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CE à Lé Or: De LAN PR à ARAANT Te D VEN AT San 77 fi » de vi ‘ ARCHIVES DE LOOLOGIE EXPÉRIMENTALE ET GÉNÉRALE ARCHIVES DE LOOLOGIE EXPÉRIMENTALE ET GÉNÉRALE Histoire Naturelle. — Morphologie. — Histologie Évolution des Animaux PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE / HENRI DE LACAZE-DUTHIERS MEMBRE DE L'INSTITUT DE FRANCE (Académie des Sciences) PROFESSEUR D'ANATOMIE COMPARÉE ET DE ZOOLOGIE À LA SORBONNE (Faculté des Sciences) FONDATEUR ET DIRECTEUR DU LABORATOIRE DE ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALE DE ROSCOFF ET DE LA STATION MARITIME DE BANYULS (Laboratoire Arago) DEUXIÈME SÉRIE! |, TOME V. SUPPL. — bis (ANNÉES 1881-a-1806) [l } % ANNÉE 1887 Yom PARIS LIBRAIRIE C. REINWALD 15, RUE DES SAINTS-PÈRES, 19 be ina du: + À. Lies ue à Ne St TABLE « DU VOLUME V bis SUPPLÉMENTAIRE (ANNÉES 1887-à-1890) DES ARCHIVES DE ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALE ET GÉNÉRALE * Accompagné de 42 planches dont quelques-unes en couleur x: M». I. — A. LETELLIER, chargé du cours de physique au Lycée d’Alen- 50 çon. Étude de la fonction urinaire chez les Mollusques acéphales, avec 3 planches doubles, quelques-unes en couleur. 2 NEC IT. — L. CUENOT, licencié ès-sciences naturelles de la Faculté des h Sciences de Paris. Contribution à l'Étude anatomique des Asté- rides, avec 9 planches, quelques-unes en couleur. Se M£m. III. — L. JOUBIN, docteur ès-sciences naturelles, préparateur à la à Faculté des sciences de Paris. Recherche sur la morphologie comparée des glandes salivaires, avec 3 planches en couleur. _ Mém. IV. — Émile TOPSENT. Contribution à l'étude des Clionides, avec pe 7 planches. | MÉm. V. — René CHEVREL. Sur l'anatomie du système nerveux grand ul Frs sympathique des Élasmobranches et des Poissons osseux, avec 6 planches, 4 Mar. VL. — G. SAINT REMY, docteur en médecine, préparateur à la Faculté HEUs des sciences de Nancy. Contribution à l'étude du cerveau chez les Arthropudes trachéates, avec 14 planches. Ce [1 eh à À Te pr y se dot De Rte - SANT TA | “a A t « + VA, A Î . f F . L / 0... f ARE | | Se, ” er Far d “Ne te «9 10. 11. BIBLIOGRAPHIE Agassiz (A.). Embryology of the Starfish, Contrib. Nat. Iist. U. $., vol. V, 1864. — North American Starfishes, Memoirs of the Museum of Com- parative Zoology at Harvard College. Cambridge Mass. voi. NV, n°1, 1877: Baudelot. Etudes générales sur le système nerveux, Arch. Zool. exp., tome I, 1872, pag. 171. Bell. Note sur l’Asterias glacialis et les espèces alliées, Zool. Anz., juin 1882, analysé dans Arch. Zool. exp., tome 10, Are série, 1882, Notes et Revues, pag. LIx. Carpenter (H.). The minute Anatomie of the brachiate Echi- . noderms (The Quaterly Journal, april 1884). — Sur les relations anatomiques du système vasculaire chez les Echinodermes (The Quaterly Journal, oct. 1883, pag. 537), analysé dans Arch. Zool. exp., tome 2, ?m° série, 4884, Notes et Revues, pag. xIx. — Notes sur la morphologie des Echinodermes (The Quaterly Journal, avril 1884), analysé dans Arch. 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Perrier (Revision des Stellérides), qui a surtout rapport à la classification de ces ani- maux. d J'ai désigné chaque ouvrage par un numéro d'ordre; dans le cou- rant de ce travail, je citerai simplement le numéro, on n'aura qu'à se rapporter à la liste bibliographique pour trouver toutes les indi- cations nécessaires. MES Les GT RE 1h EN à ÉTUDE DE LA FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES PAR AUGUSTIN LETELLIER CHARGÉ DE COURS DE PHYSIQUE AU LYCÉE D’ALENCÇON CHAPITRE I. RÉSUMÉ DES RECHERCHES QUI ONT ÉTÉ FAITES A DIFFÉRENTES ÉPOQUES AFIN DE CONNAITRE LA PHYSIOLOGIE DE L'ORGANE DE BOJANUS DES MOLLUSQUES ACÉPHALES. — CAUSES DE L’INSUCOËS DE CES RECHERCHES. Les naturalistes ont donné divers noms à la glande des Mollus-: ques acéphales dont les sécrétions, ou lesexcrétions, font l’objet de ce travail. Située dans la partie dorsale de l’animal, c’est-à-dire sous la charnière, au-dessous et sur les côtés du cœur, par conséquent à la base des branchies, elle est ordinairement paire. Chacune de ses parties communique avec celle qui est du côté opposé par un orifice situé en avant, et débouche latéralement dans le sillon que forment le pied et la branchie interne par un pore qui est placé sur une papille. Lister, et après lui Moquin Tandon (1), à cause desa position dans le voisinage du cœur, l’ont appelée la glande pré- ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2 SÉRIE. — T. V bis, — supp. 1887. — Mém. 1 2 AUGUSTIN LETELLIER. cordiale ; Cuvier l’a désignée sous le nom d’Organe de la viscosité, de sac de la glu ; Jacobson, Hunger, Siebold, de Blainville, sous celui de rein, d’Organe de la dépuraticn urinaire. C’est le professeur de Lacaze-Duthiers (3) qui le premier, dansson Mémoire sur l’Organe de Bojanus des Acéphales, lui a donné le nom du savant professeur de Wilna,rendantaïinsiau travail consciencieux, quoique erroné en plusieurs points, de Bojanus @) une justice dont il n’a pas toujours été payé de retour. Ense reportant à ce Mémoire qui n’a laissé aux anatomistes, rien à refaire,presque rien à ajouter, on voit que latopographie des Corps de Bojanus est très compliquée et qu’elle éprouve de nombreuses modifications dans la série des Mollusques acéphales. Si l’on examine avec soin leur texture histologique, il ne semble point douteux que les Sacs de Bojanus ne soient de véritables glan- des. Que l’on puisse ou non les comparer à un organe segmentaire, leurnature glandulaire ne fait aucun doute : aussi, bien avant que l’on ne connût exactement leur constitution, sans même savoir leur topographie, les naturalistes cherchaient déjà quel pouvait bien être leur rôle physiologique. Ils se sont souvent trompés, il n’en pouvait êtreautrement. C’est qu’il ne suffit pas, pour fixer la fonc- tion d’une glande, d’en faire l’anatomie, de décrire avec soin ses éléments histologiques, de rappeler les connexions qu’elle a avec les autres organes del’animal, de s’aider, en un mot, des seules don- nées que l'anatomie comparée peut mettre à notre disposition ; il faut que l’analyse chimique aït dit la nature exacte des produits qu’elle sécrète. Il n’est même pas certain que, ces connaissances une fois acquises, le problème soit résolu, tant la division du travail physiologique chez les animaux inférieurs est probablement différente de celle que nous avons coutume d’observer chez l’homme et chez les ver- tébrés supérieurs. _ Quand on consulte les différents mémoires écrits sur l’Organe de Bojanus, on voit qu’il n’y est parlé qu’incidemment des sécrétions FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 3 de la glande et seulement lorsque des concrétions remarquables par leur grosseur ou par leur transparence se sont rencontrées par hasard dans les cellules du tissu examiné. Aucun travail d’ensem- ble ayant pour but l’étude de la sécrétion elle-même, tant liquide que solide, n’a été tenté. Seul le D' Voit, de Munich, en étudiant l'Auître perlière, a cherché si certains corps existent dans les Sacs de Bojanus. Il ne les y a point trouvés et n’a rencontré que du phosphate de chaux. Avant de donner un résumé de ses recherches qui oné paru dans la Zeütschrif f. wissenschaflliche Zoologie , et dont l’importance au point de vue physiologique est réelle, je crois devoir faire connaître les résultats des observations des autres naturalistes. Le professeur Lacaze-Duthiers, se trouvant à Mahon, a observé à l’intérieur des papilles qui tapissent la face interne des Sacs de Bojanus du Jambonneau des sécrétions perliformes, arrondies, transparentes, d’une couleur brunâtre (rappelant la terre de Sienne) et à lignes concentriques. Riche, qui s’était chargé de les ana- lyser, a cru y reconnaître la présence de l’urée en employant la mé- thode de Millon. Malheureusement la quantité de matière était insuffi- sante, et par conséquent le résultat de l'analyse douteux. Plus heu- reux avec des Lutraires que Lacaze-Duthiers avait rapportées de Saint-Jacut-la-Mer, Riche, en desséchant la poussière brunâtre qui s'échappe de l’Organe de Bojanus de ces acéphales, puis en la trai- tant à chaud par une dissolution de potasse caustique et en décom- posant la solution par l’acide chlorhydrique, a obtenu un précipité d'acide urique. En effet, les cristaux ainsi préparés étaient inso- lubles dans l’eau, l’alcool et l’éther ; quand on les traitait par l’a- cide azotique et qu'on soumettait ensuite le résidu à l’action des vapeurs d’ammoniaque, la couleur rouge si caractéristique de la murexide apparaissait. Examinée au microspope, la poussière brunâtre qui s’échappe des Corps de Bojanus de la Lutraire possède l'aspect ordinaire de l'acide urique. Les cristaux qui la forment sont groupés autour 4 AUGUSTIN LETELLIER. d’un noyau de matière colorante, comme cela s’observe très sou- vent dans les dépôts urinaires. La Mactre a présenté aussi à Lacaze-Duthiers des cristaux qui rappellent ceux de l'acide urique : le dessin qu’ilen a donné est bien semblable à celui que Robin et VerdeilQN ont figuré PI. XVI, fig. I, d, lequel représente des cristaux d'acide urique hydraté déposés ra- pidement de leur dissolution dans l’eau chaude. Funke (9) n’a point reproduit cette forme cristalline à la PI. VII de son atlas. On regrette qu'il n’ait point été fait une analyse concluante des calculs de la Mactre, car la similitude des formes cristallines ne garantit pas l'identité de composition, et rien ne prouve que les con- crétions observées fussent réellement constituées par de l'acide urique ; c’est même assez douteux, comme on le verra plus loin. On a fait observer que Lacaze-Duthiers n’est pas le premier qui ait annoncé que l’Organe de Bojanus des Acéphales renferme de l'acide urique, et que Richard Owen (7) l'avait ditavant lui. C’est exact ; mais malheureusement ce savant observateur n’a pas laissé le détail des analyses sur lesquelles il basait sa découverte. Or ilest facile de trouver plusieurs corps ayantavec l'acide urique des formes . cristallines identiques, on peut même en indiquer dont les réac- tions, en présence de l'acide azotique et de l’ammoniaque, par exemple, sont sensiblement les mêmes. En l'absence d'indications précises, l’annonce de la présence de l’acide urique dans l’Organe de Bojanus ne pouvait être considérée que comme celle d’une dé- couverte, importante si elle avait été prouvée, mais insuffisamment démontrée dans les conditions où il la présentait. Siebold nous dit qu'étant parvenu à recueillir une quantité con- sidérable de calculs qui provenaient d’un Pectunculus pilosus, il les donna à de Babo pour en faire l’analyse. Ce chimiste trouva qu’ils étaient en majeure partie formés de phosphate de chaux, avec une trace de phosphate de magnésie et une faible quantité FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 5 d’une matière organique se comportant avec l'acide nitrique exacte- ment comme l’acide urique. Ainsi, des calculs trouvés dans l'Organe de Bojanus, produits évidemment pathologiques, avaient seuls été analysés quand Will et Grorup Besanez ($) crurent trouver dans la glande elle-même la gua- nine qu'ils venaient de découvrir chez l’Æpeire diadème. C'est là la première tentative d’une recherche ayant la sécrétion même de la glande pour objet. Mais ces physiologistesn’ont pas tardé à être suivis dans la même voie, par Voit (10) surtout. Malheureusement, pour des raisons que j’exposerai plus loin, aucun corps nouveau, si l’on enexcepte le fer et le phosphate acide de chaux, n’a été ajouté par les successeurs de Will et de Gorup Besanez à la liste, pourtant si courte, de ceux que l’on savait exister dans la glande. Aussi, avant de parler des mémoiresde Schlossberger (°) et de Voit, je ferai res- sortir l'importance des découvertes antérieures. Au premier abord, il paraît étrange que le premier corps dé- couvert dans l’Organe de Bojanus, c’est-à-dire dans une glande à laquelle sa position assigne le rôle d’un foie, ait été l'acide uri- que, un des produits ordinaires de la sécrétion urinaire. Mais il ya deux raisons pour cela: la première, l’acide urique était déjà si- gnalé dans le Sac des Gastéropodes, et l’analogie de position ayant amené l'identité desnoms, les naturalistes ont été tout naturellement conduits à supposer qu'il y avait identité dans les produits excré- tés, et par conséquent ils les ont cherchés. La seconde raison est la suivante : l'acide urique, insoluble dans l’eau, l'alcool, l'éther et les acides, se signale immédiatement par ses formes cristallines, souvent caractéristiques, à l'attention des observateurs. Quoi qu'il en soit, la présence de l’acide urique dans des concrétions patho- logiques de l’Organe de Bojanus était assurément un fait de la plus haute importance ; mais suffisait-elle pour qu'il fût permis d’en conclure immédiatement la fonction de la glande? C’est une question que nombre de naturalistes, et des plus éminents, n'ont pas craint de trancher par l’affirmative. Pour R. Owen, pour Sie- 6 AUGUSTIN LETELLIER. bold, Deshayes, de Blainville, Organe de Bojanus est un rein. Lacaze-Duthiers se range aussi à cette opinion, mais il émet des réserves dont les observations ultérieures devaient montrer l’impor- tance. € L'opinion la plus vraisemblable, la plus accréditée aussi, « écrit-il en effet, est que le sac de Bojanus joue le rôle d'un « rein. Or on se base sur la présence de l’acide urique, comme « s’il était par avance démontré que la sécrétion urinaire était tou- € jours caractérisée dans la série animale par la présence de cet « acide. On se demande si la présence, dans une partie de l’orga- « nisme, de quelques concrétions se comportant comme de l'acide « urique est bien une preuve que cette partie est un rein. Nous sa- € vons si peu sur les fonctions des animaux inférieurs que vérita- & blement c’est aller un peu vite en se prononçant catégoriquement « sans autres preuves. » Si cette réserve est prudente quand il y a de l’acide urique, combien n'est-elle pas indispensable quand il est prouvé que cet acide, trouvé chez la Lutraire et le Pectunculus pilosus, soupçonné, mais à tort probablement, chez la Mactre, n'a depuis été rencontré chez aucun autre Mollusque acéphale. Les concrétions d'une Pinne marine analysées par Schlossberger n’en renfermaient pas ; ilen est de même de la sécrétion de l’Organe de Bojanus de l’Anodonte et de l’Huître perlière, et même des calculs d’un Pectunculus pilosus, suivant le D' Voit. Enfin la suite de ce travail montrera que ce n’est pas là un fait particulier à ces mol- lusques, puisque je n’en ai jamais trouvé, quoique j'aie étudié la sécrétion bojanienne d’un grand nombre d’entre eux, et que j'y aie pu constater la présence de beaucoup d’autres corps. En 1856, Schlossherger a fait connaître l'analyse de deux concrétions de la grosseur d’un petit pois retirées par lui de l’organe de Bojanus d’un Pinna nobilis. L'une de ces concrétions était brun clair, l’autre presque noire. Toutes les deux étaient insolubles dans l’eau, l’alcool et l’éther, et en présence des acides donnaient naissance à une légère effervescence. Par calcination elles répandaient l’odeur de la corne brûlée ; elles n’étaient'cepen- FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 7 dant pas combustibles, puisqu'elles renfermaient 64,33 O[0 de matière minérale. La plus grande partie des calculs était consti- tuée par les phosphates de chaux et de magnésie ; il y avait en outre du carbonate de chaux et une trace d’oxyde de fer. En chauffant quelques granulations entières avec de l’acide azoti- que, ilse formaitautour de cesdernières un anneau d’unliquide jaune foncé d’où se dégageaient des bulles gazeuses ; mais la dessicca- tion n’amenait que la formation d’une masse brunâtre qui ne prenait point la couleur rouge avec l’ammoniaque. L’acide urique n’existait point non plus dans la partie que l'a- cide chlorhydrique ne pouvait dissoudre. En effet, le précipité brun renfermant du fer, insoluble dans cet hydracide, fut dissous dans une lessive de potasse bouillante ; il se dégagea de l’ammoniaque, et, après avoir jauni, le liquide finit par prendre la couleur malaga. Schlossberger en a conclu que les concrétions étaient formées d’une partie minérale et d’une matière colorante. De son côté, Voit(10) n’a pu trouver d'acide urique ni chez l’ Ano- donte, ni chez l’Huître perlière, ni enfin chez le Pectunculus pilosus. Sa méthode laisse, si l’on veut, place à la critique : ainsi ila employé un nombre d’animaux réellement insuffisant ; il n’a pas toujours dissocié les organes dontil voulait connaître les sécrétions, et on peut aussi lui reprocher de n’avoir point toujours attendu un temps assez long pour qu’il fût assuré que les corps dont il annonce l'absence n’existaient point en réalité ; néanmoins on pourrait difficilement douter de l’exactitude de ses recherches en ce qui concerne l’acide urique. Un corps aussi insoluble, aussi facile à caractériser, n’aurait pu lui échapper. Par sa manière d’opérer, Voit a même prouvé que cet acide n'existe dans aucune partie du corps des mollusques qu’il a étudiés, puisqu'il a souvent traité l'animal entier par les réac- tifs appropriés à ce genre de recherches. Du reste, voici ce qu'il a fait. Dans une première expérience, il a desséché à 100°40 uîtres perlières environ, puis il les a traitées par l’eau de chaux bouillante à 8 AUGUSTIN LETELLIER. a filtré et acidulé le résidu par l’acide chlorhydrique. Au bout de 48 heures, il ne s’était pas encore formé de cristaux. Dans une seconde expérience , les Organes dissociés et pulvéri- sés d’un grand nombre (il ne dit pas lequel) d’ÆAuîtres perlières ont été traités par l’eau bouillante. Le liquide a été évaporé pres- que à siccité et enfin additionné d’acide acétique. Cette fois en- core, il ne se forma pas de cristaux. C’est alors que, pensant qu’il lui serait plus facile de découvrir les principes urinaires s’il les cherchait dans la partie périphérique de l’Organe de Bojanus, le D' Voit dessécha avec soin vingt exem- plaires de l'Auître perlière tirés vivants de l’eau. Le résultat sec finement pulvérisé n’abandonna à l’alcool bouillant aucune trace d’urée. Ayant ensuite traité par une grande quantité d’eau la par- tie insoluble dans l’alcool, il obtint un liquide à réaction alcaline qui devait renfermer l’acide urique. Il concentra donc le liquide : des pellicules superficielles se formèrent, il les enleva au fur et à mesure et les mit en présence de l’acide acétique. Il se forma dans ces conditions un précipité de matières albuminoïdes qui renfermait quelques cristaux transparents qui n’étaient ni de l’acide urique ni de l'acide hippurique. Ce qui restait après le traitement par l’eau ayant été chauffé avec l'acide chlorhydrique, il ne se forma point de cristaux; mais seulement des flocons brunâtres qui, au microscope, semblaient formés uniquement de granulations très petites, probablement constituées par de l’albumine. | | Plus tard Voit a traité un grand nombre d'Organes de Boja- nus desséchés par une lessive de potasse qui n’en a dissous qu’une faible partie, laissant un résidu abondant et d’aspect ter- reux. Un courant d’acide carbonique passant à refus, n’ayant pas amené la formation de cristaux, l’expérimentateur en a con- clu à l'absence de l'acide urique , de la guanine, de la xan- thine et de l’hypoxanthine. Avec le sel ammoniac, rien ; pas de guanine ou de xanthine: avec l'acide acétique en ex- 6 non dt let nait FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 9 cès, rien non plus, des flocons brunâtres seulement, pas de cystine : enfin, après filtration et addition d’acide chlorhydrique aucun précipité n'ayant été obtenu, il n’y avait pas de xanthine. Un fragment de l’Organe de Bojanus et de l’Unio ou de l’Ano- donte chauffé en présence de l’acide azotique concentré a fourni à Voit une solution jaune, ne donnant point avec l’ammoniaque ou la potasse la couleur rouge qui caractérise l'acide urique : seule une coloration jaune plus foncée est apparue, et il faut l’at- tribuer à l’action de l'acide sur la matière albuminoïde. Enfin le D’ Voit a eu, comme je l'ai dit plus haut, l’occasion d'étudier les granulations extraites de l’Organe de Bojanus d’un Pectunculus pilosus, et, contrairement à toute attente, il n’y a point trouvé d'acide urique. Les calculs qu’il analysa étaient remarquables par leur grosseur et variaient depuis les dimensions d’un grain de sable jusqu’à celles d’une lentille. Leur couleur était jaune et ils étaient transparents comme du verre. Ils ne faisaient point effervescence avec l'acide azotique ét se comportaient comme du phosphate acide de chaux. Or, quoiqu'il fût bien permis de penser que l'acide urique , s'il se trouve d'ordinaire en quantité infime, devait s’être accumulé dans ces concrétions pathologiques, l'épreuve de la murexide a été cons- tamment nulle ; les calculs ne renfermaient pas d’acide urique. Voit n’a pas trouvé de guanine chez l’Anondote. Il ne re- garde pas comme caractéristique la couleur jaune qui apparaît quand on traite un fragment de l’'Organe de Bojanus de ce mol- lusque par l'acide azotique et l’ammoniaque. Le muscle posté- rieur de l’Unio se colore en jaune en présence des mêmes réactifs, et cette couleur doit être attribuée à l’albumine. Cette manière de voir est si universellement adoptée depuis Voit, qu’il n’est plus fait mention de la guanine comme étant un des élé- ments de la sécrétion Bojanienne des Mollusques acéphales dans les ouvrages les plus récents. En résumé, d’après les travaux les plus récents, on ne trouve ! 10 AUGUSTIN LETELLIER. dans l'Organe de Bojanus des Mollusques acéphales, ni urée, ni acide urique, ni acide hippurique, ni guanine, ni xanthine, ni hypoxanthine, ni cystine, mais seulement des matières albuminoï- des indéterminées et des calculs formés ordinairement de phos- phate de chaux, avec des traces de phosphate de magnésie et de peroxyde de fer. Ænfin Riche a trouvé, chez la Lutraire de Saint-Jacut-la-Mer et chez un Pectunculus pilosus, des traces d’acide urique. Dans ces derniers temps, Krukenberg a découvert chez un Pinna squammosa des concrétions presque en entier formées d'un sel de manganèse. On remarquera que les naturalistes, qui à diverses époques ont analysé des concrétions, ne sont tombés d'accord que sur un seul point: tous ont reconnn dans ces produits anormaux dela glande la présence de phosphates. Mais tandis que de Babo et Schlossber- ger y voyaient du phosphate de chaux uni à du phosphate de magnésie, Voit n’y trouvait que du phosphate acide de chaux. Est- il vrai que les produits sécrétés par l’Organe de Bojanus sont diffé- rents quand on passe d’une famille à une autre, d’un animal à un autre ? Evidemment oui, cela est vrai, et le Pectunculus pilosus est un exemple remarquable de la diversité de composition des calculs, que deux animaux appartenant à la même espèce peuvent offrir : les calculs que de Babo a analysés, renfermaient de l’acide urique, ceux que Voit a étudiésn'en contenaient pas. Mais d’autres raisons encore auraient fort bien pu produire ce manque de concor- dance dans les résultats : les méthodes analytiques suivies par les expérimentateurs n’ont pas toujours été excellentes, et d’un autre côté ce genre de recherche présente des difficultés particulières. Il faut en outre observer que l'analyse zoochimiqueest une science toute récente, à peine aujourd'hui comprise parmi les branches diverses de l'Enseignement supérieur, et qu’il n’est pas surprenant que des analyses faites il y a déjà plusieurs années, et à plus forte raison quand elles datent du commencement de ce siècle, ne FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 41 dorinent souvent que des résultats incomplets et contradictoires. Enfin les animaux inférieurs, le plus souvent de petite taille, se prêtent difficilementaux procédés d'analyse habituellementemployés par les physiologistes. Il est malaisé de séparer exactement une glande des parties qui l’entourent ; ilest impossible de la soumettre aux moyens d'investigation ordinairement employés. Le système des fistules artificielles | par exemple , qui a permis de se rendre un compte si exact de la sécrétion gastrique de l’homme et du chien, ne saurait être appliqué. Il en résulte que souvent les natu- ralistes ont eu recours à un procédé que j'ose dire barbare et qui était le seul auquel ils crussent pouvoir recourir en présence de tant de difficultés : ils ont trituré l’animal entier et cherché, dans le magma qu’ils obtenaient, les principes organiques qu'ils déses- péraient d'obtenir par une autre méthode. Tel a été le procédé suivi par Fredericq, quand il a cherché les ferments digestifs du Co- limagçon, et par Voit dans une partie de son étude chimique de l’'Huître perlière. Les inconvénients que présente une semblable manière d'opérer sautent aux yeux, et il y a longtemps que Valen- ciennes et Fremy avaient su les éviter dans leurs « Recherches sur la composition des œufs et des muscles dans la série animale ». Il faut encore remarquer que , parvint-il à force de patience à isoler l’organe qu’il étudie , le naturaliste n'en reste pas moins très souvent dans l'impossibilité de faire des analyses quelque peu exactes, à cause de la difficulté qu'il éprouve à se procurer un nombre d’exemplaires suffisant de l'animal objet de son travail. Il n’y a point besoin pour cela qu'il soit très rare ; il suffit qu’il ne soit pas excessivement commun. Ainsi, maloré l'extrême obli- geance avec laquelle il m'a été, à différentes reprises, fait des envois de Cythérées du Laboratoire de Zoologie expérimentale de Roscoff (1), je n’ai pas pu extraire de l’Organe de Bojanus de ces (1) Je prie M. le Professeur Lacaze-Duthiers d’accepter ici l'expression de toute ma reconnaissance pour la bienveillance avec laquelle il m’a ouvert son Laboratoire et rendu possible par des envois réitérés de mollusques l’étude que j'avais entreprise depuis longtemps sur la sécrétion bojanienne des Acéphales. 12 AUGUSTIN LETELLIER. animaux toutes les substances que j'ai retirées par la suite de la même glande chez la Moule commune ; des premières, je n’ai eu que quelques centaines d'individus ; des seconds, j’en ai traité des milliers. Or, quand les produits sont peu abondants, si sensibles que soient les réactions microchimiques, si nettes que soient les formes cristallines, il est souvent impossible de déterminer la na- ture des corps que représentent seuls quelques cristaux épars au milieu d’une préparation. Dans tous les cas, en présence du peu de concordance des résul- tats obtenus, quelle qu'en soit d’ailleurs la cause, qu’elle vienne des sécrétions elles-mêmes, variables d’un mollusque à un autre, ou du nombre réellement insuffisant des animaux étudiés et de la méthode d'analyse suivie par les expérimentateurs, il était désira- ble que de nouvelles recherches fussent entreprises. Mais alors il fallait que celui qui les poursuivrait soumît à ses analyses les sé- crétions de plusieurs espèces de mollusques, qu'il traitât de cha- cune d’elles un grand nombre d'individus, et que, s entourant de toutes les ressources de la chimie biologique, il se servit des pro- cédés analytiques perfectionnés mis aujourd'hui à la portée des physiologistes. Un pareil travail exige plus de patience que de sa- voir, plus d'analyses que de raisonnements. Ce n’est pas une raison pour en nier l'utilité : la moindre vérité démontrée possède, à nos yeux, plus de poids que la plus brillante des idées préconçueset que la plus ingénieuse des théories. CHAPITRE IL. DE LA SÉCRÉTION BOJANIENNE DE LA MOULE COMMUNE. — RAISONS QUI ONT DÉTERMINÉ LE CHOIX DE LA MOULE POUR SUJET D'ÉTUDE. — ORDRE SUIVI DANS CES RECHERCHES. — DESCRIPTION SOMMAIRE DE L'ORGANE DE BOJANUS DE LA MOULE. — VOIES QUE SUIVENT LES PRODUITS SOLIDES OU LIQUIDES SÉCRÉTÉS OU EXCRÉTÉS PAR LA GLANDE. — LA SÉCRÉTION BOJANIENNE DE LA MOULE EST NEUTRE AUX RÉAC- TIFS COLORÉS ET RENFERME DES MATIÈRES ALBUMINOÏDES. Le choix que j'ai fait de la Moule commune comme sujet d’étude, en vue de connaître la nature de la sécrétion bojanienne des Mollusques acéphales, est facile à justifier. Il suffit en effet de rappeler que c’est au nombre insuffisant des animaux qu’ils ont employé dans leurs recherches que les naturalistes ont dû le plus souvent l’insuccès de leurs analyses. Pour trouver la créatine, par exemple, on recommande de traiter au moins une dizaine de kilogrammes de chair musculaire, si l’on désire pouvoir compter sur un résultat certain. Que signifient quarante /luîtres perlières devant un pareil poids, et qui s’étonnera que Voit n’ait rien trouvé ? La Moule et la Coque, Cardium edule, sont les deux acéphales qu’on trouve le plascommunément sur nos marchés, et il est facile de se les procurer en abondance. Mais l’Organe de Bojanus de la première est bien plus grand, bien plus facile à distinguer et par suite à dissocier que celui du Cardium : j’ai done choisi la Moule. J'ai opéré sur des animaux de grande taille, ce qui m’a rendu la dissection plus aisée et surtout infiniment moins longue quesi J'avais employé des Moules ordinaires. Or c’est la une considé- ration qui n’est point à négliger, si l’on songe que, pour les ana- 14 AUGUSTIN LETELLIER. lyses qui comportaient un grand nombre d'opérations, j'ai employé jusqu’à cinquante litres de grosses Moules d’Isigny, c'est-à-dire que dans ces expériences j'ai dû séparer avec soin des parties qui l'entourent l'Organe de Bojanus de plus de 3,000 animaux. Si en- nuyeuse que fût cette dissection, elle était nécessaire parce que la ponction des Sacs ne donnait qu’un résultat insignifiant. Evidem- ment la dissection a été grossière, et je n’ai pas la prétention d’a- voir enlevé uniquement l’Organe de Bojanus de toutes ces Moules ; mais, telle que je l’ai pratiquée, elle offre encore des avantages nombreux sur le traitement de l'animal entier, comme l’ont fait Fredericq et Voit. Il va sans dire que cette dissection est une opé- ration extrêmement iongue, que la dextérité, rapidement acquise par l'opérateur, ne permet pas d’exécuter en quelques heures seulement : aussi faut-il, pour éviter les altérations que le temps ne manquerait pas de faire éprouver aux glandes dissociées, les plonger immédiatement dans l'alcool à 90e. En évaporant plus tard l’alcool et l’eau, puis desséchant sur l’acide sulfurique, on a les Organes de Bojanus de la Moule dans un état convenable pour tous les essais auxquels on croit devoir les soumettre. Avant d'entrer dans le détail des analyses que j'ai faites, je crois devoir indiquer l’ordre que je me propose de suivre dans cet exposé de mes recherches. Après avoir donné une description sommaire de l’Organe de Bojanus de la Moule, description que j'emprunterai aux € Etudes sur la Moule commune » par le professeur Sabatier, j'indiquerai la voie quesuivent les liquides pour sortir au dehors; j'expliqueraicom- ment, de centrales qu’elles étaient à l’origine , les concrétions de- viennent périphériques àla fin; puis je passerai à l’étude purement chimique des sécrétions ou excrétions de la glande, c’est-à-dire que Je chercherai à isoler, à distinguer les divers principes immé- a Pr ? diats qu'elle renferme, sans altérer leur nature ; qu’en un mot, RL , FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 45 je tenterai de les obtenir tels qu'ils existent dans le corps de l’ani- mal. Malheureusement il n’y a pas encore, malgré les progrès de l'analyse zoochimique, de méthode générale qui permette de sépa- rer successivement les divers principes immédiats d’un liquide ani- mal au moyen d’une seule série d’essais. [Il est même impossible par une analyse générale d’en déterminer la nature, chose qui se fait communément pour les corps de la chimie minérale. Dans bien des cas, et notamment lorsqu'il s’agit de substances que leur ra- reté dans l'économie cache facilement à l'observateur, il me faudra avoir recours à des procédés particuliers. C’est ainsi qu'après avoir déterminé la nature des principes immédiats solubles dans l’éther, l'alcool et l’eau, j'aurai à indiquer quelques expériences qui per- mettent de découvrir dans la sécrétion bojanienne celles de ces substances qui n’y sont qu’à l’état de traces. Encore même m'arri- vera-t-il quelquefois, en présence de cristaux microscopiques, de ne pouvoir employer les réactions microchimiques ordinaires. J’examinerai alors s’il est possible d’en faire néanmoins la détermi- nation ens’appuyant sur les circonstances qui ont précédé, accom- pagné ou suivi leur production. En résumé, voici donc l’ordre que je vais suivre. Je commence- rai, comme je lai déjà dit, par la description anatomique de l’or- gane de Bojanus de la Moule; j'indiquerai ensuite la voie qui est ouverte aux liquides et aux concrétions très petites qu’il sécrète ; j'expliquerai comment les calculs plus gros, venant à s’enkyster, ne cessent pas pour cela de cheminer au travers des paroïsde la glande ettombent à la fin dans le courant formé par l’eau qui a baigné les branchies. Cela fait, je montrerai que la sécrétion est neutre aux réactif colorés ; qu’elle renferme des substances albuminoïdes et de la mucine. J’étudierai ensuite les corps que la glande abandonne à l’éther, à l'alcool et à l’eau ; je chercherai par des méthodes par- ticulières les principes rares que l’analyse générale n’aura pas montrés ; j’examinerai soigneusement les calculs que renferme l'Organe de Bojanus, et j'en comparerai la composition avec celle 16 AUGUSTIN LETELLIER. des perles et de la coquille ; enfin, je terminerai par l'analyse des cendres. A l'inverse de ce que l’on observe chez les autres Mollusques acéphales, Organe de Bojanus de la Moule n’est point ramassé et nettement circonscrit, mais, en quelque sorte, dans un état de dis- persion ou de dissémination. Les sacs qui le forment semblent fen- dus longitudinalement ; et cette apparence, dont Lacaze-Duthiers a donné l’explication, a jadis induit en erreur Treviranuset Siebold. Comme cheztousles Acéphales, les Corps de Bojanus sont en con- tactavec la base des branchies, et celle-ci étant très étendue, il en est de même des Sacs qui vont des tentacules buccaux au muscle ad- ducteur postérieur des valves. [ls sont creux dans toute leur lon- sueur, et la cavité qu’ils renferment a reçu de Sabatier le nom de canal collecteur ; Lacaze-Duthiers l’appelle le canal ou la poche périphérique. De l’Organe de Bojanus de la Moule se détachent dans toute la région abdominale des replis nombreux ou piliers fusiformes qui, libres dans leur partie moyenne, adhèrent par leur extrémité infé- rieure à la face externe du foie. Un diverticulum du canal péri- phérique pénètre dans chaque pilier dont la partie inférieure en- tourée d’un tissu lacunaire est en communicationavec les vaisseaux superficiels de la région antérieure du corps. Le canal périphérique s’élargit d’avant en arrière ; il est an- fractueux et communique d’une partavec l’extérieur, par un orifice punctiforme situé sur une papille cachée derrière le pore génital, entre la bosse de Polichinelle et la base des branchies, et d’autre part avec le péricarde par une ouverture ovalaire placée au fond du couloir péricardique. Le professeur Sabatier regarde le couloir oblique du péricarde comme l’homologue de la cavité centrale de l’Anodonte : comme elle, en effet, il s’ouvre dans le péricarde et dans le canal périphéri- que et met ainsi les deux cavités en communication. FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 47 Quant aux grosses cellules sécrétantes de l’Organe de Bojanus, elles sont faciles à dissocier : ce sont alors des sphères de 18 {4 de diamètre environ, dont le noyau transparent est difficile à distin- guer, et qui renferment presque toujours des granulations colorées. Ilest à remarquer qu'aucune de ces cellules n'est ciliée ; ce fait semble en contradiction avec l’idée que l’on se forme habituelle- ment des cellules bojaniennes d’après Lacaze-Duthiers; mais il n’est pas particulier à la Moule, et nous verrons que la Cythérée, par exemple, n'offre de cellules à cils vibratiles que dans la cavité centrale. Polygonales quand elles sont pressées les unes contre les autres, les cellules bojaniennes de la Moule constituent une couche unique reposant sur une lame mince de tissu fibrillaire qui forme, soit la varoi de la grande veine longitudinale, soit celle des trabécules également fibrillaires du tissu conjonctif périphérique. Elles ren- ferment une matière protoplasmatique hyaline, au milieu de laquelle on observe de nombreuses granulations jaunes verdâtres qui d’or- dinaire cachent le noyau qui est très pâle. Ces granulations se réu- nissent généralement en un amas, central ; mais parfois aussi elles sont disséminées en plusieurs îlots distincts entourés d’une couche parfaitement transparente. Quelques cellules semblent avoir perdu leur noyau, ou du moins la réfrangibilité de celui-ci est identique à celle du contenu de la cellule et on ne le distingue pas. . Sans avoir la prétention de faire dès maintenant la physiologie de la glande, on est endroit de se demander ce que deviennent les produits solides et liquides qui résultent de la sécrétion des cellules, et de chercher le chemin qu'ils suivent. Deux voies leur seraient ou- vertes, le pore bojanien et l’orifice du couloir péricardique, si Sa- batier n'avait montré que la communication de ce dernier couloir avec le canal périphérique est fermée par une soupape qui permet bien aux liquides excrétés par le péricarde et par le couloir oblique de pénétrer dans le corps de Bojanus, pour de là être ARCH, DE ZOOL. EXP. ET GÉN, — 2° SÉRIE. — T. V bis, suppz. 1887. — 1er Mém. 2 18 AUGUSTIN LETELLIER . rejeté par le pore bojanien, maïs empêche tout retour inverse de la cavité périphérique dans le couloir et dans le péricarde. Les liquides et les solides qui proviennent de la sécrétion des cellules ne peuvent donc normalement sortir que par le pore bojanien. Tous ne suivent pas cependant cette voie, car, sans compter les liquides qui sont repris par le lacis sanguin qui tapisse de toute part la pa- roi de l’Organe.de Bojanus, il est évident que les granulations trop grosses ne peuvent sortir par le pore bojanien quiest excessi- vement fin. Elles restent donc dans le canal périphérique : li- bres d’abord, elles grossissent à la longue, grâce à l'attraction que toute substance cristalline exerce sur les corps qui lui sont identiques ou simplement isomorphes. En grossissant, elles sênent la nutrition des cellules sur lesquelles elles reposent, ce qui est cause qu'elles finissent par en amener la mort : alors elles s’en- kystent. Il semble vraisemblable que le phénomène qui se passe est analogue à celui qui détermine la disparition d’un clou enfoncé dans un arbre et que finit par recouvrir non seulement l'écorce. mais le ligneuxlui-même.On peut supposerqueles granulations qui reposent dans l’espace vide laissé par les cellules mortes, entourées qu'elles sont par des cellules vivantes, ne tardent pas à en être recouvertes, parce que ces cellules viennent en avant du côté du canal en bourgeonnant, et cela d'autant plus vite que le nombre des cellules détruites est plus grand et que l’excès de principesali- biles est plus grand par conséquent pour celles qui sont encore vi- vantes. Ce n’est là qu’une hypothèse ; mais elle expliquerait com- ment il se fait que, libres d’abord, puis enkystées dans les profon- deurs de la glande, par lacontinuation des mêmes causes agissantes, es graaulations finissent par devenir superficielles. Il suffit alors de la rupture de la mince paroi qui les sépare de l'extérieur pour qu'elles tombent dans le courant qui, après avoir baïgné les branchies, va sortir par cet orifice supérieur du manteau qui cor- respond au siphon anal. Ainsi tombent parfois des plaies des gout- teux des concrétions qui sont devenues superficielles. FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES 19 Les exemples de semblables enkystements sont rares, je n'en ai rencontré qu’un seul, mais il suffit pour nous expliquer la sor- tie des calculs qui ne peuvent, à cause deleur grosseur, s’échapper au dehors par le pore bojanien. Chez la Moule, les concrétions sont donc d’ordinaire microscopi- ques, soit parce que l’être est naturellement inapte à toute diathèse calculeuse, soit peut-être aussi parce que la vie de ces animaux, fort recherchés pour l'alimentation et aussi pour l’amendement des terres par les populations riveraines de la mer, est en réalité de trop courte durée. Cet aperçu sommaire de l'anatomie de l’organe de Bojanus de la Moule était indispensable pour comprendre ce qui va suivre, et tout le monde trouvera comme moi qu’il était utile de dire ce que de- viennent les produits que sécrète la glande. Il ne me reste plus qu'à les étudier maintenant d’une façon toute particulière, à donner d’abord les propriétés organoleptiques de la sécrétion brute , à sé- parer ensuite les principes immédiats qui la composent et à les caractériser par leurs réactions. C’est à quoi sera désormais consa- cré le reste de cette Étude. La préparation de la sécrétion brute de l’organe de Bojanus de la Moule exige quelques explications préliminaires. En effet, la dissection de la glande est une opération longue, mais simple, pour laquelle il est inutile d'indiquer une méthode particulière quand elle doit n’être faite que sur quelques mollusques seulement; mais il n’en est pas de même quand le nombre de ceux-ci s’élève à quelques centaines, voire à quelques milliers ; il est alors de la plus haute im- portance d'employer des moyens rapides : aussi crois-je devoir in- diquer comment j'ai opéré. Tenant la Moule de la main gauche, j'appuie le bord libre des valves sur une planche, et d’un conp de couteau je tranche entièrement la charnière ; l’animal est ainsi coupé en deux. Je détache ensuite chacun des sacs, en ayant soin de 20 AUGUSTIN LETELLIER. séparer les piliers fusiformes dans le haut, afin de n’emporter aucune parcelle du foie. L’opération est facilitée par la couleur jaune brun de l’Organe de Bojanus, couleur qui tranche nettement sur le vert foncé du foie et sur le blanc laiteux du reste du corps. Les glandes dissociées sont triturées dans un mortier en présence de l’eau pure ; on filtre ensuite sur un papier poreux, comme le pa- pier berzelius ou le papier macéré à la gelée , et on obtient un liquide limpide. Il est indispensable d'avoir recours au papier, parce que le passage au travers d’un linge non amidonné n’arrête point suffisamment les corps étrangers et que le liquide est toujours trouble. On peut aussi employer un appareil aspirateur : la filtra- tion se fait alors baucoup plus vite ; mais cela n’est point indis- pensable, parce que la fibrine de la Moule ne se coagule pas etqu'il est par suite inutile de craindre de la voir rester sur le filtre à l’état de coagulum. Le liquide ainsi obtenu, et que j'appellerai l'extrait brut de l'Or- gane de Bojanus , est limpide , légèrement opale et un peu filant. Il n’est pas pur, et renferme, en outre de la sécrétion pro” prement dite de la glande, la matière protoplasmatique des cellules non encore à maturité, du sang et de l’eau de mer. Il en résulte que sa saveur est salée ; son odeur est celle dela Moule. La sécrétion brute de l’Organe de Bojanus de la Moule est, quand elle est fraîche, sans action sur le papier de tournesol bleu ou rouge et sur la teinture de curcuma : elle est neutre aux réactifs colorés. On peut facilement montrer que l'extrait brut de la glande de Bojanus renferme des substances albuminoïdes. Ces matières exis- tent chez les êtres vivants sous deux états : sous l’une, elles sontin- solubles, et alors elles constituent les principaux tissus de l’animal ; sous l’autre, elles sont dissoutes dans les humeurs. Souvent alors FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 21 leur solubilité n’est qu'apparente ; une base alcaline, un sel dissous sont cause qu'elles sont fluides. L'action de la chaleur, de l’alcool et des acides minéraux les coagulent généralement. Mais, quelle que soit leur diversité quand elles étaient dissoutes, solides elles sont si semblables entre elles que l'analyse élémentaire devient impuissante à leur trouver des différences. Aussi toutes ne sont pas parfaite- ment connues, et sousle même nom le chimiste comprend souvent des corps qui sont loin d’être identiques. C’est ainsi que l’albu- mine de l'œuf de la Poule diffère de celle de l'œuf du Canard ou du Corbeau, que la fibrine du sang de l’homme qui se coa- gule au sortir de la veine n’est point pareille à celle que l’on extrait du cœur de l’Auître ou de la Moule et qui reste fluide. Chez la Moule, comme chez tous les autres animaux, les matières albuminoïdes existent sous les deux modifications solides et liquides. Jenem’occuperai que de celles qui sont sous ce dernier état, c’est-à-" dire des substances protéiques,sécrétées ou simplement excrétées par la glande et qui sont dissoutes dans le liquide qu’on en peutextraire. J'ai fait diverses expériences pour montrer que l'extrait brut des Corps de Bojanus renferme des matières albuminoïdes ; les voici: 1° Quandon fait bouillir pendant un instant l'extrait aqueux après y avoir ajouté quelques gouttes du réactif de Millon, on observe que les flocons qui se forment à la surface du liquide, d’abord blancs, ne tardent pas à se colorer en rose rouge. 2° L’acide azotique donne, avec la même liqueur, un liquide Jaune qui passe à l’orangé quand on y ajoute de l’ammoniaque. 3° L’extrait aqueux versé dans une solution de sulfate de cui- vre, puis additionné d'un excès de potasse, devient bleu violacé. 4 Si l’on verse dans la sécrétion bojanienne de la Moule un excès d’acide acétique, puis de l’acide sulfurique concentré, le liquide qui est au fond du tube prend une teinte violette. (Sa fluo- rescence ne m a pas paru bien manifeste.) 5° Enfin l’acide sulfurique et une goutte d’une solution de sucre donnent à la liqueur une coloration violet rouge. 22 AUGUSTIN LETELLIER. Toutes ces réactions sont considérées comme caractéristiques des matières albuminoïdes : l’extrait de la glande de Bojanus en renferme donc. Mais quelles sont ces substances ? c’est ce qu’il est beaucoup plus difficile de découvrir et ce dont je m’occuperai dans le chapitre suivant. CHAPITRE IIT. ÉTUDE DE LA SÉCRÉTION BOJANIENNE DE LA MOULE COMMUNE (Suite). LES SUBSTANCES ALBUMINOIDES QUE RENFERME L’EXTRAIT BRUT DE L'ORGANE DE BOJANUS DE LA MOULE SONT : DE LA SÉRINE, UNE ALBUMINE ET UNE FIBRINE PROPRES A LA MOULE, ENFIN UN ALBUMINATE A BASE INDÉTERMINÉE PLUS OU MOINS ANA- LOGUE A LA CASÉINE. IL Y A AUSSI DE LA MUCINE. Quand on a constaté qu'un liquide renferme des matières albu- minoïdes, il n’y a plus qu’à chercher si une seule substance est dissoute, ou s’il y en a plusieurs. Le dernier cas est le plus fréquent. On essayera ensuite de voir si l’on a affaire à de l’albumine et à ses variétés, aux diverses fibrines, à de la caséine ou aux albumi- nates analogues. Sous ce titre « albumine etses variétés » on comprend l’albumine du sérum ou sérine, l’albumine de l’œuf, la paralbumine et la mé- talbumine. Il n’y a pas lieu de croire que la sécrétion bojanienne renferme les deux derniers de ces corps, qui sont du reste très rares ; mais on en à la preuve, car : 1° La liqueur se troubie par l’addition d’une petite quantité d’a- cide acétique et d'acide chlorhydrique. 2 Le ferrocyanure de potassium la trouble également quand on l’y introduit après un excès d’acide acétique. 8° Le coagulum plus ou moins fibreux que produit l’alcool ne se dissout pas par une longue digestion en présence de l’eau pure et à la température ordinaire. Iln’y a donc pas de métalbumine :; il n’y a pas davantage de paralbumine. Ce corps se précipite en présence de l’alcool sous la 24 AUGUSTIN LETELLIER. forme de flocons granuleux qui se dissolvent dans l’eau à la tempé- rature de 35°, Or : 1° Le coagulum floconneux qui se produit quand on verse de l'alcool dans la sécrétion des Corps de Bojanus de la Moule ne dis- paraît pas dans l’eau à 35° ; il faut une longue, très longue ébulli- tion pour le dissoudre et encore partiellement. 20 La température de 100° n’amène pas seulement un trouble dans la liqueur, mais un coagulum véritable, et en filtrant on a un liquide limpide. | Aiünsi l’albumine de la sécrétion bojanienne de la Moule ne peut être que de la sérine ou une substance analogue à l’albumine de l’œuf de la Poule. Nous allons voir que l’extrait obtenu en tritu- rant la glande en présence de l’eau les contient toutes les deux. car elle offre un grand nombre de réactions qui conviennent à l’une et à l’autre de ces substances protéiques. 19 Quand on chauffe la sécrétion brute de l’'Organe de Bojanus de la Moule dans un tube à essai, bien avant que le point d’ébulli- tion ne soit obtenu, on voitse former un coagulum à la partie su- périeure du liquide. Le coagulum donne naissance à des flocons distincts blancs, d’une texture finement granuleuse, très lécère- ment élastiques, sans odeur ni saveur. Après leur apparition, un léger trouble se manifeste et se propage de haut en bas. Quand on fait cette expérience, il est inutile, le liquide étant neutre, d'ajouter une goutte d’acide acétique ou de neutraliser par le sulfate de soude, le chlorhydrate d’ammoniaque ou tout autre sel alcalin. Le trouble que l’on obtient ne peut être confondu avec celui que produisent parfois, dans les mêmes circonstances, les phosphates terreux (phosphates de chaux, de magnésie, ou encore ammoniaco- magnésien). On sait que ces phosphates, qui se séparent facilement à l’ébullition de leurs solutions neutres, disparaissent rapidement par l'addition d’une goutte ou deux d'acide chlorhydriquedans la liqueur. Dans l’expérience que je cite, le trouble ne disparait pas. FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 25 2° L’acide azotique modérément étendu produit dans l'extrait de la glande un précipité blanc qui est soluble dans un grand excès d'acide et en présence de beaucoup d’eau. 8° Les acides chlorhydrique, sulfurique et picrique donnent éga- lement naissance à un précipité, à un coagulum floconneux. 4 Mais le précipité fourni par l'acide chlorhydrique est difficile- ment soluble dans un excès de réactif. Il forme une masse gélati- neuse, transparente, qui remplit le tube à essaisans se dissoudre. 5° L’acide acétique, l’acide lactique donnent naïssance à un pré- cipité. 6° L'alcool forme immédiatement un coagulum blanc floconneux qui ne se dissout qu’en partie, lorsque, l'ayant immédiatement sé- paré de l'alcool, on l’agite dans l’eau distillée. 7° L’acide tannique et le bichlorure de mercure donnent d’abon- dants précipités avec la sécrétion bojanienne de la Moule. 8° L’éther agité en présence de l’extrait des Corps de Bojanus donne naissance à un coagulum qui par le repos se sépare en deux précipités. En effet, on observe au bout de quelque temps dans le tube où l’on a fait l'expérience trois couches superposées : à la sur- face un coaoulum transparentet gélatineux, au milieu une couche liquide et au fondun précipité blanc floconneux. Le coagulum d'apparence gélatineuse, qui se forme à la partie supérieure du liquide porté sous le microscope, se montre formé par des gouttelettes d'é- ther entouré d’une membrane anhiste. Le précipité floconneux est finement granuleux. La manière dont se comporte l'extrait de l’Organe de Bojanus de la Moule est aussi la même que celle qu’on observe quand on met la sérine en présence des acides azotiques, sulfuriques et picri- ques, de l'alcool, du bichlorure de mercure et dutannin. Mais les réactions que fournissent l’acide chlorhydrique, l'acide acétiqu et l'acide lactique, le coagulum surtout qui est dû à l’éther indiquent une substance analogue, mais non identique à l’albumine de l’œuf 26 AUGUSTIN LETELLIER. des oiseaux, ou plus exactement de l’œuf de la Poule, qui seule a été bien étudiée. Ainsi deux sortes d’albumines paraissent exister dans la sécré- tion bojanienne de la Moule : ce sont la sérine et une albumine plus ou moins semblable à celle de l’œuf ; maïs il pourrait se faire qu’au lieu de deux, il n’y en eût qu’une seule, et quepar l’ensemble de ses propriétés elle participât de l’une et de l’autre de ces matiè- res protéiques. Nous allons voir qu'il ya en réalité deux albumines: Traitons en effet cet extrait de la glande par l’éther, agitons, puis laissons reposer un instant et filtrons. F’il y a de la sérine, on la retrouvera dans le liquide limpide qui passe, puisque l’éther est sans action sur elle et que seule l’albumine propre à la Moule aura été coagulée et sera par conséquent restée sur le filtre. Or, si l’on verse dans la liqueur quelques gouttes d’une solution de sulfate de cuivre, puis une très petite quantité de lessive de potasse, on verra apparaître une belle couleur bleue violacée. Nous savons que cette réaction, une des plus sensibles qui existent, caractérise les corps dits protéiques. Le liquide filtré renferme donc une matière albu- minoïde : cette matière est de la sérine. Quant au coagulum resté sur le filtre et qui renferme, en outre de l’albumine proprement dite, quelques autres matières albumi- noïdes, iln’est point formé par une substance identique au blanc de l’œuf de la Poule. Nous en avons pour garanties les réactions que, sous sa modification soluble, cette albumine fournit avec les divers acides chlorhydrique, acétique et lactique, et que l’on n’ob- serve point avec les solutions dans l’eau de l’albumine de l’œut des (rallinacés. Les expériences montrent de plus que cette albu- mine, particulière à la Moule, forme la majeure partie des coagulums obtenus, et que la sérine n’existe qu’à l’état de traces dans la sécrétion. La sérine et l’albumine particulière à la Moule ne sont pas les FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 27 seules substancesalbuminoïdes que renferme la sécrétion de l’Organe de Bojanus ; on y trouve encore de la fibrine et une caséine. La recherche de la fibrine est rendue particulièrement difficile parce qu’elle ne se coagule pas. Ce qui caractérise en effetce corps, c’est sa coagulation spontanée. Ce caractère va en s’affaiblissant à mesure qu on descend l'échelle des êtres : la fibrine du sang des crustacés met déjà un temps assez long à se coaguler ; celle du sang del Huître ne se coagule jamais. Il en est de même pour la Moule dont le sang, mêlé à beaucoup d’eau, paraît seulement plus filant, plus gluant au bout de quelques heures. Aussi, à défaut de sa propriété caractéristique, on en est réduit, pour la déterminer, à chercher d’autres réactions ; il n’en existe malheureusement pas qui soient bien démonstratives. Le microscope nous apprend que la fibrine coagulée est un corps blanc, amorphe, sans texture his- tologique; et la chimie nous montre que cette matière se dissout à la longue dans une solution d’azotate de potasse dans l’eau pure, quand on a soin de maintenir pendant longtemps la température constante et dans le voisinage de 40°. La dissolution que l’on obtient forme un liquide visqueux que la chaleur coagule. La sérine se prend aussi en grumeaux par la chaleur, mais toute confusion est impossible, car l'acide acétique précipite la fibrine dissoute, ce qu’elle ne fait pas avec la sérine. Ainsi, quoique se rapportant à un état sous lequel la fibrine des humeurs de la Moule ne se présente point habituellement, la constitution histologique et la solubilité dans le salpêtre pourraient néanmoins suffire à la caractériser, s’il n'était malheureusement aujourd’hui prouvé que toute fibrine n’est pas soluble dans l’azotate de potasse, et que celle-là même qui s’y dissout perd avec le temps cette propriété et devient insoluble après une longue exposition à l’air. Quand la fibrine ne se coagule pas spontanément, si elle est insoluble dans l’eau salpêtrée, il n’y a que l’observation microscopique qui puisse, en montrant l’étatanhiste de ses flocons coagulés, faire croire à sa présence. C’est là le cas de la fibrine de la Moule. 28 AUGUSTIN LETELLIER. Quand on verse de l’aicool à 90° dans la sécrétion artificielle de la glande, il se produit immédiatementun abondant précipité blanc. Le précipité, ou plutôt le coagulum est constitué en majeure partie par une albumine particulière à la Moule avec des traces de sérine et aussi de fibrine et de mucine, ainsi que nous allons le voir. Pour isoler la fibrine, on débarrasse par filtration le coagulum de l'alcool qui l’imprègne, on le lave et on le met en présence d’une solution concentrée d’azotate de potasse, et cela pendant longtemps. Je me suis servi pour cela d’une étuve à éther. Après onze heures de contact, jai mis fin à l'expérience ; j'ai filtré et j’ai obtenu un liquide limpide, nullement visqueux, que la chaleur ne troublait pas et dans lequel l'acide acétique versé goutte à goutte ne for- mait aucun précipité. Celiquide ne renfermait donc point de fibrine dissoute. La fibrine de la Moule, s’il en existe dans le coagulum, "n'est pas soluble dans le salpêtre, au moins dans les condi- tions de l’expérience, c’est-à-dire au bout de onze heures de contact, la température étant de 35° 5. Et non seulement la liqueur ne renferme pas de fibrine, mais elle ne contient aucune autre matière albuminoïde, car le sulfate de cuivre et la potasse n'y produisent aucune coloration bleue violacée. Puisque la fibrine de la Moule ne se coagule pas et ne se dis- sout pas dans l’azotate de potasse, nous n’avons, pour la recon- naître, que l’examen microscopique ; encore faudra-t-ilnous placer dans des conditions où il soit possible. Voici comment j'ai opéré : on se souvient que, quand on agite l’extrait artificiel en présence de l'éther? on a, après repos, dans le tube où l’on fait l'expérience, trois couches superposées, deux solides et une liquide intermé- diaire. Le dépôt du fond est floconneux, il est blanc et finement granuleux, c'est de l’albumine. Au-dessus est une couche liquide qui tient les sels en dissolution ; enfin à la surface il y a un coagulum d’aspect gélatineux. Or, quand on examine ce dernier sous un grossissement suffisant, on le trouve formé de très nom- breux globales d’éther entourés d’une mince couche d’une sub- FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 29 stance sans texture histologique. Cette couche est,selon moi, consti- tuée par de la fibrine. Il n’en existe que des traces dans la sécré- tion bojanienne de la Moule. Mais alors cette fibrine provient-elle de la glande elle-même, ou n'est-elle pas plutôt apportée dans l'extrait par le sang du mollusque qui y est abondamment mé- langé ? — Cette hypothèse est la plus vraisemblable. Par son mode même de préparation la sécrétion brute de l’Organe de Bojanus, renferme du sang. Si l’on se rappelle la configuration de la glande, on voit qu'entouré d’un lacis sanguin dont le réseau très riche en capillaires le pénètre de toutes parts, chaque Sac communique en plus directement avec le péricarde. En triturant une pareille glande il est impossible qu’on n’introduise point du sang dans le liquide qu’elle fournit. Si donc le sang des invertébrés ou, pour par- ler plus exactement, si le sang de la Moule est constitué comme celui des animaux vertébrés, s’il renferme un corps analogue à la fibrine et n’en diflérant que par son inaptitude à se coaguler spontanément et à se dissoudre dans le salpêtre, on doit le trouver dans le produit de la trituration de la glande, dans la sécrétion artificielle des Corps de Bojanus. Nous venons de voir qu’on l'y trouve en effet. S'il y en avait beaucoup, on devrait en attribuer une partie à la sécrétion propre de la glande ; mais comme il n’y en a que des traces, il semblera probable que cette substance pro- vient uniquement du sang de la Moule. Quand j'aurai montré qu’il existe encore une caséine dans la sécrétion brute de l'Organe de Bojanus de la Moule, j'aurai terminé la détermination des principes albuminoïdes qu’elle renferme. On sait que la caséine et les albuminates de potasse ou de soude ne sont point coagulés par la chaleur : aussi j'ai pensé que la mé- thode la plus rapide et en même temps la plus sûre pour les obte- nir consistait à faire bouillir l’extrait et à filtrer. Quelques traces de caséine pourraient à la rigueur s'être coagulées à la surface du 30 AUGUSTIN LETELLIER. liquide, mais il y en a si peu dans la sécrétion, qu’on peut sans ins convénient les négliger. Dans le liquide limpide qui passe, j'ai versé de l'acide acétique, et il s’est manifesté un léger trouble. Un excès de réactif ne l’a point fait disparaître ; mais la liqueur m’a paru un peu plus limpide. Cette apparence peut tenir à deux causes : à la plus grande dilution du liquide, et alors il n’y a ni caséine ni albu- minate ; mais on peut aussi l’attribuer à la disparition d’une partie du précipité, et dans ce cas il y avait des traces de caséine ou d’un albuminate analogue. Je crois à la seconde de ces causes ; Je re- garde comme certaine la dissolution d’une partie du précipité, par conséquent j’admets la présence d’une caséine , non identique évidemment à celle du lait de la vache, mais à base de soude ou de potasse. Je n’ai du reste ni l’intention ni les moyens d'entrer dans la discussion que sa composition pourrait soulever ; il n’y en a que des traces ; je ne l’ai point isolée ; sa présence même n’a pu être affirmée que par unedifférence de teinte, différence qui doit toute sa valeur à l’habitude que l’opérateur peut avoir acquise par l’ob- servation des divers degrés de transparence qui se présentent dans des cas semblables. En admettant l’existence de cet albuminate dans l'extrait, on n’en peut même déterminer la base. On élimine la sérine, l’albumine propre à la Moule et sa fibrine ; on évapore le liquide limpide obtenu par filtration, non sans l’avoir au préalable additionné de quelques gouttes d’acide chlorhydrique ; puis on verse sur le résidu de l’alcool pur et on l’allume. La flamme est jaune ; mais, en la regardant au travers d’un verre bleu, le jaune disparaît et fait place au violet. Peut-on dire que l’albuminate est à base de potasse ? non , car on pourrait tout aussi bien le croire à base de soude, puisque la flamme est jaune quand on la regarde directement. L'expérience n'est pas concluante, elle n’indique pas quelle est la base qui entre dans la composition de la caséine, elle nous mon- tre seulement, chose que nous savions, qu’il y a dans l’eau de mer FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 31 l des sels de soude et de potasse, et ne prouve pas qu’il y en à aussi dans la sécrétion de l’Organe de Bojanus. En résumé, quatre substances albuminoïdes existent dans la sécrétion bojanienne de la Moule commune. Une d’elles y est abondamment répandue ; c’est une albumine qui ressemble à celle de l'œuf de la Poule, mais elle en diffère parce qu’elle est coagulée par les acides chlorhydrique, lactique et acétique, employés à l’état detraces, et aussi parce que, précipitée par l’alcoolet immédiatement soustraite à l’action de ce réactif, elle ne se dissout pas dans l’eau, même après une longue agitation. . Les trois autres substances albuminoïdes ne sont qu’à l’état de traces dans l'extrait de la glande : ce sont de la sérine, une fibrine propre à la Moule et un albuminate à base indéterminée. Il est probable que ces trois corps appartiennent au sang qui est mé- langé aveclextrait; quant au premier, à l’albumine, c’est certaine- ment un des principes propres à l’Organe de Bojanus. Avant de passer à l’étude des divers extraits qu’on peut faire de la sécrétion bojanienne de la Moule, il convient de montrer que celle-ci renferme des traces d’une matière muqueuse, la mucine, que l’ensemble de ses propriétés rapproche des substances albu- minoïdes proprement dites. Voici comment on en peut prouver la présence : 1° On porte l'extrait brut de la glande à l’ébullition: au bout de quelques instants l’albumine et la fibrine sont coagulées; ou filtre et dans la liqueur limpide qui passe il n’y a plus que l’albuminate et la mucine ; on verse alors goutte à goutte de l’acide acétique, un trouble bien plutôt qu’un précipité véritable se forme. On a vu quil ne disparaît pas par un excès de réactif : 1l y a de la mucine dans la sécrétion bojanienne de la Moule. 32 AUGUSTIN LETELLIER. 2° On coagule en bloc, au moyen de l'alcool, les albumines, la fibrine, la caséine et la mucine; puis on maintient le coagulum frais pendant longtemps en présence de l’eau aiguisée d’acide acéti- que : albumines, fibrine et caséine se dissolvent ; seule la mucine reste à l'état insoluble dans la liqueur et lui donne du louche, pour peu qu’elle y soit à l’état de traces seulement. Pour avoir des renseignements plus complets sur la mucine de la sécrétion bojanienne, pour la connaître comme celle du Colima- con, il aurait fallu l’isoler, ce n’était pas possible. Il y en a même si peu qu’on peut penser que les faibles traces qu’on en observe viennent du sang de la Moule; je n’attribue pas cependant la vis- cosité de cette humeur après plusieurs heures d’exposition à l’air, à la mucine qu’elle renferme, mais à la fibrine qui y est en plus grande abondance. Dans tous les cas, il semble que le plasma du sang de la Moule a une composition analogue à celle du sang des vertébrés, puisqu'on y trouve des traces des mêmes matières albu- minoïdes unies à des traces de mucine. CHAPITRE IV. ÉTUDE DE LA SÉCRÉTION BOJANIENNE DE LA MOULE COMMUNE (Suite). L’EXTRAIT ÉTHÉRÉ DE L'ORGANE DE BOJANUS DE LA MOULE REN- FERME DE LA STÉARINE, DE LA MARGARINE, DE L'OLÉINE, DE LA LÉCITHINE, DE L'ACIDE VALÉRIANIQUE ET DE L ACIDE BUTYRIQUE. Les graisses sont en général si solubles dans l’éther qu’en prenant quelques précautions bien simples, il est facile de les isoler des tissus qui les renferment ; l'opération n’est pas plus compliquée quand elles flottent dans les humeurs sous la forme de globules jaunes et transparents doués de la propriété de réfrac- ter fortement la lumière. Grâce à leurs caractères physiques qui sont nettement tranchés, et en s’aidant de quelques réactions rapide- ment exécutées, l'observateur peut reconnaître d’une facon géné- rale la nature du résidu que l’éther lui abandonne en s’évaporant. Toute autre est la difficulté qu’il éprouve quand il tente de séparer les divers glycérides et les acides libres qui forment la substance grasse. Ÿ’il ne dispose de plusieurs kilogrammes de matière, il est exposé à laisser passer sans les apercevoir divers acides volatils qui disparaissent pendant la série de ses opérations ; et ceux-là même que leur fixité garantit contre une semblable disparition lui ré- servent, par la similitude de leurs formes cristallines, bien des re- cherches infructueuses, bien des comparaisons délicates avant que la certitude se forme dans son esprit. La première chose à faire est donc de se procurer la plus grande quantité possible de matière grasse. Aussi, pour mes premières ARCH, DE ZOOL. EXP, E1 GÉËN, — 2° SÉRIE. — T. V bis, suppL. 1887. — 1er Mém. 3 34 AUGUSTIN LETELLIER. recherches j’ai cru devoir employer cinquante litres de grosses Moules d'Isigny, et dans la seconde, qui avait pour but de vérifier les résultats de la première, j'ai disséqué et traité par l’éther les Organes de Bojanus de vingt-cinq litres du même animal. J'ai néanmoins toujours été loin d’avoir les kilogrammes de matière que j'aurais désiré manipuler, et cependant pour ma première analyse j'ai ouvert plus de trois mille Moules, plus de quinze cents pour la seconde. Dans ces deux expériences, je n’ai pas procédé d'une façon identique à la séparation des corps solubles dans l'é- ther : les résultats n’en ont pas moins été les mêmes, d’où il suit qu’on peut employer indistinctement l’une et l’autre méthode. Quand j’ai fait mes premières recherches, j'ai laissé pendant huit jours les organes dissociés dans l’alcool à 90°, puis l'ayant décanté, je l'ai remplacé par une nouvelle quantité du même liquide, et j'ai attendu deux jours encore. Au bout de ce temps j’ai filtré et j'ai traité les glandes par l’alcool à 100° et bouillant. Après vingt mi- nutes d’ébullition, j'ai filtré et j'ai joint le liquide aux extraits déjà obtenus. Les Sacs de Bojanus avaient à ce moment presque en- tièrement perdu leur couleur brune et étaient devenus presque blancs. Je les ai alors mis en présence de l’éther anhydre à 35° 5, et ayant prolongé l’ébullition pendant un quart d'heure environ, j’ai filtré et j'ai joint l'extrait éthéré aux divers liquides alcooliques. Le mélange ainsi formé renfermait donc les corps solubles dans l'alcool, dans l’éther et dans l’eau. Afin d’isoler celles de ces substances que l’éther peut dissoudre, j’ai évaporé au bain-marie jusqu’à siccité, et j'aienfin repris le résidu par l’éther exempt d’eau et bouillant. Pour la seconde expérience j’ai mis d’abord dans l’alcool à 90° les Sacs de Bojanus au fur et à mesure que je les dissociais, ce qui les préservait de toute altération ; mais la dissection une fois ter- minée, j'ai versé le tout dans une vaste capsule et évaporé l'alcool et l’eau ; puis j'ai achevé la dessiccation sur l’acide sulfurique. Quinze iours plus tard , j’ai mis les Organes bien secs en présence de l’é- ther bouillant et j'ai filtré. FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 35 Le traitement par l’éther estune opération délicate qui demande quelques précautions, à cause de l’inflammabilité de ce dissolvant. Je me suis toujours servi d’une vaste capsule chauffée au bain-ma- rie ; mais il vaudrait mieux employer un appareil à déplacement : on n'aurait plus à craindre de voir l’éther prendre feu, et le lavage serait bien plus méthodique et bien plus complet. En rinçant en- suite soisneusement tubes et ballons, on ne perdrait aucune trace des corps gras que renferment les tissus et la sécrétion concrétée de la glande. Je reconnais donc que ma méthode était aussi défectueuse qu’elle était dangereuse ; mais les inconvénients qu'elle présente ont été pour moi sans conséquences, puisque les corps que l’éther n'avait point dissous se sont retrouvés dans l'alcool, quand j'ai fait l'étude de l'extrait que ce dernier liquide avait fourni. Quelle que soit la méthode suivie pour sa préparation, le liquide éthéré est jaune, et sa couleur se fonce à mesure que l’éther s’éva- pore ; elle devient roussâtre à la longue et finit par prendre la teinte acajou. C’est là également la couleur du résidu que le dissol- vant abandonne, en s’évaporant spontanément. L’aspect de ce ré- sidu est celui d’un corps gras, et les taches qu’il fait sur le papier ne disparaissent pas avec le temps. Il est imparfaitement soluble dans l’eau, et la densité de la partie non dissoute est égale à celle de ce liquide ou lui est un peu supérieure. Son odeur est celle de la Moule, mais elle est plus forte et plus pénétrante. On ne voit point de cristaux dans le résidu éthéré, et quand on le met sur une lame porte-objets, il esi par transparence d’un beau jaune brillant. Il réfracte donc fortement la lumière,mais, comme toutes les grais- ses, il est sans action sur la lumière polarisée dans laquelle les bords seuls de la préparation sont fortement illuminés. Les matières co- lorantes ne changent pas de couleur quand on les met en sa pré- sence. Enfin la chaleur le fond, puis le décompose en le boursou- 36 AUGUSTIN LETELLIER. flant ; il brûle alors avec une flamme très éclairante et Jaisse pour résidu un charbon noir et brillant. À ces caractères on reconnaît un corps gras. Je n’ai plus qu'à ajouter que le résidu était peu abondant,malgré le nombre des Mou- les sacrifiées, etqu’il recouvrait, comme un vernis, les paroïs du vase qui avait contenu l’éther. L’étude physique de l'extrait éthéré étant terminée, il me reste à parler des corps gras qui le constituent. Il en renferme plusieurs, ce qui n’est pas surprenant, les graisses ayant en général une com- position complexe ; voici du reste comment on s’en assure : Oa traite à chaud la graisse par une solution alcoolique de po- tasse; daus ces conditions, la saponification est presque instantanée. Des grumeaux roussâtres et visqueux, les uns flottants sur le liquide et les autres collés au fond de la capsule, se forment rapidement. Pour compléter la saponification , on ajoute à différentes reprises et par petites portions de la potasse en dissolution dans l’alcool. Une fois le savon formé , on chasse l'alcool en faisant buuillir le liquide, et l’on ajoute de l’eau pour dissoudre le savon et la glycé- rine. On attend ensuite que la masse se soit refroïdie, et, l'ayant in- troduite avec de l'éther dans un flacon bouché à l’émeri, on agite fortement et à plusieurs reprises. Après deux jours de repos, on voit deux couches superposées, l’une, la supérieure, jaune et constituée par l’éther qui a dissous les corps gras non saponifiés, l’autre, infé- rieure, aqueuse et transparente, renfermant la potasse en excès, le savon etla glycérine. fa couche éthérée décantée avec soin est abandonnée à l’éva- - poration spontanée ; mais en ralentissant sa disparition, on n'obtient pas encore de cristaux et le résidu amorphe et jaune forme seulement un enduit mamelonné sur les parois du vase. Quant à la couche aqueuse, après l’avoir débarrassée de l’éther, og à ‘ . «, P . To . * on l'évapore à siccité, puis on reprend le résidu par l'alcool à FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 37 90°, et on verse, dans la solution alcoolique de savon, de l’a- cide sulfurique goutte à goutte, afin de séparer les acides gras. Il se forme un abondant précipité de sulfate de potasse, et les acides gras que l'alcool dissout facilement surtout à chaud restent dans le liquide avec la glycérine et l’excès d’acide. En filtrant, on les sépare des cristaux de sulfate de potasse. Mais avant d'indiquer les manipulations auxquelles il faudra soumet- tre encore la solution alcoolique des acides gras afin de les isoler, je dois signaler deux particalarités importantes que l’on observe toujours quand on verse l’acide sulfurique dans la dis- solution des savons. Chaque goutte d’acide qui tombe y produit une belle couleur rose que je ne puis mieux caractériser qu'en la disant identique à celle que fournit l’acide azotique, ou un azotate quand on le met en présence du réactif ferroso-ferrique, c'est-à-dire d’un mélange de sulfate de protoxyde et de sesqui- oxyde de fer pulvérisé et en suspension dans l’acide sulfurique. Par une nouvelle addition d’acide la couleur se fonce et vire enfin au rouge brun ; mais au bout de vingt-quatre heures de repos, toute coloration disparaît. Si l’on chauffe le sulfate de potasse en présence de l'acide sulfurique pour voir s’il n'aurait point entraîné des traces d’acides gras volatils, on voit les cris- taux encore adhérents au dôme de la cornue prendre une cou- leur violette magnifique. Cette suite de couleurs, rose, rougeet vio- let, rappelle immédiatement à l’esprit la série des colorations que fournissent les acides biliaires quand on les traite par la méthode de Bogomoloff. Il ne faudrait pas cependant croire à l’existence de pro- duits biliaires dans la sécrétion bojanienne de la Moule qui, nous le verrons, n'en renferme point de traces. Au contact de l'alcool et de lacide sulfurique, et même de ce dernier tout seul, les graisses donnent souvent des colorations trompeuses qui sont si semblables à celles que fournissent les acides biliaires qu’on peut facilement se méprendre sur la cause qui les a produites. On peut cependant reconnaître leur origine véritable, en élimi- 38 AUGUSTIN LETELLIER. nant en même temps que les corps gras et l’albumine, l’alcool; les réactions de Pettenkofer et de Gmelin sont alors muettes et nulle couleurn’apparaît. Dans le cas présent, on peut, je pense, attri- buer les diverses colorations observées à l’oléine de l'extrait éthéré. L'huile d’olive pure prend en effet les mêmes couleurs quand on la traite par l'alcool et l'acide sulfurique, mais les teintes ne sont point tout à fait identiques, le violet étant plutôt lie de vin avec l'huile que violet pur. Enfin il n’est point inutile de remarquer qu'une série de couleurs, en tous points semblable à celle qui se produit avec la graisse de la Moule, apparaît toutes les fois que l’on traite de l'huile animale de Baleine ou de Morue par le procédé de Heydenreich, c’est-à-dire par l’acide sulfurique _à 66°. Ces huiles sont ailleurs fortement colorées, comme la graisse de la Moule, et il est, dans l’état de nos connaissances, difficile de dire si les colorations observées tiennent à la ma- tière grasse proprement dite ou à la substance colorante qu’elle renferme et qu'on n’a pu encore isoler jusqu’à ce jour. La deuxième observation importante à faire est la suivante : en même temps que la liqueur alcoolique se colore en rose, elle s’é- chauffe fortement à cause de l’hydratation de l’acide sulfurique et de la combinaison de la potasse avec l’acide, et on sentune in- supportable odeur de valériane. Nousallons voir plusloin qu’en effet l'acide valérianique accompagne l’acide butyrique à l’état proba- ble de glycéride dans la sécrétion bojanienne de la Moule, car nous aurons l’occasion de l’observer sous la forme de cristaux rectan- gulaires de valérianate de baryte disséminés au milieu de nom- breux losanges de butyrate de la même base. Cette digression, un peu longue, était nécessaire si l’on tient à être au courant de tous les phénomènes qui se produisent au cours de l’analyse ; du reste,je vais maintenant la reprendre pour ne plus la quitter. On avu qu'après la formation du sulfate de potasse, on filtre. Le liquide qui passe renferme les acides gras, la glycérineet l’acide FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 39 sulfurique en excès. On l'additionne de cinq ou six fois son volume d’eau, puis on y verse une dissolution d’hydrate de baryte qui précipite immédiatement l'acide sulfurique à l’état de sulfate de baryte et donne en même temps naissance à divers savons bary- tiques insolubles. Comme il est impossible de verser exactement la quantité d'hydrate de baryte strictement nécessaire, on se débarrasse de l’excès de base par un courant d’acide carbonique passant à re- fus. On chauffe ensuite, ce qui chasse l’acide carbonique et l’alcool, on filtre, et, mettant le précipité en suspension dans l’eau, par une dernière addition d'acide sulfurique, on met les acides gras fixes en liberté. Les acides ne sont pas solubles dans l’eau ; on pourrait espérer les obtenir sous leurs formes cristallines caractéristiques ; mais il n’en est rien ; on a des gouttelettes huileuses et pas de cristaux. J’ai essayé d'en préparer avec l’éther et avec le sulfure de carbone, que je laissais s’évaporer lentement , etje n'ai obtenu que des ta- ches graisseuses. Uue seule fois, ayant décomposé le savon bary- tique par l'acide chlorhydrique, j'ai obtenu quelques cristaux réunis en éventail, très nets et semblables à ceux que Robin et Verdeil ont figuré PI. XXXIX, f. 2 /, lesquels sont des cristaux d’acide stéarique. J’ai recommencé plus tard la même recherche par la même méthode ; mais, soitqu elle ait été défectueuse, soit plutôt que l’ex- trait éthéré ait été mal préparé, je n’ai point obtenu de cristaux d’acide stéarique ; je n'en conclus pas moins que l'extrait éthéré renferme des traces de stéarine. Cette manière de voir s’est du reste trouvée ultérieurement justifiée par des observations microscopi- ques, qui m'ont permis de constater l'existence de cristaux de stéa- rine mêlés à des cristaux de margarine dans un extrait éthéré pré- paré plus soigneusement. Quant aux gouttelettes huileuses que l'acide sulfurique met en liberté, il est assez facile d'en déterminer la nature. Leur aspect est semblable à celui de l’acide oléique ; j'ai en conséquence cher- 40 AUGUSTIN LETELLIER. ché si l’emplâtre qu’elles forment est partiellement soluble dans l'éther. J’ai fait bouillir en présence du massicot et de l’eau une partie de l'extrait éthéré, et, par une agitation continue, j'ai obtenu ua précipité que j'ai séparé par filtration après refroi- dissement. J’ai desséché cet emplâtre avec soin, puis je l’ai mis en présence de l’éther bouillant qui a dissous seulement l’oléate de plomb, et j'ai filtré. J’ai alors versé goutte à goutte de l’acide chlorhydrique dans la liqueur ; un léger précipité de chlorure de plomb s'est formé; une petite quantité d'oléate s'était donc dis- soute. J’ai laissé reposer pendant vingt-quatre heures, puis j'ai dé- canté et j'ai chassé au bain-marie l’éther et l’excès d’acide chlor- hydrique. Le liquide, après toutes ces manipulations, renfermait de fins globules incolores qui réfractaient fortement la lumière : j'étais évidemment en présence de l’acide oléique. Pour en être plus certain, j'aurais voulu essayer la réaction que produit l’acide azotique nitreux, mais la quantité de matière grasse dont je dis- posais était insuffisante, et je n’ai obtenu rien de bien net. Néan- moins, la formation d’un emplâtre partiellement soluble dans l’éther, l'aspect des gouttelettes sont autant de raisons qui per- mettent d'affirmer avec une certitude suffisante qu'il existe de l’oléine dans l’extrait éthéré de l’'Organe de Bojanus de la Moule. On à vu (page 36) que l'extrait éthéré traité par une solution alcoolique de potasse bouillante donne naissance à des grumeaux relativement volumineux , bruns, visqueux, aussi denses, sinon plus denses que la solution potassique, au sein de laquelle ils se sont formés, gluants et s’agglutinant facilement entre eux. Or ces gru- meaux ne sont pas formés par des savons; la quantité de ceux que forme la potasse est très petite, eb nous savons que ce sont presque uniquement de l’oléate de potasse. L’éther ne dissout point les savons et dans tous les cas ne peut les enlever à l’eau : les gru- meaux brunâtres, fournis par l’extrait éthéré, sont cependané très FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 44 solubles dans l’éther ; ce ne sont pas des savons ; que sont-ils alors”? c'est ce que je vais examiner. Quand on introduit quelques-uns de ces grumeaux dans une solution azotique de molybdate d’ammoniaque, on obtient après ébullition un liquide d’un beau jaune qui donne, quand la quantité de matière est suffisante, un précipité également jaune. On en doit conclure que ces grumeaux renferment du phosphore, car on ne peut attribuer la coloration et le précipité à une matière albu- minoïde, que l’acide azotique aurait ainsi colorée. Il serait surpre- nant que l’éther eût dissous un corps albuminoïde ; d’ailleurs les mêmes grumeaux introduits dans l’acide azotique seul ne donnent pas lieu à la coloration jaune observée. Aïnsi ces grumeaux ren- ferment du phosphore : sont-ils complexes? c’est possible ; mais dans tous les cas la liste des corps phosphorés étant assez courte, on peut espérer en trouver la composition. | Si l'on remarque en effet les propriétés physiques des grumeaux, leur aspect, leur consistance cireuse, leur gonflement dans la lessive de potasse, leur insolubilité dans l’eau, leur excessive solubilité dans l’éther, enfin leur facile fusibilité, on a presque tous les carac- tères de la lécithine. Si à une solution alcoolique des srumeaux, on ajoute une solution également alcoolique de chlorure de platine et une goutte d'acide chlorhydrique, on a un précipité plus ou moins floconneux jaunâtre qu’on peut prendre pour du chlorure double de platine et de lécithine. Ce précipité est excessivement soluble dans l’éther, mais ilne m'a pas paru se dissoudre en entier dans le chloroforme et dans la benzine, ce qui fait que j'hésite un peu à le regarder comme renfermant de la lécithine, quoique la chose soit excessivement probable. Valenciennes et Fremy ont du reste montré que l’acide oléophosphorique combiné à la soude se montre dans presque toutes les parties de l’organisme, et notamment à l’état de traces dans les muscles des Mollusques : or cet acide dérive de la lécithine. Il en est de mème de l'acide phosphogly- . cérique que l’on sait exister dans beaucoup de tissus, le cerveau, 42 AUGUSTIN LETELLIER. la substance médullaire des nerfs, le jaune de l’œufet la bile. Il est donc possible que des recherches qui porteraient sur une plus grande quantité de matière, permettraient de reconnaître ces deux acides phosphorés, et ilestencore plus vraisemblable qu’elles permet- traient d'isoler la lécithine, ce que j'ai regretté de ne pouvoir faire. Il me reste maintenant à parler des acides gras volatils qui donnent à l’extrait éthéré son odeur spéciale. Déjà, en décrivant la préparation des acides gras fixes, j'ai fait observer qu'une forte odeur de valériane s’exhale du liquide alcoolique renfermant les savons, la glycérine et l’excès de potasse, quand on le traite par l’acide sulfurique. Afin de voir si des traces d'acide valérianique n’auraient point été entraînées parles cristaux de sulfate de potasse, j'ai aistillé en présence de l’acide sulfurique le précipité que j'avais recueilli sur le filtre. J’ai obtenu ainsi une petite quantité d’un liquide ayant, mais faiblement, l’odeur de la valériane légèrement masquée par celle de l'acide sulfureux ; le dernier acide provenait de lambeaux de filtre introduits dans la cornue avec le sulfate et qui, carbonisés par l'acide sulfurique, avaient réduit ensuite cet acide lui-même pour fournir de l'acide carbonique et de l'acide sulfureux. Mais plus tard, après avoir, dans une seconde série de recherches, essayé de pré- parer de nouveau les acides gras fixes au moyen du préci- pité barytique resté sur le filtre, j'ai pu extraire les acides valérianique et butyrique du liquide limpide qui avait passé et qui renfermait les composés barytiques des acides gras volatils. Pour cela j'ai additionné la liqueur avec de l'acide phosphorique, et j'ai distillé. J’ai employé l’acide phosphorique, parce qu'il est fixe et parce que, ainsi, j'évitais toute trace d'acide sulfureux. J’ai donc obtenu par ce procédé un liquide dont l’odeur était celle des deux acides valérianique et butyrique mélangés. Je l'ai mis en FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 43 présence d’une solution d’hydrate de baryte, et j'ai abandonné le mélange à l’évaporation spontanée sur l’acide sulfurique. Au bout de quelque temps toute trace de liquide ayant disparu, il est resté sur le fond du vase de nombreux cristaux, parmi lesquels plusieurs, qui étaient rectangulaires et plus ou moins semblables à la cholesté- rine, étaient vraisemblablementdescristaux de valérianate debaryte. À côté d’eux se trouvaient d’autres cristaux en forme de losange formés de butyrate de baryte. On trouvera, PI. I, fig. 1 et 2, des dessins des cristaux barytiques de ces deux acides. L'étude de l'extrait éthéré des Corps de Bojanus de la Moule montre qu’il contient : 1° De la stéarine (traces. 2° De la margarine (id.). 3° De l’oléine. 4° De la lécithine (?). 5° De l'acide valérianique (traces). 6° De l'acide butyrique (traces). CHAPITRE V. ÉTUDE DE LASÉCRÉTION BOJANIENNE DE LA MOULE COMMUNE (suite). L’EXTRAIT ALCOOLIQUE DE L'ORGANE DE BOJANUS DE LA MOULE RENFERME : DU CHLORURE DE SODIUM, DE L’ACIDE STÉARIQUE LIBRE, DE LA STÉARINE, DE LA MARGARINE, DE LA CRÉATININE, DE LA CRÉATINE ET ENFIN UNE GRAISSE SPÉCIALE A LA MOULE. Je n’ai pas préparé l'extrait alcoolique de l’Organe de Bojanus de la Moule d’une façon identique, lorsque j'ai fait mes premières recherches et quand j’ai voulu vérifier plus tard les résultats que j avais obtenus. On se souvient que pour la première série d’ana- lyses, j'ai commencé par préparer un extrait sec qui contenait les corps solubles dans l’éther ; ceux qui, n’étant point solubles dans ce dissolvant, l’étaient au contraire dans l’alcool, et enfin la substance que l’eau seule peut dissoudre. La présence de ces derniers corps dans l'extrait sec provenait de ce que les glandes renfermaiïent de l’eau de mer au moment de leur dissection, et de ce que l'alcool employé était, lui aussi, légèrement hydraté. En traitant cet extrait par l’éther anhydre, je lui ai enlevé divers corps gras, à l’étude des- quels le chapitre qui précède a été consacré. J’ai repris ensuite la partie non dissoute par l'alcool à 100°bouillant, et j’enai ainsi isolé les substances que l’éther n’avait point dissoutes, soit qu’elles y fus- sent peu ou point solubles, ou qu’elles fussent plus spécialement so- lubles dans l'alcool. Par l’évaporation de l’alcool il est resté une masse brune dont je vais maintenant m'occuper. Lorsque j'ai voulu refaire les mêmes recherches, j'ai préparé l'extrait alcoolique autrement. J'ai commencé par dessécher les glandes dissociées, et, après les avoir pulvérisées, je les ai traitées FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 45 d’abord par l’éther etensuite par l'alcool. J’ai filtré et j'ai aban- donné comme précédemment à l'évaporation spontanée. Quelle qu’ait été la méthode employée, les corps dissous ont été les mêmes, les formes seules des cristaux ont varié. À cela rien de surprenant ; il ne faut pas avoir fait de bien nombreuses observa- tions pour s'être aperçu de l’influence que la présence des corps étrangers, la température, l’état de saturation du liquide, la rapi- dité ou la lenteur de son évaporation exercent sur les groupements moléculaires des substances cristallisables. C’est même là souvent une cause d'erreurs et de tâtonnements longs et pénibles. La créa- tinine de l’extrait alcoolique nous sera un bon exemple de sembla- bles modifications, car si tout le monde la reconnaît aisément à ses formes cristallines, peu de personnes pourraient, je pense, la retrou- ver sous l’aspect que j'ai figuré PI. I, fig. 8 ; mais l’ayant vue en quelque sorte cristalliser ainsi sous mes yeux, le doute n’était point possible pour moi. C’est donc une vérification nouvelle de l'influence encore inexpliquée des causes extérieures sur les formes des corps cristallisés. Le liquide alcoolique, qui par son évaporation spontanée fournit l'extrait que j’étudie, est limpide ; quand il a été filtré, sa couleur est jaune roussâtre, son odeur est celle de la Moule. Le résidu qu'il laisse, après évaporation et dessiccation sur l’acide sulfurique, est de consistance cireuse, brun roux, déliquescent et rempli de cristaux transparents, dont plusieurs sont assez gros pourêtre visi- bles à l'œil nu. Il fond facilement, et comme toutes les graisses il fait des taches permanentes sur le papier ; enfin ilest sans action sur le tournesol bleu ou rouge. Quand on le traite par l’eau, une partie se dissout et donne à l’eau une teinte rousse. Le liquide, trou- ble d’abord, devient limpide avec le temps, tout en conservant sa couleur. Quand on l’évapore, il abandonne un enduit brun, rous- sâtre, excessivement déliquescent, lequel est pétri de cristaux de créatinine et de créatine avec quelques aiguilles de stéarine et de margarine entraînées mécaniquement. 46 AUGUSTIN LETELLIER. Ainsi l'extrait alcoolique des Corps de Bojanus de la Moule ren- ferme une substance orasse (on peut la saponifier), qui est soluble dans l’eau et dans l'alcool. Valenciennes et Fremy ont, ily a déjà longtemps, fait une observation analogue ;et M. Bourquelot, dans une thèse récente, parle d’une graisse qu’ila trouvée dans le foie de divers céphalopodes et qui possédait la même propriété. Quand on chauffe l'extrait alcoolique de la Moule, il fond, puis se boursoufle et enfin brûle avec une flamme éclairante, quoique fu- ligineuse. Les cendres qu’on obtient sont nettement alcalines : la cause en est vraisemblablement dans la présence de sels de soude contenus dans l’extrait, et qu’on y observe souvent sous la forme d’octaèdres parfaits. Quand on croise les nicols, ces octaèdres dis- paraissent ; on en conclut qu’ils sont formés par du chlorure de sodium. On peut d’ailleurs s'assurer facilement que l'extrait renferme du sodium, en le dissolvant dans l’alcool pur que l’on enflamme ; la couleur jaune de la flamme décèle le métal qu’elle ren- ferme. Mais il y a aussi des sels de potasse dans lextrait calciné, car la flamme prend une teinte pourpre quand on la regarde au travers d'un verre bleu. J’ai cherché à déterminer la nature des corps qui donnent à l'extrait alcoolique son odeur de marée : le résultat auquel je suis arrivé n’a pas été concluant. J’ai distillé une partie de l'extrait (il n’y en avait certainement pas un gramme) en présence de l’acide phosphorique. Le liquide obtenu a présenté l'odeur de l’acide formique dilué ; mais peut-on raisonnablementen conclure que cet acide donne, avec les acides valérianique et butyrique, son odeur à l’extrait alcoolique ? Je ne l'ai pas pensé ; et, sans vouloir préten- dre qu’il n’en renferme point, je ne dirai pas qu’on trouve de l’a- cide formique dans la sécrétion bojanienne de la Moule, parce qu’il y a réellement trop de corps organiques qui, distillés en présence d’un acide, en fournissent des traces. Le liquide, en outre de son odeur, offrait encore cette particu- larité, qu’on y observait un nuage blanc que formaient de très FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 47 nombreux globules microscopiques jaunes, transparents et doués de la propriété de réfracter fortement la lumière. J'ai essayé, mais je n’ai pas réussi à combiner la substance qui formait ces globules, avec le baryte ; avec les cristaux que j'aurais obtenus, il aurait peut-être été possible de déterminer la nature des acides qui for- maient la traînée blanchâtre, flottante dans le liquide. J'ai fait un grand nombre de préparations microscopiques de l'extrait alcoolique. J’ai cru quelquefois devoir chauffer la lame afin de fondre légèrement l'extrait et d'appliquer la lamelle, mais alors la créatinine à quelquefois pris l'aspect figuré PI. I, fig. 3. Les préparations, faites avec l’extrait obtenu par la seconde méthode, n’ont pas offert ces cristaux. | L’inspection microscopique des préparations permet de distin- guer immédiatement : 4° Du chlorure de sodium. 20 De l'acide stéarique libre. 9° De la stéarine. | 4o De la margarine. 9° De la créatinine. 6 De la créatine. T° Un corps gras, jaune, brun, renfermant tous ces cristaux. Je vais donc les étudier successivement. lo Le sel marin dissous dans l’alcool, puis cristallisé dans les préparations, est généralement sous la forme octaédrique, mais on le trouve aussi cristallisé en cubes ou encore en masses allongées assez semblables à des cristaux de phosphate triple (Voir Robin et Verdeil, PI. I, fig 8, b et d), mais en différant par leur manque d’action sur la lumière polarisée dans laquelle ils s’éteignent. J’ai dessiné plusieurs des formes que j’ai observées (PI. I, fig. 2); on 48 AUGUSTIN LETELLIER. remarquera qu'elles sont identiques à celles que prend lesel marin extrait du sang du bœuf par l’alcool ou par l’éther. 2e L’acide stéarique libre n’a guère été observé dans les graisses animales que dans des cas morbides. Il n’est pas douteux cepen-- dant que les cristaux figurés PI. I, fig. 5, ne soient formés par cet acide. Ils sont transparents, ainsi qu’il arrive toujours quand l'acide stéarique se sépare de sa solution alcoolique, et forment générale- ment des masses sphériques, hérissées de pointes courtes; maïs 1l arrive aussi souvent que les cristaux (tel est le cas pour ceux que j'ai dessinés) sont constitués par deux masses cristallines en forme de balai et opposées l’une à l’autre. C’est là, du reste, une disposition fréquente chez les substances cristallines, qu’on retire du corps des animaux, disposition dont j expliquerai plus loin l’origine, quand je parlerai des calculs bojaniens de la Cytherea chione(p. 223). Si rare quesoit dans l’organisme l’acide stéarique libre, l’acide margarique l’est encore davantage ; je n’ai donc pas été surpris de n’en point trouver dans mes préparations de l’extrait alcoolique de l’Organe de Bojanus de la Moule. Son aspect est. d’ailleurs si caractéristique que toute confusion est impossible ; si donc je n'en ai pas vu, c’est qu’il n’y en a pas. 3° La stéarine affecte dans les préparations deux aspects diffé- rents. Parfois en aiguilles raides et pointues, formant un groupe peu compliqué, la stéarine se montre dans d’autres cas sous l’aspect de masses sphériques ou ovoïdes, hérissées de pointes droites, dirigées dans tous les sens et s’irradiant à partir du centre. Il est générale- ment impossible d’apercevoir le noyau autour duquel s’irradient les aiguilles cristallines ; mais on distingue souvent dans ces étoiles un ou plusieurs rayons qui paraissent plus clairs que les autres. J’ai FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 49 cherché à rendre cet aspect dans les dessins que je donne, PI. I, fig. 6, des cristaux que j'ai observés. Les aiguilles de stéarine sont excessivement fines, et il faut pour les distinguer avoir recours à un grossissement d'environ 500 dia- mètres. Je n’ai jamais vu ces cristaux atteindre la grosseur de ceux que donne le suif du mouton quand on dissout la stéarine, qui s’y trouve en abondance, dans de l’éther. Je n’en ai jamais observé non plus qui eussent la forme de ces masses losangiques que Robin et Verdeil ont figurées dans leur atlas. Les cristaux de stéarine, qui existent dans toutes les préparations de l'extrait alcoolique, sont identiques à ceux que l’on extrait au moyen de l’alcool de la graisse humaine. Comme dernière remarque, je ferai observer que les cristaux de stéarine sont presque aussi nombreux que les cristaux de marga- rine ; en général, dans les graisses animales, les cristaux de marga- rine sont beaucoup plus nombreux que les cristaux de stéarine. 4° Assez nombreux dans l’extrait alcoolique, les cristaux de mar- garine y sont en général colorés en jaune roux. Constitués par des aicuilles flexueuses, ils forment constamment des groupes sphéri- ques ou allongés. Souvent une zone pâle entoure les amas de marga- rine; le centre estopaque et difficile à distinguer, mais il arrive quel- quefois quele centre est clairet comme ponctué. Les aiguilles qui for- ment les groupes, affectent parfois la forme de balais opposés, aspect auquel l’acide stéarique libre nous a déjà familiarisés. Dans la lumière polarisée, la margarine présente le phénomène d’une croix brillante sur un fond noir, quand on croise les axes des cristaux. Rien qu'en éclairant la préparation par un rayon de lu- mière polarisée, on obtientune croix noire ; le phénomène est moins brillant que si l’on croise les nicols, mais il est plus facile à dessi- ner. La fig. 7, PI. I, montre des cristaux de margarine vus sous un grossissement de 500 diamètres environ, et la fig. 3, PI. L, fait ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN, — 2° SÉRIE, — T. V bis, suppL. 1887, — 1° Mém. 4 90 AUGUSTIN LETELLIER. fait voir ces mêmes cristaux fixés sur des aiguilles de créatinine en compagnie de cristaux de stéarine ; le dessin a été fait dans la lu- mière polarisée. 5° Il pourrait paraître étrange de voir sur les préparations de l'extrait alcoolique autant de cristaux qu'on en aperçoit, si l’on ne se rappelait qu’on a fait agir l'alcool absolu bouillant sur les glan- des ou sur l'extrait brut, et que la créatinine y est, dans ces conditions, facilement soluble. Du reste, si nombreux que soient les cristaux de créatinine, on se tromperait si l’on pensait qu'il y en a une quantité pondérable grande dans l’Organe de Bojanus de chaque mollusque ; il n’y en a bien probablement que quelques cent-millièmes de gramme, si l’on en juge par les analyses qu’on trouvera plus loin. : L'observation microscopique des cristaux de créatinine exige que la préparation soit lutée, car sans cette précaution il arrive sou- vent que l’humidité de l’air liquéfie le résidu alcoolique, et les cris- taux en partie dissous deviennentdiffus ; leurscaractèress’effacent, et toute observation fructueuse devient difficile, sinon impossible. Les cristaux de créatinine de la Moule ressemblent assez exac- tement à ceux que Robin et Verdeil ont figurés pour qu’il ne m’ait point paru absolument indispensable de dessiner toutes les formes que j'en ai pu observer. de dois dire cependant que je n’en ai pas trouvé qui fussent identiques aux cristaux que Funke a figurés PI. IV, fig. 5 ; mais, comme l’observe Robin, les formes de la créatinine peuvent différer avec la rapidité de l’évaporation du liquide, avec sa nature, et surtout avec celle des corps qu'il tient en même temps qu’elle en dissolution. Enfin le volume des cristaux et leurs biseaux différent un peu les uns des autres selon l’a- nimal d’où on les a retirés : cette remarque a son importance dans le cas de la Moule, car les fuseaux quel’on observe ne sont pas com- plets, mais toujours tronqués par une de leurs extrémités. FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 51 J'ai dessiné, PI. I, fig. 5, un groupe des cristaux de créatinine très remarquable par sa disposition en éventail et par son éclat. Je l’ai obtenu lorsque j'ai fait mes premières recherches, en chauffant légè- rement la plaque, afin d’y déposer convenablement la lamelle. Les longues aiguilles de créatinine de cette préparation auraient été assez difficiles à déterminer, si, avant leur formation, je n'avais observé des cristaux de ce corps ayant les formes ordinaires bien connues de la créatinine. On peut observer ces cristaux aiguillés avec profil dans la lumière polarisée : à cause deleur action sur cette lumière, ils apparaissent brillants surun champ noir, et on peut alors distinguer facilement les détails de leur contour. Excessivement minces, les lames prismatiques qui constituent les groupes de cristaux se font voir tantôt de profil et tantôt de face : de là un aspect différentd’un prisme à un autre et les teintesclaireset foncées qu’on observe. Plusieurs cristaux placés à la base du groupe ont été évidemment déplacés mécaniquement par les glissements de la la- melle ; on eu voit même qui sont tordus, d’où une exagération dans l'aspect flexueux de la préparation. Quand on croise les nicols, les cristaux de créatinine ne sont pas seulement brillamment illuminés, ils sont encore colorés. On voit aussi dans le même cas des festons très éclatants qui sont formés par des cristaux de créatinine, solidifiés autour de ce qui futautre- fois les bords de bulles d’air. Il faut savoir que ces cristaux exis- tent pour les distinguer dans la lumière ordinaire ; dans la lumière polarisée, ils sont au contraire aisés à observeret très remarquables. Leur aspect est celui d’ure draperie dont les plis arrondis sont tra- versés perpendiculairement à ses bords par des traits noirs exces- sivement fins, très nombreux et nettement tracés. La photographie microscopique permettrait seule de reproduire le phénomène dans toute sa beauté, à cause de la délicatesse des détails. Quoiqu'il soit difficile de se tromper sur la nature des fuseaux d’aspect blanc bleuâtre, presque fluorescents, que forme la créati- nine, il importait cependant de recourir à sa réaction caractéristi- 02 AUGUSTIN LETELLIER. que, c’est-à-dire d'essayer de former le chlorure double de zinc et de créatinine. J’ai donc dissous l'extrait dans l'alcool, et j'ai versé ensuite dans la solution quelques gouttes de chlorure de zinc neutre dissous dans l'alcool absolu. Au bout de quelques jours, j’ai obtenu des groupes de cristaux qui m'ont paru être le chlorure double que je voulais préparer. Cette étude de la créatinine que l’on trouve dans l’Organe de Bojanus de la Moule ne serait pas complète si je n’indiquais com- ment j'ai vu quil y en a quelques dixièmes de milligrammes chez chaque mollusque. Je ne me suis pas servi, pour ce dosage, de l'extrait alcoolique dont j’étudie la composition dans ce chapitre ; j'ai eu recours à un autre extrait que j’ai préparé de la façon sui- vante: j’aimis les Sacs des Moules que je sacrifiais (il y en avait 202) dans l'alcool à 90°, puis j’ai pressé pour enlever tout l’aleool, et j'ai ensuite chassé celui-ci par l’ébullition. J’ai alors repris le résidu par l’eau froide et j'ai filtré afin d’éliminer les graisses et les substan- ces albuminoïdes coagulées. Le liquide à passé coloré , parce que la graisse de la Moule est en partie soluble dans l'eau. Malgré cet inconvénient, j'ai concentré la liqueur à consistance de sirop et traité ensuite la masse par l'alcool absolu bouillant. Après vingt- quatre heures de repos, j'ai décanté l'alcool qui contient l’urée et j'ai placé sur l’acide sulfurique la partie insoluble dans l'alcool froid. En se desséchant, ce résidu s’est recouvert de nombreux cris- taux qu’à leur aspect il est facile de reconnaître pour de la créati- nine ; ce Corps, qui s'était en effet facilement dissous dans l’alcool bouillant, est peu soluble dans l'alcool froid, c’est pourquoi on le retrouve presque en entier dans le résidu. Pour faire ensuite le dosage, j’ai eu recours à la méthode volu- métrique, la seule du reste qu’il me fût possible d'employer, et j'ai décomposé la créatinine par l’hypobromite de soude. J’ai dissous à cet effet le résidu dans 10 centimètres cubes d’eau FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 53 bouillante, et, prenant deux centimètres cubes de la solution, je les ai décomposés par dix centimètres cubes d'hypobromite. J’aiobtenu deux centimètrescubes d'azote. Si toutle liquide avait été décomposé, j'en aurais donc eu dix centimètres cubes, c’est-à-dire que j'aurais obtenu 0 g. 01257 d’azote. Comme 42 g. d’azote pro- viennent de la décomposition de 113 g. de créatinine, 0 g. 01257 du même gaz auraient été produits par 0 g.0338 de créatinine. Mais alors, si 262 moules ont 0 5. 0338 de créatinine dans leurs Organes de Bojanus réunis, chacune d’elles en a environ 0 g. 00013 dans la glande qui lui est propre. On pouvait craindre qu’une partie du gaz recueilli dans cette expérience ne provint de l’action de l’hypobromite de soude sur quelques substances albuminoïdes restées avec le résidu. D’abord onne voit pas bien comment la chose serait possible ; mais pour plus de sûreté, j’ai recommencé en me mettant encore plus à l'abri, si c’était possible, de cette cause d'erreurs. J’ai étendu d’eau 4 cen- timètres cubes de la liqueur précédente ; j'y ai versé une solu- tion de sous-acétate de plomb, qui a donné naïssance à un abon- dant précipité, et j'ai filtré. J’ai ensuite précipité l'excès de plomb par le carbonate de soude ; j'ai filtré de nouveau, et concentrant la liqueur, je l’ai ramenée à son volume primitif, quatre centimètres cubes. En traitant comme précédemment deux centimètres cubes de ce liquide par l’hypobromite de soude, je n’ai obtenu que un centimètre cube et demi d'azote. J’attribue cette différence dans le volume de l’azote mis en liberté, non pas à l’élimination de matières albuminoïdes qui n’existaient pas dans le liquide, mais aux pertes de matière qu’on éprouve toujours quand on opère rapidement sur de très petites quantités de liquide. On ne s’écartera donc point de la vérité en admettant qu'en moyenne l’Organe de Bojanus de la Moule contient 0 g. 0001 de créati- nine. La découverte de la créatinine dans la sécrétion bojanienne de la Moule me paraît importante, car ce principe immédiat est avec 54 AUGUSTIN LETELLIER. l’urée un des éléments les plus constants de l’urine desanimaux ver- tébrés. 6° On peutreconnaître au milieu des cristaux de créatinine diver- ses formes quiappartiennent évidemment à la créatine. (Ce sontordi- nairement des prismes rectangulaires droits ou des prismes rhomboï- daux droits. Il y en a de très petits, ce sont les plus parfaits ; maïs on en trouve aussi qui sont assez gros et qui ressemblent à ceux que Robin et Verdeil ont figurés PI. XXII, fig. 1, e, g, m., et que Funke a représentés P]. IV, fig. 4. Gorup Besanez donne, page 225, fig. 77, quelques formes cristallines du même corps qui sont un peu différentes et qui sont celles que l’on observe le plus fréquemment avec les préparations que j’ai faites. On sait que la créatine est bien moins soluble que la créatinine dans l’alcool absolu bouillant; c’est même ce dissolvant qui est em- ployé pour les séparer. On ne pouvait donc s'attendre à trouver de nombreux cristaux de créatine dans l'extrait alcoolique des Corps de Bojanus de la Moule. Mais, d'un autre côté, la créatine devant être considérée comme un produit résultant de la décomposition de la créatinine, il était à prévoir qu'observant l’un de ces corps on devait infailliblement trouver au moins quelques cristaux de l’autre. Il y en a en effet ; et la meilleure preuve (les naturalistes se défient tou- jours des raisonnements), c’est qu'en traitant l’extrait alcoolique par le chlorure de zinc , il reste toujours quelques cristaux qui n’ont changé ni de forme ni d’aspect : ces cristaux sont des pris- mes de créatine, sur lesquels le chlorure de zine est sans action. 7° Reste maintenant à étudier l’enduit jaune brun au milieu du- quel on observe tous les cristaux que je viens d'étudier. Quelle est sa nature ? Est-ce une espèce organique simple ? Ne serait-ce pas plutôt un mélange de divers principes immédiats ? FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 55 Voilà bien des questions auxquelles il me semble difficile de ré- pondre d’une façon quelque peu satisfaisante. Un point seulement paraîtacquis, c'est vraisemblablement un corps complexe : la preuve, c’est que cet enduit est partiellement soluble dans l’eau. Je dis partiellement, car même à l’ébullition tout ne se dissout pas; le li- quide est trouble, et des flocons jaunes bruns finissent par tom- ber au fond du vase. Sans action sur le tournesol bleu ou rouge et sur la teinture de curcuma, cet enduit ressemble à de la cire, dont il a du reste la consistance. On le fond facilement, il tache alors le papier, et quand la température s'élève, il se décompose, se boursoufle et brûle ave une flamme éclairante, quoique fuligineuse. On ne peut pas en séparer l’acide stéarique libre, la stéarine et la margarine, puisqu'il est soluble dans l'alcool. Je lai soumis néanmoins à quelques essais. Quand on traite le résidu alcoolique par l’acide azotique bouillant, il se dissout assez facilement et sans dégagement apparent de gaz. Lorsque l’acideest en grande partie évaporé, si l’on ajoute une goutte d'une solution concentrée de po- tasse, la liqueur se colore en jaune rouge. Par dessiccation pres- que totale, le liquide rouge se prend en une masse de teinte vio- lacée qui ne tarde pas à noircir quand on continue à chauffer, parce qu'alors la matière se décompose. Ce sont làdes réactions propres à la xanthine ; maïs on peut se de- mander si en réalité elles sont suffisantes, pour être sûr que la sécré- tion bojanienne en renferme. Oui, elles suffisent, si l’on veut bien se contenter des preuves approximatives qu’on donne le plus souvent quand on veut prouver qu'un corps très rare existe dans une hu- meur, non si, pour être certain de ce que l’on dit, il faut avoir pré- paré le corps en nature et l'avoir étudié pur. Je dis seulement: aucun des principes immédiats que nous savons exister dans l’ex- trait ne peut donner ces colorations. L’acide urique et les urates fournissent une couleur rouge quand on les traite par l'acide azo- tique et la potasse, mais le rouge qu’ils donnent est si caracté- 56 AUGUSTIN LETELLIER. . ristique qu'il est impossible de le confondre avec un autre: la couleur rouge observée ne provient donc pas de ces corps que l’'Organe de Bojanus ne renferme pas d’ailleurs, pas plus qu'aucune autre partie de la Moule. Evidemment, si l’on admet la présence de la xanthine, on l’ad- met à l’état de traces. À cela rien de surprenant, puisque c’est un corps toujours très rare dans l’économie : 800 kilogrammes d’urine humaine n’encontiennent pas plus d’un gramme. Combien, si les proportions sont gardées, en peut-il exister dans l’Organe de Bojanus d’une Moule ? Après l’insaccès relatif de mes recherches à propos de la xan- thine, je devais m’attendre à n’être pas plus heureux avec l’hypo- xanthine. L'expérience s’est chargée malheureusement de me mon- trer que j’avais pensé juste, en prévoyant ainsi un résultat négatif. J’ai essayé la réaction de H. Weïdel ; j'ai dissous l'extrait dans l’eau de chlore, puis j’ai additionné la liqueur d’une goutte d’acide azotique. Le liquide est devenu rouge, puis jaune, puis brun en se desséchant. La vapeur d’ammoniaque a coloré très légèrement en rouge le résidu sec, préparé sur une lame de platine, et n’a rien pro- duit dans une seconde expérience. Ces résultats sont loin d'être satisfaisants, et il en sera probable- ment ainsi tant qu'on n agira pas sur un nombre suffisant d'animaux ; par le nombre de Moules que j'ai employé, on sait ce que cela veut dire. Que la xanthine, que l’hypoxanthine existent ou non à l’état de traces dans l’extrait alcoolique de l'Organe de Bojanus de la Moule, cela ne nous fournit aucun renseisnement sur la nature même de l’enduit qui en forme la plus grande partie et qui la contient en même temps que bien d’autres corps. On peut croire que c’est un corps gras, aux taches permanentes qu'il forme sur le papier, etqu'on ne pourrait sans erreur, vu leur RER FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 57 quantité minime, attribuer à la stéarine et à la margarine qu’il con- tient. D'ailleurs les taches, petites à l’origine, grandissent rapide- ment, parce que l'humidité de l'air ne tarde pas à liquéfier le résidu alcoolique déposé sur le papier. Voilà certainement une singulière graisse, et que l'on ne se serait pas attendu à trouver, si déjà Valen- ciennes et Fremy n’en avaient rencontré de pareilles. Il est bien re- grettable qu'ilsn'enaientpas fait l'analyse. J’aidit que dernièrement M. Bourquelot a, lui aussi, trouvé dans le foie des Céphalopodes une graisse soluble dans l’eau. Quand on traite cet enduit par une lessive alcoolique de potasse, il se forme un savon visqueux, soluble dans l’eau, et donnant par un excès d'acide chlorhydrique un léger précipité insoluble. Celui- ci, vraisemblablement, est formé par les acides gras insolubles que l'on sait exister dans l'extrait à l’état de glycérides et qui se pré- sentent, une fois libres, sous la forme de fines gouttelettes huileuses, ou même sous celui de masses concrétées, sans formes cristallines définies. Quant au liquide, il est brun, et lorsqu'on l'évapore il abandonne des cristaux de chlorure de potassium qui sont souillés par un liquide visqueux, brun également. Ce liquide visqueux est l'acide du corps gras propre à la Moule qui constitue la presque totalité du résidu alcoolique des Organes de Bojanus du mollusque. Il me reste encore à noter que l’extrait alcoolique donne, quand on le traite par la liqueur de Millon ou par le sulfate de cuivre et la potasse, les colorations des substances albuminoïdes. Aïnsi avec la liqueur de Millon le liquide se colore en rose au bout de quel- que temps ;avec le sulfate de cuivre et la potasse, il est bleu violet. Il n’y a pas de substances albuminoïdes pourtant dans l'extrait, car elles persistent après le traitement par le sous-acé- tate de plomb ou le sulfate de soude. Ces colorations trompeuses sont donc dues à la graisse de la Moule, à moins qu’on n’admette qu'il y a des substances albuminoïdes que l’eau bouillante, que 58 AUGUSTIN LETELLIER, l'alcool absolu et bouillant, que le sous-acétate de plomb et le sulfate de soude ne précipitent pas. Pour moi, je n’en connais pas. En résumé, l’extrait alcoolique de l’Organe de Bojanus de la Moule commune renferme : 1° Du chlorure de sodium. 2° De l'acide stéarique libre. 3° De la stéarine. 4° De la margarine. 5° De la créatinine. 6° De la créatine. 7° De la xanthine. 8 De l’hypoxanthine. 9 Une graisse propre à la Moule, dont l'acide est, comme elle, soluble dans l’alcool et dans l’eau. CHAPITRE VI. ÉTUDE DE LA SÉCRÉTION BOJANIENNE DE LA MOULE COMMUNE (suite). L'EXTRAIT AQUEUX DES ORGANES DE BOJANUS DE LA MOULE REN- FERME DE LA TYROSINE ET DE LA LEUCINE. — ON NE TROUVE DANS LA GLANDE DE BOJANUS NI ACIDE URIQUE, NI URATES, NI ACIDE HIPPURIQUE, NI GUANINE, NI PRODUITS BILIAIRES ; MAIS ON Y TROUVE DE L’URÉE ET DE LA TAURINE. — DOSAGE DE L’'URÉE DE LA MOULE. Après avoir abandonné successivement à l’éther, puis à l’alcool, les divers corps que ces liquides pouvaient dissoudre, l'extrait brut des Glandes de Bojanus de la Moule ne renfermait plus que les substances qui sont uniquement solubles dans l’eau, ou qui sont infiniment plus solubles dans ce dissolvant que dans tout autre. Solide après toutes ces manipulations, dur, cassant, couleur brun rouge pâle, le résidu était complexe. Ilrenfermait en effet, en outre de la matière grasse propre à la Moule, que nous savons soluble à la fois dans l’alcool et dans l’eau, diverses substances albuminoïdes dont ilimportait de le débarrasser. J’ai traité dans ce but l'extrait par l’eau bouillante : j'ai obtenu ainsi un liquide lactescent, d’une filtration difficile, et qui donne une liqueur opaline blanchâtre. J'ai additionné celle-ci de sous-acétate de plomb, il s’est formé un précipité, et j'ai filtré. L'opération a été assez longue, comme c’est du reste la règle quand on filtre un liquide quelconque additionné de sous-acétate de plomb. J’ai alors fait passer un courant d'acide sulthydrique jusqu’à refus ; vingt-quatre heures après, j'ai filtré ; et chauffant au bain-marie, j'ai chassé à la fois l’acide en dissolution et l’eau. Quand le liquide est devenu sirupeux, je l’ai retiré du bain et j'ai achevé la dessiccation sur l'acide sulfurique. Au bout de 60 AUGUSTIN LETELLIER. plusieurs jours la masse primitivement amorphe s’est montrée par- semée de nombreux cristaux. Lors de mes premières recherches, tous ces cristaux, à quelques raresexceptions près, étaient semblables entre eux et formés de fines aiguilles, disposées en forme de mâcles ou de balais opposés. J’ai dessiné, PI. I, fig. 8, diverses formes de ces cristaux; on pourra les comparer à celles que Gorup Besanez a figurées page 232, fig. 82, et aussi à celles que Funke a données PI. IV, fis. 3. Le grossisse- ment employé a été de trois cents diamètres environ ;maiïs l'emploi d’un objectif à immersion homogène m’a permis de voir et de des- siner le détail du groupement des cristaux. La disposition des cristaux, la manière dont ils se compor- tent dans la lumière ordinaire et dans la lumière polarisée, la façon enfin dont ils ont été obtenus, indiquent qu’on a affaire a de la tyrosine. C’est là en effet un corps dérivé des albu- minoïdes et qu’on doit s’attendre à trouver en compagnie de la leucine dans tout extrait animal analogue à celui que j’étu- die, soit qu’il y existe naturellement, soit qu'il y ait été pro- duit par les manipulations auxquelles on l’a soumis. La tyro- sine existe normalement dans le pancréas de l’homme; on la rencontre en abondance dans le foie malade et chez les ty- phiques. Gorup Besanez dit qu'elle existe dans les organes des animaux inférieurs, notamment chez les Arthropodes, et M. Bourquelot l’a trouvée dans le foie des Céphalopodes. Dans le cas de la Moule, je crois que ce corps existe normalement dans sa sécrétion bojanienne , les opérations auxquelles on a soumis celle-ci ne me paraissant pas de nature à en amener la production artificielle. La tyrosine que j'ai obtenue estinodore, très peu soluble dans l’eau froide, assez soluble dans les acides minéraux et les al- calis ; enfin, soluble dans l’alcool et dans l’éther, suivant Gorup Besanez, presque insoluble dans ces dissolvants, suivant Berthe- lot et Jungfleisch et suivant mes propres observations. à + mu. Pot FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 61 Ces caractères physiques ne suffisant pas pour déterminer la tyrosine, j'ai eu recours à la réaction caractéristique de ce corps, à la réaction de Piria. La coloration rouge passagère a été peu marquée et la couleur wjolette magnifique qui doit suivre, peu distincte. Mais on sait l’importance toute particulière qu’il y a à obtenir la tvrosine à l’état pur, si l’on ne veut voir la réaction en partie masquée : or il est impossible de se dé- barrasser notamment des traces de graisse propre à la Moule, à cause de leur solubilité dans l’eau et dans l’alcool. En même temps que la tyrosine, on voit des cristaux mal définis, ou plutôt des masses arrondies qu’on peut attribuer à la leucine. Les causes qui donnent naissance à ce corps sont d’ail- leurs si nombreuses qu'il serait bien extraordinaire que le li- quide n’en renfermât pas. La caséine, la fibrine et beaucoup d’autres corps analogues lui donnent en effet naissance sous l’in- fluence des acides, des alcalis et de la putréfaction. IL est vrai qu'on pourrait objecter que le liquide est neutre, qu'il ne ren- ferme par conséquent ni acides ni alcalis libres, et qu’on ne l'a point laissé se putréfier. La conséquence serait alors que la leucine se trouve normalemeut dans la sécrétion bojanienne de la Moule. D'ailleurs ce n’est pas le seul invertébré qui en ren- ferme, puisqu'on en trouve dans différents organes d'animaux inférieurs, et notamment dans le foie des Céphalopodes, du Poulpe commun et de la Sèche, par exemple. Au premier abord il pourra sembler étrange que je n’aie trouvé dans l’extrait aqueux, en plus de la graisse propre à la Moule, que des traces de tyrosine et de leucine; mais par son mode même de préparation, j'ai éliminé de cet extrait les corps qui, tout en étant solubles dans l’eau, le sont aussi dans l'éther et 62 AUGUSTIN LETELLIER. dans l’alcool, enfin j'ai également enlevé les matières albumi- noïdes. Or toutes ces substances ont été étudiées, quand j'ai cherché la composition des matières protéiques contenues dans la Glande et les différents corps que renferment ses extraits éthérés ou alcooliques. Au début de ces recherches sur la composition des corps que sé- crète l’Organe de Bojanus de la Moule, j'ai fait observer que, pour certaines substances peu répandues dans l’économie et qui échap- pent en conséquence facilement à l’observateur, il est indispensable de recourir à des méthodes analytiques particulières. Le nombre des corps à déterminer ainsi est heureusement assez restreint : six seulement m'ont paru nécessiter de semblables recherches, à cause de leur importance physiologique, c’est-à-dire des conséquences qu’on pourrait tirer de leur présence, pour expliquer la fonction de la Glande de Bojanus. Ces corps sont : 1° L’acide urique et les urates. 2° L'acide hippurique. 3° La guanine. 4° La taurine. 5° L’urée. 6° Les produits biliaires. 7 La glycose. I. — Acide urique et urates. Les formes cristallines qu’affecte l’acide urique sont si connues, les réactions au moyen desquelles on le reconnaît tellement caractéristiques qu’il semble impossible que R. Owen, de Babo et Riche se soient trompés dans leurs analyses. C’est par conséquent sans erreur probable qu'on a pu regarder, à partir de leurs tra- FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 63 vaux, l'acide urique comme un des éléments que l’on trouve dans l’Organe de Bojanus des Mollusques acéphales ; mais on aurait dû faire des réserves et ne point écrire, comme on le voit dans maints Traités de zoologie, que la Glande de Bojanus est spécialement chargée de sécréter de l’acide urique. Le cas est rare en effet où l’on trouve ainsi de l'acide urique, si rare même que, depuis les expérimentateurs que j'ai cités, personne n’en a trouvé, ni Schloss- berger, ni Voit, et, pourrai-je le dire, ni moi non plus, quoique je l’aie cherché chez plus de vingt mollusques d'espèces différentes, et en employant toutes les précautions possibles. A l’époque où j'ai commencé ces recherches, ces faits n'étaient point connus, et l’idée d’un organe sécrétant des urates ou de l'acide urique avait cours partout : aussi ma surprise a été grande de n'en point trouver trace chez aucun des mollusques que j’étudiais. J'ai pensé alors que l’insuccès de mes analyses tenait au nombre des animaux que je sacrifiais, et | ai ouvert des centaines de Moules, toujours inutile- ment. Et pourtant une seule Æélix aspersa, une seule Hélix vigne- ronne suffisent, un Planorbe, une Physe, qu’on dissèque, donnent de la murexide. J’ai eu beau varier les méthodes, je n'ai obtenu ni cristaux, ni réactions caractéristiques. Quand on traite l’Organe de Bojanus de la Moule par l’acide azotique, on a bien un liquide jaune rouge dont la couleur se fonce par les vapeurs ammoniacales ; mais jamais on ne voit un point, un seul, qui ait la couleur pour- pre de la murexide ou même cette teinte groseille qui décele des traces, qu’on pourrait dire pourtant impondérables, d’acide urique. J’ai fait agir, fort inutilement du reste, la potasse caustique sur les glandes dissociées, dans l’espérance d’obtenir ensuite quelques cristaux d’acide urique, en décomposant les corps dissous par l’a- cide chlorhydrique ou par l’acide acétique. J’ai aussi employé la méthode de Messner, j'ai coagulé l’extrait aqueux par la chaleur et une goutte d’acide sulfurique, puis, ajou- tant de l'hydrate de baryte jusqu’à réaction alcaline, j'ai obtenu 64 AUGUSTIN LETELLIER. un précipité que j'ai séparé par le filtre. Alors j'ai concentré le li- quide limpide quiavait passé, mais par refroidissement il ne s’est formé aucun dépôt où l’on pût reconnaître un urate quelconque. Le doute n’est pas possible, la sécrétion bojanienne de la Moule ne renferme pas d’acide urique. Je pourrais ajouter qu’il n’y en a pas non plus dans les autres parties du corps de ce mollusque ; car l’animal entier traité comme ses Glandes n’en laisse apercevoir au- cune trace. II. — Acide hippurique. On pouvait croire que chez la Moule l’acide urique est remplacé par l’acide hippurique ; mais cela n'est pas, la sécrétion boja- nienne de la Moule n’en renferme pas. Quand on traite les Glan- des par l'acide azotique et l’ammoniaque, on a bien un liquide jaune rouge, etc'est ainsi que se colorent les humeurs qui renferment de l'acide hippurique ou des hippurates ; mais, comme Voit l'a fait observer à propos de l’Æuître perlière, l'acide hippurique n’est pour rien dans cette coloration uniquement due à l'acide xanthoprotéique produit par la réaction de l’acide azotique sur les matières albumi- noïdes. Au reste, j'ai cherché à isoler l’acide hippurique en employant les méthodes ordinairement usitées quand on veut le retirer des tis- sus glandulaires, et je n’ai obtenu aucun cristal qui appartint à ce corps. III et IV. — Guanine et Taurine. On a dit que l’Organe de Bojanus sécrète de la guanine. Basée sur une étude de la sécrétion bojanienne de l’Anodonte, cette idée nu est plus admise depuisque Voit n’en a pas trouvé, en refaisant les mêmes recherches sur le même animal. Ce n’était pas une raison FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 65 pour ne point essayer de trouver ce corps chez la Moule ; mais je ne l'y ai point rencontré, et, au lieu de guanine, j'ai isolé de la taurine et peut-être de l’inosite. J'ai traité les Sacs de plus de deux cents Moules par nn lait de chaux bouillant : j'ai filtré quand la matière m’a paru suffisamment désagrégée, j'ai sursaturé le liquide limpide et concentré par l’a- cide chlorhydrique. Au bout de quelques jours j'ai vu au fond dela capsule de fines aiguilles prismatiques, incolores, à six faces, très longues, les unes isolées, les autres réunies en groupes étoilés. Quel- ques cristaux plus larges que les autres affectent la forme de tables tronquées obliquement aux extrémités (Voir PI. Ifig. 9). On peut préparer des cristaux identiques, et cela en bien plus grande abondance, en traitant par la chaux, non plus l’Organe de Bojanus seulement, mais l’animal tout entier. Le dessin que je donne a été fourni par des cristaux obtenus en traitant ainsi les corps entiers de quatre litres de Moules d'Isigny. À première vue, ces cristaux ressemblent assez à du chlorhydrate de guanine ; mais d’abord ils ne sont pas colorés, et en second lieu c'est en vain que, les ayant dissous dans l’eau, onajouterait de l’am- moniaque à leur solution pour enprécipiter de la guanine. Il ne se produirait rien, ce n’est pas du chlorhydrate de guanine. Si maintenant on compare les cristaux obtenus aux dessins que Funke et Gorup Besanez donnent de la taurine, on n’hésite pas à les considérer comme constitués par ce corps dont ils ont les for- mes cristallines et les propriétés physiques et chimiques. Ces cristaux sont en effet nacrés, durs, cassants, inaltérables à l'air, facilement solubles dans l’eau, insolubles dans l'alcool absolu, sans action sur les réactifs colorés. La chaleur les décompose diffi- cilement, les acides et les bases les dissolvent sans se combiner avec eux, et seule l’eau régale, par une longue ébullition, les dé- compose et donne naissance à des traces d’acide sulfurique. Aïnsi ces cristaux renferment du soufre : on ne doutera pas alors qu’ils ne soient de la taurine qu’onsait exister chez les Mollusques, depuis ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN., — 2° SÉRIE, — T, V bis, suppc. 1887. — 1° Mem. 5 66 AUGUSTIN LETELLIER. la pubiication du beau mémoire de Valenciennes et Fremy. Un fait reste étrange, c’est la présence même de la taurine chez un animal qui n’a point de produits biliaires, car la Moule, pas plus que les autres Mollusques acéphales que j'ai étudiés, n’en renferme aucune trace. Il en faut probablement conclure que la taurine a dans l’organisme d’autres sources que la décomposition de la bile. Au milieu des cristaux de taurine on voit quelquefois des cris- taux tabulaires, qui ressemblent si complètement à l’inosite que je me suis demandé s’ils n’appartenaient point à ce corps. Comme je n'ai pu recourir àaucune analyse, ce n’est évidemment qu’une pure hypothèse, qui n’a pour base que la similitude des formes cristal- lines, et je prends soin de mettre en garde contre les conséquences qu’on est souvent tenté de tirer trop hâtivement des formes des cristaux, lesquelles ne sont pas toujours démonstratives. On peut remarquer cependant que dans tous les cas il n’y aurait rien d’im- possible à ce que quelques cristaux d’inosite se trouvassent mélan- gés à ceux de la taurine. Comme celle-ci, l’inosite n’est point atta- quée par les acides et par les bases; elle existe dans les muscles des Mollusques, et il est bien certain qu’en dissociant l’Organe de Bojanus d’autant de Moules, je ne puis prétendre n’avoir jamais enlevé aucune partie des muscles avec leurs Glandes. Si l’inosite existe dans l’Organe de Bojanus de la Moule, c’est bien certainement un des corps les plus rares qu’on y puisse ren- contrer. V. — Urée. Quel que soit l’intérêt que présente la recherche de l’acide uri- que, de l’acide hippurique, de la guanine et de la taurine, on peut dire qu’il est presque nul en présence de celui qui s’attache à la FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 67 constatation de traces d’urée, si petites qu’elles soient, dans la sécrétion bojanienne de la Moule commune. L’urée est en effetle corps que l’on doitregardercomme l’élément caractéristique de l’urine de l’homme et des animaux supérieurs. On peut, il est vrai, en trouver des traces dans d’autres humeurs, le sang et la Iymphe, par exemple, ou même dans divers tissus, comme les muscles des Plagiostomes, mais l’urine estson véhicule par excel- lence, et le rein son organe éliminateur. Aussi, malgré les réserves qu’il convient à priori de faire sur l'identité possible ou simple- ment probable des fonctions chez les êtres qui appartiennent à des types zoologiques différents, constater la présence de l’urée chez la Moule, c'était, si la découverte était étendue à d’autres Wollusques, fixer d’une facon sinon indiscutable, du moins infiniment probable, le rôle physiologique de l’Organe de Bojanus des Mollusques acéphales. À deux reprises différentes j’ai cherché et j’ai trouvé de l’urée dans la sécrétion bojanienne de la Moule. Je l'ai préparée en nature et j'en ai essayé le dosage par les méthodes ordinaires. On verra plus loin comment cette découverte a été étendue à l’Ano- donta cygnea, à l’'Anodonta anatina, au Cardium edule, et, suivant toute vraisemblance, au Cyclas corneus. Lorsque j'ai cherché, pour la première fois, l’urée dans l'Organe de Bojanus de la Moule, je me suis servi de près de quatre cents animaux (je ne les ai pas comptés), dont j'ai mis les Glandes dans l'alcool à 90° pendant dix jours. Puis, les ayant triturées dans un mortier, je les ai traitées à nouveau par l'alcool. Ayant filtré ces liquides, j'en ai chassé l'alcool au bain-marie, puis j'ai repris par l'eau, j'ai filtré pour enlever les graisses,et j'ai concentré à consis- tance sirupeuse. J'ai alors traité le sirop ainsi préparé par l’alcool absolu et bouillant, et j'ai abandonné au repos pendant vingt-qua- tre heures. Ce temps écoulé, il y avait au fond du vase un dépôt solide, et au-dessus un liquide alcoolique peu coloré. J'ai décanté celui-ci avecprécaution, j’en ai chassé l’alcool par la chaleur, et j’ai 68 AUGUSTIN LETELLIER. repris par l’eau. Cette opération était destinée à éliminer les der- nières traces des corps gras, mais la graisse propre à la Moule étant soluble dans l’eau pure, le liquide qui a passé n'a rien aban- donné au filtre, et il est resté coloré. Je l’ai mis alors en présence du sous-acétate de plomb ; il s’est formé un abondant précipité ; j'ai attendu qu'il se fût déposé au fond du vase et j'ai filtré. Le li- quide que j'ai obtenu était limpide ; mais commeil contenait un excès de sel de plomb, j'ai dû, pour m’en débarrasser, le soumettre à l’action de l'acide sulfhydrique passant jusqu'à refus. Douze heures après, j'ai filtré, et j'ai obtenu un liquide d’une limpidité parfaite, qui néanmoins m’a donné par concentration un liquide si- rupeux assez fortement coloré. Aïnsi toutes les précautions em- ployées n'ont pu débarrasser la liqueur de sa couleur roussâtre, et, lorsque l’ayant additionnée d’une goutte d’acide azotique, j'ai ob- tenu par une longue exposition sur l’acide sulfuriqre des cristaux d’azotate durée, ceux-ci se sont trouvés placés au sein d’une masse brunâtre. Or cette masse colorée rendait assez difficile l’observa- tion microscopique des cristaux, parce que, excessivement déliques- cente, elle absorbait rapidement l'humidité de l'air et alors tombait en déliquium. Malgré cet inconvénient, j'ai vu que les cristaux avaient bien les formes de l’azotate d’urée ; je ne me suis pas con- tenté de les observer seul, je les ai fait regarder par d’autres per- sonnes qui n’ont pas hésité à se prononcer comme moi et à les reconnaître pour des cristaux d’azotate d’urée. Cela ne m'a pas suffi. Voulant être absolument sûr de ce que j’avance, j'ai eurecours aux deux réactions que je vais maintenant donner et qui ne lais- seront, je l'espère, aucun doute dans l’esprit de ceux que ces ques- tions peuvent intéresser. Il faut observer en effet que les azotates alcalins présentent des formes cristallines très voisines de celles de l’azotate d’urée et que la confusion est possible : aussi faut-il tou- jours recourir à des preuves plus certaines que celles qui résultent de la similitude des cristaux. 1° Quand on traitait sur une lame porte-objet un certain nombre FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 69 des cristaux que j'avais préparés par la liqueur de Millon, il se manifestait une vive effervescence. Orles bulles de gaz que l’on observait ne pouvaient évidemment provenir d’un azotate alcalin qui se dissout dans ces conditions sans dégagement gazeux. 2° Lorsque l’on croit qu’un liquide exempt de substances albumi- noïdes renferme de l’urée, on peut s’en assurer, comme Knop l'a indiqué , en le traitant par l’hypobromite de soude qui décom- pose l’urée en acide carbonique et en azote ; l’acide carbonique est absorbé par l'excès de soude caustique, l'azote seul reste indissous, et de son volume on déduit le poids d’urée contenu dans la liqueur. Dissolvant l’azotate d’urée que j'avais préparé dans l’eaudistillée, jai fait agir sur lui l’hypobromite de soude et j'ai obtenu de l'azote, d’où j'ai conclu pour la seconde fois que je n'avais pas affaire à un azotate alcalin, mais bien à de l’azotate d’urée. Mais ce n’est pas tout : l’hypobromite de soude permet de doser l’urée que contient un liquide animal, si l’on a eu soin d’éliminer les matières protéiques ; alorsj’aicherché combien il pouvait y avoir d’urée dans l'extrait préparé au moyen des Organes des quatre cents Moulés. Les résultats que j’ai obtenus n’ont pas été exacts, parce qu'’ily avait eu plusieurs fois perte de matière pour mes différentes observations ; je suis plus tard arrivé à connaître plus exactement la richesse en urée de la sécrétion bojanienne de la Woule ; néan- moins je vais donner mon premier dosage, parce qu’il a été faitavec le plus grand soin, que je n’étais pas seul à le faire, et par consé- quent sous l'influence des erreurs involontaires que commet souvent celui qui n’a avec lui personne pour lui signaler les causes d’insuc- cès de ses analyses. Je me suis servi, pour faire mon dosage, des ap- pareils du D' G. Noelet de Dannecy, qui ne sont que des modifica- tions de celui d’Esbach. J’ai mis le résidu fort réduit que les quatre cents Moules m’avaient fourni dans deux centimètres cubes d’eau, et les introduisant dans le mélangeur, j’ai, par l’action de l’hypo- bromite de soude, obtenu cinq centimètres cubes d'azote :la tempé- rature était de 23°,5. De cette expérience j'ai conclu qu'il y avait 70 AUGUSTIN LETELLIER. 0g.013 d’urée dans l'extrait analysé. Si l’on admettait que celui-ci n’eût point éprouvé de pertes, cela ferait 0g.00003 d’urée par ani- mal ; mais des expériences postérieures, faites avec toutes les ga- ranties désirables, m'ont fourni le nombre 0g.00045, et cest celui que j'adopte pour le poids moyen de l’urée qu’on trouve dans l'Or- gane de Bojanus d’une Moule d’'Isigny. On ne peut pas objecter, contre la méthode analytique que j’ai suivie, que l’hypobromite de soude ne donne pas seulement naissance à un dégagement gazeux en présence de l’urée, mais que le même phénomène se produit quand le liquide renferme des urates, des ma- tières albuminoïdes, de la créatine et de la créatinine. Des urates, la sécrétion bojanienne de la Moule n’en renferme pas ; quant aux substances albuminoïdes, iln’en reste plus après le traitement qu’on a fait subir à l’extrait pour préparer l’urée. Restent donc la créa- tinine et la créatine : il y a fort peu de l’une et de l’autre, parce que la première est presque insoluble dans l’alcool absolu à la tem- pérature ordinaire, et que la seconde ne s’y dissout pas du tout. Et puis, pour produire cinq centimètres cubes d'azote, il ne faudrait pas moins de 1 g. 112 de créatinine, quantité évidemment supé- rieure à celle que quatre cents Moules peuvent fournir. Malgré le bien fondé de ces observations, j’ai cru devoir recom- mencer le dosage de l’urée de la Moule et, pour être à l’abri des erreurs que les traces de créatine etde créatinine pouvaient entrai- ner, je me suis servi de la liqueur de Millon employée à froid. Mais alors l'opération est très lente, ce n’est qu’au bout de plusieurs jours que l’on peut considérer la décomposition comme terminée ; et comme, en l’état de nos connaissances, il n’y a point une importance majeure à savoir combien au juste chaque animal renferme d’urée dans ses Sacs de Bojanus, je ne retiendrai de l’analyse que j'ai faite que ce résultat capital qu’il s’est dégagé encore de l'azote. : Ainsi l’on trouve de l’urée dars l’Organe de Bojanus de la Moule, et cette importante observation est basée : FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 71 1° Sur la préparation à l’état d’azotate de l’urée qu’on en peut tirer ; 2° Sur sa décomposition par l'hypobromite de soude et par la liqueur de Millon. | Le lecteur trouvera, dans le dernier chapitre de ces recherches, des détails complémentaires sur la production de l’urée chez les Mol- lusques, et il y verra notamment que j'ai trouvé de l’urée dans l’Or- gane de Bojanus de tous les Mollusques acéphales chez lesquels je l'ai cherchée, tandis qu’ilne m'a pas été possible d’en découvrir chez les Mollusques gastéropodes. VI. — Produits biliaires. Il n y a pas de produits biliaires dans la sécrétion bojanienne de la Moule. On a vu quelles expériences m’avaient conduit à soupconner la présence des produits biliaires dans l’Organe de Bojanus de la Moule. Mais les analyses, faites avec assez de soin pour éliminer entièrement les substances albuminoïdes, les graisses et l’alcool, ce dernier surtout, ne m'ont pas permis d'obtenir les colorations ca- ractéristiques des acides biliaires, soit en employant la méthode de Pettenkofer , soit en recourant à celle de Gmelin qui est encore plus sensible. Les colorations observées, voisines de celles que prend l’oléine en pareilles circonstances , presque identiques aux colorations qu'on observe avec les huiles de Baleine ou de Morue, sont peut-être dues à la graisse propre à la Moule ou à sa matière colorante que je n'ai pas su isoler. Il est possible que ce soit cette même matière colo- rante qui produise la taurine, dont la présence sans l’existence de produits biliaires reste une énigme ; car, s’il n'y en a pas dans l’Or- gane de Bojanus, on aurait pu penser qu'il y en a aïlleurs, et je me suis assuré qu'aucune partie du corps de la Moule n’en renferme. 72 AUGUSTIN LETELLIER. VII. — Glycose. J'ai cherché si l'organe de Bojanus de la Moule renferme du su- cre. J’ai en conséquence trituré les glandes dissociées de 2 k. de Moules en présence de l’eau pure, j’ai ajouté du sulfate de soude et j'ai fait bouillir. Dans le liquide limpide que j'ai obtenu par filtra- tion j'ai ajouté quelques gouttes de la liqueur de Fehling ; ils’est formé un précipité vert, mais pas d’oxydule de cuivre..J’en ai con- clu que le liquide extrait de l’'Organe de Bojanus de la Moule ne renferme pas de sucre. Ayant eu connaissance d’une communication faite à la Kaiserli- che Akademie der Wissenschaten de Vienne qui annonçait la possi- bilité de reconnaître des traces de sucre normal dans l’urine humaine, j'ai essayé la méthode indiquée. J’ai dissous du thymol dans l’alcool absolu et j’en ai ajouté quelques gouttes au liquide précédemment essayé; il y a eu un léger trouble provenant de la précipitation d’une petite partie du thymol : j'ai alors ajouté de l’a- cide sulfurique et j’ai fortement agité. La liqueur s'est colorée en rouge cinabre ; en étendantavec de l'eau, lacouleur a viré au carmin. Après 48 heures, un dépôt rouge s’était formé ; ce dépôt était soluble dans l’ammoniaque et lui communiquait une coloration jaune. Cette expérience laisse supposer qu’il existe des traces de sucre dans les corps de Bojanus de la Moule, mais ces traces sont si in- sensibles que la liqueur de Fehling ne les révèle pas. CHAPITRE VII. ÉTUDE DE LA SÉCRÉTION BOJANIENNE DE LA MOULE OOMMUNE (Suite). CALCULS BOJANIENS DE LA MOULE. — LEURS PROPRIÉTÉS PHYSI- QUES, LEUR COMPOSITION, LEUR MODE DE CROISSANCE. -— LEUR ÉLIMINATION. — PERLES DE LA MOULE. — COMPOSITION DE LA COQUILLE DE LA MOULE. — COMPARAISON DES CALCUIS, DES PERLES ET DE LA COQUILLE AU POINT DE VUE DE LA COMPO- SITION CHIMIQUE. Les cellules de l’'Organe de Bojanus de la Moule renferment des cristaux quisont généralement microscopiques; mais il arrive aussi que, se soudant les uns avec les autres, ces cristaux prennent des dimensions considérables et deviennent de véritables concrétions. Le cas est rare, il est même beaucoup plus rare que la présence d’une perle, plus ou moins bien faite, adhérente à la coquille. Je n'en ai trouvé qu’un seul exemple, et j’ai pourtant ouvert bien certainement plus de six mille Moules pour faire mes recherches : j'ai au contraire trouvé relativement assez souvent des perles en voie de formation et encore adhérentes aux valves. Les calculs de la Moule sont généralement lisses à la surface, sphériques ou plus ou moinselliptiques, etalors assez semblables pour la forme et pour la taille à de petits grains de millet. Il y a des con- crétions qui sont presque microscopiques : on en observe qui sont toutes bossuées et qui semblent formées d’un agrégat de petites sphérules, dont celles qui sont à l'extérieur sont seules visibles. La densité de ces calculs est supérieure à celle de l’eau ; ils sont durs, cassants, incombustibles, et on en peut faire facilement des coupes minces. 74 AUGUSTIN LETELLIER. La coupe que je donne, PI. XI, fig. 11, est celle d’un calcul assez gros qui est visiblement formé par deux calculs soudés qui, au mo- ment de la juxtaposition, étaient déjà assez gros et que de nouveaux dépôts sont venus postérieurement enrober. Au centre se voit une ligne sombre, la ligne desoudure, et, de part et d'autre, deux centres d'attraction autour desquels le carbonate de chaux, dont ces calculs sont en majeure partie formés, s’est déposé par couches concentri- ques. On ne voit pas de différence entre la partie centrale et la péri- phérie,soit parce que la coupe a passé au-dessous du centre d’attrac- tion moléculaire, soit parce que, et c’est ce qui est le plus vraisembla- ble, le noyau n’était pas distinct des dépôts qui se sont formés ultérieurement et se trouvait, lui aussi, constitué par un simple gra- nule de carbonate ou de phosphate de chaux. Je crois que la coupe passe au-dessous du noyau et très près de celui-ci ; je l’admets iden- tique aux couches postérieurement surajoutées, et je fonde ma manière de voir sur les observations que j'ai faites pendant la pré- paration même de la coupe. Pour faire celle-ci, j'ai monté la concrétion dans le baume sec sur une lame de verre quielle-même était fixée sur un bouchon percé en son centre. On pouvait ainsi suivre attentivement les progrès de la taille au moyen du microscope. Or jamais je n’ai vu un point noir ou un corps étranger quelconque au centre des zones concentriques ; ce centre à aucun instant ne m’a paru différer dun reste de la préparation. À une petite distance du centre et seulement sur un des deux cal- culs,primitivement libres, maissoudésl’unàl’auire plus tard,se voient de nombreuses sphérules plus ou moins bien soudées entre elles et semblables à celles qu’on apercoitsur certaines concrétions microsco- piques. La couche de sphérules est restée peuépaisse, et elle a bientôt été recouverte par une double enveloppe de cristaux prismatiques. Là où se trouve la soudure, il n y a ni sphérules ni cristaux pris- matiques. Quant au second calcul, il ne présente la trace d'aucune formation de la même nature, on n'y voit ni sphérules, ni prismes. FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 75 Il est probable que le double dépôt de sphérules et de prismes entourait primitivement de toutes parts le premier calcul et quil a disparu aux points où s’est effectuée la soudure par le frottement qu’il a éprouvé contre le second calcul. Le double dépôt pouvait cependant n'être pas partout dela même épaisseur que là où l'on en voit des restes : il ne manque pas en effet de concrétions qui ne sont pas identiques à leurs deux extrémités, et chez lesquelles cer- tains dépôts se sont formés plus abondamment à un pôle qu'à un autre, mais penser qu'il n'existait ni granules ni prismes là où l’onn en voit point et où les calculs se sont soudés, me paraît peu vraisembla- ble. Il est, ce me semble, plus naturel de croire que le gros calcul maintenu immobile par les tissus qui l’entouraient, incessamment frotté par le petit caleul que sa taille rendait plus mobile, a perdu à la longue sa double enveloppe protectrice. C’est en effet le corps qui esten mouvement qui entame celui qui est immobile, et le gros calcul pour cette raison a dû s’user plus vite que l’autre. En regardant cette explication comme satisfaisante, on admet par là même, ce que du reste l’observation démontre vrai d'une façon journalière, que deux calculs voisins peuventtrès bien n’être pas identiques. Cette diversité tient à plusieurs causes : les calculs, même ceux qui se forment dans les cellules voisines, ne prennent pas nécessairement naissance tous à la même époque, et, alors même qu’il en serait ainsi, il est certain que les dépôts qui se font dans les différentes cellules ou dans les mailles du tissu interstitiel ne doivent pas au même moment être partout identiques, mais varier avec la position et l’activité vitale des cellules. Du reste, pour en revenir aux deux calculs qui en se soudant ont formé la concré- tion que j étudie, on peut dire que si le petit calcul avait été iden- tique au gros, il n’aurait pas perdu, en attaquant celui-ci, son enve- loppe decristaux prismatiques, évidemment plus dure que sa partie centrale, et par conséquent en ferait voir des traces sur la coupe. Une fois soudées, les deux concrétions primitives ont été recou- vertes de couches calcaires semblables à celles qui constituent le 76 AUGUSTIN LETELLIER. noyau. Puis, sous l'influence d’un phénomène dont je vais donner l'explication, de nouvelles et nombreuses sphérules se sont déposées ; enfin, un ciment amorphe, postérieur à Ja formation des sphé- rules, ou peut-être même coexistant, s’étant formé à son tour, les cranules se sont trouvés réunis les uns avec les autres et ont formé une sorte de poudingue. On ne peut pas évidemment prévoir ce qui se serait passé ulté- rieurement à tous ces dépôts si l'animal eût vécu ; mais on doit penser qu'à mesure qu’il aurait grossi, le calcul se serait rap- proché de la surface de la glande, et qu’enfin il serait tombé, par rupture dela paroi, dans le courant anal, et auraït ainsi été expulsé en même temps que l’eau qui a baigné les branchies. Mais j'ai déjà expliqué comment se fait ce cheminement lent des calculs du centre à la périphérie de l'Organe de Bojanus : il est donc inutile d’y revenir. Quant à ce qui est de la forme arron- die des dépôts, on en peut, il me semble, donner facilement la raison. Quand on laisse un corps inorganique cristalliser dans un vase de laboratoire, on ne remarque pas en général que ses cristaux af- fectent l’aspect de sphères plus ou moins régulières ou de masses mamelonnées à contours arrondis. Il n en est plus de même quand ce même corps a été extrait des tissus d’un animal ; il semble qu'il a acquis des propriétés nouvelles, car c’est toujours sous la forme de sphérules que se fontses dépôts cristallins. L’expérience est du reste facile à faire : on dissout de la chaux du marbre dans l’acide chlorhydrique, on sature le chlorure de calcium formé par l’ammo- niaque et on abandonne le liquide à l’air libre. Bientôt sa surface est recouverte d’une mince pellicule de carbonate de chaux dans laquelle on ne remarque rien qui ressemble à des mâcles. On prend alors une valve de Moule ou de tout autre mollusque, on la traite aussi par l’acide chlorhydrique, puis par l’ammoniaque, etau bout d’un jour ou deux on a sur la surface du liquide, sur les parois du vase et même sur le fond des sphérules de carbonate de FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 77 chaux. On peut au microscope voir qu’elles sont formées de cou- ches concentriques superposées, et dans la lumière polarisée on ad- mire le phénomène de la croix noire auquel toutes ces petites sphè- res donnent lieu, bien mieux encore que des grains d’amidon. Pourquoi cette différence dans le mode de groupement des cris- taux du carbonate de chaux? parce que la solution du test de la Moule renferme des détritus organiques, parce que ceux-ci, sen- siblement de même densité que le liquide, flottent à sa surface ou dans sa masse, et servent de paroi aux cristaux de carbonate de chaux qui sont en train de se former. Mais ici la paroi peut être en- tourée dans tous les sens par les cristaux, il se formera donc des sphérules que les dépôts ultérieurs recouvriront de leurs couches superposées ; de là l’aspect au microscope et le phénomène de po- larisation lamellaire observé. Cette explication est si vraie qu’il suffit d'introduire dans la so- lution provenant du marbre des filoches de coton, ou une pous- sière impalpable, de la silice, par exemple, ou du bleu d’azur, pour voir le carbonate de chaux se déposer sous la forme de petites sphères. Il est maintenant facile de comprendre pourquoi chez l’animal vivant les dépôts affectent généralement la forme sphérique. Là où ils se forment, les cellules sont en voie de dégénérescence, elles se désorganisent, et dans le liquide qu’elles contiennent doivent flotter des parcelles de leur tissa décomposé. Ce sont ces par- ticules qui, visibles ou non, servent de support aux cristaux ; de là des granules, des perles très petites mais rondes qu’on observe si souvent. A d’autres moments, les dépôts peuvent se faire au sein d’un liquide exempt de détritus organiques : les choses se passent alors comme dans le vase à précipités, et les cristaux formeraient des masses irrégulières, si les granules déjà déposés ne leur servaient de centres d'attraction. Enfin, etnous en verrons de nombreux exemples, il peutarriver 78 AUGUSTIN LETELLIER. que les dépôts se fassent si vite quela cristallisation oules groupe- ments moléculaires soient impossibles : dans ce cas, malgré la pré- sence de débris organiques, il ne se formera plus de sphères, et l’on aura seulement une masse pismentée dont les couches successives se distingueront par la plus ou moins grande abondance de détri- tus. Le même effet se produira encore lorsque le dépôt se fera lentement, si l'humeur au sein de laquelle il se forme est constam- ment agitée. Tous les calculs ne montrent pas les mêmes alternances dans les dépôts qui les constituent. Aïnsi j'ai fait la coupe de l’un d’entre eux qui était uniquement formé de la substance qui forme l’enveloppe du noyau du gros calcul dessiné à la PI. XI, fig. 11. On n'y voit ni sphérules, ni cristaux prismatiques accolés. Cela n'empêche pas qu’on pourrait montrer maint calcul plus gros ou plus petit dont la surface n’est qu’un agrégatde sphérules de carbonate de chaux. La conséquence à tirer de toutes ces observations, en s’en rap- portant uniquement à ce que l’on voit, c'est qu’au même moment la sécrétion ou l’excrétion bojanienne ne doit pas être la même partout, mais plus abondante en certains points, moindre dans d’autres, nulle dans certaines parties. Là où le dépôt est abondant et, rapidement effectué, il affecte l’aspect de graviers si petits que leur masse n’en paraît avoir acquis aucune texture cris- talline ; et le même phénomène s’observe si les dépôts se sont for- més au sein d’un liquide sans cesse Aie ce qui en certains points a dû nécessairement se produire, grâce à l’active circulation dont l’Organe de Bojanus est le siège. Là au contraire où la sécrétion est lente, où les dépôts se font dans des liquides à peine saturés, les cris- taux ont le temps de se former et l’on a ces couches Res qu’on observe dans beaucoup de calculs. On peut encore attribuer la différence d’aspect des calculs à la nature chimique des dépôts quine sont pas toujours constitués par la même substance minérale. Mais cette raison, qui a sa valeur quand les corps cristallisent dans des systèmes incompatibles, n’est plus FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 79 guère admissible quand les substances sont isomorphes, parce qu’a- lors la substitution de l’un d’eux à un autre dans les cristaux qui se forment n’en change pas bien sensiblement les propriétés phy- siques. Quoique, d'après les explications que j’ai fournies de l’origine des calculs, ceux-ci dussent être sphériques, on conçoit que cette forme a pu subir,suivant les circonstances, bien des modifications : aussi voit- on des concrétions qui sont aplaties comme des disques, d’autres qui sontallongées, d’autres enfin quiont l’aspect de poires ou de len- tilles. Toutes ces différences, sans importance, tiennent à l’irrégula- rité naturelle avec laquelle les diverses couches solides se sont dé- posées, et au hasard qui a présidé à la soudure des calculs élémen- taires dont les concrétions sont formées. Enfin, je ferai cette dernière remarque, qu’il est bien probable que tous les calculs n’ontpas le même âge, quoique placés côte à côte. Cela n’empêche pas que les calculs superficiels ne soient en général plus anciennement formés ; ce sont d’ailleurs les plus gros. J'ai ex- pliqué ailleurs le mécanisme grâce auquel des calculs nés au centre du tissu glandulaire finissent par être superficiels ; j’ai dit que ces déplacements lents sont la conséquence de l’activité vitale des cel- lules bojaniennes et des mouvements imprimés aux concrétions, mouvements qui ont pour effet d’altérer et de détruire une à une et à la longue les cellules et le tissu conjonctif qui les séparent de la surface du corps. Chez la Moule, les calculs sont ainsi vite arrivés à la périphérie de l’Organe, ils la percent et tombent : aussi sont-ils ra- res et petits ;mais chez les mollusques dont la glande est ramassée, les concrétions qui, par suite du cheminement interne, arrivent dans le tissu conjonctif lacunaïre dela partie dorsale de l'animal, arrêtées par le manteau, peuvent y séjourner longtemps avant de se frayer un chemin au dehors ; alors elles sont volumineuses et faciles à observer : tel est le cas de la Cythérée, dont j'étudierailes calculs un peu plus loin. 80 AUGUSTIN LETELLIER. La coupe que j'ai donnée d’un caleul dela Moule (PI. XI, fig. 11) est vue dans la lumière ordinaire ; dansla lumière polarisée elle apparaît brillante sur un champ noir. Ën même temps on y voit, mais peu dis- tinctement à cause de son épaisseur, une double croix noire dont les branches se confondent presque partout et donnent ainsi l’appa- rence d’une croix unique. Avec une préparation plus mince on peut voir que la substance qui constitue certains calculs est vivement colorée quand on croise les nicols. L'analyse chimique des concrétions ne présenterait aucune difñ- culté si la quantité desmatièresétaitplus grande ; je crois cependant pouvoir garantir l’exactitude de la composition suivante : 1° Les calculs sont presque entièrement formés de carbonate de chaux. Ils font une viveeffervescence quand on lestraite par l’acide chlorhydrique ou par l’acide acétique. Leur solution acétique addi- tionnée d’oxalate d'ammoniaque donne un précipité d’oxalate de chaux facilement soluble dans l'acide chlorhydrique. 2° La solution chlorhydrique des calculs saturée par l’'ammonia- que abandonne, non immédiatement, mais à la longue, un préci- pité au milieu duquel on peut distinguer au microscope diverses formes du phosphate ammoniaco-magnésien et du phosphate acide de chaux. 3° En ajoutant au précipité de l’acide acétique, tout se dissout, preuve que les calculs ne renferment pas d’oxalate de chaux. 4° Les calculs ne paraissent pas renfermer de fer, ou, s’ils en con- tiennent, il y en a si peu que la réaction est insensible. 5° Ils ne contiennent ni urate, ni acide urique. En résumé, les calculs de lorgane de Bojanus dela Moule sont formés, pour la plus grande partie, par du carbonate de chaux avec des traces constatées de phosphate acide de chaux et de phos- phate ammoniaco-magnésien ; j’ai dit constatées, car il est proba- FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 81 ble qu’il s’y joint des traces de phosphate de chaux tribasique et de phosphate de fer. Le fer est en effet un corps si universellement répandu dans la nature qu'il serait surprenant de n’en point trou- ver dans les calculs de la Moule. J’ai dit qu'on trouve des perles chez la Moule, qu’elles sont géné- ralement adhérentes aux valves et le plus souvent irrégulières. Men étant cependant procuré une qui était remarquable par sa régularité, j'en ai fait une étude attentive, afin de pouvoir la com- parer avec les concrétions de l’Organe de Bojanus du même mol- lusque. Cette perle était adhérente à lacoquille par un mince pédoncule quilui donnait un aspect piriforme. Je l’ai sciée en deux: la moitié supérieure m'a servi à faire une coupe mince, l’autre moitié a été employée aux analyses. La coupe de la perle est intéressante : on y voit au centre deux noyaux comme dans le calcul de l’Organe de Bojanus qui vient d’être étudié ; mais l’origine de ces noyaux n’est pas la même dans la perle et dans le calcul. Un de ces noyaux est constitué par des prismes, formés vraisemblablement de phosphate acide de chaux et de phosphate ammoniaco-magnésien, disposés autour d'un axe organique qui a été coupé. Quant à l’autre noyau, il n’est point entouré de prismes et ne se distingue du reste de la perle que par la disposition en couches concentriques du carbonate de chaux qui y est déposé. Autour des deux noyaux et les enrobant entièrement, des couches très nombreuses et par suite peu épaisses de calcaire se sont déposées ; entre elles il n’existe aucune différence, saufen deux outrois points où les couches plus sombres forment des cercles concentriques. La surface de la perle n’est pas de composition différente de celle des couches profondes. En examinant avec soin le pédoncule de la perle, il a été facile d'expliquer l'aspect de la coupe. La massé organique, origine de la perle, était terminée par deux branches de longueur inégale et ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2° SÉRIE. — T. V bis, supp. 4887. — 1er Mém. 6 32 AUGUSTIN LETELLIER. formant fourche à son extrémité libre. La branche la plus longue a été rencontrée par la scie qui a passé au-dessus de la petite. Malgré sa double origine, la perle était régulière, parce que les deux pointes étant très voisines, les dépôtsformésautour de chacune d’elles n’ont pas tardé à se confondre. Lorsqu'on examine la coupe dans la lumière polarisée, on s’aper- çoit qu’un des noyaux, celui qui est formé par des prismes, est légèrement coloré. On distingue en même temps une double croix, signe certain qu’il y a eu deux centres de formation à l’o- rigine, et cette croix apparaît noire sur le reste de la préparation dont l’éclat est assez vif. La seconde partie de la perle, celle qui était adhérente à la coquille par un pédoncule, a servi à déterminer la composition de ces sortes de productions chez la Moule. Je l'ai mise dans l’acide chlorhydrique, il s’est produit une très vive effervescence, et toute la partie minérale a été vite dissoute. Il est resté une masse organique, celle dont j’ai parlé, qui consti- tuait l'axe du pédoncule. Je n’ai pas déterminé la nature de cette masse organique, et il ne m'a pas été possible de voir à quel être elle avait appartenu. Quant à la solution, elle était parfaitement lim- pide : je l’ai soumise aux divers traitements qui servent à faire l'analyse des cendres, et j'ai constaté que la perle était presque entièrement formée par du carbonate de chaux , avec une trace de carbonate de magnésie, de phosphate de chaux, de phosphate ammoniaco-magnésien et de phosphate de peroxyde de fer. J'ai le regret de n'avoir pu, faute de substance, déterminer la nature du phosphate de chaux qui entrait dans la constitution de cette perle ; mais, comme il semble que 11 composition de la perle et de la coquille est la même, le phosphate trouvé doit être du phos- phate tribasique de chaux. Je n’ai pas à faire ici l’étude physique de la coquille de la foule, FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 83 laquelle ne diffère pas de celle des mollusques qui appartiennent à des familles voisines. Sa composition chimique va seule m’occu- per, parce que je veux la comparer avec celle des calculs de l’Or- gane de Bojanus. | J’ai pris, pour faire mes recherches, la valve même sur laquelle la perle avait été fixée ; je l’ai bien nettoyée, car les Moules de- viennent, quand elles vieillissent, un support d’élection pour une foule d’animaux à mœurs tranquilles : Balanes, Briozoaires ou autres ; je l’ai concassée et enfin introduite dans l’acide chlorhy- drique. Il s’est produit une très vive effervescence, etquand elle s’est ralentie, j'ai achevé la dissolution de la coquille , en portant l'acide à l’ébullition. La partie minérale s’est entièrement dissoute ; seule, la conchyoline a résisté à l’action de l'acide chlorhydrique. J'ai filtré et j'ai obtenu un liquide légèrement jaune avec lequel j'ai pu reconnaître que la coquille de la Moule renferme : 1° Du carbonate de chaux qui la compose presque enentier, avec une quantité notable 2° De carbonate de magnésie et des traces ; 3° De phosphate tribasique de chaux ; 4° De phosphate ammoniaco-magnésien ; 5° De phosphate de peroxyde dé fer. L'expérience montre qu'il y a du phosphate de magnésie j'ai cherché directement sil y a du phosphate ammoniaco-magnésien et je l’ai trouvé ; mais il est possible, sinon certain,qu’il y ait aussi : 6° Du phosphate de magnesie. Je n’ai trouvé ni cuivre, ni manganèse dans la coquille de la Moule. | La méthode d'analyse que j'ai suivie est celle qui convient pour chercher la nature des cendres organiques ; on en trou- vera donc plus loin le manuel opératoire, quand je parlerai des recherches auxquelles je me suis livré sur les cendres de l’Organe de Bojanus de la Moule. 84 AUGUSTIN LETELLIER. Les résultat des analyses qui précèdent ont été réunis dans le tableau suivant : TABLEAU DONNANT LA COMPOSITION DES CONCRÉTIONS, DES PERLES ET DE LA COQUILLE DE LA MOULE. 23000000 I TRE EL AE I a Concrétions de l’'Organe | Perle prise sur la coquille. Coquille. de Bojanus. En grande partie for-|En grande partie for-|[En grande partie for- mée de carbonale de | mée de carbonate de | mée de carbonate de chaux chaux chaux » carbonate de magné-|carbonale de magnésie sie avec des traces de avec des traces de avec des traces de phosphate de chaux|phosphate de chaux tribasique tribasique phosphate de peroxyde|phosphate de peroxyde de fer de fer phosphate ammoniaco-|phosphate ammoniaco-|phosphate ammoniaco- magnésien. magnésien. magnésien phosphate de magné- sie. phosphate acide de chaux. En résumé, les perles et la coquille ont sensiblement la même composition, et les différences qu’on observe tiennent probablement à la difficulté qu’il y avait à découvrir dans la perle les corps qu’on trouve dans la coquille et qui n’y sont qu’à l’état de tra- ces insensibles avec aussi peu de matière. Quant aux concrétions de l’Organe de Bojanus, elles paraissent avoir une composition notablement différente de celle de la coquille, et cela n'est bien probablement pas particulier à la Moule, car nous verrons qu'il en est de même pour les calculs de la Cythérée. | CHAPITRE VIII. ÉTUDE DE LA SÉCRÉTION BOJANIENNE DE LA MOULE COMMUNE (Suite et fin). ANALYSE DES CENDRES. CORPS QUE L’ON TROUVE DANS L'ORGANE DE BOJANUS DE LA MOULE. Pour compléter l’étude de la sécrétion bojanienne de la Moule, il me faut joindre aux recherches qui précèdent les résultats de l’ana- lyse des cendres de la Glande elle-même. La détermination des corps que celle-ci renferme ne présente pas de difficultés, et deux ou trois cents mollusques suffisent à tous les besoins de l'analyse. On incinère donc dans une capsule de platine, et au moyen d’un bon bec Bunsen, les Organes de Bojanus de quelques centaines de Moules, après les avoir préalablement dissociés et séchés avec soin. On obtient ainsi plutôt un charbon qu’une cendre, car il faudrait en réalité un fourneau à moufle ; mais, tel qu’il est, ce charbon peut suffire aux recherches qu’on veut faire. I. — On traite une partie des cendres bien pulvérisées par l’eau bouillante, on filtre et on évapore quelques gouttes du liquide lim- pide sur une lame de platine. Il se forme un léger dépôt blanc, d’où l’on conclut que divers sels se sont dissous dans l’eau. La liqueur étant neutre, on est assuré que si elle renferme des carbonates et des phosphates alcalins, ceux-ci n’y sont qu’à l’état de traces. 1° Pour voir s’il y a des carbonates, on additionne la liqueur avec quelques gouttes d'acide chlorhydrique. Il ne se dégage 86 AUGUSTIN LETELLIER. aucun gaz, par conséquent il n’y a ni carbonates solubles, ni sul- fures solubles. Les sulfures auraient pu provenir de la réduction des sulfates par le charbon ; mais la température ayant été peu élevée, le char- bon a été sans action sur les sulfates abandonnés par l’eau de mer, qui baignait les glandes et que celle-ci a nécessairement aban- donné en s’évaporant. 2° On cherche alors si la liqueur renferme des phosphates alca- lins. Dans ce but, on ajoute à l’eau qui a bouilli avec les cendres un mélange bien limpide de sulfate de magnésie, de chlorure d’ammonium et d’ammoniaque ; mais ni au moment du mélange, ni après on n’aperçoit traces de cristaux de phosphate ammoniaco- magnésien. Par conséquent la liqueur ne renferme pas de phos- phates alcalins. REMARQUE. On peut faire une contre-épreuve au moyen du molybdate d'ammoniaque dissous dans l'acide azotique ; mais on n’observe ni coloration, ni précipité jaune, d’où l’on con- clut à l'absence du phosphore. Ainsi l’eau n’enlève aux cendres nicarbonatesalcalins, ni sulfures, ni phosphates solubles : nous allons y trouver divers sulfates et des chlorures. 8° On additionne la liqueur d’une goutte d’acide chlorhydrique, puis on y introduit une dissolution de chlorure de baryum. Il se forme immédiatement un abondant précipité blane qui ne disparaît ni quand on étend le précipité avec de l’eau, ni quand on le met en présence de l’acide azotique ; il y a donc dans la liqueur : Des sulfates. à 4° On ajoute alors quelques gouttes d'acide azotique à la liqueur primitive, puis une goutte d’azotate d’argent. Il se forme un abon- dant précipité qui est soluble dans l’ammoniaque et qui noircit FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 87 rapidement à la lumière : c’est du chlorure d'argent. Le liquide contient : Des chlorures. Il reste maintenant à déterminer les noms des bases qui sont combinées avec l'acide sulfurique et des métaux unis au chlore. 5° On concentre la liqueur primitive ; on en met quelques gout- tes sur une lame de platine et on évapore à sec. On verse sur le ré- sidu de l'alcool pur, et on l’enflamme. On voit apparaître une colo- ration jaune ; le liquide renferme : du sodium. On interpose alors entre l’œil et la flamme un verre bleu, et la flamme paraît violette sur les bords ; la liqueur renferme : du potassium. Ainsi l’eau qui a bouilli avec les cendres leur a enlevé divers sulfates et chlorures dont le métal peut être du sodium ou du potassium. Comme nous verrons plus loin que les cendres ren- ferment aussi du calcium et du magnésium, on pourra dès main- tenant dire que les cendres renfermant les sels de la mer, l’eau contient : du chlorure de sodium. du chlorure de potassium. du chlorure de magnésium. du sulfate de chaux. du sulfate de magnésie. Si l’on voulait isoler tous ces sels, ce n’est pas quelques centai- nes, mais quelques milliers de Moules qu'il faudrait sacrifier : je n’en ai pas vu la nécessité. IT. — Nous allons maintenant découvrir des corps qui, n’exis- tant pas dans l’eau de mer, sont évidemment un produit de la Glande. 88 AUGUSTIN LETELLIER. On traite par l’acide chlorhydrique la partie des cendres que l’eau n'a pas dissoute. Une vive effervescence se manifeste, le gaz est inodore, c’est de l’acide carbonique ; les cendres con- tiennent donc : des carbonates insolubles. 1° On mélange la solution chlorhydrique avecune dissolution de chlorhydrate d’ammoniaque et de l’ammoniaque jusqu’à réaction fortement alcaline, puis on fait bouillir. Il se forme un abondant précipité blanc floconneux ; donc la liqueur ne renferme pas de fer à l’état de peroxyde, mais du phosphate de fer. Pour s’en assurer : a. — À lasolution chlorhydrique, on ajoute du sulfocyanure de potassium, et une belle couleur rouge sang apparaît. b. — A la même liqueur primitive on ajoute du prussiate jaune de potasse, et il se forme immédiatement un beau précipité bleu. Ces deux réactions sont celles qui conviennent aux sels de fer au maximum. Reste à déterminer l'acide auquel il est combiné. On verse alors dans un troisième échantillon de la solution chlor- hydrique une dissolution concentrée d’acétate de soude, et on agite ; le précipité qui se forme est blanc jaunâtre ; les cendres renferment du phosphate de peroxyde de fer. Comme il est peu probable que le précipité obtenu par le chlo- rure d’'ammonium et l’ammoniaque soit uniquement formé par ce dernier phosphate, on procède à la recherche des autres corps de la facon suivante : 2° —_ On précipite le phosphate de peroxyde de fer par l'acétate de soude, on filtre, etavec la liqueur limpide qui passe on procède aux divers essais dont je vais parler. a. — On verse dans le liquide une dissolution d’oxalate de po- tasse, il se forme immédiatement un précipité blanc insoluble dans l'acide acétique, mais soluble dans l’acide chlorhydrique : c’est de l’oxalate de chaux. Ainsi le précipité gélatineux, formé dans la so- FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 89 lution chlorhydrique par l’'ammoniaque et le chlorure d’ammo- nium renferme du phosphate de chaux. b. — À un second échantillon de la liqueur on ajoute de l’acétate de soude et du perchlorure de fer jusqu’à coloration rouge et on fait bouillir. I1se forme un abondant précipité, on filtre, on addi- tionne le liquide qui passe avec une solution de carbonate d’am- moniaque, on fait encore bouillir, la chaux se précipite, et on filtre une dernière fois. On ajoute alors du phosphate de soude, et après quel- ques instants un précipité s’étant formé, on sait que le liquide con- tenait de la magnésie combinée à l'acide phosphorique, c'est-à- dire du phosphate de magnésie ou du phosphate ammoniaco-magné- sien, et vraisemblablement l’un et l’autre. On s'assure que les cendres renferment du phosphate ammo- niaco-magnésien, en les mettant dans un verre de montre avec une dissolution de potasse ; on recouvre ce verre avec un autre au fond duquel on a collé une bande de papier rouge de tournesol. Celle-ci au bout de quelque temps est bleue, donc les cendres renferment du phosphate ammoniaco-magnésien. Renferment-elles du phosphate de magnésie ? je dis : c’est pro- bable, maïs je n’en ai pas observé de cristaux. On ne peut pas évidemment se contenter de savoir que les cen- dres renferment du phosphate de chaux, on voudra savoir quel est ce phosphate. Pour cela on traitera la solution chlorhydrique des cendres par l’ammoniaque jusqu’à réaction alcaline et on aban- donnera au repos. Il se formera dans ces conditions un abondant précipité en grande partie constitué par du phosphate tribasique de chaux, ainsi que le montre l’observation microscopique ; mais en même temps, si l’on a attendu assez longtemps, on pourra voir et recon- naître quelques cristaux de phosphate acide de chaux. Fin résumé, les cendres contiennent donc : Du phosphate tribasique de chaux. 90 AUGUSTIN LETELLIER. Du phosphate acide de chaux. Du phosphate ammoniaco-magnésien. Du phosphate de magnésie (probable). Du phosphate de peroyde de [er. 3° La vive effervescence qui se manifeste quand on attaque les cen- dres par l’acide chlorhydrique indique que celles-ci renferment des carbonates. Il est donc indispensable de chercher la chaux et la magnésie non combinées à l’acide phosphorique et à l’état de chlorures dans la solution. On filtre donc la liqueur après y avoir déterminé un précipité par l’ammoniaque et le chlorhydrate d’am- moniaque ; les phosphates sont ainsi séparés. Le liquide qui passe contient en plus des chlorures de calcium et de magnésium, de l’ammoniaque libre et du chlorure d’ammonium en excès. On l’additionne d’oxalate de potasse, et on a un précipité d’oxalate de chaux, d’où il suit que la liqueur renfermait de la chaux non combinée à l'acide phosphorique. On filtre pour se débarrasser de l’oxalate de chaux, et dans le liquide qui passe on verse une solution de phosphate de soude. Il se forme un précipité de phosphate ammoniaco-magnésien facile à reconnaître à la forme de ses cristaux. Il existait donc dans les cendres de la magnésie non combinée à l’acide phosphorique, mais unie à l’acide carbonique. Les cendres de l’Organe de Bojanus de la Moule renferment : Du carbonate de chaux, Du carbonate de magnésie. REMARQUE. — Quand on fait l'analyse des cendres, il arrive assez souvent qu’on y trouve du cuivre et du plomb. J’ai cherché ces métaux par les méthodes ordinaires, et je ne les ai pas trouvés. D’autre part, Krukenberg ayant découvert du manganèse dans une concrétion retirée d’un Pinna, j'aiessayé la réaction bien connue FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 94 de l’acide azotique, exempt de chlore, et du bioxyde de plomb ; mais le liquide est resté complètement incolore. En résumé, on trouve dans les cendres de l'Organe de Bojanusde la Moule : 1° Des corps que l’on rencontre dans l’eau de mer, à savoir: Du chlorure de sodium, Du chlorure de potassium, Du chlorure de magnésium, Du sulfate de chaux, Du sulfate de magnésie, Du carbonate de chaux, Du carbonate de magnésie ; mais les carbonates de chaux et de magnésie sont dans les cendres en proportions telles qu’on doit les regarder tout au moins comme partiellement excrétés par la Glande. 2° Des corps qu'on ne trouve qu’à l’état de traces dans l’eau de mer et qui sont assez abondants dans les cendres. Ce sont : Du phosphate de chaux tribasique, Du phosphate acide de chaux, Du phosphate ammoniaco-magnésien, Du phosphate de magnésie, Du phosphate de peroxyde de fer. Ainsi douze corps minéraux différents, trois chlorures, deux sul- fates, deux carbonates et cinq phosphates existent dans les cendres de l’Organe de Bojanus. Nous les avions déjà presque tous décou- verts en faisant les diverses analyses auxquelles les extraits, les perles, les concrétions et la coquille de la Moule ont donné lieu. L'étude des corps que l’on trouve dans l’Organe de Bojanus de la Moule est actuellement terminée : je crois donc utile d’en résumer les résultats et de les présenter dans l’ordre où ils ont été obtenus. 92 AUGUSTIN LETELLIER. + I. — La sécrétion bojanienne brute de la Moule est neutre aux réactifs colorés. II. — Elle renferme diverses substances albuminoïdes, à savoir : 1° Une sérine. 2° Une albumine propre à la Moule. 3° Une fibrine également particulière à la Moule. 4 Un albuminate à base indéterminée. IT. — 7! y a des traces de Mucine. IV. — L'extrait éthéré de la Glande renferme : 1° De la stéarine. 2° De la margarine. 8° De l'oléine. 4° De la lécithine ? 5° De l'acide valérianique. 6° De l'acide butyrique. V. — L’extrait alcoolique renferme : 1° Du chlorure de sodium. 2° De l'acide stéarique libre. 3° De la stéarine. 4° De la margarine. 5° De la creatinine. 6° De la créatine. 7° De la xanthine? 8° De l'hypoxanthine? 9° Une graisse propre à la Moule et dont l'acide est, comme elle, soluble dans l’eau. | | VI. — L’extrait aqueux contient : 1° De la tyrosine. 2° De la leucine. VII. — Des analyses spéciales montrent que la sécrétion boja- nienne renferme : 1° De la taurine. FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 20 De l’inosite ? 3° De l’urée. 4° Peut-être des traces de sucre. VIII. — Les calculs de l’Organe de Bojanus renferment : 1° Du carbonate de chaux. 2° Du phosphate ammonia-comagnésien. 3° Du phosphate acide de chaux. IX. — Les perles contiennent : 1° Du carbonate de chaux. 2° Du carbonate de magnésie. 3° Du phosphate tribasique de chaux. 4° Du phosphate ammoniaco-magnésien. 5° Du phosphate de peroxyde de fer. X. — La coquille de la Moule se compose : 1° De carbonate de chaux. 2° De carbonate de magnésie. 8° De phosphate de chaux tribasique. 4° De phosphate ammoniaco-magnésien. 5° De phosphate de peroxyde de fer. 6° De phosphate de magnésie? XI. — Les cendres de l’'Organe de Bojanus contiennent : 1° Du chlorure de sodium. 2° Du chlorure de potassium. 8° Du chlorure de magnésium. 4° Du sulfate de chaux. 5° Du sulfate de magnésie. 6° Du carbonate de chaux. Du carbonate de magnésie. 8° Du phosphate de chaux tribasique. 9° Du phosphate acide de chaux. 10° Du phosphate ammonia-comagnésien. 11° Du phosphate de magnésie. 12° Du phosphate de peroxyde de fer. 93 94 AUGUSTIN LETELLIER. XII. — On ne trouve dans les cellules bojaniennes de la Moule : ni acide urique, ni urates, ni acidé hippurique, ni guanîine, ni produits biliatres. On voit, par ce résumé, que l'Organe de Bojanus de la Moule renferme près de quarante corps différents , les uns sécrétés ou excrétés par la Glande, les autres introduits dans ses tissus par l’eau de mer. Les recherches analytiques ont mis en lumière deux faits importants : 1° L'Organe de Bojanus de la Moule ne sécrète ni acide urique hi urates ; 2° Il renferme de l’urée, de la créatinine et de la créatine, sub- stances que l’on trouve habituellement dans la sécrétion urinaire des animaux vertébrés et qui n’avaient point été signalées chez les mollusques. CHAPITRE IX. ÉTUDE DE LA SÉCRÉTION BOJANIENNE DE L'ANODONTA CYGNEA ET DE PLUSIEURS AUTRES MOLLUSQUES ACÉPHALES. ON NE TROUVE PAS CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES, DANS LES CONDITIONS NOKMALES, D’ACIDE URIQUE, D'URATES, D ACIDE HIP- PURIQUE, DE GUANINE, DE PRODUITS BILIAIRES, MAIS DE LA TAURINE, UNE GRAISSE SOLUBLE DANS L'EAU (ANODONTA xT CARDIUM EDULE), DE LA CRÉATININE (CARDIUM EDULE) ET DE L’URÉE (ANODONTA OYGNEA, A. ANATINA, CARDIUM EDULE ET CYCLAS CORNEUS). L’étudede la sécrétion bojanienne d’un seul animal, de la Moule, ne peut évidemment suffire à qui désire connaître la fonction phy- siologique de la glande dorsale des Mollusques acéphales. En bor- nant ainsi le champ de ses recherches, on serait exposé à tomber dansl’erreur commune, à prendre pourle cas général ce quiest par- ticulier à une espèce ou même à un individu, à bâtir, en un mot, une de ces théories auxquelles ne manquent ni les raisonnements ingénieux, ni lesapparences mêmes de la vérité, et qui n’attendent, pour être renversées, que des études nouvelles, que des analyses plus nombreuses ou mieux conduites. J’ai donc entrepris chez d’autres Mollusques des recherches ana- logues à celles que j'avais poursuivies sur la Moule ; mais, à mon grand regret, je n'ai pu l’étendre qu’à quelques espèces différentes. Les recherches de ce genre supposent en effet la possibilité de se procurer en abondance les animaux qu'on étudie. Or, en plus de la Moule commune, de l’Huître comestible et du Cardium edule, il n’y a guère que les Anodontes dont il soit possible de se procurer un nombre suffisant d'individus. 96 AUGUSTIN LETELLIER. On trouvera dans ce chapitre une étude sommaire de la sécré- tion bojanienne de l’Anodonta cygnea et de l'A. anatina dont j'ai pu me procurer quelques centaines d'exemplaires venant de l’étang de Torigny-sur-Vire (Manche) et de la rivière de la Sarthe qui passe à Alençon. J’y joindrai diverses recherches faites sur le Car- dium edule et sur nombre d’autres Mollusques acéphales dont je n’ai pu me procurer que de rares individus et quelquefois même $ qu’un seul‘exemplaire. Je commencerai l’exposé de ces recherches par celles qui ont eu pour but de trouver de l’acide urique dans l’Organe de Bojanus, parce que, d’après les découvertes quien ont été faites à plusieurs reprises, on considère généralement ce corps comme l'élément ca- ractéristique de la sécrétion bojanienne des Acéphales. Comme la recherche de cet acide n’exige que peu d'animaux, j’ai pu la faire même chez les Mollusques dont je n’avais qu'un ou deux exem- plaires. | Je montrerai ensuite que les Anodontes et le Cardium edule ne renferment ni acide hippurique, ni guanine, ni produits biliaires, mais seulement de la taurine. Enfin, pour terminer l'étude de la sécrétion bojanienne de. ces Mollusques, je m’occuperai de l’urée qu’elle renferme et dont la présence a été constatée chez les Anodontes, le Cardium edule et le Cyclas corneus. I. — Recherche de l'acide urique. J’ai cherché l’acide urique chez : Ostrea edulis, Pecten maximus, Pecten varius, Pinna verruculatus, FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 97 Pectuneulus pilosus, Anodonta cygnea, Anodonta anatina, Unio batava, Cardium edule, Cardium Pennanti, Cardium norvegicum, Cyclas corneus, Tapes decussata, Tapes pullastra, Cytherea chione. Mactra solida. Tellina solidula. Donax anatina, Solen ensis, Pholas dactylus, Pholas candida, Pandora rostrata. C'est-à-dire chez vingt-deux espèces différentes appartenant à dix familles distinctes de Mollusques acéphales, les unes pourvues de siphons et les autres n’en ayant pas. | Je n’ai pu trouver de traces d’acide urique ou d’urates chez au- cun de ces Mollusques, quel qu'aitété le soin apporté aux analyses ou le nombre des animaux soumis à l'expérience. Et cependant nous avons déjà vu qu'une seule /élix aspersa ou pomatia suffit à ce genre de recherche. | Il n’est donc pas vraisemblable que mes résultats soient entachés d'erreur, que la couleur de la murexide ait passé inaperçue à mes yeux, que j'aie confondu une teinte avec une autre. Evidemment aucun de ces Mollusques ne renferme d'acide urique dans ses Sacs de Bojanus. Si, au lieu de traiter les Glandes par l’acide azotique et l’am- moniaque, on les met digérer en présence de la potasse caustique, ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN, — 2 SÉRIE, — T, V bis, supp. 18817. — 4er Mem. 7 98 AUGUSTIN LETELLIER. à froid ou à chaud, peu importe, on n’obtient pas davantage de traces d'acide urique quand ensuite on verse dans la liqueur de l’a- cide chlorhydrique ou de l'acide acétique. La Mactra solida m'a fait voir dans les tissus de sa Glande des cristaux qu’à leur aspect j’ai pris pour des mâcles d’acide urique. Mais j'ai reconnu mon erreur quand je les ai traités par l’acide azo- tique et l’ammoniaque, car je n’ai point obtenu de murexide. Il serait à craindre que les cristaux observés par le professeur Lacaze- Duthiers ne fussent pas également des cristaux d’acide urique : l'apparence était la même, c’est vrai, mais l’analyse n’en a pas été faite d'une facon suffisante. | On sait que de Babo, en analysant , à la prière de Siebold, les concrétions que ce savant avait retirées de l’Organe de Bojanus d’un Pectunculus pilosus, y a découvert de l'acide urique. Voit, qui a eu l’occasion de recommencer l’analyse sur des concrétions extraites des Corps de Bojanus d’un autre Pectunculus pilosus, w’en à pas trouvé. Pour moi, étant parvenu à me procurer deux Pectunculus vivants, J'ai cherché dans leur Glande l'acide urique ou des urates, et je n’ai rien trouvé. En faut-il conclure que de Babo s’est trompé ? certainement-non ; car l’admettre, ce serait dire que les concrétions ont toujours chez une même espèce de mollusque la même com- position, alors que tout prouve le contraire et que nous voyons des différences physiques et chimiques exister entre des calculs appar- tenant, non pas à des individus différents d’une même espèce, mais : au même mollusque et retirés de la même glande. Je regarde donc comme exacts les résultats des analyses de Babo et de Voit, c’est-à-dire que j'admets que la composition des concrétions, des calculs qu’ils ont étudiés, était différente, quoiqu'ils fussent ex- traits de l’Organe de Bojanus d’animaux de la même espèce, parce que c’est la seule conclusion qu'on puisse logiquement tirer des travaux de ces chimistes. Quant à l'analyse que j'ai faite, elle portait sur la Glande elle- même du Pectunculus et non sur ses produits pathologiques. Si je. FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 99 n'ai pas analysé les calculs de ce mollusque, ce n’est pas faute de les avoir cherchés avec soin ; mais les cellules des deux individus que j'ai étudiés ne renfermaient absolument que ces granulations microscopiques qui sont en quelque sorte le caractère distinctif des cellules bojaniennes ; de calculs, de graviers , voire même de sables, il n y en avait pas trace. J’en ai donc été réduit à chercher l'acide urique ou les urates dans la Glande, et elle n’en renfer- mait pas. Mon expérience, par conséquent, ne confirme ni n’infirme les recherches de Babo et de Voit. Il ne semble pas vraisemblable que l’on puisse prétendre que l'absence d’acide urique tient à l’âge du mollusque, à l’état d’acti- yité ou de ralentissement de ses fonctions vitales, au fond qu’il habite. Ces objections seraient dans tous les cassans fondement pour la Moule, chez laquelle j'ai pu poursuivre la série de mes recher- ches pour ainsi dire mois par mois. Et non seulement l’époque de l’année est sans importance ; mais il enestde même dela taille de l'animal et du lieu où il vit. J'en ai étudié de microscopiques, de moyennes et de très grandes ; j'ai disséqué des Moules qui avaient vécu sur des fonds légèrement vaseux, sur du sable et sur le rocher ; j'en ai fait venir de Vierville, de Trouville, d’Isigny et de Gran- ville, et jamais je n'ai trouvé cet acide qu’on dit spécialement sé- crété par l’Organe de Bojanus des Mollusques acéphales. Riche en a pourtant trouvé chez la Lutraire ; mais ce n’est pas dans la Glande qu'il l’a découvert, c’est dans la poussière qui en sortait quand on ouvrait les Sacs sous l’eau : c’est-à-dire que, comme de Babo, c’est dans un produit pathologique qu’il l’a trouvé. Il se- rait bien curieux de savoir si toutes les Lutraires renferment cette poussière d’acide urique dans leur Organe de Bojanus, et si cela n’est pas, siau moins toutes celles qu’on peut recueillir à Saint-Jacut- la-Mer sont atteintes de cette diathèse urique. 100 AUGUSTIN LETELLIER. II. — Acide hippurique. — Guanine.— Taurine. — Produits biliaires. N'ayant pas trouvé d'acide urique, j'ai cherché s’il ne serait pas remplacé dans la sécrétion bojanienne de certains mollusques par l’acide hippurique. Mes analyses ont été faites sur les Organes dis- sociés de l’Anodonta cygnea, de l'Anodonta anatina et du Car- dium edule. J'en ai traité les Glandes de Bojanus par un lait de chaux, puis jai sursaturé le liquide filtré par l'acide chlorhydrique. Je n’ai obtenu par cette méthode aucun cristal ayant les formes ou les propriétés de l'acide hippurique. La découverte de la Gruanine chez l’Anodonte par Wil et Gorup Besanez, découverte dont la réalité était contestée par Voit, a nécessairement attiré mon attention. À différentes reprises, j'ai essayé d'isoler ce corps en traitant, suivant la méthode ordinaire, les Organes dissociés de plusieurs centaines d’Anodonta cygnea ou anatina, mais cela a toujours été en vain. J’ai bien obtonu des cris- taux, mais c’étaient des aiguilles de taurine et non de la guanine. En effet, les longs cristaux qui s'étaient précipités avaient les formes et la transparence de la taurine, ils en avaient de plus la solubilité dansl’eau, l’insolubilité dans l’alcool et dans l’éther, et enfin la composition, car ils renfermaient du soufre. Les produits biliaires m'ont longtemps occupé et ont été cause que j'ai fait de bien nombreuses recherches, fort inutilement du reste. À la suite de quelques expériences insuffisantes, quoique con- formes aux indications des auteurs, j'ai cru pendant très long- temps que ces corps, acides ou non, existaient chez les Mollusques acéphales. Mais je me suis assuré, en éliminant avecsoin les causes d'erreur, notamment l'alcool, l’éther et le chloroforme, qu’au- dés st DT FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 404 cun corps de cette nature n’existe dans l'Organe de Bojanus des Anodontes, du Pecten mawimus, du P. varius, du Cardium edule, du C. Pennanti, du Tapes decussata, de la Cytherae chione, de la Mactre, de la Telline, du Solen et des Pholades. On voit que je les ai cherchés chez presque tous les Mollusques dont j’ai pu disposer. J'ai employé, dans mes recherches, diverses méthodes qu’on trouve indiquées dans tous les Traités dephysiologie; etcomme je ne trou- vais rien, jai fini par traiter directement l’Organe de Bojanus que j'étudiais par l’acide azotique nitreux et à la température ordinaire. Des expériences comparatives faites sur la bile de mouton ou de bœuf m’auraient permis de me rendre compte dela valeur et de la succession des teintes que j'aurais dû observer si des principes biliaires avaient existé. Mais je ne suis jamais parvenu à voir autre chose que le coagulum produit par les substances albuminoïdes et la couleur jaune rouge que prend le liquide saturé d’acide xantho- protéique. La dernière méthode que j'ai employée a sur les autres l'avantage d’être applicable aux corps qui, commela biliverdine, ne sont pas solubles dans l’eau. III. — Graisse soluble dansl’eau de l’Anodonteet du Cardium edule. — Créatinine. | La préparation de l’Urée et, en général, de tous les sels qui se trouvent dans la sécrétion bojanienne des Mollusques acéphales est rendue excessivement difficile par la présence d’une graisse soluble dans l’eau, que j'ai déjà signalée à propos de la Moule. L'étude que j'en ai faite chez les Mollusques autres que celle-ci est si sommaire que je ne hasarderai rien sur sa composition et sur ses autres propriétés. Avec le Cardium edule et avec les Anodontes, j'ai préparé quel- quefois des extraits éthérés ou alcooliques ; je n’en ai fait qu'un examen sommaire au microscope, et la seule chose que je puisse 102 AUGUSTIN LETELLIER. en dire, c’est qu’ils m'ont paru renfermer des aiguilles de stéarine et de margarine, et des cristaux volumineux de créatinine et de créatine. La créatinine est du reste facile à reconnaître à ses formes cris- tallines. On l’obtient encore comme produit accessoire quand on prépare l’urée, et c’est ce qui m’a permis d’en faire un dosage ap- proximatif chez le Curdium. Ayant en effet préparé l’urée que contenait l’Organe de Bojanus de 417 Cardium, j'avais obtenu la créatinine de ces animaux comme résidu insoluble dans’ l'alcool absolu et froid. J’en ai dissous le quart dans dix centimètres cubes d’eau chaude, et, mettant deux centimètres de la liqueur en présence de l’hypobromite de soude, j’ai obtenu 0,8cc d’azote. Si toute la créatinine avait été décomposée, il yauraiïiteu 16 centimètres cubes d'azote, c’est-à-dire 0, 02g d'azote, ce qui correspond à 0, 054g de créatinine. Un seul Cardium en avait quatre cents fois moins ou 0, 00015. Ce poids est précisément celui qui a été précédemment trouvé pour la créatinine contenue dans l’Organe de Bojanus de la Moule. Il n’en faudrait pas conclure que le Cardium en élimine autant dans le même espace de temps. L’expérience ne donne à ce sujetaucune indication ; en voir une, serait commettre la mêmeerreur que celui qui, ayant grossièrement détaché les reins d’un chien et d'un chat, par exemple, prétendrait par le dosage de l’urée qu’il y auraït trou- vée pouvoir comparer la sécrétion de ces deux animaux. Une seule chose était importante à connaître, c’est à savoir que le Cardium éliminede la créatinine. On pouvait, à titre de curiosité, chercher si chaque Glande en renferme peu ou beaucoup ; mais les conditions de l'analyse sont si défectueuses que les causes d’erreur y abondent et qu’il ne faut attribuer aux résultats que l’on obtient aucune im- portance réelle. Le hasard seul m'a fait trouver le même nombre, et l’unique conclusion à tirer de monessai de dosage est que le Cardium, tout comme la Moule, renferme une très petite quantité de créati- nine dans sa sécrétion bojanienne. FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 103 IV.— Recherche de l’Urée chez l’Anodonte cygnea, l’A. ana- _tina, le Cardium edule et le Cyclas corneus. Longtemps avant de l’avoir découverte chez la Moule, j'avais cherché l’urée dans la sécrétion bojanienne de l’Anodonta cygnea ct de l’Anodonta anatina.J’'avaismême été assez heureux pour l’ob- tenir en nature, et j’en avais préparé l’azotate et l’oxalate. Je ne l'avais cependant point reconnue, parce que,comme rien neressemble autant aux sels d’urée que certains cristaux d’azotate et d’oxalate de soude ou de potasse, j'avais cru devoir m’assurer que les cris- taux que j’observais satisfaisaient à la réaction caractéristique des sels d’urée, c'est-à-dire que j’avais cherché à voir si, chauffés sur une lame de platine, les cristaux disparaissaient sans laisser de traces. On sait que s’ilen reste, que si elles sontalcalines surtout, on n’a point affaire à de l’urée, mais à un sel de soude ou depotasse. Or, en chauffant ainsi les cristaux que j'avais préparés, ilsne disparais- saient point entièrement, il restait toujours une tache blanche qui, dissoute dans une goutte d’eau, lui communiquait des propriétés fortement alcalines. Que conclure ? que les cristaux étaient des sels de soude ou de potasse. Lorsque près d’une année après, pour remplir un programme que je m'étais tracé à l'avance, j’en suis arrivé à chercher s’il exis- tait de l’urée dans la sécrétion bojanienne de la Moule, quoique mon espoir d’en trouver fût presque nul, je crus devoir modifier ma méthode d'analyse etj employai le réactif ordinaire de tous les laboratoires de physiologie, l’hypobromite de soude.J’ai été assez heureux pour obtenir ainsi de l'azote, autrement dit pour cons- tater qu’il existe de l’urée dans la sécrétion de l’Organe de Bojanus de la Moule ; alors j'ai repris immédiatement mes premières recher- ches et je n’ai pas tardé à me convaincre que les taches jadis obser- vées tenaient aux impuretés qui souillaient les cristaux, et qu’en 104 AUGUSTIN LETELLIER. les choisissant ils disparaissaient entièrement ; qu’enfin traitée par l'hypobromite ou la liqueur de Millon, leur solution fournissait de l’azote, ce que n’ont jamais fait les azotates alcalins. Ainsi le doute n'était plus possible et il était démontré que les cristaux depuis si longtemps préparés étaient bien, comme je l’avais un instant soupçonné, des cristaux d’urée. On me pardonnera, je l'espère, à cause de l'importance du sujet, ce long exposé de mes hésitations. Peut-être rappellerai-je à quelques-uns combien ils onteu de peine au début de leurs recher- ches à caractériser certains principes organiques dont ils n’avaient que des traces et qu’ils ne pouvaient purifier, alors que par surcroît leur aspect et leurs formes cristallines se trouvaient modifiés par la présence de corps étrangers. Après les Anodonta, j'ai étudié le Cardium édule, puis enfin, mais succinctement, le Gyclas corneus. Je vais commencer par l’'Anodonta cygnea. J’ai préparé l’urée de ce mollusque de la façon suivante : j'ai enlevé les Organes de Bojanus de 400 Anodonta cygnea environ qu'un ami m’avait envoyées de Torigny-sur-Vire, et je les ai mis au fur et à mesure dans l’alcool à 90°. Après trituration et filtration, j'ai évaporé à consistance de sirop épais, puis repris par l'alcool absolu bouillant. L’alcool, décanté après repos et au bout de vingt-quatre heures, a été chassé au bain-marie, le résidu repris par l’eau et les phosphates éliminés par l’eau de baryte. J’ai filtré, puis précipité l’excès de baryte par un courant d'acide carbonique passant jusqu’à refus, filtré encore une fois et concentré à consis- tance de sirop. Enfin, mettant dans un endroit frais, j'ai achevé la dessiccation sur l'acide sulfurique. J’ai obtenu ainsi des cristaux ayant l'aspect del'urée, et tels qu’on les trouve dessinés dans les atlas de Robin et de Funke. Avec l'acide azotique et l’acide oxalique, ces cristaux m'ont donné des formes identiques à celles de l’azotate et de l’oxalate d’urée ; maïs il m’a fallu choisir pour ces expériences les cristaux les plus nets, car ils FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 1405 sont en général souillés par des matières étrangères. Un de ces mêmes cristaux bien propre, mis sur une lame de platine, disparaît quand on chauffe sans laisser de trace bien sensible. Enfin, par l'hypobromite de soude et par la liqueur de Millon, on obtient avec ces cristaux un dégagement d’azote. J'ai employé avec le même succès le même moyen pour préparer l’'urée del’ Anodonta anatina ; cela ne fait done aucun doute pour moi que les Anodontes renferment de l’urée dans leurs Sacs de Bojanus. Le Cardium edule, vulgairement appelé coque, m'a également fourni de l’urée. Abandonnant pour la recherche de ce corps la méthode que j’avais précédemmentsuivie, j'airecouru, sans avantage du reste, à celle qui est préconisée pourextraire l’urée des muscles des poissons plagiostomes, méthode qui ne diffère de la précé- dente que par la substitution du sous-acétate de plomb à l’hydrate de baryte, et par conséquent de l’acide sulfhydrique à l'acide car- bonique. Mon expérience a porté, je crois l'avoir déjà dit, sur 417 Car- dium edule ; j'ai préparé 40€ d’un liquide dont 22€ m'ont fourni 1,82 d'azote. J’en ai conclu que si les 40€ avaient été décomposés, j'aurai obtenu 36€ d'azote, lesquels correspondent à 0, 0975 d’u- rée, c’est-à-dire qu'un seul Cardium avait en moyenne 0,00023 d’urée dans sa Glande. Ce poids est inférieur à celui que des ana- lyses récentes ont assigné pour l’Organe de Bojanus de la Moule. Mais j'ai déjà dit que, suivant toute vraisemblance, des comparai- sons de ce genre n’avaient ni fondement, ni utilité, et qu’une seule chose, l'existence même de l’urée, avait ici de l'importance. J'ai voulu voir sile Cyclas corneus, qui est assez commun dans les ruisseaux, renferme aussi de l’urée ; mais comme la dissection d'un animal aussi petit m’a paru trop longue, j'ai eu recours à la méthode que j’ai si justement qualifiée de barbare : j'ai trituré les animaux avec leur coquille dans un mortier. J’ai ajouté de l’eau, j'ai filtré, j’ai fait bouillir pour coaguler les substances albuminoï- 106 AUGUSTIN LETELLIER. des, j'ai filtré encore une fois, et j'ai enfin traité le liquide par l'hypobromite de soude et par la liqueur de Millon. Avec l’un et avec l’autre de ces réactifs, j’ai obtenude l'azote, d’où j'ai concluque le Cyclas corneus sécrète de l’urée. Mais par où s’élimine-t-elle ? — Probablement par l’'Organe de Bojanus. Ainsi, chaque fois que, par le nombre des individus que je pouvais me procurer, il m'a été possible de chercher l’urée dans la sécré- tion bojanienne d’un Mollusque acéphale, je l'ai toujours trouvée. C’est là un résultat à opposer au suivant : chaque fois que j'ai cherché l’acide urique dans lasécrétion bojanienne d’un Mollusque acéphale, je ne l'ai jamais trouvé. CHAPITRE X. GALOULS BOJANIENS DE LA CYTHEREA CHIONE (de Roscoff). DESCRIPTION SOMMAIRE DE L'ORGANE DE BOJANUS DE LA CYTHÉRÉE. —- DISPOSITION, NOMBRE, GROSSEUR, DENSITÉ DES CALCULS. — DIVISION DES CALCULS EN DEUX ESPÈCES, CAL- CULS AMORPHES ET CALCOULS TRANSPARENTS. — ORIGINE ET DÉVELOPPEMENT DES CALCULS AMORPHES. — POURQUOI LES CALCULS SITUÉS SOUS LE MANTEAU SONT PLUS GROS QUE LES CALCULS PLACÉS SUR LES CÔTÉS DE LA GLANDE. Ce chapitre et le suivant sont consacrés à l’étude d’un mollusque acéphale, la Cytherea chione, que la forme de sa coquille avait rangé dans la famille des Venus, et qu’un détail d'organisation de la charnière en a récemment séparé. Assez communes dans la baie de Paimpoul qui est toute parsemée de leurs valves éparses, les Cythérées vivent nombreuses dans les peti- tes anses de la côte bretonne qui fait face à l’île de Batz. Là, sousla mince couche d’eau qui recouvre encore la laise de mer au mo- ment des plus basses eaux d'équinoxe, deux trous tracés dans le sable indiquent la présence de la Cythérée. Je laisserai le conchylio- logiste admirer la beauté, la régularité, la vivacité des couleurs de la coquille que mouille encore l’eau de la mer et que le temps ef- facera bientôt en partie, et je ne m’occuperai que de l'animal lui- même. Or, quand on écarte les valves d'une Cythérée, on remarque immédiatement que l’Organe de Bojanus du mollusque est rempli de calculs dont le nombre, la grosseur et la transparence sont réelle- ment extraordinaires. Nous verrons que leur composition n’est pas moins remarquable et qu’elle diffère de celle de toutes les concré- tions étudiées jusqu’à ce jour. Enfin, grâce à leurs dimensions qui 108 AUGUSTIN LETELLIER. permettent d'en faire des coupes transparentes excessivement minces et larges, ces calculs apportent sur l’origine et sur le mode de dé- veloppement des concrétions des Mollusques acéphales des rensei- gnements entièrement nouveaux. Avant d'entreprendre l'exposé des recherches et des théories auxquelles conduit l’étude des calculs de la Cythérée, je crois utile de donner une description sommaire de la Glande qui les contient. Pour procéder ainsi, j'ai deux raisons : la première, l’'Organe de Bojanus de la Cythérée présente quelques particu- larités histologiques qui n’ont point encore été signalées ; la seconde, sans la connaissance de sa topographie, il serait diff- cile, sinon impossible, de comprendre com ment se forment les calculs, pourquoi ils grandissent, par quel mécanisme ils chemi- nent lentement au travers des tissus de la Glande, comment il se fait enfin qu'on les rencontre gros et nombreux dans la partie dorsale de l’Organe de Bojanus, petits et rares sur ses côtés. L’Organe de Bojanus de la Cythérée se voit aisément par transparence, sans aucune préparation, au travers du manteau ; mais, pour en suivre exactement les contours, il faut enlever ce dernier et les branchies. On remarque alors que la Glande a la forme d’un cône dont la base forme la paroi verticale du péricarde, tandis que sa pointe s’appuie sur le muscle ad- ducteur postérieur des valves ; qu’elle est placée à la base des branchies et qu’elle est recouverte dans sa partie dorsale par de nombreuses concrétions qui lui forment toit. La minceur des parois du manteau est telle qu’on peut distinguer facilement dans la cavité péricardique les oreillettes et le ventricule traversé par le rectum ; on peut aisément compter les battements du cœur, il y en a 60 par minute. Quand on ouvre le péricarde, on s’aperçoit que du tissu bo- janien en forme le plancher et que les Sacs soudés ensemble le limitent en arrière. Quoique unies intimement dans leur par- FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 14109 tie antérieure, les deux glandes qui constituent l’Organe de Bojanus de la Cythérée n’en sont pas moins distinctes en arrière. Entre elles passent le rectum, l'aorte postérieure et les mus- cles qui rattachent le pied à la coquille. Quant à la lame mince de tissu glandulaire qui forme le plancher du péricarde, elle finit avec celui-ci. Si l’on ouvre un Sac, on voit qu'il est creux et qu’à l’intérieur il y a une éminence vasculaire creuse également. Le professeur Lacaze-Duthiers à montré comment ces deux cavités, cavité périphérique et cavité centrale, communiquent entre elles, comment la cavité centrale débouche au-dessous du cœur et en avant sur le plancher du péricarde, et comment l’autre communique avec l'extérieur dans le voisinage du pore génital. Je n’ai pasété assez habile pour découvrir l’orifice par lequel la cavité centrale débouche dans le péricarde; plus heureux avec celui qui met le couloirlatéral en communicätionavecle dehors, j’aivu qu’ilestexcessivement fin et situé en dessous de l’orifice génital. Le mamelon qui le porte est à l’angle externe antérieur de la glande, entrele pied et labranchie interne. Il est difficile à apercevoir sur l’animal mort asphyxié ; on peut cependant le rendre quelquefois apparent par une goutte d’al- cool versée à l'endroit convenable et qui contracte les tissus. Il est plus certain de pousser une injection au carmin précipité par l'alcool dans le canal périphérique ; on aperçoit alors, quand l’opé- ration réussit, un très mince filet rouge qui jaillit près de la base du pore génital et du côté du pied : c’est là qu’est placé l’orifice externe du Sac de Bojanus. Quoiqu'il y en ait une de chaque côté, les glandes qui forment l’Organe de Bojanus ne communiquent point entre elles, sinon par l'intermédiaire (?) dela cavité péricardique. Quand on pousse une injection dans un des Sacs, l’autre reste incolore ; mais si la pression est trop grande, les tissus se déchirent, l'autre glande se remplit à son tour, et l’on peut croire qu’il y a une communication qui en réalité n'existe pas. 110 AUGUSTIN LETELLIER. Les parois latérales des Corps de Bojanus contiennent des concrétions assez volumineuses pour être facilement visibles à l'œil nu ; dans la partie dorsale, les calculs sont si gros etsi nom- breux qu’ils ne laissent plusapercevoir le tissu brun dela Glande. Leur masse forme un véritable dallage qui déborde latéralement etantérieurement les Sacs de Bojanus et recouvre partiellement la cavité péricardique. Surl’animal vu de dos, l’orifice buccal en haut, les concrétions qui font hernie dans le manteau, affectent la forme d’un triangle dont lesommet situé en bas s’appuie sur le muscle adducteur postérieur desvalves ; la base sur le péricarde et dont la hauteur est donnée par la suture dorsale entièrement dépourvue de cristaux. Tous ces détails se voient facilement sur l’animal vivant, mais on peutles observer tout aussi bien sur des Cythérées rendues transparentes par une longue immersion dans l'essence de girofle, après déshydratation préalable par l’alcool absolu ou par imprégna- tion des tissas par la gélatine glycérinée. Dans le premier caslani- mal a pris une couleur rougeâtre, dans le second il est devenu trans- parent et incolore, son Organe de Bojanus a perdu sa couleur brune, mais les calculs, devenus blancs comme du lait, laissent voir leur mode de groupement avec une excessive netteté. La figure 13, PI. II, représente une coupe perpendiculaire au Sac gauche de l’Organe de Bojanus d’une très petite Cythérée: on l'a pratiquée vers le milieu de la hauteur de la Glande, et sa partie supérieure eût été surmontée par de gros calculs, si l'impossibilité d'en faire des coupes au microtôme n’avait forcé de les enlever au préalable. On voit qu’il est resténéanmoins quelques concrétions relativement volumineuses dans les parois laltérale et inférieure du sac, mais qu’il n’y en a pas dans la partie centrale, qui en est constamment dépourvue. On aperçoit bien dans quelques cellules plus grandes de la partie centrale des amas solides formés par de fins corpuscules, mais ceux-ci sont toujours de dimensions micros- copiques, et jamais on ne les voit atteindre la taille des calculs su- perficiels de la Glande. FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 444 Onreconnaît aisémentsur une coupe de la cavité centrale (P]. II, fig 14) le tissu glandulaire des histologistes. Les acini sont formés d’amas de cellules volumineuses à gros noyaux souvent polynucléo- lés. Quelques cellules plus grosses que leurs voisines renferment des concrétions que l’on ne voit pas augmenter par la suite, comme c'est le cas pour les calculs qui proviennent de la matière proto- plasmatique des cellules bojaniennes qui tapissentle canal périphé- rique de la Glande. À la surface intérieure de la cavité centrale, les cellules sont cylindriques : sur la coupe on pourrait les croire calici- formes, mais l’aspect qu’elles y prennent est dû à la déshydratation des tissus. En effet, sur un lambeau fraisde l’Organe, toutes les cel_ lules épithéliales sont sphériques à leur surface et armées d’un long cil vibratile unique dont les mouvements rythmés sont faciles à observer avec un fort grossissement. Le cil forme une double boucle et se détend comme un fouet. Ainsi les cellules ne sont pas caliciformes, et la cupule qu’elles semblent présenter est produite par la contraction de la matière protoplasmatique intérieure sous l'influence prolongée des réactifs qui ont d’autre part agglutiné la substance muqueuse superficielle à ces cellules. Les observations faites sur le vivant montrent que les cellules épithéliales ont un protoplasma fortement granuleux, qui tranche nettement sur celui beaucoup plus clair des cellules profondes dont le noyau est difficilement visible. Mais pour voir que telle est hien la nature de la surface de la poche centrale de d’Organe de Bojanus, ilest indispensable de faire une observation très attentive, car, au moindre glissement, les cellules épithéliales se déplacent, et vues au milieu de celles des couches sous-jacentes, font penser à un revête- mentformé de cellules sphériques au milieu desquelles plusieurs, irrégulièrement disposées, mais de couleur plus foncée, seraientseules armées d'un cil dont les mouvements persistent longtemps encore après que le lambeau qu’on examine a été enlevé à la paroi de la Glande. Ce sont les cellules bojaniennes qui tapissent la cavité périphé- 442 AUGUSTIN LETELLIER. rique et le tissu conjontif qui leur sert de support qui nous inté— resseront le plus chez la Cythérée. C’est en etfet le protoplasma des cellules bojaniennes du canal périphérique qui donne nais- sance aux calculs si curieux de la Cythérée; et lorsque plus tard ils sont devenus quelquefois énormes, c’est dans le tissu conjonctif qu'onles trouve enkystés. Une fois dissociées, et c’estlà chose facileà obtenir, les cellules bojaniennes de la poche périphérique sont absolument sphéri- ques, transparentes et presque incolores, quelques-unes même le sont complètement. Leur noyau est très difficilement visible alors même qu’il n'existe pas de concrétions pour le cacher. La transparence du noyau des cellules bojaniennes est tellement grande et sa réfrangibilité si comparable à celle du protoplasma, il fait si difficilement élection de matière colorante qu'il n’y a guère que le carmin de Grenacher qui permette de l’apercevoir facilement. On remarque alors qu’il est assez petit, qu'il a d’ordi- naire un nucléole, mais qu’il arrive aussi qu'ilen a plusieurs ;qu’en- fin il est excentrique. La majeure partie de la cellule est en effet occupée généralement parune sphère liquide, transparente, qui ne laisse au protoplasma qu’un espace souvent très restreint. Les divers aspects sous lesquels se présentent les cellules sécré- tantes du canal périphérique sont les suivantes : il y à : 1° Des cellules absolument incolores, transparentes, formées pro- bablement par des gouttes d’huile. | 2° Des cellules à noyau invisible sans l’actiondes réactifs, presque entièrement remplies par une sphère liquide, incolore. 3° Des cellules semblables aux précédentes, mais chez lesquelles la sphère incolore ou les vacuoles incolores présentent des granu- lations : a éparses, b réunies en groupes distincts et multiples, c en un seul groupe. Pour quelle cause naturelle ou pathologique ces granulations FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 113 prennent-elles naissance dans certaines cellules et pas dans d’au- tres, c’est ce que je ne me charge pas d’expliquer, mais toujours est-1l qu’on voit : 4° Des cellules dont l’amas cristallin remplit la cavité presque entière. La substance protoplasmatique a disparu, seule une zone claire formée par l'humeur cellulaire sépare encore le calcul des parois de la cellule. À un degré plus avancé de développement des calculs corres- pondent : 5° Des cellules qui renferment chacune un calcul et qui commu- niquent entre elles grâce à la disparition de la portion de paroi qui leur était commune. Dans ce cas, les zones claires des deux cellules se confondent et entourent les deux concrétions, qui ne tardent pas à en faire une seule. Enfin, par suite du grossissement continu du calcul, les cellules se trouvent réduites à leur paroi, ou plutôt à ce qui en reste, et si . , . . , . Ê celle-ci n’est point emprisonnée par les calculs voisins quand ils se soudent, la désorganisation s’achève, et bientôt il ne reste plus rien * des cellules qui ont contenu les calculs élémentaires, origines de la concrétion volumineuse que l’on voit incluse dans un méat intercellulaire. En résumé : 4° Les Corps de Bojanus dela Cythérée sont disposés comme ceux des mollusques qui appartiennent à la famille des Vénus, 2° Les cellules bojaniennes de la cavité centrale sont seules ciliées, et elles ne renferment que des granulations microsco- piques. 3° Les cellules du canal périphérique, non ciliées, renferment au contraire des calculs qui peuvent devenir assez gros pour les remplir entièrement. On peut trouver des cellules bojaniennes à tous les états inter- médiaires, depuis celles qui sont entièrement vides et sans noyau ARCH, DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2 SÉRIE. — T. V bis, SUPPL. 1887. — 1° Hem. 8 114 AUGUSTIN LETELLIER. jusqu’à celles qui sont en voie de disparition par suite de l'accrois- sement illimité du calcul auquel elles ont donné naissance. D’après ce qui précède, on voit que nombre de calculs de la Cythérée sont, comme ceux de la Maule, formés de plusieurs calculs élémentaires soudés entre eux, chacun d’eux étant d'ailleurs lui- même constitué de granules presque invisibles. Beaucoup de ces concrétions restent microscopiques, maisil y ena toujours un certain nombre qui grandissent assez pour devenir visibles à l’œil et même pour former des masses aussi grosses qu’un petit pois. Les concrétions que l’on voit sur les parois latérales de l’Organe de Bojanas ont déjà des dimensions beaucoup plus grandes que celles des cellules bojaniennes ; maïs c’est dans la partie dorsale de la Glande qu’elles atteignent la taille la plus grande. J'en donne- rai plus loin la raison, en ce momentil me suffit de remarquer que les calculs de cette partie supérieure de l'Organe de Bojanus, deve- nus énormes, sont pressés les uns contre les autres au point d’en être presque juxtaposés à la manière des murs cyclopéens. Les plus gros font hernie sous le manteau qui en est tout bossué et dans lequel on les croirait volontiers inclus. Il n’en est rien pourtant, ou du moins, si quelques-uns le pénètrent, il n’en faudrait pas con- clure qu'ils y ont pris naissance et sont par conséquent des pro- ductions palléales. Les concrétions qui se forment dans les veines du manteau n’ont ni leur composition, ni leur action sur la lumière polarisée. Certains de ces calculs sont d’une transparence parfaite, d’au- tres sont simplement translucides, d'autres opaques et alors généra- lement blancs comme du lait. Mais il y en a aussi qui, étant opaques, sont de la couleur du café au lait ou même brun marron foncé. Il y a des calculs qui sont partiellement transparents et opaques, une extrémité, par exemple, ressemblant au cristal le plus pur et l’autre à la porcelaine blanche. Les calculs que la lumière traverse sunt souvent incolores, mais ils peuvent être légèrement ambrés ou FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 415 opalescents Enfin, quelle que soit leur transparence, les calculs la perdent quand on les déshydrate ; la dessiccation à l'air libre, dans l'alcool ou la glycérine leur donne à la longue l’opacité etla couleur blanche de la porcelaine. Nous avons vucomment on peut mettre cette propriété à profit pour juger de la disposition des calculs en les rendant opaques pendant que l’animal! devient transparent grâce à une longue immersion dans l’essence de girofle ou à l’im- prégnation de ses tissus par la gélatine glycérinée. Les calculs de la Cythérée sont assez durs, ils raient le gypse, mais sont rayés par le carbonate de chaux. Leur cassure est sou- vent conchoïde : on peut les réduire en poudre fine. Ils sont insolu- bles dans l’eau douce et salée. Enfin leur densité déterminée au moyen d’un grand nombre d’entre eux pris au hasard est 2,135. Un seul animal, en ne comptant, bien entendu, que les gros cal- culs, en renferme souvent plus de 150 et rarement moins de 20. Mais si l’on voulait compter tous ceux qu’on voit au microscope, le nombre en serait bien plus grand: Et même, là où, à cause de leur transparence et de leur petitesse extrême, on n’en peut distinguer dans la lumière ordinaire, il suffit de faire intervenir Ja lumière po- larisée pour en découvrir des centaines à l’état de sédiments im- palpables : ce sont alors autant de points brillants au milieu du champ noir du microscope. Il y a des calculs qui ont 3°°,5 et même plus de diamètre ; un d’entre eux avait ainsi le quinzième de la longueur totale de l’a- nimal mesuré de l’orifice buccal à l'extrémité rétractée des siphons. Trois Cythérées qui pesaient 45,535, 145, 815 et 135,475 ont fourni respectivement 0%,055, 0%, 115 et 0%, 205 de concrétions, soit environ 55: ro6 et 5: de leur poids total. 116 AUGUSTIN LETELLIER. Le poids des calculs est nécessairement très variable, il est com- pris entre quelques dixièmes de milligramme et cinq milligrammes environ, le poids moyen étant habituellement peu supérieur à à 0€, 001. Il y a des calculs dont la surface est lisse, mais il y en a d’autres chez lesquels elle est entièrement recouverte de cristaux faciles à reconnaître pour des octaèdres (pl. III, fig. 15 bis). Certains sont volumineux, c’est du phosphate ammoniaco-magnésien qui les constitue ; mais il y en a aussi quelquefois d’autres qui sont moins gros et de forme plus allongée : ce sont alors des octaèdres d’oxalate de chaux. — À ces deux aspects différents de la surface des concrétions, sur- face lisse ou hérissée de pointes cristallines, correspondent deux espèces également différentes de calculs. La première comprend des calculs amorphes, l’autre des calculs cristallins. Mais on se tromperait si l’on croyait que les premiers ne renferment jawais de cristaux et que les seconds ne renferment point de ciment amor- phe intercalé entre les cristaux. Et puis il y a des calculs qui sont amorphes par un bout et cristallins par l’autre extrémité. En gé- néral, les calculs amorphes sont lisses, blancs et alors laiteux, ou colorés en brun et opaques. Les calculs cristallins ont la surface hérissée de pointes, ils sont visiblement formés de cristaux et sont généralement incolores ou légèrement ambrés et toujours trans- parents. On trouve presque toujours chez le même animal des calculs amorphes laiteux et opaques, en même temps que des calculs cristal- lins. Ainsi quelquefois, à côté d’une concrétion qui esttransparente comme un grain de quartz hyalin, on en voit une ou deux autres qui sont blanches ou même couleur café au lait. Il est assez rare que les calculs étant presque tous opaques et bruns, on en trouve au milieu d’eux qui soient transparents ; mais ce cas se rencontre L4 = . . néanmoins. Toutes ces remarques sont d’ailleurs importantes, car, FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 447 ainsi qu'on va le voir, l’origine et la composition chimique diffèrent suivant que le calcul est amorphe ou cristallin. Sur la coupe de l’Organe de Bojanus d’une Cythérée encore jeune que j'ai figurée pl. IL, fig. 18, on voit des concrétions quele rasoir a coupées. Elles sont formées de couches superposées, et quoique encore microscopiques, certaines ont cependant déjà des di- mensions qui dépassent celles de plusieurs cellules bojaniennes réunies. À côté de ces calculs se trouvent des débris qui provien- nent de cristaux que le rasoir a brisés, aussi la coupe ne peut-elle nous instruire sur la constitution physique des calculs auxquels ces fragments informes ont appartenu. Ces calculs étaient de ceux que nous avons appelés calculs cristallins, les autres que le rasoir a coupés sont des calculs amorphes. La coupe et l’observation des cellules bojaniennes du canal pé- riphérique vont nous expliquer l’origine et le mode de dévelop- pement de ces derniers. Que voit-onen eftet sur la coupe ? qu’un calcul amorphe type est formé d’une matière sans texture cris- talline disposée par couches parallèles, alternativement claires et sombres. On y observe que cet état, presque idéal, se complique le plus souvent, que plusieurs calculs se soudent d’ordinaire entre eux, et que la concrétion ainsi formée s’entoure, elle aussi, de nou- veaux dépôts reconnaissables à leurs zones alternativement claires et sombres indéfiniment répétées. Voilàce qu’apprendla coupe, voicimaintenantce que montrent les cellules bojaniennes du couloir périphérique. Elles font voir que les calculs ne prennent pas naissance dans la substance protoplasmati- que elle-même, maisque, suivant une genèse identique à celle qu’on observe lors de l'apparition des dépôts minéraux chez les végétaux, c’est dans les sphères claires que j'ai signalées dans les cellules bo- janiennes, qu'ils apparaissent pour la première fois, et cela sous la forme de granulations disséminées et excessivement petites. Arrivée à une certaine période de son développement, la cellule bojanienne se remplit de vacuoles qui contiennent un liquide clair, 148 AUGUSTIN LETELLIER. que l’on appellerait le suc cellulaire si la cellule était végétale, que nousdésignerons sous le nom d’humeur de la cellule, et qui est un des éléments de la sécrétion bojanienne proprement dite aperçue à l’origine même de sa formation. Le protoplasma qui entoure les sphères liquides forme tout autraversde la cellule de minces mem- branes qui, comme des sortes de ponts, permettent pendantun temps encore le transport des granules protoplasmatiques et les échanges nutritifs dans tous les points de la substance vivante. Maïs bien- tôt, la sécrétion cellulaire augmentant, les enveloppes des sphè- res disparaissent ; il n’y a plus qu’une sphère unique, etle proto- plasma refoulé ne forme plus qu’une mince couche qui tapisse les pa- rois de la cellule. Il semble que cet état n’est lui-même que passager, quela sphère liquide augmente toujours aux dépens du protoplasme qui disparaît à la fin. Alors la cellule, morte désormais, n’at- tend plus pour se déchirer et disparaître que l’action des forces osmotiques qui, en diluant l’humeur qui la remplit, en augmente- ront le volume, la forceront par conséquent à se rompre et à répandre le liquide excrémentitiel qu’elle contient. Mais si telle est la suite des phénomènes qui accompagnent le développement et la mort de beaucoup de cellules bojaniennes, il en est d’autres chez lesquelles elle se complique par l'apparition de produits solides au milieu des vacuoles liquides. Dans certaines cel- lules, on voit en effet des granules excessivement fins dans les va- cuoles remplis de liquide : d’abord épars, puis réunis en groupes divers, ces granules finissent le plus souvent par ne plus former qu'une seule masse sphérique entourée par la sécrétion cellulaire. Il n’est pas douteux que les granules des vacuoles ne sont point de même nature que les fins corpuscules que l’on sait toujours exis- ter dans la substance protoplasmatique des cellules. Seules les cel- lules quiles renferment contiendront par la suite un ou plusieurs de ces calculs qui sont si communs dans l’Organe de Bojanus des Mollusques acéphales. Toute cellule dont les vacuoles ne renfer- 1 ment que la sécrétion limpide propre à la Glande est une cellule FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 119 saine qui aurait parcouru dans les conditionsordinaires les phases successives de son évolution et n’aurait laissé après elle nigraviers, ni concrétions. On doit se demander pourquoi les granules, d’abord disséminés dans l’humeur de la cellule, finissent par se réunir, et quelle est la cause de la forme sphérique qu’affectent toujours leurs amas. Je crois qu’il est facile de répondre à ces questions. La matière, quoiqu'elle soit inerte, attire la matière, et cette attraction qui au travers des espaces infinis maintient les astres dans leur orbite, sur la terre où nous vivons donne aux corps qui nous entourent leur forme et leur solidité. Soustraits aux actions de la pesanteur par le liquide où ils flottent, libres de céder à leurs attractions mu- tuelles, les granules se groupent donc fatalement et, comme tous les corps placés dans les mêmes conditions dynamiques, leurs amas prennent la forme de sphères. Enfin, comme si ces causes ne suf- fisaient pas pour tout expliquer, on pourra ajouter que les mâcles ne prennent naissance que dans des cellules en voie de dégénéres- cence et que les débris organiques qui nagent dans l’humeur cellu- laire doivent être pour les granules autant de parois flottantes au- tour desquelles elles s’assemblent. Les détritus organiques sont ordinairement noirs, dira-t-on, le centre des calculs devrait être noir, il est blanc quelquefois ; maïs qui pourrait se vanter de cou- per par son centre de pareils calculs ? Ainsi le calcul initial, le nucléus, si l’on veut, doit son origine aux groupements que les granules des vacuoles, sous l’action de l’attrac- tion moléculaire, effectuent nécessairement tôt ou tard, ou bien encore il la doit à la présence de quelque débris cellulaire qui a servi de paroi à ces mêmes granules. Mais, quelle que soitson origine, il estrare qu’il en reste là ; généralement il grossit par la juxtapo- sition de nouveaux dépôts, les uns foncés, les autres clairs, dispo- sés par couches alternatives et superposées (fig. 16). Avec un grossissement suffisant, on voit que la couleur des zo- 120 AUGUSTIN LETELLIER. nes foncées provient de points noirs excessivement petits, qui sont disséminés au milieu de la masse amorphe et blanchâtre formée par la substance minérale du calcul. Ces pointssont d'origine orga- nique, car ils disparaissent quand on calcine le calcul : c’est la cel- lule qui les produit en se désagrégeant. On peut admettre qu’ils se sont déposés trop vite pour servir de paroï aux particules minéra- les ou que la mâcle déjà formée a, par son attraction propre, annulé celle que ces détritus organiques pouvaient exercer sur les fins granules de phosphate de chaux. Toujours est-il que là où ils abon- dent, la couche est noire, là oùils sont rares, blanche ou légèrement teintée, car il y a toujours de ces points noirs même dans les zones les plus claires et qu'on en pourrait croiretotalement dépour- vues. À force de grandir, le calcul finit par remplir presque enentier la cellule ; alors la sécrétion cellulaire fortement comprimée dis- tend les parois : c’est elle qui forme la zone claire liquide qui existe autour de certaines concrétions. Mais cette phase de l’évolution des calculs n'est que transitoire, parce que la cellule voisine est le siège de phénomènes analogues, et que la paroi qui est commune aux deux cellules, pressée dans tous les sens, cesse de se nourrir, meurt et se désagrège. Les liquides cellulaires se confondent, les calculs en contact se soudent, et, de nouveaux dépôts survenant, la concrétion prend la forme si connue des dum bell ou haltères. Cette disposition, elle aussi, disparaît bientôt, parce que les causes qui ont déterminé la soudure des deux premiers caleuls auront vite fait d'agréger à leur masse de nouveaux calculs élémentaires, etque la concrétion résultant de leur union, déjà bien des fois plus grosse qu'une cellule bojanienne, finira par se souder elle-même à quelque autre concrétion voisine. Alors on pourra trouver à l’intérieur du calcul des lambeaux de parois, voire même des cellules bojaniennes entières que les concrétions ont emprisonnées en se juxtaposant, et qui, désormais à l'abri de la destruction organique, FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 121 pourront être observées telles qu’elles étaientau moment où elles ont été enveloppées. Cette manière de concevoir le dév:loppement des calculs de la Cythérée trouve une confirmation dans l’expérience suivante qui réussit presque toujours. Au fond d'une lame creuse, on met un calcul et on le recouvre d’une lamelle, dont, pour plus de précau- tion, on lute deux bords seulement. On introduit ensuite dans la cellule de l’acide chlorhydrique, et le calcul disparaît en produisant une très légère effervescence. On dispose alors deux fils qui vien- nent au contact de la lamelle :l’un, servant de siphon, amène de l’eau distillée contenue dans un verre ; l’autre, qui pend, sert de canal au trop-plein de la cellule. Au bout de 24 heures, l’eau qui s’écouie estpure, et en regardant avec une loupe, on n’aperçoit rien sous la lamelle. Mais si l’on substitue le picrocarmin à l’eau et si on lave de nouveau, on distingue enfin une fine dentelle rouge reproduisant .es contours des calculs élémentaires qui, en s’agré- geant, ont formé la concrétion disparue. Cette dentelle est formée par ce qui reste des parois des cellules-mères et par des débris de tissu conjonctif qui se sont trouvés également inclus quand les calculs se sont soudés. J'ai dit que l'expérience réussit presque toujours, parce qu’il est _ rare qu’un calcul donné n’ait point une origine multiple; mais il s’en trouve de gros, de très gros même, qui n’ont jamais aug- menté que parune succession ininterrompue de dépôts qui se sont superposés sans qu'un calcul voisin soit jamais soudé à eux. Ce cas s’est nécessairement produit toutes les fois qu’une concré- tion a pris naissance dans une cellule quiseule, entourée de cellules restées saines, était atteinte de la dégénérescence calculeuse. Il ne faudrait pas croire que l'épaisseur des zones sombres et claires des calculs amorphes soit exactement la même; on se trom- perait même si l’on pensait qu’elles correspondent à des dépôts de 122 AUGUSTIN LETELLIER. nature différente. En réalité, le calcul est formé d’une substance minérale fondamentale partout la même, au milieu de laquelle on ne distinguerait aucune apparence de couches superposées, si à cer- taines époques de sa formation ne s'étaient déposés des détritus or- ganiques en plus ou moins grande abondance. Dès lors on con- çoit que la limite des zones sombres et claires ne doit pas être nettement tracée, ces dernières n'étant, en réalité, que des appa- rences auxquelles ne correspond aucune formation différente de celle qui la précède ou la suit. On remarque souvent que la couche superficielle d’un calcul amorphe n’est pas pigmentée ; cela peut tenir à un changement dans la nature de la sécrétion ou à un déplacement du calcul qui, ayant quitté les couches profondes de la Glande, est venu se loger dans le tissu conjonctif superficiel au milieu duquel on l'a trouvé. On conçoit en effet que ce tissu, qui est résistant, élastique, et dont les fibres s’écartent facilement pour faire place à des con- crétions déjà fort grosses, se désorganise difficilement : et si la dé- composition se produit, ce n’est qu’en certains points relativement peu nombreux où la concrétion frotte contre sa paroi organique. Dans ces conditions, il y a peu de débris en suspension dans le li- quide qui baigne le calcul ; ilne s’en déposera donc presque pas, et les couches minérales qui se forment ne seront, pour aïinsidire, pas pigmentées. Placés d’ailleurs au milieu d’un tissu lâche, sans cesse drainé par l’eau et par le sang, les débris, plus légers que les sédi- ments phosphatés, doivent être plus facilement entraînés que ces derniers, et l’on peut admettre qu’ils ont cessé de se déposer sur le calcul quand les granules inorganiques continuent encore à le re- couvrir de leurs fines aiguilles cristallines. On voit aussi des calculs qui sont amorphes à l’intérieur et cris- tallins à la surface. Cela peut tenir à des changements survenus dans la sécrétion, changements qui ailleurs ont amené Ja forma- ° 4 FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 193 tion de calculs purement cristallins ; mais cela peut encore prove- nir d’une autre cause et qui est celle qui produit les apparences si curieuses que présentent certains calculs amorphes quand on les regarde dans la lumière polarisée. On taille facilement en lames minces les calculs de la Cythérée ; or ; quand on les regarde dans la lumière polarisée, on voit, au mi- lieu de la masse fondamentale amorphe, des cristaux très petits, très brillants, non placés au hasard, mais disposés en traînées lumi- neuses, qui partent du centre suivant la direction des rayons. Quel- ques calculs présentent même de ces cristaux brillants et vivement colorés, qui, assemblés en grand nombre, se sont disposés enéven- tail à partir du centre. On se rend compte de cette disposition par la fig. 16 bis de la pl. III : en voici maintenant la cause, Le liquide sanguin qui traverse l’Organe de Bojanus de la Cy- thérée, le séro-chyme, c'est le nom que Milne Edwards lui donne chez les invertébrés, renferme du phosphate basique de chaux en plus ou moins grande quantité, et des traces de phosphate ammo- niaco-magnésien ou phosphate triple. Le premier de ces corps em- prunté par la cellule vivante au liquide qui la baigne, se dépose, quand il est trop abondant, dans l’humeur des vacuoles, et, suivant un mécanisme qui nous est connu, y forme le nucléus de la concré- tion future. Mais en même temps, par suite de l’échange moléculaire dont la substance protoplamastique de la cellule est le siège, le phosphate triple devenu saturant également se dépose. Ses cris- taux, précipités primitivement au hasard, à la surface dela concré- tion phosphatique amorphe, sans lien aucun qui les unisse, forment ces couches discontinues que le microscope nous révèle au centre de la préparation. Et il en serait toujours ainsi, toujours les cris- taux de phosphate ammoniaco-magnésien se disposeraientau hasard si le phosphate de chaux les recouvrait entièrement avant toute nouvelle saturation de l'humeur cellulaire, c’est-à-dire avant la précipitation de nouveaux cristaux de phosphate triple. Mais si cela n’est pas, si les pointes de quelques prismes émergent au mi- 124 AUGUSTIN LETELLIER. lieu de la pâte amorphe qui les entoure, alors le phénomène de- vient réoulier, je dis même mathématique, dans sa production, parce que chaque pointe qui sort est un centre d'attraction et queles nouveaux cristaux se groupent nécessairement autour d'elle. Et par la continuité des mêmes causes agissantes, les cristaux, en se groupant au-dessus les uns des autres, forment à la longue ces files linéairesquitraversent comme des rayons lumineux les calculs amor- phes. Mais il peut aussi se faire, et ce cas arrive fréquemment, que plusieurs cristaux se disposent autour d’une pointe unique ; le nombre va alors en augmentant à mesure qu’ils sont plus éloi- gnés du centre, suivant la loi ordinaire des progressions géomé- triques, et il en résulte une disposition en éventail. Les cristaux de phosphate ammoniaco-magnesien formeront ainsi sur la coupe un triangle dont la pointe sera le cristal, situé du côté du milieu, et qui est le centre primitif d’attraction ; mais, surle calcul lui- même, les cristaux de phosphate triple constitueront en réalité des cônes dont la pointe est tournée vers l’intérieur et la base du côté de la surface de la concrétion, si même elle ne concourt pas à la former. Lorsque toutes les bases de ces cônes se touchent, le calcul pa- raît correspondre à une période de temps pendant laquelle la sé- crétion a été différente de celle qui a donné naissance au noyau de la concrétion ; mais ce n’est là qu’une apparence, et l’on voit immédiatement qu’à l'époque même où se formaient ces dépôts cristallins, pouvaient s’en produire d’autres complètementamorphes, soit dans des cellules voisines, soit dans le même méat intercellu- laire. Et c’est ainsi qu’il n’est point besoin d'admettre que les sé- crétions sont différentes dans les cellules qui se touchent, parce que les produits ne sont pas les mêmes ; il suffit que le premier granule déposé soit d’une nature plutôt que d’une autre pour que les dépôts qui se formeront soient amorphes ou cristallins. Jusqu ici jai parlé des concrétions dela Cythérée comme si elles FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 125 restaient toujours à l'intérieur de la cavité que forment en se dé- truisant les cellules mères des calculs élémentaires qui les cons- tituent ; maïs le lecteur a compris qu'à partir du moment où leur taille a dépassé une limite rapidement atteinte, c'est en dehors des cellules bojaniennes, dans le tissu conjonctif sous-jacent que se trouve le calcul. Il n'en continue pas moins à grossir grâce à la juxtaposition des éléments minéraux qu’il puise dans le sérochyme qui penètre de toutes parts l’Organe de Bojanus, et, suivant toute _ vraisemblance, cetteaugmentation continue tant que dure la vie du mollusque. Dès lors, les calculs les plus anciennement formés doivent être les plus gros, parce que ce sont eux que les dépôts re-. couvrent depuis le plus de temps ; ce doivent être aussi les plus rapprochés de la surface, parce que les calculs sont vraisem- blablement sans cesse poussés vers elle par une sorte de vis a tergo. Les calculs en effet ne détruisent évidemment que les cellules dont ils gênent la nutrition ;or ces cellules ne peuvent se trouver qu’en- tre eux et la surface corticale dure de la Glande, non vers l’intérieur, où le canal périphérique permet aux cellules de prendre le déve- loppement qu'elles sont susceptibles d'acquérir. Les concrétions cheminent donc lentement, mais sûrement, vers la surface de l'Organe de Bojanus. Si elles arrivent à la paroi latérale peu épaisse, elles la déchirent et tombent dans le courant anal qui les emporte ; si au contraire elles arrivent sous le manteau, celui-ci, plus résistant, s’oppose à leur sortie hors du corps de l'animal ; alors elles grossissent indéfiniment et forment le revêtement en mosaïque si étrange que l’on voit aussitôt qu’on écarte les valves d’une Cythérée. Ainsi se trouve expliquée d’une façon simple la différence de taille que l’on remarque entre les calculs qui sont placés dans la partie dorsale de la Glande et ceux que l’on trouve disséminés dans ses flancs. CHAPITRE XI. CALCULS BOJANIENS DE LA CYTHEREA CHIONE (de {toscof). (Suite et Jin.) CALCULS CRISTALLINS. — LEUR ORIGINE. — EXPLICATION DES PHÉNOMÈNES OPTIQUES QUE PRÉSENTENT LEURS LAMES MINCES. CARACTÈRES DISTINCTIFS DES CALCULS AMORPHES ET DES CALOULS CRISTALLINS. COMPOSITION CHIMIQUE DES CALCULS. — ELLE VARIE D'UN CALCUL A UN AUTRE. PERLES DE LA CYTHÉRÉE. COMPARAISON DE LA COMPOSITION CHIMIQUE DES PERLES ET DE LA COQUILLE AVEC CELLE DES CALCULS DE L'ORGANE DE BOJANUS. Après avoir, dès le début de cette étude des calculs de la Cythé- rée, distingué des calculs amorphes et des calculs cristallins, j'ai longuement exposé, dans le chapitre qui précède, l’origine et le mode de développement des premiers ; il me reste à parler des seconds. Les calculs cristallins sont transparents, incolores ou légère- ment ambrés ; il y en a de microscopiques, ce sont ceux que l’on voit dans le champ noir du microscope quand on croise les Nicols ; mais ils peuvent atteindre et dépasser la taille des calculs amorphes les plus gros. Leur surface est hérissée de pointes qui appar- tiennent à des octaèdres, parmi lesquels on peut parfois recon- naître des cristaux d’oxalate de chaux à leur forme allongée. Mais il y a aussi de ces calculs qui sont seulement recouverts de fins granules plus ou moins transparents et dont la surface est simple- ment mamelonnée. Il n’est pas rare d’apercevoir, par transparence, des cellules FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 127 bojaniennes qui se sont trouvées incluses dans la masse du calcul (fig. 15 bis, PI. TIT). Certaines de ces cellules sont encore assez bien conservées pour qu’ilsoit possible de les colorer au picrocarmin afin de les étudier ; mais d'ordinaire elles sont remplies d’un pigment noir qui résulte de leur décomposition. Nous avons vu précédemment que les calculs amorphes pré- sentent le même phénomène d’inclusion ; mais, à cause de leur manque de transparence, on ne peut voir les cellules emprisonnées qu’en pratiquant des coupes ou encore en recourant à l’artifice que j'ai indiqué à la page 121. Malgré leur limpidité, on se ferait difficilement une idée exacte de la nature des calculs transparents, si l’on ne recourait à l’examen des lames minces qu’on en peut faire. Sur celles-ci (fig. 17), on ne voit plus ces zones brunes concentriques, alterna- tivement plus sombres et plus claires, qui sont l'élément caracté- ristique des calculs amorphes, mais de nombreux cristaux, géné- ralement taillés en losange (p), empâtés dans une masse trans- lucide qu’on pourrait croire amorphe, mais qui ne l’est pas, ainsi que le montrent ses propriétés optiques. On devine facilement sur ces préparations les contours des cellules qui contenaient les cal- culs élémentaires dont l’agrégation a formé le calcul qu'on étudie aux lignes sombres (/) qu'on aperçoit en certains points de la coupe. Ces lignes sont d’ailleurs caractérisées par un revêtement de fins granules à zones très pâles concentriques. Enfin, des traits sombres indiquent aussi les contours des lacunes (?) que les calculs en se soudant n’ont point comblées, et qu'aucun liquide ne semble avoir remplies, car on ne voit par transparence rien qui ressemble à une inclusion de liquide quand on regarde un cal- cul entier et bien transparent. La masse translucide intercalée entre les cristaux, vue par transparence, est toute parsemée de zones très pâles (m), disposées 128 AUGUSTIN LETELLIER. circulairement autour d'un très grand nombre de points également très pâles et difficiles à définir. La chimie nous montrera que les gros cristaux (p) sont des prismes de phosphate ammoniaco-magnésien, et que divers phos- phates, parmi lesquels le phosphate tribasique de chaux est celui qui est le plus abondamment répandu, entrent dans la composition du ciment intercalaire. Ces notions sur la composition des calculs sont dès maintenant nécessaires pour comprendre ce qui va suivre. Dans la lumière diffuse, on pourrait confondre un calcul de l’'Organe de Bojanus avec une perle du manteau, si l’on n’ap- portait point à l’observation une attention suffisante ; maïs dans la lumière polarisée toute confusion serait impossible. La perle donne lieu au phénomène de polarisation lamellaire quise traduit par une croix noire nettement tracée à partir de son centre (voir fig 19, pl. IIT) ; le calcul se montre parsemé de cristaux irisés des plus vives couleurs, tandis que le ciment qui les unit est lui-même constellé de petites croix noires peuvisibles, sur l’origine desquelles je me réserve de revenir dans un instant (fig. 18 et 20). On remarque que les cristaux irisés n’ont pas, en général, la forme des prismes du phosphate ammoniaco-magnésien ; mais il est facile de comprendre que les différences que l’on observe tiennent au hasard qui a présidé à la section des cris- taux au moment où l’on a fabriqué la lame mince, et non à ce que le phosphate triple affecte chez la Cythérée des formes cris- tallines inédites. Au reste, il n’est pas difficile de trouver quelques cristaux ayant encore conservé l'aspect de ceux que Robin et Verdeil ont dessinés dans leur Atlas de chimie biologique ; et si l’on avait néanmoins encore des doutes, l'analyse se chargerait d’en montrer l’inanité. Deux points importants sont à élucider : 1° Pourquoi ne voit-on pas de zones pigmentées dans les calculs cristallins ? FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 129 2° Quelle est la cause des cercles concentriques, excessivement pâles, alternativement transparents et laiteux, qu'on voit dans le ciment en apparence amorphe qui unit les cristaux de phosphate ammoniaco-magnésien ? I. — Ala première de ces questions il ya deux réponses à faire : 1° La transparence d’un cristal est indépendante de la limpi- dité du liquide au sein duquel il se forme. Ue fait, prouvépar l’expérience journalière, tient à ce que l’aug- mentation de volume d’un cristal est due à l’attraction moléculaire qu’il exerce umiquement sur les particules cristallines qui lui sont identiques ou simplement isomorphes, Or, cette attraction, en vertu de laquelle les molécules attirées se groupent et s’orientent d’une certaine façon propre à la substance que l’on considère, doit être regardée comme une manifestation spéciale de l’attraction univer- selle que la matière exerce sur la matière et qui fait que le corps facile à mouvoir, attiré par celui qui l’est moins, se précipite à sa surface, destinée désormais à lui servir de support. Cette manière de voir est du reste conforme aux faits de l’expérience : la cristal- lisation est toujours accompagnée d’un dégagement de chaleur ; et quelquefois même elle donne lieu à des phénomènes lumineux : c’est ainsi qu'au moment où se forme un cristal d’acide arsénieux, on voit un éclair traverser la dissolution. Rien de pareiïl ne s’observe quand une poussière, organique ou non, cristalline ou amorphe, se dépose sur la paroi d'un vase. Si des débris de cellules souillent la surface des cristaux, leur transparence n’en peut être altérée, parce que les molécules cristallines qu’ils attirent se juxtaposent aux surfaces mêmes des. cristaux, qu’elles déplacent tous les corps étrangers, et qu’en se soudant intimement avec eux, elles ne laissent interposée aucune substance qui leur soit étrangère. Tout autre est le cas des calculs amorphes ; la matière qui les constitue est, au moment où elle se forme, à l’état d’un sédiment ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2 SÉRIE, — Tv. V bis, — supp. 1881. — Mém. 9 130 AUGUSTIN LETELLIER. sans texture cristalline ou même à l’état gélatineux ; rien ne s'oppose à ce qu’elle emprisonne des corps étrangers, s’il en existe à l’instant où elle se dépose. Or c’est précisément ce qui doit nécessairement arriver, car on peut difficilement admettre que l’augmentation de volume des calculs, c’est-à-dire la production de sédiments nouveaux, ne coexiste pas avec une dégénérescence des cellules de l’Organe de Bojanus, si même cette sécrétion phosphatique anormale n’en est pas la cause. Aïnsi la présence de détritus organiques dans l’humeur cellulaire ne peut faire de doute : qu’elle soit cause ou effet, elle existe du moment qu'il y a des calculs en voie d’accroissement. Or, qu’on le remarque bien, ils se précipiteront à la surface des concrétions très peu de temps après leur apparition. On sait en effet que la présence d’un sel cristallisable, et il y en a plusieurs dans le liquide cavitaire, suffit pour amener rapidement la précipitation des matières non cristallisables en suspension dans un liquide quelconque. Les débris de cellule se déposent donc en même temps que les sédi- ments phosphatiques amorphes, et comme, une fois recouverts, 1ls sont à jamais préservés de la destruction, nous les retrouvons tels qu'ils se sont déposés. 2° La seconde raison que l’on peut donner de l'absence d’un pigment quelconque dans les concrétions cristallines, est tirée de la composition même des calculs, dont les cristaux pointus ont vite fait de perforer les parois des cellules qui les renferment, et de les enrober avant leur décomposition organique. Alors ils s’ac- croissent aux dépens des substances identiques ou isomorphes transsudées par les cellules voisines, sans que le phénomène d’une désorganisation bien appréciable des cellules animales se manifeste. Quant à la rapidité avec laquelle les parois des cellules qui con- tenaient les calculs élémentaires ont dû être perforées, on en pourra juger à la fine dentelle que forment les parties conservées de ces parois, quand on les observe après avoir traité le calcul FONCTION URINARE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 131 par l'acide chlorhydrique, l’eau et le picrocarmin, suivant la méthode indiquée à la page 121 de cette Étude. IT, — Il me reste maintenant à expliquer pourquoi les calculs cristallins, au lieu d’une croix unique, présentent, dans la partie amorphe, des cercles concentriques excessivement pâles, quand on regarde les coupes dans la lumière ordinaire, et des croix noires petites et nombreuses quand on les observe dans la lumière polarisée. Cercles et croix proviennent de ce que la lumière traverse un grand nombre de mâcles qui ont été coupées quand on a fait la lame mince. Pour se rendre compte des irrégularités que son pas- sage au travers de ces sortes d’amas cristallins doit forcément lui faire éprouver, il est nécessaire de connaître commentse forment et comment s’accroissent les mâcles. L'origine de celles-ci peut être une particule organique qui, en suspension dans l’humeur de la cellule, s'est entourée de cristaux . qui forment ainsi une sphère toute hérissée de pointes. Mais la présence d’un débris de cellule n’est point nécessaire à la produc- tion du phénomène, et il suffit, pour s’en convaincre, d'observer attentivement l'action de l'acide acétique sur un calcul cristallin grossièrement concassé. On a alors de l’origine des mâcles une idée toute différente et qui, basée sur l'attraction que les extrémités des cristaux exercent les unes sur les autres, repose en définitive sur des faits d'observation, sur l’expérimentation elle-même. Quand on met un cristal transparent grossièrement concassé en présence de l’acide acétique, il se délite en quelque sorte, parce que le ciment intercalé entre les cristaux se dissout le premier ; ;l donne alors naïssance à de nombreux losanges, si l’on peut appeler ainsi des cristaux dont les angles obtus auraient été tron- qués (voir Robin, pl. VIL fig. 8, et pl. X, fig. 1 et 2,f ). Ces sortes de losanges paraissent sans action les uns sur Les autres tant qu’ils sont dans une position quelconque ; mais ils se soudent bout à bout 132 = AUGUSTIN LETELLIER. aussitôt qu’ils se rencontrent par leur pointe. D’autres cristaux, identiques aux premiers, attirés par le centre d’attraction double ainsi formé, juxtaposent de préférence une de leurs pointes à l’une ou à l’autre de celles qui se sont ainsi soudées, et, à force de coller ainsi leurs facettes pointues les unes contre les autres, les cristaux ne tardent pas à donner à la masse la forme bien connue en France sous le nom de haltère, eten Angleterre sous celui de dum-bell. Sans autre explication, on voit pourquoi deux haltères qui se rencontrent se mettent en croix et non bout à bout. Leur ensemble constitue alors un calcul qu’on pourrait croire formé de quatre gra- nulations primitivement distinctes, actuellement étroitement unies. Les nouveaux cristaux qui viennent insinuer une de leurs pointes contre toutes celles qui se sont antérieurement soudées, parce que c'est là que s’exerce toujours l’attraction maxima sans cesse croissante, comblent rapidement les vides; alors la masse cris- talline prend l’aspect d’une sphère hérissée de pointes : la mâcle est formée. À partir de ce moment, les cristaux prismatiques aw’elle attire, en intercalant toujours leur pointe entre celles de la mâcle, lui forment des couches concentriques. Les choses continue- raient à se passer ainsi, et la mâcle grandirait toujours, si deux ou un plus grand nombre de ces amas cristallins ne venaient à se toucher et, par suite, à se souder. Alors les cristaux qui se déposent les recouvrent tous ensemble de leurs couches paral- lèles et superposées. Quand on vient à couper par la suite le calcul, comme les cris- taux qui forment les mâcles ainsi que les couches parallèles qui les enveloppent sont transparents, on ne distingue les zones concentriques des premières et les couches superposées des secon- des que par des différences presque imperceptibles dans les teintes. Là où se trouvaient enchevêtrées les unes dans les autres les pointes des cristaux, la lumière mille fois brisée n’arrive à l'œil que partiellement, d’où une ligne relativement pâle ; là au contraire FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 133 où la lumière traverse le corps des cristaux, une réfraction moins fréquente, une dispersion moins intense permettent une clarté plus grande, et l’on voit un cercle lumineux. Dans cette hypo- thèse, tous les centres devraient être pâles, et ils ne le sont pas toujours ; mais cela tient à ce que la coupe passe au-dessus ou au- dessous du centre de la mâcle, ou encore à ce que la préparation n’est pas au point ; car, en faisant varier la distance del’objectif, on observe un renversement dans l’ordre des zones pâleset claires. On ne peut pas opposer à cette façon de concevoir la formation des mâcles, cet argument que, les cristaux soudés étant identiques, la lumière qui les traverse ne peut, en passant del'un à l’autre, éprouver ni réfractions ni réflexions multiples. Quoique formés par la même substance, il suffit que les axes des cristaux ne soient pas parallèles pour qu’il y ait réfraction à l’entrée de chacun d’eux ; or le mode de groupement des cristaux, disposés suivant les rayons d’une sphère, empêche les axes d’être parallèles. Et puisles calculs cristallins ne sont pas seulement formés de gros cristaux de phos- phate ammoniaco-magnésien, ils renferment également, tout au moins à l’état de traces, divers autres phosphates, phosphate de chaux, phosphate de peroxyde de fer, qui peuvent fort bien, à cause de leur isomorphisme, rester interposés entre les facettes des cristaux de phosphate triple, sans nuire à leur groupement mo- léculaire, mais qui alors par leur présence doivent forcément ame- ner des réflexions multiples de la lumière au passage d’un cristal dans un autre. On ne peut pas non plus, l’idée en peut paraître séduisante au premier abord, expliquer les zones claires et pâles par des diffé- rences dans l’hydratation des couches. Fil est vrai que les calculs cristallins perdent leur transparence et deviennent laiteux ense déshydratant, ce n’est pas une raison suffisante pour assimiler un calcul qui s'accroît à une cellule végétale qui s’épaissit. On ne voit pas à quelles époques de la vie du mollusque, à quelles pério- des d’activité vitale ou d’engourdissement pourraient bien corres- 134 AUGUSTIN LETELLIER. pondre ces couches qui tantôt seraient saturées d'humidité et tantôt en seraient dépourvues, alors que c’est toujours au sein du même liquide qu’elles se sont formées, liquide qui est si abondam- ment répandu chez ces êtres qu'ila été possible de dire que leur sang n'est que de l’eau de mer chargée de quelques principes alibiles. Quand on place dans la lumière polarisée les lames minces des calculs cristallins de la Cythérée (fig. 18), en croisant les Nicols, on observe que les gros cristaux, formés de phosphate ammoniaco- magnésien, s’illuminent des couleurs les plus vives, en même temps que la partie amorphe en apparence qui les unit, devenue noire, laisse apercevoir des taches nombreuses, les unes brillantes et co- lorées, les autres simplement lumineuses et pâles. Les premières proviennent de cristaux que l’on n’avait point remarqués dans la lumière transmise ordinaire ; les autres sont produits par les es- paces lumineux que laissent entre leurs bras les croix noires qui apparaissent partout où existent des mâcles. Le phénomène est semblable, par son aspect, sinon identique par ses causes, à celui que produit un amas de grains de fécule vu dans la lumière pola- risée. à On peut expliquer la production des croix par la double réfrac- tion que possède le phosphate ammoniaco-magnésien qui constitue les mâcles, et par ce que Biot appelle le phénomène de la polari- sation lamellaire, c’est-à-dire par l’action qu’exercent sur la lu- mière polarisée l’arrangement des parties, leur mode de juxtapo- sition et la forme de leurs surfaces. Il est clair que le phosphate triple, doué, au plus haut degré, de la double réfraction molécu- laire, ne perd point cette propriété parce qu’il est uni à des traces de phosphates isomorphes et qu’il la manifeste tout particulière- ment là où ses prismes microscopiques constituent des mâcles. Les lamelles qui les forment, quoique composées d’aiguilles invisibles à l'œil, impriment nécessairement des inégalités et des intermit- FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 435 tences à la lumière polarisée qui en traverse les plans interstitiels de jonction. Partout où ces amas de cristaux existent. on doit, par avance, s'attendre à voir les différences de dispersion et d’interfé- rence se traduire par des colorations et par des croix. L'expérience a vérifié les déductions de la théorie. Après avoir pensé qu il fallait attribuer les cercles concentriques à des mâcles formées suivant un processus dont la désagrégation des calculs en présence de l’acide acétique avait donné la clef, j’en ai conclu que des croix noires devraient apparaître à leur place si l’on observait la préparation dans la lumière polarisée ; alors, perfectionnant mon outillage, j'ai eu la satisfaction de faire des lames assez minces pour qu il fût possible d’y voir dans toute sa beauté le phénomène que j avais théoriquement prévu. Il me faut maintenant expliquer pourquoi les calculs amorphes qui semblent formés de couches distinctes et superposées, ne donnent pas lieu au phénomène de la polarisation lamellaire. Il est clair que cela ne tient pas à un manque de transparence dans les préparations, puisque, si mince qu'elles soient, on ne voit rien : c'est parce que, en réalité, les concrétions amorphes ne sont point formées de couches superposées, mais bien par un sédiment inorgauique partout identique à lui-même. Les zones, eneffet, nous l’avons vu, ne correspondent pas réellement à des dépôts de nature différente. Pareil milieu ne peut transmettre à l’œil qu’une clarté sensiblement la même en tous ses points, et c’est ce que l’on observe. Il est maintenant possible de résumer en quelques lignes les ca- ractères distinctifs des calculs amorphes et des calculs cristallins. On voit que les premiers : 1° Possèdent un pigmentnoir d’origine organique qui donne aux 136 AUGUSTIN LETELLIER. concrétions l’apparence trompeuse d’une masse formée de couches concentriques alternativement noires et brunes ; 2° Qu'ils renferment des cristaux, brillants et colorés dans la lu- mière polarisée, lesquels, s’ils sont peu nombreux, sont disposés suivant les rayons de la sphère, et, s’ils sont nombreux, en forme de coins ou de cônes dont la pointe est tournée vers le centre du calcul; 3° Qu'ils ne présentent jamais le phénomène de la polarisation lamellaire, c'est-à-dire qu’on n’y voit point une croix noire sur un fond blanc. Les calculs cristallins sont formés : 1° De gros cristaux qui se colorent vivement dans la lumière po- larisée ; 2° d’une pâte cristalline, exempte de pigment, laquelle est for- mée de mâcles microscopiques, et donne, par un phénomène de po- larisation lamellaire, naissance à des croix petites et multiples quand on croise les Nicols à 90°. Il va sans dire que les calculs cristallins cheminent à l’intérieur de l'Organe de Bojanus tout comme les calculs amorphes. Le même mode de destruction en arrière, de prolification des cel- lules en avant, du côté de la cavité périphérique, a pour effet de déplacer sans cesse les concrétions, et de les amener à la surface même de la Glande. Alors, selon qu'ils sont parvenus sur les flancs, ou dans la partie dorsale, ils disparaissent ou restent indéfiniment; de là aussi les différences que l’on observe dans la grosseur des cal- culs cristallins, tout comme dans celle des calculs amorphes, sui- vant l’endroit où on les voit. En général, c'est là une remarque qui a déjà été faite à propos des calculs amorphes, les calculs qu’on voit chez le même animal FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 137 sont tous cristallins et par conséquent transparents, ou tous opa- ques et alors amorphes, à peu d’exceptions près. J'ai fait encore observer que la présence de deux calculs, même placés côte à côte, l’un amorphe et l’autre cristallin, n’est point une preuve que ces calculs aient été produits à des époques différentes, époques pendant lesquelles les sécrétions auraient été également différentes ; mais que, comme on l’observe chez l’homme, ces sécré- tions ont pu très bien se former et s’accroître non seulement dans le même temps, mais encore au sein du même liquide. Il suffit que l’origine première de ces calculs ait été différente, car, une fois le nucléus formé, il a dû déterminer de préférence la précipitation à sa surface des molécules minérales qui lui étaient identiques. Après toutes ces observations, il ne me paraît pas utile de parler des anomalies que présentent certains calculs et des formes de pas- sage d’un état à un autre que les changements (problématiques) dans la sécrétion de la Glande, ou la soudure de concrétions de nature différente, ont pu produire. Sans importance au point de vue physi- que, tous ces détails n’apporteraient en effetaucun éclaircissement nouveau sur la manière dont se fait la sécrétion de l’Organe de Bojanus, autrement dit, sur la fonction urinaire des Mollusques acé- phales. Plusieurs méthodes permettent de connaître facilement la nature des substances, minérales ou non, qui constituent un calcul. J’ai employé de préférence celle que Robin a décrite dans son « Traité des Humeurs » ; maisje me suis éclairé de tous les autres procédés qu’indique la chimie. Les calculs de la Cythérée ne présentent aucune difficulté parti- culière à l'analyse ; les résultats en sont cependant souvent difté- rents, à cause de l’inconstance indiscutable de leur composition ou 138 AUGUSTIN LETELLIER. des proportions relatives des corps qui les constituent. Ce sont là, du reste, des choses que l’examen optique des lames minces a dû faire pressentir. J'ai d'ordinaire, quand je voulais faire une analyse, pris en bloc toutes les concrétions grosses et petites, cristallines et amorphes de plusieursanimaux à la fois, parce qu’une seule Cythérée en aurait renfermé trop peu. En opérant ainsi, j’ai nécessairement trouvé tous les corps qui entrent dans la composition des calculs ; mais quand j'ai voulu constater la différence qui existe entre les calculs cristallins et les calculs amorphes, j'ai choisi sous le microscope tous ceux qui me paraissaient de même nature, et j'en ai fait sépa- rément l’analyse. Des recherches ainsi faites m'ontmis à l’abri des surprises que réserve l’étude des concrétions de la Cythérée, quand on les prend au hasard. On peut en effet, suivant la prédominance plus ou moins prononcée du nombre des calculs cristallinssur celui des calculs amorphes, suivant que les concrétions ont été retirées de tel animal plutôt que de tel autre, observer, dansles résultats des analyses, des différences qui vont jusqu’à la constatation de la présence ou de la non-existence de certainscorps, comme de l’oxa- late de chaux, par exemple, ou de phosphates rares dans les calculs. Ces observations étant faites, je prendrai comme exemple une analyse ayant porté sur un très grand nombre de calculs pris au hasard et dont la poussière renferme par conséquent tous les corps qu'on peut trouver dans les concrétions dela Cythérée. Suivantla méthode indiquée, on partage la poussière des calculs en trois parts. La première, À, sert à voir si les calculs renferment des matières organiques. La seconde, B, est destinée à la détermination des principes qui sont solubles dans les acides. La troisième, C, sert à découvrir les corps que l’eau seule peut dissoudre sans les décomposer. FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 139 I. — Analyse de la portion A. Une certaine quantité de la poussière des calculs, bien triturée dans un mortier d’agate, est fortement chauffée dans une capsule de porcelaine ou de platine : elle ne perd presque rien de son poids, d’où l’on conclut que : Les calculs de la Cythérée renferment très peu de matières organiques. On chauffe alors un calcul au chalumeau ; il fond à peine à sa surface : Les calculs ne sont pas entièrement formés de phosphate ammo- niaco-magnésien. On cherche alors la nature de la substance organique disparue, et pour cela on chauffe un fragment de calcul en présence de l’acide azotique. On a un liquide jaune qui ne vire pas au rouge cramoisi par l’ammoniaque ou la potasse : Les calculs ne renferment pas d'acide urique. (La matière organique était formée par le pigment et par les débris de cellule ou de tissu conjonctif.) II. — Analyse de la portion B. La poussière des calculs est introduite dans une capsule de por- celaine; on y verse ensuite de l'acide chlorhydrique et on fait bouillir. Quelques bulles de gaz se dégagent à la température ordi- naire, mais il yen a très peu, et l’on ne peut pas dire qu’il y aït effervescence. Lorsque tout est dissous, il ne reste que de rares dé- tritus organiques, on filtre. La liqueur est légèrement colorée, on l’étend d’eau et : 1° On ajoute graduellement de l’ammoniaque, en s’arrêtant aussi- 140 AUGUSTIN LETELLIER. tôt que l'acide est saturé. Un abondant précipité se forme, il renferme l’oxalate de chaux et divers phosphates ; quant aux car- bonates que pouvait contenir la poussière, ils restent en dissolu- tion à l’état de chlorures. 2° On verse alors de l’acide acétique dans le liquide, le précipité disparaît, à l’exception d’un résidu composé de cristaux ayant la forme des enveloppes de lettres. Les calculs de la Cythérée renferment de l’oxalate de chaux. 3° On filtre pour se débarrasser de l’oxalate de chaux, et on ajoute un excès d’ammoniaque. Tous les phosphates se précipitent, on les recueille sur un filtre, et on cherche dans le liquide qui passe la chaux et la magnésie. On obtient la première sous la forme d’oxa- late de chaux ; la seconde, après l’élimination de la chaux, sous celle de phosphate ammoniaco-magnésien. Ainsi : Les calculs renferment des traces de chaux, c’est-à-dire de carbo- nate de chaux, et des traces de carbonate de magnésie. 4° On dissout alors le précipité formé par les phosphates dans l'acide acétique, et, ajoutant de l’oxalate d’ammoniaque, on a un précipité d’oxalate de chaux : donc Les calculs renferment du phosphate tribasique de chaux. 5° On filtre, et le liquide qui passe, additionné d'’ammoniaque, donne immédiatement un précipité de phosphate ammoniaco-ma- gnésien, et, à la longue, divers cristaux, parmi lesquels on reconnaît le phosphate acide de chaux, qui les constitue presque tous à lui seul, et, plusrarement, du phosphate neutre de soude, du phosphate acide de soude et du phosphate de magnésie. Mais ces derniers cris- taux nese voient point toutes les fois qu’on fait une analyse ; ils sont très rares et n’existent probablement que dans certains calculs. La solution des phosphates traitée par l'acide chlorhydrique donne avec le sulfocyanure de potassium une belle couleur rouge ; d’où cette conclusion : Les calculs renferment du phosphate de peroxyde de fer. La présence du phosphate ammoniaco-magnésien dans les calculs FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 141 se constate facilement de la manière suivante : on met la poussière dans un verre de montre, on ajoute une goutte de lessive de potasse, et on recouvre avec un autre verre au fond duquel on a collé une bande de papier rouge de tournesol. Soit aussitôt, soit à la longue, suivant les proportions, le papier vire du rouge au bleu. En résumé, les phosphates que l’on trouve dans les calculs de la Cythérée sont : | le phosphate tribasique de chaux, très abondants ! le phosphate ammoniaco-magnésien, \ peu abondants mais ( le phosphate acide de chaux, existent toujours ( le phosphate de peroxyde de fer, | le phosphate neutre de soude, très rares le phosphate acide de soude, le phosphate de magnésie. TL Analyse de la portion C. Quoique l’essai de la portion À ait montré que les calculs de la Cythérée ne renferment qu'une quantité infime de matières orga- niques, on soumet leur poussière finement pulvérisée à une longue ébullition dans l’eau distillée, et on filtre. Par refroidissement on n’obtient ni cristaux d’acide urique, ni traces d’un urate quel- conque. | | J'ai cherché si les calculs de la Cythérée renferment de l’urée, on en trouve quelquefois dans les concrétions de l’homme et des animaux, et Riche avait cru, sans en être certain, en trouver dans les calculs de la Pinne des Baléares. Je me suis servi, pour cette recher- che, de l'appareil du docteur Noël, que j'ai modifié dela manière suivante : j'ai mis la poussière des calculs là où se placent les deux centimètres cubes d'urine, et j'ai remp li d’une lessive de soude l’é- prouvette où plonge la cloche. Quand on fait le mélange, c'est à 142 AUGUSTIN LETELLIER. grand’peine qu’il se dégage quelques bulles de gaz. J’ai pensé que ces bulles étaient formées par de l’acide carbonique, et que dans tous les cas il n’y avait point d’urée dans les calculs que j'étudiais. Le fait capital mis en lumière par ces analyses est la découverte dans les concrétions de la Cythérée de l’oxalate de chaux, sub- stance non encore signalée chez les Mollusques, et de divers phos- phates sur l’identité desquels il ne peut y avoir de doutes. On remarquera, de plus, que les calculs de la prétendue glande coquillère de l’Organe de Bojanus de la Cythérée ne renferment que des traces de carbonate de chaux et de carbonate de magnésie. Il me reste à comparer, ainsi que je l'ai fait pour la Moule, les concrétions de l'Organe de Bojanus de la Cythérée avec les perles et avec la coquille du même mollusque. Les perles sontrares chez la Cythérée; celles que j'ai trouées, au nombre d’une vingtaine environ, étaient toutes placées à la suite les unes des autres dans la veine anastomotique qui, longeant la base du muscle postérieur, fait communiquer l’Organe de Bojanus et le sinus du muscle adducteur postérieur des valves avec la veine horizontale du manteau et la veine marginale. L’animal qui les a fournies était de grande taille ; arrivé aux limites de la vieillesse, il avait en partie résorbé une portion de son test. J'ai fait plusieurs coupes de ces perles ; celle que j'ai figurée pl. IIL, fig. 19, provenait de deux perles qui étaient intimement soudées. Je l’ai dessinée dans la lumière polarisée ; on voit qu’elle y présente le phénomène de la polarisation lamellaire. On en peut conclure immédiatement que les perles doivent leur accroissement à la superposition par couches concentriques du carbonate de chaux qui les constitue presque totalement, chaque couche étant d’ailleurs formée elle-même de cristaux très petits et invisibles, collés les uns contre les autres. her Ve Leg LR RE él ir ll _mitoiiimttes LL. , FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 143 Le noyau de ces deux perles n’est pas visible dans la lumière or- dinaire ; mais une autre perle que j'ai étudiée nous le montre assez semblable à celui de la perle de la Moule, et il est bien probable que sa composition est aussi la même. L'analyse de ces perles faite sur une quantité insuffisante de ma- tière a permis de reconnaître qu'elles sont presque entièrement formées de carbonate de chaux, avec une trace de carbonate de magnésie et de divers phosphates, parmi lesquels se trouvent cer- tainement le phosphate de peroxyde de fer, qui est décelé par le sulfocyanure de potassium, et le phosphate ammoniaco-magnésien, qui ramène au bleu, en présence de la potasse, le papier rouge de tournesol. J'ai fait une analyseattentive de la coquille de la Cythérée. Il est inutile d'entrer dans le détail de l’analyse, quine scrait qu’une ré- pétition de ce que nous savons déjà ; il suffit de dire que le test de ce mollusque est en grande partie formé de : carbonate de chaux, carbonate de magnésie, avec des traces de : phosphate de peroxyde de fer, phosphate de magnésie, phosphate ammoniaco-magnesien, phosphate tribasique de chaux. La quantité de ces divers phosphates que renferme une coquille de Cythérée est infinitésimale, principalement peut-être en ce qui regarde le dernier de ces corps. Il est indiscutable que la poussière du test de la Cythérée ren- ferme du phosphate triple, car en présence de la lessive de potasse, elle fait virer le papier rouge de tournesol au bleu. Mais je n’affirme point que la coquille renferme également du phosphate de magné- sie ordinaire, l'expérience ne prouvant rien ni pour ni contre. A44 AUGUSTIN LETELLIER. De la comparaison que l’on peut faire entre la composition chi- mique des calculs, des perles et de la coquille, il résulte que quatre corps leur sont communs. Ce sont : le carbonate de chaux, le carbonate de magnésie, le phosphale de peroxyde de fer, le phosphate ammoniaco-magnésien. Un seul corps est uniquement commun aux calculs et à la coquille, c’est le phosphate tribasique de chaux ; encore convient-il de faire des réserves, à cause de l’insuffisance de la matière analysée. Pour compléter cette étude des calculs de l’'Organe de Bojanus de la Cythérée, j'aurais voulu pouvoir ajouter à l'étude qui précède celle des sécrétions de la Glande ; maïs je n'ai pu qu'y constater l'absence : de l'acide urique, des urates, de l'acide hippurique, de la guanine, et des produits biliaires. CHAPITRE XII CONCLUSION. IL Y A UNE FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉ- PHALES. — LES PRODUITS EN SONT PRESQUE IDENTIQUES A CEUX DE LA MÊME FONCTION CHEZ L'HOMME ET CHEZ LES ANIMAUX VERTÉBRÉS SUPÉRIEURS. — CETTE FONCTION SEMBLE CARACTÉRISÉE, CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES, PAR LA PRODUCTION DURÉE ET L'ABSENCE D ACIDE URIQUE; CHEZ LES MOLLUSQUES GASTÉROPODES , PAR LA SÉCRÉTION D’ACIDE URIQUE ET L'ABSENCE D'URÉE. LES CORPS DE BOJANUS SONT LES REINS DES ACÉPHALES. — POURQUOI LES CALCOULS BOJANIENS N’EXISTENT QUE DANS LES PAROIS DU CANAL PÉRIPHÉRIQUE. La corrélation qui existe fatalement entre l’organisation et la fonction est cause que celle-ci a presque toujours servi à désigner et à classer les parties du corps des animaux, et cela encore par comparaison avec ce quise passe chez l’homme. On sait les incon- vénients, plus apparents que réels, qui en résultent déjà pour les vertébrés supérieurs, chez lesquels nous voyons la même fonction remplie successivement par des parties du corps qui n’ont entre elles ni homologie, ni communauté d’origine, maisseulement l’ana- logie qui résulte du service physiologique rendu. L’Anatomie com- parée, à cause de la simplicité qui en résulte, a tiré profit de ces désignations empruntéesaux fonctions supposées des parties qu’elle décrit; l’étude des fonctions esten effet sans importance pourelle qui ne cherche que les relations morphologiques des organes. Il n’en est pas de même pour la physiologie : l’abus des mêmes désignations appliquées à des parties semblablement placées, et cela chez des êtres aussi différents qu’un vertébré et un mollusque, est unesource continuelle d’ennuis, sinon d’erreurs. Là le nom ne fait rien à la ARCH, DE ZOOL. EXP. ET GÉN, — 2 SÉRIE, —7T, V bis, — supp. 1887. — 1er JMém. 10 156 AUGUSTIN LETELLIER. chose et souvent cache la vérité : c’est ainsi que le foie du Céphalo- pode est sa glande digestive. L’Organe de Bojanus des Mollusques acéphales n’a point échappé aux inconvénients qu’entraînent les dénominations fondées sur des fonctions supposées ou imparfaite- ment étudiées. Tour à tour Glande coquillère, Sac de la viscosité, Testicule, puis Rein, il en a porté les noms jusqu’à ce qu'enfin Lacaze- Duthiers lui ait donné celui qu'il a et qui ne préjuge rien. Telle était, bien du reste, l'intention de son auteur : tout en pu- bliant les résultats de l'analyse de Riche et en en faisant ressortir l’importance, Lacaze-Duthiers n’en faisait pas moins observer en effet que les Corps de Bojanus sont sur letrajet du sang qui, chargé des produits alimentaires, se rend à l'appareil respiratoire, qu'ils sont en conséquence dans la position d’un foie, et qu'on pourrait s'attendre à voir en eux un organe appelé à remplir la même, fonction physiologique. « C’est donc, écrivait-il, si c’est un rein un rein bien différent de celui des animaux supérieurs, car il est dans des conditions autres. » | Malgré ces réserves, dont la prudence n'échappera à personne, il a suffi que R. Owen ait trouvé de l’acide urique chez un mollus- que resté inconnu, que de Babo et Riche aient découvert le même corps, le premier dans les concrétions d’un Pectunculus pilosus, le second dans les granulations de quelques Lutraires, pour que les naturalistes. se soient accordés à regarder d’un commun accord l’'Organe de Bojanus des Mollusques acéphales comme un rein. On pouvait trouver les preuves insuffisantes et s'étonner que la pré- sence de quelques cristaux dans des produits pathologiques suffit à déterminer la fonction d’un organe. Il ne semble pas cependant que ces objections aient fait impression sur l’esprit des anatomistes, car si l’on en excepte Voit, qui du reste est un physiologiste, personne ne s’en est préoccupé ; et, depuis plus de vingt-cinq ans, aucun - travail n’a paru qui eût pour objet l’étude la sécrétion bojanienne des Mollusques acéphales. Il est vrai que ce genre de recherches a longtemps présenté des TT Not LATE ET RE LU FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 147 difficultés particulières ;qu’aujourd’huion a même encore beaucoup de peine à déterminer avec quelqueexactitude la nature des sécrétions des organes glandulaires, et par suite leur rôle physiologique. Mal- gré les perfectionnements apportés à l'outillage scientifique, malgré les travaux les plus nombreux et les plus patients, on ignore encore la fonction de plus d’une glande ; ilsuffit de citer le thymus. Quand nos connaissances physiologiques sont aussi bornées sur les organes mêmes de l’homme, il est naturel de penser que nous devons être loin de pouvoir dire avec certitude quelle est chez un invertébré la fonction d’une glande que nous connaissons à peine. Avant donc de déclarer que l’Organe de Bojanus des Mollusques acéphales est un rein, il aurait été prudent de chercher si ces animaux possèdent une fonction identique ou même analogue à la fonction urinaire des . vertébrés. Pour répondre à cette question, il eût suffi d’analyser avec soin les produits sécrétés ou excrétés par la Glande, la con- naissance de leur composition pouvant seule éclairer à ce sujet. Personne n’a fait ce travail : j'ai cru devoir l’entreprendre. J’ai donc cherché la nature des produits liquides et solides, normaux et pathologiques de la Glande de Bojanus ; j'ai fait une analyse aussi complète que possible des corps que je trouvais dans les cellules bo- janiennes dela Moule et dans les calculs de la Cythérée, et j'ai étendu mes recherches à plusieurs autres mollusques, afin de contrôler les résultats auxquels j'avais été conduit. Or ces résultats me per- mettent maintenant de dire qu’il y a une fonction urinaire chez les Mollusques acéphales, que les produits en sont presque identi- ques à ceux qu’on trouvedans l’urine des vertébrés, et qu’enfin cette fonction qui s’exerce au moyen de l'Organe de Bojanus fait de cette Glande le rein de ces animaux. Par l'étude que j'ai faite des modi- fications que subissent les cellules sécrétantes du Corps de Bojanus par l’exposé que j’ai donné du mode de formation et d'élimination probable des calculs de la Cythérée, j'ai soulevé un coin du voile qui nous cache encore la part qui existe entre la filtration propre à la Glande et le travail vital de ses cellules. 148 AUGUSTIN LETELLIER. Les Mollusques acéphales, si l’on en peut juger par la sécrétion bojanienne de la Moule commune et de quelques autres bivalves, possèdentune fonction urinaire. Par fonction urinaire, j'entends la fonction qui consiste dans l’expulsion au dehors, et par un or- gane spécial, d'un liquide extrait du sang, renfermant en même temps que l’excès d’eau introduite dans cette humeur, diverses sub- stances en général quaternaires qui ont fait autrefois partie de l’être etqui, après avoir concouru ainsi à l’exercice de sa vie propre, ontété versées dans le sang à l’état de résidus. Ainsi, pour montrer qu'il existe une fonction urinaire chez les mollusques, il faudrait prouver que : 1° Le liquide quisort par le pore bojanien contient l’eau en excès dans le sang. 2° La sécrétion bojanienne renferme les excreta non gazeux de la vie cellulaire. Il est malheureusement difficile de montrer que l’eau en excès dans le sang est éliminée par l’Organe de Bojanus. Il eût fallu pour cela étudier la sécrétion vraie de la Glande, et non une sécré- tion artificielle qui ne peut en aucune façon indiquer le rapport des poids de l’eau et des substances solides que contient la sécré- tion naturelle. Avant de se prononcer, il convient donc d’attendre que des recherches poursuivies sur des animaux de grande taille aient permis de faire l’analyse de la sécrétion elle-même. Enfinilest possible, sinon probable, que la question aura fait un pas décisif le jour où l’on saura exactement par quelle voie se fait l’introduc- tion de l’eau dans le sang. Sabatier admettait qu’elle se fait par le pied ; mais le Dr A. Fleischmanna conclu de ses recherches sur les Lamellibranches qu’il n'existe point de communication entre les glandes du pied et le système vaseulaire, et en particulier entre ces glandes et les Corps de Bojanus. Les mouvements vermiformes du pied de la Moule, dans l'expérience si curieuse de Sabatier, peu- vent du reste s’expliquer par les déplacements du sang à l’intérieur de cet organe, et les courants que l’on observe dans FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 149 l’eau sont dus aux mouvements des cils vibratiles qui le recouvrent. Il est probable que l’introduction de l’eau dans le sang se fait par l'intermédiaire des voies digestives et par imbibition. Dans tous les cas, nous savons que le sang, avant d'arriver aux branchies, traverse l’Organe de Bojanus ; là, des différences de pression doivent nécessairement produire, tout comme dans le rein d’un vertébré, la filtration de l’eau en excès. Mais cette eau n’est pas seule, pas plus que l’urine n'est de l’eau pure, avec elle sont entraînés les déchets de la vie cellulaire, et c’est précisément ce qui caractérise aussi la sécrétion urinaire. J’ai fait voir en effet que l’Organe de Bojanus, trituré en pré- sence de l’eau, lui abandonne un grand nombre de corps, parmi lesquels plusieurs sont évidemment des corps oxydes destinés à être éliminés. De ce nombre et en première ligne, se trouve l’urée que j'ai découverte chez l’Anodonta Cygnea et l'A. anatina, chez la Moule commune, le Cardium édule, le Cyclas corneus. Au même groupe de corps appartiennent la créatinine, la créatine, la xanthine l’hypoxanthine, etc. Il en est encore de même de l'acide urique et des urates découverts par R. Owen, de Babo et Riche. Je n’ai pas évidemment à refaire ici les théories qui servent à expliquer la formation de ces divers principes immédiats et à mon- trer comme quoi ce sont bien des excreta de la vie cellulaire, des produits de la combustion vitale. I] me suffit de constater que les physiologistes s’accordent à les regarder chez l’homme et chez les vertébrés supérieurs comme leséléments caractéristiques de l’urine de ces animaux, pour que je sois en droit, les trouvant dans l’Or- gane de Bojanus de la Woule, de l’Anodonte et du Curdium, de dire que cet organe est un rein, et que sa sécrétion est l’urine de ces mollusques, qu'enfin ils ont une fonction urinaire. Et comme il ne semble pas douteux que les mêmes phénomènes se produisent chez les autres mollusques, on pourra admettre qu’il existe une fonction urinaire chez les Acéphales, ce qui est la proposition que je m'étais efforcé d’établir. 150 AUGUSTIN LETELLIER. Les corps que l’on trouve normalement ou seulement dans les états pathologiques, dans l’urine humaine, sont bien connus. Pour la Moule, il n’a pas été possible de faire la part de ce qui appartient au protoplasma des cellules bojaniennes et à leur sécrétion propre- ment dite, puisqu'elle n’a point été analysée. Cependant il m’a paru intéressant d’énumérer tous ceux de ces corps qui existent dans l'urine humaine, normale ou pathologique, et que l’on trouve dans la Glande de Bojanus des Mollusques acéphales. Ce sont, en plus de traces de substances albuminoïdes, du chlorure de sodium, du chlorure de potassium, du carbonate de chaux, du carbonate de magnésie, du carbonate de potasse, du sulfate de soude, du sulfate de potasse, du phosphate neutre de soude, du phosphate acide de soude, du phosphate de magnésie, du phosphate ammoniaco-magnésien, du phosphate acide de chaux, du phosphate tribasique de chaux, du phosphate de peroxyde de fer, de l'oxalate de chaux, de l’urée, de la leucine, de la créatinine, de la créatine, de la xanthine ? de l’hypoxanthine ? de l’inosite ? de la tyrosine, de la taurine, FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 151 des corps gras, margarine, oléine stéarine, Enfin dans des cas morbides, de l’acide urique ou des urates. Si donc on en excepte quelques substances qui n’y sont qu’à l’état de traces, on peut dire que tous les corps qui existent dans l'urine humaine se retrouvent dans l’Organe de Bojanus des Mollusques acéphales. Un seul, l’acideurique, normal chez l’homme, ne se trouve chez ces animaux que dans des concrétions dont l’origine pathologique est évidente. Mais c’est là un fait du même ordre que celui qui résulte de la substitution partielle de l'acide kynurique, par exemple, ou de l’acide hippurique à l'acide urique, chez le chien ou le cheval. Une comparaison, assurément plus curieuse que celle que l’on peut faire de la sécrétion bojanienne de la Moule ou de l'urine de l’homme, c’est celle de la sécrétion de ce même animal et des autres Mollusques acéphales avec le liquide que l’on extrait de l’Organe de Bojanus des Mollusques gastéropodes. J’ai déjà dit qu’il est facile de constater la présence de l'acide urique chez l’AHélix aspersa : un petit nombre d'individus suffit, et même souvent un seul. Cette Hélice n’est pas du reste l’unique Grastéropode qui soit dans ce cas, il en est de même de l’Æ. poma- tia, de la Limnea stagnalis ou palustris, de la Physa acuta ou du Planorbis corneus. Mais si l’on cherche de l’urée,on n’en trouve pas. J'ai voulu voir eneffel si la sécrétion bojanienne de l’AHélix aspersa renferme de l’urée. J’ai traité les Glandes dissociées de cent cinquante de ces animaux comme celles de la Moule et du Cardium, puis j'ai soumis le liquide aïnsi préparé à l’action de l’hypobromite de soude. Il ne s’est pas dégagé une seule bulle de gaz : la liqueur ne renfermait pas d’urée. Que fallait-il conclure de ce résultat ? que tous les Gastéropodes sont dans ce cas ; ou que l'absence d’urée était due à ce que je m'étais adressé à un mollusque terrestre ? Alors j'ai préparé la sécrétion bojanienne de la Limnea stagnalis ; maïs pas plus que 152 AUGUSTIN LETELLIER. dans celle de l’hélice chagrinée je n’ai pu y trouver trace d’urée. Ces expériences sont évidemment insuffisantes ; ce n’est pas avec les résultats de deux analyses que l’on caractérise la sécrétion d’une glande spéciale d’un groupe d’animaux aussi important que celui des Mollusques gastéropodes. Mais elles autorisent à se demander si des recherches ultérieures ne seraient point appelées à montrer que si : 1° La sécrétion de l’Organe de Bojanus est caractérisée norma- lement chez les Mollusque acéphales par la présence de l’urée et l’absence d’acide urique et des urates. 2° Chez les Mollusques gastéropodes, c'estau contraire par la présence normale de l'acide urique ou de ses sels et l’absence d'urée qu’elle est caractérisée. Je me propose, du reste, de reprendre ces recherches : je désire voir si l'absence d’urée est générale dans la sécrétion de l’Organe de Bojanus de ces Mollusques, si elle est aussi complète que j'ai cru l’observer chez l’AHélix et chez la Limnée ; enfin si dans les cas pathologiquesla Glande de Bojanusdes Mollusques gastéropodes ne sécréterait point de l’urée, comme le Pectunculus pilosus sécrète de l'acide urique. Pour le moment, ce que je tenais à montrer me paraît assez bien établi pour qu’il soit difficile de nier l’existence d’une fonction uri- naire chez les Acéphales. Ilne me reste plus qu'àchercher comment fonctionne l'appareil éliminateur, c’est-à-dire l'Organede Bojanus. La rein de la Moule ne renferme ni glomérules, ni système- porte, mais par l’étendue de la surface sécrétante, par la compli- cation du réseau capillaire qui la parcourt, elle supplée à l'absence des premiers et aux facilités que présente le second à la filtration urinaire. On sait en effet que la Glande de Bojanus est formée d’une couche, le plus souvent unique, de cellules sécrétantes qui y circonscrivent deux cavités principales : le canal périphérique et la cavité centrale qui est le couloir oblique du péricarde de la Moule. On sait également que ces cavités présentent mille replis, mille MELLE ? Et LL." FONCTION URINAIRE CHEZ LES MOLLUSQUES ACÉPHALES. 153 contournements qui en font des canaux très compliqués, dont la lumière, souvent difficile à distinguer, paraît obstruée par des prolongements, par des pénétrations du tissu lacunaire sous- Jacent, lequel est toujours reconvert d’une couche de tissu boja- nien. De cette disposition résulte une énorme surface glandulaire, et par suite un ensemble on ne peut plus favorable à la filtration sanguine, car les cellules bojaniennes reposent partout, soit sur la paroi même des veines et des capillaires, soit sur la lame mince du tissu lacunaire que le sang pénètre largement. Il est vrai que la situation des Corps de Bojanus est très différente de celle du rein des vertébrés, puisque, comme le remarque Lacaze-Duthiers, ils sont dans la position d'un foie. Mais ce n’est pas là un argument qui soit probant pour la fonction physiologique, puisque celle-ci ne dépend pas de l'organe et de sa morphologie, mais des produits qu’ellesécrète. Oronnetrouve pas de produitsbiliaires dans l’Organe de Bojanus, on n’y rencontre pas non plus de sucre, sinon peut-être des traces commeonen peuttrouver dans bien d’autres organes qui ne remplissent pas le rôle d’un foie, mais de l’urée qui est le corps caractéristique de la sécrétion urinaire. Le sang qui traverse la Glande de Bojanus est du sang veineux, chargé des principes ali- biles ; mais le fait n’est pas particulier aux Mollusques acéphales, si l’on admet, contrairement à l’opinion de Cuvier, que chez les pois- sons et les reptiles il arrive dans le rein du sang noiïr provenant des parties postérieures du corps. Et d’ailleurs on peut dire qu’une par- tie du sang qui traverse l'Organe de Bojanus est du sang artériel. Sabatier regarde en effet le sang qui provient des palpes et de la par- tie superficielle antérieure du corps comme se rendant directement au cœur, sans passer par les branchies ; or ce sang qui à traversé un réseau de capillaires très compliqué est vraisemblablement oxygéné. Comment maintenant se fait la sécrétion ? Est-elle produite par la fonte des cellules bojaniennes, ou résulte-t-elle d’une transsudation, comme le pense Ranvier pour ce qui est de la sécrétion urinaire de l’homme, et comme semblent le rendre probable les expériences de 154 AUGUSTIN LETELLIER. MM. Arloing et Renaut ? Dans l’état actuel, on ne peut se pronon- cer. Quand on fait une coupe de l’Organe, on distingue de nom- breuses cellules incolores qui sont dans les cavités de la Glande ; mais il est impossible de dire qu’elles n’ont pointété détachées par le rasoir, le tissu bojanien étant très facile à dissocier, et d’autre part on ne voit point de croissants de Giannuzi. F’il était encore possible d'étudier la sécrétion obtenue par une fistule, on pourrait chercher sielle renferme des éléments figurés, mais nous savons que cela est impossible à cause de la petitesse des animaux sur lesquels les recherches qui précèdent ont été faites. Un dernier point reste encore à élucider. Pourquoi ne trouve- t-on point de calculs dans les paroiïs de la cavité centrale de l’Or- gane de Bojanus des Mollusques acéphales, tandis qu’on les voit nombreux dans celles du canal périphérique ? Il ne semble pas que ce fait puisse dépendre de ce que les calculs quis’y seraient formés sont entraînés dans lecouloir périphérique, car on devrait les trou- ver dans letissu à l’état de formation. Aussi est-on en droit de se demander si les cellules de la cavité centrale ne sont pas différen- tes dé celles que l’on trouve dans les autres parties de l’Organe. Plusieurs anatomistes ont répondu par l’affirmative. Chez la Cythérée, on remarque qu’elles sont plus fortement granuleuses que celles du canal périphérique; on n’y voit point, ou du moins le cas en est rare, ces vacuoles claires qui sont le caractère particulier, commun et caractéristique de celles-ci ; enfin elles ont ur cil vibra- tile, les autres n’en ont pas. Pour la Moule, Sabatïer, qui a fait l'ob- servation de différences analogues, en a été si frappé qu’il s’est de- mandé si, en concourant à l’exercice de la fonction urinaire, elles ne sont point chargées d’éliminer des produits différents de ceux qu’excrètent les cellules bojaniennes du reste de Organe. C’est là une manière de voir quin’a point été justifiée par l'expérience etque je n’ai pu contrôler personnellement, ayant toujours fait porter mes analyses sur l’ensembie de la Glande. EXPLICATION DES PLANCHES PLANCHE I. FIG. 4. — BUTYRATE DE BARYTE préparé avec l'extrait éthéré de l’Or- œane de Bojanus de la Moule. FIG. 2. — VALERIANATE DE BARYTE préparé avec le même extrait. F1G. 3. — CRÉATININE cristallisée dans l'extrait alcoolique de l’Or- gœane de Bojanus de la Moule avec cristaux de MARGARINE et de STÉARINE. g. 300 diamètres environ. F1G. 4. — CHLORURE DE SODIUM. Formes remarquables et semblables à celles du phosphate triple observées dans divers extraits de l’Organe de Bojanus de la Moule. F1G. . — ACIDE STÉARIQUE cristallisé dans l’extrait alcoolique de la Moule. g. 300 diamètres. F1G. 6. — STÉARINE de l'extrait alcoolique de la Moule. g. 300 diamètres. F1G. 7. — MARGARINE. Cristaux observés dans l'extrait alcoolique de la Moule. g. 300 diamètres. F1G. 8. — TYROSINE préparée avec l'extrait aqueux de l’Organe de Bojanus de la Moule. g. 300 diamètres. F1@. 9. — TAURINE extraite de la Moule commune. g. 130 diamètres. PLANCHE II. Fi@: 10. — CRÉATININE de l'extrait alcoolique de l’Organe de Boja- nus de la Moule. g. 300 diamètres. F1G. 11. — Cazcuz de l’Organe de Bojanus de la Moule. Coupe vue dans la lumière ordinaire. g. 130 diamètres. F1G. 12. — PERLE de la Moule. Coupe vue dans la lumière polarisée, les nicols étant croisés. g. 130 diamètres. Fi@. 13. — Coupe demi-schématique de la partie périphérique de l’Organe de Bojanus de la Cythérée. 156 EXPLICATION DES PLANCHES. a. Cellules épithéliales de la surface externe de la glande. b. Tissu conjonctif superficiel. b’. Faisceaux de fibres conjonctives. c. Acinus. d. Cellules épithéliales de la cavité périphérique. e. Calcul opaque. f. Débris de calcul transparent. F1G. 14. — Coupe demi-schématique de la partie centrale de l’Or- gane de Bojanus de la Cythérée. a. Cellules épithéliales du côté de la cavité périphérique. b. Tissu conjonctif. c. Acinus. d, Cellules épithéliales à long cil vibratile de la cavité cen- trale. FIG. 15. — CALCUL AMORPHE de l’Organe de Bojanus de la Cythérée. FIG. 16. — CALCUL AMORPHE. Coupe vue dans la lumière ordinaire. D PLANCHE III. 7 Fic. 15 bis. — CALCUL CRISTALLIN de l’Organe de Bojanus de la Cythérée. On aperçoit par transparence des cellules bojaniennes incluses. F1G. 16 bis. — CALCUL AMORPHE de la Cythérée. Coupe vue dans la lumière polarisée, les nicols étant croisés, afin de montrer la disposition des cristaux de phosphate ammoniaco- magnésien. FIG. 17. — CALCUL CRISTALLIN de la Cythérée. Coupe vue dans la lumière ordinaire. p. Phosphate ammoniaco-magnésien. l. Limites des calculs primitifs. m. Mâcles quiapparaissent sous la forme de cercles plus régu- liers que sur le dessin. l’. lacunes. FIG. 18. — CALCUL GRISTALLIN vu dans la lumière polarisée, les nicols étant croisés. Cette coupe est la même que la précédente; elle montre quelques croix blanches là où existent des mâcles. F1G. 19. — PERLES du manteau de la Cythérée. Coupe vue dans la lumière polarisée. F1G. 20. — CALCUL CRISTALLIN de la Cythérée. Coupe vue dans la lumière polarisée : on y distingue facilement les mâcles. TABLE DES MATIÈRES CHAPITRE I. Résumé des recherches qui ont été faites à différentes époques afin de connaître la physiologie de l’Organe de Bojanus des Mollusques acé- pales. — Causes de l’insuccès de ces recherches. . CHAPITRE II. Raisons qui ont déterminé le choix de la Moule pour sujet d'étude. — Ordre suivi dans ces recherches. — Description sommaire de l’Organe de Bojanus de la Moule. —- Voies que suivent les produits solides ou liquides sécrétés ou excrétés par la glande. — La sécrétion bojanienne de la Moule est neutre aux réactifs colorés et renferme des matières albu- D nn en nr ve CHAPITRE III. Les substances albuminoïdes que renferme l'extrait brut de l’Organe de Bojanus dela Moule sont : de la serine, une albumine et une fibrine propres à la Moule, enfin un albuminate à base indéterminée plus ou moins analogue à la caséine. — Il y a de la mucine. CHAPITRE IV. L'extrait éthéré de l’'Organe de Bojanus de la Moule renferme de la stéarine, de la margarine, de l’oléine, de la lécithine, de l'acide valé- raiqueetde l'acide butyrique. 240 Ne Ne SON, CHAPITRE V. L'extrait alcooliquedel’Organe de Bojanus de la Moule renferme : du chlorure de sodium, de l’acide stéarique libre, de la stéarine, de la margarine, de la créatine, de la créatinine et enfin une graisse spéciale à DL MONO TR a PP RE OR RE PRE RN CHAPITRE VI. L'’extrait aqueux de l’Organe de Bojanus de la Moule renferme de la tyrosine et de la leucine, — On ne trouve dansla Glande de Bojanus ni 15 [Ne] ©3 39 44 158 TABLE DES MATIÈRES. acide urique, ni urates, ni acide hippurique, ni guanine, ni produits biliaires, mais on y trouve de l’urée et de la taurine. — Dosage de l’urée de la Moule. . CHAPITRE VII. Calculs bojaniens de la Moule. — Leurs propriétés physiques, leur composition. — Leur mode de croissance. — Leur élimination. — Perles de la Moule. — Composition de la coquille de la Moule. — Comparaison des calculs, des perles et de la coquille au point de vue de la com- position chimique, CHAPITRE VIII. Analyse des cendres. — Corps que l’on trouve dans l’Organe de Bojanus de la Moule. . L1 CHAPITRE IX On ne trouve pas chez les Mollusques acéphales, dans les conditions normales, d'acide urique, d’urates, d’acide hippurique, de guanine, de produits biliaires, mais on y rencontre de la taurine, une graisse soluble dans l’eau (Anodonta et Cardiam édule), de la Créatinine (cardium édule) et de l’urée (Anodonta cygnea, Anatina, Cardium édule, et Cyclas cor- neus). CHAPITRE X. Description sommaire de l’Organe de Bojanus dela Cythérée, — Dis- position, nombre, grosseur, densité des calculs. — Division des calculs en deux espèces, calculs amorphes et calculs transparents. — Origine et développement des calculs amorphes. — Pourquoi les calculs situés sous le manteau sont plus gros que les calculs placés sur les côtés de la Glande. CHAPITRE XI. * : Calculs cristallins. — Leur origine, — explicatiôn des phénomènes optiques que présentent leurs lames minces. — Caractères distinctifs des calculs amorphes et des calculs cristallins. — Composition chimique des calculs. — Elle varie d’un calcul à un autre. — Perles de la Cythérée. — Comparaison de la composition chimique des perles et de la coquille avec celle des calculs de l’Organe de Bojanus. 59 73 85 95 107 . 126 TABLE DES MATIÈRES. 159 CHAPITRE XII. Conclusion. — Ti y a une fonction urinaire chez les Mollusques acéphales. — Les produits en sont presque identiques à ceux de la même fonction chez l’homme et chez les animaux vertébrés. — Cette fonction semble caractérisée : chez les Mollusques acéphales, par la production d’urée et l’absence d’acide urique ; chez les Mollusques gastéropodes, par la sécrétion d’acide urique et l'absence d'’urée. — Les corps de Bojanus sont les reins des Acéphales. — Pourquoi les calculs bojaniens n’existent que dans les parois du canal périphérique, . , . 145 dei : Pa Au C2 (0 Wen LUN ET p 4 ed' plis 2° nr y { r w +: ‘ TT Lie MIT ar PLAT. TRISTE DE: 0 LU : F ‘ Fi “ "h : La! #34 LH : * LI CORP ES ‘ É ‘ ‘ à À $ % | L » [ss ‘ e Li Le “+ a | et VUE { [' à à i ‘1 t h F } °N . t = \ 4" r É à s EN è Du A L Ù D w LL 3 ne in, > { { } : : Sat 4 le . d'e E tE gr û 1 FAP tu * , LAN v mo x AE er Sn + JE " L] n A qu v M wri l'ra Li À us LA & . re MN Ve \ Un : ARS + & 4 T4 1e. PL PAR NT OT" _S rend: "FT L ET re URI A * ‘ # à 5 4 # F tr k FY . n CAE r n , dE or Jet * : CL A L 3 MAFTE ls RSEO ON! EL UE: à + 1 Fr NL L rfi N ve ‘{ VAE 22 NY Ce L'OfT 4: , A x: vw Ste : Cle ? ie n LA M. ; À PP , WA | à CET OT # 7 M "AL CRU" MS de ON PRET ORS GRR Le û JON An pes ONTAMLNIET SRE ., W” à LAS ATEN 4 Den A ' br PAL PI Z. ? 722 Ë S pa | : Val: -x AU VAUT N CONTRIBUTION A L'ÉTUDÉ ANA TOMIOUE ASTÉRTOUES PAR L. CUENOT LICE\ CIÉ ÈS SCIENCES NATURELLES DE LA FACULTÉ DE PARIS. INTRODUCTION Les Astérides ont déjà été l’objet de nombreux travaux, tant en France qu'en Angleterre et en Allemagne ; pourtant il n’y a pas un des points de leur organisation qui ne soulève des doutes; le système nerveux, les appareilsambulacraire et vasculaire, les orga- nes génitaux sont surtout l’objet des discussions les plus ardentes. Tous les travaux qui ont été publiés manquent absolument de géné- ralité, ne s’adressant guère qu’à une ou deux espèces ; de plus, leurs auteurs ont employé exclusivement, soit les dissections et les injections, soit les coupes ; or, il n’est peut-être pas d'animaux chez lesquels l’emploi successif de ces deux procédés soit plus néces- saire que chez les Echinodermes. Comme le dit avec raison M. de Lacaze-Duthiers, on doit explorer d’abord par l’anatomie fine et les injections, puis vérifier les résultats obtenus au moyen des coupes et des diverses méthodes histologiques. J’ai cherché à faire ce travail dans des conditions toutes autres que celles des études précédentes ; je n’ai admis une disposition comme vraie que lors- ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN, — 2€ SÉRIE, — T. V bis, — supp. 1887. — 2e Mem. 1 2 L. CUÉNOT. que l’anatomie, les coupes et les dilacérations se montraient d'accord ; de plus, j'ai pu étudier dix-huit espèces appartenant à douze genres différents, tant de l’Océan que de la Méditerranée et de la mer Rouge, ce qui donne une généralité suffisante à mes résultats. Il est habituel, au commencement d’un travail, de faire l’his- torique de la question ; j’ai préféré, au fur et à mesure, citer les opinions des divers auteurs ; cela m’évite des redites continuelles etune fastidieuse énumération. Ce Mémoire a été fait en entier dans les laboratoires de zoolo- gie expérimentale de M. de Lacaze-Duthiers ; je l’ai commencé à la Sorbonne, je l’ai poursuivi et terminé dans deux séjours au bord de la mer ; j'ai pu ainsi étudier les Astérides de l'Océan à Roscoff et ceux de la Méditerranée à Banyuls. Je dois remercier ici mon vénéré maître d’avoir bien voulu m’admettre dans ses laboratoires, où l’on trouve une si large hospitalité, et de m'avoir aidé, par ses excellents conseils, à mener mon étude à bonne fin; qu’il reçoive l'expression de ma vive reconnaissance. Je dois remercier également M. le D' Faurot, qui m'a confié les Astérides qu'il a rapportés de sa mission dans la mer Rouge, M. Ed. Fournier et plusieurs de mes amis, qui m'ont aidé da diverses façons. Orientation. Dans mes descriptions, je placerai toujours l’Astérie suivant la méthode adoptée par M. de Lacaze-Duthiers , la bouche en haut, et le pôle aboral en bas, de telle sorte que l’axe ver- tical de l’Astérie, comparable au grand axe d’une Holothurie, va du milieu de la bouche au centre de la face opposée. La face sur laquelle se meui l'animal, appelée généralement face ventrale, sera la face supérieure; la face dorsale des auteurs sera la face inférieure : elle correspond chez l'Oursin régulier au périprocte avec ses dix CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 3 plaques calcaires. J’ai ainsi placé toutes les coupes de bras, de péri- stome, etc., en sens inverse de mes prédécesseurs ; pour les comparer, il suffira de les retourner. Les coupes de madréporite sont placées comme on à l'habitude de le faire ; cela n’a pas d’ailleurs grande im- portance morphologique, car la plaque madréporique ou les pores qui la représentent est très variable en position chez les divers Echi- nodermes. Dans leur forme extérieure, les Astérides ne présentent jamais de symétrie bi-latérale permettant de leur fixer un plan antéro- postérieur, comme pour un Spatangue, par exemple. Agassiz, Lôven et Ludwig ont émis trois théories différentes à ce sujet ; celle de Lôven me paraît la seule vraie; mais comme elle ne peut s’appliquer qu'aux Astéries à 5 bras, des études complémentaires me parais- sent indispensables. D'ailleurs, dans un travail anatomique, la fixa- tion du plan antéro-postérieur n'a pas grande utilité. Tissus conjonctif et musculaire. . L LA L 9 ° $ e . , Il est difficile de décrire l’histologie des différents organes sans avoir des notions précises sur le tissu conjonctif. Je vais donc en faire une étude complète au point de vue histologique. Quand on pratique des coupes sur de très jeunes Astéries ou Ophiures, on voit que les tissus non épithéliaux sont presque exclu- sivement cellulaires; ils sont formés de cellules avec un gros noyau, contenant un nucléole très réfringent; le protoplasma est très granuleux. De ces cellules vont dériver la plupart des tissus con- jonctifs. Cellules conjonctives ou embryonnaires.— Un grand nombre de ces cellules originellesne se transforment pas ; elles restent ou séparées, ou agglomérées, parfois en grande quantité ; ces amas plus ou moins sphériques ont jusqu’à 24 et 45 u de diamètre. On en trouve beau- coup dans le tégument d’Asferias glacialis et d’Asterina giblosa, k L. CUÉNOT. dans la couche conjonctive des ambulacres, ete. ( voir pl. L fig. 12, f, et pl. II, fig. 2 ). | M. Hamann a interprété ces amas cellulaires d’une toute autre façon ; il en fait le revêtement épithélial d’un système lacunaire particulier développé dans la paroi du corps ; j'y reviendrai à pro- pos de la circulation. Un grand nombre de ces cellules restent isolées ; on les voit en abondance dans toutes les coupes de téguments ; souvent elles res- tent sphériques, avec leur noyau placé latéralement (pl. II, fig. 2) ; souventaussiellesémettentdesexpansions plus ou moins nombreuses, formées de protoplasma très granuleux (pl. II, fig. 3), qui peuvent s’'anastomoser. Sous cette forme, elles représentent bien la cellule conjonctive étoilée, si développée chez certains animaux, les Mol- lusques, par exemple (Flemming). Chez les jeunes Astéries qu'il a étudiées presque exclusivement, M. Hamann a bien vu ces cellules qu'il a figurées avec assez d’exactitude. Jusqu ici la cellule ne se transforme guère ; on la recounaît très facilement. Le deuxième type conjonctif est fibrillaire ; ce sont des fibres parfois très longues, assez minces, homogènes, se colorant fortement par le carmin ; elles présentent, logé dans une petite échancrure de la fibre, un beau noyau arrondi, nucléolé, entouré de quelques granules protoplasmiques (pl. II, fig. 4) : on reconnaît facilement la cellule embryonnaire de tout à l'heure. En général, ces fibres sont feutrées assez lâchement ; on les trouve dans tous les organes qui éprouvent de grands changements de forme (ambu- lacres, vésiculesambulacraires, branchieslymphatiques, etc. Souvent elles sont contournées en spirale, lorsqu'on a fixé par les réactifs une portion d’organe contracté (pl. IL fig. 5). M. Hamann a dé- crit le premier ces fibres d’une facon exacte. Je pense qu’on peut les comparer physiologiquement aux fibrilles élastiques des animaux supérieurs. On peut reconnaître une dérivation très nette de la cellule em- bryonnairequia servi de pointde départ ; le troisième type conjonctif CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. en est très éloigné. Ce sont des fibrilles très fines, d’une grande longueur,se coloranten rose vif par le picrocarmin ; elles portentdes noyaux, petits et fusiformes, dont je n’ai pu voir le nucléole (pl. II, fig. 6; pl. I, fig. 1 et 2, f) ;on les trouve dansles organes quidoivent offrir une grande résistance, dans le mésentère, le pédoncule fibreux des pédicellaires croisés du genre Asterias. Cette forme de fibrilles conjonctives a souvent été prise pour desfibres musculaires (Hera- path, Perrier); elle s’en distingue très nettement par tous ses ca- ractères, sa coloration par les réactifs, son mode d'insertion, etc. Enfin la dernière forme de tissu conjonctif et la plus fréquente est la substance fondamentale, feutrage fibrillaire très compact ; elle est très élastique, parfaitement homogène à l'œil nu ; lors- qu'elle a été durcie par les différents alcools, elle devient d’une extrême dureté, et c’est un grand obstacle pour les coupes d’une cer- taine dimension. Cette substance fibrillaire se colore très inégale- ment par lecarmin ; par l’ébullition, elle se transforme d’aborden une matière brunâtre, qui a l’aspect et la consistance de la gomme élastique, puis devient friable, gélatineuse, sans arriver à se dis- soudre dans l’eau, ce qui la distingue de la gélatine et de la chon- drine. | Sur des coupes très minces, on voit par places de petits noyaux ovalaires répandus inégalement (pl. IL, fig. 7). Sur le vivant ou sur les coupes non durcies par l’alcool, cette substance apparaît comme un feutrage très serré de fibrilles très fines réunies par pa- quets. Enfin elle peut contenir beaucoup de cellules embryonnai- res (Asterina gibbosa). Quand l'animal vient à s’affaiblir, ce tissu meurt le premier et se décompose en fibrilles nacrées, que connais- sent bien tous ceux qui ont fait vivre dans les aquariums des As- téries ou des Holothuries. On trouve cette substance fibrillaire dans tous les organes des Astérides ; le tégument de la Culcite en est formé entièrement, sur une épaisseur de 15 à 20°", ce qui ex- plique sa grande élasticité. Trame calcaire — Le tissu calcaire a touiours été fort mal décrit ; 6 L. CUÉNOT, h il se compose de substance fondamentale avec de nombreuses cellules embryonnaires. La substance fondamentale forme des aréoles plus ou moins ser- rées, mais qui ne sontjamais disposées régulièrement, comme dans les piquants d'Oursin ; sur ces espèces de mailles, et surtout aux carrefours,se voient de nombreuses cellulesembryonnaires ; souvent ces dernières serelient les unes aux autres, et on ne voit alors que des tractus protoplasmiques suivant le trajet du substratum conjonctif avec beaucoup de noyaux dans les points de rencontre (pl. II, fig. 8). Le calcaire estabsolument localisé à la substance fondamen- tale fibreuse ; les cellules embryonnaires ne prennent aucune part à sa formation ; elles sont momifiées, pour ainsi dire, à l’intérieur de la couche minérale. On voit que le tissu conjonctif se présente sous des apparences fort diverses, ce qui explique les divergences d’opinion sur sa cons- titution Fibre musculaire. — Comme terme de comparaison, je vais décrire la fibre musculaire, dont les caractères ont été reconnus chez les Astéries etles Holothuries par MM. Hamann et Jourdan. Elle est grosse et fort longue, souvent bifurquée, entièrement lisse et homogène, ne présentant aucune trace de striation ni dans un sens ni dans l’autre ; elle se colore en rose pâle par le carmin, mais sur les pièces fixées à l’acide picrique, elle présente une teinte jaune d’or, qui la fait facilement distinguer du tissu con- jonctif, toujours vivement coloré. Le noyau, logé dans une échan- crure de la fibre, est gros, très net, avec un nucléole ; quelques granulations de protoplasma relient le noyau à la fibre (pl. II, fig. 10). On voit que la fibre musculaire présente des caractères très tranchés, qui ne permettent pas de la confondre avec un type con- jonctif fibrillaire. Les fibres musculaires ne sont jamais en commu- nication avec les cellulesde l’ectoderme, comme le prétend M. Hamann; elles résultent de la transformation directe d’une CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 7 cellule embryonnaire, qui se munit d’une fibre dont l’allongement est considérable. Elles présentent les mêmes propriétés d’irritabi- lité que celles des animaux supérieurs ; les agents physiques, piqü- res, acides, etc., les font contracter. Si l’on touche légèrement avec une aiguille un organe interne tel qu'une vésicule de Poli ou une vésicule ambulacraire, au point de contact les fibres musculaires annulaires se contractent assez fortement pour étrangler presque la lumière de l’organe. Partout où il y a des muscles (sinus sanguin axial, cæcums stomacaux, mésentère, etc...), on peut les faire contracter par une simple piqûre ; cette observation permet de comprendre ce qui a induit en erreur Tiedemann et Hoffmann au sujet des contractions du cœur (gl. ovoïde); ils ont pris le mouvement des fibres mésentériques pour une véritable systole cardiaque. Corps jaunes énigmatiques. — Principalement dans les prépa- rations de glande ovoïde, au milien des cellules normales, on trouve des corpuscules arrondis, finement granuleux, de 7 à 10 y ; dans les préparations à l’acide osmique, ils sont colorés en jaune verdâtre, rappelant un peu la teiute de la chlorophylle, et paraissent entourés d’une membrane transparente ; dans les coupes colorées au picrocarmin, ils présentent une teinte d’un jaune vif : je n’ai pas vu de noyau (pl. VIII, fig. 8, 2). Je les ai trouvés en assez grand nombre dans la glande ovoïde et ses prolongements. M. Hamann signale des corpuscules identiques (Kôrnerzellen) dans une coupe de l’intestin de la Cucumaria Planci (19, pag. 151). Ces formations ne me paraissent pas appartenir en propre à l'animal ; ce sont peut-être des cellules végétales (Zooxanthelles, Zoochlorelles). Téguments. Les téguments des Astéries présentent des aspects tout à fait différents suivant les espèces. D’épaisseur extrêmement 8 L. CUÉNOT. variable, dont les deux termes extrêmes sont la Culcite et le Palmipes, incrustés de calcaire formant des plaques diverse- ment arrangées, ils portent des appendices qu’on peut répartir dans trois catégories : les piquants, les pédicellaires et les branchies lymphatiques. Les piquants présentent des dispositions très varia- bles dont on tire de bons caractères pour la détermination; les pédicellaires, petits organes de préhension, sont considérés comme caractéristiques pour chaque espèce, mais un grand nombre d’As- téries en sont dépourvues ; enfin les branchies lymphatiques, orga- nes de respiration, existent dans tout le groupe et présentent une grande conformité de structure. Le tégument est toujours composé de trois couches : une interne formée par l’épithélium de la cavité générale, une moyenne con- jonctive, une externe formée d'un épithélium à cellules très hau- tes. C’est dans la couche moyenne et dans sa partie la plus externe que se forment les plaques calcaires du test, comme chez les Holothuries. L’épithélium péritonéal est formé de cellules plates, qui présen- tent sur les coupes un noyau en saillie ; elles se laissent facilement imprégner au nitrate d'argent, avec certaines précautions toute- fois pour enlever le chlorure d'argent qui se forme ; on a alors une mosaïque de cellules polygonales plus ou moins serrées sui- vant les endroits que l’on a imprégnés, qui rappelle tout à fait l'épithélium péritonéal des Vertébrés ou des Annélides (pl. II, fig. 9). Le noyau est gros, irrégulier, nucléolé. Ces cellules plates revêtent tous les diverticules de la cavité générale, tous les orga- nes internes, quels qu'ils soient. L’épithélium externe est formé de très hautes cellules, allongées, recouvertes d’une épaisse cuticule, et munies de cils vibratiles. Ces cellules sont réduites à un mince filament, qui d’une part s’at- tache au tissu conjonctif sous-jacent, de l’autre s’épate pour sup- porter le plateau cuticulaire ; un noyau sphérique ou ovalaire entouré d’une petite quantité de protoplasma fait saillie à la sur- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 9 face de ce filament qui représente le corps de la cellule (pl. I, fig. 12). Pour bien étudier cet épithélium, il faut avoir recours à la dilacération après coloration au carmin osmiqué (*). Tous les plateaux cellulaires paraïssent être confondus pour for- mer une cuticule continue, iln’en est rien; on peut parfaitement im- prégner lasurface à l'argent, etmontrer qu’il y a simplement juxta- position des plateaux cuticulaires; on ne voit pas les canaux poriques par lesquels passent les cils vibratiles. Les cellules sont écartées les unes desautres de façon à laisser de place en place des espaces vides: si régulièrement disposés qu’on pourrait croire à des corps glandulaires ; mais rien n'apparaît par les divers modes de prépa- ration, ce qui me fait conclure que ce sont simplement des vacuo- les ménagées entre les cellules. Avec ces cellules indifférentes on trouve deux types de cellules glandulaires, qui existent très bien développées surtout chez l’As- terias glacialis. Les unes sont des glandes muqueuses ; ce sont de grosses cellules dont le contenu se colore légèrement en gris par l'acide osmique ;le noyau est latéral ou parfois refoulé au fond de la cellule ; celle-ci est tantôt pédiculée (pl. I, fig. 23, 9), tantôt repose par $a base sur la couche conjonctive (pl. I, fig. 12, q). Les autres, plus fréquentes, présentent, à l'état de maturité parfaite, une masse müûriforme, semblable à une grappe, suppor- tée par une mince pédicule muni d’un noyau (pl. I, fig. 12, 18, 23, m) ; chaque grain de cette grappe est rond, peu réfringent, légèrement coloré en jaune sur le vivant ; la grappe se colore en lie de vin par le carmin osmiqué. On trouve souvent mêlées à celles- ci des cellules qui ne leur ressemblent aucunement ; c'est pour- (*) Le carmin osmiqué, préparé suivant la méthode de M. Delage (Archiv. de Zool. exp., tome IV, 1886, pag. 120), qui a obtenu avec ce réactif de magnifiques résultats ch2z la Convoluta, m'a été d’une utilité considérable, non plus pour les coupes, mais pour lesdilacérations : 24 h. dans le carmin osmiqué, 24 h.et plas dans l'eau distillée. Le protoplasma et les noyaux sont nettement colorés en rose, tandis que tous les granules cellulaires restent avec leur couleur et leurs contours propres. 10 L. CUÉNOT. tant l’état jeune ; elles présentent à l'intérieur un réseau protoplas- mique polygonal, parfois très apparent, d'autres fois en ne voit que de fines granulations (pl. I, fig. 18 et fig. 23, m). Les aréoles protoplasmiques indiquent la place de vésicules jaunes expulsées par la cellule. La forme granuleuse a été vue par Hamann, mais, je le répète, ce n’est point l’état parfait de la cellule. . Les cellules muqueuses sécrètent une glaire abondante quand on excite l’Astérie ; quant aux cellules mûriformes, je leur attri- bue un rôle défensif, une ressemblance physiologique avec les nématocystes des Cœlentérés ; j'en reparlerai à propos des pédi- cellaires. Les cellules müûriformes existent chez les Astropecten, V' Echi- naster sepositus, les Asterias ; elles sont beaucoup plus rares chez les autres espèces : les cellules muqueuses, très nombreuses chez les Asterias et les Astropecten, sont moins fréquentes chez les autres Astéries. On sait les magnifiques couleurs de quelques Astérides : le rouge orangé de l’Astropecten aurantiacus qui lui a valu son nom spécifique, le rouge vif de l’Æchinaster sepositus, ete., sont dus à un pigment spécial ; ce pigment rouge se trouve dans les cellules de l’épithélium externe, sous la forme de petits granules ; il résiste à l'action de l’acide osmique, mais disparaît dans l’acide azotique et l'alcool à 90° ; les cellules pigmentées, après la destruction de leur principe colorant, ont un protoplasma rempli de granules (pl. IL, fig. 18,e), ce qui montre que chaque grain de pigment a un substratum protoplasmique. Les autres pigmerts técumentaires (violet, ete.) sont également contenus dans les cellules épithéliales. Entre les bases de ces diverses cellules, se trouve une couche fibrillaire, qui est le plexus nerveux superficiel (pl. I, fig. 12, 18, 28, n). La composition de cet épithélium reste identique sur la face supérieure et sur la face inférieure ; il revêt tous les appendices, branchies lymphatiques, pédicellaires ou piauants ; il s’interrompt CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 44 seulement sur les organes exposés au frottement, tels que le som- met des piquants. Supérieurement, il se continue avec l’épithé- lium de la rainure ambulacraire et celui du tube digestif. Les deux couches épithéliales, interne et externe, sont séparées par du tissu conjonctif sous toutes ses formes ; la substance fonda- mentale fibreuse est la plus importante (Culcite) ; les nodules cal- caires, de formes extrêmement diverses, en occupent la partie externe ; pourtant, chez la Culcite, on trouve quelques baguettes logées à la surface interne ; cela est en rapport avec l'épaisseur exceptionnelle du test. Les piquants sont toujours articulés sur des masses calcaires (pl. I, fig. 20, p). L'épithélium externe est quelquefois appliqué directement sur la substance fibreuse ; mais chez les espèces dont la peau n’est pas rigide (Asé. glacialis, Ech. sepositus, Asterina gibbosa), on trouve interposée ure couche épaisse de fibrilles élastiques (pl. I, fig. 15, f). Enfin, on trouve dans toutes les coupes, entre cette couche con- jonctive et l’épithélium péritonéal, une zone plus ou moins épaisse de fibres musculaires, disposées en tous sens, mais le plus sou- vent parallèles à la direction du bras; ces fibres sont des dépen- dances du cordon musculaire radial ; elles se prolongent dans les brides mésentériques qui relient au test le tube digestif ; elles per- mettent à la paroi du corps d'effectuer une certaine pression sur le liquide de la cavité générale, ce qui produit la turgescence des branchies lymphatiques, l'évaginaiion de l’estomac hors de l’ani- mal, etc. ; lorsqu'un bras est brisé, soit par autotomie, soit par accident, c'est également à ces fibres qu'est dévolu le rôle de fer- mer la blessure en rapprochant les parois inférieure et supérieure du bras. Glandes dermiques de l’Echinaster sepositus. — Cette magni- fique Etoile, d’un beau rouge, qui fait l’ornement des aquariums de Banyuls;, présente une particularité jusqu'ici unique chez les Astérides. Outre les cellules müûüriformes répandues inégalement 12 L. CUÉNOT. dans l’épithélium externe, elle possède de véritables glandes en- foncées dans sa paroi dermique ; celles-ci sont extrêmement abon- dantes, surtout dans la région des branchies lymphatiques et vers l'extrémité du bras. Teuscher les a découvertes (64), mais les a fort mal décrites. Quand on examine avec une forte loupe un Echinaster bien vivant, on voit que toute la partie squelettique est recouverte par une épaisse couche dermique peu résistante. Lorsqu'on irrite celle-ci de place en place avec une aiguille, on voit se dessiner de petits pores, et une goutte muqueuse jaillir par l’orifice; ce mucus est filant et peut facilement s’enlever au pinceau ; il est le plus souvent opalin, parfois légèrement coloré en violet. Quand on l’exa- mine à un fort grossissement (oc. 2, obj. 9 à imm. Nachet), on voit qu’il se compose d’une infinité de vésicules transparentes, de 5 à 6 11; quelques-unes sont colorées en violet, parfois en Jjaunerou- geâtre ; on trouve aussi des cellules de la glande projetées par la pression exercée sur le derme. On retrouve facilement ces glandes sur les coupes (pl. I, fig. 15) ; elles ont une forme assez irrégulière (+ mm. de longueur) et plus ou moins sphérique. Elles sont enfoncées dans le tissu fibril- laire sous-épidermique, qui leur forme une espèce de gaîne. L'o- rifice est une dépression peu profonde, sur les bords de laquelle s'arrête l’épithéliam externe. La glande est formée d'un stroma conjonctif, composé de mailles larges circonscrivant des espaces o- voïdes (pl. I, fig. 16, j) ; dans chaque maille se trouve une cellule volumineuse, quiest la partie intéressantede l'organe ;les vésicules, produits de son activité, sont rejetées sur ses bords ou bien envahis- sent le tissu conjonctif (pl. I, fig. 16, v); le noyau est également rejeté à la périphérie. Mais, pour bien se rendre compte de leur constitution, il faut faire une dilacération au carmin osmiqué ; les glandes sont si nombreuses qu’en traitant un fragment d’épiderme, on retrouve toujours des cellules glandulaires facilement recon- naissables. De 27 à 38 1, à protoplasma extrêmement granuleux, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 143 généralement rondes ou ovoïdes, parfois digitées, leur forme dé- pend évidemment de la maille conjonctive qui les contient. Le noyau est petit, relativement au volume de la cellule (pl. I, fig. 17, g) ; on le voit émigrer vers la périphérie, s’aplatir, peut-être même sortir au dehors ; on trouve en effet un grand nombre de noyaux libres dans la glande (fig. 17, n). Dans l’intérieur de la cellule, on aperçoit des éclaircissements qui ne sont autres que les vésicules ; celles-ci sont parfois libres, le plus souvent réunies en une masse centrale, mamelonnée, formées d’utricules rendus po- lyédriques par compression réciproque ; elles ont une apparence de paroi, à angles réfringents, qui ne se colore pas par le picrocar- min ; le liquide intérieur se colore en rose très pâle. Parfois une grande partie de la cellule est occupée par un amas de vésicules. La cellule se transforme ainsi entièrement (fig. 17, v), le noyau resté seul s’entoure à nouveau de protoplasma et recommence le même cycle. Quant aux vésicules produites, elles sont peu à peu rejetées en dehors, en gagnant l’orifice par une sorte de vis a tergo. Les vésicules produites par cette glande de l'Æchinaster sepo- situs sont formées de la même substance que les cellules müûriformes que j'ai décrites dans l’épithélium externe des Astéries ; elles se comportent de même à l'égard des réactifs ; cela nous amène à les considérer comme ayant la même fonction défensive : j’en repar- lerai d’ailleurs à la suite des pédicellaires. Squelette, musculature. — On trouvera à ce sujet des détails cir- constanciés dans le travail de M. Viguier (67) ; cet auteur a étudié le squelette chez de nombreux genres et en a même déduit une systématique ; je présenterai mes observations à ce sujet, à propos de la classification. Quant à l’odontophore, que MM. Carl Vogt et Yung considèrent encore, à l’exemple de Meckel, comme un soutien ambulacrairemodifié, jemerange à l'opinion de M. Viguier, qui pense que c’est une pièce spéciale, mais il ne fixe aucunement son vrai rôle. Il me semble que cette pièce a une utilité toute mé- canique ; c’est elle qui maintient écartées les pièces ambulacraires 14 L. CUÉNOT. entre lesquelles on la trouve solidement encastrée ; grâce à elle, dans tous les mouvements de l’animal, la bouche conserve sa forme régulière. Enfin on peut observer, lorsqu'on étudie les animaux vivants et non plus desséchés, que, chez tous, le soutien interbra- chial prend son appui sur l’odontophore, soit que le soutien soit très réduit (Astropecten, Echinaster), soit qu'il ait une grande im- portance (Culcita, Asterina, Asterias). L’odontophore joue un peu le rôle d’une clef de voûte par rapport aux pièces péribuccales, et c'est sur elle que le soutien interbrachial prend une insertion solide. Tout cela me porte à remplacer ce nom d'odontophore, qui est malheureux : d’abord il n’y a pas de dents chezles Astérides, puisque les pièces auxquelles on a donné ce nomne servent aucune- ment à la mastication ; ensuite l’odontophore ne les porte pas, puis- qu'il est supporté par elles ; il me semble que le nom de soutien inter- radiaire, indiquant sa position et un peu sa fonction, serait préférable. Lôven a comparé le squelette des Astéries à celui des Oursins, en se basant sur l'étude des jeunes ; il a démontré d’une façon précise que la partie inférieure des bras et du disque des Astéries corres- pondait au périprocte de l’Oursin avec ses 10 plaques calcaires : les plaques ocellaires (radiales de Lôven) étant rejetées à l’extrémité des bras, les plaques génitales (costales de Lôven) persistant sur le disque (une étant transformée en madréporite, comme chez l’Oursin) ; cela estsurtout bien visible chez l’Asterina gibbosa, dont le pôle apical a un facies rappelant celui de lOursin. Il est à regret- ter que M. Viguier n'ait pas pris la théorie de Lôven pour base de ses descriptions et qu’il n’ait pas cherché à retrouver les plaques génitales ou costales chez les Astérides qu’il a étudiés dans son tra- vail, d’ailleurs excellent et d’une grande exactitude. Branchies lymphatiques. Quand on examine dans un bac une Asterias glacialis bien vivante, on voit que la surface totale du disque et du bras est CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 45 couverte de petites houppes de cœcums transparents qui cachent presque tous les autres appendices du corps; quand on touche ces cæœcums avec la pointe d’une aiguille, on les voit se contracter vivement, pour s'épanouir peu après (pl. VIII, fig. 11, br): ce sont les branchies lymphatiques (Hautkiemen, Kiemenbläschen des Allemands, tubules de MM. Carl Vogt et Yung). On peut les schématiser ainsi : une portion de la paroi du corps est devenue très mince, s'est pourvue de muscles particuliers et s’est dévaginée au dehors sous la pression du liquide de la cavité générale. Ces branchies existent chez toutes les Astéries, et sont caractéristiques de la famille ; elles occupent les intervalles laissés entre les pièces calcaires du squelette ; ellesmanquent dans tous les points où le test est exposé aux frottements, la face supérieure, par exemple ; cela est surtout très net chez les espèces pentagonales (Asterina gibbosa), dont la face orale en est entièrement dépourvue. Quand on examine une coupe verticale de ces branchies (pl. I, fig. 20, 21, 22),on voit qu’elles sont formées de trois couches, le prolongement de celles de la paroi du corps. M. Hamann a décrit le premier (20) un petit épaississement cellulaire de la couche interne (pl. 1, fig. 21) au sommet de la branchie ; c'est d’ailleurs le point le plus épais, car c’est là que s'exerce la pression la plus forte quand la branchie s'érige sous l’action du liquide de la cavité générale ; lorsqu’on presse un peu fortement sur un bras, de facon à faire refluer le liquide sur les autres points, on voit sou- vent des branchies qui cèdent sous l’effort et se crèvent. La couche épidermique externe renferme beaucoup de cellules glandulaires, comme celles que nous avons décrites à propos des téguments ; elle est naturellement très vibratile (pl. I, fig. 21,e). La couche conjonctive (f) renferme des fibrilles musculaires, niées par Hoffmann, Teuscher, affirmées par M. Hamann, les unes longitudi- nales, les autres circulaires. Les longitudinales sont destinées à rétracter la branchie lorsqu'on l’irrite ; les circulaires à occlure la lumière de l'organe s'il venait à se crever, de façon à ne pas lais- 16 L. CUÉNOT. ser le liquide de la cavité générale s’échapper au dehors. Ces fibres musculaires sont surtout visibles sur des coupes tangentielles. La couche interne péritonéale (p) est très vibratile : les cils détermi- nent un mouvement gyratoire, reconnu par les plus anciens ana- tomistes ; on voit souvent des plasmodiums ou des corpuscules sanguins entrer dans la branchie, en faire le tour et s’échapper du côté opposé. La branchie est entourée d’une lacune circulaire (pl. I, fig. 20 et 22, l) dont on voit la lumière de chaque côté de l'organe ; elle a été vue par tous ceux qui se sont occupés des Astérides, Ludwig, Teuscher, Hamann. Hamann en fait une dépendance du système lacunaire de la paroi du corps (Schizocælraum) ; il ne la représente pas fermée, mais bien continue avec une série de cavités. Il n’en est rien : cette lacune est parfaitement close ; elle n’est pas revêtue de l’épithélium du schizocæle, comme le prétend Hamann; les noyaux que l’on observe à sa surface sont ceux des cellules embryon- naires situées à ce niveau ; mais iln’y a pas constitution d’un revêtement épithélial. C’est un simple écartement du tissu conjonc- tif, dont le rôle est le suivant: quand la branchie se dilate, sous l'afux du liquide interne, elle tend à occlure cette cavité, et par suite elle acquiert une plus grande capacité. Par cette disposition, la perforation de la paroï est aussi réduite que possible, en corres- pondant toutefois à une surface respiratoire suffisante. La disposition des branchies varie beaucoup suivant les espèces, mais elles sont toutes calqnées sur ce type. Chez les espèces à tégument très épais (Culcite), la paroi du corps renferme de nom- breuses cavités irrégulières (pl VIII, fig. 18, br), qui vont tou- jours en se divisant; ce sont des diverticules de la cavité générale allant s'épanouir au dehors dans les branchies. Chez la Zuidia ciliaris, la branchie, au lieu d’être simple, comme chez la Cribelle, l'Asterina, etc., forme une touffe serrée de petits cœcums; le groupe ainsi constitué est entouré de la lacune habituelle (pl. I, fig. 22). CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 47 J’examinerai les fonctions des branchies lymphatiques à propos du liquide sanguin. Radioles vibratiles. À l'étude des branchies se rattache celle des radioles vibratiles ; on ne les trouve que dans les genres Luidia et Astropecten. Chez la Luidia ciliaris, le bord du bras est limité par une série de pièces aplaties, perpendiculaires à sa direction, et laissant entre elles des espaces réguliers et assez grands. Ce sont les pièces mar- ginales, portant quatre piquantsacérés ; leurs faces latérales, limitant les espaces mentionnés plus haut, sont garnies de très petites radioles articulées, qui leur forment un revêtement continu. Quand on porte une de ces radioles sous le microscope, on voit qu’elle a la forme d’un long cylindre arrondi au sommet(pl. I, fig. 19), dei mm. en- viron et couvert de cils vibratiles extrémement forts et longs. Au centre, se trouve un réseau calcaire, très délicat, déterminant la rigi- dité de l'organe (fig. 19, r). Les cils sont portés par un épithé- lium à cellules allongées ; ils ont une action si forte que la radiole détachée tourne sur elle-même avec une grande rapidité. Le courant déterminé par l’action de tous ces cils se dirige de la face supérieure vers l’inférieure ; je n’affirmerai pas, car il est bien difficile sur l’animal vivant de déterminer la direction exacte ; pourtant j'ai vu nettement de petites particules en suspension dans l’eau se transporter dans le sens indiqué. Les branchies lymphatiques de la Luidia sont alignées réguliè- rement par rangées transversales; or, à chaque rangée correspond un espace vibratile ; je pense que le mouvement ciliaire a pour but de déterminer un actif appel d'eau sur ces branchies ; sans cela, la respiration serait bien rudimentaire, les paxilles recouvrant la face inférieure et empêchant un facile renouvellement du fluide oxy- géné. Les radioles vibratiles existent aussi chez les Asfropecten auran- ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN, — 2% SÉRIE, — T. V bis, — suppl. 1887. — 2e Mém, 2 18 L. CUÉNOT. tiacus,platyacanthus, bispinosus, surtout aux abords du disque; mais elles sont loin d’avoir la même importance que chez la Luidia ci- liaris. Pédicellaires. Ce sont de petits organes de préhension, qui n'existent pas chez toutes les Astéries ; les Astropecten, par exemple, en sont dépour- vus. M. Perrier les a étudiés le premier avec grands détails (43) ; il a établi une distinction en deux formes principales : les pédicellaires quiont deux mors et une pièce basilaire (Asterias et genres voisins ),et ceux qui ont deux ou trois mors, articulés directement sur le tégu- ment (Astéries à deux rangées d’ambulacres). Chez la Luidia ciliaris, on trouve deux sortes de pédicellaires : les uns tridactyles, décrits par M. Perrier ; les autres didactyles, que personne n a encore signalés. Sur les individus de Roscoff, on voit facilement les premiers, quise trouvent en petit nombre sur les bords de la rainure ambulacraire ; sur les individus de Banyuls, je n’ai pu en trouver un seul tridactyle ; mais entre les pièces marginales, sur le bord, avec les radioles vibratiles se trouvent des pédi- cellaires à 2 branches (pl. I[, fig. 1); il en existe un à presque tous les intervalles marginaux. De ; de mm. de longueur, leurs branches finement denticulées se rejoignent sur toute leur hauteur ; le pédicellaire s'articule par sa base sur le test calcaire, un musele transversal détermine le rapprochementdes valves, d’autres externes leur écartement. C’est bien la même espèce qui se trouve dans _ l'Océan et la Méditerranée ; cette variation est donc simplement individuelle. La Gymnasteria carinifera, espèce voisine de la (uleite et du Pentaceros, va nous fournir un exemple analogue ; j'en ai étudié deux échantillons conservés dans l’alcool, provenant de la mer Rouge (env. d'Obock). M. Perrier décrit chez cette espèce des pédi- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 49 cellaires assez singuliers, situés sur le bord inférieur des bras, parmi les pores des branchies lymphatiques. Rien de pareil n’existe sur mes échantillons : les bras ne portent aucun pédicellaire; mais dans la rainure ambulacraire, attachés aux pièces qui la bordent, se voient de nombreux pédicellaires didactyles (pl. I, fig. 14). La fi- gure remplacera avecavantage une longue description ; les branches dentées s'appuient l’une sur l’autre sur une partie de leur hauteur; par la base, elles se rejoignentégalement. Un muscle transversal (a), détermine le rapprochement des valves ; des muscles externes (b), s’attachant sur le calcaire qui sert de support, président à l’écarte ment ; enfin, un fort faisceau defibrilles conjonctives (f) rattache le pédicellaire à l’échancrure dans laquelle il est enchâssé. M. Perrier parle également de spicules qui existeraient dans le derme ; iln' y en a certainement pas sur mes échantillons, qui sont pourtant bien des Gymnasteria carinifera. Je considère toutes ces différences comme simplement individuelles. L’Asterina gibbosa, espèce très intéressante à divers points de vue, que l’on trouve en abondance à la grève de Roscoff et à Port-Ven- dres, présente des caractères très particuliers, au sujet des pédicel- laires. La surface inférieure ou aborale est recouverte d’écailles sur les- quelles s’articulent divers piquants, isolés ou réunis par groupes plus ou moins nombreux ; parmi ceux-ci, des groupes didactyles sont assez fréquents. Sont-cedes pédicellaires ? M. Perrier le pense. Cr, les caractères différentiels du pédicellaire et du piquant sont la forme, la musculature et les mouvements particuliers. Ces trois caractères sont en défaut chez l’Asterina gibbosa ; les groupes de deux piquants ont même forme, même coloration que les autres : ‘le muscle transversal qui les relie et qui paraît si caractéristique à M. Perrier, se trouve entre tous les piquants, les reliant deux à deux ; enfin on voit très souvent trois ou quatre piquants d’un même groupe se rapprocher lorsqu'on les excite ; je reconnais volontiers que les groupes de deux se contractent plus fortement et plus vivement que 90 L GUÉNOT. les autres, cela est surtout sensible sur les échantillons de la Médi- terranée ; mais il est impossible d'établir une distinction absolue entre les piquants et les pédicellaires, qui présentent le passage le mieux gradué ; en m'exprimant d’une autre façon, je dirais que ce sont des pédicellaires qui se sont à peine différenciés des piquants. Je pense que les exemples précédents suffiront à prouver que, dans certaines espèces, ces organes varient suivant la provenance des individus ; cette observation aura une certaine importance lors- que je traiterai de leurs fonctions. Si l’on admet ce fait (qui a encore besoin d’autres exemples, je ne le considère pas comme démontré), on pourra supprimer quelques espèces, qu’on a établies uniquement sur les pédicellaires différents qu'elles présentent. L’Asterias glacialis est l'espèce certainement la mieux douée sous le rapport des pédicellaires, qu’elle présente au plus haut degré de complication. Comme on le sait, d’après les travaux de Duvernoy, Herapathet Perrier, on peut les diviser en deux groupes : les pédicellaires croi- sés (forcepiformes de Herapath), et les pédicellaires droits (forfi- ciformes du même auteur). J’y ajouterai un 3° groupe, celui des pédicellaires tridactyles. Les premiers, très peëits, en nombre immense, formant des col- lerettes autour des piquants, se composent de trois pièces, deux mors et une pièce basilaire décrite par M. Perrier ; chacun des mors présente une sorte de queue ou de manche, passant l’une à droite, l’autre à gauche de la pièce basilaire ( pl. I, fig 1 ). Les muscles, décrits plus ou moins exactement par M. Perrier, sont au nombre de six : deux très réduits (fig. 1, b), destinés à l'ouverture des branches, s’insérant d’une part sur la pièce basi- laire, d'autre part sur la partie externe du mors ; quatre destinés à la fermeture, les deux premiers entrant à l'intérieur des branches et s’insérant sur leur trame calcaire d’une part, sur la pièce basi- laire d'autre part (fig. 1, « ) ; les deux derniers forment un double faisceau transversal s’attachant sur cette dernière et sur la quene des q CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 21 branches (fig. 1, a’). Ce n’est pas tout; quand on examine avec une forte loupe les pédicellaires croisés sur le vivant, on voit un pédoncule blanc qui se bifurque pour embrasser le pédicellaire (fig. 1, f) :c’est ce que M. Perrier appelle muscle moteur général; ce n’est pas un muscle, mais bien un amas de fibrilles conjonctives très fines et très résistantes; le faisceau se divise en deux branches qui se croisent l'une l’autre pour aller englober la queue de cha- cun des mors. Nous verrons tout à l’heure son utilité. J’ai cru devoir donner une figure de pédicellaire croisé, celle de M. Perrier étant inexacte à divers points de vue, surtout quant à la constitution histologique. Pour étudier l’histologie des pédicellaires, il faut en faire des coupes. La préparation la plus instructive est la section verticale d’un piquant avec sa collerette de pédicellaires croisés ; la moitié d’une coupe semblable est représentée dans la fig. 2, pl. I. Toute la base de cette collerette, tissu flexible et mobile, est formée de fibrilles conjonctives à gros noyau mêlées avec des fibres musculaires, le tout formant un lacis qui échappe à la description ; de nombreuses cellules embryonnaires s’y trouvent mêlées. On reconnaît les éléments à leurs diverses colorations par le carmin ; les pédoncules des pédicellaires, colorés en rose vif qui tranche vivement sur la coloration moins foncée des autres éléments, restent isolés jusqu’à la base de la collerette ; là, leurs fibres se dissocient et se perdent dans un lacis très confus mêlé aux autres fibres (fig. 2, f). Une partie de la collerette remonte le long du piquant qui lui sert d’'axe ; il y a là de nombreuses fibres mus culaires (m), ce qui explique comment celui-ci peut être recouvert par la gaîne oui l’entoure ; ces muscles s’insèrent sur la masse calcaire du piquant, leurs autres extrémités se perdent dans le tissu de la collerette. Ou rencontre sur la coupe des pédicellaires (p), dont on voit très bien les divers muscles, colorés en jaune d’or ; tout ce qui n’est pas calcaire est formé de fibrilles conjonctives. Le tout 22 L. CUÉNOT. est recouvert de l’épithélium externe, quidescend entre les pinces, où ilest interrompu de place en place pour laisser passer les aspérités calcaires. L’épithélium est identique à ce que j’ai décrit précédemment ; il est excessivement glandulaire : on voit aussi beaucoup d’espaces clairs, vacuoles intercellulaires. Pédicellaires droits. —— Les pédicellaires droits sont moins nombreux que les précédents, isolés ou par petits groupes ; leur taille est parfois considérable, jusqu’à 47", | Ils sont formés de trois pièces calcaires creuses, connus depuis longtemps, une basilaire et deux mors. La fioure donnée par M. Per- rier du pédicellaire droit d’Asterias glacialis ne concorde que peu avec ce que J'ai observé ; elle se rapporterait plutôt à l’Asterias rubens. Sur les pédicellaires adultes de 2 ou 3%", les mors ne s’articulent pas sur toute leur longueur, comme il le représente, mais seulement par leur extrémité, qui est élargie et pourvue de dents s’engrenant avec leurs congénères ( pl. I, fig. 9). Parfois, sur certains échantillons, cette partie dentée s’élargit considérablement, et le mors prend une forme discoïde (pl. I, fig 10) ; il a alors une forte dimension, 5 et 47%. Avant d’arriver à la forme représentée dans la fig. 9, les pédicellaires driots d’Ast. glacialis présentent dans leur Jeune âge l'aspecs que M. Perrier 2 représenté, et qui est fixé chez l’Asé. rubens. | L’appareil musculaire de ces organes a toujours été fort mal décrit ; il faut l’étudier sur des coupes longitudinales, qui ne sont pas très faciles à pratiquer, il est vrai, mais qui fournissent des résultats très nets { fig. 11, pl. [).Il y a six muscles, qui n’ont que peu ou point de ressemblance avec les muscles du pédicellaire croisé : deux petits faisceaux destinés à l'ouverture de la pince (fig. 9 et 11, b), qui s’insèrent sur la pièce basilaire et sur la partie externe et inférieure de chaque mors ; quatre destinés à la ferme- ture, dont deux très grands, entièrement cachés dans les pièces calcaires, allant du fond de la pièce basilaire où ils s’insèrent CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 23 jusqu'à l'extrémité du mors (fig. 11, « ) ; les deux autres, beaucoup plus petits, s’insérant d’une part sur la pièce basilaire et d'autre part sur la partie inférieure etinterne de chaque mors (fig. 9 et 11,4). M. Perrier a décrit et figuré (43) un muscle moteur général s’attachant à la pièce basilaire et rappelant celui des pédicellaires croisés ; ce faisceau n'existe pas ; on peut s'en assurer soit sur le vivant, où il est si facile de le voir à la loupe sur les pédicellaires croisés, soit sur les coupes. Le pédicellaire droit est enveloppé d’une gaîne conjonctive recouverte de l’épithélium externe. Le tissu conjonctif est formé de nombreuses fibres et cellules embryonnaires, isolées ou réunies par amas (pl. I, fig. 12, f ). L’épithélium renferme les mêmes cellules glandulaires que nous avons déjà vues. Je termine par l'étude des pédicellaires tridactyles, qui n'ont été signalés par aucun auteur. Ils sont assez rares, et ne se ren- contrent pas sur tous Jes individus ; on les trouve sur les bras, mêlés aux pédicellaires droits dont ils ont la taille. J'en ai observé à Roscoff et à Banyuls; les échantillons qui en possédaient n’en avaient que deux ou trois sur chaque bras. Les fig. 7 et 8, pl. I, en représentent deux assez différents, l’un n’étant probablement qu'une forme jeune. Ils se composent de 3 mors, articulés sur une pièce basilaire unique ; la musculature est la même que celle des pédicellaires droits. Ils présentent cet intérêt de reproduire chez le type le plus perfectionné des Astéries la forme du pédicellaire de Luidia, qui est le type le plus inférieur. Variations individuelles. — Les Asterias glacialis de diverses provenances montrent des différences considérables pour leurs pédicellaires ; il y a là des variations comparables à celles que j'ai constatées chez la Luidia ciliaris et la Gymnasteria carinifera. Ainsi, à Roscoff, les échantillons qu? l’on trouve à Réc’hier Doun, massif de rochers battus par les vagues, vivant au milieu d’une faune assez riche composée exclusivement d’espèces fixées, Ascidies, Bryozoaires, Cirripèdes, Acéphales, etc, ne présentent que des 24 L. CUÉNOT. teintes sombres ; leurs pédicellaires sont peu nombrenx et de très petite taille ;la disposition que j’ai figurée pour lespédicellairesdroits est peu nette ; ils sont mixtes entre ceux-ciet ceux d’Ast. rubens. Même observation pour une variété naine d’Ast. glacialis, de cou- leur noire verdâtre, que l’on trouve à Banyuls, sous les rochers constamment battus par la mer, et qui vit également au milieu d’une faune d'espèces fixées. Au contraire, les Ast. glacialis que l’on ramène des environs d’Astan (au N.-E. de Roscoff) et qui se trouvent au milieu d’une faune extrêmement riche d’Annélides, de Crustacés, de Bryo- zoaires et d’Ascidies, présentent des teintes claires, rosées ou blanches, et un développement considérable des pédicellaires, tant droits que croisés ; les collerettes, qui se trouvent autour des pi- quants, se rejoignent parfois presque toutes ; les pédicellaires droits, très nombreux et très grands (de 1 à 4%), répondent exactement aux descriptions précédentes (pl. I, fig. 9 et 10). Même obser- vation pour les Ast. glacialis de grande taille que l’on ramène du large à Banyuls; les pédicellaires droits présentent même sur quelques individus des variétés de forme assez considérables. | Développement. — On peut étudier le développement des pédi- cellaires soit sur des jeunes, soit même chez des adultes, où il y a toujours des organes en voie de formation, enfin sur des bras en voie de rédintégration. Les deux sortes de pédicellaires ne se différencient qu’à une phase assez avancée. Ils commencent par une légère extumes- cence du tégument : le mamelon qui se forme se pédiculise légè- rement, puis devient bilobé à sa partie libre (pl. I, fig. 3). Dans chacun des deux lobes ainsi formés qui vont toujours en s’accen- tuant, apparaissent quelques bâtonnets calcaires parallèles, qui se groupent en vertu d'une attraction particulière : ce sont les rudi- ments des deux mors (pl. I, fig. 4). Quand ils se sont nettement dessinés, apparaît la pièce basilaire, qui prend un accroissement rapide ; elle a alors une forme triangulaire (pl. I, fig. 5). Si c’est CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 925 un pédicellaire droit, les pièces vont se dilater et grandir considé- rablement, de façon à former un appareil complètement creux; on reconnaît dans les trois rudiments les parties constitutives du pédi- cellaire droit. Si c'est un pédicellaire croisé, le développement va continuer. Les mors vont s’allonger, des aspérités vont se former à leur surface; la partie inférieure, qui est posée sur la pièce basilaire, s’allonge en une espèce de manche arrondi; ces prolongements passent l’un à droite, l’autre à gauche de la pièce basilaire; les muscles commen- cent à se former, le pédoncule fibreux apparaît aussi. On reconnaît là facilement les traits caractéristiques du pédicellaire croisé (pl. I, fig. 6). Ce développement montre combien est peu juste l'opinion de M. Perrier, qui dit, dans son travail sur les pédicellaires : «... La structure si particulière de ces organes (les pédicellaires croisés) suffirait à elle seule pour faire repousser toute idée de filiation ou d’avortement tendant à les unir aux pédicellaires droits » (43, page 213). On peut en tirer une considération intéressante : nous avons vu que les Astéries qu’on pourrait appeler les plus inférieures, celles à deux rangées d'ambulacres, ont des pédicellaires didactyles, sans trace de pièce basilaire (pl. I, fig. 15, et pl. IT, fig. 1) ; les pédicel- laires si perfectionnés de l’Ast. glacialis passent par cette phase. Il ya mieux : les pédicellaires tridactyles de la Luidia se retrou- vent également chez l’Ast. glacialis, toujours avec la pièce basilaire en plus (pl. I, fig. 7 et 8). Enfin le pédicellaire croisé est un per- fectionnement du pédicellaire droit, et nous verrons dans la phy- siologie qu’il est bien plus utile à l’animal. Suivant l’expression d’Hœckel, si souvent employée aujourd’hui, l’ontogénie du pédi- cellaire est d'accord avec sa phylogénie. Pliysiologie des pédicellaires et des glandes dermiques. — On ne connaît jusqu ici rien de certain sur les fonctions des pédicellaires, 26 L. CUÉNOT. les opinions émises sont basées sur des observations fausses ou ne présentent pas de généralité. Il est hors de doute que ce sont des organes de préhension. Mais que sont-ils destinés à prendre? M. Perrier n’émet aucune hypothèse sur leurs fonctions. Romanes et Ewart (54) donnent aux pédicellaires des Oursins un rôle actif dans la locomotion ; il suffit d'observer un Oursin vivant pour se convaincre qu’il se dé- place seulement à l’aide de ses piquants et des ambulacres, et que les pédicellaires n’y entrent pour rien. Cette explication n’étant en aucun cas applicable aux Etoiles, qui se déplacent sur une face à peu près dépourvue de pédicellaires, les auteurs précités expli- quent leur présence comme étant des organes hérités, vestiges sans utilité pour l'animal. Il suffit de les avoir étudiés, même superficiellement, pour voir combien cette opinion est absurde. M. Agassiz donne aux pédicellaires de l’Oursin le rôle de transporter les matières fécales sur les parties latérales de l’animal, d’où elles seraient facilement balayées par l’eau de mer. Dans tous les cas, inapplicable aux Etoiles. D’autres auteurs, se basant sur l'abondance des pédicellaires près de la membrane buccale, leur donnent un rôle de préhension alimentaire. Inapplicable aux Astéries, qui se nourrissent de proies très volumineuses (oursins, crabes, débris de poissons), gé- néralement immobiles; en tout cas, la préhension a lieu au moyen des ambulacres. Je suis absolument convaincu que les pédicellaires des Astéries ontun rôle purement et exclusivement défensif; je base cetteopinion sur de nombreuses observations faites sur des animaux parfaite- ment vivants, tant à Banyuls qu’à Roscoff. Je prends comme exemple lAsé. glaciulis; cet animal est entièrement dépourvu de parasites ou de corps étrangers fixés sur sesappendices;iln y a même ni Diatomées, ni Vorticelles, si abondantes chez les Ophiures. Il est pourtant vulnérable, car un ver pourrait pénétrer par l’orifice d’une branchie lymphatique, en perforant celle-ci, qui n’est qu’une CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES, 27 mince membrane; je pense que les pédicellaires servent à la défen- dre. En effet, si l’on touche, même très légèrement, une partie du técument ou une collerette de pédicellaires, les branchies lympha- tiques environnantes se contractent pour se dilater dès que l’exci- tation cesse. Si l’on touche la collerette de pédicellaires croisés d’un côté seulement, il n'y a que les branchies tournées vers ce côté qui se contractent. Quand on laisse tomber sur le tégument un petit Annélide ou un Nématoïde, les phénomènes qui se passent sont des plus remar- quables : dès que l’animal a touché une collerette de pédicellaires, les branchies lymphatiques environnantes se contractent rapidement et restent dans cet état tant que le ver s’agite. Les piquants envi- ronnants, maloré leur apparente fixité, se penchent très nettement vers celui-ci, pour aider les pédicellaires qui l’ont capturé; leur colle- rette de pédicellaires se penche le plus possible pour chercher à saisir et à immobiliser l’animal qui se débat. En même temps, les cellules glandulaires, si abondantes sur les appendices du test, rejettent leurs produits ; l'animal se trouve enveloppé de mucus, criblé de vésicules qui ont peut-être une action vénéneuse, et sa mort ne tarde pas à arriver. Qu'on ne dise pas que les Astéries puissent en tirer un parti quelconque ; j’en ai vu de parfaitement vivantes et acclimatées, capturer ainsi des Annélides de 5 à 6°", qui rampaient à leur surface ; les Annélides sont morts rapidement ; les pédicellaires les ont retenus pendant un certain temps, un jour et plus, puis les ont rejetés. L’Asterias glacialis harponne tous les corps vivants de petite taille, qui irritent sa surface tégumentaire, les garde jusqu’à leur mort, et même au delà, quels que soient ces corps, toujours très différents de la nourriture habituelle. J’ai trouvé souvent, en dilacérant des pédicellaires sous une forte loupe, de petits Néma- toïdes que je n'avais pas aperçus au premier abord et qui avaient été tués probablement par les cellules glandulaires. Les nématocystes des Cœlentérés sont aussi des organes de dé- 98 L. CUÉNOT. fense, très redoutés par tous les animaux qui vivent auprès d’eux. Si l’on met dans un hac une Actinie bien épanouie, à côté d'une Asterias glacialis d'Astan, par exemple, et que l'on regarde com- ment se comportent les animaux qu'on y met vivre, on voit qu’un Palémon fuit avec la même rapidité, lorsqu'il lui est arrivé de tou- cher avec ses antennes l’Actinie ou l’Astérie. Chaque fois que l’on blesse une Astérie, soit en irritant sa surface externe, soit en la disséquant, elle sécrète une quantité considérable de mucus qui ne peut jouer là qu’un rôle défensif. Quand on irrite une portion de técument dépourvue de pédicellaires, située, par exemple, entre deux collerettes, on voit ces deux masses s’incliner, se rapprocher jusqu’au contact pour saisir l'ennemi supposé qui les attaque. Toutes ces observations sont applicables aux pédicellaires droits; ceux-ci sont portés par un pédoncule épais et plus ou moins long ; si on touche la base avec une aiguille fine, d’an côté quelconque, on voit le pédicellaire s’incliner du même côté, avec plus ou moins de vivacité, pour saisir l’ennemi qui le menace. Lorsqu'il croit être arrivé à son niveau, il ferme brusquement ses valves, précé- demment ouvertes; s’il n’a rien saisi, il les rouvre peu après et reprend sa position primitive, si l'excitation a cessé. Le pédicel- laire droit peut décrire presque une demi-circonférence dans le plan vertical ou horizontal. La relation que j'ai déterminée entre l'abondance des pédicel- laires et la richesse de la faune vient encore à l’appui de l’opinion que je soutiens. On peut encore faire remarquer que les espèces pourvues de pédicellaires dans la rainure ambulacraire n’ont pas de commensaux, tandis que la Zuidia ciliaris, Echinaster sepositus, les divers Astropecten ont presque toujours un ou plusieurs Anné- lides (Ophiodromus flexuosus, Acholoë astericola) dans la rainure ambulacraire, aux mouvements desquels les organes si délicats qui s’y trouvent se sont habitués {Ban yuls). Le faisceau fibrillaire qui soutient la base des pédicellaires croisés peut avoir pour but d'empêcher un écartement trop grand des CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 29 branches (pl. I, fig. 1, f), mais je le crois surtout destiné à con- solider ces organes ; il est tordu sur lui-même pour offrir plus de résistance. En effet, lorsqu'ils harponnent un animal étranger, les pédicellaires ont parfois à supporter une traction considérable ; si celle-ci vient à être très forte et brusque, le pédicellaire est emporté par la partie saisie ; il s’est séparé du pédoncule conjonctif, qui reste attaché à l’Astérie ; c’est donc au point d'union des branches et du pédoncule que l’effort est le plus consi- dérable ; on comprend alors que le pédoncule augmente la résis- tance du même point. Les pédicellaires droits, ayant une large base et étant beaucoup plus robustes, sont naturellement dépourvus du faisceau fibreux. Nous avons vu que les seuls points vulnérables étaient les ambu- lacres et surtout les branchies lymphatiques. Aussi les pédicellaires sont-ils en grande abondance dans l’une et l’autre de ces régions. Chez toutes les Astéries qui possèdent des pédicellaires, ceux-ci se trouvent soit au milieu des pores lymphatiques, soit sur les bords de la rainure ambulacraire (Culcita, Pentaceros, Archaster, ete.). Mais il y a bien des Astéries dépourvues de pédicellaires ; com- ment se défendent-elles ? L’Echinaster sepositus, qui a une peau molle et vulnérable, pos- sède un nombre immense de glandes venimeuses qui, au moindre choc, font jaillir leur contenu ; elles sécrètent des vésicules toutes semblables à celles des cellules mûriformes d’Ast. glacialis. Ces glandes ont un rôle physiologique identique à celui des pédicellaires. L’ Astropecten aurantiacus, quia de nombreuses branchies lym- phatiques, n’a ni glandes ni pédicellaires. Mais on sait que les branchies sont logées entre les paxilles, pièces calcaires portant à leur sommet un cercle de piquants rayonnants, le tout formant un grossier parasol. Sur les animaux bien vivants et bien épanouis, les branchies se gonflentet passent entre les intervalles laissés par les paxilles ; sil’on touche, même légèrement, le sommet de l’une des branchies, celle-ci se contracte d’abord, puis on voit les paxilles 30 L. CUÉNOT. se rapprocher, leurs piquants rayonnants s’abaisser en se mêlant à leurs voisins, de façon à former un toit impénétrable au-dessus du point lésé ; l’ennemi se trouverait infailliblement pris entre les divers piquants. De plus, l’Astropecten a de nombreuses cellules mûriformes et muqueuses dans ses téguments (pl. I, fig. 18) ; quand on l’irrite ,il sécrète également une grande quantité de mucus. Les paxilles jouent ici le même rôle que les pédicellaires d’Asterias et les glandes d’Echinaster. Chaque Astérie a très probablement ses moyens de défense en rapport avec ses ennemis particuliers; pour les connaître, il faudrait observer ces animaux parfaitement vivants et dans leur milieu naturel, ce qui est souvent difficile. Un dernier argument: chez l’Holothuria impatiens, on trouve des filaments très nombreux, les tubes de Cuvier, destinés à être rejetés au dehors; M.Jourdan (*) qui les a bien étudiés, les con- sidère comme organes défensifs : « Il est facile de voir, dit-il, combien ces gros filaments gluants sont incommodes pour les animaux qu'ils atteignent. » L’épithélium interne de ces tubes est formé de grosses cellules tout à fait semblables aux cellules müû- riformes que nous avons décrites; dans leur forme jeune, ces cellules ont également un protoplasma en réseau polygonal. Il est intéressant de retrouver à tant de distance exactement les mêmes cellules venimeuses. Je ne parle que pour mémoire des piquants qui bordent la rainure ambulacraire; quand on irrite les ambulacres, ceux-ci se con- tractent et les piquants s’abaissent sur la rainure qu’ils ferment complètement, I] en est de même pour ceux qui entourent l'œil et le tentacule terminal du bras; les piquants forment une sorte de 1 pe . A Q paupière épineuse dont la contraction est extrêmement rapide. (*) Jourdan, Ann. Mus, d’Hist, nat. de Marseille, t. I, 1883. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 31 Autotomie. La Luidia ciliaris est une belle espèce, très vive, qui court sur les fonds rocheux, les aloues flottantes, etc.; on la trouve souvent en train de dévorer l’appât sur les cordes à pêcher le chien de mer (Roscoff). Lorsqu'on la saisit vivement, le morceau reste entre les doigts et elle s’échappe rapidement. Grâce à une contractilité ex- cessive des fibres musculaires péritonéales, la blessure se ferme im- médiatement par l'application intime de la surface inférieure sur la surface supérieure. C’est un mode défensif particulier, analogue à celui du Crabe, qui laisse sa patte entre les mains de celui qui l’a saisi (Fredericq). Les Astéries ont presque toutes ce mode de défense particulier, qui est l’autotomie. Si un bras est attaqué et que les moyens ordi- naires de défense soient impuissants, la partie lésée se sépare du reste de l'individu, qui peut alors fuir librement. Chez l'Ast. gla- cialis, la rupture a presque toujours lieu au ras du disque ; chez les autres espèces, Astropecten, Luidia, Echinaster, Asterina, dans un intervalle quelconque de deux vertèbres brachiales. Les bras qui repoussent ont souvent un pigment différent (Ast. glacialis) ; généralement, il ne reste aucune trace de la séparation, si ce n’est une différence de taille ; les divers organes se reforment très rapide- ment ; j'ai vu, sur un Æchinaster sepositus adulte, un bras en voie de rédintégration mesurant 3% ; l'œil, le tentacule et les ambulacres étaient parfaitement formés. Dans la rédintégration, il se forme un bouchon cicatriciel formé de cellules embryonnaires, de globules du sang qui viennent s’y accoler ; puis tous les organes lésés bour- geonnent en gardant leur structure propre. Tube digestif. Les Astérides possèdent un appareil digestif volumineux remplis- sant une grande partie du disque et des bras. Dans ses grandes 32 L. CUÉNOT. lignes, il est connu depuis longtemps (Tiedemann, Müller et Tros- chel) ; il est formé en règle générale d’un œsophage rétréci débou- chant dans un vaste sac stomacal à parois très circonvolutionnées. De ce sac partent inférieurement dix cæcums glandulaires très plissés, qui se rendent dans les bras :ce sont les cœcums radiaux, et encore plus bas, près de l’orifice anal, se trouve un certain nombre de glandes que j’appellerai cœæcums stomacaux. L’anus manque chez les Luidia et les Astropecten ; il n’y a pas de cæcums stomacaux chez la Luidia, comme cela a été constaté par Müller et Troschel. Quand l’anus existe, il est asymétrique et occupe une position tout à fait constante ; quand on regarde l'Étoile par la face inférieure ou aborale, la plaque madréporique étant placée en avant, c'est toujours dans l’interradius suivant, à droite de la plaque, que l’on trouve l’anus (pl. V, fig. 9, 10 et 11, an). Lôven a montré qu’il en était de même chez le très jeune Oursin régulier, mais, chez celui-ci, l'anus se déplace peu à peu vers la droite, de façon à se placer en face de l’espace ambulacraire qui suit l’interradius qu'il a quitté. (es rapports ont une très grande importance à propos de la fixation du plan antéro-postérieur de l’Astéride. Asterias glacialis. — Le tube digestif commence par une partie horizontale, qui s’invagine au centre pour former l’orifice buccal ; à partir de cette bouche (pl. IV, fig. 1 et 2), le tube digestif va en s’élargissant ; ses parois se plissent beaucoup ; enfin, après avoir donné naissance aux cæcums radiaux, le sac s’accole contre {a paroi inférieure et interne du test, où il recoit les cæcums stomacaux. Une zone très nette, très glandulaire, localisée à cette partie inférieure du tube digestif, présente de petits plissements nombreux, formant une espèce de velouté, qui se prolongent dansla partie inférieure du cæcum radial. La partie œsophagienne est lisse, plus vivement colorée, et paraît aussi plus glandulaire que la portion très plissée qui la suit et la sépare de la zone stomacale. Ce type général peut s'appliquer à tous les Astérides ; chez tous, le commencement et la fin du sac stomacal sont un peu plus glan- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 33 dulaires que la partie intermédiaire ; mais, chez aucun type, cela n’est si net que pour les Æchinasteridæ. La portion inférieure du sac stomacal, suivant l’état de plénitude de ses cellules, est teintée en rouge vif ou en orangé ; la portion supérieure ou œsophagienne présente un développement inusité (pl. II, fig. 14) ; quand on ouvre un Æchinaster sepositus par la face inférieure, après avoir enlevé la plus grande partie du sac stomacal, on voit dix poches d’un rouge brun, à parois extrêmement plissées, qui forment une couronne autour de l’œsophage ; elles mesurent environ 4 ou 5"" ; elles sont limitées par les fortes brides mésentériques qui relient le tube digestif aux axes vertébraux ; leur cavité interne est presque effacée par leurs nombreux replis ; comme l’œsophage présente la même coloration rouge, on peut les considérer comme des appa- reils glandulaires qui lui sont surajoutés, d’où le nom de poches œsophagiennes que je propose. La Cribella oculata en possède éga- lement, moins vivement colorées ; il est probable que la Culcite, le Pentaceros et le Gymnasteria en ont de fort volumineuses, mais l’alcool déforme tellement le tube digestif qu’on n’en peut donner une description exacte. Cœcums radiaux. — Les cæcums radiaux existent chez toutes les Astéries que j'ai étudiées ; morphologiquement ce sont des diverticules du sac stomacal, qui s’étendent dans la partie libre des bras. Ils n’apparaissent qu’assez tardivement ; chez un jeune Astropecten squamatus, dont le grand rayon (mesuré du centre de la bouche à l'extrémité du bras) mesurait 12°” (le quart de la taille adulte), ils avaient une longueur de 4** (pl. III, fig. 5); c'était un simple allongement tubulaire du sac stomacal, sans replis accentués, et présentant la même histologie. Mais, chez l'adulte, ils sont très différenciés ; un large sac très aplati (pl. IT, fg. 20, p) porte des poches latérales perpendiculaires à sa direction, et qui alternent régulièrement; ces poches à leurtour se plissent latéralement un certain nombre de fois, ce qui produit une augmentation de surface considérable ; iln’y a que ces der- ARCH. DE ZOOL. EXP, ET GÉN, — 22 SÉRIE. — T, V bis, suPPL. 1887, — 2° Mem. 38 34 L. CUENOT. niers plissements qui soient colorés en noir ou en brun, le reste garde une teinte blanchâtre identique à celle de l’estomac. Le sac médian, qui en est le prolongement direct, s’élargit à sa base et débouche par un très large orifice dans le tube Gigestif. Parfois, ces cæcums semblent naître par paires sur un même prolonge- ment (Asterias, Müller et Troschel) ; d’autres fois, ils sont très écartés ; ce sont là des détails sans importance ; ils sont parfois très courts, chez les Aséropecten platyacanthus, spinulosus et squa- matus, où ils n’atteignent guère que le tiers du bras. De même chez le Palmipes, cette jolie et singulière espèce, régulièrement pentagonale ; comme la cavité des bras est presque nulle, les cæcums radiaux restent cantonnés dans le disque, mais n’en existent pas moins (pl. II, fig. 13, r) ; ils ont une longueur de 4 à 5° chez un échantillon dont R =21"". La structure que nous venons de décrire est celle des familles des Asteriadæ et des Astropectinidæ ; les familles des Æchinasteridæ (Echinaster, Cri- bella) et des Asterinidæ (Asterina, Palmipes, Solaster) présentent un perfectionnement particulier : le sac médian s’allonge considé- rablement et forme un réservoir volumineux qui, dans la position naturelle de l’animal, est situé en dessous du cæcum radial ; ce réservoir va environ jusqu’à la moitié ou aux trois quarts du cæcum, il est marqué de plis obliques régulièrement espacés (pl. IL, fig. 11, 13, 18); il débouche largement dans le sac stoma- cal, dont il n’est qu’une continuation (pl. Il, fig. 15, s.). Cœcums stomacaux. — Nulle partie ne présente plus de varia- tions de forme ; on leur a donné les noms de Blinddarmchen (Tie- demann), de cæcums interradiaires (Müller et Troschel), ce qui implique une idée d’alternance avec les cæcums radiaux ; je rejette ce nom, car cela n’est aucunement vrai ; ces cæcums se logent où ils peuvent, prennent les formes et les positions les plus di- verses et n’ont aucune relation morphologique avec les interra- dius. MM. Carl Vogt et Yung les ont appelés cæcums rectaux chez l’Astropeclen aurantiacus, comme représentant le rectum qui CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 35 manque chez cette espèce ; il n’y a qu’à faire remarquer que ces cæcums existent aussi chez les Astéries pourvues d’anus pour faire rejeter cette opinion. Ce sont de simples diverticules du sac stomacal, analogues aux cæcums radiaux, présentant la même histologie ; on peut s’en con- vaincre par l'étude du développement ; chez de très jeunes Astro- pecten aurantiacus (R=82""), on les voit apparaître comme de simples prolongements tubulaires du sac stomacal (pl. IIT, fig. 4) ; ces prolongements, d’abord séparés, se réunissent ensuite, puis se plissent considérablement à leur intérieur ; ils atteignent lente- ment leur taille adulte. On sait qu'ils manquent chez la Luidia ; la partie inférieure du sac stomacal ressemble alors beaucoup à la même partie chez les Ophiures ; elle est étroitement appliquée à la paroi du corps par de nombreuses brides mésentériques. Chez tous les Astropecten que j'ai étudiés, les cæcums stomacaux assez réduits forment une masse partagée en deux lobes accentués par une forte bride mé- sentérique qui s'attache au test. Les deux lobes sont plus ou moins égaux et réguliers chez l’Astropecten aurantiacus, ce sont les Blinddarm de Tiedemann (pl. LIL, fig. 6) ; assez petits mais égaux chez les Astr. spinulosus et squamatus (pl. IIL, fig. 7) ; chez l’Astr. hystriz, les deux lobes sont très allongés et flottent librement dans la cavité générale (pl. III, fig. 9). Enfin, chez l’Astropecten pla- tyacanthus, chacun des lobes émet un certain nombre de petits tu- bes secondaires, qui se ramifient encore à leur extrémité (pl. IIT, fig. 8). Si l’on coupe avec soin la bride mésentérique et ses adhérences au test, on voit qu’à l’endroit où devrait se trouver l'anus des pla- ques calcaires se disposent par rangées concentriques en s’amineis- sant wraduellement, de façon à limiter un petit espace central (pl. III, fig. 7 et 9, a), si bien que l’on pourrait croire à un orifice anal ; effectivement, le test est réduit en.ce point à une lame tres sy . , ’ e A / D mince, mais n’est pas perforé. On sait, d’après Lôven, que l'anus 36 L. CUÉNOT. se pratique de dedans en dehors, le test s’amincissant de plus en plus jusqu'à perforation complète (Abst. glacialis). À côté de la Luidia ciliaris qui présente une paroi parfaitement lisse et sans trace d’amincissement, les Astropecten sont arrêtés à une phase postérieure, mais l’orifice n’est pas encore pratiqué ; enfin, chez les Archaster, si voisins des Astropecten qu'il est à peu près impos- sible de les distinguer génériquement, il y a un anus très petit, mais parfaitement formé. Les cæcums stomacaux sont également formés de deux lobes chez le Brisinga coronata (Tudwig, 33). Dans la famille des Culcitidæ, Müller et Troschel ont montré qu'il y a dix cæcums stomacaux ; ils naissent par cinq tubes in- terradiaires qui se divisent bientôt en deux branches allant dans deux bras contigus; j’ai retrouvé cette forme chez le Pentaceros turritus et le Gymnasteria carinifera. Chez l’Asterina gibbosa, ils sont assez réduits, et divisés en cinq lobes assez profonds (pl. IT, fig. 11, e, et 12). Le Palinipes a cinq longs tubes assez grêles (pl. IL, fig. 13, c). | Chez l’Echinaster sepositus, la Cribella oculata, les cæcums sto- macaux sont fort irréguliers, ils forment une très grosse poche, vi- vement colorée, qui suit toutes les sinuosités de la paroi inférieure ; il y a généralement cinq lobes, chacun d'eux se bifurquant pour aller dans deux bras contigus (pl. IT, fig. 15 et 17). Si on ouvre un de ces sacs, on voit qu'ils ne sont pas simplement plissés à leur intérieur, mais bien couverts de villosités assez grandes, visibles à la loupe (pl. IE, fig. 16). Chez tous ces types, cet appareil glandu- laire débouche dans le sac stomacal par une large ouverture, suscep- tible d’être fermée par un sphincter. A l'extrémité opposée, il se prolonge pour former un court rectum de quelques millimètres, pourvu de fortes parois musculaires ; les excréments, pour sortir (s'ils le font, ce qui est douteux), sont forcés de traverser la glande. Chez les Asterias glacialis et rubens, les glandes sont très irré- gulières et présentent beaucoup de variations individuelles ; elles ' CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 37 sont formées d’un nombre variable de tubes allongés, peu ramifiés, divisés en deux groupes par une bride mésentérique, et qui con- vergent tous vers un même point ; suivant l’état de leurs cellules, ils sont colorés en noir verdâtre ou en gris; j'en ai vu une fois de pourpre, comme les cæcums d’Æchinaster. Quand on les pique avec une aiguille, on les voit se contracter légèrement ; ils possè- dent, en effet, une forte couche musculaire. À l’intérieur, ils sont extrêmement plissés. Chez les jeunes Asterias (pl. IL, fig. 19), iln y a qu’un très petit nombre de cæcums; à mesure que l'animal avance en âge, le nombre augmente, et la glande se complique jus- qu’à atteindre l’état représenté fig. 19. Ces cæcums stomacaux nes’insèrent pas directement sur le tube digestif ; l'estomac se pro- longe en un court rectum, et c’est sur les flancs de ce rectum que débouche la petite poche à parois épaisses formée par leur réunion ; leur contenu, malgré cette disposition en apparence défavorable, peut pourtant refluer dans l’estomac, lorsque le rectum est fermé du côté anal par la contraction de ses paroïs; ce qu’on prouve au moyen d’injections poussées par l'extrémité d’un des tubes, le plus souvent le liquide coloré passe dans l’estomac sans qu’une goutte s’échappe par l'anus. Histologie. — Le tube digestif est formé de quatre couches une interne, l’épithélium glandulaire, munie d’une épaisse cuti- cule ; une couche conjonctive, une musculaire, et une zone externe formée par l’épithélium péritonéal. La couche musculaire est très épaisse dans la portion horizontale de l’œsophage, où elle est formée de fibres rayonnantes (pl. IV, fig. 16, m), ce qui explique comment la bouche peutse fermer ou s'ouvrir largement ; elle est formée de fibres circulaires dans les cæcums stomacaux (pl. I, fig. 21,m); enfinelle esttrès mince dans le sac stomacal et man- que absolument dans les cæcums radiaux. La couche conjonctive, formée de fibrilles et detissu fondamental, varie d'épaisseur sui- vant les points où on l’observe, comme la couche musculaire. Elle est excessivement mince dansles eæcums radiaux (pl. IL, fig. 26). 38 L. CUÉNOT. Dans tous les plissements ou villosités, elle envoie une lame soute- nant l'épithélium glandulaire (pl. II, fig. 21). Chez les Culcitidæ et l’Ophidiaster Chinensis, on trouve un grand nombre de spicules dans la couche conjonctive, ainsi que dansles brides mésentériques. Ces spicules ont les formes les plus diverses (pl. III, fig. 10), pe- tits bâtonnets, plaques aréolées, mais jamais ils ne sont géométri- quement définissables. Il y a deux sortes de cellules glandulaires, les unes muqueuses, très peu répandues, les autres granuleuses, qui secrètent le ferment digestif et qui sont de beaucoup plus importantes. Pour les étu - dier avec fruit, il faut les laisser 24 heures dans l’acide osmique à 1 p. % et les dilacérer après l’action plus ou moins prolongée de l’eau distillée. (Procédé de Ranvier.) Les cellules muqueuses (pl. IT, fig. 22, 4, fig. 24) sont calycinales ; ellesse composent d’un vaste élargissement en forme de coupe, supporté par un pédicule conte- nant le noyau ; on observe parfoisunréticulum très clair quise trouve dans la coupe (pl. III, fig. 3); ces cellules sont vibratiles et por- tent deux ou trois cils, mais sans plateau cuticulaire. On les trouve un peu partout, mais les poches œsophagiennes de l’Æchinaster sepositus en sont la place de prédilection ; elles sécrètent une glaire transparente, qui euveloppe les proies dont les astéries se nourris- sent, mais je ne crois pas qu’elles aient une action directe dans la digestion. Les cellules en forme de bouteille que décrit M. Hamann n'existent pas; je n’en ai jamais trouvé dans mes nombreuses coupes ou dilacérations, tandis que j’ai constaté bien des fois la présence des cellules que je décris. Les cellules granuleuses sont bien différentes ; très longues, de 70 à 150 /, elles contiennent un protoplasma réticulé et un noyau ovoïde, nucléolé ; leur base se rétrécit beaucoup et s'insère sur la couche conjonctive sous-jacente. De vetits granules réfringents se forment dans le réticulum protoplasmique (pl. II, fig. 23 et 25); quand ils ont atteint une certaine taille, ils tombent dans les inter- valles jusqu’à ce que la cellule soit remplie. Je ne m'explique pas CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 39 comment ces granules peuvent sortir de la cellule, puisque celle-ci est recouverte d’un plateau cuticulaire avec un ou deux cils vibra- tiles (pl. II, fig. 8, c), toujours est-il qu’ils s’échappent d’une facon ou d'une autre, laissant le réticulum protoplasmique recom- mencer une nouvelle évolution; sur le vivant, ces granules sont d’un jaune pâle, rarement légèrement pourprés ou bruns. Je me suis assuré que les Ophiures présentent des cellules identiques à granules bruns dans tout le revêtement stomacal. D'après les recherches de M. Tourdan, l'élément digestif des Holothuries est semblable au type que nous venons de décrire. Enfin, chez les Actinies, d'après les travaux des frères Hertwig *, le canal «æso- phagien (Schlundrohr). en outre des cellules muqueuses et épithé- liales, contient un grand nombre de cellules digestives à gros gra- nules qui me paraissent identiques à celles des Astéries, avec le même mode de sécrétion. Chez l’Echinaster et la Cribella, les granules digestifs de l’esto- mac présentent une taille plus considérable que dans les descrip- tions précédentes (fig. 24, 25, 26), ce qui donne à la cellule allongée un singulier aspect ; elle est formée d’un empilement de petites sphères qui ne se touchent pas, étant séparées par le réti- culum protoplasmique qui les a formées ; ce n’est d’ailleurs qu’une simple variété, les caractères microscopiques restent identiquement les mêmes. On trouvera sans doute une certaine ressemblance entre Îles cellules digestives de la Cribelle et les cellules müriformes de l’épi- thélium externe (comparer les figures précédentes avec la fig. 12, pl.I, m), elles ont une forme semblable, mais là s'arrête le paral- lèle qu'on peut établir ; en effet, les deux sortes de granules se comportent d’une manière tout à fait distincte avec les divers réactifs: ainsi les granules digestifs sont réfractaires au carmin, qui colore les autres en rose ; ils ne résistent pas du tout à l'acide picrique, qui laisse intacts les seconds. * O0. etR. Hertwig, Die Actinien, Jena, 1879: 40 L. CUÉNOT. Toutes mes figures représentent des cellules en activité, pleines de granules ; mais l'aspect est tout à fait différent, lorsque les cellules sont vides ; on ne voit plus que de grands filaments proto- plasmiques, présentant les formes les plus diverses, et sans trace de granulations. À part cet état indifférent, les cellules granuleuses sont répandues en plus ou moins grand nombre sur la surface du tube digestif; elles sont plus nombreuses au commencement (zone œsophagienne) et à la fin (zone stomacale) (pl. IT, fig. 22, 23, 25); dans la partie intermédiaire, elles sont mêlées à beaucoup de cel- lules indifférentes ; les cæcums stomacaux (pl. III, fig. 2), les cæcums radiaux (pl. III, fig. 1) présentent un épithélium entiè- rement formé de cellules digestives. Le réservoir du cæcum radial (pl. IL, fig. 26) est un peu moins actif que celui-ci. Nous avons déjà vu que l’épithélium est un peu particulier chez les Æchinasteridæ ; les poches œsophagiennes (pl. Il, fi:. 24) contiennent beaucoup de cellules à gros grains mêlées à des cellules muqueuses. Enfin, sauf dans les cæcums stomacaux, on trouve partout des cellules muqueuses, rares, il est vrai. Une couche fibrillaire, qui doit être considérée comme nerveuse, court entre les bases des cellules ; je l’ai trouvée allant en dimi- nuant d'épaisseur, dans toute l'étendue du sac digestif, depuis l'œsophage jusqu’à l’anus ; elle se prolonge, également très réduite, dans le réservoir du cæcum radial ; enfin, chez l’Astropecten auran- tiacus, je l'ai retrouvée avec une netteté indiscutable dans les cæcums stomacaux. M. Hamann a reconnu que dans l’œsophage se trouvait une couche nerveuse, mais la figure qu’il en donne n’est pas très exacte ; il avoue qu’il n’a pas pu la suivre plus loin. J’en reparlerai d’ailleurs, à propos du système nerveux, où je donnerai les preuves de sa nature nerveuse, cette question étant en ce moment des plus discutées. Physiologie. — Tous ceux qui ont observé les Astéries au bord de la mer connaissent bien leur singulier mode de préhension des aliments. Quand une Etoile a trouvé une proie à sa convenance, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 41 elle dévagine son sac stomacal, qui s’applique sur celle-ci, et l’en- veloppe complètement dans ses replis ; la digestion paraît être extérieure ; à la vérité, les particules alimentaires se détachent peu à peu sous l’action des sucs digestifs, mais e:les sont attirées et comme dégluties dans la portion du tube digestif qui est restée à l’intérieur, et là s’opère la véritable dissolution des aliments et leur tranformation en substances solubles. Dès qu’on dérange l’Astérie, elle abandonne son repas et fait rentrer son estomac à l’intérieur du corps. Pour le dévaginer, elle contracte les muscles péritonéaux ; la pression du liquide de la cavité générale fait alors sortir le tube digestif; pour le réintégrer, les muscles des brides mésentériques se contractent, et l’attirent à l’intérieur. À Banyuls, on voit dans les bacs des Asterias alacialis qui atta- quent de gros oursins et dévorent toutes les parties nutritives situées sur le test. À Rec’hier Doun (Roscoff), j'ai trouvé à marée basse, dans un petit bassin rempli d’eau, une Astérie de la même espèce qui était en train de manger un Portunus puber de forte taille, qui venait de muer ; les Astéries immobilisent en ce cas leurs proies au moyen de leurs ambulacres. Leurs mets favoris sont les mollusques, et surtout les lamellibranches; bien que ceux-ci puissent appliquer leurs valves l’une contre l’autre, l’Astérie les embrasse étroitement, sécrète une glaire douée de propriétés veni- meuses particulières, si bien que le mollusque cède bientôt et en- tr'ouvre ses valves, sans pouvoir les refermer ; l'estomac se déva- gine, s'introduit dans l'intervalle laissé libre et a bientôt tout dévoré ; on peut répéter facilement cette observation en mettant dans le même bac des Asterina gibbosa et des pectens ou des mou- les. L’Asterina gibbosa arrive même à digérer extérieurement des gastéropodes très turbinés, tels que des bigorneaux (Zittorina littorea) ; quant aux proies de petite taille, cette espèce les avale en tout ou en partie et les digère intérieurement (bras d’Ophiu- res, Phascolosomes). Les Asterias rubens, si fréquentes sur certaines plages, font de 42 L CUÉNOT. véritables ravages dans les bancs d’huîtres ou de moules, surtout dans les bancs naturels, qui ne découvrent jamais. Les ostréicul- teurs disent qu'à certaines époques ont été détruits des bancs entiers à Cancale, Oléron, Arcachon, etc. ; M. de Montaugé cite des pares d'huîtres portugaises à la Tremblade, dévastés par les Etoiles*. Dans la rivière d’Auray, se trouve un banc naturel de 10 à 12 kil. sans dicontinuité ; des Astéries ont été apportées par les pêcheurs, qui nettoient leurs filets, près d’un banc dit de l’Ours, à peu près au milieu de la rivière ; ce banc est en ce moment dévasté. La seule ressource des ostréiculteurs est de faire draguer à fond les parties attaquées, puis de porter les Etoiles à terre, où elles peuvent servir pour améliorer les terres argileuses ; l’habi- tude qu’ont certaines personnes d’enfiler les Etoiles sur un bâton pointu, comme on le fait pour les limaces, et de les rejeter sur la plage, me paraît tout à fait insuffisante, ces animaux ayant une vitalité extraordinaire ; une autre mesure préventive, les Astéries étant peu voyageuses, est d'engager les pêcheurs à ne pas jeter les Etoiles qui se trouvent dans leurs filets, dans les endroits où elles n'ont pas encore apparu. Tous les Astropecten et Luidia que j'ai étudiés avalent de préfé- rence les mollusques dont ils se nourrissent, tandis qu’on en trouve plus rarement dans le tube digestif des autres espèces ; jai trouvé une fois une vingtaine de Venus ovata, toutes vidées et digérées, dans l’estomac d’un Astropecten aurantiacus adulte. Il est utile de remarquer que les coquilles ne sont jamais brisées (ce qui prouve qu'il n’y a pas la moindre trace de mastication) et que les détails calcaires les plus délicats sont parfaitement conservés. Deux Luidia ciliaris capturées à Roscoff en été 86 ont été prises sur des cordes à pêcher le Chien de mer (Scyllium canicula), en train de dévorer le poisson mis comme appât. Enfin, j'ai trouvé dans l’es- tomac de divers Astropecten des débris de Crustacés, de Céphalopo- * De Montaugé, Les ennemis des huîtres, pag. 16. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 43 des et des écailles de poissons. On voit que si les Astéries sont car- nassières, elless’accommodent volontiers de toutes sortes d'aliments. Les aliments ne pénètrent jamais ni dans les cæcums radiaux ni dans les cæcums stomacaux ; le contenu de ceux-ci s'écoule naturellement dans le tube digestif lorsqu'il en est besoin, la con- traction musculaire des cæcums stomacaux aidant beaucoup les mouvements du produit sécrété. À l’état de jeûne, les cæcums radiaux sont vides ou ne renferment que peu de matières, dans lesquelles on reconnaît facilement les granules digestifs, soit fon- dus ensemble en présentant l'apparence de larges gouttes grais- seuses, soit encore isolés. Quel est le rôle de l’anus ? J'ai vu une seule fois une Asterina gibbosa et un Æchinaster sepositus expulser quelques excréments par l’anus; on sait que le rectum est fort musculeux, les corps sont projetés brusquement loin de l’Astérie. Mais l’emploi de l’anus doit être singulièrement restreint ; je crois qu’il n’agit que lorsque les excréments pénètrent accidentellement dans les cæcums stoma- caux ; les corps non digérés sont le plus souvent rejetés par la bou- che, comme cela a lieu forcément pour les Astropectinidæ et les Ophiures. On s’accorde généralement à attribuer aux cæcums stomacaux une fonction d’excrétion ; leur position près de l’anus semble con- firmer cette manière de voir ; Milne-Edwards dit qu’on y a trouvé de l'acide urique *. Dans cette hypothèse, comment expliquer que des organes si importants manquent chez la Luidia ? Ils existent chez les Astropecten, où il n’y a pas d’anus et où leur produit d’ex- crétion serait forcé de traverser tout le tube digestif. Ils présentent la même histologie, la même coloration que les parties très glandulaires du canal digestif. Enfin j'ai cherché nombre de fois à déceler la présence de l’acide urique par le pro- cidé classique, et j'ai toujours obtenu un résultat négatif, en me * Milne-Edwards, Leçons de physiologie, tome 5, p. 324. L4 L. CUÉNOT. plaçant dans les conditions les plus diverses, alors que des organes vraiment rénaux, comme le corps de Bojanus des Acéphales ou des Molgules, me donnaient franchement la coloration de la murexide. Nous verrons, à propos du liquide sanguin, comment peut s’opé- rer l’excrétion. Système nerveux. Le système nerveux des Astérides a été et est encore l’objet des plus graves discussions ; l’incertitude ne porte pas seulement sur les éléments constitutifs, maïs sur sa place même : ce qui est ner- veux pour les uns est du tissu conjonctif ou un épithélium pour les autres ; on voit combien les avis sont partagés. Avant d'aborder l'historique de la question, je crois qu'il vaut mieux exposer le résultat de mes recherches ; cela rendra plus facile la discussion et l’exposé des diverses opinions. Quand on examine la face supérieure ou orale d’une Astérie, débarrassée de ses ambulacres, on voit à la limite du pentagone dessiné par les pièces calcaires du disque, un léger soulèvement de la membrane buccale, qui se prolonge dans les cinq bras au fond de la gouttière ambulacraire, où il se termine par l’œil et le tentacule médian. Si l’on pratique des coupes verticales et trans- verses du péristome ou des bras (pl. IV, fig. 6,7 et 16, n),on voit qu’en dessous de cet épaississement, se trouve un large vais- seau ou sinus (s, fig. 7 ; r, fig. 16) qui, en règle générale est séparé, en deux par un septum plus ou moins épais; en dessous encore, séparé de ce sinus soit par lessmuscles vertébraux (fig. 7, «), lorsque la coupe passe par une vertèbre, soit par une lame conjonc- tive, lorsqu'elle passe entre deux vertèbres consécutives (pl. VIIT, fig. 10), se trouve un second vaisseau bien limité qui est le canal ambulacraire (a ou b). C’est dans l’épaississement supérieur (n) que se trouve le sys- tème nerveux, courant entre les bases de cellules épithéliales. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 45 Une couche conjonctive, de mince épaisseur, revêtue d’un épi- thélium pavimenteux, le sépare du sinus sanguin sous-jacent (pl. ITT, fig. 11, s); cet épithélium revêt également [e septum vertical, qui renferme les formations les plus diverses, comme nous le verrons à propos de l'appareil circulatoire. La dissection et l’étude du vivant ne peuvent nous en apprendre plus long ; il faut avoir recours à divers réactifs ; le plus précieux est l’acide osmique à 1 p. O[0, que l’on fait d’abord agir seul, et que l’on compare ensuite à des préparations au carmin osmiqué ; quand la coloration est aussi foncée que possible (248 et plus), on transporte 24h et 48; dans l’eau distillée, afin de dissocier les éléments ; on dilacère dans la glycérine ; les coupes minces très colorées au picrocarmin ou au carmin boracique donnent aussi de bons résultats. Dans l'exposé qui va suivre, je me suis trouvé contraint de répéter quelques faits constatés par des auteurs précédents, surtout par M. Hamann ; inais comme M. Hamann a presque toujours étudié des individus extrêmement jeunes, de quelques millimètres de diamètre, et d’une seule espèce, il n’est pas inutile de généraliser chez les adultes les découvertes qu'il a pu faire ; de plus, elles ont été contredites ou interprétées d’une autre façon par des auteurs plus récents, M. Perrier entre autres (50), ce qui rend nécessaire une deuxième affirmation. Ces recher- ches sont assez délicates et les controverses assez ardentes pour qu’une constatation nouvelle soit superflue. Le cercle nerveux et les cordons radiaux ont exactement la même constitution ; ils sont formés d’un épithélium à cellules fila- menteuses extrêmement allongées, entre lesquelles se trouvent les éléments nerveux (pl. III, fig. 11). La partie inférieure de la cellule épithéliale s’appuie sur le tissu conjonctif sous-jacent (f); la partie supérieure, un peu élargie, s’épate pour supporter un épais plateau cuticulaire, muni de un ou deux cils vibratiles assez courts et peu actifs. Les cellules entières mesurent 140 DE les _ noyaux sont localisés à la partie supérieure, tous situés à peu 6 L. CUÉNOT. près à la même hauteur ; ils sont gros, ovalaires ou sphériques, nucléolés, le plus souvent collés en saïllie sur le filament cellulaire et entourés d’une petite quantité de protoplasma (pl. IT, fig. 13, b). Dans la portion élargie de la cellule, on trouve quelques gra- nulations protoplasmiques ; chez l’Astropecten aurantiacus , le ruban nerveux est coloré en jaune (c'était le vaisseau orangé de Tiedemann, orange farbene Gefäss); cela est dû à des grains irré- culiers de pigment jaunâtre situés dans les cellules que je viens de décrire (pl. IL, fig. 13, a, j). La cuticule mesure 4 d'épaisseur ; elle est formée des plateaux cellulaires juxtaposés. Entre les filaments cellulaires et sur une hauteur de 120 4, se trouve la substance nerveuse, fibres et cellules. Les fibrilles sont longitudinales dans le cordon radial, circulaires dans l’anneau ner- veux. Ce sont des fibrilles extrêmement ténues, dont on ne peut approfondir la structure même aux plus forts srossissements (1400 fois); c’est une masse de substance granuleuse, à structure fibrillaire ; elle est réfractaire au carmin, se colore en gris par l’acide osmique ; les fibrilles ne sont pas raides et parallèles, mais plutôt s’anasto- mosent continuellement, de façon à former un plexus grossièrement fibrillaire (pl. III, fig. 12, n). Sur les coupes transversales, elles donnent l'apparence d'un pointillé tellement fin, qu'avec les crayons les plus durs on n’en peut reproduire exactement l’aspect. Partout où on les trouve, elles répondent exactement à cette description, ce. qui les rend assez faciles à reconnaître ; elles sont toujours paral- lèles les unes aux autres ; jamais je n’ai vu dans mes nombreuses coupes ou dilacérations, cette apparence de faisceaux croiseurs dont parle M. Hamann. Les cellules nerveuses sont fort peu nombreuses, on les voit iso- lées au milieu des fibrilles et dispersées irrégulièrement ; c'est dans le cordon radial et l'anneau nerveux qu’on en trouve le plus fréquemment, mais il y en a partout où existent les fibrilles. Elles sont fusiformes (pl. IIT, fig. 12), à gros noyau rond, nucléolé, occupant exactement le centre du fuseau ; il est impossible de voir CONTRIBUTION A L’ETUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 47 si les fibrilles dépendent de ces cellules bipolaires ; celles-ci parais- sent simplement intercalées entre les fibrilles. Ce sont les seules cellules nerveuses qui existent, et l'on voit qu’elles sont peu impor- tantes ; toutes celles multipolaires que l’on à décrites (Wilson, Lange, Perrier, Carl Vogt et Yung) sont des cellules du tissu con- Jonctif ou des cellules épithéliales, et n’ont aucun rapport avec celles que nous venons de définir. Le cordon radial n’est pas nettement délimité, comme l’ont pré- tendu Teuscher, Wilson, Carl Vogt et Yung, mais il se continue la- téralement avec l’épithéliu à externe des ambulacres (pl. VI, fig. 8, et pl. IV, fig. 6); dans les espaces interambulacraires, il s’étale en diminuant d'épaisseur. Hoffmann, Lange, Ludwig, Hamann ont bien vu cette continuation ; l’épithélium ne change presque pas de forme ; la couche nerveuse diminue d’épaisseur et se trouve comme toujours entre les bases des cellules ; dans l’ambulacre, les fibrilles sont alors circulaires, je n’en ai jamais rencontré de longitudinales (M. Hamann). A la ventouse (pl. IIT, fig. 22), l’épaisseur de la zone fibrillaire augmente légèrement, ainsi que la hauteur des cellules ; les cellules épithéliales sont longues, filamenteuses, avec un noyau nucléolé situé à différentes hauteurs ; elles portent une cuticule épaisse munie de cils vibratiles très forts. On ne trouve * qu’assez rarement des cellules glandulaires comme celles de l’épithé- lium externe. M. Jourdan a donné une description fort erronée de l'épithélium de la ventouse des Astéries, et il ne parle pas de la couche nerveuse. . À l’extrémité du bras, le ruban nerveux (pl. IIT, fig. 14, 15 et 16) porte les sodets oculaires et revêt le tentacule terminal ; j’en réserve la description au chapitre des organes du tact. | Le cercle nerveux péribuccal n’est pas non plus limité (pl. IV, fig. 16), il se continue directement avec le revêtement du tube diges- tif (Ludwig, Hamann). L’épithélium revêt la portion horizontale de l’œsophage, s’invagine au centre pour former la couche interne glandulaire du tube digestif. La couche nerveuse le suit-elle dans 48 L. CUÉNOT. tout son parcours ? M. Hamann a pu la suivre dans le commence- ment de l’œsophage chez de très jeunes Asterias rubens, maïs il n’a pu aller plus loin : « Wie ïhr Verhalten zu den Zellen des Mittel- darm und der radiaren Blinddarme ist, konnte ich nicht eruiren (20, pag. 14) ». J’ai repris ses études chez les adultes et chez toutes les espèces que j'ai puavoir vivantes ; j’ai obtenu un résultat par- faitement général, grâce au précieux réactif du système nerveux, l’acide osmique : les cellules glandulaires deviennent noires, tandis que la substance nerveuse reste grise ; je ne me suis décidé à afir- mer son existence pour chaque espèce que lorsque j avais pu voir nettement la structure fibrillaire caractéristique. Quant à la direc- tion des fibrilles, M. Hamann croit qu’elles sont lonoitudinales, c’est-à-dire parallèles à l'axe du tube digestif ; je les crois bien plutôt circulaires ; toutefois je n’oserai l’affirmer d’une façon pré- cise. Dans l’œsophage, la zone nerveuse a une épaisseur d’environ 20 L., plus d’un huitième de la hauteur des cellules glandulaires ; on la retrouve jusque dans les moindres replis des poches œsopha- giennes des Æchinasteridæ (pl. IT, fig. 24, n). Dans l'estomac, la zone nerveuse se continue en diminuant in- sensiblement d’épaisseur, (pl. IL, fig. 22 et25,n); ellea à peu près le dixième de l’épaisseur totale; les cellules glandulaires sont bourrées de granules sur presque toute leur longueur; le reste est un petit filament qui plonge dans les fibrilles nerveuses et va s'attacher au tissu conjonctif sous-jacent. Pour voir cette dispo- sition avec netteté, il faut choisir un moment où les cellules sont vides. On trouve ainsi une couche nerveuse jusque dans la partie tout à fait inférieure du sac stomacal (fig. 22). Restent les glandes annexes, cæcums radiaux et stomacaux; nous avons vu qu'elles ne naissent que tardivement et comme prolongements de la surface stomacale ; jai trouvé une zone ner- veuse mince, ayant £ de l'épaisseur totale, dans le réservoir du cæcum radial des Echinasteridæ et des Asteinidæ (pl. IL, fig. 26, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 49 n) ; chez les Asteriadæ et les Astropectinidæ, où n’existe pas ce ré- servoir, j'ai trouvé au commencement du sac médian sur lequel sont greffées les poches latérales et glandulaires du cæcum, une mince couche nerveuse, ayant -1 de l'épaisseur totale, notamment chez l'Astropecten aurantiacus. Mais chez tous les types, la couche nerveuse diminue peu à peu d'épaisseur, et il est impossible de la reconnaître au delà du premier tiers ou de la moitié du cæcum. Enfin, dans la partie vraiment glandulaire colorée en brun (pl. III, fig. 1), je n'ai jamais trouvé trace de fibrilles. Dans les cæcums stomacaux peu développés chez les Astropec- tinidæ, j'ai trouvé une couche nerveuse dans toute leur étendue ; elle est fort mince, & de l’épaisseur totale (pl. IIL, fig. 2, n). Je n'en ai jamais trouvé dans les glandes bien développées des autres familles ; je n’affirmerai pas la non-existence d’une zone nerveuse, à cause des difficultés particulières que l’on éprouve à faire une bonne dilacération; toutefois il est infiniment probable que la zone nerveuse s’arrête à leur base. Enfin, pour terminer cette étude du système nerveux, il me reste à parler du plexus nerveux superficiel; c’est M. Hamann qui la découvert et décrit le premier chez de jeunes Asé. rubens ; je ne sais s’il est facile de le constater chez les jeunes, mais chez les adultes, il faut faire un grand nombre de coupes et de dilacérations avant d'en obtenir de passables. Le grand obstacle est formé par les cellules glandulaires, qui rejettent leur produit de sécrétion dès qu’on touche l’épiderme, ce qui entrave notablement l’action de l'acide osmique ; toutefois, avec beaucoup de patience et quelques tours de main, on arrive à avoir de bonnes préparations. Cette zone nerveuse, cachée entre les bases des cellules épithéliales, revêt absolument tout l’épiderme; les fibrilles paraissent former un plexus plus lâche que dans les points où nous en avons précédemment signalées ; la zone nerveuse présente une épaisseur assez variable, s environ de la hauteur des cellules épithéliales ; elle est un peu plus épaisse dans les branchies lymphatiques (pl. 1, fig. 23, n), les ARCH, DE ZOOL. EX. ET GÉN. — Ÿ SÉRIE, — T, V bis, — suppc. 1887. — 2e Mém. 4 90 ‘ L. CUÉNOT. pédicellaires (pl. I, fig. 12, n), qui sont les organes les plus délicats du test. J’ai reconnu cette couche superficielle chez toutes les espèces à tégument mou, comme Asterias glacialis, Echinaster sepositus, aussi bien que chez celles dont l’épithélium est collé sur le squelette, comme l’Astropecten aurantiacus (pl.I fig. 18, n) et l'Asterinagibbosa. Cette zone nerveuse est en continuation directe avec celle du cercle nerveux et des cordons radiaux ; on voit dans les coupes l’épithé- lium du ruban nerveux se continuer avec l’épithélium ordinaire du corps en s’amincissant considérablement ; les fibrilles nerveuses suivent le trajet de l’épithélium dans lequel elles sont enclavées. Ce plexus nerveux superficiel, tel que je viens de le décrire, es évidemment homologue de celui que MM. Jourdan et Hamann ont trouvé chez les Holothuries; MM. Lôven et Prouho (*) chez les Oursins ; mais les dispositions anatomiques sont notablement différentes, ce qui s'explique d’ailleurs par la différence de position des cordons nerveux radiaires et buccaux chez ces derniers Echi- nodermes. Je ne puis mempêcher de signaler la ressemblance extraordi- naire qui existe entre le système nerveux des Astérides et celui des Actinies, tel qu'il nous est connu par les beaux travaux des frères Hertwig ; on n’a qu’à regarder leurs figures, notamment la coupe du tentacule d'Anthea cereus, pour se convaincre de l’iden- tité histologique des deux systèmes. Je ne veux pas faire de rap- prochement forcé, mais il est évident que ceux qui veulent éloi- gner les Echinodermes des Cœlentérés pour les rejeter au delà des Vers, commettent une faute grave. Généralement les rappro- chements fondés sur le système nerveux sont très légitimes, et il est impossible de méconnaître les liens qui unissent à ce point de vue les Echinodermes inférieurs, tels que les Astéries et peut- (*) Prouho, Sur le système nerveux de l’Echinus acutus, Comptes-Rendus, 22 février 1886, n° 8, pag 444. j CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 51 être les Crinoïdes, aux Cœlentérés supérieurs, tels que les Actinies et les Méduses. À priori, il peut sembler bizarre que chez des animaux aussi inférieurs que les Astérides, le tube digestif ait une couche nerveuse aussi développée, sorte de stomato-gastrique continu ; chez les Actinies, on trouve dans le canal œsophagien (Schlundrohr) et jusque dans l’entéroïde, une couche nerveuse passant entre les bases des cellules glandulaires, dont nous avons déjà fait remarquer l'identité avec les cellules digestives des Astéries. Une différence pourtant à signaler : MM. Hertwig représentent de belles cellules ganglionnaires , très développées, s’unissant souvent en plexus (disque buccal, lamelle musculaire du septum d’Anthea cereus) ; la ressemblance avec le système nerveux des Astérides est si frappante que j’ai recherché avec grand soin chez ces dernières les cellules ganglionnaires dans différents organes ; je suis convaincu qu’il n’en existe pas d’autres que les petites cellules bipolaires que j'ai décrites précédemment. Le système nerveux des Astérides est entièrement contenu dans divers épithéliums ; toute la surface du corps et du tube digestif en est revêtue ; il est, pour ainsi dire, entièrement destiné au tact ; c'est d’ailleurs le caractère du système nerveux des animaux infé- rieurs. Mais il existe des muscles qui sont en communication phy- siologique avec les épithéliums extérieurs ; si l’on touche le ruban nerveux le plus légèrement possible, les pédicellaires voisins vont se mouvoir pour chercher à saisir l'ennemi, les ambulacres vont se contracter, les piquants de la rainure ambulacraire vont se rabattre sur celle-ci pour protéger le point lésé ; il est évident que l’impression ressentie s’est transmise aux muscles des pédi- cellaires, des ambulacres et des piquants. Mais par quelle voie ? Tous les auteurs qui ont parlé de fibrilles nerveuses se rendant vers les muscles ont été trompés par de fausses apparences ou se basent sur des erreurs évidentes d'interprétation ; il est impos- sible de voir sur les coupes ces fibrilles si ténues passer à travers 52 L. CUÉNOT. le tissu conjonctif, si dur et si compact ; personne ne les a jamais vues, et il me semble peu probable que ce soit par ce moyen que la communication s’établisse. Chez les Ophiures, des nerfs volu- mineux se détachent du ruban nerveux radial pour aller aux muscles du bras (Ophiolepis, Ophiocoma scolopendrina) ; il m’a été impossible de déceler une pareille disposition chez les Asté- rides, bien qu’il soit évident qu’il doit exister quelque chose d'ana- logue. Organes des sens. — Les seuls appareils sensoriels sont ceux du tact et de la vision. Mais ici je diffère complètement d'avis avec M. Hamann : dans tout l’épithélium extérieur, pédicellaires, branchies lymphatiques, ambulacres, tentacule, il décrit des cellules spéciales (Sinneszellen), sensorielles, plus délicates que les autres cellules épithéliales dites de soutien (Stützzellen), et qui se continuent directement avec la couche nerveuse sous-ja- cente. Il en serait de même des cellules de l’œil. Je suis parfaitement convaincu qu’il n’y a pas continuation entre les cellules épithéliales, sensorielles ou autres, et la couche nerveuse. Une observation négative n’a pas grande valeur, Je le sais, aussi ai-je cherché à voir sur les cellules les plus sen- sorielles possible, si je puis m'exprimer ainsi, c’est-à-dire dans l’œil et le tentacule, comment elles se comportaient à leur base : jai pu constater sur des préparations d’une grande évidence (pl. IL, fig. 17 et 21), que la cellule s’attache par son extrémité in- férieure sur le tissu conjonctif sous-jacent ; le filament qui repré- sente le corps cellulaire est tellement fin, tellement délicat, qu’il peut se rompre souvent, et paraître alors s’enfoncer au milieu de la couche nerveuse ; mais il n’en est rien. D'ailleurs est-il si nécessaire que la cellule sensorielle se con- tinue directement avec la fibrille nerveuse ? L’excitation se trans- mettra tout aussi bien si elle en est entourée de toutes parts ; voici une preuve qui me paraît décisive et propre à emporter la con- viction : le ruban nerveux, dont les cellules sont moins délicates CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 53 et si nettes après l’action de l’acide osmique qu’on peut les suivre une à une (pl. III, fig. 11), montre avec une certitude absolue qu'aucune de ses cellules épithéliales ne se continue avec les fibrilles nerveuses dans lesquelles elles se trouvent plongées ; il n’y a donc pas de cellule sensorielle, au sens où l’entend M. Hamann ; cependant, si l’on touche le ruban nerveux, même avec la plus grande délicatesse, sur un animal bien vivant renversé sur la face inférieure, on voit tous les organes environnants se contracter, se mouvoir en tous sens. l’excitation s’est donc bien propagée. On retrouve bien, dans les divers épithéliums des cellules plus délicates que les autres, et qui paraissent identiques aux Sinnes- zellen de Hamaun (pl. III, fig. 22, a); j'ai constaté nombre de fois que ces cellules ne se continuaient pas avec les fibrilles ner- veuses; en raison de leur délicatesse, dont la cause est toute mé- canique, elles se rompent plus facilement que les autres et parais- sent ainsi se perdre au milieu des fibrilles. Je pense donc que ce sont des accidents de préparation qui ont induit Hamann en erreur, et qu’iln y a pas de cellules sensorielles au sens où il l’en- tend ; je sais bien que cela choque les opinions généralement reçues, mais je n’ai pu m'empêcher d'exprimer ma conviction. Organes tactiles. — L'extrémité du bras est le siège du tact le plus délicat ; le ruban nerveux se termine chez lAsterias glacialis (pl. II, fig. 14) par une surface arrondie, portant une tache bien délimitée, colorée en rouge vif. Au-dessus de cette tache oculaire se dresse le tentacule, qui est le prolongement du canal ambula- craire radial (Ludwig); il existe dans les plus jeunes stades du dé- veloppement, comme l'ont montré MM. Agassiz (1), de Lacaze- Duthiers (29), Ludwig (35), etc. ; il n’a donc aucun rapport avec un ambulacre, comme on le dit souvent. Dans les bras en voie de rédintégration, il se reforme presque immédiatement ; on le voit facilement sur des bourgeons de 2 à 5"". Le tentacule et la tache oculaire qu’il porte à sa base sont abrités sous la plaque ocellaire (radiale de Liôven) et sont entourés d’un cercle de piquants très 54 L. CUÉNOT. mobiles (pl. IT, fig. 16). Quand on touche le tentacule, il se ré- tracte vivement et les piquants en se rapprochant empêchent com- plètement l’arrivée des sensations extérieures. Il y a aussi un certain nombre d’ambulacres spécialement des- tinés au tact; ils sont plus longs, dépourvus de ventouse, enfin gar- dent le caractère embryonnaire de très jeunes ambulacres (pl. ILE, fig. 15 et 19, a) ; naturellement ils ne servent pas du tout à la locomotion, mais ils passent insensiblement aux ambulacres actifs. Chez l’Asterias glacialis, les quatre paires les plus rapprochées du tentacule médian sont ainsi transformées en organes tactiles et forte- ment pigmentées en jaune ; les quatre à six paires suivantes sont léoèrement colorées à la partie terminale, très longues et grêles, elles passent graduellement aux ambulacres à ventouse. Chez toutes les Astéries que j'ai examinées, un certain nombre d’ambulacres terminaux sont ainsi transformés ; lorsque le bras avance, ils tâtent les corps extérieurs, en se retirant au moment du contact, pour s’allonger un moment après, comme un tentacule de Limacon ; ils sont pourvus de petites vésicules ambulacraires, comme les ambula- cres ordinaires. L’épithélium du tentacule et des ambulacres, voisins est sem- blable ; les cellules sont très délicates ; à leur base, elles s’attachent sur le tissu conjonctif sous-jacent, en s’épatant léoèrement; on en voit quelques-unes dont le filament cellulaire est contracté en spi- rale : c’est une preuve de plus que les cellules ne se continuent pas avec les fibrilles nerveuses (pl. III, fig. 21). Une cuticule épaisse, portant des cils très longs, termine l’épithélium. La zone nerveuse a à peu près la moitié de l'épaisseur totale, de 70 à 80 pr. Les ambulacres sont très sensibles aux impressions, grâce à l'épaisseur de leur couche nerveuse ; mais ce ne sont pas des or- ganes du tact, comme on le dit trop souvent ; en effet, la ventouse se fixe sur une paroi que les tentacules se contentent d'explorer. Même lorsque l'Astérie est immobile, fixée par tous ses ambu- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 55 lacres, les tentacules sont constamment en mouvement, à errer . dans le liquide ambiant. Certains Astropecten de petite taille (Asér. spinulosus, squa- matus) présentent une particularité au sujet des organes tactiles. Quand on les observe dans un bac dont le fond est recouvert d’une épaisse couche de sable, on les voit le plus souvent s’y en- foncer complètement etavec une certaine rapidité ; les cinq extré- mités brachiales portant J’œil et le tentacule se relèvent et dépassent la couche sableuse. En outre, on voit s élever du centre de la face aborale un prolongement conique de près d’un centi- mètre de hauteur ; ce cône, éminemment sensible, gonflé par le liquide de la cavité générale, paraît destiné à avertir l’animal de l'approche des corps étrangers ; en effet, dès qu’on le touche, il se rétracte rapidement, la face aborale redevient plane et l’animal s’enfonce plus profondément dans le sable. Organe visuel. — Nous avons vu, au-devant du tentacule, une tache vivement colorée : c’est l’organe visuel, ensemble de petites masses pigmentaires d’un rouge vif ; il est assez rudimentaire et d’une bien peu grande utilité ; les Oursins, les Comatules et les Ophiures en sont dépourvus, et vivent dans les mêmes conditions que les Astérides. Chez l’Asterias glacialis, la tache oculaire est rectangulaire (pl. III, fig. 14); chez les autres types, elle est plutôt ovalaire (pl. IT, fig. 16) ; elle est extrêmement réduite chez la ZLuidia ciliaris (pl. TTL, fig. 15). Pour en faire une bonne description, il faut combiner les études sur le vivant avec les coupes et les dilacé- rations. L'appareil visuel consiste en une multitude de petits sodets pigmentaires séparés par des espaces incolores. Quand on examine de champ, on voit que ces godets sont légèrement creux et ne ren- ferment aucune lentille ni conformation réfractante quelconque (pl. ILL, fig. 17) ; la cuticule (c) qui revêt le cordon nerveux ra- dial descend jusque dans les godets oculaires qu’elle revêt com- plètement ; sur le vivant, je n'ai jamais observé de cils vibratiles. 56 L. CUÉNOT. Les cellules pigmentées forment un revêtement serré ; les plus grandes sont naturellement les plus externes ; celles qui corres-- pondent au fond du godet sont beaucoup plus courtes. Le pigment formé de granulations d’un rouge vif occupe la partie supérieure et élargie de la cellule ; les granulations, très serrées à la surface, s’écartent un peu en arrivant au noyau (pl. LIL, fig. 18) ; celui-ci occupe toujours la zone immédia- tement inférieure au pigment ; il est gros, ovalaire, avec un nucléole réfringent ; généralement il est en saillie sur la surface latérale de la cellule, entouré d’une mince couche protoplasmique. Le reste de la cellule se réduit à un filament extrêmement fin et délicat, plus ou moins long suivant la place où on l’observe, qui se termine par une extrémité un peu renflée sur le tissu conjonctif sous-jacent. Quand on fait une dilacération au carmin osmiqué après un long séjour dans l’eau distillée, on peut avoir les cel- lules complètement isolées et constater facilement tous leurs carac- tères. Parfois le filament cellulaire porte de petits granules proto- plasmiques, placés de distance en distance ; assez rarement des filaments secondaires s’en détachent (fig. 18), soit que ceux-ci aillent s'attacher au substratum, soit qu’ils se perdent dans la cou- che nerveuse ; enfin j'en ai vu qui, partant d’un point de la cel- lule, venaient s’y recoller un peu plus bas (fig. 18) ; ces filaments n'existent point à toutes les cellules, tant s'en faut ; ils ont évi- demment pour but de multiplier les points de contact avec le tissu nerveux. La cellule porte à sa surface la couche cuticulaire qui la protège ; ces plateaux ont souvent une apparence bizarre: ils sem- blent fichés obliquement sur les cellules ; cela est en rapport, comme on peut s’en assurer en regardant la figure d'ensemble, avec la place où on considère celles-ci ; on en voit, rares à la vérité, qui portent deux de ces plateaux cuticulaires (fig. 18, «’). Lange et les auteurs qui l'ont suivi, les ont considérés comme de petits cris- tallins; c’est une erreur ; ils se comportent à l’acide osmique comme toutes les cuticules que nous avons pu voir, si fréquentes CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 57 dans le tube digestif et les divers épithéliums ; sur le vivant, on voit qu’ils n’ont aucune propriété réfractante spéciale ; enfin, dans des dilacérations, je les ai vus en continuité parfaite avec la cuti- cule des cellules non pigmentées environnantes. Le pigment estextrêmement résistant; il garde la vivacité de sa teinte dans l’acide osmique, les acides, l’alcool même absolu, la glycérine ; il est ainsi bien différent de tous les pigments rouges qui colorent le tégument externe. L’intervalle des godets oculaires est occupé par des cellules fila- menteuses ordinaires, mais moins délicates que les cellules visuelles (pl. III, fig. 17); celles-ci s’insèrent sur un espace assez réduit, vers lequel elles convergent. La couche nerveuse ne contient pas plus de cellules nerveuses que dans le reste du cordon radial ; elle est un peu moins épaisse que dans celui-ci, elle occupe environ la moitié de la hauteur des cellules. Tout l'appareil visuel repose sur une couche de tissu conjonctif assez fortement épaissi et conte- nant beaucoup de fibres à gros noyau. . Historique. — Un grand nombre de travaux se sont succédé sur ces organes visuels, depuis la découverte d'Ehrenberg (1834); la préoccupation d’y retrouver les éléments classiques, cornée, cris- tallin et rétine, a presque toujours faussé les opinions des auteurs, en même temps que les idées erronées sur le système nerveux les empêchaient de se rendre compte de l’anatomie des godets oculaires. Mettenheimer, Wilson et Hæckel (1860) ont pris la surface cu- ticulaire, diviséeen petits polygones correspondant aux cellules sous- Jacentes (voir pl. III, fig. 17), pour une cornée composée de cel- lules polygonales. Jourdain (1865) a donné une assez bonne descriptionde l’œil au point de vue macroscopique; mais il y voyait un cristallin occupant le centre de chaque godet oculaire. Lange (1876) décrivait l’épaississement conjonctif comme une masse ganglionnaire en communication avec les cellules pigmen- taires ; il en est de même de Wilson et de Jourdain; ce sont des LT L. CUÉNOT. noyaux conjonctifs qu’ils ont pris pour des cellules nerveuses. Ludwig (1878) a fait justice de cette erreur ; M. Hamann (1883) a précisé les connaissances de ses prédécesseurs, mais il a fait continuer ses cellules pigmentaires avec les fibrilles nerveuses ; ses figures pèchent d’ailleurs par plusieurs points. Enfin jai montré que je n'étais nullement de l'avis de Lange et de ses successeurs au sujet des pseudo-corps cristalliniens. La seule raison qui puisse faire considérer cet appareil comme visuel est la présence de ce pigment spécial, car toutes les con- formations habituelles des yeux manquent ; suivant l'expression de Jourdain, c'est un œil photoscopique, qui donne seulement la sensation de lumière (Vers), en opposition avec l'œil idoscopique, fournissant de véritables images (Insectes, Mollusques, Crustacés). Organes de l'ouïe et de l’odorat. — Ils ne sont pas représentés chez les Astérides; je les crois complètement insensibles aux sons ; quant à l’odorat, qni paraît être assez délicat chez les Étoiles, car elles reconnaissent bien vite la présence de proies mortes, il peut s’opérer facilement au travers des épithéliums, la couche nerveuse étant tout à fait rapprochée de la surface extérieure (tentacule). Physiologie. — Quelle est la valeur relative des diverses parties du système nerveux? Y-a-t-il un centre comparable plus ou moins à un cerveau? M. Vulpian, en 1866, avait pensé que tel était le rôle du cercle nerveux; d’après lui, lorsqu'un bras était séparé du disque, il n’avait plus que des mouvements incohérents: le cercle nerveux était done un centre de coordination. Cette conclusion, attaquée par Baudelot, puis par Romanes et Ewart, aétéreprise par M. Hamann, qui donne au cercle nerveux le nom d’anneau céré- bral (Gehirnring.) A Banyuls, où les animaux sont parfaitement acclimatés dans les bacs, j'ai pu répéter nombre de fois diverses expériences dont voici les résultats : Quand on sépare un bras du disque, en le coupant, par exemple, au niveau de la quatrième vertèbre, on observe bien quelquefois des mouvements de torsion, mais cela est dû au trouble causé CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 59 par le traumatisme ; ces mouvements cessent d’ailleurs bientôt, le bras reprend son équilibre, se déplace dans une direction parfai- tement rectiligne et va se fixer sur les parois de l’aquarium, comme les Astéries entières ont l’habitude de le faire. J’ai rejeté des bras à la mer, dans un endroit où je pouvais facilement les observer pendant des périodes de calme; non seulement ils avaient les allures des animaux bien portants, mais ils se déplaçaient parfois spontanément pour aller s’abriter sous un autre fragment de roche(Asterias glacialis, Luidia). Le plus souvent des bras séparés du disque reprennent leur équilibre, puis restent au point où ils sont placés et ne se livrent plus à aucun mouvement (Astropecten, Echinaster). Si l'on sectionne profondément le ruban nerveux radial, les ambulacres situés de part et d'autre dela section exécutent des mouvements non coordonnés. Ên somme, par rapport aux ambulacres du bras, le cordon radial joue le rôle de centre coordinateur, comme on peut le voir a priori par la direction des fibrilles. D'autre part, si l’on sectionne le cercle oral de chaque côté d’un bras, le radius ainsi circonscrit exécute des mouvements non coordonnés avec ceux des autres bras;le cercle nerveux joue donc le rôle de centre coordinateur par rapport aux différents bras ; c’est un centre brachial, tandis que le cordon radial est un centre am- bulacraire. Enfin le plexus nerveux superficiel se suffit à lui-même. Si, en quatre coups de scalpel, on isole un rectangle sur un bras d’Asterias glacialis bien vivant, après un certain temps de repos, on peut faire contracter les branchies lymphatiques du rectangle en irritant les pédicellaires contenus dans la même surface. [’influx nerveux va directement du point excité à la branchie lymphatique, sans passer par un centre quelconque. Naturellement le rectangle ainsi délimité ne ressent en rien les excitations des parties voisines. Historique. — Je passe sur les travaux de Spix et de quelques autres 60 L. CUÉNOT. qui ont pris des brides mésentériques pour des ganglions nerveux. Tiedemann (1815) remarque que lorsqu'on enlève délicatement la paroï du vaisseau orangé du bras (Astr. aurantiacus), on découvre en dessous un très fin filament blanchâtre, longitudinal, qui se con- tinue autour de la bouche avec un anneau identique. Ce sont les septums radiaires et buccaux du système sanguin que Tiedemann prenait ainsi pour le système nerveux. Müller(1850) pense que le técument même du vaisseau orangé est le système nerveux. Hæœckel (1860) inaugure lesrecherches histologiques ; il décrit un névrilemme, des tubes primitifs, de la substance médullaire ; c’est un mélange méconnaissable de tous les éléments du ruban nerveux. Wilson (1862) prend les noyaux des cellules épithéliales pour des cellules nerveuses, et ne parle point de fibrilles. Greeff (1871) est le premier qui s'approche de la vérité, on peut au moins reconnaître ce qu'il décrit ; en étudiant sur des coupes, voici ce qu’il voit dans le ruban nerveux : cuticule ciliée, épithélium aplati formé de petites cellules, couche épaisse peut-être nerveuse, autre épithélium bordant le sinus radial. Greeff a pris pour une couche épithéliale les noyaux des cellules de soutien ; il n’est pas très fixé sur la substance nerveuse, qu’il place aussi bien dans la couche épaisse que dans le septum radial. Baudelot (1372) déclare que la question est restée pour lui tout à fait obscure chez les Astéries. Hoffmann (1874) admet dans le ruban nerveux une cuticule ciliée, un épithélium pavimenteux, puis la substance nerveuse, formée de nos cellules de soutien. Teuscher (1876) est le premier qui assigne nettement un caractère nerveux aux fibrilles sous-épithéliales, mais il n’a vu que les noyaux des cellules de soutien, qu’il décrit comme cellules nerveuses. Enfin, si nous arrivons aux travaux plus modernes, nous voyons qu’il n’existe plus que deux théories très dissemblables, en désaccord sur la place même du système nerveux : celle de Ludwig, que CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 64 LL M. Hamann et moiont complétée et généralisée; celle de Lange, que M. Perrier a reprise récemment. Ludwig a reconnu que les fibrilles sous-épithéliales étaient de nature nerveuse, en confirmant les idées de Teuscher à ce sujet ; il a montré leurs rapports avec les cellules filiformes. M. Hamann, dans un beau travail, a précisé les études de Ludwig ; il a découvert chez les jeunes Asterias r'ubens le plexus nerveux superficiel et la couche nerveuse de l’œsophage; je ne suis pas de son avis sur nombre de points, relativement aux organes des sens, aux cellules sensorielles, mais on ne peut méconnaître que Ludwig et Hamann sont les seuls auteurs qui aient un peu éclairei cette question si difficile du système nerveux. Quant à lithéorie de Lange, un mot d'explication est nécessaire : quand on examine la coupe du sinus radial, on voit qu'ilest limité par un épithélium cubique; cet épithélium est épaissi de place en place à la partie supérieure, soit par des contractions inhérentes au procédé d'étude employé, soit pour toute autre raison. Lange admettait que ces épaississements étaient de nature nerveuse, et s’étendaient dans tout le cercle oral etles sinus radiaux, en contact direct avec le iiquide sanguin ; enfin l’œil repose, d'après Lange, sur un volumineux ganglion optique. L'auteur allemand a bien vu la couche fibrillaire sous-épithéliale et les cellules qui la traversent ; mais pour lui, elle est conjonctive ; il l’appelle : fibrilläre Zwischensubstanz. M. Perrier, après avoir adopté les idées d'Hoffmann, c’est-à-dire admettant que tout le ruban brachial est de nature nerveuse, a émis ( 50 ) récemment une autre manière de voir qui se rapproche infi- niment de celle de Lange. Comme cet auteur, il admet comme cellules nerveuses l’épithé- lium cubique du sinus radial et celui du septum ; au niveau de l'œil, il dit également que ces pseudo-cellules nerveuses se mettent en rapport avec les fossettes oculaires. M. Perrier à mal observé le ruban nerveux ; pour lui, le tissu fibrillaire n’est : € qu'une meri- brane de supporttraversée dans toute son épaisseur par une multi- 62 L. CUÉNOT. tude defibres déjà vues par divers anatomistes, qui aboutissent tou- tes d’une part à certaines cellules de l’épithélium extérieur, d'autre part aux cellules que l’on considérait comme formant la couche épi- théliale interne.» Il est facile de voir que les fibres dont parle M. Perrier sont les cellules de soutien, et qu’il a pris leurs noyaux pour un épithélium extérieur, comme Greeff et Teuscher. Preuves de la nature nerveuse des fibrilles sous-épithéliales. — Dans les études sur le système nerveux des animaux inférieurs, on se heurte à une grave difficulté; comment prouver que telle partie décrite est de nature nerveuse ? Généralement on se base sur la présence de cellules prétendues nerveuses pour le démontrer, c’est un tort; les cellules nerveuses ont rarement une forme caractéris- tique; elles peuvent être facilement confondues avec des cellules conjonctives ( Lange, Wilson, Romanes et Ewart, etc.). Si on mettait à côté l’une de l’autre une cellule conjonctive et une cellule nerveuse, il serait certes impossible de dire, chez les Astérides et chez bien d’autres animaux : ceci est certainement de nature ner- veuse. Mais il y a un élément caractéristique, impossible à confondre avec d’autres types histologiques, qui possède des caractères tran- chés et nets : c’est la fibrille nerveuse. C’est une couche de fibrilles que M M. Lôven et Prouho ont montrée dans le plexus nerveux superficiel des Oursins, et avec raison ils n’ont pas considéré les cellules nerveuses comme devant servir de points de repère. Les fibrilles que nous avons décrites sont bien nerveuses, et pas autre chose ; elles ne se rapportent à aucune variété de tissu con- jonctif et s'en éloignent au contraire d’une facon considérable. Enfin elles présentent une identité complète avec les fibrilles des systèmes nerveux bien nets des Holothuries et des Oursins ; je les ai retrouvées chez les Ophiures avec exactement les mêmes carac- tères ; la ressemblance est frappante avec les fibrilles nerveuses des Actinies et des Méduses, et j'ai déjà insisté sur ce point, quelques pages plus haut, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 63 Les arguments qu’on peut tirer de la morphologie des Echino- dermes ne sont pas moins convaincants ; il est vrai que chez les Oursins, les Holothuries et les Ophiures, le système nerveux est placé à l’intérieur de la peau etnon plus à lextérieur, comme chez les Astéries ; il y a là des questions d’embryogénie du plus haut intérêt à éclaircir ; mais le rapport avec les vaisseaux ambulacraires et sanguins est constant. Liquide sanguin. Tous les liquides internes des Astérides ont la même compo- sition, qu’ils appartiennent à la cavité générale, à l’appareil san- guin ou aux vaisseaux ambulacraires : on peut donc en faire une unique description. Le milieu intérieur, suivant l'expression de Claude Bernard, est formé par un liquide tenant en suspension de très nombreux corpuscules figurés, signalés depuis longtemps chez divers Echino- dermes. Il n'y a qu’une seule espèce de corpuscules; ce sont des cellules de petite dimension, 5 à 6 f1, dont le noyau est diffcile à voir sur le vivant, émettant à leur périphérie des prolongements amæboïdes parfois très longs (pl. IV, fig. 11) ; leurs mouvements sont peu rapides ; dans l’espace d’une minute, la forme change assez sensiblement. Ces prolongementsamæboïdes, véritables pseu- dopodes d’amæbes, présentent les configurations les plus diverses ; ils sont généralement à peu près isolés ou peu anastomosés ; mais il est des circonstances où il se forme des réseaux d’une complication extraordinaire (vésicules de Poli des Asterinidæ et des Ophiures), lorsque la cellule est bien nourrie, par exemple (pl. VI, fig. 6, pré- sente un réseau très simple). D’autres fois les pseudopodes s’anasto- mosent de facon à donner la figure d’anneaux se touchant par un point de leur circonférence ; Semper et Geddes signalent ce détail chez les Holothuries et les Oursins. Le protoplasma qui forme les 64 L. CUÉNOT. pseudopodes est très hyalin, tandis que le reste de la cellule est granuleux et contient du pigment; ce pigment, formé de petits grains colorés, très réfringents, est répandu uniformément dans la cellule ; il est le plus souvent d’un jaune plus ou moins vif, rarement violet (Cribella oculata), ou noirâtre (Astropecten spinu- losus) ; les corpuscules âgés en sont entièrement dépourvus, les jeunes présentent une coloration vive. Enfin le protoplasma cellulaire contient souvent une ou plusieurs vacuoles remplies d’un liquide légèrement coloré en violet mauve très pâle (pl. IV, fig. 11); on retrouve ces vacuoles à teinte indécise dans les taches germinatives des œufs, presque chez toutes les espèces ; c’est du liquide cellulaire qui les remplit. On ne trouve qu’assez peu de corpuscules isolés ; le plus souvent ils se réunissent pour former des plasmodiums d’un volume va- riable ; dans ceux-ci, on reconnaît encore vaguement la forme sphérique des diverses cellules composantes (pl. VI, fig. 11, et pl. VI, fig. 6); les amas de pigment ne se mélangent pas non plus; la périphérie du plasmodium émet ies pseudopodes habituels. Souvent la taille du plasmodium est assez considérable pour que celui-ci soit visible à l’œil nu, jusqu’à 1°* 5 ;on en voit tour- billonner danslesambulacres, les branchies lymphatiques, ce qui per- met de bien juger de la circulation dans ces organes. P. Geddes (14), qui a décrit les plasmodiums des Oursins, pense qu'ils ne se forment que lorsque l'animal souffre ; toutes les Astéries que j'ai étudiées m'ont montré des plasmodiums en toute occasion, sur les animaux très bien portants, et je pouvais les voir sur le vivant sans léser aucun organe. J'ai reconnu ces mêmes corpuscules, avec un pigment jaune identique, chez les Ophiures et les Holothuries (Cucumaria et Synapte), où ils présentent les mêmes caractères ; M. Fœttinger en a donné une description tout à fait erronée chez lOphiactis virens, où il n’a vu ni les prolongements amæboïdes, ni la consti- tution du pigment. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 65 Quelle estla nature de ce pigment jaune? MM. Howell et Fœttinger ont constaté que l’hémoglobine existe dans le sang des Echino- dermes; au moyen du microspectroscope, ils l'ont localisée dans les corpuscules ; maïs la question ne me semble pas résolue dans tous ses détails ; le pigment est certainement respiratoire, il n’y a pas de doute là-dessus. Mais est-ce de l’hémoglobine ? il n’en offre guère les caractères microscopiques ; ses variétés, violettes chez la Cri- bella, brunâtres ou noires chez certains Astropecten, semblent indi- quer que c’est une substance voisine de l’hémoglobine, sans doute, mais distincte au point de vue chimique et assez polymorphe ; pour rappeler sa parenté et sa couleur, je l’appellerai Lémoxanthine. Le pigment se détruit peu à peu dans l’acte de la respiration, car on observe que les corpuscules existant depuis un certain temps ne renferment plus qu’un substratum de granules protoplasmiques, sans trace de coloration. Ce sont les seuls corpuscules figurés contenus dans le liquide sanguin ; tous ceux qu’'Hoffmann à représentés sont des débris de cellules qui y sont tombés accidentellement ; on n'en trouve jamais lorsqu'on prend du sang avec les soins convenables. Parfois, mais très rarement, on trouve des cellules chargées de pigment, mais non amoœæboïdes ; elles appartiennent aux glandes lymphatiques, forma- trices des corpuscules sanguins, et sont tombées dans le liquide avant leur parfaite maturité ; mais, je le répète, c’est un fait excessivement rare, je ne l'ai constaté qu’une seule fois (Luidia ciliaris, liquide am- bulacraire). Le liquide dans lequel ces cellules sont en suspension est de l’eau de mer, avec tous les sels qui y sont contenus et sans autres corps étrangers ; quand on décante dans un cristallisoir le liquide de la cavité générale d’une Astérie et qu’on l’abandonne à lui-même, voici ce qu’on observe : les globules amæboïdes, n'étant plus mis en mouvement par les cils vibratiles, tombent au fond du vase et y forment une couche très visible. Il n’y a aucune trace de coagu- lation. ARCH, DE ZOOL, EXP, ET GÉN, — 2€ SÉRIE, — T. V bis, —,suppL. 1887. — 2e Mém. 5 66 L. CUÉNOT. Origine des corpuscules sanguins ou globules lymphatiques. — Il y a chez les Astéries une production presque incessante de globules sanguins, Correspondant à une destruction constante des mêmes éléments. J’anticipe un peu ici sur les études qui vont suivre ; mais j'ai voulu présenter en un seul faisceau tous les faits relatifs au liquide sanguin, quijoue un rôle capital dans la physiologie des Echino- dermes. Les centres de production des globules sont des glandes, que je propose d'appeler glandes lymphatiques. On a fort diversement inter- prété leur rôle, souvent on l’a soupçonné (Teuscher, H. Carpenter, Hamann, Perrier), mais aucun des auteurs précédents ne l’a démontré d’une facon décisive. Les glandes lymphatiques sont extrêmement nombreuses chez les Astérides; la cavité générale, le système vasculaire qui en est une dépendance, etle système ambulacraireen ont chacun une spé- ciale. La plus célèbreest la glande ovoïde, qui est encore l’objet de tant de discussions : celle-ci et toutes ses dépendances fournissent des globules sanguins au système vasculaire et à la cavité générale; les corps de Tiedemann et les vésicules de Poli sont en rapport avec l'appareil ambulacraire. J’étudierai seulement ici l’évolution des cellules qu’elles contiennent ; leur histologie plus détaillée et leur anatomie seront traitées à propos des systèmes avec lesquels ces glandes sont en rapport. | On peut définir schématiquement la glande lymphatique de la facon suivante : trame conjonctive supportant des cellules, à multi- plication rapide, qui, une fois chargées du pigment respiratoire, peuvent sortir de l'organe qui les contient pour se répandre dans le liquide environnant (pl. IV, fig. 8 et 10 ; pl. VII, fig. 16; pl. VIII, fig. 8 et 9). La cellule jeune présente un cros noyau avec un nucléole réfringent (pl. IV, fig. 12); le protoplasma est très abondant et très granuleux. Le pigment commence à se déposer sous forme de petites sphères d'apparence huileuse, très réfrin- gentes, d’un jaune très pâle, en petit nombre dans chaque cellule CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 67 s (pl. VIIL, fig. 18, j). À ce moment la cellule ne présente jamais de mouvements amœboïdes. Peu à peu, les sphères se divisent, se multiplient considérablement, se foncent en couleur ; à l’état parfaitement mûr, la cellule est entièrement remplie de fins granules d’un jaune vif, qui pourraient faire croire à une coloration uniforme (Fœttinger) et en masse de la cellule; mais avec de bons objectifs à immersion, on distingue parfaitement les granulations séparées. Bien avant cet état, dès que la coloration devient un peu vive (pl. VII, fig. 9, L), la cellule émet dans la glande même quelques prolongements amæboïdes (pl. IV, fig.10 ; pl. VL fig. 7, l; pl. VII, fig. 17); quand elle est arrivée à maturité, elle sort de la glande en repoussant la trame conjonctive sur des points qui y sont prédisposés (pl. IV, fig. 10, d), et tombe dans le liquide environnant ; elle offre les prolongements amœæboïdes ordinaires avec toutes leurs variétés ; les cellules s’en vont isolément, ou bien forment des plasmodiums comme ceux que j'ai décrits dans le liquides anguin (pl. IV, fig.12,cs ; pl. V, fig. 4;pl. VIII, fig. 9, /). Parfois des cellules bien nourries, au moment où elles sortent de la glande, émettent des pseudopodes très compliqués (vésicules de Poli Asterina et Ophiure), mais ceux-ci reviennent bientôt au type ordinaire. On reconnait facilement qu’une glande lymphatique est à matu- rité par sa coloration foncée, brune ou noire | Astropecten spinulosus) ou violacée ( Cribella, Echinaster) ; on n’a qu'à en détacher un frag- ment d’un coup de ciseau, à l’examiner dans l’eau de mer aérée, en évitant la compression du couvre-objet, avec un 10 à imm. Nachet, pour reconnaître l’exactitude de ma description ; on voit très bien la trame conjonctive de la glande, la sortie des cellules et leurs différents caractères. Evolution du globule.—Le corpuscule sanguin ainsi constitué vit pendant un temps impossible à déterminer, qui doit être assez court ; il remplit les fonctions qui lui sont assignées, et que je vais 68 L. CUÉNOT. examiner bientôt. Peu à peu son pigment disparaît, les granulations colorées diminuent en nombre, bientôt il n’en reste plus que quel- ques-unes ;enfin il arrive un moment où la cellule est tout à fait incolore ; son noyau devient apparent, par suite du départ du pig- ment qui le cachait ; des vacuoles abondantes se creusent dans son protoplasma ; puis elle se dissout et disparaît aussi dans le liquide sanguin. Elle est remplacée par une autre génération de cellules provenant de la glande lymphatique, qui recommencent le même cycle. Origine du liquide de la cavité générale. Nous avons vu que l’Astérie était munie d’un nombre considérable de branchies lym- phatiques, à parois excessivement minces. J’en ai donné la descrip- tion et l’anatomie dans un précédent chapitre. Par ces organes comme par n importe quelle membrane mince, ils’opère une osmose extrêmement active entre le liquide sanguin et l’eau de mer ; on s'explique ainsi comment ces deux liquides ont une composition identique ; on peut le démontrer facilement par l'expérience, bien que cela soit évidentpar le raisonnement : si on plonge une Astérie dans l’eau de mer contenant une couleur d’aniline,inoffensive pour l'animal, et qu'on l'y laisse un certain temps, on observe que les branchies Ilymphatiques sont très colorées ; sur la paroïinterne du test, le pourtour des branchies est également teinté ; le liquide de la cavité générale présente une coloration égale à celle du liquide am- biant. Si l’on remet cette Astérie dans l’eau de mer pure, on observe le phénomène inverse, et tout ce qui n’a pas été fixé par les globules sanguins retourne dans l’eau environnante. Il n’y a aucune intro- duction de liquide par le canal du sable ; je réserve d’ailleurs la discussion de ce fait important à la suite des études anatomiques. C’est donc par la voie des branchies lymphatiques que s’opère l’osmose active entre les deux liquides. La paroi des ambulacres, jorsque ceux-ci sont étendus, présente également des phénomènes osmotiques, un peu moins rapides naturellement, en raison de l'épaisseur plus considérable. Enfin, dans les espèces de petite taille, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 69 il peut s’opérer quelque échange au travers de la portion horizon- tale de l’œsophage. Respiration et excrétion.—Les globules sanguins sont constam- ment remués par les cils des cavités dans lesquelles ils sont conte- nus ; leur pigment (hémoxanthine) fixe l'oxygène comme l’hémo- globine et va le distribuer dans tout l'organisme ; l’acide carbonique, produit de la combustion, se dissout dans le liquide sanguin et s'échappe par osmose. Le pigment se détruit peu à peu par l’acte respiratoire, en se dissolvant dans le liquide ambiant, et delà il quitte également l’organisme par osmose ; en effet, on n’en trouve point de dissous dans le sang. Les produits de désassimilation, urates, acide urique, guanine, etc., passent dissous dans la cavité générale ; comme ce sont des sels, ils quittent l'organisme, également par osmose, à travers les branchies lymphatiques. En effet, on netrouve aucun organe d’excré- tion chez les Astérides : la glande ovoïde,à qui on a donné autrefois ce rôle (Perrier, Koehler, Apostolidès, Hamann), a une toute autre fonction, c’est une glande lymphatique, comme nous l’avons vu ; les cæcums stomacaux sont des organes digestifs, et pas autre chose. A priori, chez les animaux dont les organes et liquides internes sont en osmose continue et facile avec l’eau de mer, il ne doit pas y avoir d’organe excrétoire, car c’est par voie osmotique que les produits de désassimilation et l’acide carbonique quittent l’orga- nisme. L’anatomie comparée des Echinodermes fournit à cette manière de voir une nouvelle preuve, d’une grande valeur ; dans chacune des cinq familles on trouve des organes destinés à mettre en com- munication osmotique l’eau de mer et le liquide de la cavité géné- rale : chez les Oursins, c’est le siphon intestinal (M. Perrier) et les branchies buccales; chez les Ophiures, les sacs respiratoires (Ludwig, Apostolidès) ; chez les Astéries, les branchies lympha- ques ; chez les Holothuries, les poumons ou organes arbores- cents ; chez les Crinoïdes, les entonnoirs vibratiles et le réseau 70 L. CUÉNOT. aquifère qui leur est annexé (Ludwig, Perrier) ; ce sont là différentes dispositions anatomiques ayant toutes le même but physiologique, à savoir d'établir des échanges continus et faciles entre les deux liquides que ces organes séparent. Par les expériences de M. Perrier (45), il est prouvé qu’il y a un courant d’eau par le siphon intestinal des Oursins ; par celles d’Apostolidès que j'ai répétées à Roscoff, que l’eau est constamment appelée à l’intérieur des sacs respiratoires, véritables branchies]ymphatiques invaginées dans la cavité générale ; tous ceux qui ont observé les Holothuries au bord de la mer ont facilement constaté l’entrée de l’eau dans les organesarborescents ; enfin, d’après M. Perrier, Carl Vogtet Yung, l’eau entre par les entonnoirs vibratiles des Comatules et parcourt tout l'organisme en ressortant au niveau des syzygies. Je sais bien que cet appareil aquifère des Comatules est homolo- gue de l’appareil ambulacraire des Oursins, Astéries, Ophiures et Holothuries ; mais on a vu bien des fois des organes homologues avoir des fonctions différentes : cela dépend des dispositions ana- tomiques. Je considère comme certain qu’il n’y a pas introduction d’eau par la plaque madréporique, du moins d’une façon utile ; mais je ne veux pas anticiper sur un chapitre suivant. Nutrition et assimilation. — Nons avons vu que le pigment res- piratoire siège dans les corpuscules sanguins ; mais ces globules ont encore un autre rôle, peut-être plus important encore. Les produits de la digestion, peptones ou autres, passent naturellement dans le liquide de la cavité générale par simple osmose ; maïs il est évident qu'ils ne restent point là. On sait que ce sont des sub- stances très solubles, à faculté osmotique assez considérable ; elles passeraient donc à travers les branchieslymphatiques comme elles viennent de passer à travers les parois du tube digestif, aucune dis- position particulière ne les arrêtant ; tout le travail digestif serait donc en pure perte. Cela étant inadmissible, quelle est donc la par- tie destinée à absorber les produits assimilables? Ce rôle ne peut être dévolu qu’aux corpuscules sanguins ; très nombreux, très ac- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 71 tifs, ils absorbent tous les produits solubles qui sans cela s’échap- peraient dans l’eau de mer; on le peut prouver facilement, en met- tant une couleur d’aniline ou des granulations colorées dans le li- quide de la cavité générale ; au bout de peu de temps, les corpus- culés lymphatiques les ont entièrement absorbées, le liquide n’en conserve plus trace. Maïs que deviennent ces produits nutritifs, que le globule a ainsi assimilés? Il doit en brüler une partie pour son propre compte, et restituer le reste lorsqu'il se dissout dans le sans, à la fin de son évolution ;il le restitue probablement sous une forme très résistante à l’osmose, se rapprochant de l’albu- mine. Je n'ai pu faire de recherches directes sur ce point délicat, qui exige une expérience consommée. Je n’ai pu non plus dé- montrer directement l'absorption des peptones par le corpuscule, ni leur transformation chimique, car il est impossible de nourrir les Astéries avec des proies spéciales, au moment où on le désire. Chez d’autres animaux, j'espère, dans un prochain travail, présen- ter une démonstration plus nette sur ce point de physiclogie, dont l’importance n’échappera à personne. Partout où se trouve une glande lymphatique, il y a par consé- quent une nutrition assurée pour les parties avoisinantes, car il y aura production abondante d’albumine. Les organes qui exigent un développement rapide, comme les ovaires ou les testicules, sont en rapport immédiat avec un important réseau de glandes lympha- tiques, comme nous le verrons dans l’étude de la circulation. Ce queje tiens à bien préciser, c'est que le liquide sanguin pro prement dit ne contient aucune substance (autre que les sels de l’eau de mer) dissoute à l’état constant ; que les particules nutri tives sont localisées dans les corpuscules amæboïdes, et que la res- piration et l’excrétion s’opèrent par simple osmose à travers les branchies lymphatiques. Historique. — Je terminerai ce chapitre par un mot d'historique. Dans une note insérée aux Comptes-Rendus du 28 juin 1886, j'ai signalé les fonctions des corps de Tiedemann, des vésicules de 72 L. CUÉNOT. Poliet de la glande ovoïde, en décrivant la transformation des cel- lulesen corpuscules sanguins ; M. Perrier a revendiqué pour lui la priorité de cette découverte quant à la glande ovoïde (note du 17 janyier 1887); je demande à présenter quelques explications à ce sujet: Nombre d'auteurs ont cherché depuis longtemps une re- lation entre les corpuscules pigmentés du liquide sanguin et la glande ovoïde; Greeff, Teuscher ont signalé depuis longtemps des amas piomentaires dans la glande ovoïde ; M. Hamann a émis une idée analogue, tout en se trompant sur la véritable fonction du pigment. M. H. Carpenter (5) a dit d’une façon très explicite qu’il était probable que la glande ovoïde fournissait les corpuscules pig- mentés de la cavité générale. M. Perrier, après une étude sur l’Asterias Hyadesi, publiée le 24 mai 1886 (50), dit, sans autre ex- plication, que la glande ovoïde produit les corpuscules de la ca- vité générale; comme les animaux qu’il a étudiés étaient conser- vés dans l'alcool, ce n’est que par une simple vue de l’esprit qu'il a avancé le fait, caril est impossible de le constater autrement que sur le vivant; je passe sous silence les nombreuses inexactitudes qui l’amènent à ce résultat. Je reconnais volontiers que tous les auteurs précités ont appro- ché plus ou moins de la vérité ; mais il n’en reste pas moins acquis que c’est moi qui ai vu et démontré le premier, par l’étude directe sur de nombreuses espèces vivantes, la transformation des cellules des glandes lymphatiques en corpuscules sanguins, ainsi que leur histologie exacte. Quant au nom de corps plastidogène que propose M. Perrier [note du 17 janvier 1887] pour désigner la glande ovoïde, il est mauvais au point de vue spécifique, car les corps de Tiedemann et les vésicules de Poli sont aussi bien producteurs de plastides. Si c’est un nom générique, je ferais observer à M. Perrier que j'ai employé avant lui le nom de glandes lymphatiques, qui me paraît plus explicite [note du 3 janvier 1887]. J’ai conservé le nom de glande ovoïde, employé pour la première fois par M. Perrier en CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 73 1875, parce qu'il est commode, aussi bien que celui de canal du sable ; ces dénominations, ne signifiant rien, ont l'avantage de ne pas introduire d'idées fausses dans la science. Appareil ambulacraire. L’Astérie possède un certain nombre de cavités vasculiformes constituant deux systèmes que je considère comme parfaitement distincts et sans relation l’un avec l’autre : le premier est en rapport avec la locomotion de l'animal, c’est l’appareil «mbula- craire ; le second est une dépendance de la cavité générale, mais s’en isole chez d’autres Echinodermes, c’est l’appareil vasculaire ou sanguin, comme on voudra l’appeler. Le premier est connu dans ses grandes lignes depuis longtemps; Tiedemann et Jourdain ont les premiers élucidé son anatomie. Il se compose d’un cercle oral ou supérieur, donnant une branche radiale pour chacun des bras, et d’un tube calcaire, le canal du sable, qui débouche à l'extérieur par une plaque criblée de petits pores, le madréporite, située toujours dans un interradius; ilya un nombre variable de glandes lymphatiques annexées au cercle oral, ce sont les corps de Tiedemann et les vésicules de Poli. La branche radiale donne de petits vaisseaux latéraux qui se jettent au carrefour de l’ambulacre et de la vésicule ambu- lacraire. Ce sont là des faits connus que je résume rapidement. Le deuxième système est formé d’un anneau oral, placé au- dessus du cercle ambulacraire et donnant aussi une branche radiale supérieure à chacun des bras; d'un anneau aboral, donnant dix branches qui vont entourer les organes génitaux. Ces deux anneaux sont réunis par un vaste sinus qui renferme à son intérieur Je canal du sable et la glande ovoïde; enfin le cercle oral débouche dans la cavité générale par cinqgorifices interradiaires; chacune des branches radiales se comporte de même par autant d’orifices qu’il y a de vertèbres, moins une. 74 L. CUÉNOT. Dans toutes mes figures, j'ai représenté en rouge, à l'exemple d’Hoffmann, l'appareil sanguin, et en bleu l'appareil ambulacraire. Histologie. — J'ai peu de chose à dire sur l’histologie générale des vaisseaux ambulacraires ; ils sont tapissés par un épithélium pavimenteux vibratile (pl. IV, fig. 7, D) ; une couche de tissu con- jonctif un peu différencié les limite. La constitution des ambulacres est partout la même (Hoffmann, Ludwig, Hamann): l'épithélium interne ambulacraire, une couche de muscles longi- tudinaux, une couche comjonctive assez épaisse, et enfin l’épi- thélium externe avec sa zone nerveuse, que nous avons étudié précédemment (pl. VIII, fig. 10). La vésicule ambulacraire a la même composition, à cela près que les muscles sont circulaires, et que la couche externe est remplacée par l’épithélium péritonéal. Au point de rencontre du vaisseau ambulacraire transverse et du vaisseau radial (pl. IV, fig. 6; pl. VIII, fig. 10), se trouve une valvule découverte par Jourdain et très bien décrite par Lange ; le vaisseau radial présente une ouverture conique, dont les bords sont libres dans le vaisseau transverse plus large ; quand le liquide ambulacraire est comprimé, ïl rabat les bords libres sur l'orifice et empêche ainsi le contenu de l’ambulacre de refluer dans le vaisseau radial. Cela est de la plus haute importance pour la physiologie de l'appareil ambulacraire. Dans la pl. VIII, fig. 10, la coupe est exactement dirigée par le centre de l’orifice ; dans la pl. IV, fg. 6, la coupe passe un peu tangentiellement, de telle sorte qu’elle traverse le vaisseau transverse plus large, et ne rencontre pas l'orifice ; en comparant ces figures avec celle de Lange, qui représente une coupe horizontale (30, taf. XV, fig. 9), on comprendra bien la disposition de cette valvule. Sur les coupes transversales, on voit que le vaisseau radial est entouré d’un feutrage très lâche de fibres conjonctives (pl. VI, fig. 1), qui se rompent facilement, de sorte qu’il paraît souvent surmonter une cavité assez spacieuse, qui est absolument artificielle. Sur des coupes longitudinales, il est légèrement ondulé (pl. VI, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 75 fig. 5), concave quand il passe entre deux vertèbres, convexe lors- qu’il passe au-dessus des muscles vertébraux transverses (x). Le sinus sanguin radial (s) est ondulé aussi, mais en sens inverse, de sorte que ces deux cavités sont parfois très rapprochées dans les espaces intervertébraux (pl. VIII, fig. 10). Chez les grandes espèces, lAstropecten aurantiacus, par exemple, les contractionssont si fortes, qu'on arrive à rencontrer dans la même coupe transversale deux fois la lumière du vaisseau ambulacraire radial (Teuscher); c’est un simple accident de préparation, comme on s’en convainc très bien sur des coupes longitudinales. Le cercle oral suit le contour des pièces de la bouche ; dans un interradius (pl. V, fig. 13), il donne naissance au canal du sable : il porte, généralement dansles interradius, des glandes lymphatiques, les unes formant des amas sphériques, irréguliers, assez fortement colorés : ce sont les corps de Tiedemann, constants chez toutes les espèces que j'ai étudiées ; les autres sont les vésicules de Poli, sortes de grosses vessies transparentes et longuement pédiculées, qui manquent dans un certain nombre de familles. Les corps de Tiedemann sont formés par une série de tubes qui convergent tous vers leur point d'attache au cercle oral; ces tubes, généralement peu ramifiés, sont tapissés par un épithélium cubique qui repose directement sur la couche conjonctive sous- jacente (pl. IV, fig. 8) ;on trouve toujours, dans les coupes transver- sales des tubes, leur lumière obstruée par un paquet de cellules (1); ce sont des morceaux de l’épithélium cubique qui desquame avec grande facilité. Le protoplasma de ces cellules est fort granuleux, le noyau gros et nucléolé ; sur le vivant, on voit qu’elles sont chargées de pigment jaune, et qu'elles émettent de nombreux prolongements amæboïdes. Les corps de Tiedemann sont donc des glandes lymphatiques ; les corpuscules sanguins produits par la desquamation de l’épithélium cubique se répandent dans tout le système ambulacraire. Hoffmann, Ludwig et Hamann ont bien remarqué ces amas cellulaires qui remplissent les tubes des corps 76 L. CUÉNOT. de Tiedemann , mais ïls pensaient que les cellules se multi- pliaient probablement en ce point; en tous cas ils n'ont point soupçonné qu’elles étaient produites par la desquamation de l’épithélium cubique. M. Hamann attribuait aux corps de Tiede- mann un rôle d’excrétion. Avec une apparence tout à fait dissemblable, les vésicules de Poli ont les mêmes fonctions que les corps de Tiedemann. Je prendrai mon exemple chez l’Astropecten aurantiacus, qui en présente de fort volumineuses (pl. VIII, fig 3, p). La vésicule est toujours creuse, etc’est sur la paroi interne que l’on trouve la partie active ; dans sa cavité, on remarque de nombreux plasmodiums, visibles à l'œil nu, produits par la vésicule ; ces plasmodiums n'étant mus par aucune surface vibratile, tombent au fond de la vessie et ne peuvent guère passer dans l’anneau ambulacraire que par une contraction de l’organe. Maloré sa minceur, la paroi est formée de quatre couches (pl. VIII, fig. 9): un épithélium externe péritonéal, cilié (e); une couche conjonctive formée de fibres élastiques à gros noyau (f);dans cette zone et collées contre l’épithélium externe, on trouve de nombreuses fibres musculaires longitudinales (m°) dont on n'aperçoit que la coupe ; une couche de fibres musculaires circu- laires, s’entrelacant légèrement (m); enfin la partie sécrétante, formée d’un lacis fibreux, limitant des sortes d’alvéoles contiguës, traversées en tous sens par des fibres conjonctives. Ces alvéoles renferment des cellules éparses (/) qui se multiplient et se chargent de pigment jaune, pour finalement devenir amæboïdes dans l’inté- rieur même du lacis fibreux (pl. VI, fig. 7, l), d’où elles s’é- chappent pour tomber dans le liquide de la vésicule. Toutes les vésicules de Poli ont à peu près la même constitution ; chez les petites espèces, la couche musculaire est bien moins déve- loppée et composée uniquement de fibres circulaires. J’ai reconnu que les vésicules de Poli des Ophiures ont égale- ment le même rôle, mais ce sont des glandes plus compactes que celles des Astérides ; les vésicules de Poli des Holothuries sont CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 77 également un lieu de production de globules sanguins, en cumulant cette fonction avec celle de réservoir du liquide tentaculaire. Canal du sable. —Dans un interradius naît le canal du sable ; c’estun tube membraneux à sa base, et qui,se chargeant de calcaire, devient bientôt rigide ; dans l’intérieur, on trouve des replis cal- caires, dont la disposition est aussi variable que la forme extérieure du tube. À l'extrémité inférieure ou aborale, le canal du sable s’insère sur le madréporite ; les replis calcaires subsistent jusqu à la plaque avec laquelle ils se continuent, de sorte que chez certaines espèces (Aséropecten, Luidia, pl. VII, fig. 1) on ne peut pas dé- cider où commence la plaque et où finit le canal. Le plus grand nombre des pores madréporiques débouchent dans le canal du sable, les autres dans la cavité périphérique appartenant au système sanguin (pl. VI, fig. 10). Chez les grandes espèces dont la plaque a une taille considérable, le canal du sable présente une particu- larité d'organisation (pl. VI, fig. 1; pl. VIT, fig.1). Du côté interne il émet une longue poche (d), aplatie et membraneuse, qui collecte tous les tubes madréporiques qui ne pourraient sans cette disposition déboucher dans le canal du sable. En dessous de cette cavité ampullaire, se trouve une autre cavité bien plus volumineuse (k), qui renferme la terminaison de la glande ovoïde et qui appartient au système sanguin. La poche madréporique existe chez les Asterias glacialis et rubens, ainsi que chez l’Astropecten aurantiacus ; il n’y a rien de semblable chez les autres espèces, où le canal du sable a à peu près le même diamètre que la plaque. Greeffet Ludwig ont décrit assez inexactement cette disposition ; ils figurent tantôt trois poches, tantôt deux ; il n'y a en réalité qu’une seule cavité, À côté des madréporites très simples, à peu de pores des Aste- rinidæ et des Echinasteridæ, ceux des autres familles sont très compliqués, mais l’organisation est toujours la même. M. Perrier commet une erreur (50) en disant que la plaque résulte du plisse- ment des parois d’un pore primitivement unique : on sait, d’après 78 L. CUÉNOT. les belles études de Lôven, qu’à côté du premier pore, il s’en creuse un second, puis un iroisième, et ainsi de suite ; peu à peu ces perforations s’anastomosent de façon à constituer l’ensemble si complexe que l’on voit chez l'adulte. Quant à l’histologie de l'appareil, elle est fort simple ; le canal du sable est formé de trois couches, une externe péritonéale, une moyenne de tissu réti- culé calcaire, une interne, composée d’un épithélium à hautes cel- lules vibratiles ; dans les canaux du madréporite, l’épithélium externe du corps entre dans les pores jusqu’à une certaine profon- deur ; toute la partie comprise entre celui-ci et l’épithélium vibratile du canal est formée de cellules cubiques à petits cils (Ludwig, Hamann). A la surface du canal du sable s’attachent des membranes qui le relient aux parois du sinus sanguin qui l’en- toure; mais, quoi qu’en disent MM. Perrier (50), Carl Vogt et Yung, iln’y a jamais de perforations mettant en communication le canal du sable et les parties environnantes, pas plus à la base qu’au sommet. Nousallons examiner les diverses modifications de l’appareïl am- bulacraire dans les familles que j’ai pu étudier ; on peut faire des rapprochements utiles entre des genres que l’on croyait fort éloi- gnés. Il serait plus logique de commencer l’étude par les Astéries à deux rangées d’ambulacres ; mais nous verrons que la phylo- génie est loin d’être d’accord avec l’ontogénie, et que les rapports de ces deux évolutions sont brouillés plus d’une fois. Asteriadæ (Asterias rubens et glacialis). — On sait que les Aste- riadæ, à quatre rangées d’ambulacres, n’en ont que deux dans le jeune âge ; il s'opère une compression et un arrangement des am- bulacres, qui sont loin d’être disposés régulièrement, comme on peut s’en convaincre en regardant la fig. 1, pl. IV ; deux bras con- tigus sont généralement symétriques par rapport à un plan vertical passant par l’interradius qu’ils comprennent (pl. IV, fig. 2) ; mais il n’en est pas toujours ainsi. 3 Les ambulacres présentent, quand on les examine avec grand CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 79 soin, deux lignes blanches très nettes, placées à l'opposé l’une de l’autre, qui courent depuis la base jusqu’à la ventouse (pl. IV, fg. 4); ce sont des vaisseaux sanguins, que l’on peut injecter ; ils sont surtout apparents sur les ambulacres les plus rapprochés de ja bouche. L’anneau ambulacraire porte dans chaque interradius deux petits corps de Tiedemann (pl. IV, fig. 1, é) ; l'interradius du canal du sable n’en porte le plus souvent qu'un seul, placé à droite, lors- qu’on examine la face interne de la bouche, comme dans la figure 1. Le canal du sable est connu depuis longtemps (von Siebold, Jourdain) ; il contient à son intérieur un repli en forme de T dont les branches seraient enroulées une fois et demie sur elles-mêmes (pl. V, fig. 2, c). Chez le jeune, la lame verticale est simplement bifurquée à son extrémité (pl. IV, fig. 14) ; c’est une forme que nous retrouverons assez souvent dans diverses familles. Dans une coupe, j'ai trouvé un canal du sable (pl. IV, fig. 13), dont la lame verticale s’attachait à la paroi opposée ; c’est une forme que nous retrouverons chez le Gymnasteria carinifera. Enfin un épithélium très haut et très vibratile revêt toutes les parties concaves des replis calcaires et du canal (pl. IV, fig. 15), tandis qu’un épi- thélium moins haut revêt toutes les parties convexes ; aucun auteur _n'a signalé cette différence entre les deux revêtements épithéliaux. Echinasteridæ (Cribella oculata, Echinaster sepositus). — Asté- ries à deux rangées d’ambulacres. Je n’ai pu voir qu’un seul vais- seau placé au côté externe de l’ambulacre (pl. V, fig. 7), mais ces vaisseaux sont si difficiles à voir sur le vivant et si difficiles à injecter, que le second m'a peut-être échappé ; vésicules ambu- lacraires légèrement bilobées (pl. V, fig. 8) ; anneau ambulacraire, à peu près pentagonal, avec neuf corps de Tiedemann disposés comme chez les Asteriadæ. Le canal du sable renferme chez l’Æchi- naster sepositus une simple lame verticale légèrement renflée à l’ex- trémité (pl. V, fig. 6), n’atteignant pas le quart de la cavité; c’est un canal du sable bien rudimentaire ; Ludwig a décrit chez l Echi- naster fallax une disposition à peu près semblable. Chez la Cribella 80 L. CUÉNOT. oculata, la lame verticale est un peu moins simple ; elle a la forme d’un T à branches courtes. La plaque madréporique, dans cette famille, est également très peu compliquée et n’a qu’un petit nom- bre de pores. Linchkiadæ (Ophidiaster chinensis). — Mêmes caractères de l’an- neau ambulacraire (pl. VI, fig. 2). Canal du sable cylindrique, présentant, à ce qu’il m’a semblé, une disposition analogue à celle des Asteriadæ. Je rappellerai que M. Viguier a trouvé chez l Ophi- diaster pyramidatus un canal du sable globuleux, rempli d’un feutrage de feuillets calcaires. Dans cette famille, on trouve une couronne spiculaire dans les ambulacres, comme chez les Oursins (M. Viguier). Asterinidæ (Asterina gibbosa et Weqa, Palmipes membranaceus, Solaster papposus). — À mesure que l’on descend dans la série, c’est-à-dire que l’on s'éloigne le plus du type des Asteriadeæ, on remarque une complication réelle de l’appareil ambulacraire. L’anneau ambulacraire suit les contours des pièces buccales (pl. V, fig. 13, 14). Dans chaque interradius il porte deux petits corps de Tiedemann (t) etau-dessous d'eux une vésicule de Poli (p) assez longuement pédiculée, qui flotte dans le liquide de la cavité générale. À l’interradius du canal du sable, il n’existe plus que le corps de Tiedemann droit, mais il ne faut pas croire que cela ait une signification morphologique, c'est un fait tout mécanique : le canal du sable, s'appuyant sur la paroi, empêche la glande lympha- tique de se développer. Romanes et Ewart, dans leur étude sur le Solaster papposus, appellent les corps de Tiedemann : « The first serie of ampulla » ; il est inutile de dire que ces glandes n'ont au- cun rapport avec les vésicules ambulacraires (ampulla). Je n’ai vu qu’un seul vaisseau sur le côté externe de l’ambula- cre; même observation que pour les Æchinasteridæ. Chacun des ambulacres, au lieu de la vésicule unique qui lui est annexée, en présente deux, situées au-dessus l’une de l’autre (pl. V, fig. 15) ; ce n’est pas une division apparente, elle est parfaitement réelle ; CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES 81 les deux vésicules ne communiquent tout à fait qu’à leur base (pl. VI, fig. 14) ; on peut en crever une sans que l’autre se dé- gonfle, et lorsqu’elles sont remplies de liquide, leur dualité est en- core plus nette. Le premier ambulacre seul à une vésicule unique, probablement pour une raison mécanique ; ie pilier interradial oc- cupant beaucoup de place, il n’y a pas l'espace nécessaire pour deux vésicules. Le Palmipes présente des vésicules ambulacraires doubles jusqu’à l'extrémité des bras ; la cavité générale se prolonge jnsqu'aux angles du pentagone dessiné par ce singulier animal (pl. VI, fig. 14); malgré son apparence aberrante, c’est une Astérie très normale, qui présente exagérés les caractères des bras d’A4s- terina gibbosa. Le canal du sable est fort simple dans cette famille : un simple repli en formede T, plus ou moins développé, suivant l’âge de l’in- dividu (pl. VI fig. 3, cet 4) ; la plaque madréporique a un petit nombre de pores. Culcitidæ (Pentaceros turritus, Gymnasteria carinifera, Culcita coriaceu). — Les caractères de cette famille rappellent beaucoup ceux de la précédente, même disposition de l’anneau ambulacraire (pl. VI, fig. 15), deux vésicules ambulacraires pour chaque ambu- lacre, sauf au premier ; les glandes lymphatiques de l’anneau sont lesmêmes, les vésicules de Poli sont fort longuement pédiculées. Chez ces trois espèces il y a des spicules calcaires dans l'ambulacre, formant, comme chez l’Oursin, une couronne à la face inférieure de la ventouse (pl. IIl, fig. 23); M. Viguier les a signalés le pre- mier. Le Gymnasteria m'a paru présenter des ambulacres assez bizarres ; la ventouse a une apparence chicoracée ; cela est-il dû entièrement aux contractions causées par l'alcool ? j’en doute. J’ai représenté, fig. 23, la ventouse de cette espèce en tenant compte des contractions artificielles ; on voit bien la couronne calcaire et les nombreux spicules épars dans le corps de l’ambulacre ; ces spi- cules ont le plus souvent la forme de deux plaques aréolées réunies par un manche plein (pl. III, fig. 24). ARCH, DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2° SÉRIE, — T, V dis, — suppz. 18817. — 2e Hém. 6 82 L. CUÉNOT. Le canal du sable présente des différences assez considérables ; chez la Culcite il est rempli d’un grand nombre de replis entremèé- lés irrégulièrement (pl. VI, fig. 16, c) ; chez le Pentaceros et le Grymnasteria, la lame verticale qui le divise en deux porte deux replis s'enroulant jusqu'à deux fois sur eux-mêmes (pl. VI, fig. 19); cela rappelle les Astemade. Astropectinidæ (Astropecten, Luidia ciliaris). — Il n’y a, pour ainsidire, pas de caractères absolument communs ; c’est une fa- mille fort curieuse par les phases diverses de développement qu’elle offre, fixées sur différentes espèces. Chezla Luidia ciliaris (pl. V, fig. 19), dans chaque interradius, deux gros corps de Tiedemann, de couleur brune et si écartés, qu'ils paraissent plutôt appartenir au radius ; une vésicule de Poli leur est adjointe. Dansl'interradius du canal du sable, on ne trouve que les deux corps de Tiedemann. Chez les Astropecten hystrix, spinulosus, squamatus et platya- canthus (pl. VIII, fig. 1), on trouve de même deux corps de Tiedemann et une vésicule de Poli par interradius ; au niveau du canal du sable , on trouve non seulement les deux corps de Tiede- mann, mais deux vésicules de Poli, une de chaque côté du tube calcaire ; on voit que c’est une tendance tout à fait inverseà celle que nous avons constatée jusqu'ici. Chez l’Astropecten aurantiacus (pl. VIIT, fig. 8), il y a un nom- rabre variable de vésicules de Poli, deux, trois et quatre par inter- . dius, dans tous sans exception; le nombre le plus fréquent et caractéristique est troision voit parfois deux vésicules sur un même pédicule, ou une seule présentant deux tubes excréteurs. Je renvoie à la monographie de MM: Carl Vogt et Yung pour plus de détails sur leur disposition. Les ambulacres présentent quelques variations : chez l’Aséro- pecten aurantiacus et la Zuidia ciliäris, j'ai pu voir et injecter les deux vaisseaux sanguins qu'ils présentent (pl: V, fig. 18), comme chez les Asteriadæ ; l'observation est rendue plus facile par la grande CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 83 taille des animaux. Chez la Luidia ciliaris (pl. VI, fig. 25), lesam- bulacres présentent une extrémité arrondie, sans ventouse; pour- tant ils ont la faculté de se fixer, faiblement il est vrai; on voit parfois, dans les bacs de Banyuls, la Luidia monter sur la surface verticale du verre ; cetanimal se sert surtout de ses appendices pour courir avec une certaine rapidité. La vésicule ambulacraire est fortement bilobée, c'est un passage à la forme des Astropecten. Chez ceux-ci, l'’ambulacre a une extrémité conique, creuse, inca- pable de se fixer (pl. V, fig. 18) ; il y a toujours deux vésicules am- bulacraires nettement séparées, même au premier ambulacre. Le canal du sable présente dans cette famille des particularités intéressantes : chez les Astropecten platyacanthus, spinulosus et squa- matus, il est divisé en deux parties égales par un septum vertical complet, portant deux replis opposés en forme d’ancre (pl. VIII, fig. 4) ; on pourrait comparer cette forme à deux canaux du sable de l’Asterias superposés par leur face sillonnée ; si on étudie le dé- veloppement, on voitque chez de jeunes Asér. squamatus, dont R = 122% c’est un tube contenant simplement un repli en formede T (pl. VIIL, fig. 5), c’est la phase fixée chez les Asteriadæ èt les Aste- rinidæ ; peu après, le repli atteint la face opposée où il se soude, le reste du développementest facile à comprendre, Chez les jeunes Astropecten aurantiacus, d’après MM. Carl Vogt et Yung, on re- trouve la forme fixée chez les adultes des trois espèces précédentes, c'est-à-dire deux canaux séparés avec chacun une ancre ; peu à peu cette disposition se complique par l’adjonction d’autres trabé- cules calcaires, disposés irrégulièrement ; à mesure que l’animal avance en âge, la disposition primitiveest masquée de plus en plus ; la coupe représentée par MM. Carl Vogt et Vung (69) rend parfaitement l'aspect chez un adulte. Enfin chez l’Astropecten hys- tri, le canal du sable (pl. VIII, fig. 6) est rempli de lames moins nombreuses, mais plus irrégulières encore que dans l'espèce précé- dente. Chez la Zuidia ciliaris, le canal du sable commence par un tube mince, membraneux (pl: VI, fig. 21 et 28), avec quelques 84 L. CUENOT. plaques calcaires dans l'épaisseur des parois, puis le tube s’évase tout à coup, devient globuleux et se remplit de calcaire disposé sans aucune loi; le canal du sable se rétrécit un peu en arrivant au madréporite ; quand on y pratique des coupes transversales (pl VLfig. 22),0on voit que les cavités sont tancôt tapissées par un haut épithélium vibratile, tantôt par une simple couche pavi- menteuse, Sans qu on puisse remarquer aucune régularité dans leur distribution. On voit que ce n’est pas sans raison que j’ai dit précédemment que la phylogénie n’était pus d'accord avec l’ontogénie; les Astro- pecten qui occupent dans l’échelle une place bien inférieure à celle des Asteriadæ présentent dans leur jeune âge la phase qui caracté- rise le canal du sable de cette dernière famille, puis la dépassent ; la Luidia, inférieure aux Astropecten par les caractères du tube digestif et des vésicules ambulacraires, offre le canal le plus com- pliqué du groupe. La vésicule ambulacraire commence par être unique, puis par se bilober si profondément, qu’elle devient réellement double ; c’est chez les Asteriadæ, animaux perfectionnés, que l’on observe la forme simple, et chez les Aséropecten, animaux plus inférieurs, que l’on trouve la forme compliquée. Je ne fais que signaler ces faits en passant, sans prétendre en tirer des conclusions préma- turées. Physiologie. — Les idées qui ont cours actuellement dans la science au sujet de l'appareil ambulacraire me paraissent singu- lièrement exagérées. MM. Jourdain, Perrier, etc., paraissent penser que l’eau de mer s’introduit dans l’organisme par la plaque madréporique et qu’elle parcourt ainsi toute l’Astérie ; il n’en est rien, Je sais qu’il y a de forts cils vibratiles dans le canal du sable; mais ces cils battent le liquide ambiant en tous sens et ne déter- minent aucun courant ; j'ai souvent observé le canal du sable déta- ché, sous le microscope, et je n’ai jamais vu les part.cules colorées inises en contact avec lui entrer par une extrémité et sortir par CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 83 l'autre. D'autre part, si l’eau de mer entrait dans l'appareil ambu- lacraire, par où sortirait-elle ? L'appareil ambulacraire se comporte comme un flacon à col mince plein d’eau de mer, qui serait bouché avecune matière poreuse, le tout plongé dans l’eau de mer: ilestévi- dent que les échanges entre lesdeuxliquides seraient à peu prèsnuls. L'observation des animaux vivants nous montre que le madré- porite n’est le siège d’aucun courant d’eau, ni pour l'entrée (Jour- dain, Perrier, etc.), ni pour la sortie (Williams, Hamann). En effet quand on met une Astérie dans un bac rempli de poussières flottantes, on verrait s’accumuler celles-ci sur le madréporite, si l'eau était attirée par les cils ; cela n’est pas, la plaque n’est jamais recouverte de corps étrangers ; d'autre part, le canal du sable des Luidia, des Astropecten, etc., est vraiment tout à fait obstrué par les replis calcaires qu’il contient (pl. VII, fig. 1) ; il est impossible qu'un courant d’eau s’établisse dans ces conditions. Enfin si l’on met une Astérie dans un bac rempli d’eau colorée, on voit qu'il n’en pénètre pas du tout par le canal du sable. Je ne préterds pas nier que l'eau de mer entre par le canal du sable, surtout chez les petites espèces ; mais le mouvement de cette eau, qui ne peut dépasser le canal, est vraiment négligeable ; le vo- lame de liquide contenu dans l’appareil ambulacraire est toujours le même, grâce à la disposition valvulaire découverte par Jourdain et Lance ; de plus, il renferme de nombreux globules sanguins, ce qui prouve qu’il n’y a pas de courant d’eau avec l’extérieur. Enfin, chez les Holothuries adultes, il n'y a pas de madréporite, le canal du sable s’ouvre dans la cavité générale. Quel est donc le rôle du canal du sable ? Je pense qu’il n’ena pas chez l'adulte ; si on enlève la paroi inférieure d'une Astérie et qu'on obture le canal du sable en le liant, l’animal se meut et se déplace comme auparavant, cela ne paraît lui apporter aucune perturbation. Le canal du sable et le madréporite sont un souvenir des pavillons vibratiles de la Comatule, et n’ont qu'une utilité tout à fait secondaire, 86 L. CUÉNOT, Tous les auteurs s'accordent pour donner aux vésicules de Poli un rôle assez analogue à celui des vésicules ambulacraires ; ces organes se contracteraient rhythmiquement pour faire progresser le liquide dans les vaisseaux circulaires et radiaux : ce n’est aucu- nement exact. Il est vrai que chez l’Aséropecten aurantiacus elles ont une assez forte tunique musculaire, mais leurs contractions (que je n’ai jamais observées) ont simplement pour but de faire passer les globules sanguins qu’elles produisent dans l’appareil ambulacraire ; leur forme, leur anatomie, leurs fonctions spéciales, tout parle contre l’idée précédemment émise ; enfin elles manquent dans un certain nombre de familles. Si on excite avec une aiguille 12 surface d’une vésicule de Poli (Astropecten aurantiacus), on force celle-ci à se contracter, tout le liquide qu’elle contient va dans l’anneau oral, qui se gonfle démesurément et reste dans cet état pendant fort longtemps ; cela prouve deux choses : l° que tout le système ambulacraire se comporte comme un appareil rempli de liquide auquel on ne peut rien ajouter ; 2° que même si le liquide interne est soumis à une certaine pression, il n’en peut rien sortir par le canal du sable, dont les replis calcaires obstruent complè- tement la cavité. Romanes et Ewart avaient également remarqué chez le Solasier papposus qu’il faut une très forte pression, pro- longée pendant quelque temps, pour qu’un liquide injecté par un vaisseau radial arrive à la plaque madréporique. Appareil vasculaire sanguin. Je vais prendre comme exemple une Astérie à deux rangées d'ambulacres, l'Asterina gibkosa où un Astropecten quelconque. J'ai dit précédemment que cetappareil se composait de deux parties, l’une orale, l’autre aborale, réunies par un vaste sinus interradial. Occupons-nous d’abord de la partie inférieure ou orale. Lorsqu’on examine une Astérie dans la position morphologique CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES, 87 que nous lui avons assignée, on voit (pl. V, fig. 17) que le milieu de la rainure ambulacraire est occupé par un large ruban qui paraît donner une branche transversale à chaque espace inter- ambulacraire (s) : c’est le vaisseau orangé de Tiedemann, le ruban épithélio-nerveux que nous avons étudié précédemment. Sous ce ruban se trouve une cavité. Si on introduit une canule de petite dimension, ou mieux une canule de Pravaz, et qu’on pousse l'injection avec précaution, on voit se remplir tout ce sinus radial, puis l'injection passe dans un anneau oral, d’où elle remplit les sinus radiaux des autres bras. Le sinus radial présente, quand on l’examine avec soin sur la ligne médiane, une ligne blanchâtre que l'injection n’a pas pénétrée, c’est la trace d’un septum con- jonctif qui partage en deux sa cavité ; devant chaque ambulacre on trouve une branche perpendiculaire à la direction du tronc radial ; tous ces sinus transverses se jettent dans un sinus marginal (u), qui borde la rainure ambulacraire ; ce dernier, après avoir dépassé un peu le niveau du premier ambulacre et recu la branche transverse qui passe au-dessus de celui-ci, se perd dans le tissu conjonctif. Au niveau de chaque ambulacre (pl. V, fig. 18),un mince vais- seau se détache du sinus radial ; un autre, placé à l’opposite de ce- lui-ci, se détache du sinus marginal (pl. V, fig. 7) ; ils courent sur l’ambulacre jusqu’à la ventouse où ils se terminent en cœcum ; on constate par les coupes qu’ils se trouvent dans la zone conjonc- tive de l'ambulacre ; chez les grandes espèces, Luidia, Astropecten, Asterias, j'en ai vu deux tels que je viens de les décrire ; mais chez les Aserinidæ et Echinasteridæ, je n’ai pu injecter que celui qui se détache du sinus marginal. L’anneau oral forme un grand sinus circulaire logé sous le ru- ban nerveux ; on voit également à'sa surface (pl. V, fig. 17,7) une ligne blanchâtre, marquant un septum qui partage sa cavité en deux parties superposées ;ce septum se continue avec celui du sinus radial (pl. VI, fig. 5, sb). L'anneau oral envoie quelques 88 L. CUÉNOT. courts diverticules dans la couche conjonctive de l’œsophage (pl. V, fig. 17), mais ce n’est pas constant. À chaque interradius (pl. VIIL, fig. 2) il donne une branche qui descend presque vertica- lement, passe entre le muscle abducteur des pièces buccales (y) et le tissu conjonctif qui l'entoure d’une part, et le soutien interra- dial ou odontophore d’autre part ; cette branche s’ouvre alors lar- gement dans la cavité générale, comme on peut le voir dans la pl. VIII, fig. 2, qui représente une coupe verticale passant par l’orifice interradial. Nous avons vu la distribution des sinus sanguins dans le bras ; au niveau de chaque ambulacre, il existe un orifice limité par les pièces ambulacraires et adambulacraires qui bordent la rainure brachiale : dans chaque orifice (pl. V, fig. 18, 0°), le sinus marginal envoie une branche qui traverse ainsi l'axe vertébral vers sa base et s'ouvre ensuite dans la cavité générale du bras. MM. Perrier et Poi- rier ont signalé ces ouvertures vertébrales chez les Asterias rubens et glacialis (52). Dans lesfigures qui s’y rapportent(pl. IV, fig. 5; pl. V, fig. 8, 15, 18, 19), on voit en o’ à la base des vertebres, au- dessus des vésicules ambulacraires, un filet coloré ressemblant à un vaisseau : c’est ce que l’on voit sur les injections ; la matière colo- rante s'échappe de l’orifice et file sur le tissu environnant, en don- nant l'apparence représentée sur mes figures, mais en réalité l’o- rifice de communication est situé un peu plus profondément. On voit donc qu’à chaque ambulacre correspond un orifice vertébral, sauf au premier cependant ; comme il passe à travers une pièce pleine (formée par la soudure de deux vertèbres), il n’y a pas d’orifice préformé, et le sinus marginal n’envoie pas de branche correspondant au premier ambulacre. On pourrait croire que l’ori- fice interradial correspond morphologiquement à la soudure des deux orifices vertébraux appartenant aux premiers ambulacres de deux bras contigus : il n’en est rien : tandis que la branche interra- diale se détache du cercle buccal, l’autre branche se détache du si- nus marginal ; de plus, elles n’ont aucunement les mêmes rapports CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 89 avec les pièces calcaires. Je n’insiste pas plus lonstemps sur ce point. Les coupes nous permettent de vérifier et de compléter cet exposé; elles ne sont pas toujours très faciles à pratiquer, surtout chez les espèces de grande taille, où elles ont conduit à bien des erreurs ; il vaut mieux s'adresser à l’Asterina gibbosa ou à une petite espèce d’Astropecten. Sur une coupe transversale du bras, tangentielle à un ambulacre (pl. VI, fig. 8), on voit en haut le ruban nerveux (n) qui se con- tinue sur l’ambulacre ; en dessous de lui est creusé le sinus radial (s), séparé du ruban nerveux par une mince couche conjonctive et par un épithélium pavimenteux vibratile, qui est la continuation directe de celui de la cavité générale ; en dessous encore, la coupe du muscle vertébral transverse (x), et enfin la lumière du vaisseau ambulacraire radial (b) ; sur les côtés, on voit la conpe ovalaire du sinus marginal (uw), au delà de l’ambulacre. La lumière du sinus radial est toujours traversée par un septum, de forme très diverse suivant les espèces; chez l’Asterina gibbosa, le Palmipes, il est très mince et porte des noyaux épars à sa surface (pl. VI, fio. 8); chez les Asteriadæ, les Astropectinide, c’est une lame assez épaisse, qui est perforée au niveau de chaque intervalle vertébral par un large trou, dont les bords sont reliés aux parois du sinus par un septum oblique (pl. VIT, fis. 10, L), de sorte que sur la coupe le sinns radial paraît être formé par la superposition de trois cavités. Quelle que soit sa forme, ce septum se continue dans tout le sinus radial et va s'insérer sur un autre septum qui parcourt tout l'anneau oral (pl. VI, fig. 5, sb); celui-ci est plus épais, placé obli- quement de façon à partager en deux parties inégales ce sinus circulaire ; la plus grande est externe, c’est elle qui va s'ouvrir dans la cavité générale par l’orifice interradiaire précédemment décrit (pl. VIII, fig. 2); la petite est la plus interne, c'est elle qui donne naissance au sinus interradial (pl. IV, fig. 16, »’). Dans l’un des interradius, on trouve un vaste sinus, qui descend 90 L. CUÉNOT. vers la face inférieure ; on lui a donné divers noms, ceux de schlauchformige kanal, de canal axial périhæmal (Ludwig), canal sacciforme, sac hydrophorique (Perrier) ; je l’appellerai sinus axial ou sinus glandulaire, parce qu’il contient à son intérieur, non seule- ment le canal du sable, mais encore la glande ovoïde ; quand on en fait des coupes, on voit qu’il est formé d’une couche conjonctive avec quelques fibres musculaires, recouverte des deux côtés par un épithélium pavimenteux, vibratile. Comment naît la glande ovoïde? Elle s'implante sur le septum circulaire de l’anneau buccal (pl. IV, fig. 16), de diverses façons, par un pédicule simple ou double ;'parfois même ce pédicule traverse le septum pour aller se continuer avec le tissu conjonctif sous-jacent au ruban nerveux (Penfaceros turritus); quoi qu'il en soit, elle est en continuité avec le septum ; Ludwig l'avait bien vu, mais avait interprété les choses d’une facon bien différente, comme on le verra dans lhistorique. Si l’on place le canal du sable en avant, la glande ovoïde se place toujours à sa gauche ; elle garde constamment cette position, Âu point de vue histologique, elle est formée d’un lacis conjonctif et de cellules lymphatiques (pl. VII, fig. 16) ; le lacis de fibrilles conjonctives forme un réseau très compliqué, limitant des aréoles ; un grand nombre de cellules, que nous avons déjà décrites à propos du liquide sanguin, disposées assez irrégulièrement, couvrent ces tractus conjonctifs ; à la périphérie, il y a des espèces d’alvéoles contiguës l’une à l’autre (pl. VIIT, fig. 8), où les cellules mûres finissent par arriver : aussi, lorsqu'on regarde sur le vivant cette partie de la glande ovoïde, la voit-on remplie de cellules pigmentées, très amæboïdes (pl. VIT, fig. 17, l) ; celles-ci soulèvent la paroi conjonctive sur des points qui y sont prédisposés eb s’é- chappent au dehors. Un épithélium formé de cellules pavimen- teuses revêt en partie la glande ovoïde; mais il manque dans tous les endroits de sortie. J’ai étudié précédemment l’évolution des cellules, je n’y reviendrai pas ; elles sont identiques au point de vue histologique avec les cellules embryonnaires du tissu conjonctif. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 94 La couleurde la glande ovoïde est le plussouvent brune ; la teinte va du brun clair au brun presque noir (Astropecten spinulosus) ou violacé (Cribella, Echinaster). En arrivant à la face inférieure, le sinus axial so rétrécitnotablo- ment ; du côté interne (pl. V, fig. 1), il se prolonge en un ampoule très volumineuse, cachée dans l’intérieur du test, située au dessus de la dilatation ampullaire du canal du sable (d) ; du côté interne, il s'instre au pourtour du madréporite, le canal du sable en occupant le centre. L’ampoule interne (voir pl. V,fig. let 5 ; pl. VI, fig. 10 ; pl. VII, fig. 1) est séparée du sinus axial par un sepium membra- neux ;sa cavité ne communique donc pas librement avec celle de ce dernier. Examinons maintenant le trajet de la glande ovoïde : avant d'arriver près du madréporite, elle envoie un prolongement (L), qui perfore la paroi du sinus et s’étalelibrement daus la cavité générale ; c'est la glande lymphatique de la cavité générale, quiprend les formes les plus diverses suivant les espèces. La glande ovoïde continue à descendre vers le madréporite, perfore le septumqui sépare l’am- poule du sinus axial, et, traversant toute la longueur de cediverticule (g’), va s'attacher à la paroï opposée. Sur une coupe verticale, cette terminaison représente un fuseau très allongé, suspendu à peu près au milieu de l’ampoule, mais en réalité elle forme une lame hori- zontale traversant toute la cavité. Dans toutes les espèces que j’ai étudiées, j'ai trouvé la même disposition ; cette terminaison de la glande ovoïde est peu active, peu colorée ; pourtant elle renferme des cellules amæboïdes ; l’am- poule étant fermée detoutes parts, je ne vois pas à quoi peut servir la glande lymphatique : l’'embryogénie nous l’apprendra probable- ment. | Je rappellerai que la plupart des auteurs ont considéré la glande lymphatique de la cavité générale comme un appareil vasculaire destiné au tube digestif ; M. Hamann en a même figuré les rami- fications sur le sac stomacal : c’est une idée complètement fausse: 0% L.-CUÉNOT. les injections n’y pénètrent jamais, et tous les procédés d'étude montrent que c’est simplement une dépendance de la glande ovoïde, destinée à fournir les corpuscules sanguins de la cavité générale. Ilnous reste une question difficile à élucider : les communications de système sanguin avec l'extérieur, tantôt affirmées, tontôt niées. Il faut s'adresser à des espèces de petite taille, lAsterina gibbosa, par exemple, qui présente le moins de complication dans le madré- porite (pl. VI, fig. 10): les coupes verticalesde l’ensemble montrent, avec une netteté indiscutable, que des canaux parcourant toute la plaque viennent déboucher dans la partie externe du sinus glandu- laire ; j'ai vu très nettement l’épithélinm péritonéal qui recouvre tout le sinus sanguin se continuer avec les cellules cubiques des canaux madréporiques, et celles-ci angmenter peu à peu de taille jusqu'à l'épithélium externe. Tous les canaux de la plaque sont en communication les nns avec les autres ; on ne peut, sur un dessin, représenter les anastomoses, alors qu’on les voit fort hien sur la coupe, en faisant varier la vis micrométrique. (C’est ce qui explique le fait suivant: quand avectoutes les précautions possibles on injecte un liquide par le sinus axial, l'injection passe dans le madréporite, puis revient par le canal du sable; j'ai constaté celaun grand nom- bre de fois et chez toutes les espèces sans exception. J'ai constaté par les coupes que des canaux madréporiques débou- chent directement dans le sinus axial chez l’Æchinaster sepositus, divers Astropecten, la Luidia ciliaris, l’'Asterias glacialis et Aste- rina gibbosa ; chezles grandesespèces, Asterias glacialis et Astro- pecten aurantiacus, on peut, par l'injection et la dissection, trouver les orifices sans faire de coupes. On voit que le fait est parfaitement constant dans toutes les familles. Tout ce que je viens de décrire ne s'applique qu'au côté externe du sinus sanguin, c’est-à-dire compris entre le canal du sable et le pilier interradial, Des canaux débouchent-ils dans l’ampoule conte- nant le prolongement glandulaire g ? Je crois lavoir constaté chez CONTRIBUTION À L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 98 l Asterina gibbosa et 'Echinaster sepositus ; chez les autres espèces on n’y trouve aucun pore; les liquides injectés par le sinus n’y pénètrent pas. La question de savoir si le système sanguin débouche à l'exté- rieur comme le système ambulacraire est fort controversée ; Greeff, Hoffmann et Teuscher, se basant sur des injections et ce dernier auteur sur une coupe, admettent l'afirmative; mais la figure que donne Teuscher est si peu exacte qu’elle retire toute valeur à son assertion ; KRèomanes et Ewart, Perrier et Poirier, sont également de cet avis, d’après des injections ; Ludwig, reprenant les vues de Sharpey, Tiedemann, L. Agassiz et Müller, nie toute communication entre le système sanguin et l'extérieur. M. Perrier (50) a émis récemment une autre manière de voir ; d’après cet auteur, « aucun des canalicules ne conduirait ailleurs que dans le tube hydrophore ; ces canalicules ne sont en effet que le résultat du plissement des parois de l’entonnoir vibratile, primitivement unique, par lequel le tube hydrophore s'ouvre à extérieur, mais le tube hydrophore communique au point où il s’unit au sommet de l’entonnoir vibratile, avec une cavité qui, je n’en suis minutieusement assuré, est bien la cavité même du canal sacciforme. » Les canalicules ne sont nullement le résultat du plis- sement de l’entonnoir vibratile primitif, je l'ai montré plus haut ; en outre, cette communication entre le canal du sable et le sinus ne signifie pas grand'chose, car chez les grosses espèces il est impossible de déterminer où finit le caual et où commence le madréporite (pl. VII, fig. 1) ; M. Perrier manque donc de précision ; chez les petites espèces (pl. VI, fig. 10) et même chez la Luidia ciliaris, les Asterias, on voit parfaitement que le canal du sable n’est nullement perforé, et que ce sont directement des canaux madréporiques qui débouchent dans le sinus sanguin ; enfin dans les figures de Lovén qui représentent le développement du madréporite chez l’Ast. glacialis, on voit des pores qui se percent en dehors du canal du sable et sont par conséquent destinés 94 L. CUÉNOT. au sinus sanguin. Maintenant il faut faire quelques restrictions : à mesure que l’animal avance en âge, les pores sanguins deviennent très minimes, ils sont insignifiants chez les Astropecten aurantiacus adultes où souvent les injections ne passent pas à l'extérieur. On a beaucoup exagéré l'importance de ce dispositif, je crois qu'il n'a aucune influence physiologique ; je ne peux que réteri cice que j'ai dità propos du canal du sable. Appareil vasculaire génital. — Il me reste à examiner la se- conde partie de l'appareil sanguin, entièrement en rapport avec les organes génitaux. lle ne se forme qu'à une époque relativement tardive, lorsque l’Astérie a atteint à peu près le tiers de sa taille maximum. Pour la bien comprendre, il est nécessaire de com- mencer par le développement ; je vais prendre comme type un Astropecten. Si l’on prend un jeune Astropecten aurantiacus bien avant le développement des organes génitaux, on voit qu'il n’existe à la face aborale que le sinus glandulaire ; la glande ovoïde mérite alors bien son nom; elle se prolonge en dehors du sinus pour former les deux glandes lymphatiques de la cavité générale. Il n’y a pas trace de l’anneau sanguin aboral. Un jeune Astropecten de la même espèce, dont R = 80°", va nous montrer la phase suivante (pl. VIT, fig. 2) ; sur la face interne dutest, on trouve un pentagone régulier, partant du sinus axial ; des angles de ce pentagone, marqués par les piliers interradiaires, se détachent deux petits vaisseaux, qui remontent quelques millimètres le long du pilier, puis se terminent en cœcum. On peut injecter tout le pentagone et les rudiments de vaisseaux génitaux en poussant par le sinus axial; ce sont donc des canaux creux. Si l’on pratique des coupes transversales (pl. VII, fig. 3), on voit qu’ils sont logés dans le tissu conjonctif de la paroi inférieure du test, et recouverts par le péritoine avec ses fibres musculaires habituelles (e); un épithélium pavimenteux les tapisse ; au centre du canal se voit un cordon arrondi, libre de toutes attaches; ce cordon est revêtu de ét [en a, *# CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 95 l’épithélium pavimenteux ordinaire, il est formé de tissu conjonctif et de cellules, les unes isolées, les autres réunies en petits groupes; celles-ci sont identiques aux cellules jeunes de la glande ovoïde, gros noyau nucléolé, protoplasma très granuleux. Si l’on poursuit les coupes jusqu'au voisinage du sinus axial, on voit que ce cordon n'est qu’une émanation de la glande ovoïde, dont les diverses parties conslituantes se sont ainsi prolongées dans le pentagone sanguin. La glande ovoïde a émis ainsi à droite et à gauche deux processus ; ceux-ci parcourent toute la face aborale en donnantaux interradius des bourgeons qui entrent dans les vaisseaux génitaux ; en se réunissant, ils ferment le pentagone. Je n'ai jamais trouvé d’intermédiaires entre les deux phases que je viens d'étudier, car il est fort difficile de se procurer de jeunes Astéries ; mais je pense que le pentagone sanguin et le cordon génital se forment et progressent en même temps. Les cellules se multi- plient abondamment dans le cordon génital, si bien que l'on a un axe presque complètement cellulaire, entouré d’une zone conjonctive et de l’épithélium pavimenteux (pl. VII, fig. 4, 9”), qui est toujours libre au centre du vaisseau sanguin vw. La formation des organes génitaux commence chez l’Astropecten aurantiacus lorsque R = 8 à 10°" (chez l'adulte R = 22°"), chez l’Astropecten hystrix lorsque R = 4° 5 (chez l’adulte R = 7 #5), chez l'Æchinaster sepositus lorsque R = 2 à 3 * (chez l'adulte R = 12 ‘*). On voit que l'animal est déjà très bien constitué, sous tous les rapports, longtemps avant d'arriver à maturité sexuelle, Chez un Astropecten ou une Luidia; où le vaisseau génital est relativement longs, le cordon génital se prolonge jusqu’à son extré- mité en s’amincissant graduellement ; le développement commence par le point le plus proche du disque; puis se propage jusqu'à l’ex- trémité opposée, de sorte que l'on a sur un même vaisseau génital toutes les phases se succédant régulièrement (pl. VII, fig. 7). En un point déterminé, les cellules se multiplient activement 96 L. CUÉNOT. (pl. VII, fig. 4), ce qui produit une légère extumescence du cordon génital; ce soulèvement refoule devant lui la paroi du vaisseau sanguin, puis prend un développement considérable en gardant tou- jours la même constitution histologique (pl. VIL, fig. 5). À ce moment, on à un organe génital plus ou moins entièrement constitué, en continuation directe avec le cordon qui lui a donné naissance, le tout entouré d’un sinus sanguin. Arrive alors une importante modification : un septum conjonctif semi-lunaire (pl. VIL, fig. 6, f) s’interpose entre la paroi du sinus et la base de l'or- gane génital, de façon à interrompre la communication entre le sinus génital etle vaisseau d’un seul côté, qui estle côté appliqué sur le test. Ce septum se soude au test; c’est à son intérieur que se perforera le spermiducte ou l'oviducte, ou, pour m’exprimer autrement, la communication entre le cœcum génital et l'extérieur. Pour bien comprendre cette disposition, il faut comparer les fiou- res 6 et 10 de a pl. VIT: l’une est une coupe verticale, perpendi- culaire au vaisseau génital; l’autre est la projection de ce même vaisseau sur un plan vertical : le septum semilunaire f correspond à la base de l'organe génital de la fig. 10, depuis le point où s’at- tache Le cordon 4” jusqu’au point où l'organe génital perfore le test pour aller s'ouvrir au dehors. Revenons au moment où vient de se former le septum conjonc- tif : une invagination de l’épithélium extérieur passe à travers le septum et rejoint les cellules internes ; le canal de sortie est ainsi constitué. Je ne m'occuperai des transformations cellulaires qu’au chapitre qui traite des produits génitaux. Le cordon génital est toujours en communication cellulaire avec l'organe qu’il a contribué à former. Mais le pédicule qui les relie s’étrangle bientôt; en même temps le cordon change notablement de forme (pl. VII, fig. 10, 12, 13;. Je me résume. On trouve chez le jeune, immédiatement aprés la formation des organes génitaux : 1° un pentagone creux par- tant du sinus axial, qui donne deux vaisseaux génitaux par inter- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 97 radius ; ces vaisseaux, à chaque organe génital, se dilatent en un sinus qui l’entoure complètement; 2° un cordon cellulaire, par- tant de la glande ovoïde, parcourt tout l'appareil précédent, et s’at- tache à la base de chaque organe génital. Que devient chez l'adulte cet ensemble complexe? Si l’on fait des coupes du pentagone aboral (pl. VII, fig. 8), on voit que le cordon génital est relié à la paroï du vaisseau par un gros pédi- cule conjonctif qui règne dans toute la longueur du cordon; la forme de ce dernier s’est également modifiée, il s’est lobé plus ou moins profondément. Les cellules qu'il contient se sont énormé- ment multipliées ; elles se chargent de pigment jaune et se trans- forment en globules sanguins, en suivant toutes les phases que j'ai décrites auparavant : le cordon génital est donc devenu une glande lymphatique ; cela n’a rien d'étonnant, puisqu'il est le prolon- gement de la glande ovoïde. Tandis que le centre est formé d’un amas de tissu conjonctif et de cellules (pl. VIL, fig. 9), la péri- phérie présente des alvéoles assez semblables à celles de la vési- cule de Poli, dans lesquelles les cellules se divisent activement, se chargent de pigment, deviennent amæboïdes (pl. VII, fig. 9, L), et d’où elles sont finalement expulsées pour tomber dans le pentagone sanguin. Jusqu’aux organes génitaux, on trouve ainsi le cordon génital relié à la paroï par une lame conjonctive, et transformé en glande lymphatique sur tout son parcours ; quand la coupe passe par un organe génital (pl. VIL fig. 10,12, 13), le cordon est en conti- nuité avec lui et libre de toute attache surle reste de sa surface. Chez l’adulte (pl. VIL, fig. 15), on peut presque toujours recon- naître le trajet des vaisseaux sans injection, grâce à la couleur du cordon ; il éprouve les mêmes variations de teinte que la glande ovoïde, tantôt brun, noirâtre ou violacé, et apparaît par transpa- rence au travers des téguments. Il est impossible, quand on re- garde ainsi un adulte, de ne pas avouer que ce cordon génital est bien la continuation directe de la glande ovoïde. Il n’y a que dans ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. —- 2 SÉRIE. — T. V bis. — supp. 1887, — 2e Mem. 7 98 L. CUÉNOT. la famille des Asterinidæ, dont les espèces sont d'assez petite taille, que le cordon génital ne se transforme pas en glande lymphati- que (pl. VI, fig. 12, 9”); il ne renferme qu’un petit nombre de cellules et garde le caractère embryonnaire (compareravec le cordon d’un jeune Astr. aurantiacus (pl. VII, fig. 3). Aussi chez les Asterina, Palmipes, Solaster, il faut avoir recours à l’injection pour déceler le cercle aboral ; jamais il ne devient apparent sur le vivant, puisque le cordon génital ne se colore pas. Quel peut être le rôle de ce réseau lymphatique ? Il est unique- ment en rapport avec les organes génitaux, puisque très souvent la communication entre le sinus axial et l’anneau aboral est nulle (Asterias glacialis, Astropecten aurantiacus). J’ai montré que très probablement les globules Iymphatiques absorbaïent les substances nutritives solubles répandues dans la cavité générale, pour les resti- tuer sous une forme résistante à l’osmose. Les peptones peuvent bien être absorbées par le réseau glandulaire aboral ; mais l’albumine produite par la dissolution de ses cellules ne peut s'échapper, elle est forcément utilisée par les organes génitaux, qui ont un déve- loppement très rapide et absorbent une quantité considérable de vitellus. Toutes les parois des vaisseaux sont recouvertes d’un épithélium pavimenteux vibratile parfaitement continu ; M.:Hamann ne l’a point vu et a considéré tout le cercle aboral et ses dépendances comme une série de lacunes irrégulières creusées dans le tissu con- jonctif : il n’en est rien ; ces sinus ou vaisseaux, comme on voudra les appeler, sont toujours parfaitement limités ; nulle part ils ne s'ouvrent dans les interstices des muscles, des divers organes ; enfin leur paroi interne est toujours recouverte d’un épithélium continu, qui donnerait au nitrate d'argent la mosaïque polygonale repré- sentée fig. 9, pl. II. On peut voir sur le vivant la circulation dans le sinus génital (pl. VL, fig. 13, v”) ; en comprimant l’organe sexuel avec certaines précautions, on distingue très bien les diverses couches épithéliales TS 0 NU ITU CONTRIBUTION À L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES- 99 externe et interne ; jamais je n'ai vu de cils vibrer à l’intérieur du sinus sanguin ; on voit de nombreux globules pigmentés se dé- plaçant lentement par leurs mouvements amæboïdes. On peut cons- tater les mêmes faits chez les Ophiures où les organes génitaux sont également enveloppés de toutes parts d'un sinus sanguin. Ce sim- ple examen de l’organe vivant suffit pour démontrer l'erreur de Ludwig, qui croyait que le cordon génital était l'appareil vasculaire destiné aux organes génitaux et qu'il se continuait tout autour de ceux-ci. | Pour simplifier cette description, j'ai toujours parlé de l'anneau vasculaire aboral comme formant un pentagone régulier ; mais il est fort souvent irrégulier ; souvent chez l’Aséropecten aurantiacus, on voit un des vaisseaux doublé sur l’un des points du parcours (pl. VIL fig. 15) ; cela est bien plus caractérisé encore chez l Echinaster sepositus (pl. V, fig. 10 et 11), où l’anneau aboral prend la forme d'un réseau circulaire très irrégulier, on ne trouve pas deux Echinaster chez lesquels il soit semblable ; presque tou- jours la complication semble partir du sinus axial. Quel que soit le nombre des vaisseaux (pl. VI, fig. 11), la glande ovoïde se pro- longe dans chacun d’eux. Ou voit qu’il ne faut pas considérer l'appareil vasculaire aboral comme comparable à l'anneau oral ; tandis que ce dernier est immuable, l'appareil abcral varie beaucoup de forme ; c’est un réseau, de forme simple, qui va du sinus axial aux organes génitaux. Ainsi considéré, il est tout à fait homologue à celui que M. Prouho (1) a trouvé chez un oursin, le Dorocidaris, et qui se trouve dans la lame mésentérique unissant les cinq glandes génitales. Physiologie. — Le nom d'appareil vasculaire sanguin est un peu ambitieux ; il n'y pas de liquide sanguin, à proprement parler, puisque le contenu de cet appareil est identique à celui de la cavité (1) Sur le système vasculaire du Dorocidaris papillata, Comptes rendus, n° 24, 15 juin 1886, page 1403, 100 L. CUÉNOT. générale ; j'ai voulu simplement rappeler qu'il est destiné à la nu- trition des organes qu’il parcourt, savoir le ruban épithélio-nerveux à la face supérieure, les organes génitaux à la face inférieure, grâce aux nombreuses glandes lymphatiques qu'il contient à son intérieur. Le liquide contenu dans les vaisseaux et sinus n’est mû par aucun courant ; il est simplement ballotté par les cils vibratiles de l’épithélium vasculaire, sans direction déterminée. Bien des fois, j'ai essayé de voir s’il n’y avait pas un courant quelconque par les orifices vertébraux ou interradiaires ; mes essais, quelque variés qu’ils fussent, ont été négatifs ; à la loupe, on voit parfaitement des particules s’introduire dans les orifices, être ballotées longtemps à Ja surface, puis s’échapper définitivement. Après avoir décrit en général la disposition du système vascu- laire, il convient d'examiner ses modifications dans les différentes familles ; il en présente de très curieuses qui jettent un grand jour sur sa morphologie. Asteriadæ. — Dans les études de mes prédécesseurs, c’est presque toujours les Asterias rubens ou glacialis qu'ils ont pris comme types ; c’est un choix malheureux, car ces espèces sont justement assez aberrantes et présentent quelques dispositions spé- ciales : l’une d’entre elles a été le point de départ d'une erreur de Ludwig, qui aurait été certainement d’un autre avis, s’il avait étudié une Astérie plus simple. | Si on injecte par le sinus radial (pl. IV, fig. 2, 4), on voit que l'intervalle laissé entre les ambulacres est occupé par un réseau vasculaire, qui paraît, au premier abord, très différent de celni que nous avons étudié : il n’en est rien ; on sait que dans cette famille les trous ambulacraires sont disposées sur quatre rangées, alternes ; de sorte que si l’on considère une paire, l’un des trous sera rappro- ché du sinus, l’autresera éloigné, et ainsi de suite.[Inaît de même un sinus transverse au devant de chaque ambulacre, mais il est forcé de contourner le trou ambulacraire qui est sur son chemin, c’est la CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 401 seule différence qui existe avec les Astéries à deux rangées. On voit donc naître côte à côte deux vaisseaux parallèles, qui s’écar- tent pour embrasser le trou distal, suivant l'expression anglaise, qui est sur leur chemin ; un coup d'œil jeté sur la figure 2 ou 4, en dira plus qu'une longue et pénible description. Au bord de la rai- nure ambulacraire, tous ces vaisseaux se jettent dans un sinus maroinal (u), assez mal délimité ; ce sinus, à son tour, au niveau de chaque orifice adambulacraire (0°), émet une branche qui va s’ouvrir dans la cavité générale (pl. IV, fig. 5,0°).C’est Hoffmann qui a découvert ce réseau brachial ; MM. Perrier et Poirier ont rectifié sa description ; ce sont eux qui ont sionalé chez les deux espèces dont je m'occupe les ouvertures vertébrales (52). Au com- mencement du bras, on voit les sinus reprendrela disposition typique (pl. IV, fig. 8); le sinas marginal, après avoir recu le premier vaisseau transverse, se perd dans les intervalles con- jonctifs. M. Hoffmann le fait serelier avec le sinus marginal du bras suivant, bien à tort ; dans toutes mes injections, je l’ai vu se terminer en cœcum; d'ailleurs ce serait en contradiction avec ce que j'ai reconnu précédemment chez les espèces plus simples. Le cercle sanguin (pl. IV, fig. 1) débouche dans la cavité générale par cinq orifices interradiaires , fort petits, à moitié recouverts par des brides mésentériques ; si on introduit une canule très fine dans l’un d’eux, on peut facilement injecter les quatre autres. Au point où se trouvent ces orifices, Hoffmann indique un petit lacis de vaisseaux ; il est probable qu’il les a injectés, mais ila pris pour des vaisseaux les brides conjonctives qui s’imprègnent de matière colorée, lorsque celle-ci s’échappe dans la cavité générale. Jusqu'icinous retrouvons exactement les mêmes dispositions que dans le type général. Etudions maintenant le sinus radial et l’an- neau oral sur les coupes. Un mot d’historique est nécessaire : Ludwig (1878) a donné une théorie de l’appareïil vasculaire, qui est partout acceptée ; elle n’est cependant pas exacte, au point de vue des interprétations ; quant aux faits, ils ont été assez hien A02 L. CUÉNOT. observés pour la plupart. Ludwig, étudiant un type aberrant, l’Asterias rubens, au moyen des coupes sur des échantillons conservés dans l'alcool, a tiré tout le parti possible de ses matériaux. Les Astérides se conservent mal dans l’alcool, à moins de précautions spéciales; les épithéliums sont fort délicats ; et, surtout après les décalcifications, toujours nécessaires pour les coupes, à la place d’une glande compacte, on ne retrouve plus que le lacis conjonctif qui la soutient. C’est ce qui a amené Ludwig à admettre des réseaux vasculaires dans des organes qui, sur le vivant, sont manifestement pleins. Hamann, qui l’a suivi dans sa théorie ,en négligeant les études sur le vivant,est tombé exactement dans la même erreur. Tout ce que j'ai déerit comme sinus ou vaisseaux est pour Ludwig un espace périhæmal ; le véritable appareil vasculaire de cet auteur est formé par les septumsradiaires et annulaires, par la glande ovoïde et le cordon génital ; en effet, toutes ces parties sont continues les unes avec les autres, et, sur des Astéries mal conservées, ont assez l'apparence d’un réseau vasculaire. Nous avons vu précédemment la signification du cordon génital ; la glande ovoïde que Jourdain, Teuscher et Hoffmann chez les Astéries, Perrier chez les Oursins ont montré n'être qu’une glande, est un organe lymphatique comme je l’ai démontré le premier ; il nous reste à voir ce qui a pu induire en erreur Ludwig dans les septums radiaux. Le septum radial est une lame fort épaisse qui, aux intervalles vertébraux, est perforée de larges trous, toujours placés à la partie inférieure. Au bord de ces trous s’attachent des septums obliques, conjonctivo-musculaires, qui se relient aux paroïs du sinus ; quand la coupe transversale passe par un des trous, on a la fig. 6, pl. IV ; quand la coupe passe par un point non perforé, on a la fig. 7, qui montre un simple septum vertical ; Ludwig avait bien vu cette disposition. On voit que le septum va depuis la base du bras jusqu’à son extrémité, complet seulement à sa partie supérieure, quiest absolument creuse; c’est cette cavité que Ludwig CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 103 a interprétée comme vaisseau sanguin. Pour bien l’étudier, voici comment il faut procéder : avec un scalpel, on enlève tout le fond de la rainure ambulacruire ; on a ainsi un long ruban, comprenant le septum et la couche épithélio-nerveuse ; il n’y a pas à décalcifier, et l’on peut faire des coupes aussi minces que l’on veut. On voit alors que le septum, limité par une mince couche conjonctive et un épithélium pavimenteux manquant par places, est absolument creux (pl. IV, fig. 9) ; sa cavité est traversée par une grande quantité de tractus conjonctifs, qui la subdivisent en nom- breuses alvéoles ; des cellules (L), identiques à celles des glandes lymphatiques, reposent sur les tractus conjonctifs, ou sont libres dans les cavités qu'ils limitent; on voit que ce septum est tout à fait semblable à une glande lymphatique ; pour s’en convaincre, il suffit de le détacher sur le vivant et de le regarder à un fort grossissement (oc. 2, obj. 10 -à imm. Nachet); la figure 10, pl. 1V, en est une fidèle représentation ; le septum est rempli des cellules pigmentées habituelles, les unes non mûres, les autres déjà amæboïdes (/); on les voit affluer en grand nombre sur des points prédisposés à leur sortie (d), véritables hernies de fibres conjonctives, non recouvertes de l’épithélium vibratile externe. Chez les Asterias rubens et glacialis, la partie supérieure du sep- tum radialest donc convertie en glande lymphatique. Lange, Teus- cher et Ludwig ont pris sa cavité pour un vaisseau, sans voir ni les tractus conjonctifs, ni les cellules ; MM. Perrier et Poirier se itrom- pent en déclarant que le septum est plein et qu'il n’existe pas trace de l'appareil vasculaire décrit par les auteurs allemands précités. Les sinus transverses qui passent entre les ambulacres débouchent toujours dans la partie supérieure du sinus et jamais dans sa cavité inférieure (lorsqu'il paraît formé de 3 canaux superposés) ; la fig. 6, pl. IV, le montre fort nettement, à l’encontre des opinions d’Hoffmann. Le septum radial se relie au septum buccal; Ludwig décrit éga- 104 L. CUÉNOT. lement dans ce dernier, un appareil vasculaire, le cercle sanguin oral. Cet appareil n’existe pas ; le septum (pl. IV, fig. 16, sb) est absolument plein, les cavités lymphatiques du septum radial ne s’y prolongent point, du moins d’une façon constante ; parfois les réac- tifs le contractent, il se forme alors à sa surface des boursouflures, des épaississements épithéliaux, qui simulent des vaisseaux; mais, je le répète, cela est absolument artificiel, il n’y a pas de cavité continue dans le septum oral. Celui-ci limite deux cavités dans l'anneau sanguin, une interne, plus petite, qui donne naissance au sinus glandulaire (fig. 16,7’), une externe, plus grande, qui correspond avec les sinus radiaux et la cavité générale ; lorsqu'on pousse doucement une injection par les bras, il arrive assez souvent qu’elle ne passe point dans le sinus glandulaire ; la communication n est donc pas facile entre les diverses parties du système sanguin. Même observation pour la face inférieure (pl. V, fig. 2); si on l’examine sur un animal frais, on voit facilement le cercle aboral et son cordon génital interne g” ; si l’on pousse une injection par le cercle, on voit le liquide passer au devant du sinus glandulaire, sans y pénétrer, puis le dépasser et remplir le reste de l’anneau sanguin. Il n’y a donc pas communication entre le sinus et le cercle aboral. Par une dissection attentive on voit la glande ovoïde perforer la paroi du sinus (pl. V, fig. 1), puis passer dans le cercle aboral, où elle forme le cordon génital ; les fig. Let 2 montrent clairement cette disposition ; la coupe (fig. 3) confirme absolument les dissec— tions. | Le cordon génital qui, formant ainsi un cercle complet, passe au devant du sinus axial, perfore à son tour la paroi du vaisseau dans lequel il est contenu et s'étale dans la cavité générale (fig. 1, 2, 3), sous forme de deux masses glandulaires, très irrégulières (L), légèrement colorées en jaune, qui sont les glandes lymphatiques de la cavité générale, Chez l’Asterias rubens, il y a de même deux glandes lymphatiques, mais plus régulières que chez l’Asé. glacialis. On voit, par cet exposé, combien il se faut garder de comparer CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 105 l'appareil vasculaire des Astéries à celui des animaux plus élevés en organisation. Chez les Asteriadæ, il se compose en réalité de trois parties séparées, toutes pourvues d’une glande lymphatique, et qui n’ont que peu ou point de communication entre elles : la pre- mière est formée des sinus radiaux et du cercle oral externe ; elle débouche dans la cavité générale ; la seconde comprend le cercle buceal interne et le sinus axial, elle débouche à l'extérieur par quel- ques pores madréporiques ; la troisième est formée du cercle aboral et ses dépendances, uniquement en rapport avec les organes géni- taux; jene dis pas qu'il ne puisse passer quelques globules d'un système à l’autre, mais les communications sont extrêmement res- treintes, surtout chez l'Asterias glacialis ; cela n'est pas si absolu chez l’Asterias rubens. Echinasteridæ, Linckiadæ. — La circulation du bras est celle du type général (pl. V, fig. 7) ; le sinus radial est divisé en deux par une lame mince chez le jeune, plus épaisse chez l'adulte, présentant des perforations et des septums obliques (pl. VI, fig. 1 ), comme précédemment; iln y a pas trace de cavité lymphatique dans le septum radial. Lesorificesinterradiaires sont très petits et très difficiles à injecter. Toutes les cavités sanguines communiquent ensemble ; on peut injecter tout le système en poussant par un sinus radial. Chez la Cribella oculata (pl. V, fig. 9), l’anneau aboral a la forme d’un pentagone régulier émettant les dix vaisseaux génitaux habituels ; on imjecte facilement les sinus génitaux. Chez l’Echinaster sepositus la disposition est tout autre, je l’ai déjà signalée précédemment ; anneau aboral (pl. V, fig. 10 et 11) a la forme d’un réseau très variable ; j'en ai représenté un très simple et un autre très com- pliqué ; chez aucun Echinaster je n’ai trouvé la forme absolument régulière. Dans chacune de ces branches (pl. V, fig. 5), on trou- ve un cordon génital transformé en glande lymphatique, ce qui permet de voir le réseau aboral sans injection, grâce à sa couleur. Dans une note (Comptes-Rendus, 10 janvier 1887), j'ai dit que 106 L, CUÉNOT. les Æchinasteridæ ne présentaient jamais de glandes Ilymphatiques de lacavité générale ; c’est trop absolu ; à la vérité , elles sontextré- mement réduites et fort difficiles à trouver : elles se réduisent à quelques amas cellulaires réunis sur deux brides mésentériques (pl. V, fig. 12, L), qui partent du sinus axial et vonten divergeant s'attacher au test ; mais ces cellules m’ont présenté de la façon la plus nette la transformation en corpuscules sanguins; sur des coupes on peut constater que ces amas sont en continuité de tissu avec la glande ovoïde, Chez l’Ophidiaster Chinensis, la paroi du sinus glandulaire est remplie de spicules assez volumineux. Asterinidæ. — Le septum du sinus radial (pl. VI, fig. 8,1) est une lame mince parfaitement continue, qui porte sur ses deux faces des noyaux épars ; si Ludwig avait examiné cette famille, il aurait bien vu que ce septum simince ne pouvait renfermer d'appareil vasculaire. Les orifices interradiaires (pl. V, fig. 13 et 14) sont assez grands et faciles à injecter. Chez l’Asterina gibbosa, les organes génitaux étant placés à la face supérieure (pl. IT, fig. 11) comme Ludwig la décrit le premier, les vaisseaux génitaux sont fort longs, parcou- rentl’interradius (pl. V ,fig.16),puis remontent sur la face supérieure jusqu'aux organes génitaux. L’anneau aboral est très souvent irrégu- lier ; la fig. 11, pl. VI, montre Ja coupe de trois anneaux, dans chacun desquels on trouve le cordon génital, non transformé en glande lymphatique (pl. VI, fig. 12). Il y a deux glandes lymphatiques de la cavité générale (pl. VI, fig. 9), assez petites, globuleuses, que l’on retrouve facilement dans les dissections et les coupes (pl. VI, fig. 10). Culcitidæ. — Le septum du sinus radial présente des particu- larités du plus haut intérêt. Chez le Gymnasteria carinifera, au lieu d’être formé d’une lame membraneuse, plus ou moins épaisse, il est entièrement calcaire. Quand on le détache avec soin, etqu’on le porte sous le microscope, on voit (pl. VI, fig. 20) que c'est un long cylindre calcaire,de trame assez serrée, qui va s’amincissant légère- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 407 ment jusqu’à l'extrémité du bras ; il est lésèrement épineux à la surface, et pourvu de très nombreuses articulations, disposées dans tous les sens, afin de pouvoir suivre sans se rompre tous les mou- vements du bras ; ilest relié à la paroi inférieure du sinus par une lame conjonctive ; bien qu’il intercepte en grande partie la cavité, on retrouve sur les côtés la lumière du sinus. En arrivant vers la bouche, le septum calcaire, qui était compact depuis l'extrémité du bras, se dissocie pour ainsi dire ; son extrémité orale ne renferme plus que des plaques calcaires isolées, assez nombreuses à la vérité ; le septum de l’anneau buccal contient également beaucoup de plaques calcaires. Cette particularité présehtée par le Gymnasteria me semble un argument convaincant: ilne peut y avoir d'appareil vasculaire dans la cloison (Ludwig), pas plus que de système ner- veux (Perrier), puisque celle-ci est formée de calcaire com- pact. Le Pentaceros présente un septum radial épais et simple. Chez la Culcite, la lumière du sinus radial est parcourue par plusieurs septums, disposés assez irrégulièrement, limitant des cavités qui s'ouvrent les unes dans les autres ; la fig. 18 de la pl. VI donne une bonne idée de cette disposition. Les orifices interradiaires (pl. VI, fic. 15) sont fort grands et rappellent ceux que nous verrons chez les Astropecten. J’ai trouvé deux glandes lymphatiques de la cavité générale (pl. VIT, fig. 17 et 19, {), assez minimes; elles sont supportées par deux brides mésentériques qui vont se confondre à leur extrémité avec celles du tube digestif. La partie glandulaire est un amas fusiforme qui parcourt toute la bride mésentérique. Astropectinidæ. — J’aurai peu de chose à dire sur cette famille que j'ai presque constamment prise comme type. Chez les Astropecten platyacanthus, spinulosus et squamatus, le septum radial est une membrane mince, présentant des perfora- tions et des septums obliques, comme ceux que nous avons déjà étudiés (pl. VIIT, fig. 10). Chez les Astropecten aurantiacus et hys- 108 L. CUÉNOT. trix, ainsi que chez la Zuidia ciliaris, le septum est une lame épaisse, entièrement conjonctive (pl. VI, fig. 24) et continue tout le long du bras. On a souvent parlé de lacunes vasculaires dans le septum d’Astropecten aurantiacus ; elles n’ont pas la signification qu’on leur attribue; on a pris soit des déchirures du tissu con- jonctif, soit des accidents de préparation (Teuscher) pour des lacunes ; il est facile de voir qu’elles ne sont tapissées par aucun épithélium, et, par conséquent, elles doivent être considérées comme artificielles. Sur les coupes minces, j’ai toujours vu que le septum radial ne renfermait pas de cavités lymphatiques comme celles des Asterias. Les orifices interradiaires sont fort grands (pl. VIII, fig. 8,0), situés immédiatement en avant du soutien interradiaire ou odon- tophore; je ne m'explique pas comment on ne les ait jamais recon- nus ; on n'a qu'à soulever ou à couper les vésicules de Poli pour les voir sans injection, ils sont partagés en deux par une mince cloison qui se continue avec la cloison interbrachiale. Chez l’Astropecten aurantiacus adulte et de belle taille, on peut noter à peu près le même fait que pour l'anneau aboral d’Ast. gla- cialis; la communication (pl. VII, fig. 15) est extrêmement réduite entre le sinus axial et le cercle aboral. Les irrégularités (pl. V, fig. 20), assez fréquentes, consistent simplement en un dédoublement d’un des côtés du pentagone; cela a lieu presque toujours sur les côtés les plus rapprochés du sinus axial. Dans toute cette famille, enfin, le cordon génital est transformé en glande lymphatique sur tont son parcours, ce qui décèle immédia- tement le trajet des vaisseaux. Chez la Luidia ciliaris, grâce au grand développement du canal du sable (pl. VI, fig. 21), la glande ovoïde est collée contre celui- ci ; le sinus glandulaire a une cavité à peu près nulle ; pourtant, il livre encore passage aux injections. Il n’y a, dans cette espèce, qu'une seule glande lymphatique de la cavité générale (pl. VI, fig. 21, l), volumineuse, allongée, encastrée entre deux brides mésen- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 109 . tériques. Chez tous les Asfropecten (pl. VIT, fig. 1, 2, 15, !), il y a deux glandes de cette sorte, cachées chacune sous une bride mésentérique ; sur la coupe, elles sont profondément lobées (pl. VIIL, fig. 7); elles sont loin d’arriver jusqu’au point d’attache de l'intestin, et s’arrêtent environ à moitié chemin. Développement. — Le développement de l'appareil sanguin est entièrement du domaine de l’organogénie ; il est parfaitement constitué chez les jeunes Astéries ; le sinus radial naît par écarte- ment du tissu conjonctif : aussi, chez de jeunes animaux,voit-on sa lumière à moitié obstruée par quelques filets conjonctifs (pl. VI, fig.1) ; peu à peu ces tractus se résorbent,et le septum radial prend sa forme habituelle. Les septums radiaux s’épaississent, etse tranforment avec l’âge ; ainsi chez un jeune Asterias, ils ne renferment pas encore de ca- vités lymphatiques. Historique. — I1 me reste à exposer les opinions qui ont eu cours dans la science sur l'appareil vasculaire. Je ne parlerai pas ici des observations de détail ;elles ont trouvé leur place dans le courant des études précédentes. Tiedemann (1816) décrit chez l’Astropecten aurantiacus deux anneaux sanguins oraux, superposés et séparés par le septum oral qui est pour lui l'anneau nerveux ; l’un, le plus externe, est son vaisseau orangé, l’autre le véritable anneau sanguin. Pour lui, la glande ovoïde est un cœur, qui donne à la face inférieure un anneau aboral, dix vaisseaux génitaux,dix allant aux cœcums radi- aires et deux allant au sac stomacal (Sharpey, Greeff et Hoffmann ont montré que les dix vaisseaux allant aux cœcums radiaires n’é- taient que des brides mésentériques). Je passe sous silence les travaux de Della Chiaje (1825), de Volk- mann (1837), de Müller (1854), qui confirment et compliquent les descriptions de Tiedemann. Jourdain (1867) accepte comme unique appareil vasculaire le système ambulacraire ; il nie complètement le système sanguin, 110 L. CUÉNOT. malgré les travaux précédents ; pour lui, le cœur de Tiedemann est une simple glande. Hoffmann (1874) fait faire un grand pas à la question par la méthode des injections ; il décrit deux anneaux, l'un oral, émet- tant cinq vaisseaux radiaux, l’autre aboral, émettant dix vaisseaux génitaux, réunis par un sinus renfermant dans sa cavité le canal du sable et un organe particulier (korper drüsenformige), animé de contractions semblables à celles d’un cœur. Hoffmann a vu le premier le réseau vasculaire du bras ; les vaisseaux intestinaux de Tiedemann sont pour lui des glandes parcourues pas un réseau vasculaire. Il suppose que les Astéries n’ont pas d’orifices géni- taux ; comme on arrive à injecter le sinus périgénital en poussant par le sinus axial, il croyait que les œufs tombaient directement dans l’anneau sanguin dorsal, et de là s’échappaient au dehors par les pores du madréporite. Greeff (1871-74) découvre le cordon génital contenu à l’inté- rieur du cercle vasculaire aboral ; mais il en fait la voie d’excrétion des produits génitaux, qui s’échapperaient au dehors par des pores interradiaires, plaçant en communication directe l'eau de mer et le système vasculaire; cet auteur commence à trouver des vais- seaux dans les différents septums; pour lui, le cœur de Tiedemann est un organe branchial. M. Perrier (1875), dans ses études sur les Oursins, montre que le cœur de ces animaux n’est qu’une glande, qu’il assimile à une glande rénale ou excrétrice ; au sujet des Astéries, il émetune sup- position, d’après laquelle tout l’anneau aboral et les vaisseaux géni- taux ne seraient que les canaux excréteurs du sperme ou des œufs : c’est l'hypothèse d’Hoffmann et de Greeff. Les travaux de Lange (1876) et de Teuscher, surtout ceux de ce dernier, conduisent peu à peu à la théorie célèbrede Ludwig. Teus- cher montre que la glande ovoïde est formée de fibreset de cellules pigmentées ; il pense qu'elle remplit un rôle chez le jeune, et que chez l'adulte elle tombe en dégénérescence, sansavoir aucuneutilité. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES'ASTÉRIDES. 414 Ludwig (1878) est le premier qui se soit appuyé sur des faits bien observés ; il décrit deux appareils vasculaires enchâssés l’un dans l’autre: le premier, périhæmal, est une dépendance de la cavité générale ; le second est le véritable système sanguin ou hæmal. J'ai déjà exposé sa théorie à propos des Asteriadæ, je n’y reviendrai pas. Il démontre que les orifices génitaux sont pré- sents chez tous les Astérides, et que le sinus sanguin qui entoure ces organes n’a aucune communication avec leur cavité interne ; il considère l’appareil vasculaire (hæmal et périhæmal) comme parfai- tement séparé de l'appareil ambulacraire, à l’encontre d’Hoffmann et de Greeff, qui admettaient une connexion entre les deux sys- tèmes dans la région du disque. Pour lui, la glande ovoïde est un cœur plexiforme, animé de mouvements rhythmiques. Enfin il admet un système de cavités dans les parois du corps, dépendantes de l’appareil périhæmal. Jourdain (1882), revenu de ses opinions précédentes, décrit comme nouveautés le cordon génital et les pseudo-vaisseaux intesti- naux, il leur assigne une fonction d’excrétion, ainsi qu'à la glande ovoïde ; il pense que tout le système périhæmal des auteurs précé- dents n’estqu’un vaste appareil excréteur parcouru par les produits génitaux et la glande ovoïde, qui déboucherait à l'extérieur par un pore situé dans le cadre péribuccal. MM. Perrier et Poirier (1882) confirment les vues de Ludwig, de Müller et Troschel sur les orifices génitaux des Asterias ; ils précisent l'opinion de Ludwig en montrant les ouvertures du sinus radial dans la cavité générale du bras. Enfin M. Hamann (1885) reprend la théorie de Ludwig ; comme lui, il décrit un appareil vasculaire dans les divers septums et dans le cordon génital ; il considère une partie de ce dernier et la glande ovoïde (organe chromatogène) comme des organes d’ex- crétion, dont le produit s’échapperait par la plaque madréporique. De même, il confirme les vues de Ludwig sur le système de cavités situées dans la paroi du corps ; il accepte les deux vaisseaux intes- 112 L. CUÉNOT. tinaux de cet auteur dont il figure les ramifications sur l'intestin ;: enfin il considère les espaces périhæmaux de Ludwig comme un schizocæle, la cavité générale comme un entérocæle ; il nie toute communication entre les deux. M. Perrier (1886) reconnaît chez la Comatule que les produits génitaux se développent aux dépens d’un prolongement de la glande ovoïde. On a vuque j'ai signalé les mêmes faits chez les Asté- ries. M. Prouho (1) n’est pas de cet avis chez les Oursins; il pense que le bourgeon primitif génital se forme à côté de la glande ovoïde, sans communication avec cette dernière; je regrette de me trouver en contradiction avec lui; mais les faits sont tellement démonstratifs chez les Astéries, où le cordon génital présente chez l'adulte une identité d’histologie et de fonctions avec la glande ovoïde, que pour mon compte iln’y a pas place au moindre doute. On voit combien la question est remplie d’obscurité; j'ai essayé de l’élucider en employant tous les moyens d’étude chez les espè- ces les plus diverses; je ne me suis arrêté à un résultat que lors- qu'il a été constant dans toutes les familles ; j'ai montré la véri- table signification de l’appareil hæmal de Ludwig, la signification du cordon génital et de la glande ovoïde, dont jai défini et étudié la fonction ; de même les vaisseaux intestinaux ne sont que les glan- des lymphatiques, annexées à la cavité générale. Ni par les injec- tions ni par les coupes je n'ai trouvé d'appareil vasculaire dans les parois du corps; nous avons d’ailleurs vu, dans l’histologie du tissu conjonctif, que Ludwig et Hamann ont pris pour des lacunes (schi- zocæle) les amas de cellules embryonnaires épars dans la paroi du corps. Enfin j ai démontré par les injections et les coupes la com- munication constante du véritable système sanguin (correspondant aux espaces périhæmaux de Ludwig) avec la cavité générale chez toutes les espèces que j’ai étudiées. | Valeur morphologique du système vasculaire. — Il ne faut (1) Sur le développement de l’appareil génital des Oursins, Comptes-Rendus, 3 janvier 1887, page 83. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 443 pas croire, à l'exemple de Ludwig et de MM. Perrier et Poirier, que le système vasculaire des Astéries, quoique dérivant directement de la cavité générale, ne soit pas homologue au système vasculaire des autrès Echinodermes. Comparons avec l’'Oursin, par exemple : dans les deux familles, on trouve un anneau oral ; les sinus radiaux qui longent les bras correspondent aux vaisseaux sanguins, inférieurs aux canaux ambulacraires, que l’on trouve chez l'Oursin ; le sinus axial correspond au réseau vasculaire qui s'étend sur la glande ovoïde chez ce dernier ; le sinus génital et l’anneau aboral correspondent exactement au réseau vasculaire génital que M. Prouho a décrit chez le Doro- cidaris. On peut faire cette remarque que partout où l’on trouve chez les Astéries un vaste sinus englobant les organes, correspond chez l’Oursin un réseau vasculaire plus ou moins complexe. A la vérité l’Oursin posséde un grand nombre de vaisseaux à la surface du tube digestif ; cela manque absolument chez l’Astérie, mais les lignes fondamentales restent les mêmes. Reproduction sexuée. Les Astérides ont deux modes de reproduction : l’une, par voie sexuée, existant chez toutes les espèces ; l’autre, asexuée, se présentant normalement chez un petit nombre de types. Les Astérides ont généralement les sexes séparés ; cependant la famille des Asterinidæ présente un hermaphroditisme très net et dont les phases sont fort singulières. Le nombre des mâles est à peu près égal à celui des femelles ; il ny a entre eux aucune différence extérieure, mais la couleur des organes génitaux, blanc jaunâtre chez les mâles, rouges, roses ou bruns chez les femelles, les différencie dès qu’on les a ouverts. Il y a très probablement plusieurs pontes par an ; à Banyuls, j'en ai observé pendant l'hiver, en novembre et décembre ; à Roscoïf, pendant les mois de juin et juillet. En captivité, lorsqu'une Astérie ARCH, DE ZOOL, EXP. ET GÉN.— 2 SÉRIE, — T, V bis, — supp. 1887, — 2° Mem. 8 11% L. CUÉNOT. va pondre, elle prend généralement une station verticale, en s’at- tachant par exemple aux parois d’un bac, puis le sperme ou les œufs s’écoulent lentement pendant un temps assez long, en troublant fortement l’eau ambiante. On parle souvent d’une sorte d’accouple- ment, de rapprochement des animaux ; j'ai vu fréquemment la sortie des produits sexuels, chez diverses espèces, et jamais je n’ai vu Ja moindre velléité de rapprochement, les mâles et les femelles déversent isolément le sperme et les œufs ; mais comme ils vivent dans des points localisés, où on en trouve un grand nombre, on conçoit que la fécondation puisse s’opérer, malgré ces conditions défectueuses. Comme nous l’avons vu dans l’étude du système san- guin, les organes génitaux sont entourés de toutes paris par un sinus ; lorsque la ponte vient d'avoir lieu, ce sinus est fort dilaté et facile à injecter ; sa cavité est presque entièrement annulée lorsque l'organe est gonflé par les produits qu’il contient. Les organes génitaux débouchent à l’extérieur par des orifices spéciaux. Tiedemann pensait que chez l’Astropecten aurantiacus, les œufs sortaient par des orifices situés aux coins de la bouche : Müller et Troschel, chez la même espèce, que les produits génitaux tombaient dans la cavité générale, puis s’échappaient par les pores ambulacraires. Je rappelle pour mémoire les opinions d’Hoffmann, de Greeff et de Jourdain, qui faisaient du système sanguin la voie d'excrétion des produits génitaux. Ludwig a trouvé les vrais orifices chez quelques espèces ; c’est un fait parfaitement constant chez toutes les Astéries : quand on ne peut découvrir l’orifice sur le vivant, on le décèle facilement par les coupes. Avant d'étudier l’évolution des éléments sexuels, je crois utile d'examiner les diverses formes des organes génitaux dans les familles que j'ai pu étudier. Astropectinidæ. — Le type de la famille, l’Astropecten atran- tiacus, est bien connu à ce sujet ; je renvoie aux figures de Tiedez mann (voir Bronn, Klassen und Ordnuñigen, Band II, Actinozoa), de MM. Carl Vogt et Yung. Dans chaque interradius, on trouve un CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 415 grand nombre de cæcums, rassemblés en une vingtaine de groupes : à peine envahissent-ils le commencement du bras ; les orifices sont assez grands et simples, il en existe une dizaine de chaque côté de l'interradius, un pour chaque grappe de cæcums ; on les retrouve facilement dans les coupes (pl. VIL, fig. 10) ; ils sont situés à la partie inférieure ou aborale du bras, immédiatement après les pièces marginales dites dorsales ; les testicules sont blanchâtres, les ovaires rosés. La description précédente convient également aux Astropecten spinulosus | squamatus et platyacanthus ; le nombre des cæcums génitaux et leur volume sont un peu moindres. Chez l’Astropecten hystrix de la mer Rouge, la disposition est un peu différente : les vaisseaux génitaux s'étendent jusqu’au premier tiers du bras (pl. VIT, fig. 7), les groupes de cæcums sont assez nombreux et échelonnés régulièrement; cette espèce est ainsi un type de passage à la Luidia. La Luidia ciliaris présente également des groupes de cæcums s’étendant dans le bras, mais presque jusqu’à l'extrémité ; ils sont serrés les uns contre les autres ; à chaque vertèbre correspond un ou deux groupes. Je renvoie à la figure de Müller et Troschel, qui ont découvert cette disposition. Les orifices génitaux sont placés comme chez l’Astropecten, tout auprès des pièces marginales. Culcitidæ. — Cette famille dont les appareils ambulacraire et vasculaire présentent beaucoup d’affinités avec ceux des Astropecti- nidæ, a des organes génitaux formés aussi de nombreux groupes placés à côté les uns des autres. Chezla Culcita coriacea (pl. VIII, fig. 18), les vaisseaux génitaux (2) remontent le long des piliers interradiaires en suivant une direc- tion presque verticale ; tout le long de ces vaisseaux sont greffés les organes génitaux, de moins en moins développés à mesure que l’on s'approche de la face supérieure ; les conduits excréteurs (d’) pré- sentent une disposition particulière, liée à la grande épaisseur du test ; on sait que la paroi interne du corps est marquée de longues fentes, dans lesquelles se continue la cavité générale, qui vont toujours en se divisant et se rétrécissant, pour finalement aboutir 4416 L. CUÉNOT. aux branchies lymphatiques ; on voit se détacher des grappes de cæcums de petits conduits creux qui rampent sur la face interne du test jusqu’à ce qu'ils aient atteint une des fentes que nous venons de décrire ; là ils s’enfoncent verticalement pour arriver jusqu’à la surface externe, où ils s'ouvrent au dehors ; il part ainsi un ou deux de ces conduits pour chaque groupe de cæcums. Les parois conjonctives du sinus génital renferment beaucoup de spicules calcaires (pl. VIIT, fig. 19). Le Pentaceros turritus et le Gymnasteria carinifera présentent à peu près la mê:ne disposition que la Culcite. Asterinidæ. — Dans cette famille, les organes génitaux se con- densent et ne forment plus qu’une seule grappe de cæcums, assez volumineuse. Par interradius, il y a ainsi deux de ces grappes pla- cées l’une à côté de l’autre ( pl. II, fig. 13 ; pl. VIII, fig.16 et 17, og) ; elles débouchent à la paroi inférieure du corps, chacune par un poreassez grand, chez le Palmipes, l’Asterina Wega et le Solas- ter papposus ; chez l’Asterina gibbosa, ainsi que Ludwig l’a décrit le premier, les organes génitaux débouchent à la face supérieure (pl. IL, fig. 11), mais cette particularité, unique dans cette famille, est en rapport avec sa ponte spéciale. Comme M. de Lacaze- Duthiers l’a observé (29), au lieu d'abandonner ses œufs au courant de l’eau, l’Asterina gibbosa les dépose sous les pierres qui se trouvent à sa portée ; à la grève de Roscoff, dansle mois de juillet, on trouve assez fréquemment les pontes de cette Astérie; les œufs, d'un rouge brunâtre, disposés à côté les uns des antres, forment des plaques irrégulières, de peu d’étendue. La disposition des orifices, placés à la face dite ventrale,'sur laquelle se meut l’animal, est évidemment liée à cette ponte. Müller et Troschel ont décrit chez le Solaster papposus une pla- que criblée (Siebplatte), servant à la sortie des produits génitaux : leur figure est reproduite partout. C’est une erreur, j’ai parfaitement vu les orifices interradiaires, assez larges, et ne présentant aucune- ment l'apparence d’un crible. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 1417 Chez les adultes de grande taille, les organes génitaux, volumi- neux, sont d’un rouge brun assez vif: nous verrons à quoi tient cette coloration spéciale; chez les jeunes ou de taille moyenne , les cæcums, beaucoup plus petits, sont blanchâtres ou jaunâtres. Echinasteridæ et Linckiadæ. — Dans chaque bras, vers la base, on trouve deux groupes génitaux, formés d’un amas de cæcums arrondis, qui occupent environ le tiers du bras. Chez l’Echinaster sepositus, les ovaires sont d’un rouge brun ; chez la Cribella oculata, d’un rouge un peu moins foncé ; les testicules sont d’un blanc jau- pâtre. Les orifices génitaux sont faciles à trouver chez la Cribelle ; ils sont situés tout à fait dans l’angle interradial, à peu près à mi- chemin entre la face supérieure et la face inférieure : les deux orifices sont éloignés de 3** environ. Ceux de l’Æchinaster sepositus (pl. VIIT, fig. 13) sont cachés au milieu desreplis du derme ; pour les bien reconnaître, il faut avoir la chance de tomber sur des échantil- lonsmäûrs, dont les produits sortent naturellement : on constate alors que les orifices génitaux sont plus avancés sur les bras que dans l'espèce précédente: chaque orifice est éloigné de l’angle inter- radial de 4** environ. L'Ophidiaster Chinensis (pl. VI, fig. 2) présente cette disposi- tion encore plus accentuée ; les organes génitaux, formés également d’un amas de cæcums arrondis, avec des spicules calcaires, sont fort avancés dans le bras. Dans la figure, on ne les Voit pas arrivés à leur entier développement ; ils sont encore fort réduits. Je rapproche les ZLinckiadæ des Echinasteridæ pour plusieurs raisons (appareils ambulacraire et vasculaire, organes génitaux) ; ce qui confirme cette manière de voir, c’est que ces deux familles présentent dans le jeune âge la même disposition des organes géni- taux : chez un jeune Æchinaster, dont l'ovaire vient de se former, on le trouve constitué par deux lobes égaux (pl. VII fig. 14), assez nettement séparés ; l’un de ces lobes se développera énormé- ment, c’est celui qui regarde l'extrémité du bras ; l’autre restera 118 L. CUÉNOT. beaucoup plus petit. De même chez l’Ophidiaster Chinensis, des deux lobes qui composent le jeune organe génital (pl. VIIL, fig. 15), l'externe prendra un développement beaucoup plus considé- rable que l’autre. Cette phase transitoire des organes génitaux est peut-être fixée chez d’autres espèces ; c'est aux études ultérieures de le décider. Asteriadæ. — La disposition générale des organes génitaux est connue depuis longtemps ; les figures qui les représentent sont classiques. La couleur des ovaires varie du rose clair à un beau rouge (Ast. glacialis, var. naine de Banyuls). On peut remarquer une grande irrégularité dans le dévelop- pement de ces organes ; parfois chez des individus de belle taille, R = 22 à 28°, on trouve des testicules ou des ovaires de 2, à et 4m, tandis que, chez des individus de taille moyenne, ils rem- pliront complétement la cavité du bras ; ces variations sont probablement liées à des différences de nutrition. La question des orifices a été assez controversée: Müller et Troschel les ont décrits les premiers comme des plaques criblées (Siebplatte), par les pores desquelles sortiraient les produits géni- taux. On n’est pas habitué à voir des organes génitaux déboucher à l’extérieur par des plaques criblées; ce fait est jusqu'ici parti- culier aux Asterias et trouve facilement son explication quand on étudie le développement. Chez les Oursins, il existe des orifices que je qualifierai de morphologiques, c’est-à-dire percés dans des plaques calcaires, parfaitement déterminées et constantes (géni- tales ou costales) ; il n’en est pas de même chez les Astéries: il n’y a pas de plaques génitales, au sens strict du mot ; les organes génitaux débouchent au dehors dans des points très différents, même chez des espèces voisines. On trouve bien dans les Étoiles des plaques homologues aux génitales ou costales de l’Oursin; mais chez aucune des espèces connues, elles ne sont perforées par les orifices génitaux ; {oujours, ceux-ci se constituent à la place d’une branchie lymphatique. On sait que les pièces calcaires du test, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 449 ce que Lôven appelle le tissu périsomatique, limitent de place en place des espaces membraneux, qui sont occupés par des branchies lymphatiques. L’organe génital profite de ces intervalles pour y pratiquer son orifice, de sorte que celui-ci affecte une disposition identique à celle des pores lymphatiques dont il occupe l’em- placement. Aïnsi chez les Astropectinidæ, Culcitidæ, Asterinidæ, Echinasteridæ, par chaque espace membraneux sort une seule branchie lymphatique (du moins dans la région où se trouvent les organes génitaux): aussi l’orifice sexuel est simple et unique, Chez les Asteriadæ, chaque espace membraneux est divisé en plusieurs parties par de fortes brides conjonctives, et un nombre variable de branchies correspond à chaque intervalle périsoma- tique: aussi les orifices génitaux sont-ils multiples; on voit qu'il ne faut pas parler de plaque criblée. La fig. 12, pl. VIIT, montre clairement que l'organe génital d’Asterias glacialis débouche dans un intervalle membraneux, en tout semblable à ceux qui suivent, occupés par des branchies lymphatiques (br).La Culcite (pl. VIIL fig. 18) est une preuve convaincante de la vérité de mon opinion. Se basant sur ce que je viens de dire, on peut voir a priori que le Solaster papposus (pl. VIII, fig. 16) ne peut pas posséder de pores multiples (plaques criblées de Müller et Troschel) pour chaque organe génital, puisque les orifices lym- phatiques sont simples dans cette région. Chez l’Asterias glacialis, c’est toujours dans le deuxième inter- valle périsomatique du bras que l’on trouve les orifices génitaux ; ils sont en nombre très variable, de 3 à 9, pour chaque groupe (pl. VIIL fig. 11, d). Quand on les a vus sur une Astérie dont les produits sexuels sortent naturellement, on peut facilement les retrouver sur le vivant : on constate alors que ce sont de petits tubercules blancs, percés au centre d’un orifice ; ils sont surtout apparents dans les moments de maturité sexuelle. On a attribué au frai des Astéries des propriétés vénéneuses qu’il est loin de posséder; je crois que les accidents qu’il a pu 120 L. GUÉNOT. causer doivent être attribués au mucus vénéneux que l’Astérie sécrète pour sa défense, et dont s’imprègnent les organes génitaux. D’après le docteur Ozenne (*), ce frai appliqué sur la peaü, dénudée ou non, y détermine du gonflement avec sensation vive de brûlure, engourdissement et rougeur érythémateuse, J'ai répété souvent cette expérience, et jamais je n'ai constaté le moin- dre des accidents précités. Evolution des éléments sexuels. Spermatozoïdes. — I] nous reste à examiner la formation des produits génitaux ; pour bien l’étu- dier, on fixe au carmin osmiqué pendant 24 heures, et on dilacère après un temps égal passé dans l’eau distillée. Nous avons vu que les glandes sexuelles se formaient aux dépens du cordon génital, prolongement direct de la glande ovoïde-. Dans le jeune âge, ovaires et testicules sont identiques ; les cæ- cums sont remplis de cellules, le plus souvent pigmentées ; elles présentent un gros noyau nucléolé, un protoplasma très granuleux renfermant quelques granules d’un jaune très pâle (forme jeune du pigment respiratoire hémoxanthine). J’ai vu chez des Astropec- ten spinulosus (pl. VII, fig. 11), les cellules contenir beaucoup de pigment noirâtre (comme la glande ovoïde de cette même espèce). Enfin, si l'on examine dans l’eau de mer le contenu d’un jeune cæcum, à un fort grossissement, on voit parfois les cellules devenir amæboïdes : l'identité est done complète avec les cellules lympha- tiques typiques. La différenciation des éléments commence très vite: chez l’Aste- rias glacialis, des organes de 22 à 4m renferment déjà des pro- duits mûrs. Supposons que l'organe qui va se former soit un testi- cule; il y a deux types à distinguer : l’un réservé aux Astropecten, l’autre qui comprend toutes les autres familles. Chez les Astropec- ten (pl. VIL, fig. 14), au centre du cæcum génital se creuse une A9? = , : . cavité, qui est entourée par une épaisse couche de cellules (2); il (*) Essai sur les Mollusques considérés comme poisens. Thèse de Paris, 1858. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 121 n’y a que celles qui bordent la cavité qui vont donner des sperma- tozoïdes, les autres restent à peu près inutiles pendant toute la vie de l’animal ; de sorte que si l’on fait une coupe transversale vers le milieu de la longueur du cæcum, on voit d’abord la paroi interne du sinus génital, puis une couche épaisse de cellules, et enfin les spermatoblastes, limitant une cavité dans laquelle se déversent leurs produits. Dans les autres familles, on voit les cellules pariétales, celles qui sont appliquées contre la paroï du sinus génital, se déve- lopper un peu plus que les autres et s’aligner régulièrement ; toutes celles qui restent au centre de l'organe, sauf celles qui se dissou- dront et serviront de nourriture aux spermatoblastes pariétaux, sont perdues pour l’animal, car elles seront expulsées au dehors avec le sperme, On voit que, d'une facon comme de l’autre, il n’y a qu'un petit nombre des cellules primitives qui soit utilisé. La cellule primordiale ( spermatospore de Sabatier) contient un gros noyau nucléolé (pl. IX, fig. 1); celui-cis’allonge sensiblement, le nucléole se divise en deux, le noyau le suit bientôt ; la cellule contient à ce moment deux noyaux munis chacun d’un nucléole ; la segmentation continue ainsi, trois, quatre, etc. Quard ils com- mencent à être assez nombreux, dessinant de légères saillies à la surface de la cellule, ils s’alignent sur deux, trois ou quatre rangs (pl. IX, fig. 2) : on a alors un amas de noyaux nucléolés, tous ren- fermés dans une même masse protoplasmique ; c’est la morula sper- matique ou spermosphère (polyblaste de Bloomfeld et de Sabatier) ; le développement marche de bas en haut, de sorte que les noyaux les plus terminaux sont aussi les plus avancés ; on peut suivre tout le développement du spermatoblaste sur une même spermosphère. Les noyaux font de plus en plus hernie à la surface de la cellule, et finissent par n’être plus reliés à la partie centrale que par un pédi- cule qui va toujours en se rétrécissant. La morula spermatique a alors la forme d’une grappe (fis. 2), dont la tige est formée par un rachis protoplasmique et les grains par des noyaux entourés d'une mince zone claire de protoplasma (ce sont les spermatoblastes), La 122 L. CUÉNOT, queus du spermatozoïde commence à se former, c’est une masse co- nique de protoplasma (fig. 3), qui s’allonge de plus en plus en s'a- mincissant ; le nucléole émigre alors à la périphérie du noyau. La morula spermatique est constituée peu après par un amas de sper- matozoïdes bien formés, suspendus par un mince pédicule au rachis cellulaire ; la rupture du pédicule, commençant d’abord pour les spermatozoïdes terminaux, marque la mise en liberté du produit fécondateur, qui tombe dans l’intérieur du testicule. Nous avons vu que les spermatoblastes se disposaient en rangées ; les noyaux initiaux de cesrangées ne se sont pas développés en spermatozoïdes, et restent seuls, de sorte que lorsque le spermatoblaste a accompli sa fonction, on trouve à sa place, collés contre la paroï conjonctive du testicule, deux ou trois noyaux qui ne se sont pas transformés ; ce sont eux qui seront le point de départ des nouvelles générations de spermatozoïdes ; ils correspondent ainsi au blastophore sperma= tique de Bloomfield (protoblastophore de Subatier). Le spermatozoïde n’a pas fini son évolution, lorsqu'il est sorti de la cellule-mère ; nons avons vn que la tête comprend deux parties, le noyau primitif ctun petit grain réfringent, placé sur le bord du noyau non loin de la naissance de la queue, qui n’est autre que le nucléole (pl. IX, fig. 5). Quand on examine des spermatozoïdes vivants, on voit le nucléole (+) faire hernie de plus en plus sur le bord du noyau, se pédiculiser, puis s'échapper dans le liquide am- biant ; la tête du spermatozoïde est ainsi réduite au noyau. Chez la Cribella oculata (fig. 7), le nucléole est fort gros, très réfringent ; je ne crois pas que chez cette espèce le nucléole quitte la tête du zoosperme. J’aiconstaté le départ du nucléole chez toutes les espèces vivantes d’Astéries que j’ai étudiées ; de même chez les Ophiures, qui présentent exactement le même mode de développement des sper- matoblastes et spermatozoïdes. Quand on examine du sperme vivant, à un très fort grossisse- ment, outre les spermatozoïdes, les uns encore pourvus du nucléole, les autres réduits à leur noyau, on remarque dans le liquide de CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 193 petits corpuscules réfringents, qui sont évidemment les nucléoles expulsés, et des cellules, très nombreuses chez les jeunes, beau- coup moins chez les adultes (fig. 9), les unes trouées de vacuoles, les autres chargées de pigment (j): ce sont les cellules primordiales non utilisées dans le développement. Elles deviennent rarement amæboïdes ; je n’en ai vu de telles qu’une seule fois (fig. 8) dans le sperme que venait de rejeter un Æchinaster sepositus. Chez presque toutes les Astéries, la tête du zoosperme (de 1 à 8 L.) est arrondie ; chez l'Asterina gibbosa elle est le plus souvent trian- _ gulaire. Chez la Cribella oculata, le deuxième segment ou nucléole si développé, lui donne une apparence singulière. La queue est toujours fort longue (jusqu'à 52 11) ; malgré le plus fort grossis- sement (1450 fois), je n'ai pu parvenir à voir la dualité de la queue, telle qu’Olaf Jensen, Leydig et Lavalett Saint-Georges l’ont décrit chez divers Vertébrés, Articulés, Mollusques et Vers. | Le mode de développement que nous venons de décrire,commun aux Astéries eb aux Ophiures, est localisé jusqu'ici aux animaux inférieurs :un noyau primitif se segmente en de nombreux noyaux- fils, dont chacun devient un seul spermatozoïde, Chez une Eponge, l’Halisarca (Schulze) et la plupart des Hydraires, on a constaté un développement analogue. Chez les animaux plus supérieurs (Annélides, Némertiens), le noyau-fils se seomente lui-même en un certain nombre de noyaux-petits-fils, dont chacun devient un spermatozoïde : il y a une génération de plus. Œufs. — Si nous faisons une coupe mince de l'ovaire, alors qu’il est uniquement rempli de cellules primordiales, nous verrons que ces cellules (pl. VIT, fig. 11) sont comprises dans un fin réseau conjonclif, formé de fibres entrelacées, se reliant à l’épaisse couche conjonctive qui supporte l’épithélium du sinus sanguin ; ces fibres conjonctives jouent un grand rôle dans la formation du vitellus. On retrouve aussi ce réseau conjonctif dans les testicules ; soit qu’il se résorbe, soit que le mouvement des spermatozoïdes 124 L. CUÉNOT. le brise, on n’en retrouve plus que des traces dans les testicules adultes. Quelques cellules, surtout les pariétales, augmentent r: pi ement de volume, ce sont les futurs œufs : le noyau devient natu: ilement la vésicule germinative, le nucléole la tache germina ve ou de Wagner ; le protoplasma perd tout son pigment et se harge peu à peu de granulations vitellines, d’une teinte rost très claire. Dans les œufs parfaitement mûrs (pl. IX, fig. 10), on remarque en outre une zone claire qui entoure l’œuf : c’est la z 1a radiata ou oolemme pellucide, sorte de membrane vitelline sécré ‘e par l'œuf. A mesure que l’œuf se développe, il refoule devant ui le réseau conjonctif, qui s’applique étroitement à sa surface ; les cellules primordiales non transformées se placent également sur les fibres conjonctives, de sorte que, lorsqu’on pratique des coupes d’ovaires, on voit sur les œufs des noyaux disposés irrégulièrement; c’est ce qui a fait croire à MM. Folet Hamann que les œufs d’Astéries étaient enveloppés d’un épithélium folliculaire ; il n’en est rien. Le nucléole est une vésicule réfringente, formée de protoplasma très condensé (pl. IX, fig. 14); il contient souvent des vacuoles (Astropecten aurantiacus), remplies de liquide cellulaire d’un violet mauve très pâle. Parfois on voit se dessiner à l’intérieur un autre nucléole qui lui est exactement concentrique (Palmipes). Chez l’Echinaster sepositus seulement, le nucléole ne répond pas à cette description ; très difficile à voir (pl. IX, fig. 15), ilest formé d'une masse irrégulière de protoplasma, à peine distincte de la vésicule germinative. | La vésicnle germinative, grande, toujours transparente, ne ren- ferme que de rares vacuoles (pl. IX, fig. 11, va), le plus souvent elle est homogène. Il n’y a qne chez l’Asterias glacialis (pl. IX, fig. 10) que j'ai vu le réseau protoplasmique si net dans les œufs d’Oursins ; : il n'apparaît aucunement chez les autres espèces. Le protoplasma de l’œuf présente dans toutes les familles, sauf celles des Æchinasteride et des Asterinidæ, un vitellus rose très: clair, CONTRIBUTION A L'ETUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 425 transparent, formé de vésicules extrêmement petites, ce qui donne à l’œuf mûr un pointillé assez fin ; la transparence de ce vitellus a permis à M. Fol de faire ses belles recherches sur la fécondation. Mais, dans les deux familles précitées, l'œuf a un vitellus supplé- mentaire ; ce vitellus chemine, comme l’autre, sur le réseau con- jonctif (pl. IX, fig. 13) où on le voit apparaître sous forme de vési- cules jaunes ou brun clair, très réfringentes, ressemblant à des goutteleties de graisse ; comme le réseau conjonctif est appliqué intimement à la surface de l’œuf, le vitellus jaune se trouve en con- tact immédiat avec ce dernier, et pénètre à son intérieur je ne sais par quel processus ; toujours est-il que chez l’Æchinaster sepositus (pl. IX, fig. 15), on voit apparaître un amas de fines granulations brunes d’un côté de la vésicule germinative ; puis il se forme un autre amas du côté opposé ; l'arrivée du vitellus continuant, ces deux parties se rejoignent, l’œuf se remplit de granulations brunes, si bien qu’à l’état de maturité, il est absolument opaque, on ne voit même plus la vésicule germinative. Chez les Asterinidæ, le vitellus jaune se dépose uniformément dans l’œuf, jusqu’à ce que celui-ci soit complètement opaque (pl. IX, fig. 20). Ce vitellus supplémen- taire donne la coloration particulière des œufs et des ovaires de la Cribella, de l'Echinaster, de l'Asterina, du Palmipes et du Solaster. Il y a une relation entre cette particularité et le développement de la larve ; M. de Lacaze-Duthiers a montré que chez l’Asterina gibbosa (Asteriscus verruculatus, M. et Tr.) il n’y avait pas la forme larvaire et pélasgique Bipinnaria ; l’embryon est simple, reste au point où il est né, et se développe rapidement en Ktoile ; en un mot, il y a développement direct, sans forme larvaire ; M. Sars a fait la même observation sur la Cribella oculata (Cribella sanguino- lenta) ; on pourrait en conclure a prior? que chez toutes les Astéries à vitellus double il y a développement direct ; il serait curieux de voir si l’embryogénie confirmera cette hypothèse, Quant à la zona radiata, elle ne mérite vraiment son nom que chez l’Asterias glacialis, où elle montre des stries radiaires (pl. IX, 126 L CUÉNOT. fig. 10), surtout apparentes à la circonférence de l'œuf ; chez les autres espèces, elle est parfaitement homogène et dépourvue de stries. Elle n’est sécrétée que lorsque l’œuf est parfaitement mür, prêtà être pondu. Dans une ponte d’Ast. glacialis, j'ai vu plusieurs œufs collés ensemble par cette sorte de membrane vitelline (pl. IX, fo QHb): Dans la cavité de l’ovaire, on trouve très souvent des cellules amæboïdes (pl. IX, fig. 10, /), les unes excessivement vacuolaires, les autres présentant l’aspect ordinaire et chargées de pigment : ce sont les cellules primordiales, non transformées en œufs, qui ont poursuivi leur évolution en corpuscules sanguins ; on n’a pas oublié qu’elles dérivent de la glande ovoïde, qui est la glande lymphati- que par excellence ; cette transformation me semble une des meil- leures preuves pour convaincre des rapports de la glande ovoïde avec les organes génitaux. Chez les Astérides, l’œuf est homologue du corpuscule sanguin. Comment s'opère le renouvellement des œufs? Dans un ovaire mûr et adulte, on ne rencontre presque pas d’œufs jeunes ; la plu- part sont mûrs et prêts à être expulsésau dehors ; mais il reste, col- lées contre la paroi et les tractus qui traversent l'ovaire (pl. IX, fig. 12), un certain nombre de cellules primordiales, non trans- formées, qui se multiplient activement, et qui seront le point de départ d’une nouvelle génération d'œufs. Hermaphroditisme. — T’hermaphroditisme est assez rare chez les Echinodermes, où il n’est signalé presque que comme excep- tion. Je lai constaté avec certitude chez l’Asterina gibbosa ; d’après les figures de Ludwig, il est possible qu’il en soit de même chez l’As- | terina pentagona, maïs je n’ai pu étudier cette espèce; enfin j’ai eu entre les mains trop peu d'échantillons de Palmipes et de Solaster pour pouvoir affirmer chez eux l’hermaphroditisme. Les moments les plus favorables pour étudier l’Asterina gibbosa sont les mois de mai, juin, juillet ; on trouve alors, à la grève de Ros- coff, des individus de toutes les tailles et à maturité sexuelle. Chez CONTRIBUTION A L ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 427 les plus jeunes (pl. IX, fig, 16), où les organes génitaux mesu- rent à peine quelques milimètres, ceux-ci sont remplis de spermato- zoïdes mûrs ; les œufs commencent à se développer, on en voit quelques-uns, très petits, collés contre la paroi conjonctive. Chez les individus de taille moyenne, l’organe génital, d’un blanc jaunâtre, renferme de même de nombreux spermatozoïdes mûrs (pl. IX, fig. 17 et 18) ; les œufs sont nombreux et assez développés, mais le vitellus jaune n’a pas encore fait son apparition. Enfin les adultes de grande taille (pl. IX, fig. 19) sont absolu- ment femelles ; on ne trouve plus trace de spermatozoïdes ; les œufs développés occupent seuls la cavité de l’organe; ils sont parfaitement mürs, chargés de vitellus opaque, et prêts à être fé- condés. On trouve, en même temps que ces œufs, quelques cellules primordiales ; les tractus conjonctifs sont chargés de vitellus jaune inutilisé. La fécondation a lieu; ce sont les jeunes ou moyens, à spermato- zoïdes mûrs, qui remplissent le rôle de mâles, les adultes étant réellement femelles. Quand la ponte a eu lieu (juin), les adultes reforment à nouveau des œufs ; les individus de taille moyenne mènent leurs œufs à maturité et prennent l'apparence de femelles ; enfin les très jeunes reforment encore des cellules spermatiques. Ainsi, les adultes de grande taille sont toujours femelles ; les jeunes, jusqu’à une limite impossible à fixer, produisent des spermatozoï- des ; à mesure qu’ils avancent en âge, les œufs qu'ils produisent en même temps grandissent et se développent ; à un certain âge, après une ponte, il ne se reforme plus de cellules spermatiques, les œufs commencent alors à se charger de vitellus jaune. J’ai cons- taté lermême cycle à Banyuls, dans l'hiver 86-87 ; les adultes, dont R = 16 à 26"", étant femelles, les jeunes, jusqu'à R = 12°", présentaient des cellules spermatiques et des œufs en voie de développement. J’ai vu une seule fois à Roscoff, une Asterias glaciahis herma- phrodite ; parfaitement normale sous les autres rappotts, elle pré- 128 L. CUÉNOT. sentait des organes génitaux bien développés, contenant en même temps des œufs mürs et des spermatozoïdes vivants. C’est évidem- ment un cas de monstruosité. Reproduction asexuée. Les Astérides présentent deux modes différents de reproduction asexuée : dans le premier, l'Astérie se coupe en deux parties à peu près égales ; chacune de ces moitiés bourgeonne ce qui lui manque, et deux Astéries sont ainsi constituées. Dans le second, un bras se détache et bourgeonne à lui seul tout le reste de l'Astérie pendant que l’animal-mère remplace le bras qui vient ainsi de tomber. Je vais prendre comme exemple du premier mode de division l’Asterina Wega, Ed. Per. (pl. IX, fig. 21 et 23),de la mer Rouge. C’est une petite Asterina, présentant le plus souvent sept bras ; uue seule plaque madréporique se trouve dans un intervalle inter. brachial. À un certain moment il se dessine dans deux interradius une ligne de rupture, de telle façon que d’un côté on ait trois bras avec la plaque madréporique et la moitié de la bouche, de l’autre quatre bras et l’autre moitié ; le tube digestif et les organes géni- taux sont répartis également de part et d'autre. Les deux parties ainsi délimitées se séparent brusquement. Etudions, par exemple, la moitié à trois bras (pl. IX, fig. 21 et 22) ; nous voyons que ceux-ci se rapprochent, de façon à rétrécir la blessure, qui est immédiatement fermée par un tissu cicatriciel. Bientôt quatre bras nouveaux bourgeonnent dans cet espace libre. Dans l'individu figuré fig. 21, ils n’ont pas plus d'un millimètre ; ce ne sont que de petits mamelons calcaires à peine séparés les uns des autres ; les écailles qui les couvrent sont très fines et fort petites ; il y a déjà un certain nombre d'ambulacres bien formés, avec ventouse, mais ils ne se correspondent pas exactement ; l’égalisation se fera probablement avec les progrès de l’âge ; à l'extrémité on voit le tentacule impair formé par l'allongement du vaisseau ambulacraire CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 129 radial ; les derniers ambulacres formés, les plus éloignés de la bou- che, par conséquent, n’ont pas encore de ventouse ;1ls sont sim- plement arrondis à l’extrémité. Le sinus radial est large et bien formé ; à la base du bras, il a presque ses dimensions définitives ; les rubans nerveux se continuent avec l'anneau nerveux des trois grands bras. Le développement se poursuit ainsi rapidement jus- qu'à presque complète égalité des bras anciens et des bras nou- veaux ; à ce moment le même phénomène se représente, de sorte que l'on ne trouve jamais des Asterina Wega parfaitement réou- lières. Souvent, au lieu de trois bras, il en bourgeonne plus ou moins : l’on a ainsi des échantillons à 8 ou à 6 bras, mais le nom- bre normal est 7. Ce mode de division, que j’appellerai volontiers médiane, n’est pas propre à l’Aséerina Wega ; d’après les recherches de Lutken, les Asterias tenuispinus (Lmk), acutispina (Stimpson), macrodiscus (Stimpson), calamaria (Ast. muricata, Verr.), atlantica (Verr.), le Stichaster albulus (Ast. problema, Steenstrup), appartenant tous à la famille des Asteriadæ, présentent la division médiane; Kowalewsky l’a même vu s opérersous ses yeux chez une espèce méditerranéenne, l’Asterias tenuispinus, qui a de 6 à 8 bras irréguliers sun échantillon de 7 bras se divise en deux moïitiés, l’une de 3, l’autre de 4 ; lestypes à G bras présentent deux moitiés de 3 bras. Malheureusement nous manquons absolument de détails sur le plus grand nombre des espèces précédentes ; le fait n'est absolument authentique que pour les Asterias tenuispinus et calamaria. Enfin chezles Ophiures, Simroth a montré que l’'Ophiactis virens se divisait également en deux parties égales. Le second mode de reproduction asexuée, ou division radiale, est bien mieux connu; la division radiale aboutit à la forme en comète, elle paraît localisée jusqu'ici aux Zinckiadæw. Une Linckia adulte et complète présente un nombre variable de bras ; mettons cinq pour fixer les idées ; les bras s’isolent par une ligne de rupture circulaire et quittent le disque ; celui-ci reste donc avec ses plaques madré- ARCH, DE ZOOL. EXP, ET GÉN, — 2° SÉRIE, — T, V bis, — Suppz, 1887, — 2e Mém. 9 130 L. CUÉNOT. poriques et les moignons des cinq bras tombés ; il reproduit ceux-ci peu à peu par un simple phénomène de rédintégration. Chaque bras tombé, à son tour, bourgeonne sur son extrémité cicatrisée quatre ou cinq petits mamelons : c’est le rudiment de la Linckia ; il se forme une bouche, un disque se dessine, les bras s’allongent, et on a bientot une petite Astérie bonrgeonnée parle grand bras pri- mitif : c’est la forme en comète. Il se forme de nouvelles plaques madréporiques sur ces jeunes bras. et la Linckia est ainsi entière- ment constituée, prête à recommencer le même cycle. Bien que ce mode de reproduction soit connu depuis longtemps, nous manquons absolument de détails sur la formation des jeunes bras et du nou- veau disque. Je renvoie aux figures d’Hæckel (18) pour la disposi- tion des madréporites chezlesdiversesespèces de Linckia. On a cons- taté avec certitude ce mode de développement chez la Linckia mul- liforis(von Martens), la Zinckia Guildingii (Ophidiaster ornithopus, M.etTr.),la Linckia diplax, laLinckia Ehrenbergii (Ophidiaster Eh- renbergii). Chez ces espèces seulement il est constant et normal. On cite également des formes en comète chez la Mithrodia clavigera (M. Perrier, 46), chez le Brisinga coronata, d’ap. Sars, chez le Labidiaster radiosus, d’ap. Studer (famille des Asteriadæ) et même chez Asteriasglacialis, d'ap. Schleiden (*).Le fait m'étonne particu- lièrement chez cette dernière ; j'ai vu, tant à Banyuls qu’à Roscoff, un grandnombre d’Asterias glacialis, et jamais la moindre forme en comète ; l’assertion de M. Perrier (Colonies Animales, Paris, 1881), qui prétend qu’un bras isolé d'Ast. glacialis peut reproduire le reste de l’animal, me paraît également hasardée ; les bras isolés vivent pendant un temps fort long, jusqu'à un mois; maïs jamais je ne leur ai vu montrer la moindre apparence de reproduction. Je ne sache pas que personne, à part Schleiden, ait jamais vu une forme en co- mète chez les Asterias rubens ou glacialis. Quoi qu’il en soit, ce sont des accidents de rédintégration, qui ne méritent pas le nom de re- production asexuée. (*) Das Meer, Berlin, 1874, pag: 353, fig. 1134 CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 1434 Classification. Pour avoir une classification naturelle d’une famille aussi bien délimitée que celle des Astérides, il faut faire intervenir tous les caractères variables ; il n’y en a aucun de parfait, qui puisse servir à l’exclusion des autres. Les classifications actuelles, celles de MM. Vi- guier et Perrier, basées exclusivement sur l’étude du squelette et de quelques caractères extérieurs, approchent certainement de la vérité ; mais lorsqu'on connaîtra l’anatomie d’un grand nombre d’Astérides, elles éprouveront probablement des changements no- tables, À mon avis, les grandes coupes que l’on a établies chez ces animaux ne sont nullement justifiées par l'anatomie ; MM. Viguier et Perrier adoptent deux grandes divisions ; d’un côté, les Astéries à deux rangées d’ambulacres et à bouche ambulacraire (voir le mé- moire de M. Viguier pour l'explication de ce terme, 67),de l’autre, les Astéries à quatre rangées d’ambulacres et à bouche ambulacraire. La différence entre ces deux sortes de bouches n’est ni si profonde ni si importante que M. Viguier semble le croire ; quand on étudie les animaux recouverts de leurs parties molles, on voit que cette dis- position n’a aucune influence sur l'organisme ; d’autre part, il y a certainement beaucoup plus de ressemblance entre un Echinaster et un Asterias, qu'entre un Echinaster et une Culcite ; enfin il y a des types de passage entre les Astéries à quatre et à deux rangées d’ambulacres ; cette grande coupe n’est donc pas naturelle. De même la division fondée sur la présence ou l’absence de l’anus n’a aucune valeur : les Culcitidæ, qui ont un anus, ont beaucoup plus de ressemblance avec les Astropectinidæ, qui en sont dépourvus, qu'avec les familles précédentes. Voici la liste des espèces que j'ai étudiées, classées suivant leurs affinités : Asterias glacialis. , . . ,. . . Roscoff, Banyuls. Astertadæ. . à: . 7» pubens. 4. ,. 7.7 2 Côtes de Normandie, S.4 = Très rare à Roscoff, 132 L. CUÉNOT. D Te UE J Cribella oculafa,, fifa Se SR ORGUE Echinaster sepositus. , . , . . Roscoff, Banyuls,. Linckiadæ. . . .4 Ophidiaster Chinensis. . . . . Mer Rouge (Obock). ( Solaster papposus. . . . . . Roscoff. Are D Asterina gibbosa. + + + « + . Roscoff, Banyuls. ( —. Wega.: "101 1 UMer Rouge (Alien): Palmipes membranaceus, . . . Roscoff, Banyuls. { Culcita coriacea. . . . . . . Mer Rouge (Gubbet Kharab). Culeitide.,. 413; \1Pentaceres tacrrtus 27 PT EME (Obock). \ Gymnasteria carinifera, . . . . — (Obock). Astropecten aurantiacus. . . . Banyuls. — spinulosus, . . . Banyuls. ARE — squamalus, . . . Banyuls. — platyacanthus, . . Banyuls. — hystrix. . . . . . Mer Rouge (Obock). Luidia ciliaris. . . . . . . . Roscoff, Banyuls. (Pour les noms des espèces, je me suis arrêté à ceux que M. Per- rier a fixés dans sa Révision des Stellérides du Muséum ; il faudra donc se reporter à cet ouvrage pour la synonymie.) Bien entendu, le tableau précédent n’a rien d’absolu ; la classifi- cation ne pourra être considérée comme définitive que lorsqu'on connaîtra l'anatomie des différents types ; mais la liste de ces quel- ques espèces exprime parfaitement les liens qui les relient. Les Asteriadæ forment la famille la plus élevée en organisation, sous beaucoup de rapports ; entre cette dernière et les Æchinasteridæ, il y a une lacune que je n’ai pu combler : évidemment ces deux familles se ressemblent (organes génitaux, appareiïl ambulacraire), mais elles sont mal reliées l’une à l’autre. On a vu pourquoi j'ai rapproché les Zinckiadæ des Echinasteridæ (org. génitaux, appa- reil ambulacraire) ; mais Muller et Troschel ont signalé chez la Linckia miliaris et Ludwig chez l’Echinaster fallax des organes génitaux multiples ; si cela est vrai, ce sont peut-être des types de passage, il faudrait voir les autres caractères pour savoir où placer ces espèces. Les Asterinidæ forment le passagele plus naturel et le plus com- plet entre les Echinasteridæ et les familles qui suivent ; elles pré- sentent les organes génitaux et le tube digestif des premiers avec l'appareil ambulacraire et vasculaire des seconds. On a vu que CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 1433 j'ai rangé le Solaster papposus à côté des Asterina ;en effet, cette espèce n'appartient aucunement aux Æchinasteridæ par ses carac- tères anatomiques, bien qu'elle présente un squelette rappelant celui de cette dernière famille (Viguier, Perrier, Muller et Troschel, etc. ) ; le Solaster montre almirablement le peu de valeur d’un caractère isolé et la confiance très limitée qu’on peut accorder au squelette pour classer les Astérides. Les Culcitidæ présentent encore quelques caractères des Asteri- nidæ, mais surtout une grande affinité avec les Astropectinidæ (appa- reils ambulacraire et vasculaire, organes génitaux). Enfin les Astropectinidæ présentent des caractères anatomiques un peu différents pour chaque genre, mais parfaitement reliés les uns aux autres. La ZLuidia ciliaris paraît être le type le plus inférieur des Astérides, tandis que l’Asterias glacialis en est le type le plus supérieur. Aucun caractère, employé seul, ne peut donner une classifica- tion naturelle ; pour le squelette, le Solaster papposus en est une preuve convaincante ; quant aux pédicellaires, non seulement ils ne sont pas caractéristiques des genres ou des familles, mais je crois même qu’ils sont variables dans les individus d’une même espèce, provenant de localités différentes (voir le chapitre des pédicellaires). Les caractères qui me paraissent les plus constante sont ceux tirés de l’appareil ambulacraire et des organes génitaux, pourvu que lon examine les divers changements de ces organes dans la famille que l’on considére. J'ai cru devoir conserver jusqu'ici les deux genres Cribella et Echinaster, bien que leur anatomie permette de les réunir en un seul : il y a certainement moins de différence entre ces deux genres qu'entre un Astropecten aurantiacus et un Astropecten platyacanthus ou hystrix ; mais des études ultérieures sont nécessaires pour déci- der si les caractères de l’Echinaster (glandes dermiques, cercle aboral sanguin) sont communs à toutes les espèces de ce genre ou au contraire s’ils ne sont qu'accidentels, auquel cas 134 L. CUÉNOT. on devrait réunir en un seul genre l'Æchinaster et la Cribella. Distribution géographique. — On voit, par le tableau précédent, combien le genre Astropecten est bien représenté à Banyuls ; on y trouve en outre les Astropecten subinermis,pentacanthus et bispino- sus; mais je n’ai pas eu entre les mains ces espèces vivantes. Les spicules présentent une élection bien singulière et dont les causes sont absolument obscures : ainsi aucune des espèces que j'ai étudiées, de la Méditerranée ou de l'Océan, ne présente de calcaire dans ses organes internes : dans la mer Rouge, les Zinckiadæ et les Culcitidæ en sont véritablement bourrés (tube digestif, organes génitaux), surtout cette dernière famille où on trouve des spi- cules jusque dans les vésicules ambulacraires et les vésicules de Poli, L’Asterina Wega et l’Astropecten hystrix, appartenant à des familles différentes, mais vivant dans les mêmes endroits, en sont absolument dépourvus. Remarques générales. — On a souvent cherché chez les Astéri- dés des types de passage aux Oursins, aux Ophiures ou aux Cri- noïdes : on a rapproché la Oulcite et l’Asterina des Oursins en rai- son de leur forme pentagonale ou globuleuse : le Palmipes, dont es oras ne renferment ni glandes génitales, ni cœcums radiaux, a été rapproché des Ophiures, ainsi qne la Luidia et le Brisinga, en raison de Îa longueur et de Ja fragilité de leurs bras; M. Perrier a rapproché des Crinoïdes le Caulaster, voisin des Ctenodiscus et des Astropecten. Ces comparaisons reposent seulement sur des appa- rences ; tous ces types présentent franchement les caractères des Astérides sans le moindre passage aux groupes voisins ; M. Viguier a montré également que le Brisinga n'avait nullement un sque- lette d’Ophiure. Je suis loin de nier qu’il y ait des relations entre les diverses classes d'Echinodermes, mais je crois que les types qui les établissaient ont disparu de la nature actuelle. Enfin, rien dans les divers caractères anatomiques ne vient à l'appui de la théorie de M. Perrier, qui voit dans l’Astérie ordi- naire une colonie de six individus : un central nourricier, et cinq CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 435 reproducteurs disposés sur des lignes rayonnantes, Où sont donc les individus reproducteurs dans une Culcite, un Palmipes, une Asterina ou une Ophiure ? Les bras ne sont que des élargisse- ments du disque, dans lesquels se dirigent tous les organes qui n’ont pu trouver place dans celui-ci, les cœcums radiaux, les orga- nes génitaux, etc.; ce ne sont nullement des appendices, comme on le dit trop souvent, mais bien des parties latérales du disque, considérablement développées ;il n’y a rien d’étonnant qu’en cette qualité, ils puissent reproduire, chez certaines Astéries, tout Je reste de l’animal. La valeur morphologique des bras n’est pas bien fixée, je le sais ; il est assez étonnant de voir dans la même famille des Asterina à cinq bras et des Solaster à quatorze ; de même, la variation du nombre des bras chez une même espèce n’est pas expliquée du tout ; chez les espèces à cinq bras, les échantillons qui en présentent six entiers, allant jusqu’à la bouche, ont tou- jours deux canaux du sable et deux plaques madréporiques (Aste- ras glacialis, Asterina gibbosa) ; tous les organes suivent le même mouvement, 1l y a douze organes génitaux, douze cœcums radiaux, etc. La raison morphologique de toutes ces variations m’échappe complètement ; peut-être la trouvera-t-on en étudiant le dévelop- pement des Astéries à nombreux bras, telles que le Solaster. Voilà ma tâche terminée. J'ai cherché à exposer le plus com- plètement possible l’anatomie des Astérides, tant jeunes qu’adultes. J'aurais bien voulu y joindre une étude embryogénique, mais des circonstances indépendantes de ma volonté s’y sont opposées ; j'espère plus tard combler cette lacune, car surtout au point de vue de l’organogénie, il y a à faire chez les Echinodermes bien des recherches nouvelles et du plus haut intérêt. Vu et approuvé : Paris, le 15 mai 1887, LE DOYEN DE LA FACULTÉ DES SCIENCES, Vu et, permis d'imprimer : E. HEBERT. LE VICE-RECTEUR DE L’'ACADÉMIE DE PARIS. Paris, le 16 mai 1887. GRÉARD. EXPLICATION DES PLANCHES PLANCHE I. Appendices du test. Fic. 1. — Pédicellaire croisé d’Asterias glacialis, gr. 100 fois; a et a’, muscles addue- teurs ; b, muscle abducteur; g, pièce basilaire; f, pédoncule fibreux. FiG. 2. — Coupe verticale d’un piquant avec sa collerette de pédicellaires croisés (on a représenté seulement la moitié de la coupe); f, couche de fibrilies conjonctives où viennent se perdre les pédoncules des divers pédicellaires ; p, pédicellaires rencontrés sur a coupe; M, petit muscle remontant le long du piquant. Fire. 3-6, — Développement d’un pédicellaire croisé d’Asf. glaclalis; f, pédoncule fibreux commençant à se former. FiG. 7, — Pédicellaire tridactyle, gr. 20 fois. FrG. 8, — Autre forme de pédicellaire tridactyle, mais plus jeune; gr. 50 fois. Fig. 9, — Pédicellaire droit d'Ast. glacialis; a’, muscle adducteur; b, musele abducteur. Fic. 10. — Moitié du pédicellaire droit, dont le mors a une forme discoïde. Fire. 1. — Coupe du pédicellaire droit de la fig. 9 ; & et a’, muscles adducteurs ; b, musele abdueteur; gr. 10 fois. Fra. 12, — Revêtement épithélial d’un pédicellaire droit; qg, cellule muqueuse ; m, cellule müriforme ; n, plexus nerveux superficiel; f, fibres conjonctives et cellules em- bryonnaires formant le substratum du pédicellaire (oc. 2, obj. 9 à imm. Nachet). Fra, 13, — Cellule mûriforme d’un pédicellaire croisé, présentant à sa surface un réseau polygonal. F1G. 14. — Pédicellaire de la rainure ambulacraire, Gymnnasteria carinifera : a, muscle adducteur ; b, muscle abducteur; f, pédoncule fibreux attachant le pédicellaire aux pièces calcaires du test, Fra. 15, — Coupe d'une glande dermique de l’Echinaster sepositus; e, épithélium externe ; /, feutrage lâche de fibres conjonctives ; gr. 10 fois. F1G. 16. — Portion très grossie de la coupe précédente : f, réseau conjonctif limitant ies cellules ; g, cellules glandulaires avec ou sans noyau ; v, vésicules refoulées sur le côté des cellules. Fra. 17, — Cellules de la même glande, isolées après fixation au carmin osmiqué, gr. 500 fois ; g, cellules glandulaires de toute taille, contenant des vésicules à leur inté- rieur ; A, noyau libre ; v, vésicules sorties des celluies. Fig. 18. — Epithélium externe du bras, Astropecten aurantiacus; e, cellules à pigment rouge; m, cellule müriforme ; n, plexus nerveux superficiel (oc. 2, obj. 9, à imm. Nachet). F6. 19. — Radiole vibratile revêtant les plaques marginales inférieures de Luidia ciliaris ; », réseau calcaire soutenant la radiole ; gr. 400 fois. Fi. 20. — Coupe verticale d’une branchie lymphatique, Cribella oculata ; €, cavité CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 137 générale ; !, lacune concentrique à la branchie; p, piquants articulés sur les pièces cal- caires. Fig. 21, — Sommet d’une branchie lymphatique, Asterias glacialis; e, épithélium externe glandulaire; f, couche conjonctive et musculaire; p, épithélium péritonéal (la flèche indique le sens dans lequel se meuvent les cils vibratiles). Fi. 22. — Coupe verticale d’une branchie de Luidia ciliaris; 1, lacune concentrique à la branchie, Fig. 23, — Epithélium externe d’une branchie d’Asterias glacialis; m, cellule mûri- forme à l'état granuleux ; q, cellule muqueuse; n, plexus nerveux superficiel. PLANCHE II, . Tissu conjonctif, tube digestif. F1G. 4. — Pédicellaire didactyle de Luidia ciliaris (Banyuls), gr. 10 fois, Fra. 2. — Cellules embryonnaires du tissu conjonctif, réunies en amas (pédicellaire droit d’Asf. glacialis). F6. 3. — Cellules embryonnaires étoilées, Astlerias glacialis. Fi. 4. — Fibres conjonctives élastiques (ambulacres d’'Asferias glacialis). Fr@. 5. — Fibre conjonctive élastique repliée en zigzag (pédicellaire droit d’Ast. gla- cialis). F1G. 6. — Fibrilles conjonctives (pédoncule fibreux des pédicellaires croisés, Ast. gla- cialis). Fig. 7. —— Substance fondamentale fibreuse, avec des noyaux et une cellule embryon” naire, Echinaster sepositus. Fic. 8. — Réseau calcaire avec ses cellules embryonnaires, Asferina gibbosa. F1G. 9. — Epithélium péritonéal, imprégné au nitrate d’argent et coloré au carmin, Astf, glacialis. Fig. 10. — Fibre musculaire (cordon radial Asf. glacialis). FrG. 11. — Tube digestif de l’Asterina gibbosa, gr. 3 fois; b, bouche; $, sac stoma- cal ; >, cœcum radial avec sa poche ; ce, cœcums stomacaux ; &, anus ; À, pilier interradial ; 0, organe génital, Fi. 12. — Cœcums stomacaux de l'Asferina gibbosa, vus par le côté oral. F1G. 13. — Partie inférieure du tube digestif du Palmipes membranaceus (mêmes _lettres que fig. 11), gr. 3 fois. FiG. 14. — Partie supérieure du tube digestif de l’Echinaster sepositus; 0, poche œsophagienne ; s, sac stomacal. F1G. 15, — Cœcums stomacaux de l’Echinaster sepositus (on a conservé d'un côté les cœcums radiaux); s, orifice mettant en communication les cœcums stomacaux et l’estomac, Fire. 16. — Aspect villeux de la face interne des cœcums stomacaux, Æchinaster sepositus. Fic. 17. — Cœcums stomacaux dela Cribella oculata. Fic. 18. — Cœcum radial de Cribella oculata, vu de profil et dans sa position uaturelle, pour montrer la poche qui s'étend au-dessous de lui. Fig. 19, — Cœcums stomacaux de l'Asferias glacialis; l’un, très simple, gr 2 fois, provenant d’un individu dont R — 52 mm; l’autre très compliqué, d’un individu adulte; s, orifice stomacal. Fig. 20. — Cœcum radial de l’Asf, glacialis, vu par sa face inférieure (gr. 2 fois) ; p, poche médiane, 138 L. CUÉNOT. F1G. 21. — Coupe transversale du cœcum stomacal de l’Ast. glacialis; p, épithélium péritonéal; m, museles circulaires; f, couche conjonctive; g, épithélium glandulaire. Fig. 22. — Cellules de la partie tout à fait inférieure de l'estomac, Asf. glacialis; q, cellule muqueuse; n, couche nerveuse du tube digestif. Fic. 23. — Cellules de l'estomac, vues à un fort grossissement ; &, portion de cellule montrant la formation des granules digestifs dans le protoplasma aréolaire; n, noyau (oc. 2, obj. 9 à imm. Nachet). FiG. 24. — Couche glandulaire des poches œsophagiennes d'Echinaster seposilus, avec nombreuses cellules muqueuses. Fie. 25. — Estomac de Cribella oculata; p, épithélium péritonéal ; f, couche con- jonctive avec quelques fibres musculaires; n, couche nerveuse du tube digestif; à, cellule isolée, dépourvue de granules, et ne renfermant que son protoplasma aréolaire, Fie. 26. — Réservoir du cæcum radial, Æchinaster sepositus (préparation prise vers la moitié de la longueur du sac), cellules mûres ‘à côté de cellules en voie de développe - ment ; #, couche nerveuse. PLANCHE III. Tube digestif, système nerveux. Fire. 4. — Cœcum radial de l’Asfropecten aurantiacus (acide osmique). F1G. 2. — Cœcum stomacal de l'Astropecten aurantiacus ; n, couche nerveuse très réduite (acide osmique). Fic. 3. — Extrémité supérieure des cellules du cœcum radial, Luidia ciliaris; q, cellule muqueuse; c, plateaux cuticulaires. Fi1G. 4. — Développement des cœcums stomacaux (gr. 4 fois), Aséropecten auran- liacus (R. — 82 mm). F1G. 5. — Développement du cœcum radial (gr. 10 fois), Astr. squamatus (R. — 12 mm). FiG. 6. — Cœcums stomacaux de l’Asfr. aurantlacus. Fig. T. — Cœcums stomacaux de l'Astr. squamatus ; m, bride mésentérique reliant l’organe à la paroi du corps. F1G. 8. — Cœcums stomacaux de l’Asfr, platyacanthus. Fig. 9. — Cœcums stomacaux de l’Astr. hystrix ; a, pseudo-perforation anale, Fic. 10. — Spicules du tube digestif, Culcitascoriacea. Fic. 11. — Ruban nerveux brachial, Asferias glacialis (carmin osmiqué) ; #, couche de fibrilles nerveuses avec quelques cellules ; /, couche conjonctive; s, épithélium eu- bique du sinus sanguin radial. Fc. 12, — Cellule nerveuse, vue à un fort grossissement (oc. 2, obj. 9 à imm. Nachet). 5 Fig. 13. — Cellules épithéliales du ruban nerveux ; a, chez l’Astropecten auran- liacus ; j, grains de pigment jaunâtre ; b, chez l’Echinaster seposilus. Fi. 14. — Tentacule et tache oculaire d’Asterias glacialis, vus de profil. F1G. 15. — Extrémité du bras de la Luidia ciliaris ; t, tentacule; a, ambulacres tactiles. Fig. 16. — Tentacule et tache oculaire d'Echinasler sepositus (mêmes lettres que précédemment). Fig. 17. — Godet oculaire d'Asferias glacialis, vu en coupe (carmin osmiqué) ; €, -plateaux cuticulaires ; n, couche nerveuse (oc. 2, obj. 9 à imm. Nachet). FiG. 18. — Cellules pigmentaires de l'œil, de différentes formes (carmin osmiqué); €, plateaux cuticulaires (corps cristalliniens de Lange). CONTRIBUTION A IZÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 4139 Fic. 19. — Extrémité du bras d’une très jeune Asterina gibbosa (R.—2 mm 112), vue de la face inférieure; £, tentacule ; «, ambulacres tactiles dépourvus de ventouses, Fig. 20. — Un des ambulacres tactiles d’Asterias glacialis. Fi. 21. — Cellules du tentacule, Asf. glacialis. Fi. 22. — Cellules de la ventouse d’un ambulacre, Asf. glacialis (acide osmiqué) ; &, cellule isolée identique aux Sinnezellen de M. Hamann. | FiG. 23. — Sommet de l’ambulacre de Gymnasteria carinifera (gr. 20 fois) ; r, cou- ronne de spicules située à la face inférieure de la ventouse; r’, spicules dans le corps même de l’ambulaere, Fi. 24. — Un de ces spicules ambulacraires, fortement grossi. PLANCHE IV. Lettres communes à cette planche et aux suivantes. a, anneau ambulacraire, 0’, orifices vertébraux. b, vaisseau ambul, radial, p, vésicule de Poli. c, canal du sable. r, anneau sanguin oral. g, glande ovoïde. s, Sinus sanguin radial. g', terminaison de la gl. ovoïde, s, branche transverse. g’, cordon génital. t, corps de Tiedemann, h, sinus axial (s. glandulaire), u, Sinus marginal. 4, pilier interradial, v, anneau sanguin aboral. j, pigment jaune. v’, vaisseau génital. n, ruban épithélio-nerveux. v”, sinus génital. 0, orifice interradiaire de l’anneau sanguin | æ, muscle interambulacraire. dans la cavité générale, y, muscle adducteur des pièces buccales. Système ambulacraire, Système sanguin. Fic. 1. — Vue interne du péristome, Asterias rubens. FrG. 2. — Circulation dans les bras (deux seulement sont représentés complètement injectés), Ast, glacialis. Fi. 3. — Commencement du bras, grossi 2 fois; va, vaisseaux destinés à l’ambulacre. FiG. 4 — Portion de bras, gros. 2 fois, avec deux ambulacres montrant leurs vais- Seaux V4. Fig. 5. — Portion de l’axe du bras, Asf, rubens ; les vésicules ambulacraires ont été en partie enlevées. Fi. 6. — Coupe transversale de l'axe du bras passant par un ambulacre (gr. 12 fois), Ast. rubens ; b’, vaisseau transversal allant du vaisseau ambulacraire radial à l’ambu- lacre. Fic. 7. — Coupe transversale de l’axe du bras, plus grossie que la précédente, rasant tangentiellement un ambulacre ; Z, septum radial. Fi. 8, — Coupe transversale d'un corps de Tiedemann, montrant la section des tubes sécréteurs ; f, substratum conjonctif ; 2, cellules lymphatiques. FiG. 9. — Coupe transversale du ruban nerveux brachial, fortement grossie, Asf. gla- cialis ; e, épithélium interne du sinus raûial ; /, cellules lymphatiques contenues à l’inté- rieur du septum. Fic. 10. — Portion du septum radial vue sur le vivant, Ast. glacialis ; L, cellules 1lym- phatiques ; e, épithélium interne du sinus radial; 4, point prédisposé à la sortie des cellules lymphatiques (oc. 2, obj. 9 à imm. Nachet). 140 L. CUÉNOT. Fig. 11. — Corpuscules sanguins de la cavité générale ; pa, petite partie d’un plasmo- dium (oc. 2, obj. 9 à imm. Nachet). Fig. 12. — Cellules de la glande ovoïde, préparées à l'acide osmique ; cs, cellule vivante, transformée en corpuscule sanguin. Fi. 13. — Coupe transversale du canal du sable d’Ast. glacialis (forme assez rare) ; k, lame mésentérique reliant le canal du sable aux parois du sinus axial. FiG, 14. — Coupe du canal du sable d’un jeune Ast. glacialis. FiG. 15. — Coupe transversale d’un repli interne du canal du sable, gr. 250 fois ; e, épithélium vibratile du canal; f, coupe du réseau calcaire. F1G. 16. — Coupe verticale du péristome d’Asé. glacialis, montrant la naissance de la glande ovoïde ; m, couche musculaire rayonnante del’œsophage; f, couche conjonctive ; »’, prolongement du ruban nerveux sur l’æsophage ; r, cavité du sinus glandulaire ; sb, septum de l'anneau sanguin oral. PLANCHE V. Fi. 4. — Madréporite et parties adjacentes, Ast. glacialis, d'après la dissection d'é- chantillons injectés et des coupes, gr, T fois ; m, plaque madréporique ; d, dilatation am- pullaire du canal du sable; h’, ampoule terminale dépendant du système sanguin ; !, glande lymphatique de la cavité générale; e, piquant entouré de sa collerette de pédicellaires croisés. Fig. 2. — Vue interne de la face inférieure du test ; £, lame conjonctive reliant le ca= nal du sable aux parois du sinus glandulaire ; /, glande lymphatique de la cavité générale ; br, orifices des branchies lymphatiques. | F1G. 3. — Coupe transversale montrant la continuation de la glande ovoïde avec le cor- don génital g”. Fig. 4 — Cellules vivantes de la glande lymphatique de la cavité générale; l’une n’est pas arrivée à maturité ; l'autre présente des mouvements amæboïdes. F1G. 5. — Coupe transversale de l'anneau aboral ; m, fibres musculaires péritonéales. Fic. 6. — Coupe transversale du canal du sable, Echinaster sepositus ; k, tractus mé- sentérique. FiG. T. — Circulation du bras, Echinaster sepositus; on a conservé un seul ambulacre avec Son vaisseau sanguin. FiG. 8. — Vue latérale de l’axe du bras, Ech. sepositus. F1G.9.— Cercle aboral dela Cribella oculata; on a conservé deux ovaires injectés : an,anus. Fra. 10 et 11. — Cercle aboral de l'Echinasler sepositus, l'une très simple, l’autre compliqué; an, anus. FiG. 12. — Glande lymphatique (l) de la cavité générale, Echinaster sepositus. FiG. 13. — Vue interne du péristome, Asterina gibbosa : gr. 5 fois. FiG. 14. — Interradius de Solaster papposus. FrG. 15. — Vue latérale de l’axe du bras chez l’Asterina gibbosa ; gr. 5 fois. F1G. 16. — Anneau aboral chez l’Asferina gibbosa. FiG. 17. — Circulation du bras, Astropecten aurantiacus. F1G. 18. — Ambulacre d’Astropecten aurantiacus, avec ses 2 vésicules et ses vaisseaux SAnguIns ; gr. nat. F16. 19. -- Péristome de Lutdia ciliaris. F1G. 20. — Anneau aboral, Lutdia ciliaris. PLANCHE VI. FiG. {. — Coupe transversale du bras, chez un jeune Echinaster sepositus (R —18"m) ; l, septum radial. / CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 144 Fic. 2. — Bras de l'Ophidiaster Chinensis ; og, organe génital de petite taille. Fic. 3. — Coupe transversale du pilier interradial correspondant à la plaque madrépo- rique, Asterina gibbosa. | Fia. 4. — Extrémité inférieure du canal du sable chez un adulte de grande taille. Fig. 5. — Coupe longitudinale d’un radius, montrant la continuité des septums des sinus sanguins ; sb, septum de l'anneau sanguin oral, Ast. gibbosa. Fig. 6. — Plasmodium formé à l’intérieur d’une vésicule de Poli. FiG. 7. — Portion de la vésicule de Poï, vue sur le vivant, montrant des cellules trans- formées en corpuscules sanguins (oc. 2, obj, 9 à imm. Nachet). F1G. 8. — Coupe transversale du bras, fortement grossie, rasant tangentiellement un am- bulacre am; L, septum du sinus radial, Aslerina gibbosa. FiG. 9. — Vue de face du pilier interradial correspondant à la plaque madréporique ; l, glande lymphatique de la cavité générale; br, orifice de branchie lymphatique. FiG. 10. — Coupe verticale du madréporite et des parties adjacentes, Aslerina gibbosa, gr. 17 fois; m, plaque madréporique; !, glande lymphatique de la cavité générale; }, ampoule terminale, dépendant du sinus glandulaire h. Fire. 11. — Coupe transversale de l'anneau aboral, présentant 3 canaux côte à côte. Fig. 12. — Coupe transversale très grossie de l’anneau aboral, Asterina gibbosa ; m, fibres musculaires péritonéales. Fie. 13. — Sinus génital vu sur le vivant, Asferina gibbosa, avec des globules san- guins circulant dans sa cavité; e, épithélium péritonéal (oc, 2, obj. 9 à imm, Nachet). F1G. 14. — Coupe transversale du radius de Palmipes membranaceus, dans la portion presque terminale ; e, paroi inférieure de l'animal. FiG, 15. — Vue interne du péristome de la Culcila coriacea. Fi. 16. — Coupe transversale du sinus glandulaire et des organes qu'il contient, Culc. corT., gr. 18 fois. F1G. 17. —Terminaison du canal du sable et des parties adjacentes, Cul. cor.;l, glande lymphatique de la cavité générale. Fra. 18. — Coupe transversale du sinus sanguin radial, Culc. cor. Fig. 19, — Coupe transversale du canal du sable de Pentaceros turrilus. Fig. 20. — Septum radial calcaire de la Gymnasteria carinifera, gr. 8 fois. F1G. 21. — Canal du sable de Luidia ciliaris, flanqué de la glande ovoïde ; 7, glande lymphatique de la cavité générale ; og, organe génital. F1. 22. — Très petite partie de la coupe transversale du canal du sable précédent ; e, épithelium péritonéal ; f, réseau calcaire, F1G. 23. — Coupe longitudinale du canal du sable de Luidia ciliaris, montrant la forme en tube creux de sa partie orale, Frc. 24. — Coupe transversale de l’axe du bras de Luidia ciliaris; L, septum radial très épais. Fire. 25, — Ambulacre ct vésiculaire ambulacraire de Luidia ciliaris; gr. nat. PLANCHE VII. Glande ovoïde; développt des organes génitaux. FiG.1. — Coupe verticale du madréporite et des parties adjacentes, chez un Astropectien aurantacus adulte, d’après une dissection, gr. 3 fois; m, madréporite; d, dilatation ampullaire du canal du sable ; /, glande lymphatique de la cavité générale; e, paxilles. Fig. 2. — Face infre d’un As{. aurantiacus (R— S0"") avant la formation des organes génitaux, gr. 2 fois ; br, orifices des branchies lymphatiques ; cs, cœcums stomacaux laissés en place, 149 L. CUÉNOT. Fig. 4. — Coupe de l'anneau aboral (même individu que la figure précédente) ; e, épi- thélium péritonéal. Fi. 4 et 5. — Formation d’un organe génital, Asfropecten hystrix. Fic. 6. — Développement un peu plus avancé; og, organe génital; f, lame conjonctive semilunaire, reliant l’organe au test sous-jacent. Fig. T. — Vaisseau génital et les organes génitaux, vus dans leur entier, gr. 42 fois ; Astr. hystrix. F16. 8. — Coupe de l'anneau aboral, chez un Asfropeclen aurantiacus adulte ; le cor- don génital est relié à la paroi par une lame conjonctive. Fig. 9, — Portion très grossie du cordon génital, chez un adulte: }, cellules vivantes du cordon, transformées en corpuscules sanguins, Fig. 10. — Coupe d’un testicule, perpendiculaire au trajet du vaisseau génital, et pas- sant par l'orifice externe du testicule, Asér. aur., gr. 32 fois; m, fibres musculaires péritonéales. Fig. 11. — Cellules primordiales pigmentées en noir (carmin osmiqué), provenant d'un organe génital nouvellement formé, Asfropecten spinulosus; f, réseau conjonctif soutenant les cellules génitales. FiG. 12. — Coupe d’un ovaire, passant par l'orifice externe, perpendiculaire au trajet du vaisseau génital, Palmipes membranaceus. FiG. 13. — Coupe transversale du cordon génital, au point où il s'attache au testicule, Culcita coriacea. F1G. 14. — Coupe transversale d’un cœcum testiculaire, Asf. aurantiacus; 1, cellules lymphatiques restées inactives ; sp, cellules spermatiques en voie de formation; f, couche conjonciive du sinus sanguin, Fie. 15. — Sinus axial et organes adjacents, Astr. aurantiacus adulte, gr. nat.; /, glande lymphatique de la cavité générale; br, orifices des branchies lymphatiques ; 0g, organe génital. F1G. 16. — Coupe de la glande ovoïde, As{r. aurantiacus ; f, réseau conjonctif soute- nant les cellules lymphatiques. F1G. 17. — Périphérie de la glande, vue sur le vivant ; L, cellules transformées en cor- puscules sanguins ; f, réseau conjonctif; e, cellule de l’épithélium péritonéal: Astr. aur Fi. 18. — Cellules vivantes de la glande ovoïde, non arrivées à maturité (oc. 2, obj. 9 à imm,. Nachet). PLANCHE VIli. Système ambulacraire, système sanguin, organes génitaux. Fig, 4. — Vue interne du péristome chez l’Astropecten spinulosus, gr. 2 fois. FrG. 2. — Coupe verticale du péristome de l’Astr. squamatus, passant par un orifice sanguin interradial (o) etle canal du sable ; /, septum de l'anneau sanguin oral ; n’, pro- longement du ruban nerveux sur l’œsophage. Fi6. 3. -— Interradius d'Asfropecten aurantiacus adulte, présentant quatre vésicules de Poli (p). FiG. 4. — Coupe transversale du sinus axial chez l’Astr. spinulosus. FiG. 5. — Développement du canal du sable chez l’Astr. squamatus ; le plus petit pro- vient d’un individu de taille dont R — 12m; l’autre d’un individu de taille moyenne (R —— 30mm), F1G. 6. — Coupe transversale du sinus axial chez l'Astr. hystrix, dans sa partie orale ; k, repli mésentérique enclavant le sinus, Fig. 7. — Coupe transversale de la glande lymphatique de la cavité générale, Astr, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE ANATOMIQUE DES ASTÉRIDES. 443 aurantiacus ; k, forte lame conjonctive à laquelle est attachée la glande ; m, fibres mus- culaires péritonéales. Fic. 8. — Périphérie de la glande, vue en coupe, à un très fort grossissement ; J, cellules lymphatiques ; /, réseau conjonctif ; %, corps jaune énigmatique (zoochlorelle ?). Fra. 9, — Coupe transversale d’une vésicule de Poli,Astr. aur., gr. 50 fois ; e, épi- thélium péritonéal ; #”’, fibres musculaires longitudinales ; f, couche fibreuse conjonc- tive ; », fibres musculaires circulaires ; /, partie glandulaire de la vésicule. Fra. 10, — Coupe transversale de l'axe du bras chez un jeune Ast. squamatus (R — 12mm) ; J, septum radial ; m, coupe de la paroi de l’ambulacre ; D’, carrefour de l'ambu- lacre et du vaisseau transverse provenant du vaisseau radial b. Fic. 11. — Vue d'un interradius, face externe, chez l’Asferias glacialis ; d, groupe d’orifices génitaux (plaque criblée de Muller et Troschel) ; br, branchies lymphatiques. Fig. 12. — Vue d’un interradius, face interne, Ast. glacialis; d’, canal excréteur de l'organe génital rudimentaire 0g; br, orifices de branchies lymphatiques. Fig. 13. — Testicule de l’Echinaster sepositus, vu de profil ; d, orifice génital ; 4, inter- radius. Fig. 14. — Très jeune organe génital de l’Echinaster sepositus (R — 33m), yr, 7 fois. FiG. 15. — Développement de l'organe génital chez l’Ophidiaster Chinensis, sur un même individu, gr. 7 fois. FiG. 16. — Face inférieure de Soluster papposus, montrant les ovaires og, et leurs orifices simples d. Fi. 47, — Organes génitaux de l’Asferina Wega. Fig. 48. — Vue latérale d’un interradius de GCulcita cortacea ; d’, canaux excréteurs des testicules og ; br, orifices des branchies lymphatiques, gr. nat. Fi. 19, — Spicules calcaires du testicule de Culcita coriacea. PLANCHE IX, Développement des produits génitaux. — Reproduction. FiG. 1. — Cellules du testicule, montrant divers stades de la segmentation du noyau, Ast. glacialis. FiG. 2 — Morulas spermatiques à divers états de développement, Luidia ciliaris (acide osmique ). Fic. 3. — Développement du srermatozoïde, Ast. glacialis (carmin osmiqué). FiG. 4. — Portion très grossie de la coupe du testicule d’un jeune Asfropecten spinu- losus ; L, cellules lymphatiques inactives ; sp, cellules testiculaires à divers stades, Fic. 5, — Spermatozoïdes vivants de l’Astr. auranliacus, montrant l'expulsion du nucléole 4 (oc. 2, obj. 9 à imm. Nachet). Fig. 6. — Spermatozoïde vivant, pourvu d’un nucléole, de l’Asterina glbbosu, F16. 1. — Spermatozoïdes vivants, très grossis, de la Cribella oculata, pourvus d’un nucléole 4. Fic. 8. — Cellules lymphatiques, dont l’une est amæboïde, rejetées avec le sperme par un Echinaster sepositus. Fic. 9. — Cellules primordiales, chargées de pigment 7, restées inactives, trouvées dans la cavité de testicules mûrs (Astr. aurantiacus, Cribella oculata). FiG. 10.— OEuf mûr d’Asferius glacialis, avec le réseau vitellogène f, et des cellules primordiales amæboïdes 2; mv, membrane vitelline (zona radiata), Fi@. 11. — OEufs pondus d’Ast, clacialis, réunis ensemble par leur membrane vitél- line ; va, vacuole dans la vésicule germinative. 144 L. CUÉNOT. Fig. 42. — Coupe d’un ovaire d’Ast. glacialis ; f, réseau conjonctif vitellogène ; /, cellules primordiales destinées au renouvellement des œufs. Fic. 13. — Portion du réseau conjonctif vitellogène de l’Asferina gibbosa, très grossi ; g, vésicules de vitellus jaune. Fig. 14. — Tache germinative d’un œuf mûr d'Asfropecten aurantiacus, gr. 400 fois ; va, vacuoles. F1G. 15. — Dépôt du vitellus jaune qg dans des œufs non mürs d’Echinaster sepositus ; {g, tache germinative de forme indécise. Fic. 16. — Organe génital d'Asterina gibbosa, très jeune, renfermant des zoospermes mûrs à côté d'œufs à peine formés. FiG. 17. — Organe génital plus développé d'Asterina gibbosa; zoospermes mûrs avec œufs développés. Fig. 18. — Coupe transversale d'un organe génital au stade précédent; f, réseau conjonctif vitellogène ; Z, cellules non transformées ; sp, cellules testiculaires. Fig. 19. — Coupe transversale d'un organe tout à fait adulte, Ast. gibbosa, ne renfer- mant plus que des œufs à vitellus jaune. Fig. 20. — OEuf pondu d'Asterina gibbosa, rendu opaque par le vitellus jaune : mn, membrane vitelline parfaitement homogène et transparente. Fi. 21. — Asterina Wega (gr. nat.), présentant 4 bras qui commencent à se former. La flèche indique l’interradius où se trouve la plaque madréporique. FiG. 22. — Individu précédent, montrant les bras nouveaux grossis 10 fois r« radius. Fic. 23. — Asterina Wega vus par la face inférieure :l’un présente 8 bra: l’autre T (gr. nat). Poitiers. — Typographie Oudin. a ä ee ; GR Rae à à A FE — « 4 2 D} II) CUELCÉ a À. rat. ed. RON Ed UN EN “ VW NS ue | | Durfur.sSe, Re ES SEC DORE OGC EE TOUT SSSzS: ————— RSS d'au me — PSE LS < ame CG ST Qi te LED $ er Cuenot. ad.nat.del. ES D — — ES — SEP eo en ororsv ess 2 Re = = 5° svco 80 200 00e se à DT OOOUX DO0SooUUvr (o) L ool Exp | CU 4 Arch.de HU | D ï Ô J cu | “ ; TT | le ; AL | 9 à li à Y IL AUX | ù sw a î # ue CR VS. e CE 1 a » # LE ra « T KT 4 Er Enx ’ et G [=] Arch de Zool. Exp 1 Dm. One Cuenot AA rt. del. 2 7 (LT IER RAT _ ee uen &c FE us Ur 2 Cm Er un vi ce AT 777 u/ #S SRE ; DA É Fe Æ REBRIE del. Arch .de Zoo. Expl° et Grénl® luencé ad rat. : di fi hit ns 4° Serie Vol V is(Sup) PIVII EE EE — mn Noa re \he th FL) 1 dd W 7 2 Ê7 2 C4 7 JDupour. se. Arch de Zool.Expl® et Géni° Cu£gnot ad nat.del_. 2° Serie Vol V (Sup) PL IX RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE COMPARÉE DES GLANDES SALIVAIRES PAR Louis JOUBIN DOCTEUR ES SCIENCES NATURELLES PRÉPANATEUR A LA FACULTÉ DES SCIENCES DE PARIS ANCIEN ÉLÈVE DE L'ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES PRET RON RE DO == De ee re Les leçons faites au Collège de France pendant l’hiver 1886-87 par le Professeur Ranvier sur les olandes salivaires des mammi- fères supérieurs m'ont conduit à l’idée de chercher si ces crsanes présentaient chez Jes invertébrés quelque analogie avec ceux dont le célèbre histologiste étudiait avec tant de science la struc- ture intime. Beaucoup d’invertébrés présentent des glandes salivaires ex- trêmement développées ; nombre d’entre eux en possèdent plusieurs paires ; j'ai pensé qu'il y gurait auelque intérêt à savoir si ces glandes dans leur ensemble présentaient des points de ressemblance avec celles de l’homme et des animaux supérieurs, et si par leur structure et leurs fonctions les unes pouvaient être comparées à la parotide, par exemple, les autres à la sublinguale. ARCH. DE ZOOL, EXP. ET GÉN. — 20 séRtiE, — T. V, bis. — supp. 1887, — 3° Mém. 1! 2 LOUIS JOUBIN. Dans cette intention, je me suis mis à rechercher ce qui avait été fait sur l’histologie des glandes salivaires des animaux in- vertébrés. Maïs je me suis bientôt aperçu que non seulement l’his- tologie proprement dite n’était point connue, mais que presque dans aucun groupe leurs rapports macroscopiques avec les or- ganes voisins et avec les appareils circulatoire et nerveux n'étaient indiqués avec une précision et une exactitude suffisantes. Quant à la physiolocie et à l’'embryologie de ces organes, il n’en est pour ainsi dire pas question. J’ai cru devoir, pour faire cette étude, prendre les animaux par groupes zoologiques, et rechercher successivement chez chacun d’eux à résoudre les diverses questions que je m’étais posées. J'ai choisi pour premier sujet d’études les mollusques, et parmi eux les Céphalopodes tout d'abord. Ces animaux sont en effet extrê- mement élevés en organisation, et présentent dans la structure de leurs glandes salivaires une perfection qui ne se retrouve pas ailleurs chez les invertébrés. Il était donc, pour cette raison, tout indiqué de commencer par eux. Ce mémoire est donc le premier d’une étude assez longue sur la Morpholosie des glandes salivaires des animaux invertébrés ; il se rapporte exclusivement aux Céphalopodes, et sera suivi, bientôt, je l'espère, d'un second mémoire destiné à faire con- naître les glandes salivaires des Gastéropodes. ninte à GLANDES SALIVAIRES DES CÉPHALOPODES. Les Céphalopodes présentent une organisation extrêmement compliquée, et parmi leurs organes il en est qui sont aussi parfaits sous tous les rapports que ceux des vertébrés inférieurs et même des mammifères. Pour ne citer quel’œil, par exemple, chacun sait que chez le poulpe ou la seiche il comprend les mêmes parties que chez l'homme. Les branchies sont aussi parfaites que celles de n'importe quel poisson ; on verra, par la suite dece mémoire, que les glandes salivaires contiennent aussi des parties semblables et homologues à celles des mammifères, et qu’elles ne leur sont point inférieures en organisation. Des descriptions succinctes de ces organes ont été données par divers auteurs plus ou moins anciens dans des traités classiques. Je n’ai pas trouvé, en effet, de mémoire spécial sur cette question. Seul M. Livon en 1878 a donné une description du tube digestif du poulpe en y comprenant surtout l’histologie ; les glandes sa- livaires y ont été étudiées d’une facon très rapide et pour ainsi dire accessoire (1). — Au point de vue de la physiclogie, et plus spé- cialement de l'étude des ferments, je dois citer aussi le travail de mon excellent ami M. Bourquelot (2). — On trouvera plus loin un exposé succinct des études qu'il a faites sur les glandes sali- vaires des Céphalopodes. M. Livon, dansle mémoire que je viensde citer, fait précisément ce rapprochement entre les glandes salivaires des céphalopodes et (1) CH. Livox. Recherches sur la structure des organes digestifs des Poul- pes. — Journal de l’ Anatomie et de la Physiologie, t. XVII, 1878. (2) BOURQUELOT. Recherches expérimentales sur l’action des sucs digestifs des Céphalopodes. — Archives de zoologie expérimentale, t, X, 1882. J 4 LOUIS JOUBIN. celles des mammifères. Mais on doit convenir, après avoir lu son travail, que les résultats histologiques qu’il a obtenus sont pour peu de chose dans ce rapprochement. Et cependant il me semble tout à fait justifié. Comme on pourra le voir par les pages qui suivent, il y a une analogie frappante des plus intéressantes entre ces or- ganes dans les deux ordres. Pour remplir le but que je me proposais, il fallait avant tout être abondamment pourvu d’animaux frais et même vivants ; on verra que cela était absolument nécessaire pour arriver à des ré- sultats précis. Il était tout indiqué de me rendre dans une des stations zoologiques fondées par mon cher et vénéré maître M. de Lacaze-Duthiers. Je suis donc allé à Banyuls-sur-mer (P yrénées- Orientales), au Laboratoire Arago, et je puis dire que j'ai eu là littéralement à profusion des animaux parfaitement vivants, admi- rablement acclimatés dans les bassins de la station, ce qui était pour moi une condition inappréciable. Les dragues et chaluts m'ont fourni une quantité considérable de pontes de Sepia ele- gans, Sepiola, Loligo, Ommastrephes, dont j'ai suivi, heure par heure, toutes les phases du développement et qui ont éclos dans mes cuvettes. Après avoir passé les mois d'avril, mai et juin à Banyuls, je me suis rendu à Roscoff, dans le second laboratoire fonde par M. de Lacaze-Duthiers. Là j'ai pu achever ce que j’avzis com- mencé sur le poulpe, et revoir sur les embryons de Sepia officinalis quelques-uns des résultats obtenus sur d’autres céphalopodes. Grâce à ces excellentes conditions d’étude, j'ai pu revoir le travail de Livon sur le poulpe, étendre ses observations à tous les céphalopodes de nos côtes, ainsi que les modifications que j'ai cru devoir apporter à ses conclusions ; j'ai étudié la circulation des glandes et fait l’embryogénie complète de ces organes. Je dois donc, devant l’heureux accomplissement de mon plan de travail, offrir à mon vénéré maître, M. de Lacaze-Duthiers, mes remerciements les plus sincères, non seulement pour les facilités RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 5 de travail que j’ai rencontrées dans les laboratoires qu il a fondés, mais aussi pour la libéralité et la bienveillance particulière avec lesquelles il les a mises à ma disposition. Ce mémoire était achevé et les planches qui l’accompagnent étaient gravées, quand j’eus la bonne fortune de rencontrer au Congrès de Toulouse pour l'avancement des sciences M. Vayssière, maître de conférences à la Faculté des sciences de Marseille. Il mit obligeamment à ma disposition un bulbe buccal de Nautilus Micrombilicatus sur lequel je fis quelques observations intéres- santes. Je le prie de vouloir bien agréer mes remerciements, ainsi que M. le professeur Delage, qui m'a autorisé à examiner un Nau- tilus Pompilius de son musée de la Sorbonne. J’ai ajouté à divers chapitres des appendices relatifs à ces deux Nautilus. Voici maintenant la marche que je compte suivre dans ce tra- vail. J’étudierai d’abord et rapidement : 1° l'anatomie des glandes salivaires et leurs rapports avec le bulbe buccal; c’est, en somme, la partie la plus connue. — 2° La circulation, qui est beaucoup moins connue, surtout en ce qui touche le rapport des glandes avec le système veineux. — 3° L’histologie de ces organes. — 4° L'embryogénie des glandes salivaires chez divers décapodes et aussi chez un type d’octopode. 6 LOUIS JOUBIN. I. — ANATOMIE ET RAPPORTS DES GLANDES SALIVAIRES. 1° Céphalopodes octopodes. — La description de l’appareïlsalivaire que donne Milne-Edwards dans ses lecons sur la physiologie sem- ble se rapporter presque exclusivement au poulpe ; il n’y est pas dit un seul mot des décapodes ; quelques notes complètent d'une facon très rudimentaire le texte même de l'ouvrage dont je cite le passage entier ayant trait à ces organes (vol. 5, p. 409) : « L'appareil salivaire n’est que rudimentaire chez le nautile ; « mais, chez la plupart des céphalopodes dibranchiaux, il est très « développé et ressemble beaucoup à ce que nous avons déjà vu « chez les gastéropodes. II se compose de deux paires de glandes « dont l’une est logée dans la tête et appliquée contre la partie « latérale et postérieure de la masse buccale, tandis que l’autre « est située beaucoup plus loin en arrière, etse trouve à la partie « antérieure de la cavité abdominale, sur les côtés de l’œsophage. « Les glandes salivaires antérieures sont multilobulées et s'ouvrent « isolément à l’entrée de l’œsophage ; celles de la seconde paire « donnent naissance à un conduit excréteur commun très long qui « débouche à la base de la langue. » Voilà tout ce que contient le traité de Milne-Edwards sur l’ana- tomie des glandes salivaires. Une note indique que ces glandes sont plus ou moins lisses ou lobulées chez le poulpe et sont com- posées de petits cœcums grêles. Chez les onychoteuthes, les glandes bulbaires se prolongent dansla masse buccale. Enfin chez le nautile « l’appareil salivaire ne paraît être représenté que par une « paire d'organes glandulaires logés dans l'épaisseur des replis « pharyngiens et s’ouvrant dans la bouche par un petit orifice situé « au centre de ces appendices charnus ». \ RECHERCIHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 7 Il est nécessaire, avant de reprendre cette description et pour faciliter la compréhension des rapports des glandes salivaires, d'indiquer sommairement les principales parties du bulbe buccal des céphalopodes. Cet organe est de forme ovoïde ou arrondie, et est fixé dans une cavité de la même forme, occupant le centre de la base des bras, par 2 brides musculaires, en bas par l’œsophage, des vais- seaux et le canal excréteur des glandes salivaires, en hant par une lèvre circulaire au centre de laquelle s'ouvre la bouche. Le bulbe est essentiellement musculaire; les muscles en effet occupent au moins les 2 tiers de son volume, et laissent au centre de sa masse une cavité ovalaire où sont contenus diversorganes, Les deux plus connus et les plusfaciles à voir sont les deux mandi- bules cornées que l’on a souvent comparées à un bec de perroquet. Elles sont, l’une courte, dorsale, l’autre plus longue, ventrale ; elles forment la voûte et le plancher, tous deux en ogive, de la cavité buccale proprement dite. C’est sur elles que viennent s’insérer les muscles composant la masse extérieure dont il vient d être parlé. Si l’on fait une section longitudinale de la cavité buccale, passant par le plan médian des 2 mandibules cornées (fig. 7, pl. 2), on trouve, en commençant par la face dorsale, l’œæsophase Œ situé contre la mandibule dorsale. Latéralement ce condait est limité par deux gros bourrelets charnuset plissés, qu’on ne peut voir natu- rellement sur la coupe sagittale que représente Ja fioure 7: — Puis on voit le plancher ventral, charnu de l’œsophage (b) le séparant d’une cavité en forme de poche (c) où vient se loger la partie dorsale de la radula. En dessous de cette cavité il y a une masse de muscles, de tissu conjonctif et de cellules nerveuses qui seront décrites à une autre place. La radula (R) est formée de dents appliquées sur une membrane qui glisse sur une espèce de poulie cartilagineuse (d) limitée par les deux poches radulaires,: l’'inférieure (e) et la supérieure (ec). Au-dessous de cette radula se trouve la langue P, limitée aussi dorsalement par le sac infé- 8 LOUIS JOUBIN, rieur {e) dela radula et ventralement par une autre poche (f) qui la sépare de la mandibule cornée inférieure. Sur une coupe transversale on trouve que la cavité limitée par les deux mandibules cornées est à peu près pentagonale; un des angles estinférieur, et son sommet médian ; le côté opposé à cet angle, et les deux eôtés adjacents forment une espèce de fer à che- val. Dans la cavité de ce fer à cheval on trouve d'abord l’æsophage, très large, avec ses deux grands bourrelets latéraux, puis toute la masse de la radula, avec ses deux gros cartilages servant de pou- lie à la membrane qui porte les dents. Ces 2 cartilages occupent à peu près le centre du bulbe. Au-dessous est la poche sous-radu- laire, puis enfin la langue et la cavité sublinguale logées dans l’angle médian et inférieur formé par le bec ventral. Tels sont, rapidement décrits, pour les placer et indiquer leurs rapports, les organes contenus dans le bulbe buccal. Il faut maintenantindiquer les positions occupées par les glandes salivaires par rapport à ce bulbe. | Une première paire, que j’appellerai paire extra-bulbaire, est composée de deux glandes plates situées en dehors du bulbe buccal, mais appliquées contre lui : elles n’y sont adhérentes que par un pédoncule qui contientle canal excréteur, les vaisseaux et les nerfs, etun peu de tissu conjonctif. Ces glandes sont libres dans la grande cavité sanguine qui entoure le bulbe et qui est creusée dans la base des 8 bras à leur réunion. Cette paire de glandes est entièrement baignée dans le sang ; nous verrons, à propos de la circulation, les conséquences à tirer de cette disposition ; Milne- Edwards décrit ces glandes comme très irrégulièrement divisées en -plusieurs lobes. Je les ai au contraire trouvées toujours ovoïdes, la moitié inférieure divisée en 2 lobes, tandis que la supérieure reste entière. La forme de ces glandes m’a paru très constante. Leur canal excréteur est court : ces glandes eneffet sont situées du côté dorsal du bulbe, et sont par conséquent voisines de l'œsophage qui est aussi de ce côté. Il part de chacune d'elles un canal, qui, tra- RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 9 versant obliquement les masses charnues, viennent symétrique- ment déboucher des deux côtés de l’origine de l’œsophage entre les deux grands lobes dont j'ai parlé plus haut. La seconde paire de glandes salivaires est beaucoup plus consi- dérable que la précédente. Elle est située dans la grande cavité abdominale où sont logés les principaux viscères. Elle en occupe le sommet. Ces deux glandes sont reliées par leur canal excréteur à la masse buccale, dont elles sont séparées par toute l'épaisseur du cartilage céphalique et de la masse nerveuse qu'il renferme ; aussi leur canal excréteur est très long. Les glandes abdominales sont suspendues au sommet de la paroi en forme de voûte par une membrane de nature conjonctive d’une forme curieuse. Chaque glande est pourvue d’une sorte de hile, d’où part un cordon qui immédiatement s’évase comme d’un cône à large base. C’est cette base qui s'attache à la voûte ; mais comme il y a 2 glandes, les deux cônes se rencontrent à moitié chemin, d’où il résulte une combinaison de ces deux membranes coniques s’attachant à cette voûte. Il va sans dire que cette forme de cône n’a rien de géométrique, et que je prends la compa- raison qui s'en rapproche le plus pour en donner une idée la plus exacte possible. Du même hile partent le canal excréteur, les nerfs et vaisseaux de la glande, et ces organes sont plus ou moins maintenus pendant un certain parcours par la membrane de suspersion, de même que l'aorte dorsale qui la traverse aussi. Les deux glandes ne sont adhérentes à aucun organe voisin, et sont pendues à la paroi par les deux seules membranes coniques. Elles baignent dans le grand sinus abdominal, et sont entièrement entourées par le sang veineux. — Comme pour les glandes extra- bulbaires, nous verrons les rapports des éléments glandulaires et des vaisseaux dans le chapitre suivant. Les deux olandes ont plus ou moins la forme d’une amande, le hile étant supérieur et sur un des côtés de la grosse extrémité ; la pointe est tournée vers le bas. C’est là leur forme générale ; mais 10 LOUIS JOUBIN. elle est assez variable suivant le volume des organes voisins (pl. 3, fiw. 1,2, 3). Leur surface est finement granuleuse, et cette appa- rence est due aux fonds des culs-de-sac et aux intervalles sanouins qui les séparent. Je n'y ai point vu les lobules qu’indique Milne- Edwards ; ces glandes sont en effet compactes et indivises. Du bhile part un canal excréteur cylindrique, assez gros, qui rejoint bientôt celui du côté opposé, en formant entre eux un angle assez ouvert. Le canal unique qu’ils constituent devient parallèle à l’œsophage, traverse avec lui le cartilage céphalique, le système nerveux central, de nouveau le cartilage, et arrive au bulbe buccal. Là il se sépare de l’œsophage qui est dorsal, lui devient ventral et pénètre dans le bulbe où il rejoint la base de [a langue ; il y entre et en suit l'axe central ; 1l vient enfin déboucher au bout de cette langue au milieu d’une papille en forme de chou-fleur, qui la termine. Cette paire de glandes abdominales est très développé chez le poulpe et l’élédone, et est au moins dix fois plus grosse que la paire de glandes extra-bulbaires. Telles sont les deux paires de glandes salivaires connues som- mairement depuis longtemps. Il y a quelques années, M. Livon, dont j'ai déjà cité le nom précédemment, décrivit une nouvelle glande située sous la langue, dans la poche comprise entre la mandibule inférieure et cet organe. Les rapports, les dimensions de cet organe ont été fort bien indi- qués par M. Livon,et il est inutile d'y revenir. Cependantsil est un point sur lequel je ne suis pas d'accord avec cet auteur. Il dit qu'il est impossible de la confondre avec les glandes salivaires cépbaliques, dont elle est bien distincte par sa position inféricure, par une membrane qui l'enveloppe et lui fait faire corps avec le bulbe buccal. Je n'ai pas vu cette membrane d’enveloppe, et je crois qu'elle n'existe pas. En effet, la poche qui est sons la langue est tapissée dans toute son étendue par un épithélium dont la moitié inférieure sécrète la mandibule cornée, et dont l’autre, plissée, est la glande en question. Du côté de la langue, elle en est séparée par RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 41 une membrane conjonctive épaisse ; mais du côté de la cavité de la poche (qui n’est autre que la cavité buccale elle-même), iln'y a pas de membrane du tout. Quand on examine l’histolosie de cette glande, on voit qu'elle est formée par l’épithélium de la cavité buc- cale plissé dans tous les sens, de facon à former une foule de petits culs-de-sac s’ouvrant tous dans cette cavité buccale. Il n’y a pas de membrane d’enveloppe propre à cette glande. M. Livon a cherché le canal excréteur de cette glande, et n’a pas pu le trouver. Ce que je viens d'en dire montre la raison de ce fait ; il n’y a pas de canal excréteur, puisque chaque cul-de-sac glandulaire s’ouvre séparé- ment dans la cavité buccale. Malgré ces quelquesinexactitudes, la découverte de cette glande par M. Livon est intéressante ; il l’a vue chez le poulpe, et je lai retrouvée chez tous les céphalopodes que j'ai examinés, aussi bien octopodes que décapodes, avec lamême position etles mêmes carac- tères. En résumé, les céphalopodes octopodes ont : l’une pairedeglandes salivaires evira-bulbaires ; 2° une paire de glandes abdominales, et 3° une glande impaire (glande décrite par M. Livon) ou glande sublinguale. 2° Céphalopodes décapodes. La description des glandes salivaires des décapodes sera beaucoup plus courte que celle des octopodes : nous avons là en effet des glandes identiques ou à peu près sem- blables. La première à signaler est la glande sublinquale; elle offre chez les décapodes exactement les mêmes caractères que chez les octopodes ; ses rapports, ses dimensions sont aussi les mêmes. Il est donc inu- tile de revenir sur cette description. La deuxième paire est constituée par les glandes abdominales. Iciil y a des différences considérables avec les mêmes glandes chez les octopodes. Chez ceux-ci elles sont très volumineuses etoccupent une bonne partie de la cavité abdominale, Chez les décapodes au contraire, elles sont beaucoup plus petites et reléguées tout en haut 12 LOUIS JOUBIN. de la voûte de cette cavité, contre le cartilage céphalique. Chez les seiches et les calmars de grande taille, elles ne sont pas plus grosses qu'une petite amande ; chez les sépioles, elles sont extrême- ment difficiles à reconnaître, tant elles sont petites. En outre, elles ne sont pas libres dans la cavité abdominale, mais elles sont enve- loppées dans une masse considérable de tissu conjonctif qui les dis- simule complètement, de sorte que lorsqu'on enlève les viscères de la cavité abdominale, celle-ci semble tout à fait vide, bien que les glandes salivaires y soient encore, mais adhérentes à la voûte au milieu du tissu conjonctif. Le canal excréteur commun des deux glandes vient, comme chez les octopodes, s’ouvrir à l'extrémité de la langue. Il reste maintenant à voir si les décapodes ne possèdent pas de: glandes extra-bulbaires. Tous les ouvrages disent que les actopodes ont deux paires de glandes salivaires, tandis que les décapodes n’en ont qu'une. À première vue c’est exact ; mais si l’on dissèque attentivement, ou mieux, si l’on fait des coupes du bulbe sur de petits animaux, la Sepia elegans, par exemple, on voit que ce bulbe renferme une autre glande dont on ne retrouve pas l’analooue chez les octopodes. Il faudra voir si elle n’en serait pas lhomologue. Cette glande est impaire et médiane, etest située dans le plancher de l’œsophage, entre ee canal et le sac dorsal de la radula (fig. 7 pl.2 n). La dissection de cette glande est très difficile, car elle est logée 2 dans une masse de fibres musculaires croisées dans tous les sens, et formant, au moins à la périphérie, des trabécules entre lesquels les culs-de-sac glandulaires sont intriqués. Les coupes donnent des résultats plus précis. On voit que cette glande est assez volumi- neuse, elle paraît être formée de deux glandes accolées, et elle est en rapports avec les ganglions nerveux buccaux (9), le sac de la radula (ec) et l'angle de l’œsophage (Œ). On voit aussi au-dessus de la glande un petit réservoir (7) assez allongé, dans lequel s’ac- cumulent les produits de la glande. Ce réservoir communique avec RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 143 l'extérieur par plusieurs canaux excréteurs. Il y en a un certain nombre dans l’œsophage ; la fig. 7 en représente 4 chez Sepia elegans ; on en trouve un autre plus considérable et situé au bout d’un assez long canal qui débouche dans la poche de la radula, dans une sorte de chambre ou poche secondaire (a fig. 7) quien est comme un diverticulum. Je ne sais s’il faut considérer ce canal supérieur comme le plus important et le vrai canal excréteur, ceux qui s'ouvrent dans l’œ- sophage n'étant qu’accessoires. Au point de vue purement anato- mique, il n’y a pas de différences entre eux ; mais on verra, par l'embryogénie, que c’est le canal supérieur qui est le point d’ori- gine de cette glande. Je considère cette glande intra-bulbaire comme l'homologue des glandes extra-bulbaires des octopodes. Elles ont les mêmes rapports de leurs conduits excréteurs, la même structure histologique, et la même origine embryogénique. On verra en effet un stade de l'embryon du poulpe, où la glande extra-bulbaire non encore sortie du bulbe ressemble absolument à la glande intra-bulbaire des dé- capodes (fig. 1, pl. 2). Il faut donc conclure que les Céphalopodes dibranchiaux possè- dent une glande impaire sublinguale, une paire de glandes abdo- minales, et les octopodes une paire de glandes extra-bulbaires, rem- placée chez les décapodes par une glande impaire intra-bulbaire homologue. Le Nautile, seul représentant vivant des innombrables tétra- branchiaux fossiles, offre une disposition absolument différente de celle des autres Céphalopodes, quant à ce qui est de ses glandes salivaires. La figure 1 ci-contre représente la partie antérieure du tube di- gestif du Nautilus Micrombilicatus. L’œsophage (Œ) s'ouvre au- dessous d’un bourrelet charnu (BO), garni de papilles dures sur son bord supérieur ; au-dessus de lui se trouve la cavité buccale limitée à droite et à gauche par 2 grands lobes garnis de nom- 14 LOUIS JOUBIN. breuses papilles assez dures, qui sur cette figure ont été rejetés latéralement. Au fond toute la masse des cartilages et muscles ra- dulaires occupe la face ventrale ; cette face est aussi garnie de papilles sur le milieu (PM), qui deviennent plus petites à mesure que l’on s'approche davantage de la radula , et finissent par se glisser sous cet organe. La radula (R), très large, de couleur brune, est pourvue de 4 rangées de dents très longues, d’un rachis à dents très acérées, de quatre Ji / 7] rangées de petites plaquettes alternant avec les rangées de KE AE F2 +1 7 F2 dents, et de deux lignes sail- SE: RE ——" Ts lantes et continues, limitant à droite et à gauche les émi- nences de la radula. — Chez aucun des céphalopodes que FIG. 1. jai pu examiner, la radula n’est aussi considérable. En arrière se dresse ce qui correspond à la langue des cépha- lopodes dibranchiaux ; mais ici, au lieu d'être un organe plein et entier, garni de papilles, c’est une membrane formant trois replis parallèles, et parcourue par une foule de petits sillons longitudinaux (L. 1,2, 3). De chaque côté, deux petits plans cartilagineux la limitent. | Si l’on fait une coupe dans cette membrane linguale passant par le plan saoittal, c’est-à-dire, dans la fig. 1, parle plan du rachis de la radula, on obtient la disposition que représente la figure 2 ci- contre. Les chiffres 1, 2, 8, indiquent les mêmes replis que dans la fig. 1, et les lettres a, b, e, les cavités qui les séparent ; en R est RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 45 la radula, en B la membrane qui va tapisser la mandibule ventrale. On voit que les cavités qui séparent les bourrelets sont très iné- gales ; la 1", «, est très profonde, de mêmela 8°, c, tandis que b est à peine sensible. Sur les coupes que mL 4. W -Î j'ai faites, j'ai vu quela cavité c est Fa Ÿ tapissée sur les 2 faces de sa partie 3. 6 ÿ & lé NE YA NU N : É NY NS sp» aY ‘ + QC s al À L SCA ” SF profonde par des papilles (G) larges, Î ( WU B- , ' 1 \ ee) e] A] Ÿ % élevées, molles, ayant tout à fait l'as- Il \| le ] ÿ c 4 f sect glandulaire. Maiheureusement ; HA Î 9 \ ) l’état de conservation des pièces ne m'a pas permis de constater si rcelle- ment, sans laisser place au doute, c'est là une glande. Cependant je crois que c’est quelque chose de com- Re parable à la glande sublinguale des autres céphalopodes. Mais chez ceux-ci la glandena pas cette position ; elle est au fond de Ja cavité, B, entre la langue et la mandibule ; ici elle est entre la langue et la radula. Malgré cette différence importante, je con- sidère les deux organes comme analogues, mais non homo- logues. Comme l’ont indiqué les auteurs qui se sont occupésdu Nautile, je n'ai pas trouvé non plus de glandes abdominales, et sur les cou- pes passant par le plan sagittal de la région linguale on ne trouve rien qui se rapproche du canal excréteur de ces organes. Les cavi- tés qui sont situces sous les plis de la membrane couverte de villo- sités ct que l’on peut comparer à la langue des céphalopodes, il y a seulement des sinus sanguins, avec des fibres musculaires eë des fibres conjonctives. Il n'ya donc chez le Nautile pas trace de glandes salivaires abdo- mivales, et la glande sublinguale est assez contestable, sinon pour son existence, du moins pour son homolosation avec celle des autres céphalopodes. Restent donc les extra-bulbaires des octopodes et l'intra-bulbaire des décapodes. Disons tout de suite que cette 16 LOUIS JOUBIN. dernière n’existe pas chezle Nautilus Micrombilicatus et que je ne l'ai pas vue non plus chez le N. Pompilius. Mais sur les deux grandes lèvres couvertes de papilles dures et élevées qui limitent latéralement la cavité buccale au-dessus de l’en- trée de l’æsophage, on voit deux orifices assez étroits, situés au milieu de ces deux lambeaux (OS, fig. 1). Ils ont été indiqués par Owen et Valenciennes. Chacun de ces orifices est entouré par une sorte de sphincter musculaire, formant un bourrelet à la sur- face. Chacun d’eux mène à une sorte de cavité assez étroite, au fond de laquelle s’ouvre une grosse glande 1. il logée dans l'épaisseur du grand pli papiilifère limitant la cavité buccale sous la mandibule res A gain à À ‘ dorsale. Sur des coupes transversales de cette Pa Le s “a “AT région (fig. 3), on voit que la glande est assez ‘ Ne ex volumineuse et de forme ovoïde. Je n’ai pas * pu faire autre chose que de constater sa pré- sence ; il était impossible de songer à en faire l'histologie. D’après la position de ces orifices, il me semble que ces deux glandes sont tout à fait comparables aux glandes extra-bulbaires des octo- podes. La figure ci-jointe montre une coupe passant par l'orifice et une par le milieu de la glande chez le Nautilus Micrombilicatus. La position des orifices est la même chez le N. Pompilius. Le Nautile s'éloigne donc considérablement du type des dibran- chiaux par l’absence complète de glandes abdominales, déjà réduites chez les décapodes, et par la position inverse de la glande sublin- guale, qui y est supralinquale ; il semble se rapprocher des octopodes par ses glandes dela paroi œsophagienne comparables aux glandes extra-bulbaires de ces animaux. RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES, 17 II. — CIRCULATION DANS LES GLANDES SALIVAIRES. Les glandes salivaires bulbaires et abdominales reçoivent des artères qui partent de l'aorte et de ses principales branches. Il est à remarquer que ces vaisseaux sont extrêmement grêles, et que le sang quils fournissent à des organes aussi volumineux et aussi actifs serait insuffisant si une disposition spéciale ne venait y suppléer. En effet, le sang artériel, chez les octopodes au moins, est pour peu de chose dans la circulation des glandes salivaires, tandis qu’au contraire ces organes baignent de toute part dans des sinus veineux, et c’est là certainement que les liquides excrétés sont puisés. J'étudieraisurtoutles glandes abdominales et extra-bulbaires au point de vue de la circulation. Les autres glandes intra-bulbaires des décapodes, et sublinguales, sont alimentées par des artères peu constantes, et sont en rapport avec des espaces lacunaires intra- bulbaires qui sont peu fixes et mal délimités. 1° Chez les octopodes, l'Elédone, par exemple, l'aorte dorsale remonte en suivant la ligne médiane, elle passe entre les deux glandes salivaires abdominales, et rencontre l’espèce de tente fibreuse formée par les membranes de soutien des 2 glandes. Un peu au-dessus, elle se divise en deux grosses branches qui ne tar- dent pas elles-mêmes à se subdiviser de nouveau en un certain nombre d’artères. Mais ces divisions ne nous intéressent plus. Des deux branches primitives (a, a’, fig. 1, pl. 3)au même niveau, on voit partir un petit tronc très court et très grêle (b, b', même figure) que l’on pourrait nommer artère salivaire commune. Ce tronc n’a pas plus de 2 millimètres de longueur ; il se divise immédiatement en deux autres branches qui sont, l’une supérieure, l'artère salivaire bulbaire (c c’), et l’autre inférieure, l’artère salivaire abdomi- ARCH. DE ZOOL. EXP. ÊT GÉN. — 2 SÉRIE, — T. Vbis. — supp. 1887. — 3e Mém. 2 18 LOUIS JOUBIN. nale (d d’). Les 2 artères salivaires supérieures s’engagent avec l'aorte, l’œsophage et le canal excréteur des glandes abdominales dans letrou du cartilage céphalique, traversent le système nerveux central, puis ressortent ensemble par l’autre orifice du cartilage. Les 2 artères gagnent alors le ganglion supérieur du bulbe, passent laté- ralement vers le canal excréteur des glandes salivaires extra-bul- baires et y pénètrent. Les deux artères salivaires inférieures suivent un trajet directe- tement opposé ; elles descendent verticalement vers la membrane de soutien des glandes, s’y attachent et arrivent au hile de chaque glande sans avoir donné de branches; elles sont presque recti- lignes. Il est à remarquer combien le tronc commun desartères salivaires (bb”, fig. 1) est réduit. Il semble tout d’abord que les 2 artères, supé- rieure et inférieure, naissent du même point de la branche de l’aorte. Ce tronc commun existe cependant, comme j'ai pu m'en assurer par des injections répétées. Un autre point remarquable, c’est l’extrême petitesse de ces artères qui rendent lesinjections très difficiles ; il faut le plus grand soin pour que la masse à injection passe. Celle qui m’a donné le meilleur résultat est le bleu soluble. Mais il arrive très souvent que l'injection n’a pas été suffisamment poussée pour pénétrer les artères salivaires :aussi est-il, à plus forte raison, rare d’avoir injecté les glandes salivaires elles-mêmes suffisamment pour pouvoir y pratiquer des coupes. Il est bien évident que ces artères jouent, physiologiquement, un rôle très réduit et que le sang des lacunes est presque seulactif. | 2° Chez les décapodes, la Sepia officinalis, par exemple, la disposition des artères est tout à fait différente. On sait que chez ces animaux les glandes salivaires extra-bulbai- res manquent, et queles glandes abdominales sontenfouies dans une masse de tissu conjonctif. Ces glandes sont enchevêtrées dans ces fibres qui maintiennent dans le même paquet l’œsophage, leur canal RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 19 excréteur et l’aorte. Ces organes sont bien plus voisins les uns des autres que chez le poulpe, et les branches artérielles sont plus courtes. En outre, comme le sang veineux ne baigne pas les glandes, il y a un nombre d’artères plus considérable, quoique grêles, et la circulation doit y être plus active. La fig. 2, pl. 3, donne une image exacte des artères salivaires abdominales de Sepia officinalis. L'aorte oremonte et arrive au niveau des glandes ; là un premier vaisseau grêle en part ; il suit plus ou moins longtemps l’aorte dans le tissu conjonctif qui l'enveloppe, puis la quitte et passe à la glande gauche. Elle se divise («) en deux petites branches. Notons,en passant, qu’on ne voit pas de branches de ces artères se diviser à lasurface des glandes. Les divisions, quand ily en a, se font à une certaine distance de la glande, et semblent y pénétrer comme par un petit trou etse diriger immédiatement vers la profon- deur de l'organe. Un autre tronc (b) un peu plus gros part de l’aorte, et se divise bientôt en 2 autres: l’un passe à gauche (b’}, l’autre à droite (b”), où il se divise encore en 2 branches qui suivent toute la facette de la glande accolée à l’œsophage; plusieurs petits rameaux (5 ou 6) pénètrent dans la glande. Une 3° artère quitte l’aorte un peu au-dessus (c) et va à la glande gauche. | L’aorte se divise ensuite en deux gros troncs 0’0” ; celui de gau- che donne deux grosses artères : l’une (m°) monte vers le bulbe, l’autre (4°) descend vers la face interne de la cavité abdominale céphalique. De ces deux branches 0’ et 4’ partent deux autres pe- tites artères (d, e) allant encore 4 la glande salivaire gauche. Celle- ci recoit doncen définitive 5 troncs. Le gros tronc droit (0°) de l'aorte donne trois branches, tandis que le correspondant de gauche n’en donnait que deux. Le 1% (m)est le tronc bulbaire droit. Le 2° (p) est impair, remonte jusqu’à la base de la grande cavité ai) LOUIS JOUBIN. veineuse où est le bulbe buccal, et là se divise en deux troncs qui fournissent des artères aux bras. Le 3 (g) estl’artère de la cavité abdominale du côté droit ; c’est de ce dernier que part la 2° artère salivaire (f) du côté droit, elle donne deux ou trois branches à cette glande. Telles sont les artères que recoivent ces deux glandes salivaires. Elles sont assez variables, tant par le niveau de leur point d’émer- gence de l'aorte que par le nombre de leurs branches. Cepen- dant le type que je viens de décrire est assez commun et peut être considéré comme général. Tous ces petits troncs sont à peu près de même calibre et sont toujours plus importants que les artères salivaires des oetopodes, dont le nombreetla direction sont parfai- tement fixes. CIRCULATION VEINEUSE. — 1° Jécapodes. — Chez ces animaux, les veines sont en général mieux endiguées que chez les octopodes, et leurs sinus sont beaucoup plus réduits. C’est pour cette raison que les glandes salivaires ne sont pas baignées par le sang de la grande cavité abdominale. Les glandes abdominales sontlogées au milieu d’un tissu con- Jonctif abondant, creusé par des veines véritabies, collectant le sang qui en sortet se jetant les unes dans les autres pour former un véritable réseau veineux. La fis. 8, pl. 8, représente cette disposi- tion chez la Sepia officinalis. — Les veines sont irrégulières ; ce- pendant on peut dire que généralement elles suivent les arêtes des glandes et viennent se rassembler à leur hile, où elles forment une sorte de petit réservoir {a a, fig. 3). De ce réservoir part, de chaque glande, une veine (4 b) qui reste-pendant quelque temps paral- lèle au canal excréteur ; puis toutes les deux se portent vers la gauche et vont se jeter dans un tronc veineux (c c) qui ramène le sang de Ja paroi interne de la cavité abdominale. Cette veine et son homologue de gauche correspondent aux deuxartères (g 9, fig. 2) que nous avons vu suivre la face inférieure du cartilage cépha- lique. Dans cette veine vientse jeterune veine salivaire accessoire a; RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. ©?4 revenant de la glande droite. Donc les 3 veines salivaires vien- nent se jeter dans cette veine abdominale droite, qui se réunit à son homologue (c') de gauche pour foriner un tronc impair (e), lequel va se jeter tout près de là dans la grande veine V. Celle-ci ramène le sang des parties supérieures du corps vers les branchies en passant par les corps urinaires. Cette disposition des veines est tout à fait analogue à ce que l’on observe chez le calmar et la sépiole. 2° Chez les octopodes, 1 n’y a rien absolument à signaler de semblable ; comme je l’ai déjà dit, les glandes baiïgnent dans la cavité abdominale remplie de sang, ou dans le grand sinus péribulbaire; il n’y a donc pas de vaisseaux veineux à leur surface. Il reste maintenant à examiner de quelle facon se fait la cir- culation dans l'épaisseur de la glande. Pour cela il faut commen- cer par faire des injections fines de ces organes. La meilleure masse est le bleu de Prusse soluble, avec de la gélatine en assez grande quantité. On arrive, en faisant passer graduellement cette masse dans les glandes de l’élédone, à voir les gouttes de bleu perler à leur surface ; chez la seiche ou le calmar, en poussant l'injection par l'aorte, on peut voir le bleu remplir les premières veines superficielles. En détachant alors les glandes et en les traitant par les alcools successifs, on peut avoir des coupes de glandes injectées, indiquant de la manière la plus évidente le mode de circulation dans leur épaisseur. Ces coupes ne sont mal- heureusement pas bonnes pour une étude histologique, car la fixa- tion ne peut se faire que quelque temps après la mort de l'animal, et l'injection détériore les éléments glandulaires. Les coupes faites dans de telles conditions ont l'aspect repré- senté dans les figures 8 et 9, pl. 2. 28 acini glandulaires sont séparés les ans des autres par des intervalles remplis par la masse à injection au bleu de Prusse. Cà et là les espaces se réunissent pour former de petites lacunes. Cet aspect lacunaire commence dès le point de pénétration de 22 LOUIS JOUBIN. l'artère dans la glande ; elle ne se divise point en rameaux, mais immédiatement se déverse à plein canal dans les interstices des acini. Chez l’élédone (fig. 8), la masse à injection passe dans les intervalles conjonctifs, puis arrive à la superficie par une foule d’orifices compris entre les éléments de la glande, et tombe dans le grand sinus abdominal. Le sang a donc traversé la glandé dans tous les sens et arrive dans la cavité générale comme par les trous d’une pomme d’arrosoir. Chez les décapodes au contraire, le sang traverse la glande comme chez les octopodes, maïs, arrivé à la périphérie, rencontre la gaine conjonctive. Les petits jets inter-aciniens se réunis- sent alors et constituent des espèces de capillaires veineux dont on voit la coupe sur la fig. 9. Leur réunion produit des veinules puis des veines qui viennentse centraliser dans le réservoir veineux du hile. La coupe passe précisément par ce réservoir (a, fig. 9, pl. 2). Je n’ai pas pu voir d'épithélium propre à ces vaisseaux tant qu’ils vont à la superficie de la glande ; ils ne sont de véritables veines qu’au delà de cet organe. Les veines de ces glandes sont donc exclusivement superficielles, et toutes les parties comprises dans l’épaisseur de la glande ne sont que les espaces inter-aci- niens. En somme, la différence quiexiste au point de vue de la circula- tion veineuse entre les octopodes et les décapodes est assez impor- tante, puisque chez les premiers le sang tombe directement dans le sinus abdominal, tandis que chez les seconds le sang est ramené directement aux branchies par la grande veine. Chez le Nautile je n’ai naturellement pas pu étudier ce qui peut avoir trait à la circulation. Il semble cependant que les glandes de la paroï supérieure de l’œsophage et la glande linguale peuvent être comparées à la sublingale et à l’intra-bulbaire des décapodes. Elles sont logées entre les muscles et les mailles du tissu conjonctif, et le sang peut circuler assez facilement entre ces fibres, entourant plus ou moins complètement la glande. RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 23 III. — HISTOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. Les glandes salivaires des céphalopodes peuvent, au point de vue histologique, se ramener à deux variétés de glandes muqueuses , la première glande sécrétant surtout une matière qui, mêlée à l’eau, devient le mucus. On peut reconnaitre cette division par des caractères de structure faciles à constater au microscope, pourvu que l’on se soit servi d'animaux vivants et que la fixation des tis- sus ait eu lieu d’une façon à la fois énergique et rapide. Ces conditions sont essentielles, et c’est probablement faute de les avoir employées que le travail de M. Livon est si incomplet. D'une façon générale il est nécessaire, pour avoir des détails des cellules salivaires, d'opérer sur des animaux vivants, et, s’il est possible, sur des animaux qui se sont remis des accidents occa- sionnés par leur capture, qui ont repris en partie leurs habitu- des, ce qu’on reconnaît à ce qu’ils commencent à manger en capti- vité. Il faut, pour atteindre ce but, avoir, comme onen 4 au labo- ratoire de Banyuls, des bassins à courant d’eau continu, et assez vastes pour que les élédones et les seiches y vivent bien. Au bout de quelques jours on extrait rapidement les glandes salivaires, et on les fixe, après les avoir divisées par petits fragments, au moyen de l’acide osmique à 1 %. Ni l'acide picrosulfurique, ni l'acide chromique, ni la liqueur de Müller ne m'ont donné de résultats suffisants ; les cellules ne sont pas fixées assez rapidement, et leur contenu qui est caractéristique n’est plus visible. On obtient avec ces liquides.des cellules renfermant, comme toutes les cellules 24 LOUIS JOUBIN. glandulaires, du protoplasma et un noyau; mais le produit d'excré- tion n'y est plus. L'action de l'acide osmique doit être prolongée au moins pen- dant 12 heures pour les petits morceaux. Il est facile ensuite de les couper ; et les colorations à l’hématoxyline, quoique difficiles à obtenir, donnent cà et là de très bons résultats. J’étudierai d'abord la structure des glandes bulbaires, c’est-à- dire : 1° la glande sublinguale commune aux octopodes et aux dé- capodes ; 2° les glandes extra-bulbaires des octopodes ; 3° la glande extra-bulbaire des décapodes, et 4° les glandes abdominales. l° GLANDE SALIVAIRE SUBLINGUALE, Cette glande tapisse, comme cela a été indiqué par M. Livon, la face inférieure de la langue, celle qui est en rapport avec la mandibule inférieure. Elle est séparée de la langue uniquement par un plan de fibres conjonctives faisant corps avec celles qui sont propres à la lanwue. La glande, mince en haut, est plus épaisse en bas de la cavité buc- cale rétro-linguale où elle se trouve accolée à l’autre paroi. Voici sommairement l'opinion de M. Livon. M. Livon ditque, au point de vue de la structure, cette glande est franchement une glande en grappe ; sur des coupes après dur- cissement dans J'alcool ou l’acide chromique et coloration au picro- carminate, on lui reconnait assez facilement la structure suivante : d’abord une charpente de tissu conjonctif à noyau formant les cloisons séparant les acini. Cette couche de tissu conjonctif est assez mince; et si on la compare à la charpente des glandes salivaires, on voit qu’elle a une épaisseur bien moindre. Les espaces délimités par ces cloisons et qui constituent les acini peuvent sur les coupes se diviser en deux groupes suivant la nature des cellules qu'ils con- tiennent. La plus orande majorité et quelquefois tous, sur la même RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 25 préparation, présentent à leur intérieur des cellules polyédriques de 0,018 à 0,027 que l’on doit par leur grand nombre regarder comme les véritables cellules glandulaires de cet organe. Elles présentent dans leur intérieur un protoplasma granuleux, uu noyau bien dis- tinct, et sur certaines cellules un nucléole bien visible. À côté de ces acini, de temps en temps on voit des espaces qui présentent dans leur intérieur un épithélium cylindrique, Par ana- logie il faut sans doute voir là des sections de conduits collecteurs. Voilà, à peu de chose près, le texte du mémoire de M. Livon. Bon nombre de ces observations sont exactes ; mais cependant je crois qu’il y en a d'autres inexactes et incomplètes. M. Livon a étudié le Poulpe seulement ; j'ai étudié en outre l’'Elédone, l'Argonaute chez les octopodes, et chez les décapodes, Sepia, Sepiola, Rossia, Loligo, Ommastrephes. Chez tous ces types J'ai trouvé la même structure, sans aucune modification entre les 2 grandes divisions des céphalopodes. Le tissu conjonctif m'a paru être plus considérable entre les acini de cette glande que dans les glandes extra-bulbaires, et que dans les glandes abdominales des décapodes. Chez l'Elédone Mos- chata, par exemple (fig. 6, pl. 2, 9), on voit que dans les angles des acini il y a degros amas plus ou moins polysonaux sur des coupes, comblant les espaces interglandulaires ; ce tissu contient des cel- lules ovales à gros noyau. Cette charpente conjonctive se rattache par une foule d’endroits au plancher conjonctif qui sépare les glandes de la masse linguale. Ce que dit M. Livon de la dimension des cellules est exact ; il est vrai aussi qu’elles contiennent un nucléole et du protoplasma gra- nuleux. Mais toutes les cellules glandulaires salivaires en sont là, et précisément l’auteur n’a pas vu le caractère important de ces cellules. Elles renferment le noyau etle protoplasma granuleux dans leur moitié inférieure seulement ; toute la moitié (ou les 2 tiers) supérieure sont remplis par le produit d’excrétion de la glande, qui sont des globules petits, à peu près de la même dimen- 26 LOUIS JOUBIN. sion que le nucléole du noyau, et serrés contre les autres de facon à former une sorte de grappe de raisin. Il faut, pour constater ce fait, fixer rapidement par l'acide osmique à 1 % des glandes vi- vantes. Ces granules ont disparu si l’animal était mort. On peut voir dans de telles préparations des granules en train de sortir de la cellule et d'entrer dans la cavité des acini. Sur ces préparations on constate que tous les culs-de-sac de la glande viennent déboucher, non pas dans des canaux excréteurs, mais dans la cavité buccale sublinguale ; c’est à peine si çà et là on trouve quelques acini, se réunissant pour s'ouvrir en commun dans la cavité ; généralement ils sont indépendants. En outre, on trouve dans toutes les cellules l’aspect glandulaire dû à la présence des granulations ; je n’ai pu retrouver les canaux excréteurs dont parle M. Livon, caractérisés par des cellules cylindriques et plus étroites ; toutes m'ont paru être semblables aux cellules sécrétantes propres de la glande. D'ailleurs le fait que tous les culs -de-sac viennent s’ouvrir par une grande quantité d'ouvertures dans la cavité inférieure de la bouche, exclut par lui-même la présence d’un canal excréteur qui n'existe pas d'ailleurs. Le noyau des cellules glandulaires est très gros, rond, et con- tient toujours un nucléole, quelquefois deux, et des granulations. Le protoplasma n’est granuleux que dans le fond de la cellule; au- dessus du noyau, il ne remplit plus la cellule, mais la tapisse d’une couche de plus en plus mince. Il arrive que par l’action de l’aeide osmique cette couche prenne l'aspect de filaments ou de réseaux. Les granules qui forment le contenu des cellules sont colorés d’une facon intense par l’action de l’hématoxyline, au point qu'ils deviennent noirs, alors que le noyau et le protoplasma sont seule- ment d’un violet clair. Je n'ai pas constaté de différence sensible, au point de vue histo- logique, entre les glandes des diverse: céphalopodes que j’ai exa- minés. Dans tous, les caractères de la glande sublinguale m'ont paru être identiques. RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 27 2° GLANDES EXTRA-BULBAIRES DES OCTOPODES. Après ce qui vient d'être dit sur l’histologie de la glande sub- linguale des céphalopodes, il est facile de résumer rapidement la structure des glandes extra-bulbaires des octopodes. Les mêmes procédés de technique s’appliquent aussi bien à celles-ci, et les con- ditions d'observations sont identiques. Voici ce que dit M. Livon de la structure histologique de ces glandes chez le poulpe. Il ne fait pas de distinction entre les glan- . des extra-bulbaires et les glandes abdominales : € La structure de ces glandes est le type des glandes en grappe, « et l’analogie est frappante entre la structure des glandes sali- « vaires des poulpes et la structure des glandes salivaires des « vertébrés supérieurs. Ces masses glandulaires sont formées, « comme chez l’homme, le chien, etc., par la réunion de culs-de- € sac ou acini remplis de grosses cellules glandulaires supportées « par une forte charpente de tissu conjonctif. Ces culs-de-sac « réunis donnent naissance à des conduits tapissés par un épithé- « lium. Ce canal excréteur peut aussi par sa structure se com- € parer au canal de Sténon des vertébrés supérieurs. » On voit que les renseignements précis sur la structure histo- logique de ces glandes manquent absolument. Les dessins que donne M. Livon montrent aussi que ses procédés histologiques ont été insuffisants pour faire voir le caractère propre des cellules. L’épaisseur de la charpente conjonctive m'a paru aussi bien moins considérable que le dit M. Livon ; dans la plupart des cas, les cloisons conjonctives sont tellement minces entre les acini, que les cellules semblent adossées sur celles des acini contigus ; il n’en est rien pourtant, car on verra, à propos de la circulation, qu'il y a encore entre les acini de nombreuses lacunes sanguines. Quant aux cellules sécrétantes proprement dites, elles offrent le 28 LOUIS JOUBIN. même caractère que celles de la glande sublinguale, c’est-à-dire qu’on y trouve de grosses granulations en remplissant les deux tiers supérieurs, et en colorant en violet presque noir par l’héma- toxyline. Il y a une différence cependant au point de vue de la dimension des cellules; dans la glande sublinguale, les cellules sont courtes et larges; ici, au contraire, elles sont longues et effi- lées à leur base fixe. Par des dissociations au chlorure d’or, on voit ces cellules en forme de cornets très allongés. Un très gros noyau en occupe la partie inférieure, le protoplasma remonte le long des parois et y forme des espèces de réseaux autour des gra- nulations nombreuses et serrées qui remplissent le haut du cornet. L’analogie histologique avec les glandes salivaires des vertébrés supérieurs est certaine, comme le dit M. Livon ; mais il y a une grande différence cependant entre les acini de ces glandes dans les deux groupes. Chez les vertébrés, ce sont de petits culs-de-sae, renfermaut peu de cellules ; ici au contraire ce sont de longs culs- de-sac avec de très nombreuses cellules, et pourvus d'une large lu- mière se continuant dans celle du canal excréteur. Dans les glandes extra-bulbaires, les cellules sont extrêmement nettes et bien plus faciles à observer que dans les glandes abdo- minales. On verra plus loin à quoi est due cette différence. Chez celles qui nous occupent maintenant, on colore fort bien par l’hématoxyline les noyaux etle réseau protoplasmique ; l’éosine coloreles parois cellulaires. Sur les coupes passant transversalement par le haut des cellules, celles-ci prennent l’aspect d’un pavage régulier à intervalles rouges, le pourtour intérieur étant violet clair et le centre incolore ou contenant les granulations. L'histologie du canal excréteur de ces glandes n’a rien de plus à signaler que pour les glandes abdominales. RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 29 3° GLANDES INTRA-BULBAIRES DES DÉCAPODES. J'ai signalé chez les décapodes l'existence d’une glande impaire et médiane située sous la radula ; cette glande est intra-bulbaire et me paraît l’homolooue de la paire de glandes extra-bulbaires des octopodes ; on verra plusloin que l’'embryogénie confirme cette ma- nièére de voir. Sur des coupes faites dans le bulbe de petits décapodes, on peut se rendre compte de sa structure. La fixation parfaite est plus dif- ficile à obtenir que pour les autres glandes, parce que les tissus denses qui l’avoisinent s'opposent à la pénétration du réactif. C’est sur les jeuncs calmars de 6 à 7 centimètres, chez les sépioles et la Sepiola elegans que l’on arrive le plus facilement à avoir des coupes d'ensemble suffisantes. Il vaut mieux prendre, pour exa- miner seulement les détails cellulaires, des animaux adultes et extraire la glande avec le moins possible des tissus durs péri- phériques. On constate alors que les parties externes de la glande n’ont pas un contour net, mais pénètrent entre les fibres musculaires voisines, et forment un ensemble tout à fait complexe et indis- sécable. | La glande est formée également de cellules à grosses granu- lations offrant absolument les mêmes caractères histologiques que celles des glandes extra-bulbaires des octopodes. Il est tout à fait inutile de revenir sur cette description qui vient d’être faite. Je n'ai pas non plus constaté de différence appréciable entre les di- verses espèces de décapodes. 30 LOUIS JOUBIN. 4° GLANDE ABDOMINALE DES DÉCAPODES. a. Sepiola Rondeletii. — Cette paire de glandes est très res- treinte comme dimension chez les Sepioles, et elle est formée par un nombre peu considérable de culs-de-sac glandulaires très gros. Sur une coupe transversale on en trouve de 8 à 12 chez une sépiole de taille ordinaire. Ces culs-de-sac sont courts et très lar- gement ouverts les uns dans les autres. C'est dans cette espèce que l’on trouve les plus belles cellules salivaires de tous les céphalopodes que j'ai étudiés. Les meilleures préparations que j'en aie obtenues ont été faites par la méthode suivante : acide osmique 1 0/0, 10 minutes : lavages et dur- cissement par les alcools gradués; inclusion dans la paraffine, coloration après coupes par l’hématoxyline à l’eau et l’éosine. Le protoplasma des cellules est.coloré en lilas, les noyaux en violet intense parfaitement délimités ; les nucléoles sont noirs. Les produits de sécrétion de la glande prennent seuls l’éosine et sont colorés en rouge. — Les fibres conjonctives qui entourent les culs-de-sac glandulaires sont colorées en brun par l’acide osmique. La fig. 6, pl. 3, montre une coupe faite dans ces conditions. — On voit que les cellules sont extrêmement longues. La partie protoplasmique en occupe environ le tiers inférieur, tantôt plus, tantôt moins. Toute la partie supérieure de la cellule qui est évasée et calyciforme est remplie par le mucus sécrété sous forme de boules bien distinctes les unes des autres. Il y en a de 10 à 20 par cellule, et toutes ont à peu près la même dimension. Les parois des cellules, qui sont bien distinctes dans le tiers inférieur, deviennent de plus en plus minces en approchant de leur extrémité supérieure, et finissent par être très difficiles à apercevoir au sommet de la cellule. À ce niveau les boules de mucus sortent des cellules et se mêlent les unes aux autres. Elles perdent alors RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 31 cette forme sphérique et constituent une masse compacte qui occupe le centre de l’acinus et monte dans le canal excréteur commun de la glande. La paroi interne de la cellule glandulaire, dans sa partie supé- rieure, est tapissée par une mince couche de protoplasma qui s’'amincit à mesure que l’on s'éloigne du fond; dans la masse protoplasmique inférieure, on voit assez bien les boules de mucus encore enveloppées de protoplasma fibrillaire. Les noyaux des cellules sont gros, légèrement ovales, à grand axe longitudinal. [ls contiennent un gros nucléole central, un grand nombre de petites granulations qui, ainsi que le nu- cléole, se colorent très vivement par l’hématoxyline. Les noyaux sont en général situés à mi-hauteur du protoplasma. Sur des coupes transversales des culs-de-sac, on voit que les cellules ont un aspect polygonal, et que le noyau est situé contre une des parois. Sur la coupe d’une glande de sépiole, les cellules sont toutes semblables à ce que je viens de décrire ; ce sont bien franchement des cellules muqueuses. Mais on distingue très nettement un ou deux culs-de-sac où les cellules, tout en conservant le même aspect, sont un peu plus petites (fig. 6, pl. 3, c), et sécrètent un mucus également disposé en boules, mais qui contiennent une grande quantité de fines granulations, tout à fait semblables à celles des glandes séreuses. Ces corpuscules se colorent d’une facon moins intense que ceux des véritables glandes séreuses , etils sont ainsi plus petits. Il y a dans ces cellules un rapprochement à faire avec les cel- lules de Gannuzzi, au fond des culs-de-sac. Le tissu conjonctif qui développe les acini est extrêmement peu développé dans l'épaisseur de la glande ; à peine une petite lame, creusée çà et là de lacunes. Autour de Ja glande il est plus abon- dant, et on y voit les lacunes veineuses qui se rencontrent chez d’autres espèces. 32 LOUIS JOUBIN. b. Sepia oficinalis. Dans cette espèce, les glandes abdominales sont proportionnellement un peu plus considérables que chez la sé- piole. Elles occupent la même place et sont contenues dans du tissu conjonctif. Elles diffèrent de celles de la sépiole en ceque les culs-de- sac glandulaires sont plus nombreux et plus petits ; sur une coupe, au lieu d'en voir 8 ou 10, on en voit près de cent. Les cellules sécrétrices sont aussi plus petites, mais elles offrent les mêmes caractères que chez les sépioles. Ce sont encore des cellules calyciformes, à pro- longement inférieur filiforme et à moitié supérieure plus large et souvent rétrécie à l’ouverture en forme de goulot. Tandis que les cellules de la sépiole étaient très longues et de même dimension sur presque toute leur étendue, celles-ci au contraire sont rétrécies à leurs deux extrémités, surtout en bas, et renflées fortement dans leur tiers supérieur. On trouve une grande variété dans les formes de ces cellules, quoique toutes rentrent dans la description géné- rale précédente. Les fic. 7et8, pl. 3, donnent une idée de ces diffé- rents aspects. Les boules de menus sont aussi à contour moins net que chez la sépiole, et j'ai trouvé presque partout les granula- tions ; leur présence est la règle au lieu d’être l’exception. Les culs- de-sac étant plus petits, les orifices des cellules se touchent presque et arrivent souvent à obstruer la lumière. Enfin le tissu conjonctif, qui est fortement noirei par l'acide osmique, est bien plus abon- dant que chez la sépiole; ce sont de grandes fibres épaisses et enchevêtrées aux angles qui séparent les culs-de-sac les uns des autres. c. Rossiu macrosoma. Ce céphalopode n’est pas autre chose qu'une grosse sépiole ; quelques détails peu importants séparent seulement les deux genres. On trouve dans les glandes salivaires abdominales mélangés les caractères de la sépiole et de la sépia. Comme chez la première, les cellules sont longues, cylindriques, presque droites ; les culs-de-sac sont larges ; comme chez la sépia, ces acini sont nombreux et la plupart d’entre eux sont constitués par des cellules muqueuses à granulations. Quelques cnls-de-sac RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 33 seuls n’en présentent pas, et il m'a paru que c’étaient les plus voi- sins des canaux collecteurs. 9° GLANDE ABDOMINALE DES OCTOPODES. La structure de la glande est identique chez Octopus et Elédone. Les rapports anatomiques et circulatoires sont aussi les mêmes : ce qui sera dit de l’un des genres se rapporte à l’autre. Livon, parlant de la structure des 2 paires de glandes, dit qu’elles sont le type des glandes en grappe et que l’analogie est frappante entre la structure des glandes salivaires du poulpe et des animaux supérieurs. J’admets cette définition de glande en grappe pour les glandes bulbaires du poulpe ; mais elle est tout à fait inexacte si on l’applique aux glandes abdominales, On reconnaît en effet que cette glande est le type des glandes dites en tube. Pour se rendre compte de cette disposition en tubes, la méthode des coupes dans la paraffine est tout à fait insuffisante. Elle ne donne sur les préparations qu'une grande quantité de figures rondes ou ovales produites par la section des tubes dans tous les sens, etayant à peu près toutes les mêmes dimensions. La meil- leure méthode consiste à dissocier et à colorer tout à la fois la glande au moyen du chlorure d’or et de l’acide acétique. Par ce moyen on détruit tout le tissu conjonctif qui relie les tubes entre eux, et ceux-ci sont vivement colorés en rouge. En agitant la glande ainsi traitée dans de l’alcool à 30 %, on arrive à séparer les tubes qui, sous une lamelle, se disposent en arborisatiens très élégantes. On constate ainsi que à peu près dans toute leur étendue ces tubes ont le même diamètre ; les branches seules qui avoisinent le canal excréteur sont plus larges, et les extrémités dernières des branches sont plus étroites. Tout le reste est sensiblement égal. Ce qui frappe au premier abord, c'est la dichotomie parfaite selon laquelle les branches du tube glandulaire se divisent. En suivant ARCH. DE ZOOL, EXP, ET GÉN. — 2 SÉRIE. T. V bis. — supPL. 1887. — 3° Mém. 3 34 LOUIS JOUBIN. une branche quelconque en partant d'un bout central, on voit qu elle se divise bientôt en 2 branches d’éga! diamètre, puis celles- ci en 2 autres ; ainsi de suite jusqu’à la périphérie. Les divisions se font suivant des angles assez ouverts, de sorte que deux branches de même origine divergent de suite beaucoup (fig. 4, pl. 3). Cette structure de la glande la fait différer essentiellement de celles des vertébrés supérieurs, mais la rapproche au contraire, a ce qu’il me semble, de celles des mollusques gastéropodes ; chez plusieurs d’entre eux, chez la Fissurelle, par exemple, la glande est formée par des tubes ramifiés à peu près d’égal diamètre, et dont beaucoup sont bifurqués. La dichotomie y est moins nette, et sou- vent trois branches partent du même point, mais l'aspect de la glande est cependant très comparable. Je renvoie le lecteur, pour en juger, au mémoire de M. Boutan sur la Fissurelle (pl. xxt, fig. 3. Arch. de zool. expér. 2° série, vol. 3 bis). Tous ces tubes de la glande abdominale sont extrêmement en- tortillés et recourbés les uns sur les autres : c’est précisément ce qui cause l’impossibilité d’en reconnaitre la structure, si l'on veut les étudier tout d’abord sur des coupes. Les extrémités en cul-de- sac se trouvent tout aussi bien à la périphérie que noyées dans la profondeur de la glande. C’est même probablement par suite de telles coupes que la glande a paru être en grappe. Entre tous ces tubes entrelacés, Îes espaces sont comblés par des cellules étuilées munies d’un gros noyau. Elles sont plus ou moins abondantes suivant les points ; notamment vers le centre de la glande, on en trouve davantage. Structure du tube salivaire. Il est nécessaire, pour se rendre compte de la structure compli- quée du tube salivaire, d'employer plusieurs méthodes combinées. La première est celle du chlorure d'or qui vient d’être indiquée, excellente pour les dissociations. Ensuite on peut employer l’acide RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 55 osmique à 1%, en prenant des fragments peu considérables de la glande et en les traitant pendant 15 heures. Sur des fragments ainsi fixés et très fortement noircis, les coupes doivent être nécessaire- ment très fines : aussi pour les faire je me sers du microtane de Dumaige, avec lequel on obtient des séries de 11500 de millimètre d'épaisseur. On peut laisser ces coupes sans coloration nouvelle, mais aussi il est bon de faire agir l’hématoxyline non alcoolique. Avec ce réactif on obtient des résultats intéressants. Tantôt la partie protoplasmique des cellules est colorée seule, tantôt au contraire c’est la partie muqueuse qui prend un violet intense, tandis que le reste, soit par l’action de l'acide osmique, soit par contraste, prend une teinte vert jaunâtre. Ou reconnaît dès le premier examen sur les tubes glandulaires soit frais, soit traités par le chlorure d’or, que les cellules quile rem- plisseni sont dirigées obliquement vers l’orifice de sortie dutube;leur pointe est donc tournée vers le fond du cul-de-sac. Cette obli- quité est extrêmement prononcée. Ces cellules se touchent au cen- tre du cylindre, de sorte que celui-ci n’a qu’une lumière virtuelle, et le produit sécrété par le fond de la glande doit en passant com- primer les parois de toutes les autres cellules. Ces cellules sont calyciformes et ressemblent à celles des mêmes glandes de la Sé- piole, mais elles sont de dimensions beaucoup plus restreintes. La pénétration plus lente de l’acide osmique dans cette glande très compacte ne permet d’apercevoir le produit de sécrétion de ces cellules encore enfermé dedans que surles tubes périphériques ; ceux qui sont plus profonds ont eu le temps de se vider avant la fixation. Les cellules qui sont ainsi complètes montrent que chez l'Elé- done comme chez la Seiche la glande abdominale estessentiellement muqueuse. De grosses boules de mucus transparent parsemées de très fines granulations occupent les 2 tiers supérieurs, et sortent par l’ori- fice évasé de ces cellules calyciformes. Il arrive que dans certaines cellules le mucus est vivement coloré en violet par l’hématoxyline. 36 LOUIS JOUBIN. La présence de ce mucus dans les cellules où il a été fixé ne per- met pas de voir distinctement la partie protoplasmique ; mais dans d’autres où il a été expulsé, on voit que la plus grande partie de la cellule est occupée par un réseau formé de fibres nombreuses parallèles ou anastomosées, et partant du plasma dense occupant le fond de la cellule et qui contient le noyau. Il arrive ainsi que la masse de protoplasma où est renfermé le noyau se divise en fibres parallèles plus fortes que celles du réseau supérieur, de sorte que le noyau paraît suspendu au milieu d’une sorte de treillage con- tenu dans la paroi cellulaire. Le noyau est gros, arrondi, renferme un gros nucléole et plu- sieurs petits; il est entouré par une couche de protoplasma à prolongements denticulés. Sur des sections faites à travers la masse et qui coupent par conséquent souvent des tubes dans le sens longitudinal, il ne semble pas qu'il y ait de différence entre les cellules glandulaires. Elles sont identiques dans toute la longueur du tube; c’est encore une différence avec les vraies glandes en grappe où les cellules de l’acinus et de son tube excréteur ne se ressemblent pas. Le tube glandulaire est limité par une gaine de tissu conjonc- tif à fibres longitudinales formant une nappe bien continue avec des cellules à noyaux très clairsemées. On se rend compte de la présence de cette gaine lorsque dans les dissociations on arrive à enlever les cellules salivaires, Elle se colore bien par l’hématoxyline. Cette gaine conjonctive est entourée par une couche de fibres musculaires. Ces fibres, au premier abord, sur des coupes ou sur ? des fragments de glande frais observés au compresseur, paraissent sur les côtés des tubes comme une rangée de cellules aplaties, très régulières et pour la plupart dépourvues de noyau. Vu de cette façon, cela ressemble à un épithélium pavimenteux entourant la glande. Mais en faisant une observation plus attentive sur des glandes dissociées et coiorées au chlorure d’or, on voitque l’on a affaire non à unépithélium, mais à une couche de vraies fibres musculaires lisses. RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 37 Ces fibres sont en forme d’anneaux, elles sont parfaitement régu- lières, et leur ensemble peut être comparé à une série de bagues enfilées sur un mandrin cylindrique. Tous ces anneaux se touchent presque dans un trés petit intervalle, On en trouve sur les plus terminales des branches tubulaires, et aux points de bifurcation il m'a semblé qu'il restait un petit triangle qui en était dépourvu. (Fig. 5, pl. 3.) Ces anneaux musculaires se colorent vivement en violet par le chlorure d’or ; et comme leur saillie est assez considérable, on les voit fort bien à la surface des tubes glandulaires. Chacun d’eux est pourvu d’un gros noyau ovale, dont la place varie, de sorte que les anneaux dont le noyau est derrière le tube paraissent en être dépourvus. | Je n’ai malheureusement pas pu voir la terminaison des nerfs dans ces anneaux musculaires. J’ai reconnu la présence de ces fibres musculaires dans les 3 ou 4 dernières ramifications tubulaires ; mais jene puis dire s’ilyena dans les branches plus rapprochées du canal excréteur. Il reste un mot à dire sur la structure du canal excréteur des glandes salivaires des céphalopodes. M. Livon en a fait une étude très suffisante, que je rappellerai en quelques mots ; il en à vu l’origine par l’anastomose des acini ; la présence d’un épithélium cylindrique à grosses cellules. Il y a vu, dans les parois épaisses, à zones de tissu conjonctif et élas- tique : l’une longitudinale, importante, entourée d’une couche externe et d’une couche interne circulaire. Les fibres conjonc- tives longitudinales présentent appliquées contre elles des cellules plates à noyaux nets. Cette disposition constatée par M. Livon chez le poulpe se re- trouve chez tous les autres céphalopodes que j'ai examinés. Il m'a paru seulement que les cellules tapissant le conduit excréteur ne sont cylindriques que dans la glande ; dès que le canal en est sorti, 38 LOUIS JOUBIN. ce sont des cellules plates à gros noyau. Dans l'épaisseur de la lanoue, les diverses couches conjonctives sont dissociées et s’entre- mêlent aux couches conjonctives propres de cette langue, qui y sont si développées. L'épithélium du canal présente de nombreuses cellules à mucus. NoTE. — Ce mémoire élait complètement terminé et mes planches œravées depuis longtemps, lorsque j'ai eu connaissance, grâce à M. R. Blanchard, professeur agrégé à la Faculté de médecine, d’un mémoire publié récemment par M. A. Pilliet sur les glandes œso- phagiennes de l’Octopus vulgaris (1). — Je regrette vivement de n'avoir pas eu ce mémoire plus tôt sous les yeux: j aurais pu discuter quelques propositions plus à fond. M. Pilliet a constaté, comme Livon, que les cellules glandulaires contiennent du mucus : il évalue environ au 115 de la masse totale de la glande le tissu interstitiel. Cette proportion me semble très exagérée. La description qu'il donne des cellules de ce tissu inters- titiel est presque identique à la mienne, sauf pour ce qui est de la présence des capillaires, à l'existence desquels je ne crois pas, au moins en prenant la définition stricte du mot capillaire; je pense que ce sont de simples lacunes interstitielles. M. Pilliet a bien vu que ce n'était point une glande acineuse, mais une glande en tubes. — Il reconnait ? sortes de cellules dans les canaux sécréteurs, les unes claires, les autres foncées, ces dernières situées à la partie pro- fonde des tubes. — Enfin il trouve que certains des culs-de-sac, plus petits, sont tapissés de cellules polyédriques à contenu granuleux, sans lumière centrale ; ces cellules granuleuses sont en petit nombre et font bientôt place à des éléments allongés sans granulations. M. Pilliet pense que ce sont 1à ? stades différents de l'évolution d'une même cellule. — Il les compare enfin aux glandes de Brunner qu’a décrites Renaut dans le duodénum du chien. — Je ne crois pas qu'il y ait une distinction à faire entre les divers culs-de-sac. Je pense au contraire qu'ils ont tous la même structure et les mêmes dimen- sions. Je crois. que, en effet, c’est la partie profonde des tubes glan- dulaires qui sécrète le ferment spécial, mais aussi du mucus. Quant aux cellules figurées par M. Pilliet dans sa planche, avec des stries longitudinales, je crois que ce sont simplement celles dont le mucus a été expulsé, et où le réseau fibrillaire protoplasmique n’est plus masqué par lui ; il se colore fort bien, et ces réseaux sont très faciles à constater, mais je ne pense pas que les cellules où on le voit soient dans leur état physiologique, car la fixation des éléments semble avoir été très imparfaite. (1) A. Pilliet, Journal de l’Anatomie et de la Physiologie, PI. XIV, pages 1 à 3. RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 39 L'action chimique des produits des glandes salivaires a été prin- cipalement étudiée par M. Bourquelot dans un travail remarquable sur la digestion des céphalopodes. Je me bornerai, pour complé- ter l'ensemble de l'étude de ces organes, à exposer les résultats auxquels il est arrivé. C'est en faisant des infusions des glandes que l’on peut arriver à étudier l'action de leur sécrétion, car il ne faut pas songer à obtenir le liquide salivaire à l’état naturel. Voici les principales propriétés du liquide obtenu ; il est à remarquer qu'elles sont toutes négatives. Les glandes bulbaires du poulpe ne transforment pas l’amidon en sucre, et les glandes abdominales donnent un li- quide visqueux ne transformant pas davantage l’amidon en sucre. Chez laseiche, le produit des glandes abdominales est très visqueux (cela correspond à la grande quantité de mucus que j’y ai indiquée) et ne saccharifie pas l’amidon. La salive des céphalopodes n’a pas d'action sur les matières protéiques ; elle coagule rapidement le lait, peut-être par sa simple acidité. M. Bourquelot a trouvé seule- ment des traces de mucine chez le poulpe, pas du tout chez la seiche ; mais la salive contient quelque chose d’analogue à l’albu- mine. En résumé, les glandes salivaires ne sécrètent pas de liquide doué de propriétés digestives. Cette conclusion, des plus inattendues, me semble avoir besoin d’être de nouveau reprise. J’ai isolé, dans ce but, suivant les mé- thodes ordinaires, les ferments des deux glandes, et je me propose de refaire les principales réactions, notamment sur la fibrine et les diverses matières animales composant les crustacés et les mollus- ques acéphales dont se nourrissent les céphalopodes. Je puis dire que par la méthode ordinaire j'ai obtenu de 150 élédones environ 80 centigrammes du ferment de la glande abdominale et 10 centi- orammes du ferment de la glande buibaire da même nombre d’ani- maux. 40 LOUIS JOUBIN. EMBRYOGÉNIE DES GLANDES SALIVAIRES I. — DÉVELOPPEMENT DES GLANDES SALIVAIRES ABDOMINALES. 1° Décapodes-Loligo. — L'embryogénie des glandes salivaires, ou, plus exactement, de la paire de glandes abdominales, a été indiquée par Bobretzky dans un mémoire général sur l’em- bryogénie des céphalopodes. Son travail important, paru en 1877, étant écrit en langue russe, il m’a été malheureusement impos- sible d’en prendre connaïssance autrement que par la comparai- son des dessins avec les miens, et par l'analyse succincte qu’en a donnée Balfour dans son Traité général d'embryogénie. Ce sont là évidemment de détestables conditions de critique : aussi je me bornerai à indiquer, dans le cours de l’exposé que je ferai de mes recherches, les points où mes résultats concordent ou diffèrent de ce que j'ai pu juger du mémoire de Bobretzky par ses planches. — Parmi les dessins qui m'ont semblé le plus intéressants au point de vue des glandes saïivaires, je citerai notamment les n® 18,54, 57et 83. J'auraià y renvoyer le lecteur à plusieurs occasions. J’ai eu à Banyuls des pontes de divers céphalopodes, mais sur- tout de Loligo et de Sepiola, puis de Sepia elegans et d’Argonaute. À Roscoff, j'ai eu en grande abondance les œufs de Sepia officinalis que l’on rencontre dans l’herbier de Pempoull à tous les états de développement. Les pontes de ces animaux sont très faciles à élever dans les laboratoires, de sorte qu'il est possible de com- bler les lacunes que laissent entre eux les stades que l’on a ren- contrés. Les œufs de Loligo sont les plus faciles à observer, à cause de leur transparence et de la facilité avec laquelle on peut les con- pet. _ RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 41 J'ai divisé les formes embryonnaires des décapodes dont j'ai suivi le développement en un certain nombre de stades, comme l’a fait Kôlliker. Mais comme je n’avais pas à étudier les premières phases de la segmentation, de la formation du blastoderme, ce que Je con- sidère comme le 1‘ stade est le moment où apparaît la glande sali- vaire. J'aurai soin d'indiquer à quel numéro des & stades » de Kôlliker les divisions que j'ai établies correspondent. a. L’invagination buccale apparaît chez les embryons fort jeunes sur une aire peu proéminente, qui deviendra par la suite du dévelop- pement le bulbe et ses dépendances. C’est à peu près vers le 3° ou le 4° stade de Kôlliker que se fait cette apparition. b. Un peu plus tard, l’invagination, continuant à s enfoncer, forme un canal en cul-de-sac, l’œsophage, qui descend entre l’ecto- derme et la paroï du sac vitellin sur la face qui deviendra dorsale. À ce moment en effet, l'embryon est à plat sur le gros globe vitellin, et les faces dorsales et ventrales sont en quelque sorte sur le même plan, car le pôle occupé par l'embryon est assez aplati. c. Au stade suivant, correspondant au stade cing de Kôlliker (fig.119, B, du Traité de Balfour, édition française), embryon commence à faire saillie au-dessus du globe vitellin,et l’on peut nettement distinguer la face dorsale de la face ventrale. Dans le bulbe, le canal œsophagien est toujours simple chez Loligo, il s’est seulement un peu allongé. d. Le stade 6 de Kôlliker est marqué par l'apparition d’un léger enfoncement, ventral par rapport à l’œsophage : c’est à peu près ce qui correspond aux figures 17 et 18 du mémoire de Bobretzky, appartenant à Lolico. J'ai constaté le même stade chez la Sépiole et la Sepia, et j'ai peu de choses à en dire de plus que ce qui est montré par les figures de Bobretzky reproduites dans le traité d’embryogénie de Balfour. Il m'a paru seulement que les cellules occupant le fond du cul-de-sac gländulaire étaient plus grandes que les autres, et avaient dès ce jeune âge un aspect qui ne permet pas de les confondre avec celles de l’œsophage. C’est là le premier 4? LOUIS JOUBIN. rudiment des glandes salivaires, ou, plus exactement, du canal excréteur des glandes abdominales. Ce canal salivaire s'accroît rapidement et descend parallèlement à l’œsophage vers l'abdomen, en se tenant très près du sac vitellin. Entre lui et l’œsophage se trouve maintenant isolée une grosse papille contenant des cellules mésodermiques (a fig. 1,pl. 1) et recouverte par un épithélium assez élevé. Au-dessus de l’entréedu canal salivaire on voit une autre papille moins élevée (b même fig.) limitée en haut par une petite concavité (e même fig.). La petite papille est destinée à se réunir à la grande (a) et doit former la langue de l'adulte ; la petite cavité supérieure s’enfoncant formera la poche dont la paroi adossée à la langue deviendra la glande salivaire linguale, et la paroi opposée formera la mandibule cornée (bec ventral). Le fond du cul-de-sac salivaire est entouré parquelques grosses cellules qui sont le premier rudiment de la glande abdo- minale. Elles ne doivent point rester en ce point, et descendront verticalement sans changer de nature jusqu’à la rencontre de l’œæso: phage et même un peu plus loin. La bouche à ce stade est une simple perforation assez étroite (B) suivie par un assez long canal qui est destiné à s’élargir considé- rablement et dont les parois formeront les lèvres et leurs papilles qui précèdent le bulbe buccal. Celui-ci ne commence qu’au niveau de la petite invagination sublinguale (e fig. 1). Si l’on fait une coupe transversale du même embryon passant par la bouche (fig. 2, pl. 1), on constate qu’elle est limitée par unesorte de lèvre peu proé- minente, formant plutôt un bourrelet (a fig. 2). Au-dessous de cette région buccale se voit la lacune assez importante que l’on retrouve derrière le bulbe plus avancé et chez l’adulte. On peut remarquer qu'à ce stade l'œsophage en dessous de l’invagination radulaire est extrêmement rétréci et sur une coupe longitudinale (fig. 1) se ter- mine en pointe inférieurement. Si l’on étudie un embryonde Sepiola, on constate à peu prèsles mêmes caractères que chez Loligo. Il est à remarquer cependant RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 43 . qu'à ce stade le bulbe buccal correspondant à la fig. 1 (pl. 1) est plus court et plus large, et que les épithéliums sont beaucoup plus épais. L’œsophage, lui aussi, se termine en pointe inférieu- rement. e. Si l’on passe maintenant à l'étude d’un embryon plus âgé cor- respondant à peu près au stade 7 de Kôlliker, on constate que le canal salivaire s’est allongé sur la ligne médiane jusqu’à venir toucher l’œsophage contre lequelil s'applique (voir fig. 5) peu à peu. Un mince plan de cellules l’en sépare encore ici, comme on peut le voir sur la coupe transversale faite au niveau de l’inva- gination de laradula (fig. 3, pl. 1). Le canal salivaire estence point fort aplati et appliqué contre le sac vitellin. Nous verrons un peu plus tard des organes venir s’intercaler entre lui et ce sac. Le bulbe buccal à ce niveau est entouré par une zone de tissu fibreux qui entoure à la fois l’œsophage et le canal salivaire, etla masse de cellules qui les enveloppe. Cescellulessont destinées à former divers éléments glandulaires et musculaires. À ce stade l’œsophage est encore large et bien ouvert ; on y voit l'apparition de 2 petites papilles de chaque côté de la radula ; ce sont elles qui en grandissant vont former les deux grandes lèvres glandulaires que l’on trouve dans la partie bulbaire de l’œso- phage adulte. C’estdans la gouttière du fond de ces deux lèvres que se trouvent tous les organes impairs, radula, glandes salivaires, ete. L’épithélium qui est situé de l’autre côté de la cavité œso- phagienne (b fig. 3) est destiné à sécréter la mandibule cornée dorsale. Le canal salivaire est entouré par une mince couche de tissu conjonctif ; ses cellules ne présentent rien de bien remar- quable, elles sont à peu près cubiques et se ressemblent toutes. Les autres parties de ce bulle à ce stade n’ont pas consi- dérablement changé. Elles se sont un peu accentuées seulement. f. L’embryon est parvenuà un stade qui est intermédiaire aux stades 7 et 8 de Külliker et représenté à peu près par le dessin de Balfour, Traité d’embryogénie, édition française (fig. 120, B), un 44 LOUIS JOUBIN. peu plus avancé cependant. La figure 4, pl. 1, donne l'aspect du bulbe buccal au niveau de la langue, au point où s'est faite l’inva- gination primitive du canal salivaire. On voit que le progrès à surtout consisté en ce que le canal salivaire, au lieu d’une large invagination, a pris l'aspect d’un vrai canal étroit, tel qu’il doit rester définitivement. La papille linguale, qui était peu développée, s'est accentuée et le canal en occupe le milieu. Les deux lèvres de l’œso- phage (a a’ fig. 4) ont aussi beauconp augmenté, limitant 2 culs- de-sac latéraux (bb’). Cette disposition de l’œsophage persiste jusqu à l’état adulte sans presque changer. Enfin l’épithélium dorsal de l’œsophage esttrès haut et va bientôt commencer à sécréter la matière cornée de la mandibule dorsale. Quant à la mandibule ventrale, elle ne peut se voir dans cette coupe, étant située plus haut vers l’orifice buccal. D'ailleurs elle ne se forme que plus tard, et ne s'accentue que dans uu stade plus éloigné. La masse buccale forme à ce stade un ensemble compact, ovoïde, percé d’un petit orifice au sommet, quiest la bouche. A la partie inférieure on ne voit encore sortir ni l’œsophage, ni le ca— nal salivaire, et le bulbe est isolé ; ce n’est qu’au stade suivant que ces invaginations auront dépassé le niveau du bulbe. Outre les productions épithéliales destinées à tapisser l’œsophage, la langue et les glandes salivaires, le bulbe est formé par une grande quantité de cellules qui lui donnent sa forme arrondie et englobent les invaginations dont je viens de parler. Jusqu'à présent ces cel- lules étaient restées toutes semblables les unes aux autres et for- maient un tout compact ; à partir de ce stade, elles s'organisent en diverses productions ; des deux côtés de la masse bulbaire elles s’allongent et forment deux croissants qui embrassent les canaux digestifs, Ce sont les masses musculaires destinées à mouvoir les mandibules. En dessous d'elles on voit deux autres croissants qui présentent l’aspect de cellules conjonctives et sont plus ou moins fibreuses. La masse de cellules qui forme la langue prend aussi un aspect fibreux qui va en s’accentuant jusque chez l’adulte. Au- RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 45 dessous de cette langue, les cellules nombreuses se transforme- rontles unes en la glande salivaire impaire, correspondant aux glandes bulbaires des octopodes, les autres en cellules nerveuses, d’autres en tissu conjonclif. Ces différenciations ne se feront d’ail- leurs que plus tard. Autour de la masse buccale on reconnaît deux grandes lacunes, probablement veineuses ({l fig. 4), et quisont, je pense, l’origine du sinus péribulbaire. Au-dessus du bulbe il est simple, et en y arri- vant ilse divise en deux, et descend à travers le cerveau jusqu'à la cavité abdominale. g. Nous arrivons maintenant à un stade où les organes de plus en plus différenciés commencent à s’isoler les uns des autres. Le jeune animal commence à prendre un air de céphalopode qu'il n'avait pas jusqu'à présent. C’est à peu près le stade 9 de Külliker. La paire de glandes salivaires abdominales a évolué avec une grande rapi- dité aussitôt que son canal a eu dépassé le cerveau qui a été tra- versé par lui parallèlement à l’œsophage. La glande elle-même existe dès à présent ; mais, avant de l'étudier, il faut suivre la marche descendante de son canal, Sur une coupe transversale pratiquée après la traversée du sys- tème nerveux (fig. 6, pl. 1), on voit que l’æsophage, qui jusque-là était séparé du canal salivaire par une masse compacte de tissu, vient s’accoler à ce canalet y devient tout à fait adhérent. Au premier abord il semble que le gros canal doit être l’œsophage, et le petit le conduit salivaire. [1 n’en est rien cependant ; l’œsophage est primitivement très étroit, et c’est à peine si quelques cellules en limitent le contour. Le canal salivaire est très gros, est tapissé par de très grandes cellules, et refoule en arrière l’æsophage. Il est intéressant de remarquer que des glandes salivaires, qui ne sont qu’un organe accessoire, se développent plus rapidement et surtout avec plus d’ampleur que l'organe essentiel, le tube digestif. D’ail- leurs ce fait n’est pas à remarquer dans les glandes salivaires seu- lement, mais aussi en divers autres organes. On remarquera, par 46 LOUIS JOUBIN. exemple, que les otocystes sont énormes et développés de très bonne heure, avant même que le cerveau soit distinct anatomiquement, de même aussi on voit se produire, sur des rudiments de bras à peine indiqués, deux ou trois ventouses énormes et déjà bien per- fectionnées. On peut remarquer que, dans la fig. 6, on voitse continuer la gaine conjonctive du bulbe autour de l’æœsophage et du canal salivaire. Dans cette glande se voient diverses cellules probable- ment conjonctives, qui en occupent les angles ; autour de l’œso- phage il y a aussi d’autres cellules situées contre deux lacunes vei- neuses, qui sont probablement l’origine des vaisseaux du bulbe. La section du canalsalivaire à ce niveau est ovale, car on appro- che du point où vase faire une division en deux moitiés. Un peu plus haut la section est circulaire. Autour de l’œsophage et du canal salivaire on voit une très mince gaine propre à chacun de ses deux conduits. La gaine générale enveloppe le tout, C’est en ce point, après la bifurcation, que l'on commence à trouver la glande salivaire proprementdite; mais, avant d’en com- mencer l'étude, il faut revenir à un détail intéressant relatif à la traversée du cerveau par le canal salivaire. Surun embryon de 2ou 3 millimètres de long, comme celui que nous étudions en cemoment, le: passage dans l'étroit espace compris entre les ganglions est naturellement très court: aussi n’est-ce que sur un espace d’en” viron 1 ou 2? centièmes de millimètre que l’on peut apercevoir la disposition représentée par la fig. 5, pl. 1. Les cellules qui jus- qu'à présent avaient tapissé régulièrement le canal salivaire ont énormément proliféré et se sont disposées sans ordre dans toute l’é- tendue de la gaine. Ce n’est donc plus à ce niveau un canal, mais un cordon plein et compact, de forme irrégulièrement arron- die. On voit en outre qu'en ce point déjà le canal salivaire s’est subitement très renflé et a pris une grande avance sur l’œso- phage. L'œsophage, dans ce passage à travers le cerveau, a fait aussi la RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 47 même chose ; ses cellules se sont beaucoup maltipliées et sont arri- vées à boucher la lumière de ce canal. Il y a là quelque chose de comparable à ce que l’on constate dans le développement des pois- sons, chez lesquels l’æsophage est bouché età l’état de cordon plein pendant une grande partie de la vie embryonnaire. Il est aussi à remarquer que la gaine générale qui enveloppe l’œsophage et le canal salivaire est extrêmement serrée et forte- ment appliquée contre ces organes. Il n’y a pas place à l’intérieur pour ces cellules dont nous avons constaté l’existence un peu plus bas (fig. 6). Sur cette coupe on remarque un canal(a) qui est pro- bablement l'aorte, mais que dans les coupes suivantes je n’ai pas retrouvé ; plus bas, au-dessous du niveau des glandes salivaires, on le retrouve. Dans les angles de la gaine on voit quelques lacunes, puis le tout est enfermé dans de grosses cellules encore non diffé- renciées qui formeront les nombreux organes de cetterégion etsur- tout le système nerveux central. Le sac vitellin est lui-même très étroit dans cette région ; il traverse avec l'œsophage et le canal salivaire le système nerveux. Reprenons maintenant le développement de la glande abdominale proprement dite, telle que l'indique la fig. 6, pl. 1. Le gros canal c est en effet le premier indice de la glande ; on peut même prévoir qu'il se divisera en deux moitiés semblables, à cause de sa forme allongée. C’est ce qui arrive en effet à une très faible distance ; la fig. 7 montre une coupe faite 2 centièmes de millimètre plus bas ; la division en 2 est opérée (cc fig. 7), et l’on a deux gros canaux excréteurs enfermés chacun dans une gaine conjonctive épaisse. Presque immédiatement ces canaux bourgeonnent des acini, et sur cette coupe on en distingue 3 (aa’)nettement séparés du canal, et deux autres en train de bourgeonner (b L’). Le tout est contenu dans la gaine conjonctive générale ; mais les acini bourgeonnés sur un même canal excréteur ont une gaine particulière. Les deux glandes sont donc déjà séparées. Plus tard elles le seront encore davantage et s’écarteront l’une de l’autre. L’œsophage reste très 48 LOUIS JOUBIN. réduit à ce stade ; on le voit refoulé en arrière de cette paire de glandes déjà volumineuses, entouré de quelques petites cellules ; il est compris dans la gaine conjonctive des glandes salivaires, et est très voisin de la peau du dos de l’embryon. Une coupe un peu plus bas donne l’aspect des glandes dans leur partie la mieux formée. Leurs gaines sont déjà plus fortes et bien distinctes, on voit qu’elles sont sur le point de se séparer. Les cellules qui constituent ces glandes ne sont pas différentes les unes des autres et ne présentent pas encore le caractère de l'adulte. Ce sont des cellules cubiques ou un peu allongées, pré- sentant une grande quantité de protoplasma granuleux et un très gros noyau; sur certains culs-de-sac glandalaires, on distingue faci- lement, lorsque la fixation a été bonne, les principaux traits de la karyokynèse. Presque toutes ces cellules sont en voie de division, beaucoup présentent deux nucléoles que l’hématoxylinc rend très apparents (fig. 4, pl. 2). En suivant encore la série des coupes pendant deux ou trois centièmes de millimètre, on arrive à dépasser les glandes salivaires. On voit alors l’œsophage seul, accolé à côté de l’aorte sur la ligne médiane dorsale ; puis, bientôt, cet œsophage s'ouvre dans le sac vitellin (fig. 9, pl. L, a). | Sur certaines préparations bien fixées, on peut constater que le sac vitellin présente un aspect tout à fait spécial (fig. 10, pl. 1). Il est bordé par de grandes cellules (a), qui semblent sans paroïs, et pourvues de fins prolongements dirigés vers l’intérieur de ce sac. Ces cellules sont accolées sans interposition de membrane contre les cellules ordinaires (b) de l'embryon. Entre les gaines du vitellus et ces cellules du bord se trouve un réseau de fils extrêmement fins, qui sont probablement protoplasmiques, à voir la coloration qu'ils prennent. Les grosses cellules du bord ont l’air d’avoir émigré du vitellus vers la périphérie, et les cellules de l'embryon sont, à ce que je crois avoir constaté, des résultats de la division des cellules du bord du sac vitellin. Dans l’épaisseur du vitellus, on RÉCHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 4° constate aussi de grosses granulations qui ne sont certainement pas graisseuses, comme la plupart des autres, mais bien proto- plasmiques. h. La suite du développement des glandes salivaires abdomi- nales ne présente rien de bien nouveau à indiquer. Cuez la Seiche Kôlliker les figure comme très écartées l’une de l’autre et ayant chacune, au stade suivant, un long canal excréteur, dont la réunion forme le canal commun. Chez Loliso, les choses différent en ce sens que les deux glandes restent très voisines l’une de l’autre, et le canal excréteur commun seulest bien développé. Le tissu conjonctif qui enveloppe les deux glandes devient assez abondant et se creuse | des lacunes veineuses qui collectent le sang qui les a traversées. Les cellules prennent à peu près au moment de l’éclosion leur caractère de glandes muqueuses, et la suite de leur développement n’est plus qu’une affaire d'accroissement en volume et en nombre des acini. Tel est le développement de la paire de glandes salivaires abdo minales de Loliso. Chez Sepia et Sepiola, les choses se passent identiquement de lainème facon, et il est tout à fait inutile de reve- nir sur les particularités insignifiantes qui les font différer, et qu sont peut-être dues simplement à des modes de préparation ou de fixation non pareils. 2° Octopodes. — J'ai eu un assez grand nombre d'œufs d’'Argo- nauta Argo à Banyuls, et j'ai pu me procurer aussi quelques œufs d'Octopus vulgaris. Sur ces deux types, dont je n’ai pu observer qu'un petit nombre de phases de développement et que je n'ai pas eus à l’état vivant, j'ai pu constater ceperdant quelques faits intéressants. Il est à remarquer d’abord, d’une facon générale, que le type du développement des octopodes ressemble beaucoup à celui des décapodes. À part la dimension des œufs, qui, comme on le sait, sont très petits chez les octopodes, les grands traits se correspon- ARCH. DEZOOL. EXP, ET GÉN. — 2 SÉRIE, —T. V. bis. — suPPL, 1887. — 3° jlém. 4 50 LOUIS JOUBIN. dent presque exactement. J’ai placé en regard l’une de l'autre deux coupes du bulbe d'Argonaute et de Loligo, le 2e étant un peu moins avancé (fig. 12, pl. 2) ; on voit que la comparaison est facile à établir. Jereviendrai, à propos des autres glandes salivaires, sur la struc- ture comparée du bulbe. Je veux signaler seulement maintenant la ressemblance entre la position du canal excréteur de la paire abdominale de glandes salivaires ; la langue, comme on le voit, est aussi formée des mêmes parties, les rapports de l’œsophage et du canal salivaire sont aussi identiques. Le canal excréteur se forme entre deux papilles dont la réunion constitue la langue, puis il descend contre la paroi du sac vitellin, et ne tarde pas à se bifurquer aussitôt à sa sortie du bulbe. Il accompagne alors l’œsophage sous forme de deux conduits grêles, que sur des coupes on peut confondre facilement avec un vais- seau. C’est, plus tard, la partie située au-dessus de la bifurcation qui s’allonge le plus. Chacune des deux branches aboutit à la glande qui est formée de culs-de-sac d’abord, puis se divise ensuite. De bonne heure le nombre des culs-de-sac est plus grand que chez les décapodes et sont plus petits ; à un stade où le sac vitellin extérieur est à lui seul presque aussi gros que toute la tête de l’embryon, chaque glande est pourvue de 20 ou 30 culs-de-sac ; leur ensemble occupe près de la moitié de la cavité abdominale, le reste étant rempli par le sac vitellin, le foie et la glande du noir à ce niveau. Le calibre de l'œsophage est beaucoup plus considérable que chez les décapodes, et il m'a semblé qu'il ne s’ouvrait pas dans le sac vitellin, mais continuait jusqu à l'estomac sans solution de continuité. Les embryons que j'ai pu examiner n'étaient pas suffisamment bien fixés pour qu'il me fût possible de voir la formation des fibres musculaires quientourent, comme on l’a vu, les culs-de-sac glandu= laires de l'adulte. RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 51 En somme, il n’y a aucune différence importante dans le déve- loppement des glandes abdominales des céphalopodes. II. — DÉVELOPPEMENT DE LA GLANDE SALIVAIRE SUBLIN@UALE. Chez les décapodes comme chez les octopodes, la glande sali- vaire sublinguale, décrite chez le poulpe par Livon, se développe par une invagination produite de bonne heure. Dès les premiers stades, chez Loligo (fig. 1, pl. 1), alors que ce bulbe est formé seulement par un canal bifurqué, on voit au-dessus de la papille ventrale destinée à former la moitié de la langue, une petite inva- gination (ec fig. 1, pl. 1), très peu accentuée, sous forme d’un très large pli. Elle a été dessinée par Bobretzky (fig. 85, 57, 58); mais elle n’est désignée par aucune lettre, et j'ignore si son texte en fait mention. C’est la première ébauche du cul-de-sac situé entre la langue etla mandibule ventrale, et c’est elle qui délimitera la langue de ce côté. Cette invagination s'accentue peu à peu, et suit un trajet paral- lèle au canal excréteur de la glande abdominale, qui, lui, est plus avancé que l’invagination sublinguale. À un stade beaucoup plus avancé (fig. 2, pl. 2, c), l’invagination est devenue profonde ; la lan- gue P commence à faire une saillie volumineuse dans laquelle on voit le canal de la glande salivaire abdominale. La face ventrale L est déjà pourvue d’un haut épithélium à longues cellules : c’est la pre- mière indication de la glande sublinguale. De l’autre côté se voit l’épithélium destiné à former la mandibule cornée inférieure. La suite du développement de la -glande sublinguale est extrèmement simple. Les cellules sont d’abord sur une seule lame qui tapisse la surface de la langue ; elles sont en forme de calice, et ont à peu près le même diamètre dans toute leur hauteur ; le tiers inférieur est occupé par une masse de protoplasma, remon- tant un peu sur la surface interne du reste de la cellule. Un gros 52 LOUIS JOUBIN. noyau rond y est contenu. À ce stade, on voit la cavité de la cel- lule remplie par une matière transparente qui se colore faiblement par l’hématoxyline ou le carmin. Entre les cellules on voit de dis- tance en distance d’autres cellules, plus petites, ovales, probable- ment conjonctives, qui semblent s’être glissées entre les premières. Ce sont, je pense, les premiers rudiments de la charpente conjonc- tive de la glande. Il m'a paru en effet que c'était autour de ces cellules intercalaires que se formaient les premiers plis de lépithé- lium glandulaire. Ces plis se forment seulement après l’éclosion chez Loligo et Sepiola. Chez Octopus et Argonaute, les embryons avancés que j’ai étudiés n’en posséda‘ent pas encore (fig. 1, pl. 2). Pendant tout le développement et même au moment de l’éclo- sion, les cellules de la glande sublinguale sont tout à fait dépour- vues des granulations caractéristiques de cette glande adulte. Je n’en ai pas trouvé chez Loliso, tant qu’il est resté du vitellus dans l'embryon. Le développement de cette glande est beaucoup plus tardif que celui des autres glandes salivaires. Elle ne prend l'aspect d une vraie glande active que longtemps après l’Cclosion. III. — DÉVELOPPEMENT DE LA PAIRE DE GLANDES SALIVAIRES EXTRA-BULBAIRES DES OCTOPODES , INTRA-BULBAIRES DES DÉCAPODES. On a vu, au chapitre relatif à la structure et à la position des glandes salivaires, que chez les octopodes il y avait une paire vo- lumineuse de ces glandes appliquées contre le bulbe buccal, et que les canaux excréteurs de ces glandes venaient s’ouvrir dans l’æso- phage des deux côtés de la gouttière limitée par les deux grands lobes latéraux. J’ai décrit sur les décapodes une glande impaire que j'ai homologuée à la paire de glandes extra-bulbaires des octo- podes. On verra que cette homologation est non seulement indi- RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 55 quée par l'anatomie, mais prouvée par l'embryogénie. Il suffit en effet de constater que partant du même point elles suivent un déve- loppement parallèle, et contractent avec lesorganes voisins des rap- ports semblables. Elles sont pour cela morphologiquement compa- rables, Chez les octopodes où ces glandes sont bien développées, on voit de bonne heure leur apparition dans le bulbe. A un stade qui corres- pond à peu près à celni dans lequel une coupe du bulbe a été repré- sentée, fis. 4, pl. 1, on trouve chez le jeune argonaute quelque chose de tout à fait semblable comme disposition des replis épithéliaux, Les coupes suivantes montrent inférieurement l’invagination de la radula, puis ensuite une aatre invagination formant un tube court, qui ne tarde pas à se diviser en deux parties symétriques, formant deux culs-de-sac divergeant latéralement vers l'extérieur du bulbe. Sur des embryons plus avancés on retrouve ces mêmes culs-de-sac: mais leurs 2 ouvertures ne se font plus dans le même point, elles sont maintenant séparées et symétriques. Elles se sont agrandies et ont de grandes cellules d'aspect glandulaire. Une coupe longitu- dinale du bulbe d’Argonauta à ce stade a été représentée (fig. 1, pl. 2). Le canal excréteur est déjà formé (a); la glande est assez vo- lumineuse (b); elle commence à faire saillie sur les côtés du bulbe, comme on peut s’en apercevoir sur des coupes transversales. Sur cette coupe longitudinale on voit bien les rapports du canal excré- teur de ces glandes avec le sac radulaire. La paire de glandes, pendant qu’elle est encore contenue dans l'épaisseur du bulbe, est assez près de la ligne médiane, et vient jusqu'à toucher le canal des glandes abdominales. Mais lorsque, par la suite du développe- ment, elles se sont dégagées du bulbe, leur canal excréteur seul se tronve assez près de celui des glandes abdominales; les glandes elles-mêmes en sonttout à fait éloignées. J'ai constaté sur un embryon plus âgé l'émergence des glandes salivaires à l'extérieur du bulbe et leurs premières divisions ; , mais je n’ai pu étudier les détails d'histogénie, faute d’une con- 54 LOUIS JOUBIN. servation et surtout d’une fixation suffisante des embryons. Chez Loligo et surtout chez Sépiole, on constate que la glande salivaire impaire et intra-bulbaire se ferme à l’entrée de l’æsophage par une petite invagination (a fig. 2, pl. 2). Dans cette figure, elle est à peine perceptible; mais sur des embryons plus avancés dans leur développement, la glande est mieux caractérisée. C’est donc immédiatement au-dessous du sac radulaire que se forme cette glande au fond d’une petite dépression qui s’accroît et qui prend des rapports assez étroits avecla poche radulaire, comme on peut le voir chez Sepia elegans adulte (fig. 7, pl. 2, a). La glande setrouve aussisur la ligne médiane. Chez Sepiaelegans, on a vuqu’elles’ouvre dans l’œsophage par plusieurs orifices; je n’ai pas pu constater si ces orifices se formaient primitivement (et dans ce cas la glande aurait une origine complexe), ou bien s’ils se formaient ultérieure- ment. Quoi qu’il en soit, cela ne change en rien les rapports de la glande. | Cette glande se développe tard, et c'est à peine si au moment de l’éclosion on en trouve des traces ; on la voit à peine chez les Se- pioles naissantes ; il estvrai qu’à ce moment cesanimaux ont encore une grande quantité de vitellus interne. Telles sont les principales circonstances du développement des glandes salivaires des céphalopodes ; on voit combien sont sem— blables leur processus embryonnaire chezles octopodes et chez les décapodes. Toutes les parties se correspondent parfaitement et se développent de la même manière. NOTE SUR L’EMBRYOGÉNIE DE LA LANGUE. En suivant le cours de l’embryogénie des glandes salivaires, on à pu voir que le canal excréteur des glandes abdominales, d’abord très large, se rétrécit peu à peu, ou plutôt semble se rétrécir par suite de l'accroissement des parties voisines. Ce canal RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 55 s’enfonce entre deux petites éminences qui, limitées bientôt par une invagination supérieure (cavité sous-linguale et de la mandi- bule inférieure) et par une autre invagination inférieure (radula), forment une sorte de bouton arrondi qui se renfle à sa partie supé- rieure à mesure que le développement avance. Ce bouton est d’abord rempli par les nombreuses cellules indifférentes qui consti- tuent le mésoderme ; mais bientôt tout autour du canal salivaire central ces cellules se transforment en tissu fibreux conjonctif et contenant quelques fibres musculaires. Peu à peu ces fibres mus- culaires augmentent de nombre vers la périphérie de la langue ; la plupart sont par paquets longitudinaux, d’autres transversales, L’épithélium ventral, situé contre le bec, forme la glande sublin- ouale ; l’épithélium qui est dans le sac radulaire contribue à la formation de cet organe et de ses annexes ; il reste celui de la partie renflée et terminale de la langue. Dans l'adulte, cet épithélium est ondulé, plissé en difté- rents sens au point de masquer l'orifice du canal salivaire et de prendre l'aspect d’un chou-fleur. Dans l'embryon avancé, il est uni- forme et ne semble pas modifié. Maisau moment de la naissance il s’y fait une modification intéressante. Sur de jeunes sépioles écloses d’elles-mêmes dans mes aquariums de Banyuls, j’ai constaté que dès cette époque il y avait des terminaisons nerveuses volumineuses. — La figure 3, pl. 2, montre la coupe de la pointe de la langue de ce jeune animal. L’épithélium (e) repose sur un tissu lâche, dans le- quel on aperçoit de grosses cellules étoilées dont les branches se rejoionent et qui sont destinées à former du tissu conjonctif. Entre les cellules de l’épithélium se sont pour ainsi dire glissées de grosses cellules en forme de poire, dont la queue est attachée à un filet nerveux traversant le tissu conjonctif sous-jacent. Les renfle- ments de ces cellules sont entourés de granules très fins, et au- dessus des cellules tactiles s’étend une cuticule bosselée, les recou- vrant toutes. L’épithélium ordinaire de la langue se trouve refoulé inférieurement entre les pointes des cellules tactiles. 56 LOUIS JOUBIN. On obtient assez facilement des préparations avec les filaments nerveux en traitant par le chlorure d’or et l’acide formique. On constate que ces terminaisons nerveuses ne se trouvent que sur le plateau terminal de la langue. Plus tard, lorsque les replis ont donné à cet organe l’aspect d'un chou-fleur, il est beaucoup plus difficile de voir ces terminaisons nerveuses, Une note publiée dans les comptes-rendus de l’Académie des Sciences résume les principaux résultats de ce mémoire. (Comptes- rendus de l’Académie, tome OV, n° 3, 18 juillet 188%.) On connaît depuis longtemps l'existence de deux paires de glandes salivaires chez les céphalopodes octopodes : l’une située dans la cavité abdominale, l’autre contre le bulbe buccal, cette der- nière manquant chez les décapodes. J'ai c2pendant constaté chez eux sa présence; mais elle est fusionnée en une seule glande médiane et impaire située sous l’œsophage et intimement mêlée à des paquets musculaires. Cette glande est bien, par sa structure et la position de son organe excréteur, l'homologue des glandes bul- baires des octopodes. M. Livon a reconnu chez le poulpe (Octopus vulgaris) l'existence d’une glande tapissant une des faces de la langue ; il dit ne pas avoir pu trouver le canal excréteur. J’ai retrouvé cette glande chez tous les céphalopodes que j'ai examinés. Elle est constituée par une sorte de nappe d’acini peu contournés, s’ouvrant tous dans l’espace séparant la langue de la mandibule, et qui fait partie de la cavité buccale. Cette disposition même explique pourquoi M. Livon n'a pu voir de canal excréteur. Chez les octopodes (Octopus, Elédone, Argonauta), les glandes salivaires sont situées dans des lacunes sanguines considérables, 58 LOUIS JOUBIN. où elles baignent largement. Le sang leur arrive par des artères très grêles, partant symétriquement de la première division de l’aorte par un tronc conique de chaque côté ; il se divise presque immédiatement en deux branches: la supérieure traverse la tête et se rend à la paire de glandes bulbaires ; l’inférieure descend verticalement de la paire abdominale. Le sang qu’elles apportent en très faible quantité se répand entre les éléments glandulaires, gagne la périphérie, et tombe dans le grand sinus par une multitude de pores qui ne sont autre chose que les intervalles des acini super- ficiels, ou des tubes glandulaires dans le cas de la glande abdo- minale. Chez les décapodes (Sepia, Loligo, Sepiola, Rossia), les glan- des ne baiïgnent plus dans le sinus sanguin : aussi le sang quiles a traversées est-il recueilli par réseau veineux bien endigué qui va rejoindre la grande veine. Les artères sont aussi plus consi- dérables que chez les octopodes ; mais leur disposition est moins constante. Si l’on fait des coupes sur les glandes prises sur les animaux vivants et préparées avecunlrès grand soin par l’acide osmique, on reconnaît que chez tous les Céphalopodes la glande sublinguale, la glandeiïmpaire sous-æsophagienne des décapodes et la paireextra- bulbaire des octopodes sont construites sur le même type. Ce sont des grappes d’acini formés de cellules cylindriques assez courtes, remplies dans leur tiers inférieur par du protoplasma, avec un gros noyau. Le protoplasma se continue sous forme d’un réseau dans le tiers moyen ; le reste est rempli par desgranulations assez grosses se colorant fortement. Elles ressemblent beaucoup à : des cellules muqueuses de vertébrés. Au contraire, la paire de glandes abdominales est formée par de grandes cellules coniques dont la partie étroite inférieure contient le protoplasma, et les deux tiers supérieurs sontremplis par de grosses boules de mucus quine se colore pas par les mêmes réactifs que le tiers inférieur. Ces larges cellules calyciformes laissent échapper RECHERCHES SUR LA MORPHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES. 59 LA par leur large ouverture les boules de mucus qui se fusionnent en une masse uniforme dans les canaux excréteurs. Il y a là aussi une analogie remarquable avec les cellules muqueuses des vertébrés supérieurs. Telle est la structure fondamentale des éléments salivaires; mais leur groupement diffère beaucoup, si on l’étudie dans ces deux grandes divisions des céphalopodes. Chez les décapodes la glande abdominale est -petite et formée d’acini comme dans les autres glandes; mais chez les octopodes elle est très grosse, et c’est une glande en tube que l’on peut arri- ver à dissocier par l’action du chlorure d’or. On constate ainsi qu'elle est formée par un tube indéfiniment dichotomique, à peu près d’égal diamètre dans toute son étendue, sauf aux dernières branches qui sont plus petites. En outre, les branches tubulaires terminales sont revêtues parune couche unique de fibres musculaires en forme d’anneaux très réguliers et bien délimités, dont l’action est évidemment de refouler le mucus vers le canal excréteur. Tous les tubes qui constituent cette glande sont contournés et entortillés les uns dans les autres de facon à former un réseau inex- tricable dont les vides sont remplis par des fibres conjonctives, par de grosses cellules étoilées et par des espaces où circule le sang. Tout cela forme un corps compact que la méthode des coupes seule ne permet pas de débrouiller. Enfin, j'ai étudié l'embryogénie de ces glandes chez divers dé- capodes et chez l’argonaute. J’ai suivi le processus de la formation du canal salivaire depuis sa première invagination jusqu’à la cons- titution des glandes ; en même temps j'ai suivi la formation de la langue, des papilles sensitives qui la terminent, de ses rapports avec la glande sublinguale qui se forme aux dépens d'une in- vagination dont l’autre face forme le bec ventral. L'étude de l’embryogénie de l’argonaute m'a montré que les glandes salivaires bulbaires, que j’ai vu se former, sont les 60 LOUIS JOUBIN. homologues de la glande impaire intra-bulbaire des décapodes. Cette étude m'a amené à comparer le développement du bulbe buccal des octopodes et des décapodes, dont les formes embryon- naires, assez diverses en apparence, peuvent cependant se ramener au même type. EXPLICATION DES PLANCHES LETTRES COMMUNES À TOUTES LES PLANCHES. À Lèvre. B Bouche. Œ Œsophage, C Canal salivaire de la glande abdominale. G Glande abdominale. L Glande sublinguale. P Langue. S Sac vilellin. R Radula. PLANCHE I. EMBRYOGÉNIE DE LA GLANDE SALIVAIRE ABDOMINALE DE LOLIGO. l'1&, 1. — Coupe sagittale de la région bulbaire d’un très jeune embryon, correspondant à peu près au stade 7 de Külliker, quoique un peu plus jeune : — gross. 150 diam. a. Papille située entre l’æœsophage et le canal salivaire, destinée, à devenir une partie de la langue. b. Papille plus petite qui deviendra la ?° moitié de la langue. c, Invagination qui deviendra d’un côté la glande salivaire sub- linguale, de l’autre l’épithélium sécréteur de la mandibule ventrale. d. Cellules du fond du cul-de-sac, premier rudiment de la glande abdominale. F1G. ?, — Coupe transversale du même embryon que fig. {, passant par la bouche : — gross. 150 diam. a a. Lèvre en bourrelet. l. Lacune tapissée par un épithélium. F16. 3. — Coupe transversale d’un stade un peu plusavancé, pas- sant au niveau de l'invagination radulaire : — gros. 150 diam. b. Epithélium qui produirala mandibule cornée dorsale. p. Papilles destinées à former les 2? lobes œsophagiens. 62 EXPLICATION DES PLANCHES. F1&. 4. — Coupe transversale passant par la région buccale d'un embryon plus avancé que le précédent. Il correspond à un stade un peu plus âgé que le n° 8 de Külliker. Le sac vitellin est encore plus gros que la totalité du corps. Cette coupe montre les ? lobes qui limitent latéralement l’œsophage et le niveau de l'invagination du canal salivaire : — gross. 150 diam. a a. Les ? lobes de la gouttière œsophagienne. : b b’. Les ? culs-de-sac latéraux de l’œsophage. e. Epithélium dorsal de l’œsophage qui sécrétera la mandibule dorsale en partie. L l’. Lacunes péribulbaires. m m'.Muscles bulbaires. o. Peau du dos. F1G. 5. — Même embryon en coupe transversale au niveau de la traversée du cerveau ; le canal salivaire n’est plus un épithélium dis- posé autour de la lumière, mais un gros cordon plein: — gross. 310 diam. a. Aorte. l 1. Lacunes. g. Gaine générale. FIG. 6. — Coupe d’un embryon au stade 9 un peu au-dessous de la région bulbaire, montrant l’œsophage très petit, et le canal salivaire très gros : — gross. 310 diam. g. Gaine conjonctive propre de l’œsophage. h. Gaine conjonctive du canal salivaire. |. Lacune. m. m. Amas cellulaire. o. Gaine conjonctive générale. ; Fig. 7. — Coupe transversale du même embryon un peu plus bas ; le canal salivaire s’est bifurqué ; on voit les premiers culs-de-sae, le haut est très près du dos : — gross. 310 diam. a a a. Acini déjà formés. b b’. Acini en train de bourgeonner. c c. Les ? moitiés du canal salivaire. | l’. Lacunes. p. Peau du dos. FIG. 8. — Coupe en pleine glande qui est divisée en ? lobes : — gross. 310 diam. c. Gaine commune. g g. Gaine conjonctive propre à chaque glande. l’. Lacunes. 0. Point où va se faire la séparation des ? glandes: EXPLICATION DES PLANCHES. 63 F1G. 9. — Coupe transversale sous le niveau des glandes sali- vaires, montrant l’ouverture de l’æœsophage dans le sac vitellin : — gross. 310 diam. a. Ouverture de l’œsophage dans le sac vitellin. v. Aorte. F1G. 10. — Fond du sac vitellin, montrant autour du sac une zone de grosses cellules à gros noyaux, sans paroi, avec prolongements fibrillaires : — gross. 660 diam. a. Grandes cellules du pourtour du sac. b. Cellules de l'embryon. r. Réseau de filaments. PLANCHE II. EMBRYOGÉNIE DE LOLIGO ET ARGONAUTE, CIRCULATION INTERSTITIELLE DES GLANDES SALIVAIRES. F1G. 1. — Coupe longitudinale sagittale d’un embryon d'Argonaute assez avancé; placé à côté de la figure ? pour les comparer : — gross. 180 diam. a. Canal excréteur de la glande extra-bulbaire. b. La glande extra-bulbaire avant sa sortie du bulbe. d d’. Replis autour desquelsse développent les deux mandibules cornées. F1G. 2. — Coupe sagittale d’un embryon de Loligo, un peu moins âgé que celle précédente d’Argonaute : — gross. 120 diam. a. Première trace de l’invagination d’où sortira la glande intra- bulbaire médiane. d d’. Invaginations qui formeront les glandes sécrétrices des mandibules cornées. . p. Glande de la plume. ; L Lacune sanguine. m. Pointe de la langue. Fi@. 3. — Extrémité de la langue de Loligo prise sur un embryon de même âge que celui de la fig. 2 : — gross. 660 diam. e. Epithélium du côté de la radula. a. Grosses cellules conjonctives. b. Cellules nerveuses. c. Cuticule bosselée. n. Nerf aboutissant aux cellules. F1G: 4. — Un cul-de-sac glandulaire de la glande abdominale de Loligo : — gross. 950 diam. environ. 64 EXPLICATION DES PLANCHES. F1G. 5. — Coupe de la région linguale d'une jeune élédone ayant environ 4 centimètres de long : — gross. 90. aa. Cavité buccale comprise entre le bec et lalangue. m. Masse musculaire formant la charpente de la langue. n. Portion centrale fibreuse et un peu musculaire, entourant le canal excréteur des glandes abdominales. b. Matière cornée du bec. e. Epithélium sécrétant le bec, et né du même épithélium qui a formé la glande sublinguale. qg. Glande sublinguale, coupe transversale montrant ses nom- breux orifices dans la cavité buccale a. h h. Replis latéraux du bec corné. o. Fibres musculaires de la mandibule inférieure. F1G. 6. — Coupe d'un cul-de-sac de la glande sublinguale chez Elédone moschata. a. Paroi de la cellule salivaire. b. Noyau. c. Protoplasma granuleux. d. Amas de grosses granulations remplissant la moitié supé- rieure de la cellule. g. Gaine conjonctive. h. Grosses cellules conjonctives. ) F1G 7. — Coupe sagittale du bulbe buccal de Sepia elesans pour montrer les rapports des divers organes compris entre les mandi- bules. a. Poche salivaire de la glande intra-bulbaire. b. Plancher ventral de l’æœsophage. c. Sac radulaire supérieur. d. Poulie cartilagineuse sur laquelle-glisse la radula. e. Sac radulaire inférieur. f. Poche ventrale entre la langue et la mandibule inférieure. g. Ganglions nerveux. h. Renflement œsophagien. m. Muscles bulbaires. n. Glande salivaire intra-bulbaire. o. Orifices excréteurs de la glande intra-bulbaire. r. Réservoir salivaire. F1G. 8. — Coupe de la glande abdominale injectée d’élédone : — cross. 100. a a. Petits réservoirs formés par la réunion de quelques espaces irter-aciniens. EXPLICATION DES PLANCHES. 65 b. Espaces circulatoires entre les acini glandulaires. c. Origine des canaux excréteurs. d. Culs-de-sac glandulaires. 0 0. Orifices des espaces sanguins dans le sinus abdominal. FIG. 9. — Coupe d'une glande abdominale de Sepia injectée: — gross. 100. R a. Réservoir du hile. b. Espaces veineuxinter-aciniens. g. Gaine conjonctive externe de la glande. m. Origines des canaux excréteurs. v. Veines superficielles. PLANCHE III. ANATOMIE ET HISTOLOGIE. Fi1G. 1. — Figure montrant l’ensemble du bulbe buccal d’une Elé- done vue du côté dorsal. Le cerveau et le cartilage céphalique ont été supprimés. — Grandeur naturelle. O. Aorte primitive. a a’. Les deux branches primitives de l’aorte. b b’. Tronc commun très court des artères salivaires. c c’. Artère salivaire bulbaire. d d’. Artère salivaire abdominale. FIG. 2. — Artères des glandes salivaires abdominales de Sepia officinalis. — Grossissement : ? diam. La glande droite est un peu rejetée obliquement pour faire voir sa facette accolée contre l’œso- phage. O. Aorte. a. Are branche allant à la glande gauche. b. Tronc commun se divisant en : b’, qui va à la glande gauche; b”, qui va à la glande droite et fournit 2? branches dont les rameaux À, 2, 3, 4, vont à la facette interne de la glande droite. c. 3° Artère allant à la glande gauche. 0’ 0”. Les deux branches primitives de l’aorte. m’. Artère bulbaire gauche. g’. Artère gauche de la paroi de la cavité abdominale. d. 4° Branche artérielle allant à la glande gauche. e. »° id. m. Tronc artériel bulbaire droit. ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2 SÉRIE. — T. V bis. — suppz 4887. — 3e Mem. 5 66 EXPLICATION DES PLANCHES. p. Origine de l’artère fournissant aux bras. g. Tronc de la cavitéabdominale du côté droit. f. Artère salivaire du côté droit. F1G. 3. — Circulation veineuse des glandes salivaires abdominales de Sepia ofticinalis. — Gross. ? fois environ. a a’. Réservoir veineux du hile où se rassemblent les veines superficielles. b b’. Veines partant du réservoir glandulaire. cc’. Veines ramenant le sang de la paroi de la cavité abdomi- nale. d. Veine accessoire de la glande salivaire droite. e. Veine formée par la réunion des deux veines abdominales c c’. v. Grande veine. FiG. 4. — Un fragment de glande salivaire abdominale d’élédone traité par le chlorure d'or, pour montrer la dissociation des tubes bifurqués à leur extrémité : — gross. 150. Fi1G. 5. — Un cul-de-sac du tube salivaire de la glande abdominale d’élédone. F1G. 6. — Coupe dans une glande salivaire abdominale de sépiole passant par la cloison de séparation de deux culs-de-sac. a. Tissu conjonctif. b. Cellules muqueuses. c. Cellules muqueuses et granuleuses. F1G. 7. — Coupe dans la glande abdominale de Sepia officinalis montrant les cellules plus rétrécies à leur ouverture qu'à leur partie moyenne. FIG. 8 — Coupe de glande abdominale de Sepia officinalis mon- trant une autre forme de cellules en cône allongé. Poitiers. — Typographie Oudin. the MS RAP le) A — No mA # Ÿ .“4à To We LE, (®. 8 S (® Æ 4 £ : A BPHLAL OPODES {Gla 4 P NT (EE bol Exp ° et Génl°; PTYARE QE RAR A (1—- > CAT, ne PTIT TO ee 2e LC») DT TES NE Ro LAS Nr et; y EX Qz— A LS _ SR DORE TETE LES SR PA ES 1res.) & LV fe! CRHEMALOPODES.. LAS RE , Lee AN L LA En qe LA LD PUVE Re, Cl + SE Li, PAREIL g, « on TE 3 re ” j' =; L'LUTCUT SC Ée PA LOPODES Glandes, salivaires. 4 02 NE "1 À 45 ; * % | ? pc Le Ca! 7e ns | ae" 2 “{ T- Lek \ #1 Ne: CONTRIBUTION A L'ÉTUDEF DÉSYCLIONIDES PAR EmiILE TOPSENT INTRODUCTION. Les Eponges perforantes trouvent sur les côtes calcaires du Cal- vados les conditions les plus favorables à leur existence. Là, pas une pierre, à la grève comme au large, pas une coquille, de celles qu’elles ont coutume d'attaquer, qui ne porte la marque de leur puissance dévastatrice. Au lieu de disposer leurs spicules, comme les autres Eponges sili- ceuses, en une solide charpente squelettique, au lieu de s’en cou- vrir d’une cuirasse épaisse et résistante, les jeunes Cliones deman- dent soutien et protection à tous ces corps calcaires organiques ou inorganiques. Par un procédé qui échappe, jusqu'à présent, à notre observation, leur corps d’une mollesse extrême s’y creuse un abri, et, en croissant, s’y ramifie de mille manières, ne conservant avec l'extérieur que quelques points de communication indispensables à sa nutrition. Des phénomènes biologiques aussi curieux portaient à penser que l’anatomie de ces Spongiaires offrirait d’intéressantes particu- larités. Déjà un ouvrage publié récemment à l'étranger (1) conte- (1) Voyez dans l'historique l’année 1883. _ARCH, | DE Z00L, EXP. ET GÉN. — 29 SÉRIE, — T. V bis, supp, 1887. — 4e Mém. 1. : ÉMILE TOPSENT. nait des indications nouvelles qu’il importait d'examiner et de com- pléter au besoin. Stimulé par ces considérations, nous nous sommes proposé le but suivant : étudier en détail l'anatomie de quelques éponges perfo- rantes, la comparer à celle d’éponges siliceuses libres pourconnaître comment elle s’harmonise avec une biologie spéciale, et chercher la place que doitoccuper parmiles Silicispongesla famille des Clionides. Ces recherches ont été poursuivies au Laboratoire mari-” time de Luc, dont une autorisation bienveillante nous a permis de mettre les ressources à profit. Les conseils dont nous ont honoré les directeurs de la Station, nos savants maîtres, MM. les Professeurs Y. Delage et Joyeux-Laffuie, et les encouragements que nous a prodiænés M. Morière, doyen de la Faculté des Sciences de Caen, nous ont pénétré de la plus profonde reconnaissance. Le plan que nous avons adopté pour consigner ici nos observa- tions correspond à l’énoncé même donné plus haut de la tâche que nous nous étions prescrite. Le présent travail est donc divisé en trois parties : : La première partie, consacrée aux éponges perforantes, se sub- divise en trois chapitres. Le premier contient l’étude anatomique et histologique des Cliones qui vivent dans nos parages et qui, heu- reusement, setrouvent représenter les types les plus répandus dans les différentes mers. N'ayant pas encore eu la chance d'obtenir des embryons dont la fixation aurait peut-être donné une solution à la question de savoir comment le calcaire est aîtaqué, nous expo- sons dans le second chapitre, avec quelques notions sur la physiolo- gie de ces éponges, et d’après ce que nous avons pu observer sur l'adulte, la discussion des moyens mis en œuvre dans l'acte de la perforation. Enfin l’on conviendra, en lisant l’histoire des Eponges perforantes, qu une révision de la famille des Clionides était devenue nécessaire ; cette révision fait l’ob jet du troisième chapitre et nous conduit à dresser le tableau des genres et des espèces que l’on pa- rait pouvoir scientifiquement admettre. Ov CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 3 Nous réservons la deuxième partie pour l’étude des Renierinae, une famille d’éponges siliceuses non perforantes dont quelques genres sont représentés à Luc par de nombreuses espèces. Nous pensons avoir réussi à distinguer les divers ordres d’éléments cel- lulaires de ces éponges et à marquer le rôle de chacun d’eux. En outre, en essayant de constater entre les genres en question d’autres différences que celles qu’on observe dans la disposition des spicules, nous avons été amené à faire quelques recherches sur le dévelop- pement de leurs embryonseet à opérer certains remaniements dans la classification. Un résumé qui termine cette seconde partie aidera à saisir l’ensemble des résultats acquis. La troisième partie établit la comparaison entre Renicrinaëé et Clionidae et détermine les affinités de ces dernières. Enfin, comme la faune des Spongiaires de Luc est constituée presque exclusivement par des $ilicisponges et qu’en traitant la deuxième partie et la troisième nous avons dû parler de la plupart de celles qu'on recueille dans la région, il nous a semblé opportun d'ajouter en appendice à ce travail un aperçu de cette faunule qui pourrait être utile par les divers renseignements qu'il contient : désignation des véritables caractères de plusieurs éponges qui n’a- vaient été vues qu’une ou deux fois et en mauvais état ; description de quelques espèces nouvelles ; essai sur la distribution bathymé- trique des espèces sur la côte du Calvados ; indications sur l’époque de reproduction de bon nombre d’éponges ; et comparaison de la faune de Luc avec celle des îles Anglo-Normandes montrant l’in- térêt qu’il y aurait à multiplier les recherches faunistiques. Historique. Les Cliones vivantes ont occupé tant de zoologistes qu’aborder de nouveau leur étude pouvait paraître téméraire. Pourtant, sauf quelques exceptions, l'apport de chaque auteur a été si faible, et les indications éparses sont tellement vagues, qu'il restait, comme on : 4 ÉMILE TOPSENT. le verra, beaucoup à faire pour que la description de ces êtres fût à la hauteur des connaissances actuelles de Spongologie. L'histoire de l'étude des Eponges perforantes serait longue à exposer. Heureusement une notice bibliographique écrite par M. P. Fischer en 1868 nous permet de la résumer brièvement jusqu’à cette époque. Nous devrons toutefois réparer quelques omis- sions de cette notice et faire ressortir certains points importants pour faciliter l'intelligence des pages qui suivront. C’est en 1826 qu'un auteur anglais, R.-E, Grant, fit connaître la première éponge perforante dans un travail intitulé : Notice of a new zoophyte (Cliona celata) from the Firth of Forth (1). Bien qu’une erreur, causée sans doute par la présence de parasites sur deux des spécimens examinés, ait conduit Grant à penser qu’à cet être nouveau appartenaient de très petits poiypes, on sent, en lisant la description qu'il en donne et qui est plus parfaite que toutes celles publiées ultérieurement, qu'il incline à le considérer comme un spongiaire : pouitant deux observations l’obligent à faire du genre Cliona un intermédiaire entre les Alcyons et les Eponges. Grant avait remarqué la contractilité générale du sarcode, les changements de forme des papilles, la disposition des œufs, etc., mais il pensait que la Clione ne faisait que remplir des cavi- tés préexistantes. En 1832, Ehrenberg émet des doutes à ce sujet, et, dans sa fa- mille des Halcyonina (Schwamm-Corallen) (2), la Cliona celata f- gure avec cette mention : Ostreas perforans. An perforatas occupans ? Ce n’est que beaucoup plus tard que cette question sera élucidée. J. Fleming (3) et de Blainville (4) indiquent seulement la place que leur paraît devoir occuper la Clione. (1) Edinburgh philos. Journal, t. I, 1826, et Ann. Sc. Nat. lre série, t. X 1827. (2) Beiträge zur physiologischen Kenntniss der Corallenthiere…., Abhandl. der kôünigl. Akad. der Wissenschaften, Berlin, 1832, p. 286. (3) Hist. of british animals, 1828. (4) Manuel d’Actinologie et de Zoophytologie, 1834. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 5) En 1838, G. Johnston (1) compose la famille des A/cyoni- dulæ des deux genres Alcyonidium et Cliona, mais il avoue avoir vainement cherché les polypes de la Cliona celata. La même année, F. Dujardin (2) résume dans une phrase inci- dente son opinion sur l'être en question : « .... cette singulière Spongiaire occupant, dans des pierres calcaires, des trous qu elle n'a point creusés, mais qui sont dus à une Sabelle..….. ». Il ajoute y avoir vu des spicules et des globules amiboïdes. Désormais la Cliona celata Gr. sera considérée comme une éponge. En 1839 seulement, D. Nardo, en Italie, publie pour la pre- mière fois ses observations sur les éponges perforantes. Dans sa note Supra un nuovo genere di Spugne, le quali perforano le pietre ed igusci marini (3), il annonce en avoir trouvé quatre espèces dans l’Adriatique. Mais, fort inutilement, se prévalant de l’erreur de Grant en ce qui concerne l'existence de polypes, il abandonne le nom de Cliona et donne celui de Vioa au genre pourtant si clairement décrit par l’auteur anglais. Cela entraînera par la suite de légères confusions, car, malgré la priorité de la dénomi- nation choisie par Grant, plusieurs auteurs adopteront celle proposée par Nardo. La ponte et la fixation des germes ont été suivies par l’auteur italien. La note de Nardo, présentée d’abord à l’Athénée de Venise, fut lue l'année suivante au Congrès scientifique de Pise, et un extrait traduit en français en fut imprimé dans la Revue zoologique par la Société Cuviérienne (1840, p. 27, 28). En même temps, G.-L. Duvernoy, ignorant les publications an- (1) A history of the british Zoophytes. | (2) Ann. Sc. Nat. 2e série, t. X, 1838. Observations sur les Eponges, et en parti- eulier sur la Spongille ou éponge d'eau douce, p. 5. (3) Annali delle Scienze del Regno Lombardo-Veneto, t. IX. Venezia, 1839. p-. 221-226. 6 ÉMILE TOPSENT. térieures, communique à l’Académie des Sciences (1) sa découverte à Dieppe « d’une espèce d’éponge (Spongia terebrans) qui se loge dans la coquille de l’huître à pied de cheval en creusant des canaux dans l'épaisseur des valves de cette coquille » ; puis, dans une note additionnelle, il reconnaît la nature siliceuse des spicules qu'il avait cru calcaites.et cite les travaux de Grant et de Nardo. De nouveau, la Cliona celata est décrite en 1841 par A. Lere- boullet (2). Les détails diffèrent un peu de ceux fournis par Duvernoy, à cause des fréquentes variations de l’aspect général de l'éponge. D.-G. Bianconi fait, en 1841 également (3), l’histoire des épon- ges perforantes connues et ajoute quelques remarques. D’après lui, il n’est permis de répondre que par une hypothèse à la question de savoir si la Vioa perfore elle-même. En 1842, Johnston, convaincu cette fois que Grant a été in- duit en erreur par un parasite, considère la Cliona celata comme un véritable spongiaire qu’il fait entrer dans son genre Aali- chondria (4). En 1846, la Revue Zoologique insère une note de H. Miche- lin (5) contenant la description de trois Vioa. l’une, trouvée par Michelin sur des Placuna sella et présentée au Congrès scientifique de Milan en 1844, fut examinée par une commission au nom de aquelle Nardo fitun rapport (6) où il appela Vioa Michelin l’es- (1) Comptes rendus de l’Académie des Sciences, 1840, t. XI, p. 683-686. (2) L'Institut, t. IX, 1841. Sur une espèce d’éponge perforante qui occupe l'épaisseur de V Huître comestible, p. 131. (3) Nuovi Annali delle Scienze naturali, Anno III, t. VI. Bologna, 1841. — Sopra alcuni Zoofiti descritti sotto à nomi di Cliona celata \Grant), Vioa (Nardo) e Spongia terebrans (Duvernoy). Estratto ed Osservazioni, p. 455-469. (4) A history of british Sponges and Lithophytes. Edinburgh, 1842, p. 125- 131. (5) Note sur différentes espèces du genre Vioa (famille des Spongiaires), p. 56-61. (6) Atti della sesta Riunione degli Scien. Ital. tenuta in Milano, 1844, p. 372- 498, et Annali delle Scienze del Regno Lombardo-Veneto, vol. XIV, 1845, Vi- cenza, p. 103-105. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 2 pèce reconnue nouvelle et où il ajouta des idées générales sur les Vioa, reprochant à Johnston de ne pas avoir soupçonné que /ali- chondria celata soit une éponge perforante, réfutant l'opinion émise par Dujardin queles galeries des Vioa sont creusées par des Annélides, et proposant pour la Spongia terebrans de Duvernoy la désignation de Vioa Dujurdini, si toutefois c’est une espèce dis- tincte de celles déjà décrites. Une autre, perforant les Placuna pla- centa, fut dédiée à Nardo (V. Nardina) par Michelin qui l'avait aussi découverte. La troisième était fossile. Malheureusement, pas _plus que les espèces précédemment établies par Nardo, Vioa Mi- chelini et V. Nardina ne pourront pas être conservées : elles ontété créées sur la considération de caractères sans valeur, et ce qu’en ont dit les auteurs ne suffit pas pour les faire reconnaître. Pour ce dernier motif, on ne sait ce que pouvait être cette Vioa typica dont Nardo dit encore quelques mots en 1847 (1). J.-E. Gray en 1848 (2) ne distingue que deux espèces de Cliones qu’il range dans ses Æalichondriæe. C. hystrix, qui n’a jamais été décrite, doit être mise à l'écart. Avec l’année 1849 nous arrivons au naturaliste qui a, sans contredit, le plus contribué à faire connaître les Cliones des ditfé- rentes mers. Dans son premier mémoire (3), Alb. Hancock reprend l'étude de la biolosie de ces Eponges, admire leur puissance des- trucirice, examine la forme lobée et ramifice qu’affectent leurs galeries aussi bien dans les pierres et les coraux que dans les coquilles, et remarque que les parois de ces galeries sont toujours chagrinées, la ponctuation pouvant varier avec les espèces, mais restant comme un indice qui permet de reconnaître l’origine d’excavations fossiles. Puis il essaieed’expliquer le phénomène de (1) Prospetto della fauna marina volgare del veneto estuario. Venezia, 1847. (2) British Museum Catalogues. List of british Sponces, 1848. — N'ayant pu me procurer cet ouvrage, j'emprunte cette indication à M. Fischer. (3) Annals and Magazine of natural history, 2° série, t. III, 1849. On the eæca vating porers of certain sponges belonging to the genus Cliona; with ‘descrip- tions of several ner species and an allied generic form, p. 321-348. 8 ÉMILE TOPSENT. SES la perforation : iln’a pas pu découvrir d'acide et croit à une simple action mécanique, la contractilité énergique de l'éponge devant s'employer à buriner le calcaire à l’aide de corps cristallins de deux sortes, parfaitement inattaquables par l'acide nitrique, dont sa surface est abondamment pourvue. Enfin Hancock passe en revue 24 espèces du g. Cliona dont 23 ont été découvertes par lui, et décrit deux espèces d’un genre nouveau (7’hoosa) qui se dis- tingue du précédent par l'absence de spicules et par l’existence d’une croûte superficielle de corps noduleux cristallins, siliceux. A ce travail John Morris fit aussitôt quelques critiques (1) : Hancock semble avoir ignoré les essais écrits sur le même sujet en Italie par Nardo, en France par Michelin ; et les deux Vioa dont parle ce dernier auteur paraissent identiques à deux des espèces que Hancock vient d'établir : la Vioa Nardina Mich. est la Cliona Fryeri Hanc., toutes deux vivant dans la Placuna pla- centa ; la Vioa Michelini Nard. est la Cliona spinosa Hanc., toutes deux vivant dans la Placuna sella. La réponse à ces observations ne se fit pas attendre (2). Hancock, en s’excusant de n’avoir pas connu les travaux précités, affirme n'avoir eu nullement la prétention de découvrir la faculté dont jouissent les Cliones de perforer les objets calcaires, car il avait vu plusieurs savants (entre autres Duvernoy avec sa Spongia terebrans) mettre avant lui ce fait en lumière. Il revendique pour les éponges perforantes le nom de Cliona que leur avait donné Grant : Nardo n'avait aucune raison pour le remplacer, puisqu’il semble admettre que son genre Vioa est identique au genre Cliona de Grant. Enfin, pour défendre les deux espèces que Morris désirerait sup- primer, il ajoute, avec raison, Si nous jugeons bien, qu’on ne saurait reconnaître les deux espèces signalées par Michelin aux (1) Ann. and Mag. nat. hist., 2e série, t. IV, 1849. Observations on M. Han- ccok’s paper on the excavating Sponges, p. 239-242. (2) Ann. and Mag. nat. hist., 2e série, t. IV, 1849. Observations on M. Morris's paper on the excavating Sponges (Letter to M. Richard Taylor.). HR RE CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 9 descriptions ni aux dessins qui les concernent : les caractères des spicules ne sont pas donnés et, sans eux, il est impossible de se former une opinion définitive. John Hoggs, en 1851 (1), parle incidemment des éponges per- forantes et se montre peu au courant des progrès de la science, car il insinue que les Cliones, qui perforent par un procédé encore inconnu, ne sont peut-être pas de vraies éponges, comme en font foi les écrits de Grant, Johnston, de Blainville, etc. En 1856 (2), l’Académie des Sciences de Philadelphie reçoit du DJ. Leidy une communication touchant une Clione abon- dante sur les côtes de l'Etat de New-Jersey, mais l’auteur ne peut dire si cette éponge est distincte de celles décrites en Europe, et ses indications sont trop peu précises pour qu’on réussisse à la déterminer aprèslui:les spicules dela Clione de Leidy sont en épin- gle ; plusieurs des espèces de Hancock n’ont pasd’autre spiculation. N. Lieberkühn trouve à Helgoland en 1859 (3), sur 1Ostrea edulis, une éponge perforante qu’il pense être la Cliona celata de Grant. Le parenchyme, coloré en jaune, contient les mêmes élé- ments cellulaires que celui des Spongilles. On le voit, jusqu’à présent, la C/iona celata, les vingt-trois Cliones de Hancock et ses deux Thoosa constituent seules, à pro- prement parler, la famille des Clionides. Les recherches faunis- tiques d’O. Schmidt vont y ajouter plusieurs représentants sufh- samment caractérisés. Dès 1862 (4), l’exploration de l’Adriatique révèle l’existence dans cette mer de quatre Vioa nouvelles: VW. viridis, V. Grant, V. Hancocci et V. Johnstoni. (1) Ann. and Mag. nat. hist., 2e série, &. VII, 1851. On D' Nardo’s classifice- tion of the Spongiæ, p. 192. (2) Proceedings Acad. nat. Sciences of Philadelphia, 1856, t. VIII, n° V, p. 162. (3) Arch. für Anatomie, Physiologie uud wissenschaftliche Medicin. Leipzig, 1359. (4) Die Spongien des Adriatischen Meeres. Leipzig, 1862, p. 77. 10 ÉMILE TOPSENT. En 1864 (1), la Vioa (Cliona) celata y est aussi rencontrée. Enfin en 1868 (2) et 1870 (3), la Vioa Johnstoni est enrichie de deux variétés, dont la dernière décrite diffère tellement du type qu'on doit en faire, comme le propose M. Stuart O. Ridley, une espèce distincte dédiée à Schmidt. Les Eponges perforantes continuant d’attirer l’attention des spongologistes, plusieurs publications fournissent durant ces quel- ques années de nouveaux documents à leur histoire. Duchassaing et Michelotti ont recueilli cinq éponges perforantes dans la mer Caraïbe (4). Trois rentrent, pour eux, dans le g. Vioa, mais sont méconnaissables ; il est regrettable que ces naturalistes, au lieu de chercher à identifier ces Cliones à celles décrites avec tant de soin dans le mémoire de Hancock qu'ils citent pourtant, les aient comparées aux espèces douteuses de Michelin. Les deux autres sont placées dans un nouveau genre, g. Euryphylle, pour cette raison insignifiante qu’elles perforent des coraux. La sagacité de l’illustre auteur de la Monographie des Hponges d'Angleterre a été singulièrement mise en défaut en tout ce qui concerne les Eponges perforantes, et on est étonné de l’opinià- treté avec laquelle il soutient des conclusions de tout point con- traires à celles de Hancock. Les dix pages qu'il consacre à l’'Hymeniacidon celatus (5) renferment la réfutation absolue des données scientifiques minutieusement préparées par ses prédéces- seurs. Pour lui, la Clicena celata n’est qu’un simple Æymeniacidon, qui n’a de remarquable que son aptitude à élire domicile dans les canaux dont certaines Annélides ont coutume de perforer les pierres calcaires et les coquilles. (1) Supplement der Spongien des Adriat. Meeres. Leipzig, 1864, p. 40. (2) Die Spongien der Kïüiste von Algier. Id. 1868, p. 27. (3) Grundzüge einer Spongien-Fauna des Atlantischen Gebietes. Id. 1870, p. 5. (4) Spongiaires de la mer Caraïbe, par Duchassaing de Fonbressin et Giovanni Michelotti. Natuurk. Verhandi. Holland. Maat. der Wetenschappen te Haarlem, t. XXI, 1864. (5) À Monograph of the british Spongiadæ, t. 11, 1866, p. 212. w CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. A1 J.-S. Bowerbank est le dernier zoologiste qui défende cette théorie erronée. Il fonde son opinion sur des considérations qui pèchent par une notable étroitesse de vues. S'il se refuse à admettre qu'Ælymeniacidon celatus possède le pouvoir de creuser lui-même sa demeure, c’est qu’en premier lieu il a constaté (ceci fort à propos) que les corps cristallins regardés par Hancock comme les instruments de la perforation sont simplement des cellules qui sécrètent le carbonate de chaux dissociées pendant le travail qui a miné les coquilles ; c’est qu’en second lieu il a été frappé du nombre considérable de débris perforés où l’on cher- cherait en vain la moindre trace de Clione (l’éponge ayant péri et ses restes étant dispersés) ; c’est qu’enfin il a eu occasion d’exa- miner plusieurs échantillons qui, débordant de leur abri primitif, le recouvraient d’une couche plus ou moins étendue et plus ou moins épaisse de leur propre substance. On ne comprend pas qu'après avoir vu de ces individus revêtants, Bowerbank n'ait pas admis les deux variétés de la Cliona celata distinguées par Johnston, et qu'il ait cru devoir créer pour la forme « massive et rude » le genre ÆRaphyrus et l’espèce RÀ. Griffthsi. À Enfin, par une autre erreur aussi inexplicable, Bowerbank pré- tend que les diverses espèces trouvées par Hancock sur les côtes anglaises se réduisent à une seule (Cliona celata Gr., Halichondria celata Johnst.), et que les différences de spiculation qui ont servi à les établir sont purement accidentelles. En 1867 paraît le second mémoire de Hancock (1) : il apporte la réponse aux objections de Bowerbank. Hancock a acquis de lui- même la conviction que les grands corps cristallins qu'il avait trouvés à la surface de C. celata sont des portions du tissu corné de la coquille d’huître perforée, et il ajoute que si la Cliona travaille (1) Ann. and Mag. nat. hist., 8° série, t. XIX, 1867, p. 229. Mote on the exca- vating Sponges ; nith descriptions of four new species. 42 ÉMILE TOPSENT. mécaniquement, ce doit être à l’aide des petits corps décrits dans sa première note, ou à l’aide des spicules. Il est indubitable, en 7 A = . somme, que l'éponge faconne elle-même ses galeries ; toutes les observations confirment cette manière de voir. ‘ Quant à l’hypothèse émise par Bowerbank que douze espèces auraient été faites avec la seule ÆZalichondria celata Johnst., elle n’est pas soutenable. L’auteur vient de reconnaître dans certaines de ces espèces des différences de spiculation encore plus profondes que celles qu’il avait d’abord constatées : il a découvert une troisième sorte de spicules, très petits, d’une grande utilité pour la spécification. Cette trouvaille l’oblige même à modifier quelque . . L4 peu la diagnose de plusieurs de ces éponges. Le mémoire se termine par la description de quatre nouvelles Cliones étrangères. Dans un essai de classification des Eponges (1), J.-E. Gray a démembré le genre Cliona en huit genres qui rentrent dans l’ordre des Zeiospongia. Le besoin ne se faisait pas sentir de pratiquer ces coupures, toutes les espèces connues se ressemblant à un tel point que la détermination en est ordinairement difficile. Aussi les nomsnouveaux n’ont pas été consacrés par l’usage. Le remarquable traité de M. Fischer sur les éponges perforantes fossiles (2) nous intéresse ici surtout par les vues générales qu’il présente. Le rôle des Clionides semble être de rendre à la mer le calcaire des coquilles ; leur activité est très grande, maïs il n’est pas probable qu’elles arrivent jamais à tuer le mollusque sur lequel elles se fixent en ouvrantles voies aux attaques meurtrières d’ani- maux zoophages. Leur revêtement siliceux se compose de granu- lations cristallines d’un faible diamètre (les petits corps cristal- lins, à l’importance desquels Hancock n’a pas cessé de croire), (1) Proceedings of the Zoolog. Soc. of London, 1867, part II, p. 492. Noteson the arrangement of Sponges, with the description of some nem genera. (2) Nouvelles Archives du Muséum d’Hist. nat. de Paris, {re série, t. IV, 1868. Recherches sur les Eponges perforantes fossiles, p. 117. À # Q 4 2 ï "3 F- CONTRIBUTION A L'ETUDE DES CLIONIDES. 13 dont le rôle doit être considérable dans l’acte de la perforation. Cette erreur n’est pas imputable à M. Fischer. Ce qui peut être discuté,ce sont deux des observations qui accompagnent la notice bibliographique placée au commencement de son ouvrage. Ainsi, c’est contrairement à l’une d’elles que nous appuyons plus haut les revendications de Hancock au sujet de ses Cliona Fryeri et C. spinosa. Il ne noussemble pasnon plus qu’on doive admettre l'hypothèse de M. Fischer touchant la Clione dont Leidy entretenait en 1856 l'Académie des Sciences de Philadelphie. Rien ne prouve que ce soit la Cliona canadensis de Hancock; nous savons que cette éponge possède deux sortes de spicules : la Clione de Leidy n’a que des spicules en épingle. R. Grant avait supposé que les différents aspects des papilles de la Cliona celata correspondaient à des états divers de contraction et d'extension. En 1870, M. L. Vaillant observe (1) que ces papil- les sont de deux sortes : les unes servent de pores à l'éponge et les autres jouent le rôle d'oscules. À plusieurs reprises, H.-J. Carter s’est occupé des Eponges perforantes. Sa première publication sur ces êtres date de 1870 (2). Elle à pour principal but d’exposer les affinités qui relient les Cliona etl'Osculina polystomella Schm. à la Grayella cyathophora décrite par lui en 1869. Elle confirme en même temps les vues de Vaillant sur le rôle des papilles de C. celata et l’opinion de Johnston sur l’existence de deux formes de l’Æalichondria celata. Pour Carter, les genres Raphyrus, Cliona, Grayella et Osculina font partie d’un même groupe, puisqu'ils ont mêmes organes papilli- formes et mêmes spicules semblablement disposés. L’année suivante, il développe ses remarques sur les papilles (1) Comptes rendus des séances de l’Académie des Sciences, t. LXX, 1870. Note sur la disposition des pores ou orifices afférents dans la Cliona celata, p. 41. (2) Ann. and Mag. nat. hist. 4e série, 1870, t. V. Vote on the Sponges Grayella, Osculina and Cliona, p. 73. 44 ÉMILE TOPSENT. de la Cliona corallinoides (1). Ce sont les appendices tentaculi- formes de ces organes qui leur prêtentune vague ressemblance avec les polypes. En 1872 (2), J.-E. Gray cherche de nouveau la place qu'il convient d’assigner aux Eponges perforantes et les range dans l’ordre des Suberispongia, où le g. Raphyrus fait partie d’une autre famille que le g. Cliona. En 1874 (3), Carter décritune espèce nouvelle, Cliona abyssorum, draguée à bord du Porcupine. Nous aurons plus tard occasion de parler en détail de la décou- verte que fit M. W.-J. Sollas en 1878 (4), dans ses Cliona mucronata et C. ensifera, de diaphragmes compliqués situés entre les lobes, sur le rôle desquels il s’est livré à diverses conjectures. Sollas a vai- nement cherché de semblables diaphragmes dans la CL. celata. En revanche, un échantillon de cette éponge lui a montré une seconde sorte de spicules qui n'avait jamais été vue ; il proposa pour cette raison de reconnaître à la Cliona celata une variété qu'il nomma C1. linearis, mais qu’on devra abandonner. Disons encore que sa Cliona subulata est probablement une des espèces de Hancock. Parmi les Spongiae littorales Pontis Euxini et maris Caspii (5), M. Vold. Czerniawsky cite trois éponges perforantes. L’une, trouvée en abondance par Ulljanin dans la baie de Sébastopol, serait la Vioa typica de Nardo. Une autre n’est ni nommée ni décrite ; on sait seulement que cette Clione perfore les pierres de la baie de Suchum, où elle a été recueillie par des profondeurs de 1" 50 à 37. (1) Id. 4e série, 1871,t. VIIL À description of tro ner Calcispongiae... and an account of the polype-like pore-area of Cliona corallinoides contrasted with Prof. Æ, Hacckel's view on the relationship of the Sponges to the Corals. (2) Id. 4 série, 1872, t. IX. Classification of the Sponaes. (3) Ann. and Mag. nat. hist. 4°série, t. XIV, 1874. Descriptions and figures of deep-sea sponges, p. 249. (4) Id. 5e série, 1878. On tno new and remarkable species of Cliona. (5) Bullet. de la Soc. Imp. des Naturalistes de Moscou, 1878, n° 4, p. 396, et 1879, n° 4, p, 243, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 15 Enfin la troisième est décrite et ses spicules sont figurés ; l’auteur l'appelle Cliona pontica et la range dans un sous-genre Archæocliona qu’il crée pour les espèces à spiculation simple. 11 semble pourtant qu'à cet égard 1 Archæocliona pontica ne soit pas à rapprocher des Cliona labyrinthica et nodosa de Hancock. En 1879 (1), Carter reprend l'étude de la Samus anonyma que Gray avait rangée parmi les Clionidesen 1867 ; et, la même année, une éponge trouvée par le D' Millar lui permet de faire connaître (2) un nouveau genre de Clionides: l’Alectona Millari, qui en est ac- tuellement l’unique espèce, possède une spiculation tout à fait spéciale. Carter est convaincu que cette Alectona représente, sinon un échantillon typique, du moins une variété d’un spongiaire dont il n'avait encore pu voir que les spicules et qu’il avait nommé Gum- mina Wallichü (3). En 1880, O. Schmidt (Die Spongien des Meerbusens von Mexico und des Caraibischen Meeres, 2° Heft) s'exprime ainsi en ce qui concerne le #. Vioa: & Les Vioa appartiennent surtout à la zone littorale. Parmi nos matériaux (dragages du Blake sous la direc- tion d'Alex. Agassiz) ne se trouve qu’une Subéritidine perforante, cramoisie comme V. Johnstonii , mais seulement avec des spicules en épingle. » En discutant les affinités des Clionides, nous aurons à examiner les raisons qui ont conduit le D° W. Marshall à rapprocher de ces éponges le genre Phoriospongia (4). En 18S1, M.A. Giardétudie dans ses (Fragments biologiques (5) deux ennemis de l’Ostréiculture : Leucodora ciliata et Cliona celata. Remarquant que l’annélide n’attaque point les coquilles tant qu’elle (1) Ann. and Mag. of nat. hist. 5° série, t. III, 1879, p. 350. Contributions to our know!rdge of the Spongida. (2) Transact. Journ. Roy. Microsc. Society, 1879, vol. IT, n° 5, (3) Ann. and Mag. of nat. hist. 1879, t. III, p. 353. (4) Zeitsch.für wissenschaftl. Zoologie, 1880, t. XXXV. Untersuchungen über Dysideiden und Phorivspongien. (5) Bullet. scientifique du département du Nord, 1881, n° 2, p. 70. 16 ÉMILE TOPSENT. trouve sur le rivage le calcaire qui lui est nécessaire, M. Giard demande si l’on ne pourrait obvier aux ravages de l’éponge en introduisant des blocs de calcaire dans le voisinage des huîtrières. La même année, M. Stuart O. Ridley donne la description d’une Clone ( Viou Carteri) de la côte S.-0. du Brésil (1). En 1882 (2), le D' Hyatt agite encore la question de savoir si les Cliones creusent elles-mêmes leurs galeries ou si elles les trouvent préparées par d’autres animaux : l'inspection d’un nombre con- sidérable de valves d’huîtres perforées le porte à rejeter cette dernière hypothèse. Enfin, en 1383 (3), dans un travail dont des extraits ont été in- sérés dans plusieurs publications périodiques de zoologie, M. N. Nassonow aborde l’étude miscroscopique de l’anatomie et de la biologie des Cliones. Une éponge perforante supposée nouvelle, la Cliona stationis, abonde dansla baie de Sébastopol. Ayant réussi à en voir la ponte, l’auteur a suivi la fixation des embryons sur des lamelles calcaires minces et transparentes. L’embryon perd ses cils et s’aplatit, puis il émet des prolongements charnus qui s’enfoncent dans le calcaire, y découpant des corpuscules dont la face profonde est toujours arrondie et que la jeune éponge ne tarde pas à rejeter hors de sa masse. Ainsi se trouve expliquée la ponctuation constante des parois des galeries découverte par Hancock dès 1849. Mais le phénomène intime de la perforation reste ignoré, puisque M. N. Nassonow n’a pas pu constater d'action chimique et que sa narration ne nous fait pas comprendre comment l'animal, extrêmement mou et dé- pourvu de tout instrument spécial, parvient à insinuer dans le cal- caire compact les prolongements périphériques charnus de son (1) Proceed. of the Zool. Society of London, 1881, Part I. Account of the zoolo- gical collections made during the Survey of H. M. S. « Alert » in the Straits of Magellan and on the Coast of Patagonia. Spongida, p. 107. (2) Amer. Mon. Micr. Journ. III, 1882. Boring sponges, p. 81. (3) Zeitsch. für wissenschaftl. Zoologie, XXXIX Bd. 1883. Zur Biologie und Anatomie der Clione, p. 295. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 17 corps et à détacher des corpuscules dont la forme et le volume à peu près invariables sont tout à fait dignes de remarque. Pour arriver au but que nous nous sommes proposé, il nous faudra discuter certains résultats des recherches de M. Nassonow, at, en particulier, vérifier l'existence d’organesspéciaux aux Cliones, de longs filaments jaunâtres , unicellulaires, anastomotiques, qui naîtraient de la surface du corps de l'éponge adulte, pour de là sillonner toute l'épaisseur de la coquille attaquée en essayant d'établir des communications entre les différentes galeries et, pro- bablement, pour déterminer les points où doit s'exercer l’activité de la Clione. L ÀARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2° SÉRIE. — T. V bis, suppc. 1887. — 4e Jém 2. PREMIÈRE PARTIE CHAPITRE I. ÉTUDE ANATOMIQUE DE QUELQUES CLIONES. On recueille à Luc trois espèces du genre Cliona : C. celata Gr., C. vastifica Hanc. et C. lobata Hanc. Comme ce sont trois types autour desquels se groupent la plupart des espèces connues, nous allons les passer en revue successivement. $ 1. — Cliona celata Grant. C’est sans contredit la plus commune des Éponges qui vivent sur les côtes du Calvados ; on la trouve partout : dans les draga- ges, sur les coquilles et les plaquettes de grande-oolithe dont le fond est couvert par endroits, dans les excursions sur les rochers qui émergent aux basses mers de vive eau, et même à la grève où elle s’avance aussi haut que les Amorphina panicea et caruncula, mi- nant les grosses pierres que les vagues ne parviennent pas à rouler. En général, elle se présente sous l'aspect qui lui a mérité l’épi- thète choisie par Grant : ses papilles trahissent seules sa présence. Mais parfois il arrive qu’elle croît avec vigueur et que le corps qui l’abrite, criblé de toutes parts, devient insuffisant à la contenir : alors elle déborde en certains points et commence à le couvrir d’un revêtement encore mince mais assez résistant pour défier toute attaque. Favorisée par les conditions de milieu, son expansion peut CONTRIBUTION A L’'ÉTUDE DES CLIONIDES. 19 n'avoir plus de limite et, protégée à la surface par un épais feu- trage de spicules, soutenue par de solides piliers de même nature qui remplacent sa charpente d’emprunt, la Olione s'accroît en dia- mètre et ne tarde pas à englober son ancien refuge tout entier. Dans ces transformations, l’éponge modifie si profondément ses dispositions anatomiques qu'il est indispensable de l’étudier dans ses trois états, perforante, revêtante et massive ou raphyroïde, comme on peut dire aussi, pour rappeler qu’un nom spécial a quel- que temps désigné la forme libre de la Clione. À. — Cliona celata perforante. Spiculation. — La Cliona celata possède des spicules de trois sortes. L'éponge qui nous occupe n'a pas été décrite moins de huit fois, et il est surprenant que, malgré les observations toujours si précises de Hancock, de Bowerbank et d'O. Schmidt, sa véritable spiculation soit restée si longtemps inconnue. Ces auteurs n’y avaient remarqué que des spicules longs et forts, en forme d’épingle, dont la tête ovale et bien définie por- tait généralement à son extrémité une courte pointe obtuse, et l’espèce semblait presque suffisamment caractérisée par cette simplicité même de son squelette. Aussi, lorsqu'il découvrit en 1878, sur un spécimen provenant de Dawlish dans lequel il avait bien cru reconnaître une Cliona celata, des spicules longs, lisses et très grêles, rappelant néan- moins les spicules acérés de beaucoup d’autres Cliones, M. Sollas fut-il convaineu qu’il avait affaire à une variété de la Cliona celata pour laquelle il proposa le nom de Cliona linearis. Après examen comparatif d’un grand nombre d'éponges recueil- lies entre le Havre et Arromanches, j'avais pu, en 1886 (1), mon- (1) Bulletin de la Société Linnéenne de Normandie, 3 série, t. X, p. 226. 20 ÉMILE TOPSENT.,. trer que ces spicules, une seule fois signalés, se trouvent fréquem- ment sur les échantillons des côtes du Calvados, que leur abon- dance, leur rareté ou leur absence sont dues à des variations indi- viduelles, et que la variété C. linearis est une distinction inutile. J'ai depuis revu ces spicules dans des Cliona celata du golfe du Mexique et de la mer des Indes, et l’on peut déjà conclure que, partout, les spécimens typiques de cette espèce ont deux sortes de spicules et que la Cliona celata diffère nettement, jusqu’à nouvel ordre, des Cliona radiata, C. insidiosa, C. angulata, décrites et figurées avec une seule sorte de spicules par Hancock, en 1867. Il y a plus encore, à la fin de septembre de la même année, plu- sieurs dragages m'ont procuré une quantité considérable de val- ves de Pecten maximus attaquées par de jeuneséponges perforantes dont une ou deux papilles seulement étaient formées. Montées au baume du Canada, ces papilles ont offert une troisième sorte de spicules ressemblant beaucoup à ceux de Cliona lobata. Le doute n’était pourtant pas possible ; l'abondance de ces jeunes individus dans toute la région explorée par la drague, la présence des deux sortes de spicules dont il vient d’être parlé, la structure même des papilles et certains détails histologiques prouvaient qu’il s’agis- sait bien de la Cliona celata, et qu'il faudrait désormais considérer la spiculation complète de cette éponge comme constituée par trois sortes d'organites. Les spicules en épingle sont les seuls qui ne manquent jamais, mais ils sont eux-mêmes sujets à de fréquentes variations de forme et de dimensions. Leur tête, ordinairement bien distincte de la tige, n'en est quelquefois qu'un renflement graduel ; généralement munie d'une courte pointe obtuse, elle peut être parfaitement sphé- rique, ou bien la pointe qui la termine acquiert une importance exagérée eb paraît une continuation directe et plus ou moins lon- gue de la tige portantsouvent à son extrémité un renflement glo- buleux. De la sorte, plusieurs dilatations se présentent parfois à CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 21 peu de distance les unes des autres. Il est facile d'imaginer toutes les modifications qu’on doit rencontrer. La tige, fusiforme, forte et longue, atteint son plus grand dia- mètre un peu au-dessous de la tête. Un canal, très fin d'habitude, la parcourt longitudinalement et, sans changer de calibreen tra- versant les dilatations supplémentaires, va aboutir au dernier ren- flement qui est creusé d’une petite cavité arrondie. Dans des cas anormaux, cé canal devient très large et sa paroi siliceuse est fort mince. La longueur et l'épaisseur du spicule en épingle n’ont rien de fixe. Bien des causes en déterminent les variations : ainsi j'ai sou- vent remarqué, d’une part, que les éponges les plus vigoureuses (celles, par exemple, qui tendent à devenir massives) ont des spi- cules de grande taille, et, d'autre part, que dans une même Clione perforant une coquille de Buccin, les spicules sont plus petits dans les galeries étroites qui se ramifient dans les parties minces que dans les larges cavités de la columelle. Dans beaucoup d'individus se voient épars des spicules très grêles, dont la tige généralement flexueuse, sans canal visible, est presque aussi longue que celle des plus petits spicules en épingle bien développés, mais ne mesure pas un demi # de diamètre ; ils ontune tête elliptique relativement grosse, surmontée d’un mucron bien marqué, grêle comme la tige. C’est là vraisemblablement l’état jeune des grands spicules ; on en trouve dont le diamètre s accroît en même temps que la longueur s’accentue, et il est aisé d’obtenir tous les termes de transition (PI. VII, fig. 1, a a’). Il faut que les spicules aient déjà acquis une épaisseur notable pour qu’on puisse apercevoir leur canal axial. Jamais les spicules grêles capités ne dérivent des spicules grê- les acérés découverts par Sollas. Sauf de très rares exceptions, le spicule en épingle offre une courbure légère à l’union de son tiers antérieur avec ses deux tiers postérieurs. On pourrait croire, en examinant une prépara : 29 ÉMILE TOPSENT. lion de l'éponge, que ces exceptions sont moins rares que je ne l'indique ici ; cela tient à la façon dont beaucoup de spicules se présentent : il suffit de changer le point pour constater qu’il faut chercher leurs extrémités tantôt plus haut et tantôt plus bas que leur milieu. L’inflexion constante de ces spicules est un assez bon caractère spécifique, car elle permet de distinguer de plu- sieurs Cliones les spécimens de Cliona celata dont la spiculation est réduite à sa plus simple expression. C’est au milieu de l’enchevêtrement irrégulier des spicules en épingle, dans les parties charnues de l’éponge, qu'il faut cher- cher les spicules de la deuxième sorte. Ceux-ci sont fusiformes, légèrement arqués, toujours lisses et acérés (acerate, pointu aux deux bouts, Bow. I. c., t. I, p.228). Leur diamètre est difficilement appréciable ; ils sont si fins que, de même que les spicules capités grêles, ils se trouvent diversement tordus par les accidents de préparation. Leur longueur varie avec les individus. Les plus robustes que j'aie vu mesuraient 225 » de longueur et à peine 1 » d'épaisseur vers le centre. Dans la règle, ils sont fasciculés (PI, VII, fig. 1, b). C’est un caractère qui a échappé à Sollas. Les faisceaux ne sont pas tou- jours constitués de la même manière : les spicules restent paral- lèles, ou bien s’entre-croisent, ou enfin se tiennent tous à une extré- mité et s’écartent à l’autre. Rien ne varie comme les proportions dans lesquelles existent ces spicules. Dans certains, cas les faisceaux se montrent en quan- tité considérable ; d’autres fois il faut chercher longtemps pour constater la présence de quelques spicules isolés ; enfin parfois il est impossible d’en apercevoir un seul. Les spicules de la troisième sorte sont les plus rares. Ils sont courts et relativement gros (longueur = 20 — 25 x, largeur — 2 — 3» ,en moyenne), chargés d'épines petites et grandes tou- jours aiguës : ils ne se ressemblent nullement entre eux, étant 2, 3 ou 4 fois courbés et figurant même des corps étoilés (P1. VIT, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 23 fig. 1, c’ ). Leur production peu active même au début de la vie de l'éponge ne tarde pas à s’arrêter, de sorte que, pour les étudier, il faut disposer d'individus fort jeunes ; encore ne les trouve-t-on qu'en petit nombre, épars sur les papilles et sur les portions membraneuses. On pourrait, il est vrai, les découvrir en recher- chant les deux ou trois premières papilles de Cliones adultes ; j'ai réussi à le faire sur un spécimen qui, après avoir complètement perforé les parois d'un tube de Dentale, en avait rempli la cavité et ne communiquait avec l'extérieur que par une vingtaine de papilles ; mais, comme il faut monter chaque papille au baume du Canada pour voir les spicules en question, à moins d’un heureux hasard, ce procédé exige beaucoup de patience. [ci les spicules en épingle sont en réalité les seuls qui servent à l'éponge, mais, dans les Cliones, où les trois formes se produi- sent abondamment, un rôle spécial est réservé à chacune d'elles, car chacune rentre dans l’une des catégories établies par Bower- bank : les spicules en épingle sont les spicules essentiels du sque- lette, les spicules acérés sont les spicules de connexion ou de ten- sion, enfin les petits spicules spiralés sont les spicules des membranes. La spiculation de la Cliona celata est surtout intéressante par sa variabilité, et tout ce qui précède porte à penser que la spiculation peut être imparfaitement connue de certaines autres Cliones où l’on n'a encore observé qu’une seule sorte de spicules (sp. en épingle dans C. radiata, sp. fusiformes dans C. labyrinthica) ou deux sortes seulement (C. Fryeri, C. muscoïdes,ete.). Toutefois les carac- tères de l'adulte suffisent généralement à différencier les espèces. Histologie. — L'examen de la Cliona celata nous laisse reconnai- tre quatre sortes d’élements cellulaires : cellules contractiles, cel- lules vibratiles, cellules conjonctives et cellules digestives pig- mentées (1). (4) Nous retrouverons la même constitution histologique dans les Halichon- driae. 24 ÉMILE TOPSENT. La désignation de cellules contractiles s'applique à des éléments que des aspects différents faisaient diviser en cellules de l’ectoderme et de l’endoderme (1) et cellules fibres (2) ou cellules contrac- tiles du mésoderme (3). Voici d’après quelles considérations une telle fusion a pu être opérée sur la Cliona celata. À l’aide du nitrate d'argent on constate que toute la surface des éponges ‘et les paroïs de leurs canaux aquifères sont couvertes d’un revêtement cellulaire sur lequel le dépôt d'argent s’effectue, sous l'influence de la lumière solaire, en suivant les lignes de con- tact des cellules. Par ce procédé apparaît sur ces parties un dessin assez régulier figurant un véritable épithélium (PI. I, fig. 12). Les cellules de cet épithélium étaient, d’après les auteurs, les seuls éléments de l’ectoderme, ‘et, comme la question n’est pas résolue de savoir où finit l’ectoderme et où commence l’endoderme dans les canaux, ces mêmes éléments, qui remplissent tous les intervalles existant entre les corbeilles vibratiles, parais- saient entrer aussi dans la constitution du troisième feuillet du blastoderme. Elles étaient décrites plates, polygonales, munies d’un noyau et disposées sur une seule couche. Nassonow, qui a étudié (4) les détails de structure de la Cliona stationis, n’a pas pu obtenir cet é pithélium avec le nitrate d’argent, mais le traitement de l’éponge par une solution de 112 O0 de nitrate d’argentet de chlorure d’or l’a persuadé qu’il avait affaire à un épithélium formé de cellules avec des prolongements. Sa con- viction s’est ensuite changée en certitude, car, après avoir laissé une Clione séjourner un jour et demi dans l’alcool au tiers, il a pu très bien dissocier ces cellules et les voir décidément fort irrégu- lières et réunies par d’étroits prolongements ménageant entre eux de nombreux espaces, comme illes a représentées dans la fig. 7 de sa deuxièmes planche. (1) F.-E. Schulze, Keller, p. ex. (2) F.-E. Schulze. (3) N. Nassonow. (4) L. c. p. 303. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 25 Plus heureux que Nassonow, j'ai réussi à retrouver sur les parois des grands canaux et dans les points où la Cliona celata s’accole au calcaire perforé le dessin que le nitrate d’argent trace si facile- ment sur la surface des éponges libres. On remarquera dans la fig. 13, PI. I, que le contact des cellules entre elles ne s’établis- sant pas toujours par leur contour tout entier, de petits espaces se trouvent limités où l’argent se dépose abondamment. En dis- sociant ces préparations, j'ai pu reconnaître directement qu’un épithélium régulier n'existe pas et que les cellules de revêtement ont dans la profondeur des traits d’union dont le procédé employé d’abord est incapable de révéler la présence. Puis, expérimentant sur des éponges ayant séjourné dans l'alcool faible, j'ai constaté qu’il y a très souvent une certaine épaisseur de ces cellules parfai- tement identiques à celles obtenues par Nassonow. La fig. 4, a, PI. II, montre quelques-unes des formes de ces éléments si variables. Toutefois l’auteur russe, frappé de la bizarrerie de ces formes, se demande si ce n’est pas là un résultat de la structure spéciale des éponges perforantes et, ne supposant pas que les intervalles qu’il observe entre les prolongements des cellules soient chan- geants, il explique leur existence par une erreur, par la nécessité qu’il y aurait pour certains filaments longs et délicats qui par- tent de la surface de l'éponge de se frayer un passage vers le calcaire où ils vont s’enfoncer. Etendant mes recherches aux épon- ges libres, je me suis assuré, au contraire, que ces cellules de revé- tement sont partout aussi irrégulières ; et, d'autre part, j'ai vu dans des portions vivantes de Cliones, comme dans la membrane der- mique des Renierinae, leur forme varier sans cesse. Ç Cette variabilité étant un fait avéré, il devient aisé de compren- dre que les cellules met c de la fig. 7, PI. II, de Nassonow, et celles de nos figures 4 a et 5, PI. II, sont de même nature. Cela nous conduit encore à reconnaître que les cellules fibres ne représentent pas des éléments à part : pour s’en convaincre, il suffit d’exami- ner les parois des canaux de Cliones jétées vivantes dans l'alcool, 26 ÉMILE TOPSENT. ou bien les tractus qui traversent les canaux fixés par l'acide os- mique (1), on trouve alors toutes les cellules étirées dans le même sens, véritables fibres absolument semblables à ce qu’on voit dans la fig. 5, PI. IT, de Nassonow et dans les figures consacrées par plusieurs naturalistes aux fibres de différents Spongiaires. L'étude comparative des fibres et des cellules de revêtement apprend qu'elles ont même protoplasma, même noyau, mêmes propriétés et même position dans l’éponge ; elles sont donc iden- tiques et l’on peut conclure: les cellules contractiles sont des élé-— ments dont le protoplasma contient de très fines granulations : elles possèdent un gros noyau saillant, diversement placé ; elles sont douées d’une amæbicité énergique et occupent dans l'éponge tous les points où sont nécessaires des alternatives de contraction et de relâchement. Elles existent naturellement en fortes propor- tions dans les Cliones, dont le pouvoir contractile a frappé tous les observateurs. Nous verrons ces cellules former aux Æalichondriaeune enve- loppe complète extrêmement mince ; mais ici se présente une par- ticularité intéressante des Cliones. A part le plateau qui couronne les papilles, toutes les parties libres sont inactives ; elles sont ren- dues fermes et fixes par un feutrage épais de spicules en épingle. Sur ces points les cellules de revêtement n'auraient pas de raison d'exercer leur contractilité : aussi y sont-elles remplacées cons- tamment par une cuticule incolore d'apparence anhiste. C’est exactement ce qu'ont déjà observé Kolliker et Schulze sur des éponges fibreuses, le premier sur Cacospongia cavernosa Schm., le second sur un exemplaire d’ÆEuspongia oficinalis (2) et sur certains individus d’Aplysina aerophoba (3) ou d’'Aircinia (4). Quand une (1) On peut choisir les diaphragmes dont il sera parlé ultérieurement. Le ni- trate d'argent trace sur ces membranes contractées des polygones allongés paral- lèlement entre eux. (2) Zeitsch. f. wiss. Zoologie, 32 Bd. Die Familie der Spongide. (3) Id. 30 Bd. Die Familie der Aplysinide. (4) Id. 33 Bd, Die Gattung Hircinia. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 27 Clione a été déchirée, les parties mises à nu s'organisent pour résister à toute cause de destruction ; il se produit, pour les proté- ger, un enchevêtrement de spicules, et une cuticule se forme pour les recouvrir. En suivant pas à pas la cicatrisation de ces blessu- res, J'ai pu constater que cette cuticule dérive des cellules contrac- tiles, qui s'accumulent et perdent leurs contours. Pendant long- temps, le nitrate d’argent révèle la présence de ces éléments en dessinant un réseau dont les maiïlles deviennent de plus en plus petites. Des cellules vibratiles il v a peu de choses à dire : ces éléments, que les auteurs s'accordent à considérer comme endodermiques, sont ici de très petite taille ; ils sont disposés par groupes dont la forme varie un peu suivant qu'ils sont à l’état de repos ou en pleine activité; dans le dernier cas, les groupes figurent de vérita- bles corbeiïlles hémisphériques en communication avec le liquide ambiant par un large orifice. Les corbeilles, en nombre considéra- ble, sont éparses sur les parois des plus fins canaux de l'éponge. Chaque cellule, ovoïde, claire, contient quelques granules d’un pigment jaune d’or; vers la base s’apercoit un noyau brillant où j'ai vainement cherché un nucléole à l’aide des principes colorants. La partie de la cellule qui est tournée vers l’intérieur de la cor- beille porte une collerette protoplasmique hyaline, légèrement évasée, et de son sommet même part un cil qui s’anime à l’occa- sion de mouvements rapides de flagellation. Les cellules sont unies entre elles par les collerettes. Collerettes et cils sont rétrac- tiles comme les pseudopodes de cellules amiboïdes. L’agitation des cils de toutes les corbeilles provoque, suivant des sens déterminés, des courants d’eau qui parcourent les canalicules les plus profonds de l’éponge. Comme celles des autres éléments histologiques, les dimensions des corbeilles vibratiles et de leurs cellules constitutives varient lécèrement avec les individus. Les cellules conjonctives sont une troisième sorte d'éléments qui paraît ne manquer jamais dans les Silicisponges. Par leur dis- 28 ÉMILE TOPSENT. position elles méritent toujours cette appellation, mais, d'habitude, elles jouent en même temps un autre rôle de haute importance: elles emmagasinent les réserves nutritives. Cela est remarquable dans la Cliona celata, où elles contiennent une matière grasse de consistance butyreuse, jaune verdâtre, qui brunit en s oxydant. Par l’éther ou l'alcool, on peut extraire cette graisse toute l’année en proportions considérables. Sa coloration permet de distinguer au premier abord les cellules conjonctives. On les met encore mieux en évidence en soumettant les préparations de Clione aux vapeurs d’acide osmique qui les noircissent instantanément. Quel- ques-unes se trouvent parfois n’en contenir qu’une faible quantité, mais cela est l’exception et ne se voit guère que dans les spécimens qui souffrent. La majeure partie de leur protoplasma est organisée en sphérules qui renferment la graisse (PI. II, fig. 4, b) ; parmi ces sphérules réfringentes le noyau se distingue comme une tache claire arrondie. Les cellules conjonctives, activement amiboïdes, émettent des pseudopodes hyalins, quelquefois très longs, qui se ramifient et rejoignent ceux des cellules voisines. Quand on les a dissociées, elles se cherchent longtemps à l’aide des pseudo- podes et, si elles ne se rencontrent pas, finissent par adopter la forme sphérique, qui semble par conséquent répondre à l’état de repos. Toutes normalement réunies par ces prolongements pro- toplasmiques forment un réseau d’une richesse inouïe. J’ai re- trouvé ce réseau avee des caractères divers dans toutes les Cliones et dans toutes les éponges siliceuses que j'ai examinées jusqu’à présent : toujours il est en rapport avec le système contractile. Fait digne de remarque, l’éponge fait des réserves nutritives dès le début de sa vie, et l’on trouve déjà de la graisse dans les cellules conjonctives d'individus n’ayant encore qu’une ou deux papilles. La présence de cellules adipeuses et la courbure des spicules en épingle caractérisent nettement les très jeunes Cliona celata. Ainsi les cellules contractiles, les cellules vibratiles et une partie des cellules conjonctives contribuent à former les parois des cana- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 29 ! licules dont toute l'éponge est sillonnée. Retenues par ces revête- ments membraneux, les cellules digestives pigmentées s’amoncellent entre les entre-croisements de ces canalicules. Elles sont de taille et d'aspect variables au point de rendre difficile au premier abord le classement des éléments cellulaires. La figure 4, c, PI. II, ne peut en donner qu’une faible idée. On en voit de petites tout à fait incolores et à peine granuleuses, de plus grosses où les granulations s’amassent et où le pigment apparaît ; les plus belles sont remplies de grains d’un pigment jaune d’or et de granules incolores fort iné- gaux. Cette inégalité des granules permet, dans les éponges sans couleur, de distinguer à première vue les cellules digestives des cellules conjonctives, dont les sphérules protoplasmiques, serrées les unes contre les autres, sont égales entre elles. Les cellules digestives pigmentées ont un gros noyau avec un beau nucléole. On trouve dans les préparations de Cliones beaucoup de noyaux nucléolés libres et une multitude de granules en agita- tion perpétuelle ; ces noyaux et une grande partie des granules proviennent de cellules digestives, ces éléments se déchirant avec une extrême facilité (1). Les cellules digestives et les cellules vibratiles contenant tout le pigment déterminent la véritable coloration de la Cliona celata, mais la teinte jaune verdâtre des cellules adipeuses qui couvrent les surfaces en diminue sensiblement l’intensité. La couleur des individus dépend par conséquent des proportions dans lesquelles se trouvent les cellules digestives : jaune foncé quand elles abon- dent, l'éponge est pâle dans le cas contraire et, presque réduite alors à ses portions membraneuses, elle est maigre et lacuneuse. Quelquefois, beaucoup de cellules digestives se montrent sphéri- ques et pleines de corpuscules jaunes ou incolores animés d’un mouvement brownien ressemblant ainsi tout à faità celles que C. (1) Le fait est commode à vérifier sur la Spongilla fluviatilis, dont les cellules digestives ont un noyau énorme, 30 ÉMILE TOPSENT. Keller a signalées dans la Chalinula fertilis (1). Examinée deux jours de suite, une Clione qui ne présentait le premier jour que des cellules immobiles, la plupart avec des corpuscules en agitation, ne contenait plus guère le lendemaïn que des cellules digestives ami- boïdes. Sans doute cette observation ne réduit pas à néant l’hypo- thèse de Keller d’après laquelle les cellules à mouvement brownien seraient des éléments en voie de destruction : les cellules mortes ont pu être rejetées d’un jour à l’autre ; mais elle permet de se de- mander s’il ne s'agirait pas pour ces éléments d’un état transitoire. Ch. Robin a fait remarquer (2) que le mouvement brownien des granules intrà-cellulaires prouve l'existence d’une paroi propre naturelle, distincte de la cavité et de son contenu. Tous les élé- ments des Eponges sont dépourvus de membrane, mais il semble que, dans cet état, la cellule se soit creusée d’une grande vacuole et que son protoplasma se soit condensé à la périphérie. Normalement, les cellules digestives pigmentées sont amiboïdes et émettent des pseudopodes le plus souvent lobés qui cherchent sans cesse tout autour d'elles les particules alimentaires ; elles englobent ainsi toutes sortes de corpuscules et même des diatomées entières. Ce sont elles qui digèrent les matières nutritives intro- duites dans le système aquifère. Quand du carmin est mis en sus- pension dans une eau où une Clione est en pleine activité, les cellules digestives en ingèrent une grande quantité de granules ; les cellules vibratiles n'en ingèrent pas. Les expériences faites à ce sujet m'ont toujours fourni le même résultat. Les cellules digestives pigmentées jouent encore un autre rôle de la plus haute importance : elles servent à la reproduction. Ce sont cer- aines d’entre elles, comme on s’accorde à le reconnaître, qui se transforment en spermatoblastes et en œufs. Les spermatozoïdes des Cliones n’ont jamais été vus. Quant aux œufs, ils sont pondus (4) Zeïitsch. f. wiss. Zool. 33. Bd. Séudien über Organisation und Entrwichlung der Chalineen. (2) Anatomie et physiologie cellulaires. Paris, 1873. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 31 avant le début de leur segmentation, parce que leur croissance rapide menace d’obstruer les canaux aquifères. C’est en mai et juin 1826 que R. Grant observa sur les côtes d’Ecosse les œufs de la Cliona celata. C'est en septembre et octobre que s’effectue la reproduction de cette espèce sur la côte du Calva- dos ; à cette époque, un grand nombre d'individus sont remplis d'œufs et la drague recueille une foule de coquilles que perforent de toutes jeunes éponges. * Les œufs unicellulaires mesurent à l’approche de leur maturité environ 45 # de diamètre. Tous les intermédiaires peuvent se ren- contrer dans une même préparation entre eux et les cellules diges- tives pigmentées. Ces œufs sont de grosses cellules amiboïdes jau- nes possédant un noyau clair énorme et un nucléole, autrement dit une vésicule et une tache germinatives. Ils ne contiennent pas de graisse. Quand on les isole, on les voit changer continuellement de forme et émettre de toutes parts des pseudopodes hyalins lobés ou filiformes (PI. I, fig. 14) qu’il faut se garder de prendre pour des restes du mésoderme qui les entourait primitivement (1). Il faut avouer cependant que des cellules s’y attachent souvent, et surtout des cellules conjonctives adipeuses. Les cellules contractiles et vibratiles constituant l’ectoderme et l’endoderme, les cellules conjonctives et digestives sont les élé- ments du mésoderme. La substance fondamentale est difficile à étudier, parce qu’on risque souvent de prendre pour elle des fragments de membranes contractiles. Pour la préparer, il suffit de briser l'habitation de la Clione sans écarter les parties disjointes ; leur poids tend par lui- même à les séparer, l'éponge réussit quelque temps à les maintenir en place, mais finit par céder, s’étire lentement et s'effile, et les (1) Cette erreur légère a été commise par Nassonow, 1. c., p. 298 : « Die meis- ten Eier waren an der Oberfläche mit zahlreichen feinen, unregelmassigen Zütt- chen versehen (Taf. xIx, fig. 6, &). Aller Wahrscheinlichkeit nach war es nichts Anderes, als der Rest eines dicht an ihnen haïtenden Mesoderms. » La figure en question est exacte, mais l'explication qui en est donnée ne l’est pas, 32 ÉMILE TOPSENT. cellules contractiles et conjonctives qui supportaient tout l’effort s'étant peu à peu retirées, il ne reste plus qu’un pont de substance fondamentale qui se rompt. Conservée entre lame et lamelle, la subs tance fondamentale paraît toujours inerte ( PI. IT, fig. 6). Dans la Cliona celata, et aussi dans la Cliona vastifica, on trouve quelquefois des spicules qu’une matière cornée jaunâtre réunit par paquets et entoure de couches concentriques suivant plus ou moins leurs contours ( PI. I, fig. 9 ). Ce sont vraisemblablement là des épaississements accidentels de la substance fondamentale. Des individus peuvent être remplis de ces productions tératologiques. Papilles. — La surface de tout objet perforé livre passage de place en place à de petites saillies de l’éponge qui portent les orifices du système aquifère. Déjà en 1870 L. Vaillant a reconnu que l’eau chargée de prin- cipes nutritifs pénètre par les unes et que par les autres sont rejetés les produits d’excrétion etles matières non assimilables. Pour com- pléter le classement des diverses saillies, il convient de signaler encore des papilles dont j’ai constaté l’existence avec la dernière évidence, et qui jouent tout à la fois le rôle des papilles osculaires et celui des papilles porifères. Quand la Cliona celata a besoin de s'affranchir de toute commu- nication avec l’extérieur, toutes se$ papilles rétractées se présentent comme de petits boutons déprimés, à surface lisse, d’un jaune assez foncé, fermes au toucher, parmi lesquels on ne parvient à distinguer les oscules qu’à leur taille généralement quelque peu supérieure à celle des éminences porifères. Placée dans un milieu favorable, l’éponge va rouvrir ses orifices. Lentement les papilles entrent dans la période de relâchement, et l’expansion de toutes leurs partiesles faitlonguementsaillirau dehors, en même temps qu’elles s’amollissent et que leur coloration pâlit. Les papilles osculaires, les moins nombreuses, dont l’orifice était marqué d’abord par un point à peine visible, ont maintenant une CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 33 gorge spacieuse, en entonnoir, au fond de laquelle débouche un canal d'évacuation. Elles sonteylindro-coniques. Leur paroi devient très mince vers le haut et son bord libre est souvent denticulé. On en voit s échapper, troublé par les molécules de rebut, un courant d’eau très rapide, Les papilles porifères(P1. I, fig. 5) sont des cylindres creux ; un plateau un peu élargi, assez mince, auquel des lignes spiculeuses arborescentes soutenant les parties molles donnent un aspect ve- louté, les couronne et constitue un tamis dont les éléments cellu- laires changeant continuellement de forme livrent à l’eau d’étroits passages par où elle gagne l’entrée du système aquifere. Les Cliones qui se ramifient profondément dans la retraite qu’elles ont choisie ( c’est alors une pierre ou une valve d'huître) modifient quelques-unes de leurs papilles porifères et les trans- forment en papilles mixtes. Dans ces papilles, une zone marginale épaisse sert à l’inhalation et le plateau se montre surtout constitué par un anneau dont la structure est celle des papilles poriferes. Central ou subcentral, un orifice, d'ordinaire étroit mais dont le diamètre peut, dans certains cas, mesurer presque la moitié de la papille entière, est la terminaison d’un oude plusieurs canaux oscu- laires ; le courant qui en jaillit ne laisse aucun doute sur sa fonction. Grâce à ces papilles, l'éponge est pourvue d’une série de petits systèmes aquifères secondaires évitant à l’eau qui vient de baigner les parties superficielles etne charrie plus que des matériaux de rebut le long trajet qu’elle devrait faire à travers les galeries lobées et ramifiées pour se jeter dans les canaux osculaires principaux. Le simple raisonnement faisait prévoir l’existence de papilles mixtes; il était nécessaire en effet que la première papille formée fût de cette nature pour que fussent assurées les fonctions d’inhalation et d’exhalation du jeune animal. Dans l'adulte on voit les papilles mixtes remplir tantôt simultanément et tantôt successivement leurs doubles fonctions d'oscules et de pores, suivant les besoins de l’économie. ARCH, DE ZOOL, EXP, ET GÉN. —- 2€ SÉRIE, — T, V bis, suppu. 1887. — 4° Mém. ds 34 ÉMILE TOPSENT. Sur les échantillons robustes de Cliona celata, les papilles porifères et mixtes sont saillantes de 2 mm. 112 à 3 mm. Le diamètre de leur plateau est sensiblement égal à leur hauteur. Les papilles osculaires sont un peu plus élevées (3-4 mm..); larges à la base, elles ne mesurent guère, en moyenne, que 2 mm. 112 au sommet. Ces organes sont ainsi susceptibles d'acquérir des dimen- sions relativement considérables quand l’éponge habite les pierres, les huîtres, les Pecten maximus, etc. ; mais leur taille est sujette à des variations profondes et ne caractérise pas l’espèce. Sans parler de certaines papilles qu'on voit parmi les plus grandes et qui ne sont petites que parce qu'elles sont en voie de formation, il faut remarquer qu’on rencontre souvent des Cliones adultes dont les papilles complètement développées atteignent à peine un demi-millimètre de diamètre. Tous les termesde passage s’observent entre ces extrêmes. L’étendue et l’épaisseur de la coquille sur laquelle se fixe l'embryon exercent une influence manifeste sur le développement ultérieur de l’éponge. Si sa vigueur ne lui permet pas de devenir massive, elle ne s’accroît que peu : ses galeries sont étroites, ses spicules faibles et ses papilles chétives. Tel estle cas de la plupart des Cliona celata qui s’abritent dans les valves minces du Pecten opercularis, dans les tubes de Dentales et de Serpules, etc. Toutes les papilles sont soutenues par une solide charpente de spicules en épingle, parmi lesquels, dans les premières formées, s’entremêlent quelques spicules sinueux épineux. Les grandsspicules affectent une orientation constante : ils se placent parallèlement entre eux suivant l'axe de l’organe, leur pointe toujours dirigée vers l'extérieur. Comme la papille a d'ordinaire une hauteur égale à plusieurs fois la longueur moyenne des spicules, ses limites supérieureet inférieure se trouvent marquées, l’une par les pointes, l’autre par les têtes des spicules extrêmes. Elle figure une sorte de bouchon cylindrique compact qui se distingue nettement des parties molles sous-jacentes de l’éponge où les spicules clairsemés CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. S 35 sont irrégulièrement disposés, et qui se détache d’une seule pièce quand on parvient à rompre sa ferme adhérence aux parois cal- caires. Les flancs des papilles n’ont aucun rôle dans l’inhalation et l’exhalation, et sont enveloppés d'une cuticule mince qui, ‘comme on sait, revêt toujours les surfaces libres et inactives de l’éponge. Seules de tous les éléments histologiques, les cellules vibratiles n’entrent pas dansla constitution de ces organes. Le tissu con- tractile au contraire, en raison des fonctions qu’ils ont à remplir, sy montre particulièrement développé ; il est l’agent de leur contraction et de leur extension, leur imprime les aspects les plus variés et produit, par l’écartement ou le rapprochement des pointes de spicules, les arborescences et le velouté de leur plateau. Les cellules adipeuses y sont aussi très répandues et contribuent à les colorer de concert avec les cellules digestives pigmentées, dont l’abondance ou la rareté relatives déterminent des nuances diverses. S’il n’y a qu’une faible proportion de ces dernières, la teinte jaune verdâtre assez pâle des cellules adipeuses prédomine, et l’on doit s'attendre à trouver l'éponge presque entièrement lacuneuse ; d’un autre côté, une forte accumulation des cellules à pigment communique aux papilles une belle coloration jaune d’or et, dans ce cas, les lobes de la Clione sont généralement charnus. Galeries et lobes. — Le reste du corps de la Clione s’enfonce dans le calcaire, le creusant de galeries dont la nature même de l'abri détermine la direction : elles s’étendent dans un seul plan si la coquille est mince, en tous sens s’il s’agit d’une pierre ou d'une valve d’huître, par exemple: Leur ensemble figure une sorte de réseau plutôt qu'une arborescence, car chacune est unie par de courtes branches à ses voisines. Toutes ont à peu près le même diamètre moyen,excepté dans leurs terminaisons périphériques qui vont s’amincissant en de longs et fins prolongements (PI. IT, fig. 2). 36 ÉMILE TOPSENT. Sauf dans ces parties où l’éponge en pleine activité n’a pas encore pris toute la place qu’elle tend à occuper, les galeries sont moni- liformes : des lobes en série les composent, à peu près aussi larges que longs (3-4 mm.) et séparés par des étranglements de la paroi calcaire. Le tissu contractile est très développé sur les étroits orifices de communication ainsi ménagés et permet à chaque lobe de s’isoler. Ces occlusions partielles complètent le jeu des papilles. Ceux des lobes qui se trouvent immédiatement sous la surface de l’objet perforé portent chacun une papille, deux quel- quefois , laissant entrer l’eau que leurs cellules vibratiles poussent jusque dans les lobes plus profonds, ou servant à l’excrétion de toute une portion de l’éponge. Mais ce réseau à trame noueuse et à mailles souvent fort larges représente la forme typique des Eponges perforantes, et la Cliona celata est presque toujours trop active pour conserver longtemps la régularité du type ; elle nivelle les saillies de sa paroi qui limitaient ses lobes et qu’elle avait d’abord respectées, et multiplie les branches d’anastomose de ses galeries au point de ne laisser subsister entre les deux lames externes de la coquille que de faibles îlots calcaires que le moindre choc sera capable de briser. Il en résulte un polymorphisme très marqué, et l’on a quelque peine à reconnaître des représentants d’une même espèce dans deuxCliones dont l’une, à papilles exiguës, se ramifie lâchement dans une valve de Mactre, et dont l’autre, à papilles larges et hautes, crible une valve d’Huître de telle sorte qu’on l’émietterait en la pressant dans la main. Sila Clione vient à supprimer les cadres calcaires des obtu- rateurs contractiles quirèglent le courant de l’eau, elle les remplace par des diaphragmes entièrement cellulaires. De place en place, le revêtement membraneux du large canal qui occupe l'axe de chaque galerie se soulève et forme une mince cloison transversale. Les cloisons sont toujours peu distantes les unes des autres et, pour une même longueur de galerie, sont plus nombreuses que les étran- glements calcaires (PI. I, fig. 6). Il serait par suite téméraire CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 37 d'affirmer qu'un segment dela nouvelle division représente un lobe de la constitution primitive de l’éponge. D'ordinaire, l’état des papilles indique celui des diaphragmes cellulaires. Si les papilles sont contractées, les diaphragmes s’opposent à toute communication entre segments consécutifs et se présentent comme des lames pleines, minces et transparentes toutes identiques. Ils sont surtout formés par des cellules contrac- tiles dont le nitrate d'argent dessine en partie les contours. Des cellules conjonctives adipeuses entrent aussi dans leur constitution, composant, entre deux couches contractiles, un réseau assez facile à distinguer ; mais elles diminuent graduellement de nombre à partir de la périphérie et manquent tout à fait au centre. Les cloisons sont soutenues par une charpente rayonnante de spicules en épingle disposés sur un seul rang, la tête toujours dirigée vers la paroi du canal axial (PI. I, fig. 7). Quand les papilles sont béantes, l'éponge pourvoit à sa nutrition et, pour livrer passage à l’eau, les diaphragmes se sont percés d’un large orifice autour duquel les cellules contractiles apparaissent comme un anneau de fibres circulaires (PI. I, fig. 8). Les spicules n’ont pas changé de position. Nous verrons dans les Æalichondriae, traversant les canaux aqui- fères, un système de tractus contractiles qui ne diffère de ce que nous trouvons ici que par son irrégularité. Les Cliones sont plus parfaites que les autres Eponges sous ce rapport, et, dans certaines espèces, les diaphragmes, qui règlent le flux du liquide nourricier et mettent obstacle à l'entrée de commensaux, sont d’une com- plication remarquable. Tels sont ceux que Sollas a décrits dans ses Cliona mucronata et C. ensifera, occupant les tubes stoloni- formes qui unissent les lobes. Ceux de C. mucronata, en particulier, sont conformés de telle facon que l’auteur se demande s'ils servent simplement à fermer les lobes et si ce ne sont pas des gemmules comme celles des Spongilles ou encore des kystes où se concentre toute la chair de l’éponge aux approches de l'hiver. Pour être 38 ÉMILE TOPSENT. beaucoup plus simples, les diaphragmes cellulaires de Cliona celata n’en sont pas moins distincts, et si Sollas les a cherchés en vain, c’est sans doute qu’il a examiné des spécimens où le calcaire encadrait encore les obturateurs contractiles, très étroits et dé- pourvus de toute structure spéciale. L’aspect normal de la (liona celata, que modifient si profondé- ment et la disparition des étranglements calcaires et la multiplica- tion des galeries, peut encore être altéré par d’autres causes : ainsi il arrive qu’au lieu de rester à peu près constant, le diamètre d’une galerie varie beaucoup dans lesdivers lobes ; ou bien certaines de ses ramifications ayant abouti à des tubes de Grastrochènes ou aux larges espaces qui existent souvent entre les lames d’une valve d’huître, l'éponge s'établit dans ces cavités. Toutefois l'anatomie de ces parties est semblable d'ordinaire à celle des galeries typiques, le canal longitudinal s’élargissant à l’occasion pour que l’éponge n'ait pas à tapisser la cavité sur une épaisseur trop considérable. Remarquons que dans ce cas les diaphragmes sont assez espacés et que dans les intervalles qui les séparent se voient souvent des traînées solides et ramifiées (PI. I, fig. 19), formées de files serrées de spicules en épingle, et colorées en jaune pâle par une accu- mulation de cellules conjonctivés ; ce sont là des rudiments de squelette destinés à soutenir ces portions charnues un peu plus étendues et plus épaisses que de coutume. Quelquefois aussi la Clionée emplit complètement les vides qu’elle rencontre et s’y montre lacuneuse ; il n’est pas difficile de reconnaître alors dans l’ensémble des lacunes un système aquifère complexe dont les parois, constituées en grande partie comme celles des lobes, por- tent les orifices de communication. À plusieurs reprises il a été question des canaux qui suivent l'axe des galeries et dont le revêtement membraneux, soutenu, en l'absence des spicules de membranes, par des spicules en épingle, donne naissance aux diaphragmes. De tels canaux ne manquent Jamais ; ils ont la signification de conduits principaux du système CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 39 aquifère ; toute distinction portant sur eux serait arbitraire, puis- qu’ils communiquent tous directement entre eux et qu'ils sont la continuation les uns des autres. Ils prennent originé à la base des papilles porifères situées soit sur une seule face, soit sur toutes les faces de l’objet perforé, suivant le développement acquis par l'éponge, et se terminent aux oscules. Assez souvent deux ou plu- sieurs canaux aboutissent à une même papille ; quelquefois aussi deux papilles ayant chacune un canal en propre sont soudées, sans que cela provienne forcément du fait que deux embryons se sont fixés au même point. Comme les papilles osculaires sont moins nombreuses que les papilles porifères, chaque canal qui y débou- che est grossi de l'apport de plusieurs canaux partis des pores, et l’eau en jaillit avec violence. Quant à l’état des parois calcaires auxquelles s’accolent les ramifications et sur lesquelles s’exerce l'énergie de la Clione, ïl est connu depuis longtemps. On sait que dès 1849 Hancock a constaté à la loupe qu’elles sont toujours ponctuées, qu’il s'agisse d’une coquille, d’un caillou, d’un corail ou d’un nullipore, et qu'en 1883 Nassonow a expliqué cette ponctuation constante par ce fait que l'animal s’enfonce dans sa retraite en y découpant des corpuscules dont la face profonde est toujours arrondie. L’éponge se moule exactement sur les fossettes ainsi creusées et présente à leur contact, comme nous l’avons ditplus haut, un revêtement contractile semblable à celui des grands canaux aqui- fères. L’état même des parois indique pourquoi elle y adhère si fortement qu’on ne saurait l’en détacher sans déchirures. Tous les détails qui précèdent permettent maintenant de com- prendre facilement l’anatomie d’une des unités, lobe ou segment, qui composent les galeries, et, ces unités se ressemblant toutes, la structure de la Cliona celata. Une telle unité est limitée à ses extrémités par des cloisons contractiles capables d’intercepter toute communication avec les unités voisines. Un canal assez large la traverse d’une cloison à 40 ÉMILE TOPSENT. l’autre, et la substance de l’éponge figure un manchon qui s’appuie au calcaire creusé d’alvéoles. La paroi du canal est percée d'ori- fices donnant accès dans de nombreux canalicules qui se répandent dans l’épaisseur du manchon. Enfin, dans les entre-croisements de ces canalicules sont comprises les parties charnues, soutenues par des spicules irrégulièrement disposés. L’eau entre par l’une des cloisons et sort par l’autre, et l’impulsion des cellules cïliées détermine sa marche à travers les canalicules. Changeant conti- nuellement de forme, les cellules contractiles qui revêtent ces derniers entre les corbeilles vibratiles ouvrent des passages par où l'eau pénètre parmi les cellules digestives dont les pseudo- podes ingèrent les particules alimentaires. Le courant exhalant emporte les produits d’excrétion rejetés par la même voie. B. — Cliona celata revétante. La Cliona celata s'établit fréquemment, au large de Luc, sur des coquilles de Dentales ou sur des tubes de Serpules fixés à des galets siliceux (1). Ce sont là pour elle des habitations bien étroites, aussi finit-elle toujours, pour en tirer tout le parti possible, par emplir leur cavité après s’être en tous sens étendue dans leur épaisseur. On ly trouve alors avec cette disposition lacuneuse qu'elle affecte dans les intervalles que laissent entre elles les iames d’une valve d’huître. Mais la large ouverture qui livre accès dans la cavité est pour son corps d’une mollesse extrême un danger contre lequel il lui faut se prémunir : comme elle ne doit compter que sur elle-même pour se protéger en ce point, la Clione applique sur cette entrée un bouchon compact constitué en majeure partie par un amas de spicules en épingle. La plupart des spicules tournent leur pointe vers l’extérieur, comme font (1) Ces galets proviennent des falaises crétacées de la partie orientale du Cal- vados, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 41 ceux des papilles, mais, servant uniquement ici à la défense de l'éponge, ils ne conservent aucune mobilité et d’autres spicules s’enchevêtrent sans ordre parmi eux. [L’ensemble, cimenté par une condensation des éléments cellulaires du système dermique, forme un feutrage très serré. Soutenue par les pointes des spicules, une cuticule, dont l’origine nous est connue, couvre la face externe de cette sorte de cuirasse ; elle est doublée par une accu- mulation de cellules conjonctives qui communique une teinte jaune pâle au bouchon tout entier. Au-dessous de ce revêtement solide l’éponge a son aspect normal. La Clione, dans ces cas, se borne à compléter son abri. Nous verrons bientôt qu’elle peut devenir spontanément revêtante : la structure de ses portions limitantes sera toujours alors celle que nous venons d'étudier. Le plus souvent, le bouchon qui clôt la coquille de Dentale ou le tube d’annélide porte, quelque part sur sa surface, une papille dont la couleur, bien moins vive, comme on sait, que celle des régions internes, tranche cependant nettement sur ce qui l’en- toure. Signalons enfin une complication plus grande qu'il n’est pas rare d’observer : en dehors, fermant le tube, la membrane, fort épais- sie, se détache de la partie spiculeuse et laisse un court intervalle entre elle et le bouchon cylindrique épais lui-même de près d’un millimètre. Si les conditions de milieu sont favorables à sa croissance, la Cliona celata peut, à un moment donné, ne plus trouver dans le corps qu'elle perfore de place pour creuser de nouvelles galeries : l’exiguiïté relative de sa demeure la détermine à se développer à l'extérieur. C’est la raison ordinaire pour laquelle elle devient revêtante ; toutefois, certains individus ont une vigueur telle qu'ils n’attendent pas pour adopter cet autre mode d'existence que leur retraite soit entièrement remplie de leurs galeries. Dans la plu- part des cas, l'éponge déborde par plusieurs points à la fois ; puis, 49 ÉMILE TOPSENT. les épanchements partiels se rejoignant peu à peu, elle enveloppe plus ou moins son ancien abri. (PI. I, fig. 3.) L’étude d’une portion de ce revêtement montrant bien comment il se forme, prenons un exemple pour en faciliter la compréhen- sion. À la face profonde d’une valve de Cardium norvegicum est accolée une petite valve d’huître sur laquelle sont fixés des tubes de. Serpules. Le Cardium étant abondamment perforé par une Cliona celata, celle-ci étend ses ravages à l’huître, maïs en outre, en un point du contact des deux coquilles, elle s’épanche sur l'huître en une nappe qui va se terminer sur l’un des tubes de Serpules. Cette nappe prend largement insertion sur le tube par une membrane extrêmement mince formée de cellules contractiles et de cellules conjonctives. Si l’on se rapproche du point d’émer- gence, on trouve d’abord sous la membrane quelques spicules, tous disposés horizontalement avec leur pointe dirigée vers la périphérie, indiquant ainsi le sens de l’expansion ; puis le nombre des spicules augmente (PI. I, fig. 11), la direction de leurs pointes reste quel- que temps la même ; mais peu à peu ils s’enchevêtrent, et entre eux s'accumulent les éléments cellulaires dermiques ; enfin beaucoup de spicules se redressent et portent la cuticule sur leurs pointes : le feutrage est alors exactement composé comme celui qui bouche l’orifice large des coquilles de Dentales. Longtemps encore la nappe encroûtante repose directement sur la surface de l’huître, et ce n'est qu’au voisinage de son lieu d’origine qu'elle recouvre la substance molle de l’éponge. On peut maintenant se rendre compte de ce qui se passe d’habi- tude dans les points où l’éponge devient revêtante. Sous la pres- sion des parties profondes qui ne cessent de croître, une papille se soulève et, verssa base, une prolifération des cellules contractiles et conjonctives donne naissance à une pellicule claire qui s’étend de proche enprochesur l’objet perforé, à mesure que des spiculessepres- sent sous elle ; quand le système dermique lui assure une protection suffisante, la chair de l'éponge s’insinue entre lui et le calcaire. Par CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 43 ce procédé la Clione ne tarde pas à gagner beaucoup en épaisseur et en superficie ; ses papilles augmentent de nombre et se tien- nent aussi peu distantes les unes des autres qu’elles l’étaient à la surface de la coquille ; enfin, comme il est nécessaire qu’une char- pente soutienne les parties molles entre l'écorce et le calcaire, il s'organise un squelette qui se complique à mesure que l’éponge devient massive. C. — Cliona celata massive. Beaucoup d’éponges perforantes sont, comme la Cliona celata, capables de s’accroître en dehors de leur abri primitif. Les trans- formations qu’elles subissent dans ce but s'opèrent, comme on le voit, progressivement, et la division en Clione revêtante et Clione massive ne correspond pas à des stades limités. Il a paru bon cependant de distinguer ici la Clione revêtante, pour faciliter l’étude du type et surtout pour bien marquer l'intermédiaire qui relie naturellement la Cliona celata perforante à ce qu’on a souvent appelé et qu'on appelle quelquefois encore le Raphyrus Grifithsü. G. Johnston avait pourtant, dès 1842, considéré simplement la forme perforante et la forme massive comme deux variétés de l'Halichondria celata. Mais Bowerbank, frappé de la constitution du squelette de la forme massive, pensa que c'était une éponge rappro- chée à tort de la Cliona celata Gr. et la décrivit sous le nom de Raphyrus (n. g.) Grifithsh (n. sp.). N'ayant pas vu cette forme, O. Schmidt était incapable de relever l'erreur, et pour lui (1) Raphyrus Grifithsii est une espèce distincte qu'il croit même reconnaître dans sa Papillina suberea. J.-E. Gray (2) ne paraît pas l’avoir vue davantage ; il sépare avec raison la Papillina suberea Schm. de l’éponge massive décrite (1) Spong Adriat. Suppl. II, p.18, et Sp. Atlant. Geb. p. 71. (2) Proc. Zool. Soc. London, 1867, p. 516. 44 ÉMILE TOPSENT. par Bowerbank, mais il augmente la confusion en appelant d’une part Raphyrus Grifithsii la Papillina suberea de Schmidt , et d'autre part Raphyrus celatus le Raphyrus Grifithsii de Bower- bank. Il faut arriver jusqu’en 1884 pour voir H. Carter rétablir en termes catégoriques le rapprochement opéré par Johnston : « La Cliona celata, après avoir détruit la coquille qu’elle perfore, vit sous la forme libre que Bowerbank a appelée Raphyrus Grifithsii (1). » Après avoir entièrement recouvert son ancienne demeure, la Cliona celata se montre de forme essentiellement variable etacquiert souvent de grandes dimensions (2). C’est une éponge généralement libre de toute attache au sol, toujours massive, aux contours arrondis, à la surface assez régulière et lisse entre les papilles. Elle est ferme au toucher et sa couleur offre deux tons, les papilles étant colorées en jaune plus intense que les intervalles qui les séparent. Ces papilles sont nombreuses, et on reconnaît parmielles les diffé- rentes formes que nous avons étudiées, papilles osculaires et papilles à plateau entier ou percé d’un orifice évacuateur (PI. I, fig. 1). Elles ont d’ordinaire la même taille que dans la Clione perforante ; cependant, dans certains échantillons, les oscules prennent une importance spéciale : ce sont alors de larges orifices, arrondis ou à bord diversement découpé et assez peu mobile, occupant le sommet de petites tubérosités et donnant accès dans de vastes canaux qui pénètrent jusqu’au plus profond de l’éponge. Les oscules peuvent être épars, ou groupés par places, ou encore alignés le long d’une crête. En s’épanouissant, les papilles deviennent légèrement sail- lantes au-dessus de la surface générale ; elles s’enfoncent au (1) Proc. Acad. Nat. Sc. Philad. part IT, p. 207. — Cutaloque of marine spon- ges collected by M. Jos. Willcox on the west coast of Florida. (2) Bowerbank cite un spécimen qui mesurait environ deux pieds de long, et un autre qui égalait à peu près la moitié d'une grosse noix de coco. Le volume de ceux que j'ai vus jusqu'à présent sur les côtes du Calvados n’excédait pas 8 centimètres cubes. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 45 contraire en se contractant. La figure de la Monographie de Bower- bank (1. c., t. III, pl. LXIV) a été dessinée d’après un individu desséché ; elle ne saurait donner une idée de l’éponge vivante. Une couche corticale spiculeuse, épaisse et résistante, revêtue d’une cuticule jaunâtre, limite le corps de la Clione entre les papilles et se continue par sa face interne avec des piliers qui forment le squelette de la masse. Dans cette charpente, les spicules en épingle, cimentés de la même façon que ceux de l’écorce, se disposent suivant l’axe des piliers avec une faible obliquité, et de leur incli- naison en tous sens résulte un faisceau compact : on ne peut pas dire que leur direction soit constante, mais il est manifeste que la plupart d’entre eux tournent leur pointe vers l'extérieur. À chaque papille correspond une galerie qui contient les parties actives de l'éponge et ressemble absolument à celles qui sillonnent les coquilles perforées ; il n y a de changé que leurs paroïs formées ici par les piliers spiculeux qui, en s’enfonçant, se divisent et laissent entre leurs branches des communications entre galeries voisines (PI. I, fig. 2). Un canal central parcourt la galerie ; il est divisé en segments par des diaphragmes cellulaires. Les parties charnues sont sou- tenues par des spicules en épingle qui ne diffèrent pas sensiblement de ceux des piliers ; les uns et lesautres sont très longs et mesurent 330-340 » en moyenne. On y trouve aussi des spicules capités grêles et de longs spicules acérés grêles, qui semblent manquer tou- jours dans les piliers. Les piliers forment un système continu tra- versant le corps de part en part, ou bien ils s'appuient sur ce qui reste de la coquille où la Clione s’est développée. Le squelette peut encore être compliqué par des cailloux siliceux , des tubes de Serpules ou de petites coquilles que l’éponge englobe en croissant. Il est remarquable que, dans la plupart des cas, les corps calcaires ainsi introduits dans la masse sont à peine attaqués, même ceux qu’on trouve à une assez grande distance de la surface. D'autre part, depuis le moment où elle a commencé à s'étendre au dehors, c’est fort lentement que la Clione continue à cribler son abri primitif. 46 ÉMILE TOPSENT. Tout indique que l’activité perforante de la Cliona celata diminue dès lors au profit de son activité revêtante. En résumé, la Cliona celata est une éponge perforante très poly- morphe qui doit sa coloration à un pigment jaune d’or dont l’effet est amoindri par la présence à toute époque d’une matière grasse jaune pâle dans ses cellules conjonctives. Ses papilles ordinaire- ment de grande taille sont de trois sortes, bien distinctes : papilles osculaires, papilles porifères et papilles mixtes. Ses galeries souvent irrégulières sont composées de lobes dont les cloisons calcaires sont fréquemment éliminées et remplacées par des diaphragmes contractiles soutenus par une charpente rayonnante de spicules. Il existe trois sortes de spicules, mais la production des spicules des membranes, courts, spiralés, épineux, cesse de bonne heure ; les spicules de tension avortent à peu près complètement et ne sont représentés tout au plus que par quelques rares faisceaux de spicules acérés, grêles et lisses ; les spicules du squelette, en forme d’épingle, remplissent donc l’emploi des spicules de toutes sortes ; ils sont longs et forts et courbés à l’union du tiers antérieur et des deux tiers postérieurs de leur tige. Dans la Manche, la Cliona celata déborde souvent de son abri calcaire et devient revêtante, puis massive, s’enveloppant alors d’un système dermique inatta- quable et se constituant un squelette au moyen de piliers spicu- leux solides. $ 2. — Cliona vâstifica novo sensu. Parmi les nombreuses espèces créées par Alb. Hancock, il en est deux, Cliona northumbrica et C. vastifica, qu’une foule de raisons portent à réunir, ainsi qu'on s’en convaincra bientôt. C'est l'espèce unique provenant de cette fusion que nous allons maintenant étudier. La Cliona vastifica (novo sensu) est une éponge en toutes propor- tions plus petite que la Cliona celata ; elle est presque aussi CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 47 commune qu’elle dans les eaux de Luc, mais elle s'approche un peu moirs du littoral et ne se rencontre pas fréquemment sur les rochers qui découvrent aux syzygies. Ses caractères ont plus de fixité que ceux de cette autre espèce : dans tous les individus, ses trois sortes de spicules existent en abondance et les lobes des ga- leries restent limités par des septa calcaires. Spiculation. — Chaque sorte de spicules remplit une fonction spéciale, et l'on distingue ici des spicules du squelette, des spicules de tension et des spicules des membranes. Les spicules du squelette ont, comme eux de Cliona celata, la forme d’épingles. Leur tête est d'ordinaire parfaitement sphé- rique ; quelquefois elle devient ovoïde, cubique ou trilobée, ces déformations pouvant affecter tous les spicules d’une éponge entière. Leur tige est droite et s’atténue graduellement pour se terminer en une pointe aiguë (PI. VII, fig. 3). Leur longueur varie beaucoup avec les individus ; en moyenne, elle mesure 240 à 250 w. Les spicules de tension, bien plus nombreux, sont fusiformes, légèrement courbés vers le centre, terminés par deux pointes effilées et chargés de petites épines si mal marquées dans certaines Cliones qu'il est fort difficile d’y constater leur présence. Un canal très fin occupe leur axe, mais les épines permettent rarement de l’apercevoir. Il n’y a pas de rapport constant entre la longueur des spicules en épingle et celle des spicules acérés. Ceux-ci égalent tantôt le quart, tantôt la moitié, et, le plus souvent, le tiers de ceux-là. J’ai trouvé parfois des groupes de spicules de tension enveloppés dans une couche de kératode jaunâtre. Dès 1849, Hancock avait signaléles spicules capités et acérés ; nous savons que c’est en 1867 seulement qu’il découvrit ceux que nous considérons comme les spicules des membranes. Ces derniers sont très courts et leur longueur, qui ne mesure en moyenne que 13-15 #, n’atteint guère que 8 # dans certains cas. Comme Cliona 48 | ÉMILE TOPSENT. northumbrica et C. vastifica ont été séparées surtout à cause de prétendues différences dans les petits spicules, il est nécessaire d'indiquer les formes diverses que ceux-ci sont susceptibles de présenter. Si l’on observe des échantillons choisis aussi semblables que possible, dans le plus grand nombre on trouve les petits spi- cules spiralés, nettement ou faiblement épineux, avec les extré- mités arrondies et légèrement recourbées ; sous cet aspect, ils sont, au dire de Hancock, propres à la Cliona northumbrica. Dans les autres, ils caractérisent la Cliona vastifica et se montrent épineux, droits pour la plupart ou bien deux ou trois fois coudés et tronqués aux deux bouts. La profonde ressemblance des échantillons examinés faisait naître sur l'opportunité de la distinction établie des doutes que vient confirmer la considération suivante : on rencontre quelquefois les deux formes réunies dans un même individu. Dans quelques spécimens de Cliona vastifica n. s., chaque sorte de spicules possède une forme grêle ; les spicules acérés grêles sont lisses et ne diffèrent pas, non plus que les spicules capités grêles, de ce qu’on voit dans la Cliona celata. Quant aux petits spicules grêles, ils ont ceci de remarquable qu'ils se rapportent aux spicules de Cliona vastifica Hanc., alors même que les spicules développés sont ceux de €. northumbrica Hanc. Histologie. — La description des cellules contractiles et vibra- tiles de Cliona celata convient aux mêmes éléments de Cliona vasti- fica. Les cellules conjonctives de cette dernière sont, comme celles de la plupart des Eponges, incolores et composées de petites sphé- rules protoplasmiques brillantes, parmi lesquelles on entrevoit un noyau clair. Ainsi que les cellules vibratiles, les cellules digestives con- tiennent des granules d'un pigment rouge orangé, insoluble dans l’eau douce, soluble dans l'alcool et l’éther ; c’est une variété de la CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 49 zoonérvthrine : une goutte d’acide sulfurique transformeen bleu sa coloration et le sulfure de carbone le dissout sans changement de couleur ; mais si on le traite au préalable par un acide, par une base et par l'alcool absolu, il se dissout dans le sulfure de car- bone en donnant une coloration rose (1). La plupart des Cliona vastifica étant d’un beau rouge orangé, quelques-unes sont seulement jaunâtres ; les quantités relatives de pigment déterminent ces variations individuelles. Par la dessicca- tion l'éponge peut devenir d’un jaune d’ocre pâle ou se décolorer complètement. Les œufs mûrissent en septembre et octobre ; ils ne diffèrent des œufs de Cliona celata que par leur couleur orangée. Papilles. — Les papilles porifères, dont la distribution dépend de la direction des galeries dans l’objet perforé, font saillie par des orifices dont le diamètre mesure rarement plus d’un demi-mil- limètre. On aperçoit souvent parmi elles quelques papilles larges d'un millimètre environ, qui servent à l’exhalation ; mais dans beaucoup de spécimens les oscules sont indistincts. Leur hauteur étant sensiblement égale à leur largeur, ces dif- férents organes s'élèvent fort peu au-dessus du calcaire qu'ils traversent. Ils ont tous même constitution anatomique. Ce sont des cy- lindres creux dont la base inférieure est nettement limitée au con- tact des tissus du lobe sous-jacent, et dont la base supérieure porte une couronne de faux tentacules. Leur charpente se com- pose de spicules du squelette et de spicules des membranes. Les spicules acérés ne se trouvent jamais dans les papilles des Cliones, (1) Par l'emploi de ces réactifs, C. de Mérejkowsky a constaté que beaucoup de pigments (Vélelline, Echinastrine, etc.) sont en rapport intime avec la Zoo- nérythrine et peuvent être transformés en celle-ci. — Bullet. Soc. Zool. de France, 1883, p. 81. Nouvelles recherches sur la Zoonérythrine et autres pigments ani- maux. ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 20 SÉRIE, —T,. V bis, supPL, 1887, — 4e Wém. 4, 50 ÉMILE TOPSENT. si l’on excepte, cela s’entend, certaines espèces, telles que la Cliona labyrinthica, où ils existent seuls. La paroi interne du cylindre, plus ou moins irrégulière, peut, par places, être proéminente dans la cavité centrale, toujours relativement vaste. Le corps de la papille est formé de cellules contractiles et conjonctives et de cellules pigmentées. Une pellicule revêt ses flancs sur lesquels abondent les spicules spiralés épineux. Les spicules en épingle se groupent en faisceaux verticaux au milieu de la masse cellulaire (PI. III, fig. 4 et 5). Les spicules des membranes sont en nombre assez restreint dans les deux tiers inférieurs de cette masse, mais ils s'accumulent dans son tiers supérieur en un bourrelet circulaire épais. En ce point la gorge de la papille est tendue d’une mem- brane contractile incolore, chargée de ces mêmes spicules, qui s’écarte pour laisser sortir l’eau, s’il s’agit d'un oscule, et qui, dans le cas contraire, se perce d’orifices toujours changeants et joue le rôle d’un tamis au même titre que le plateau des papilles de Cliona celata (PI. IIT, fig. 6). Enfin, au-dessus du bourrelet se découpent les pseudo-tentacules, simples prolongements des faisceaux de spicules du squelette qu’accompagnent des spicules spiralés et qu'enveloppe du tissu contractile. Au fond de la cavité s’ouvre un canal aquifère. | Dans les papilles qui se contractent, les orifices de la membrane disparaissent et les tentacules se recourbent au-dessus de la cavité centrale pour en défendre l’entrée. Pour qu'ellesentrent en activité, les pores dermiques s’ouvriront et les languettes spiculeuses se redresseront et souvent même se rejetteront au dehors. Quand les spicules fasciculés sont parallèles à l’axe de l’organe, on ne voit, de face, au milieu de la masse cellulaire, que leur coupe optique ronde et brillante. Il semble que Üarter ait pris ces points clairs pour les pores des papilles dela Cliona corallinoides (1). Parmi les papilles arrivées au terme de leur développement, le (1) Ann, Mag. nat. hist. 4e série, t, VIII. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 5] microscope révèle fréquemment à la surface des coquilles minées par la Cliona vastifica la présence de très petites perforations où s’établissent des papilles nouvelles. Il reste encore un fait à signaler au sujet des papilles : c’est la différence, constante autant que j'ai pu m'en assurer, de leur coloration sur les deux faces des valves de Lamellibranches attaquées par l'éponge. La face externe des Pecten, des Ostrea, des Cardium, etc., un peu colorée par elle-même, peut présenter des papilles du plus beau rouge orangé, et leur face interne blanche est perforée uniquement par des papilles jaune pâle. Il est bien certain que sur une pierre on verra toujours les papilles les _ plus foncées du côté qui était exposé à la lumière, mais on ne saurait admettre que les valves détachées reposent invariablement sur leur face interne. Pour quelques coquilles, l'embryon de Clione peut s'être fixé sur leur face externe, maisle retard qui estquelquefois apporté dansla production de papilles à leur face interne n’explique pas une différence de coloration qu’on chercherait en vain sur les papilles qui continuent à se former sur la première de ces faces, alors que les ravages de l'éponge se sont depuis longtemps étendus à la seconde. Peut-être y a-t-il là une accommodation spéciale ? Galeries et lobes (PI. IIT, fig. 1). — Les galeries creusées au début de la vie contiennent des ramifications assez déliées du corps de l’éponge ; celles de l’adulte gardent quelquefois leur disposition en réseau, mais la plupart du temps la Cliona vastifica perfore _ avec énergie et crible les coquilles attaquées au point de ne laisser entre ses lobes que de minces cloisons calcaires. Ces séparations sont toujours respectées, et c’est seulement dans les vastes cavités préexistantes que les lobes s'appuient directement les uns sur les autres. À la surface des objets perforés, les lobes communiquent avec l’extérieur par une et très souvent par deux papilles ; dans la profondeur, ils sont en rapport entre eux par des orifices étroits #9 ÉMILE TOPSENT. ménagés dans les cloisons, sur lesquels s'étend un diaphragme contractile. En moyenne, les lobes mesurent 2 mm. 112 delong sur Z mm. de large et à peu près autant de haut. Leur structure ne diffère que par des détails de ce qu’on a vu dans la Cliona celata : il n’y a dans les diaphragmes aucune orientation remarquable des spicules acérés et spiralés qui les soutiennent ; le revêtement des canaux aquifères est parsemé de petits spicules des membranes, et la chair des lobes est pleine de spicules de tension disposés sans ordre; enfin, représentant le squelette, des traînées de quelques spicules en épingle traversent les lobes et semblent se continuer de chaque côté des cloisons, les pointes marquant presque toutes le sens de l’accroissement de l’éponge. Les surfaces libres naturelles de la Clione, et, par exemple, celles qui bouchent l’entrée des tubes de Serpules, sont incolores entre les papilles qu’elles peuvent porter ; elles sont couvertes d’une cuticule et présentent les trois sortes de spicules : une quantité considérable de spicules spiralés qui se pressent immédiatement sous le revêtement externe, un assez grand nombre de spicules en épingle perpendiculaires à la surface et tournant leur pointe vers l’extérieur, et, entre ceux-ci, des spicules acérés qui s’entre- croisent pour augmenter la compacité du feutrage. Gemmules. — La Cliona vastifica se multiplie par gemmules. Sur la côte du Calvados, presque tous les individus bien développés possèdent de ces corps reproducteurs qui jusqu’à présent ont passé inaperçus, maloré leur taille et leur coloration. L'existence de gemmules n’avait encore été constatée que dans les éponges d’eau douce et dans une éponge fibro-siliceuse marine provenant des îles Shetland, nommée par Bowerbank Diplodemia vesicula (1). La description des fibres de cette dernière a porte O. Schmidt à penser que l’échantillon unique de Diplodemia pourrait (1) L. ct. IF p: 307; t NESpluex dal des + CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 93 être simplement un fragment ou une forme jeune d’une Ühalinée (1). Cette hypothèse me paraît confirmée par ce fait que j'ai découvert, pendant l'été de 1887,des gemmules dans deux Chalinées communes à Luc : dans le pied de la Chalina oculata Bow. d’une part, et d'autre part dans la Chalina gracilenta Bow., à la surface des pierres et des coquilles qui lui servent de support. J’ajouterai que ceque H.-J. Carter prenait pour les œufs de Suberites domuncula (2) n’est autre chose que des gemmules au contact du support de l'éponge. On les retrouve encore avec les mêmes caractères dans Suberites ficus. Il existe les rapports de structure les plus étroits entre les gemmules des Spongilles et celles des Chalina, des Suberites et de Cliona vastifica. Maïs ces dernières sont toutes dépourvues de spi- cules spéciaux rappelant les spicules uni ou bi-rotulés des Spongilla recurvata et Sp. fluviatilis, par exemple. Celles des Suberites sont même complètement dépourvues de spicules. Les gemmules de la Clione sont cachées dans les lobes. Leur couleur est rouge vif, ou jaune pâle dans des cas exceptionnels. Leur forme typique est ovoïde, un peu déprimée ; elle peut d’ail- leurs varier jusqu’à devenir tout à fait irrégulière. Leur taille n'a rien de fixe, mais est toujours relativement considérable, et fré- quemment leur longueur mesure près de 2 mm. et leur largeur 1 mm.lj4. Un petit nombre de lobes seulement renferment des gemmules, et c’est assez l'habitude qu'ils occupent alors une même région de l’éponge ; dans la règle, chacun d’eux ne contient qu’une gemmule, bien qu’il ne soit pas rare d’en trouver deux ou davantage, séparées ou accolées et soudées. La gemmule adhère fortement aux parois des galeries par sa face profonde qui se moule sur les fossettes dont elles sont creusées ; cette partie n’a d’autre protection que le calcaire, mais tout le reste (1) Grandz. Sp. Faun. Atl. Geb. 1870, p. 77: « Diplodemia vesicula scheint ein Bruchstück oder Jugendzustand einer Chalinee zu sein ». (2) Ann. and Mag. of nat. hist. 5e série, t. XII. On the ovigerous layer or Suberites domuncula. 54 ÉMILE TOPSENT. : de la surface, plongé dans la chair de l'éponge, est recouvert d’une membrane anhiste qui prend attach: tout autour sur la paroï du lobe (PI. IT, fig. 2 et 3). C’est, comme partout ailleurs, une pro- duction kératodique transparente, jaunâtre et résistante, d’une épaisseur notable. On met facilement à nu le corps ainsi nette- ment limité, mais il est moins aisé de le détacher. La masse est compacte, ferme au toucher, l’intérieur étant rempli d’éléments cellulaires serrés et de spicules. Les éléments cellulaires, vivement colorés, ressemblent à ceux des gemmules des Spongilles, des Cha- lina, etc. ; ils sont gros, polyédriques par compression réciproque, assombris par une accumulation prodigieuse de granules ronds qui cachent le noyau(P1. II, fig. 7). 11 peut y avoir dans les gemmules des spicules des trois sortes, ou de deux sortes seulement, ou même d’une seule sorte, n’importe laquelle ; enfin j’ai examiné quelques Cliones où les spicules y faisaient complètement défaut ; mais, en général, ils y abondent : ils sont surtout nombreux à la périphérie et s’y déposent tangentiellement à la masse et paral- lèlement entre eux pour doubler la membrane d’enveloppe ; au milieu des cellules, ils sont répandus au hasard. On trouve souvent parmi eux des productions siliceuses épais- ses et courtes qui semblent être des spicules en épingle mons- trueux. La figure 8, planche II, en montre toute une série prise dans une seule gemmule ; on en voit de fort petites, parfaitement sphériques, de plus grosses rondes ou ovalaires, d’autres où s’ac- cuse un rudiment de tête, d’autres enfin dont la tige, présentant un canal axial, s’allonge et se termine en une pointe fort obtuse. Sans en avoir observé une série aussi complète, Bowerbank avait rencontré de ces spicules monstrueux, car il en signale dans Æalic- nemia patera les formes spinulées qu'il regarde comme des spicules jeunes dont la tête est développée et dont la tige s’atténuera en s’allongeant (1). Il paraît hasardeux de partager cette manière (D) BL, ct, TS p'Ibtet pl rx. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES, 55 de voir, car ces corps siliceux sont rares dans les tissus de Cliona vastifica et des autres Cliones, et ce n’est guère que dans les gem- mules en question qu’ils existent profusément. L'état jeune des spicules en épingle doit être représenté plutôt par les spicules grêles capités qui sont nombreux dans nos trois Cliones, particu- lièrement dans les Cliona celata à 2 ou 3 papilles et dans les points où cette éponge devient revêtante. Les gemmules des Spongilles s’organisent en automne et éva- cuent leur contenu au printemps. Dans la Cliona vastifica, elles n'arrivent pas à maturité toutes à la même époque, car on les trouve toute l’année, même pendant que s’effectue la reproduction par voie sexuelle. Quant à la facon dont elles sont mises en liberté, à défaut de données précises, voici ce qu’on peut supposer à ce sujet : leur enveloppe, ne portant pas la moindre trace d’un orifice naturel, doit se détacher pour laisser sortir son contenu ; et, comme beau- coup d’entre elles acquièrent une taille qui ne leur permettrait pas de passer, rigides comme elles le sont dans leur coque, par les oscules, il est présumable qu’elles se dépouillent de leur revête- ment incomplet dans l’intérieur de l’éponge . Toutefois je n’ai pu consigner à l'appui de cette hypothèse qu'une seule observation de membrane vide dans les tissus. Les gemmules ont une protection tellement efficace qu’elles sont capables de résister à des influences funestes à l’éponge,et l’on drague assez souvent des coquilles où il ne reste d’autres vestiges de la Clione qui les à minées que ces corps rouges adhérant au calcaire et en parfait état de conservation. Les premiers essais tentés pour déterminer la Clione à gemmu- les me laissaient toujours hésitant, car, en tâchant de tenir compte des faibles différences indiquées par Hancock entre les Cliona nor- thumbrica et C. vastifica, je ne trouvais presque jamais à la fois tous les caractères de ces deux espèces : coloration intense ou lé- 56 ÉMILE TOPSENT. gère, spicules acérés égaux au tiers ou au quart des spicules en épingle, spicules spiralés arrondis ou tronqués aux deux bouts. etc. L'examen d’une foule d'échantillons, et, pour diminuer autant que possible les chances d'erreur, d'échantillons possédant des gemmules, a montré : 1° que la couleur de l’éponge peut être rouge (et alors la Clione devient jaune d’ocre comme Cliona nor- thumbrica en se desséchant) (1) ou simplement jaune (et elle est blanchâtre de même que Clona vastiñca après dessiccation) ; 2° que les papilles sont alignées si les galeries sont peu nombreuses, éparses dans le cas contraire, et que les oscules restent indistincts ou acquièrent un diamètre double de celui des papilles porifères ; 3° que les plus grandes variations s’observent dans les rapports de longueur des spicules acérés aux spicules en épingle ; 4 et que, comme il a été dit plus haut, l’on trouve les spicules spiralés des deux prétendues espèces tantôt séparés et tantôt réunis dans un même individu. Il est nécessaire d’ajouter que tous ces caractères varient indépendamment les uns des autres. Ces considérations autorisent à opérer la fusion des deux Cliones, dont Hancock n'avait en somme étudié qu’un petit nombre de représentants. Et, bien que les spicules spiralés aient le plus souvent la forme qui devait servir à faire reconnaître Cliona northumbrica et qui semble être typique, le nom de Cliona vastifica a été conservé de préférence à l’autre, parce que, loin d’être loca- lisée sur les côtes du Northumberland, cette éponge habite toutes les mers. Voici, en résumé, les caractères de Cliona vastifica (novo sensu) : . ? Là Eponge perforante rouge ou jaune orangé, composée de lobes en série ou pressés les uns contre les autres et communiquant entre eux par des orifices étroits pratiqués dans le calcaire. Papilles pe- (1) Hancock n’a eu entre les mains que des spécimens desséchés. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 97 tites, parmi lesquelles ne se distinguent pas toujours les oscules. Spicules de trois sortes, sans atrophies : spicules du squelette spi- nulés, à tête globuleuse, ovalaire ou trilobée, longs en moyenne de 240-250 x ; spicules de tension acérés, épineux, courbés, attei- gnant rarement la moitié de la longueur des précédents ; et spicu- les des membranes très courts (en moyenne 13-15 # de long), spiralés, épineux, à extrémités généralement arrondies et un peu recourbées. Reproduction par voie sexuelle et par gemmules. $ 3. — Cliona lobata, Hancock. Hancock, qui créa l'espèce, n’en avait vu que deux spécimens desséchés, l’un sur une /Jaliotis tuberculata de Guernesey, l’autre sur une Ostrea de la côte Ouest de l’Ecosse. J’en ai, pour ma part, examiné une vingtaine, et je suis certain d’en avoir laissé passer bon nombre dans les dragages. L'espèce n’est donc pas très rare à Luc, maisses papilles pâles et exiguës sontdifficiles à découvrir au milieu des productions diverses dont les vieilles coquilles sont pres- que toujours chargées. Par suite de l’atrophie complète des spicules de tension, il n’y a que deux sortes de spicules (PI. VII, fig. 2). Ceux du squelette sont disposés en trainées assez pauvres dans les lobes et consti- tuent la charpente des papilles. Ce sont encore des épingles, cour- bées ou droites, qui atteignent, dans les Üliones vigoureuses, 250 » de long et 4 « de large au-dessous de la tête. Le plus souvent la tête est surmontée d’une pointe obtuse très courte et se mon- tre trilobée ; mais elle est fréquemment sphérique. Les spicules capités grêles sont abondants. Pas plus ici que dans les deux éponges déjà étudiées, ils n’entrent jamais dans la com- position des papilles. Les spicules des membranes jouent en même temps le rôle de spicules de tension. Ils sont cylindriques, en zigzag, épineux. Une même préparation en renferme de toutes dimensions, depuis 58 ÉMILE TOPSENT. des bâtonnets finement et entièrement épineux, droïts ou une seule fois coudés, et des petites étoiles de cinq », jusqu’à des spi- cules robustes 9-10 fois coudés, presque lisses, à l'exception de leurs angles qui portent quelques pointes aiguës. Ces derniers peu- ventne pas mesurer moins de 60-65 # de long sur 4 » 112 de large ; mais parfois, avec la même longueur, ils sont à peine épais de 1 #et ne sont armés d’épines qu’à leurs extrémités. Le diamètre des papilles porifères n'excède pas 150 », et il faut compter le double environ pour celui des oseules ; la hauteur de ces divers organes ne dépasse pas la longueur d’un spicule en épingle. Les papilles de la Cliona lobata sont donc excessivement petites et ne font nullement saillie à la surface du corps perforé ; leur nombre est considérable, mais comme il varie pour chaque lobe, on les trouve irrégulièrement distribuées (PI. III, fig. 8). D’après ce qui vient d’êtredit, on comprend que dans la charpente des papilles il n’y ait qu’une seule hauteur de spicules; ceux- ci se groupent par 5-6 en 7 ou 8 faisceaux et s’orientent, comme toujours,la pointe vers l’extérieur. Les faisceaux découpentla papille en autant de pseudo-tentacules capables de s’incliner au- dessus de la cavité centrale pour en fermer l’entrée. Les spicules des membranes abondent naturellement au milieu des spicules du squelette et s'accumulent autour des pointes de ceux-ci; remarquons pourtant que ce sont surtout les petites formes qui se rencontrent là et qu’il faut chercher les plus grandes dans les galeries. (PI. III, fig: 00), D’ordinaire, la Cliona lobata est branchue et les oscules sont situés aux points où les galeries se croisent. Les lobes, plus ou moins arrondis et larges tout au plus de 1" 112, sont séparés par des diaphragmes contractiles sans structure particulière. Ici comme dans les Cliona celata et vastifica, chaque lobe peut com- muniquer avec le dehors par des orifices percés dans les deux faces de la coquille attaquée, si celle-ci est assez mince, s’il s’agit, par exemple, d’une valve de Mactra ou de Pecten opercularis. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 59 Les éléments cellulaires (PI. III, fig, 10), et surtout les cellules vibratiles, sont, dans la plupart des cas, de plus grande taille que ce qu'on a coutume de voir dans les Cliones. Les cellules conjonc- tives sont incolores. Le pigment jaune de l’éponge est contenu dans les cellules vibratiles et les cellules digestives. Il n’ya rien à ajouter à ce que nous avons dit de la répartition des divers éléments dans la Cliona celata. Je n’ai pas eu occasion d’observer la Cliona lobata en voie de repro- duction. CHAPITRE II. OBSERVATIONS SUR LA BIOLOGIE DES CLIONES. BI Par quel procédé les Olionides parviennent-elles à creuser leurs retraites ? (est ce qu’on ne saurait dire exactement. Des recherches récentes ont montré que des corpuscules calcaires dont la forme est plan convexe sont détachés, puis rejetés à mesure que l’éponge grandit et s'enfonce, mais on ignore s’il s’agit simplement d’un phénomène mécanique difficile à expliquer, ou si ce phénomène est accompagné d’une action chimique; on se demande enfin quelle influence détermine la forme constante des corpuscules. Maintenant que nous connaissons bien l’être qui perfore, l’exa- men d’un corps perforé devient indispensable. La solution du problème doit nous échapper encore, mais du moins cette étude ne sera pas infructueuse : elle nous révèlera certaines erreurs commises par les auteurs concernant l’état de la surface de l’éponge au contact des parois de ses galeries et nous permettra de discuter avec avantage le rôle d’un acide dans l’acte de la perforation. Le choix s’est porté sur une valve supérieure d’Ostrea edulis, 60 ÉMILE TOPSENT. parce que, composé de plusieurs couches bien définies, ce corps semblait propre à fournir des indications intéressantes. Etude d'une valve supérieure d'Ostrea edulis perforée par une Clione.-— Des lames calcaires solides et transparentes constituent, comme on sait, la majeure partie de la valve. La figure 1, pl. IV, représente, arrachée à l’une de ces lames, une esquille dont la surface est irrégulière à cause des cassures provoquées. On y voit, du côté gauche, la paroi d’une galerie large creusée de fossettes relativement vastes correspondant aux corpuscules détachés par l'éponge. De tout corpuscule la face qui vient d’être mise à nu est arrondie, mais l’autre porte les empreintes de ceux que la Clione a dû enlever pour arriver jusqu'à lui. Ou comprend que ceux-là seuls soient réellement plan-convexes que l’embryon a découpés en entamant la surface sur laquelle il s’est fixé. Les autres reçoivent des formes dont la figure 13, pl. IIT, donne une idée. Des striations fines s’observent souvent à leur surface, qui sont dues simplement à la texture du calcaire. La Clione contient presque toujours une grande quantité de corpuscules dans ses canalicules au voisinage des parties sur lesquelles s’exerceactivement sonpouvoir destructeur (fig. 12, pl. IIT) ; ils suivent les méandres du système aquifère et sont évacués avec les matières non assimilables. Dès qu’une éponge perforante, placée dans une eau bien calme, ouvre ses orifices, le courant exhalant rejette les corpuscules qui s’entassent en une poussière blanche au pied de chaque papille osculaire. Pierres, coraux ou coquilles, les abris divers sont minés de la même façon par toutes les Clionides, et l’aspect des parois des galeries est partout semblable. Les fossettes dont nos trois espèces indigènes pointillent leurs parois mesurent le plus souvent environ 45 » de diamètre. Mais le volume des corpuscules varie beaucoup avec les points observés, comme le montrent, dans la fig. 1, pl. IV,la coupe d’une petite galerie et le dessin d’une galerie en formation; et, si l’on excepte la Cliona quadrata Hanc. dont les logettes sont CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 61 plutôt cubiques que sphériques, il semble bien difficile de recon- naître les espèces d'éponges perforantes à l’inspection des cavités qu'elles creusent. Entre les assises calcaires normales sont intercalées par places des lames de conchyoline plus ou moins étendues qu’on ne saurait déchirer sans un effort appréciable. Leur teinte varie avec leur épaisseur qui, généralement assez faible, est cependant susceptible de mesurer près d’un demi-millimètre (cela dans certaines huîtres exotiques). Elles sont donc, suivant les cas, jaune verdâtre, jaunes ou jaune orangé, presque rouges. Ces lames tantôt sont homogènes et tantôt contiennent, enfouis dans leur substance, une grande quantité de trèspetits cristaux cubiques de carbonate de chaux qu’on ne peut énucléer qu'au moyen d’un grattage violent. Le calcaire, au contact de la face externe de ces lames, ne présente aucune modification d'aspect, mais, du côté interne, il est, sur très peu d'épaisseur, lactescent, semi-fluide. Les couches adjacentes de part et d'autre laissent un dépôt blanchâtre abondant quand on les traite par l'acide azotique. Les propriétés de la conchyoline sont connues: la résistance de cette substance aux acides est ici particulièrement intéressante, Toutes les fois qu’en se ramifiant une Clione rencontre une lame de conchyoline, elle la traverse pour s'étendre, quelles qu’en soient d’ailleurs l’épaisseur et la consistance. Si la lame est mince, l'éponge la découpe en prismes polygonaux qui ont son épaisseur pour hauteur (PI. IV, fig. 3); mais si la perforation ne peutêtre achevée d’un seul coup, la Clione procède en détachant des corpuscules semblables à ceux qu’elle taille dans les assises calcaires (PI. IV, fig. 7). Les prismes et les corpuscules n’ont pas les mêmes dimen- sions dans tous les points attaqués. Lorsque la conchyoline est parsemée de petits cristaux, bien que ceux-ci soient éminemment destructibles parles acides, l’éponge ne cherche jamais à en tirer profit et les lignes de découpure peuvent remplir tout l'intervalle entre deux cristaux voisins. Jamais on ne 62 ÉMILE TOPSENT. voit sur les contours des corpuscules extirpés de vides correspondant à des cristaux dissous (PI. IV, fig. 4). La conchyoline ne paraît nullement entraver la marche de la Clione, et l’on rencontre des perforations de minces lamelles de cette substance qui continuent directement celles du calcaire situé à leur contact (PI. IV, fig. 8). À travers la couche nacrée qui limite la valve intérieurement s’apercoivent des régions irrégulières, très blanches, où, au lieu d’être disposé en plaques solides et transparentes, le calcaire se montre très friable, riche en matière organique, formé d’un enche- vêtrement de petites aiguilles et opaque sous une faible épaisseur ; il est encore stratifié, maisses assises, séparées par des lames trans- parentes, paraïissentstriées verticalement. Ces régions sont perforées comme le reste de la coquille et les corpuscules dont la Clione prend la place n’ont en eux rien de remarquable (P1. IIT, fig. 14). A l’extérieurs’étendentdeslames feuilletées brunâtres confondues vers la charnière, mais indépendantes vers le bord postérieur de la coquille. La matière organique qui entre dans leur composition forme des mailles remplies de calcaire, colonnettes prismatiques, faciles à diviser dans le sens vertical et dans le sens horizontal. On réussit à étudier l’action de l’éponge sur cette couche des prismes en cherchant des feuillets minces qui sont quelquefois interposés entre les lames épaisses. La Clione, sans tenir compte des alter- nances de calcaire et de conchyoline, taille dans la masse des cor- puscules composés qui ont le même volume et la même forme que de coutume (PI. IV, fig. 2). | Les perforations de la face interne méritent davantage d'attirer l'attention. Quand le mollusque producteur de la valve est mort avant que les galeries de la Clione n'aient atteint la nacre, l’œuvre de destructrion s’achève naturellement, comme s’il s’agissait des couches profondes (PI. IV, fig. 8). Mais si l’huître est encore vivante au moment où l'éponge menace d'établir des papilles sur cette face, les choses ne se passent pas de la même façon. Certains mollusques iuttent contre l’invasion du parasite en déposant un bouchon cal- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. - 63 caire sur chaque blessure : l’intérieur des coquilles d’'Haliotides, notamment, estsouvent couvert de tubérosités qui n’ont pas d’autre raison d’être. Dans l'huître, que nous étudions, la coquille subiten chaque point attaqué une modification qui consiste en l'apparition d’une.lame mince et étroite de conchyoline sans cristaux, visible à l'œil nu comme une petite tache jaune verdâtre (PI. IV, fig. 10). Les annélides qui pénètrent dans les valves d’huîtres provoquent exactement le même phénomène et les paroïs de leurs trous sont aussi colorées en jaune verdâtre par la conchyoline. J’ajouterai que la face interne des valves du Pecten maximus, qui semblent être rarement perforées du vivant de l’animal, offre des taches brunes ayant la même signification lorsque les prolongements des Cliones essaient de se frayer un passage à travers elle. Nous savons que la conchyoline ne peut être considérée comme un obstacle sérieux au développement de l’éponge qui , de fait, la morcelle avant ou après la mort du mollusque(P1. IV, fig. 9). Dans ce dernier cas, elle peut en toute liberté agrandir ses papilles, et celles-ci deviennent peu à peu aussi importantes que celles dont le côté externe de la valve est criblé. Tout ce qui vient d’être dit s'applique aussi à cette plaque épaisse, dure, riche en matière organique traçant des bandes rou- geâtres parallèles, sur laquelle prend insertion le muscle adduc- teur des valves. On chercherait en vain dans les excavations faites par la Clione les indices d'agents spéciaux de la perforation. Tout ce qu'il est possible d’observer parfois au voisinage des galeries, ce sont de longs filaments jaune verdâtre ou verts qui se ramifient dans les parties non encore attaquées de la coquille , se dilatent légèrement de place en place et s’anastomosent ou s’entre- croisent en tous sens. (On voit un de ces filaments en #z de la fig .1, pl. IV). Nassonow, en étudiant sa Cliona stationis, les a considérés (L. c., p. 302) comme des prolongements très fins, sans cellules 64 ÉMILE TOPSENT. visibles et sans squelette, du corps de l'éponge, dont le rôle serait de marquer les points où doit s'exercer l’action perforante. Leur coloration indiquerait que le mésoderme contribue pour une grande part à leur formation, car le pigment est contenu exclusivement dans les éléments de cette couche (1). Enfin l’auteur constate que leur existence fournit la seule explication convenable des “inter- valles que laissent entre elles les cellules ectodermiques : ce seraient autant d’orifices ménagés pour le passage des filaments qui partent de la surface de l'éponge et pénètrent dans le cal- caire. Mais nous savons que les intervalles auxquels il est fait allusion sont essentiellement changeants et dépendent de l’amæbicité des cellules contractiles. De plus, nous avons constaté que, dans les Cliones, comme aussi d'ailleurs dans les autres éponges (voy. 2° partie), le pigment est contenu à la fois dans les cellules digestives et dans les cellules vibratiles. À première vue, ces sortes de pseudopodes de couleur variable, munis d’une membrane d’enveloppe facile à mettre en évidence au moyen de l’acide chlorhydrique, ne sont pas en rapport avec ce que l’on connaît de la structure intime des éponges ; et l’hypothèse émise à leur sujet semble elle-même peu admissible : elle leur attribue un rôle inutile, puisque les Cliones creusent leurs galeries toujours de proche en proche. En essayant de déterminer si ces prétendus prolongements périphériques du corps de l'éponge naissent surtout des parties jeunes et actives, j'ai constaté, d’une part, qu’ils peuvent manquer complètement dans les coquilles qu’une Clione ravage durant Ja vie du mollusque (valves de Pecten opercularis, de Pecten maæimus, par exemple), et, d’autre part, qu’ils sont abondants dans toutes les vieilles coquilles imperforées. A) & In ihrem Bau das Mesoderm eine grosse Rolle spielt, da Pigment aus- schliesz:lich nur die Elemente des letsteren enthalten, » CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 65 La bibliographie (1) m'apprit que, considérés comme indé- pendants des Cliones, ces filaments sont connus depuis longtemps et ont été figurés dans plusieurs mémoires ayant trait à la cons- titution des coquilles. On les a découverts dans une foule de corps marins, coquilles, coraux, écailles de poissons, etc., dans divers débris fossiles, dans les gastéropodes d’eau douce ; enfin je les trouvais récemment dans des valves d’Unio de l’Orne. Les auteurs s'accordent à les regarder comme des parasites végétaux. Algues ou champignons, ce sont, en tout cas, des Thallophytes perforants qui profitent des canaux des Cliones, comme aussi des trous de vers, pour gagner directement la profon- deur des coquilles où ils enfoncent leurs ramifications. Au contact des excavations l'éponge a saconstitution normale, et le nitrate d’argent montre qu’elle est limitée de ce côté par un re- vêtement continu de cellules contractiles (P1. II, fig. 3). Tout cela ne nous fait pas comprendre le phénomène intime de la perforation. On ne peut cependant pas admettre que les spicules jouent un rôle dans ce travail mystérieux. Hancock lui-même, qui émet en passant cette hypothèse, la reconnaît si mal fondée qu’il cherche, sans plus de succès, comme nous le dirons bientôt, d’autres agents d'une action mécanique. D’ailleurs Nassonow nous apprend que les spicules de la jeune Clione n'apparaissent qu’à (1) Carpenter. Report of the prit. Assoc. for the advanc. of Science, York. 1844. John Quekett. Lectures on Histology, vol. 11, 1854, Æose. Quart. Journ. Micr. Soc., n° 10, p. 7, 1855. Weld. Sitzungsb. d. Kaiserl. Akad. d. Wissensch, — Math. Naturw. Classe xxxII1 Bd. Wien, 1859. Kôlliker. Ann. and Mag. of nat. hist. 3e série, t. IV, 1859, p. 300. Stirrup. Proc. of the Lit. and Philos. Soc. of Manchester, vol. xI, 1872, D. 137. Moseley. Proc. Roy. Soc, vol. XxXIV, 1875, p. 64. Duncan. Journ. KR. M. Society, 1881, vol. I, nos 4 et 5. Id.. Proceed. of the Roy. Soc. London, vol. XXV, 1876-1877. W. Roux. Zeitsch. f. wiss. Zoologie, XLV Bd. ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2° SÉRIE, — T. Vis, suppL. 4887. — 4e Mém. 5. 66 ÉMILE TOPSENT. partir du moment où celle-ci s’est mise tout entière à l’abri dans l’objet attaqué. Ce fait est, il est vrai, en désaccord avec ce que l'on constate dans les autres éponges siliceuses, dont les embryons sont armés de spicules bien avant leur fixation, mais il faut remar- quer combien l'embryon de la Cliona stationis Nass. diffère de ceux qui ont été décrits chez les Silicisponges et ressemble au contraire à ceux des Eponges gélatineuses par tous ses caractères : par sa coloration uniforme, par l'existence dans son intérieur d’une grande cavité centrale limitée par une seule assise de cellules, enfin par la présence de cils sur ses grosses cellules postérieures. Nousn'avons pas ici de raison de douter des descriptions de M. Nassonow, et l'opinion qu’elles nous suggèrentest confirmée par cet autre fait qu'une éponge perforante, la Thoosa cacioides de Hancock, possède pour toute spiculation des corpuscules siliceux noduleux dont les tubérosités arrondies sont relativement grosses et par suite incapables de pratiquer de fines incisions. Hypothèses émises au sujet du mode de perforation. Quelques auteurs ont essayé d'expliquer le phénomène. En 1840, Duvernoy s’exprimait ainsi à propos de sa Spongia terebrans (Cliona celata Gr.) :« Ici les moyens mécaniques sont évidemment nuls. Il n'y a que les moyens chimiques qui puissent être mis en jeu par un organisme privé de toute force motrice appa- rente. » Contrairement à cette hypothèse, Hancock remarquait en 1846 que « les Cliones jouissent d’un pouvoir contractile tellement énergique qu elles semblent, par cette qualité, s’élever beaucoup au-dessus des autres Spongiaires »; il ajoutait que l’extrême simplicité de leur structure organique étant connue ,il est impossible de croire à une action chimique de leur part. Il formulait par con- séquent une conclusion inverse : € Zn the siliceous granules of the surface and in the contractility of these sponges, we thus find an explanation of their excavating powers. » à: hp yéssi: "6 lradédé Rita As. 0 CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 67 Malheureusement les observations sur lesquelles est basée cette manière de voir sont entachées d’erreurs relevées fort justement par Bowerbank et reconnues en partie par l’auteur lui-même, qui avouait en b867 que les grands granules siliceux (siliceous granules) ou corps cristallins (erystalline bodies, comme il les appelait aussi) trouvés à la surface de la Cliona celata € sont simplement des fragments du tissu corné membraneux de la coquille d’huître perforée ». J’ai déjà insisté sur ce point que les grands corps cristallins ont seuls été abandonnés. Des siliceous granules de deux sortes avaient été découverts : les plus grands mesuraient,4 et les plus petits! de pouce de large. Or il est très facile de reconnaître dans les figures représentant ces corps (1) que les uns et les autres proviennent de lames de conchyoline plus ou moins dissociées. Une rectification incomplète n’a rien changé aux effets d’une méprise malencontreuse : Hancock a continué à considérer les petits corps cristallins comme les principaux agents d’un travail mécanique et, sur la foi de ses déclarations, Duchassaing et Michelottien 1864 et Fischer en 1868 ont répété ses conclusions. Deux hypothèses contradictoires sont, en somme, tout ce qui a été écrit sur la matière jusqu'en 1883. Or Nassonow, qui a repris la question à cette époque, se trouve, lui aussi, réduit à des suppositions : il a bien vu l’embryon dépourvu de tout instrument de perforation insinuer dans l’abri choisi des prolongements charnus de sa masse et tailler les corpuscules dont il prend la place, maïs, pour expliquer de quelle façon le calcaire est entamé, il est obligé d'admettre « qu’ilse dégage un acide dontla forte réac- & tion alcaline de l’eau de mer empêche de constater la présence ». Diverses considérations font douter de l’intervention d’un acide dans le travail de la Clione. On connaît la principale : la conchyoline est perforée exac- tement comme le calcaire. (1) L. c., 1849, pl. xII, fig. 2 et 3. 68 ÉMILE TOPSENT. On a remarqué aussi que les cellules contractiles en contact avec lesp aroïs des galeries n’affectent aucune disposition spéciale et qu'il en faut un certain nombre pour tapisser chaque logette (PL. I, fig. 3).Eh bien ! si un acide était exsudé ou exhalé par ces éléments dépourvus de membrane, ce devrait être par toute leur surface, ou tout au moins en des points multiples de la couche appliquée contre le calcaire, ce qui ne permettrait nullement à l'éponge de détacher des corpuscules de forme et de diamètre peu variables. En outre, l'acide serait dégagé aussi par les cellules qui revêtent les canaux et agirait sur ceux des corpuscules qui ne sont pas rapidement expulsés au dehors. J’ai constaté au contraire qu’au bout d’un très long temps on retrouve ceux-ci avec leurs arêtes vives dans des fragments d’éponge rétractés mais continuant à vivre. Que conjecturer dans ces conditions ? La puissante contractilité des éponges perforantes reste seule indéniable, mais comment affirmer qu'elle leur suffit pour entamer le calcaire et la conchyoline et que les cellules contractiles pénètrent par leur énergie propre dans ces substances suivant des lignes déterminées par la fonction ? Irritabilité et vitalité des Cliones. — Les expériences auxquelles C. de Merejkowky soumettait la Rinalda arctica (1) donnent ici les meilleurs résultats, car la moindre irritation, le fait, par exemple, d’agiter ou de renouveler l’eau des cuvettes où sont placées des Cliones, ou même d’y mettre en suspension des granules de carmin, provoque l’occlusion relativement rapide des papilles. La température exerce une influence évidente sur ces éponges, et j'en ai souvent vu contracter énergiquement leurs papilles quand elle s’abaissait vers 0° centigrade, pour les rouvrir dès qu’elle s'élevait de nouveau. (1) Etudes sur les Eponges de la Mer Blanche. Mém. Acad. de Saint-Péters- bourg, vire série, t. XX VI, n° 7, 1878, p. 18. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 69 Toutefois c’est l’étroitesse des orifices qui paraît, plutôt que cette sensibilité, assez délicate il est vrai, mais dont les manifestations se produisent toujours progressivement, être un obstacle à l’entrée des petits animaux dans le système aquifère. Les œufs d’un petit crustacé (Copépode ?), introduits sans doute par l’aspiration des pores, se développent fréquemment, jusqu’au stade nauplien, dans les Cliona celata et vastifica. Ce Nauplius est le seul être qu’on ren- contre communément dans nos espèces indigènes. Une gêne persistante finit par imprimer des aspects bizarres aux papilles: les unes, saillantes maïs sans orifice apparent, portent alors un plateau à 3, 4, 5 angles bien marqués correspondant à autant de côtes verticales ; et les autres, arrondies à la base, se terminent par une pointe molle et effilée, longue souvent de plus de 2%" ,et composée de cellules contractiles et de cellules conjonctives qui ont enlevé à la portion basilaire une alignée de spicules consti- tuant leur charpente. À l'inverse des autres Eponges, les Cliones sont faciles à conserver en aquarium, de sorte qu'on peut suivre sur elles, et surtout sur la Cliona celata, ces alternatives d’activité et de contraction. D’autres expériences prouvent leur puissante vitalité. Quand on brise une pierre ou une coquille perforée, chaque fragment d’éponge peut continuer à vivre : il suffit pour cela qu'il ait une certaine épaisseur, car les parties voisines de la surface mise à nu se rétractent et s’organisent en un système protecteur. Les cellules contractiles et conjonctives s’accumulentau dehors en une couche jaune clair, très mince, qui, comme on sait, se trans- forme peu à peu en une cuticule sous laquelle tous les spicules de la région s’entre-croisent et composent une écorce solide (1). . Un morceau de Clione, privé de toute adhérence au calcaire, résiste de la même façon : il se contracte promptement et sacrifie (1) M. L. Vaillant a vu se reformer aussi les parties détruites de la Tethya lyn- curium. Compt. rend. Acad. Sc. 1869, p. 86. Note sur la vitalité d’une éponge de la famille des Corticatæ, la Tethya lyncurium. 70 ÉMILE TOPSENT. une partie de sa masse pour s’entourer d’un revêtement dermique. Qu'on l’abandonne quelque temps, un mois, par exemple, dans une chambre humide, on retrouvera les divers éléments vivants dans son intérieur et on reconnaîtra les cellules contractiles, les cellules digestives et les cellules conjonctives, et parmi elles des corpuscules calcaires parfaitement intacts. Et s'ils agit d’une Cliona celata, le seul changement qu’on pourra constater aura porté sur les cellules conjonctives qui seront de- venues presque incolores par suite de l’épuisement de leur graisse au profit du fragment tout entier. Aïnsi, perforantes et spontanément ou accidentellement re- vêtantes, les Cliones ne sauraient se passer d’une écorce périphé- rique consistante. Toutefois, grâce à l'autonomie de leurs cellules, une dénudation même étendue ne leur est pas funeste. Et l’on drague beaucoup de valves d’huîtres dont les lames externes se sont détachées et dont la surface n’est plus qu'une sorte de treillis calcaire dans les mailles duquel l'éponge a survécu à l’accident et s’est reformé une couche corticale et des papilles. [1 n’en reste plus de trace dans les points où la rupture n’avait pas laissé de quoi refaire une enveloppe dermique ; mais au fond de la plupart des mailles fait saillie, entourée généralement d’une aire revêtante, une papille dont la nature dépend vraisemblablement de l’ancienne fonction de la galerie qu’elle termine. Une telle constatation oblige à rejeter cette opinion émise par Hancock qu'après avoir criblé sa demeure jusqu'à lui ôter toute solidité, la Clione, mise à nu à la fin par une influence quelconque, meurt de sa propre énergie. Protégées comme elles le sont par elles-mêmes ou par les murs de leurs retraites, les Cliones n’ont guère à redouter les luttes de la vie sous-marine et poursuivent activement leur œuvre de destruc- tion, rendant inconsciemment, comme Leidy et Fischer l’ont fait remarquer, une quantité énorine de carbonate de chaux à la mer. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 7 Leur mort semble résulter surtout des changements que les cou- rants amènent dans les conditions du milieu ambiant : les pierres peuvent être envasées ou ensablées, et les coquilles roulées et mor- celées à l'infini, quelquefois rejetées à la grève. Presque toutes les coquilles sont susceptibles d’abriter les Clio- nes et quelques-unes seulement, trop minces ou trop nacrées, par exemple celles de nos Mytilus edulis, Donax trunculus, etc., demeu- rent ordinairement intactes. Pour la plupart, elles ne sont perforées qu'après la mort du mollusque qui les a produites ; mais les Huîtres(1) et les Haliotides sont attaquées vivantes ; ilen est souvent de même du Pecten opercularis ; enfin j'ai constaté pareil fait une fois sur le Pecten maximus. Les Cliones et l'Ostréiculture. — I] est remarqtüable que les Hui- tres ne perdent pas de leurs qualités, et qu’elles restent grasses et produisent du naiïssain alors même que leurs valves sont criblées jusqu à la lame interne ; on ignore même si elles succombent à un empoisonnement ou à cette décomposition de leur coquille dont elles ne paraissent nullement souffrir. Cependant, au témoignage de tous les ostréiculteurs, les atteintes des Cliones leur sont funestes. La citation suivante que j'emprunte à M. Giard (1. c.) donne une idée du préjudice que la Cliona celata, entre autres, est capable de cau- ser aux huîtrières : & Il y a cinq ans, à Saint-Vaast-la-Hougue, les dragueurs d’huîtres avec lesquels Je vivais m'ont plusieurs fois parlé de ce fléau qu’ils connaissent bien et qu’ils nomment la mala- die du Pain d'épices (à cause de la couleur jaune, visible même sans briser les coquilles, sur les papilles qui font saillie par les ouvertures superficielles ). Ils m'ont affirmé qu'en peu de temps des bancs entiers avaient été détruits par ce parasite qui, selon eux, fait plus de tort aux huîtrières que la pêche en temps prohibé. » Les bancs naturels sont surtout ravagés. En 1880, les ostréicul- (1) Je n'ai jamais trouvé une seule éponge perforante sur les valves de l'huître portugaise (Gryphæa angulala). 72 ÉMILE TOPSENT. teurs du bassin d’Auray s’émurent de l’envahissement par la Cliona celata d’un des bancs de la rivière d’Auray (le banc de Locqueltas), où ils s'approvisionnent, au mois de'mars de chaque année, d’huîtres destinées à donner du naissain. M. Giard proposa à cette époque d’introduire des blocs de calcaire dans le voisinage ou au pourtour des huîtrières, dans l’espoir que les éponges se fixeraient sur ces blocs de préférence aux huîtres mortes ou aux huîtres vivantes. Ce procédé n’a point recu d’appli- cation, et il estdouteux qu’il eût réussi, car, sur nos côtes du Calva- dos, malgré la nature calcaire du fond, toutes les huîtres âgées sont minées par le parasite. L'administration de la marine prit d’autres mesures et prescrivit en mars 1882 un nettoyage à fond des endroits infestés. Sans doute les Cliones n’ont ps disparu complètement sur ces points, mais les ostréiculteurs se montrent assez satisfaits du résultat de ces opéra- tions (1). : D'autre part, dans les établissements ostréicoles, où les huîtres | sont l’objet de soins constants, les dommages ne sont pas sensibles. D'ailleurs les conditions y sont défavorables à l’existence des Cliones, surtout dans les zones hautes du rivage utilisées pour l’élevage, où elles se trouvent à découvert pendant une partie de chaque marée. On constate en effet à Luc que la Uliona celata ne s’avance guère sur la grève au-dessus du niveau du balancement des marées de syzygie. Enfin chaque année les huîtres de 3 à 4 ans sont livrées à la consommation : on expédie à cette occasion toutes celles qui sont perforées, non sans en avoir soigneusement gratté les coquilles. Les embryons des Cliones ne se fixent pas sur les huîtres âgées de moins de deux ans, aussi ne sont-ils redoutables que pour ceux de ces mollusques qui sont placés dans les claires où ils atteignent (1) Je dois ces renseignements à la bienveillance de M. le commandant Ragiot, ostréiculteur à Auray, qui a présenté dans le Bulletin de la Société ostréicole du Bassin d’Auray, 1881, des remarques au sujet de la Cliona celata, ennemie de l’ostréiculture. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 73 la taille et la perfection désirables. Encore ne serait-il peut-être pas bien difficile d’y prévenir tout dégât de leur part. Ne pourrait-on pas, par exemple, établir à l’entrée des claires, pendant les mois de reproduction de ces Eponges (septembre et octobre), une sorte de filtre composé d’une accumulation de vieilles coquilles de toutes sortes (1) qu'on aurait eu soin de dessécher au préalable pour être sûr qu'elles ne contiennent pas elles-mêmes de Cliones ? Les embryons ciliés venant de la mer s’arrêteraient tous ou presque tous sur le filtre. En décembre, on jetterait à terre les coquilles qu'on avait entassées, tuant ainsi tout ce qu'elles auraient retenu d’éponges. En outre, puisqu’on examine etq"1’on nettoie souvent les huîtres, il n’y aurait aucun inconvénient à plonger pendant quelques minu- tes, et à plusieurs reprises, dans l’eau douce toutes celles qui sont contaminées ; on prendrait soin d'agiter le récipient pour inquiéter les mollusques, et ceux-ci n’auraient nullement à souffrir de ces courtes immersions dans un liquide qui tuerait infailliblement la Clione en faisant éclater tous ses éléments cellulaires. Enfin les huîtres draguées qui sont envahies par le parasite et qui ont donné du naïssain en juin-août dans les pares de reproduc- tion devraient, à la fin d’août, subir la même opération avant d’être parquées dans les claires. J’estime que le fait de préciser aux ostréiculteurs l’époque où ils ont à se mettre en garde contre la propagation des Cliones aurait son utilité ; cette donnée nouvelle pourrait leur suggérer des idées que des hommes privés de connaïssances techniques ne sau- raient concevoir. (1) On sait que nos principaux établissements ostréicoles sont situés sur les côtes siliceuses du Morbihan. 74 ÉMILE TOPSENT. CHAPITRE III. RÉVISION DE LA FAMILLE DES CLIONIDES. Les éponges perforantes qui vivent dans les différentes mers se distinguent sinettement desautres Silicisponges par leur biologie et sont toutes si semblables entre elles qu'il était naturel de les réunir, comme l’a fait J.-E. Gray en 1867, dans une famille à part pour laquelle le nom de Clionidae était tout indiqué. Les genres quicomposent cette famille ne sont pas nombreux, mais l’un d’eux, le genre Cliona (Cliona Gr., Vioa Nard.), est riche en espèces ; malheureusement la liste des noms qui s’y ratta- chent est en réalité bien plus longue que ceïle de ses espèces connues, d’où l'impossibilité dedresserrigoureusementle tableau des Clionides. De certaines Cliona nous ne savons que le nom ; d’autres ont été décrites sans la moindre indication des caractères de la spicula- tionqu’on sait être les moins variables et dont on doit tenir compte avant tout ; enfin l'existence de très petits spicules des mem- branes, découverte par Hancock en 1867 seulement, a été ignorée de quelques auteurs, de sorte qu’une même éponge a pu être plusieurs fois dénommée. J’aurais voulu apporter un peu d'ordre dans cette nomenclature, mais la comparaison des descriptions ne m’a souvent permis que d'émettre un doute,et l’on comprendra que j'aie agi avec la plus grande circonspection. Les naturalistes qui ont en leur pos- session lestypesd’auteurs sont seuls capables de compléter la révision que j'ai cru devoir entreprendre. | Une excursion faite en septembre 1886 surles bords de la Médi- terranée m’a misà même de rapprocher la faune des Clionidesde nos côtes de Provence de celle de la Manche et de l'Océan. Quant aux espèces exotiques que j'ai étudiées, elles proviennent de plusieurs sources : M. Joyeux-Laffuie a bien voulu m'autoriser à examiner CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 75 les perforations des doubles de coquilles que possède le musée de Caen; M. Lennier, conservateur du Muséumdu Havre, m'a commu- niqué quelques spécimens intéressants; enfin, au cours de deux voyages au Mexique, M. M. Touret, capitaine d’un trois-mâts long courrier, a eu la complaisance de draguer à mon intention sur le banc de Campêche. Parmiles matériaux misà ma disposition, j'ai rencontré quelques- unes des Clionides décrites par Hancock et plusieurs formes nou- velles. Toutefois le nombre des espèces dontj'aipu prendre connais- sance de la sorte est petit, comparé à celui des coquilles qu’il m'a fallu fouiller. À part quelques Cliones très communes et fort répan- dues, j'avais peu de chances de retrouver les autres, qui n’avaient été vues qu'une ou deux fois ; leur recherche devait être d’autant moins fructueuse que la plupart des coquilles de collection ne conte- naient plus trace des éponges qui les avaient perforées, sans doute parce que celles-ci avaient péri avant qu’on les recueillit ; leurs galeries avaient alors été lavées si bien par la mer qu'il ne restait pas, même dans leurs lobes les plus profonds, de spicules leur ayant appartenu : je n’y trouvais que des grains de sable, quelques spicules introduits accidentellement et des cadavres d’Acariens. Les Clionides desséchées ne ressemblent guère aux autres éponges dans les mêmes conditions, car leur squeletteest insuffisant à maintenir leur forme ; elles se présentent comme des revêtements membraneux minces des galeries, le plus souvent jaune pâle, quel- quefois brunâtres, notamment s’il s’agit de la Cliona celata ou de toute autre espèce dont les cellules conjonctives pleines d’une graisse colorée rancie apparaissent comme autant de points jaune foncé. Il peut arriver qu'uneéponge libre remplisse après coup les lobes laissés vides par la mort du premier occupant, mais l’absence de corpuscules calcaires dans sa masse et la disposition même de ses spicules sont des caractères auxquels on ne saurait se méprendre. Les orifices arrondis des trous de quelques annélides {Leuco- dores) sont de même dimension que les papilles de beaucoup de 76 ÉMILE TOPSENT. Oliones et se trouvent parfois en si grand nombre à la surface des coquilles qu’il est très difficile de distinguer leur groupement par deux; mais en enlevant une esquille à l’objet perforé, on voit queles canaux ne conduisent dans aucune dilatation semblable à un lobe et qu'il est inutile d’y chercher les restes d’une Clione. Il existe d’autres causes d’erreurs momentanées sur lesquelles il serait oiseux d'insister : on arrive à reconnaître du premier coup d’œil la nature des perforations diverses. La description précise du spécimen presque toujours unique des espèces exotiques (Cliona Carpenteri, C. millepunctata, ete.) constitue peut-être la plus sérieuse difficulté de la détermination des Cliones. Il faut savoir, comme nous l’avons appris sur nos éponges indigènes, combien varient les rapports entre les diffé- rentes sortes de spicules, et la forme et la distribution des papilles et des lobes, pour ne pas se croire obligé d’établir une foule d’es- pèces nouvelles. I. — Je consignerai d’abord le résultat de mes recherches sur des coquilles de toutes provenances. Genre CLIONA, Grant. Cliona celata, Grant. (PI. VII, fig. 1.) Je l’ai retrouvée, d’une part sur une Tridacna et sur un Spondylus de l'Océan Indien, et d’autre part sur un Pecten du golfe du Mexique. Les échantillons possédaient des faisceaux de spicules acérés grêles. Deux variétés se rattachaient à cette espèce: 1° Cliona gorgonioides. — En1849, Hancock en faisait une espèce distincte, mais il avouait en 1867 que ce n’était probablement qu'une simple variété de C1. celata. Il n’y a pas lieu de conserver cette désignation, car la description de l’auteur montre clairement qu’elle s’appliquait à des individus à spicules plus courts que de CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 71 coutume, comme 1l est si fréquent d'en observer dans les coquilles minces. 2° Cliona linearis, Sollas. — Cette variété doit aussi disparaître, puisque la Cliona celata typique présente les spicules grêles qui la caractérisaient. Cliona vastifica, novo sensu. (PI. VII, fig. 3.) Nous avons exposé les motifs qui portent à réunir les Cliona northumbrica et vastifica de Hancock. L’espèce ainsi comprise est l’une des plus répandues. Elle abonde sur les côtes d'Angleterre, sur nos côtes de la Manche, de l'Océan (Concarneau) et de la Méditerranée (Toulon) ; elle habite aussi l'Océan Indien, l'Océan Pacifique (N‘!°-Zélande), le golfe du Mexique. Cliona gracilis, Hancock. Un seul spécimen avait été trouvé sur un Pecten maximus &pro- venant probablement des Orcades », 1849. J’en ai vu un second sur un Zurbo de l’Océan Indien. Eponge jaune à l’état sec ; papilles très petites, galeries fort étroites, radiées. Spicules en épingle = 150 » de long, spic. en zigzag — 15-20 w. Cliona Carpenteri, Hancock. (PI. VII, fig. 4.) C’est l’espèce que j'ai le plus souvent rencontrée dans les col- lections. Leseul échantillon signalé jusqu’à présent provenait de Mazatlan (Océan Pacifique). Elle habite le golfe du Mexique, l'Océan Indien (Ceylan), la côte orientale d'Afrique (Gabon). Elle se distingue des deux éponges précédentes à trois sortes de spicules par ses spicules des membranes généralement droits, fu- siformes, munis de nodosités plus ou moins marquées, quelque- fois éparses, le plus souvent disposées sur plusieurs lignes circu- 78 ÉMILE TOPSENT. Jaires. Les spicules de tension sont forts et atteignent habituelle- ment les deux tiers de la longueur des spicules du squelette. Cliona lobata, Hancock. (P1. VII, fig. 2.) Habite les îles Anglo-Normandes (Guernesey), les côtes occi- dentales d’Ecosse, les côtes du Calvados et les côtes de Provence (Toulon). Je l’ai encore trouvée sur un Triton variegatum et sur une grande Ostrea de provenance inconnue. Nous savons que le court mucron obtus qui rend trilobée la tête des spicules en épingle s’efface fréquemment, aussi la valeur des espèces créées par Sollas et Ridley pour des individus à tête glo- buleuse paraît-elle discutable. En premier lieu, la distinction établie entre la Cliona subulata, Soll. (un spécimen, localité ignorée) et la Vioa Carteri, Ridl. (un spécimen, $.-E. du Brésil) semble inutile, puisqu'elle n’est basée que sur des différences dans la longueur et la largeur relatives de la tige des spicules en épingle de ces deux éponges. En second lieu, si le nom de Cliona subulata, qui a la prio- rité, devait être conservé, il ne servirait à désigner, si j en juge bien, qu’une simple variété de la Cliona lobata. Cliona millepunctata, Hancock. Le seul spécimen connu perforait un Cassis tuberosa de prove- nance non indiquée. J'en ai vu un second sur un Murex sp. ? de l’Océan Indien. Les papilles assez petites sont excessivement nom- breuses et pressées les unes contre les autres. Les spicules sont en forme d’épingle avec une tête elliptique ; ils mesurent 225-250 » de long et 4-5 y de large ; ils sont droits ou très légèrement cour- bés. Cliona quadrata, Hancock. Hancock dit en avoir vu un ou deux individus sur une 77r1- dacna gigas ; c’est aussi sur une 7ridacna gigas que j'en ai trouvé CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 79 un nouvel échantillon. Il est facile de reconnaître les spicules, longs d'environ 425 x, dont la tête est grosse et toute ronde, et dont la tige se renfle et atteint son maximum de largeur (15-18 ») un peu plus bas que son milieu, pour s’atténuer ensuite. Les pa- pilles sont assez grandes. La couleur brune après dessiccation est due à l’existence dans la Cliona quadrata comme dans la Cliona celata de cellules conjonctives contenant une graisse jaune qui brunit par oxydation. Cliona labyrinthica, Hancock. Sur Tridacna gigas. Epongejaune pâle; papilles petites, disposées sansordreapparent ;lobes petits; spicules acérés fusiformes ,courbés au centre, longs d'environ 100 x, larges de 4 x. Cliona Michelini, n. sp. (PI. VII, fig. 7.) Le spécimen type de cette espèce crible un Murex de l'Océan Indien. Les papilles porifères, excessivement nombreuses, n’atteignent pas :% de millimètre de large; les oscules, épars, mesurent à peu près le double. Les lobes sont petits et pressés les uns contre les autres. Deux sortes de spicules : 1° spic. du squelette capités, courts (150 ) et assez grêles (2 « 1/2), droits ou flexueux, à tête trilobée ou ronde ; 2° spic. des membranes petits (10-12 » ) et grêles, finement et entièrement épineux, généralement droits, extrémités tronquées. La Vioa Michelini de Nardo ne doit pas être conservée, comme il sera dit plus loin; aussi ai-je cru pouvoir, pour rendre hommage à la mémoire de Michelin, quis’estundes premiers occupé des éponges perforantes, donner une appellation ancienne à une espèce nou- velle. 80 ÉMILE TOPSENT. Cliona thoosina, n. sp. (PI. VII, fig. 6.) Un échantillon surun Pectunculus en partie agglutiné par un Pho- rus. Couleur jaune. Papilles peu nombreuses, larges d’un demi-milli- mètre. Spicules de 2 sortes : 1° spic. du squelette, à tête nettement trilobée, forts, longs de 200 x en moyenne; 2° spic. des membranes très remarquables par leur variété : les uns sont des bâtonnets cylindriques couverts de petites pointes obtuses ; d’autres plus courts et spiralés, armés d’épines robustes, ressemblent à ceux de la Cliona euryphylle; enfin la plupart rappellent les corpuscules nodu- leux des 7'hoosa. Cliona Lesueuri, n. sp. (PI. VII, fig. 8.) Deux échantillons sur des Æaliotis de provenance inconnue. Pa- pilles très nombreuses ayant à peine ; de millimètre delarge. Lobes à peu près cubiques, serrés les uns contre les autres, mesurant 1 mil- limètre en moyenne dans chaque dimension. Spiculation : 1° les spi- cules du squelette sont tout à fait caractéristiques, car ils sont acués sansle moindre passage à la forme capitée;ils sont légèrement cour- bes ; l’une de leurs extrémités étant arrondie, l’autre porte une pointe courte mais aiguë ; longueur moyenne — 180 », largeur = 8 k ; 2° les spicules des membranes sont spiralés, entièrement et finement épineux : longueur = 16-18 x, largeur = 2 x. Genre THOOSA, Hancock. Thoosa bulbosa, Hancock. L'étude en est particulièrement intéressante. Hancock avait trouvé (1849 )sur une Tridacna gigas ce qu'il a considéré comme le type de l’espèce. Je n’ai rien à ajouter à la description générale de cette éponge, que j'ai retrouvée sur une 7ridacna gigas éga- a ad. | en, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 81 lement et dont j'ai dessiné la spiculation PI. VII, fig. 10. Sur lamême coquille avec letype supposé, dontil existait plusieurs échantillons, l’auteur anglais avait découvert une seconde forme que j'airencontrée moi aussi, dans des conditions semblables, sur la valve de Tridacna où j'avais déjà reconnu la première (PI. VIL fig. 11). Les deux éponges étaient séparées. Cette singulière coïncidence n’était pas faite pour dissiper ces doutes exprimés par Hancock : « Z have not yet been able to deter- mine whether the specimen ( 2° forme) provided with these curious spiculais distinct or not, though T am inclined to believe that it 1s. » Mais il faut désormais tenir compte de l’observation suivante : J’ai vu, perforant la valve inférieure d’une Ostrea du Gabon, une éponge dont la spiculation représente à la fois celles des deux T’hoosa précédentes, et même se trouve être encore pluscompliquée.On n'y compte pas moins de six sortes de spicules (PI. VII, fig. 9). Les spicules les plus nombreux sont les corpuscules noduleux, avec leur forme grêle ; puis viennent les spicules à 2 ou 3 branches pointues et recourbées et les étoiles dont les rayons, terminés par une sorte de bouton, sont couverts d’épines ; puis, groupées par endroits, les grandes étoiles à forts rayons armés d’une pointe conique à leur extrémité; les spicules ovoïdes épineux ne sont pas non plus répandus partout ; quant aux grands spicules acérés, qui mesurent 625 « de long et 10-12 de large, ils sont réunis par places pour constituer la charpente squelettique. Sommes-nous en présence de trois 7'hoosa distinctes ou de trois variétés d’une même espèce? C’est Ce que nous essaierons de déter- miner en dressant le tableau des Clionides. Thoosa Hancocci n. sp. ( PI VIL fig. 12. ) Enfin, entrelacée avec la Cliona quadrata dont j'ai parlé plus haut, j'ai découvert une autre Thoosa, à spicules de deux sortes : les uns sont ces corpuscules noduleux qu’on voit dans toutes les Thoosa ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 29 SÉRIE. — T. V Dis, SUPPL, 1887. — 4° Mem. 6 82 ÉMILE TOPSENT. connues, un peu plus petits ici que d’ordinaire ; les autres sont des étoiles irrégulières dont les branches grêles, en uombre variable, partent d’une souche épaisse et se terminent par deux ou trois crochets recourbés. II. — L'examen des coquilles recueillies par M. Touret sur le banc de Campêche m'a révélé l'existence de cinq Cliones dans cette région du golfe du Mexique : 1° Cliona celata, Gr. 2° Cliona vastifica, n. se. 3° Cliona Carpenteri, Hanc. 4° Cliona vermifera, Hancock. Sur un Spondylus dragué en décembre 1886. Cette éponge contient des cellules conjonctives remplies d’une graisse jaune comme celle de Cliona celata et de Cliona quadrata. Entre les lobes sont tendus des diaphragmes dont le squelette est formé de spicules vermiformes lisses très nombreux et de quelques spicules en épingle tournant leur pointe vers l’orifice central. 5° Cliona euryphylle, n.sp. (PI. VII, fig. 5.) Sur un Madrépore etsur un Chama. Eponge jaune pâle, à l’état sec, dans ses parties profondes, plus foncé dans les papilles. Papilles de taille variable, les plus grandes mesurant 5mm. de diamètre. Cette espèce se distingue nettement de C. celata par l'absence totale de spicules de tension et par la présence de spicules des membranes chez l’adulte. Les spicules du squelette, généralement courbes, ont une tête elliptique ; ils sont longs et forts : longueur 300 » ; largeur = 4-5 ». Les spicules des membranes, peu norabreux, relativement gros (longueur = 354, largeur == 54), sont armés d’épines robustes. Les diaphragmes ont l'aspect de ceux de Cliona celata ; on y CONTRIBUTION A L’'ÉTUDE DES CLIONIDES. 83 aperçoit de plus quelques spicules des membranes. Enfin les cellules conjonctives sont adipeuses, autant qu’on en peut juger sur des spécimens desséchés. III. — 11 me reste à dire quelques mots des Cliones de nos côtes de Provence. Sept Clionides étaientconnues dans la Méditerranée : cinq espèces d'O. Schmidt (Wioa viridis, V. Grantii, V. Hancocci et V. Johnstoni 1862, V. celata 1864, et deux variétés de V. Johnston 1868 et 1870) et deux espèces de Hancock(Clona angulata 1849 et C. globulifera 1867). À Toulon, les pierres et les coquilles sont perforées par trois éponges : 1° L'une est la Cliona celata (1). Je n’en ai pu voir que le moule sur de vieilles coquilles lavées à fond par la mer, mais elle est bien reconnaissable, car, des espèces signalées dans la Méditerranée, elle est la seule qui possède des papilles porifères de 2 à 3mm. de diamètre. Les deux autres ne se rapportent à aucune des espèces ci-dessus énumérées. 2° La plus commune est rouge orangé et possède trois sortes de spicules : spicales en épingle, spicules acérés épineux et spicules en zigzag épineux ; elle est, par tous ses caractères, identique à Ja Cliona vastifica de la Manche. On ne saurait la confondre avec les Cliona angulata et C. globulifera, quin’ont que des spicules en épingle, ni avec les espèces de Schmidt, qui ne sont figurées qu'avec deux sortes de spicules. Cependant, par sa coloration et par deux de ses formes de spicules, l'éponge en question offre de grands rapports avec la Vioa Grantii Schm. ; seule, l'absence dans cette dernière de spicules en zigzag oblige à les séparer. Ne serait-il pas permis, toutefois, de se demander, tout en rendant au mérite d’O. Schmidt l'hommage qui (1) O. Schmidt l’a trouvée dans les environs de Cette, (L. c. 1868, p. 30.) 84 ÉMILE TOPSENT. lui est dû, si la Vioa Grant n’a pas été incomplètement décrite et s’il n'y a pas lieu d'identifier ces deux espèces ? En effet, à l’époque où parut le premier mémoiresur les Eponges de l’Adriatique (1862), la première note de Hancock était seule connue, et les spicules en zigzag qui caractérisent plusieurs éponges perforantes n’avaient pas encore été découverts. N’est-il pas possible que, grâce à leur petitesse et à leur rareté ou leur absence même dans certaines préparations, ces spicules, que j'ai cherchés et trouvés dans la Clione de Toulon, aient passé inaperçus pour l’auteur de la Vioa Grantii ? 3° Enfin la troisième Clione que j'ai trouvée à Toulon est encore une espèce de la Manche : à sa spiculation lâche formée de spicules eu épingle et de spicules en zigzag grands et épineux, et à la disposition de ses papilles, j’ai reconnu notre Cliona lobata. Il est remarquable que ces trois Cliones composent à la fois la faune de Luc et, en partie du moins, celle des côtes de Provence : mais nous savons déja combien ces trois espèces sont répandues dans les différentes mers. FAMILLE DES CLIONIDAE. Ce qui précède nous prépare à l’étude générale des Clionides. (inq genres ont été créés par les auteurs : le &. Cliona par Grant en 1826, le g. Thoosa par Hancock en 1849, le g. Euryphylle par Duchassaing en 1864, leg. Samus par Gray en 1867 et le g. Alectona par Carter en 1879. Les autres coupures proposées par Gray n’ont pas été admises ; il en sera parlé ultérieurement. GENRE CLIONAGrant. — L'histoire des Eponges perforantes nous a appris que, sans raisons valables, D. Nardo a substitué l’appel- lation de Vioa à celle que Grant avait choisie. Le nom de Clona ayant la priorité doit subsister. Ce genre est riche en espèces, mais il convient de le débar- die dt a CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 85 rasser à tout jamais de toutes celles qui n’ont pas été décrites ou qui, du moins, sont absolument méconnaissables. Les Vioa typus, V.coccinea, V. Clio et V. Pasithea trouvées par Nardo dans l’Adriatique en 1839 ne sont connues que de nom. On ne saurait dire davantage quelles étaient la Wioa Michelini du même auteur et la Vioa nardina de Michelin (1846). La Cliona hystrix de Gray (1848) n’est qu'un nom tombé dans l'oubli. Il ne faut tenir aucun compte de ces dénominations : les travaux de Hancock et d’O. Schmidt compensent amplement cet abandon. Il est impossible de ne pas écarter aussi de la liste des Eponges perforantes connues les trois Vioa que Duchassaing et Michelotti ont découvertes dans la mer Caraïbe. Ces auteurs n'ont examiné que la forme et la disposition des lobes, qui sont si variables dans une mêmeespèce, et n’ont pas donnéles caractères dela spiculation. Qui pourrait dire quelle estla Clione qu’ils comparent aux Vioa nardina et Michelini et qu’ils appellent Vioa Duvernoysü ? Leur Vioa disso- ciata est bien étrange : ses lobes seraient isolés ou réunis par petits groupes tout à fait indépendants ; s’il ne s’agit pas d’une agglo- mération de jeunes Cliones, semblable à celle observée par Hancock sur sa Chiona Fryeri, il y a certainement là une erreur, car on ne peut imaginer un être dont le corps se fractionne à un moment donné et dont les parties vivent séparées sans que le calcaire où elles sont enfoncées conserve la marque de leurs liens primitifs. Enfin leur Vioa Strombi est une éponge dont les lobes sont pressés les uns contre les autres et superposés dans les points où la coquille est épaisse ; à combien de Cliones ne se rapporte-t-elle pas ? Il est évident que Duchassaing et Michelotti se sont occupés fortuitement des Eponges perforantes, puisqu'ils n’en ont remarqué que sur des Pinna et sur des Strombus gigas dans une mer où elles abondent. Rappelons ici que les Cliona vastifica et C. northumbrica Hanc. doivent être réunies, queles Cliona gorgonioides Hanc. et C. linearis Soll. sont à supprimer, et que nous sommes tenté de considérer comme des formes de la Cliona lobata Hanc. les Cliona subu lata Sol]. 86 ÉMILE TOPSENT. et Vioa Carteri Ridl. Ajoutons que la Clionastationis Nasson. paraît étrela Cliona vastifica n. se., dont l’auteur a vu, sans en soupçonner l'importance, les petits spicules des membranes, qu’il a placés au même rang que les spicules monstrueux (1. c., fig. 8, r, pl. XIX). Faisons observer enfin que la Cliona Mazatlanensis Hanc. ne dif- fère, à proprement parler, de la même Cliona vastifica que par son habitat. Si maintenant nous essayons de dresser le tableau des espèces du genre Cliona, nous remarquerons que la spiculation de la plu- part d’entre elles est composée d’après un type générique facile à définir : dans sa plus grande complication, elle comprend trois sortes d’organites, des spicules du squelette en forme d'épingle, des spicules de tension ÿfusiformes acérés, enfin des spicules des membranes spiralés épineux, dont les aspects divers servent à la spécification. Entre les espèces absolument conformes à ce type et celles moins nombreuses qui s’en écartent par la modification de l’une quelconque des trois sortes de spicules, on peut, pour la commodité de l'exposition, marquer une séparation en somme assez naturelle dans l’état actuel de la science, et appeler les premières Æuclionae et les dernières Paraclionae. Euclionae. La spiculation des Æuclionae n’est complète que dans quelques cas; beaucoup d'espèces ne réunissent que deux de ses éléments ; d’autres même ne sont pourvues que d’une seule sorte de spicules. Euclionae à spiculationcomplète. — Ce sontles Cliona corallinoides Hanc., C. gracilis H., C. abyssorum Ortr., C. vastifica n. se., enfin C. celata Gr., étudiée aux diverses époques de sa vie. Euclionae à deux sortes de spicules. —1° Les unes possèdent des spicules du squelette et des spicules de tension. Elles sont nom- breuses : Cliona dendritica, C. spinosa, C. canadensis, C. Fryeri, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 87 C. rhombea, C. mruscoides de Hancock, C. Grantii de Schmidt (sur laquelle nous avons fait nos réserves ) et C. pontica de Czerniawsky. Mais quelques-unes (C. muscoïdes et canadensis) ont été créées d’après un spécimen unique dont les particularités se résument dans une de ces anomalies que présentent si fréquem- ment les spicules et qui ont une tendance à se répéter au point de prédominer dans toute une éponge. De plus, il existe entre plu- sieurs de ces espèces une ressemblance frappante dans leur spi- culation qui aurait peut-être conduit à les identifier si la variabilité de leurs autres caractères n’avait été méconnue. Les zoologistes apprécieront d’après des séries d’échantillons l'opportunité de ces rapprochements. 2° Les autres ont à la fois des spicules du squelette et des spicules des membranes: Cliona lobata Hanc., C. Howsei H.(ceux des spic. en épingle quiportent deux renflements consécutifs vers leur extrémité élargie ne rentrent nullement dans une catégorie à part), C. vermifera H., C. Michelini n.sp., et C. euryphylle, n. sp. 3° Enfin la Cliona Schmidtii (Vioa Schmidtü, Ridl.= var. de V. Johnstoni O. Schm. 1870) est le seul exemple connu d’Æucliona munie de spicules de tension et de spicules des membranes. Euclionae à une seule sorte de spicules. — 1° Les unes n’ont que des spicules du squelette: Cliona radiata H., C. angulata H., C. globulifera H. (entre lesquelles des fusions pourraient bien être opérées par la suite), C. insidiosa H., C.millepunctata H., C. qua- drata H., C. Alderi H. (la distinction établie à son sujet par Hancock est inutile: il s’agit encore ici de variations du renfle- ment terminal des spicules en épingle) et ©. viridis (Vioa viridis Schm.). 2° Les autres n’ont que des spicules de tension: Cliona nodosa H. et C. labyrinthica H. Paraclionae. Groupons-les de la manière suivante : A. Il y a 3 sortes de spicules. — Dans larègle, ce sont les spicules 88 ÉMILE TOPSENT. detension qui doivent soutenir les diaphragmes contractiles, aussi n'est-il pas douteux que, dans les Cliona mucronata et C. ensifera de Sollas, ce ne soient eux qui se trouvent modifiés et représentés par des formes d’organites dérivant de celle des spicules du squelette. La Cliona Carpenteri H. s’écarte moins du type, et ce sont les spicules des membranes, fuseaux chargés de nodosités, qui diffè- rent de ce qu’on voit dans les Zuclionae. B. Il y a 2 sortes de spicules. — 1° Les spicules du squelette yormanx sont accompagnés de spicules de tension modifiés, irré- guliers dans Cliona cervina H., acués, épineux à la base, dans C. Hancocci (V. Hancocei Schm.). 2° Ou bien ces spicules du squelette sont accompagnés de spic. des membranes de plusieurs sortes: C. thoosina, n. sp. 3° À des spicules de tension normaux s’associent des spic. des membranes étoilés : (. Johnstoni (Vioa Johnstoni Schm.). 4 Enfin avec des spic. des membranes normaux les éponges présentent des spicules du squelette dérivant des spic. en épingle, acués dans la C. Lesueuri n. sp., cylindriques dans la C. purpu- rea H. On le voit, l’une des formes despicules au moins se rapporte toujours au type, et l’examen des Paraclionae montre combien sont grandes les affinités des espèces du g. Cliona entre elles. Aussi devons-nous nous garder de démembrercegenre,commeGray le proposait en 1867. D'ailleurs l’histoire de la (/liona celata, à 'aquelle on ne connut long- temps qu’une seule sorte de spicules et qui en réalité en possède trois, nous enseigne à quels remaniements sont sujettes les subdivi- sions introduites pour plus de clarté dans les Zuclionae et les Para- clionae, et nous empêche de les élever, à l'exemple de Gray, à la hauteur de véritables genres. GENRE THoosA Hancock. — Ce genre est à peine connu. Les CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 89 espèces rencontrées jusqu’à présent ne sont pas nombreuses, et l’on n’a guère pu étudierque leur spiculation, moins que cela encore, que la spiculation des parties sarcodiques accolées par dessiccation aux parois des lobes. Les papilles de celles de ces éponges que j'ai examinées étaient détruites et leur cadre lui-même avait disparu. Hancock n'avait pas eu plus de chance avec le spécimen unique de sa Thoosa cactoides, et il n’a décrit que les ouvertures par où font saillie les papilles de sa T’hoosa bulbosa. Dans toutes les espèces, on a constaté l'abondance d’une sorte de corpuscules siliceux noduleux qui consistent en de fortes tiges terminées à chaquebout par un renflement globuleux et entourées de deux anneaux de renflements semblables équidistants des extrémités. L'existence de ces corpuscules est la caractéristique du genre. Hancock croyait constante aussi dans les Thoosa l’absence de grands spicules ; mais nous avons vu des grands spicules acérés servir de charpente aux parties élargies des lobes d’une Thoosa qui minait une huître du Gabon. Ici comme dans les Cliona, les espèces sont reconnaissables aux spicules dont elles sont pourvues et semblent se rattacher à untype. Il n’est pas douteux que les formes de la planche VII, figures 9, 10 et 11, ne soient trois espèces distinctes. L'une (fig. 9) est la plus riche : cette T’hoosa armata, comme il serait juste de l'appeler, rap- pellerait les Cliona à spiculation compliquée ; elle contient en effet, aveclesspicules noduleux quetouteslesautres possèdentet qui existent seuls dans 7°’. cactoides, des spicules du squelette acérés, des spicules spéciaux dont ceux de 7°. Hancocci(Pl. VIL, fig. 12) sont une trans- formation, et enfin les spicules caractéristiques de la deuxième forme de Thoosa bulbosa découverte par Hancock. Entre les deux autres formes, réunies avec beaucoup d’hésitation sous le nom de 7°. bulbosa, les figures des spicules à branches grêles donnéesdans les Annals and Magazineof natural history et les dessins de ces mêmes spicules dans les figures 10 et 11 de notre planche VIT marquent une différence tranchée. Nous laisserons son appel- 90 ÉMILE TOPSENT. lation à celle que Hancock considérait comme la véritable T, bulbosa etnous appliquerons à l’autre, à cause de ses grosses étoiles à rayons terminés par une pointe conique, la désignation nouvelle de 7. radiata. D’après ces considérations, le genre Thoosa comprendrait actuel- lement cinq espèces : T’hoosa cactoides Hanc., T°. bulbosa Hanc., T. Hancocci n. sp., T. radiata n. se. et T. armata n. sp. GENRE EURYPHYLLE Duch. et Mich.— Ce genre est à supprimer: c’est une erreur qui l’a fait établir. Duchassaing et Michelotti ontcru devoir séparer les éponges qui perforent les pierres madréporiques de celles qui s’attaquent aux coquilles, malgré leur parfaite identité. Dans la règle, les Clionides n'ont pas de support spécial et c’est sans doute par hasard que les T’hoosa bulbosa et Thoosa radiata n’ont été vues que sur des 7ridacna gigas. Les deux Euryphylle, E. latens et E. dubia, ne sont guère mieux décrites que les Vioa. Pourtant une Clione trouvée sur un ma- drépore et sur un Chama du banc de Campêche pourrait bien être l’Euryphylle latens de Duchassaing, à en juger par la grandeur de ses papilles et par sa coloration à l'état sec. Dans cette pensée, j'ai proposé pour elle le nom de Cliona euryphylle. GENRE ALECTONA Carter. — Carter a donné (1. c.) une des- cription complète de l’Alectona Millari, seule espèce du genre, dont le spécimen unique perforait une Amphihelia oculata draguée par le Porcupine en 1869 entre le N. de l’Ecosse et les îles Féroë. Je ferai seulement remarquer que, des trois formes de spicules figurées par cet auteur, deux se rapprochent beaucoup de celles des Thoosa : 1° les flesh-spicules fusiformes, courts, entourés de deux anneaux de tubercules équidistants des extrémités, corres- pondent aux spicules noduleux de toutes les T'hoosa ; 2° les spi- cules dits accessoires du squelette (subskeleton spicules) rappellent les spicules de la fig. 10, pl. VII, de la Thoosa bulbosa. Il existe entre les deux genres des affinités évidentes. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 94 GENRE SAMUS Gray. — Une espèce : Samus anonyma, Gray. J.-E. Gray donna ce nom en 1867 à une éponge dont les spicules avaient été rencontrés par Bowerbank dans des galeries de perfora- tion et en fit son huitième genre de Clionidae. Carter en reprit l’étude en 1879 ; seulement, comme les échan- tillons qu’il examinait, bien que parfaitement distincts et habitant des galeries de perforation, étaient tous accompagnés de la Cliona mucronata Soll. et manquaient de spicules en épingle (caractéris- tiques, selon lui, des Cliona), il concçut l'idée que Samus anonyma n’est pas une Clionide. Il faut croire que la découverte de l’Alectona Millari le fit ré- fléchir, car, dans sa note sur cette éponge, il ajoute à la récapitu- lation des genres connus qu’il n'est pas douteux que Samus ano- nyma ne vienne former un autre genre. Les pores et les oscules sont inconnus. Il y a 3 sortes de spicules, tout à fait spéciales (Ann. and Mag. 1. c., p. 350). — Prove- nance : Indes occidentales et Australie sur Millepora alcicornis; et Nouvelle-Galles du Sud sur Siylaster sanguineus. DEUXIÈME PARTIE Pour prendre connaissance des particularités anatomiques des Clionides, si une biologie spéciale en avait déterminé de sensibles, le plus sûr moyen était, sans contredit, de comparer ces éponges perforantes aux éponges siliceuses non perforantes. Mais, parmi celles-ci, il était difficile de faire choix du groupe qui servirait de second terme à la comparaison, car les auteurs étaient bien loin de s’entendre sur la place des Clionidae dans la classification. Le système d’O. Schmidt ne laissait d’hésitation possible qu'entre les deux groupes des Corticatae et des Halichondriae. Et comme ce dernier contenait le genre Vioa, j'entrepris quelques recherches sur les Aalichondriae (1), dont les représentants sont le plus nom- breux sur nos côtes. J’ai reconnu plus tard que l’organisation des Cliones ne diffère pas notablement de celle des Corticatae. Mais les indications qui seront fournies sur ces dernières dans la troisième partie de ce travail permettront d'apprécier les raisons qui me portent à placer les Clionides parmi elles, et la description de quelques //alichon- driae faisant suite ici à celle des Cliona (Corticatae) aura l’avan- tage de rappeler comparativement les caractères des deux groupes. Les espèces de la Manche dont il va être parlé rentraient dans les trois genres Zsodyctia, Halichondria et Hymeniacidon de Bower- bank ; pour des motifs qui seront exposés successivement, j'ai cru (1) Consulter à leur sujet : Zeits. f. wiss. Zool. xxx Bü. Keller. Renicra semi- tubulosa, et les nombreux mémoires écrits sur les Spongilles. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 93 devoir les ranger dans les genres Reniera (Rayneria) Nardo, Amor- phina Schm. et Dendoryx Gray. $ 1. — GENRE RENIERA Nardo. En 1833 (1), D. Nardo créaitle genre Rayneria (2) avec la caractéristique suivante : € Aggregata polymorpha (Spongiaria) magis aut minus porosa et foraminosa, tenacitate ferè nulla, facilè digites pulverizabilia in sicco. Fulcimenta aculeiformia inconspicua simplicia, dispositione varia materiei animalis ope conjuncta ta ut pulpam uniformem præbeat. » Dans sa Monographie (1864), Bowerbank a donné cette défi- nition du genre Zsodyctia établi par lui : « Squelette dépourvu de fibres, composé d'un réseau symétrique de spicules dont les lignes primaires vont de la base ou centre de l'éponge à la surface et sont perpendiculaires aux lignes secon- daires. Reproduction par gemmules internes, membraneuses, sans spicules. » La seconde partie en est erronée ; mais la première est d'une valeur incontestable, et l’on ne connaît que quelques espèces aux- quelles on ne puisse l'appliquer qu'après un effort d’attention. : Elle est du reste plus précise que celle d’O. Schmidi concernant le g. Reniera (Isodyctia part.) (3): « Halichondriae porosissimae, fragiles et quae siccae facillimè digitis in pulverem conteruntur. Spi- cula simplicissima et uniformia, nunguäm nodosa. » Dans tous les cas il n’est guère fait mention que des caractères du squelette ; mais ceux de l'embryon, aujourd’hui bien connus, se distinguent assez nettement de ce qu'on observe dans les ÆZalichon- dria et Hymeniacidon (seu Amorphina Schm.), pour qu'il semble (1) Isis. Spongiariorum classificatio. (2) Du nom de Renier, | (5: 1862, pe 72. 94 ÉMILE TOPSENT. A nécessaire de les faire entrer dès à présent en ligne de compte. Le terme Zsodyctia n’a pas la priorité et embarrasse la science d’un synonyme inutile. Reniera rosea Schm. (Isodyctia rosea Bow.). La Reniera (Isodyctia) rosea a été, comme on sait, le sujet de recherches approfondies de la part de M. Ch. Barrois. Il était naturel de compléter l’histoired’une éponge dontle développement avait été décrit en détail. C’est une espèce favorable à l'étude, parce qu’elle est fort répandue sur nos côtes de la Manche : Barrois l’a trouvée très commune à Saint-Vaast ; M. Koehler l’a recueillie à Jersey et à Guernesey (7. cinerea Bow.) ; elle abonde aussi au Quihoc (ro- cher situé en face du laboratoire de Luc), sur les pierres qui découvrent aux syzygies. De plus, elle est de nos Aeniera celle qui vit le plus près du rivage. Elle s’étale en larges plaques quelquefois compactes, le plus souvent formées d'un entrelacement de rameaux rampants et déprimés dont la largeur varie beaucoup et dont l'épaisseur dépasse bien rarement un centimètre. La surface est légèrement hispide, par la raison que les terminaisons des lignes de spicules du sque- lette se projettent un peu au dehors de la membrane dermique qui la revêt entièrement. Les oscules sont épars, éminences coniques qui atteignent fréquemment 5 mm. de hauteur et 2 mm. de largeur au sommet. Les pores s’aperçoivent par transparence de la pellicule limitante externe comme des orifices sombres, nombreux, mesurant O mm., 2 à Omm., 3 de diamètre. La coloration, d’un rose ordinairement vif, est parfois assez pâle, suivant la rareté relative du pigment. Souvent même, l'éponge paraît grisâtre ; sous cet aspect elle diffère assez du type pour que Bowerbank ait cru reconnaître une espèce distincte qu'il appelait Jsodyctia cinerea. Barrois a fait observer, à juste £ , . « . titre, qu on ne saurait, sans trop multiplier les espèces, conserver CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 95 à la fois les Zsodyctia rosea et I. cinerea. À Luc, il n’est pas rare de voir la couleur naturelle de Rentera rosea tourner au jaune orangé ; cela tient à une modification accidentelle du kératode dont nous nous entretiendrons plus loin. Les spicules du squelette et les spicules de tension ont la même forme. Ces derniers sont seulement un peu plus grêles ; on les trouve dispersés sans ordre dans les portions charnues de l'éponge et dans les nombreux tractus membraneux qui traversent les ca- naux aquifères. Ce sont des bâtonnets fusiformes, à extrémités acérées, un peu courbés au centre, avec un fin canal axial. Îls ont en moyenne 160 # de long et 7 à 8 4 de diamètre. Les spicules des membranes font ici défaut. On se souvient que dans certaines Reniera les spicules des lignes squelettiques s’entre-croisent sans que rien ne cimente leur jonction, tandis que chez d’autres il existe, aux points de rencontre de ces organites, une sorte de lien kératodique qui enveloppe leurs pointes et s’étend quelque peu sur leur tige, et que cette production peut même être assez développée (Reniera Bowerbanki, p. ex.) pour que le passage aux Chalineae devienne insensible. Cekératode d’union manque le plus souvent dans Reniera rosea ; ou bien il constitue des ligaments incolores peu solides. Pourtant, dans quelques cas, qui semblent autant d'anomalies localisées dans un fragment d’éponge ouintéressant une plaque entière, il se forme à tous les entre-croise- ments de spicules un empâtement remarquable par sa belle couleur jaune d'or que ne détruit pas un séjour prolongé dans l'alcool, et par son apparence granuleuse (PI. V, fig. 9) : l'abondance d’un tel kératode communique alors à la’ Reniera la teinte orangée que l'on sait. On chercherait vainement dans ces échantillons particu- liers des éléments cellulaires colorés en jaune. L’agencement du squelette figure un réseau dont la trame supporte la chair de l'éponge; mais les maïlles en sont lâches, parce que les li- gnes spicyleuses caractéristiques des Reniera ne se croisent qu’à des intervalles à peu près égaux à la longueur d’un spicule : de plus, 96 ÉMILE TOPSENT. ces lignes sont assez faibles en elles-mêmes, les plus fermes possé- dant rarement plus de trois spicules de front. Tout cela ne donne aucune consistance à Aeniera rosea qui, molle pendant sa vie, devient friable après dessiccation. | Ici, commedans lesCliones, onreconnaît facilement quatre sortes d'éléments cellulaires : des cellules vibratiles, des cellules contrac- tiles, des cellules digestives pigmentées et des cellules conjonctives. Les cellules ciliées ont 4 à 5 » de diamètre et possèdent un fla- gellum long de 12 à 15 y ; elles se réunissent par leurs collerettes en groupes d’une soixantaine environ, qui mesurent souvent plus de 35 4 de diamètre. Quand les cellules sont en pleine activité, ces groupes affectent la forme de corbeilles dans la cavité desquelles s'agitent les cils : les éléments qui les composent sont alors écartés les uns des autres par leur base ; maïs, quand un fragment d’épongeest en préparation depuis un certain temps, on observe sur euxune véritable contraction, les cils s'arrêtent et se rétractent et les cellules se serrent les unes contre les autres. La dilacération détache fréquemment un certain nombre de cellules, les collerettes demeurent seules en rapport entre elles, et l’on voit nager entre lame et lamelle des corps transparents, d'aspect strié, qui ne sont autre chose que des groupements de collerettes, comme l’atteste la présence de quelques cellules restées en place (PI. V, fig. 14). Quelquefois aussi, on rencontre de ces corheilles sous forme de masses ovoides creuses dont les éléments sont munis de cils exté- rieurement (PI. V, fig. 15). Les cellules contractiles ne diffèrent en rien de ce que nous avons vu dans les Cliones : leur forme ést naturellement variable, à cause de leur amæbicité (PI. V, fig. 12). Les cellules digestives pigmentées à noyau nucléolé ressemblent également à ce qui a été décrit au sujet de la Cliona celata (PI. V, fig. 10). J’ai toujours constaté, en mettant du carmin en suspension dans l’eau, que ce sont elles qui en ingèrent les granules. Le pigment rose de l’éponge est contenu à la fois, comme il est CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 97 facile de s’en assurer, dans les cellules vibratiles et dans les cellules digestives. Les cellules conjonctives sont elles-mêmes de deux sortes : les unes, exactement semblables aux éléments du même ordre des Cliones et, comme eux, unies entre elles par des prolongements hyalins, ne se distinguent pas par leur taille, mais seulement par la réfringence de leurs petites sphérules protoplasmiques incolores au milieu desquelles est un noyau peu volumineux. Elles ne ren- ferment ni cette graisse que nous trouvions dans Cliona celata ni l’'amidon dont sont remplies les mêmes cellules de certaines éponges EVE, fe. 5). Lesautres,sphériquesouovoïdes, acquièrent de grandes dimensions (154 de diamètre moyen) et se reconnaissent au premier coup d'œil. Leurs sphérules protoplasmiques, douées d’amæbicité et entourant un beau noyau arrondi (PI. VI, fig. 4), sont relativement grosses, très brillantes, et se colorent en rouge vif par le picrocarmin. Elles sont éparses, assez nombreuses, et, comme les cellules conjonctives ordinaires (qui ne manquent jamais dans les /Jalichondriae), tou- jours en rapport avec les parties membraneuses contractiles de l'animal. Nous aurons dans l’Amorphina coalita la preuve irréfutable que ces deux sortes de cellules sont bien des variétés d’une même espèce d'éléments qui, dans les différentes éponges, se partagent les fonctions réservées au tissu conjonctif de ces êtres. Ces deux sortes de cellules conjonctives existent dans la plupart des ÆReniera que j'ai examinées, mais celles à grosses sphérules réfringentes attei- gnent rarement une taille aussi considérable que chez Reniera rosea. Des unes et des autres l’alcool et l’éther effacent les sphérules. Je n’ai aucune observation nouvelle à consigner au sujet de la substance fondamentale. On sait que, d’après Schmidt, les fibres des Ceraospongiae seraient un produit de durcissement du sarcode; les liens de kératode qui unissent les spicules des Æeniera ont vraisemblablement la même origine. ARCH, DE ZOOL, EXP, ET GÉN. — 928 SÉRIE. — T, V bis, SuPPL. 1887, — 4e Mem. 7 98 ÉMILE TOPSENT. Le réseau squelettique est formé de lignes axiales principales, et de lignes secondaires qui les coupent sous des angles divers pour composer avec elles unemultitude de petites cages, solides irréguliers dont les angles dièdres, marqués par la trame siliceuse, sont seuls couverts d’une couche cellulaire ayant toujours sa plus grande épaisseur aux entre-croisements des lignes de spicules. La masse de l'éponge ainsi faconnée est parcourue par les canaux princi- paux du système aquifère. La mince membrane qui revêt toute la surface libre de ÆReniera rosea est dépourvue de spicules de tension et s'appuie sur les termi- naisons saillantes au dehors des lignes du squelette. Elle est faite presque uniquement de cellules contractiles, les cellules conjonc- tives s’y montrant fort peu abondantes. Ses éléments constituants, changeant constamment de forme, la percent en mille endroits de petits orifices, les pores dermiques, qui sans cesse se ferment pour se rouvrir dans le voisinage. L'eau pénètre ainsi par des points multiples dela voûte dans une cavité sous-dermique continue dont le même tissu contractile tapisse le plafond, les piliers verticaux et le plancher. L'absence de cellules digestives et de cellules vibratiles dans toute cette région périphérique détermine une aire incolore tranchantpar ce caractère sur les parties sous-jacentes. Dansle plan- cher dela cavité sous-dermique, distants les uns dés autres d'environ 9-6 dixièmes de millimètre, sont les véritables pores, ouvertures des canaux inhalants auxquelles la charpente squelettique donne la fixité des fistules osculaires. | Les canaux inhalants, en libre communication avec les canali- cules sinueux qui traversent les petites cages irrégulièrement empi- lées du squelette, et où les corbeiïlles vibratiles aspirent un courant d’eau continuel, s’enfoncent sans variation notable de calibre et s’anastomosent dans la profondeur en un canal unique qui va s’é- largissant jusqu’à l’oscule. De leur revêtement pariétal de tissu contractile renforcé d’un riche lacis conjonctif se soulèvent de loin en loin des tractus transversaux, diaphragmes incomplets qui, sans bé -:260 es de. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 99 doute, régularisent le torrent circulatoire. Cette disposition se com- plique souvent d’une façon remarquable dans les fistules osculaires de l'éponge au repos : pour défendre l’entrée de l’oscule large- ment béant, destractus en nombre considérable en tendent la cavité et se croisent en tous sens, figurant sur toute la hauteur de l’émi- nence conique comme un tamis composé de cellules contractiles et de cellules conjonctives des deux sortes, parmi lesquelles quel- ques spicules de tension se trouvent généralement entraînés (PI. V Hu E) Dans les parties charnues baignées par les plus fins canalicules, la distribution des éléments cellulaires est la suivante : le paroi porte, espacées, des corbeilles vibratiles, entre lesquelles s’étend un revêé- tement contractile livrant passage aux particules nutritives que recherchent avidement les pseudopodes des cellules digestives pig- mentées. Le tissu conjonctif est, comme partout, en rapport avec le tissu contractile, et à eux deux ils émettent ici encore des trac- tus filamenteux transversaux où s’aperçoivent de place en place les grosses cellules conjonctives réfringentes. Je n’ai pas encore vu les spermatozoïdes de Reniera rosea. C’est d’ailleurs le hasard seul qui, d’ordinaire, fait découvrir ces éléments, si l’on ne connaît d’avance l’époque de la reproduction . des espèces que l’on désire étudier. A Luc, les Renierarosea sont remplies d'œufs en juillet. Comme dans toutes les Æalichondriae, ces œufs sont de grande taille quand leur segmentation est avancée ; ils ne mesurent alors pas moins de 0 mm., 4. Ils sont groupés sous la pellicule qui tapisse les larges canaux par où la larve gagnera l’extérieur, et s’aperçoivent à l’œil nu comme de petits corps arrondis d’un rose plus pâle que la masse générale de l'éponge. On verra que cette disposition n’est pas la même dans toutes les Aalichondriae. J’ai eu occasion de suivre, après Barrois, le développement des œufs en embryons parfaits. Mes observations différent par quelques détails de celles de cet auteur. 109 ÉMILE TOPSENT. En particulier, j'ai pu m’assurer que les spicules apparaissent même avant (1)la formation d’une calotte colorée. C’est la première modification qui s'opère lorsqueles cellules granuleuses de segmen- tation se sont fondues en cette sorte de plasmodium que Barrois considère comme le résultat de la désagrégation de tous les élé- ments du germe. Ces organites sont naturellement grêles et courts, et mesurent environ 70 » de long sur 1 # de large. On sait que trois sortes principales de spicules se rencontrent dans les éponges siliceuses : des spicules du squelette, des spicules de tension et des spicules des membranes. On sait de plus que ces derniers manquent ici et que ceux des deux autres sortes sont acé- rés. Nous verrons plus tard, par analogie, que ce sont les spicules de tension qui se forment ici les premiers dans l’embryon et que les spicules du squelette ne font leur apparition qu'après la fixation. Après la production des spicules survient un nouveau change- ment : l'embryon s’éclaircit ; il reste rose, mais presque tout le pig- ment se condense dans un point, qui marquera sa partie postérieure, en une calotte qui d’abord ne fait nullement saillie, mais qui peu à peu devient proéminente. Sauf en ce point, une couche de petites cellules ciliées se diffe- rencie à la surface, et, de ces cellules, celles qui entourent la ca- lotte colorée se munissent d’un long flagellam. La coque contrac- tile qui renfermait l’œuf s'écarte quand cils et flagellums entrent en mouvement. La calotte, orangée plutôt que rose, est relative- ment petite ; elle est composée de grosses cellules rondes fortement pigmentées et opaques. Barroiïs dit, il est vrai, n’avoir jamais re- connu d’élément cellulaire net dans la larve, mais l’observation qui précède est d’accord avec ce que Schmidt et Carter ont signalé, le (1) D'après Batrois (Zmbryol, de quelques Eponges de la Manche, Ann. Sc. Nat. 6e série, t. III, p. 69), ce serait toujours pendant que les larves d’Eponges siliceuses vivent en liberté qu’apparaîtraient leurs spicules. Et la fig. 48 de sa planche V montre un embryon d’Zsodyctia rosea avec sa calotte rouge postérieure, mais dépourvu de spicules. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 401 premier chez une ARentiera (1), le second chez Zsodyctia simu- lans (2), et se trouve confirmée par ce que j’ai moi-même vu dans cette dernière espèce. Les spicules sont situés, comme dans les autres Æalichondriae que nous étudierons, immédiatement sous la couche ciliée, et parais- sent un peu plus nombreux au voisinage de la calotte postérieure. Pas plus que Barroiïs, je n’ai réussi, quant à présent, à constater l'existence d’une couche moyenne de cellules contractiles décrite par Lieberkühn et Schmidtet qui contiendrait les spicules. Reniera simulans Schm. (Zsodyctia simulans Bow.) À Luc, la Reniera simulans ne se rencontre que dans les dragages, mais elle y est très commune, surtout à une assez grande distance de la côte. C’est, en quelques mots, une éponge composée de rameaux subcylindriques, souvent épais de près d’un centimètre, qui s’entre- croisent et s’anastomosent et, généralement rampants, ne prennent que quelques points d'attache au sol. Sa couleur, assez variable, est tantôt grisâtre et tantôt brunâtre ; certains échantillons sont teintés de rouge sombre. Les oscules, ordinairement répandus sur une face du rameau, sont larges et peu élevés (PI. V, fig. 3) ; la membrane dermique, bien que possédant en propre un réseau de spicules, est pellucide etlaisse voir les pores. La charpente siliceuse estfaitede spi. cules fusiformes acérés assez robustes que des liens kératodiques puis- sants fixent dans leurs positions respectives ; cette disposition donne à l'éponge une grande consistance et permet d’ypratiquer des cou- pes macroscopiques montrant parfaitement la réunion des canaux inhalants en de larges canaux osculaires. Les spicules de tension sont acérés comme ceux du squelette. Il n’y a pas de spicules des membranes. (1) Zeits. f. wiss. Zool. Supplément au t. 35. Orientirung über die Entrick- lung der Spongien. (2) Ann. and Mag. nat. hist, 4° série, t. XIV, 1874. H,J, Carter : Development of the marine sponges. 102 ÉMILE TOPSENT. L'étude histologique ne découvre là rien de particulier : les cel- lules conjonctives sont de deux sortes (PI. VI, fig. 10), mais celles à grosses sphérules ne se distinguent pas par leur taille et ne me- surent guère que 10 # de diamètre ; par contre, elles sont bien plus abondantes que dans Reniera rosea. Les phénomènes de la reproduction méritent davantage d'attirer l'attention. Reniera simulans est franchement hermaphrodite, et, à la fin de juillet, tous les individus de cette espèce sont remplis à la fois de spermatozoïdes aux différents stades de développement et d'œufs en voie de segmentation. C'estlà une constatation intéressante, puisque les zoologistes admettent la séparation dessexes chez la plupart des éponges dont ils ont cherché la sexualité. D’après F.-E. Schulze (1), Halisarca lobularis aurait les sexes séparés ; il existerait des plaques mâles et des plaques femelles d’ailleurs parfaitement semblables d'aspect ; et ilen serait pro- bablement de même d’Aalisarca Dujardinii, à en juger du moins par l’unique échantillon que l’auteur aiteu occasion d'examiner et quine contenait que des œufs à toutes les phases de leur évolu- tion. Ganin (2) dit avoir trouvé des œufs dans certains individus de Spongilla fluviatilis et du sperme dans d’autres. Keller (3) signale chez Chalinula fertilis une séparation des sexes marquée même par des caractères extérieurs. À l’époque de la maturité de leurs produits, les individus mâles sont grêles et maigres ; les femelles sont deux ou trois fois plus grosses et leur co- loration change quand les œufs mûrissent et passe du jaune brun au rouge. (1) Zeits, f. wiss. Zool. t. XXVIII, 1877. Le genre Halisarca. (2) Beiträge zur Kenntniss des Baues und der Entnicklunasgeschichte der Schwämme, Warschau, 1879. (3)Z. W.7Z. 33 Bd, 1879. Studien über Drganisation und Entnicklung der Chalineen. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 103 Dezsô (1) a observé la séparation des sexes chez la Tethya lyn- curium, maïs il ajoute : « Ob dies immer der Fall ist, wage ich nicht zu entschieden. » Au contraire, en 1853, N. Poléjaeff (2) a vu à la fois des sper- matozoïdes, des œufs et des embryons dans le Sycandra rapha- nus. Les spermatozoïdes de Reniera simulans ressemblent à ceux que Schulze a décrits chez plusieurs éponges. A leur sortie de la cap- sule où ils ont pris naissance, ils se tiennent par la tête et leurs lon- gues queues restent immobiles, comme fasciculées (PI. VI, fig. 1) ; puis ces queues s’animent de mouvements d’abord très lents, s’ac- centuant peu à peu, et leur agitation finit par diviser les amas de spermatozoïdes en groupes dont chaque individu fait des efforts pour devenir indépendant. Les œufs, d’un blanc pur, ont à peu près les mêmes dimensions que ceux de Æeniera rosea ; ils sont encore groupés, mais non plus sous le revêtement pariétal des canaux osculaires ; ils occupent de larges cavités, plus ou moins allongées, en communication avec le canal principal qui aboutit au dehors ; là, presque sans spicules, du tissu contractile rempli de cellules conjonctives brillantes les en- veloppe et les relie entre eux (fig. 2, PI. VI). Ces sortes de poches ovariennes, qui contiennent un nombre d'œufs variable, mais tou- . jours assez considérable, sont distantes les unes des autres sur un même rameau et rien au dehors ne révèle leur existence. Carter, dans son étude du développement de l'espèce en question, ne parle pas de cette disposition remarquable. Il n'indique pas davantage les époques respectives de formation des spicules et de la calotte. L’œuf de Reniera simulans, longtemps si mou qu’il est impossible de le dégager de ses adhérences, en se segmentant prend de la consis- (1) Arch. f. mikrosk. Anat, 1880. Forsetzung der Untersuchungen über Tethya lyncurium. (2) Sitzungsb. d. k. Akad. d, W. math. naturw. Classe, LxxxVI Bd, 1882. Uber das Sperma und die Spermatogenese bei Sycandra raphanus. 104 ÉMILE TOPSENT. tance eb s’obscurcit ; à un moment donné, il y a d’abord produc- tion sous sa surface de petits spicules longs d’environ 85 x (PI. VI, fig. 13), les spicules de l'adulte en mesurant 160 en moyenne. Puis, bien que l'embryon ait jusque-là paru incolore, du pigment rouge brun se concentre à sa partie postérieure en une calotte que Carter a vue tantôt pleine et tantôt annulaire. C’est invariablement sous ce dernier aspect que la calotte colorée de Reniera simulans m’est apparue. Pour le reste, le développement ne diffère pas de celui de Re- nierarosea : une couche cellulaire périphérique pousse des cils et une couronne de flagellums, dont l'agitation provoque un retrait de la coque contractile qui les met à découvert. Reniera eleyans Schm. (Zsodyctia elegans Bow.) La Reniera dont il s’agit maintenant doit être l'Zsodyctia ele- gans de Bowerbank : son habitat, sa couleur, sa forme générale et la disposition de ses spicules ressemblent plus à ceux de cette espèce qu’à ceux de toute autre éponge. Elle n’est pas très rare à Lue, dans les dragages. Tout l'intérêt quelle offre réside dans les particularités de son tissu conjonctif, composé ici encore de deux sortes d’éléments. Les cellules ordinaires ont l’aspect habituel, mais l’iode les bleuit d’une manière intense, y décelant ainsi la présence d’amidon. Elles se montrent donc chargées surtout d’accumuler des réserves nu- tritives (P1. VI, fig. 6). Quant aux autres éléments, ils jouent plus spécialement le rôle de cellules conjonctives et subissent dans ce but une modification remarquable. Epars d'habitude, ils se disposent ici en longues files élastiques (PI. VI, fig. 7) affectant avec le tissu contractile, prin- : cipalement dans les parois des canaux aquifères, les mêmes rapports que de coutume. Dans cet. état, ils représentent ce que O. Schmidt a rencontré CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 105 chez une Xeniera aquæductus et appelé KXôrnchenballen (1), et ce que Barrois a retrouvé dans des Zsodyctia sp. ? de Saint-V'aast. Pour O. Schmidt, « ces pelotes granuleuses n'avaient pas de rapport avec des formations cellulaires, elles étaient un produit immédiat du sarcode, et ce groupement de granules était dû à la formation de courants et de cordes dans le sarcode. » Barrois, & n’ayant rien observé qui ressemblât aux sperma- tozoïdes des éponges dessinés par Haeckel et Eiïmer », inclinait à y voir des cellules-mères des spermatozoïdes comparables à celles de l’'Hydre (2). * Ces deux auteurs n’avaient pris qu’une connaissance imparfaite de la constitution de ces éléments. Dans un fragment de Reniera elegans placé sous le microscope, les cellules en question peuvent se présenter de plusieurs façons : la dilacération en a forcément isclé quelques-unes, mais la plupart restent réunies, directement accolées ou espacées le long d’une sorte de fil diversement tordu. Isolées ou accolées, elles paraissent renfermer une assez grande quantité de sphérules réfringentes qui rendent leur noyau invisible ; espacées au contraire, elles semblent avoir perdu une partie de leur contenu, bien qu’elles soient encore assez opaques pour qu'on ne sache si le fil qui les relie les traverse ou non (a). La fixation par l'iode a pour effet de diminuer l'éclat des sphé- rules et d'effacer plus ou moins leurs contours et, par suite, de faire apparaître le noyau. Dans les cellules dissociées, ce noyau, gros et brillant, est arrondi et central (b) ; il peut se montrer rond également dans les cellules accolées, mais souvent, dans certaines d’entre elles, il s’allonge vers les points de contact des éléments voisins. Enfin sur un fil tordu l’on voit ces noyaux, placés bout à bout, servir de trait d'union entre les cellules. La nature du support commun des pelotes granuleuses est dès (1) Supplement der Spong. Adriat. Meeres, 1864, p. 3 et pl. I, fig. 12. (2) L. c., p. 62 et 63, pl. V, fig. 42, 106 ÉMILE TOPSENT. lors connue : quand une de ces chaînes, généralement fort longues, entre en extension, tous les noyaux, ronds dans le système rétracté, s’étirent transversalement, puis débordent, d’un côté dans les cellules terminales, des deux côtés à la fois dans les autres, et se mettent en rapport par leurs extrémités un peu élargies avec les noyaux adjacents. Le fil n’est donc pas homogène, et une ligne nette marque les contacts des noyaux qui le composent. | La préparation détache toujours un certain nombre de pelotes plasmatiques granuleuses dont le noyau reste à nu. Reniera densa Schm. {Zsodyctia densa Bow.) ! Lorsqu'on tire de l’eau ÆReniera densa, elle laisse suinter par toute sa surface une viscosité remplie de belles cellules conjonctives dont les grosses sphérules claires sont susceptibles de se dissocier dans leur plasma ; c’est pour ces cellules un point commun avec les rosettes d’Aalisarca Dujardin, auxquelles elles ressemblent tant d’ailleurs. La fixation par l’iode colore la viscosité en jaune et les rosettes en bleu intense : donc ici encore il y a de l’amidon, mais il n’est plus contenu dans les mêmes éléments cellulaires. Reniera fistulosa Schm. (Zsodyctia fistulosa Bow.) Cette espèce, commune à Luc, nous intéresse à d’autres titres que les précédentes. Dans les anfractuosités multiples et irrégulières des pierres du large que criblent les trous de Grastrochènes ou les galeries des Cliones, ou que recouvre un enlacement inextricable de tubes de Serpules, vit Reniera fistulosa qu’une mollesse extrême oblige à se loger dans ces retraites toutes préparées. Son habitat et sa faiblesse font naturellement songer aux Clionides; mais il est impossible d'établir un rapprochement étroit entre ces éponges, celle dont CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 107 il s’agitici étant une véritable Rentera incapable de creuser sa demeure. Ne communiquant avec l'extérieur que par quelques ouvertures d’un diamètre variable et le plus souvent fort étroites dont il ne lui appartient ni d'augmenter le nombre ni d'accroître les dimen- sions, Reniera fistulosa ne présenterait qu’une surface d’absorption certainement insuffisante si son système dermique n’acquérait un développement exceptionnel. C’est pour répondre à cette nécessité que de ses points à découvert s’élèvent des tubes incolores ayant même constitution et même rôle que les fistules de Polymastia mam- millaris, par exemple (1), c’est-à-dire portant tous les orifices du système aquifère. De l’éponge, on ne voit au dehors que ces fistules sensiblement cylindriques, à paroïs excessivement minces, fermées ou béantes à leur extrémité libre suivant leurs fonctions, simples ou réunies à plein canal à leurs voisines (PI. V, fig. 6) et mesurant souvent 2 cen- timètres de longueur ; il faut briser la pierre qui lui sert d’abri pour trouver, remplissant les cavités, sa chair abondante, de cou- leur brun clair et de consistance semi-gélatineuse. Dans les parois des papilles se reconnaît la disposition suivante : les spicules, fusiformes acérés, longs de 125 # en moyenne et à peine larges de 4 #, forment à la surface un réseau . continu, uni-spiculé, à mailles généralement triangulaires, sur lequel s'étend presque uniquement du tissu contractile ouvrant et fermant les pores dermiques. Cela seul constituerait l’enveloppe membraneuse de toute autre Æalichondria. Ici, un second réseau, pluri-spiculé, mais à mailles lâches et irrégulières, soutient la face interne et se relie au premier par de courtes lignes dans l’épaisseur de la paroi. Enfin, entre ces deux couches limitantes, montent ver- ticalement des lignes spiculeuses solides, bien visibles à l’œil nu, (4) Ces papilles ressemblent encore à celles d'Xamacantha papillata de Vos- maer (Bijd. tot de Dierkunde. Natura Artis Magistra. The Sponges of the « Wil- lem Barent's » Æxpédition. 12° Aflevering, 1885. 108 ÉMILE TOPSENT. qui représentent la véritable charpente des fistules et leur donnent leur rigidité. Il faut remarquer encore que dans tout ce système les spicules sont unis par des liens kératodiques qui font défaut dans les parties profondes de l'éponge. Sauf sur la membrane externe, les cellules conjonctives, de deux sortes, se mêlent aux cellules con- tractiles ; les rosettes, éparses, sont encore plus grosses que dans Reniera rosea ; les éléments pigmentés, cellules digestives et cel- lules vibratiles, y manquent absolument. Au fond de chaque vaste cavité sous-dermique ainsi ménagée débouche un canal aquifère. Il serait fastidieux de passer en revue toutes les AReniera qui vivent sar les côtes du Calvados ; il est pourtant une /sodyctia de Bowerbank dont il nous faut dire quelques mots : l’Zsodyctia Hynd- mani (Alebion Hyndmani, Gray). L’auteur en avait d’abord fait une Æalichondria, mais, avant cons- taté une certaine régularité dans la position de ses spicules, il la rangea parmi ses /sodyctia. C’est provisoirement que nous laisserons à côté des Reniera typiques cette éponge que nous considérons plus volontiers comme une Dendoryæ (voy. plus loin) à l’égal des Zalichondria incrustans, IT. irregularis, ete., qui lui ressemblent par tant de caractères (1). $ 2. — GENRE AMORPHINA Schmidt, Il comprend la plupart des /Jalichondria et des Æymeniacidon que Bowerbank caractérisait comme il suit : G. {alichondria (Fleming). Skeleton without fibre, composed of an irregular polysérial network of spicula cemented together by kera- tode. (1) Pour en faire un genre à part (g. Alebion), Gray 1. c., p. 534) n’a tenu compte que des formes des spicules des membranes, dont quelques-unes sont très particulières. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 109 G. Iymeniacidon (Bowerbank). Skeleton without fibre, spicula without order, imbedded in irreqularly disposed membranous struc- lure. Il faut avouer qu'entre ce réseau irrégulier de spicules et cette disposition sans ordre de spicules il n’y a que des différences du plus au moins souvent insaisissables. Nous verrons aussi que par leur développement embryonnaire les Æymeniacidon et les Halichondria se confondent, de sorte qu’il paraît avantageux de les réunir avec Schmidt dans un genre unique. Mais nous ne saurions adopter sans restriction la caractéristique des Amorphina proposée par cet auteur : & G. Amorphina(]. c., 1870, p.40): Xürzere oder längereumspitzige Nadeln in groben unregelmässigen Zügen oder ganz wirr durch einan- der. Keine Oberhaut, oder nur stellenweise. > Toutes les espèces dont nous allons nous occuper possèdent au contraire, sur leur sur- face entière, un système dermique incolore bien distinct et facile à détacher. Amorphina panicea Schm. (/alichondria panicea Johnston.) Tout le monde a rencontré cette éponge polymorphe si commune sur nos côtes de la Manche et de l'Océan. Tout le monde connaît ses grands oscules épars ou alignés sur une crête comme les trous d’une flûte de Pan. F'élevant plus que toute autre sur le rivage, et, par conséquent, s’exposant plus que toute autre au choc des vagues, elle jonche les plages à chaque coup de vent du large et les cultiva- teurs en enlèvent des tombereaux pour amender leurs terres. Parasite dans les fucus ou rampante sur les pierres de la grève qu’elle couvre de plaques minces ou massives, elle se distingue sou- vent à première vue par une coloration verte qui cache sa véri- table couleur. Mais au large, où elle est moins commune, elle n’a jamais cette teinte due à la production, dansses parties périphériques, d’une substance moléculaire (matière verte de Priestley) qui se développe aussi dans les Spongilles, dans l’Amorphina caruncula, 110 ÉMILE TOPSENT. dans les feuillets respiratoires de certaines Huîtres, etc., sous l’in- fluence de la lumière. On reconnaît aisément à la loupe Amorphina panicea aux petits champs, criblés de pores, que délimitent les spi- cules de sa membrane dermique. Comme dans Amorphina coalita, A.glabra ettant d’autres encore, les spicules sontacérés. Ils n’ont plusune orientation constante mais on comprend très bien que, malgré l’absence de lignes continues, le squelette constitue la charpente d’une masse décomposable en polyèdres fort irréguliers où d'innombrables canalicules sinueux conduisent l’eau chargée de matières nutritives. Des canaux prin- cipaux partent des pores, distribuent leur apport aux canalicules qui s’ouvrent dans leurs parois, et, se réunissant, vont déboucher aux oscules. La membrane enveloppante est incolore et, comme dans les Reniera, ne possède guère que des éléments contractiles dont dé- pend le jeu des pores dermiques ; ces éléments, dont le nitrate d'Ag. marque les points de contact entre eux, dissociés, offrent les aspects les plus divers (PI. V, fig. 11), ainsi que nous l’avions déjà constaté dans les Cliones. La membrane est soutenue par des piliers verticaux poly-spiculés (PI. V, fig. 4) sur lesquels s’étend la couche contractile qui tapisse aussi le plancher de la cavité sous-dermique et, passant par les pores, va former le revêtement pariétal des ca- naux aquifères. La cavité sous-dermique est ici très spacieuse et, malgré sa trans- parence, la membrane est ordinairement trop distante de l'éponge pour en laisser apercevoir les pores ; elle en affaiblit même sensi- blement la coloration ; mais on l’enlève par grandes pièces sans s’armer des moindres précautions, et l'on découvre les pores. Nous connaissons déjà les éléments cellulaires des Amorphina par l’étude que nous avons faite de ceux des Aeniera. | Les cellules conjonctives d’À. panicea et des espèces dont il sera parlé ultérieurement sont d’une seule sorte ; toutefois ce n’est nul- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. A1 lement un caractère des Amorphina, puisque A. sanguinea et À. inconspicua, par exemple, possèdent des rosettes. Les cellules conjonctives concourent avec les cellules contrac- tiles à tendre canaux et canalicules de tractus simples ou compliqués et sans cesse changeants. Les cellules digestives et vibratiles contiennent un pigment qui colore l'éponge en jaune, au moins dans ses parties profondes, si l’on examine un échantillon littoral. Ce pigment est la zoonérythrine, comme on peut s'en convaincre en appliquant à Amorphina pa- nicea le traitement recommandé par de Merejkowsky (1). La ma- tière verte se dissout dans l’eau douce, mais non pas le pigment ; celui-ci est soluble dans l’alcool et l’éther ;1l donne une coloration bleue avec l'acide sulfurique ; il se dissout en donnant une colora- tion rouge carmin dans le sulfure de carbone ; enfin l’action de la lumière le décolore. Les corbeilles sont percées d’un seul orifice très large, qu’on voit se rétrécir dans les préparations lorsque cesse l'agitation des cils. Comme partout, les corbeilles à cils extérieurs sont rares. Enfin l’aspect des chambres ciliées peut être modifié par l’amoæbi- cité deleurs éléments constituants : sous certaines influences, diffi- ciles à préciser, elles affectent toutes dans une même éponge des formes bizarres, telles que celles de la figure 15, pl. V ; les cellules restent unies par leurs collerettes, mais elles s’allongent démesuré- ment et, d'ordinaire, se terminent par un renflement où est placé le noyau. La sensibilité d’Amorphina panicea et des Renierinae en général est obtuse. J’ai bien des fois essayé, mais en vain, de provoquer la contraction des fistules osculaires en les irritant longuement. D’ail- leurs les oscules se ferment rarement et, à basse mer, on les trouve presque toujours béants ; quand ils se closent, la membrane dermique s’avance de toutes parts au-dessus de l'orifice et à (1) L. c., p. 82. A1? ÉMILE TOPSENT. travers elle on aperçoit la cavité sombre du canal évacuateur. J'ai eu occasion d'étudier les spermatozoïdes d’Amorphina pa- nicea et d'A. coalita ; ils ne diffèrent en rien des éléments mâles de Reniera simulans. J’ajouterai seulement qu’il ny avait pas d'œufs dans les individus où je les observais, sans vouloir rien avancer au sujet de la sexualité de ces espèces, l’hermaphroditisme pouvant bien n'être pas marqué par le développement simultané des éléments mâles et des éléments femelles. Dans les parties profondes de l'éponge, surtout au voisinage du support (PI. V, fig. 4), les œufs paraissent comme une multitude de points plus jaunes que la masse environnante ; ils tranchent mieux encore sur le fond vert des régions superficielles ; mais ils y sont toujours rares. Un peu plus petits que ceux des Reniera, ils ne sont pas assemblés comme eux en groupes importants, distants les uns des autres, et placés sous le revêtement contractile des ca- naux osculaires ou dans des poches dont ils emplissent la cavité ; ils sont au contraire dispersés et recouverts par la paroï de cana- licules dont le diamètre n'est pas beaucoup plus grand que le leur. En se segmentant, ils s’obscurcissent et prennent de la consis- tance. À un moment donné, de petits spicules acérés naïssent dans leur plasmodium, puis la zone périphérique, plus claire que le reste de l’embryon, se différencie en une couche depetites cellules rondes qui se munissent chacune d’un cil dont les mouvements s’activent peu à peu. Les larves écartent alors leur enveloppe, s’allongent (PI. V, fig. 5)et font saillie dans les canaux où elles ne tardent pas à s’engager pour gagner l’oscule. Leur coloration est uniforme et les spicules sont orientés sous la couche externe qui laisse à la partie postérieure une zone non ciliée représentant la calotte des Reniera. | La reproduction est complètement terminée au commencement de juillet. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 113 Amorphina coalita Sehm.(Æalichondria coalita Bow.) Un point de l’histologie d’ Amorphina coalitanous intéresse spécia- lement. Dans certains échantillons, les cellules conjonctives à sphé- rules protoplasmiques très petites ressemblent tout à fait aux éléments conjonctifs qui sont le plus abondants dans Ateniera rosea et R. fistulosa et qui existent seuls dans Reniera fucorum, Amorphina panicea, À. glabra, ete. Dans d’autres, les sphérules de ces cellules sont plus grandes que ce qu’on a coutume de voir dans toutes ces éponges. Dans d’autres enfin, ces cellules sont de véritables rosettes. On observe ainsi dans une même espèce tous les passages de l’une à l’autre forme d’un même ordre d'éléments cellulaires (P1. VI, fig. 9). Je n’ai que peu de choses à dire de la reproduction d’Amorphina coalita. Je trouvais les spermatozoïdes en grande quantité au commencement de juillet 1887,et ce n’est que vers la fin de ce mois que j'ai recueilli les premiers spécimens remplis d’œufs en segmen- tation. Ces œufs sont d’un jaune encore plus vif que ceux d’ Amor- phina panicea ; ils ont d’ailleurs même taille et même position, et se transforment d'une manière identique en embryons ciliés qui, pour la plupart, sortent en septembre. Amorphina glabra Schm. (/alichondria glabra Bow.) Les cellules conjonctives d'Amorphina glabra, à sphérules de petites dimensions, servent évidemment de réservoirs nutritifs, car elles renferment, comme celles de Cliona celata, une matière grasse teintée de jaune pâle qui noircit instantanément sous l’action des vapeurs d'acide osmique. Amorphina caruncula Schm. ({ymeniacidon caruncula Bow.) C’est une éponge d'un rouge orangé vif, dont la membrane dermique incolore affaiblit sensiblement l'éclat. Son habitat littoral ARCH, DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2€ SÉRIE, T, V Dis, supPL. 1887. — 4e Mem. 8. 114 ÉMILE TOPSENT. favorise en outre chez elle comme chez À. panicea la production de la matière verte de Priestley qui, se mélangeant à son pigment, la zoonérythrine, en gâte la magnifique coloration. Amorphina caruneula avait été choisie par Bowerbank comme type de son genre Æymeniacidon (Brit. Spong. t. I, p. 191). TI faut avouer qu'elle est plus molle que les Amorphina précédentes, sa chair étant relativement abondante, mais cette différence n’a pas la valeur d’un caractère générique ; du reste, l’étude du développement de cette espèce ne révèle rien qui la distingue des JJalichondria et qui permette de la détacher du genre Amorphina de Schmidt. Les œufs, rouge foncé, ont les mêmes dimensions et la même position que ceux des Amorphina panicea et coalita. Ils se trans- forment comme eux en une perigastrula sans calotte colorée dont les spicules (acués) font leur apparition avant les cils de la couche cellulaire externe( PI. VI, fig. 13, b). Je n’ai pas suivi les premiers stades de la seomentation, mais quand celle-ci étaitencorepeu avancée, j airemarquésur les œufs une tache claire arrondie qui m’a toujours paru représenter une lacune (PI. V, fig. 8). Peut-être est-ce un vestige de lacavité de segmentation, Plus tard l’œuf devient opaque et la tache claire n’est pas visible. $ 3. — GENRE DENDORYX Gray. En 1867, J.-E. Gray rangea un certain nombre d'Æalichondria de Bowerbank dans un genre nouveau qu il caractérisait ainsi : G. Dendoryx (1). Sponge massive, irreqularly reticulated. Spicules - of 4 kinds : 1. Fusiform or cylindrical, pointed at each end, smooth. 2. Needle-like, spinulose all over. 3. Equibianchorate, three-spined at each end.4. Bihamate. O. Schmidt, en assignant aux éponges anglaises une place dans son système de classification (1870), n’a pas non plus pensé que ces (1) L.c., p. 535. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 115 Halichondria pussent entrer avec Z1. panicea, IT. glabra, IT. coalita, etc., dans son g. Amorphina. J'ai repris le genre Dendoryx en lui attribuant une autre définition que celle de Gray : 1o à cause de la distinction toujours nette qui existe dans ces /Jalichondria entre les spicules de tension et les spicules du squelette, ce qui, nous le savons, n’a pas lieu dans les Amorphina ; 2° à cause de la forme normalement cylindrique des spicules de tension qui se rencontrent chez toutes les espèces du genre ainsi compris seuls ou accompagnés de divers petits spicules des membranes ; 3° à cause enfin de la forme constamment acuée épineuse des spicules du squelette de ces mêmes éponges. Ces considérations m'ont permis de l'agrandir et d’en faire un tout aussi naturel que possible. Dendoryæ Dujardinii Tops. (Hymeniacidon Dujardin Bow., Halisarca Dujardinii Gray.) En décrivant, en 1866, sous le nom d’Æ/ymeniacidon Dujardinii une éponge siliceuse des côtes d'Angleterre, Bowerbankeroyait mettre en lumière les véritables caractères de l’Halisarca Dujardinii de Johnston. À son avis, les spicules assez grêles del’ Æ/ymeniacidon, noyés dans une chair abondante, avaient dû passer inaperçus pour Dujardin et Johnston. En 1867, sur la foi de Bowerbank, Gray, persuadé que deux noms avaient désigné un même être, pensa sim- plifier les choses en restituant à l’espèce sa première dénomination. Halisarca Dujurdinii est une éponge gélatineuse ; ymeniacidon Dujardinii était une nouvelle acquisition pour la science. Mais il est certain qu on ne doit pas l’inscrire à la suite des Æymeniacidon dans le g. Amorphina : sa structure, sa spiculation, son développe- ment sont ceux des Jendoryx. Dendoryx Dujardinii est très commune sur les côtes du Calvados, au large comme sur les rochers qui découvrent aux marées de syzygies. Sa couleur varie du jaune clair au brun foncé ; eile est _ 116 EMILE TOPSENT. même parfois violacée. Pas plus que les autres Dendoryz, elle n’a pas de forme définie ; elle se moule sur les corps étrangers qu’elle couvre d’un revêtement toujours mince. De consistance assez molle, elle est lisse à sa surface et douce au toucher. Les orifices aquifères sont petits. La peau épaisse est soutenue par de longs spicules cylindriques lisses, tronqués aux deux extrémités, et le sqnelette se compose de spicules acués, entièrement épineux, irrégulièrement disposés. Remarquons, cela devant nous être bientôt utile, qu’il n’est pas rare de rencontrer des échantillons dont les spicules du derme sont acués lisses. La Dendoryx irregularis, commune aussi dans nos parages, est sujette à de semblables variations. Les œufs se voient par transparence du système dermique et paraissent blanchâtres au milieu des tissus ; par leur taille et leur distribution ils rappellent ceux des Amorphina. On les trouve en abondance depuis le milieu de juillet jusqu’à la fin de sep- tembre, mais c’est surtout en septembre que les embryons sont mis en liberté. Comme dans les Rentiera etles Amorphina, les spicules appa- raissent de bonne heure dans l’œuf rendu opaque par la segmen- tation progressive de ses sphères jaune pâle finement granuleuses. Et dans les spécimens de Dendoryx Dujardinii que j'ai étudiés, les premiers spicules produits étaient toujoursles mêmes : les spicules de tension (P1. VI, fig. 13, c). | La différence si bien marquée entre ces organites et les spicules du squelette fournit une donnée nouvelle qui ne pouvait découler des recherchespoursuivies jusqu’à présent sur les Silicisponges. On sait depuis longtemps que les embryons de ces éponges sont armés de spicules pendant leur vie libre, tandis que les Calcisponges ne produisent de spicules qu'après leur fixation ; mais, des espèces qui ont été observées, les unes (Æeniera sp. ? Amorphina sp. ? par Schmidt, Zsodyctia simulans par Carter, Zsodyctia rosea par Barroiïs) possèdent des spicules du squelette et des spicules de tension de même forme, et les autres (Æsperia sp.? par Schmidt, Æsperia CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 117 aegagropila = Desmacidon aegagropila Bow. par Carter), munies de plusieurs sortes de spicules, présentent avec des spicules des membranes variés des spicules de tension pareils aux spicules du squelette. Aussi Carter avait-il conclu que tous les spicules d’une espèce font leur apparition en même temps dans la larve (1). Plus propice, l'examen de Dendoryx Dujardin conduit à une au- tre conclusion; sur les larves dont j'ai suivi l’évolution, les spicules acués épineux du squelette ne se sont formés qu'après la fixation. D'ailleurs le retard que subit la production des spicules du squelette nest point un phénomène propre à D. Dujardinti ; je l'ai constaté chez d’autres éponges à spicules du squelette spéciaux, sur Dendoryx incrustans et Microciona armata, dont les larves sortent munies seulement de leurs spicules de tension et des membranes. On pourrait, à ce point de vue, établir un rapprochement entre les éponges siliceuses et les éponges calcaires, puisque, dans ces dernières, les spicules acérés, qui correspondent aux spicules de tension, se développent dans l’animal fixé avant les spicules radiés du squelette. Après l’apparition des spicules, la couche périphérique de l’œuf de Dendoryx Dujardinii pousse les cils qui serviront à la nata- tion de l'embryon. L’œuf ne s’éclaircit pas et, pas plus que dans les Amorphina, pas plus que dans la Desmacidon fruticosa Bow. (Barrois), son extrémité postérieure n’est point marquée par une calotte colorée. L’embryon sort: il est ovoïde et porte sous sa couche externe des spicules cylindriques généralement fasciculés; ses cils, courts à l'extrémité antérieure, vont, à partir de là, s’allongeant et s’infléchissant vers l'arrière ; une zone arrondie, plus claire, à bord net, non entourée d’une couronne de flagellums, homologue évidemment de la calotte colorée des AReniera, occupe la région postérieure (PI. VI, fig. 3). (1) Les premiers spicules de Desmacidon fruticosa Bow. dessinés par Barrois (1. c., fig.55) ne ressemblent pas aux spicules de l’adulte. L'auteur n’a rien dit de précis à ce sujet. 118 ÉMILE TOPSENT. L'absence de couronne flagellée est un premier trait de dissem- blance entre les Desmacidon et les Dendoryx. L’écart entre elles ne fait que s’accentuer par la suite, car Desmacidon fruticosa une fois libre acquiert une calotte colorée, son développement n’offrant que des hétérochronies, comme le dit Barrois, comparé à celui d’Zsodyctia rosea, tandis que Dendoryx Dujardinii nage et se fixe, : comme les Amorphina, sans que jamais s’opère en elle la moindre concentration de pigment. Ces différences déjà profondes viennent s'ajouter à des différences fondamentales dans la disposition des spicules de ces éponges adultes (1) pour montrer que les affinités des Dendoryxæ ne sont pas avec les Z/esmacidon, quoi qu’en ait pensé O. Schmidt, mais bien avec les Amorphina. Il semble donc natu- rel, en adoptant provisoirement la classification de Schmidt(1870), de détacher les Dendoryx de la famille des Desmacidinae pour les placer à côté des Amorphina dans celle des Æenierinae. Dendoryx incrustans Gray (Halichondria incrustans Johnston). La simplicité de sa spiculation peut faire considérer Dendoryx Dujardiniicomme le type du genre Dendoryx d’acception nouvelle : c’est la raison pour laquelle nous sommes entré à son sujet dans des détails dont la plupart seraient maintenant des redites. Dendoryx ‘incrustans était le type du genre créé par Gray. Elle est amorphe, mince ou massive, revêtante ou parasite, et abonde sur les côtes du Calvados, où elle présente les deux variétés suivantes : a. var. Dendoryx incrustans typica. C'est l'éponge décrite par Johnston et Bowerbank.En quelques mots rappelons que sa couleur varie du jaune clair au rouge orangé, que sa surface est fort irré- gulière, enfin qu’elle possède des spicules du squelette acués (1) On sait que la charpente des Desmacidon Bow. se compose de files lon- gues et solides de spicules parallèles. RS de nn dde ne . démons tt tt à CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 119 épineux, des spicules de tension cylindriques lisses terminés par deux mucrons (PI. VI, fig. 16, «) et des spicules des membranes, € bihamate simple, reversed and contort retentive » et « bidentate equianchorate.>» B. var. Dendoryx incrustans viscosa. Cette variété n’a pas été décrite, et pourtant elle est encore plus commune que l’autre dans nos parages. Elle s’en distingue au premier abord par une viscosité qui suinte abondamment de toute sa surface et qui est peut-être une modification de la substance fondamentale comparable à celles qui prennent une si grande part à la constitution des Æalisarcinae et des Gummineae. Si on l’étudie de plus près, on s'aperçoit que son tissu conjonctif diffère manifestement de celui de D. incrusians typica; celle-ci ne contient que des cellules ordinaires à sphérules très petites ; D. incrustans viscosa possède au contraire des rosettes à grosses sphérules brillantes que la mucosité, en filant, entraîne en quantité considérable. La spiculation elle-même a des caractères spéciaux: les spicules cylindriques lisses de la variété viscosa n’ont jamais un seul mucron à chaque bout, mais portent soit un mucron à un bout et deux à l’autre, soit deux mucrons à chaque extrémité (PI. VI, fig. 16, à). La couleur et la forme de 2). incrustans viscosa sont d’ailleurs aussi peu fixes que celles de 2). incrustans typica. La lumière a une influence incontestable sur la coloration, et la face de l'éponge qui y estexposée est ordinairement d’un beau rouge orangé, tandis _que l’autre est d’un jaune pâle. Cette influence s’exerce même sur le pigment des œufs épars dans la masse; ceux qui sont situés au voisinage de la première sont rouges comme elle, et les autres simplement jaunes. La reproduction des deux variétés se fait en août et septembre ; leur développement embryonnaire est en tout semblable à celui de Dendoryx Dujardinu. Le genre Dendoryx (novo sensu) comprend avec les deux espèces 120 ÉMILE TOPSENT. précédentes toutes celles dont il se composait primitivement dans la classification de Gray, D. irreqularis, D. Dickiei, D. Pattersoni, D. granulata et aussi D.Robertsoni, une Halichondria décrite dans le t. IV de la Monographie des éponges anglaises. Je n’en sépare pas, on le conçoit, les Æalichondria scandens et nigricans Bow. dont, entraîné par sa tendance à multiplier les genres d’après des différences de spiculation réellement négligeables, Gray faisait des Zophon (n.g.), ni 7. Ingalli Bow.(Menyllus Ingalli Gray), ni enfin 77. pulchella Bow. (Biemma pulchella Gray). J'y fais rentrer encore les Æalichondria albula, Thompsoni, can- dida, Batei et virgea Bow., dont les spicules de tension sont pourtant acués, parce que Dendoryx Dujardinii et D. irregularis nous montrent souvent cette forme des spicules de tension dérivant de la forme normale, et nous révèlent par suite des affinités que laissaient déjà soupconner les autres caractères. Enfin j'y ajoute mentalement l’/sodyctia Hyndmani Bow., à cause de la forme deses spicules de tension et de ses spicules du squelette, et parce que la régularité de sa charpente ne paraît guère conforme à celle des Æeniera. Toutefois l’examen des embryons de cette éponge pourra seul faire juger si c’est une Dendoryx ou vraiment une Rentiera. Résumé. Bien que succincte, l’étude que nous venons de faire des Reniera, Amorphina et Dendoryx nous permet de donner de ces trois genres les définitions suivantes : g. Reniera. — Halichpndriae à squelette composé de lignes,toujours grêles, de spicules unis par du kératode plus ou moins développé. Em- bryons acquérant une petite calotte colorée avant l'apparition des als. g. Amorphina. — Halichondriae à spiculation généralement sim- ple ; spicules irrégulièrement disposés. Embryons allongés, sans ca- lotte colorée à la partie postérieure. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 121 g. Dendoryx. — Halichondriae sans formes définies; spicules de tension cylindriques, quelquefois acués ; spicules du squelette acués épineux. Embryons ovoides, sans calotte colorée. Ces genres font partie de la famille des Renierinae de Schmidt. On remarquera sans peine combien le genre Æeniera diffère des deux autres : les Renierinae n’ont certainement pas toute l’homo- généité désirable ; mais, n’ayant pas eu occasion d’étudier les autres genres de cette famille, nous ne saurions quant à présent lui faire subir de modifications valables. Celles des Renierinae que nous connaissons présentent entre elles et avec les autres Æalichondriae des points de ressemblance: par leur membrane dermique toute leur surface se prête à l’inhala- tion du liquide nourricier ; leur irritabilité est très obtuse ; et leurs œufs sortent à l’état d’embryons parfaits. Système aquifère. Les orifices du système aquifère portent des noms différents, pores et oscules, mais sont identiques au fond. Leur fonction commande leur distribution. Il était naturel que l'éponge multipliât ceux de ces orifices qui devaientlaisser pénétrer dans sa masse les matières alimentaires répandues dans le milieu ambiant. Cela explique la répartition sur toute sa surface des pores, plus petits, il est vrai, mais aussi fixes que les oscules. Une membrane dermique qui s'étend sur eux, livrant à l’eau d’étroits passages, joue par rapport à eux, à proprement parler, le rôle d’un tamis. Il y avait avantage au contraire à ce que les oscules fussent peu nombreux pour que la violence même du courant d’é- vacuation rejetât au loin les matériaux de rebut ; et, de fait, pour que la dissémination de ces produits impropres à la nutrition soit assurée, nous voyons le plus souvent les oscules déboucher au sommet de fistules élevées. Une hypothèse mal fondée peut seule faire considérer tout ori- fice efférent comme révélant l’existence d’un spongozoon dans une éponge à plusieurs oscules, et regarder cette éponge comme une colonie animale. Cette manière de voir satisfait à une tendance 122 ÉMILE TOPSENT. formelle à fondre les Spongiaires dans les Cœlentérés. Mais, outre qu’il serait tout aussi logique, dans cet ordre d’idées, de reconnaître autant de spongozoons que d’orifices inhalants de canaux abou- tissant à un cloaque commun, n’est-il pas plus naturel, étant donnée l’infériorité des êtres dont nous nous occupons, de considérer toute éponge à plusieurs oscules comme un seul animal dont la croissance sans limite spécifique nécessite la multiplication desorificesaquifères ? Eléments cellulaires. Quatre sortes d'éléments cellulaires entrent dans la constitution des Æénierinaecomme dans celle des Clionidae. Je les ai d’ailleurs retrouvées dans les /esmacidinae (Desmacidon, Microciona), dans les Chalinidae (Chalina), dans les Chalinopsidae (Dictyocylindrus) et dans les Suberitidinae (Suberites, Polymastia);1 est donc présumable que toutes les Silicisponges ont même com- position histologique. Les cellules contractiles (fibres-cellules et cellules épithéliales des auteurs) tapissant les canaux et entourant de sphincters les orifices aquifères règlent d’après des influences diverses le courant.circula- toire. Elles forment la coque adventice des œufs. Eiles président aussi à la cicatrisation des blessures faites aux éponges, et, si l’on pratique une section à travers une Amorphina, on ne tarde pas à voir uu revêtement blanchâtre s’étendre sur les parties mutilées et fermer les canaux béants que la coupe a rencontrés ; ce revête- ment est formé de cellules contractiles dont le nitrate d'argent accuse les contours. Le rôle des cellules vibratiles estsimplement de provoquer l’afflux de l’eau et d’en déterminer le cours. Les matières nutritives passent à travers la paroi des canalicules etsont ingérées par ces cellules amiboïdes granuleuses à noyau nucléolé que nous appelons cellules digestives pigmentées et que les auteurs s'accordent à considérer comme les éléments principaux du mésoderme. Déjà E. Metschnikoff a montré (1),dans les Calcis- t (1) Zeits. f. Wiss. Zool. xxxI1 Bd, Sponyivlogische Studien. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 193 ponges, que les particules alimentaires sont absorbées abondamment par les cellules mésoblastiques dérivant des cellules granuleuses de l'embryon. F. Balfour (1) nous apprend d’autre part que le profes- seur Schulze l’a informé par lettre qu'il a observé que les cellules à collerette de Sycandra remplissent une fonction respiratoire, tandis que les cellules dérivées des cellules granuleuses sont nu- tritives. Balfour fait remarquer que, par contre, Carter s’est con- vaincu, d'après une observation sur la Spongille (2), que les aliments sont absorbés par les cellules qui tapissent les chambres ciliées. J’ai pu, pour ma part, constater sur toutes les Renierinae en pleine activité, dans l’eau desquelles j’ai mis du carmin en suspension, que ce sont leurs cellules mésodermiques à noyau nucléolé qui en ingèrent les granules. Le pigment est toujours contenu à la fois dans les cellules vibratiles et dans les cellules digestives. Cela se voit avec la plus grande aïsance. De plus, il est certain que les cellules contractiles en contiennent un peu parmi les fines granulations qui entourent généralement leur noyau, car l’écorce de Tethya lyncurium et les fistules des Polymastia ont une teinte légère qui n’est nullement un reflet des parties sous-jacentes. Dans les Suberites, le pigment se condense à la surface dans une zone d'épaisseur notable; il s’accumule aussi dans les parties éclairées de Dendoryx incrustans ; mais, dansla plupart des Éponges, le derme incolore et épais en affaiblit l’éclat. L’abondance ou la rareté relatives du pigment causent des va- riations individuelles telles que celles signalées plus haut à propos de Reniera rosea, de R. simulans, de Dendoryx Dujardinit, etc. L’albinisme n’est pas rare : O. Schmidt en cite un cas chez sa Vioa Johnstoni (1868), et nous en avons un sous les yeux à Luc, celui d’une éponge calcaire, l’Ascetta coriacea. (1) Traité d'embryologie et d’organogénie comparées. (Traduct. française, t. I, p. 136, 1883.) (2) Ann. and Mag. of nat. hist, 5e série t, IV. On fhe nutritive and reproduc- tive processes of Sponges. 124 ÉMILE TOPSENT. Le pigment n'est pas toujours seul à colorer les éponges : c’est ainsi que nous voyons dans Aeniera rosea le kératode prendre ac- cidentellement une coloration jaune d’or que possède normalement celui de Microciona armata, par exemple; ce sont encore, mais ra- rement, les spicules qui ont une couleur propre (spicules violets de Cliona Johnstoni, d’après O. Schmidt) ; enfinles cellules conjonctives renferment fréquemment des substances colorées dont l’effet s’a- joute à celui du pigment, ce qui est surtoutsensible dans Aplysina aerophoba (Schulze), dans Cliona celata, dans Dictyocylindrus ramosus, etc. | Dans beaucoup de cas, les cellules conjonctives, reconnaissables à leurs petites sphérules protoplasmiques au milieu desquelles leur noyau apparaît comme une vacuole, ne sont remarquables ni par leurs dimensions ni par leur coloration. Mais souvent aussi elles se distinguent par leur contenu; et la graisse qu'on y découvre en quantité considérable dans plusieurs Cliones et dans Amorphina glabra prouve qu’elles peuvent servir de réservoirs nutritifs. Elles renferment dans Microciona armata une substance jaune clair qui n’a aucun rapport avec le pigment rouge vif des autres éléments, et dans Dictyocylindrus ramosus une substance brun foncé. Là et ailleurs ancore la chimie révèlera peut-être l’existence de matériaux de réserve. Outre les cellules ordinaires, une foule d'éponges ont des cellules conjonctives d’une autre sorte, plus grandes, à grosses sphérules très réfringentes, dérivant certainement des premières, comme Amorphina coalita nous l’a laissé comprendre, et rappelant tout à fait les cellules en rosette del’ Halisarca Dujardinii. Quand les petites cellules existent seules, elles peuvent remplir à la fois le rôle d'éléments conjonctifs et celui de réservoirs nutritifs (cellules adipeuses de Cliona celata et d'Amorphina glabra) ; maïsquand elles sont accompagnées de rosettes, il y a division du travail, et tantôt les petites cellules entassentles réserves (amidon de Reniera elegans), les rosettes étant alors les véritables cellules conjonctives, tantôt au CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 425 contraire les rosettes accumulent ces réserves (amidon de Reniera densa), tandis que Les petites cellules sont chargées d’autres fonctions. Les rosettes sont une complication des cellules conjonctives ordi- naires ;leur taille et leur aspect sont très variables, mais leur réfringence est toujours telle qu’il n’était pas possible qu’elles eussent jusqu'ici échappé aux observateurs. Schulze les a vues dans la Chondrosia renifornis, eta remarqué leur éclat spécial, qui disparaît par l’éther et l’alcool absolu. Pour cet auteur, c'étaient là des corps de réserve, « quelque chose comme de la graisse, de l’a- midon ou autre produit similaire du corps des animaux ou des plantes » . Keller a figuré des rosettes dans Reniera semitubulosa ; il dit aussi avoir trouvé des cellules à amidon dans le mésoderme de plusieurs éponges, parmi lesquelles la Tethya lyncurium ; j'avoue, pour ma part, n'avoir mis en évidence dans cette dernière rien de comparable à ce que je rencontrais chez Reniera elegans et À. densa. Enfin les descriptions de Schulze ne laissent pas douter que les cellules jaunes d’Aplysina aerophoba qui bleuissent immédiatement au contact de l’air ne soient des éléments de même ordre. La cons- tance, la signification et le double rôle de ces éléments restaient ignorés. | | Petites et très nombreuses dans Æeniera simulans, les rosettes sont grosses et éparses dans Z?. fistulosa, R. rosea, ete. D’habitude elles communiquent aux espèces qui en sont pleinesune certaine viscosité, très appréciable quand on vient à les déchirer avec des pinces. Elles sont grosses et abondantes dans celles qui agglutinent et, par exemple, dans Desmacidon pannosa. Nous savons encore qu’elles s’écoulent quelquefois au milieu de la viscosité qui suinte de toute l’éponge (Dendoryx incrustans, Reniera densa). Enfin leur rôle conjonctif est bien marqué par la faculté dont jouissent leurs sphérules de se dissocier dans leur plasma, et par leur trans- formation en cordons connectifs dans Reniera elegans ; il l’est peut-être mieux encore dans Microciona armata: là en effet les rosettes changent d’aspect d’un moment à l’autre et s’étirent en 126 ÉMILE TOPSENT. fibrilles irrégulières dont les sphérules s’effacent, pour revenir peu après à leur forme typique (PI. VI, fig. 8). Reproduction. Nous avons trouvé des variations dans la position, la taille et le développement des œufs des Renierinae, mais partout la jeune éponge sort à l’état avancé d’embryon cilié pourvu de ses spicules de tension et des membranes. TROISIÈME PARTIE AFFINITÉS DES CLIONIDES. Depuis que nous avons constaté que les Cliones n’ont à leur service aucun instrument de perforation spécial, depuis que nous avons suivi pas à pas leur transformation éventuelle en éponges capables de se soutenir et de se protéger elles-mêmes, nous ne devons plus nous attendre à trouver des différences fondamentales entre l’organisation de ces obscurs mineurs et celle des Silici- sponges rameuses ou massives que nous venons d'étudier et aux- quelles le moindre support suffit pour se développer librement. Les particularités anatomiques des Eponges perforantes dépendent moins de leurs conditions biologiques que de leurs affinités na- turelles. | La Clione trouve dans les parois mêmes des excavations qu’elle pratique dans les corps calcaires le soutien qui lui est nécessaire ; elle ne saurait se passer de spicules de tension, mais son squelette reste rudimentaire et n’est constitué que par quelques traînées de spicules : aussi se montre-t-elle d’une mollesse extrême qui n’est égalée que par celle de cette Reniera fistulosa dont la biologie est si semblable à la sienne. L’atrophie du système squelettique qui donne aux autres Éponges une consistance plus ferme et une forme souvent bien définie est peut-être ce qu’on doit le plus remarquer ici. Encore semble-t-il qu’on puisse admettre, à cause de l'importance que ce système est susceptible d'acquérir à l’occasion, que son atrophie résulte moins d’une incapacité réelle de la part de l'animal à s’édifier une charpente spiculeuse que d’une sorte d'économie 198 ÉMILE TOPSENT. réalisée en raison de l’inutilité d’une telle charpente dans les cavités étroites des lobes. Au contact de ses galeries, la Clione porte unrevêtement contrac- tile analogue à l’enveloppe continue des Amorphina, Reniera, etc., mais, et c’est la seule particularité de son système aquifère, cen’est que de place en place que s’ouvrent les pores dermiques ; de même, la cavité sous-dermiquen’est représentée ici que par l’espace compris entre le plateau des papilles de Cliona celata ou la membrane con- tractile de celles de C. vastifica et l'entrée des canaux inhalants. Nous verrons bientôt que cette disposition n'appartient pas en propre aux éponges perforantes. Comparées encore aux types de ces genres, les Cliones paraissent d’une irritabilité extraordinaire ; l’orientation menacante des spicules dans leurs papilles et la contractilité énergique de ces organes sont commandées par un grand besoin de protection. On peut en dire autantde leurs étranglements interlobaires et de leurs dia- phragmes puissamment armés. Il y a vraiment ici une compli- cation remarquable des tractus que nous avons observés ailleurs : elle dépasse même de beaucoup celle des parties homologues des Éponges auprès desquelles il convient de ranger les Clionides. Enfin les galeries inextensibles des Cliones ne pourraient contenir à l'état d’embryons la grande quantité d’œufs qui mürissent à l’époque de la reproduction sans que les canaux aquifères se trou- vent oblitérés : aussi les œufs sont pondus avant le début de leur segmentation. Les Silicisponges étudiées dans la deuxième partie de ce travail sont toutes vivipares ; mais l’oviparité ne semble pas être spéciale aux éponges perforantes. En un mot, des particularités que nous découvrons dans les Clionides en les comparant aux Halichondriae, les unes sont transi- toires (lesquelette, rudimentaire dans les galeries, devient d’une solidité à toute épreuve quand l'éponge déborde de son abri) etles autres, qui caractérisent tout un groupe, vont nous servir à déter- miner les affinités que nous cherchons. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 129 Différentes places ont été assignées aux Clionides parmi les Eponges siliceuses. En 1842 (Hist. Brit. Sponges), Johnston croit remarquer que, par sa texture et par le mode de disposition des spicules dans son parenchyme, la Cliona celata ressemble à Æalichondria panicea ou à I. incrustans ; il l'appelle donc Æ/alichondria celata. Une opinion émise par Hancock au commencement de son premier mémoire est digne d’attention. La Cliona celata diffère peu comme structure interne d’une Æulichondria, mais il faut en faire un genre distinct à cause de son habitatet surtout à cause de son pouvoir contractile. Sous ce rapport, les Cliona et Thoosa sont très proches des Tethya qu'on sait être irritables, et, comme leur surface est pourvue de corps ou granules siliceux, elles paraissent aussi voisines des Geodia. O. Schmidt en 1862 range le g. Vioa à la suite du genreReniera dans ses Æalichondriae. En 1868, le même genre fait partie des Com- pagineae et se trouve placé entre les genres Suberites et Papillina. Duchassaing et Michelotti, dans leur ouvrage sur les Spongiaires de la mer Caraïbe (1864), font de leurs Vioa et Euryphylle des * Oxyspongiae perforantes. Je ne m'explique pas par suite de quelle contradiction Duchassaing, dans sa Revue des Zoophytes et des Spongiaires des Antilles (Paris, 1870), les met parmi ses Polyther- siens que F.-E. Schulze dit être des Ceraospongiae du g. Hircinia (1). On sait que pour Bowerbank toutes les Cliones décrites par Hancockne sont qu’une seuleetmême espèce, l’ymeniacidon celatus. Dans son système de 1867, Gray compose l’ordre des Leios- pongia (unarmed Sponges) des 3 familles : Jalichondriadae, Clioniadae et Polymastiadue. En 1870, Carter opère un rapprochement entreles genres Grayella et Osculina d’une part et le genre Cliona de l’autre. Les Grayella cyathophora Crtr. et Osculina polystomella Schm. lui paraissent des (1) Zeits. f. wiss. Zool. xxxIII Bd, ARCH. DE ZOOL, EXP. ET GÉN. — 2 SÉRIE. — T. V bis, supp. 1887, — 4e Mem. 9 430 ÉMILE TOPSENT. formes libres de Clionides, comme le Aaphyrus Grifithsi Bow. n’est qu’une forme libre de la Cliona celata. C’est une opinion que je ne saurais discuter rigoureusement, n'ayant vuni Grayella ni Osculina ; mais il me paraît possible que les diverses Clioues en devenant massives affectent des formes un peu différentes de celle du Raphyrus. Carter fait remarquer avec raison qu’il y a dans ces Raphyrus, Grayella et Osculina même sorte d'organes papilliformes inhalants et exhalants et même sorte de spicules semblablement disposés. Et dans la description (1) que trace Schmidt de la spiculation de l’Osculina polystomella je reconnais les traits principaux d’une Clione massive, à savoir la pénurie relative de spicules capités dans les parties charnues, et l’accumulation au contraire de ces organites dans les piliers et dans l'écorce où ils sont cimentés par une sorte de kératode ; et je m'étonne que Schmidt ait fait de cette éponge une Gumminea, alors qu'il place dansles Compagineae, V'un à côté de l’autre, les genres Vioa et Papillina. C’est plutôt avec ceux- ci qu'avec les genres Chondrosia et Corticiunm que l’Osculina polystomella a des affinités. Entre tous ces genres Raphyrus, Grayella, Osculina et Papillina, il y a un air de parenté très marqué, et l’on peut s'attendre à ce que l'hypothèse de Carter se trouve un jour, au moins en partie, confirmée. : Dans le même ordre d’idées, Gray, en 1872, a rapproché dans l’ordre des Suberispongiae les familles des Raphiophoridae (genres Raphiophora, Raphyrus, Osculina) et des Clioniadae. Enfin Carter en 1879 (Trans. Journ. R. M. Society) proposait un ordre spécial, celui des Ælolorhaphidota, pour contenir la famille (1) Kieselgebilde kommen nur in Gestalt stecknadelfôrmiger oder einfach stumpf-spitzer Nadeln vor. Das Kôpfchen erscheint in mannichfachen Abänder- ungen. Sie fehlen zwar nicht in der Zellensubstanz, herrschen jedoch vor in der Sarcoidsubstauz. Oft sind sie mit einer intensiv gelben Kittsubstanz theilweise oder ganz überzogen und mit einander verbunden, liegen in Innern vôllig regel- los und vereinigen sich nur in den Papillen und Krausen der Oscula zu Bündeln und strahlenfôrmiger Anoränung. (Spong. Küste Algier, 1868, p. 3.) Co de ‘0 6 SOIT SE Lies, MOULE F \-r L'OCRR 2 | : | ë | CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 131 des Æccælonida avec les genres de Clionides connus jusqu’à présent. Telles sont les diverses opinions des auteurs qui ont par eux- mêmes étudié les Eponges perforantes. Je ne puis m'empêcher de signaler à la suite le rapprochement peu heureux que le D° W. Marshall a opéré à la fin de ses Untersuchungen über Dysideiden und Phoriospongien (1) entre les genres Phoriospongia et Vioa. Sans doute, en se développant au dehors des coquilles perforées, la Cliona celata peut, à l’occasion, comme tant d’autres éponges, englober danssa masse quelques pierres, quelques tubes de Serpules ; mais il n'y a là rien de comparable à ces alignées de grains de sable dont sont remplis les Phoriospongia et aussi notre Desmacidon pannosa. Les Cliones détachent et rejettent des corpuscules calcaires pour en prendre la place, tandis que les Phoriospongia augmentent la solidité de leur squelette en agglutinant du sable. Les différences anatomiques sont d’ailleurs considérables entre ces éponges, et le D° Marshall a interprété dans un sens trop strict une simple observation de Johnston. Sur cette question des affinités des Éponges perforantes comme sur beaucoup d’autres concernant les Spongiaires,tant d’hypothèses ont été faites qu’il eût été extraordinaire que l’idée juste n’eüt pas été conçue. Et, de fait, Hancock avait entrevu la vérité. Nous savons à quoi nous en tenir aa sujet des prétendus corpuscules siliceux qu’il avait découverts à la surface des Cliona, mais il est facile . d'établir que, comme ïil:le prévoyait, les Clionides doivent être rangées à côté des Tethya, des Stelletta, des Geodia, etc., en un mot parmi les Corticatae. - Comme la plupart des Corticatae, en effet,elles s’enveloppentd’une cuirasse épaisse et se munissent de piliers squelettiques dia- (1) Zeits, f. wiss. Zoologie, XxxV Bd, 132 ÉMILE TOPSENT. métraux : l'éponge perforante ne diffère de éponge massive qu’en ce que les murs de sa demeure constituent son écorce et ses piliers. Comme les Corticatae, elles couvrent leur surface de petits spicules des membranes, tels que ceux qui abondent sur les parties libres de la Cliona vastifica, par exemple, et dont la forme spiralée est en re- lation avec la forme étoilée de ceux des Tethya. Les spicules des Thoosa rappellent, quoique d’assez loin, les boules siliceuses des Geo- dia, des Caminus et des Stelletta ; la spiculation de la Tethya lyncu- rium contient comme éléments principaux des spicules très simples, acués : celle des Cliona est composée surtout de spicules spinulés. Enfin, si l’on voulait pousser plus loin la comparaison sur ce point, on remarquerait la ressemblance de certains spicules du Caminus apiarium Schm. avec ceux de la T'hoosa bulbosa Hanc. Mais il est d’autres analogies. Comme dans les Tethya, l'écorce des Clionides ne livre accés dans le système aquifère que de place en place: entre les épanouissements externes des piliers s'élèvent des papilles dontla membrane porifère correspond à la lame criblée des vallécules superficielles de la Téthye (1) et s’étend comme elle au-dessus d’une cavité sous-dermique au fond de laquelle s'ouvrent les pores. De plus, la couche circulaire de cellules contractiles qui permet à la Téthye de se contracter et de fermer ses canaux est représentée chez les Cliones par un système de diaphragmes et d’étranglements interlobaires tendus de membranes contractiles. Les différences secondaires qui s’observent dans la disposition de ces parties ho- mologues se comprennent aisément. Les Cliones possèdent des piliers bien plus rigides et bien plus importants que ceux de la Téthye, et leur surface est composée d’une écorce solide sur une bien plus grande étendue que celle de cette éponge : aussi, tandis (1) D: Béla Dezsô. Arch. f. mikr. Anat. t. XVI, 1879 : Die Histiologie und Sprossenentnwicklung der Tethyen; ett. XVII, 1880 : Forsetzung der Untersu- chungen über Tethya lyncurium. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 133 que cette dernière est capable, en rejetant l’eau qu’elle contient, de diminuer de volume et de se durcir considérablement, les pre- mières, libres ou enfouiss dans les coquilles, ne peuvent pas changer de forme pour se défendre. Enfin, bien que le développement des Corticatae soit à peu près in- connu, on sait déjà par les recherches de Dezsô que les œufs de la Tethya lyncurium rese segmentent pas dans la couche profonde où ils ont pris naissance. Là, comme dans les Éponges perforantes, les canaux ne suffisent pas à contenir les embryons développés. Par l’ensemble de leurs caractères, les Clionidae se révèlent donc comme de véritables Corticatae. Elles forment dans ce groupe une famille bien naturelle qui ne le cède pas en importance à celles donÿ il est encore composé, les Tethyadae (ys. Tethya, Tetilla, Pachastrella, etc.), les Ancorinae et les (eodiae, et qui ne se dis- tingue de ses voisines que par l’aptitude de ses membres à em- prunter aux corps calcaires, au moins pendant les premiers temps de leur vie, soutien et protection. APPENDICE En cherchant des matériaux pour l’étude des Æalichondriae, j'ai réuni les éléments d’une faune des Spongiaires de la région maritime comprise entre l'embouchure de la Seine à l’Est et celle de la Seulles à l'Ouest. | Cette région avait déjà été explorée par Lamouroux au com- mencement dusiècle. Son Æxposition méthodique des genres de l’or- dre des Polypiers, publiée quatre ans avant sa mort, en 1521, et la Collection Lamouroux que conserve le Musée zoologique de la Faculté des Sciences de Caen, où il professait l'histoire naturelle, nous permettent de jeter un coup d'œil en arrière. Le groupe des Spongiées, que Lamouroux élevait à l’état d'ordre, ne comprenait alors que deux genres : le o. ÆEphydatia, avec trois espèces, et le g. Spongia, bien autrement riche. Dans ce dernier, au milieu d’espè- ces exotiques nombreuses (1), provenant pour la plupart du voyage de Péron et Lesueur aux terres Australes, les dessins de l'auteur, l’indication de l'habitat et aussi la suite des synonymes laissent reconnaître d’une manière certaine plusieurs des espèces de notre côte :la Spongia coronata (Sycandra ciliata Haeck.), la Spongia botryoides (Leucosolenia botryoides Bow.), la Spongia pal- mata an oculata (Chalina oculata Bow.). Là ne se bornaïent pas les connaissances du savant professeur, et j’ai déterminé dans sa col- lection : Alcyonium lyncurium ( Tethya lyncurium), Alcyonium me- dullare ou À. paniceum (Amorphina panicea), Alcyonium compactum ou Spongia domuncula(Suberites ficus), Alcyonium sp ? (Cliona celata (1) Créées par de Lamarck, Hist. nat. des Anim. sans Vertèbres, t, II. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 135 raphyroïde), Alcyonium ramosum (Dictyocylindrus fascicularis), etc. ; mais, à défaut des caractères microscopiques, l’auteur éprouvait de grandes difficultés à limiter les genres : seules, la forme et la con- sistance des Polypiers guidaient ses déterminations, et, pour beau- coup d’éponges, ces deux caractères conduisaient à les ranger, comme on vient de le voir, dans le g. Alcyonium. Pourtant les hésitations étaient fréquentes ; on en constate sur les étiquettes écrites par Lamouroux, par exemple sur celle de Suberites ficus qui est appelé Alcyonium compactum et Spongia domuncula. Deux autres genres d’éponges siliceuses, placés par de Lamarck à la suite du genre Spongia, ne rentraient pas non plus dans les Spongiées, les genres Tethya et (reodia, qui ont été conservés et dont on a établi la véritable position. Voilà, en quelques mots, ce qu’on savait alors des éponges de nos mers. Les progrès ont été rapides ; mais, en France, l’atten- tion des naturalistes ne s’est que fort peu portée sur ces êtres in- férieurs, et nous ne trouvons que des indications éparses sur la présence de certaines espèces en divers points des côtes de la Manche. | En 1835, F. Dujardin (1) découvrit sur les côtes du Calvados, à la base des Laminaria palmata, la première éponge gélatineuse, une Âalisarca (Duj.) à laquelle Johnston (2) donna le nom spé- cifique d’AHalisarca Dujardinii. En 1840, G. Duvernoy (3) vit pour la première fois, à Dieppe, la Cliona celata de Grant dont A. Lereboullet en 1841 et M. L. Vaillant en 1870 complétèrent la description. Dans ses excursions à Saint-Malo (1868) et à Roscoff (1869), M. Ed. Grübe (4) recueillit quelques éponges, parmi lesquelles il reconnut //ymeniacidon caruncula Bow. et Sycon ciliatum Haeck. (1) Ann. Sc. Nat. 2e série, t, X, 1838, (2) Brit. Spong. 1842, p. 192. (3) Compt. rend. Acad. Sciences 1840, t. XI. (4) Mittheilungen über die Meeresfauna von St-Malo und Roscoff. (Aus den Verhandl. d. schlesischen Gesells. f. vaterl. Cultur, 1868, Breslau.) 136 ÉMILE TOPSENT. (Roscoff). Il décrivit aussi comme une espèce nouvelle du g. Caminus Schm. (Caminus osculosus Grü.) la Pachymatisma Johnstonia de Bowerbank, abondante à la pointe de la Varde, près de Saint-Malo, sur les rochers qui découvrent à marée basse. La monographie des Calcisponges d'Haeckel comprend plu- sieurs éponges dont la présence sur nos côtes a été reconnue par M. de Lacaze-Duthiers. | Dans une étude sur les Synascidies (1), M. Giard a signalé deux Halisarca nouvelles dans la Manche : 1. roscovita à Roscoff et IT. mimosa à Wimereux. M. Ch. Barrois, aucours des recherches qu’il a faites sur l’em- bryogénie des Eponges à Saint-Vaast et à Wimereux, a retrouvé plusieurs espèces de Bowerbank et d’Haeckel, l Æalisarca lobularis de Schmidt et l’ÆZalisarca mimosa de Giard dont il incline à faire une Gummina ; il a aussi découvert à Saint-Vaast une nouvelle éponge fibreuse qu’il a appelée Verongia rosea (2). Enfin les recherches récentes de M. Koœbhler sur la faune ma- rine des îles Anglo-Normandes (3) contiennent une liste des éponges de ces parages ; mais cette liste ne signale guère que des espèces littorales, et on y remarque l’absence d’une foule d’autres espèces recueillies sur ce point par plusieurs naturalistes anglais et décrites par Bowerbank. Découvrant des différences profondes entre la faune que j'ob- servais à Luc et celle des îles Anglo-Normandes, j’ai essayé de contribuer à l'étude, encore rudimentaire, de la distribution des Eponges sur les côtes françaises de la Manche en m’appliquant à déterminer tout ce que j'ai rencontré dans mes excursions à la grève et dans de nombreux dragages. (1) Arch. Zool. Exp. et Gén. t. IT, 1873. (2) Be po \3) Ann. Sc. Nat, 6e série, t. XX, n° 5, et Bullet. Soc. Se. Nancy, 1886, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 431 Je me suis heurté, dans cette tentative, à des difficultés de différentes natures. En premier lieu, la région que j’explorais ne présente que des fonds sans abri, lavés par de forts courants et recouverts seulement d'une quinzaine de brasses d’eau en moyenne ; dans ces conditions défavorables, les espèces ne sont pas riches en individus, d’où la nécessité de multiplier les recherches. D’au- tre part, la détermination des éponges n'est pas toujours possible ; l'ouvrage de Bowerbank, qui, naturellement, m'a servi de prin- cipal guide, contient vlus d’une description d’espèce faite sur un seuléchantillon oufragment d’échantillon, sans caractères extérieurs frappants, sans spiculation particulière et, souvent, examiné à l’état sec ou conservé dans l’alcool, c’est-à-dire ne fournissant aucune indication précise sur sa couleur à l’état de vie. En présence de tels obstacles, je ne saurais avoir la prétention de donner la liste complète des éponges de notre faune locale ; il est probable que de nouveaux dragages récolteront de nouvelles espèces et que certaines autres se rencontreront mieux caractérisées dont jai dû provisoirement abandonner la détermination. Toutefois j’espère que cet aperçu ne sera pas inutile, parce que je me suis efforcé d’en faire autre chose qu’un simple cata- logue. Ayant eu l’avantage d’examiner tous les échantillons à l’état frais, j'ai pu réformer quelque peu certaines descriptions de Bowerbank tracées d’après des éponges provenant de collections et donner des indications nouvelles sur la couleur et l’aspect gé- néral de quelques espèces qui n’avaient été vues qu’une fois ou deux et qui ne sont pas rares à Luc. Mais ce que j'ai voulu sur- tout faire ressortir, c'est ce point important que, dans plusieurs d’entre elles (Amorphina angulata, Raphiodesma sordidum, Hy- medesmia Zetlandica, Dendoryx incrustans, etc.), la spiculation présente avec les individus des variations profondes. Ces obser- vations portent à penser que l'examen d’une grande quantité d’éponges permettra de restreindre le nombre des espèces créées 138 ÉMILE TOPSENT. sur de faibles différences ; on peut toutefois savoir gré à Bower- bank d’avoir signalé toutes les formes qu'ila eues en sa posses- sion, puisqu'il établissait ainsi les premiers termes des comparaisons qui décideront à opérerles fusions. Enfin j'ai cru qu’il y aurait intérêt à fournir quelques rensei- gnements concernant l'époque où s’effectue la reproduction des diverses éponges ; mais, comme il est possible que des variations annuelles amènent tantôt un peu de retard et tantôt une légère avance, pour éviter l'absolu, j'ai noté, dans un même été, la pé- riode pendant laquelle chacune des éponges que j'ai pu voir fré- quemment m'a montré des œufs en segmentation. Spongiaires recueillis dans les eaux de la Station zoolo- gique de Luc (1). CALCISPONGES. 1. ASCETTA CORIACEA. Haeckel. Die Kalkschwämme, t. III, pls. III et V.(Leucosolenia coriacea Bow. 1. c., t. IIT, pl. IIT). — Haeckel l'a déjà signalée sur les côtes normandes d’après M. de Lacaze-Du- thiers. C’est une épongede couleur variable. Barrois nous apprend (1. c., p. 63) qu'à Saint-Vaastelle esttantôt blanche et tantôt rouge brique. J’en ai vu des échantillons lilas pâle provenant de Gréville (Manche), mais à Luc tous ceux recueillis jusqu’à présent sont d’un blanc pur ; tous se rapportent à la forme Auloplegma. Très com- mune dans les dragages et sur les berges du Quihoc. Ses ramifica- tions s'étendent sur les pierres et les coquilles. Œufs en octobre. 2. ASCALTIS BOTRYOIDES. Haeck. l.c., pls. IX et X (Leucosolenia botryoides Bow. 1. c., pl. IT). — Eponge blanche assez commune sur les colonies d’hydraires et sur le thalle ramifié des Floridées. Habite près de la côte. (1) Des échantillons de toutes les espèces sont déposés dans la collection du Laboratoire. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 139 J’en ai suivi un peu le développement en juillet 1887, parce que, en ce qui concerne les Ascones, la description des embryons d’Ascetta clathrus par O. Schmidt diffère de celle des embryons d’4s- candra contorta par Barroïs. Les embryons d’Ascaltis botryoides sont semblables à ceux d’As- candra contorta. Quand ils sont prêts à sortir, ils sont formés de deux parties : l’une antérieure, ciliée, constituée par de longues cellules prismatiques à base jaunâtre ; l’autre postérieure composée de grosses cellules arrondies, sans cils, rentrant en partie dans la cavité de segmentation. 3. ASCANDRA CONTORTA. Haeck. L. c., pl. XIV (Zeucosolenia con- torta Bow. I. c., pl. IIT). — Blanche ; assez rare. Dragages. 4. ASCANDRA VARIABILIS. Haeck. 1. e., pl. XVI. — Commune au large. Elle est reconnaissable aux spicules acérés de deux sortes qui couvrent sa surface, les uns très longs, les autres très courts. Presque tous les échantillons de cette espèce portent, du moins en été, des bourgeons dont M. G. Vasseura donné la description. Malgré le titre que l’auteur donne à son mémoire : Reproduction asexuelle de la Leucosolenia botryoides (1), il est bien certain que c’est l’Ascandra variabilis qui est en question ; l’Ascaltis botryoides n’a pas de spicules acérés, et M. Vasseur en reconnaît deux sortes dans l'éponge qu il étudie. 5. DYCORTIS CILIATA et DYCANDRA CILIATA. Haeck. 1. c., pl. LI. — Ces deux variétés d’une même espèce sont également com- munes à Luc. Le Quihoc et dragages. Je les ai trouvées en pleine reproduction en juillet et août. SILICISPONGES. 6. POLYMASTIA MAMMILLARIS. Bow. I. c., t. III, pl. XIT (Pencillaria mammillaris, Gray, P. Z. $. L.1867,p. 57). — Eponge du large, commune en certains points. (1) Arch. Zool. Exp. et Gén.t. VIII, 1879-80. A10 ÉMILE TOPSENT. Bien que ressemblant d'assez près à la Rinalda arctica (1) , elle paraît ne jamais produire de bourgeons à l'extrémité de ses appen- dices dermiques. On peut presque toujours distinguer trois colorations sur elle : l’intérieur est jaune vif, les languettes fistuleuses sont teintées de jaune très pâle, et la surface générale offre une nuance inter- médiaire. | Depuis la fin d'août jusqu’au commencement d'octobre, je l'ai trouvée remplie d'œufs unicellulaires dépourvus de pigment et grisâtres, qui, par suite, assombrissent l’éponge au lieu de lui donner, comme cela se voit d'ordinaire, une couleur plus vive. 7. PozymasrTiaA RoBuSTA. Bow. 1. c., pl. X (Polymastica robusta, Gray, L. c., p.527). — Commune aussi par places au large. Le tissu conjonctif est très abondant et rend la masse interne un peu filante. La reproduction paraît se faire en août et septembre ; les œufs, unicellulaires, sont colorés. 8. PoLyMasTIA BREvIS. Bow. 1. c., pl. XI. — Un seul échan- tillon, parfaitement caractérisé, a été dragué à 3 lieues au N. de Luc. 9. CrocALYPTA PENICILLUS. Bow. 1. c., pl. XIII (Axinella peni- cillus, O. Schmidt Spong. atlant. Geb. 1870, p. 76). — Bowerbank n’enavait vu quedeux spécimens provenant d’Hastings. Elle n’a pas été signalée ailleurs, que jesache. Elle est commune aux environs de la tonne des Essarts de Langrune, en un point où le fond est cou- vert de grandes pierres plates généralement nues; c’est donc une espèce caractéristique de la faune de Luc. — L'éponge vivante est jaune et non gris clair, mais le système dermique est tellement développé qu’il empêche de voir cette coloration par transparence. 10. TETHYA LYNCURIUM (auct.). Bow. 1. c., pl. XV (Donatia aurantium, Gray, 1 e., p.341). Très commune ; dragages seulement. (1) Mémoires de l'Acad. Imp. des Sciences de Saint-Pétersbourg, VII® série, t. XXVI,n07, Ætudes sur les Eponges de la Mer Blanche, par C. de Mérej- kowsky. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. A4 Œufs en août et septembre. Bourgeons tout l'été; il est très rare de voir deux bourgeons bout à bout. 11. DrcryocyziNprus RAMoSuS (Montaigu) , Bow. 1. c., pl. XVI (Raspailia ramosa, Schmidt I.c., p.76). — Très abondante, dragages ; couleur brune.lJ”y ai trouvé en septembre des œufs jaunes unicellulaires. 12. DrcryocyziNprus xispipus (Mont.), Bow. I. c., pl. XVII CRaspailia viminalis ? Schmidt, 1. c., p. 76). — Commune ; dra- gages. | 13. DicryocYLINDRUS FASCICULARIS. Bow. I. c., pl. XVIII (Adreus fascicularis, Gray,l. c., p. 545, Raspailia stelligera? Schmidt, l. c., p. 76). — Commune, dragages. 14. DicryocyziNprus sTuPoSUs (Mont.), Bow. 1. c., pl. XIX ( Vi- bulinus stuposus, Gray, 1. c., p. 545, Raspailia stuposa, Schm. I. c., p. 76). — Bowerbank n'avait pas vu de spécimen frais de cette espèce qu’il n’est pas rare de draguer au large de Luc. L’éponge vivante est généralement rouge orangé, et sa surface, souvent couverte de vase, est gluante ethispide à la fois. J’y ai trouvé en août des œufs jaunes non segmentés. 15. MicRocioNA ARMATA. Bow.l. c., pl. XXIII.—Epongerouge, de nuances variées; très commune dans les dragages etsur le Quihoc. Le tissu conjonctif est très développé. Les extrémités des spicules tricurvés sont souvent épineuses. Œufs et embryons rouge vif, en août et septembre. 16. MicrocIONA PLUMOSA. Bow. I. c., pl. XXIV (Pronaz plumosa, Gray, 1. c., p. 536, Desmacidon plumosus, Schmidt, 1. c., p. 76). — Cette espèce paraît assez rare à Luc. 17. MICROCIONA ATRASANGUINEA. Bow. I. c., pl. XXIV.— Le Quihoc. 18. HymErRAPHIA MINAX 0. sp. (PI. VI, fig. 17). Eponge revêtante, très mince, fortement hispide et coriace Couleur : rouge à l’état frais. 142 ÉMILE TOPSENT. La spiculation de cette espèce ne permet de la confondre avec aucune autre : des spicules capités d’unetaille considérable (700 ») font longuement saillie à l'extérieur ; des spicules de même forme, mais beaucoup plus grêles et ne mesurant plus que 250 x en moyenne, s’entre-croisent dans l’épaisseur de l'éponge ; enfin de petits spicules tout à fait caractéristiques forment à la surface un feutrage serré fort difficile à dissocier. Ces spicules sont ordinaire- ment en fer à cheval; mais il arrive souvent aussi que, leurs deux extrémités ne tendant pas à se rejoindre, ils figurent des lignes brisées à deux, rarement à trois parties. Le bord externe et les extrémités du fer à cheval ou de la forme qui en dérive sont couverts d'épines nombreuses et très pointues. La largeur moyenne de ces spicules est de 4 » ; l’écartement de leurs branches ne dépasse pas 15 ». Habitat : environs de la tonne des Essarts de Langrune. Trois échantillons examinés vivants tapissaient les parois d'anciens trous de Gastrochènes. 19. HyMEDESMIA RADIATA. Bow. 1. c., pls. XX VIII et XXIX (Epicles radiosus, Gray, 1. e., p. 521). — Deux échantillons seule- ment en étaient connus. Bowerbank n’a pas vu l’éponge fraîche ; elle est blanc grisâtre, mince et, contrairement à ce que pensait le spongologiste anglais, naturellement hispide par la projection des grands spicules acués à travers le derme. Assez commune au large de Lue, sur les pierres. 20. HYMEDESMIA ZETLANDICA. Bow.l. c., pl. XXIX. — Deux représentants de cette espèce ont été recueillis pleins d'œufs en segmentation en septembre, près de la tonne des Essarts de Langrune ; leur coloration était jaune clair à l'état frais ; ils différent des quelques échantillons examinés par Bowerbank et s’écartent du type par certains détails de leur spiculation : les spicules simples à deux crochets (simple bihamate spicules), au lieu d’être très grêles, sont énormes, et fréquemment leur tige est épaisse CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 143 de 5 x ; de plus, ils ne sont pas fasciculés ; enfin j'y ai constaté la présence d’une sixième sorte de spicules que n'indique pas Bowerbank : des spicules tricurvo-acérés. 21. AMORPHINA CARUNCULA. Schmidt, I. c.,p. 76(Hymeniacidon caruncula Bow. 1. c.,pl. XXXII, Reniera caruncula, Gray ,l.c., p.518). — Elle abonde sur les berges du Quihoc et des rochers voisins et s’étend en larges plaques sur les grosses pierres de la grève qui dé- couvrent en grande marée. Se reproduit surtout en septembre. 22. AMORPHINA SANGUINEA. Schmidt, 1. c., p.76 (Hymeniacidon sanguineus Gr., Bow.l. c., pl. XXXII, Reniera sanguinea, Gray, 1. c., p. 518). — Le Quihoc et dragages. Couleur rouge foncé. Les spicules acués longs et gros rendent la surface remarquablement hispide. 23. AMORPHINA VIRIDANS.({/ymeniacidon viridans Bow. 1. c., pl. XXXIIT). — De cette espèce polymorphe je n’ai pu voir que des spécimens minces recouvrant des pierres du large et en tout sem- blables à ceux que M. Stewart a trouvés à Plymouth. 24. AMORPHINA ALDOUSII. (/ymeniacidon Aldousii Bow. 1. e., pl. XCII). — Un échantillon dragué ; comme le spécimen type de l'espèce, il est criblé par des annélides. 25. AMORPHINA PANICEA. Schmidt, 1. c., p.77(Halichondria pani- cea Johnston. Voy Bow. l.c.,pls. XXXIX et XL).— Reproduction en juin. 26. AMORPHINA GLABRA. Schmidt, l. c.,p. 77 (Halichondria glabra Bow. 1. c., pl. XLI). — N'est pas rare à trois lieues au N. de Luc, sur les pierres. Cette éponge jaunâtre ressemble beaucoup à la précédente; cependant des différences dans l’état de la surface et dans les dimensions des spicules permettent de l’en séparer ; l'examen des éléments cellulaires rend la distinction plus facile encore. (Voy. 2° partie.) 144 ÉMILE TOPSENT. 27. AMORPHINA CONNEXA n. sp. ? an AMORPHINA ANGULATA TYPICA (PI. VI, fig. 15). J’appelle ainsi une éponge de teinte gris clair à l’état frais, assez commune au large de Luc. Elle est sessile et ne s'élève jamais beaucoup au-dessus de ses supports qu’elle recouvre de plaques de forme et de dimensions variables. Sa surface, assez régulière, est rendue nettement hispide par la projection des spi- cules du squelette à travers la membrane limitante externe. Le squelette est constitué par des spicules à deux pointes (acerate spicula), le plus souvent un peu courbés vers le centre ; ils atteignent 250 x delongueur et 7 à 8 « de largeur. La membrane dermique et toutes les parties d'apparence membraneuse de l’éponge sont couvertes d’une grande quantité de spicules linéaires acérés, 8 fois courbés (tricurvo-acerate), atteignant une longueur moyenne de 50z et de fort petits spicules à deux crochets simples (simple bihamate spicula) dont le grand axe mesure 7 à 8 “environ. Sans l'étude de la spiculation à l’aide du microscope il serait impossible de déterminer cette éponge, dont les caractères géné- raux sont aussi ceux des //alichondria angulata et de 1. Couchii de Bowerbank ; c’est précisément à cause de sa spiculation que j'ai cru devoir attirer l’attention sur elle. | Halichondria angulata, avec les mêmes spicules du squelette, possède des spicules grêles éricurvo-acerate , maïs pas de spicules simple bihamate. Halichondria Couchii, avec les mêmes spicules du squelette, présente au contraire des spicules simple bihamate ; mais, au lieu de spicules grêles acérés à trois courbures , elle n’a que des spicules grêles acérés droits. Bowerbank insiste beaucoup surces différences entre /J. angulata et 7. Couchü. L’éponge ici en question diffère de chacune de ces espèces par le point qui la rapproche de l’autre. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 145 Mais, loin d’exagérer la valeur de ces distinctions, je suis assez porté à considérer Amorphina connexa comme représentant la forme typique d’une espèce dont Æ. angulata Bow. serait une forme pri- vée de spicules bihamate, comme cela se voit dans certains Raphio- desma sordidum (v. cette espèce), et dont Æ. Couchii Bow. serait une autre forme presque complète, ne s’écartant du type qu’en ce que les spicules normalement angulés ne se seraient pas coudés et se présenteraient par conséquent comme des spicules linéaires acérés droits. J’ai aussi trouvé dans Raphiodesma sordidum des exemples de cette anomalie. Cette supposition semble d’autant plus valable que de cette Amorphina angulata typica (comme on pourrait l'appeler si l’hy- pothèse étaitadmise), les formes incomplètes Halichondria angulata et 1. Couchii de Bowerbank n’ont été vues qu'une seule fois (1). Si pourtant ces considérations devaient être abandonnées et si l'opportunité était reconnue d'établir une troisième espèce, le nom que je propose de donner à l'éponge nouvelle marquerait les rap- ports étroits qui existent entre elle et les deux Æalichondria de Bowerbank. En résumé : 1° ou bien il n’y a qu’une seule espèce, Amorphina angulata, dont les deux éponges de Bowerbank sont des variétés ; 2° ou bien il y a 3 espèces distinctes : Amorphina angulata, Amor- phina Couchii et Amorphina connexa n. sp. 28. AMORPHINA CADUCA. Schm. I. c., p. 77 (Halichondria caduca Bow. L c., pl. XLI). — Je rapporte avec quelque doute à cette espèce mal caractérisée un petit échantillon dragué, gris clair à ’état sec. 29. AMORPHINA INCONSPICUA. Schm.l. c., p. 77 (Halichondria inconspicua Bow. 1. c., pl. XLI). — Bowerbank n'en a vu qu'un (1) J'ai cru quelque temps avoir trouvé A. anqulata Bow. à Gréville (Pull, Soc. Linn. Norm. 5° série,t, X) ; un nouvel examen m'a convaincu que j'avais affaire à Am. connexa. ARCH, DE ZOOL. EXP, ET GÉN., — 2° SÉRIE, — T, V bis, supp. 1887, — 4e Mém. 10 146 ÉMILE TOPSENT. mauvais spécimen. — Elle n’est pas rare dans les dragages ; sa couleur est grisâtre à l’état frais. 30. AMORPHINA INCERTA. (Halichondria incerta Bow. 1. c., pl. XLI). — Environs de la tonne des Essarts de Langrune. Je n’ai vu que deux éponges de cette espèce ; elles sont jaune soufre à l’état sec et parfaitement semblables à l'unique spécimen type trouvé par le Rév. A. Norman à Guernesey. 31. AMORPHINA COALITA. Schm. 1. c., p. 77 (Halichondria coalita Johnston ; voy. Bow. I. c., pl. XLI). — Espèce littorale qu'avec un peu d'habitude on distingue facilement d'A. panicea avec laquelle elle se rencontre en abondance sur les berges du Quihoc. 32. DENDORYX DUJARDINII. (/ymeniacidon Dujardinii Bow. 1. c., pl. XXXVIIT). — Voir la deuxième partie de ce travail. 33. DENDORYx INCRUSTANS. Gray, 1. c., p. 535 (Halichondria incrustans Johnston ; voy. Bow. IL. c., pl. XLIV). — Deux variétés de cette espèce sont communes à Luc et au Quihoc : 2. incrustans typica et D. incrustans viscosa. Elles se reproduisent simultanément en août et septembre. 84. DENDORYX IRREGULARIS. Gray, 1. c., p. 536 (Halichondria irregularis Bow. 1. c., pl. XLIV). — Bowerbank en a vu un seul spécimen provenant d’Hastings. Eponge jaune d’ocre, peu commune à Luc ; dragages. Les spicules dermiques sont quelquefois acués. Quand D. irregularis est bien vivante, ses oscules sont ie légèrement saillants ; on les aperçoit comme des taches arrondies plus claires que le reste de sa surface ; des spicules dermiques dressés forment la charpente de ces faibles éminences. Œufs en août. 85. DENDORYX NIGRICANS. (/Jalichondria nigricans Bow. I. c., pl. XLV ; Zophon nigricans Gray, 1. c., p.534). — Brun foncé à l’état sec ; assez rare ; dragages. 36. REeN1ERA HYNDMANI. (Zsodyctia Hyndmani Bow. I. c., HR le Méhomntitl» dé rite msn lost Sete a dé DS de LS CS dé dde de d “nd de te de ‘1 CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 147 XLVI; Alebion Hyndmani Gray, 1. c., p. 534). — Est-ce une Reniera? Ne serait-ce pas plutôt une Dendoryx ? Commune à Luc ; dragages. Couleur. Vivante : jaune, quelquefois légèrement orangé ; des- séchée : brun-noirâtre. Il est remarquable que le simple contact du fer bleuit le kératode d’union des spicules. 37. RENIERA PERMOLLIS. (Zsodyctia permollis Bow. 1 c., pl. XLVIII). — Dragages. 38. RENIERA BOWERBANKI. (/sodyctia Bowerbanki Norman, I. simulo Bow. 1. c., pl. X LVIII). — Dragages. Eponge remar- quable par l’abondance du kératode qui unit les spicules. 89. RENIERA VARIANS. (/sodyctia varians Bow.l. c., pl. XL VITT ; Philotia varians Gray, 1. c., p. 522). — Plusieurs échantillons sur des /nachus Dorsettensis ; dragages. — Le plus beau spécimen que j'aie vu de cette espèce ressemble beaucoup à ÆR. simulans par ses caractères extérieurs ; mais les mailles du réseau squelet- tique sont assez lâches, et l'éponge est molle et facilement recon- naissable à la forme de ses spicules. Rappelons que Bowerbank a signalé (t. III, p. 307, pl. LXXXVIII) une autre forme d'Z. varians, commune à l’embou- chure de la Mersey, impossible à distinguer de Chalina oculata sans le secours du microscope. 40. RENIERA ROSEA. (Zsodyctia rosea et I. cinerea Bow. 1. c., pls. XLIX et XLVIIT). — Sur les berges du Quihoc. Reproduc- tion en juillet. (Voy. 2° partie.) A1. RENIERA ELEGANS. (/sodyctia elegans Bow. 1. c., pl. XLIX). — Dragages. Le tissu conjonctif est tout à fait spécial. 42. RENIERA PARASITICA ? (/sodyctia parasitica Bow. 1. c., pl. XLIX). — Un échantillon, le Quihoc. Détermination douteuse, JT. parasitica n'ayant pas de caractères marqués. 43. RENIERA DENSA. (/sodyctia densa Bow. 1. c., pl. L). — Eponge polymorphe, fréquemment visqueuse, qui se rencontre au 148 . ÉMILE TOPSENT. large et sur les berges du Quihoc. La couleur est tantôt brun clair et tantôt lie de vin. 44. RENIERA FISTULOSA. (Zsodyctia fistulosa Bow. I. c., pl. LIII). — Commune dans les dragages. Le corps de l’éponge, coloré en brun clair, est toujours enfoncé dans les anfractuosités du support, et la présence de À. fistulosa n’est révélée que par les longues papilles blanches de son système dermique. 45. RENIERA SIMULANS. (/sodyctia simulans Bow. 1. c., pl. LI ; Adocia simulans, Gray, 1. c., p. 522). — Commune au large de Luc. Epoque de la reproduction : juillet-août. 46. RENIERA RAMUSCOULUS. (/sodyctia ramusceulus Bow. 1. c., pl. LIIT). — C’est une espèce bien voisine de À. rosea ; sa surface est plus lisse et sa coloration plus bleuâtre. Habitat : assez près de la côte. 47. RENIERA FUCORUM. (/sodyctia fucorum Bow. L. e., pl. LVI). — Abondante sous les berges du Quihoc ; vit aussi à quelque distance de la côte sur les Algues et les Tubulaires. 48. RENIERA PAUPERA (/sodyctia paupera Bow. 1. e., pl. LV). — Dragages.Jaune d’ocre à l’état sec. Cette Reniera est bien facile à confondre avec À. Edwardiü, car la seule différence que Bowerbank indique entre ces deux éponges réside dans les proportions relatives de leurs spicules acérés. D'un autre côté, À. Edward diffère assez peu de À. gracilis pour que Vosmaer (1) les ait réunies sous le nom d’Amphilectus gracilis. Stuart O. Ridley (2) prétend au contraire que R. gracilis se distingue à sa forme toujours branchue. Pour savoir s’il s’agit là de 3 variétés d’une éponge polymorphe, il convient d'attendre qu’il en ait été examiné un nombre suffisant d'échantillons. Ceux recueillis sur les côtes du Calvados s’étalent (1) Vosmaer. Notes from the Royal Museum of the Nederlands. (2) Stuart O Ridley. Notes on Zoophytes and Sponges obtained by M. F. Day of the East Coast of Scotlund.Journ. Linn. Soc. London, vol. XVIT, p. 105. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 149 sur des coquilles de Lamellibranches, et leur surface est irrégulière et hispide. 49. RENIERA UNIFORMIS. (/sodyctia uniformis Bow. 1. c., pl. LV). — Eponge grise à spicules acués formant un réseau assez peu régu- lier. N'est pas rare au large sur les Hydraires. 90. RENIERA VISCOSA n. Sp. ÆR. viscosa n’a que des spicules fusiformes acérés, faiblement courbés, de grosseur fort variable et de longueur atteignant 160 x en moyenne. Mais c’est à d’autres caractères qu'on la reconnaîtra. L’éponge vivante est extrêmement visqueuse, plus encore peut-être que Dendoryx incrustans viscosa. Le caractère distinctif de l'espèce réside dans les oscules, qui sont ici composés. En certains points, la surface s'élève un peu, et le plateau circulaire qui couronne chaque légère éminence et qui n’a pas moins de 5 à 7 mm:dediamètre est criblé de trous assez larges qui sont autant d’oscules. Les pores sont faciles à voir si l’on pratique une coupe tangen- tielle à la surface générale de l'éponge. JR. viscosa a une coloration brunâtre qu’elle conserve assez bien après dessiccation. La surface est unie et douce, ou bien, par places, se recouvre . de grains de sable que retient la viscosité. Les aires osculaires éparses sont assez nombreuses. Deux magnifiques spécimens, sessiles et massifs, gros comme la moitié du poing, ont été dragués au large de Luc. 51. RENIERA FIBULATA Schmidt 1862. Il existe dans les eaux de Luc une Reniera qui n'a pas été signalée sur les côtes anglaises, la Reniera fibulata, rencontrée pour la première fois par Schmidt dans l’Adriatique. Je n’en ai mal- heureusement vu qu'un fragment sur une valve de Cardium norvegicum, mais je l’ai vite reconnue à sa spiculation. Le squelette est constitué par des spicules fusiformes acérés, 150 ÉMILE TOPSENT. courbés graduellement vers le centre et atteignant en moyenne 140 # de longueur et 3 # 112 à4# de largeur. La présence de spicules courbes à deux crochets simples dans les parties membraneuses est tout à fait caractéristique. Ces orga- nites y sont abondants et de taille assez belle, puisque leur grand axe mesure 25 # en moyenne et que l'épaisseur de leur tige au centre égale 2 . Couleur : gris clair à l'état de vie. Habitat : Luc, dragages. 52. SUBERITES SUBEREA. Gray, 1. c., p. 523 (Hymeniacidon suberea Bow. 1. c., pl. XXX VI ; Suberites domuncula Schmidt ]. c., p. 76). — Le Quihocet dragages. Elle ne paraît jamais acquérir un beau développement dans nos parages où je l’ai toujours trouvée revêtante, assez mince. Couleur : orangé foncé à la sur- face, jaune dans la profondeur. | 53. SUBERITES FiCUs. Schmidt 1. c., p. 76 (Hymeniacidon ficus Bow. I. c., pl. XXXVI ; Ficulina ficus, Gray, L. c., p. 528). — Peu commune. Même habitat que l’espèce précédente. Sa couche corticale, rouge orangé d’ordinaire, est sujette à des décolorations partielles, et S. ficus se montre souvent simplement jaune ou même grisâtre. La surface est fréquemment perforée de petites logettes ovalaires dont chacune sert d’habitation à un Amphipode de l'espèce Tritaeta gibbosa. 54. SUBERITES SULPHUREA. Gray, 1. c., p. 523 (Hymeniacidon sulphureus Bow. 1. c., pl. XXXVII). — Les recherches de Bo- werbank ont porté sur une trop grande étendue de côtes pour qu’on doive s’attendre à trouver dans sa Monographie des indi- cations sur la distribution géographique et bathymétrique des espèces qu’il a décriteset sur l'abondance ou la rareté relatives de leurs représentants. La plupart du temps, c'était par hasard et par l'entremise de naturalistes que Bowerbank prenait connaissance d’éponges nouvelles. Aussi ne doit-on pas s'étonner qu'il ne soit parlé dans son ouvrage que de quatre échantillons de son //ymenia- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 151 cidon sulphureus provenant de localités différentes, et que cette simple mention ait été écrite en ce qui concerne leur couleur : € Dried, sulphur-yellow ». S. sulphurea est très commune à Luc, sur les pierres du Quihoc et des rochers voisins, et, au large, sur les pierres et les coquilles. Elle est le plus souvent revêtante, mais parfois aussi devient mas- sive. Sa consistance, ferme d'ordinaire, est remarquablement dure dans ce dernier cas.-La surface est hérissée de bouquets de spi- cules capités à pointes dirigées vers l'extérieur et divergentes. La taille des spicules du squelette est extrêmement variable dans un même individu. La couleur, à l’état de vie, peut être jaune très pâle, jaune d’or, jaune orangé presque rouge, enfin jaune brun foncé. 55. CLIONA CELATA Grant. (Voir la 1° partie.) 56. CLIONA VASsTIFICA n. se. (Id.) 57. CLIONA LOBATA Hancock. (Id.) 58. RaPxropesma sorpipuM Bow. 1. c., pl. XC. — Eponge mince. Sa couleur varie du gris jaunâtre au jaune orangé ; quel- quefois aussi elle est violet foncé. Commune, le Quihoc et dra- gages, sur les pierres et les coquilles. Reproduction en août et septembre. Œufs de grande taille, colorés en jaune vif et disposés en gros amas de place en place. La spiculation de ZX. sordidum est très intéressante à cause de ses variations. Sur des spécimens provenant du large, j'ai trouvé, outre les énormes spicules courbes à deux crochets simples (simple bihamate spicules), en quantité considérable et couvrant les parties membraneuses, de très petits spicules de la même forme, vraisem- blablement arrivés à leur taille normale, et qui n’ont point été indiqués par Bowerbank. Mais ces échantillons ne s’écartent pas du type au même degré que la plupart de ceux que j’ai recueillis au Quihoc. Dans ces derniers, il y a absence totale de spicules courbes à deux crochets simples, même dans la membrane dermi- que ; de plus, les spicules éricurvo-acerate, ne s’étant pas courbés, 182 ÉMILE TOPSENT. sont restés à l’état de spicules acérés grêles, fréquemment fasci- culés, plus longs que les spicules capités du squelette. 59. RAPHIODESMA ACULEATUM n. sp. (PI. VI, fig. 14.) J’ai recueilli, dans un dragage à 8 lieues au N. de Luc, un échan- tillon d’un Æaphiodesma distinct des 6 espèces de ce genre créées par Bowerbank. Cette éponge, sessile et massive, n’a que de faibles dimensions ; ele ne s'élève pas de plus de 2 centimètres au-dessus du silex sur lequel elle est fixée, et ne couvre guère que 3 centimètres carrés de son support. Sa surface est irrégulière. La disposition du squelette est celle qui caractérise le g. Raphiodesma Bow. ; les spicules en sont acués, légèrement courbés, à pointe très courte ; ils mesurent 625 « de long et 20 x de large à la tête. Les spicules de tension sont acérés, ce qui n’existe dans aucun Raphiodesma connu ; il y en a même de deux sortes, les uns longs et grêles, souvent courbes, les autres droits, plus courts et relativement plus larges ; les premiers ont en moyenne 150 « de long sur 1 # de large, et les autres n’ont que 70 « de long. Ces deux formes sont excessivement abondantes, la petite surtout. Très souvent ces spi- cules sont fasciculés et leurs faisceaux sont perpendiculaires aux lignes du squelette. Comme Æaphiodesma intermedium (et naturellement comme ER. simplicissimum, qui n’a qu’une seule forme de spicules), l'espèce dont il s’agit est dépourvue de spicules en forme d’ancres. Les spicules des membranes sont en quantité innombrable ; ils sont courbes, à deux crochets simples ;il y en a aussi de deux grandeurs, sans intermédiaires : les grands, moins nombreux, mesurent en moyenne 85 # de grand axe, leur plus grande épaisseur étant de 3 # ; quant aux petits, dont les tissus sont chargés, leur grand axe ne mesure guère que 20 «, leur plus grande épaisseur étant à peu près égale aux 3[4 d’un «. La couleur à l’état de vie était jaune d’ocre pâle. , CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 153 Par son aspect et par l’absence de rosettes de spicules en forme d’ancres, cette espèce se rapproche de Æ. intermedium. D'autre part, elle ressemble beaucoup à ÆX. lingua par la profusion des petits spicules courbes à deux crochets dans ses tissus et par une dif- férence considérable de taille entre les spicules du squelette et les spicules de tension. Mais les caractères de ces derniers (acérés au sens de Bowerbank) la séparent des autres Raphiodesma. Pour rappeler que la nouvelle espèce est armée de ces aiguillons, je propose de l’appeler Raphiodesma aculeatum. 60. DEsMACIDON FRUTICOSA. Bow. 1. c., pl. LXI. — Le seul représentant de cette espèce que j'aie recueillià Luc est un ma- gnifique échantillon rejeté à la grève et décoloré. 61. DEsMACIDON PANNOSA. Bow. I. c., pl. LXXXIX. — Bowerbank n’en a examiné que deux échantillons provenant l’un de Guernesey et l’autre de Jersey, le premier conservé dans l’al- cool, le second desséché. L'espèce est commune dans les dragages sur la côte du Calva- dos, surtout sur les touffes d’'Hydraires qui couvrent les extré- mités des tubes de Chétoptères. Elle atteint de fort belles dimen- sionset se montre généralement dressée et comprimée latérale- ment. Sa couleur est jaune pâle à l’état de vie, mais elle devient grisâtre par dessiccation. Son tissu conjonctif rend sa surface agolutinante ; aussi la trouve-t-on toujours remplie de corpuscules étrangers qui s’alignent le long de ses fibres spiculeuses et don- nent, à s y méprendre, à sa structure l’aspect caractéristique des Phoriospongia de Marshall (1). 62. Desmacrpox copiosa. Bow. 1. c., pl. LXXXII. — Parasite sur lesalgues, ou en belles plaques sur les pierres, autour du Quihoc. Extérieur grisâtre, intérieur jaune. Après dessiccation, le derme blanchit et prend un aspect chagriné. 63. DESMACIDON SIMILARIS. Bow. 1. c., pl LXXXIX. — Dra- (1) Zeits. w. Z. t. XXXV. 154 ÉMILE TOPSENT, gages à 4 lieues au N. de Luc. Vivante, l'éponge est d’un magnifique rouge orangé. D. similaris a les plus grandes affinités avec l’espèce précédente, dont elle se distingue cependant par sa couleur;en outreses spicules sont normalement acués, mais ilarrive souvent que leur extrémité se renfle et qu'ils deviennent subcapités. C’est sans doute par suite d’une confusion causée par la variabilité de ce caractère que Bowerbank a dit avoir vu un échantillon couleur chair de Desma- cidon copiosa. 64. DESMACIDON ÆGAGROPILA. Bow. I. c., pl LXIIL. (Ægagropila varians, Gray, 1 c., p. 538 ; Esperia œgagropila, Schmidt, 1. c., p. 77.) — Peu commune, dragages ; rouge à l’état frais. 65. CHALINA OCULATA. Bow. 1, c., pl. LXVI. (Chalinula ocu- lata Schmidt, 1.e., p. 77.) — C’est une des meilleures espèces de la faune de Luc. On la trouve partout au large et chaque coup de vent en jette à la grève un grand nombre d’individus. Bowerbank dit que, vivante, C. oculata est jaune, teintée de vert. Dans nos parages, sa couleur naturelle est un rose délicat qui disparaît à l'époque de la reproduction, en juin, parce que l’éponge se remplit alors d’œufs et d’embryons blancs. 66. CHazINA MoxraGur. Bow. Il. c., pl. LX VIII. — Assez rare ; dragages. Elle a souvent le port de Aemiera simulans; mais elle s’en distingue aisément par sa consistance beaucoup plus molle. 67. CHALINA GRACILENTA. Bow.l. c., pl. LXVII — Eponge délicate, à fibres minces, couleur jaune pâle, quelquefois brunâtre. Le Quihoc et dragages. Reproduction en août et septembre. FIBROSPONGES. 68. DysipEA FRAGILIS. Bow. 1. c., pl. LXIX (Spongelia fragilis, Schmidt, 1. e., p. 77). — Très commune ; dragages, le Quihoc. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 155 69. VERONGIA ROSEA. Barrois, L. c., p. 57. — A Luc, on trouve cette éponge au large. MYXOSPONGES. 70. HaziSARCA DuyARDINI. Johnston (Brit. Sp. 1842, p.192). — C’est sur les côtes du Calvados que Dujardin découvrit en 1835 cette éponge à laquelle Johnston a donné son nom. Très commune au Quihocet dans les dragages. Deux colorations : blanc pur ou jaunâtre. Très gélatineuse. 71. HALISARCA LOBULARIS. O. Schmidt (1862, p.80).—Le Quihoc. Consistance plus ferme, semi-cartilagineuse. Œufs et embryons au commencement d’octohre. Les embryons que j'ai vus ne possé- daïent pas de calotte rouge brun comme ceux décrits par F.-E. Schulze, mais étaient uniformément colorés comme ceux étudiés par Ch. Barrois. Les recherches de Barrois sur l’embryogénie d’éponges de la Manche ont fait connaître le moment del’année où se reproduisent les quelques espèces dont il est traité dans son ouvrage ; mais, en ce qui concerne l’époque où se multiplient celles de nos éponges communes qui n’ont pas été étudiées en détail, le seul renseigne- ment qui nous ait été donné est contenu dans la phrase suivante du même auteur (1.c., p.2) : « C’est en juin que les produits génitaux de la plupart des éponges de la Manche commencent à mürir. » Les observations faites à Luc pendant l'été de 1887 permettent de dégager de cette indication vague quelques considérations plus avancées sur ce sujet. Les éponges des côtes du Calvados se re- produisent pendant tout l’été et pendant au moins une partie de lPautomne. A part les genres Ciocalypta et Dysidea, sur lesquels on doit encore faire des réserves, tous les autres genres de spon- giaires ont, du commencement de juin à la fin d'octobre, des repré- sentants en voie de reproduction. Pour chaque espèce, un espace de 1 56 ÉMILE TOPSENT. temps assez long s’écoule (deux mois et même davantage) pendant lequelon peut en trouver des spécimens d’abord avec des sperma- tozoïdes ou des œufs unicellulaires mûrs pour la fécondation, puis, et cela plus longtemps, avec des œufs en segmentation, enfin avec des embryons ; et, bien que toujours on rencontre quelques individus en avance ou en retard, cet espace de temps estrelativement facile à limiter. Indiquant, pour les espèces qu’il a été possible de suivre, le mois dans lequel la généralité des individus mettent leurs embryons en liberté, le tableau suivant a l'avantage de montrer une succession dans le temps qui peut être de quelque utilité pour les recherches futures d’embryogénie : Juin. — Amorphina panicea. Juillet. — Chalina oculata, Desmacidon similaris, Ascaltis botryoides, Reniera rosea. Août. — Aalisarca Dujardinü, Sycandra et Sycortis ciliata, Reniera simulans. Septembre. — Amorphina coalita, Amorphina caruncula, Den- doryx incrustans, Raphiodesma sordidum, Microciona armata, Cha- lina gracilenta, Dictyocylindrus stuposus, Tethya lyncurium, Poly- mastia robusta. Octobre. — Ascettacoriacea, Halisarca lobularis, Cliona celata et vastifica, Dictyocylindrus ramosus, Polymastia mammillaris. | Malheureusement, la station maritime de Luc n’étant pas à pro- ximité d’un port, les recherches sur les éponges du large ne sont possibles que pendant la belle saison. Aussi la question n'est pas résolue de savoir si certaines espèces de notre région se reprodui- sent en hiver. On a pu voir au catalogue que certaines fusions d’espèces ont été opérées. Conformément aux vues de Carter et de Barroïs, j'ai réuni Cliona celata Gr. et Raphyrus Grifithsii Bow. d’une part, et Reniera rosea et R. cinerea, d'autre part. Des raisons nombreuses CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 157 m'ont conduit aussi à rapprocher Cliona vasthifica et CT. northum- brica, et à proposer d'admettre sous la dénomination unique d’ À- morphina angulata les Halichondria angulata et IH. Couchiide Bo- werbank, auxquelles on pourrait joindre aussi son Zsodyctia fallax. Il est certain qu’il y aura à faire beaucoup de retouches à l’admi- rable monographie anglaise ; on peut dire aussi qu’il reste beau- coup à v ajouter. À cetégard, la région plate et nue comprise entre la Seine et la Seulles n’est pas sans intérêt : bien plus fructueuse serait toute exploration attentive de tant d’autres points de la Man- che où la côte découpée assure aux animaux des abris conve- nables. Jusqu'à une distance considérable au large, la profondeur ne varie pas sensiblement dans toute la région dont nous nous occu- pons et n'excède jamais 25 brasses ; aussi l'apport de la drague n'offre pas de changements notables dans les excursions lointaines’ Malgré tout, il est encore possible de faire quelques remarques sur la distribution des éponges recueillies. Le rocher plat appelé le Quihoc, qu’une passe étroite sépare de la terre, découvre un peu à toutes les basses mers des syzygies ; il ne présente sur la plus grande partie de son étendue que des espèces absolument littorales, dont plusieurs se rencontrent même sur la grève, quand la mer ne l’a pas trop ravagée. Mais aux marées des équinoxes, les parties basses de ce rocher émergent et laissent récolter une foule d’éponges qu'on se procure également dans tous les dragages, aussi loin qu’on les fasse. Quant aux autres espèces, la drague seule peut les fournir, rares dans cer- tains points, communes dans d’autres, suivant la nature du fond bien plutôt que suivant la distance à la terre. Trois catégories se trouvent ainsi établies : La première, celle des Eponges littorales, comprend Amorphina caruncula, Amorphina coalita, Reniera rosea, Microciona atrasangui- nea, Desmacidon copiosa. C’est au milieu des représentants de ces 158 * ÉMILE TOPSENT. espèces que Amorphina panicea, fortement colorée en vert, occupe sa station favorite. À la seconde catégorie appartient un plus grand nombre d’es- pèces : Ascetta coriacea, Ascaltis botryoides, Sycortis et Sycandra ciliata, Microciona armata, Amorphina panicea, Suberites ficus, S. sulphurea, S. suberea, Cliona celata, ©. vastifica, Dendoryx in- crustans, D. Dujardinii, Reniera densa, Raphiodesma sordidum, Chalina gracilenta, Dysidea fragilis, Halisarca Dujardini, Re- niera fucorum. Enfin il faut citer, composant la dernière catégorie, les Dic- tyocylindrus, les Polymastia, Tethya lyncurium, Cliona lobata, Amorphina glabra, A.connexa, Dendoryx irregularis et D. ni- gricans, Chalina oculata et C. Montagui, quelques Desmacidon et la plupart des Reniera. C’est même toujours à une assez grande dis- tance qu’on a obtenu jusqu’à présent Pésmacidon similaris, Reniera Hyndmani et Reniera simulans. Si l’on vientà rapprocher ces remarques des observations relevées par M. Kœbhler, on est frappé des changements d’habitat que peuvent présenter plusieurs Eponges : ainsi Tethya lyncurium est littorale à Jersey et Sark ; Dictyocylindrus ramosus se rencontre à basse mer à Jersey, Guernesey et Herm ; AReniera simulans se trouve dans les mêmes conditions dans ces diverses localités. Chez nous, aucune des trois ne s’approche de la côte. Une telle comparaison nous donne encore d’autres renseignements précieux. Elle nous montre, par exemple, combien, auprès de la faune des îles Anglo-Normandes, celle que nous étudions est pauvre en Eponges calcaires. En ce qui concerne les Éponges siliceuses, on constate moins d’inégalité si au catalogue de Kœhler on ajoute les espèces, pro- venant des mêmes îles, communiquées à Bowerbank par plusieurs naturalistes; mais sur ce point aussi il existe des différences profondes. Beaucoup d'espèces de Luc n’ont pas été signalées aux îles CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 159 Anglo-Normandes, et beaucoup d’espèces de ces parages ne figurent pas sur la liste que j'ai essayé de dresser. Et, bien qu’on puisse conserver l'espoir que de nouvelles investigations feront découvrir en chacun de ces points la plupart des éponges peu communes qui semblent y manquer, on doit dès à présent admet- tre que l'identification des deux faunes restera impossible, parce que certaines éponges qui, par leur taille et la fixité de leurs caractères, ne sauraient échapper à l'observation, auraient certainementété déjà recueillies de part et d’autre, si leur absence n’était complète dans l’une des deux régions comparées. Par ces motifs, il est présumable que Geodia Zetlandica, Pachy- matisma johnstonia et Reniera infundibuliformis n'habitent pas la côte du Calvados et que, au contraire, Ciocalypta penicillus, Dictyocylindrus hispidus, Chalina oculata, etc., n’existent pas aux îles Anglo-Normandes. Mais ce qui est encore plus digne de remarque, c'est que cer- taines éponges qui sont extrêmement rares en ce dernier point, si même elles n’y manquent absolument, sont assez abondantes à Luc pour qu’on soit sûr de les rencontrer dans tous les dragages. Ce sont surtout : Chalina oculata. Dysidea fragilis. Polymastia robusta. Dictyocylindrus hispidus. Ces espèces, toutes reconnaissables au simple aspect, peuvent être considérées comme caractéristiques de la faune des Spongiai- res de Luc. EXPLICATION DES PLANCHES PLANCHE I. FiG. 4. — Cliona selata massive; os, un oscule ; pp, papilles pori- fères ; pm, papilles mixtes. Gr. nat. Fig. 2. — Coupe à travers une Cliona celata massive ; ec, l’écorce ; ca, canaux ; p, papilles; pi, piliers spiculeux. FiG. 3. — Cliona celata revêtante, sur Cardium norvegicum, des- sinée après dessiccation. F1G. 4. — Coupe longitudinale d’un oscule de Cliona celata. Tres grossi. F16. 5. — Coupe longitudinale d’une papille porifère d’id.; pé, le plateau contractile. Très grossi. F1G. 6. — Aspect d’une galerie de Cliona celata perforant une pierre de grande-oolithe ; di, diaphragmes.'Gr. nat. : FiG. 7. — Un diaphragme fermé; ca, cellules conjonctives; v, voile contractile. F1G. 8. — Un diaphragme ouvert; les cellules contractiles forment un anneau fibrillaire autour de l’orifice central. FiG. 9. — Kératode enveloppant de couches concentriques un groupe de spicules de Cliona celata. F1G. 10. — Trainées de spicules, rudiments de squelette, qui se ramifient dans les lobes larges de Cliona celata. F1G. 11. — Croissance d’une Clione devenue revêtante; en ce, la membrane d'insertion est uniquement constituée par des cellules contractiles; en ca, les cellules conjonctives s’accumulent sous l’épi- derme ; sp, spiculesorientés ; sp’, spicules s’entre-croisant pour donner de la consistance au derme. Vérick. obj. ?. oc. 1. FiG. 12. — Revêtement contractile des canaux de Cliona celata après traitement au nitrate d'Ag. Vérick. obj. imm. 9. oc. 1. - FIG. 13. —Portion d'un tel revêtement montrant entre les cellules des vides où l'argent se dépose. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DES CLIONIDES. 461 Fi. 14. — Œufs de Cliona celata; o, œuf émettant des pseudopo- des lobés; o’, œuf à pseudopodes filiformes auquel se sont attachées des cellules conjonctives ca. PLANCHE II. F1G. 1. — Cliona celata perforant un Buccinum undatum ; papilles de tailles diverses suivant leur âge. Gr. nat. F1&G. ?. — Le réseau des galeries d’id. vu partransparence. FiG. 3. — Cellules contractiles au contact du calcaire perforé; fo, fossettes de perforation. Préparation au nitrate d'Ag. FIG. 4. — Eléments cellulaires de Cliona celata. Vérick. obj imm, 9. oc. 1. — à, cellules contractiles; b, cellules conjonctives adipeuses avec ou sans pseudopodes ; b’, un groupe de cellules conjonctives ; b”, cellules conjonctives dans la glycérine : les sphérules s’effacent et laissent voir le noyau ;c, cellules digestives pigmentées à noyau nucléolé; d, cellules à granules animés d'un mouvement brownien ; n, noyaux et granules mis en liberté; v, corbeille vibratile. Fi&. 5. — Cellules contractiles sur le bord d’une préparation de Cliona celata. F1G. 6. — La substance fondamentale, sf. F1G. 7. — Eléments des gemmules de Cliona vastifica. Vérick. obj. 1. OC. 1. F1G. 8. — Spicules tératologiques de ces gemmules, m. gr. PLANCHE III. F1G. 1. — Fragment de valve d’huître perforée par Cliona vastifica ; p, les papilles; !, les lobes ; 4, les gemmules. Gr. nat. Fi1G. ?. — Une gemmule de Cliona vastifica en place sur la paroi d’une galerie. Vérick. obj. 2 oc. 1. Fi&. 3. — Une gemmule détachée; m, son enveloppe incomplète. Fi&. 4. — Une papille de Cliona vastifica vue de face; t, pseudo- tentacules légèrement penchés au-dessus de l’orifice ; co, coupe opti- que des spicules verticaux; md, la membrane dermique; csd, cavité sous dermique. Vérick. obj. ? oc. 1. F1G. 5. — Portion d'une coupe longitudinale de papille de Cliona ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2 SÉRIE, — 7. V bis, suPPL, 1887. — 4e Mém. 11 162 ÉMILE TOPSENT, vastifica. — La membrane dermique prend insertion à la base de pseudo-tentacules ; sa, spicules acérés dans la chair du lobe. FiG. 6. — Détail de la membrane dermique composée de cellules contractiles et couverte de spicules des membranes. FiG. 7. — Œufs de Cliona vastifica. Vérick. obj. imm. 9. oc. 1. Fig. 8 — Les orifices aquifères de Cliona lobata. Gr. nat. l'1G. 9. — Une papille de Cliona lobala ; fsp, faisceaux de spicules en épingle. Vérick. obj. 7. oc. 1. FiG. 10. — Eléments cellulaires de Cliona lobata ; d, cellules diges- tives pigmentées ; a, cellule conjonctive; c, cellule contractile : v, cellule vibratile. F1G. 11. — Papilles de très jeune Cliona celata. FiG. 12. — Amas de corpuscules calcaires dans une galerie où la perforation est active. FrG. 13. — Corpuscules calcaires détachés par les Cliones. Vérick. ODj:#7::06. 1; F1G. 14. — Corpuscules détachés des couches de calcaire opaque d'une valve d'Huitre. PLANCHE IV. F1G. 1. — Calcaire compact d'une valve d'Huiître perforé par une Clione ; fo, fossettes d'une grande galerie ; gf, galerie en formation ; pg, coupe transversale d’une galerie étroite ; fh, thallophyte perfo- rant./Vérick.-0bj. 7. oc. 4: F1G. 2. — Le travail d’une Clione sur la couche des prismes d'une Huiître, m. gr. Fi. 3. Perforation d’une lame mince de conchyoline remplie de cristaux; forme prismatique des corpuscules découpés. F1G. 4. — Détail d'id. F1G. 5, — Début de la perforation d’une lame de conchyoline. Fig. 6. — Le travail de la Clione intéressant simultanément une lamelle de CHATS et le calcaire au contact. Fc. 7. — Perforation d’une lame épaisse de conchyoline sans cristaux ; forme arrondie des corpuscules détachés. F1G. 8. — Perforation de la nacre d’une coquille d’Huitre après la mort du mollu > = ‘ g r : N. = « L L2 6 = n À î R h ur | ( NS EE = Bt 7. * à à Lis Ÿ à nu RS + PVR 4 SIT sc: 1 COS FR TS VELO « Ve ER V4 ÉD y = Lt Te “0 : * en : 2 , ; etude 7 v iTar ; CAS 4 y LP 3 be NE RE CT : + . CUT £ a TS El ET ‘ , | ARAPOE OT" à » st | ù UE ’ * PER, pa + , ” Le w d ..» DT Der vers + t tai € æ n + Va 1 [ { ? "+ v fn y @ L * dd « à e à ” 4 ' ' < -. La de h 10e { . Éy FRA NT v à AL ( 1 . F Y ' LANE Fr à tp Arch.de Zoo! nr Hole F Zopsent ax nat.del CLIONIDAE 9% a ! -. Vol de S apt P] IL 2 Li Ver1e A RL Or£a | \ CLIONIDAE 7 Le, Æ, Topsent __ad.rai. de ï PA Fe id de foration) ÀÂF (Per Î = J = +. We | : Li p à Rue | JE SERIES ON an 4h “Las .nat.d£el. ent. Æ Tops Le Du e L L M ta > Et « n É FPE dE ru LES ue l _ "4 “ ‘ foi \ INIERINAE Organisation. RENTE INA Org I Je an le de Zool. Exp et G n Aren A (J L z (QUE NT TAATOOLS CG Aroene.Nol V.ti,S XP Le et G Ale - “ Arch de Zool.E SUR L’'ANATOMIE DU SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX PAR RENÉ CHEVREL INTRODUCTION En cherchant à approfondir la connaissance du système sympa- thique dansla série des Vertébrés, notre attention fut spécialement attirée sur celui des Poissons. Malgré les recherches dont il avait jusqu'alors été l’objet, l’étude que nous en fimes nous persuada bientôt que de nombreux points de détail restaient encore douteux ou ignorés. De là nous vint l’idée de reprendre le sujet et de le traiter aussi complètement que possible. Malheureusement, le cadre était trop vaste pour le temps dont nous pouvions disposer ; à notre grand regret, nous dûmes nous borner à faire l’anatomie de l’organe. Et encore, des circonstances indépendantes de notre volonté nous forcèrent à laisser de côté certains groupes. Aïnsi le système sympathique des Ammocètes venait d’être décrit par M. Julin ; nous n'avons pas jugé utile de reprendre cette étude ou de reproduire son travail ; quant aux Myxines, qui forment, avec les Lamproies, le groupe des Cyclostomes, et à l’Esturgeon, ARCH. DE ZOOL, EXP. ET GÉN. — 2° SÉRIE. — T. Vbis, — Suppl. 1889. — Mém. 1 2 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE le seul représentant du groupe des Ganoïdes en France, il nous a été impossible de nous en procurer. Nous décrirons donc exclu- sivement le sympathique des Elasmobranches et celui des Poissons osseux. La plupart des auteurs qui se sont occupés du sympathique des Poissons ne l’ont étudié que chez quelques espèces. Seuls, Giltay et Stannius ont étendu leurs recherches à un certain nombre de familles ; le travail du premier embrasse une vingtaine d'espèces ; celui du second, une trentaine environ. Le nôtre est plus vaste, il s'applique à quarante familles environ, comprenant plus de cent espèces. Ces chiffres montrent quelle énorme quantité d'individus nous avons dû sacrifier pour mener à bien notre travail. Si nous avions été réduit à nos seules ressources, jamais nous n’aurions pu réunir une collection d’étude aussi complète. Mais noussommes heu- reux d’avoir eu la bonne fortune d’éprouver les effets de la bienveil- lance de M. H. de Lacaze-Duthiers. Non seulement il nous a offert, à plusieurs reprises, l'hospitalité la plus large dans ses magnifiques laboratoires de Roscoff et de Banyuls, mais encore il nous a procuré, souvent même au prix de sacrifices onéreux, presque tous les poissons, au nombre de plus de 300, qui ont servi à nos recherches. Aussi nous est-il agréable d'adresser publiquement à l'illustre membre de l’Institut nos sincères remerciements, et de lui offrir l'hommage de notre vive et profonde gratitude. Nous adressons également nos plus vifs remerciements à toutes les personnes qui ont contribué à faciliter notre travail, soit en nous procurant certaines espèces de poissons, soit en nous aidant de leurs conseils ou de leur bienveillant appui, et, parmi elles, nous nous faisons un devoir de nommer expressément notre savant maître, M. Yves Delage, professeur à la Sorbonne, et M. Liard, directeur de l’Enseisnement supérieur. Nous commencerons notre exposé par les Elasmobranches ; mais, avant, nous donnerons la technique que nous avons suivie. er, 47e DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 3 Procédé opératoire. Tous ceux qui se sont occupés du système nerveux périphérique ont eu à lutter contre des difficultés réelles. Aussi chacun s’est-il efforcé de trouver un procédé donnant aux nerfs une coloration particulière qui permît de les distinguer facilement des tissus voisins sans les rendre plus fragiles. Ceux qu'on a jusqu'ici préco- nisés dans ce but laissent beaucoup à désirer, du moins en ce qui concerne les Poissons ; l’acide azotique faible n’a qu’une action insignifiante et l'acide picrique concentré n’en a aucune. Nous avons à notre tour cherché les moyens de résoudre la question et nous y sommes parvenu au delà de toute espérance. On sait que les matières grasses possèdent la propriété de réduire l’acide osmique, en se colorant en noir ; il en est de même de la myéline des nerfs. Or, chez presque tous les Poissons, cartilagi- neux ou osseux, les filets nerveux contiennent une certaine pro- portion de fibres à double contour. C’est sur la présence constante d'un plus ou moins grand nombre de ces fibres dans les filets sym- pathiques, même les plus fins, et sur la propriété de la myéline de réduire l'acide osmique, qu’est basé notre procédé. Voici comment nous opérons: À l’aide d’une pipette, nous prenons quelques gouttes d'acide osmique à 1 0/0 et nous les répandons, soit sur les cordons sympa- thiques mis à découvert, soit, si les filets sont trop fins pour être aperçus, sur l'endroit probable où ils se trouvent. Au bout de quel- ques instants, c’est-à-dire de quelques secondes à quelques minutes, suivant les espèces, nous recouvrons d’eau et nous laissons à l’acide osmique le temps de se réduire. Ce temps est variable suivant l'é- paisseur de la gaîne qui entoure le nerf, suivant le nombre des tubes à myéline qu’il contient et suivant le degré de fraîcheur du sujet. Toutes choses égales d'ailleurs, la coloration est d’autant plus rapide et plus intense que l’animal est plus frais ; s il se trouve dans up état de décomposition avancé, la coloration peut ne pas se 4 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE. produire. Il est important de ne pas laisser trop longtemps l’acide osmique en contact avec les tissus, sans quoi ceux-ci prendraient à la longue une nuance foncée qui gênerait l’observation ; voilà pourquoi nous recommandons plus haut de recouvrir d'eau. Après un certain temps, on voitapparaître en noir plus ou moins foncé, sur le fond resté blanc des muscles ou du tissu conjonctif, les cordons sympathiques et les filets souvent très fins qui en par- tent ou qui s’y rendent. On peut suivre ainsi très facilement, dans toute son étendues, le sympathique et ses dépendances. Il va de soi que l'épandage de l'acide osmique doit être renouvelé autant que le besoin s’en fait sentir. Mais comme ce réactif est d’un prix élevé, il ne faut s’en servir que lorsqu'on ne peut faire autrement. Pour que son action soit efficace, il est nécessaire que les filets qu’il doit colorer soient à nu ou à une petite profondeur dans l’épaisseur des muscles ou des tissus. Il arrive assez souvent qu'une couche de tissu adipeux entoure les filets nerveux ; dans ce cas, il est absolu- ment nécessaire d'enlever la couche graisseuse, car elle forme au- tour des filets une gaîne impénétrable à l’acide osmique ; le premier rang des cellules de la couche absorbe seul l’acide, se colore forte- ment en noir et rend la dissection beaucoup plus diffcile. L’action de l’acideosmique sur les ganglions nerveux se réduit en généralàune faible coloration bistrée qui permet de les distinguer facilement sur letrajetdes nerfs. 11 enest de même des filetstrès fins composés presque exclusivement de fibres de Remak ; on les trouve presque toujours vers l'extrémité postérieure des Cordonssympathi- ques, c’est-à-dire dansle canal hémaletle voisinage du Vasa caudale. Chez un certain nombre de poissons osseux, les Salmonides entre autres, l’acide osmiquen'’arrive à colorer aucun filetnerveux, ou ne lui communique qu’une teinte peu foncée qui nuit à la dé- couverte des filets au lieu de la faciliter. Enfin, chez les Elasmobranches, les Capsules surrénales de Ley- dis se colore nt très fortement et très rapidement en noir, comme nous le verrons un peu plus loin. PREMIÈRE PARTIE Elasmobranches. HISTORIQUE Le système nerveux grand sympathique des Elasmobranches n’a été étudié que par un petit nombre d’auteurs. Cela tient, sans aucun doute, aux difficultés mêmes de l’étude. Il est à remarquer en effet que, chez ces poissons, les filets sympathiques sont d'une extrême ténuité, et, d’un autre côté, leur coloration grise ne per- met pas de les distinguer facilement des tissus voisins. Grâce au procédé de coloration que nous avons employé, nous sommes par- venu à vaincre cette double difficulté, et nous avons pu suivre de la sorte des nerfs ayant moins de 35 de millimètre de diamètre. Cuvier (1), dans l’AHistoire naturelle des Poissons, ‘dit simple- ment : On a voulu nier que le sympathique existât dans les Chon- droptérygiens, mais c’est une assertion erronée, car je l’ai vu fort distinctement dans les Raies. Dans un ouvrage intitulé De nervo sympathico (2), ouvrage in- trouvable et que nous ne connaissons que par le résumé qui s’en trouve dans Muller's Archiv de 1835, Giltay remarque, chez les Squales,un ganglion voisin de l’œsophage, duquel partent des nerfs (1) Cuvier et Valenciennes, Histoire naturelle des Poissons, t. Te’, p. 438. 1828. (2) Giltay, De Nervo sympathico, Lugd. Batav., 8 atlas de 31 pl 1835, et dans : Muller's Archiv, Jahr Ber. 1835. 6 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE fins se rendant aux intestins et aux nerfs spinaux supérieurs, tandis qu’une branche remontante se lie au rameau intestinal du Vague. Une autre branche forme la continuation du nerf sympathique dont la partie abdominale donne encore lieu à un second ganglion. Vers la même époque, Swan (1), dans ses Zllustrations, consacre six planchesaux Poissons ; la neuvième représente le système sym- pathique de Raja batis. Dans l'explication de cette planche, il est dit quele premier ganglion, de formeoblongue et de couleur rouge cen- dré, est situé à la partie supérieure del’abdomen. Il donne naïssance à des nerfs, les uns gros, les autres petits. Ces nerfs passent dans le mésentère, communiquent avec les rameaux du Vague, suivent l'artère mésentérique et vont innerver les viscères. Quelques filets se distribuent aux testicules, d’autres se portent vers l’aorte. Sur une certaine étendue, le long de la colonne vertébrale, les divers ganglions sont unis entre eux par un tissu semi-transparent ; l’au- teur se demande si ce tissu est de nature nerveuse et conclut affirmativement, bien que les nerfs splanchniques issus du premier ganglion aient un aspect différent. Nous verrons que ce tissu semi-transparent n'est autre chose que la continuation des masses ganglionnaires décrites par Leydig sous le nom de Capsules surrénales. Enfin, il constate que le système nerveux sympathique de l’es- pèce dont il est question est presque entièrement destiné aux vis- cères abdominaux, car ce système n’a pas encore été observé dans aucune autre partie du corps. Remak (2) a étudié le sympathique des Squales et l’a trouvé très développé. Il a observé le premier que sur tous les nerfs spinaux se trouvent des ganglions arrondis dont le volume diminue d’avant en arrière et qui envoient des nerfs, d’uncôté à la moelle épinière, (1) Swan, Illustrations of the ccmparative Anatomy of the nervous system. London, 18352 l, (2) Remak, Uber den N. sympathicus der Hanfische, in Neue Notizen, n° 54, col. 153-154. 1837. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 4 de l’autre aux nerfs spinaux et aux testicules. Du 1% ganglion jar- tent beaucoup de petits, filets munis de ganglions dont les uns se portent aux branchies et les autres se relient avec le rameau viscéral du Vague. Il n'a pu trouver le cordon limitant en avant de ce gan- glion, mais il l’a suivi en arrière jusqu'à l'anus, sans toutefois pou- voir atteindre son extrémité. Remak est, de tous les auteurs cités jusqu'ici, celui qui a lemieux connu le sympathique des Squales; mais, à côté de faits nouveaux vrais, ila commis plusieurs erreurs. Ainsiles ganglions n’envoient pas de filets à la moelle épinière ; il n’existe pas de filets destinés aux branchies ; quant au cordon limitant qu'il a suivi, dit-il, jusqu’à l'anus, nous verrons plus loin ce qu’il faut penser de ce cordon et la limite qu'il serait possible de lui assigner. Dans ses Leçons d’ Anatomie comparée (1), Cuvier dit : On peut suivre le sympathique dans la tête jusqu'à la 5° paire, aussi bien dans les Poissons Osseux que dans les Cartilagineux, quoiqu'on ait nié qu’il existât dans ces derniers. Les Cartilagineux, ou du moins les Squales et les Raies, ne pré- sentent rien de tel. Stannius (2) a étu lié le Spinax acanthias et le Carcharias glau- cus. Pour lui, « on trouve chez les Syuales, le long de la colonne « vertébrale, un grand cordon da sympathique. Il est enclavé dans « Jes reins, auxquels il envoie des filets. Lui-même recoit des ra- « meaux de communication très distinctement reconnaissables, « sortant des branches antérieures des nerfs spinaux. Sur ce grand « cordon se présentent quelques faibles ganglions. Deux ganglions « antérieurs ou supérieurs sont plus forts que les autres. Des « rameaux communicants de plusieurs nerfs spinaux pénètrent « dans chacun d’eux ; quatre entrent dans le ganglion postérienr, «trois dans le ganglion antérieur ». Du 2° ganglion part une (1) G. Cuvier, Leçons d'Anatomie comparée, 2° édition, t. ITT. 1845. (2) Stannius, Das peripherische Nervensystem der Fische (5 tafel). 1849 8 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE ramification assez forte destinée à l’oviducte. Le 1® ganglion est situé près de l'œsophage et fortement appuyé contre la colonne vertébrale ; il est uni par une anastomose avec celui du côté opposé, ce qui est faux. C’est de ce ganglion que part le nerf splanchnique qui accompagne l'artère cœliaque. La partie céphaliqne proprement dite du cordon sympathique extrême manque chez les Squales. On peut seulement reconnaître une liaison entre le premier ganglionet un rameau du Vague. Chez la Raïe, du 1 ganglion sortent des nerfs destinés aux testicules et des filets qui se rendent à l’aorte. Béraud (1) fait remarquer que le 1* ganglion, qui est aussi le plus considérable, fait saillie dans la veine correspondante, de ma- nière à être à peu près complètement baigné par le sang de cette veine. Îl ajoute que les ganglions sont unis entre eux par des filets quis’anastomosent ensemble et qui accompagnent les artères gas- triques et mésentériques. D’autres se rendent aux artères des organes génitaux. Dans une seconde communication, il entre dans de plus nom- breux détails. C’est du 3° ganglion que part lerameau testiculaire. Un filet émané du même ganglion suit l’artère mésentérique et se distribue au commencement de l’intestin. Du 1* ganglion par- tent deux nerfs qui accompagnent l'artère cœliaque ; ila pu les suivre jusque dans l'estomac. Enfin, il a cherché avec beaucoup d'attention si le pneumogastrique contractait avec le sympathique des rapports quelconques, soit dans son trajet, soit dans sa termi- naison ; il lui a été impossible d'en trouver nulle part. Cet auteur a été moins heureux dans ses recherches que ses de- vanciers, car il existe chez tous les Sélaciens plusieurs anastomoses entre le sympathique et le pneumogastrique. Dans Æandbuch der Zootomié (2), Stannius donne une courte description du sympathique de l’Acanthias. Il dit : « Des gan- (1) Béraud, Mémoires de la Société de biologie, pp. 22 — 31. 1849. (2) Stanvius, Handbuch der zootomie, IT Auflage. 1854. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 9 « glions postérieurs partent des nerfs volumineux pour les parties « sexuelles. » Les nerfs destinés aux parties sexuelles, loin d’être volumineux, comme le prétend Stannius, sont au contraire tou- jours fort ténus et difficiles à voir sans le secours d’une loupe. « La chaine ganglionnaire, dit-il encore, et les nerfs paraissent «être l’objet d’un renouvellement constant et peut-être périodique. « Les lieux de formation des globules ganglionnaires sont en partie « des Vésicules arrondies, remplies de Blastème, appendues aux « gros troncs veineux dans lesquels pénètrent des vaisseaux ve- «nant des veines vertébrales, en partie, des corps désignés « comme reins accessoires (Capsules surrénales). » La description précédente semble s'appliquer aux Capsules surrénales de Leydig; s’il en est ainsi, les vésicules arrondies ne sont passituées sur les veines vertébrales, mais sur les artères vertébrales. Nous avons d’ailleurs vainement cherché sur les veines vertébrales des corps ayant quelque apparence avec ceux dont il est question ci-dessus. Quant aux Capsules surrénales de Stannius, la description qu'il en donne manque de clarté. Là s'arrête la liste des auteurs qui se sont occupés du système sympathique des Elasmobranches. Nous devons cependant ana- lyser encore quelques travaux qui s’y rapportent indirectement. Les corps qui ont été pris, par tous les auteurs que nous avons cités, pour des ganglions sympathiques, et ceux que l’on désignait chez la Chimère sous le nom de Cœurs axillaires, furent étudiés histologiquement par Leydig, qui les reconnut pour être les ana- logues des Capsules surrénales des Mammifères. Nous donnerons simplement ici un court aperçu des vues de Leydig, de Semper et de Balfour, qui s’en sont spécialement occupés, nous réservant d'analyser beauccup plus longuement leurs travaux quand nous ferons la description de ces corps. Leydig (1), en étudiant chezla Chimère monstrueuse les soi- (1) Leydig, Beiträgez, mikrosk Arat. d. Rochen u. Haie. —Leïipzig, 1852. 10 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE disant cœurs rénaux des artères axillaires, reconnaît que ces corps n'ont aucunement la structure de cœurs. Peu après, il vérifie le fait chez un T'orpedo narke et trouve en même temps chez cette espèce 6 petits corps placés les uns à la suite des autres sur les artères intercostales et en relation avec les véritables ganglions sympathiques, qu'il est le premier à découvrir. Il retrouve les mêmes corps chez les Raïes et les Squales avec la même structure, la même disposition et les mêmes rapports. Se fondant sur l’ana- logie de structure que ces petits corps présentent avec les Capsules surrénales des Mammifères, il les considère comme étant les Cap- sules surrénales des Sélaciens. En revanche, il refuse cette qualité à un corps impair, situé entre les reins, et qui, jusque-là, avait seul été considéré comme représentant les Capsules surrénales de ce groupe de poissons. Mais, l'année suivante (1), il le range définitivement avec les premiers. Semper (2) a également étudié les Capsules surrénales des Sélaciens. Il confirme les observations anatomiques et histologiques de Leydig ; mais iln’ÿy ajoute aucune contribution personnelle ; cependant, il appuie beaucoup plus fortement que. ne l’a fait ce dernier auteur sur leur disposition segmentaire. Ainsi que Leydig, il considère la bande jaune d’ocre étendue entre les reins comme appartenant aux capsules surrénales. Balfour (3) n’est pas de cet avis. Il conserve le nom de Capsules surrénales aux corps pairs et donne au corps impair celui de Corps interrénal. Et il s’appuie, pour établir cette division, sur l’origine différente de ces corps, le Corps interrénal paraissant se développer aux dépens du Mésoblaste, tandis que les Capsules surrénales dé- rivent des ganglions sympathiques. De ses recherches anato- (1) Leydig, Untersuchung ü. Fische und Reptilien. 1853. (2) Semper, Das Urogenitalsystem der Plagiostomen (Arbeit. a. d. zool. — zoot. Instit. Würzburg, II, 1875. (3) Balfour, À monograph on the development of Elasmobranch Fishes. Londres, 1878. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 1 miques, histologiques et embryologiques, il résulte pour lui que le Corps interrénal n’a aucune connexion avec les Capsules sur- rénales et n'appartient pas au même système. En résumé, Cuvier a vu le sympathique dans les Raïes ; Giltay a trouvé dans les Squales un ganglion voisin de l'œsophage d’où partent des nerfs fins pour lesintestins, les nerfs Spinaux supérieu:s et un rameau du Vague ; Swan a figuré le sympathique de ÆRaia batis ; d’après lui, quelques filets se portent aux testicules, d’autres: vers l'aorte ; il a remarqué que le tissu qui unit les ganglions et qui lui paraît de nature nerveuse a un aspect différent de celui des nerfs splanchniques ; Remak reconnaît le premier que tous les nerfs spinaux portent un ganglion (il eût été plus exact de dire : toutes les artères vertébrales) ; Leydig découvre que les petits corps que l’on avait jusque-là considérés comme des cœurs axil- laires et des ganglions sympathiques sont des formations ana- logues aux Capsules surrénales des Mammifères ; il découvre en même temps les véritables ganglions sympathiques. Voilà ce qui était connu du système sympathique des Elasmo- branches. Mais il restait à faire connaître : 1° Les limites véritables du système sympathique ; 2 La distribution de ses ganglions ; 3° Les connexions et la distribution des filets qui en partent ; 4 La description du Cordon latéral et la signification qu’il comporte ; 5° La disposition générale du nerf splanchnique et l’innervation des différents viscères. Nous croyons avoir réussi à porter la lumière sur tous ces points. Si imparfait que soit notre travail, nous avons l'espoir qu'il donnera du sympathique des Elasmobranches une notion beaucoup plus complète et plus exacte que toutes les descriptions qui en ont été faites jusqu'ici. Nous décrirons d’abord le système sympathique chez Scyllium catulus, puis chez les autres Squales et les Raïes. Toutefois, la 12 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYM PATHIQUE description des Capsules surrénales s’appliquera à tous les Elas- mobranches, bien que ce soient surtout celles de Scyllium que , 7, . . ; nousayons étudiées. Mais, pour des raisons que l'on trouvera plus loin, nous décrirons les Capsules surrénales de Leydig sous le nom de Corpssuprarénaux, pour les corps pairs, et de Corps interrénaux, pour le corps impair. Système sympathique de « Scyllium Catulus. » Le système nerveux grand sympathique de Seyllium Catulus, des autres Squales et des Raies comprend : 1° des ganglions et des nerfs ; 2° des formations généralement désignces sous le nom de Capsules surrénales. Nous commencerons par décrire ces dernières. « Capsules surrénales » de Leydig. Lorsqu'on fend, dans toute sa longueur, la face ventrale de la veine cardinale d’un Squale, on met à découvert une série de petits corps placés les uns à la suite des autres, et qui s'étendent depuis le diaphragme jusqu’à l'extrémité postérieure de la veine cardinale. Un examen plus attentif montre qu’ils sont tous situés sur letrajet des artères intercostales et qu’ils répondent assez bien, par leur nombre et leur espacement régulier, aux différents métamères de cette partie du corps. Leur coloration grise tranche peu sur le fond blanchâtre de la paroi dorsale de la cavité abdo- minale, et c’est à cela qu’ils ont dû de rester longtemps inaperçus. Semper est parvenu tout récemment àles mettre en évidence au moyen de l’acide chromique; ils prennent alors une coloration d’un brun noir qui les détache nettement du tissu voisin. On obtient le même résultat en employant un autre procédé préfé- rable à celui de Semper, car il permet de colorer en même temps tous les filets nerveux qui en partent ou qui s’y rendent, même DES ELASMOBRANCHES ET DE3 POISSONS OSSEUX. 13 les plus fins. C’est le procédé que nous avons décrit au commen- cement de ce travail et sur lequelnous ne reviendrons pas. Nous dirons seulement que ces corps prennent, pour ainsi dire ins- tantanément, une coloration foncée qui passe peu à peu au noir, tandis que les tissus voisins ne se colorent pas ou se colorent peu. Avec le procédé de Semper, la coloration est beaucoup plus lente et moins prononcée. Indépendamment de ces corps pairs, il en existe d’autres, impairs, placés en arrière des premiers, sur la ligne médiane. Ils forment en général une bande unique, très irrégulière, large à sa partie postérieure, amincie en baguette à son extrémitéantérieure. (PI. I, fig. 2, ci.) De place en place, la bande s’élargit ; elle quitte fré- quemment la ligne médiane pour se porter tantôt sur le rein droit, tantôt sur le rein gauche. Elle est couchée entre la face in- férieure de l'aorte dorsale etla face supérieure de la veine que nous nommons interrénale. — Semper et Balfour considèrent cette veine comme étant la veine caudale ; il n’en est rien. Cette der- nière, à sa sortie du canal hémal, se bifurque et donne ainsi nais- sance aux deux veines de Jacobson, qui cheminent à la partie supé- rieure des reins et reçoivent le sang des veines intercostales correspondantes. Ce sang passe de là, par une multitude d’orifices, dans la substance rénale, d'où il sort par d’autres orifices s’ouvrant dans une large veine située entre les deux reins. C’est cette veine, fermée en arrière, à l'endroit où les deux reins se rejoignent, que nous proposons d'appeler Veine interrénale. (PI. I, fig. 2, vi.) Elle occupe une position médiane, légèrement inférieure à celle des Veines de Jacobson ; elle est située à peu près dans le même plan que la veine caudale, bien qu’elle n’en soit pas le prolongement. A la partie antéricure du corps impair, on voit quelquefois un ou plusieurs îlots placés à une certaine distance les uns des autres à la face inférieure de l’aorte abdominale ; ces îlots ont la même structure que le corps impair ; ils peuvent être unis entre eux etavec ce dernier par un petit filet de même substance. 14 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Le premier îlot, ou, si les îlots manquent, l’extrémité anté- rieure du corps impair, s’avance généralement au delà de la naissance des deux veines cardinales ; son extrémité posté- rieure correspond à peu près au point où les deux reins se rejoi- gnent. ( Tels sont les corps ordinairement désignés sous le nom de Cap- sules surrénales et dont nous allons faire l’étude en détail. Mais, avant de commencer, il nous reste encore à dire quelques mots de petits corps qui se montrent de temps à autre dans la même région. Leydig a signalé chez Raja batis, à la partie supérieure et pos- tirieure des reins, quelques petits corps arrondis, d’un jaune d ocre, au nombre de 4à gauche et de 5 à droite. Nous ne les avons pas revus. Mais chez les Raiïes et les Squales, nous en avons remarqué d’autres situés soit en arrière du corps impair, soit le long des pa-. rois latérales des reins. Ils ont le même aspect et la même struc- ture que le Corps interrénal et n’en sont évidemment que des parties détachées. Le même auteur a encore vu dans le péritoine d'un Ange de mer des cellules brillantes, rondes, grosses environ de 5 millimètres, placées l’une derrière l’autre. Nous n’avons pu les découvrir, ni chez Scyllium, ni chez les autres Squales que nous avons examinés , mais nous avons remarqué, chez Acanthias et chez Scyllium, de petites formations placées au- dessous de chaque veine cardinale ; elles s’étendaient depuis le dia- phragme jusqu’à l’extrémité postérieure de la veine ; et même, chez la première de ces deux espèces, jusqu’au niveau de l'orifice anal. L’acide o3mique les colorait en noir foncé et de chacune partait un filet nerveux passant transversalement à la face infé- rieure de la veine cardinale. Revenons maintenant aux corps pairs et aux corps impairs. Ley- dig, Semper et surtout Balfour les ont longuement décrits ; comme nos recherches ne confirment pas toujours les observations de ces auteurs, nous les décrirons avec détail à notre tour. Corps suprarénaux. — Le premier des corps pairs, qui est de DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 15 beaucoup le plus considérable (1, fig 1, PI. I), se trouve placé près de l’œsophage (e),un peu en arrière de l'artère axiliaire (ax) et du diaphragme. Sa forme, essentiellement variable, est généralement celle d’an ovale irrégulier très allongé. Il est comprimé de bas en haut et placé un peu obliquement par rapport à la colonne vertébrale, avec laquelle il dessine un angle très aigu, ouvert en avant. Il est entouré d’une membrane de tissu conjonctif qui s’é- tend sur les nerfs qui en partent et sur les racines nerveuses qui y aboutissent. Suspendu au plafond du Sinus de Monro (5), il esten- tièrement baigné dans le sang de ce sinus, ainsi que l’a fait remar- quer Béraud. Une artériole le traverse dans toute sa longueur ; il est en outre soutenu par les racines nerveuses qui y arrivent, par les nerfs splanchniques quien partent et par les nombreux tractus de nature conjonctive qui s'attachent d'une part à son bord interne et de l’autre aux parois de la cloison perforée (cl) qui sépare les” deux sinus. Comme nous le verrons plus loin en parlant des racines ner- veuses, il correspond à plusieurs seginents et n'est en réalité que le résultat de la fusion d'un certain nombre de corps. Au lieu d’être, comme tous ceux qui le suivent, en rapport avec un vaisseau issu directement de l'aorte, il se trouve, chez Scylliumet les autres Squales, sur une artériole née de l’artère axillaire. Parfois, ce corps est placé immédiatement sur l'artère axillaire qu'il entoure comine d'un manchon. C’est ce que l’on voit chez la Chimère, et cette situation l’avait fait considérer comme un cœur axillaire. En étudiant son histologie, Leydig reconnut qu'on s'était mépris sursa nature et qu’il n'avait en rien la structure d’un cœur : ce fut là l’origine d'une série de recherches heureuses que l’auteur poursuivit chez plu:ieurs Sélaciens. Le même corps ayant été si- gnalé chez la Torpille, Leydig l’examina et fut frappé de la simili- tude de structure qu’il présentait avec celui de la Chimère. L’é- tude des Raïes et des Squales la conduisit aux mêmes résultats et confirma, en les étendant, ses découvertes histologiques. Chez ces 16 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE derniers poissons, le premier corps était connu ; mais comme il n’avait pas exactement la même situation que chez la Chimère et la Torpille, on n’avait pas été tenté de le considérer comme un cœur axillaire, et Giltay, Swan, Remak, Stannius et Béraud l'avaient dé- crit comme un ganglion du système sympathique. La plupart de ces auteurs avaient en outre observé tout ou partie des petits corps qui le suivent. Leydig était donc mal fondé à dire que ces corps n'avaient pas jusqu'alors attiré l'attention. Quoi qu’il en soit, en examinant attentivement la Torpille, cet auteur découvrit en arrière du premier corps un second corps de la grosseur d’une tête d’épingle, puis un troisième, et put enfin en compter 6 Jusqu'à l'extrémité de la colonne vertébrale. Tous ces corps offraient la même structure et la même particularité que les cœurs axillaires : Ils se composaient de lobes formés de vésicules closes remplies de noyaux et de cellules ; en outre, tous étaient en rapport intime avec un ou même deux ganglions sympathiques. Ce fait établit d’une manière évidente la relation deces corpsavec le système sympathi- que et fournit la raison pour laquelle nous noussommes occupé de leur étude. Mais, avant de faire connaître le résultat de nos recherches, il nous reste à présenter les vues de Leydig sur ces corps et à donner le résumé des observations et des appréciations de Semper et de Balfour. Quelle est, pour Leydig, la signification de ces corps ? « Si l’on sait, dit-il, que ces formations sont composées de vésicules « fermées que du tissu conjonctif entoure, vésicules constituées par « des cellules et enveloppées par de nombreux faisceaux, nous « sommes conduit à les considérer comme des glandes vasculaires «“ sanguines. Si, de plus, l’on tient compte de ce fait, qu’elles sont & en rapport avec les ganglions du Cordon sympathique, et si l'on « se rappelle que la glande hypophysaire du cerveau possède la & structure des glandes vasculaires sanguines, on pensera que le « système nerveux possède des organes accessoires particuliers DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 17 « qui ont la structure des glandes vasculaires sanguines. Pour & le cerveau, la glande hypophysaire serait un pareil organe & accessoire ; pour les ganglions sympathiques, il y aurait ce qu'on « appelle les cœurs axillaires et les autres corps que nous avons & indiqués. Mais il me semble possible de pénétrer plus avant dans € la question si l’on compare ces organes avec d’autres. En effet, « toutes les particularités que montrent les Capsules surrénales « des Mammifèresse retrouvent dans nos corps en question : 1° ils &« ont tous deux d’abord la même stracture fondamentale ; les € Capsules surrénales des Mammifères et les corps en question &« des Poissons cartilagineux consistent en vésicules fermées rem- € plies de cellules ; 2° les Capsules surrénales des Mammifères sont, « comme on sait, extrêmement richesen vaisseaux sanguins et nos « corps possèdent la même particularité ; 3° tous les observateurs « qui ont étudié les Capsules surrénales des Mammifères ont re- « marqué la richesse nerveuse peu commune de ces formations, Ce & fait se retrouve dans les cœurs axillaires et les autres corps, &« comme je l’ai déjà dit. Si l’on pousse la chose plus loin, on arri- « vera à cette opinion, déjà exprimée par d'autres naturalistes, &« que les Capsules surrénales sont dans un rapport étroit avec le &« système nerveux, et on pourra enfin arriver à ces conclusions « que, comme l’hypophyse est une partie intégrante du cerveau, « les Capsules surrénales sont une partie intégrante du sympa- « thique, et chez les Poissons cartilagineux, au lieu d’une capsule « surrénale volumineuse, unique de chaque côté, celle-ci se résout « en une quantité de Capsules surrénales plus petites. » Ainsi donc, pour Leydig, les corps pairs placés chez les Sélaciens aux deux côtés de la colonne vertébrale sont des Capsules surrénales, et les Capsules surrénales sont une dépendance du sympathique. Quant au corps impair placé entre les reins, et qui jusqu'alors avait seul été considéré comme représentantles _apsules surrénales des Sélaciens, voici ce qu'ilen disait : « Exam 4es au microscope, € ces soi-disant Capsules surrénales de Scym , Torpedo et Raja ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 9% SÉRIE. -— T.vbis — PL. 14889. — Mém. 2 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE s’accordent parfaitement dans leur structure : la substance principale de ces corps est formée de molécules graisseuses qui lui donnent sa couleur blanchâtre ou jaune d’ocre, et on y observe des noyaux clairs, en forme de vésicule, qui y sont plongés librement. D'après cette manière d’être histologique, je ne puis aucunement considérer ces corps comme les analogues des Capsules surrénales des Mammifères, puisqu'il ne se trouve dans leur structure rien d’approchant avec ces dernières ; bien plus, je les considère comme identiques aux corps graisseux qui sont connus chez les Amphibiens nus aux environs des reins ou des organes génitaux. » Mais l’année suivante, dans Fische und Reptilien, il revient sur cette question et dit : & Si j'ai exclu des Capsules surrénales les « « « « bandes jaune d’ocre des Poissons cartilagineux et le corps placé derrière ou entre lesreins, c'est que je n’avais trouvé, par les recherches microscopiques, que de la graisse et des noyaux clairs. Mais je me suis convaincu, chez les Reptiles nus, que les corps particuliers aux ganglions sympathiques, que possèdent aussi les Reptiles, augmentent en masse au voisinage des reins et passent très certainement dans la bande jaune adipeuse des reins. J’ai par là acquis la conviction que les bandes jaune d’ocre et les corps sur les reins des Squales et des Raies doivent être considérés comme des Capsules surrénales; ils appartiennent, aussi bien que les cœurs axillaires et les corps pairs, à la même série d’organes. » Semper confirme les observations anatomiques et histologiques de Leydig et considère aussi le corps impair comme appartenant aux Capsules surrénales. Balfour s’est longuement étendu sur la structure histologique de ces différents corps. Nous allons reproduire la plus grande partie de ses observations. e « La fig. 6 de la PI. XVIII (1), dit-il, représente une portion (1) Balfour, Loc. cit. Le De, DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 19 de coupe à travers une Capsule surrénale et montre les caractères suivants : Extérieurement, il existe une capsule fibreuse qui envoie des septa divisant imparfaitement le corps en une série d’alvéoles ou de lobes. IT existe un riche réseau capillaire péné- trant et accompagnant les septéa. Dans la majorité des cas, le parenchyme lui-même présente bien nettement une substance corticale et une substance médullaire. La substance corticale est composée de cellules columnaires, quelque peu irrégulières, formant pour la plupart une rangée profonde disposée tout autour de la périphérie du corps. La substance médullaire est plus ou moins distinctement divisée en alvéoles et est formée de cellules polygonales irrégulières. Le caractère des cellules cor- ticales et médullaires est presque le même etles cellules des deux assises paraissent plutôt différer dans leur forme que dans aucun autre point essentiel. Le protoplasme des unes et des autres a uve teinte jaune notable, donnant aux Capsules surrénales une couleur jaune brun. Les nuclei sont petits comparativement aux dimensions des cellules. Dans la capsule antérieure, il y a une distinction moins marquée entre les couches corticale et mé- dullaire, et une coloration jaune totale moins prononcée que dans les Capsules postérieures. Dans le cas d’une coupe de capsule postérieure, on trouve généralement un petit ganglion fixé aux deux extrémités de la capsule et enveloppé dans la même gaîne ; en outre, un certain nombre de cellules ganglionnaires (très remarquables par leurs dimensions et d’autres caractères) se trouvent dispersées dans la capsule. Dans les Capsules surré- nales antérieures, le développement des cellules ganglionnaires est beaucoup plus grand. Si l’on fait une coupe transversale dans la région où le grand ganglion sympathique est attaché à la Capsule surrénale, la moitié de la coupe est principalement composée de cellules ganglionnaires sympathiques et de fibres nerveuses, et l’autre de tissu surrénal; mais les cellules se ré- pandent en nombre dans le tissu surrénal. 20 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE & Des fibresonduleuses, que je crois être nerveuses, se distribuent & dans le Corps surrénal proportionnellement au nombre des « cellules ganglionnaires. Quelquefois, le ganglion sympathique et « les nerfs sont clairement unis avec le Corps surrénal et d’une « manière si intime qu'on ne peut les séparer. » Relativement au corps impair, qu’il nomme Corps interrénal, Balfour s'exprime ainsi: « Antérieurement, le Corps interrénal « recouvre les Capsules surrénales, et je n’ai pas réussi à trouver & aucune connexion entre eux et lui. Surce point, mes observa- « tions ne s'accordent point avec celles du professeur ‘Semper. « Il est entouré d’une tunique propre, épaisse, qui envoie, à l’in- « térieur, des septa divisant le corps en lobules assez bien « marqués. Ces lobules sont remplis de cellules polygonales qui « forment le véritable parenchyme du corps. « Les nuclei sont remarquablement granuleux. Les septa sont & pourvus d’un très riche réseau capillaire. & À première vue, il y a quelque ressemblance de structure « entre les tissus des Capsules surrénales et du Corps interrénal ; « mais un examen plus attentif montre que ces deux corps n’ont « d’autre ressemblance qu’une division en lobules par des septa de € tissu conjonctif. Il n'y a pas, dans le Corps interrénal, de distinc- « tion entre les couches corticale et médullaire, comme dans les « Capsules surrénales. Les cellules des deux corps ontdes caractères € très différents, comme le démontre la comparaison des diamètres « relatifs des nuclei et des cellules. Les cellules des Capsules sont « considérablement plus grandes que celles du Corps interrénäal, € 21 à 30 y par rapport à 15 y ; encore les nuclei des plus grandes « cellules du premier corps n’égalent pas en dimension ceux des « plus petites ceilules du dernier : 9 4 par rapport à 10 x. » « Mes observations de grosse anatomie et d’histologie du Corps « interrénal dans l'adulte montrent qu’il n’a aucune connexion « avec les capsules surrénales et sont ainsi en complet accord avec € les premières vues de Leydig et non avec les dernières. » DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 21 Cette opinion se trouve encore confirmée par ses recherches embryologiques, d’après lesquelles le Corps interrénal dériverait du Mésoblaste, tandis que les Capsules surrénales dériveraient des ganglions sympathiques. Lequel de ces deux corps est l’analogue des Capsules surrénales des Vertébrés supérieurs ? Balfour croit que ce sont les corps pairs, et bon nombre de points, dit-il, relatifs à leur structure et à leur position, peuvent être avancés en faveur de cette vue. Mais, avant de se prononcer catégoriquement, il lui paraît préférable d'attendre que le développement embryonnaire des Capsules surrénales ait été étudié dans les Vertébrés supérieurs. C’est ce qui a été fait depuis par Braun chez les Lézards ; par Mitsukuri, Gottschau et Janosik chez les Mammifères, et par Weldon chez les Lézards, le Poulet et le Pristiure. Mais les résultats auxquels sont arrivés ces auteurs ne concordant pas entre eux, on peut considérer la question comme toujours pendante. = Nous allons maintenant exposer le résultat de nos recherches anatomiques et histologiques chez les adultes ; ces résultats, comme on le verra plus loin, ne confirment pas les vues des auteurs précédents sur la nature de ces petits corps. Nous avons donné plus haut la description du cœur axillaire. Les corps qui le suivent sont beaucoup plus petits et leur forme, d’ailleurs excessivement variable, ne rappelle aucunement la sienne. Il est en effet toujours allongé, tandis que ceux-ci sont plutôt discoïdes ; il arrive assez souvent que ces petits disques s’allongent en dehors, suivant deux cornes divergentes entre lesquelles on aperçoit l’artère latérale ; mais cet allongement n'est jamais considérable et la forme discoïdale est à peine altérée. Ainsi que nous l'avons dit précédemment, tous ces corps sans excep- tion sont situés sur une artériole ; il serait plus exact de dire qu'ils sont traversés par l’artériole : c’est ce que montre la fig. 5 de la PI. III, qui représente une coupe transversale de l’un de ces corps faite perpendiculairement à l’axe de l’artériole. La substance supra- 22 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE rénale est parfois peu épaisse en dessus et en dessous de l’artériole, mais elle existe toujours ou tout au moins presque toujours. Tous ces petits corps ont à peu près les mêmes dimensions ; les plus antérieurs sont placés à la partie supérieure du Sinus de Monro, à une certaine distance des reins (b, fig. 1, PI. I) ; ils se rapprochent peu à peu de ces organes, et les derniers, situés vers l’origine des veines cardinales, s’accolent à leur face interne et pénètrent même dans leur épaisseur ; dans ce cas, ils peuvent paraître réduits à un point presque imperceptible. Un certain nombre d’entre les premiers sont placés à l’inté- rieur du sinus, comme le cœur axillaire, et sont par conséquent baignés entièrement par le sang de ce sinus. Il est possible de les soulever ; on voit alors nettement la fine membrane qui les entoure se continuer, aux deux extrémités d’un même diamètre, avec la paroi de la veine cardinale. Chez Scyllium Catulus, on en compte, de chaque côté, de 16 à 18; leur nombre n’est pas constant, par suite de la fusion de quel- ques-uns. Ce fait se produit fréquemment et mérite de nous retenir quelques instants. De l'artère axillaire part une petite artériole qui traverse dans toute sa longueur le premier Corps suprarénal. Elle décrit ordi- nairement une courbe à concavité externe et va se terminer dans l'épaisseur des muscles latéraux. Mais le plus souvent, cette arté- riole émet sur son trajet une, deux et même trois branches, qui vont également se perdre dans la masse musculaire voisine en suivant en dehors une direction à peu près parallèle à celle de la partie postérieure de l’artériole. D’autres fois, au lieu de se terminer comme nous venons de l’indiquer, elle va se souder à la première artériole intercostale issue directement de l'aorte ; cette première intercostale peut à son tour être unie à la 2°, et même à la 3. Enfin, il arrive qu’une intercostale émet un rameau destiné à remplacer l’artériole voisine manquante. Lorsque ces dispositions anatomiques se présentent, les Corps suprarénaux qui entourent DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 23 chacune de ces artérioles sont unis entre eux par une bande plus ou moins large de substance suprarénale, de sorte que là où l’on devrait compter trois, quatre ou cinq corps, on ne voit qu’une ou deux masses allongées sans forme déterminée. Quant aux Corps suprarénaux postérieurs, il est rare qu’ils soient unis entre eux. La position de ces petits corps montre leurs rapports avec le système vasculaire ; ils entourent, avons-nous dit, les artérioles intercostales ; presque toujours ils se trouvent au point où l’arté- riole se divise en deux petites branches. Si l’on injecte le système artériel, on voit partir de l’artériole et de ses branches de nom- breux vaisseaux capillaires qui vont se distribuer dans tout le parenchyme du corps (cv, fig. 7, PI. III). Sur une coupe transver- sale, on voit de place en place la lumière de ces vaisseaux capillaires; elle n'offre d’ailleurs rien de remarquable, mais celle de l’artériole et des principaux rameaux est tapissée d’une couche endothéliale et entourée d’un anneau de fibres conjonctives dont quelques-unes contribuent à former la trame du petit corps. Il arrive assez souvent que le vaisseau principal est entouré d’un système de lacunes à mailles plus ou moins lâches. Quant au système veineux de ces corps, nous n’avons rien à en dire. Il nous a été impossible de l’injecter ; certains baignaiïent entièrement dans la masse à injection et leur contour se colorait ; mais l’intérieur ne contenait que quelques points où le liquide paraissait avoir pénétré. Et maintenant, cherchons quelle est la structure des Corps suprarénaux. Pour étudier cette structure, nous avons fait usage de deux procédés : les coupes et les dissociations. Les Corps suprarénaux ont d’abord été fixés à l’aide de l’acide osmique, de l’alcool à 45° ou à 60°, de la liqueur de Fleming, du sublimé corrosif, de l’acide azotique à 3 ou 4%, du liquide d’Er- 1icki, etc. Tous ces procédés faisant partie de la technique courante, - nous ne les décrirons pas. Pour les dissociations, nous avons fait 24 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE usage de l'acide formique à 5%, de l’acide acétique à 1%, de l'alcool au +, de la dissolution physiologique de sel marin, ete. Vu à un faible grossissement, le petit corps nous semble com- posé d’un certain nombre de lobes à contours nettement accusés ; mais cette structure n’est qu’apparente, car l’aspect qu’il présente est dû à ce queles faces supérieure et inférieure sont ordinairement mamelonnées. Si, en effet, les mamelons sont très petits ou man- quent, ce qui arrive quelquefois, la structure du corps paraît homo- gène. Leur examen à un grossissement convenable est plus instructif. D’après Leydig, les Capsules surrénales se composeraient de lobes formés de vésicules closes remplies de noyaux et de cellules. Les lobes dont parle cet auteur ne doivent pas être bien évidents, car Balfour, décrivant la structure interne des mêmes corps, dit que de leur enveloppe fibreuse partent des septa qui divisent impar- faitement la capsule en une série d’alvéoles ou de lobes. Pour nous, il est bien certain que le Corps entier n’est pas divisé en lobes ; on ne pourrait tout au plus considérer comme lobulée que la moitié périphérique. On voit le plus souvent, en effet, par- tir de son enveloppe un grand nombre de traînées fibreuses, assez nettes près de sa surface, mais qui disparaissent en approchant de son centre. Elles sont d’ailleurs de 2 sortes ; nous allons les exami- ner l’une après l’autre. Nous savons que la surface des Corps est ordinairement mamelonnée. Deux mamelons voisins peuvent être plus ou moins étroitement accolés et le repli qui se trouve entre eux plus ou moins profond. Si la coupe est faite perpendiculairement à la direction du repli, celui-ci nous apparaîtra sous la forme d’un V allongé ou sous celle d’une ligne plus ou moins large et plus ou moins profonde. Pour peu qu’il y ait sur cette coupe trois ou quatre replis de cette nature, la capsule paraîtra lobée dans sa partie périphérique. Mais il est rare qu’il en soit ainsi ; les mamelons varient considérablement dans leur nombre et leur disposition ; quelquefois ils sont à peine sensibles ; dans ce cas, il n’y a de ce chef aucune division lobaire. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 25 Les autres traînées fibreuses paraissent se détacher de la mem- brane qui enveloppe le Corps suprarénal ; elles sont plus nom- breuses et plus fines que les précédentes. Si ce sont des septa, la moitié périphérique du corps se trouve partagée en un grand nom- bre de lobes ; mais l'examen attentif d’une série de coupes montre que les traînées appartiennent à des fibres et non à des mem- branes ; le petit corps n’est donc pas lobé. Voici comment nous avons procédé pour nous assurer que les traînées appartiennent bien à des fibres et non à des membranes. Après avoir dessiné toute une série de coupes, nous avons choisi sur la première coupe une traînée quelconque, ordinairement l’une des plus apparentes. Si cette trai- née avait appartenu à une membrane, nous aurions dû la retrou- ver sur toutes les coupes suivantes ou tout au moins sur un certain nombre d’entre elles. Or, jamais nous n’avons pu en suivre au delà de la deuxième coupe, bien que nos coupes fussent très minces. Il semble donc se dégager de là bien nettement que les trainées n’ap- partiennent pas à des septa, mais que ce sont au contraire des fibres très fines. C’est ce que l'on peut d’ailleurs constater sur certaines coupes minces. Îl arrive parfois qu’une portion de la surface de ces coupes se trouve à peu près dépourvue de noyaux. Dans ce cas, il ne reste qu'un reticulum formé de fibres de grosseur différente, enchevêtrées de toutes les façons. On peut dire d’une manière générale que, sur une coupe donnée, le reticulum est formé de mailles irrégulièrement arrondies, de grandeur très différente. Le contour des mailles est constitué par plusieurs fibres dont le nombre et l’espacement va- rient fréquemment. Du point où plusieurs mailles se rencontrent, partent d’autres fibres qui se dirigent perpendiculairement aux premières, formant en partie le contour d’une autre série de mailles. Quant aux vésicules closes dont seraient composées les capsules, nous n’avons jamais pu les apercevoir. Enfin, Leydig parle de noyaux et de cellules ? De quelles cel- 26 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE lules s'agit-il ? Est-ce de cellules nerveuses ou de cellules propres aux Capsules surrénales ? Il semble que c’est de ces dernières ; mais, comme il neles a ni figurées ni décrites, nous sommes obligé de nous en tenir à cette simple mention. Mais Balfour a repré- senté ces cellules dans sa PI. XVIII, fig. 6 (1). D'après lui, le pa- renchyme des plus petites Capsules surrénales présenterait bien nettement, dans la majorité des cas, une substance corticale et une substance médullaire : la première, périphérique, formée de cellules columnaires, allongées, irrégulières ; la seconde, centrale, formée de cellules polygonales écalement irrégulières. Avant de parler des cellules, examinons l’aspect que présentent sur les coupes la périphérie et le centre des corps suprarénaux. Lorsque les fibres qui partent de la membrane d’enveloppe du petit Corpsse dirigent en grand nombre vers la partie centrale, l’aspect de la coupe rappelle assez bien ce que Balfour a décrit. À première vue, la périphérie semble formée de cellules columnaires, et l’inté- rieur, de cellules polygonales. Mais, au lieu de se rencontrer fré- quemment, comme le dit Balfour, le fait paraît au contraire assez rare ; le plus souvent la périphérie semble formée de cellules poly- gonales plus petites que celles du centre. D'où vient cette anoma- lie ? Nous croyons qu’elle est simplement due aux réactifs em- ployés. Si l’on fixe, en effet, le corps suprarénal au moyen de la- cide osmique, on constate que la couche qui a subi l’action de l’acide présente un aspect tout différent de celui qu'offre la partie centrale. Les fibres sont plus nettes, et les noyaux plus petits et plus arron- dis ; toutes les préparations faites par ce procédé présentent toujours les mêmes caractères. Si la fixation a lieu par certains réactifs, l'alcool, le sublimé, etc., la coupe présente un aspect sensible- ment uniforme ; les noyaux du centre et de la périphérie sont iden- tiques et la division du corps en partie corticale eten partie médul- laire n'existe plus. Il y a donc lieu de tenir compte de l’action des (1) Balfour, loc. cit. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 27 réactifs. En examinant à l’état frais des fragments pris à la péri- phérie et d’autres pris à l’intérieur, on ne remarque, dans la forme et les dimensions de leurs noyaux, aucune différence. On n’en remarque pas davantage si on les compare à ceux des coupes fixées par l'alcool et le sublimé. On peut donc conclure de là, ou bien que l'acide osmique rétracte en les arrondissant les noyaux des couches périphériques des Corps, ou bien que l'alcool, le sublimé ou la goutte d’eau dans laquelle on place le fragment examiné à l’état frais, dilatent ces mêmes noyaux en leur donnant une forme ellip- tique. Quelle que soit celle de ces deux suppositions qui soit la vraie, la division des corps en partie corticale et en partie médul- laire n’est que le résultat de l’action des réactifs et n’existe pas en réalité. Balfour avait d’ailleurs fait remarquer que la division en deux couches était moins prononcée dans le premier corps que dans les suivants. Cela tient sans doute au volume plus considé- rable de ce corps et à l'épaisseur de la membrane qui l'enveloppe. La fig. 6 de la PI. XVIII de l'ouvrage déjà cité de Balfour nous montre des cellules nettement délimitées. Malgré des recher- ches multipliées, nous n’avons jamais pu apercevoir rien de sem- blable ; nous avons fait des coupes d’une grande minceur, au 106 et d’autres au 355 et même au ;4, après les avoir préparées par des procédés divers ; nous avons toujours obtenu des résultats identiques entre eux, mais n’ayant avec ceux de Balfour qu'une vague ressemblance. De temps en temps, une cellule arrondie ou polygonale (PI. I, fig. 5) semble apparaître nettement sur une coupe; mais elle est presque toujours isolée et, s’il s’en trouve de voisines, leurs bords ne sont jamais juxtaposés comme l'indique le dessin de Balfour. On ne voit ni cellules colamnaires à la périphérie, ni cellules polygonales au centre ; il n’y a que des apparences. Et ces apparences sont dues vraisemblablem ent aux contours des mailles de la trame conjonctive des corps. Les disso- ciations nous ont également donné des résultats négatifs. Voici ce que l’on observe : 28 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Lorsque l’on est parvenu à obtenirune mince couche de tissu surrénal, les nombreux noyaux qu’elle renferme sont comme plon- gés dans une substance légèrement granuleuse ; celle-ci, unifor- mément répandue dans toute la couche, ne laisse apercevoir ni cellule, ni enveloppe d'aucune sorte. Quant à la plupartdes noyaux isolés par la manipulation, ils sont complètement libres et nus ; quelques-uns, toujours en petit nombre, sont jus ou moins entou- rés par la substance granuleuse. La fig. 11 dela PI. IIT repré- sente six de ces noyaux. De ce que nous venons de dire, il semble résulter que les noyaux des petits Corps sont simplement plongés dans la substance fine- ment granuleuse qui constitue ces derniers, et ne paraissent avoir avec elle qu’une faible adhérence. On pourrait encore supposer que chaque noyau appartient à une cellule dépourvue de membrane d’enveloppe. Dans ce cas, le protoplasme des cellules voisines pour- rait être considéré comme se fusionnant et constituant une masse granuleuse unique remplissant les mailles du corps. Si, contraire- ment à nos recherches, chaquenoyau appartientà une cellule pour- vue d’une membrane d’enveloppe, l’inutilité de nos efforts pour découvrir cette membrane prouve péremptoirement que Balfour n'a pu l’apercevoir aussi nettement qu'il l’a représentée sur ses dessins. C'est là surtout ce que nous voulions démontrer. Quant aux fibres conjonctives qui constituent la trame des corps, il est impossible d'en obtenir d’une certaine longueur; la disso- ciation les brise en fragments ayant l’apparence de courts bâton- nets ; cependant, au voisinage du vaisseau qui traverse le petit corps, elles ont des dimensions un peu plus considérables. Nous devons maintenant parler de l'association des Corps supra- rénaux et des petits ganglions sympathiques. Découverte par Leydig et confirmée par Semper et Balfour, cette association n’est pas, chez les plus petits Corps, aussi fré- quente que ces auteurs le supposent. Nous examinerons successi- vement le premier Corps et les petits Corps suivants. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 29 Le premier Corps ou Cœur axillaire est toujours associé à un ou plusieurs ganglions sympathiques. Si l’on examine attentive- ment ce corps, on ne tarde pas à remarquer qu’il paraît formé de deux parties distinctes : l’une externe, de couleur jaunâtre, ayant complètement l'aspect des petits corps suivants ; l’autre, interne, plus blanche. Après l’action de l’acide osmique, la différence est encore plus sensible, car la partie externe se colore en noir pres- que instantanément, tandis que l’interne se colore beaucoup plus lentement et moins fortement que l’autre. Sur une coupe trans- versale, comme l’a fait remarquer Balfour, une moitié de la coupe est formée de tissu surrénal, l’autre de grandes cellules nerveuses. C’est cette dernière, c’est-à-dire l’interne, qui est le vrai ganglion sympathique. Celui-ci est de beaucoup le plus considérable ; sa masse égale au moins celle de tous les autres réunis ; il est forte- mentallongé d’avant en arrière ; c’est de son bord postéro-interne que partent les différents faisceaux qui composent le nerf splanch- nique ; à son extrémité antérieure aboutissent presque toutes les racines nerveuses émanées des premiers nerfs rachidiens. $es rapports avec le premier Corps suprarénal se réduisent à un simple accolement ; toutefois, la membrane qui les enveloppe est commune. Indépendamment de ce gros ganglion, on en trouve assez fré- quemment un ou deux petits plongés dans la substance de la partie surrénale ou placés sur l’un de ses bords. Ces petits ganglions sont tout à fait identiques à ceux dont nous allons parler et leur structure n’est autre que celle du gros ganglion. Lorsque ces petits ganglions existent, les fibres qui partent de leurs cellules traversent la sub- stance surrénale pour aller se confondre avec celles du ganglion principal. Leydig crut observer que les petites capsules sont toujours accompagnées d’un ganglion sympathique ; Balfour fit la même remarque ; ilvit même parfois deux de ces ganglions placés aux deux extrémités d’une même Capsule. Ces faits sont vrais, mais ils 30 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE n’ont pas la généralité qu’on leur a attribuée. Le plus souvent même, les ganglions sympathiques ne touchent pas au Corps suprarénal ; ils en sont à une certaine distance ou se trouvent près de son contour ; lorsqu'ils sont enveloppés par lui, ils sont généralement situés sur son pourtour et ne se rencontrent que très rarement au milieu de son parenchyme. Plus rarement, des cellules sympathiques isolées se trouvent disséminées dans sa substance. Ainsi donc un petit Corps suprarénal peut contenir un ou deux ganglions sympathiques, ou bien quelques cellules isolées, ou enfin ne renfermer aucun élément nerveux apparent. Cherchons, dans ces différents cas, ses rapports avec le sympathique et essayons d’en tirer des conclusions. D'une manière générale, on peut dire que des filets sympa- thiques se portent toujours sur le Corps suprarénal. Quelle que soit leur origine, ces filets, en arrivant près de lui, se divisent en fibrilles qui se répandent à sa surface et vont se rejoindre au delà pour constituer un ou deux nouveaux filets (PI. III, fig. 4). Les rameaux communicants issus du nerf rachidien voisin se compor- tent exactement de la même facon. Ces rameaux communicants et les filets sympathiques qui se divisent en fibrilles à la surface des Corps suprarénaux, envoient-ils au parenchyme de ces Corps des ramuscules nerveux ? Nous n’avons pu vérifier le fait ; s’il est vrai, on pourrait alors, à cause de leur richesse en vaisseaux san- | guins et de lenr innervation, considérer les Corps suprarénaux comme les analogues des Capsules surrénales des Mammifères ; la différence entre leur composition anatomique et celle des Capsules de ces derniers animaux ne serait pas, en effet, un obstacle à cette assimilation, car la structure des Capsules surrénales chez les diffé- rents Vertébrés est loin d’être identique ; mais, nous le répétons, maloréles recherches les plus minutieuses, nous n'avons pas réussi à voir partir le moindre rameau des fibrilles nerveuses quienlacent le Corps suprarénal. Certains Corps, il est vrai, enveloppent des DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 34 cellules ou des ganglions sympathiques ; mais toutes ces cellules sont unipolaires, et la fibre unique qui en part ne fait tout au plus que de traverser une petite portion du parenchyme du corps ; elle ne paraît pas non plus lui envoyer de ramuscules. Ainsi donc, que le Corps suprarénal renferme ou non des cellules sympathiques, il est impossible de voir aucun filet nerveux se rendre au parenchyme du corps ; tout ce que l’on peut constater, c’est un simple rapport de contact. Chez les Mammifères et les autres Vertébrés, les rapports entre le Sympathique et les Capsules surrénales sont probablement plus intimes ; les cellules nerveuses disséminées dans la partie mé- dullaire de la capsule sont toutes multipolaires, et il est à présumer que les fibres qui partent de la plupart des cornes de la cellule ner- veuse vont se distribuer aux cellules formant le parenchyme de la glande. Nous ne pouvons donc pas voir, dans les petits Corps en question, au moins d’une manière évidente, les analogues des Capsules surrénales des autres Vertébrés. Ne pourrait-on les considérer comme une partie intégrante du système sympathique, ou comme une couche corticale protectrice des ganglions sympathiques, ou enfin comme remplissant un rôle de soutien à l’instar de la Névroglie du cervean et de la moelle épinière des Mammifères ? En ce qui concerne le premier point, on pourrait peut-être sou- tenir cette thèse : 1° si les rameaux communicants qui les envelop- pent de leurs fibrilles, presque toujours avantde rencontrer un gan- glion sympathique, leur distribuaient des rameauxnerveuxet en rece- vaient : 2 si de leur parenchyme partaient des fibres de renforce- ment pour les filets émanés des ganglions ou des cellules sympa- thiques. Mais nous n’avons pas plus réussi à voir la substance fondamentale de ces corps émettre des filets qu’en recevoir. Et . comme, d’un autre côté, un grand nombre de ganglions sympa- thiques sont éloignés des Corps suprarénaux, lesquels, par suite, ne peuvent jouer vis-à-vis des premiers ni le rôle de couche protec- trice, ni celui que remplit la Névroglie chez les animaux supé- 32 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE rieurs, nous sommes encore obligé d'abandonner notre seconde hypothèse. De notre étude se dégage donc ce fait, que les Corps pairs, situés de chaque côté de la colonne vertébrale des Elasmobranches, ne peuvent être considérés d’une manière certaine ni comme une partie intégrante du Sympathique, ni comme les analogues des Capsules surrénales des autres vertébrés. Dans ces conditions, il nous paraît prudent de les désigner par un nom qui ne préjuge rien ; nous abandonnerons donc celui par lequel on les désigne habituellement depuis les travaux de Leydig. Si nous supposons le poisson placé de telle sorte que, son axe lon- gitudinal étant vertical, sa tête soit en haut, la plupart des petits Corps en question se trouveront au-dessus des reins. À cause de cette situation, nous les appellerons Corps suprarénaux et nous conserverons au corps impair situé entre lesreins le nom de Corps interrénal, par lequel l’a désigné Balfour. Nous pouvons maintenant résumer comme suit ce que nous sa- vons des Corps suprarénaux : Les Corps suprarénaux sont des formations d’un gris jaunâtre, à surface mamelonnée, situées de chaque côté de la colonne ver- tébrale au plafond de la veine cardinale ; les uns sont à l’intérieur de cette veine, dans le sang de laquelle ils baignent ; les autres sont placés entre la membrane de cette veine et la paroi du corps ; les derniers disparaissent presque dans la substance des reins. Chacun d’eux est traversé par une artériole intercostale qui lui envoie de nombreux vaisseaux capillaires. De la fine membrane qui les en- veloppe partent des filets qui vont former dans son intérieur, de concert avec ceux qui naïssent de l’anneau conjonctif entourant l’artériole, une sorte de réticulum très compliqué, à mailles iné- gales, dans lesquelles se trouvent un nombre considérable de noyaux ovales. Chacun de ces noyaux, pourvu de plusieurs petits corps très réfringents, paraît simplement plongé dans le proto- plasme granuleux ; on pourrait peut-être supposer qu'il appartient DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 33 à une cellule sans membrane d’enveloppe dont le protoplasme granuleux se fusionne avec celui des cellules voisines. De cette fusion résulterait une masse protoplasmique unique contenant - tous les noyaux etremplissant les mailles du réticulum. Enfin des _ ganglions et des cellules sympathiques se trouvent assez souvent plongés dans le parenchyme du corps, et, à sa surface, circulent sans pénétrer, du moins en apparence, dans sa substance, et sans émettre de rameaux, des filets nerveux appartenant également au système sympathique. Corps interrénal. Le Corps impair ou Corps interrénal de Balfour est, avons-nous dit, considéré par Leydig et Semper comme appartenant à la même série d'organes que les Corps suprarénaux. Balfour est d’un tout autre avis ; la seule ressemblance qu'il trouve entre eux réside dans la division des deux corps en lobules par des septa de tissu conjonctif. Nous avons étudié avec soin par le moyen des coupes et des dissociations la structure intime de ce corps. Voici, à notre tour, ce que nous aVONS VU : A l’état frais, les éléments propres de ce corps disparaissent sous une couche de globules clairs, légèrement teintés, qui lui donnent une couleur jaunâtre particulière. Ces globules ont été considérés par Leydig comme étant de nature graisseuse ; Balfour, dans ses Eléments d'embryologie (1), dit au contraire qu’ils n’ap- partiennent pas au tissu adipeux. Examinés attentivement au mi- croscope, sans réactifs, ils n’offrent pas la réfringence de la graisse ; l’éther ne les dissout pas; l'acide osmique ne les noircit aucu- nement ; il semble donc que ces globules n’ont que l’apparence des (1) Balfour, Traité d'Embryologie et d'organogénie comparées, traduit par Robin et Mocquard. Paris, J.-B. Baïllière. 1885. ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN, — 2° SÉRIE. — T. V bis, — suppz. 1889. — Mém. 3 34 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE t globules graisseux et qu’ils sont d’une tout autre nature. Les ma- nipulations que l’on fait subir au Corps interrénal les font dis- paraître entièrement ; aussi les coupes sont-elles le meilleur moyen d'étudier la structure intime de ce corps. Ici Balfour n’a pas vu de distinction entre les couches corticale et médullaire comme dans les Corps pairs. Nous avons dit que, chez ces derniers, la dis- tinction n’était qu'apparente ; dans le Corps impair, grâce à la présence des globules clairs qui forment en quelque sorte une couche protectrice, l’action du réactif fixateur est moins prompte, moins énergique, et voilà sans doute pourquoi la partie périphé- rique du corps ne se trouve pas modifiée. Les cellules des Capsules surrénales, dit encore Balfour, sont considérablement plus grandes que celles du Corps interrénal. Lei, comme dans les premières, il n'existe pas de cellules, au moins comme l’entendait Balfour ; ce qu'il prenait pour les contours de cellules appartient au Stroma conjonctif du Corps, c’est-à-dire à ce tissu réticulé dans les maïlles duquel se trouvent logés de nom- breux noyaux. Mais il avait raison en déclarant que les noyaux du Corps impair sont plus grands que ceux des Corps pairs, 10 p. contre 9 p (fig. 4, PI. T). Ces noyaux peuvent être isolés par la dissociation, mais avec la plus grande difficulté, en raison de l'abondance des globules clairs. Ils se présentent alors ou bien complètement nus, ou bien entourés d’une substance granuleuse, à peu près identique à celle des noyaux des Corps pairs. La compo- sition fondamentale des deux Corps est donc à peu près la même. Il existe néanmoins quelques différences. Outre l'inégalité des noyaux déjà constatée et l’absence dans les Corps pairs de globules clairs que le Corps interrénal renferme en abondance, ce dernier présente encore, au moins chez les Raiïes et les Torpilles, ane divi- sion en capsules ou vésicules nettement marquée. Suivant le point où passe la coupe, on peut voir le contour de une, deux, trois vésicules avec les noyaux de leurs membranes. Le Corps impair semble, en outre, moins riche en vaisseaux sanguins. Enfin, comme DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 39 le dit Balfour, ce Corps, bien qu’il s’avance assez loin entre les Corps pairs, n'entre point en relation avec eux ; nous ajoutons qu’il ne recoit jamais du système sympathique aucun filet nerveux et sa substance n’entoure ni ganglion ni cellules sympathiques, comme cela se voit chez les Corps suprarénaux. Ces différences suffisent-elles pour faire considérer le Corps inter- rénal comme étant d’une formation différente de celle des Corps suprarénaux? Nous nous abstiendrons de discuter cette question, car, pour avoir des chances de la résoudre convenablement, il faudrait que nous eussions pu suivre l’embryogénie de ces corps qui, à notre avis, n'a pas été suffisamment éclaircie par ceux qui L s’en sont occupés jusqu'ici. Système Sympathique proprement dit. — Ganglions. Les ganglions sympathiques s'étendent depuis le diaphragme jusqu’à l’extrémité postérieure de l'abdomen. Le premier, comme nous l’avons dit, se trouve toujours accolé au bord interne du pre- mier Corps suprarénal. Nous l'avons suffisamment décrit pour n'avoir plus à y revenir. Les autres ganglions ont à peu près tou: la même forme et les mêmes dimensions ; quelques-uns cependant sont plus petits que les autres ; ils sont généralement circulaires et leur diamètre varie entre 2 et 7 dixièmes de millimètre chez les adultes. On peut les diviser en deux groupes ; le premier comprend tous ceux qui occupent la partie antérieure de la cavité abdominale et qui accompasnent les Corps suprarénaux ; le second renferme les ganglions'situés à la face interne et supérieure des reins. Les ganglions qui constituent le premier groupe furent, comme on sait, découverts par Leydig. Après lui, Semper et Balfour s’en occupèrent incidemment, mais n'ajoutèrent aucun fait nouveau à ce qu’il avait annoncé. Tous crurent que les ganglions sympa- thiques étaient toujours situés à l’intérieur ou tout au moins sur les 36 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE bords des Corps suprarénaux. En décrivant ces derniers, nous avons fait remarquer que, très souvent, ils ne contiennent aucun ganglion sympathique ; mais ceux-ci n’en existent pas moins. Voici comment on peut s’en assurer : Versons quelques gouttes d'acide osmique le long de la veine cardinale, préalablementfendue et débarrassée du sang qu’elle con- tient. Les filets nerveux se noircissent peu à peu et, au bout d’un certain temps, les petits ganglions sympathiques apparaissent sur le trajet des nerfs sous la forme de petits disques à peine teintés. Ils sont fortement aplatis de bas en haut, entourés d’une membrane propre et présentent un aspect légèrement muriforme dû aux grandes cellules unipolaires qui les constituent. Au lieu d’affecter une disposition segmentaire nettement accusée, comme les Corps suprarénaux, ils paraissent répandus sans ordre. Il arrive, en effet, qu'entre deux Corps suprarénaux, on en trouve quelquefois 2, 3 et même 4, tandis qu'entre deux ou plusieurs des corps sui- vants, on n en voit aucun. D'ailleurs, leur distribution est fort irré- gulière ; elle varie constamment avec les individus et il est impos- sible de donner à cet égard aucun renseignement précis. Nous avons même constaté plusieurs fois que, dans le même individu, l'un des côtés présente seulement cinq ou six ganglions indépen- dants des Corps suprarénaux, tandis que le côté opposé en offre une quinzaine. Ils se trouvent presque toujours au point de concours de plusieurs nerfs et leur nombre coïncide approximativement avec celui des Corps suprarénaux. Les ganglions formant le 2° groupe n’ont jamais été signalés jusqu ici. Ils sont placés à la face interne et supérieure des reins, en dehors de la membrane de la veine interrénale. Leur forme est presque globuleuse ; ils sont seulement légèrement aplatis de dedans en dehors etsont ainsi beaucoup moins discoïdes que ceux du premier groupe; leur diamètre varie entre 6 et 8 dixièmes de millimètre. Ce n’est pas seulement leur forme qui les distingue de ceux du premier groupe ; ils affectent encore une disposition segmentaire nettement DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 37 accusée. Chacun d’eux, en effet, correspond à un nerf rachidien et en recoit une racine. [ls commencent vers l'endroit où se ter- minent les Corps suprarénaux et se continuent à peu près jusqu’au niveau de l’anus, un peu en avant du point où les deux reins se rejoignent. Chez Scyllium Catulus, nous en avons compté de 10 à 12 de chaque côté. ( V. fig. 2, PI. I.) Comme leur recherche est difficile, nous dirons quelques mots sur la manière de les découvrir. Et d'abord, les Squales seuls les possèdent; chez les Raïes, dont les Corps suprarénaux s’étendent jusqu’à l’extrémité postérieure de l'abdomen, on ne trouve que les ganglions appartenant au premier groupe. Parmi les Squales, l'espèce que l’on doit choisir de préférence pour les découvrir est le Scyllium Catulus. Après avoir fendu dans toute sa longueur la paroi inférieure de la veine interrénale, on écarte le plus pos- sible les reins, droit et gauche, puis on répand sur chacun d’eux quelques gouttes d’acide osmique. Après un certain temps, les filets nerveux issus des ganglions dont il est question se colorent en noir près du bord inférieur des reins; ces filets seront autant de points de repère qui nous permettront de nous guider sûrement vers les ganglions. À cet effet, la paroi de la veine interrénale est enlevée avec les plus grandes précautions ; cette opération est ren- due difficile par l’intime adhérence que la paroi contracte fré- quemment avec la pulpe des reins et par le grand nombre d'orifices dont elle est percée. En suivant les filets nerveux mis à nu et colorés au fur et à mesure, si besoin est, on arrive jusqu'au petit ganglion. Nerfs. — Racines nerveuses. De la partie antérieure du premier ganglion partent, ou du moins semblent partir, quelques filets ne:veux qui se dirigent en avant et en dehors, traversent la paroi supérieure du Sinus de Monro et la membrane aponévrotique appliquée à la face inférieure 38 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE des grands muscles latéraux, et vont s’unir aux nerfs rachidiens des premières paires : ce sont les racines nerveuses antérieures du premier ganglion. Afin de faciliter la description, nous les suivrons d’arrière en avant, c’est-à-dire du ganglion à leur origine, au lieu de suivre la marche opposée qui eût été plus logique. 4 ou 5 filets nervenx partent de l’extrémité antérieure de la partie sympathique du premier Corps suprarénal et accompagnent l'artère sur laquelle il se trouve. Ils peuvent être réunis en un seul faisceau ou, ce qui est le cas le plus ordinaire, en deux faisceaux peu divergents. Les nerfs quiles forment se séparent et chacun va se perdre dans l’un des premiers nerfs rachidiens. Le plus interne de tous ces filets accompagne assez fréquemment l'artère axillaire, de dehors en dedans, puis se rejette en dehors et va se terminer, après s'être ramifié, dans les premières paires rachi- diennes. Ce filet présente ceci de particulier, c'est que, sur son trajet, il offre trois ou quatre petits ganglions, rangés en file ou dis- persés. Le filet suivant en porte ordinairement un ou deux égale- ment. Ces ganglions sont le plus souvent reliés entre eux et avec un plexus dont il va être question un peu plus loin. Ils sont en outre le point de départ de quelques-unes des ramifications dont nous avons parlé ci-dessus. La plus antérieure de ces ramifications se porte sur un faisceau composé des deux premiers nerfs rachidiens ; mais elle se dirige d’arrière en avant, ou mieux de la périphérie vers le point d'origine du nerf ; ce n’est donc pas, comme on serait tenté de le croire, la ramification d’un filet sympathique, mais bien une racine émise par le faisceau des deux premiers nerfs rachidiens. Les autres ramifications sont également des racines issues des nerfs rachidiens suivants, et le filet nerveux résultant de leur union, et qui porte quelques petits ganglions, n’est autre chose qu’une racine com- posée. Les autres filets nerveux que nous faisions partir du premier ganglion sympathique et qui, au contraire, y aboutissent, sont également des racines composées. Enfin d’autres racines, simples celles-là, se rendent au bord externe et à la partie postérieure du DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 39 premier ganglion. Ce dernier recoit ainsi des racines de 10 à 12 et même 15 nerfs rachidiens, tandis que les Corps suprarénaux sui- vants ne reçoivent jamais qu’une seule racine. (Nous croyons devoir rappeler qu'avant d'aller se jeter dans les ganglions sympa- thiques, les rameaux communicants nés des nerfs rachidiens se portent ordinairement sur le Corps suprarénal correspondant, et que là leurs fibrilles s’écartent et enveloppent le Corps. Voilà pour- quoi nous disons plus haut Corps suprarénaux au lieu de qan- glions sympathiques.) Les nombreuses racines du premier ganglion paraissent indiquer qu'il est formé de la réunion de plusieurs petits ganglions sympathi- ques. D'il était possible d'établir qu’à chaque racine correspond un ganglion, lenombre des racines du premier ganglion indiquerait le nombre de ganglions dont il serait composé. Mais ce n’est pas une question facile à résoudre. Nous avons déjà dit qu'entre deux Corps suprarénaux on rencontre parfois deux, trois et quatre ganglions. Or, généralement, ce sont les rameaux d’une même racine qui se por- tent à ces différents ganglions. D’autres fois, on ne voit de ganglions ni dans le voisinage, ni dans l’intérieur d’un Corps suprarénal, et cependant le rameau communicant existe quand même ; il se porte sur le Corps suprarénal et ses rameaux vont s'unir à ceux des nerfs voisins ou se rendent directement aux viscères. Les rameaux com- municants se comportent donc différemment suivant le point considéré et compliquent la question au lieu de la simplifier. Le Corps suprarénal adjoint au premier ganglion est lui-même beaucoup plus considérable que les corps suivants et paraît formé de la coalescence d’un certain nombre d’entre eux. Mais pour lui, comme pour le premier ganglion, il n’existe pas de criterium per- mettant de déterminer la valeur morphologique exacte de ce corps. Chacun des petits Corps qui le suivent se trouve sur une artériole intercostale; le premier Corps occupe un espace dans lequel on pourrait compter quatre ou cinq artériolessi l'aorte en émettaitlatéra- lement dans cette partie de l’abdomen. Habituellement, de celle qui 40 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE , traverse de part en part le premier Corps partent deux ou trois branches qui remplacent les artères intercostales manquantes. D’après cela, celui-ci équivaudrait donc au plus à quatre ou cinq des petits Corps suivants. Si l’on rapproche ce chiffre du nombre des ra- cines du premier ganglion, on voit que, pour une partie composante du 1* Corps, il y aurait à peu près trois racines, alors que chacun des autres petits Corps n’en a qu’une. Ceci suffit à démontrer, ce nous semble, qu’il est impossible d'établir, en s'appuyant sur les rameaux communicants et sur les artérioles intercostales, la valeur morphologique du premier ganglion et du premier Corps supra- rénal. Nous pouvons seulement en induire que ces deux masses accolées représentent réellement un certain nombre de Corps supra- rénaux et de ganglions sympathiques. : S'il en est ainsi, le premier ganglion ne pourrait-il pas être con- sidéré comme tenant lieu des ganglions céphaliques que l’on ren- contre chez les Poissons osseux et chez les autres Vertébrés, et qui paraissent ici faire défaut ? Non, car, chez ces derniers animaux, les ganglions céphaliques reçoivent leurs racines desnerfs crâniens auxquels ils correspondent, et, chez les Elasmobranches, aucun nerf crânien n’envoie deracines au premier ganglion. Nous savons, en effet, que la racine la plus antérieure de ce ganglion sort du fai- sceau formé par les deux premiers nerfs rachidiens. En outre, les ganglions céphaliques des Poissons osseux envoient des filets à cer- tains nerfs crâniens et aux branchies, tandis que le premier gan- glion des Elasmobranches, contrairement aux affirmations de Remak, n’en envoie aucun à ces mêmes organes. Le premier ganglion ne peut donc être regardé comme remplaçant les gan- glions céphaliques. D’un autre côté, nous n’avons aperçu, au voi- sinage des nerfs crâniens, ni ganglion ni filet nerveux pouvant jouer le rôle du sympathique. En faisant nos réserves sur la valeur des résultats négatifs que nous signalons, nous pouvons, à notre tour, considérer que la partie crânienne du sympathique manque chez les Elasmobranches. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX, 41 Cela n’exclut pas la possibilité de relations entre le sympathique et certains nerfs crâniens. On a déjà signalé des connexions entre le nerf splanchnique et la branche viscérale du pneumogastrique ; il en existe d’autres qui n’ont été vues paraucun de nos devanciers ; elles se trouvent entre les racines antérieures du premier ganglion et un plexus dont voici la description. Plexus post-branchial. Ce plexus est placé immédiatement en arrière des branchies et, à cause de cette situation,nous proposons de le nommer Plexus post- branchal. Il tire son origine du pneumogastrique, de l’hypoglosse etdes cinq premiers nerfs rachidiens ; mais c’est le pneumogastrique qui lui fournit la plus grande partie de ses racines. Celles-ci partent des rameaux destinés aux viscères et à la pectorale et se réunissent en un ganglion placé généralement entre le 5° et le 6° nerf rachi- dien, sur le bord externe des grands muscles latéraux. Ce gan- glion n'est pas toujours unique ; ilen existe souvent deux, rappro chés l’un de l’autre et reliés par une très forte commissure. Les racines de ce ganglion sonten nombre assez considérable; le pneumogastrique en fournit de dix à douze pour sa part ; les autres nerfs ne lui en donnent qu'une ou deux. Toutes ces racines, ainsi que le ganglion vers lequel elles convergent, sont plongées au milieu d’une couche épaisse de tissu conjouctif lâche qui en rend la recherche très difficile. Elles sont en outre situées dans des plans différents, ce quiaugmente encore la difficulté. Du ganglion où elles se rendent partent, également dans des plans différents, un nombre considérable de filets nerveux, les uns fins, les autres plus gros, qui se jettent les uns dans les autres presque au sortir du ganglion. La plupart se dirigent en arrière, parallèlement à la colonne vertébrale, quelques-uns en avant eten dedans, d’autres en arrière et en dehors. Ils cheminent entre les parois du Sinus de 4? SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Monro et de la veine cardinale, et la membrane aponévrotique qui tapisse la face inférieure des grands muscles latéraux. Leur direction n’est pas rectilisne, mais ondulée ou enzigzags. Des angles qu'ils présentent partent des rameaux secondaires qui émettent à leur tour des rameaux tertiaires, ete. Ces diverses ramifications s’enchevêtrent, s’accolent, se soudent et constituent un réseau compliqué à mailles irrégulières, inégales, qui embrasse étroite- ment toute la partie supérieure du Sinus de Monro. En arrière,au- dessus des parois de la veine cardinale, le plexus disparaît et il ne reste que les rameaux les plus considérables qui se prolongent fort loin en arrière. En dehors du Sinus de Monro, on peut suivre éga- lement le Plexus. Il tapisse la face supérieure de la glande nida- menteuse, chez les femelles, et celle de l’épididyme, chez les mâles ; plus en dehors, il occupe à la face inférieure des grands muscles latéraux un espace assez large se prolongeant sur une certaine longueur. Les filets antérieurs, peu nombreux, méritent une mention spé- ciale. C’est par eux en effet que le sympathique se trouve relié au Plexus post-branchial. Ces filets se portent vers les petits ganglions situés sur le trajet des racines antérieures du premier ganglion sympathique. Le pneumogastrique et les nerfs suivants leur envoient des anastomoses ; ils sont en outre eux-mêmes pourvus de petits ganglions reliés avec les ganglions dépendants des racines du sympathique. Il en résulte un nouveau petit plexus à la for- mation duquel concourent des filets du pneumogastrique, de l’hypo- glosse, des premiers nerfs rachidiens, du sympathique et du Plexus post-branchial. De ce nouveau plexus partent quelques fins filets dont la distribution varie avec les individus. Une fois, nous en avons suivi un au-dessus des arcs branchiaux, jusqu’au niveau de l’orifice interne de l’évent ; là, il s’anastomosait avec un petit plexus issu du pneumogastrique et situé à la face inférieure du cerveau, au-dessus de l'extrémité antérieure des grands muscles latéraux. C’est là le point extrême auquel nous avons vu atteindre, DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 43 non pas précisément le sympathique, mais un filet nerveux issu du petit plexus formé par les racines antérieures du sympathique etle Plexus post-branchial. Nous devons ajouter que, depuis lors, nous n'avons pu revoir ce filet. Cordon sympathique. Tous les auteurs qui se sont occupés du système sympathique ou des Corps supyarénaux s'accordent à reconnaître l’existence d’un cordon limitant chez les Elasmobranches. Ce cordon existe d’une facon indubitable chez les Poissons osseux et chez les autres Ver- tébrés. Chez tous ces animaux, il se présente sous la forme d’un véritable cordon, étendu sans interruption depuis son origine jusqu’à sa terminaison et renflé de distance en distance ; mais ces renflements ne modifient pour ainsi dire pas son aspect; qu'ils soient gros ou petits, le cordon qui les relie les uns aux autres se reconnaîtra toujours pour un cordon. De même, si, de l’un de ses points, part un filet quelconque, ses dimensions et sa marche ne permettront jamais de le confondre avec le cordon. Existe-t-il, chez les Hlasmobranches, quelque chose d’identique ? Non. Voici simplement ce que l’on trouve : Les premiers Corps suprarénaux ou les petits ganglions sympa- thiques isolés sont ordinairement reliés par un filet nerveux très fin. À la rigueur, on pourrait considerer ce filet comme représen- tant le Cordon sympathique des autres Vertébrés, car ses faibles dimensions ne sont pas une raison suffisante pour lui refuser cette qualité. Mais il arrive fréquemment que deux ganglions sympa- thiques ou deux Corps suprarénaux ne sont point reliés entre eux, de sorte que la ligne ondulée ou en zigzags qui devrait représenter le Cordon sympathique est divisée en deux ou trois tronçons, Enfin les ganglions du second groupe, c’est-à-dire ceux qui sont placés vers l’extrémité postérieure de l’abdomen, à la face interne des reins, ne sont jamais reliés entre eux dans le sens de la-longueur. 44 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Cette indépendance est-elle particulière aux ganglionsde ce groupe, ou bien appartient-elle à tous ? Nous croyons qu’elle appartient à tous. Si l’on examine, en effet, chaque petit ganglion isolé ou chaque Corps suprarénal, on en voit partir un certain nombre de filets nerveux; cette particularité ne se rencontre pas chez les Osseux, où quelques ganglions seulement fournissent des nerfs à un petit nombre d'organes. Il est donc probable que les ganglions des Elasmobranches sont comme autant de petits centres nerveux d’où rayonnent quelques filets. L’un se porte sur le‘ganglion voisin en tant que filet nerveux et non comme Cordon latéral. D'ailleurs, il est à remarquer que presque tous les petits ganglions isolés sont reliés entre eux et avec les Corps suprarénaux de manière à for- mer un plexus à mailles larges. Il n’est donc pas surprenant que l’un de ces filets, par sa direction, semble représenter plus particu- lièrement le Cordon latéral. Nous devons ajouter, pour être com- plet, que, le plus souvent, ilest un peu plus gros que les autres, ce qui pourrait contribuer à le faire passer pour tel. Aïnsi done, les deux seuls faits qu’on puisse invoquer en faveur de l’existence d’un Cordon latéral chez les Elasmobranches sont la direction de filets nerveux reliant entre eux les petits ganglions sympathiques et les Corps suprarénaux, et la faible supériorité que le diamètre de ces filets présente sur celui des filets voisins. L'opinion contraire peut s’appuyer : 1° sur la marche irrégulière de ces filets qui res- semblent à une ligne ondulée ou en zigzags, dont les différentes portions ont un diamètre variable ; 2° sur ce que cette ligne ne s'étend pas sans interruption depuis le premier jusqu’au dernier Corps suprarénal, et 3° sur ce que les petits ganglions sympa- thiques postérieurs ne sont aucunement reliés entre eux. Cet exposé montre que, chez les Elasmobranches, il n’existe pas de Cordon latéral semblable à celui qui se voit chez les Osseux et les autres Vertébrés. Mais nous ne refusons pas de considérer l’en- semble des filets qui unissent les premiers ganglions ou les Corps suprarénaux les uns aux autres comme formant l’ébauche d’un Cor- DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 45 don latéral. Nous ferons enfin remarquer que, contrairement aux affirmations de Remak, ce Cordon latéral imparfait ne se prolonge pas Jusqu'à l’anus; il ne s’avance même pas en arrière jusqu’à l’origine des veines cardinales. Filets émanés des ganglions. Les nerfs les plus considérables naissent de la partie postérieure du premier ganglion. Ils accompagnent l’artère cœliaque et vont se distribuer à la plupart des viscères de la cavité abdominale : ce sont les nerfs splanchniques. Le premier ganglion n’est pas relié à son symétrique par une anastomose transversale, comme le pré- tend Stannius. Chacun d’eux donne naissance à un groupe de faisceaux nerveux dont deux ont ordinairement des dimen- sions plus considérables que les autres. Ces derniers sont en nombre variable (fig. 1, PI. Let PI. IL, y) ; il peut y en avoir trois, quatre ou même plus. Lorsque ces divers faisceaux ont rejoint l'artère mésentérique, ils se trouvent enveloppés avec elle par une lame épaisse de tissu conjonctif de nature ligamenteuse. Cette lame très résistante rend difficile l’étude des faisceaux, car non seule- ment les troncs principaux, mais aussi la plupart des rameaux qui sen détachent sont recouverts par elle ; si l’on ajoute à cela l’en- _ chevêtrement des vaisseaux et des brides mésentériques qui sou- tiennent la plupart des viscères de la cavité abdominale, on comprendra que s’il est difficile de suivre le trajet des différents rameaux splanchniques, il est encore plus difficile de les repré- senter. La fig. 1 de la PI. II ne donne donc qu’une idée impar- faite du tableau véritable de cette partie du sympathique. Les faisceaux comjosant le nerf splanchnique ne restent pas isolés ; ils s’envoient de nombreuses anastomoses et forment un véritable plexus cœliaque compliqué, à la formation duquel ils concourent tous, qu'ils appartiennent au nerf splanchnique de droite ou à celui de gauche. Il suffit, pour s’en convaincre, 46 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE d’écarter les principaux d’entre eux immédiatement après leur sortie du 1% ganglion. Mais ce ne sont pas là les seules liaisons que le sympathique contracte ; il est encore en rapport avec le rameau viscéral du pneumogastrique. Béraud avait en vain cherché cette liaison chez les Raïes ; ilaffirmait que les deux nerfs étaient indépen- dants l’un de l’autre ; Giltay, Swan, Remak et Stannius l’avaient au contraire signalée chez les Squales. Quant à nous, toutes les fois que nous l’avons cherchée, soït chez les Raïes, soit chez les Squales, nous l'avons trouvée. Voici ce que l’on constate ordinai- rement : | L'un des petits faisceaux qui composent le nerf splanchnique se porte en bas et en avant et se dirige vers la partie de l’œsophage où le rameau viscérai du pneumogastrique étale ses ramifications. Le filet sympathique ne reste pas simple ; il se divise bientôt en un certain nombre de branches très fines qui s’avancent plus ou moins loin sur l'œsophage ; elles finissent par se confondre avec l’un des : rameaux du pneumogastrique, de sorte que le filet peut s’anasto- moser en trois ou quatre endroits et même plus. Maiscomment se fait cette anastomose ? Voilà ce qu’aucuu de nos devanciers n’a proba- blement connu, car personne n’en a parlé. Au lieu de se diriger vers la périphérie du nerf splanchnique, le filet sympathique se porte vers son origine, de telle sorte qu’il est difficile de décider si le filet anastomotique provient plutôt du sympathique que du pneumogastrique. Toutefois, si l’on admet qu’un filet devient de plus en plus délié à mesure qu’il s'éloigne de son origine, nous serons forcé de reconnaître que le filet anastomotique en question émane bien du sympathique, Indépendamment de ce filet, qui, d’ailleurs, n’est pas toujours constant, il en existe plusieurs autres qui naissent du bord interne du premier ganglion, et qui se comportent exactement comme celui dont nous venons de parler. Enfin, à une certaine distance de l'origine du nerf splanchnique, un des plus gros faisceaux peut aussi s’anastomoser avec l’une des prineipales ramifications du DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 47 pneumogastrique; dans ce cas, l’anastomose, très forte, semble encore provenir indifféremment de l’un ou de l’autre des deux nerfs tee, PICET, fig. 97 Pour bien caractériser les rapports du sympathique et du rameau viscéral du pneumogastrique, nous pouvons dire que ces deux nerfs sont reliés par des anastomoses en anse. Cette particularité ne s’applique pas exclusivement aux rapports de ces deux nerfs. On la retrouve encore dans le nerf splanchnique lui-même. Il arrive très fréquemment, en effet, qu’un des rameaux de ce nerf, après un trajet plus ou moins long, se recourbe et se continue intimement avec le faisceau voisin ou simplement avec une branche de ce faisceau. Enfin, on peut voir encore, mais plus rarement, un faisceau du nerf splanchnique se relier de la même façon à l’un des rameaux d’un filet issu du petit Corps suprarénal suivant, ou d’un petit gan- glion sympathique voisin de ce corps. : | L'artère cœliaque se divise bientôt en deux branches principales : l’antérieure se porte vers la partie antérieure de l'intestin spiral, dans les parois duquel elle pénètre par plusieurs rameaux, en même temps que le canal cholédoque et le canal pancréatique ; c’est l’ar- tère intestinale antérieure; la branche postérieure se rend dans la lame mésentérique qui soutient l’estomac et les organes voisins ; c'est l'artère mésentérique. Le long de son trajet, elle donne nais- sance à plusieurs branches, dont les principales sont l’artère séoma- cale et l'artère hépatique; les autres se rendent presque toutes à la partie antérieure ou élargie de l'estomac (v. PI. I, fig. 1). Les faisceaux du nerf splanchnique accompagnent l'artère _ intestinale antérieure, l’artère mésentérique et toutes leurs divi- sions. L’estomac, qui est très riche en vaisseaux, reçoit donc éga- lement une quantité considérable de filets sympathiques, sans compter ceux, au moins aussi nombreux, que lui fournit la branche viscérale du pneumogastrique. Les filets sympathiques qui se rendent au foie partent pour : 48 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE la plupart de l’artère mésentérique, et accompagnent l'artère hépatique ; ils forment un plexus peu fourni dans l’espace compris entre les deux lobes du foie et les deux canaux hépatiques (fig. 5, PI. II, pl). Quelques filets se rendent à la vésicule biliaire. D’autres accompagnent le canal cholédoque dans presque toute sa longueur. Enfin, parmi ceux qui entourent l'artère intestinale antérieure et ses ramifications, quelques-uns se détachent et se portent sur le canal pancréatique qu’ils accompa- gnent jusqu’à sa disparition dans le duodenum. Cette partie de l'intestin, où débouchent plusieurs vaisseaux et les canaux cholé- doque et pancréatique, doit donc être également très riche en filets sympathiques. Rappelons que l’artère cœliaque est entourée d’un plexus nerveux ; nous en dirons autant des artères intestinale antérieure et mésentérique, car les filets, au nombre de trois ou quatre, qui accompagnent chacune d’elles, envoient de nombreuses anastomoses ; mais les mailles du réseau ainsi formé sont assez lâches. Parlons maintenant des nerfs émanés des petits ganglions sym- pathiques. Nous avons dit plus haut que chaque ganglion sympathique était en quelque sorte un petit centre nerveux d’où partaient dans différentes directions des filets en nombre variable. Indépen- damment des connectifs qui les unissent entre eux, chacun émet encore deux, trois ou quatre filets qui se portent principalement sur la face interne de la veine cardinale ; ils sy anastomosent en partie ou se rendent à sa face inférieure. Si l’on examine cette dernière avec attention, on voit cinq ou six filets se porter de la partie antérieure de la veine jusqu’au niveau du point où elle prend naissance. Quant aux filets de la face interne, ils gagnent la cloison inter- veineuse qui sépare les deux veines cardinales et pénètrent dans la lame mésentérique qui soutient les différents viscères ; nous allons voir ce qu'ils deviennent; mais, parmi eux, il s’en trouve quelques-uns qui méritent une mention spéciale. DES ELASMOBRANCHES,ET DES POISSONS OSSEUX. 49 Entre le premier ganglion et le point où se termine en avant la veine interrénale et où commencent les deux veines cardinales, on voit ordinairement partir de l'aorte trois artérioles assez fortés ; les deux plus antérieures, voisines l’une de l’autre, sont situées, chez Seyllium, à une petite distance du 1° ganglion sympathique; la 3° se trouve tout à fait en arrière, près de l’extrémité antérieure de la veine interrénale. Si nous suivons chacune d’elles, nous trou- vons que la plus antérieure croise la seconde et se place en arrière d’elle, puis elle va se jeter vers le milieu de l'intestin spiral ; c’est elle qui fournit le sang à la moitié postérieure de cet intestin : c’est l’artère intestinale postérieure. Dans son trajet,elle émet quatre ou cinq petites ramifications qui se rendent aux organes génitaux. La 2° se place bientôt, comme nous l’avons dit, en avant de la première ;elle suit la grande courbure de l’estomac, distribue dans son trajet quelques ramifications au pancréas et va se ter- miner dans la rate à laquelle elle envoie de nombreux rameaux. C’est l'artère splénique. La 3° se porte en arrière et va se perdre dans la glande anale (P1. IL, fig. 2, a*-ar-aa). Les deux premières artères sont chacune accompagnées d’un certain nombre de faisceaux nerveux assez volumineux et de plusieurs petits filets qui se ramifient à leur surface ou dans leur voisinage. Les faisceaux qui accompagnent l'artère intestinale postérieure proviennent de troncs nerveux résultant de l’asso- ciation de plusieurs petits filets issus des ganglions voisins des 2 3e, 4° et 5° Corps suprarénaux gauches. L’un d'eux est placé en avant de l’artère ; d’autres sont placés immédiatement en arrière et sont assez difficiles à découvrir. En arrivant près de la lame mésentérique intertesticulaire, l'artère émet en avant un rameau destiné au testicule ; il est accompagné d’un fin filet nerveux émané du faisceau antérieur. Au delà du testicule, l’arière est toujours accompagnée de trois ou quatre filets principaux qui, de tempsà autre, envoientdes ramifications dans la lame mésentérique ARC. DE ZOOL. EXP. ET GÉN, — 2* SÉRIE. — T. V bis, — suppc. 1889. — YWéin. 4 50 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE quisoutient l'artère. Ils pénètrent à sa suite dans l'épaisseur des parois intestinales et vont innerver la moitié postérieure de l’in- testin spiral. Nous avons vu plushaut que l'artère intestinale pos- térieure envoie quatre ou cinq petites ramifications aux organes génitaux (P1. IL, fig 1, as) ; eh bien ! aucune de ces artérioles n’est accompagnée de filets sympathiques ; la partie antérieure de ces mêmes organes recoit aussi une artériole de l'artère intestinale antérieure, contrairement aux assertions de la plupart des auteurs, cette autre artériole nest pas non plus accompagnée de filets nerveux. Les filets sympathiques destinés aux organes génitaux ne suivent donc pas la voie des artères ; nous allons voir qu'ils s’y rendent directement. L’artère splénique est également accompagnée de plusieurs faisceaux, nés aussi du côté gauche, de nerfs issus des petits ganglions sympathiques voisins des 5° et 6° Corps suprarénaux. Deux faisceaux se trouvent en avant d'elle, les autres au nombre de deux ou trois sont en contact immédiat avec elle. Comme ceux qui accompagnent l’artère précédente, ils envoient, le long de leur trajet, un certain nombre de filets à la lame mésentérique. En arrivant près du pancréas, plusieurs filets accompagnent l'artère pancréatique et pénètrent à sa suite dans la substance de la glande (PL IT, fig. 4). Un peu plus loin, l'artère se termine dans la rate. Les filets nerveux s’anastomosent à la surface de la petite lame mésentérique qui soutient cet organe et les nombreuses rami- fications artérielles qui s’y rendent. Il en résulte un plexus rénal très fourni d’où se détachent les filets qui vont se distribuer à la pulpe de la glande (PI. II, fig. 4, pl). Entre l'artère splénique et l’artère de la glande anale, assez éloignées l’une l’autre(P1. IL, fig. 2, ar-aa), on voit plusieurs filets se porter aux testicules ; les uns sont très fins, les autres (nt) sont assez considérables. Parmi ces derniers, le plus antérieur se trouve à une petite distance de l'artère splénique ; il provient encore de l’union de plusieurs filets émanés des divers ganglions DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. o1 sympathiques du côté gauche, et principalement de deux issus des ganglions correspondant aux 7° et 8° Corps suprarénaux. Il chemine entre les deux feuillets de la lame mésentérique en se dirigeant un peu en arrière et va se perdre dans la partie postérieure des deux testicules, un peu en avant de leur partie commune. Deux autres sont voisins de l'artère de la glande anale ; ils en suivent la direction pendant un certain temps et naissent l’un et l’autre de filets nerveux provenant du côté droit; ils sont destinés à la partie commune des testicules. L’artère de la glande anale est en outre accompagnée, mais plus étroitement, de trois ou quatre petits filets que lui envoient les ganglions voisins de l’origine des veines cardinales et même ceux qui se trouvent un peu en arrière de ce point. Ils se rendent à la glande. Enfin, entre cette dernière artère et le cloaque, il existe un nombre relativement considérable de filets nerveux, les uns d’une extrême ténuité, les autres bien apparents après coloration, qui cheminent dans le mésentère et vont se distribuer à la glande anale et à la partie terminale de l'intestin ( P1. I, fig. 2, ns). Ces nerfs proviennent des nombreux petits ganglions appliqués à la partie supérieure de la face interne des reins (PI. I, fig. 2, 9). Chacun d’eux donne naissance à deux, trois ou quatre filets qui se portent de haut en bas vers la lame aponévrotique médiane recou- vrant la face inférieure des reins. Îls y pénètrent, y circulent sur un plus ou moins long parcours et en sortent pour se rendre dans Ja lame mésentérique qui semble se détacher de cette aponévrose et à laquelle sont suspendus la glande anale et l’intestin. Mais tous les filets nés de ces petits ganglions sympathiques ne sont pas destinés à la glande anale et à l'intestin terminal. Quelques-uns pénètrent dans la substance des reins ; d’autres se répandent à la surface des canaux déférents ou dans la lame mésentérique qui soutient les oviductes. Nous n’en avons jamais vu aucun se porter d'un ganglion au ganglion voisin du même côté. Nous avons seulement remarqué, et cela très rarement, qu’un filet pouvait unir 32 SYSTEME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE. deux ganglions opposés, c’est-à-dire situés l’un sur le rein droit, l’autre sur le rein gauche ; ce filet anastomotique passait en dessous du corps interrénal, mais ne lui envoyait aucune fibrille. Les filets qui se rendent à la glande anale et à l’intestin pro- viennent des ganglions de droite et de gauche. On les voit suivre pendant quelque temps, d'avant en arrière, le bord supérieur de ces organes, dans lesquels ils pénètrent bientôt et où 1l est impos- sible de les suivre. Canal hémal. — Le sympathique possède-t-il une partie caudale ? Nous avons vainement cherché des Cordons latéraux. ; cela n’a rien de surprenant chez un animal dont la partie abdominale ,en est, au moins partiellement, dépourvue. Mais puisque l'extrémité postérieure de l'abdomen possède des ganglions isolés d’où par- tent des filets nerveux pour les organes voisins, nous pensions que le système sympathique caudal pourrait être représenté sous une forme analogue. La partie antérieure du canal hémal nous a laissé voir en effet des filets nerveux, mais aucun ne portait de ganglion. Il est donc à présumer que leur rôle physiologique est le même que celui des autres rameaux du nerf d’oùils émanent. Les Poissons osseux nous montreront que les filets des ganglions de la partie caudale du sympathique se portent presque exclusive- ment sur les nerfs rachidiens qui vont innerver les petits muscles des rayons des nageoires anale et caudale. I] est donc bien probable que leur fonction s'exerce dans les muscles de ces nageoires. Chez Scyllium, et en général chez les Squales, les nageoires dont il s’agit sont dépourvues de rayons mobiles, et par suite de muscles; sil existait chez ces poissons un sympathique caudal, son action devrait être tout autre que chez les Osseux. Or, l’absence de rayons mobiles aux nageoires anale et caudale et l'absence de ganglions sur les quelques nerfs que nous avons apercus et qui d’ailleurs ne se rendent pas aux nageoires, nous autorisent à conclure, au moins jusqu'à preuve du contraire, que chez Scyllium et les autres Squales, il n'existe pas de sympathique caudal. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 53 Coup d'œil sur l’histologie du système sympathique de Scyllium Catulus. Ce chapitre a simplement pour but de donner une idée de la structure des filets et des ganglions sympathiques de Scyllium Catulus. Et d’abord, on peut affirmer que tous les filets sympathiques, même les plus fins, contiennent des fibres à double contour. Nous voulons parler de ceux qu'il est possible d’apercevoir à l’œil nu ou à l’aide d’une forte loupe. Nous en avons suivi qui n'avaient pas un +, de millimètre de diamètre, et cependant leur coloration noire était aussi foncée que celle des plus gros filets. Ainsi, l’action de l'acide osmique suffit déjà à révéler l'existence des fibres à myéline. Les dissociations et les coupes nous conduisent au même résultat. Sur une coupe transversale, on peut constater que souvent le nombre de ces fibres est au moins aussi considérable que celui des fibres de Remak, ou du moins que l’espace occupé par elles égale à peu près celui qu’occupent ces dernières. La proportion de ces fibres varie avec les filets nerveux ; maïs, dans tous les cas, Îles fibres à double contour existent constamment et en nombre tou- jours assez considérable. La dissociation des plus fins filets est . presque impossible ; celle des filets plus gros nous montre que toutes les fibres à myéline n’ont pas le même diamètre. Si l’on fait une coupe transversale de l’un des principaux faisceaux du nerf splanchnique, on constate qu'il est lui-même composé d’un certain nombre de faisceaux placés autour d’un vaisseau central et reliés entre eux par du tissu conjonctif. Si la coupe passe près de l’origine du nerf, les faisceaux contiennent une plus ou moins forte proportion de cellules nerveuses. Les ganglions sympathiques sont entourés d’une fine mem- brane. Leur dissociation fait voir que les cellules qui les com- posent ont un diamètre différent, variant entre 15 et 27 |1 ; mais 94 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE toutes ou presque toutes ont pour caractère d’être unipolaires et de posséder chacune un double noyau ; on en rencontre, rarement il est vrai, qui n’en ont qu'un. Ces cellules présentent en outre, sur leur pourtour, un nombre variable de noyaux beaucoup plus petits que ceux dont nous venons de parler, puisqu'ils n’ont guère que 2 à 4 y de diamètre, tandis que les autres ont un diamètre de 6 à 10 y. Ces petits noyaux appartiennent à la membrane d’enveloppe de la cellule. (PI. III, fig. 10, n’.) Sur une coupe transversale, indépendamment des cellules uni- polaires, on aperçoit encore quelques petits noyaux disséminés ou groupés quiappartiennentà des fibres ondulées disposées en paquets ; nous ne saurions dire si ces fibres sont de nature nerveuse ou si elles appartiennent au tissu conjonctif qui forme la trame du gan- glion. (P]. III, fig. 6, rc.) Squales. Nous allons maintenant étudier rapidement le sympathique des autres Elasmobranches. Nous commencerons par celui des Squales ; nous verrons ensuite celui des Raïes et des Chimères. Outre le Scyllium Catulus, nous avons étudié chez les Squales le Scyllium Canicula, les Mustelus vulgaris et lœvis, le Galeus canis, l’Acanthias vulgaris, la Centrina vulpecula et le Squatina angelus. Chez toutes ces espèces, la disposition et la distribution du sympathique sont à peu près identiques. La partie céphalique et la partie caudale paraissent manquer comme chez Scyllium. Les Corps suprarénaux sont en nombre variable ; mais si l’on excepte la Centrine, toutes les autres espèces en présentent, de chaque côté, de 14 à 20. Chez la Centrine, nous en avons vu beau- coup moins ; mais nous n’avons pas-étudié son sympathique avec le même soin que celui des autres Squales. D’abord nous n’avons eu que deux exemplaires à notre disposition ; puis le tissu conjonc- DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 05 tif est très abondant et gêne les recherches ; enfin la coloration par l'acide osmique se fait moins bien que chez les autres. Ces diverses raisons nous engagent à ne pas parler plus longuement de cette espèce. Nous dirons simplement que, outre le 1° Corps suprarénal, nous n’avons pu en découvrir que 4 autres à sa suite, Chez l’Ange de mer, les racines du 1° ganglion étaient toutes fort longues ; on en comptait 16 ou 17. Ordinairement, les racines sont en moins grand nombre et ne dépassent guère 12 ; mais ce chiffre varie avec les individus etn’a rien de fixe. En général, les deux racines les plus antérieures portent quelques petits ganglions qui sont en connexion avec le Plexus post-branchial. Ce plexus existe, en effet, chez tous ; ce sont toujours les mêmes nerfs qui lui fournissent ses racines. Le ganglion d’où partent ses principaux rameaux n'est pas toujours nettement formé ; quelquefois il paraît remplacé par une sorte de réticulum très serré produit par l’enchevêtrement des racines ; d’autres fois il est double. Chacun des petits Corps suprarénaux suivants reçoit une racine et une seule. Il arrive assez souvent qu'au point où cette racine émerge dans la cavité abdominale, quelques-uns de ses filets s’anas- tomosent avec les rameaux du Plexus post-branchial. Le nombre des petits ganglions sympathiques indépendants des Corps suprarénaux est toujours très variable. Chez Scyllium Cani- _cula, par exemple, on en trouve dix à gauche et seulement quatre à droite, ou bien six à gauche et 15 à droite. De ces divers ganglions partent toujours un certain nombrede filets destinés pour la plupart, comme chez Scyllium Catulus, aux viscères de la partie postérieure de l’abdomen; un filet anastomotique les réunit ordinairement soit entre eux, soit avec les Corps suprarénaux ; mais il existe, à peu près chez tous les individus, des ganglions ou des corps suprarénaux consécutifs qui ne sont pas reliés entre eux. Les petits ganglions indépendan!s, placés sur la paroi interne des reins, se trouvent également chez toutes ces espèces, mais ils sont en général beaucoup plus difficiles à découvrir. 56 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE 1 Le premier ganglion donne naissance aux nerfs splanchniques qui sont composés, comme chez Scyllium, de plusieurs faisceaux anastomosés ; ils sont reliés au rameau viscéral du pneumogastrique par des anastomoses en anse; le nombre des filets anastomotiques peut s’élever à sept ou huit, et comme chacun se ramifie trois ou quatre fois, il en résulte que le nombre des anastomoses est consi- dérable. Les nerfs splanchniques forment des plexus autour des artères viscérales, et il est plus facile de les suivre et de voir les plexus qu'ils forment au voisinage des organes que chez Scyllium Catulus. Les artères intestinale postérieure, splénique, et celle de la glande anale ont une position différente suivant les espèces ; il en est de même naturellement des filets sympathiques qui les accom- pagnent ; mais les rapports des artères et des filets nerveux ne s’en trouvent pas modifiés. Raies. Dans ce groupe nous avons étudié le Torpedo marmorata, les Raja clavata, alba et oxyrhynchus, le Myliobates aquila et le Trygon vulgaris. | La disposition du sympathique est à peu près la même chez tous ces Poissons ; il présente en outre avec celui des Squales la plus grande ressemblance. Maïs chez aucun d'eux on ne voit le Plexus post-branchial que nous avons signalé chez ces derniers ; les Corps suprarénaux, au lieu de s'arrêter vers le milieu de la cavité abdomi- nale, s'étendent jusqu’à son extrémité postérieure, et enfin les petits ganglions sympathiques situés à la face interne des reins et indépendants les uns des autres font défaut chez tous les Raïidés. Le 1% Corps suprarénal est généralement situé sur l’artère axil- laire ; sa forme n’a rien de fixe ; le 1° ganglion lui est accolé comme chez les Squales. Celui-ci reçoit un nombre de racines va- riable, pouvant aller de 10à 15. En réalité, ce nombre est plus con- DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 57 sidérable, car chacune des racines antérieures est elle-même formée de plusieurs racines. Et ici, comme chez les Squales, toutes pro- viennent exclusivement des premiers nerfs rachidiens. (PI. ITT, fig. 1, rs.) La disposition spéciale de ces nerfs chez les Raïes ne laisse aucun doute sur l’origine réelle du 1° ganglion sympathique. Il est facile de voir que le pneumogastrique et les autres nerfs cräàniens ne participent en rien à sa formation. La racine la plus antérieure peut être suivie jusqu’à un faisceau composé des trois ou quatre pre- miers nerfs rachidiens. Il n’est pas possible d'affirmer que chacun de ces nerfs contribue à la constitution de cette racine, mais c'est proba- ble; en outre, les nerfs rachidiens suivants lui envoient des fibres de renforcement ; elle se trouve ainsi sous la dépendance d’une dizaine de nerfs. De la partie postérieure du 1° ganglion part le nerf splanchnique. Comme chez les Squales, il se compose de plu- sieurs faisceaux reliés les uns aux autres par des anastomoses ; leurs rameaux forment un plexus autour de l'artère cœliaque et de ses ramifications ; enfin, des anastomoses en anse relient le nerf splanch- nique au rameau viscéral du pneumogastrique. (P1. III, fig. 2, Les petits Corps suprarénaux sont placés irrégulièrement chez les Raïidés ; on en compte de 6 à 8 chez les Torpilles et les Raies ; il s’en trouve presque une douzaine chez le Trygon. Ils n'ont pas cette régularité que l’on observe chez les Squales et tous ne sont pas placés sur des artères. Le Corps interrénal est presque toujours composé d’un certain nombre de masses isolées, rejetées tantôt sur la face interne du rein droit, tantôt sur celle du gauche. Ordinairement, les deux Corps suprarénaux qui suivent le premier sont petits, arrondis ; on les voit aisément. Les autres sont mal délimités ; leur substance est peu épaisse, claire, nuageuse en quelque sorte, et semble n’être qu’imparfaitement formée ; ceux- ci ne se découvrent pas facilement. Enveloppés par eux ou situés dans leur voisinage, se trouvent de petits ganglions ; ceux qui sont indépendants des Corps suprarénaux sont en nombre variable ; 58 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE parfois on n’en compte que trois ou quatre, d’autres fois, ils sont plus nombreux que les petits Corps eux-mêmes. De ces dernierset des petits ganglions partent un assez grand nombre de filets, six ou sept, qui permettent, encore mieux que chez les Squales, de considérer les ganglions ou les petits Corps comme autant de centres nerveux. La plupart de ces filets se portent sur le mésentère et de là sur les viscères abdominaux ; quelques-uns relient entre eux les ganglions et les Corps supra- rénaux et prennent ainsi l'apparence d’un cordon sympathique ; mais tous les ganglions et les Corps suprarénaux ne sont pas reliés, de sorte que le cordon se trouve interrompu de place en place (P1. III, fig. 2). En résumé, le sympathique des Raïidés ne diffère pas de celui des Squales, au moins dans son ensemble. Chimère. Nous dirons peu de chose du sympathique de la Chimère. Nous n'avons eu qu'un seul spécimen à notre disposition ; il était conservé depuis longtemps dans l’alcool et se trouvait par consé- quent dans de mauvaises conditions pour subir l’action de l'acide osmique. Nous avons constaté simplement que son sympathique ressem- blait plus à celui des Raïes qu’à celui des Squales. Les Corps suprarénaux se continuent en effet jusqu’à l’extrémité postérieure de l’abdomen. Le 1°”, situé sur l’artère axillaire, recoit au moins cinq racines. De son extrémité postérieure part le nerf splanch- nique ; un autre nerf, issu du même ganglion, se porte en arrière, mais nous ne savons où il se rend ; nous avions pensé qu'il allait rejoindre le 2° Corps suprarénal situé à une assez grande dis- tance en arrière ; mais nous n'avons pas réussi à constater leur liaison. Les autres petits Corps suprarénaux sont au nombre de 12 à 14 ; ilen part quelques filets qui se dirigent les uns en dedans, DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 59 les autres en dehors, vers les conduits des organes génitaux. Enfin, d’autres relient entre eux les Cérps suprarénaux. C’est là tout ce qu'il nous a été permis de voir ; nous ignorons si tous les petits corps entourent un ou plusieurs ganglions sympathiques, s’il existe de ces ganglions en dehors des petits corps et si les filets qui les unissent rappellent plus que ceux des Raïes et des Squales le Cordon latéral des Osseux et des autres Vertébrés. Conclusions. De notre étude nous pouvons conclure que (1) : 1° La partie céphalique du sympathique manque probablement chez tous les Elasmobranches. 2° Il en est de même de la partie caudale. 3° Le 1° ganglion sympathique recoit toutes ses racines, en nombre assez considérable, des premiers nerfs rachidiens. La racine la plus antérieure provient du faisceau formé par les premiers nerfs chez les Squales, et des 3 ou 4 premiers nerfs chez les Raïes. 4° Les 2 premières racines du 1®* ganglion sympathique chez les Squales portent presque toujours un ou plusieurs petits ganglions qui s anastomosent avec le Pleœus post-branchial. 5° Le Plexus post-branchial n'existe que chez les Squales. Il part d’un ganglion formé par les anastomoses de 8 ou 10 racines issues du rameau viscéral du pneumogastrique et de quelques autres | fournies par l’hypoglosse et les 3 ou À premiers nerfs rachidiens. Ce plexus envoie surtout des filets à la face supérieure de la veine cardinale, ainsi qu'à la partie de la voûte abdominale qui longe cette veine en dehors. 6° Le nerf splanchnique est toujours formé de plusieurs faisceaux (1) Nous mettons en italiques les points que nous avons mis en lumière ou les faits nouveaux que nous avons signalés. 60 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE anastomosés et constituant de véritables plexus autour de l'artère cœliaque et de ses ramifications. 1° Le nerf splanchnique contracte plusieurs anastomoses avec le rameau viscéral du pneumogastrique ; ces anastomoses sont tou- jours disposées en anse. | 8° Les petits ganglions sympathiques s'étendent chez tous les Elasmobranches depuis le diaphragme jusqu'à l'extrémité posté- rieure des reins. Chez les Squales, on peut les diviser en deux groupes. Le 1° groupe comprend ceux qui sont associés aux Corps suprarénaux ou qui les accompagnent. Un filet anastomotique les relie ordinairement entre eux ou avec les Corps suprarénaux. La série de ces filets irréguliers, plus fins que les racines des ganglions, constitue une sorte de cordon souvent interrompu qui ne peut étre comparé au Cordon latéral des Osseux : il ne peut être considéré tout au plus que comme une ébauche de ce cordon. Le 2° groupe comprend des ganglions toujours indépendants des Corps suprarénaux situés dans la partie postérieure de l'abdomen et qui ne sont jamais reliés longitudinalement par aucun filet. 9 Les ganglions des Squales et des Raïes forment comme autant de petits centres nerveux d'où partent des filets qui se distribuent à la veine cardinale, aux reins, aux organes génitaux et à leurs conduits et aux autres viscères contenus dans la partie postérieure de l'abdomen. 10° Au lieu d'aller sejeter directement dans un ganglion sym- pathique, les racines nerveuses émanées des nerfs rachidiens se portent d'abord sur les formations que l'on a comparées à des Capsules surrénales, mais que, par prudence, nous nommons simplement Corps suprarénaux. Ces Corps ont été assimilés à des Capsules surrénales à cause de leur structure et de leurs rapports avec le système sanguin ét le système sympathique. S'ils ont en effet des rapports intimes et indéniables avec le système artériel, leurs rapports avec le sympathique sont moins évidents ou ne paraissent pas être de même nature que ceux des Capsules surrénales des Maminifères et des autres Vertébrés. En outre, leur structure n'est pas celle qu'on leur DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 64 attribue ; ils ne sont pas divisés en lobes et ne renferment pas de vésicules closes remplies de cellules à membrane et de noyaux isolés. Un stroma conjonctif, dont les faisceaux constituent un réseau à mailles d’inégale grandeur, en forme la trame. Dans ces mailles se trouvent ou bien une multitude de cellules sans membrane, composées d'un noyau ovale entouré d’une atmosphère de protoplasme granuleux, ow bien une masse granuleuse protoplasmique dans laquelle sont plongés de très nombreux noyaux. e Ÿ- ee c He NT LR DEUXIÈME PARTIE Poissons osseux HISTORIQUE Contrairement à ce que nous avons constaté en traitant des Elasmobranches, le grand sympathique des Poissons osseux a fait l’objet des recherches d’un grand nombre de naturalistes. Mais, si l’on excepte Giltay et Stannius, comme nous l'avons dit précédemment, chacun d’eux s’est contenté de le décrire chez une ou deux espèces seulement. L’analyse que nous en donnons suffira d'ailleurs à édifier le lecteur à ce sujet. Cuvier (1) décrit le sympathique des Poissons comme un fil serpentant sous la colonne vertébrale, sans avoir de ganglions distincts. _ Carus (2) trouve des ganglions sur la partie céphalique du sympathique de la Lotte et suit le Cordon jusqu’au trijumeau. Dans son étude sur Perca lucioperca et Silurus glanis, E.-H. Weber (3) remarque en outre que la partie céphalique du sym- pathique ne pénètre point dans la cavité crânienne, maïs se répand au dehors à la base du crâne. Un ganglion sympathique se (1) Cuvier, Anatomie comparée, 1" édition. (2) Carus, Traité élémentaire d’ Anatomie comparée, trad. par Jourdan, t. I, p. 75. (3) E.-H. Weber, Anatomia comparata nervi sympathici, analysé dans Meckel's archiv f. physiologie, bd 3, pp. 396-417, 64 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE trouve vis-à-vis de celui du Vague auquel il est relié. Les nerfs de la nageoire pectorale sont unis au Cordon sympathique : au point d'union se trouvent trois petits ganglions d’où partent des filets qui se rendent les uns à l'aorte, les autres au nerf splanchnique. Les deux nerfs splanchniques se réunissent sans former ni ganglion ni plexus. Des filets se rendent à l’estomac, aux intestins, aux artères hépatique et splénique, à la vessie natatoire, à laquelle le Vague envoie une branche plus forte. Il existe chez le Sandre (Perca lucioperca) un Plexus spermatique né d’un très gros tronc provenant de la fusion des nerfs spermatiques des deux côtés. Ce plexus se retrouve chez Silurus glanis dont les deux nerfs splanchniques, formant un plexus, se reliaient à un rameau du Vague de grosseur extraordinaire. Il ne put suivre le sympathique au delà de l’abdomen. Chez la Carpe et le Brochet, il ne vit ni nerf splanchnique, ni Plexus cœliaque, ni Plexus spermatique. Desmoulins (1) dit que chez le Cycloptère lump les rapports du grand sympathique avec les nerfs intercostaux sont comme dans les Mammifères. Deux gros faisceaux seulement partent du Cordon sympathique, l'un pour l’estomac, l’autre pour les ovaires. Les deux cordons n’ont d’anastomoses qu'aux points d'où partent les deux gros faisceaux dont il vient d’être parlé. La partie céphalique s'étend jusqu’à la branche postérieure de la 5° paire et communique, au moyen d’un filet, avec la 8° paire. Enfin, il reconnaît que les deux cordons en chapelet se continuent dans le canal sous- rachidien. Dans la Baudroie, la partie antérieure du sympathique pré- sente un développement considérable. Dans un autre travail (2), fait en commun avec Magendie, (1) Desmoulins, ÆRecherches anatomiques et physiologiques sur le système nerveux des Poissons, extrait dans Journal de Physiologie expérimentale et pathologique, par F. Magendie, t. IT, p. 131 et 351. (2) Desmoulins et Magendie, Anatomie des systèmes nerveux, t. II, p. 512. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 65 Desmoulins établit les différences que le nerf sympathique des Cycloptères présente avee celui des Mammifères. Il se termine presque perpendiculairement sur la branche operculaire de la 5° paire qu’il gagne par un conduit à travers le basilaire et le parié- tal; jamais aucun filet ne se rend à la 6° paire ni à aucune autre antérieure ; les filets internes du 3° ganglion forment une arcade d’où sort un faisceau de deux cordons dont l’un est trois fois plus gros que l’autre ; ces deux cordons se distribuent à l’estomac, au foie et aux premiers intestins. Du 11° ganglion impair sort un faisceau de trois cordons dont l'intermédiaire très gros se portait à l'ovaire. | Dans les Trigles, les corps rouges dela vessie natatoire reçoivent un filet du 4° ou du 5° ganglion dorsal. Il lui a été impossible de découvrir, sur les troncs artériels, de Plexus sympathique comme on en voit chez les Mammifères et les Oiseaux. [l en conclut que, dans les Poissons, le grand sympathique n’est pas lié aux artères. Cuvier (1), dans l'Histoire naturelle des poissons, faite en collaboration avec Valenciennes, dit que le nerf sympathique est généralement d’une extrême ténuité, et possède diverses racines venant des nerfs spinaux. Il forme des plexus et des ganglions en se rendant aux viscères. On peut le suivre jusqu’à la 5° paire. Il croit avoir aperçu la jonction du sympathique etde la 6° paire dans la Morue. Giltay (2) a vu, dans le Brochet, le sympathique uni à la 5° paire et au nerf Vague ; il n’a pu apercevoir, même au micros- cope, les filets destinés aux intestins. Dans son ouvrage intitulé : De nervo sympathico (3), Giltay a étendu ses recherches à 23 espèces de poissons. Les deux cordons s'étendent de la 5° paire jusqu'à l'extrémité postérieure de la (1) Cuvier et Valenciennes, Hist. naturelle des Poissons, t. I, p. 438. (2) Giltay (Carol. Marinus), Commentatio de Esoce lucio, Lugd. Batav. 1832. (3) Giltay (C. M.), De nervo sympathico. ARCH, DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2% SÉRIE. — T, V bis, — supp, 1889, — Mém. 5 66 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE cavité abdominale et même en partie dans le canal. Ils sont reliés entre eux par une ou deux commissures qui passent sous la 1'*° ver- tèbre ; chez certains poissons, ils sont également reliés en arrière. Le cordon sympathique n'offre de ganglions apparents que chez un petit nombre d'espèces. Enfin plusieurs muscles seraient pour- vus de filets sympathiques dont les plus remarquables sont ceux des muscles branchiaux. En outre, ila vu d’autres filets se rendre au glosso-pharyngien et au nerf Vague, et de là aux branchies. Dans ses Z{lustrations of the comparative Anatomy of the nervous system, Swan (1) consacre la 8° planche de cette publication à la représentation du nerf sympathique de la Morue ; il montre ses connexions avec les 5°, 9° et 10° paires crâniennes, ainsi qu'avecles nerfs spinaux. Îl figure un nerf partant du cordon de gauche et se rendant à la branche viscérale du Vague. De ce même cordon de gauche part une anastomose qui va rejoindre le cordon de droite ; le point d'union est marqué par un renflement ganglion- naire. Carus (2), dans ZLehrb. der Zoot., dit que chez la Lote, on voit clairement le cordon sympathique passer d’un nerf intervertébral à l’autre, former de petits renflements, fournir de petites bran- ches et se terminer sur le nerf trijumeau au côté externe de la base du crâne, après s'être attaché au nerf branchial. Büchner (3) décrit le sympathique des Cyprins. Très fin, pres- que imperceptible le long de la colonne vertébrale, il est plus distinct à la partie antérieure. Il présente de petits ganglions qui s’anastomosent avec la branche profonde des nerfs spinaux. Le premier de ces ganglions est placé au bord postérieur du nerf operculaire, auquel il est intimement soudé. Ce ganglion s'anasto- mose par deux filets avec le ganglion du glosso-pharyngien etavec (1) Swan, Zllustrations. (2) Carus, Traité d'Anatomie comparée, trad. par Jourdan. (3) Büchner (G.), Mémoire sur le système nerveux du Barbeau. Strasbourg 1836, in Soc. d'hist. nat. de Strasbourg, t. IT, 1836. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 67 sa branche antérieure. Il donne par son bord antérieur un filet, qui semblait s’anastomoser avec la branche maxillaire inférieure du trijumeau, et envoie un filet considérable à la première branchie. L'auteur croit avoir une fois poursuivi un filet de ce ganglion jus- qu’à la 6° paire. Des ganglions suivants ou des cordons qui les relient, partent des nerfs se rendant aux branchies; ces nerfs unis aux rameaux branchiaux de la paire Vague forment un véritable Plexus branchial. C’est du 4° ganglion, le plus volumineux de tous, que part le nerf splanchnique. Les deux nerfs splanchniques se réunissent bientôt en un ganglion considérable, véritable ganglion semi-lunaire, et se continuent par un tronc volumineux qui s'unit d’une manière intime à la branche intestinale du Vague. Ce tronc accompagne l'artère cœliaque, se sous-divise en 3 ou 4 filets qui forment un plexus à mailles très larges d’où partent les nerfs destinés au foie, au canal intestinal et à la vessie natatoire. Le tronc se termine par un petit ganglion d’où partent 3 ou 4 filets pour les organes géni- taux et la rate. Les reins reçoivent le long de la colonne verté- brale des filets très déliés provenant du tronc du grand sympa- thique et un filet plus considérable du nerf splanchnique. Chez le Brochet, il ne se trouve que 4 ou 5 ganglions bien déve- loppés. Le premier est uni à la branche operculaire. Le second s'anastomose avec le glosso-pharyngien et le Vague. Le 3°, le plus volumineux, fournit un filet aux reins et forme le nerf splanch- nique. Le Plexus branchial de l’Alose est très apparent ; le cordon se termine également sur la branche operculaire. Cuvier (1) dit encore : Le nerf sympathique des poissons est extrêmement grêle; c’est un double cordon nerveux qui fournit au péritoine des filets qui se prolongent autour des artères des intestins. Des anastomoses relient ce cordon aux nerfs spinaux, (1) Cuvier, Anatomie comparée, 3° édit. 68 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Au point d'union se trouvent des ganglions généralement peu sen- sibles, sauf dans quelques espèces, entre autres le Poisson-lune et la Lote. On peut suivre le sympathique dans la tête jusqu’à la )° paire. Schlemm (1) a vu chez le Sandre le nerf ciliaire long s’anasto- moser avec un filet provenant du ganglion ciliaire du nerf sympa- thique. Voici la description que Stannius donne du sympathique de Gradus callurias (2) : Lie premier ganglion est placé sous le point de sortie du trijumeau. Le nerf abducteur s'applique contre ce ganglion et se relie vraisemblablement à lui par l’intermédiaire de filets. Une anastomose relie ce même ganglion au rameau antérieur du glosso-pharyngien ; un autre filet va à la première branchie. Le tronc du sympathique passe sous le rameau antérieur du glosso-pharyngien en formant un ganglion allongé ; de là il se rend au Vague auquel il s’unit ; sous ce dernier nerf il se renfle en 2 ganglions serrés l’un contre l’autre. De chaque ganglion splanch- nique sortent des rameaux nerveux qui se rendent au tronc de l'aorte et même au Cercle céphalique. De celui de gauche sort un nerf qui traverse le rein et qui porte un petit ganglion d’où part un filet destiné à la substance rénale ; un autre se dirige vers le rameau viscéral du Vague, un autre vers la vessie natatoire. Les 2 ganglions splanchniques sont unis par une anastomose. C’est du ganglion droit que partent les nerfs splanchniques ; leurs rameaux s’unissent avec ceux du Vague pour constituer un Plexus cœliaque qui fournit des filets au Corps rouge de la vessie natatoire, à l’es- tomac, au canal intestinal et aux différents viscères. Îl existe un Plexus spermatique né du cordon gauche ; les 2 cordons se rejoi- gnent au delà, pénètrent dans le Canal hémal, se divisent encore à plusieurs reprises en deux troncs. On peut les suivre Jusque (1) Schlemm, Observationes neurologicæ, 1834. (2;=Stannius, Uber das peripherische Nervensystem des Dorch (Gadus Calla- rias), in Muller's Archiv, vol. IX, p. 338-366. 1842. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 69 vers la 2° nageoiïre anale; leurs ramifications enlacent par de nom- breux filets les vaisseaux sanguins. Longet (1) présente le résumé des observations de Carus, Des- moulins et Weber. Carl Vogt (2) fait partir la première racine du sympathique de la face inférieure du ganglion de Gasser, sous la forme de plusieurs filets extrêmement minces qui se dirigent en arrière, et 1l semble, dit-il, que les fibrilles formant ces filets viennent aussi bien de la 5° que de la 7° paire. Ceux-ci se renflent en un ganglion placé sous le glosso-pharyngien. Du ganglion correspondant au triju- meau naissent plusieurs nerfs qui s’associent aux nerfs branchiaux du glosso-pharyngien et du Vague. En arrière commence une longue série de ganglions reliés les uns aux autres par des bran- ches intermédiaires. [ls entrent en communication avec toutes les branches inférieures des nerfs spinaux : c’est de là que part cette multitude de petits filets qui se ramifient dans les intestins. Le nombre des ganglions du Cordon sympathique ne correspond pas exactement au nombre des vertébres. Van der Hæœven (3) donne simplement un résumé des connais- sances acquises sur le système sympathique des Poissons. Girgensohn (4) résume les travaux de ses devanciers. Il fait observer que le tronc du sympathique des Poissons semble pré- ‘senter moins de renflements que dans les autres vertébrés, et lors- qu'ils existent, ces renflements ne correspondent nullement aux nerfs spinaux. Dans le Cottus quadricornis, qu'il a étudié en com- mun avec le docteur Holst, il n’a pu voir un seul ganglion sur le (1) Longet, Anatomie et physiologie du système nerveux, t. II, p. 641. 1843. (2) Carl Vogt, Anatomie des Salmones, in Mém. de la Soc. des sciences helvétique. Neufchâtel, 1840. (3) Van der Hoœæven, Handbook of Zoology, translated by the rever. William Clark. London, 1858. (4) Girgensohn (D O. G. L.), Anat. Physiol. des Fische Nervensystems, in Mém. de l’Acad. imp. des sciences de Saint-Pétersbourg, t. V, p. 103-105 et 433-437. 70 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE tronc du sympathique qui s’étendait cependant le long de 7 vertè- bres, et dans la Lote vulgaire il n’a vu sur toute l’étendue de la cavité abdominale qu’un petit nombre de ganglions, inférieur au nombre des vertèbres. Outre le Plexus rénal et le Plexus sperma- tique, le sympathique des Poissons forme encore le lacis de la vessie natatoire et le lacis de l’œsophage. Dans le Manuel d Anatomie comparée, de Siebold et Stannius (1), on trouve une excellente description du sympathique des Poissons. Nous y voyons, pour la première fois, la mention suivante : « Du premier ganglion céphalique part, d’une manière constante, à ce qu'il paraît, un filet destiné au système des nerfs ciliaires. » Ce mot, à ce qu'il paraît, semble indiquer que plusieurs observa- teurs ont signalé le fait; nous ne savons à qui revient l’honneur de cette découverte, car de tous les auteurs analysés jusqu'ici, aucun n’en parle. Nous devons ajouter que nous ne connaissons les tra- vaux de E.-H. Weber et Giltay, que par l’analyse qui s’en trouve dans Meckel's Archiv pour le premier et dans Muller’s Archiv pour le second. Enfin nous n’avons pas réussi à nous procurer l'ouvrage de Schlemm et d’Alton. Il se pourrait que ces auteurs en eussent parlé dans leur travail. Nous arrivons à l’ouvrage de Stannius sur le système nerveux périphérique des Poissons (2). C’est l’œuvre la plus considérable qui ait été publiée sur le sympathique des Poissons ; aussi serons- nous obligé d’en donner une analyse en rapport avec son impor- tance. Le sympathique des Poissons osseux, dit-il, est très développé ; il comprend une partie céphalique, une partie abdominale et une partie caudale. Les deux dernières parties reçoivent des filets de communication venant des rameaux antérieurs de tous les nerfs spinaux. Au point où aboutissent les rameaux communicants, le (1) Siebold et Stannius, Manuel d'Anat. comparée, traduction de Spring et Lacordaire. 1850, Roret. (3) Stannius, Das peripherische Nervensystem der F'ische. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 71 grand cordon présente constamment des ganglions, quelquefois microscopiques. La partie céphalique du grand cordon est toujours reliée aux nerfs Vague, glosso-pharyngien et facial. Elle est toujours située en dehors dela cavité crânienne ; quelques rameaux de communication pénètrent dans les canaux osseux des nerfs cérébraux sortants, ou bien en sortent eux-mêmes. Lorsque le premier ganglion est placé à la sortie du nerf facial, il est le plus souvent en liaison avec le nerf palatin. Ce ganglion peut envoyer des faisceaux courts à celui du trijumeau ; il peut se trouver placé sous le facial, sous le ganglion commun du trijumeau et du facial, sous le trijumeau proprement dit, sous le Plexus ganglionnaire du triju- meau, sous le point de sortie du rameau ophthalmique, et enfin entre le trijumeau et le facial. [] peut y avoir un ganglion sous le triju- meau, un autre sous le facial. Du premier ganglion partent des filets qui vont au ganglion ciliaire, au nerfabducteur chez certains poissons et à la pseudobranchie. Le Cordon sympathique semble constamment relié au glosso-pharyngien, mais il n’existe pas toujours de ganglion au point où ils se réunissent; au contraire, l'union de ce grand cordon et du pneumogastrique serait toujours accompagnée d’un renflement ganglionnaire. Le Cordon sympa- thique est communément relié au Vague par un double filet, puis au premier tronc branchial de celui-ci, et ensuite au reste de la masse. Chez la plupart des Poissons osseux, le grand cordon partantde la naissance du trijumeau ou du facial pour se rendre au Vague forme de chaque côté un segment de courbe. De chacun de ces deux ares émanent des branches destinées aux arcs branchiaux ou plutôt aux vaisseaux de ceux-ci. Il examine‘ensuite les conditions diverses qui accompagnent l’origine des nerfs splanchniques et reconnaît que, presque toujours, ils partent de l’endroit qui répond à la base de l'artère cœliaco-mésentérique. Du ganglion cœliaque sortent des cordons qui accompagnent les branches de l'artère et se rendent au foie, à la vessie natatoire, etc. En général, le 7 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE ganglion d’où part le nerf splanchnique gauche est relié à son symétrique de droite par une ou deux anastomoses qui passent en dessous de l'aorte, et les deux nerfs splanchniques véritables naissent du ganglion droit. Si le nerf splanchnique gauche naît directement du ganglion gauche, les deux ganglions symétriques ne sont pas reliés entre eux. De chaque côté du grand cordon sortent toujours de fins et nombreux rameaux pour les reins. Chez le Diodon, l’auteur a vu un filet se rendre au vestibule du cœur ; d’autres se portent au cholédoque et au duodenum, mais les branches les plus remarquables qui naissent de la région tho- racique du grand sympathique sont les nerfs destinés aux ovaires et aux testicules. Enfin, il consacre quelques lignes à la partie du sympathique contenue dans le Canal hémal. Le cordon reste souvent pair, dit-il ; chez le Cotte cependant il est impair; mais ce tronc se partage fréquemment en deux branches, qui plus loin se relient pour se séparer de nouveau, et ainsi de suite. Des filets sympathiques enla- cent toujours le Vasa caudale en produisant aussi de petits renfle- ments ganglionnaires. Les liaisons de la partie caudale du grand cordon avec les rameaux antérieurs des nerfs spinaux n'ont été observées qu’isolément chez de grands poissons. Vulpian (1) dit: Quelquefois, on ne trouve pas un des ganglions d’un côté, surtout dans la région antérieure de l’animal ; alcrs la distribution des nerfs sympathiques de ce côté est faite par les ganglions du côté opposé. (Il cite comme exemple le Congre.) Il ajoute que le premier ganglion cervical fournit des nerfs vaso- moteurs aux vaisseaux de la tête, en même temps qu'il donne naissance à des filets nerveux ciliaires. Il rappelle qu’il a signalé, chez le Poisson-lune, le développement considérable que prennent les parties abdominale et caudale du Cordon sympathique. (1) Vulpian, Lecons sur la Physiologie générale et comparée du système nerveux, p. 832. 1866. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 73 Aug. Duméril (1), Ch. d'Orbigny (2), H. Milne-Edwards (3) et Huxley (4) décrivent le sympathique d’après les travaux que nous avons analysés et n’y apportentaucune contribution per- sonnelle. Dans son Æistoire naturelle des Poissons de France (5), Moreau décrit très brièvement le sympathique des Osseux ; ildit entre autres choses: À la partie antérieure de chaque cordon se trouve un ganglion plus ou moins volumineux qui envoie des rameaux au nerf trijumeau, au nerf glosso-pharyngien et au nerf pneumogas- trique. Ce n’est pas tout à fait exact. Dans le travail posthume de Baudelot (6) sur le système nerveux des Poissons, on trouve la description du sympathique de la Perche. Les deux cordons s’avancent jusqu’an trijumeau, ils offrent sur leur trajet une série de petits ganglions correspondant à peu près aux segments intervertébraux ; il en part des filets pour les nerfs spinaux, l'aorte et le rein. Ces derniers suivent les artères rénales. Le premier ganglion appliqué au-dessous de la branche antérieure du trijumeau émet en avant un filet qui se perd dans l'orbite, et en dedans une racine qui pénètre dans la branche ophthalmique. Vis-à-vis le glosso-pha- ryngien se trouve un petit ganglion d’où part un filet grêle pour Ja branche respiratoire de ce nerf. En face du pneumogastrique se trouve un gros ganglion dont l'angle externe envoie au plexus du pneumogastrique une branche aussi grosse que le tronc même du sympathique. Enfin, il termine ainsi sa description: Ceux-ci (les (1) Aug. Duméril, Hist. nat. des Poissons, t. I, 1"° partie (édit. Roret). (2) Ch. d’Orbigny, Dict. d’Hist. nat., 2° édition, aux articles : Syst. nerv. et Poissons. (3) H. Milne-Edwards, Leçons sur la Phys. et l’Anat. comp. de l'homme et des animaux, t. XI, 1874. (4) Huxley(traduct. Brunet), Eléments d’'Anat. comparée des anim. vertéb. , p. 82. (5) E. Moreau, Hist. naturelle des Poissons de France, t. I, p. 63, 1881 (6) Baudelot, Recherches sur le syst. nerv. des Poissons. Paris, 1883. 74 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE cordons) ont été suivis jusqu’au voisinage de l’origine de la queue Jusq q où ils se réunissent. Résumé. En résumé, Cuvier décrit le premier le sympathique des Pois- sons comme un fil serpentant sous la colonne vertébrale, sans avoir de ganglions distincts ; Carus trouve des ganglions à la partie céphalique et suit le cordon jusqu’au trijumeau; E.-H. Weber re- marque que le cordon ne pénètre pas dans le crâne ; il décrit les nerfs splanchniques et signale les viscères auxquels se rendent leurs rameaux ; il découvre chez le Sandre un Plexus spermatique. Desmoulins suit les deux cordons dans le Canal hémal ; il remarque qu'aucun filet ne se rend à la 6° paire. Cuvier croit, au contraire, avoir aperçu une liaison du sympathique avec la 6° paire. D’après Giltay, plusieurs muscles recevraient des filets sympathiques et, parmi eux, les muscles branchiaux. Il à vu en outre des filets se rendre au glosso-pharyngien et au nerf Vague, et de là aux branchies ; Swan figure un nerf partant du cordon de gauche et se rendant au rameau viscéral du Vague; Büchner signale un filet partant du premier ganglion et se rendant à la branche antérieure du glosso-pharyngien ; un autre lui a semblé s’anastomoser avec la branche maxillaire inférieure : elle envoyait un filet considérable à la première branchie. Il croit avoir une fois poursuivi un filet sympathique jusqu’à la 6° paire. Le premier, il fait connaître le plexus branchial formé de l’anastomose des rameaux du Vague et de filets sympathiques nés des premiers ganglions ou du cordon qui les relie; Schlemm a vu chez le Sandre le nerf ciliaire long s’anastomoser avec un filet provenant du ganglion ciliaire du nerf sympathique ; Stannius remarque chez Gadus callarias que le nerf abdacteur s'applique contre le 1% ganglion et se relie vraisembla- blement à lui. Il voiten outre un filet se porter sur la branche antérieure du glosso-pharyngien et un autre sur la 1" branchie. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 75 Il constate l’existence d’un Plexus cœliaque et d’un Plexus sper- matique et suit les deux cordons sympathiques dans le canal hémal jusqu’au delà de la 2° anale. Carl Vogt a vu plusieurs nerfs s’as- socier aux nerfs branchiaux du glosso-pharyngien et du Vague. Du cordon sympathique partent une multitude de petits filets qui se ramifient dans les intestins; les nerfs rénaux proviennent non seulement des petits ganglions de. ce cordon, mais encore des rameaux intermédiaires qui les relient ; Girgensohn dit que, quand il existe des renflements sur le cordon, ces renflements ne corres- pondent pas aux nerfs spinaux. Outre le Plexus rénal et le Plexus spermatique, il a encore vu le sympathique former le lacis de la vessie urinaire et celui de l’œsophage; Bidder et Volkman, cités par Grirgensohn, ont constaté, dans le Brochet, que les rameaux communicants des nerfs spinaux sont mixtes. Stannius rappelle que le 1* ganglion envoie constamment un filet au système des nerfs ciliaires. Il affirme qu’au point où aboutit, sur le cordon, chaque rameau communicant, il existe toujours un ganglion ; que la partie céphalique est toujours située en dehors du crâne. Le 1° ganglion est quelquefois relié au palatin. Du ganglion splanchnique partent, chez certains Poissons, outre les nerfs splanchniques destinés aux viscères, des filets pour les reins, la dernière veine branchiale (4 artère épibranchiale) et l'extrémité antérieure de l'ovaire. Il a vu chez le Diodon un filet se rendre au vestibule du cœur. Enfin, le premier, il a suivi le sympathique jusqu'à l'extrémité postérieure du Canal hémal, où il a vu des filets enlacer le Vasa caudale. Baudelot dit que les petits ganglions du cordon correspondent à peu près aux segments intervertébraux. Il en part des filets pour les nerfs spinaux, l’aorte et le rein; ces dernières suivent les artères rénales. Le grand nombre de travaux publiés sur le sympathique des Poissons osseux devait laisser bien peu de chose à découvrir. Aussi notre but, en entreprenant ce travail, était moins d’enrichir la science de faits nouveaux, que d'apporter un peu de généralisation 76 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE dans une question presque toujours traitée à un point de vue particulier. Le dernier travail d'ensemble qui ait été produit sur le sujet est de Stannius et date de 1849. I] était à prévoir que, malgré ses réels mérites, ce travail contiendrait, en raison de l'époque où il avait fait son apparition, des omissions et aussi quelques erreurs. En outre, plusieurs des faits qu’il renferme sont empruntés aux auteurs anciens et n'ont été ni vérifiés niconfirmés par Stannius. Nous nous sommes attaché à combler ces lacunes et à présenter à nos lecteurs un travail aussi complet et aussi exempt d'erreurs que possible. On verra dans la suite que nombre de faits qui n’avaient été signalés que par un ou deux anatomistes peuvent être maintenant considérés comme appartenant à la généralité des Poissons. Enfin, nos recherches nous ont permis de contribuer pour notre part à la connaissance du sympathique des Poissons osseux ; nous citerons particulièrement : le filet destiné au nerf ciliaire Jong, les filets qui se jettent dans les nerfs maxillaires et le facial ; ceux qui se rendent aux nageoires pectorales, et enfin le Plexus caudal, faits qui avaient échappé jusqu'ici aux recherches de nos devanciers. | De même que pour les Elasmobranches, nous ferons l’étude du système sympathique d’un poisson pris pour type ; nous décrirons ensuite très brièvement celuides autres Poissons, en choisissant dans chaque famille l’espèce la plus commune ou la plus facile à étudier. Notre poisson type est le Bar ou Loup (ZLabrax lupus) ; nous l'avons choisi parce qu’il appartient à toutes les mers d'Europe et qu'ilest voisin d’un autre poisson d’eau douce très répandu, la Perche { Perca fluviatilis), dont le sympathique doit avoir avec celui du Bar la plus grande ressemblance. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 77 SYSTÈME SYMPATHIQUE DE LABRAX LUPUS Aperçu général. Après avoir enlevé avec précaution la partie antérieure des reins qui s’avancent, chez le Bar, à peu près jusqu'au niveau du 2° arc branchial, on aperçoit, au fond de la dépression qui longe la paroi latérale du crâne, les points de sortie du nerf glosso-pharyn- gien et du pneumogastrique, et, parallèlement à la ligne médiane, un filet fin qui va du premier de ces nerfs au second et quise con- tinue en arrière jusqu’au lisament rond de l’épaule situé à une cer- taine distance du pneumogastrique. C’est le Cordon sympathique. Limite antérieure du Cordon sympathique. _ En écartant avec soin le premier arc branchial, on peut encore découvrir en avant du glosso-pharyngien une certaine portion du cordon plongée au milieu d’un tissu conjonctif abondant. On la suit Jusqu'au point où le rameau antérieur du glosso-pharyngien fait un coude pour aller se jeter dans la pseudobranchie. Ce coude est toujours placé au-dessous du facial qui lui envoie une forte anastomose. Là le Cordon sympathique se renfle en un ganglion situé presque entièrement en arrière du facial. Aïnsi donc la par tie crânienne actuellement visible du sympathique s'étend au côté externe de la boîte crânienne ; elle est située immédiatement au- dessous des points de sortie des nerfs facial, glosso-pharyngien et pneumogastrique, et en dessus du rein, des artères épibranchiales et des arcs branchiaux. Mais, indépendamment de cette partie visible, il en existe une autre, logée dans un canal osseux formé par la grande aile du sphénoïde. Ju qu'ici cette particularité n’avait pour ainsi dire pas 78 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE été remarquée. Seul, Desmoulins loge le sympathique dans un conduit situé dans le basilaire et le pariétal, en arrière du nerf operculaire ; nous n’avons jamais aperçu ce conduit dans aucun poisson. Tous les autres auteurs placent la partie céphalique du cordon à l’extérieur du crâne ; nous devons cependant faire excep- tion pour Stannius, qui a reconnu que chez Belone la partie anté- rieure céphalique du sympathique était logéedans un canal osseux. On a même voulu tirer de cette disposition un argument en faveur de l’infériorité du sympathique des Poissons par rapport à celui des Batraciens et des Reptiles. Sans vouloir attribuer au fait que nous signalons une importance qu’à nos yeux il n’a pas, nous ferons toutefois remarquer qu’il enlève à l’argument une partie de sa valeur. Ce canal existe d’ailleurs chez la plupart des poissons osseux ; mais, comme il éprouve de nombreuses variations, nous nous y arrè- terons quelques instants. Ce canal est étendu entre les points d'émergence du trijumeau et du facial. A leur sortie du crâne, ces deux nerfs sont accolés et n’ontqu’un orifice commun ; mais, immédiatement après, ils s’écar- tent l’un de l’autre et paraissent sortir du crâne par deux orifices distincts ; en effet, une lamelle osseuse plus ou moins large s'étend: au-dessous de l’orifice réel et forme avec les parois du crâne un véritable canal qui loge la partie antérieure du Cordon sympa- thique. Cette lamelle, qui est une dépendance de la grande aile du sphénoïde, est intimement soudée au corps de cet os. Sa largeur peut diminuer à un point tel que la lamelle se trouve réduite à un simple filet osseux; il est excessivement rare, comme dans la Bau- droie, de la voir manquer ; on peut donc conclure de là que chez presque tous les Poissons osseux la partie la plus antérieure du Cordon sympathique est logée dans un canal osseux. L'existence de ce canal ayant échappé aux recherches de nos devanciers, il n’est pas surprenant qu'ils aient assigné le facial comme limite antérieure extrême au Cordon sympathique chez un certain nombre de Poissons osseux. Or, il résulte des nombreuses DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 79 dissections que nous avons faites, que le Cordon latéral s’avance toujours jusqu’au trijumeau proprement dit. Limite postérieure du Cordon sympathique. Au delà du ligament rond de l’épaule, placéimmédiatement en arrière du 5° ganglion et un peu en avant de l'artère axillaire, se trouve la masse des viscères abdominaux. Pour voir ici le Cordon sympathique, il est nécessaire de détacher les viscères de la paroi dorsale de la cavité de l’abdomen. On aperçoit alors, au fond de la carène formée par les parois latérales du corps, deux bandes d’un brun rouge placées de chaque côté de la colonne vertébrale : ce sont les reins. En les écartant soigneusement de dedans en dehors, on metà découvert un cordon blanc qui n’est autre que le Cordon sympathique. Il suit en général assez fidèlement les mouvements latéraux de la colonne vertébrale et présente un petit ganglion vis- à-vis de chacune des vertèbres. Les deux cordons restent indépen- dants l’un de l’autre dans presque toute leur étendue ; mais, à la partie postérieure de la cavité abdominale, là où les deux reins se rejoignent et se fondent en une seule masse, les ganglions sont reliés entre eux par une ou plusieurs anastomoses. Pour les bien _ voir, il est nécessaire d’enlever aux dernières vertèbres abdomi- nales les ponts osseux qui forment en quelque sorte la partie anté- rieure du Canal hémal. Il nos reste à voir la partie du sympathique comprise dans le Canal hémal proprement dit. Après avoir enlevé la moitié infé- rieure de ce canal, on saisit avec une pince l'extrémité antérieure de la veine caudale ; on la soulève délicatement en coupant au fur et à mesure les veinules qui y aboutissent. On peut voir alors, en cher- chant avec soin de chaque côté de l’aorte caudale, les 2 cordons qui présentent de distance en distance de petits renflements accolés ou tout au moins reliés l’un à l’autre par une ou plusieurs anasto- 80 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE moses. On peut les suivre jusqu’au point où l'aorte et la veine con- stituent le Vasa caudale, c’est-à-dire jusqu’à l’extrémité postérieure du Canal hémal. DESCRIPTION DU SYSTÈME SYMPATHIQUE DE LABRAX LUPUS Pour faciliter la description du sympathique, nous le diviserons en trois parties, qui sont d’ailleurs purement factices : 1° la partie antérieure ou crânienne ; 2° la partie moyenne ou abdominale, et 8° la partie postérieure ou caudale. La partie crânienne s’étend depuis le trijumeau jusqu’à l’hypo- glosse inclusivement, c’est-à-dire à peu près jusqu’au niveau du liga- ment rond de l’épaule. La partie abdominale va de l’hypoglosse à l’entrée du Canal hémal. La partie caudale est tout entière logée dans le Canal hémal. Partie crânienne. Ganglions. — La partie crânienne ou céphalique comprend généralement à ganglions. Le premier correspond au trijumeau, le deuxième au facial, le troisième au glosso-pharyngien, le qua- trième au pneumogastrique et le cinquième au nerf hypoglosse. Leur situation par rapport à ces nerfs est assez variable ; nous en dirons autant de leurs dimensions et de leur nombre. Ces différences s’observent non seulement suivant les individus, mais encore, dans le même individu, suivant le côté considéré. La description que nous en donnons n a donc rien de bien général et s'applique plus particulièrement au sujet représenté dans la PI. IV, fig. 1 et 2. Nous aurons soin d’ailleurs de noter les principales particularités que nous avons observées dans nos dissections. 1° ganglion. — Le premier ganglion est situé au-dessous du point de sortie du trijumeau. Il s'étend à peu près depuis la partie anté- DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 81 rieure du ganglion de Gasser jusqu’à la partie postérieure de la masse commune des nerfs maxillaires. Aplati de bas en haut, il présente une forme difficile à définir ; sa partie antérieure est élar- gile ; il se rétrécit ensuite et se renfle à sa partie postérieure. Son extrémité antérieure présente 3 ou 4 filets relativeinent assez gros et plusieurs autres très fins. Les uns proviennent du ganglion, les autres y aboutissent. Ces derniers, qui en sont les racines, naissent du ganglion de Gasser et du tronc du trijumeau. Si l’on coupe le Cordon sympathique un peu en arrière du 1° ganglion et qu’on relève ce dernier pour le rejeter en avant, on voit aboutir à son anglo interne un filet émené du trijumeau. Il sort du milieu dela masse totale de ce dernier nerf, se porte en avant et en dehors et se replie en bas et en arrière pour pénétrer dans le ganglion. Nous avons vainement essayé Ge poursuivre cette racine au milieu des faisceaux qui composent le trijumeau; elle se divise bientôt en une foule de fibrilles qui s’entremêlent d'une façon inextricable avec celles des faisceaux traversés. D’autres filets beaucoup plus fins sortent du ganglion de Gasser et vont se perdre sur le bord antérieur du ganglion sympathique. Tous ces filets sont autant de racines. Ils proviennent des faisceaux du trijumeau et traversent le ganglion de Gasser qui leur envoie sans doute quelques fibrilles. En général, ils sont très courts ; aussi le 1° ganglion sympathique est-il étroitement appliqué. contre la face inférieure du ganglion de Gasser et du tronc commun des nerfs maxillaires. A la partie postéro-interne du ganglion sympa- thique, le sujet représenté dans la fig. 2 de la PI. IV recevait du facial une assez grosse racine (r’). Elle suivait à peu près le tra- jet de l’anastomose du trijumeau et du facial et pénétrait dans le 1 ganglion, un peu en arrière du filet postérieur des nerfs ciliaires. Les filets émanés du 1°” ganglion sont au nombre de 5. De l'angle antéro-externe, il en part un (nm) assez volumineux qui se porte à la masse commune des maxillaires ; il ne conserve pas long- ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN, — 2° SÉRIE, — T. V bis, — supp. 1889. — Mém. 6 82 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE temps son indépendance, car, peu après sa pénétration au milieu des faisceaux, ilse divise en un grand nombre de fibrilles impossibles à suivre. De tous les filets issus du 1° ganglion, celui-ci est le plus long, sinon le plus gros. On en voit un autre (sv) sortir de l’angle antéro-interne et se porter sur la branche principale de l’ophthalmique, avec laquelle il se confond bientôt. Un peu en arrière de ce filet, il en naît deux, gros et courts, qui se détachent l’un et l’autre du bord interne du ganglion et se portent sur un nerf dont nous devons dire quelques mots. On sait que le ganglion ophthalmique reçoit ordinairement une racine du trijumeau, laquelle concourt à la formation du nerf ciliaire court. Le nerf cilaire long provieut directement du trijumeau. Or, ilarrive quel- quefois que la racine du ganglion ophthalmiqueet le nerf ciliaire long sont confondus à leur origine et semblent être les deux branches de bifurcation d’un même nerf. Nous appellerons tronc commun des 2 nerfs ciliaires la partie commune de ces deux nerfs. Il est fort probable que ce trone commun résulte de la simple juxtaposition des 2 nerfs et non d’une fusion plus ou moins intime ; mais, à cause de la ténuité et de la fragilité des filets, nous n’avons pu éclaircir ce point. C'est sur le éronc commun des 2 nerfs ciliaires que se portent les 2 filets sympathiques (sc) dont il est question ci- dessus et dont les fibres se mêlent intimement à celles de ces 2 nerfs. Nous verrons dans la suite que chez tous les Poissons osseux il existe constamment 2 filets sympathiques destinés aux 2 nerfs ciliaires : l’un se porte directement sur le ganglion ophthalmique ou, ce qui est le cas le plus tréquent, sur la racine que le triju- meau fournit à ce ganglion; l’autre se porte sur le nerf ciliaire long. Plus loin, nous établirons que ce dernier filet n’a jamais été vu par aucun de nos devanciers. Enfin, tout à fait en arrière, près de la racine provenant du facial, un filet très fin se recourbe vers le palatin, dans lequel il pénètre. La base de ce dernier nerf est également logée dans un canal osseux qui s’embranche presque à angle droit sur celui du DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 83 sympathique. Pour voir le filet qu’il reçoit du 1° ganglion sympa- thique, il est nécessaire d'ouvrir son canal avec précaution. Ainsi le 1° ganglion sympathique reçoit plusieurs racines du trijumeau et du ganglion de Gasser ; il en reçoit une du facial. Il envoie des filets nerveux au tronc commun des nerfs maxillaires, à l’ophthalmique, aux 2 nerfs ciliaires et au palatin. 2° Ganglion. — Le 2° ganglion est placé au-dessous et en arrière du facial. Sa forme est ovoïde et ses dimensions sont beaucoup plus considérables que celles du 1°; aussi se voit-il facilement, tandis que le précédent, qui se confond presque avec le ganglion de Gasser et la base du tronc des nerfs maxillaires, est à peine visible. Il recoit du facial une double racine et donne naissance à quelques filets dont la distribution est particulière au sujet représenté. L'un d'eux, le plus antérieur (sg, fig. 2, PI. IV), passe en dessus des nerfs maxillaires et va se perdre dans le ganglion de Gasser. Il résulte de cette disposition que le tronc commun des nerfs maxillaires est placé dans une anse sympathique. Nous verrons un peu plus loin qu’il en est ainsi pour le tronc du glosso-pharyngien. De la base de ce filet, il se détache une branche (sf) qui se recourbe en arrière et va se perdre au milieu des faisceaux de la partie supé- rieure du facial. Un autre filet (sf°), destiné à la face inférieure du même nerf, se détache du bord externe du ganglion. De l’extrémité postérieure de ce même ganglion, il part deux nerfs qui se portent l’un et l’autre en arrière, presque parallèlement au Cordon sympa- thique. L’interne (sd), en arrivant vis-à-vis du 8° ganglion, se recourbe en dehors et va se perdre dans le rameau principal du glosso-pharyngien. L’externe (an), beaucoup plus fin, passe au- dessus de ce dernier nerf, le contourneet va se souder au 3° gan- glion, formant ainsi l’anse nerveuse dont il est parlé ci-dessus. 3° Ganglion. — Le 3° ganglion est rarement simple. Dans l’'exemplairereprésenté PI. IV, fig. 2, il se compose de 2 petits gan- glions recevant l’un et l’autre des racines du glosso-pharyngien. Le plus antérieur est situé sous ce nerf, près du point d’où se 84 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE détache son rameau antérieur; il en reçoit une seule racine très faible et n’émet aucun filet. Il en est de même du ganglion posté- rieur situé un peu en arrière du tronc du glosso-pharyngien dont il reçoit deux faibles racines (r°). Grénéralement, il n’en est pas ainsi et les ganglions sympathiques correspondant au glosso-pharyngien envoient à ce nerf un ou plusieurs filets; c’est ce que l’on peut cons- tater en sd et sl, sur la fig. 5 de la PI. V. 4° Granglion. — Le 4 ganglion est le plus considérable de tous. Il est placé sous le point de sortie du pneumogastrique, tantôt un peu en avant de ce nerf, tantôt un peu en arrière. Il reçoit du pneumogastrique deux racines, dont l’une est relativement très grosse (r°). Elles se jettent vers le milieu du bord externe de ce ganglion, qui envoie à certains rameaux du pneumogastrique des nerfs généralement courts, en nombre variable. Dans l’exemplaire représenté dans la fig. 2 de la PL IV, ils étaient au nombre de 3 du côté droit ; ils présentaient en outre une disposition toute parti- culière qui ne s'est pas retrouvée dans les autres individus dissé- qués. Chacun de ces trois filets (sk) se termine à son bout périphé- rique par un petit ganglion, et les 3 ganglions sont reliés entre eux par une anastomose ; en outre, ils reçoivent une racine du rameau sous lequel ils se trouvent, et envoient à ce rameau un court filet sympathique. Les branches du pneumogastrique qui reçoivent ces filets sont les 2 faisceaux destinés aux arcs branchiaux et un autre faisceau, plus petit, qui se porte aux muscles de ces mêmes arcs. Les 2 premiers représentent donc le Plexus branchial, qui a été signalé, par Büchner et quelques auteurs, chez certains poissons. Le rameau viscéral ne recevait aucun filet ; quant au rameau latéral, nous allons voir comment, dans l’exemplaire représenté, il se trou- vait en relation avec le sympathique. 5° Ganglion. — Le 5° ganglion, ovale et plus petit que le pré- cédent, est situé immédiatement en avant du ligament rond de l'épaule et au-dessous du nerf hypoglosse. Il reçoit de ce nerf une racine ordinairement assez considérable ; dans le cas présent, cette DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 85 racine était mixte, c’est-à-dire que la partie voisine du ganglion contenait à la fois des fibres provenant dela racine et d’autres, issues du ganglion, qui se portaient vers la périphérie de l’hypoglosse (bi). Un filet remarquable, né du bord interne du 5° ganglion, se dirige en avant, se bifurque et disparaît bientôt dans l'épaisseur de la partie du muscle latéral qui s'attache au crâne en arrière du pneumogastrique. Si l’on suit les 2 branches de bifurcation à tra- vers le muscle, on constate que l’une d’elles se porte sur le rameau latéral du pneumogastrique, de éeile sorte que ce rameau reçoit un filet sympathique né du 5° ganglion correspondant à l’hypoglosse. Au moment où la branche dont il est question atteint le rameau latéral, elle semble se bifurquer : la division principale se porte vers la périphérie de ce nerf et l’autre vers son origine. Quant à la 2° branche de la première bifurcation, elle se porte également sur le pneumogastrique ; mais il nous a été impossible de la suivre jusqu'à sa terminaison, à cause de sa ténuité etde sa fragilité. 62 Ganglion. — Nous ne devrions pas parler ici du 6° ganglion, puisqu'il appartient à la partie abdominale ; mais il reçoit excep- tionnellement une forte racine de l’hypoglosse, et à ce titre on pourrait considérer, au moins sa partie antérieure, comme une dépendance du 6° ganglion. Ce qui paraît encore confirmer cette hypothèse, c’est que, de la partie antérieure du 6° ganglion, partun nerf fin destiné à l'hypoglosse. Ordinairement, c’est le5° ganglion seul qui fournit ce filet (si). Le nerf hypoglosse, qui se porte aux pectorales, reçoit donc à la fois un filet sympathique du 5° et un autre du 6° ganglion. Cordon sympathique. — Tous ces ganglions sont reliés entre eux par un cordon qui n’est autre que le Cordon latéral. Entre le 1% et le 2° ganglion, ce cordon est logé, comme nous l’avons dit, dans un canal osseux formé par la grande aile du sphénoïde. Il en suit naturellement la direction et décrit une courbe légère à concavité interne. Entre le 2° et le 3° ganglion, il est appliqué contre la paroi du crâne et décrit ainsi une courbe peu accusée 86 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE dont la corde està peu près parallèle à l’axe du crâne. Entre le 3° et le 4° ganglion, assez éloignés l’un de l’autre, il décrit une courbe prononcée ou fait un angle à ouverture externe. La branche antérieure de la courbe on de l’angle est appliquée étroitement contre la face inférieure du glosso-pharyngien. Sur la fig. 2 de la PI. IV, cette partieest comprise entre les deux petits ganglions (3). La branche postérieure plus forte va trouver le 4 ganglion ens’approchant de la ligne médiane. Il en est de même de la partie comprise entre le 4° etle 5° ganglion. À partir de ce dernier, le cordon s’abaisse et contourne en dessous le ligament rond de l'épaule, puis il s’élève un peu et va se jeter dans le 6° ganglion. Nous n’avons pas cru devoir donner les dimensions des gan- glions et la distance qui les sépare, attendu que ces mesures varient avec la taille des individus et souvent avec les individus mêmes ; le dessin remplacera avantageusement les mesures que nous aurions pu donner. Il est à remarquer que, chez le Bar, la partie céphalique du système sympathiqueest sujette à des variations considérables, tant sous le rapport du nombre total des ganglions que sous celui de la distribution des filets qui en naissent. Comme nous l’avons déjà dit, ces variations se manifestent quelquefois dansle même individu suivant le côté considéré. Pour être complet, nous sommes done obligé de signaler les plus remarquables, celles principalement qui tendent à donner au sympathique sa physionomie véritable. Dans la fig. 2 de la PI, IV, nous avons représenté le côté droit du sympathique ; dans la fig. 5 de la PI. V, nous donnons une partie du côté gauche. L’inspection de cette figure montre que la partie céphalique des 2 cordons n’est pas identique. Le 2° ganglion corres- pondant au facial n’a nila même forme ni les mêmes dimensions que son symétrique. Le 3° ganglion est unique et très allongé ; le 4 ganglion, simple et gros du côté droit, est triple du côté gauche. Enfin, entre le pneumogastrique et le glosso-pharyngien, il existe un ganglion quin’a pas son analogue à droite. Le facial et le En 7 3 : DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 87 glosso-pharyngien sont encore réunis par une fine anastomose, mais qui n’embrasse plus, cette fois, le tronc principal du dernier de ces 2 nerfs. Du facial part, pour la branche antérieure du glosso-pha- ryngien, un filet qui n’existait pas du côté opposé. Le glosso-pharyngien envoie un filet (s/) à un petit vaisseau (ad) qui circule dans l’épaisseur du muscle abaisseur de l’opercule. Le 4° ganglion est triple, avons-nous dit ; le plus antérieur de ces trois ganglions ne reçoit pas de racine du pneumogastrique ; mais il lui envoie un filet ; aucontraire, les 2 postérieurs reçoivent de ce nerf chacun une racine et ne lui envoient pas de filet. Le dernier de ces trois petits ganglions donne naïssance au filet (s2) qui naïssait, à droite, du 5° ganglion ; comme nous n’avons pu suivre ce filet jusqu’au bout, à cause du mauvais état du sujet, nous décrirons sa marche chez un autre exemplaire où nous sommes parvenu à le suivre complètement. [l nous reste à parler du ganglion (4) situé entre le glosso-pha- ryngien et le pneumogastrique. Ce ganglion ne reçoit aucune racine, de sorte qu’il nous est difficile de le rapporter à l’un plutôt qu'à l’autre des 2 nerfs ci-dessus nommés. Quoi qu'il en soit, de son bord externe naît un filet fin qui traverse la couche du muscle abaisseur de l'opercule ; là il se bifurque et ses 2 branches se jettent surles ramifications (pb) d’un rameau (ba) issu du facial. Parfois le nombre des ganglions de la partie céphalique est exac- tement de 5 ; les plus considérables sont toujours ceux qui corres- pondent au facial et surtout au pneumogastrique. C’est également presque toujours du ganglion correspondant à ce dernier nerf que part le filet représenté en s* dans la fig. 2 de la P1 IV. Chez un des individus disséqués, ce filet, émané du 4° ganglion, se porte d’abord en arrière et en dedans ; ilse recourbe brusquement en avant et pénètre dans la masse musculaire sus-jacente. Dans sa marche intramusculaire, il se rapproche du point de sortie du pneumogastrique et se renfle en un petit ganglion de dimensions relativement fortes. Deux filetsen partent : l’un, fin, se porte sur 88 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE le rameau latéral du pneumogastrique en sedirigeant vers la péri- phérie de ce nerf; l’autre s’accole aux parois du crâne et vatrouver le point de sortie de l’hypoglosse. Ce dernier nerf se compose de 3 ou 4 faisceaux émergeant du crâne par autant d’orifices situés les uns tout près des autres. Le faisceau qui sort de l’orifice antérieur innerve les muscles adjacents à la face interne de la ceinture scapu- laire ; il présente à sa sortie un petit ganglion où aboutit le filet sympathique qui nous occupe. Ainsi donc, chez le Bar, il existe un filet sympathique qui va du 4° ganglion à l’hypoglosse ou du 5° ganglion au pneumogas- trique, en traversant la couche du muscle latéral et en fournissant un filet au rameau latéral du dernier de ces 2 nerfs. Ordinairement, c’est du 5° ganglion que naît le filet sympathique destiné à l’hypoglosse, quise porte, comme on sait, aux muscles de la pectorale. Il n’est pas rare de voir ce filet présenter sur son trajet de petits ganglions microscopiques. Au lieu d'accompagner l'artère axillaire, comme on le voit chez d’autres Osseux, il se jette dans l’hypoglosse assez près de son origine, et c’est par cette voie qu’il se rend, sans aucun doute, aux vaisseaux et aux muscles de la pectorale. Le rameau antérieur du glosso-pharyngien recoit ordinaire- ment, un filet sympathique. [| manquait, à droite, chez le sujet représenté fig. 2, PI. IV ; mais sur le dessin de gauche, fig. 5, PI. V, on peut le voir en sa. Il naît presque toujours du ganglion qui correspond au facial. Résumé.—De la description précédente, il est possible de déga- ger les faits suivants : La partie céphalique du cordon sympathique comprend 5 gan- glions, ainsi placés d’avant en arrière : le premier sous le triju- meau, le 2° sousle facial, le 3° sous le glosso-pharyngien, le 4° sous le pneumogastrique et le 5° sous l’hypoglosse. Ces ganglions sont reliés entre eux par un cordon dont la direction générale est 0 à DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 89 à peu près parallèle à l’axe du crâne et dont la partie antérieure est logés dans un canal osseux formé par la grandeaiïle du sphénoïde et compris entre le trijumeau et le facial. Chacun de ces gan- glices reçoit ordinairement ses racines du nerf crânien correspon- dant. I! émot des filets qui se distribuent comme suit : le 1% gan- glion en envoie au tronc commun des maxillaires, à l’ophthalmique, aux 2 ne’is ciliaires et au palatin ; le 2° en envoie au facial et à la prineip£le de ce dernier nerf, laquelle se rend à la 1° branchie ; le 4 aux rameaux du pneumogastrique destinés aux 3 dernières branchies et au rameau qui forme le nerf latéral, et enfin le 5°, à l'hypoglosse, et par son intermédiaire aux vaisseaux etaux muscles de la pectorale. Partie abdominale. La partie abdominale s’étend depuis l’hvpoglosse jusqu’à l'en- trée du Canal hémal. Elle présente à considérer : 1° des ganglions et le cordon qui les relie ; 2° les nerfs qui naissent des ganglions, et principalement le nerf splanchnique et le nerf des organes génitaux. Ganglion. — Le nombre des ganglions situés de chaque côté de la colonne vertébrale est généralement égal à celui des vertèbres abdominales. Cependant il arrive fréquemment que pour une ver- tèbre on compte deux ganglions. Chez le Bar, le plus remarquable est le premier, car c’est lui qui donne naissance au nerf splanch- nique. Il est situé en arrière du ligament rond et de l'artère axillaire ; sa forme est excessivement variable, comme on peut s’en convaincre en examinaut le gaaglion (6) des fig. 2 et 3 de la PI. IV. Les 2 ganglions symétriques sont unis par une forte anastomose. Cette anastomose présente ici un caractère spécial sur lequel nous appelons l’attention. Nous venons de dire que le 1° ganglion abdominal donne naiïssance au nerf splanchnique ; 90 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE cela n’est vrai que pour le ganglion de droite, car celui de gauche n'émet d'autre nerf que l’anastomose dontil est question. Mais doit-on considérer ce nerf comme une simple anastomose ? N'’est-il pas, au contraire, plus rationnel d'y voir la racine gauche d’un nerf splanchnique ? Cette dernière hypothèse nous paraît seule vraie. En effet, le nerf issu du premier ganglion abdominal gauche ne se rend pas toujours au ganglion de droite. Il peut se termi- ner par un renflement d'où part une racine pour le nerf splanch- nique. Quelquefois même, il se rend directement au ganglion splanchnique. Ce dernier fait prouve d’une façon péremptoire que l’on se trouve bien en présence d’une racine du ganglion splanch- nique et non d’une simple anastomose des 2 premiers ganglions abdominaux. Les ganglions suivants sont plus petits, généralement ovales et plus ou moins étroitement appliqués sur le côté des vertèbres. Cha- cun d’eux reçoit du nerf rachidien correspondant une et quelque- fois deux racines. Cette racine se sépare du nerf rachidien au mo- ment où celui-ci sort de la vertèbre pour se jeter dans les muscles voisins. Elle descend en contournant la vertèbre et va se jeter dans le ganglion. D’autres fois, c’est le rameau ventral seul qui lui donne naissance, et dans ce cas elle se sépare du nerf rachidien tout près du ganglion. Il arrive parfois, comme nous l'avons dit, que, pour une même vertèbre, on compte deux ganglions ; lorsqu'il en est ainsi, l’un d'eux reçoit généralement une racine profonde, c’est-à-dire issue du nerf rachidien tout entier, à son point de sortie de la vertèbre, et l’autre une ou même deux racines superficielles nées du rameau ventral seulement. Si les premiers ganglions abdominaux ne sont point reliés entre eux par une anastomose, il n’en est pas de même des 3 ou 4 derniers. Ceux-ci, en effet, sont toujours unis par un ou deux filets nerveux ou sont accolés l’un à l’autre ; dans l’exemplaire représenté fig. 1, PI. V,le dernier ganglion abdominal est divisé en 2 ou 3 petites masses espacées les unes des autres et reliées entre elles par des D DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 94 anastomoses, C’est du ganglion gauche, ou mieux des petites masses ganglionnaires de ce côté, que naissent les 2 nerfs ovariques dont il sera parlé plus loin. Cordon abdominal. — Tous ces ganglions sont unis par un cor- don assez volumineux qui conserve sensiblement son calibre dans toute son étendue et qui suit fidèlement la courbure des Vertèbres. ( Voir fig 1, PI. V, cs, le cordon de gauche.) Nerfs splanchniques.:— Les nerfs splanchniques naissent, chez le Bar, du premier ganglion abdominal droit ; une anastomose, qui n'est à proprement parler, comme nous venons de le démontrer, que la racine gauche du ganglion splanchnique, unit les deux 1% ganglions abdominaux symétriques. Dans l’exemplaire repré- senté fig. 8, PI. IV, trois nerfs partent du premier ganglion abdo- minal droit ; l’un, le plus court, mais aussi le plus gros, se renfle presque immédiatement en un ganglion (gs) qui n’est autre que le ganglion splanchnique. Un autre nerf plus fin que le précédent unit également le premier ganglion au ganglion splanchnique, mais en décrivant une anse qui embrasse l’artère cœliaque (ac) située sur la gauche, à une petite distance des 2 ganglions précé- dents ; enfin, un 3° nerf va se souder à l'un des rameaux du nerf splanchnique. Le ganglion splanchnique atteint à peu près le volume du pre- mier ganglion abdominal ; sa forme générale est celle d'un ovale, mais elle se trouve toujours altérée par les nerfs qui en partent ou par ceux qui y aboutissent. Il donne naissance à deux gros nerfs qui sont les nerfs splanchniques ; tous deux partent de son extré- mité postérieure et peuvent se distinguer en externe et interne (ns). L’externe est le plus considérable et le plus régulier. Il décrit une courbe à concavité interne et va s’accoler aux parois de l’ar- tère mésentérique (am) qu’il accompagne jusqu’au point où elle se ramifie. En général, ce nerf donne naissance à un rameau assez vo- lumineux qui suit également et dans les mêmes conditions l’artère mésentérique. L’interne, situé plus en dedans, se renfle bientôt en 92 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE. un ganglion dont le volume atteint au moins celui d’où part le nerf; ce deuxième ganglion peut être considéré comme un 2° ganglion splanchnique (gs). [1 donne naissance à son tour à un nerf splanch- nique beaucoup moins fort que le premier et qui va r’accoler à l'artère (ah). Cette artère se trouve également accompagnée, jus- qu’au moment où elle se ramifie, par le tronc splanchnique et par un ou deux de ses rameaux. En outre, un certain nombre de filets plus fins naissent du ganglion dont il s’agit ; mais, pour bien faire connaître leur distribution, il est nécessaire de parler avec quelques détails des ramifications de l’artère cœliaque. L'artère cœliaque (ac, fig. 8, et fig. 1, PI. IV) naît de l’aorte presque immédiatement en arrière du tronc formé par les 2 der- nières artères épibranchiales et un peu en avant de l’artère axil- laire (ax), fig. 3, PI. IV. À quelque distance de son origine, elle se bifurque et donne ainsi naissance aux 2 artères am et ah. La plus considérable (am) donne à son tour naissance à un rameau at qui n’est aatre que l'artère stomacale. Elle continue sa marche dans le mésentère jusqu'au voisinage de la rate. Là, elle se ramifie un grand nombre de fois ; deux de ces ramifications se rendent à la rate ; les autres rayonnent dans toutes les directions et se portent à l’intestin proprement dit. Nous n'avons pas cru devoir donner une figure d'ensemble des viscères abdominaux. L’enchevêtrement des lames mésentériques est tel qu'on ne peut représenter ces viscères sans faire le sacrifice d’un grand nombre de branches artérielles. Or, comme nous le verrons plus loin, toutes ces artérioles sont ac- compagnées de filets sympathiques très fins, pour ainsi dire invi- sibles, qui n'auraient pu être indiqués que par la représentation complète des ramifications de l’artère cœliaque. La nécessité d'en sacrifier un certain nombre nous a déterminé à ne figurer que les premières ramifications des artères am et ah; c’est ce que repré- sentent les figures 6 et 7 dela PI. V. L’artère ah se ramifie au voisinage du duodenum ; la plupart de ses ramifications se portent à cette partie de l'intestin et même AS RS DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 93 à une certaine distance en arrière du point où va s'ouvrir le canal cholédoque. L’une d’elles se porte sur le mésentère et, le long de son trajet, émet à droite et à gauche de nombreuses branches artérielles. Enfin, d’autres, ordinairement très fines, se rendent aux 2 lobes du foie, à la vésicule biliaire et aux petites masses dis- séminées dans le mésentère et regardées par le P. Legouis comme constituant le pancréas. Revenons maintenant au nerf splanchnique. Nous avons dit que le nerf splanchnique externe décrivait une courbe à concavité interne ; nous devons faire remarquer que cette courbe est moins accentute, et que le nerf est beaucoup moins éloigné de l'artère (am) que le dessin ne le laisse supposer. Cette disposition # pour but de montrer le riche plexus qui embrasse la base des artères am etah. Ce plexus est formé de filets appartenant à la fois au sympathique et au pneumogastrique. Le rameau viscéral du pneumogastrique (bv) se divise au voisi- nage du nerf splanchnique en deux branches; la principale se porte sur l’œsophage auquel elle distribue de nombreux rameaux qui s’anastomosent entre eux et avec des filets sympathiques; quel- ques-uns de ces rameaux se portent sur les artères am et ah, et leur fournissent les éjéments d’un plexus très riche (pl) qui reçoit en outre de nombreux filets sympathiques émanés des 2 branches principales du nerf splanchnique. Tantôt ce sont les filets du pneumogastrique qui se perdent dans les rameaux du sympathique, tantôt c'est le contraire (x... +). Mais, indépendam- ment des anastomoses dont il vient d’être question, ilen existe d’autres eten grand nombre qui vont de l’une à l’autre des prinei- pales branches du nerf splanchnique. Chacune de ces anastomoses est à son tour reliée à ses voisines ; il en résulte un plexus compli- qué quise continue sur les artères am et ah et leurs ramifications. Ces plexus artériels (pl) n'ont jamais été formellement signalés. Plu- sieurs auteurs ont même été frappés de leur absence sur les vaisseaux sanguins des Poissons, alors que leur présence sur les artères des 94 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Mammifères est si caractéristique. Quant au plexus cœliaque, il n’a été observé que chez de rares poissons, tandis qu'il existe probable- ment chez tous les Osseux. Il est vrai que, pour mettre ces différents _ plexus en évidence, il fautles colorer préalablement au moyen de l'acide osmique. Les mailles du réseau qui enveloppe les artères deviennent de plasen plus lâches à mesure que le vaisseau s’éloigne de son origine ; mais, au voisinage des points de bifurcation, il se détache des troncsnerveux sympathiques de nombreux filets quise portent sur toutes les ramifications et donnent à leur tour naissance à des plexus (pl, fig. 5et 6, PL. IV). Parmi les ramifications de l’artère mésentérique, 2 se portent à la rate (ar, fig. 7, PI. V). La plus grosse pénètre dans la glande par la partie antérieure, qui forme en quelque sorte la base d’un prisme triangulaire terminé à la partie opposée par un tétraèdre. Avec de la patience, on peut arriver à enlever la pulpe de la glande et à mettre à nu les principales rami- fications (be, fig. 4, PI. IV) de l’artère splénique (ar, même fig.). Or, il est possible de suivre sur presque toutes ces ramifications les filets sympathiques émanés du plexus rénal (pl, fig.5, PI. IV). Le plexus représenté a été pris sur le tronc de l’artère rénale dans le tiers inférieur de la glande ; les principales ramifications présen- taient également un réseau sympathique ; quant aux plus petites, leur exiguïté ne permet pas d'affirmer l'existence d'un plexus, mais la plupart étaient accompagnées d’un filet nerveux. Ce que nous venons de dire du plexus rénal peut s'appliquer à toutes les ramifications de l'artère mésentérique (am). Ces rami-. fications étant, comme nous l’avons dit plus haut, destinées à porter le sang artériel dans la partie terminale de l'intestin propre- ment dit, cet intestin reçoit un grand nombre de filets sympathiques qui vont former dans l’épaisseur de ses parois les Plexus d’'Auer- bach et de Meisner. Nous n'avons pas représenté le plexus qui entoure les ramifications au moment où elles pénètrent dans l’in- testin; nous avons pensé que la représentation du plexus des DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 95 ramifications de l'artère hépatique suffirait. (PI. IV, fig. 6, pL.) Nous devons rappeler ici que les deux artères amet ah sont accompagnées dans tout leur trajet par les troncs ou les gros rameaux des nerfs splanchniques. Ce sont cestroncs ou ces rameaux qui fournissent aux artères les éléments des plexus. Le réseau qui enveloppe l'artère (a) contient très probablement plus de fibres du pneumogastrique que celui de l’artère mésentérique am ; mais, comme la distinction de ces fibres est impossible, nous nous con- tenterons de parler du plexus. Les fibres de ce plexus sont assez fines ; néanmoins, il est pos- sible de les suivre jusqu’au point où l'artère se ramifie. Sur toutes ses ramifications, l’on trouve également un plexus, même sur les plus faibles. (’est ce que l’on peut constater sur l’un des rameaux de l'artère hépatique, au moment où il pénètre dans la glande (fic. 6, PL IV, pl). Le rameau principal ah et ses deux ramifications (bd) portent un plexus évident. Il en est de même de toutes les autres ramifications de cette artère. Or, si l’on se rappelle que ces ramifica- tions se portent aux lobes du foie, à la vésicule biliaire, au duode- num et à la partie antérieure de l'intestin, ainsi qu'aux masses considérées par le P. Legouis comme appartenant au pancréas, nous pourrons affirmer que tous ces organes sont sous la dépen- dance des nerfs splanchniques. Les différentes lames mésentériques qui soutiennent les viscères abdominaux recoivent aussi des filets nerveux fournis de place en place par les plexus des ramifications artérielles. Il nous reste encore à parler des filets qui naissent des nerfs splanchniques et qui se rendent à des organes dont il n’a pas été question jusqu'ici. La branche la plus considérable des nerfs splanchniques émet près de l’artère at un filet assez considérable (su) qui reçoit du pneumogastrique une forte anastomose. Ce filet est destiné à la vessie natatoire ; c’est le seul que nous ayons pu découvrir. Il se rend à la partie inférieure et médiane de la vessie, dans les parois de 96 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE laquelle il pénètre à peu près vers la fin de son quart antérieur. Le pneumogastrique fournit aussi des filets à cet organe ; le rameau viscéral droit en envoie deux (pv) qui sont destinés à la partie droite. À la partie postérieure du 2° ganglion splanchnique, il existe un autre petit ganglion arrondi situé en dehors du precédent et duquel partent, à droite, quatre filets (nr) destinés à la partie antérieure des reins, c’est-à-dire à celle qui se trouve comprise entre la cein- ture scapulaire et le 1° ou le 2° arc branchial. En dedans de ce ganglion et tout à fait à l’origine du plus petit des deux nerfs splanch- niques, on voit partir de ce nerf un filet plus gros que ies quatre dont il vient d’être question et qui se porte également sur les reins, mais un peu en arrière de la ceinture scapulaire. Ce filet se bifarque en atteignant l’organe; l’une de ses branches traverse une partie des reins et reparaît à une petite distance en arrière ; on la suit quelque tempsle long du bord externe de la partie de la veine car- dinale non recouverte par les reins (vp et nr, fig. 1, Pl. V). Elle pénètre alors dans l’épaisseur des parois de la veine où ses rami- fications s’anastomosent avec celles d’autres filets issus des gan- glions abdominaux pour former un plexus à la surface des parois de la veine (fig. 1, PI. VI, pl). L’auntre branche de bifurcation reste tout le temps en dehors des reins ; elle suit le bord interne visible de la veine cardinale, puis contourne en dedans les reinset disparaît dans leur substance. Du côté gauche, voici ce que l’on constate. Un filet destiné au rein gauche naît de l’anastomose des deux premiers ganglions abdominaux, à une petite distance du ganglion gauche. Ilse dirige d’abord en arrière et en dehors, puis décrit une courbe prononcée à concavité antérieure et présente un petit ganglion d’où partent en divers sens plusieurs filets (gr, fig. 1, PL. V); les uns et les autres se perdent dans la substance des reins ou dans les parois de la veine cardinale gauche. Ces filets sont uniquement destinés à la partie antérieure du rein gauche ; nous n’en avons vu aucun se rendre à la partie moyenne. nées >" LR LS DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 97 La partie postérieure du rein droit se trouve innervée par des filets sympathiques issus, non plus cette fois du nerf splanchnique, mais des divers ganglions abdominaux. Comme les précédents, ils se perdent de place en place dans la substance rénale ou dans l'épaisseur des paroïs de la veine cardinale. En résumé, les nerfs splanchniques forment, avec le rameau viscéral du pneumogastrique, un Plexus cœliaque compliqué qui se continue sur les artères hépatique et’ mésentérique et sur toutes leurs ramifications, même les plus fines. Ilen part des filets qui se portent au foie, à la vésicule biliaire, à la rate, au duodenuin, à l'intestin toutentier, à la vessie natatoire, au pancréas, au mésen- tère ; d’autres filets, nés du ganglion splanchnique, se portent à la partie antérieure des reins et forment un plexus à la surface de la veine cardinale. Examinons maintenant la marche des filets issus des autres ganglions abdominaux. Du 2° ganglion abdominal gauche naît un filet destiné au nerf rachidien correspondant. Chacun des 4 ou 5 nerfs rachidiens Suivants reçoit également un filet du ganglion sympathique voisin, tandis que ceux qui viennent ensuite en sont généralement dé- pourvus. Mais il n’y a rien de fixe à cet égard ; cependant, il est à remarquer que les nerfs qui reçoivent les filets sympathiques sont précisément ceux qui sont destinés aux nageoires ventrales. En outre, un certain nombre de ces ganglions abdominaux émettent d’autres petits filets qui se portent vers l’artériole adossée à la côte (PI. V, fig. 1, ji) et l’accompagnent ; on peut les suivre sur une certaine longueur. L'observation qui a été faite précédemment surles anses nerveuses, à propos des nerfs facial et glosso-pha- ryngien, peut trouver ici une nouvelle confirmation. Presque toutes les artérioles intercostales traversent en effet un anneau nerveux. Les 2° et 3° ganglions donnent encore naissance à 3 filets fins qui se dirigent en arrière vers le point d’attache de la vessie na- ARCH. DE ZOOL, EXP. ET GÉN. — 2€ SÉRIE. — T,. V bis, — SuppL. 1889, — Mém. {) 98 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE tatoire, au niveau de la 4° vertèbre. Leur ténuité nous a empêché de les suivre. | De place en place on voit encore sortir d’un ganglion abdo- minal un filet très fin qui se dirige de dedans en dehors et de haut en bas. Ce filet pénètre dans les parois de l’aorte où il se perd (fa). Quelques-uns contournent l’aorte en dessous et vont se terminer du côté opposé dans la pulpe des reins. Enfin il nous reste à parler des filets issus de l’avant-dernier ganglion abdominal. À ce niveau, l'aorte émet deux artérioles qui se dirigent de haut en bas et qui sont placées l’une derrière l’autre à une faible distance. Ces 2 artérioles se rejoignent et pé- nètrent de concert dans les organes génitaux : ce sont en effet les artères ovariques ou spermatiques. Toutes les deux naissent sur la gauche de l’aorte. Le ganglion abdominal de ce côtéest divisé en trois petits ganglions. Le premier se trouve placé immédiatement en avant de la première artériole, le 2° entre les. deux, et le 3° immédiatement en arrière de la 2°. La première artériole traverse une anse nerveuse. Du 2e eë du 3° ganglion naissent 2 nerfs assez volumineux qui accompagnent les 2 artérioles jusqu'à leur entrée dans les organes génitaux. Là, les 2 nerfs qui se sont ramifés dans leur trajet se réunissent en un gros ganglion situé à la face inférieure et antérieure de ces organes (90, fig. 2, PI. V). (Le dessin représente les ovaires.) Du ganglion go partent de gros nerfs (70) qui se ramifient à la face inférieure de chaque ovaire. Des principales ramifications en partent d’autres très fines qui s’anastomosent entre elles et forment un plexus à mailles assez lâches. Tous ces filets diminuent de calibre en s’éloisnant de leur origine, et lorsqu'ils arrivent vers le milieu de la longueur des ovaires, ils sont à peine visibles, même avec une forte loupe. Le ganglion ovarique (go) donne encore naissance à des nerfs qui cheminent entre les ovaires, d’avant en arrière, pour les con- tourner et se répandre à leur face supérieure ; ils passent près de l'extrémité anale (in) du tube digestif et lui envoient d'assez ses ut c DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 99 nombreux rameaux, ainsi qu’à la vessie urinaire, qui débouche près de là. Enfin, la plupart des principaux troncs nerveux suivent letrajet des ramifications de l’artère ovarique et pénètrent à leur suite dans l’intérieur de l'ovaire. En résumé, la partie abdominale du sympathique comprend deux cordons qui s'étendent de chaque côté de la colonne verté- brale, depuis le ligament rond de l'épaule jusqu’à l'entrée du Canal hémal. Ces cordons présentent, vis-à-vis de chaque vertèbre, un ou deux ganglions qui reçoivent du nerf rachidien corres- pondant une ou deux racines. Le 1* ganglion et les 3 derniers sont unis à leur symétrique par une anastomose ; les autres sont indépendants ; du premier ganglion de droite naissent les nerfs splanchniques ; les autres ganglions abdominäux envoient des filets à certains nerfsrachidiens, aux artérioles latérales, à l’aorte, au point d'attache de la vessie naiatoire, et à la partie postérieure des reins. Des derniers sortent les nerfs ovariques, qui se réunissent en un gros ganglion d’où partent de nombreux filets formant à la surface des ovaires un plexus à mailles [âches. Ce plexus envoie à son tour d’autres filets à la partie terminale de l’intestin et à la vessie urinaire. Partie caudale La partie caudale du sympathique s’étend depuis l’extrémité antérieure du Canal hémal jusqu’à son extrémité postérieure. Elle offre à examiner : 1° des ganglions et les cordons qui les relient ; 2° les filets qui émanent des ganglions. La partie caudale se compose de deux cordons placés entre l'aorte et la veine caudales ; ils sont situés sur les parois latérales de ces vaisseaux et chacun compte généralement autant de gan- glions qu'il existe de vertèbres caudales. Mais il arrive fré- quemment qu’au lieu d’un seul ganglion pour chaque vertèbre, il en existe deux, dont l’un est simplement un ganglion surnu- 109 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE méraire. La forme de ces ganglions est très variable; ils sont presque toujours accolés à leurs symétriques ou, tout au moins, unis par une ou deux anastomoses. Ainsi, ce qui n’était que l’ex- ception pour la partie abdominale, devient la règle pour la partie caudale. Chacun de ces ganglions reçoit du nerf rachidien cor- respondant une et le plus souvent deux racines. Voici comment elles se comportent {fig. 8 et 4, PI. V). Chaque nerf rachidien, à sa sortie de la colonne vertébrale, se divise en trois rameaux prin- cipaux : un rameau dorsal, un médian et un autre ventral; leur partie commune est courte. C’est de cétte partie commune que sort la racine la plus antérieure. Elle est située dans la dépression qui loge l’artériole intervertébrale, elle accompagne cette arté- riole en se portant vers son origine et pénètre dans le Canal hémal par un orifice percé dans l’are vertébral inférieur. Son point d’union avec le cordon sympathique est marqué par un ganglion plus ou moins développé. La seconde racine naît géné- ralement du rameau ventral : elle est située un peu en arrière de la précédente et lui est parallèle. Elle pénètre dans le Canal hémal, soit parle mêmeorifice que la première, soit par l’intervalle que laissent entre eux deux arcs consécutifs ; elle se jette dans le ganglion où aboutit la première racine ou quelquefois dans un ganglion surnuméraire. Parfois ces racines sont unies par une anastomose, comme le montre la fig. 4 de la PI. V. D’autres fois l’une des racines est mixte et une partie de ses fibres va se perdre dans les muscles qui entourent le rachis. Les deux cordons s’amincissent de plus en plus et lorsqu'ils arrivent à l'extrémité postérieure du Canal hémal, il est fort difficile de les apercevoir. Dans tout leur trajet, les deux cordons con- servent à peu près un calibre identique; nous verrons plus loin qu'iln’enest pas de même chez tous les poissons. Les filets émanés des ganglions de la partie caudale sont peu nombreux. Cependant de chaque ganglion il part un et, plus rarement, deux filets très fins destinés au rameau ventral du nerf DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 101 rachidien. Ce rameau contourne en partie la vertèbre, en se dirigeant en arrière eten bas (rn, fig. 3, P1. V); ilse place au- devant de l’arc vertébral inférieur sur lequel il s’appuie ; c’est en venant prendre cette position qu’il reçoit le ou les filets sym- pathiques (fr, même fig.). Vers l’extrémité caudale, les rameaux ventraux des nerfs rachidiens se comportent différemment. Ils s’anastomosent entre eux et avec les rameaux médians et cons- tituent de la sorte un Plezus caudal dont les filets vont se dis- tribuer aux petits muscles de la nageoiïre caudale (p/, fig. 3, PI. V). Mais ce plexus n’est pas: uniquement formé par les nerfs rachi- diens ; il reçoit encore desfilets sympathiques. Chez le Bar, il est difficile de bien voir sa composition ; mais chez d’autres poissons, et entre autres le Serran Cabrille (fig. 2, PI. VI), le plexus, formé comme nousle disons, est parfaitement évident. Comment se terminent les 2 cordons sympathiques ? Personne jusqu'ici n’a pu les suivre jusqu'à leur terminaison. Certains auteurs ont vu les deux cordons se réunir en un ganglion médian et s’arrêter là: d’autres ont parlé des filets qu'ils envoient au Vasa caudale, mais n’ont rien dit de leur véritable terminaison. Voici ce que nous avons vu chez la plupart des poissons osseux, et en particulier chez le Bar. Les deux cordons, dans leur partie terminale, restent généralement distincts ; chez quelques individus cependant, ils se réunissent en un cordon impair plus ou moins long. Siles deux cordons restent distincts, on voit chacun d’eux, un peu avant l'extrémité antérieure de l’urostyle, se porter en dehors en décrivant une courbe, traverser les parois du Canal hémal par un orifice ouvert dans le dernier are vertébral inférieur ou dans le dernier espace intervertébralet se jeter dans l’un des principaux rameaux du Plexus caudal. Sur leur trajet, ils donnent naissance à quelques filets très ténus qui accompagnent les diverses ramifications du Vasa caudale. Si les deux cordons se réunissent en un cordon impair, ce cordon ne se bifurque pas ; il va se terminer soit à droite, soit à gauche, exactement de la 102 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE même façon que chacun des deux cordons, c’est-à-dire sur l’un des principaux rameaux du Plexus caudal. Il envoie également au Vasa caudale quelques filets d’une finesse extrême. Ainsi, les deux cordons sympathiques s'étendent jusqu’à l'extrémité postérieure du Canal hémal ; puis ils sortent de ce canal pour aller se perdre dans le Plezus caudal (ts, fig. 3, P1. V, et fig. 2, PI. VI). Quelques mots sur l’Histologie du système sympathique du Bar. L’examen histologique du système sympathique des différents poissons osseux nous révélerait sans doute des différences pro- fondes dans la constitution intime des filets nerveux et des gan- glions. Il suffit, en effet, de voir comment ils se comportent vis-à- vis de l’acide osmique pour en être convaincu. Tandis que, chez certains poissons, la coloration des nerfs se fait violemment et ra- pidement, chez d’autres, elle est lente et faible ; quelquefois le nerf est à peine teinté ; plus rarement il ne prend aucune coloration. Si l’on examine les ganglions à un faible grossissement, on cons- tate que, chez certains poissons, ils ont l'aspect mûriforme dû aux grosses cellules qui les constituent, tandis que, chez d’autres, leur aspect est celui d’une masse homogène. Pour les raisons que nous avons données plus haut, nous ne nous sommes occupé que de l’histologie du système sympathique du Bar, et enccre ne l’avons- nous étudiée que d’une manière tout à fait superficielle. Chez ce poisson, les filets contiennent tous une certaine pro- portion de fibres à myéline ; mais la proportion de ces fibres et de celles de Remak varie avec le filet. En général, les filets les plus fins en contiennent, toute proportion gardée, moins que les plus gros. Lorsque ceux-ci s’éloignent de leur origine, le nombre des fibres à myéline diminue et, lorsqu'ils deviennent très fins, ils paraissent n’en plus contenir. v DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 103 Les tubes à double contour n’ont pas tous le même diamètre ; quelques-uns sont plus gros que le reste des autres. Les ganglions possèdent également des cellules de différentes grandeurs ; l’examen des fig. 9 et 10 de la PL. VI donne une idée de leurs dimensions. On remarquera que, chez le Bar, les cel- lules sont encore unipolaires ; mais chacune d’elles ne possède qu’un noyau. Ces cellules varient entre 9 et 29 L. ;on en trouve même qui mesurent 35 (1. Sur une coupe transversale, fig. 10, les gan- glions montrent des*paquets de fibres pourvues de nombreux noyaux. SYSTÈME SYMPATHIQUE DES AUTRES OSSEUX Nous allons maintenant décrire plus brièvement le système sym- pathique d'un type de chacune des principales familles de la faune ichthyologique française. Nous suivrons dans notre description l'ordre adopté dans l'Histoire naturelle des Poissons du docteur Emile Moreau. I. — Lophobranches. SYNGNATHIDÉS (/lippocampus guitulatus, Syngnathus acus et Siphonostoma Rondeletii). Les Lophobranches ne renferment en France que la famille des Syngnathidés, qui comprend deux groupes de poissons de forme très distincte, les Hippocampes et les Syngnathes. Leur petite taille rend l’étude de leur sympathique très difficile. L'Hippo- campe qui a servi à nos recherches est le guttulatus, pluscommun à Banyuls que le brevirostris. Nous avons étudié, d'autre part, le Syngnathus acus etle Siphonostoma Rondeleti. L’anatomie générale des Hippocampes et des Syngnathes est à peu près identique ; il en est de même de la disposition de leur 104 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE sympathique ; la description suivante s'applique donc aussi bien aux uns qu'aux autres. Chez tous ces animaux, la partie antérieure du sympathique se voit un peu en arrière du facial; elle sort d’un canal osseux en même temps que la veine cardinale antérieure. Si l’on enlève la partie inférieure de ce canal, on peut suivre facilement le cordon sympathique jusqu’au facial lui-même. En examinant avec atten- tion,on peut le voir se continuer, en avant de ce nerf, sur une petite longueur, remonter vers le trijumeau en décrivant une courbe et se terminer par un petit ganglion mal délimité. Ce ganglion n’est pas situé sous la masse principale du trijumeau, mais sous une faible branche de ce nerf. Cette branche naît du trijumeau propre- ment dit et sort du crâne entre le tronc commun des nerfs maxil- laires et le facial ; elle se continue au delà du 1% ganglion sympa- thique , et distribue ses ramifications aux 2 nerfs maxillaires et à d’autres nerfs se rendant au tube buccal et aux parois de l’or- bite. Nous n'avons pu voir si les nerfs ciliaires recevaient égale- ments des filets. Le cordon sympathique accompagne, en dedans, jusqu’au pneumogastrique, la veine cardinale antérieure. Il pré- sente de petits ganglions correspondant aux nerfs facial, glosso- pharyngien et pneumogastrique; ces ganglions sont allongés et assez nets. Ils sont reliés à ces nerfs par des racines et des filets. En arrière du ganglion correspondant a pneumogastrique, 2 anastomoses excessivement fines relient les Cordons latéraux. Cha- cune de ces anastomoses porte un ou deux petits renflements également reliés entre eux. À partir du pneumogastrique, le Cordon sympathique suit pen- dant un certain temps une direction à peu près parallèle à celle du nerf latéral. Ce dernier nerf est très considérable. Tout près de lui se voient les deux fortes racines de l’hypoglosse qui se réu- nissent bientôt et vont se souder d’abord au 1° nerf rachi- dien, puis au second, pour se porter de là aux muscles de la pecto- torale. Ce Plexus brachial recouvre en partie le nerf latéral. Le . DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 105 Cordon sympathique se trouve en dedans de tous ces nerfs. Vers le milieu de l’espace qui sépare le pneumogastrique du premier nerf rachidien, il présente un petit ganglion d’où part une anastomose pour le cordon gauche. Un peu plus en arrière, c’est-à-dire tout près du premier nerf rachidien, un second petit ganglion envoie également au cordon gauche une seconde anastomose, pourvue ainsi que la première de petits renflements ; deux d’entre eux sont à leur tour unis par une petite commissure. Au niveau du second nerf rachidien se trouve un ganglion beaucoup plus considérable que tous ceux que nous avons vus jusqu'ici. Les 2 ganglions symé- triques sont unis par une anastomose et du ganglion de droite partent deux nerfs excessivement fins qui se portent sur l'artère mésentérique et l’accompagnent dans son trajet. Nous n’avons pas vu de ganglion splanchnique ; maïs les deux nerfs, qui restent distincts sur une assez grande longueur, présentent, chez Hip- pocampe, quelques petits ganglions d’où ne part aucun filet. Chez le Siphonostome, les deux cordons sont reliés entre eux et avec le rameau viscéral du pneumogastrique. Ils restent distincts dans toute l’étendue de la cavité abdominale; sous chaque nerf rachidien se trouve un petit ganglion nettement accusé. Le cordon droit est situé au-dessus de la veine cardinale qui nous a paruêtre unique ; il faut la fendre dans toute sa longueur pour apercevoir le cordon. Celui de gauche est toujours en dehors de l'aorte abdominale qui est constamment rejetée à gauche de la ligne médiane. Au niveau de l’insertion des organes génitaux se voit un petit ganglion d’où partent sans doute les nerfs spermatiques. Au delà commence le Canal hémal dans lequel les deux cordons restent dis- tincts ; leurs ganglions sont unis par de fines anastomoses. Telle est, dans son ensemble, la disposition du sympathique de ces petits êtres ; elle ne s’écarte pas, comme on peut le voir, de celle que présente le sympathique chez les autres osseux. Nous ferons remarquer, en terminant, que l'étude du sympathique 106 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE des Syngnathes est de la plus grande difficulté, car les nerfs ne se colorent que fort peu et très lentement par l'acide osmique ; en outre le diamètre du cordon et des filets est toujours excessivement faible. Il varie entre :$ et #4 de millimètre. II. — Plectognathes. Ce groupe renferme 4 familles dont les représentants ne parais- sent que de loin en loin dans les mers d'Europe. Une seule espèce, l’Orthagoriseus mola, se prend de temps à autre sur les côtes de France. Malgré des recherches nombreuses, nous n’avons réussi à nous procurer qu'un seul individu de cette espèce, et malheureuse- ment son état de décomposition était si avancé que nous n’avons pu en tirer qu’un faible parti. Nous ne dirons donc que quelques mots de son sympathique, nous réservant, lorsque l’occasion s’en présentera, de le décrire complètement. ORTHAGORISCIDÉS (Orthagoriseus mola). Le seul fait digne d’être mentionné, c’est la coalescence des pre- miers ganglions. Ceux qui correspondent en effet aux nerfs tri- jumeau, facial, glosso-pharyngien et pneumogastrique sont soudés en un seul gros ganglion étendu depuis le premier de ces nerfs jusqu’à la partie postérieure du dernier. Le pneumogastrique. très volumineux, en recoit deux gros filets. Le cordon sympathique présente au-dessous de chacun des nerfs rachidiens un ganglion nettement limité; une courte racine le rattache au nerf. Le nerf splanchnique naît du cordon, entre le gros ganglion céphalique et le premier petit ganglion suivant. III. — Chorignathes TRACHINIDÉS. Dans cette famille, se trouvent deux genres bien distincts que nousavons étudiés séparément. Nous examinerons d’abord DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 407 Trachinus draco. Le sympathique commence sous le trijumeau par un ganglion pyriforme ; il reçoit du trijumeau au moins deux racines ; il en recoit une du facial. En dehors il émet 8 filets, dont deux se portent sur le tronc commun des maxillaires et l’autre sur l’ophthalmique. En dedans il en émet deux, l’un destiné au nerf ciliaire long, l’autre au ganglion ophthalmique, dans lequel il se jette directement après s’être divisé en 2 ou 3 branches. Il existe des ganglions sympathiques sous les nerfs facial, glosso-pharyngien, pneumogastrique et hypoglosse ; des filets les unissent à ces nerfs. Du ganglion correspondant à l’hypoglosse partent 8 filets, dont deux se perdent dans le muscle latéral et le 3° dans l’hypoglosse. Ce . ganglion, quireçoit une forte racine de ce dernier nerf, est en outre uni à son symétrique de sauche par une anastomose, et de sa partie postérieure naît le nerf splanchnique. Ce nerf est plus fort que le cordon sympathique. Il envoie 2 filets à la partie antérieure des reins ; puis il se bifurque et ses branches forment un Plexus cœliaque. Les 2 cordons abdominaux présentent le long de leur trajet des ganglions en général très nets. Vers la partie postérieure de l’ab- domen, les reins reçoivent de nouveaux filets. Le nerf sperma- tique naît de l’un des derniers ganglions gauches de l’abdomen. Les 2 cordons, d’abord écartés l’un de l’autre, se rapprochent vers la partie postérieure de l’abdomen ; ils restent distincts, mais s’en- voient des anastomoses. La partie caudale est également double et les 2 cordons sont divisés en segments alternativement gros et fins. Uranoscopus scaber. Le sympathique de l’autre espèce de cette famille commence sous le ganglion de Gasser, par un petit renflement qui reçoit plu- 108 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE sieurs racines du trijumeau. Il en part plusieurs filets, dont 2 internes qui vont l’un au nerf ciliaire long et l’autre au ganglion ophthalmique. Un autre rameau part du bord antérieur du gan- glion sympathique, se bifurque, et ses deux branches vont se jeter sur deux rameaux du nerf ophthalmique. Un autre, né du même ganglion, se porte au tronc commun des maxillaires. Comme chez le Trachinus, la partie du cordon comprise entre le trijumeau et le facial est logée dans un canal osseux ; cette partie est double et le nerf facial passe dans l'anneau formé par ces 2 cordons. Le palatin est accolé intimement au cordon sympathique dont il reçoit un filet. Les ganglions céphaliques suivants sont petits et peu dis- tincts ; ils sont reliés aux nerfs crâniens correspondants par des racines et des filets. Le 5° ganglion reçoit de l'hypoglosse une forte racine ; il lui envoie ensuite un filet portant quelques petits ganglions et donne naissance au nerf splanchnique droit ; il n’est pas uni à son symétrique par une anastomose; mais ce dernier en revanche donne naissance au nerf splanchnique gauche. La partie abdominale présente une disposition remarquable. Les 2 cordons, d’abord écartés, se rapprochent peu à peu et finissent par se souder ; cela se voit chez quelques espèces. Mais ici les 2 cordons s’envoient un nombre considérable d'anastomoses, de telle sorte qu’au lieu de 2 cordons, on a, en réalité, un Plexus abdominal très compliqué. Les ganglions qu’il renferme reçoivent, des nerfs rachidiens, de très longues racines, et, de son réseau ou de ses gan- glions, partent de nombreux filets pour les reins. Les nerfs sperma- tiques présentent à leur origine un ganglion assez volumineux. Enfin la partie caudale est double et les deux cordons nous ont paru conserver le même calibre dans toute leur étendue. BLENNIIDÉS (Blennius ocellaris). Chez ce poisson, le sympathique commence par un petit ganglion placé au-dessous et en avant du trijumeau, juste au niveau du point DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 109 d’émergence des deux nerfs ciliaires. Ces deux nerfs sont d’abord accolés ; ils se séparent bientôt et s’envoient quelques anastomoses. Le 1° ganglion sympathique leur envoie deux filets : l’un se jette directement dans le ganglion ophthalmique ; l’autre, plus gros, se bifurque : sa plus petite branche se porte sur le nerf ciliaire long ; la branche principale se dirige vers le tronc de l’oculo-moteur commun d’où naissent la racine du ganglion ophthalmique et les nerfs des muscles droits interne et inférieur, et l’oblique inférieur. Il nous a été impossible de suivre cette branche dans son trajet au milieu du tronc de l’oculo-moteur commun, de sorte que nous igno- rons si toutes ses fibres se portaient exclusivement sur la racine du ganglion ophthalmique, ou bien si elles se distribuaient à toutes les branches issues de ce tronc. La partie du cordon logée dans le canal osseux est assez longue. Le 2° ganglion est voisin du premier, il reçoit à la fois des ra- cines du trijumeau et du facial. Le 3° est assez gros ; il est relié par une forte racine au glosso-pharyngien et, par un filet, au pneumo- gastrique. Par une exception remarquable, le 4 ganglion est fort peu apparent. Mais un peu en arrière de lui, il en existe un très gros qui reçoit une longue racine de l’hypoglosse et lui envoie un filet. C’est de ce gros ganglion que partent les racines du ganglion splanchnique. Elles sont placées de chaque côté de l’artère cœliaque ets’envoient quelques anastomoses avant de se réunir dans le gan- glion splanchnique. Celui-ci reçoit en outre un filet nerveux du gan- glion gauche qui est relié par une anastomose avec son symétrique de droite. La partie abdominale du cordon suit étroitement la colonne ver- tébrale. Sous chaque nerf rachidien se trouve un petit ganglion. Les deux cordons se soudent en un cordon unique vers le milieu de la cavité abdominale. Ils se séparent en entrant dans le Canal hémal et restent dis- tincts jusqu’à leur terminaison. Chacun d'eux est formé de segments alternativement gros et fins qui alternent avec ceux du côté opposé. 110 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE CALLIONYMIDÉS (Callionymus maculatus). Chez ce poisson, le sympathique commence au-dessous et à la partie antérieure du trijumeau par un ganglion aplati en forme de disque. Il en part plusieurs filets destinés, l’un au tronc commun des maxillaires, et les autres aux nerfs ciliaires. Le cordon est encore logé dans un canal osseux et décrit une courbe à concavité interne. Son calibre est relativement gros pour la petite taille de l'animal ; mais les ganglions échelonnés sur son parcours n’ont que des dimensions très réduites. Il faut en excepter cependant celui qui se trouve placé entre le facial et le glosso-pharyngien. Les filets qui en naissent sent de la plus grande ténuité ; aussi est-il difficile de les voir tous et de bien déterminer leurs rapports. Nous avons observé, chez ce poisson, une disposition intéressante des nerfs branchiaux. Tous sont pourvus d’un gros ganglion, et celui qui se porte à la 2° branchie naît du même tronc que le glosso- pharyngien, mais il reçoit du pneumogastrique une très forte anas- tomose. C’est du 5° ganglion que naît le nerf splanchnique qui émet à sa partie postérieure deux filets, dont l’un accompagne l’artère- axillaire et dont l’autre va se jeter surle 1* nerf rachidien. Le reste du cordon n’offre rien de remarquable ; la partie ab- dominale reste double ;: maïs dans la moitié postérieure les deux cordons s’envoient de nombreuses anastomoses. LOPHIIDÉS (Lophius budegassa et piscatorius). Le sympathique des deux espèces que l’on trouve sur les côtes de France étant identique, la description suivante s’applique à l’une comme à l’autre. La partie antérieure du cordon n’est pas logée dans un canal osseux ; c’est, de toutes les espèces que nous avons étudiées, la seule qui, avec les Gadidés, présente cette particularité. Le cordon décrit une courbe très accentuée à concavité interne et se trouve à une DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. a assez grande distance de l’axe longitudinal de l'animal. Il prend naissance par un ganglion situé au-dessous et à la partie antérieure dutrijumeau. Ce dernier nerf lui envoie un grand nombre de racines qui vont le trouver directement ou qui traversent préalablement le ganglion de Gasser. Il donne naissance à plusieurs filets nerveux Le plus important va trouver, à une assez crande distance en avant, le nerf palatin ; d’autres fois, il est court et se ramifie avant de se perdre dans ce nerf. Un autre filet se porte vers le point de sortie des deux nerfs oculo-moteurs. En arrivant près d’eux, il se bi- furque : la plus grosse branche se porte sur l’oculo-moteur commun et se divise à son tour ; l’une des branches de la nouvelle bifurca- tion se dirige vers la périphérie de l’oculo-moteur, tandis que l’autre provient de l’oculo-moteur lui-même. Le nerf dont il est question est done mixte et le premier ganglion sympathique, d’où il émane, reçoit ainsi des fibrilles de l’oculo-moteur commun. Nous aurons plus tard l’occasion de revoir le même fait chez un autre poisson. La seconde branche de la première bifurcation s'approche de l’o- culo-moteur externe ; mais au lieu de mêler ses fibres à celles de ce nerf, elle forme simplement une anse qui embrasse un très mince faisceau de l’oculo-moteur externe et va se perdre dans l’un des muscles de l’œil. L’oculo-moteur externe n’est done pas en rapport intime avec le sympathique. Le filet sympathique dont il _est question émet sur son trajet de nombreux rameaux qui vont se jeter dans les nerfs ciliaires. Ces deux nerfs sont eux-mêmes unis par des anastomoses. Chaque nerf ciliaire recoit ordinairement un …. filet sympathique ; quelquefois le nerf ciliaire court en recnit deux. Indépendamment de ces filets nerveux, les deux nerfs ciliaires sont encore en rapport avec un autre nerf sympathique également issu du 1% ganglion. Ce nerf se porte sur un faisceau émané de l’'ophthalmique et placé entre les 2 nerfs ciliaires ; il se perd dans un petit ganglion situé à la bifurcation du faisceau dont les deux branches se portent l’une sur le nerf ciliaire long et l’autre sur le court. 142 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE D'autres filets sympathiques se dirigent vers le nerf ophthal- mique, les nerfs maxillaires et le facial. L’un des plus impor- tants s’anastomose avec des rameaux du glosso-pharyngien et disparaît dans la branche antérieure de ce nerf. Enfin, quelques filets très fins, et que nous n’avons pas vus ailleurs, se distribuent à la surface ou sur le pourtour de l'orbite. Nous avons même pu en suivre un jusque sur la partie médiane et intra- osseuse du Circulus cephalicus. Le 2° ganglion ne se distingue pas facilement du premier auprès duquel il est placé. Le facial lui fournit une très forte racine et en reçoit un filet considérable. En face du glosso-phar yngien, il n’existe pas, à proprement parler, de ganglion. Le léger renflement qui correspond au facial se continue jusque sous le glosso-pharyngien, situé à une petite distance du facial. Parfois le glosso-pharyngien passe dans une anse nerveuse avec laquelle il ne contracte aucune liaison ; d’autres fois il est relié avec le sympathique par une anas- tomose. La partie céphalique du cordon sympathique semble toujours composée de 2 faisceaux principaux qui s’envoient de nombreux filets. Le faisceau le plus considérable représente réellement le cordon sympathique (fig. 4, PI. VI). Quant à l’autre, sd, c’est un gros filet mixte dont une partie des fibres est envoyée au glosso- pharyngien par le ganglion correspondant au pneumogastrique ; une autre partie lui vient du glosso-pharyngien lui-même et du sympathique; on peut donc également le considérer comme une dépendance du sympathique, comme une sorte de Cordon surnumé- raire. Îl émet le long de sontrajet un certain nombre de filets qui se ramifient, s’anastomosent entre eux et avec d’autres filets issus du cordon sympathique ‘ou de ses ganglions, et se distribuent aux muscles branchiaux, pl. Nous ne dirons rien des ganglions suivants dont le nombre, la forme et la position varient avec les individus. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 143 Le ganglion d’où part la racine droite du nerf splanchnique recoit une racine de l’hypoglosse et une autre du premier nerf rachidien ; il envoie un gros filet à chacun de ces 2 nerfs. Il existe 2 nerfs splanchniques. La racine droite est longue ; elle se termine par le ganglion splanchnique droit relié à son symétrique par 2 ou 3 filets fins munis ordinairement chacun d’un ganglion. De chaque ganglion splanchnique part un faisceau assez volumineux pour le rein correspondant. Chez la Baudroie, le rein est très court, parfaitement délimité, ayant presque la forme d’un haricot et placé immédiatement en arrière du pneu- mogastrique. Le faisceau nerveux qu'il recoit se ramifie en péné- trant dans la substance rénale et ne tarde pas à s'y perdre. Du côté gauche, le faisceau destiné au rein se divise avant d’atteindre cet organe ; la plus petite partie le dépasse et va mêler ses nom- breux filets à ceux du rameau viscéral du pneumogastrique. Le nerf splanchnique gauche, composé de 3 ou 4 faisceaux, va renforcer le droit en deux points différents. Leurs ramifications accompagnent celles de l'artère cœliaque, qu’elles entourent de plexus fournis. Les filets qui en partent se rendent an mésentère et à tous les organes de la cavité abdominale. Les 2 cordons, d’abord éloignés l’un de l’autre, se rapprochent et finissent par se souder en un cordon unique vers la fin du pre- mier tiers de l'abdomen, c'est-à-dire un peu avant le canal formé par les dernières vertèbres dorsales. Ces cordons portent des gan- glions bien développés, qui s’envoient des anastomoses; leurs racines sont longues et mixtes, de sorte que les nerfs rachidiens qui se portent aux ventrales contiennent des fibres sympathiques. Les premiers ganglions de la partie abdominale donnent en outre naissance à des filets longs et fins qui accompagnent les uretères en émettant de nombreux rameaux, ou qui se portent vers la partie médiane du revêtement péritonéal de la cavité abdominale. Ces derniers présentent des ganglions ; ils sanastomosent entre eux et avec les précédents et donnent naïssance à un riche plexus situé ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2° SÉRIE. — T. V Dis, — suppL. 1889. — Mém. 8 114 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE entre les uretères. De ‘ce plexus partent les filets destinés aux organes génitaux ; cest donc le Plexus spermatique. Près du point où les deux cordons réunis disparaissent dans le canal abdominal, les derniers ganglions donnent naissance à deux filets plus gros que les précédents; ils se dirigent en droite ligne vers la partie postérieure de la vessie urinaire, puis se réunis- sent en un ganglion d’où partent les filets qui se distribuent sur toute la surface de cet organe, La partie du cordon logée dans le canal abdominal est double et disparaît complètement. Elle se continue dans le Canal hémal sans offrir rien de remarquable. $es ganglions sont ou accolés ou réunis par une commissure. Chacun d'eux reçoit une ou deux racines et émet un filet destiné au rameau ventral du nerf rachi- dien. Le calibre de chacun des cordons est à peu près constant. A l'extrémité du Canal hémal, chaque cordon se porte en dehors, sort du canal et va se confondre avec l’une des principales bran- ches du Plexus caudal. GoB1lIDÉS ((robius Jozo). Le sympathique naît sous le trijumeau. Le premier ganglion est étroit et allongé ; il se continue en avant par deux filets dont l’un se porte sur le nerf ciliaire long né du ganglion de Gasser et l’autre sur l’oculo-moteur commun ; il est probable que les fibres de ce dernier n’intéressent que la racine du ganglion ophthalmique issue de l’oculo-moteur ; mais l’extrême ténuité de ces différents nerfs ne nous a pas permis de nous en assurer. Sous chacun des nerfs crâniens suivants se trouve un tout petit ganglion; le cordon qui les relie décrit une courbe fortement accusée, dont le sommet est très ‘éloigné de la ligne médiane. Cela tient à ce que la cavité de l'oreille est très développée en largeur. La ténuité du cordon sympathique contraste avec l'énorme développement des nerfs crâniens; le glosso-pharyngien et le DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 115 pneumogastrique sont en outre pourvus de ganglions considé- rables. Le 5° ganglion, très petit, est relié à son symétrique par une anastomose. Celui de droite donne naissance à un nerf, racine splanchnique considérable qui va se placer en arrière de l’artère mésentérique. Cette grosse racine porte deux ganglions allongés et assez volumineux, d’où partent les nerfs destinés aux viscères. Les deux cordons se rapprochent vers la partie antérieure de la 4° vertèbre et, à partir de ce point, ils sont presque tout le temps très voisins de l'aorte. On ne les découvre qu'avec la plus grande difficulté, d'autant plus qu’ils sont très fragiles et s’enlèvent faci- lement avec le péritoine, Muzzinés (Mullus surmuletus). Le 1° ganglion sympathique se trouve au-dessous du trijumeau, mais sans y adhérer. Il en reçoit deux ou trois racines; il en recoit une également du facial. Des deux gros filets qu’il émet, l’un se porte sur le nerf maxillaire et l’autre sur les nerfs ciliaires. Il se trouve placé immédiatement en avant du gros nerf destiné au barbillon. Le 2° ganglion est placé au contraire immédiatement en arrière de ce nerf, qui n’est qu'un simple rameau du facial. Il lui envoie un fort filet qui le contourne en avant pour aller se perdre dans les faisceaux de sa partie supérieure. Il envoie également un filet au rameau antérieur du glosso-pharyngien. Le 3° ganglion, très petit, accolé à la face inférieure du glosso-pharyngien, dont il reçoit une racine, envoie à ce nerf un assez gros filet. Le 4° s’apercoit difficilement ; il est, en effet, caché par le faisceau musculaire anté- rieur du muscle latéral ; il ne présente d’ailleurs rien de remar- quable. Le 5° est placé en arrière du ligament rond ; il recoit de lhypoglosse une forte racine et lui envoie un filet assez gros qui accompagne pendant quelque temps l'artère axillaire. 446 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Près de lui et en arrière se trouve le premier ganglion abdo- minal, relié à son symétrique par une anastomose. C’est de là que part le nerf splanchnique qui se ramifie immédiatement. Ses diverses branches s’anastomosent et forment un plexus serré autour de l'artère mésentérique. La présence du gangiion splanchnique n'est pas constante. | Dans la partie abdominale, les deux cordons restent dis- tincts, mais s’envoient quelques rares anastomoses ; les ganglions sont petits. La partie caudale est double également. De place en place, l’un des cordons devient plus fin ; les petits ganglions sont peu appa- rents. À l'extrémité postérieure du Canal hémal, les deux derniers ganglions se soudent, puis les deux cordons s’écartent; ils pas- sent entre les deux dernières vertèbres caudales et vontse terminer sur l’un des principaux rameaux du Plexus caudal, après avoir donné naïssance à quelques fibrilles destinées aux vaisseaux du Vasa caudale. TRIGLIDÉS (Scorpæna scrofa). Nous avons étudié dans cette famille le Scorpæna scrofa etles Trigla lyra et corax. Nous commencerons par la scorpène. Le premier ganglion sympathique est placé sous le ganglion de Grasser auquel il est étroitement accolé ; sa forme est celle d'une sphère aplatie de bas en haut ayant, chez un individu long de 37 centimètres, un diamètre de 2 millimètres. Ce ganglion paraît d'autant plus considérable que le cordon sympathique est faible. IL est entouré d’une membrane jaunâtre assez épaisse ; si on l'enlève, on peut apercevoir, à l’aide d'une loupe, les grosses et belles cellules qu’il renferme. Le trijumeau lui envoie deux racines, une forte et une faible ; le facial lui en envoie également deux. De son bord interne partent deux filets destinés aux nerfs ciliaires Le postérieur, qui est le plusgros, se porte sur la branche du DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 117 trijumeau qui forme l’une des racines du ganglion ophthalmique et se bifurque en y arrivant ; les deux branches de la bifurcation se distribuent aux deux racines du ganglion ophthalmique, c’est-à- dire à la racine venue du trijumeau et à la racine venue de l’oculo- moteur commun. Le 2° filet, émané du bord interne du premier ganglion, va se jeter dans le nerf ciliaire long. Les deux nerfs ciliaires, indépendants à leur origine, sont unis par une anasto- mose. Les ganglions suivants sont très petits; ils sont tous reliés aux nerfs crâniens correspondants par des racines et des filets. Entre le 2° et le 3° ganglion, le cordon sympathique, qui ne mesure qu'un quart de millimètre de diamètre, émet deux filets des- tinés l’un au rameau antérieur du glosso-pharyngien et l’autre à la partie principale du même nerf. Le 5° ganglion est placé en arrière du ligament rond ; il recoit de l’hypoglosse 3 racines, fournies par chacune des trois branches qui forment ce nerf. La postérieure est mixte. C’est de ce ganglion que partla racine du nerf splanchnique. Le ganglion splanchnique, voisin du précédent, est très considérable. Il en part deux nerfs principaux et plusieurs petits qui s’envoient des anastomoses pour constituer le Plevus cœliaque. Un autre filet, émané de ce même ganglion, se rend à la partie antérieure des reins ; ses ramifications parcourent, en avant et en arrière, les paroiïs de la veine cardi- nale postérieure. Le 5° ganglion est uni à son symétrique par une anastomose. A partir de là, le cordon latéral devient un peu plus considérable. Les deux cordons se rapprochent et se soudent au niveau du 10° ganglion ; c’est de ce cordon unique que partent, vers le 12° ganglion, les nerts spermatiques. Ils accompagnent les uretères et les canaux déférents et se répandent dans les organes génitaux et à la surface de la vessie urinaire, sans former de plexus, au moins apparent. Les nerfs rachidiens correspondant aux quatre premiers gan- 118 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE. glions abdominaux en recoivent des filets assez considérables, surtout les deux premiers qui, de concert avec l’hypoglosse, inner- vent les muscles de la pectorale ; les deux nerfs rachidiens suivants se portent aux muscles des ventrales. Les autres ganglions abdo- minaux recoivent tous des racines mixtes. En arrivant au Canal hémal, le cordon se dédouble ; ses ganglions ont accolés les uns aux autres dans la partie antérieure du canal, ils sont simplement unis par une anastomose dans la partie posté- rieure. Chacun reçoit une ou deux racines du nerf rachidien correspondant et envoie à la branche ventrale de ce nerf un filet très ténu. Les divers segments des deux cordons sont inégaux, ils alternent entre eux et avec ceux du Cordon opposé. A l’extrémité du Canal hémal nous n’avons pu apercevoir que le cordon de droite ; il émettait de nombreuses fibrilles accompagnant chacune un rameau artériel, et allait se perdre dans le nerf rachi- dien voisin. Trigla Jyra et T. corax. Il nous reste peu de chose à dire du sympathique des Trigles ; ilse comporte, en effet, sensiblement comme celui de la Scorpène. Mais le premier ganglion est très petit, tandis que le second est beaucoup plus considérable. L’anastomose du 5° ganglion cépha- lique gauche se portait ici sur le ganglion splanchnique et non sur son symétrique, comme dans la Scorpène. Le Plexus cœliaque était très compliqué. La réunion des deux cordons dans la partie abdominale se fait un peu plus en arrière que dans la Scorpène. Ce que nous avons dit des filets destinés aux nerfs ciliaires, aux différents nerfs crâniens et rachidiens s'applique exactement aux Trigles, ainsi d'ailleurs que la terminaison du sympathique à l’ex- trémité du Canal hémal. Chez Trigla lyra, les branches ventrales des nerfs rachidiens forment, de chaque côté des hémapophyses de la partie caudale, un plexus compliqué (p1, fig. 5, PI VI), contenant des fibres sympathiques. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 119 Cette famille contient un poisson d’eau douce qui a été souvent étudié, le Cotte ; malheureusement nous n’avons pu nous le pro- curer. Peroipés (Serranus Cabrilla). Outre le Bar, que nous avons choisi comme type des Osseux, la famille des Percidés contient encore la Perche, que nous n’avons pu étudier, et les Serrans. D'une manière générale, nous pouvons dire que le sympa- thique de ces derniers poissons se comporte comme celui du Bar. Chez eux, le sympathique naît encore sous le ganglion de Gasser et envoie deux filets aux nerfs ciliaires ; chacun des nerfs crâniens suivants est relié par une ou plusieurs racines et un ou plusieurs filets au petit ganglion correspondant. Le 5° ganglion reçoit une forte racine sympathique de l’hypoglosse et une anastomose de son symétrique. [Il donne naissance au nerf splanchnique et à trois filets qui se portent vers la périphérie de l’hypoglosse et du premier nerf rachidien. Les deux cordons, dans la partie abdominale, n’offrent rien de remarquable. Distincts dans la partie antérieure, ils se réunissent en un cordon unique avant de pénétrer dans le canal formé par les apophyses des dernières vertèbres dorsales. Ils se séparent en entrant dans le Canal hémal. Dans cette partie, les deux cordons conservent à peu près le même calibre; leurs ganglions sont unis par des anastomoses; chacun recoit une ou deux racines et envoie un filet à la branche ventrale du nerf rachidien correspondant. Mais ici les derniers nerfs rachidiens s'unissent vers le tiers postérieur du canal et forment un plexus caudal recevant plusieurs filets du sympathique (fr, fig. 2, PI. VI). Les cordons vont se terminer en dehors du Canal hémal sur l’un des rameaux du plexus, après avoir donné naissance à plusieurs fibrilles destinées au Vasa caudale. 120 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE SCOMBRIDÉS. Nous avons étudié dans cette nombreuse famille le Scomber scomber, le Trachurus trachurus, le Pelamys sarda, le Zeus faber, le Capros aper et le Lichia vadigo. Les autres espèces sont malheureusement rares et nous n’avons pu nous les procurer. | Comme le sympathique de ces divers poissons présente une grande similitude, nous décrirons celui de l’une des espèces les plus répandues et les plus caractéristiques, le Maquereau. Scomber scomber. Le sympathique présente à sa partie antérieure un petit gan- glion situé sous le trijumeau. Il reçoit de ce nerf plusieurs racines et donne naissance à un certain nombre de filets. L'un gros et courtse porteen haut et en avant et va se confondre avec l’ophthal- mique. Un autre, long et fin, se porteen dehors sur le tronc commun des maxillaires. < En dedans, deux petits filets se rendent aux deux branches de bifurcation d’un nerf issu du trijumeau ; ce nerf est le tronc com- mun des nerfs ciliaires. Les points où aboutissent les filets sympa- thiques ne sont marqués par aucun renflement. Sous les nerfs crâniens suivants se voient de petits ganglions qui donnent des fiiets et reçoivent des racines. Le 5° est ordinairement placé en arrière du ligament rond. C’est de ce ganglion que partent les racines du nerf splanchnique. Il existe un gros ganglion splanch- nique au point où l’artère cœliaque se bifurque. De ce ganglion partent cinq ou six gros nerfs qui s’anastomosent entre eux et avec la branche viscérale du pneumogastrique et forment un plexus d'où partent des filets pour la vessie natatoire, la partie antérieure des ovaires et les viscères de la cavité abdominale ; ordinairement, = DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 121 c’est au 5° ganglion droit qu’aboutit l’anastomose envoyée par le 9° ganglion gauche ; quelquefois, cependant, cette anastomose va trouver un petit ganglion placé sur la racine du nerf splanchnique droit, un peu avant le ganglion splanchnique. Dans la partie abdominale, les cordons restent distincts ; leurs ganglions, peu développés, reçoivent de longues racines ; ceux qui précèdent le canal formé par les dernières vertèbres dorsales s’en- voient des anastomoses. Dans le Canal hémal, ils restent séparés et sont divisés en seg- ments inégaux qui alternent avec ceux du côté opposé ; leurs ganglions sont fréquemment soudés ou accolés. Chez le Zeus faber, le facial est très voisin des nerfs maxillaires ; aussi le canal osseux qui sépare leurs points de sortie est-il très court. En arrière du facial et au-dessous il existe un très fort ganglion. Si l’on enlève la paroi inférieure du canal osseux, on voit que ce ganglion se continue en avant jusqu'au ganglion de Gasser. C’est encore là l’origine du sympathique. Mais le 1% gan- glion est fort peu apparent ; il est large et sans forme accusée ; le trijumeau et le facial lui envoient plusieurs fortes racines. Les nerfs maxillaires, ophthalmique et facial reçoivent de lui de forts filets. Il en envoie deux au tronc des nerfs ciliaires. Au point où ces nerfs se séparent il existe un ganglion qui nous a paru soudé à l’oculo- moteur commun. Entre les deux premiers ganglions, le cordon, logé dans un canal osseux, est double; le facial traverse un anneau nerveux. Sous chacun des nerfs crâniens suivants, il se trouve un ganglion relativement considérable qui est relié au nerf correspondant par de grosses racines et des filets. Entre le facial et le pneumogastrique, le cordon émet plusieurs filets qui se ramifient un grand nombre de fois et se distribuent à certains muscles bran- chiaux et à la surface interne de la membrane qui tapisse intérieu- rement la chambre branchiale. La racine du 5° ganglion est consi- _dérable et les filets qu’il envoie à l’hypoglosse et par suite à la pec- torale sont longs et forts. Le premier ganglion abdominal est assez 122 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE éloigné du 5° ganglion crânien; aussi sa racine est fort longue. Chez l’un des individus que nous avons disséqués, c'est de ce pre- mier ganglion abdominal, ou plutôt d’un petit ganglion sans racine qui le précède immédiatement, que part, à droite, la racine du nerf splanchnique, sous la forme d’un filet fin et très long. Ce filet se jette dans le ganglion splanchnique, dont les dimensions sont con- sidérables et qui est accolé à l'artère cœliaque. La racine gauche, plus courte, porte un ganglion très net relié au ganglion splanch- nique par un assez gros nerf qui fournit en même temps des filets au rein droit. Chez un autre individu, la racine droite du ganglion splanchnique est encore fine et très longue, mais cette fois elle part du 5° ganglion céphalique. À gauche, c’est encore du 5° ganglion que part la racine du ganglion splanchnique; mais elle est forte et courte et présente un gros ganglion d’où partent 8 filets : deux se rendent au ganglion splanchnique, de sorte que ce ganglion paraît avoir trois racines, et le troisième va au rein gauche. Du ganglion splanchnique partent trois gros nerfs qui s’anas- tomosent entre eux et avec le pneumogastrique. Ils se continuent sur les artères viscérales etleurs ramifications. Le premier nerf rachidien, petit, se rend à la pectorale et reçoit un filet sympathique. Il semble qu’à partir de ce nerf, et jusqu’au sixième inclusivement, 1l y ait de chaque côté un double cordon sympathique; il est, croyons-nous, plus exact de les considérer comme le résultat d’un dédoublement du cordon. l’un et l’autre sont considérables. Le supérieur est appliqué directement à la partie inférieure des nerfs rachidiens auxquels il envoie de nom- breux filets ; l'inférieur en est plus ou moins éloigné, suivant les individus ; la longueur des racines qui se rendent à ses ganglions est naturellement en rapport avec la distance du cordon ; il envoie également des filets aux mêmes nerfs rachidiensqui se portent tous à la nageoire ventrale. Les deux cordons d’un même côté sont unis par plusieurs anastomoses ; les artérioles intercostales sont Léna DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 123 assez souvent entourées par une anse sympathique ; enfin, les gan- glions des cordons latéraux s’envoient plusieurs commissures. C’est au niveau du 7° nerf rachidien que les 2 cordons pénètrent dans le canal formé par les dernières vertèbres dorsales ; ils se réunissent au niveau de la 9° vertèbre. É Arrivés dans le Canal hémal, ils se dédoublent et se divisent en seoments d'inégal calibre. Tæœnioïdes. Cette famille renferme des poissons remarquables, rares dans nos mers, sauf la Cépole. Nous avons eu la chance d’avoir à notre disposition un Régalec et un Trachypière. La disposition du sym- pathique étant sensiblement la même chez ces 2 animaux, la des- cription suivante convient à l’un et à l’autre. Nous donnerons ensuite celle de la Cépole, dont le sympathique présente des dispo- sitions spéciales. Regalecus gladius ? et Trachypterus falx. Deux espèces de Régalecs sont signalées comme appartenant à la faune française ; elles se distinguent surtout l’une de l’autre par la position de l'anus et le nombre des rayons de la dorsale. L’indi- vidu qui a fait l’objet de nos recherches ne se rapporte exarte- ment ni à l’une ni à l’autre des deux espèces, mais se rapproche plus du Régalec-épée que du Régalec-trait. Aïnsi, l'anus était situé après le quart antérieur, comme dans la première espèce ; mais le nombre des rayons de la dorsale n’atteignait pas 200, tandis que Moreau en attribue 340 à un individu dont la longueur était infé- rieure à celle de notre exemplaire. Le nombre des rayons de la dorsale, chez la seconde espèce, est encore plus considérable. En outre, Moreau, d’après Cuvier et Valenciennes, dit que, dans les deux espèces, l’anus est situé sous le 90° rayon de la dorsale ; 124 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE dans notre individu, il était sous le 100°. Ces différences ne sont pas, à notre avis, suffisantes pour créer une espèce nouvelle ; elles nous sembleraient plutôt prouver que les caractères tirés du nombre des rayons et de la position de l'anus n’ont pas la fixité qu'on leur a attribuée, Le sympathique commence au-dessous du trijumeau, mais ne présente pas de ganglion apparent. Il reçoit de ce nerf un grand nombre de fibres et se dirige en arrière vers le facial, au- dessous duquel se voit un renflement ganglionnaire ; puis le cordon se rapproche de la ligne médiane et se renfle en un gros ganglion duquel part un nerf assez volumineux destiné au palatin. Voioi une particularité que nous n'avons constatée que chez ce poisson et chez le Trachyptère. Les deux filets issus des deux gros ganglions dont il est question se rapprochent de la ligne médiane et se soudent en un ganglion impair d’où partent les deux anastomoses destinées aux deux nerfs palatins (g et sb, fig. 9, PI. V). Vis-à-vis du glosso-pharyngien se trouve un ganglion sympa- thique très net ; il y en a trois, non moins nets, correspondant au pneumogastrique et assez distants les uns des autres (3 et 4). Enfin, en arrière de ces petits ganglions s en trouve un autre ayant des dimensions énormes 6. Ce ganglion, long de 2 centimètres et larce en certains points de 3 millimètres, paraissait formé de deux ganglions aplatis réunis par une substance nerveuse particulière. Il est uni à son symétrique par une double anastomose. Chacun d’eux reçoit plusieurs racines du pneumogastrique et des nerfs sui- vants, et leur envoie un certain nombre de filets, Enfin, de celui de droite naît le nerf splanchnique, qui accompagne l’artère cœæliaque et présente à une petite distance un ganglion splanchnique très net. Trois filets partent de ce ganglion et accompagnent les ramifi- cations de l'artère. Les cordons latéraux restent distincts dans toute l’étendue du corps ; au-dessous des nerfs rachidiens se voient de petits ganglions bien accusés; toutes leurs racines sont mixtes. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 125 Ils restent séparés dans toute l'étendue du Canal hémal et con- servent le même calibre. A l'extrémité postérieure du canal, ils se ramifient plusieurs fois et vont se distribuer dans les muscles caudaux ou s’accoler aux vaisseaux du Vasa caudale. Cepola rubescens. La Cépole appartient à la même famille ; néanmoins, nous déeri- rons son sympathique parce qu’il présente quelques dispositions particulières. Il commence par un assez gros ganglion arrondi, situé an-dessous du ganglion de Grasser, auquel il est étroitement accolé. De ce ganglion partent en dehors deux filets destinés à la masse com- mune des maxillaires. En dedans, il part également deux filets, gros et longs, quil est important de faire connaître. I’un d'eux, le postérieur, se rend directement au ganglion ophthalmique. Au moment de se jeter dans ce ganglion, il rencontre la racine issue du nerf oculo-moteur commun ; la racine que le ganglion recoit ordinairement du trijumeau manque ici, de sorte que le gros filet émané du 1* ganglion sympathique la remplace {rp, fig. 10, 5 RARE Le second filet situé un peu en avant du premier constitue, à pro- prement parler, le nerf ciliaire long. Voici ce que nous constatons chez deux individus. Chez l’un, il part du ganglion de Gasser un filet fin (nb) qui se porte vers le second filet sympathique dont il est question; leur jonction est marquée par un petit ganglion (a) d’où partent à leur tour deux nerfs ; l’un, court (li), rejoint le premier filet sympathique, celui qui se rend au ganglion ophthal- mique (v) ; le second n’est autre que le nerf ciliaire long (nb). Chez le 2° individu, le filet postérieur se porte encore directement au ganglion ophthalmique; mais l’antérieur constitue seul cette fois le nerf ciliaire long ; il n’est relié par aucune anastomose ni au triju- meau, ni même à la racine sympathique du ganglion ophthalmique. 126 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Ainsi, chez la Cépole, le nerf ciliaire long est entièrement ou pres- que entièrement constitué par un filet sympathique. Une autre particularité non moins remarquable nous est encore offerte par ce poisson. Le cordon sympathique paraîtdouble entre le 1° et le 2° sanglion. Or, l’un des cordons, généralement ie plus gros, se perden arrière dans le deuxième ganglion céphalique, c’est-à-dire dans celui qui correspond aufacial. Si on le suit d’arrière en avant, onconstate qu’il ne s'arrête pas au premier ganglion céphalique ; en passant au-dessous de ce ganglion, il se renfle légèrement, se soude partiellement à lui et continue sa marche, en avant et en bas, dans un canal osseux qui va déboucher dans le Canal sous-crânien logeant les muscles droits de l’œil. Il en sort par le même orifice que le nerf oculo-moteur externe et va sedistribuer à la face inférieure de la mâchoire supérieure. Ce nerf n’est autre que le palatin. Chez presque tous les poissons osseux, ce nerf part du facial ; par une remarquable exception, il naît, chez la Cépole, du deuxième gan- glion sympathique crânien (k, fig. 10, PI. V). Le 1° ganglion recoit une forte racine du trijumeau ; il en reçoit une, également forte, du facial. La portion céphalique des deux cordons ne présente rien de bien remarquable ; le cordon gauche est cependant plus faible que le droit. En arrivant au cinquième ganglion céphaliqne, le cordon de droite envoie à celui du côté opposé une forte anastomose qui rencontre ce dernier un peu en arrière du ligament rond. Immédiatement en avant de ce point se trouve le ganglion correspondant au pneumogastrique. En passant sous ce dernier nerf, le cordon ne présente en effet aucun renfle- ment ; mais, beaucoup plus en arrière, se voit un ganglion relié par deux longues racines au pneumosastrique. Au point où l’anasto- mose transversale rencontre le cordon gauche, il existe un petit ganglion d’où naît la racine du ganglion splanchnique. Cette dis- position est la seule que nous ayons rencontrée, car chez tous les autres poissons que nous avons examinés, quand la racine du gan- glion splanchnique était unique, elle naiïssait du côté droit. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 127 Il existe un fort ganglion splanchnique d’où partent les nerfs destinés aux viscères. | L'hypoglosse reçoit deux filets sympathiques, issus l’un du cin- quième ganglion céphalique et l’autre, qui est muni de deux petits ganglions, du cordon sympathique même. Les deux cordons restent distincts dans toute l’étendue de la cavité abdominale ; mais presque tous les ganglions envoient à leurs symétriques une et quelquefois deux anastomoses. Dans le Canal hémal, les cordons restent également distincts et leurs ganglions sont unis par une anastomose ; ils sont divisés en segments d'inégal calibre qui alternent généralement avec ceux du côté opposé. Sparidés. Sargus vulgaris et Rondeletii, — Box salpa, — Oblada melanura, — Pagel- lus erythrinus et Centrodontus, — Cantharus griseus. Nous avons étudié dans cette famille les Sargus vulgaris et Ron- deleti, le Box salpa ; V Oblada melanura, les Pagellus erythrinus et un autre Pagel voisin du Centrodonte; enfin le Cantharus griseus. Chez tous ces poissons, la disposition du sympathique est à peu près identique. La forme aplatie de la tête et du corps en rendent l'étude difficile. Voici comment il se comporte d’une manière générale : Les nerfs maxillaires et facial sont voisins l’un de l’autre : AUSSI le canal osseux qui se trouve entre eux est-il très court. Un seul ganglion sympathique correspond à ces deux nerfs. Il est placé sous la masse commune des maxillaires et du facial et s’étend un peu en arrière de ce dernier nerf. Ses racines lui viennent du tri- jumeau et du facial. De son angle externe part un filet pour le tronc commun des maxillaires ; de son angle interne, il en part un 128 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE autre qui bientôt se bifurque; l’une des branches se rend au rameau de l’oculo-moteur commun qui forme l’une des racines du ganglion ophthalmique; Pautre se porte au nerfciliaire long. Un autre filet fin émané du même ganglion se rend au facial. . Les ganglions suivants n’offrent rien de remarquable. Le 5° ganglion céphalique estsitué en arrière du ligament rond ; il recoit deux racines de l’hypoglosse, dont une très grosse ; les deux sont unies par une anastomose en avant du ligament. Il envoie au même nerf trois filets nerveux, dont deux longs et ténus ; le troisième, pluscourt que les deux autres, contourne en dessous et en avant le ligament rond pour aller trouver l’hypoglosse. C’est du premier ganglion abdominal droit que part la racine du ganglion splanchnique. Celui-ci est ovale et relativement gros; il donne naissance à plusieurs nerfs qui s’anastomosent entre eux et forment un plexus entourant l'artère cœliaque et ses divisions. La racine gauche du ganglion splanchnique est représentée par l’anas- tomose que le premier ganglion abdominal de ce côté envoie à son symétrique. Dans la partie abdominale, les deux cordons restent distincts ; sous chaque nerf rachidien se trouve un ganglion allongé, net, pourvu d’une assez grosse racine ; les deux ganglions qui précèdent le canal formé par les dernières vertèbres dorsales s’envoient plu- sieurs anastomoses ; il en est de même des ganglions suivants. Le plexus qui en résulte recouvre la face inférieure de l’aorte abdo- minale. Dans cette partie de leur trajet, les deux cordons deviennent alternativement d’une extrême finesse et paraissent ne former qu'un seul cordon. Au contraire, dans le Canal hémal, où ils restent également doubles, leur calibre demeure à peu près constant. Ils se comportent d’ailleurs comme chez les autres poissons. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 129 Ménidés. Moœna Osbeckii et Smaris{Chryselis. Les caractères anatomiques des poissons de cette famille sont très voisins de ceux des poissons de la famille précédente. Leur sympathique est à peu près identique. Nous croyons donc inutile de décrire celui des Ménidés, qui n’offre rien de particulier. Labridés. Labrus Bergylta et Crenilabrus Pavo. Cette famille comprend un certain nombre de genres, parmi lesquels les Labres et les Crénilabres sont riches en espèces. Dans le nombre, quelques-unes ont une taille suffisante pour être dissé- quées. Ainsi, nous avons pu étudier le fabrus bergylta et le L. merula ; et, parmi les Crénilabres, les espèces Melops, Mediterra- neus et Pavo. Mais celle qui a principalement servi à nos recherches est l'espèce Pavo, l’une des plus grosses de la Méditerranée. Son sympathique ne diffère pas de celui du Labrus Bergylta ; la des- cription suivante, qui s’applique spécialement au Crénilabre paon, peut done s'appliquer également au Labrus Bergylta, et d’une manière générale à toutes les espèces de cette famille. Le sympathique commence au-dessous et en avant du trijumeau par un ganglion allongé d'avant en arrière, aplati de haut en bas et appliqué très étroitement à la face inférieure de ce nerf. Sa forme est peu nette. Il donne naissance en dehorsà deux filets, l’un supérieur, l’autre inférieur, qui se portent sur la inasse commune des maxillaires. En dedans, il émet aussi deux filets très fins et très courts qui vont se jeter dans les deux nerfs ciliaires. En avant, sa substance se continue pour ainsi dire dans les rameaux du nerf ophthalmique. Ilreçoit dutrijumeau et principalement du ganglion ARCH, DE ZOOL, EXP. ET GÉN. — 29 SÉRIE, — T, V Dis, — supPL. 1889. — Mém. 9 130 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE de Gasser un nombre assez considérable de racines, cinq ou six. Il passe en dessous du facial, très voisin desmaxillaires, et se continue dans un canal osseux, court, par un double cordon nerveux qui va se jeter dans le 2° ganglion placé un peu en arrière du facial. Le 2° ganglion est relié à ce dernier nerf par des racines et des filets : de plus, ilenvoie un filet fin à l’anastomose que le facial fournit à la branche antérieure du glosso-pharyngien. Le 3° et le 4° ganglion sont petits et voisins l’un de l’autre ; ils se touchent presque ; il est vrai que le glosso-pharyngien semble être une dépendance du pneumogastrique. Ces deux ganglions émettent quelques petits filets. Le 1*reçoit du glosso-pharyngien une longue et grosse racine ; le second en recoit deux, évcalement longues et grosses ; l’antérieure lui est fournie par le RE pharyngien et la seconde par le pneumogastrique. Le 5° ganglion est petit et situé en arrière du ligament rond ; l'hypoglosse lui envoie une longue et forte racine, À son tour, il envoie au même nerf un filet assez considérable. Le 1% ganglion abdominal est relié à son symétrique par une anastomose ; ce ganglion, ainsi que le suivant, envoient chacun un filet à l’hypoglosse. Entre le 1%et le 2° ganglion abdominal, le Cordon sympathique qui, jusque-là, était d’un faible calibre, devient très considérable. Le nerf splanchnique part du 2° ganglion abdominal. Dans la partie antérieure de la cavité abdominale, les deux cor- dons s’envoient de nombreuses anastomoses et forment à la face inférieure de l’aorte un plexus compliqué ; dans la partie postérieure, au contraire, ils sont à peu près indépendants. Les nerfs sperma- tiques naissent près du point où les deux uretères se recourbent de haut en bas ; ils les accompagnent et vont fo rmer un riche plexus à la surface de la vessieurinaire,ainsi que sur les organes génitaux. Dans le Canal hémal les deux cordons restent distincts, mais leurs ganglions s’accolent ou s’envoient des anastomoses. Les filets qu’ils émettent se comportent comme chezles autres poissons osseux. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 431 Gastérostéidés. Gasterosteus Aculeatus. Nous n’avons eu à notre disposition qu’un seul exemplaire de taille un peu considérable, 7 centimètres de long. Nous n'avons pu par suite étudier son sympathique avec toute la rigueur désirable, d’autant plus que ce petit poisson était en mauvais état. Entre les nerfs maxillaires et le facial se trouve le canal osseux d’où sort le sympathique. Celui-ci naît encore du Trijumeau pro- prement dit, mais nous n'avons pu nous assurer s’ilexistait un ganglion sympathique en ce point. De son extrémité antérieure part un filet pour l’oculo-moteur commun et un autre pour les - maxillaires ; au niveau au facial il en part un autre pour le pala- tin. Le facial en recoit un également ; quant aux racines, nous n'avons vu que celles du trijumeau. Par une curieuse bizarrerie, la partie céphalique du sympathique ne s’est pas colorée par l’acide osmique, tandis que la partie abdominale s’est au contraire fortement noircie ; cette circonstance nous a empêché de voir les rapports du sympathique et des nerfs crâniens. Nous n'avons vu de ganglion ni sous le facial ni sous le glosso- pharyngien. À droite, entre ces deux nerfs, le cordon est double et chaque partie est à elle seule plus considérable que la partie anté- rieure du sympathique. De l’un de ces cordons part une anasto- mose pour le glosso-pharyngien antérieur. Le ganglion correspondant au pneumogastrique est assez con- sidérable, surtout à gauche ; il se trouve relié à ce nerf par quelques racines. Le 5° ganglion, bien visible, est situé sous l’hypoglosse qui pré- sente deux faisceaux considérables reliésau ganglion par une racine et un filet. Les deux ganglions symétriques sont unis par une anas- tomose. C’est du 5° ganglion droit que part la racine du ganglion splanchnique, lequel est accolé aux parois de l'artère cœliaque. 132 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Indépendamment des nerfs splanchniques, le ganglion émet encore un filet destiné à la partie antérieure des reins. À gauche, ce filet émane d'un renflement situé un peu en arrière du 5° ganglion de ce côté. Dans la partie abdominale, les deux cordons restent distincts, mais le droit est plus développé que le gauche. Dans l’individu que nous avons disséqué, ce cordon présentait la particularité suivante : à partir de la 6° vertèbre et jusqu’à la 11° exclusivement, il affec- tait une disposition serpentiforme, tandis que le gauche restait sensiblement rectiligne. Sous chaque nerf rachidien se trouve un petit ganglion à peine visible, relié au nerf par une racine plus ou moins longue. Les ganglions de la partie abdominale antérieure sont unis par des anastomoses; ceux de la partie postérieure, qui est logée dans un canal formé par les dernières vertèbres dorsales, sont accolés l’un à l’autre. Dans la partie caudale, les cordons s’amincissent beaucoup et sont très difficiles à voir. Aulostomidés. Centriscus Scolopax. Ce petit poisson n’est pêché à Banyuls qu'accidentellement. Nous n’avons pu nous en procurer de vivant ; un seul, conservé depuis longtemps dans l’alcool et dont les intestins ne tenaient plus à la paroi du corps, a servi à notre étude. Voici ce qu’il nous a été possible de voir : La partie antérieure du cordon est logée dans un canal osseux. En arrière de ce canal, il existe un gros ganglion correspondant au facial. Ce ganglion se continue, d’une manière manifeste, dans le canal osseux et va se terminer à la partie antérieure du tri- jumeau. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 133 Nous n'avons pas vu de ganglion sous le glosso-pharyngien ni sous le pneumogastrique. Dans la cavité abdominale, les deux cordons sont très fins. Ils nous ont semblé rester distincts jusqu’à l'extrémité postérieure de l'abdomen. En résumé, nous avons simplement constaté l'existence du sym- pathique chez ce poisson. Mugilidés. Mugil Cephalus et M. Saliens. Le sympathique de ces poissons est très réduit. Il commence par un ganglion allongé, mal délimité, placé au-dessous du ganglion de Gasser, auquel il est étroitement accolé. De son angle interne partent deux filets très fins destinés aux nerfs ciliaires ; il fournit encore deux autres filets aux nerfs maxillaires et un autre à la branche antérieure du glosso-pharyngien. En général, cette branche reçoit du facial une fine anastomose qui n'augmente pas son volume d'une façon appréciable. Ici le rameau issu du glosso-pharyn- gien est très ténu, tandis que l’anastomose qu’il recoit du facial est considérable. C’est au delà de leur point de rencontre que le filet sympathique, envoyé par le 1% ganglion, va se mêler à leurs fibres. La partie antérieure du Cordon sympathique est logée dans un canal osseux d’une certaine longueur, bien qu'il ne s’étende pas jusqu’au facial. Sous ce dernier nerf et sous les deux suivants, il existe des gan- glions, petits, mais très nets, reliés à ces nerfs par des racines et des filets très courts. Le 5° ganglion, situé sous l’hypoglosse, en avant du ligament rond, envoie à ce nerf un long filet. C’est du premier ganglion abdominal droit que part le nerf splanchnique. Il naît par deux racines beaucoup plus fortes que le 134 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE cordon qui leur donne naissance. Elles accompagnent l'artère cœliaque, puis, après un court trajet, elles se réunissent sans former de ganglion proprement dit ; mais le nerf unique résultant de leur fusion est considérable. Il se ramifie bientôt pour se rendre aux viscères. Dans la partie abdominale, les deux cordons restent distincts, mais leurs ganglions postérieurs s’envoient des anastomoses. (hacun des ganglions abdominaux recoit du nerf rachidien correspondant une assez longue racine. C’est de l’un des derniers que partent les nerfs spermatiques, qui n’offrent d’ailleurs rien de remarquable. La partie caudale est double, mais excessivement difficile à étudier. Sphyrénidés. Sphyrœna Spet. C’est sous le ganglion de Gasser que se trouve le premier gan- glion sympathique ; il en reçoit 3 ou 4 racines. Le trijumeau lui en envoie une grosse. De son bord interne part un filet destiné au tronc commun des deux nerfs ciliaires. En avant, il en émet un gros qui se jette dans l’ophthalmique ; en dehors, 2 plus fins destinés au tronc commun des maxillaires. Enfin, un peu en arrière de ces derniers, on en voit sortir un autre qui se perd dans le nerf palatin. Le 2° ganglion est double ; chacun d’eux reçoit une ou deux racines du facial ; l’antérieur fournit un filet au glosso-pharyngien antérieur, et le postérieur, plus volumineux, se rend à la branche buccale du facial. Le 3° ganglion est à peine visible ; le 4°, assez volumineux, reçoit une grosse racine du pneumogastrique,aux rameaux duquel il envoie plusieurs filets. Le 5° ganglion nous a sans doute échappé, car il n’en est pas question dans nos notes ; nous n’avons eu d’ail- leurs à notre disposition qu’un seul exemplaire de ce poisson très rare sur les côtes de France. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 135 À une certaine distance en arrière du ligament rond de l’épaule, vis-à-vis de la partie antérieure de la 2° vertèbre, se voit un gros ganglion relié par une anastomose avec son symétrique. C'est de ce ganglion que part à droite la racine du ganglion splanchnique. Ce dernier est assez considérable ; il émet deux nerfs qui accompa- guent les artères mésentérique et splénique en formant, soit seuls, soit à l’aide de filets issus du rameau viscéral du pneumogastrique, des plexus autour de ces artères. La vessie natatoire recoit des filets du pneumogastrique et du sympathique. Ces derniers, au nombre de 3 ou 4, se ramifient et s’anastomosent en formant un plexus à mailles lâches, à la face médiane et inférieure de la vessie nata- toire. Les 2 cordons sont distincts dans la partie abdominale. De placeen place naissent des filets pour les reins et les paroïs du corps ; ces filets accompagnent les artérioles rénales et intercos- tales. C’est du cordon gauche que partent les nerfs spermatiques. Nous n’avons rien de particulier à dire de la partie caudale. Ophidiidés. Ophidium barbatum. — Fierasfer imberbis. Cette famille comprend les 2 genres Ophidium et Fierasfer. Dans les deux, le sympathique estexcessivement fin et par suite très difficile à étudier. Chez Ophidium, nous avons pu voir le sympathique partir du trijumeau proprementdit. Les ganglions correspondant au facial et au pneumogastrique sont assez développés ; une grosse racine est fournie au 4° ganglion par ce dernier nerf. C’est du 1° ganglion abdominal droit, relié par une anastomose avec son symétrique, que partent les 2 nerfs splanchniques. La partie abdominale est double ; les petits ganglions placés sous les nerfs rachidiens sont très nets. 136 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE La partie caudale est double également. Chez le Fierasfer, nous avons suivi, le long de la veine cardi- pale postérieure, un filet nerveux qui, croyons-nous, appartient au sympathique. Cette description s'applique aux deuxespèces ; les filets qui nais- sent des 2 cordons sont si fins qu’il est presque impossible de les apercevoir. Gadidés. Dans cette famille, nombreuse en genres et en espèces, nous avons étudié: Gadus minutus et Morrhua, Merlangus pollachius, Merlucius vulgaris, Lota molva, Phycis blennoïdes, Motella tricirrata. Chez tous ces poissons, la disposition du sympathique està peu près la même ; nous ne ferons donc qu'une seule description. Le 1° ganglion est appliqué à la face inférieure de la masse commune dutrijumeau et du facial. Ce ganglion est tantôt arrondi, tantôt allongé transversalement ; il est toujours étroitement appli- qué à la face inférieure desnerfs crâniens quenous venons de citer, etrecoit plusieurs grosses racines du trijumeau proprement dit et du facial ; le ganglion de Gasser lui en envoie également plusieurs autres dont une très grosse. De son bord interne partent 2 filets pour le nerf palatin, qui traverse ordinairement une partie de sa substance ; son bord antérieur en émet deux également : le plns gros se porte sur la racine que le nerf ophthalmique envoie au gan- glion du même nom : un léger renflement marque leur point de jonction ; le 2° filet, plus finet plus long, se bifurque : l’une de ses branches se porte sur le nerf ciliaire long et l’autre sur un des ra- meaux externes du nerf ophthalmique. Enfin, d’autres filets émanés du même ganglion se portent, en avant et en dehors, sur le nerf ophthalmique, surlamasse commune des maxillaires et sur le facial. Nous n’en avons pas vu se rendre à l’oculo-moteur externe. Chez les poissons de cette famille, il n’existe pas de canal osseux, comme DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 137 chez la plupart des autres poissons ; mais la partie antero-interne du 1° ganglion sympathique est située dans une sorte de cavité osseuse qui le dissimule incomplètement,. Les ganglions correspondant aux nerfs glosso-pharyngien et _ pneumogastrique sont plus ou moins volumineux ; ils sont tou- jours reliés à ces nerfs par une ou plusieurs racines et par des filets. Le 5° ganglion est assez considérable et placé sous l’hypoglosse; il en recoit 2 trés fortes et longues racines, et lui envoie 2 filets qui ne se perdent dans ses faisceaux qu’à une certaine distance de leur origine. Voici ce que nous remarquons chez un Merlucius : De la partie du cordon comprise entre le 3° et le 5° ganglion partent plusieurs fins filets qui se répandent à la face inférieure de la partie anté- rieure desreins et se distribuent dans leur substance ; guelques- uns portent un petit ganglion microscopique. Le ganglion splanch- nique reçoit une racine du 5° ganglion céphalique droit, une autre du cordon du même côté, et enfin une 3° du 5° ganglion céphalique gauche. Ce ganglion est gros et allongé ; il donne naissance à 3 nerfs principaux : l’un accompagne l'artère mésentérique ; le 2° et le 3° se ramifient et leurs ramifications se rencontrent avec deux branches du rameau viscéral du pneumogastrique en un nouveau ganglion d’où partent plusieurs filets qni s’anastomosent entre eux et avec d’autres envoyés par le pneumogastrique. Il en résulte un plexus dont les maïlles enveloppent les principales artères viscé- rales ; les filets qui en partent se rendent à l’estomac, à la rate, au foie, à la vessie natatoire, aux intestins. Chez un autre spécimen, les racines du ganglion splanchnique étaient d’un calibre inégal ; celle qui partait du 5° ganglion gauche était beaucoup plus considérable que celle du 5° ganglion droit. Chez Motella Tricirrata, les racines de ce ganglion émanent du premier ganglion abdominal. Chez Merlucius, les ganglions de la partie abdominale sont petits 138 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE et rapprochés. Leurs racines offrent la particularité suivante : elles ne naissent pas du nerf rachidien correspondant de la même manière que chez les autres poissons ; mais elles sortent d’un gros ganglion que présente le rameau ventral de ce nerf. Le Cordon abdominal longe le bord latéral de la saillie inférieure des 5 premières vertèbres, au-dessus et en dehorsdu muscle rétrac- teur des pharyngiens supérieurs. Il atteint ensuite l'aorte abdo- minale qu’il accompagne jusqu’au niveau de l'orifice anal. La partie caudale est double, et ses cordons sont divisés en segments d’inégal diamètre ; les ganglions sont généralement accolés ou tout au moins unis par une ou deux anastomoses. Pleuronectidés. La Solea lascaris, le Rhombus maximus et le Pleuronectes Boscii nous ont servi pour l’étude du sympathique des Pleuronectes. Le sympathique prend naissance sur le trijumeau ; suivant l’es- pèce, il présente des différences que nous allons indiquer. Chez Rhombus et Solea, au moins chez les individus qui ont servi à nos recherches, il n’existe pas, à proprement parler, de premier ganglion ; il est remplacé par une sorte d’empâtement de la partie antérieure du cordon. Chez Pleuronectes, au contraire, le ganglion est très apparent; situé en dedans des nerfs maxillaires, il est relié par un très gros filet au ganglion de Gasser ; il en reçoit un autre du trijumeau. Les filets qu’il émet sont assez nombreux. L’un se rend à l’oculo- moteur commun et de là, sans doute, à la branche qui forme l’une des racines du ganglion ophthalmique : un autre, très court, se jette presque immédiatement dans le nerf ciliaire long ; ce der- nier nerf reçoit en outre du premier filet une fine anastomose. Deux autres filets se portent sur les maxillaires et forment à leur surface inférieure un petit plexus. Ce sont les seuls poissons chez lesquels nous ayons remarqué ce plexus que l'on rencontre assez DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 139 souvent chez les vertébrés supérieurs. Enfin, deux filets sont des- tinés au palatin et un dernier à la branche interne du nerf ophthal- mique. Il existe un petit ganglion bien net sous chacun des nerfs crâniens suivants : facial, glosso-pharyngien, pneumogastrique et hypoglosse. Tous sont reliés à ces nerfs par une ou deux racines et par des filets. En outre, le 2° ganglion qui correspond au facial envoie une anastomose au rameau antérieur du glosso- pharyngien. Le 5° ganglion donne naissance à un petit filet qui rencontre au-dessous du ligament rond un autre filet envoyé par le 1% gan- glion abdominal à la partie périphérique de l’hypoglosse. Le premier ganglion abdominal droit est relié par une anas- tomose à celui de gauche. C’est de ce ganglion que part à droite la racine du ganglion splanchnique ; elle est longue et beaucoup plus faible que le rameau principal du nerf splanchnique. Le gan- glion splanchnique, relativement gros, est situé au point de bi- furcation de l’artère cœæliaque. Le cordon latéral est double dans toute l’étendue de la cavité abdominale, mais presque tous ses ganglions sont reliés entre eux par une anastomose. De temps en temps, il part de l’un d’eux un filet destiné à la périphérie du nerf rachidien correspondant. La partie caudale est double également ; les cordons sont divisés en segments d’inégal diamètre ; leurs ganglions et les filets qui en partent se comportent comme chez les autres poissons. Cycloptéridés. Cyclopterus lumpus. Nous n’avons eu qu'un seul Cycloptère à notre disposition, et même il n’était pas en bon état. Nous n’avons donc pu malheu- reusement étudier le sympathique de ce poisson comme nous l’au- rions désiré. 140 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Le premier ganglion est placé sous la masse commune du tri- jumeau et du facial et n’est que peu apparent. Il reçoit plusieurs racines du trijumeau et donne naissance à quelques filets. L’un d’eux, le plus interne, se porte vers l’oculo-moteur commun et ren- contre la racine que le trijumeau fournit au ganglion ophthal- mique ; nous n’avons pas aperçu de filet se portant au nerf ciliaire long ; il aura sans doute été brisé dans la dissection. Un petit ganglion se trouve sous le glosso-pharyngienu et un. autre plus gros sous le pneumogastrique ; ils sont reliés aux nerfs crâniens correspondants par des racines et des filets. Le 5° ganglion reçoit de l’hypoglosse une forte racine ; il lui envoie un petit filet. La partie céphalique du sympathique du Cycloptère est rela- tivement développée, tandis que les parties abdominale et caudale sont au contraire assez réduites. À partir du 5° ganglion, le cordon se dirige de dehors en dedans jusqu’au premier ganglion abdo- minal, lequel est uni à son symétrique par une forte anastomose. C’est du milieu de cette anastomose que partent les deux gros nerfs splanchniques qui vont se distribuer aux viscères. Sous chaque nerf rachidien se trouve un ganglion bien accusé. Chacun d’eux donne naissance à plusieurs filets qui se ramifient et s'anastomosent à la surface des reins et des organes génitaux. Le plexus ainsi formé est même très développé. Les nerfs spermatiques naissent à l'extrémité postérieure de l’ab- domen ; ils se ramifient également et s’anastomosent, formant à leur tour un plexus qui se trouve en rapport avec le plexus pré- cédent. Les deux cordons se réunissent vers le milieu de la cavité abdo- minale ; ils se séparenten entrant dans le Canal hémal, dans lequel ils se comportent comme chez les autres poissons. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 141 Gobiésocidés. Lepadogaster Candollii. Dans sa belle Monographie sur les Lépadogasters, notre ami, Frédéric Guitel, s’est contenté de décrire la marche générale du système sympathique. La petite taille de ces curieux poissons ne permet guère de l’étudier d’une manière plus approfondie, et nous aurions pu nous dispenser d’en parler après lui si, éclairé par nos recherches sur d’autres poissons, nous n’avions pas trouvé quelques petits faits qui lui ont échappé. Le facial et le trijumeau sont ici très voisins l’un de l’autre ; néanmoins, il existe entre eux un petit canal osseux dans lequel est logée la partie antérieur: du Cordon sympathique. Celui-ci s’avance jusqu’au-dessous de la partie antérieure du ganglion de Gasser; il reçoit du trijumeau deux racines qui se recourbent brusquement en arrière, s'engagent dans le canal osseux et vont se jeter dans un ganglion relativement volumineux, situé un peuenarrière du facial; quant aux filets issus du sympathique lui-même, nous ne pouvons rien dire de leursrapports ; leur ténuité et leur délicatesse sont telles que, maigré les plus grandes pré- cautions, on les brise constamment. La tête du Lépadogaster est large, aussi le Cordon latéral se trouve-t-il à une assez grande distance de la ligne médiane du corps ; chez l'individu qui sert à notre rédaction, le facial gauche est divisé en deux faisceaux, et l’inférieur passe dans une anse sympathique ; à droite, un peu avant le glosso-pharyngien, le cordon présente un renflement ganglionnaire allongé, peu apparent ; puis il s’accole à la face in- férieure du glosso-pharyngien et l’accompagne ainsi jusqu’au _ point où celui-ci semble se détacher du pneumogastrique sous lequel se trouve un ganglion sympathique net, mais peu consi- dérable. Chacun de ces ganglions est relié au nerf crânien cor- respondant par de fins filets courts et très difficiles à apercevoir. 142 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Sous l’hypoglosse, il existe un ganglion bien développé. Comme chez la plupart des autres osseux, la racine qu’il reçoit de ce nerf est relativement considérable ; le filet qu'il lui envoie est également fort développé. Sous le 1° nerf rachidien, l’on trouve un tout petit ganglion ; mais sous le second, il en existe un qui est de beaucoup le plus considérable de tous ceux qu'offre le Lépadogaster. C’est, à pro- prement parler, un ganglion multiple ; il se compose en effet des ganglions sympathiques correspondant au 2°et au 3° nerf rachidien, et du ganglion splanchnique qui leur est intimement accolé. Le nerf splanchnique, qui en part, accompagne l'artère cœliaque et l’enlace de ses ramifications. Au point où cette artère se bifurque, le nerf splanchnique s’amincit beaucoup ; puis il se ramifie et ac- compagne les artères et leurs divisions. Le gros ganglion dont il est question est relié à son symétrique par une anastomose ; en outre, il émet trois filets dont l’un se rend au 2° nerf rachidien, l’autre à la partie antérieure des reins et le 8° vers l’aorte. Dans l’abdomen, les deux cordons restent distincts Jusqu'au canal formé par les dernières vertèbres dorsales. C’est de là que partent les nerfs spermatiques, très fins. Sous chaque nerf rachidien se trouve un petit ganglion relié au nerf par une ra- cine. Ces ganglions ne s’envoient d’anastomoses que dans la par- tie postérieure. Le calibre du nerf unique résultant de la fusion des deux cordons est assez considérable; mais, en pénétrant dans le Canal hémail, il se dédouble et les deux cordons deviennent alors d’une extrême finesse. Cyprinidés. Nous avons étudié dans cette famille le Cyprinus Carpio, le Bar- bus fluviatilis et le Tinca vulgaris. Notre description s'applique principalement à la Carpe. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 143 Immédiatement en arrière du 1* tronc vasculaire formé par les deux premières artères épibranchiales, se voit un ganglion allongé, sans forme déterminée, qui correspond à peu près au olosso-pharyngien. De ses différents angles partent des filets ner- veux un peu dans toutes les directions. En avant, on en peut suivre quelques-uns au delà du facial, jusqu’au trijumeau d’où ils pa- raissent émaner. Le sympathique tire donc encore son origine du tri- jumeau, mais nous n’avons pas remarqué de ganglion corres- pondant à ce nerf. Il en existe un petit placé en avant de l’anas- tomose que le trijumeau envoie au facial, et ce petit ganglion correspond en apparence au 2° ganglion des autres osseux ; le plus | gros répondrait donc au 3° ganglion et sa position auprès du glosso- pharyngien semblerait donner quelque valeur à cette hypothèse. Mais il nous semble plus exact de le considérer comme l'équivalent des trois premiers ganglions, car c’est lui, en effet, qui donne nais- sance à tous les filets que ces ganglions distribuent ordinairement ; en outre, il reçoit des racines du trijumeau, du facial et du glosso- pharyngien. De son angle interne part un filet qui pénètre dans le canal du palatin ; après avoir contourné ce nerf, il se ramifie à sa surface et dans le tissu conjonctif voisin. Tout près de son origine, ce même filet émet une branche qui se porte versle côté externe du nerf maxillaire, ou bien un filet directement issu du ganglion se porte entre les deux maxillaires, se ramifie et va se jeter dans le maxillaire supérieur, au point où ce dernier nerf pénètre dans les parois de la partie antérieure de la bouche. [l est probable égale- ment que ses ramifications s’anastomosent dans la même région avec celles du palatin. Enfin, du côté interne, partent les filets destinés aux nerfs ciliaires et à l’ophthalmique. C’est de son extrémité postéro-externe que sortent les filets qui vont aux deux premières branchies. Chacun d’eux se ramifie plusieurs fois en pénétrant dans le canal de l’arc branchial ; ses 144 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE rameaux restent distincts jusqu’au milieu environ de l'arc ; là, ils s’anastomosent de la manière la plus intime avec les rameaux branchiaux du glosso-pharyngien et du pneumogastrique. C’est en cela que consiste le Plexus branchial dont a parlé Büchner. Le ganglion suivant est petit et situé en avant du 2° tronc vasculaire formé par les deux dernières artères épibranchiales. II est relié à son symétrique par une fine ana-tomose d'où part un iet très ténu pour l’aorte. De la partie externe de ce même ganglion sortent 2 filets qui vont se distribuer et s’anastomoser avec les rameaux du pneumo- gastrique dans les 8° et 4° arcs branchiaux ; il correspond donc au 4 ganglion céphalique. À partir de là et jusqu’à l’entrée de la cavité abdominale, l’aorte est logée dans un canal osseux formé par les apophyses inférieures des premières vertèbres. Les deux cordons sympathiques n’accompagnent pas l’aorte dans ce canal, contrairement aux assertions de Büchner, mais passent en dehors, au-dessus des bords latéraux de la plaque triangulaire contre laquelle s’appuie la Pierre de Carpe. Le ganglion suivant est placé un peu en arrière du canal dont il vient d'être question ; une anastomose le relie à son symétrique. C’est de la partie antérieure de ce ganglion que partent les nerfs destinés à la pectorale, ce qui semble indiquer que ce ganglion est le 5° ganglion céphalique. [ls sont au nombre de deux ; ils accom- pagnent l'artère axillaire sur une assez grande longueur, puis finissent par se confondre avec les fibres de l’hypoglosse ; sur leur trajet, on trouve de nombreux petits ganglions. C’est encore de ce 5° ganglion que naît le nerf splanchnique ; on en compte un de chaque côté. Ils accompagnent l’artère cœlia- que et ses ramifications ; ilss’anastomosent entre eux et fournissent des plexus autour de chaque artère. Dans la partie abdominale, les deux cordons restent distincts ; il existe sous chaque nerf rachidien un petit ganglion pourvu d’une racine mixte. De ce ganglion part un petit filet qui accompagne DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 145 l'artère intercostale ; de temps à autre il s’en détache une branche qui suit l’artériole rénale. Enfin les derniers ganglions s’envoient des anastomoses. HE | Le cordon reste double également dans le Canal hémal ; il est divisé en segments d'inégal diamètre ; les petits ganglions ne nous ont point paru reliés entre eux ; mais cela tient sans doute à la ténuité de leurs filets et à cette circonstance que le sympathique se colore difficilement et faiblement par l'acide osmique. Li Clupéidés. Nous avons étudié l’Alose commune. Les aäutres poissons de cette famille sont en général trop petits pour qu’on puisse les faire servir à l’étude du sympathique. La Sardine et l’Anchois pré- sentent un cordon très ténu et difficile à voir, même avec une forte loupe. En outre, cet organe est plongé au milieu d’une masse de tissu adipeux qui gêne ou empêche la coloration. Chez l’Alose, le calibre du cordon sympathique est assez fort pour qu’on puisse se dispenser de recourir à l’emploi de l’acide osmique. Le sympathique naît sur le trijumeau proprement dit. La partie antérieure du Cordon est logée dans un canal osseux. À sa sortie de ce canal, le cordon s’abaiïsse et se place à une certaine distance du point d'émergence des nerfs crâniens. Le 1° ganglion recoit des racines du trijumeau et du facial ; il envoie des filets aux nerfs ciliaires, aux nerfs maxillaires et au facial. Le ganglion correspondant à ce dernier nerf est très voisin du premier. En avant du glosso-pharyngien, on trouve un ganglion d’où part un long filet destiné à la 1° branchie. D'un autre ganglion situé en arrière du pneumogastrique, il en part un autre qui se porte vers les derniers arcs branchiaux. Ces filets sont beaucoup plus longs chez l’Alose que chez la plupart des autres poissons osseux, sauf chez les Cyprinidés etles Salmonidés, où ils atteignent une ARCH. DE ZOOL, EXP. ET GÉN. — 2€ SÉRIE, — T. V bis, — suppz. 4889. — Mém. 10 À46 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE longueur au moins égale. Büchuer, qui les a signalés, dit qu’ils forment respectivement avec lesnerfs glosso-pharyngien et pneumo- gastrique des plexus faciles à voir et plus développés que chez les Cyprins. Nous ne sommes pas de son avis, car nous avons constaté tout le contraire, au moins chez les deux spécimens que nous avons puétudier. Les nerfs branchiaux sympathiques sont certainement plus gros, toute proportion gardée, chez les Cyprins et les Saumons que chez l’Alose. Les nerfs splanchniques au nombre de deux naïssent un peu en arrière du pneumogastrique ; les ganglions splanchniques sont petits. Dans la partie abdominale, les 2 cordons restent distincts ; les ganglions sont assez nets, mais petits. Nous n avons pas vu d’anas- tomoses entre eux ; leurs racines sont courtes. La partie caudale est double également ; les anastomoses entre les ganglions nous ont paru rares. A l’extrémité du Canal hémal, le dernier segment est un peu plus développé que les précédents; les 2 cordons se portent en dehors et vont se terminsr dans le nerf rachidien voisin. Exocétiniens. Nous avons étudié dans cette famille le Belone acus et l'Exocætus volitans. La description suivante s'applique principalement à la première de ces deux espèces. Chez la seconde, le sympathique est d’une grande ténuité et, comme nous n’avons eu qu’un seul exem- plaire à notre disposition, il nous a été impossible de l’étudier aussi bien que celui de la première. Chez Belone, le sympathique part encore du trijumeau propre- ment dit ; il prend naissance au-dessous du ganglion de Gasser, accompagne l’anastomose du trijumeau et du facial, passe en dessous et quelquefois en dessus de ce dernier nerf, en arrière duquel il devient libre. Dans tout ce trajet ,il est logé dans un DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 187 canal osseux, qui s’étend même sur une partie des nerfs maxillaires ; en arrière il dépasse le facial. Toute la partie du sympathique logée dans ce canal est difficile à étudier à cause de l’excessive dureté des os et de la grande ténuité des filets qu’il émet. Un léger ganglion se trouve en arrière du glosso-pharyngien ; il s’en trouve un autre, également très faible, sous le pneumogastrique ; chacun d’eux est relié au nerf correspondant, le 1° par deux filetsfins, le 2° par deux également, mais plus gros. Indépendammentdes filets dont il vient d’être question, l’exemplaire qui sert à notre rédaction présentait la curieuse disposition suivante : Chacun des deux petits ganglions recevait encore un autre rameau. Celui du 1° ganglion lui venait du faisceau antérieur du pneumogastrique ; celui du second lui était envoyé par le glosso-pharyngien, de sorte que ces rameaux étaient croisés. Un long filet relie l’hypoglosse au léger renflement qui repré- sente le 5° ganglion ; l’hypoglosse recoit en outre un filet du petit ganglion suivant. En arrière de ce dernier s’en trouve un très gros dont les racines lui viennent du 1° et du 2° nerf rachidien. C’est de ce gros ganglion que part à droite la racine du ganglion splanchnique ; celui de gauche n’émet ni racine, ni anastomose. Le ganglion splanchnique est pyriforme et accolé aux parois de l'artère cœliaque ; il en part deux nerfs principaux qui accompa- gnent les ramifications de l'artère. Dans la cavité abdominale, les deux cordons restent distincts ; leurs ganglions, très petits, ne s’envoient pas d’anastomoses; mais ils donnent naissance à des filets qui se distribuent de la manière suivante. En général, les artérioles intercostales émergent de l'aorte de deux en deux vertèbres ; chacune d’elles se bifurque ; la plus longue branche se porte vers les points où la vessie natatoire s'accole aux parois du corps ; l’autre, beaucoup plus courte, pénètre dans le muscle latéral, tout près de la colonne vertébrale ; elle s'avance jusqu'au milieu de l'épaisseur du muscle, en suivant . , . . . 1 l’aponévrose qui en sépare les deux parties principales. C’est à 148 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE cette courte branche que se rend un filet excessivement fin que nous avons pu suivre sur une grande longueur. Dans le Canal hémal, les cordons restent encore distincts et sont à peu près d'égal calibre ; leurs ganglions sont allongés et ne s’envoient d’anastomoses que dans la partie postérieure du canal. Salmonidés. Dans cette famille, nous avons étudié les Trutta fario et ma- rina et le Salmo salar. C’est principalement le sympathique de ce dernier que nous décrirons. Il commence par un petit ganglion situé à la partie antéro-infé- rieure du trijumeau dont il reçoit deux ou trois racines; il en recoit une également du facial. De ce ganglion partent des filets pour le palatin, les nerfs ciliaires et les maxillaires. La partie antérieure du cordon est logée dans un canal osseux. En arrière de ce canal et du facial, il existe un petit ganglion allongé qui est relié au facial par une racine et plusieurs filets. A partir de là, le cordon semble être composé de deux ou même d’un plus grand nombre de faisceaux qui vont se jeter dans un gros ganglion correspondant au glosso-pharyngien dont il recoit des racines. Îl envoie à ce dernier nerf un certain nombre de filets, parmi lesquels, deux, plus importants que les autres, accompagnent les deux premières artères épibranchiales: et vont s’anastomoser avec les branches du glosso-pharyngien et du pneumogastrique, pour former dans les deux premiers arcs branchiaux le plexœus bran- chial. Ce même ganglion émet encore un filet pour le rameau an- térieur du glosso-pharyngien et deux ou trois autres qui vont se perdre dans les muscles branchiaux. De là le cordon s’abaisse et vient se placer au-dessous du crâne ; les deux cordons sont alors très voisins. Le ganglion qui corres- pond au pneumogastrique est éloigné de ce nerf ; aussi les racines qu’il en recoit sont-elles très longues, et, comme elles sont fortes, DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. _ 449 on peut être tenté, si l’on ne prête pas une attention suffisante, de les prendre pour un second cordon sympathique. C’est, croyons- nous, ce qui est arrivé à Stannius : il décrit chez le Saumon un cordon sympathique médian, qui n’est autre, à notre avis, que le véritable cordon, et ce qu’il prenait pour le cordon latéral doit être la racine longue et forte qui provient du pneumogastrique. De ce gros ganglion part un petit filet destiné aux muscles bran- chiaux postérieurs. Un peu en arrière, le cordon donne naissance à 2 filets qui accompagnent une petite artériole, se bifurquent et vont se distribuer aux 3° et 4° branchies. Enfin, d’un ganglion gauche postérieur, il part un assez fort filet ; arrivé au niveau du dernier tronc artériel formé par les 2 dernières artères épibran- chiales, il se bifurque ; la branche droite ne tarde pas à se diviser en deux rameaux quiaccompagnent les deux dernières artères épi- branchiales droites; la branche gauche accompagne le tronc formé par les deux dernières artères épibranchiales gauches et se bifurque au point où ces artères se réunissent. Voilà ce que présentait l’un des individus que nous avons disséqués. Un autre offrait une dis- position bien différente. Des deux ganglions sympathiques cor- respondant aux nerfs glosso-pharyngien et pneumogastrique par- taient des filets pour les arcs branchiaux. Le quatrième ganglion était considérable et donnait naissance à six ou sept filets anastomosésentre eux et avec les branches du pneu- mogastrique ; trois ou quatre se joignaient à ceux du ganglion pré- cédent pour se rendre au premier are branchial ; le reste était des- tiné au 2° arc branchial, et un des gros filets, au 3°; un autre se perdait dans les muscles branchiaux compris entre le 2° et le 3° arc branchial. Ces filets sympathiques longeaient en avant et en arrière la partie de l’artère épibranchiale comprise dans la courbure de l'arc ; ils restaient distincts du rameau du glosso-pharyngien ou du pneumogastrique dans presque toute l’étendue de l'arc et ne se ‘confondaient avec lui d’une manière tout à fait intime que dans le quart inférieur de cet arc. 450 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Du cinquième ganglion, petit, situé en avant du tronc formé par les deux dernières artères épibranchiales, part un fort filet qui accompagne l'artère axillaire. Il reste distinct sur un trajet assez long et finit par se confondre avec l’hypoglosse. Le nerf splanchnique prend naissance sur le premier ganglion abdominal par deux ou trois filets qui portent quelquefois des petits renflements ; les filets de gauche se rencontrent avec ceux de droite en un petit ganglion splanchnique qui émet les nerfs splanch- niques. Les cordons sont étroitement accolés à l’aorte et restent distincts dans toute l’étendue dela cavité abdominale ; leurs ganglions, nette- mentaccusés, ne s’envoient même pas d’anastomoses. Les artérioles intercostales qui sortent de l'aorte de deux en deux vertèbres donnent naissance, à une certaine distance de leur origine, aux arté- rioles rénales qui s’embranchent sur elles presque à angle droit. Un filet sympathique accompagne le tronc commun de ces artères, se bifurque, et ses deux branches s'accolent à l'artériole rénale et à l’artériole intercostale. Dans la partie caudale, les deux cordons restent encore distincts et nous n'avons pas vu d’anastomoses entre les ganglions symé- triques ; mais, comme les filets ne se colorent pas par l'acide osmique et qu’ils sont souvent d’une extrême ténuité, ils ont pu nous échapper. A l'extrémité du Canal hémal, les deux cordons se portent à droite et à gauche, émettant quelques fins filets, et vont se perdre dans l’une des principales branches du Plexus caudal. IV. Apodes. Le système sympathique des vrais Apodes diffère notablement de celui des poissons des autres ordres que nous venons de passer en revue. Nous serons donc obligé de le décrire avec quelques détails ; mais, comme les différences qu’il présente suivant Îles DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 151 L L1 1 familles sont de peu d'importance, nous nous attacherons plus spécialement à présenter celui des Anguillidés;, quelques mots suffiront ensuite pour faire connaître exactement celui des autres familles de cet ordre. Anguillidés. Nous avons étudié dans cette famille l’Anguille et surtout le Congre. C’est donc plus spécialement le sympathique de ce der- nier poisson que nous décrirons. Le ganglion le plus antérieur que l’on puisse apercevoir est placé à la partie occipitale du crâne, contre lequel il est étroitement appli- qué. Sa forme est celle d’un ovale allongé: il a des dimensions relativement considérables, car son extrémité postérieure se trouve vis-à-vis de la partie antérieure de la deuxième vertèbre, tandisque son autre extrémité s'appuie sur le crâne, comme nous venons de le dire. Il setrouve au-dessous des points de sortie des nerfs glosso- pharyngien et pneumogastriqua et au-dessus des deux premiers arcs branchiaux ; enfin, il est très voisin de l’extrémité antérieure de la veine cardinale antérieure. Si nous donnons tous ces détails, c'est afin de préciser l’endroitoù l’on doit aller le chercher, car il est difficile à découvrir. Ce ganglion recoit deux racines du glosso- pharyngien ; il en reçoit cinq grosses du pneumogastrique et un assez grand nombre de petites. Si on le relève pour le rejeter de côté afin de voir ses racines, on remarque qu’au lieu de se rendre directement dans le ganglion, elles s’anastomosent entre elles et forment un petit plexus assez souvent pourvu de ganglions. Par ses racines, ce gros ganglion correspond donc au 3° etau 4° des autres poissons osseux. Cherchons s’il n'en existe pas d’autres plus antérieurs. Ce ganglion se continue en avant par un petit faisceau de filets nerveux, dont les uns passent en dessus, les autres en dessous du tronc du glosso-pharyngien, ou, quandil existe, du gros ganglion que 152 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE ce nerf présente assez fréquemment. Bientôt le faisceau disparaît dans un canal osseux de la grande aile du sphénoïde; tout près du rameau récurrent que le facial émét, les filets de ce faisceau se sé- parent de nouveau et passent les uns en dessus, les autres en des- sous de ce dernier nerf. Ils suivent l’anastomose du facial et du trijumeau et vont se perdre en grande partie dans le dernier de ces deux nerfs, duquel ils émanent. Les autres continuent leur tra- jet et vont se distribuer aux différentes branches nerveuses du trijumeau et des nerfs voisins. Nous y reviendrons. Quant aux ganglions, il n’en existe ni sous le facial ni sous le trijumeau, du moins, nous n’en avons jamais vu aucun. Le faisceau logé dans le canal osseux est donc mixte; il contient à la fois les racines que le trijumeau et le facial envoient au gros ganglion, et les filets que ce ganglion envoie à son tour aux mêmes nerfs et à leurs ramifi- cations. Examinons successivement les uns et les autres. Les racines issues du trijumeau sont peu nombreuses et très fines; nous en dirons autant de celles que fournit le facial; ce der- nier n’en donne que deux ou trois et le premier trois ou quatre. Il pourrait cependant s'en trouver davantage, car, à cause de leur ténuité et de leur fragilité, il est difficile de ne pas en briser quel- ques-unes. Les filets envoyés par le faisceau sont plus nombreux et en général plus considérables que les racines. L’un d’eux, le plus facile à voir, se porte en dedans vers le palatin et, après un trajet assez long, disparaît. Si on l’examine de plus près, on constate que ce n’est pas le palatin qu’il va trouver, maïs la branche que l’oculo-moteur fournit au nerf ciliaire court; un peu plus loin a lieu la rencontre de cette branche avec celle du trijumeau, mais cette rencontre n’est marquée par aucun ganglion. Un autre filet qui passe en dessus du facial va se perdre dans la branche maxillaire supérieure du trijumeau ; un autre, plus considérable que le précédent, se ramifie un grand nombre de fois ; ses ramif- cations se rendent à la branche maxillaire inférieure, à la branche / DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 153 maxillaire supérieure, à différentes branches plus faibles que les précédentes et qui vont se distribuer à la partie antérieure de la voûte palatine. D’autres ramifications se rendent au nerf ophthal- mique et très probablement au nerf ciliaire long; mais nous ne sommes pas assez certain de ce dernier fait pour l'affirmer; nous n'avons pas réussi à voir aucun filet se rendre au nerf palatin. Rappelons que ces recherches sont de la plus grande difficulté et qu'il n’est pas surprenant que certains faits nous aient échappé. Un certain nombre de filets, quatre ou cinq, se dirigent vers la périphérie du facial ; ils proviennent de la partie du faisceau sym- pathique située en arrière de ce nerf et se portent par conséquent d’arrière en avant et de dedans en dehors. Ils semblent donc encore provenir du gros ganglion. Nous devons faire remarquer ici que le faisceau sympathique est composé généralement de quatre cordons qu’ii est facile de séparer les uns des autres en arrière du canal ; mais, au voisinage du facial, ces mêmes cordons s’envoient une multitude d’anastomoses qui les maintiennent étroitement serrés les uns contre les autres; il en résulte une sorte de plexus qui remplace peut-être le deuxième ganglion sympathique ? De la partie postérieure du gros ganglion (9 *., fig. 6, PI. IV) partent 3 filets fins;les deux internes se réunissent bientôt en un petit ganglion microscopique relié à celui du côté opposé par une longue anastomose (og) qui, supérieure d’abord aux trones anté- rieurs de l’aorte, passe ensuite en dessous. Le troisième filet, un peu plus gros, porte aussi quelquefois un petit ganglion près de son origine. C’est en ce point qu’aboutit une racine très fine pro- venant du premier nerf rachidien ; mais il est bon d’ajouter que ni le ganglion nila racine ne nous ont paru constants. Ce troisième filet se porte loin en arrière ; il va se jeter dans un gros ganglion situé vis-à-vis de la sixième vertèbre, au delà du deuxième tronc artériel formé par les deux dernières artères épibranchiales, et en face du point où l’artère axillaire se porte, pour ainsi dire, brus- quement, de dedans en dehors, afin d’aller se distribuer dans la 154 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE pectorale. Ce 3° filet n’est autre que le Cordon sympathique. Voyons ce qu’est le ganglion dans lequel il se rend. Et d’abord ce ganglion (g*) n’est pas placé sur les parois de la colonne vertébrale, comme le sont toujours ceux qui appartiennent aux cordons latéraux chez les autres osseux; il est situé au-dessous durachis, tout à côté de son symétrique, auquel il est relié par une grosse anastomose, de sorte que les deux ganglions rejetés ordinai- rement un peu à gauche de la ligne médiane et quelquefois à droite, paraissent ne former qu’une seule masse à laquelle aboutissent les deux cordons latéraux. Si l’on enlève la petite membrane qui les maintient appliqués à la face inférieure du rachis, on peut les soulever et les déplacer à volonté, car ils ne reçoivent aucune racine qui les assujettisse à conserver une position fixe. Ils sont simplement soutenus d’une manière assez lâche par les cordons latéraux dont nous venons de parler, et par les faisceaux nerveux qui en partent. Ces faisceaux sont au nombre de trois. L’un d’eux sort de l’extrémité libre du ganglion droit, dont le volume est ordi- nairement plus considérable que celui du gauche, et va se terminer dans un petit ganglion situé sur la droite du rachis ; ce ganglion n’est autre que le premier ganglion abdominal (9, fig. 6,et 7, PI. VI), et le faisceau n’est lui-même que le cordon sympathique qui, à partir du gros ganglion, devient unique et se continue aïnsi Jus- qu'au Canal hémal. Les deux autresfaisceaux sont symétriques ; ils se portent transversalement vers les nageoires pectorales et vont innerver des organes analogues; nous n’en décrirons qu’un seul, celui de droite. Au lieu d’être composé d’un seul cordon, comme le précédent, ce faisceau comprend uu cordon principal et un assez grand nombre de filets qui l’accompagnent. Le cordon principal se ramifie bientôt et ses ramifications s’anastomosent avec les autres filets composant le faisceau; il en résulte un plexus quienveloppe partiellement l'artère axillaire; commeses filets se rendent en grande partie à la pectorale, on peut l'appeler pletus brachial sympa- A thique. Le gros ganglion qui donne naiïssance à ce faisceau peut DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 155 donc être considéré comme l'équivalent du 5° ganglion des autres osseux, c'est-à-dire comme celui qui correspond à l’hypoglosse, bien qu'il ne recoive de ce nerf aucune racine. Mais comme ce ganglion est particulier aux Physostomes apodes, nous le dési- gnerons sous le nom de deuxième ganglion, en réservant celui de 1* ganglion au ganglion placé au-dessous du glosso-pharyngien et du pneumogastrique. L’une des ramifications du Cordon prin- cipal, la plus antérieure, suit en arrière le ligament rond de l'épaule (#, fig. 6), jusqu'au point où le nerf hypoglosse et le pre- mier nerf rachidien, qui sont accolés, sortent de l'épaisseur des tissus (à, rn°). Le longde son trajet, il envoie plusieurs ramifications aux filets voisins, pour constituer le plexus brachial sympathique. Parmi elles, il en est qui vont se mêler intimement aux fibres des nerfs rachidiens des premières paires; une autreaccompagne le nerf _ hypoglosse et lui envoie quelques anastomoses ; enfin, une seconde, qui accompagne le même nerf, passe en dessus du ligament rond et vase ramifier sur les parois de la chambre branchiale (cb, fig. 6). Une autre ramification du faisceau issu du 2° ganglion accompagne l'artère axillaire et pénètre avec elle dans l’épaisseur des muscles internes et externes de la pectorale. On peut les suivre jusqu’à l’origine des rayons de la nageoire(fs, fig. 8). Il existe un ou même . deux filets pour chacune des artérioles ; ici ces filets sympathiques ne se confondent pas avec les dernières ramifications des nerfs rachidiens (rn). Le même faisceau envoie encore une et quelquefois deux branches à la partie antérieure de l’œsophage (7e, fig. 6). Là, cesbranches se ramifient et forment de concert avec les rameaux de la branche vis- cérale du pneumogastrique un plexus œsophagiennettementaccusé. Le rameau sympathique que le faisceau envoie à l’œsophage donne toujours naissance à un ou deux filets (fre) qui se rendent au rein céphalique, dans lequel ils se distribuent; nous avons pu voir les ramifications de ces filets passer d’un rein à l’autre et se confondre les unes avec les autres. 156 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Nous avons dit que l’un des trois faisceaux émis par le 2° gan- glion céphalique se rendait au 1° ganglion abdominal. Ce gan- glion reçoit les racines des nerfs rachidiens des troisièmes et qua- trièmes paires, droites et gauches, car le cordon abdominal devient unique, comme nous l’avons déjà dit, à partir du deuxième ganglion céphalique. Ce ganglion ne présente d’ailleurs rien de remarquable ; il est suivi de très près par le ganglion suivant qui reçoit ses raci- nes de la septième paire rachidienne. Parmi les paires rachidiennes antérieures, il s’en trouve donc quelques-unes qui ne fournissent pas de rameaux communicants. En général, l’aorte abdominale n’est pas placée sous le milieu du rachis; elle se trouve presque toujours reje- tée à droite; quelquefois on la voit à gauche. Le cordon sympa- thique lui est toujours opposé. Placé d’abord à droite de la colonne vertébrale, il ne tarde pas à passer à gauche, et si l'aorte change de côté, le cordon sympathique se rapproche de la ligne médiane et passe bientôt encore du côté opposé à l'aorte. Ses ganglions sont en nombre à peu près égal à celui des vertèbres, au moins depuis le premier ganglion abdominal. Chacun d’eux reçoit une racine droite et une racine gauche; la position du cordon oblige ces racines à avoir des longueurs très différentes; elles ne deviennent à peu près égales entre elles que lorsque le cordon se trouve sous le milieu du rachis. | Vers la 15° vertèbre, il existe un ganglion plus volumineux que ceux quile précèdent ou le suivent ;'indépendamment des 2 racines qui y aboutissent, il présente encore 2 filets qui se portent vers le point où le tronc cœliaque très court se ramifie. Ce sont donc les nerfs splanchniques, et le gros ganglion de la chaîne abdominale n’est autre que le ganglion splanchnique. Les nerfs splanchniques se ramifient presque aussitôt pour se porter à la vessie natatoire, à l'estomac, à la rate et aux intestins, sans présenter aucun gan- glion sur leur trajet. L’un des rameaux des nerfs splanchniques envoie des filets au foie et sans doute aussi à la vésicule biliaire. Dans la partie postérieure de l'abdomen, on voit partir de place DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 157 en place quelques fins filets qui se rendent aux reins postérieurs ou auxovaires. En pénétrantdans le Canal hémal, le cordon abdominal est encore unique ; ce n’est qu’à une petite distance en arrière qu’il devient double. La partie caudale est longue ; sous chaque vertèbre, il existe deux petits ganglions accolés l’un à l'autre ou très voisins ; les cordons qui relient les divers ganglions ne sont pas parallèles ; | mais ils s’écartent l’un de l’autre entre deux paires de ganglions consécutifs, de telle sorte qu'ils forment deux lignes ondulées rap- prochées au-niveau des ganglions. Dans la partie postérieure du canal, les deux cordons se réunissent en un cordon impair qui de- vient d’une telle ténuité que, malgré les plus grands efforts, nous n’avons pas réussi à voir où et comment il se termine. Le sympathique de l’Anguille se comporte sensiblement comme celui du Congre. Mais le 1* ganglion céphalique n’est pas situé sous le pneumogastrique ; il en est même fort éloigné, car il est placé à une petite distance du 2° ganglion céphalique, entre les deux troncs artériels formés par les artères épibranchiales. Une très longue et très forte racine lui est envoyée par le pneumogas- trique ; de prime abord, on serait tenté de prendre cette racine pour le cordon sympathique lui-même ; mais celui-ci se trouve rejeté assez loin en dehors et part, comme chez le Congre, de la masse * commune du trijumeau et du facial. Le 2° ganglion céphalique et les deux filets qui en partent n'offrent rien de particulier. Le 1° ganglion abdominal recoit les racines de 3 paires de nerfs ra- chidiens, au lieu de 2, comme chez le Congre. Mais l’Anguille présente quelques filets que nous n’avons jamais aperçus chez ee dernier poisson. C’est du 1* ganglion céphalique gauche qu'ils partent; ils s’anastomosent entre eux et forment ainsi un plexus qui entoure en partie l’extrémité antérieure de l’aorte et le tronc artériel formé par les 2 premières artères épibranchiales : droites. Ce plexus se termine par un ganglion qui émet deux filets destinés aux arcs branchiaux droits. 158 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Quant au reste du système sympathique de l’Anguille, nous n’avous rien de particulier à en dire. Murénidés. — Ophisuridés. — Sphagébranchidés. Après la longue description que nous venons de donner du sym- pathique du Congre, il nous reste peu de chose à dire de celui des poissons qui composent les trois familles des Murénidés, Ophisuri- dés et Sphagébranchidés. D'une manière générale, nous pouvons dire que la partie abdo- minale et la partie caudale du sympathique des poissons de ces trois familles sont identiques à celles du Congre. Les différences qu'elles présentent portent seulement sur des variations de rapports qui n’altèrent en rien leur physionomie générale. Nous n’en parlerons pas plus longuement. Quant à la partie céphalique, elle présente avec celle du Congre quelques différences en apparence plus profondes, bien que dans tous ces poissons la disposition fondamentale soit la même. Murœna helena. Dans la famille des Murénidés, nous n’avons étudié que la Murène hélène. Ici le sympathique commence encore sous la masse commune du trijumeau et du facial. Les 2 cordons décrivent une courbe à concavité interne et se rencontrent au ni- veau des points de sortie du pneumogastrique en un gros ganglion unique situé sur Ja ligne médiane, à la partie antérieure des muscles latéraux. Chaque pneumogastrique lui envoie une racine ; ce ganglion résulte donc de la fusion des ganglions que nous avons nommés, chez le Congre, 1% ganglions céphaliques. Il envoie de chaque côté deux filets qui pénètrent dans l’épaisseur des arcs bran- chiaux. En arrière, il donne naissance à 2 cordons très rapprochés, composés chacun de 3 petits faisceaux unis par du tissu conjonctif ; DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 159 ce sont les cordons latéraux. Ils s'étendent sur la ligne médiane depuis le 1° ganglion céphalique impair jusqu’à un autre ganglion impair qui représente ceux que nous avonsnommés, chez le Congre, 2% ganglions céphaliques. Chez ce dernier poisson, la fusion entre ces 2 ganglions était incomplète ; ici, elle est complète. À partir de ce ganglion, le cordon abdominal devient impair ; il s'étend à peu près en ligne droite jusqu’à l’entrée du Canal hémal, en présentant surson trajet de petits ganglions pourvus chacun de deux racines, comme chez le Congre. Le 2° ganglion céphalique impair donne en outre naissance à deux faisceaux qui se portent l’un à droite, l’autre à gauche vers l’œsophage. Leurs ramifications s’anastomosent avec celles des fibres du rameau viscéral du pneumogastrique pour constituer le plexus œsophagien. Chacun de ces faisceaux envoie un filet au rein cépha- lique antérieur. Mais les filets qui, chez le Congre, se portaient à la pectorale, manquent chez la Murène, ce qui n’a d’ailleurs rien de surprenant, puisque, chez ce poisson, les pectorales font défaut. Ophisurus serpens et hispanus. Nous avons pu étudier les 2 espèces d’Ophisures qui se pêchent sur les côtes de France. La fig. 8 de la PI. V représente la partie céphalique de l’Ophisurus hispanus. Elle montre que, comme chez la Murène, les 2 ganglions céphaliques sont impairs et situés sur la ligne médiane. Le 1° ganglion est seulement placé un peu plus en arrière. La partie antérieure des muscles latéraux coïncide à peu près avec les points de sortie des nerfs pneumogastriques. Chez la Murène, le 1 ganglion céphalique est placé juste en ce point; ici, le dessin montre qu’il est plus en arrière, mais qu il se trouve encore à une assez grande distance des premiers troncs artériels formés par les artères épibranchiales. Il résulte de cette situation que les racines (rs) que lui envoient les deux pneumogastriques sont plus longues que chez la Murène. 460 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Elles sont parallèles et placées à une petite distance l’une de l’au- tre sur la ligne médiane. Les 2 cordons latéraux qui partent de son extrémité postérieure sont écartés l’un de l’autre ; ils sont accompagnés presque tout le long de leur trajet par les filets que le ganglion envoie à l’aorte et aux différents arcs branchiaux. Le 2° ganglion céphalique où se rencontrent les deux cordons latéraux est assez développé. Il donne naissance en arrière au cordon abdominal unique cs, et de chaque côté à quelques filets qui vont à l’œsophage, former le plexus æsophagien, au rein cépha- lique (frc), et enfin aux pectorales (fp), car ces poissons possèdent des pectorales. Sphagebranchus imberbis. La disposition du sympathique de ce poisson est absolument la même que celle des Ophisures. Mais le premier ganglion céphalique est placé encore plus en arrière que chez les deux poissons précédents; il se trouve en effet situé sous le premier tronc artériel formé par les deux premières artères épibranchiales. Comme le 2° ganglion céphalique est toujours placé presque immédiatement en arrière du 2° tronc artériel, la distance entre ces deux ganglions est ici beaucoup plus courte que chez les Ophisures et surtout que chez les Murènes. En revanche, la lon- gueur des racines que lui envoie le pneumogastrique est beaucoup plus grande. Ces deux racines se portent aussitôt après leur sortie, l’une vers l’autre, s’accolent et paraissent former sur la ligne médiane un tronc sympathique impair plus gros que chacun des deux troncs véritables, éloignés l’un et l’autre de l’axe longitu- dinal. Le premier ganglion fournit encore des filets aux arcs bran- chiaux et probablement aux muscles branchiaux. Le 2° ganglion envoie des filets à l’œsophage et au rein céphalique ; mais comme les pectorales manquent encore à ce poisson, on ne trouve pas de filets accompagnant l'artère axillaire. De sa partie postérieure DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 161 part le cordon abdominal unique dont les ganglions sont peut-être plus développés que chez les poissons des deux familles précé- _/dentes. Enfin, nous ferons remarquer en terminant que, dans les trois familles dont nous venons de parler, le 2° ganglion céphalique . comprend peut-être le 1° ganglion abdominal des Congres, car il recoit des racines de quelques nerfs rachidiens. REMARQUES GÉNÉRALES SUR LE SYSTÈME SYMPATHIQUE | DES OSSEUX. Nous venons d'exposer en détail l’économie du système sympa- thique des poissons osseux ; nous allons maintenant essayer d’en dégager la physionomie générale. Le lecteur peut remarquer que nos descriptions concordent à peu près sur tous les points. Les différences individuelles ou spéci- fiques que l’on constate parfois n'ont jamais qu’un intérêt secon- daire ; elles n’altèrent pas la disposition générale du système. Le fait le plus important que l’on puisse signaler est l’absence, chez certaines espèces, de quelques filets qui se rencontrent ordinaire- ment chez les autres poissons ; mais cette absence ne peut être sérieusement invoquée contre l’idée de généralisation que nous défendons, car de ce que nous n’avons pas vu les filets, il ne s'en- suit pas qu’ils n’existent point. Il ne faut pas oublier que l’étude du sympathique des poissons est de la plus grande difficulté; les filets sont généralement très fins, très délicats; ils sont souvent plongés au milieu du tissu conjonctif ou da tissu adipeux;, quelque- fois logés, au moins partiellement, dans un canal osseux. Ces diverses circonstances rendent les recherches plus pénibles ; la disposition des os du crâne ou du rachis vient encore parfois accroître ces difficultés. Il n'est donc pas surprenant qu’un filet fin puisse échapper, surtout lorsqu'on ne peut consacrer aux . recherches qu’un nombre restreint d'individus de la même espèce. Et même, en admettant qu'un filet manque indubitablement et ! ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2° SÉRIE. — T. V bis, — suppL. 1889. — Mém. 11 162 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE constamment chez une ou quelques espèces, alors qu’il se trouve chez un grand nombre d’autres, il nous semble que ce fait ne peut avoir que la valeur d’une exception; c’est-à-dire qu'au lieu d’infir- mer la règle, il la confirme. Sous le bénéfice de ces observations, nous allons reprendre la série des filets et des organes, signaler leurs rapports et mettre en évidence ceux qui s'appliquent à la généralité des poissons. Il estaujourd’hui universellement reconnu que le système sympa- thique ne forme pas un organe à part ; il se trouve sous la dépen- dance du système cérébro-spinal qui lui fournit des racines. Chez les poissons osseux, tous les nerfs rachidiens lui en envoient une ou deux ; et, parmi les nerfs crâniens, le trijumeau, le facial,le glosso- pharyngien, le pneumogastrique et enfin celui qu’on a désigné sous le nom d’hypoglosse, lui en envoient également une ou deux et même davantage. Le sympathique a donc des origines nom- breuses qui s’étendent sur presque toute la longueur de l'animal. Comme le cordon sympathique se termine ordinairement en avant par un ganglion, la plupart des auteurs qui nous ont précédé dans cette étude se sont contentés d’indiquer ce ganglion comme limite antérieure du sympathique. Il était cependant naturel de rechercher d’où lui viennent ses racines; c’est ce que nous avons fait et ce qui nous a permis de déterminer avec précision l’origine constante de la partie antérieure du sympathique (1). Certains auteurs ont suivi le Cordon latéral jusque sous le trijumeau proprement dit ; d’autres l’ont vu se terminer sous la branche operculaire de ce nerf, c'est-à-dire sous le facial. Nous ferons remarquer qu’il n’est pas possible de considérer le ganglion le plus antérieur comme la limite extrême du cordon sympathique, (1) À cette occasion, nous ferons remarquer qu’en disant dans nos descrip- tions : Le sympathique commence... ou le sympathique prend naissance... nous voulons simplement dire par là : Les racines antérieures du cordon sympathique proviennent de. diner DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 163 car, chez certains poissons, chez les Physostomes apodes principa- . lement, le cordon se continue manifestement au delà du 1°" gan- glion. Suivant les espèces, ce ganglion se trouve sous le pneumo- * gastrique ou beaucoup plus loin en arrière, et le cordon se poursuit en avant jusqu'au trijumeau. Nous avons donc cherché d’où par- taient ses racines les plus antérieures. Sauf dans quelques poissons de très petite taille, où nous n’avons pas pu suivre le sympathique dans toute son étendue, nous avons toujours trouvé que les racines les plus antérieures provenaient du trijumeau proprement dit et du ganglion de Gasser. Et, de plus, ces racines n allaient pas se jeter dans le ganglion placé au-dessous du facial, mais dans un autre accolé à la face inférieure du ganglion de Gasser. Le ganglion correspondant au facial n’est donc pas, comme on le croyait jusque- là, le ganglion céphalique antérieur, mais seulement le 2° ganglion céphalique. Aïnsi que nous l'avons dit en commençant l'étude du Bar, la partie antérieure du cordon, comprise entre le trijumeau et le facial, est logée dans un canal osseux, Cette particularité est passée pour ainsi dire inaperçue. Dans son Anatomie des systèmes nerveux, tome II, p. 512, Desmoulins dit bien en parlant du sym- pathique des poissons : « Ilse termine presque perpendiculairement sur la branche operculaire de la 5° paire qu’il gagne par un con- duit à travers le basilaire et le pariétal (c’est-à-dire [’Occipital latéral). » Le conduit dont parle Desmoulins ne peut être le même que le canal en question, car celui-ci est toujours placé entre le trijumeau et le facial, tandis que celui de Desmoulins se trouve en arrière de ce dernier nerf. Ajoutons que jamais nous n’avons aperçu le conduit auquel il fait allusion. Stannius, dans Peripherische, le signale chez Belone, où il est facile à voir, grâce à la transparence des os ; mais il s’en tient presque à cette mention ; dans la suite de son travail, il le considère uniquement comme « le canal vascu- laire de l’os sphénoïde basilaire, dans lequel se relient les deux grosses branches antérieures du Cüreulus cephalieus ». Les filets nerveux qu'il a vus s’y rendre se portaient, dit-il, au ganglion 164 SYSTÈME NERVEUX: GRAND SYMPATHIQUE ciliaire, chez certains poissons ; au nerf abducteur, chez d’autres. Ainsi, bien que cet auteur ait connu l'existence du canal qui loge la partie antérieure du sympathique, il n’y a vu qu’un canal vascu- laire dans lequel on peut suivre des filets émanés du commence- ment de la partie céphalique du sympathique. Nous avons dit plus haut que ce canal manque chez les Baudroies et les Gadidés ; le crâne de ceux-ci présente à la place une excavation qui loge le tronc du trijumeau et du facial, et abrite en partie le ganglion antérieur du sympathique. Chez toutes les autres espèces que nous avons disséquées, il existe, mais il peut être plus ou moins développé. Lorsqu'il se trouve très réduit, les points de sortie du trijumeau et du facial sont voisins l’un de l’autre, et les deux ganglions sympathiques qui leur correspondent peuvent être rapprochés au point de se toucher et même de se confondre. Dans ce cas, le ganglion qui résulte de leur fusion se trouve placé soit sous le trijumeau, soit sous le facial. Lorsque les deux ganglions sont séparés, le 1° est ordinairement placé sous le ganglion de Gasser, lequel peut être plus ou moins apparent. Ce premier ganglion sympathique reçoit toujours un certain nombre de racines du trijumeau; on en compte ordinaire- ment deux principales et plusieurs petites; parmi ces dernières une grande partie traversent le ganglion de Gasser pour aller trouver le bord antérieur du ganglion sympathique ; d’autres sem- blent provenir directement du ganglion de Gasser. En outre, maloré l'existence d’un 2° ganglion céphalique, le facial envoie très souvent au 1% une forte racine. Quels filets émet-il ? Nous allons les passer en revue successive- ment. Ceux qu'il est le plus facile de voir se portent sur les deux | branches maxillaires du trijumeau. Ils sont ordinairement au nombre de deux, l’unplacé à la face inférieure de la partie com- mune des deux nerfs, l’autre à la face supérieure. Bien que ces filets se perdent dans la partie commune et qu’il soit impossible de les suivre au delà, ilest probable qu'ils innerventles deux maxillaires DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 165 On en voit souvent un 3° et quelquefois un 4°; mais, quel que soit leur nombre,cesfilets se trouvent constammentchez tousles Poissons. D'autres filets se portent aux branches ophthalmiques du triju- meau. Ils sont moins faciles à découvrir, d’abord parce qu'ils sont plus déliés et plus courts, ensuite parce qu’ils sont situés dans la cavité de l’orbite et que cette position rend leur recherche moins aisée. C’est là sans doute la cause pour laquelle nous ne les avons pas trouvés chez tous les Poissons. Une autre raison peut être tirée de la position du 1* ganglion céphalique. S'il est placé en arrière du ganglion de Gasser, les filets qu’il envoie aux branches de l’ophthalmique peuvent traverser la substance de ce ganglion, et comme, dans ce cas, ilestbien difficile de les suivre sans les rompre, on les croit absents alors qu’ils existent réellement. Ces raisons, ajoutées aux cas nombreux où nous avons aperçu les filets dont il s’agit, nous autorisent à penser qu'ils existent constamment chez tous les Poissons. Un autre filet qui ne se laisse pas toujours facilement découvrir, c’est celui qui se rend au palatin, Ce nerf est généralement sous la dépendance du facial, et, cependant, ce n’est pas ordinairement le ganglion correspondant à ce nerf qui lui envoie une anastomose ; elle lui vient le plus souvent du 1* ganglion. Sice dernier estéloïgné de l'origine du palatin,l’anastomose se détache de la partie du cordon située entre les deux ganglions céphaliques et se dirige en arrière ; mais, avecun peu de patience, on arrive toujours, dans ce cas, à la détacher du cordon et à la suivre jusqu’au 1° ganglion. D'autres fois, elle se porte loin en avant et se voit alors très facile- ment. Mais il arrive fréquemment que la base du palatin est logée dans un canal osseux et que le filet sympathique pénètre dans ce canal. Sa recherche, dans ces conditions, devient très difficile ; il peut se trouver facilement brisé ou enlevé, et c’est là sans doute la raison qui nous a empêché de l’apercevoir chez certains poissons. Mais nous l’avons vu chez un trop grand nombre pour ne pas être persuadé qu’il existe chez tous. | 166 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE Un autre filet, que l’on retrouve constamment, se rend au gan- glion ophthalmique ou tout au moins à la racine que le triju- meau fournit à ce ganglion. Un certain nombre de nos devanciers l’ontsignalé et, parmi eux, se trouve Stannius, qui l’a observé chez plusieurs Poissons. Voici ce qu’il en dit: « Il n’a été observé que chez quelques Poissons osseux, une liaison évidente entre le tronc ciliaire sortant du ganglion-racine du nerf trijumeau et les filets nés du 1* ganglion céphalique du nerf sympathique. £x. Cottus, Belone, Gadus. Chez le Trigle également, d’après les apparences, il se rend un filet sympathique au tronc ciliaire du trijumeau. Chez Scomter, Cycloptère et Esox, un filet sympathique se rend au ganglion ciliaire. » Depuis lors, d’autres auteurs n’ont pu retrouver le filet en question particulièrement chez Esox. Noüs aurions hien voulu vérifier le fait chez ce dernier poisson ; malheureusement, c’est encore un de ceux que nous n’avons pu nous procurer. Mais dans toutes les autres espèces, lorsque les individus étaient de quel- que taille, nous l’avons toujours aperçu. Nous pouvons donc affir- mer, plus fortement encore que pour ceux dont il a été question précédemment, que le filet qui se rend au ganglion ophthalmique ou au tronc ciliaire fourni par le trijumeau existe chez tous les poissons. Ilen est de même d’un autre filet qu'aucun auteur n’a signalé ; nous voulons parler de celui qui est destiné au nerf ciliaire long. Dans l’Anatomie comparée de Siebold et Stannius, traduite par Spring et Lacordaire, Stannius dit au bas de la page 72, dernier renvoi de cette page : &« Schlemm a vu chez le Sandre cette branche (le nerf ciliaire long) s’anastomoser avec un filet prove- nant du ganglion ciliaire du nerf sympathique. » Nous avons tou- jours vu que le nerfciliaire long était uni par une ou plusieurs anastomoses avec le tronc ciliaire du trijumeau, c’est-à-dire avec la racine que le trijumeau fournit au ganglion ophthalmique. Mais, indépendamment de ces anastomoses, il existe chez tous les Pois- sous un filet sympathique spécial pour le nerf ciliaire long; si le DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 167 nerf ciliaire long et le tronc ciliaire sont réunis ou accolés à leur base, il peut arriver que le 1% ganglion céphalique n’envoie qu’un seul filet pour la partie commune de ces deux nerfs ; mais, ordinai- rement, les deux filets sont distincts dans toute leur étendue ou ne sont accolés que sur un petit trajet. ” Ainsi donc, le 1°" ganglion céphalique envoie chez tous les Pois- sons des filets sympathiques : 1° aux nerfs maxillaires ; 2° au nerf ophthalmique ; 8° au palatin ; 4 au ganglion ophthalmique ou à la racine que le trijumeau fournit à ce ganglion, ou à la branche de l’oculo-moteur commun, qui forme avec le précédent le nerf ciliaire court ; 5° enfin au nerf ciliaire long. Ce même ganglion en envoie-t-il à d’autres nerfs ? Cuvier, Büchner et Stannius disent qu'il s’anastomose également avec l’'oculo-moteur externe. Quant à nous, malgré les recherches les plus minutieuses, nous n'avons jamais pu apercevoir cette anasto- mose. Nous devons faire remarquer qu'aucun de ces auteurs n’af- firme l'avoir vue d’une facon indubitable. Cuvier dit en effet dans l Histoire naturelle des Poissons, tome I, p. 4388 : « … mais onn'a pu voir encore assez nettement sajonction (du nerf sympathique) avec ceux (les nerfs) de la 6° paire. Nous croyons cependant l'avoir aperçue dans la Morue. » Büchner (1) dit, de son côté : « … Une fois, je crois avoir poursuivi un filet de ce ganglion (le 1%) jusqu’à la 6° paire à laquelle il se rendait par un petit trou situé près du bord externe du corps du sphénoïde antérieur. » Enfin, Stannius (2) s’exprime ainsi: « Le tronc du nerf abducteur, qui se répand ici, s'applique étroitement contre ce gros ganglion (le 1° ganglion céphalique) etse relie avec lui, selon toute apparence, par l’intermé- diaire de filets.» Ilest vrai que, dans son autre ouvrage, Das peri- pherische, ete. ildit d’une façon non dubitative qu'unfilet sympathique s’anastomose avec le nerfabducteurchez le Cycloptère. Nous l’avons (1) Büchner, loc. cût. (2) Stannius, Uber das peripherische N'ervensystem des Dorch(Gadus callarias), 168 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE bien cherché chez cette espèce, mais sans succès. Aïnsi, chez les espèces mêmes où ces auteurs ont cru apercevoir une liaison entre le sympathique etle nerf abducteur, nous l'avons cherchée inuti- lement. Nous ne l’avons pas découverte davantage chez les autres espèces que nous avons disséquées ; nous pouvons, je crois, Con- clure de là que, si eilese trouve chez quelques individus, ce n’est qu’accidentellement et non d’une facon constante. Nous ajouterons maintenantquelques réflexions. Personne n’a jamais signalé d’anas- tomose entre le sympathique et le pathétique, pas plus qu'entre le sympathique et les branches de l’oculo-moteur commun qui se rendent aux muscles de l'œil. Il semblerait bien étonnant que, de tous les nerfs qui se rendent à ces muscles, l’abducteur, destiné uniquement au muscle externe, fût le seul à recevoir une anas- tomose sympathique. Nous n’insisterons pas davantage ; nous rap- pellerons seulement que chez la Baudroie nous avons vu un filet sympathique se porter sur l’oculo-moteur externe séparé en ce point en deux faisceaux, puis passer entre ces deux faisceaux, mais sans envoyer de filet au nerf. Nous avons vu chez deux autres espèces un autre filet sympa- thique se diriger vers le tronc commun de l’oculo-moteur commun etse bifarquer en y arrivant ; l’une des branches se portait vers la périphérie du nerf et se rendait probablement dans la racine du ‘ganglion ophthalmique, mais peut-être aussi dans les autres branches du nerf. L’autre branche de bifurcation se portait vers la racine du nerfet doit être considérée par conséquent, non comme un filet sympathique, mais comme une racine que l’oculo-moteur commun fournitau 1% ganglion céphalique. | Le 2° ganglion céphalique, considéré jusqu’ici comme le 1%, se trouve ordinairement placé sous le facial et plus souvent un peu en arrière de ce nerf. Celui-ci lui envoie toujours une ou deux | racines, quelquefois davantage. Il fournit généralement un, deux, ou même trois filets au facial. Où se portent ces filets? Il est bien difficile de le dire, car ils sont ordinairement très courts et se DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 169 perdent dans les fibrilles des faisceaux qui composent le nerf. Cepen- dant il est rationnel de croire que tous les rameaux du facial en possèdent des fibrilles. Si le facial émet un gros rameau, comme chez les Mullidés, où les Barbillons sont innervés par le facial, un filet sympathique émané du 2° ganglion se porte directement sur ce rameau. En outre,le 2° ganglion fournit ordinairement un filetà la branche antérieure du glosso-pharyngien, laquelle se rend, comme onsait, à la pseudo-branchie. Mais ce filet manque ou paraît man- quer parfois, quoique assez rarement. Dans ce cas, il peut cepen- dant exister. Le facial, en effet, envoie toujours une anastomose au rameau antérieur du glosso-pharyngien. Le filet sympathique destiné à ce dernier nerf peut emprunter la voie de l’anastomose pour sa rendre à la pseudo-branchie, et circuler parmi les faisceaux du facial sans qu il soit possible de déceler sa présence. Nous dirons done de ce filet, qu’un grand nombre de Poissons présentent d’une façon évidente, ce que nous avons dit de quelques autres, c’est qu'il se trouve chez tous les Poissons. Nous savons quele 1° et le 2° ganglion peuvent se trouver con- fondus. Lorsqu'il en est ainsi, tous les nerfs qui recoivent habituel- lement des anastomoses sympathiques de ces deux ganglions cépha- liques, les reçoivent du ganglion unique, et les racines de ce dernier lui viennent à la fois du trijumeau et du facial. Quelquefois, le 1% ganglion manque ou paraît manquer. Le ganglion qui reste joue le rôle des deux ganglions ordinaires. Maïs les filets qu’il envoie et qui sont destinés aux nerfs antérieurs de la tête accompagnent les racines qui lui viennent du trijumeau proprement dit et forment, de concert avec ces racines, un faisceau mixte dont le calibre égale à peu près celui du Cordon sympathique et semble en être exclusi- vement la partie antérieure. Ühez les Physostomesapodes, ces gan- ghons manquent tous les deux et le cordon qui les relie au triju- meau n'est autre chose que le faisceau mixte dont nous venons de parler. Rappelons qu’ordinairement ce faisceau mixte ou la partie 170 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE antérieure du Cordon sympathique est logée dans un canal osseux. | Le 3° ganglion céphalique correspond au glosso-pharyngien. Il est généralement plus faible que le précédent et surtout que le suivant ; il est fréquemment divisé en deux renflements. Le glosso- pharyngien lui envoie presque toujours une ou deux racines ; de son côté, il envoie au tronc de ce nerf ou à sa partie principale un ou deux filets. Il ne fournit que très rarement, à défaut du 2° ou même du 1% ganglion, le filet du rameau antérieur du glosso- pharyngien. Ce fait prouve que si an organe donné reçoit un filet sympathique, ce filet peut avoir pour origine des points différents du Cordon sympathique. Le 4° ganglion céphalique correspond au pneumogastrique. De taille souvent considérable, ce ganglion peut être divisé en deux et même trois parties ; il reçoit toujours du nerf crânien auquel il correspond deux ou trois grosses racines. Il donne également tou- jours naissance à un certain nombre de filets qui se portent sur les rameaux branchiaux de ce nerf et, quelquefois, sur ceux qui se dis- tribuent aux muscles des arcs qui soutiennent les lamelles bran- chiales. Exceptionnellement, comme chez le Bar, il fournit encore un filet au rameau latéral. Mais les filets qu'il émet ont des dimen- sions excessivement variables. Chez le Saumon, l’Alose, les Cyprins et certains Physostomes apodes, ces filets acquièrent un volume et une longueur considérables ; aussi ont-ils été aperçus et décrits chez ces Poissons, sauf chez les apodes. On a remarqué qu'ils s’unissaient aux rameaux branchiaux du pneumogastrique, et Büchner a considéré cette union comme formant un plexus qu'il a comparé au plexus pulmonaire des vertébrés supérieurs. Chez les autres Poissons, où ils n’ont pour ainsi dire pas été signalés, ils n’en existent pas moins, mais ils sont faibles, courts, en un mot peu apparents ; ils se jettent toujours dans les rameaux branchiaux, et quelquefois, maïs plus rarement, dans les nerfs des muscles bran- chiaux. Dansson ouvrage, Das Peripherische, Stannius dit en par- lant des nerfs qui naissent de la partie céphalique du cordon que DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 171 des filets généralement gris passent dans la rainure de la convexité de chaque arc branchial, enaccompagnant les troncs des vaisseaux. Il ajoute : Weber et Giltay les ont surtout mentionnés. Nous regrettons de n’avoir pas pu nous procurer les travaux de ces auteurs ; les analyses que nous en possédons ne font pas mention de ces filets et nous ne savons à quels Poissons ils se rapportent. Le ganglion suivant, quenous avons appelé 5° ganglion cépha- lique, correspond à l’hypoglosse. Nous avons considéré ce nerf comme un nerf crânien, non seulement parce qu’il sort du crâne par un trou percé dans l’occipital, mais encore parce qu’il se trouve placé, comme les nerfs crâniens proprement dits, en avant du liga- ment rond de l'épaule, qui forme en quelque sorte une limite naturelle, entre la partie céphalique et la partie abdominale. Les racines que le 5° ganglion reçoit sont presque toujours très fortes ; elles sont au nombre de 1, de 2 ou de 3, selon que l’hypoglosse naît lui-même par 1, 2 ou 3 racines. Quant aux filets qui en partent et qui se portent toujours sur l’hypoglosse, leur importance varie suivant les espèces. Nous avons dit, en parlant des Physostomes apodes et surtout du Congre et de l’Anguille, l’énorme développe- ment que prennent ces filets ; ils forment chez ces espèces un Plexus brachial sympathique qui accompagne l’hypoglosse, les premiers nerfs rachidiens, l’artère axillaire et ses nombreuses ramifications. Chez d’autres poissons, la Carpe, par exemple, ils sont moins déve- loppés, mais ils présentent comme particularité d’être pourvus d’un grand nombre de petits ganglions ; ils se jettent dans l’hypo- glosse etle 1% nerf rachidien, dont les ramifications s'unissent à celles du nerf précédent. Souvent ce filet est unique; il ne porte aucun ganglion et se jette directement dans l’hypoglosse. Il peut donc avoir une plus ou moins grande importance ; mais, quelle qu’elle soit, il existe chez tous les poissons. Il est donc étonnant que la plupart des auteurs anciens n’en aient pas fait mention. Weber est le seul quil’ait signalé dans son ouvrage intitulé Anato- mia comparata. Voici simplement en quels termes cette partie de 172 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE son travail se trouve résumée dans les Archives de Meckel : « De là il (le sympathique) descend le long de la colonne vertébrale jusqu’au point de la naissance des nerfs de la nageoire pectorale. Il se lie à ces derniers nerfs par trois filaments et forme trois petits gan- glions... » Avant de quitter le nerf hypoglosse, disons encore que parfois les ganglions correspondant au 1° et même au 2° nerf rachidien, lui envoient également chacun un filet sympathique. Le 5° ganglion céphalique se trouveordinairement placé en avant, | au-dessous, où un peu en arrière du ligament rond de l'épaule, qui existe chez presque tous les poissons osseux. Ce ligament forme aussi la limite postérieure de la cavité branchiale interne, c’est-à-dire de l’espace compris entre la concavité des arcs bran- chiaux et les parois du crâne : ordinairement cette cavité se trouve remplie par la partie antérieure des reins ; elle loge entièrement la portion céphalique du sympathique qui s’étend sur les parois du crâne dont elle épouse les contours. La portion abdominale comprend 2 cordons. En passant sous chaque nerf rachidien, chacun d’eux recoit de ce nerf une ou deux racines. Leur point d’union est toujours marqué par un ganglion. Plusieurs auteurs ont prétendu que, parfois, il n'existait pas de ganglion en ces points ; Stannius répond à cela que les ganglions existent constamment; mais que, chez certains poissons, leur pré- sence ne peut être démontrée qu'à l’aide du microscope. Cela n’est même pas nécessaire; une simple loupe suffit. Les racines ne proviennent pas toujours uniquement de la branche ventrale du nerf, de temps en temps ces racines sortent directement du tronc rachidien à sa sortie de la colonne vertébrale. Maïs, ce qui ne forme que l'exception pour la partie abdominale du sympathique devient la règle pour la partie caudale. Il arrive fréquemment que ces racines sont mixtes, comme chez les Mammifères ; une partie des fibres provient du nerf rachidien et se porte au ganglion; une autre part du ganglion et se mêle aux fibres des nerfs rachidiens. D’autres fois, un filet distinct des | DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 473 racines se détache du ganglion et se porte sur le nerf rachidien correspondant ; on remarque surtout ce fait dans la partie an- térieure de la cavité abdominale, là où les nerfs rachidiens se portent aux nageoires pectorales et aux nageoires ventrales. Les deux cordons se comportent différemment l’un vis-à-vis de l’autre, suivant les espèces. Ils peuvent rester distincts dans toute létendue de la cavité abdominale ; dans ce cas, chacun d’eux est étroitement accolé à la colonne vertébrale et recouvert inférieure- ment par lerein ; ils ne sont jamais complètement indépendants l’un de l’autre, car leurs ganglions, au moins ceux de la moitié posté- rieure, s’envoient des anastomoses. D’autres fois, les 2 cordons sépa- rés dans la partie antérieure de la cavité abdominale se réunissent en ün cordon unique dans la partie postérieure. Enfin, chez les Physostomes apodes, les 2 cordons se réunissent en un cordon unique dès le commencement de la cavité abdominale et se continuent ainsi jusqu’au delà de l'entrée du Canal hémal. Quelle que soit la disposi- tion des cordons dans cette partie du corps, leur rôle est de four- nir les filets sympathiques destinés aux viscères de cette cavité. Nous allons les passer en revue. Les plus importants des nerfs émis par les cordons abdominaux sont les nerfs splanchniques. Ils accompagnent toujours l'artère cœliaque et ses ramifications et naissent en général d’un ganglion unique ou double situé sur les paroïs de cette artère. Dans la majeure partie des cas, le ganglion splanchnique n’a qu’une seule racine apparente qui provient de l’un des premiers ganglions abdominaux du côté droit ; plus rarement il en a deux, et la se- conde lui vient alors d’un ganglion gauche, symétrique de celui qui fournit l’autre racine. Mais, le plus ordinairement, la seconde racine se présente sous les apparences d’une anastomose. En effet, au lieu d’aller trouver le ganglion splanchnique, cette racine se porte sur le ganglion d’où part la racine de droite, ou même sur cette racine. Îl est rare qu'il existe 2 ganglions splanchniques distincts, ayant chacun sa racine propre; il est plus rare encore 174 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE que la racine unique du ganglion splanchnique vienne du côté gauche et que celle de droite ait les apparences d’une simple anastomose. Il nous reste à faire connaître les ganglions d’où naissent les racines des nerfs splanchniques. En général, ces racines partent du 5° ganglion céphalique ou du 1° ganglion abdominal, ou encore d’une masse ganglionnaire composée des 2 ganglions précédents et quelquefois du 2° ganglion abdominal; enfin, plus rarement, elles peuvent partir du 2° ganglion abdominal seul ou des deux premiers ganglions abdominaux réunis. En dehors de ces cas, on ne trouve guère d'exception que chez les Physostomes apodes, où le ganglion splanchnique se confond avec le 11° ou le 12° ganglion, correspon- dant à la 15° ou 16*vertèbre, et chez quelquesautres osseux, dont le nerf splanchnique double ne montre aucun autre renflement que celui d’où il émane, Les nerfs splanchniques proprement dits, généralement au nom- bre de 2 ou 3, ne tardent pas à se ramifier. Leurs ramifications s’anastomosent entre elles et avec celles da rameau viscéral du pneumogastrique ; il en résulte un plexus très compliqué d’où partent les filets qui accompagnent les artères des viscères. Au- tour de chacune de ces artères, il existe également un plexus faci- lement visible sur les gros sujets et que l’on retrouve avec plus de peine, il est vrai, chez les petites espèces. Les viscères qui sont ainsi innervés sont : le foie et la vésicule biliaire, la rate, l’esto- mac et surtout le duodenuin et l'intestin proprement dit; le mé- sentère et les amas qui constituent le pancréas reçoivent également des filets. Quand la vessie natatoire existe, il s’y rend toujours au moins un filet sympathique, mais cet organe est surtout innervé par le pneumogastrique. Indépendamment des organes dont nous venons de parler, le nerf splanchnique envoie encore des filets à la partie antérieure des reins. Du côté droit, ces filets partent ordi- nairement du ganglion splanchnique ; les uns pénètrent dans la substance rénale, les autres accompagnent la veine cardinale pos- SES DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 475 térieure à la surface de laquelle ils se ramifient, s’anastomosent, formant ainsi un plexus veineux qui n’a jamais été observé. Du côté gauche, les filets nerveux partent de la racine gauche du nerf splanchnique, disposée, comme on sait, en forme d’anastomose transversale. | Parmi les autres nerfs émanés des cordons abdominaux, nous devons mentionner spécialement les nerfs spermatiques. Leur im- portance varie considérablement avec les poissons ; ils sont parfois d’une grosseur extraordinaire, et, parfois, ils sont si réduits qu’il est difficile de les découvrir. Dans le premier cas, en arrivant sur les organes génitaux, ils se rencontrent ordinairement en un gan- glion d’où partent de nombreuses branches qui vont se ramifier ets’anastomoser, à la surface de ces organes ; il en résulte un Plexus spermatique. Généralement, quelques-uns de leurs filets se portent sur la vessie urinaire, l’enveloppent entièrement dans un Plexus vésical très riche et très fourni. Si les nerfs spermatiques sont faibles, leur ténuité empêche de les poursuivre et les organes gé- nitaux ne présentent pas de Plexus spermatique apparent, ni de Plexus vésical. Ces nerfs émanent ordinairement des derniers gan- glions abdominaux ; si les cordons sont doubles, ce sont presque toujours les ganglions du côté gauche qui les fournissent. Lorsqu'il existe un canal formé par les dernières vertèbres dorsales et que ce canal est complètement clos, les nerfs spermatiques naïssent des ganglions abdominaux situés immédiatement avant l’entrée de ce canal; c’est ce qui existe chez la Baudroïe et les Scorpènes, par exemple. Enfin, pour terminer ce qui concerne la partie abdominale, nous ferons connaître la distribution des petits filets qui naïssent des ganglions de cette région. À la partie antérieure, les gan- glions envoient de très petits filets vers les points d’attache de la vessie natatoire et des muscles rétracteurs des pharyngiens supérieurs. De place en place, un filet fin se porte à l’aorte; mais nous n'avons pas vu de plexus visible à la surface de l'artère. 476 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE D’autres filets qui naissent régulièrement de deux en deux ver- tèbres accompagnent les artérioles intercostales et se rendent avec elles dans les muscles latéraux. Lorsqu'une branche se détache de l'artériole pour se rendre aux reins, le filet sympathique qui ac- compagne la première se bifurque et l’une des branches de bifur- cation pénètre dans la pulpe rénale à la suite de l’artériole. Les reins reçoivent donc des filets de plusieurs sources ; ils peuvent même, comme chez les Gadidés, en recevoir de la partie céphalique du sympathique. D'autres filets, dont nous avons déjà eu l’occasion de parler, se portent sur les nerfs rachidiens et lesaccompagnent dans leur dis- tribution. Si les organes génitaux s’étendent sur toute la longueur de la cavité abdominale, comme chez les Anguillidés, les nerfs spermatiques sont très faibles ; ils se détachent de place en place et accompagnent les artères qui se rendent à ces organes. Malgré les recherches les plus minutieuses, nous n’avons pas réussi à voir des filets sympathiques se rendre soit directement, soit indirectement au cœur ou au Sinus de Ouvier. Stannius dit à ce propos dans Das Peripherische, ete. : « Uhezle Diodon, j'ai vu de chaque côté un rameau traverser les reins de part en part pour se rendre au vestibule du cœur enlongeantle Ductus Cuvieri. » Comme nous n’avons pas pu nous procurer ce poisson, il nous a été impos- sible de vérifier le fait avancé par Stannius. (est d’ailleurs le seul poisson où il ait été signalé jusqu'ici. La partie caudale du sympathique est toujours double, sauf peut-être tout à fait à son extrémité postérieure. Lorsque le cor- don abdominal est simple dans la moitié postérieure ou dans toute l'étendue de la cavité, il se dédouble en entrant dans le Canal hémal, mais il présente très fréquemment une singulière particularité. Chacun des deux cordons se trouve divisé en segments d’inégal calibre quialternent avec ceux du cordon opposé, et comme les gan- glions de cette partie sont fréquemment accolés, il semble que le Cordon caudalest simple et qu’il se porte alternativement à droite et DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 177 à gauche de l'aorte et de la veine caudales. C’est là probablement ce qui a induit Stannius en erreur, car il signale un Cordon caudal impair chez certains poissons. Il ajoute : « Ce tronc simple se par- tage souvent en deux branches qui plus loin se relient et se séparent de nouveau alternativement.» C’est bien là l'effet que produit le cordon chez plusieurs espèces ; mais, s’il paraît simple en certains endroits, cela tient à l'extrême ténuité du second cordon. Les anciens auteurs n’avaient pas connu la partie caudale du sympathique, sauf Desmoulins, qui l’avait aperçue dans la partie antérieure du Canal hémal. Stannius est le premier qui l’ait suivie jusqu’à l'extrémité postérieure de ce canal. D’après lui, la partie thoracique du grand cordon se continue très généralement sous forme de partie caudale.... Nous l’avons cherchée et nous l’avons suivie chez tous les Poissons que nous avons disséqués, même chez le Fierasfer, le Syngnathe et l’Hippocampe. Nous pouvons donc affirmer que la partie caudale du sympathique existe chez tous les Poissons osseux. Relativement aux racines des ganglions de la partie caudale, personne, à notre connaissance, n'en a fait mention. Cependant, ils existent et se comportent même autrement que dans la partie ab- dominale. Ils sont régulièrement au nombre de deux pour chaque ganglion. Le plus antérieur naît directement du tronc commun d’où partent les trois branches principales du nerf rachidien ; il contourne la vertèbre et pénètre dans le Canal hémal, soit par un orifice percé dans la base de l’hémapophyse, soit par l'intervalle laissé entre 2 hémapophyses successives. La 2° racine se trouve un peu arrière de la précédente ; elle part de la base du rameau ventral du nerf rachidien et se rapproche da- vantage, par conséquent, de celles des ganglions de la partie abdomi- nale. Ces 2 racines sont quelquefois indépendantes l’une de l’autre 5 d’autres fois, elles s’envoient une oudeux anastomoses, et enfin, l’une d'elles, la seconde, peut être mixte. Une partie de ses fibres émanées du ganglion correspondant se portent dans les muscles dorsaux, ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2€ SÉRIE. — T, V bis, — Suppu. 1889, — Mém. 12 178 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE où ilnous a été impossible de les suivre à cause de leur ténuité. Stannius dit que « des filets sympathiques enlacent toujours le Vasa caudale ». De notre côté, nous en avons constamment aperçu chez tous les poissons où nous les avons cherchés. Nous dirons d’où ils naïssent. Il ajoute : « Les liaisons de la partie cau- dale du grand cordon avec les rameaux antérieurs des nerfs spi- naux n’ont été observées qu'isolément chez de grands poissons. » Ce qu’il n’a observé qu'isolément chez de grands poissons, nous l'avons observé, nous, chez tous les poissons de grande et de moyenne taille que nous avons pu nous procurer. En général, chaque nerf rachidien ne reçoit qu’un seul filet ; cependant, les nerfs qui recoivent deux filets ne sont pas rares. Chez certains poissons, les Trigles, par exemple (fig. 5, PI. VI), les branches ven- trales des nerfs rachidiens s’anastomosent et forment un plexus appliqué sur les parois des rayons de la nageoïire anale. Le sympa- thique qui envoie des filets à ces nerfs rachidiens contribue donc à la formation de ces plexus. Mais il en est un autre que nous avons appelé Plezus caudal et qui se trouve placé en avant de la nageoire caudale, de chaque côté de la base de la queue. Il est formé par les dernières paires rachidiennes qui, au lieu de se diriger de haut en bas, se portent d'avant en arrière et s’anasto- mosent les unes avec les autres. Les rameaux de ce plexus vont se distribuer dans les petits muscles de lanageoïire caudale. Ce plexus reçoit toujours un certain nombre de filets sympathiques qui sont d'autant plus nombreux que le plexus commence plus tôt. C’est ce que montrentla fig. 3de la PI. V et la fig. 2de la PI. VI. En outre, c'est toujours dans ce plexus que se terminent les cordons sympa- thiques. Arrivés près de l'extrémité postérieure du Canal hémal, les deux cordons se rejettent en dehors, sortent du Canal hémal en dé- crivant une courba à convexité postérieure et vont se perdre dans l’un des rameaux principaux du plexus. Si les deux cordons se réunissent en un Cordon unique, comme nous avons cru le voir chez certaines espèces, celui-ci se porte tantôt du côté droit, tantôt du DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 179 côté gauche, et va se terminer comme nous venons de le dire. C’est dela courbe décrite par les cordons que partent les filets qui accom- pagnent les petits vaisseaux formant le Vasa caudale. RÉSUMÉ. De l'étude que nous venons de faire sur les Poissons osseux, il résulte que (1) : 1° Le cordon sympathique consiste en un double cordon qui s'étend depuis le trijumeau proprement dit jusqu’à l'extrémité posté- rieure du Canal hémal. 2° Chaque cordon porte d’espace en espace, ordinairement sous certains nerfs crâniens et sous tous les nerfs rachidiens, un ganglion plus ou moins visible, mais constant. 3° Chacun de ces ganglions est relié au nerf correspondant par une ou plusieurs racines. 4° Les racines les plus antérieures sortent toujours du trijumeau proprement dit. 5° Ces racines se rendent ordinairement dans un ganglion placé sous le ganglion de Gasser ; c’est le 1* ganglion céphalique. 6° De ce 1°” ganglion -céplalique, relié par des racines au trijumeau et fréquemment au facial, partent constamment : À. Deux ou trois filets pour letronc commun des mawillaires ; B. Un filet pour le palatin ; C. Un ou deux filets pour le nerf ophthalmique; D. Un filet pour le ganglion ophthalmique ou pour la racine que le trijumeau envoie à ce ganglion ; E. Un filet pour le nerf ciliaire long, toujours relié au précédent par une ou plusieurs anastomosés. 7° Le 2° ganglion céphalique est placé sous le facial ou en (1) Nous mettons en italiques les faits nouveaux que nous avons signalés ou ceux que nous avons généralisés. 180 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE arrière de ce nerf qui lui envoie ses racines. Il émet un ow deux filets pour le facial et ses ramifications; il en émet toujours un autre pour le rameau antérieur du glosso-pharyngien. 8° La portion du cordon sympathique comprise entre le 1% et le 2° ganglion céphalique est presque toujours logée dans un canal osseux percé dans la grande aile du Sphénoïde (1) ; 90 Le 3° ganglion céphalique est placé sous le glosso-pharyngien ; il est ordinairement très réduit. Il recoit une ou deux racines de ce nerf et lui envoie un ou deux filets. 10° Le 4° ganglion céphalique correspond au pneumogastrique, auquel il est relié par deux et plus souvent par trois fortes racines. Il envoie toujours des filets aux rameaux branchiaux de ce nerf, et assez souvent aux rameaux qui se distribuent dans les muscles des arcs branchiaux. Parfois de ce ganglion et du précédent, il part des nerfs considérables qui se portent directement aux arcs branchiaux et là s’anastomosent avec les rameaux du pneumosastrique. Mais ces gros nerfs nese rencontrent que chez quelques familles, tandis que les filets courts, dont nous parlons plus haut, et qui remplissent évidem- ment les mêmes fonctions, se voient chez tous les autres Poissons. 11° Le 5° ganglion céphalique est situé sous l’hypoglosse. | Ce ganglion, relativement considérable, reçoit de ce nerf une, deux et même trois fortes racines; ùl lui envoie un ou deux filets, tantôt longs, tantôt courts, simples ou pourvus dé ganglions. La pecto- rale à laquelle se rend l’hypoglosse reçoit donc des filets sympa- thiques. 12° C’est de ce ganglion, ou bien du 1% ou du 2° ganglion abdo- minal, ou bien encore de ces ganglions unis entre eux ou simple- (1) Dans une note que nous avons adressée à l’Académie des sciences et qui a paru dans le numéro des comptes rendus du 24 septembre 1888, on nous fait dire : « La portion céphalique du sympathique n’est pas toujours située en dehors du crâne. Chez quelques poissons, sa partie antérieure est logée dans la cavité crânienne, » Nous avions écrit : « Chez quelques poissons, sa partie antérieure est logée dans un canal percé dans l’un des os qui forment les parois de la cavité crânienne. DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 181 ment unis 2 à 2, que naissent ordinairement les racines du gan- glion splanchnique. Presque toujours la racine gauche se présente sous la forme d’une anastomose qui relie entre eux les deux gan- glions symétriques. Les nerfs splanchniques, en général au nombre de deux ou trois, s’anastomosent, formant un Plexus cœliaque d’où partent d’autres plexus qui entourent les ramifica- tions de l’artère cœliaque et vont distribuer leurs filets au foie, à _ Ja vésicule biliaire, à la rate, au pancréas, au mésentère, à l’esto- mac, au duodenum, à l'intestin proprement dit, à la vessie natatoire, quand elle existe, et à la partie antérieure des reins. Indépendamment des plexus formés par les filets sympathiques autour de l'artère cœliaque et de ses principales ramifications, üs en for- ment encore dans la substance même des organes (rate), ou dans leur voisinage (foie, rate). Le filet qui se porte à la partie antérieure des reins en forme un à la surface de la veine cardinale postérieure. 13° Les rameaux de la branche viscérale du pneumogastrique s anastomosent toujours avec ceux du nerf splanchnique, et contri- buent à la formation du Plexus cœliaque et des plexus secon- daires. 14° La portion abdominale du sympathique comprend deux cordons qui restent distincts dans toute l’étendue de la cavité, mais s’envoient des anastomoses en plus ou moins grand nombre ; ou bien les deux cordons se réunissent en un cordon unique dans la partie postérieure et quelquefois (Physostomes apodes) dans toute l'étendue de l'abdomen. 15° Le 1% et quelquefois le 2° ganglion abdominal envoient chacun un filet sympathique au nerf rachidien correspondant, lequel s’unit à son voisin et à l'hypoglosse pour innerver les muscles de la pectorale. 16° Assez fréquemment, les autres ganglions de la partie abdominale envoient également un filet au nerf rachidien correspondant ; parmi ces nerfs, ceux qui en reçoivent le plus souvent sont ceux qui se rendent aux muscles des nageoires ventrales. 17° Des filets sympathiques accompagnent d'ordinaire les artérioles 182 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE intercostales et pénètrent à leur suite dans l'épaisseur des muscles latéraux. Au point où l'artériole intercostale émet l’artériole rénale, il se détache du filet sympathique, qui accompagne la 1°, un filet destiné au rein. 18° Les reins recoivent donc des filets sympathiques de la plu- part des petits ganglions abdominaux et du ganglion splanchnique ou du Plexus cœliaque ; 4! en reçoit encore également de la partie céphalique chez quelques poissons (Gadidés). 19° Les nerfs spermatiques naissent ordinairement de l’un des derniers ganglions abdominaux ; mais si les vertèbres abdominales postérieures constituent un canal fermé, ces mêmes nerfs partent des ganglions qui précèdent l’entrée du canal. En arrivant sur les organes, ils se réunissent d'ordinaire en un gros ganglion d’où partent les nerfs qui vont se distribuer et s’anastomoser à la sur- face et dans l’intérieur des glandes génitales. 20° La vessie urinaire est elle-même ordinairement entourée d'un Plexus vésical fourni qui provient des nerfs spermatiques. 21° Dans le Canal hémal, es 2 cordons sympathiques sont toujours distincts, que la partie abdominale soit double ou simple ; et, presque toujours, chacun des cordons est divisé en seyments d’inégal calibre qui alternent entre eux et avec ceux du cordon opposé. 22° Les ganglions de cette partie sont accolés l’un à l’autre ou reliés par une ou deux anastomoses. 28° Chaque ganglion reçoit ordinairement 2 racines dont l’une prend naissance sur le tronc même du nerf rachidien et dont l’autre tire son origine de la branche ventrale de ce nerf. Elles peuvent être indépendantes l’une de l'autre, ou anastomosées ou mixtes ; dans ce der- nier cas, une partie des fibres est destinée aux muscles du dos. 249 De chaque ganglion part constamment un filet nerveux destiné à la branche ventrale du nerf rachidien correspondant ; cette branche va innerver les petits muscles des rayons de la nageoire anale. 25° Dans la partie postérieure du corps, les branches ventrales des nerfs rachidiens s’anastomosent et constituent un plezus que nous DES ELASMOBRANCHES ET DES POISSONS OSSEUX. 183 avons nommé Plexus caudal et dont les filets vont se distribuer dans les muscles des rayons de la nageoïre caudale. Les filets sympathiques des derniers ganglions contribuent à la formation de ce plexus. 26° À l'extrémité du Canal hémal, chacun des cordons se porte en dehors, sort du canal en décrivant une courbe et va se terminer sur l'une des principales branches de ce pleæus. C’est de la courbure de chaque cordon que partent les filets qui accompagnent les branches du Vasa caudale. 27° Le sympathique émet encore, mais rarement, quelques filet: destinés aux muscles branchiaux, aux points d'attache de la vessie natatoire, aux points d'attache des muscles rétracteurs des pharyngiens supérieurs, et à l'aorte. 23° Nous n'avons jamais aperçu de filet sympathique se rendant à l’oculo-moteur externe, au pathétique et au cœur. 299 Chez les Physostomes apodes, le 1° ganglion céphalique est placé sous le pneumogastrique ou en arrière délui. C'est de ce ganglion que partent les filets destinés aux différents nerfs cräniens ordinai- rement innervés par les 3 premiers ganglions. Les 2 ganglions symétriques peuvent être séparés l’un de l’autre ou accolés. Dans ce dernier cas, ils sont plus ou moins éloignés du pneumogastrique et les racines qu’ils en reçoivent sont fortes et ordinairement longues, de façon qu’elles ressemblent à un cordon sympathique médian. De ce ganglion partent les nerfs branchiaux, qui sont ici beaucoup plus longs que chez la plupart des autres osseux. 30° II existe un second ganglion céphalique d’où partent : 1. Un faisceau nerveux qui accompagne l'artère axillaire, le nerf hypoglosse et les premiers nerfs rachidiens. Les filets qui les composent s’anasto- mosent entre eux et forment un plezus qu'on peut appeler Plexus brachial sympathique ; les filets qui le continuent s anastomosent avec les 1% nerfs rachidiens, ou accompagnent les diverses ramifications de l'artère axillaire, et principalement celles qui se rendent dans les muscles des rayons de la nageoïre pectorale. L'un des filets du plexus va se ramifier sur la paroi postéro-interne de la chambre branchiale ; 184 SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE. IT. Un ou le plus souvent 2 filets nerveux pourvus de ganglions, qui se portent sur l’œsophage et forment avec les ramifications du rameau branchial du pneumogastrique un Plexus œæsophagien ; III. Enfin un filet qui accompagne lartériole antérieure du rein céphalique et va se distribuer dans la pulpe decet organe. À partir dece 2° ganglion céphalique, le cordon sympathique devient unique, et reste tel jusqu'au Canal hémal dans lequel il se dédouble. LC] RSR TS on DS ES ROC! n EXPLICATION DES PLANCHES Lettres communes aux Planches I, II et III. . Aorte. . Corps suprarénaux. . Racines antérieures du 1° ganglion sympathique. Œsophage. Foie. . Ganglions sympathiques. . Terminaison de l'intestin spiral. . Pneumogastrique. . Reins. . Testicule. . Anastomoses entre le sympathique et le pneumogastrique. . Nerfsplanchnique. . Premier ganglion et premier corps suprarénal réunis. an. Glande anale. al. Artériole latérale ou intercostale. ar. Artère splénique. am. Artère mésentérique. a?. Artère de la partie postérieure de l'intestin spiral. ax. Artère axillaire. cs. Filet sympathique représentant le cordon sympathique des autres Vertébrés. nt. ns. rs. rn. UC. Fig. 1. Catulus. m. pl. Op. Filet sympathique testiculaire. Filet sympathique. Racines des ganglions sympathiques. Nerf rachidien. Veine cardinale. PLANCHE I — Partie antérieure du système sympathique de Scyllium Ganglion du plexus post-branchial. Plexus post-branchial. Son origine sur l’une des branches du pneumogastrique. 186 EXPLICATION DES PLANCHES. x!. Anastomose entre des filets du 1er ganglion sympathique et des rameaux du Plexus post-branchial. s. Sinus de Monro. l. Limite antérieure du Sinus de Monro. ca. Chambre cardiaque. v. Canal déférent. sm. Membrane formant la paroi du Sinus de Monro. pr. Péritoine. cl. Cloison perforée séparant les 2 sinus. FIG. 2. — Partie postérieure du système sympathique de Scyllium Catulus. gg. Anastomose entre ? ganglions situés de côtés différents. ci. Corps interrénal. vi. Veine interrénale. FIG. 3. — Coupe d’un Corps suprarénal. n. Noyau. rc. Réticulum conjonctif. F1G. 4. — Coupe du Corps interrénal. n. Noyau. rc. Réticulum conjonctif. PLANCHE II. F1G. 4. — Viscères abdominaux de Mustelus vulgaris. al. Artère antérieure de l'intestin spiral. at. Artère stomacale. ah. Artère hépatique. as. Artère spermatique. cc. Canal cholédoque. cp. Canal pancréatique. c. Cœur. p. Pancréas. q. Rate. h. Estomac. FIG. 2. — Viscères abdominaux de Scyllium Catulus. h. Estomac. as. Artère spermatique. aa. Artère de la glande anale. fs. Filets sympathiques longeant la face inférieure de la veine cardinale. F1G. 3: — Partie antérieure de l'æœsophage de Scyllium Catulus. pl. Plexus post-branchial dont un filet s’anastomose avec le pneumogastrique. F1G. 4. — Rate et pancréas de Scyllium Catulus. q. Rate. EXPLICATION DES PLANCHES. 187 p. Pancréas. al, Artère antérieure de l'intestin spiral. ap. Artère pancréatique. cp. Canal pancréatique. pl. Plexus splénique. h. Estomac. h'. Partie rétrécie de l'estomac. F1G. 5. — Partie du foie et canaux hépatiques de Scyllium Catulus. pl. Plexus hépatique. ch. Canal hépatique. ah. Artère hépatique. vb. Vésicule biliaire. cc. Canal cholédoque. PLANCHE I FiG. 1. — Cerveau et premiers nerfs rachidiens de Torpedo mar- morata, pour montrer les racines antérieures du 1% ganglion sympa- thique. cr. Cerveau. tr. Nerf trijumeau. pi. Glande pituitaire. ep. Moelle épinière. FiG. ?. — Partie abdominale de Torpedo marmorata. 0. Oviducte. lo. Cloaque. F1G. 3. — Corps suprarénal grossi 5 fois environ et entouré de 4 ganglions sympathiques (g) d’où partent des filets qui unissent les ganglions entre eux ou se portent sur le mésentère. F1G. 4. — Corps suprarénal grossi 5 fois environ et destiné à mon- trer comment la racine (rs) se divise en fibrilles à sa surface, et com- ment celles-ci se réunissent pour constituer les ? nerfs (ns) unis entre eux par d'autres fibrilles. Fig. 5. — Coupe transversale d'un Corps suprarénal grossi 25 fois. Il est traversé par l'artériole (al) et son contour sinueux montre que sa surface n'est pas unie, Fig. 6. — Coupe d'un petit ganglion sympathique grossi 190 fois. ul. Cellules sympathiques. n. Leurs noyaux. rc. Réticulum conjonctif avec de nombreux petits noyaux. F1G. 7. — Corps suprarénal injecté grossi 10 fois. cv. Vaisseaux capillaires. F1G. 8. — Petit ganglion sympathique, grossi 30 fois, pris au voisi- nage des reins et destiné à montrer comment les filets qui en partent s'anastomosent entre eux. 188 EXPLICATION DES PLANCHES. ul, Cellules sympathiques. na. Anastomoses principales qui vont d’un nerf à l’autre. F1G. 9. — Cellule sympathique bipolaire de Raja. Ordinairement les autres sont unipolaires. n. Son noyau unique. ns. Prolongements qui partent de la cellule. F1G. 10. — Groupe de 3 cellules tirées d'un même petit ganglion sympathique de ScylliumCatulus. Elles sont toutes unipolaires et pres- que toutes contiennent 2? noyaux ; leurs dimensions sont très variables. n. Noyaux. ns. Prolongement qui part de la cellule. n’. Petits noyaux appartenant à la membrane d’enveloppe de la cellule. FiG. 11. — Groupe de cellules ? formant la masse des Corps supra- rénaux. n. Noyau. pp. Protoplasme qui les entoure. Lettres communes aux Planches IV, V et VI. . Aorte. . Nerf facial. . Nerf glosso-pharyngien. . Œsophage. . Ganglions sympathiques. . Nerf palatin. Nerfhypoglosse. . Nerf pneumogastrique. t. Anastomose entre le trijumeau et le facial. ab. Arcs branchiaux. ac. Artère cœliaque. ah. Artère hépato-duodénale. am. Artère mésentéro-splénique. ar. Artère splénique, ax. Artère axillaire. cs. Cordon sympathique. gg. Filet anastomotique entre 2 ganglions symétriques. gs. Ganglion splanchnique. na. Nerf ciliaire court. nb. Nerf ciliaire long. ns. Nertsplanchnique. pl. Plexus formé de filets sympathiques et pneumogastriques, et entourant les artères am et ah. sd. Filet allant au glosso-pharyngien. sf. Filet allant au facial. & © 9 Duo Sr QUO © "7 EXPLICATION DES PLANCHES. 189 sh. Filet allant au palatin. si. Filet allant à l’hypoglosse et de là à la pectorale. sk. Filet allant au pneumogastrique. r2. Racine venant du facial. r3. Racine venant du glosso-pharyngien. r*, Racine venant du pneumogastrique. rn. Nerfs rachidiens. rs. Racines du sympathique. 4. 4% ganglion céphalique. ARE — — 3. 3° — — UE — — 5. 5° — — PLANCHE:IV F1@G. 4. — Figure d'ensemble du sympathique de Labrax lupus pa. Partie crânienne du sympathique. pm. Partie abdominale — pp. Partie caudale — r. Reins. p. Plaques pharyngiennes supérieures. c. Cœur. q. Muscle rétracteur des pharyngiens supérieurs. rb. Rayons branchiostéges. un. Nageoire ventrale. oc. Côtes. ov. Nerf ovarique. z. Vessie natatoire. m. Nerf maxillaire inférieur. n. Nerf maxillaire supérieur. o. Œil. cr. Crâne. F1G. 2. — Partie crânienne du sympathique de Labrax lupus. n. Nerf maxillaire supérieur. m. Nerf maxillaire inférieur. no. Nerf optique. nv. Nerf ophthalmique. nm. Filet sympathique allant aux maxillaires. sg. Filet sympathique venant du ganglion de Gasser. br. Rameaux branchiaux du pneumogastrique. bv. Rameau viscéral du pneumogastrique. bl. Rameau latéral. bi. Nerf mixte (une partie de ses fibres provient de l'hynoglosse, l’autre se rend vers la périphérie du même nerf). 490 EXPLICATION DES PLANCHES. LL. Ligament rond de l'épaule. ré. Racine du 1° ganglion abdominal. fs. Nerfs se rendant au ganglion splanchnique. s. Anastomose des 2? ganglions symétriques. s*, Filetssympathiques allant du 5° ganglion au nerf pneumogas- trique à travers la masse du muscle latéral. cr. Crâne. me. Muscle droit externe. sc. Filets sympathiques allant à la partie commune des 2 nerfs ciliaires. sv. Filet sympathique allant à l’ophthalmique. v. Ganglion ophthalmique. nc. Nerf oculo-moteur commun. mi. Muscle droit inférieur. ma. Muscle droit interne. r‘. Racine sympathique venant du facial et allant au 1 ganglion. fo. Anastomose du facialet du glosso-pharyngien antérieur. an. Anse sympathique entourant le glosso-pharyngien. F1G. 3. — Nerf splanchnique de Labrax lupus et plexus qu'il forme de concert avec le rameau viscéral du pneumogastrique. ac. Artère cœliaque. at. Artère stomacale. 6. 4% Ganglion abdominal. bv. Rameau viscéral du pneumogastrique. nr. Filets rénaux. sn. Filet sympathique se rendant à la vessie natatoire. pv. Filet pneumogastrique se rendant à la vessie natatoire. x..x. Anastomoses entre le sympathique et le pneumogastrique. F1G. 4. — Rate de Labrax lupus dont on a enlevé la te pour mon- trer les ramifications de l’artère splénique. ar. Artère splénique. bc. Ramifications de cette artère dans la pulpe de la glande. Toutes les ramifications, même les plus faibles, sont accompagnées d’un réseau nerveux sympathique ou tout au moins d’un filet. F1G. 5. — Portion du tronc de l'artère splénique de Labrax lupus mon- trant le plexus qui l'entoure. ar. Artère splénique. bc. Ses ramifications. pl. Plexus nerveux sympathique. F1G. 6. — Portion de l'artère hépatique de Labrax lupus au momen où ses 3 rameaux pénètrent dans le foie. ah. Artère hépatique. bd. Ses ramifications. pl. Plexus sympathique qui les entoure. Fi. EXPLICATION DES PLANCHES. 194 PLANCHE V 1. — Partie abdominale du sympathique de Labrax lupus. r-r. Reins. q. Muscle rétracteur des pharyngiens supérieurs. vp. Veine cardinale. nr. Filets rénaux. gr. Ganglions d’où partent les nerfs rénaux du côté gauche. oc. Côtes. s. Anastomose de ? ganglions symétriques. ao. Artère ovarique. li. Ligaments intercostaux. ai. Artérioles intercostales. bi. Nerf mixte. fa. Filet se rendant à l’aorte. fr. Filet accompagnant le nerf rachidien correspondant. fi. Filet accompagnant l'artériole intercostale. fq. Filets se rendant à l'insertion du muscle rétracteur des pha- ryngiens supérieurs. FIG. 2. — Ovaires de Labrax lupus. or. Ovaires. in. Portion terminale de l'intestin. ov. Nerf sympathique des ovaires. go. Ganglion ovarique. fo. Filets sympathiques formant le Plexus ovarique. FiG. 3. —- Partie caudale du sympathique de Labrax lupus. g. Ganglions sympathiques accolés. fr. Filet se jetant dans la branche ventrale du nerf rachidien. ts. Terminaison du sympathique. pl. Plexus caudal formé par les derniers nerfs rachidiens. F1G. 4. — Portion caudale du rachis de Labrax lupus pour montrer l'origine des racines des ganglions sympathiques. rn. Branches du nerf rachidien. rs. Racines sympathiques des ganglions de la partie caudale. av. Artérioles vertébrales. fm. Filet sympathique se perdant dans les muscles dela région du dos. F1G. 5. — Partie céphalique du sympathique de Labrax lupus (côté gauche). | et de fv. Anastomose du facial et du glosso-pharyngien antérieur. da. Glosso-pharyngien antérieur. sa. Filet sympathique allant au glosso-pharyngien antérieur. ba, Rameau récurrent du facial. pb. Plexus formé par les ramifications du rameau précédent 192 EXPLICATION DES PLANCHES. sb. Filet sympathique émané de g. Ganglion sympathique situé entre le pneumogastrique et le glosso-pharyngien. k sl. Filet mixte se rendant au glosso-pharyngien et à ad. Petite artériole intramusculaire. sz. Filet sympathique pénétrant dans l'épaisseur du muscle latéral. F1G. 6. — Arière hépato-duodénale et ses ramifications (Labrax lupus), plexus sympathique qui les entoure. ak. Artériole se rendant à la vésicule biliaire. ag. Artériole destinée au foie. adu. — — au duodenum. al. — — au mésentère. F1G. 7. — Artère mésentéro-splénique de Labrax lupus ; ses ra mi- fications et le plexus sympathique qui les entoure. | ar. Rameaux spléniques. as. Rameaux se rendant à l'intestin. FIG. 8. — Partie céphalique du sympathique de Ophisurus serpens. csa. Cordon sympathique antérieur. rsi. Racines sympathiques antérieures venant du pneumogas- trique. : g'. Ganglion céphalique antérieur correspondant aux 4 premiers ganglions des autres Osseux. ml. Muscle latéral. fb. Filet branchial. fa. Filet aortique. g?. Ganglion céphalique postérieur correspondant au 5e ganglion des autres Osseux. rs?. Racines sympathiques du ?° ganglion. fp. Filets accompagnant l'artère axillaire. fre. Filet allant au rein céphalique. FIG. 9. — Partie antérieure du système sympathique de Regalecus gladius ? r*. Racines du premier ganglion abdominal. 6. 4% Ganglion abdominal. | fa. Filet sympathique allant à l'aorte. F1G. 10. — Partie céphalique antérieure du sympathique de Cepola rubescens. Par suite d’une erreur, la partie antérieure de cette figure esten bas. la. Filet sympathique allant au nerf ciliaire long. g. Ganglion situé au point de rencontre du filet sympathique et du nerf ciliaire long. nv. Nerf ophthalmique. rp. Racine sympathique du ganglion ophthalmique. ro. Racine de l’oculo-moteur commun. Ed PE 0 EXPLICATION DES PLANCHES. 193 v. Ganglion ophthalmique. li. Anastomose entre la racine sympathique du ganglion ophthal- mique et le petit ganglion du nerf ciliaire long. PLANCHE VI F1@. 4. — Portion de la veine cardinale droite de Labrax lupus pour montrer le plexus formé à la surface de sa paroi par les filets sympa- thiques. vb. Veine cardinale postérieure. pl. Plexus sympathique. F1G. 2. — Partie caudale du sympathique de Serranus Cabrilla montrant que le sympathique corcourt à la formation du Plexus caudal. fr. Filets se rendantaux nerfs rachidiens. pl. Plexus formé par les derniers nerfs rachidiens et certains filets sympathiques. ts. Terminaison du sympathique. fs. Filets sympathiques accompagnant les vaisseaux du Vasa caudale. F1G. 3. — Terminaison du sympathique chez Trigla lyra. gs. Dernier ganglion sympathique. ts. Terminaison du sympathique. fs. Filets allantau Vasa caudale. rn. Nerf rachidien. FiG. 4. — Partie céphalique du Cordon sympathique de Lophius budegassa. tr. Trijumeau. sc. Filet allant aux nerfs ciliaires. SÙ. — — à l’'ophthalmique. nm. — — aux maxillaires. r’. Racines venant de la partie commune du trijumeau et du facial. an. Anse sympathique entourant le glosso-pharyngien. mbr. Muscle branchial. r$. Racine venant de l’hypoglosse. cr. Crâne. FiG. 5. — Extrémité caudale de Triglalÿyra montrant le plexus formé sur les parois de la base de la nageoïre anale, par Les rameaux ven- traux des nerfs rachidiens el par les filets sympathiques envoyés à ces nerfs par les ganglions de la partie caudale. nan. Nageoire anale coupée et rejetée sur le côté. pl. Plexus. Fig. 6. — Partie antérieure du sympathique de Conger vulgaris. tr. Trijumeau. csa. Cordon sympathique antérieur. va. Veine cave antérieure. p. Plaques pharyngiennes supérieures. ARCH. DE ZOOL. EXP, ET GÉN. — %° SÉRIE, — T. V bis, — suppL, 1889. — Méji. 12 194 EXPLICATION DES PLANCHES. gt. 1% glanglion. acc. Artère du Circulus cephalicus. ml. Muscle latéral. g?. ?° ganglion. l. Ligament rond de l’épaule. mp. Muscles internes de la pectorale. bv. Rameau viscéral du pneumogastrique. rn!. Nerfs rachidiens des premières paires. rc. Rein céphalique. fre. Filet accompagnant l'artère principale du rein céphalique. fe. Filets allant former le Plexus œsophagien avec le pneumo- gastrique. fax. Filets accompagnant l'artère axillaire. fL. — — le ligament rond de l’épaule et l’hypos glosse. fcb. Filets se ramifiant sur les parois interne et postérieure de la chambre branchiale. gs. Ganglion splanchnique. ep. Artères épibranchiales. F1&. 7. — Partie grossie de la figure précédente, montrant le 2e ganglion céphalique. ep. Artères épibranchiales. g?. 2e ganglion céphalique. fax. Filets accompagnant l'artère axillaire. fl. Filets accompagnant le ligament rond de l'épaule et l’hypo- glosse. F1G. 8. — Pectorale de Conger vulgaris. apc. Artère pectorale et ses ramifications. rn. Nerf rachidien. fs. Filets sympathiques. F1G. 9. — Cellules sympathiques de Labrax lupus. ce. Cellule. ny. Noyau. pr. Prolongement de la cellule. Fi1G. 10. — Coupe de ganglion sympathique de Labrax lupus. ce. Cellule. mb. Sa membrane d’enveloppe. ny. Noyau. ny’. Petits noyaux des fibres conjonctives. TABLE DES MATIÈRES Introduction. BAPE A SAV RE ent RE ER Bnn 4 Late à Le AUOT ODÉPAROiTe SN RENE LRU LE te te Le PREMIÈRE PARTIE ELASMOBRANCHES Historique. Ton DENT GUERRE à Système A nbtiine Fe Soytlium Cortes DRE EL RER ER Capsules surrénales de Leydig ou doi suprarénaux. à +. Corps interrénal. Système sympathique po oEt dit. — Éansoee Nerfs, racines nerveuses. UT RE : Pleæus postbranchial. . . Cordon sympathique, Filets émanés des ganglions. Coup d’œil sur bu du 1 Syotème sympathique ds Seyliun NS Squales. LIT SON SPIP Chimère. : Ghhelaisione 2 ER OL RE DEUXIÈME PARTIE POISSONS OSSEUX Historique. . . Résumé, Système ruine: de Fr Aout : Aperçu général. — Limite antérieure du Ca a ES Limite postérieure du Cordon sympathique. Description du système rene Partiecrânienne. MT Ne a Sets LS PE AP ISO 27 Partie abdominale. PT ONTS Cordon abdominal, Nerfs splanchniques. Partie caudale. . Quelques mots sur PRE du ubue Sc Ritiane rs Bar. SYSTÈME SYMPATHIQUE DES AUTRES OSSEUX I. — LOPHOBRANCHES Syngnathidés : ÆHippocampus Es Syngnathus acus, Siphonos- toma Rondeletii. 63 74 77 LE 79 80 80 89 99 102 103 196 TABLE DES MATIÈRES. II, — PLECTOGNATHES Orthagoriscidés : Orthagoriscus mola. III, — CHORIGNATHES Trachinidés : Trachinus Draco, Uranoscopus Scaber. Blenniidés : Blennius ocellaris. Callionymidés : Callionymus maculatus. Lophiidés : Lophius budegassa et piscatorius. Gobiidés : Gobius Jozo. à Mullidés : Mullus surmuletus. } - Triglidés : Scorpæna scrofa, Trigla lyra et coraæ. Percidés : Serranus cabrilla. Scombridés : Scomber scomber, Tshères RE PH ts Zeus faber, Capros aper, Lichia vadigo. . Tœnioïdés : Regalecus gladius, Trachypterus falæ dt Crdle Dore Sparidés : Sargus vulgaris et ÆRondeletii, Box salpa, Oblada mela- nura, Pagellus erythrinus et centrodontus, Cantharus griseus. Ménidés : Mæœna Osbeckii et Smaris Chrysells. . . . . . Labridés : Labrus bergylia et Merula, Crenilabrus pavo. Gastérostéidés : Gasterosteus aculeatus. RATE Aulostomidés : Centriscus scolopax. . Mugilidés : Mugil cephalus etsallens. . . . . Sphyrénidés : Splyrænd spi e A INNNTSTEEES Ophidiidés : Ophidium barbatum, Fierasfer imberbis. Gadidés : Gadus minutus et morrhua, Merlangus pollachius, Merlucius vulgaris, Lota molva, Phycis blennoïdes, Motella tricirrata. . Pleuronectidés : Solea lascaris, Rhombus maæimus, Pleuronectes Boscii. Cycloptéridés : Cyclopterus lumpus. Gobiésocidés: Lepadogaster Candollii. Cyprinidés : Cyprinus Carpio, Barbus fluviatilis, nsa EE Clupéidés : A/osa vulgaris. TS Exocétidés : Belone acus, Exocætus ae PAT GRS Salmonidés : Zrutta fario, Trutta marina, Salmo at. IV, — APODES Anguillidés : Anguilla vulgaris, Conger vulgaris. . . . Murénidés : Muræna. Helena. 2..." 20000 ee Ophisuridés : Ophisurus serpens, Ophisurus hispanus. Sphagébranchidés : Sphagebranchus imberbis. Remarques générales sur le Fr sympathique des ne, Résumé. 5 7% se ge L'odues Ve EN ES ONE Explication des Planchof: POITIERS. — TYPOGRAPHIE OUDIN. 106 106 108 110 110 114 115 116 119 120 123 127 129 129 131 132 133 134 135 136 138 139 141 142 145 146 148 151 158 159 160 161 179 185 2° Série, Vol, Suppre,PLI, FA # TES 4 Pt \ Z LT \ Fe _ X EG Ÿ IR LX \ À‘ SES ONLINE CA TULATS Pch. de Zool. Expl° et Cénl® en ee NT AE ne an PR use e — = ie = = ist — —* _ == = — = c — om 2° Série, Vol, Supp'*, FN 4 de Zool. Expl® et Génl®. SCYELIUM CATULUS ET MUSTELUS VULGARIS VV, A7 DCE de Zool. Exp!° et Cénte. fi Série, Vol Supp *, Pl [I] » PORC MARMORATA ET SCYLLIUM CATULUS ma \ SPP SEET Himely se. ) UD « , 10 VERRE 0 AD -----N- et Gén!® : Arch de Zool. Expie supp”, PI V RES DB) 2° Série Vol. Arch.de Zool. Exp'° et Gén!® CL e LAB.LUP OPHISURUS HISPANUS, REGALECUS GLADIUS, CEPOLA RUBESCENS. AE do Lu + w = LAS cut ny LE 44 EE doi Er HT 4 rh 4 DA e Le È ‘ Le. À XC 17 A g x L Fr e & NE Fin | ; | = es Main | has || 5 + Ne us \ ee \ £ / # A Lo 2 & ; L JDA ÿ KT au 4 S TS Ÿ à K DNS N * SE \ ? . / s À Ty VA 3 V4 D > 4 = NE Rp ? ï a d 1 \ Ÿ LT ra à s (* Li, NS 2° Série Vol. SUPP', PME CONGER VUI ShAGGA CRAN, IDE IN Ü 2 RP ANU AXEL ep LAB LUP,. SE Arch. de Zoo. Expl° et Gén. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DU CERVEAU CHEZ LES ARTHROPODES TRACHÉATES PAR G. SAINT REMY DOCTEUR EN MÉDECINE PRÉPARATEUR À LA FACULTÉ DES SCIENCES DE NANCY. INTRODUCTION L'étude de la structure interne des centres nerveux des Arthro- podes ne date réellement que des travaux de Dietl. Jusqu’alors la topographie externe de ces organes avait été à peu près seule l’objet des recherches des anatomistes. Depuis longtemps cepen- _ dant, quelques auteurs (Newport) avaient étudié la disposition des faisceaux de fibres dans les ganglions de la chaîne ventrale examinés par compression ; mais cette méthode primitive ne pouvait conduire qu’à des résultats incomplets, et n’était pas applicable, dans toute sa simplicité, aux organes plus gros et plus compliqués, comme les ganglions cérébroïdes. Cependant l'intérêt qui s'attache à la connaissance de la structure d’un organe aussi différencié et aussi important que le cerveau (1) des Arthropodes, ne pouvait manquer d'attirer l’attention des naturalistes. Dujardin, Leydig (1) Il faut entendre par cerveau, ou ganglions cérébroïdes, la masse nerveuse sus-æsophagienne, quelle que soit du reste sa constitution. ARCH, DE ZO0L, EXP, ET GÉN, — 29 SÉRIE, — ‘T, V bis, — Suppr, 1887, — Mém. 1 2 G. SAINT REMY. tentèrent cette étude à l’aide des procédés habituels, la compres- sion jointe au traitement des objets par certains réactifs éclair- cissants. En s'adressant à de très petites pièces, Leydig arriva à quelques résultats intéressants, qui ne furent guère dépassés par ses successeurs (Rabl-Rückhardt), tant qu’ils employèrent les mêmes procédés. C’est à Dietl que revient l'honneur d’avoir fait entrer l’étude des centres nerveux des [nvertébrés dans une nou- velle phase, en imaginant d’appliquer au cerveau relativement volumineux des Arthropodes, la méthode qui a donné de si beaux résultats dans l'étude du système nerveux des Vertébrés, la méthode des coupes successives. Les résultats obtenus par Diet], chez les Insectes et les Crustacés (1), furent bien faits pour provo- quer de nouvelles recherches dans cette voie. Aussi, en même temps que Dietl continuait ailleurs ses observations en appliquant ses procédés aux Mollusques (Céphalopodes), Fiogel (2) les éten- dait à tous les ordres d’Insectes, en montrant que dans ce groupe le cerveau proprement dit était partout construit sur un même plan, et la même année, Berger (3) publiait une étude très soignée du ganglion ou lobe optique chez les Insectes et les Crus- tacés supérieurs, et montrait aussi pour cette région une unité remarquable du plan d’organisation dans ces deux classes. Depuis, de nombreux travaux, parmi lesquels il faut citer en première ligne ceux de Bellonci (4) et de Viallanes (5), se sont succédé (1) M. J. Diet], Die Organisation des Arthropodengehirns. Zeitschr. f. w. Zoo: ogie. XXVII, 1876. (2) J. H. L. Flôügel, Ueber den einheitlichen Bau des Gehirns in den verschic- denen Insecten-Ordnungen. Zeitschr. f. w. Zool, xxx, suppl, 1878. (3) E. Berger. Untersuchungen über den Bau des Gehirns und der Retina der Arthropoden. Arb. aus dem zool. Inst. zu Wieu. 1, 1878. (4) G. Bellonci, Morphologia del sistema nervoso centrale della $quilla mantis; Ann. d, Mus. civ. di Genova, x11, 1878, — id. Sistema nervoso edorgani de’sensi d21lo Sphaeroma serratum. Reale accad. de’ Lince1, 1881.— id. Nuovericerche sulla struttura del ganglio ottico della Squilla Mantis. Acc. delle scienze di Bologna: 1882, — id. Intorno alla struttura e alle connessioni dei lobi olfactori negli Arthropodi superiori e nei vertebrati, Reale Acc. de’ Lincei, 1881-82, —. id. Intorno all ganglio otticodegii arthropodisuperiori. Intern.Monatschrft, 111, 1886. (5) H, Viallanes Études sur les centres nerveux et les organes des sens des ani- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 3 rapidement, portant tous sur le cerveau des Insectes ou des Crus- tacés. Aucune attention n'a été accordée, à ce point de vue, aux deux grandes classes des Myriapodes et des Arachnides, peut-être en raison des résultats singulièrement simples et pou encoura- geants, obtenus par ceux qui, à l’occasion d’autres recherches, avaient pratiqué des coupes dans les centres nerveux de ces animaux. Supposant avec raison, comme l'expérience nous l’a prouvé, que l’apparente simplicité du cerveau était due à l’insuf- fisance des procédés employés par des observateurs qui ne s’occu- paient pas spécialement de cet organe, nous avons cru intéres- sant de l’étudier dans ces deux groupes, en essayant d’obtenir des résultats d’ensemble dans chaque classe. Notre excellent maître, M. le professeur Friant, a bien voulu nous encourager dans cette voie, et nous aider de ses affectueux conseils. Mais pour un travail de ce genre, il nous était indispensable d’avoir à notre disposition des exemplaires nombreux de types variés. Ce sont des conditions qui ont été réalisées grâce à la bienveillance de M. le professeur de Lacaze-Duthiers, auquel nous devons d’avoir pu profiter de l’excellente organisation du laboratoire de Banyuls-sur-Mer. Non seulement nous avons pu passer à deux reprises, dans les conditions les plus favorables, un temps assez long au laboratoire Arago, et recueillir, sur les indi- cations du savant directeur de cet établissement, de nombreux Myriapodes et Arachnides intéressants ; mais en outre des envois réguliers et nombreux d’animaux vivants nous ont été faits à la Faculté des sciences de Nancy, et nous ont permis de conti- nuer sans interruption nos recherches sur des espèces méridionales. S'il nous a été possible d'exécuter ce travail, c'est au fonda- teur du laboratoire Arago que nous en sommes redevable, et nous le prions d'accepter l’hommage de notre vive et respectueuse reconnaissance . maux articulés (5 mémoires). Ann, des Sc. nat, ; Zool, ; et Biblioth. des Hautes Etudes ; sc, nat. 1885-87. A G. SAINT REMY. MÉTHODE . Nos observations ont toujours été faites sur des pièces soigneu- sement disséquées et isolées avant d’être traitées par les réactifs. Les coupes pratiquées sur la tête entière, quelle que soit sa peti- tesse, peuvent être utiles pour montrer les rapports naturels du cerveau avec les organes voisins, mais elles sont toujours insuffi- santes pour l'étude de la structure interne. C’est à cette méthode surtout qu’il faut attribuer les insuccès des rares auteurs qui se sont occupés occasionnellement du cerveau chez les Myria- podes et les Arachnides. La fixation par l’acide osmique nous a donné les meilleurs résultats, et c’est le seul traitement con ve- nable pour les petits cerveaux ; nous colorions ces pièces par le carmin alunique ou le carmin boracique à l’alcool Toutefois les cerveaux plus gros (Scolopendre, Scorpion) ne sont pénétrés que lentement par ce fixateur, surtout lorsque le névrilemme est épais (Scolopendre), et lorsque le centre est atteint, la couche cellulaire périphérique à pris une teinte noire foncée et n’est plus: susceptible d’être colorée par le carmin. Aussi, nous avons sur- tout utilisé pour ces cerveaux la fixation à l'alcool, à l’aide de: mélanges employés successivement avec un titre graduellement plus élevé, ou mieux à la liqueur picro-sulfurique de Kleinenberg, : suivie d’une double coloration au carmin alunique ou à l’héma- toxyline et à l’éosine : les pièces traitées à l’acide osmique nous servaient pour l’étude des détails. Nous avons toujours pratiqué des coupes sériées dans trois sens, des coupes horizontales, des coupes sagittales, et enfin des coupes transversales, c’est-à-dire perpendiculaires au plan de symétrie et au plan horizontal ; dans certains cas, nous avons également utilisé avec fruit des coupes pratiquées dans un plan incliné à 45° environ sur le plan horizontal et sur le plan transversal. Pour la détermination de ces plans, nous considérons le cerveau CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. : ÿ dans sa situation naturelle, ce qu’il est toujours possible de faire en tenant compte de la disposition des commissures œsophagiennes chez les Myriapodes, et de la situation de la masse sous-æsopha- gienne supposée parfaitement horizontale, chez les Arachnides. Il est inutile de dire qu’il est à peu près impossible d’obtenir des coupes absolument symétriques sur la plupart des petits cerveaux que nous avons examinés. Nos dessins ont été exécutés à la chambre claire, autant que possible à un grossissement unique dans un même type. Des motifs qu'il est facile de deviner, nous ont obligé à en réduire le nombre et les dimensions au strict nécessaire, mais nous croyons cependant avoir donné toutes les figures indispensables à l’intel- ligence du texte. Dans ce travail, nous avons suivi dans chaque groupe, pour la facilité de l'exposition, une marche descendante, passant des types de cerveau plus compliqués aux types plus simples. Nous avons cru devoir donner des faits que nous avons reconnus des. descriptions très détaillées. Au premier abord il pourra paraître superflu de décrire avec tant de détails des organes dont la signi- fication nous échappe complètement jusqu'ici; mais c’est préci- sément dans ce cas qu’un exposé minutieux est nécessaire, si l’on veut qu’il puisse servir plus tard, lorsque des observations nou- velles auront été faites, à des comparaisons plus étendues et à des vues plus générales. Comme l’a si bien dit un maître dont per- sonne ne contestera la compétence en pareille matière, « dans l'histoire de la science, on trouve à chaque pas des faits sans nombre, dont l’importance n'avait aucune valeur à l’époque où ils étaient découverts, et qui peu à peu finissent par s’enchaîner, se coordonner, et conduisent à des explications tout à fait inat- tendues » (1). | (1) H. de Lacaze-Duthiers, Le monde de la mer et ses laborutoires. Revue scientifique, 3e série, T. XVI, p. 207. 6 G. SAINT REMY. REMARQUES SUR L'HISTOLOGIE DES CENTRES NERVEUX. Nos recherches sont essentiellement anatomiques, et les limites que nous nous étions fixées ne comprenaient pas de recherches sur l’histologie des centres nerveux. De pareilles observations n'avaient aucun rapport avec le but que nous nous proposions et nous auraient entraîné beaucoup trop loin de notre sujet principal. Elles mériteraient d’ailleurs elles-mêmes d’être l’objet d’un tra- vail particulier, et il eût été imprudent de notre part de vouloir traiter d’une façon accessoire et détournée des questions aussi importantes. Néanmoins il est indispensable de dire quelques mots des éléments qui prennent part à la constitution des organes que nous allons étudier, afin de préciser la valeur des termes que nous emploierons. Les éléments nerveux qui entrent dans la composition des centres ganglionnaires des [Invertébrés, ou plus spécialement des Arthropodes, sont des cellules ganglionnaires, des fibres ner- veuses, et un tissu spécial connu sous le nom de substance ponc- tuée ou substance médullaire. | Les cellules ganglionnaires, qui sont dépourvues de membrane propre, mais enveloppées d'un étui conjonctif, se présentent sous les formes les plus diverses. A différentes reprises, les histologistes ont tenté de les répartir en un certain nombre de groupes, mais toutes ces classifications se sont montrées tôt ou tard arbitraires, car on arrive à trouver tous les intermédiaires entre les types en apparence les plus francs et les mieñx délimités. Au surplus, une classification complète ne nous eût pas été d’un grand secours, car pour être sérieuse elle doit tenir compte surtout de la nature et des relations des prolongements des cellules, et ce sont des ca- ractères qui ne peuvent s’apprécier que par des recherches histo- logiques minutieuses, tout à fait différentes des recherches d'ana- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 7 tomie que nous avons entreprises. Nous avons donc dû renoncer à tenir compte de toute classification. Il est cependant un type de cellules nerveuses qui, s'il n’est pas mieux limité que les autres, mérite néanmoins une attention spé- ciale, Nous voulons parler de ces petits éléments unipolaires, si pauvres en protoplasma que leurs contours cellulaires échappent à l'observation sur les coupes, et que Dietl, qui les a signalés le premier, regardait comme des « noyaux libres dépourvus de pro- toplasme » et désignait sous le nom de noyaux ganglionnaires. Outre la réduction extrême du corps protoplasmique, ces éléments présentent une particularité remarquable, la richesse de leur noyau en substance chromatique capable de prendre très vivement les matières colorantes, même après l’action prolongée de l’acide osmi- que. Enfin ce qui les rend toutspécialement intéressants, c’est qu'on ne les rencontre que dans les centres sensoriels du cerveau, où ils forment des accumulations très serrées. Ces éléments sont abon- dants chez les Myriapodes, où ils sont particulièrement petits et vivement colorables ; ils se rencontrent également chez les Arach- nides et les Onychophores. Ils sont toujours en relation directe avec des différenciations de la substance ponctuée, et d’une facon générale, nous avons constaté qu'ils sont d’autant plus nombreux et présentent des caractères d'autant plus tranchés, que le cer- veau est plus élevé en organisation. C’est ainsi que, chez les My- riapodes, ils sont surtout abondants dans les cerveaux compliqués de l’Iule et de la Scutigère, et n’existent pas dans le cerveau rudimentaire du Géophile. Chez les Arachnides, on remarque leur présence dans les lobes optiques très développés des Lycosides ou des Phalangiides ; tandis qu'ils sont remplacés par de petites cel- lules à noyau moins colorable et à protoplasma visible, dans le lobe très simple des Agalénides, ou même par des cellules ordi. naires, dans le lobe rudimentaire des Pholcides. Comme nous avons trouvé nous-même, surtout chez les Arachnides, de nom- breuses formes de passage, depuis les mieux caractérisés de ces 8 G. SAINT REMY. éléments, jusqu'aux cellules ordinaires à protoplasma abondant, nous songeons, moins que personne, à en faire une catégorie fer- mée, mais nous croyons qu’il faut en tenir grand compte, car leurs propriétés physiques si spéciales sont très probablement en rap- port avec des propriétés physiologiques particulières. Nous aurons si fréquemment à parler de ces éléments, dans nos descriptions, qu’il nous semble nécessaire d'adopter pour eux une désignation propre. Le nom de noyaux ganglionnaires employé par Diet] est depuis longtemps abandonné, comme impliquant une idée inexacte de leur nature, mais n’a pas été remplacé; nous emploierons le terme de cellules chromatiques, qui rappelle un de leurs caractères les plus saillants. Ce nom de &« noyaux ganglionnaires » conviendrait parfaite- ment à une forme curieuse d'éléments que nous avons observée chez la Scutigère, et qui n’a jamais été signalée jusqu'ici. Ce sont de petits noyaux ovoïdes, riches en granulations chromatiques vivement colorables, qui sont plongés dans une masse potoplas- mique fondamentale (voy. plus loin, page 76, et PI. VI, fig. 36). La substance dans laquelle ils sont disséminés pourrait, à la rigueur, être regardée comme de la substance ponctuée déli- cate, car il n’y a aucune différence qui permette de distinguer certains aspects de la substance médullaire et le protoplasma des grandes cellules, et, dans le cas particulier, les deux opinions pourraient se soutenir. Maïs la question de la nature même du substratum est moins intéressante que le fait de noyaux nerveux dépourvus d’un corps protoplasmique propre. Or, il né nous paraît pas y avoir de doute sur la nature ganglionnaire de ces noyaux, Car leurs caractères d’une part, et la disposition de l’or- gane dont ils font partie, excluent absolument la possibilité de les regarder comme des noyaux conjonctifs. Il est vraisemblable que cet exemple n’est pas unique, et que d’autres cas analo- gues se présenteront. Il faut toutefois se tenir en garde contre l'aspect offert, sur les coupes, par les accumulations de cellules 4 CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHEATES, 9 pauvres en protoplasma, et nous avouerons que si nous n’avions pas vu ces éléments dissociés présenter une mince zone protoplas- mique et un petit prolongement, nous aurions cru volontiers que la plupart d'entre eux étaient des noyaux plongés dans une masse commune de protoplasma peu abondant, Au point de vue de la nature des conducteurs nerveux, chez les animaux qui nous occupent, nous partageons entièrement les idées soutenues dans ces derniers temps par F. Nansen, dans son beau mémoire sur l'histologie du système nerveux. Les faits que nous avons observés, tout à fait incidemment, nous paraissent confir- mer absolument la théorie défendue par Nansen (1), qui peut se résumer ainsi : les éléments qui ont reçu le nom de fibres ner- veuses, sont de véritables tubes, formés d’une gaîne solide et d’un contenu liquide ; le contenu est seul de nature nerveuse, la gaine est de nature conjonctive, et appartient au système conjonctif qui s'étend, sans discontinuité, à travers tout le système nerveux, l’enveloppant lui-même tout entier (névrilemme), et formant les étuis des cellules et des tubes, jouant par conséquent, vis-à-vis de la substance nerveuse liquide, le rôle d’une charpente et d’une paroi. Par suite, un nerf ne doit pas être regardé comme une réunion d'éléments simplement accolés, mais comme un gros tube divisé intérieurement par des cloisons longitudinales de même nature que sa paroi. C’est là, d’ailleurs, une manière de voir qu'on est forcé d’adopter quand on examine certaines dispositions, comme celles qu’on observe, par exemple, dans la commissure œsophagienne de la Scolopendre (PI. I, fig. 11). Il existe là une charpente conjonctive très puissante, parsemée de quelques rares noyaux, qui forme sur les coupes un réseau à mailles irrégulières, de toutes tailles et de toutes formes ; il est inutile de chercher ici des fibres au sens primitif du mot. (1) F. Nansen, The structure and combination of the histological elements of the central nervous system. Bergens Museums Aarsberetning for 1886, Berge 1887 | 10 G, SAINT REMY. Au surplus, si nous rejetons absolument la notion de la fibre, nous n’en continuons pas moins à employer ce terme, consacré par un long usage, et qui se prête mieux que tout autre aux descriptions anatomiques. Maïs nous prévenons que, pour nous, les mots de fibres et de fibrilles ne signifient pas autre chose que des tubes nerveux plus ou moins gros. Quant à la structure de la substance ponctuée, ou substance médullaire, nous n'avons pas fait non plus sur elle d'observations particulières. Les questions agitées à son sujet, notamment celle de savoir si les fibrilles qui la constituent sont simplement entre- lacées ou présentent des anastomoses, sont intéressantes à coup sûr, mais n'avaient qu'une importance secondaire à notre point de vue, et pour prendre parti dans le débat en connaissance de cause, il eût fallu faire sur des types favorables et convenablement choisis, des recherches comparatives qui sortaient complètement du cadre de notre travail. Nous noterons en passant que sa tex- ture est plus délicate dans les régions qui ont sûrement un rôle sensoriel ou psychique, mais en faisant remarquer que la colora- tion plus forte qu'elle prend dans certains points (glomérules et formations similaires), sous l'influence de l'acide osmique, ne doit pas forcément être attribuée uniquement à la condensation plus grande de son tissu, mais peut fort bien tenir à la présence dans ces régions de substances myéliniques particulières, jouissant de propriétés réductrices plus prononcées. Le tissu conjonctif, qui prend part à la constitution des centres nerveux (1), forme à la périphérie une couche d’importance varia- ble, à la surface extérieure de laquelle se différencie une lame anhiste continue, le névrilemme, qui s’étend sans interruption sur tout le système nerveux, en se continuant avec la paroi des nerfs, ne se laissant traverser que par les trachées ou les vaisseaux destinés (1) Nous n'avons pas à tenir compte du tissu conjonctif extérieur aux centres nerveux, qui les englobe partiellement pour les protéger, et qu a été ASRIBTE autrefois sous le nom de nevrilemme externe. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. A1 à la nutrition des tissus. Cette lame offre une épaisseur extrêmement variable, étant parfois à peine mesurable (Scutigère, Aranéides), et pouvantatteindre d’autre part jusqu'à 151, (Scolopendre) ; cette épaisseur est généralement en rapport avec l'importance de la couche conjonctive périphérique, bien que celle-ci puisse être très considérable en certains points sans que le névrilemme augmente pour cela d'épaisseur, et que d’autre part nous ayons vu un névri- Jemme très épais avec une couche conjonctive périphérique à peu près nulle (Péripate). La nature de ce tissu conjonctif périphé- rique, qui a été considéré avec raison comme la matrice du névri- lemme, a été souvent méconnue chez les Arthropodes ; on l’a pris pour une couche de cellules conjonctives vésiculeuses ou granu- leuses (Krieger) (1), Michels) (2), tandis qu’en réalité il offre la structure que B. Haller (3) décrit dans le tissu conjonctif péri- neural des Annélides, en le comparant au réseau névroglique de nature cornée des Vertébrés, étudié par H. Gierke (Glianetz). Il consiste en un réseau à larges mailles irrégulières de lamelles et de fibrilles de même substance que le névrilemme, dont certains points renflés présentent souvent un noyau. Ce réseau est continu avec le névrilemme avec lequel ses prolongements se soudent en dehors, et avec les étuis des cellulles ganglionnaires et des tubes nerveux en dedans. Chez une Aranéide (Æpeira sericea, Walck.) nous avons fait, sur le névrilemme et le tissu conjonctif périphérique, une observation intéressante au point de vue de la structure et du mode de déve- loppement (PI. 1X, fig. 92). Dans le cas dont il s’agit, le névri- lemme, en tant que lame cornée distincte et appréciable, n’existe pas sur toute la périphérie des centres nerveux, On trouve une (1) K. R. Krieger, Ueber das Centralnervensystem des Flusskrebses, Zeit- schr. f. w. Zool. XXXIII, 1880. (2) H. Michels, Beschreibung des Nervensystems von Oryctes nasicornis Zeitschr. f. w. Zool. xxXxIvV, 1880. (3) B. Haller, Üeber die sogenannte Leydig'sche Punktsubstanz im Central- nervensystem. Morph. Jarhb. xI, 1886. 42 G. SAINT REMY. couche conjonctive puissante, constituée par un tissu fondamental de fibrilles très fines, onduleuses, dont la direction générale est celle de la partie recouverte. Au scin de cette masse de fibrilles se trouvent disséminées de nombreuses cellules fusiformes ou étoi- lées, pourvues d’un noyau ovalaire granuleux, et dont les prolon- gements s’anastomosent entre eux et se continuent avec les fi- brilles. Cette structure rappelle tout à fait comme aspect le tissu conjonctif muqueux des Vertébrés. La surface externe de cette couche est limitée par un contour net occupé par de très nom- breuses cellules étoilées qui constituent probablement, par la fusion intime de leurs prolongements, une membrane continue correspondant au névrilemme habituel. Du côté interne, cette couche est en contact avec le tissu nerveux et se continue avec les étuis conjonctifs délicats des cellules ganglionnaires. Elle se continue de même avec le névrilemme ordinaire des nerfs et la lame névrilemmatique normale qui partage en deux moitiés la # _«< ! ke } »? / région antéro-supérieure du cerveau, en s’enfonçant dans l'écorce cellulaire. La valeur de cette enveloppe est facile à déterminer ; elle re- présente à la fois le névrilemme et le réseau corné sous-jacent. Le tissu conjonctif périphérique embryonnaire, au lieu d’em- ployer la plus grande partie de son activité à différencier à sa surface externe une lame anbhiste, s’est différencié d’une facon régulière, homogène en quelque sorte, dans toute son épaisseur, et en même temps ses éléments, au lieu de subir une transforma- tion à peu près complète en substance cornée, en restant réduits presque exclusivement à leur noyau, ont gardé leurs caractères cellulaires en conservant la plus grande partie de leur protoplasma. La présence à la surface externe de cette couche d’un plus grand nombre de ces cellules indique le mode de développement du névrilemme ordinaire quise constitue aux dépens d’une plus grande quantité de cellules que le réseau corné sous-jacent. Outre ces éléments constitutifs des centres nerveux que nous "trial. à db dé | CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 13 venons d'examiner rapidement, on trouve encore dans le cerveau des animaux que nous avons étudiés, soit des trachées, soit des vaisseaux, suivant le mode d’organisation du type. Les troncs primitifs traversent le névrilemme, de préférence aux points de sortie des nerfs ; mais ce n’est pas là cependant une règle absolue, et on en voit qui pénètrent isolément dans le cerveau. L’étude de ces organes ne rentre pas dans les limites de notre sujet. Disons seulement qu’ils se répartissent dans toutes les régions indistinctement, aussi bien dans la substance médullaire que dans l'écorce; toutefois on n’en trouve jamais dans l'épaisseur des parties différenciées de la substance pouctuée à texture dense et fortement colorable. D’une façon générale, ce sont des trachées qu’on observe dans le cerveau des Myriapodes, et des vaisseaux dans celui des Arachnides. Mais il y a des exceptions à cette règle ; ainsi les Kcutigérides, qui ne possèdent pas de tubes tra- chéens ramifiés, présentent des vaisseaux dans leurs centres nerveux; en revanche, les Phalangides et, exceptionnellement, une Aranéide (Ségestrie), nous ont montré des trachées au lieu de vaisseaux. Ces différences dans le mode de nutrition du système nerveux sont naturellement en rapport avec le développement respectif du système trachéen et de l’appareil circulatoire dans les divers types considérés. MYRIAPODES Chez les Myriapodes, nos observations ont porté sur deux familles de Chilognathes et sur toutes les familles de Chilopodes. Les résultats que nous avons obtenus sont particulièrement intéres- sants au point de vue de la morphologie générale du groupe, car ils montrent que, dans cette classe, le cerveau, tout en offrant une certaine variété de forme et surtout de profondes différences de structure, présente néanmoins une unité de composition absolue, A4 G. SAINT REMY. et que ses parties constitutives sont les mêmes que chez les In- sectes et les Crustacés supérieurs. Pour mieux saisir l'intérêt de certains des faits que nous allons exposer, il est indispensable de connaître les résultats acquis sur l'anatomie du cerveau dans ces deux derniers groupes. Mais il n’entre pas dans le cadre de notre sujet de faire un long historique qui nous entraïnerait trop loin : le lecteur se renseignera lui-même sur la question en lisant les beaux mémoires de H. Viallanes (1), ét en particulier ses monographies du cerveau de la Guêpe (2) et du cerveau du Cri- quet (3), où il trouvera, du reste, un historique complet des points principaux. D'autre part, détailler dès maintenant les résultats généraux de cette étude, sous prétexte d’en faciliter l'exposition, serait renverser la marche normale habituellement suivie, et transformer les conclusions en prémisses; nous nous contenterons de dire que nous reconnaissons, dans le cerveau des Myriapodes, trois segments ganglionnaires, auxquels nous attribuons les noms de protocérebron, deutocérébron et tritocérébron, proposés par H. Viallanes pour les segments du cerveau des Insectes et des Crustacés; nous justifierons plus tard l’em- ploi de ces termes dans la classe qui nous occupe en ce mo- ment. CHILOGNATHES FAMILLE DES JULIDES. GENRE IULUS L. (PL. I, fig. 1-0). Dans le genre Zulus L., dont nous avons étudié en particulier les espèces Z. sabulosus L. et I. maritimus. le cerveau est extrê- mement petit. Aussi l'étude de sa structure interne est-elle (1) H. Viallanes. Voy. plus haut. (2) Bibl. des Hautes Etudes, xXX111, 1886. (3) Bibl. des Hautes Etudes, xxxX1V, 1887. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 15 pour ce motif, assez difficile chez les petites espèces de nos contrées. Nous avons pu, heureusement, nous procurer quelques exemplaires assez gros de Z. sabulosus, qui nous ont fourni des résultats assez complets. Au point de vue du cerveau, ces di- verses espèces ne présentent pas de différences entre elles, et bien que notre description et nos figures se rapportent à 7. sabu- losus, elles sont valables pour tout le genre, Le cerveau de l’Iule (F1G. I) est divisé par un large sillon médian, circulaire, en deux lobes frontaux convexes (L. f.) qui se soudent chacun en dehors à un lobe de forme tronc-conique, le lobe optique (1. o.), de l’extrémité externe duquel partent des filets nerveux destinés aux yeux. De la région externe du lobe frontal, se détache, sur le bord inférieur, une petite branche nerveuse dont nous avons vérifié la nature sur les coupes,et qui se porte en dehors (n. T.). Elle est destinée à un F1G. 1 (1) organe sensoriel céphalique, dont nous avons pu constater l'existence vers le point d’in- _sertion de l’antenne. Des organes semblablement placés ont été décrits, chez un certain nombre de Myriapodes, par Tomos- vary (2), et peuvent être désignés sous le nom de cet obser- vatenr , puisque leurs fonctions étant mal connues, on n’a pas le droit de leur attribuer une dénomination plus précise. Nous proposons également de désigner le nerf qui va à ces .. oo organes, sous le nom de nerf de Tomosvary. (1) Fr&.1. Cerveau de J. marillmus, vu par la face supérieure, Gr, 23 fois. C. œs , commissure œsophagienne; c. tr. , commissure transverse de l'anneau œsophagien ; — L. f., lobe frontal : — [, o., lobe optique { — n. o, nerfs opti- ques ; — n. 8., nerfstomato-gastrique ; — n. T., nerf de l'organe de Tômôsvary; — P., pont stomato-gastrique supposé vu par transparence). (2) Tômôsvary. Eigenthümliche Sinnesorgane der Myriopoden. Math. Naturw Ber. Ungarn 1, 1882-83. 16 G. SAINT REMY. Au-dessous et en avant de chaque lobe frontal, le cerveau se renfle légèrement en un lobe antennaire qui émet en dehors et en avant, au-dessous des lobes optiques, deux nerfs se portant directement à l’antenne voisine. La commissure œsophagienne part du point où le lobe antennaire et le lobe frontal se con- fondent en bas et en dedans. Ce même point est réuni à son homologue du côté opposé par un tronc cylindrique de substance nerveuse quis’étend en avant et transversalement, comme une sorte de pont, dans la résion frontale de la tête au-dessus de l’œsophage. Ce tronc, auquel nous donnons le nom de pont stomato-gastrique (P.), donne naïssance en arrière, sur la li- gne médiane, à une branche impaire qui s'étend sur l’œsophage et qui est connue sous le nom de nerf stomato-gastrique (n. s.). Du point où s’insère le pont stomato-gastrique, sort un petit filet nerveux grêle : Owen l’attribue à la mandibule. N'ayant pas eu d’'Iule suffisamment gros, nous n’avons pu chercher directement ses rapports, mais nous avons constaté chez la Scolopendre que le nerf correspondant est destiné à la lèvre supérieure, et comme cette région cérébrale à une structure très uniforme, nous n’hési- tons pas à regarder ce nerf, chez l’Iule, comme le nerf de la lèvre supérieure. Au même niveau que ce nerf, mais plus en dehors, un autre filet prend naissance, le nerf viscéral pair. Les commissures œsophagiennes sont deux longs cordons cylin- driques, dont nous avons indiqué l’origine ; elles sont accolées à l’œsophage de chaque côté, et rejoignent la chaîne ventrale un peu au-dessous de lui. Mais auparavant, elles sont reliées l’une à l’autre par un petit tronc transversal qui passe au-dessous de l’œsophage, en longeant sa face ventrale : c’est la commissure transverse de l’anneau æsophagien (ce. tr.), qui existe chez tous les Insectes et les Crustacés supérieurs (1). | Le cerveau de l’Iule, étudié sommairement, et figuré par Tré- (1) Voy. V. Liénard, Recherches sur le système nerveux des Arthropodés (cons- titution de l’anneau œsophagien), Arch. de Biol. 1, 1880. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. Li viranus (1), qui en indiqua la configuration générale, fut décrit complètement pour la première fois par Newport (2), dans son beau mémoire sur le système nerveux des Myriapodes et du Scorpion. Sa description est très soigneuse, et si des filets ner- veux lui ont échappé, il a du moins exposé l’ensemble avec beau- coup de précision. Owen (3) donna plus tard une nouvelle description moins claire, mais fit connaître quelques détails inté- ressants : il montre qu’il existe deux nerfs antennaires, qu’il suppose devoir être, l’un moteur, et l’autre sensitif, et il signale au-dessous d'eux deux filets nerveux qu’il attribue aux mandi- bules, mais dont nous rapportons l’un à la lèvre supérieure, l’autre au système viscéral, [1 décrit également, mais d’une façon peu claire, la commissure transverse de l’anneau œsophagien, qu'il homologue à celle du Homard, de la Limule et du Cossus, déjà connue à cette époque. In revanche, il croit que le pont ner- veux, qui donne naissance au nerf stomato-gastrique, forme un anneau autour de l’œsophage. Le cerveau est formé, comme nous l'avons dit plus haut, de trois régions ganglionnaires : le protocérébron, le deutocérébron et le tritocérébron. Il est enveloppé par un névrilemme assez mince mais très résistant, reposant sur une couche conjonctive qui atteint en certains points une assez grande épaisseur et régu- : larise les contours de l'organe. Nous allons étudier successive- ment les trois segments que nous avons indiqués. PROTOCÉRÉBRON. — Le protocérébron occupe la région anté- rieure et supérieure du cerveau; il comprend deux parties : le protocérébron moyen, au centre, formé des lobes frontaux, et latéralement, les lobes optiques. Lobe optique. — Chaque lobe optique représente un petit (1) Treviranus, Vermischte Schriften, 1, 1816. (Taf, 1X, f. 3 et 4.) (2) Newport, On the nervous and circulatory systems of Myriapods and ma- crourous Arachnida., Phil. Trans. vol. 59, 1843. (3) Owen, Anat. of inv. anim. 1855 (fig. 144). ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN, — 2 SÉRIE, — T. V bis, — suppl. 1881, — Mém. 2 48 G. SAINT REMY. cylindre reposant sur le tronc de cône formé par le lobe frontal. De son extrémité externe, légèrement convexe, partent de nom- breux petits faisceaux nerveux, destinés aux yeux. Les coupes pratiquées dans cette région (PI. L'fig. 6) y réve- lent une structure assez compliquée, surtout si on la compare à celle du même organe chez la plupart des autres Myriapodes, mais cependant beaucoup plus simple que celle du ganglion ou obe optique des Crustacés et des Insectes. Dans le lobe optique de l’[ule, nous trouvons quatre couches, que nous appellerons : : la masse médullaire, la couche des fibrilles optiques, la lame ganglionnaire et la couche des faisceaux optiques. La masse médullaire (PI. I, fis. 6, m. m. l.), partie la plus D \ ‘interne du lobe optique, présente à peu près la forme d’un cône tronqué irrégulier, appliqué par sa petite base sur la substance médullaire centrale du lobe frontal. Sa grande base, tournée en dehors, qui forme sa face externe très lécèrement concave, est oblique d’arrière en avant, de bas en haut, et de dedans en dehors; c’est par elle que la masse est en rapport avec les fibrilles optiques. Ses faces supérieure, antérieure et inférieure, sont recouvertes par la masse ganglionnaire du lobe (m. g. l. ), formée de petits noyaux riches en chromatine, et dont les limites cellulaires ne sont pas visibles ; ils ont un diamètre moyen de 4 j., 5. La face postérieure de la masse médullaire est libre, et se trouve en contact immédiat avec le tissu conjonctif, qui, sur les autres faces du lobe, sépare la couche des noyaux, du névrilemme. : La masse médullaire est constituée par de la substance ponc- tuée, à structure fine et homogène, qui se colore fortement par l’acide osmique. Dans la partie interne, cette substance ponctuée est finement fibrillaire ; ses fibrilles très délicates sont dirigées horizontalement de dehors en dedans, et servent à établir une union intime entre la masse médallaire et le lobe frontal, dans la substance ponctuée duquel elles se perdent. Du bord posté- rieur de la masse médullaire, part, dans la région moyenne, un LÉ de. ne es CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 19 cordon de substance ponctuée en partie fibrillaire (PI. I, fig. 6, . /.), qui se dirige d’avant en arrière, de dehors en dedans et un peu de haut en bas, pour gagner le bord postéro-supérieur du lobe frontal, le long duquel il se continue. Ses fibrilles se dissocient légèrement, ce qui rend le cordon peu distinct, et vont se mêler à un système de fibrilles commissurales qui passent d’un lobe frontal à l’autre. Ilest permis de supposer que les cordons de chaque côté s’unissent plus ou moins directement entre eux, et servent à relier les deux masses médullaires, et par conséquent les deux lobes optiques droit et gauche. On sait qu’il existe, chez les Insectes, une pareille relation entre les deux lobes optiques. Chez l’Iule, il existe d’ailleurs encore une bande médullaire qui traverse tout le protocérébron moyen, et qui disparaît de chaque côté, vers la masse médullaire du lobe optique (PI. I, fig. 8, c. L.). Cette bande de structure fibrillaire est très probablement une commissure des lobes optiques. La substance ponctuée qui forme la masse médullaire, ne renferme comme éléments étrangers, que quelques fines trachées, dont quelques-unes la traversant parallèlement à sa face externe, pourraient faire croire au premier abord, sur certaines coupes, à sa division en deux parties. De la face externe, légèrement mamelonnée, de la masse médul- laire, s’échappent par petits groupes, de très nombreuses fibrilles nerveuses (PI. I, fig. 6, f. o.), qui la relient à la lame ganglion- naire. Ces fibres s’étendent horizontalement, de dedans en dehors, suivant un trajet légèrement onduleux, sans jamais s’anastomoser entre elles, ni s’entrecroiser ; il n'y a donc pas ici de chiasma comme on en rencontre chez les Insectes. Leur longueur varie avec leur situation, en raison de la forme de la masse médullaire et de la lame ganglionnaire ; elles atteignent 75 11 vers le centre de la couche, et ne dépassent pas 15 12 vers le bord antérieur et inférieur, où la masse médullaire et la lame ganglionnaire se rap- prochent beaucoup l’une de l’autre : en ce point, elles sont parti- 20 G. SAINT REMY. culièrement serrées. Entre ces fibres, on observe deux sortes de noyaux. Les uns petits, arrondis ou légèrement ovoïdes, sont les, plus nombreux ; ils mesurent de 3 à 4 11 en diamètre, et sont dissé- minés sans ordre. Les autres noyaux plus gros, généralement ovoïides, également riches en chromatine, sont plus rares ; ils atteignent jusqu’à 7 1 ; mais en examinant les préparations avec attention, on observe des transitions entre ces deux formes. On trouve encore, entre les fibrilles, de fines trachées qui, pour la plupart, leur sont parallèles. | Sur toutes ses faces, autres que l’interne et l’externe, la couche des fibrilles optiques est libre eten contact avec le tissu conjonctif. La lame ganglionnaire (L. g.), dans laquelle viennent se jeter les fibrilles optiques, comprend deux couches: une interne, de sub- stance ponctuée ; l’autre externe, de petites cellules chromatiques. Elle peut être comparée à la région de même nom du lobe optique des Insectes. Elle a la forme d’une calotte à concavité interne ; elle est disposée verticalement, mais le bord supérieur et antérieur s’avance un peu plus en dedans que l’inférieur et postérieur, et va en quelque sorte à la rencontre de la pointe de la masse médullaire. La substance ponctuée, qui constitue la couche interne, a une texture grossière. Les fibrilles optiques s’y perdent dès leur entrée, sans qu’il soit possible de voir ce qu’elles deviennent. On croit quelquefois les voir, à un grossissement moyen, se continuer direc- tement avec les fibres des faisceaux optiques, mais un examen à un plus fort grossissement montre qu'il s’agit de la coupe optique de troncs trachéens qui traversent la lame. Du côté externe de cette couche médullaire, sortent par places les faisceaux optiques. La couche externe de la lame ganglionnaire est constituée par une accumulation de petits noyaux arrondis, riches en chromatine, dont on ne peut voir les limites cellulaires; ils mesurent environ 3 1, b de diamètre. {ls revêtent toute la face externe convexe de la lame, d’une couche quiatteintson maximum d'épaisseur versle centre; cette couche est interrompue pour le passage des faisceaux optiques. Vos ns ne. nes de. dé dr > in CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES, 21 De la lame interne de substance ponctuée, sortent, comme nous l'avons dit, les faisceaux optiques (PI. I, fig. 6, jsc. o.), formés de fibres qui prennent naissance sur un certain espace, et sortent en convergeant sous forme d’un petit cône dont les éléments, d’abord séparés, se resserrent, et en sortant de la couche des noyaux, se trouvent groupés cn un cylindre compact, le faisceau optique, dirigé de dedans en dehors suivant un trajet rectilisne. Ces fais- ceaux sont au nombre d’une trentaine ; chacun d’eux perce isolé- ment le névrilemme, qui se prolonge sur lui en s’amincissant pour former son enveloppe ; il mérite alors le nom de nerf optique (n.0.). Les intervalles entre les faisceaux optiques sont occupés par Île tissu conjonctif, parsemé de noyaux de diverses tailles. De nombreuses trachées, très fines, pénètrent dans le lobe optique à son extrémité, particulièrement au point où les faisceaux percent le névrilemme ; elles restent généralement parallèles à ceux-ci, traversent la lame ganglionnaire et gasnent les couches plus profondes du cerveau. Lobe frontal. — Le protocérébron moyen, formé des deux lobes frontaux (PI. I, Z.f.), occupe la région antérieure et moyenne du cerveau. Chaque lobe frontal est constitué par une masse médullaire centrale revêtue d’une écorce cellulaire. Ilest limité, du côté externe, par la masse médullaire du lobe optique qui lui est accolée; en arrière et en bas, par le deutocérébron dont il est séparé seulement sur le bord externe par une échancrure (voy. PI. I, fig. 3, 8, 9) ; en hautet en arrière, il représente la face postéro-supérieure du cerveau. Enfin, en arrière, il recoit l’insertion de la commissure œsophagienne, et repose sur le tritocérébron. Latéralement et en dedans, le lobe frontal s’unit, en s’amincissant, avec son homo- logue du côté opposé. Il est loin d’avoir la complication que la région correspondante présente chez les Insectes. Les coupes les plus favorables à son étude sont des coupes à peu près frontales, qui sont en somme presque transversales ; c’est dans une série de coupes de cette nature que nous avons pris les fig. 1 22 G. SAINT REMY. à 5 (PI. I). Les sections menées dans cette direction ont l’avan- tage de passer dans le plan de certains faisceaux commissuraux et de les montrer dans toute leur étendue, tandis que les coupes hori- zontales ou régulièrement transversales ne les présentent qu’en partie et sectionnés plus ou moins obliquement. Le lobe frontal présente sur son bord supéro-antérieur deux îlots de petites cellules chromatiques pauvres en protoplasma, les masses ganglionnaires interne et externe, qui sont mises en rela- tion avec d’autres régions du cerveau par des commissures spé- ciales traversant la substance médullaire du lobe. Ce sont ces formations que nous allons étudier tout d’abord à cause de leur intérêt. Examinons, par exemple, l’une des premières coupes d'une série orientée comme nous l'avons indiqué plus hant (PL. I, fig. 1). La coupe présente en arrière une échancrure très large et très profonde, qui sépare les deux moiïtiés cérébrales. Son bord antérieur est à peu près rectiligne, sauf sur la ligne médiane, où il montre également une échancrure large maïs peu profonde. En dehors, la coupe se termine de chaque côté en pointe mousse, les lobes optiques n’étant pas intéressés. La substance médullaire qui occupe le centre de la coupe, présente à peu près les mêmes contours, et constitue environ les deux tiers de la surface. Toute la partie postérieure de cette coupe ne nous occupe pas pour le moment, car elle passe par le deutocérébron. La région moyenne est formée en majeure partie par une des commissures olfactives (ce. olf.). Examinons seulement le tiers anté- rieur de la figure ;: nous constatons que dans cette région la sub- stance ponctuée, qui se montre homogène, nous offre une limite droite, sauf en deux points symétriques. De chaque côté de la ligne médiane, au niveau du point où le névrilemme s’incurve pour dessiner l’échancrure antérieure, la substance ponctuée pré- sente une petite éminence qui est recouverte, non plus par de grandes cellules à protoplasma abondant, mais par plusieurs couches de petites cellules chromatiques à protoplasma difficile- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 23 ment visible. C’est l'accumulation à laquelle nous donnons le nom de masse ganolionnaire interne (PI. I, fig. 1 et 2, m. q. à). Il est impossible de reconnaître des limites cellulaires à ces petits élé- ments dont les noyaux seuls sont distincts, mais on voit la sub- stance ponctuée de l’éminence envoyer entre eux des prolonge- ments, ou, si l’on veut, recevoir de cette masse ganglionnaire des cordons fibrillaires formés par la réunion des prolongements de ces petites cellules. La substance ponctuée de l’éminence est d’une structure plus délicate et plus homogène que celle du reste du lobe frontal ; nous lui donnons le nom de masse médullaire interne. En l'étudiant sur des coupes sagittales et des coupes horizontales, on se rend un compte exact de sa forme, et l’on constate qu’elle repré- sente une sorte de petit cône émoussé qui se dirige d’arrière en avant et de bas en haut, en se recourbant lécérement en forme de corne (voy. fig. 7 et 9, m. g. i). Les petites cellules chromatiques lui constituent un revêtement complet, et comme elles se massent dans l’angle postérieur que fait la corne avec la substance médul- laire générale du lobe frontal, l'organe entier a la forme d’un hémisphère aplati. Sur la coupe que nous examinons, les masses ganglionnaires internes ne sont pas les seuls amas de cellules chromatiques. De chaque côté, vers l'extrémité externe du bord antérieur de la substance médullaire, on reconnaît un petit groupe de ces mêmes éléments. Ce groupe, que nous avons appelé la masse ganglion- naire externe (fig. 1, m. g. e), n’est que faiblement intéressé par la coupe en question, et se montre mieux sur les coupes suivantes (fig. 2, m. g. e), où l’on reconnaît que cette couche de cellules s étale de dedans en dehors, pour se continuer avec celle qui revêt la masse médullaire du lobe optique. Sur des coupes horizontales favorables, on observe que la substance médullaire se soulève en une petite pointe dirigée de bas en haut, et qui s'enfonce dans cette masse ganglionnaire externe. Cette pointe médullaire est beaucoup plus faible que la masse médullaire interre. 24 G. SAINT REMY. La coupe qui suit immédiatement celle que nous venons dé décrire, est plus intéressante, en ce qu’elle montre les relations de ces masses ganglionnaires avec les lobes deutocérébraux (PI. I, fig. 2). Du petit noyau central de substance médullaire de la masse ganglionnaire externe, part un cordon de substance ponc- tuée, très finement fibrillaire (7. o. 0), qui s’avance en dedans et en bas, en faisant, avec le bord antérieur de la substance médul- laire, un angle très aigu. Ce cordon s’incurve, et va se perdre dans la région moyenne de la masse de substance ponctuée dense, adjacente à la masse ganglionnaire {m. g. a). Du lobe deutocéré- bral, immédiatement en dehors du point d'arrivée de ce cordon dans cette masse, un autre cordon sort (f. 0. 0’), légèrement in- cliné de dehors en dedans; il se dirige ainsi de bas en haut en croi- sant presque de suite le premier, sous un angle très aigu, puis il s’incurve en dedans et longe le bord supérieur de la substance ponciuée du protocérébron moyen, et passe ainsi dans l’autre lobe frontal, où nous n’avons pas réussi à le suivre complètement. D’autres coupes nous ont montré la même disposition, plus ou moins clairement, sans nous faire connaître plus de détails. Faute de coupes absolument symétriques, nous n’avons jamais pu consta- ter ces faits que d’un seul côté à la fois, et le cordon commissural dont nous parlons, semblait chaque fois se perdre dans la substance ponctuée du lobe frontal opposé, dans la région de la masse gan- glionnaire externe. Nous nommons la commissure qui relie la masse ganglionnaire externe au lobe deutocérébral du même côté, commissure optico- olfactive directe ; la commissure qui relie le lobe deutocérébral au lobe frontal du côté opposé, commissure optico-olfactive croisée. Ces commissures sont intéressantes, car elles sont comparables à cer- tains faisceaux observés chez les Insectes. On sait, en effet, depuis les observations de Bellonci, que chez les Insectes et les Crus- tacés, le lobe deutocérébral ou lobe olfactif est uni par des trajets fibreux au corps pédonculé ou corps fongiforme du côté corres- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 25 pondant, et à celui du côté opposé. Ce sont précisément là les relations de la masse ganglionnaire externe, qui pourrait donc être considérée comme l’homologue du corps pédonculé des In- sectes, et représenterait le calice. Bien que la masse ganglionnaire interne soit privée de ces mêmes relations, sa similitude de struc- ture permet de la considérer comme analogue à la masse gan- glionnaire externe, et on peut, à la rigueur, la regarder comme un deuxième calice. En étudiant les masses ganglionnaires interne et externe, et leurs rapports avec les autres parties du cerveau, nous venons de voir la structure de la région supérieure des lobes frontaux. Dans leurs résions moyenne et inférieure, ces lobes présentent encore quelques tractus intéressants. Ils sont reliés l’un à l’autre par une commissure fibreuse, dont la fig. 8 montre la région moyenne eb les extrémités (c. L. f.) qui s’enfoncent dans la sub- stance médullaire. Cette commissure peut être regardée comme la commissure principale des deux lobes ; elle longe le bord de la substance ponctuée dans la région médiane du cerveau, et se trouve, par suite, légèrement concave en arrière. Ses fibres, qui sont très nettes et très distinctes, se perdent de chaque côté dans le renflement antérieur du lobe frontal. Sur la même figure, on remarque, immédiatement au-dessous de cette commissure, une autre bande médullaire de structure fibrillaire (fig. 3, e. L.), qui s'étend d’une extrémité à l’autre du protocérébron moyen ; nous avons déjà dit, à propos des lobes optiques, qu’elle se perd de chaque côté (sur les coupes précédentes) vers la base des lobes optiques, et qu’il est probable qu’elle réunit ces deux lobes. Au même niveau, et sur la même figure, s’étend un autre fais- ceau horizontal (PI. I, fig. 3, c.), qui traverse tout le cerveau. Dans sa région moyenne, ce faisceau suit la courbure de la com- ! missure des lobes optiques, à laquelle il est accolé ; c’est-à-dire qu’il forme un arc très ouvert à concavité supérieure. Dans le lobe frontal, la courbure change, il s’incurve en prenant une concavité 26 G. SAINT REMY. inférieure et se dirige en bas vers l’échancrure qui sépare le deu- tocérébron du lobe frontal. | Chaque lobe frontal envoie deux faisceaux de fibres dans la commissure œsophagienne correspondante. Le faisceau interne, le plus gros (PI. I, fig. 7, j. 1), prend naissance dans la région inférieure et externe du lobe, vers la base du lobe optique ; ses fibres très fines se dirigent en bas et en dedans, en se groupant plus intimement, puis décrivent un arc à concavité externe, et s'enfoncent dans la commissure, où le faisceau ne tarde pas à perdre son individualité. On observe chez les Insectes une pareille relation entre le lobe cérébral et la commissure œsophagienne. — L'autre faisceau externe, très grêle (fig. 7, f. e), est constitué par des fibres plus grosses. Il paraît prendre naïssance vers la base du lobe optique, et se dirige obliquement en dedans et en bas, en longeant le bord inférieur du iobe, le long de l’échancrure qui le sépare du deutocérébron ; il gagne ainsi la commissure œsopha- gienne dans laquelle il s'enfonce et se perd, son trajet paraissant être parallèle à l’axe de la commissure. Le lobe frontal émet le petit nerf de Tomosvary, qui prend naissance dans sa région externe, et se détache directement du bord postéro-inférieur de sa substance médullaire, un peu en dedans et en arrière du lobe optique. Ce nerf se porte en dehors et un peu en bas, à travers le tissu conjonctif périphérique, et sort du cerveau vers la base de ce dernier lobe dont il suit au dehors le bord inférieur ; son volume est à peu près le même que celui d’un nerf optique. Nous avons dit que les lobes frontaux sont partiellement re- couverts d’une écorce ganglionnaire. Les faces qui sont en rap- port avec les lobes deutocérébraux, les lobes optiques et les com- missures œsophagiennes, ne peuvent présenter de cellules ; il n’y a que les faces supérieure et antérieure qui possèdent un revête- ment ganglionnaire. À l'exception des points occupés par les masses ganolionnaires externe et interne, la partie supéro-posté- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 27 rieure du lobe frontal est revêtue de nombreuses cellules de moyenne taille qui envoient leurs prolongements dans la substance médulliaire. Dans la région moyenne du cerveau, au fond de l'échancrure, il n’existe pas d’écorce cellulaire ; l'écorce s’étend latéralement jusqu'a la base du lobe optique, et descend dans l’échancrure, qui sépare la masse médullaire deutocérébrale de celle du lobe frontal. Les prolongements des cellules qui rem- plissent cette échancrure, nous ont paru se porter dans le lobe frontal opposé. En arrière, au niveau du lobe optique, l'écorce cellulaire s'étend peu à peu en dedans, et recouvre la face antérieure de léchancrure médiane séparant les deux moitiés du cerveau ; mais à mesure qu’elle s’étend en dedans, elle se rétrécit en dehors (voy. PI. I, fig. 3). Au niveau du lobe optique, à partir de la masse ganglionnaire externe, la face postérieure du lobe frontal est partiellement libre ; puis les cellules de la région interne disparaissant à leur tour, la substance médullaire de la face postérieure n’est plus séparée du névrilemme que par le tissu conjonctif. DEUTOCÉRÉBRON. — Le deutocérébron (P1.I, L. a), ou ganglion antennaire, occupe la partie inférieure du cerveau ; il forme les deux lobes antennaires, ou lobes deutocérébraux, fortement écartés l’un de l’autre. Ces lobes antennaires ont une structure assez com- - pliquée, chacun d'eux a grossièrement la forme d’un hémisphère ; en bas et latéralement, le lobe représente la face correspondante du cerveau ; en haut, il s'applique surle protocéréhron.et se con- fond avec lui, sauf en dehors où leurs limites sont indiquées par une échancrure de la substance médullaire. En arrière, il est soudé au tritocérébron et à la commissure œsophagienne. C’est de la face latérale libre que sortent les deux nerfs antennaires. Le lobe antennaire (L. a) est constitué par un noyau de sub- stance ponctuée, revêtu d’une écorce ganglionnaire épaisse ; nous commencerons par décrire celle-ci, à cause de son importance. Sur une coupe passant par la partie antérieure du cerveau (PI. I, 28 G. SAINT REMY. fig. 1, 2), on reconnaît que la face antéro-inférieure du lobe deu- tocérébral est occupée par une lame très épaisse de petites cellules chromatiques (fig. 1, 2, m.g. a). Ces petits éléments se présentent comme des noyaux arrondis, très colorables, ne mesurant pas plus de 3 {4 ; ils sont extrêmement serrés, et bien que sur les coupes ils soient séparés les uns des autres par une zone claire, on ne peut voir leurs limites cellulaires. Des traînées de substance ponctuée s’insinuent dans cette masse ganglionnaire. La forme de cette masse est celle d’une calotte ; ses deux faces sont incur- vées et concaves vers l’intérieur du cerveau ; elles passent de l’une à l’autre par un bord arrondi et épais. Cette masse ganglionnaire est allongée d'avant en arrière, et coiffe en quelque sorte la partie supérieure et interne du lobe deutocérébral. À ce niveau, la sub- stance ponctuée en contact avec la masse ganglionnaire est plus dense, plus homogène, se colore plus fortement par l’acide osmique. La limite de cette région ainsi différenciée est irrégulière, et présente des sortes de renflements qui dépriment la face concave de la masse. A un fort grossissement, on reconnaît que des pro- longements, issus des petites cellules chromatiques, viennent se perdre dans cette région médullaire. De la partie interne de cette masse médullaire homogène, partent trois commissures qui pa- raissent avoir leur origine, chacune, en partie du moins, dans un de ces renflements dont nous parlions ; la commissure supérieure, tout au moins, tire en partie son origine de la substance médul- laire du lobule olfactif que nous allons indiquer. Ces trois com- missures, qui relient les deux masses ganglionnaires du deutocé- rébron, ss voient simultanément vers leur origine, sur la coupe un peu épaisse représentée fig. 2. La commissure inférieure (c. olf. à.) etla commissure supérieure (ec. olf. s.), qui sont presque dans le même plan, sont parallèles ; elles suivent dans leur trajet le contour de l’échancrure. La commissure moyenne (c. olf. m.) se trouve sur un plan légèrement supérieur à celui des deux autres ; elle décrit un arc beaucoup plus ouvert que celles-ci. Ces com- D RL - CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 29 missures occupent la majeure partie de la région moyenne du cerveau ; elles sont constituées, à leur origine seulement, par de la substance ponctuée fibrillaire ; le reste du cordon est formé par de la substance ponctuée très homogène et très dense, qui se dis- tingue du tissu ambiant par sa coloration un peu plus forte. Nous nommons ces commissures : commissures olfactives. L'insertion de ces commissures se fait dans la région interne de la masse médullaire. Du côté externe, la substance ponctuée affecte une structure particulière qui se continue dans la région postéro-inférieure au-dessous du niveau où s’arrrête la masse ganglionnaire. Dans cette région, la substance forme de petits îlots à structure homogène extrêmement fine et dense, de forme irrégulièrement polygonale, qui se colorent fortement par l'acide osmique. Ces petits îlots (fig. 8, 9[.), sauf la forme et la disposition, sont tout à fait comparables aux corps qui ont été nommés chez les Insectes glomérules olfactifs: nous leur conservons ce nom. Outre ces formations, qui mesurent de 15 à 25 uw de diamètre, on observe des points où la substance ponctuée est également con- densée sur une très petite étendue, et forme comme des sortes de mouchetures. Les glomérules sont considérés chez les Insectes comme en relation avec les sensations olfactives ; il est possible que ces petites condensations ponctiformes soient en rapport avec d’autres phénomènes de sensibilité. Nous avons vu également, chez le Péripate, une région pourvue de petites condensations poncti- formes former un lobule accessoire annexé au lobe olfactif. Chez l'Iule, la région des glomérules olfactifs offre un contour externe arrondi, et se trouve séparée du lobe frontal, en arrière, par une échancrure dont nous avons déjà parlée ; elle forme en quelque sorte un hémisphère appliqué par sa base sur le reste du lobe deutocérébral (fig. 3, {. olf.). Nous lui donnerons le nom de lobule olfactif. C’est de la partie interne de cette région que se détachent, à peu près au même niveau que les commissures olfac- tives, les commissures optico-olfactives directe et croisée, qui se 30 G. SAINT REMY. portent au protocérébron, comme nous l'avons décrit plus haut avec détails. Les lobules olfactifs sont reliés l’un à l’autre par une longue commissure fibreuse, qui traverse tout le cerveau, appliquée contre la face inférieure de la région moyenne ; les deux extrémités de cette commissure se perdent dans la substance médullaire des lobules (PL. I, fig. 3, c. a). Nous avons étudié plus haut la partie la plus importante de l’écorce ganglionnaire da deutocérébron, les masses ganglionnaires antérieures, mais elles ne constituent pas à elles seules tout le revêtement cellulaire, et on trouve à côté d'elles quelques assises beaucoup moins épaisses de cellules riches en protoplasma, qui tapissent les faces libres du deutocérébron. Le lobule olfactif est aussi revêtu de plusieurs assises de cellules de petite taille, interrompues largement pour le passage des nerfs antennaires. Les nerfs antennaires constituent deux faisceaux considérés depuis longtemps (Owen) comme étant probablement l’un sen- sitif et l’autre moteur. Ces deux faisceaux sortent des parties latéro-externes du Jobe antennaire, et sont situés tout près l’un de l’autre, l’un étant inférieur et l’autre supérieur. Le faisceau inférieur a son origine au sein du lobule olfactif, et doit être considéré comme un faisceau sensitif (nerf olfactif. — PI. I, fig. 8, 5, n. a. olf.). Ni pour cette raison nous considérons son trajet de la périphérie vers le centre, nous voyons qu’en entrant dans le cerveau, il s’élargit légèrement et pénètre presque immédiate- ment dans le lobule olfactif, leurs bords respectifs se continuant mutuellement sans interruption. Les fibres qui composent ce nerf se perdent dans la substance médullaire générale du lobule, et sont vraisemblablement en relation par son intermédiaire avec les glomérules olfactifs. — [Le nerf antennaire supérieur ou moteur (n. a. m.) n’a aucun: relation avec le lobule olfactif, et tire son origine de la région postérieure du lobe deutocérébral et de deux faisceaux, dont l’un provient de la commissure œso- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 31 plagienne correspondante, et l’autre d’un cordon commissural qui vient de la moitié opposée du cerveau, et plus spécialement de la commissure œæsophagienne opposée. Ceci nous oblige à décrire la structure des commissures œs0- phagiennes à ce niveau. Les dispositions qu’elles présentent, s’étudient le mieux sur des coupes menées à peu près parallèle- ment au plan passant par leurs axes. Il est impossible d’obtenir des sections absolument parallèles à ce plan, mais en étudiant plusieurs séries, et suivant les coupes avec soin, on arrive à se faire une idée exacte des rapports. Nous avons représenté (PI. T, fig. 7, 8) deux coupes d'une même série à peu près parallèles aux commissures, intéressant obliquement, l’une la moitié droite du cerveau, l’autre la moitié gauche. Dans la région antéro-inférieure, on distingue un faisceau de fibrilles, qui s’isole du reste de la masse fibrillaire de la commis- sure, et, après un court trajet rectiligne, se recourbe en dehors et en arrière du deutocérébron, en décrivant un grand arc pour aller prendre part à la constitution du nerf antennaire moteur. Ce faisceau est grêle, et ses fibres sont très serrées. [l ne constitue qu’un6 faible portion du nerf antennaire, dont une grande partie est formée par un gros paquet de fibrilles venant de l'hémisphère cérébral opposé. Si pour connaître l’origine de ce dernier fais- ceau, que nous nommons faisceau antennaire commissural (fig. 8, f. a. c.), nous le suivons depuis la périphérie vers le centre, nous voyons qu'il forme dans le deutocérébron un tractus hori- zontal dont les éléments sont lâchement unis et comme dissociés, tout en restant parallèles ; en se rapprochant du bord interne de la commissure œsophagienne, ce faisceau se recourbe peu à peu en haut pour suivre le bord de la région moyenne du cerveau. Comme nous n'avons jamais pu obtenir de coupes rigoureusement symétriques, c’est-à-dire exactement parallèles aux axes des commissures, il nous a été impossible de suivre le trajet de ces fibres d’un côté à l’autre, quelque soin que nous ayons apporté 32 G. SAINT REMY. à l'étude de nos préparations. Toutefois, si l’on considère qu'il existe dans chaque commissure œsophagienne, un faisceau (fig. 8, f. a. m.), qui, se recourbant presque à angle droit, envoie ses fibres en dedans et les mêle à celles du faisceau antennaire com- missural, il est permis de supposer que le faisceau antennaire commissural d’un côté tire une partie de ses fibres de la commis- sure œsophagienne du côté opposé; nous disons une partie de ses fibres, car le faisceau antennaire paraissant plus considérable que le faisceau venu de la commissure œsophagienne opposée, il est probable qu’une partie de ses fibres proviennent du faisceau antennaire commissural opposé lui-même, les deux nerfs moteurs étant ainsi reliés l’un à l’autre. Pour nous résumer, le nerf antennaire moteur (nerf antennaire supérieur) est constitué par quatre sortes de fibres : 1° les unes sortant directement du lobe antennaire correspondant; 2° d’autres provenant de la commis- sure œsophagienne correspondante; 3° d’autres provenant de la comimissure œsophagienne du côté opposé; 4° d’autres enfin venant probablement du nerf antennaire moteur du côté opposé : ces deux dernières sortes lui arrivent réunies dans le faisceau antennaire commissural. Dans la fig. 8, on remarque un faisceau (f.) qui prend nais- sance dans la commissure œsophagienne, et se porte en dedans pour gagner la moitié cérébrale opposée ; nous n'avons pas réussi à élucider ses rapports d'une façon certaine, mais nous croyons qu'il se rend dans le lobe frontal de l’autre côté. Le lobe deutocérébral donne naissance, dans sa partie posté» rieure, au nerf viscéral pair, qui se détache de la face inférieure du cerveau un peu en avant et en dehors du point d’origine du nerf de la lèvre supérieure. Ce nerf viscéral se constitue au centre de la substance même du lobe, et exécute un trajet d’une cet- taine longueur à travers celle-ci, pour gagner son point de sortie, La fig. 5 (n.v.) le montre dans presque toute l'étendue de son trajet intérieur ; il est dirigé de haut en bas et de dedans en CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 33 dehors. Faute de préparations suffisamment démonstratives, nous n avons pu élucider la question de savoir s’il est en relation avec certains faisceaux commissuraux, ce que semble indiquer son origine profonde. TRITOCÉRÉBRON.— Le tritocérébronestsitué dans la partie postéro- inférieure du cerveau, en dedans et au-dessous du deuto cérébron ; il est constitué par deux lobes latéraux (PI. I, fig. 4, 5, ZL. #.) réunis d’une part par le pont stomato-castrique (fig. 3, 4, 5, P.) bien séparé du reste du cerveau, et d'autre part par une portion œsophagienne qui comprend : un faisceau de fibres qui se continue sur le bord interne des commissures œsophagiennes (PI. [, fig. 10, c. tr.) dans leur moitié antérieure, et les quitte pour embrasser étroitement la face inférieure de l’œsophage, en constituant ce que les anatomistes ont appelé Ia commissure transverse de l’anneau œsophagien ; et une paire de petits amas ganglionnaires situés à l'insertion de cette commissure transverse sur les commissures œsophagiennes. De chaque lobe part un petitnerf destiné à la lèvre supérieure (fig. 5, n. L.) ; du pont stomato-gastrique part le nerf stomato-gastrique impair et médian (fo. 4, n. s.). Chaque lobe tritocérébral (PI. I, Z. £.) est constitué par une masse centrale de substance ponctuée, et un revêtement incomplet de cellules ganglionnaires. La limite du lobe tritocérébral médul- laire et du deutocérébron n’est indiquée que par une légère échan- crure latérale ; en bas le lobe est libre, en arrière il s’unit à la com- missure œsophagienne. En bas et en dedans, la substance ponctuée prend un aspect fibrillaire.en se continuant dans le pont stomato- gastrique. L’écorce cellulaire est constituée par des éléments à protoplasma abondant, de grande et de moyenne taille ; on n’y trouve pas de petites cellules chromatiques pauvres en protoplasma. La face externe du lobe présente seule un revêtement sanglion- naire complet ; ce revêtement, très épais latéralement, se réduit en se rapprochant de la face antérieure. La face interne n’offre qu'un petit groupe de grandes cellules situées dans une échan- ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2° SÉRIE, — 7, v bis, — supPL. 1881. — 1* Mém. 3 34 G. SAINT REMY. crure ; le reste de la substance ponctuée n’est recouvert que par du tissu conjonctif qui la sépare du névrilemme. C’est de la face infé- rieure, comme nous l'avons dit, que part le nerf destiné à la lèvre supérieure (fig. 5,n./.) ; il sort un peu en dehors du point de réu- nion du lobe avec le pont stomato-castrique. Son origine est très simple : en cet endroit les cellules ganglionnaires ne forment qu’un revêtement de deux assises : la substance ponctuée est donc très voisine du névrilemme, et les fibres qui en sortent n’ont que cette mince couche à traverser pour arriver au dehors. Le pont stomato-gastrique (fig. 4, 5, P.) est constitué par un cylindre de substance ponctuée, recouvert en partie d’une écorce cellulaire. Du milieu de ce cylindre s’en détache un autre plus petit qui est le nerf stomato-castrique. Le cylindre de substance ponctuée qui forme la partie principale du pont, est la continuation de la substance ponctuée du lobe tritocérébral ; elleest nettement fibrillaire. Dans la région inférieure ces fbrilles sont parallèles, tan- dis que dans la région supérieure elles forment un réseau à mailles lâches d’où part le nerf stomato-castrique. Les éléments cellulaires qui tapissent en partie le pont stomato-gastrique sont de grande taille. À la jonction du pont avec les lobes tritocérébraux, il en existe un groupe qui occupe une position antéro-inférieure. Ce groupe est continué par une seule assise des mêmes éléments sur les faces antérieure, inférieure et supérieure ; en arrière, il n’en existe pas, sauf à l’origine du nerf stomato-castrique. Ce nerf, à sa naissance (PI. I, fig. 4), est enveloppé par une sorte de manchon conique, très court, de grandes cellules qui forment le petit gan- glion triangulaire décrit par Newport. Le diamètre de ce nerfest considérable et égale à peu près la moitié de celui du pont ; ce nerf volumineux est constitué par des fibrilles extrêmement fines, comme celles de la substance ponctuée. La commissure propre des lobes tritocérébraux n’est autre chose que la commissure transverse de l’anneau œsophagien, comme l’a montré H. Viallanes chez les Insectes, et comme nous l'avons CERVEAU DES ARTHROPODES TRAÇHÉATES. 35 constaté avec certitude chez la Scutigère. Chez l’[ule, nous n’a- vons malheureusement pu observer rigoureusement sur nos prépa- rations l’origine, dans les lobes tritocérébraux, du faisceau de fibres qui constitue cette commissure transverse ; mais nous n’hé- sitons pas à admettre cette disposition par analogie avec ce qui se passe chez la Scutigère. Sur les coupes parallèles aux commis- sures œæsophagiennes, il est parfaitement reconnaissable comme un faisceau particulier, et on peuëé le suivre distinctement sur une grande longueur (fig. 10, c. tr.) jusqu’au voisinage du tritocérébron. En arrière, ce faisceau s’isole, sous un angle très aigu, du reste des fibres de la commissure œsophagienne, à peu près au niveau du bord supérieur de l’œsophage, et embrasse le tube digestif en’ décrivant une sorte de trapèze dépourvu de grande base, dont les côtés latéraux, dirigés de dehors en dedans et d'avant en arrière, restent reliés chacun à la commissure œsophagienne correspon- dante, par une accumulation de cellules ganglionnaires et du tissu conjonctif constituant un petit ganglion æsophagien (fig. 10, g. æs.) homologue, en partie du moins, au ganglion œsophagien (dit man- dibulaire) des Crustacés supérieurs. Nous n’avons pas constaté la présence de substance ponctuée dans ce petit ganglion. Nous n’a- vons pu observer les prolongements de ses cellules nerveuses, mais il est probable qu’ils suivent la partie antérieure de la commissure œæsophagienne et se portent aux lobes tritocérébraux ; il ne se dé- tache aucun nerf de ce ganglion œsophagien. — L’épaisseur de la commissure transverse est faiblement augmentée par la présence d’une lame de tissu conjonctif à sa face inférieure (fig. 10, #. c.). La commissure œæsophagienne prend son insertion à la partie pos- térieure, inférieure et interne du cerveau au-dessous du lobe céré- bral, en arrière du deutocérébron et du tritocérébron ; elle tire son origine des trois ganglions cérébraux. Sa région supérieure est constituée par une masse de substance médullaire dans laquelle on observe quelques faisceaux de fibrilles, dont les relations avec les différentes parties du cerveau ont déjà été indiquées précédem- 36 G. SAINT REMY. ment. La substance médullaire est revêtue du côté externe par une écorce assez épaisse de grandes cellules ganglionnaires ; cette écorce cesse bientôt, de même que les faisceaux de fibres perdent leur individualité, et, dans sa région inférieure, avant d’arriver à la commissure transverse de l’anneau, la commissure œsophagienne n’est plus constituée que par un cordon fibreux et son névrilemme. Il est vraisemblable que c’est là seulement qu’il faut faire commen- cer la commissure œsophagienne, et que la région formée de sub- stance ponctuée et pourvue d’une écorce cellulaire doit être rap- portée au lobe tritocérébral. FAMILLE DES GLOMÉRIDES. GENRE GLOMERIS Latr. (PI. II, fig. 12-20). Nous avons étudié cinq espèces du genre Glomeris Latr. : G1. limbata Latr., G1. hexasticha Brdt, Gl. guitata Risso, Gl. castanea Risso, Gl. plumbea Gerv. Le cerveau s’est présenté partout avec la même structure, et ne nous a montré que des différences de vo- lume, en relation avec la taille variable de ces types. Aussi notre description se rapporte-t-elle au genre tout entier, et non à une espèce particulière, et nos dessins sont empruntés à des prépara- tions des cerveaux de plusieurs espèces. C’est ce qui explique pour- quoi un même grossissement nous a fourni des images dont les dimensions ne sont pas comparables (Voy., par exemple, PI. IE, fig. 14 et 16). | Le cerveau du Gloméris, dans sa forme extérieure, est construit sur le même plan que celui de l’[ule, dont il diffère cependant par quelques points importants. La division en deux moitiés, séparées par un étranglement, est plus accentuée ; les deux moitiés sont plus écartées et la portion moyenne du cerveau représente une sorte de tige d'union très grêle, dont le diamètre est plus petit que celui du pont stomato-castrique (Fic. II : PI. II, fig. 12). Chacune de ces CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 37 moitiés est un ovoïde très allongé en dehors, dont la forme géné- rale est due à une grande quantité de tissu conjonctif périphérique qui régularise ses contours. La portion supéro-antérieure, ou lobe frontal (PI. II, fig. 12, 13, 14, 17, 18, 19. L. f.), est légèrement arrondie ; sa pointe externe représente un lobe optique rudimen- taire (PI, II, fig. 13, 14, L.o.) qui se continue avec un long nerf optique (n. o.) rectiligne, dirigé en dehors et un peu en avant vers les yeux. Vers la base de ce lobe optique et en dessous de lui, un tronc nerveux très volumineux, le nerf de Tômôsvary (Fa. II, n. T.), sort du lobe frontal et se porte, comme chez l’Iule, à un organe sensoriel, qui a été signalé ici par Leydig (2) et décrit par Tômôsvary. La face inférieure du cerveau, FIG. IT, (1) très légèrement renflée, représente le lobe antennaire (PI. II, fis. 12, 13, 16, 18, 19, L. a.) du bord postéro-inférieur duquel sort le nerf antennaire unique (Fic. IT ; PI IL, fig. 15, 16, 18, n. a.) qui se porte en avant et en dedans vers l’antenne. Sur le bord inféro-postérieur de la base renflée de l’ovoïde s’insèrent, en dedans le pont stomato-sastrique, en bas et en arrière la commissure œsophagienne. Le pont stomato-gastrique (Fic. II; PI. IT, fig. 15, 16, P.) est un cylindre épais, un peu incurvé en avant et en bas, du milieu (1) Fig. 11. — Cerveau de Glomeris limbata Latr. vu par la face inférieure. Gr. 16 fois. — ©, æs., commissure œsophagienne ; — c. fr.,commissure transverse de l’anneau œsophagien ; — Z, a., lobe antennaire ; — Z. f., lobe frontal; — L. 0., lobeoptique; — n., nerf émis par le ganglion œsophagien ; — n, 4., nerf antennaire ; — n. L., nerf de la lèvre supérieure ; — n.0, nerf optique; — n. &., nerf stomato-gastrique ; — n. T., nerf de Tômosvary ; — n. v., nerf viscéra pair ; — P,, pont stomato-gastrique. (2) F. Leydig. Vom Bau desthierischen Kôrpers. Tubingen, 1864, — Tafeln z. vérgleich, Anatomie, : 864. | 38 G. SAINT REMY duquel se détache le nerf stomato-gastrique (n. s.). Au point d’in- sertion du pont, on voit sortir de la face inférieure du cerveau le nerf pair de la lèvre supérieure (Fi. IT, ». L.) et un peu en dehors le nerf viscéral pair. | Les commissures œsophagiennes (FiG. II, C.«æs.) sont deux filets qui partent du bord interne et postérieur des deux ovoïdes cérébraux, et se dirigent, de chaque côté de l’œsophage, en arrière et en bas, vers la chaîne ventrale, et sont réunis vers le milieu de leur longueur par une commissure transverse de l’anneau œsopha- gien, très grêle (Fi1G. IT. — PL II, fig. 20, ce. fr.) formant un arc à peine indiqué qui embrasse laface inférieure d’un tube digestif. Aux points d'insertion de cette commissure existe de chaque côté un petit renflement ganglionnaire, le ganglion æsophagien, peu visible àl’examen microscopique, qui émet sur son bord supéro-interne un filet nerveux très fin (PI. IT, fig. 20. n.). La forme extérieure du cerveau du Gloméris avaitdé)jà été décrite et figurée par Brandt (1) et par Leydig (2), mais d’une façon inexacte. Brandt en donne une figure très grossière, et comme le pont stomato-gastrique est ici aussi gros que la région moyenne du cerveau proprement dit, il ne reconnaît pas sa valeur morpholo- gique, etfait naître le nerf stomato-gastrique d’un petit arc fili- forme qui n’existe pas en réalité. Leydig s'est également trompé sur la véritable forme du cerveau, dont il représente les deux moi- tiés comme sphériques; il regarde le pont stomato-gastrique comme passant au-dessous de l’œsophage, et le prend pour la com- missure transverse de l’anneau œsophagien. Celle-ci, qui se trouve beaucoup plus bas, comme nous venons de le dire, a échappé à ces deux observateurs. Leydig a figuré le nerf de Tômôsvary, et constaté l'existence d’un organe sensoriel céphalique. (1) J.F. Brandt. Bemerkungen tiber die Mundmagen- oder Eingeweidenerven der Ervertebraten, Mém. de l’Acad. impér. des Sc. de Saint-Pétersbourg, 6° sér., t. III, 1835. -- Beitrâge zur Kenntniss des innern PBaues von Glomeris marginata. Miüller's Archiv. für Anat. und Phys. 1887. (2) F. Leydig, loc. cit, p. 256; pl. VII. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 39 Les détails accessoires de la structure du cerveau du Gloméris se présentent comme chez l’[ule. Le névrilemme a la même constitu- tion, ebil existe également au-dessous de lui une couche de tissu conjonctif assez épaisse en certains points. On remarque évcalement de nombreuses trachées, et même des troncs volumineux pourvus d'un épaississement spiralé interne, qui viennent de la partie sous- œsophagienne du système nerveux, et arrivent dans le cerveau avec los commissures œsophagiennes (PI. LI, fig. 20, ér.). Mais en ce qui concerne l’organisation même, le cerveau est infiniment plis sim- ple que celui de l’Tule, et présente une réduction beaucoup plus considérable qu’on ne pourrait s’y attendre en comparant seule- ment les formes extérieures. C’est surtout dans la structure du pro- tocérébron que cette différence est sensible, PRoTOCÉRÉBRON. -— Üomme chez l'Tule, nous distinguons, dans le pro‘océrébron, les lobes optiques et les lobes frontaux. Les lobes optiques du Gloméris ne se montrent pas extérieure- ment, comme ceux de l'Iule, à l'examen macroscopique, les nerfs optiques paraissant se continuer insensiblement avec le cerveau. C’est seulement sur les coupes qu’on reconnaît l’existence de ces organes, dont la structure est du reste fort simple. Chacun de ces lobes optiques se compose d’une masse médullaire et d’une écorce ganglionnaire, La masse médullaire (PI. IT, fig. 13, 14 sm. m. L.), qui semble représenter celle du lobe optique de l'Tule, est d’une structure très dense et parfaitement homogène, et se colore plus fortement que les parties voisines par l’acide osmique, Elle forme un cône étroit dirigé horizontalement en dehors, en avant et un peu en bas, dont la base, tronquée très obliquement, est tournée en dedans et en bas etappliquée contre l'extrémité externe du lobe frontal médullaire (Z. f.). De sà pointe et de toute sa face posté- rieure s’échappentles tubes nerveux dont la réunion constitue le nerf optique (n. o.). Cette masse médullaire n’est en relation directe qu'avec la substance du lobe frontal, avec laquelle elle se continue en prenant un aspect fibrillaire. On n’observe aucun fais- 40 G. SAINT REMY. ceau de fibres reliant le lobe optique à une autre partie du cerveau. L’écorce ganglionnaire du lobe est formée par un revêtement épais de cellules chromatiques pauvres en protoplasma, qui n’existe que sur les faces antérieure et inférieure. Ces éléments se présen- tent comme de petits noyaux arrondis ouovoïdes, mesurant environ 4 de diamètre, se colorant fortement par le carmin, même après l’action prolongée de l’acide osmique ; ils sont très serrés, et on ne peut distinguer de revêtement protoplasmique, particulier à chacun d'eux, en raison de leur petitesse. Cette écorce se continue, en dedans, avec le revêtement de l’organe frontal voisin. | Les lobes frontaux proprement dits, en n’y comprenant pas les organes frontaux que nous allons décrire plus loin, représentent la majeure partie du protocérébron, mais aussi la région la moins intéressante, en raison de leur extrême simplicité. Chaque lobe frontal est constitué par une masse médullaire piriforme, étendue horizontalement à la partie supérieure de chaque moitié du cerveau, et revêtue d’une faïble écorce de cellules ganglionnaiïres. La grosse extrémité de cette masse piriforme, tournée en dehors, est soudée au lobe optique età la masse externede l'organe frontal (PL IL, fig. 14); sa pointe très effilée, dirigée en dedans, se réunit à son homologue de l’autre côté pour former ce que l’on peut appeler la commissure des lobes frontaux, qui représente les deux tiers supérieur et anté- rieur de larégion moyenne commissuriforme du cerveau. En avant le lobe frontal est uni aux parties moyenne et interne de l'organe frontal (PI. IT, fig. 14, 18, 19) ; en bas il se confond sans limite précise avec le lobe antennaire (fig. 18); sa face supérieure et la moitié externe de sa face postérieure sont libres ; enfin, la moitié interne de sa face postérieure est unie à la commissure æsopha- gienne. La substance ponctuée du lobe présente une structure réticulée très délicate et très régulière. On n’y découvre aucun trajet de fibrilles ; maïs dans la région moyenne commissurale elle prend un aspect fibrillaire. De fines ramifications trachéennes peu nombreuses, paraissant toutes venues de cette région, pénètrent CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 41 dans les lobes ; elles sont difficiles à voir et ne se reconnaissent qu’à un fort grossissement, mais leur trajet est marqué par la ‘présence de petits noyaux fusiformes appartenant à leur paroi. Rares au centre des lobes frontaux, ils sont plus abondants dans la région commissurale, ce qui s'explique par l'existence, dans cette région, de gros troncs trachéens primitifs sous le névri- lemme. À ce propos, nous pouvons indiquer dès maintenant que cette portion moyenne effilée du cerveau est légèrement incurvée en forme d'arc très ouvert, à concavité inférieure embrassant l’œso- phage. Il n’y existe pas de revêtement ganglionnaire, et le tissu conjonctif périphérique y est extrêmement réduit : le névrilemme recouvre presque immédiatement , surtout à la face inférieure, le cylindre de substance médullaire (PI. IL, fig. 12, 16). L’écorce ganglionnaire des lobes frontaux est formée de petites cellules à protoplasma abondant, à noyaux beaucoup moins colo- rables que ceux des cellules chromatiques. Ce revêtement, assez épais, n’existe pas sur toute la surface des lobes ; il manque sur la face postérieure. Le lobe frontal donne naissance au nerf de Tômôsvary, presque aussi gros que le nerf optique. Ce nerf prend naissance à la pointe externe du noyau médullaire, un peu en avant de la masse médul- aire du lobe optique, et près de l’extrémité de la masse externe de l'organe frontal, dont il tire peut-être quelques fibres ; il se porte en dehors à travers la masse ganglionnaire du lobe optique et le tissu conjonctif de ce lobe, et s’isole en même temps que le nerf optique. La fig. 12 le montre sectionné obliquement REC bo 12 np.) Dans chaque moitié du cerveau, le bord antéro-supérieur est occupé par un organe de structure complexe, appliqué sur le noyau médullaire du lobe frontal, et constitué par plusieurs masses de substance ponctuée, revêtues partiellement de petits 4? G. SAINT REMY. noyaux ganolionnaires. Nous le désignons sous le nom d’organe frontal (PI. IL, fig. 14, 17, 18, 19,0./.). Cet organe comprend trois régions différentes, ou, si l’on veut, trois masses de substance médullaire. La masse externe, la plus volumineuse (fig. 14, 17, m. e), présente une structure caractéristique ; elle est constituée parun tissu réticulé à mailles lâches, dans lequel sont plongés de petits amas de substance plus dense, de forme irrégulière. Ces amas se continuent à la périphérie, avec les mailles du tissa ambiant, ce qui leur donne un contour crénelé à un fort gros- sissement, [ls sont plus petits vers la face antérieure de la masse, plus gros vers la face postérieure appliquée surle lobe frontal, La masse elle-même a la forme d’un ovoïde aplati d’avant en arrière, dont l’extrémité externe est beaucoup plus grosse que l'extrémité interne. Celle-ci se termine en simplifiant sa structure pour se fondre dans la masse moyenne : les petits amas dis- paraissent, les mailles de sa substance deviennent plus serrées et plus régulières. La masse moyenne (PI. IT, fig. 17, m. m.) est située en dedans et au-dessus de la précédente ; c’est un îlot de substance ponctuée à structure réticalée lâche dans presque toute son étendue, saufsur son bord antéro-supérieur, où elle est plus dense et presque homogène. Elle a une forme irrégulière qu’on reconnaît sur los coupes sagittales du cerveau. À son extrémité externe (fig. 17, m.m.), elle se présente comme une lame courte et épaisse, incurvée en arc à concavité dirigée en avant et en haut, dont la face postéro-inférieure convexe repose en arrière sur le lobe frontal, en avant sur la masse moyenne avec laquelle ellese continus. Le segment postérieur de l’arc disparait, tandis que le seoment antérieur grossit et constitue la partie principale de forme cubique qui se fusionne franchement avec l'extrémité interne de la masse externe. Ces deux masses, la moyenne et l'externe, ne sont pas en contact immédiat avec la masse interne ; elles sont reliées à celle-ci par une lame intermédiaire (PI. Il, fig. 18,/. i.), assez large et épaisse, mais dont les contours sont CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 43 difficiles à préciser. Cette région est constituée par un tissu lâche qui passe insensiblement, en arrière, au tissu plus serré du lobe frontal. La face libre de cette lame n'est pas régulière, mais divisée en plusieurs mamelons. La masse interne, enfin, située plus en dedans et en bas {PL IT, fig. 14, 19, m.1.), est formée par du tissu homogène, dense, qui prend par l’acide osmique une colo- ration foncée. Elle représente une lame épaisse, renflée en ovoïde à son extrémité interne, et disposée presque verticalement contre la face antérieure du lobe frontal, dont elle est séparée par la ter- minaison de la lame intermédiaire. Son tissu se continue sans transition avec celui de cettelame, et elle se prolonge du côté externe, en avantet au-dessus d'elle, sous forme d’une lamelle homogène qui s'étend assez loin. L'écorce ganglionnaire de l'organe frontal est formée par une couche épaisse de petites cellules chromatiques pauvres en pro- toplasma, identiques à celles qui existent dans le lobe optique ; cette couche recouvre la face libre, c’est-à-dire la face antérieure de la masse externe (PI. IT, fig. 14, 17), à laquelle elle envoie tous. ses prolonvements ; elle confine, du côté externe et en bas, au revêtement de même nature du lobe optique avec lequel elle se continue ;elle s'étend un peu en avant de la lame intermédiaire, mais elle ne recouvre ni la masse moyenne ni la masse externe, qui sont en partie nues et en contact avec le tissu conjonctif, en partie recouvertes par des cellules à protoplasma abondant. _ Telle est la structure de cet organe frontal. Pour se rendre un compte exact de ces différentes parties, il faut s’adresser de préfé- rence aux coupes à peu près horizontales, menées parallèlement aux commissures œsophagiennes, comme celle qui est représentée fig. 14, PI. IT, et aux coupes sagittales. Les coupes horizontales vraies et les coupes transversales don- nent de l’ensemble une idée beaucoup moins nette et ne sont bien comprises qu'après l’étude des premières. La fig. 14 qui représente une coupe pratiquée suivant un plan un peu oblique sur le plan 44 G. SAINT REMY. horizontal, intéresse les trois masses, mais plus spécialement Ja masse externe (m. e.), dont elle fait voir le volume considérable par rapport aux autres ; en ce qui concerne la masse interne, la coupe passe par son bord supérieur seulement (m. 1.) qui se montre un peu séparé du reste de l'organe. Les fig. 17, 18, 19, qui repré- sentent trois coupes sagittales appartenant à une même série, font mieux saisir les relations des trois masses et de la lame inter- médiaire. Il est difficile d’homologuer avec certitude l'organe frontal à une formation quelconque du cerveau d’un autre Arthropode. Il est vraisemblable cependant que, dans le cerveau très simple du Gloméris, il remplit une fonction analogue à celle qui est réservée aux organes plus compliqués, mais formés également de parties médullaires différenciées et d’accumulations de cellules chro- matiques, qu’on rencontre dans les cerveaux plus développés. DEUTOCÉRÉBRON. — Le deutocérébron est situé à la face infé- rieure du cerveau. [Il se compose de deux lobes deutocérébraux ou antennaires, réunis par une commissure transversale située dans la portion étranglée da cerveau. Chaque lobe antennaire (PI. IF, fig. 13, 14, 16, 18, 19, Z. a.) est constitué par une masse ovoïde de substance ponctuée disposée verticalement, et revêtue postérieure- | ment d’une écorce ganglionnaire. Ce lobe, appliqué contre la face inférieure du lobe frontal, par les deux tiers postérieurs de sa face supérieure, est séparé en partie du lobe frontal par une échancrure profonde, embrassant la face antérieure, les faces laté- rales, et s'étendant légèrement de chaque côté en arrière. La face inférieure, très bombée, forme la face inférieure du cerveau ; la face latérale externe est également libre et donne naissance, en bas, au nerf antennaire ; la face latérale interne n’est libre que dans sa partie supérieure et antérieure : dans sa partie inférieure et postérieure, elle donne insertion à la commissure antennaire (PI. I, fig. 16,c.a.)et se soude au lobe tritocérébral. Quant à la face postérieure, libre en bas, elle donne insertion en haut à la com- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 45 missure œsophagienne avec laquelle elle se continue graduelle- ment (P1. II, fig. 18, C. æs.). Le lobe antennaire est divisé en deux régions. L'une, postéro- inférieure, est formée par de la substance ponctuée, finement réti- culée, identique à celle qui constitue les lobes frontaux : c’est celle qui se soude à la commissure antennaire etau lobe tritocérébral. L'autre, antérieure, un peu plus volumineuse, représente une masse hémisphérique se distinguant par la présence des éléments caractéristiques du lobe olfactif des Arthropodes, les glomérules olfactifs ; nous lui donnons le nom de lobule olfactif (P1. IL, fig. 13, 16, 18, Z. olf.). La substance ponctuée fondamentale du lobule est d’une structure plus lâche que celle du lobe antennaire proprement dit, mais elle ne représente qu’une faible partie de l'organe ; les glomérules, petits îlots de substance dense et homogène, en occupent presque toute la masse. Ces formations, de méme que chez l’Iule, n’ont pas toutes la forme de sphères qui leur a valu leur nom chez les Insectes. Quelques-unes seulement sont sphériques, les autres sont des ovoïdes ou des polyèdres, de forme et de taille très diverses, se présentant même comme des rectangles ou des lames. Les plus petits glomérules, sphériques, mesurent environ 5 u de diamètre ; les plus gros, ovoïdes, environ 15 p. Les plus volumi- neux se trouvent à la périphérie, les plus petits vers le centre ; ïls _n’occupent pas tout l'hémisphère formé par le lobule, mais sont groupés en une sorte de chapeau de champignon massif, à conca- vité très petite et dirigée en haut, disposition qu’on ne peut natu- rellement reconnaître que sur les coupes voisines del’axe du lobule. Ils sont très serrés à la périphérie, où ils occupent toute la face convexe libre, en formant une sorte de couche corticale compacte ;ils sont plus espacés vers le centre, et laissent quelques intervalles pour la substance fondamentale lâche dans laquelle on observe des images circulaires, claires, qui paraissent représenter la section transversale de gros tubes nerveux. Les mailles de cette substance se continuent, d’une part avec la substance dense du 46 G. SAINT REMY. glomérule, et d'autre part, comme on peut l’observer sur les coupes sagittales, avec une partie des fibres du nerf antennaire. Lenerf antennaire, assez gros (fig. 15, 16, 18, n. a.), naît sur le bord postérieur, inférieur et externe du lobule olfactif, au point d'union de ce lobule avec la région non glomérulée du lobe anten- naire, etse dirige en dehors et en avant. Il est unique, mais ses fibres ont une double origine, très vraisemblablement sensitive et motrice; tandis que, chez l’Tule, il existe deux nerfs antennaires, l’un sensitif, l’autre moteur, nous avons ici un nerf mixte. Les deux tiers environ de ses fibrilles sortent du lobule olfactif, ou, si l’on veut, se rendent dans ce lobule où elles sont en relation avec les glomérules ;le tiers postérieur provient de la partie non glo- mérulée du lobe, dans la substance médullaire de laquelle il prend naissance, et représente évidemment le nerf moteur du cerveau de l’Tule. La commissure antennaire (PI. IT, fig. 14, 16, ce. a.) qui relie les deux lobes, est un tractus de substance ponctuée, de structure fibrillaire, qui décrit unarc à concavité inférieure et s’étend à la face inférieure de la région moyenne effilée du cerveau. Dans cette région, nous n'avons pu la distinguer comme un cordon isolé ; mais elle est nettement visible de chaque côté, à l'extrémité interne et postérieure du lobe, en particulier sur les coupes frontales. Elle passe en avant et au-dessous du lobe frontal, dont elle est séparée par une mince cloison de tissu conjonctif, et en arrière du lobe tritocérébral. Elle est dirigée de dedans en dehors, et un peu de hauten bas ; elle s’élargit légèrement en pénétrant dansle lobe antennaire et se fond progressivement dans sa substance médul- laire. On la suit cependant jusqu'au voisiaage du point d’origine du nerf, où elle disparaît complètement, Le nerf viscéral pair prend naissance dans le lobe antennaire, Il sort du cerveau par sa face inféro-antérieure, à peu près au même niveau que le nerf de la lèvre supérieure, dontil n’est pas éloigné, mais il exécute un certain trajet dans le tissu conjonctif CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 47 et dans l’écorce ganglionnaire, entre son point de sortie et le noyau de substance ponctuée du lobe antennaire d’où iltire son origine. La fig. 45, PI. II, le montre à sa sortie du cerveau (n. v.). [écorce ganglionnaire des lobes antennaires est formée da petites cellules qui revêtent la majeure partie de leur surface libre. Il en existe une accumulation d’une certaine importance dans l’échancrure qui sépare le lobe des régions voisines. La face infé- rieure n’en présente qu'une couche d’une faible épaisseur ; enfin, la face antérieure en est complètement dépourvue. Ces éléments ont partout un protoplosma visible ; mais sur les faces latérales du lobule olfactif, on remarque que les cellules sont plus petiteset que leurs noyaux sont plus colorables que ceux des autres cellules voi- sines ;leurs caractères, en un mot, se rapprochent beaucoup de ceux des cellules chromatiques de l'organe frontal. TRITOCÉRÉBRON. — La troisième région ganglionnaire du cer- veau, letritocérébron, présente les mêmes relations que chez l’Iule ; il se compose de deux petits lobes tritocérébraux (PI. IT, fg. 15, 16, L. t.), sans relation l’un avec l’autre en arrière et en haut, car ils ne possèdent pas, comme les lobes antennaires, une commissure dans la portion moyenne du cerveau, mais réunis en avant et en bas par le pont stomato-gastrique (PI. IT, fig. 15, 16, P.) relativement volumineux, et au-dessous du tube digestif par la commissure transverse de l'anneau œsophagien. Ils donnent naissance, comme dans le genre précédent, à un2 paire de petits nerfs latéraux infé- rieurs destinés à la lèvre supérieure, et au nerf stomato-gastrique impair médian. | Le lobe tritocérébral (fig. 16, L.t.) est une petite masse de Substance médullaire irrégalièremeut ovoïde, pourvue d’un revê- tement cellulaire externe de peu d’importance. Il est situé en dedans et un peu en arrière du lobe antennaire, au-dessous du lobe frontal. Dans se partie postérieure, il se confond en arrière avec la commissure æsophagienne, en haut avec le lobe frontal, latérale- ment en dehors avec le lobe antennaire ; dans sa partie antérieure 48 G. SAINT REMY. il est mieux isolé et se rattache, par une portion un peu étranglée, au lobe antennaire seal. Sa face externe, oblique de dedans en dehors et de bas en haut, est libre dans toute son étendue, séparée de la face interne du lobe antennaire par un large espace rempli de cel- lules ganglicnnaires, qui est l’échancrure dont nous avons déjà parlé. Sa face interne est également libre. Enfin, c’est à l’extré- mité antérieure de son bord inférieur que s’insère le pont stomato- gastrique. La substance médullaire qui constitue le lobe trito- cérébral a, d’une façon générale, la même structure que celle du lobe frontal, ou du lobe antennaire ; maïs dans la région inféro- interne, surtout en avant, elle présente une différenciation intéressante, et forme de petits îlots denses, homogènes, plus for- tement colorables que les parties voisines, par l'acide osmique, rappelant tout à fait les glomérules du lobule olfactif ; ilsen diffe- rent par une densitéet une coloration osmique moins grandes, et par leur contour moins arrêté, plus vague. Cette région est pré- cisément celle d’où part le nerf. Il est à remarquer que H. Vial- lanes a observé chez le Criquet la même différenciation du lobe tritocérébral en deux régions, dont l’une est caractérisée par la présence de formations semblables aux glomérules olfactifs. Lenerf de la lèvre supérieure (n. L.), qui sort du lobe, se voit soit sur les coupes sagittales, soit mieux encore sur des coupes intermédiaires entre la direction transversale et la direction horizontale, comme celle représentée fig. 15, PI. IT. Ilest dirigé en bas et un pey en arrière et en dehors. Il a son origine vers le point de réunion du pont stomato-gastrique avec le lobe ; la sub- stance médullaire, dans cette région, n’est pas revêtue de cellules etle nerf n’a à traverser qu’une très faible couche de tissu con- jonctif. | L’écorce ganglionnaire du lobe tritocérébral est formée de cellules assez grandes. Elle recouvre la face externe et la face antérieure ; il existe aussi un petit groupe de cellules à la face interne, CERVEAU LES ARTHROPODES TRACHÉATES. 9 Le pont stomato-gastrique (PI. IT, fig. 15, 16, P.) est une ban- delette nerveuse assez grosse, en forme de cylindre aplati, à section transversale ovalaire, constituée par un cordon médullaire de même forme, dont la face antéro-inférieure est revêtue de cellules sauglionnaires. La substance ponctuée a une structure légèrement fibrillaire, dans le sens de la longueur. Le nerf stomato-gastrique (fig. 15, n.s.) en sort sur la ligne médiane, à la face inférieure, et s'étend en arrière le long du tube digestif. Il est volumineux et constitué par des fibrilles extrêmement fines ; ilse détache assez brusquement, en présentant son diamètre définitif immédiatement au sortir de la bande médullaire. 11 existe, à son origine, un petit groupe de cellules nerveuses ; mais ces cellules ne s'étendent pas sur sa base, et ne forment pas autour de lui un petit revêtement conique comme chez l’'Iule. — Les cellules qui recouvrent la face antéro-inférieure du pont stomato-castrique sont relativement grandes, par rapport à celles des autres parties du cerveau, mais leur diamètre est bien inférieur à celui des gros éléments de l’Iule. Ce revêtementse continue latéralement avec celui des lobes. La forme et la disposition des commissures œsophagiennes ont été décrites plus haut. Leur structure est plus simple que chez l'[ule. Chaque commissure tire son origine d’une masse médullaire commune, dans laquelle se trouvent fusionnés le lobe frontal, le lobe antennaire et le lobe tritocérébral. Cette masse se continue en arrière, en bas et en dedans, par un faisceau de tubes nerveux parallèles, où l’on ne peut distinguer aucun trajet spécial. Ce faisceau est entouré d’une couche de tissu conjonctif, qui donne à la commissure sa forme cylindrique. Dans ce tissu conjonctif s'étend, dans la région postérieure, un tronc trachéen volumineux, appliqué contre le bord externe et supérieur du faisceau fibreux ; ce tronc, aplati, est étranglé longitudinalement, et offre une sec- tion en bissac; en avant, un peu au delà de la commissure trans- verse, il se divise en deux branches plus ou moins cylindriques qui pénètrent dans le cerveau. ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GËN, — 2° SÉRIE, — T, Y bis. — supp, 1887. — 1% Mem. #% _ 50 G. SAINT REMY. La commissure transverse de l’anneau œsophagien (PI. IT, fie. 20, c. tr.) décrit un arc très ouvert à concavité supérieure et anté- rieure, qui embrasse l'œsophage. Elle est formée par un faisceau cylindrique de tubes nerveux, qui tire vraisemblablement son origine du lobe tritocérébral du côté correspondant, bien que nous n'ayons punousen assurer ; nous avons pu le voir distinct du reste de la commissure, à une faible distance du cerveau. Il suit le bord inférieur et interne de la commissure œsophagienne, et se recourbe assez brusquement, immédiatement au-dessous du tube digestif, en se détachant d'elle pour former la commissure trans- verse. Il entraîne avec luiune gaîne de tissu conjonctif. Au niveau de l’origine apparente de la commissure transverse, la com- missure œsophagienne présente un petit renflement ganglionnaire comme chez l’Iule, constitué en grande partie par du tissu con- jonctif entourant une faible accumulation de petites cellules ner- veuses situées à la face interne de la commissure. Ce petit ganglion œsophagien (fig. 20, g. æs.) est tout à fait comparable à celui des Crustacés supérieurs. Il émet un petit nerf (fig. 20, n.) qui se détache à ce niveau de la face supérieure de la commissure œsophagienne ; c’est un petit filet nerveux grêle, qui traverse le tissu conjonctif en se dirigeant un peu en arrière et en dedans. Nous avons pu suivre, sur les coupes, le trajet de ce nerf après qu'ila franchi le névrilemme : il se porte en dedans et en axant, et vient s appliquer sur l’œsophage, où nous l’avons perdu. En arrière de la commissure transverse, le diamètre du faisceau nerveux qui constitue la commissure œsophagienne, se trouve fortement diminué, mais le diamètre total de la commissure ne l'est pas de suite sensiblement, en raison de l'épaisseur plus grande du tissu conjonctif ; c’est seulement plus loin que, la couche con- jonctive s'amincissant, la commissure œsophagienne paraît plus grêle. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 01 CHILOPODES. FAMILLE DES NSCUTIGÉRIDES GENRE SCUTIGERA Lam. (CEÉRMATIA Illig.) (PL. IT, fig. 21-23; PL. IIT, fig. 24-33 ; PI. IV; fig. 34-36.) L'organisation générale des Scutigérides est fort curieuse, et l'étude du cervean nous paraissait d'autant plus intéressante à faire, que ces animaux, par une remarquable exception, possèdent des yeux composés. Nous avons pu nous procurer à Banyuls- sur-Mer d'assez nombreux exemplaires de Scutigera coleoptrata L. (Sc. arancoides Pall.), condition importante, car, en raison de l'extrême minceur du névrilemme et de la disposition même de certaines parties, la dissection du cerveau frais est délicate, et on n’est jamais sûr, en prenant les plus grandes précautions, d’ex- traire l’organe dans son intégrité. Ta forme extérieure du cerveau (1) est déjà particulière en ce qu’elle tient à la fois du type ordinaire du cerveau des Chilopodes et du type des Chilognathes : comme dans les autres Chilopodes, Jes lobes antennaires, font une fortesaillie ; mais, comme chez les seconds, ces lobes sont rejetés un peu en arrière, et les lobes fron- taux sont situés en avant. Le protocérébron, en raison de Ja situa- tion respective des yeux et du cerveau, est légèrement incurvé en arrière ; les lobes frontaux (FiG. III, Z. 7) représentent deux masses ovoïdes accolées par leur grosse extrémité et prolon- gées en dehors et un peu en arrière par les lobes optiques à peu (1) Sograff, dans son Mémoire sur l’Anatomie du Lithobius forficatus (Trav. Mus. zool. Univ. Moscou, I, 1580 , en russe), donne une figure du système ner- veux de la Scutigère; mais ce travail étant publié en russe, nous n’avons pu prendre connaissance du texte ,et nous ignorons s’il renferme une description correspondant à cette figure. 52 ; G. SAINT REMY. près cylindriques (Z. o.) qui s'étendent jusqu’à la face interne de l’œil, comme chez les Insectes. Du bord inféro-postérieur du lobe frontal, vers son tiers externe, se détache un petit nerf grêle (n. T.) qui est destiné à un organe sensoriel situé à la base de la partie interne du filament maxillaire inférieur. Ce nerf paraît être l’ho- mologue du nerf de Tomosvary des autres Myriapodes, et nous lui conservons ce nom. Les lobes antennaires (L. a.) forment deux autres masses ovoïdes, situées au-dessous et en arrière des lobes frontaux et diri- gées obliquement de dedans en dehors. Le nerf antennaire (n. a.) part de leur bord antérieur et ex- terne ; sur le bord antérieur et interne s’insère le pont stomato- gastrique (P.), qui se présente ici, FLG, LIL) GE) à l'inverse de cequ’on trouve chez, les autres Chilopodes, comme un petit filet grêle assez long, décrivant un arc à concavité posté- rieure : ce petit filet est renflé en son milieu et donne naissance à un nerf stomato-gastrique offrant à peu près le même diamètre que lui (».s.). En arrière, les lobes antennaires se continuent avec des commissures œsophagiennes volumineuses et courtes. Contrai- rement à ce que nous verrons chez les autres Chilopodes, il existe une commissure transverse de l’anneau œsophagien (c. tr.) extrême- ment grêle, il est vrai, surtout en comparaison du volume relative- ment considérable du cerveau ; cette commissure transverse est dim- cile à voir et à conserver. Vers l’origine des commissures æsopha- giennes, se détachent deux nerfs grêles qu’on ne peut observer que sur les coupes, et que nous regardons comme appartenant à la lèvre supérieure. (i) FIG. 111, — Cerveau de Scutigera coleoptrata L. vu par la face inférieure, Gr. 19 fois. — Lettres comme dans la FIG. II, age 81, CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 53 Telle est, en peu de mots, la topographie externe du cerveau. Son anatomieinterne n'est pas moins curieuse, et montre un haut degré d'organisation. Elle a été l’objet de quelques recherches de Mason (1); mais ses détails ont complètement échappé à cet auteur, qui n’a constaté absolument que les proportions relatives de la substance ponctuée et de l'écorce cellulaire. Cependant, outre l'existence de pièces compliquées, différenciées dans la substance médullaire, le cerveau de la Scutigère nous offre deux particula- rités, par lesquelles ce genre s’écarte des autres Myriapodes et se rapproche des Arachnides. C’est d’abord l'existence d’un névri- lemme très mince et très délicat, et le peu de développement du tissu conjonctif, puis surtout la présence de vaisseaux sanguins dans la profondeur de l’organe. Chez tous les autres Myriapodes que nous avons étudiés, la respiration du tissu nerveux s'effectue grâce à la pénétration de troncs trachéens dans son épaisseur : chez la Scutigère, comme chez la plupart des Arachnides supé- rieurs, ce sont des ramifications de l’appareil circulatoire qui assu- rent la nutrition du système nerveux, en la rendant vraisembla- blement plus active. PRoOTOCÉRÉBRON. — Nous avons à étudier successivement, dans le protocérébron, les lobes optiques, les lobes frontaux, les organes pédonculés et les organes ganpglionnaires antéro-internes. Lobe optique. — Le lobe optique (PI. IE, fig. 21 ; PI. IIT, fig. 29, L. o.) est un petit cône tronqué un peu courbé en croissant, dont la petite base est soudée à l'extrémité externe du lobe frontal (1) N. Mason, The eyes and brain or" Cermatia forceps. — Amer. natur XV, 8, 1880. — Voici la traduction des quelques lignes consacrées au cerveau « Le nerf optique, gros, épais, part du côté supérieur de chaque hémis- phère. Le sillon médian est profond, et de chaque côté se trouve une accumu- lation de cellules ganglionnaires ; de même il existe une accumulation ganglion- naire dans l’échancrure profonde située au-dessous de l’origine du nerf optique, et une autre dans le lobe inférieur, s'étendant en bas de chaque côté de l’œso- phage, probablement près de l’origine ou à l’origine de la commissure posté- rieure. Ces accumulations, c’est-à-dire celles des faces supérieure et inférieure du cerveau, se rejoignent de chaque côté sur la ligne médiane... » 54 G. SAINT REMY. (L. f.), tandis que la grande base est tournée en dehors et en arrière, vers l’œil composé. Sa structure et ses relations rappellent immédiatement le lobe ou ganglion optique des Insectes et des Crustacés supérieurs; mais un de ses caractères les plus saillants, c'est sa petitesse relativement aux dimensions de l’œil et du cer- veau. Carrière, dans son ouvrage sur l’œil dans la série animale, a signalé incidemment l'existence, chez la Scutigère, d’un « gan- glion optique » dont il décrit ainsi les rapports : € La membrane basale de l’hypoderme se continue sous l’œil composé, dont elle forme le fond bombé en dehors, et se trouve recouverte du côté du cerveau par une faible couche de cellules conjonctives à noyaux ovalaires. Immédiatement au-dessous d'elle, est situé le ganglion rétinien, petit et grêle, commun à tous les yeux élémentaires, en relation étroite avec le ganglion cérébral; les fibres nerveuses se portent directement du ganglion aux cellules visuelles » (1). Il figure une coupe générale de l'œil, au-dessous de laquelle la section du cerveau est représentée schématiquement ; mais il est facile de voir qu’il n’a considéré comme «€ ganglion optique » qu’une partie seulement du lobe optique, celle que nous allons décrire sous le nom de lame ganglionnaire ;il rattache au cerveau proprement dit toutes les parties situées en dedans. En dehors, entre son ganglion optique et la membrane basale tapis- sée de cellules conjonctives, il laisse un espace vide qu’il repré- sente traversé par quelques fibres nerveuses. La description de Carrière correspond bien à ce qu'on observe sur des coupes detêtes traitées en masse ou en fragments par l'alcool, la liqueur picro- sulfurique ou d’autres réactifs analogues. Les résultats sont beau- coup plus exacts lorsqu'on s’adresse à des coupes fines pratiquées sur des pièces préalablement disséquées et fixées par l’acide osmi- que. Comme nous n’avions pas à nous occuper de la constitution de l’œil lui-même, nous détachions les cornées en même temps que (1) J. Carrière. Die Sehorgane der Thiere, 1885, p. 120, fig. 94. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHEÉATES. 59 la cuticule générale, ce qui nous permettait d'obtenir des coupes plus minces et plus sûrement entières. Les régions sous-jacentes à la membrane basale de l'œil étant fortement pismentées en noir, nous avons décoloré quelques coupes par lacide azotique, afin de mieux observer les rapports. Enfin, pour nous faciliter l’étude du lobe optique, nous avons pratiqué des coupes parallèles à son axe longitudinal, qui est lécèrement oblique sur l’axe transversal du cerveau proprement dit. La figure 21, PI]. IT, représente une de ces coupes. Nous distinguons dans le lobe optique, en allant de dehors en dedans : la couche des fibres post-rétiniennes (P], II, fig. 21,7. p.r.), la lame ganglionnaire (/. g.), la couche des fibres chiasmatiques (f. ch.), la masse médullaire (m.m. L.), et la masse ganglionnaire antérieure (m. g. l.). La couche des fibres post-rétiniennes (f. p. r.) qui correspond à la couche de même nom des {nsectes, a pour éléments essentiels des fibres issues des yeux élémentaires et qui sont destinées à les relier aux parties plus profondes de l’appareil visuel. Nous n’avons pu nous assurer si chacun d'eux en émet une seule ou plusieurs ; inais, étant donné la grande surface de l’œil composé, formé d’yeux élémentaires volumineux, on conçoit qu’en tous cas, ces fibres, rela- _tivement peu nombreuses ne peuvent remplir tout l’espace inter- médiaire entre la membrane basale et la lame ganglionnaire du lobe, si peu large qu'il soit. Ce fait est déjà très net chez les Insectes, où cependant les yeux élémentaires sont très grêles et très nombreux ; on constate généralement que les fibres post-rétinien- nes se sroupent en petits faisceaux entre lesquels trouvent place du tissu conjonctif, des trachtes. [ci cette disposition est exagérée, et la majeure partie de la couche est constituée par de grandes cellules conjonctives qui ne diffèrent de celles qui entourent le système nerveux central au dehors, que par la présence de granu- lations pigmentaires identiques à celles qui couvrent les fibres ner- veuces dans cette région. Dans notre figure (PI. IT, fic. 21) qui 56 G. SAINT REMY. représente une coupe non dépigmentée, ces cellules conjonctives sont entièrement cachées par le pigment ; on aperçoit seulement quelques-uns de leurs noyaux (x. c.). Ce tissu conjonctif n'est pas celui que Carrière a signalé et ficuré entre la membrane basale de l'œil : sur des préparations à l'alcool ou à la liqueur picro-sulfu- rique, il se ratatine et s’applique contre la lame ganglionnaire, en laissant entre elle et l’œil composé un espace vide, comme l’a repré- senté Carrière. Sur ces préparations on trouve contre la membrane basale (m. b.) une assise d’éléments qui peuvent à la rigueur être pris pour des cellules conjonctives à noyaux ovalaires, comme les décrit cet auteur ; sur des coupes à l'alcool cette couche s’est même ‘présentée comme une lame granuleuse renfermant des noyaux, telle que la montre sa figure. Mais lorsqu'on étudie des coupes de pièces convenablement traitées à l’acide osmique, on reconnaît que cette couche (m.) n’est nullement formée de cellules conjonctives, mais bien de fibres musculaires striées. Leur nature pourrait être douteuse si l’on s’en tenait à l'examen de coupes sagittales de l’œil, où ces muscles sont sectionnés transversalement et se montrent comme de petites masses ovales ou polygonales entremêlées de noyaux. Mais sur les coupes passant sur les bords de l’œil, ou mieux encore sur des coupes transversales obliques de cet organe, on voit les fibres musculaires suivant leur longueur, avec leur: striation parfaitement nette. Les fibres s’insèrent, au moins à une de leurs extrémités, sur la membrane basale, à la périphérie de l'œil, et restent appliquées dans toute leur étendue contre la face interne de cette membrane dont elles suivent la courbure. Leur rôle semble être de modifier la courbure de la membrane basale, dans un but qui ne nous apparaît pas clairement. Il est difficile d'admettre que ces muscles fonctionnent comme muscles accommo- dateurs. Peut-être la membrane basale est-elle percée d’orifices permettant l'introduction, entre les yeux élémentaires, du liquide sanguin de Ja cavité générale, et des tractions exercées par ces muscles sur ses bords pourraient être destinées à dilater ces orifi- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 57 ces, ou, en modifiant le bombement de la membrane, à forcer le liquide à se déplacer et à se renouveler. Cette couche musculaire n’est pas absolument continue, puis- qu’elle livre passage aux fibres post-rétiniennes qui, au sortir des yeux élémentaires, traversent la membrane basale et s’insinuent entre les fibres musculaires. On les reconnait facilement à ce niveau (f. p. ».), grâce à la coucho de pigment dontelles sont revêtues ; sur lescoupes dépigmentées elles échappent à l'observa- tion. La présence de ce pigment n’arien quidoive nous surprendre. Les fibres post-rétiniennes du lobe optique des Insectes en présen- tent très généralement ; parfois on en trouve dans la lame gan- glionnaire et même jusque dans le chiasma externe (Pieris (1) ). Entre la couche musculaire et la lame ganglionnaire, les fibres post-rétiniennes exécutent un trajet de longueur variable suivant le point où elles ont pris naissance, la surface de la lame ganglion- naire étant d’une part beaucoup plus petite que la face interne de l'œil composé, et d’autre part son orientation n’étant pas la même. Les intervalles entre ces fibres se trouvent comblés par des cellules conjonctives, comme nous l'avons dit plus haut. Vers la périphérie de l’œil, ce tissu conjonctif n’étant que peu ou point pigmenté, les fibres s’y dessinent comme des traînées noires ; mais dans la région centrale, au voisinage de la lame ganglionnaire, l’ensemble forme une masse foncée dans laquelle on ne peut distinguer de détails. C’estsur les coupes dépigmentées qu’onreconnaît la présence du tissu conjonctif ; mais les fibres y sont difficilemeut visibles. — Les fibres post-rétiniennes se prolongent, avec leur revêtement pigmentaire, jusqu’à la couche interne médullaire dela lame ganglionnaire dans laquelle elles se perdent, et traversent la couche externe cellulaire sans contracter de relations avec ses éléments. La lame ganglionnaire (PI. IE, fig. 21, /. g.) est une sorte d'écran nerveux interposé entre l’œil et les parties plus profondes du cer- e M)Berger, Zac. cit.,p.: 23. 08 G. SAINT REMY. veau, placé sur le trajet des fibres post-rétiniennes. Elle recoit celles-ci du côté externe, et donne naissance, du côté interne, aux fibres chiasmatiques. La lame ganglionnaire a la forme d’une calotte fortement convexe en dehors, concave en dedans, disposée à peu près verticalement. Sa courbure n’est pas beaucoup plus accentuée que celle de la face interne de l'œil, mais elle ne lui correspond pas ; la lame est inclinée en dedans et en arrière, de telle sorte que son bord antérieur est plus rapproché de la mem- brane basale que le postérieur. Cette courbure, de plus, n’est pas absolument régulière ; les deux faces de la lame ne sont pas paral- lèles, de telle façon que le bord antéro-inférieur est plus épais et en même temps relevé en bourrelet ; sur les coupes horizontales, il forme une sorte de crochet recourbé en haut et en dedans. La lame ganglionnaire des Insectes et des Crustacés est géné- ralement différenciée en trois régions ; mais on connaît cependant des cas (Criquet) où elle n’est formée que de deux couches : une externe cellulaire et une interne médullaire ; il en est de même chez la Scutigere. La couche externe (1. q. c.) représente un revê- tement peu considérable de cellules nerveuses, étendu sur toute la surface externe de la couche interne. Cette couche externe est identique comme structure et comme relations à la couche corres- pondante, ou &« couche à noyaux » de la lame ganglionnaire des Insectes (couche granuleuse de la rétine de Berger ). Chez la Scu- tigère, les éléments de cette couche forment deux assises ; ils pré- sentent un noyau arrondi relativement volumineux, entouré d’une zone de protoplasma clair. Il est probable que chacune de ces cellules envoie un prolongement dans la couche interne, comme H. Viallanes l’a constaté chez la Libellule ; mais leur petitesse ne nous apas permis de nous en assurer, d'autant plus que toute la couche est envahie par le même pigment noir que la région pré- cédente, qui remplit les interstices et gêne l’observation. La couche externe est traversée par les fibres post-rétiniennes, comme nous l'avons dit plus haut. — La couche interne (/. g. m.), la plus impor- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 59 tante des deux, est constituée par une substance ponctuée dense, offrant une fine striation extéro-interne, formée parle passage des fibres optiques. À un grossissement suffisant, on reconnaît en effet qu’elle est traversée dans toute son épaisseur par des tubes ner- veux très délicats, orientés à peu près normalement à ses faces; qui partent du bord externe et ne sont autre chose que la conti- nuation directe des fibres post-rétiniennes. Ces fibres sortent par la face interne pour former le chiasma. La couche interne cor- respond à la couche moyenne, ou couche moléculaire, de la lame ganglionnaire de la plupart des Insectes. Il n’existe pas ici de limitante interne ou externe de la lame, comme cela existe parfois dans ce dernier groupe, aussi la surface, en dedans et en dehors, est-elle irrégulière et mal définie. Les fibres nerveuses qui naissent de toute la concavité interne de la lame ganglionnaire, se rendent à la masse médullaire ; dans leur trajet elles s’entrecroisent et constituent le chiasma (PI. IT, fig. 21, f. ch.). Les fibres de la partie postérieure et externe de la lame se portent à la région interne de la masse médullaire ; celles de la partie antérieure et interne se portent à la région externe. Il est difficile de donner plus de détails sur la forme du chiasma, avant d’avoir fait connaître la disposition et les relations de la masse médullaire auxquelles cette forme se trouve surbordonnée. Au point de vue de leur structure, les tubes nerveux quile consti- tuent sont volumineux et comme dilatés au voisinage de Ja lame ganglionnaire, tandis qu'ils sont fins et déliés dans le reste de leur parcours, surtout dans la région où se fait l’entre-croisement On trouve entre ces fibres quelques noyaux, assez gros, mais peu nombreux ; ils se remarquent en particulier au voisinage de la masse médullaire. Le chiasma est limité en arrière et en dedans par la masse médullaire, en avant par la masse ganglionnaire. Nous allons nous occuper d’abord de la première ; nous revien- drons plus tard sur la seconde. La masse médullaire du lobe optique (PI. II, fig. 21, m. m. L.), 60 | G. SAINT REMY. qui représente près de la moitié de la totalité du lobe, est allongée presque horizontalement de dehors en dedans ; elle se divise en deux capsules emboîtées, la capsule antérieure (c. a.) et la capsule postérieure (ce. p.), celle-ci embrassant la première. La capsule antérieure est une sorte de calotte épaisse de substance ponctuée dense, à concavité antérieure, dirigée un peu oblique- ment de dehors en dedans et d'arrière en avant. Ses deux faces ne sont pas concentriques, et elle est un peu plus épaisse au centre qu’à la périphérie. Sa forme générale rappelle un peu celle de la lame ganglionnaire ; tandis que son bord interne s’arrête réguliè- rement dans le prolongement des faces, son bord externe se re- courbe en avant en une sorte de bourrelet aigu dû à una courbure plus prononcée de la face postérieure, et représente sur les coupes un bec pointu. Ce rebord existe juste au niveau du rebord sem- biable formé par la partie antéro-interne de la couche médullaire de la lame ganglionnaire, et c'est entre ces deux bourreiets que se produit l’entre-croisement des fibres allant de la lame à la masse médullaire. La connaissance de ces rapports nous permet d’ajouter quelques détails sur la forme du chiasma. D’après ce que nous venons de voir, les fibres antéro-postérieures qui unissent le bord antérieur de Ja lame au bord externe de la masse sont forcément très courtes, tandis que les fibres qui s'étendent entre la région postérieure de la lame et la partie interne de la masse sont les plus longues et ont une direction extéro-interne presque parallèle à la face antérieure de la masse médullaire. Le chiasma a donc la forme générale d’une croix à branches très inclinées et très inégales. Enfin, nous ferons remarquer que les conducteurs nerveux extéro-internes forment un cône aigu et allongé en dedans du chiasma, tandis qu’en dehors ils sont écartés et représentent un cône obtus assez court. L’extrémité externe de la capsule antérieure de la masse médul- laire est séparée de la moitié externe des fibres du chiasma et du bord postérieur de la lame ganglionnaire par une mince lamelle CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 61 conjonctive présentant quelques noyaux, émise par le névrilemme et qui s'étend d’abord sur l'extrémité de la capsule postérieure, puis sur le bord de la capsule antérieure jusqu’au bec. Cette mem- brane limitante externe est la seule que présente la masse médul- laire. La face antérieure de la capsule, qui recoit les fibres chias- matiques, ne possède pas de limitante et se montre un peu irrégulière. La substance fondamentale de la capsule antérieure est une substance ponctuée dense et homogène, qui se colore plus fortement que les régions voisines par l’acide osmique. En raison de leur direction, les fibrilles du chiasma y pénètrent plus ou moins obliquement de dehors en dedans et d’avant en arrière. Elles s’y enfoncent en gardant leur individualité, et produisent une fine striation de la substance médullaire, les plus grosses la divisant sur les coupes en petits triangles allongés qui se confondent par leurs bases postérieures. On voit la plupart des tubes nerveux s'é- tendre jusqu à la face postérieure de la capsule antérieure, et il est possible de constater le passage de beaucoup d’entre eux dans la seconde capsule. À la périphérie, la capsule antérieure est fusion- née avec la postérieure, et ne sedistingue que par son aspect fibril- laire ; mais dans la région moyenne, elle se montre sur les coupes séparées d'elle par une mince zone claire. Cette apparence est due à un lacis de tubes nerveux formés par la réunion d’un certain nombre de tubes plus petits qui ont traversé la capsule antérieure. Les tubes ainsi constitués forment, en se fusionnant entre eux à leur tour, quelques tubes très gros vers l’extrémité interne de la capsule, où onen voit sur la fig. 21, PI. IT, et ceux-ci se portent en arrière pour longer le bord postérieur et supérieur du lobe frontal. La capsule antérieure présente encore une autre relation avec ce lobe. Une partie de son bord interne dans la région moyenne se continue avec une lame de substance ponctuée de structure fibril- laire, qui se porte en arrière et en dedans, au-dessous des cordons optiques que nous allons décrire plus loin, et s’unit à la substance médullaire du lobe frontal. La coupe que nous avons figurée 62 G. SAINT REMY. (P1. I, fig. 21) passe précisément par cette région et montre cette disposition. Signalons, pour terminer l’étude de la capsule anté- rieure, qu'elle recoit les prolongements de la masse ganglionnaire située en avant d’elle ; ces prolongements traversent obliquement la région interne &es fibres du chiasma et viennent se perdre dans la substance ponctuée de la capsule. La capsule postérieure (c. p.), qui emboîte fort exactement la précédente, est constituée par de la substance médullaire dense et très homogène, qui se colore un peu moins que celle de la capsule antérieure. Les fibrilles qu’elle reçoit en abondance de cette der- nière capsule y disparaissent aussitôt entrées, et ne donnent lieu à aucune apparence striée ou réticulée. Son caractère principal est sa parfaite homogénéité. La face antérieure, concave, se moule exactement sur la face postérieure de la première capsule, mais elle s'arrête au bord externe de celle-ci et ne s’étend pas jusqu’à l'extrémité du bourrelet. La face postérieure, convexe, est appli- quée à son extrémité externe contre l’extrémité postérieure de la lame ganglionnaire dont eile est séparée par la lame conjonctive dont nous avons parlé, et dans presque tout le reste de son étendue elle est recouverte par le névrilemme. Si l’on se rappelle la disposition de la capsule antérieure, oblique de dehors en dedans et d’arrière en avant, on comprend que la capsule pos- térieure doit être dans ces conditions très mince en dehors et plus épaisse en dedans, où elle se porte même en avant pour recouvrir une portion du bord interne de la capsule antérieure (cette dernière disposition ne se voit pas dans la coupe que nous avons représen- tée). Du côté interne, la capsule postérieure n’a pas de limite pré- cise et passe insensiblement à la structure des régions voisines. C’est en effet en grande partie par elle que le lobe optique est mis en re- lation avec le lobe frontal. Cette union a lieu en partie directement, en partie par l’intermédiaire de traînées de substance médullaire, les cordons optiques (e. o.). Ces cordons optiques, au nombre de trois, sont des bandelettes de substance ponctuée très dense, £e CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 63 colorant fortement par l’acide osmique, qui s’étendent obliquement de la portion interne de la capsule postérieure à la face antéro- supérieure du lobe frontal, en s'accolant à l'extrémité externe du noyau médullaire de ce lobe. [ls prennent naissance au sein de la substance de la capsule postérieure, et se portent en avant, en de- dans et un peu en haut, en suivant un trajet en forme de $ très allongé. Ils se terminent brusquement par une extrémité arrondie, immédiatement sous le névriléèmme, en faisant saillie en avant et au-dessus de la substance ponctuée du lobe frontal. Bien que ce mode de terminaison soit assez singulier, on peut néanmoins con- sidérer ces cordons optiques comme destinés à unir la capsule pos- térieure au lobe frontal, avec lequel ils sont soudés, soit directe- ment, soit par l'intermédiaire d’un tissu plus lâche de substance ponctuée qui les entoure partiellement et qui s'étend au-dessous d'eux, sans limite distincte du côté du lobe frontal. Nous avons cherché avec soin s’il n’existait pas de commissure s'étendant entre les deux lobes optiques. On cbserve une longue bande de substance ponctuée, à structure vaguement fibrillaire, qui s’étendà travers les lobes frontaux dans un plan horizontal (PI. III, fig. 27-31, c. L.). Elle suit les axes de ces lobes, c’est-à-dire qu’elle présente deux concavités postérieures latérales et une concavité antérieure médiane. Ên examinant avec soin lesextrémités de cette bande, on reconnaît qu'elle se perd dans la capsule postérieure. Nous n’avons pu nous assurer avec certitude si la capsule est l’ori- gine de cette bande commissurale ; mais si cette bande ne sert pas uniquement à relier les deux lobes optiques, elle est susceptible du moins d'établir entre eux des communications. Il existe de plus, comme chez l’Iule, une agglomération de fibres destinées à relier ces deux lobes. Elleest formée par la réunion des tubes nerveux du lacis situé entre les deux capsules dont nous avons parlé, et d’une petite quantité de tubes plus fins sortis du bord postéro- interne de la capsule postérieure. Tous ces éléments forment un tractus lâche qui suit le bord postérieur et supérieur du lobe 64 G. SAINT REMY. frontal, en prenant dans la région moyenne du cerveau une direc- tion oblique de haut en bas, et vient s’unir sur la ligne médiane à son congénère de l’autre côté (PI. TITI, fig. 29, f. 2.). Les éléments ganglionnaires du lobe optique forment une accu- mulation assez considérable qui occupe l’espace laissé libre entre la lame ganglionnaire, la capsule antérieure de la masse médul- laire et l'extrémité du lobe frontal. Elle représente à peu près le tiers antérieur de l'épaisseur du lobe en ce point. La portion interne de cette accumulation est formée de cellules riches en protoplasma, dont les prolongementss’enfoncent dans lelobe frontalet qui appar- tiennent par conséquent à ce lobe ; mais les deux tiers externes constituant une lame en forme de coin qui s’enfonce entre la masse ganglionnaire et la masse médullaire ou plutôt la portion interne du chiasma, sont formés de petites cellules chomatiques pauvres en protoplasma, dont les noyaux très colorables, mesurant environ 7 {4 de diamètre, ne laissent pas reconnaître autour d’eux de limite cellulaire : ils constituent la masse ganglionnaire antérieure du lobe optique (PI. IL, fig. 21; PI. III, fig. 29, m. g. L.). Tousces éléments envoient leurs prolongements, réunis en quelques petits faisceaux, dans la substance ponctuée de la capsule antérieure, comme nous avons eu déjà occasion de l'indiquer. La complication de ce lobe optique est, comme on le voit, assez considérable. Il est un point particulièrement intéressant : nous voulons parler de l’entre-croisement complet des conducteurs nerveux, qui se produit dans la région moyenne de cet appareil. C'est une disposition rare chez les Myriapodes et les Arachni- des, que nous n’avons constatée que chez la Scutigère et chez le Phalangium. Elle paraît en rapport avec un haut degré d’organi- sation du lobe optique et joue probablement un rôle physiologique important. On sait que dans le lobe optique des Crustacés supérieurs et des Insectes, il existe deux chiasmas successifs. Lobe frontal. — Le lobe frontal (PI. IT, fig. 24-33, L. f.) a la 1 u .. Q , . ’ - ! forme d’un ovoïde irrégulier, très allongé, fusionné par son extré- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 65 mité interne, la plus grosse, avec son homologue, et par son extré- mité externe avec le lobe optique. Son axe longitudinal n’est pas rectiligne, mais figure une ligne courbe à concavité postérieure. La partie postéro-inférieure de son tiers interne est soudée au lobe antennaire et à l’extrémité de la commissure œsophagienne ; tout le reste de sa surface est libre. Le lobe frontal est constitué par une masse de substance ponctuée considérable, recouverte seule- ment sur ses faces antérieure et supérieure d’une écorce ganglion naire. Toutefois une partie de ce revêtement n'appartient pas au lobe frontal proprement dit, mais à des organes qui lui sont annexés, l’organe pédonculé et l’organe gauglionnaire antéro-interne, situés dans les régions supérieures et antérieures. La substance ponctuée qui constitue le lobe frontal est d’une texture fine assez régulière et homogène. Outre les tractus qui dépendent des organes que nous venons d'indiquer, on y remarque quelques trajets commissurauxet quelques gros tubes nerveux, dont quelques-uns sont très volumineux. Nous n'avons pas à parler ici des vaisseaux (v.) qu’on y rencontre. (Jette masse ponctuée n'offre que deux différenciations. A l'extrémité externe, il existe sur le bord antéro-supérieur, au-dessous de la masse ganglionnaire externe, une région de forme lenticulaire où la substance se colore plus fortement et présente un aspect grossièrement granuleux, avec de petites condensations ponctiformes (PI. III, fig. 26, 27,28, 82, o.f.). Peut-être faut-il voir dans cette région le représentant du segment externe de l'organe frontal du Gloméris :mais nous n’osons insister sur ce rapprochement. Dans le tiers interne et inférieur, il existe un renflement de la face antérieure qui vient s'appliquer contre le névrilemme. La substance de ce lobule présente également de petites condensations irrégulières, plus colorables par l'acide osmi: que. Les deux lobules, droit et gauche, sont réunis directement entre eux par plusieurs petites commissures transversales. Dans la partie supérieure, ce sont de simples bandes desubstance ponctuée dense, dont les extrémités se perdent dans les lobules ; dans la par= ARCH, DE Z00L. EXP. ET GÉN. — 3° SÉRIE. — T. V bis, — sueez. 1887, —l% Mém, D 66 G. SAINT REMY. tie inférieure, il existe une commissure fibrillaire très longue (PI. III, fig. 29, c.) qui décrit unarc très ouvert à concavité antérieure: en son milieu cette commissure se confond avec la face antérieure du noyau médullaire des lobes frontaux ; latéralement, entre la ligne médiane et le lobule, elle isole en avant un gros faisceau fibreux qui suit la face antérieure du lobe frontal, et sert à relier la région antérieure de ce lobe à la commissure œsophagienne correspondante. Ce faisceau de fibres, qui est presque vertical, se voit en section transversale sur les coupes horizontales comme une masse pointillée (PI. III, fig. 29, f. æs.). On l’observe en section longitudinale sur les coupes sagittales du cerveau (PI. III, fig. 31, fr @s0; Le long de la face postérieure du protocérébron, dans la région moyenne, se trouvent des tubes nerveux (PI. III, fig. 29, f. L.) qui établissent des relations plus intimes entre les deux lobes fron- taux. Enfin nous avons décrit déjà, à l’occasion des lobes optiques, une longue bande commissurale (PI. III, fig. 27, 31, c. L.) quise voit sur les coupes horizontales, et qui s’étend de la base d’un lobe optique à l’autre ; il nous a semblé que cette bande assez large prenait naissance non seulement dans les masses médullaires des lobes optiques, mais encore dans la substance ponctuée de l’extré- mité externe des lobes frontaux, entre lesquels elle établit des communications directes. Il existe un autre tractus intéressant, qui prend naissance également à la base du lobe optique, d’une facon assez vague. Il est formé d’un mélange de substance ponctuée et de petites fibres nerveuses ; il se porte dans la commissure œsophagienne en s’éten- dant horizontalement en ligne droite, au-dessus de la bande com- missurale dont nous venons de parler. En arrière, au delà de l’or- gane pédonculé, à peu près dans l’axe de la commissure œsopha- gienne, il s’incurve presque à angle droit, en même temps que la plupart de ses tubes nerveux se fusionnent entre eux pour en cons- tituer de plus gros. Il se dirige versle bord interne de la commis- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 67 sure où ses éléments se perdent au milieu d’une foule d’autres, dont beaucoup proviennent de l’écorce du lobe frontal. La sub- stance médullaire de celobe envoie encore dans la commissure différents tractus dont le principal suit la face postérieure du cerveau et se recourbe ensuite en avant, De la même région externe voisine du lobe optique partent un grand nombre de tubes nerveux quisuivent le bord antéro-inférieur du lobe frontal, et vont se jeter dans le lobe antennaire. La fig. 28, PI. IIT, représente une coupe intéressant en partie ce groupe de fibres (7. f. a.). En arrière le lobe antennaire est soudé complètement au lobe frontal, et en recoit un grand nombre de fibres qui sortent de l'écorce supérieure du cerveau (PI. III, fig. 33, f.). Le revêtement ganglionnaire, qui forme une couche corticale importante sur la face antérieure et la face supérieure surtout du lobe frontal, est constitué en partie par des accumulations de cellules chromatiques, qui sont des dépendances des organes par- ticuliers que nous avons indiqués plus haut. Mais la majeure partie est formée de cellules à protoplasma abondant, qui n’ont aucun rapport avec ces organes, mais qui cependant n’appartiennent pas toutes, au point de vue physiologique, au lobe frontal proprement dit. Les prolongements partant de certains groupes de cellules, qui ne se distinguent d’ailleurs par aucun caractère spécial, ne se perdent pas dans la substance médullaire de ce lobe, mais la traversent complètement en conservant leur individualité, pour se porter soit à la commissure œsophagienne, soit au lobe anten- naire du même côté. Ces cellules riches en protoplasma sont de tailles très diverses ; les plus volumineuses, véritables cellules géantes, se trouvent à la face supérieure du lobe frontal, où elles forment un petit groupe en dedans et un peu en arrière de la masse médullaire de l’organe pédoncalé (PI. III fig. 25, 26, 29, g. ce. g.). On voit partir de ces cellules, sur les coupes, un gros _ tube nerveux qui en représente le prolongement principal ; il s’en- fonce dans la substance ponctuée et s’y perd après un certain 68 G. SAINT REMY. trajet. Ces cellules sont piriformes sur les coupes, leur diamètre transversal peut atteindre 52 1 ; leur noyau ovoïde, homogène et faiblement coloré après l’action de l’acide osmique, mesure 161 environ dans son plus grand diamètre, et renferme un gros nu- cléole sphérique, homogène, très colorable, d'environ 4 1, 5 de diamètre. Le protaplasma de ces cellules est très granuleux et coloré en gris par l’acide osmique. Le tube nerveux qui forme la continuation de ces éléments est très volumineux (jusqu’à 9-10 H de diamètre), et tranche nettement sur les parties voisines par son aspect hyalin. Le lobe frontal donne naissance à un nerf que nous avons indi- qué et qui est l’homologue du nerf de Tomosvary des autres My- riapodes, bien que l'organe sensoriel (1) auquel il se porte occupe une situation différente de celle de l'organe de Tomosvary. Ce filet nerveux extrêmement grêle (PI. III, fig. 29,n. 7.) sort di- rectement de la substance médullaire, immédiatement recouverte par le névrilemme en cet endroit, sur le bord postéro-inférieur du lobe, vers l'union du tiers externe avec le tiers moyen. Organe pédonculé. — La conformation qui attire au premier abord l'attention sur les coupes du cerveau de la Scutigère, est un organe assez compliqué, implanté en quelque sorte dans la région supérieure, antérieure et interne du lobe frontal. Nous donnons à cet organe le nom d’organe pédonculé, non pas tant à cause de son homologie probable avec le corps pédonculé des Insectes, qu’en raison de sa structure même, qui impose en quelque sorte cette dénomination. L’organe pédonculé comprend trois accumulations de petites cellules chromatiques pauvres en protoplasma, que nous appelons les masses ganglionnaires interne, moyenne et externe, et un système de formations médullaires en rapportavec ces masses ganglionnaires : la masse médullaire commune, le tubercule (1) Voy. Tomosvary, loc.cit, — E. Haase, Schlundgetiist und Maxillarorganñ von Scutigera, Zool. Beitr. 1, 2, 1884 ; — et F. G. Heathcote, On a peculiar sense crgan in Scutigera coleoptrata; Quart. Journ. of Micr, Sc. XxXV, 18:5. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 69 interne, les pédoncules postérieur et antérieur, la tige externe, La masse ganglionnaire interne (PI. III, fig. 24, 25, 26, 80, 81, m. g. 1.) constitue l'accumulation de cellules chromatiques la plus considérable. Ses éléments se présentent comme de petits noyaux, très serrés les uns contre les autres, et ne laissant pas reconnaître autour d'eux de contours cellulaires ; ils mesurent environ 4 11 de diamètre, et se colorent très fortement par le carmin, même après l'action prolongée de l'acide osmique. Cette masse ganglionnaire forme une calotte compacte, à peu près hémisphérique, située sous le névrilemme à la partie interne de la face supérieure du lobe frontal, et dont les bords arrondis et épais sont parfaitement régu- liers. Cette calotte est plus grosse de moitié sur le bord postérieur que sur le bord antérieur. Les prolongements délicats émis par les éléments de cette masse ganglionnaire se groupent en petits fais- ceaux dirigés radialement de la périphérie vers la face inférieure concave ; ces faisceaux représentent de petits cônes grêles, très allongés, qui, sur les coupes, divisent la masse en segments irré- guliers ; ils augmentent d'épaisseur de la face convexe vers la face concave et se perdent, pour la plupart, dans la masse médullaire commune (PI. ITE, fig. 25, m. m. c.), un petit nombre seulement, dans la région externe et supérieure, se réunissant pour constituer la racine du pédoncule postérieur (PI. IIT, fig. 25, p. p.) qui tra- verse la masse commune sans se confondre avec elle. — Quant aux masses ganglionnaires moyenne et externe, nous les décrirons plus loin. Nous donnons le nom de masse médullaire commune (PI. TI, fig. 24, 25, 26, 30, 51, m. m. c.) à un ilot de substance ponctuée homogène, plus dense que la substance du lobe frontal, mais moins cependant que celle des pédoncules, qui semble constituée, en ma- jeure partie, par la réunion des prolongements de la masse gan- glionnaire interne. Cette masse commune est comprise entre la face inférieure de la masse ganglionnaire interne, dont elle rem- plit la concavité, et la face supérieure de la substance médullaire LA 70 G. SAINT REMY. du lobe frontal, sur laquelle elle repose et avec laquelle elle est en continuité. Elle donne insertion aux partiesles plus importantes de l'organe pédonculé : au pédoncule antérieur (p. a.), au tubercule interne (€. 2.) et à la tige externe (£. e.) ; elle est traversée, comme nous l'avons dit, par la racine du pédoncule postérieur (P1. III, fig. 25,p. p.) ; enfin elle recoit un petit cordon fibreux très grêle qui s'étend horizontalement à la face supérieure du cerveau, et la met en relation directe avec la substance médullaire du bord pos- térieur du lobe frontal. Le tubercule interne (PI. IIT, fig. 26, £. à.) est un bourrelet médullaire court et épais, étendu à peu près horizontalement en dedans de la masse commune. La forme est celle d’un cylindre légèrement incurvé et aplati de bas en haut et un peu d’avant en arrière, dont la section transversale (sur les coupes sagittales) est par conséquentovalaire. Sa face inférieure, très légèrementconcave, recouvre l’origine du pédoncule antérieur ; sa face supéro-anté- rieure, convexe, est recouverte en dehors par l'extrémité de la masse ganglionnaire, en dedans par le névrilemme. Il se termine libre- ment en dedans par une extrémité arrondie, qui s’avance un peu au delà du bord interne du pédoncule antérieur. En dedans le tu- bercule s'amincit et se fusionne avec la masse médullaire com- mune. La substance du tubercule interne est très homogène et très dense et se colore fortement par. l’acide osmique ; une mince ligne plus claire la sépare du pédoncule antérieur ; du côté de la masse commune, elle devient plus lâche et passe insensiblement à la substance de cette masse. Le tubercule interne est, en somme, un troisième pédoncule, plus petit et dirigé horizontalement, tan- dis que les deux autres s’enfoncent profondément en bas dans le lobe frontal. Les pédoncules (PI. ITL, fig. 24, 26, 27, 28, p. a., p. p.) sont en effet deux lames accolées, d’une certaine longueur, qui s’enfoncent obliquement en bas et en dedans, dans la région antérieure de la substance médullaire du lobe frontal. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. TA Le pédoncule antérieur (PI. III, fig. 24, 26, 27, 31, p. a.), le _plus gros, se détache de la masse médullaire commune en arrière du tubercule interne. Il s’étend d’abord de dehors en dedans, sous forme d’une lame verticale (P1. IIT, fig. 26, p. a.) de même épais- seur que le tubercule, un peu concave en arrière, puis il devient prismatique, et pénètre dans le lobe en se dirigeant en dedans et un peu enarrière, vers la face inférieure. Il se termine par une extrémité arrondie, un peu au-dessus de cette face, à une faible distance de la ligne médiane. Ce pédoncule est constitué par la même substance ponctuée dense que le tubercule interne ; il est plus gros à son origine que dans la partie moyenne de son trajet. La section transversale moyenne (sur les coupes horizontales) est un ovale allongé, orienté obliquement de dehors en dedans et d'avant en arrière ; son diamètre antéro-postérieur moyen est d'environ 35 p. ; son grand diamètre mesure 60 11. La face posté- rieure est recouverte par le pédoncule postérieur (P1. III, fig. 27, p.p.) qui lui est accolé ; sa face antérieure est recouverte par une mince épaisseur de la substance du lobe frontal, dont la surface antérieure se bombe pour passer au-devant de lui. Vers le milieu du trajet du pédoncule, on observe à la face antérieure du cerveau appliquée contre le lobe frontal et situé entre lui et le névrilemme, un organe particulier auquel nous donnons le nom d’organe gan- glionnaire antéro-interne (PI. TITI, fig. 27, 31, pl. 9. ; fig. 28,1. m.); il ne semble pas avoir de relation directe avec le pédoncule, malgré sa proximité. Nous étudions cet organe plusloin. Le pédoncule postérieur (PI. IIT, fig. 24-27, 31, p. p.), plus grêle que le précédent, naît directement de la région externe de la masse ganglionnaire interne, par une racine distincte de la masse médullaire commune.‘Cette racine se présente comme une sorte d’entonnoir plein, aplati latéralement en une lame triangu- laire verticale, dont la base est dirigée en avant et un peu en dehors vers la face inférieure de la masse ganglionnaire, pour en recueillir les prolongements, tandis que la pointe qui forme, si l’on 72 G. SAINT REMY. veut, le tube de l’entonnoir, se recourbe à angle droit en dedans et en bas, vers le pédoncule proprement dit. Toute cette racine se’ trouve plongée dans la masse médullaire commune même, et s'en distingue par sa coloration plus foncée, Le pédoncule proprement dit est situé immédiatement contre la face postérieure du pédon- cule antérieur, dont il suit exactement le trajet et sur lequel il se moule. Sa forme générale est celle d’une lame transversale qui va en diminuant de largeur et d'épaisseur, à mesure qu’elle s'éloigne de son origine, et qui descend un peu moins bas que le pédoncule antérieur. La section transversale (sur les coupes horizontales), d’abord ovalaire et beaucoup plus volumineuse que celle du pédoncule antérieur, passe graduellement à un demi-cercle, puis à un croissant à concavité antérieure (P1. III, fig. 27, p. p.), séparé par une ligne claire de la face postérieure convexe du pédoncule antérieur. La substance ponctuée homogène qui constitue le pédon- cule postérieur, est la même que celle de l’antérieur. Il est à noter seulement que dans la racineil existe une structure fibrillaire. La tige externe (PI. IIT, fig. 25, 32,t. e.) qui s’insère, comme le pédoncule antérieur et le tubercule interne, sur la masse médullaire commune, s'étend, comme son nom l'indique, en dehors de celle-ci. Elle commence par une courte portion cylindrique qui se soude, sans ligne de démarcation, au bord externe de la masse commune, et s'étend horizontalement sous le tiers externe de la masse gan- glionnaire interne. Au point où s'arrête cette masse ganglionnaire, cette portion cylindrique se continue par une portion conique beau- coup pluslongue, dont la base, dirigée en dedans, offre un diamètre plus grand que larégion précédente. Ce cône, très aigu, sedirige obli- quement enarrièreeten bas, en s’enfonçant dans la région superfi- cielle de la substance ponctuée du lobe frontal ; vers sa base, sa face supérieure est légèrement mamelonnée. — La tige externeest cons- tituée, à son origine etàsa périphérie, par de la substance ponctuée plus homogène que celle du lobe frontal et identique à celle de la masse médullaire commune. Mais, dans la partie externe de la CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 73 portion cylindrique, et dans toute l’étendue du cône, cette suh- stance renferme des îlots très denses, qui se colorent fortement en noir sous l'influence de l’acide osmique. Ces sortes de glomérules sont de taille variable et de forme irrégulière; ils sont plus gros et plus nombreux à la base du cône, où la tige atteint son plus grand diamètre ; ce sont eux qui produisent les bosselures de la face supérieure dans cette région. À son extrémité la pointe de la por- tion conique est formée par dela substance ponctuée dense, identique à celle de ces glomérules. L’examen des coupes sagittales, comme celle représentée fig. 32, pl. III, et aussi de certaines coupes obliques par rapport aux plans horizontal et transversal, montre les relations de ces glomérules et le rôle de la tige externe. Toutes ces masses de substance ponctuée dense sont formées par les prolongements cellulaires des deux accumulations de cellules chromatiques que nous appelons respectivement masses ganglion- naires moyenne et externe (PI. TIT, fig 25-28,32, m. g.m., m. g.i.). Ces masses ganglionnaires, situées à la face antérieure du lobe frontal, sont constituées par des noyaux serrés, de même taille que ceux de lamasse ganglionnaire interne, mais plus granuleux et moins riches en chromatine. La masse moyenne (m7. g.m.), la plus épaisse, parce qu’elle s'enfonce comme un coin dans la sub- _stance ponctuée du lobe frontal, se trouve un peu au-dessous et en dehors de la masse ganglionnaire interne, dont elle est séparée par un petit groupe de cellules à protoplasma abondant. La masse externe (m. g. e.), beaucoup moins épaisse, s'étend sur une plus grande longueur ;elle est séparée de la masse moyenne par un léger renflement de la substance médullaire du lobe frontal et un petit groupe de cellules ordinaires ; elle se continue jusqu’au voi- sinage du lobe optique (PI. IL, fig. 21). Les prolongements émis par ces masses ganglionnaires forment quatre à cinq faisceaux fibrillaires grêles, élargis seulement à leur origine, qui s’enfoncent dans le lobe frontal à la rencontre de la tige externe. Le plus externe de ces faisceaux rejoint la pointe terminale du cône, et se 74 G. SAINT REMY. confond avec elle. Les autres, qui se voient très bien sur les coupes sagittales (comme dans la fig. 32, PI. III, . m.), abordent la tige perpendiculairement ; ils décrivent un arc très ouvert à con- cavité antérieure, se portant d’abord en arrière et en haut, puis en haut et un peuen avant. En arrivant à la tige, ils traversent la substance corticale lâche sans se mêler à elle, puis se dissocient pour s'unir aux glomérules voisins, dans la substance desquels les fibrilles se perdent. On voit donc que le rôle de la tige est de rece- voir et de mettre en communication avec la masse médullaire com- mune, les prolongements sortis desmasses ganglionnaires moyenne et externe. De sorte que le pédoncule antérieur et le tubercule interne sont en relation non seulement avec la masse ganglionnaire interne, mais encore avec les deux autres groupes de cellules chro- matiques situés plus en dehors, bien que d’une façon plus indi- recte. Les homologies de l'appareil si compliqué que nous venons de décrire, sont difficiles, nous pouvons même dire impossibles, à établir d’une manière certaine. L'aspect général et la disposition des par- ties principales font penser de suite que cet ensemble représente le corps pédonculé si constant chez les Insectes, et dont nous avons retrouvé des vestiges dans le cerveau de l’Iule. Mais lorsqu'on veut examiner les choses de plus près, et pousser la comparaison plus à fond, on s'aperçoit immédiatement que le rapprochement est abso- lument superficiel et qu’on ne peut arriver à trouver des points de ressemblance précis, entre les pièces de notre appareil et celles du corps pédonculé des Insectes. Nous sommes même ici moins bien renseigné que chez l’Iule, car il nous manque les relations avec le lobe optique et le lobe olfactif (commissures de Bellonci), qui nous ont servi, dans ce cas, à affirmer l’existence d’un corps pédonculé rudimentaire représenté par un calice. Faute de données de ce genre, nous devons nous contenter d'hypothèses, assez vraisem— blables cependant, il faut le reconnaître. Sans chercher à comparer les deux organes dans leurs détails, nous les regardons comme CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 75 très probablement homologues. Quelles sont, en effet, les parties constitutives du corps pédonculé des Insectes ? Une accumulation de cellules chromatiques en relation avec un système de tiges mé- dullaires qui s’enfoncent dans le protocérébron, et se terminent brusquement au sein de la substance ponctuée. Nous retrouvons la même structure et les mêmes dispositions dans l'organe pédonculé de la Scutigère. Lies pédoncules s'arrêtent au voisinage de la ligne médiane, comme le fait la poutre chez les Insectes, et le tubercule interne cesse sous le névrilemme, comme la corne antérieure chez ces derniers. Les trois masses ganglionnaires semblent devoir jouer, vis-à-vis de ces parties, le même rôle que les calices vis-à-vis de la corne et de la poutre. Organe ganglionnaire antéro-interne. — Pour terminer l'étude du protocérébron, il nous reste à examiner l’organe ganglionnaire antéro-interne, dont la structure histologique offre un certain inté- rêt. Il est situé à la face antérieure du lobe frontal, dans sa région supérieure et interne, au-devant des pédoncules. Il se compose d’une lame médullaire (PI. III, fig. 28, {. m.) appliquée en saillie contre la substance ponctuée du lobe, et d’une plaque ganglion- naire (PI. III, fig. 27, 28, 31, pl. g.), d'une structure spéciale, qui en recouvre l'extrémité externe. La lame médullaire est constituée par une substance très dense, fortement colorée en noir par l’a- cide osmique. Sa forme est à peu près celle d’un triangle isocèle, dont la base, verticale et dirigée en dehors, est située au niveau du bord externe des pédoncules, et dont la pointe, dirigée en bas et en dedans, s’unit sur la ligne médiane à son homologue du côté opposé. Cette lame n'offre pas la même épaisseur sur toute son étendue ; sur son bord externe elle est partiellement renflée en un bourrelet saillant ; immédiatement après ce bourrelet, elle est au contraire très amincie, puis elle reprend une certaine épaisseur (16 1. environ) et se maintient ainsi jusqu’au voisinage de la ligne médiane, où elle redevient très mince avant de se fusionner avec son homologue opposée. Elle suit dans son contour la masse ponc- 76 G. SAINT REMY. tuée du lobe frontal et reste dans toute son étendue complètement fusionnée avec elle, sauf dans la portion externe et supérieure, où elle en est séparée par üne ligne claire. Au niveau des pédoncules elle forme une sorte de gouttière à concavité postérieure, en se moulant sur le renflement occasionné par leur présence à la surface du lobe ; depuis les pédoncules jusqu’au plan médian, elle suit une direction très oblique en arrière, correspondant à la paroi du sillon antéro-postérieur qui sépare les deux moitiés du cerveau. La plaque ganglionnaire (PI. IIT, fig. 27, 31, pl. g.) qui re- couvre la lame médullaire au niveau des pédoncules, est une plaque circulaire un peu concave, amincie de haut en bas, dont le bord supérieur, le plus épais, se recourbe en une sorte de crête destinée à recouvrir le bord supérieur de la lame médullaire, plus épais et plus saïllant que l’inférieur. La surface libre de cette plaque est séparée du névrilemme par une faible couche conjonctive ; du côté de la lame médullaire, elle est fusionnée avec celle-ci, et sa li- mite n’est indiquée que par l’absence des noyaux dont nous allons parler. Cette plaque offre une structure curieuse. Elle est cons- tituée (PI. IV, fig. 86) par de petits noyaux plongés dans une sub - stance fondamentale commune. Ces petits noyaux ovoïdes, en général allongés, mesurent environ 3 [1,5 à 4 u de largeur, sur 6 et même 9 p. de longueur. Ils sont moins riches en chromatine que les noyaux des cellules chromatiques des masses ganglionnaires de l'organe pédonculé, et leurs granulations, plus grosses, mais moins abondantes que dans ces noyaux, les font paraître encore moins colorés ; néanmoins, ils sont encore beaucoup plus colorables que les noyaux des cellules nerveuses riches en protoplasma , ce qui se constate bien après l’action de l’acide osmique. À l'opposé de ce que nous voyons dans les masses ganglionnaires, ils ne sont pas serrés eb comme tassés les uns contre les autres, ce qui nous permet de nous assurer que la substance qui les renferme est abso- lument continue et n’est pas divisée en cellules. Cette substance, très homogène et fortement colorée par l’acide osmique, est iden- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 77 tique au protoplasma des cellules de taille moyenne de l'écorce céré- brale, et nousla regardons comme du protoplasma. Toutefois, comme elle se continue, sans ligne de démarcation, avec la lame médul- laire, dont la substance présente les mêmes caractères, on pourrait être tenté de la considérer comme de la substance ponctuée ; mais il est à remarquer, en tous cas, que la différence entre la substance protoplasmique des cellules nerveuses et la substance ponctuée est moins profonde qu’on ne se l'imaginerait au premier abord, puisque les prolongements des cellules entrent dans la consti- tution de cette substance. Le fait intéressant du reste, c’est l'exis- tence de noyaux nerveux non pourvus de limites cellulaires dis- tinctes ; or sur la nature nerveuse de ces noyaux il ne peut y avoir aucun doute, leurs caractères les éloignant complètement des noyaux conjonctifs. Pour nous, la plaque ganglionnaire est jusqu'à un certain point comparable à une énorme cellule nerveuse multi- nucléée qui, au lieu d'être en rapport avec la substance ponctuée par un ou plusieurs prolongements grêles, se continue avecelle par une large surface. DEUTOCÉRÉBRON. — Le deutocérébron est formé par les deux lobes antennaires et une petite commissure qui les réunit en suivant la face inférieure du protocérébron. Chaque lobe antennaire, ou lobe deutocérébral (PI. IIT, fig. 30-33, L. a.), seprésente comme un _ovoïde dirigé obliquement de dehors en dedans et d’avant en arrière. Il est soudé par sa face supérieure au lobe frontal (PI. III, fig. 88, L. f.), par sa face postérieure à la commissure œsophagienne (PI. IIL, fig. 80, 31, C. æs.) ; en arrière sa face interne est unie au lobe tritocérébral, en avant elle est libre ; ses faces inférieure, antérieure et externe sont également libres ; du tiers antérieur de cette dernière sort le nerf de l'antenne. Le lobe antennaire est cons- titué par une masse principale de substance ponctuée et par une écorce cellulaire peu considérable qui s'étend seulement sur les faces inférieure et interne. Lie tiers inférieur environ de la masse présente les condensations médullaires constantes dans le centre 18 G. SAINT REMY. olfactif, qui affectent ici la forme de rubans prismatiques épais et un peu ondulés, étendus obliquement de haut en bas et de dedans en dehors. (PI. III, fig. 33, et fig. 81, 82, r. olf.) Cette forme ru- bannée, dont nous avons vu une ébauche chez le Gloméris, s’écarte du type habituel plus ou moins sphérique etse rapproche de la dis- position vermiforme décrite chez l’Ecrevisse, et aussi de ce que nous avons observé dans le centre ganglionnaire des peignes chez le Scorpion (1). À leur extrémité antéro-externe, ces rubans deviennent moins denses et moins colorés, et se continuent avec les fibrilles délicates du nerf antennaire. A leur extrémité opposée (PL. III, fig. 81) les rubans se terminent franchement par une pointe mousse vers la périphérie de la masse médullaire. Ils sont d’ailleurs, sur toute leur surface, en continuité avec la substance ponctuée générale du lobe, dont ils représentent des condensations. Il est utile de faire remarquer que, sur beaucoup de coupes, ces rubans sont sectionnés plus ou moins obliquement, et donnent des images polygonales ou ovalaires qui pourraient induire en erreur. À la formation du nerf antennaire, qui est très volumineux, prennent part, outre les fibrilles en relation avec les rubans olfac- tifs, trois autres sortes de fibres : les unes sortent de la substance ponctuée générale du lobe antennaire ; les autres sont des prolon- gements des cellules de la couche corticale supérieure du lobe frontal ;' d’autres enfin proviennent d’une masse de substance médullaire spéciale que nous appelons la masse lamelleuse. La masse lamelleuse (P]. IIT, fig. 30, 33, m. L.) est une formation ovoïde dans laquelle la substance ponctuée, plus dense que dans la région avoisinante, est divisée en lames parallèles orientées obliquement, de telle sorte que sur les coupes horizontales et trans= versales on a l’image d’une série de cordons parallèles. Les coupes sagittales montrent sa véritable structure. Cette masse est orientée de dedans en dehors et de haut en bas. (1) Ce centre ganglionnaire étant sous-œsophagien, nous ne pouvons le décrire dans ce travail, mais nous l'étudierons prochainement ailleurs. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 79 Les tubes nerveux qui sortent de son extrémité externe mal dé- limitée, se portent dans le nerf antennaire ; son extrémité interne et supérieure reçoit des fibres dont les unes sont fournies par la couche corticale du lobe frontal, tandis que les autres en majorité viennent de la commissure deutocérébrale ou antennaire, qui relie les deux lobes antennaires. — Parmi les fibres du nerfantennaire qui sortent directement de la substance ponctuée générale du lobe antennaire, nous signalerons de gros tubes qui occupent le bord externe du lobe ; ils se continuent dans le nerf dont ils garnissent la périphérie externe, tandis que la partie centrale est occupée par des éléments beaucoup plus petits. Si l’on observe que, d’une façon générale, les nerfs sensitifs sont formés de fibres plus ténues et les nerfs moteurs de fibres plus volumineuses, il est permis de croire que ces deux sortes d'éléments du nerf anten- naire correspondent à des fonctions différentes. On a déjà signalé, chez les Insectes, la présence, dans le nerf antennaire, de deux sortes de fibres de taille différente (Cuccatti) (1). Les cellules du lobe frontal qui envoient leurs prolongements dans le lobe antennaire sont situées sur le bord supérieur et posté- rieur, dans la région interne. Les fibres forment un faisceau assez volumineux, qui se porte en bas et en dehors en se dissociant un peu (PI. IT, fig. 38, /j.) ; une partie s'enfonce dans la masse lamelleuse, quelques-unes se perdent dans la substance fonda- mentale, mais la majorité se rend directement dans le nerf anten- naire. Ce ne sont pas les seules fibres que le lobe antennaire recoit du protocérébron, et nous avons déjà signalé l'existence d’un faisceau allant de l’extrémité externe du lobe frontal au lobe an- tennaire du même côté, en suivant le bord antéro-inférieur du lobe frontal. Les deux lobes, antennaire et frontal, sont du reste en continuité de substance sur une assez grande surface, et leurs limités ne sont visibles qu’à la périphérie. (1) J. Cuccatti, Ueber die Organisation des Gehirns der Somomya erythro- ephala, — Zeitschr. £. w. Zool. XLVI, 1888, 80 G. (SAINT REMY. Le lobe antennaire est également soudé à la commissure œso- phagienne, dans laquelle il envoie des fibres, ou dont ilen reçoit, comme on le voit sur les coupes sagittales (PI. III, fig. 30, 31). L’écorce du lobe antennaire, dont nous avons indiqué la situa- tion et le peu d'importance, est formée exclusivement de cellules à protoplasma abondant, de taille moyenne. Ces éléments envoient leurs prolongements dans la substance médullaire du lobe, et on peut suivre certains faisceaux assez loin de leur point d’origine. Un petit groupe cellulaire notamment, qui se trouve dans l’échan- crure séparant le lobe antennaire dulobe frontal, émet un faisceau fibreux qui décrit une demi-circonférenceembrassant les deux tiers antérieurs du lobe, pour venir se perdre dans sa région antéro- inférieure olfactive. La commissure antennaire (PI. III, fie. 27, 28, 83, c. a.), qui unit les deux lobes et complète le deutocérébron, est constituée par un groupe de fibres s'étendant transversalement à la face in- férieure du protocérébron, dans la région moyenne. Ces fibres proviennent, pour la majeure partie, de la substance médullaire fondamentale du lobe, mais il en est qui sortent de la masse lamel- leuse, et peut-être quelques-unes sont-elles la continuation directe de fibres du nerf antennaire ; s’il en était ainsi, le nerf antennaire recevrait, comme le nerf antennaire de l’Iule, des. fibres venant de la moitié opposée du cerveau. ; Nous n’avons pas réussi à mettre en évidence un nerf viscéral pair, qui probablement existe comme chez les autres Myriapodes ; il à pu nous échapper en raison de la friabilité du tissu nerveux, qui détermine facilement des déchirures. | TrirocéréBron. — Le tritocérébron est très peu développé chez la Scutigère, dans sa partie cérébrale proprement dite, et les lobes tritocérébraux sont peu considérables ; mais il faut remarquer qu'ils se continuent sur les commissures œsophagiennes par une lame médullaire accompagnée d’une couche de cellules ganglion- Û . . Q Q = Le naires, et que le ganglion entier estpar suite moins réduit qu'il CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 81 ne semblerait au premier abord. Nous avons eu occasion de décrire la forme du pont stomato-gastrique, et de parler de la commissure tritocérébrale ou commissure transverse de l’anneau œsophagien. Le lobe tritocérébral (PI. III, fig. 31) est représenté par une masse allongée de substance ponctuée accolée au bord inférieur et interne de la commissure œsophagienne, un peu en arrière dulobe antennaire. La texture de cette masse est un peu plus dense que celle de la commissure à laquelle elle est soudée, et elle renferme de petites condensations affectant la forme de traînées, peut-être comparables aux condensations du tritocérébron du Criquet (Vial- lanés) et du Gloméris. Elle est accompagnée, du côté externe, par une accumulation de cellules de petite taille. En arrière elle se continue le long de la commissure par une bande de substance ponctuée très légèrement fibrillaire, qui se soude intimement à celle-ci, mais qu’on peut suivre grâce à sa coloration un peu plus foncée. En avant, où sa structure particulière est le mieux accusée, elle se détache de la commissure dont elle est séparée par une mince couche de cellules, et fait une saillie prononcée ; puis elle se continue en dedans avec le pont stomato-gastrique. Dans cette région antérieure, où les condensations plus colorées sont plus abondantes, on doit peut-être voir l’homologue du lobule glomérule signalé par Viallanes chez le Criquet. Ce lobe tritocérébral four- nit deux nerfs grêles visibles seulement sur les coupes, qui se dé- tachent tous deux l’un à côté de l’autre, d’une petite saillie de la portion externe dela face inférieure (PI. IV, fig. 34, n.L.). L’in- terne est plus petit que l’externe. Ils se dirigent en avant, et sont vraisemblablement destinés à la lèvre supérieure. Le pont stomato-gastrique (PI. II, fig. 22, 23, P) se détache du lobe tritocérébral comme un cordon cylindrique qui se porte en avant et un peu en dedans, puis se recourbe franchement en de- dans pour devenir transversal. Ce cordon (PI. II, fig. 22) est formé de tubes nerveux et de quelques traînées de substance ponc- tuée, et ne présente que peu de cellules ganglionnaires ; il émet, ARCH, DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 2° SÉRIE. — T. V bis, — supp. 1889. — 1* Mém. 6 82 G. SAINT REMY. sur sa face inférieure, dans sa portion antérieure, un petit filet nerveux dirigé en avant. La portion transversale, qui continue ce cordon, a la forme d’un cône tronqué dont la grande base, aplatie de bas en haut, se soude sur la ligne médiane avec son homologue du côté opposé, pour donner naissance en ce point au nerf sto- mato-gastrique horizontal (PI. IL, fig. 23, n. s.) et à un petit filet qui se détache de la face supérieure et s’élève verticalement (n. p.). Ce cône est constitué par un mélange de tubes nerveux parallèles à son axe et de substance médullaire dense, en partie recouverte de cellules nerveuses ; il en existe quelques-unes à la face supérieure vers l’extrémité externe ; dans la région moyenne elles sont dissé- minées à la face supérieure, mais forment une couche continue à la face inférieure ; enfin, vers la base, elles constituent un revé- tement complet, interrompu seulement par le passage du nerf stomato-gastrique. Ce nerf, cylindrique (PI. IT, fig. 23, n. s.), naît du bord postérieur du pont, et s'étend presque horizontalement en arrière ; son épaisseur est égale au petit diamètre de la région où il prend naissance. En réalité, ce n’est pas un nerf au sens où l’on entend habituellement ce terme, car il est constitué par de la sub- stance ponctuée à structure fibrillaire, renfermant quelques fins tubes nerveux, et revêtue sur sa face inférieure, et en particulier sur ses faces latérales, d’une assise de cellules ganglionnaires (c.g.); de plus il donne naissance sur sa face supérieure à quelques filets nerveux extrêmement délicats (PI. IL, fig. 23. n.). C’est donc plutôt une sorte de ganglion allongé qui remplace ici le nerf sto- mato-gastrique. La bande de substance ponctuée, qui continue le lobe tritocé- rébral, tout le long de la face inférieure de la commissure œso- phagienne (PI. IIL, fig. 31 ; PL. IV, fig, 34, 35, L. &.), peut être suivie facilement sur les coupes, grâce à sa structure spéciale. Elle renferme des tractus de substance plus dense, qui se colorent for- tement en noir et la font distinguer. Sa forme est d’abord demi- cylindrique, puis elle s'aplatit en s’éloignant du cerveau. Ka face CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 83 iaférieure arrondie est recouverte par une couche de cellules gan- glionnaires, plus épaisse sur les côtés où elle régularise le contour de la commissure. Après la fusion des deux commissures, ces bandes sont réunies par une lame transversale, puis elles dispa- raissent bientôt en se confondant avec les régions voisines. Immé- diatement au-dessous de l’œsophage, ces bandes sont reliées par un petit filet nerveux transversal, qui s'étend de l’une à l’autre en décrivant un arc à concavité supérieure (PI. IV, fg. 35, c. tr.). Il s'insère de chaque côté à la partie interne de la face inférieure de la bande. Cette commissure, qui ne mesure pas plus de 124 de diamètre, est extrêmement délicate, et ne peut guère se voir que sur les coupes. Nous avons eu l’heureuse chance de l’observer une fois, conservée dans toute son étendue, surune coupe transver- sale que nous avons représentée (PI. IV, fig. 35), ce qui nous per- met d'être absolument affirmatif sur ses rapports. Elle est, eneffet, extrêmement intéressante, car elle représente la commissure trans- verse de l'anneau œsophagien, c’est-à-dire la commissure tritocé- rébrale. La couche de cellules qui tapisse la face inférieure de la commissure œsophagienne doit être, par conséquent, regardée comme l’homologue de l’accumulation ganglionnaire que nous avons observée chez l’Tule et chez le Gloméris au point d’émergence de la commissure transverse, c’est-à-dire aussi du petit ganglion œsophagien des Crustacés supérieurs. Les commissures œsophagiennes constituent deux gros troncs en forme de cylindre un peu aplati de dedans en dehors, formé par un ensemble de substance ponctuée et de nombreux tubes nerveux parallèles à l’axe, et revêtu à la face inférieure de la couche cel- lulaire dont nous venons d’indiquer la valeur morphologique. Les commissures (PI. III, fig. 25-28, 30, 31; PI. IV fig. 34, 35, C.æs.) tirent leur origine des trois régions constitutives du cerveau, auxquelles elles sont intimement soudées ; les éléments de chacune d’elles proviennent de la moitié correspondante du cerveau.On 84 G. SAINT REMY. reconnaît sur les coupes sagittales (PI. III, fig. 30, 31) que ia commissure œsophagienne reçoit du lobe frontal une large lame médullaire constituée par un mélange de substance ponctuée et de tubes nerveux parallèles, qui occupe la face postérieure du lobe dans la région interne. Cette lame se dirige en bas jusqu’au niveau du lobe antennaire, puis s’infléchit pour se porter en arrière, et enfin prend place à la face supérieure de la commissure, où elle finit par se perdre. Outre cette lame, la commissure recoit du protocérébron un faisceau qui prend naïssance dans la région externe du lobe frontal et vient occuper son bord interne ; nous avons eu occasion de décrire son trajet en étudiant le lobe frontal. Enfin, l’écorce ganglionnaire de ce dernier lobe lui fournit un certain nombre de prolongements cellulaires, et nous savons de plus qu’elle est en continuité de substance avec le noyau médul- laire général du protocérébron qui lui fournit aussi des fibres directement. — Du lobe antennaire la commissure œsophagienne reçoit de nombreux tubes nerveux sortis de la substance ponctuée ; mais on ne distingue aucun faisceau se formant à l’avance dans une région spéciale du deutocérébron. — Enfin, le lobe tritocé- rébral prend part à la formation dela commissure œsophagienne par la bande médullaire dont nous avons parlé, qui garde une certaine individualité, et à laquelle il faut rattacher la couche de cellules ganglionnaires (P]. TTL, fig. 31 ; PI. IV, fig. 34, 85 }). FAMILLE DES LITHOBIIDES. GENRE LITHOBIUS Leach. (PI. IV, fig. 31-46.) Dans la famille des Lithobiides, nous avons étudié l’espèce commune Lithobius forficatus Li. Le système nerveux de cette espèce a été décrit et figuré par Treviranus (1), et plus récem- (1) Treviranus, Vermischte Schriften. 11, 1817. (Scolopendra forficata L.) CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 85 ment par Sograff dans une monographie très complète. Le cerveau, de forme un peu grêle, présente ses différentes parties bien dégagées. Le lobe frontal (F1G. IV, L.f.) est un ovoïde allongé, qui donne naissance au nerf de Tomosvary sur son bord inférieur, dans sa région externe (n. 7), et se continue en dehors par un lobe optique cylindrique (Z. o.), émettant un faisceau de nerfs à son extrémité. Le lobe antennaire (Z. a.) se montre éga- lement comme un ovale allongé situé au-dessous et en avant du lobe frontal, et s’effilant d’un côté en un gros nerf antennaire, se soudant de l’autre à la commissure œsophagienne dirigée en dedans. Il n’e- xiste pas de commissure transverse de l'anneau œso- phagien. Entre les deux lobes antennaires s’étend FIG. IV (1). un pont stomato-gastrique bien développé , incurvé, à concavité postérieure (P.). Le nerf stomato-sastrique est assez gros. Il se détache encore du cerveau d’autres petits nerfs pairs non encore signalés, dont nous avons contrôlé l’existence sur les conpes : ce sont le nerf de lalèvre supérieure (n. [.), un petit nerf viscéral qui sort latéralement du lobe antennaire (n. v.) et un petit nerf tégumen- taire (n. £.) qui prend naïssance à la base du nerf antennaire. Sograff (2) a figuré diverses coupes du cerveau. Ses dessins, à défaut du texte que nous n’avons pu traduire, suffisent à montrer que s’ila fort bien compris la forme générale de l’orgune et Îles (1) FiG. 1V. Cerveau de Lithobius forficatus L., vu par la face inférieure. Gr. 35 fois. — n. t, nerf tégumentaire. Les autres lettres comme dans la FIG. 11 page 37. (2) Sograff, Anatomie du Lithobius forficatus. — Trav. du Mus. Zool. de l'Univ. de Moscou, 1, 1880 (en russe). — L'auteur a eu l’obligeance de nous adresser ce mémoire. Nous avons dû malheureusement nous borner à examiner les figures. 86 G. SAINT REMY. rapports de la substance médullaire et de l’écorce, il n’en a pas reconnu la structure intime, évidemment en raison d’un mode de traitement peu favorable à l'observation des détails. Il représente en effet la substance médullaire comme formant une masse homo- gène, renfermant seulement une sorte de réseau de fibres éparses, tandis qu’il y existe en réalité des différenciations complexes que nous allons décrire. Disons de suite, et pour n’y plus revenir, que chez le Lithobius, et d’une façon générale chez tous les Chilopodes autres que la Seutigère, le névrilemme est remarquablement épais et repose sur une petite couche de tissu coujonctif ; de nombreuses trachées se montrent dans le cerveau. PROTOCÉRÉBRON. — Le protocérébron du Lithobius présente une grande simplicité, comparé à celui de la Scutigère. Le lobe optique est très réduit, et le protocérébron moyen est loin d’offrir le haut degré de complication que nous venons de voir dans le cas pré- cédent. Lobe optique. — Le lobe optique (PI. IV, fig. 38, 41, 48, L. o.) se rattache au type simple que nousavons étudié chez le Gloméris ; il est constitué (PI. IV, fig. 41) par un cylindre médullaire qui recoit à son extrémité externe les nerfs optiques, et qui est relié en dedans au lobe frontal (Z. jf.) par une portion plus étroite, rétrécie d'avant en arrière en forme de col. Ce col est revêtu, sauf sur sa face inférieure, d'un manchon de cellules ganglion- naires qui appartiennent au lobe frontal ; mais le lobe optique lui-même ne possède qu’une faible écorce cellulaire. Les nerfs optiques, formés de fibres fines, sont grêles et courts, et réunis en un faisceau compact. Ils se fondent à une faible distance des yeux dans la masse médullaire du lobe. Cette masse (m. m.1.), qui constitue en somme tout le lobe, est un mélange de substance ponctuée dense et de tubes nerveux, au sein duquel sont plongés de nombreux petits noyaux arrondis ou ovalaires, de taille et de coloration variables, qui paraissent être de nature conjonctive ; on CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 87 “en trouve d’autres à la périphérie, entourés d’une faible couche de protoplasma (PI. IV, fig. 41, c. g.), qui sont certainement de nature nerveuse, mais ils sont peu abondantset ne constituent pas un revêtement régulier. La masse médullaire est donc recouverte par le névrilemme. Elle est rectiligne et à peu près horizontale, un peu inclinée en bas ; la coupe oblique sur le plan horizontal représentée figure 41, PI. IV, l’intéresse dans presque toute son étendue. Au voisinage du lobe frontal, la masse se rétrécit et s’in- cline en arrière pour se souder à la région postérieure de l'extré- mité externe du lobe frontal médullaire, sur laquelle elle s'étale. Une partie de ses fibres suivent le bord postéro-supérieur du cer- - veau, en se portant vers la ligne médiane, où elles paraissent s'unir à leurs homologues du côté opposé pour former un groupe commissural homologue de celui que nous avons vu dans celte région chez la Scutigère. En même temps quela masse médullaire se rétrécit en forme de col, l’enveloppe névrilemmatique s’élargit au contraire pour se continuer sans échancrure sur le lobe frontal. Les deux lobes optiques sont évidemment reliés par le système de tubes nerveux dont nous venons de parler. Il existe de plus, comme chez la Scutigère, un long cordon de substance ponctuée fibrillaire (PI. IV, fig. 41, c. L.), qui occupe à peu près l’axe du protocérébron moyen, et décrit une légère courbe à concavité antérieure. Ce tractus se perd à ses deux extrémités vers la base des lobes optiques, et sert vraisemblablement à établir entre eux des communications directes ; nous verrons d’ailleurs qu’il dispa- raît dans le genre Cryptops, où les lobes optiques manquent. Lobe frontal. — Le lobe frontal (PI. IV, fig. 38, 42, 43, 45, L. f.) est un ovoïle allongé, un peu incliné d’arrière en avant et de dedans en dehors, dans le plan horizontal; il est soudé en dedans à son homologue, et en dehors au lobe optique. Sa face inférieure est largement fusionnée en avant, dans ses deux tiers internes, avec le lobe antennaire (P1. IV, fig. 42, L. a.), et en arrière, dans 88 G. SAINT REMY. son tiers interne, avec la commissure œsophagienne (C. æs.) ; en dehors le lobe frontal dépasse le lobe antennaire (PI. IV, fig. 43, 45) : les limites de ces deux lobes sont indiquées par une échancrure profonde occupée par l'écorce ganglionnaire. Lelobe frontal est constitué par une portion centrale médullaire et par une écorce cellulaire, qui forme un revêtement presque complet, manquant seulement dans la portion libre de la face inférieure et dans une faible partie de la face supérieure. La masse médullaire du lobe frontal est assez homogène, elle renferme de nombreux petits tubes nerveux et présente peu de différenciations importantes, si l’on en excepte, bien entendu, les pièces de l’organe lobulé qui y exécutent un certain trajet. La modification la plus intéressante se trouve à l’extrémité externe du lobe, où le bord antéro-supérieur est renflé et formé d’une substance plus dense, d’unestructure grenue (PI. IV, fig. 38, o.f.); cette formation, dont nous avons vu l’équivalent chez la Scutigère, est peut-être, comme nous l’avons déjà dit, un vestige de l’organe frontal du Gloméris. Les faisceaux nerveux qu’on remarque dans le lobe frontal sont peu nombreux ; nous avons déjà signalé ceux qui dépendent des lobes optiques. Il existe aussi un groupe volumineux de fibres, qui suit la face antérieure de la région externe, pour se porter dans le lobe antennaire. Enfin, nous signalerons un gros faisceau qui se trouve dans la région interne, un peu en dedans du niveau de la commissure œsophagienne, et qui suit de haut en bas la face antéro-supérieure du lobe, en décrivant une courbe à concavité postéro-inférieure. Ce faisceau, dont les extrémités se perdent lans la substance ponctuée générale du lobe, est l’homologue d’un faisceau, identique comme situation et rapports, que nous avons signalé chez la Scutigère. Mais tandis que chez celle-ci les parties qu il relie sont un peu différenciées, chez le Lithobius les régions dans lesquelles ce faisceau se résout ne présentent pas une struc- ture spéciale et forment simplement un léger renflement de la sur- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 89 face. Ajoutons, pour mémoire, que le lobe frontal fournit à la commissure œsophagienne une partie de ses éléments ; il existe notamment, comme chez la Scutigsère, un faisceau qui naît dans la région externe, s’étend horizontalement en dedans, puis se recourbe à angle droit et se porte en arrière et en bas pour suivre le bord interne de la commissure. L'écorce propre du lobe frontal, en laissant de côté la masse ganglionnaire externe qui fait partie de l’organe lobulé, est cons- tituée par une couche d'épaisseur variable de cellules riches en protoplasma. Cette écorce atteint sa plus grande épaisseur à la face postérieure ; elle est au contraire très réduite à la face antérieure, surtout vers la ligne médiane (PI. IV, fig. 38); nous avons déjà indiqué qu’elle fait défaut à la face inférieure et sur le bord supé- rieur dans la région moyenne (PI. IV, fig. 45,45). Les cellules de ce revêtement sont groupées ensemble suivant leur grandeur ; de même que chez la Scutigère, on observe un îlot de cellules plus volumineuses que toutes les autres, occupant le même point que chez ce type, c’est-à-dire se trouvant dans le tiers interne du bord supérieur du lobe.— Les prolongements de la majeure partie des cellules de l'écorce se perdent rapidement dans la substance médullaire; quelques éléments cependant, situés dans la région _ moyenne dela face postérieure, émettent des tubes nerveux qui se portent dans la commissure œæsophagienne où ils se mêlent aux autres fibres. Nous avons déjà observé le même fait chez la Scuti- gère. Le nerf de Tomosvary (PL IV, fig. 38,43, 44,n. T.) se détache de la face postérieure et inférieure de la substance médullaire du lobe frontal, vers l’union du tiers externe avec le tiers moyen, comme chez la Scutigère, mais il ne sort pas immédiatement du cerveau. [1 exécute un trajet assez long en se portant de dedans en dehors et un peu de haut en bas, à travers l'écorce propre du lobe et la partie inférieure de la masse ganglionnaire externe, et quitte le cerveau à la base du lobe optique dont il suit la direction 90 ‘G. SAINT REMY. en restant presque accolé à lui. La fig. 43, PI. IV, le montre àson point d’émergence, où il est accompagné d’une petite trachée. Organe optique lobulé. — T’organe optique lobulé (PI. IV, fig. 37, 38, 42, 45) est situé à la partie antérieure et supérieure du lobe frontal, et s'enfonce en partie dans sa substance médullaire. Il est constitué par un noyau de substance ponctuée divisée en balles secondaires, la masse lobulée (m. L.) située sur le bord antéro- interne du lobe frontal, qui recoit en dehors les prolongements d’une accumulation de cellules chromatiques, la masse ganglion- naire externe (m. g.e.), par l'intermédiaire du cordon médullaire externe (c. e.), et qui envoie en dedans un cordon médullaire interne (ce. à.) allant s’unir en partie à une balle médullaire médiane (6. m.) située à la face supérieure du cerveau, en partie à la moitié simi- laire du cordon de l’autre côté. La masse lobulée (P1.IV, fig. 38, 42, 43, m. L.) forme un groupe de 6 à 7 balles, grossièrement sphériques, de substance ponctuée dense et fortement colorée par l’acide osmique, réunies par de la substance à structure lâche dans laquelle elles sont plongées, et dont elles représentent en quelque sorte des condensations. Ces balles mesurent environ 35 11 de diamètre ; leur texture est serrée ; leur contour n’est pas absolument régulier, mais présente quel- ques dentelures qui s’enfoncent dans le cordon externe. Elles peu- vent être reliées deux à deux par un tractus de même substance ; deux sont situées immédiatement sous le névrilemme. La masse lobulée donne insertion, en dehors, au cordon médullaire externe ; en dedans, elle émet le cordon médullaire interne. Le cordon médullaire externe (P1.IV, fig. 37, c. e.) prend naiïs- sance dans la masse ganglionnaire externe : aussi devons-nous étu- dier celle-ci tout d’abord. Cette masse ganglionnaire (PI. IV, fig. 37,938, 43, 45, m.9.e.) est un îlot de petites cellules chromatiques situé en dedans de la base du lobe optique, sur le bord de l’extrc- mité du lobe frontal postéro-supérieur. Ses éléments se présentent comme de petits noyaux arrondis, fortement colorables, mesu- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 94. rant environ 5 11 de diamètre ; leurs prolongements, en se réunis- sant vers la face antérieure de la masse, donnent naïssance à une sorte de gros pédoncule aplati (PI. IV, fig. 37, c. e.) qui s’enfonce, d’arrière en avant et un peu en dedans, au sein de la substance ponctuée du lobe frontal, dont il gagne ensuite la surface antéro- postérieure où il reste à découvert; là il s’infléchit en dedans et se porte dans la masse lobulée. C’est à ce pédoncule que nous donnons le nom de cordon médullaire externe. La fig. 37, PI. IV, le montre en coupe horizontale dans une partie de son trajet, et fait voir son origine au sein de la masse ganglionnaire. Sur la coupe transver- sale représentée fig. 43, PI. IV, on reconnaît, à gauche, l’extré- mité interne de ce cordon, et à droite, la section de son extrémité externe près de son origine. La substance médullaire qui le consti- tue est caractérisée par sa grande homogénéité sur les prépara- tions à- l’acide osmique; elle ne prend néanmoins qu’une très faible coloration sous l'influence de ce réactif. Ce cordon externe s’observe le mieux sur les coupes horizontales et les coupes trans- versales. En abordant la masse lobulée, il s’insinue entre les balles médullaires avec lesquelles il se soude, en même temps qu'il se fusionne aussi avec la substance ponctuée lâche qui les englobe. On voit par cette description que les rapports de la masse gan- glionnaire et du cordon externe avec la masse lobulée sont les mêmes que ceux de la masse ganglionnaire externe et de la tige externe avec la masse médullaire commune dans l’organe pédonculé de la Scutigère. Néanmoins, si le rôle physiologique de la masse gan- glionnaire externe, vis-à-vis de la masse lobulée est vraisembla- blement le même que celui de l’accumulation ganglionnaire de même nom chez la Scutigère, vis-à-vis des parties médullaires en rapport avec elle, il ne semble pas probable qu’il existe entre les deux des relations morphologiques, ou du moins nous n’oserions tenter d’en proposer, car nous ne trouvons aucune homologie certaine entre les autres pièces de l'appareil lobulé et celles de l’organe pédonculé. Le cordon médullaire interne (PI. IV, fig. 38, 43-45, c. à.) qui 92 G. SAINT REMY. relie la masse lobulée à la balle médullaire médiane, se détache spécialement des deux balles lés plus internes. Ellesse prolongent, comme le montre la coupe sagittale représentée fig. 42, pl. IV, la supérieure en bas, l’antérieure en arrière, etse soudent à angle droit; c’est de leur point de réunion que part en dedans le cordon médul- laire (c. 2.). Ce tractus ne gagne pas directement la balle médiane, qui est située dans un plan postérieur par rapport à la masse lobu- lée ;il décrit un arc à concavité supérieure, en se dirigeant toujours en arrière et en dedans. À son origine ce cordon est à peu près cy- lindrique (P1. IV, fig. 38, c. 1.), puis sa face postérieure s'aplatit, et il devient demi-cylindrique. IL se dédouble alors par une sorte de clivage qui sépare et écarte légèrement de sa face antéro-posté- rieure une lame d’abord mince, puis plus épaisse ; cette branche de supérieure devient tout à fait antérieure, et affecte la forme d’une gouttière embrassant l’autre branche (postérieure) dont le diamètre augmente. La branche antérieure (PI. IV fig. 44, c. .”) est formée de substance ponctuée, de structure fine et homogène peu colo- rable ; elle s'étend transversalement, à peu près horizontalement, au-devant et un peu au-dessous de la balle médiane, et s’unit à son homologue de l’autre côté, en constituant ainsi une commissure transversale qui relie les deux organes lobulés. Sa branche posté- rieure (PI. IV, fig. 44, 45, c. 1.””), plus grosse, complète l’arc com- mencé par la partie antérieure du cordon, et se porte, en haut et en arrière, jusqu’à la balle médiane qu'elle aborde par sa face anté- rieure. Elle est constituée par de la substance ponctuée fibrillaire, qui prend une coloration foncée par l'acide osmique. La balle médullaire médiane (PI. IV, fig. 38, 45, b. m.) est une masse de substance ponctuée finement réticulée, très fortement colorée en noir par l’acide osmique, qui est située immédiatement sous le névrilemme de la face supérieure du cerveau, sur la ligne médiane. Elle est de forme hémisphérique, sa face plane tournée en bas, et fait saillie au-dessus de la surface de la substance ponc- tuée des lobes frontaux. Les branches postérieures des deux cor- we. À 2 p k ’ “ 3 ee b À CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 93 dons internes, droit et gauche, s’y enfoncent et s’y perdent ; elle semble donc avoir pour but de les réunir. Mais, de plus, elle est en relation avec la substance médullaire des lobes fronta1x, dans les- quelles elle est en partie plongée, et dont elle n’est aucunement séparée. Au-dessous et en avant de la balle médiane, au niveau de la partie inférieure des arcs formés par les cordons médullaires internes, on observe sur les coupes horizontales un tractus médul- laire de coloration foncée qui suit le bord antérieur des lobes fron- taux, et s'étend entre les deux masses lobulées. Il ne semble pas cependant que ce tractus soit destiné à les relier, car ses extrémités ne pénètrent pas entre les balles, et se perdent avant d’arriver aux masses ; de plus, il part de la face postérieure des traînées fibril- laires qui s’enfoncent dans la substance ponctuée des lobes frontaux. Aïnsi que nous l’avons dit, il est difficile de trouver, entre l'or- gane lobulé du Lithobius et l'organe pédonculé de la Scutigère, des homologies sérieusement établies. Nous indiquerons cependant une comparaison qu’il est permis de faire, à condition de ne pas lui donner plus d'importance qu’elle n’en peut avoir. On peut compa- rer la masse ganglionnaire externe et le cordon externe avec la masse Jlobulée tout entière, à la masse de même nom et à la tige externe de l’organe pédonculé ; les balles médullaires sont peut- _ être les représentants des condensations que nous avons observées dans la tige, comme points de concentration des prolongements émis par les masses ganglionnaires externe et moyenne. La masse ganglionnaire interne, et probablement aussi la masse moyenne, d’une part, la masse médullaire commune et le tubercule interne de la Scutigère, d'autre part, feraient défaut. Quant au cordon interne divisé en deux branches, il représenterait chez le Lithobius les deux pédoncules, qui auraient ici une importance physiologique plus grande, puisqu'ils établissent des relations directes entre les deux organes droit et gauche. La balle médullaire médiane serait une formation nouvelle répondant à un double but: non seulement 91 . . G, SAINT REMY. elle réunit les deux cordons internes, qui le sont déjà par leurs branches antérieures, maïs elle les met en même temps en relation avec la substance ponctuée des lobes frontaux. Ainsi les organes lobulés du Lithobius seraient les homologues des organes pédon- culés de la Scutigère, avec un développement moindre, mais cepen- dant avec des relations réciproques plus complètes. | DEUTOCÉRÉBRON. — Le deutocérébron (PI. IV, fig. 39, 42-45, L. a.), situé au-dessous et en avant du protocérébron, se compose des parties que nous sommes habitués à y trouver: les lobes anten- naires et la commissure antennaire. Les lobes antennaires (L. a.) sont plutôt piriformes qu'ovoides ; ils sont soudés, par leur face supérieure aplatie, à la face inférieure des lobes frontaux ; en arrière, ils sont en relation avec les commis- sures œsophagiennes (PI. IV, fig. 42, C. æs.) et sont unis par leur bord inférieur et interne aux lobes tritocérébraux. Leur petite extré- mité, dirigée en avantetun peu en dehors, se continue par le nerf antennaire. [ls sont constitués par une masse centrale de substance ponctuée et une écorce cellulaire peu considérable qui revêt la face inférieure et la face interne. La substance médullaire est caracté- risée par sa structure moins fine et moins régulière que dans le protocérébron, et par la présence d’un nombre bien plus considé- rable de tubes nerveux distincts, dont quelques-uns sont très volu- mineux. Cette masse est en relation, dans sa région postérieure et supérieure, avec la substance du lobe frontal avec laquelle elle est fusionnée, et dont elle reçoit un volumineux paquet de fibrilles qui prend naiïssance vers la base du lobe optique, à l'extrémité externe du lobe frontal. Ce faisceau suit le bord antérieur de ce lobe pour se perdre dans la portion supéro-postérieure du lobe antennaire. Nous avons déjà constaté des faits analogues chez la Scutigère. On ne voit pas avec autant de netteté que dans ce type, certaines cellules du lobe frontal envoyer leurs prolongements dans le lobe antennaire ; on peut cependant l’observer pour un petit nombre d’éléments du bord postéro-supérieur. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 95 La trame de la substance médullaire est plus serrée dans la région antérieure que dans la région postérieure, et on y voit, du côté interne, un grand nombre de glomérules olfactifs (PI. IV, fig. 89, gl.). Ces condensations se colorent avec une grande intensité sous l'influence de l'acide osmique, et se présentent sur les coupes comme autant de taches noires plus ou moins ovalaires. Leur forme est irrégulièrement ovoïde ou piriforme, et leur taille est variable (environ 30 {4 de diamètre). Beaucoup de ces glomé- rules sont situés à la limite de la substance médullaire ct de l'écorce ganglionnaire. Vers la face inférieure, les condensations ont une texture moins dense, qui se rapproche plus de celle de la substance ambiante ; elles prennent une forme allongée et offrent par conséquent des caractères un peu différents de ceux des vrais glomérules. Sur toute la surface des glomérules, comme nous l’avons toujours vu, leur trame plus serrée se continue franchement avec la trame fibrillaire lâche qui les entoure, mais en avant ces formations émettent, par leur extrémité un peu effilée, des faisceaux fibrillaires qui se réunissent pour prendre part à la formation du nerf antennaire. Ces glomérules olfactifs rappellent donc, au premier abord, ceux des Insectes; cependant ils en différent quant à la façon dont s’éta- blissent leurs relations avec la substance médullaire générale et les nerfs olfactifs. Chez les Insectes,en effet, le slomérule estune sphère assez régulière, parfaitement limitée, reliée à la masse centrale du lobe olfactif par un pédicule court, également formé de substance ponctuée. Les faisceaux de fibres du nerf olfactif s’insinuent entre les glomérules, et disparaissent dans la substance centrale du lobe, et c’est par l’intermédiaire de cette substance médullaire qui en- veloppe les glomérules, que ceux-ci sont en rapport avec les fibres olfactives. Nous avons vu une disposition analogue chez les Chilognathes ; elle est inverse chez les Chilopodes. Les glomérules en relation avec la masse centrale du lobe par toute leur surface, ont leur petite extrémité, leur pédicule si l’on veut, tournée non 96 G. SAINT REMY. pas vers l’intérieur, mais en avant et un peu en dehors, vers le point d'insertion du nerf antennaire; c’est par ce pédicule qu'ils reçoivent les fibres de ce nerf. Ils sont donc directe- ment en relation avec les fibres olfactives, au lieu que chez les Insectes ils ne sont en communication avec elles que par l'inter- médiaire de la substance ponctuée générale du lobe. Il semble que la disposition qu’on observe chez les [Insectes soit plus parfaite au point de vue physiologique, car elle doit avoir pour résultat une diffusion plus complète, si l’on peut s'exprimer ainsi, des percep- tions recueillies, un groupe de fibres n’étant pas en rapport avec un glomérule en particulier, comme c’est le cas dans le lobe ol- factif des Chilopodes, mais avec plusieurs et peut-être avec tous. Il est à peine besoin de faire remarquer que cette observation s'applique aussi bien aux condensations rubanées de la Scutigere, qu'aux glomérules proprement dits des autres genres, car leurs rapports avecles fibres olfactives et la substance médullaire am- biante sont les mêmes. Outre lesfbrilles en RUE avec les glomérules olfactifs, d’autres éléments concourent aussi à la formation du nerf antennaire. Un grand nombre des fibres qui le constituent, sortent de la substance ponctuée à structure lâche du lobe ; d’autres viennent d’une masse fibreuse centrale (P1. IV, fig. 44, 45, m. f.), qui est l’homo- logue de la masse lamelleuse du lobe antennaire de la Scutigère. Cette masse médullaire n’est pas divisée en couches lamellaires comme dans ce type, mais en cordons fibrillaires au milieu desquels se voient des tubes nerveux assez gros ; elle est de forme pyra- midale allongée, et orientée de dedans en dehors, de haut en bas et d'arrière en avant. Elle a les mêmes relations que chez la Scutigère, car elle paraît recevoir une partie du petit nombre de fibres envoyées par les cellules du lobe frontal, et se montre aussi comme la continuation directe d’une grande partie des élémentsdela commissure antennaire. Tous ces éléments étrangers aux glomérules se groupent dans la portion externe de la région antérieure du lobe, CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 97 où ils forment une masse considérable à structure fibrillaire ; la face externe de cette région est occupée par des tubes nerveux qui viennent des parties postérieures. On en remarque aussi de tres gros au centre, entre cette région et la région glomérulée. Le nerf antennaire (PI. IV, fig. 42, n. a.) se constitue aux dépens de toute cette partie antérieure du lobe, de laquelle sortent ses tubes comme un gros faisceau compacte, unique ; mais sa structure n’est pas homogène. Les fibres de la moitié interne, qui proviennent de la région glomérulée, sont plus ténues, plus semblables entre elles et plus colorées par l’acide osmique, que celle de la moitié externe issues de la région non glomérulée. Il est très vraisemblable que les premières sont des conducteurs sensitifs, et les secondes des éléments moteurs, d'autant plus que nous voyons toujours les fibres des nerfs sensitifs (nerfs optiques par exemple) être plus fines et plus délicates que celles des nerfs moteurs. Le nerf antennaire se divise donc en un cordon sensoriel et en cordon moteur intime- ment soudés. Nous avons déjà vu qu'une pareille disposition existe chez la Scutigère. Un petit filet nerveux se détache de la face de du lobe deutocérébral, un peu en arrière du point où le nerf antennaire se différencie ; il est dirigé en avant et en dehors. — Le lobe anten- naire fournit, comme à l'ordinaire, le nerf viscéral pair (PI. IV, fig. 40, 43, n. v.), beaucoup plus gros, qui prend naissance sur son bord inférieur et externe ; il naît de la masse ponctuée générale du lobe, dans la région postérieure, et traverse obliquement le névrilemme d’arrière en avant, puis se dirige immédiatement en dehors. Nous avons peu de choses à dire sur l'écorce ganglionnaire du lobe antennaire. Elle est formée exclusivement de cellules riches en protoplasma, dont les prolongements s’enfoncent et se perdent profondément dans la substance ponctuée. La commissure antennaire qui forme la région moyenne du deu- tocérébron et relie les deux lobes, s'étend, sous forme de lame, à ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GËN, — 2° SÉRIE. — T. V Dis, — SUPPL. 1887. — Mem. 98 > G. SAINT REMY. la face inférieure du protocérébron. Elle est formée de substance ponctuée fibrillaire en avant, et de gros tubes nerveux en arrière. Une partie de sa substance ponctuée fibrillaire forme la masse fi- breuse dont nous avons parlé, qui prend part à la constitution du nerf antennaire. Ses autres éléments se perdent dans la substance générale du lobe. En somme, elle ne réunit pas seulement les deux lobes, mais aussi les deux nerfs directement, comme cela existe chez la Scutigère. TrirocéRéBRON. — Le tritocérébron (PI. IV, fig. 40,43, 44, 45) se compose, comme précédemment, des lobes tritocérébraux (L. t.) et du pont stomato-gastrique ( P.) ; mais les lobes sont encore rela- tivement moins développés que chez la Scutigère, tandis que le pont est beaucoup plus volumineux. Le lobe tritocérébral, réduit à une petite masse de substance ponctuée présentant quelques condensations, est reconnaissable à sa teinte générale plus foncée ; ilest situé sur le bord inférieur et interne du lobe antennaire dans sa partie postérieure (PI. [V, fig. 43,45, L. t.). Cette masse ponctuée est comprise entre le névri- lemme en dedans et en bas, le noyau médullaire du lobe anten- naire en haut, et la couche ganglionnaire qui revêt la face infé- rieure de celui-ci, en dehors ; une partie de ces éléments doit dé- pendre du lobe tritocérébral. Latéralement, ce lobe est délimité par une lame conjonctive ; mais en haut son contour cesse d'être net, et sa substance se continue avec un tractus médullaire qui suit le bord interne du lobe antennaire (PI. IV, fig. 45, c. t.)et se porte à la rencontre de son homologue du côté opposé, avec lequel il se soude à la face inférieure du protocérébron. Il existe donc ici une commissure tritocérébrale sus-æsophagienne, analogue à la commissure antennaire, et que nous n’avions pas observée chez les Chilognathes et la Scuticère ; elle remplace évidemment la com- missure transverse de l’anneau œsophagien. En avant, le lobe se continue avec le pont stomato-gastrique ; en arrière, avec une lame de substance ponctuée fibrillaire qui suit le bord inférieur et CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 99 interne de la commissure œsophagienne (PI. IV, fig. 46, Z. #.), accompagnée d’une couche de cellules nerveuses qui s’étend sur la face inférieure de la commissure. Cette lame ne reste pas suff- samment caractérisée dans toute son étendue pour qu’on puisse la suivre avec certitude jusqu’au point de réunion des commissures “æsophagiennes, et dire si elle conserve jusque-là son individualité, et se fusionne avec son homologue du côté opposé, ce qui cepen- dant paraît assez vraisemblable. Le lobe tritocérébral, un peu en arrière du point d’origine du pont stomato-gastrique, donne naissance à deux nerfs qui se déta- chent tous deux de son bord externe presque en même temps ; le plus gros sort un peu en avant et en dehors du second qui est beau- coup plus grêle. Ces deux nerfs sont les homologues de ceux que nous avons indiquées dans le lobe tritocérébral de la Scutigère, et doivent innerver la lèvre supérieure. — La lame qui continue le lobe dans la commissure, fournit également deux filets nerveux de taille différente, qui en sortent à peu près simultanément un peu en arrière du point où la commissure se sépare du cerveau. Plus en arrière, vers le milieu de la commissure, cette lame donne encore un nerf assez gros qui se porte sur le tube digestif. Nous avons examiné attentivement s’il ne s’unissait pas avec le nerfcorrespon- dant de l’autre côté, pour former une petite commissure transverse ; mais nous avons pu nous assurer qu'il n'en estrien. Cette paire de nerfs représente les nerfs œæsophagiens que nous avons vus sortir de cette région chez le Gloméris, de même que la couche de cellules ganglionnaires qui accompagne la lame médullaire trito- cérébrale sur la commissure œsophagienne, représente le petit ganglion œsophagien de l’Iule, du Gloméris et des Crustacés supérieurs, comme nous l’avons dit à propos de la Scutigère. Le pont stomato-gastrique (PI. IV, fig. 40, P.) se présente com- me un cylindre très aplati d'avant en arrière, qui décrit un arc très prononcé, à concavité postérieure, du fond duquel se détache le nerf stomato-gastrique volumineux. Ce pont, assez gros, est 100 G. SAINT REMY. presque entièrement constitué par de la substance ponctuée fibril- laire ; il existe seulement une zone de cellules ganglionnairesoceu- pant la face antéro-supérieure. Dans la région antérieure, les fibrilles de la substance médullaire sont parallèles, dans la région postérieure, elles s’incurvent en arrière sur la ligne médiane pour former le nerf stomato-gastrique. Celui-ci est constitué par un cor- don cylindrique de substance ponctuée fibrillaire, s’insérant sur le pont par une base élargie en forme de cône tronqué ; la couche ganglionnaire du pont se prolonge quelque peu sur la face supé- rieure de sa racine. Vers son point de séparation du lobe propre- ment dit, le pont émet de chaque côté, sur sa face inférieure, un petit filet nerveux. Comime nous l’avons dit, la commissure transverse de l’anneau œsophagien, qui existe constamment chez les Crustacés supé- rieurs, les Insectes et les Myriapodes Chilognathes, où elle repré- sente la commissure tritocérébrale, et que nous avons observée très réduite chez la Scutigère, fait ici complètement défaut, et c'est le cas de tous les autres Chilopodes. La commissure tri- tocérébrale se trouve reportée au-dessus de l’œsophage, et fait partie du cerveau proprement dit. Ce fait est assez curieux pour mériter un examen attentif, non pas que les relations qui doivent exister physiologiquement entre les deux moitiés du ganglion cérébral ne nous paraissent pas suffisamment établies par la commissure que nous avons décrite, et, au besoin même, par le pont stomato-oastrique. Mais comme la réunion des deux moitiés de ce ganglion par une commissure sous-æsophagienne, est un des faits les plus constants chez une grande partie des Arthro- podes, nous avons cru devoir rechercher s’il n'existait pas encore ici un vestige d’une telle commissure. L’examen minutieux des pièces disséquées et des séries de coupes nous a convaincu que si une commissure sous-æsophagienne existe, elle ne peut se trouver qu'au-delà du point de réunion des commissures œæsophagiennes, , \ . . . Q \ A cest-à-dire dans la première masse ganglionnaire de la chaîne CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 104 ventrale. Mais, comme nous l’avons dit, les bandes de substance fibrillaires qui représentent la portion œsophagienne du tritocé- rébron, ne gardent pas jusque-là leur individualité, au moins pour nos moyens d'investigation ; de sorte qu’il nous est impos- sible d'affirmer qu’elles se continuent jusque-là et s’y réunissent. D'ailleurs, même dans le cas où cette réunion se produirait, le tritocérébron n’en resterait pas moins privé, selon nous, d’une partie absolument homologue, au point de vue anatomique, de la commissure transverse, puisque chez la Scutigère, où cette com- missure existe, la réunion des deux bandes tritocérébrales œæsopha- giennes se produit aussi. Et, au surplus, si nous avions résolu d’une facon affirmative la question de l’existence d’une commis- sure tritocérébrale sous-œæsophagienne chez le Lithobius, il n’en resterait pas moins vrai qu’une telle commissure peut faire défaut, car chez les autres Chilopodes (Scolopendrides, Géophilides) son absence ne fait point de doute. Nous admettons donc chez les Chilopodes, moins la famille des Scutigérides, l'absence de la commissure transverse de l’anneau œsophagien, et son rempla- cement par une commissure sus-œsophagienne faisant partie du cerveau proprement dit, qui, physiologiquement, lui est équiva- lente, puisqu'elle relie comme elle les deux moitiés du tritocéré- bron. Les commissures œsophagiennes ont la forme de deux cônes tron- qués, allongés, dont les petites bases, peu différentes des grandes, se soudent pour former le commencement de la chaîne ventrale. Ces commissures (PI. IV, fig. 46) sont légèrement aplaties sui- vant un plan dirigé de haut en bas et de dedans en dehors. Elles sont formées d’un mélange de tubes nerveux et de substance ponctuée ; le tiers supérieur est occupé exclusivement par de gros tubes. Sur le bord inférieur, au moins dans la moitié antérieure de la commissure, on remarque la lame plus dense qui continue le lobe tritocérébral, et dont nous avons suffisamment parlé 102 G. SAINT REMY. (PL IV, fig. 46, L. t.) ; la presque totalité de la face inféro-externe est revêtue d’une couche de cellules ganglionnaires qui semble appartenir, au moins en grande partie, au tritocérébron. Comme à l'ordinaire, chaque commissure œæsophagienne tire son origine de la moitié correspondante des trois ganglions cérébraux. La majeure partie de ses éléments sortent directement de la sub- stance médullaire, dans la région où la commissure est soudée au ganglion ; cependant on observe quelques groupes de fibres ayant une origine plus éloignée. Aïnsi l’écorce du lobe frontal lui fournit des tubes nerveux ; il existe, comme chez la Scutigère, un faisceau naissant vers l'extrémité externe du même lobe et venant se mêler aux éléments du bord interne de la commissure. De même, on observe, à la face inférieure du lobe antennaire, une importante masse fibreuse qui provient de la région antérieure, et se porte horizontalement en arrière dans la commissure œsophagienne (PI. IV, fig. 42, f.) FAMILLE DES SCOLOPENDRIDES. GENRE SCOLOPENDRA L. (PL V, fig. 4-58.) Dans le genre Scolopendra L., nous avons pris pour objet d'étude l’espèce Sc. morsitans Gerv. (Sc. cingulata Latr.) qui était tout indiquée, en raison de sa grande taille et de son abon- dance relative aux environs de Banyuls. La forme extérieure du cerveau (Fig. V ) rappelle beaucoup celle du cerveau da Lithobius, mais avec une apparence plus massive. Les lobes frontaux (Z. f.), toute proportion gardée, sont plus épais et fournissent un nerf de Tomosvary volumineux (n. 7.). Les lobes optiques (Z. 0.) sont très courts et à peine distincts ; il en part un faisceau de quatre gros nerfs optiques correspondant à an même nombre d’yeux. Les lobes antennaires sont plus gros et plus rapprochés l’un de l’autre {(L. a.) ; au lieu d’un nerf anten- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 103 naire unique, comme chez le Lithobius, il sort de chacun d'eux un faisceau considérable de petites branches qui pénètrent en masse dans l’antenne. On y remarque également un petit nerf tégu- mentaire accessoire, et un nerf viscéral pair, accompagné d'un filet accessoire (n. v.). Le pont stomato-gastrique est très court, très épais et presque complètement accolé aux lobes frontaux ; le nerf stomato-gastrique est, au contraire, très grêle (n. s.). Les nerfs de la lèvre supérieure forment une paire se détachant de la face inférieure du cerveau (n. L.); ils sont ici plus visibles que dans les autres genres, et nous avons pu, sur des cou- pes totales de la tête d’une Scolopendre de taille moyenne, observer leurs rela- tions. Quant aux commissures œsopha- siennes, elles sont très longues et cylin- driques ; nous avons eu occasion de dire qu’on ne trouve pas de commissure transverse dé l’anneau œsophaoien. . Le cerveau de la Scolopendre a été étudié par Ranzani et par Alessandri, FIG. v. (1) dans d’anciens mémoires que nous n’a- vons pu nous procurer, puis par Kutorga et par Brandt. Les données de Kutorga (2) sont très incomplètes. Il n’a dis- tingué que trois branches dans le faisceau des nerfs optiques, et a pris le nerf de Tomosvary pour le nerf du quatrième œil. Il n’a pas reconnu l'existence du pont stomato-gastrique, ce qui s’ex- plique, il est vrai, par l’accolement de cette partie au reste du cerveau. [1 n’a pas vu d’ailleurs le nerf stomato-gastrique. — Quant à Brandt, la figure qu’il donne est tellement inexacte, (1) F1G. v. — Cerveau de Scolopendra morsitans, Gerv., vu par la face in- férieure. Gr. 10 fois. —- ». £., nerf tégumentaire ; — n.v., nerfs viscéraux, Les autres lettrescomme dans la FIG. II, page 37. _(2) Kutorga, Scolopendrae morsitantis anatome. Petrop. 1834, 104 G. SAINT REMY. qu’on peut se demander si elle provient réellement de Sc. mor- sitans comme il l’indique (1). Leydig (2) cite Rymer Jones et Gade comme ayant donné des figures du cerveau de la même espèce ; mais nous n'avons pu consulter les ouvrages dans lesquels elles se trouvent. | D'une facon générale, la structure interne du cerveau dans ce genre se rapproche considérablement de l’organisation que nous observée chez le Lithobius, dont elle reproduit les traits essen- tiels ; mais elle en diffère par quelques points. Nous l'avons étu- diée principalement sur des pièces traitées soit à l’alcool, soit à la liqueur picro-sulfurique, la grosseur de l’organe et surtout l’é- paisseur considérable du névrilemme étant peu favorables à l’em- ploi de l’acide osmique. Nous avons traité par ce dernier réactif le cerveau de quelques individus jeunes, de taille plus faible, sur lesquels nous avons examiné les détails. PROTOCÉRÉBRON. — Le protocérébron de la Scolopendre, comme celui du Lithobius, occupe la région supéro-postérieure du cerveau. On y distingue également : le lobe optique, le lobe frontal et l’organe lobulé. Lobe optique. — Le lobe optique représente l’extrémité externe, terminée en pointe mousse, du cône formé par chaque moitié du protocérébron (PI. V, fig. 49, 53, 54, L. o.). Il donne nais- ance, à son extrémité, au nerf optique ; par sa base interne, il est soudé au lobe frontal, si intimement qu’on ne reconnaît pas extérieurement de limite entre lui et ce lobe. La forme du lobe optique s’étudie le mieux sur les coupes horizontales (PI. V, fig. 49, L. o.). Il est constitué par une masse médullaire épaisse (m.m. L.) à laquelle s’ajoute un très petit nombre de cellules seu- lement. Sur ces coupes on reconnaît que cette masse médullaire est divisée en deux parties : une interne formant une sorte de gros (1) Brandt, Loc cit. (Muudmagen der Evertebraten.) (2) Leydig, Vom Bau... p. 256. — Rymer Jones in Cyclop. of An. and Fhys. p. 147 ; — Gade in Wiedemann'’s zool. Magazin, I. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 105 pédoncule court (p.), qui se sépare nettement du lobe frontal ; et une externe plus large, étalée en avant et en bas, que nous appe- lons la lame externe (/. e.). Le pédoncule, qui correspond au col que nous avons signalé chez le Lithobius, est bien différencié dans la partie inférieure du lobe optique, où la lame est au contraire très réduite et commence seulement à se montrer ; vers le haut, il diminue de plus en plus, et perd de sa longueur par suite de l'épaisseur de la lame. Ce pédoncule est en outre plus épais de haut en bas que d’avant en arrière ; sa coupe dans le plan sagittal est un rectangle à coins arrondis. Il est formé de substance ponc- tuée semblable à celle de lobe frontal, sauf dans sa partie supé- rieure où sa structure est plus dense, comme dans la lame externe. Celle-ci est une masse de substance médullaire homogène, plus fortement colorable, étalée sous le névrilemme et s’avançant forte- ment en avant. Les fibres des nerfs optiques en sortent brusque- ment au niveau même du névrilemme qu’elles traversent indivi- duellement, bien que déjà groupées en quatre faisceaux, comme on peut le voir sur une coupe sagittale passant exactement par la pointe externe du lobe. Immédiatement au delà du névrilemme, toutes ces fibres forment quatre nerfs volumineux et courts, qui se rendent chacun à un œil, tous quatre restant accolés ensemble et formant un groupe compacte. L’écorce ganglionnaire du lobe optique est extrêmement réduite. Le pédoncule est complètement recouvert, sauf sur sa face infé- rieure, de petites cellules qui sont la continuation de la couche enveloppant la région externe du lobe frontal ; la lame externe, de même que la masse médullaire chez le Lithobius, ne possède pas de revêtement ganglionnaire, mais on observe quelques cellules sur son bord antérieur. Sur les coupes de pièces fixées à l'acide osmique, nous avons reconnu l'existence du grand cordon médullaire axial qui traverse les lobes frontaux et s’étend entre les lobes optiques. On le voit plus difficilement sur les pièces traitées à l'alcool ou à la hqueur 106 G. SAINT REMY. picro-sulfarique (P1. V, fig. 56, c. L.). On observe également un système de fibres peu abondantes, longeant le bord postéro-supé- rieur du cerveau. Les relations des deux lobes optiques sont donc assurées de la même façon que chez le Lithobius. Lobe frontal. — Le lobe frontal se présente avec les mêmes caractères que dans le genre précédent, et nous n’insisterons pas sur sa strucinre, pour éviter des répétitions inutiles. — Le nerf de Tomosvary naît de sa substance ponctuée centrale sur son bord postérieur, vers l’union du tiers externe avec le tiers moyen, mais exécute, comme chez le Lithobius, un certain trajet dans l'écorce ganglionnaire à travers la masse ganglionnaire externe, et sort à la base du lobe optique pour continuer sa course parallèlement aux nerfs des yeux. Organe lobulé. — A la face supérieure de la substance ponc- tuée du lobe frontal, on retrouve, avec quelques différences de structure, la formation que nous avons fait connaître dans le type précédent sous le nom d’organe lobulé. La partie que nous avons décrite sous le nom de masse lobulée, se présente également sur le bord antéro-supérieur du lobe, à l’union du tiers interne avec le tiers moyen; c’est une masse de substance ponctuée à structure très homogène qui a l’aspect d'une agglomération de balles médul- laires qui se seraient fusionnées vers le centre, en restant dis- tinctes, seulement à la périphérie. Cette masse multilobée fait saillie au-dessus du niveau de la substance ponctuée du lobe frontal, et n’est pas recouverte par l'écorce cellulaire (PI. V, fig. 57, 52, m. l.). De la face inférieure de cette masse lobulée se détachent deux cordons, l’un externe et l’autre interne, qui correspondent aux formations de même nom du Lithobius; leur origine et leur trajet s’étudient le mieux sur les coupes transversales. Le cordon externe (PI. V, fig. 49, 53, c. e.) est également formé par la réu- nion des prolongements cellulaires émis par une accumulation de petites cellules chromatiques, la masse ganglionnaire externe (PI. V, fig. 49, 53-55, 57, m. g. e.) située, comme chez le Lithobius, CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 107 dans la région externe du bord postéro-supérieur du lobe frontal. Ce cordon externe diffère un peu de celui du Lithobius; à son origine, il est très nettement fibrillaire et étalé en pinceau ; il se dirige en dedans en devenant plus compacte et plus homogène, et gagne la face inférieure de la masse lobulée en décrivant un arc très ouvert à concavité inférieure (PI. V, fig. 57). — Le cordon interne (PI. V, fig. 49-59, 54, 55, 58, 57, 47, c. 1.) part de la masse lobulée immédiatement en dedans du point d'insertion du cordon externe ; certaines préparations favorables montrent qu’il tire une partie de ses fibres de ce dernier, fait que nous n'avons pas observé chez le Lithobius. Il descend d'abord en s’inclinant en bas, en dedans et légèrement en arrière, jusque vers le milieu de l'épaisseur du lobe frontal (PI. V, fig. 54, c. à.) ; là il s’amincit : et forme une lame horizontale qui, en se relevant du côté interne, redevient peu à peu cylindrique, remonte en accentuant sa cour- bure, et va se terminer dans un renflement que nous appelons la balle médullaire interne (PI. V, fig. 49, 53, 55, b. i.). Les coupes sagittales et horizontales du cordon interne le montrent formé de deux parties : l’une représentant un cylindre de substance ponc- tuée dense, l’autre formant une lamelle qui revêt ce cylindre, d’abord en arrière de la masse lobulée, puis en haut dans le reste de son trajet. Cette lamelle paraît exclusivement fibrillaire ; elle existe sur toute la longueur du cordon, avec la même importance; tandis que le cylindre, très épais à ses deux extrémités, où il repré- sente les deux tiers du cordon, est très réduit vers le milieu du trajet, ce qui détermine l’amincissement et l’aplatissement du cor- don interne dans sa portion horizontale. La balle médullaire interne est une petite masse de substance ponctuée très dense et très homogène, située tout prés de la ligne médiane presque immédiatement au-dessous de la surface de la substance ponctuée du lobe frontal, dans la région postérieure. Nous voyons donc que c’est surtout dans ses relations avec son homologue du côté opposé, que l'organe lobulé de la Scolopendre 108 G. SAINT REMY. diffère de celui du Lithobius. Les deux parties constitutives du cordon interne de la Scolopendre correspondent évidemment aux branches antérieure et postérieure de la même formation du Lithobius, mais leur destinée n'est plus la même. Dans ce dernier type en effet, l’une des branches se fusionne avec son homologue de l’autre moitié du cerveau, tandis que la seconde va se perdre dans une balle médullaire médiane, de même que son homologue du côté opposé. Il s'établit ainsi des relations très étroites entre les deux organes lobulés, relations que nous ne retrouvons pas chez la Scolopendre ; ici la balle médullaire unique, commune, est rem- placée par deux balles plus petites, isolées, dans chacune desquelles vient se terminer le cordon interne tout entier de l’organe lobulé correspondant. Les relations anatomiques directes entre les deux organes n'existent donc pas ; et si des relations physiologiques sont possibles, ce n'est que par la voie très indirecte de la substance ponctuée générale des lobes frontaux ; cela constitue, nous semble- t-il, un certain degré d'infériorité pour le cerveau de la Scolo- pendre. Nous signalerons ici seulement, immédiatement en arrière des deux cordons internes, droit et gauche, au niveau de leur union avec les balles internes, c’est-à-dire vers le milieu de l'épaisseur du protocérébron, l’existence d’une lame de substance médullaire étendue d’un lobe à l’autre. Cette lame centrale (PI. V, fig. 55, L. c.) est très dense, très homogène ; elle décrit un arc à conca- vité inférieure, mais ces bords externes se relèvent, et sa coupe transversale vers son milieu donne à peu près l’image d’un accent circonflexe très allongé et surbaïissé. Son épaisseur au centre est plus grande que sur ses bords. Elle passe derrière la branche ascendante ou interne des cordons internes, contre laquelle s’ap- plique son bord antérieur , et s’avance même un peu au-delà du plan passant par ses branches. Son bord postérieur est égale- ment arrondi au centre ; ses dimensions antéro-postérieures sont du reste peu considérables. Elle est en relation avec les régions CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 109 plus profondes de la substance ponctuée des lobes frontaux, par des fibres qui se détachent de sa face inférieure et peuvent être suivies assez loin. Nous avons cherché avec soin sielle n’était pas en rapport avec les organes lobulés, mais nous n’avons observé aucune relation directe. DEUTOCÉRÉBRON. — Le deutocérébron, constitué par les deux lobes antennaires réunis par leur commissure, représente deux masses piriformes très voisines l’une de l’autre, et non plus écartées comme chez le Lithobius, mais reliées seulement en arrière et en haut par une lame médullaire située à la face inférieure du proto- cérébron. Ces lobes, au lieu d’être disposés en V comme dans le groupe précédent, sont à peu près parallèles. Leurs rapports sont d’ailleurs les mêmes que dans ce genre. Chaque lobe est libre dans presque toute son étendue sur ses faces interne et externe. Sa face inférieure l'est complètement ; mais sa face supérieure ne l’est qu'en avant, puisque dans sa moitié postérieure il se fusionne en haut avec le lobe frontal ; en arrière il se confond avec la commissure œsophagienne et avec le lobe tritocérébral sur son bord inférieur et interne. Par sa pointe dirigée en avant et un peu en dehors, lelobe antennaire donne naissance au faisceau des nerfs antennaires, et dans cette région, sur sa face externe, à un petit nerf tégumentaire dirigé en dehors ; en arrière et en bas sort le nerf viscéralpair (PI. VI, fig. 51, n. v.) La structure du lobe antennaire offre les mêmes caractères que chez le Lithobius. Les coupes montrent qu’il est constitué en majeure partie par une masse de substance ponctuée à structure plus lâche que celle des lobes frontaux, dans la région antérieure et interne de laquelle se différencient de volumineux glomérules olfactifs piriformes (PI. V, fig. 49, 50, 58, gl.) et quelques traînées de substance médullaire d’une densité intermédiaire à celle des glomérules et à celle du tissu ambiant. Les vrais glomérules sont identiques, sauf leur taille plus considérable, à ceux que nous avons décrits dans le type précédent. Ils sont en relation avec la subs- 110 G. SAINT REMY. tance médullaire ambiante par toute leur surface ; certains se trouvent à la limite de l’écorce ganglionnaire. De leur extrémité conique, dirigée en avant, s’échappent de nombreuses fibrilles groupées en petits faisceaux qui se portent en avant et un peu en dehors pour former à la pointe du lobe olfactif, en se mêlant et s’entrecroisant avec d’autres faisceaux fibrillaires issus de la subs- tance ponctuée centrale, un amas plexiforme (PI. V, fig. 50, 58) d'où sortent les nerfs antennaires. Ces faisceaux de fibrilles, qui viennent des régions plus profondes du lobe et sont étrangers aux glomérules, ont la même origine que chez le Lithobius. Ils pro- viennent soit, pour la plupart, de la substance ponctuée générale du lobe, comme c'est le cas notamment pour un petit nombre de gros tubes nerveux qui se montrent au milieu de lui, soit d'une masse fine fibreuse (PI. V, fig. 56,m. f.) en rapport avec la com- missure antennaire. Elle est de même nature que celle que nous avons vue dans le lobe antennaire du Lithobius ; mais ses dimen- sions sont proportionnellement beaucoup moindres. Elle est l’ho- mologue de la masse lamelleuse du lobe antennaire de la Scuti- gère. Comme elle, elle est la continuation d'une partie des éléments de la commissure antennaire. En raison de sa différenciation, relativement peu accentuée par rapport à la substance médullaire voisine, elle est difficile à voir, si l’on n’est prévenu, sur les pièces fixées à la liqueur picro-sulfuriqne ou à l’alcool, mais elle est très nette sur les pièces traitées à l’acide osmique. Si l’origine des éléments divers qui constituent les nerfs anten- naires multiples de la Scolopendre, est en définitive la même que celle des éléments du nerf antennaire unique du Lithobius, leur mode de répartition à l’extrémité du lobe est tout à fait différent. Chez le [Laithobius en effet, nous avons vu les fibres en relation directe avec les glomérules, réunies à la partie interne de la région antérieure du lobe, constituer la moitié interne, olfactive, du nerf ; les fibres issues des régions profondes non glomérulées du lobe se rassembler au contraire dans la partieantéro-externe et former PS PE de sd motiele ss, 4" rè- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. a la moitié externe, motrice, du nerf antennaire. Chez la Scolo- pendre, il existe non pas un nerf unique, maisun faisceau de petits nerfs distincts, dont chacun, semble-t-il, reproduit la cons- titution du nerf du Lithobius, et renferme à la fois des fibres issues de la région motrice et des fibres issues de la région sensi- tive. Car ici, les tubes nerveux d’origine différente, au lieu de se grouper isolément, se mêlent les uns aux autres dans la région sous-jacente à la base des nerfs, et constituent la masse plexiforme dont nousavons parlé (PI. V, fig. 50, 58). Elle est formée essen- tiellement par de petits faisceaux légèrement ondulés, entrecroisés en arrière, une partie des fibres sorties des glomérules se portant en dehors, une partie des fibres de la région externe se portant en dedans, mais à peu près parallèles en avant ; on y remarque de nombreux noyaux conjonctifs. Au-dessous du névrilemme ces petits faisceaux perdent leur individualité, et toutes les fibres for- ment un groupe compacte. Tous ces tubes nerveux traversent le névrilemme, qui disparaît en quelque sorte pour leur livrer pas- sage, La lame névrilemmatique s’épaissit tout autour du point de sortie de ceséléments. Au sein de la masse des fibres, elle est représentée par une sorte de lame criblée dont le contour interne est seul net ; à l'extérieur le contour est peu reconnaissable, _ sauf dans certains points périphériques où quelques groupes s’écartent un peu de la masse principale, ce qui permet de dis- tinguer une lame névrilemmatique concave à l'extérieur pa” suite de l’atténuation progressive de ses bords sur les nerfs environnants. La masse de fibres qui était indivise sous le névrilemme, se montre séparée en faisceaux distincts, aussitôt après l’avoir traversé. Un peu en arrière du groupe des nerfs antennaires, la région externe du lobe donne naïssance au petit nerf tégumentaire que nous avons indiqué, et qui sort de la région non glomérulée comme chez le Lithobius. Du bord inféro-externe sort également en arrière, le nerf viscéral (PI. V, fig. 51,m. v.), beaucoup plus gros. 112 G. SAINT REMY. 1] prend naissance dans la substance ponctuée, et traverse immé- diatement le névrilemme d’arrière en avant. Immédiatement au- dessous de ce nerf sort un petit filet accessoire très grêle, qui est peut-être celui que Brandt a figuré. La commissure antennaire (pl. V, fic. 56, c. a.) offre les mêmes caractères et la même constitution que chez le Lithobius. C'est une lame fibreuse et médullaire qui suit la face inférieure du procérébron dans la région moyenne et postérieure. Une partie de ces fibresse continuent dans la masse fibreuse peu développée dont nous avons parlé (PI. V, fig. 56,m. [.). La presque totalité ‘à L4 oénérale du lobe an- paraît se perdre dans la substance ponctuée g tennaire. Les relations du lobe antennaire avec le lobe frontal sont les mêmes que chez le Lithobius, et nous n’avons pas à y revenir. Les rapports du lobe antennaire avec la commisure œsopha- gienne sont également les mêmes que dans le genre précédent : une quantité de fibresissues de la masse médullaire,et qui partent de la région inférieure et antérieure, viennent se réunir dans la région postérieure et interne du lobe, et se jettent dans la com- missure œsophagienne. Le deutocérébron ne possède pas un revêtement cellulaire con- sidérable ; la plus grande partie de sa surface est dépourvue d’écorce ganglionnaire comme c’est généralement le cas chez les Myriapodes ; le revêtement ganglionnaire qui est distribué de la même façon que chez le Lithobius, est formé de cellules riches en protoplasma. TRITOCÉRÉBRON. — Le tritocérébron, situé à la partie infé- rieure et postérieure du cerveau, se présente à peu près comme chez le Lithobius; il comprend des lobes tritocérébraux très peu développés (PL V, fig. 55, 56, L. t.) réunis en haut par une com- missure tritocérébrale située à la partie inférieure et postérieure du protocérébron (PI. V, fig. 56, c. &.), et en bas parun pont sto- mato-gastrique très volumineux, comme nous l'avons déjà fait CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 113 remarquer (PI. V, fig. 51, 56, P.). Ce ganglion se distingue ici dans ses rapports avec la commissure œsophagienne : les fais- ceaux de fibres qu'il y envoie ne gardent pas leur individualité, et de plus ne sont accompagnés ni de substance ponctuée, ni de cellules ganglionnaires. Le lobe tritocérébral est moins distinct que chez le Lithobius. Sur les coupes à la liqueur picro-sulfurique ou à l'alcool, on ne peut même le délimiter du lobe antennaire. Îl est plus net sur les coupes à l'acide osmique, où il sa colore un peu plus. Sa substance ponctuée est plus fine et plus homogène, maïs néanmoins il est difficile de fixer ses limites, aussi bien du côté du deutocérébron que du côté du pont stomato-gastrique. Il se montre, sur lescoupes transversales où on l’étudie le plus facilement (PI. V, fig. 55, 56, L.t.) comme une petite masse confondue, du côté supéro-externe, avec le lobe antennaire,se continuant en haut avec la commissure tritocérébrale, en dedans avec le pont stomato-gastrique, et libre seulement en bas, où il fait une saillie prononcée, et limite ainsi le bord interne de la couche cellulaire de la face inférieure du cerveau, appartenant en majeure partie au lobe antennaire, mais dont quelques éléments dépendent du tritocérébron. Sa limite du côté du pont esi marquée à la face inférieure du cerveau par une légère échancrure. La commissure tritocérébrale est une lame de substance ponc- tuée fibrillaire, en forme de fer-à-cheval, qui s’étend d’un lobe à l’autre, en suivant en bas la face interne des lobes antennaires, et en haut le bord inféro-postérieur du deutocérébron. Cette. com- missure est plus nette que chez le Lithobius ; nous avons eu occa- sion de dire, àpropos de cette espèce, qu’elle remplace la commissure transverse de l’anneau œsophagien, et nous n’avons pas à revenir sur la discussion que nous avons donnée à ce sujet. — Le lobetrito- cérébral ne donne naissance qu’au nerf de la lèvre supérieure ,quise détache de son bord inférieur et externe, et perce le névrilemme après un court trajet oblique en bas et en dedans dans le tissu conjonctif. ARCH. DE ZOOL, EXP. ET GÉN. — 2° SÉRIE. — T, V bis, — supp, 1887. — Mém. 8 . 414 G. SAINT REMY. Le pont stomato-gastrique (PI. V, fig. 51-56, P.) est, à tous les points de vue, beaucoup plus développé que chez le Lithobius, et constitue la majeure partie du tritocérébron. Son développement paraît d'ailleurs n'être pas en rapport avec le peu d'imsortance des lobes tritocérébraux, mais surtout. comme nous allons l'expliquer, avec la réduction du nerf stomato-gastrique (PI. V, fig. 51,n. s.). Celui-ci n’est plus en effet une sorte de prolongement du pont lui- même, mais un véritable nerf formé exclusivement de tubes ner- veux assez volumineux, identique comme constitution aux autres filets nerveux émis par le cerveau ou la chaîne ventrale. Il est per- mis de croire que, dans ces conditions, certaines fonctions, qui pouvaient avoir leur siège dans le nerf stomato-gastrique même, sont ici dévolues au pont ; c’est ce qui expliquerait le plus grand développement de ce dernier. Cet organe est constitué par une masse principale de substance ponctuée revêtue d’une écorce gan- glionnaire partielle. La forme de cette masse ponctuée est celle d’un fuseau ou, pour être plus exact, elle représente un cylindre horizon- tal décrivant un arc très ouvert à concavité postérieure, à la face postéro-inférieure duquel s’ajoute dans la région moyenne un bour- relet en forme de cône qui le complète. Cette division n’est pas aussi artificielle qu’on pourrait le croire, car la structure n’est pas absolument la même dans le cylindre et dans le bourrelet. Dans le cylindre la substance est lécèrement fibrillaire dans le sens de l’axe, etils y différencie, de plus, des traînées lamelliformes, homogènes, plus denses et plus colorables. Dans le bourrelet conique qui donne naissance au nerf stomato-gastrique (PI. V, fig. 51, n.s.) la subs- tance ponctuée n’est pas fibrillaire, mais on trouve à son centre un petit îlot de fibres qui y prennent naissance et se portent en arrière et en bas vers sa pointe, d’où sortent un grand nombre de fibrilles accompagnées de noyaux conjonctifs ; c'est là l’origine du nerf stomato-gastrique qui traverse le névrilemme, accompagné de quatre groupes de troncs trachéens volumineux pénétrant dans le cerveau. Le névrilemme s’interrompt en s’épaississant autour du CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 115 nerf, et les trachées sont en quelque sorte englobées dans cette espèces d’anneau. — Le pont donne encore naissance, sur la ligne médiane, mais à la face inférieure, à un petit nerf qu'on peut observer sur les coupes transversales. La face antérieure de la masse centrale ponctuée du pont est complètement recouverte de cellules ganglionnaires de petite et d moyenne taille (PI. V, fig. 52, 53, P.) ; ce revêtement passe à la face inférieure où il s’y ajoute quelques gros éléments, et s’étend également en arrière dans la région moyenne. Le reste de la face postérieure et la face supérieure sont dépourvus de cellules ner- veuses. Les commissures æsophagiennes (PI. V, fig. 51, 58, C. æs. — PI. I, fig. 11), diffèrent notablement de celles de la Scutigère et du Lithobius, par l’absence complète de substance ponctuée et de cel- lules ganglionnaires. Leur structure paraît, au premier abord, toute spéciale et différente de celle des nerfs ; elle s’en écarte en réalité fort peu, et s’explique facilement d’après les idées récem- ment soutenues par Nansen (1), en faveur desquelles elles semblent un fait très probant. Tandis que dans les nerfs, en général, le tissu conjonctif forme à la périphérie une enveloppe mince (névrilemme) et à l’intérieur un système de lamelles, également très minces, divisant le nerf en tubes primitifs sensiblement égaux, dans cette commissure œsophagienne le névrilemme est très épais et en rap- portavec une charpente puissante, dont les ramifications secon- daires et tertiaires délimitent des tubes très inégaux. C’est la pré- sence de la partie de la charpente conjonctive qu’on peut appeler primaire, qui donne à la commissure son aspect particulier sur les coupes. Notons que cette structure s’étudie le mieux sur les pièces fixées à l'acide osmique, et que l’alcool et la liqueur picro-sulfurique lui enlèvent beaucoup de sa netteté en altérant un peu le tissu con- (1) Voy. plus haut page 9, 116 G. SAINT REMY. jonctif ; ces derniers réactifs mettent mieux en évidence les noyaux conjonctifs épars dans la charpente. — L'origine et les relations des tubes nerveux de la commissure sont les mêmes que chez le Lithobius, et se trouvent dans la moitié correspondante des trois ganglions du cerveau. GENRE CRYPTOPS Leach. (PL VI, fig. 59, 60.) On sait que les Cryptops, autrefois rangés dans le genre Scolo- pendra, n’en diffèrent que par des caractères la plupart secondaires, dont le principal est l'absence d’yeux. Il était donc intéressant d'examiner le cerveau de ce type, et de chercher quelles modifica- tions avaient accompagné la disparition de la vision chez ces ani- maux. Nous avons étudié deux espèces, Cr. Savignyi Leach, et Cr. hortensis Leach, qui ne présentent, au point de vue qui nous occupe, aucune différence entre elles. La simple dissection du sys- tème nerveux montre l'absence complète des nerfs optiques. Le protocérébron se termine latéralement de chaque côté par une sur- face arrondie, beaucoup moins effilée que chez la Scolopendre, ce qui permet de supposer au premier abord que le lobe optique, déjà si rudimentaire dans ce dernier genre, a ici complètement disparu. En examinantavec soin le lobe frontal, on peut constater qu'il donne naissance, par sa face postéro-inférieure, un peu en dedans de son extrémité, au petit nerfde Tomosvary, et qu’il n’émet aucune autre branche nerveuse. Dans tous ses autres détails la forme extérieure du cerveau se présente comme chez la Scolopendre. L'étude de la structure interne confirme absolument les indica- tions de ce premier examen. On constate en effet, disons-le de suite, que la structure du deutocérébron et du tritocérébron est la même que dans le cerveau de la Scolopendre. Dans le protocéré- bron, avec les yeux et les nerfs optiques ont disparu les lobes optiques et les deux bandes commissurales que nous avons signalées dans les types précédents comme étant destinées à relier ces lobes, CERVEAU DES ARTHOHODES TRACHÉATES. 117 c’est-à-direle tractus médullaire axial du protocérébron et le groupe de fibres qui seportentd’un lobe à l’autre en suivant le bord supéro- postérieur du cerveau. Ce fait vient donc à l’appuide notre opinion sur le rôle de ces deux commissures, et confirme l'interprétation que nous en avons donnée. La fi. 59, PI. VI, qui représente une coupe passant à peu près par le même plan que la coupe du cerveau de Scolopendre figurée PI. V, fig. 49, permet de juger immédia- tement des principales modifications qu’a subies le protocérébron. Quant aux autres parties de ce ganglion, lobes frontaux et organes lobulés, elles n’ont éprouvé aucune réduction, et les légères modi- fications qu’on y observe sont peu importantes et ne peuvent être considérées comme des simplifications. La structure des organes lobulés est, dans ses points essentiels, celle que nous avons décrite dans la Scolopendre ; maïs quelques particularités secondaires rappellent celles du Lithobius. Ainsi chaque masse lobulée est compacte comme chez la Scolopendre, et le cordon interne qu’elle émet se termine isolément dans une balle médullaire interne, située tout près de la ligne médiane ; mais le cordon externe, au lieu d'effectuer son trajet à l'intérieur de la substance ponctuée du lobe frontal, comme dans ce type, l’exécute à la surface (PI. VI, fig. 60, c. e.) dans presque toute son étendue, comme chez le Litho- bius. La masse ganglionnaire externe (PI. VI, fig. 60, m. g.e.) occupe presque l’extrémité du lobe frontal ; mais ce déplacement, sans importance du reste, est plus apparent que réel, car ül ne résulte pas d’un transport latéral de la masse, mais simplement du raccourcissement du protocérébron par la suppression du lobe optique qui le terminait latéralement. La masse lobulée occupe elle-même une situation un peu plus externe que chez la Scolo- pendre, mais ce n’est pas là un fait important. En somme, l’organe lobulé doit être considéré comme construit sur le type de celui de la Scolopendre, et les légères différences de détail qu’il nous offre se retrouvant chez le Lithobius, on ne peut admettre qu’elles soient le résultat d’un amoiïndrissement du rôle physiologique de l'organe 118 G. SAINT REMY. consécutif à la suppression des sensations visuelles. Considérces d’ailleurs en dehors de toute comparaison morphologique, ces diffé- rences sont elles-mêmes bien minimes, et ne sont pas proportion- nées à l'importance qu’on est en droit d'attribuer au sens de la vue. Les lobes frontaux ne présentent du reste eux-mêmes aucun changement, et sont identiques à ceux de la Scolopendre. Nous retrouvons également ici la lame centrale de substance ponctuée formant une sorte de commissure des lobes frontaux, située immé- diatement en arrière des cordons internes. De même nous recon- naissons vers l'extrémité externe du lobe frontal la région présen- tant des condensations ponctiformes (PI. VI, fig. 59, o. f.) que nous avons vues chez tous les Chilopodes examinés jusqu'ici. Le nerf de Tomosvary naît au même point que chez la Scolopendre, et sort, comme chez elle, plus en dehors, à quelque distance de l’extré- mité du lobe. En un mot, à l'exception des lobes optiques et de leurs dépen- dances directes (commissures), aucune des parties constitutives du protocérébron ne se trouve modifiée par suite de la disparition des yeux, et de la comparaison attentive que nous avons faite des mêmes organes dans les deux genres, en tenant compte de la diffé- rence de taille des animaux et de leurs cerveaux, il résulte d’une façon certaine que non seulement aucune partie du protocérébron moyen n a cessé d'exister, mais que même aucune ne s’est réduite. Des faits analogues avaient déjà été entrevus partiellement chez les Insectes. Rabl-Rückhardt (1), étudiant une espèce africaine de Fourmi complètement aveugle, du genre Typhlopone, constata également l'absence totale des lobes optiques, et la persistance des pièces principales du reste du cerveau parfaitement développées. Toutefois les procédés de recherches et l'état des connaissances relatives à la structure du cerveau des Insectes à cette époque, ne (1) Rabl-Rückhardt, Studien über Insectengehirne. — Archiv für Anato- mie und Phys. 1875. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. lui permirent pas de pousser bien loin le détail de son examen. Notre observation vient donc confirmer l'opinion, généralement admise, que la région moyenne du protocérébron est le siège des facultés psychiques et non pas simplement des perceptions visuel- les. Il est vrai que Weber, chez un Crustacé aveugle | Glyptorotus Sabini), a observé non seulement l'absence des lobes optiques, mais une certaine dégénérescence des lobes moyens du cerveau, dont le tissu était en partie remplacé par de la graisse. Mais ce fait s'explique fort bien, car nous ne songeons pas à nier que les lobes frontaux et leurs appareils ne soient en relation avec la vision ; nous croyons seulement qu’ils ne sont pas exclusivement des dépendances de l’appareil visuel, et qu’ils sont seulement en rapport avec la vue au même titre qu'avec les autres fonctions. La réduction considérable des lobes frontaux que nous avons observée chez le Géophile n’est pas uniquement le résultat de l'absence de la vue, mais est surtout en rapport avec le faible degré de centra- lisation que présente l'organisation de ce type (1). FAMILLE DES GEOPHILIDES. GENRE GEOPHILUS Leach (PI. VI, fig. 61-68) _ Comme le genre Cryptops, le genre Geophilus Lieach est dé- pourvu d’yeux. Mais, outre cette particularité intéressante, le cerveau présente extérieurement une forme toute différente du type habituel, et devait pour ce motif attirer notre attention. Nous avons étudié deux espèces, G. longicornis Tieach et G. subterra- (2) A. F. Forel a fait, chez différentes espèces de Fourmis, des observations qui prouvent que le développement des lobes moyens du protocérébron, et en particu- lier des corps pédonculés, n’est pas en rapport avecle développement des organes visuels, mais avec la perfection des facultés psychiques. Dans ie genre Formica qui renferme les Fourmis les plus intelligentes, les corps pédonculés sont énormes chez les ouvrières et beaucoup plus petits chez les mâles et les femelles dont l'intelligence est moindre ; or les yeux à facettes et le lobe optique sont précisé- ment beaucoup plus considérables chez les mâles que chez les ouvrières. (A. F. Forel, Nouv. mémoires de la Soc. hélvétique des Sc. nat. 1874.) 120 G. SAINT REMY. meus Leach qui ne nous ont montré aucune différence au point de vue qui nous occupe. Le cerveau du Géophile (FIG. vI) se présente comme une petite masse dont la forme, presque carrée, est en réalité celle d’un tra- pèze à grande base dirigée en arrière. Son épaisseur verticale est la moitié de son diamètre transverse ; ses bords latéraux sont ar- rondis, de telle sorte que sa section transversale est un ovale allon- gé. En avant et en arrière, il est échancré sur la ligne médiane. De son bord postéro-inférieur partent, de chaque côté de la ligne médiane, les commissures œsophagiennes, cor- dons cylindriques très grêles et très longs. De chacun de ses angles antérieurs se détache un faisceau de petits filets nerveux destinés à l’an- tenne, qui se dirige en avant et un peu en dehors. Ces faits sont le plus faciles à constater sur les pièces entières, et ont été vus depuis longtemps par Treviranus (2) et Newport (3) ; Fi@. vr. (1) ce dernier a même reconnu l'existence d’un petit nerf latéral difficile à voir, qu il considère comme un nerf optique destiné à un ocelle unique situé à la base de l'antenne. Ce prétendu ocelle est un organe sensoriel ana- logue à celui décrit par Tomosvary chez d’autres types. Walter (4) qui tenta de faire l'étude microscopique du cerveau du Géophile, en l’éclaircissant etle comprimant, n’y observa rien de plus; sa descrip- tion est même moins précise, car il représente une partie des nerfs antennaires dirigés directement en dehors commele seraient des nerfs optiques, et désigne simplement tous ces nerfsantérieurs sous le nom de nerfs des sens. La description la plus complète qui ait été donnée (1) FIG. vi. — Cerveau de Geophilus sublerraneus Leach, vu par la face inférieure. Gr. 45 fois, Lettres comme dans la F1G. 11, page 37. (2), Treviranus, Vermischte Schriften. 11. 1817 (Scolopendra flava, De. Geer.) (3) Newport, Loc. cit. (4) Walter, Mikroskopische Studien über das Centralnervensystem der wir- elloser Thiere. Bonn. 1863. (Scolopendra electrica). CERVEAU DES ARTRHOPODES TRACHÉATES. 191 du cerveau du Géophile, doit se trouver dans l’important mémoi- re de Sograff(1), sur l’embryologie de ce genre ; nous disons « doit se trouver, » car nous ne pouvons en juger que d’après une figure (Fig. 62, p. 36) qui montre le nerfstomato-gastrique impair naissant au fond du sillon médian postérieur, et un nerf viscéral pair se détachant de son bord externe. Sograff, toutefois, ne paraît pas avoir vu une paire de nerfs vraisemblablement destinés à la lèvre supérieure, qui sort du cerveau en même temps que le stomato- gastrique ; elle n’est d’ailleurs reconnaissable que sur les coupes, en raison de son extrême petitesse et de la présence de trachées en ce même point. Le cerveau de ce genre semble, d’après sa forme extérieure, s'écarter beaucoupdu type ordinaire desChilopodes, et l’étude des coupes sériées pouvait seule nous donner des renseignements exacts sur sa constitution. Par cette méthode on se convainc facilement que les trois régions ganglionnaires que nous avons trouvées chez tous les Myriapodes, sont représentées également chez le Géophile, mais avec un développement différent de ce que nous avons vu jusqu'ici. La dissemblance extérieure considérable, entre le cerveau que nous étudions et ceux des familles voisines, tient essentielle- ment à ce changement dans l’importance relative des parties, et à la coalescence des lobes antennaires et tritocérébraux droits et gauches, partout ailleurs séparés ; la forme aplatie de l’organe est due à la réduction considérable du protocérébron, dont les lobes frontaux ne font plus une saillie marquée et ne se voient pas exté- rieurement sur le bord postéro-supérieur. Par suite de la coales- cence surtout, les rapports apparents sont singulièrement modi- fiés entre ce que nous appelons parfois le cerveau proprement dii, d’une part, et la région qui correspond au pont stomato-gastrique, de l’autre. L’intervalle qui les sépare, déjà fortement rétréci chez la (1) Sograff, Embryologie de Geophilus ferrugineus et G. proxzimus. — Trav. Mus. zool. Univ. Moscou, T. IL. 1883 (en russe), Nous devons ce mémoire à l’o- bligeance de l’auteur. 122 G. SAINT REMY. Scolopendre (PI. V. fig. 52, 56, int.) et le Cryptops, devientici une sorte de petit canal linéaire s'étendant obliquement, d’arrière en avant et de bas en haut sur la ligne médiane, dans la partie postérieure du cerveau. En raison de sa direction, ce canalest sectionné obliquement sur les coupes horizontales (PI. V, fig. 65, int.), ou transversales (fig. 68) ; les coupes sagittales pourraient le montrer dans toute son étendue en section longitudinale ; mais comme il est difficile d'orienter exactement un cerveau aussi petit, elles n’en présentent généralement qu’une partie (PI. VI. fig. 69, nt.). Au-dessus et enarrière de ce canal, se trouvent, dans le plan médian, la région moyenne du protocérébron et la commissu- re antennaire, comme dans les genres voisins, mais non une com- missure tritocérébrale; au-dessous et en avant, dans le même plan médian, nous voyons la région moyenne du deutocérébron et letri- tocérébron tout entier, dont les lobes se sont fusionnés entre eux et avec le pont stomato-gastrique, pour former une masse unique. Ces détails sur la topographie du cerveau étant connus, nous pouvons aborder plus facilement l’étude des diverses régions. PROTOCÉRÉBRON, — Le protocérébron, situé, comme dans les gen- res précédents, à la partie supérieure et postérieure du cerveau, au-dessus du deutocérébron, est fort réduit, comme nous l’avons déjà indiqué. Les Géophiles étant privés d’yeux, les lobes opti- ques n'existent pas et le ganglion est limité aux lobes frontaux, eux-mêmes peu développés. Ce sont deux masses de substance médullaire (PI. VI, fig. 61, 65, 67, 68,69, L. f.) en forme de lames ovalaires, épaisses, presque arrondies, réunies en arrièresur la ligne médiane par leur petite extrémité. Ces lobes sont recou- verts, sur presque toute leur face supérieure et leurs bords laté- raux, d'un revêtement compacte de petites cellules pauvres en pro- toplasma, mais dont le noyau, seul visible sur les coupes, est peu chromatique ; ces éléments paraissent intermédiaires aux petites cellules chromatiques vraies et aux cellules à protoplasma abon- dant. La substance ponctuée fine et homogène, qui constitue les D THROPODES TRACHÉATES. 123 lobes frontaux présente bien quelques conden:ations plus colo- rables, mal délimitées à la périphérie ; mais on ne trouve pas trace d'organes spéciaux comme les organes lobulés du Lithobius et de la Scolopendre. Comme chez les autres Chilopodes, le lobe frontal émet un petit nerf de Tomosvary dans sa partie posté- rieure sur son bordinférieur et externe (PL VI, fig. 68, n. T.); ce petit nerf, pris par Newport pour un nerf optique, se détache de la masse ponctuée et gagne immédiatement le névrilemme qu'il traverse, sa situation et son origine sont donc les mêmes que dans les autres genres. La simplification profonde des lobes frontaux ne doit pas être regardée, selon nous, uniquement comme la conséquence de l’ab- sence des yeux ; nous avons vu, chez le Cryptops la disparition de ces mêmes organes n’amener aucune modification, importante dans la structure des appareils relativement compliqués du proto- cérébron moyen. Evidemment cette région est en relation phy- siologique avec la fonction visuelle; mais elle est certainement avant tout en relation avec toutes les autres fonctions, et possède un rôle prépondérant comme organe central des facultés psychi- ques. La simplicité rudimentaire du protocérébron moyen, chez le Géophile, nous semble doncliée au faible degré de centralisation que présente l'organisation de ces animaux. Walter a fait remarquer avec raison la grande ressemblance qui existe entre leur système nerveux et celui des Annélides, et l’on sait que le rôle du cerveau comme organe central est à peu près uul. Si les lobes frontaux n'étaient en rapport qu'avec la fonction visuelle et la fonction de l'organe de Tomosvary, ils devraient être beaucoup plus réduits qu'ils ne le sont, nous pouvons l’affirmer tout au moins pour les Cryptops. DEUTOCÉRÉBRON. — Le deutocérébron est bien développé et re- présente la moitié dela totalité du cerveau. Il se compose des mêmes parties que dans les familles voisines, c’est-à-dire de deux lobes antennaires (PI. VI, fig. 62, 63, 65, 66, L. a.) réunis par une 124 G. SAINT REMY. commissure antennaire (P1. VI, fig. 65, c. a.) ; maïs, comme nous l’avons déjà dit, «es deux lobes sont soudés sur la ligne médiane, ce qui contribue à modifier beaucoup l’aspect du cerveau. Chaque lobe antennaire est constitué par une masse piriforme de subs- tance ponctuée, dont la petite extrémité est dirigée en avantet en dehors, et par un revêtement ganglionnaire. En arrière, la face supérieure de la grosse extrémité du lobe est fusionnée avec le lobe frontal. La petite extrémité, qui constitue l’angle antérieur et externe du cerveau, donne naissance aux nerfs de l’antenne. Quant à la face postérieure, elle est unie en dedans au tritocéré- bron et à la commissure œsophagienne (PI. VI, fig. 69, C. æs.) Les faces inférieure et latérale sont libres. Enfin, la face interne du noyau de substance médullaire, dans la partie antérieure et inférieure par rapport à l’espace canaliculaire dont nous avons parlé plus haut, est fusionnée en arrière avec son homologue du côté opposé, mais en est séparée en avant par une lame de cellules nerveuses (PI. VI, fig. 62, 63). La région antérieure du lobe antennaire présente les conden- sations caractéristiques que nous connaissons. Dans la moitié in- terne et supérieure, (PI. VI, fig. 62, 9l.), elles sont piriformes avec un pédoncule fibreux dirigé en avant en dehors, et se colo- rent très fortement par l’acide osmique : grâce au rapprochement des deux lobes, et aussi au volume relativement considérable de ces glomérules olfactifs, on peut constater que tout au moins ceux qui sont situés sur le bord interne même ne sont pas disséminés sans ordre, mais disposés symétriquemment dans les deux moitiés du cerveau. Dans la moitié externe et inférieure de la région an- térieure du lobe, il existe encore quelques condensations ; mais elles ont une structure plus lâche etaffectent la forme de traînées moins colorées que les vrais glomérules. Cette disposition repro- duit exactement celle que nous avons observée chez les types voi- sins. Les relations de ces deux régions avec les nerfs antennaires, sont également les mêmes que chez la Scolopendre et le Cryptops, CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES 195 et les fibrilles issues des glomérules olfactifs, des traînées ou des régions non différenciées, forment, à la pointe antérieure et ex- terne du lobe, une zone de petits faisceaux fibreux plexiformes d’où sortent les nerfs, absolument comme nous l’avons indiqué chez la Scolopendre. Il est inutile de reproduire ici les détails de la description que nous avons donnée en étudiant le cerveau de ce type. Il existe également, dans la partie moyenne du lobe une masse fibreuse (PI. VI, fig. 65, 67, m. f.), dirigée d’arrière en avant et de dedans en dehors, dont les éléments sont destinés aux nerfs antennaires. Elle représente, comme chez les autres Chilo- podes, la continuation d’une partie de la commissure antennaire. Celle-ci (PI VI, fig. 65, c. a.)a la même disposition que précé- demment, et suit la face inférieure de la région moyenne du protocérébron. Bien que vers le centre du cerveau les limites des ganglions soient moins faciles à préciser qu’à la périphérie, il semble que la coalescence des deux lobes antennaires, au-dessous et en avant de l’espace canaliculaire, s’est étendue, comme nous l’avons dit plus haut, en arrière et en bas à leurs centres médullaires ; il existe donc là une réunion, du reste peu considé- rable, et qui n’a évidemment pas l’importance de la vraie commis- sure deutocérébrale qui passe au-dessus de ce canal. L’écorce ganglionnaire du deutocérébron est formé des mêmes petits éléments à protoplasma peu abondant, mais à noyau peu colorable, que nous avons vus dans le protocérébron ; il s’en pré- sente seulement de plus gros. Cette écorce cellulaire existe surtout dans le plan médian entre les deux lobes médullaires ; elle s'étend sur la face inférieure et un peu sur la face externe, où elle comble l’échancrure qui sépare le lobe antennaire du lobe frontal (PI. VI, fig. 67). Nous avons vu se détacher de la face supérieure du lobe deuto- céréhral un petit filet nerveux (PI. VI, fig. 66, n. v.) que nous regardons comme le nerf viscéral, malgré sa position dorsale, parce qu’il prend naissance dans la région postérieure du lobe comme le 126 G. SAINT REMY. nerf viscéral dans les autres genres. Quant à l’existence d’un nerf tégumentaire, un peu en arrière des nerfs antennaires, nous ne saurions l’affirmer ; nous avons cependant observé un petit filet qui pourrait correspondre à ce nerf, mais qui pourrait bien aussi n'être qu’un nerf antennaire un peu isolé des autres. On conçoit que, sur un organe aussi petit que le cerveau du Géophile, les observations se font avec une certaine difficulté. TKITOCÉRÉBRON. — Le tritocérébron est fort intéressant en raison de son extrême simplicité. Les lobes et le pont stomato-gastrique sont ici réunis en une seule masse médiane, située à la partie infé- rieure et postérieure du cerveau. Cette masse médullaire (PI. VI, fig. 67, L.t.), arrondie et saïllante en bas, est soudée en haut et latéralement aux lobes antennaires, vers lesquels elleenvoie encore en bas, de chaque côté, un prolongement en forme de lame ver- ticale; en arrière, elle émet deux sortes de branches qui se portent dans les comimissures œsophagiennes. Cette masse trito- cérébrale unique donne naissance, sur son bord inféro-postérieur, où elle est appliquée contre le névrilemme, au nerf stomato- gastrique sur la ligne médiane (PI. VI, fig. 64, n. s.), et de chaque côté de celui-ci aux nerfs de la lèvre supérieure un peu plus petits (n. .). Ces trois nerfs, très grêles, se détachent pour ainsi dire du même point, et forment, avec une paire de rameaux trachéens (tr.) qui pénètrent dans le cerveau en cet endroit, une sorte de petite touife. Par suite de cette concentration du ganglion tritocérébral, il n existe pas de commissure tritocérébrale ; du moinsnousn'avons pas reconnu son existence, et sa suppression s'explique fort bien. L’écorce ganglionnaire du tritocérébron est formée de cel- lules à protoplasma relativement abondant, plus volumineuses que celles des deux autres ganglions du cerveau; ces éléments occupent les faces libres de la masse médullaire que nous avons décrite, et remplissent en partie le fond de l’échancrure verticale qui sépare les deux moitiés médullaires du cerveau, c’est-à-dire CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 127 qu'ils confinent à la surface antéro-supérieure de la masse trito- cérébrale (PI. VI, fig. 67). Les commissures æsophagiennes cylindriques sont purement fi- breuses, comme chez les Scolopendrides, et tirent leur origine des trois régions ganglionnaires du cerveau ; elles n’offreut d’ailleurs aucune particularité (PI. VI, fig. 62, 69, C. æs.) CONCLUSIONS. Nous pouvons résumer de la facon suivante les faits généraux qui ressortent de cette série d'observations. Le cerveau des Myriapodes comprend trois ganglions parfai- tement comparables aux trois ganglions qui composent le cerveau des Crustacés supérieurs et des Insectes, bien que leur structure soit infiniment plus simple. Le protocérébron, ou ganglion du premier zoonite céphalique, est formé de deux lobes latéraux ou lobes optiques en rapport direct avec les yeux, homologues aux lobes optiques des Insectes et des Crustacés, et de deux lobes moyens, homologues aux lobes moyens du protocérébron de ces deux groupes, qui sont vraisemblablement le siège des fonctions psychiques, Ces lobes moyens ou lobes fron- taux fournissent ici une paire de petits nerfs destinés aux organes de Tomosvary. Le deutocérebron, cu ganglion du deuxième zoonite céphalique, est homologue au deutocérébron des Insectes et des Crustacés. IL est formé de deux lobes antennaires réunis par la commissure antennaire. Chacun de ces lobes présente une région glomérulée ou olfactive, et une région non différenciée correspondant respec- tivement au lobe olfactif et au lobe dorsal du deutocébron des Insectes et des Crustacés. Le nerf antennaire, sanf chez l'Iule, paraît être un nerf mixte, comme chez ces derniers, et il tire aussi ses fibres à la fois des deux régions; chez l’lule, il est dédoublé 128 G. SAINT REMY. en un faisceau olfactif et un faisceau vraisemblablement moteur. La région non différenciée fournit encore, comme le lobe dorsal des Insectes et des Crustacés, un petit nerf tégumentaire, et un nerf viscéral pair comme chez les Insectes, homologue par con- séquent à la racine du premier ganglion latéral pair des In- sectes. Le tritocérébron, ou ganglion du troisième zoonite céphalique, correspond à la fois au tritocérébron des Insectes et des Crustacés etaupremier ganglion viscéral impair de ces Arthropodes. On sait que H. Viallanes a établi de la facon suivante les homologies de ce ganglion chez les Insectes et les Crustacés supérieurs. Chez le Crustacé, le tritocérébron se compose de deux lobes antennaires, de deux ganglions œsophagiens et d'une commissure sous-œso- phagienne, la commissure transverse de l’anneau œsophagien. Le lobe antennaire donne naissance au nerf de l'antenne externe (deu- xième antenne), le ganglion œsophagien à la racine (double) du premier ganglion viscéral impair (dit #. stomato-gastrique) et au nerf du labre qui se détache de cette racine. Chez l’Insecte, le troisième zoonite et son ganglion subissent une importante réduc- tion. Ce zoonite est ici dépourvu d’appendices, et les lobes « an- tennaires » avec leurs nerfs disparaissent ; mais les représentants des ganglions sous-œæsophagiens subsistent (lobes tritocérébraux) ; ils sont unis au cerveau proprement dit, et fournissent chacun la racine (simple ou double) du premier ganglion viscéral impair (dit g. frontal), et le nerf du labre qui se détache de celle-ci. Ajoutons que le premier ganglion viscéral impair donne naissance à un nerf important, dit nerf stomato-gastrique chez les Crustacés, nerf récurrent chez les Insectes, qui présente sur son trajet d’autres renflements ganglionnaires. | Nous venons de voir que, chez les Myriapodes, le troisième ganglion est formé de deux lobes, réunis par une commissure qui, chez les Chilognathes et la Scutigère, passe au-dessous de l’œso- phage et forme une commissure transverse de l'anneau œsophagien CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 129 _ comme chez les Insectes et les Crustacés, tandis que chezles autres Chilopodes elle est située dans le cerveau ; il comprend en outre dans plusieurs familles, une portion œsophagienne formant un petit ganglion œsophagien à chaque extrémité de la commissure transverse ([ulides, Glomérides), ou une bande ganglionnaire à la face inférieure de la commissure œsophagienne (Scutigérides, Lithobiides). Enfin entre les deux lobes, s'étend horizontalement une masse nerveuse isolée en son milieu du reste du cerveau, et qui donne naissance sur la ligne médiane au nerf stomato-gastrique: nous lui donnons le nom de pont stomato-castrique. Du lobe à son point d’union avec le pont, sort le nerf du labre. On voit done que le troisième ganglion cérébral du Myriapode correspond à celui de l’Insecte avec quelques différences, et mérite le nom de tritocérébron. Il correspond, comme chez l’Insecte, aux ganglions œsophagiens du Crustacé ; seulement, tandis que chez l’Insecte ces ganglions se sont en entier soudés au cerveau, chez le Myriapode une faible portion peut continuer à faire partie de la commissure œsophagienne. Maïs une particularité beaucoup plus intéressante, c’est le fait que le ganglion stomato-castrique (ou frontal} et ses racines sont remplacés par une masse complètement ganglion- paire, unie au cerveau, le pont stomato-castrique, qui lui-même peut disparaître (Géophilides),le nerf stomato-gastrique sortant alors directement du cerveau. Si l’on admettait que les Myriapodes représentent un type plus primitif que les Crustacés supérieurs, chez lesquels seulement le stomato-gastrique est bien connu, il serait permis de croire que l’existence d’un ganglion stomato-gastrique isolé est un fait se- condaire, et que primitivement le nerf stomato-gastrique sortait directement du cerveau, d’autant plus que nous voyons chez la Scutigère le pont stomato-oastrique prendre une forme intermé- diaire entre le type ordinaire et le ganglion distinct réuniau cerveau par les nerfs. Faisons encore remarquer la constitution spéciale du nerf stomato-gastrique chez la plupart des Myriapodes. ARCH: DE ZOOL, EXP, ET GÉN, — 2° SÉRIE, — T, V Dis, — suppl. 1887. — Mem. 9 130 G, SAINT REMY. Il est, en général, formé par des fibres extrêmement fines, comme celles qui constituent la substance ponctuée, et accompagné à son origine de cellules ganglionnaires. Chez la Scutigère, il est formé par de la substance ponctuée vraie, et renferme quelques cellules nerveuses corticales ; ce n’est plus un nerf, maïs un ganglion al- longé, homologue évidemment à la série de petits ganglions viscéraux impairs que présente le stomato-gastrique (récurrent) chez les Insectes. ARACHNIDES Dans la classe des Arachnides, comme nous l’avons dit au début de ce travail, nous ne nous sommes occupé que des groupes su- périeurs des Aranéides et des Arthrogastres. La nécessité où nous étions de n’utiliser que des animaux vivants, a fait que nous avons dû limiter nos recherches aux sous-croupes des Dipneumones chez les Aranéides, des Phalangides et des Scorpionides chez les Arthro- gastres. L'étude de ces types nous a du reste suffi pour nous donner une idée générale de la constitution du cerveau chez les Arach- nides supérieurs et pour nous convaincre que là, comme chez les Myriapodes, la structure interne du cerveau répond, dans ses grandes lignes, à un plan général unique, comme le faisait prévoir la morphologie externe étudiée depuis longtemps, mais présente dans ses détails la plus grande diversité. On sait que lecerveau, c’est-à-dire la partie sus-æsophagienne des centres nerveux, est intimement soudé à une masse sous- œsophagienne compacte, formée par la fusion de l’ensemble ou d’une grande partie des ganglions ventraux. Ces centres nerveux ont été étudiés sommairement chez une Âranéide, l’'Epeire dia- dème, par Schimkewitsch (1), dans une monographie de cette espèce. Ce naturaliste n’a reconnu aucune des particularités (1) W. Schimkewitsch, Etude sur l'anatomie de l’Epeire. — Ant. des Sc. Nat., Zool, (6*série.) XVII. 1884. si n à ; i { CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 131 intéressantes de la structure du cerveau, peut-être parce que le type choisi était en réalité peu favorable à une première étude, mais surtout parce que les méthodes employées (coupes totales du céphalothorax) n'étaient pas faites pour l’éclairer beaucoup. Il à cependant vu les grands traits de la constitution du cerveau, et a distingué dans cet organe deux régions, le ganglion optique et le ganglion des chélicères, en relation respectivement avec les yeux et avec les chélicères ou mandidules, eta montré que les parties laté- rales par rapport à l’œsophage, les commissures œsophagiennes si lon veut, appartiennent au second ganglion. Nous acceptons la division de cet auteur ; maïs nous donnons à la seconde région cérébrale le nom de ganglion rostro-mandibulaire, car nous avons trouvé qu'elle innerve aussi le rostre (rostrum, lèvre supé- rieure, lèvre sternale, languette, lingua). Nous discuterons les homologies de ces deux régions ganglionnaires quand nous les aurons étudiées. ARANEIDES DIPNEUMONES L’anatomie externe du cerveau des Aranéides Dipneumones a été l’objet d'anciens travaux de Treviranus (1), Brandt (2), Grube (3), etc., qui ont porté généralement sur des espèces du | groupe des Sédentaires et n’ont fait connaître que les faits les plus évidents. Cetorgane est généralement décrit comme un petit tu- bercule bilobé, fournissant deux paires de nerfs optiques en avant et en haut, une paire de nerfs mandibulaires en avant et en bas, et une paire de nerfs viscéraux latéralement et en arrière. Quant au (1) Treviranus, Ueber die inneren Bau der Arachniden.— Vermischte Schriften 1. 1816, — Ueber das Nervensystem des Scorpions und der Spinnen. Zeitschr. für Physiologie. 1832. (2) Brandt, Recherches sur l'anatomie des Araignées. Ann. des Sc. nat. 2° série.) XIII. 1840. (3) Grube, Einige Resultate aus Untersuchungen über die Anatomie der Ara. neiden. 1842. 132 G. SAINT REMY. nerf rostrs rir, qui se détache sur la ligne médiane à peu près a" " que les nerfs mandibulaires, ila jusqu'ici éch ‘s, en raison de sa délicatesse ; Weïssenborn, Aographique de l’état de nos connaissances sur & bien que, chez les Aranéides, le premier gan- ophagien « innerve les yeux et le rostre » ; mais il n’a- juaw pas s’il a vérifié cette affirmation, fondée vraisemblablement sur une supposition de Schimkewitsch (1), et qui est du reste inexacte. En ce qui concerne les rapports des nerfs des chélicères et des nerfs viscéraux, nous n'avons rien à ajouter aux faits connus ; le système viscéral, dont l'examen ne rentraiït pas dans les limites de notre sujet, a été du reste étudié récemment en détail, avec beau- coup de soin, par À. Schneider (2).Mais, au sujet de la distribution des nerfs optiques, les anatomistes n’ont donné jusqu'ici que des observations et des dessins inexacts. Brandt attribue une des paires aux yeux médians, et l’autre aux yeux latéraux ; Schim- kewitsch, au contraire, attribue une paire aux yeux anté- rieurs médians et latéraux, et l’autre paire aux yeux postérieurs. Dans ces derniers temps cependant, Vogt et Vung (3), dans leur Anatomie comparée, sans avoir eu connaissance de nos observa- tions (4) publiées quelques mois auparavant, ont indiqué, chez la Tégénaire, que les nerfs des yeux médians antérieurs naissent au-dessus de ceux des yeux médians postérieurs et les croisent pour se porter à leur destination. Ils n’ont pas reconnu d'ailleurs que ces nerfs avaient une origine distincte. Cette observation, en apparence insignifiante, a cependant un certain intérêt, car cette (1) Schimkewitsch, Loc. cit. p. 21. « Ce ganglion (optique) donne probablement naissance aux nerfs du rostrum ; mais je n’ai pu le constater. » (2) A. Schneider, Système stomato-gastrique des Aranéides. Tablettes z00- logiques. T. IT,1887. (3) Vogt et Yung, Traité d’Anatomie comparée. T. II, fascic. 3. (14* livr. parue en avril 1889.) (4) G. Saint Remy, Recherches sur le cerveau des Aranéides . Comptes-rendus Acad. Se, T. 107,1888 2° sem.) p. 926. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES,. 133 disposition, générale dans tout le groupe, est en rapport avec la structure du cerveau et des yeux. On sait que les Aranéides possèdent quatre paires d’yeux uni- cornéens qui présentent un remarquable dimorphisme (1). Dans les deux yeux médians antérieurs, les cellules visuelles montrent toujours les bâtonnets au voisinage immédiat du corps vitré, les noyaux à l’extrémité opposée, comme dans les yeux unicornéens des autres Trachéates (larves d’Insectes, etc.) ; dans les trois autres paires d’yeux, au contraire, lesnoyaux des cellules visuelles sont situés entre le corps vitré et les bâtonnets, à l'inverse du type habituel (2). Ces deux formes se distinguent en outre par des particularités accessoires, l’existence de muscles pour les yeux médians antérieurs, et la présence d’un tapis pour les yeux laté- raux antérieurs et les yeux postérieurs. Aussi Bertkau a-t-il pro- posé pour ces deux types les noms respectifs d’yeux principaux et d’yeux accessoires. Locy (3) a montré du reste qu'au point de vue morphologique, la différence de structure qui les caractérise est moins profonde en réalité qu’elle ne semble au premier abord ; le développement des yeux principaux à noyaux post-bacillaires est précédé d’une invagination de l’ectoderme qui est la cause de la disposition inverse que les noyaux et les bâtonnets affectent dans les deux cas. Mais il n’en reste pas moins vrai qu’au point de vue (1) Consulter principalement : H. Grenacher. Untersuchungen über das Sehorgan der Arthropoden. Gôttin gen. 1876. V. Graber. Ueber das unicorneale Tracheaten-Auge. Archiv f. mikr. Anat. XII. 1880. Ph. Bertkau. Beiträge zur Kenntniss der Sinnesorgane der Spinnen. I, Die Augen. — Arch. f. mikr. Anat. XX VII. 1886. (2) C’est à tort que Vogt et Yung disent que «’œil médian antérieur est con- forme, quant à la structure intime, avec les yeux latéraux » ; eè que « l'œil médian postérieur présente des différences ». C’est l'inverse qui esb vrai, comme le disent les auteurs qui se sont occupés de cette question, et comme nous avons pu le vérifier sur nos préparations. — (VOo&@rT et YUNG, Anat. comp. 14 Liv T. II, fascic. 3, p. 218.) (3) W. A. Locy. On the development of Agelena naevia. — Bull. of the Mus of Compar. Zool., at Harvard coll. XII. 1886. 134 G. SAINT REMY. physiologique, la différence doit être assez grande, et il était curieux de chercher si les parties centrales de l’appareil visuel présentaient des différences en rapport avec celles offertes par les organes périphériques. Nous avons précisément trouvé que, dans chaque moitié du cerveau, il existe à l’origine des nerfs optiques deux centres distincts réunis en une masse commune, le lobe optique, constituant chez beaucoup d’espèces une simple intumes- cence piriforme qui a été remarquée depuis longtemps ;le nerf de l'œil principal du même côté est en relation avec le centre supé- rieur, ou lobule optique supérieur, qui offre toujours la structure la plus simple, et les nerfs des trois yeux accessoires naissent par une racine commune du centre inférieur, ou lobule optique infé- rieur, de structure plus complexe que le premier. Les lobes optiques, qui atteignent un développement et une complication considérables chez les Citigrades, sont la partie la plus intéressante du cerveau, dont les autres régions offrent peu de variations. Ils présentent la plus grande diversité, bien que constitués sur un même plan fondamental ; ils ne sont jamais identiques dans deux familles voisines, etpeuvent même se modi- fier dans un même genre (voy. par exemple Epeira sericea et E. diadema). Leur étude pour être complète demanderait donc l'examen d’un nombre très considérable de types, et pourrait faire à elle seule l’objet d’un travail étendu. Notre but étant surtout de donner un aperçu général de la constitution du cerveau, nous nous sommes borné à étudier avec détails un ou deux types dans chaque tribu, suivant son importance. TRIBU DES CITIGRADES. GENRE LYCOSA Latr. (PL. VII et VIII, fig. 11-88.) Dans la tribu des Citigrades, nous avons étudié deux espèces du genre Lycosa Latr. : L. narbonensis Walck, et L. (Pardosa) sac- 0 n Le | 2 en 0 CAT D L'Npes, CORRSNR AIRTLRE PAT ÿ f * * ‘44 " | | : CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 135 cata Li. — La première espèce, très favorable par sa grande taille et son abondance aux environs de Banyuls, nous a servi de type, et c’est à elle que se rapportent toutes nos descriptions et nos figures. Nous avons constaté que le cerveau de la seconde espèce ne différait aucunement de celui de la première. La forme attribuée généralement au cerveau des Aranéides, d'après les observations faites chez les Sédentaires, est celle d’un petit tubercule presque cubique, reposant sur le bord antérieur de la masse sous-æsophagienne, et divisé en haut et en avant, par une échancrure médiane, en deux lobes, de l'extrémité desquels partent les nerfs optiques très grêles. Le cerveau de la Lycose examiné à l’état frais, après une simple dissection, semble s'éloigner no- tablement de ce type ; on voit, en effet, sa moitié supérieure se prolonger, en avant au-dessus de l’œsophage , sous FIG. vit (1). forme d’une lame horizontale épaisse, dont l'extrémité antérieure donne naissance à une masse compacte de faisceaux nerveux constituant une lame verticale aplatie. Mais si l’on examine à la loupe une pièce convenable- ment isolée et traitée par l'acide osmique, qui noircit les centres nerveux et donne seulement une teinte grisâtre aux nerfs et au tissu conjonctif, on reconnaît que cette lame horizontale est formée par deux masses cylindro-coniques , légèrement apla- ties et accolées sur leurs faces internes, et dont l'extrémité la plus petite, dirigée en arrière et formant une sorte de pédicule, s’insère sur le bord antéro-supérieur du cerveau proprement dit, laissant dans cette région deux profondes échancrures médianes, une supérieure et uneinférieure, comblées par du tissu conjonctif. (1) F1G. vir. Cerveau de Zycosa narbonensis, Walck., vu par la face supé- rieure. Gr. 18 fois. — L. G. 0., lobe cérébral ; — 7. o., lobe optique ; — ». 0., nerfs optiques ; — #. vw, nerf viscéral —». p., nerf du pédipalpe. 136 G. SAINT REMY. Ces masses (F1G. vir, Z. o.), qui viennent s’ajouter en quelque sorte au type ordinaire du cerveau, sont de véritables lobes optiques comparables aux lobes ou ganglions optiques des Insectes, comme le montre leur constitution. Les nerfs optiques (n. 0.) quipartent de l'extrémité antérieure de ces lobes, forment, aïnsique nous l’avons dit, une lame verticale compacte, dont les faisceaux constitutifs s’épanouissent sous le groupe des yeux. Un examen attentif montre que chacun des quatre petits yeux de la rangée antérieure reçoit un filet nerveux unique, et que le reste du faisceau est réservé aux quatre gros yeux postérieurs. Dans sa moitié inférieure le cerveau émet trois nerfs par sa face antérieure, presque au niveau de l’œsophage : une paire de gros nerfs latéraux, qui sont destinés aux chélicères, et un petit nerf médian, très grêle, qui suit la face supérieure de l’œsophage pour se porter vers le rostre. Mais ce dernier, plongé dans le tissu conjonctif, qui occupe l’espace libre entre le tube digestif et les lobes optiques et forme à ceux-ci une sorte de coussin, se trouve généralement arraché quand on enlève ce tissu, et ne peut être observé sur une dissection ; on ne peut l’étudier que sur des coupes. Nous devons dire que c’est par analogie avec ce que nous avons constaté directement chez le Scorpion, et ce qui est connu dans d’autres groupes d’Arachnides — Acariens (1), Pycnogoni- des (2), — que nous attribuons ce nerf au rostre chez les Ara- néides. — Latéralement et en arrière, vers l'union de son tiers moyen avec son tiers inférieur , le cerveau émet le petit nerf viscé- ral (FIG. vit, n. v.), dont les relations ont été si bien décrites et figurées chez Lycosa saccata, par Schneider. Le cerveau en réalité n’est pas situé au-dessus de la masse sous- œsophagienne, mais un peu en avant d’elle. Le tube digestif ne (1) Voy. par ex. M. Winkler : Anatomie der Gamasiden. — Arb. aus dem Zool. Inst. zu Wien. VII, 1888. (2) Voy. par ex. Hoeck : Pycnogonida, in Rep. of the scient. res, of the voy. of Challenger. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 137 traverse pas en effet la masse nerveuse horizontalement d’avant en arrière, mais obliquement de bas en haut et d'avant en arrière, Il monte verticalement de l’orifice buccal jusqu’à la rencontre du faisceau des nerfs optiques ; là il se coude à angle droit et suit un trajet horizontal, parallèle aux lobes optiques, jusqu'au point d’émergence du nerf rostral, en arrière et au-dessous duquel il pénètre dans la masse nerveuse en décrivant une courbure très prononcée qui lui donne une direction presque verticale, c’est-à- dire presque perpendiculaire à celle qu'il avait auparavant et qu’il reprend au-dessus de la masse ventrale. Indiquons ici deux particularités de la structure du cerveau, qui se retrouvent d’une facon générale chez presque toutes les Aranéides. C'est l’extrême minceur du névrilemme, qui n’est séparé des éléments nerveux que par une zone à peine appré- ciable de tissu conjonctif ; puis la pénétration, dans la profon- deur des tissus, de ramifications de l’appareil circulatoire, dispo- sition en rapport avec l’absence de trachées ordinaires et l’exis- tence d’un appareil circulatoire bien développé. G'ANGLION OPTIQUE. — Le ganglion optique représente à lui seul presque toute la portion sus-œæsophagienne, ou plutôt anté-œso- phagienne. Il s’étend en effet en arrière et en bas, jusqu’au voi- sinage de l’œsophage, sans qu’on puisse lui fixer de limites pré- cises dans la région médiane, où il se confond intimement avec le ganglion rostro-mandibulaire. Celui-ci forme autour de l’œso- phage un anneau complet offrant très peu d’épaisseur en avant e en arrière, mais bien développé latéralement. Le ganglion optique peut être divisé pour la description en trois régions : les lobes optiques pairs, l'organe stratifié postérieur impair, et les lobes cérébraux pairs. Lobe optique. — Le lobe optique offre, avons-nous dit plus haut, à peu près la forme d'un tronc de cône ; maïs cette compa- raison qui s'applique bien à sa forme macrosconique, n’est plus aussi exacte quand on cherche à définir les limites rigoureuses 4138 G, SAINT REMY. de cet organe étudié sur les coupes. La base antérieure, qui donne naissance sur toute son étendue aux fibrilles des nerfs optiques, n’est pas un plan, maïs une surface très irrégulièrement découpée (voir PI. VII, fig. 72-76). La base postérieure, qui se confond avec le lobe cérébral, n’a pas de limites précises. Chaque lobe optique anatomique comprend, comme nous l'avons déjà indiqué, deux organes distincts : le lobule supérieur et le lobule inférieur, d'importance différente. Le lobule supé- rieur, situé sur le bord supérieur du lobe, n’en représente qu’une très faible partie, et semble au premier abord un petit organe accessoire logé dans une sorte de sillon creusé dans les couches cellulaires du lobule inférieur. Celui-ci représente en effet presque toute la masse du lobe, et son volume considérable, ainsi que sa structure plus compliquée que celle du lobule supérieur, témoi- gnent de l'importance de son rôle physiologique. Comme nous l'avons dit, le lobule supérieur reçoit seulement le nerf de l'œil médian antérieur situé du même côté ; le lobule inférieur reçoit les nerfs de l’œil latéral antérieur et des deux yeux postérieurs. Nous commencerons l'étude du lobe optique, par le lobule infé- rieur le plus compliqué. | Pour rendre plus facile la description du lobule inférieur (PI. VIT et VIII, Z. o.1.), nous suivrons le trajet des fibres nerveuses, partant des yeux. Au sortir de l'œil, elles sont groupées en fais- ceaux ou nerfs optiques inférieurs (PI. VIT et VIII, n. o.1,);en entrant dans le lobule, elles traversent une sorte d'écran de sub- stance nerveuse, que nous nommons la lame médullaire (L. m. 1.) ; au delà de cette lame, elles forment ensemble la couche fibrillaire antérieure (f. a.), puis elles traversent un autre écran nerveux, la lame glomérulée (1. gl.), forment ensuite la couche fibrillaire posté- rieure (f. p.), et se jettent enfin dans la masse médullaire inférieure (m. m. 1.). Cet ensemble est complété par une écorce ganglion- naire qui revêt partiellement les faces antérieure, postérieure et nterne du lobule, dont une partie dépend du lobe cérébral et dont CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 139 l’autre appartient en propre au lobule. Dans ses deux tiers anté- rieurs, le lobule inférieur est incomplètement divisé par uno cloi- son conjonctive en deux régions (PI. VII, fig. 78, et PI. VIIT, fig. 79) : une supérieure à laqueile arrivent les fibres de l’œil latéral ‘postérieur, et une inférieure qui reçoit celles de l'œil médian postérieur et de l’œil latéral antérieur. Dans la région infé- rieure elle-même, la lame médullaire et la lame glomérulée sont divisées en deux parties inégales, dont la plus grande est en rap- port avec l’œil médian postérieur, et la plus petite, inférieure, est réservée au nerf de l'œil latéral antérieur (PI. VII, fig. 76; PI. VIIL fig. 79, 87, 88, L. m. à, l. m.v.). Nous avons donc trois seoments pour chacune de ces lames : le segment supérieur, le seoment moyen et le segment inférieur. Nous avons dit que les nerfs optiques forment une lame verti- cale, qui s'étend à peu près horizontalement entre les centres ner- veux et le groupe des yeux. Cette lame est très régulière et très compacte, bien qu’elle soit due simplement à l’accolement intime des faisceaux. Sa forme et la disposition des branches qui la com- posent s’étudient le mieux sur les coupes transversales. Une coupe pratiquée immédiatement au-dessous des yeux montre que les rameaux qui en sortent sont extrêmement nombreux (environ une centaine) et très petits, sauf deux, un peu plus volumineux, qu'on remarque sur le bord inférieur du groupe et qui correspondent aux yeux médians antérieurs (yeux principaux). Sur les coupes sui- vantes, on voit ces petits nerfs se réunir et se serrer les uns contre les autres pour former la lame. Quelques-uns se soudent entre eux, de sorte que leur nombre diminue progressivement, tandis que leur volume augmente. On observe de plus que les deux gro s nerfsdu bord inférieur (PI. VIII, fig. 85, n. o. s.) se sont accolés et ont quitté le bord du groupe pour prendre place à l’intérieur de la lame, où ils sont situés non pas l’un à côté de l’autre, mais l’un au-dessus de l’autre ; ils tendent toujours à se rapprocher du bord . ? . = supérieur. C'est ce que confirme l’examen des coupes sagittales ; 440 G. SAINT REMY. on y constate que toutes les branches nerveuses sont parallèles, sauf ces deux nerfs des yeux principaux qui, pour se porter de ces organes, situés à la face inférieure du groupe, au lobule optique supérieur, sont forcés de suivre une direction oblique, diagonale si lon veut, au sein de la lame. En se rapprochant du cerveau, la lame change de forme, et sa section transversale devient un court triangle isocèle, dont la base est dirigée vers le haut et la pointe en bas. Les nerfs qui viennent des yeux latéraux postérieurs se réunissent complètement en deux grosses branches, un peu avant ceux des yeux médians de la même rangée ; ces deux branches s’écartent lécèrement pour laisser passer les deux nerfs optiques supérieurs, et c’est à ce niveau qu'ils rencontrent la lame médul- laire supérieure du lobule inférieur. La lame moyenne n’apparais- sant qu un peuen arrière, la fusion des rameaux nerveux des yeux médians postérieurs est par suite un peu plus tardive. La fig. 78, PI. VII, qui représente une coupe transversale de la région anté- 1ieure du lobule, montre bien que le segment moyen de la lame médullaire a apparu après le segment supérieur. Les deux nerfs des yeux latéraux antérieurs, restés distincts sur le bord inférieur de la masse des nerfs (PI. VIIL fig. 85, n. o. Ÿ.) dans toute son étendue, se montrent encore au centre de cette coupe transversale (PL VII, fig. 78, n. o.v.), le segment inférieur de la lame médul- laire auquel ils se rendent étant situé assez en arrière (PI. VIII, üg. 19; PL VER Roi V6; um ve) La lame médullaire inférieure (PI, VIL et VIII, L. m. 1.) se pré- sente comme une lame foncée, diversement repliée et contournée. Elle est constituée par un ensemble de tubes nerveux dont chacun est la continuation d’un tube élémentaire d’un nerf optique, dont il représente en quelque sorte le prolongement élargi et modifié sur une certaine étendue. Ces tubes, d’une longueur de 32 y environ, ont un diamètre interne un peu plus grand que celui des tubes qui y aboutissent; mais ce qui les distingue au premier abord et donne à la lame son aspect nettement tranché, c’est l'épaisseur nb PRET RE ER ET oh de D ne à 7: CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 141 de leur paroi, formée de substance ponctuée fine et homogène, for- tement colorée par l’acide osmique, qui attemt 1 1. Il est facile, sur des coupes convenablement traitées à l’acide osmique et menées parallèlement aux tubes, de voir l’extrémité supérieure de cette paroi s'amincir et se continuer dans la paroi des fibrilles optiques. Mais c’est surtout sur des coupes transversales que la nature tubuleuse des éléments de la lame se montre avec évidence en particulier sur les coupes de la région antérieure du lobule, où l’on a simultanément des sections des tubes de la lame et des sec- tions des tubes des nerfs optiques. Ces tubes sont très réculière- ment parallèles les uns aux autres, sauf dans les points où la lame se replie ; ils sont alors disposés un peu en éventail, et ont une direction à peu près horizontale, c’est-à-dire qu’ils se trouvent dans le prolongement de l’axe des nerfs optiques, tandis que la grande majorité de ces éléments sont fortement inclinés sur cet axe, sans cependant jamais lui être perpendiculaires. Cette disposition des tubes en échelons, donnant une lame plissée et ondulée, s’ex- plique très bien si l’on songe que les tubes, en nombre égal aux éléments des nerfs, mais d’un diamètre au moins triple, devaient forcément occuper une surface plus étendue. La lame, au lieu de s'étendre suivant un plan vertical et transversal, s’est repliée en différents sens. Elle est, en outre, comme nous l’avons indiqué, divisée en autant de segments qu'il y a d’yeux desservis par elle. La forme générale du segment supérieur, le plus considérable, est celle d’une sorte de cornet, c’est-à-dire d’un cône creux coupé obliquement. La pointe de ce cornet est dirigée en avant, son ouverture très large tournée en haut et en dehors ; ses parois sont très irrégulièrement plissées et contournées au point de représenter une M sur certaines coupes horizontales (voy. PI VII, fig. 72, 73). Le segment moyen affecte à peu près la même forme, l’orifice du cornet étant tourné en bas (voy. PI. VITE, fig. 87). Le mode de répartition des fibrilles nerveuses des nerfs optiques est facile à saisir, Celles qui se trouvent dans le prolongement de la pointe 142 G. SAINT REMY. du cornet rencontrent directement les tubes de la lame qui leur correspondent ; les autres s'inclinent parallèlement à la lame, en gardant d’ailleurs leurs caractères et leur aspect légèrement ondu- leux, et vont s’insérer plus ou moins obliquemment sur leurs tubes respectifs. Le segment inférieur, de beaucoup le plus petit, puis- qu'il ne reçoit que les fibres du petit nerf de l’œil latéral antérieur, offre la forme d’une calotte hémisphérique à convexité antérieure (PI. VII, fig. 76; PI. VII, fig. 88, L. m. 1’). Il est situé immédia- tement en arrière, en dedans et un peu au-dessous du bord infé- rieur et postérieur du segment moyen, sur le bord interne et infé- rieur du lobule. Au voisinage des faces antérieure et postérieure de la lame médullaire, on trouve disséminés un certain nombre de noyaux conjonctifs identiques à ceux qui accompagnent les nerfs, de forme ovale et aplatie, avec quelques granulations chromatiques sur un fond très clair. Ajoutons enfin que la lame recoit par sa face postérieure les prolongements cellulaires d’une partie des petits éléments chromatiques de l'écorce du lobule. | Ces fibrilles paraissent se perdre dans la substance ponctuée qui forme la paroi des tubes et concourir ainsi à sa constitution. Chaque tube nerveux de la lame médullaire se continue par son extrémité postérieure avec une fibrille nerveuse plus fine que celle qu’il avait reçue à son extrémité antérieure. On reconnaît que ces fibrilles se portent toutes à peu près parallèlement en arrière, pour se perdre chacune dans un glomérule de la lame glomérulée. Elles constituent ensemble la couche des fibrilles antérieures (PI. VII et VIII, j. a.). Cette couche, limitée en avant par la lame médullaire, en arrière par la lame glomérulée, offre une épaisseur extrêmement variable, les replis de la seconde lame ne correspondant pas à ceux de la première. On y observe peu de noyaux. La cloison conjonctive qui divise le lobule sépare les fibrilles sorties du segment supérieur de la lame médul- laire, de celles des segments moyenset inférieurs. Celles-ci ne cn thé at ati ml somonatmtaitiit must àsiés né th situé és un dé ie à CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 143 sont pasisolées en deux groupes. Outre ces fibrilles, prolongements plus ou moins directs des fibrilles des nerfs optiques, cette couche en renferme d’autres qui croisent généralement les premières ; ce sont les prolongements des cellules chromatiques voisines qui se portent à la lame médullaire (voy. PI. VIT, fig. 74). La lame glomérulée (PI. VITet VIII, L. gl.), à laquelle abou- tissent les fibrilles de la couche antérieure, est formée par la réunion d’un grand nombre de petites condensations, ovoïdes ou sphériques, mesurant environ 9 p1 de diamètre, et se colorant fortement en noir par l’acide osmique. Chacun de ces glomérules recoit au moins un tube nerveux de la couche des fibrilles antérieures, et en émet un autre qui concourt à la formation de la couche des fibrilles postérieures. Ils reçoivent également les prolongements des petites cellules chromatiques voisines. Ces glomérules, bien délimités, ne sont pas serrés les uns contre les autres ; ils laissent entre eux des intervalles plus clairs, occupés par les fibrilles qu’ils émettent ou reçoivent. Ils sont groupés assez régulièrement pour former une sorte de lame, contournée en différents sens pour la même raison que la lame médullaire, mais dont les replis ne correspondent pas à ceux de cette dernière, Cette lame est également divisée en trois segments correspondant aux trois yeux en rapport avec le lobe inférieur ; mais le segment -supérieur seul est bien isolé des autres, grâce à la cloison con- jonctive qui sectionne le lobule ; les segments moyen et inférieur, quoique bien nettement reconnaissables, se confondent par leurs bords (voy. PL VIIL fig. 80, 86, 87, L. gl.). La forme géné- rale de ces seoments est celle d’un cône creux à pointe antérieure. Ils se rapprochent beaucoup par endroits des bords de la lame médullaire. — L’épaisseur de cettelame glomérulée est difficile à mesurer avec précision, car elle est le plus souvent coupée obliquement ou bien en des points où un pli augmente son dia- mètre, et l’on n’a pas ici un repère comme l'orientation des tubes dans la lame médullaire. Cependant en mesurant les points, où 44% G. SAINT REMY. l'on peut croire qu’elle à été sectionnée transversalement, on trouve, dans sa région moyenne, une épaisseur de 30 à 35 1. — On observe des noyaux conjonctifs disséminés sur les bords, jamais au milieu de la lame parmi les glomérules ; ceux qni parfois se montrent sur une coupe au centre de la lame, occupent en réalité le fond d’un pli, comme on peut s’en convaincre en examinant les coupes suivantes. Les fibrilles qui sortent de la lame glomérulée constituent la couche des fibrilles postérieures (PI. VIT et VIILI, jf. p.) selles ont toutes pour origine un glomérule, autant que nous avons pu le cons- tater, et se portent toutes à la masse médullaire inférieure dans laquelle elles se perdent. Elles ne peuvent être toutes parallèles les unes aux autres, la situation respective de cette masse et des seoments de la lame s’y opposant ; mais elles forment des groupes dans lesquels l’obliquité des éléments est ménagée pour qu'il n’y ait pas d’entrecroisements soit entre eux, soit avec les éléments des groupes voisins : on n’observe aucun chiasma. Ces groupes, qui renferment chacun les fibrilles d’une certaine région de la lame, dispersent leurs éléments à la surface de la masse médullaire PI. VII, fig. 74, 76,f. p., m. m.i.) dans laquelle chaque fibrille pénètre isolément et disparaît aussitôt. Ces fibrilles de la couche postérieure paraissent un peu moins fines et un peu plus ondulées que celles de la couche antérieure. Comme dans cette dernière, on observe peu de noyaux conjonctifs, sauf au voisinage immédiat de la lame glomérulée. — Outre les éléments que nous venons de décrire, cette région renferme d’autres fibrilles qui croisent les premières ; ce sont les prolongements des cellules chromatiques de l'écorce qui se portent par petits groupes à la lame glomérulée (voy. pl. VII, fig. 74). La masse médullaire inférieure (m. m. 1.) à laquelle aboutissent en définitive les fibres optiques, occupe la partie posté- rieure, inférieure et interne du lobule optique inférieur. Elle se compose d’une partie antérieure renflée, que nous nommons la …) vy 4 TP ee en ee Net OU TUNIS RUN CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 445 tête de la masse médullaire (PI. VII, fig. 75; PI. VIII, fig. 87, t.),et d'une partie cylindrique postérieure, le pédoncule (p.), qui donne naissance du côté interne à la commissure transverse des masses médullaires inférieures (PI. VII, fig. 75, c.ér. 1.) et qui s’enfonce en arrière dans le lobe cérébral (L. Go.). La tête a la forme d’une calotte hémisphérique épaisse, très convexe en+avant, tandis que sa concavité postérieure est très accentuée (PI. VIIT, fig. 87, t.) ; elle reçoit sur toute sa surface convexe les fibrilles de la couche postérieure ; son bord interne se soude au pédoncule (PL. VIL, fig. 74, 75, p.), qui passe obliquement en arrière d'elle, tandis que le reste de sa face postérieure en est séparé par une zone de substance ponctuée fine peu colorée (PI. VIIT, fig. 87). La masse médullaire tout entière est constituée par de la sub- stance ponctuée à structure grenue, que l’acide osmique colore en brun très foncé. Mais l'aspect est très nettement différent dans la tête et dans le pédoncule. Dans la tête en effet, la texture est plus grossière, et on observe de très nombreuses taches pâles, arrondies ou ovalaires, à contour franchement limité, qui parais- sent représenter la section de tubes nerveux assez gros, contournés en tous sens. Dans le pédoncule, la substance est plus homogène, et les taches claires qu’on y observe sont moins abondantes et beaucoup plus petites. Cette région de la masse médullaire que nous nommons le pédoncule, en raison de sa forme et de ses rapports, est un gros cordon cylindrique qui commence sur le bord interne de la tête par une portion légèrement renflée (PI. VII, fig. 75) et s'étend obliquement en arrière eten dehors, pour longer la face externe du cerveau, et se perdre graduellement dans la substance du lobe cérébral. C'est sur sa portion antérieure et interne renflée que s’insère la commissure transverse des masses. La commissure transverse des masses médullaires inférieures (PL VII, fig. 75 ; PI. VII, fig. 82, 88, c. tr. 1.) s'étend horizon- talement en forme de fer à cheval à la partie antérieure et moyenne ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. —2® SÉRIE,— T. V bis, — suppPL. 1887. — jfém. 10 146 G. SAINT REMY. du ganglion optique, un peu en arrière de l’écorce ganglionnaire antérieure. Elle présente une concavité principale antérieure et une courbure accessoire à concavité inférieure : les branches du fer à cheval s’élargissent et deviennent coniques pour s'insérer sur les pédoncules. Sa portion moyenne rétrécie est un cordon demi- cylindrique creusé d'une gouttière ; sa coupe transversale dans cette région (PI. VII, fig. 88, c.tr. 1.) se présente comme un croissant épais presque vertical, dont le bord convexe est dirigé en avant etun peu en bas. Lorsqu'on examine les coupes sui- vantes, on voit ce croissant s’épaissir, son contour antérieur se bombant, et passer peu à peu à un demi-cercle. La courbure du bord concave de la commissure transverse est plus prononcée que la courbure du bord convexe ; ce dernier rencontre la face interne du pédoncule sous un angle presque droit, tandis que le premier se continue directement avec elle d’une facon insensible. Cette com- missure est formée de tubes nerveux très volumineux, disposés parallèlement, et qui se ramifienten pénétrant dans la masse médullaire. La cloison conjonctive qui sépare incomplètement les deux moitiés du ganglion optique, existe en avant et au-dessous d'elle (PI. VII, fig. 75, &.; PI. VIII, fig. 82), et envoie sur sa face postérieure un prolongement transversal qui la tapisse entièrement et s'étend même sur la partie voisine du pédoncule. Les fibrilles qui résultent en dernière analyse des éléments des nerfs optiques, ne se portent cependant pas toutes à la masse mé- dullaire. Un très petit nombre affecte une autre disposition ; ces éléments se fusionnent entre eux de bonne heure et forment une certaine quantité de tubes plus gros qui apparaissent déjà dans la couche fibrillaire antérieure. Ces tubes, réunis en définitiveau-des- sus de la masse médullaire, suivent la face externe du lobe céré- bral et vont former à la face postérieure du cerveau, au-dessous de l’organe stratifié, une commissure à laquelle nous donnons le nom de commissure postérieure des lobules inférieurs (PI. VII, fig. 713, e. p. i.). Cette commissure, très réduite dans le type que nous F 1 * ” : 4 EN * tue AS Li Sn RE DS Le à ne dE CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 147 étudions, prend une importance très considérable chez d’autres Aranéides. Le lobule optique supérieur ou lobule de l’œil principal (médian antérieur) (P1. VIlIet VIII Z. o. s.), occupe la face supérieure du lobe et s’étend obliquement, d’avant en arrière et de dedans en dehors, au-dessus du lobule inférieur, dans l’écorce cellulaire duquel il semble se creuser un chemin. Sa constitution est beaucoup plus simple que celle du lobule inférieur, et il ne comprend que trois parties : la lame médullaire, la couche fibrillaire et la masse mé- dullaire supérieure. Nous avons fait connaître, en décrivant la disposition des nerfs optiques, le trajet suivi par les nerfs des yeux médians antérieurs. Au niveau de la région antérieure initiale de la lame médullaire du lobule inférieur, ils sont superposés et logés dans une étroite échancrure laissée entre les deux lobules. Plus en arrière, cette échancrure s’élargit en devenant de moins en moins profonde ; les deux nerfs se placent l’un à côté de l’autre sur le bord interne des lobules inférieurs, s’aplatissent de haut en bas, et se logent chacun dans une rainure creusée aux dépens de l'écorce cellulaire. . Ils atteignent leur lame médullaire respective, au niveau de la partie postérieure de la lame glomérulée du lobule supérieur. La lame médullaire du lobule supérieur (PI. VII, fig. 72; PI. VIII, fig. 80, Z. m. 8.) a la même constitution que celle du lo- bule inférieur, c’est-à-dire qu’elle est formée des mêmes tubes ner- veux à paroi épaisse disposés parallèlement, à chacun desquels aboutit un des tubes du nerf. Cette lame prend également la forme d’une sorte de cornet surbaissé, dont l'ouverture, très large, est dirigée en arrière, la pointe obtuse, en avant et en dedans; la portion interne de la lame est plus courte et plus oblique que la portion externe. On rencontre quelques noyaux conjonctifs sur les deux faces de cette lame. Chaque tube, comme dans le lobule in- férieur, donne naissance en arrière à un tube plus fin que les élé- ments du nerf. Ce sont ces tubes qui forment par leur réunion la 148 G. SAINT REMY. couche ou pédoncule fibrillaire (PI. VIT, fig. 72 ; PI. VIII, fig. 87 ; l. s.), correspondant à la couche fibrillaire antérieure du lobule inférieur, mais n’aboutissant pas à une lame glomérulée. Cette couche dont le diamètre est naturellement moindre que celui de la région occupée par la lame, représente une sorte de pédoncule cylindrique dirigé très obliquement en dehors, pour se porter à la pointe antérieure de la masse médullaire supérieure. Celle-ci (PI. VIL fig. 72; PI. VIII, fig. 81, 87, m. m. s.) est un noyau mé- dullaire de forme allongée, dirigé en arrière et en bas; elle se montre formée de fibrilles fines, continuation de celles de la couche précédente dont elles diffèrent par leurs parois et leur coloration générale plus foncée après le traitement à l'acide osmique. Cette structure est facile à reconnaître à un grossissement suffisant, dans la région antérieure de la masse où les tubes sont parallèles ; elle cesse d’être nette en arrière et en bas. Les deux masses mé- dullaires supérieures sont réunies entre elles par une bande de substance ponctuée à structure nettement fibrillaire, qui forme la commissure transverse des masses médullaires supérieures (PI. VIT, fig. 72, c.tr. s.) ; elle est située à la partie supérieure du cerveau, immédiatement en avant et au-dessous de l’organe stratifié. L'écorce ganglionnaire, qui revêt les lobes optiques anato- miques et régularise leur forme extérieure, est assez considérable ; mais tous ses éléments n'envoient pas leurs prolongements aux ré- gions médullaires de ses lobes, de sorte que la moitié environ de ce revêtement appartient physiologiquement aux lobes cérébraux. Les éléments qui appartiennent en propre aux lobes optiques, et qui forment ce que nousappelons l’écorce propre des lobes optiques, sont exclusivement de petites cellules chromatiques pauvres en proto- | plasma, qui constituent le revêtement de toute la région anté- rieure, depuis le bord de la lame médullaire jusqu’au niveau de la masse médullaire. Cette écorce n’existe d’abord que sur les parties supérieures et inférieures du lobe, puis elle s’étend sous la face interne où elle atteint une certaine épaisseur (voy. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 149 PI. VII, fig. 73; PI. VIII, fig. 88). Ces cellules sont repré- sentées par de petits noyaux sphériques ou ovoïdes, mesurant environ 6 y, chargés de granulations chromatiques, et très forte- ment colorables ; ces noyaux sont très serrés, et on ne peut recon- naître leurs limites cellulaires. Les prolongements longtemps émis par ces éléments se portent, suivant leur situation et le plus souvent en formant des faisceaux (voy. PI. VII, fig. 74), soit à la lame médullaire, soit à la lame glomérulée du 1o- bule inférieur, soit enfin pour quelques-uns, nous a-t-il sem- blé, à la lame médullaire du lobule supérieur ; ils ne sont pas néanmoins divisés en îlots apparents, et forment une masse continue. — Au niveau des masses médullaires inférieures, le re- vêtement ganglionnaire du iobe optique est formé de cellules riches en protoplasma, qui envoient leurs prolongements dans les lobes cérébraux. Elles forment une couche épaisse surtout en avant et en dedans, et représentent l’écorce antérieure des lobes cérébraux ; elles sont toutes à peu près de même taille. On re- marque seulement un petit groupe de cellules plus grandes, dont deux ou trois sont très volumineuses,situé à la face supérieure du lobe, contre la face externe du lobule supérieur. Les plus gros éléments, ovoïdes, sont situés immédiatement sous le névrilemme, et mesurent 34 u. environ en diamètre transversal, et 60 11 en diamètre longitu- dinal ; leur noyau, ovoïde, très pâle, atteint environ 17 1, et ren- ferme quelques grosses granulations chromatiques (PI. VIT, fig. 72; PI. VIIL, fig. 86, c. g.). Organe stratifié postérieur. — L'organe stratifié postérieur (PI. VIL, fig. 71, 75; PI. VIII, fig. 84, 87, 88, str.) est situé sur le bord postérieur et supérieur légèrement saillant du cerveau, de telle sorte qu’il est intéressé par les premières coupes horizon- tales, d’autant plus qu’il forme un bourrelet proéminent au-dessus de la masse ponctuée des lobes cérébraux. Il comprend une partie principale médullaire et un revêtement cellulaire. La partie mé- dullaire à la forme d’un gros fuseau transversal à pointe mousse, 150 G. SAINT REMY. aplati de bas en haut, recourbé en croissant à concavité antérieure et légèrement incliné d’avant en arrière et de haut en bas. Cette formation médullaire comprend deux segments : l’un antérieur et l’autre postérieur, emboîtés l’un dans l’autre. Sa face supérieure convexe est recouverte par la lame ganglionnaire : elle présente, vers l'union de son tiers postérieur avec les deux tiers antérieurs, un sillon longitudinal peu profond qui marque l'accolement des deux segments. Sa face inférieure, qui repose sur la substance ponctuée des lobes cérébraux, est à peu près plane, mais présente en son milieu un sillon longitudinal plus accentué que celui de la face supérieure (voy. P]. VIII, fig. 88). Le bord antérieur con- cave et le bord postérieur convexe sont épais et arrondis ; le pre- mier s’enfonce dans l’écorce cellulaire du cerveau ; le second n’est séparé du névrilemme que par une couche de tissu conjonctif. Les deux segments accolés qui forment l'organe sont constitués par de la substance ponctuée d'une structure très fine et très homogène, qui preud une coloration foncée par l'acide osmique ; entre eux se trouve une lame de substance moins dense, qui reste plus claire. Le segment antérieur (PI. VIII, fig. 84, 88, L. s. a. — ls. a.), un peu pluslong mais moins épais que le segment postérieur, a la forme d'un prisme triangulaire à bords arrondis, dont les diamètres diminuent en allant de sa région moyenne vers ses extrémités. Il est orienté de manière à présenter une face antéro-supérieure, une antéro-inférieure et une postéro-inférieure ; cette dernière recouvre en partie le segment postérieur. Dans la région moyenne, le tissu de l’angle postéro-supérieur de ce segment est plus dense et plus colorable que le reste, et forme une lame plus foncée à section transversale ovalaire (P1. VIII, fig. 88, l’.s. a.), à laquelle nous donnons le nom de lame accessoire du segment antérieur, par opposition au reste de ce sesment que nous appelons lame principale (/. s. a.). Cette différenciation est plus marquée chez d’autres Aranéides. Le seoment postérieur (PI. VIII, fig. 84, 88, s.p.), situé en arrière et au-dessous du CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 151 précédent, présente à peu près la même forme que lui, mais est beaucoup plus arrondi. La lame de substance ponctuée moins dense interposée entre ces deux segments, sert d’intermédiaire entre eux et les faisceaux fibrillaires qui arrivent à l'organe ou qui en partent. On voit en effet s’enfoncer dans le sillon inférieur les prolongements des cel- lules riches en protoplasma, les plus voisines du bord antérieur, qu'ils contournent pour gagner le sillon. Il en sort de plus quelques faisceaux de fibrilles, qui se perdent ensuite dans la substance ponctuée des lobes cérébraux. Enfin la plupart des prolongements des cellules chromatiques qui forment la lame ganglionnaire se réunissent à la face supérieure de l’organe et y forment une couche fibrillaire pénétrant, par le sillon supérieur, dans cette même lame interposée. Cette lame se montre sur les coupes horizontales, striée d'avant en arrière, par suite de l’existence de nombreuses fibrilles qui passent d’un segment à l’autre. La substance ponctuée qui constitue les segments ne forme pas une masse homogène ; elle présente dans la région supérieure des bandes longitudinales plus claires ou plus foncées. Ces détails de structure, peu visibles sur les coupes transversales de l’organe, sont très nets sur les coupes longitudinales (horizontales) , et les premières coupes horizontales du cerveau qui intéressent dans un même plan les deux segments etla lame intermédiaire, nous montrent l'organe stratifié comme formé de bandes parallèles al- ternativement claires et obscures (PI. VII, fig. 71). Dans les coupes de la partie inférieure de l’organe, ces bandes n'existent pas; on n’observe que les deux segments homogènes, séparés par une zone claire qui est la coupe de la lame intermédiaire. La lame ganglionnaire qui revêt la face supérieure et le bord antérieur de l’organe stratifié, est formée, dans presque toute son étendue, de petites cellules chromatiques identiques à celles des lobes optiques. En arrière seulement elle présente quelques petits _ groupes de cellules à protoplasma abondant. Tous ces éléments 152 G. SAINT REMY. envoient leurs prolongements dans l’organe stratifié ; mais il semble que les prolongements des cellules à protoplasma abondant, passent toujours directement dans la substance des segments situés immé- diatement au-dessous d’elles, tandis que ceux des cellules chro- matiques, au moins pour la plupart, forment la couche fibrillaire qui tapisse en grande partie la face supérieure des segments, et s’enfoncent ainsi en masse dans le sillon supérieur. Lobes cérébraux. — Les lobes cérébraux (PI. VIT et VIII, Z. G. o.) sont plus importants par leur volume que par leur compli- cation ; ils se composent d’une masse de substance ponctuée cen- trale considérable et d’une écorce ganglionnaire relativement faible. Le noyau médullairé du lobe cérébral a la forme d’un ovoïde aplati sur la face interne, par laquelle il est accolé à son homologue du côté opposé. La face externe est recouverte immé- diatement par le névrilemme ; les faces supérieure et inférieure sont revêtues par les couches cellulaires corticales. La face interne présente un revêtement cellulaire, dans les régions supérieure et inférieure de la partie antérieure (voy. Pi. VIIL fig. 82), revé- tement qui comble l'échancrure produite par l’'écartement des deux lobes. Enfin, la face postérieure est mal délimitée, et se confond avec le ganglion rostro-mandibulaire. Les deux lobes cérébraux ne sont pas en continuité de substance l’un avec l’autre dans toute leur étendue ; ils sont séparés in- complètement par une cloison conjonctive verticale antéro-posté- rieure, fournie par le névrilemme, qui est en quelque sorte replié et invaginé. Cette cloison, qui comprend deux lames, s’étend très profondément en arrière, jusqu’à la moitié de l'épaisseur du cer- veau ; toutefois dans le plan horizontal passant par la commissure transverse inférieure, elle s’arrête en avant de cette commissure. C’est donc, sauf à ce niveau, dans la région postérieure seulement que les lobes optiques sont fusionnés ; dans cette région, leurs relations physiologiques peuvent être établies par la continuité de la substance médullaire. Mais il existe des tractus commissuraux CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 153 qui permettent des relations plus directes entre des points éloi- gnés : ce sont d’abord des traînées de fibrilles situées dans la partie postérieure, puis surtout des faisceaux transversaux bien distincts, représentant des commissures proprement dites. Deux de ces commissures sont intéressantes par leur existence constante dans tout le groupe des Aranéides ; nous les avons retrouvées chez toutes celles que nous avons étudiées. La première est un petit faisceau assez grêle qui s’étend en avant et au-dessous de l'organe stratifié, entre les deux extrémités supérieures des lobes céré- braux ; on la trouve sur les premières coupes horizontales qui passent par la partie supérieure des lobes, et elle mérite le nom de commissure supérieure des lobes cérébraux (Voy. PI. IX, fig. 114 (Ségestrie) c. s.). La seconde, plus volumineuse, se trouve au niveau de la commissure transverse des masses médullaires inférieures, un peu en arrière d'elles ; c’est une grosse commissure fibreuse en forme de croissant, à concavité postérieure, dont les deux branches plongent de chaque côté dans la substance médul- laire en se relevant un peu, et s’y perdent (PI. VII, fig. 75 ; PI. VIII, fig. 83, c. pr.). Nous la nommons commissure princi- pale des lobes cérébraux. En dehors de ces commissures, il n’existe pas, dans les lobes cérébraux, beaucoup de faisceaux fibrillaires susceptibles d’être étudiés et suivis complètement. Ces lobes sont en relation directe, par continuité de substance, avec les pédoncules des masses mé- dullaires inférieures ; l'organe stratifié leur envoie quelques fais- ceaux qui sy perdent presque immédiatement. Les seuls fais- ceaux qui soient bien nets, sont ceux formés pur les prolonge- ments des cellules de l’écorce ganglionnaire ; ils traversent en général une partie du ganglion, et vont se perdre assez loin de leur point d’origine. C’est ainsi que les groupes cellulaires situés à la face supérieure du cerveau envoient leurs prolongements dans le voisinage de la face inférieure. Les cellules de l’écorce des lobes cérébraux sont toutes des éléments riches en protoplasma 154 G. SAINT REMY. GANGLION ROSTRO-MANDIBULAIRE. — La région que Schimke- witsch a désignée, chez l'Epeire, sous le nom de ganglion des ché- licères, fournit, comme nous l'avons indiqué plus haut, outre les nerfs mandibulaires pairs, le petit nerf rostral sur la ligne médiane : de là le nom que nous lui avons attribué. Ce ganglion (PI. VIT et VIII, G. rm.) est, à proprement parler, péri-æsophagien, car il est traversé par le tube digestif autour duquel il forme une sorte de collier complet. $es portions sus- et sous-œæsophagiennes, ou plus exactement ante- et post-æsophagiennes, sont aussi peu con- sidérables l’une que l’autre, et ce sont les parties latérales les plus volumineuses. Comme les nerfs fournis par ce ganglion sortent au-dessus de l’æsophage, ils méritent d’être décrits comme sus- œsophagiens. Ses limites exactes ne peuvent être indiquées qu'en supposant prolongées vers la ligne médiane, en haut et en avant, les cloisons conjonctives qui s’enfoncent latéralement de dehors en dedans, et séparent du ganglion optique ses portions latérales, en bas celles qui s'étendent de la même façon entre lui et la périphérie latérale du ganglion des pédipalpes. En avant, il est également isolé du ganglion optique par une cloison peu étendue. Ce sont les coupes sagittales qui nous montrent le mieux sa forme et sa disposition par rapport aux ganglions entre lesquels il est compris ; il est en effet parallèle à la direction de l’œsophage dans les centres ner- veux, c’est-à-dire oblique sur le plan horizontal ; il en résulte que les coupes menées par ce dernier plan le rencontrent, ainsi que l’œsophage, toujours obliquement, et intéressent toujours d’autres régions en même temps que lui. Le ganglion rostro-mandibulaire est divisé incomplètement en deux moitiés par une cloison conjonctive verticale. Cette sépara- tion en deux moitiés latérales est marquée extérieurement en avant, par une échancrure médiane qui devient très profonde et très étroite en se rapprochant du trou œsophagien ; c’est du fond de cette échancrure que sort le nerf rostral (PI. VII, fig. 77, CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 155 n. ».). Chaque moitié comprend un noyau médullaire et un revé- tement ganglionnaire antéro-inférieur et latéral. Le noyau mé- dullaire, indivis dans sa partie postéro-inférieure , se continue en avant et en haut par trois lobes : un petit médian, le lobe rostral (PI. VIL fig. 77; PI. VIII, fig. 88, L. r.), et deux latéranx plus volumineux, les lobes mandibulaires (Z. m.). Le lobe rostral est dirigé en haut et en avant, et forme une sorte de bandelette de substance ponctuée placée au-dessus et en avant de l’œsophage immédiatement sous le névrilemme, au fond de l’échancrure dont nous avons parlé ; c'est de cette bandelette que sort le nerf rostral, juste au niveau de la face supérieure de l’œsophage qu’il suit quelque temps (PI. VII, fig. 77, n. r.). Le lobe mandibulaire est une grosse masse ovoide de substance ponctuée, beaucoup plus large qu’épaisse, dirigée d’arrière en avant (PI. VII, fig. 77; PI. VIIL, fig. 83, 86, 87, L. m.). Son extrémité antérieure se rétrécit et se continue par le nerf mandibulaire volumineux (PI. VII, fig. 77; PI. VIII, fig. 82, 86, 87, n. m.). Ce nerf sort du cerveau à égale distance de la ligne médiane et de sa face laté- rale, un peu au-dessus de l’œsophage et du nerf rostral. De la base du lobe mandibulaire, part du côté extérne un court fais- ceau fibreux (Voy. PI. VIL fig. 77), dirigé en arrière et en bas, vers la base du lobe du pédipalpe, où il disparaît ; un autre fais- ceau naît en dedans de celui-ci et prend une direction presque horizontale pour aller se perdre au sein de la substance médullaire du ganglion des pédipalpes. Enfin, sur le bord interne du lobe, apparaît une masse de fibrilles fortement colorées par l’acide osmique, qui donne naissance à un faisceau recourbé en fer à cheval, allant s'épanouir sur le bord interne du lobe du pédipalpe. L’écorce cellulaire du ganglion rostro-mandibulaire est peu con- sidérable. Elle n’atteint une certaine épaisseur qu’au niveau du point de sortie des nerfs mandibulaires, dans la région médiane du ganglion, au-dessus du lobe rostral. Cette écorce n’existe que sur la face antérieure, en s'étendant un peu latéralement en arrière ; 156 G. SAINT REMY. A elle ne comprend que des cellules à protoplasma abondant, de taille moyenne en général, qui envoient leurs prolongements dans la substance médullaire sans former de faisceaux importants. Il existe, immédiatement au-dessus du point de sortie du nerf man- dibulaire, un îlot de très gros éléments qui se trouvent de fait en avant du lobe cérébral, maïs qui envoient leurs prolongements en arrière et en bas, dans le lobe mandibulaire. Le ganglion rostro-mandibulaire donne naissance, dans sa par- tie supérieure et postérieure, à une paire importante de petits nerfs viscéraux qui sont les origines cérébrales du système stomato- gastrique (1). Ces nerfs, très grêles (PI. VII, fig. 74, n. v.), nais- sent sur le bord externe de la masse médullaire du ganglion, un peu en arrière et au-dessus de l’échancrure oblique de bas en haut, qui marque en dehors la limite du ganglion optique situé en avant, et du ganglion qui nous occupe situé en arrière. Ce petit filet ner- veux ne se reconnaît facilement que sur les sections horizontales ; et comme à ce niveau l’échancrure est très peu prononcée, il faut suivre la série des coupes pour se convaincre que la région où il naît est bien la portion supérieure du ganglion rostro-mandibu- laire, sectionnée en même temps que la région moyenne du gan- glion optique. Le nerf ne quitte pas immédiatement le cerveau ; il exécute un trajet d’une certainelongueur sous le névrilemme dans le tissu conjonctif périphérique qui prend là un peu plus d’épais- seur, et se dirige en avant presque horizontalement, un peu en haut et en dehors, pour sortir vers le milieu de la face externe du lobe cérébral. Son origine apparente pourrait donc le faire prendre pour un nerf issu du ganglion optique, tandis que par son origine réelle il appartient au ganglion rostro-mandibulaire. Ilest à remarquer qu’il sort directement de la substance médul- laire générale du ganglion, sans qu’elle présente au voisinage de ce point aucune modification. (4) Voy. Schneider, loc. cit. le SP sde TE CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 157. TRIBU DES LATÉRIGRADES. GENRE THOMISUS Walck. (PL. IX, fig. 89, 90). Chez les Latérigrades, nous avons étudié plusieurs espèces du genre T'homisus Walck., et en particulier 7. citreus Geoff. Les différentes espèces de ce genre ne nous ont pas montré de diffé- rences entre elles dans la structure des centres nerveux. Le cer- veau de la Thomise est construit exactement sur le même type que celui de la Lycose, et on y retrouve les mêmes parties ; mais il présente naturellement des différences de détails que nous allons étudier. Sa forme extérieure est, à peu de chose près, celle que nous avous décrite chez la Lycose. Il est relativement très gros, au moins aussi volumineux que la masse sous-æsophagienne. Il se montre constitué par deux lobes piriformes, fortement renflés en arrière, et intimement soudés par leur face interne aplatie ; leurs pointes, dirigées en avant et un peu en dedans, restent accolées et donnent ensemble naïssance au groupe des nerfs optiques diri- gés horizontalement en avant ; elles représentent des lobes optiques qui se continuent directement avec le reste du cerveau, sans tran- sition extérieure. Ces deux lobes piriformes semblent reposer sur deux sortes de pédoncules qui les relient à la masse sous-æsopha- gienne. On distingue les nerfs des chélicères ; mais lenerf rostral ne peut guère s’apercevoir que sur les coupes. Les sections nous _ montrent également que le sillon médian, qui existe entre les deux lobes, se prolonge sur toute la longueur dela face supérieure du cerveau. GANGLION OPTIQUE. — Comme chez la Lycose, nous distinguons dans le ganglion optique les lobes optiques, l'organe stratifié postérieur et les lobes cérébraux. Lobe optique. — Le faisceau formé par les nerfs optiques offre ici cette particularité qu’il ne constitue pas une lame, mais un 158 G. SAINT REMY. cylindre dont les éléments sont très intimement unis les uns aux autres. Dans presque toute sa longueur il ne comprend que quatre cordons : deux petits qui sont les nerfs des yeux principaux, et deux gros en forme de demi-cylindre. Ceux-ci (PI, IX, fig. 89, n. 0. i.) sont accolés dans les deux tiers postérieurs de leur trajet, et s’écartent en avant pour laisser passer les premiers qui occu- paient d’abord les bords supérieurs et latéraux du cylindre et deviennent médians et inférieurs. Immédiatement en arrière et au-dessous des yeux, les deux gros nerfs se ramifient pour se porter aux yeux postérieurs et aux yeux antérieurs latéraux (yeux accessoires). Les lobes optiques présentent sur les coupes un aspect un peu différent de ceux de la Lycose. Ils forment ensemble un cône plus accentué, et chacun d’eux est dirigé plus obliquement en dedans que dans ce genre. Ils se divisent chacun en un lobule inférieur considérable et un petit lobule supérieur, en relation respective- ment avec les yeux accessoires et l’œil principal du même côté. Le lobule optique inférieur (PI. IX, fig. 89, 90, L. o. i.) nous montre, comme chez la Lycose : une lame médullaire (4. m. 1.), une couche fibrillaire antérieure (7. a.), une lame glomérulée (Z gl.), une couche fibrillaire postérieure (7. p.), une masse médullaire (mn. m. i.) et une écorce ganglionnaire. La division en seoments supérieur, moyen et inférieur, correspondant aux trois yeux innervés par le lobule inférieur, si nette chez la Lycose où elle s'étend jusqu’à la lame glomérulée, est ici plus restreinte et ne porte que sur la lame médullaire. La forme et la disposition des segments de cette lame sont, à peu de chose près, les mêmes que chez la Lycose ; mais, en raison de l’obliquité plus grande du lobule, les cônes creux, que ces formations représentent, ont leurs pointes dirigées plus fortement en dedans. La lame médullaire est également formée de tubes nerveux courts, dont la constitution est la même que celle que nous avons vue ; mais ces tubes, plus fins et aussi moins longs, ont des parois d’épaisseur inégale et — cons ht de ré dre et de nes Des 2 mods AP PORN TITSS PT. TS hd. pl. déni no éhé hs à - CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 159 sont moins régulièrement disposés ; ils rappellent plutôt la lame médullaire du lobule supérieur de la Lycose que celle du lobule inférieur. Les noyaux conjonctifs sont rares à la surface de la lame. Nous n’avons pas de remarque particulière à faire au sujet de la couche fibrillaire antérieure. Elle est formée essentiellement, comme chez la Lycose, de fibrilles extrêmement fines, plus délicates que celles des nerfs optiques, et qui vont chacune de l’extrémité posté- rieure d’un tube de la lame médullaire à un glomérule de la lame glomérulée. On y observe également d’autres fibrilles obliques sur les premières, qui sont les prolongements des cellules chromatiques de l'écorce allant à la lame médullaire et à la lame glomérulée ; mais tous ces détails, on le comprend, sont beaucoup moins nets que chez la Lycose, en raison de la petitesse des parties. On trouve également quelques noyaux conjonctifs dans cette couche. La lame glomérulée (PI. IX, fig. 89,90, [. 91.) offre des carac- tères propres. Elle n’est pas divisée en segments, comme chez la Lycose, et constitue une sorte de calotte circulaire, large et peu profonde, à concavité postérieure, qui semble coiffer en quelque sorte la masse médullaire dont elle n’est séparée que par un faible intervalle. Elle est constituée également par la réunion de glomé- rules de substance ponctuée très fine et homogène, un peu plus petits que ceux de la Lycose (mesurant environ 6 [1), qui laissent passer entre eux les fibrilles de la couche antérieure, celles de la couche postérieure et enfin les prolongements des cellules chroma- tiques voisines. Comme chez la Lycose, il nous a semblé que cha- que glomérule recevait une fibrille antérieure, et en émettait une autre destinée à la couche fibrillaire postérieure. Cette couche (f. p.) formée par la réunion des fibrilles qui se portent de la lame glomérulée à la masse médullaire, est peu épaisse, l'intervalle qui sépare ces deux régions étant peu considérable. Les noyaux con- jonctifs sont peu nombreux sur les faces de la lame glomérulée et dans la couche fibrillaire. f, 160 G. SAINT REMY. La masse médullaire iuférieure se compose ici aussi d’une tête (PI. IX, fig. 89, 90, £.) et d’un pédoncule (p.). La substance ponc- tuée qui la constitue est également très colorable par l'acide os- mique, mais sa structure est plus délicate que chez la Lycose. Dans la tête, le tissu est plus grenu que dansle pédoncule, et on y reconnaît plus facilement un enchevêtrement de tubes nerveux assez gros, dont le contenu, plus pâle que la paroï, dessine sur les coupes des taches ou des filets plus clairs ; cette structure est aussi celle du pédoncule. — La forme de la tête est la même que chez la Lycose. C’est une masse hémisphérique, à convexité antérieure, qui se soude par son bord interne au pédoncule ; par toute sa face convexe, elle recoit les éléments de la couche fibrillaire postérieure, qui disparaissent dans sa substance dès qu’ils y ont pénétré. De sa face postérieure, un peu concave, on voit sortir de très nombreuses fibrilles qui se jettent dans le pédoncule situé en arrière et qui ne lui est soudé que du côté interne. Le pédoncule et la commissure transverse des masses inférieures s’écartent un peu plus de ce que nous avons vu chez la Lycose. Là le pédoncule est une sorte de gros cylindre renflé à sa partie anté- rieure etse perdant insensiblement en arrière, sa substance se con- fondant peu à peu avec celle des lobes cérébraux, ef l'extrémité externe de la commissure qui vient s’insérer sur lui représente un cône très étroit. Chez la Thomise, le pédoncule a la forme d’un cône court dont la grande base est antérieure ; sa pointe tronquée, dirigée en arrière et un peu en dedans, se termine plus franche- ment et présente un contour plus net. La commissure transverse des masses médullaires inférieures (PI. IX, fig. 89, 90, c. ér. à.), dont l’extrémité représente un cône obtus, s’insère sur le pédoncule par une très large base, de telle sorte que son bord antérieur se continuedirectement aveccelui du pédoncule, sans ligne de démarcation, tandis que son bord pos- térieur fait un angle obtus avec le bord interne de cet organe. À l'opposé de la structure que nous avons vue chez la Lycose, la ns NAS æ à, 16e re he CS D LC CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 164 commissure est ici formée de fibrilles fines. Elle ne décrit pas ici une courbe régulière d’un.petit rayon, mais un arc à grande ou- verture se décomposant en trois segments : deux externes coniques se rattachant aux pédoncules, et un segment moyen presque droit, faisant un angle avec les autres. Ce segment est légèrement renflé du côté antérieur ; sa forme générale est celle d’un cylindre aplati d'avant en arrière, et sa section transversale est par suite un ovale au lieu d’être un croissant comme chez la Lycose. Il existe aussi une petite commissure postérieure des lobules infé- rieurs constituée par des éléments qui ne prennent pas part à la formation des masses médullaires. Le lobule optique supérieur a la même constitution que chez la Lycose et comprend : une lame médullaire qui reçoit le nerf de l'œil principal, une couche fibrillaire, une masse médullaire supé- rieure réunie à son homologue du côté opposé par une commissure transverse des masses médullaires supérieures. La lame médullaire forme un petit cône creux dont les éléments sont aussi des tubes ; mais sa structure est moins nette et encore moins régulière que celle de la lame du lobule inférieur. L’orientation du lobule supé- rieur, chez la Lycose, est oblique de dedans en dehors, le nerf se trouvant sur la ligne médiane, et la masse médullaire sur le bord externe du cerveau ; ici le nerf supérieur est externe et latéral par rapport aux autres, dans le voisinage des lobes optiques, etl’axe du lobule est à peu près horizontal et parallèle au bord externe du lobule inférieur. L’écorce ganglionnaire des lobes optiques a la même constitution que chez la Lycose. En avant, elle est formée de petites cellules chromatiques envoyant leurs prolongements dans la lame médul- Jlaire et dans la lame glomérulée : c’est l’écorce propre des lobes optiques. Le reste de la masse cellulaire est formé de cellules à protoplasma abondant qui envoient leurs prolongements dans les lobes cérébraux. On remarque ici aussi un petit groupe de grosses cellules, situé du côté externe du lobule supérieur; mais il se trouve * ARCH. DE ZO0OL. EXP. ET GÉN: — 2° SÉRIE. — T. v bls, — surpr. 1887. — Mém. 11 162 G. SAINT REMY. plus en arrière que chez la Lycose. — Les lobes optiques sont inti- mement soudés, et la masse cellulaire médiane, formée par le revé- tement dela face interne des deux lobules, n’est pas divisée par une cloison névrilemmatique. Organe stratifié postérieur. — L’organe stratifié postérieur pré- sente des rapports un peu différents de ce que nous avons vu chez la Lycose ; dans ce type il s'élève en effet comme une sorte de bour- relet au-dessus des lobes cérébraux, de sorte qu’il représente le point culminant des parties médullaires du cerveau. Chez la Tho- mise les lobes cérébraux sont plus nettement ovoïdes, et leur face supérieure est fortement arrondie, de sorte que l’organe stratifié se trouve placé non plus au-dessus mais en arrière d’eux, sur leur face postérieure fortement inclinée. Aussi n'est-il plus rencontré | par les premières coupes horizontales, et n’apparaît-il que sur celles qui passent par la commissure transverse des masses médullaires inférieures (PI. IX, fis. 86, str.). Sa forme se trouve influencée par l’existence du sillon longitudinal médian qui s'étend jusqu’au- dessus de lui. Non seulement la lame ganglionnaire est échancrée, mais la partie médullaire est incurvée dans sa région moyenne, de telle sorte que sa coupe longitudinale (sur les coupes transversales) décrit une sorte d’accolade sans crochet moyen. Quant à sa struc- ture, elle est la même que dans le type précédent, eton y distingue aussi un seoment antérieur avec une lame accessoire, et un seg- ment postérieur, tous deux formés de substance ponctuée fortement colorable ; une lame de substance plus lâche sépare ces deux seg- ments et sert d’intermédiaire entre eux et les régions voisines. La lame ganglionnaire, formée principalement de cellules chroma- tiques identiques à celles des lobes optiques, revêt toute la face supé- rieure de l’organe, mais elle est surtout épaisse en avant et sur les côtés, comme le lui permet la disposition des parties. En arrière et latéralement, elle est formée de cellules à protoplasma abondant. Lobes cérébraux. — Nous avons peu de chose à dire sur les lobes cérébraux. Nous avons indiqué que leur noyau médullaire CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 163 est plus ovoïde que chez la Liycose, et que le revêtement ganglion- naire supérieur de cette région est creusé d’un sillon médian qui rappelle Ja division du cerveau en deux parties symétriques. On y trouve également la commissure supérieure et la commissure prin- cipale que nous avons décrites chez la Lycose. G'ANGLION ROSTRO-MANDIBULAIRE. — La forme générale de ce ganglion est la même que chez la Lycose. Il est divisé également en avant en un lobe rostral médian, à cheval en quelque sorte sur l’œæsophage, et une paire de lobes mandibulaires ovoïdes latéraux. Le petit nerf rostral impair sort du lobe médian et reste appliqué sur le tube digestif. Les lobes mandibulaires, volumineux, s’avan- cent en avant et en haut, en dehorset en avant de la base du lobe cérébral, pour donner naissance aux nerfs des chélicères ; ils font avec leur écorce une saillie assez forte, et le nerf mandibulaire part en quelque sorte de l'extrémité d’un petit tubercule, tandis que le nerf rostral, situé un peu au-dessous, naît au fond d’une échancrure. — Le ganglion rostro-mandibulaire fournit égale- ment les nerfs viscéraux qui se comportent de la même façon que chez la Lycose. TRIBU DES ORBITÉLAIRES. GENRE EPEIRA Walck. Chez les Orbitélaires, l'étude du genre Epeira Walck. était tout indiquée, tant à cause de son extension, qu’en raison de ce fait que l'espèce commune Æ. diadema L. a été fréquemment l’objet de recherches, et en particulier de la part de Schimkewitsch, qui a pratiqué des coupes du système nerveux. La diversité des formes qui composent ce genre a nécessité leur groupement en plusieurs subdivisions ; il nous a paru intéressant d'examiner deux espèces appartenant à deux groupes différents, et nous avons pu constater ainsi que dans un même genre l’anatomie du cerveau pouvait va- 164 G. SAINT REMY. rier très sensiblement. Nous avons étudié Æ. sericea Walck. de la subdivision des Festonnées Walck., et Æ. diadema L. de la sub- division des Ovalaires à mâchoires courtes Walck. EPEIRA SERICEA Walck. (PI. IX, fig. 91-96). Le cerveau d’Æ. sericea représente une sorte de petit tubercule reposant sur la masse sous-æsophagienne (Fi6. VIII). Il est très neitement bilobé à sa partie antérieure et supérieure, et forme deux pointesconiques dirigées en avant et débordant la masse sous- œsophagienne. Ces deux pointes (L. o.) sont des lobes optiques, qui donnent f | à 7 \/ (ll | 7 .O. . . nt . ART Pen chacun naissance à deux nerfs opti- LAN | SN ÿ /| \/ NA / 4 #7 ° NS JAN «eo ques : un très gros qui part de l’extré- mité même du lobe (7. 0.1.), et un second beaucoup plus grêle qui s’é- chappe au-dessus (7. o. s.), un peu FIG. VIII. (1) en arrière de la pointe du lobe. Ces nerfs sont assez longs, et restent parallèles jusqu’au moment où ils disparaissent dans le tissu conjonctif qui entoure le groupe des yeux. L’examen macroscopique seul ne peut faire connaître ce qu’ils deviennent en y pénétrant. L'étude attentive des séries de coupes montre que les petits nerfs supérieurs passent entre les deux gros, et se portent chacun à l’œil médian antérieur du même côté sans émettre de ramifications. Uhacun des deux gros nerfs inférieurs au contraire, en arrivant sous le groupe des yeux, donne deux petits filets pour les yeux latéraux antérieur | et postérieur, tandis que le tronc principal se rend à l’œil médian postérieur, le plus volumineux. Les nerfs des chélicères se voient (1) F1G. VIIT. — Cerveau d’Epeira sericez Walck., vu par la face supérieure. Gr. 25 fois. — Z. G.o., lobe cérébral; — L. o0., lobe optique; — ». 0. à., nerf optique inférieur ; —». 0. s.,nerf optique supérieur ; — »,#»., nerf manüibu- laire; -- à. r., nerf rostral; — x. v., nerf viscéral; — #. p., nerf du pédi- palpe. ue UCI NP CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 165 très bien (n. m.) ; chacun d’eux se divise en deux branches peu après sa sortie. Le nerf rostral, bien que très grêle, est parfaite- ment visible (n. r.) ; il suit le tube digestif. L’œsophage, comme dans les cas précédents, traverse les centres nerveux un peu obli- quement de bas en haut. Une particularité remarquable du système nerveux d’Æpeira sericea, particularité qui facilite singulièrement l'étude des nerfs, c’est la structure de son enveloppe conjonctive : au lieu d’une membrane névrilemmatique anhiste, reposant sur une faible couche de tissu conjonctif, nous trouvons ici autour du cerveau et de la masse sous-æsophagienne, une puissante couche conjonctive, assez épaisse partout, sauf à la face supérieure du cerveau, pour être distinguée à la loupe sur des pièces traitées à l'acide osmique, où elle se montre comme une zone claire. Nous avons fait con- naître plus haut la structure de cette couche et sa signification. Ajoutons que son épaisseur est très variable; à la face supérieure du cerveau elle esttrès mince et forme une simple lame nucléée, peu différente du névrilemme ordinaire ; entre les deux lobes op- tiques accolés, elle est représentée par une double lamelle nucléée, comme chez la Liycose. Elle atteint son maximum d’épaisseur sur les parties latérales de la masse sous-æsophagienne, entre les gros nerfs pédieux, où elle régularise le contour général du système nerveux : elle mesure dans ces intervalles jusqu’à 160 11. Elle en- toure la base des nerfs en diminuant rapidement d'épaisseur, et se continue avec leur névrilemme du type ordinaire. GANGLION OPTIQUE. — Le ganglion optique de cette espèce, comme le faisait prévoir l’examen macroscopique, se différencie de celui des types précédemment étudiés par la réduction considé- rable des lobes optiques ; les autres parties ne présentent pas de modifications importantes. Lobe optique. — Les lobes optiques ont une forme cylindro- conique. Leurs bases dirigées en arrière sont soudées aux lobes cérébraux ; leurs pointes tournées en avant sont continuées par les + MIUIARES pa 2% 1: C EI d 21, A) 166 G. SAINT REMY. gros perfs optiques. Ils sont accolés l’un à l’autre dans leur partie postérieure ; leurs faces internes arrondies laissent par conséquent entre eux, en haut et en bas, deux échancrures profondes et larges ; un épaississement du tissu conjonctif périphérique comble l’échancrure inférieure et les réunit plus étroitement. Chaque lobe est divisé, comme dans les types que nous avons déjà vus, en un lobule inférieur qui en représente la majeure partie, et un petit lobule supérieur. Le lobule inférieur recoit le gros nerf optique inférieur, c’est-à-dire est en relation avec les yeux accessoires ; le lobule supérieur reçoit le nerf de l’œil principal. Les rapports sont donc identiques à ceux que nous avons trouvés chez les Citi- grades et les Latérigrades. Le lobule optique inférieur (PI. IX, fig. 91, 94, 95, L. o.1.), le plus volumineux et le plus compliqué, offre une structure beaucoup plus simple que dans les deux groupes précédents. Il présente toujours une masse médullaire réunie à son homologue du côté opposé par une commissure transverse ; mais les deux écrans mé- dullaires (lame médullaire et lame glomérulée), interposés sur le trajet de la fibre optique entre l’œil et cette masse médullaire, sont remplacés par une formation unique, la couche médullaire, que sa structure rapproche de la lame glomérulée. Nous aurons donc à considérer : la couche médullaire (PI. IX, fig. 91, 94, 95, c. m. 1), la couche fibrillaire (7. :.), la masse médullaire (m. m. à) et la commissure transverse (c. tr. 1.), enfin l’écorce ganglion- naire qui entoure ces parties. La couche médullaire (PI. IX, fig. 91, 94, 95, c. m. 1.) à la- quelle aboutissent les fibres du nerf optique inférieur, est formée par la réunion d’un grand nombre de petites masses polygonales, à contour plus ou moins arrondi, et de forme irrégulière, cons- tituées par de la substance ponctuée dense et homogène, qui se colorent fortement en noir par l’acide osmique. Ces petits corps ont des diamètres variant de 7 à 12 4; ils sont groupés de façon à figurer une lame en forme de calotte à concavité postérieure, CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 167 extraordinairement plissée et contournée, dont les divers plis con- tractent ensemble des adhérences. La disposition irrégulière de ces masses donne à la lame une épaisseur variable ; elles sont en général très serrées, séparées par un étroit intervalle destiné au passage des fibrilles se rendant à leurs voisines, et offrent l’aspect de corps dont la forme serait due à la pression réciproque. Mais en certains points leurs rangs s’écartent (Voy. par exemple, PI. IX, fig. 89) pour livrer passage à de petits groupes de fibres du nerf optique, dont les unes se portent à des régions de la lame qu'elles ne peuvent atteindre autrement, par exemple à ses bords repliés en dedans, mais dont les autres restent peut-être sans rela- tion avec elle, comme avec la masse médullaire, ainsi que nous le décrirons plus loin. Chacun de ces lobules médullaires paraît recevoir une fibrille du nerf optique qui se perd dans sa substance, et émettre une fibrille destinée à la masse médullaire. Il esta peu près impossible de s’assurer de ces faits, c'est-à-dire de consta- ter que chaque lobule ne reçoit qu’une fibre, et n’en émet qu'une seule, leur disposition et leur forme irrégulière ne s’y prêtant pas ; mais on arrive à cette conclusion, en comparant approxima- tivement leur nombre à celui de ces éléments. — Cette couche médullaire reçoit des prolongements des cellules chromatiques qui forment dans cette région l’écorce du lobe optique ; ils se dis- : tribuent aux diverses petites masses de substance ponctuée. On voit donc que les relations de ces masses sont celles des glomérules de la Lycose et de la Thomise. Aussi pouvons-nous regarder cette couche médullaire comme le représentant de la lame glomérulée de ces types. Si nous ne lui conservons pas la même désignation, c'est surtout parce qu'elle représente un type de transition vers une structure plus simple à laquelle les termes de lame et de glo- mérule ne peuvent s'appliquer. — On trouve quelques noyaux conjonctifs, à la face antérieure de cette couche ; ils sont encore plus rares à la face postérieure. Les tubes nerveux émis en arrière par leslobules de la couche 168 G. SAINT REMY. médullaire se rassemblent pour se porter à la masse méduliaire inférieure. Elle forme la couche fibrillaire (PI. IX, fig. 91, 94, 95, f.i. ) qui correspond à la couche fibrillaire postérieure des types précédents. Cette couche a la forme d’un entonnoir plein ; ses éléments, au sortir de la couche médullaire convergeant à peu près vers l'axe du lobe optique, puis se réunissant en une sorte de court pédoncule cylindrique dirigé horizontalement en arrière et un peu en dehors, jusqu’au bord supérieur et externe de la masse médullaire. On remarque dans cette couche de gros tubes nerveux (voy. PI. IX. fis. 94), peu nombreux, très volumineux, mesurant en moyenne 9 L de diamètre, et dont les plus gros atteignent 7 [1 ; ils ont une forme sinueuse qui fait qu’on n’en trouve, sur les coupes, que des portions très courtes et des sec- tions difficiles à suivre et à raccorder. On les voit ramper à la face postérieure de la couche médullaire, ils se dirigent ensuite en arrière et en haut, et s’enfoncent tous, en devenant rectilignes, dans le lobe cérébral dont ils suivent la face externe pour former en arrière, sous l'organe stratifié, une commissure postérieure des lobules inférieurs plus développée que celle de la Lycose et de la Thomise. Nous n'avons pas de données certaines sur l’origine de ces tubes dansle lobule inférieur. Une image que nous avons observée, nous porte à croire qu’ils seraient dus à la réunion de plusieurs tubes du nerf optique ayant traversé la couche médullaire sans contracter de relations avec ses éléments. Ces fibres optiques, qui seraient sans rapports avec la couche et la masse médullaires, représenteraient à l'égard des autres une très faible minorité. La masse médullaire, elle aussi, a subi une simplification dans son volume et dans sa structure (PI. IX, fig. 91, 95, m. m. à.) ; elle est, toute proportion gardée, beaucoup plus petite ici que chez la Lycose et la Thomise; de plus, les régions qui peuvent être regardées comme correspondant à la tête et au pédoncule, sont intimement fusionnées. Elle a à peu près la forme d’un tronc de cône, aplati de haut en bas et d’arrière en avant, dont la petite CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES, 169 base antérieure est très fortement convexe, la grande postérieure légèrement concave ; de la partie interne de sa face postérieure part la commissure transverse (PI. IX, fig. 91, 95, c. tr. à.) ; de la partie externe supérieure, un pédoncule rudimentaire (p.) qui représente seulement la partie externe et postérieure du pédon- cule de la Lycose, la partie interne et antérieure qui donne inser- tion à la commissure transverse n'étant plus distincte. Les fibrilles issues de la couche médullaire rencontrent le bord antéro-supérieur de cette masse médullaire (PI. IX, fig. 91) et s’étalent sur toute sa face supérieure légèrement déchiquetée par de petits sillons ; elles forment une couche qui s’amincit d'avant eu arrière, par suite de la pénétration de ses éléments dans la masse. Le tissu de celle-ci est constitué, comme dans les deux types précédents, par de la substance ponctuée très dense et très fortement colorée, au sein de laquelle sont plongés des tubes nerveux detaille moyenne, contournés et enchevêtrés, nombreux surtout dans la région pos- térieure où ils se rassemblent pour former la commissure et le pédoncule. Le pédoncule (PI. IX, fig. 91, 95, p.) est une lame formée de substance ponctuée fibrillaire et de tubes nerveux à peu près rectilignes, dont quelques-uns assez gros, qui paraissent dus à la fusion de plusieurs tubes de la masse. Cette lame s’enfonce dans le lobe cérébral, sur lequel repose la masse médullaire, en suivant sa face externe, et se perd graduellement dans sa sub- stance. Si les masses médullaires inférieures sont plus simples, chez l’Epeire soyeuse que chez la Lycose et la Thomise, leur com- missure transverse présente en revanche une structure un peu plus compliquée. Elle affecte une double courbure ; elle représente, comme précédemment, un arc à concavité externe, mais cet arc subit de plus une inflexion qui le rend convexe en haut, concave en bas, comme chez la Lycose. Nous avons vu que, chez la Thomise, la commissure, au lieu de dessinerun arc régulier, _ comme chez la Lycose, se décompose en trois segments : deux 470 G. SAINT REMY. latéraux etun moyen légèrement renflé, faisant un angle très obtus avec les premiers (PI. IX, fig. 90, c. tr. ü.). Cette dispo- sition est plus accentuée chez l’Epeire soyeuse (PI. IX, fig. 95, c. tr. 1.). Chacun des segments latéraux (s. /.) a la forme d’un cône très allongé dont la base se confond avec la masse médullaire, et dont Ja pointe, dirigée en dedans et un peu en arrière et en haut, rejoint le segment moyen. La fig. 95, PI. IX, représente une coupe horizontale oblique qui permet de voir à la fois le segment latéral droit dans toute son étendue et le segment moyen. Ces segments latéraux sont constitués par des tubes nerveux assez gros enarrière, plus grêles en avant où ils sont accompagnés de substance ponctuée fortement colorable. Le segment moyen (PI. IX, fig. 95,s. m.), au lieu d’être la simple continuation du seg- ment latéral, est beaucoup plus gros que lui. Il est fortement ovoïde et s'étend transversalement immédiatement ‘en arrière de la masse cellulaire antérieure du cerveau, dans laquelle il fait saillie. IL est formé par un faisceau transversal de tubes nerveux, qui sont la continuation des gros tubes des sesments latéraux, et par un manchon incomplet de substance ponctuée, dans laquelle se perdent les petites fibres de ces sesments; ce manchon, qui entoure incomplètement le faisceau, s'étend surtout en avant et au-dessus de lui et un peu en arrière. Les coupes sagittales montrent que sa substance ponctuée est traversée de chaque côté, d'avant en arrière et de haut en bas, par un faisceau de fibres qui sont les prolongements d’un groupe de cellules voisines, faisceau qui va se perdre plus bas, dans la substance des lobes cérébraux. On reconnaît ces faisceaux sur les coupes horizontales ; sur ces mêmes coupes, on trouve encore, immédiatement contre le bord du segment moyen, la commissure principale des lobes cérébraux. Le lobule optique supérieur (PI. IX, fig. 91, 93, L. o. s.) est situé à la face supérieure du lobe optique, et orienté d’avant en arrière et de dedans en dehors. Il comprend les mêmes parties que chez les Citigrades et les Latérigrades, mais un peu simpli- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. ATA fiées. Les fibrilles du nerf de l’œil principal (PI. IX, fig. 91, 93, n. 0. 8.) pénètrent dans le cerveau au niveau du bord postérieur de la couche médullaire inférieure, et rencontrent un peu en arrière un écran médullaire en forme de calotte très épaisse, à face antérieure fortement convexe et à face postérieure légèrement concave ; cet écran (PI. IX, fig. 93, c. m.s.) est également formé de tubes nerveux dont la paroi est très épaisse, comme nous l’avons vu dans la lame médullaire supérieure des deux groupes précédents ; maïs ici cette structure est vaguement indiquée, moins nette encore que chez la Thomise, et sert de transition vers les types que nous allons étudier, où il n y a plus en ce point qu’un amas de substance ponctuée homogène. Aussi donnerons-nous dès maintenant à cette formation le nom de couche médullaire supé- rieure. Les fibrilles assez grosses qui sortent de cette couche forment une sorte de pédoncule assez long (couche fibrillaire) qui se dirige horizontalement, en arrière et en denors, vers le bord supérieur et externe du lobe cérébral (PI. IX, fig. 93, f. s.). À ce niveau, le pédoncule se continue avec une masse médullaire supérieure (m. m. s.), allongée, d’un diamètre un peu plus grand que lui, formée de tubes nerveux à parois épaisses, et fortement colorables par l’acide osmique. Cette masse médullaire se confond peu à peu avec le lobe cérébral. La commissure transverse des masses médul- laires supérieures existe également, et forme une zone fibrillaire transversale qui s’étend devant l’organe stratifié et se recourbe de chaque côté pour s'unir à la masse médullaire. L’écorce ganglionnaire du lobe optique comprend, comme dans les types précédents : une région antérieure formée de petites cellules chromatiques, qui représente l’écorce propre du lobe op- _ tique, et une région postérieure constituée par des cellules riches en protoplasma, qui envoient leurs prolongements dans les lobes cérébraux. L’écorce propre est située autour des couches médul- laires, et en arrière de celles-ci autour de la portion antérieure des 172 G. SAINT REMY. couches fibrillaires (voy. PL IX, fig. 91, 93-95). Ses éléments sont des noyaux ovoïdes, très riches en granulations de chromatine et mesurant environ 6 1 de diamètre, autour desquels on ne peut reconnaître sur les coupes de limites cellulaires. Ils envoient leurs prolongements dans les couches médullaires inférieure et supé- rieure. Cette accumulation de cellules chromatiques a moins d’im- portance que chez la Lycose et la Thomise, ce qui s'explique, puisqu'elle n’est en rapport qu'avec une seule région au lieu de deux. Dans l'écorce de la base du lobe optique, nous devons signa- ler l'absence du groupe de grandes cellules, que nous avons vu sur le bord externe du lobule supérieur dans les types précédents. Organe stratifié postérieur. — T?organe stratifié postérieur est appliqué en saillie contre la face supéro-postérieure oblique du noyau médullaire des Jobes cérébraux (PI. IX, fig. 91, str.), L’organe médullaire est assez fortement convexe en avant (PI. IX, fig. 98, str.), et même un peu concave en arrière, dans sa partie moyenne et supérieure. Sa face supérieure est convexe, sa face inférieure concave ; mais ces courbures sont peu prononcées, celle de la face inférieure surtout. Il comprend les mêmes parties que dans les deux types que nous avons étudiés, et nous nous dis- penserons d’en donner une description complète, pour éviter des redites inutiles. Le segment antérieur et supérieur est très nette- ment divisé, dans sa partie moyenne, en une lame principale (PI. IX, fig. 91, L. s. a.) et une lame accessoire assez épaisse (l’.s. a.) de forme prismatique. La lame ganglionnaire, qui recouvre com- plètement la face supéro-postérieure et les bords externes de l'organe médullaire, est formée des mêmes cellules chromatiques, pauvres en protoplasma, que l'écorce propre des lobes optiques. Lobes cérébraux. — Les lobes cérébraux (PI. IX, fig. 91, 93, 95, L. G. 0.) n’offrent rien de particulièrement intéressant à | état nn er sitio ete RAS Lido à on + signaler. Les faisceaux de prolongements cellulaires, surtout ceux venant de l'écorce de la face supérieure, sont extrêmement nets; ils s’enfoncent très profondément, et se divisent et se dissocient L CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 173 au centre et dans la région inférieure du lobe. — La commissure supérieure des lobes cérébraux est très nette. La commissure prin- cipale se présente comme un gros cylindre de fibrilles, situé im- médiatement contre le bord postéro-supérieur du segment moyen de la commissure transverse des masses médullaires inférieures : elle est très fortement recourbée en arrière, et ses extrémités se portent en haut et se perdent dans le tiers supérieur des lobes. Un peu en arrière d’elle et dans le même plan que sa partie moyenne, on remarque une petite commissure accessoire plus courte. GANGLION ROSTRO-MANDIBULAIRE. — Lie ganglion rostro-mandi- bulaire (P1. IX, fig. 95, 96, G. rm.) est construit sur le type que nous avons déjà décrit; il donne également naissance aux nerfs mandibulaires, au nerf rostral et aux nerfs viscéraux, et comprend une masse médullaire commune en arrière, diviséeen avant en une paire de lobes mandibulaires et un petit lobe rostral. Les lobes mandibulaires (PI. IX, fig.96, Z. m.) sont relativement plus petits que chez la Lycose, et ne sont pas piriformes ; ils représentent chacun un cône assez étroit, oblique de bas en haut et d’arrière en avant, qui s’avance sur les parties latérales et inférieures du gan- glion optique. En traversant le tissu conjonctif périphérique assez épais en cet endroit, les fibres qui constituent le nerf se rassem- blent plus intimement, et le faisceau a même un diamètre un peu plus petit que dans son trajet hors du cerveau ; il prend, à l’inté- rieur de ce tissu, une direction oblique en dehors, qui s'accentue lorsqu'il en est sorti. — Le lobe rostral (Z. r.) est ici une petite masse plus réduite que dans les types précédents, en forme de bandelette cylindrique coudée, constituant une espèce de pont au- dessus de l’œsophage. Sa partie moyenne n’est pas recouverte par l’écorce ganglionnaire qui laisse, en ce point, une échancrure occupée par le tissu conjonctif périphérique, et par laquelle sort le nerf (PI. IX, fig. 96, n. r.) qui exécute un certain trajet entre deux parois cellulaires dont il est séparé par le tissu conjonctif, Comme précédemment, les nerfs mandibulaires sortent du cer- 174 G. SAINT REMY. veau dans un plan un peu plus élevé que celui du nerf rostral. Le nerf viscéral naît, comme nous l’avons décrit chez la Ly- cose, du bord externe de la région supérieure et postérieure du ganglion, et s'étend d’abord sous le tissu conjonctif périphérique le long de la partie postérieure et inférieure de la face externe du lobe cérébral, avec une direction oblique en avant et en haut, puis se coude brusquement et se porte à travers le tissu conjonctif - en avant et en dehors, en faisant un angle obtus avec son trajet primitif (PL IX, fig. 95, n. v.). L’écorce cellulaire du ganglion rostro-mandibulaire n'offre au- cune particularité. On y trouve, dans chaque moitié, à la face an- térieure, un îlot de grosses cellules comme nous en avons signalé un chez la Lycose. EPEIRA DIADEMA L. (PL. IX, fig. 91; PL. X, fig. 98-102.) Le cerveau d'Æ. diadema L. est peu différent de celui d’Æ. se- ricea, mais il s’en distingue cependant par une réduction pro- noncée des nerfs optiques, et aussi par la nature de son névrilemme qui forme une simple lamelle nucléée, comme chez toutes les Ara- néides. Ces deux faits peuvent être reconnus déjà à l’examen ma- croscopique ; on ne remarque plus, sur les pièces traitées à l'acide osmique, la zone claire qui entoure le système nerveux, dans le cas précédent, et les lobes optiques ne font pas une saillie bien sensible en avant du cerveau. Ces lobes sont représentés par les deux pointes antérieures et extérieures du cerveau qui, on le sait, a été décrit depuis longtemps chez les Aranéides, comme bilobé à sa partie antérieure et supérieure. Ces lobes donnent également nais- sance chacun à deux nerfs : un supérieur, et un inférieur ; mais tandis que chez l’Epeire soyeuse, le nerf supérieur, plus grêle, naît un peu en arrière de l'extrémité du lobe d’où part le nerf in- férieur plus volumineux, chez l’Epeire diadème on voit les deux nerfs, qui sont presque égaux, se détacher en même temps de la CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHEATES. 175 pointe même du lobe. L'étude des coupes confirme ce fait, et montre qu'il est le résultat d’un changement dans les relations des lobules optiques. Quant aux diamètres respectifs des nerfs, on s'explique facilement que les nerfs supériears soient ici assez gros et presque égaux aux nerfs inférieurs, car les yeux principaux sont ici de beaucoup les plus volumineux de tous, tandis que chez l'Epeire soyeuse ils sont extrêmement petits. GANGLION OPTIQUE. — Les coupes nousmontrentles lobes optiques comme deux cônes tronqués courts, dirigés en avant et un peu en haut (PI. X, fig 98). Par conséquent leurs faces internes ne se touchent pas, comme cela avait lieu dans les types étudiés jusqu'ici (comparez PI. IX, fig. 94, 95, et PI. X, fig. 100), et leurs bases seules se confondent , bases formées, il faut le remarquer, de couches cellulaires appartenant par leurs relations aux lobes cé- rébraux. Chaque lobe optique est divisé, comme précédemment, en un lobule supérieur et un lobule inférieur; mais les rapports de ces lobules sont modifiés : le lobule supérieur, qui dans les autres cas était très petit et rejeté en arrière, est ici presque de la même taille que le lobule inférieur (comparez PI. X, fig. 99, 100, L. o. s., L. o.i.), et sa couche médullaire, pour pouvoir s’étendre, s’est portée en avant de celle du lobule inférieur. De sorte que le nerf inférieur exécute un certain trajet dans le cerveau au-dessous, en avant et en dehors de la couche médullaire supérieure qu’il con- tourne en quelque sorte (PI. X, fig. 98, n. o. 1.). L’axe de la portion médullaire du lobule inférieur est dirigé d'avant en arrière et de dedans en dehors, comme chez l'Epeire _soyeuse, mais beaucoup plus incliné de haut en bas. La couche médullaire de ce lobule et la couche fibrillaire qui lui fait suite, ont la même structure que dans l’espèce précédente, et nous n'avons pas à y revenir (PI. X, fig. 98, 100, 101, c. m. à 3 f. à). Mais la masse médullaire (PI. X, fig. 102, m. m. 1.) doit attirer notre attention ; elle est, toute proportion gardée, sensiblement plus petite que dans la première espèce, et au lieu d’avoir une 176 G. SAINT REMY. forme allongée d'avant en arrière, se rapprochant d’un tronc de cône, elle est devenue hémisphérique. Le petit pédoncule (PI. X, fig. 102, p.), qui part de son bord externe et inférieur, est très court et se perd rapidement dans la substance du lobe cérébral. La commissure transverse des masses médullaires (PI. X, fig. 101, 102, c. tr. 4.) a la même constitution que chez l'Epeire soyeuse ; mais le segment latéral (PI. X, fig. 102, s. L.), au lieu de suivre une ligne droite pour se porter en haut et en arrière vers l'extrémité du segment moyen (fig. 101, s. m.), décrit une courbe en forme de $ très allongé, et aborde moins obliquement ce segment. La commissure postérieure des lobules inférieurs, dont une faible partie du bord inférieur se voit fig. 100, PI. X, c. p. à. est ici plus développée encore que dans l'espèce précédente. Elle a la même origine aux dépens de fibrilles qui ne contractent pas de rapports avec la masse médullaire et qui sont ici plus nom- breuses. Le lobule supérieur (PI. X, fig. 98, 99, L. o. s.) a exactement la même constitution que chez l'Epeire soyeuse ; il est orienté obliquement en arrière, en dehors et en bas. La couche médul- laire (c. m. s.) est plus volumineuse, comme nous l’avons déjà dit ; certaines coupes, voisines de ses bords latéraux, pourraient faire croire qu’elle est sphérique, mais les sections sériées montrent qu'il s’agit d’une lame très épaisse dont le contour est arrondi: On reconnaît qu’elle est formée de tubes nerveux à parois épaissies. Elle est en contact en bas avec l’origine du nerf inférieur, en haut avec le névrilemme ; latéralement elle est enveloppée d’une couche de tissu conjonctif qui rectifie le contour du lobe optique. À cette couche médullaire, fait suite un pédoncule fibrillaire (f. s.) qui aboutit à une petite masse médullaire (m. m. s.) divisée en fibres longitudinales comme dans les cas précédents. On distingue aussi des fibres commissurales entre les deux masses médullaires su- périeures. La base des deux couches médullaires supérieure et inférieure CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 177 est entourée par une agglomération de cellules chromatiques pauvres en protoplasma qui envoient leurs prolongements dans ces couches (écorce propre du lobe optique). Quant à la portion de l'écorce cellulaire qui entoure les couches fibrillaires et s’étend à la surface antérieure des lobes cérébraux, elle est for- mée, comme la région correspondante dans les autres types étudiés jusqu'ici, de cellules riches en protoplasma, dont les pro- longements pénètrent dans ces derniers lobes. Nous n'avons rien de spécial à signaler au sujet de l’organe stratifié, des lobes cérébraux, où du ganglion rostro-mandibulaire. Mais nous avons fait chez | Epeire diadème une observation inté- ressante sur les nerfs mandibulaires, observation que nous n’avons pu répéter ailleurs. Nous avons constaté, sur le trajet de ces nerfs, l'existence d’une accumulation de cellules ganglionnaires (PI. VI, fig. 70). À une faible distance de son point d'émergence, le nerf se renfle légèrement, principalement à sa face supérieure, sur une certaine longueur, jusqu'au point où il se divise en deux branches. Il présente là un véritable petit ganglion fusiforme, très allongé, formé d’une masse de cellules nerveuses, et aussi, nous a-t-il semblé, d’un petit amas de substance ponctuée. Les fibres du nerf, sorties du cerveau, se divisent en deux groupes en arrivant à l’extrémité proximale du ganglion. La majeure partie le contourne, et va former la branche dedivision inférieure du nerf : c’est le faisceau inférieur sur lequel se trouve appliqué le ganglion. Quelques-unes des fibres du tronc primitif pénètrent seules dans cet amas ganglionnaire ; il en sort un bien plus grand nombre de son extrémité distale : celles-ci, jointes à quelques-unes de celles du faisceau inférieur, forment la branche de division supérieure. TRIBU DES TUBITÉLAIRES. En raison de l’étendue de cette tribu, nous avons cCitudié trois types pris dans trois familles différentes, et appartenant aux genres ARCH. DE ZOOL. EXP, ET GÉN. — 2° SÉRIE. — T. V bis, — supp. 1887. — Mém. 12 178 G. SAINT REMY. Tegenaria Walck. (fam. des Agalénides), Drassus Walck. (fam. des Drassides) et Segestria Latr. (fam. des Dysdérides). GENRE TEGENARIA Walck. (PL. XI, fig. 109-112). Nous n’avons pasà décrirela forme du cerveau de Téegenaria domestica L. que nous avons pris pour exemple. Cet organe se présente comme chez l’Epeire diadème, et a été du reste souvent décrit. Le ganglion optique est caractérisé par la simplification de ses lobes optiques. La structure du lobule inférieur est intéressante pour cette raison. La couche médullaire inférieure (PI. XI, fig. 110, c. m.i.) a une structure beaucoup plus simple que dans le cas précédent ; elle se compose de trois lames épaisses de sub- stance ponctuée, étendues d’avant en arrière et un peu de dedans en dehors, et disposées en éventail. La lame moyenne est plane et presque verticale, très légèrement inclinée du côté interne, de bas en haut; les latérales sont bombées à concavité interne, et leur bord inférieur se confond, dans la partie moyenne de l’en- semble, avec le bord inférieur de la lame moyenne ;enfin, on remarque à la face inférieure, dans le plan et au-dessous de la lame moyenne,un petit cylindre de même nature formant une sorte de bourrelet : c’est une espèce d’appendice de la lame moyenne, qui s’en détache dans la région antérieure. D’après cette description, on peu s'expliquer facilement les images fournies par les coupes, Les sections horizontales donnent trois lames parallèles dans presque toute l’étendue de l'organe (PI. XI, fig, 110, c. m. 1.),et une masse confuse dans la partie inférieure ; les sections transver- sales donnent une sorte de fourche à trois dents, au-dessous de laquelle se trouve la coupe du cylindre médian ; quant aux sections sagittales du cerveau, comme elles ne sont pas parallèles au plan d'orientation du lobule, elles donnent forcément des images très variables et moins claires que les autres. — Le nerf inférieur, en CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 179 arrivant au voisinage immédiat de la couche médullaire, se par- tage nettement en trois faisceaux séparés par desespaces occupés par du tissu conjonctif ; chacun de ces faisceaux pénètre dans une lame par son bord antérieur ; mais on ne peut s’assurer si ces faisceaux, et par conséquent les lames, correspondent chacun à un œil accessoire déterminé. La substance ponctuce qui forme ces lames est très grenue, et se colore fortement en noir par l’acide osmique;elle se montre sur les coupes transversales et horizontales criblée de petites taches pâles, qui sont des sections très obliques de tubes nerveux. Ces tubes, qui sont la continuation du nerf optique, se reconnaissent sur les coupes sagittales ; ils sont dirigés d’avant en arrière etun peu obliquement de haut en bas, ce qui explique pourquoi on ne les obtient, dans une partie de leur étendue, que sur ces dernières coupes. Les lames s’amincissent un peu d’avant en arrière, etleur bord antérieur, qui recoit les fibres du nerf optique, estsensiblement plus gros que le bord postérieur, ce qui tient à ce que les fibrilles, qui sortent pour aller constituer la couche fibrillaire (PI. XI, fig. 110, f. i.), s’échappent non seule- ment du bord postérieur, mais aussi des faces latérales obliques. Toutes les fibres du nerf optique inférieur ne traversent pas les lames de la couche médullaire ; quelques-unes, en petit nombre, poursuivent leur trajet à côté d'elles, notamment sur le bord interne de cette région, et se portent directement à la couche fibrillaire. Les éléments de celle-ci ne sont pas parallèles, mais forment une sorte d’écheveau embrouillé, au sein duquel appa- raissent quelques gros tubes nerveux, constitués probablement par la fusion d’un certain nombre de fibrilles, comme nous l’avons vu chez l'Epeire soyeuse ; ces gros tubes se portent en arrière, tout à faiten dehors contre le bord externe et supérieur de la couche fibrillaire ; ils longent la face externe du lobe cérébral, comme nous l'avons observé déjà dans les types précédents, et vont constituer en arrière, à sa place habituelle, la commissure postérieure des lobules inférieurs (PI. XI, fig. 110, c. p.i.). Celle- 180 G. SAINT REMY. i est très développée, et ses contours sont bien arrêtés ; elle pré- sente un degré d'organisation plus élevée que dansles espèces étudiées jusqu'ici, ce qui semble en rapport avec la simplification de l’appareil commissural antérieur. Cette structure, on le voit, est beaucoup plus simple, plus gros- sière, pourrait-on dire, que celle que nous avons constatée dans les différents types précédemment étudiés. Mais la région postérieure du lobule inférieur x subi une réduction bien plus considérable encore. En effet, la masse médullaire n'existe plus ; elle a totale- ment disparu, et l'examen le plus minutieux ne peut en déceler une trace. La couche fibrillaire s’unit directement au bord externe du lobe cérébral. La commissure transverse des masses médullaires inférieures a cependant persisté, mais sous une forme rudimentaire. Elle se présente comme un cordon fibrillaire très grêle (PI. XI, fig. 111, c. tr. 1.), légèrement onduleux, qui réunit les points où devraient précisément se trouver les bases des masses médullaires c’est-à-dire qu’il disparaît à une faible distance du bord antérieur et externe du lobe cérébral, un peu au-dessous du point d’union de la couche fibrillaire. Ce cordon comprend trois sesments, comme la commissure de l’Epeire : deux latéraux et un moyen. Chaque segment latéral, dont notre figure (PI. XI, fig. 111, s. L.) ne pré- sente que la portion interne, offre, comme danslecas précédent, la forme d’un $ très allongé dont la direction générale, supposée rectiligne, est orientée de dehors en dedans, d’avant en arrière et un peu de hauten bas. La concavité externe de l’S est tournée en arrière, et le cordon se termine par une sorte de pinceau dû à l'étalement et à la dispersion dans la substance ponctuée du lobe, des fibrilles qui le constituent ; dans cette région se trouvent quel- ques trajets de fibres issus de l’écorce cellulaire, et il faut se garder de les confondre sur les coupes avec les dernières traces de la commissure, Dans son tiers interne, le segment latéral est concave en dehors (PI. XI, fig. 111, s. L.) et s’unit au segment moyen ; celui-ci (3. m.) est un petit arceau médian, en forme de croissant CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 181 un peu plus épais au centre qu'aux extrémités, qui présente deux courbures très nettes, l’une dans un plan horizontal à concavité postérieure, l’autre dans un plan vertical à concavité supérieure, c’est-à-dire que chacune de ses moitiés se dirige depuis la ligne médiane, en dehors et à la fois en haut et en arrière. Il se con- tinue directement de chaque côté avec les segments latéraux ; mais dans la moitié inférieure de son épaisseur, ses fibrilles sont moins serrées que dans sa moitié supérieure et dans les segments latéraux, ce qui lui donne un aspect renflé. Sa convexité antérieure se trouve, comme toujours, au fond du sillon médian qui sépare en avant les deux lobes cérébraux ; la cloison conjonctive verticale antéro-pos- térieure s'arrête à ce niveau. Le lobule optique supérieur témoigne encore ici de la fixité de sa constitution ; on y retrouve les mêmes parties que précédemment. Le nerf se jette dans une couche médullaire à peu près sphérique, située un peu en avant, au-dessus et en dedans de celle du lobule inférieur (PI. XI, fig. 109, 112, c. m. s.), formée de tubes ner- veux à paroi épaisse fortement colorée, continuation de ceux du nerf. Cette couche est suivie d’un pédoncule fibrillaire (7. s.) dirigé enarrière, en dehors et en bas, qui se termine dans une masse médullaire de structure fibrillaire dont les limites sont diff- ciles à préciser. Les deux masses médullaires supérieures sont réunies par une commissure fibreuse considérable, qui suit les faces externe et postérieure du cerveau, au-dessous de l’organe stratifié. La base des couches médullaires supérieure et inférieure est enveloppée par un revêtement de petites cellules pauvres en pro- toplasma, mais cependant à limites cellulaires distinctes, dont le noyau ne se colore pas beaucoup plus que celui des autres éléments de l'écorce cérébrale ; ce revêtement, qui représente l'écorce propre du lobe optique, envoie ses prolongements dans les couches médul- laires. Les couches fibrillaires traversent une accumulation de cel- lules appartenant aux lobes cérébraux, comme nous l'avons vu chez l’Epeire, 182 G. SAINT REMY. L'organe stratifié postérieur (PI. XI, fig. 109, 112, str.) est assez volumineux chez la Tégénaire ; ses différentes parties sont très nettes et d’une étude facile. Sa face inférieure est à peu près plane et sa face supérieure très peu convexe. Mais ses faces antérieure et postérieure présentent des courbures très accentuées, et sur les coupes horizontales (fig. 109) il se montre comme un énorme crois- sant dont les pointes se portent très loin en avant. Son segment antérieur, plus considérable que le postérieur, est très nettement divisé en deux parties par une lamelle claire ; les trajets fibreux qui sortent de cette lame intermédiaire, sont parfaitement visibles (voy. PI. XI, fig. 112) ;on les suit même sur une certaine longueur dans les lobes cérébraux, en avant ou en arrière, le long de la face postérieure du cerveau. Sa lame ganglionnaire ne renferme exclu- sivement que des cellules chromatiques bien caractérisées, dont les noyaux sont relativement assez gros. Les lobes cérébraux (PI. XI, fig. 110-112, ZL. G. 0.) ne se dis- tinguent, dans le cerveau de la Tégénaire, par aucun caractère particulier ; leur commissure supérieure est très grêle ; leur com- missure principale très volumineuse. Cette dernière (PI. XI, fo. 111, ce, pr.) se voit, comme toujours, au niveau de la commissure trans- verse des masses médullaires inférieures ; ses caractères sont les mêmes que dans les autres types. Un peu au-dessous et en arrière, à la limite du ganglion optique et du ganglion rostro-mandibulaire, on remarque une autre petite commissure accessoire, presque droite et assez grêle, formée de fibres moins fines que la première. Le revêtement cellulaire des lobes cérébraux, qui s'étend sur les faces supérieure etantérieure, est constitué par des cellules à protoplasma abondant, de taille moyenne. Ilexiste cependant, dans la ré- gion moyenne de la face supérieure du cerveau, de chaque côté de l'échancrure antéro-postérieure qui s'étend sur presque toute cette face, un îlot de grosses cellules. Les prolongements de tous ces éléments se réunissent en faisceaux qui s’enfoncent profondément dans la substance médullaire des lobes, se laissant suivre dans leurs CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 183 ramifications, mais finissant toujours par disparaître en se confon- dant avec cette substance. Le ganglion rostro-mandibulaire n'offre rien de spécial à signaler, Les lobes mandibulaires piriformes et le lobe rostral présentent leur disposition habituelle ; les nerfs mandibulaires, le nerf rostral et les nerfs viscéraux, se comportent comme dans les autres cas GENRE DRASSUS Walck. (PL XI, fig. 117, 448), Chez le Drasse les lobes optiques représentent deux faibles pointes, moins saillantes et plus rapprochées de la ligne médiane que chez la Tégénaire. Ils donnent naissance, chacun à leur extrémité, à deux nerfs optiques, en apparence de même dia mètre ; mais cepeudant l’un est plus gros que l'autre, et c’est ici le nerf supérieur qui l’emporte légèrement sur l’inférieur, ce qui s’explique par la taille considérable de l'œil principal, et la petitesse des autres yeux. La structure du lobule optiqueinférieur (1) est encore plus simple que chez la Tégénaire. La couche médul- laire dans laquelle se jette le nerfinférieur, est une masse ovoïde (PI. XI, fig. 117, c. m.i.) étendue presque transversalement de dedans en dehors et en arrière ; elle est formée de petits tubes à paroi épaisse et fortement colorée par l’acide osmique, qui con- tinuent les fibrilles du nerf. La plupart des tubes de la couche médullaire se fusionnent entre eux, pour constituer des tubes plus gros, qui apparaissent vers l'extrémité postérieure de cette couche. Un certain nombre des tubes du nerf se réunissent d’ail- leurs de la même facon, sans passer par la couche médullaire. La région qui correspond à la couche fibrillaire des types précédem- ment étudiés, comprend donc très peu de fibrilles fines, mais au contraire beaucoup de grosses fibres, qui jusqu'ici, comme nous (1) La coupe que nous représentons Pl. XI, fig. 117, est oblique sur le plan horizontal : c’est ce qui fait qu’elle montre à la fois une partie du lobule inférieur et une partie du lobule supérieur, en" eut me 21 | 184 G. SAINT REMY. l'avons vu, étaient très peu abondantes. La masse médullaire n'existe pas, et cette couche de fibres se porte, comme chez la Tégénaire, au bord externe et antérieur du lobe cérébral, avec la substance duquel une partie de ses éléments se confondent. Beau- coup de gros tubes se continuent en arrière le long de la face externe de ce lobe, et forment une commissure postérieure des lobules inférieurs très développée. — La commissure transverse des masses médullaires inférieures existe à l'état rudimentaire, et se présente à peu près comme chez la Tégénaire. C’est un petit cordon fibrillaire un peu onduleux, qui réunit les régions des bords antéro-externes des lobes cérébraux situées un peu au-dessous du point d'insertion de la couche fibrillaire du lobule inférieur. On peut y distinguer également trois segments : les deux segments latéraux sont orientés de dehors en dedans, en arrière et un peu en bas, offrant la forme d'un $ allongé, l’extrémité externe se per- dant dans la substance du lobe latéral, l'extrémité interne se conti- nuant avec le segment moyen. Celui-ci (PI. XI, fig. 118, c. tr. à.) n’est pas légèrement renflé comme chez la Tégénaire, et se montre comme la simple continuation des seoments latéraux ; il présente cependant les deux mêmes courbures que dans letype précédent, l’une à concavité supérieure, l’autre à concavité postérieure ; mais celle-ci surtout est infiniment moins prononcée que chez la Tévé- naire. C’est un acheminement vers la disposition rectiligne que nous verrons chez la Ségestrie. Le lobule optique supérieur garde dans sa partie antérieure la structure qu'il nous a présentée jusqu'ici. Il comprerd d’abord une couche médullaire (PI. XL, fig. 117, c. m. s.) presque sphérique, relativement volumineuse par rapport à la couche médullaire infé- rieure, étant données les proportions habituelles, en raison de la taille de l’œil principal. Elle est située un peu au-dessus et en dedans de cette dernière, et formée de tubes nerveux parallèles à parois épaisses, comme à l'ordinaire ; elle donne naissance à un pédoncule de fibrilles fines, qui s’étend en dehors, en arrière et en CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 185 bas, jusqu’à une masse médullaire ovoïde constituée comme tou- jours par des tubes onduleux plongés dans une substance ponctuée commune, fortement colorable. Cette masse médullaire se fusionne en arrière et en bas avec la partie supérieure et externe du lobe cérébral, et on ne reconnaît pas de commissure transverse des masses médullaires supérieures. Les relations entre les deux lobules supérieurs sont établies d’une façon indirecte par la sub- stance des lobes cérébraux, ce qui marque un degré plus avancé de simplification. L'écorce propre du lobe optique, peu considérable, est formée de cellules à protoplasma peu abondant, et dont les caractères différent sensiblement de ceux des cellules chromatiques typiques qui constituent la lame ganglionnaire de l'organe stratifié ; comme chez la Tégénaire, les noyaux sont plus gros, moins riches en chromatine, et laissent reconnaître, autour de chacun d’eux, une zone de protoplasma bien nette. L’organe stralifié postérieur est aussi développé que chez la Tégénaire ; les lobes cérébraux, pas plus que le ganglion rostro- mandibulaire, n’offrent rien de spécial à signaler. GENRE SEGESTRIA Latr. (PL. XI, fig. 13-116.) La famille des Dysdérides était intéressante à étudier en raison dela réduction du nombre des yeux qu’elle présente ; elle n’en possède en effet que trois paires, D’après les entomologistes, les deux qui font défaut seraient les médians antérieurs dans le genre Dysdera etles médians postérieurs dans le genre Segestria ; mais Bertkau (1) a montré que dans ce dernier genre comme dans le premier, c étaient bien les yeux médians antérieurs ou prinei- paux quin'existaient pas. L'absence des yeux principaux, dont le mode de développement et la structure marquent un degré d’or- (1) Bertkau. Loc. cit. p. 627. 186 G. SAINT REMY. ganisation plus élevée, nous semblait devoir s'accompagner d’un certain degré d'infériorité dans la structure des centres nerveux. Nous avons étudié à ce point de vue l'espèce Segestria perfida Walck., et notre supposition s’est trouvée confirmée ; le système nerveux s’écarte même par certains points accessoires de celui de la plupart des Aranéides. Aïnsi le tube digestif le traverse hori- zontalement, et le névrilemme, au lieu d’être une lamelle délicate d’une grande minceur, est au contraire une membrane épaisse et résistante, accompagnée d’une couche importante de tissu con- jonctif, comme chez les Myriapodes. Mais un fait beaucoup plus important et qui constitue, croyons-nous, un caractère d'infériorité marqué, tant au point de vue physiologique qu’au point de vue anatomique, c’est l'absence de vaisseaux sanguins à l’intérieur des centres nerveux, et leur remplacement par des trachées nom- breuses répandues partout. Le cerveau de la Ségestrie se présente comme une petite masse un peu allongée transversalement, dont la face supérieure arrondie est divisée par une échancrure antéro-postérieure profonde, en deux moitiés latérales. L’extrémité antérieure de chacune de ces moitiés représente un lobe optique rudimentaire, et ilen part un nerf optique unique, assez gros, correspondant évidemment au nerf optique inférieur des autres Aranéides. L'étude des coupes révèle que ce lobe optique, à l'opposé de ce que nous avons toujours vu jusqu'ici, n’est pas divisé en deux lobules et représente un organe simple. Sa structure, bien que peu compli- quée, et ses relations avec les lobes cérébraux, suffisent pour nous convaincre qu'il correspond au lobule inférieur des autres types. Il comprend en effet une couche médullaire, une couche de fibres et de fibrilles qui se portent au bord externe du lobe cérébral vers le milieu de son tiers supérieur, et il existe une cominissure trans- verse des masses médullaires inférieures. La couche médullaire (PI. XI, fig. 113, c. m. i.) est formée par les tubes du nerf optique qui deviennent onduleux, et dont la paroi s’épaissit et devient sus- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 4187 ceptible de se colorer fortement par l'acide osmique ; elle est orientée de haut en bas, d'avant en arrière et de dedans en dehors. À différents niveaux, les tubes en se fusionnant donnent naissance à des éléments plus considérables, et la région qui fait suite à la couche médullaire est formée de fibres de tailles diverses, toutes plus grosses que les tubes de la couche même. Ces fibres consti- tuent un gros faisceau qui correspond à la couche fibrillaire infé- rieure des autres types (PI. XI, fig. 114, j. 2.), et qui suit la masse externe du cerveau immédiatement sous le névrilemme, en se dirigeant en arrière et un peu en bas. En arrivant au lobe céré- bral, une faible partie des éléments de ce faisceau, prise parmi les plus petits, se perd dans sa substance dans la région où se trouve- rait la masse médullaire sielle existait. Le reste poursuit son tra- jet le long de la face externe du cerveau, sous forme d'une bande de grosses fibres onduleuses ; quelques-unes, petites, s’en déta- chent pour s’enfoncer dans le lobe cérébral où elles disparaissent bientôt ; mais la majorité de ces tubes nerveux suit le contour du ganglion optique, pour venir constituer une volumineuse commis- sure postérieure des lobules inférieurs (PI. XI, fig. 115, c. p. 1.), au-dessous de l'organe stratifié. Le rudiment de la commissure transverse des masses médullaires inférieures est d’une extrême simplicité ; il est constitué par un fin cordon fibrillaire, dans lequel on ne peut préciser les limites des régions correspondant à celles que nous avons appelées seg- ments latéraux et segment moyen. Ce cordon dans son tiers moyen est presque rectiligne (PI. XI, fig. 115, e. ér. 4.) ; il décrit seulement une courbure, à concavité supérieure à peine sensible, d’un très grand rayon. La courbure à concavité postérieure n'existe pas. Chacunde ses deux autrestiers se porte en dehors, en avant et en haut, et esquisse un arc à concavité postérieure, dans le voisinage du bord antérieur du lobe latéral, mais se termine sans le compléter en se fondant dans la substance médullaire envi- ronnante. Immédiatement derrière la commissure transverse, on 188 G. SAINT REMY. trouve la commissure principale des lobes cérébraux (PI. XI, fig. 115, c. pr.) ; elle forme un arc à grande courbure postérieure, et ses extrémités ne se relèvent pas en avant, comme nous l’avons vu dans les autres types. En arrière, on observe une petite com- missure accessoire. L'écorce propre du lobe optique est formée par des cellules à protoplasma peu abondant, qui diffèrent peu de celles de l’écorce des lobes cérébraux et se distinguent au contraire très nettement des vraies cellules chromatiques de la lame ganglionnaire de l’organe stratifié. Ce dernier organe est bien développé ; ni lui, ni les lobes cérébraux n’offrent de particularités ; la commissure supérieure de ces lobes est très nette. (PI. XI, fig. 114, c. s.) Le tube digestif traverse horizontalement le ganglion rostro-man- dibulaire, sous forme d’un canal très étroit. C’est là une disposi- tion curieuse, mais qui n’a pas sur le ganglion une influence consi- dérable. Nous signalerons un fait plus intéressant : nous.n’avons pas trouvé le nerf viscéral dans la région où il naît habituellement, et la consistance du névrilemme doit nous faire écarter toute idée d’arrachementet de disparition artificielle complète ; en revanche, nous avons constaté l'existence d’un petit nerf qui naît près de la ligne médiane sur le bord postérieur du ganglion rostro-mandi- bulaire, dans la région où ce bord s’infléchit pour former l’orifice postérieur du trou œsophagien. Ce petit nerf est peut-être le nerf viscéral. — Nousavons représenté (PI. XI, fig. 116)la naissance du nerf rostral et des nerfs mandibulaires, qui se détachent du cerveau sur le même plan, plus au-dessus du trou œsophagien que dans les autres types, leurs lobes respectifs étant dirigés beaucoup plus obliquement de bas en haut. La coupe figurée n’intéresse pas encore les lobes mandibulaires, et seulement la partie tout à faitsupérieure du lobe rostral. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 189 TRIBU DES RÉTITÉLAIRES. GENRE PHOLCUS Walck. (PI. X, fig. 103-106.) Dans la tribu des Rétitélaires, nous avons étudié l’espèce com- mune Pholcus phalangioides Walck. Le cerveau, proportionné aux dimensionsde l’animal, est naturellement fort petit. De la face anté- rieure, de chaque côté de laligne médiane, se détache un petit nerf destiné au groupe des yeux accessoires ovalaires, situés latérale- ment : c'est le nerf optique inférieur, à la base duquel on ne distin- gue extérieurement aucun lobe optique. Un nerf optique supérieur, extrêmement grêle, visible seulement sur les coupes, sort de la même façon beaucoup plus en arrière et en dehors que le premier, et innerve le petit œil médian antérieur. A chacun de ces nerfs cor- respond un lobule d’une extrême simplicité, auquel on ne songerait certainement pas à donner ce titre sil’on n’était prévenu par l’étude de types plus développés ; de plus ces lobules ne sont pas réunis en un lobe optique commun : ils sont situés à une certaine distance l’un de l’autre, et sans rapports entre eux. Le lobule inférieur (PL X, fig. 103, 106, L. o. i.) comprend les parties que nous sommes habitués à y voir, mais sous une forme tellement réduite qu’il est difficile de les reconnaître au premier abord. La couche médullaire à laquelle aboutit le nerf optique inférieur, est une masse ovoïde de substance ponctuée, étendue transversalement sous le névrilemme à la face antérieure du cer- veau, un peu obliquement de dedans en dehors et de haut en bas. Elle reçoit à son extrémité interne le nerf optique ; la substance ponctuée qui la constitue a une structure réticulée grenue, à mailles lâches, sans trace. de tubes nerveux distincts ; elle est peu colorable par l’acide osmique et ne présente aucune différenciation. Par les deux tiers externes de sa face postéro-inférieure, cette couche médullaire se continue avec une sorte de pédoncule court, 190 G. SAINT REMY. qui s'étend obliquement, en arrière et en dehors, jusqu’au lobe cérébral ; ce pédoncule (PI. X, fig. 103, f. i.) qui représente la couche fibrillaire des types plus développés, est formé par un mélange de substance ponctuée plus dense que celle de la couche médullaire, de fibrilles eb de fibres plus grosses. Ces dernières sont situées sur le bord externe, et tandis que la substance médul- laire et les fibrilles fines se confondent avec la substance médul- laire du lobe cérébral, elles se continuent en arrière le long de la face externe de ce lobe pour former, en avant et au-dessous de l'organe stratifié, une commissure postérieure des lobules inférieurs assez vaguement indiquée. — Il existe une ébauche de la commis- sure transverse des masses médullaires inférieures. C’est un mince tractus fibrillaire auquel on peut, à la rigueur, reconnaître trois segments : un segment moyen tres petit (PI. X, fig. 104, c. #r.c.) décrivant un petit arc à concavité postérieure, situé au fond de l’échancrure médiane qui sépare les deux lobes cérébraux ; et deux seoments latéraux qui se portent en dehors, en avant et un peu en haut, et décrivent un arc à concavité postérieure dans le voisi- nage de la face antérieure de ces derniers lobes, un peu au-dessous du point d'insertion de la couche fibrillaire du lobule. Les extré- mités externes de cette commissure se perdent dans la substance des lobules cérébraux. Le lobule optique supérieur est représenté simplement par un petit îlot de substance ponctuée réticulée, à structure lâche et peu colorabie, en forme de cône aplati de dehors en dedans. Ce petit cône, qui représente une couche médullaire rudimentaire, est situé verticalement à la partie supérieure du cerveau, vers le milieu de son diamètre antéro-postérieur. (P1. X, fig. 105, L.o.s.) Sa pointe supérieure recoit le nerf optique ; sa base se confond en bas avec la face externe du lobe cérébral. On ne distingue pas de masse médullaire supérieure, ni de commissure transverse réunissant directement les deux lobules supérieurs. Les éléments cellulaires qui sont situés au voisinage de ces CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 194 lobules, et qui paraissent leur envoyer leurs prolongements, ne se différencient aucunement des cellules de l’écorce des lobes céré- braux. Ce sont des cellules à protoplasma bien net et à noyau peu colorable, bien distinctes des cellules chromatiques de la lame gan- glionnaire de l’organe stratifié. L’organe stratifié postérieur est relativement volumineux (P1]. X, fig. 104, 105, 106, str.), et fait une forte saillie sur le bord pos- térieur des lobes cérébraux ; son bord antérieur est droit ; son bord postérieur (fig. 105) et sa face supérieure (fig. 106) sont assez for- tement convexes. Il présente la même composition que dans les autres types : un segment antérieur plus considérable (s. a.) et divisé en deux lames, et un seoment postérieur (s. p.). Sa lame ganglionnaire est formée de petites cellules chromatiques dont le contour protoplasmique ne peut se voir sur les coupes. Les lobes cérébraux n'’offrent rien d’intéressant ; ils possèdent une faible commissure principale ( PI. X,fig. 104, c. pr.) sous forme d’une bande à structure fibrillaire, située, comme toujours, immé- diatement en arrière de la commissure transverse des masses médullaires inférieures. Leur commissure supérieure n’est que vaguement indiquée. Le ganglion rostro-mandibulaire est traversé à peu près hori- zontalement par l’œsophage assez volumineux ; ilne présente aucune particularité qui mérite d’être indiquée, TRIBU DES $SALTIGRADES, GENRE ERESUS Walck. (PL X, fig. 107, 108.) Chez les Saltigrades, nous avons pris pour type le genre Æresus Walck. qui ne possède que trois paires d’yeux. Mais nous n’avons pu nous procurer qu’un très petit nombre d’Æresus cinnaberinus Walck., condition défavorable, étant donnée l'extrême friabilité des centres nerveux protégés par un névrilemme d’une grande min ceur, qui rend difficile la dissection et le traitément du cerveau de 192 G. SAINT REMY. ces petits animaux. Le cerveau de l’Erèse est relativement gros, par rapport à la masse sous-œæsophagienne ; à sa partie antérieure et supérieure, ilest divisé par une large et profonde échancrure en deux lobes optiques volumineux quise dirigent en avant et un peu en dehors, vers les yeux contre lesquels ils sontaccolés. Cette échan- crure se prolonge en un sillon profond sur toute la face supérieure de l’organe. Cet organe présente un degré d'organisation assez élevé ; mais comme il nous était difficile de lui trouver une place dans la série que nous venons d’examiner sans en interrompre la gradation, nous avons préféré l’étudier à part. Les lobes optiques que nous venons d’indiquer ont une struc- ture assez complexe, qui se rattache parfaitement au plan général que nous avons décrit dans le lobule inférieur. Ils représentent donc les lobules optiques inférieurs, ou lobules des yeux accessoi- res des autres Aranéides. [ls comprennent chacun une lame médul- laire, une couche fibrillaire, une masse médullaire, et sont réunis par une commissure transverse des masses. Pour les étudier, le mieux est de pratiquer des coupes parallèles à leur axe, sens qui ne correspond à aucun de ceux qui nous guident habituellement dans l'étude du cerveau. Les fibrilles qui forment le nerf optique ont une paroi extrême- ment fine et délicate, beaucoup plus mince que dans les nerfs opti- ques des autres groupes ; elles s’étalent en arrivant à la lame médul- laire. Celle-ci est divisée en trois segments inégaux (PI. X, fig. 107, L. m. 1), réunis dans leur partie inférieure, correspondant vrai- semblablement aux trois yeux en rapport avec elle. Dans son ensemble, cette lame a la forme d’une calotte fortement incurvée, à convexité antéro-supérieure, à concavité inféro-postérieure. Elle est constituée par une quantité de petits cylindres pleins, formés de substance ponctuée grenue, prenant par l'acide osmique une colo- ration noire très foncée ; ces petits cylindres médullaires sont orientés normalement aux faces de la lame ; ils sont très espacés les uns des autres, et les intervalles qui les séparent sont occupés CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 193 par de la substance ponctuée moins colorable, à structure fibrillaire. Cette lame est comparable à la lame glomérulée de la Lycose, et à la couche médullaire de l’Epeire ; ses petits cordons médullaires ne différent des petites masses de même substance, qui constituent les régions en question, que par leur extension en longueur. Les rela- tions des fibrilles optiques avec ces cordons médullaires ne sont pas nettes. Nous avons pu constater la pénétration de fibrilles dans leur substance ; mais nous ignorons si elles se répartissent toutes entre ces éléments, ou si une partie d’entre elles poursuivent directement leur trajet dans les intervalles libres. Ce qui se voit nettement, c’est que les éléments de la couche fibrillaire qui fait suite à la lame, sortent indifféremment des cordons ou de leurs intervalles, ce qui peut tenir, il est vrai, à ce que certaines de ces fibrilles quittent les cordons avant leur extrémité, en se détachant de leur surface. La couche fibrillaire (PI. X, fig. 107, f. i. ) présente la forme d’un sablier, à face antérieure convexe et à face postérieure concave : ses fibrilles en effet, au sortir de la lame médullaire, se resserrent autour de l'axe général du lobule, puis elles s’écartent de nouveau pour couvrir toute la face antérieure convexe de la masse médul- laire. Cette forme fait songer, au premier abord, à l’existence d’un chiasma ; mais il suffit d’un grossissement moyen pour se convain- cre quil ne se produit pas d’entre-croisement. Dans sa partie anté- rieure, où cette couche est élargie, elle présente des traînées de tissu con jonctif renfermant des noyaux, orientées parallèlement aux fibres ; elle est entourée dans sa partie rétrécie par une accumula- tion de cellules chromatiques dont les prolongements, réunis en faisceaux (voy. PI. X, fig. 107), s’enfoncent entre les fibrilles de la couche et y disparaissent bientôt, se portant, selon toute vrai- semblance, à lalame médullaire. Peut-être sont-ce ces prolongements qui s’insinuent entreles cordons pour pénétrer dans leur substance, et alors ce seraient les fibrilles optiques seules qui sortiraient de l'extrémité postérieure des cordons, après y avoir pénétré par leur extrémité antérieure. ARCH. DE ZOOL. EXP, ET GÉN. — 2° SÉRIE. — T. V Dis, — SUPPL. 1887. — Mém. 13 194 G. SAINT REMY. La masse médullaire (PI. X, fig. 107, m. m. 1.) est limitée laté- ralement par une surface convexe extérieurement ; sa face anté- rieure esb également convexe ; en arrière, sa face postérieure se confond avec le lobe cérébral et n’a pas de limites absolument pré- cises. Elle comprend deux moitiés ou segments, de structure diffé- rente : le segment antérieur (m.s. a.) est formé d’une substance plus dense et plus colorable que celle du segment postérieur ; de plus, sa substance est plus ou moins régulièrement divisée en gros cordons antéro-postérieurs, par une striation plus ou moins dis- tincte. Le segment postérieur (r». s. p.) est constitué par de la sub- stance ponctuée homogène, qui établit la transition entrele premier segment et le lobe cérébral. La commissure transverse des masses médullaires estassez volumi- neuse et peut à la rigueur être divisée en deux seoments latéraux et un segment moyen (PI. X, fig. 108, c. #r. 1.). Les seoments laté- raux sont constitués par un tractus fibreux pourvu de noyaux con- jonctifs sur son bord postérieur, qui s'étend presque horizontale- ment et à peu près parallèlement à la face antérieure du lobe céré- bral, de dehors au dedans, un peu en arrière et en bas. L’extré- mité externe de ce faisceau décrit un arc à concavité postérieure, à la base de la masse médullaire, avant que ces fibrilles se dispersent et se perdent ; son extrémité interne, en arrivant à l’'échancrure qui sépare les lobes cérébraux, se recvurbe assez brusquement en bas et en arrière, pour s'unir au segment moyen.Celui-ci a la forme d’un V très ouvert, dont la pointe est dirigée en arrière et en bas, et dont les branches embrassent le fond arrondi de l’échancrure. Une coupe horizontale, comme celle représentée fig. 108, PI. X, ne peut montrer ce segment moyen qu'en partie. Disons, à propos de cette figure et de la fig. 107, que la séparation des deux moitiés latérales de l’écorce des lobes cérébraux que nous avons représentée comme elle existait sur nos coupes, pourrait bien tenir en partie à une action mécanique favorisée par l’existence d’une double lame névrilemmatique s’enfonçant dans cette écorce. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 195 Tous les éléments de la couche fibrillaire ne se perdent pas dans la masse médullaire : un petit nombre semblent se réunir sur le bord externeet supérieur de celle-ci, pour constituer, en se fusionnant, des tubes plus volumineux qui suivent la face externe du lobe céré- bral ; ces grosses fibres forment en arrière et au-dessous de l’or- gane stratifié, une petite commissure postérieure des lobules infé- rieurs, comme dans les autres types. Les couches cellulaires qui revêtent partiellement les lobes opti- ques, sont constituées par deux sortes d'éléments. En avant, au niveau de la couche fibrillaire (voy.P1. X, fig. 107), se trouve l'écorce propre du lobule, formée de petites cellules chromatiques pauvres en protoplasma, qui paraissent envoyer leurs prolongements dans la masse médullaire ; enarrière, au niveau de la masse médul- laire, ce sont des cellules à protoplasma abondant, qui dépendent du lobe cérébral. Les couches cellulaires des deux lobes cérébraux ne sont en continuité qu’en arrière ; mais cette disposition pourrait bien avoir été exagérée sur nos préparations, comme nous l’avons expliqué plus haut. L’organe stratifié postérieur est bien développé et recouvert d’une lame ganglionnaire formée des mêmes petites cellules chromatiques que l'écorce propre des lobes optiques. Il présente cette particula- rité que l’échancrure supérieure médiane du cerveau divise sa lame ganglionnaire, pénètre jusqu’à sa partie médullaire, et ÿ creuse un sillon assez profond à la face supérieure, sillon qui se continue légèrement dans la partie postérieure. Les lobes cérébraux possèdent également une commissure su- périeure nette, et une commissure principale en fer à cheval, assez grosse, située un peu en arrière et au-dessous de la commis- sure transverse des masses médullaires. Le ganglion rostro-mandibulaire, que le tube digestif traverse à peu près horizontalement, ne présente aucune particularité à signaler. 496 G. SAINT REMY. Conclusions. Nous n'avons pas à discuter ici les homologies des régions gan- glionnaires que nous venons d'étudier chez les Aranéides. Des considérations de ce genre trouveront leur place à la fin de ce cha- pitre, quand nous aurons examiné d’autres groupes. Mais nous devons, dès maintenant, comparer entre eux les résultats obtenus dans les divers types que nous venons de passer en revue. La région que nous avonsappelée ganglion rostro-mandibulaire, ainsi que dans le ganglion optique, les lobes cérébraux et l’organe stra- tifié, ne donnent pas lieu à des remarques particulières, en raison de l’uniformité et de la simplicité de leur structure ; il est vraisem- blable qu’au point de vue physiologique, les lobes cérébraux et l'organe stratifié correspondent aux lobes moyens et aux organes spéciaux du protocérébron des Insectes et des Myriapodes, c’est-à- dire qu’ils sont le siège des fonctions psychiques les plus élevées de l'animal; mais comme nous n’avons pas eu ici l’occasion d’observer comparativement des espèces aveugles, comme chez les Myria- podes, nous devons nous contenter de proposer cette manière de voir fort admissible, à titre d’hypothèse. La région la plus intéressante du cerveau des Aranéides est sans contredit le lobe optique. Sa division en deux lobules correspon- dant aux deux types d’yeux est déjà un fait curieux, et semble prouver qu’un de ces types est une formation supplémentaire qui s’est constituée de toutes pièces, et ne résulte pas de la transfor- mation sur place d’organes de l’autre type préexistants, car, dans ce dernier cas, l'œil modifié fût resté en relation avec le centre commun, ou, s’il s’en était détaché, la séparation de l’organe cen- tral nouveau eût été moins complète qu’elle ne l’est, et surtout les différences avec l’organe central primitif n’eussent pas été aussi considérables. L’œil surajouté est évidemment l’œil dit principal, comme le font prévoir sa structure plus parfaite et son mode de | | s CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 197 développement plus compliqué, et comme le confirme cette obser- vation que cet œil peut manquer sans cause apparente, en parti- culier dans un groupe dont l’organisation paraît moins élevée que celle des types voisins (Ségestrie). Le fait que dans ce cas cet œil manque totalement, sans qu’on trouve à sa place un œil accessoire, paraît être une preuve en faveur de l'opinion que nous avancions plus haut. Il est donc permis de croire que l’œil principal et le lobule supérieur sont des formations distinctes respectivement des yeux accessoires et du lobule inférieur tels qu’ils existent actuelle- ment, et que le lobule supérieur ne représente pas une partie déta- chée du lobule inférieur. De la série d’observations que nous avons exposées résultent encore deux faits importants au point de vue physiologique, qui peuvent s’énoncer ainsi : d'une part, à deux types donnés de rétine ne peut correspondre un organe central unique ; d’autre part, des yeux de structure identique peuvent être en rapport, chez des espèces différentes, avec des appareils centraux très inégale- ment développés, ce qu'on n'aurait pas pu supposer d’après les ob- servations faites jusqu ici chez les [Insectes et les Crustacés. Un corollaire obligé de cette dernière conclusion, c’est que la struc- ture même de l’œil ne doit avoir qu une importance relativement faible dans les phénomènes visuels, puisque l'organe central chargé de l'élaboration des perceptions étant très diversement développé, fait subir aux sensations recueillies de la même manière des trans- formations très différentes. Enfin, signalons encore une remarque d’un intérêt général, qui peut être faite à l’occasion des masses médullaires et de leur com- missure transverse : c’est qu'une région, en apparence non diffé- renciée, peut tenir lieu d’un organe spécialisé et le remplacer en partie. Nous avons vu en effet que dans les types où les masses médullaires inférieures disparaissent entièrement, la commissure transverse de ces masses persisie, sous une forme réduite il est vrai, mais parfaitement reconnaissable, et que ses extrémités se perdent 198 G. SAINT REMY. de chaque côté dans la région où se trouverait la masse médullaire; cette région joue donc vis-à-vis de la commissure et des parties pé- riphériques du lobule optique, le même rôle quela masse médullaire bien différenciée des autres types, et bien qu'elle ne se distingue par aucun caractère appréciable pour nos moyens d'investigation, elle n’en a pas moins jusqu’à un certain point la valeur d’une masse médullaire. Quant à la question de l’homologation des lobules optiques des Aranéides, soit avec le « ganglion optique » des yeux composés, soit avec les ganglions des ocelles des Insectes, il nous paraît inu- tile de l’aborder, faute de données suffisantes pour tenter des rap- prochements convenablement justifiés. PHALANGIDES GENRE PUALANGIUM L. (PL. XI, fig. 119-120; PL. XII, fig. 121-131.) Chez les Phalangides, nous avons étudié, comme on l'a fait généralement, le genre Phalangium L. (Opilio Herbst), de la famille des Phalangiides, dans lequel nous avons pris pour type l’es- pèce PA. opilio L. (Ph. parietinum Deg., Ph. cornutum L.), dont le système nerveux avait déjà été l’objet de recherches. Le cer- veau se présente comme une petite masse conique obtuse, dont la pointe est dirigée en avant et en haut, dont la base se prolonge de chaque côté en deux courts pédoncules qui s’insèrent sur le bord antérieur de la masse sous-œæsophagienne, en laissant entre eux un orifice elliptique relativement large pour le passage du tube digestif. | Les données que nous ssédons sur l’anatomie et les relations de cet organe sont fort imparfaites. Leydig (1), qui étudia le sys: () F. Leydig. Ueber das Nervensystem der Afterspinne. — Archiv, für Anat, uud Physiol. 1862; — Tafeln 3. vergl. Anat., T, VIII, fig, 2. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 199 tème nerveux après Treviranus (1) et Tulk (2), a laissé subsister sur la partie qui nous occupe, des inexactitudes que ces auteurs avaient introduites dans sa description. Pour lui comme pour eux, le cerveau ne fournirait que les nerfs optiques, dont il fixe le nom- bre à trois : € un moyen plus considérable, pour la grosse paire d’yeux médians, qui se divise bientôt, et deux troncs plus grêles pour les petits yeux latéraux ». Le nerf du rostre n’a pas été reconnu, et quant aux nerfs des chélicères, ils sortiraient de la masse sous-œsophagienne, comme les nerfs des autres appendices, ce qui constituerait une exception singulière au type habituel des Arachnides. Comme on découvrit depuis, que les prétendus yeux latéraux n'étaient que des amas de pigment entourant les orifices de glandes cutanées (glandes de Krohn), on supposa (Weissenborn) que les nerfs optiques latéraux des anciens auteurs étaient des nerfs cutanés, De Graaf (3), dans son mémoire sur les organes génitaux des Phalangiens, confirme l’origine cérébrale de ces nerfs des glandes de Krohn, et ne dit rien de l’origine des nerfs des chélicères; il est probable qu’il a pris pour les nerfs des glandes de Krobn, les nerfs de ces appendices. De nos recherches, il résulte que le cerveau donne naissance à cinq nerfs, comme chez les Aranéides qui ne possèdent qu’une seule forme d’yeux (Ségesirie) : une paire de nerfs optiques partant de la pointe du cône qui constitue un lobe optique (Fi. IX, L. o.), une paire de nerfs mandibulaires (n. m.), et un nerf rostral impair (n.r.). Les nerfs mandibulaires ou nerfs des chélicères, nais- sent de chaque côté très peu au-dessus du point où commence le trou œsophagien ; c’est ce qui explique, étant donnée la petitesse des centres nerveux, l'erreur qui a été commise au sujet de leur origine. À ce point de vue, l'étude des coupes ne laisse subsister (1) Treviranus Vermischte Schriften, 1. 1816. (2) A. Tulk. Upon the anotomy of Phalangium opèilio. — Ann, and Mag. of nat. history. XII, 1843. , (3) De Graaf. Sur la construction des Organes génitaux des Phalangiens, (en hall, et en franç.) Leyde, 1882. 200 G. SAINT REMY. aucun doute, et le cerveau des Phalangides ne fait pas exception au type général. Les centres nerveux du Phalangium sont enveluppés d’un névri- lemme épais et résistant, séparé du tissu nerveux par une couche assez importante de tissu conjonctif, qui se différencie de plus, à la surface même de ce tissu, en une lamelle de même nature que le névri- lemme, mais plus mince.Cette couche de tissu conjonctif est assez réduite dans quelques points, mais dans d’autres elle prend un grand déve- loppement,au voisinage des nerfs, par exemple, où elle se soulève autour d'eux, et vers la base des lobes opti- ques où elle rend insensible à l’exa- FIG. IX (1). men macroscopique la transition des lobes cérébraux à ces organes. Sous l'influence des réactifs, cette couche conjonctive se déchire et peut même tomber, en entraînant le névrilemme proprement dit ; le plus souvent ce der- nier s’écarte, et la couche conjonctive déchirée pourrait donner l'illusion d’une lacune sanguine périphérique, si l’on n’était mis en garde par la comparaison avec les vraies lacunes sanguines (Scor- pion), et par la présence de trachées nombreuses qui rampent dans cette couche avant de s’enfoncer dans le tissu nerveux. GANGLION OPTIQUE. — Le ganglion optique du Phalangium pré- sente une complication un peu plus grande que celui des Aranéi- des. Les lobes optiques qui correspondent aux lobules supérieurs de ces derniers seulement, puisque les yeux appartiennent au type des yeux principaux et correspondent aux yeux médians antérieurs de ce groupe, présentent un développement assez considérable, (1) FIG. 1x. Cerveau et masse sous-œsophagienne de Phalangium opilio L., vus par la face antérieure. Gr. 25 fois. — Z. G:. 0., lobe cérébral ; — Z,. o., lobe op- tique ; — n. m., nerf mandibulaire ; — n. 0., nerf optique ; — #. r., nerf rostral ; — tr. @s., trou œsophagien. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 204 LL et se font remarquer par l'existence d’un chiasma, fait exception- nel chez les Trachéates, en dehors de la classe des Insectes. L’or- gane stratifié postérieur a une structure un peu différente de celle que nous venons d'étudier ; enfin on trouve à la face antérieure du lobe cérébral, un organe spécial formé de substance médullaire dense, et d’une accumulation de cellules chromatiques, auquel nous donnons le nom d’organe lobulé, en raison de sa forme, et sans avoir l'intention de le rapprocher morphologiquement de l’or- gane lobulé du Lithobius et de la Scolopendre. Lobe optique. — Le lobe optique (PI. XI, fig. 120; PI. XII, fig. 131), de forme à peu près cylindro-conique, comprend les régions suivantes, que nous énumérons de haut en bas, de la périphérie vers le centre : la couche fibro-médullaire supérieure (f. sn. s.), la couche des fibrilles chiasmatiques (ck.), la couche fibro-médullaireinférieure (f. m.1.), et la masse médullaire (m. m.). I1 possède une faible écorce ganglionnaire. De chaque œil partent sept à huit rameaux nerveux qui se déta- chent de son bord inféro-interne ; ces rameaux se réunissent entre eux en branches plus grosses, qui se fusionnent à leur tour, de façon à former enfin un seul tronc. Les deux nerfs optiques droit et gauche, ainsi constitués vers le milieu de la distance qui sépare les yeux des lobes optiques, se rapprochent l’un de l’autre et s’acco- lent, pour pénétrer dans les lobes optiques, en se renflant un peu. Les fibrilles du nerf optique, en pénétrant dans le lobe, suivent deux. trajets différents : la majeure partie traverse la couche fibro- médullaire supérieure :le reste suit le bord postérieur et interne du lobe, entre la périphérie et la couche fibro-médullaire, sans traverser celle-ci. La fig. 131, PI. XIT, représente une coupe très oblique sur le plan vertical transversal, et montre deux régions différentes des lobes optiques, l’un d'eux présentant la couche fibro- médullaire supérieure, l’autre les fibres qui ne la traversent pas. La couche fibro-médullaire supérieure (PI. XII, fig. 131, f. m.s.), dont le nomrappelle l'aspect, a la forme d’un cylindre très court, 202 \ G. SAINT REMY. un peu incliné en bas et en dedans sur l’axe du lobe. Celui-ci est renflé à son niveau, maïs elle n occupe pas néanmoins toute sa section, puisque nous venons de dire qu’une partie des fibres du nerf optique prend place à côté d’elle. Examinée à un faible gros- sissement sur les coupes longitudinales, elle semble constituée par de petits bâtonnets de substance médullaire diversement orientés et séparés par une zone claire. Mais une étude plus attentive à un grossissement convenable, faite à la fois sur des coupes longitudi- nales et des coupes transversales, donne l’explication de cet aspect particulier, et on reconnaît que cette couche est constituée par de gros tubes nerveux à parois très épaisses et très colorables et à contenu pâle. Cette couche, qui au premier abord rappelle par son aspect la couche médullaire que nous avons vue chez l’Erèse, a donc en réalité la même structure que la lame médullaire de Ja Lycose. Mais l’orientation des tubes étant influencée par celle deg fibrilles chiasmatiques de la couche suivante, ces tubes ne présen- tent pas tous la même direction et ne sont pas parallèles, comme les éléments de la lame médullaire de la Lycose. Ces tubes sont allongés ; leur paroi paraît formée d’une substance ponctuée grenue qui prend par l’acide osmique une coloration très foncée. La région qui fait suite à la couche fibro-médullaire supérieure et à laquelle nous donnons le nom de couche des fibrilles chiasmati- ques (PI. XII, fig. 131, ck.), est formée de fibrilles très fines dont l’origine est double : les unes sortent de la couche fibro-médullaire supérieure, les autres viennent directement du nerf optique. De ces dernières une partie seulement, celles de la face postérieure s’entre-croisent sous un angle très aigu en formant un chiasma très allongé ; celles du bord interne ne subissent pas d’entre-croise- ment, et se portent directement dans la couche fibro-médullaire inférieure. Les fibrilles qui sortent de la couche fibro-médullaire supérieure s'entre-croisent toutes entre elles, formant la partie principale du chiasma ; pour cela, au sortir de cette couche elles s'inclinent vers l’axe du lobule, les externes s6 dirigeant en CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 203 - dedans, les internes en dehors ; il en résulte un entre-croisement complet qui se produit sur une certaine épaisseur dans la portion de la couche située en avant de l'extrémité antérieure de la couche fibro-médullaire inférieure. Cet entre-croisement ne se fait pas fibre à fibre d’une facon irrégulière, de manière à donner un feu- trage : les fibres sont disposées par lames, par lits en quelque sorte, qui se recouvrent alternativement. — La forme de cette couche des fibrilles chiasmatiques est difficile à décrire ; elle représente à peu près un cône oblique renversé, très allongé, dont la partie externe serait profondément évidée dans les deux tiers inférieurs de sa longueur, pour s'appliquer sur la couche fibro-médullaire inférieure. La face interne de ce cône est recouverte par l’écorce propre du lobe optique, qui comble le vide laissé entre lui et le contour du lobe. Cette forme sera mieux comprise quand nous aurons étudié celle de la couche fibro-médullaire inférieure. Ajou- tons qu'on trouve entre les fibrilles quelques noyaux conjonctifs très peu nombreux. La couche fibro-médullaire inférieure (PI. XIT, fig. 131, 128 ; PI. XI, fig. 120 ; 7. m. i.) n’est pas formée par des tubes, comme la couche fibro-médullaire supérieure, bien qu’elle ait presque le même aspect, sauf la teinte. — L'étude des coupes transversales (fig. 120) montre que sa structure est comparable à celle de la couche médullaire de l'Erèse. Elle est en effet constituée par des cordons médullaires très longs et disposés parallèlement, séparés par une substance plus claire. Chacun de ces cordons est peut-être la continuation d’un tube de la couche chiasmatique ; il s'étend en gardant son individualité jusqu’à la masse médullaire au-devant de laquelle il s’arrête. La couche fibro-médullaire inférieure esten effet séparée de cette dernière par une mince zone plus claire, qui semble constituée par des tubes nerveux extrêmement courts conti- nuant les cordons, et disparaissant à la surface de la masse médul- Jaire. Ces cordons n’ont pas tous la même longueur ; en effet la couche est concave à sa face inférieure pour s’emboîter sur la face 204 G. SAINT REMY. supérieure de la masse médullaire; de plus, sa face interne est oblique de bas en haut et de dedans en dehors, taillée en bec de flûte plus oblique dans la région inférieure que dans la région supérieure. Les cordons à la partie inférieure sont tous dirigés ” à peu près normalement à la surface convexe de la masse mé- dullaire, c’est-à-dire qu'à la périphérie ils ne sont pas parallèles : à l'axe du lobe, comme ceux du centre, mais forcément un peu inclinés, les externes en dehors, les internes en dedans. Ces cordons périphériques s’incurvent ensuite légèrement vers l’axe du lobe, pour se disposer parallèlement aux autres ; cette incurvation est surtout marquée pour ceux de la face interne qui s'étendent plus bas que ceux de la face externe pour se conformer à la courbure de la masse médullaire. Il résulte de cette disposition que la couche fibro-médullaire inférieure est renflée à sa base, ou plutôt un peu au-dessus de sa base, caractère qui est d'autant plus accentué que les cordons se resserrent vers leur extrémité supérieure, ceux de la périphérie s’inclinant légère- ment vers l'axe du lobe pour rapprocher leur direction de celle que possèdent les fibrilles chiasmatiques qui y arrivent. — On remarque dans cette couche quelques noyaux conjonctifs. La masse médullaire (PI. XI, fig. 128, 131, m. m.) qui occupe la base du lobe optique, est un noyau de substance ponctuée à structure grenue régulière, se colorant fortement par l’acide osmi- que; elle affecte la forme d’un cône court, à base convexe tournée vers le haut, à pointe obtuse dirigée en bas, l’axe étant incliné de dedans en dehors et en bas. Par sa face interne ce cône médul- laire s'appuie sur un groupe de cellules nerveuses, qui ne lui en- voie aucun prolongement et appartient au lobe cérébral. Sa face externe est libre ; sa face supérieure convexe est coiffée en quel- que sorte par la couche fibro-médullaire inférieure, dont elle est séparée par la zone plus claire dont nousavons parlé. L’extrémité inférieure, dirigée en dehors, passe insensiblement à un tissu lâche de grosses fibres, qui établissent les relations physiologiques entre CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 205 le lobe optique et le reste du cerveau. Cette couche se perd égale- ment par une transition insensible dans la substance ponctuée des lobes cérébraux. Nous n’avons pas trouvé de commissure réunis- sant directement les lokes optiques entre eux ; ils ne sont reliés que par l'intermédiaire des lobes cérébraux. L'écorce propre du lobe optique est constituée par l’accumulation de petites cellules chromatiques que nous avons signalée sur la face interne de la couche des fibrilles chiasmatiques. Sa forme est celle d'une lame aplatie, comme la face interne du lobe à ce niveau, épaisse à son extrémité supérieure, où elle s’étend sur les bords an- térieur et postérieur (voy. PI. XI, fig. 120 ; PI. XII, fig. 181), s’amincissant au contraire dans sa région inférieure, où elle se réduit à une seule assise d’éléments. Ceux-ci se présentent partout comme de petits noyaux très serrés et très colorables, sans limites cellulaires distinctes. Il est probable qu’ils envoient leurs prolon- gements aux couches fibro-médullaires. Le lobe optique du Phalangium peut être comparé, jusqu’à un certain point, au lobule inférieur de la Lycose. Nous avons dit plus haut que la couche fibro-médullaire supérieure avait une struc- ture analogue à celle de la lame médullaire. La couche fibro-médul- laire inférieure est comparable à la lame glomérulée de la Lycose ; dans l’un comme dans l’autre cas, nous sommes en présence de con- densations de la substance ponctuée dans lesquelles viennent aboutir les fibrilles issues de la couche précédente. S'il peut paraître singu- lier, au premier abord, de comparer les longs cordons médullaires du Phalangium aux petits glomérules ponctiformes de la Lycose, rappelons que nous trouvons des intermédiaires dans la couche mé- dullaire du lobule inférieur de l’Epeire etde l’Erèse. La comparai- son quenous faisons en ce moment ne porte, bien entendu, que sur la structure respective des régions. Nous ne pouvons songer à homolo- guer,au point de vue morphologique, les couches fibro-médullaires dulobe optique du Phalangium, respectivement à la lame médullaire et à la lame glomérulée du lobule inférieur de la Lycose, puisque 206 G. SAINT REMY. ce lobe correspond évidemment au lobule supérieur. Sa com- plexité, infiniment plus grande que celle du lobule supérieur des Aranéides, s'explique par l’absence du lobule inférieur et des yeux accessoires. Rappelons simplement, puisque nous en avons déjà parlé plus haut, l'intérêt que présente l’existence du chiasma, que nous n’avons observé chez aucun autre Arach- nide. Organe stratifié postérieur. — L'organe stratifié postérieur (PI. XI, fig. 119 ; PI. XII, fig. 121, 122, 128, 130, str.) occupe la même situation que chez les Aranéides, c’est-à-dire qu’il est situé dans la région postéro-supérieure du ganglion optique, au- dessus des lobes cérébraux. S2 constitution fondamentale est la même ; il comprend une partie médullaire et une lame ganglion- naire ; mais sa structure est différente, en ce sens que la partie médullaire, au lieu de former un bourrelet compact, est disposée en forme de lame. On peut décrire cette partie comme une lame épaisse et courte, formée de substance ponctuée dense et homo- gène, repliée sur elle-même en arrière et présentant par conséquent un feuillet supérieur (PI. XI, fig. 119 ; PI. XII, fig. 128, 129, s.) et un feuillet inférieur (2.) qui sont soudés par leur bord externe. L’organe entier est incurvé en forme de gouttière, et offre une face supérieure concave et une face inférieure convexe. Le feuillet supérieur s’avance en avant plus loin que le feuillet inférieur (PI. XII, fig. 198, str.) ; il se recourbe en bas, et descend jusqu’au niveau de l’autre, en même tempsqu’il s’amincit, commeon le con- state bien sur les coupes sagittales (PI. XI, fig. 109, s.); dans cette région, sa concavité est fortement accentuée (PI. XII, fig. 128, s.); en arrière, il s’épaissit, sa concavité s’atténuant, et il se recourbe vers la région inférieure pour s’unir au feuillet inférieur, sur une large surface (PI. XI, fig. 119, str.) ; celui-ci est court et obtusen avant, presque horizontal (fig. 119, :). C’est la face postérieure de l'organe, oblique de haut en bas et d’avant en arrière, commune aux deux feuillets, qui est couverte par une couche de cellules CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 207 chromatiques (voy. PI. XI, fig. 119). C’est surtout par la compa- raison des coupes sagittales et des coupes transversales, qu on peut acquérir une idée exacte de la forme et de la structure de cet organe. Les coupes horizontales du cerveau le sectionnent obli- quement et ne sont instructives qu’au point de vue de ses relations avec les lobes cérébraux. Les coupes transversales représentées fig. 128-130, PI. XII, donnent une idée des différences de forme qu’il montre. Pour mieux le comprendre, nous pouvons le suivre sur cette série, d’arrière en avant. Les premières coupes n’intéres-. sent que la lame ganglionnaire oblique, dans sa partie inférieure ; les suivantes (PI. XII, fig. 130) sectionnent aussi la partie médul- laire dans sa région postéro-inférieure ; sa coupe est d’abord celle d’une lentille bi-convexe, à face inférieure presque plane, puis devient celle d’un croissant épais, la face inférieure devenant convexe et la face supérieure légèrement concave ; deux lignes claires, paral- lèles à la face inférieure, divisent cette image en un segment supé- rieur plus épais et deux segments inférieurs plus minces. La face supérieure et les bords latéraux sont revêtus par la lame ganglion- naire. Sur les coupes suivantes, l’organe s’élargit, et sa forme de croissant s’accentue (PI. XII, fig. 129, str.). La division en deux feuillets se montre après que les lignes claires ont disparu ; la fente qui détermine la délamination de l'organe, s’étend de plus en plus vers la périphérie en restant parallèle aux deux faces, mais sans aîteindre les bords externes ; elle est traversée par des fibrilles qui passent d’un feuillet à l’autre, et est occupée par du tissu conjonctif ; à mesure qu’on se rapproche de la partie antérieure, la lame gan- glionnaire diminue d'épaisseur, l’organe devient de plus en plus concave. Enfin, sur les dernières coupes, les parties centrales du feuillet inférieur et de la lame ganglionnaire disparaissent (P1. XII, fig. 128, str.). Le feuillet supérieur se continue en s amincissant, mais dans sa région médiane il est déchiqueté en quelque sorte, par le passage, à travers sa substance, de gros faisceaux de fibrilles, qui sont les prolongements des cellules à protoplasma abondant, 208 G. SAINT REMY. situées au-dessus de lui, allant se perdre dans la substance ponctuée des lobes cérébraux. Lobes cérébraux. — Les lobes cérébraux (PI. XI, fig. 119; PI. XII, fig. 111, 125, L. G. 0.) sont constitués par deux masses latérales de substance ponctuée, et par une écorce cellulaire. Chacun de ces lobes médullaires présente à peu près la forme d’un cône aplati de dehors en dedans, dont la base se confond avec le ganglion rostro-mandibulaire, et dont la pointese continue en haut aveclelobe optique; en arrièreeten dedans,ces lobes sont soudés à l’or- gane stratifié, et dans la moitié inférieure du ganglion ils se rejoi- gnent sur la ligne médiane en avant eten dessous de cet organe. Les deux lobes cérébraux sont reliés par trois commissures fibreuses. La commissure supérieure (PI. XIT, fig. 121, ce. s.), homologue de la commissure de même nom des Aranéides, unit les parties supé- rieures qui ne sont pas en contact ; c’est un faisceau grêle de fibril- les fines qui s’étend horizontalement le long de la face antérieure et inférieure de l'organe stratifié. Une autre commissure plus importante existe vers l’union du tiers inférieur avec le tiers moyen du ganglion optique, au fond de la fente qui sépare les deux lobes à ce niveau. Cette commissure est intéressante en ce que les fibres qui la constituent ne sont pas toutes groupées parallèlement, mais se dirigent en deux sens principaux. Sur des coupes horizontales, on reconnaît en effet que les fibres supérieures sont destinées à mettre en relation les portions antérieures des lobes, et présentent une courbure à concavité antérieure contournant l’échancrure ; mais sur les coupes transversales, où il est facile de retrouver ce faisceau, on constate que la plupart des fibres décrivent un arc à concavité inférieure, au-dessus d’un groupe de tubes trachéens, et plongent par leurs extrémités dans la profondeur des lobes. Le troisième système commissural qui unit les lobes cérébraux, consiste en une masse fibrillaire située à la partie postérieure et inférieure du ganglion, au-dessous de l'organe stratifié (PI. XII, fig. 122, c.). — Le lobe cérébral reçoit de nombreuses fibrilles d’un gros faisceau € ” DUT TT US FOUT NE DIN NS CNIL LT 7 T'ON le NE CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 209 qui parcourt toute la longueur de la masse nerveuse sous-œæsopha- gienne, tout près de la ligne médiane. En arrivant au cerveau, ce faisceau se porte en dehors, et gagne la face externe du lobe cérébral dans la région supérieure duquel il se perd (PI. XII, fig. 128, f.). — Le revêtement ganglionnaire des lobes cérébraux est moins consi- dérable que chez les Aranéides ; la disposition et le volume des lobes optiques, et la présence, en avant, des organes lobulés avec leur masse ganglionnaire, diminuant forcément la surface pouvant être occupée par l'écorce cellulaire. Le caractèrele plus remarqua- ble de ses éléments est leur grande dimension, en comparaison des cellules que nous avons trouvées dans la même région chez les Aranéides. Il existe des cellules plus grosses que les autres, de chaque côté de la ligne médiane, dans la région supérieure, et aussi dans la région antéro-externe de chaque lobe au-dessus de l’or- gane lobulé. Organe lobulé. — À la face antérieure du ganglion optique, dans sa région inférieure, les deux tiers externes de chaque lobe céré- bral sont occupés par une formation que nous avons indiquée sous le nom d’organe lobulé. Cet organe, qui s'étend presque jusqu'à la limite du ganglion rostro-mandibulaire, est constitué par une masse de substance ponctuée dense et homogène, se colorant forte- ment par l’acide osmique, qui est comme implantée dans le lobe cérébral (PI. IX, fig. 119, m. 1. ; PL. XII, fig. 122, 127, m. L.-p.), et par une accumulation considérable de petites cellules chroma- tiques, la masse ganglionnaire antérieure (m. g. a.), qui occupe l’angle antéro-externe du cerveau, dans la région moyenne et inférieure du ganglion optique. La forme de la masse de substance ponctuée et ses relations avec la masse ganglionnaire se compren- nent bien surtout sur les coupes transversales. Elle comprend une portion interne à peu près hémisphérique, la masse lobulée (m. l.) située sur le bord interne du lobe cérébral, et un pédoncule dirigé en dehors, qui plonge dans la masse ganglionnaire et y envoie des ramifications (P1. XII, fig. 127, p.). La masse ganglionnaire anté- ARCH. DE ZOOL. EXP, ET GÉN, — 2° SÉRIE. — T, V bis, — suPPL. 1887. — Mém. FRE 210 G. SAINT REMY. ricure est constituée par de petiles cellules chromatiques se présen- tant comme de petits noyaux fortement colorés, identiques à ceux que nous avons vus dans le lobe optique et dans l’organe stratifié. Elle forme une sorte de calotte épaisse située immédiatement sous le névrilemme, et dont la concavité irrégulière s'applique sur la portion moyenne et externe de l'organe, et sur l’angle externe du lobe cérébral ; elle ne recouvre pas tout à fait la masse lobulée, dont la région interne est en contact avec les cellules ordinaires de l'écorce du lobe cérébral. Les prolongements des cellales chroma- tiques se réunissent en petits faisceaux qui se jettent dans le pédon- cule. Celui-ci est une lame très courte, aplatie d'avant en arrière (PI. XI, fig. 122, 127, p.), qui s'insère en dedans sur la masse lobulée, et en dehors s’épaissit en une sorte de pied ramifié, dont les divisions obtuses recueillent les prolongements émis par la masse ganglionnaire. Sa structure est absolument homogène, et on n’y découvre pas de fibrilles. Par sa face postérieure il est appliqué sur le lobe cérébral médullaire, et sa substance se continue en arrière avec Jui. La masse lobulée est de forme à peu près hémis- phérique (PI. XII, fig. 122,127, m. L.) ; sa substance est plus grenue que celle du pédoncule et se divise partiellement, dans sa région antérieure et inférieure, en un certain nombre de lobules de taille variable qui donnent à la masse un contour mamelonné. La masse lobalée est recouverte en haut et en dehors par la masse ganglion- naire ; ses faces antérieure, interne et inférieure sont en contact avec l'écorce du lobe cérébral qui ne lui envoie aucun prolonge- ment. = GANGLION ROSTRO-MANDIBULAIRE. — Les limites du ganglion ros- tro-mandibulaire sont difficiles à déterminer avec précision,surtout si on les cherche sur des coupes horizontales, car il est intimement fusionné avec le ganglion optique en haut, et le ganglion des pédi- palpes en bas ; c'est seulement latéralement et en avant qu'un repli du tissu conjonctif marque ses contours, ce quise voit bien surtout sur les coupes sagittales. Sa portion sus-æsophagienne est la plus CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 211 intéressante, puisque c’est d’elle que se détachent les trois nerfs qui prennent naissance dans ce ganglion : les deux nerfs des chélicères et le nerf rostral. Comme chez les Aranéides, son noyau médullaire est indivis dans sa région postérieure et infé- rieure, mais offre en avant trois lobes correspondant à ses trois nerfs. Toutefois, le lobe rostral ne se présente pas comme dans le groupe précédent. Au lieu d’être une sorte de cylindre coudé, à cheval sur l’œsophage, c’est ici une bandelette médullaire appli- quée contre la face antérieure de la substance ponctuée générale du ganglion dans sa partie supérieure, bien au-dessus du trou œsophagien (PI. XIII, fig. 123, 124, L. r.); elle paraît même s'étendre à la partie inférieure du ganglion optique. Cette bande- lette incurvée en arrière n’est pas homogène dans toute son épais- seur; elle est formée par une lame antérieure de substance ponc- tuée dense et plus fortement colorable, derrière laquelle se trouvent quelques lamelles irrégulières d’un tissu plus lâche plongées dans de la substance ponctuée ordinaire. Dans sa région supérieure, cette bandelette est séparée de cette substance par une mince lamelle conjonctive qui disparaît plus bas ; dans cette région, elle n’est pas recouverte en avant par l’écorce cellulaire, etle nerf passe directement de son bord antérieur hors du cerveau. — Les lobes mandibulaires se détachent de la masse générale de substance ponctuée, dans la région inférieure du ganglion, et se portent en avant et en haut, en restant accolés à elle dans presque toute leur étendue, séparés seulement par une lame de tissu conjonctif (PI. XI, fig. 125, L. m.) ; ils ont la forme d’ovoïdes très aplatis de dehors en dedans. Les nerfs mandibulaires (PI. XII, fig. 124, n. m.) se détachent du cerveau dans un plan un peu inférieur à celui du nerf rostra!. Bien que les deux moitiés du ganglion rostro-mandibulaire soient en continuité de tissu sur la ligne médiane, il existe des commissures transversales qui paraissent destinées : a mettre en relation directe certains points éloignés. Dans la région supérieure 212 G. SAINT REMY. du ganglion, au niveau du point d’émergence des nerfs mandibu- laires, on remarque au centre de la substance médullaire un fais- ceau commissural dont les extrémités se perdent en arrière dans la région externe (PI. XII, fis. 124, c.). À un niveau plus inférieur, | existe une autre commissure plus importante, dont les fibres se résolvent également de chaque côté, dans la portion externe et postérieure du ganglion. Enfin, immédiatement au-dessus de l’œso- phage, toute la moitié antérieure de la ligne médiane est occupée par des fibrilles paraïlèles qui s’enfoncent plus bas dans les deux moitiés du ganglion, de chaque côté de l’œsophage (PI. XII, fig. 127, G. rm.). — Au niveau du point de sortie des nerfs mand ibu- laires, on remarque, sur le bord antérieur et externe de la sub- stance médullaire, une petite région différenciée où la substance ponctuée s’est condensée en petites sphérules ; nous donnons à cette région, qui fait légèrement saillie dans l'écorce, le nom de lobule glomérulé (PI. XII, fig. 124, L. g.). En arrière et en dedans de ce lobule, on aperçoit sur les coupes horizontales la section d’un faisceau qui est peut-être celui qui vient de la masse sous- œsophagienne, et dont nous avons parlé plus haut. HE chaque côté de l’œsophage le ganglion rostro-mandibulaire se divise en deux gros pédoncules courts, en forme de cylindres aplatis laté- ralement; son écorce cellulaire se continue sur la face externe (PI. XIT, fig. 126). Au-dessous de l’œsophage, de même que chez les Aranëides, il ne constitue qu'une lame peu importante. L’écorce ganglionnaire du ganglion rostro-mandibulaire est peu considérable et formée de cellules à protoplasma abondant, d’une taille généralement plus grande que dans le ganglion optique. SCORPIONIDES, GENRE BUTHUS Leach. (PL, XII, fig. 132-133 ; PL. XIII, fig. 134-143.) Chez les Scorpionides, nous avons étudié particulièrement l’es- pèce Buthus (Scorpio) occitanus Amorx. que nous pouvions nous CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 243 procurer en abondance à Banyuls, et c’est à elle que se rapportent notre description et nos figures ; mais, en outre, nous avons exa- miné trois autres espèces qui ne nous ont présenté avec ce type aucune différence importante ; ce sont d’une part: Androctonus funestus Ehr. (Sc. tunetanus Redi, Sc. australis L.) appartenant, comme notre type, à la famille des Androctonides, et, d'autre part, Scorpio europœus Latr. (Euscorpius carpathicus L., Scorpio flavicaudus de Geer) et Heterometrus palmatus Ehr. (Buthus pal- matus Ehr., Scorpio maurus L.) de la famille des Pandinides. La forme extérieure du cerveau du Scorpion, et en particulier de Buthus occitanus qui a été tout particulièrement étudié, est bien connue ; elle ne diffère guère de la forme classique du cerveau des Aranéides, et on décrit généralement cet organe comme une petite masse presque cubique, bilobée à sa partie supérieure et anté- rieure, s’élevant verticalement au-dessus d'une large masse sous- œsophagienne. Nous signalerons que le cerveau de Buthus pal- matus a une forme plus ramassée et plus ovoïde ; il s’élève moins au-dessus de la masse sous-æsophagienne. Le cerveau a été, en même temps que le reste du système ner- veux, l’objet de recherches répétées. Les premières observations datent des travaux de Meckel, Treviranus et Müller. Treviranus(1) qui reprit l’étude du système nerveux, dans un mémoire spécial, fit connaître l’origine des nerfs optiques et des nerfs des chélicères aux dépens de la partie sus-æsophagienne. Après lui, Em. Blan- chard et L. Dufour s’occupèrent de cette question. Le travail de L. Dufour (2) parut après celui de Blanchard dont nous allons parler, mais fut, tout au moins, écrit en même temps, car l’auteur n’en à pas eu connaissance. Ces recherches renferment, au point de vue qui nous occupe, une grosse inexactitude : Dufour (1) Treviranus. Ueber die Nervensystem des Scorpions und der Spinnen. — Zeitschr. f. Physiol. 1832. | (2) L. Dufour. Histoire anatomique et physiologique des Scorpions. — Mém. prés. à l'Acad. des Sc. Vol.xIV, 1856. — Voy. aussi Ann. des Sc, nat,, Zool., 3e série. T. xv., 1851. 214 G. SAINT REMY. fait naître les nerfs des chélicères de la masse sous-æsophagienne. Les observations de Blanchard (1), publiées dans son Organisa- tion du règne animal, sont plus soignées, mais n’ont pas été abso- lument heureuses, car cet auteur a décritcomme branches ner- veuses des vaisseaux sanguins qui pénètrent dans le cerveau. Oatre les deux paires de nerfs optiques et les deux paires de nerfs des chélicères, qui existent réellement, ilindique deux paires de nerfs pharyngiens et une paire de nerfs destinés aux muscles de la lame aponévrotique sur laquelle repose l’œsophage ; ces trois der- nières paires n'existent pas, et on trouve des vaisseaux dans les régions où il les signale (2). En employant simultanément l'examen macroscopique et l’é- tude des coupes sériées, nous avons pu confirmer l'existence de quatre paires de nerfs déjà connues, et observer un petit nerf impair naissant au-dessus de l’œsophage, le nerf rostral, dont nous avons suivi le trajet hors du cerveau et trouvé les relations, sur des coupes totales du céphalothorax d’un exemplaire jeune. D’après Blanchard, le rostre (appendice buccal) serait innervé par deux petits nerfs naissant de la masse sous-æsophagienne et se déta- chant de l'extrémité d'un petit tubercule situé entre les deux gros neris des pédipalpes. Nous avons cherché vainement ce tubereule et ces nerfs sur nos préparations. Le cerveau du Scorpion donne donc naissance : à une paire de gros nerfs optiques supérieurs destinés aux yeux médians (yeux principaux), une paire de nerfs optiques inférieurs destinés aux yeux latéraux (yeux accessoires), une paire denerfs mandibulaires principaux, une paire de nerfs mandibulaires accessoires, et un nerf rostral impair. Blanchard a décrit un système nerveux de la vie organique, consistant en ganglions voisins de la face postérieure du cerveau, (1) E. Blanchard, — Organisation du règne animal. Arachnides. 1652. (2) Newport et plus récemment Ray-Lankaster ont étudié le système ner- veux en général, sans s'occuper du cerveau. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 2415 sans dire toutefois qu’il soit en relation avec celui-ci ; nous n'a- vons pas trouvé de nerfs viscéraux sortant du cerveau dans cette région, etil est probable que l’origine du système viscéral est sous- œsophagienne comme chez les Phalangides. Le cerveau du Scorpion adulte étant relativement volumineux est mal pénétré par l’acide osmique ; nous l’avons fixé à l'alcool, ou mieux à la liqueur picro-sulfurique qui donne de bons résultats. De plus, nous avons utilisé des individus jeunes, dont le cerveau est beaucoup plus petit, pour le traitement à l’acide osmique. Les résultats observés sur les jeunes etsur les adultes sont absolument comparables. Nous avons donné à la fois des figures empruntées au cerveau de l’adulte traité à la liqueur picro-sulfurique., et des figures empruntées aux cerveaux d’exemplaires très jeunes. Les coupes représentées PI. XIII, fig. 136-143, appartiennent à une même série; mais les quatre premières ont été dessinées à un plus fort grossissement, en raison des détails qu’elles contien- nent. Le système nerveux du Scorpion est entouré par un névrilemme d’épaisseur moyenne, lamelle résistante contractant des rapports intimes avec le tissu conjonctif extérieur : celui-ci forme à son contact une sorte de feutrage que nous n'avons pas représenté dans nos figures ; ce tissu conjonctif constitue une couche épaisse, en particulier à la face supérieure du cerveau. Comme dans la grande majorité des Aranéides, le système nerveux du Scorpion renferme des prolongements de l'appareil circulatoire. Il est de plus accom- pagné extérieurement de lacunes importantes. Les vaisseaux sont très nombreux dans le cerveau ; on les observe bien surtout sur les pièces traitées par l'alcool ou la liqueur picro-sulfurique ; ils sont toujours accompagnés d’une gaine de tissu conjonctif. Nous avons pu du reste les injecter au bleu de Prusse, et pratiquer en- suite des coupes sur les pièces fixées par l'alcool et colorées au car- min boracique. Les vaisseaux pénètrent particulièrement aux points de sortie des nerfs, comme Île font les trachées ; mais, 216 G. SAINT REMY. comme elles, ils peuvent également pénétrer isolément (1). _ GANGLION OPTIQUE. — Le ganglion optique, qui forme les deux tiers supérieurs du cerveau, présente une structure assez compli- quée ; mais cette complication est offerte non par les lobes optiques, mais par les lobes cérébraux, dans lesquelsla substance médullaire forme des organes différenciés. Lobe optique. — Les lobes optiques occupent les angles externes (1) Au sujet des relations de l’appareil circulatoire avec les centres nerveux, chez Buthus occitanus, Blanchard dit que l'aorte & en arrière du cerveau se partage en deux troncs qui contournent le collier œsophagien, de telle sorte que les noyaux cérébroïdes se trouvent entourés par un tronc artériel qui repose en même temps sur la masse médullaire céphalothoracique. » De ce « vaisseau cir- culaire » naissent en avant diverses artères (Organ. du Règne an. Arachn. p. 77). Houssay admet que « l’aorte, arrivée à la base des ganglions cérébroïdes, se bifurque et envoie deux rameaux au long des connectifs du collier œsopha- gien. Ces deux rameaux, extérieurs à l'enveloppe du connectifet ayant des parois propres, méritent encore les noms d’artères. Au point où ils atteignent l’enve- loppe conjonctive de la masse ganglionnaire, leurs paroïs deviennent continues avec cette enveloppe ; et le sang est alors déversé dans une vraie lacune péri- ganglionnaire. » (Houssay. Sur lu lacune sanguine périnerveuse, dite artère spinale, chez les Scorpions. Comptes-rendus, T. 104, p. 521, 1887. — Voy. aussi, Id. Vote sur le système artériel des Scorpions. Comptes-rendus, T. 103, 1886.) . Nous avons fait, sur les rapports de l’appareil circulatoire avec le cerveau, quelques observations qui complètent les données de ces deux anatomistes, er que nous croyons devoir résumer brièvement ici. Nos figures sont un peu sché- matisées au point de vue de l'appareil circulatoire. La paroi conjonctive des lacunes a été représentée par un simple contour, le reste du tissu conjonctif n'ayant pas été dessiné. Chez Buthus occitanus l'aorte s’accole à la face postérieure du cerveau, au niveau de l’extrémité inférieure de l'organe stratifié (PI. XIII, fig. 138, a.) ; elle forme, au-dessous de cet organe, un sinus qui tient le milieu entre une véritable lacune et un vaisseau (P1. XIII, fig. 139, s.), car sa paroi antérieure est formée par le névrilemme, et sa paroi postérieure est identique à celle de l'aorte et ren- ferme même, comme elle, des fibres musculaires dans son épaisseur. Ce sinus envoie sur les faces postérieure et latérales du cerveau, dans la région moyenne, un diverticulum purement lacunaire, compris entre le névrilemme et le tissu con- jonctif extérieur au cerveau {P1. XIII, fig. 140, /.), qui chemine en quelque sorte dans un sillon creusé dans le cerveau (PI. XIII, fig. 135, L.), et s'étend un peu au delà de la moitié postérieure de l’organe ; il se continue en avant avec un véritable vaisseau à paroi propre, extérieur au cerveau dont il embrasse l’angle antéro-externe au voisinage du point de sortie des nerfs mandibulaires, en se divisant en deux rameaux, dont l’un externe accompagne les nerfs (PI. XIII, fig. 140, v'), et dont l’autre interne (v) pénètre dans le cerveau par la face anté- rieure (PI. XIII, fig. 4141 ».). Au niveau du point où le sinus émet ces prolongements lacunaires latéraux, il en part sur la ligne médiane de grosses branches s’enfonçant dans le cerveau» PPT NT ON ONDES CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 247 antéro-supérieurs du cerveau, où ils forment, en avant et en dehors, une très légère saillie qui ne peut attirer l'attention quesur les coupes. Chaque lobe optique comprend, comme chez les Ara- néides, deux lobules correspondant aux nerfs supérieur et infé- rieur. Le lobule optique supérieur (PI. XIII, fig. 136, L. o. s.), qui correspond aux yeux médians, est le plus petit ; il est situé au-dessus etun peu en dedans du lobule inférieur ; il est constitué par une balle médullaire (b. m. s.) à peu près hémisphérique, reliée au lobe cérébral parun pédoncule fibrillaire. La balle médul- laire qui correspond à la couche médullaire du lobule supérieur des Aranéides, est une masse de substance ponctuée homogène, (PI. XII, fig. 140. Comp. la disposition de ces branches sanguines avec celle des grosses trachées pénétrant par la face postérieure dans le cerveau duPhalangium, PI. XII, fig. 124). Plus bas, ce sinus s'étale sur le cerveau (PI. XIII, fig. 141, 142, s.), et enfin se divise en deux branches qui suivent le bord postéro-interne des pédoncules cérébraux (fig. 143, s.). Ces branches sont formées presque entiè- rement par une paroi propre, la partie accolée au système nerveux étant seule constituée par le névrilemme ; mais cette paroi est mince, sauf en dehors où il existe des fibres musculaires nombreuses, Ces branches, avant de se jeter dans la lacune de la masse sous-œsophagienne, se séparent un instant du système ner- veux et possèdent alors une paroi propre complète. Chez Scorpio eurvyæus, lesrelations sont à peu près les mêmes. L’aorte s’accole également à la face postérieure du cerveau,et la partie antérieure de sa paroi propre est remplacée par le névrilemme ; elle émet de même latéralement une lacune, beaucoup plus étroite, il est vrai, que dans le cas précédent, qui se continue aussi avec un vaisseau se divisant en deux branches considérables ; mais ici la branche interne de ce vaisseau, au lieu de s’enfoncer purement et simplement dans le cerveau, rejoint son homologue du côté opposé. Au delà du niveau des ramifica- tions lacunaires latérales, l’aorte se détache du cerveau en reprenant une paroi propre en avant, puis elle s'étale transversalement et se divise bien au-dessus du trou œsophagien. Ses deux branches s’accolent de nouveau au cerveau de chaque côté de la ligne médiane, et perdent leur paroi antérieure propre qui est rem- placée par le névrilemme ; elles se continuent dans la lacune de la masse gan- glionnaire sous-œsophagienne, en suivant les pédoncules cérébraux sans s’en détacher. En somme, cette disposition diffère peu de ce qui existe chez B. occi- tanus. L'’aorte se détache provisoirement du cerveau en complétant sa paroi propre, avant de se diviser; tandis que, chez ce dernier, elle ne s’en détache qu'après s'être divisée, Chez Heterometrus palmatus, l'aorte se divise avant d'arriver au cerveau ; ses branches s'y accolent et envoient chacune une très grande lacune latérale se con- tinuant en avant avec un vaisseau, comme précédemment ; ce vaisseau est volu- mineux et, comme chez Sc. euwropæus, sa branche interne s’unit à son homolo- gue. Au delà du sinus latéral chaque branche se sépare du eerveau. 218 G, SAINT REMY. qui prend une teinte foncée par l’acide osmique et les matières colorantes, Sur les coupes passant par son axe, on reconnaît qu’elle présente une face à peu près plane, dirigée en avant et un peu obliquement de bas en haut et de dehors en dedans, à laquelle aboutissent les fibres du nerf optique et une face convexe tour- née en arrière, de laquelle part le pédoncule. Celui-ci(f. s.), qui est l’homologue du pédoncule ou couche fibrillaire du lobule supé- rieur des Aranéides, est constitué par la réunion de nombreuses fibrilles qui prennent naissance sur toute la face convexe de la balle méduilaire. Ce pédoncule est dirigé obliquement en arrière et en dehors, et c’est presque immédiatement sous le névrilemme, vers le milieu du diamètre antéro-postérieur du cerveau, qu’il se fusionne avec une lame de substance ponctuée légèrement fibril- laire, quitraverse le lobe cérébral de dehors en dedans et en ar- ricre, eb à laquelle nous donnonsle nom de pédoncule commun des lobules optiques. Le lobule optique inférieur (PI. XIII, fig. 137, 138, L. o. à.) est un peu plus compliqué que le précédent, commecest le cas général chez les Aranéides ; il comprend trois balles médullaires successives (antérieure, b.a. ; moyenne, b. m.; postérieure, b. p.). Ces balles sont formées de substance ponctuée homogène et colo- rable, et présentent la forme de sphères légèrement aplaties d'a: vant en arrière ; la moyenne est la plus volumineuse, l’antérieure est la plus petite. La balle médullaire antérieure (b. a.) est plutôt piriforme que sphérique, parce qu'en avant elle recoit les fibrilles du petit nerf optique inférieur ; elle est entourée complètement sur ses côtés par l'écorce ganglionnaire ; en arrière, elle repose contre la balle moyenne sur une partie de sa surface. Cette seconde masse médullaire (b. m.) est recouverte en dehors par le névri- lemme ; en dedans en arrière dans sa partie inférieure, elle s’en- fonce dans le lobe cérébral (PI. XIII, fig. 138, d. m.) ; en arrière, “sa face postérieure est partiellement en relation avec la balle pos- térieure. Celle-ci (b. p.) est comprise latéralement entre le névri- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 219 lemme et le lobe cérébral avec lequel elle est en partie soudée (PL. XIII, fig. 138) ; dans sa partie supérieure elle est en relation avec le pédoneule commun des lobules (PI. XIIE, fig. 137, p. c.), qui paraît représenter, dans sa région antérieure, la couche fibril- laire du lobule inférieur des Aranéides. C’est un tractus de sub- sance ponctuée, formé à la fois par des fibrilles issues de la balle médullaire postérieure du lobule inférieur et par le pédoncule du lobule supérieur. Il affecte la forme d’une lame dirigée horizonta- lement, mais obliquement en dedans et en arrière, et décrivant un arc très ouvert à concavité interne. À son origine, dans son quart antérieur, il est complètement fibrillaire et isolé, reposant seulement par sa face inférieure sur le lobe cérébral ; mais, dans sa région moyenne, ilest accolé à la face externe de ce lobe et comprend, outre ses fibres, une lame externe de substance ponctuée homo- gène, fortement colorable, qui lai donne un aspect fusiforme ; cette lame est divisée en plusieurs îlots. Enfin, dans sa région pos- térieure, le pédoncule commun estde nouveau purement fibrillaire et isolé ; il se dirige plus obliquement en dedans, et vient s’en- foncer dans la zone de substance ponctuée à structure lâche qui forme la partieinférieure du segment supérieur de l’organe stra- tifié ; ses fibrilles s’y perdent aussitôt (voy. PI. XIII, fig. 137). Les éléments ganglionnaires qui forment l'écorce propre du lobe optique, sont de petites cellules à protoplasma visible, mais peu abondant ; :l n'existe pas de vraies cellules chromatiques. Les lobes optiques sont reliés l’un à l’autre par une longue com- missure, assez délicate à suivre en raison des sinuosités quelle décrit pour contourner les formations médullaires situées au centre du ganglion optique, C’est an tractus fibrillaire orêle qui naît de la portion moyenne du pédoncule commun, dans la région où celui-ci est fusionné avec le lobe cérébral. Ce faisceau, d’abord dirigé obli- quement en arrière et en dedans, traverse le tiers moyen du lobe _ cérébral en décrivant un arc horizontal très ouvert à concavité antérieure, et arrive dans le tiers interne avec une direction 220 G. SAINT REMY. oblique en avant, en dedanset un peu en bas (PI. XITT, fig. 138, c. L.); là, il passe au-dessous du faisceau principal de l'organe en bissac, entre le seoment antérieur de cet organe en arrière et un îlot conjonctif et vasculaire assez considérable, en avant ; il suit la face antérieure de la balle médullaire piriforme. Grâce à sa direction légèrement oblique de haut en bas, il arrive à la ligne médiane dans un plan inférieur à celui du segment antérieur de l'organe en bissac, en un point où l’échancrure antéro-postérieure cesse partiellement en avant, ce qui lui permet de s’unir à son homologue du côté opposé, pour relier les deux lobes optiques. Organe stratifié postérieur. — L’organe stratifié postérieur (PI. XII, fig. 132, 133; P1 XIII, fig. 134-138, str.) occupe, comme toujours, le bord postérieur et supérieur du ganglion optique. Sa partie médullaire est assez considérable et décrit un are à conca- vité inférieure très prononcée ; elle comprend deux segments: l’un supérieur horizontal (s. s.), l’autre inférieur et postérieur (s. 1.) incliné sur le plan vertical. Le sement supérieur s'élève au- dessus de la masse médullaire des lobes cérébraux, comme une sorte de gros bourrelet incomplètement divisé, d'avant en arrière, en trois lames épaisses qui se confondent dans leur tiers inférieur; les deux tiers supérieurs de ces lames sont formés de substance ponctuée à structure très fine et fortement colorable, renfermant par endroits de petites condensations ponctiformes, tandis que le tiers inférieur est d’une texture très lâche, fibrillaire dans le sens transversal. Cette division en une zone supérieure dense et une zone plus lâche est surtout bien nette dans la région moyenne où le segment atteint son maximum d’épaisseur (PI. XII, fig. 132, 138 ; PI. XIII, fig. 134, s. s.). Aux extrémités latérales la zone plus lâche n’existe plus. Des trois lames du segment supé- rieur, l’antérieure est la plus considérable ; elle a la forme d’un cylindre aplati et incurvé en arrière (PI. XII, fig. 132, 183; PL. XIII, fig. 134, 136, 137, L. a.) ; sa substance n’est pas homogène, mais présente de nombreuses petites condensations. La lame CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 221 moyenne (/. m.), la plus mince, ne s'élève pas jusqu’au niveau des autres, ce qui fait que la face supérieure du segment antérieur est en quelque sorte creusée d’une rainure ; sa face antérieure est légèrement concave pour recevoir la face postérieure convexe de la première ; sa face postérieure est plane ; sa face supérieure con- vexe. La lame postérieure ({. p.) a, dans sa région moyenne, la forme d’un prisme rectangulaire à bords arrondis. Aux extrémi- tés latérales du segment ces lames se terminent en s’arrondissant. — Le segment inférieur (s. i.) est constitué par une lame très épaisse, très oblique par rapport au segment supérieur, décrivant également comme lui un arc à concavité inférieure. En section transversale, c'est-à-dire sur une coupe sagittale, il affecte la forme d’un ovale allongé, dont le bord antéro-supérieur est appli- qué contre le bord postéro-inférieur de l’autre segment. Ce segment inférieur est également divisé en deux zones : une supérieure, de tissu plus dense, qui se continue avec le tissu de même nature de la lame postérieure du premier segment, et une inférieure, de tissu lâche, qui n’est pas soudée à la zone correspondante du seoment supérieur. Ce segment inférieur présente son maximum d'épaisseur dans tous les sens, dans sa région moyenne ; sa lon- gueur est un peu moindre que celle du segment supérieur. Ajou- tons que le segment antérieur est séparé du noyau médullaire des lobes cérébraux par une lame conjonctive qui s’étend un peu au- dessous du segment inférieur dans sa région antérieure, et envoie un prolongement au-devant de lui, pour isoler sa lame de tissu lâche de celle du segment supérieur (voy. PI. XII, fig. 132, 133 ; PI. XII, fig. 134). Le revêtement ganglionnaire qui recouvre l’organe stratifié n’est constitué qu’en partie par des cellules chromatiques; celles-ci, qui paraissent représenter son écorce propre, forment une lame postérieure recouvrant la face postérieure du segment supérieur, et la face supéro-postérieure du segment inférieur (voy. PI. XII, fig. 132, 133; PL XIII, fig. 134, 137). Les faces supérieure et 222 G. SAINT REMY. antérieure du segment supérieur sont en contact avec des cel- lules à protoplasma abondant, qui toutes semblent envoyer leurs prolongements dans les lobes cérébraux. La structure de l'organe stratifié du Scorpion diffère donc de celle que nous avons vue daus les groupes précédents. Mais le fait le plus intéressant, c’est la relation qui existe entre cet organe et le lobe optique par l’intermédiaire du pédoncule commun. | Lobe cérébral. — Les noyaux médullaires des lobes cérébranx sont soudés entre eux en partie, en arrière et surtout en bas ; en avant et en haut, ils sont séparés par une large échancrure dans laquelle s'enfonce l'écorce cellulaire. Nous avons indiqué qu'il se différencie dans leur substance des formations compliquées que nous allons étudier. Mais auparavant nous parlerons de quelques particularités moins intéressantes de leur structure, pour n’avoir plus à y revenir. On observe une petite commissure supérieure, réunissant les régions supérieures non soudées des deux lobes, et qui paraît homologue à la même formation du cerveau des Ara- néides et des Phalangides. Il existe une autre commissure plus importante, qui s étend verticalement en forme de fer à cheval allongé dont les branches plongent dans les lobes, forme prise pour contourner l'organe en bissac et les autres formations centrales, Cette commissure s’étudie bien surtout sur les coupes sagittales et transversales ; on la retrouve assez facilement sur les coupes ho- rizontales où elle est sectionnée transversalement dans presque toute son étendue, mais à condition d’être exactement renseigné sur sa position, Car elle ne se présente que comme une petite ré- gion pointillée. Dans chaque lobe, cette commissure naît dans le tiers inférieur, au-dessous de l’organe en bissac, par la réunion d’une masse de fibrilles qui se différencient au sein de la substance ponctuée, et viennent se grouper à la partie inférieure du col de cetorgane en un faisceau assez volumineux appliqué contre sa face externe (P1. XII, fig. 132, c.). Au-dessus du col ce faisceau s’incurve légèrement en dedans, comme on le voit bien sur les CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 223 coupes transversales, et se porte un peu en arrière (PT. XII, fig. 133, c.). Il se rapproche ainsi du bord supérieur du lobe cérébral et de la ligne médiane, pour se fusionner avec son homologue du côté opposé, immédiatement suus l'écorce cellulaire. L'’écorce des lobes cérébraux, si l’on en excepte la masse gan- glionnaire antérieure qui appartient en propre aux formations médullaires spéciales, est constituée par des cellules riches en protoplasma, qui recouvrent ses faces supérieure, latérales et antérieure. Ces éléments sont de tailles diverses ; on remarque à Ja face supérieure, de chaque côté de la ligne médiane, une série de trois ou quatre grosses cellules. Les formations qui sont comprises dans les lobes cérébraux, consistent en une accumulation de cellules chromatiques, la masse ganglionnaire antérieure, et une série de pièces différenciées dans la substance ponctuée. La masse ganglionnaire antérieure (PI. XII, fig. 132, 133 ; PI. XIIT, fig. 134, 136, 137, mn. g. a.)est une accumulation considérable de cellules chromatiques, formant une lame épaisse à bordsarrondis, dirigée obliquement de haut en bas et de dedans en dehors, occupant la face antérieure du lobe cérébral dans la région supérieure et interne. Ses éléments se présentent comme de petits noyaux très colorables, mesurant environ 5 p de diamètre, autour desquels on ne peut distinguer de contour cellu- laire. En arrière et au-dessous de cette lame, la substance ponc- tuée du lobe cérébral forme un grand nombre de petites conden- sations ponctiformes, qui donnent à cette région un aspect parti- culier en raison duquel nous lui donnons le nom de région tachetée (PI. XII, fig. 132; PI. XIII, fig. 136, 187, r. £.). Cette région n'a pas, à proprement parler, de limites précises ; elle est mise en relation avec une autre formation située plus en arrière, l’organe en bissac, par deux faisceaux fibreux. Le plus considérable prend naissance à la partie antérieure et inférieure de la région, et s'étend presque horizontalement en arrière jusqu’à la masse médullaire principale de l’organe en bissac, dans la partie inférieure de la- 224 G. SAINT REMY. quelle il s'enfonce (PI. XIT, fig. 132, j. r. t.). Un autre tractus tire son origine du bord postérieur de la région, et descend un peu obliquement dans la même masse antérieure. La région tache- tée (PI. XIT, fig. 182 ; PI. XIII, fig. 136, 187, r. t.) est encore mise en relation avec le lobe optique correspondant, par un fais- ceau direct qui prend naissance sur son bord externe et inférieur par le groupement d’une quantité de fibrilles délicates issues des petites condensations médullaires. Ces fibres se réunissent à la limite de la région, et le faisceau qui en résulte se porte horizon- talementen dehors et un peu en arrière, vers l'origine du pédon- cule commun des lobes optiques, avec lequel il se fusionne. La formation, qu’à défaut d’autre terme, nous désignons sous le nom d’organe en bissac, pour rappeler sa forme générale, occupe la partie interne et moyenne du lobe cérébral. Elle comprend deux segments réunis par une portion moyenne beaucoup plus petite, en forme de col. Le segment antérieur est formé d’une masse volumineuse de substance ponctuée dense, ayant à peu près la forme d’un ovoïde à grand axe vertical, et d’une masse plus petite et piriforme située en bas et en dehors. La masse médullaire piriforme (PL. XIII, fig. 138, pir.) estune petite balle de substance ponctuée homogène, fortement colorable, limitée par un contour très régulier, dont le grand axe est perpendiculaire sur la masse principale ; elle est comprise entre celle-ci, à laquelle elle est soudée par sa petite extrémité, et le bord interne du lobe cérébral dont elle est séparée par une certaine épaisseur de substance ponctuée ordinaire; en avant elle touche au lobule antéro-interne dont nous parlerons plus loin. — La masse médullaire principale (PI. XII, fig. 132, 133; PI. XIII, fig. 137, 138, m. pr.) a une forme irrégulièrement ovoïde, allongée de haut en bas ; son tissu est le même que celui de la masse piriforme, mais présente quelques condensations peu prononcées, vaguement indiquées ; il se délimite bien de la sub- stance ponctuée ambiante, sauf dans la région inférieure et posté- TE 3”, +4 SEA F2 CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 225 rieure, où il passe insensiblement au tissu voisin. Cette masse est divisée en quelques lobules polygonaux, par des lignes claires. Elle recoit des fibrilles de deux origines : les unes provenant de la récion tachetée et formant les deux faisceaux que nous avons indiqués plus haut, les autres venant directement de la masse gan- glionnaire antérieure. Celles-ci proviennent de la région interne de la masse ganglionnaire ; aussitôt après avoir pénétré dans la substance médullaire du lobe cérébral, elles se groupent parallèle- ment entre elles, pour longer le bord supérieur de ce lobe. Le fais- ceau fibrillaire ainsi formé aborde la masse médullaire princi- pale par sa face supérieure et se résout dans sa substance ; il échappe facilement à l’examen sur les coupes horizontales et sagit- tales où il est sectionné obliquement, et c’est seulement sur les coupes transversales qu’il est possible de l’étudier. Les fibres four- nies à l'organe en bissac par la région tachetée forment deux groupes que nous avons déjà signalés. Une grande partie des fibres qui sont venues de la région tachetée dans la masse principale du segment antérieur, ne font que la traverser sans s’unir intimement à elle ; elles se creusent en quelque sorte un passage dans sa substance, pour se rendre dans le segment postérieur de l’organe. Nous désignons ce tractus sous le nom de faisceau principal de l'organe en bissac (PI. XIII, fis. 138, . pr.). Il constitue en partie la portion rétrécie ou col de l'organe ; le reste de ce col, exclusivement fibrillaire, est formé surtout par les fibrilles émises par la substance même de la masse médullaire principale, fibrilles qui sont destinées à l’unir au seg- ment postérieur. Ces fibrilles unissantes occupent principalement la portion supérieure du col, mais se réunissent en partie aux élé- ments du faisceau principal : c’est surtout vers le bord supérieur du col qu'on peut reconnaître nettement, sur les coupes sagittales, le passage de ces fibrilles d’un segment à l’autre (voy. PI. XII, fig. 133); elles décrivent, en général, un arc à concavité supé- rieure dont le col représente la partie moyenne. Le col n’est pas ARCH. DE ZOOL, EXP. ET GÉN. — 2° SÉRIE — T, V. bis, — supp. 1881. — Mém, 15 226 G. SAINT REMY. d’ailleurs constitué uniquement par des fibrilles, et une petite por- tion est formée par de la substance ponctuée non fibrillaire. Le segment postérieur de l'organe en bissac est constitué par une masse principale glomérulée (PI. XII, fig. 132, 133 ; PI. XIII, fig. 138, 139, m. gl.) et par une petite masse médullaire acces- soire (PI. XIII, fig. 139, acc.). La dénomination de glomérulée, que nous appliquons à la masse principale, indique que sa sub- stance présente des condensations; ces sortes de glomérules ont des contours vagues, maïs tranchent nettement, par leur coloration plus foncée, sur le tissu lâche dans lequel ils sont plongés. Cette masse olomérulée, qui représente la majeure partie du segment postérieur, a une forme à peu près ovoïde, à grand axe oblique d'avant en arrière etde dehors en dedans. Son extrémité supérieure se différencie nettement de la sübstance ponctuée ambiante ; il en est de même de sôn extrémité inférieure et interne qui s’appro- che en bas d’une formation dont nous parlerons sous le nom d'or- gane olivaire (PI. XIII, fig. 139, o1.). La masse médallaire acces- soire du segment postéïieur est une petite masse ovoïde de sub- stance ponctuée homogène, mais relativement peu colorable, située un peu au-dessous et en avant de la masse glomérulée contre laquelle elle est appliquée (PI. XIIT, fig. 139, acc.). Elle est en relation avec elle par simple continuité de substance et ne paraît recevoir aucun faisceau fibreux spécial. Le lobule antéro-interne (P1. XIII, fig. 137, 138, /. a. à.) occupe l'angle antérieur et interne du lobe cérébral ; sa forme est à peu près celle d’une pyramide quadrangulaire, limitée en avant, en haut et en dedans par l'écorce ganglionnaire, en dehors par une échancrure occupée par du tissu conjonctif ; en arrière il est en contact avec la masse piriforme du segment antérieur de l’organe en bissac. La substance ponctuée qui constitue ce lobule se diffé- rencie, dans la plus grande partie de son étendue, en trois ou quatre petites masses d’une texture plus dense, un peu allongées et dirigées obliquement. Ce lobule antéro-interne ne paraît pas CER VEAUDES ARTHROPODES TRACHÉATES. 227 être en relation avec la région tachetée et l'organe en bissac. Chez Heterometrus palmatus, et surtout chez Scorpio europœus, ce lobule est plus distinct, séparé qu’il est du reste du lobe céré- bral par des cloisons conjonctives épaisses et profondes; il est divisé en trois segments par des sillons, et de plus la base médul- laire piriforme, que nous avons décrite dans l'organe en bissac, lui est si nettement accolée qu’elle semble en faire partie; cette balle offre de plus cette particularité qu’elle n’est pas séparée des éléments ganglionnaires de l’échancrure médiane des lobes céré- braux, par une couche de substance ponctuée, mais fait saillie dans cette échancrure. Chez Scorpio europœus nous avons vu un faisceau de fibres partir de la région interne du lobule et se perdre dans le lobe cérébral, assez en arrière, en dehors de lor- gane en bissac. L’organe olivaire est situé dans la région postérieure du lobe cérébral, au-dessous de l'organe en bissac contre la ligne médiane (PI. XIII, fig. 134, 135, 139, 140, ol.) ; c'est une masse de substance ponctuée dense, de forme olivaire, orientée obliquement de haut en bas et d'avant en arrière. Il est formé de deux moitiés superposées nettement séparées, et de texture différente; la moitié inférieure et antérieure représente une masse piriforme allongée et aplatie, dont le tissu n'est guère plus dense que celui de la sub- stancé ambiante ; la moitié supérieure et postérieure présente à peu près la même forme, mais s’accole en sens inverse à la pré- cédente, et s’en distingue par la plus grande finesse de sa struc- ture et sa coloration plus foncée. Les deux organes olivaires droit et gauche sont très rapprochés dans leur partie supérieure, où une mince couche de substance ponctuée les sépare seule sur la ligne médiane ; ils sont légèrement écartés vers leur extrémité inférieure qui se trouve au niveau da point où de gros faisceaux médians s’enfoncent dans le ganglion optique. Ces organes, qui sont en continuité de tissu avec la substance générale des lobes cérébraux, he recoivent aucun faisceau spécial, et ne paraissent en 228 G. SAINT REMY. relation directe avec aucune des autres régions différenciées du ganglion optique. G'ANGLION ROSTRO-MANDIBULAIRE. — Le ganglion rostro-mandi- bulaire, compris entre le ganglion optique et le ganglion des pédipalpes, est intimement confondu avec eux dans la région centrale, et ne peut être délimité facilement que du côté externe, Comme dans les groupes précédents, son noyau médullaire forme une masse commune en arrière et en bas, et se divise en avant et en haut, en un lobe rostral et une paire de lobes mandibulaires ; ces lobes s'étendent très haut en avant, et leur région supérieure se trouve au niveau de la partie inférieure du ganglion optique (voy. PI. XIII, fig. 141, L. r., L. m.). Le Jobe rostral se présente comme una lame de substance ponctuée se détachant de la masse commune par deux racines situées de chaque côté de l’échancrure qui marque le commencement du trou œsophagien ; ces deux racines se réunissent (PI. XIII, fig. 142, L. r.), et la lame unique se dirige, d’arrière en avant et de bas en haut, contre la face anté- rieure du cerveau (PI. XIII fig. 134, Z. r.), pour émettre à son extrémité le nerf du rostre. _ Les lobes mandibulaires se détachent de la masse ponctuée cen- trale comme deux masses ovoïdes aplaties, et s’en écartent en se portant en haut et en avant. Contrairement à ce que nous avons vu chez les Aranéides et chez les Phalangides, ces lobes donnent cha- cun naissance à deux nerfs au lieu d’un; de l’extrémité antéro- supérieure même du lobe part, au niveau du névrilemme, le gros nerf mandibulaire principal (nerf antennaire de Blanchard) ; immédiatement au-dessus de celui-ci sort du cerveau un filet accessoire beaucoup plus petit (nerf antennaire auxiliaire de Blan- chard) dont l’origine est plus profonde, car il se détache de la face supérieure du lobe mandibulaire, vers l’union de son tiers posté- rieur avec son tiers moyen, et exécute un certain trajet à travers l'écorce ganglionnaire. Comme nous avons pu constater, chez plu- sieurs Aranéides (Epeires, etc.), la division du nerf mandibulaire CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 229 unique en deux branches, à quelque distance de son point de sortie, nous pensons que les deux nerfs mandibulaires du Scor- pion représentent simplement le nerf mandibulaire unique des Aranéides. L Dans la région supérieure, la substance ponctuée du ganglion rostro-mandibulaire ne présente pas de trajets fibreux autres que des faisceaux de prolongements cellulaires, qui viennent de l’écorce et ne tardent pas à se désagréger. Dans la partie située immédiate- ment au-dessus de l’œsophage, on reconnaît une grosse commissure transversale courte, située presque immédiatement en arrière de Ja naissance du lobe rostral; les branches de cette commissure s’enfoncent de chaque côté en bas et un peu en arrière, dans les parties latérales à l’æsophage (pédoncules cérébraux), et se por- tent dans la masse sous-æsophagienne où nous n’avons pas à les suivre (Pi. XIII, fig. 143, . c.). Signalons encore l’existence dans la même région que cette commissure, entre elle et la base du lobe rostral, de deux petits tractus médullaires venus de la masse sous-æsophagienne, qui se réunissent avec leurs homologues res- pectifs du côté opposé, en formant un arceau au-dessus de l’œso- phage. La coupe horizontale représentée fig. 142, PI. XIII, £. m., les montre au point où ils commencent à s’incurver pour former deux arcs commissuraux. Dans la région supérieure, on remarque, sur le bord externe du gangion, un lobule glomérulé analogue à celui que nous avons signalé dans la même région, chez le Phalangium. L’écorce ganglionnaire, qui occupe les faces latérales et anté- rieure du ganglion rostro-mandibulaire, est surtout épaisse dans les pédoncules cérébraux ; elle est formée de cellules à proto- plasma abondant, de taille moyenne en général ; mais, au niveau des pédoncules cérébraux, il existe sur le bord antéro-externe une accumulation considérable d’éléments très volumineux, comme nous en avons déjà remarqué dans le ganglion rostro-mandibu- laire des Aranéides et des Phalangides, 230 G. SAINT REMY. CONCLUSIONS. De la série d'observations que nous venons d’exposer, ressort avant tout l’unité du plan de composition du cerveau des Arach- nides supérieurs. Partout il se montre divisé en deux régions, dont les relations sont les mêmes dans tout le groupe. Ta région que nous avons appelée, après Schimkewitsch, gan- glion optique, ne fournit pas d’autres nerfs que des nerfs optiques. Elle comprend trois parties parfaitement caractérisées ‘chez tous les types que nous avons étudiés : les lobes optiques, l'organe stra- tifié postérieur, et les lobes cérébraux très simples chez les Ara- néides, mais renfermant des différenciations complexes chez les Phalangides et les Scorpionides. Les nerfs optiques qui partent des lobes optiques sont au nombre d’une seule paire ou de deux, suivant qu’il existe une ou deux sortes d’yeux, et le lobe lui-même constitue un appareil unique ou se divise en deux centres, suivant l’un ou l’autre cas. La seconde région du cerveau, que nous avons désignée sous le nom de ganglion rostro-mandibulaire, a une constitution beaucoup plus simple et, par suite, beaucoup plus semblable dans tout le groupe. Elle se compose d’une masse nerveuse, traversée par le tube digestif, dont la portion sus-œæsophagienne se divise en avant en trois lobes : un impair, très petit, d’où part sur la ligne médiane le nerf du rostre ; et deux autres plus volumineux, disposés latéra- lement, qui donnent naissance aux nerfs des chélicères. Ceux-ci forment une seule paire chez les Phalangides et chez les Aranéides où nous les avons vus se diviser bientôt en deux branches ; il y en a deux paires chez les Scorpionides, les deux nerfs de chaque côté correspondant vraisemblablement aux deux branches de division du tronc unique des Aranéides. Le ganglion rostro-mandibulaire donne naissance, dans ce dernier groupe, à une paire de nerfs VISCéTaAUx. Telle est, en peu de mots, la composition du cerveau des Arach- CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 231 nides ; nous devons chercher s’il est possible d’homologuer ces régions avec certaines parties des centres nerveux des autres Arthropodes. En ce qui concerne le ganglion optique, les rapprochements sont faciles ; les lobes optiques représentent les organes de même nom et de mêmes relations des autres classes, et les lobes cérébraux avec l’organe stratifié postérieur correspondent au protocérébron moyen. L'ensemble est l’homologue du protocérébron des Insectes, des Myriapodes et des Crustacés. Mais pour ce qui est de la seconde région du cerveau, ou gan- glion rostro-mandibulaire, la détermination des homologies est plus délicate. Tout d’abord il est certain que si elle offre l'aspect et les caractères extérieurs d'un centre unique, elle doit être en réalité considérée comme constituée par la fusion intime de deux centres primitivement distincts. On sait en effet, depuis les recher- ches embryologiques de Metschnikoff, Salensky, Balfour, que les chélicères et leur ganglion se développent sur le premier zoonite post-buccal, et correspondent aux mandibules et au ganglion man- dibulaire des Insectes. L’homologue du ganglion des chélicères, ou ganglion mandibulaire, ne se trouve donc pas dans le cerveau des Insectes et des Crustacés, mais dans la portion sous-æsophagienne du système nerveux, comme l’a fait remarquer Schimkewitsch. Or le rostre est une formation pré-buccale, et son centre ganglion- naire ne peut être que d’origine sus-œæsophagienne, absolument distinct, par conséquent, du ganglion mandibulaire. Schim- kewitsch (1) a précisément trouvé, chez l'embryon des Aranéides, une paire d'ébauches nerveuses sus-æsophagiennes, interposées entre le ganglion optique et le ganglion mandibulaire, qu'il regarde comme le ganglion du rostre. Le nerf rostral que nous avons observé, sort évidemment d’une région particulière issue de ce ganglion rostral embryonnaire. (1) W. Schimkewitsch, Etude sur le développement des Araignées. Arch. de biol. VI. 1887, 232 G. SAINT REMY. ° Mais à quel segment du cerveau des Insectes et des Crustacés peut correspondre le ganglion rostral? Cela revient à poser la question de la signification du rostre. Cet organe est volontiers regardé, par les entomologistes, comme une paire d’appendices soudés, et a été homologué soit aux antennes, soit à la lèvre supé- rieure des Insectes (1) qui a été considérée, elle aussi, comme le résultat de la fusion de deux appendices. Mais la bifidité d’un organe impair, comme la présence d’une crête ou d’un sillon, ou même la formation d’un organe par la fusion d’une paire de pro- longements qui ne ressemblent que peu ou point à des appendices, ne nous semblent pas une preuve suffisante pour admettre que cet organe représente une paire d’appendices au sens étroit du mot (2). Metschnikoff a d’ailleurs montré, chez le Scorpion, que le rostre se forme comme un prolongement impair échancré. De sorte que si l'on considère, avec Viallanes, l4 lèvre supérieure des Insectes comme une formation impaire, homologue au rostre des Crustacés et représentant une dépendance du zoonite des secondes antennes, mais non ces appendices eux-mêmes, rien ne s’oppose à ce qu on regarde également le rostre des Arachnides comme l’homologue de la lèvre supérieure des Insectes et du rostre des Crustacés, les secondes antennes des Crustacés ayant complètement disparu dans ce groupe comme chez les Insectes. Nous croyons donc pouvoir admettre que le centre ganglion- naire rostral des Arachnides, représenté par une partie anatomi- -quement indistincte du ganglion rostro-mandibulaire, est l’homo- Jogue du troisième ganglion, ou tritocérébron, du cerveau des Insectes, des Myriapodes et des Crustacés. Le deutocérébron de ces trois classes n’est pas représenté ici. Cette portion rostrale du (1) Blanchard regarde le rostre comme représentant à la fois les mandibules et les mâchoires, opinion évidemment inadmissible, puisque cet organe cest pré- buccal. (2) Balfour n’admet pas que les proéminences embryonnaires qui forment la lèvre supérieure de l’Insecte, aient la valeur d’appendices. (Balfour, Zraité d'Em- bryologie, Trad. Robin, Il, page 381.) CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 233 ganglion rostro-mandibulaire est évidemment située dans sa partie supérieure, et vraisemblablemeut elle n’est pas limitée au lobe ros- tral, pas plus que le ganglion des chélicères n’est limité aux [obes mandibulaires : il est probable qu’elle s’étend en arrière, et il est légitime de supposer que c’est d’elle que naissent les nerfs viscé- raux des Aranéides, qui seraient ainsi les homologues des racines du stomato-gastrique des Insectes et des Crustacés (1). — Le nerf rostral représente donc la paire des nerfs de la lèvre supé- rieure des Insectes, des Myriapodes et des Crustacés : le fait de son imparité n’a aucune importance. ONYCHOPHORES. PERIPATUS CAPENSIS Gr. (PI. XIII, fig. 144 ; PL. XIV, fig. 145-159.) La forme extérieure et les relations du système nerveux du genre Peripatus Guild. ont été étudiées très soigneusement par Balfour (2), chez P. capensis Gr. La description qu’il en donne est: des plus exactes. Le cerveau se présente (F1&. X) comme formé de deux grosses masses ganglionnaires ovoïdes, aplaties à la face supé- rieure, plus larges en avant qu’en arrière, libres à leurs extrémi- tés, et complètement fusionnées sur la ligne médiane dans leur région moyenne. L’extrémité antérieure de chacune de ces masses se prolonge en un tronc volumineux considéré jusqu'ici comme un nerf, le nerf antennaire (Z. ant.) ; l’extrémité postérieure se con tinue en arrière avec la commissure œsophagienne (C. æs.). Sur le bord externe de la face supérieure, vers l’union du tiers antérieur (1) Schimkewitsch, il est vrai, fait naître chez l'embryon les nerfs viscéraux du ganglion maudibulaire : € Sur le bord postérieur », dit-il, la paire de ganglions mandibulaires « donne naissance à une paire de prolongements qui correspondent à l'ébauche du système sympathique » ; mais une telle interprétation de ces « prolongements » a besoin d’être prouvée autrement que par une simple affr- mation et une figure schématique. /Schimkewitsch, Dével. des Araign., page 567.) (2) F. M. Balfour. — The Anatomy and développement of Peripatus capensis. — (Trav. publié après la mort de l’auteur par les soins de H. M. Moseley et A. Sedwick.) Quart. Journ. of Micr. Science. Vol. XXIII, 1883. 234 : G. SAINT REMY. avec les deux tiers postérieurs, on remarque l’« œil > (æ.) étroite- ment appliqué sur le cerveau ; sa face interne est formée par une cupule nerveuse soudée à la rétine, représentant un lobe optique ; cette lame nerveuse est reliée au cerveau proprement dit par un tronc gros et court, le « nerf optique » qu'on ne peut voir sur une dissection. Un certain nombre de petits nerfs se détachent du cerveau, De l'extrémité antérieure de l’organe, vers l’origine des « nerfs antennai. res», sortent de petits troncs nerveux grêles qui se rendent aux téguments. Balfour signale également deux paires de petits nerfs au voisinage du « nerf optique » ; mais nous avons reconnu, Fig. x (1). sur les coupes, que ces filets ne sont autre chose que des faisceaux de trachées qui pénètrent en ce point dans le cerveau. En revan- che il existe encore quelques filets grêles qui ne se remar- quent que sur les coupes, notamment quelques petits filets dorso- latéraux et une paire qui se détache de la ligne médiane ventrale dans la région antérieure (P1. XIV, fig. 149, 150, n.). En arrière, sur la ligne médiane dorsale, sort un nerf impair assez gros, que Balfour a suivi sur des coupes totales, et qui paraît innerver le tégument de la région dorsale de la tête. Deux branches nerveu- ses importantes partent du voisinage dela ligne médiane ventrale, près de l'extrémité postérieure du cerveau (F1@. X, n.v.); ces deux nerfs, qui représentent les origines du système viscéral, se portent sur le pharynx, et se fusionnent en un tronc unique sur la face dorsale : ils paraissent être les homologues des racines du (1) FIG. X. — Cerveau de Peripatus capensis Gr. vu par la face inférieure ; Gr. 20 fois. — C. æs., commissure œsophagienne ; — ZL . ant., lobe antennaire. — n.m.a., nerf mandibulaire antérieur; — n. #.p., nerf mandibulaire posté- rieur; — n.*,, nerf viscéral; — æ., œil ; — 0. »,, organe ventral. : CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 235 stomato-oastrique, Enfin, deux autres nerfs postérieurs se déta- chent de chaque côté sur le bord externe, le premier du cerveau proprement dit (n. m. a.), le second un peu en arrière de la partie antérieure de la commissure œsophagienne (n. m.p.); ces deux nerfs se rendent à la mâchoire qui est regardée comme l’homolo- gue de la mandibule des Insectes. La région moyenne des com- missures œsophagiennes donne encore naissance à quatre ou cinq paires de petits filets tégumentaires. Enfin, on sait qu’en arrière les commissures ‘ne se réunissent pas au-dessous de l’œsophage, et se continuent directement dans les cordons ventraux, sans limites extérieures précises. Nous n’avons pas à nous occuper de la partie sous-æsophagienne du système nerveux. Les recherches embryologiques (Kennel) (1) ont montré que Îe cerveau se compose, comme pouvaient le faire prévoir les données anatomiques, de la réunion des masses ganglionnaires de deux régions, le « segment céphalique » qui porte les yeux et les an- tennes, et le premier segment thoracique qui porte les mâchoires ou mieux les mandibules ; quant à la commissure œsophagienne, elle est formée, dans sa partie postérieure, par le ganglion du deuxième segment thoracique, ou segment des papilles muqueuses. Pour clore la description de la forme extérieure du cerveau, nous devons indiquer qu’il existe, à la face ventrale de cet organe, une paire de petits tubercules situés au voisinage de la ligne médiane, à peu près daus le plan vertical passant par les yeux. La nature réelle de ces petits corps signalés depuis longtemps par Grube, resta complètement inconnue, jusqu’à ce que Kennel découvrit leur origine embryonnaire. Il se forme dans chaque segment, aux dépens de la portion ventrale de l’épaississement ecto- dermique qui donne naissance au système nerveux central, une ébauche particulière dont le développement régressif aboutit à la (4) J. von Kennel, — Entwiklungsgeschichte von Peripatus Edwardsii Blanch, und Peripatus torquatus n. sp. — Arbeiten aus dem Zool. Instit. in Würzburg. VII-VIII. 1885-1888. 236 G. SAINT REMY. constitution dans les técuments d’un organe énigmatique impair, très réduit, auquel Kennel donne le nom d'organe ventral. Les appendices cérébraux en question ne sont autre chose que les restes de deux moitiés non fusionnées de l’organe ventral du seg- ment céphalique, qui, au lieu de se détacher du système nerveux, ont abandonné le tégument et sont demeurées en connexion avec le cerveau. Balfour a tenté d'étudier la structure interne du cerveau ; mais ses recherches, faites vraisemblablement sur des pièces mal conser- vées, si l’on en juge d’après sa description et ses figures, ne lui ont fourni que des résultats très incomplets. Il n’a pu que montrer les relations réciproques de l’écorce ganglionnaire et de la substance ponctuée, sans reconnaître la structure différenciée de celle-ci, ni l’origine réelle des nerfs. D’après sa description, on pourrait croire l’organisation du cerveau du Péripate extrêmement simple, tandis qu’en réalité elle offre une certaine complication, plus accen- tuée même que celle d’autres Trachéates (Gloméris, Géophile, Pholque, par ex.). L'espèce qui a servi à nos recherches est également P. capensis. Nous avons eu à notre disposition trois exemplaires vivants, et un exemplaire conservé dans l'alcool. Les cerveaux frais ont été fixés à l’acide osmique, et colorés au carmin alunique ; nous avons pra- tiqué sur ces pièces trois séries de coupes : une série dans le plan transversal, une autre dans le plan horizontal, et une autre dans un plan intermédiaire au plan transversal et au plan horizontal. Ces dernières coupes sont très favorables et nous ont été fortutiles. Quant au cerveau de l’exemplaire traité en masse par l’alcool, il nous a donné une série de coupes sagittales, après coloration au carmin boracique à l'alcool ; les éléments étaient assez mal conser- vés, mais néanmoins cette série pouvait parfaitement être étudiée, à l’aide des indications fournies par les autres coupes, et nous a procuré d’utiles renseignements anatomiques. L’écorce ganglionnaire du cerveau du Péripate est intéressante L 2e RES à | : À 4 CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHEATES. 237 par la grande uniformité et la constitution particulière de ses élé- ments. Les cellules pourvues d’un protoplasma relativement abon- dant sont peu nombreuses. La presque totalité du revêtement est formée d'éléments extrêmement pauvres en protoplasma, qui se présentent comme de petits noyaux homogènes très fortement colorés (environ 8 y. de diamètre), assez serrés, avec une très faible zone de protoplasma ; ces éléments rappellent par consé- quent les cellules chromatiques. Il existe, en outre, des points où les noyaux sont plus serrés, plus pauvres en protoplasma, et pren- nent une coloration un peu plus foncée, caractère qui n’est évi- dent que sur les pièces traitées à l'acide osmique : ces éléments sont de vraies cellules chromatiques. Tous ces noyaux, au lieu de présenter une forme régulièrement ovoïde ou sphérique, se mon- trent généralement plus ou moins polyédriques, comme Balfour Jes a figurés ; mais il semble que les réactifs contribuent heaucoup à accentuer cette particularité. Les cellules riches en protoplasma sont disséminées, en très petit nombre, dans l’épaisseur de l’écorce ganglionnaire; leur noyau sphérique ou ovoïde est très pâle et chargé de fines granulations chromatiques. On trouve de plus dans la partie postérieure de chaque moitié du cerveau, au voisi- nage de la ligne médiane ventrale, quelques cellules volumineuses dépassant de beaucoup toutes les autres ; leur noyau ovoïde, très volumineux (mesurant environ 17 y, sur 24), se colore uniformé- ment en rose pâle par le carmin alunique, et renferme un gros nucléole sphérique, homogène, mesurant environ 7 1. de diamètre, c'est-à-dire aussi gros que les noyaux des cellules ordinaires, mais plus pâle que ceux-ci. Le névrilemme est une membrane hyaline très épaisse, reposant directement sur la substance nerveuse sans interposition d’une couche appréciable de tissu conjonctif. Cette membrane se détache avec la plus grande facilité, et le plus souvent les coupes en sont privées plus ou moins complètement. C’est ce qui explique pourquoi elle a échappé à Balfour, qui figure le névrilemme sous forme d’une 238 G. SAINT REMY. ligne délicate. Cette lame se continue en s’amincissant sur les nerfs et sur les cordons ventraux. Elle est interrompue par le passage des faisceaux de trachées, qui pénètrent dans le cerveau par petits groupes, soit au point même de sortie des nerfs, comme chez les Myriapodes, soiten des points différents (P1. XIV, fig. 146, 147, 152, tr.). Ces trachées se perdent dans la profondeur de la sub- stance ponctuée. Nous avons dit que le cerveau se forme par la réunion du centre nerveux du « segment céphalique » et du centre nerveux du pre- mier segment thoracique ou segment mandibulaire. Il est possible de délimiter à peu près exactement les régions qui appartiennent à ce dernier segment, et qui méritent le nom de ganglion mandi- bulaire, de celles qui proviennent des ébauches nerveuses céphali- ques. De chaque côté le ganglion mandibulaire forme la partie antérieure de la commissure œsophagienne et la partie postérieure, supérieure et externe de chaque moitié du cerveau proprement dit, sur le bord supéro-externe duquel il se continue. Pour ce qui est de la partie principale du cerveau, qui correspond évidemment au protocérébron et au deutocérébron, et probablement aussi au tritocérébron des Myriapodes et des Insectes, nous n’avons pu la diviser nettement, comme chez ces derniers. Elle paraît former un ensemble unique : c’est ainsi que les régions médullaires, en rapport avec les antennes, ne sont pas reliées par une commissure parti- culière, et se présentent comme des dépendances de la masse géné- tale. Aussi avons-nous cru devoir décrire simplement toute cette pôrtion du cerveau, d’origine céphalique, sous le nom de ganglion céphalique, qui a l'avantage de ne rien préjuger. GANGLION CÉPHALIQUE. — Le ganglion céphalique, auquel se rattachent les lobes optiques, se compose d’une masse médullaire presque totalement recouverte par l’écorce ganglionnaire : sa face supérieure seule est libre. Cette masse de substance ponctuée pré- sente des différenciations qui ont complètement échappé à Balfour ; elles forment un système complexe que nous étudierons plus loin. re vét , he à CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 239 Lobe optique. — Tia description du lobe optique est intimement liée à celle de l’œil ; mais comme l’étude du cerveau était avant tout notre principal objet, nous n’avons pu dépigmenter la rétine, de crainte d’altérer les centres nerveux, ce qui nous oblige à laisser de côté cet organe intéressant. Au sujet du lobe optique, Balfour dit simplement que « le nerf optique se réunit à une grosse masse ganglionnaire placée derrière la rétine ». Carrière a étudié l’œil chez Peripatus Edwardsi Blanch. ; la description qu’il en donne diffère très sensiblement de ce qu’on peut observer chez P. capensis, et il est possible que les deux organes ne soient pas absolument identiques. Il décrit et figare l’œil comme écarté du cerveau, et légèrementcreusé du côté interne ; le nerf assez long qui y arrive, forme dans la concavité « un coussin de fibres fines, limité du côté de la rétine par une mince membrane présentant des noyaux allon- gés ». Il n’yaurait sur la surface extérieure, du côté interne, de la partie étalée du nerf, aucune couche nucléée, ettout ce qui se trouve en contact avec cette paitieappartiendrait à la rétine même. Ce que nous avons observé chez P. capensis est plus conforme à la figure donnée par Balfour pour la même espèce. Le « nerf optique » est formé de substance ponctuée finement fibrillaire ; ce n’est pas à proprement parler un nerf, mais un prolongement de la substance médullaire du cerveau, que nous désignerons sous le nom de pédi- cule optique, pour éviter d'employer un terme qui ne lui convient pas. Ce pédicule est extrêmement court : il se détache de la face supérieure de la substance ponctuée centrale (PI. XIV, fig. 147, 151, p. o.), immédiatement en dedans et au-dessus du lobe olfactif (L. olf.), et en dehors de la crête longitudinale que Balfour nomme corne dorso-latérale (c. dl.). Il se porte en haut et un pet en dehors et en avant, et traverse le névrilemme. La masse ocu- laire, à peu près sphérique, est immédiatement appliquée contre cette membrane qui se continue sur elle en s’amincissant pour lui former une capsule ; le pédicule n’a donc pas en réalité de trajet hors du cerveau. Immédiatement au delà du niveau du contour 240 G. SAINT REMY. extérieur du névrilemme, il s'étale en une sorte de coupe régu- lière, largement ouverte, dont les parois vont en s’amincissant du centre vers la périphérie pour former des bords très aigus. Les faces de cette lame concave sont très nettement limitées, mais il n'existe pas sur sa concavité de membrane, ni de noyaux transver- saux, pouvant en faire soupconner l'existence. On observe dans l’épaisseur de cette lame, et en particulier au centre, c’est-à-dire au point où se produit l’étalement du pédicule, un certain nombre de noyaux aplatis et allongés. Comme l’a figuré Balfour, cette sorte de coupe est plongée entièrement dans une accumulation de noyaux très serrés, se rapprochant beaucoup de ceux de l'écorce cérébrale. Ces noyaux non seulement remplissent la coupe, mais en recouvrent entièrement la surface extérieure. Balfour repré- sente comme semblables tous les éléments qui occupent l’intervalle entre le fond de la coupe médullaire et la couche pigmentée où pour lui commence la rétine. En réalité, il y a deux couches dis- zinctes de noyaux. La couche dans laquelle la lame médullaire est plongée, est formée d'éléments plus petits et plus colorables, plus serrés que ceux de la couche attenant à la zone pigmentée : ils se rapprochent par leurs caractères des cellules chromatiques qui existent dans le cerveau. Les éléments de la seconde couche sont des noyaux plus gros et plus pâles, moins serrés et saissant recon- naître autour d’eux un faible contour protoplasmique : ils ne res- semblent à aucun des éléments de l'écorce cérébrale. Ces deux couches sont nettement délimitées suivant une surface parallèle à la concavité de la coupe, et n’empiètent pas l’une sur l’autre; mais il n’existe entre elles aucune membrane limitante (1). La couche proximale par rapport au cerveau est évidemment ganglionnaire ; il semble que la couche distale appartient à la rétine, et repré- sente la base des cellules visuelles. Malheureusement nous n’a- (1) Cette division en deux couches semble exister de très bonne heure; elleest visible sur une figure de Kennel, relative au développement de l'œil. (Kennel, loc. cit. 11; Pl, III, fig. 34.) CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 241 vons pu étudier plus complètement cette question, faute de maté- riaux. Un point intéressant reste acquis, c'est qu’il existe une région ganglionnaire spéciale, une sorte de lame ganglionnaire (PI. XIV, fic. 147, 151, L. 9.), entre la rétine et les parties centrales du cerveau. La région d’où se détache le pédicule optique est unie à la par- tie voisine, que nous allons décrire sous le nom de masse médul- laire antérieure, par un gros cordon médullaire (PI. XIII, fig. 148, c. m. o.). Elle est de plus reliée à la région correspondante du côté opposé, par trois autres cordons médullaires beaucoup plus grêles (PI. XIV, fig. 147, c. o.) qui se portent en dedans, en arrière et un peu en haut, et se fasionnent bientôt pour former une commissure passant d’une moitié du cerveau à l’autre, dans la partie supérieure et postérieure de l'organe (PI. XII, fig. 147, €. 0.). Organes ganglionnaires. — IT existe, avons-nous dit, un système d'organes différenciés dans la susbtance médullaire et composé de plusieurs pièces auxquelles nous donnons les noms de masses médul- laires antérieures, pédoncules, lames ventrales, et bourrelet dorsal. Chacune des masses médullaires (PI. XIV, fisc. 148, 149, 156, m.Mm.), Située dans la région movenne et antérieure de chaque moi- tié du cerveau, a la forme d’un ovoïde dont la grosse extrémité très renflée, dirigée en avant et en bas, fait saillie hors du reste de la substance ponctuée, et plonge dans une accumulation de petites cellules chromatiques, plus colorées que les autres éléments de l’é- corce ; cette accumulation ou masse ganglionnaire antérieure (PI. XIV, fig. 146, 150, 156-158, m. g. a.) occupe une grande partie de la portion antéro-inférieure de l'écorce cérébrale qui s’étend en dedans du nerf antennaire. La masse médullaire est formée de substance ponctuée homogène ; en avant elle se ramifie en quelques grosses branches qui s'enfoncent dans la masse ganglionnaire, et sv subdivisent pour en recueillir les prolongements ; elle s’unit en arrière eten bas aux lames ventrales ; en dehors, elle fournit le ARCH. DE ZOOL. EXP, ET GÉN. — 2° SÉRIE. — T. V bis, — suppL. 1887. — 1° Mém. 16 242 G. SAINT REMY. cordon médullaire qui se porte dans la région où s’insère le pé- dicule optique; en arrière et en dedans, elle émet le pédoncule: (PI. XIV, fig. 197, p.) qui la relie au bourrelet dorsal; enfin il est probable qu'elle est réunie à son homologue du côté opposé. Nous avons vu en effet, sur les coupes horizontales, un petit cor- don fibrillaire très grêle, partant de la face postérieure de cha- cune des masses etse portant en dedans et en arrière, après avoir décrit un arc à concavité interne ; nous avons suivi ces cordons dans la région moyenne du cerveau, mais sans pouvoir nous as- surer s’ils se réunissent pour former une commissure, ce qui uous paraît cependant vraisemblable. Les lames ventrales (PI. XIV, fig. 148, 149, 151-153, 155-157, l. v.), au nombre de trois dans chaque moitié du cerveau, sont des lames de substance ponctuée plus homogène, qui s'étendent sur la face inférieure de la substance médullaire du ganglion cé- phalique, où elles occupent les parties inférieure et postérieure de la région appelée par Balfour corne ventro-latérale ; elles s’é- tendent de dehors en dedans et d’avant en arrière, en s’incurvant légèrement du côté interne, et sont appliquées les unes contre: les autres, séparées par une mince lamelle conjonctive offrant | quelques noyaux. La lame moyenne est la plus épaisse et la plus longue (voy. PI. XIV, fig. 149). À leur extrémité antérieure, elles se fusionnent toutes ensemble et avec la face inférieure et externe de la masse médullaire. Elles émettent de plus à ce ni- veau un gros cordon fibreux qui se porte au segment antérieur du lobe olfactif (PI. XII, fig. 149, c. m. olf.). Sur les coupes sagittales, on remarque un petit faisceau de fibres qui part de la lame externe, traverse le ganglion céphalique d’arrière en avant et un peu de bas en haut, et se perd en avant dans le bourrelet: antérieur que nous indiquerons plus loin (PI. XII, fig. 156, f.). Ce système des lames et de la masse médullaire peut être comparé à l'organe pédonculé de la Scutigère. Ici comme chez la Scutigère, nous avons un organe médullaire qui recueille, d’une: CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 243 part, les prolongements de petites cellules chromatiques pauvres en protoplasma, et est en relation, d'autre part, avec des pièces qui s’enfoncent dans la substance ponctuée et se terminent fran- chement, sans contracter de rapports à l’extrémité avec d’autres régions. Mais, outre ce rapprochement fondé exclusivement sur des caractères généraux, il est possible d’en faire un autre avec le corps pédonculé des [nsectes, basé sur les mêmes caractères et appuyé de plus sur un fait anatomique intéressant, l'existence de relations entre ces organes et le lobe olfactif, ainsi que la région qui donne naissance au pédicule optique, disposition commune à l'organe que nous venons d'étudier chez le Péripate et au corps pédonculé des Insectes. | Le pédoncule (PI. XIV fig. 157,146, 148, p.) qui va de la masse médullaire à l’extrémitéexterne du bourreletdorsal,est dirigé d’avant en arrière et de basen haut, ce qui fait qu’on l’étudie le plus facile- ment sur les coupes sagittales qui peuvent l’intéresser dans toute sa longueur,tandis que les coupes horizontales et transversales le sec- tionnent toujours obliquement. Sa constitution est purement fibreuse. Il est à peu près cylindrique et enveloppé d’une délicate membrane conjonctive présentant quelques noyaux ; dans ses deux tiers antérieurs, il est divisé en deux moitiés, c’est-à-dire qu’il est formé de deux faisceaux de fibrilles, en forme de demi-cylindres, dont l’interne est légèrement creusé pour recevoir l’externe dont la face correspondante est un peu bombée. À son extrémité anté- rieure, ces fibrilles s’écartent légèrement en pinceau, pour se perdre dans l’intérieur de la masse médullaire ; son extrémité postérieure est faiblement renflée en massue, et s’unit ainsi à l'extrémité de la lame postérieure du bourrelet dorsal. Le bourrelet dorsal (PI. XIV, fig. 158, 159, 145, 152, 153, b. d.) auquel vient aboutir le pédoncule de la masse médullaire, occupe dans la région moyenne environ un tiers du diamètre transversal du cerveau. C'est une saillie différenciée du noyau médullaire, qui forme encore en avant, également dans la récion moyenne du 244 G. SAINT REMY. cerveau, un renflement transversal demi-cylindrique, sans struc- ture particulière, et par suite moins intéressant, auquel on peut donner le nom de bourrelet antérieur (P1. XIV, fig. 157-159, 146, 147, b. a.). Ces deux bourrelets sont séparés l’un de l’autre par une profondeéchancrure, dans laquelle pénètre l'écorce ganglionnaire; Balfour n’a pas reconnu cette disposition, et les confond en un seul, sous le nom de bourrelet postéro-dorsal (1). Le bourrelet dorsal est une formation curieuse en ce qu’elle rappelle l'organe stratifié postérieur que nous avons décrit chez les Aranéides. Il se compose de deux grosses lames presque cylindriques, aplaties d’avant en arrière, enveloppées chacune d’une membrane conjonctive à noyaux, qui les isole l’une de l’autre et du reste de la substance médullaire. La lame postérieure (PI XIV, fig. 158, 159, /. p.), la plus petite, est divisée en deux segments par une cloison émanée de l’enve- loppe conjonctive ; elle recoit à chacune de ses extrémités l’inser- tion du pédoncule, et se met de plus en relation avec la région antérieure de la substance ponctuée, située en avant et au-dessous d'elle, grâce à un petit faisceau de fibres qu'elle émet de chaque côté sur son bord antérieur, et qui passe sous l’autre lame pour aller se perdre vers la base du bourrelet antérieur. La lame an- térieure ({. a.) est plus volumineuse, maïs elle n’est en relation qu'avec la substance médullaire voisine par ses deux extrémités ; sa partie centrale se différencie en une lamelle de substance plus dense et plus colorable par l'acide osmique (voy. PI. XIL, fig. 145 ; cette structure n’est pas montrée par nos coupes sagittales qui provenaient du cerveau traité par l'alcool). Enfin le bourrelet dorsal est recouvert par une lame de petits éléments plus colorés que les autres et paraissant identiques à ceux des masses gan- (1) Comp. Balfour, loc. cit. fig. 19 K, G, PI. XVII. — Ja fig. 19 F montre le bourrelet antérieur ; 19 G montreune partie du bourrelet dorsal. Dans la fig. 23, PI XVIII, c'est le bourrelet antérieur qui se présente encore bien isolé en avant ; en arrière de lui, on voit des traces du bourrelet dorsal, La méprise de Balfour vient de ce qu’il n’a pas tenu suffisamment compte des coupes horizon- tales et sagittales. ; D tee 2 | a * ; Pa rés £ F = ef - js MCE dei pe CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 245 glionnaires antérieures ; ce revêtement correspond à la lame gan- glionnaire de l’organe stratifié des Arachnides. Comme on le voit, la structure de ce bourrelet dorsal rappelle entièrement celle de l'organe stratifié des Araignées ; son aspect, sur les coupes hori- zontales surtout, est tout à fait le même, et suggère au premier abord ce rapprochement qu’une étude plus complète ne fait que confirmer. Sa situation est également à peu près identique à celle de cet organe. Le bourrelet antérieur que nous venons de décrire donne nais- sance au nerf dorsal que PBalfour a suivi hors du cerveau, sans en chercher l'origine réelle. Ce nerf impair sort du cerveau sur la ligne médiane dorsale, immédiatement en arrière du bourrelet dorsal ; mais il prend naissance par deux racines dans le bourrelet antérieur ; il exécute par suite, à l’intérieur du cerveau, un trajet assez long dans l'épaisseur de l'écorce ganglionnaire. La naissance de ces deux racines et leur fusion se voient bien sur les coupes transversales. Elles tirent leur origine de l'extrémité supérieure du bourrelet antérieur, au fond du sillon qui sépare les deux moi- üés du cerveau, très près de la ligne médiane et par conséquent très près l’une de l’autre. Elles se portent en arrière en suivant la face supérieure du bourrelet antérieur (PI. XIV, fig. 146, n. d.), et ne tardent pas à s’accoler sur la ligne médiane, en restant d’abord distinctes, puis à se fusionner en un tronc cylindrique qui traverse le sillon séparant les deux bourrelets (PI. XIV, fig. 152, 159, n. d.). Ce tronc commun atteint la partie supérieure de la face antérieure du bourrelet dorsal, et suit toute la face supérieure de ce bourrelet, accolé à lui, mais en restant parfaitement distinct: à l'extrémité postérieure du bourrelet, il se recourbe brusquement presque à angle droit et traverse le névrilemme dont il est peu dis- tant (PI. XIV, fig. 153, n. d.). Hors du cerveau, il se porte en arrière et en haut, comme l’a décrit Balfour. Centre olfactif. — Le lobe olfactif (PI. XIV, fig. 149, 150, 151, L. olf.), bien caractérisé parla présence denombreux glomérules, est 246 G. SAINT REMY. situé dans la région antérieure et inférieure du cerveau. C’est lui qui formela partie antérieure dela corne ventro-latérale de Balfour. Il est bien isolé en avant, mais en arrière se soude de plus en plus largement à la masse médullaire générale. Sur sa face externe il présente une sorte de sillon très large, qui le divise en un seg- ment antérieur (PI. XIV, fig. 149, s. a.), et un segment posté- rieur (s. p.\ indiqué seulement dans sa partie moyenne. Les glomé- rules olfactifs (gl.) accumulés surtout à la périphérie, où se trou- vent les plus gros, sont de tailles diverses (16 à 85 1. de diamètre), mais très régulièrement sphériques ou ovoïdes ; leur contour est parfaitement limité, et ils se colorent plus fortement par l'acide osmique, mais ne paraissent pas d’une structure plus fine que la substance ambiante. Les fibrilles provenant du lobe antennaire par l'intermédiaire de la crête dorsale (voy. plus loin), s’insinuent entre eux et pénètrent dans leur masse par toute leur surface. Le lobe olfactif, comme nous l’avons déjà indiqué plus haut, est mis en relation directe avec la partie antérieure commune des trois lames ventrales, vers le point où elles s’unissent à la masse médul- laire antérieure ; il part de là, comme nous l’avons vu, un cordon médullaire à structure fibrillaire (PI. XIV, fig. 149, c. m. olf.) qui s’étend en dehors et un peu en avant, vers le seoment antérieur du lobe dans la substance duquel il disparaît. Nous avons déjà insisté sur l’intérêt que présente cette relation. À l'extrémité antérieure de son bord inférieur et externe, le lobe olfactif se prolonge, au-dessous des faisceaux qui vont à la crête dorso-latérale, en un petit renflement capité dirigé en avant et en dehors, auquel nous donnons le nom de lobule sensoriel acces- soire du lobe olfactif (PI. XIV, fig. 150, Z. acc.). Ce lobule acces- soire est constitué par de la substance ponctuée, aussi fortement colorée par l'acide osmique que celle des glomérules olfactifs, dans laquelle se différencient de petits amas sphériques qui pren- nent une teinte beaucoup plus foncée, sortes de glomérules minus- cules d'environ 5114 de diamètre. Ce lobule ne paraît pas être en CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 247 rapport avec un faisceau spécial du nerf. Il est ependant vrai- semblable qu’il est en relation avec une fonction sensorielle parti- culière, différente de celle du lobe. La formation qui porte le nom de nerf antennaire n'est pas, à proprement parler, un nerf. C’est un volumineux cylindre de substance ponctuée accompagnée d’une petite accumulation de cellules ganolionnaires sur sa face interne (PI. XIII, fig. 144, L. ant.); ce prétendu nerf a done la valeur d’un véritable lobe cérébral. Cette observation explique son mode particulier de développement aux dépens d’une traînée cellulaire prolongeant le ganglion céphalique « … Le nerf tentaculaire, dit Kennel (1), occupe parmi tous les nerfs périphériques une place à part; il se développe d’abord bien avant qu’on ne trouve trace des autres nerfs, et de plus il ne se forme pas comme les autres par une émission de fibres nerveuses, mais il est un prolongement direct du ganglion cérébral, avant tout sans substance fibreuse. » Ce terme de nerf ne pouvant s'appliquer à un ensemble de substance ponc- tuée et de cellules ganglionnaires, nous donnons à cette formation le nom de lobe antennaire. Sa substance ponctuée renferme des fibrilles. Il s’en détache, à la périphérie, de nombreux petits filets nerveux destinés aux organes sensoriels, comme l’a décrit Balfour : ce sont là les véritables nerfs antennaires. L’accumulation de cellules nerveuses occupe une grande partie de sa face interne (voy. PI. XIII, fig. 144, L. ant.) ; ses éléments ne diffèrent pas de ceux qui constituent essentiellement l'écorce cérébrale ; mais on trouve aussi sur les bords quelques noyaux vésiculeux qui sont peut-être conjonctifs. Le névrilemme cérébral se continue sur le lobe, mais son épaisseur y est moins grande. Le lobe antennaire se rattache à la masse principale du ganglion -céphalique par la créte dorso-latérale (corne dorso-latérale de Bal- four) (PI. XIII, fig. 144; PI. XIV, fig. 145-149, 151-153, 155- ‘1\ Kennel, loc. cit., II, p. 7. 248 G. SAINT REMY. 156, c. dl.), sorte de bourrelet longitudinal de substance ponctuée | qui s'étend sur le bord externe et supérieur du cerveau, en dehors des bourrelets antérieurset dorsal, entrelacommissure œsophagienne et le lobe antennaire. En arrière, cette crête s’efface en se fusion- nant avec le ganglion mandibulaire ; en avant, elle se prolonge jusqu’à la pointe formée par chaque moitié du cerveau, et se soude au lobe antennaire dont la limite est marquée par un faible étran- glement (Voy. PI. XIIT, fig. 144). C'est d’elle que se détachent les petits nerfs dorso-latéraux que nous avons signalés. Sa face supérieure est libre et recouverte immédiatement par le névrilemme, À son extrémité antérieure, vers le point de réunion avec le lobe antennaire, sa face externe ne présente qu’une faible couche de cellules nerveuses, et sur sa face interne on remarque une accumulation de petits noyaux vésiculeux, pourvus de chromatine à la périphérie seulement, qui sont peut-être de nature conjonctive. C’est dans cette région que prennent naissance les petits nerfs tégumentaires signalés par Balfour (PI. XIV, fig. 149, n. t.); un seul est assez gros : il prend naissance un peu en arrière, sur le bord supéro-externe de la crête, et le suit parallèlement en se diri- geant en avant, puis se recourbe en dehors et traverse le névri- lemme. Cette extrémité antérieure de la crête dorso-latérale se trouve au-dessus du lobe olfactif; elle y envoie trois ou quatre faisceaux de fibres qui partent de sa face inférieure et se portent dans la région inférieure et interne du lobe (PI. XIV, fig. 150, f. olf.). Ces fibres se répandent dans sa substance, et s’insinuent entre les glomérules pour pénétrer dans leur intérieur. — Les nerfs viscéraux qui ont éte indiqués par Balfour, naïssent du ganglion céphalique. Ils sortent, comme nous l'avons dit, de chaque côté de la ligne médiane ventrale ; mais Jeur origine réelle ne correspond pas à leur point de sortie ; ils prennent naissance du côté dorsal, et un peu plus en arrière, au fond du sillon qui sépare, dans cette région, les deux moitiés du cerveau (PI. XIV, fiy. 145, 154, n.v.). De là, ils se portent en avant et en bas, en restant CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 249 quelque temps appliqués contre le névrilemme ; on les suit très bien sur les coupes horizontales ou semi-horizontales, où ils se présentent en section transversale avec une forme ovalaire (PI. XIV, fig. 146, 147, n.v.). Hors du cerveau, comme l’a indiqué Balfour, ils se portent en avant, puis se recourbent brusquement en arrière avant de se fusionner. GANGLION MANDIBULAIRE. —Le ganglion mandibulaire occupe la partie postérieure du cerveau, où il est intimement soudé au gan- glion céphalique, et se continue en arrière en formant la portion antérieure des commissures œsophagiennes (PI. XIV, fig. 145, 146, 154-156, G.m.). La structure des commissures œsophagiennés n'offre rien de particulier, et ressemble beaucoup à celle du reste de la chaîne ventrale, fort bien décrite par Balfour. Son écorce ganglionnaire est seulement plus considérable, et 'ctend sur la majeure partie de la face supérieure, ne laissant à nu que le bord supéro-interne du noyau médullaire cylindrique. Les éléments ganglionnaires de cette écorce ne sont pas exclusivement des cel- lules pauvres en protoplasma, à noyau homogène et fortement coloré ; on y rencontre beaucoup plus de cellules ordinaires, à noyau granuleux et à protoplasma abondant, que dans l’écorce du cerveau. La substance ponctuée est de structure fine et délicate, et renferme des fibres longitudinales ; la structure fibrillaire est surtout accusée dans la portion antérieure, au voisinage du point de fusion avec le ganglion céphalique, où la commissure reçoit de nombreuses fibrilles de ce ganglion, les unes venant de la crête dorso-latérale, les autres du bourrelet médullaire antérieur. Les petites commissures qui relientles deux commissures œsophagiennes au-dessous de l’œsophage, sont purement fibreuses : la première, tout au moins, est destinée à relier les deux moitiés du ganglion mandibulaire, elle n’est évidemment pas homologue à la commis- sure transverse de l’anneau œsophagien des Insectes et des Myria- podes, qui représente la commissure du tritocérébron et nou pas du ganglion mandibulaire. 250 G. SAINT REMY. Les petits nerfs qui sortent latéralement de la région moyenne et postérieure de la commissure œsophagienne sont peu inté- ressants ; le nerf mandibulaire postérieur, situé en avant de ceux-ci, n'en diffère que par sa taille (PI. XIV, fig. 146, ». m. p.). Mais le nerf mandibulaire antérieur est plus curieux à étudier. Ce nerf sort de la face inférieure du cerveau propre- ment dit (PI. XIV, fig. 149, n. m. a.), comme l'indique Bal- four ; mais iloffre cette particularité d’avoir deux racines : l’une partant de la substance ponctuée de la commissure, l’autre de la substance ponctuée du cerveau proprement dit, dans une région dont il est difficile de décider avec certitude, si elle appartient au ganglion céphalique ou au ganglion mandibulaire, quoique nous inclinions vers la première opinion. La racine externe, qui se détache de la commissure même, prend naissance à la face infé- rieure de la substance médullaire, et se porte obliquement en avant eten bas (PI. XIV, fig. 146, 154, 155, n. m. al.) ; la racine interne, dont nous venons d'indiquer l’origine, se dirige en dehors et, après un court trajet, s’unit à la précédente (PI. XIV, fig. 146, 154,n. m. a°.). Le tronc commun (PI. XIV, fig. 147-149, n.m. a.) sort du cerveau un peu en avant et en bas, dans le prolongement de la racine externe, au-dessous des lames ventrales. La région médullaire où prend naissance cette racine interne du nerf man- dibulaire antérieur, est séparée de l’extrémité antérieure de la commissure œsophagienne (PI. XIV, fig. 154, (G. m.) par une échancrure visible sur les coupes transversales; cette échancrure nous semble délimiter le ganglion mandibulaire et le ganglion céphalique, et par conséquent nous admettons que la racine interne prend naissance dans ce dernier. Le ganglion mandibulaire n’occupe donc dans le cerveau que la région postérieure, supérieure et externe, et ses deux moitiés latérales ne se réunissent pas au- dessus de l’œsophage. ORGANE VENTRAL. — Nous avons dit qu’il existe à la face ven- r CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 251 trale du cerveau, une paire de petits appendices, dont Kennel a étudié le développement et qu’il regarde comme les représentants, dans le « segment céphalique », des organes découverts et décrits par lui, dans les autres segments du corps, sous le nom d'organes ventraux. Chez Peripatus capensis, ces petits appendices ont la forme d’ovoïdes aplatis de bas en haut et latéralement, dont le grand axe est dirigé d’avant en arrière. Balfour en donne la description sui- vante. Chacun d'eux « consiste, comme le montrent les coupes, principalement en cellules ganglionnaires. Il renferme une cavité pourvue d’une membrane limitante distincte : les cellules qui le constituent varient un peu de grosseur, étant plus petites vers le point d'attache. À son extrémité libre, est situé un corps fortement réfringent à peu près ovale, constituant probablement ce que Grube décrit comme une tache opaque, à demi plongé dans sa substance et maintenu en place par l’enveloppe de substance ner- veuse qui l’entoure. Ce corps paraît être tombé sur mes coupes. La pièce entière est fixée à la face inférieure du cerveau, par un très court pédicule formé par un faisceau de cellules et de fibres ner- veuses » (1). Balfour ajoute que cet organe paraît trop éloigné de la surface du corps pour être un organe sensoriel, d'autant plus qu’il ne semble pas adapté à la fonction auditive. Cette description n’est pas complètement exacte. L’appendice n'est pas rattaché au cerveau par un pédicule, mais lui est soudé par toute sa face supérieure. Il est limité par une capsule hyaline mince, qui se continue avec le névrilemme, et paraît être de même nature que lui. En haut, il est séparé de l'écorce cérébrale par le névrilemme même, qui est un peu aminci en ce point. Les éléments qui constituent cet organe sont des cellules allongées, à protoplasma peu abondant, à noyau également allongé fortement coloré et homogène ; ces cellules se distinguent, par leur forme et celle de leur noyau, des cellules de l'écorce cérébrale, et ne semblent pas _ (1) Balfour, loc. cit. p. 234. 25? G. SAINT REMY. devoir être regardées comme des cellules nerveuses. Ces éléments sont très serrés, et affectent une disposition radiaire par rapport à un espace un peu excentrique, qu'ils limitent. Cet espace est étroit et à peu près lenticulaire. Balfour le figure presque vertical, un peu oblique, et nous l’avons vu présenter la même disposition sur notre série de coupes transversales; mais sur la série de coupes sagittales, il paraissait presque horizontal et situé plus près de la face ventrale (voy. PI. XIV, fig. 158, o. w.). Il n’est pas extraor- dinaire qu'un organe rudimentaire à développement régressif puisse présenter dans sa forme quelques variations peu importantes. Cet espace est occupé par un noyau de substance homosène, présen- tant sur les coupes traitées à l'acide osmique une teinte un peu jaunâtre qui le rapproche de la substance cuticulaire, plutôt que de la substance du névrilemme. Ce noyau cuticulaire, qui est le corpuscule réfrimgent dont parle Balfour, représente simplement le revêtement de la cavité virtuelle de l’organe, cavité qui dans le cours du développement a existé réellement, et était à son origine en communication avec l'extérieur. — Outre leséléments allonges, : on remarque aussi, disséminés parmi eux, quelques noyaux ovoïdes très oranuleux. La masse centrale de l’appendiceesten communication avec l’in- térieur du cerveau pardes pores de diamètres divers (voy. PI. XIV, fig. 158) percés dans la lame névrilemmatique qui les sépare. Ces pores servent au passage de groupes de cellules très allon- gées en forme de grosses fibres. On observe des éléments semblables au-dessous et au-dessus de la région des pores, c’est-à-dire dans l’appendice et dans le cerveau. Nous n'avons trouvé aucune fibre nerveuse, et le seul rôle physiologique qu'on puisse attribuer à ces grandes cellules est un rôle nourricier (1). (1) Nous avons observé, dans la pointe antérieure formée par chaque moitié du cerveau, une formation singulière, que nous signalous en passant, sans chercher à lui donner une signification quelconque (P. XIV, fig. 155,æx). Sur la face dor- sale le névrilemme s’amincit brusquement et se 1enfle en une cavité saiilante UN ET EP ONELAR 4 mn AE ee à : ; 21 À ; û \ : 1° : re 7 ‘ UE De LAS p 2. | 2 SL a LUE Le LS bats LE SR D re nn, ns UT À ds de st Ad to à te Ge nn 1 é ve a dr ds pape Es CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 253 Conczusrons. -— Il est difficile de tirer des conclusions générales de l'étude du cerveau du Péripate. Le plan d'organisation de cet organe tient à la fois de celui des Insectes et des Myriapodes, et de celui des Arachnides. Le cerveau se rapproche évidemmentde ce- lui des autres Antennés par la présence de toutes les dépendances nerveuses des antennes, qui n'existent pas chez les Arachnides où ces appendices font défaut. Mais, d'autre part, le ganglion mandi- bulaire, totalement sous-æsophagien chez les Myriapodes et les In- sectes, est ici sus-æsophagien comme chez les Arachnides, et il existe, dans la région dorsale et postérieuredu ganglion céphalique, un organe tout à fait comparable à l’organestratifié de ces derniers. Le cerveau du Péripate semble s’écarter de celui des autres Tra- chéates par l’absence du tritocérébron (ganglion du segment des secondes antennes des Crustacés), mais on peut considérer la région où prennent naissance les deux nerfs viscéraux, homologues des racines du stomato-gastrique, comme l’homolooue du tritocéré- bron. Il est vrai que c’est là une simple hypothèse, puisqu'il ne part de cette région aucune autre branche nerveuse pouvant appuyer cette opinion. La difficulté que l’on éprouve à délimiter les régions protocéré- brale et deutocérébrale, surtout une région tritocérébrale, dans le ganglion céphalique du Péripate, peut être invoquée comme une preuve en faveur de l'opinion qui regarde la région céphalique pré-buccale comme ayant constitué primitivement un segment unique, dans lequel des segments secondaires non absolument ho- molooues aux autres seoments du corps, se seraient différenciés ultérieurement. Chez le Péripate par conséquent, les deux pre- mières régions céphaliques seraient encore confondues assez inti- au d'‘hors, ayant la forme d'une sphère aplatie et incomplète d'environ 55 # de diamètre, dont le tiers inférieur serait supprimé pour la faire communiquer avec l'écorce cérébrale. Cette cavité est occupée par des noyaux fusiformes, très serrés. En raison de la chute très facile du névrilemme, nous n'avons pu observer cette | cavité que sur nos coupes sagittales ; mais comme elle existait symétriquement des deux côtés, on ne peut la considérer comme une production artificielle. 254 G. SAINT REMY. mement pourn’avoir pas pris déjà tous les caractères des zoonites; la troisième même n'aurait pas encore apparu. Une conséquence forcée de cette manière de voir, c'est que les Arachnides, chez les- quels le deuxième segment céphalique des Arthropodes antennés n’existe pas, mais qui possèdent un segment homologue au troi- sième segment céphalique de ces derniers, ne peuvent être regardés comme les descendants directs des Onychophores. L’existence d’un organe identique (organe stratifié postérieur, bourrelet dor- sal) chez les Aranéides et les Onychophores, s’explique fort bien, tout en admettant que les premiers ne sont pas les descendants des seconds, car on peut les considérer comme deux rameaux diver- gents issus d’une souche commune plus ancienne, qui possédait ce même organe, mais n'avait pas encore d’antennes et chez laquelle le troisième segment: céphalique n’existait qu’en puissance. On a même proposé, du reste, de regarder les Onychophores, non pas comme la souche générale des Arthropodes Trachéates, mais comme une branche divergente de ce groupe, dans laquelle cer- tains caractères primitifs se sont mieux conservés. Nous n’avons pas à discuter les rapports de parenté du Péripate avec les Myria- podes et les Insectes, les faits tirés de l'étude du cerveau ne s’op- posant nullement à ce qu’on le regarde comme leur ancêtre direct. CONCLUSIONS GÉNÉRALES. Nous résumerons de la façon suivante les faits les plus intéres- sants qui ressortent de cette étude (1). 1. — Le cerveau des Myriapodes a la même constitution que celui des [Insectes ; il comprend trois ganglions identiques à ceux {1) On trouvera un résumé succinct des faits et des conclusions particulières qui précèdent, dans une note préliminaire que nous avons publiée, pour prendre date: Sur la structure du cerveau chez les Myriapodes et les Arachnides. (Revue biologique du Nord de la France, T. 1, n°8, et T. 11, n° 2, 1889.) CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 255 dont Viallanes a montré l'existence dans le cerveau de l’Insecte. Par conséquent, il existe dans la tête des Myriapodes trois zoonites pré-buccaux, homologues aux trois zoonites pré-buccaux des Insectes et des Crustacés. De même que chez les Insectes, le troi- sième zoonite ne porte pas d’appendices ; la lèvre supérieure des Myriapodes correspond à la lèvre supérieure des Insectes et des Crustacés. 2. — Chez les Arachnides, le cerveau comprend également trois régions ganglionnaires correspondant à trois zoonites ; mais les deux premières seules sont pré-bnccales ; la troisième (ganglion des mandibules) est post-buccale, comme on le sait depuis long- temps. Les deux ganglions pré-buccaux et leurs zoonites corres- pondent respectivement au premier et au troisième ganglions du cerveau des Insectes, des Myriapodes et des Crustacés, et à leurs zoonites ; on ne trouve pas trace du deuxième ganglion cérébral de ces derniers, ce qui implique l'absence du deuxième zoonite céphalique ou zoonite des premières antennes des Crustacés, des antennes des Insectes et des Myriapodes. 3. —Chez le Péripate, le cerveau se laisse moins nettement divi- ser en segments, que chez les autres Trachéates; ilcomprend mani- festement deux régions : la région postérieure (ganglion des man- dibules) est formée par le ganglion du premier zoonite post-buccal, comme l’ont montré l’anatomie et l’embryologie ; la région anté- rieure seule est pré-buccale : elle correspond sûrementaux pre- mier et deuxième ganglions cérébraux des Insectes, des Myria- podes et des Crustacés, et sa partie postérieure est probablement l’homologue du troisième ganglion cérébral de ces groupes. 4. — La racine du nerf viscéral impair (pont stomato-castrique) des Myriapodes, les nerfs viscéraux pairs des Aranéides et du Péripate, paraissent avoir la même valeur morphologique, et correspondent aux racines du nerf viscéral impair des Insectes et des Crustacés. 5.— Chez tous les Trachéates pourvus d’yeux, le premier gan- 250! G. SAINT REMY. glion cérébral présente un appareil différencié plus ou moins com- pliqué (lobe optique) interposé entre les régions plus profondes et la rétine, et paraissant destiné à l'élaboration des perceptions visuelles. La structure de cet appareil n’est pas forcément partout la même pour une même forme d’yeux, et ses modifications doivent avoir une influence considérable sur les phénomèmes de la vision, la structure même de l'œil n'ayant qu’une importance beaucoup moindre. — Les autres parties du premier ganglion cérébral sont en relation avec les fonctions psychiques, et non pas uniquement avec la fonction visuelle. — La structure de ces régions a été trop profondément influencée par leur rôle physiologique, pour qu’elle soit toujours comparable dans les différents groupes. Nancy, septembre 1889. Hs ren. Aufriallé du 0 “om ch D nt A Si LE TT de VTC le TT : “à nr) te % hr ei Eee he ans die RÉ) te do de PNA PTE nr NP 2 - ; CARE RENE FRE DD BTE EXPLICATION DES PLANCHES. Les fiqures qui ne portent pas d'indication spéciale proviennent de coupes traitées à l'acide osmique. MYRIAPODES. LETTRES COMMUNES AUX PL. I-V. c. a. Commissure deutocérébrale ou c. antennaire. c. L commissure des lobes optiques. c.æs. commissure œsophagienne. gl. glomérules olfactifs. L.a. lobe antennaire. L. f. lobe frontal. L.t. lobe tritocérébral. n. a nerf antennaire. n. l. nerf de la lèvre supérieure. n. o. nerf optique. s. nerf stomato-gastrique. T. nerf de Toômôüsvary. v. nerf viscéral pair. : pont stomato-gastrique. £ c. tissu conjonctif. dre trachée. PLANCHE I. Iulus L. F1G. 1. — Coupe pratiquée suivant un plan intermédiaire au plan horizontal et au plan transversal, — I. sabulosus L.— Gr. 85 diam. — c. olf. i. commissure olfactive inférieure; — c. olf. m. commissure ol- factive moyenne; — m. g. a. masse ganglionnaire antérieure du lobe antennaire ; — m. g.e. masse ganglionnaire externe; — m. g. i. masse ganglionnaire interne. F1G. 2. — Même série ; même Gr. — c. olf. s., commissure olfactive supérieure ; — f. 0. 0. faisceau optico-olfactif direct ; — f. 0. o’. fais- ARCH. DE ZOOL. EXP.ET GÉN. — 2° SÉRIE. — T. V bis, — supp, 1887. — 1* Mém. 17 258 G. SAINT REMY. ceau optico-olfactif croisé. — Les autres lettres comme dans la he. 1: F1G. 3. — Même série; même Gr. — c., faisceau de fibres d'origine inconnue; — €. a commissure antennaire; — c. |. commissure des lobes optiques; — c. L. f. commissure reliant les lobes frontaux ; — L. olf. lobule olfactif; — n. a. m. nerf antennaire moteur ; — n. a. olf. nerf antennaire sensoriel. F1G. 4. — Même série; même Gr. F1G. 5. — Même série ; même Gr. —n. a. m. nerf antennaire mo- teur ; — n. a. olf. nerf antennaire sensoriel. F1&. 6. — Coupe horizontale du lobe optique. — I.sabulosus L. — Gr. 100 d. — f. 1. fibres partant de la masse médullaire du lobe opti- que pour former un faisceau commissural ;— f.o. couche des fibrilles optiques; — fsc. o. couche des faisceaux optiques; — 1. g. lame gan- glionnaire ; — m. m. |. masse médullaire du lobe optique ; — m.g. L. masse ganglionnaire du lobe optique; — n.0. nerfs optiques. F1G. 7. — Coupe presque horizontale. — I. sabulosus L. — Gr. 85 d. —f. faisceau allant de la commissure œsophagienne au lobe frontal de l’autre côté ; — f. a. m. faisceau allant au faisceau antennaire com- missural ; — f. e. faisceau externe allant du lobe frontal à la com- missure œsophagienne; — f. i. faisceau interne ayant les mêmes rela- tions; — m. g. e. masse ganglionnaire externe; — m. g. i. masse gan- glionnaire interne. FIG. 8. — Même série; même Gr. — f.a.c. faisceau antennaire commissural ; — f. a. m. faisceau venant de la commissure œsopha- gienne, et destiné au faisceau antennaire commissural. — Les autres lettres comme dans la fig. 7. F1G. 9. — Coupe sagittale passant vers l’union du tiers interne avec le tiers moyen du cerveau. — I. sabulosus L. — Gr. 85 d. — c. of. commissures olfactives ; — m. g. i. masse ganglionnaire interne. F1G. 10. — Coupe horizontale des commissures œsophagiennes. — I. maritimus. — Gr. 80 d. — c. tr. commissure transverse de l’anneau œsophagien (comm. tritocérébrale); — g. æs. ganglion œsophagien. F1G. 11.— Scolopendra morsitans Gerv. — Coupe transversale de là commissure œsophagienne. — Gr. 165 d. PLANCHE II. Glomeris Latr. Fi. 12. — Coupe pratiquée suivant un plan intermédiaire au RU “4 horizontal et au plan transversal. — GI. hexasticha Brdt. — Gr. 93 d. — L.olf. section du bord supérieur du lobule olfactif, présentant des glomérules olfactifs ; — m. g. l. masse ganglionnaire de l'organe fron- tal; — m. g. l. masse ganglionnaire du lobe optique; — m1. m. I. section de la partie antéro- -supérieure dela masse médullaire du lobe optique. EAP" . RP ER PS PRE NT SU Le Sn T2 n] " 2m, y 'NTe Mrale st EN ES ES à a Y2 bte HS LIRE CP Era 505, ( CA y Le + Les TEA a A EN ME SEX “ \ 4 CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 259 F1G. 13. — Même série. — Coupe du lobe optique (L. o.) et du lo- buleolfactif (1. olf.) — Gr. 107 d. —Les lettres comme dans la fig. 12. F1G. 14. — Coupe pratiquée suivant une direction un peu inclinée sur le plan horizontal. — GI. plumbea Gerv. — Gr. 93 d. — 0. f. or- gane frontal; — m. e. sa masse médullaire externe; — mm. m. sa masse médullaire moyenne ; — m.i. sa masse médullaire interne. — Les autres lettres comme dans la fig. 12. F1G. 15. — Même série. — Coupe passant par le pont stomato-gas- trique (P.) — Gr. 93 d. F1G. 16. — Coupe à peu près transversale. — GI. hexasticha Brdt. — Gr. 93 d.— 1. olf. lobule olfactif. F1G. 17. — Coupe sagittale passant par l’extrémité externe du lobe frontal (L. f.) — Gl.castanea Risso. — Gr. 93 d.— o. f. organe frontal ; — m. e. sa masse médullaire externe ; — m. m. sa masse médullaire moyenne ; — m.g. f. Sa masse ganglionnaire. F1G. 18. — Même série; même Gr. — L. i. lame intermédiaire entre la masse moyenne et la masse interne de l'organe frontal ; — L. olf. olfactif. F1G. 419. — Même série; même Gr.; mêmes lettres. F1G. 20. — Coupe menée suivant un plan intermédiaire au plan horizontal et au plan transversal. — Gl. hexasticha Brdt. — Gr. 200 d. __— c. tr. commissure transverse de l'anneau œsophagien; — g. æs. ganglion œsophagien ; — n. nerf émis par ce ganglion. Scutigera coleoptrata L. F1G. 21. — Coupe horizontale du lobe optique. — Gr. 200 d. — c.a. capsule antérieure de la masse médullaire, — c. p. capsule posté rieure; — c. o. cordons optiques; — f. ch. fibrilles chiasmatiques ; — f. p. r. fibres post-rétiniennes ; — L. g. lameganglionnaire ; — lg. c. sa couche externe cellulaire; — !g. m. sa couche interne médullaire ; -- m. muscles coupés obliquement; — m. b. membrane basale, ou limitante, de l’œil composé, chargée de pigment ; — m. g. e. masse ganglionnaire externe de l'organe pédonculé; — m. g. l. masse gan glionnaire antérieure du lobe optique ; — n. noyau conjonctif ; — nv, névrilemme;— nv’. prolongement du névrilemme s'interposant entre la masse médullaire et la partie externe du chiasma; — y. yeux élé- DAT (la base de quelques-uns seulement a été figurée). F1G. 22. — Coupe horizontale du pont stomato-gastrique (P.). Gr. 93 + — L. a. section du lobe antennaire présentant des rubans olfactifs coupés obliquement (r. olf.). F1G. 23. — Coupe sagittale passant par le pont stomato-gastrique (P.) et le nerf stomato-gastrique (n. s.); — Gr. 93 d. — n. petit nerf émis par le nerf stomato-gastrique ; — n. p. petit nerf émis par le pont; — c. g. cellules ganglionnaires. LV TIR 260 G. SAINT REMY. PLANCHE III. Scutigera coleoptrata (suite). LETTRES COMMUNES : m. g.e. masse ganglionnaire externe de l'organe pédonculé. m.g.i. masse ganglionnaire interne du même organe. m.g.m. masse ganglionnaire moyenne du même organe. m. m. c. masse médullaire commune. p.a. pédoncule antérieur. p.p. pédoncule postérieur. le, tige externe. Lt tubercule interne. v. vaisseau. FiG. 24. — Coupe transversale passant par la région antérieure du cerveau. — Gr. 74 d. — gq. c. g. grande cellule ganglionnaire ; — l. m.lame médullaire de l’organe ganglionnaire antéro-interne. . F1G. 25. — Coupe horizontale passant par la partie supérieure du protocérébron. — Gr. 74 d. F1G. 26. — Même série ; même Gr. — c. 0. extrémité de l’un des cor- - dons optiques ; — f. m. fibres émises par la masse ganglionnaire ex- terne (m. g. e.) et se portant à la tige externe. F1G. 27. — Même série. Coupe passant par la région moyenne du protocérébron. Même Gr. — c. a. commissure antennaire ; c. lL. commissure des lobes optiques; — o. f. vestiges de l’organe fron- tal ; — pl. g. plaque ganglionnaire de l’organe ganglionnaire antéro- interne. F1G. 28. — Coupe horizontale passant par la partie inférieure du protocérébron. — Gr. 74 d. — f. f. a. fibres allant du lobe frontal au lobe antennaire. Les autres lettres comme dans la fig. 27. Fic. 29. — Coupe pratiquée suivant une direction presque hori- zontale un peu inclinée d'avant en arrière et de bas en haut (région inférieure du protocérébron). — Gr. 74 d. — c. commissure réunissant deux régions de structure un peu différenciée ; — c. L. commissure des lobes optiques; — f. L. fibres nerveuses étendues entre les deux lobes optiques suivant le bord postérieur du protocérébron ; — f. æs. coupe transversale d'une masse fibreuse allant à la commissure œso- phagienne ; — m. g. l. masse ganglionnaire du lobe optique. FiG. 30. — Coupe sagittale passant par le milieu du lobe frontal. Gr. 74 d. — m. l. masse lamelleuse; — r. olf. coupes transversales des rubans olfactifs. FIG, 31. — Même série; coupe passant un peu en dedans de celle représentée fig. 29. Même Gr. — pl. g. plaque ganglionnaire de l'or- gane ganglionnaire antéro-interne. F1G. 32. — Coupe sagittale passant vers l’union dutiers externe du Et ne (2 En ue € Es à. Ti ER nn lee D SEAL ES F : *. " EN CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 264 lobe frontal avec le tiers moyen. — Gr. 14 d. — 1. f. m. fibres émises par la masse ganglionnaire moyenne {m. g. m.) et se portant à la tige externe (#. e.); — o. f. vestiges de l'organe frontal. Fig. 33. — Coupe transversale passant par le tiers postérieur du cerveau. — Gr. 14 d. — c. a. commissure antennaire; —f. fibres émises par l’écorce du lobe frontal, et allant dans le lobe antennaire (L. a.); — g. t. gros tube nerveux ; — m. L. masse lamelleuse du lobe antennaire ; — n. a. origine du nerf antennaire; — r, olf. rubans ol- factifs. PLANCHE IV. Scutigera coleoptrata L. (fin). F1G. 34. — Coupe transversale un peu oblique, passant par la par- tie postérieure du cerveau vers l'origine des commissures œsopha- giennes (les deux nerfs de la lèvre supérieure, n. L., ne se montrent ensemble que parce que la coupe est légèrement oblique). — Gr. 14 d. FiG. 35. — Même série ; coupe transversale des commissures œso- phagiennes au niveau de leur commissure transverse {(commissure tritocérébrale, c. tr.) Gr. 14 d. — n. nerf émis par le prolongement du lobe tritocérébral. F1G. 36. — Coupe sagittale, fortement grossie, de la partie supé- rieure de la plaque ganglionnaire de l'organe ganglionnaire antéro- interne. —Gr. 400 d.— c. g. petite cellule ganglionnaire à protoplasma abondant; — n.g. noyaux ganglionnaires ; —nvu. névrilemme présen- tant à sa face interne un noyau conjonctif;, — pl. q. plaque gan- glionnaire; — p. p. pédoncule postérieur ; — pr. protoplasma fonda- mental commun ; — s. p. substance ponctuée du lobe frontal. Lithobius forficatus L. LETTRES COMMUNES AUX FIG. 37-46 : c. e. cordon externe; — c.i. cordon interne ; — m. g. e. masse ganglionnaire externe de l'organe lobulé. F1G. 37. — Coupe horizontale de la partie supérieure du lobe fror- tal gauche (L. f.) montrant le cordon externe (c. e.), et ses rapports avec la masse ganglionnaire externe (m. g. e.) — Gr. 74 d. F1G. 38. — Même série ; même Gr. — m. !. masse lobulée; — b. m. balle médullaire médiane ; — 0. f. vestiges de l'organe frontal ; — 1. c. tissu conjonctif dont l'épaisseur à été exagérée par l’écar- tement léger du névrilemme sous l'influence des réactifs. 262 G. SAINT REMY. F1G. 39. — Même série ; même Gr. — Coupe passant par les lobes antennaires (L. a.). — gl. glomérules olfactifs. F1G. 40. — Même série; même Gr. — Coupe passant par le pont stomato-gastrique (P.). F1G. 41. — Même série. Coupe montrant le lobe optique dans pres- que toute son étendue. — Gr. 135 d. — c. g. cellules ganglionnaires ; — c. |. commissure des lobes optiques vers son origine ; — f. L. faisceau de fibres commissurales s'étendant entre les deux lobes optiques, le long du bord postérieur du cerveau ; — m. m. L. masse médullaire du lobe optique. F1G. 42. — Coupe sagittale passant vers l'union du tiers interne du cerveau avec le tiers moyen. — Gr. T4 d. — in. 1. masse lobulée : — c.i. point de réunion de deux prolongements émis par deux balles de cette masse, dont l'antérieure est seule visiblesur la coupe : c’est le point d'origine du cordon interne ; — m. f. coupe transversale de la masse fibreuse du lobe antennaire ; — f. groupe de fibres se por- tant de la région antérieure du lobe antennaire à la commissure œso- phagienne. F1G. 43. — Coupe transversale un peu oblique de la région moyenne du cerveau. — Gr. 74 d. — m. l. masse lobulée ; — m. f. masse fibreuse du lobe antennaire ; — n. v. nerf viscéral pair. — n. s. nerf stomato-gastrique émettant un petit nerf par sa face supérieure. F1G. 44. — Même série. Coupe passant un peu en arrière de celle réprésentée dans la fig. 43 ; même Gr. — c. a. commissure anten- naire ; — m.f. masse: fibreuse du lobe antennaire ; — c. à’. branche antérieure-ducordon médullaire interne se réunissant à son homo- logue du côté‘opposé ; — c. à”. branche postérieure de ce cordon. F1G. 45. — Coupe transversale oblique sur le plan vertical trans- versal, de telle sorte que, dans sa partie supérieure, elle passe un peu en arrière des coupes représentées dans les fig. 43 et 44, tandis que, dans sa partie inférieure, elle passe un peu en avant d'elles. — Gr. 74 d.— b. m. balle médullaire médiane (face antérieure); — c. à’., c. à”. branches antérieure et postérieure du cordon interne ; — c. a. com- missure antennaire ; — c. {. commissure tritocérébrale; — m. f. ré- gion moyenne de la masse fibreuse du lobe antennaire. F1G. 46. — Coupe transversale des commissures œsophagiennes vers le milieu de leur longueur. — Gr. 158 d. — L. t. cordon prolongeant le lobe tritocérébral ; — c. g. cellules ganglionnaires qui accompa-. gnent ce cordon. mo tn me. ELLES Si de amer hate dé ‘| PTE SE HOT ET vers + DR LE 7 eh si + ns Rte tt ; La Lge LU 0, CERVEAU DES ARTHROPODES TRACH£ATES. 263 PLANCHE V. Scolopendra morsitans Gerv. LETTRES COMMUNES : b. i. balle médullaire interne de l'organe lobulé ; — c. e. son cordon externe; — c. à. son cordon interne ; — m. g. e. masse gan- glionnaire externe du même organe. F1G. 47. — Portion d’une coupe sagittale passant par la masse lobu” lée (m. L.), et montrant la structure du cordon interne {c. i.) à son origine. — Liq. picro-sulf, — Gr. 80 d. F1G. 48. — Coupe horizontale passant par la région supérieure du protocérébron. — Alcool. — Gr. 40 d. — b.i. balle médullaire interne. F1G. 49. — Même série. Coupe horizontale passant par la région moyenne du protocérébron et par la partie supérieure du deutocé- rébron. Même Gr. — L. e. lame externe du lobe optique; — p. son pédoncule. Fire. 50. —- Même série. Coupe passant par le tiers inférieur du deutocérébron. — Même Gr. —- m. f. masse fibreuse. F1G. 51. — Même série. Coupe passant par la partie inférieure du cerveau. Même Gr. F1G. 52. — Coupe transversale passant par la région moyenne du cerveau. — Alcool. — Gr. 45 d. — f. petit faisceau de fibrilles d’ori- gine inconnue ; — m. l. masse lobulée ; — P. face antérieure du pont stomato-gastrique ; — int.intervalle libre compris entre le pont sto- mato-gastrique et la région moyenne du cerveau. F1G. 53. — Même série ; même Gr. — f. fibres allant de l'écorce du lobe frontal au lobe RÉ SUAEER ; — b. i. balle médullaire interne. Fi. 54. — Même série ; même Gr. — c. a. commissure antennaire ; — n. 0. un des nerfs optiques. FiG. 55. — Même série ; même Gr. — I. c. lame centrale ; — L. t. lobe tritocérébral peu distinct. FIG. 56. — Même série ; même Gr. — c. t. commissure tritocéré- brale ; — m. f. masse D Éreuse FIG. 57. — Portion d'une coupe transversale passant par la masse lobulée (m. L.), et montrant l'insertion du cordon externe (c. e.) et du cordon interne (c. i.).— Liq. picro-sulf. — Gr. 80 d. — n. v. névri- lemme recouvert par une fine lamelle de tissu conjonctif extérieur au cerveau. né Fig. 58. — Coupe sagittale passant vers l’union du tiers interne avec le tiers moyen du cerveau. — Alcool. — Gr. 45 d. — a. et b. cor- . dons fibreux allant du lobe frontal au lobe antennaire; — m. |. masse lobulée. 264 G. SAINT REMY. PLANCHE VI. Cryptops Leach. Fie. 59. — Coupe horizontale passant par la partie moyenne du cerveau (comp. avec fig. 49). — Gr. 74 d. — o. f. vestiges de l'organe frontal. F1G. 60. — Coupetransversale oblique passant parla partie moyenne du cerveau. — Gr. 74 d. — m. g. e. masse ganglionnaire externe ; — c. e. cordon externe. Geophilus Leach. F1G. 61. — Coupe horizontale passant par le protocérébron. — Gr. 160 d. F1G. 62. — Même série. Coupe passant par la partie moyenne du deutocérébron, et la partie supérieure de l’origine des commissures œsophagiennes. — Même Gr. F1G. 63. — Même série. Coupe passant par la partie inférieure du deutocérébron, montrant les traînées médullaires olfactives. — Même Gr. FiG. 64. — Même série. — Coupe passant près de la face inférieure du cerveau, et rasant le tritocérébron (L. t.). — Même Gr. F1G. 65. — Coupe horizontale passant par le deutocérébron et la face inférieure du protocérébron, et montrant l'espace canaliculaire (int.) qui sépare le protocérébron (L. f.) de la partie soudée des lobes antennaires (L. a.). — Gr. 160 d. — c. a. commissure antennaire ; —. m. f. masse fibreuse du lobe antennaire. F1G. 66. — Coupe transversale passant par la région antérieure des lobes antennaires soudés ensemble. — Gr. 160 d. — n. v. nerf viscé- ral pair. F1G. 67. — Coupe transversale passant par le tiers postérieur du cerveau, et montrant le tritocérébron (L. t.). — Gr. 460 d. — m. fr masse fibreuse. F1G. 68. — Même série. Coupe passant par l’extrémité postérieure du cerveau, et montrant l'origine des commissures œsophagiennes et l'extrémité postérieure de l’espace canaliculaire (int.).— Gr. 460 d. — n. T. nerf de Tômôsvary. F1G. 69. — Coupe sagittale montrant ie extrémité antérieure de l'es- pace canaliculaire (int.). — Gr. 160 d. FiG. 70. — Epeira diadema L. — Coupe longitudinale du nerf man- dibulaire montrant le ganglion qu’il renferme. — Gr. 135 d. she "e : + FE. GP $ FETE 2e) - E, . à ‘4: PAS D 27e RTE : f 2 \ JE LE de EU PAUSE NS ” - ès NPC AT ENANOER PER ETES CÉRÉCERRERAUEREA PR TROP TN RS % ke E) ” =. ©: L2 (2) CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 265 ARACHNIDES. Lycosa narbonensis Walck. LETTRES COMMUNES AUX PL. VII ET VIII : grande cellule ganglionnaire. commissure postérieure des lobules optiques inférieurs. commissure principale des lobes cérébraux. commissure transverse des masses médullaires inférieures. commissure transverse des masses médullaires supérieures. couche fibrillaire antérieure du lobule optique inférieur. couche fibrillaire postérieure du lobule optique inférieur. couche fibrillaire du lobule optique supérieur. ganglion rostro-mandibulaire. lame glomérulée du lobule inférieur. lame médullaire inférieure. . segment inférieur de la lame médullaire inférieure. lame médullaire supérieure. lame principale du segment antérieur de l’organe stratifié. lame accessoire du segment antérieur de l’organe stratifié. lobe cérébral. lobe mandibulaire. lobule optique inférieur. . lobule optique supérieur. lobe rostral. . masse médullaire inférieure {lobule optique inférieur). . masse médullaire supérieure (lobule optique supérieur). nerf mandibulaire. . nerf optique inférieur. . brauche inférieure du nerf optique inférieur, destinée à j’œil latéral antérieur. . nerf optique supérieur. nerf rostral. nerf viscéral. œsophage. pédoncule de la masse médullaire inférieure. ganglion des pédipalpes. sesment antérieur de l'organe stratifié. segment postérieur de l’organe stratifié, organe stratifié postérieur. tête de la masse médullaire inférieure vaisseau. ’ Gr. unique {excepté fig. 85) — 66 d. 266 G. SAINT REMY. PLANCHE VII. F1G. T1. — Coupe horizontale passant par la partie supéro-posté- rieure du cerveau. F1G. 12. — Même série. Coupe passant par la partie supérieure du lobe optique. F1G. 73. — Même série. — Coupe passant par la partie moyenne : des segments supérieurs de la lame médullaire et de la lame glomé- rulée du lobule optique inférieur. F1G. 74. — Même série. Coupe passant par la région moyenne du lobe optique et montrant la partie supérieure du segment moyen de la lame médullaire, et la partie supérieure de la masse médullaire du lobule inférieur. F1G. 75. — Même série. Coupe passant par le milieu du segment moyen de la lame médullaire inférieure, et par la partie moyenne de la masse médullaire inférieure. F1G. 76. — Même série. Coupe passant par la partie inférieure du lobule optique inférieur. F1G. 77. — Même série. Coupe passant par la partie inférieure du ganglion rostro-mandibulaire. F1G. 78. — Coupe transversale passant parl’extrémité antérieure du lobe optique (lobule inférieur). PLANCHE VIIL F1G. 79. — Coupe transversale (même série que la coupe réprésen- tée fig. 78) passant par le lobe optique, vers l'union du tiers anté- rieur avec le tiers moyen. , F1G. 80. — Même série. Coupe passant par le lobe optique, vers l’union du tiers moyen avec le tiers postérieur. F1G. 81. — Même série. Coupe passant par le milieu du tiers posté- rieur du lobe optique. F1G. 82. — Même série. Coupe passant par la base du lobe optique. F1G. 83. — Même série. Coupe passant par le tiersantérieur du gan- glion optique et larégion antérieure du ganglion rostro-mandibulaire. FIG. 84. — Même série. Coupe passant par l'organe stratifié posté- rieur. F1G. 85. — Même série. Coupe passant par le tiers antérieur de la lame des nerfs optiques. — Gr. 74 d. F1G. 86. — Coupe sagittale passant vers l'union du tiers externe avec le tiers moyen du cerveau. F1G. 87. — Même série. Coupe passant un peu en dedans de la précédente. FIG. 88. — Même série. Coupe voisine du plan médian. 4 war CUS RS se " he + ST © S = | CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 267 LETTRES COMMUNES AUX PLANCHES IX-XII (SAUF LES FIG. 89 ET 90): c. m.i. couche médullaire inférieure (lobule optique inférieur). €. m.s. couche médull. supér. (lobule optique supér.). c.p.r. commissure principale des lobes cérébraux. c. tr. i. commiss. transverse des masses médullaires inférieures. fi couche fibrillaire du lobule optique inférieur. Ts. couche fibrill. du lobule optique supérieur (pédoncule). G.rm. ganglion rostro-mandibulaire. d. s.a. lame principale du segment antérieur de l'organe stratifié. d'.s. a. lame accessoire du segment antérieur de l'organe stratifié. s . G. o. lobe cérébral. à lobe mandibulaire. i. lobule optique inférieur. .s. lobule optique supérieur. r lobe rostral. m.m.i. masse médullaire inférieure (lobule optique inférieur). m. m.s. masse médullaire supérieure (lobule optique supérieur). n. M. nerf mandibulaire. n.o.i. nerf optique inférieur. n.o.s. nerf optique supérieur, n.Tr. nerf rostral. EU: nerf viscéral. -®S. œsophage. D. pédoncule de la masse médullaire inférieure. #4. segment antérieur de l'organe stratifié. SR: segment latéral de la commissure transverse des masses médullaires inférieures. s. M. segment moyen de la même commissure. STE segment postérieur de l'organe stratifié. str. organe stratifié postérieur. Æ: €. tissu conjonctif. dr. trachée. ®. vaisseau. PLANCHE IX. | Thomisus citreus Geoffr. Mèmes lettres que pour Lycosa. Fi1G. 89. — Coupe horizontale passant par le tiers inférieur du lobe optique. — Gr. 90 d. F1G. 90. — Coupe horizontale montrant la commissure transverse des masses médullaires inférieures. — Gr. 135 d. 268 G. SAINT REMY. Epeira sericea Walck. Fig. 91. — Coupe sagittale passant par le tiers externe du cerveau. — Gr. 90 d. F1G. 92. — Tissu conjonctif périphérique (portion d'une coupe hori- zontale passant un peu au-dessus du niveau de la coupe représentée fig. 94). — Gr. 200 d. FIG. 93. — Coupe horizontale passant par la partie supérieure du cerveau et montrant le lobule optique supérieur. — Gr. 90 d. F1G. 94. — Même série. Coupe passant par le tiers supérieur du lobule optique inférieur. — Même Gr. F1G. 95. — Même série. Coupe passant par la partie inférieure du lobe optique. — Même Gr. F1G. 96. — Même série. Coupe passant par la partie inférieure du ganglion rostro-mandibulaire. — Même Gr. Epeira diadema L. F1G. 97. — Coupe transversale passant par la partie postérieure du cerveau et montrant l’organe stratifié. — Gr. 93 d. PLANCHE X. Epeira diadema L. (suite). F1G. 98. — Coupe sagittale passant par la partie moyenne du lobe optique. — Gr. 74 d. — (Individu plus gros que ceux qui ont fourni les autres figures.) F1G. 99. — Coupe horizontale passant par le lobule optique supé- rieur. — Gr. 93 d. F1G. 100. — Même série. Coupe passant par le milieu du lobule optique inférieur. — Même Gr. F1G. 101. — Même série. Coupe passant par le tiers inférieur du lobule optique inférieur, et montrant le segment moyen (s. m.) de la commissure transverse des masses médullaires inférieures. — Même Gr. F1G. 102. — Même série. Coupe un peu inférieure à la précédente et montrant les segments latéraux de la même commissure. — Même Gr. | Pholcus phalangioides Walck. F1G. 103. — Coupe horizontale passant par le milieu du lobule optiqueinférieur. — Gr. 93 d. | F1G. 404. — Même série. Coupe passant par la commissure transverse des masses médullaires inférieures. — Même Gr. PEL” à ». — t +} 14e Et à 7 sai Pr KE LR + r ’ ” CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 269 F1G. 105. — Coupe horizontale passant par le lobule optique supé- rieur. — Gr. 93 d. F1G. 106. — Coupe sagittale passant par le tiers externe du cer- veau. — Gr. 93 d. Eresus cinnaberinus Walck. F1G. 107. — Coupe menée parallèlement à l’axe du lobe optique (lobule inférieur). — Gr. 93 d.— 1. m. i. lame médullaire inférieure; — m. s. a. segment antérieur de la masse médullaire inférieure ; — m. 8. p. son segment postérieur. F1G. 108. — Coupe horizontale montrant la partie moyenne de la commissure transverse des masses médullaires inférieures. — Gr: 99 d. PLANCHE XI. Tegenaria domestica L. F1G. 109. — Coupe horizontale passant par le lobule optique supé- rieur. — Gr. 74 d. F1G. 110. — Même série. Coupe passant par le milieu du lobule optique inférieur. — Même Gr. F1G. 111. — Même série. Coupe montrant une partie de la commis- sure transverse des masses médullaires inférieures. — Même Gr. F1G. 112. — Coupe sagittale passant par l'extrémité antérieure du lobule optique supérieur. — Gr. 74 d. Segestria perfida Walck. F1G. 113. — Coupe horizontale passant par la partie supérieure du cerveau. — Gr. 74 d. Fi1G. 114. — Même série. Coupe passant par le tiers supérieur du cerveau. — Même Gr.— c. s. commissure supérieure des lobes céré- braux. F1G. 115. — Même série. Coupe passant par la commissure trans- verse des masses médullaires inférieures. — Même Gr. F1G. 116. — Même série. Coupe passant par le point de sortie des nerfs mandibulaires et du nerf rostral. — Même Gr. Drassus Walck. F1. 117. — Coupe oblique sur le plan horizontal, montrant à la fois une partie du lobule optique supérieur et une partie du lobule inférieur. — Gr. 14 d. F16. 118. — Même série. Coupe passant par la partie moyenne de ù fe LEP NT SANTO 270 G. SAINT REMY. la commissure transverse des masses médullaires inférieures. — Même Gr. Phalangium opilio. L. F1G. 119. — Coupe sagittale voisine du plan médian. — Gr. 74 d. — m.g.a. masse ganglionnaire antérieure ; — m. l. masse lobulée; — str. organe stratifié postérieur ; — s. segment supérieur ; — i. son segment inférieur; — t. c. tissu conjonctif dissocié par l’action des. réactifs. F1G. 120. — Coupe horizontale sectionnant transversalement le- lobe optique vers le milieu de sa longueur. — Gr. 93 d. — ch. couche des fibrilles chiasmatiques; — f. m. i. couche fibro-médullaire infé—- rieure. PLANCHE XII. Phalangium opilio L. (suite). \ Fig. 121. — Coupe horizontale passant au-dessous de la base des: lobes optiques. — Gr. 93 d. — c. s. commissure supérieure des lobes : cérébraux. Fig. 122. — Même série. — Coupe passant par l’organe lobulé. — Même Gr. — c. fibrilles commissurales; — m. g. a. masse ganglion- naire antérieure ; — m. l. masse lobulée ; — p. pédoncule de l’organe- lobulé. F1G. 123. — Coupe horizontale passant par la partie supérieure dw lobe rostral. — Gr. 74 d. F1G. 124. — Même série. — Coupe montrant l’origine des nerfs man- dibulaires. — Même Gr. — c. commissure centrale; — f. faisceau de: fibres venant de la masse œsophagienne; — {.gl. lobule glomérulé. Fig. 125. — Même série. — Coupe montrant le iobe mandibulaïre.… — Même Gr. F1G. 126. — Même série. — Coupe passant par les pédoncules céré- braux. — Même Gr. — f. faisceau de fibres venant de la masse sous- œsophagienne. F1G. 127. — Coupe transversale passant par la région antérieure du cerveau et montrant les organes lobulés. — Gr. 93d. — m. g. a. masse ganglionnaire antérieure; — mn. L. masse lobulée ; — p. pédoncule de l'organe lobulé. F1G. 128. — Même série. — Coupe passant par l’extrémité antérieure: de l'organe stratifié. — Même Gr. — f. faisceau de fibrilles venant. de la masse sous-œsophagienne ; — f. m. i. couche fibro-médullaire- inférieure; — m. m. masse médullaire du lobe optique; — i. segment inférieur de l'organe stratifié, — s. segment supérieur du même organe. : FiG. 129. — Même série. — Coupe passant par la partie moyenne de- ee” 7 s : Fari , # C4 LS 4 F D LÉ (v Ma + RÉ M ct coiee d f Ee NNUT NOR ou LE METRE 3% # : %., ER A SGEN SE TR DR CR SA EU CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES. 274 l'organe stratifié. — Même Gr. — s. et i. rase supérieur et in- férieur de l’organe stratifié. F1G. 130. — Même série. — Coupe passant par l’extrémité posté- rieure de l'organe stratifié. — Même Gr. F1G. 131. — Coupe longitudinale des lobes optiques (oblique sur le plan sagittal et le plan transversal ). — Gr. 158 d. — ch. couche des fibrilles chiasmatiques ; — ch. chiasma formé par une partie des fibrilles optiques qui ne traversent pas la couche fibro-médullaire supérieure ; — f. m. i. couche"fibro-médullaire inférieure ; — PS: ALL couche fibro-médullaire supérieure ; — m. m. masse médullaire ; — n. o. nerf optique. Buthus occitanus Amorx. LETTRES COMMUNES AUX FIGURES 132-143: balle médullaire antérieure du lobule optique inférieur. balle médullaire moyenne du même. balle médullaire postérieure du même. ganglion rostro-mandibulaire. lacune sanguine. lame antérieure du segment supérieur de l'organe stratifié. lame moyenne du même. lame postérieure du même. . lobe cérébral. lobe mandibulaire. lobule optique inférieur. lobule optique supérieur. lobe rostral. . masse ganglionnaire antérieure. masse principale glomérulée du segment postérieur de l’or- gane en bissac. m.pr. masse médullaire principale de segment antérieur de l’or- gane en bissac, TS su Six as093e88s" RAT 5 RE LA ns UE MASSE USE d Q 4 ol. organe olivaire. MU région tachetée. S. sinus sanguin. set segment inférieur de l’organe stratifié. 8. S. segment supérieur du même. sir. organe stratifié postérieur. Tv. vaisseau. F1G. 132. — Coupe sagittale passant vers l’union dutiersinterne avec le tiers moyen du cerveau. Individu très jeune. — Gr. 53 d. — c. fais- ceau commissural en fer à cheval passant au-dessus des organes en bissac; — f. r.t. un des faisceaux de prolongements de la région ta- chetée, pénétrant dans l'organe en bissac. # 272 G. SAINT REMY. F1G. 133. — Même série. — Coupe passant un peu en dedans de celle représentée fig. 132. — Même Gr. — c. faisceau commissural en fer à cheval. PLANCHE XIII. Buthus occitanus Amorx. (suite). F1G. 134. — Coupe sagittale voisine du plan médian. — Gr. 53 dl. — [Même série que les coupes des Fig. 132, 133 ; même Gr.) F1G. 135. — Coupe transversale, un peu oblique, du bord postérieur du cerveau, montrant l'organe stratifié. — Individu très jeune. — Gr. 53 d. F1G. 136. — Coupe horizontale passant par la partie supérieure du cerveau. — Liq. picro-sulf. — Gr. 53 d. — b. m. s. balle médullaire supérieure (lobule optique supérieur); — f. s. pédoncule fibrillaire du lobule optique supérieur ; — n. o.s.nerf optique supérieur. Fi1G. 137. — Même série. — Coupe passant par le lobule optique infé- rieur. — Même Gr. — L. a. i. lobule antéro-interne ; — n. 0. i. nerf optique inférieur ; — p. c« pédoncule commun des lobules optiques. FiG. 138. — Même série. — Coupe passant vers l’union du tiers su- périeur du cerveau avec le tiers moyen. — Même Gr. — a. aorte; — c. l. commissure des lobes optiques; — f. pr. faisceau principal de l'organe en bissac; — L. a. i. lobule antéro-interne ; — pir. masse médullaire piriforme. F1G. 139. — Même série. Mème Gr. — acc. masse médullaire acces- soire du segment postérieur de l'organe en bissac. FIG. 140. — Même série. — Coupe passant vers le milieu du cerveau. — Gr. 38 d. — v.’ branche vasculaire accompagnant les nerfs man- dibulaires. | Fi. 141. — Même série. — Coupe montrant les lobes mandibu- laires et le lobe rostral, passant au-devant des lobes cérébraux. — Même Gr. | Fix. 442. — Même série. — Coupe passant un peu au-dessus du trou æsophagien. — Même Gr. — t. m. tractus médullaires formant deux petits arceaux commissuraux. F1G. 143. — Même série. — Coupe passant par les pédoncules céré- braux. — Même Gr. — f. c. faisceau venant de la masse sous-æsopha- gienne, et formant une commissure au-dessus du trou œsophagien. ONYCHOPHORES. Peripatus capensis Gr. F1G. 144. — Coupe horizontale sectionnant le lobe antennaire (Lie ant.) dans une grande partie de sa longueur. — Gr. 93 d. — n. c. CERVEAU DES ARTHROPODES TRACHÉATES 213 noyaux conjonctifs ? — (Les autres lettres comme ci-dessous, PI. XIV.) PLANCHE XIV. Peripatus capensis Gr. (suite). LETTRES COMMUNES : fr, da bourrelet médullaire antérieur. b. d. bourrelet dorsal. ÉD 0 V PA crête dorso-latérale. C. æs. commissure œsophagienne. gl. glomérules olfactifs. : SAT, ganglion céphalique. G m. ganglion mandibulaire. L. a. lame antérieure du bourrelet dorsal. . lame ganglionnaire (lobe optique). Ep. lame postérieure du bourrelet dorsal. by. lames ventrales. L. o. lobe optique. L. olf. lobe olfactif. m.g.a. masse ganglionnaire antérieure. m.m, masse médullaire. iv, nerf dorsal. n.m. a. nerf mandibulaire antérieur. n.Mm.a.t racine externe du nerf mandibulaire antérieur. n.m.a.* racine interne du même. n.m.p. nerf mandibulaire postérieur. \ n. U. nerf viscéral. È 0. v. organe ventral. | D. pédoncule. LMD: 0. pédicule optique. RTE RP: rétine. ES F. trachées. je | F1G. 145, — Coupe pratiquée suivant un planintermédiaire au plan {> horizontal et au plan transversal, et passant par la partie postéro- Le supérieure du cerveau. — Gr. 38 d. $ F1G. 146. — Même série. Coupe passant par le tiers supérieur du 12 cerveau. — Même Gr. EN Fi. 147. — Même série. — Coupe passant par le milieu du cer- DEN veau. — Même Gr. — c. o. commissure réunissant les régions où mu s’insèrent les pédicules optiques ; — c.”’ o. une des branches formant | d: cette commissure. | É F1G. 148. — Mêmesérie. —Coupe passant vers l’uniondutiersmoyen :f avec le tiers inférieur du cerveau. — Même Gr. — €. m. o. cordon de . ! ARCH, DB ZOOL. EXP. ET GÉN, — % SÉRIE. — T, v bis. — suppr. 1887. — ler mé. 18 me GA POSE EIRE TIRER 274 G. SAINT REMY. médullaire réunissant la masse médullaire à la région où s’insère le pédicule optique. F1@. 149. — Même série. — Coupe passant parle tiers inférieur du cer. veau. — Même Gr. — n. nerf sortant par la face ventrale au voisi- nage de la ligne médiane; — n. t. nerf tégumentaire sortant de la crête dorso-latérale; — s.a. segment antérieur du lobe olfactif ; —s. p. segment postérieur du même. F1G. 150. — Même série. — Coupe voisine de la face inférieure du cer- veau. — Mêre Gr. — n nerf sortant près de la ligne médiane ; — f. olf. faisceau de fibrilles allant de la crête dorso-latérale au lobe olfactif et le reliant au lobe antennaire ; — !. acc. lobule sensoriel accessoire. Fi@. 151. — Coupe transversale un peu oblique, passant vers l’u- nion du tiers antérieur avec le tiers moyen du cerveau. — Gr. 93 d. F1G. 152.— Même série. — Coupe passant par le bourrelet dorsal. — Même Gr. FIG. 153. — Mêmesérie. — Coupe passantpar l'extrémité postérieure du bourrelet dorsal. — Même Gr. F1G. 154. — Même série. — Coupe passant par la partie postérieure du cerveau. — Même Gr. FIG. 155. — Coupe sagittale passant par le tiers externe du cerveau, immédiatement en dedans du lobe antenpaire. — Gr.38 d. — x. forma- tion de nature inconnue. FIG. 156. — Même série. — Coupe passant vers l'union du tiers moyen du cerveau. — Même Gr. — f. petit faisceau de fibres se por- tant de lalame ventrale externe au bourrelet antérieur. FIG. 157. — Même série. — Coupepassant parletiers moyen du cer- veau. — Même Gr. FIG. 158. — Même série. — Coupe passant par le tiers interne du cerveau. — Même Gr. F3G. 159. — Même série. — Coupe voisine du plan médian. — Même Gr. ; 1e ; a MAL le 2® Série Vol. V5 (Suppl) PLI sf Ke C3 SJ tel à CA \S Mipirese = TR mad ete SIELOPT TT ça B- pat S'Rémy ad nat. del La” SE A 15 2 a. A Arch. de Zool. Expl° ét gén l° 2° Série Vol. VPS (Supplt) PL II À La ie tiers à GS! Remy ad nat del GLOMERIS, SCUTIGERA > Arch de Zool. Expl° et gen!‘ Ya 77  œ- 5 #2 PE Æ (RER EEE 4: + 10 © Xe Ce» G. S'Rémy ad nat. del OCUTIGERA 2° Série Vol. VS (Suppl!) PI Ill n €: LA . L” AS ; ; Ÿ L] ’ ra » | A * E £ x : : J. ti Ÿ 4 i L 5 Là Pal D * * LP Mir | . L 6 24 0 2e Ÿ RICA Là Da SAS LS ) Ne w , 4 À HE AS Rois fe ‘Es Ê | NN | e 24 À ” L) L | (NL 57 ; L c-4 Lu y” [2 « ; : #, =, x < a LA À al 6 i CNT A nn RS F+ … he 4 Arch de Zool. Expl° et genl° 2° Série Vol. VS (Suppl) PI. IV LIRE Arch. de Zool. Exp et qen le 2° Serie Vol.V?*(Supplt) PLV De 0000€2 52 L . c DOS OSEO OC 25000084 OBS | D ec EL Xe S C3 DRQELE 5 Ds DO er CAT AR SEEN THIS ÉMIS ILE Ebpenerrex np one © “5 ET Coco 00 ? | SCOLOPENDRA LR ER Arch. de Zool. Exple et gén l° 2° Série Vol. VP (Suppl!) PL VI RERO PS; : GEOPHILUS : QU al CCE VER Cu D 2° Série Vol. V?® (Suppl!) P1 VII DES SE sp" E RSS # 2° Série Vol.V?® (Suppl!) PL VIII G ca 54 52) S oO: Ce. x (i* a ar S n j à se po (os) g 0 Se EE es 2 ASS Se . / € KL? y , Le ie , \ - n L : .: & , = 2 Série Vol. VP® Supplt) PL IX \ -. snmesmsdphe rss a PORTO O0 SC THOMISUS, EPEIRA SERICEA 22 Série Vol. VPS (Suppl®) PL X o (Aemel COO ES M: 7e 50 JE, (e) oc ie TO o œ eo PA NBC Se N A cn ann ennsnes $ ee: ce. EPEIRA DIADEMA, PHOLCUS, ERESUS Série Vol. VS (Suppl!) PI XI a R 5 PS e SOSSRTSE > DA = RQ er oc LÉ ROBE OS S. S RO SO AO SA RSA ASS Te teta(e GS a SRE ere], TEGENARIA, SEGESTRIA, DRASSUS, PHALANGIUM 2° Série Vol VP5 (Supplt) PL XII PHALANGIUM, BUTHUS a D Arch de Zool. Exp et gén 2° Série Vol. VS (Suppl!) PI XIII Lux, .g.4. JP) 17419 9//,,47 -- | ne Cm on en Te L Le. PPS Lis RUE 127 , Ni Eos ENT vh: cn TL re LOL pe o e-- ” AIT SELF Tee * PERITPATUS [ape 8" fs À " Q Cr RON ES VEN AVE de. LATE DES ; x 0 # 17 7. nn EN 26e Ld px es, | LU Le das L'4 A b EL VIRE De . + di le \, ou. Rue AU Date Due -8-2-ÿ-1996 à au “4 L _ « qe = … = - <—— - 2 au + & iv » « Ln : mr he A ar. purates tend NC era eme ou 7 0 Ve SE M nn Te dans gt see er de Eee psp pe L - ES nn re Pre - De ee rente ot. PR ES D OL note gt . 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