge des verlangerten Markes belrachlen als den Oit, wo der grossie Theil der Nerven des korpers hiiidurchgehen und ihre Erregung als Summe den Alhemnerven inducirten, wie die eleklrische Slromschwankung ineinem Drabl eine solclie im benacbba'ten. Ob das Bild gliicklich isl odcr iiicbt, ist ain Ende gleicbgultig, jedenfails ist es Tbalsacbe, dasse die Albcinncrven von dea Erregun- gen der verscbiedensten sensiblen Nerven in Milleidenschafl gezogen werden und zwar vom Beginn des extrauterinen Lebens. Der erste Athemzug is wobl unzweifel- haft die Folge der Reizung der sensiblen Nerven durch den jelzt beginnenden Wàr- meverlust von der Haut. Bleibt er aus, so wendet sich der Geburtshelfer nicbt an das Atbemcentrum, sondern er reizt die Haut, sowie aucb fiir die Erregung der Inspiration bei Erwachsenen in der Olinniaebl das Besprengen mit kaltem Wasser die kriiftigste Wirkung zeigt. » Hoppe-Seyler développe la même idée dans son traité de cbimie pbysiologiijue (') : « Da nun iiberhaupt die Ilijpoihexe dcr clieminchen lleizniKj dcr Medulla obluiujata ah Ur.sache dcr AthembewegiuKjcn nur ah Notlibehelf eiK.staudcn isl, und Griinde zu seiner Aufrecbthaltung nicht vorliegen, ja sogar die ganze Hypothèse eine klare Gestalt noch gar nicht gewonnen bat, so fragl sich nur noch welche anderen Môg- lichkeiten der Erklarung bleiben. » Et plus loin : a , nur die Unhaltbarkeit der Verschiebung der Athemreize auf chemisches Gebiet musste nachgewiesen und ein Boden gewonnen werden fiir das Verstandniss dcr Einwirkung der verschiedenen Nervenbabnen auf der Gang der Respiration und der mit ihm veriinderten Ausscheidung von CO.j und Aufnahme von Sauersloff. » (*) Hoppe-Seyler. l'hi/siilnginhi' (hernie, 187g, p. 544. RECHERCHES SUR LE RYTHÏIE RESPIRATOIRE. 141 ratoire et en avoir critiqué quelques points, conclut de la façon suivante : Les mouvements respiratoires ne sont pas dus à une action locale du sang sur les centres respiratoires ; mais ils sont en corrélation directe avec l'excitation des nerfs sensibles; c'est ainsi que le premier mouvement respiratoire de l'enfant est dû à l'action du froid sur les nerfs cutanés, et que l'on ranime les personnes en syncope en les aspergeant d'eau froide. Aucun motif n'existant pour, soutenir l'hypothèse chimique, on doit l'abandonner et rechercher une autre explication. Mosso (^) n'est pas moins affirraatif : " Jusqu'à présent, dit-il, on pensait que l'activité plus grande ou plus faible du centre respiratoire représentait le plus ou moins grand besoin de pourvoir, par la ventilation pulmo- naire, aux besoins chimiques de l'organisme; je ne crois pas m' éloigner du vrai en soutenant que les mouvements respira- toires se modifient d'une manière correspondant à l'état de sommeil ou de veille, et à la plus ou moins grande activité du système nerveux. Pour exagérer mon principe et le rendre plus facilement compréhensible, je dirai que, jusqu'à un certain point, on peut considérer comme deux phénomènes distincts la respiration chimique et la partie mécanique de la respiration. La partie mécanique, bien qu'elle ne soit pas complètement autonome, jouit pourtant d'une telle indépendance qu'elle représente mieux la vitalité des centres nerveux dont elle dépend que les besoins chimiques de l'organisme „ Enfin, Marckwald (^) nie directement que l'excitation nor- (') A. Mosso, l.d rcsjìiiitlioìì ]inio/ \ \ ^ _/ ; 1 Hl- 1 1^ ' ' 1 ! / 7<7 \^Juls' i \ 1 7/ ' \'/^i\ 1 / 10 Y 1 \ 1 / c\ ' ' ' \l « i i 1 Y 7 1 1 1 1 ' ' ' ! 1 1 ! 1 1 1 ' 1 .f : 1 ! i k- ! J^P- i i .^ i / V 1 / 1 \ •?. -- \ / v ' / 1 \ 1/ j 1 1 1 0 ! ' 1 A E 160 GEORGE ANSIAUX. La profondeur des mouvements respiratoires ne suit pas les mêmes variations; l'augmentation d'amplitude du début persiste. 4" Cette période d'accélération ne dure guère. La respiration se ralentit insensiblement, d'autres fois brusquement (de 10 mouvements à 4 au bout de 5 minutes, de 9 à 3 au bout de 25 minutes). Au bout d'un certain temps (un quart d'heure en moyenne), la fréquence est de 1 à 3 pour 6 secondes. La respiration conserve cette fréquence presque jusqu'à la fin de l'expérience, c'est-à-dire jusqu'à la mort de l'animal. De plus, le nombre de mouvements respiratoires est généralement alors à peu près égal à celui observé avant l'aspersion. Il y a cependant quelques exceptions, certains chiens présentant des pauses respiratoires quelquefois très longues, dont la durée peut être de plusieurs minutes. 5° L'aspersion d'eau froide, avons-nous dit, détermine toujours une augmentation de l'amplitude des mouvements respiratoires. En général, cette augmentation persiste beaucoup plus longtemps que l'accélération du début. Cette persistance n'est pas toujours aussi manifeste que dans le cas donné comme exemple (fig. 2), mais elle est constante. Le tableau suivant donne le résultat de quatre expériences : L'amplitude diminue au bout de La période de mouvements respiratoires accélérés est terminée après . . . . Chien n" I Chien n» II Chien n'MII Chien n« IV V-2 Il- io m. 1 h. 15 m. V, h. 1 h. 45 m. 15 m. 45 m. 15 m. C'est la combinaison des deux facteurs fréquence et pro- fondeur des mouvements respiratoires, qui représente l'énergie de la ventilation pulmonaire. Les travaux de Pfliiger et de quelques-uns de ses élèves ont démontré qu'il existait deux LA MORT PAR LE REFROIDISSEMENT. 161 FiG. 2. A. Graphique de res|)iraiion pris au tkU)ut de l'aspersion, à 10 heures. li. (jr:i|)hi(|ue pris à midi, 20 minutes avant la mort de l'animal; température rectale : ^o" ; pression sanguine : S centimètres. périodes dans la consommation de l'oxygène des animaux soumis à un refroidissement progressif; à l'augmentation de cette consommation au début, succède une diminution constante. A la première période, correspondent l'accélération et l'augmen- tation d'ami)litude ; comme à la seconde, le ralentissement de la respiration (•()ml)iné k la diminution de l'amplitude, diminu- tion ([ui survient plus ou moins tôt. Au début de l'aspersion, les mouvements respiratoires sont donc plus profonds et plus fréquents. Il s'agit vraisemblable- ment d'une action réflexe sur les centres respii-atoires, ayant son point de départ dans la vive irritation des nerfs cutanés sous l'influence du froid. Mais cette irritation des nerfs cutanés ne persiste pas long- temps et fait bientôt place à l'anestliésie par le froid, anes- tliésie dont il est facile de se convaincre directement. A ce moment, en etïet, les changements signalés à la figure 1, comme se produisant dans le rythme respiratoire sous 11 162 GEORGE ANSIAUX. l'inflence de l'aspersion, ne s'observent plus : les lésions méca- niques des nerfs cutanés obtenues par incision de la peau ne provoquent également aucun réflexe respiratoire. L'anesthésie des nerfs cutanés supprime l'accélération respi- ratoire du début de l'expérience et le nombre des mouvements respiratoires est ramené approximativement à ce qu'il était avant l'aspersion d'eau froide. On pourrait conclure de ce qui précède qu'à l'état ordinaire, les nerfs cutanés ne semblent pas jouer le rôle important que certains physiologistes ont voulu leur attribuer, la suppression de leur fonctionnement par le froid ramenant le nombre de mouvements respiratoires à ce qu'il était avant leur excitation par aspersion d'eaU. Avant d'examiner les changements produits sur la respiration au point de vue du rythme, j'ajouterai que jamais, ni sur les chiens, ni sur quelques lapins opérés dans les mêmes conditions, je n'ai remarqué les arrêts de la respiration obtenus par Falk au début de l'aspersion d'eau froide. 6° Le type des mouvements respiratoires présente quelques particularités intéressantes. A l'état normal, l'expiration se fait d'une façon absolument paisible ; la durée normale de l'inspiration est plus courte que celle de l'expiration (environ comme 10 : 14). Ce rapport semble se renverser après un certain degré de refroidissement, l'expiration active se fait rapidement; l'ascen- sion du levier inscripteur est brusque : sur le graphique, elle est presque verticale. L'inspiration se fait avec une plus grande lenteur: cette lenteur peut être même considérable (fig. 3 et 4). Ce ralentissement s'observe presque chez tous les animaux en expérience, quoiqu'il ne s'observe pas à chaque inspiration. De plus, le ralentissement remarquable de l'inspiration ne se produit jamais qu'à une période assez avancée du refroidisse- ment, ainsi que le démontrent les indications placées au-dessous des figures 3 et 4. 70 Comme le montre la figure 4, une pause peut s'intercaler entre les deux parties de l'inspiration. L'inspiration peut, dans LA MORT PAR LF- REFROIDISSEMENT. 163 FiG. 3. Graphique de resiiralion. Chien n» V. Durde du refroidissement : 1 h. 45 m.; temperature rectale : 20" C. FiG. i. Graphique de respiration. Chien n" VI. Durée de refroidissement : 2 heures; température rectale : 25" C. Itemnrqne. — La circulation a cessé. Même vitesse du cylindre enregistreur qu'à la figure 3. certain cas, soit être coupée d'expirations actives (la réciproque est d'ailleurs vraie), soit même ne pas s'achever (flg. 5). On observe fréquemment des arrêts de la respiration ou pauses. 164 GEORGE ANSIAUX. I-'IG. r.. Graphique de respiration. Chien n" VI. L'inspiration I ne s acneve pas, interrom|)ue par une pause. En E, expiration ; en 1' inspiration complète. Meme vitesse du cylindre enregistreur, qu'à la ligure ?.. Ces pauses sont de différente nature. a) On sait qu'à l'état normal il n'intervient pas de pause entre l'inspiration et l'expiration : cliez un animal refroidi, une telle pause peut se présenter par suite de la suppression du fonctionnement des fibres sensibles inspiratrices et expiratrices du nerf vague (Hering et Breuer, Léon Fredericq). Le graphique obtenu dans ces conditions rappelle celui pris chez un animal après la section des pneumogastriques (Léon Fredericq). La pause est beaucoup plus marquée si l'on a sectionné un des pneumo-gastriques (fig. 6). Fig. t). Graphique de respiration. Chien n» XIV. Température rectale : :24'' C. refroidissement : 2 '/a h. Remarque. — Pneumogastriques intacts. durée du LA MORT PAR LE REFROIDISSEMENT. 165 Cette pause ne s'observe pas dans chaque expérience ; elle peut apparaître, soit avant, soit après la cessation de la circulation. h) Les pauses qu'il m'a été donné de constater le plus souvent, dans chaque expérience pour ainsi dire, sont celles qui divisent une des parties d'un mouvement respiratoire, soit l'inspiration, soit l'expiration, soit même les deux à la fois. Ces pauses sont quelquefois extrêmement longues : parfois même elles durent plusieurs minutes ; pendant ce temps, la pression sanguine baisse très légèrement et remonte de même à la reprise de la respiration : donc aucun symptôme d'asphyxie. Les pauses peuvent apparaître plus ou moins tôt, quelquefois une demi-heure après le commencement de la réfrigération. Dans un de ces derniers cas, l'animal avait une température rectale de 26» C. J'avais cru avoir affaire à une espèce de syncope respiratoire et établi la respiration artificielle. Qu'on entretienne ou non la respiration artificielle, les mouvements respiratoires réapparaissent au bout d'un certain temps, sans que l'animal semble être incommodé le moins du monde. Il " oublie „ de respirer, suivant l'expression pittoresque de Mosso. De plus, la respiration artificielle semble ne pas avoir beau- coup d'influence, les mouvements respiratoires réapparaissant quelquefois pendant qu'on entretient activement cette dernière. Les pauses séparent, ou bien un seul mouvement respiratoire, ou bien des groupes de mouvements respiratoires. Le premier cas est presque général ; je n'ai observé le second cas que trois fois (fig. 7 et 8). Chez le chien n» XIV, les pauses séparant les mouvements respiratoires n'étaient pas complètes ; entre des mouvements respiratoires, groupés comme ceux figurés aux tracés 7 et 8, mouvements d'amplitude normale, se remarquent de petits mouvements faibles et superficiels, qui ressemblent, comme le dit Mosso, à des mouvements respiratoires avortés (v. fig. 9). On a donc affaire ici aux phénomènes de respiration inter- mittente et rémittente, tels que Mosso les a obtenus sur des JiLìtKV'-"^^»*!'*^* 166 GEORGE ANSIAUX. e 3 2 " ce tn H — g nics indications que pour la figure préc('dente. 8° De ce qui précètle, on peut tirer quelques conclusions intéressantes sur les altérations apportées au fonctionnement des centres respiratoires. Le froid semble, en effet, ne pas agir de la même façon sur le centre d'inspiration et sur le centre d'expiration, en ce sens que le dernier résiste mieux que le premier à son action : j'ai montré, dans les pages précédentes, le ralentissement de l'in- spiration, l'accélération relative de l'expiration, les pauses qui interviennent plus souvent dans l'inspiration que dans l'expira- tion, ou qui peuvent séparer l'expiration de l'inspiration. LA MORT PAE LE REFROIDISSEMENT. 169 L'excitation du pneumog-astriqiie donne des résultats concor- dants avec cette interprétation. Voici, en eifet, ce qu'on observe: Une excitation électrique d'une valeur donnée choisie de façon à ne produire aucun effet à l'état normal n'en produira pas davantage dans les premières périodes du refroidissement. A une période plus avancée du refroidissement, avec un courant de même intensité, on remarque une prédominance plus ou moins accusée, mais constante, du type expiratoire (tig'. 12) ; la figure 12 montre une augmentation de la pause entre l'expiration et l'inspiration ; Quelquefois on observe une période latente assez prononcée ; quelquefois aussi l'effet de l'excitation peut se prolonger pen- dant un certain temps (fig. 12, après A'). Le froid fait pour ainsi dire " une brèche „ dans la résistance qu'oppose le centre d'expiration à l'excitation. l'ic, \^1 Graphique de respiration ; excitation du nerf vague. Chariot de du Bois-Reyinond : 0, deux élf^ments. Signal Despretz dans le circuit primaire. Un des pneumogas- triques intact, Tautre sectionna. Le nerf intact est excité. Température rectale : :23",5 C; durée du refroidissement : 1 h. 30 m. En A et A', un arrêt de l'appareil enregistreur. 170 GEORGE ANSIAUX. Cette expérience montre aussi que le centre d'expiration supporte mieux l'action du froid, et est plus difficilement exci- table que le centre d'inspiration (Marckwald). Il faut rapprocher ce résultat de celui obtenu par M. Fre- dericq dans l'excitation du vague chez des lapins à bulbe refroidi : là, l'arrêt en expiration est des plus caractéristiques et absolument constant. 9" La respiration linit par s'arrêter tout à fait. Cet arrêt de la respiration survient toujours plusieurs minutes après la ces- sation des battements du cœur. Il est dû, non à l'action directe du froid sur les centres respiratoires, mais à l'anémie des centres, qui est la conséquence de l'arrêt du cœur. B. — Modifications observées dans la circulation. 1° Pression sanguine. — Nombre de Pulsations, La première aspersion d'eau froide a toujours pour consé- quence immédiate une hausse de la pression et un ralentisse- ment des pulsations (François Frank, Marey, Bence Jones et Dickinson, etc.). Ces variations s'effectuent avec une rapidité plus ou moins grande. Si, au bout de quelques minutes, on cesse l'aspersion, la pression et le nombre de pulsations redeviennent normaux (voir fig. 1, diagramme VII). A la reprise de l'asper- sion, les nouvelles variations sont absolument comparables à celles obtenues la première fois (fig. 1). La hausse de la pression résulte de la contraction réflexe des vaisseaux périphériques et le ralentissement des pulsations d'une exagération du tonus du nerf vague : au début, ces deux phéno- mènes marchent toujours de pair. La hausse de la pression a, dans les expériences faites, une valeur moyemie de 3 centimètres de mercure ; le ralentissement des pulsations est plus ou moins prononcé. Il n'est pas possible d'établir un rapport moyen exact entre ces deux phénomènes, comme le montrent d'ailleurs le diagramme VII de la figure 1 et aussi le tableau suivant : LA MORT PAR LE REFROIDISSEMENT. 171 Chnngcmenfs observés pendant les cinq premières minutes de l'aspersion. CHIENS. HAUSSE (le la pression sanguine. RALENTISSEMENT des iiulsations No I No II No IV 3 centimètres. . . 4 _ . . . 3 - ... 3 _ . , . 3 pulsations de moins. 1 pulsation — 4 pulsations — 4 - - No VIII. . . Le mécanisme suivant lequel s'opèrent ces changements est plus ou moins perfectionné, fonctionne plus ou moins rapide- ment (Eosentlial) ; c'est ainsi que chez un tout jeune chien d'une quinzaine de jours l'aspersion n'avait pour résultat ni une hausse de la pression, ni un ralentissement des pulsations. Cette absence de contraction des vaisseaux cutanés (pression sanguine constante) expliquerait probablement en partie le refroidissement si rapide des animaux à sang chaud nouveau- nés (W. Edwards, Milne Edwards, Nassarof, Raudnitz, p. 458 et suivantes. Voir travaux de S jltmann et Tarchanoff). A la hausse de la pression sanguine du début succède une baisse plus ou moins rapide (période EF de la figure 1). A partir du point E, la pression baisse constamment (voir aussi figure 13, diagramme IV; le diagramme n" V fait seul excep- tion). A cette diminution de pression répond une augmentation du nombre des pulsations (fig. 1, période EE; à partir du point E, le nombre des pulsations diminue rapidement). La diminution de pression doit s'expliquer par une dilatation des mêmes vaisseaux périphériques. La preuve, d'ailleurs, se trouve dans l'abaissement rapide de la température, abaisse- ment qui ne s'explique que par une mise au contact, dans les parties cutanées, du sang et du milieu ambiant. Les interprétations diffèrent au sujet de cette dilatation; s'agit-il d'une " réaction „ provoquée par l'énergique contrac- 172 GEORGE ANSIAUX. tion du début, ou bien d'une " paralysie vasculaire „ provoquée par la forte impression de froid du début? (Rosenthal, Marey, Afanasiew). D'un autre côté, le refroidissement si intense de la peau (voir plus haut les expériences de Colin) n'aurait-il pas un rôle à jouer? Quoi qu'il en soit, cette dilatation constitue une circonstance défavorable à la régulation de la température et facilite le refroidissement consécutif. Jusqu'à ce moment les résultats des expériences concordent, FiG, 13. Diagramme lie l'expérience fails sur le chien n" IV. Sur la ligne horizontale est inscrii le lemps, un côté du carré représentant une durée de cinq minutes. La pression est indiquée en centimètres de mercure. Le nombre de pulsations est celui observé pendant six secondes. A droite la température. A gauche de la ligne verticale se trouve la période du début de l'aspersion. LA MORT PAR LE REFROIDISSEMENT. 173 mais dans les périodes suivantes du refroidissement U 3- a de grandes différences suivant les différents chiens, suivant la plus ou moins grande aptitude qu'ils ont à lutter contre le froid. Je n'ai pas à m'occuper ici des divers phénomènes qui se passent dans la lutte contre le froid. J'aurai seulement une remarque à faire sur les différences considérables de la durée de la lutte contre le froid chez les chiens en expérience. 25 \ — — — — — — : — — — - -^ — 55' 23 \ / ^ - 33' 1 — \ ■% / 1 s-^" \ 0/ ^' / N ^^ ,1/" ■ ^f) f-> f-.~ ^^ ^ s Ss '^O' ^ 1<3 •> ^ >^ ^i -, s ^ £*■ fifl' iS — <^'. ■^. ■V- "^o. •^ s^ \ ;?/?!' '' tw^ ^ 1 1 V "<. •^ ^ fe ^ 27? • 1S 1 1 \ *v 1 1 N ^. N \ P.,')'^ i ^'s '" >. "N V 24-^ r: ♦^ ■\ ^ )\/ i1 / 1 J t 10 'R' Ì 1 1 ^« -. .^ \ Ì \, ''■ V \ # / 7 »^ / \ — -- i 5 4' -- ^.__ ,3 i 2 ! i 1 1 0 ___ ! 1 1 1 1 ! 15'"-' 60^ yi5 Mo -j'^A^ Fio. li. Dingrunime de l'expérience faite sur le cliieii n" V. Mêmes indications que pour la figure précédente. l_h. SO m. après le début de l'expérience, la pression sanguine tombe brusquement à 0. 174 GEORGE ANSIAUX. Tous les observateurs sont d'accord sur ce fait : l'abaisse- ment de la température du cœur a pour effet de ralentir ses pulsations (Newell Martin, Lauder-Brunton, Cyon, Horvath, Schelske, Bowditch, Luciani). La plupart de ces expériences ont été faites sur des cœurs de grenouilles, ou sur des cœurs de mammifères soit extraits de la cage thoracique, soit isolés physiologiquement par ligature des artères. Sur le cœur conservé dans ses connexions anatomiques et Ijliysiologiques, cette action du froid s'exerce au bout d'un certain temps (fig. 13 et 15). L'accélération passagère des pulsations qu'on remarque à la figure 14 et que j'ai pu observer dans environ le quart des expériences, constitue une exception à la règle formulée plus haut : le froid ralentit les pulsations du cœur; mais à cette accélération correspondent les différences concordantes du côté de la respiration; les animaux présentant cette accélération accusent des mouvements respiratoires un peu plus fréquents, d'une amplitude un peu plus considérable; enfin, leur refroidis- sement se fait moins rapidement. En résumé, chez ces animaux la lutte contre le froid a une plus grande durée. Chez ces ani- maux l'action directe du froid sur le cœur (ralentissement des pulsations) s'exerce beaucoup plus tard, après le commencement du refroidissement, que chez ceux qui luttent moins contre le froid. Cette action directe du froid s'exerce quand l'animal présente une température d'environ 28» en moyenne. C'est à ce moment que le lien physiologique qui sert de régulateur à la pression sanguine semble être rompu : à la baisse de cette pression ne répond plus une accélération des pulsations ; à partir de ce moment aussi le rapport entre la courbe de la température et celle indiquant le nombre des pulsations est plus étroit (fig. 15). De plus, cette accélération passagère et exceptionnelle des pulsations cardiaques est intéressante à étudier à un autre point de vue. Cette accélération devient, en effet, un facteur prépondérant LA MORT PAR LE REFROIDISSEMENT. 175 — — — — _.. — — - - - _7 7 , ^ .N . -/Ue, f^*^« ^ ^ Z5'- l'i / ''^, L^ - > \ yji.f 1"! — -~ / \^ ^ ^J ^ PH-i 12 N 1 < -^ \\ "k ?.?.f / <- È> \ fe \\ <^ ^X„ Pf! 10 / >j. '^^ ^ ,-ii. ■— -V, 90" \j h^. •- r*^ \ ^ \ 'S /Ci' '<. \ ■ l \ 7 -" -— ' N \ i* — i 1 ^x \ y A 1 1 / i 4^ 1 1 « \ — ' l / / \ , 4 1 / \ ^ -- » i ^zn. y -"" *" ( fl _ _ ^ 15"^ 30-^ 45''- 60' M5. FiG. Io. Diagramme de l'expdrience faite sur le chien n» I. iMèines indications que pour les diagrammes précédents voir fig. i3). La p.^riode du début de l'aspersion n'est pas figurée. Durée : une dizaine de minutes. dans la valeur de la pression sanguine qui dépendait surtout, dans les premières périodes du refroidissement, de l'état de dilatation ou de contraction des vaisseaux périphériques. Le nombre de pulsations a, en effet, une influence très marquée sur la hauteur de la pression sanguine, comme le montre la comparaison des figures 13, 14, 15. A la figure 14, une accélération considérable fait hausser la pression; une 176 GEORGE ANSIAUX. accélération moins considérable ralentit la chute de la pression sanguine (comparez flg'. 13 et a5). Or c'est cette accélération des pulsations qui détruit le parallélisme inévitable entre la courbe de la température et celle de la pression (^) ; il y a, en effet, un rapport de cause à effet entre la première et la seconde, une baisse de la pression indiquant une dilatation de vaisseaux, c'est-à-dire une plus grande facilité, à ce moment, pour le sang à se mettre en équi- libre de température avec le milieu réfrigérant. Dans la deuxième période du refroidissement, la cessation de la circulation peut se faire ou d'une manière brusque ou plus ou moins insensiblement (voir flg. 13, 14, 15). La valeur de la chute peut être considérable. Chez le chien n» III, la pression tombe brusquement de 16 centimètres de mercure à 0. Avant de terminer ce paragraphe, j'ai à faire remarquer une coïncidence assez intéressante qui s'est produite plusieurs fois. A partir d'une certaine température, ai-je dit plus haut, le cœur semble subir directement l'action du froid, c'est-à-dire donc qu'à la baisse de la pression il ne répond plus par une accélération de pulsations, le froid ne permettant plus au nerf vague de fonctionner normalement. Plusieurs fois j'ai pu constater que c'était précisément à ce moment que les mouve- ments respiratoires atteignaient la fréquence qu'ils conservaient jusqu'à la fin (voir fig. 15 en A, et aussi fig. 1 : en F les pul- sations commencent à se ralentir. En F aussi les mouvements respiratoires se produisent avec une fréquence de deux pour six secondes, jusqu'à la mort de l'animal). 2^ Variations respiratoires de la pression artérielle. On sait que chez le chien, à l'inverse de ce qui se présente chez les autres animaux, à l'exception du porc cependant. (') François Franck avait déjà fail remarquer ce rapport, étroit, en signalant cependant un certain nomlire d'exceptions. Ces exceptions m'ont paru relativement assez nombreuses et ayant leur cause dans le nombre des pulsations. LA MOET PAR LE REFROIDISSEMENT. 177 on observe à l'inspiration une accélération des pulsations et une hausse de la pression (Léon Fredericq, 2). Le froid supprime cette discordance entre les variations de la pression sanguine (artérielle) et celles de la pression pleurale, c'est-à-dire, au point de vue du résultat, a la même action que l'atropine, la saignée et la fièvre (Léon Fi-edericq, 4) (voir fig. 16 et 17). La pression monte alors à l'expiration. ric. 10. Tracé supérieur : respiration ; Iracé infé- rieur : pression artérielle. Variations respiratoires particulières au chien -. accélération des pulsations et hausse de la pression à l'inspiration. FiG. 17. Tracé supérieur : respiration ; tracé infé- rieur: pression artérielle. Môme chien (n" VII). Température rectale : 27", 5 ; durée du refroidissement : -1 h. 50 m. La pression monte à l'expiration. Cette suppression ne se fait pas brusquement : souvent on peut observer une période où la pression commence à monter 12 178 GEORGE ANSIAUX. Tracé supérieur : respiration ; tracé in- férieur : pression artérielle. Chien n" VI. Température rectale : 29"; durée du refroidissement :'20 minutes. Ici l'on peut observer une accélération des pul- sations à l'expiration. En A, arrêt de l'appareil servant de point de repère. à la fin de l'inspiration, celle- ci se faisant plus lentement que l'expiration (voir fig. 18). Quant au nombre de pulsa- tions, il peut être égal à l'in- spiration et à l'expiration ; on a alors chez le chien le même tracé que chez un lapin, ou bien il y a une légère accélé- ration des pulsations à l'expi- ration. Il est presque impossible de fixer im instant précis pour cette disparition, de la discor- dance entre les variations de la pression artérielle et celles de la pression pleurale, ni même de fixer exactement une moyenne des conditions dans lesquelles se produit ce phénomène (voir le tableau suivant). CHIENS. Temps au bout duquel les va- riations respi- ratoires dispa- raissent. © u -ti <]3 NOMBRE des mouve- ments res- piratoires pendant 6 secondes NOMBRE des pulsations pendant 6 secondes. li w •£ 1 iNo V. . . No VII . . No III . . No VI . . 50 minutes. 30 - 20 - 15 — 29o 28o 34o 35o 3 1-/, 2 19 10 18 15 23 cent. 14 cent. 19 cent. 16 cent. LA MORT PAR LE REFROIDISSEMENT. 179 Cette disparition est certainement indépendante de la hauteur de la pression. Elle coïncide avec le ralentissement des mouve- ments respiratoires et un certain degré de refroidissement. C. — Modifications de la temjjérature rectale cm cours du refroidissement. J'ai montré les rapports de la courbe de la température avec celle de la pression artérielle. Envisagée en elle-même, cette courbe présente deux parties généralement bien distinctes (voir fig. 13 et 14). La première période de refroidissement est une période de refroidissement rapide ; dans la seconde, le refroidissement est beaucoup plus lent : ceci est parfaitement naturel et conforme, d'ailleurs, à la loi de Newton. On a souvent cité la variation dans le nombre des pulsations comme intervenant d'une façon importante dans la régulation de la température. AValther (8) avait même établi comme une des lois du refroidissement que la vitesse du refroidissement était en rapport avec l'activité du cœur. Cette opinion a été également soutenue par Landois (Lelirhuch der Pinjsiologie, 1889. p. 415 et 416), Paul Bert et Liebermeister. Outre son peu de probabilité a priori, cette opinion est cumplètement en désaccord avec les faits. Un ralentissement dans les pulsations aurait donc pour conséquence un ralentissement correspondant dans la vitesse du refroidissement. Si, en utilisant les résultats donnés par mes expériences, on trace au-dessus d'une ligne horizontale (fig. 19), la courbe de la diminution de la température, au-dessous, celle indiquant le ralentissement progressif des pulsations, on remarque que les deux lignes divergent également ; d'après la loi de Walther, plus la ligne inférieure (pulsations) s'écarterait de la ligne du 0", moins la courbe supérieure (température) devrait le faire ; il n'en est rien ; la loi est complètement inexacte, on doit en renverser les termes et dire, comme je l'ai indiqué déjà plus haut, confirmant les conclusions de plusieiu's 180 GEORGE ANSIAUX. physiologistes, que la diiiiinntion de l'activité du cœur est en rapport direct avec la rapidité de l'abaissement de la tempé- rature. }3 t r^ • s ■'/ 6 5 \4- 3 2 1 \ 0 I ' 2 ,■ 3 4- , Ó ■ 6 ' 7 8 h lo 11 12 13 1 CL < ,* r,V^ & ^ F ,' ^é>} K <>> 1 } / / h 1 / / 1 / / — t / / / f / r / / / ^ _ ^ ■ - . -^ <' / ??. /: .^ 1 ._-;: — -- — ^ ^ ■?»». "n^ ,_ \ \ \ "-N ^ ^^ i'. ï \ \ ''^ /^ ^ \ \ -- \ % \ \ \ , / \ \ Si- V ^ ^^>- V. % f^: "N, — 1 ■ '*. ^ FiG. 49. Pour la diirde de l'expérience, chaque côté du carré répond à 3 minutes. Le tableau monire le résultat des observations pendant deux quarts d'heure (deuxième et troisiònie de la durée du total refroidissement). Si je me suis peut-être trop étendu sur une chose qui paraît si naturelle, c'est que, partant de cette proposition fausse, Paul Bert en a tiré les conclusions suivantes : LA MORT PAR LE REFROIDISSEMENT. 181 1" Un animal tué se refroidit plus lentement qu'un animal vivant ; 2" La saignée diminue la vitesse du refroidissement ; 3" L'excitation du nerf vague aurait le même effet. J'ai eu malheureusement connaissance un peu tard de ces conclusions, qui ont fait l'objet d'une communication à la Société de biologie ; je ne m'occuperai ici que de la première de ces propositions ; quant à la troisième, François Franck en a démontré l'inexactitude. A première vue, il ne paraît pas facile d'expérimenter sur une pareille donnée ; mais l'oblitération de l'aorte à un niveau convenable, suivant le procédé employé au laboratoire de Ludwig (Stolnikow), modifié par Léon Fredericq, permet de frapper de mort la partie postérieure de l'animal et d'y obser- ver la marche de la température. L'appareil est des plus simples : il se compose d'une sonde en métal, à une des extrémités de laquelle on fixe solidement un petit morceau (environ 2 centimètres) de tube de caoutchouc fermé à l'autre bout. L'appareil est introduit dans l'aorte thoracique descendante par la carotide gauche, maintenu par une ligature à une hauteur convenable ; à l'aide d'une seringue chargée d'eau et reliée à la sonde, on distend en forme d'am- poule le tube de caoutchouc et on oblitère ainsi complètement l'aorte ; comme moyen de contrôle, on place un manomètre dans l'artère fémorale. Cette opération a pour résultat de diviser, si l'on peut ainsi s'exprimer, l'animal en deux parties, une partie supérieure vivante, une partie inférieure morte (la paralysie de l' arrière- train est presque instantanée). Si alors on refroidit l'animal par immersion dans l'eau froide, en prenant toutes les dix minutes la température du rectum et celle de l'œsophage, on observe chaque fois l'abaissement plus rapide de la température rectale (partie morte), abaissement qui s'explique par ces deux faits : paralysie musculaire de r arrière-train, absence de circulation. Il arrive cependant un moment, dans le refroidissement, où les courbes des tempéra- 18^ GEORGE ANSI AUX. tures rectale et œsophagienne, après avoir divergé à partir d'un point commun, se rapprochent et finissent par se con- fondre : les deux parties de l'animal se retrouveraient à peu près dans les mêmes conditions vis-à-vis du milieu réfrigérant. Les expériences faites à ce sujet ne sont pas assez nom- breuses pour démontrer ce fait très intéressant d'une façon incontestable; des études ultérieures devront rechercher exacte- ment le point de réunion des deux températures, qui m'a paru situé vers 22-25o C. Bemarque. — Les expériences précitées permettent de montrer que l'inégale distribution du sang n'est pas une cause de mort, comme Horvath l'avait prétendu (4, 5). D'après lui, dans la mort par le refroidissement, la majeure partie du sang s'amasserait dans la cavité abdominale par suite de la paralysie des intestins et amènerait ainsi une anémie des parties supérieures; l'oblitération de l'aorte à un niveau élevé supprime cette cause ; on ne remarque pas de changements notables dans les différents phénomènes qui précèdent la mort. On ne trouve pas non plus une quantité de sang anormale, soit dans le foie, soit dans les intestins, à l'autopsie de chiens morts de froid sans avoir subi l'oblitération. (Voir aussi Winternitz, p. 193.) Pour terminer ce qui concerne la marche de la température dans les expériences de refroidissement, j'ajouterai qu'il est absolument impossible de conclure des particularités de la courbe de la température à la durée de l'expérience; la durée de l'expérience n'a pas non plus d'influence sur la température au moment de la mort : pour deux chiens, par exemple, la mort survenait au bout de deux heures et un quart ; les tempé- ratures différaient de plus de huit degrés. On peut fixer comme moyenne pour la température finale, 22» C. à 24° C. ; la plus basse atteinte a été 14» C; la plus haute, 280 C. La durée totale du refroidissement, dans les conditions où je me suis placé, présente une moyenne d'une heure trois quarts à deux heiu'es; elle varie d'une à trois LA MORT PAR LE REFROIDISSEMENT. 183 heures. Ces chiffres n'ont pas grande importance, les variations individuelles, les circonstances ayant ici beaucoup plus d'im- portance que partout ailleurs. D'après un grand nombre d'auteurs (Hoppe-Seyler, Pfliiger, etc.), l'aspersion d'eau froide amènerait une élévation pas- sagère de la température au début de l'expérience. Colin déclare ne jamais l'avoir observée. Pour ma part, sur une trentaine d'expériences, je ne l'ai remarquée qu'une fois : l'augmentation était d'environ % de degré. D. — Quelques remarques faites à Vautopsie. 1" La couleur du sang artériel et veineux est un peu différente de ce qu'elle est à l'état normal : le sang artériel a une couleur vermeille ; le sang veineux est moins sombre qu'à l'état normal sur le vivant; suivant l'expression de Quinquand : " il s'artérialise „ 2, p. 366. (Ogston, Eulenburg, Claude Bernard.) C'est peut-être un des rares caractères constants qu'il soit permis d'observer. Ces résultats concordent avec ceux obtenus par Falk dans ses expériences sur le sang soumis au refroidissement en dehors de l'organisme. 2" Si on ouvre la poitrine immédiatement après la mort, on peut constater encore la contraction des oreillettes, qui se présente pendant quelque tem[)S avec une assez grande régularité; une excitation très légère suffit pour les provoquer. Deux fois j'ai observé les faits suivants : Une excitation de l'oreillette droite amenait une contraction des deux oreillettes, des veines pulmonaires et des veines caves supérieure et inférieure dans leurs portions voisines du cœur. L'excitation de n'importe laquelle de ces parties (veines ou oreillettes) produit une contraction générale. L'excitation se transmet avec un plus grand retard de l'oreillette gauche à la droite qu'en sens inverse. 184 GEORGE ANSIAUX. La tétanisation d'une oreillette amène le delire de cette oreillette et quelques contractions isolées dans l'autre. L'excitabilité des veines diminue rapidement, beaucoup plus vite que celle des oreillettes. Pour celles-ci, le fait suivant donnera une idée de cette diminution ; à l'ouverture de la poitrine, il suffit, pour obtenir une contraction, de passer légèrement le doigt sur l'oreillette : au bout d'une demi-heure, il faut un courant électrique fourni par deux éléments (Chariot de du Bois-Reymond). Les ventricules montrent la contraction idio-musculaire, mais ne battent plus ni spontanément, ni à la suite d'une exci- tation extérieure. 30 A la différence des muscles striés, les muscles lisses des intestins semblent avoir perdu leur excitabilité. Les mouvements péristaltiques reparaissent spontanément dans une anse intestinale que l'on réchauffe. (Faits déjà signalés par Horvath et Calliburcès.) § 4. — Conclusions. Cause de la mort par le froid. Giez tous les chiens on observe la persistance des mouvements respiratoires après la cessation de toute circidation {yressiooi artérielle réduite à 0). La durée de cette persistance varie de deux à six minutes. Parfois la chute de la pression à 0 se fait sans que l'on re- marque rien du côté de la respiration. Le nombre de mouve- ments respiratoires peut quelquefois augmenter ou se ralentir. Dans les dernières périodes du refroidissement, on peut parfois observer immédiatement, avant ou après la cessation de la circulation, une augmentation considérable du nombre de mouvements respiratoires ; d'après Horvath et d'autres auteurs, cette sorte de convulsion respiratoire se présenterait souvent: ce n'était pas le cas dans les expériences que j'ai faites. Cette persistance de la respiration malgré l'anémie cérébrale peut papaître paradoxale, si on la compare à ce que l'on obtient LA MORT PAR LE REFROIDISSEMENT. 185 chez un lapin auquel on lie les vertébrales et les carotides : convulsions et cessation presque immédiate de la respiration ; il n'y a là cependant rien d'étonnant : le froid semble, en eflfet, transformer les animaux à sang chaud en animaux à sang froid, comme l'avait déjà fait remarquer Claude Bernard, s'appuyant surtout sur les observations médicales de Magendie et de Doyère sur les cholériques. D'après ce dernier, " la vie per- sisterait, en quelque sorte indépendamment de ses caractères chimiques ordinaires : le cœur ne fonctionne plus, les artères sont vides, la respiration est presque entièrement supprimée et cependant le moribond entend, voit et parle (^). „ " Chez la grenouille, dans son état ordinaire, la vie peut continuer un certain temps après l'arrêt de la circulation. „ (Cl. Bernard, 1, p. 162.) Il en est de même chez un chien dont la température a été fortement abaissée il présente une sorte de poikilothermie artificielle, suivant l'expression de Claude Bernard; ce qui confirme cette manière de voir, c'est la remarque suivante que j'ai pu faire dans les expériences : la durée de la persistance de la respiration, après l'arrêt du cœur, semble être en rapport direct avec la température atteinte ; ainsi à 14° C. elle peut être de dix à douze minutes ; à 22» C, de deux minutes (^). La cause de la mort par le froid est donc Varrei du cœur, cet arrêt amenant une anémie cérébrale ( Walther), anémie se présentant ici avec des caractères particuliers. Pour Colin, le cœur constituerait Vultimum moriens ; il n'en est rien ; dans les cas les plus favorables, on observe quelques contractions faibles et espacées après la chute de la pression artérielle à 0, mais ces pulsations, ou plus exacte- ment ces contractions, n'ont aucune influence sur la circulation générale, et d'ailleurs elles cessent toujours avant la respiration, C) Cité d'après Cl. Bernard {Chai, auimale, p. 287) (*) Sous ce rapport, l'élude du refroidissement chez les nouveau-nés serait très intéressante: les jeunes animaux supportent mieux un froid intense, tout en se refroidissant beaucoup plus vite, se rapprochant en cela des animaux hibernants et des animaux à sangfroid. 186 GEORGE ANSIAUX. OU bien on observe dans les ventricules des trémulations irré- gulières (contractions vermiculaires de Cyon, délire du cœur). Tout ceci doit donc faire rejeter toute idée d'asphyxie ; ce qui cependant a contribué également à répandre cette opinion (voir Exposé historique), ce sont les expériences de réchauffe- ment par la respiration artificielle de Walther. Je ne me serais pas arrêté à la discussion de cette opinion, aujourd'hui que nous savons que la respiration artificielle active est un moyen de refroidir un animal, si je n'avais trouvé cette opinion reproduite dans la Beal-Encydoimedie, d'Eulenburg, et le Traité de xiliysiologie, de Landois (1889, s. 429). Walther prend la température dans l'oreille ; c'est dans les parties les plus éloignées du cœur que la diminution de pression fera surtout sentir ses effets, d'où refroidissement rapide; la respiration artificielle favorise d'une façon mécanique le travail du cœur (Rosenthal) {}), le sang circule de nouveau dans les parties précédemment plus ou moins exsangues, d'où leur ré- chaufferaent (environ 10" (1 d'après Walther). En réalité, ce n'est qu'une facilité de plus pour le sang à se refroidir: Horvath a remarqué, en effet, que les animaux chez lesquels on entretient la respiration artificielle atteignent plus rapidement une tem- pérature plus basse ; au point de vue pratique, il y aurait donc là toute une série d'études intéressantes à faire; la respiration artificielle d'air chaud et une application plus considérable de la chaleur qu'on ne le fait généralement (évidemment quand il n'y a pas eu de parties congelées) seraient, comme AValther le recommande d'ailleurs, les meilleurs moyens de rappeler l'organisme à la vie en le ramenant à sa température normale. En résumé donc , le froid ii' amène pas d'asphyxie, ne para- lysant ni les centres respiratoires, ni les nerfs respiratoires. (') Rappelons ('gaiement à ce sujet les exp^^riences de Bohm qui prétend que la respiration artificielle et la compression rythmique du cœur seraient suffisantes pour ranimer le cœur ayant cessé de battre même depuis quarante minutes. (Cité d'après Landois, loc. cit., s. 789-790.) La pulsation cardio-œsophagienne chez l'homme, LE Docteur Eenest SAROLEA. § I. — Historique. Dans r étude générale qu'il a publiée sur les mouvements respiratoires, Rosenthal (^) note incidemment les petites ondu- lations que l'on observe sur les lignes d'ascension et de descente des graphiques respiratoires pris chez les Mammifères, au moyen d'une sonde œsophagienne reliée à un tambour à levier de Marey. La courbe descend à chaque inspiration et monte à chaque expiration ; à cette courbe respiratoire se superposent de petites ondulations à peine marquées. Ces dernières, d'après Rosenthal, " sont dues aux variations de volume du cœur „. Kronecker et Meltzer ont fait l'observation suivante, au cours de leurs recherches sur la déglutition (^) : Meltzer intro- duit chez l'homme, dans l'œsophage, une sonde assez ferme, dont l'ouverture inférieure est fermée par un petit ballon à paroi mince et élastique. Avant de relier à un tambour à levier de (•) Heniiaììux Ilandbiicli lier l'Iiijsiolotjw, IV. Bil II. Th. p. 2^7. (•-) Der ScliliickiiiecliaiiUinus^ seine Ene7.Z teTzloTt V V - KiG. 1:2 el 13. Tracû CitrtlioL;r:i|iliiiiue pris chez W. G. au moyen de la sonde Jœso|)hagieiiue (35 ('1^37,3 ceiiliinutres). Une autre particularité que présentent la plupart de ces graphiques, c'est un degré extraordinaire de complication. Beaucoup d'entre eux laissent apercevoir sept, voire même huit ou neuf ondulations positives (fig. 14) alternant avec autant d'ondulations négatives. /f y •A Ai J \r j 1 / uu r / r^ / 1 V FiG. 14 et 13. Exemples de la eoiiiplicalioii de cei'laiiis cardiogrammes œsophagiens. 198 ERNEST SAROLEA. Nous sommes loin, on le voit, des trois ondulations du tracé considéré comme type par Martins. Cette diversité et cette complication rendent à première vue fort difficile la tâche consistant à rechercher le type commun à tous ces tracés, et à rapporter les unes aux autres les ondulations des différents tracés. Cette tâche est considérable- ment facilitée si l'on a soin de prendre en même temps que le tracé œsopliagien un tracé du choc du cœur à l'extérieur ou un tracé du pouls radial. On établit ainsi le synchronisme des ondulations du pouls œsophagien avec les ondulations dues à la systole auriculaire et ventriculaire et à la pulsation artérielle, qui est une émanation de cette dernière. Les tracés qui, à première vue, paraissaient totalement différents, se montrent alors composés des mêmes éléments et se laissent rapporter à un type commun. Un type fréquent et caractéristique est celui où une ondu- lation négative, pinson moins étendue, câ! (fig. 16), se produit pendant la plus grande partie de la systole ventriculaire. Cette ondulation négative débute brusquement en c', et atteint en fort peu de temps sa plus grande déclivité (qui constitue le point le FiG 10. Traces siniullanés du cardiogramma œsophagien S. 0. cl du pouls mdial (recueillis chez J. H. âgé de 60 ans, héniiplógifjuc sans signes li'alTeclion car- diaque). crf, p\ilsalion artérielle principale ; t'(/', pulsation négative œsophagienne qui lui correspond. LA PULSATION CARDIO-ŒSOPHAGIENNE CHEZ L HOMME. 199 plus bas de toute la courbe) ; puis le tracé se relève lentement en présentant une série de saccades. L'ensemble de cette dépression rappelle beaucoup, dans certains cas, un tracé spliygmograpliique ordinaire renversé. Le début c' de cette pulsation négative retarde de quelques centièmes de seconde sur le début h de la systole ventriculaire, mesuré sur le tracé du choc du cœur : il paraît coïncider exactement avec le moment de l'ouverture des valvules sigmoïdes de l'aorte et avec la pénétration dans ce vaisseau de l'ondée sanguine du ventricule. ^1 ^' IJ- \ Secondes — ^ c' __J^ ± FiG. n. Tracti du choc du cœur (l''« ligue) pris à l'extérieur au moyen du cardio- graphe de Marey et trace de la sonde œsophagienne (2''e ligne) (J. D., 52 ans, bronchite). Cette pulsation négative qui débute après le commencement de la systole ventriculaire se prolonge généralement au delà de la fin de cette systole, et se rattache au début de la pulsation principale suivante par une ligne sinueuse présentant une série d'ondulations. Deux au moins de celles-ci s'inscrivent avant la fin de la systole ventriculaire ; elles correspondent approximativement, comme temps, aux ondulations qui se voient sur le plateau systolique ventriculaire du tracé du choc du cœur. 200 ERNEST SAROLEA. Parmi les ondulations post-systoliques négatives qui suivent la fin de la systole ventriculaire, il en est une qui paraît coïncider avec la dépression du tracé du choc du cœur correspondant à ce FiG. 18. Curdiogramiiie externe (explorateiii- à co(|iiille «le Marey) et cardiogi'amme œsophagien (J. n., fj^i ans). i Y f: jJ>econ(ies_J\ , __A A A_ FiG. 19. Cardiogramme externe et caidiogramme œsophagien (J. D., i);2 ans). LA PULSATION CARDIO-ŒSOPHAGIENNE CHEZ L HOMME. 201 queMarey a appelé le vide post-systoliqiie; les autres coïncident avec les ondulations du tracé spliygmograpliique qui suivent l'ondulation dicrote. Leur nombre ne paraît pas constant. cJtoc ) Ann. and Mayaz. of Naliir. llisi. 1877, |). 2:20. (-) Loc. cit., p. "l'ili. 280 JULES WAGNER. de quatre de ces organes dans la structure des gonophores et il suppose que trois d'entre eux sont devenus inutiles. S'il en était ainsi pourquoi le tentacule restant se serait-il allongé de façon à suppléer à l'atrophie d'organes superflus. Comme je l'ai déjà dit, il est peu probable que le Monohracliiimi puisse se servir de son tentacule pour saisir sa nourriture, enfoui qu'il est dans la vase. Il me paraît lieaucoup plus naturel de rechercher la cause de ce développement extraordinaire dans les circon- stances qui ont produit également l'allongement si considérable des siphons des Tellines. La Telline qui porte les colonies de Monohracldum s'enfonce dans la vase, à la surface de laquelle l'une étale ses siphons et l'autre, son tentacule ; mais, comme un organe de préhension est inutile à l'hydroïde, trois des appendices ont disparu, tandis que le quatrième s'est allongé et a pris l'apparence vermiforme. Cette atrophie et ce développement anormal sont donc deux phénomènes tout à fait indépendants l'un de l'autre. Bien que l'on n'aperçoive extérieurement aucun indice d'hypostome à l'extrémité de l'hydranthe, comme l'avait déjà reuiarqué Méréjkowsky, je conserverai cependant cette déno- mination parce que la structure de cette partie est analogue à celle de l'hypostome des autres hydroïdes. On ne trouve aucune trace de calice ; le périsarc de l'hydro- rhize se continue insensiblement dans le périsarc de l'hydranthe et diminuant de plus en plus, devient la mince cuticule qui revêt le polype entier. A sa base, l'hydranthe est, comme l'hydro- rliize, recouvert d'une couche de vase. Pour terminer cette description générale de la colonie, je ne crois pas superflu de mentionner trois cas d'anomalie que j'ai rencontrés : dans l'un deux, qui s'est présenté plusieurs fois, le tronc ne portait pas le moindre indice de tentacule ; dans un autre, j'ai observé un individu muni de deux ouvertures buccales bien formées ; enfin j'ai trouvé un polype complètement déve- loppé, mais sans ouverture buccale à son extrémité, quoique un examen attentif m'en montrât une ayant l'aspect d'un bourgeon proéminent et placée de côté, près du tentacule. MONOBRACHIUM PARASITICUM MÉRÉJK. 281 H. Price (^) a démontré que les liyclraiitlies " polystomates „ de Cordylopliora lacmfris doivent cette anomalie à des blessures produites par des crustacés munis de pinces. II. — Structure fflSTOLOciiQUE des Hydranthes. L'edoderme des hydranthes et des pseudonématophores est constitué par des cellules musculo-épithéliales. L' epithelium est plus épais sur le corps de l'hydranthe (fig-. 3), où les cellules atteignent à peu près 0.0291 millim. de hauteur, et plus mince sur le tentacule (fig. 9). Les cellules ectodermiques les plus élevées se trouvent dans la tête des pseudonématophores (fig. 6, 0,0624 millim.). En cet endroit, beaucoup de ces cellules changent d'aspect : leurs bases s'amincissent, tandis que leurs extrémités périphériques s'élargissent graduellement (fig. 6, a), ce qui est dû à la forme plus ou moins sphérique de la tête du pseudonématophore. Les cellules dont je parle sont désignées sous le nom de cellules de soutien (Stiitzzellen des auteurs allemands). Toute cellule ectodermique semble pouvoir se transformer en cellule de soutien; il s'ensuit que cette dénomination est tout à fait arbitraire. Les cellules ectodermiques de la base de l'hypostome sont aussi transformées en " cellules de soutien „. Le contenu des cellules ectodermiques est finement granulé et devient d'un brun intense par l'action de l'acide osmique. Les noyaux (0,0125 millim.), placés presque au centre, ont une forme arrondie, un peu allongée dans le sens de la longueur de la cellule. Le nucléole est tantôt absent, tantôt nettement dessiné (fig. 9). Il me semble que les réactifs modi- fient la structure du noyau, car les nucléoles sont presque toujours très apparents (fig. 9) lorsque les objets ont été traités par un mélange d'acide osmique et d'acide chromique, tandis (•) H. Price. Polijxtoinntoiis condition of Cordyl. Uicuairis. Quart. Journal, v. XVI, N.-S. 1876, p. "2^. 282 JTJLES WAGNER. qu'ils ne sont ordinairement pas visibles par l'action du sublimé (fig. 2) et du liquide de Perenyi. Les rapports entre les cellules et leurs fibres musculaires longitudinales sont les mêmes que chez les autres hydroïdes. Près de la base de l'iiydranthe, au point où celui-ci se continue dans l'hydrorhize, les cellules ectodermiques pré- sentent des vacuoles : la plus grande partie du contenu cellu- laire semble être refoulée vers le périsarc, tandis que le reste tapisse, en mince couche, la membrane propre ; ces deux parties sont reliées par des filaments protoplasmiques. Les noyaux se montrent parfois dans la couche externe et ils changent alors de position, leur axe longitudinal devenant parallèle à la surface de l'hydranthe. On peut considérer ces cellules comme des éléments en voie de dégénérescence; elles sont surtout abon- dantes dans l'ectoderme de l'hydrorhize. La couche sous-épithéliale de l'ectoderme fait presque com- plètement défaut sur le corps de l'hydroïde, sur le tentacule et sur les pseudonématophores ; elle est, au contraire, bien déve- loppée à la base de l'hydranthe et en beaucoup de points de l'hydrorhize. A la coupe, celle-ci montre un grand nombre de noyaux dont la disposition indique plusieurs couches de cellules à contours invisibles ; entre les noyaux se trouvent çà et là des capsules de nématocystes. La couche sous-épithéliale de la base de l'hydranthe, des gonophores et de plusieurs points de l'hydrorhize est littérale- ment bourrée de ces capsules aux divers stades de leur déve- loppement. D'un autre côté, je n'ai jamais observé de jeunes capsules, ni sur le corps des hydranthes, ni sur les têtes des pseudonématophores. Cette absence de jeunes nématocystes dans le corps des hydranthes a déjà été constatée (^) et l'on a cherché à s'expliquer le mode d'apparition de ces éléments (^). (') JiCKEU a constaté leur absence chez Cladnuema, Corijne^ Gemmaria^ Cnmpa- ìudaritt, Obclia^ Plnmularia, Lofoat, Eudeudrium. (-) JiCKELl. Ueb. d. liisiol. Dau. V. Eudeudrium. Ehrb(j. iiiid Uijdra. Morphol. Jahrb. T. VIII, 188^2, p. 879. MONOBRACfflUM PARASITICUM MÉRÉJK. 283 H est certain que la totalité des nématocystes qui, complètement développés, seront nécessaires à la vie de l'hydranthe, se trouve déjà dans le bourgeon de l'hydroïde. Je pense que l'animal possédant toujours plus de nématocystes qu'il n'en a besoin, riiydrorhize ne contribue pas à en augmenter le nombre. On peut voir sur la fig. 3 (qui représente une coupe transversale de l'hydranthe dans la région du cercle des nématocystes) que la plupart de ces formations n'arrivent pas à la surface et ne peuvent fonctionner si l'on vient à toucher l'hydroïde ; la preuve en est donnée par la présence dans leur intérieur du filament enroulé, lequel n'a pas même été projeté par suite de l'action du réactif employé (solution concentrée de sublimé chauffée à 50" C). Un seul nématocyste a lancé son filament (a). D'autre part, la même figure montre que trois de ces éléments seulement touchent à la surface. A mesure que les nématocystes les plus superficiels ont projeté leur dard, d'autres arrivent à la surface pour les remplacer. La plupart des capsules restent dans riiydrorhize, sans fonctionner, pendant toute la vie de l'animal. Grâce à cette circonstance, les diverses parties de l'hydrorhize peuvent, à tout instant, donner naissance soit à un nouvel hydranthe, soit à un pseudonématophore abondamment pourvus l'un et l'autre de nématocystes. Ces éléments dispersés çà et là, en petit nombre, sur le corps du Monohrachium sont très abondants dans les têtes des pseudonématophores et à la base de l'hypostome oii ils forment un véritable anneau. Les coupes pratiquées en ces points intéressent souvent les cellules dans toute leur longueur et l'on voit alors très distinctement le prolon- gement central de la cellule ; il est d'apparence fibrillaire et l'on peut parfois le poursuivre jusqu'à la membrane propre (fig. 3 b, et 5). Je n'ai jamais pu constater une union entre les fibres muscu- laires et ce prolongement qu'il est plus rationnel de considérer comme muscle ou simplement comme filament de la membrane cellulaire, que comme nerf. Les noyaux des cellules à nématocystes ne présentent aucune régularité quant à leur situation. Ils ont la forme 284 JULES WAGNER. d'une calotte serai-elliptique, dont la base repose sur la capsule; en coupe transversale, ils ont l'aspect de triangles (fig. 3). Ils se colorent plus fortement que ceux des cellules ordinaires de l'ectoderme et, à leur intérieur, on peut toujours observer un nucléole d'assez grande dimension. Ce qui les caractérise encore, c'est leur structure presque homogène, tandis que les noyaux des cellules épitliéliales sont nettement réticulaires (c'est-à-dire que les granulations de la cliromatine sont très distinctes). Monobrachium ne possède qu'une seule sorte de némato- cystes : ce sont des capsules de forme ovoïde (0,0208™™ de long sur 0,0125 de large) renfermant un filament enroulé en spirale, dont la base, légèrement renflée, présente plusieurs fortes épines; ce filament est traversé, dans toute sa longueur, par une ligne spirale (^). Il est à noter que ces capsules n'ont pas de cnidocils. On sait que chez les hydroïdes à tentacules renflés à l'extrémité, les nématocystes ont la foi'me d'un haricot (^) et sont dépourvus de cnidocils; une seule exception a été observée par Korotneff" (^), chez Myriothela, où les nématocystes sont de grande taille, de forme ovoïde, avec un filament plié et non enroulé en spirale, filament que cet auteur considère comme un organe de sens {^). Par ce qui précède, on voit que les nématocystes de MonohrmMmn constituent une sorte de stade transitoire entre les capsules à filament plié et les capsules habituelles. Il est évident que ces organes peuvent fonctionner sans l'aide de cnidocils; on ne doit donc pas considérer l'absence de cnidocils chez Monobrachium comme constituant un caractère (') V. LiiNDENFELi). Ctjiinea miaskuUi. Zeitsch. f. Wiss. Zool. T. 37, i88!2, p. 479. PI. XXIX, lig. -29. C'} JiCKEU {Der Bail lier Hydroulpnl) les décrit chez Cladou. radiatiim (p. 002;, Coryne Greffci (p. 607) et Gainiiaria iiiiplcKt (p. 014). (*) A. Korotneff. lissai d'une étude comparée des Coelentérés [en russe). Part. H. Bulletin (le la Société des amis des Sciences naturelles de Moscou. T. 37, 1880, p. 17. (*) Ibidem, p. 19. MONOBRACHIUM PAKASITICUM MÉKÉJK. 285 primordial : il est plus probable que ces éléments ont existé jadis et ont disparu dans la suite, à cause du séjour de l'iiy- droïde dans la vase. Souvent j'ai rencontré, dans l'hydrorliize, des nématocystes incomplètement développés, avec un filament court, faisant saillie à la surface (flg. 4). Jickeli a déjà décrit de semblables capsules (^) ; il les considère comme de jeunes phases du déve- loppement et il croit que, au début, le filament se trouve en dehors des nématocystes et que ce n'est que plus tard, par suite de la difi'érence qui existe entre la pression extérieure et la pression intérieure, que ce filament rentre dans la capsule. Quant à moi, je suis plutôt disposé à y voir des produits artificiels, surtout si je tiens compte de la présence de vacuoles dans leur contenu (fig. 4), vacuoles remplies d'un liquide qui ne change pas par les matières colorantes. Je pense que par l'action des réactifs, des capsules encore jeunes peuvent pro- jeter à l'extérieur une partie seulement de leurs filaments. En général, l'ectoderme des hydranthes, comme celui des pseudonématophores, se distingue par le faible développement de la couche sous-épithéliale ; aussi n'ai-je pu trouver chez Monohradùam aucun indice de cellule ganglionnaire, quelle que fût la méthode employée. Je ne me baserai pas là-dessus pour nier d'une façon absolue l'existence de cellules nerveuses chez cet hydroïde, car ce résultat négatif pourrait être attribué à l'état très imparfait des procédés de recherche actuels. Les noyaux de l'ectoderme avaient tous la même structure et, si parfois on constatait quelque légère variation, la présence de tous les stades transitoires possibles montrait qu'il ne fallait pas en tenir compte : l'absence ou le faible développement des cellules ganglionnaires différenciées s'expliquerait parfaitement par le mode de vie du Monohrachium. Il est tout naturel que si le système nerveux central fait (') Jickeli. L'b. d. lust, liauv. Eudemlrium, \t. 39'J. 286 JULES WAGNER. pour ainsi dire défaut, les organes périphériques de perception doivent également manquer ; en effet, je n'ai trouvé chez Monobraàiium aucune cellule de sens (Sinneszellen). On ren- contre parfois dans l'ectoderme de l'hydi^anthe un ou deux noyaux accolés à la membrane propre; je ne pense pas qu'on doive les considérer comme des noyaux de cellules nerveuses, mais bien plutôt comme appartenant à de jeunes cellules ecto- dermiques. Les dernières cellules ectodermiques à signaler sont les élé- ments glandulaires qui existent dans les pseudonématophores où ils forment, autour de la base de la tête (fig. 6, c, c), un anneau identique à celui que décrit Jickeli chez Eudendrium ramosum L. (^) et Weissmann chez Eudendrium racemosum et chez Eudendrium capUlare i^). La surface extérieure de ces cellules est couverte de protubérances ; leurs noyaux, à part une légère différence de grandeur, ne se distinguent en rien de ceux des cellules ectodermiques ordinaires; leur contenu, au contraire, se colore plus fortement par l'acide osmique et par le carmin. Les cellules glandulaires ne sont sans doute qu'une variété locale des cellules ectodermiques et, comme elles apparaissent ordinairement dans les parties de l'hydroïde où le développe- ment est le plus énergique, à l'extrémité des nouveaux rameaux, par exemple, on peut en conclure que l'accroissement des pseu- donématophores se fait probablement à la base de la tête. En résumé, l'ectoderme des hydranthes et des pseudonéma- tophores de Monohrachium porte des traces évidentes d'atrophie due au parasitisme : 1» absence de la couche sous-épithéliale, 2° manque d'éléments nerveux, 3» défaut presque complet d'une différenciation dans les cellules. L'endoderme des hydranthes est constitué par des cellules de très grande dimension reposant sur des fibres musculaires circulaires. (') Jickeli. Ibidem, p. 378. (*) A. Weissmann. Ueber eigentintml. Organe p. 7. MONOBRACfflUM PARASITICUM MÉRÉJK. 287 Les cellules endodermiques ont des limites à peine visibles du côté de la cavité gastrique, où elles forment ce que l'on appelle un syncitium ; du côté externe, on distingue mieux les contours cellulaires, et cela grâce aux épaississements de la membrane propre. Le fait que les extrémités internes de ces cellules se confondent est dû à la façon dont elles prennent la nourriture solide (nutrition interstitielle) : deux ou plusieurs cellules voisines émettent des pseudopodes qui se touchent et se fusionnent. De cette manière apparaît une couche proto- plasmique digestive, toute remplie de particules nutritives et autres, et recouvrant entièrement la surface interne de la cavité gastrique. Cette structure de l'endoderme provient de la fonction de nutrition de la cavité gastrique : en eifet, les cellules endodermiques de l'hydrorhize sont déjà mieux limitées et dans les pseudonématophores, où la nourriture solide ne peut plus arriver, les contours cellulaires sont tout à fait distincts (fig. 6). Les corpuscules ou granulations que l'on trouve dans les cellules endodermiques sont ordinairement de forme irrégulière (fig. 7 et fig. 8, a), très réfringentes, ce qui leur donne un aspect de substance grasse, et elles se colorent plus ou moins fortement par le carmin ; cependant celles dont les bords sont effacés ne se colorent que très peu (fig. 8, h). Il est facile, avec de faibles grossissements, de confondre certaines de ces granulations avec les noyaux cellulaires (fig. 8), et ce n'est qu'à l'aide de forts grossissements que l'erreur peut être évitée, par suite de la structure caractéristique des éléments nucléaires. Quelques-uns de ces corpuscules présentent un aspect parti- culier (fig. 20) : ils sont de forme globulaire et à contours assez diffus ; la partie centrale se colore d'une façon très intense, tandis que des rayons plus pâles partent du centre vers la périphérie. Ils ont probablement quelque rapport avec la digestion et surtout avec les substances sécrétées par les cellules. Le protoplasme et les noyaux des cellules digestives de l'en- doderme, chez les hydranthes, ne se distinguent des cellules 288 JULES WAGNER. ectodermiques ni par leurs propriétés optiques, ni par leurs réactions micro-chimiques. Toutefois les noyaux des cellules endodermiques sont habituellement ronds et non ovalaires comme dans l'ectoderme. L'hypostome présente un autre genre de cellules (fig. 3 et 7). Ces cellules sont très allongées; leur protoplasme est plus grossièrement granulé, se colore plus fortement et ne possède pas de corpuscules ; à leur base, on observe presque toujours des vacuoles (fig. 7), de sorte qu'en ces points, les limites cellu- laires deviennent peu distinctes, tandis qu'elles sont toujours très nettes dans la partie tournée vers la cavité gastrique. Les noyaux sont situés vers la base, entre les vacuoles et sont très rapprochés les uns des autres ; sur une coupe transversale, leur ensemble apparaît sous forme d'anneau (fig. 3). Ils sont homo- gènes et moins grands que dans les cellules digestives ; ils se distingent surtout par leur forme irrégulière, souvent anguleuse. Une autre particularité de ces cellules consiste dans la pro- priété que possèdent leurs cils vibratiles de se conserver après l'action de l'acide osmique, tandis que, dans les autres régions du corps, les cellules endodermiques les perdent sous l'influence de ce réactif. On- doit attribuer ce fait à une plus grande consistance des cils vibratiles dans l'hypostome et y voir la preuve de la fonction prédominante de ces cellules : le transport de la nourriture. Ces cellules forment les ténioles caractéris- tiques de l'hypostome des hydranthes ; ils sont au nombre de quatre, rarement de cinq chez Monohrachium et affectent la forme de crêtes. On rencontre dans ces renflements, parmi les cellules allongées ordinaires, des éléments en forme de minces bandelettes qui s'imprègnent fortement par les matières colo- rantes et brunissent par l'acide osmique (fig. 7, a, a, a). Le contenu de ces bandelettes est assez grossièrement granulé. Je pense qu'il s'agit ici de cellules glandulaires, analogues à celles qu'a décrites Jickeli, chez Eudendrium (^). Il ne m'a pas été (') Ibitkm, p. 380. MONOBRACHIITM PARASITICUM MÉRÉJK. 289 possible d'obtenir de coupe entière d'une de ces cellules; il est probable que les bases, qui se perdent dans la région des vacuoles, sont très effilées et que la cellule ne devient plus large qu'à partir du noyau. Cette sorte de cellules ne montre jamais de cils vibratiles. Les cellules endodermiques de la cavité gastrique se trans- foi-ment insensiblement dans les cellules du tissu axial du tentacule. Chez presque tous les autres liydroïdes, ce tissu est séparé de l'endoderme par la membrane propre ; Tubularia pour- tant fait naître quelque doute sous ce rapport (^). C'était jusqu'ici, parmi les liydroïdes, le seul genre dont les tentacules, privés d'un canal gastro-vasculaire, renferment un tissu axial composé non d'une rangée de cellules, mais de plusieurs rangées paral- lèles. Chez Monobrachiam les cellules axiales sont également sur plusieurs rangs, mais elles sont disposées sans aucun ordre apparent (voir flg. 9, une coupe verticale à travers un tentacule). De plus, il n'y a point de limite tranchée entre ce tissu et l'endoderme de la cavité gastrique (fig. 8). Lorsque les cellules axiales sont sur un rang, comme cela a lieu chez la plupart des hydroïdes, elles sont séparées de l'endoderme de la cavité gastrique par une membrane anhyste ; chez Tubularia où elles sont sur plusieurs rangs, cette mem- brane n'existe peut-être pas ou tout au moins elle est très peu apparente, enfin chez Monobrachiimi, la membrane fait complè- tement défaut. Sur une coupe longitudinale du tentacule, on observe toujours deux rangées de cellules et l'on pourrait croire, en examinant la fig. 8, que ces cellules forment des rangées régulières; ce serait erroné, car certaines coupes transversales montrent cinq cellules, tandis que d'autres en ofirent davantage (sur la coupe représentée fig. 9 on en voit 8). Tout le protoplasme des cellules axiales s'accumule vers leur (') Voir TicHOMiHOFF {l.oc. Cit., p. 2G), bien qu'il refuse aussi aux petits tentacules (l'avoir leur tissu sdparé de l'endoderme. PI. II, (ig. -1, Z'^. 19 290 JULES WAGNER. extrémité centrale (fig-. 9) ; le noyau se trouve au contraire à la périphérie. Le protoplasme est plus grossièrement granulé que dans les cellules endodermiques de la cavité gastrique, mais cette différence est peu importante car on trouve toutes les phases de transition possibles. La membrane cellulaire qui, dans les cellules axiales typiques est d'habitude fortement développée, n'existe chez Monohrachium qu'à la périphérie des cellules (fig. 8, c), tandis que les parties centrales, par lesquelles les cellules se touchent, semblent être confondues en une même masse ; du moins on n'aperçoit pas de limites cellulaires en ces points, même sur des coupes faites à travers des objets dont la membrane propre s'était beaucoup gonflée à la suite d'une longue macération. Le centre du tentacule est donc occupé par un axe protoplasmique (d). Souvent, à la base du tentacule, une partie de cet axe (fig. 8, e) se montre dépourvue des granulations propres au protoplasme des cellules axiales : on dirait que la cavité gastrique pénètre dans le tentacule sous forme d'un cul-de-sac à contenu liquide plus ou moins granulé. Je n'ai pu me rendre compte de ce phénomène. Quant aux particularités que présente la structure du tenta- cule de Monohrachium, elles s'expliquent facilement : un tentacule aussi long ne peut être formé, à son intérieur, d'une seule rangée de cellules; il doit en renfermer un grand nombre disposées sans ordre. Le role de ces cellules est de servir, d'une part, à soutenir le tentacule, d'autre part, à transporter les liquides nourriciers. Les cellules du tissu axial situées à la base du tentacule reçoivent les substances élaborées par les cellules gastriques; de là, la nourriture passe dans les cellules axiales voisines, pour arriver peu à peu jusqu'à l'extrémité du tentacule. Comme ici il n'existe pas de voies intercellulaires, les éléments nutritifs ne sont transmis que par le protoplasme et la disposition la plus favorable pour ce but est justement celle que nous offre Monohrachium : la plus grande partie du protoplasme des cellules axiales s'accumule vers le centre du tentacule, c'est-à-dire au point où convergent toutes les cellules et y forme une masse disposée en ligne droite. Si les cellules axiales étaient MONOBRAOHIUM PARASITICUM MÉRÉJK. 291 uniquement composées de protoplasme, une semblable disposition cellulaire présenterait peu ou [)oint d'avantages; mais, comme les cellules axiales doivent, pour donner plus de solidité au tentacule, être de grande dimension et comme la plus grande partie de leur contenu, dans le but d'économiser les matériaux plastiques, est constituée par une substance aqueuse (élément mécanique), on ne peut méconnaître un avantage réel dans la façon dont sont disposées les cellules ainsi que le plasma du tissu axial. Sous ce rapport, Monohradiium présente un stade inter- médiaire entre les liydroïdes à tentacules creux et ceux dont les tentacules sont pleins. En eitet, si nous supposons que les cellules de 1' epithelium interne des tentacules de Hydra deviennent plus volumineuses, au point de se toucher au centre de l'organe par leurs extrémités, nous aurons la disposition réalisée chez Monobrachmm. Pour terminer la description histologique de l'hydranthe, il ne me reste qu'à dire quehiues mots de la membrane propre et du périsarc. La membrane propre est assez peu développée. Dans l'hy- drorhize, elle est à peine visible, mais devient plus apparente dans les hydranthes. Elle forme des espèces de protubérances ou de crêtes entre les cellules ectodermiques et surtout entre les cellules endodermiques, de telle sorte que si on enlève toutes les cellules, la surface de cette membrane montre, nettement dessinés, les contours des bases cellulaires. Cet aspect ne se voit pourtant que dans la région moyenne de l'hydranthe; il a à peu près disparu dans le voisinage de l'hypostome. La mem- brane paraît simple; elle ne montre aucune trace d'une structure fibrillaire due à la présence des fibres musculaires longitudinales dans l'ectoderme ni à celle des fibres circulaires dans l'endoderme (Jickeli, chez l'hydre) (^). Le carmin colore ordinairement cette membrane assez fortement. La mince cuticule qui recouvre les hydranthes et les pseudo- (') Jickeli. Loc. cit., fig. 12 et 13, pi. XVIII. 292 JULES WAGNER. nématopliores devient, à la base de l'hydrantlie, comme nous l'avons dit, peu à peu le périsarc de l'hydrorliize, lequel prend ici une coloration jaune. On peut y distinguer trois couches : une interne, une moyenne et une externe. Il n'existe aucun rapport déterminé entre l'épaisseur de ces diverses couches. Parfois leur nombre s'élève à quatre ; c'est lorsque dans l'hy- drorhize on en trouve déjà plusieurs. m. — Les Gonophores. Les gonophores de Monohrachium ont une forme ovoïde; ils sont placés sur de courts pédoncules. • Sur le vivant, on n'aperçoit, à travers la gonothèque, que quatre bandes obscures, de couleur verdâtre, qui représentent les quatre canaux radiaires ou plutôt leur epithelium ventral. Le sommet de la gonothèque ne porte au3un orifice. Les gonophores renferment une méduse presque complètement développée. Pour étudier en détail la méduse, il est nécessaire de l'enlever de la gonothèque, ce qui est assez difficile, ou mieux de pratiquer des séries de coupes. C'est cette dernière méthode que j'ai adoptée. L'ombrelle de la méduse présente une forme ellipsoïdale. L'ectoderme du sous-ombrelle se continue dans l'ectoderme du pédoncule. La cavité de l'ombrelle n'est pas apparente, à raison de la constriction de l'ombrelle. Cette cavité ne fait son apparition que dans les gonophores mûrs. Une saillie que l'on observe (fig. 14 sj).) à la base du gonophore proemine dans la cavité de la cloche : c'est le rudi- ment du manubrium; Méréjkowsky ne l'a pas vu. A la naissance du spadice se voit une petite excavation qui est le rudiment de la cavité gastrique ; il en part quatre canaux radiaires. Sur la fig. 13, qui représente une partie d'une coupe transversale d'un gonophore, nous voyons les sections de deux de ces canaux. Les canaux radiaires (r. c.) sont fortement développés, tandis que le canal circulaire, qui en général l'est très peu (fig. 10 c. c), ne possède chez certaines méduses aucune cavité. MONOBEACfflUM PARASITICDM MÉRÉJK. 293 Il existe deux sacs sexuels accolés à chacun des canaux radiaires (fig. 13 5. se). Méréjkowsky {^) dit que primitivement la méduse n'est munie que de quatre amas génitaux qui, par la suite, se divisent chacun en deux. Je ne puis confirmer l'assertion de cet auteur; du reste ce mode de développement n'existerait pas. Les tentacules de la méduse (fig. 10 tn.) sont à l'état rudimentaire et ne renferment aucune cavité à leur intérieur, contrairement à l'opinion de Méréjkowsky {^). Le velum est bien développé (fig. 10 vL). Passons maintenant à l'étude histologique de la méduse. L'épithélium de la face supérieure de l'ombrelle est constitué par des cellules assez élevées, comparativement aux cellules aplaties des autres méduses (^). Ces cellules sont, en outre, entièrement remplies de protoplasme (*), ce qui est dû certaine- ment, comme le montre le développement, à l'absence de substance gélatineuse dans l'ombrelle; en effet, chez les jeunes méduses, dont les parois de la cloche sont très minces, les cellules de la surface de l'ombrelle sont en même temps plus riches en protoplasme. Ces cellules ne présentent aucune particularité ni pour leur forme, ni pour leurs noyaux; certaines d'entre elles renferment parfois des capsules de nématocystes qui, à part une légère différence de grandeur, ne paraissent se distinguer en rien de celles des hydranthes. Je n'ai observé les capsules que sur des méduses traitées par différents réactifs, aussi ne puis-je rien dire relativement aux cnidocils. Je remar- querai que je n'ai trouvé dans l'hydrorhize qu'une seule espèce de capsules. Dans la méduse de Monoh-achium, ces éléments sont peu abondants et ne forment jamais d'agglomération. {') Méréjkowsky. Ann. ami Mmj. nf y^t. Hist., 18"7, p. 233. (*) Ibid., p. <2-2'2. (') G. et R. Hertwig. Des OrcjmiismuH der Medusen, p. o. F. E. SCHULTZE. Vb. den Bau von Syncoryne Sursii, p. 16. (') V. Lendknfelu. Cijanea Anascnla. led. f wiss. Zoologie. T. XXXVII, p. 475. PI. XXIX, fig. 10. 294 JULES WAGNER. Les cellules ectodermiques de la face inférieure de l'ombrelle présentent des caractères différents suivant leur position; dans les régions inter-radiaires existent des cellules musculo- épitliéliales développées surtout perpendiculairement à l'axe de la méduse, c'est-à-dire dans le sens des fibres musculaires. Leur forme, par conséquent, est celle d'un rhombe allongé. Quant au noyau, il est non seulement étiré dans le même sens que la cellule, mais encore aplati suivant la largeur de celle-ci. Cette forme de la cellule et du noyau résulte évidemment de la direction des fibres musculaires circulaires. La preuve en est donnée par le fait que les cellules situées sur les canaux radiaires changent de forme (elles ne sont plus rhomboïdales) et que dans les interstices entre les sacs génitaux d'une même paire, les cellules de la face inférieure de l'ombrelle ne se distinguent plus en rien de celles de la face supérieure. La fig. 10 représente une partie d'une coupe longitudinale de la méduse passant à gauche par la région inter-radiaire et à droite, par un canal radiaire. Si l'on compare entre elles les cellules de la face inférieure de l'ombrelle du côté droit, avec celles qui sont à gauche de la figure' (vers le haut du dessin), on verra que les premières sont plus larges, tandis que les secondes sont plus étroites et plus resserrées, de telle sorte que les noyaux ne peuvent plus se ranger en une seule ligne. Enfin, les cellules qui forment les parois des sacs génitaux se distinguent par leur forme aplatie et par la petitesse de leurs noyaux (fig. 10 et 13 ej).). Elles constituent un véritable epithelium de revêtement ou " Deckepithelium „ des Allemands. Leur épaisseur est si minime, qu'avec un grossissement insuffi- sant, comme celui à l'aide duquel a été dessinée la fig. 13 (Zeiss 4. A), les noyaux sont seuls visibles ; il faut un fort grossissement pour pouvoir distinguer autour du noyau une mince couche de protoplasme (fig. 10, ej).), que l'on remarque encore plus facilement si la coupe est oblique (fig. 10, e^.). Cela est prin- cipalement dû à ce que le protoplasme de ces cellules se colore plus vivement par le carmin que celui des œufs. Il n'existe pas de couche sous-épithéliale à la face inférieure MONOBRACHIUM PARASITICUM MÉRÉJK. 295 de l'ombrelle, chez Monobrachiiim, où je n'ai, du reste, pas non plus constaté de trace de cellule gang-lionnaire ; toutetois, à la base du velum, l'ectoderme, à la face dorsale ainsi qu'à la face ventrale, est composé de plusieurs couches cellulaires formant des amas sous-épithéliaux disposés en une espèce de double anneau (fig. 10 n, n') dont les deux parties sont séparées parla membrane sans structure du velum. Sur le velum lui-même, les cellules sous-épithéliales disparaissent de nouveau et 1' epithelium devient plus épais. Ces deux anneaux de cellules sous- épithéliales doivent être considérés comme un reste du système nerveux cirulaire dont l'état rudimentaire explique l'absence de cellules ganglionnaires sous-épithéliales à la face inférieure de l'ombrelle. Les fibres musculaires sont peu développées dans le velum et dans la sous-ombrelle et leur surface n'est pas striée transversalement. L'ectoderme du tentacule (fig. 10, tn) ne se distingue de celui de la face externe de la méduse, que par la plus grande quantité de nématocystes (ne) qu'il renferme et par la présence de cellules sous-épithéliales (a) dispersées çà et là. Si nous passons à l'étude de l'endoderme du gonophore, nous constatons que la lamelle vasculaire présente la particularité fort intéressante d'être formée par des cellules comprimées rappelant , par leur aspect , les cellules cartilagineuses (fig. 10, vs. b.). Le protoplasme de ces cellules, peu abondant, est accumulé autour des noyaux d'où il envoie des filaments en forme de rayons vers la membrane cellulaire. Le reste du contenu est un liquide clair, ne s'imprégnant pas par les matières colorantes. Les membranes cellulaires sont assez épaisses. Les cellules de la plaque vasculaire, au point où elles passent dans les parois du canal circulaire (fig. 10, ce), acquièrent plus de développement en hauteur et deviennent plus riches en protoplasme. Les cellules de F epithelium ventral des canaux radiaires (fig. 10 et 11, V, ep) rappellent déjà parfaitement les cellules endodermiques de la cavité gastrique de l'hydranthe. En comparant la fig. 12 {v, ep) avec la fig. 8, nous n'observons 296 JULES WAGNER. de différence que dans la quantité relative des granulations du protoplasme. Dans l'endoderme de l'iiydranthe, ces granulations sont plus nombreuses et celles d'entre elles qui se colorent fortement par le carmin sont plus abondantes. Par contre, dans l'endoderme des canaux radiaires, ce sont les corpuscules presque incolores et à contours diffus qui prennent sensiblement le dessus; ils donnent probablement lieu à la coloration verdâtre des canaux radiaires, sur le vivant. L' epithelium dorsal de ceux-ci renferme également des corpuscules tout à fait analogues, mais en moins grande quantité et appartenant tous à la variété qui reste indifférente vis-à-vis du carmin. L'endoderme qui compose le tissu axial des tentacules des méduses, consiste en une rangée de cellules. Les cellules axiales de l'extrémité du tentacule sont complètement remplies de protoplasme, celles de la base passent insensiblement aux cel- lules endodermiques ordinaires, qui forment des amas cellulaires près des canaux radiaires aux points où s'insèrent les tentacules (fig. 10, b.). Là, les cellules ne sont plus en une seule rangée, mais sont disposées sans ordre et leurs contours deviennent peu distincts. Ces amas cellulaires semblent être les rudiments des corpuscules marginaux sensitifs, qui font défaut chez les méduses de Monobrachium. Donc la base du tentacule n'est pas non plus séparée du reste de l'endoderme par la membrane propre. Le tentacule a évidemment commencé à s'atrophier et ainsi a acquis un caractère embryonnaire. IV. — Produits sexuels. Il n'est guère de question qui ait fait l'objet d'autant de con- troverses que l'origine des produits sexuels chez les Cœlentérés. Je ne referai pas l'analyse complète des travaux relatifs à ce sujet : les mémoires des frères Hertwig (^), de Weissmann (^), (') O. und. R. Hertwig. Ortjanismus der Meditxen. Iena 1878. (-) \Vt;issM\NN. Die E'iutehiui'j d. Sexualzelleii bei den Hydromediisen. Iena 1883. MONOBRACmUJI PARASITICUM MÉRÉJK. 297 et de Hartlaiib (^), ont donné une bibliographie très complète que je crois inutile de reproduire. Quelques mots cependant des travaux récents de Hartlaub, de Thalwitz {^) et de Ticliomiroff (^). Hartlaub a étudié trois espèces du genre Ohelia {Oh. Ade- lungi Hartl. ; Oh. helgolandica et Oh. sp.). D'après lui, le lieu primordial de formation des germes (Keimstâtte des auteurs allemands) répondrait, chez les Eucopides, aux endroits où ces éléments arrivent à maturité et se trouverait dans l'ectoderme de la base du manubrium sur les lignes interradiaires. En effet, la maturation des œufs se fait assez souvent, par anomalie, dans le manubrium (■*). De ce point, le lieu de maturation se serait transporté dans les canaux radiaires et les " Keimstâtte „ auraient suivi ce déplacement, tout en restant sur les lignes interradiaires. Ce qui prouve qu'il en est ainsi, c'est que chez Ohelia sp. les spermatoblastes procèdent des cellules du sous- ombrelle disposées à côté des spermaires qui, eux, sont placés sur les lignes radiaires (^). Chez les Eucopides actuels, il se forme en outre des spermatoblastes aux dépens des cellules ectodermiques des spermaires {^) mêmes, l'ectoderme s'y divi- sant en deux couches, l'une superficielle épithéliale, l'autre profonde spermatoblastique. Thalwitz a surtout porté son attention sur la spermatoge- nèse proprement dite. En ce qui concerne l'origine des sperma- toblastes qu'il a recherchée chez les espèces étudiées par Weissman, il confirme les conclusions de ce dernier. Thalwitz (') Haktlaub. Ileobacht. ïib.die EntxiehiaK] d. Scxiinlzellen bei Obelin. Zeitsch. fur wiss. Zool. T. Il, \8m. {-) Th. Thalwitz. Ueb. die EniwkkluiKi d. mànnlichen Kcinizellcn beid.IIydroiden. len. Zeilschr. T. i8, i88o. (') A. TiCHOMlROFF. Sur l'hixtoire du développemeut dot liydroïdes. (Russ : Mdm. d. 1. soc. (les amis des se. nat. à Moscou. T. L., livr. 2; 1887.) (*) Hartlaub. Loc. cit., p. 171. C) r. . » 182. (") » » .. 181. 298 JULES WAGNER. a fait en outre des observations sur Eudendrium capillare {}) qui, au point de vue du développement des produits sexuels, se comporte comme Eadendriiim racemosum Cav. étudié par Weissmann. Je reviendrai plus loin sur le mémoire de Tlialwitz. Ticliomiroff a pris pour objet de ses recherches Tubularia mesemhryanthemum Allm. et Eudendrium armatum Ticliom. Ses conclusions sont en opposition avec celles de Weissmann. Chez Eudendrium armatum (^), au moment de la maturation des g'onophores, l'endoderme subit, tant dans les gonophores que dans les parties avoisinantes de l'hydranthe, des modi- fications qui se manifestent par une plus grande affinité du plasma cellulaire pour les matières colorantes. Aux points oii se montreront plus tard les spermaires, les cellules endodermiques se divisent transversalement (^). Les cellules profondes résultant de cette division se multiplient activement et donnent naissance aux masses cellulaires spermatoblastiques. Celles-ci sont séparées de l'ectoderme par une lamelle fondamentale et bientôt après, une semblable membrane apparaît aussi entre elles et la portion restée épithéliale de l'endoderme. Le développement des produits sexuels femelles, Ticliomiroff l'a étudié chez Tubularia mesemhryantliemum Allm. (■^). Au moment de l'apparition du bourgeon ectodermique, les cel- lules endodermiques qui l'avoisinent se multiplient rapidement et donnent naissance à des amas cellulaires que l'auteur appelle " coussinets sexuels ,,. Lorsque l'ébauche du manubrium commence à se montrer, les cellules qui occupent le milieu de chaque coussinet émigrent à travers la lamelle fondamentale (membrana propria), jusque dans l'ectoderme du manubrium. Ce passage, Tichomiroff ne l'a pas observé directement. Il le présume en se fondant sur le fait que les coussinets sexuels diminuent de volume concurremment avec l'accroissement du (») Thalwitz. /.oc. cit., p. 430-431. (*) A. Tichomiroff. » » 3G. (■') » » .. 3o, lig. 23, (*) .. ., . 4. MONOBRACfflUJI PARASITIGUM 51ÉRÉJK. 299 bourgeon ectodermiqiie (GlockenkeiDi) et proportionnellement à cet accroissement (^). Après l'apparition des canaux radiaires, les coussinets sexuels ont totalement disparu. Une autre observation que Ticliomirolf invoque à l'appui de son opinion, c'est l'absence de tout indice de la lamelle fondamentale entre le bourgeon ectodermique et les coussinets sexuels, spécialement dans les points où, d'après l'auteur, s'opérerait le passage. Le bourgeon ectodermique s'accroîtrait, dans l'opinion de Ticliomirotf, aux dépens des coussinets. Les conclusions erronées formulées par ses prédécesseurs (-) trouveraient leur explication dans la circonstance que les coussinets sexuels, peu accusés au moment où le bourgeon ectodermique vient de naitre, ont échapiié à l'observation. L'existence de ces ébauches n'est pas cependant bien difficile à reconnaître (voir Tichomiroff, l. c, fig. 12 et 3). Deux conclusions positives se dégagent des recherches de cet auteur (^) : la première c'est que chez E. armatum Ticliom. les spermatoblastes procèdent de l'endoderme au niveau des sper- maires ; la seconde, c'est que chez Tahiilaria mesem hryanthe- muni les ovules procèdent de l'endoderme. Récemment a paru une courte note de C. Ischikawa (^) sur la formation des spermatoblastes chez Eudendrium racemosum. Ses recherches ne concordent pas avec les conclusions formulées par Tichomiroff. D'après Ischikawa, les cellules mâles pren- draient naissance dans l'endoderme du blastostyle et à la base des gonophores ; au contraire, ces mêmes éléments occuperaient à l'extrémité apicale des gonophores l'ectoderme de ces for- mations. La lamelle fondamentale constitue pour la déter- mination de la position un point de repère précieux ; les cellules mâles siégeraient ici à l'extérieur, là à la face interne de cette membrane, et pour passer d'un feuillet dans l'autre (*)A. Tichomiroff. Loc. cit., p. 6. C-) » .. - 3. (S) .. « n 59. (•) C. Ischikawa. Ueb die Absiammung d. m'ànnlich. Gcsclilechiszelleii bei End. racernoswn Car. Zeitschr. fiir wiss. Zoologie. T. 45, 1880. 300 JULES WAGNER. les cellules sexuelles traverseraient cette lamelle. Cette diver- gence dans les résultats obtenus par Ticliomiroff d'une part, par Iscliikawa de l'autre, suppose ou que les choses se passent différemment chez E. armatum et chez E. racemosum, ou bien qu'une erreur d'observation a été commise par l'un des deux auteurs. On peut en dire autant de l'ensemble des données que l'on possède sur l'origine des éléments sexuels chez les hydroïdes. Elles sont si peu concordantes que l'on se trouve dans l'obligation d'admettre que la question doit être reprise et qu'à l'heure actuelle nous ne pouvons rien affirmer à cet égard, ou qu'il existe réellement d'espèce à espèce des différences dans le mode de formation des œufs et des cellules spermatiques , les éléments sexuels pouvant se former indifféremment soit aux dépens de l'ectoderme, soit aux dépens de l'endoderme, soit aux dépens de l'un et l'autre de ces feuillets. Cette dernière conclusion n'a d'ailleurs rien d'invraisemblable, si l'on se rappelle les travaux récents sur la structure des couches primaires des hydroïdes : ils ont établi que la différen- ciation des feuillets est fort imparfaite chez les animaux de ce groupe. N'est-il pas prouvé aujourd'hui que les cellules endoder- miques, tout en remplissant les fonctions digestives, sont en même temps capables d'activité musculaire ? Chez les Scypho- méduses et les Actinies, les cellules endodermiques engendrent des nématocystes. v. Lendenfeld a trouvé chez Eucopella campanularia des nerfs endodermiques analogues à ceux que l'on connaissait déjà chez les Actinies (^). L'ectoderme aussi bien que l'endoderme peut concourir à la formation de la lamelle fondamentale. D'autre part, on voit des cellules ectodermiques non seulement transmettre des aliments à d'autres cellules (Jickeli) (^), mais même les digérer (Méréjkowsky) (^). (') V. Lendenfeld. Zeitschr. fur wissensch. Zool. 38 Bd., 1883. (•} F. JiCKEU. Ueb. Bau des Hydroidpolype», Morph. Jahrlj. T. VIII, 1882, p. 638. (') MéRÉJCHKOWSKY. Sur une anomalie chez les méduses, etc.. (en russe) 1880, MONOBRACHIUM PARASITICtJM MÉRÉJK. 301 von Lendenfeld a constaté que, cliez les spongiaires de groupe des Aplysinides (^), les cellules ectodermiques peuvent ingérer des matériaux solides pour les faire parvenir ensuite au mésoderme; d'autres auteurs entin n'admettent que la possibilité d'une semblable faculté digestive (Metsclmikotf) (-). D'après Gotte (^), la face interne des lobes buccaux de V Aurélia aurita sont parfaitement capables de digestion, quoiqu'ils soient recouverts par un epithelium ectodermique. J'ai confirmé ces résultats en ce qui concerne la Cyanea arctica. Une grande Lucernaria quadricornis avait été recouverte par les lobes buccaux d'une méduse de cette espèce. Ayant éloigné la méduse, je constatais que partout où la lucernaire avait été en contact intime avec ces lobes, elle présentait une coloration blanchâtre résultant de l'enlèvement de l'ectoderme naturellement coloré en brun. N. AVagner a signalé des faits du même genre; il a été le premier à affirmer la faculté digérante des lobes buccaux chez Aurélia et chez Cyanea (*). S'il est vrai que les éléments sexuels peuvent naître indifteremment soit de l'ectoderme, soit de l'endoderme, chez les hydroïdes, il nous reste à rechercher comment les choses se passent dans chaque cas particulier. J'ai eu en vue de rechercher la solution du problème chez Monobrachimn parasiticum. J'ai dit, au début de ce mémoire, comment il s'est fait que je n'ai pas réussi à trancher complètement la question. Je vais rendre compte de ce que j'ai observé. Tous les gonophores de Monohrachiiim étaient presque complètement mûrs et leurs sacs sexuels, entièrement déve- loppés. D'habitude il m'était impossible de distinguer les limites p. 7, aussi dans : Aim. and Magaz. of. Nat. Hist. Voir aussi Mehejkowsky. Slriiclure el dévdoppeinciU des némulopliores, eie. Arch, de Zool. expérim. — T. X, 1882, p. 607. (') V. Lendenfeld. Veb. Coelenteniten der Siidsee, II. Zeitschr. fur wissensch. Zoologie, I.XXXVIII, 1883. ('^) H. Metscunikoff. Unteisucli. ùb. d. intercellulare Verdang bei wirbellosen Thierc». Arbeiien aus d. Zool. Instit d. Univ Wien, Claus T. V, 1883, p. u. (•'1 GOETTE. Eììlwickelunijsgexch. d. Auretia aurita, eie, 1887. (') N. Wagner. Les inrcrtébrés de la Mer Blanche {en russe), p. 91 el 94. 302 JULES WAGNEK. des cellules ovulaires, dont le protoplasme constituant l'ovaire remplit tout à fait les sacs génitaux {ûg. 12); toutefois, la disposition des noyaux permettait de se faire une idée sur la situation des œufs mêmes. Ce n'est que rarement, et seulement sur des objets traités par une solution concentrée et chaude de sublimé, qu'on parvenait à voir les limites des ovules {ûg. 13). Le protoplasme des œufs est plus grossièrement granulé que celui des autres cellules (fig. 10, 12 et 13). Le liquide plasma- tique se colore faiblement, tandis que les granulations prennent une teinte très prononcée. Les noyaux, ou vésicules vitellines, sont plongés dans cette masse protoplasmique qui ne peut être décomposée en œufs séparés. Les noyaux ont à peu près un diamètre de 0,03741"/^. Le liquide nucléaire ne s'imprègne presque pas de carmin (fig. 17). Sur des coupes, on voit nette- ment de minces tronçons de filaments nucléaires et parmi eux, des granules de cliromatine de forme irrégulière, fortement colorés (fig. 1 7 chr.) et qui ne sont probablement que des renfle- ments du réseau de la cbromatine. Ces granules ont, en moyenne, un diamètre de 0,0021 à 0,00421»/^. Le nucléole (nel.) est très volumineux (de 0,0104 à 0,0125™/i") et placé excentriquement ; il est homogène, bien que le milieu se colore plus fortement, ce qui ferait supposer l'existence d'un nucléo- lule, dont on ne peut cependant apercevoir de limites suffi- samment nettes. Le fait que cette apparence se montre lorsque l'on traite les objets avec les réactifs les plus divers (liquide de Kleinenberg, liquide de Perenyi, acide osmio-chromique) nous prouve qu'elle n'est point un produit artificiel, dû à l'action des liquides employés. Je n'ai pas observé la structure du nucléole sur le vivant. La constitution des noyaux tels que nous venons de les décrire, indique que les œufs n'ont pas encore atteint leur complète maturité. (Voir les changements du noyau accompa- gnant la maturation des œufs décrits par Bergh, chez Gono- thyrea (^), chez Clava et Aurélia (^), par Méréjkowsky chez (') Bergh. Stndieu iïb. d. er.ite Enlwicklung d. lues. c. Gonothijrca Lovoii, Allni, Morph. Jahrb. T. V., 1879, p. 28. (-) Ibidem., p. 37. MONOBRACHIUM PARASITICUM MÉRÉJK. 303 Eucope (^) et par Metsclmikoff, chez plusieurs méduses ('^)). Il m'est arrivé de rencontrer des noyaux qui n'étaient pas tout à fait ronds (fig. 12); je pense qu'il s'agissait de défor- mations causées soit par les réactifs, soit par l'action com- pressive du rasoir. L'aspect vésiculeux du noyau et les contours bien nets du nucléole nous donnent un moyen facile de distinguer les œufs des autres cellules. C'est ainsi que j'ai observé souvent, dans r epithelium ventral des canaux radiaires, des cellules amœ- boïdes qui, par leur grandeur et par l'apparence du noyau, ressemblaient aux ovules (fig. 1 1 ov.). Les noyaux étaient d'une structure plus hornogène, c'est-à-dire que leurs granules de chromatine n'étaient pas aussi grands que dans les noyaux ovulaires précédemment décrits. Je suppose que les gros frag- ments de chromatine étaient dissous dans le suc nucléolaire, car le volume absolu du nucléole était presque identique. C'est précisément à cette circonstance qu'était due la coloration plus intense des noyaux, dont le volume n'était que la moitié de celui des noyaux des ovules à peu près mûrs. Toutefois l'ana- logie de ces deux sortes d'éléments n'est basée que sur leur aspect général. Je suis parvenu cependant à fixer ces cellules amœboïdes au moment même de leur passage à travers la membrane propre dans les sacs sexuels, ce qui m'a permis d'en reconnaître la véritable signification. Ainsi, sur la fig. 12, nous voyons quatre cellules ovulaires amœboïdes dont une a presque entière- ment émigré à l'intérieur du sac génital ; il ne reste qu'une fail)le portion de son protoplasme dans l'épithélium ventral du canal radiaire {ov') tandis que la majeure partie s'est déjà fusionnée avec le plasma des autres œufs. Une autre cellule (oy") a à peine dépassé la membrane propre, alors que les (') MÉRKJKOWSKY. Sur Vorirjine et le développement de V neuf de la méduse Obelia avant la fécondation. Comptes rendus de TAcadémie de Paris, -1880. (-) Metschnikow. Emb^ijoloijUelicn Studicn Medusen. Wien, 188G. 304 JULES WAGNER. deux dernières sont encore dans les parois du canal (ov). Le noyau de la première de ces cellules ressemble déjà tout à fait aux noyaux des œufs ; celui de la deuxième est plus fortement coloré, quoiqu'il renferme des granulations de chromatine assez volumineuses (moins grosses pourtant que dans les œufs mûrs). Il est intéressant de constater que les cellules amœboïdes ovulaires, lors de leur passage dans les sacs sexuels, ne con- tiennent qu'une faible quantité de protoplasme. On doit donc supposer que le restant du plasma ne quitte que plus tard r epithelium des canaux radiaires pour arriver aux cellules, en s'infiltrant, par osmose, à travers la membrane propre. Toutes les cellules parvenues dans le sac sexuel se transforment en ovules, de telle sorte que chez Monobrachium, les œufs ne s'accroissent pas en ingérant des cellules voisines. On ne trouve jamais, en effet, dans le plasma des œufs, d'inclusions d'aucune sorte, jamais de fragments de noyaux (^). Dans les points où se fait le passage des cellules ovulaires, on ne remarque aucune trace de membrane propre ; cette mem- brane devient très mince au voisinage des œufs aussi n'y a-t-il pas moyen de déterminer l'endroit où elle iinit. Ayant rencontré des cellules embryonnaires amœboïdes dans l'endoderme des canaux radiaires, j'ai eu l'idée de rechercher de semblables éléments dans des parties plus centrales de la colonie, et j'en ai observé dans l'hydrorliize, ordinairement près du pédoncule du gonophore : par leurs noyaux, ils rappelaient de jeunes ovules (fig. 18 et 19). Le protoplasme ne différait que légèrement de celui des cellules endodermiques et, par consé- quent, il était difficile d'en déterminer les limites ; néanmoins, il était toujours possible de distinguer une petite quantité de protoplasme plus grossièrement granulée, accumulée autour de chaque noyau. La plus jeune des cellules embryonnaires que j'ai rencontrées, à en juger du moins par la grandeur du noyau, est représentée par la flg. 18. Son nucleus est presque double de celui des cellules ectodermiques, dont il diffère en ce que les (') Voir par ex. Ticlwmiioff^ loc. cit., fig. 6, pi. 10. MONOBRACHHTM PARASITICUM MÉRÉJK. 305 renflements du réseau cliromatique sont rassemblés autour du nucléole et qu'on peut distinguer très nettement un nucléolule. Chez d'autres cellules de l'endoderme, au contraire, la cliro- matine était répartie dans tout le noyau et le nucléole était entièrement homogène (flg. li)). Il semble donc que la première cellule quoique pourvue d'un nucleus moins volumineux soit plus âgée que les autres ; j'incline à croire cependant qu'il n'en est pas ainsi et que les particularités que présente son noyau sont dues à un accident de préparation (^). Passons à l'étude des gonophores mâles. Tous les gonophores mâles étaient dans un état peu avancé de maturité. Les sacs sexuels de la plupart des gonophores étaient tellement bourrés de spermatozoïdes, qu'ils remplissaient toute la cavité de la cloche, et que leurs limites n'étaient plus visibles. Ces spermatozoïdes, non encore pourvus de queues, présen- taient un noyau, à peu près homogène, d'assez grande dimension (0,0083 mm), très réfringent et se colorant fortement (flg. 21). La mince couche achromophile (jui entoure le noyau, autour duquel elle forme comme un anneau clair, était capable de mouvements assez actifs dans les spermatoblastes vivants, plongés dans l'eau de mer. On rencontre également dans les gono^thores mâles et dans r epithelium ventral de leurs canaux radiaires des cellules sexuelles amœboïdes, mais moins abondantes que chez les femelles. Ici, je n'ai pu jamais les observer au moment de leur passage dans les sacs génitaux ; toutefois cette émigration doit se faire de la même manière que pour les cellules femelles, pendant le stade où le noyau devient homogène. Ce stade est représenté dans la fig. 15 (") par la cellule s^)', qui adhère (•) Les observations de Vakiìnne {Itccherclies sur lit production des polypes liildniiies. Archiv. lie zool, expér. T. \. 188"2), comme l'ont démontré Wkissmann et Thalwitz, sont erronées. (-) Ce stade parait correspondre à la lig. 4, d de la pi XII et à la lig. 41, e de la pi. XIV du travad de Thalwitz {lac. cil); il en diffère d'abord par la vive coloration du plasma cellulaire, et ensuite par la grandeur. iLe noyau de cette cellule atteint 0,0230 millini.) -20 306 JULES WAGNER. intimement à la membrane propre, tandis qne les cellules moins développées (sj)" et sp'") sont toujours enfouies dans l'épaisseur même de 1' epithelium ventral. Le développement des spermatoblastes a lieu de la manière suivante : les renflements du réseau de cliromatine situés au niveau des nœuds, au lieu de se confondre en un petit nombre de grosses granulations, comme c'est le cas pour les cellules ovulaires, disparaissent complèteuient et leur cliromatine se dissout dans le suc nucléaire. Les nucléoles disparaissent eux aussi (fig. 15) et finalement tout le noyau devient complètement homogène et se colore fortement (^). La quantité de plasma cellulaire est insignifiante. C'est à ce stade que les cellules passent dans les sacs sexuels où a lieu leur segmentation. Je n'ai vu aucun indice d'une division indirecte des noyaux (-). On rencontre assez souvent des cellules contenant beaucoup de noyaux (jusqu'à 64, fig. 16). Il est très probable que de semblables cellules sont en réalité composées d'un grand nombre de spermatoblastes, jeunes spermatozoïdes, réunis en une seule masse, et dont les limites ne sont pas visibles, comme l'a également observé Thalwitz chez Corydendrium (^). Leurs noyaux étaient de forme irrégulière, à angles arrondis (fig. 16). De ce qui précède, on peut conclure que le lieu de maturation des produits sexuels chez Monohrachium diffère du lieu de leur apparition, aussi bien dans les gonophores mâles que dans les gonophores femelles. Quant aux cellules embryonnaires de l'hydrorhize des colonies femelles, ce sont incontestablement des éléments femelles. (Les colonies de Monohrachium sont, comme celles de la plupart des hydroïdes, de sexe différent.) Quoique je n'aie pas étudié l'hydrorhize des individus mâles, je suis certain qu'il doit y avoir des cellules amœboïdes mâles, car il ne se trouve dans l'épithélium des canaux radiaires, que des (') Voir la description de ce proc(?dé dans Thalwitz {Ine cu., p. 4l8j, qui a eu pour ol),jel la Tnbularin ìnexeiiibniiiìiiliciiiuìit. (-) Thalwitz, loc cit., p. 436. {J') lùidein, p. i'M. M0N(3BRACHIUM PARASITICTOI MÉRÉJK. 307 cellules mâles relativement fort avancées dans leur développe- ment. La région germinative (Keimstatte) chez Monohrachium est donc dans l'hydrorliize; toutefois, j'ignore quelle est la couche qui donne naissance aux produits génitaux. Je n'ai rencontré, il est vrai, les cellules sexuelles que dans l'endoderme; cependant il est possible qu'elles proviennent de l'ectoderme, d'autant plus que la couche sous-épithéliale de l'hydrorliize est plus développée dans l'ectoderme, tandis que dans l'endoderme, il n'existe que fort rarement des cellules sous- épithéliales. Quoi qu'il en soit, c'est dans l'endoderme de l'hydrorliize qu'a lieu la différenciation des produits sexuels et dans F epithelium ventral des canaux radiaires, leur maturation. Nous voyons que, chez Monobrachium, il se fait une émigration très importante des cellules sexuelles, bien que cet hydroïde possède une méduse presque complètement formée {}). Les cellules embryonnaires, tout en suivant l'endoderme, passent de l'hydrorliize dans le blastostyle, puis dans 1' epithe- lium ventral des canaux radiaires, pour arriver dans les sacs génitaux en perforant la membrane propre. (') Weissmann. Die Eììisickittìfi d. Scjualzell bei (t. lïtjiboiiten. C. Die Wiiudcrung der Kciiìiizdlciì, p. 2G7 et suivantes. 308 JULES WAGNER. EXPLICATION DES PLANCHES. 8. Syphon du mollusque. M. Hydranthe. G. Gonophore. gnts. Gonothèque. N. Pseudonématophore. Ne. Batterie de Nématocystes. ne. Nématocystes. n et n'. Deux anneaux du système nerveux. c. c. Canal circulaire. r. e. Canal radiaire. cp. ep'. Epithelium des parois du sac génital. V. cp. Epithelium ventral du canal radiaire, d. ep Epithelium dorsal du canal radiaire. exumbr. et eoe ". Face supérieure de l'ombrelle. Sbumbr. Sous-ombrelle. vs. h. Lamelle vasculaire. ri. Vélum. tn. Tentacule de la méduse. sp. Manubrium (spadice). s. se. Sac génital. OV, QV', ov". Cellules ovulaires. sp', sp". sp"'. Cellules sexuelles mâles. PLANCHE VIIT. Fig. 1. Une colonie de Monobrneh'um parmiticum, Méréjk, sur une coquille de Tellina. Fig. 2. Un pseudonématophore. Fig. 3. Coupe transversale de la base de l'hypostome. fl, némato- cyste; h, prolongement central d'une cellule k némato- cyste. MONOBEACHIUM PARASITICUM MÉRÉJK. 309 Fig. 4. Jeune nématocyste (Zeiss. F., 4). Fig. 5. Nématocyste avec le filament. Fig. G. Coupe longitudinale de la tête d'un pseudonématopliore (Hart. IV, lOim). a, cellules de soutien; h, voir la fig. 3; c, anneau des cellules glandulaires. Fig. 7. Coupe verticale de l'hypostome (Zeiss. C, 5). a, cellules glandulaires endoderraiques. Fig. 8. Coupe longitudinale de la base du tentacule (Zeiss. C, 5). a et h, inclusions dans les cellules endodermiques ; c, parois des cellules du tissu axial; d ^ axe protoplasmique du tentacule. Fig. 9. Coupe transversale du tentacule (Zeiss, C, 4). Fig. 10. Partie d'une coupe verticale d'une méduse (Zeiss. C. 4). a, une cellule sous-épitliéliale; h, amas de cellules à la base d'un tentacule. Fig. 13. Partie d'une coupe horizontale d'une méduse (Zeiss. A., 4), Voir la figure précédente. Fig. 17. No3^au d'un œuf (Zeiss. E., 5). dir, granules de chromatine; nd, nucléole. Fig. 20. Une inclusion dans une cellule de l'hydrorliize. PLANCHE IX. Fig. 11. Coupe transversale de l'épithélium ventral d'un canal radiaire (O). Fig. 12. Coupe longitudinale de l'épithélium ventral d'un canal radiaire (<^) Im. lamelle soutien (membrane propre). Fig. 14. Coupe verticale du manubrium de la méduse (Zeiss. C. 4). Fig. 15. Coupe longitudinale d'un canal radiaire (+). Fig. 16. Spermatoblaste. Fig. 18 et 19. Cellules ovulaires à divers degi'és de développement. (Zeiss. E.. 5.) Fig. 21. Tête d'un spermatozoïde presque mûr. (Seibert, 3, V.) Nouvelle contribution à la Faune pélagique du Golfe de Marseille M. Paul GOURRET sous-direcleui' do la Slatiori zooloi;i(|iie do Marsoillc, i)rofosseiir siippk'ant ;i TKcolo do Môdociiie. [['l.A^Ctlli^ X. En 1884, dans des considérations sur la Faune pélagique de Marseille (Annales du Musée d'histoire naturelle, tome II, mémoire n" 2), j'ai dû ne pas multiplier la liste des espèces qui habitent la surface de la mer pour m'attacher surtout à dégager une vue d'ensemble et je crois avoir montré que la faune péla- gique est originale dans notre rade, en ce sens qu'elle est très pauvre en animaux flottants. Des recherches fréquemment renouvelées depuis cette époque viennent à l'appui de cette conclusion. Ce sont ces recherches qui font l'objet de la présente note, dans laquelle j'ai également inséré certaines observations faites antérieure- ment au laboratoire zoologique dirigé par M. le professeur A. F. Marion. 312 PAUL GOURRET. I. — Classe des Poissons. Ce n'est qu'à de très longs intervalles et exceptionnellement que l'on capture à la surface, soit dans le voisinage des côtes, soit au large, des Poissons pélagiques. Aussi, y a-t-il intérêt à connaître et à consigner avec S(jin'les espèces qu'il est permis d'y constater quelquefois. Cependant, si les poissons qui ont été capturés jusqu'ici seulement à la surface sont rares, il n'en est pas de même de ceux qui, tout en étant pélagiques, sont capables de descendre à une profondeur qui paraît être très variable suivant les types, lorsque règne le mauvais temps. Ces dernières espèces sont assez communes et il est facile de les suivre dans leur migration batliymétrique. Cette migration est certaine et il suffit de rechercher des Poissons pélagiques pendant la belle et la mauvaise saison pour s'en convaincre. La récolte des mêmes espèces à la surface et aussi à des profondeurs plus ou moins grandes le démontre d'une façon indiscutable. C'est ainsi, par exemple, qvC Orthagoriscus mola a été parfois recueilli dans des fonds de 1 8 brasses, que Scomber scomber est, surtout en liiver, ramené depuis 25 à 50 mètres jusqu'à 60 et 80 mètres de profondeur, que la Sardine et l'Anchois ont été assez souvent pris dans des fonds de 30 mètres, enfin que le Trachurus tracJmrus descend jusqu'à 30, 50, 65 mètres. D'autre part, certaines espèces qui habitent d'ordinaire des stations plus ou moins profondes, quittent ces points et montent à la surface à des époques (pii sont peut-être invariables, ou lorsque des conditions spéciales se présentent, venant ainsi ajouter un nouvel élément à la faune si complexe de la surface de la mer. En dehors des Dactyloptères {Dactylojiteî'us volitans L.), des Dragons de mer (Trachiniis draco L.), des Syngnates {Syngnatus 2)hlefjon Risso) et des Sphyrenides {Sphyrœna spet Lac.) déjà signalés en 188-4, j'ai reconnu jusqu'en décembre 1889 les espèces suivantes : 1" Carcharodon lamia Bp. — Cette espèce errante est assez FAUNE PÉLAGIQUE DU (tOLFE DE MARSEILLE. 313 commune dans le golfe, surtout dans la portion Nord-Ouest, où elle se livre à la chasse des Poissons migrateurs, notamment des Thons, tantôt par 60-80 mètres de profondeur, tantôt par des fonds moins considérables, ou encore à la surface même. C'est ainsi que le 7 novembre 1888 trois individus ont été pris dans le golfe de Fos, embarrassés dans une thonaire de poste. L'un d'eux ne mesurait pas moins de 4m80 et pesait 5000 kilo- grammes. Les deux autres atteignaient une longueur de 8 mètres et pesaient environ 1000 kilogrammes chacun. Dans l'estomac du premier on a trouvé six Thons et deux dans le ventre d'un autre. 20 Carcharias glaucus Âg. — Ce Squale appelé par les pêcheurs provençaux " Cagnaou „ ou " Emperour, „ se montre un peu partout dans le golfe, pendant le printemps et l'été, surtout en juillet, août et septembre, pour disparaître à l'approche de l'hiver. Durant la belle saison, on le capture soit avec les thonaires de poste, soit avec les thonaires flottantes ou courantilles. Assez souvent il se laisse prendre aussi dans les madragues de Niolon et de Gignac. Il est assez commun dans les fonds vaseux de la région N.-O. par 60-80 mètres, ainsi que dans les graviers vaseux qui s'étendent au Sud de Riou et de Planier par 100- J 08 mètres. En été il n'est pas rare de le voir rallier la côte et venir sur l'eau. 30 Centrina vulpecula Bel. — " Lou pouar „ des pêcheurs Marseillais est rarement aperçu dans le golfe. Dans ces der- nières années il a été pris à la calanque même de Sormiou, le 7 février 1888. Il fait ce jour-là une véritable tempête, la mer est démontée et le mistral (vent du N.-O.) souffle avec force. Le même Squale avait été capturé l'année précédente, fin janvier, dans les mêmes conditions et dans la même portion de la côte. Jamais, jusqu'ici, il n'a été ramené par la drague. 4° Echinorhinus spinosus Blainv. — Très rare à Nice et à Cette d'après Moreau, cette espèce a été recueillie à deux reprises dans le golfe, le 11 avril 1880 au large du cap Cou- ronne et le ler juin 1883 par le travers du cap Méjean. 314: PAUL GOURRET. 50 Orthagoriscus mola Sclineid. — A plusieurs reprises sa présence a été constatée. Un premier individu a été rencontré au large de la Corbière le 29 juin 1873. Du 31 mai au 10 juin 1H76, on remarque une abondance tout à fait exceptionnelle de Moles, notamment au large de Maire, de Jarre et de Riou. Mais cette espèce ne tarde pas à disparaître complètement. Toutefois, le 29 juin de la même année, on en capture un exemplaire au large de la Corbière. Enfin, le 4 juillet 1888, un nouvel individu est pris dans les tliys, à une profondeur de 18 brasses, également par le travers de la Corbière. Les différents individus sont attaqués par leur commensal ordinaire, Lepeophthirus Nordmanni Baird (Caligus M. Edw.). 6" Batistes capriscus Linné. — Deux individus seulement ont été recueillis depuis quinze ans, l'un vers Canoubier, le 28 septembre 1873, l'autre au large de la Joliette, en mai 1880, par des pêcheurs de maquereaux et à la canne. Ils avaient une coloration brun foncé avec quelques bandes noires irrégulières et peu délimitées de la région dorsale, vers le milieu des flancs. 70 Naucrates dudor Cuv. et Valenc. — Cette espèce, que l'on désigne sous le nom de " pilote „ ou de " fanfre „, est prise assez souvent à Marseille dans les ports, notamment dans les bassins de carénage. C'est ainsi, pour n'en citer qu'un exemple, que le 10 décembre 1889, une grande quantité de ces poissons venus à la suite de l'Anatole, brick chargé de morues et arrivant de Terre-neuve, s'est fait capturer dans le vieux port de Marseille. 80 Shedophilus medusophagus Cocco. — Elle a été rencon- trée une seule fois par les pêcheurs à la Seine, le l^r juillet 1877, près du château d'If. L'unique spécimen recueilli a été donné au Museum de Paris, par le professeur Marion. 90 Astrodermus elegans Cuv. et Valenc. — Il a été pris le 2 octobre 1879, dans un filet à sardines. Il n'a plus été revu depuis cette époque. 10" Coryphœna hippurus Linné. — Deux individus se sont engagés et fait capturer dans la madrague du Brusc (Var). 1 If- Echeneis naucrates Linné. — Un individu est trouvé FAUNE PÉLAGIQUE DU (iOLFE DE MARSEILLE. 815 en avril 1872 dans le port de Marseille, fixé sur la coque d'un navire " la Clyde „. Il se rapporte à E. Naiicrates, malgré quelques particularités qui tiennent au grand développement du disque. Ce dernier, pourvu de 25 paires de lamelles, mesure une longueur un peu inférieure à la moitié de la longueur totale s' élevant à 27 centimètres. Son bord postérieur dépasse d'un centimètre l'extrémité de la pectorale. La seconde dorsale commence bien vers le milieu du corps. L'œil est placé à la hauteur de l'espace correspondant à celui compris entre la huitième et la dixième lamelle du disque. Un autre individu pris dans les mêmes conditions ne montre que 21 lamelles. 12" Echeneis remora Linné. — Le 3 juin 1874, sur des Squales bleus pris à la surface par le traverà de Pomègues, sont fixés deux petits individus longs à peine de 16 centimètres et pourvus de 19 paires de lamelles sur la ventouse. Comme l'espèce précédente, nos pêcheurs le nomment le '' Calf at ,. ou le '' Suçon „. 13" Lepidopus argenteus Bonnat. — Les pêcheurs à la Seine en prennent un bel échantillon près du château d'If en août 1880. Il avait été rencontré précédemment au large de Cassis. Tout récemment enfin, le 26 juin 1888, après quelques jours de fort mistral, des bandes assez compactes se montrent à la surface entre Cassis et Riou; plus de vingt kilogrammes sont vendus le lendemain sur le marché de Marseille. 14" Trachypterus Spinolœ Cuv. et Val eue. — Un individu, long de 10 centimètres et demi est pris le 19 avril 1886, dans le voisinage du château d'If. Il présente trois taches noires seulement au-dessus de la ligne latérale et une tache moins intense et plus irrégulière sur les flancs. Le corps est argenté ; les nageoires sont rouge orangé. La caudale a une longueur un peu supérieure à la moitié de la longueur totale ; la ventrale mesure une longueur égale au tiers de la même longueur totale. Quant au panache, il était très incomplet. 15" Trachyj)terus faix Cuv. et Valenc. — En juin 1872, un 316 PAUL GOURRET. bel individu, mesurant une longueur de 2 mètres, est ramené dans les filets à sardines. Il est remarquable par l'absence des nageoires ventrales. Un second individu est aperçu à la surface, entre le Pliaro et le fort St-Jean, presque à l'entrée du vieux port, en mai 1883. 16° Ammodytes cicerellas Rafin. — Des bandes très com- pactes de ce poisson que nos pêcheurs appellent •' l'américain „, traversent le golfe en mai 1885 et en avril 1886. Elles s'observent surtout dans le voisinage du château d'If. Elles ne tardent pas à s'éloigner et à dis[»araître entièrement. Les individus mâles et femelles étaient en pleine maturité sexuelle. Plusieurs de ces poissons sont rencontrés le 28 août 1889, non plus à la surface, mais dans l'espace sableux qui avoisine le château d'If, par 25-28 mètres de profondeur. 17" Exocœtus voUtcms Linné. — Cinq individus ont été recueillis à diverses reprises par les soins de M. le professeur Marion. Tout récemment, le 24 décembre 1889, une grande quantité d'Exocets se montre à la surface, entre le château d'If et le Canoubier. 18" Exocœtus Rondeletii Cuv. et Valenc. — Il a été pris le 1er juin 1883. Il était seul. Le laboratoire de zoologie en avait précédemment acquis trois individus. 19" Belone acus Risso. — Assez commun à la surface où il se livre à la chasse des sardines. 20" Scomber scomber Linné. — Deux espèces de scombre se rencontrent dans le golfe, mais l'une d'elles, le Maquereau ordinaire, est de beaucoup la plus commune. De janvier en mai, cette espèce ne se rencontre guère et l'on peut dire qu'elle ne compte dans cette période aucun représentant. A partir du 15 mai jusqu'en septembre, des bandes compactes arrivent dans le golfe où la quantité des Maquereaux prise chaque année oscille entre 65 et 75,000 kilogrammes. Avec le mois d'octobre, leur nombre diminue progressivement jusqu'à la Noël. En été, c'est surtout à l'aube et au crépuscule que le Maque- reau V Gourion ou le Veiza des pécheurs se rapproche de la surface. Dans la mauvaise saison, il choisit de préférence les FAUNE PÉLAItIQUE DU GOLFE DE MARSEILLE. 817 nuits obscures pour s'élever. Dans ces conditions, le Maquereau mord facilement à l'appât qui consiste en sardines fraîches ou en harengs salés que l'on colore assez souvent en rouge avec de la rate de mouton, et ce procédé de pêche (pêche à la canne) pratiqué surtout à Carry, à Sausset et à Planier, est assez lucratif. Dans la journée ou lorsque la nuit est éclairée par la lune, le Maquereau s'enfonce pour éviter la lumière. On le pêche alors avec les battudes et les battudons, dans des fonds variant entre 20 et 50 mètres. Entin, par les gros temps, il n'est pas rare d'en prendre dans les vases de la région Nord-Ouest, par 00-80 mètres. 21° Scomber colias Linné. — Un autre Maquereau, appelé lou hiard à Marseille, est bien moins commun que le Maquereau ordinaire avec lequel il vit en société. 22'> Tiiymms thynnus Gunth. — Voii- Annales Musée d'Histoire naturelle, tome III, au sujet de cette espèce qui a fait l'objet d'une Note spéciale. 23" Thijnnns alalonga Cuv. et Valenc. — Cette espèce que nos pêcheurs appellent : " grandes oreilles „, passe plus rare- ment. Elle arrive d'ordinaire en août et en septembre, en compagnie du Thon ordinaire. 24" Tliynnus thunnina Cuv. et Valenc. — La Thonine est encore moins commune; elle vit dans la société des deux précédentes espèces. 25" Trachurus trachurus Giinth. — Ce poisson de passage traverse le golfe en grandes compagnies à partir de mai jusqu'en octobre. Il est très rare en hiver. Le Sévéréou ou Estranglo hello mèro se tient à la surface où on le pêche au moyen d'appâts, soit à la canne, soit à la ligne ; il n'est pas rare aussi d'en prendre avec les filets à sardines. D'autre part et assez souvent il se trouve à une certaine distance de la surface ; on le pêche alors avec les issaougo, les battudons, les battudes, les boguières et même avec les tliys, suivant la profondeur à laquelle il se tient. Lorsque la mer est soulevée et par les gros temps, on en prend quelquefois au 318 PAUL GOURRET. moyen du gangui, dans les prairies profondes de zostères par 10-25 mètres. On le recueille même alors dans les fonds vaseux de la région Nord-Ouest du golfe. 26" Alosa sardina Bell. — Voir à ce sujet une Note insérée dans le tome III des Annales du Musée de Marseille. 27° Engraulis encrasicholus Cuv. — Même remarque. 28" Melatta jihalerica. — La Melette ou Apliye phalérique de Rondelet est assez commune à la surface où on la pêche au moyen des issaougo. En automne, on la recueille quelquefois dans les fonds vaseux de la région Nord-Ouest par 50-70 mètres. 29" Laprax lupus Cuv. — Le Loup ou Bar donnait lieu, il y a quelques années, à une pêche assez importante qui a beau- coup diminué depuis, et ce n'est guère qu'exceptionnellement et à de longs intervalles que la récolte est aujourd'hui très fruc- tueuse. C'est ainsi que le 20 septembre 1888 et pendant quelques jours consécutifs on a constaté une affluence anormale de loups au large de Montredon. La pêche s'est alors élevée à plus de 200 kilogrammes par jour. En dehors de ce cas exceptionnel, le Bar est assez commun pendant l'hiver depuis une jusqu'à douze brasses, et il n'est pas rare d'en voir de grandes troupes à la surface. C'est également en troupes plus ou moins serrées qu'il quitte le golfe au commencement du printemps. Cependant, et bien qu'il ne semble pas rechercher les eaux chaudes, il persiste et demeure dans la rade de Marseille même en été, mais il est alors moins fréquent. La pêche de ce poisson a lieu toute l'année avant le lever du soleil au moyen de seinches et de mugelières, et la nuit à partir du mois d'avril jusqu'en octobre. On se sert alors surtout des mugelières. 30" Brama Rail Schn. — La " Castagnolo négré ,, se tient dans le voisinage des rochers, à proximité du rivage, depuis une jusqu'à cinq brasses. Elle monte à la surface par compagnies et ne s'enfonce que lorsque règne le mauvais temps. Dans ces conditions, elle recherche des fonds plus tranquilles, notamment les prairies profondes de zostères (10 à 30 mètres) d'où le FAUNE PÉLAGIQUE DU GOLFE DE MARSEILLE. 319 cangili la ramène. C'est un poisson stagiaire, restant dans les mêmes lieux. Il serait cependant, de l'avis des pêcheurs, plus commun en été. 31» Sargiis Eondeletii Cuv. et Valenc. — Le Sar aifectionne les fonds de zostères (1-12 brasses). En été, il arrive assez souvent d'en prendre des individus à la surface même. C'est dans ces conditions qu'il en a été recueilli plus de 40 kilo- grammes par jour pendant la première quinzaine de septembre 1888. Ce poisson a ensuite quitté la surface pour gagner les prairies de zostères où il est assez commun. 32" 8argiis annularis Cuv. et Valenc. — Le " Pataclé „ commun dans les prairies profondes et dans la Broundo (gra- viers coralligènes), vient à la côte et se montre à la surface en été. 33" Sargus vulgaris G. S^ Hil. — La " Veirado „ a les mêmes habitudes que l'espèce précédente. Toutefois elle ne vient à la surface que très rarement. 34" Ciiarax puntazzo Cuv. et Valenc. — Le " Mouré pounchu „ ou " Subo „ des pêcheurs, otfre les mêmes mœurs que Sargus vulgaris. 35" Box hoops Bp. — La " Bogo „ qui est assez commune aux environs de Planier et aussi le long de la côte Est du golfe, est un poisson de surface où on en voit nager de grandes troupes en été et avec le beau temps. Les mois de mars, d'avril et de mai sont ceux où cette espèce paraît être la plus abondante. On la pêche au moyen de filets spéciaux appelés Boguières, et aussi avec les issaougo et les seinches. La Bogue ne se tient pas toujours à la surface et assez souvent elle se trouve assez profondément, jusque dans les fonds coralligènes où on la prend avec les battudons et les battudes. Dans la mauvaise saison, elle quitte la surface soit pour gagner le pourtour des prairies de zostères, soit les prairies profondes, d'où le gangui la ramène. Mais dans ce cas, elle est peu commune. 36" Box salpa Risso. — La " Saoupo „ oifre les mêmes habitudes que la Bogo. Comme celle-ci, on la voit rechercher les eaux tièdes et nager à la surface avec le beau temps. 320 PAUL UOUERET. 37" Ohlada melanura Ciiv. et Valenc. — Rare dans les prairies profondes de zostères, la " Biado „ est commune à la còte. Elle est plus commune en hiver qu'en été. Elle se rencontre quelquefois à la surface, toujours en petits bancs. 38" Pagellus bogaraveo Cuv. et Valenc. — La " Bogo ravello „ est une espèce abondante dans les prairies profondes de zostères. Elle remonte cependant à la surface, en bandes compactes, pendant l'été, époque pendant laquelle elle est très abondante. 37" Chrysophrys aurata Cuv. et Valenc. — " L'Aourado „, autrefois très commune, tend aujourd'hui à diminuer. Très peu abondante dans les prairies profondes de zostères, elle fréquente la côte. On la pêche surtout le long de la jetée du large et presque à la surface, où on en voit d'ailleurs venir " bouler „. Ce poisson erratique est plus rare en hiver. 40" Cantharus griseus Cuv. et Valenc. — Le " Canto „ se tient à la surface en été le long des rochers, ou à une faible profondeur (une ou deux brasses). Avec l'hiver, il quitte la côte et s'engage dans les prairies profondes de zostères. 41" Mœna Osbeckii Lac. — Ce poisson erratique appelé " Mendolo „ par les Marseillais habite surtout les prairies de zostères (10-25 mètres). Mais, de juin à septembre, il monte à la surface ou à quelques mètres seulement de celle-ci. Il est en grandes troupes. 42" Smaris vulgaris Bp. — La " Cagarello ,. vit dans la société de la précédente espèce. 43" Mugil. — Les Muges sont des poissons erratiques que l'on prend avec la ligne ou au moyen de filets spéciaux appelés Mugelières. Ils se trouvent dans les ports et dans la plage sableuse du Prado. Ils abondent en automne et en été, sans disparaître le reste de l'année. En été surtout, ils viennent à la surface en rangs serrés. Il y a quatre espèces de Muges dans la rade de Marseille : Mugil cephalus appelé lou Testu. „ auratus appelé la gaouto rousso, la taco Jaouno. „ cajxito appelé la jioimchudo, la talugo. FAUNK PÉLA(4lyUE DU (40LFE DE MARSEILLE. 321 Mugil chelo appelé l'ueil négré, loii pansard. 44" Murœna helena Linné. — La " Mureno ,. recherche les fonds de rochers. En été, il n'est pas rare d'en voir venir bouler sur l'eau, c'est-à-dire à la surface. On les capture soit avec les Mugelières, soit avec la ligne, ou encore avec le jambin. Par les gros temps, la Murène gagne les prairies profondes de zostères d'où le Gangui la ramène quelquefois. 45" Blenniuspavo et Oohius capito se tiennent à la surface aussi bien que dans les fonds de zostères par 10-25 mètres. 46" Atherina hepsetus et Atherina Boyerii. — Ces deux espèces sont très communes à la surface. En dehors des espèces précédentes, on ramène avec les Sardinaou et dans le haut de ces filets d'autres espèces qui n'habitent pas la surface ou qui ne sont pas considérées comme des poissons erratiques. Leur présence est tout à fait exceptionnelle dans ces filets et elle ne peut s'expliquer que si l'on suppose que ces espèces viennent séjourner à la surface pendant quelque temps, très probablement à l'époque du frai. C'est là du reste un point à suivre et à examiner de plus près. Quoi qu'il en soit, les espèces remarquées pendant les mois de mars et d'avril dans ces conditions, se réduisent jus(iu'à présent à quatre. Ce sont : Hippocampus guttidatus, Uranoscopus scaber, Merlangus poutassou et Zeus pungio. II. — Classe des Mollusques. Jusqu'ici aucun hétéropode n'a été recueilli dans le Golfe. Il en est presque de même des Ptéropodes. Si on excepte, en effet, Creseis aricula que l'on rencontre quelquefois à la surface, cet ordre ne compte aucun représentant. Cependant, à diverses reprises, j'ai recueilli flottant, surtout entre Maïré et Jarre, des coquilles vides de Cymhdia Peronii Cuv. et je n'avais jamais capturé cette espèce vivante jusqu'en 1884, époque à laquelle (13 mai) elle a été prise entre les îles et Méjean. C'est 21 322 PAUL (lOURRET. la première fois que ce Ptéropode a été constaté à l'état vivant dans notre rade. D'autres espèces doivent également traverser notre Golfe, mais elles n'ont pas été recueillies vivantes. Tel est le cas de Clio pyramidata et à'Iïyalœa uncinata trouvées mortes au Sud de Planier dans un limon jaunâtre gluant par 105 mètres de profondeur. 11 en est de même d'Hyalœa vaginella ramenée par la drague. Quant à l'ordre des Céphalopodes, il renferme quelques espèces que l'on peut regarder comme des types à la fois pélagiques et marcheurs (^). Sur 15 espèces (pie cet ordre compte dans le Golfe, 9 ont été jusqu'ici prises à des profon- deurs variables et en même temps à la surface. Ce sont : 1" Octo])us catenulatus. — Assez commune dans les graviers vaseux de Riou et de Planier par 100-108 mètres où on la pêche avec les palangres, cette espèce peut quitter ces fonds et remonter plus ou moins près de la surface. C'est ainsi qu'elle a été capturée quelquefois dans les prairies littorales de zostères par 8 mètres de profondeur et qu'elle a été prise à la surface même delà mer, à deux époques différentes, le 15 mai 1879 et le 20 juin de la même année, entre les îles et Montredon. Un seul individu a été recueilli dans chacune de ces deux dernières pêches. Enfin un autre avait été capturé antérieurement au milieu des brisants du Pharo. 20 Tremodoims violaceus. — C'est sans contredit le plus rare des Céphalopodes qui fréquentent notre rade. Il a été recueilli une unique fois et seulement à la surface (deux individus), entre les îles et Montredon, le 30 septembre 1879. 3» Sepia officinalis. — Un individu est rencontré à la surface le 5 mai 1887 par le travers de Méjean. Il avait sans doute quitté les fonds vaseux de la région Nord-Ouest du Golfe où cette espèce se trouve habituellement par 60-80 mètres. Ce (') Considérai ions sur la faune pélagique de Marseille. Annales. Musée Hist""" nat. Marseille, tome II, Mém. 2. FAUNE PÉLAGIQUE DU GOLFE DE MARSEILLE. 323 n'est pas là toutefois un cas unique ; car il n'est pas très rare de prendre la Seiche officinale dans les filets flottants employés pour la pêche de la Sardine, au large et à la surface, en des points où la profondeur est assez considérable. Bien plus, il est donné quelquefois d'en voir nager dans des anses tranquilles, à proximité du rivage. Cette Sepia se trompe donc dans les fonds vaseux par 80-60 mètres dans les prairies profondes de zostères par 30-10 mètres, dans les prairies littorales par 10-2 mètres, enfin à la surface même. 4» Sepiola BondeletU. — Elle se rencontre dans les mêmes fonds que la précédente espèce et, comme celle-ci, peut remonter et se maintenir à la surface, où sa présence a été constatée le 3 juin 1887, au large du Cap Couronne. On la voit quelquefois aussi, nageant dans les anses tranquilles. 5" Loligo vidf/aris. — Probablement aii moment de la repro- duction, cette espèce peut abandonner son lieu d'élection (fonds vaseux de la région Nord-Ouest ou les espaces vaseux littoraux) et se rapprocher de la surface. Un individu a été pris dans ces conditions par un filet à Sardine (courantille) en avril 1883, près du Château d'If. 6" Eledone moscliatus. — Rare dans les prairies profondes de zostères, " lou Pourpré doou mus „ des pêcheurs marseillais fréquente le pourtour des Zostères et les fonds vaseux de la région Nord-Ouest. C'est de tous les céphalopodes celui qui est le plus souvent pris à la surface, surtout au large de la Corbière et de Niolon. 70 Ommastrephes sagittatus. — Il habite les vases de la région Nord-Ouest par fiO-80 mètres ; mais il nage, s'approche quelquefois du rivage ou se montre à la surface, tantôt au large en des points où la profondeur est considérable, tantôt dans les anses tranquilles en compagnie des Seiches et des Sepioles. A ces espèces il convient d'ajouter Octoims tuherculatus qui a été signalé par M. le professeur Marion comme faisant partie, mais à titre excei)tionnel, de la zone littorale (0-2 mètres). Cette espèce a été prise le 25 mai 1870, au Pharo. 324 PAUL GOURRET. Enfin, un Argonauta argo est pris en avril 1875, dans le voisinage du château d'If et à la surface. Sa présence est tout à fait exceptionnelle dans notre rade, tandis qu'elle est, au contraire, très commune aux environs de Toulon et des îles d'Hyères, notamment à l'île de Porquerolles où de nombreux individus sont rejetés lorsque soufflent les vents du large. Quant aux autres céphalopodes de Marseille, ils n'ont jamais été jusqu'à présent rencontrés à la surface. Voici d'ailleurs, avec leurs noms, les points qu'ils fréquentent et la profondeur où on peut les trouver : Zone litto- rale O-'i ineti-f" Prairies lit- torales ï>-10 met. Prairies profonde;' 10-30 m. Pourtour (les Zoi:iteres Fonds va- seux 00-80 m. Graviers vaseux de Hiou et Planier 100-i200n). Sepia bisserialis. . . . Sepia elet;;ans Sepia Fillouxii .... Loligo niariiiorca . . . Oinmastrephes lodai'us Octopus vuli^aris . . . Octopus de Filippi . . Octopus macropus. . . + + + + + + 4-(rare). . .4-. . ■ + ■ III. Classe des Vers. Une seule espèce prise à la surface appartient à cette classe. C'est une belle Planaire, Jungia aurantlaca Lang., qui a été capturée nageant à la surface, par le travers du château d'If et de l'île des Pendus, le 26 juin 1888. iV. — Classe des Crustacés. Indépendamment des espèces citées en 1884 dans les Annales du Musée de Marseille (mémoire u" 2) et dans les Archives de FAUNE PÉLAGIQUE DU GOLFE DE MAESEILLE. 325 Biologie (torn. IX 1889), il y a, clans le golfe, d'autres espèces qui font partie de la faune pélagique côtière. Ce sont : 1" Siriella intermedia Gourret (^). — Calanque de llato- neau, en compagnie de S. Clausii. 2° Leptomysis mar ioni Gourret. — Même habitat que la précédente. 3" Tiialestris robusta Claus. — Vallon des Auffes; entre Niolon et Tiboulen de Ratoneau. 4" Cyclops canthocarpoides Fischer. — A la surface dans les calanques de Morgilet (île Ratoneau) et de Pomégues. 5" Oikona spec? — Morgilet; il s'en trouve aussi dans l'estomac des sardines. 6» Cypridina mediterranea Costa. — En juillet 1888, de nombreux individus sont recueillis à la surface dans la calanque de Morgilet (Ratoneau). 7° Podon minutus G.-O. Sars. J'ai recueilli ce cladocére en 1884 et en 1885à Morgilet et aussi au château d'If. A diverses reprises, notamment en janvier, juin et juillet, le Salabre en a ramené plusieurs individus. Mais cette espèce n'est pas com- mune. Cependant il faut noter une abondance exceptionnelle de Podon minutus le 5 juillet 1887; on les trouve partout dans le golfe. Un peu avant cette époque, en mai, il y avait de nombreux individus dans l'estomac des sardines. 8° Podon polyphemoides Leuckt. — Encore moins commun que le précédent, ce Podon se rencontre quelquefois à la sur- face dans le voisinage des îles, ainsi que près du vallon des Auffes. 9" Axius. — Enfin, parmi les larves de crustacés prises à la surface, j'ai recueilli le 5 mai 1887 dans le voisinage de la Pointe rouge une larve d' Axius que j'ai représentée fig. 2. (') Aniinlea Mus(^e Marseille, tome III, Mém. b. 326 PAUL GOURRET. EXPLICATION DE LA PLANCHE X. Figure 1. Trachypterus spinola Cuv. et Valenc. — Gr. nat. Figure 2. Zoé ò.^Axius. Recherches sur le système cutané et sur le système musculaire du Lombric terrestre (LuMBRicus Agricola Hoffmeister) PAR Paul CERFONTAINE, docteur en sciences naturelles, assistant à l'Université de Liège. (Planches XI à XIV.) INTRODUCTION. Un nombre assez considérable de travaux ont paru tant sur l'anatomie que sur l'histologie du Lombric. L'ouvrage de M. Charles Morr en (32), paru en 1826, est la base de nos connaissances sur l'anatomie du Ver de terre. Les travaux d'Ewald Hering (15) et de J. d'Udekem (50), qui ont fait connaître les ovaires, et celui de C. Oegenbauer (12), qui nous a donné les premières notions exactes sur la constitution et la répartition des organes segmentaires, relatent les princi- pales découvertes dont l'anatomie du Lombric a été l'objet pendant la période qui s'étend de 1826 jusqu'en 1868. En 1869, Éd. Claparède (4) publia ses recherches histolo- giques sur le Ver de terre; son mémoire est encore classique 328 PAUL CERFONTAINE. -> aujourd'hui; c'est un travail anatomique précis, exact, et si des erreurs s'y sont glissées çà et là, elles proviennent spécia- lement des méthodes histologi'ques défectueuses employées à cette époque. Depuis ce temps, plusieurs travaux importants ont paru sur des points spéciaux relatifs à l'organisation et aussi à la struc- ture de certains organes ou de certains appareils; signalons particulièrement les mémoires de R. Horst (18 et 19), de A. von Mojsisoivkz (29 et 30) sur le système cutané, et les ouvrages récents de Bergli (53), de Friedlânder (54), de Jacquet (55) et de Ude (56) sur les organes sexuels, le système nerveux, le système vasculaire et la constitution de la paroi du corps. Citons encore la Monographie des Oligochètes, publiée en 1884 par Fr. Vejdovsky (51) qui, pour être un travail général, n'en renferme pas moins des données importantes sur le Lom- bric terrestre. Bien des questions cependant réclament encore une solution et, comme le Ver de terre est un animal facile à se procurer et qui est pris constamment comme type d'Oligochète, il importe que l'on cherche à combler les lacunes que présente encore la connaissance de son organisation. Qu'il me soit permis de remercier ici publiquement M. le professeui- Edouard Van Beneden qui, après m' avoir engagé à entreprendre ce travail, n'a cessé de me prodiguer ses savants conseils et a bien voulu contrôler journellement mes résultats. J'ai entrepris une série de recherches sur l'ensemble de l'organisation du Lombric, en vue d'arriver à faire une mono- graphie anatomique de cet animal. Je publie dès aujourd'hui les résultats obtenus en ce qui concerne le système cutané et le système musculaire, me réser- vant de faire comiaître ultérieurement mes recherches sur la constitution des difterents appareils du Ver de terre. EECH. SUR LES SYST. CUT. ET MUSC. DU LOMBKIC TERRESTRE. 329 BIBLIOGRAPHIE. La Bibliographie a été faite dans ces derniers temps d'une façon irréprochable par Fr. Vejdovsky (51). Il nous éuumère en tout deux cent quatre-vingt-trois ouvrages, parmi lesquels je citerai ceux qui ont plus spécialement rapport à l'espèce qui nous occupe : 1. BlOOMFIELD, J., On tlie development of the Spermatozoa. P. I. Lumbricus (Quart. Journ. ofmicr. sc, vol. XX). 2. BOSC, Histoire naturelle des Vers pour faire suite au Buffon. Article Naïade et Lombric. Paris, 1830. 3. Charvin, p., Le Lombric terrestre. Paris, imp. appart., 1852. 4. Claparède. E., Histologische Untersucliungen iiber den Regen- wurm (Z. f. w. Z., Ed. XIX, 1869). 5. Clarke, J. LOCKHART, On the nervous system of Lumbricus terrestris (Roy. Soc. Proc, VIII, 1856). 6. COHN, F., Ueber die Phosphorescenz der Regenwiirmer (Z. f, iv. Z., 1873). 7. DUFOUR, L., Notice sur les cocons ou les œufs du Lumbricus terrestris {Ann. se. nat., Ire série, t. V, 1825). 8. DUFOUR, L., Nouvelle notice sur les œufs du Lumbricus terrestris (ibid., 1828). 9. DuGÈS, Ant., Recherches sur la circulation, la respiration et la reproduction des Annélides abranches (ibid., 1828). 10. Fitzinger, L., Beobachtungen iiber die Lumbrici (Isis, 1833). 11. FraisSE, P., Ueber Spermatophoren bei Regenwiirmern (^r6ei^. iii zool. Inst. in Wilrzburg, Bd. V). 12. Gegenbauer, C, Ueber die sogenannten Respirationsorgane der Regenwurmer (Z. f. w. Z., Bd. IV, 1853). 13. Grass, Lumbricorum terrestrium regeneratio (Acta Acad, nat, curios., 1689). 14. GRUBE, Ed., Ueber den Lumbricus variegatus Miiller's und ihm verwandte Anneliden ( Wiegmanii^s Archiv, 1844). 15. Hering, Ew., Zur Anatomie und Physiologie der Generations- organe des Regenwurmes (Z. f. w. Z., IV, 1857). 16. HOFFMEISTER, W., De vermibus quibusdam ad genus lumbrico- rum pertinentibus. Berolini, 1842. 17. HOFFMEISTER, W., Die bis jetzt bekannten Arten aus der Familie der Regenwiirmer. Braunschweig, 1845. 330 PAUL CERFONTAINE. 18. HORST, E,., Aanteekeningen op de anatomie van Lumbricus terrestris {Tij'lschr. ncdcrl. dierk. Vereen., deel III, 1876). 19. HORST, R., Die Lumbricidenhypodermis {ibid., deel IV, afl. 1, p. 56). 20. Kleinenberg, N., The development of the Earthworm {Quart. Journ. of. micr. sc, 1880). 21. LANKESTER, E., Anatomy of the Earthvporm {Transact, of the micr. Sac. London, 1864). 22. LANKESTER, E., On the structure and origin of the Spermato- phors {Quart. Journ. of. micr. sc, 1871). 23. Leo, J., Dissertatio inauguralis de structura Lumbrici terrestris. Regiomonti, 1820. 24. Leo, J., Ueber die Fortpflanzung der Regenwiirmer {Tsis, 1820). 25. Leydig, Fr., Ueber das Nervensystem der Anneliden {Midler's Archiv, 1862). 26. Leidig, Fr. Ueber Phreoryctes menkeanus nebst, etc. {Arch. f. micr. Anat., I, 1865). 27. Meckel, J.-F., Ueber die Zeugung der Regenwiirmer {Meckel's deutsch. Arch. f. Phys., 1815). 28. Meckel, H., Ueber Geschlechtsapparat einiger hermaphroditen Thiere {Millier' s Archiv, 1844). 29. MOJSISOWICZ, A. (von), Ueber den Bau der Lumbi-icidenhypo- dermis {Sitz. d. kais. Acad. d. Wiss. in Wien, 1877). 30. MOJSISOWICZ, A. (VON), Zur Lumbricidenhypodermis {Zool. Anzeiger, 1879). 31. MONTÈGRE, A. (de), Observations sur le Lombric ou Ver de terre. Paris, Musée d'hist. nat., 1815. 32. Morren, Ch., Descriptio structuras anatomica et expositio his- torise naturalis Lumbrici vulgaris sive terrestris. Bruxelles, 1826. 33. Morren, Ch., De Lumbrici terrestris historia naturalis nec non anatome tractatus. Bruxelles, 1822. 34. Newport, G., On the reproduction of lost parte in Earthworm {Proc. Lin. Soc, 1855). 35. Perrier, Edm., Recherches pour servir à l'histoire des Lombri- cins terrestres {Nouv. arch, du Mus. Paris, 1872). 36. Perrier, Edm., Organisation des Lombricins terrestres {Arch. de zool. exp. et gén., 1873-1874). 37. Perrier, Edm., Note sur l'accouplement des Lombricins {ibid., 1875). RECH. SUR LES SYST. CUT. ET MUSC. DU LOMBRIC TERRESTRE. 331 38. PONTALLIÉ, Recherches sur la nutrition et la reproduction du Lombric terrestre {Aìin. se. nat., 1858). 39. Power d'Arcy, On the endothelium of etc. {Quart. Jonrn. of micr. se, 1878). 40. QUATREFAGES, A. (DE), Mémoire sur le système nerveux {Comptes rendus Acad. se. Paris, 1852). 41. QUATREFAGES, A. (DE), Note sur la classification des Annelidas {Ann. se. nat., 1863). 42. RATZEL und AVarschawsky, Zur Entwicklungsgeschichte der Regenwurmer {Z. f. w. Z., 1868). 43. RORIE, James, On the nervous system of Lombricus terrestris {Quart. Journ. of mier. so., 1863). 44. San Giovanni, Ueber die Reproduction des Regenwurmes {Frorieii''s Notizen, 1824). 45. Schwalbe, Ueber die Muskelfasern von Lumbricus {Arch. f. mier. Anat., 1869). 46. SURRIRAY, Notes .sur quelques parasites et produits organiques du Lombric terrestre {Aim. se. nat., 1836). 47. TrevirANUS, g., Ueber die Zeugung des Regenw^urmes {Tiede- mann's Zeitschr. f. Phys., 1835). 48. TrouessART, E., Sur les constructions terriformes des Vers de terre en France {Comptes rendus Acad. se. Paris, t. XCV). 49. Udekem, J. (d'). Développement du Lombric terrestre {Mém. cour. et mém. sav. étr. Acad. Belg., 1855). 50. Udekem, J. (d'). Mémoire sur les Lombricins {Mém. Acad. roy. de Belg., 1862). 51. Vejdovsky, Fr., System und Morphologie der Oligochaeten. Prag, 1884. 52. WlCHMANN, Vom Giirtel des Regenwurmes {Berol. naturf. Fr. Beri, 8, 1777). Ajoutons-y quelques ouvrages publiés depuis lors, à savoir : 53. Bergh, Untersuchungea liber den Bau und die Entwicklung der Geschlechtsorgane der Regenwurmer {Z. f. iv. Z., XLIV, 1886). 54. Friedlânder, B., Beitriige zur Kenntniss des Centralnerven- sy stems von Lumbricus {ibid., 1888). 55. Jacquet, M., Recherches sur le système vasculaire des Annélides {M. T.zu Neapel, 1885). 50. Ude, Herrmann, Ueber die Rlickenporen der terricolen Oligo- chaeten nebst Bemerkungen, etc. {Z. f. iv. Z., Bd. XLIII, 1886, p. 87). 332 PAUL CERFONTAINE. I. CAEACTÈRES EXTÉRIEURS. Mon intention n'est pas ici de décrire tous les caractères extérieurs du Ver de terre ; je veux relever seulement certains points encore discutés aujourd'hui. On lit généralement dans les traités de zoologie que le nombre des anneaux chez le Lombric est d'environ cent quatre- vingts. Il y a là certainement de l'exagération, car, en général, je n'ai compté que de cent à cent cinquante anneaux et, chez le plus grand exemplaire que j'aie eu entre les mains, un individu qui, conservé dans l'alcool, mesure 33 centimètres de long, je ne compte que cent quarante-trois anneaux. Et cependant, d'après la diagnose donnée dans ces derniers temps par Ude (56) pour le Lumbricus agricola {lierculeus de Savigny), c'est bien de cette espèce qu'il s'agit. La forme du Ver est cylindroïde, mais elle varie constamment quand l'animal est en mouvement. La forme cylindrique est surtout apparente à l'extrémité antérieure et la coupe transversale y est toujours nettement circulaire, que l'individu soit pris à l'état d'extension ou à l'état de contraction. Dans la région moyenne et dans la partie postérieure, la forme est cylindrique, un peu aplatie ventralement quand le Ver est à l'état d'extension ; mais, lors de la contraction, la forme varie énormément, la coupe transversale devient, dans ce cas, un quadrilatère irrégulier, à trois côtés plans ou légè- rement concaves et un quatrième côté convexe. Le côté convexe est le plus grand et situé du côté du dos, la face ventrale est constituée par un côté plan légèrement concave et les deux autres côtés, plus petits que ce dernier, sont latéraux, mais plus rapprochés de la ligne médio-ventrale que de la ligne médio- dorsale. RECH. SUR LES SYST. CUT. ET MUSC. DU LOMBRIC TERRESTRE. 333 Les angles du quadrilatère sont occupés chacun par un groupe de soies. Le nombre des soies est déterminé pour chaque segment et est le même pour tous. Tous les anneaux portent des soies ; il n'y a d'exception que pour le segment buccal et l'anneau anal. Quelquefois, cependant, plusieurs segments, à l'extrémité posté- rieure, ne portent pas de soies. Un organe très apparent sur des individus bien développés, c'est ce que l'on désigne sous le nom de cUtellum ou ceinture. Il se fait remarquer par sa couleur pâle blanc-jaunâtre et règne surtout du côté du dos et sur les faces latérales du corps. Il a ra[)parence d'une selle plutôt que d'une véritable ceinture. Sa place et son étendue ont été controversées dans les différents ouvrages traitant de ces questions. Comme on le sait depuis le mémoire de Hermann Tide (56) sur les pores dorsaux des Oligochètes et sur la systématique des Lombricides, la ceinture, chez l'espèce agricola, occupe l'étendue de six segments et ce sont les segments 82, 33, 34, 35, 36, 37 ; sur les bords de la face ventrale de la ceinture régnent deux bourrelets très apparents désignés par Ude sous le nom de Tuhercula pubertatis ; ils occupent les segments 33, 34, 35 et 36. A propos de ces chiifres, disons qu'il faut s'entendre sur la numération des segments du Lombric. Il en est parmi les auteurs qui comptent comme numéro 1 le segment buccal, d'autres ne commencent la numération qu'au segment suivant. C'est ainsi que, pour Clax>arède (4) et d'autres, les orifices sexuels mâles se trouvent sur le 15e anneau antérieur, tandis que pour if. TJde{ò - formes que l'on rencontre un peu partout dans les tissus du , , , Lombric et dans la cavité du corps. Ces corpuscules sont probablement des bacilles et cela nous explique peut-être pourquoi les Lombrics morts se décomposent si rapidement. Fig. 47. Coupe longitudinale de la paroi du tube digestif dans la région du gésier ou estomac. La couche musculaire circulaire présente ici une forte épaisseur, et les éléments y affectent une disposition tout à fait caractéristique et d'une régularité remarquable. M. p. Membrane peritoneale. M. L Muscles longitudinaux. M. c. Muscles circulaires. RECH. SUR LES SYST. CUT. ET MUSC. DU LOMBRIC TERRESTRE. 427 E. i. Epithelium intestinal. C. Cuticule assez épaisse que l'on rencontre dans cette partie de la cavité digestive. E. s. Espaces sanguins. Fig. 18. Quelques formes que présente la coupe transversale de colonnes musculaires de la paroi du corps. A, B, C, D, E, dans la couche circulaire; F, G, dans la couche longitudinale. S. c. Substance contractile. S. a. Substance axiale. Fig. 49. Cette structure des éléments musculaires toujours évidente dans les muscles du gésier. Une partie de la coupe, figure 47, à un plus fort grossissement. Fig. .50. Coupe transversale de la paroi du corps, montrant avec évi- dence que des muscles de la couche circulaire peuvent inter- venir pour constituer des muscles radiaires des soies. 8. Soie. PLANCHE XIV. Fig. 51. Vue d'une préparation obtenue par deux sections opérées l'une en avant, l'autre en arrière d'une cloison intersegmen- taire, dans la partie postérieure du corps. 1, 2, .3, 4. Groupes de soies : 1 et 2, dorsaux-latéraux, 3 et 4, ventraux. Cut. Cuticule. : Hyi). Hypoderme. M. c. Muscles circulaires. M. l. Muscles longitudinaux. M. p. Membi-ane peritoneale. C. n. Chaîne nerveuse. V. s.-i. Vaisseau sous-intestinal. V. d. Vaisseau dorsal. C. d. Cavité digestive. Fig. 52. Coupe transversale dans la région moyenne du corps. Le tube musculo-cutané est seul représenté ici. Le Ver a la forme caractéristique de l'état de contraction, c'est-à-dire plus ou moins quadrilatérale. Cette figure est faite surtout en vue de montrer les différents chomps musculaires longitudinaux. C. d. Champ dorsal. 428 PAUL CERFONTAINE. C. V. Champ ventral. C. I. — C. I. Champs latéraux. G. a. — G. a. Champs accessoires. 1, 3, 3, 4. Champs intersétaux. M. r. Muscles rétracteurs des soies. M. r. s. Muscles radiaires des soies. Fig. 53. Vue intérieure de la paroi du coi*ps, dans le but de montrer la disposition générale des muscles présidant aux mouve- ments des soies. Hyp. Hypoderme. M. c. Muscles circulaires. J. s. Jeunes soies en voie de développement. S. f. Soie fonctionnant. Pour les autres lettres, même signifif^ation que dans la figure précédente. rig. 54. Coupe transversale montrant des vaisseaux sanguins courant entre les séries de colonnes musculaires longitudinales et obliquement à travers ces séries. T. n. Gros tronc nerveux, courant entre les muscles longitudinaux et circulaires. Fig. 55. Coupe transversale, nous montrant des éléments musculaires traversant aussi bien les rubans mu.«culaires de Claparède que les caissons de Udc. Fig. 56. Coupe tangentielle, parallèle à la surface du corps, passant à travers un groupe de soies, dans l'épaisseur de la couche musculaire longitudinale. Ce mémoire a été présenté au concours pour la collation des bourses de voyage et déposé le 28 décembre 1888. Sur la conservation de l'oxyhénioglobine à l'abri des germes atmosphériques, Léon FREDERICQ. J'ai conservé pendant plus d'un mois, au contact de l'air et dans un appartement chauffé pendant le jour (c'était en hiver), des échantillons d' oxyhémoglohine de chien,- tant en solution qu'à l'état de cristaux. H était facile de constater spectroscopiquement l'intégrité de la matière colorante rouge. Je m'explique cette conservation d'une substance considérée comme éminemment altérable au contact de l'air (dès que la température dépasse G»), par le mode de préparation de. la solution et des cristaux. Le sang avait été recueilli directe- ment de l'artère dans des vases stérilisés au préalable. L'opé- ration ainsi que toutes les manipulations ultérieures avaient été exécutées en observant les précautions minutieuses qui permettent d'exclure les germes atmosphériques. J'ai constaté en même temps que les solutions aseptiques à' oxyhémoglobine se conservaient à l'abri de l'air extérieur (vases et tubes scellés) sans que Voxyhêmoglobine subisse le phénomène ordinaire de la réduction à l'état d' hémoglobine. Mais la durée de conservation de Voxyhêmoglobine aseptique n'est pas illimitée. Au bout de quelques semaines, elle com- mence à passer à la méthémoglobine, et la transformation est complète en quelques mois. L'ensemencement de cette méthé- moglobine dans différents milieux de culture a montré qu'elle 430 LÉON FREDERICQ. ne renfermait réellement aucun germe vivant (^). Il suffit d'ajouter à l'un des tubes contenant de la méthémoglobine aseptique, une goutte de sang putréfié (ou simplement exposé à l'air), puis de sceller le tube, pour observer au bout de quelques jours, la disparition de l'oxygène de la méthémoglobine et la transformation de cette substance en hémoglohme réduite. Cette propriété (bien connue) de la matière colorante du sang, de se réduire au contact des germes atmosphériques, peut servir à reconnaître si un échantillon de sang ou à'oxi/hé- moglobine est réellement stérile. Si les germes ont été rigou- reusement exclus, V oxyhémoglohine se conserve intacte pendant assez longtemps et se transforme ensuite graduellement en méthémoglobine. Au contraire, le sang souillé de microorga- nismes peut être scellé avec dix, vingt, etc., fois son volume d'air : l'oxygène finit toujours par disparaître dans ce cas et V oxyhémoglohine se réduit entièrement. Les deux substances en question, Vhémoglohine réduite et la méthémoglobine, sont faciles à reconnaître, grâce à leur teinte et à leur spectre d'absorption caractéristique. (') M le Di' Henrijean, agregii special à l'Université do Liège, a bien voulu contrôler, par la mélhoile de l'eiiseinencenient, l'étal aseptique des éctiantillons de niélhétnoglobine que je lui ai remis. Recherches physiologiques sur l'occlusion de l'aorte thoracique, LE Dr COLSON. CHAPITRE I. — Historique. L'occlusion de l'aorte abdominale fut exécutée pour la pre- mière fois, et en même temps, par Sténon (^) chez les Poissons, et par Swammerdam (^) chez les Mammifères : elle est presque immédiatement suivie d'une paralysie complète de l'arrière- train, paralysie définitive ou passagère, suivant la durée plus ou moins longue de l'occlusion, et dont le point de départ est fixé par Swammerdam dans l'anémie des organes périphériques, c'est-à-dire des muscles et des nerfs. L'expérience fut reprise plus tard par Albrecht von Haller (^) sur des chats, et par Ségalas d'Etchepare (^) sur des chiens. Tandis que le premier reconnut que dans certains cas, la para- lysie de r arrière-train est précédée d'un stade d'excitation (•) NiCOLM Stenonis. Eleiiieut myologiœ spedine}! cui accednnt cants carchnriœ (iissectum caput et dissectìis piscis ex cauiim (jenere. Amstelodamife, I(i67, p. 109 (cité d'après Spronck). (-) JoH. SwAMMERDAMi. Tractatiis (le respiraiione. Lugd. Batav., I66T, pp. 61-62 (cilé d'après Spronck). (') LUCHSINGEB. Znr Ketììittìi-is der Fitnctionen des Riickenmarkes. Archiv. f. d. ges. Physiol., 1878, X'.I, p. 310. (*) Magendik. Journal de physiol. exp., 1824, t. IV, p. 287, 432 COLSON. motrice peu intense, se traduisant par quelques convulsions passagères, le second n'observa jamais cette excitation, mais nota que la ligature simultanée de l'aorte abdominale et de la veine cave retarde notablement l'apparition de la paralysie. Le procédé jusque-là en usage consistait à aller lier directe- ment le vaisseau au-dessus de sa bifurcation en iliaques primi- tives, après une laparotomie préalable. Stannius (^), pour éviter l'ouverture de la cavité abdominale et pouvoir soumettre le même animal à une série successive d'occlusions, alla à la recherche de l'aorte par une incision profonde, pratiquée entre la colonne vertébrale lombaire et la masse musculaire sacro- lombaire, et la saisit dans une ligature qu'il put relâcher à volonté. Il nota le premier que lors du retour des fonctions de r arrière-train par suppression de la ligature, la sensibilité reparut après la motilité. Kussmaul et Tenner {^) firent chez le lapin la compression de la crosse aortique au moyen d'une pince de Charrière spéciale : ce n'est que très exceptionnellement (1 cas sur 10) que la para- lysie fut précédée de quelques légers tremblements, rappelant ceux de la paralysie agitante. E. du Bois-Reymond (^) recourut à un procédé déjà utilisé par Joh. Brunnerus (*) pour la constriction du canal thora- cique : il contourna la colonne vertébrale avec un trocart- aiguille, armé d'un ruban résistant qui, serré sur les apophyses épineuses, devait comprimer l'aorte contre la colonne verté- brale. Il opéra également sur les lapins, et vit la paralysie, en général, n'apparaître que très tardivement, ignorant lui-même si ce retard tient à la compression concomitante de la veine cave (fait déjà signalé par Ségalas d'Etchepare), ou bien à l'insuffisance de la compression de l'aorte, logée dans la gout- (') Stannius. Archiv fur physiolog. Heilkunde, l8o!2, XI, p. -1. (*) Kussmaul et Tenner. Moleschotl's Untersuchungen zur Naturlehre des Men- schen und der Thiere, 1857, p. 60. (5) E. DU Bois-Reymond. Archiv fur Anatomie und Physiologie, I860, p. 639. (*) Joh. Brunnerus. Expérimenta nova circa Pancreas. Lugd. Bat , 1722, p. ISô (cité d'après Spronck). RECH. PHYSIOL. SUR l'oCCLUSION DE l'aORTE THORACIQUE. 433 tière des deux psoas (comme l'a prétendu plus tard Spronck) (^). Quoi qu'il en soit, il continua à admettre, avec tous les autres auteurs, l'ancienne opinion de Swammerdam, relative à l'ori- gine de cette paralysie, opinion qui avait persisté malgré la découverte de Stannius, que les nerfs et les muscles conservent encore leur excitabilité longtemps après l'établissement de la paralysie. C'est à Schiffer (^) que revient le mérite d'avoir rectifié cette manière de voir , en établissant d'une façon positive que cette paralysie est d'origine médullaire, et que parmi les organes périphériques, l'anémie frappe d'abord les terminaisons ner- veuses, puis les troncs nerveux, et en dernier lieu seulement les muscles. Il opéra sur des lapins et fit la compression de l'aorte au moyen d'un compresseur de Ludwig et Sczelkow ; pour exclure l'influence de la compression possible de la moelle à travers la colonne vertébrale, il contrôla ses résultats avec ceux fournis par la ligature directe de l'aorte. Il établit en outre : 1° Que cette anémie médullaire est caractérisée avant tout par l'absence de tout stade d'excitation, fait qui fut bientôt confirmé par Nothnagel (^) ; 2° Que, contrairement à l'opinion émise par Brown- Séquard (*), la sensibilité disparaît toujours après la motilité lors de l'occlusion aortique, et reparaît avant elle lors du retour de la circulation dans les parties anémiées. Mais ces derniers résultats de ses expériences furent bientôt contredits par Luchsinger et Mayer d'une part, par Vulpian et Spronck de l'autre. Luchsinger (^), pour éviter toute circulation collatérale, fit la (') Spronck. Over Ischaemie van liei Riiggemeik, -1886. (*) Schiffer. Ueber die Bedeutnng dea Stenson'sehen Verxuches. Ceniralblatt fur die medici nischen Wissenschafte, -1809, p. ;>79. (^) NoTHNAGEL. Zar Lettre d. klonixchen Kràmpfe. Archiv. f. palhol. Anatomie, 1870. (*) Brown-Sécuabd. Comptes rendus Acad. 1851, t. XXXIII, p. 816. (') Luchsinger. Loc. cit. •134 COLSON. ligature préalable des sous-clavières : dans ce cas, le stade de convulsions existe toujours cliez le chat et quelquefois chez le lapin. Sigmund Mayer (^) obtint le même résultat, d'une façon constante, chez le lapin, en faisant la ligature préalable des carotides. Vulpian (^) obtint, chez des chiens, l'anémie de la moelle, en injectant dans le bout central d'une des artères crurales une petite quantité de poudre de lycopode, suspendue dans 20 à 25 grammes d'eau : les spores de lycopode remontent d'abord à contre-courant dans l'aorte, puis, entraînées par le courant artériel, viennent oblitérer les derniers ramuscules des artères qui naissent de l'aorte en dessous de l'aorte rénale. Dans ces expériences, la perte de la sensibilité précéda presque toujours, quoique de peu, la perte de la motilité ; et les quelques expé- riences où la sensibilité disparut après la motilité, Vulpian les considère comme " non réussies „, tout comme celles oii se produisit une agitation plus ou moins vive, avec des cris plain- tifs quelques secondes après l'injection. Spronck (^) fit ses expériences sur des lapins, d'après le pro- cédé de du Bois-Keymond : il vit non seulement la sensibilité disparaître avant la motilité, lors de l'occlusion, mais en outre il la vit toujours reparaître plus tard que la motilité, lors du retour de la circulation dans l' arrière-train. Il attribue cette différence entre la sensibilité et la motilité, à ce que les cellules ganglionnaires de la première sont plus impressionnables par l'anémie que celles de la seconde. Par contre, il ne vit jamais se produire ces phénomènes très vifs d'excitation signalés, chez le lapin, par Ehrlich et Brieger (■*), lors du retour de la circu- lation, et considérés par eux comme le premier indice du rétablissement des fonctions. Récemment Léon Fredericq (^) a repris l'expérience de (') s. Mayer. Zeilschrift fur Heilkimde, IV, 1883. (-) Vulpian. Maladies du si/stème nerveux, 1879, p. 101. ("') Spronck. Iaîc. cit. {'■) Ehrlich et Brieger. Zeilschrift f. klin. Medic. Bd II, p. 881. (*) Léon Freuekicû. Bull, de l'Acad. royale de Belgique, 3»-' sfîrie, t. XVIII, n" 7, -1889. RECH. PHYSIOL. SUR l'oCCLUSION DE l'aORTE THORACIQUE. 435 Sténon sur de grands chiens, et est arrivé à des résultats très intéressants, directement opposés à ceux de Spronck, Vulpian et Brown-Séquard. Toujours l'occlusion de l'aorte fut suivie de quatre phases bien distinctes, se succédant dans l'ordre sui- vant: 1° excitation motrice; 2° paralysie; 3° excitation sensi- tive; 40 anesthésie; toujours aussi, lors de la suppression de l'occlusion, la sensibilité reparut longtemps avant la motilité. Il produit l'occlusion de l'aorte au moyen d'une sonde coiffée, à une de ses extrémités, d'un petit doigt de gant extensible ; cette extrémité est glissée à travers la carotide primitive jusque dans l'aorte thoracique. L'autre extrémité, munie d'un robinet, sert à l'injection d'une certaine quantité d'eau qui doit dilater le doigt de gant et qu'on peut laisser écouler ou renouveler à volonté. Un procédé analogue avait déjà été employé par Pawlow (^) et par Bohr (^), qui pénétrèrent dans l'aorte thoracique par l'artère sous-clavière gauche. Bohr vit le sang, après une occlu- sion aortique d'un quart d'heure, perdre sa coagulabilité pour au moins vingt-quatre heures. En présence de résultats aussi contradictoires obtenus par les différents auteurs, j'ai cru intéressant de reprendre ces expériences d'après le procédé de Léon Fredericq, et de les compléter par l'étude des modifications qui se produisent lors de l'occlusion aortique du côté du sang, de la circulation sanguine, de la circulation lymphatique, de la respiration (^) et de la calorification. CHAPITRE IL — Procédé opératoire. Un grand chien, anesthésie (^) par une injection sous-cutanée de morphine, est fixé sur le dos dans la gouttière d'opération ; (•) Pawlow. Archi v fur Physiologie, 1888, p. 281. C^) Bohr. Ceatralblatl fur Physiologie, 1888, p. 2Gi. {'') Pendant que je faisais ces recherches, Heinricius (Zeitschrift fiir Biologie, 4889, p. 43) publia un travail, dans lequel il affirme que l'occlusion aortique, chez le lapin, n'est accompagnt'e d'aucune augmentation de la pression carotidienne. (*) Dans quelques-unes de mes expériences, l'animal n'était pas anesthésie, par exemple : n"» 1 et 11, et tous ceux utilisés pour l'étude de la motilité et de la sensibilité (p. 40). 436 COLSON. des deux membres postérieurs, l'un est attaché très lâchement, l'autre reste complètement libre. Une grande incision médiane longitudinale est faite dans la région du cou , les carotides droite et gauche sont mises à nu dans une étendue d'environ 8 centimètres, et une ligature est appliquée sur leur partie moyenne (^). On place une pince à pression dans l'angle supérieur de la plaie cutanée, sur les bouts périphériques des carotides droite et gauche, et l'on introduit dans ceux-ci une canule en verre à laquelle fait suite un petit tube en caoutchouc. Il suffit dès lors de lever la pince à pression pour recueillir des échantillons de sang de l'une ou de l'autre des carotides. Une pince à pression est appliquée provisoirement dans l'angle inférieur de la plaie cutanée, sur le bout central de la carotide droite, dans laquelle on introduit dans la direction de la poitrine, une sonde en laiton, longue de 40 centimètres et de 3 millimètres de diamètre extérieur, coiffée, à son extrémité obtuse, d'un petit doigt de gant en caoutchouc extensible. On lève la pince à pression et l'on glisse la sonde à travers la caro- tide, dans une direction légèrement oblique en haut, en arrière et à gauche (par rapport à l'animal supposé dans sa position naturelle), de manière à éviter le ventricule gauche, pour la faire pénétrer dans l'aorte thoracique (^). On fixe la carotide au moyen d'une ligature sur l'extrémité de la sonde qui reste à l'extérieur. Celle-ci porte un bout de tube en caoutchouc épais permettant d'y raccorder un tube en plomb, solidement fixé à la gouttière d'opération et muni, à son extrémité libre, d'un robinet auquel peut s'adapter une seringue. De cette façon, (•) Celte incision est faite par des coups de scalpel, donnés avec un instrument bien tranchant, d'une façon brusque et sûre. La première incision produit chez l'animal une espèce d'aneslhésie, permettant, le plus souvent, de terminer l'opéra- tion sans cris. Voir Brown-Séquard, Comptes rendus, 1887, t. CIV, p. 931, et t. G, p. -1306-1309. (■■') La position de l'ampoule est relevée à l'autopsie de l'animal : voici quel'[ues-uns des niveaux auxquels j'ai trouvé l'ampoule dilatée et obstruant complètement l'aorte : -l" lie, {-2e et 13« côtes; 2» 9e et IQe espaces intercostaux ; 3° Se, 9e et IQe côtes; 4" 7«, Se et 9 côtes ; S» 7e et Se espaces intercostaux ; 6° Se, lie et 12» côtes. RECH. PHYSIOL. SUR l'OCCLUSION DE l' AORTE THORACIQUE. 437 rinjection de 15 à 20 centimètres cubes d'eau, destinée à dilater le doigt de gant, peut se faire au moyen d'une petite seringue, sans irriter la plaie de l'animal, et à une certaine distance de lui; il en est de même de l'écoulement, qui peut être fait à volonté. Le bout central de la carotide gauche est mis en rapport avec un manomètre à mercure de Ludwig par l'intermédiaire d'une canule en T (canule en verre, modèle François Franck) et d'un tube en caoutchouc court et épais. Le manomètre a été chargé au préalable d'une solution de carbonate de Na d'une densité de 1083 (solution de Traube), sous une pression d'en- viron 10 centimètres de mercure. Les mouvements respiratoires sont enregistrés au moyen d'un pneumographe de Knoll, l'inspiration correspond à la ligne de descente, et les graphiques se lisent de gauche à droite. La plume de l'horloge à secondes écrit sous celles de la respiration et de la circulation sur le papier enfumé du grand appareil enregistreur de Hering. La température anale est prise au moyen d'un thermomètre coudé à angle droit et gradué en dixième de degré. Dans quelques-unes de ces expériences l'horloge à secondes a été arrêtée un instant pour marquer le moment exact de l'injection ou de l'écoulement de l'eau, c'est-à-dire de l'occlusion ou de la désobstruction aortique. CHAPITEE m. — MoTiLiTÉ, sensibilité et fonction des SPfflNCTERS ANAL ET VESICAL. Abstraction faite de certains points relatifs aux sphincters anal et vesical, sur lesquels j'ai plus spécialement porté mon attention, mes recherches ont pleinement confli'mé les résultats obtenus par Léon Fredericq. Je transcris ici, à titre d'exemple, le tableau des phénomènes observés chez deux chiens à la suite de l'occlusion de l'aorte thoracique : 438 COLSON. Chien n^ 1. TEMPS PHENOMENES OBSERVES. 0 00 0 20 0 40 0 48 1 10 1 30 1 33 1 30 2 40 2 45 2 50 2 55 3 00 8 00 13 00 18 00 23 00 28 00 38 00 38 00 43 00 48 00 53 00 58 00 Injection d'eau. Disparition instantanée du pouls crural. Convulsions toniques de l'arrière-train. Résolution musculaire de l'arrière-train. Expulsions de matières fécales. Gémissements. Cris plaintifs. Gémissements. Calme complet. Le sciatique droit est mis rapidement à nu et relié au chariot de du Bois-Reymond. Excitation du sciatique = cris et contraction du membre postérieur. Excitation du sciatique = cris et contraction du membre postérieur. Excitation du sciatique =-- cris et contraction du membre postérieur. Excitation du sciatique ^ cris et contraction du membre postérie^^r. Excitation du sciatique = contraction du membre posté- rieur sans cris. Excitation du sciatique ■= simple contraction du membre postérieur. Excitation du sciatique ■= simple contraction du membre postérieur. Excitation du sciatique = simple contraction du membre postérieur. Excitation du sciatique ^= simple contraction du membre postérieur. Excitation du sciatique = simple contraction du membre postérieur. Excitation du sciatique = simple contraction du membre postérieur. Excitation du sciatique = simple contraction du membre postérieur. Excitation du sciatique ■= plus même de contraction. Excitation directe du muscle = contraction. Excitation directe du muscle = contraction. Excitation directe du muscle = contraction. RECH. PHYSIOL. SUR l'oCCLUSION DE l'aORTE THORACIQUE. 439 CJiien no 11. 0 00 0 25 0 45 0 50 0 52 0 55 1 85 1 40 2 30 2 35 2 40 2 45 2 50 2 55 3 00 3 10 4 00 G 30 G 40 G 53 7 00 8 00 21 00 23 00 Injection d'eau. Dispaiitiou du pouls crural. Convulsions toniques de l'arrière-truin. Résolut on musculaire. Jet continu d'urine. Expulsion de matières fécales. Anus largement entr'ouvert. Cris. Calme complet. Le sciatique droit, mis rapidement à nu, est relié au chariot de du Bois-Reymond. Excitation du sciatique =^ cris et contraction du membre postérieur droit. Excitation du sciatique -= cris et contraction du membre postérieur droit. Excitation du sciatique ^= cris et contraction du membre postérieur droit. Excitation du sciatique ^ cris et contraction du membre postérieur droit. Excitation du sciatique ^= cris et contraction du membre postérieur droit. Excitation du sciatique ■= cris et contraction du membre p stérieur droit. Excitation du sciatique = simple contraction du membre. Excitation du sciatique =- simple contraction du membre. Suppression de l'occlusion par écoulement du liquide. Réapparition instantanée du pouls crural. Excitation du sciatique = contraction du membre. Excitation du sciatique =-- contraction du membre. Excitation du sciatique ^ contraction du membre. Excitation du sciatique =^ contraction et cris. Excitation du sciatique ^ contraction et cris. Légers mouvements volontaires de la queue. Mouvements volontaires de la patte, ^9 440 COLSON. Voici quelques chiffres relatifs au moment d'apparition de ces diff'érentes phases : ■ No du chien. TEMPS AU BOUT DUQUEL APPARAIT LA PÉRIODE DE l'excitation motrice. la paralysie. l'excitation sensitive. l'anesthésie. 1 ' 2 3 4 5 G 7 8 9 10 11 12 13 Moyenne. Quelques secondes Quelques secondes 0' 20" 0 20 0 25 0 35 0 45 0 30 0 45 0 15 Quelques secondes 0' 28" 0 25 Avant 1 minute Avant 1 minute 0' 32" 0 40 0 50 1 0 1 30 1 0 1 15 0 30 0 48 0 51 0 41 il ÌÌ )i 1' 10" 2 30 1 30 2 15 2 45 2 30 2 30 1 30 1 50 1 35 il il 3' 15'' 4 0 3 0 3 15 4 30 11 il 11 )i 5 2 3 20 0' 28" 0' 50" 1' 48" 3' 42" L'occlusion de l'aorte est donc toujours suivie de quatre phases bien distinctes, se succédant dans l'ordre suivant : excitation motrice, paralysie motrice, excitation sensitive et anesthésie. 1° La période d'excitation motrice survient au bout de quinze RECH, PHYSIOL. SUR L OCCLUSION DE l'aORTE THORACIQUE. 441 à quarante-cinq secondes. La queue se raidit et reste le plus souvent immobile. Les membres postérieurs se fixent dans une extension forcée, souvent entrecoupée de quelques légères secousses cloniques. Une seule fois ces dernières, très pronon- cées, occupaient tout le stade et afitectaient assez bien la forme du tremblement de la paralysie agitante. A la fin de cette période, le doigt introduit dans l'anus, se trouve fortement serré par la contracture du sphincter anal; à ce moment aussi se produit souvent une émission d'uiine, sous forme d'un jet continu assez énergique. 2» La période de paralj^sie motrice apparaît au bout de trente secondes à une minute et demie. La queue d'abord, puis les deux membres postérieurs retombent flasques et inertes. Bientôt aussi l'anus, contracture jusque là, laisse expulser des matières fécales et reste dorénavant largement ouvert; l'émission d'urine, sous forme de jet, s'arrête et est remplacée, pendant (pie^iues se- condes, par un léger suintement se faisant goutte à goutte; dans quelques cas, ce suintement existait seul, sans jet préalable. 30 La période d'excitation sensitive survient au bout d'une minute dix secondes à deux minutes trente secondes ; elle est caractérisée par des gémissements et des cris plaintifs, auxquels succède bientôt un calme complet. A partir de ce moment, l'ex- citation électrique du sciatique continue à provoquer des cris pendant plusieurs secondes, voire même pendant plusieurs minutes. 4" La période d'anesthésie survient au bout de trois minutes quinze secondes à cinq minutes deux secondes ; elle est carac- térisée par l'absence de cris pendant l'excitation du sciatique. A ce moment, l'excitabilité indirecte des muscles est encore intacte ; elle finit cependant par disparaître, malgré la persis- tance de leur excitabilité directe. Pour la facilité de la description, j'ai laissé confondues avec ces quatre périodes deux phases qu'on devrait en isoler à la rigueur : ce sont celles de l'excitation et de la paralysie des sphincters anal et vesical. Leur stade d'excitation débute un peu plus tard que celui de la motilité, et se termine après l'éta- 442 COLSON. blissement de la paralysie motrice, avant le début de l'excitation sensitive. Retour de la motilité et de la sensibilité. — Après le retour de la circulation dans l'arrière-train par la sui)piessi()n de l'oc- clusion de l'aorte, la motilité reparut toujours longtemps après la sensibilité. N° TEMPS AU BOUT DUQUEL APPARAIT 1 DURÉE du chien. de l'occlusion. la sensibilité. la motilité. 5 8' 20' 4' 0" 2 (II) 30 55 7 30 4 40 Paralysie persiste après 1 heure. 10 0 3 35 Paralysie persiste après 1 heure. 12 45 1 (II) 1 heure. Mouvements de la queue après 1 1 heures. Ceux de la patte et de l'anus après 1 1 heures. 20 0 Le retour de ces fonctions n'est plus guère possible après une occlusion de plus de vingt minutes. Cette limite concorde assez bien avec celle fixée par Ivussmaul et Tenner, Schiffer, Lucli- singer et Léon Fredericq ; mais elle est de beaucoup inférieure à celle fixée par Elirlich et Brieger (une heure), Spronck (une heure), Brown-Séquai'd (une heure quinze minutes à une heure quarante-cinq minutes) et Stannius (trois à quatre heures). Ce retour se fit toujours d'une façon calme et lentement, pro- gressivement, et ne fut jamais, ni accompagné, ni précédé des phénomènes d'excitation signalés par Ehrlich et Brieger. Jamais non plus, du vivant de l'animal, je n'ai vu survenir dans l'arrière-train, pai-alysé depuis une à huit heures, la rigi- dité cadavérique constatée par Brown-Séquard au bout d'une heure à une heure quinze minutes, par Stannius après trois à quatre heures. RECH. PHYSIOL. SUR l'ocCLUSION DE l'aORTE THORACIQUE. 443 Notons, enfin, que l'anestliésie par le chloroforme supprime complètement les deux stades d'excitation motrice et sensitive, que l'anestliésie par la morphine peut produire le môme effet ou bien supprimer seulement l'excitation sensitive, tout en laissant persister l'excitation motrice. Je crois donc pouvoir conclure de l'ensemble de ces recher- ches : 1° Que l'anémie de la moelle lombaire produit très rapide- ment la paralysie de ces éléments moteurs et sensitifs, et des centres ano-spinal et vésico-spinal de Masius et Yanlair ; 2" Que ces différentes paralysies sont, chacune, précédées d'un stade d'excitation préalable; 30 Que les éléments moteurs sont, contrairement à l'opinion de Spronck, plus rapidement et plus fortement impressionnés par l'anémie que les éléuients sensitifs, et que les centres anal et vesical sont frappés après les éléments moteurs, mais avant les éléments sensitifs. Ce fait est du reste en rapport avec cet autre, d'observation clinique (^), que, dans les paraplégies d'origine médullaire, la motilité est souvent fortement atteinte et les troubles sphinc- tériels déjà prononcés, malgré la persistance d'une sensibilité plus ou moins intacte. CHAPITRE IV. — Sang. A. — Matériaux solides. Refouler presque toute la masse sanguine dans l'avant-train d'un animal revient, en somme, à y pratiquer une forte trans- fusion, et les modifications produites dans la composition du sang doivent être les mêmes : le courant normal de transsu- dation, qui pousse le plasma sanguin à travers les parois vasculaires dans les interstices des tissus, se trouvera renforcé ; (*) Vdlpian. Maladies du système nerveux, p. 29. 444 coLSON. la proportion des éléments figurés à l'intérieiu^ des vaisseaux, augmentera (^), et, de plus, comme la lymphe est notablement plus riche en eau que le plasma sanguin (^), ce dernier lui- même deviendra moins aqueux et plus riche en matériaux solides. Pour résoudre la question, j'ai déterminé, chez un certain nombre de chiens, la proportion de résidu sec (^) de deux échan- tillons de sang (I et II) recueillis avant l'occlusion aortique, et celles de deux autres (III et IV) recueillis après une occlusion d'une heure. (*) Alexander Andreessen. Disseruuiun de Dorpat, 1883. — J. Cohnstein uiul N. ZUNTZ. Archiv fiir die ges. Physiologie, B<1. XLII, \8S8. UiiicinKcItitinicii iiticr den Flilisifikeitsciisiniisch^ eie. (-) GALI.KN et QuÉVENNR Gtizeltc mt-dic(dc de Pari.i^ 1834, n"^ 24, 27, liO el 34. — SCHERER. VerliaudluiKien der medicin. plnjsilinl. GeselUchafc zu Wàrzburq^ Vif, p. 268. — Hen.sen el Dahnhardt. Archivfâr pailiolorj. Aiiaiomie. XXXVH, |i|i. ."io et (!8. — Carl Schmidt, Uulleiin de Saint-Péierxbourfj, IV, p. 335, 18lil. — Ham- MARSTEN. Ueher dns Pararilnbidiii, Avchiv f. d. ijcs. Phijsiolofiie, 1878, XVII, p. 413, et XVII, p. 38. — Hoppe-Seyler. Phyùol. Clicmie, III, ,^ 203 et suiv., 4879. ("") Deu.x capsules en porcelaine (n»* I et II), pesfes au préalable avec leur verre de montre respectif, sont plac(^es à une certaine dislance de la table d'opération. Avant rocclusion aortique, environ 13 centimetres cubes de sang sont recueillis, du bout périphérique de la carotide droite, dans un tube gradué. Celui-ci est ren- versé un certain nombre de fois pour obtenir un mélange bien uniforme de tous les éléments, et, dans ce même but, le liquide est versé allernativement et par petites quantités, dans les deux capsules qu'on recouvre immédiatement de leur verre de montre. On repèse aussi vite que possible pour éviter toute perte par evaporation, et la différence du nombre obtenu avec celui de la première pesée exprime le poids du sang liquide. On abandonne les capsules, dépourvues de leur verre de montre, au bain-marie pendant environ six heures, et l'on continue la dessiccation dans l'étuve sèche à dOS». Au bout d'une dizaine d'heures environ, la dessiccation est interrompue de temps à autre par une pesée, faite chaque fois après refroidissement préalable dans l'exsiccateur, et on ne considère la dessiccation comme achevée, que lorsque le nombre de la dernière pe.sée ne dépasse plus celui de la précédente. On repèse finalement la capsule et le verre de montre, bien lavés, desséchés et refroidis au préalable, el leur poids est déduit de celui de la pesée antérieure pour avoir le poids du résidu sec. Les échantillons du sang, recueillis du bout périphérique de la carotide gauche, après une occlusion aortique d'une heure, sont traités de la même façon dans les capsules III et IV. RECH. PHYSIOL. SUR l'OCCLUSION DE l' AORTE THORACIQUE. 445 Les résultats de mes recherches se trouvent résumés dans le tableau suivant : à POIDS DU SANG POIDS DU RÉSIDU PROPORTION DU RÉSIDU u S a ■a c X w (en grammes). (en grammes). par gramme de sang. Avant Après Avant Après Avant Après c occlusion. occlusion. occl usion. occlusion. occlusion. occlusion. a . I2,0G9 III 4.284 I 2, 1 '^8 111 0,806 I 0,178 m 0,188 2 < + 0.0105 Il I0,74o IV 7,301 II 1,922 iV 1,379 II 0,178 IV 0,189 I 0,210 III 6, lìio I 1,0 i2 111 1,310 1 0,200 III 0,213) G ^ H .■i,5;rt IV 7,881 II 1,122 IV 1,702 H 0,202 IV + 0.0135 0,2 16| I 8,874 III S,d83 I 0,8 iO III i,20o I 0,214 III 0,230/ 7 . + 0.016 11 3, io8 IV 5,0 S7 11 0,7oo IV 1,185 II 0,217 IV 0,233) I 6,630 III 6,'40o I l,S17 III 1,582 I 0,228 III 0,247) 8 + 0 0185 II o.3o3 IV 6,289 II 1,217 IV 1,339 II 0,227 IV 0,243) I 6,827 m 7,0:-)o I l,:3S0 IH 1,763 1 0,231 III 0,251) 4 + 0.0203 II 7.497 IV 0,712 II I,7o0 IV 1 ,433 11 0,233 IV 0,234) l I 4,883 111 i,48o I 0,988 III 0,846 I 0,202 m 0,188) •^ — 0.0135 II 0,636 IV o,o88 II 1,136 IV 1,040 II 0,201 IV 0,188) Donc, l'occlusion de l'aorte est suivie, dans l' avant-train, d'une augmentation de la proportion des matériaux solides du sang, et cette condensation est d'autant plus forte que le sang était plus dense avant l'occlusion. La seule exception à cette règle est fournie par le chien n» 3, chez lequel le résidu sec est plus fort avant qu'après l'occlusion. Mais chez lui, s'était produite une hemorrhagic abondante une demi-heure après le début de l'occlusion. Or, la saignée a pour effet direct de diminuer la proportion des matériaux solides du sang (^); (') Popp. Uebcr die Bexcliaffenheil des rnemchlichen Btuteti, 1843, p. 89. — Bec- querel et RoDiER. Recherches sur lu composition du snug dans Vélat de santé, etc. Paris, 1844. — Von Lesser. Berichte der sâchs. Gesellschaft d. Wissenschaften zu Leipzig, 1874-1875, XtV, p. 153. 446 COLSON. elle a donc pu, dans ce cas-ci, supprimer et même renverser l'eifet de condensation qu'aurait dû produire l'occlusion aortique. B. — Coagulabilité du sang. Pour l'étude de l'action qu'exerce l'occlusion de l'aorte sur la coagulabilité du sang, les échantillons de ce liquide sont recueillis par les bouts périphériques des carotides dans des tubes à réaction d'un même calibre. Avant l'occlusion, la prise est faite dans la carotide droite; après l'occlusion, dans la carotide gauche. Lorsqu'on fait plusieurs prises de sang à des moments inégalement éloignés du début de l'occlusion, la der- nière prise n'est faite qu'après une saignée préalable destinée à entraîner les caillots restés dans les tubes à la fin de la prise précédente. Comme les occlusions de dix à quinze minutes ne me donnaient que des différences à peine appréciables, j'ai fait toute une série d'occlusions beaucoup plus prolongées, dont voici le résultat : TEMPS NÉCESSAIRE RETARD DUREE pour la coagulation complète. (iëterniiné es -a a. a Z del occlusion. par l'occlusion. Avant occlusion. Après occlusion. H. M. s. H M S. H. M. s. H. M. s. 1 0 2o 0 0 6 0 0 6 do 0 0 lo 2 0 0 (1 2 0 0 i 2 0 "2 ^2 3 0 0 0 0 7 G '2 3 0 1 o6 1 4 0 0 0 '■2 3 0 ■> 30 0 3 ■27 ! 6 0 0 0 3 a 0 10 0 0 6 - 0 0 0 8 30 0 13 0 0 r; 30 1 7 "2 0 0 0 8 30 1 o 0 0 oO 30 « ! 1 0 0 0 i 10 0 8 30 0 4 20 / -2 0 0 0 4 10 0 oo 30 0 oO oO RECH. PHYSIOL. SUR l'oCCLUSION DE l' AORTE THORACIQUE. 447 Donc, rocclusion de l'aorte diminue toujours la coagulabilité du sang, mais dans une proportion beaucoup moindre que celle indiquée par Bohr. Cette diminution de la coagulabilité est d'autant plus forte que l'occlusion a duré plus longtemps, et elle progresse beaucoup plus rapidement que la durée de rocclusion. Ce fait de la diminution de la coagulabilité suffit à lui seul pour expliquer l'hémorrliagie en nappe qui survient chez l'animal dans la plaie du cou après une heure et quart d'occlusion. Cette hémorrhagie, d'abord très faible, va petit à petit en augmen- tant de façon à devenir très intense au bout de deux heures. Il n'est pas impossible cependant que l'état de dilatation et l'aug- mentation de la pression sanguine dans les petits vaisseaux de l'avant-train (^) y joue un certain rôle en facilitant, jusqu'à un certain point, l'éclosion de l'hémorrhagie : mais l'influence de ces facteurs doit être bien faible si l'on tient compte de l'appa- rition si tardive de l'hémorrhagie. Ce fait nous explique encore l'état particulier de la •' couenne inflammatoire (^) „ que présente le sang coagulé et qui, à peine visible après une occlusion d'une heure, devient manifeste après celle de deux heures. Grâce à la lenteur de la coagulation, la séparation des globules et du plasma peut se faire en grande partie avant la formation de la fibrine, et, par là, la partie supérieure du coagulum est beaucoup plus pâle et presque incolore. Quant à la cause de cette moindre coagulabilité du sang, dans l'état actuel de nos connaissances incomplètes sur la coagulation elle-même, il serait difficile d'apprécier, à sa juste valeur, la conclusion de Bohr : " donc le sang qui perd petit à petit sa coagulabilité en passant à travers les poumons la regagne d'une façon constante en passant à travers les intestins et le foie „. Quoi qu'il en soit, il résulte de toute une série d'expé- riences qu'il doit la regagner plus lentement qu'il ne la perd; {*) Cette dilatation des vaisseaux et l'augmentation de la pression sanguine seront démontrées dans le chapitre suivant : Circulation. {*) LÉON Fredericq. Action physiologique des soustractions sanguines, 1886. 4-18 COLSON. car, en soumettant un chien à une série successive d'occlusions de cinq à vingt minutes, séparées par des désobstructions même plus longues, l'hémorrliagie en nappe n'en survient pas moins manifestement, quoique beaucoup plus tardivement et avec moins d'intensité. CHAPITRE V. — Circulation sanguine. A. — Pression sanguine. Après que Tappeiner (^) eut déjà noté " que, grâce à une espèce d'accommodation du système vasculaire, une perte san- guine de 3 % du poids du corps n'empêche pas la pression sanguine de rester suffisante pour l'entretien de la vie „, Worm-Miiller (^) démontra qu'un animal peut perdre 1.6 à 2.8 "/o de son sang, sans que la pression soit notablement diminuée, et, réciproquement, recevoir, par transfusion, une assez grande quantité de sang, sans que la pression monte d'une façon appréciable. Plus tard, von Lesser (^), Pawlow (*) et Vinay (^) arrivèrent à des résultats analogues. Pour expliquer le mécanisme de cette régulation de la pres- sion sanguine, les élèves de Ludwig (Tappeiner, Worm-Miiller, von Lesser), tout en reconnaissant un certain rôle aux modifi- cations survenues dans la circulation plasmatique, accordent une importance capitale à l'intervention du système nerveux (^) : (') Tappeiner. Berichte der sachsischen Gesellsehafl (1er Wissenschaften, 1872, BJ VII, p. 198. (-) Worm Mùller. Berichte fier sachsischen, etc., 1873, Bd XXV, p. 572. ("') Von Lesser. Berichte der sachsischen, etc., 187i-187o, Bd XIV, p. 153. Ueber die Aupdssung der Gefassc an (jroHnen lllutineii'ien. (') l'AWi.ow. Archiv f. d. ges. Physiologie, XXXVII, p. 73. Cj ViNAY. Des émissiom sanguines dans les maladies aiguos. Paris, 1880, p. 173. {>') Worm Millier base sa manière de voir sur la rapidité de la régulation et sur la nécessité de la coexistence d'un système nerveux central intact : lorsque après la section de la moelle dorsale, chez un animal saigné au préalable, on fait la transfu- sion d'une certaine quantité de sang, on voit la pression monter proportionnellement à la quantité de sang injectée et se maintenir bientôt à un niveau qu'on ne parvient plus à dépasser et qui est inférieur à celui atteint par la même transfusion et beau- coup plus rapidement, chez un animal à moelle intacte. RECH. PHYSIOL. SUR l'oCCLUSION DE l' AORTE THORACIQUE. 449 grâce à celui-cif probablement par action vaso-motrice, le système vasculaire s'adapte à la quantité de sang qu'il contient, en se rétractant pendant et après la saignée, en se dilatant lors de la transfusion. C'est E. N. von Regéczy (^) qui nia le premier l'origine nerveuse de cette régulation et la fit dépendre essentiellement de l'équilibre qui tend à se produire entre deux courants oppo- sés : l'un constitué par la résorption intestinale, la diffusion ou absorption de la lymphe interstitielle et la circulation lympha- tique; l'autre, par la filtration du plasma sanguin et les phéno- mènes d'excrétion du côté des reins et des glandes. Le premier tend à faire monter la pression en augmentant la masse san- guine, l'autre tend à un eff'et inverse en la diminuant. Plus récemment, Léon Fredericq (^) a démontré que le méca- nisme de la régulation n'existe pas au même degré chez les différents animaux; qu'il est beaucoup moins développé, par exemple, chez le lapin que chez le chien : une saignée de 1 % du poids dn corps, qui passe inaperçue chez le dernier, suffit à réduire de moitié la pression chez le premier. Plus récemment encore J. Conhstein et N. Zuntz (^) démon- trèrent que les conclusions de von Regéczy sont erronées, parce que cet auteur ne distingue pas assez ce qui, dans ses expé- riences, doit être attribué à l'endosmose de ce qui est dû à la filtration, et ils conclurent en faveur de la théorie vaso-motrice de Worm-Miiller (^). (*) Von Regéczy. Archiv fiir die ges. l'hysiologie, 1885, p. 73. (*) Léon Fredericq. AcHon phy.sioloyiqiie des sonxtractionx xaiignines, 1886. ('') J. CoHNSTEiN et N. Zuntz. Archiv fUr die ges. Physiologie, Bd XLII. Untetau- cliimgen iïber den Flussigkeilsuuslausch, etc. 1888. (*j Au moment où j'ai terminé la rédaction de ce travail, Johanson et Robert Tigertedt (Mittheilungen vom physiologischem Laboralorium in Stockholm, -1889, Heft 6, p. 331) publient un travail dans lequel ils considèrent les conclusions de Regéczy comme exagérées ; ils se rallient à la théorie vaso-motrice tout en reconnais- sant un rôle assez important aux phénomènes de la fdtration, et démontrent, par une série de transfusions et saignées, comment le cœur, par l'énergie plus ou moins forte de ses contractions, peut jouer un certain rôle dans la régulation de la pression sanguine. ■450 COLSON. L'occlusion aortique représente assez bien le tableau d'une forte transfusion dans l'avant-train, celui d'une forte saignée dans r arrière-train ; la désobstruction consécutive réalise assez bien les conditions d'une saignée après transfusion pour le premier, celles d'une transfusion après saignée pour le second. J'ai donc cru pouvoir utiliser l'expérience de Sténon pour l'étude des modifications de la pression sanguine et du méca- nisme de sa régulation (^). I. — Modifications de la pression sanguine après une seule occlusion aortique. L'occlusion de l'aorte est suivie d'une hausse presque instan- tanée, brusque et notable de la pression sanguine, qui va en augmentant jusqu'au moment du stade de l'excitation sensi- tive (^) et devient très considérable pendant ce stade (voir fig. 1 et 2). Elle redescend ensuite plus ou moins rapidement vers im niveau, variable suivant les sujets, mais toujours supé- rieur à celui de la pression normale, et auquel elle se maintient, avec de légères oscillations, pendant un temps considérable (une heure (^) et davantage). (•) Pour l'étude de ces phénomènes quelques chiens ont été opérés sans anesthésie préalable ; d'autres furent au préalable anesthésiés par la morphine (0e'',"25 à Os^SS) afin de contrôler les résultats fournis par les premiers en se mettant à l'abri des influences extérieures (courants d'air, cris, etc.). Dans ce même but aussi j'ai recouru a un dispositif permettant l'injection et l'écoulement du liquide, sans devoir irriter d'une façon quelconque les nerfs sensibles de la plaie. (') Ce stade de l'excitation sensitive, caractérisé par les cris plaintifs de l'animal, survient, comme l'a démontré pour la première fois Léon Frcdericq, une à deux minutes après le début de l'occlusion, et quelques secondes après l'établissement de la paralysie de l'arrière-train. (') Ces résultats sont directement opposés à ceux trouvés par Heinricius chez le lapin (quatre expériences). RECH. PHYSIOL. SUR l'oOCLUSION DE l' AORTE THORACIQUE. 451 Fig. I. Graphique de pression carorullomie pris au niomenl d'une oeclusion de l'aorte ; id. après désobstruction de l'aorte. L'horloge à secondes est reportée à une pression de 30 millimètres de Hg (à multiplier par deux pour avoir la pression réelle'. A = pression sanguine avant la première occlusion faite à 4 heure 3 minutes */« ; Occ, = moment de Tocclusion de l'aorte; B = pression sanguine pendant une désobstruction, après l'occlusion de 19 minutes. 452 COLSON. Chien A. — Poids : 2V'^,300. Morphine : 0. Pression normale (mm. de Hg.)- Durée de l'occlusion. . . . Pression sang, correspondante. Chien B. — Poids : 23''«,280. Morphine : 0^'\25. 170 O'o" 3' 4'o0" lo' 30' 30' 190 I9i 182 180 186 184 Pression normale . . . Durée de rocclusion . Pression correspondante no 0'30" 4' 20' 30' 40' 55' 190 206 190 186 202 194 Chien C. — Poids : 22''«,930. Morphine : 0"',40. Pression normale. Durée de l'occlusion . . Pression correspondante 60' 180 60' 54 0'30" 1' 2' 3' 4' 25' 30' 35' 110 128 166 148 150 126 ... 130 n. — Modification de la pressioii sanguine lors d'une série d'occlusions aortiques. Lorsqu'on soumet un chien à une série successive d'occlu- sions alternant avec des désobstructions, on voit la pression sanguine alternativement monter et descendre. 1» Lors de chaque occlusion postérieure à la première, la pression remonte plus ou moins rapidement et se maintient avec de légères oscillations à un niveau constant, toujours supérieur à celui de la pression normale, et sensiblement égal à celui atteint à la fin de la première occlusion (fig. 3). RECH. PHYSIOL. ST^R l/ocOLITSinK PE I,' AORTE THORAOIQT'E. 453 FiG.!2. ElTol d'une occlusion el d'une désobslfuction aortiques surla pressio;! caio- lidienne. xz = niveau de la pression normale. / = arre*, de l'horloge k secondes indiquant le moment de l'occlusion (llhlîi'jet retardant de 8 milliiiu'trcs sur le tracé de la pression sanguine ac. g T= arrêt de l'horloge indiipiant le moment de la septième désobsiruction (l;21iii>') et relardant de ,"> millimélres sui' la pression bed. a = niveau atteint après la désohstruclion suivant une première occlusion de 10 min. c ^ niveau atteint après la seconde occlusion. b = niveau atteint après la septième occlusion qui a duré 20 minutes. e = chute brusque correspondant à la septième désobstruction. d = niveau maximum atteint après la septième désobstruction. 454 n(>Li=^nN. Pig. 8. r.raplii(|iie de pi'cssiuii LarolliliDiiiio jiris au iiioiiienl (1 1 li. •![') d'une désobstruction de l'aorle succédant à une première occlusion de "2 minutes. La pression normale est de i'-lO millimètres de Hg. En a = arrèl jusque -11 h. 23'; A = échelle de U pression sanguine à multiplier par deux pour avoir la pression réelle. Ce graphique montre en même temps l'inversion passagère dei oscillations respiratoires immédiatement après la désobstruction. Chien n" 42. RECH. PHYSIOL. STIR l' OCCLUSION DE l' AORTE THORACIQUE. 455 Vie. i. Crjipliiqiie de iiression cUi'olldiciint) pris uu moment d'une déobstructioii (D) succc'dant à nne occlusion antérieure de 20 minutes chez le même chien n" 12. Maintien de la pression au-dessous de la normale; rythme cardiaque absolument uniformi'. L'inversion des oscillations se maintient. A'. />. L'horloge à secondes est reportée à un niveau supérieur ("20 millimètres Hg). 50 456 COLSON. 2° Après chaque désobstruction survient instantanément une chute brusque de la pression sanguine, chute phis ou moins forte, suivie, au bout de quelques secondes, d'une ascension plus ou moins rapide vers un niveau également plus ou moins élevé, suivant la durée de l'occlusion antérieure. a. Si l'occlusion antérieure a été très courte, par exemple de trente secondes à cinq minutes, la pression, après une baisse initiale relativement faible, remonte très rapidement de façon à dépasser d'abord la pression normale pour y retourner ensuite et s'y maintenir (fig. 3). b. Si l'occlusion antérieure a été plus longue, par exemple de cinq à huit minutes, la baisse initiale sera plus forte, et l'ascension consécutive, moins rapide, peut ne remonter que jusqu'au niveau de la pression normale. c. Si l'occlusion antérieure a duré de dix à quinze minutes, la chute initiale sera très considérable, et l'ascension consécu- tive, très lente, n'atteindra qu'un niveau notablement inférieur à celui de la pression normale (fig. 2 et 4), A partir de ce moment la courbe de la pression réalisera toujours le même type, quelle que soit la durée de l'occlusion antérieure. d. Ces trois types de forme peuvent être reliés entre eux par des formes de transition nombreuses, déterminées par la durée plus ou moins longue de l'occlusion. Voici quelques tableaux résumant les modifications de la pression constatées lors d'une série d'occlusionss alternant avec des désobstructions : Chieiî A. — Poids : 2b^'^,330. Mo?phine : 0^'-,35. Pression normale (mm. de Hg). . . liiO N" d'occlusion cl de désobstruction . I II III IV V VI Durée de Tocclusion V -2' u' 10' 20' 30' Pression moyenne après l'occlusion . 210 2(8 214 210 212 206 Durée de la désobstruction .... il,' 20' 10' 13' 4' 20' Pression b" après la désobstruction . 116 110 112 110 70 72 Pression moyenne maxima après la désobstruction IGO 16o 150 130 lit) 114 RECH. PHYSIOL. SUR l'OCCLUSION DE l'aORTE THORACIQUE. 457 Chien B. — Poids : 23 kïlog. Morpidne : O-'/ÎO. Pression normale (mm. de Hg). . . i'28 N» d'occlusion et de désobstruction . I II III IV V VI Durée de l'occlusion 2'30" 3' 5' 6' 10' 30' Pression après occlusion .... lo6 154 ii;6 152 158 154 Durée de la désobstruction .... 13' -' li' 11' 20' 20' Pression moyenne minima après la désobstruction 84 80 70 54 48 5 Pression moyenne maxima après la désobstruction 134 132 130 126 108 liO Chien C. — Poids : 2Pr,300. Morphine : 0^%0. Pression normale (mm. de Hg). • 160 N" d'occlusion et de désobstruction. I II III IV V VI VII Vili IX Durée de l'occlusion 5' 5' 6' 15" 10' 8'30" 6'30" 2' 4' 5' Pression au début de l'occlus on . 226 34 238 236 228 216 218 220 216 Pression à la fin de l'occlusion. . 230 228 240 228 226 134 136 218 20' Durée de la désobstruction . . . \V 22' 12' 15' 1' 2' 10' 8' 138 i'ression moyenne maxima après la désobstruclion 588 102 !0'2 13(i t.! 2 t3'f i:^6 liO Bref, les modifications survenues dans la pression sanguine peuvent être résumées dans le graphique suivant : FiG. 5. Figure schémali(iue indi(iiiant Failure des variations de la pression san- guine après une série d'occlusions (durée 1', 5', 12', 30') et de dé.sobstruclion de l'aorte, a = niveau de la pression normale, bcde = debuts des occlusions de 1', 5', 12', 30'. /(//a' ^= débuts des désobstruclions. fc/m» ^courbes de l'ascension (?onsé- cutive à la baisse initiale. 458 COLSON. Donc, la régulation de la pression sanguine est loin de domier les résultats anxquels on aurait pu s'attendre en se basant sur les faits connus jusqu'ici par l'étude de la transfu- sion et de la saignée cliez le chien. Comment expliquer cette absence, ou plutôt cette insuffi- sance du mécanisme de la régulation dans les deux théories émises au commencement de ce chapitre ? 1°. TJiéorie vaso-motrice. Si l'on tient compte, d'abord de la grande quantité de sang que l'occlusion aortique refoule dans l'avant-train de l'animal, et ensuite de ce fait que le champ d'action des centres vaso- moteurs, étendu dans les expériences ordinaires de transfusion à tout l'organisme, se trouve limité, ici à une partie restreinte du corps, et ne comprend plus le champ d'action par excellence des vaso-moteurs, c'est-à-dire le territoire abdominal; si l'on tient compte de tous ces faits, dis-je, on conçoit aisément que, dans l'avant-train, la masse sanguine soit parvenue à distendre les vaisseaux jusqu'à une limite supérieure à celle que peut produire l'excitation maxima des centres vaso-dilatateurs. De là le main- tien prolongé de la pression sanguine au-dessus de la normale. D'un autre côté, une occlusion prolongée doit produire, par anémie, une paralysie des centres vaso-constricteurs de la moelle lombaire. Cette paralysie et l'élargissement consécutif des vaisseaux portent ici sur un territoire relativement étendu et surtout très important (territoire abdominal). La masse san- guine qui, à peu de chose près est restée la même, en rentrant, lors de la désobstruction, dans ce système, si profondément modifié, ne parviendi^a donc plus à ramener la pression à son niveau primitif, malgré l'appui que peuvent lui apporter les vaso-constricteurs de l'avant-train (^). La courbe, à ce moment, sera caractérisée par une chute profonde suivie d'une ascension lente et peu prononcée, n'atteignant plus le niveau normal. (\ Car « la quantité totale de sang ne suffit pas, tie loin, pour remplir tout l'arbre circulatoire non rétréci, puisque le seul système porte est assez spacieux, chez l'her- bivore pour loger tout le sang du corps. » Voir Léon Fredericû, Éléments de physiologie, l'^^ edit., i883, p. 128. RECH. PHYSIOL. SUR l'OCCLUSION DE l' AORTE THORACIQUE. 459 Il n'est pas étonnant non plus que cette paralysie soit, tout comme celle de la motilité et de la sensibilité, précédée d'un stade d'excitation pendant lequel tous ces vaisseaux sont, au contraire, rétrécis, et les centres vaso-constricteurs de la moelle lombaire très irritables. Le retour de la masse sanguine dans ce système doit se traduire par une ligne de descente relative- ment petite, et sera accompagnée d'une réaction immédiate et énergique, caractérisée par une ligne d'ascension rapide pouvant dépasser, momentanément, le niveau de la pression normale. Enfin, à cause de la lenteur relative du passage du stade d'excitation à celui de la paralysie, ces deux courbes extrêmes seront reliées entre elles par un grand nombre de formes de transition, déterminées par la durée plus ou moins longue de l'occlusion aortique, et parmi lesquelles l'une ou l'autre réali- sera le type moyen où la pression remonte jusqu'au niveau normal. 2o Théorie de von Regéczy. En se plaçant au point de vue de cette théorie, l'occlusion aortique produit, dans l' avant-train, les effets d'une transfusion : les facteurs, qui diminuent la masse sanguine et que j'appellerai négatifs, augmentent, tandis que les autres, que j'appellerai positifs, diminuent. De là, rupture d'équilibre entre les deux courants et tendance à la diminution de la pression. Mais, d'un côté, dans cette région du corps, deux des élé- ments les plus importants des facteurs négatifs, c'est-à-dire l'élimination par les reins et l'excrétion des glandes, font, l'un complètement, l'autre presque complètement défaut. De plus, le seul élément qui reste, à savoir la filtration, au lieu de pou- voir exercer son action dans toute l'étendue de l'organisme, comme dans les transfusions ordinaires, a ici un champ d'action restreint. La valeur dont augmentent les facteurs négatifs ne sera donc pas bien forte. De l'autre côté, dans cette même région du corps, un des principaux éléments des facteurs positifs, c'est-à-dire l'absorption intestinale, fait complètement défaut ; les deux autres (diffusion 460 COLSON. ou résorption lymphatique et circulation lymphatique) ont éga- lement leur champ d'action restreint La valeur dont diminuent les facteurs positifs doit être bien faible également. Il en résulte, en somme, que la tendance à la diminution de la masse sanguine est réduite à un minimun ; de là la possibilité du maintien de la pression sanguine au-dessus de la normale. Mais les différentes courbes qui suivent les désobstructions sont beaucoup plus difficiles à expliquer avec les données de cette théorie : Dans l'arrière-train se produisent, pendant l'occlusion, des modifications directement opposées à celles signalées pour r avant-train : les facteurs négatifs diminuent, les positifs aug- mentent ; d'oii tendance à l'augmentation de la masse sanguine. Par des considérations analogues à celles de tantôt, on arrivera à la conclusion que la tendance à cette augmentation sera rela- tivement beaucoup plus forte que la tendance à la diminution de la masse sanguine signalée dans l'avant-train. Qu'arrivera-t-il dès lors après la désobstruction consécutive ? La masse sanguine aura augmenté dans l'arrière-train d'une quantité supérieure à celle qu'elle a perdue dans l'avant-train. La masse totale sera donc augmentée, et la pression sanguine, après sa chute initiale, remontera au delà du niveau normal. Mais bientôt une nouvelle rupture de l'équilibre, avec diminu- tion consécutive de la masse sanguine, la ramènera à son niveau normal. Dès lors se trouve expliquée la première courbe de la figure 5. Si l'on veut, au contraire, admettre que la masse sanguine totale n'ait pas changé, on aura expliqué la seconde courbe, et la première restera inexplicable. Mais comment expliquer cette troisième courbe et ce main- tien constant de la pression au-dessous de la normale ? Comment encore expliquer cette succession même de phases absolument différentes, sous l'influence de causes qui agissent toujours dans le même sens, mais prolongent leur action pen- dant un temps plus ou moins considérable ? RECH. PHYSIOL. SUR l'oCCLUSION DE l'aORTE THORACIQUE. 461 La durée plus longue de leur action peut tout au plus ren- forcer un effet déjà produit par une durée plus courte. Du reste, le fait seul que la pression sanguine remonte après chaque occlusion à un même niveau constant, quel que soit celui atteint à la fin de la désobstruction précédente, et quelle que soit la durée de cette dernière, ce fait seul, dis-je, prouve que la masse totale du sang ne varie que dans des limites certainement très faibles. Les variations de la masse sanguine, nécessaires pour l'explication des faits, n'existent donc pas. Donc tous ces phénomènes, à part un seul, de même que leur succession régulière et constante, restent inexplicables dans la théorie de Regéczy. Peut-être pourrait-on tourner la difficulté en procédant comme le fait du reste Regéczy lui-même (^) pour expliquer la différence d'action de la transfusion, constatée par Worni- Miiller chez des chiens, suivant que leur moelle dorsale a été sectionnée ou est restée intacte, " au bout d'un certain temps la paralysie de la moelle amènerait un élargissement des vais- seaux de r arrière-train par affaiblissement de leur paroi musculaire : dès lors la même masse sanguine ne suffit plus pour maintenir les parois vasculaires dans le même état de tension, et la pression baissera d'autant plus, dit-il, que cet élargissement même des parois s'accompagnera nécessairement d'une dilatation proportionnelle de leurs pores, c'est-à-dire d'une augmentation de la filtration. En admettant même cette dernière considération purement hypothétique et erronée (-), comment expliquer ce relâchement même des vaisseaux par paralysie de la moelle, si ce n'est par la paralysie des centres vaso-moteurs? Regéczy rentre donc forcément dans la théorie vaso-motrice qu'il combat. Je crois donc pouvoir conclure de ces recherches : 1» Que cette insuffisance de la régulation de la pression sanguine s'explique parfaitement par la paralysie, par anémie (') Voir VON RtGÉCZY, loc. cit. (-) Voir chapitre : Ciradniiou liiinphatiqiie, p. 4!^. 462 COLSON. des centres vaso-constricteurs de la moelle lombaire, et que l'intégrité de ces centres est indispensable et suffisante pour le mécanisme normal de cette régulation ; 2» Que si les phénomènes de diffusion, de filtration, d'ab- sorption et d'élimination des liquides de l'organisme peuvent jouer un rôle relativement important dans cette régulation, leui' intervention n'est cependant pas indispensable et est parfois insuffisante quand celle des centres vaso-moteurs est supprimée ; 3" Que, tout comme pour les éléments moteurs et sensibles de la moelle, l'anémie peut produire très rapidement la para- lysie des centres vaso-constricteurs de la moelle lombaire, et que cette paralysie est toujours précédée d'un stade d'exci- tation. B. — Oscillations respiratoires et fréquence des pulsations CARDIAQUES. On sait que toute hausse de la pression sanguine est accom- pagnée d'un ralentissement des pulsations cardiaques, que toute baisse produit leur accélération (^). On sait également (^) que toute baisse notable de la pression sanguine amène une modification profonde dans les oscillations respiratoires de la pression artérielle chez le chien : la pression carotidienne (') Hales. Hémostatique^ Ì774. — Bernstein. Centralblall fur die medicin. Wissensch., 1807. — Marey. Phij.iiologie médicale de la circulntion. Paris, 1883, (Comptes rendus de la Société de biologie), et Comptes rendus^ 1873. — Kowalewsky et Adamuk. Centralblattl f(jr d. medicin. Wissensch., 4808. — E. Bernhardt. Unter- suchungen ùber den Nerriis depressor bei der Katze. (Inaugural Dissertât. Dorpat, 4868. — Nawrocki. Warschauer Universitâts Nachrichten, n" 3, 1870. Ueber den Einjluss des Dlutdmckes aiif dus Centrum der N. vagi. — Nawrocki et Muraschko. Warschauer Universitâts Nachrichten, no 2, 1870, p 200. Ueber die FAnwirkuvg des Blutdruckcs auf die Haûfigkeit der Herzsrblà'je. — François Franck. Travaux du laboratoire de Marcy, 4877, III, p. 273. (-) Mosso. Ueber dell Kreislauf des Blutes im meiìsclilichen Gcliirn. Leipzig, 1881, et Atti dei Lincei, 7 dec. 1879. ^ Léon Frederico. Injlueuce de la respiration sur la circulation. Archives de biologie. III, p. oo, 1882, et Action physiologique des Mustract-ions sanguines, 1880. RECH. PHYSIOL. SUR l'OCCLUSION DE l' AORTE THORACIQUE. 463 baisse pendant rinspiration pour remonter pendant l'expiration, alors que les rapports entre les variations de la pression arté- rielle et de la respiration sont inverses chez le chien intact. Toutes ces modifications sont attribuées avant tout, sinon exclusivement, à l'action tonique du pneumogastrique et du centre d'arrêt de la moelle allongée, action tonique qui est diminuée par la baisse, exagérée par la hausse de la pression sanguine. C'est la suspension de cette même action tonique qui, comme l'a démontré surtout Léon Fredericq, fait dispa- raître les inégalités respiratoires du rythme cardiaque et ren- verse par là les rapports entre les variations de la pression artérielle et de la respiration. Mes recherches, à ce point de vue, n'ont fait que confirmer ces résultats, mais ont l'avantage de montrer, sous une forme nouvelle et des plus évidentes, les rapports intimes entre ces phénomènes et la pression sanguine. I» Après l'occlusion aortique, les pulsations cardiaques deviennent moins fréquentes ; leur inégalité respiratoire se maintient suffisamment pour que les oscillations respiratoires, devenues plus étendues, continuent à présenter leur type nor- mal : la pression monte pendant l'inspiration et baisse pendant l'expiration (fig. 4). Ralentissement des pulsations cardiaques par occlusion aortique. N° (lu chien I 40 III IV 124 VI 41 VII 41 XII 74 XIV 40 Pouls (en 30"j avant l'occlusion . . Pouls (en 30") après l'occlusion . . 31 12 70 38 35 70 34 II» Lors d'une désobstruction, on voit survenir, en même temps que la chute de la pression sanguine, au-dessous de la normale, une accélération plus ou moins marquée des pulsations cardiaques, la suppression presque complète de leur inégalité respiratoire, une réduction considérable des oscillations respi- 464 COLSON. ratoires et leur inversion complète : la pression monte pendant l'expiration et baisse pendant rins})iration. FiG. 6. Rythme cardiaque pendant la huitième désobstruclion. La pression monte pendant l'expiralion. La durée même de ces modifications varie avec la durée de l'occlusion antérieure : elles sont permanentes si cette dernière a été assez longue pour que la pression sanguine reste constam- ment au-dessous de la normale (fig. 4 et (i ) ; elles ne sont que passagères et peu prononcées si la baisse de la pression san- guine n'est pas permanente : alors on les voit disparaître au fur et à mesure que la pression remonte à son niveau normal. Accélération du loouls lors d'une désobstruction. \ N" (lu chien .... 10 ^2 li N" de désobstruction. I 11 111 IV VI I 11 111 IV I II III Pouls (en ;^0") avant désob- struction oO 4G GO 43 32 84 81 60 69 34 43 60 Pouls (en 30") après désob- struction 78 420 123 6o 74 93 90 87 dio 63 86 82 RECH. PHYSIOL. SUR l'oCCLUSION DE l' AORTE THORACIQUE. 465 m» Quelle que soit la durée des modifications survenues lors d'une désobstruction, l'occlusion suivante, en ramenant la pression au-dessus de la normale, les fait disparaître immédia- tement et leur substitue celles constatées lors de la première occlusion. Ralentissement du pouls par une occlusion succédant à une désobstruction. N" du chien i n ni IV II III IV 14 H II! IV N" de rocclusion Pouls (en 30") avant rnrclusinn . . 139 Ì-20 107 8o 76 80 57 79 83 l'ouls (en 30") après l'ucclusion . . io- 8G 8'2 58 56 61 53 40 49 C. — État de la circulation dans l' arrière-train après l'occlusion AORTKiUJi- I. — Distribution du sang. La circulation de retour, comme on sait, est due essentielle- ment à l'impulsion cardiaque ou vis a tergo, qui se transmet à travers les capillaires jusque dans les veines; secondairement à l'aspiration du cœur lui-même et surtout du vide thoracique, aux mouvements respiratoires du diaphragme et à la contrac- tion des muscles volontaires (^). L'occlusion aortique supprime directement le vis a tergo dans tout l' arrière-train; j'ai cru intéressant de l'echerclier jusqu'à quel point les autres facteurs, secondés du reste par la rétractilité propre des parois vasculaires, arrivaient à chasser le sang de cette région du corps. Le dosage du sang des membres postérieurs et du foie devait me permettre de résoudre cette question. (') Je ne parle pas ici de l'influence de la pesanteur, parce que la position couchée de l'animal dan? la gouttière d'opération permet de négliger ce facteur. 466 COLSON. Pour faire ce dosage j'ai coraparéla teinte de leur sang dilué avec celle d'une solution titrée au millième et préparée avec le sang recueilli du même animal et défibriné au mercure (^). J'ai comparé les résultats ainsi obtenus à ceux fournis par les mêmes organes que j'avais enlevés à des animaux non soumis à l'occlusion aortique. 1° Ciiiens non soumis à l'occlusion aortique : N" du chien Poids du chien (en grammes) Organe examiné Poids de cet organe (en grammes) . . . Poids de son sang Proportion du sang par kilogr. d'organe. . I 23,600 Patte. 3,210 67.5 17.8 II 21,000 Patte. 3,300 60.9 154 Foie. 820 78.1 90.4 Foie. 730 76.3 103.1 2° Chiens soumis à une occlusion aortique d'une heure : N" du chien .... I II III IV II III IV. Poids du chien (en grammes) 14,592 20,500 23,515 31,000 Organe examiné . . . Patte. Patte. Patte. Patie. Foie. Foie Foie. Poids de cet organe (en grammes) .... 1,960 2,680 2,900 3.200 652 616 583 Poids de son sang. . . 13.7 15.9 18.0 18.2 48.1 50.0 49.4 Proportion du sang par kilogr. d'organe. . . 7.0 5.9 6.2 6.6 86.9 81.2 84.7 1 (') Procédé opératoire. — a) Membre postérieur -. Une canule en verre est fixée dans l'artère fémorale gauche, et le memhre postérieur correspondant est désarticulé rapidement au niveau de l'articulation coxofemorale. On lave la surface de section à grande eau, et l'on place le membre dans un grand bocal, où il est soumis à une irrigation continue, faite par l'artère fémorale, sous une pression de deux mètres; le liquide de lavage est formé d'abord par quatre litres d'une solution de Nacl à Va RECH. PHYSIOL. SUR l'oCCLUSION DE l'aORTE THORACIQUE. 467 En comparant les différents chiffres de ces deux tableaux, on voit : 1° Que, malgré la suppression du vis a tergo, il s'est produit, dans ces deux espèces d'organes, une diminution réelle de la proportion de sang; 20 Que cette diminution est relativement notable pour les membres postérieurs, mais presque nulle pour le foie. Je crois pouvoir attribuer cette différence aux deux circon- stances suivantes : a. A ce que les contractions musculaires ont, sur la circu- lation de retour, une influence beaucoup plus marquée que l'aspiration tlioracique et les mouvements du diaphragme. Les membres postérieurs sont presque exclusivement sollicités par les premières, très prononcées pendant le stade de l'excitation motrice; le foie est presque exclusivement sollicité par les seconds, dont l'effet utile est encore affaibli, parce que leur influence sur les vaisseaux est ici en partie détruite par la résistance du parenchyme hépatique lui-même. b. A la difference anatomique des parois vasculaires de ces deux organes. En effet, la tendance des vaisseaux à s'adapter à leur contenu de façon à le soumettre à une pression égale à la normale est, pour la circulation de retour, un facteur qu'on ne peut négliger dans le cas présent où les centres vaso-constric- teurs passent par un stade d'excitation prononcée. Or, ce facteur aura un effet beaucoup moins considérable dans le foie, où les vaisseaux sont maintenus béants par l'adhérence de leurs parois au parenchyme hépatique dur et résistant, que dans les membres postérieurs, où les vaisseaux ne sont (jue très lâchement unis aux tissus voisins, qui, eux-mêmes, sont beaucoup moins rigides. pour mille, et ensuite par de l'eau ordinaire jusqu'à ce que celle-ci revienne incolore, b) Foie : Le foie est extirpé, une ligature appliquée sur le conduit cholédo(iue et une canule en verre fixée dans la veine cave. L'organe est lavé superficiellement à grande eau; une ligature est appliquée sur la plupart des veines sushépatiques pour ralentir le courant du liquide de lavage, et l'irrigation est faite comme pour le membre postérieur, par la veine cave. A la fin de l'opération la ligature des veines sushépa- tiques est enlevée. 468 COLSON. II. — Circulation collatérale. La proportion de sang- retrouvée dans l' arrière-train, après l'occlusion aortique, est, en somme, plus considérable qu'on n'aurait pu le croire à jjriori. En présence d'un tel résultat, j'ai voulu rechercher si la proportion de sang retrouvée dans les membres postérieurs est un simple reste du sang contenu dans les vaisseaux au moment même de l'occlusion, ou si elle est due, en partie au moins, à ce que du nouveau sang vient s'y ajouter par des voies collatérales. Le peu de développement de ces voies au niveau de la base du thorax aurait pu faire rejeter cette dernière hypothèse. Pour résoudre la question, j'ai employé le procédé qu'inventa Hering (^) pour déterminer expérimentalement le temps que met le sang à parcourir l'arbre circulatoire, avec certaines modifications préconisées par Hermann. Après une occlusion aortique d'une heure, j'injecte lentement, et sous une faible pression, 50 centimètres cubes d'une solution (') Hering [Venuche die SchiielligkeU des Dlulumlaujs^ etc. Zeitschrift fur Physio- logie, Bd. III, p. 83, 1829) injecte chez le cheval, dans l'une des veines jugulaires, une solution de ferro-cyanure de potassium ; par l'autre veine jugulaire il recueille de cinq en cinq secondes un échantillon de sang. Il laisse reposer ce dernier pendant vingt-quatre heures et en recueille le sérum dont il dépose quelques gouttes sur du papier blanc. Une goutte d'une solution de sulfate défera 42 "/o, déposée sur le papier ainsi préparé, y proiuit une coloration bleue dès que le ferro-cyanure, injecté dans l'une des veines, est arrivé à se mêler au sang recueilli de l'autre. ViERORDT (Die Erscheinuugen inid Geseize der Stromgenchwindiiikeileu , etc., p. 5o, -1808) moditia le procédé en s'aidant d'un appareil qui rendit l'exécution plus facile et la détermination, du temps plus précise. Il recommande de prendre toujours une solution de ferro-cyanure bien récente, et s-ubstilue le chlorure de fer au sulfate du môme métal. Après avoir mélangé le sang recueilli à une quantité égale de noir animal, il broie le tout avec environ 15 centimètres cubes d'eau, fait bouillir, fdtre et traite le filtrat par un peu d'acide chlorhydrique et une goutte de chlorure de fer. La réaction tarde un peu à se faire et se montre sous forme d'anneaux bleus après evaporation du liquide. Enfin, Hermann (.Archiv. f. d. ges. Physiologie, 4884, Bd 33) modifia à son tour le procédé de Hering de façon à le rendre applicable aux cas où l'on ne dispose pas d'une quantité assez grande de sang, nécessaire pour l'exécution des procédés pré- cités. C'est ce procédé que j'ai suivi. REUH. PHYSIOL. SUR l'oCCLUSION DE l' AORTE THORACIQUE. 469 récente de feiTO-cj-aniire de sodium à 10% dans le bout central de la veine jugulaire externe droite. Les échantillons de sang sont recueillis, de trois en trois minutes, du bout périphériciue de la veine fémorale droite, dans laquelle j'ai fixé au préalable une canule en verre. La petite quantité de sang est reçue sur un fragment de papier à filtrer qu'on laisse sécher et qu'on projette ensuite dans un peu d'eau bouillante : celle-ci coagule les matières albuminoïdes et entraîne les matières solubles, y compris le ferro-cyanure de sodium. On maintient 1' ebullition pendant quelques minutes et on laisse refroidir. Finalement on décante et l'on ajoute au liquide clair ainsi obtenu quelques gouttes d'une solution diluée de chlorure de fer et une goutte d'acide chlorhydrique. Si le liquide contient du ferro-cyanure, sa présence est décelée par l'appari- tion d'une belle teinte bleue qui tarde un peu à se produire. Par ce procédé, on peut se convaincre qu'après une occlusion aortique d'une heure, le ferro-cyanure reparaît dans le sang de la veine fémorale au moins six à neuf minutes après son injec- tion dans la veine jugulaire externe. Il en résulte que la circulation collatérale présumée existe réellement et est beaucoup plus énergique qu'on n'aurait pu le croire. CHAPITRE VI. — Circulation lymphatique. On considère généralement la lymphe comme provenant des li(iuides exsudés, par filtration, des vaisseaux sanguins dans les interstices des tissus, d'où elle est reprise par les vaisseaux lymphatiques pour être déversée dans les grosses veines, près de leur embouchure dans le cœur. On admet généralement aussi que cette filtration, et par conséquent l'activité de la circulation lymphatique, est en rapport direct avec la pression sanguine elle-même. Cette manière de voir était basée sur des considérations théoriques, mais ne reposait sur aucune preuve expérimentale 470 COLSON. directe, quand Pascliutin (^) démontra, par une série d'expé- riences faites sur la ciiTulation l3'nipliati(|ue du membre anté- rieur de cliiens curarisés, que la circulation lymphatique n'est influencée en rien, ni par la congestion active, due à la section des nerfs du membre et de la moelle cervicale, ni par l'élévation notable de la pression sanguine due à l'excitation électrique de ces mêmes éléments nerveux. Il arriva ainsi à la conclusion que, contrairement à l'opinion admise jusqu'alors, l'énergie de la circulation lymphatique n'offre pas le moindre rapport avec celle de la circulation san- guine, pas plus qu'avec le niveau de sa pression. Bientôt Emminghaus (^) reprit quelques-unes de ces expé- riences sur le membre postérieur de chiens anesthésiés par la morphine, et arriva à des résultats analogues; d'après lui, notamment, la ligature des veines augmente notablement l'écou- lement de la lymphe, tandis que la constriction des artères ne la réduirait nullement. Ces deux auteurs prirent, comme tei-me de comparaison, le volume de lymphe écoulé en un temps déterminé. Pour assurer l'écoulement qui est absolument nul quand le membre est au repos, Paschutin imprima au membre des mouvements passifs réguliers, exécutés par une machine spéciale ; Emnimghaus préféra recourir à des expressions faites directement à la main. En présence de résultats aussi surprenants, j'ai voulu recher- cher l'influence de l'occlusion aortique sur la circulation lym- phatique de r arrière-train. Dans ce but, le canal thoracique est mis à nu près de son embouchure dans la veine sous-clavière gauche, et une canule salivaire (modèle de Claude Bernard) est fixée dans son bout périphérique. Un tube en caoutchouc, très court, relie cette canule à un tube en verre, long de 22 centimètres et de 4 millimètres de diamètre intérieur. Ce '/) Bericlitc (1er siichsischen Gesellsch. der Wissenscliaften, 1873, p. 93. (■•^) Id. id. 1873, p. 39G. RECH. PHYSIOL. SUR l'OCCLUSION DE l' AORTE THORACIQUE. 471 dernier, placé le long de la tête de l'animal, dans la direction du canal tlioraciqiie, repose par son extrémité libre sur un point d'appui fixe destiné à lui donner la même inclinaison, presque horizontale, pendant toute la durée de l'expérience. Comme l'écoulement de la lymphe se fait dans ce cas sponta- nément, sans qu'il soit nécessaire d'imprimer des mouvements quelconques aux membres, ce procédé devient beaucoup plus simple et est certainement moins sujet à des causes d'erreur que celui utilisé par Paschutin et surtout par Emminghaus. Tout comme ces derniers, j'ai voulu d'abord prendre comme terme de comparaison le volume de lymphe écoulé en un temps déterminé. Mais la coagulation trop rapide de la lymphe à l'intérieur des conduits rend ce procédé de mensuration difficile et, surtout, peu exact. J'ai donc préféré prendre comme terme de comparaison le temps que met la lymphe à remplir une longueur déterminée du tube en verre, limitée par deux points de repère fixes et d'une étendue d'environ 20 centimètres. Chaque fois que le tube en verre a été rempli, on le retire et on le vide en soufflant fortement par une de ses extrémités ; et la canule salivaire est nettoyée également par un fil de fer avant de procéder à une nouvelle mensuration. On soumet ensuite l'animal à une série successive d'occlu- sions aortiques, et l'on fait un certain nombre de ces mensu- rations avant la première occlusion, ainsi que pendant les occlusions et désobstructions suivantes. Chaque fois qu'on opère dans ces conditions, on obtient un résultat analogue à celui résumé dans le tableau suivant et emprunté au chien n" 13. De l'examen de ce tableau résulte : 1» Lors de chaque occlusion aortique, la circulation lym- phatique de r arrière-train diminue brusquement et se trouve arrêtée complètement au bout d'une minute environ ; 2° Lors de chaque désobstruction aortique, la circulation lymphatique de l' arrière-train renaît immédiatement et atteint, 51 472 COLSON. Durée de V écoulement avant la première occlusion : 40", 50", 55", 45". DURÉE de l'écoulement pendant l'occlusion. "-2 1 S m III IV VI 2'30" 10 20 Le tube ne se remplit que dans les 8/4 de sa longueur; arrêt complet de l'écoule- ment au bout de 1'. Le tube se remplit à moitié ; arrêt complet de l'écoule- ment après oO". Arrêt complet de l'écoule- ment au bout de 60". Arrêt complet de l'écoule- ment au bout de 40". Arrêt complet de l'écoule- ment au bout de o5". Arrêt d'écoulement au bout de 38". m IV VI 13' 14 I! 20 lO l'OO 0 iiO \ 0 0 o5 0 §9 0 50 0 55 \ 5 0 58 0 53 \ 10 \ 5 1 8 1 18 ■1 29 i 16 \ 15 1 23 1 18 N.-B. — L'occlusion n» IV est suivie d'un début de paralysie des centres vaso-moteurs de la moelle lombaire; cette paralysie est complète après la V^ occlusion. Dès lors, la pression sanguine reste notablement abaissée pendant la désobstruction. RECH. PHYSIOL. SUR l'oCCLUSION DE l' AORTE THORACIQUE. 473 au bout de trente secondes à une minute, une intensité variable avec le niveau plus ou moins élevé qu'atteint la pression sanguine : Si celle-ci retourne à son niveau normal, l'intensité redevient rapidement ce qu'elle était avant la première occlusion (exemples I, II et III du tableau) ; si elle reste au-dessous de la normale, l'activité de la circulation lymphatique reste un peu moindre (exemples V et VI du tableau). Notons que ce dernier cas correspond précisément au moment où Regéczy suppose les vaisseaux élargis, leurs pores dilatés et la filtration augmentée. Cette hypothèse est donc en contra- diction directe avec l'expérimentation. Donc, dans toutes ces expériences, l'activité de la circulation lymphatique a paru réglée avant tout et directement par le niveau de la pression sanguine (^). CHAPITRE VII. — Respiration. Lorsqu'on soumet un chien, anesthésié ou non par la mor- phine, à une série successive d'occlusions aortiques et de désobstructions, on constate, du côté de la respiration, des modifications très intéressantes. Lors de chaque occlusion, les mouvements respiratoires deviennent plus lents, surtout au bout de quelques secondes ; la courbe des inspirations et celle des expirations descendent pendant quelques secondes au- dessous de la normale (voir fig. 8). Lors de chaque désobstruc- tion, les mouvements respiratoires deviennent plus accélérés ; la courbe des inspirations descend fortement au-dessous de la normale, celle des expirations remonte légèrement au delà de la normale (voir fig. 7). (') Ce procudé opératoire constitue certainement un moyen d'étude de la lymphe et de sa circulation, qui se rapproche le plus des condhtions normales et permettra d'élucider plusieurs questions intéressantes. Le temps et le matériel m'ont fait défaut : je me propose de reprendre plus tard cette étude. 474 COLSON. Fig. 7. Modification du rythme respiratoire R sous l'influence de la chute de la pression aorlique P, due à la ddsobstruction de l'aorte. En X, on fait la huitième désobstruction aorlique. RECH. PHYSIOL. SUT? l'oCCLI'SION DE l' AORTE THORACIQUE. 475 FiG. 8. iMoilification du rytlime respiratoire (ligne supérieure) sous l'influence de l'occlusion de l'aorte. Ligne inférieure : pression artérielle. En X se fait la neuvième occlusion aortique. Donc: lo Lors de chaque occlusion aortique, se produit immédiate- ment une tendance passagère à l'apnée, disparaissant au bout de quelques minutes et parfois même au bout de quelques secondes, malgré le maintien de la pression sanguine au-dessus de la normale. Cette tendance à l'apnée est caractérisée tantôt par un ralen- tissement notable des mouvements respiratoires, leur profondeur restant la même, tantôt par un ralentissement moins marqué, mais combiné à une réduction plus ou moins prononcée de leur profondeur. Cette dernière porte le plus souvent sur les inspi- rations et en même temps, quoique plus faiblement, sur les expirations; moins souvent elle porte exclusivement sur les premières et presque jamais exclusivement sur les secondes ; 2° Après chaque désobstruction aortique se produit immé- diatement de la dyspnée, d'habitude plus accentuée et un peu 476 coLSON. plus prolongée que l'apnée de l'occlusion, mais également passagère, quel que soit le niveau auquel descend et remonte la pression sanguine. Cette dyspnée est caractérisée par une accélération et surtout par ime plus grande profondeur des mouvements respiratoires ; cette dernière porte toujours sur les inspirations et les expira- tions, mais beaucoup plus sur les premières que sur les secondes, de sorte que la courbe expiratoire monte toujours légèrement, en même temps que la courbe inspiratoire baisse fortement (^). Ces faits me semblent fournir une nouvelle preuve à l'appui de la théorie de Rosenthal sur la régulation des mouvements respiratoires, théorie si vivement combattue depuis quelques années par Hoppe-Seyler, Markwald, Mosso et d'autres. D'après elle, le degré d'activité des centres respiratoires et l'énergie de la ventilation pulmonaire, qui en est la conséquence, sont réglés à chaque instant par les besoins respiratoires de l'organisme : c'est la qualité ou la quantité du sang, baignant la moelle allongée, qui sert de régulateur par sa teneur en 0 et CO^. Or, dans l'expérience envisagée : 1» Lors de chaque occlusion aortique la grande masse de sang artérialisé, refoulée brusquement dans l' avant-train, augmente la quantité d'O de la moelle allongée : de là, diminu- tion de l'activité du centre respiratoire et tendance à l'apnée ; 2° Après chaque désobstruction aortique se produit, en quelque sorte, une saignée brusque et copieuse de l' avant-train : de là, pénurie d'O pour la moelle allongée, excitation exagérée du nœud vital de Flourens et dyspnée ; 3» Dans les deux cas, ces modifications mêmes de la venti- lation pulmonaire, combinées au ralentissement du pouls dans le premier cas et à son accélération dans le second, ne tardent {') Ces modifications diffèrent assez bien de celles signalées par Gad (Verhand- lungen d. physiolog. Gesellschaft zu Berlin, d88S-86, n" 9) à la suite d'une saignée non mortelle ; là il n'y a qu'une simple ampliation des mouvements respiratoires sans accélération, et de plus la courbe des expirations baisse en même temps, quoique plus faiblement, que celle des inspirations. RECH. PHYSIOL. SUR l'oCCLUSION DE l' AORTE THORACIQUE. 477 pas à ramener la teneur en 0 à sa proportion normale : de là, retour à une excitation normale et eupnèe. CHAPITRE VIII. — Thermométrie. Influence de l'occlusion aortique sur la calorification dans V arrière-train. Il est établi par les expériences physiologiques (de Marschall Hall, Cliorazewski, von Barensprung et Gatruck (^) ) aussi bien que par les observations cliniques (de Traube, Maurice, Billet, Thomas, Lorain, Memeyer (^) ) que la saignée a généralement pour effet d'abaisser la température interne, et que cet abais- sement, peu marqué dans une saignée ordinaire, n'acquiert de véritable valeur qu'à la suite de depletions sanguines copieuses et répétées. " Cette diminution de la température, dit Léon Fredericq (^), est un fait brut dont la signification nous échappe pour le moment. En effet, l'étude de la température ne se confond pas avec celle de la calorification : la température interne peut diminuer sans que la quantité de chaleur produite ait subi le plus léger changement „, et réciproquement, pourrait-on ajouter. (*) Marshall Hall. Archives générales de médecine, II, p. 370, 4883. — GuoiiAZEWSKi, Un'erxHchuufjcn iiber den EinfluM des Aderlaxses auf die Kôrpertem- pcniinv (Dissertation, Greifswald, 1874). — Barensprung, Archiv f. Anatomie und Physiologie, 1831, p. 426. — Gatruck, Centralblatt f. d. medicinisclien Wissen- schaflen, 1871, n" 53, p. 833. (*, Traube. Goschen's deutsche Klinik, 1851, n" 9. — Maurice. Dea modifications morbides de la température animale dans les affections fébriles (Thèse de Paris, 18oo). — Billet. Ëtnde clinique sur la température, etc. (Thèse de Strisbourg, 1869). — Thomas. Ueber die Temperaturverhàltnisse bei croupôser Pneumonie (Arch. d. Heiliiunde, V, pp. 30-30). — Lorain. Journal de l'anatomie et de la physiologie de Charles Robin, 1870-71, vol. VII, p. 336. — Niemeyer. Ueber dus Verhalten der Eiijenwàrme bei qcsuiiden iind Inanktit Menschen. Berlin, 1869. (^) LÉON Fredericq. Action plajsiolor/ique des soustractions sanguines, 1886. 478 COLSON. la quantité de chaleur produite peut diminuer sans que la tem- pérature interne change. Car l'état seul des vaisseaux de la peau, dont le rétrécissement amène un ralentissement de la circulation cutanée avec une diminution proportionnelle de la perte de chaleur par rayonnement et par contact, et dont la dila- tation, au contraire, augmente la perte de calorique par un effet inverse, cet état seul des vaisseaux cutanés peu profondément modifier la température interne, alors que la production de chaleur est restée la même ou est même modifiée dans un sens opposé. Dès lors, comme le fait observer Hayem (^), les recherches thermométriques ne sauraient, en aucune façon, nous renseigner sur les modifications que la saignée imprime aux processus de calorification. Ces objections à la thermométrie, parfaitement justes, per- draient la plus grande partie de leur valeur, si chez un animal placé dans un mileu constant on arrivait à maintenir les vais- seaux dans un état invariable, de façon à réduire la perte de chaleur par rayonnement et par contact à une valeur quelconque, mais constamment et directement proportiomielle à l'excès de la température du corps sur celle du milieu ambiant. L'occlusion aortique, en supprimant presque complètement toute circulation sanguine dans l' arrière-train et en produisant la paralysie des centres vaso-moteurs de la moelle lombaire, réalise ces conditions, et j'ai cru intéressant de rechercher les modifications que subit dans ce cas la température anale : (') Hayem. Leçons sur les modifications du sanrj sous Vinfluence des agents médica- menteux et des pratiques thérapeutiques. Émissions snnjuines, etc. Paris, 188i2, t. XXVI, p. 5H. RECH. PHYSIOL. SUE l' OCCLUSION DE l' AORTE THORACIQUE. 479 Giien n° 2. Temps compté à partir du ddlnil de l'occlusion Température anale Abaissement de celte température. 0 38",2 0 30' 0,i 40' 37",0 1,2 6Ò' 3C",5 1 J l|,4o' 36",2 2,0 Chien n'^ 3. Temps compté à parlir du début de l'occlusion Température anale Abaissement de celle température. 0 39' 49' 5T llilT' 3<\o 39»,0 380,6 38", 4 37", 4 0 0,5 0,9 ^,1 2,0 ii,26' 37", 0 2 H CJiien w^ 4. Temps compté à partir du début de l'occlusion Température anale Abaissement de cette température. 0 5' 24' 60' W",0 40», 0 39", 6 390,0 0 0 0,1 1,0 11,15" 38", 2 1,8 Chien n" 6. Temps compté à parlir du début de l'occlusion Température anale Abaissement de cette température. 0 31' 40' 45' 58' ll,38" 37",8 37",4 37",2 37",0 36»,5 35", 5 0 0,4 0,6 0,8 1,3 2,3 2 '15' 34",0 3,8 Chien n" 7. Temps compté à partir du début de l'occlusion Température anale Abaissement de cette température. 0 30' 55' li'31' 21.0' 2i,40' 37»,6 37",3 36",6 3o",0 33",8 32", 1 0 0,3 1,0 2,6 3,8 5,5 3 26' 30",6 7.0 480 COLSON. L'examen de ce tableau (^) montre que la température anale baisse notablement à la suite de l'occlusion aortique et que cette baisse va en augmentant avec la durée de l'occlusion, de façon à suivre une courbe à convexité supérieure. Comment expliquer cette baisse si considérable et la forme de sa courbe ? A priori, cette chute de la température pourrait être attri- buée, soit à une exagéi-ation dans la perte de chaleur par la dilatation paralytique des vaisseaux cutanés, soit à une dimi- nution dans la production de chaleur par l'anémie des tissus, soit enfin à ces deux causes réunies ('^). 1° Dans la première hypothèse : la baisse pourrait difficile- ment être si notable, vu le peu d'activité de la circulation cutanée, et de plus sa courbe serait à convexité inférieure, puisque la perte de chaleur diminue au fur et à mesure que le refroidissement progresse. 2o Daiîs la seconde hypothèse : on s'explique aisément l'im- portance de la chute totale de la température, vu le degré profond d'anémie des tissus et la suppression presque totale de la circulation. Mais sa courbe spéciale à convexité supérieure ne s'explique qu'en admettant que la production de chaleur se maintient encore un petit temps, puis diminue progressivement et de plus en plus fortement, avec la durée de plus en plus longue de l'occlusion aortique. Car un arrêt brusque de la pro- duction de chaleur nous conduirait au mode de refroidissement de la première hypothèse et donnerait une courbe à convexité inférieure. 30 Dans la troisième hypothèse : la courbe à convexité supé- rieure ne s'explique qu'en admettant une prépondérance notable du facteur admis dans la seconde hypothèse sur celui de la première. (') Les chiifres de ce tableau sont un peu inférieurs à ceux trouvés par Spronck chez le lapin : ià, la baisse est de 20.9 à o^.S pour une occlusion d'une heure. (-) Je suppose la température du milieu ambiant constante : ce fait n'est pas absolument exact; mais les tuodificalions de cette température étaient très faibles, et, dans tous les cas, ne peuvent modifier en rien les conclusions de ce raisonnement. RECH. PHYSIOL. SUR l'oCCLUSION DE l' AORTE THORACIQUE. 481 Je crois donc pouvoir conclure de cette analyse que, dans l'occlusion aortique, la température anale peut nous renseigner réellement sur les modifications imprimées, par l'arrêt de la circulation, aux processus de calorification ; que la réduction totale de ces processus est assez considérable et se fait d'abord lentement, puis de plus en plus rapidement avec la durée de plus en plus longue de l'occlusion. GHAPITEE IX. — Résumé. Chapitre III. — Motilité, sensibilité et fonctions des sphinc- ters anal et vesical. 1" L'occlusion de l'aorte produit toujours, dans l'arrière- train, quatre phases bien distinctes se succédant dans l'ordre suivant : excitation motrice, paralysie motrice, excitation sensi- tive, anesthésie; 2" Les sphincters anal et vesical passent également par un stade d'excitation manifeste avant d'être paralysés ; ce stade d'excitation débute vers la fin de l'excitation motrice et se termine après l'établissement de la paralysie motrice, mais avant le début de l'excitation sensitive ; 3" Lors de la suppressioil de l'occlusion, la sensibilité repa- raît longtemps avant la motilité et les fonctions des sphincters ; ce retour n'est plus guère possible après une occlusion de plus de vingt minutes. Donc les éléments sensitifs de la moeUe lombaire résistent plus longtemps à l'anémie que les éléments moteurs, et ceux-ci moins longtemps que les centres ano-spinal et vésico-spinal. Chapitre IV. — Sang. A. Matériaux solides du sang. Une occlusion aortique d'une heure est accompagnée d'une condensation des matériaux solides du sang de l'avant-train, et cette condensation est directement proportionnelle à la densité même que présentait le sang avant l'occlusion. 482 COLSON. B. Coagulahilité. L'occlusion aortiqiie diminue réellement la coagulabilité du sang, mais dans une proportion beaucoup moindre que celle fixée par Bolir : le retard de la coagulation est de vingt-cinq secondes pour une occlusion de vingt-cinq minutes, d'une minute cinquante-six secondes à six minutes cinquante secondes pour une occlusion d'une heure, et de cinquante minutes cinquante secondes à cinquante-six minutes trente secondes pour une occlusion de deux heures. Cette diminution de la coagulabilité du sang nous explique l'hémorrhagie en nappe qui survient dans la plaie du cou après une occlusion d'une heure quinze minutes, et la " couenne inflammatoire „ du coagulum après une occlusion d'une à deux heures. Chapitre V. — Circulation sanguine. A. Pression sanguine. 1» Contrairement à l'opinion de Henricius l'occlusion aor- tique est toujours accompagnée d'une hausse instantanée, brusque et notable de la pression sanguine; cette hausse devient très considérable pendant le stade de l'excitation sensi- tive et retourne ensuite plus ou moins rapidement à un niveau notablement supérieur à celui de la pression normale, et auquel elle se maintient pendant une heure, et davantage : 2« La suppression de l'occlusion aortique est suivie d'une chute brusque et instantanée de la pression sanguine, chute plus ou moins forte et suivie d'une ascension plus ou moins rapide et plus ou moins forte, pouvant dépasser, atteindre le niveau normal ou lui rester inférieure, suivant la durée plus ou moins longue de l'occlusion antérieure, c'est-à-dire suivant l'état d'excitation ou de paralysie des centres vaso-constricteurs de la moelle lombaire ; 30 Les centres vaso-constricteurs de la moelle lombaire sont paralysés par une anémie de douze à seize minutes ; lenr para- lysie est précédée d'un stade d'excitation, tout comme celle des autres centres de la moelle, mais leur résistance à l'anémie RECH. PHYSIOL. SUR l'oCCLUSION DE L AORTE THORACIQUE. 483 est plus forte que celle de ces derniers, y compris les éléments sensitifs ; 40 Le mécanisme de la régulation de la pression sanguine est dû essentiellement à l'action vaso-motrice des centres nei- veux; la diffusion et la filtration des liquides de l'organisme peuvent y jouer un rôle important, mais qui reste secondaire. B. Oscillations respiratoires de la pression sanguine et fré- quence des pulsations cardiaques. lo La hausse de la pression sanguine qui suit l'occlusion aortique est accompagnée d'un ralentissement et d'une amplia- tion des pulsations cardiaques, et du maintien de leurs inégalités respiratoires, et du type normal des oscillations respiratoires : la pression monte à l'inspiration et baisse à l'expiration ; 2» Après la suppression de l'occlusion aortique, surviennent en même temps que la chute de la pression sanguine : une accélération des pulsations cardiaques et une réduction de leur ampleur ; la suppression complète de leur inégalité respiratoire ; une réduction notable des oscillations respiratoires et leur inversion complète : la pression monte à l'expiration et baisse à l'inspiration ; 30 Ces dernières modifications sont constantes ou passagères, suivant que la pression se maintient au-dessous, ou retourne au niveau de la pression normale ; 40 Quelle que soit la durée des modifications survenues après la suppression de l'occlusion, une occlusion ultérieure les supprime immédiatement et leur substitue celles constatées après la première occlusion. C. Etat de la circulation dans V arrière-train après une occlusion aortique. I" Distribution du sang. A la suite de l'occlusion aortique d'une heure, la proportion de sang retrouvée dans les membres postérieurs et dans le foie est diminuée ; pour les premiers, cette diminution est plus faible qu'on n'aurait pu le croire a priori, et elle est presque nulle pour le second. 484 coLSON. Il» Circulation collatérale. Le sang retrouvé dans les organes précités n'est pas un simple reste du sang contenu dans les vaisseaux au moment de l'occlusion ; il provient, en partie au moins, d'une circula- tion collatérale qui s'établit au niveau de la base du thorax et qui est beaucoup plus intense qu'on n'aurait pu le supposer : car le ferro-cyanure, injecté dans la veine jugulaire externe se retrouve dans le sang de la veine fémorale après six à neuf minutes. Chapitre VI. — Circulation lymphatique. La circulation lymphatique de l' arrière-train est complète- ment supprimée par l'occlusion de l'aorte thoracique; elle reparaît immédiatement après sa désobstruction avec une inten- sité variable, directement proportionnelle au niveau de la pression sanguine. Chapitre VII. — Respiration. Chaque occlusion aortique est accompagnée d'ime tendance passagère à l'apnée; chaque désobstruction, d'ime dyspnée passagère; et ces faits constituent une nouvelle preuve en faveur de la théorie de Kosenthal sur la régulation des mouve- ments respiratoires. Chapitre VIII. — TJiermométrie. Calorification. L'occlusion aortique est suivie d'un abaissement notable de la température anale, abaissement qui suit une courbe à con- vexité supérieure; et qui ne s'explique qu'en admettant, qu'après la suppression de l'irrigation sanguine, la production de chaleur se continue encore un certain temps dans les organes anémiés, et diminue ensuite de plus en plus fortement, avec la durée de plus en plus longue de l'arrêt de la circulation. Les Âiittiozoaires nélaiidiies recueillis par M. le profeiiseiir Heiiseu (laiis son expédition 1ë Plankton. COMMUNICATION PRÉLIMINAIRE I. — Une Larve voisine de la Larve de Semper Edouard VAN BENEDEN (Planche XV.) Mon collègue et ami, M. le professeur Hensen, de l'Univer- sité de Kiel, m'a envoyé à l'étude, il y a peu de temps, les Antliozoaires pélagiques qu'il a recueillis, l'an dernier, pendant son expédition du Plankton. J'ai fait rapidement le triage du matériel; quelques exemplaires de la plupart des formes ont été colorés et débités en coupes sériées, puis soumis à un premier examen. Tous les Antliozoaires qui m'ont été envoyés sont des formes larvaires et, chose bien remarquable, la plupart se rattachent à l'évolution de Cérianthides. On ne connaît que quatre genres appartenant à cette tribu : les genres Cerianthus, Arachnactis, Bathyanthus et Saccan- thus. Encore l'existence de ce dernier genre est-elle fort pro- blématique : suivant Andres, le genre aurait été fondé sur des 486 EDOUARD VAN BENEDEN. exemplaires mutilés de vrais Cérianthes. Le genre Bathyan- thus ne comprend que l'espèce Bathyantlius lathymetricus de Moseley; un seul exemplaire a servi à l'établissement du genre et de l'espèce, et cet unique exemplaire se trouvait dans un état de conservation fort défectueux. Par contre, le genre Cerianthus est relativement bien connu. Il n'est représenté que par un petit nombre d'espèces; mais l'organisation de quelques-unes de ces espèces a été fort bien élucidée, grâce aux recherches de J. Haime, de von Heider, des frères Hertv^^ig, de C. Yogt et de Danielssen; les larves de C. membranaceus ont été étudiées et décrites par J. Haime, par Kowalewsky et par Jourdan. Quant au genre Arachnactis, créé par Sars, il n'est connu jusqu'ici que par des formes larvaires recueillies à la surface de l'océan et étudiées par A. Agassiz, C. Vogt et récemment par Boveri. On a pensé que les Arachnactis pourraient bien être de jeunes exemplaires de vrais Cérianthes; mais Boveri annonce dans son mémoire la découverte ([^Arachnactis adultes obtenus par dragage, pendant l'expédition du Triton ; ils seront prochainement décrits par E. Hertwig. Dans le matériel qui m'a été contié par M. Hensen se trouvent, indépendamment du genre Arachnactis, représenté par un certain nombre d'individus d'âges divers, neuf autres formes de Cérianthides, très différentes les unes des autres et faciles à caractériser. Je crois pouvoir affirmer qu'aucune d'elles ne se rapporte ni au genre Cerianthus, ni au genre Arachnactis. Elles indiquent l'existence de nombreux Cérian- thides, dont les formes adultes sont restées inconnues jusqu'ici. Les larves, qui vivent à la surface de l'océan, en plein Atlan- tique, tant au nord qu'au sud de l'équateur, gagnent très pro- bablement les fonds pour y continuer leur développement et y devenir sexuées. S'il eu était autrement, on ne s'expliquerait pas comment aucun exemplaire sexué n'a été capturé, et il n'est pas possible d'admettre que les larves d'animaux appartenant à des faunes littorales se trouvent en abondance en plein océan. Quoique les dragages exécutés dans le cours des expéditions TTOT: LAR^T. VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 487 océaniques récentes n'aient révélé l'existence clans les abysses que d'un seul Cériantliicle. le Batht/anthus Batiti/metriais de Moselej', il est donc éminemment probable, à en juger par l'abondance et la variété des larves pélagiques, que cette tribu est représentée dans les grands fonds par des formes très diverses. Ce fait est intéressant en ce que les Cériantliides sont fort probablement apparentées aux Rugosa ou Tétracoralliaires paléozoïques, dont (piarante-six genres sont connus de la période silurienne, vingt-neuf du dévonien, vingt-quatre du carbonifère, un seul du permien (Zittel). Suivant Zittel, le groupe a atteint son plus grand développement spécifique et numérique dans le silurien supérieur. Il en serait donc des Cériantliides comme des Crinoïdes ; les uns et les autres peupleraient principalement, à l'époque actuelle, les grandes profondeurs des océans. J'ai tenu à annoncer dès à présent ce premier résultat de l'étude que j'ai entreprise des Anthozoaires du Plankton, en attendant la publication spéciale dans laquelle les différentes formes larvaires sont décrites et figurées. Le but principal de la présente note est de faire connaître l'organisation d'une larve connue depuis longtemps quant à ses caractères extérieurs, et (pii a beaucoup intrigué les natu- ralistes. En 1867 Semper décrivit une forme larvaire des tropiques, sur laquelle, à ce qu'il raconte, son attention avait été appelée, avant son départ pour les Philippines, par M. le professeur Behn, de l'Université de Kiel. Pendant son voyage autour du monde, Behn avait observé, dans les régions les plus diverses des mers tropicales, un organisme pélagique de 6 millimètres de longueur, dont le corps cylindrique était pourvu d'une frange courant parallèlement à l'axe du cylindre et donnait lieu à des phénomènes d'irisation d'un admirable effet. Semper ne tarda pas à retrouver cet organisme. Il le rencontra une première fois au voisinage du cap de Bonne-Espérance, par 42° de lati- tude méridionale, dans le courant de Mozambique, et plus tard dans le courant de la Sonde, sur la côte de Java. 488 EDOUARD VAN BENEDEN. Il en a donné une description, accompagnée d'une belle figure, dans le Zeitschrift fur wissenschaftUche Zoologie, et a rendu compte, en quelques lignes, des faits qui le déterminèrent à considérer l'organisme comme une larve d'Actiniaire. Cette forme larvaire est connue sous le nom de larve de Semper. Autant que je sache, elle n'a pas été retrouvée depuis, de telle sorte que nous ne possédons d'autres renseignements à son suj et que ceux que nous devons à la publication faite, en 1 8 6 7 , par r eminent naturaliste de Wtirzburg. Semper n'a pu faire qu'un examen macroscopique de la larve. Voici les principaux faits qu'il a relevés : le corps, cylindrique, présente à chacun de ses pôles un orifice circulaire; l'un d'eux est la bouche; il conduit dans un tube pharyngien qui, après un court trajet, débouche dans une cavité cœlentérique, subdivisée à sa péri- phérie en six loges parallèles par un nombre égal de mésenté- roïdes. L'orifice aboral. Semper l'appelle anus. Dans la peau se trouvent des nématocystes de deux types difierents. La frange irisée règne dans toute la longueur du corps, d'un pôle à l'autre suivant une génératrice du cylindre. Elle est formée de filaments auxquels l'auteur donne le nom de cirrhes; elle s'incline alter- nativement à di^oite et à gauche, et les irisations qu'elle présente sont dues à des phénomènes d'interférence. Elle constitue l'or- gane de locomotion et indique, par sa situation médiane, la symétrie bilatérale de la larve. Il est vraiment étrange que ni les traités récents d'embryo- logie comparée, ni les mémoires spéciaux relatifs au développe- ment des Anthozoaires ne font mention de la larve de Semper. Cet oubli tient certainement en partie au caractère aberrant de l'organisme et à l'impossibilité de le rattacher à l'évolution d'un groupe déterminé d' Anthozoaires ; peut-être aussi a-t-on conservé quelque doute sur l'exactitude des renseignements fournis à son sujet. D'après Semper, la larve aurait six cloisons mésentériques seulement, dont deux notablement plus courtes que les tpiatre autres. Or, toutes les recherches faites sur le développement des Anthozoaires, depuis les travaux classiques UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 489 de M. de Lacaze-Duthiers, ont conduit à ce résultat que, pas plus chez les Actiniaires que chez les Hexacoralliaires, dont le développement est connu, il n'existe, dans le cours de l'évolu- tion, de stade quelque peu persistant, durant lequel la larve serait pourvue de trois paires de mésentéroïdes. Dans un travail récent, Boveri a cherché à établir que tous les Actiniaires passent, au contraire, par un stade caractérisé par la présence de quatre paires de cloisons mésentériques, constituées comme celles qui persistent pendant toute la durée de la vie chez les Edv^arsies; elles sont homologues à ces dernières. Tandis que le nombre des sarcoseptes ne s'élève jamais au-dessus de huit chez les Edwarsies, leur nombre s'accroît chez les Actiniaires suivant une loi, variable de tribu à tribu, mais constante dans les limites d'un même groupe naturel. Les frères Hertwig avaient démontré antérieurement l'im- portance que présente, au point de vue de la classification, le nombre des sarcoseptes et la loi suivant laquelle s'accroît ce nombre; à la suite de ses recherches sur les Actiniaires du Challenger, E. Hertwig en était arrivé à distinguer six tribus parmi les Actiniaires : les Edv^^ardsides, les Hexactinides ou Actinies hexamères, auxquelles il faut adjoindre une partie tout au moins des Madréporaires ; les Monaulées, les Paracti- nides, les Cérianthides et les Zoantines. Blochmann et Hilger ont créé depuis une septième tribu qui comprend les Gonacti- nides. D'après Boveri, tous ces animaux passeraient dans le cours de leur évolution, par le stade Edivardsia, et ce stade succéderait rapidement, dans l'ordre évolutif, au stade à quatre sarcoseptes, réalisé d'une façon permanente chez les Scypho- zoaires (S. St.). Mais aucun Actinozoaire actuellement connu ne présente, dans le cours de son développement, de stade quelque peu persistant caractérisé par la présence des six mésentéroïdes. Or, à en croire Semper, sa larve, qu'il considère comme se rattachant au développement d'un Actiniaire, n'aurait que six sarcoseptes. Parmi les matériaux qui m'ont été communiqués, j'ai trouvé 490 EDOUARD VAN BENEDEN. un exemplaire fort bien conservé d'un organisme que Hensen m'avait signalé comme étant probablement identique à la larve de Semper. L'étude que j'ai faite de cette larve a confirmé la détermination de Hensen, en ce sens que la larve dont il s'agit est voisine de celle que Semper a fait connaître. J'ai l'honneur de communiquer à la Classe la description de cet organisme. La larve, après avoir été colorée par le carmin boracique, a été coupée perpendiculairement à son grand axe. Le nombre des coupes obtenues a été de 220. L'épaisseur moyenne des coupes est de 0,03 mm., ce qui donne, pour l'organisme entier, une longueur totale de 6,6 millimètres environ. La larve a été fixée par le sublimé et conservée dans l'alcool. Les tissus admirablement conservés, se prêtent à un examen liistologique minutieux. Dans le même travail dans lequel il décrit la larve qui porte son nom. Semper signale une autre forme larvaire rappelant certaines larves d'Annélides, en ce qu'elle présente, à quelque distance en arrière de l'orifice buccal, ime couronne ciliaire transversale. Semper est d'avis que cette seconde forme doit se rapporter, elle aussi, au développement d'un Antliozoaire ; son ectoderme est bourré de nématocystes de deux formes, rappelant celles qu'il avait observées cbez sa première larve. Il exprime l'opinion que cette seconde forme pourrait bien être un stade de développement plus avancé du même Actiniaire auquel se rapporte sa première larve. J'ai trouvé également dans le matériel recueilli par Hensen un exemplaire de la seconde larve de Semper. Elle est extrême- ment remarquable à divers points de vue ; elle ne se rattache certainement pas au même développement que la larve à frange vibratile longitudinale, mais bien à l'évolution d'un Antliozoaire du même groupe. Dans son corps globuleux, qui ne mesure guère plus de 2 millimètres de diamètre, se trouvent logées trois autres larves du même type, mais d'âges différents ; ce qui fait que la même série de coupes permet d'étudier quatre stades différents du développement du même organisme. Ce fait extra- UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 491 ordinaire à première vue. trouve probablement son explication dans la propriété commune à un grand nombre d'Actiniaires d'être vivipares. Les larves en voie de développement dans la cavité cœlentérique de l'organisme maternel cheminent dans toutes les parties de cette cavité. C'est un fait bien connu qu'elles pénètrent même dans les tentacules. On conçoit que des larves plus jeunes puissent pénétrer par la bouche dans la cavité cœlentéiique de larves plus âgées et y demeurer après la naissance de ces dernières. Je ferai connaître cette seconde larve dans une note ulté- rieure. La présente communication a pour objet la description de la larve n» 1. Caractères extérieurs. La forme générale de la larve rappelle celle d'une poire : elle est renflée à une de ses extrémités et s'atténue progressivement à l'autre, où siège l'orifice oral. Celui-ci est terminal et se voit distinctement à la loupe. L'axe de la larve n'est pas rectiligne, mais bien incurvé en C. Il est probable que l'incurvation n'existait pas pendant la vie, qu'elle s'est produite au moment où l'organisme a été fixé par le réactif employé pour le durcir. La concavité de la courbe répond à la face que nous appelons ventrale. La surface du corps est ridée et inégale dans sa région moyenne et au niveau du renflement aboral. Elle montre des crêtes arrondies et des bosselures qui n'ont rien de régulier. L'étude des coupes démontre que ces rides sont dues à l'action des réactifs. En certains points, l'ectoderme s'est détaché de la lamelle mésenchymatique et a été soulevé de manière à former les crêtes et les bosselures que l'on observe à la surface. La portion orale du corps n'a pas subi ces altérations : elle est lisse et unie. Toute la surface de la larve est fortement pigmentée, à l'exception d'une bande médiane qui règne le long de la face ventrale, sans atteindre cependant l'extrémité aborale : elle 492 EDOUARD VAN BENEDEN. n'intéresse que les deux tiers antérieurs du corps et se prolonge en avant jusqu'à la bouche. Cette bande médiane occupe la concavité de la courbe larvaire. Au milieu de la bande se voit un sillon peu accusé ; sa coloration est jaunâtre et d'une teinte uniforme, contrastant avec le reste de la surface du corps, qui est très foncée. La pigmentation n'est pas uniforme : on distingue à la loupe des traînées pigmentaires formant un réseau irrégulier très serré. Quand on examine la larve de profil, au moyen d'une bonne loupe, on distingue dans sa concavité une sorte de grumeau translucide, qui remplit l'excavation ventrale ; il n'intéresse pas le renflement aboral. Comme l'ont appris les coupes, cette formation est due à la présence d'une frange vibratile aflalogue à celle que Semper a figurée chez sa larve. C'est elle qui donne lieu, sur le vivant, à ces phénomènes d'interférence et produit ces merveilleuses irisations que Semper a si bien décrites. Examiné à la loupe, l'orifice buccal m'a paru être de forme quadrilatère ; sur son pourtour on ne distingue aucune trace de tentacules. Je n'ai pas observé d'orifice à l'extrémité aborale, et l'étude des coupes m'autorise à affirmer qu'il n'existe pas d'autre orifice que la bouche. Semper a signalé l'existence d'un orifice circulaire à chacune des deux extrémités de sa larve cylindiique. Je ne songe pas à contester l'exactitude du fait affirmé par l'éminent naturaliste de Wiirzburg. Il n'est pas possible, vu le soin avec lequel il a observé sa larve et l'exactitude parfaite des renseignements qu'il a fournis à son sujet, qu'il ait affirmé la présence d'un orifice qui n'existerait point. J'indiquerai plus loin les raisons qui me portent à croire que la larve recueillie par M. Hensen, si voisine qu'elle soit de celle que Semper a décrite, est non seulement spécifiquement, mais génériquement différente de cette dernière. Organisation. Pour se rendre compte de l'organisation de la larve, il convient d'examiner tout d'abord une coupe transversale pratiquée vers le milieu de la longueur du corps. UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 493 Une semblable coupe a la forme d'un ovale irrégulier à grand axe, dirigé transversalement. La symétrie bilatérale est mani- feste (fig. 1). Edoderme. — L'ectoderme n'est pas partout adhérent à la lamelle mésencliymatique. Çà et là se voient, entre les deux formations, des espaces assez étendus. Il en 'résulte que l'ecto- derme forme des plis irréguliers qui déterminent l'apparence ridée de la surface. Ces rides, aussi bien que les fentes que l'on observe entre l'ectoderme et le mesenchyme, sont manifestement les produits artificiels de l'action des réactifs employés pour fix;er et durcir l'organisme. Tandis que, dans toutes les larves d'Anthozoaires décrites jusqu'ici, l'ectoderme présente le même caractère sur tout le pourtour du corps, il existe chez notre organisme, du côté de la face ventrale, une portion nettement différenciée, bien délimitée à droite et à gauche, dont la structure et l'aspect contrastent à première vue avec celle du reste de la couche cellulaire ecto- dermique. Cette formation, que j'appellerai IdiplaqueftageUifère, est médiane et symétrique. Sa largeur représente la moitié environ du diamètre transversal de la coupe. Dans les prépa- rations colorées par le carmin boracique, la plaque flagellifère se montre colorée en rouge vif. Cette coloration n'affecte pas cependant toute l'épaisseur de la plaque, mais seulement sa partie profonde, la zone superficielle qui porte les fouets vibra- tiles étant d'une teinte rosée uniforme. La coloration de la zone profonde est due à la présence d'innombrables noyaux sphé- riques ou légèrement allongés en bâtonnets courts, qui fixent énergiquement le carmin. La zone superficielle est totalement dépourvue de noyaux et se constitue des portions distales, exclusivement protoplasmiques, des cellules flagellées. La plaque flagellifère est formée d'une seule et même espèce de cellules; ces cellules, excessivement étroites et filiformes, ont leur noyau placé à des distances variables de la lamelle mésencliymatique, mais toujours dans la profondeur de 1' epi- thelium. On ne trouve dans la plaque fiagelUfère ni cellules 494 ÉDOUAED VAN BENEDEN. glandulaires, ni nêmatocystes, mais seulement des cellules flagellées. Chacune d'elles présente à son extrémité libre un petit plateau brillant, punctiforme, qui porte le flagellum. Ces petits plateaux contigus donnent lieu à un contour très apparent qui, à un fort grossissement, se montre constitué de points brillants juxtaposés et régulièrement alignés. Dans la portion moyenne de la plaque, la striation de 1' epi- thelium, due à sa composition cellulaire, est normale à la surface ; mais suivant ses bords, les cellules filiformes sont inclinées obliquement de dehors et dedans. Il en résulte qu'aux points où elle se continue avec le reste de l'ectoderme, à droite et à gauche, la plaque semble former deux bourrelets que l'on pourrait assez bien comparer aux bourrelets dorsaux de la plaque médullaire de certains Vertébrés. Dans la plus grande partie de sa longueur, la plaque flagel- lifère, déprimée à son milieu, saillante suivant ses bords et constituée de deux moitiés semblables, l'une droite, l'autre gauche, inclinées l'une vers l'autre, forme une gouttière large- ment ouverte. On peut se faire une idée très exacte de cette gouttière en la comparant à la gouttière médullaire d'un Sauropside ou d'un Mammifère, au début de la formation du myelencéphale. Inutile défaire observer que je n'entends nulle- ment, en faisant ces comparaisons, établir entre ces formations le moindre rapprochement morphologique ; je n'ai en vue que de faire mieux comprendre la forme de la plaque flagellifère. Nous verrons plus loin qu'à ses deux extrémités la gouttière devient moins profonde et que la plaque finit par devenir plane. La plaque porte, dans toute sa largeur, d'innombrables fouets vibratiles admirablement conservés. Ces fouets, dont j'estime la longueur moye-nne au tiers environ du diamètre transversal moyen de la larve, ont un trajet ondulé. On ne peut les suivre dans toute leur longueur sur une coupe ; ils forment ensemble une touffe, striée en certains points, finement ponctuée en d'autres, suivant que le rasoir a passé parallèlement ou perpen- diculairement aux filaments. Il est à remarquer que la frange vibratile formée par l'ensemble des fouets n'est pas ici une UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 495 lame insérée suivant une ligue, comme dans la larve de 8emper, mais bien une couche épaisse dont la largeur répond à celle de la bande flagellifère elle-même. Pour terminer la description de la bande, il me reste à signaler la présence, dans l'épitliélium, de traînées pigmentaires, radiaires ou étoilées, semblables à celles que l'on observe en très grande abondance dans toute l'étendue de l'ectoderme. Dans la plaque flagellifère, ces éléments pigmentaires sont relativement rares. Il est des coupes dans lesquelles on n'en observe aucune trace. Le reste de l'ectoderme a un tout autre aspect. Dans les préparations colorées au carmin boracique, on constate tou- jours l'existence, dans l'épaisseur de la couche, de trois zones différemment colorées. La zone superficielle est d'un jaime brun ; la moyenne est rose ; la profonde est à peu près incolore. Dans la zone moyenne, il existe de très nombreux noyaux, fort rapprochés les uns des autres ; on en trouve également dans la zone profonde, mais ils y sont clairsemés ; dans la zone super- ficielle ne se rencontrent pas de noyaux; la coloration jaune brun de cette zone est due à la présence d'innombrables néma- tocystes et de glandes monocellulaires dont le contenu, composé de grains, offre une teinte brunâtre. De plus, l'ectoderme est fortement pigmenté. Il semble que le pigment siège dans des cellules spéciales, soit filiformes, et alors radiairement dirigées, soit étoilées. Ce qui distingue essentiellement l'ectoderme proprement dit, c'est qu'il se constitue de diverses catégories d'éléments cellu- laires : il se compose, en effet, indépendamment des cellules épithéliales ordinaires, d'une énorme quantité de nématoblastes et d'innombrables cellules glandulaires. Je ne signale pas d'éléments sensoriels, parce qu'il n'est pas possible de les distinguer dans les coupes ; mais il n'est pas douteux qu'il n'existe ici, comme chez les autres Cnidaires, des éléments nerveux en partie mêlés aux autres cellules de l'ectoderme, en partie sous-jacents à ces dernières. Les noyaux de toutes les cellules, quelle que soit la caté- 496 EDOUARD VAN BENEDEN. gorie à laquelle ils appartiennent, sont plus volumineux que ceux des cellules flagellifères : ils se teintent en rose et non en rouge vif; ils sont généralement ovalaires et montrent à peu près constamment des ponctuations foncées, dont une, particu- lièrement apparente, est peut-être un nucléole. Les noyaux des cellules flagellées ont, au contraire, une apparence homogène. Les nématocystes se rattachent à deux formes bien dis- tinctes : les uns, de faibles dimensions, ont la forme de petits cylindres à bouts arrondis ou de boudins droits ; ils renferment un ill décrivant une spirale extrêmement régulière à la péri- phérie du cylindre. Ds sont de dimensions un peu variables ; mais les différences que l'on remarque entre eux ne dépassent pas des limites assez étroites. Ils siègent exclusivement dans la zone superficielle de l'ectoderme. Les autres, très volumineux, de forme ovoïde, renferment un fil enroulé en une spirale très apparente, mais toujours assez irrégulière, les tours de spire étant tantôt plus, tantôt moins rapprochés les uns des autres, et le diamètre de la spire étant sujet à variation dans un même nématocyste. Ils sont relativement rares. On en trouve à peine une dizaine dans une même coupe transversale; ils siègent principalement dans la zone profonde de l'ectoderme. Il existe aussi deux formes de cellules glandulaires : les unes ont un contenu grossièrement, mais uniformément granuleux, les autres un contenu clair et d'apparence homogène ou réti- culée. Les premières sont de loin les plus nombreuses. Très étroites dans la zone moyenne et dans la zone profonde de l'épiderme, au point d'y être filiformes, elles s'élargissent consi- dérablement et s'évasent dans la zone superficielle. Les grains brillants, tous de mêmes dimensions, ont une teinte brunâtre. Les glandes claires, plus rares, se voient surtout dans la partie orale du corps. Lamelle mfsenchymatique. — Elle est remarquablement épaisse et se fait remarquer en outre en ce qu'elle renferme de très nombreux éléments cellulaires. Les cellules, disséminées dans une substance fondamentale UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 497 abondante, faiblement colorée en rose, peuvent être groupées en deux catég-ories : les unes sont volumineuses ; leur proto- plasme fixe énergiquement la matière colorante; elles sont tantôt arrondies, ovoïdes ou spliéroïdales, tantôt pourvues de prolongements, et, dans ce cas, fusiformes ou étoilées. Les autres sont de dimensions beaucoup moindres et toujours pour- vues de prolongements très fins et incolores. Les cellules du mesenchyme ne sont pas uniformément réparties dans la sub- stance fondamentale : très abondantes et voisines les unes des autres en certains points, elles sont relativement rares dans d'autres. On trouve, dans la profondeur de l'endoderme, au voisinage de la couche mésenchymatique, de nombreuses cellules présen- tant des caractères identiques à ceux des grosses cellules du mesenchyme. Elles contrastent par tous leurs caractères avec les cellules épithéliales du feuillet interne ; elles sont arrondies ou fusiformes et, dans ce dernier cas, allongées, non pas per- pendiculairement, mais parallèlement à la lamelle fondamentale. On en voit çà et là qui sont partiellement engagées dans la substance fondamentale du mesenchyme, en partie encore dans l'endoderme. Il n'est pas douteux que les cellules mésenchyma- tiques ne soient, en partie du moins, d'origine endodermique. En est-il ainsi de toutes les cellules du mesenchyme? Je ne le pense pas. On trouve, en effet, dans la profondeur de l'ecto- derme, au voisinage immédiat du mesenchyme, voire même accolées à la surface ectodermique de la lamelle, de petites cellules fusiformes qui, au lieu d'être allongées dans une direc- tion radiaire, sont, au contraire, tangentielles par rapport au mesenchyme. Dans les points où l'ectoderme s'est décollé de la lamelle fondamentale, il n'est pas rare de voir de ces petites cellules ecto dermiques, affectant l'apparence de cellules endo- théliales vues en coupe, accolées à la face externe du mesen- chyme. Ces cellules diffèrent des cellules d'origine endodermique par leurs dimensions minuscules. Il me paraît probable que les deux couches épithéliales du corps fournissent l'une et l'autre des éléments cellulaires au tissu mésenchymatique. ■Ì98 EDOUARD VAN BENEDEN. Ce qui confirme cette manière de voir, c'est que, même dans la plaque flagellifère, on trouve dans la profondeur de la bande, au contact immédiat de la lamelle mésenchymatique, une mince assise cellulaire dont les éléments contrastent avec les cellules flagellifères. Leurs noyaux sont plus volumineux, plus clairs et pourvus d'un point nucléoliforme. Ces noyaux sont identiques à ceux que l'on rencontre régulièrement dans les petites cellules du mesenchyme. A en juger par l'importance qu'a déjà atteinte, dans le stade larvaire que nous décrivons, la lamelle mésenchymatique, et par le nombre des cellules tant endodermi ques qu'ectodermiques, qui paraissent destinées à participer, dans le cours de l'évolution, à l'accroissement du mesenchyme, il semble que cette formation doit être très développée dans les organismes dont notre larve nous représente le début. Dans les larves d'Hexactinies, d'Ed- wardsies et de Cérianthides que j'ai eues sous les yeux, la lamelle fondamentale est le plus souvent totalement dépourvue de cellules ; tout au plus y trouve-t-on çà et là quelques rares noyaux peu apparents. Dans notre larve, au contraire, la lamelle fondamentale est un tissu cellulaire bien caractérisé et les assises cellulaires différenciées de l'endoderme et de l'ectoderme, au contact immédiat de la lamelle fondamentale, ont à peu près l'apparence de la couche des ostéoblastes du tissu osseux, des odontoblastes de l'ivoire dentaire. Cœlentéron, sarcoseptes et endod&>'me. — La cavité cœlen- térique présente, vers le milieu de la longueur du corps, l'appa- rence d'une fente transversale, en forme de croissant, la convexité du croissant étant dorsale, sa concavité ventrale (%• 1). Elle est subdivisée à sa périphérie par trois paires de macro- septes pourvus, suivant leur bord libre, d'un bourrelet mésenté- rique, en six loges, dont deux sont médianes, quatre latérales ; celles-ci sont symétriques deux à deux. De ces loges, la plus étendue dans le sens transversal est la loge directrice ou médio- ventrale. Les sarcoseptes qui la délimitent latéralement ont UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 499 leurs insertions situées en dehors des lignes qui répondent aux bords de la plaque flagellifère. La loge dorsale vient immédia- tement après la loge directrice, en ce qui concerne l'écartement des cloisons mésentériques qui la délimitent. Les loges latéro- ventrales sont plus étendues que les loges latéro-dorsales. Les sarcoseptes directeurs proéminent moins dans la cavité que les deux autres paires; mais les trois paires d'organes mésentéroïdes présentent la même structure, à part la position des fibrilles musculaires, dont il sera question plus loin. Lidépendamment des trois paires de macroseptes, dont il vient d'être question, il existe six microseptes : quatre divisent en deux moitiés semblables les loges latérales ; la troisième paire siège dans la loge dorsale, qu'elle tend à diviser en trois parties, dont une médiane et deux latérales. Il existe donc en tout douze mésentéroïdes, six di-oits et six gauches, six macroseptes et six microseptes alternant entre eux. La loge directrice ventrale seule est dépourvue de microseptes, la loge médio-dorsale est délimitée par deux microseptes. Les trois paires de microseptes sont inégalement développées. La plus saillante siège dans les loges latéro-dorsales; si l'on peut conclure du degré de développement à l'ordre évolutif, il y a lieu de croire que les microseptes interposés entre les ma- croseptes latéraux se forment immédiatement après les six macroseptes. La couche endu dermique qui tapisse les deux faces de la lamelle mésenchymatique des mésentéroïdes est mince et formée de cellules cuboïdes. Cependant, au contact immédiat de la lamelle se voient çà et là des cellules fusiformes, adja- centes à la lamelle et qui fixent énergiquement les matières colorantes. Elles sont identiques aux éléments cellulaires que l'on observe dans l'épaisseur de cette lamelle. Les bourrelets mésentériques n'ont aucune tendance à décrire des circonvolutions. Dans toutes les coupes, ils affectent une forme arrondie, et l'on distingue de nombreuses cellules glan- dulaires, les unes à contenu granuleux, les autres à contenu clair et d'apparence homogène. Toutes les cellules qui consti- 500 EDOUARD VAN BENEDEN. tuent ensemble le bourrelet sont conoïdes et rayonnent dans tous les sens autour de l'extrémité légèrement renflée en massue de la lamelle mésencliymatique. On distingue, sous la forme d'une rangée de grains brillants, une couche de fibrilles musculaires longitudinales dans chacun des macroseptes. Dans les sarcoseptes directeurs, la couche musculaire siège sur la face opposée à celle qui délimite la loge médio-ventrale. Dans les deux autres paires, la couche musculaire est adjacente, au contraire, à la face qui regarde la loge directrice. La surface de la lamelle mésencliymatique, qui porte les fibrilles, est irrégulière; mais il n'existe pas d'étendards mus- culaires proprement dits, à moins que l'on ne considère comme rudiments de formations semblables les petites dentelures qui supportent les fibrilles. Les microseptes diffèrent des macroseptes ; l^ en ce que leur lamelle mésencliymatique, très courte, est à peu près réduite à la massue terminale des macroseptes ; 2° en ce que la couche endodermique qui les recouvre est très mince ; S» en ce qu'ils ne présentent pas de bourrelet mésentérique. Dans la région du corps où les microseptes présentent leur plus grand développement, c'est-à-dire dans la moitié aborale de la larve, ces formations portent déjà quelques fibrilles mus- culaires longitudinales. Dans les microseptes qui délimitent la loge médio-dorsale, les fibrilles siègent sur la face opposée à celle qui regarde la loge. Dans les deux autres paires la couche musculaire est au contraire dirigée dorsalement; il en résulte que, des douze loges futures, six seront intraseptales, six autres interseptales. Les loges médianes sont interseptales, les latéi-ales sont alternati- vement interseptales et intraseptales, l'alternance se produisant aussi avec les loges médianes. L'endoderme de la paroi du corps contraste, par son énorme épaisseur, avec la partie de ce feuillet qui revêt les sarcoseptes. Il forme des bourrelets saillants dans la cavité cœlentérique. Le nombre de ces bourrelets répond exactement au nombre des UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 501 loges, que celles-ci soient délimitées exclusivement par des macroseptes, par un macrosepte et un microsepte, ou par des microseptes. La largeur du bourrelet répond à celui de la loge. Cependant, d'une manière générale, l'épaisseur de l'endoderme pariétal diminue de la face ventrale où elle est au maximum, à la face dorsale où elle est au minimum. Les cellules constitu- tives de ces bourrelets ont pour hauteur l'épaisseur totale de l'endoderme; leur structure est manifestement réticulée et vacuoleuse. Il paraît exister une couche de fibrilles musculaires transversale, à la face interne de la lamelle mésenchymatique de la paroi du corps, et aussi sur celle des faces de la lamelle fondamentale des sarcoseptes qui ne porte pas de fibrilles mus- culaires longitudinales. Nous allons, maintenant que nous connaissons la constitution d'une coupe transversale faite vers le milieu de la longueur du corps, passer en revue les différents organes et indiquer les résultats que l'étude de la série des coupes successives nous autorise à formuler. I. — Plagile flag ellif ère. Cette formation ne règne pas, comme chez la larve de Semper, dans toute la longueur du corps. Elle s'arrête brus- quement, sans se rétrécir au préalable, au point d'union des deux tiers antérieurs avec le tiers postérieur du corps de la larve. Son bord aboral est délimité par un bourrelet légèrement saillant, de forme semi-circulaire. Ce bourrelet, au niveau duquel la plaque se continue avec le reste de l'ectoderme, présente la même constitution que les bourrelets latéraux que nous avons décrits plus haut. La plaque s'étend, au contraire, jusqu'à l'extrémité orale de l'organisme larvaire ; elle se rétrécit progressivement d'arrière en avant et se termine en pointe dans la lèvre ventrale de l'ouverture buccale (fig. 2). La structure de la plaque reste la même dans toute sa longueur. La frange vibratile présente sa hauteur maximum dans la 502 EDOUARD VAN BRNEDEN. partie la plus large de la plaque. Sa hauteur diminue lentement d'arrière en avant. J'ai déjà dit que la plaque foi'me gouttière dans la plus grande partie de sa longueur (fig. G). La gouttière devient moins profonde aux extrémités orale et aborale de la plaque ; elle finit par s'elï'acer complètement. Les caractères de l'épiderme se maintiennent identiques dans toute l'étendue de la surface du corps. Tout au plus constate-t-on de légères différences dans l'épaisseur de la concile. Elle est un peu plus mince à l'extrémité orale. IL — Uorifice buccal. Il n'existe encore aucune trace de tentacules autour de la bouche. Celle-ci présente la forme d'un hexagone symétrique, mais irrégulier. Elle est surmontée par deux lèvres saillantes inégalement développées : l'une, ventrale, plus petite, répond à la loge de direction qui vient s'y terminer en cul-de-sac ; l'autre, dorsale, semilunaire, beaucoup plus étendue que la lèvre ventrale, répond à la loge dorsale et aux deux paires latérales qui lui sont adjacentes (fig. 2 et 3). La loge dorsale est, des trois, celle qui s'avance le plus loin dans la lèvre supérieure. Une coupe faite transversalement, au niveau de l'orifice buccal, montre avec une netteté remarquable, la symétrie bilatérale de l'organisme. La plaque flagellifère se termine sur la face externe de la lèvre ventrale. Elle s'y rétrécit progressivement pour se terminer en pointe. III. — Pharynx. Le pharynx présente des caractères bien particuliers (fig. 4, 5 et G). Il montre une symétrie bilatérale parfaite. Il pourrait paraître, à première vue, que les gouttières pharyngiennes {Sulcus et Sulculus de Haddon) font ici défaut. En effet, tant UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 503 du côté de la face ventrale que du côté de la face dorsale, r epithelium pharyngien forme une saillie vers la cavité pharyn- gienne. Du côté ventral, la lamelle mésenchymatique de la paroi pharyngienne est ployée de façon à former un angle saillant vers l'axe de l'organisme. Mais il me paraît évident qu'en se plaçant au point de vue morphologique, il faut consi- dérer comme homologue au Sulcus des autres Anthozoaires la portion ventrale élargie de la cavité pharyngienne ; la plaque épithéliale très large et peu élevée , qui répond à la loge directrice, est homologue à cette partie de F epithelium pharyn- gien qui, chez les autres Anthozoaires, constitue le plancher de la gouttière pharyngienne ventrale (Siphonoglyphe de Hickson). Il n'est pas possible de résoudre la question de savoir si la partie dorsale de la fente pharyngienne, celle qui répond à la loge médio-dorsale, doit être considérée comme un Sulculus. La cavité proprement dite a la forme d'une fente ventro- dorsale répondant au plan médian (fig. 4). Le revêtement ectodermique du pharynx présente latérale- ment trois paires de bouiTelets longitudinaux, symétriques deux à deux, séparés les uns des autres par des sillons bien marqués. Ces trois paires de bourrelets répondent aux trois paires de sarcoseptes primaires. De ces bourrelets, ceux qui correspondent aux septa directeurs, sont les moins volumineux; les moyens sont les plus considérables. Dans sa partie initiale, celle qui succède immédiatement à l'orifice buccal, le pharynx a une forme à peu près quadrilatère, l'un des côtés répondant à la loge médio-ventrale, le côté opposé à la loge dorsale, les côtés latéraux aux deux paires de loges latérales (flg. 4). Mais, après un court trajet, le pharynx change de forme : il se développe dans le sens transversal et montre à la coupe la forme d'un croissant (fig. 6). Le bour- relet epithelial répondant au fond du Sulcus s'élargit, et en même temps la portion médiane du plancher du pharynx, soulevée en dos d'âne, fait fortement saillie dans la cavité pharyngienne. Ce bourrelet de Sulcus répond à lui seul à la concavité du croissant. Les bourrelets qui surmontent les septa 55 504 EDOUARD VAN BENEDEN, directeurs siègent aux extrémités du croissant. Le bourrelet qui, par sa position dorsale, répond au Sulculus, se rétrécit au fur à mesure que l'on s'éloigne de l'extrémité orale, et bientôt disparaît. Les bourrelets épithéliaux qui surmontent les quatre autres mésentéroïdes régnent le long de la convexité du crois- sant pharyngien : ils en forment la voûte, tandis que la plaque de Sulcus en forme à eUe seule le plancher. Après un court trajet, ce plancher se fend sur la ligne médiane et le pharynx est mis en communication avec la loge directrice. La fente s'élargit rapidement; elle gagne bientôt toute la largeur de la cavité pharyngienne, qui se confond alors avec la loge médio-ventrale. L'endoderme pariétal de la loge directrice constitue alors le plancher de la cavité du pharynx ; il est très proéminent et envahit en partie la cavité pharyn- gienne confondue avec la loge directrice. A ce niveau, les loges latérales et la dorsale sont encore séparées de la cavité pharyngienne, dont la voûte est encore complète. Mais bientôt les fentes interposées entre les bourrelets ectodermiques qui répondent aux sarcoseptes s'approfondissent, et l'on voit toutes les loges communiquer avec la cavité axiale. Nous nous trouvons maintenant dans la région gastrique ou cœlentérique ; les bourrelets qui garnissent le bord libre des sarcoseptes primaires doivent être appelés " bourrelets mésentériques „ ; nous avons dépassé le bord inférieur du pharynx. Il est de toute évidence qu'ici comme chez les Cérianthes et chez d'autres Anthozoaires, les bourrelets mésentériques sont la continuation des bourrelets ectodermiques du pharynx, comme l'a soutenu Heider et comme l'ont démontré "Wilson et Boveri. La structure est identique de part et d'autre, et il n'existe aucune ligne de démarcation, au bord inférieur du pharynx, entre les deux genres de formations qui, en fait, n'en font qu'une. Il ressort de ce qui précède que, contrairement à ce qui existe chez d'autres Anthozoaires et à l'opposé de ce que l'on connaît chez les Cérianthides, depuis les recherches classiques de J. Haime, chez notre larve le pharynx est plus court du côté UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 505 ventral que du côté dorsal. Le Sulcus est plus court que le Sulculus. Indépendamment de sa couche épithéliale interne, ectoder- mique, la paroi du pharynx comprend une lamelle mésen- chymatique et un revêtement externe endodermique. Celui-ci est fort mince ; c'est un epithelium pavimenteux ou cuboïde qui se continue sur les faces des sarcoseptes. IV. — Mésentéroïdes (sarcoseptes) et loges mésentériques. La larve présente trois paires de macroseptes qui se fixent à la paroi du pharynx et sont garnis dans toute leur longueur, à partir du bord inférieur de cet organe, de bourrelets mésen- tériques. De ces trois paires de macroseptes, l'une délimite la loge directrice et répond à la paire directrice ventrale des autres Anthozoaires ; les deux autres sont latérales. La paire directrice, notablement plus courte que les deux autres, n'atteint pas l'extrémité aborale. Elle ne se trouve plus sur les coupes de l'extrémité renflée du corps de la larve. Les deux autres sont à peu près de même longueur ; elles atteignent, ou peu s'en faut, le pôle aboral ; néanmoins la paire intermé- diaire dépasse un peu, vers cette extrémité, la paire dorsale ; elle proemine un peu plus aussi que les deux autres dans la cavité cœlentérique, et les bourrelets ectodermiques du pharynx, qui ne sont que les extrémités orales des bourrelets mésenté- riques (entéroïdes de Lacaze-Duthiers), sont plus volumineux, en ce qui concerne la paire intermédiaire, que les deux autres. Il existe en outre trois paires de microseptes, dont nous avons indiqué plus haut les positions. La paire dorsale délimite la loge médio-dorsale, les deux autres alternent avec les macro- septes latéraux. Ces microseptes n'atteignent pas la paroi du pharynx, mais sont cependant indiqués dans la partie orale du corps, même immédiatement en deçà de la bouche. Ils s'étendent en arrière jusque près de l'extrémité aborale. La paire adja- cente à la paire directrice est plus courte que les autres : elle ne dépasse guère les septa directeurs ; la plus longue est inter- 506 EDOUARD VAN^BENEDEN. posée entre les macroseptes latéraux. A ces différences de longueur correspond une légère différence de leur développe- ment en saillie. Les microseptes latéraux sont les plus proémi- nents dans la cavité cœlentérique ; puis viennent les dorsaux ; en dernier lieu, les ventraux. Nul doute que les microseptes ne soient de formation plus récente que les macroseptes, et qu'il existe dans le cours de l'évolution de notre larve un stade longtemps prolongé pendant lequel l'organisme se caractérise par la présence de six sarco- septes primaires. Si l'on peut conclure, d'ailleurs, de la longueur relative des septa et de leur degré de développement à l'ordre de leur apparition, les latéraux apparaîtraient en premier lieu, les dorsaux ensuite, les septa directeurs en troisième rang. Viendraient ensuite, après une période de repos, les microseptes moyens, puis les dorsaux, enfin les ventraux. A en juger par le développement notablement plus avancé des microseptes moyens, il doit se présenter dans le cours de l'évolution un stade, de courte durée, caractérisé par la présence de huit cloisons, dont six macroseptes et deux microseptes. J'ai représenté, dans le schéma ci-dessous, une figure destinée à représenter synthéti- quement les conclusions que je viens de formuler. Les chiffres 1 à 6 indiquent l'ordre probable de succession des mésentéroïdes. FiG. 1. UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 507 Une particularité bien caractéristique de notre larve, c'est l'extension considérable, dans le sens transversal, de la loge directrice dans la région pharyngienne du corps. Néanmoins, la cavité de la loge, et il en est de même de toutes les autres, se trouve réduite à n'être qu'une fente étroite par suite de la grande épaisseur de l'endoderme pariétal, qui proemine forte- ment dans les cavités mésentériques (fig. 4 et 6). Dans les loges latérales, le bourrelet endodermique pariétal se trouve subdivisé par les microseptes naissants; dans la loge dorsale, le bourrelet est subdivisé par la même cause en trois parties, une médiane et deux latérales (fig. -i et 6). Nous devons maintenant nous poser la question de savoir si notre larve est identique à la larve de Semper. La forme générale du corps, caractérisée par son allongement considérable, l'existence de six sarcoseptes bien développés, l'absence totale de toute trace de tentacules autour de la bouche, et surtout la présence de la frange vibratile médiane, ne laissent aucun doute sur l'affinité qui existe entre les deux larves. Cependant, une série de caractères les différencient nettement et nous obligent à les rattacher à l'évolution d'espèces, proba- blement même de genres différents. Ces caractères différentiels sont relatifs : fo A la forme de la larve, cylindrique d'une part, pyriforme de l'autre ; 20 A la longueur de la frange vibratile, qui règne dans toute la longueur du corps chez la larve de Semper, qui n'intéresse que les deux tiers antérieurs de la face ventrale de l'organisme recueilli par Hensen ; 3» A la présence d'un orifice aboral chez la larve de Semper, orifice qui fait totalement défaut chez notre exemplaire ; 4° Aux organes urticants (nématocystes) qui, à en juger par les figures produites par Semper, sont très différents dans les deux larves. Semper a conclu de la présence de la bordure vibratile à la symétrie bilatérale de sa larve. Une coupe transversale du corps, faite en n'importe quel point de sa longueur, démontre avec la 508 EDOUARD VAN BENEDEN. dernière évidence l'ordonnance parfaitement bilatérale de toutes les parties de l'organisme. Semper décrit six septa chez sa larve ; il a vu que l'une des paires était notablement plus courte que les deux autres, exac- tement comme je l'ai décrit pour l'exemplaire dont j'ai fait l'étude. Si Semper n'a pas signalé l'existence de trois paires de microseptes, on ne peut en conclure que ces cloisons naissantes feraient défaut chez sa larve, l'examen macroscopique ne permettant pas de reconnaître la présence de mésentéroïdes rudimentaires qui ne font pas encore saillie dans la cavité cœlentérique. On ne peut donc attacher aucune importance à cette différence dans les descriptions. D'après la description que Semper a donnée de sa larve, la frange vibratile serait insérée dans un sillon médian régnant dans une bande claire. Il me paraît éminemment probable que la bande claire de Semper répond à ce que j'ai appelé la plaque flagellifère et que les fouets vibratiles, formant ensemble la frange, émanent, dans les deux cas, de toute la surface de la plaque. On peut se demander si la différence que j'ai signalée dans la forme des deux organismes n'est pas le résultat d'un change- ment qui se serait produit au moment où l'on a fixé la larve. L'étude des coupes démontre clairement qu'il ne peut en être ainsi : le diamètre de l'extrémité aborale est cinq ou six fois plus considérable que celui de l'extrémité orale, sans qu'il y ait aucun indice d'altération ; les diverses couches présentent approximativement la même épaisseur dans toute la longueur du corps. Le peu de développement du système musculaire ne permet pas d'ailleurs d'admettre des contractions énergiques et différentes dans les diverses régions du corps. A quel groupe d'Anthozoaires se rapportent les larves de Semper et celle que j'ai fait connaître? Les recherches dont l'organisation et le développement des Anthozoaires ont été l'objet dans le cours de ces dernières années ont démontré l'existence dans ce groupe de plusieurs types évolutifs distincts. L'insuffisance des données acquises UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 509 jusqu'ici ne permet pas encore une réforme définitive de la clas- sification des Anthozoaires ; mais la nécessité de cette réforme est dès à présent établie. On a confondu à tort, dans le groupe des Actiniaires, des organismes qui n'ont de commun que le caractère d'ordre très secondaire d'être dépourvus de formations squelettiques ; les Actinies évoluent de manières diverses, suivant des lois diffé- rentes, tandis que, d'autre part, les affinités qui relient les Hexactiniaires aux Sclérodermés ne sont plus l'objet d'un doute. A côté des Octactiniens et des Antipataires, qui constituent deux groupes naturels bien définis, on peut distinguer avec R. Hertwig, dans le groupe peu naturel des Actiniaires, sept tribus bien caractérisées : Les Edwardsies. Les Hexactinies. Les Cérianthides. Les Zoanthines. Les Monaulées. Les Paractinies. Les Gonactinies. Edwardsies. — Les Edwardsies possèdent huit sarcoseptes et une symétrie bilatérale bien accusée. Andres et les frères Hertw^ig ont fait connaître l'ordonnance des muscles chez ces organismes. Le pharynx est pourvu de deux gouttières pharyn- giennes, l'une ventrale, l'autre dorsale; disons, avec Haddon, d'un sulcus et d'un sulculus. La loge directrice ventrale est délimitée par des mésentéroïdes directeurs qui portent des muscles longitudinaux opposés. Il en est de même de la loge dorsale. Les deux paires latérales ont leurs muscles dirigés ven- tralement, comme la paire dorsale. La paire ventrale est donc toujours reconnaissable en ce qu'elle porte ses muscles en sens opposé de ce que l'on observe sur les trois autres paires. On connaît suffisamment les larves des Edw^ardsies pour pouvoir affirmer qu'elles n'ont aucune analogie avec la larve de Semper; l'existence de douze cloisons dans celle que nous avons décrite suffit pour écarter toute idée de rapprochement entre ces larves et les Edwardsies, dont le nombre des sarcoseptes ne dépasse jamais huit. 510 EDOUARD VAN BENEDEN. Hexadinies. — M. de Lacaze-Duthiers, dans ses mémorables recherches sur le développement des Hexactinies, a établi qu'il y a lieu de distinguer deux périodes dans l'histoire évolutive de ces animaux. Première période : La première comprend la formation des douzes sarcoseptes primaires, la seconde celle des septa secon- daires. Tandis que l'on admettait, avec Milne-Edwards et J. Haime, qu'il se forme simultanément six cloisons primaires, puis, à mi-distance entre celles-ci, six cloisons de second ordre, puis successivement, entre les cloisons antérieurement formées, douze cloisons de troisième ordre, vingt-quatre de quatrième ordre et ainsi de suite, M. de Lacaze-Duthiers a établi que les douze premières cloisons se forment successivement et symé- triquement deux par deux, suivant un ordre bien déterminé. La jeune Actinie passe, dans le cours de son développement, par une série de stades, respectivement caractérisés par 2, 4, 6, 8, 10 et 12 sarcoseptes. Tandis que l'on constate à une période de repos plus ou moins prolongée après les stades à 2, à 4 et à 8 cloisons, les stades à 6 et à 10 cloisons sont de très courte durée. Si nous désignons par I les sarcoseptes directeurs, par II, III, IV, V et VI les autres paires, ces numéros d'ordre indiquant leur degré d'écartement de la paire directrice, l'ordre de formation serait le suivant : III, VI, I, V, IV et IL Les cloisons TTT formées en premier lieu, dirigées transversalement par rapport à la fente buccale, divisent la cavité cœlentérique en deux chambres, l'une dorsale, plus étendue, l'autre ventrale, plus réduite, qui, dans le cours du développement, se subdivisent la première en sept, la seconde en cinq loges. Quelques doutes ont été émis par les frères Hertwig au sujet de la loi de formation indiquée par M. de Lacaze-Duthiers, en ce qui concerne l'âge relatif des cloisons V et VI, et ces doutes ont été confirmés par les recherches de Wilson sur le développement d'une espèce du genre Manicina. D'après Wilson, l'ordre de formation serait le suivant : III, V, I, VI, IV et IL Comme on le voit, la différence entre la manière de voir de M. de Lacaze-Duthiers et celle de Wilson UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 511 porte seulement sur l'âge relatif des cloisons V et VI. D'après Lacaze, VI se formerait avant V; d'après Wilson, V pré- céderait VI. Mais AVilson et Haddon sont d'accord avec M. de Lacaze- Dutliiers pour faire naître les cloisons IV et II en dernier lieu, l'une dorsalement, l'autre ventralement, par rapport à la cloison III. Les frères Hertwig, dont les observations ont été récemment confirmées par Boveri, ont vu chez Admnsia diaiiliana les quatre derniers sarcoseptes naître par couples dans les deux loges latérales situées à égale distance de la ventrale et de la dorsale. Ce cas est certainement exceptionnel dans le groupe des Hexactinies. Mais il suffit à établir l'existence de variations quant à l'ordre de succession des sarcoseptes pri- maires, dans ce groupe. Toutes les observations s'accordent néanmoins pour établir la présence, chez toutes les Hexactinies, d'un stade assez prolongé pendant lequel il n'existe que huit cloisons complètes, répondant, non seulement au point de vue du nombre et de l'ordre d'ap- parition des cloisons, mais aussi au point de vue de l'ordonnance des muscles longitudinaux des mésentéroïdes, aux dispositions réalisées d'une manière permanente chez les Edwardsies. C'est ce qui résulte des observations concordantes de Haddon sur Halcampa et Peachia, de J. Playfair M. Murrich sur Auladinia, et de Boveri sur diverses Hexactinies de la Médi- terranée. De là l'idée formulée par Haddon, Playfair M. Murrich et Boveri, que les Edwardsies représentent un stade ancestral de l'évolution des Hexactinies; les Hexactinies passent, dans le cours de leur évolution, par le stade Edwardsia et sont probablement issus d'Anthozoaires organisés à la manière des Edwardsies actuelles. Seconde période : Des douze loges mésentériques qui caracté- risent la fin de la première période de l'évolution des Hexactinies, deux sont médianes et interseptales, dix latérales, cinq droites, cinq gauches. De ces cinq paires de loges, trois sont inter- septales, deux intraseptales. D'après la loi formulée par de 512 EDOUARD VAN BENEDEN Lacaze-Duthiers et confirmée par tous les observateurs subséquents, la multiplication du nombre des septa résulte de l'apparition simultanée de couples de mésentéroïdes dans toutes les loges interseptales latérales, à l'exclusion de toute inter- vention des loges directrices et des loges intraseptales, conformément au schéma ci-dessous. Les lois indiquées ci-dessus paraissent présider au développe- ment, non seulement des Hexactiniaires, mais aussi des Hexacoralliaires. Plusieurs auteurs récents définissent la sjTuétrie de ce type par le mot biradiaire. Certes la structure, telle qu'elle se révèle à partir du début de la seconde période du développement, est manifestement biradiaire et non bilatérale : la face dorsale ne se distingue en rien de la face ventrale dans le schéma ci-dessus. Mais il ne faut pas oublier que l'étude du développement a établi que la symétrie primitive est bien nettement bilatérale et qu'elle ne devient biradiaire que dans le cours de l'évolution. Les sarcoseptes ventraux et dorsaux qui paraissent équivalents dans l'organisme développé, ne sont pas équivalents, si l'on tient compte de leur origine. Le fait que chez tous les Hexactiniaires et chez les Hexa- UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 513 coralliaires dont le développement a été étudié, le stade caractérisé par la présence de six sarcoseptes est extrêmement passager et raccourci, nous autorise à penser que la larve de Semper et celle que j'ai décrite ne se rattachent pas à l'évolution d'Hexactiniens. Cette conclusion est confirmée par le fait que les organismes qui se développent aux dépens de ces larves passent rapidement du stade à six au stade à douze cloisons. Enfin, parmi les nombreuses larves d'Hexactiniens qui ont été décrites, aucune ne présente rien qui ressemble à la plaque flagellifère. Cérianthides. — Il résulte des recherches de J. Haime, de von Heider, des frères Hertwig, d'A. Agassiz, de von Kocli, de Vogt, de Boveri et de mes propres observations sur un Cérianthe de nos côtes, que l'ordonnance des sarcoseptes diffère essentiellement, chez les Cérianthes et les Arachnactis, de ce qui se trouve réalisé chez tous les autres Anthozoaires. Une symétrie bilatérale manifeste se maintient à tous les stades de l'évolution. Il n'existe plus chez les Cérianthides deux gouttières pharyngiennes, mais seulement un sulcus, et la face à laquelle répond le sulcus est appelée face ventrale. Toutes les observations récentes tendent à établir que la multiplication des sarcoseptes se fait exclusivement dans la loge médio-dorsale, par apparition à peu près simultanée, dans cette loge, de paires successives de nouvelles cloisons en dedans des paires précédemment formées. Il en résulte que les numéros d'ordre des sarcoseptes, comptés à partir de la loge directrice, marquent aussi l'ordre de leur apparition successive. Cette loi se vérifie-t-elle aussi pour les toutes premières cloisons ? Les observations que l'on possède sur les premiers stades du développement sont insuffisantes pour résoudre la question. Les recherches récentes de Boveri sur des larves qu'il attribue au genre Arachnactis semblent établir que, tout au moins chez ces derniers, les quatre premières paires de sarco- septes répondent aux cloisons des Edwardsies, ce qui permet 514 EDOUARD VAN BENEDEN. de supposer que l'ordre de formation des huit premiers sarco- septes des Cériantliides est le même que chez les Edwardsies et les Hexactinies : les Cériantliides passeraient, comme les Hexactinies, par le stade Edwardsia. D'après Boveri, les quatre premières paires formées seraient les sarcoseptes direc- teurs et les trois paires voisines des Cériantliides adultes. On connaît les premières formes larvaires des Cérianthes, grâce à J. Haime, à Kowalewsky, à Jourdan; celles des Arachnadis par les recherches de M. Sars, de A. Agassiz, de C. Vogi et de Boveri. On peut affirmer que la larve de Semper ne se rattache pas à l'évolution d'Anthozoaires de la tribu des Cérianthes. Monaidées. — La tribu des Monaulées, créée par R. Hert- wig, ne comprend que le seul genre Scytophonis, une Actinie pourvue de sept paires de sarcoseptes primaires, dont une, délimitant la loge directrice ventrale, porte des muscles opposés, les six autres portant alternativement leurs muscles dorsalement et ventralement, les muscles étant portés par la face dorsale dans les sarcoseptes adjacents aux sarcoseptes directeurs. Boveri a montré comment ce type peut être déduit de celui des Edwardsies, par intercalation, dans chacune des loges latérales des jeunes Edwardsies, d'un sarcosepte portant ses muscles sur sa face dorsale. Rien ne justifie la supposition qu'un stade à six cloisons serait caractéristique de l'évolution de ces Monaulées ; il est fort probable, au contraire, comme le fait remarquer Boveri, que ces Anthozoaires dérivent directement des Edwardsies. Elles se rapprochent de ces dernières par la forme très allongée du corps, par la présence d'une cuticule (périderme), enfin, et c'est là la raison qui a déterminé Boveri à rattacher directement les Monaulées aux Edwardsies, plutôt que de les faire dériver des Hexactinies, leur pharynx est pourvu inté- rieurement de trois paires de bourrelets ectodermiques, qui ne peuvent se rapporter aux quatorze sarcoseptes, et dont la pré- sence ne peut s'expliquer que si les Monaulées dérivent d'une forme pourvue de huit cloisons. UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 515 Oonadinies. — Ce groupe ne comprend que le genre Gonadinia, es\)èœ j^rolifera, récemment créé par Blochmann et Hilger. Il se caractérise par la présence de huit macroseptes oifrant l'ordonnance musculaire caractéristique de ceux des Edwardsies, de deux loges directrices et de deux gouttières pharyngiennes. On compte, en outre, huit microseptes. Boveri pense que les Gonactinies dérivent directement des Edwardsies par intercalation des microseptes dans les latérales de ces dernières. En tout cas, l'existence des huit macroseptes homologues à ceux des Edwaidsies rend éminemment improbable l'existence de liens de parenté entre les Actinies et les larves pourvues d'une plaque flagellifère et de six macroseptes. Paradinies. — Cette tribu, établie par R. Hertwig, à laquelle on peut rattacher les Téalides, se caractérise en ce que toute l'organisation est semblable à celle des Hexactinies, avec cette seule différence que la symétrie n'est pas dominée par le chiffre 6, ce qui, en ce qui concerne les Téalides, a été démontré par Gosse et par Dixon, D'après Boveri, ce type peut être facilement déduit de celui des Hexactiniens, et il est fort pro- bable que les premiers stades du développement, ceux qui s'accomplissent pendant la première période, ne diffèrent en rien de ce que l'on observe chez les Hexactiniaires et les Hexacoralliaires. Rien n'indique que la larve de Semper ait rien de commun avec les Anthozoaires de cette tribu. Zoanthines. — C'est à G. von Koch, au labeur duquel la science est redevable de tant de beaux travaux sur l'organi- sation et le développement des Anthozoaires, que remontent les premières recherches exactes sur l'anatomie des Zoanthines {Polythoa axinellce). Les résultats auxquels il est arrivé ont été confirmés et étendus par les belles publications de G. Miiller, de Erdmann et de R. Hertwig ; ces derniers ont fait connaître, en partie du moins, la loi qui règle la multiplication des cloisons. Tandis que, chez toutes les Actinies hexamènes, les septa d'un même couple ont même grandeur, même structure et 516 EDOUARD VAN BENEDEN. mêmes fonctions, chez les Zoantliines, les couples sont con- stitués de deux cloisons différentes : l'une complète, fertile et garnie d'un iilament mésentérique, est un macrosepte ; l'autre incomplète, stérile, dépourvue de filament mésentérique, est mi microsepte. Un macrosepte et un microsepte forment ensemble un couple : ils se regardent par celle de leurs faces qui porte le muscle lon- gitudinal. Au point de vue de l'ordonnance des muscles, deux paires font seules exception : elles siègent aux extrémités oppo- sées du diamètre par lequel passe le plan de symétrie de l'orga- nisme. Cette symétrie est nettement bilatérale. Des deux loges médianes, l'une, ventrale, est délimitée par deux macroseptes; l'autre, dorsale, par deux microseptes. Dans ces loges les muscles sont opposés, les cloisons directrices se regardant par leur face dépourvue de muscles. Le phar3aix ne possède qu'une gouttière pharyngienne; elle répond au sulcus de Haddon. Les paires latérales sont ordonnées de telle manière que toutes celles qui se trouvent à droite et à gauche de la loge directrice ventrale ont leur macrosepte plus voisin de la cloison directrice ventrale, le microsepte correspondant étant plus éloigné de cette cloison. D'autre part, celles qui sont voisines de la loge directrice dorsale ont leur macrosepte plus rapproché des microseptes directeurs dorsaux. Il n'existe jamais que deux paires droites et deux paires gauches qui suivent la règle énoncée en dernier lieu. Toutes les autres paires, quel que soit leur nombre, ont leur macrosepte ventralement dirigé. On peut donc distinguer, dans une Zoanthine, une zone dorsale comprenant la paire médio-dorsale et les quatre paires avoisinantes, et une zone ventrale comprenant toutes les autres paires, quel que soit du reste leur nombre. Ce nombre augmente avec l'âge du polype. L'arrangement que nous venons de caractériser souffre une légère modification, utilisée pour la classification. Dans quelques genres, la paire externe de la zone dorsale est formée non pas d'un macrosepte et d'un microsepte, mais bien de deux macro- septes. De là, la distinction établie par Erdmami entre ce qu'il UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 517 appelle le " microtype „ réalisé dans les genres Zoanthus, Mammillifera et Corticifera, et le " macrotype „ qui se ren- contre dans les genres Epizoanthus et PolytJwa. Tandis que chez les Actinies liexamènes et les Hexacoral- liaires toute loge interseptale, abstraction faite des loges direc- trices, est capable d'engendrer un nouveau couple de cloisons, chez les Zoanthines il ne se forme de nouveaux couples que dans la cavité interseptale immédiatement adjacente à la loge directrice ventrale. Ce fait important a été mis en lumière par les belles recherches de Erdmann. Chez tous les individus examinés par Erdmann, la zone dor- sale était complète : elle se constituait invariablement de cinq paires de septa. Il en était tout autrement de la zone ventrale, qui comprenait d'autant moins de couples que l'individu analysé était plus jeune. En poussant à l'extrême la réduction du nombre de ces couples ventraux, qui prennent successivement naissance dans la loge adjacente à la loge medio- ventrale, en ramenant le nombre de ces couples à zéro, on arrive à un stade caractérisé par la présence des cinq paires dorsales et de la paire directrice ventrale, soit en tout de six paires ou de douze cloisons. Ce stade, qui n'a pas encore été observé, pourrait être représenté comme ci-dessous, figure 3 pour le microtype {Zoanthus, Mam- millifera, Corticifera), figure 4 pour le macrotype (^ï^oan^/iMs, Polythoa) (Erdmann). On est forcément conduit, en se fondant sur la loi d'accrois- sement découverte par Erdmann, à admettre l'existence d'un semblable stade évolutif chez les Zoanthines. (Voir les figures ci-dessous : fig. 3, Microtype; fig. 4, Macrotype.) 518 EDOUARD VAN BENEDEN. Or, c'est précisément ce stade microtype qui se trouve réalisé dans la larve que j'ai décrite, et probablement aussi dans la larve de Semper, Ce stade suppose, en ce qui concerne le microtype, c'est-à-dire l'évolution d'un Zoanthus, d'un Mammillifera ou d'un Cortici- fera, douze septes, dont trois paires de macroseptes et trois paires de microseptes, une loge directrice ventrale délimitée par deux macroseptes ; une loge médio-dorsale, délimitée par deux microseptes, deux paires de couples latéraux, formés chacun d'un macrosepte dorsal et d'un microsepte ventral; tout cela se trouve chez notre larve. Ce qui confirme encore notre opinion, d'après laquelle notre larve et celle de Semper peuvent se rattacher à l'évolution des Zoanthines, c'est la constitution de la lamelle mésenchymatique, particulièrement développée et pourvue de nombreux éléments cellulaires, dont les uns sont d'origine endodermique, les autres des dérivés de l'ectoderme. Erdmann a recoimu, en effet, la structure relativement très compliquée du mesenchyme et sa richesse en éléments cellu- laires chez les Zoanthines. Il y décrit : 1° des amas cellulaires, tantôt arrondis, tantôt ramifiés, confluents et anastomosés entre eux en un réseau ; des canaux peuvent apparaître dans ces traînées cellulaires ; 2° de nombreuses cellules, disséminées dans la substance fondamentale ; elles sont filiformes ou fusiformes, étoilées ou arrondies. Je ne connais aucune larve d'Anthozoaire chez laquelle la lamelle fondamentale soit aussi chargée de cellules que chez notre larve, aucune autre chez laquelle on distingue, dans la profondeur des epitheliums adjacents, une véritable assise cellulaire, composée de cellules identiques à celles que l'on observe dans le mesenchyme et qui sont manifes- tement prédestinées à l'accroissement du mesenchyme. A supposer que la larve de Semper et celle qui a été décrite dans les pages qui précèdent se rattachent réellement, comme je le crois, à l'évolution des Zoanthines, on doit se poser la question de savoir quelle position il convient d'assigner à ce groupe dans la classification des Anthozoaires. UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 519 Boveri, dans un récent travail, a cherché à établir que les Zoanthines, aussi bien que les Hexactinies, les Cérianthides, les Monaulées, les Paractinies et les Gonactinies peuvent être déduites du stade Edwardsie, soit directement, ce qui serait le cas pour les Cérianthides, les Hexactinies, les Monaulées et les Gonactinies, soit indirectement par l'intermédiaire des Hexac- tinies, ce qu'il suppose être le cas pour les Zoanthines et les Paractinies. Ces conclusions sont basées sur l'étude du développement, en ce qui concerne les Actinies hexamères et les Cérianthides ; sur l'étude de l'organisation, en ce qui concerne les Monaulées, les Gonactinies, les Zoanthines et les Paractinies. La constitution de notre larve semble à première vue pouvoir être interprétée en faveur de l'hypothèse de Boveri. En effet, elle est caractérisée par la présence de douze sarcoseptes, comme c'est le cas pour les larves des Hexactinies à la fin de la première période de leur développement. Mais cependant, comme la suite du développement suit une tout autre direction chez les Zoanthines que celle des Hexactinies, il est clair qu'il ne pourrait être question de faire dériver les Zoanthines que d'Hexactinies primitives, pourvues de douze cloisons primaires, comme chez Halcampa clavus (R. Hertwig). Il est à remarquer cependant que notre larve diffère du stade à douze cloisons primaires des Hexactinies : 1° en ce qu'elle présente trois paires de microseptes; chez les Hexactinies, à douze cloisons, toutes ces cloisons deviennent complètes; 2» en ce que le stade Edwardsie, qui est de longue durée chez les Hexactinies, fait défaut chez les Zoanthines. Au lieu d'un stade à huit cloisons, les Zoanthines présentent, dans le cours de leur évolution, un stade à six macroseptes. Or, c'est sur la durée prolongée du stade, caractérisé par la présence de huit sarco- septes homologues à ceux des Edwardsies, que Boveri s'est fondé pour établir les affinités des Hexactinies avec les Edward- sies. Je crois qu'en raisonnant comme le fait Boveri, nous devons logiquement conclure à l'absence d'affinités entre les Zoanthines et les Edwardsies, d'une part, des Hexactiniens de 520 EDOUARD VAN BENEDEN. l'autre. Nous devons admettre pour les Zoanthines un tronc d'origine distinct de celui des Edwardsies, à moins que l'on ne soit en droit de considérer les microseptes dorsaux comme homologues des septa directeurs dorsaux des Edwardsia. Il me paraît que les faits n'autorisent pas cette assimilation. En effet, des trois paires de microseptes qui se forment à peu près simultanément, il en est une qui est en avance assez notable sur les deux autres, et cette paire n'est pas la paire médio- dorsale, mais bien celle qui est interposée entre les macroseptes latéraux. Pour admettre que les Zoantliines sont issues des Hexactinies primitives et par conséquent des Edwardsies, il faudrait donc supposer : l» (jue les septa directeurs dorsaux sont devenus des cloisons incomplètes de complètes qu'elles étaient d'abord; 2» qu'il s'est produit dans le cours du déve- loppement, un changement dans l'ordre de formation des septa : la quatrième paire de cloisons des Edwardsies ancestrales aurait apparu chez les Zoanthines postérieurement à la paire médio-latérale. Il me paraît que rien ne justifie cette double hypothèse, et l'on ne voit pas pourquoi le stade Edwardsia, si nettement conservé dans le cours de l'évolution des Actinies hexamènes et chez les Hexacoralliaires, se serait effacé dans le cours du développement des Zoanthines. A s'en tenir aux faits, il me paraît nécessaire de conclure à l'indépendance du rameau des Zoantliines. Je pense donc que les rapports entre les divers groupes, dont il a été question ci-dessus, doivent être exprimés comme suit : Zoanthines Edwardsies Cérianthides Hexactinies Monaulées Gonactinies I ,. Paractinies. UNE LARVE VOISINE DE LA LARVE DE SEMPER. 521 EXPLICATION DE LA PLANCHE XV. Toutes les figures ont été dessinées à la chambre claire. Les figures 2, 3, 4 et 6 donnent le même grossissement. Idem pour les figures 1, 5 et 7. Fig. 1. Coupe transversale vers le milieu de la longueur du corps. Fig. 2. Idem à l'extrémité orale. Fig. 3. Idem un peu en deçà de cette extrémité. Fig. 4. Idem vers le milieu de la longueur du pharynx. Fig. 5. Idem voisine de la précédente, dessinée au même grossisse- ment que 1 et 7 afin de permettre de juger de la forme de la larve. Fig. 6. Idem près de l'extrémité aborale du pharynx. Fig. 7. Idem près de l'extrémité aborale du corps. Contribution à l'étude des yeux de quelques Crustacés et Recherches expérimentales sur les iiioiïïenieiits ë Dipeiit irauuleiix et des cellules pi^uieiitaires sons FMneiice de la lumière et de Folisciirité daus les yeux des Crustacés et des AracMldes, PAR Wanda SZCZAWINSKA. Planches XVI et XVII. LISTE DES OUVRAGES CITES. 1 FÉLIX Plateau. Recherches expérimentales sur la vision chez les Arthropodes. 1887-1888, Bruxelles. 2 Dr H. GrenACHER. Unlersuchungen ilber dus Sehorgan der Arthropoden. 1879, Gôttingen. 3 C. Claus. Der Organismus der Phronimiden. Arbeiten aus dem zoologisclien Institute der Universitàt Wien und der zoolog. Station in Triest. Tom. II, Heft 1. 1879. Wien. 4 Leydig. Zum feinereìi Bau der Arthropoden. Archiv fiir Anatomie und Physiologie von Johannes Miiller 1856. Berlin. 5 Leydig. Lehrbuch der Histologie. 1857. 6 William Patten. Eyes of Molluscs and Arthropods. Mittheilun- gen aus der zoologischen Station zu Neapel. Sechster Band. 1886. Berlin. 7 J.-S. Kinsley. The development of the Coumpound Eye of Crangon. Zoologischer Anzeiger. No 234, page 597. 1886. Leipzig. 8 J. NUSBAUM. L'embryologie de Mysis Chameleo, page 171 dans Archives de zoologie expérimentale et générale. Deuxième série. Tome I. 1887. Paris. 54 524 WANDA SZCZAWINSKA. 9 Micheline StefANOWSKA. La disjyosition histologique dupigment dans les yeux des Arthropodes sous Vinfluence de la lumière directe et de l'obscurité complète. 1889. Genève. 10 RANVIER. Traité technique d'' histologie,. 1889. Paris. 11 BOLLES Lee et HennegUY. Traité des méthodes techniques. 1887. Paris. 12 Sars. Histoire naturelle des crustacés d'eau douce de Norvège. Ire livr. Malacostracés. 1867. Christiania. 13 M. SCHULTZE. Untersuchungen ilhcr die zusammengesetzten Augen der Krebse und Insecten. Bonn. 1868. 14 GOTTSCHE. Beitrag zur Anatomie und Physiologie des Auges der Krebse und Fliegen. Miillers Archiv. 1852. 15 LemoinE. Recherches pour servir à l'histoire des systèmes nervetix, musculaire et glandulaire de VEcrevisse. Annales des sciences naturelles. 1868. 16 Clads. Untersuchungen iiber die Organisation und Entwickelung von Brunchipus und Artemia. Arbeiten aus dem zoologischen Institute der Universitàt Wien und der zool. Station in Tri est. Band p. 1886. Wien. 17 Otto Hermann. XJngams Spinnen. Fauna 1878. Budapest. 18 BrONN'S Klassen und Ordungen der Thier-Beichs. Leipsig und Heidelberg. 19 Edouard ClaparÈDE. Zur Morphologie der susammengesetzten Augen bei den Arthropoden. Zeitsch. fur w. Zool. Bd. 10. 1859. 20 MiLNE Edwards. Histoire naturelle des Crustacés. 21 E. JOTJRDAN. Les sens chez les animaux inférieurs. 1889. Paris. 22 VOGT et YUNG. Traité d'Anatomie comparée pratique. En publica- tion. 23 E. E. Ray LankESTER et A. G. Bourne. The minute structure of the lateral an the central Eyes of Scorpio and Limulus. Quarterly Journal of Microscopical Science, New series, n" 89. Janv. 1883- 24 ReichenBACH. Studien zur Entwickelungsgeschichte des Fliisskrebses. Abbandlung d. Senckenbergischen naturforschenden Gesell- schaft in Frankfort a M. Bd. XIV. 1886. 25 EngelmANN. Sur les mouvements des cônes et des cellules pigmen- taires de la rétine sous Vinfluence de la lumière et du système nerveux. 1884. CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE l^UELQUES CRUSTACÉS. 525 INTRODUCTION. Des nombreux travaux publiés jusqu'ici sur la structure des yeux des Arthropodes se dégagent deux théories contradictoires. La première, la théorie classique, les considère comme un en- semble d'ocelles et les appelle des yeux composés. Elle est, comme on le sait, professée par la majorité des autorités scienti- fiques, dont je ne puis citer ici les noms, tant leur nombre est considérable; deux ans se sont à peine écoulés depuis que Plateau (1) a publié un historique complet des ouvrages trai- tant de ce sujet. Nous nous bornerons donc à citer Grenacher (2), dont le travail présente une étude très complète sur les yeux des Arthropodes et auquel la science est redevable de la nomen- clature relative à cette branche de l'anatomie comparée. L'argument principal des adhérents de cette théorie se base sur la présence, dans les yeux soi-disant composés, d'autant d'élé- ments transmetteurs de la lumière qu'il y a d'éléments récepteurs de la sensation lumineuse. Comme éléments transmetteurs de la lumière sont considérés les cônes cristallins et comme récepteurs : les bâtonnets nerveux. Toutefois, suivant Grenacher, ces der- niers sont composés de deux parties : 1» de cellules rétiniennes; 2o du rhabdôme formé aux dépens de ces cellules. Claus (3), dans son travail sur l'organisme des Phronimidés, émet les suppositions suivantes sur le fonctionnement des deux parties en question : ou bien, dit-il, les cinq cellules des bâtonnets représentant les éléments sensibles sont en rapport avec les fibres nerveuses, et, dans ce cas, le rhabdôme et le cristallin ne sont que des agents de transmission des rayons lumineux à la rétinule qui les transforme en sensation nerveuse ; ou bien c'est le rhabdôme qui est le siège des terminaisons ner- veuses réceptrices. Claus conclut, conformément aux résultats obtenus par Grenacher, que la seconde hypothèse est la seule admissible. 526 WANDA SZCZAWINSKA. La seconde théorie considère les yeux des Arthropodes comme des yeux simples, mais modifiés. Elle ne possède pas autant de défenseurs que la première et quoique Ley dig (4) l'ait énoncée dès 1855, elle peut être qualifiée de récente : ce sont, en effet, des travaux de fraîche date qui l'ont assise sur une base solide. Parmi ceux-ci, je dois citer en première ligne celui de Eay Lankester et Bourne (23) qui, par l'étude com- parative des yeux des Scorpions et des Limules, sont arrivés à la conclusion que la différence, entre les yeux simples et les yeux soi-disant composés, ne consiste que dans une distribution plus régulière des éléments rétiniens et dans la subdivision de la cornée en facettes. Puis ce fut Patten (6) qui présenta une étude importante ayant trait au sujet qui nous occupe aujourd'hui. Cet auteur détermina pour la première fois, d'une manière absolument pré- cise, le rôle des différentes parties constitutives de l'œil. Ayant trouvé un nerf axial dans le rhabdôme et le cristallin, il confirma l'hypothèse émise par Clans et Grenacher. Il existe néanmoins une différence capitale entre la manière de voir de Patten et celle de ses prédécesseurs ; en effet, ces derniers considèrent les cris- tallins comme de simples conducteurs des rayons lumineux, alors que le premier les envisage comme une continuation directe du rhabdôme où se trouve la terminaison nerveuse. Grenacher fait dériver le rhabdôme des cellules rétiniennes. Patten, lui, soutient qu'elles sont indépendantes du premier et ne leur attribue d'autres fonctions que celles qui sont inhérentes à leur nature pigmentaire. Par de nombreux diagrammes d'yeux simples de Mollusques et d'Araignées, ainsi que d'yeux composés de Crustacés et d'Insectes, Patten démontre l'identité essentielle de structure des deux sortes d'yeux. Cependant les recherches récentes de Kingsley (7) sur l'em- bryologie des yeux de Crangon, de Reichenbach (24) sur l'embryologie d'Astacus fluvlatilis, de Nusbaum (8) sur Mysis Chameleo, enfin celles de Patten ont assuré le triomphe défi- nitif de la théorie nouvelle. CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 527 Tous ces auteurs sont d'accord quant à la première ébauche des yeux composés : c'est toujours une invagination épi- blastique qui se sépare, peu à peu, de la couche qui lui a donné naissance. (Nusbaum décrit les premières ébauches des yeux des Mysis comme deux épaississements ectoder- miques.) A raison de ces faits embryologiques, il est impossible de considérer les yeux des Arthropodes comme une agglomé- ration d'ocelles. Il résulte de ces théories contradictoires de graves inconvé- nients pour celui qui désire entreprendre une recherche physio- logique à ce sujet et notamment lorsque, pour l'interprétation des expériences, il veut se servir des données morphologiques jusqu'ici acquises. M. le professeur Cari Vogt m'a proposé de faire l'étude des changements dans la disposition histologiqne du pigment sous l'iniiuence de la lumière et de l'obscurité dans les yeux des Invertébrés. A cette occasion, je suis heureuse de pouvoir exprimer ma profonde gratitude à mon eminent professeur M. Cari Vogt, pour les conseils et les bonnes paroles qu'il a bien voulu m'adresser pendant toute la durée de mon travail. Des recherches analogues ont été faites, il y a deux ans, par Mlle Micheline Stefanowska (9) sur les Arthropodes et en particulier sur les Insectes. Les résultats de ses recherches l'ont conduite aux conclusions suivantes : dans l'obscurité, le pigment se ramasse en amas compacts, surtout à la base des cônes ; les cellules pigmentaires contractées, recouvrent une partie moindre des éléments de l'œil. A la lumière, le pigment est réparti beaucoup plus uniformément, les cellules pigmentaires s'allongent dans les deux directions : vers la cornée et vers la rétinule. Les résultats de recherches analogues, ayant pour objet les Vertébrés, ont été communiqués en 1884, par Engelmann (25) et Van Genderen Stort. Les voici sommairement : Dans les yeux de Rana, placés dans l'obscurité, les franges des cellules pigmentaires sont contractées et n'entourent que la partie 528 WANDA SZCZAWINSKA. distale des bâtonnets et des cônes rétiniens ; à la lumière, par contre, elles s'étendent considérablement et parviennent jusqu'à la membrane limitante externe, enveloppant complètement ces derniers. Ces auteurs ont également observé des mouvements dans les cônes eux-mêmes et constatèrent qu'ils suivent dans leurs mouvements, la direction du mouvement des cellules pigmentaires. On voit donc que les mouvements du pigment dans les yeux des Antliropodes et des Vertébrés tendent vers un même but : la protection des parties qu'il entoure; ce qu'exprime M'ie Stefa- no wska en disant : " Nous savons que l'œil des Vertébrés possède la faculté d'adapter la disposition de son pigment à la quantité de lumière qui le frappe, et nous venons d'établir que cette adaptation se trouve dans un œil construit sur un type complètement différent du premier, celui des Arthropodes. „ J'ai commencé mes études expérimentales sur une classe d'Arthropodes que M^ie Stefanowska n'a pas étudiée dans son travail, c'est-à-dire les Crustacés. J'y ai presque limité mes recherches. C'est d'une part, la constatation des lacunes exis- tantes dans la connaissances que l'on a sur la structure histolo- gique des yeux des Crustacés, constatation amenée par l'examen de mes coupes et la consultation de travaux spéciaux, et de l'autre les opinions contradictoires quant à la signification morphologique et physiologique de différents éléments de ces yeux, qui m'ont conduite à faire des recherches morphologiques sur les yeux en général. Dans ces recherches, j'ai concentré spécialement mon attention sur les yeux de Gammarus et d'Astacus fluviatilis, ces animaux étant le plus facilement à ma portée. Dans le choix du matériel nécessaire à mes études physiologiques, le travail de Grenacher m'a servi de guide. Cet auteur, sans établir une classification spéciale des yeux des Crustacés, les décrit dans l'ordre qui résulte de la supériorité relative de l'organisation entière de l'animal. J'ai fait aussi des expériences sur beaucoup d'espèces d'Araignées, malheureusement la difficulté des coupes, causée CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 529 par le dimorpliisme qui existe chez cette classe d'Arthropodes, ne me permet pas d'en communiquer tous les résultats ; seules Lycosa hortensis, Epeira diadema et Linyphia triangularis ont pu me servir avantageusement. En ce qui concerne l'étude de l'influence de la lumière et de l'obscurité sur le mouvement du pigment et des cellules pigmen- taires dans les yeux d'Arthropodes, nous nous sommes posé les quatre problèmes suivants : 1° Déterminer dans la position du pigment et des cellules pigmentaires les changements maxima occasionnés par leur mouvement à la lumière et dans l'obscurité. 2° Apprécier le temps nécessaire pour obtenir ces deux positions maxima. 30 Etant donnée la position maximum du pigment dans l'obs- curité, déterminer l'unité de temps nécessaire pour provoquer le moincke changement de la position du pigment et des cellules pigmentaires dans les yeux exposés à une lumière dont l'inten- sité est connue. 40 Indiquer l'influence de deux lumières, à intensités diffé- rentes, sur la rapidité des changements de la position du pigment et des cellules pigmentaires. Ce n'est du reste que grâce à Astacus fluviatilis que je suis parvenue à répondre avec plus ou moins de précision aux questions ci-dessus mentionnées, n'ayant jamais éprouvé de bien grandes difficultés à me procurer cette espèce. TECHNIQUE. Après m' être assurée du bon état de santé des animaux que je désirais étudier, je plaçais une série de la même espèce d'animaux dans une obscurité complète, alors qu'une seconde série restait directement exposée à la lumière solaire (entre onze heures du matin et quatre heures de l'après-midi). Presque toutes les expériences se firent en été. Toutes les heures, je fixais une partie de ces animaux, afin de déterminer l'influence du nombre d'heures sur la progression du pigment dans les cel- lules pigmentaires et sur la configuration des cellules mêmes. 530 WANDA SZCZAWINSKA. Ainsi je laissais les animaux à robscurité de 1-8 heures. J'usais du même procédé pour les animaux exposés à l'action des rayons solaires. Tandis qu'il était facile de conserver les premiers vivants jusqu'à la fin de l'expérience, la chaleur des rayons solaires directs tuait ordinairement les autres après deux ou trois heures; d'autres Crustacés plus délicats périssaient déjà après un quart d'heure, par exemple Bythotrephes. Si je réussissais à conserver les animaux plus longtemps à la lumière, ils per- daient leur vivacité. En face de ces inconvénients multiples, je me décidai à tenter mes expériences à la lumière électrique. On mit à ma disposition une lampe électrique dont l'intensité égalait 80 becs de gaz. Malgré le peu de chaleur se dégageant de la lampe, les Ecrevisses, mes sujets d'alors, perdirent de leur force et déclinèrent. Les procédés décrits ci-dessus m'ont donné les réponses à trois des quatre problèmes, que je m'étais promis de résoudre. Ils ont déterminé : 1^ les changements maximum dans la posi- tion du pigment et des cellules pigmentaires à l'obscurité et à la lumière, 2° le temps nécessaire pour obtenir ces deux positions et 3» l'influence de l'intensité lumineuse sur la rapidité de ces changements. Pour résoudre la quatrième question, celle de l'unité de temps pour produire le minimum de changement dans la position du pigment et des cellules pigmentaires à la lumière, j'ai procédé comme suit : les animaux soumis à l'épreuve furent fixés, une première série, immédiatement après avoir été retirée de l'obscu- rité, puis d'autres séries, toutes les cinq minutes pendant la durée de deux heures. Une des conditions importantes pour la bonne réussite des expériences réside dans la valeur du fixatif. Cette valeur doit se dévoiler notamment dans la rapidité de l'action, car, avant toutes choses, il s'agit dans ces sortes d'expériences de saisir la nature sur le vif. An commencement de mes études j'avais suivi la méthode indiquée par M^ie Stefanowska (9), je fixais les yeux par l'acide osmique. Mais me trouvant à ViUefranche et faute GONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 531 de ce dernier réactif, j'ai été forcée d'employer la liqueur de Kleinenberg, fixatif renommé pour les Arthropodes; l'emploi de cette liqueur m'a permis d'obtenir les résultats les plus surpre- nants sur Palaemon squilla et Galathea squamifera. Dernière- ment même, pour fixer les yeux, je me suis servie de la solution du sublimé corrosif dans l'eau distillée chauffée jusqu'au point d' ebullition. La concentration de ce réactif rend son action si rapide que les petits Crustacés y meurent dans une durée de temps difficile à apprécier; quant aux grands Crustacés, un quart d'heure suffit amplement à produire la fixation des tissus. Grâce à cette propriété du sublimé chauffé, je n'ai pas eu besoin de couper la tête aux animaux de petite taille, ni de la partager en deux, pour préserver les cellules pigmentaires de l'action des centres nerveux, comme le faisait M^ie Stefanowska, le cerveau ainsi que les cellules étant fixés également vite. Pour la fixation des yeux d'Astacus et de Palaemon, je les séparais ordinairement du reste du corps pour facUiter la pénétration du réactif, la couche de chitine s'y trouvant fort épaisse. Je puis donc affirmer, en ce qui concerne du moins la fixation des éléments de l'œil des Arthropodes, qu'entre ces trois réactifs, dont j'ai essayé l'action sur Gammarus et Astacus (et qui, dans les mêmes conditions, me donnaient les mêmes résultats), je dois donner la préférence au sublimé chaud et cela pour la cause que je viens de signaler plus haut. J'ajoute même que ce n'est pas là son unique avantage. L'acide osmique présente un inconvénient, celui de noircir les tissus, difficulté que ]Vriy^)- Pour avoir une idée nette de la structure des éléments constitutifs de l'œil ainsi que du rapport qui existe entre ces élé- ments, il faut avoir recours au procédé de macération. J'ai obtenu les meilleurs résultats, pour les éléments hyalins, par la macéra- tion dans le mélange d'acide sulfurique et d'eau de mer. Si l'on examine les éléments hyalins in toto (fig. 1, c. c, st.), on pourrait croire, à première vue, qu'ils sont composés de deux formations différentes, dont l'une est placée à la suite de l'autre. Eu effet, chacun de ces éléments peut être divisé en deux parties : l'une, la partie distale, est assez volumineuse et revêt la forme d'un cône tronqué dont la base regarde la cornée, l'autre, la partie proximale, est beaucoup plus mince. Ce passage brusque de la partie distale élargie de l'élément hyalin à la partie proximale mince, masque la véritable relation qui existe entre elles. Ce n'est qu'en opérant une coupe longitudinale par les parties de l'élément hyalin, qu'on voit que la partie distale 536 WANDA SZCZAWINSKA. passe à la partie proximale sans présenter aucune ligne de dé- marcation (flg. 3, c, st.). Le dernier résultat de nos recherches nous met en contra- diction avec Grenacher, qui considère les deux parties en ques- tion comme deux éléments différents. Grenacher appelle cris- tallin la partie distale de l'élément hyalin et rhabdOme la partie proximale du même élément. Au contraire, la relation que nous venons d'établir entre les deux parties de l'élément hyalin de l'œil deGammarus serait conforme aux résultats des recherches de Patten sur les yeux des Crustacés supérieurs; c'est pourquoi nous préférons appeler avec Patten l'élément entier — le réti- nophore, sa partie distale élargie ou cristallin des auteurs — le calice (fig. 3, c), et sa partie proximale ou rhabdôme de Grenacher — le style (fig. 3 st.). Le calice est composé de deux parties, dont l'une est super- ficielle, et de substance granuleuse (fig. 3, en. p.), et l'autre d'un contenu hyalin, qui a nom cône cristallin. La substance granuleuse du calice n'est visible que dans les deux tiers anté- rieurs de sa longueur totale. Elle forme une enveloppe proto- plasmique du calice qui renferme deux noyaux réniformes appelés noyaux de Semper (fig. 3, n. rph.) ; ces derniers correspondent aux noyaux du rétinophore de Patten. On voit sur une coupe transversale du calice qu'il est composé de deux parties soudées dans leur longueur (fig. 5, a.). J'ai souvent observé dans l'in- térieur du cône, un corps très réfringent, dont la grosseur n'était pas constante et dont les contours étaient parallèles aux ^contours du calice. Je ne saurais rien dire quant à la signification de cette conformation. Une série de coupes transversales, - passant par le style, montrent à son pourtour la présence de quatre ailes longitudi- nales qui furent mentionnées par Grenacher (fig. 5, t.). Ces ailes s'accentuent de moins en moins, à mesure que le style diminue de diamètre, pour disparaître complètement; alors il revêt la forme d'un filament grêle (fig. 5, c). Je n'ai jamais pu suivre le prolongement filamenteux du style jusqu'à la mem- brane basale, de même qu'il m'a été impossible de déterminer le CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 537 nombre de parties diverses qui entrent dans la constitution du style. La forme en croix, qui distingue la coupe transversale du style, ne saurait être invoquée en faveur de la supposition d'un style composé de quatre cellules. Au contraire, nous avons obtenu des coupes qui montraient un dédoublement du calice, concurremment avec un dédoublement du style. Nous avons constaté plus haut, dans chaque groupe des cel- lules pigmentaires entourant le rétinophore, la présence de trois séries de noyaux {ûg. 4, n\ pg, n^. pg, n^. pg.). Ces trois sortes de noyaux appartiennent aux trois verticilles des cellules pigmentaires, qui se groupent l'un à la suite de l'autre, formant ainsi une enveloppe presque complète du rétinophore (fig. 4 pg, pg'^, pg^-)' Oil acquiert une idée nette de la forme des cellules des trois verticilles, et du rapport qui existe entre elles, si l'on dissocie les éléments de l'œil par la macération des yeux dans la liqueur de Millier : six à huit jours sont suffisants pour rendre possible la dissociation de l'œil. Les cellules sont disposées par cinq dans chaque verticille. Celles du verticille externe recouvrent la plus grande partie du calice et se pro- longent en arrière pour couvrir aussi le style (fig. 4, 2>9^-)' Ces cellules, larges et lamelleuses dans la partie externe qui recouvre le calice, possèdent des bords latéraux également libres. A la limite du calice et du style, elles perdent leur indivi- dualité, se soudent ensemble et en même temps deviennent plus épaisses mais moins larges. Ces cellules portent des noyaux (fig. 4, n^. pg.) dans leur partie distale un peu épaissie en cet endroit. Leur pigment paraît noir et abondant. Les cellules du verticille interne s'aperçoivent facilement : elles occupent le tiers postérieur de l'œil (fig. 4:,pg^). Elles sont aplaties comme les premières, et comme elles sont pourvues d'un énorme noyau (fig. 4, n^ pg.) ; elles semblent porter une bosse à l'endroit où se trouve ce dernier. C'est ainsi que vues de face elles offrent l'aspect d'un corps lamelleux avec une faible pigmentation, tandis que, vues de profil, elles sont filamen- teuses et ce n'est qu'à l'endroit où surgit le noyau qu'on observe un épaississement. Dans le même verticille, les noyaux des 538 WANDA SZCZAWINSKA. cellules ne sont pas placés à la même hauteur, on peut compter ordinairement trois cellules dont les noyaux sont placés à leur extrémité proximale et deux cellules les ayant à l'extrémité distale. Vers l'intérieur de l'œil, près de la membrane basale, l'extrémité proximale des cellules devient pointue et porte un prolongement hyalin qui, réuni aux prolongements des autres cellules du même verticille, forme un seul et unique lilament, servant à retenir les cellules à la membrane basale. Les cellules du verticille moyen, faiblement pigmentées, sont pourvues d'un noyau ovalaire (fig. 4, n^, pg.). Leurs prolonge- ments antérieurs recouvrent les prolongements postérieurs ou internes des cellules du premier verticille ; en arrière, ils se continuent sur les cellules du verticille interne. Il nous serait difficile de tracer exactement les limites des cellules de ces trois verticilles, car malgré l'emploi de la méthode de macé- ration nous ne pûmes le plus souvent arriver à les séparer complètement; quand elles étaient disjointes, elles ne parais- saient pas être complètes. Les cellules du verticille externe et moyen correspondent à la rétinule de Grenacher. Celles du verticille interne n'ont pas été décrites par cet auteur. De cet aperçu de la structure des cellules pigmentées qui enveloppent les éléments hyalins de l'œil, nous devons conclure que les cellules pigmentées chez Gammarus se groupent en trois verticilles, qui se suivent d'avant en arrière, formant une enveloppe complète autour d'un axe hyalin ; ces cellules sont indépendantes de cet axe, car elles s'attachent à la membrane basale par des filaments propres. Souvent nous avons observé sur le calice des lignes très fines avec de nombreuses ramifications ; dans certains cas nous avons pu voir, d'une manière tout à fait nette, grâce à l'action du chlorure d'or qui les avait colorés en noir (fig. 3, n. ex.) deux rameaux nerveux s'épanouir à la surface du calice. Leurs rami- fications étaient surtout abondantes près de la face distale du calice. Nous avons pu suivre les deux filaments nerveux sur le style et distinguer des réseaux délicats à la surface des cellules pigmentaires postérieures. CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 539 Le nerf axial, que Patten a trouvé dans le rétinophore, ne s'est pas montré clairement à nous chez Gammarus ; il est vrai que sur les coupes transversales du style nous aperçûmes constamment, au centre de la croix, un point fortement réfrin- gent {ûg. 5, t.), mais comme nous ne l'avons jamais traité par un réactif qui aurait pu nous indiquer sa nature nerveuse, il nous est impossible d'exprimer notre opinion à ce sujet. BRANCfflPUS. Planche XVI, fig. 10 et il. Grenadier (2), Clans (16) et Patten (6) ayant décrit d'une manière détaillée les yeux de Brancliipus, nous nous sommes bornée, en ce qui concerne la structure oculaire de ce crustacé, aux faits dont la constatation dans les yeux de Gammarus, nous ont placée en contradiction avec les recherches de Gre- nacher, c'est-à-dire : l» au passage du cristallin en rhabdôme et 2» aux relations entre les cellules rétiniennes et le rhabdôme. L'examen attentif des coupes longitudinales des yeux pairs de ce crustacé (flg. 11, comparer avec n» 2, pl.X, ûg. 107), ainsi que celui d'yeux soumis à la macération dans l'eau de mer et dans l'acide sulfurique, nous a convaincue que le cône cristallin passe en rhabdôme ou style sans solution de continuité, formant un axe hyalin, qu'il faudrait, par analogie avec le cas précédent, appeler rétinophore. Nous avons aussi pu nous convaincre de l'indépendance complète de cet axe d'avec les cellules rétiniennes. Si l'on examine la terminaison interne des yeux près de la mem- brane basale, là où s'épanouissent les filaments du nerf optique, sur des coupes de Vioo — V200 ^'^- d'épaisseur, on voit, à un faible grossissement, un espace qui sépare l'œil des terminaisons du nerf optique, comme le prouve le dessin de Claus (n» 16, pi. VII, flg. 7). Mais un fort grossissement démontre que cet espace est rempli de fllaments, dont les uns sont complètement hyalins et dépourvus de pigment, tandis que les autres portent les grains pigmentaires qui viennent depuis la zone des filaments nerveux (Nervenbiindelschicht) (fig. 10 et ll,2Jr. rjih, pr.pg.). Les filaments pigmentés se groupent par cinq et se continuent 55 540 WANDA SZCZAWINSKA. avec les cellules de la rétinule ou les cellules pigmentées de chaque rétinopliore. Au milieu de chaque groupe formé par les cinq filaments pigmentés se trouve un filament hyalin qui, avant de s'attacher à la membrane basale, se divise en deux branches qui, elles aussi, se subdivisent encore. Ce filament n'est autre chose que la terminaison grêle du rétinophore reliant ce dernier à la membrane basale. Par conséquent, le rétinophore est indépendant des cellules rétiniennes. ASTACUS FLUVIATILIS. Planche XVII, lig. 1 à 9. Presque tous les naturalistes qui se sont occupés de la structure oculaire des Arthropodes, se sont adonnés à l'étude des yeux de cette espèce, quelques auteurs se limitant à telle ou telle partie de l'œil, les autres décrivant l'oi-gane en entier. Parmi les premiers je dois citer l'éminent naturaliste Schultze (13), parmi les seconds : Gotsche (14), Leydig (4) et Lemoine (15). Les yeux d'Astacus fluviatilis appartiennent à la catégorie des yeux à facettes. En elfet, l'examen des coupes transversales, passant par la cornée, montre que cette dernière est divisée en facettes quadrangulaires [ûg. 5), qui peuvent pourtant revêtir une forme pentagonale ou hexagonale. Au milieu de chaque facette il y a un enfoncement qui prend tantôt la forme d'une croix, tantôt un aspect circulaire ; cet enfoncement semble correspondre aux ouvertures trouvées dans chaque cornéule par Dugès. Sur une coupe longitudinale del'œil on peut observer trois couches de la cornée qui diffèrent par l'intensité de la coloration que leur donne le carmin : l'une d'elles, externe, très réfrin- gente, paraît être continue; elle est suivie d'une série de len- tilles biconvexes se colorant fortement par le carmin boracique. Ces lentilles sont séparées les unes des autres par des espaces plus clairs dont l'intensité de coloration est la même que celle de la couche interne et dernière de la cornée (flg. 1 et 2, cr.). Sous la cornée se groupent les éléments que nous appellerons, comme dans l'œil de Gammarus, les rétinophores (fig. 1 et 2, c. c, st., pi.) ; leur nombre correspond à celui des facettes de la CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 541 cornée ; chacun d'eux est entouré de cellules pigmentaires (fig. 1 et 2, yg^, x>(/, iHj^), qui, à première vue, dans les yeux ayant séjourné longtemps dans l'obscurité, forment deux zones noires : l'une externe ou distale, l'autre interne ou proximale (% 1). Entre la cornée et les rétinopliores on trouve l'hypoderme dont les cellules sont différenciées (fig. 1 et 2, hy. c). Deux cellules hypodermiques se rapprochent et forment des tablettes quadrilatérales qui recouvrent la face externe de chaque rétino- phore. La face distale des tablettes est légèrement concave afin de recevoir la convexité de la cornéule, tandis que la face proxi- male est fortement concave, car elle s'applique contre la surface distale du rétinophore dont la convexité est bien prononcée. Chacune de ces tablettes quadrilatérales porte deux noyaux dans les deux angles opposés des tablettes (fig. 2, n. hy. c. et fig. 6). La macération des yeux d'Astacus dans la liqueur de Millier permet d'observer les rétinophores séparés de leurs enveloppes pigmentaires. Les coupes longitudinales des yeux qui ont séjourné à l'obscurité se prêtent également à cette sorte d'études. Sur de telles préparations on voit que le rétinophore change de forme : ainsi, dans sa partie antérieure, il offre la forme d'un parallélipipède (fig. 1, c. c); plus loin il s'amincit (fig. 1, st.) pour s'élargir de nouveau dans son quart postérieur, où il prend l'aspect d'un corps fusiforme (fig. 1 et 2, pi.). La partie antérieure du rétinophore, correspondant au calice de l'axe hyalin de l'œil de Gammarus, se trouve composée de deux parties qui, sous l'influence de l'acide acétique, prennent un aspect diiférent. Une de ces parties que nous appellerons la sub- stance fondamentale du calice, revêt un aspect granuleux avec des grains assez volumineux; l'autre présente des granules très fins de sorte qu'elle apparaît presque homogène. La partie hyaline du calice est la plus étendue : la- substance granuleuse ne se trouve que dans la partie antérieure et dans la partie postérieure du calice ; dans la partie moyenne, presque exclu- sivement formée par le contenu hyalin, elle est réduite à une simple membrane. La partie antérieure contient quatre grands 542 WANDA SZCZAWINSKA. noyaux qui se placent dans les quatre angles du calice (fig. 1 et 2, n. rph.). Ces noyaux correspondent aux noyaux de Semper des auteurs, ou bien encore aux noyaux du rétinopliore de Patten. Le calice est composé de quatre segments ; on constate ceci en consultant les coupes transversales de l'œil d'Astacus (fig. 7 et 8, c). On peut voir déjà sa composition en examinant les rétino- phores soumis à la macération. Pour examiner la forme du con- tenu hyalin du calice ou du cône cristallin, il faut se servir de l'acide acétique concentré. On voit alors qu'il est composé de quatre segments longitudinaux qui donnent des prolongements en avant et en arrière. Les quatre prolongements antérieurs du cône sont courts, les postérieurs longs ; ces derniers plongent dans la substance granuleuse du calice (fig. 1 et 2, c. c). Schultze compare les prolongements postérieurs à des doigts de gants. Comme nous avons eu l'occasion de le mentionner plus haut, le rétinophore s'amincit dans sa partie postérieure. Cet amin- cissement, que nous appellerons le style, correspond à la partie postérieure amincie du rétinophore de l'œil de Gammarus. Le style avant de se transformer en un corps fusiforme qui constitue en somme la partie proximale du rétinophore d'Astacus, s'élargit un peu, parce que les quatre segments dont il est composé, en s' aplatissant considérablement sur les côtés, deviennent plus larges et plus indépendants (fig. 4). Nous ne sommes pas d'accord avec Schultze quant au passage de la partie mince du cristallin dans le corps fusiforme qui le suit, corps auquel cet auteur donne le nom de bâtonnet. D'après Schultze, la partie postérieure du cristallin (le style d'après notre nomenclature) se termine par quatre filaments ténus qui embras- seraient l'extrémité distale du bâtonnet nerveux. Nous aussi, nous avons observé ces filaments, mais nous les avons poursuivis au delà de la limite que leur a tracée Schultze. Sur les yeux dis- sociés après la macération dans la liqueur de Mliller, nous avons vu les filaments hyalins au nombre de quatre (fig. 4) s'épanouir à la surface du bâtonnet ou corps fusiforme du rétinophore ; ces filaments se continuent au delà de la terminaison proximale du corps fusiforme d'un côté, ainsi que sur le style de l'autre. CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 543 La partie postérieure du rétinophore qui présente un épais- sissement fusiforme, correspond au rhabdôme de Grenadier ou pédicelle de Patten (fig. 1 et 2, pi. XVII). Nous nous appro- prions la dernière nomenclature vu la divergence qui existe entre les résultats de nos recherches et ceux de Grenacher quant à la signification morphologique de la partie en question. Le pédicelle nous montre sur une coupe transversale la forme d'un rectangle dont les deux axes auraient une longueur différente (fig. 9, pi. XVII). Je n'ai jamais pu voir la division en quatre de la coupe transversale du pédicelle, d'où l'on pour- rait conclure à l'existence de quatre segments longitudinaux. L'extrémité antérieure du pédicelle se continue en style, l'ex- trémité postérieure, avant d'atteindre la membrane basale, se transforme en un filament hyalin très grêle. La surface du pédi- celle offre des dessins singuliers (fig. 1, pi. XVII). Sur des coupes longitudinales d'yeux d'Astacus, fixés par le sublimé corrosif et dépigmentés par la liqueur de Grenacher, l'on voit tantôt des espaces enfoncés alternant avec des espaces saillants, les premiers étant limités par des lignes courbes dont la concavité était tournée au dehors, les seconds, au contraire, par des lignes courbes avec concavité à l'extérieur ; tantôt une ligne brisée traversant le milieu du pédicelle depuis son sommet jusqu'à la base ; de cette ligne en partaient d'autres transversales qui divisaient la surface du pédicelle en deux rangées de polygones. Dans le premier cas les espaces enfoncés sont complètement clairs et portent au milieu des points sombres ; dans le second cas, les côtés des polygones sont sombres et saillants, tandis que les espaces qu'ils limitent sont clairs et enfoncés et toujours pourvus de lignes plus sombres au milieu. Nous ne saurions expliquer la structure du pédicelle d'après les aspects singuliers que présente sa surface. Patten, pour se rendre compte de sa structure, chez Penaeus, avait fait des modèles en cire. Voici les résultats auxquels il est arrivé : il admet une structure lamelleuse du pédicelle. Les lames formant le pédicelle sont construites suivant deux types, celles d'un des types alternent avec celles de l'autre. Leur 544 WANDA SZCZAWINSKA. épaisseur varie suivant qu'on les considère aux bords ou à l'intérieur. Pour l'intelligence de la structure des lames, Patten suppose deux axes dans une coupe transversale du pédicelle : un grand axe et un petit axe. Cet auteur désigne sous le nom de lames de premier ordre, celles qui atteignent la plus grande épaisseur suivant la direction du premier axe, et de lames de second ordre celles qui s'épanouissent le long du second axe. Les lames de premier ordre deviennent excessive- ment minces, presque membraneuses dans la direction de l'axe secondaire, tandis que leurs deux extrémités qui correspon- draient aux deux pôles de l'axe primaire, revêtent la forme de boules et gardent l'épaisseur primitive. Les secondes lames sont creusées à l'endroit qui correspond aux épaississements en forme de boules dans les lames primaires. Les boules des lames primaires ont les surfaces externes enfoncées. Scliultze décrit autrement la structure du bâtonnet nerveux qu'il considère comme un organe nerveux terminal (Nervenend- Apparat). Suivant ce naturaliste, le bâtonnet est composé de quatre segments longitudinaux à structure lamelleuse : ils sont formés de couches, alternativement rouges et incolores ; toutefois les segments sont disposés de telle sorte que la couche colorée de l'un d'eux correspond à la couche incolore des deux segments suivants. Les couches colorées semblent être plus épaisses que les incolores; les dernières sont recouvertes de pigment. En examinant les coupes longitudinales de l'œil d'Astacus, on voit que les espaces entre les deux rétinophores sont occupés par des formations membraneuses qui s'élargissent à mesure que le diamètre du rétinophore diminue (fig. 1 et 2, m. rph.). Ces formations atteignent la plus grande largeur avant la zone des noyaux des cellules pigmentaires internes (fig. 1 et 2, n^. pg.) et semblent disparaître à cet endroit ; en revanche, on peut observer une membrane à la surface des styles qui paraît être en rapport avec les formations décrites auparavant. Ces formations se sont produites par la fusion des membranes des rétinophores à l'endroit où ces membranes se touchent. Les CONTRIB, A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 545 coupes transversales viennent à l'appui de cette interprétation ; dans la partie antérieure du rétinopliore, à la hauteur de la zone pigmentaire externe, la membrane du rétinopliore reste invisible; elle est soudée avec les parois du calice; plus loin on l'aperçoit sous la forme de carrés membraneux entre les arêtes des calices qui prennent ici une forme hexagonale (fig. 7, m. riih.). Derrière les prolongements postérieurs du cône cristallin du rétinophore, la membrane acquiert de l'importance ; en effet, une coupe transversale faite à cette hauteur, montre que la mem- brane crée ici une zone hyaline avec des ouvertures circulaires, dans lesquelles se trouvent les quatre segments du rétinophore (fig. 8, m. rph.). Autour du style, la membrane devient de nou- veau mince. Schultze nie l'existence de cette membrane dans les yeux des animaux adultes, quoiqu'il affirme son existence à l'état larvaire. Leydig, au contraire, dans la description des yeux d'Astacus, parle d'une membrane qui entoure chaque élément de l'œil et dans cette membrane il place les noyaux disposés à des hauteurs différentes. Nous arrivons maintenant aux enveloppes pigmentaires que nous qualifions du nom d'externe et d'interne. L'enveloppe externe (dans les yeux qui ont séjourné longtemps dans l'obscu- rité) recouvre la partie distale du calice (fig. 1, pg^). Elle est constituée par quatre cellules disposées à chaque angle dièdre du calice. Ces cellules placées sur un angle prennent une forme spéciale. Pour se représenter la forme de ces cellules, on pourrait les comparer à un livre ouvert dont les deux parties forment un angle droit (fig. 3). Chaque cellule s'étend ainsi sur la moitié de deux faces du calice, ce qui fait que la réunion des quatre cellules donne une enveloppe ininterrompue. Dans les angles, les cellules sont plus épaisses, c'est ainsi qu'à cet endroit elles semblent plus noires; c'est aussi depuis là qu'elles se con- tinuent en arrière en un filament qui se place sur l'arête du calice et se confond avec la membrane enveloppante. Le long du style on ne les voit pas ; en revanclie, près du pédicelle, apparaissent les quatre filaments qui se continuent à la surface du pédicelle ; ce sont les mêmes filaments dont nous avons parlé plus haut et que 546 WANDA SZCZAWINSKA. Scliultze considérait comme prolongements du cône cristallin. Ils paraissent être la continuation des filaments hyalins des cellules pigmentaires externes. Les cellules répandent aussi des prolongements hyalins du côté de la cornée à laquelle ces pro- longements s'attachent (fig. 1 et 2, |jr.i pg'^, pr.^ pg.^). Le pigment des cellules est noir. La seconde enveloppe pigmentaire du rétinophore recouvre le pédicelle et le style (fig. 2, pg^). Elle est composée de sept cellules qui vont depuis le plus grand épaississement de la membrane du rétinophore jusqu'à la membrane basale. Dans sa partie externe épaissie, ces cellules renferment de grands noyaux (fig. 1 et 2, n^ pg.). Trois cellules sont ordinaire- ment plus longues que les quatre autres, et des trois précé- dentes l'une domine les deux autres. Vu les différences de longueur de ces cellules, on observe sur une coupe longitu- dinale de l'œil d'Astacus, d'un côté du style, trois cellules qui se suivent de l'extérieur vers l'intérieur (flg. 1). Sur une coupe transversale on voit la disposition de ces cellules autour du pédicelle; vers leur partie antérieure qui correspond à la même extrémité du pédicelle, les cellules sont plus larges et plus intimement liées les unes aux autres dans les yeux qui ont été exposés à la lumière ; dans la partie postérieure, elles deviennent de plus en plus minces et plus indépendantes; c'est sous forme de filaments grêles qu'elles aboutissent à la membrane basale (fig. 9, pg.^). Les cellules en avant émettent des prolongements qui, suivant Patten, arrivent jusqu'à la cornée ; nous ne les avons vues que près du pédicelle ; Patten appelle ces prolon- gements, ainsi que ceux des cellules externes, des bacilles. Le pigment de ces cellules est également noir. Leydig et Schultze mentionnent chez Astacus la présence de deux enveloppes pigmentaires décrites plus haut. Leydig parle même de noyaux des cellules postérieures, mais il les place dans la membrane entourant les rétinophores, ignorant qu'ils appar- tiennent aux cellules de l'enveloppe pigmentaire postérieure. Il y a encore une catégorie de cellules pigmentaires qui contiennent le pigment jaune en forme de cristaux (fig. 2, pg^) ; CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 547 les noyaux de ces cellules se trouvent près de la membrane basale (fig. 1 et 2, n^ i)g.) ; les cellules mêmes ne sont pas grandes, elles atteignent la moitié postérieure du pédicelle ; leur quantité semble correspondre à la quantité des cellules précédentes ; on les distingue tout au moins sur une coupe trans- versale de l'œil entre deux cellules précédentes (fig. 9, pg^). Nous n'avons pu, malgré l'emploi du chlorure d'or, constater chez Astacus l'existence de fibres nerveuses ni à la surface du rétinophore, ni sur les cellules pigmentaires. Il eût probable- ment fallu, pour rendre les terminaisons visibles, laisser agir le réactif plus longtemps. Faute du matériel nécessaire pour nous livrer à des études morphologiques originales, concernant les autres crustacés sou- mis à nos expériences, nous avons dû recourir, pour la partie expérimentale de notre travail, aux descriptions données par divers savants. Les yeux de Phronima ont été les sujets d'étude de Claus (3); cet auteui' affirme l'insuffisance des recherches de Grenacher au sujet du fonctionnement de différents éléments de l'œil des Arthropodes; quant aux points qui mettent nos recherches en contradiction avec celles de Grenacher, Claus semble être d'accord avec ce dernier. Pour la description des yeux des Arachnides, nous utili- sâmes le travail de Grenacher (2). Les yeux de Galathea et Palaemon ont été décrits par Patten (6). En vue de conserver la même nomenclature dans notre tra- vail, nous nous permettrons d'employer le nom de rétinophore pour désigner l'ensemble du cristallin et du rhabdôme dans les yeux de Phronima, ainsi que pour les éléments hyalins de la rétine dans les yeux simples des Arachnides. 548 WANDA SZCZAWINSKA. RECHERCHES EXPÉRIMF:NTALES sur les mouvements du pigment gramdeux et des cellules pigmentaires dans les yeux des Arthropodes sous l'influence de la lumière et de V obscurité. CRUSTACES Gammarus Roeselïï. IM. XVI, fig. 1 et ï>. - -î M Position du pigment et des cellules ingmentaires dans l'obscu- rité (fig. 1). — En examinant une coupe longitudinale de l'œil qui a séjourné pendant six heures dans l'obscurité complète, on voit deux bandes noires de pigment dont l'une correspond à la partie lamelleuse des cellules pigmentaires du verticille externe et recouvi'e le calice, et dont l'autre s'étend dans la zone des cellules pigmentaires du verticille interne ainsi qu'en avant de cette zone. La partie antérieure de la bande pigmentaire interne est plus noire que la partie tournée vers le ganglion optique. Le milieu de l'œil est complètement dépourvu de pigment. Les bords latéraux des parties aplaties des cellules extérieures sont écartés et permettent d'observer le calice. Position du pigment et des cellules pigmentaires à la lumière (fig. 2). — Dans les yeux de Gammarus, exposés pendant deux heures à la lumière solaire directe, le pigment est réparti uni- formément dans les trois sortes de cellules pigmentaires ; sur une coupe longitudinale de l'œil il forme une bande noire continue. Les parties lamelleuses des cellules externes s'étalent considé- rablement et leurs bords latéraux se touchant, elles couvrent presque entièrement les calices dans les deux tiers postérieurs. CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 549 Mouvement du pigment et des cellules pigmentaires. — Le pigment qui, à l'obscurité, forme deux zones noires ré- pondant aux extrémités de l'œil, effectue à la lumière un mouvement qui prend une direction différente dans les trois sortes de cellules pigmentaires : dans les cellules externes et internes, le pigment se rapproche de l'intérieur de l'œil; dans les cellules moyennes il se porte vers l'extérieur. Les parties lamelleuses des cellules extérieures s'étalent à la lumière sui- vant l'axe transversal. Phronima sedentaria.. Planche XVI, fig. 4 à 9. Dans les deux sortes d'yeux dont ces animaux sont pourvus par le dédoublement du nerf optique, l'observation des chan- gements que produit la lumière et l'obscurité dans la position du pigment et des cellules pigmentaires, est très difficile à saisir : d'abord à cause de la longueur excessive des cristallins dans les yeux frontaux et ensuite de la coloration dorée du pigment. La première cause ne nous a pas permis de constater les chan- gements dans la configuration des cellules rétiniennes ou pigmentaires dans l'obscurité et à la lumière, cette observation se basant sur la longueur relative des éléments constituant l'œil. C'est pourquoi nous nous sommes bornée à constater la répar- tition des grains pigmentaires dans le protoplasme des cellules rétiniennes. Position du ingment dans l'obscurité. Yeux frontaux (fig. 6). Quand on observe les coupes longitudi- nales des yeux frontaux ayant séjourné pendant quelques heures dans l'obscurité, on est frappé par la beauté d'une bordure jaune assez intense qui pare la partie distale des cellules réti- niennes. Cette bordure se sépare brusquement des autres parties incolores par une ligne de démarcation très nette. Il est pro- bable que la partie postérieure des cellules n'est pas complète- ment dépourvue de pigment, mais les grains étant très fins et 550 WANDA SZCZAWINSKA. leur quantité très minime, ils se confondent avec le contenu protoplasmique des cellules rétiniennes. Yeux latéraux (flg. 8). —La même accumulation du pigment, que nous venons de constater dans les yeux frontaux, se laisse observer dans les yeux latéraux, avec cette différence pourtant, que le passage de la coloration jaune sombre de la partie anté- rieure des cellules pigmentaires à l'absence de coloration de leur partie postérieure, s'effectue graduellement. Position du 2)ig'>nent à la lumière. Yeux frontaux (fig. 7). — Rien de particulier dans les coupes longitudinales des yeux exposés à la lumière. La coloration jaime paille est uniforme pour les cellules rétiniennes entières, à l'exception de la partie antérieure qui est plus foncée, ce qu'on explique facilement par la plus grande quantité de pigment dans cette partie un peu élargie des cellules. Yeux latéraux (fig. 9). — Mêmes observations pour les yeux latéraux. Mouvement du pigment. Les grains pigmentaires accumulés, à l'obscurité, dans la partie antérieure des cellules rétiniennes, subissent à la lumière un transfert vers la partie proximale de l'œil. Branchipus. Planche XVI, fig. 10 et \\. Position du pigment et des cellules pigmentaires dans l' obscu- rité (fig. 10). — Dans les yeux qui ont séjourné six heures à l'obscurité, le pigment forme une zone noire compacte qui se con- centre, dans la partie distale de l'œil, derrière le cône cristallin du rétinophore ; il est donc accumulé dans la partie distale des cellules pigmentaires. La partie proximale de ces cellules jusqu'à la membrane basale est très faiblement pigmentée, à l'exception CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 551 des traînées noires qui se placent le long des parois latérales du rétinopliore. Chaque groupe des rétinules oflfre la forme d'un long tube à diamètre presque égal; ce n'est que vers l'extrémité distale que ce tube s'élargit par l'écartement des extrémités des cellules. Position du pigment et des cellules pigmentaires à la lumière (fig. 11). —Le pigment est réparti presque uniformément le long des cellules, mais il est moins abondant dans la couche pé- riphérique des rétinules que dans celle qui recouvre les parois du rétinophore. Le rétinophore est visible cette fois dans son tiers antérieur ; les cellules pigmentaires sont beaucoup plus épaisses et serrées dans leur extrémité antérieure que dans l'extrémité postérieure. Mouvement du pigment et des cellules pigmentaires. — Amassé à l'obscurité, le pigment effectue à la lumière un mou- vement vers la partie proximale de l'œil. Les cellules pigmen- taires s' étalant à la lumière, suivent en quelque sorte dans leur mouvement la direction du mouvement du pigment. Nous avons également fait des expériences sui^ un autre Phyl- lopode, Bythotrephes longimanus, mais sans pouv^oir observer les changements de position du pigment dans son œil médian exposé à la lumière ou mis dans l'obscurité. Nous attribuons la mauvaise réussite de nos expériences sur cette espèce de Crustacés à l'extrême sensibilité de l'animal à l'égard de la cha- leur des rayons lumineux ; ceci est en rapport avec sa manière de vivre à vingt mètres de profondeur. ASTACUS FLUVIATILIS. l'I. XVII, ng. I et 2. Position du pigment et des cellules pigmentaires dans V obscu- rité (flg. 1). — Les cellules pigmentaires externes recouvrent la moitié distale du cône cristallin du calice ; les noyaux du rétinophore sont visibles; l'anneau pigmentaire est complet et 552 WANDA ,SZCZA\\1NSKA. n'émet pas de prolongements postérieurs. Dans les cellules postérieures ou internes qui atteignent la partie large de la membrane du calice, les noyaux sont nettement visibles, le pigment s'est complètement retiré en arrière près de la mem- brane basale, où il forme une zone noire continue ; ceci influe sur la forme des cellules mêmes ; derrière l'élargissement qui contient les noyaux, chaque cellule devient grêle, s' épaississant au contraire près de la membrane basale. Les cellules avec du pigment jaune débordent sur la raie noire postérieure. Dans le style, la moitié externe du pédicelle et la moitié interne du calice sont à nu. Position du pigment et des cellules pigmentaires à la lumière (fig. 2). — Les cellules externes s'allongent vers la partie proxi- male de l'œil, l'anneau pigmentaire n'est plus complet, il est moins riche en pigment ; de chaque cellule part, en se dirigeant en arrière, une traînée noire qui atteint la partie la plus large de la membrane du rétinophore, et dont l'extrémité proximale touche presque les têtes des cellules pigmentaires postérieures. Dans les cellules internes tout le pigment s'est placé dans les parties élargies des cellules qui contiennent les noyaux ainsi que dans celles qui recouvrent l'extrémité distale du pédicelle ; sur la partie proximale du pédicelle on peut observer les prolonge- ments amincis des cellules pigmentaires internes ; le pédicelle serait ici complètement à nu, n'étaient les cellules à pigment jaune ; ces cellules se sont raccourcies et gonflées. Mouvement du ])igment et des cellules pigmentciires. — Le pigment des yeux mis dans l'obscurité, occupant les deux ex- trémités de l'œil à la lumière, est animé d'un double mouve- ment : celui qui occupe l'extrémité antérieure de l'œil avance en arrière, l'autre, placé près de la membrane basale, va à la rencontre du pigment précédent. Ces deux mouvements ont pour résultat une répartition plus uniforme du pigment le long des éléments hyalins de l'œil. Les cellules suivent la direction du mouvement du pigment. Nous avons obtenu chez Astacus ces deux positions du pig- CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 553 ment et des cellules pigmentaires : dans l'obscurité, après six heures; à la lumière, après deux heures. Malgré l'augmenta- tion de la quantité d'heures pendant lesquelles les animaux étaient soumis à l'épreuve, nous n'avons jamais pu obtenir une position du pigment plus extrême que celle que nous venons de décrire. Donc, en envisageant les conditions dans lesquelles nous avons opéré, nous pouvons dire que les deux positions du pigment et des cellules pigmentaires, indiquées ci-dessus, sont les positions extrêmes que peuvent prendre le pigment et les cellules pigmentaires dans l'œil d'Astacus, par suite du mouvement de ces deux éléments occasionné par l'influence de la lumière et de l'obscurité. Le temps nécessaire pour obtenir ces deux positions maxima est le suivant : pour l'obscurité, il est égal à six heures, pour la lumière, à deux heures. Pour déterminer l'unité de temps nécessaire pour produire le moindre changment dans la position du pigment et des cellules pigmentaires à la lumière, partant de la position maxi- mum à l'obscurité, nous avons eu recours àia lumière électrique dont l'intensité égalait 80 becs de gaz. Nous avons observé que le temps suffisant pour que le changement dans la position du pigment puisse se produire égalait le temps nécessaire pour retirer l'animal de l'obscurité et lui enlever les yeux. Les cellules postérieures sont influencées les premières : leur pig- ment avance vers les extrémités externes des cellules, mais seulement en partie, de sorte que sur une coupe longitudinale d'un tel œil, on observe trois zones pigmentaires : une à l'extré- mité antérieure du rétinophore, la seconde autour du style, dans la zone des noyaux des cellules internes, et enfin la troi- sième près de la membrane basale. Les cellules externes ne se sont pas laissé influencer. L'intensité lumineuse a une grande influence sur la rapidité du changement de la position du pigment et des cellules pig- mentaires. Les yeux exposés à la lumière solaire depuis midi jusqu'à deux heures (donc pendant deux heures) comparés avec ceux qui étaient exposés à la lumière électrique durant le même temps (cette lumière égalait 80 becs de gaz), présentaient 554 WANDA SZCZAWINSKA. des différences dans l'éloignement du pigment de la position extrême à l'obscurité ; nous avons trouvé surtout une grande différence dans les cellules extérieures : dans le premier cas (à la lumière solaire), leurs prolongements arrivaient presque à toucher les têtes des cellules intérieures, tandis que dans le second (à la lumière électrique), ils atteignaient la moitié du trajet. Palaemon Squilla. Planche XVII, lig. 40 et H. Position du pigment et des cellules pigmentaires dans Vohscu- rité (fig. 10). — Les cellules pigmentaires externes ou, comme les appelle Patten, le collier pigmentaire, occupe la partie anté- rieure du rétinopliore ; le pigment est ramassé ici surtout dans les angles des cellules formant des bâtons noirs ; la surface du calice est faiblement pigmentée. Les prolongements antérieurs et postérieurs des cellules sont pourvus de pigment à une certaine distance en avant et en arrière du collier. Dans la rétinule, tout le pigment est accumulé dans des prolongements postérieurs des cellules tout près de la membrane basale ; en avant il arrive jusqu'au premier tiers du pédicelle; les têtes des cellules étant complètement dépourvues de pigment, on peut observer la structure du pédicelle. Position du pigment et des cellules pigmentaires à la lumière (fig. 11). — Nous devons mentionner ici un fait qui n'est pas sans importance. Les expériences ont été faites à Villefranche, où, vu l'intensité lumineuse considérable des rayons solaires, les changements de la position du pigment et des cellules pigmen- taii'es ont été beaucoup plus accusés. Les cellules qui recouvraient presque entièrement le cône cristallin du calice se sont transportées en arrière, entourant le style jusqu'à la cellule la plus longue de la rétinule, les cellules sont contractées et le pigment est fortement accumulé. Dans les cellules postérieures, le pigment n'arrive pas àia tête des cellules, mais il recouvre la partie antérieure du pédicelle ; les prolonge- ments des cellules sont gonflés dans cet endroit, tandis qu'en CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 555 arrière ils ne présentent que des filaments ténus. Ce qui permet de voir le pigment jaune à la base du pédicelle. Mouvement du pigment et des cellules pigmentaires. — Le pigment occupant dans l'obscurité les extrémités opposées du rétinophore, etfectua à la lumière des mouvements diamétrale- ment opposés dans les deux sortes de cellules pigmentaires. Le pigment placé à l'extrémité antérieure du rétinopliore se déplace avec les cellules pigmentaires, qui le contiennent, vers la partie proximale de l'œil, celui de l'extrémité postérieui'e tend vers la distale. Quant à la rapidité du changement, nous devons constater que les cellules postérieures sont influencées les premières. Galathea Squamifera. Position du pigment et des cellules pigmentaires dans V obscu- rité.— Le collier pigmentaire antérieur recouvre la partie posté- rieure du cône cristallin du calice. Les cellules qui constituent le collier se touchent dans leur partie postérieure en formant un anneau complet ; en avant ou mieux, à l'extérieur, elles s'amincissent de plus en plus et avant d'atteindre les noyaux du rétinophore elles perdent leur pigment et deviennent fila- menteuses. En arrière, les prolongements des cellules en question sont des bâtons jaunes dépourvus de pigment. La seconde zone pigmentaire est formée par le pigment des cellules postérieures, qui entourent le pédicelle. Le pigment est accu- mulé ici dans les prolongements postérieurs des cellules formant une zone noire près de la membrane basale. Position du pigment et des cellules jjigmentaires à la lumière. — Les calices sont complètement dépourvus de pigment, qui n'entoure que le style. Les prolongements antérieurs des cellules du collier ont subi un raccourcissement considérable et forment des festons spyrales autour du calice; on ne voit plus de trace de pigment dans la région du cône cristallin. Dans les cellules postérieures, le pigment se trouve dans les parties des cellules qui recouvrent l'extrémité antérieure du pédicelle. 56 556 WANDA SZCZAWINSKA. Mouvement du pigment et des cellules pigmentaires. — Sous l'influence de la lumière, le pigment effectue un mouvement de direction contraire dans les deux sortes de cellules : dans les cellules antérieures, par le déplacement des cellules mêmes, il tend vers la partie proximale de l'œil, dans les cellules posté- rieures — vers la partie distale. ARACHNIDES. Lycosa hortensis. Planche XVII, fig. 42 el 43. Position du pigment dans l'obscurité (fig. 12). Œil antérieur. — Le pigment est disposé en deux zones : distale et proximale. Immédiatement derrière l'hypoderme com- mence la zone pigmentaire distale. Elle est composée de petits cônes noirs très rapprochés les uns des autres qui vont jusqu'à se fusionner dans leur partie postérieure. Cette zone occupe la moitié de l'épaisseur de l'œil. L'autre moitié jusqu'au nerf op- tique est remplie par la zone proximale dont le pigment se dispose en petits triangles à base tournée vers le nerf optique et à sommets touchant le bord proximal de la première zone. Les triangles ne sont pas très serrés, les espaces qui les séparent sont remplis de pigment disposé en réseau délicat. Œil postérieur. — Le pigment forme ici trois zones. Derrière l'hypoderme et la zone des noyaux des rétinophores s'étend le pigment disposé en cônes réguliers très serrés de manière à former presque une couche pigmentaire continue très compacte. Cette zone est très large, elle occupe le tiers de l'épaisseur de l'œil. Puis vient une couche mince avec le pigment qui y est dispersé uniformément — c'est la seconde zone. Elle est suivie de franges pigmentaires de la zone interne ou dernière. Position du pigment à la lumière (fig. 13). Œil antérieur. — Au-dessous de l'hypoderme on voit une zone dépourvue de pigment. Elle est suivie de deux zones CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 557 pigmentaires : l'une d'elles, la zone distale se compose d'une rangée de petits triangles très noirs disposés régulièrement et séparés les uns des autres par des espaces incolores. La zone pigmentaire proximale offre une disposition de raies régulières ; elle est moins noire, mais plus large que la précédente. Du côté du nerf optique, elle se termine brusquement. Les espaces entre les raies pigmentaires sont remplis de grains pigmentaires. A l'endroit où les deux zones pigmentaires se touchent, le pigment forme une raie noire continue. Œil postérieur. — On distingue ici trois zones pigmentaires. Au-dessous de l'hypoderme s'épanouit une zone hyaline ; elle est suivie d'une rangée de baguettes noires presque quadrilaté- rales, cette zone n'est pas large. Elle est suivie d'une seconde zone encore plus mince et plus claire que la précédente, ses raies pigmentaires sont rares. La troisième est composée des fils noirs parallèles légèrement ramifiés. Mouvement du pigment Œil antérieur. — Le pigment de la zone distale s' étalant dans l'obscurité jusqu'à l'hypoderme, se retire à la lumière vers le nerf optique. En ce qui concerne la zone proximale, le pig- ment amassé dans l'obscurité dans la partie postérieure de la zone, effectue à la lumière un mouvement vers l'hypoderme pour se disposer en raies noires d'épaisseur égale. Œil postérieur. — C'est surtout le pigment de la rangée distale qui subit un mouvement : atteignant dans l'obscurité la région des noyaux des rétinophores, il se retire vers le nerf optique à la lumière. Le pigment de la seconde zone uniformé- ment réparti dans l'obscurité, se range à la lumière en bande- lettes longitudinales régulières. Epeira diadema. Planche XVI, fig. 12 et 13. Position du pigment dans V obscurité (fig. 12). Œil antérieur. — On y voit une masse compacte de pigment, dans laquelle on peut distinguer im arrangement de bâtons 558 WANDA SZCZAWINSKA. réguliers, qui ne se trouve que dans la partie antérieure de cette masse, le pigment parvenant presque jusqu'à l'hypoderme en avant et jusqu'à la moitié de l'épaisseur de l'œil en arrière. Au- dessous de cette zone il s'étale moins abondamment en eifectuant les contours de festons réguliers. Il n'y a pas de séparation nette entre la première zone et la seconde. Œil 2)ostérieiir. — Le pigment disposé en bandes noires régu- lières commence seulement à une certaine distance de l'hypo- derme, laissant entre cette dernière et le bord externe de la zone pigmentaire une raie hyaline dépourvue de pigment. Dans le second tiers de l'épaisseur de l'œil, ces bandes s'en montrent ri- chement pourvues, de sorte qu'il y forme une raie noire continue de laquelle, en avant et en arrière, partent des prolongements qui, dans le premier cas, sont courts et triangulaires, dans le second beaucoup plus longs. Position du pigment à la lumière (fig. 13). Œil antérieur. — Le pigment commence à une certaine distance de l'hypoderme, derrière celle-ci on voit une zone dépourvue de pigment. Ce pigment se divise en bandelettes noires régulières très rapprochées les unes des autres. Derrière cette zone fortement noire on trouve une seconde couche de pigment dans laquelle les grains pigmentaires sont uniformé- ment dispersés. Œil postérieur. — Le pigment disposé en bandes noires entre chacun des éléments doubles de l'œil, s'étend depuis l'hypoderme jusqu'au nerf optique. Les deux extrémités de ces bandes, sont effilées et sont séparées par des espaces dépourvus de pigment, ce qui laisse les éléments hyalins de l'œil à découvert. (]e n'est que dans la moitié postérieure de l'œil qu'elles s'épaississent et qu'en même temps elles s'étalent de manière à se toucher par leurs bords latéraux en formant une couche mince continue de pigment. Mouvement du pigment. m Œil antérieur. — Dans l'obscurité le pigment, étant placé dans la partie distale de l'œil où il forme un amas compact, se retire CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 559 à la lumière vers le nerf optique et se divise en même temps en bandes noires longitudinales et parallèles. Le pigment qui recouvre les parties postérieures des éléments hyalins de l'œil en formant des festons réguliers dans l'obscurité, se disperse uniformément à la lumière. Œil postérieur. — Le pigment formant dans l'obscurité un amas compact dans la partie distale de l'œil, retire à la lumière sa plus grande masse à l'intérieur de l'œil, mais de l'autre côté les prolongements antérieurs de la bande pigmentaire avancent sans interruption vers l'iiypoderme. Dans les yeux de la troisième espèce d'Arachnides, Linyphia triangularis sur laquelle nous avons fait les expériences et dont les coupes ont bien réussi, nous n'avons pas observé de chan- gements dans la position du pigment dans l'obscurité et à la lumière. RÉSULTATS DES EECHERCHES MORPHOLOGIQUES. L'œil de Gammarus est pourvu d'un hypoderme, constitué par une seule couche des cellules aplaties non différenciées pour chaque rétinophore. Chez Astacus, les cellules de l' hypoderme se groupent par deux, recouvrant ensemble la face externe d'un rétinophore. Le calice et le style chez Gammarus et Branchipus, le calice, le style et le pédicelle chez Astacus , forment ensemble un axe hyalin continu, qui s'étend depuis la cornée jusqu'à la membrane basale, à laquelle il s'attache au moyen de filaments hyalins et ténus, indépendants des cellules rétiniennes. Le pédicelle d' Astacus n'a pas d'homologue dans les yeux de Gammarus et Branchipus. Chez Gammarus, autour de chaque élément hyalin de l'œil, se groupent trois sortes de cellules pigmentaires, disposées en verticilles de cinq chacun ; ces cellules sont pourvues de noyaux très distincts qui sont disposés en trois rangées occupant des niveaux différents. Chez Astacus, les trois sortes d'enveloppes pigmentaires 560 WANDA SZCZAWINSKA. mentionnées par les auteurs sont formées de la manière sui- vante : la première recouvre la partie antérieure du rétinophore ; elle est constituée par quatre cellules placées sur les quatre arêtes du calice; les noyaux de ces cellules sont placés dans l'angle dièdre que forment les deux parties des cellules. Elles émettent des filaments, un en avant, l'autre en arrière, qui servent à les attacher à la cornée et à la membrane basale. La seconde enveloppe ou rétinule de Grenadier constitue un verti- cille de sept cellules munies de grands noyaux placés dans leur extrémité antérieure et élargie. Quatre de ces cellules sont plus courtes que les trois autres ; des trois dernières une domine les deux autres. Les cellules de la troisième sorte sont placées près de la membrane basale ; elles se distinguent des premières par leur contenu cristallin jaune. Elles paraissent être au nombre de sept. RÉSULTATS DES RECHERCHES PHYSIOLOGIQUES. Chez Gammarus, le pigment se dispose dans les yeux mis à l'obscurité en deux zones dont l'externe occupe la partie antérieure de l'œil, l'interne la partie postérieure; le pigment de la première est accumulé dans la partie antérieure des cellules pigmentaires externes, tandis que le pigment de la seconde s'accumule dans la partie antérieure des cellules internes et postérieure des cellules moyennes. A la lumière, ce pigment se déplace et ce déplacement a pour résultat une distribution égale du pigment dans les trois sortes de cellules. Outre le mouvement du pigment dans les yeux soumis à l'action de la lumière, on peut observer des changements dans la configuration des cellules externes : leur partie antérieure s'étale, à la lumière, dans la direction transversale. Chez Branchipus et Phronima, le pigment s'accumule dans la partie antérieure des cellules rétiniennes, lorsque les yeux ont séjourné à l'obscurité, de façon à former une zone antérieure noire : à la lumière, le pigment effectue un mouvement analogue à celui que nous avons décrit dans les cellules homotypes du Gammarus : il avance vers l'intérieui^ de l'œil. Les cellules se CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 561 conti-acteiit à la lumière chez Brancliipus, et dans leur mouve- ment elles suivent la direction du pigment. Chez Astacus, Palaemon et Gralathea, le pigment se groupe en deux zones noires qui recouvrent les deux extrémités des rétinophores. A la lumière, ce pigment subit deux mouvements dans des directions opposées. Celui de la partie antérieure de l'œil tend vers le nerf optique comme le pigment dans les yeux de Gammarus, Brancliipus et Phronima. Le pigment des cellules internes avance vers la cornée pour occuper un plus grand espace. Ce mouvement du pigment n'est propre qu'aux yeux des Crustacés supérieurs. Les cellules suivent la dii-ection du pigment : les extrémités étant placées à l'obscurité dans la partie antérieure de l'œil, poussent à la lumière des prolonge- ments en arrière ; ce déplacement s'accentuait d'autant plus que l'action de la lumière était plus prolongée ou que l'intensité lumineuse était plus considérable, de sorte qu'elles peuvent complètement changer leur position comme c'est le cas pour Palaemon et Galathea. Vers la cornée, on peut observer aussi un mouvement des cellules internes. Les résultats des expériences sur les Araignées ne sont pas aussi concluants que ceux obtenus sur les Crustacés. On peut pourtant les généraliser : des deux ou trois zones noires que forme le pigment dans les yeux antérieurs et postérieurs de Lycosa et Epeira, c'est toujours la zone distale qui subit le plus grand changement ; elle s'étale davantage dans l'obscurité qu'à la lumière; elle va même, dans le premier cas, jusqu'à atteindre l'hypoderme ; dans le second on observe, contre l'hypo- derme et cette zone pigmentaire, un espace plus ou moins grand, complètement dépourvu de pigment. CONCLUSION. En comparant les résultats de la position du pigment dans l'obscurité et à la lumière, ainsi que la direction du mouvement de celui-ci et des cellules pigmentaires, on arrive à la conclusion suivante: Dans les cellules pigmentaires qui entourent le calice 562 WANDA SZCZAWINSKA. et le style, le pigment dans l'obscurité se place dans la partie dictale de l'œil, les cellules mêmes avançant vers cette partie de l'œil ; dans les cellules qui entourent le pédicelle, le pigment est disposé dans l'extrémité proximale de l'œil, près de la membrane basale. A la lumière, le pigment des cellules qui entourent le calice et le style, subit un mouvement vers le nerf optique pour prendre une plus grande extension, les cellules mêmes effectuent im mouvement dont la direction est la même que la direction du mouvement du pigment ; le pigment des cellules, qui entourent le pédicelle, avance vers la cornée, jusqu'à atteindre la zone pigmentaire externe pour former une zone continue de pigment qui s'étend depuis l'ex- trémité distale du rétinopliore jusqu'à la membrane basale. On ne remarque chez Plironima et Branchipus qu'un seul des mouvements du pigment que nous venons de décrire; par contre, chez les Décapodes, on observe les deux à la fois, d'où découle la conclusion suivante : les cellules de la rétinule de Grenacher, chez Phronima et Branchipus, sont analogues aux cellules externes des Décapodes et pour la même raison, les cellules pigmentaires internes des derniers n'ont pas de forma- tions correspondantes dans les yeux des premiers. C'est ainsi que les recherches physiologiques concordent avec les résultats des études morphologiques, suivant lesquelles le pédicelle d'Astacus n'a pas d'homologue chez Gammarus. De ce qui précède, ainsi que du fait que le calice forme avec le style et le pédicelle un seul axe hyalin, suivant nos recherches sur Gammarus, Branchipus et Astacus et qui corroborent celles de Patten sur Penaeus, Palaeman et Galathea,il résulterait qu'il n'y a aucun motif concluant qui puisse faire considérer les yeux de ces animaux comme des yeux composés. Ce sont, au contraire, des yeux simples, dont la cornée s'est différenciée d'une manière spéciale et dont les cellules pigmentaires se sont groupées plus régulièrement que chez les vertébrés, où l'adaptation de l'organe visuel aux changements qui se produisent dans les milieux am- biants, s'effectue au moyen d'organes spéciaux qui manquent aux crustacés. CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 563 Chez les Crustacés cette adaptation s'effectue par le mouve- ment du pigment granuleux et des cellules pigmentaires. L'œil de Gammarus, à raison d'une cornée lisse et d'un hypoderme non différencié, caractères qui distinguent les yeux simples des animaux articulés, vu aussi la structure du calice et du style qui rapproche cet œil des yeux des autres crustacés inférieurs, et enfin, à cause de la présence des cellules pigmen- taires que ne possèdent pas les derniers, offre un état de passage entre les ocelles des Arachnides et les formes larvaires des Arthropodes d'un côté et les yeux dits composés des Crustacés de l'autre. Enfin nos recherches sur les changements de position du pigment dans les yeux des Crustacés, comparées avec celles de M'^e Stefanowska sur les Insectes et celles d'Engelmann sur les Vertébrés, malgré des différences de détails qui découlent de la différence de structure dans ces trois sortes d'yeux, sont par- faitement d'accord quant aux traits généraux et permettent de généraliser les résultats de la manière suivante: dans les yeux exposés dans l'obscurité, le pigment tend à occuper la plus petite surface, tandis qiCà la lumière il s'étale considérablement afin de protéger les éléments récepteurs contre l'influence de la lumière. 564 WANDA SZCZAWINSKA. EXPLICATION DES PLANCHES (^). PLANCHE XVI. Fig. 1. Schick, oc. 0. obj. 5. Grammarus Roeselii. Coupe longitudinale d'un œil qui a séjourné pendant six heures dans l'obscurité. cr. — cornée, hy. c. — hypoderme cornéenne. ce. — cône cristallin, st. — style, m. b. — membrane basale, — jyg^ — cellules pigmentaires du verticille externe, j}g-. — cellules pigmentaires du verticille moyen, pg'\ — cellules pigmen- taires du verticille interne, n^. pg. — noyaux des cellules pigmentaires du verticille moyen, n'. pg. — noyaux des cellules pigmentaires du verticille interne. Fig. 2. Schick, oc. 0. obj. 5. Gammarus Roeselii. Coupe longitudinale de l'œil qui a séjourné pendant deux heures à la lumière. Mêmes lettres que dans la figure précédente. Fig. 3. Thury, Immersion. Gammarus Roeselii. Rétinophore isolé par macération, en. p. — enveloppe externe du calice, c. — calice, st. — style, n. rph. — noyau du rétinophore, n, ex- — rameau nerveux externe. Fig. 4. Schick, oc. 0. obj. 8. Gammarus Roeselii. 3 verticilles des cellules pigmentaires isolées par macération, pg^, pg'^, pg^. — cellules pigmentaires des trois verticilles externe, moyen et interne, w*. pg, n^ pg, n' pg. — leurs noyaux. Fig. 5. Schick, oc. 2. obj. 8. Gammarus Roeselii. Coupes transversales du rétinophore et des cellules pigmentaires. n. — coupe transversale passant par le calice, b. — par le style quioffre ici la forme en croix, — c. — par le style un peu plus bas. Fig. 6. Schick, oc. 0. obj. 5. Phronima sedentaria. Coupe longitu- dinale d'un œil frontal qui a séjourné à l'obscurité. Les cônes cristallins manquent, pg. — pigment des cellules des rétinules, st. style, li. — ligament, c. g. — cellules glan- glionnaires. Fig. 7. Schick, oc. 0. obj. 5. Phronima sedentaria. Coupe longitudi- nale d'un œil frontal qui a séjourné à la lumière solaire directe. Mêmes lettres que dans la figure précédente. (') N.B. — Toutes les ligures ont été faites à la chambre claire. CONTRIB. A l'étude DES YEUX DE QUELQUES CRUSTACÉS. 565 Fig. 8. Schick, oc. 0. obj. 5. Phronima sedentaria. Coupe longitudi- nale d'un œil latéral qui a séjourné dans l'obscurité. Les cônes cristallins manquent, pg. — pigment des cellules rétiniennes, npt. — fibres du nerf optique, gr. — partie ganglionnaire de la rétine, st. — style. Fig. 9. Schick, oc. 0. obj. 5. Phronima sedentaria. Coupe longitudi- nale d'un œil latéral qui a séjourné à la lumière solaire directe. Mêmes lettres que dans la figure précédente. Fig. 10. Schick, oc. 0. obj. 5. Branchipus. Deux ommatidies d'un œil exposé à l'obscurité, cr. — cornée, c. — calice, c. c. cône cristallin, ^;r. rph. — prolongements hyalin du rétinophore, pg. — cellules pigmentaires ou rétinules, m. h. —membrane basale, n. rph. — noyau du rétinophore, opt. — fibres du nerf optique, pr. pg. — prolongement des cellules pigmentaires. Fig. 11. Schick, oc. 0. obj. 8. Branchipus. Deux ommatidies d'un œil exposé à la lumière solaire directe. Mêmes lettres que dans la figure précédente Fig. 12. Schrick. oc. 0. obj. 8. Epeira diademata. Coupe longitudi- nale de deux yeux exposés à l'obscurité. A. — œil anté- rieur, B. œil postérieur, pg. — pigment. Fig. 13. Schick, oc. 0. obj. 5. Epeira diademata. Mêmes lettres que dans la figure précédente. PLANCHE XVII. Fig. 1. Schick, oc. 0. obj. 8. Astacus fluviatilis. Deux ommatidies d'un^ œil exposé pendant six heures dans l'obscurité, cr. — cornée, liy. c. — hypoderme cornéen, n. rph. — noyau du réti- nophore, c. c. — cône cristallin, st. — style, pi. — pédicelle, m. rph. — membrane du rétinophore, pg^. — cellules pigmentaires externes, ^)r*. pg^. — pi'olongements posté- rieurs des cellules pigmentaires externes, pg^. — cellules pigmentaires du pédicelle, pg''. — pigment jaune, n* pg. — noyaux des cellules pigmentaires, pg^, n'. pg. — noyaux des cellules pigmentaires pg^ . Fig. 2. Schick, oc. 0. obj. 8. Astacus fluviatilis. Deux ommatidies d'un œil exposé pendant deux heures à la lumière solaire directe. Mêmes lettres que dans la figure précédente. pr*. pg^. — prolongements antérieurs des cellules pigmen- taires externes. 566 WANDA SZCZAWINSKA. Fig. 3. Schick, oc. 2. obj. 8. Astacns fluviatilis. Une celiale pigmen- taire interne isolée par macération. Dessin demi-schéma- tique, n'. pg. — noyau. Fig. 4. Thury. Immersion. Astacas fluviatilis. Extrémité postérieure du style avec 3 prolongements hyalins (le quatrième est supprimé dans le dessin). Fig. 5. Schick, oc. 0. obj. 8. Astacus fluviatilis. Coupe transversale des cornéules avec leur ouverture centrale. Fig. 6. Schick, oc. 0. obj. 8. Astacus fluviatilis. Coupe transversale des cellules hypodermiques avec leurs noyaux. Fig. 7. Schick, oc. 0. obj. 8. Astacus fluviatilis. Coupe transversale du calice faite au-dessous des cellules pigmentaires externes sur un œil exposé à l'obscurité, m. rph — membrane du rétinophore, c. c. — cône cristallin, c. — calice. Fig. 8. Schick, oc. 0. obj. 8. Astacus fluviatilis. Coupe transversale du calice au niveau de l'épaississement de la membrane du rétinophore. Mêmes lettres que dans la figure précé- dente. Fig. 9. Schick, oc. 0. obj. 8. Astacus fluviatilis. Coupes transversales passant par les trois régions différentes du pédicelle. pi. — pédicelle. pg'^. cellules pigmentaires postérieures 2)^'. — pigment jaune. Fig. 10. Schick, oc. 0. obj. 8. Palaemon squilla. Deux ommatidies d'un œil qui aséjourné dansl'obscurité.n.r^j/t. — noyaux du réti- nophore. c. — calice, pg^. cellules pigmentaires externes, pr^. pg*. — prolongements postérieurs des cellules pigmen- taires externes, >i*. pg. — noyaux des cellules pigmentaires postérieures, pg"^. — cellules pigmentaires postérieures. Fig. 11. Schick, oc. 0. obj. 8. Palaemon squilla. Deux ommatidies d'un œil qui séjournait à la lumière solaire directe. Mêmes lettres que dans la figure précédente. Fig. 12. Schick, oc. 0. obj. 5. Lycosa hortensis. Coupe longitudinale de deux yeux exposés à l'obscurité. A. — œil antérieur, B. — œil postérieur. Fig. 13. Schick, oc. 0. obj. 5. Lycosa hortensis. Coupe longitudinale de deux yeux exposés à la lumière solaire directe. Mêmes lettres que dans la figure précédente. Recherches sur la marche des Insectes et des Arachnides, ÉTUDE EXPÉRIMENTALE d'aNATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE COMPARÉES, PAR Jean DEMOOR Docteur en sciences naturelles. {Truruil fiiit un Laboratoire de zooloijie de L'UniversUé de Bruxelles.) [Planches XVIII à XX. HISTORIQUE. La locomotion terrestre des Arthropodes est actuellement encore peu connue. Les travaux concernant cette partie de la physiologie sont cependant assez nombreux ; mais peu, en réalité, étudient le vrai mécanisme de la marche de ces ani- maux. Borelli (^) ne donne que peu de renseignements sur la ques- tion. Son étude de la marche des Hexapodes, comme celle de la station des Hexapodes et des animaux à un plus grand nombre de pattes, outre qu'elle est très incomplète, est aussi erronée en plusieurs points. 11 indique que la condition de repos est la même pour les insectes que pour les quadrupèdes : la ligne de propension abaissée du centre de gravité perpendiculairement à l'horizon doit tomber dans l'espace formé par les pattes qui sont sur le sol. Le corps une fois soutenu et donc en repos, (') Borelli. De mota aniìualium. 568 JEAN DEMOOR. deux ou trois pattes agissent pour déterminer le pas. Les pattes postérieures doivent toujours agir en premier lieu, dit-il, pour faire progresser le centre de gravité : ".... /S'i e^iim ante- rior es pedes primo loco extender entur, retroì'sum animal f erre- tur; et ideo initium incessus a posteriorihus pedïbus fieri debet. „ Borelli ne détermine pas quelles sont les pattes agissant simultanément ; il ne nous dit pas comment se fait la marche. Il est vrai qu'il ajoute : " At commodissime fieret, si très pedes unius lateris, unus post alterum liromoveretur, dummodo initium motus fieret a posteriori, cui succederei médius, et ultimo anticus ; sic enim très pedum plantœ parallélogrammum obli- quangulum constituèrent, commodum sustentationi et incessili animalis. „ Ce mécanisme, cependant, n'est pas conforme à la réalité. Borelli semble ne pas avoir vu et ne pas avoir compris les diiférents rôles de chacun des membres, chose pourtant aisée en ce qui concerne les pattes antérieures et postérieures. Le système qu'il expose, d'ailleurs un peu vaguement, fait de la progression de l'hexapode une sorte de reptation. Borelli montre encore dans son travail que la station de l'insecte est plus fatigante que celle du quadrupède, que sa marche est plus laborieuse que celle de ce dernier. Les articles des pattes sont toujours fléchis faisant les uns avec les autres des angles aigus. Jamais le corps n'est soutenu par la rigidité des supports, la force musculaire intervient constamment pour tenir cette masse suspendue. Le fait est exact. Mais les mêmes conditions se retrouvent chez le quadrupède. " Les quatre soutiens du quadrupède sont formés d'éléments fléchis à angles les uns sur les autres. Borelli avait fait exception p)our les membres antérieurs qu'il regarde comme représentant à yeu près des colonnes osseuses.... Mais sa restriction n'est pas justifiée (^). „ Et, loin de nous rallier aux dernières considéra- tions de Borelli, nous pensons, au contaire, que la marche hexapode est d'une haute perfection physiologique. (') GlRAUD TeuLON. Principes de mécanique animnlc. RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 569 L'observation devait venir ruiner rapidement les idées de Borelli. Aussi en trouvons-nous déjà la critique dans les travaux de Weiss et de Mtiller. Weiss (^) fait remarquer, en effet, que dans la marche de l'insecte, la patte de devant et la patte de derrière d'un côté et la patte moyenne du côté opposé agissent simultanément et alternent régulièrement avec les membres du deuxième système de mouvement. Il établit aussi que la progression de l'insecte est une marche et non une reptation et distingue nettement, à cette occasion, ces deux modes de transport. Car voici ce qu'il dit : " De toutes les façons de se mouvoir des insectes,... celle de courir ou inarcher, que l'on pourrait attri- buer aux hexapodes ou, insectes à six pieds {nombre ordinaire à la plus fp-ande p)artie de ces aiiimaux) ou à tel nombre de pieds qu'on voudra, pourvu que le corps ne contribue pas immédiate- ment A LA PROGRESSION.... „ Muller (2) cite les mêmes faits et donne des conclusions analogues. Burmeister (^) expose la même mécanique. Il nous apprend en outre que la part prépondérante dans l'acte du transport appartient aux pattes extrêmes ; les moyennes ne viennent qu'assister les autres. Aux mouvements de la patte dans son ensemble correspondent des déplacements de chacun des articles : la hanche tourne autour de son axe longitudinal ; la jambe se rapproche de la cuisse par diminution de l'angle articulaire lors de la flexion ; les différents segments se mettent dans le prolongement l'un de l'autre lors de l'exteiïsion. Ces différentes données ont aussi été résumées et confirmées par Newport (*) et Kirby et Spence (^), (') E. Weiss. Mémoire sur le mouvement progressif de quelques reptiles. Aca Helvetica^ Pliy.i. med., T. III, p. 378. (-) Miller. Eléments de l'Iujaiologie. (*) Burmeister. Ilandbucli der Eiiiomologic. (*) Newport. însecta (Tlw Cydopoedia of anatomy and Pliysiolo(jy, Robert B. Todd. C*) Kirby et Spenge. An iniroductiou ta Entomology. 570 JEAN DEMOOR. Tous les observateurs sont ainsi d'accord jusqu'ici sur le moment du dépôt des pattes. Nous devons cependant en excepter De Geer (^). D'après lui, les pattes de même ordre sont pro- jetées simultanément en avant, et la locomotion de l'insecte est un véritable galop. Paul Bert (^), plus tard, analyse la marche du Carabus auratus, et arrive à des conclusions différentes de celles que nous avons citées jusqu'ici. Eeprésentant les pattes d'un côté par les chiffres 1, 2,. 3, celles du côté opposé par les chiffres primés T, 2', 3', il montre que deux pattes du même côté ni de même ordre ne se lèvent jamais ensemble. Les membres se lèvent en quatre temps qu'il indique comme suit : 3 et 2' ; 1'; 2 et 3' ; 1. Paul Bert, en se basant sur ses observations, conclut que la base d'appui, pour les insectes, est constamment un quadrilatère et que le centre de gravité reste toujours dans la base de sustentation. " La marche n'est donc ims ici, dit-il, comme dans les hifpèdes et les quadrupèdes une série de chutes arrêtées.... H y a ici simple traction et propulsion. „ D'un autre côté, il fait voir que, les articulations des insectes se mouvant d'après lui, dans le sens horizontal, le centre de gravité ne subit pas d'oscillations et sa trajectoire est sensiblement rectiligne et parallèle au sol. Il obtint des résultats un peu différents chez les agrions et chez la mouche. De ses observations sur la marche normale et sur la marche d'insectes dont il avait fait l'ablation de dilférentes pattes, il conclut : " Tirer le corps en avant, soit dans un plan vertical, soit sur un p lan horizontal, est le fait des pattes antérieures ; les médianes servent surtout à sauter, les postérieures soutiennent un peu V abdomen. „ Graber, en 1877, étudie les différents temps de la marche des insectes et décrit, d'une façon détaillée, les mouvements variés que comporte la translation (^). Nous résumons rapide- (') De Geer. Mémoii-ea. T. III. (*) Paul Bert. Sur la locomotion chez plusieurs espèces animales. {Mém. de la Soc. (kl Sciences phijs. et nal. de Dordeuttx.) T. 1\ (i<"' cahier). (') Gkabkr. Die [nseckteu. Miinchen 4877. RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 571 ment les résultats auxquels est arrivé le professeur de Czernovitz. Comme organes de support, les pattes des insectes sont par- faitement organisées. Le poids du corps, au niveau de chaque articulation, agit suivant deux composantes. L'une de celles-ci est parallèle au grand axe de l'article supérieur de cette arti- culation ; la force ainsi dirigée est donc détruite au point de vue de la pression. La seconde partie de l'énergie se transmet au segment suivant et y subit une décomposition analogue à la précédente. La pression réelle s'affaiblit ainsi à chaque arti- culation. Le tarse supporte donc une pression relativement faible et peut employer toute sa force à la progression. Dans la marche, la patte antérieure se fixe par l'extrémité du tarse et l'épine terminale de la jambe. Lors de la contraction du fléchisseur du tibia, le corps est attiré vers le point de fixation : l'angle que fait la cuisse avec la jambe diminue de valeur. La patte postérieure agit en sens opposé, elle refoule le corps en augmentant son angle genual. Mais la fixation des pattes sur le sol n'est jamais parfaite. Aussi, lors de l'action musculaire, les extrémités des pattes décrivent des courbes exprimant la résultante de la flexion de la jambe sur la cuisse et de la rotation de la hanche dans sa cavité articulaire. Ces courbes, dont la direction générale varie avec les pattes exa- minées, sont donc décrites pendant que le corps est projeté en avant, pendant que les pattes sont actives pour la progression. Elles représentent ainsi ce que l'auteur nomme 1' " Adiven BaJin „. Dès que la patte a terminé sa période de travail actif, qu'elle a parcouru, en conséquence, l'activen Bahn, il se produit un mouvement contraire devant amener le dépôt de la patte. Pendant ce deuxième mouvement, l'extrémité tarsienne décrit une courbe différente de celle tracée par le membre à l'appui. Graber, après avoir analysé les mouvements d'une patte, étudie la combinaison de ces différentes actions. Pour le dépôt des pattes, il dit : " Mann kann die Kerfe, nach der Art, ivie sie ihre Beine filr einander setzen, doppelte Dreifusse nennen. Es werden nàhmlich immer je drei Beine gleichzeitig oder dodi 37 572 JEAN DEMOOR. fast gleichzeitig in Bewegung gesetzt tvàhrend die iibrigen imwischen den Korper stutzen, worauf sie ihre Molle ver- tauscìien. „ Les trois pattes qui agissent ensemble sont l'anté- rieure et la postérieure d'un côté, la moyenne du côté opposé. Pendant la marche, le corps se penche successivement à droite et à gauche, de sorte que le chemin parcouru par un point déterminé du corps n'est pas une ligne droite. Nous ne faisons pas ici la critique du travail de Graber, cet examen étant fait dans le courant de notre étude ; mais nous devons relever, dès à présent, la première partie de ce travail. Nous ne saurions, en effet, nous rallier à la théorie de la décomposition de la force de la pesanteur au niveau des arti- culations avec transmission finale du poids du corps fortement amoindri aux derniers segments de la patte. Dahl (^) attaque aussi Graber sur ce point. Certes, il serait difficile, pour ne pas dire impossible, de donner la justification mathématique de l'une ou de l'autre théorie. Les travaux de Weber, Marey, Giraud Teulon, Carlet, ne permettent pas encore de donner la mécanique exacte des mouvements de l'homme. Pourtant l'anatomie humaine est bien connue ; les organes du mouvement : os et muscles sont d'une étude facile; les surfaces articulaires sont rigoureusement dé- terminables. Mais précisément, les surfaces articulaires n'appar- tiennent jamais à des courbures parfaitement déterminées et mathématiquemeiit calculables; elles ne sont gii' approxijmative- ment sphériques, cylindriques, hélicoïdes, etc., et il est par conséquent à peu pires impossible de les faire rentrer dans une formule générale (^). Combien sont grandes les difficultés d'une étude analogue chez l'insecte ! La petitesse des organes, prin- cipalement des surfaces articulaires, sera un obstacle constant à leur analyse complète. Dans ces conditions, que valent les raisonnements mathématiques ? Cependant, en examinant l'ar- (•j Dahl. Beilrâge ziir Kenntniss des Baues iiiid (1er Foiictionen der Inseklen- beine. (/Icc/ut'/. naiùrgesch. iiOJahrg. 1884.) (*) Beaunis. Éléments de Physiologie humaine. RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 573 ticulation la plus facile à étudier, celle du fémur avec le tibia (nous en donnons plus loin la description faite d'après Oiyctes nasicornis), on trouve qu'à l'obliquité, variable suivant la patte étudiée, des cavités articulaires de l'extrémité fémorale infé- rieure correspondent des obliquités variables de la partie ter- minale du fémur. Les normales de ces cavités articulaires sont, du moins en apparence, toujours parallèles à l'axe de la portion fémorale qui les porte. Pour le tibia, les normales des deux condyles articulaires sont parallèles à l'axe du tibia. Or cette articulation est certainement celle dans laquelle on doit obtenir, d'après la théorie de Graber, la valeur la plus grande pour la composante devenant négligeable dans le calcul du poids transmis par le corps aux extrémités des membres. Or, les conditions anatomiques que nous avons énoncées plus haut ont pour conséquence d'entraîner une décomposition des forces telle que, en dernière analyse, le poids exercé sur im point quelconque du segment supérieur est transmis intégralement au segment inférieur, et ainsi d'articulation en articulation, jusqu'au dernier article. En est-il ainsi rigoureusement chez l'insecte ? Nous ne pré- tendons nullement l'affirmer. Mais nous tenons à faire remar- quer que la démonstration toute superficielle de Graber ne justifie pas sa déduction, et que certainement, s'il y a diminu- tion du poids transmis au niveau de chaque articulation, cette réduction doit être très minime et négligeable dans notre étude. Carlet, après Graber, observe la marche des insectes et des arachnides. Il ne nous fournit d'ailleurs aucun renseignement nouveau en ce qui concerne les premiers. " La seule règle posée à ce sujet {mode de locomotion) par les auteurs est que les pattes d'une même imire ne se meuvent jamais simultanément, „ dit-il au commencement de sa première note (^). Carlet ignorait donc les travaux de Weiss, Burmeister, Graber, pour ne citer que les principaux. " Fendant que les pattes 1, 2, 3 se soulèvent (') Carlet. Sur la locomotion des insectes et des arachnides. Coiupies remliis Acad. se. de Paris, T. 89, 29 déc, p. i 124. 574 JEAN DEMOOR. presque simultanément, les pattes 4, ô, 6 restent à V appui. En d'autres termes, l'insecte se repose sur un triangle de sustenta- tion formé par les deux pattes extrêmes d'un même côté et la patte moyenne de l'autre côté, pendant qu'il porte en avant les trois autres pattes (^). „ C'est ce qu'on avait observé et décrit déjà depuis longtemps. Carlet représente l'allure de l'animal par le tableau : 1 4 6)2 3^ 6 dans lequel les nombres indiquent l'ordre de levée. Dans sa note sur l'insecte rendu tétrapode (^), il résume des observations curieuses que nous avons pu vérifier rapidement. L'insecte tétrapode marchant lentement tient toujours trois pattes sur le sol. Les quatre pattes se lèvent successivement et l'allure de l'animal peut être représentée par les quatre dia- grammes que nous empruntons au savant français, et dans lesquels les points indiquent les membres à l'appui, les signes X les membres au soutien. X . . X . . . X . . . .X L'insecte tétrapode marchant rapidement a une allure pouvant être " représentée exactemeyit par celle de deux hommes mar- chant l'un derrière Vautre d'un pas contraire „ (^). C'est une locomotion par bipèdes diagonaux, analogue à celle des reptiles et des batraciens. " Mais le corps de V insecte est rigide et ne peut s'incurver latéralement comme chez la salamandre, il n'est pas non pilus si bien soutenu que chez le crapaud car les membres postérieurs ne peuvent se replier assez en avant pour (') Carlet, l. c (-) Carlet . De la marche d'un insecte rendu tétrapode par la suppression d'une paire de pattes. Comptes rendus Acad. se. de Paris. T. 4 17, 4888, I*^'' octobre, p. 5GO-5G6. (^) Carlet. Sur la locomotion terrestre des reptiles et des batraciens. Comptes rendus Acad. se de Paris. T. 417, 1888, i<"^ octobre, p. bC2-ó64. RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 575 servir d'appui au milieu du coì'iìs. Il en résulte pour l'insecte mutilé une accentuation du mouvement de bascule qui se pro- duit à chaque pas, autour du bipède diagonal à l'appui (^). „ Carlet, en terminant, dit que les résultats sont, à peu de chose près, les mêmes si on supprime la !•■« ou la 3® paire de pattes au lieu de la 2^. Nous sommes d'un avis absolument contraire. Des expériences nombreuses nous ont montré que les chutes sont les plus fréquentes lors de l'ablation des pattes moyennes. Au point de vue de la stabilité, le résultat est sensiblement le même pour l'enlèvement de la première ou de la troisième paire de pattes. Mais pour la rapidité, il y a encore une différence : l'insecte pourvu des pattes antérieures et moyennes a une marche beaucoup plus rapide que celui qui possède encore les pattes moyennes et postérieures. L'observation nous a donné ces résultats, nous verrons que la mécanique de la marche normale permettait de les prévoir. Pour finir cet historique, nous devons citer le travail de Wilkins sur la marche proprement dite et ceux de quelques autres auteurs sur des questions se rattachant d'une façon plus ou moins directe à celle que nous allons étudier. Wilkins (^) considère la marche des insectes, des arachnides et des myriapodes comme ne différant pas essentiellement de celle des vertébrés. En tenant compte du premier anneau porteur de membres, on voit que la marche se fait comme chez le bipède: une patte alterne avec l'autre. A considérer deux segments pourvus de pattes et consécutifs, la locomotion se fait comme chez le quadrupède ne marchant pas à l'amble. Les pattes du troisième segment doivent se mouvoir avec les membres antérieurs, celles du quatrième avec les membres de la deuxième paire. L'observation de Wilkins est exacte pour ce qui concerne les insectes. Pour les arachnides et les myriapodes, nous ne pouvons pas l'admettre. Mais à la comparer aux (') Carlet. De la marche d'un insecte rendu tétrapode par la suppression d'une paire de patles. /. c. (-) Wilkins. The Beetle in Motion, Nature aitijlaise. T. XXXV, 1887, p. 414. 576 JEAN DEMOOR. observations que nous avons résumées dans cet historique, elle est, de par sa simplicité et de par ses lacunes, d'une importance nulle. Et si nous adoptons, pour les insectes, l'exposé de l'auteur anglais, nous sommes loin d'admettre que cette périodicité dans le travail des pattes puisse justifier les mots: " 1 general, I found, that the mode of projection in articulates does not differ essentially from what we see in vertebrates. „ A dire vrai, nous ne saisissons pas bien le genre d'homologie qu'il veut établir. Dans le travail déjà cité plus haut, Dahl (^) insiste sur la direction oblique des pattes. Cette disposition assure une grande stabilité. Elle est en relation, d'après lui, avec la fonction principale de l'insecte (par rapport au transport terrestre, bien entendu), l'acte de grimper. D'un autre côté, Dahl voit une relation très étroite entre la fonction de grimper, celle de courir le long de parois verticales et le nombre de trois paires de membres. Des animaux grimpeurs de ce genre ne sauraient pas avoir moins de six pattes. — Six est bien le minimum. Nous ne discutons pas ici ces conclusions. Qu'il nous soit simplement permis de dire, dès à présent et relativement à cette question, que la marche hexapode est d'une perfection très grande. Vis à vis de la marche octopode, qui est la même en définitive, elle réalise une économie considérable de travail. La question de l'adhérence des pattes aux corps sur lesquels l'animal court, a été étudiée par un grand nombre d'auteurs. La progression de certains insectes sur des parois polies verticales est surtout celle qui a été examinée. Cependant il est à constater que, malgré le grand nombre de travaux faits dans cette voie, la question est encore loin d'avoir une solution définitive. La mécanique de la locomotion est absolument délaissée dans ces recherches, et comme le sujet ne se rapporte pas directement à notre étude, nous citons, sans résumer les opinions des auteurs, les articles parus sur la question. (') Dahl, /. c. RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 577 TrUFFEN West. The foot of the Fly. Trails, of the Lin. Soc. of Lon- doii. T. XXIII, 1862. J. Blackwall. Tach relative of the movement of Insects. The journ, of the Lin. Soc.-Zoology. T. VIII, 1865. „ Ann. and mag. of. nat. Hist. T. XV, 1884. H. DewITZ. Untersuchung liber den Histologischen Bau der Haften der Theil. Sitzungsbericht d. Gesellsch. nat. Frcunde zìi Ber- lin, 1882. „ Ueber die Fortbewogung der Thiere an senkrechten glatten Flachen vermittels eines Secretes. Pfliiger's Archiv f. d.ges. Physiol. XXXIII, p. 440-480. „ Ueber die Fortbewegung der Thiere an senkrechten glatten Flachen vermittels eines Secretes. Zool. Anzeiger. VII .lahrg. nos 1< 2-173, p. 400. ,, Weitere Mittheilungen iiber das Klettern der Insekten an glatten senkrechten Flachen. Zool. Anzeiger. VIII Jahrg. no 190, p. 157-159. Dahl. Ueber den Bau und die Fonctionen des Insectenbeines. Zool. Anzeiger, VII Jnhrg. no 158, p. 38-41. „ Màme travail plus détaillé. Archiv f. Natargesch. -50 Jahrg. 2 Hft., p. 146-193. ROMBOUTS. De la faculté qu'ont les mouches de se mouvoir sur le verre et sur les autres corps polis. Arclùves dit musée Tey- ler, série II, 4© partie. 1883. „ Même travail. Nature française, 12e année, no 550. p. 34, 1883. „ Ueber die Fortbewegung der Fliegen an glatten Flachen Zool. Anzeiger. V H Jahrg., no 181, 17 nov. 1884. SiMMERMACHER. Untersuchungen ueber Haftapparate an Tarsalglie- dern von Insecten. Zeiischr. f. iviss. Zool. 40 Bd. 1884, p. 481. „ Même travail résumé. Zool. Anzeiger. VII Jahrg., no 165, p. 225-228. Emery. Fortbew^egung von Thieren an senkrechten und uberhangende glàtte Flachen. Biol. Centralbl. 1884, 4 Bd. no 14. Graber. Ueber das Mechanik des Insektenkôrpers. Biol. Centralbl. 1884, 4 Bd. no 18. Pero Paolo. Nota sui Peli ventosa de Tarsi de Colleotteri. Boll. Mus. zool. di Torino, voi. I, no 13, 1886. 578 JEAN DEMOOR. De l'exposé des idées de Weiss, Miiller, Burmeister, P. Bert, Graber et Carlet, il résulte que ces deux derniers auteurs con- iirment les observations de Weiss, Miiller et Burmeister et qu'ils contredisent en conséquence les faits avancés par P. Bert et les conclusions qui en découlent. Il semble d'ailleurs que Graber n'ait pas connu l'étude de P. Bert et qu'il n'ait pas eu connais- sance des travaux plus anciens faits sur la question; il ne cite aucun auteur et ne fait aucun exposé critique. — Mais, tandis que P, Bert était arrivé à un système mécanique expliquant la progression de l'insecte, Graber et Carlet ne sont arrivés à aucune théorie complète. On ne voit pas dans le travail si précis de Graber, par exemple, comment se fait le passage d'un pas à un autre, comment s'exécute le transport du poids du corps d'un triangle d'appui au triangle d'appui du pas suivant. Graber explique les forces intervenant dans la projection du corps en avant pendant le pas simple, il n'explique pas le passage d'un pas à un autre et la formation du double pas. Il ne nous rend pas compte de la continuité dans la marche de l'insecte. L'étude de la marche des arachnides a été totalement négli- gée. Nous ne possédons, en eflfet, que quelques observations peu certaines de Eedi (^), la remarque de Wilkins (-), dont nous avons parlé plus haut, et une courte analyse de la marche de l'Epeira diadema (^ ) faite par Carlet (^). Carlet représente l'allure de l'araignée par le tableau sui- vant : Dans lequel les pattes sont représentées par les chiifres indi- quant leur ordre de soulèvement. Les pattes 1, 2, 3, 4 se lèvent (') Redi : OpuxcuU di Sioria nnlinalc. Firenze, 1858, p. {"l'i. (*j WlI.KINS, l c. ('} Carlet. Sur la locoiiiolion des insectes et des arachnides. Compc. rend Acnd. se. de Paris. T. 89, 1879, 29 déc. p. 1124. RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 579 presque simultanément. " Le imlijgone de sustentation est formé d'un côté par les imttes de rang ixiir et de Vautre côté par les pattes de rang impair. La marche des arachnides peut être figurée par quatre bipèdes se suivant et allant, ceux de rang pair d'un même pas et ceux de rang impair dupas contraire. „ Nous examinerons cette question à la fin de notre mémoire. Structure et action de la patte antérieure {Etudiées spécialement sur Voryctes nasicornis) (^). La patte antérieure de l'insecte, quel que soit le moment choisi pour l'observer, forme par les différents articles qui la composent, une courbure à concavité interne (PL XIX, f. 1). Cette patte a pour fonction de constituer un point d'appui à l'aide des griffes ({ui terminent le tarse, point d'appui vers lequel sera attiré le corps. Cette traction du corps en avant se fait par augmentation de la courbure générale du membre en question. Pendant le soutien et la projection en avant, la patte prend sa plus grande longueur par réduction au minimum de sa courbure. La fixation de la patte étant faite, l'action des fiéchisseurs détermine la flexion des différents segments les uns sur les autres et l'augmentation de la courbure générale. Il en résulte une diminution de la longueur de la patte et une traction conséquente du corps vers le point fixe. Dans la projection de la patte en avant la courbure n'est jamais égale à 0, les (') Remarque. = Dans toute l'étude qui suit, nous n'examinons que la progres- sion de l'insecte courant sur une surface plane et horizontale. Nous avons employé quelquefois des plans inclinés ou des jiistes sinueuses pour compléter l'analyse de la fonction d'une patte, du rôle d'un segment de membre, de la valeur d'un mou- vement articulaire. Mais ces expériences ne sont jamais citées dans ce travail et les résultats qu'elles ont donnés n'entrent pour rien dans nos déductions. Il eût été dangereux d'agir autrement. L'animal courant sur une surface bosselée présente des mouvements irréguliers: La vitesse de sa marche diminue dès qu'il arrive sur un plan incliné soit ascendant, soit descendant. Arrive-t-il sur une partie horizontale, immédiatement la réiiularité réapparaît dans sa progression en môme temps que la vitesse augmente et devient normale. 580 JEAN DEMOOR. segments ne sont jamais dans le prolongement l'un de l'autre. L'observation directe montre parfaitement la chose ; l'étude des articulations et l'examen des tracés du mouvement de cette patte le prouvent également. Considérons l'oryctes nasicornis (^). La hanche de forme générale cylindrique, dilatée en son milieu et aplanie sur la face ventrale, s'articule dans une cavité du thorax directement dirigée de dedans en dehors (PI. XIX, f. 2). Ce segment ne peut exécuter que des mouvements de rotation suivant son grand axe. La cuisse et le trochanter forment avec la hanche une articulation importante. L'angle que forment ces pièces est ouvert en dehors. Le mouvement n'est possible que d'avant en arrière suivant un plan trans verse dirigé obli- quement d'avant en arrière, un peu de bas en haut. Dans le mouvement en arrière, la cuisse peut arriver jusqu'à la position perpendiculaire à l'axe ; dans le mouvement en avant, elle n'atteint jamais la position normale à la hanche. L'ouverture maximum de l'angle est d'environ 60» (PL XIX, f. 3). Dans le cas qui nous occupe, c'est le trochanter qui empêche, par son articulation avec la hanche, l'exagération du mouvement de la cuisse. L'articulation de la cuisse avec la jambe empêche égale- ment les deux segments de se mettre dans le prolongement l'un de l'autre. Un seul mouvement y est possible : la flexion. L'extrémité inférieure du fémur (PI. XIX, f. 4) a la forme d'un parallélipipède rectangle creux. Sur la face interne de la paroi inférieure et de la paroi supérieure de cette extrémité se trouve creusée, dans l'épaisseur de la couche chitineuse, une petite excavation en forme de croissant. Ces fossettes sont situées plus du côté de la flexion que du côté de l'extension. Les parois externe et interne de cette extrémité sont dirigées d'avant en arrière, de dedans en dehors, de sorte que l'axe de la partie terminale du fémur est parallèle à la normale des sur- (0 Notre but n'est pas de faire ranalomie complète de la patte. Ce travail a déjà été fait à différentes reprises. Nous ne décrivons que les organes et les articulations donila connaissance est absolument nécessaire pour la compréhension et la justi- fication de notre exposé. RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 581 faces articulaires du croissant. L'extrémité supérieure de la jambe (PL XIX, f. 5) est aplatie de dehors en dedans. Elle porte sur ses faces supérieure et inférieure un petit condyle qui s'emboîte dans les cavités articulaires signalées au fémur. La face externe présente une courbure concave dans laquelle vient s'arrêter, lors de l'extension atteignant approximativement 100", la paroi externe de la cuisse qui est infléchie en dedans. Les points d'articulations situés fortement du côté delà flexion, l'obliquité externe de la paroi interne de la cuisse, font que, lors de l'extension, le mouvement est rapidement arrêté par la rencontre de l'extrémité intra-fémorale de la jambe contre la face interne de la paroi interne de la cuisse. En résumé, le mouvement dans cette articulation est un mouvement de flexion, depuis la flexion totale jusqu'à l'extension de 100° (^). Le tarse peut se mouvoir dans tous les sens. Les mouvements se loca- lisent surtout dans les articulations des premiers articles. Les derniers segments forment un système quasi fixe et courbe. Dans les pattes moyennes et postérieures, les extrémités des tarses sont aussi souvent courbées, mais la courbure est à concavité inférieure, tandis que dans les pattes antérieures elle est à concavité interne (^). Nous n'attachons pas l'importance que Graber accorde à l'analyse de ce qu'il nomme l'Activen Balm. Graber constate que le point d'appui déterminé par les griffes ou l'appareil terminal de la patte, n'étant jamais bien fixe, il se fait un mouvement de recul dans la patte antérieure lors de la traction du corps en avant. Pendant ce mouvement du corps, il y a, d'un côté, flexion de la cuisse sur la hanche, d'un autre côté rotation de la hanche autour de son axe. Le mouvement de recul de la patte se fait suivant la résultante de cette double action muscu- (*) Nous avons montré plus haut (p. 573) quelle est l'importance de la disposition des surfaces articulaires vis-à-vis de l'axe des segments qui les portent. (') Cette différence entre les tarses persiste après la mort; les insectes nombreux, non étalés, que nous avons examinés sous ce rapport nous ont fourni presque tou- jours des courbures horizontales pour les pattes antérieures, des courbures verticales pour les deux membres postérieurs. 582 JEAN DEMOOR. laire. Graber analyse ces phénomènes très en détail. Pour nous, ce recul est absolument accessoire. Tandis qu'il se mani- feste très fort quand on fait marcher l'animal sur une surface lisse, il diminue au fur et à mesure que l'on procure un chemin plus rugueux à l'insecte. Les résultats que nous avons obtenus en faisant courir les insectes sur des plaques de verre enduites de noir de fumée, sur des feuilles de papier plus ou moins rugueux, sont démonstratifs. Et il est probable, pour ne pas dire certain, que dans la marche normale il n'y a pas de recul de l'extrémité tarsienne. Le tracé de ce recul montre pour la patte antérieure, une ligne courbe antéro-postérieure à concavité dirigée vers l'axe du corps. La courbure se manifeste dès le commencement de la trace. Celle-ci représente la direction de la résultante des énergies musculaires déterminant le mouve- ment; et elle prouve, à l'évidence, que dès le commencement de la traction, il y avait une courbure générale dans la patte considérée en longueur. La patte antérieure est donc tractive. Son jeu le prouve, sa structure le démontre. En effet, supposons que les segments puissent se placer suivant une ligne droite, du moins dans une partie de la longueur de la patte. Le muscle fléchisseur de deux segments consécutifs ainsi placés, agira parallèlement (ou à peu près) à l'axe de ces segments. S'il agit parallèlement, son effort aura pour effet d'appuyer le premier article sur le second, et ne déterminera aucun mouve- ment. Plus ce parallélisme sera complet, plus, lors de la décom- position de la force au niveau de l'articulation, la composante perdue sera énorme et la composante efficace pour la marche sera réduite. Dans la flexion et dans l'extension de la patte antérieure, les mouvements des articulations de la hanche avec la cuisse et de la cuisse avec la jambe se font d'avant en arrière, de bas en haut, et réciproquement. Les mouvements de cette patte dans le sens vertical se localisent dans les articulations de la hanche avec le corps et du tarse avec la jambe. Les déplacements dans le sens vertical sont nécessaires pour permettre la projection de la patte en avant, sans qu'elle touche le sol. Il est à remarquer RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 583 cependant que la flexion antéro-postérieure ne se faisant pas dans un plan horizontal, mais bien dans un plan oblique, les oscillations verticales nïnterviennent que très peu. Certains mouvements du corps, que nous analyserons plus loin, diminuent encore leur importance. Dans les graphiques, on obtient quelquefois (plus souvent pour les pattes moyennes et postérieures que pour les anté- rieures) le tracé du mouvement de retour de la patte. Plus le chemin est glissant, plus cette trace est nette. Nous étudierons ces graphiques du retour en même temps que l'action de la patte moyenne et celle de la patte postérieure, en même temps aussi que les mouvements variés du corps. Le stade de soutien des membres aura donc son explication détaillée plus loin. Si nous en ptirlons dès maintenant, c'est afin que les figures que nous présentons, ne paraissent pas contradictoires à nos affir- mations et opposées à nos déductions. Structure et fonctions de la patte moyenne. La patte moyenne (PI. XIX, f. 6) est une patte d'appui. Le professeur Plateau (^) a démontré que chez les insectes obligés de tirer des poids, les membres moyens interviennent peu dans la production de l'eâort. Il en est de même dans la marche normale pendant laquelle ces pattes n'agissent que très secon- dairement pour la traction et la poussée du corps. Le rôle de ces membres dans la combinaison des mouvements est, au contraire, absolument principal. Leur travail, en efîet, détermine l'affaissement latéral du corps, phénomène que nous analyserons plus loin. C'est de leur jeu aussi que dérivent, comme nous le verrons, -les variations dans la position du centre de gravité et dans l'équilibre de l'animal. L'insecte dont on ampute les pattes moyennes peut encore marcher, mais cette progression est très irrégulière : L'animal s'arrête souvent et quand il (') PLATKAii. Sur la force musculiire des insectes (Ih' noie). Bull, de l'.Acad. lioijale de Bclgi'iiie, 2^ série, t. XXII, n" 11. 584 JEAN DEMOOR. s'avance, culbute fréquemment. L'enlèvement des pattes anté- rieures et postérieures est beaucoup moins gênant ; la marche, après cette opération, devient certainement moins uniforme, mais l'équilibre persiste relativement bien. La cavité articulaire (PI. XIX, f. 7) qui reçoit la hanche est dirigée en avant, en dehors et en bas. La hanche y subit des rotations autour de son axe longitudinal. L'articulation de la cuisse avec la hanche et le trochanter (PL XIX, f. 8Aet B) se trouve près de la ligne axiale. Le mouvement ne peut s'y faire que dans un seul plan obliquement dirigé d'arrière en avant, de bas en haut. L'angle articulaire qui regarde en dehors ne peut atteindre et n'atteint pendant la locomotion que tout au plus 90° (fig. 8 A). Et comme la hanche est obliquement dirigée, for- mant un angle antérieur de 15° avec l'axe du corps, le mouve- ment de la cuisse se fait approximativement d'une égale valeur en avant et en arrière de la ligne perpendiculaire à l'axe du corps passant par l'articulation. Dans la marche, comme dans la traction, l'angle moyen formé par la deuxième patte et l'axe du corps est un angle de 90». L'articulation de la cuisse avec le tibia est semblable anatomiquement à celle décrite pour la première patte. Le seul mouvement qui y soit possible est la flexion du tibia sur le fémur, flexion se faisant précisément dans le plan du mouvement de la cuisse sur la hanche. Ce mouve- ment dépasse l'angle droit, les deux articles peuvent cependant se mettre moins dans le prolongement l'un de l'autre que les segments analogues le font dans la première patte. Ces articulations avec la direction qu'elles impriment aux mouvements sont des plus importantes. Leur examen approfondi est nécessaire ; car, à première vue, les mouvements qui s'y accomplissent et qu'on analyse sur l'insecte ramolli 'dans la chambre humide ou sur l'animal traité par la solution de potasse, sont différents de ceux qu'on constate chez les sujets vivants observés suivant les méthodes indiquées plus loin. Le mouvement de la cuisse sur la jambe se faisant, pendant le pas, d'avant en arrière, de haut en bas, semble devoir produire une élévation progressive du corps. La levée du corps, dans RECHERCHES SDR LA MARCHE DES INSECTES. 585 ces conditions, devrait atteindre sa hauteur maximum à la fin du pas. Or on constate, au contraire, en ce moment, un affaissement du corps sur la patte médiane, effet dû au mécanisme des articulations du tarse. Comment les effets de ces deux groupes d'articulations ne se détruisent-ils pas mutuellement ? L'unité de plan pour les mouvements des articulations de la hanche avec la cuisse et de la cuisse avec la jambe, plan toujours oblique d'avant en arrière, de haut en bas, fait que, au fur et à mesure que les angles de ces deux articu- lations s'ouvrent, l'inclinaison du plan de mouvement diminue ; celui-ci tend vers l'horizontalité. Au commencement du pas, la jambe, à peu près verticale, lève le corps de toute sa hauteur; à la fin du pas, la jambe, très obliquement dirigée, n'a plus qu'une hauteur de levée très minime. L'abaissement de l'extrémité supérieure de la jambe à la fin du pas est donc compensée par l'inclinaison de cet article. Les mouvements de ces articles ne déterminent donc en aucune façon les oscillations du corps, ils permettent un simple mouvement du corps d'arrière en avant dans un seul plan horizontal, l'appui de la patte sur le sol restant fixe. Le jeu des articles tarsiens donne à la patte moyenne une nouvelle fonction : la bascule du corps dans le plan transversal. Si nous examinons l'oryctes nasicornis, nous voyons que lors du dépôt de la patte à 45» en avant de la ligne normale, l'appui se fait sur les griffes terminales et les deux ou trois derniers articles. Pendant tout le temps de repos de la patte sur le sol, jusqu'au moment où la cuisse forme un angle de 45» en arrière de la normale, la patte s'affaisse pour se trouver appuyée finalement par tout le tarse et par l'épine inférieure de la jambe. A cet affaissement correspond une descente du corps; cette descente est unilatérale, car, nous devons le dire dès maintenant, les deux pattes alternent dans leurs manifestations, l'une est appuyée pendant que l'autre est soutenue. Le corps abaissé du côté gauche est relevé du côté droit et réciproque- ment. — (Les mouvements du corps sont étudiés plus loin^ nous donnons également là les méthodes employées pour les 586 JEAN DEMOOR. observer et les analyser.) Le dépôt de la patte moyenne par segments successifs s'observe très bien directement, mais il apparaît manifeste dans les tracés de la marche. Pour ce genre d'étude on a soin de faire courir l'insecte sur un chemin assez lisse, afin que les différentes traces soient plus espacées. Nous donnons (PI. XIX, f. 14) le dessin des traces fournies par le Meloe proscarabeus ; le système de mouvement de cet animal est identique à celui de l'oryctes. On voit sur ce graphique, successivement en allant d'avant en arrière, la trace double des griffes, les traces des deux premiers articles, la trace d'un troisième, puis celle d'un quatrième article, enfin la trace de la pointe de la jambe. Le mouvement de bascule du corps dans le sens transversal est dû toujours aux mouvements de la patte moyenne. Ces mou- vements sont d'ailleurs assez variés. Nous décrivons encore le fonctionnement de la deuxième patte de la Geotrupes vernalis. A ce système se ramène le travail de la patte moyenne d'un très grand nombre d'insectes. Lors du dépôt de la patte, l'appui se fait sur l'extrémité du dernier article du tarse (griffes ter- minales) et sur la pointe de l'extrémité inférieure de la jambe (PI. XIX, f. 9). Ces deux points sont situés sur une ligne oblique d'avant en arrière, de dehors en dedans. L'épine jambière est verticale, et le segment terminal du tarse très long, par adaptation, a une direction analogue. Pendant l'appui, l'article tarsien se rabat de façon à se mettre parallèlement à la surface d'appui; la jambe se meut d'arrière en avant autour de l'extré- mité de l'épine, fixée sur le sol, pour devenir ainsi à peu près parallèle au sol (PI. XIX, f. 10). Tout le tarse est finalement appuyé. Et, comme on le comprend aisément, le corps s'est affaissé du côté de la patte qui a subi ces différents dépla- cements. Structure et fonctions de la ])atte postérieure. La patte postérieure (PI. XIX, f. 11) est une patte de poussée. C'est elle aussi qui détermine le mouvement du corps dans le sens horizontal. RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 587 La cavité articulaire (PI. XIX, f. 12) que porte le corps pern- ia hanche est dirigée de dedans en dehors, d'arrière en avant. La cuisse, lors de sa flexion maximum, aura donc cette direction. L'articulation de la cuisse avec la jambe permet un mouvement relativement étendu (deux tiers de circonférence). Ce qui la caractérise, c'est qu'elle laisse les deux segments se mettre dans le prolongement l'un de l'autre. Cette extension étendue dérive de ce que, dans cette articulation, homologue de celle de la cuisse avec la jambe décrite plus haut, la hanche est échancrée en cœur (PI. XLX, f. 13) du côté de l'extension, disposition que nous ne trouvons qu'à la troisième patte. La jambe, les segments du tarse peuvent également se placer en ligne droite et il existe un temps physiologique où ils occupent cette position. Les différents articles du tarse sont peu articulés entre eux, sauf cependant le dernier qui fait avec le reste du tarse un angle ouvert en dehors et est donc dirigé de dedans en dehors, d'avant en arrière. La fonction de cette patte est de refouler le corps en avant et de déterminer la jetée du corps dans le sens horizontal du côté opposé à la patte agissante. L'angle que fait la cuisse avec la jambe n'est jamais inférieur à 90°. L'angle droit est en effet l'angle minimum pour lequel l'action ultérieure des muscles se fait, dans le sens de la poussée, sans perte de force. L'angle articulaire atteint, disons- nous, 90o. Si la hanche était perpendiculaire à l'axe du corps, l'action musculaire tendant à l'ouverture de l'angle de la cuisse avec la hanche amènerait, au premier temps, un mouvement du corps directement en avant. Au contraire, la position oblique prise par la cuisse dès le premier déploiement de force (grâce à la direction de la hanche) fait que la jambe n'est jamais parallèle à l'axe du corps et que la poussée en avant est toujours accompagnée de la foulée latérale du corps. D'un autre côté, la direction oblique en dehors et en arrière du dernier article tarsien amène une direction plus oblique de l'effort appliqué à l'extrémité de la patte et facilite encore l'oscillation horizontale. La fonction de poussée apparaît manifeste dans la structui'e 58 588 JEAN DEMOOR. générale de cette patte aux segments directement dans le prolongement les uns des autres. Celle de foulée latérale apparaît évidente quand on examine les traces que laisse ce membre sur le sol. Ces traces sont, en effet, dirigées obliquement d'avant en arrière, de dedans en dehors. Combinaison des mouvements des pattes. Dans la marche régulière, les pattes antérieure et postérieure d'un côté et la patte moyenne du côté opposé agissent ensemble. Les mouvements simultanés de ces trois pattes constituent un pas. Pendant qu'un système de trois pattes se trouve sur le sol, et que ces trois membres accomplissent respectivement les différents mouvements analysés dans les chapitres précédents, les trois autres membres, formant le deuxième système, sont au soutien et se projettent en avant. Le jeu des membres se voit très bien directement. Lors des premières observations faites sur la corrélation de ces mouve- ments nombreux, il est nécessaire de les analyser deux par deux ; d'étudier, par exemple, le mouvement de la première patte droite par rapport au déplacement des cinq autres membres, et de faire le même travail pour chacune des pattes. Avec un peu d'habitude, on saisit très rapidement les diffé- rentes manifestations et leurs combinaisons, on observe très bien des progressions relativement rapides. Et on trouve alors que quelle que soit la vitesse avec laquelle se meut Vhexapode, les mouvements restent coiistants. L'insecte ni! a qu'une forme de progression terrestre : la marche (^). Nous avons fait à ce sujet des observations nombreuses sur cicindela campestris, carabus auratus, amara ovata, harpalus griseus, oryctes nasicornis, geotrupes vernalis, ateuchus puncticollis, aphoduis (') Nous exceptons naturellement les animaux sauteurs. En n'attribuant à l'insecte qu'une forme de translation terrestre, nous ne faisons donc qu'exclure les modes de locomotion tels que le trot, la course, le galop, etc. RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 589 merdarius, meloe proscarabeus et toujours nous avons obtenu les mêmes résultats. La marche par le système que nous nommerons : double trépied, l'orientation et la constitution de chacun de ces tré- pieds, se mettent facilement en évidence par l'expérience suivante : On force l'insecte à se mouvoir dans un sens bien déterminé. Comme, très souvent, l'animal effrayé par la capture, reste longtemps immobile, et que, d'un autre côté, sa marche sur le sol se fait avec beaucoup de circonvolutions, il est nécessaire pour l'expérimentation d'user de certains artifices. Voici la description des appareils dont nous nous sommes servi. Piste à obscurité croissante, ou à obscurité décroissante. (PI. XX, fig. 1.) — Deux lames de verre sont placées verti- calement l'une à côté de l'autre. Une de ces lames est mobile sur le plancher de l'appareil ; il est aisé, ainsi, de faire varier la largeur de la piste comprise entre les deux plans verticaux. A une des extrémités du chemin, les deux lames sont libres : la piste est ouverte; à l'autre extrémité les lames viennent s'appuyer contre un fond perpendiculaire au plancher et aux lames de verre : la piste est fermée. Des cadres légers, triangu- laires, recouverts de papiers noirs, sont placés obliquement le long des lames de verre, de façon que les sommets de ces triangles soient au sommet supérieur du petit côté libre de ces lames, et que les bases correspondent à la ligne d'inter- section du fond de la piste avec le plancher de l'appareil. Entre les deux lames, et suivant leurs diagonales, est tendu un diaphragme percé de fenêtres rectangulaires ayant la largeur de la piste. Ces fenêtres, qui ont des grandeurs décroissantes, sont d'autant plus espacées l'une de l'autre qu'elles sont plus rapprochées du fond de la piste. L'appareil ainsi construit est placé le fond dirigé vers la lumière (fenêtre, lumière artificielle). H est facile de com- prendre que la lumière est distribuée en quantité décroissante depuis l'une des extrémités jusqu'à l'autre du chemin ainsi 590 JEAN DEMOOR. préparé, cela grâce aux différents cadres obscurs employés. La route formée passe insensiblement d'une clarté, variant avec la source lumineuse, à une obscurité pour ainsi dire totale. Les deux lames de verre sont montées de telle sorte qu'on peut fixer sous elles des feuilles de papier (ou graduées, ou recouvertes de noir de fumée, ou collées), des plaques de verre, etc. Le fond qui limite la piste est pourvu d'une fenêtre pouvant se fermer au moyen d'une planchette glissant dans deux coulisses. L'insecte parvenu à l'extrémité du chemin peut y être facilement capturé. De plus, cette fenêtre permet aussi de prendre l'extrémité obscure de la route comme tête de ligne. Bien des insectes fuient la lumière. Placés au commencement éclairé du chemin, ils se dirigent directement vers le fond obscur de la route. D'autres insectes recherchent la lumière, ceux-là placés à l'extrémité opposée de la piste, dans l'appareil identiquement disposé, se dirigent vers la partie éclairée et ouverte du chemin. Pour cette deuxième catégorie d'insectes, l'usage de l'appa- reil suivant est recommandable. Chambre noire à fenêtres lumineuses variables. (PI. XX, fig. 2.) — Une caisse rectangulaire mesurant 0^,50 de long, 0^,08 de haut, 0^,10 de large est pourvue d'une paroi supé- rieure glissant dans des rainures des deux faces latérales, et de parois antérieure et postérieure également mobiles par glisse- ment. La paroi postérieure est pleine, la paroi antérieure est formée par une planchette dans laquelle est pratiquée une ouverture. Suivant la planchette employée, la fenêtre est plus ou moins grande. L'intérieur de la caisse est noirci. La paroi supérieure, entièrement mobile, permet de déposer dans la chambre tel fond qu'on désire. Au moyen de deux lattes noires fixées dans une échelle de fer, on règle à l'intérieur de la chambre noire un chemin dont la largeur varie avec l'animal soumis à l'expérience. La voie préparée, on glisse la paroi supérieure, on place l'insecte à l'extrémité postérieure de la piste, on ferme le fond de la caisse. L'animal se trouve dans une obscurité complète. On ouvi^e la fenêtre antérieure, l'ani- mal se dirige rapidement vers la lumière. RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 591 Avant de nous servir des expériences faites à l'aide de ces appareils, nous avons vérifié avec soin si l'allure ne se modifie pas chez l'insecte sollicité à la marche par sa sensibilité à la lumière. Dans aucune de nos observations nous n'avons trouvé un changement quelconque dans les mouvements. Nous avons dit plus haut qu'une expérience très simple pouvait mettre en évidence le mouvement par double trépied. La voici : Quand l'animal, sollicité à la marche, se dirige régulièrement vers le but de la route, il suffit très souvent de produire une modification subite et intense dans l'éclairage du chemin pour amener un arrêt, une interruption immédiate dans la marche. Cet arrêt n'a pas la valeur d'un arrêt de repos. Avant de le prouver, disons que ces stades d'immobilité, si intéressants, s'observent aussi, de temps en temps, chez les insectes allant à l'aventure, nullement soumis à l'expérimentation. Dans le repos, le corps est affaissé sur les pattes. Les membres identiques se trouvent dans les mêmes positions. L'animal peut être schématisé comme suit: Lors de l'arrêt déterminé par l'excitation, le corps reste éloigné du sol comme dans la marche. Trois pattes : l'antérieure et la postérieure d'un côté, la moyenne du côté opposé sont sur le sol et y forment le triangle d'appui; les trois autres membres, au soutien lors de l'impression, se déposent bientôt, lentement et simultanément, et cela en conservant tous les rapports qu'ils avaient au soutien dans la progression. On constate, en effet, les pattes une fois toutes appuyées, que les positions des membres semblables ne sont pas homologues. Les positions sont celles du schéma suivant : X] a 592 JEAN DEMOOR. dans lequel le triangle 1, 2, 3 est à l'appui, le triangle A, B, C au soutien. L'insecte fournit à l'observateur, pendant la durée du dépôt des membres, la décomposition de son double pas. Pendant tout le temps de l'arrêt, il lui donne la preuve de l'alternance des triangles d'appui à bases dirigées successivement à droite et à gauche. Cette position ne persiste pas longtemps. Ou bien l'animal passe au repos en laissant aifaisser le corps et en ramenant les pattes dans des positions homologues pour les membres de même ordre ; ou bien il reprend sa marche et dans ce cas le triangle à l'appui lors de l'arrêt, est projeté le premier en avant. L'appui par trois pattes est ainsi un fait acquis. La succession des appuis se détermine facilement. On enduit les trois espèces de membres de couleurs diiférentes. Dans les tracés donnés alors par les insectes, il est facile de réunir par des lignes droites les traces des pattes déposées simultanément sur le sol. On obtient ainsi une série régulière de triangles orientés différemment d'une figure à l'autre. (PI. XYin, fig. 1 et 2.) Avant d'analyser quel est le mécanisme du changement de la base de sustentation, d'étudier en conséquence, la cause de la continuité dans le mouvement, nous devons donner quelques détails sur l'isochronisme du travail des trois éléments consti- tutifs du trépied. La patte antérieure agit par traction, la patte postérieure par poussée. Le membre moyen forme un instrument essentielle- ment d'appui. Pour que la marche en ligne droite soit possible, il faut que les quatre leviers vraiment agissants dans le travail du transport : pattes antérieures et postérieures, soient intacts. Si l'un de ces leviers n'accomplit pas sa besogne, ou ne la fait qu'avec paresse, la progression cesse d'être rectiligne. Nous avons eu l'occasion d'observer un carabus monilis, var. consitus, chez lequel la patte antérieure droite présentait une disposition anormale telle que le pouvoir tracteur de cet organe devait être réduit. D'ailleurs, l'animal ne déposait pas cette patte à chaque RECHEECHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 593 pas ; ce dépôt semblait douloureux. Les autres leviers, absolu- ment normaux, effectuaient leurs fonctions d'une façon régulière. L'action de la patte antérieure gauche l'emportait de beaucoup sur celle de l'homologue droite; il en résultait une marche suivant une courbe appartenant à une circonférence d'un rayon très petit, variant de 0»i,10 à 0»»,25. Lors du dépôt du trépied, les mouvements de chacune des pattes sont simultanés. Lors de la levée, la patte postérieure est toujours un peu en retard sur les deux autres. L'action du membre postérieur est donc plus longue que celle des deux antérieurs ; le dernier temps de sa poussée est très important. On peut dire que ce dernier effort détermine et règle, dans une grande mesure, les mouvements réactionnels du corps. Le pre- mier temps de poussée est efficace pour la progression du corps pendant le pas simple; le deuxième temps est favorable à la formation du pas double : élément fondamental de la progression continuée. La valeur de la progression dans chaque pas simple a pour mesure la longueur de projection de l'extrémité abdominale. La longueur de la jetée des pattes, la quantité dont progresse la partie antérieure du corps ne représentent pas, en effet, la valeur du pas. Les courbures des membres antérieurs rendent fautifs les résultats déduits de leurs mouvements. Les oscillations de la tête sur le corselet et du corselet sur l'abdomen rendent impossible l'estimation de la longueur du pas d'après la progression de l'extrémité antérieure de la tête. Les valeurs numériques du déplacement réel du corps n'ont qu'une importance tout accessoire pour la compréhension de la mécanique de la progression. Mouvements généraux du corps. La marche est caractérisée par la continuité dans le transport. Elle est formée de la somme des déplacements peu importants qui se font pendant les pas simples. Au premier pas succède un second, à la première projection rectiligne postéro-antérieure succède une deuxième. 594 JEAN DEMOOR. Comment se font ces transmissions? Comment le corps quitte-t-il momentanément l'instrument qu'il vient d'employer, c'est-à-dire le trépied actif, pour se servir de l'outil homologue qu'il trouve dans le trépied au soutien ? Pour le comprendre, l'étude des mouvements généraux du corps est nécessaire. Ces mouvements sont de trois catégories : 1» Mouvements dans le sens liorizonal, 2° Mouvements de balancier dans le sens vertical, 3° Mouvements de balancier dans le sens transverse. I. — Mouvement du corps dans le sens horizontal. On constate facilement que dans la marche, le corps subit des oscillations dans le sens horizontal. L'extrémité postérieure du corps est portée successivement à droite et à gauche de la ligne suivant laquelle se fait le mouvement, pendant que l'extrémité antérieure est portée à gauche et à droite. Si on fait marcher l'insecte sur un fond enduit de noir de fumée, très souvent, l'abdomen touchant le sol à certains moments de la progression fournit le tracé de ce mouvement. En fixant à l'extrémité de l'abdomen un stylet léger dirigé en bas et en arrière, on obtient des tracés parfaits de cette oscillation. Sur de tels grapliiques (l'observation directe d'indi- vidus armés ou non de stylet inscripteur suffit déjà) on constate facilement que le corps est oblique d'avant en arrière, de gauche à droite, pendant presque tout le temps d'appui du triangle à base dirigée à gauche ; que, au contraire, il est oblique de droite à gauche et d'avant en arrière pendant la plus grande durée de l'appui du triangle à base droite. Au moment du dépôt d'un triangle d'appui, l'obliquité de l'axe du corps est inverse de son obliquité au moment de la levée de la patte postérieure de ce système. A la levée de la patte postérieure, l'éloignement de l'abdomen de la ligne de direction est maximum. L'extrémité abdominale décrit, en conséquence, une serpen- tine dont les positions extrêmes en dehors de la normale correspondent aux levées des pattes postérieures. RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 595 Nous avons parlé antérieurement (p. 587) de l'action de la patte postérieure par rapport à cette oscillation horizontale du corps. II. — Mouvements du corps dans le sens vertical. Au moment où un système de trois pattes prend position sur le sol, le corps est incliné de haut en bas, d'avant en arrière. Pendant l'appui, cette inclinaison diminue petit à petit grâce: 10 à l'abaissement de la partie antérieure du corps due à l'obliquité du plan dans lequel se meut la première patte, et 2° au relèvement de la partie postérieure du corps déterminé par la foulée de la troisième patte. Quand un système de trois pattes va se lever, le corps est horizontal, quelquefois même, oblique d'arrière en avant, de haut en bas. H revient d'ailleurs rapidement à l'obliquité inverse lors du premier temps d'appui du trépied suivant. 11 est à noter que ce mouvement est un mouvement de bascule, dans lequel le corps agit " in toto „ autour d'un axe situé beaucoup plus en avant du corps qu'en arrière. Les tracés donnés par les insectes courant sur du noir de fumée présentent une alternance régulière dans l'intensité de la courbe de l'abdomen, souvent même cette courbe est régu- lièrement interrompue de place en place (pi. XVIII, fig. 2). Ces faits résultent du mouvement vertical. Il est cependant dangereux de se baser sur ces tracés pour étudier le phénomène. L'insecte en marche présente ordinairement des mouvements abdominaux nullement en rapport avec la locomotion. Ces oscillations s'inscrivent et modifient les rapports entre les tracés du mouvement vertical et ceux des pattes. Ce mouvement est directement observable et voici une bonne méthode pour l'étudier : On fait marcher l'animal dans la chambre noire décrite plus haut. En se couvrant la tête d'un voile noir analogue à celui dont se servent les photographes, l'observateur examine, par la paroi postérieure ouverte de la chambre, l'insecte sur le fond 596 JEAN DEMOOR. lumineux de la fenêtre antérieure de la caisse. La silhouette mobile de l'animai en marche est des plus intéressantes. Au point de vue du mouvement vertical surtout, elle est instructive. En tenant l'œil fixé à un niveau favorable, on voit, dès que la patte postérieure est déposée, toute la surface tergale de l'insecte. Insensiblement cette face tergale devient de moins en moins visible, le corps se rapproche de la direction horizontale ; bientôt on ne voit plus que la partie postérieure du corps, et même quelquefois, au moment du dernier temps de la foulée, on aperçoit la face sternale du corps depuis l'extrémité de l'abdo- men jusqu'au niveau de la tête. La bascule du corps apparaît ainsi dans toute son évidence. m. — Balancement du corps dans le sens transversal. Nous avons analysé ce mouvement en parlant des fonctions de la patte moyeime. Le corps s'affaisse successivement à droite et à gauche, du côté où la patte d'appui est sur le sol. Nous avons montré que cet affaissement est nul, négatif même, au moment où la patte moyenne se dépose ; qu'il se manifeste pen- dant toute la période d'appui de cette patte, qu'il est maximum approximativement au moment de la levée de cette patte. Si on considère les trois fonctions que nous venons d'étudier, au point de vue de leur continuité et de leur succession, de leurs rapports avec le mouvement des pattes, il est à noter : 1° Que les deux premiers mouvements se font autour d'un axe horizontal et d'un axe vertical situés très en avant du corps. 2" Que le troisième mouvement ne se fait pas autour de l'axe longitudinal du corps. Il en résulte que le centre de gravité de l'insecte qui, d'après les curieuses et patientes recherches de Plateau (^), se trouve dans le plan médian du corps, à la base de l'abdomen ou dans la partie postérieure du thorax, ordinairement vers le milieu de (') Plateau. Recherches expérimentales sur la position liu centre de gravitd chez les insectes. Archives des sciences delà bibliothèque universelle. Janvier 1872. RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 507 la longueur du corps, que ce centre de gravité, disons-nous, subit des déplacements provenant des trois mouvements du corps. Nous admettons parfaitement, avec le professeur Plateau, que pendant la marche les déplacements du centre de gravité autour de sa position moyenne doivent être très minimes, si on considère les oscillations de ce point dans l'organisme même, déterminées par les variations dans les divers organes. Mais si on examine la position du centre de gravité par rapport au triangle d'appui de la marche, les déplacements déterminés par les mouvements du corps, sont relativement considérables et absolument fondamentaux dans la mécanique de l'insecte. Or, les trois oscillations corporelles atteignent leur maximum au moment de la levée de la patte médiane d'appui, c'est-à-dire au moment où un pas vient d'être terminé par le trépied d'appui. Quelles sont les conséquences de chacun de ces mouvements? L'oscillation verticale porte la région abdominale en haut, donc élève le centre de gravité. Plus le centre de gravité du système général de l'insecte sera élevé, moins la stabilité sera assurée. L'oscillation horizontale portant la région abdominale et, en conséquence, le centre de gravité vers la patte médiane, sommet du triangle d'appui; le balancement transversal du corps déter- minant l'affaissement du corps vers la même patte d'appui, amènent la sortie du centre de gravité hors de la base d'appui et la chute du corps de ce côté. Le corps oscille autour de la ligne qui joint les extrémités des pattes antérieure et moyenne de son trépied d'appui (PL XVIII, fig. 1 et 2). Et si on veut y réfléchir quelque peu, tous les mouvements simples que nous avons analysés contribuent à rendre ces chutes successives faciles, et à rendre leur succession régulière. Nous reviendrons sur ce sujet dans nos conclusions générales. La marche chez les arachnides. Nos recherches sur la locomotion des octopodes ne sont pas suffisantes pour permettre l'énoncé d'une théorie générale. 598 JEAN DEMOOR. Ces observations ont porté principalement sur le Buthus australis (L.). Nos conclusions ne se rapportent donc, d'une façon formelle, qu'au sous-groupe des scorpions. Nous n'infir- mons en aucune façon l'exactitude des remarques faites par Carlet (^) à propos de l'Epeira diadema ^, et dont nous avons parlé plus haut ; mais, d'après des observations encore insuf- fisantes sur Epeira (species?) dans lesquelles nous sommes arrivés à des résultats différents, nous sommes obligés de serrer de près les remarques de l'auteur français et de poser les questions suivantes : 1» Quel était le volume de l'abdomen anormal de l'Epeira ? 2° Quelle était la nature de la piste fournie à l'animal ? 3" Quel degré de pente avait ce chemin ? Il se pourrait bien, en effet, que la locomotion observée par Carlet fût une locomotion anormale. Nous exposerons plus loin les données qui nous permettent de faire cette hypothèse. Marche du Buthus australis (L.). Si on examine les quatre pattes d'un même côté, on observe que la première et la quatrième se déposent en même temps sur le sol. La première patte, lors du dépôt, place ses articles pour ainsi dire dans le prolongement les uns des autres. Son action consécutive se fait par augmentation de la courbure générale, l'extrémité de la patte restant fixée sur le sol et le corps étant attiré vers ce point stable. La patte postérieure est plus longue que l'antérieure, la foulée qu'elle fait faire est d'une valeur de projection plus grande que la traction dont est capable le membre antérieur. Aussi voit-on que la quatrième patte reste plus longtemps fixée sur le sol que l'antérieure. Elle a une valeur agissante plus grande que cette dernière. Le mouvement des deux pattes moyennes (2^ et 3^) est alter- natif : l'une se dépose, l'autre se lève. Dans ces déplacements, il y a un temps pendant lequel les deux pattes sont appuyées (*) Carlet, /. c. RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 599 simultanément. De sorte que la succession des temps est la suivante : 1°, la 3^ se rapproche de la 2^ ; 2», les deux pattes rapprocliées restent un moment appuyées toutes les deux ; 3", la 2e patte se projette en avant; 4°, la 3^ se lève au moment où la 2e touche terre. La première et la deuxième pattes ont des mouvements régulièrement alternatifs. Au dépôt de l'une correspond la levée de l'autre. Mais point important à noter, ces deux membres sont des leviers de traction. L'extrémité de chacune de ces pattes ne dépasse jamais en arrière, le plan transversal mené par leur insertion au corps ; leurs directions sont sensiblement parallèles. Les pattes 3 et 4 alternent aussi dans leurs mouvements, un temps d'appui commun interrompant leurs oscillations. Pendant la période de double appui, les extrémités de ces deux pattes se trouvent sur une même ligne transversale, la troisième interne vis-à-vis de la quatrième. De même que les deux pattes antérieures (1^ et 2^) sont tractives, de même les pattes posté- rieures (3e et 4e) forment des instruments de pulsion, leur point de fixation se trouve toujours en arrière du plan trans- versal mené par la région du corps où s'articulent ces membres. La pe et la 3e pattes alternent régulièrement dans leurs actions, la levée de l'une et le dépôt de l'autre sont isochrones. La 2e et la 4e pattes se lèvent et se déposent simultanément. Pour les deux séries de pattes : droite et gauche, il ne suffit pas de dire que les pattes de même ordre ne se meuvent pas en même temps. Il est nécessaire d'examiner de près la corrélation des différents stades. Les 2 pattes antérieures alternent régulièrement entre elles, de même que les quatrièmes. Nous avons décrit plus haut des temps de double appui pour les pattes d'un même côté du corps. Les valeurs de ces repos communs varient avec la vitesse de progression. Il en résulte que, suivant la rapidité de la marche, les pattes de même ordre pourront se trouver, pendant un temps variable, ensemble sur le sol. Le tableau des rapports entre les mouvements des pattes moyennes (2e et 3e) droites et 600 JEAN DEMOOR. gauches dépend aussi entièrement du rapport existant entre le balancement de la patte antérieure d'un côté et le déplacement de la patte postérieure du côté opposé, la levée de l'une pouvant coïncider avec l'appui de l'autre, ou en être séparée par un temps d'appui commun. Le scorpion en marchant tient ses pinces écartées; les branches de chacune de ces pinces sont également distantes. Aucun mouvement régulier de ces organes volumineux et pesants n'est en relation avec les différents temps de la marche. Le corps, pendant la progression, est successivement déjeté à droite et à gauche. Il est fortement relevé sur les pattes, sa distance du sol est de 1/2 à 3/-1 centim. Lors de la station, le corps s'affaisse sur les membres et vient toucher terre par toute sa longueur. Les pinces antérieures se déposent sans se fermer. — Cette position est passagère. — L'animal entre au repos : Le corps se ramasse fortement dans le sens antéro-postérieur, les membres se replient; les pinces se ferment et se retirent sous le corps. Le scorpion présente comme les insectes, mais d'une façon beaucoup plus nette, certains arrêts qui sont des plus intéres- sants à étudier. Ces interruptions correspondent à une sorte d'étonnement de l'animal. Elles se produisent très souvent quand des modifications, grandes et subites, sont déterminées dans les conditions externes. La projection d'un faisceau lumineux intense sur la piste, la production d'un bruit subit, la chute d'un corps solide devant l'animal, l'insuiflation d'air chaud et humide surtout, sont des moyens pour les provoquer. L'animal arrête donc brusquement sa marche. Les membres à l'appui y persistent. Les membres au soutien s'abaissent lentement, en conservant les rapports qu'ils avaient entre eux et avec les autres membres. Or les scorpions lèvent fortement les pattes pendant la progression; si le moment de l'excitation est favorable, il est on ne peut plus aisé d'étudier le dépôt des pattes qui étaient au soutien ; leur descente dans une de nos expériences a duré approximativement trois secondes. Bientôt l'animal, ou reprend sa course ce qui est le cas RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 601 général après une excitation lumineuse ou auditive, ou prend la position de repos ce qui est habituel dans le cas de l'emploi de l'air chaud et humide. La durée de la période transitoire est assez longue; elle nous a suffi dans tous les cas pour prendre le croquis des organes de la locomotion (PI. XIX, fig. 15). En considérant les mouvements des pattes et leurs positions dans les stades de repos, nous pouvons comprendre le système mécanique en présence duquel nous nous trouvons. Pour toute l'analyse des mouvements combinés qui suit, voir la figure (PI. XIX, fig. 15) qui représente la position des pattes pendant un des arrêts observés par nous. Les quatre pattes moyennes forment sans cesse un triangle. Le sommet en est formé par les deux pattes en appui commun pendant un certain temps, les angles à la base sont constitués par les pattes moyennes du côté opposé, précisément distantes l'une de l'autre au moment où celles du côté opposé ont leurs extrémités réunies. Par le jeu des pattes de la deuxième et de la troisième paire, le triangle se déplace de façon à avoir son sommet successivement à droite et à gauche. Pendant que le triangle formé par les pattes médianes a son sommet dirigé à droite, par exemple (PI. XIX, fig. 15) les pattes antérieure et postérieure du même côté agissent, la première par traction, la seconde par pulsion. La deuxième patte droite se lève bientôt et se projette en avant. Le sommet du triangle de droite devient gauche, car la troisième patte gauche se rapproche de la se- conde d'un mouvement à peu près isochrone à celui de la deuxième patte. La première patte droite termine sa traction, la première gauche a commencé son eifort efficace pour le transport. La quatrième droite finit sa pulsion un peu après que la première patte du même côté a terminé son travail. Au moment où la quatrième droite finit la poussée, la quatrième gauche se met à l'œuvre par augmentation de l'angle genual qui mesure à ce moment 90». En somme, l'animal se sert des quatre pattes moyennes pour former la base de sustentation. La forme triangulaire de cette 602 JEAN DEMOOR. figure est analogue à la surface d'appui des insectes. Cette figure se déplace à chaque pas : la base est droite, puis gauche (PI. XVIII, fig. 3). Mais il est évident que, pendant ce change- ment, au moment par exemple où le sommet est à droite, la deuxième patte de ce côté et la troisième gauche se levant simultanément, il y a im temps durant lequel la base d'appui est exclusivement formée par la droite joignant les extrémités des pattes deuxième de gauche, troisième de droite. Le corps en équilibre instable sur cette ligne, poussé par la patte posté- rieure droite et attiré par la première patte du même côté, basculera au-dessus de cette ligne, tombera jusqu'au moment où la deuxième patte droite, s' étant de nouveau appuyée, aura fermé le triangle qui dès lors est à base droite. En ce moment le centre de gravité est de nouveau compris dans la base de sustentation. Le pas vient d'être terminé. Les pattes antérieures et postérieures sont les véritables organes actifs de la marche; les pattes moyennes sont les membres d'appui. Nous avons insisté sur le fait que la poussée de la quatrième patte est plus longue que la traction de la patte antérieure; nous avons dit aussi que la deuxième patte droite, par exemple, se lève un peu avant la troisième gauche. Nous comprenons maintenant l'importance de ces retards. Les deux efforts continués font, en effet, que le centre de gra- vité est déjà propulsé avant que le triangle d'appui ne s'ouvre. Il en résulte que la bascule du corps autour de la Ligne de support doit se faire inévitablement en avant. Il doit se faire inévitablement de par la loi de la chute des corps. L'intervention de l'action musculaire n'est pas nécessaire en ce moment pour assurer la progression. — La chute en arrière amènerait le renversement de l'animal, l'interruption de la marche ; la tombée en avant amène la formation du pas. Dans ce que nous venons de dire sur le rôle des pattes de la deuxième et de la troisième paire, nous avons été trop exclusifs. Leur rôle principal est le soutien du corps, sans doute. Mais ces membres interviennent aussi, les deuxièmes dans la traction, EECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 603 les troisièmes dans la pulsion. Leur orientation que nous avons fait connaître plus haut, leur permet d'accomplir cette fonction accessoire. La hauteur de suspension du corps, l'oscillation horizontale de celui-ci, rendent, comme on le comprend aisément, la bascule de la massepesante au-dessus de la ligne d'appui beaucoup plus commode. Il est utile de rebrousser un peu chemin et de voir ce que devient cette étude de la marche du scorpion en présence des observations de Oarlet (^) et de Wilkins (-). La locomotion de l'Epeira diadema S. est-elle donc essentiellement dilférente de celle de cet autre octopode : le Buthus australis ? En premier lieu, la petitesse relative de l'Epeira en rend l'observation beaucoup plus difficile que celle du scorpion. Chez Epeira (species ?), nous sommes parvenus à suivre le mouvement des pattes. Mais étudier les temps de double appui des différents membres était impossible. La vitesse s'opposait à cet examen. En second lieu, comme Carlet le dit lui-même, chez la femelle l'abdomen volumineux constitue un fardeau qui retarde l'allure ; et l'allure n'est-elle pas aussi changée ? Il est évident, toute la série des insectes le prouve, que l'action de la patte postérieure augmente à mesure que le poids de la portion abdominale s'accroît. Cette patte est toujours en retard sur la patte antérieurs lors de la levée, nous en avons donné la raison théorique plus haut. Plus l'abdomen est lourd, plus, on le conçoit, ce retard est grand ; à tel point même que la surcharge expérimentale de l'abdomen détruit absolument la simultanéité d'action des pattes antérieure et postérieure de l'insecte. L'araignée que nous avons observée ne nous a pas donné l'allure décrite par Carlet, elle nous a présenté le système de mouvement du scorpion. Malheureusement, comme nous le disions plus haut, la petitesse de cette espèce et sa marche assez précipitée ne Carlet, l. c. Wilkins, /. c. 39 604 JEAN DEMOOR. nous ont point permis de faire l'analyse complète de sa progres- sion. Mais en faisant marcher cette araignée sur une surface lisse et quasi verticale nous avons vusemodifier l'allure de l'ani- mal ; nous avons pu tracer alors le tableau que Carlet nous a fourni pour l'Epeira diadema. Les conclusions de Carlet sont-elles donc applicables au transport normal ? Nous en doutons ; nous nous croyons en droit de les éliminer provisoirement. Demandons de nouvelles recherches sur la marche des araignées. Nous ne doutons guère du résultat de ces études; nous osons penser, d'après des observations trop incomplètes certainement, que la marche de l'araignée présente une grande analogie avec selle du scorpion. Si nos prévisions sont vérifiées, nous pourrons généraliser nos conclusions et les étendre, à tout le groupe des octopodes. Peut-être même, un seul système mécanique régit-il les transports hexapode, octopode, décapode (*). Conclusions générales. Les hexapodes, dont on a exactement défini le système de progression par la désignation : système du double trépied, ont une base d'appui triangulaire. Le corps en équilibre sur les pattes, bascule bientôt autour de la ligne représentée par le côté antérieur de ce triangle, grâce aux mouvements combinés des trois pattes, les pattes antérieure et postérieure d'un même côté (celui de la base du triangle) agissant d'une façon réellement active pour déterminer la chute. Dans les éléments constitutifs (*) D'après des expériences personnelles faites pendant un temps malheureusement trop court sur ditterent décapodes. Depuis la présentation de ce travail, nous avons eu l'occasion d'étudier en détail un grand nombre de crustacés. Nous avons pu voir que notre hypothèse sur leur méca- nique était justifiée. Le détail de ces observations paraîtra ultérieurement. Mais nous tenons dès maintenant, à remercier publiquement Monsieur le professeur de Lacaze Duthiers qui a bien voulu nous recevoir dans ses laboratoires de Roscoff et de Eanyuls-s-m. EECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 605 du trépied d'appui sont donc compris les leviers nécessaires à la progression. Les scorpions (peut-être tous les octopodes) ont aussi une base de sustentation triangulaire. Le pas est également déterminé par la bascule du corps autour du côté antérieur du triangle. Mais chez eux, ce mouvement est obtenu par des pattes actives qui sont indépendantes du triangle soutenant le corps.-— Les mêmes eftéts sont donc obtenus, d'une façon homologue, chez les deux types. Le système du scorpion doit être nommé : système du trépied unique et variable avec organes actifs externes. Les deux mécanismes sont semblables. L'infériorité du système octopode peut être résumée dans ces mots : multi- plicité inutile d'organes. La loi qui régit les marches bipède et quadrupède est aussi celle qui domine les marches hexapode, octopode, décapode ('?). La marche est déterminée par la sortie du centre de gravité des bases de sustentation que l'organisme se procure succes- sivement. Et, à l'opposé de P. Bert, nous appliquons au transport terrestre des insectes et des scorpions, des araignées et des crustacés probablement aussi, comme à la marche de l'homme et des quadrupèdes, la définition générale : La marche EST une série de chutes SUCCESSIVEMENT ARRÊTÉES. En terminant ce travail, qu'il nous soit permis d'adresser nos plus vifs remercîments à MM. les professeurs Yseux et Plateau qui ont bien voulu nous guider de leurs conseils. 606 JEAN DEMOOa. EXPLICATION DES PLANCHES. Planche XVIII. Fig. 1. Traces laissées sur papier par Meloe proscarabeus dont les jjattes étaient enduites de couleurs. Vert : Patte antérieure ; rouge brun : Patte moyenne ; violet : Patte postérieure. Fig. 2. Traces laissées par Ateu chus puncticollis. — Mêmes couleurs. La trace noire sinueuse et médiane est celle de l'abdomen qui était armé d'un stylet inscripteur. Dans les fig. 1 et 2, les trépieds d'appui sont représentés par les triangles pointillés. Les triangles à base droite sont dessinés à l'encre verte, ceux à base gauche à l'encre rouge. Fig. 3. Traces de la marche du BUTHUS AUSTRALIS. Vert : Traces des deux premières pattes. Violet : Id. dernières pattes. Les trépieds d'appui sont représentés par les triangles poin- tillés. Les triangles à base droite sont dessinés à l'encre rouge; ceux à base gauche à l'encre verte. Planche XIX. Fig. 1. Patte antérieure droite, vue par la face sternale. — (Stade moyen de traction.) Fig. 2. Patte antérieure droite. — Cavité articulaire pour la hanche; (ax) axe du corps. Fig. 3. Patte antérieure droite. — Hanche (h); trochanter (tr.); fémur (/■) ; vus par la face sternale ; (ax) axe du corps. Fig. 4. Patte antérieure droite. Extrémité inférieure du fémur. — (Cavité articulaire de sa paroi inférieure, (c) ; cavité articu- laire de sa paroi supérieure, (c'); paroi externe, (pe); paroi interne, (pi)-) RECHERCHES SUR LA MARCHE DES INSECTES. 607 Fig. 5. Patte antérieure droite. Extrémité supérieure de la jambe. — Condyle de la face inférieure, (a). Fig. 6. Patte moyenne droite, vue par la face sternale. Fig. 7. Patte moyenne droite. Cavité articulaire pour la hanche ; (rtx) axe du corps. Fig. 8. Patte moyenne droite. Hanche, (h) ; trochanter, (f,r) ; fémur, (/") ; vus par la face ventrale. A. Les segments sont représentés sur un seul plan. L'exten- sion est totale. B. Les segments sont dessinés en perspective. Demi-extension; (ax) axe du corps. Fig. 9. Patte moj'enne gauche. Extrémité de la jambe et tarse au moment du dépôt du membre. Fig. 10. Patte moyenne gauche. Extrémité de la jambe et tarse à la fin du stade d'appui. Fig. 11. Patte postérieure droite, vue jîar sa face ventrale. Fig. 12. Patte postérieui-e droite. Cavité articulaire pour la hanche. {ax) axe du corps. Fig. IB. Patte postérieure droite. Extrémité inférieure du fémur. Cavité articulaire de la paroi inférieure, (c) ; cavité articu- laii-e de la paroi supérieure, (c') ; échancrure de la paroi externe, (e). N. B. — Les figures 1-8 et 11-13 sont faites (Vaprès Oryctes NASICORNIS. Les figures 9 et 10 d'apr<'s GeotruPES VERNALIS. Fig. 14. Traces laissées par Melœ PROSOARABEUS marchant sur une lame de verre enduite de noir de fumée. \ x) Traces des griffes terminales du tarse. Patte antérieure', ,_ -, . n -p.- -, • ^ 1 ,3) Traces de la race mierieure des articles. ' c) Traces des griffes terminales du tarse. Patte moyenne -> d) là. successives des différents articles tarsiens. ' e) Trace de l'épine de l'extrémité supérieure du tarse. Patte postérieure (/") Traces. Fig. 15. Croquis des organes de la locomotion du BUTHUS AUSTRALIS, pris pendant un stade d'arrêt. 1, 2, 3, 4 : Pattes droites. a, b,c, d : Id. gauches. b, c, 2, 3 : 4 pattes moyennes formant le triangle d'appui. 608 JEAN DEMOOR. 1, 4. Première et quatrième pattes droites, en appui et agis- santes au moment de l'obsei-vation. a, cl. Première et quatrième pattes gauches; au soutien lors de l'observation, mais s'étant déposées pendant la durée de l'arrêt. Planche XX. Fig. 1. Piste à obscurité croissante. P : plancher, L : lame fixe, L' : lame mobile, 0 : Extrémité ouverte de la piste, F : fond, ce' : cadres triangulaires, D : diaphragme, Fe : fenêtre mobile. Fig. 2. Chambre noire. Pp : paroi postéiùeure, Ps : paroi supérieure mobile, Pa : pai'oi antérieure pourvue d'une fenêtre, LL' : lattes internes, EE : échelle. Laljoratoire de Patliologie piiérale de Bolope. Sur la kératinisation du poil et les altérations des follicules causées par l'épilation (i), LE Dr Sébastien GIOVANNINI, Professeur de Dermatologie el de Syiiliilngra|)liic à rUniversilé de Turin. (Planches XXI k XXIV Dans la présente publication , je me propose de faire connaître les résultats d'une série de recherches microscopiques, faites directement sur le cuir chevelu, enlevé sur des vivants, pour déterminer : 1» les altérations qui se produisent dans les follicules au moment de l'arrachement du poil ; 2" les modifications régressives qui ont lieu dans le follicule après l'arrachement du poil. Ce qui m'a déterminé à entreprendre cette étude d'alopécie produite artificiellement sur l'homme, a été, non seulement la considération qu'elle pourrait contribuer à accroître nos connaissances sur la physiologie et sur la pathologie du poil, mais aussi l'espoir que les faits établis dans ces recherches pourraient rendre plus facile et moins incertaine, que par le passé, l'interprétation de ce que l'on peut observer dans les follicules de l'homme à l'occasion de la perte des poils, dans des conditions soit normales, soit pathologiques. (') Dans le travail intitulé Un la réiji'néraïkm des poils après l'épilation et publié dans les « Archiv fur inikroskop. Anatomie (Bd. XXXVI, S. 528) » on a renvoyé le lecteur à la planche III, (ig. 17, 13, 12, lo du travail que nous publions dans ces Archives. Nous devons prévenir que, par suite de modifications apportées dans la numération des planches et des figures annexées au présent mémoire, la pi. III sus- indiquée est devenue la pi. XXIV et les fig. 17, 13, 12, 15 les fig. 12, 8, 7, 10. 610 SÉBASTIEN GIOVANNINI. Quelques-uns des résultats de mes recherches ont déjà été publiés, partie dans une note préliminaire (^), partie dans une publication particulière de circonstance, dont il a été tiré cinq exemplaires seulement {^), et partie dans une communication faite à l'Académie royale des sciences de Turin, dans la séance du 18 avril 1890 (^). Mais ce n'est qu'aujourd'hui que ce travail paraît avec le caractère d'une publication définitive. Pour les observations qui forment le sujet du présent mé- moire, la peau fut fournie volontairement par des personnes jeunes , saines et pourvues d'une riche chevelure. Le plus souvent cette peau fut prise dans la région occipitale, dont une partie avait été très soigneusement épilée auparavant. On l'exportait dans toute son épaisseur, par portions longues d'un centimètre et larges de cinq millimètres environ. Le plus sou- vent, chacun de ces lambeaux de cuir chevelu fut fourni par des sujets différents ; mais quelquefois le même sujet fournit deux ou même trois de ces lambeaux. Immédiatement après l'excision, la peau fut fixée, selon les indications de Flemming, dans une solution composée des acides osmique, chromique et acétique, et, après une préparation oppor- tune, elle fut convenablement sectionnée avec le microtome. Je pratiquai toujours les coupes de manière que les follicules fussent sectionnés transversalement ; quelques rares fois aussi, dans des fragments de la peau excisée, je les pratiquai dans la direction de l'axe du folHcule. Les coupes, disposées en séries sur le porte-objets, de la manière déjà décrite dans un autre travail (*), furent colorées exclusivement avec le violet de mé- (') GiovANNiNl. — liilonio aile uUcru-Jnni dei follicoli lìdia dcpiluziouc ed al inailo di generarsi dei peli nuovi. Bologna, -1888. Hugia tip. (^) Idem. — Tavole i.stolor/iche rappresentanti le alterazioni dei follicoli nella depi- lazione ed il modo di i;eneraisi dei peli nuovi. Bologna, 1881). lîegia lip. (') Idem. — Delle alteraz.oni dei follicoli nella depilazione e del modo di (jcne arsi deipeli nuovi. [Giornale della R". Accademia di Medecina di Torino, I89i, page 338.) (*j GlOVANNiNl. — Sullo sviluppo normale e sopra alcune alterazioni dei peli umani {Atti della R. Accademia medica di Roma. Anno XIII, 1886-87, serie II, voi. III. Vierteljahressclirift f. Dermatologie u.Sìjphilis, 1887, p. 1049). SUR LA KÉRATINISATION DU POIL. 611 thyle ; ensuite, avant de procéder à leur décoloration, au moj^en de l'alcool absolu et de l'essence de girofle, elles furent mises en contact avec une solution composée, suivant les indi- cations de Bizzozero (^), d'une partie d'acide cliromique sur mille parties d'eau. Je préférai sectionner les follicules en sens transversal, parce que, leur direction, dans le cuir, étant variée, les coupes longitudinales qu'on essaye de pratiquer deviennent presque toujours obliques, et parce que, avec les coupes transversales disposées en séries, on arrive toujours à composer graphique- ment les coupes longitudinales des follicules. La méthode que j'ai toujours suivie dans la composition de ces coupes longitudinales, est la suivante : Au moyen de la chambre claire, au grossissement constant de 200 diamètres, avec lequel ont été faits tous les dessins des planches jointes au présent travail, j'obtenais d'abord les contours des diverses parties contenues dans chaque coupe transvei^sale du follicule que je voulais représenter graphique- ment en coupe longitudinale; ensuite, d'après ces dessins, je reportais les diamètres de ces diverses parties sur des lignes parallèles distantes de deux millimètres l'une de l'autre, dis- tance qui représentait conventionnel! ement l'épaisseur de chaque coupe transversale. Les règles que j'ai observées dans cette représentation graphique, sont les suivantes : Pour la partie de la racine du poil qui s'étend depuis la matrice jusqu'à l'extrémité du collet, je reportai, tel quel, le diamètre de chaque coupe transversale, quand celle-ci se présentait de forme ronde, et le diamètre moyen, quand la coupe présentait une forme plus ou moins ovale. Des coupes transversales de la partie radi- culaire de la tige du poil, je reportai le diamètre le plus court. Des diverses couches de la gaine radiculaire interne, je re- portai leur épaisseur normale . De la papille, je reportai le diamètre moyen de la coupe transversale. (') Bizzozero. — Sullu pioduzinne c sulla rigeneiazione fisiologica degli elementi glandìdari. [Archivio per le scienze mediche^ voi. XI, 1887, p. 200.) 612 SÉBASTIEN GIO VANNINI. Quant à la cavité du follicule, je reportai le diamètre le plus grand de la portion que j 'indiquerai plus loin comme étant la plus lente à s'atrophier, et le diamètre moyen du reste du follicule. Les diverses zones de kératinisation des poils et de la gaine interne de la racine, le pigment, les fragments de la substance kératinisée, la kératoliyaline, etc., furent aussi marqués dans les dessins longitudinaux, conformément à la position de ces parties, dans les coupes transversales correspondantes. Quant aux cellules en karyokinèse, tant de la matrice des poils et de celle de la gaine interne de la racine que de la papille et des parois folliculaires, je ne représentai pas seulement celles qu'on rencontrait sur le diamètre de section transversale, mais toutes celles qu'on observait dans ces parties, dans les diffé- rentes coupes transversales d'un même follicule, et je les projetai à la place voulue dans la coupe longitudinale correspondante. Pour donner une empreinte plus grande de vérité aux dessins des coupes longitudinales des follicules obtenus de la manière décrite ci-dessus, j'ai reproduit divers détails des meilleures coupes longitudinales réelles que j'avais à ma disposition. Quant à la littérature relative aux altérations des follicules dans l'épilation, elle est encore très pauvre. Les connaissances que nous avons sur ce sujet, relativement aux animaux, nous ont été procurées indirectement par des auteurs qui se pro- posaient d'étudier la régénération du poil. Parmi eux il faut mentionner, tout d'abord, Heusinger (i) qui, à l'examen des follicules des poils de la moustache d'un chien, après l'arrachement , découvrit les particularités suivantes : " Aussitôt après l'arrachement du poil, une goutte de sang " paraît à l'orifice supérieur de la bourse. Si on ouvre celle-ci, " de deux à vingt heures après l'avulsion, on trouve la substance " charnue gonflée et remplie de vaisseaux. " Trois jours après l'arrachement, j'ai retrouvé cette sub- (') Heusinger. — Sur la régénération dea poilu [Journal complémentaire du Diction- naire des Sciences médicales^ t. XIV, 1822, p. 339). SUR LA KÉRATINISATION DU POIL. 613 " stance, à peu de chose près, dans son état ordinaire. On " aperçoit, dans son milieu, une masse noirâtre et friable qui " s'étend depuis le fond de la bourse jusqu'au milieu de la " hauteur de la substance charnue. „ De longues années après, Vaillant, faisant des expériences sur le cochon d'Inde, nous fit aussi connaître quelques parti- cularités sur les parties qui suivent le poil et sur l'état du folli- cule dans r epilation. Quant au premier de ces points, il dis- tingue plusieurs cas: Lorsque le poil est encore très jeune, " il ne paraît alors, " écrit Vaillant (^), avoir contracté que de faibles adhérences " avec la tunique vaginale interne, car, arraché, il n'en entraîne " aucune portion. Quant à la papille, tantôt elle suit en partie " le bouton, tantôt, et c'est le cas le plus ordinaire, elle reste " adhérente au fond du follicule. " Un peu plus tard, la forme restant la même, une adhérence " intime s'établit entre le poil, la tunique vaginale interne et " la papille, si bien que les trois parties sont arrachées en " même temps. " Enfin, lorsque le poil atteint les dernières limites de son " existence, le bouton disparaît, la papille se flétrit, et la tige " descend, en restant cylindrique, jusqu'au fond du follicule, " auquel il adhère si fortement, que, en l'arrachant, on enlève, " outre la gaine vaginale interne, une portion de la membrane " propre qui coiife comme d'un capuchon l'extrémité de la " racine. ,, Touchant l'état du follicule après l'épilation. Vaillant (^), faisant des expériences sur le cochon d'Inde, ne vit point apparaître une goutte de sang à l'orifice du follicule aussitôt après l'arrachement du poil, comme l'avait observé Heusinger sur le chien. Toutefois " pendant les premières vingt-quatre " heures, ajoute-t-il, le follicule nous a paru rempli de sang, mais (*) Vaillant. — Essai sur le système pileux dans l'espèce humaine. {Thèse du doctoral, Paris, 1861, p. T 4.) (-) Vaillant. — Loc. cit., p. 7!2 et 7;i. 614 SÉBASTIEN GIOVANNINI. " par repletion du sinus de la membrane propre, sans que ce " fluide nous ait jamais paru pénétrer au lieu et place du poil. " Dès le second jour, l'épancliement sanguin diminue; la " gaine externe de la racine, qui ne suit pas le poil arraché, " forme alors une espèce de cylindre renfermé au centre du " follicule, terminé en cul-de-sac inférieurement, plein et " continu à l'épiderme supérieurement. On n'y distingue rien •' qui paraisse représenter la tunique vaginale interne. Les " glandes sébacées restent d'ordinaire en place. En écrasant le " follicule, il est facile d'extraire tout, ou portion, du cylindre " intérieur; on voit qu'il est composé d'éléments nucléaires " granuleux de O^m^oos à O^ni^oiO avec des nucléoles brillants. " C'est bien là l'aspect des cellules de la gaine externe de la " racine chez le cochon d'Inde. „ Enfin, Stroganow (^), ayant examiné la peau du dos sur le chien, quelque temps après l'épilation, s'exprime de la manière suivante sur le détachement du poil et sur l'état des follicules : " Bei der untersuchung habe ich gefunden, dass kiinstlich " nicht aile Haare vollkommen herausgezogen werden, sondern " die meisten brechen im obersten Theile des Haarsackes ab, " seltner am Haarbulbus und noch seltener unterhalb desselben, " so dass das Haar von der papille vollkommen getrennt wird. " Wenn der Bulbus herausgezogen wird, so bilden sich gewohn- " lich amm 3 bis 5 Tage nach der Operation an der Oberflàche " der papille junge pigmentirte zellen, welche lângst des " Haarsackes allmâhlich fortkriechen und endlich den ganzen " Sack erfiillen, was man nach Verlaufe von 3-5 Wochen " deutlich sehen kann. Die Lage dieser zellen bleibt sehr " lange Zeit unregelmâssig. „ Évidemment, ces recherches, faites dans un temps où la science avait à sa disposition des moyens beaucoup moins parfaits qu'aujourd'hui, nous disent bien peu de chose sur les altérations immédiates et successives que l'on rencontre dans (') Stroganow. — Ueher die Regeneration der Haare [Cenlralblali fur die medici- nischen Wissenschafien, 18ti9, p. 315). SUE, LA KÉRATINISATION DU POIL. 615 les follicules après 1' epilation. On peut même dire que ces questions, que je me suis proposé de résoudre en vue de l'homme, dans le présent travail, n'avaient pas encore trouvé une solution exacte dans les recherches faites sur les animaux. Du reste, personne, que je sache, n'avait encore excisé, sur l'homme vivant, la peau du cuir chevelu, dans l'intention d'y observer les modifications des follicules, après 1' epilation. L'examen du poil arraché a été, jusqu'à présent, l'unique crité- rium qui pouvait servir, en quelque manière, à faire connaître indirectement les altérations produites dans les follicules de l'homme, à la suite de l'épilation. Quant aux résultats de cet examen, il en est fait mention dans divers auteurs : Par exemple, Kôlliker (^) écrit, sur cette question : " En arrachant " un poil, souvent on enlève en même temps la partie supérieure " de la gaine externe de la racine, quelquefois cette gaine tout " entière La gaine interne existe quelquefois tout entière " sur des poils qu'on vient d'arracher. „ Wertheim (^), en par- lant de la structure des poils, touche aussi, en passant, la ques- tion de l'épilation : " Ein friche ausgerissenenes Haar, dit-il, " besitzt jederzeit ein en vom pigment entblossten und papil- " lenlosen kolben. Augenscheinlich wird ersteres auf dem " Wege an den Wànden des Balges abgestreift, und letztere " bleibt bekanntlich jedesmal im Balge zuriick. „ Enfin Wal- deyer (^) s'exprime ainsi, relativement aux parties qui suivent le poil arraché : " Wird ein noch vollstàndig lebensfrisches " Haar ausgerissen so folgen gewôhnlich beide Wurzels " scheiden dem Zuge ; die Glashaut und die papille bleiben " aber am Haarbalge zuriick, ebenso immer einzelne Eeste der " àusseren Wurzelscheide, „ (') KoLUKKR — Eléments d'lnx(olo(jie humaine. Traduction de MM. Ddclard et Sée. Paris 1851!, p. 170. (-) G. Wf.rthf.im. — Ueber dcn Bau dea IlimrbuUjex behn Menxchcn ; ferner iiber einiye den Haarnachwiichs betrejjende punkle. {Sitzitngsberichie der Sialhematisch- Naturwixsenschaftlichen. Classe der kaiserlichen Akademie der Winsenscbaften. L. Bd. Abl. -1804, p. 302.) (5) Waldeter !(. Grimm. — Allas der menscidichen und thierischen Haare. Lahr, 1884, p. 29. 616 SÉBASTIEN GIOVANNINI. Comme on peut voir, les opinions du premier et du dernier de ces auteurs ne sont pas tout à fait d'accord surla portion de la gaine externe de la racine qui suivrait', le plus souvent, le le poil arraché, et sur la fréquence avec laquelle la gaine interne de la racine suivrait le poil. En outre, il est presque superflu d'ajouter que ce que l'on sait sur le poil arraclié est bien loin de donner un critérium suffisant pour en déduire le véritable état du follicule après 1' epilation. Mais si, jusqu'à présent, on savait peu de chose relativement aux altérations des follicules, chez l'homme, au moment de r epilation, on n'avait absolument aucune connaissance positive sur les modifications successives auxquelles les follicules sont sujets. Avant de parler des altérations des follicules produites par l'épilation, je crois utile de faire connaître quelques observa- tions SUR LA KÉRATINISATION DU POIL ET DE LA GAINE INTERNE DE LA RACINE, observations que j'ai eu l'occasion de faire pendant que je me livrais à l'étiide des altérations susdites (^). Les faits que je vais exposer à ce sujet, n'ont pas seulement une importance en eux-mêmes, mais ils sont, en grande partie, indispensables pour comprendre ce que je dirai plus loin. Il faut d'abord remarquer que, avec la méthode de fixation et de coloration employée dans ces recherches, la kératohyaline ne prend une coloration très noire qu'à la périphérie des lambeaux de peau qui sont soumis à l'examen, c'est-à-dire, seulement là où le mélange chromo-osmio-acétique de Flemming a agi avec plus d'intensité. La kératohyaline se présente alors sous l'aspect de granulations qui sont très variables en grandeur et qui ont leur siège dans le protoplasma cellulaire. Dans la gaine radi- culaire interne, ces granulations ont une forme irrégulière ; dans la moelle du poil, au contraire, elles ont, pour la plupart, (') On trouvera une démonstration à l'appui dans les planches jointes au présent travail, et, mieux encore, dans celles d'un autre de mes travaux, qui peut être consi- déré comme la continuation de cette élude et qui a pour litre : De la régénération des poils [Archiv Jur mikroskopische Anatomie Bd. LXXXVI). SUR LA KÉRATINISATION DU POIL. 617 une forme ronde ou ovale, La propriété qu'a la kératoliy aline, de se colorer dans la zone la plus externe des lambeaux de peau fixés de la manière indiquée plus haut, n'a encore été con- statée, que je sache, par aucun auteur ; c'est pourquoi il m'a semblé utile de la signaler ici. En ce qui regarde les présentes recherches, cette circonstance a été particulièrement avanta- geuse. D'abord, elle a permis de déterminer exactement, à la périphérie des lambeaux de cuir, là où la kératohyaline se colore, l'extension de celle-ci dans les diverses couches de la gaine interne de la racine et dans la moelle des poils. Ensuite, elle a permis d'observer d'une manière parfaite, dans la partie interne de la peau, où la kératohyaline ne se colore pas, la structure des cellules occupées par elle ; ce qui naturellement n'est pas possible, lorsque cette substance masque en grande partie les cellules par sa coloration. J'ai profité de cette circonstance pour reproduire, dans les planches jointes au présent travail, des coupes transversales de poils, où la kératohyaline n'apparaît pas. M'appuyant sur l'observation des parties qui la montraient distinctement, j'en ai indiqué le siège, de la manière la plus exacte possible, dans les seules coupes schématiques longitudinales. Dans ces dernières coupes représentant des poils déjà suffisam- ment développés, on peut observer que la kératohyaline se trouve dans chacune des trois couches de la gaine interne de la racine, où elle occupe constamment des parties déterminées. Dans les cellules des couches de la gaine interne de la racine, dans lesquelles la kératohyaline n'apparaît pas, et qui correspondent à ces parties, on observe constamment des modifications particu- lières qui leur donnent un aspect caractéristique, et qui peuvent être considérées comme appartenant exclusivement aux cellules qui commencent à se kératiniser. Ces modifications consistent essentiellement en ce que les noyaux des cellules se ratatinent de plus en plus à mesure qu'on procède du bas vers le haut, tandis qu'ils prennent, en général, avec le progrès de cette altération, une couleur un peu obscure et qu'ils s'entourent d'un halo clair qui devient graduellement plus distinct. La partie des différentes 618 SÉBASTIEN GIO VANNINI. couches de la gaine radiculaire interne, occupée par la kéra- tohyaline, et sur l'extension de laquelle ont lieu les modifications cellulaires mentionnées plus haut, je la nomme zona granulosa. Immédiatement au-dessus de la zona granulosa de chacune des couches de la gaine radiculaire interne, les cellules, tout en montrant assez distinctement leurs noyaux déjà notablement atrophiés et d'une couleur obscure, se présentent avec un contour bien marqué et avec le protoplasma d'une clarté uniforme et toute particulière. Cet aspect des cellules, qui indique évidem- ment un degré de kératinisation plus avancé que celui qu'on observe dans la zona granulosa, se maintient, dans les couches sus-mentionnées, sur une extension déterminée, presque toujours égale dans les poils déjà développés. Quant à la signification de cette partie que l'on observe constamment dans les diverses couches de la gaine radiculaire interne, il me semble qu'elle doit être considérée comme correspondant entièrement au stratum lucidum de l'épiderme. J'ai été amené à cette conclu- sion, d'abord, parce que, au commencement de cette partie, aussi bien qu'au commencement du stratum lucidum, la kéra- tohyaline cesse tout à coup d'être évidente, et, ensuite, parce que l'aspect des cellules est très ressemblant dans les deux cas. Pour ce motif, la partie en question est désignée, dans le présent travail, sous la dénomination de zona lucida des diverses COUCHES de la gaine RADICULAIRE INTERNE. Dans chacune des couches de la gaine radiculaire interne, les cellules qui se trouvent immédiatement au-dessus de celles de la zona lucida, sont constamment sujettes à des modifications spéciales de coloration. D'abord le protoplasma cellulaire prend, de dehors en dedans, une couleur vert clair, presque toujours égale dans tous les cas, tandis que le noyau, obscur au commen- cement, devient clair, de manière à rappeler l'aspect du proto- plasma des cellules de la zona lucida. A cette couleur verte des cellules, laquelle se maintient ordinairement sur une étendue beaucoup plus courte que celle qui est occupée par la zona lucida, succède, en général, assez vite, une coloration très noire qui, procédant, elle aussi, peu à peu de dehors en dedans, SUR LA KÉRATINISATION DU POIL. 619 finit par envahir les cellules dans leur totalité. Cette coloration noire, qui est identique dans les cellules de la couche cornée de l'épiderme, lorsque celui-ci est traité de la manière décrite dans ce travail, indique, selon toute probabilité, la kératinisation complète, tandis que la coloration verte, dont nous avons parlé plus haut, ne représente évidemment qu'une phase intermédiaire entre la kératinisation arrivée à son dernier stade et celle que l'on observe dans les cellules de la zona lucida. C'est pourquoi ces deux parties diversement colorées de chaque couche de la gaine radiculaire interne, ont été nommées, par moi, zona VIRIDIS et ZONA NIGRA DE LA KÉRATINISATION. Dans toute l'étendue de la gaine radiculaire interne qui entoure immédiatement la portion radiculaire de la tige du poil, les zones de la kératinisation noire des diverses couches se confondent pour former une couche unique. J'ai désigné cette couche sous le nom de portion kératinisée de la gaine radicu- laire INTERNE. De ce que je viens d'exposer, il résulte qu'il y a une grande analogie entre la manière dont se comporte la kératinisation dans l'épiderme et la manière dont elle se comporte dans les couches de la gaine radiculaire interne. Le seul fait qui s'oppose à la ressemblance complète dans le mode dont ces deux parties se kératinisent, consiste en ce que, jusqu'à présent, il ne m'a pas été donné d'observer, dans l'épiderme, la zona viridis qu'on trouve dans la gaine radiculaire interne. Mais le stratum luci- dum de l'épiderme étant beaucoup moins haut que la zona lucida des couches de la gaine radiculaire interne, il serait possible que la zona viridis, dans la première de ces parties, fût aussi, pro- portionnellement, beaucoup plus mince que dans la seconde, et que, justement pour cela, elle échappât aux moyens ordinaires d'observation. Maintenant, passant au poil, j'ai remarqué qu'il se comporte, en plusieurs points, comme la gaine radiculaire interne relative- ment à la kératinisation. Dans le poil, abstraction faite de la moelle, on n'observe de kératohyaline en aucun point, comme cela a déjà été remarqué par d'autres auteurs. Mais malgré 40 620 SÉBASTIEN GIOVANNINI. cela, dans une partie déterminée de son collet, correspondant à peu près au point où la portion la plus large de celui-ci perd, en se resserrant notablement, sa forme évidemment conique, pour en prendre une qui se rapproche de la cylindrique, ses ceUules se présentent sous un aspect qui rappelle grandement celui qu'on observe dans les cellules de la zona lucida des diffé- rentes conciles de la gaine radiculaire interne. Ici, en effet, les cellules les plus externes du poil, aussi bien que celles de la zona lucida, se présentent, sur l'épaisseur de plusieurs couches, avec un contour très nettement marqué et un aspect bien clair. Cette dernière particularité ressort d'autant plus que, dans le point en question, les cellules, à l'intérieur du poil, dans une zone régulièrement et plutôt brusquement délimitée, présentent une coloration un peu obscure. Vers le haut, l'apparence claire des cellules les plus externes du poil cesse presque tout à coup, et, par conséquent, il y a une limite bien définie. Vers le bas, au contraire, cette limite ne peut être bien déterminée, l'apparence en question se perdant seulement peu à peu. De même, la distinction entre les cellules externes claires et les cellules internes semi-obscures du poil, disparaît insensi- blement de haut en bas. Une apparence claire, égale à celle que nous avons décrite plus haut dans les cellules les plus externes du poil, peut aussi se rencontrer dans la cuticule du poil; mais, là, elle a son siège un peu plus en haut. Il m'a semblé convenable de désigner la partie, sur l'étendue de laquelle on observe ledit aspect clair des cellules, sous les noms de zona lucida du poil et de zona lucida de la cuticule DU poil. La coloration obscure observée dans les cellules, à l'intérieur du poil, en correspondance de la limite supérieure de la zona lucida, s'étend, au-dessus de celle-ci, à toutes les cellules de la portion restante du collet du poil, tant à celles qui appartiennent exclusivement au poil lui-même, qu'à celles qui appartiennent à sa cuticule. En outre, dans cette partie, spécialement à l'inté- rieur du poil, on ne distingue plus, çà et là, que le seul noyau des cellules, déjà notablement atrophié. Toute la partie du collet du SUR LA KÊRATINISATION DU POIL. 621 poil, qui présente cet aspect, je l'ai désignée sous le nom de zona FUSCA DU POIL et ZONA FUSCA DE LA CUTICULE DU POIL. A l'extrémité du collet du poil, c'est-à-dire un peu avant que le collet subisse son plus grand rétrécissement, les cellules propres du poil Un-même, surtout les plus externes, prennent, ici encore, sur une courte étendue, une coloration identique à celle que l'on observe dans les cellules de la zona viridis des couches de la gaine radiculaire interne; et ainsi se trouve constituée la zona viridis de la kératinisation du poil. Quant aux cellules de la cuticule du poil, je n'y ai pas observé la coloration caractéristique de cette zone. A la couleur verte indiquée, succède ensuite, vers le haut, une coloration très noire et uniforme des cellules propres du poil ; ce qui démontre que celles-ci, aussi bien que les cellules de la gaine radiculaire interne sont sujettes à la kératinisation (zona nigra du poil). Par rapport à cette dernière zone, il faut remarquer un fait assez important. A l'aide d'observations répétées, faites non seulement sur les poils du cuir chevelu, mais aussi sur ceux d'autres parties du corps, j'ai pu m'assurer que le collet pileux, qui, en coupes transversales, présente une forme plus ou moins régulièrement ronde, perd cette forme au niveau de la zone de la kératinisation noire, pour prendre la forme ovale, triangulaire, ou autrement irrégulière, particulière à la tige. Pour ce motif il ne m'a pas semblé hors de propos de désigner cette partie simplement kératinisée, sous le nom de zona plasmatrix de la TIGE PILAIRE. Ce que je viens d'exposer, démontre clairement l'analogie entre le mode de kératinisation du poil et celui de la gaine radiculaire interne. En substance, la seule différence consisterait dans les deux circonstances suivantes : d'abord, la zona lucida. dans le poil, n'est pas précédée de la zona granulosa, comme dans la gaine radiculaire interne; ensuite, dans le poil, entre la zona lucida et la zona viridis, il y a une zone intermédiaire de kératinisation {zona fusca) dont il n'existe pas de trace dans la gaine radiculaire interne. 622 SÉBASTIEN GIOVANNINI. Toutefois, s'il est permis de croire que les ceîlules de la gaine radiculaire interne, aussi bien que celles du poil, au niveau des zones noires correspondantes, soient arrivées à un degré de kératinisation identique, cependant les cellules du poil, dans la tige, sont destinées à subir des modifications ultérieures. En effet, à la partie inférieure de la tige pileuse, immédiatement au-dessus de la zoìia nigra, le protoplasma des cellules du poil devient peu à peu plus clair et prend, en même temps, une coloration nette d'un rouge violet. On observe aussi, dans la cuticule du poil, une coloration analogue. En outre, dans le poil, ainsi que dans sa cuticule, le protoplasma perd peu à peu, vers le haut, cette coloration et prend celle d'un jaune clair, uniforme, caractéristique de la substance corticale complète- ment formée. J'ai donné le nom de zona praecorticalis à cette partie du poil et de la cuticule respective, sur l'extension de laquelle a lieu la dite coloration rouge violet. D'après les résul- tats de l'observation, la corticalisation se fait plus vite dans le protoplasma cellulaire que dans le noyau. En effet, le protoplasma des cellules du poil commence à se colorer en rouge violet, tandis que le noyau apparaît encore complètement obscur ; et plus tard, quand la première de ces colorations s'est étendue au noyau, le protoplasma se présente déjà avec un aspect jaune clair. Les diverses zones de kératinisation décrites jusqu'à présent, indiquant, selon toute probabilité, autant d'états spéciaux des cellules dans lesquelles elles se présentent, peuvent être consi- dérées comme divers stades ou degrés de la kératinisation. On peut dire la même cliose de la zona praecorticalis qui, très probablement, ne représente qu'un état de corticalisation incomplète. Tout ce que j'ai exposé jusqu'ici, relativement à la kératini- sation du poil et de la gaine radiculaire interne, n'a pas encore été décrit ou ne l'a été que d'une manière incomplète. C'est ainsi que l'existence d'une zona lucida, dans chacune des couches de la gaine radiculaire interne, trouve, pour la première SUR LA KÉRATINISATION DU POIL. 623 fois, dans ces reclierclies, la délimitation qui lui convient. Elle avait déjà été entrevue par M. AValdeyer (^j, mais d'une manière vague, et elle avait été réunie par lui avec tout ce qui se trouve au-dessus de la partie de la gaine occupée par la kératoliyaline. Quant à la zona lucida du poil et de sa cuticule, je n'ai trouvé aucun auteur qui en parle. De même, la description des diverses zones différemment colorées, qui existent, tant dans le poil que dans la gaine radi- culaire interne, au-dessus de la zona lucida, n'avait pas encore été faite, quoique des recherches sur la coloration de ces parties eussent été entreprises par plusieurs auteurs. Parmi ceux-ci, il faut nommer tout d'abord M. Unna qui, comme on le sait, réussit à colorer la portion kératinisée de la gaine radiculaire interne avec l'iode-méthyle-aniline et avec l'iode violet. Puis Flemming, après avoir réussi, avec les méthodes qui lui ont servi pour l'étude de la karyokinèse, à colorer, en rouge clair, la partie kératinisée de la gaine radiculaire interne, trouva que, avec le vert d'iode, les noyaux cellulaires se pré- sentent colorés en violet, tandis que le poil se colore en jaune, sa cuticule, en jaune clair, et la couche de Henle ainsi que la portion kératinisée de la gaine radiculaire interne, en beau vert. Dans des préparations fixées au moyen du bichromate de potasse, sur lesquelles avait été pratiquée la double coloration avec le carmin picrique et avec l'hématoxyline, le même auteur parvient aussi à colorer en un brillant bleu clair la gaine radi- culaire interne. Enfin Reinke {^), qui a continué ces recherches en employant, dans la méthode de Flemming, la coloration avec la safranine et le violet de méthyle, constata : Que la matrice du poil reste décolorée, tandis que les cellules de la substance corticale du (') Waldeyer. — Linlcrmchnngcn ûber diellislogeneae derlIoriKiebikh, imbesondere der Haare und Fedcrii (Ileiile's rcxiijabe, -1882, p. lo'J). (-) HiilNCKE. — Unterxiichimijeii uber die lloni;«.< qui se présentent dans cette région du folli- cule en voie d'atrophie, sont évidemment privés de l'importance que d'autres auteurs leur avaient attribuée. En effet, on ne pourra plus penser que ces niniis indiquent une plus grande productivité des cellules épithéliales correspondantes (Unna), et encore moins qu'ils doivent être considérés comme des glandes sébacées embryonnaires (Diesing). En outre, la démonstration qu'on a donnée du mode de formation de ces sinus concilie, entre elles, et reconnaît pour vraies, des opinions en apparence contradic- toires; telles sont, celle d'Ebner et de Schulin qui virent, dans leur formation, l'influence des muscles érecteurs, et celle d'Unna qui démontra qu'ils pouvaient se produire indépendamment de ces mêmes muscles. SDR LA KÉRATINISATION DU POIL. 647 poils, ressemblent beaucoup à celles qui ont été décrites ici comme consécutives à l'épilation. Cette ressemblance olïre, selon moi, un double avantage. En premier lieu, tout ce qui a été exposé dans le cours du présent travail, pourra dorénavant servir de guide dans l'interprétation de ce que l'on aura occasion d'observer dans les follicules après la chute naturelle des poils. En second lieu, dans ce dernier cas, on aura une règle siire pour déterminer approximativement, par des comparaisons opportunes, l'époque à laquelle remonte, dans chacun des folli- cules en examen, le détachement du poil ; ce qui, jusqu'à présent, n'avait pas été possible. 648 SÉBASTIEN GIO VANNINI. EXPLICATION DES FIGURES. Dans les planches, les différentes coupes transversales des follicules sont accompagnées des numéros reproduits, à la hauteur voulue, sur un côté des coupes longitudinales auxquelles elles se rapportent. Dans les coupes longitudinales, la place des cellules en karyokinèse est indiquée par de gros points ; celle des zones granuleuses par un pointillage fin et serré. Les zones de kératinisation verte, noire et rouge violet sont indiquées par une coloration analogue. De même, la substance corticale et le pigment ont été reproduits avec une coloration qui rappelle celle qui leur est propre. Toutes les figures correspondent à un grossissement de 200 diamètres. PLANCHE XXI. Fig. 1^, partie inférieure, et fig. 1b, partie supérieure, de la coupe longitudinale d'un follicule. Cuir chevelu excisé immédia- tement RTprès l'épilation. Fig. 2, 3, 4, 5. Coupes transversales du follicule représenté dans la fig lA et IB . Fig. G. Coupe transversale d'un follicule, prise à la hauteur, environ, du sommet de la papille. Cuir chevelu excisé immédiate- ment après l'épilation. Fig. 7. Coupe transversale d'un follicule, prise au niveau de la zona lucida de la couche de Huxley. Cuir chevelu excisé 9 heures après l'épilation. Fig. 8. Coupe transversale d'un follicule, prise vers le milieu de la hauteur de la papille. Cuir chevelu excisé 16 heiires après l'épilation. PLANCHE XXII. Fig. 1. Le même follicule de la figure 8, pi. XXI. Coupe transversale prise un peu au-dessus du sommet de la papille. SUR LA KÉRATINISATION DU POIL. 649 Fig. 2. Coupe transversale d'un Ibllicule, prise à la partie inférieure de la portion kératinisée de la gaine radiculaire interne. Cuir chevelu excisé 16 heures après l'épilation. Fig. 3. Coupe transversale d'un follicule, prise au niveau du sinus musculaire. Cuir chevelu, excisé 16 heures après l'épilation. Fig. 4. Coupe transversale d'un follicule, prise au niveau de la zona lucida de la couche de Huxley. Cuir chevelu excisé un jour après l'épilation. Fig. 5. Coupe transversale d'un follicule, prise au niveau de la zona lucida de la couche de Huxley. Cuir chevelu excisé 2 jours après l'épilation. Fig. 6. Coupe transversale d'un follicule, prise en correspondance de la, zona viridisde kératinisation de la couche de Huxley. Cuir chevelu excisé 2 jours après l'épilation. Fig. 7. Coupe longitudinale d'un follicule, appartenant à du cuir chevelu excisé 3 jours après l'épilation. Fig. 8, 9, 10. Coupes transversales du follicule représenté dans la figure 7. Fig. 11. Coupe transversale d'un follicule, prise immédiatement au- dessus du sommet de la papille. Cuir chevelu excisé 4 jours après l'épilation. PLANCHE XXIII. Fig. 1. Coupe longitudinale d'un follicule appartenant à du cuir chevelu excisé 8 jours après l'épilation. Fig. 2, 3, 4, 5. Coupes transversales du follicule représenté dans la fig. 1. Fig. 6, 7, 8, 9. Coupes transversales d'un même follicule, apparte- nant à du cuir chevelu excisé 24 jours après l'épilation. Fig. 10. Coupe longitudinale du follicule auquel appartiennent les coupes transversales 6-9. PLANCHE XXIV. Fig. 1, 2, 3, 4, 5. Coupes transversales d'un même follicule. Cuir chevelu excisé 32 jours après l'épilation. Fig. 6. Coupe longitudinale du follicule, auquel appartiennent les coupes transversales représentées dans les fig. 1-5. 650 SÉBASTIEN GIO VANNINI. Fig. 7, 8. Coupes transversales d'un même follicule, appartenant à du cuir chevelu excisé 48 jours après l'épilation. Dans la partie de ce follicule qui s'étend du sommet de la papille à la portion la plus lente à s'atrophier, la première de ces coupes correspond, à peu près, à la hauteur de la limite entre le tiers inférieur et le tiers moyen, et la seconde, à la hauteur de la limite entre le tiers moyen et le tiers supérieur. Fig. 9, 10, 11. Coupes transversales d'un même follicule, appartenant à du cuir chevelu excisé 58 jours après l'épilation. Fig. 12. Coupe longitudinale, à laquelle appartiennent les coupes transversales représentées dans les fig, 9-11. Contribution à l'étude des Rotateurs PAR Jean MASIUS Tnii'iiil du Idhoniidire de t'iiistittii ztHiloijKiue de t' Université ulleiiuinde de Pr(t(jue\ (Planches XXV lt XXVI ) INTRODUCTION. Il y a de nombreuses années déjà, Balfour faisait remarquer l'importance qu'il y aurait à posséder une connaissance com- plète de l'ontogénie des vers rotateurs ; cette ontogénie bien connue, il serait plus aisé de déterminer la signification mor- phologique des rotateurs, leurs affinités, leurs rapports entre eux et avec d'autres groupes, notamment les annélides et les nematodes. Tels sont les points principaux que je voulais éclaircir en commençant la présente étude à Prague, dès le printemps 1889, sous la savante direction de M. le professeur Hatschek. Avant d'entreprendre l'examen du développement de l'une ou l'autre espèce, j'ai voulu étudier scrupuleusement l'organisation de quelques types rotateurs appartenant aux diverses familles. Malheureusement, des circonstances inattendues ont inter- rompu mes études zoologiques et ne me permettent pas encore de prévoir l'époque où je pourrai les poursuivre à nouveau. Pour ce motif, je me suis décidé à publier dès maintenant les résultats qui me semblent présenter quelque intérêt sur l'ana- 42 652 JEAN MASIUS. tomie des deux formes que j'ai plus spécialement eues sous les yeux : Asplanclina helvetica (Perty-Tessin), et Lacinularia socialis (Leydig). L'étude du développement de ces formes ne m'a donné que des résultats encore trop incomplets pour être utilisés avec certitude. Je remplis un devoir des plus agréables en remerciant ici publiquement M. le professeur Hatschek de ses précieux conseils qui m'ont été d'un grand secours et qu'il m'a du reste prodigués avec son amabilité et sa bonne grâce habituelles. La première difficulté que l'on rencontre dans l'étude micro- scopique des rotateurs vivants, provient du mouvement ininter- rompu de l'animal ; cette difficulté est complètement supprimée par l'emploi d'un réactif dont je dois la formule à M. le Dr Cori. C'est un mélange d'alcool méthylique, eau et cocaïne en solution étendue. Les rotateurs primitivement anesthésiés par l'emploi de ce liquide, se laissent ensuite très bien fixer sans aucune rétraction par les réactifs habituels (liquide de Flem- ming étendu, par exemple). Comme l'ont déjà fait remarquer bien des auteurs, les prépa- rations permanentes des rotateurs entiers sont extrêmement difficiles à obtenir et, pour ma part, je n'en ai pas obtenu de réellement durables. Elles seraient, du reste, peu utiles en ce sens que le baume de Canada et même la glycérine, éclaircissent les préparations au point d'empêcher l'observation de détails souvent importants. Outre l'étude des animaux complets (vivants ou fixés par les réactifs ordinaires), j'ai eu recours aux coupes microsco- piques et aux dissociations étudiées dans l'eau, l'alcool faible et la glycérine très étendue. Pour l'étude de l'organisation de la tête, j'ai procédé d'une façon spéciale, que je crois utile d'exposer un peu plus longue- ment. Un individu, fixé dans de bonnes conditions, est placé sur un porte-objets; sous le microscope simple, on sectionne la tête suivant un plan transversal rapproché le plus possible de l'extrémité antérieure. On obtient ainsi une coupe très mince que l'on pourra déposer dans l'eau ou l'alcool faible CONTRIBUTION A l' ÉTUDE DES ROTATEURS. 653 entre deux couvre-objets, de façon à pouvoir examiner à volonté l'une ou l'autre face de la préparation. Les recherches bibliographiques concernant les rotateurs sont singulièrement facilitées par la liste bibliographique publiée par Eckstein (^) et complétée depuis par divers auteurs notamment Plate (^) et Zelinka (^). Je crois inutile de la repro- duire ici ; je me contenterai de compléter la liste qui accom- pagne le travail de Plate paru en 1886 (^). 183. Plate. Beitràge zur Naturgesch. der Rotatorien. Jenaïsch. Zeitsch. 188G. V. 19. 184. Billet. Sur les mœurs et pi'emiers phénomènes du develop, de l'œuf de Plùlodhia roseola. Bull. Scient, départ, du Nord, Ge année. 18'). Bourne. On the modificat. of the trochal. Disc, of the Rotifera. Rep. Brit. ass. Adv. Se, 1885. 180 BrAUN. Naturgesch. der Rotatorien. Arch, fiir Naturgesch. 48 Jahrg. 187. COSMOVICI. Vésicule contractile des Rotifères. Bull. Soc. Zool. de France. T. 13. 188. DADAY. Neae Beitrage z. Kenntn. der Ràderthiere. Mathem. u. Nat. wis. Ber. Ungarn. Vol. 1 et aussi dans Jour. R. Micr. Soc. Lond. Vol. 4. 189. Debray. Notommata Werneckii. Bull, scient, de France. T. 22. 190. Dewitz. Rotatorien litteratur, 1882-1886. Arch. f. Naturg. 52. Jahrg. 1886. Vol. 2. 191. Eckstein. Zur geograph. Verbreitung von Callidina Symbio- tica. Zool. Anz. 1888. (') Zeilsrh. f. Wissensch. zoolo. Bd 39. — 1S83. (*) Pi-ATK. BeilrJige zur Naturgesch. der Rotatorien. Jenai.s.Zeitschr. Hd 19.-1880. ("') Zelinka. Stud. ub. Râderth. Zeit. f. w. Vool. Bd. U. Id. Id. Bd. 47. (*) Pour les 182 premiers numéros, consulter les travaux de Eckstein et Plate précités. Il ne m'a pas été possible de me procurer tous les ouvrages formant la biblio- graphie des vers Rotateurs, notamment des ouvrages anglais ou américains. J'es|)ère cependant avoir eu entre les mains les mémoires les plus importants sur ce sujet. 654 JEAN MASIUS. 192. FOULKE. Oli a new species of Rotifer. Proc. Acad. Nat. so. Philad. 1884. 193. GOSSE. Twenty four new spec, of Rotif J. R. Mie. Soc. L., 1887. 194. GUERNE. Monograph. Note on the Rotifera of the fami. Asplanchn. Ann. of Nat. Hist. Vol. 2. Jour. R. Micr. Soc. L., 1888. 195. Hartmann. Ueber einige Ràderthiere. Sitzheri. Ges. Nat. Fr. 1885. 196. Hudson. New Floscularia. Jour. R. Micr. Soc. L. Vol. 2. 197. Id. Five new Floscules. Id. Vol. 3. 198. Id. New. Floscul. Id. Vol. 5. 199. Id. On four new sp. of Flos. Id. Vol. 5. 200. Id. Dessication of Rotifers. Id. Vol. 6. 201. Hudson et Gosse. The Rotifera, or Wheelanimalcules. Londres 1886. Supplément en 1889. 202. HerRICK. Rotifers of America. Bull, scientif. Laborat. Denison. Univ. Vol. 1 . 203. Hood. Floscularia annulata. Science Gossip. 1888. 204. IMHOF. Die Rotatorien der pelagischen Fauna. Zool. Anz. 8e Jahrg. 205. Joliet. Monographie des Mélicertes. Arch. Zool. experiment, et génér., 2û série. T. 1, n» 1 et n» 2. 206. KelliCOT. New Floscule. Proce. ameri. Soci. Micros., 1885. 207. Id. Ameri. Rotif. Proc. am. Soc. micr. Vol. 10. 208. KnipOWITSCH. (en russe) dans les Bull, de la Soc. des Natural, de St-Pétersbourg. Vol. 16. 209. LEIDY. Rotifera without Rotato, organ. Proc. Ac Nat. Sc Phila. 1882. 210. Id. Asplanchna Ebbesbornii. Id. 1887. 211. Lord. A new Rotifer. Naturalist's World 1885. 212. Id. Science Gossip. 1886. 213. Milne. New Rotifer. Proc. Philos. Soc. Glascow 1885. Vol. 16. — J. R. Micr. Soci. Lond. Vol. 5. 214. Milne. Defectiveness of the Eye-Spot. Id. 1886. Vol. 17 et id. Vol. 6. 215. Plate. Ueber einige ectoporasi. Rotatorien. Mit. d. Zool. Stat. Neapel. Vol. 7. 216. RoCQUIGNY-AdANSON. Stephanoceros Eichhornii. Jour. d. mi- crograph. T. 13, no 2. 217. ROUSSELET. New Rotifer. J. R. Micr. Soc. L. 1889. CONTRffiUTION A l'ÉTUDE DES ROTATEURS. 655 218. Smithson. Tube of melicerta. Id. Vol. 6. 219. Stevens. A key to the Eotifera. J. E. Mi. Soc Lo. 1887 et Ameri. Month. Microscop. Jour. Vol. 8. 220. Stokes. Rotifer within an acanthoceptis. J. R. Mi. Soc. L. 1884. 221. Tessin. Ueber Eibildung und Entwick. der Rotator. Zeitsch. f. wissen. Zoologie. Vol. 44, 1888. 222. Id. Rotatorien der Umgegend von Rostock. Arch. d. Ver. d. Fr. Naturgesch. Mecklemb. 43 Jahr. 22)3. Thorpe et GUNSON. Description of a n. sp. of megalotroch. Jour. R. Micr. Soc. L. 1889. 224. Vallentin. Some Remarks on the anatomy of Stephanoceros Eich. Ann. of. Nat. Histor}'. Vol. 5. 225. Weber. Notes sur quelques Rotateurs des environs de Genève. Arch, de Biolog. T. 8. 22G. Zacharias. Ueber die Bedeutung des Palmforra in der Entwick, von Rotat. Biol. Centralblt. Vol. 5. 227. Id. Konnen die Rotatorien und Tardigraden nach vollstand. Austrochnung wieder aufleben. Id. Vol. 6. 228. ID. Ein neues Râderthier. 229. ZelinkA. Studien ûber Raderthieren. Zeitsch. fur wissensch. Zoolog. Vol. 44 et vol. 47. 230. ID. Id. Zoolo. Anzeig. 1887. 231. Plate. Ueber die Rotatorienfauna des Bothnischen Meerbusens. Zeitsch. tur wissensch. Zoolog. Vol. 47. 656 JEAN MASIUS. I. — Asplanchìia helvetica, (IM. XXV.) La longueur ordinaire est de Imm à Imm y^, la forme est celle d'un cône tronfine, à base arrondie qui répond à l'extrémité postérieure de l'animal (fig. 1). Ije sommet tronqué ou extrémité antérieure, est garni d'une couronne de cils. La surface du corps est recouverte par une mince cuticule chitineuse finement striée longitudinalement ; les cellules matrices de cette cuticule forment une mince couche de protoplasme contenant, de dis- tance en distance, des noyaux ovalaires aplatis (dont le nombre total est de 40 à 50). Appareil digestif. — Comme chez tous les asplanclmides, le tube digestif se temiine en cul de sac; il est caractérisé par l'absence d'intestin terminal et d'anus. On y distingue facile- ment trois régions d'aspect très différent : le pharynx, l'œso- phage et l'estomac. Aux deux premières parties de l'appareil digestif se rattachent encore quelques organes qui sont, dans la région pharyngienne : un groupe de cellules glandulaires et deux paires de mandibules ; dans la région œsophagienne : une paire de glandes volumineuses dites ; glandes salivaires. L'ensemble de l'appareil digestif est normalement animé d'un double mouvement rythmique. L'un intéresse le pharynx s. s., l'autre l'estomac et l'œsophage. Le premier mouvement est une simple contraction des parois du pharynx, suivie d'une dilatation plus ou moins prononcée; ce mouvement se fait grâce à deux cellules contractiles à prolon- gements ramifiés qui s'étendent dans les parois du pharynx. Le second mouvement, qui est le plus caractéristique, résulte de la contraction de l'œsophage se plissant alors à la façon d'un accordéon. La contraction de l'œsophage entraîne l'estomac vers l'extrémité antérieure du corps. CONTRIBUTION A l'ÉTUDE DES ROTATEURS. 657 Dans certaines circonstances, l'asplanchna peut évaginer toute l'extrémité antérieure de son tube digestif (comme un doigt de gant), jusques et y compris le pharynx.Pourtant, l'éva- gination du pharynx n'est pas normale et n'a lieu que lorsque l'animal est très vivement excité par une cause extrinsèque (fig. 3 et 4). L'ouverture buccale est située à l'extrémité antérieure de la face ventrale (fig. 1, 0. h.). L'extrémité antérieure, ou tête, est formée par trois emi- nences arrondies : une médiane et deux latérales. Toutes trois fonctionnent probablement comme organes de sens. La saillie médiane, moins marquée que les deux autres, se continue dans la lèvre antérieure (ou supérieure) de l'ouverture buccale. L'asplanchna est munie de deux paires de mandibules situées au plancher de la bouche, elles se rattachent à un volumineux groupe de cellules matrices. Pour prendre la nourriture, les mandibules sont projetées vers l'extérieur, puis rentrées, et dans cette situation, leur mouvement ordinaire est latéral : alter- nativement de dehors en dedans et inversement. Gosse (63) a donné une bonne description de ces formations dans son travail sur l'appareil mandibulaire des rotateurs. Immédiatement en arrière des mandibules, se trouve un groupe d'une dizaine de glandes monocellulaires. Ce sont de grandes cellules allongées dont une des extrémités répond au pharynx (à ce niveau, se trouve une dépression de la paroi pharyngienne); elles sont pourvues d'un noyau arrondi peu volumineux. La cellule même est chargée de gouttelettes réfrin- gentes disposées en rangées, suivant le grand axe cellulaire. Pharynx s. s. (fig. 1). Le pharynx est le siège de plis nombreux, ce qui complique un peu l'étude de cet organe, mais d'autre part, sa propriété de pouvoir s' évaginer complètement sera avantageusement utilisée dans certains cas. L'évagination du pharynx est provoquée facilement chez l'animal vivant par une pression légère sur le couvre-objet. Chez rindividu nageant librement, le pharynx a l'aspect d'un sac membraneux, flaïupié de deux dilatations chitineuses. 658 . JEAN MASIUS. La partie membraneuse forme un sac plissé plus ou moins aplati d'avant en arrière. Outre de nombreux plis peu impor- tants, mais constants, il faut signaler deux grands plis latéraux antéro-postérieurs, en dehors desquels existe, dans la paroi pharyngienne, une grande cellule ramiiiée. De chaque côté de la partie supérieure du pharynx membra- neux se trouvent deux grandes vésicules chitineuses avec une fine striation quadrillée. Ces vésicules sont ovalaires, à grand axe légèrement oblique en arrière et en haut; leur partie antérieure et ventrale se continue dans le pharynx membraneux et chacune de ces vésicules est rattachée aux mandibules par un prolongement chitineux. On se trouve ici en présence d'un appareil squelettique destiné à donner plus de résistance à cette partie de l'animal. L'évagination du pharynx permet de se rendre un compte exact de la disposition des deux cellules qui président aux mouvements de contraction et de dilatation du pharynx. Sur un pharynx évaginé (fig. 3 et 4), on distingue, symétri- quement placées sur la face ventrale, deux grandes cellules contractiles à prolongements. On peut facilement observer, à l'état normal, la contraction de ces prolongements distribués de façon à entourer le pharynx d'une sorte de réseau contractile. 1j œsophage. Il a la foi-me d'un cône fort allongé à sommet antérieur se continuant dans la partie ventrale du pharynx, et à base postérieure aboutissant à l'estomac. Il est formé par un petit nombre de grandes cellules plates ciliées. Sur toute l'étendue de l'œsophage, les cils sont disposés en rangées longitudinales, ce qui, vu la minceur de la paroi, le fait paraître strié longitudinalement. En réalité, ces stries sont dues aux séries des coupes optiques des cils. Quatre filaments musculaires longitudinaux, disposés à égale distance l'un de l'autre le long de l'œsophage, déterminent les mouvements spéciaux indiqués précédemment. Vers l'extrémité postérieure, de chaque côté de l'œsophage, s'y trouvent rattachés deux organes connus sous le nom de : glandes salivaires. Ce sont des masses protoplasmiques dans CONTRIBUTION A l'ÉTUDE DES ROTATEURS. 659 lesquelles sont logés six ou sept noyaux cellulaires. Ces glandes paraissent accolées à l'œsophage, et s'il existe un conduit excréteur, il ne peut être que très courl:. Ces glandes renferment parfois des granulations graisseuses. D'ordinaire les gi-anula- tions les plus nombreuses sont brillantes, disposées en séries convergeant vers le hile de la glande, et ne noircissent pas par l'acide osmique. Enfin, à l'une des extrémités de ces glandes, se trouve un groupe de trois ou quatre petites cellules claires, dont je ne saisis pas la signification. Ij estomac (fig. 1). C'est un organe presque spliérique, formé par une seule couche de grandes cellules dont la face interne, plane, est garnie de cils nombreux et délicats. La face externe de ces cellules est fortement convexe. On trouve dans ces cellules un réseau protoplasmique net ; le noyau peu volumineux est reporté à la périphérie ; enfin, des goutte- lettes de graisse, des vacuoles à liquide clair et des granulations alimentaires souvent verdâtres, sont fréquentes dans le corps cellulaire. Avant de passer à l'examen de l'appareil excréteur, je dirai quelques mots d'une cellule du tissu conjonctif située entre l'extrémité postérieure du corps et l'estomac. C'est une cellule étoilée dont les prolongements dirigés en sens opposés s'insèrent, les uns à la face externe du fond de l'estomac, les autres à la cuticule de l'extrémité postérieure du corps. Un troisième groupe de prolongements s'insère à l'appareil sexuel. Cette cellule est destinée à empêcher l'estomac de remonter trop haut vers la tête de l'animal, lors de la contraction des muscles de l'œsophage. Il appareil excréteur (fig. 1 et 5). — Il est connu en allemand sous le terme " Wassergefàssystem „ et se compose d'un proto- néphridium double, avec canal excréteur aboutissant à une vessie contractile unique en communication elle-même avec le cloaque (par l'intermédiaire duquel sont également rejetés les produits sexuels). 660 JEAN MASIUS. Les deux reins primitifs sont situés symétriquement sur les faces latéro ventrales du corps, à peu près à égale distance des deux extrémités du corps. Chaque rein se compose d'un tube sécréteur non ramifié, enroulé sur lui-même d'une façon com- pliquée ; il se continue par l'une de ses extrémités dans un canal excréteur légèrement sinueux. Dans la partie sécrétante, la paroi du tube népliridien est épaisse, la lumière relativement étroite. En outre, on observe dans l'épaisseur de cette paroi, de nombreuses gouttelettes ou granulations brillantes. Les noyaux cellulaires sont peu nombreux dans l'étendue de l'organe. Le canal excréteur est simplement sinueux ; le diamètre total de la partie excrétante est le même que celui de la partie précédente, mais ici la lumière du conduit est large et la paroi fort mince, avec quelques rares noyaux plats et allongés. Cet appareil urinaire en entier renferme un liquide clair, hyalin qui est cependant granuleux chez les individus fixés par les acides. La partie opposée du tube néphridien se termine par quatre organes appelés " organes terminaux „ répartis à peu près à égale distance l'un de l'autre, le long de l'extrémité du tube sécréteur. Au nombre de quatre dans chaque moitié du corps, ils ne représentent chacun, qu'un prolongement de cellule. Ils sont creux, ils ont une forme de cône aplati à base libre dont le sommet se continue dans un pédicule court en continuité avec le reste de l'appareil. Il n'existe aucune espèce d'ouverture établissant une communication directe entre le rein primitif et la cavité du corps de l'asplanchna. La cavité de l'organe terminal est occupée par une flamme vibratile triangulaire insérée par sa base à la partie large de l'organe terminal. Vue sur la tranche, la flamme vibratile fait l'effet d'un gros cil. Cette flamme vibratile est couverte de stries longitudinales qui commencent chacune par un petit épaississement; il en résulte que la base de la flamme est limitée par une rangée de points brillants. L'extrémité libre de l'organe terminal est recouverte d'une couche de protoplasma finement granulé lequel est traversé par trois ou quatre filaments insérés CONTRIBUTION A l'éTUDE DES ROTATEURS. 661 d'autre part, à un point voisin de la paroi du corps. L'un de ces filaments situé dans l'axe de l'organe, est plus épais que les autres et souvent le seul visible à l'aide des grossissements habituels. Sur le vivant, la flamme vibratile et les filaments sont animés d'un mouvement ondulatoire continu qui se propage de proche en proche, dans une direction centripède par rapport à l'appareil excréteur. Le mouvement de la flamme et des filaments est synchrone, celui des filaments étant peut-être déterminé par celui de la flamme vibratile. Cependant, à l'approche de la mort de l'animal, les mouvements de la flamme vibratile se ralentissent, puis s'arrêtent alors que les filaments sont encore animés de leur mouvement régulier pendant quelques instants. Il me semble donc probable que ces filaments servent simple- ment à donner plus de fixité au rein et que l'un d'eux, plus puissant que les autres, est le siège d'un mouvement analogue à celui de la flamme vibratile, peut-être destiné à favoriser le courant des liquides de la cavité générale du corps vers le rein primitif. Le conduit excréteur proprement dit s'ouvre dans la vessie par un orifice sans valvule ; il est possible que les nombreux replis du tube néphridien suffisent à empêcher le reflux des liquides contenus dans la vessie, La vessie (fig. 1). Elle est grande, sphérique, située ven- tralement sur la ligne médiane. La vessie se contracte régulièrement une dizaine de fois par minute. Sa paroi est formée par de grandes cellules très plates, formant une membrane mince avec quelques noyaux plats. En outre, deux grandes cellules étoilées, à prolongements nom- breux, couvrent toute la vessie d'un réseau contractile en relief. Par leur contraction, ces deux cellules réduisent le volume de la vessie à l'extrême, et les différentes parties de la paroi chargée de mille petits plis sont ramenées l'une contre l'autre, de façon à supprimer pour un instant toute trace de cavité vésicale. Par ce mécanisme, la vessie est chaque fois débarrassée de tout son contenu. Dans l'intervalle entre deux contractions, la vessie se remplit et se distend de nouveau. 662 JEAN MASIUS. Le cloaque. C'est un canal assez large, à parois minces ; il s'ouvre à l'extérieur sur la ligne médioventrale. Le cloaque est strié circulairement sur la plus grande partie de son étendue. L'orifice cloacal externe est garni d'une grande valvule formée par un repli antéro-postérieur de la paroi du corps. De l'extrémité postérieure libre part un gi-os filament qui s'insère plus en arrière à la face externe de la paroi du corps. C'est une sorte de frein de la valvule cloacale. L'appareil sexuel femelle (fig. 1) comprend un ovaire et un oviducte. L'ovaire. — Il se constitue de deux parties très diiférentes, l'une volumineuse, c'est le vitellogène (dotterstock), l'autre beaucoup plus réduite, c'est l'ovaire proprement dit (keimstock). C'est Plate (183) et Tessin (221) qui, les premiers, ont établi cette distinction dans l'appareil sexuel des rotateurs. Le vitellogène est un organe ovoïde de la moitié moins volu- mineux que l'estomac ; il est situé à l'extrémité postérieure du corps dans une situation qui varie avec le degré de distension de r oviducte. Le vitellogène est formé d'un Plasmodium renfermant de gros noyaux; le protoplasme est chargé de grosses granulations deutoplasmiques. Les noyaux sont caractéristiques à cause de leur énorme nucléole. Ce nucléole forme la plus grande partie du noyau, il est réfringent et fixe très bien les matières colo- rantes. D'après certains auteurs, le nombre de ces noyaux serait constant ; il m'a semblé variable, dans des limites assez étroites, il est vrai : entre 8 et 12. Jamais on ne voit ces noyaux en division mitosique. L'ovaire proprement dit se trouve étroitement appliqué sur l'un des pôles du vitellogène, c'est un groupe de petites cellules réunies en forme de demi-croissant. A l'une des extrémité de ce demi-croissant, les cellules sont un peu plus grandes, arrondies, avec un noyau ordinaire à nucléole ; en se rappro- chant de l'extrémité opposée, les cellules deviennent plus petites et l'ovaire se termine par une couche protoplasmique poly- CONTRIB'JTION A l'ÉTUDE DES ROTATEURS. 663 nucléée sans limites cellulaires. Il est à remarquer que, si les divers territoires cellulaires de l'ovaire ont parfois des dimen- sions très différentes, les noyaux cellulaires ont tous sensible- ment le même volume (abstraction faite de la couche multi - nucléée). L'œuf se développe aux dépens d'une cellule de l'ovaire. Pour devenir un œuf, chaque cellule augmente successivement de volume, s'isole de plus en plus et acquiert un volume sensible- ment égal à celui du vitellogène. Après s'être complètement séparé de l'ovaire, l'œuf s'entoure d'une membrane mince, son noyau se transforme et les phénomènes de segmentation commencent (^). Outre ces œufs, qui sont de beaucoup les plus fréquents, j'ai pu observer quelques individus contenant à la fois un embryon ordinaire et un œuf d'hiver (fig. 6 et 7) nettement caractérisé comme tel, par ses dimensions et ses membranes. Ce fait me paraît suffire à démontrer que les œufs d'été et les œufs d'hiver peuvent être produits à la fois par un même individu. L'œuf d'hiver, le plus jeune que j'ai rencontré, était déjà quelque peu plus volumineux qu'un œuf d'été au moment de la segmentation. Ces œufs d'hiver sont sphériques, chargés de granulations albuminoïdes et renferment, en outre, un nombre variable de gouttelettes de graisse parfois très grosses. Leur diamètre peut atteindre jusque 20 à 30 millièmes de m.m. de longeur. Ils sont pourvus de membranes épaisses, au nombre de trois pour l'œuf ayant atteint son maximum de développement (flg. 6). 1» Une membrane interne mince, surtout bien visible lors- qu'elle est plissée par suite d'une altération de l'œuf; 2° Une membrane plus périphérique, ti'ès épaisse, striée et divisée en deux zones concentriques. Avec un grossissement convenable, on voit que cette striation est due à une infinité (') Auguste Lamerre. A propos de la maturile de l'œuf parlhénogénélique, 1890. 664 JEAN MASIUS. de fins canalicules radiairement disposés à côté les uns des autres. Ils sont élargis vers l'intérieur et c'est la suite de ces élargissements qui provoque l'aspect d'une division de la mem- brane en deux zones ; 3" Une membrane externe plus mince que la précédente, elle est jaunâtre et homogène. Souvent à la surface de ces œufs, on trouve un amas de pro- toplasme granulé dans lequel on distingue plus ou moins clai- rement quelques noyaux altérés. Sur les œufs très développés, on ne trouve pas toujours ces éléments. Un fait remarquable, c'est que toujours l'ovaire a complète- ment disparu chez les individus portant des œufs d'hiver. L'ovaire proprement dit ne se retrouve plus non plus, à moins qu'il ne soit représenté par l'amas cellulaire que nous venons de signaler à la périphérie des œufs d'hiver. Cette disparition constante du vitellogène, rapprochée du volume énorme des œufs d'hiver, de leur richesse en deuto- plasme, me fait croire qu'il est au moins probable que le vitel- logène de l'asplanchna est utilisé à la formation de ces œufs. Appareil sexuel mâle (PI. XXVI, fig. 9). — • Comme je l'ai déjà fait remarquer, les individus des deux sexes ont les mêmes proportions et ne diffèrent les uns des autres que par la constitution de l'appareil reproducteur, ce qui n'est pas le cas ordinaire chez les diverses espèces de rotateurs. L'appareil sexuel mâle comprend un volumineux testicule et un conduit excréteur ou canal déférent qui s'ouvre dans le cloaque. Le testicule est reniforme entouré par une membrane mince qui se continue avec les parois du canal déférent. La périphérie du testicule est formé par une mince zone de protoplasme clair avec quelques noyaux vésiculeux. Mais la masse principale de cet organe est formée par des spermatozoïdes. A côté de ceux-ci, on trouve, en assez grand nombre, des éléments ovalaires limités par un contour net ; ils sont formés par un protoplasme clair, dans lequel se trouvent logés deux corps allongés et réfringents. Les spermatozoïdes ont une partie principale, de forme ova- CONTRIBUTION A l' ÉTUDE DES ROTATEURS. 665 laire allongée, à contours bien distincts ; cette partie se continue dans un prolongement épais assez court, animé d'un mouvement lent. Les contours de ce prolongement sont vagues, indécis. Le canal déférent est large et en temps ordinaire, sa surface présente une suite de dilatation et de rétrécissements successifs. Sur la paroi membraneuse de ce canal, on voit quelques cel- lules à prolongement très ténus qui rayonnent en éventail à partir du cor{)S cellulaire. Enfin, la paroi elle-même du canal est formée de cellules assez plates, chargées d'un produit de sécrétion granuleux et jaunâtre. Tel est l'aspect ordinaire du canal déférent dont l'énorme diamètre semble peu en rapport avec ses fonctions. La raison du diamètre considérable de ce conduit s'explique par ce fait que (dans certains cas du moins) les spermatozoïdes sont rejetés à l'extérieur dans un volumineux spermatophore. Ce mode d'expulsion des spermatozoïdes est-il une règle sans exception ? Je ne puis l'affirmer, mais quoi qu'il en soit, j'ai observé trois cas dans lesquels le canal déférent contenait un spermatophore rempli de spermatozoïdes. Voici la description de ce spermatophore (fig. 8) : Il est sphérique ou légèrement allongé, jaune brunâtre et formé par la réunion d'un grand nombre d'éléments chitineux, polyé- driques, de dimensions variables. Les plus grands de ces éléments sont réunis aux environs de l'un des pôles, les éléments plus petits entourent le pôle opposé. La cavité du spermatophore est circulaire, mais excentriquement placée, de sorte qu'au niveau des éléments chitineux les plus petits, la paroi est aussi la plus mince. Le canal contenant un spermatophore a perdu son aspect glandulaire, le produit de sécrétion jaunâtre de ses cellules a disparu, il est probablement utilisé à la formation du sperma- tophore. Système musculaire (fig. 1 et 2). — On peut diviser les muscles de l'asplanchna en muscles longitudinaux auxquels se rattachent les muscles de la tête, en muscles circulaires et en muscles transversaux. Les muscles les plus volumineux sont les muscles longitudi- 666 JEAN MAsros. naux. Ils sont formés par une cellule unique dont le noyau est encore très apparent. Certains muscles sont cependant si grêles qu'il est parfois difficile de distinguer le noyau d'une façon positive. Les muscles longitudinaux sont disposés symétriquement au nombre de sept de chaque côté du plan médian ; ils sont de lon- gueur et d'épaisseur très variables. L'insertion supérieure se fait souvent au voisinage de l'appareil rotateur. Le muscle le plus volumineux du corps se trouve le long de la partie médiane des deux faces latérales. Ce muscle est rubanné et s'étend en arrière jusqu'à la hauteur du fond de l'estomac; à ce niveau, il s'épanouit pour s'insérer à la paroi du corps. A son extrémité antérieure, il se sépare en deux chefs d'insertion inégaux, et vers le milieu de son étendue, se voit le corpuscule cellulaire. Les faisceaux musculaires de la tête sont nombreux, mais ne sont, pour la plupart, que des prolongements des grands muscles longitudinaux du corps. Les muscles circulaires sont assez grêles et forment cinq ou six anneaux situés immédiatement en arrière de l'appareil rotateur. Ce qu'on appelle muscles transversaux répond à cinq iila- ments contractiles, chacun transversalement étendu entre deux points voisins de la face dorsale de l'asplanchna. C'est à la fois sur l'aspect microscopique et sur l'étude des phénomènes de contraction que je me suis surtout basé pour affirmer la nature musculaire des divers éléments que je viens de décrire comme muscles. Il n'est, en effet, pas toujours aisé de discerner à première vue, sur le vivant, un muscle grêle d'un faisceau conjonctif, par exemple. Les éléments nettement distingués comme muscles ont la texture de faisceaux formés par des fibrilles moniliformes très fines. Les grains de ces fibrilles ne se correspondent pas dans deux fibrilles voisines, c'est-à-dire ne forment pas des séries moniliformes transversales. Il en résulte une fine striation longitudinale jointe à un pointillé très délicat. L'appareil vibratil (fig. 1 et 2). — L'appareil vibratil ou CONTRIBUTION A l'ÉTUDE DES ROTATEURS 667 appareil rotateur forme, à l'extrémité antérieure du corps, un cercle de cellules ciliées interrompu seulement en deux points diamétralement opposés : au niveau de l'ouverture buccale, et sur la ligne médiodorsale. (Cette dernière interruption s'accom- pagne d'un renfoncement notable de la paroi du corps à ce niveau.) L'appareil rotateur est constitué symétriquement de chaque côté du plan médian. Sur la face ventrale, de chaque côté de l'ouverture buccale, se trouve un groupe de grandes cellules au niveau desquelles l'appareil vibratil est renforcé. En ce point sont réunies une douzaine de grandes cellules ovoïdes dont la grosse extrémité est tournée vers l'intérieur, un filet nerveux y aboutit. L'extré- mité plus petite est libre et porte de forts cils vibratils. Au centre de la cellule, se voit un noyau ordinaire. Le reste de l'appareil rotateur est formé de chaque côté par sept cellules modérément aplaties et munies de cils plus délicats. Deux cellules dorsales, plus hautes et plus courtes que les autres, se réunissent par leur extrémité externe, en formant un prolongement cellulaire gros, court, et saillant à la surface du corps. Ce prolongement est strié longitudinalement et recou- vert d'une enveloppe chitineuse ; il présente encore cette particularité d'être terminé par une série de soies courtes et raides. Une autre particularité de l'appareil rotateur se montre un peu dorsalement de l'insertion du grand muscle latéral ; à ce niveau, l'une des cellules s'élève au-dessus des autres et (en arrière de la grande cellule ganglionnaire) se continue en un prolongement qui porte une tache pigmentaire cupuliforme, qui est d'ordinaire considérée comme servant à la perception de sensations lumineuses. Citons encore comme organe probable du tact, les deux eminences latérales qui forment l'extrémité antérieure du corps et sur lesquelles on arrive à distinguer quelques cils. Aux environs de la partie moyenne de 1' eminence médiane, on remarque un singulier organe très clairement visible, lorsque 43 668 JEAN MASIUS. cette eminence est évaginée en même temps que le pharynx (fig. 4). Au repos, cet organe est formé par un gros cil raide logé au fond d'une petite dépression conique, de sorte que, après évagination, c'est un cône tronqué saillant et surmonté d'un gros cil. Système nerveux et organes de sens (fig. 1 et 2). — L'organe nerveux central est un ganglion situé à l'extrémité antérieure du corps, au-dessus du pharynx (Gr. c). Ce ganglion a une forme allongée transversalement, il est en majeure partie formé par de grandes cellules nerveuses régulièrement disposées en une sorte de croissant, autour d'une zone protoplasmique portant une petite tache pigmentaire. L'étude du reste du système nerveux de l'asplanchna présente certaines difficultés ; en effet, les réactifs ordinaires du tissu nerveux tels que le chlorure d'or, le bleu de méthylène, l'acide osmique, etc., ne m'ont donné que des résultats tout à fait insuffisants. Le parti auquel j'ai cru le plus sage de me rendre, c'est de ne considérer comme nerfs, que les filaments en continuité évidente avec le ganglion nerveux central. Au niveau de la région moyenne du corps, se trouvent dis- posés, à peu près à égale distance les uns des autres, quatre organes considérés comme organes du tact. Il faut distinguer ces organes en ventraux et dorsaux, différents les uns des autres par leur situation, leur mode d'innervation, leur structure et leurs rapports mutuels. Ces organes de sens ont à peu près une forme de massue à grosse extrémité libre terminée par un petit renforcement chitineux, garni d'une touffe de cils de longueur inégale. Chaque cil est terminé par un petit renflement sphérique. Les organes dorsaux sont formés de trois ou quatre cellules. Les organes ventraux m'ont le plus souvent paru formés de deux cellules seulement. Les deux organes dorsaux sont réunis entre eux par une commissure transversale. Cette commissure, avec deux cellules qui s'y rattachent, est particulièrement bien visible sur les individus jeunes. CONTRIBUTION A l'ÉTUDE DES ROTATEURS. 669 Comme on l'a observé chez presque tous les rotifères, chaque organe dorsal reçoit directement du ganglion cérébral un gros filet nerveux sur le trajet duquel se trouve intercalée, à une faible distance de l'organe terminal, une cellule allongée. Le nerf allant ainsi du cerveau à l'organe dorsal est simple, c'est-à-dire ne détache aucune branche latérale. Le corps entier de l'asplanchna, l'appareil rotateur excepté, est innervé par les seules ramifications de deux grands nerfs ventraux, l'un à droite, l'autre à gauche. De chaque côté de l'organe nerveux central, se détache un nerf qui se porte transversalement en dehors et aboutit à une énorme cellule ganglionnaire située immédiatement en dedans de l'insertion du grand muscle latéral. Cette cellule ganglion- naire est à peu près rectangulaire, et, de son extrémité externe se détache un tronc nerveux. Celui-ci, après avoir longé l'inser- tion du grand muscle latéral et du muscle plus immédiatement ventral, se coude en arrière et suit ce dernier. Bientôt le nerf se divise à diverses reprises dans son trajet vers l'extrémité postérieure de l'asplanchna; outre les branches qui aboutissent aux muscles (le plus souvent aux abords du noyau), il faut remarquer : 1° une branche nerveuse pour l'or- gane ventral ; 2° une grande branche nerveuse qui aboutit près de l'ouverture cloacale et dont se détachent deux filets extrê- mement grêles, l'un allant à la cellule contractile de la vessie, l'autre aboutissant aux environs de l'ouverture de la vessie dans le cloaque. Le long de certains nerfs, et ayant quelquefois des trajets partiellement analogues, se trouvent des filaments ramifiés du tissu conjonctif. L'ensemble de ces formations conjonctives paraît former tout un système de soutien pour certaines rami- fications nerveuses. L'innervation du pharynx est donnée (peut-être en partie seulement) par deux petits filets nerveux partant du ganglion, pour se distribuer à la face dorsale de l'appareil pharyngien. Une petite cellule ganglionnaire est intercalée dans le cours de ce nerf. Toute cette disposition se découvre facilement chez un animal dont le pharynx est évaginé (fig. 4). 670 JEAN MASIUS. Le mode d'innervation de l'appareil vibratil s'étudie très commodément sur les préparations faites comme je l'ai indiqué précédemment (fig. 2). Des diverses cellules du ganglion cérébral, se détache un nombre déterminé de filets nerveux, se rendant chacun à une cellule de l'appareil rotateur. Les nerfs les plus nettement visibles sont ceux qui fournissent au groupe antérieur droit et gauche. Chaque nerf, immédiatement après s'être séparé du cerveau, est pourvu d'une petite cellule ganglionnaire fusiforme. Au delà de cette cellule, le nerf se rend le plus souvent directement à la base d'une cellule vibratile. Je n'ai pas réussi à distinguer un trajet du filament nerveux dans l'intérieur même de la cellule. Il peut aussi arriver qu'un nerf se divise pour fournir à deux cellules voisines. Il faut encore remarquer que le filet nerveux qui se rend à la cellule portant la tache oculaire est particulièrement déve- loppé et se termine près de l'organe visuel par deux très petites cellules qui paraissent en rapport avec la grande cellule gan- glionnaire du grand nerf ventral principal. II. — Lacinularia socialis (Ehr.). (PI. XXVI.) Après les remarquables travaux d'EnRENBERG (49), Leydig (110), Huxley (92), Plate (183) et autres, il semble que l'orga- nisation de Lacinularia socialis soit parfaitement connue ; aussi n'entrerai-je pas ici dans de gi-ands détails à propos de ce rotateur tubicele ; je me contenterai d'insister sur quelques points, à propos desquels mes observations m'ont conduit à une opinion quelque peu différente de celle de mes savants devanciers. Chez Lacinularia le tube digestif est complet, comprenant une partie pharyngienne avec appareil masticateur, une région œsophagienne courte à laquelle se rattachent les glandes sali- CONTRIBUTION A l'éTUDE DES ROTATEURS. 671 vaires, une région stomacale à cellules volumineuses, enfin l'intestin terminal avec le cloaque dans lequel s'ouvrent l'ovi- ducte et les canaux excréteurs des reins. L'ouverture du cloaque est située dorsalement vers l'extrémité postérieure du tronc. De chaque côté du plan médian, et plus rapproché de la face dorsale, se trouve un tube ondulé qui aboutit en arrière au cloaque ; vers son extrémité antérieure, il se bifurque et se comporte d'une fa(^on assez spéciale comme nous le verrons bientôt. L'ensemble de ces deux canaux forme Vapparcil excréteur ou rein primitif de l'animal. La structure des parois du tube néphridien est la même que chez l'asplanchna. Outre ceux de l'extrémité antérieure, trois organes termi- naux de l'appareil excréteur se trouvent dans chaque moitié du corps ; ce sont de petits diverticules se détachant du tube principal sous un angle foit aigu, leur extrémité postérieure est libre et, à leur intérieur, se trouve un gros cil animé d'un mouvement ondulatoire centripède. La situation de ces organes terminaux est fixe. L'un se trouve approximativement à la hauteur de l'anus, le deuxième immédiatement derrière la glande salivaire, et le troisième immédiatement au-devant d'elle. Pas plus ici que chez Asplanchna, je ne puis admettre que ces organes établissent une communication directe avec la cavité générale du corps, comme Joliet (200) le décrit pour les Mélicertes. Chacun des reins s'ouvre séparément dans le cloaque sans présenter au préalable de dilatation permanente, contractile ou non contractile. L'extrémité antérieure du corps de Lacinularia soc. est étalée en ombelle au-dessus du reste du corps. Arrivé près de la tête, chaque rein primitif se bifurque en deux branches, l'une ventrale, l'autre dorsale. La branche dorsale devient tout à fait super- ficielle dans la tête et se renfle en un organe plus ou moins sphérique extrêmement volumineux. Ces énormes appendices céphaliques de l'appareil excréteur, sont situés de chaque côté 672 JEAN MASIUS. du ganglion cérébral et ont une structure analogue au reste de l'organe ; ils renferment un conduit sécréteur très contourné. Chaque appendice céphalique est pourvu de deux organes terminaux, l'un interne, l'autre externe, avec un noyau cellulaire dans chacun d'entre eux. L'organe terminal interne est fort long et s'étend jusqu'à l'appendice céphalique du côté opposé. Sur la ligne médiane, au- dessus du ganglion cérébral, les deux organes terminaux internes symétriques s'entrecroisent donc l'un avec l'autre (iig. 11). C'est cet entrecroisement qu'on a parfois considéré, à tort, comme une anastomose. (En rapport avec l'existence de l'entrecroisement, on peut observer que le cil de l'organe terminal entrecroisé ondule dans un sens centri- fuge par rappoi't à la moitié du corps où il se ti-ouve, mais centripède par rapport à la partie de l'appareil excréteur dont il dépend réelle- ment.) De l'extrémité libre des organes terminaux de la tête, partent de très fins filaments, les reliant plus ou moins directement aux cellules voisines de l'appareil vibratil. Deux gros prolongements cellulaires pleins réunissent encore chaque appendice céphalique de l'appareil excréteur, à deux cellules voisines de la rangée supérieure dans l'appareil vibratil. Enfin, de la face inférieure ou ventrale du prolongement céphalique, part un canal court aboutissant d'autre part à la branche de bifurcation ventrale du rein primitif. Cette branche ventrale, souvent repoussée jusqu'au contact de l'appendice céphalique correspondant, a une forme de fuseau creux ; trois noyaux cellulaires y sont visibles. L'extrémité antérieure du fuseau est bifurquée et se continue, d'une part, dans le canal court de l'appendice céphali(iue dont nous venons de parler, et d'autre part dans un organe terminal ordinaire avec quelques filaments conjonctifs pour le rattacher à des éléments voisins. Appareil sexuel femelle. — Lacinularia soc. est ovipare. L'appareil sexuel femelle se compose d'un ovaire s. s., d'un vitellogène et d'un conduit excréteur des produits sexuels. Le vitellogèue est énormément développé, l'ovaire s. s. est très CONTRIBUTION A l'ÉTUDE DES ROTJATEURS. 673 réduit et plus difficile à découvrir que chez l'Asplanclina. Sur un individu portant un œuf, on ne le voit bien qu'en coupe microscopique (ûg. 12). Le vitellogène et l'ovaire réunis forment ensemble un organe reniforme dont le grand axe est parallèle au grand axe du corps de l'animal. Cet organe est tout à fait ventral, le liile est tourné vers le dos, et c'est au liile que se trouve l'ovaire s. s. Celui-ci tout à fait à la surface du vitellogène, forme une rangée de petites cellules nettement séparées les unes des autres. Plus profondément, on distingue encore des noyaux sans terri- toire cellulaire indiqué. Le vitellogène renferme une dizaine de grands noyaux avec nucléole énorme. Eemarquons, accessoire- ment, que les limites cellulaires sont souvent visibles dans le vitellogène de lacinularia. L'œuf se forme et se développe suivant le processus décrit pour l'asplanclma ; le volume du vitellogène ne diminue pas pendant la durée du phénomène. Dans le corps maternel, l'œuf se développe jusqu'à atteindre un volume égal à celui du vitellogène contre lequel il est appliqué. On lui distingue alors un grand noyau clair avec une charpente réticulée et quelques petits nucléoles. L'anif est expulsé par l'oviducte, large canal membraneux d'ordinaire complètement revenu sur lui-même et, pour ce motif, peu visible. Avant d'aborder l'étude des muscles de Lacinularia, je dirai un mot de la glande muqueuse avec son conduit. Le produit d'excrétion de cette glande forme la gaine gélatineuse de chaque individu. La glande est située un peu en arrière de l'intestin terminal, elle est maintenue en place par l'extrémité antérieure bifurquée, laquelle se continue dans de larges faisceaux de tissu conjonctif formés de tines fibrilles enveloppant quelques noyaux allongés. Ces faisceaux conjonctifs s'insèrent aux muscles voisins par un épanouissement terminal considérable. Chez l'adulte, cette glande ne fonctionne plus. Le conduit excréteur de la glande s'étend directement jusqu'à l'extrémité postérieure du pied où il s'ouvre à l'extérieur. 674 JEAN MASIUS. Cette glande paraît être monocellulaire. Système musculaire. — Il existe chez lacinularia, des muscles longitudinaux et des muscles circulaires. Mais, au point de vue de leur structure, nous devons distinguer les muscles longitudinaux ordinaires des muscles longitudinaux à striation oblique double. Les muscles longitudinaux sont disposés d'une façon ^ymé- trique de chaque côté du plan médian. Dans le tiers antérieur du pied de Lacinularia, on remarque quatre grandes cellules (deux de chaque côté de la médiane, disposées de telle façon que deux soient plus ventrales et deux plus dorsales). Les deux cellules ventrales sont très régulièrement piriformes, un noyau arrondi avec un petit nucléole en occupe le centre. Les deux cellules, plus dorsales, sont finement granulées et régulièrement pourvues chacune de deux noyaux sphériques. D'après Leydig (110), ces quatre cellules seraient des cellules nerveuses ; je crois, au contraire, que ce sont là les corps cellulaires de quatre muscles longitudinaux. Deux autres muscles ont un corps cellulaire fusiforme situé à une faible distance de l'extrémité postérieure du pied. Les différents corps cellulaires dont nous venons de parler (au nombre de six) se continuent respectivement en avant et en arrière dans un prolongement assez fort, qui, accolé à la paroi du corps, s'étend en arrière jusqu'à l'extrémité du pied, et peut se prolonger en avant jusqu'à l'ombelle. L'observation des phénomènes de contraction, l'absence de connexion directe des prolongements avec le ganglion nerveux central, leur aspect à l'examen avec des objectifs puissants, leur disposition générale, tout, enfin, me porte à croire que les élé- ments que je viens de décrire sont bien réellement des éléments contractiles, ayant la valeur de fibres musculaires. Quatre de ces muscles arrivent jusqu'à l'extrémité antérieure de l'animal, et là, se divisent chacun en trois ou quatre branches qui s'étalent dans l'ombelle, y prennent insertion. Dans toute l'étendue du pied, on rencontre quelques anasto- moses constantes entre les divers muscles. CONTRIBUTION A l'ÉTUDE DES ROTATEURS. 675 De chaque côté du plan médian, et tout à fait dorsalement, se trouve encore un muscle longitudinal d'un caractère bien particulier. Le corps cellulaire de ce muscle se trouve en avant des autres, immédiatement en arrière de l'intestin terminal. Vers l'extrémité antérieure, le muscle se divise en trois branches dont la plus importante peut encore se subdiviser à son tour. En arrière, ce muscle arrive jusqu'à l'extrémité du pied. Ces deux muscles dorsaux sont caractérisés par une striation oblique double très analogue à celle qu'ENOELMAN a étudiée dans le muscle postérieur de l'anodonte. Ici aussi, cette striation n'est pas due à une structure comparable à celle des fibres musculaires striées ordinaires; elle paraît plutôt provenir d'un enroulement spiraloïde de tibres très ténues autour de la masse principale du muscle. L'exactitude de cette supposition se démontre par l'impossibilité de mettre au point simultanément les deux striations et par l'aspect denticulé des bords de l'élément musculaire. (Immers, homog. de Zeiss.) La contraction des muscles longitudinaux amène le raccour- cissement de tout l'individu avec formation d'une infinité de petits plis transversaux particulièrement nombreux dans le pied. La contraction des parties distribuées dans l'extrémité antérieure et la tête, referme sur elle-même cette extrémité antérieure étalée en ombelle. Les muscles circulaires sont très fins et surtout nombreux dans la partie antérieure du tronc. Dans le pied, il n'en existe pas. Il y en a en tout une quinzaine environ. Appareil vibratil ou aiipareil rotateur. — Situé à l'extrémité antérieure de l'animal, il sert à la locomotion dans le jeune âge. Plus tard ce même ap[)areil fort développé ne sert plus guère qu'à attirer les particules alimentaires dont l'animal se nourrit. L'extrémité antérieure de Lacinularia soc. est étalée en forme de disque à peu près circulaire, présentant une échancrure au niveau de la ligne médioventrale. La face supérieure de ce disque ou ombelle, est plane, le bord est creusé d'une gouttière circulaiie profonde limitée par une lèvre supérieure faisant saillie sur la lèvre inférieure qu'elle recouvre. 676 JEAN MASIUS. Chaque lèvre est gamie de cils vibratils nombreux, formant ainsi deux bandes ciliées superposées ; la bande supérieure a des cils plus nombreux et plus puissants, lesquels sont implantés dans une zone chitineuse à striation oblique nette. Cette disposition explique l'aspect de l'appareil vibratil vu par au-dessus ou par en dessous. Dans l'un et l'autre cas, les deux bandes de cils, rapprochées l'une contre l'autre, forment une zone circulaire foncée. Cette zone paraît nettement séparée des cellules (dont elle dépend), par une ligne sombre qui, en réalité, répond au fond de la gouttière qui règne entre les deux bandes ciliées. Correspondant à ces dernières on trouve au fond de la gouttière, deux rangées superposées de grandes cellules claires allongées, limitées du côté opposé par un bord ondulé. Le protoplasme de ces cellules est réticulé, il renferme un noyau avec un nucléole assez gros. Le nombre dix est constant pour chaque rangée de grandes cellules de l'appareil vibratil. Comme nous l'avons déjà vu précédemment, deux cellules de chaque côté, dans la rangée supérieure, se rattachent à l'appendice céphalique de l'appareil excréteur, par un épais prolongement conique. Les deux bandes ciliées sont continues, mais sur la face ventrale, elles s'écartent fortement l'une de l'autre, de façon à limiter entre elles les bords de l'ouverture buccale. Système nerveux et organes de sens. — L'organe nerveux central est un volumineux ganglion dorsalement situé dans la partie tout à fait antérieure de la tête, immédiatement au-dessus du pharynx, entre les deux appendices céphaliques de l'appareil excréteur. Il est surtout visible quand on examine la face supérieure de l'extrémité antérieure; il est formé par un grand nombre de cellules. Il est allongé trans- versalement et divisé en deux moitiés symétriques, par un sillon dorsal longitudinal. De ce ganglion partent plusieurs nerfs. J'ai observé : 1" Un nerf dorsomédian, fournissant à l'organe de sens dorsal ; CONTRIBUTION A l'ÉTUDE DES ROTATEURS. 677 2° Deux nerfs dorsolatéranx pour les muscles ; 30 Deux nerfs latéraux pour l'appareil vibraiil. Outre ceux-ci, un quatrième tronc nerveux volumineux se détache du ganglion entre les nerfs 2» et 3° et se dirige vers la partie postérieure du corps; je n'ai pas réussi à en observer exactement la distribution. Les organes de sens dorsaux sont au nombre de deux chez l'Asplanchna, réunis directement par une commissure tranver- sale. ChezLacinularia, au contraire, cet organe est unique, mais semble conserver des traces d'une dualité primitive. Il est situé sur la face dorsale, dans la partie antérieure du corps, là où elle commence à s'élargir. Quatre cellules contribuent à la forma- tion de cet organe ; les deux plus superficielles sont relativement grandes, vacuolées et garnies d'une houpe de cils rigides. Un filet nerveux unique part du ganglion central et aboutit à l'organe de sens en se divisant en deux filets plus grêles, se terminant chacun à l'une des cellules basilaires. Ce nerf se trouve placé entre deux autres qui, dans chaque moitié de la tête, partent du ganglion, et se dirigent vers le bord dorsal de l'appareil rotateur. A mi-distance environ, entre le cerveau et ce bord, ils se divisent en deux branches ; l'une latérale plus grosse et plus courte aboutit au grand muscle dorsal. La seconde branche est plus médiane et se termine en se divisant en deux rameaux très courts, dont l'un innerve une cellule de la rangée supérieure de l'organe rotateur, l'autre arrive à une cellule médiane conique, très allongée, dont le sommet est en rapport avec l'organe de sens dorsal. La base de cette cellule allongée répond à l'organe rotateur. De chaque côté du ganglion central, partent, plus ventrale- ment deux gros nerfs qui se dirigent vers l'extrémité postérieure en se rapprochant de la face dorsale ; ils atteignent bientôt l'appareil excréteur et, dès ce moment, il devient presque im- possible de les suivre dans leur trajet. Plus ventralement encore que les précédents, se détachent du cerveau deux nerfs à peu près transversaux ; chacun de ces nerfs arrive, dans la moitié correspondante de la tête, à une 678 JEAN MASIUS. petite cellule triangulaire, pourvue d'un noyau ordinaire, à côté duquel, d'une façon constante, se trouve une petite vacuole. Cette cellule directement reliée au cerveau, doit être une cellule nerveuse ganglionnaire intercalée dans le trajet du nerf. Les ramifications nerveuses sortent de la cellule pour se distri- buer péripliériquement aux cellules vibratiles. Nous avons vu précédemment le mode d'innervation des deux cellules dorsales de la rangée supérieure; en outre, quelques cellules rapprochées de l'orifice buccal sont innervées par des rameaux nerveux spéciaux venant directement du cerveau. Il semble donc que, chez Lacinularia, chaque cellule de l'appareil vibratil soit en rapport avec un ramuscule nerveux spécial. Sous ce rapport, l'analogie avec Asplanchna, serait complète. Pour terminer cette étude sur Lacinularia socialis, je citerai encore quelques groupes de cellules formant, chez l'adulte, des organes dont la signification ne m'est pas clairement apparue. Sur les côtés de la partie dorsale des glandes salivaires, se trouvent deux traînées cellulaires convergeant vers la ligne mèdio -dorsale. Au niveau de l'extrémité postérieure du vitellogène, symétriquement de chaque côté de la face ventrale et dans un plan très superficiel, ou observe toujours la présence de deux petites traînées cellulaires, se dirigeant en arrière, en se rapprochant de la ligne médio-ventrale. Cette série de cellules unies les unes aux autres paraît n'avoir aucun rapport avec les appareils voisins. Les cellules, au nombre de quatre ou cinq de chaque côté, sont toujours peu volumineuses et de plus en plus petites à mesure qu'elles sont postérieures. Si on examine Lacinularia par la face ventrale, on remarque, sous le bord inférieur de l'ouverture buccale, une gouttière large et peu profonde qui s'étend dans le sens antéro-postérieur jusqu'au niveau correspondant à celui des mandibules. En ce point, la gouttière s'élargit et se termine bientôt par une sorte de petit cul-de-sac. L'ensemble, gouttière et cul-de-sac. est couvert de cils vibratils courts. L'élargissement postérieur de la goutière se fait de telle façon que, de face, elle paraît venir s'ouvrir dans une petite fosse ovalaire à grand axe transversal. Le fond du cul-de-sac répond à un organe tout à fait superficiel ayant la forme d'un cube aplati, qui se continue CONTRffiUTION A l'ÉTUDE DES ROTATEURS. 679 en ai'rière dans deux prolongements assez longs. Ces derniers se réunissent à des éléments de la substance conjonctive. Cet organe ventral est formé de protoplasme polynucléé, sans limites cellulaires visibles; les noyaux y sont répartis symétriquement, au nombre de cinq. Comme on a pu le voir, les pages qui précèdent sont le résultat d'une étude purement objective, et il serait au moins prématuré de vouloir en tirer l'une ou l'autre conclusion générale. Il faut considérer ce mémoire comme le début d'un travail qui, étendu aux diverses familles de Rotateurs et accompagné de l'étude du développement de quelques formes, permettrait seulement alors des conclusions importantes et sérieuses en ce qui concerne l'ontogénie et la pliylogénie des diverses formes de ce groupe. 680 JEAN MASIUS. EXPLICATION DES FIGURES. PLANCHE XXV. - Asjnanchna. Fig. 1. Asplanchna ^ vue de profil. Le système nerveux est teinté en jaune, le système musculaire en rose. G. c. Ganglion cérébral. 0. s. d. Organe de sens dorsal. Es. Estomac. V. Vitellogène. Ov. Ovaire proprement dit. 0. s. V. Organe de sens ventral. 0. b. Orifice buccal. t. c. tissu conjonctif. N. Nerf principal. G. s. Glande salivaire. Fig. 2. Tète d'Asplanchna vue par au-dessus, pour démontrer l'inner- vation des cellules de l'appareil vibratil. Le système nerveux en jaune. Le système musculaire en rose. M. Mandibules aperçus dans la profondeur. N. Le grand nerf principal qui contourne l'insertion du grand muscle latéral, puis se dirige vers l'extrémité postérieure du corps (voir fig. 1). -X. Deux cellules nerveuses unies d'une part au ganglion cérébral, d'autre à la grande cellule ganglionnaire de laquelle part le nerf principal. Fig. 3. Vue du pharynx évaginé, de face. M. Cellules contractiles. m. Petits filaments musculaires pour les mandibules. A. Appendices latéraux du pharynx après l'évagination. Fig. 4. Pharynx évaginé vu de profil, même grossissement, mais chez un individu plus jeune que celui de la figure précédente. Fig. 5. Un organe terminal de l'appareil excréteur, k un très fort grossissement. CONTRIBUTION A l'ÉTUDE DES ROTATEURS. 681 Fir. 6 et 7. Deux œufs d'hiver. Celui de la fig, 6 a atteint tout son développement. Celui de la fig. 7 est beaucoup plus jeune et provient d'une femelle qui portait, outre*cet œuf, un embryon ayant atteint un degré avancé de son développe- ment. Fig. 8. Un spermatophore avec spermatozoïdes. PLANCHE XXVI. Fig. 9. Appareil sexuel mâle. c. c. Cellule conjonctive qui n'est pas représentée dans la fig. 1. E. L'estomac esquissé. T. Testicule. Fig. 10. Lacinularia socialis. Vue générale de face. 0. h. Ouverture buccale. A. c. Appen.àces céphaliques de l'appareil excréteur. X. Point où se fait la bifurcation antérieure de l'appareil excréteur. 0. V. Organe ventral. G. s. Glande salivaire. V. Vitellogène. 0. Œuf en voie de formation. 1. t. Intestin terminal. A. e. Appareil excréteur. M. Mandibules. Z). P. Dilatation latérale du pharynx. C. M. Cellules musculaires. G.m. Glande muqueuse. T. c. Traînées cellulaires superficielles, de signification incon- nue. C. m. c. Corps cellulaires des deux muscles à double striation oblique. Fig. 11. Tète de Lacinularia vue par au-dessus. Le système nerveux est teinté en jaune et les muscles en rose. G. c. Ganglion cérébral. C. t. Cellules nerveuses triangulaires, d'une part unies direc- tement au ganglion cérébral, et fournissant, d'autre part, quelques ramifications nerveuses pour des cellules de l'appareil vibratil. 682 ■ JEAN MAsros. A. e. Appendice céphalique de l'appareil excréteur, réuni à l'appareil vibratil par deux prolongements protoplas- miques épais ]) et p'. Fig. 12. Coupe frontale dans le tronc de Lacinulax'ia, montrant nette- ment la situation et les rapports de l'ovaire propre- ment dit. Ov. Ovaire. V. Vitellogène. T. Tube digestif. G. s. Glandes salivaires. E. Appareil excréteur qui a été atteint d'un côté seulement. 0. Un œuf en voie de formation. Fig. 13. Lacinularia socialis; exemplaire très jeune — (forme soi- disant larvaire). Vue de profil. 0. b. Ouverture buccale. 60Ù1# DEC 1974 222 Date Due ili ;|: 1