. V ^ ♦ i^- >^ MARINE BIOLOGIGAL LABORATORY. Received Accession No. Given by Place, *^,*flo book or pamphlet is to be pemovad fpom the Iiab" ofatopy «lithout tfee permission of the Trustées. ARCHIVES DE ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALE ET GÉNÉRALE t'AHIS. — ÎÏPoriUAPniE A. HE.NIV'L'YICH, HL"E DARCKT, ARCHIVES DE ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALE ET GÉNÉRALE HISTOIRE NATURELLE — MORPHOLOGIE — HISTOLOGIE ÉVOLUTION DES ANIMAUX PUBLIÉES SOLS LA UIRKGTION DE HENRI DE LACAZE-DUÏHIERS MEMBRE DE l'iNSTITUT DE FRANCE (Académie des sciences) PROFESSEUR d'aNATOMIE COMPARÉE ET DE ZOOLOGIE A LA SORBONNE (Faculté des sciences) FONDATEUR ET DIRECTEUR DES LABORATOIRES DE ZOOLOGIE EXPÉRLMKNTALE DE ROSCOFF (FINISTÈRE) ET DE LA STATION MARITIME DE BAN YULS-SUR-MER ( PYRÉNKES-ORIENTALES) (Laboratoire Arago) PRÉSIDENT DE LA SECTION DES SCIENCES NATURELLES (Ecole des hautes études) TROISIEME SÉRIE TOME TROISIÈME 1893 PARIS LIBRAIRIE C. REINWALD & C' ir», iîUE DrS SAINTS-PÈRES, 1o Tftil? drni( 3 Hertwig, Der Kerntheilung héi Actinofphœrium Eichhorni. Jenaische Zeitschrift. * A. Brauer, Ueber die Encyslirung von Actinosphœrium Eichhorni {Zeilschr. f. Wiss. Zool., 38, 1894, p. 187-222, pi. X-XI). ^ Brandt, Radiolarien {Faune du golfe de Naples). *■ A. Gruber, Eine Mittheilungen uber Kernvermehrung und Schwarmerbildung bei Susswasser Rhizopoden [Ber. Nat. ges. Freiburg, 6, p. 114-118, pi. V). ' W. Schewiakoff, Uber die karyokynetische Kerntheilung der Euglypha alveolata [Morphol. Jahrb., XIII, 1888, p. 193-2S9, pi. VI-VII). 8 C. IsHiKAWA, Uber die Kerntheilung bei Nocliluca miliaris {Ber. d. Nat. Ges. su Freiburg, VIII, 1894). » FiscH, Untersuchungen uber einige Flagellaten und verwandte Organismen {Zeit. f. Wiss. Zool., XLII, 1885, p. 55-56). »o Blochmann, Bemerkungen uber einige Flagellaten {Zeitschr. f. Wiss. Zool., 1884, p. 42-50, pi. II) ; Kleinere Mttheilung Uber Prolozoen {Biolog. Centralblatt, 1894, p. 82-91 et p. 194-197). " Annales de micrographie. " Arch. f. Mikr.Anat., 1891. " Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1892 et 1893. xii NOTES ET REVUE. ridies • et les Coccidies!^, avons signalé des mitoses entièrement comparables à celles des cellules des Métazoaires. Il y a presque partout des globules polaires, des Endplatten ou des Polplal- ten qui répondent anx cenlrosphères de Strasburger, c'est-à-dire à l'archoplasma de Boveri, plus le centrosome. 11 y a pourtant un caractère tout à fait général qui semble distinguer la mitose des Protozoaires : c'est la persistance de la membrane nucléaire à tous les stades de la vie nucléaire. 11 n'y a qu'une exception : dans la mitose des Sporozoaires, la membrane nucléaire disparait. Dans les autres groupes, elle persiste. Si donc on met à part les Sporozoaires, chez lesquels la division nucléaire est exactement comparable à celle des Métazoaires, on peut dire que la prin- cipale différence entre la mitose des Protozoaires et celle des Métazoaires consiste dans la persistance de la membrane nucléaire^. Nous pouvons voir que, chez la plupart des Protozoaires, il est possible d'homologuer le noyau soit à l'état de repos, soit à l'état de division, avec celui des Métazoaires, au moins fonctionnellement. La difficulté réelle ne se trouve que chez les Ciliés, où la division fonction- nelle du noyau existe au plus haut point. Que sont le micronucleus et le ma- cronucleus respectivement au noyau des cellules des Métazoaires ? Voici la théorie imaginée par M. Heidcnhain * dans son grand mémoire sur les centrosomes : Le fuseau du micronucleus des Infusoires avec ses fibrilles est identique au fuseau central de Hermann dans les cellules des Métazoaires; c'est au moins un rudiment de ce fuseau. Si l'on se souvient que le fuseau des Infusoires provient de la substance achromatique du micronucleus et que, d'autre part, le noyau entier reste, pendant la initose, entouré de la membrane nucléaire, il en résulte qu'on peut chercher les restes des micronuclei à cette place de la cellule des Métazoaires où se tient le fuseau. La partie achromatique du mi- cronucleus des Infusoires est homologue de la substance achromatique du microcentre des lymphocytes, substance qui se distingue bien du fuseau central. Le macronucleus des Infusoires correspond au noyau des cellules des Méta- zoaires; quant à la substance chromatique du micronucleus, elle a disparu dans les cellules des Métazoaires et les chromosomes de la division des mi- cronuclei sont produits chez les Métazoaires par le noyau cellulaire, c'est- à-dire par le macronucleus. Il en résulte que le fuseau externe et les radiations polaires ont été produits dans le cours de la phylogénèse, au moment où le * Archives de zoologie expérimentale et générale, 1894. 2 Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1803, et Archives de zoologie expéri- mentale et générale, 1893. ' Il est vrai de dire que pour Biitschli et ScliewiakofT, la membrane du noyau persisterait même chez les .Métazoaires. * M. Heidenhain, Seue Untersucitungen iiber die Centralkôrper und ihre Beziehungen zum Kern und Zellenprotoptasma {Arch. f. Mikr. Anat., vol. XLIII, 1894, p. 683 et suivantes). NOTES ET REVUE. xiii macronudeus commença à fournir les chromosomes. Nous avons ainsi l'expli- cation de ce fait que la membrane du noyau persiste dans la mitose des mi- cronucfft, tandis qu'elle disparaît dans la mitose des cellules des Métazoaires. Les centroiomes des cellules des Métazoaires sont donc des néoformations dérivant du micronucleus des Protozoaires et de sa substance achromatique; ce sont, du reste, simplement les points médians d'insertion du système cen- tré. Les anses de rarchoplasma (de Piatner et de Hermann) ne sont autre chose que les rudiments des chromosomes du micronucleus qui a perdu sa chro- matine. Piatner lui-même considère les Stabchen du Nebenkern comme homologues des radiations étoilées des cônes antipodes de VanBeneden. Dans la division du microcentre, il apparaît une fij^ure fusifornie rudimen- taire qui semble être l'homologue de la figure fusiforme du micronucleus des Infusoires. Donc le fuseau central des Métazoaires n'est que le fuseau du mïcronuc/eM5, dans lequel se sont différenciés les chromosomes; c'est ce fuseau central qu'il faut homologuer chez les Protozoaires et les Métazoaires, et non les chromosomes. Pendant la mitose, la membrane du micronucleus persiste, tandis qu'elle disparaît dans le macronudeus des Métazoaires. Dans un des cas, le fuseau est donc nucléaire; dans l'autre, cellulaire. Mais, chez les Métazoaires, le noyau et le cytoplasma concourent ensemble à la formation de la figure kariokyné- tique. Telle est la théorie de Heidenhain ; elle dérive des idées de Biitschli S qui avait pensé, lui aussi, que les micronudei des Infusoires étaient peut-être ho- mologues des centrosomes des cellules des Métazoaires. Autre est la théorie développée par Henneguy"-. Si l'on considère l'œuf comme représentant le stade protozoaire des Métazoaires et la conjugaison des Infusoires comme répondant à la fécondation, c'est dans l'œuf qu'où doit trou- ver les homologues du macronudeus et du micronucleus. Dans le noyau de l'œuf, le macronudeus est représenté par les éléments nucléolaires de la vési- cule germinative et, quand il existe, par le corps vitellin de Balbiani ; le mi- cronucleus, par le réseau chromatique. Parfois, il y a séparation de ces deux organes ancestraux, d'où la présence dans l'œuf du corps vitellin à côté du noyau. Sur cette question d'homologation, les théories les plus opposées sont en présence; pour Ziégler^, il y a mainte analogie entre le macronudeus et le Meganudeus des Métazoaires; pour d'autres, ce sont les micronudei qui doi- vent être homologués au Meganudeus. * BûTSCHLi, Uber die sog. Cenlralkôrper der Zelle und ihre Bedenlung [Verh. des Naturf. medvereins. zu Heidelberg, IV, 5, 1892). 2 Henneguy, te Corps vitellin de Balbiani dans l'œuf des Vertébrés [Journal de l'ana- tomie et de la physiologie, 1893, p. 1-39, pi. I). ' ZiEGLER. Die Biologische Bedentung der amilotisclien Kernthedung in Tliierreich [biolog. CentralbL, 1891, p. 372). viv NOTES ET REVUE. Dans un travail très récent, Rompel ' signale chez un nouvel Infusoire,Zfen- trochona Nebaliœ, rexistence, à l'état de repos cellulaire, de centrosomes bien différenciés, placés dans une échancrure du macronucleus. Si cette observa- tion était vérifiée, il serait impossible de soutenir avec Biitschli et Heidenhain que les centrosomes sont homologiies du micronudeus des Infusoires. Dans l'état présent de la science, on ne peut affirmer si le micronudeus a quelque chose à voir avec les centrosomes et leurs radiations, ou s'ils ont une même origine dans un même organe ancestral. Il paraît plus probable, comme le pense Drûner, que le micronudeus des Infusoires et le fuseau central des cellules des Métazoaires sont des formations tout à fait hétérogènes. Dans tous les cas, il faut considérer que, chez presque tous les Protozoaires, le noyau est, soit à l'état de repos, soit à l'état de division, l'homologue de celui des cellules des Métazoaires, et que c'est seulement chez les Infusoires ciliés qu'on trouve deux noyaux fonctionnellement différents; la division de l'organe et de la fonction nucléaires des Ciliés est donc, en somme, un phénomène anormal, surtout physiologique, et je ne crois pas qu'on puisse résoudre le problème à l'aide de données simplement morphologiques. XI NOTE SUll LES PROTOZOAIRES MARINS DE ROSCOFF, Par A. Labbé, Docteur es sciences. Le vivier du laboratoire de Roscoff renferme une faune très abondante de Protozoaires. Je donne ici une esquisse des principaux types que j'y ai rencon- trés pendant les mois de juillet et d'août 1894, sans avoir la prétention de donner une liste complète. Les Infusoires ciliés et les Acinétiens constituent la grande majorité des espèces. L'eau du vivier, qui se renouvelle sans subir l'agitation des eaux exté- rieures, est pour ces Protozoaires un milieu d'existence extrêmement favo- rable. Mais les espèces varient extrêmement, et quelques types, Prorodon ma- rinus Glap. et Lachm, Euplotes harpa Stein. et les Oxytricha, sont seuls à peu près constants. Il n'en est pas de même des Péritriches fixés ; Vorlicclla marina Greeff abonde, ainsi que les Tintinnoïdiens {Tintinnus inquilinus G. F. Miill. et T. denticulalus Ehrg.). On trouve surtout en grand nombre des Cotliurnidés (Cotliurnia maritima Ehrg., C. striata, C. fusiformis Gourretet Rœser'. Une Cothurnia, que nous croyons nouvelle et que nous pourrons nommer * J. Rompel, Kentrochona Nebalive ein neues Infusor... {Zeitschr. f. Wiss. ZooL, oS, 1894, p. 618-636, pi. XXXIX). 2 Cette espèce a été trouvée dans le vieux port de Marseille. NOTES ET REVUE. xv Cothurnia spinosa, est remarquable par les épines régulièrement espacées que porte sa coque. Tous ces Péritriches, lorsque la mer se retire, restent à sec sur le fond du vivier avec les algues qui les portent; il m'a toujours été impossible d'obtenir la reviviscence de ces Protozoaires laissés à sec par la marée basse. Les Rhizopodes sont extrêmement nombreux. Les Foraminifères {Polystomelles, Milioles) sont très abondants. Je veux si- gnaler des Cornuspira, chez lesquels il m'a été possible d'observer la division du noyau. Les Amibes sont de plusieurs espèces. Se rencontrent surtout le Dactylo- sphœria polypodia M. Schultze et un grand Amibe, très allongé et proche pa- rent de Biomyxa î;a(/an« Leidy. Je ne signale que pour mémoire les Vampyrelles et les Gromia. Un rhizopode très commun est le Trichosphœrium Sieboldii Schn., qui forme à lui seul le type des Trichosa de Môbius. Sa coque, brune, ovalaire, chiti- neuse, ayant de 70 à 80 centimètres, percée de quelques pores par oii sortent des pseudopodes lobés, est recouverte de petits bâtonnets chitineux, transpa- rents, serrés les uns contre les autres. Le protoplasme, souvent granuleux et renfermant des granules chromatoïdes, renferme des Xanthochlorelles et de nombreux noyaux qui peuvent se diviser. Ces Trichosphœrium peuvent se di- viser par étranglement. Ils ont déjà été trouvés par Schneider à Ostende et par Môbius à Kiel. XII BANAmiLA LACAZEl GENRE NOUVEAU DE COCCIDIE OLIGOSI'ORÉE, Par A. Labbé,'' Docteur es sciences. Cette Coccidie habite l'intestin d'un Myriapode, I,«7/io6jms forficalus L.,oii on la trouve en même temps qvi'Adeba ovata Schneider, qui est une Poly- sporée digénique, et qn'Eimeria Schneideri Bûtschli, qui est une Polysporée monogénique. Elle paraît être assez rare; je ne l'ai rencontrée qu'une seule fois. Les jeunes stades ne présentent rien de particulier. Au stade capsulaire, cette Coccidie atteint environ 35 à iO [x de longueur sur 30 à 33 de largeur; parfois, elle est tout ù fait sphérique. La capsule est mince. Le plasma renferme des granules plastiques, des granules chroma- toïdes très petits et de gros granules éosinophiles; ces derniers, très nombreux, ont une grande affinité pour l'éosine et la fuchsine acide ; l'hématoxyline colore en violet foncé leur contour, tandis que les couleurs acides se portent au centre; ces granules peuvent devenir tout à fait hématoxylinophiles. XVI NOTES ET REVUE. Le noyau se divise par mitose à la façon ordinaire. Les centrosomes sont visibles près du noyau au repos. Il se forme trois spores, du moins ce nombre trois paraît être général (je n'ai rencontré qu'une fois un kyste tétraspore). Les spores peuvent atteindre 27 à 3S p. de long sur 12-14 |a de large ; elles sont cylindroïdes, mais arquées. Dans la partie centrale, Vépispore est cylindroïde et de parois épaisses; aux extrémités, la paroi s'amincit et se recourbe légèrement ; il y a souvent des bourrelets terminaux. De plus, les parois de l'épispore s'amincissent latérale- ment, tandis qu'elles sont très épaissies en avant et en arrière, ce qui semble indiquer une ligne de déhiscence. A l'intérieur, Vendospore forme une masse ovalaire ne dépassant guère 16 {/. sur 10 p., qui renferme deux sporozoïles, recourbés l'un sur l'autre, avec, entre eux, un reliquat granuleux. Les spo- rozoïles, pourvus d'un beau noyau, atteignent 23-25 p.. La Bananclla Lacazei, que je dédie à mon vénéré maître M. de Lacaze- Duthiers, est donc une Coccidie oligosporée-lrisporée-dizoïque. Le genre Bananella serait intermédiaire entre les Coccidium et les Cyclo- spora. Le directeur ; H. de Lacaze-Dutuiers. Les gérants : G. Reinwald et C". lïï ARCHIVES DE ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALE ET GÉNÉRALE . LES AMÉLIORATIONS MATÉRIELLES DES LABORATOIRES MARITIMES DE ROSCOFF ET DE BANYULS EN 1894 I Rester eu place quand tout progresse autour de nous, c'est vou- loir rester en arrière ; pour tout dire en un mot, c'est reculer. Tel ne devait pas être, tel n'est pas le cas des laboratoires de Roscoff et de Banyuls ! Aussi, tous les ans, lors de l'ouverture de mon cours, je me plais à rappeler ce qui a été fait dans les deux stations pendant l'année qui vient de finir. Ce compte rendu se rapportera, cette année, plus particulièrement aux progrès du laboratoire Arago. Il a quelque intérêt. En plus d'une circonstance, j'ai insisté sur les différences qui existent entre les deux stations. Il est utile de les rappeler encore. Le ciel de la Bretagne n'a rien qui permette de le comparer à celui du Midi. La lumière est ici éblouissante, là la brume voile l'hori- zon, dont les nuances rosées et les couleurs éteintes contrastent vivement quand on les compare à celles du Roussillon. D'un côlé; AIlCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉ.N. — 3« SÉRIE. — T. III. 1 S95. 1 2 H. DE LÂCAZE-DUTHIERS. dans la belle saison, la température est élevée ; les chaleurs acca- blantes fatiguent et forcent à ralentir le travail. De l'autre, le climat, même au plus fort de l'été, rappelle celui d'une belle journée tiède et tempérée du printemps. ARoscoiF, le travail est facile et ne donne jamais cette fatigue qu'on éprouve dans les pays aux grandes cha- leurs; alors qu'à Banyuls, si la brise de mer ne vient tempérer la lourdeur de l'air, on étouffe, on se débat sous une atmosphère acca- blante. On le volt, les deux climats sont aussi différents que pos- sible. L'un est excessif, l'autre est constant et maritime. Dans l'un, les hivers sont le plus souvent superbes et très doux. Quelquefois, exceptionnellement, ils deviennent froids, mais par intermittences de courte durée. Dans l'autre, la brume, la pluie, habituellement sans grands froids, entretiennent l'activité de la végétation, et l'on trouve des camélias, des fuchsias, des pélargoniums, des véroniques, en arbre et en pleine terre, à côté du grand mésembrianthemum d'Afrique. Quand vient octobre, à Roscoff, les pluies sont fréquentes, les vents forts et les nuages prennent une grande partie de la lumière du jour. Vers trois heures, le travail au microscope commence à devenir difficile ; il est temps de gagner Banyuls, où octobre et novembre sont d'une douceur exceptionnelle et la lumière intense. La marée, condition si précieuse pour les études, qui anime, excite, entraîne le chercheur après elle, en laissant à découvert des plages immenses, des richesses zoologiques qu'on n'a qu'à recueillir à pleines mains, offre à Hoscoff un attrait tout particulier. Les plages incomparables de cette côte découvrant à de grandes distances fournissent au naturaliste des ressources inestimables. Peu de loca- lités, sur le littoral français, sont comparables à celle de Roscoff, que favorise d'ailleurs une condition des plus heureuses. L'île de Balz forme un vaste rempart contre la mer, souvent dé- chaînée, et à l'abri duquel les algues prennent un développement exceptionnel. On sait qu'à une végétation luxuriante el variée cor- respond une faune toujours riche. C'est le cas de Roscoff, et Dieu sait si nous sommes loin de connaître et d'avoir épuisé toutes les LABORATOIRES DE ROSGOFK ET DE BANYULS. 3 merveilleuses richesses de celte localité zoologique privilégiée. A Banyiils, pendant l'hiver, avec les avantages des pays chauds, on trouve une autre faune, mais aussi d'autres conditions de pèche et de chasse maritimes. La mer s'y retire si peu, les fonds y sont si immédiatement pro- fonds, qu'il faut, pour obtenir les matériaux de travail, user de moyens tout différents de ceux employés dans une mer à marée. En Bretagne, avec une carte marine et un annuaire des marées, chacun, suivant ses goûts, ses désirs, peut chasser à la grève et faire ses provi- sions comme il l'entend. Il n'a, pour ainsi dire, besoin de personne, une fois qu'il a été mis au courant des pratiques de la recherche. Sur les côtes du Roussillon, tout autres sont les conditions de tra- vail, et l'on peut être assuré que tel naturaliste n'ayant vu qu'une mer à marée, et qui vient sur les bords de la Méditerranée, sera, dans les premiers moments de son arrivée, complètement dépaysé et souvent l'oit désappointé. Le besoin impérieuxd'avoir sous la main une embarcation pour se procurerdes matériaux de travail devient, dans la plupartdes localités, une charge quelquefois très lourde, et des naturalistes ont renoncé à leurs recherches par suite des difficultés nées de ces conditions. Mais, d'un autre côté, quel charme dans les études de la faune particulière de la Méditerranée, et dans ces pêches pélagiques où les guirlandes des siphonophores viennent captiver sans partage l'admiration, lorsque, ainsi que le disent, dans leur langage figuré, les pêcheurs de quelques localités du littoral, « la mer fleurit ». D'après cela, bien que les deux stations sœurs soient, au fond, organisées sur un plan identique, néanmoins il a fallu les adapter aux conditions naturelles des deux localités, et Ton comprend aussi combien elles se complètent heureusement l'une l'autre, justement par les conditions différentes naturelles qu'elles offrent. A Banyuls, les embarcations et le personnel pour la pêche sont parfaitement en mesure de répondre à tous les besoins. Il en est de même du local oh se font les travaux. 4 H. DE LACAZE-DUTHIERS. Mais la question de l'habitation a aussi une grande importance, et c'est elle qui m'a conduit aux modifications qui ont été le but de la campagne de 1894. Jusqu'ici, il n'a pas été possible de donner à Banyuls, comme à Roscoff, des logements aux travailleurs, et cela pour deux raisons. D'abord les sacrifices faits par le département et la commune de Banyuls, quoique considérables relativement aux ressources du pays, n'étaient pas tels qu'il fût possible de donner à l'établissement, dès son origine, des proportions suflisanles pour pouvoir loger un nombre aussi considérable de travailleurs qu'à Roscoff. D'ailleurs, à l'époque de la création, j'avais cédé un peu trop vite aux observations qui m'avaient été faites par des savants étrangers venus à Roscoff, et qui trouvaient de grands inconvénients à voir réunis et logés dans le laboratoire de nombreux jeunes gens dont plusieurs, se préparant exclusivement aux examens, ne songeaient pas encore à faire des recherches originales. J'avais cru bon, je l'avoue, d'expérime)iter les deux conditions et d'avoir une station donnant le logement, et une sans l'habitation. Aujourd'hui, voilà bientôt vingt-deux ans que l'expérience se con- tinue à Roscoff. Il n'est pas un naturaliste qui y soit venu et qui, en arrivant à Banyuls pour y séjourner l'hiver, y continuer et terminer des travaux commencés dans l'été en Bretagne, n'ait exprimé le regret de ne pas se retrouver dans les mêmes conditions qu'il venait de quitter. 11 n'en est pas un qui n'ait regretté de ne pas habiter à côté de ses objets d'étude, de ne plus pouvoir, à tout instant de la journée et même de la soirée, descendre de sa chambre à coucher à sa table de travail, à son bac d'observation, au vivier d'expériences. Ces observations m'ont été répétées par les amis les plus dévoués des créations que, ma vie durant, je n'ai cessé de considérer comme l'un des moyens les plus puissants pour favoriser les progrès de la zoologie française, et je n'ai pu rester sourd à leurs justes réclama- tions. LABORATOIUES DE ROSCOFF ET DE BANYULS. 5 Certainement, dans de grands centres, dans des villes où l'on peut avoir tout le confortable, tout le bien-être et tout le luxe désirables, il est possible d'ouvrir et de fermer, à des heures réglementaires, les laboratoires, comme cela se passe dans les centres universitaires. C'est là ce qui m'avait été conseillé à l'origine par les savants venus à Roscoff. Mais tout autre doit être l'organisation dans un pays par- fois peu hospitalier, oii tout au moins peu organisé pour satisfaire même les exigences bien modestes des naturalistes. Aussi, pour Banyuls, snis-je revenu à mes premières idées, car je considère que rien, pendant un long travail, ne peut remplacer l'ha- bitation au laboratoire, auprès de ses expériences. Une circonstance est venue prouver, de nouveau, combien était appréciée celte con- dition du logement donné h tous ceux ({ui demandaient l'hospita- lité à la station. II Parmi les étrangers qui ont visilé Hoscofî pendant l'été dernier, l'un d'eux, M. Bather, du British Muséum, a publié' les observa- tion? que lui avaient suggérées ses visites dans deux laboratoires placés à peu près sur le môme méridien et sur les deux rives oppo- sées de la Manche, à Plymouth en Angleterre, à Roscoff en France. Les impressions éprouvées par M. Bather, en séjournant dans les deux laboratoires, sont curieuses à relater. Il est utile de les faire connaître chez nous. Il faut pour cela les citer textuellement : « At Plymouth, Ihe coast is more favourable, the fauna is richer, while tbe bulding is finer and more richly equipped than is the case at Roscoff. From the Plymouth laboratory there proceeds every year a large quantity of work of much practical value to the English fîsheries ; so far as thèse observations are concerned, we compare very favourably with our neighbours. But when we consider the amount of purely biological investigation that is carried on at thèse ' Voir Nalural Science {A Monlhly Review of Scientific Progress, n» 33, vol. V, november 1894, p. 323). The Toilers of Ihe Sea. 6 H. DE LAC^ZE-DUTHlERS. laboratories, and the number of zoologists that corne lo thcm, a calm examination of the facts will show a very large balance on the side of the French. The RoscofT laboratory is thronged every summer, not merely with students, but with investigators, from ail part of the world, including England, while the saine may be said of the corresponding laboratory at Banyuls in the south of France. » Peut-être est-il permis de ne pas accepter sans observation l'opi' nion de M. Bather, quand il dit que la faune de Plymouth est plus riche {rkher) et la localité plus favorable que celle de Roscoff, car il faudrait d'abord savoir comment, à la station de Plymouth, on se procure les animaux? Si c'est à l'aide des bateaux et des engins de pêche, drague, chalut, etc., il n'est pas possible de discuter sans avoir connaissance de ce que rapportent les pêcheurs au laboratoire. Mais il est, dans ce cas, indispensable d'observer que le grand avan- tage de la si'iuation d'un laboratoire, sur les côtes d'une mer à marée comme l'Océan, est justement le bénéfice de la recherche, sans aucun secours, des animaux à marée basse. 11 suffit de jeter les yeux sur la carte marine des environs de Plymoulh, pour recon- naître que cette recherche, à marée basse, n'est nullement favorisée par la faible profondeur des eaux dans les environs de la station anglaise, et surtout par la configuration des côtes et la situation de la ville. Que l'on compare les deux localités à l'aide des cartes ma^ rines, et l'on verra combien l'avantage des conditions naturelles l'emporte à Roscoff, sur les mêmes conditions orograpbiques, à Plymoulh. Ce sont ces conditions qui, avant même d'avoir exploré la plage de Roscoff, avaient appelé mon attention, et fait considérer, a priori, la localité bretonne comme devant être éminemment favo- rable aux éludes zoologiques. A part cette observation, il est certainement très intéressant de constater, dans cet écrit, que si la station de Plymouth est plus lar- gement installée {Ihe biUding is finer and more richly eqidpped) que celle de Roscoff; que, s'il y a été fait de nombreux travaux d'appli- cations utiles aux pêcheries anglaises, la balance penche encore lar- LABORATOIRES DE ROSCOFF ET DE BANYULS. 7 gement de notre côté, quand on compare le nombre des travailleurs venus de toutes les parties du monde (ce sont les expressions mêmes, from ail part of the world] et celui des travaux de biologie produits. Il y a plusieurs raisons à cet état des choses, dit M. Balher, et il y est fort curieux de trouver ces raisons sous la plume d'un Anglais, car nos voisins n'ont pas l'habitude de dénigrer leur pays. La première raison est une question de dépense : « The first is the simple question of cost. The work for a monlh at Plymouth the student must pay £ S for his table, he will be charged extra for ail above a small allowance for material and reagents, he will hâve lo take lodgings in the town, and, when he leaves, he will doubtless make some suitable présent to Ihe atten- dants. « At Roscoff during the same period, the student is charged nothing for the use of the tables he is permitted as much of the various reagents, even of absolute alcohol, as any reasonable man can want, he can hâve a bedroom at the laboratory, and, when he leaves, he will only be expected to leave behind him ten francs for the attendant and fifleen francs for the servant that looks his bedroom. » Il est nécessaire d'insister sur ce fait, que tout est gratuit dans mes deux stations, à Roscoff comme à Banyuls. Certes, payer 5 livres par mois, 125 francs, pour occuper une table de travail, est une vraie charge pour un étudiant, et même pour beaucoup de profes- seurs, et il est probable qu'on doit y payer aussi pour les réactifs, puisque M. Balher raconte qu'à Roscoff, non seulement l'étudiant n'a aucune charge pour occuper la table, mais encore qu'il lui est remis différents réactifs, même de l'alcool absolu. Il faut remarquer aussi que rien n'est fixé et imposé quant à la teneur de la somme que veulent bien laisser, d'une façon tout à fait facultative et spontanée, les naturalistes ayant reçu l'hospitalité. Ce qu'on donne est remis au directeur ou à son représentant, et versé 8 II. DE LACAZE-DUTHIERS. ilans la oaisso de chacun de? laboratoires, pour èlre ensuite [KU-tagé, par le directeur lui-nii^nie, entre les marins et le personnel, sans (jue ceux-ci sachent qui n'a rien laissé, qui a laissé peu ou donné beaucoup. De la sorte, les soins pour les travaux sont les mêmes pour tous, quels que soient les deniers d'adieu, il vaudrait mieux dire de satisfaction, laissés au moment du départ. Les sommes dont parle M. Bather sont, sans doute, celles qu'il a appris avoir été données, mais que personne n'aurait connues s'il ne les avait indiquées. Il est de nombreux cas où, peu aisés, des étudiants sont partis sans rien laisser au directeur; personne n'en a rien su. Tout comme il y a eu des savants, fort généreux, dont l'obole s'est élevée jusqu'à 150 francs, et j'ai le regret de ne pouvoir les remercier publiquement, en raison même de la règle du silence imposée; mais ces généreux donateurs savent bien que la plus vive reconnaissance leur est acquise. Il faut le dire, tout le monde n'est pas du même avis sur le fait de la gratuité. Pendant Tannée 1S93, il est venu beaucoup de savants étrangers à Roscofl' ; parmi eux, d'éminents professeurs qui m'ont souvent répété : «Nous voudrions payer; cette libéralité, cette gratuité nous gênent. Pour lusage des réactifs et du service, nous serions bien plus libres.» Ou le voit, si M. Bather trouve notre organisation bonne, par une discrétion qu'il est facile de comprendre, d'autres savants préféreraient supporter les charges que le savant anglais trouve, dans son pays, trop lourdes pour les étudiants. Ces appréciations viennent un peu des moyens dont chacun dis- pose ; mais, il faut le remarquer, il est peu de pays où l'on ne paye pour travailler dans les stations ou les laboratoires. Comme conclu- sion, restons, en France, dans nos habitudes libérales. La seconde raison donnée par M. Bather est plus curieuse encore : L. FAUROT. Dans les polypes des colonies de Zoanthides, on reconnaît deux parties latérales symétriques, comme chez les Hexactinies, à l'aide des deux commissures et de la situation des paires commissurales ; mais, en outre, une de ces paires se distingue très nettement de l'autre par le plus grand nombre de jeunes cloisons qui se forment dans les deux interloges voisines. Cette paire a été considérée comme ventrale (fig. 11, p. 105). Chez le Cérianthe, les cloisons sont dépourvues de faisceaux de lames musculaires, et la distinction du côté ventral et du côté dorsal se fait par l'examen des rainures commissurales, dont une est beau- coup plus longue et profonde que l'autre. A la première sont fixées deux cloisons constituant, en raison de certaines particularités de structure, une véritable paire. A la seconde correspondent d'une à quatre cloisons en voie de développement. Les deux extrémités du plan commissural se trouvent ainsi nettement différenciées et pour- ront recevoir des appellations différentes. La connaissance de l'ordre dans lequel apparaissent les huit cloisons primitives, toutes situées du côté de la longue et profonde rainure œsophagienne, permet, en outre, de les homologuer avec les huit primitives des Hexactinies, aussi nommerons-nous ventrale la partie qui correspond à cette pro- fonde rainure et à la paire qui y est fixée, et dorsale la partie com- missurale où se forment les nouvelles cloisons. D'autres Actinies, le Peachia, VEdwardsia et diverses espèces de Zoanthides, sont pourvues, de même que le Cérianthe, d'une rainure ventrale œsophagienne remarquablement plus développée que la dorsale. Jamais, au contraire, chez aucune autre Actinie, il n'a été observé une disposition inverse, c'est-à-dire une rainure dorsale plus profonde que la ventrale. Ce fait constitue un caractère mor- phologique de haute valeur qui, ajouté à l'orientation identique des huit plus larges cloisons primitives, montre bien l'unité du plan d'organisation des Actiniaires. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 63 HISTOLOGIE. Hollard, M. Edwards, J. Haime et les autres naturalistes qui ont décrit la structure des Actinies avant que la technique de l'histo- logie eût atteint son degré actuel de perfectionnement, s'accordent généralement pour distinguer trois couches principales dans les parois du corps de ces animaux : un tégument ou épilhélium externe, une couche moyenne ou musculaire et une couche muqueuse ou épithélium interne. Heider (iSQ^'ï) et Hertwig ont également décrit trois couches : ectoderme, mésoderme et entoderme. Mes recherches ayant eu pour but principal l'étude de la couche moyenne ou mésoderme, la description de l'ectodernie et de l'en- toderme qui va suivre sera nécessairement brève. La structure de ces deux couches épithéliales a d'ailleurs été déjà exposée par R. et 0. Hertwig avec beaucoup de détails (I8'î'9]. Ectoderme. — Si l'on fait agir pendant un temps suffisant sur des fragments de paroi de la colonne ou de tentacules, soit le mélange d'Hertwig (acide osmique et acide acétique), soit le carmin de Beale, soit le liquide de Plemming, on peut à l'aide d'un pinceau détacher des lambeaux d'ectoderme qui se laissent dissocier sans trop de dif- ficultés. Deux éléments frappent tout d'abord par leur abondance et leurs dimensions : ce sont les nématocystes et les cellules glandu- laires. Les nématocystes forment à la surface de l'ectoderme une couche très dense. Serrés les uns contre les autres, ils sont de forme ovale avec une extrémité plus étroite toujours tournée vers l'exté- rieur. C'est cette extrémité qui donne issue à un long fil à action urticante. Les nématocystes peuvent présenter différents aspects, mais dans l'ectoderme de la paroi, ils ont le plus souvent celui figuré planche I, fîg. lu, a. Les cellules glandulaires (fig, 10, pi. I) sont bien reconnaissables à leur forme en gourde dont le col est plus ou moins allongé. L'ex- trémité renflée laisse voir par transparence un contenu granuleux jaunâtre qui souvent ne remplit qu'une très petite portion de la 64 L. FÂUKOT. cavité de la cellule. Il en est même qui sont complètement vides. La forme des cellules glandulaires ainsi que celle des cellules épi- théliales proprement dites que nous allons décrire peut cependant varier dans d'assez grandes limites; on en voit qui sont étroites et effilées à leurs deux ex! rémités. L'absence de noyau et l'aspect de leur contenu sont alors les seuls caractères qui permettent de dis- tinguer les premières des secondes. 11 est probable que les granu- lations intérieures des cellules glandulaires sont destinées à se transformer en mucus, mais nous n'avons aucune preuve de cette transformation. Pour observer les cellules épi théliales proprement dites qui consti- tuent les éléments les plus nombreux de l'ectoderme, il est néces- saire de faire des dissociations encore plus minutieuses que celles qui permettent d'examiner les nématocystes et les cellules glandu- laires. Ce sont de longues cellules à cils vibratils (Flimmerzellen) que Hertwig désigne ausbi sous le nom de cellules de soutien (Stutz- zellen). Dans leur moitié externe, elles présentent un ou plusieurs * renflements qui contiennent le noyau et des granulations. Quant à leur extrémité interne, elle s'élargit brusquement en une surface triangulaire qui, d'après Kleinemberg et Hertwig, représente la partie musculaire de la cellule. Ce sont donc des cellules épithélio- musculaires (fig. 13, pi. I). On trouve aussi, entremêlés avec ces cellules, d'autres éléments désignés par le même auteur sous le nom de cellules des sens (Sinneszellen). 11 est souvent difficile de les distin- guer de certaines cellules épithéliales très effilées qui peut-être n'ont pas encore atteint leur complet développement. Ces cellules sont parfois accolées à des nématocystes, ce qui a fait supposer que ces derniers pouvaient projeter leurs fils intérieurs sous l'influence d'un réflexe provoqué par une excitation extérieure agissant sur les sinneszellen. On trouve encore dans l'ectoderme de la paroi et des tentacules de fines granulations qui, au cours des dissociations, sont dispersées dans tous les sens. Pour reconnaître leurs véritables rapports de ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 6S situation avec les cellules épithéliales il faut pratiquer des coupes transversales ou longitudinales sur des fragments de colonne préa- lablement traités par une forte solution de carmin additionnée d'a- cide osmique. Ces granulations prennent alors une couleur opaque brun foncé qui les rend très distinctes. Elles sont disposées en une couche dans la partie profonde de l'ectoderme près de Y Interbasalsubstanz de Heider ou Nervenfaserschicht de Hertwig. Cette couche se reconnaît bien plus nettement encore dans l'ectoderme très épais du Cérianthe où les granulations sont naturellement opaques et d'un volume relativement grand. Nous étudierons ces corpuscules à propos du Cérianthe et nous montrerons qu'ils sont destinés à se transformer en nématocystes. L'Interbasalsubstanz ou Nervenfasenschicht des naturalistes alle- mands s'observe facilement sur des coupes transversales du disque oral du Cérianthe {ec^ phot. 6, pi. IV) et de l'unique sillon commis- sural du Peac/tia. Elle est située dans la partie la plus interne de l'ectoderme et s'étend parallèlement au mésoderme. Sur les prépa- rations traitées par l'acide osmique et colorées au carmin, elle appa- raît comme un mince réseau à mailles très fines. Sur celles que l'acide osmique a fortement pénétrées, elle prend l'aspect d'une raie opaque noire (phot. 5, pi. V). R. et 0. Hertwig assimilent la struc- ture de cette couche, qu'ils ont étudiée minutieusement, à celle de l'anneau nerveux des Méduses et des ganglions des Vers et des Ar- thropodes. Pour ces auteurs, elle est donc nerveuse et contient, à la base des tentacules et du disque, de nombreuses cellules ganglionnaires bi, tri et multipolaires. C'est dans la région péristomiale du disque que la couche nerveuse serait pourvue d'une plus grande abon- dance de cellules ganglionnaires et constituerait ainsi une sorte d'organe central nerveux. L'ectoderme des tentacules, du disque oral et de l'œsophage ne m'a pas paru différer essentiellement de celui de la colonne. Cepen^ ARCH.' DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 3»; SÉRIE. — T. III. I89b. 5 66 L. FAUROT. dant, dans le disque oral, je n'ai pas retrouvé la couche de granula- tions. Hertwig a vu les cellules des sens plus nombreuses dans les tentacules que partout ailleurs; il a également observé une plus grande quantité de cellules glandulaires dans l'œsophage. Entoderme. — Les cellules épithélio-musculaires qui constituent cette couche se désagrègent beaucoup plus rapidement que celles de l'ectoderme ; leur ensemble a, en outre, un aspect très différent de ces dernières sur des coupes transversales traitées par l'acide osmique (phot. 5, pi. V). Je n'y ai pas observé la couche nerveuse d'Hertwig. D'après cet auteur, les éléments épithéliaux de l'ento- derrae se distinguent de ceux de l'ectoderme par un caractère cons- tant : celui d'être munis, à leur extrémité libre, d'un long et unique cil vibratile. Cette surface, dans l'épithélium externe, est au con- traire garnie de cils nombreux et courts. Mésodernie ou couche musculaire (tunique musculaire de M. Ed- wards et Haime). Pour Heider (iSî'ï), le mésoderme renferme à la fois des fibres musculaires et du tissu conjonctif. La structure de ce dernier à l'état frais (lebenden Zustande) a, dit-il, une ressemblance si com- plète avec le tissu musculaire, qu'il est difficile de l'en distinguer. Traité par les réactifs fixateurs et colorants, le tissu conjonctif du mésoderme serait, d'après le môme auteur, tantôt constitué par des couches parallèles de fibres intimement unies, tantôt par une sorte de feutrage de fines fibrilles parsemées de lacunes dans lesquelles se trouvent des cellules de différentes formes. Pour Hertwig, le mé- soderme est, au contraire, tout entier formé par du tissu conjonctif et est recouvert sur les faces interne et externe de la paroi du corps par un mince revêtement de fibrilles musculaires qui appartiendrait d'un côté à l'ectoderme et de l'autre à l'entoderme. Les éléments du tissu conjonctif seraient représentés dans les tentacules par de fines fibrilles reliées par une substance intermédiaire homogène et entre lesquelles sont placées de petites cellules du tissu conjonctif renfermant des corpuscules graisseux. Dans la paroi du corps, ce ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 67 même tissu consisterait en couches de fibrilles parallèles et entre- croisées K Ces fibrilles ne peuvent être dissociées. Bourne ('•889) n"a pu découvrir aucune structure dans le méso- derme des parties molles desFongies; aussi lui donne-t-il le nom de mesoglœa qui a été adopté par Haddon(i889)pour désigner la couche moyenne de toutes les Actinies. 11 était nécessaire d'exposer cesl différentes opinions, car leur diversité, en justifiant de nouvelles recherches, fait ressortir en même temps la difficulté qu'on éprouve à interpréter la structure de la couche moyenne. Si, pour Hollard, MM. Edwards et J. Haime, cette couche est musculaire, c'est sans doute parce qu'ils avaient remarqué qu'elle pouvait se contracter fortement. Si, selon R, et 0. Hertwig, le mésoderme est tout entier formé par du tissu con- jonctif, c'est, je crois, surtout en raison de l'aspect fibrillaire et lami* neux qu'il présente dans la presque totalité du corps des Actinies, et en raison aussi de l'absence dans sa texture de fibres musculaires comparablesàcelles desautres animaux. Mais, quelquevraisemblables que soient les considérations sur lesquelles ces deux naturalistes s'appuient, il me paraît difficile d'admettre avec eux que le méso- derme, souvent très épais, de la colonne des Actinies, soit uni- quement constitué par une lamelle de soutien(Stutzlamelle) dont les modifications très variées de forme et d'épaisseur seraient produites par des fibrilles musculaires disposées les unes près des autres en deux couches simples dépendantes l'une de l'ectoderme, l'autre de l'entoderme. On ne peut concevoir que l'action de ces couches rudi- mentaires et superficielles puisse déterminer des contractions qui vont jusqu'à la rupture de la colonne et des organes internes. Mes recherches ont été entreprises sur des spécimens d'Actinies dont les tissus avaient été fixés à un degré extrême d'épanouisse- ment. Le Peachia hastata a surtout été utilisé ; le Sagarlia parasitica, bien que muni d'un mésoderme très épais, m'a paru moins facile à ' » Die iu jeder Lage parallel angeordnet sind und sich abwecfiaelnd^unter rechten' winkel kreuzend bald longitudinal bald quer verlaufen. » 68 L. FAUROT. étudier en raison de sa grande consistance. Jamais, en outre, ses parois dilatées ne s'amincissent au point de devenir translucides comme celles du Peachia. Cependant, malgré les conditions plus favorables offertes par cette dernière Actinie, je ne suis pas parvenu à interpréter complètement et définitivement la structure histolo- gique du mésoderme. Cette couche présente, le plus souvent, une structure lamelleuse et fibrillaire ; parfois aussi, comme dans l'œsophage, elle paraît homogène. Dans la paroi du corps, elle se laisse dissocier en lamelles hyalines, que les coupes longitudinales et transversales montrent disposées en couches superposées parallèles et concentriques. Sur ces mêmes coupes, on observe que les lamelles sont formées de fibrilles courant circulairement autour de l'axe longitudinal de la colonne. Dans les cloisons, ces lamelles et ces fibrilles sont, au con- traire, parallèles à cet axe. Un caractère remarquable du mésoderme est de présenter des plissements plus ou moins saillants, parfois ramifiés. Ces plissements sont très nombreux dans les cloisons et s'y multiplient de manière à produire, dans les faisceaux muscu- laires, une sorte de dissociation naturelle en lamelles fîbrillaires. Quant au rôle physiologique du mésoderme, s'il est vrai, comme le disent Heider et les Hertwig, qu'il consiste à servir de soutien, de charpente, à l'ectoderme et à l'entoderme, il me paraît non moins indiscutable que c'est par sa très grande contractilité que les Acti- nies peuvent modifier leur forme, s'épanouir, se rétracter et se déplacer. Les parois de la colonne doivent être préférées à celles des tenta- cules et de l'œsophage pour observer la structure lamellaire du mé- soderme. Un fragment rectangulaire de colonne étant excisé sur une longueur et une largeur de 2 à 3 centimètres, de manière à y comprendre l'attache de plusieurs cloisons, on le laisse macérer durant plusieurs jours dans une solution faible d'acide chromique. A l'aide d'un pinceau, on dépouille le mésoderme de son revêtement ectodermique et entodermique. On détache ensuite les cloisons qui 1 ÉTUDES SUR LIÏS ACTINIES. 69 y sont fixées, mais de façon à en laisser une très petite portion, sous forme d'un cordon de feuillets longitudinaux (feuillets des fais- ceaux pariétaux). Examiné par transparence, à un faible grossisse- ment, le mésoderme, ainsi mis à nu, parait amorphe ; la face, pri- mitivement recouverte par l'ectoderme, est bosselée irrégulièrement, tandis que celle qui l'était par l'entoderme présente, au contraire, des plissements transversaux, c'est-à-dire courant circulairement autour du grand axe de la colonne. Ces plissements circulaires sont assez régulièrement parallèles et, de distance en distance, sont croisés par les attaches des cloisons à direction longitudinale. La surface des plissements circulaires se laisse dissocier en fibrilles rigides comme des soies et à contours irréguliers, déchique- tés. Ces fibrilles ne constituent pas des éléments histologiques, mais seulement de très fines saillies arrachées par la manœuvre des aiguilles. La longueur des saillies circulaires paraît être limitée à l'intervalle qui sépare deux cloisons voisines ; mais si, avec des pinces, on saisit à la fois plusieurs de ces saillies, ou mieux une des cloisons incomplètement détachées, et qu'on tire fortement, il se trouve qu'on enlève une large pellicule de même dimension que le fragment de colonne. On arrache ainsi, du même coup, tous les plissements circulaires de la paroi et tous les cordons de feuillets longitudinaux appartenant aux faisceaux pariétaux des cloisons. Nous verrons, d'ailleurs, que les cloisons sont fixées à la paroi du corps uniquement par l'intermédiaire des plissements circulaires du mésoderme de cette paroi. On peut, par le même procédé, enlever successivement plusieurs pellicules de mêmes dimensions que la première, mais elles ne pré- sentent pas, comme celle-ci, de saillies fibrillaires ; elles sont planes, lisses, et ont le même aspect hyalin, amorphe, que nous avons signalé-pour le fragment de colonne examiné dans son entier (fig. 7, pi. I). Cependant, à un fort grossissement (300 à 400 diamètres), ces minces membranes parallèles n'apparaissent plus amorphes; elles sont alors parsemées de stries et de particules granuleuses. Je n'y 70 l FAUROT. ai jamais observé de corps pouvant être rapportés avec certitude, soit à des fibres, soit à des cellules dites de tissu conjonctif, sem- blables à celles qui ont été figurées schématiquement par Hertwig*, Il est probable que le mésoderme de la colonne est entièrement constitué par ces membranes superposées concenlriquement les unes aux autres, car il m'a été possible d'en détacher non seule- ment de la surface interne de la colonne, mais aussi de la face externe ou ectodermique. Leur cohésion est de plus en plus forte à mesure qu'elles sont situées plus profondément; aussi ne parvient- on à en isoler qu'un très petit nombre. A l'examen au microscope, les coupes transversales ou longitudi- nales de la colonne offrent toujours, lorsqu'elles sont suffisamment colorées, un aspect à la fois lamelleux et fibrillairc. La photogra- phie 6, pi. V, obtenue à un grossissement de 35 diamètres, repro- duit une coupe longitudinale de colonne non contractée. Elle montre la disposition parallèle des membranes dont les bords sectionnés apparaîtraient, à un plus fort grossissement, comme hérissés de fibrilles extrêmement fines orientées dans un sens perpendicu- laire à celui de la coupe. Le parallélisme des membranes est beau- coup moins net sur le côté entodermal de la colonne qui, sur la photographie, est reconnaissable aux plissements ramifiés corres- pondant aux saillies circulaires dont il a été question plus haut. D'autres préparations auraient, au contraire, montré les membranes plus distinctes de ce même côté entodermal que du côté ectoder- mal. Les différences d'aspect qu'on peut observer ainsi, à différents niveaux de la colonne, sont dues, sans doute, à de légères contrac- •lions partielles qui peuvent se produire à côté de dilatations égale- ment partielles. De ces variations paraissent dépendre l'écartement et le rapprochement plus ou moins intime des membranes parallèles. De l'examen du mésoderme sur des coupes de colonne contractée, il semble résulter une structure un peu différente de celle que nous t THeActinien, Taf. III, fig. 18, s. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 71 venons d'exposer. Déjà, sur des parties très légèrement contractées, le parallélisme des membranes disparaît; il se produit d'abord des ondulations, qui, à mesure que la contraction devient plus forte, s'enchevêtrent les unes dans les autres et finissent par former comme un réseau très embrouillé de fibrilles. Sur la photographie 4, pi. V, qui reproduit, au même grossissement que la précédente, une coupe transversale de colonne, on peut constater ces différentes modifi- cations. Elles débutent du côte entodermal et se terminent du côté ectodermal beaucoup plus contracté, ainsi que l'indique la forte et étroite saillie de l'épithélium. On ne distingue pas de noyaux dans ces fibrilles, que les dissociations ne parviennent pas à isoler. L'étude de nombreuses préparations pratiquées sur des Actinies, à divers états de contraction, m'a montré que, dans la colonne, l'as- pect fîbrillaire du mésoderme est d'autant plus net que les plisse- ments de cette couche sont plus nombreux et plus profonds. Dans les tentacules, les deux faces eclodermale et entodermale du mésoderme ont une autre apparence que dans la colonne. Les plissements circulaires ramifiés sont ici de simples denticulations (phot. \, pi. V) et les bosselures irrégulières de la face ectodermale sont remplacées par des plissements longitudinaux. Chez le Chito- nactis coronata (fig. 2, pi. 1), à ces plissements s'en ajoutent d'autres secondaires et tertiaires, de plus en plus petits. Les tentacules des très jeunes Tealia felina présentent aussi les mêmes particularités et, chez les individus de cette dernière espèce qui ont acquis leurs dimen- sions définitives, les plissements se compliquent encore davantage et se soudent par leurs extrémités, de manière à former des lacunes irrégulières. Ilertwig (1879) attribue ces lacunes aux plissements de la couche musculaire ectodermale, les bords de ces plissements étant réunis secondairement par la soudure de la substance conjonctive (mésoderme) enveloppante. Le mésoderme s'amincit graduellement en passant de la couronne tentaculaire au disque buccal et à l'œsophage; mais, chez beaucoup d'Actinies et particulièrement Peachia, J/yanlhus, Tealia, il acquiert 72 L. FAUROT. subitement une épaisseur considérable dans les rainures commissu- rales et sa structure y semble homogène, quels que soient les gros- sissements et les réactifs employés. Mais ce n'est sans doute qu'une apparence due à la cohésion très intime de membranes parallèles. Avant de décrire la structure du mésoderme dans les cloisons, il importe d'examiner comment cette couche se modifie chez beaucoup d'Actinies pour former un épaississement du sommet de la colonne, auquel on a donné le nom de muscle ou sphincter circulaire. Cet or- gane est facile à apercevoir à l'œil nu lorsqu'on a divisé longitudi- nalement une colonne de Sagartia parasilica ou de Tealia felina. SPHINCTER. Schneider et Rotteken (iS'îi) ont, les premiers, signalé que des fibres circulaires s'amoncellent soit dans l'épaisseur du mésoderme de la colonne {Actinoloba), soit contre la face entodermale de cette même partie du corps {Tealia). Le sphincter du Tealia, décrit par Hertwig, est particulièrement remarquable par sa forme en bour- relet annulaire faisant saillie dans la cavité du corps. En examinant la photographie 1, pi. IV, qui le reproduit (en coupe longitudinale) adhérant à un fragment du sommet de la colonne, on constate que ce bourrelet est formé par un prolongement du mésoderme; le centre du bourrelet et le mésoderme de la colonne sont, en effet, réunis par un isthme étroit. Les longues et étroites lames rayon- nantes de la périphérie de ce bourrelet peuvent être assimilées aux plissements circulaires qu'on distingue, sous forme de denticulations, à la face entodermale de la colonne. Il est vraisemblable que ces plissements, dont il a été question dans le paragraphe précédent, se sont allongés en lames autour du bourrelet. On remarquera, en outre, que ces lames se sont entrelacées et soudées en réseau à leur base, de manière à former des lacunes irrégulières. Chez les autres Actinies pourvues d'un sphincter, on constate une toute autre disposition. La plus simple que j'aie observée est celle offerte par VAdamsia padiala. Elle est figurée en coupe longitudi- ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 73 nale par la photographie 3 (pi. IV), d'un fragment de portion supé- rieure de la colonne de cette Actinie. Le sphincter y est constitué par des lames transversales et superposées de substance mésoder- male; des faces supérieures et inférieures de ces lames se détachent de courts prolongements qui se soudent sans régularité avec ceux des lames voisines et limitent ainsi des lacunes communiquant lar- gement entre elles sur toute la périphérie de la colonne. Ainsi que le montre la figure 5,spA, pl.I, les lames superposées sont contenues entre deux bandes longitudinales de mésoderme, une externe plus large et une interne plus mince. Ces deux bandes s'écartent graduel- lement l'une de l'autre, et les lames s'élargissent transversalement dans les mêmes proportions. Aux points où les bandes sont rappro- chées, il n'existe entre elles que de très petites lacunes irrégulières, limitées par des trabéculesde mésoderme, qui sont comparables aux plissements circulaires tapissant, de même que chez toutes les Ac- tinies, la face entodermale de la colonne. Il semble même que les lacunes, en se rapprochant de l'entoderme, se confondent peu à peu avec les sillons que limitent ces plissements. Cette particularité va nous permettre d'expliquer d'une manière vraisemblable le mode de formation du sphincter. Chez VAdamsia palliata, les lames circulaires et superposées qui constituent le sphincter peuvent être assimilées aux larges plisse- ments, également circulaires et superposés, qui garnissent la péri- phérie du bourrelet sphinctérien du Tealia. Mais ces lames ne sont pas rassemblées, comme dans cette Actinie, autour d'une masse globuleuse centrale, en partie détachée du mésoderme; elles ont conservé leur disposition parallèle comme tous les autres plisse- ments circulaires moins saillants qui garnissent la face entodermale de la même couche au-dessous du sphincter. Dans le sphincter du Tealia, les plissements sont en partie ramifiés et soudés à leur base; de même, dans celui de VAdamsia, les lames s'envoient de l'une à l'autre des ponts de substance mésodermale. Mais, tandis que les bords internes des plissements du sphincter du Tealia demeurent 71 L. FAUROT. libres, ceux des lames du même organe, chez l'Adamsia, sont soudés entre eux; c'est de leur soudure qu'est résultée la bande interne longitudinale du mésoderme, isolant complètement de la cavité du corps les lames parallèles et les lacunes. La face entodermale de cette bande interne est, d'ailleurs, recouverte de petits plissements circulaires semblables à ceux qui garnissent la même face de toute la portion de colonne située au-dessous de cet organe. Un mode de formation semblable peut être attribué au sphincter du Chitonactis coronata (phot. 2, pi, IV), qui est formé d'un réseau peu serré de trabécules. Les mailles les plus épaisses et les plus lon- gues de ce réseau y sont orientées transversalement. Chez le Saga7'- tia parasùîca, le sphincter est, ainsi que celui des trois Actinies précédentes, enfermé dans l'épaisseur du mésoderme. Il présente, en coupe longitudinale (phot. 4, pi. IVj, l'aspect d'une fine dentelle formée de petites lacunes disposées en séries transversales superpo- sées. Ces lacunes sont plus larges du côté de la bande externe que de la bande interne, qui est seule représentée dans la photographie. On peut encore considérer ce sphincter comme ayant même origine que celui de VAdamsia et du Chitonactis, si l'on admet que les lames transversales, très épaisses chez le Sagartia, se sont soudées non seulement par leurs extrémités internes en une bande longitudinale, mais aussi dans toute leur étendue par des prolongements égale- ment très épais*. Le sphincter du Polythoa arenacea a une structure beaucoup plus simple que les précédents ; il semble formé par une très forte saillie des plissements circulaires de la face entodermale de la colonne. ' 0. et R.Hert\vig(18'ï9) expliquent d'une autre façon la formation des lames et des lacunes contenues dans le sphincter. Pour eux, la couche entodermale de fibrilles musculaires s'est plissée, et lorsque la substance conjonctive (mésoderme) qui entoure les plis est venue en contact sur les bords de ces plis, elle s'est soudée de manière à enclore complètement un amas de fibrilles musculaires. Ces fibrilles, d'abord entodermales, seraient donc maintenant mésodermales. Là, disent-ils, existe une structure semblable à celle des animaux vertébrés, seulement le tissu coujonctif ne limite pas encore le paquet de fibrilles comme une cloison spéciale, le sarco- lemne... A la vérité, dans le faisceau musculaire primitif des Vertébrés, le proto- ÉTUDES SUR LES ACTFNIES. 75 La présence ou l'absence d'un sphincter chez les Actinies n'a aucun rapport avec les deux divisions qu'on a faites de ces ani- maux : Actinies à tentacules rétractiles, Actinies à tentacules non rétractiles. Je n'en ai pas observé sur les Edwardsia, Peachia, Hal- campa, Jlyanthus, Bunodes, dont les tentacules sont rétractiles. Le Cerianthus membranaceus, le Discosoma giganlea, dont les appendices ne sont pas rétractiles, en sont également dépourvus. Hcrlwig (-ISSS) a signalé que VAnthea, non rétractile, est muni d'un épais sphincter et que le Corallimorphus, également non rétractile, n'en présentait pas. Il en conclut que ces termes : rétractiles et non rétractiles sont impropres, attendu que, dans la classification, le caractère anato- mique, et non l'apparence physiologique, doit avoir une valeur sys- tématique. Il me paraît évident que le sphincter n'a aucune action sur les tentacules ; par sa situation, en eiTet, ce muscle semble devoir agir plus particulièrement sur le sommet de la colonne. Les cloisons, constituées en grande partie, ainsi que le sphincter, par la subs- tance contractile mésodermale, sont bien mieux disposées, en se contractant, pour attirer le disque tentaculaire dans l'intérieur de la cavité du corps de l'Actinie. Il est probable que le sphincter a un tout autre but que celui qui lui a été attribué, car beaucoup d'Actinies sont rétractiles sans être cependant pourvues de cet organe. On remarquera, ainsi que nous l'avons exposé plus haut, que sa structure, chez le Tealia, Adamsia, Chitonactls, Sagartia, semble dériver de celle des plissements circulaires revotant la surface interne du mésoderme de la colonne. Or, ces plissements s'observent aussi bien sur les Actinies épanouies que sur les Actinies contrac- plasma avec ses noyaux domine, tandis que, les fibrilles musculaires de l'Actinie ne sont réunies qu'en une fine et unique couche sous l'enveloppe de substance con- jonctive. Le sphincter ainsi représenté à l'origine par une lacune tapissée de fibrilles mus- culaires s'augmenterait par une succession de plissements se produisant dans sea propres parois, chaque plissement isolant par la soudure de ses bords une nouvelle lacune. 11 en serait de même, disent-ils, dans tout le règne animal toutes les fois que, dans un muscle, de nouveaux faisceaux primitifs s'ajoutent aux premiers. 76 L. FAUHOT. tées ; il est, par conséquent, difficile de décider si leur action est de diminuer soit le diamètre, soit la hauteur de la cavité du corps. Les coupes longitudinales du sphincter de diverses Actinies pré- sentent des aspects différents dont Hertwig a tiré parti pour carac- tériser des genres et des espèces. Dans la classification, il admet (-1888 et i888) des sphincters minces ou épais, des sphincters mé- sodermaux {Sagartia parasitica), entodermaux {Tealia, Polythoa), D'après le même auteur, les Actinies pivotantes {Ilyantkidœ, Sipho- nactinidœ) auraient un sphincter obscur (?). CLOISONS. Nous étudierons leur mode d'attache à la paroi du corps ainsi que leurs faisceaux de feuillets musculaires pariétaux et unilaté- raux. Nous n'examinerons ni les entéroïdes, ni les acontia,ni les cel- lules sexuelles déjà décrits par Hertwig. Sauf chez le Cérianthe et quelques Zoanthides, chez lesquels les cloisons ne possèdent ni feuillets pariétaux ni feuillets unilatéraux, la structure histologique des cloisons paraît identique chez toutes les Actinies. Le mésoderme, qui forme ces feuillets, présente une structure nettement fibrillaire. Les fibrilles dérivant d'une substance contractile doivent nécessairement être désignées sous le nom de fibrilles musculaires ; elles ont, d'ailleurs, l'aspect de fibres lisses. La photographie 2, pi. IV, qui reproduit une coupe longitudinale traversant à la fois l'attache d'une cloison et la paroi du corps, montre comment le mésoderme passe de la première à la seconde. Entre la portion de paroi a et la cloison c, on voit, disposées sur une ligne, une série de petites lacunes b, qui correspondent à l'intervalle des plissements circulaires, très épais chez cette Actinie [C hilonactis) . Une autre coupe (phot. 3, pi. V), pratiquée sur unPeachm contracté, ne passe pas, comme la précédente, exactement par le milieu de la cloison ; elle montre que des tractus fibrillaires se dirigent trans- versalement de la paroi contractée dans l'épaisseur de la cloison. On voit, en outre, que c'est de l'extrémité seulement des plisse- ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 77 ments circulaires de la face interne de la colonne que partent les tractus. On retrouve la même disposition chez toutes les Actinies ; les dilTérences qu'on observe entre plusieurs espèces paraissent dé- pendre uniquement de l'épaisseur plus ou moins grande des plisse- ments et de leur état d'épanouissement et de contraction. Le mésoderme des cloisons n'est donc en continuité avec celui de la colonne que par l'intermédiaire des plissements circulaires. Il en résulte une assez faible adhérence qui explique la facilité avec laquelle on peut, ainsi que cela a été dit plus haut, séparer l'une de l'autre ces deux parties du corps des Actinies. Peut-être cette dis- position a-t-elle pour conséquence de laisser les cloisons se con- tracter indépendamment de la colonne ? Peut-être aussi a-t-el!e pour origine le mode de croissance des cloisons? Celles-ci naissent, en effet, à l'extrémité supérieure de la colonne, à l'union de cette colonne avec le disque tentaculaire, d'où elles descendent graduel- lement jusqu'au centre de l'extrémité basale. 11 est très vraisem- blable que les cloisons, durant leur croissance de haut en bas le long de la surface interne de la colonne, se soudent aux cimes des saillies circulaires, franchissant les sillons qui se transforment ainsi en lacunes. Les nombreux feuillets qui constituent le faisceau pariétal et le faisceau unilatéral sont appendus au mésoderme de la hampe, et les intervalles qui les séparent sont remplis par des cellules de l'entoderme. L'adhérence des feuillets à la hampe est très faible, et il semble que celle-ci n'est unie avec eux qu'au moyen d'une lamelle superficielle. C'est ainsi que, sur une cloison dépouillée, à l'aide d'un pinceau, de son revêtement de cellules entodermales, on peut, en tirant à soi un des feuillets, en détacher plusieurs qui restent unis par une membrane extrêmement mince. La photographie 1, pi. 111, montre une cloison ainsi préparée et dont un certain nombre de feuillets ont été écartés de la hampe, laquelle apparaît comme une lame indépendante. Ces faibles rap- ports de continuité entre la hampe et les feuillets rappellent très 78 L. FAUROT. exactement les particularités que nous avons exposées au sujet de runiori des plissements circulaires et des cloisons à la face interne de la colonne. Sur les coupes transversales des cloisons, la surface externe des feuillets apparaît, à un grossissement de 200 à 300 diamètres, revêtue de petites granulations claires placées les unes à côté des autres qui, sur des coupes obliques et longitudinales, se montrent comme de fines saillies faisant partie intime de ces feuillets. On observe aussi très nettement des saillies semblables sur les parois des lacunes des sphincters de VAdatnsia palliata du Chitonactis co- ronata et du Sagartia parasitica. D'après 0. et R,. Hertwig, ce sont des fibres musculaires lisses appartenant à l'endoderme et accolées en couche simple sur le mésoderme, dont le rôle serait uniquement de leur servir de soutien. Mes recherches m'ont conduit à une inter- prétation différente. Si l'on examine des coupes assez épaisses et un peu obliques de cloisons non contractées, on constate que les granulations claires n'existent pas et qu'elles sont remplacées par des barbelures (phot. 2, pi. III). En coupe longitudinale, ces barbelures ont l'aspect de fines fibrilles fixées sur les feuillets et dirigées parallèlement à la longueur de ces derniers. Elles ne sont pas accolées en couche simple et indé- pendante des feuillets, mais semblent plutôt faire partie des élé- ments constituant ces derniers. Par les dissociations, les feuillets se laissent subdiviser en lames et en lamelles formées de fibrilles ; mais parmi ces fibrilles, on ne saurait discerner avec certitude celles qui appartiennent aux barbelures de celles qui appartiennent aux lamelles. La photographie 5, pi. III, reproduit une lamelle obtenue par dissociation. Elle est parcourue transversalement par des plis on- dulés qui se correspondent non seulement d'une lamelle à l'autre, mais aussi d'un feuillet à l'autre feuillet. Les coupes longitudinales pratiquées parallèlement au plan de la cloison (phot. 3, pi. 111) font voir comment les plis transversaux de chacun des feuillets ondulent ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 79 et se raccordent les uns avec les autres. Les lamelles des feuillets paraissent entièrement formées de fibrilles difficiles à isoler. Il ne m'a pas été possible d'observer si ces fibrilles filiformes, lisses, très longues, à contours déchiquetés et sans noyau, sont réunies par une substance intermédiaire, ou si elles sont simplement accolées. Leur assemblage en lamelles peut faire cependant supposer qu'elles adhèrent intimement à une membrane extrêmement fine et trans- parente de tissu mésodermique, et la difficulté qu'on éprouve à les séparer résulte peut-être de ce qu'on les arrache plutôt qu'on ne les isole. Dans l'épaisseur delà colonne du Gérianthe, on observe des lames mésodermiques de même structure que les lamelles des feuillets que nous venons de décrire. Elles sont disposées parallèlement les unes aux autres et, sur des coupes transversales (phot. 5, pi. IV), elles apparaissent, sous la forme de chapelets linéaires de granulation, beaucoup plus volumineuses que celles qu'on observe sur les parois des lacunes du sphincter et à la surface des feuillets des cloisons des autres Actinies. La photographie 6, pi. III, reproduit quatre de ces lames préparées par dissociation. Trois d'entre elles sont superposées et ont été repliées à trois niveaux différents. Elles ne sont séparées par aucune substance intermédiaire. Les fibrilles qui les composent sont beaucoup plus épaisses que les lamelles précédemment étudiées ; elles sont, en outre, comme entrela- cées. Isolées et colorées au vert de méthyle, leur noyau devient apparent. DÉVELOPPEMENT. Segmentation. — Qhez la plupart des Actinies, la segmentation des œufs fécondés se produit sans que ceux-ci se détachent des mésen- téroïdes. Leur issue hors des ovaires n'a jamais été observée dans les espèces suivantes très fréquemment examinées aux laboratoires de Roscoff et deBanyuls : Actinia mesembryanthemum, Anthea cereus, Bunodes gemmacea, Chltonactis coronata. Elle est au contraire facile à 80 L. FAUKOT. constater chez les Adamsia palliata et les Sagartia parasitica, si l'on a soin, aux mois de mai et juin, d'en réunir un grand nombre dans un espace restreint tel qu'un bocal ou une cuvette de verre. 11 est probable qu'ainsi que cela peut être constaté pour d'autres Cœlen- térés (Lucernaires) le changement de milieu, l'altération de l'eau ou d'autres causes telles que les lésions internes produites durant la pêche et le transport de la mer à l'aquarium ont pour effet de pro- voquer la ponte des cellules-œufs et des cellules à spermatozoïdes arrivées à maturité. Aussi, n'esl-il pas certain que, dans la mer, les œufs soient rejetés tous à la fois en grande masse comme on peut l'observer dans les conditions que nous venons d'indiquer. On constate, d'ailleurs, que les Sagartia parasitica, vivant dans de vastes récipients à eau constamment renouvelée, donnent assez fré- quemment naissance à des embryons déjà pourvus de deux ou trois rangées de tentacules. Cette viviparité est habituelle à d'autres Ac- tinies {Aclinia, Bunodes, Chitonactis, etc.). Kowalevsky (i8'î3), chez \eSaga?Hia parasitica, deLacaze-Duthiers, François (1885), chez Y Adamsia palliata^ ont observé des œufs en segmentation. De mon côté, j'ai étudié à plusieurs reprises cette phase du développement sur les mêmes espèces ainsi que sur le Phellia elongala et le Peachia haslala. D'après Kowalevsky, les œufs du Sagartia parasitica se fractionnent régulièrement et se trans- forment en amas de cellules sans cavité de segmentation. Après que le fractionnement est achevé, l'embryon se couvre de cils vibratiles et commence à nager. 11 apparaît ensuite, à l'une des extrémités, un petit refoulement en forme de fossette. Les stades ultérieurs n'ont pu être suivis parce que l'œuf est complètement opaque. L'endo- derme ne se formerait pas par refoulement, mais probablement par scission des cellules. D'après mes recherches, les phénomènes de la segmentation dif- fèrent un peu de ceux qui viennent d'être décrits. Ils m'ont paru identiques pour le Sagartia parasitica et V Adamsia palliata. Les divisions de l'œuf fécondé se font d'abord par 2, 4, et l'on ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 81 ' compte parfois des œufs à 8 et 16 blasLomères, mais le plus sou- vent la segmentation se poursuit sans que l'on puisse reconnaître un doublement régulier et continu du nombre de ces blastomères. Durant le fractionnement il arrive, en effet, que des cellules ne se divisent pas dans le même temps que les autres et qu'elles restent plusieurs minutes avec un volume plus considérable. Ce retard se produit indifféremment sur des cellules voisines ou sur des cellules éloignées; c'est ainsi que sur un œuf à 28 blastomères, deux de ceux-ci, situés aux deux extrémités d'un même axe transversal, ne s'étaient pas divisés. Sur un autre œuf comptant de 40 à 50 blas- tomères, quatre en contact immédiat avaient également conservé un volume supérieur à celui des voisins. J'avais d'abord rapporté ces faits et beaucoup d'autres semblables à des cas de segmentation anormale, mais en renouvelant plusieurs fois mes observations j'ai constaté que les œufs, bien que formés de cellules inégales, subis- saient tous les mêmes transformations ultérieures pour arriver au slade planula. J'ai ainsi acquis la certitude qu'il s'agissait d'une marche normale de développement. La segmentation ne s'arrête pas au moment où l'œuf a pris l'as- pect d'un amas cellulaire (10° heure) que l'on pourrait comparer à nwQ monda pleine s'il n'était de forme très irrégulière, mais elle se poursuit encore pendant environ six heures. Les blastomères de- viennent de plus en plus petits, et en même temps on observe à la surface de la masse une ou plusieurs dépressions, parfois de larges lacunes et des bosselures. Sur quatre-vingts à cent œufs examinés à cette période, c'est à peine s'i; lui est dix qui se ressemblent. Il en est de comparable à des gastrula, mais la plupart n'en ont pas l'as- pect extérieur. Les coupes faites sur ces œufs segmentés montrent qu'ils sont formés d'une seule couche de cellules, et que les parties déprimées ont l'apparence d'invaginations; mais j'ignore si l'une de ces dépressions se complète de manière à former une véritable gas- trula. L'irrégularité de forme des amas cellulaires s'est opposée, jus- qu'à présent, à une observation concluante, et je dois avouer que ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN, — S" SÉRIE. -- T. III. 1895. 6 82 L. FAUROT. dans la note (1885) j'ai été trop affirmatif en disant que les monda irrégulières se transformaient en gastrula. Vers la seizième heure environ, il se produit par degrés un change- ment considérable dans la forme des amas cellulaires. Ceux-ci se régularisent, deviennent sphériques, et les blastomères, d'abord très distincts, deviennent invisibles. Les cils vibratiles apparaissent et avec eux les mouvements de natation. Sur les coupes, on constate que ces petites sphères nageantes (fig. 1, pi. II) ne possèdent pas de cavité intérieure. On n'y voit (fig. 12, pi. 11) qu'une seule couche épi- théliale distincte enveloppant une masse cellulaire dont les éléments sont plus petits et plus condensés dans la partie centrale, plus volu- mineux et plus lâches à la périphérie. L'œuf est donc arrivé au stade planula pleine. S'il est vrai qu'une gastrula par invagination a pré- cédé ce stade, la portion invaginée de Fectoderme n'aurait donc pas constitué directement l'endoderme, mais d'abord la masse cellulaire interne 1. La segmentation des ovules de Peachia hastala évolue de la même manière que chez VAdamsia palUata et le Sagartia parasilica, mais il est à remarquer que la membrane vilelline de l'œuf mûr de cette Actinie est couverte d'un revêtement de prolongements ressemblant à des cils très fins et immobiles (phot. 6, pi. YI). J'ai observé que les blastomères étaient également revêtus de ces mêmes cils ou soies rigides, ce qui démontre que la membrane vitelline participe à la segmentation. M. de Lacaze-Dulhiers («8'ï2) a décrit et figuré des ovules à'Actinia mesembryanlliemum revêtus d'appendices ana- logues, et chez d'autres animaux (Echinodermes, Géphyriens, Ver- tébrés), Balfour a aussi (-1883, p. 22) signalé soit des pores rayonnes, soit des prolongements de la membrane vitelline. Cependant, jus- qu'à présent ni ces pores, ni ces prolongements n'ont été observés à la surface des cellules de segmentation. > D'après Jourdan(I 899), il se l'orme chez V Aclimames emhryanlhemumuue gas- trula par invagination dont la cavité est dépourvue de cellules. Cependant la.'planula serait pleine. ÉTUDES SUK LES ACTINIES. 83 Formation de la bouche, de l'œsophage., des huit premières cloisons et des huit premiers tentacules. La planula du Peachia hastata ainsi que celle do V Adamsia pal- liata et du Saga7-tia parasitica est d'abord sphérique. 11 s'y forme en un point une dépression circulaire et, à l'extrémité opposée, chez les deux dernières espèces, une houppe de cils. Lorsqu'en nageant les planules s'allongent, l'enfoncement est toujours en arrière et la houppe de cils en avant. Cette transformation a déjà été observée par M. de Lacaze-Dulhiers sur VActinia mesembrianlhemum et d'au- tres Actinies. Les embryons ont alors la forme de petites outres, on pourrait dire l'apparence extérieure de gastrules.car par transparence on ob- serve que la masse cellulaire interne diminue peu à peu, tandis que l'enfoncement circulaire, destiné à former le disque tentaculaire, la bouche et l'œsophage, s'accuse de plus en plus. Sur les embryons de Peachia, deux jours après le début de la segmentation, on peut déjà distinguer l'œsophage à travers les parois du corps. Les figures 2 et 3, pi. II, reproduisent deux de ces embryons. Chez l'un, l'en- foncement est en partie (disque oral) extroversé; chez l'autre, il a conservé son aspect habituel. Arrivés à ce stade, tous les embryons de Peachia hastata mou- rurent, mais il n'en fut pas de même pour ceux à' Adamsia palliata et de Sagartia parasitica que, grâce à l'excellente installation du la- boratoire de Banyuls, j'ai pu conserver vivants pendant près de deux mois. Ils se fixèrent par l'extrémité garnie de cils trois à quatre jours après le début de la segmentation . La suite du dévelop- pement ne fut pas identique chez les deux espèces comme elle l'avait été jusqu'alors. Les embryons A' Adamsia palliata, au bout de vingt-quatre à trente- six heures, furent trouvés pourvus de huit sillons longitudinaux exté- rieurs, c'est-à-dire de huit cloisons, et un peu plus tard, huit tuber- cules destinés à s'allonger en tentacules apparurent à la fois autour 84 L. FAUROÏ. de la bouche. Le développement de ces embryons resta ensuite sta- tionnaire, c'est-à-dire que ni cloisons nouvelles, ni tentacules nou- veaux ne se formèrent. Des pèches au filet de surface faites durant le mois de juin, dans l'anse de Morgatt (baie de Douarnenez), m'ont procuré un nombre très considérable de larves nageantes, toutes pourvues de huit cloi- sons dont deux, visibles par transparence, étaient remarquablement plus développées que les six autres. Ces larves, appartenant sans doute à différentes espèces d'Actinies, étaient trois à quatre fois plus volumineuses que celles à'Adatnsia palliafa et àeSagat'tia parn- sitica, munies du même nombre de cloisons. Elles se fixèrent peu après avoir été recueillies et poussèrent huit tentacules. Il est cer- tain que ces larves volumineuses étaient nées dans des conditions plus favorables que celles des deux espèces précédentes. Aussi, la cavité moins remplie de cellules (globules vitellins) était-elle relati- vement grande, et ses parois plus transparentes. Plusieurs d'entre elles se détachèrent après environ quarante-huit heures de fixation et se remirent à nager munies encore de leur fouet aboral. Parmi les larves qui s'étaient définitivement fixées, j'ai observé qu'il y en avait de difiérentes tailles. Il est donc probable que certaines conditions autres que celles dépendant de leur âge ou de leur volume déter- minent le passage de la phase errante à la phase fixée. Ainsi que chez les embryons à'Adamsia palliata, les huit tentacules apparurent à la fois, sans qu'il fût possible de constater une avance des uns sur les autres. Au bout de huit jours, ils avaient atteint une longueur de 1 à 2 millimètres, qui est à peu près celle que la colonne mesurait à cette période du développement. Transparents et très mobiles, ils se raccourcissaient ou s'allongeaient inégalement par l'effet de contractions partielles. Cependant, malgré les variations fréquentes de forme et de volume qui en résultaient, j'ai observé, en examinant un très grand nombre d'embryons d'Adamsia, que, parmi les huit tentacules, deux étaient plus petits que les six autres. Nous verrons plus loin que ces tentacules prolongent deux interloges. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 85 Des coupes transversales de ces embryons fixés (fig. 11, pi. II) à.'Adamsia démontrent que la masse cellulaire interne, qui remplis- sait la planula, ne s'est pas encore complètement résorbée. Le mé- soderme * est apparu au-dessous de l'ectoderme, et l'entoderme, encore indistinct, se formera peut-être aux dépens de la masse cel- lulaire interne. On voit, en outre, que deux cloisons, plus larges que les autres, sont bordées par de très volumineux entéroïdes. Ce ca- ractère, ainsi que leurs rapports de situation, permet de les identi- fier avec celles que M. de Lacaze-Duthiers a reconnues comme s'étant formées les premières chez VActinia mesembryant hemum, le Bunodes gemmacea, le Sagartia bellis et 5. troglodytes. Ainsi qu'il le signale, ces deux cloisons divisent la cavité de l'embryon en deux loges iné- gales. La plus grande des loges correspond au côté que nous avons nommé dorsal, la plus petite au côté ventral. Les coupes transversales faites au niveau de l'œsophage des mêmes embryons (fig. 9, pi. II) montrent quelle est l'orientation du faisceau musculaire unilatéral sur chacune des huit premières cloisons. Quatre de celles-ci, dont deux correspondent à l'une et deux à l'autre des commissures, ont leur faisceau orienté suivant le mode qui est particulier aux cloisons commissurales chez toutes les Hexactinies. Les quatre autres cloisons, placées deux à gauche et deux à droite, ont ces mêmes faisceaux tournés du côté de la paire commissurale qui a été appelée ventrale. Une disposition semblable des cloisons a été observée par Hertwig sur des larves nageantes d'Actiniaires. Elle peut donc exister avant la fixation, mais il n'en est pas ainsi dans toutes les espèces de ce groupe. Les embryons provenant de l'anse de Morgatt étaient dé- pourvus de faisceaux unilatéraux avant cette phase de leur dévelop- pement, et nous avons même observé, au laboratoire de Banyuls, de ' D'après JouRDAN (1879), h\ mésoderme de V Aclinia mesemhryanthemum ^e forme aux dépens de l'ectoderme. « C'est, dit-il, une simple différenciation de la région basilaire de l'ectoderme. « Il en serait de même, d'après le même auteur, chez le Balano\^hylUa regia. 86 L. FAUROT, jeunes Antheacereus, fixés depuis plus de quinze jours et munis de huit cloisons qui n'avaient aucune trace do ces faisceaux. Parmi les huit tentacules prolongeant les chambres limitées par les huit cloisons, il en est deux, avons-nous dit, qui, chez VAdamsiapal- liata, sont plus petits que les six autres. Ils sont placés de chaque côté d'un tentacule commissural, qui est certainement le dorsal, car, à travers le disque tentaculaire bien épanoui et près du commissural opposé, on apercevait les deux gros entéroïdes dont nous avons parlé plus haut qui, en divisant la cavité de l'embryon en deux moitiés inégales, permettent d'orienter facilement cet embryon. Or, les deux chambres voisines de la loge commissurale dorsale et qui corres- pondent aux deux plus petits tentacules, sont les seules dans les- quelles aucune cloison nouvelle n'apparaîtra jusqu'après la forma- tion d'un stade où la jeune Actinie comptera douze de ces cloisons. Ce sont donc les deux premières des six interloges primitives de ce stade hexactiniaire, pendant lequel six tentacules loculaires alter- nent avec six tentacules interloculaires plus petits. On avait cru, jusqu'à présent, que le stade 8 du développement des Hexactinies se conservait sans modification chez VEdivardsia adulte. Nous montrerons que cetteActinie possède, non pas huit, mais seize et même vingt cloisons, dont huit, il est vrai, sont de très grande dimension, tandis que les huit ou les douze autres sont très petites. Formation du stade 12; Je n'ai pas observé la poussée de plus de huit tentacules ni sur les embryons d'Adamsia palliata, ni sur ceux des espèces indéterminées que j'avais recueillis dans l'anse de Morgatt. Les embryons do Sagartia parasitica, au contraire, passèrent très rapidement du stade 8 au stade 12 par la formation de quatre nouveaux tentacules succédant à la naissance de quatre nouvelles cloisons. L'apparition de ces dernières fut manifestement indiquée à la face supérieure du disque tentaculaire, par la formation de quatre nou- veaux sillons péristomiaux, ne se prolongeant pas comme les huit ÉTUDES SUR LES ACTINIE?. 87 plus anciens jusqu'aux bords de l'orifice buccal (fig. 7 et 8, pi. II). En même temps, deux tentacules poussèrent de chaque côté du commis- sural ventral et deux autres aux extrémités de l'axe médian perpen- diculaire àl'axe commissural. La longueur des quatre nouveaux appen- dices ne surpassa point celle des deux tentacules interloculaires que nous avons signalés au stade 8, chez TAdamsia palliata, comme étant moins longs que les six autres. A cette période du développement, il y a donc six grands et six petits tentacules, dont les rapports de situation avec les douze cloi- sons peuvent se reconnaître facilement si l'on compare la figure 8, pi. II, avec la figure 1 de la page 105. On voit que les quatre plus petites cloisons, c'est-à-dire les plus jeunes, ont leurs faisceaux unilatéraux placés en regard des mêmes faisceaux orientant les quatre cloisons latérales plus anciennes. Ces huit cloisons constituent ainsi quatre loges, qui, avec les deux commissurales, font un total de six. Elles sont séparées par six interloges, dont deux, situées de chaque côté de la loge commissurale dorsale, étaient déjà, au stade 8, prolon- gées en deux moins longs tentacules. Les six petits tentacules sont donc tous interloculaires et les six grands tous loculaires. Les embryons de Sagartia parasitica qui ont servi à ces observa- tions vécurent une quinzaine de jours, sans augmentation de nom- bre de leurs cloisons, et il ne me fut pas possible de continuer l'étude de la suite de leur développement. On verra, dans l'exposé de mes recherches sur V llyanthus parthenopeus et sur le Tealia felina, com- ment se poursuit, chez ces deux espèces, l'apparition des cloisons, loges, interloges et tentacules. Nous reviendrons, d'ailleurs, plus loin sur ce sujet, en utilisant diverses notions embryogéniques et ana- tomiques ; mais, auparavant, il est nécessaire que je rappelle les principaux faits, antérieurement signalés (187S) par M. de Lacaze- Duthiers, sur le développement et l'ordre d'apparition des cloisons chez ÏActinia mesembryanthemum, le Bunodes gemmacea, etc. Dans ce but, je résumerai sommairement la partie du mémoire de l'éminent professeur concernant la formation des douze premières loges et des 88 L. FAUROT. douze premiers tentacules. Cette formation appartient aune période bien distincte de celle où le nombre de ces loges et de ces tentacules se trouvera porté de 12 à 24, à 48, etc. « Apparition de la bouche et de l'œsophage par prolongement des bords de l'orifice vers le centre. Division en deux parties de la cavité de l'embryon. Un des lobes formés est plus grand que l'autre ; les deux tentacules commissuraux correspondent à ces deux lobes. — Apparition des deux replis et des deux loges de deuxième formation dans la plus grande des deux moitiés, qui se trouve ainsi divisée en trois lobes. — Apparition des loges et replis de troisième formation comprenant quatre cloisons, dont deux se développent dans la plus petite des deux moitiés restée jusque-là indivise et deux autres immédiatement après dans la grande moitié, au milieu de ses deux lobes symétriques latéraux. A cette période, on compte donc huit cloisons, huit lobes. Il résulte de là que la période pendant laquelle existe le nombre 6 caractéristique est très vite franchie, très fugace. Au contraire, la période de quatre loges est très évidente et la pé- riode du nombre 8 également, car, jusqu'à ce que les loges soient égales, que les lames qui les séparent soient arrivées vers le centre, le travail de multiplication se ralentit. Il semble que, le nombre étant établi, le travail de division est un moment suspendu pour donner aux parties le temps de se développer, qu'en un mot il s'éta- blit une période de régularisation. — Apparition presque simultanée des loges et replis de cinquième et sixième formation de chaque côté des deux cloisons primaires. Le nombre 12 est donc atteint par l'apparition de replis deux par deux et par étapes bien caracté- risées, 2, 4, 8 et 12. Ces observations sont tout à fait contraires à l'idée qu'on se faisait du développement des Actinies pour lesquelles on avait admis une apparition des cloisons dans l'ordre suivant: 6 _!_ 6 + 12 + 24 4- 48, etc. — Le stade 12 est le terme du mode d'ap- parition des cloisons deux par deux. Les huit premiers tentacules naissent presque à la fois. Lorsque les douze tentacules sont nés, le travail évolutif tend à en former une couronne dont les rayons sont ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 89 alternativement grands et peli ts^ Toujours deux tentacules répondent aux deux premières loges opposées l'une à l'autre, qui elles-mêmes correspondent aux deux commissures de la bouche ; ils entrent dans la composition du premier cycle formé des sis plus grands tenta- cules de la couronne d'une Actinie. )> L'ordre de développement des cloisons observé par M. de Lacaze- Duthiers (fig. 4) ne concorde pas complètement avec celui qui a été admis par Wilson (1889). La divergence porte exclusivement sur les cloisons 2, 2 ; 4, 4, même figure. Pour le naturaliste américain, les chiffres qui servent à indiquer l'ordre d'apparition de ces deux coiiples doivent être trans- posés, les cloisons de la paire commis- surale dorsale étant, selon lui, apparues en quatrième lieu. D'après l'examen de ses coupes transversales, il juge que les différentes largeurs des cloisons sont en rapport avec leur ordre d'apparition , tandis que, d'après l'étude embryogénique que nous avons résumée ci-dessus, ce rapport ne semble pas absolu. C'est ainsi que, pour M. de Lacaze-Duthiers, les premiers cordons entéroides se forment sur les deux replis primitifs 1, 1, et, ayant une avance par leur ori- gine, ils continuent à la conserver dans leur accroissement; mais il ne s'ensuit pas que les autres cloisons produisent leurs entéroïdes dans l'ordre où elles sont apparues. « Les deux replis formés en quatrième lieu, dit-il, et notés 4, 4 semblent produire après les deux précédents, 1 et 1, leurs cordons entéroïdes; puis ce sont les cloisons 3, 3 et 2, 2 dont les bords sem- blent s'épaissir presque en même temps, ainsi qu'on le voit dans la figure ci-dessus un peu schématisée,maiscependantprise sur nature'.)) ' En se reportant à ce que j'ai exposé plus haut au sujet du Sagartia parasitica, on verra que ce travail de régularisation ne se produit pas ainsi chez cette Actinie. 2 D'après Mac-Muhrich ( 1 891 J, Haddon aurait constaté sur des coupes transver- sales l'exactitude des observations de M. de Lacaze-Duthlers. Fi! 3 3 ',. 4. — Aclinia mesembryan- themum (embryon), d'après M. de Lacaze-Duthiers. 90 L. FAUROT. Il ne paraît pas douteux, d'après cette citation, que l'ordre d'ap- parition admis par M. de Lacaze-Duthiers pour les cordons enté- roïdes de VActùiia mesembryanthemum ne soit identique à celui que Wilson a fait connaître pour les cloisons du Manicina âreolata. On verra, d'autre part, dans mon étude anatomique de VHalcampa chry- santhellum, que les différentes parties qui constituent chacune des douze cloisons primitives (hampe, faisceaux de feuil- lets musculaires, entéroï- des) diminuent progres- sivement de l'extrémité supérieure à l'extrémité basale de l'Actinie, dans un ordre qui ne diffÎM'e pas r de celui qui a présidé à l'apparition des douze pre- miers entéroïdes de VAc- iinia mesembryanthemum . Cet ordre serait donc iden- tique chez ïBalcampa chrysanthellum pour les cloisons et pour les entéroïdes (fig. oj. Des recherches entreprises par d'autres naturalistes sur le déve- loppement des douze premières cloisons, il semble résulter que l'ordre dans lequel ces dernières apparaissent peut différer dans certaines espèces. Hertwig et Boveri auraient observé ^nvVAdamsia diaphana, après la formation des quatre couples primitifs, un mode d'apparition des cloisons qui, jusqu'à présent, n'a été constaté chez toutes les autres Hexactinies dont on a suivi le développement, que postérieurement au stade ri. Mac-Murrich (I89i) admet, pour les huit premières cloisons de VAulactinia stelloïdes, l'ordre d'apparition que Wilson a signalé chez le Manicina âreolata; pour les couples 5, 5; 6, 6 de la môme Actinie, cet ordre serait celui qui existe chez Y Actinia mesembryanthemum. Mais, d'après ce naturaliste, ces deux Fij m II! Halcompa chrysanihellum. ETUDES SUR LES ACTINIES. 91 derniers couples, qui complètent le stade 12, sont disposés d'une manière toute différente dans les embryons de Metridium margina- tum, Halcampaproducta, Oractis D'wmedex et une larve de Zoanthide. Knfm, il y a contradiction entre Boveri(i889)et Gerfontaine(l89i) au sujet du Cereactis aurantiaca ; pour le premier, les douze pre- mières cloisons apparaissent dans le môme ordre que celles de YActinia mesembryanthemum ; pour le second, elles se succèdent comme dans le Manicina areolataK Les cloisons 5, 3 et 6, 6 conservent longtemps, chez les jeunes Actinies, une largeur et une longueur notablement plus petites que celles des huit autres cloisons du stade 12. On peut même constater une diflerence entre ces deux couples, le premier plus âgé étant plus large et plus long que le second, il en résulte une disposition qui, sur des coupes transversales (lig. 10, pi. II), permet de recon- naître facilement les huit premières cloisons formées chez l'em- bryon (fig. 9, pi. II). Cette disposition existe aussi, quoique moins évidente, sur les Hexactinies adultes. Elle a été d'abord observée par Hertwig («882) sur YHalcampa clavus et, croyant qu'elle était particulière au genre Halcampa, il en a déduit que celui-ci représen- tait une forme de transition entre les Edwardsies et les Hexactinies. J'ai montré que, dans YHalcampa chrysant hélium, on retrouve la môme particularité, mais qu'elle s'y observe dans une partie seule- ment de l'Actinie, les autres parties offrant des dispositions diffé- rentes (pi. VIII). Chez le Peachia hastata, j'ai reconnu également celles des douze cloisons qui correspondent aux couples .o, S et 6, 6 de YActinm mesembryanthemum. 11 est très probable que ces * 0. et R. Heutwig {Die Actinien, p. 87) n'admeltont pas rordre d apparition des cloisons tel que l'a observé M. de Lacaze-Dulhiers, et sans invoquer aucune obser- vation, ils considèrent que l'ordre de formation des eutéroïdes de VAclinia mesem- br>/anthemum est exaclement celui des cloisons dont ces organes dépendent. Les réflexions qui accompagnent l'exposé de leur opinion reposent sur des données erro- nées, par exemple la division au stade huit des cloisons en deux groupes (un situé i chaque angle de la bouche), chaque groupe se correspondant dans les détails ana- lomiques, « ce qui, ajoutent-ils, fait supposer qu'ils se sont développés de la même manière ». 92 L. FAUHOr. couples plus étroits pourront être observés chez un grand nombre d'autres Actinies adultes, si l'on a soin d'examiner des spécimens non contractés. Je les ai constatés, d'ailleurs, très distinctement sur des coupes transversales de Sagartia bellis et de Chitonactis coronata, passant un peu au-dessus du disque pédieux. Bien qu'il existe des Actinies dont le nombre de tentacules ne dépasse jamais 12 {Halcampa chrysanthellum, Peachia kastata), il n'en est cependant aucune qui présente, à son complet développe- ment, douze cloisons seulement. La disposition représentée par la figure 1, p. 105, est donc embryonnaire. Ce fait est à rapprocher de ce que nous avons dit en terminant l'exposé du développement au stade 8, et nous rappelons que les Edwardsies ne peuvent être consi- dérées, d'une manière absolue, comme représentant ce stade. DÉVELOPPEMENT DES CLOISONS ET DES TENTACULES APRÈS LE STADE \ 2. Pour ce développement, de môme que pour celui des douze cloi- sons primitives, nous allons donner un bref sommaire des obser- vations de M. de Lacaze-Duthiers. Apparition des cloisons et des tentacules portant le nombre de 12 à 24. — De même que dans la période précédente, la formation des cloisons précède celle des tentacules. « Ce n'est point dans cha- cun des douze intervalles qu'apparaît un nouveau tentacule, mais bien dans six seulement; ce n'est pas non plus un seul tentacule qui naît, c'est une paire ; de sorte qu'il y a certainement douze tentacules produits, non isolés, mais formant six paires... ce n'est plus une seule cloison qui se forme, mais deux... Par la formation de deux cloisons nouvelles, la loge primitive se trouve divisée en trois loges. — Apparition des tentacules portant le nombre de 24 à 48. — « C'est daijs le milieu des intervalles correspondant au der- nier cycle composé des plus petits tentacules que se forment les nou- velles loges, et, comme de leur formation résultent toujours deux nouveaux intervalles, il s'ensuit que le nombre des tentacules s'ac- croît par autant de fois deux qu'il y a de petits tentacules dans le ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 93 dernier cycle... Aux périodes ultérieures, la formation des loges nouvelles et des tentacules suit la loi formulée précédemment... Le dernier cycle renferme toujours des tentacules de toutes les forma- lions et de tous les âges. » Les recherches que j'ai entreprises sur le Sagartia bellis, le Bu- nodes gemmacea, B. thailia, Tealia felina, llyanthus parthenopeus cor- roborent les observations que nous venons de résumer. Si dans le développement de Vllyanlhus il existe certaines particularités qui font différer le mode d'apparition des tentacules de celui qui a été décrit par M. de Lacaze-Duthiers, celles-ci ne peuvent cependant être considérées, ainsi que nous l'expliquerons plus loin, comme mettant en défaut les règles auxquelles est soumise la formation de ces appendices. Nous verrons, d'ailleurs, que ces particularités pa- raissent propres aux Ilexactinies pivotantes, groupe auquel Vllyan- llius appartient. Nous verrons aussi que la disposition spéciale des cloisons du Tealia et du Peachia, et de VEloactis peut être considé- rée comme résultant d'une simple modification du plan sur lequel toutes les Hexactinies sont organisées et non comme une exception à ce môme plan. La concordance des faits qui ont été précédemment résumés avec ceux que j'ai moi-même constatés ressortira de la lecture de ce qui suit ; mais on remarquera que par la distinction que j'ai établie entre les loges et les interloges, entre les tentacules loculaires et les tentacules interloculaires, j'explique complètement le dévelop- pement de ces différentes parties. Apparition de 12 nouvelles cloisons portant leur nombre de 12 à 24, c'esl-à-dlre formatioit de six paires de deuxième ordre. A partir du stade 12, c'est une règle sans exception que toujours les cloisons apparaissent dans les interloges, jamais dans les loges. Ces cloisons n'apparaissent pas par couples, comme dans la période précédente, c'est-à-dire une d'un côté, une de l'autre côté de l'axe commissural de l'Actinie, mais par paires dans les interloges formées U L. FAUUOT. durant cette période. U a été expliqué qu'une paire est constituée par deux cloisons voisines dont les faisceaux de feuillets unilatéraux se font vis-à-vis (les faisceaux unilatéraux des deux paires commensu- rales faisant, seuls, exception) et que chaque paire forme une loge. Nous avons en outre fait remarquer que les douze cloisons primitives sont disposées en six paires constituant le premier ordre de paires de cloisons. Ces paires forment six loges de premier ordre, lintre cha- cune des loges se trouve une interloge dans laquelle naît une paire de cloisons de deuxième ordre. Les six nouvelles paires apparaissant chacune dans le milieu d'une interloge diviseront celte interloge en trois parties : une loge de deuxième ordre et deux inlerloges. A cette période du développement (24 cloisons), les cloisons offrent une disposition qui est permanente chez V Halcmupa chrysanlhelliau adulte (Iig. 5). Apparition de cloisons portant leur nombre de 24 à 48, c'est-à-dire formation de douze paires de cloisons de troisième ordre. Dans les interloges dont le nombre a été porté de six à douze, par l'apparition des six loges de second ordre, naîtront douze paires de cloisons qui diviseront les douze interloges en trois parties : une loge médiane de troisième ordre et deux interloges. A la lin de cette période du développement, les cloisons présentent une disposition qui est permanente chez V IlyantJius parthenopeus adulte (fig. 3). Pour l'apparition de 48 nouvelles cloisons constituant 24 paires de quatrième ordre, ce qui porterait le nombre total des cloisons de 48 à 96, il en serait de môme que pour la formation des paires de deuxième et de troisième ordre. Elles apparaîtraient dans les inter- loges formées antérieurement. Apparition de 12 nouveaux tentacules portant leur nombre de 12 à 24. Formation du second cycle. Nous avons montré (p. 87) (ju'au stade 12 il y avait six tentacules loculaires alternant avec six tentacules interloculaires plus petits. Ces ÉTUDES sua LES ACTINIES. 95 derniers prolongent des interloges dans chacune desquelles apparaî- tront,ainsi que nous l'avons indiqué ci-dessus, une paire de cloisonsde second ordre divisant l'interloge en trois parties : une loge médiane et deux interloges latérales. Ces trois parties sont d'abord prolon- gées par le tentacule interloculaire i (fig. 6) du stade 12. Il reste à Fig. 6. — Un des six systèmes tenlaculaires depuis le stade 12 jusqu'au stade 48. \, \, tentacules du premier cycle loculaire ; 2, tentacules du second cycle loculaire ; 3, 3, tentacules du troisième cycle loculaire ; !, interloculaire. du premier cycle ; i', interloculaire apparu en même temps que le loculaire ± du second cycle ; i" , interloculaire apparu en même temps que le loculaire 3 du troisième cycle. apparaître deux tentacules : un (2 B) pour la loge médiane de deuxième ordre, l'autre (i', même figure) pour l'une des deux inter- loges latérales. L'autre interloge, en effet, sera prolongée par le tentacule interloculaire primitif i (B), Ce dernier qui d'abord occu- pait tout l'intervalle entre les deux loculaircs(l et 1 A) du premier cycle, sera refoulé de côté par le loculaire (2 B) du second cycle. Le loculaire du second cycle s'allongera beaucoup plus que les deux in- 96 L. FA U ROT. terloculaires i et i' entre lesquels il est placé, mais sa longueur sera toujours inférieure à celle des loculaires du premier cycle (C). Apparition de 24 nouveaux tentacules portant leur nombre de 12 « 48. Formation du troisième cycle. A la fin de la période précédente il y avait 24 tentacules, dont : iSix loculaires de premier cycle; Six loculaires de second cycle; Douze interloculaires, dont six étaient apparus en même temps que les loculaires de ce second cycle. Ces douze interloculaires prolongent douze interloges dans cha- cune desquelles apparaîtra, avons-nous dit, une paire de cloisons de troisième ordre la divisant en trois parties : une loge médiane et deux interloges latérales. Gomme dans la période précédente, ces trois parties sont d'abord prolongées en un seul tentacule qui sera refoulé de côté dans le prolongement de l'une des deux nouvelles interloges par l'effet de l'apparition du loculaire 3 (D) du troisième cycle. Quant à l'autre interloge, elle se prolongera en un nouvel interloculaire i". Le loculaire nouveau 3 s'allongera plus que les interloculaires, mais moins que le loculaire 2 du second cycle (voir D et E, fig. 6). Le mode d'apparition des tentacules est donc sem- blable pour le second et le troisième cycle au-dessus des interloges nouvellement divisées par la naissance, au milieu de chacune d'elles, d'une paire de cloisons. Il en serait de même pour la formation d'un quatrième cycle por- tant le nombre des tentacules de 48 à 96 et d'un cinquième cycle portant ce nombre de 96 à 192. Memarques. On s'explique qu'après le stade 12 correspondant à la présence de six loges et de six interloges les nouveaux tentacules n'apparaissent que dans six des douze intervalles primitifs, puisque les nouvelles loges ne se forment que dans les interloges, jamais dans les loges. ETUDES SUR LES ACTINIES. 97 On s'explique également pourquoi les tentacules apparaissent par deux à la fois : un loculaire et un interloculaire, car sur les trois parties en lesquelles chacune des interloges sont divisées, une sera prolongée par l'interloculaire du stade antérieur. J^es loculaircs sont toujours plus longs que les interloculaires. Leur accroissement a souvent une avance sur celui des interlocu- laires et leur longueur est en rapport avec l'ordre d'apparition du cycle auquel ils appartiennent, les plus grands étant les plus âgés. Les interloculaires acquièrent tous une longueur égale, quel que soit le cycle des loculaires avec lesquels ils sont apparus. Leur ensemble forme un cycle unique dont les éléments sont toujours plus petits que ceux du dernier cycle loculaire apparu. Le cycle des ïnler loculaires est donc le dernier, par ordre de grandeur. Le nombre des éléments de ce cycle est toujours moitié du total des tentacules de l'Actinie, car le nombre des interloges est toujours égal à celui des loges. RAPPORTS DE DISPOSITION DES ORGANES (CLOISONS ET TENTACULES) ENTRE LES DIFFÉRENTS TYPES d'aCTINIES. Le mode de formation des ordres de cloisons et des cycles de ten- tacules que nous venons d'exposer subit une modification impor- tante chez le Tealia felina. Sur cette Actinie complètement déve- loppée, ordres et cycles sont disposés en nombre multiple de 10 au lieu de G, qui est le chiffre normal. Malgré cette différence, j'ai néan- moins constaté que le Tealia commence, comme c'est la règle chez les Hexactinies, par être pourvu de six paires de cloisons primitives ; mais à ces six paires s'ajoutent, pour former le premier ordre, quatre autres paires appartenant à la seconde période de l'apparition des cloisons, c'est-à-dire celle dans laquelle elles apparaissent par paires. Les dimensions de ces quatre paires sont, par conséquent, beaucoup plus grandes que celles des deux autres paires apparais- sant ensuite à cette seconde période. Les dix loges de premier ordie ainsi formées se prolongent en dix tentacules de premier cycle Le ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 3*; SÉKIE. — T. 111. l89o. 7 98 L. FAUROT. développement se continue, comme chez les Hexactinies, avec cette différence, cependant, que la multiplication des éléments des ordres et des cycles se poursuivra en nombre multiple de 10. Chez Vllyantkus parthenopeus, qui est une Actinie pivotante très régulièrement construite sur le type 6, il est à remarquer que les tentacules devant prolonger les interloges dont la formation résulte de la naissance des paires de deuxième et de troisième ordre ne poussent pas en même temps que les loculaires de deuxième et troisième cycle. Ce n'est que postérieurement au développement complet de ces deux cycles que j'ai vu tous les interloculaires, moins les six primitivement apparus au stade 12, naître à peu près simul- tanément. Cette particularité paraît constituer une exception au mode de développement dont nous avons résumé plus haut les règles. Nous avons signalé que souvent l'allongement des loculaires se faisait plus vite que celui des interloculaires ; mais cette avance dans l'ac- croissement des premiers sur les seconds pouvait s'expliquer, en partie, par la plus grande longueur que ces loculaires doivent acquérir. Dans Vllyanthus parthenopeus. il n'en est pas ainsi ; l'appari- tion des interloculaires fait complètement défaut durant la poussée des deux dernières rangées de loculaires, de sorte qu'à un moment la disposition numérique des tentacules est 6-4-6H-12H-G, le dernier chif- fre G se rapportant aux interloculaires primitifs, qui forment un cycle incomplet, puisque 18 interloculaires restent encore à apparaître. Il semble y avoir une certaine homologie entre ce qui, chez Vllyan- tkus parthenopeus^ peut être considéré comme un arrêt temporaire de développement et l'absence totale de production d'un certain nombre de tentacules et de cloisons chez les autres Actinies pivo- tantes, Halcampa, Peachia et Fdwardsia. C'est ainsi que le disque tentaculairc de V Halcampa chrysanthellum n'est pourvu que de douze appendices, et cependant sa cavité renferme vingt-quatre cloisons (fig. 3, p. tOo et pi. VllI). Les appendices correspondent: six aux loges primitives et six aux interloges qui séparent ces dernières, et qui sont divisées chacune en trois parties (une loge médiane et ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 99 deux interloges latérales) par une paire de cloisons de second ordre. Chez le Peachia, on compte également douze tentacules, mais vingt cloisons. Ces organes ont entre eux des rapports semblables à ceux que je viens d'indiquer pour VHalcampa, avec cette différence que, sur les six interloges primitives du Peachia, deux n'ont pas été divi- sées en trois parties ; c'est-à-dire qu'au lieu de posséder six loges de second ordre, comme VHalcampa, cette Actinie n'en compte que quatre, les deux loges dorso-latérales de ce second ordre n'apparais- sant jamais (fig. 6, p. 105, et phot. I, pi. IX). Les loculaires, de même que les interloculaires, correspondant à la formation des cloisons de second ordre, font donc défaut chez Vffalcampa et le Peachia. Ces cloisons, il est vrai, sont uniquement constituées par des faisceaux de feuillets pariétaux, et l'on pourrait trouver, dans cette Simplification de structure, une relation de cause à effet, avec l'absence totale des tentacules de second ordre. Cepen- dant VEdfvardsia BeaiUempsi possède seize tentacules, bien que sa cavité ne renferme (juc huit cloisons qui soient constituées à la fois par des faisceaux pariétaux et par des faisceaux unilatéraux. Ses huit autres cloisons, réduites à des faisceaux pariétaux, sont de dimen- sions si petites que, jusqu'à présent, elles avaient passé inaperçues. \jEdii:ardsia /Jeaulempsi, en raison de la simplicité de structure de ces petites cloisons et de leurs rapports de situation avec les huit grandes, pourrait être considéré comme ayant subi, dans son déve- loppement \ un arrêt beaucoup plus fortement marqué que celui que nous venons de constater sur ïllyanlhus, V Halcampa et \e Peachia. Cet arrêt, d'après les considérations exposées page 120, se serait produit immédiatement après la formation des huit loges primitives de l'em- bryon. Je ferai, en ou Ire, incidemment remarquer que le nombre tolal des grandes et petites cloisons de YEdivardsia Beaidempsiiuslilie la présence de ses seize tentacules et doit faire rejeter cette opinion admise, dans toutes les descriptions de ce genre d'Actinie, que ces appendices y sont toujours en plus grand nombre que les cloisons. ' Il en serait de même pour VEdwardsia Adenensis et l'E, timida. 100 L. FAUROï. Il n'existe, à ma connaissance, aucune Actinie fixée présentant, à l'état adulte, des particularités comparables à celles que nous venons de signaler chez les Actinies pivotantes dont il vient d'être question. Dans les jeunes Bunodes thallia (Actinies fixées), dont le dernier cycle n'est pas encore formé, j'ai compté un nombre d'ordres déloges et d'interloges supérieur d'une unité à celui des cycles tentaculaires. Mais cette observation confirme simplement la règle que l'appari- tion des cloisons précède celle des tentacules, et elle ne donne pas sujet à une comparaison avec les Actinies pivotantes, VHalcampa chrysanlhellum par exemple, qui, possédant deux ordres de loges et un seul cycle de tentacules loculaires, subit un avortement complet, définitif, de six loculaires et de six interloculaires. J'ai recherché si, après le stade 12, la formation des cloisons par paires, chez les Hexactinies, se fait simultanément dans toutes les interloges, si elle débute indifféremment vers l'une ou l'autre des extrémités de l'axe commissural, ou bien si c'est une seule de ces extrémités, la dorsale ou la ventrale, qui est la région où la marche du développement présente une sorte d'avance sur l'extrémité oppo- sée. Je rappellerai, à ce propos, qu'en décrivant le mode d'appari- tion des douze tentacules primitifs, M. de Lacaze-Duthiers a signalé que le tentacule commissural correspondant à l'extrémité de la plus grande des deux loges primitives s'allongeait presque toujours le premier. Cette extrémité est celle qui est occupée, dès le stade 8, par la paire de cloisons commissurales dorsales (fig. 9, pi. II). D'autre part, en examinant un grand nombre d'embryons de Bu- nodes gemmacea, B. thallia, Sagartia bellis et ses variétés, 5. troglo- dytes et S. viduala, à une période de leur développement, où le nombre des tentacules est porté de 12 à 24, j'ai toujours observé que ces nouveaux appendices commençaient à se produire vers l'une des extrémités de l'axe commissural. Chez Vl/yanlhus pa?-t/teno/jeus, c'est dans la formation successive de deux cycles de tentacules locu- laires que j'ai observé cette avance d'une extrémité sur l'autre. Dans toutes ces Actinies, cette extrémité est très probablement ÉTUDES SUR LES ACTINIES. iOl aussi dorsale. En effet, je puis confirmer l'exactitude de l'observation faite par Dixon(i889) sur des coupes transversales de jeunes ^Mnorfes thallia, que les paires de cloisons qui apparaissent après le stade 12 sont toujours plus développées, plus larges du côté dorsal. J'ajoute- rai que, sur un dessin de M. de Lacaze-Duthiers, se rapportant à un jeune Sagartia bellis, et sur ceux figurant des Bunodes gemmacea ', les nouveaux tentacules sont placés du côté de la grande loge pri- mitive, c'est-à-dire dorsalement. L'observation du mode d'apparition du deuxième, troisième et qua- trième cycle du Tealia felina semble contredire les faits précédents, car c'est toujours dans la région venti'ale du disque que j'ai vu se former les premiers éléments de ces cycles. Mais ce n'est là qu'une apparence. Il sera, en effet, expliqué, dans l'étude du développe- ment des paires de cloisons de cette Actinie, qu'après la formation des six paires primitives, il naît, dans chacune des six interloges qui les séparent, six paires secondaires. Contrairement à ce qui se passe chez toutes les Hexactinies, ces six paires ne sont pas toutes desti- nées à former le second ordre de cloisons. Les deux paires secon- daires dorsales acquièrent un peu plus de largeur que les deux paires secondaires médianes ; toutes les quatre, cependant, mesurent, au sommet de la région œsophagienne, des dimensions à peu près égales à celles des six paires primitives. De sorte que le premier ordre de cloisons et le premier cycle de tentacules sont constitués, chez le T'ea/ia, par 6 éléments primitifs +4 éléments secondaires. Les deux autres paires secondaires sont ventrales et leurs dimen- sions sont très petites relativement à celles de leurs congénères, aussi vont-elles faire partie d'un nouvel ordre de paires de cloisons. Les loges, limitées par ces deux paires secondaires ventrales, vont donc se prolonger en tentacules de second cycle, lequel so^a com- plété par huit éléments de troisième formation, c'est-à-dire que les deux tentacules ventraux du second cycle prolongent les deux loges les moins avancées en développement, d'une formation antérieure, et * Archives de zoologie expérimentale et générale, vol. I, p. 375, 387, 388. 102 L. FAUROT. sont en même temps les premiers-nés de ce même cycle. Un phéno- mène semblable se reproduira dans le développement de tous les nou- veaux ordres et cycles. En somme, on peut dire que chez le Tealin felina^les éléments ventraux ne sont les premiers apparus des ordres et des cycles auxquels ils appartiennent que parce qu'ils sont les der- niers nés d'une formation précédente ayant débuté par le côté dorsal. Ces observations, on le voit, tendent à prouver qu'il existe après le stade 12, chez les Hexactinies, une avance dans la formation des éléments dorsaux des ordres et des cycles sur la formation des élé- ments ventraux. Le Peachia ferait cependant exception, les deux paires dorsales de cloisons n'apparaissant jamais. Zoanthides et Cérianthides; leurs rapports entre eux et avec les Hexactinies. — Y on Koch (*880\ Muller (1883), Erdman (1885), ont montré que, dans les individus des colonies de Zoanthides, de môme que chez les Hexactinies, le développement des cloisons évoluait en deux périodes distinctes. Il s'en formerait douze dans la première, suivant un ordre qui n'a pas été déterminé, mais que Haddon et Mac-Murrich admettent cependant comme étant très probablement semblable à celui des Hexactinies. Ces naturalistes basent leur opi- nion uniquement sur la similitude de situation et d'orientation des cloisons (fig. 11, p. 105), sans tenir compte ni des largeurs, ni des longueurs relatives. Jusqu'à présent, aucune observation directe n'a été faite permettant d'affirmer que les douze cloisons primitives aient apparu dans le même ordre chez les Zoanthides et les Hexac- tinies. D'après mes recherches sur le Pahjthoa sulcata, huit ma- croseptes primitifs apparaissent par couples, les deux premiers formés étant placés latéralement comme les deux premières cloisons des Hexactinies. Quant aux cloisons qui, dans cette dernière famille {Actinia mesemhryanthemum , Aulaclima stello'ides, Halcampa chrysaii- Ihelhim, etc.), sont les sixièmes dans l'ordre d'apparition, elles sont les quatrièmes chez le Palythoa sulcata. Dans la seconde période du développement, on sait que toutes les cloisons apparaissent par paires, non pas dans six interloges primitives, comme chez les ÉTUDES SUR LES ACTFNIES. <03 Hexactinies, mais dans deux seulement : les latérales ventrales. Cériantiu'des. — Pour le Cerianthus membranaceus, je crois avoir démontré que l'Actinie nageante, décrite sous le nom â'A7'achnaclis brachiolata, n'est pas une forme adulte, mais une larve. Les descrip- tions qui ont été faites par Agassiz, C. Vogt, Mac-Murrich et E. Van Beneden concordent, d'une part, avec l'ensemble des caractères que J. Haime attribue aux larves de C. membranaceus, et, d'autre part, avec l'organisation anatomique — telle que nous la décrirons — de cette même Actinie à l'état adulte. J'en ai conclu que, très vraisemblablement, les Arachnactis brachiolata sont des jeunes de Cerianthus membranaceus. De même que chez les Hexactinies, de même aussi que chez les Zoanthides, le développement des cloisons du Cérianthe évoluerait, d'après mes recherches, en deux périodes distinctes. A la première, allant jusqu'à un stade 8, elles se formeraient par couples, dans un ordre identique à celui des Hexactinies. A la seconde, elles n'appa- raîtraient pas pa.r paires, comme dans les deux familles précédentes; il semble que leur production continuerait à se faire par couples, sans s'interrompre, pendant un laps de temps plus ou moins long, quand le nombre 12 est atteint. Ces couples se formeraient non pas en des régions différentes et symétriques, mais les unes à la suite des au- tres, dans un même point situé entre les deux dernières cloisons apparues à la période précédente, c'est-à-dire à l'extrémité dorsale et dans l'intervalle qui sépare les cloisons iv-iv (fig. 27). Mes observations sur les Cérianthes complètement développés m'ont montré que l'ordre d'apparition des cloisons par couples est plus complexe dans la seconde période que dans la première. Les nouvelles cloisons, en effet, ne se succèdent pas régulièrement, car, le plus souvent, les Cérianthes sont pourvus d'un plus grand nombre de cloisons d'un côté que de l'autre. J'ai constaté, en outre, que les longueurs de ces cloisons ne sont régulièrement décroissantes (les plus petites étant les plus rapprochées du point unique de forma- tion) que si on les considère par groupes de quatre (quatroseptes). 104 L. FAUROT. Enfin, la disposition des éléments de chacun des quatroseptes peut se trouver différente d'un côté à l'autre de l'Actinie. D'importants caractères éloignent les Cérianthes de toutes les autres Actinies. Ce sont la présence d'une double couronne de ten- tacules et d'un pore aboral, la disposition en quatroseptes des cloi- sons apparues durant la seconde période du développement, la situa- tion exclusivement dorsale des plus jeunes de ces cloisons, et enfin la structure particulière de la couche moyenne des parois du corps. Enfin dans le développement des Zoanthides, au cours de la seconde période, les cloisons se forment par paires. Ces cloisons n'apparaissent pas constamment en nombre égal de chaque côté du corps, et leurs dimensions ne sont régulièrement décroissantes (à partir des deux points où elles se forment) que si on les considère par groupes de deux, c'est-à-dire par paires, formées chacune d'un macrosepte et d'un microsepte. RÉSUMÉ DES RAPPORTS DE DISPOSITION DES CLOISONS. Coupes transversales de la région œsophagienne : FiG. 1. D'embryon d'Hexactinie au Fxg. 7. B'Eloactis Mazeli. stade 12. S. De Tealia felina. 2. D' Edwardsia Beautempsi. 9. De polype d'Alcyonnaire. 3. D'Halcampa chrysanthellum. 10. De Certanthus membranaceus. 4. D'Ilyanthus parlhenopeus. H. De polype d'une colonie de 5. D'Actinia mesembryanlhemum. Palythoa. 6. De Peachia hastata. Dans tous ces schémas, les huit premières cloisons apparues (stade 8) sont colorées en rouge. Les quatre cloisons qui naissent ensuite pour former le stade 12 sont figurées en gros traits noirs. Ces douze cloisons primitives apparaissent en six couples successifs, c'est-à-dire une à gauche et une à droite et en des places symé- triques de chaque côté de l'axe commissural. Toutes les autres cloisons apparaissent par paire, c'est-à-dire deux en même temps dans une même interloge. Ces paires sont représentées dans la planche par des traits moins apparents que ceux qui servent à figurer les douze cloisons primitives. Première période. — Apparition par couples des douze cloisons primitives. — Il n'a pas été observé, jusqu'à présent, d'Actinie adulte pourvue de huit cloisons seu- lement comme le sont probablement les embryons de toutes les Actinies à un stade de cette première période. Le stade 12, qui termine cette période, n'a également aucun représentant dans les formes arrivées au terme de leur développement. Les huit larges cloisons de VEdwardsia Beautetnpsi (fig. 2) sont, par leurs faisceaux unilatéraux, orientées dans le même sens que les huit primitives des Hexactinies. RAPPORTS DE DISPOSITION DES CLOISONS. ÉTUDES SUR LliS ACTINIES. 107 Parmi les huit petites cloisons de la même Actinie, quatre sont homologues par leur situation avec celles qui, chez VActinia mesembryanthemum, VHalcampa chry- santhellum, le Peachia haslata, le Tealia felina, etc., sont apparues après le stade S pour compléter les éléments du stade 12. Deuxième période. — Apparition des cloisons par paires. — Chez VEdivardsia Beautempsi, deux petites cloisons sont situées dans chacune des deux interloges dorso-lalérales. Bien que l'ordre d'apparition de ces paires n'ait pas été observé', il est cependant vraisemblable qu'elles sont homologues à deux des paires secon- daires qui apparaissent à la seconde période chez les Actinies organisées sur le type C ou sur le type 10. Chacun de ces deux types est représenté par trois espèces disposées en deux séries parallèles. La série gauche est formée par les Ilexactinies, la série droite par les Actinies décamères. Les premières diffèrent entre elles en ce que chacune des six interloges primitives du stade 12 renferme : une paire de cloisons de deuxième ordre chez V Halcampa chrysanthellum, fig. 3 ; une paire de deuxième ordre et deux paires de troisième ordre chez Vllyanthus parllienopeus, fig. 4 ; une paire de deuxième ordre, deux paires de troisième ordre et quatre paires de quatrième ordre chez VActinia mesembryan- themiim, fig. 5, Dans les secondes, il y a à distinguer deux dispositions distinctes ; 1° celle où sur les six interloges primitives, quatre seulement, les ventro-latérales et les médio- latérales renferment des paires de deuxième ordre. Chez le Peachia hastala, fig. fi, ces quatre paires se développent incomplètement, tandis que chez VEloactis Mazeli, fig. 7, elles arrivent ?i acquérir les mêmes dimensions que les six paires primitives; 2" celle du Tealia felina, fig. S, Actinie fixée, qui, de même que les Hexactinies, est en réalité pourvue de six paires de deuxième ordre; mais sur ces six, il en est quatre, les dorso-latérales et les médio-Iatérales, qui se développent beaucoup plus que les deux ventro-latérales, de sorte que ces dernières se placent dans le deuxième ordre, tandis que les quatre autres se rangent dans le premier. Les autres paires apparaîtront dans les dix interloges qui séparent les six paires primitives et les quatre plus larges paires secondaires de deuxième ordre. On remarquera que le nombre des cloisons est moins considérable chez les Acti- nies pivotantes du type 6 et du type 10 que chez les Actinies fixées des types corres- pondants. Zoanthides, fig. II. — Jusqu'à présent, l'ordre d'apparition des douze cloisons pri- mitives des polypes de Zoanthides n'a pas été observé ; on peut cependant, en se basant sur leur analogie d'orientation (Muller, Koch, Erdman), comparer la dispo- sition des dix dorsales et des doux commissurales ventrales avec les dix dorsales et les deux commissurales ventrales des embryons d'Hexactinies, fig. 1. On voit que cette disposition est semblable. A la seconde période du développement des polypes, les paires de cloisons n'apparaissent pas dans les six interloges primitives, mais dans deux seulement, les latérales ventrales. Cérianthe, fig. 10. — Aucune des cloisons du Cérianthe n'a de faisceau unilatéral. Les douze primitives sont toutes rassemblées du côté ventral. Celles de la seconde période ne semblent pas apparaître par paires, mais par couples successifs, les uns à la suite des autres au côté dorsal du sixième couple primitif. 108 L. FAUROT. DEUXIÈME PARTIE. ÉTUDES Sur les AcTiNiDES pivotantes : Edvjardsia, HaJcampa, Peachia et Ilyunthus ; Sur les AcTiNiDES fixées : Tealia, Sagartia et Aclamsia ; Sur les ZoANTHiDEs et le CeriantJim (Cérianthide). Sous le nom dMc, pi. VII), par des ren- flements faisant saillie dans le milieu de chacun des huit espaces intercloisonnaires. Ces renflements semblent, à première vue, dé- pendre de la portion principale du mésoderme que nous venons de ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 125 décrire, mais l'examen de séries de coupes longitudinales démontre qu'ils sont formés par les saillies circulaires considérablement élar- gies dans les parties que la ligure 9 montre comme étant plus ren- flées que partout ailleurs. L'entoderme, fortement soulevé par ces renflements, se divise en petits amas de cellules, en crénelures, qui sont d'autant moins saillantes qu'elles sont plus éloignées du som- met du renflement. Une disposition toute semblable des cellules épithéliales s'observe, à l'état frais, sur les entéro'ides des cloisons desHalcainpa, Peachia, Jlyanthus,Sagartia, etc., et probablement de toutes les Actinies. Cloisons. — Le capitulum du spécimen étudié s'était complètement introversé dans le sommet de la colonne au moment où il avait été placé dans l'alcool ; mais, grâce à la rigidité des parois et bien que je n'eusse pris aucune précaution pour éviter la contraction, la forme et la disposition des cloisons apparurent assez nettement distinctes sur les coupes transversales. Entre l'œsophage et la paroi du corps s'étendent huit larges cloisons fertiles dont les faisceaux unilatéraux se prolongent, du côté interne, en gros bourrelets, tandis que, du côté externe, ils font très peu de saillie. Dans chacun des intervalles qui séparent les cloisons fertiles — à l'exception de ceux qui séparent les cloisons commissurales — existent, sur la paroi, de très courtes cloisons, analogues à celles que j'ai signalées dans le capitulum de VEdwardsia Beautenipsi. Cependant, soit par suite de l'introversion complète de cette partie du corps, soit parce que la coloration des coupes était insufiisante, soit enfin parce qu'ils n'existent réellement pas, je n'ai pas observé de feuillets musculaires dans ces cloisons rudimentaires. Au nombre de douze, elles sont disposées deux par deux. Le sommet du capitulum de Y Edwardsia Adenensis est donc pourvu de vingt cloisons. Ce chiffre est supérieur à celui des tenta- cules, qui n'est que de seize ; mais cette inégalité numérique n'a rien d'exceptionnelle. Elle existe chez YHalcampa (24 cloisons, J2 tenta- cules), chez le Peacliia (20 cloisons, 12 tentacules). On peut, d'ail- leurs, admettre qu'il s'est pnvlnit, chez V Edivardsia Adenensis, un ne L. FAUKOT. retard ou un arrêt dans l'apparition de ces appendices, car une autre espèce d'Edwardsie, ÏEdwardsia timida de Quatrefages, pos- sède vingt tentacules qui, vraisemblablement, correspondent à un nombre égal d'espaces intercloisonnaires. Je rappellerai, à ce pro- pos, qu'il a été allrihué au genre Edwardsic ce caractère de posséder un nombre de tentacules plus considérable que celui des cloisons (Hertwig, Andres, Haddon). VEdwardsia Deautempsi et l'^. Adenensis ^ nous montrent, au con- / traire, que lescloisons sont toujours en nombre égal ou même supérieur à celui de ces appendices. Immédiatement au-des- sous de la rôgion œsopha- gienne, les prolongements externes des faisceauxuni- latéraux des huit plus grandes cloisons augmen- tent de largeur, de ma- nière à atteindre une di- mension à peu près égale à celle des prolongements internes des mêmes faisceaux (fig. 8 et phot. S, pi. VI). De même que chez VEdwardsia Beautempsi, ces prolongements internes ont leur plus grand volume dans le milieu de la région génitale, puis ils diminuent graduellement et dispa- raissent tout à fait au-dessous de la région digestive (phot. 6, pi. VU). Au contraire, le prolongement externe, tout en se raccour- cissant de façon à ne plus former (ju'un gros bourrelet, se montre encore jusque sur les coupes les plus rapprochées de l'extrémité inférieure. Quant aux faisceaux pariétaux de ces huit cloisons, ils ne changent ni d'aspect, ni de dimension du haut en bas de la colonne. En somme, les cloisons fertiles de l'Edwardsie d'Aden diffèrent de celles de VEdivardsia Beautempsi principalement par le volume très Fig. 9. — • E'nvai uxiu Adtnensis. Coupe de la région basale. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 127 considérable qu'acquiert, chez la première, le prolongement externe du l'aisceau unilatéral'. HALCAMPA CHRYSANTHELLVM PEACU. CARACTÈRES EXTÉRIEURS. La colonne a une longueur de i à :1 cenlimètres cl demi et un dianiôlre de 3 à 5 millimètres. Souvent ce diamètre est plus grand dans la moitié inférieure que dans l'autre moitié. Sa couleur est jaune-paille au tiers supérieur et rosée ou grisâtre dans les deux tiers inférieurs. L'extrémité aborale arrondie est translucide. 11 n'existe jamais plus de douze tentacules jaunâtres translucides qui, ta leur base, ont une teinte jaune-paille. Ces tentacules, longs de 2 à 3 millimètres, sont fréquemment ornés de barres transversales gris pâle ou jaune clair, et celles de ces barres qui sont placées près du disque se plissent en forme de v ou de w ouvert du côté de la pointe des tentacules. Souvent aussi le disque buccal présente, à la base de chacun de ces douze appendices, douze marques semblables en y ou en iv, mais qui, contrairement aux précédentes, sont ouvertes du côté de l'orilice buccal. Peach, Johnston et Fischer ont signale, sur la colonne des Hal- carnpa, la présence de vingt-quatre bandes longitudinales blanches et de largeurs inégales. Six de ces banties sont plus larges que les autres, et, dans chacun des espaces qui les séparent, on compte trois autres bandes plus étroites. Cette disposition est exacte et s'explique par la présence de vingt-quatie cloisons, à l'attache des- quelles correspondent les intervalles (sillons) de ces bandes. Il est à noter que les vingt-quatre bandes longitudinales ne sont bien visibles qu'en s'aidant de la loupe et seulement à la partie supé- rieure de la colonne. On les y voit se prolonger jusqu'aux douze ten- tacules, les six larges bandes correspondant à six de ces dei'iiiers, les ' Il est à remai(|uei' que dans les cloisons de i'Aurelian-: r.ngusta lAcLinie lixée), (is^. 1, pi. 1, le faisceau uiiilaléral esl uniquement constitué par la pai'tie lioniuloyue au volnmineux pr;)longi'mcnt externe des huit grandes cloisons de VEdivurdsia Adenensis. 1^8 L. FAUROÏ. dix-huit bandes plus étroites correspondant, trois par trois, aux six autres tentacules. Nous verrons que cette disposition est une con- séquence des rapports des loges et interloges avec leurs prolonge- ments tentaculaires. En effet, six de ces derniers sont loculaires, tandis que chacun des six autres correspond à la fois à une loge et à deux interloges. Les caractères relatifs à la coloration de YHalcampa et à la pré- sence des barres et des marques sur les tentacules et le disque oral ne me paraissent pas avoir la généralité et, par conséquent, l'impor- tance qu'y ont attachée Gosse, Haddon et Fischer. Sur onze indi- vidus provenant d'une même pêche faite à Penpoul, près de Roscofi', quatre seulement répondaient complètement à la description que nous avons faite de ces particularités extérieures ; six en différaient par un disque sans aucune marque, dont la couleur était gris-cendré, jaune-paille ou brune. Le onzième avait une couleur uniformément gris-cendré, les tentacules et le disque ne présentant aucune barre ou marque. Les Halcampa chrysanthellum, de même que les Edwardsia Beau- tempsi, vivent enfoncés dans la vase, ne laissant apparaître que leur disque tentaculaire presque constamment épanoui. On trouve par- fois ces deux espèces réunies dans un même espace de peu d'étendue. Lorsque des Halcampa sont placés horizontalement sur le fond d'un vase à fond plat rempli d'eau de mer, on observe que la surface du corps est parcourue, depuis le disque oral jusqu'à l'extrémité infé- rieure, par des ondes de contractions annulaires semblables à celles que nous décrirons chez le Peachia. Ces ondes ont pour effet de faire progresser l'Actinie par une sorte de reptation, la bouche en arrière, car, venant du disque oral, elles tendent à refouler la base. La rep- tation du Peachia est toujours (bien que cette Actinie ait un plus grand volume) plus lente que celle de VHalcampa. Il est aussi plus rare de voir un Peachia ramper que de faire des efforts pour s'enfoncer verticalement dans le fond du vase. Les Halcampa sont mieux que ceux-ci aptes à la reptation, mode de progression qui ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 129 s'effectue chez elle d'une manière comparable à celle qu'on observe chez les Synaptes. A certains moments, cette reptation s'interrompt, et l'Actinie se fixe par son extrémité postérieure arrondie, tout en continuant souvent à s'allonger et à raccourcir sa colonne. De même que les Peachia, les Halcampa sont aussi capables de s'enfoncer dans le sable. C'est ainsi qu'ayant réuni onze de ces Acti- nies sur un fond de sable très fin, toutes s'étaient enlisées et épa- nouies au bout de trois heures. Il ne m'a pas été possible de décou- vrir par quel procédé leur colonne peut ainsi se creuser un abri. Chez le Peachia, au contraire, on peut observer très facilement les resserrements annulaires, les ondes de contraction qui accompa- gnent toujours cet acte. ANATOMIE . R. Hertwig (1883) a observé que V Halcampa clavus (Quoy et Gaymard) ou H. purpwea (Studer), d'après Haddon , était pourvu de cloisons inégales. Sur douze cloisons, dit- il, quatre sont un peu plus minces que les huit autres. Rapprochant cette particu- larité d'une autre assez semblable signalée par Strethil Wright sur V Halcampa FuUoni, il ajoute : « Si nous supposons que les huit grandes cloisons sont homologues avec les cloisons des Edwardsies, tandis que les quatre autres sont de nouvelle formation, alors le genre Halcampa apparaîtra comme une forme de transition entre les Edwardsies et les Hexactinies. » Ce même rapport morpholo- gique fut de nouveau déduit, par Haddon (-1887), de la disposition des cloisons trouvée par lui sur des larves d'Actinies qui vivent, dit-il, fixées par leurs tentacules aux bords de l'œsophage et sous l'ombrelle de différentes sortes de Méduses'. Il attribue sans hési- tation ces larves au développement de VHalcampa chrysanlliellum. * Haddon (1S87), p. 478. « At Ihe lovvcr extremity of the œsophagus four oflhe raesentei'ies l'ail short of joining llie œsophagus... in Iho gastric région of tiie body they are eight large mesenleries, whlch alone bear the swollen digestive borders... The dorsal directive mesenleries also appeared somewlial smaller than the remain- ing six. » ARCU. DE ZOOL. EXP. ET GÉ.\. — Z^ SÉRIE. — T. III. 1893. 9 130 L. FAUROT. Rien cependant, dans la description qu'en fait l'auteur, ne justifie cette opinion, et, à mon avis, il n'y a pas de motif pour ne pas les considérer comme appartenant plutôt à d'autres espèces d'Hexacti- nies pivotantes ou fixées. Les trois spécimens observés par Haddon mesuraient de 3 à 5 millimètres de long ; leur couleur était jaunâtre, le disque bigarré^de brun, les tentacules teintés de brun et de blanc jaunâtre. Les autres caractères qu'il mentionne n'autorisent pas mieux que ceux-ci à assimiler ces larves à des Halcampa. 11 en est même un qui n'appartient pas à ce genre, mais au Peackm ; c'est la présence d'une unique gouttière pharyngienne. Dans une note (i890), j'ai résumé très brièvement mes observations sur l'anatomie de ÏBalcampa chrysanthellum . D'après ce résumé, l'inégalité des cloisons signalée par Hertwig n'est pas limitée, comme il le dit, à quatre de celles-ci, mais elle s'étend aux six paires constituées par les douze cloisons primitives de l'Actinie. Il importe de faire remarquer que par inégalité des cloisons j'entends non seu- lement les différences entre leurs largeurs, c'est-à-dire entre les saillies plus ou moins fortes que leurs bords libres font dans la ca- vité du corps, mais encore les différences de longueur de leurs por- tions munies de cellules sexuelles. Les inégalités de ces deux dimen- sions des cloisons constituent deux caractères anatomiques qui sont très vraisemblablement en relation avec leur âge plus ou moins avancé. Aussi leur disposition va-t-elle me permettre de conclure que r^o/cfl?/2/ja, à l'état adulte, présente des caractères qui, chez les autres Hexactinies, ne s'observent que dans le cours du développement. Les Halcampa se contractent très fortement ' sous l'influence des réactifs fixateurs. C'est ainsi qu'en faisant agir la solution chromique sur une douzaine environ de ces Actinies, je n'ai pu en obtenir que deux dont la colonne fût dilatée normalement. Deux ou trois autres, dont la moitié inférieure seule était dilatée, m'ont permis cependant de vérifier ce que j'avais observé sur les premières. Quant au disque ' Beaucoup plus que les Peachia, ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 131 tentacLilaire, je n'ai jamais réussi à le fixer en état d'épanouisse- ment. En raison du peu de longueur de la colonne et de son petit diamètre, j'ai préféré recourir à la méthode des coupes transversales en séries plutôt qu'à l'incision longitudinale des parois du corps et à l'écartement des bords sectionnés de ces parois. Par ce dernier pro- cédé, j'aurais, en efl'et, couru le risque, en rompant les attaches des cloisons, de ne plus pou- voir en distinguer les lar- geurs relatives, aux diffé- rents niveaux de la co- lonne. La planche XI synthé- tise l'ensemble de mes coupes transversales, dont j'ai photographié (pi. VIII) les plus importantes. VHalcampa y est ligure ouvert, la cloison extrême de gauche et la cloison extrême de droite appar- tiennent à celle des deux paires commissurales dont la portion génitale a le moins de longueur. Ces deux cloisons sont numé- rotées IV, IV, sur la coupe schématique 10. La seconde paire com- missurale est au centre de la planche XI et, de même que la pré- cédente, ne correspond pas, par ses attaches œsophagiennes, à un sillon commissural qui soit, comme chez d'autres Actinies, beau- coup plus profond que les dix autres sillons de l'œsophage. Cepen- dant, sur VHalcampa vivant, les commissures de la bouche sont très apparentes. Il n'existe pas non plus, à l'extrémité inférieure de l'œsophage, de prolongements comraissuraux, comme ceux que nous signalerons chez Vllyanlhus parlhenopeus. Il ne m'a pas été possible de constater la présence ou l'absence, dans les cloisons, d'orifices péri-œsophagiens, car mes coupes trans- iii m Fig. 10. — Halcampa chrysanihellum. 132 L. FAUROT. versales n'ont été faites qu'à partir du tiers inférieur de la région œsophagienne. Au-dessus de ce niveau, les tissus, trop fortement rétractés, s'opposaient à un examen approfondi. Quant au sphincter circulaire de l'extrémité supérieure de la colonne, qui, selon Hert- wig et Haddon, n'est pas très distinct, no sharply defined, je n'en ai pas trouvé trace. Les cloisons sont au nombre de vingt-quatre, dont six paires larges et fertiles, et six paires stériles et étroites. Il y a donc douze loges et vingt-quatre interloges; les Halcampa^ cependant, ne pos- sèdent jamais plus de douze tentacules. Les six loges des paires fer- tiles se prolongent chacune en un tentacule, et les six loges des paires stériles, ainsi que les vingt-quatre interloges, se continuent dans les six autres appendices, chacun de ces derniers correspondant par conséquent à une loge et à deux interloges. On observe une disposition en partie homologue dans le Peachia hasiala. Cloisons fertiles. — Les loges limitées par les douze cloisons fer- tiles sont complètes, c'est-à-dire que leur attache à l'œsophage s'étend jusqu'au bord inférieur de cet organe. De même que chez toutes les Actinies, ces cloisons ne sont fertiles que sur une portion de leur longueur. Chez les Balcampa, cette portion commence à 3 millimètres environ au-dessous de l'œsophage et finit à une dis- lance de l'extrémité inférieure de la colonne, qui n'est pas égale pour les douze cloisons. Elle cesse à deux niveaux différents pour les deux paires comimissurales, mais à un même niveau pour les cloisons qui constituent chacune de ces paires. Quant aux huit autres cloisons fertiles, on voit (pi. XI) que ce n'est pas paire par paire, mais couple par couple que leur portion génitale se termine également; de telle manière que chacun des quatre couples formés par ces cloisons devient stérile à quatre niveaux différents. On peut donc distinguer parmi les douze cloisons fertiles, sous le rapport de l'étendue occupée par les cellules sexuelles, six ordres de cloi- sons. Ces ordres ont été numérotés sur la coupe schématique 10, les deux cloisons IV, IV (paire commissurale) étant celles, nous le ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 133 rappelons, qui sont placées une à l'exlrùmc gauche, l'autre à l'ex- trême droite de VHalcampa figuré sur la planche XI. Ces cloisons, on le voit, viennent en quatrième ligne, par l'étendue occupée par leurs cellules génitales. En reportant les autres notations du sché- ma 10 aux larges cloisons fertiles de VHalcampa (même planche), il est facile de se rendre compte de la disposition relative de chacun des quatre autres ordres de cloisons. A partir du point où chacun des six couples de cloisons fertiles est dépourvu de cellules sexuelles, les saillies que font leurs bords libres à l'intérieur de la cavité du corps diminuent rapidement, et, des quatre parties dont elles sont formées (hampe, faisceau pariétal, faisceau unilatéral, entéroïde), il n'y a que la hampe qui subsiste jusqu'à la base ; les trois autres disparaissent graduellement (pi. VIII). Il est ti remarquer, cependant, que les entéroïdes des cloi- sons I, I et II, II sont relativement plus volumineux et plus larges que les autres jusqu'à un niveau très rapproché de l'extrémité inférieure. Les douze cloisons fertiles, ainsi réduites, se réunissent au centre de la base hémisphérique de VHalcampa, en conservant des lar- geurs proportionnelles à leur ordre. Le couple 1,1 apparaîtra encore très saillant sur des coupes transversales de la base ', alors que les cinq autres seront devenus très étroits. C'est ce qui explique que Hertwig (1882) ait observé que, parmi les douze cloisons fertiles de V Halcampa clavus « s'étendant jusqu'au point central de l'extrémité inférieure du corps, deux cloisons sont réunies de telle manière qu'elles forment une paroi séparant quatre cloisons d'un côté et six cloisons de l'autre ». Cette disposition, que Hertwig a considérée comme prouvant qu'un orifice terminal postérieur n'existait pas, indique, à mon avis, que ces deux cloisons, homo- logues, sans aucun doute, avec le couple I, I (fig. 10), sont très vraisemblablement apparues avant les autres. De même les cloi- sons II, II, moins larges que celles-ci et plus saillantes que les couples III, III ; IV, IV ; V, V; VI, VI ; seraient apparues les secondes, ' Ces coupes transversales n'ont pas été figurées. 134 L. FAUROT. et ainsi de suite pour les suivantes. En somme, les six ordres en les- quels nous avons divisé les douze cloisons fertiles de VHalcampa chrysanlhelhm, d'après les longueurs de leurs portions génitales et les saillies de leurs bords libres, correspondraient exactement au rang suivant lequel elles se sont succédé à leur naissance. Si maintenant, pour mieux préciser l'ordre d'apparition de ces douze cloisons primitives de VHalcampa chrysanthellum, nous exami- nions leur disposition, sur des coupes transversales faites successi- vement de la région basale à la région œsophagienne, nous consta- terions que les entéroïdes apparaissent : 1° Sur deux cloisons 1 , 1 qui sont situées dans un plan à peu près perpendiculaire à l'axe passant par les commissures. Ces deux pre- mières cloisons divisent ainsi la cavité du corps en deux chambres inégales. Il en est de même chez VActinia mesembryanthemum, comme l'a montré M. de Lacaze-Duthiers. 2° Sur les deux cloisons 2, 2 placées dans la plus grande des deux chambres, et qui la divisent en trois chambres secondaires égales; 3" Sur les cloisons 3, 3 disposées en paire commissurale, à l'extré- mité terminale de la petite chambre primaire ; 4° Sur les cloisons 4, 4 placées à l'extrémité de la grande chambre primaire, et qui forment la seconde paire commissurale ; o" Sur les cloisons 5, 5 situées également dans la grande chambre primaire, et qui, avec le couple 2, 2, forment deux autres paires ; 6" Sur les cloisons 6, 6 placées dans la petite chambre primaire, pour former, avec le couple 1, 1, deux autres paires. Cloisons stériles. — Les douze cloisons étroites et stériles, dispo- sées par paires dans chacune des six interloges primitives, ne sont formées que d'un faisceau pariétal; aussi ne font-elles, dans la cavité du corps, qu'une saillie très petite. Ces cloisons rudimentaires com- mencent à l'union du disque buccal avec la paroi du corps, et, de même que les douze cloisons fertiles, se terminent au centre de l'extrémité basale de l'Actinie, mais en conservant des largeurs beaucoup plus réduites que ces dernières. L'égalité de leurs dimen- ÉTUDES SUR LES ACTINIES. I3S sions, du haut en bas de VfJalcampa, fait que nous ne pouvons rien préjuger de leur ordre d'apparition. Structure des cloisons. Faisceaux de feuillets pariétaux et faisceaux de feuillets unilatéraux. — Chacune des douze cloisons étroites et stériles est formée, avons-nous dit, par un faisceau de feuillets parié- taux. Ces feuillets sont de largeur égale sur les deux faces de la hampe. Il en est de môme pour les faisceaux pariétaux des douze cloisons larges et fertiles. Quant aux faisceaux unilatéraux de ces dernières, ils sont, comme chez les Edwardsies, séparés des parié- taux par une portion de hampe relativement large et complètement dégarnie de feuillets et de plissements. Cet intervalle entre les deux faisceaux de la même cloison est d'autant plus large que la région examinée est plus rapprochée de l'exlrémilé supérieure (pi. VIII). Sur des coupes transversales de la région œsophagienne (phot. 1), chacun des douze faisceaux a la forme d'un long bourrelet qui peut, en raison sans doute d'une légère contraction de la hampe, se recourber et prendre, sur quelques individus, un aspect réniforme. Au-dessous de l'œsophage, les faisceaux ont constamment ce der- nier aspect. Ils vont s'amincissant graduellement jusqu'à la base de l'Actinie. Des deux extrémités du bourrelet unilatéral, l'une, corres- pondant au bord interne de la cloison, reste arrondie dans presque toute la longueur de celle-ci, caries feuillets y conservent la même largeur ; l'autre, regardant la paroi du corps et qui, à la région œso- phagienne, est pourvue des feuillets les plus larges, les plus sail- lants (phot. 1, pi. VIII), subit, dès la région génitale, à mesure que les différents couples de cloisons deviennent plus étroits, une dimi- nution assez rapide du nombre de ses feuillets (phot. '2, pi. VIII). Ceux-ci diminuent d'abord de largeur, prennent l'aspect de dente- lures et leurs attaches à la hampe finissent par se confondre en une masse irrégulière. Plus bas, ce sont les feuillets les plus voisins de cette masse qui, à leur tour, subissent la même régression, et ainsi de suite, jusqu'à ce que le faisceau unilatéral tout entier ait complè- tement disparu. A la place qu'il occupait, près de l'extrémité basale 136 L. FAUROT. (phot. 6, pi. VIII), on observe seulement des denticulalions qui, plus bas encore, se confondent avec les étroits feuillets du faisceau pariétal. Cette diminution dans le volume, cette simplification dans la struc- ture du faisceau unilatéral, comme celle, d'ailleurs, de la cloison tout entière, qui vont en s'accentuant de l'extrémité supérieure à l'extrémité inférieure du corps de VHalcampa, indiquent clairement que la croissance des cloisons se fait du haut vers le bas de la colonne. PEXCHIA HASTATA GOSSE. Caractères extérieurs. — La colonne cylindrique se termine gra- duellement, à son extrémité inférieure, en une pointe mousse non pourvue d'orifice. Presque toujours cette extrémité présente au centre une dépression circulaire très étroite ayant Tapparence d'une perforation. Cette apparence est due à une introversion plus ou moins profonde, qui peut mesurer jusqu'à 1 centimètre. La longueur de la colonne, sur un même individu non contracté, varie de 10 à 25 centimètres; son diamètre est, en moyenne, de 1 centimètre. Dans l'état d'extrême dilatation transversale, ce diamètre peut atteindre exceptionnellement 1 centimètre et demi à 2 centi- mètres. C'est toujours dans la partie supérieure de l'Actinie, au- dessous de la région œsophagienne, que se produit la dilatation la plus considérable. La couleur rose chair, avec des marbrures brun rougeâtre, est plus ou moins foncée, suivant les divers degrés de dilatation. Certains individus présentent, à la partie moyenne de la colonne, une couleur rouge acajou sans aucune marbrure; mais c'est là une exception. Sur quarante-cinq Peachia péchés tant àLannion qu'à Morgatt, un seul présentait cette coloration, que j'ai également observée sur un spécimen dragué àBanyuls-sur-Mer. De même que chez VHalcampa, les tentacules sont toujours au nombre de douze. Gris jaunâtre, translucides, épais et coniques, leur longueur est de I centimètre. Ils sont ornés généralement de sept ^c ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 1.*^7 marques brunes (fig. II). La forme de ces marques a élé comparée à celle d'un fer de flèche, à celle d'une croix à branches recourbées vers le haut, à un W. En réalité, elle est très variable, tout en con- servant une grande régularité. Il est remarquable de voir, durant l'espace de quelques heures, cette forme se modifier lentement sur un même individu. Rien, mieux que l'observation de ces modifica- tions, ne peut montrer, avec plus d'évidence, que, même dans l'état d'épanouissement et de repos ap- parent, les tissus des Actinies sont soumis à des mou- vements de dilatation et de resserrement longitudi- naux et transversaux. La figure 1 1 est destinée à mon- trer les principales variations de forme des marques tentaculaires. Fréquemment, celles qui sont numé- . vvf/ rotées 2, 4 et o, affectent une configuration identique \\yl ) [fj/? à celle indiquée au chiffre 3. Il suffit de comparer ces \ \ / /^ différentes marques entre elles pour s'en expliquer les transformations; on voit, en effet, que les deux pig-. ii. branches du V l'enversé (3) s'écartent (4), se confon- Tentacule de Peachia hastula. dent (2) et sont complètement rassemblées (5), de manière à figurer un fer de hache franque. I^a marque 6, en forme de chevron, se modifie aussi en rapprochant plus ou moins ses branches, et les deux croissants verticaux 7, accolés par leurs côtés convexes, réunissent tantôt leurs cornes supérieures, tantôt recour- bent fortement leurs cornes inférieures, de manière à simuler soit un V, soit un W à branches ouvertes du côté de l'orifice buccal. D'autres fois, enfin, les deux croissants sont complètement isolés l'un de l'autre. Quant à la bandelette 1, elle présente deux bords courbes parallèles dont la convexité est tournée soit du côté de la pointe, soit du côté de la base du tentacule. Le disque oral présente la même coloration gris jaunâtre que les tentacules. Il est parfois très nettement limité à sa périphérie, c'est- à-dire aux points de contact des bases des tentacules par la réunion, deux à deux, des extrémités des marques en forme de V ou de W. 138 L. FAUIIOT. L'ensemble de ces marques figure alors une étoile très régulière à douze pointes. Sur les bords de la bouche, au-dessus des lobes œso- phagiens, on observe parfois d'autres marques brunes, en forme de claveaux, dont le nombre est de dix, jamais de douze, car elles man quent dans les deux points du péristome correspondant aux deux loges commissurales. C'est au-dessus d'une de ces loges que se trouve l'ouverture indé- pendante de la bouche que Gosse a nommée conchula. Celte ouverture apparaît comme l'évasement supérieur d'un tube (tube conchulaire) adhérent au péristome par les deux tiers environ de sa périphérie, et libre par l'autre tiers. L'évasement est ouvert en haut et en dedans, du côté de la bouche et de la partie libre du tube (pi. Xlt). Les bords du conchula présentent des deiiticulalions arrondies, de formes irrégulières et en nombre variable (de dix à quinze). Dans les localités où j'ai recueilli les Peachia, non loin de l'em- bouchure de la rivière de Lannion et en plusieurs points de la baie de Douarnenez, c'était seulement près du niveau des plus basses mers qu'il m'était possible de les trouver en grand nombre. Ils vivent enfoncés dans du sable vaseux très meuble et aux endroits les plus exposés aux lames du large. Leur colonne est fréquemment rétrac- tée au fond d'un trou à bords circulaires ; souvent aussi on en aperçoit le sommet sous l'aspect d'une sorte de vésicule grise trans- lucide, dont la surface est divisée en saillies rayonnantes. Ces saillies sont les lobes œsophagiens extroversés toujours au nombre de onze et non de douze, qui est celui des paires de cloisons. La place du douzième lobe est, en effet, occupée par le tube faisant suite au conchula, et qui se trouve situé dans une des deux loges commis- surales. L'extroversion des lobes œsophagiens se produit fréquemment chez les Actinies observées à marée basse, dans les mêmes condi- tions que le Peachia hastata. Il m'a semblé qu'elle a pour cause une légère rétraction limitée aux tissus de la périphérie du disque ten- taculaire, plus exposé et plus sensible que l'œsophage et la surface lîTUDES SUR LES ACTINIES. 139 de la colonne, au changement de milieu résultant du reirait de la mer. Lorsque, en efl'et, la plage est à sec, la colonne de ces Aclinies, plongée dans la vase humide, conserve encore ses dimensions d'épanouissement et reste remplie de liquide. Que la périphérie du disque tentaculaire, en contact avec l'air extérieur et la surface asséchée du sol, vienne à se contracter modérément, une partie du liquide sera poussée du côté qui oll're le moins de résistance, c'est- à-dire dans les chambres situées autour de l'œsophage. Les parois de cet organe, beaucoup moins épaisses que celles de la colonne, se dilateront alors passivement, et ses lobes seront refoulés à l'exté- rieur, se renversant même par-dessus le bord externe contracté du disque tentaculaire et faisant office d'un lien circulaire. Les Peachia haslata ne sont recueillis sans contractions ni déchi- rures qu'à la condition de creuser le sable vaseux à une profondeur d'environ 40 centimètres tout autour de leur gîte. Dans ces circons- tances, on observe que la surface de la colonne n'est pas en contact immédiat avec la vase dans laquelle elle est enfouie, mais qu'elle en est séparée par une très mince couche de mucus agglutinant les grains du sable dont sont formées les parois du gîte. Grâce à celte sorte de gaine muqueuse, l'animal peut se rétracter ou s'épanouir avec rapidité. Celte enveloppe a également pour effet, à marée basse, de maintenir béant l'orifice du gîte, lorsque l'Actinie s'est retirée vers le fond de celui-ci. D'aulrcs animaux, le Balanoglossus, par exemple, vivant dans le sable vaseux, sont aussi munis d'une gaine protectrice semblable à celle du Peachia hastata. Lorsque ces Actinies, extraites de leur gîle, sont transportées dans un aquarium et observées pendant un certain temps, on constate que leurs mouvements de contractions se produisent dans un but bien déterminé, qui est de pénétrer à nouveau dans le sable et d'y reprendre leur position normale, c'est-à-dire verticale. Cet acte qui, chez d'autres animaux marins, pourrait ne pas attirer l'attention, est bien fait pour surprendre chez un être dont l'organisation, de même que celle de toutes les Aclinies, est relativement rudimentaire. d40 L. FAUROT. Une description incomplète en a été faite par Holdworth', d'après une observation entreprise sur un seul individu. Il semble que l'au- teur de cette description, en faisant intervenir, durant les mouve- ments de l'Actinie, une expulsion partielle de l'eau contenue dans la cavité du corps, admet, avec Gosse, un orifice à l'extrémité basale. Cet orifice, nous l'avons déjà dit, n'existe pas. Ayant observé un grand nombre de Peachia, j'ai pu suivre le phé- nomène dans tous ses détails. Nous le décrirons donc à nouveau : une de ces Actinies, étant placée dans un bac à fond de sable, dilate peu à peu sa colonne, se gonfle à un très haut degré, tout en se déplaçant de-ci et de-là avec lenteur et sans but appréciable. Au bout d'un certain temps, une demi-heure à une heure, ses mouve- ments cessent et, hinisquement , l'Actinie diminue de volume, en expulsant par la bouche la plus grande partie de l'eau contenue dans la cavité du corps. A ce moment, son aspect a changé complè- tement, car elle est inerte, aplatie, flasque comme une outre dégon- flée, et, suivant l'expression d'une personne témoin de mes observa- lions, « c'est à croire que l'Actinie va mourir >^. Après être restée quelques instants dans cet état singulier, on remarque que la colonne se rapetisse, s'effile, sans cependant s'allonger beaucoup, et que les parois de celle-ci prennent un aspect plus ferme, comme si elles s'étaient épaissies, rétractées. C'est alors que commence la série de mouvements qui permettront à l'animal de s'enfoncer perpendicu- lairement dans le sable. Le Peachla recourbe sa colonne en arc de cercle, son extrémité basale appuyant à peu près verticalement sur le fond de sable, tandis que l'extrémité orale est rétractée, de ma- nière à s'opposer à l'issue de l'eau intérieure. Dans cette situation, les parois du corps de l'Actinie offrent une certaine rigidité, et il paraît évident que le hquide qu'elles renferment est soumis à une compression. En même temps, des constrictions circulaires apparaissent à la ' Aciinologia hritannica Gosse, p. 236. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. Ul surface du corps, se manifestant sous la forme de profonds sillons annulaires au devant desquels la colonne est fortement distendue. Ces constrictions se succèdent sans interruption et parcourent toute l'étendue de la colonne, chacune d'elles prenant naissance à la région œsophagienne et s'arrêlant à l'extrémité basale. On ne peut mieux les comparer qu'aux ondes péristaltiques de l'intestin des mammifères, avec cette différence, cependant, que leur production est plus régulière sur la colonne du Peaclùa que sur Tintestin. C'est ainsi que le liquide cavilaire de l'Actinie, se trouvant comprimé supérieurement par les contractions cheminant de haut en bas, est poussé dans les portions inférieures où les parois sont encore dans le relâchement. Lorsqu'une onde de liquide arrive ainsi à l'extré- mité basale toujours en contact avec le sable, elle refoule au dehors et gonfle ensuite en une boule hémisphérique la partie inlroversée de cette extrémité. Cette extroversion et ce gonflement se produi- sant perpendiculairement à la surface du sable, il en résulte que les grains en sont repoussés excentriquement. La constriction cir- culaire poursuit sa marche sur la boule hémisphérique dont elle diminue peu à peu le volume, et finalement la transforme en une pointe cylindrique qui s'introverse presque aussitôt dans la colonne. Cinq à six secondes après, une nouvelle constriction annulaire survient, chassant devant elle une nouvelle onde de liquide, qui provoque une deuxième extroversion suivie d'une deuxième intro- version, et ainsi de suite, chacune des dilatations en boule hémis- phérique de l'extrémité basale alternant régulièrement avec un amincissement en pointe de celte même extrémité. C'est à laide de cette succession de mouvements alternatifs que le Peaclùa s'en- fonce, car les extroversions agissent toujours à la place où ont agi les extroversions précédentes, en repoussant toujours excentrique- ment les grains de sable. Dès qu'une dépression est pratiquée dans le sol el qu'une partie de la surface extérieure de la colonne se trouve en contact avec les bords de cette dépression, le diamètre du corps de l'Actinie reste à 142 L. lAUKOT. peu près invariable sur ces bords, de sorte que le calibre du Irou est maintenu très régulièrement cylindrique. 11 est à remarquer aussi que le sable n'est pas rejeté en dehors de roriflce, mais seule- ment refoulé, tassé sur les parois. Cette façon de s'enliser est iden- tique, sans doute, à celle qu'emploient certains Némertes et Anné- lides pourvus d'une trompe exsertile ; on remarquera cependant que chez le Peachia c'est l'extrémité aborale qui agit. Pendant toute la durée de l'enlisement, une heure environ, l'Ac- tinie n'épanouit jamais son disque lentaculaire. A son début, cet enlisement a une marche très lente, mais, ainsi que le signale lloldworth, dès que le trou est assez profond pour permettre à l'Ac- tinie de se placer verticalement, il s'opère avec beaucoup plus de rapidité. ANAÏOMIE . Danielssen et Koren (1856) avaient décrit et figuré une Actinie à douze tentacules, qu'ils nommèrent Siphonactinia Beckii, dont le caractère le plus remarquable était la présence d'un organe en forme de tube muni d'une fente sur toute sa longueur. Les figures annexées à leur description ne laissent aucun doute pour permettre d'identifier cette espèce au Peachia hastata, que Gosse décrivait un an auparavant (1855). La description des caractères extérieurs, faite par ce dernier, est plus exacte que celle des naturalistes norvé- giens, et il la compléta définitivement plus lard (1860). Il ne donne cependant aucun détail sur l'organisation interne que Da- nielssen et Koren ont méconnue, en raison de l'extrême contrac- tion de l'unique spécimen soumis à leur observation. En 1884, je donnais une description sommaire de l'anatomie du Peachia haslata, en signalant la présence de douze grandes cloisons, dont deux, au lieu de flotter librement par leurs bords libres dans la cavité générale, s'accolent à un organe en forme de gouttière. Les bords de cette gouttière sont rapprochés et pourvus, dans toute leur étendue sous-œsophagienne, dune lame membraneuse qui est un ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 443 prolongement de l'œsophage. J'indiquais, en outre, les rapports de situation de huit autres cloisons, si réduites que, à l'œil nu, elles ont l'apparence de cordons longitudinaux. « Ces cordons, disais-je, sont disposés par paires, de telle sorte que quatre chambres seulement, sur douze, en sont pourvues. Ces quatre chambres ne sont pas situées d'après la symétrie rayonnée, car deux d'entre elles sont placées de chaque côté de l'organe impair. Quant aux deux autres, elles se font vis-à-vis sur un axe perpendiculaire à celui qui passerait par l'or- gane et l'orifice inférieur.» L'année suivante (1885), A.-C. Iladdon et Dixon signalèrent quelques particularités relatives aux caractères extérieurs, mais, pas plus que Gosse, ne firent de reciierches ana- tomiques. Cependant («889), le premier de ces auteurs décrivit à nouveau, et très brièvement, l'organisation du Peachia et donna, en outre, une figure représentant exactement l'orientation des cloi- sons, mais erronée quant à la forme et aux dimensions relatives de ces dernières. C'est à cette occasion que je publiai (i890) un résumé de mes observations, pour compléter en partie et rectifier tout ce qui avait été écrit sur l'organisation du Peachia. Depuis cette époque, il m'a été possible, par de nouvelles recherches sur des spé- cimens préparés en état d'épanouissement, d'achever l'étude de cette espèce queson extrêmecontractililé m'avaitrenduelongueetdifficile. Il est, en elfet, de toute nécessité que les cloisons soient exami- nées dans leur état de plus grande extension, afin de pouvoir cons- tater les longueurs relatives de leurs portions génitales, ainsi que les /ardeurs variables qu'elles présentent à différents niveaux. Une sec- tion longitudinale de toute la paroi du corps, pratiquée exactement en face du tube conchulaire et dans l'intervalle des deux cloisons qui sont en face de cet organe, est le meilleur moyen à employer pour cette recherche. J'ai cependant eu aussi recours aux inclusions dans la paraffine, et, parmi les coupes obtenues en séries, j'ai pho- tographié (pi. IX) quelques-unes seulement des plus importantes. La ligure il (texte) est destinée à suppléer, en partie, à celles qui nont pas été reproduites. 144 L. FAUROT. La planche XII représente un Peachia ouvert de la façon que j'ai indiquée précédemment; on y compte douze larges cloisons fertiles et huit étroites stériles, au total vingt, dont les faisceaux unilaté- raux (fig. 12) sont orientés de manière à constituer dix paires, cha- que paire étant formée, comme on sait, par deux cloisons dont les feuillets se font vis-à-vis, à l'exception cependant des deux paires commissurales, pour lesquelles c'est l'inverse qui se produit. Cloisons fertiles. — Disposées en six paires, elles ne sont toutes complètes que dans le tiers supérieur de la région œsophagienne, et les chambres qu'elles délimitent, à ce niveau, communiquent par des orifices cloisonnaires. Dans les deux tiers inférieurs de la même région, deux de ces douze cloisons se séparent de l'œsophage, et leurs bords internes deviennent • libres. Ce sont les cloisons numéro- tées 6, 6 sur la ligure 12 ; les dix autres restent, au contraire, fixées : huit à l'œsophage et deux au tube conchulaire. La portion génitale des cloisons commence à une distance de 1 centimètre environ au-dessous de l'œsophage. Les deux cloisons de la paire commissurale auxquelles est attaché le tube conchulaire font cepen- dant exception, car c'est seulement à l'extrémité inférieure de ce dernier organe qu'on peut les voir garnies de cellules sexuelles. La terminaison inférieure de la portion génitale des douze cloi- sons se fait à des niveaux diflereuts qu'il est facile de distinguer sur un Peachia ouvert longitudinalement. Les cloisons de la paire commissurale 4, 4 (fig. 12) sont celles dont la portion génitale se termine le plus haut. Sur la planche XII, ces cloisons sont, l'une à l'extrêine droite, l'autre à l'extrême gauche du dessin. Un peu au- dessous et à deux niveaux différents, quoique très rapprochés, le couple 6, 6 et le couple 5, 5 se trouvent, à leur tour, dépourvus de cellules sexuelles. Enfin, à un niveau beaucoup plus inférieur, six cloisons, la paire 3, 3 et les couples 1, 1 ; 2, i2 deviennent stériles. Dans toute leur portion génitale, ces douze cloisons ont les mêmes dimensions en largeur, c'est-à-dire que les saillies de leurs bords libres, dans la cavité du corps, sont égales entre elles. Leur por- ÉTUDES SUR LES ACTIiNIES. 145 tion digestive ' Taisant suite à leur portion génitale, il en résulte que les quatre différents niveaux indiqués ci-dessus comme ter- minaison de cette dernière marquent le commencement de la pre- mière. Dès ce commencement, les cloisons diminuent graduel- lement de largeur, jusqu'à l'extrémité inférieure de leur portion basale; mais cette diminution se produit dans des proportions très diO'érentes ; c'est-à-dire que, à leur portion digestive, les six couples de cloisons primitives, tout en ayant des largeurs moins considé- rables qu'à leur portion génitale, sont, en outre, symétriquement inégaux. Cette particularité s'observe beaucoup plus facilement sur des coupes transversales que sur un Peachia ouvert longitudinale- ment. Je vais donc, d'après mes préparations, montrer quelle est, à leur portion digestive, la disposition des douze cloisons fertiles. Sur une coupe transversale passant immédiatement au-dessus des six plus longues portions génitales, on verrait celles-ci pourvues à leur bord libre de cellulles sexuelles, tandis que les six autres cloi- sons seraient seulement munies de larges lamelles entéroïdes carac- térisant la portion digestive des cloisons. A ce niveau, les largeurs de ces six cloisons devenues stériles sont un peu moins grandes que celles des six cloisons restées fertiles. Plus bas, au sommet du tiers mférieur de la colonne et au-dessous de la terminaison inférieure des SIX plus longues portions génitales appartenant aux cloisons 2, 2; l, 1 ; 3, 3 de la figure 1^2 (texte), on voit que (même figure) ces six cloisons sont plus larges et présentent, à leurs bords libres, de larges entéroïdes qui, plus haut, ne se montraient que sur les cou- ples 4,4; 5, o ; 6, 6. Celles-ci en sont maintenant privées, ce qui indique qu'à ce niveau elles sont à leur portion basale ; on voit, eu outre, que les saillies qu'elles font vers le centre de la cavité du corps sont inégales d'un couple à l'autre couple. C'est ainsi que les deux cloisons 4, 4, formant la paire commissu- > Cette portion digestive n'est pas distincte sur la planche XII ; mais sur la planche IX, pliot. 4, on voit six cloisons qui ont été coupées transversalement à son niveau. ARCH. DE ZOOL EXP. ET GÉN — 3^ SÉRIE. - T. III. 1 S'Jo. 10 U6 L. FAUKOT. raie opposée à celle qui, plus haut, se fixe au tube concliulaire (phol. 1, pi. IX), sont mainlenant si réduites que leurs dimensions et leur aspect sont identiques à ceux des huit petites cloisons rudi- mentaires et stériles disposées en quatre paires dans quatre des douze interloges séparant les douze paires fertiles. Quant aux bords ^ libres des cloisons 6, G (fîg, 12), ils sont de- venus moins saillants que ceux des deux au- tres 5, 5. A un niveau un peu plus élevé, re- produit par la pholo- '< graphie 4 (pi. IX), on voit que les bords de ces deux couples font encore des saillies éga- les. En résumé, au tiers inférieur de la colonne, les largeurs des douze cloisons fertiles ont diminué ; six cloisons plus larges, et dont la por- tion génitale est plus longue, font des saillies égales et sont pourvues d'un entéroïde ; six plus étroites, et dont la portion génitale est moins longue, font, couple par couple, des saillies différentes et sont dé- pourvues d'entéroïde. Parmi ces six dernières cloisons, la paire 4, 4 est la première dont la largeur a diminué ; vient ensuite le couple 5, 5, puis le couple 6, 6. La photographie G (pi. IX) montre une disposition toute différente de celles qui précèdent. Parmi les douze cloisons fertiles, la paire 4, 4, qui, à la région œsophagienne, était égale en saillie aux cinq autres paires et qui, au tiers inférieur, avait diminué de volume au point de ressembler aux quatre petites paires stériles, n'a pas changé' d'aspect. Les couples 5, 5 et G, G semblent avoir repris des 3 ^-^ 3 Fig. a. — Peachia hastaia. Coiipu au niveau du tiers inférieur de la colonne. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 147 dimensions égales aux six autres 2, 2 ; 1 , 1 ; 3, 3 (fig. 12, texte), qui, depuis la terminaison de leur portion génitale, étaient restées les plus grandes. Mais ce n'est là qu'une apparence causée par l'in- troversion de l'extrémité inférieure de la colonne. C'est aussi à cette introversion presque constante chez le Peachia qu'il faut attribuer la lacune circulaire de tissu qu'on voit au centre de la pho- tographie. En réalité, toutes les cloisons, les douze fertiles dont nous venons de décrire les dispositions à différents niveaux, aussi bien que les huit stériles rudimentaires, se terminent au centre de l'ex- trémité basale du Peachia, mais jusqu'à cette terminaison inférieure elles conservent leurs différences de largeurs. Ces largeurs y sont seulement de plus en plus petites ^ Cloisons stériles. Disposées en quatre paires. Ces huit cloisons sont très étroites relativement aux douze fertiles (phot. \, pi. IX); elles ne sont pas munies d'entéroïdes. Depuis leur extrémité supérieure, située à l'union du disque tentaculaire avec la colonne, jusqu'à leur extrémité inférieure, au centre de l'extrémité basale de l'Actinie, ces cloisons conservent des dimensions à peu près invariables. Les quatre petites loges et les huit petites interloges qu'elles forment, dans quatre grandes interloges, ne se prolongent jamais en tenta- cules qui leur soient propres. Ces appendices, avons-nous dit, sont toujours en nombre égal à celui des cloisons fertiles, lesquelles limitent six grandes loges et six grandes interloges. Faisceau pariétal et faisceau unilatéral des cloisons. — Chacune des douze cloisons fertiles possède un faisceau de feuillets pariétaux et un faisceau de feuillets unilatéraux. Les huit cloisons stériles sont uniquement constituées par des feuillets pariétaux qui, de la région ' L'extrémité inférieure des cloisons se rccourbaiil par suite de riiilroversion de la base de la colonne, le rasoir du microtome les coupera à ce niveau, non pas trans- versalement, mais à peu près longitudinalement. On comprendra ainsi qu'en coupant transversalement de haut en bas une extrémité inférieure de Peachia, on obtienne d'abord des préparations semblables à la photographie 6, pi. IX, et ensuite des pré- parations oîi les vingt cloisons apparaîtront comme autant de rayons égaux se réu- nissant autour d'une lacune circulaire. Je n'ai pas jugé utile de reproduire ces pré- parations. 148 L. FAUIIOT. œsophagienne à la région basale, ne présentent aucune différence avec ceux des douze cloisons précédentes. Il y a donc, chez le Pea- c/iia, vingt faisceaux pariétaux et douze faisceaux unilatéraux. Les feuillets des faisceaux pariétaux ne sont pas d'égale largeur sur les deux faces de chacune des vingt cloisons. Sur l'une, ils sont plus nombreux et plus larges qu^ sur l'autre. La face où ils sont le plus larges est, dans les douze cloisons fertiles, toujours placée du même côte que le faisceau unilatéral, c'est-à-dire du côté de la loge, et toujours celle où ils sont le plus étroits et le moins nonibreux est placée du côté opposé, c'est-à-dire du côté de l'interloge. Cette iné- galité de largeur des feuillets latéraux des vingt faisceaux pariétaux permet donc de distinguer, dans chacun de ceux-ci, une face locu- laire et une face interloculaire. Nul doute, par conséquent, que les huit cloisons stériles ne constituent quatre paires distinctes. Les faces de ces cloisons, qui sont munies des feuillets les plus larges et les plus nombreux, sont en effet tournées les unes vers les autres (lig. 12, texte), de la même manière que les faisceaux unilatéraux des douze cloisons fertiles. Ni chez VEdwardsia ni chez VHalcampa, on n'observe une semblable structure des cloisons stériles rudimen- taires. A la région œsophagienne, les feuillets unilatéraux des douze cloi- sons fertiles s'étendent sur presque toute la largeur de la hampe, depuis la paroi de la colonne où ils se réunissent au faisceau pariétal jusqu'à leur attache œsophagienne. En ce point, près de l'extrémité interne de la hampe, l'ensemble des feuillets unilatéraux prend la forme, sur chacune des cloisons, d'un bourrelet arrondi. Sur les coupes transversales on voit, en outre, les faisceaux unilatéraux devenir graduellement plus épais, à partir du faisceau pariétal jus- qu'à ce bourrelet interne. On retrouve les mêmes particularités dans la partie supérieure de la portion génitale des mêmes cloisons, mais plus bas le nombre des feuillets y est moins considérable, et il s'y produit, en outre, un amincissement qui commence par la partie la plus épaisse en forme de bourrelet du faisceau, c'est-à-dire celle ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 149 qui correspond au bord interne libre de la cloison terminé par l'en- téroïdc. Cet amincissement augmente d'étendue du haut en bas de la cloison; il en résulte que, dans la portion digestive de celle-ci (phot. 4, pi. JX), le bourrelet interne des faisceaux, qui plus haut était formé par les feuillets les plus saillants, a complètement dis- paru. On voit qu'à la place qu'il occupait, les faisceaux unilatéraux se terminent en pointe mousse. Dans la portion basalc des cloisons, le faisceau unilatéral s'amin- cit de plus en plus ; ses feuillets les plus externes, les plus proches du faisceau pariétal sont ceux qui se prolongent le plus bas. Enfin, à un niveau assez rapproché de l'extrémité inférieure (phot. o et 6, pi. IX), les faisceaux unilatéraux des dix cloisons fertiles, dont les portions génitales sont les plus longues \ ne sont plus distincts. Le faisceau pariétal de chacune de ces dix cloisons se prolonge, au contraire, beaucoup plus bas, tout en conservant les mômes dimen- sions qu'il présentait dans les autres régions. On voit (phot. 6] que sa forme ne diffère pas de celle des faisceaux des huit cloisons rudi- mentaires. On remarquera que chez le Pcachia, de même que chez Y Halcampa et VEdwardsia, le faisceau unilatéral de chacune des cloisons fer- tiles diminue graduellement d'épaisseur vers l'extrémité inférieure de la colonne, et que cette diminution correspond à celle de la lar- geur des cloisons auxquelles chacun d'eux est fixé. Sillon commissural. — On sait que l'œsophage des Actinies pré- sente généralement deux sillons longitudinaux correspondant aux commissures buccales, et auxquels sont fixées les deux paires de cloi- sons commissurales. Chez le Peackia, il n'existe qu'un seul de ces sillons, mais il est remarquable par sa profondeur, l'épaisseur de ses parois et l'étendue qu'il occupe dans la cavité du corps. En raison de ces particularités, le sillon commissural semble constituer un véritable organe, dont la forme peut être comparée à un tube accolé ' Il a été dit plus liant que les portions génitales des cloisons de la paire commis- surale dorsale (4/i sur la figure 12, texte) étaient les plus courtes. ISO L. FAUROT. à l'œsophage, s'ouvrant, à l'extérieur, par l'orifice du conchula et se prolongeant, dans la cavité générale, bien au delà du bord inférieur de cet œsophage. Nous l'étudierons dans ses deux portions œso- phagienne et sous-œsophagienne. Ces deux portions réunies ont une longueur totale équivalente environ au tiers de la colonne. Les rapports de situation du sillon commissural avec l'œsophage et les vingt cloisons sont faciles à reconnaître sur la photographie i, pi. IX, reproduisant une coupe transversale pratiquée immédiate- ment au-dessous du conchula et du disque tentaculaire. On y voit, en outre, que les parois de ce sillon sont beaucoup plus épaisses que celles de l'œsophage, et que sa cavité a une forme très allongée. Ce n'est qu'au niveau du conchula que cette cavité présente une forme circulaire. Dans toute sa portion œsophagienne, la cavité du sillon commis- sural est toujours isolée de celle de l'œsophage; c'est, du moins, ce que j'ai toujours constaté sur les spécimens ouverts après fixa- tion par la solution chromique (pi. XII), ainsi que sur les coupes transversales. Sur les Peachia fraîchement préparés, ce n'est qu'en employant une certaine force qu'on peut entr'ouvrir les deux bords de cet organe, entre lesquels cependant il n'y a aucune continuité de tissu. La portion sous-œsophagienne du sillon mesure une longueur environ deux fois aussi grande que celle que nous venons de décrire, Elle s'étend vers le bas, accompagnée de deux larges lamelles ondu^ lées (pi. XII) constituées par deux minces prolongements de l'œso-^ phage. On reconnaîtra facilement ces deux lamelles sur la photogra- phie 2 (pi. IX), elles y sont déjetées latéralement, mais une coupe faite plus haut ou plus bas les aurait montrées avec une disposition différente, car elles sont molles et flottantes. Le sillon commissural conserve, au contraire, une direction verticale. Dans toute son étendue, c'est-à-dire depuis le bord inférieur de l'œsophage jus- qu'au tiers moyen de la c;ivilc du corps, son calibre se rétrécit peu à peu et se perd entre les plis des deux lamelles, de telle sorte que ÉTUDES SUR LES ACTINIES. ISl son ouverture inférieure opposée au conchula présente plutôt l'as- pect d'une fente que celui d'un véritable orifice. Quant aux deux cloisons commissurales (ventrales) qui relient le sillon à la cavité du corps, je rappellerai que leur bord interne devient libre à un niveau beaucoup plus bas que celui des dix autres cloisons fertiles. J'ajou- terai que rétendue occupée par les cellules sexuelles sur ces deux cloisons est à peu près égale à celle que ces mômes cellules occu- pent sur la paire commissurale opposée (dorsale). L'unique sillon commissural du Peachia n'a pas une structure très différente de celle des deux sillons analogues qu'on observe chez la plupart des autres Actinies. Celte structure est, d'ailleurs, celle de l'œsophage lui-même dont les sillons ne sont que des replis à parois plus ou moins épaisses. Nous avons vu, dans les généralités, que dans le cours du développement un enfoncement se produisait en un point du corps de la larve, pour former le disque oral et l'œso- phage. Il en résulte que, dans ce dernier organe et dans les sillons commissuraux, l'ectoderme formera la couche la plus interne, et que l'entoderme, au contraire, tapissera la face externe de la couche mésodermale. Chez le Peachia, depuis le conchula jusqu'à l'extré- mité inférieure du sillon, ces trois couches ne sont pas développées au même degré. Le mésoderme, très épais immédiatement au- dessous du disque tentaculaire, s'amincit assez rapidement vers le bas. Sa face ectodermale est plissce longitudinalement, comme l'est la même face dans les tentacules. L'entoderme conserve, jusqu'à l'extrémité inférieure sous-œsophagienne, une grande épaisseur (phot. 1, pi. IX, et, plus nettement encore, phof. 5, pi. V). Sa super- ficie présente des plis qui disparaissent, sans doute, lorsque la cavité du sillon s'élargit. DÉVELOPPEMENT. — J'ai cxposé, dans la première partie de ce tra- vail, quelques détails sur l'ovule, la segmentation et les embryons du Peachia hastata, en ajoutant qu'il ne m'avait pas été possible d'observer le développement des cloisons. Si, chez cette Actinie, complètement développée, les longueurs 152 L. FAUROT. relatives des portions génitales des douze cloisons fertiles étaient, comme chez Ylialcampa, en rapport avec leur ordre d'apparition, il est évident que cet ordre serait tout autre que celui observé, jusqu'à présent, sur les embryons d'Hexactinies. Cependant, en raison des analogies de situation (orientation des faisceaux de feuillets unilaté- raux), et aussi dans le but de faciliter la description anatomique, je me suis servi, pour désigner ces cloisons, des mêmes chiffres (fig. 12, texte), qui, chez VHalcampa, indiquent l'ordre d'apparition des six couples primitifs. Chez le Peachia, les bords internes des cloisons 6,6 se détachent de la face externe de l'œsophage à un niveau beaucoup plus élevé que les cinq autres couples fertiles. Cette particularité anatomique, ainsi que les largeurs relatives des portions génitales de ces mêmes cloisons examinées sur une coupe transversale au tiers inférieur (même figure), sembleraitjustifier leur homologation avec le couple qui, chez VHalcampa^ est le sixième dans l'ordre d'apparition. 11 en serait de même pour le couple 5,5. Mais les longueurs relatives des mômes portions génitales de ces deux couples ne sont nullement en relation avec cet ordre. D'après ces longueurs (pi. XII), en effet, c'est le couple 4,4 qui devrait être le sixième dans l'ordre d'appa- rition. Il est possible que les grandes dimensions acquises par le sillon commissural ventral et l'avortement du sillon dorsal soient la cause, chez le Peachia, d'un ordre d'apparition des cloisons tout diflërent de celui que nous avons décrit chez VHalcampa. Peut-être aussi ces particularités n'ont-elles eu pour effet que de modifier les lon- gueurs des portions génitales d'un certain nombre de ces cloisons? ELOACTIS MAZELl ANDRES. Cette Actinie pivotante, ;\ tentacules non rétractilcs, a été d'abord décrite sous le nom dllyanthus Mazeli (Jourdan). Je conserve la dé- nomination donnée par Andres en raison de particularités très carac- ÉTUDES SUR LES ACTINIES. -153 téristiquesqui l'éloignentdu genre Ihjanthus.Le nom iVA^iemonacds Mazeli (Fischer) lui a aussi été atlribuc, mais il ne me parait pas de- voir lui être conservé en raison de la ressemblance qu'a cette dési- gnation avec Anemonia et Ammonactis, se rapportant à des Actinies fixées, desquelles ce genre Eloactis s'écarte notablement. Le nombre des tentacules, la couleur rosée du disque et de la co- lonne de VEloactis Mazeli dragué à Banyuls-sur-Mer, entre le cap Bearn et le cap l'Abeille, concordent complètement avec ce qu'en dit Jourdaii(di8'î9); mais ce naturaliste, de môme qu'Andres et Fis- cher (-1890), ne mentionne pas la forme des tentacules qui sont ca- pilés comme ceux des Corynactis. Au nombre de vingt, ils sont alter- nativement courts et longs, formant ainsi deux rangées, chacune de dix appendices. Aux commissures buccales correspondent deux des dix courts tentacules. L'examen anatomiquc a été fait au moj'en de coupes transver- sales sur un spécimen dont la colonne était très contractée, mais dont le disque tentaculaire était, au contraire, très épanoui. L'œso- phage, extroversé d'un seul côté, faisait saillie à l'extérieur, de telle sorte que l'un des deux épais sillons commissuraux apparaissait tout entier au-dessus du disque. Cette saillie qui, par sa forme, ressem- blait au tube conchulaire du Peachia hastata, n'existe pas sur VEloactis vivant, dont les deux commissures, de même que celles de Vllyanlhus parthenopeus, ne proéminent pas au-dessus de l'ouver- ture buccale. On voit, par cet exemple, à quelle erreur peut être sujette la description des caractères extérieurs d'une Actinie dont l'élude n'aurait été entreprise que sur un spécimen contracté. Sur l'ensemble des coupes faites au niveau et au-dessous du dis- que tentaculaire, j'ai constaté la présence de vingt cloisons toutes égales en largeur et orientées de manière à former dix loges, dont deux commissurales et dix interloges. Les dix petits tentacules sont tous loculaires et les dix plus grands tous interloculaires. Ce rap- port des plus petits tentacules avec les loges et des plus grands avec les interloges est contraire à celui qu'on observe chez les Actinies; \U L. FAUUOT. aussi aurais-je douté de l'exacte interprétation de mes coupes*, si cette interprétation n'avait été justifiée par l'examen de VEloactis vivant sur lequel deux des plus petits tentacules étaient situés en face des commissures buccales qui, on le sait, correspondent à deux loges et non pas à deux interloges. De même que chez Vllyanlhus parthenopeiis, les deux sillons com- missuraux de VEloactis Mazeli se prolongent au-dessous du bord libre de l'œsophage. Les bords de ces sillons sont largement écartés et non pas rapprochés, comme cela s'observe chez le Peachia hastata. ILYANTBUS PARTHEXOPEUS ANDRES. Le genre Ilyanihus a été créé par Forbes. Gosse en fit le type d'un groupe renfermant toutes les Actinies qui ne sont pas fixées par leur extrémité inférieure [Ihjanlhidw). Andres, au contraire, estime que ses caractères extérieurs justifient l'établissement d'une sous- famille des Actiniœ, à laquelle il donne aussi le nom &' llyanthidx. Aucun des principaux caractères attribués par ce naturaliste à l'espèce que nous étudions ici ne nous paraissent caractéristiques. « Une colonne piriforme, un bord marginal relevé et dentelé, un col en forme de fosse circulaire, un péristome déprimé, des commis- sures peu apparentes» indiquent, chez cette Actinie, un état de demi-contraction. C'est, d'ailleurs, contracté^ que V Ilyanthus par- thenopeus est représenté par le dessin d'Andres. La colonne est alors conique, large et caliciforme vers le disque, et sa longueur est de 5 à 10 centimètres. Mais, chez les Ilyanthus parlhenopeus complètement dilates que j'ai examinés en très grand nombre au laboratoire de Banyuls, celte longueur peut atteindre 18 à 20 centimètres. Dans ces conditions, la colonne présente une forme cylindrique depuis son extrémité su- périeure, à la base des tentacules, jusqu'à son extrémité inférieure arrondie et perforée. Le diamètre de cette colonne est de -4 à G cen- 1 La pholograpliie I, pi. V, montre la coupe de l'un dos deux tentacules commis- suraux en face de la loge commissurale dont il est le prolongement. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 15b timètres. Sa surface extérieure est parcourue par des sillons lon- gitudinaux parallèles, dont douze sont particulièrement faciles à distinguer. Entre chacun de ces sillons, on en distingue quelque- fois, à l'aide de la loupe, six autres moins profonds. On remarque aussi, dans les intervalles des sillons, vingt-quatre bandelettes lon- gitudinales qui se terminent à la base des tentacules par des sail- lies plus ou moins globuleuses. Ce sont ces saillies qui donnent au sommet de la colonne un aspect dentelé et qu'Andres considère comme caractéristique de l'espèce. Le disque tentaculairc, très large, tantôt aplati, tantôt excavé, mesure 2 à 4 centimètres de diamètre. Il peut se rétracter, mais beaucoup moins fréquemment qu'on ne l'observe en général chez les autres Actinies à tentacules rétractiles. Les tentacules, au nombre de quarante-huit en quatre cycles (6-1-6+12 + 24=48) et longs d'environ 6 centimètres, reposent presque constamment sur le sable. Leurs dimensions sont d'ailleurs, comme chez toutes les Actinies, plus ou moins grandes, suivant que ces appendices appartiennent à un premier, à un second, troisième, etc., cycle. Mesuré d'une extrémité à l'autre des deux tentacules commissuraux, le disque tentaculaire atteint, chez certains individus, jusqu'à 16 à 18 centi- mètres de diamètre, égalant parfois la longueur de la colonne elle- même. La couleur des llyanthus parthenopeus est, le plus souvent, brun grisâtre, parfois gris rosé sans aucune marque rappelant la teinte uniforme des Authea cerews. Une variété a les tentacules de premier ordre ainsi que les douze sillons péristomiaux correspondants brun rougeâtre. Une autre, assez rare, a tous les tentacules uniformé- ment grenats, cette coloration s'interrompant brusquement à la base des tentacules. On observe aussi chez quelques individus, surtout à la hase des tentacules, des taches irrégulières, des marbrures, des barres transversales de couleur foncée. Il est peu d'Actinies chez lesquelles il soit aussi aisé que chez VJhjantkus parthenopeus, bien épanoui, d'observer la disposition ré- lf)6 L. FAUROT. gulière des tentacules en plusieurs cycles. Sur le disque oral, la base de chaque tentacule du premier cycle s'amincit graduellement en pointe et se prolonge jusqu'aux bords de la bouche. Un peu moins rapprochées de ces bords s'arrêtent les bases tentaculaires du deuxième cycle. Viennent ensuite, et toujours de plus en plus éloignées de l'orifice buccal, les extrémités basales des douze tenta- cules du troisième cycle et ensuite celles des vingt-quatre tenta- cules du quatrième cycle. Cette disposition typique est fréquente, mais il arrive parfois, même sur des Ilyanthes paraissant complète- ment épanouis, que par suite d'une légère contraction du disque oral on ne puisse distinguer le deuxième cycle tentaculaire du pre- mier, qui semble alors être formé de douze appendices au lieu de six. Les llyanthus parihenopem sont fréquemment dragués à Banyuls, près du cap Bearn, par des fonds de 30 à 50 mètres. D'après les pê- cheurs, on les relire toujours avec de la vase, jamais avec du sable. A Naples, Andres les a recueillis à une profondeur de 10 mètres. En mai hSQO, vingt à vingt-cinq individus de cette espèce vivaient depuis deux ans au laboratoire Arago, dans un bac de l'aquarium. Le fond de ce bac était garni de sable, et les Ilyanthes s'y étaient implantés. Au moment de mon arrivée à Banyuls, quelques Ilyanthes étaient épanouis, d'autres étaient rétractés, d'autres enfin étaient complètement enfouis sous une couche de sable. Des débris de poisson qui leur furent jetés provoquèrent, dans l'espace de vingt à trente minutes, l'épanouissement de toutes ces Actinies. Je retirai alors du sable celles dont le disque tentaculaire était plus large, et après les avoir conservées en repos durant quelques heures dans de l'eau de mer, je constatai que leur colonne mesurait de 10 à 20 cen- timètres de longueur. Ces dimensions dépassent dç beaucoup celles qui ont été notées par Andres et Fischer. C'est d'ailleurs une règle générale chez toutes les Actinies que pendant l'acte de la digestion, dont la durée est de vingt-quatre à quarante-huit heures chez V llyanthus pa-rtlienopeus^ l'état d'épanouissement se manifeste à son plus haut degré. ÉTUDES SUll LES ACTINIES. 157 La demi-obscurité et surtout l'obscunté complète ravorisciit aussi l'épanouissement des Ilyanlhes. Venait-on à les éclairer par la lumière du jour, ils se contractaient plus ou moins complètement; venait- on, au contraire, à les éclairer à l'aide d'un faisceau de lumière élec- trique (lampe à incandescence), ils restaient épanouis. Cette diffé- rence dans l'effet des deux sortes d'éclairage, observée par M. de Lacaze-Duthiers, met fort bien en évidence, ainsi que l'a signalé ce savant professeur, qu'il peut exister une différence dans la nature physique des deux lumières. La surface de la colonne de V Ibjanthus parthenopeus, de même que celle du Peachia, sécrète un mucus destiné à tapisser les parois du gîte qu'il se creuse dans la vase ou le sable. Ce mucus forme une couche excessivement mince, mais qui suffit parfois ù maintenir béant l'orifice de ce gîte, lorsque l'Actinie rétractée en occupe le fond, L irritabilité de la colonne est très vive, et c'est pour ce motif que, malgré de nombreux essais, je ne suis pas parvenu à fixer par les réactifs un seul individu sans qu'il se soit contracté. Lorsqu'un Ilyanthe est placé dans une cuvette de verre pleine d'eau de mer, il s'épanouit et se meut par des contractions annulaires de la colonne semblables à celles de VHalcampa et du Peachia. Sur un épais fond de sable, il ne tarde pas à s'enliser; très probablement de la même façon quej'ai décrite chez la dernière de ces Actinies. h' Ihjanthus scolkus (Forbes) et Vllyanlhus MUckeiii (Gosse), des côtes d'Ecosse et d'Angleterre, paraissent constituer deux espèces bien distinctes de Vllyanthus parlhenopeus (Andres) qui, jusqu'à pré- sent, n'avait été signalé que dans la Méditerranée, à Naples, Mar- seille et Banyuls. Je l'ai cependant observé sur les côtes de l'Océan, à IJoscoff. Anatomie. — Parmi les llyanthes qui, malgré tous mes essais avec la solution chromique, étaient morts en état de contraction, quelques-uns moins déformés m'ont permis de constater que deux sillons commissuraux se prolongeaient au-dessous de l'oesophage, sur une longueur environ égale ù celle de cet organe. Il est pro- 158 L. FAUROÏ. bable que celte proportion ne correspond pas à celle qu'on pourrait observer sur un llyanthe non contracté ; elle est cependant supé- rieure à celle qui existe chez les Actinies fixées {Sagartia, Bunodes, Chitonactis, etc.), dont les sillons commissuraux n'apparaissent au- dessous du bord libre de l'œsophage que sous la forme de très courtes languettes. C'est donc à tort que Ilertwig (1888) avance que les Ilyanthidœ ont le sillon commissural non évident, « siphono- glyphe obscur ». L'examen dllyanthes vivants et épanouis, de manière à ce que leur colonne très gonflée d'eau devienne transparente dans toute la partie située au-dessous de l'œsophage, laisse voir assez nettement les rapports de longueur des portions génitales des différents ordres de cloisons. C'est ainsi que, grâce à l'extrême minceur et la trans- parence des parois du corps, j'ai vu, sur un spécimen de 16 centi- mètres de long, que toutes les cloisons sont fertiles, mais que dans leur étendue une portion seulement est munie de cellules sexuelles. Cette portion se révèle à l'extérieur pour chacun des ordres de paires de cloisons sous la forme de bandelettes de couleur jaunâtre dont l'extrémité supérieure se perd dans la région obscure de l'œsophage, tandis que l'extrémité inférieure, très apparente, se termine à trois niveaux différents. Les cloisons de ces trois ordres sont, d'après quelques coupes transversales suflisamment nettes, au nombre de 12 pour le premier ordre, 12 pour le second et 24 pour le troisième. Elles sont disposées en paires, de telle sorte que les six paires de pre- mier ordre sont celles dont les cellules sexuelles descendent le plus bas, à 5 centimètres environ au-dessous de Toesophage. Quant aux six paires de second ordre et aux douze paires de troi- sième ordre, leurs cellules sexuelles cessent pour les premières à i centimètre environ au-dessous de l'œsophage, pour les secondes près du niveau même du bord inférieur de cet organe. 11 est ù remarquer que les portions fertiles de ces deux derniers ordres de paires occupent une très petite longueur, et qu'au contraire ces portions, sur les six paires de premier ordre, sont relativement ÉTUDES amx LES ACTINIES. 159 beaucoup plus longues. En somme, dans les trois ordres de paires de cloisons de l'Ilyanthe, il en est deux, le second et le troisième, à portion fertile brève, et un, le premier, à portion fertile relati- vement très longue- Les parois de la cavité du corps, même sur les llyanthes les plus contractés^ sont toujours d'une très faible épaisseur. En état d'épa- nouissement, elles sont, comme chez la plupart des Actinies, lisses à l'extérieur et deviennent parfois transparentes, tandis qu'en état de contraction elles se rident très fortement. Chacune des cloisons est pourvue d'un faisceau unilatéral dont les feuillets très grêles et peu ramifiés ne forment aucune saillie en bourrelet ni du côté pariétal, ni du coté du bord libre. De même que chez VEdivardsia, V Halcampa, le Peachia et VL'loactis, il n'existe pas de sphincter au sommet de la colonne. Développement du deuxième, troisième et quatrième cycle de tentacules; du second et troisième ordre de cloisons. Les nombreux llyanthes qui, avons-nous dit, vivaient depuis deux ans dans l'aquarium du laboratoire Arago n'avaient donné naissance à aucun embryon. Durant un séjour (du \-l mai au 12 juillet 1890) que je lis à Banyuls, je n'observai également aucune ponte chez ces Actinies dont les cellules-œufs et les cellules à spermatozoïdes parais- saient cependant arrivées à maturité. 11 semble donc que les llyan- t/ius parthenopeus, de même que les Edwardsia et les Halcampa, ne trouvent pas en captivité des conditions favorables à leur repro- duction. Parmi les llyanthes dragués durant le mois de juin, plusieurs mesuraient, épanouis, de 1 à 3 centimètres de longueur, et l'un d'eux, plus petit que les autres et recueilli par oO à 40 mètres en même temps que des Néoméniens et des Salicornes, ne possédait encore que dix-huit tentacules. Ces appendices, de même que la ' La longueur d"uu Uyantlie mosuraut lo cenlimètres se i-éduit souvent, à 3 ceuU mètres par l'effet de la contraction. 160 L. FAUROT. colonne et le disque, étaient d'ailleurs intacts. En raison de la rareté de spécimens aussi jeunes que celui-ci, j'entrepris de le conserver vivant jusqu'au complet développement de ses trente autres tenta- cules. Ce développement arriva à son terme après une durée de seize mois, pendant lesquels l'eau de mer dans laquelle il vivait fut rare- ment renouvelée. Pour faciliter l'examen des lentes modifications qui se produisirent dans le disque tentaculaire, l'Actinie était placée dans une large cuvette à fond garni de sable, et recouverte en outre d'un verre dépoli servant à maintenir une demi-obscurité. Tous les huit jours environ, de menus débris de poisson étaient déposés sur le péristome,et l'ingestion de ces aliments s'opérait, suivie quelques minutes après d'un très grand épanouissement, qui était l'occasion pour moi de noter les changements qui s'étaient produits dans le nombre et les longueurs relatives des tentacules. L'étude du développement des Invertébrés, et peut-être plus parti- culièrement des Cœlentérés, se fait, en général, en examinant suc- cessivement les diverses phases embryonnaires évoluées, à divers degrés, sur un plus ou moins grand nombre d'embryons. Par la comparaison des faits constatés chez les uns et les autres, on déduit alors l'enchaînement des phénomènes qui doivent survenir dans le cours du développement d'un seul et même individu. Cette méthode ne pouvait être la mienne; aussi les détails qui précèdent ne sont- ils pas inutiles. Avant d'attribuer à l'espèce llyanthus parthenopeus les faits de développement observés sur un unique spécimen, j'ai voulu, en effet, faire connaître les conditions dans lesquelles je les ai constatés, afin que, guidé par cette connaissance, on puisse les vérifier au besoin. Dans l'exposé qui va suivre, on remarquera que l'apparition des trente tentacules de VJlyantlius parthenopeus destinés à former le second, le troisième cycle, ainsi que la plus grande partie du qua- trième et dernier, s'est faite dans chacun des six systèmes, suivant une régularité de symétrie qui ne peut être la conséquence que de lois rigoureuses. Par conséquent, aucune de ses particularités ne ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 161 peut être rangée parmi ces variations d'un individu à l'autre d'une même espèce qu'on observe parfois dans la production de certains phénomènes embryogéniques. Pour les naturalistes, d'ailleurs, qui lie partageraient pas mon opinion à cet égard, l'histoire d'un déve- loppement à stades aussi régulièrement ordonnés que ceux observés sur cet unique Ilyanlhe ne saurait être dépourvue d'intérêt. Dans le but de mieux faire comprendre la partie du développe- ment qu'il m'a été possible d'observer, je vais d'abord rappeler quel est le nombre et la disposition des cloisons et des tentacules chez rilyanthe adulte. Quarante-huit cloisons forment 24 paires disposées suivant trois ordres de grandeur (fig. 3, première partie) : 6 paires de premier ordre, 6 paires de deuxième ordre et 12 paires de quatrième ordre. Ces 24 paires formant chacune une loge, il y a en tout 24 loges. Les inlerloges sont donc aussi au nombre de 24. Le nombre des tentacules est de 48, disposés en quatre cycles (fig. 2, première partie) : Six tentacules de premier cycle prolongeant les loges de premier ordre ; 6 tentacules de deuxième cycle prolongeant les loges de deuxième ordre ; 12 tentacules de troisième cycle prolongeant les loges de troisième ordre ; 24 tentacules de quatrième cycle prolon- geant les 24 interloges. On remarquera que les 24 tentacules du quatrième et dernier cycle sont interloculaires, et que les 24 autres tentacules sont tous loculaires. Voyons maintenant dans combien de stades vont apparaître les 24 paires de cloisons avec leur 24 interloges, ainsi que les 48 tenta- cules correspondants. Dans un premier stade se sont formés les 6 paires de cloisons de premier ordre, avec les 6 tentacules de premier cycle et G tenta- cules interloculaires destinés à faire partie du quatrième et dernier cycle. Dans un seoond stade se sont formés, à une première phase, les AKCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉ.N. — 3^ SÉRIEt — T. III. 189b. 11 162 L. FAUROT. 6 paires de cloisons de deuxième ordre, avec les 6 Leiitacules de deuxième cycle. Ces éléments s'ajoutant à ceux du premier slade, la somme des paires de cloisons sera de 42, celle des loges de 12, et celle des interloges sera aussi de 12. Fig. 13. — Hyanthus parthenopeus. Développement de l'un des six systèmes tentaculaires. 1, 1. tentacules loculsires du premier cycle ; 2, tentacule loculaire du second cycle'; 3, tentacule loculaire du troisième cycle : i, interloculaire du premier cycle : i', i', i'. interloculaires apparus après le loculaire du troisième cycle. Le nombre des tentacules interloculaires reste à 6, tandis que celui des loculaires est porté à 12; total, 18 tentacules. C'est à cette période du développement que j'ai commencé à observer le jeune Ilyanthe. A une seconde phase de ce môme stade, c'est-à-dire sans arrêt dans la formation des éléments des ordres et des cycles, se sont ÉTUDES SUK LES ACTINIES. 163 formés les 12 paires de cloisons de troisième ordre, avec les 12 ten- tacules du troisième cycle. Le nombre total des loges est alors de 24; celui des interloges est également de 24. Il est à remarquer que, pendant la première partie de ce stade, ainsi que pendant la seconde, les tentacules des nouvelles interloges n'apparaissent pas encore. A la fin du second stade, toutes les paires de cloisons (24) et tous les tentacules loculaires (24) sont donc apparus, mais il n'existe tou- jours que les 6 tentacules interloculaires formés au premier stade. Dans un troisième stade, enfin, il n'apparaît aucune paire de cloi- sons, mais 18 tentacules interloculaires se forment pour prolonger les 18 interloges qui s'étaient produites durant le deuxième stade, par la formation de 18 paires nouvelles de cloisons. PREMIER STADE A 12 TENTACULES Devant former le premier cycle en entier et le quart des éléments du quatrième cycle. Les tentacules de Vllyanthus parthenopeus qui a fait l'objet de cette élude sont représentés, dans la figure 14, avec les longueurs rela- tives constatées dès le début de l'observation. Il se trouva que l'ap- préciation exacte de ces longueurs fut d'une grande importance, car, dans la suite et sans que nous ayons eu à prévoir ce résultat, elle nous a permis de distinguer le premier stade, à 6 paires de cloisons et à 12 tentacules, de la première phase du deuxième stade, à 12 paires de cloisons et à 18 tentacules. On voit, dans cette figure 14, 6 grands tentacules numérotés 1, alternant avec 6 tentacules un peu plus petits marqués i. L'observa- tion de ces 12 éléments du disque, pendant une durée de seize mois, m'a montré que les 6 premiers, qui dès maintenant sont les plus longs, conservent, par une croissance lente mais continue, jus- qu'à la fin du développement, une longueur prédominante non seu- lement sur les tentacules déjà apparus, mais aussi sur tous ceux <64 L. FAUROT. qui naissent dans la suite. Quant aux 6 seconds, i, leur longueur, que nous voyons actuellement au second rang, resta presque station- naire et fut ensuite dépassée par les tentacules des deuxième et troisième cycles, qui apparurent postérieurement. Les 6 grands ten- tacules 1 formèrent la totalité du premier cycle, et les 6 plus petits contribuèrent, pour un quart, à former le quatrième et dernier cycle. D'après ce qui précède, il résulte que les 1-2 tentacules I et i sont déjà arrivés au terme du développe- ment de leurs longueurs relatives. Ce fait, ainsi que la démonstration que nous allons faire que les plus ^- petits tentacules numérotés 2 (même figure) sont, en raison de leurs petites dimensions et de leur rapide crois- sance^ au début seulement de leur développement, montreront, avec évi- Fig. 14. - liyanihu, parthenopeus. dencc, que Vllyunthus parthenopem a Embryon, grandeur naturelle. passé par une phase prolongée, pen- dant laquelle les 12 tentacules 1 et i existaient seuls. Celte période de repos, ce véritable stade a été d'ailleurs constaté sur un certain nombre d'Hexactinies, Actinia mesembryanthemum, Sagartia para- sitica, S. troglodytes, elc. A ce stade à 12 tentacules, nous avons vu^ qu'il existait 6 paires de cloisons formant 6 loges de premier ordre et 6 inter- loges. Les tentacules 1 prolongent les 6 loges, et les tentacules i prolongent les 6 interloges ; ces derniers, de même que tous les ten- tacules interloculaires, contribueront à former le quatrième cycle. * Première partie. Développement. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 165 PREMIÈRE PHASE DU DEUXIÈME STADE. Apparition des 6 paires de cloisons de second ordre et des 6 tentacules du second cycle. Parmi les 18 tentacules de la figure 14, douze, ai-je dit, se sont formés dans un premier stade et ont atteint leurs longueurs relatives. A l'époque où commença cette étude (2 juin), les dimensions des 6 autres tentacules numérotés 2 étaient beaucoup plus petites que celles des précédents. Cette petitesse ne constituait cependant pas un motif suffisant pour les attribuer avec certitude à un stade nou- veau, mais leur rapide croissance ne me laissa aucun doule sur la date récente de leur apparition. 11 me semble même très probable que leur naissance ne pouvait être antérieure à trois ou quatre semaines, car leur taille doubla dans ce laps de temps et arriva, vers le 15 juillet de la même année (1890), à égaler et, en septembre, à dépasser celle des tentacules interloculaires i. Ils se placèrent ainsi au second rang, que les six derniers occupaient au premier stade, et le conservèrent jusqu'à la fin du développement. Nous avons montré que les six tentacules numérotés 2 (fig. 14) sont nés après le premier stade à douze appendices et qu'ils sont destinés à former le deuxième cycle. Il n'est pas douteux que leur apparition n'ait été précédée de celle de six paires de cloisons de second ordre, puisque la formation de nouveaux tentacules locu- laires est toujours la conséquence de la formation de nouvelles loges. On voit, d'ailleurs, sur la même figure 14 et sur la figure 13 B que les sillons périslomiaux à la base de ces six prolongements 2 indiquent la présence de six nouvelles paires de cloisons qui, on le remarquera, sont nées tout près de la base] de quatj'e des six tenta- cules du premier cycle. C'est ainsi que (fig. 14) : une paire de sillons péristomiaux se trouve de chaque côté des bases des deux tenta- cules commissuraux et que la base des deux tentacules ventro-laté- raux 1 est adjacente à une paire seulement de ces sillons. Les deux 466 L FAUROT. tentacules 1 dorso-latéraiix sont donc les seuls du premier cycle qui ne montrent pas de nouvelles paires près de leur base. Pour comprendre la suite du développement, il est nécessaire de remarquer que c'est dans les six interloges du premier stade que se sont formées les six paires de cloisons de second ordre, et que, de ce fait, le nombre des interloges a été porté de six à douze, mais qu'aucune de ces dernières ne s'est prolongée en tentacule. SECONDE PHASE DU DEUXIÈME STADE. Aftpai'ùion des douze paires de cloisons de troisième ordre et des 12 tentacules du troisième cycle. Je range la formation de ces cloisons et de ces tentacules dans le deuxième stade, car c'est très peu de jours après le début de cette étude que j'en observai les premiers rudiments (fig. 15). D'un autre côté, je n'ai pas constaté d'arrêt entre la formation du troisième cycle et celle du second. En effet, le deuxième cycle, ai-je dit, datait probablement du mois de mai ; or, c'est du 4 juin au 3 juillet que je vis apparaître les douze paires de cloisons et les douze tentacules numérotés 3. On voit, dans la figure 15, que les douze rayons péristomiaux correspondant à la base de ces nouveaux ten- tacules ne sillonnent encore que le bord du disque, ce qui indique que les douze paires de cloisons de troisième ordre sont également de formation nouvelle. Ou remarquera:!" que six de ces douze tentacules (3) sont intercalés entre quatre éléments (1) du premier cycle et six élé- ments (2) du second cycle; 2° que les six autres ont des rapports différents puisqu'ils sont placés entre quatre éléments (1) du premier cycle et six tentacules interloculaires i. Cette distinction en deux groupes que nous venons d'établir dans les douze tentacules de troisième cycle est encore justifiée par une disposition particulière à leurs bases des vingt-quatre rayons péristomiaux : les six paires de rayons péristomiaux des tentacules du premier groupe placées. ÉTUDES SUR LliS ACTINIES. 167 je le répète, entre les bases des tentacules 1 et 2, occupent exac- lemenl le milieu des six petites interloges qui se sont formées lors de l'apparition des six paires de cloisons de deuxième ordre. Au contraire, les six paires de rayons péristomiaux des tentacules du ['\'^. \'i. — llyaulhus parihenopeus. second groupe, placées entre les bases des tentacules i et t n'occupent pas encore le milieu des six plus grandes interloges. Ces différences sont dues à ce que les six tentacules du premier groupe, poussant au-dessus d'inlerloges dépourvues de tentacules, peuvent s'allonger dans le prolongement de ces interloges sans ren- 168 L. FAUROT. contrer d'obstacle. Ceux du second groupe, au contraire, naissant au-dessus d'inlerloges prolongées en tentacules, ne peuvent croître dans l'intérieur de ces derniers et se dévient latéralement jusqu'à ce que, par leur complet développement, ils aient pris leur place défi- nitive. On remarquera qu'il en est de même chaque fois qu'une paire de cloisons apparaît dans une interloge déjà prolongée en ten- tacule. On voit, en effet, sur la figure 14, que les tentacules 2 du second cycle paraissent comme entés par leurs rayons péristomiaux sur les tentacules interloculaires primitifs t. Rapport de situation des douze tentacules loculaires 3 du troisième cycle avec les six tentacules toculaires 1 du premier cycle, les six tentacules loculaires 2 du second cycle et les six tentacules interloculaires i du premier stade. 'Deux intercalés^ Le tentacule commissiiral dorsal 1 I entre : ( et deux tentacules 2. ■ejSix sont intercales entrel ,, , , . , 5 lUeux intercaleSyLe tentacule commissurai ventral 1 -c QMfl/retentaculesdupre-l ■; , . , , œ' entre : ' et deux tentacules 2. mier cycle et les six ten- tacules du second cyc savoii' : Un intercalé 'Le tentacule ventro-latéral droit 1 entre : ( et un tentacule 2. Un intercalé ^Le tentacule ventm-iatéral gauche 1 entre : ,' et un tentacule 2. /Deuxintercalési Le tentacule dorso-latéral droit 1 et ^ . , entre : r deux tentacules interloculaires i. S S /riix sont intercalés entrel,^ •.,, . i- ,r ■ i i i i .- i \ . ^ 2j VDeux intercalesn.e tentacule dorso-lateral gauche 1 quM/r^ tentacules du pre-i .. 5 . i . i i • ^ i i • • ^ ' J entre: ( et deux tentacules interloculairesi. mier cycle et les six ten-x t, ■ , i- t . . i , i .■ i j -i . "' \ Un intercale tLe tentacule veniro-lateral droit 1 tacules interloculaires il , i . • . i i • • I entre : f et un interloculaire i. du premierstade savoir:! r, • , i- ,t . . i . i i- . i . ' Un intercale CLe tentacule ventro-lateral gauche 1 \ entre: ( et un interloculaire i. Pour mieux faire comprendre quels sont, à cette période du déve- loppement, les rapports de situation de l'ensemble des douze élé- ments du troisième cycle et du troisième ordre avec les six paires de cloisons du premier ordre, les six paires de cloisons du second ordre et les dix-huit tentacules (six de premier cycle, six interloculaires et six de second cycle) qui les ont précédés, je les ai résumes en un tableau où, pour plus de clarté, je n'ai fait mention que des rap- ports des tentacules. Mais, en se souvenant que les tentacules locu- ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 169 laires (premier, second et troisième cycle) sont les prolongements des loges (premier, second et troisième ordre), il sera facile d'appli- quer aux paires de cloisons ce que nous disons des tentacules. On remarquera que la situation des six tentacules du premier groupe de ce troisième cycle (fig. 1 5) par rapport à quatre tentacules 1 du premier cycle est exactement la même que celle qu'occupaient à leur naissance les six tentacules 2 du second cycle (Hg. 1-4). De ces faits, on peut conclure que le second cycle tout entier et six tentacules du troisième, au total douze tentacules loculaires (nous pour- rions également dire douze paires de cloisons) ont apparu en six points symétriques du disque de l'ilyanthe. Ces six points sont voisins de six des douze cloisons primitives de l'Actinie. Quant aux six ten- tacules du second groupe, c'est-à-dire les six autres tentacules du troisième cycle {nous pourrions dire : six des douze paires de cloisons de troisième ordre), ils apparaissent en s>'x points également symé- triques, qui sont situés entre les six autres cloisons primitives et les six interloculaires du premier stade. Ces interloculaires, refoulés par la croissance des six nouveaux tentacules, paraissent être la cause du retard observé dans la croissance de ces derniers. L'accroissement des douze tentacules du troisième cycle, apparus en même temps que ceux du second cycle (juin-juillet hS'JO), se continua jusqu'au mois de septembre de la même année, et, à cette époque, leurs longueurs relatives étaient semblables à celles qui sont représentées dans la figure i6 (tentacules 3). Les tentacules naissants i" de la même figure appartiennent au troisième stade, qui sera décrit plus loin. A la fin de ce second stade, toutes les cloisons de l'Ilyanthe, au nombre de quarante-huit, formant vingt-quatre paires, ont apparu, et les vingt-quatre loges formées par ces paires ordonnées en trois ordres se prolongent en vingt-quatre tentacules. Les six interloges du premier stade ont quadruplé de nombre par suite de la nais- sance de dix-huit nouvelles loges. Le nombre de ces interloges qui, chez l'Ilyanthe adulte, ne dépasse jamais vingt-quatre, est donc au 170 L. FAUROT. complet (6 primitives plus 18 nouvelles), mais six seulement, celles du premier stade, sont munies de tentacules. Apparition des derniers tentacules au nombre de dix-huit ; ils sniit Fig. IG. — Ityaniluis partlienopeus. TROISIEME STADE. tous mterlociilanes. Ils lormeronl le quatrième cycle, dont le quar (six tentacules?) des éléments s'est déjà développé au premier stade. Ces dix-huit tentacules (y", fig. IG et 17) apparurent tous dans le courant de mai-juin 1891, au-dessus des interloges formées pendant le second stade en mai-juillet 1890. J'ai dit que le développement ÉTUDES SUR Ï.ES ACTINIES. 171 des dix-huit tentacules de ce second stade s'était terminé en sep- tembre 1890. Il y a donc eu un intervalle, octobre 1890 à juin 1891, pendant lequel le premier, le second et le troisième cycle et les six interloculaires i étant complètement formés, il ne se produisit Fie;-. 17. — llyantiius parlhrnopcits. aucune nouvelle formation de tentacules. Ce l'ut un véritable arrêt dans le développement. Lorsque j'examinai l'Ilyanthe pour la première fois, au commen- cement du second stade, la longueur de la colonne mesurait déjà 1 centimètre et demi à 2 centimètres, et celle des six tentacules de 172 L. FAUROT. premier cycle, \ centimètre et demi. Ces dimensions, grandes rela- tivement au petit nombre des tentacules, ainsi que ce fait, assez général chez un certain nombre d'Actinies, que la reproduction se manifeste de février à mars, permettent de supposer avec beaucoup de vraisemblance que cet llyanthe était à cette époque âgé d'en- viron un an. S'il en a été réellement ainsi, la formation des trois stades aurait débuté au printemps de trois années successives : 1889. Premier sla/le, h la fin duquel existaient : 6 paires de cloi- sons, 6 tentacules loculaires et 6 tentacules interloculaires. 1890. Second stade, à la fin duquel existaient : 24 paires de cloi- sons, 24 tentacules loculaires et 6 tentacules interloculaires. 1891. Troisième stade, à la fin duquel on compte : 24 paires de cloisons, 24 tentacules loculaires et 24 tentacules interloculaires. A ce moment, le développement de Vl/yanthus parthenopeus est complète- ment achevé, car il n'a jamais été observé d'individus de cette espèce possédant plus de 48 tentacules. Bemargties : i° L'étude de cedéveloppement semble démontrer que la présence des six tentacules interloculaires primitifs du premier stade est l'unique cause qui fait que les éléments du second et du troisième cycle ne sont pas apparus successivement en s'intercalant régulièrement; en d'autres termes, si les six interloges du premier stade étaient restées, jusqu'à la fin du développement des loges, dé- pourvues de prolongements tentaculaires, comme le furent les dix- huit interloges formées au second stade, on aurait vu qu'entre les six tentacules du premier cycle se seraient intercalés les six élé- ments du second cycle, puis les douze du troisième cycle et enfin les vingt-quatre inlerloculaires constituant le quatrième et dernier cycle. 2° Parmi les douze tentacules du troisième cycle, il y en a six qui ont une croissance plus rapide que les six autres, parce que celle-ci n'est pas retardée par la présence des six interloculaires pri- mitifs; et il est aussi à remarquer que, pour ce cycle, de même que pour le second, il y a une avance dans le développement du côté de ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 473 l'un des deux tentacules commissuraux. Cette avance se remarque chez beaucoup d'Actinies'. 3» Les six tentacules du second et les douze du troisième cycle apparaissent en des places parfaitement symétriques dans chacun des six systèmes. ACTINIES FIXÉES. Tealia felina. Sagartia parasilica. Adamsia pa/.liata. Après l'étude des Actinies pivotantes et avant de commencer celle des Actinies fixées, il me paraît utile de compléter i'énumération des laits qui, d'après mes recherches, différencient ces deux groupes. Actinies pivotantes, La colonne est très longue par rap- port au diamètre. Celui-ci est plus étroit en bas qu'en haut. La base est arrondie. Cloisons moins nombreuses- mais plus longues. Les cellules sexuelles occupent une plus grande étendue sur chacune des cloisons fertiles. Les cloisons diminuent graduelle- ment de largeur vers le bas en même temps que l'appareil musculaire de- vient rudimentaire. Pasde pariéto-basilairesnide sphinc- ter. Corps plus mobile. Reptation à la manière des Synaptes. Enlisement (à l'exception des Edwardsies). Actinies fixées. La disproportion entre la longueur et le diamètie de la colonne est beau- coup moins grande. Le diamètre du disque pédieux est à peu près égal à celui des autres régions. Cloisons plus nombreuses mais plus courtes. Chacune des cloisons fertiles renferme donc une quantité moindre de cellules sexuelles. C'est dans leur portion inférieure que les cloisons sont le plus larges. Cette plus grande largeur est comme le résultat d'un raccourcissement de la colonne, les cloisons s'élargissant par suite du rapprochement de la base vers la partie supérieure de l'Actinie. Toujours des pariéto-basilaires. Fré- quemment un sphincter. Corps ordi- nairement immobile. Glissement au moyen du di.-que pédieux à la manière des Gastéropodes. ' Première partie. Rapports de disposition des organes. - ]^'Hyantltus parthenopeus est pourvu de quaraiiie-liuit cloisons, mah les dimen- sions de celte Actinie sont très grandes relativement aux Actinies fixées qui en pos- sèdent le même nombre. 174 L. F AU ROT. Chez V Edwardsia Beautempsi, dé- Chez les Actinies fixées, formatiou •veloppement incomplet des quatre der- régulière (à l'exception du Tealia) des nières cloisons du stade 12, apparition cloisous et tentacules par 8, 12, 24, de deux paires seulement de deuxième 48, etc. ordre. Chez X'Ualcampa chrysanthellum, absence de six tentacules loculaires et de six tentacules interloculaires. Chez le Peachia hastata, absence de deux paires de cloisons de deuxième or- dre, de quatre tentacules loculaires et de quatre interloculaires. Chez Vllf/anthus parthenopeus, re- tard dans l'apparition de dix-huit ten- tacules interloculaires. On peut conclure d'après l'ensemble de ces caractères différen- tiels, que les Actinies pivotantes ont une structure plus simple, plus primitive que les Actinies fixées; mais leur plus grande simplicité ne signifie pas infériorité d'organisation. Diverses phases embryogéniques des Actinies fixées peuvent se reconnaître dans l'organisation de VEdwardsia, de VHalcampa, de Vllyanthus, complètement développés ; mais ce fait ne prouve pas que les premières aient généalogiquement succédé aux Actinies pivotantes. En outre, chez le Peachia (Actinie pivotante), il existe un profond plissement de l'œsophage, un organe à fonction inconnue qui peut être interprété vraisemblablement comme un important perfectionnement de l'organisme. TEALIA FELIN A LINNÉ, TEALIA CBASSICOBNIS GOSSE. Cette Actinie, figurée et longuement décrite par Gosse, est fré- quente sur les côtes rocheuses de la Bretagne et de la Normandie. Sa coloration est très variable; le plus souvent, la colonne est bigarrée de rouge, de gris verdâtre et d'orange, et les tentacules, gros et courts, sont d'un beau rouge grenat. Ces appendices ne sont pas, comme on l'a prétendu, perforés à leur extrémité, mais y sont parfois ombiliqués. Le disque tentaculaire, large de 4 à 6 cen- ÉTUDES SUR LES ACTINIES. timèlres, esl entouré par un rebord saillant fornrié par le sommet rétléchi de la colonne. Les Tealia vivent à partir du niveau des basses mers entre des pierres ou des iissures de rochers où elles adhèrent fortement par leur disque pédieux, celui-ci très large relativement à la hauteur de la colonne. Aux tubercules adhésifs qui garnissent principalement le tiers supérieur de la surface de la colonne sont fixés des débris de coquilles, des grains de sable qui se détachent au bout de vingt- quatre à trente-six heures lorsque les Actinies sont placées dans un aquarium. Elles ne peuvent y être conservées longtemps vivantes ; elles meurent en extroversant complètement leur œsophage. L'organisation du Tealia a déjà éfé étudiée par Hertwig (18^9 et ■188a), qui a décrit la structure du sphincter, des cloisons et des tentacules. 11 ne fait cependant aucune allusion à la sériation en cycles de ces appendices. Cette sériation est remarquable en ce qu'elle est établie sur un plan différent de celui que l'on observe chez la plupart des Actinies. Pour l'auteur de VActinologie britan- nique [m^O), les Tealia présentent cinq rangées lentaculaires, savoir, o + u-f- 10-+-:J0-f-40 = 8U. Pour Dixon (i889), ces nombres sont « invariablement présents ». Je crois, au contraire, que cette sériation n'est pas exacte. L'existence d'un premier cycle à cinq ten- tacules et d'un second cycle également à cinq tentacules ne serait d'ailleurs possible qu'avec un nombre impair de loges primitives, ce qui est tout à fait contraire avec ce que l'on connaît de Tordre d'ap- parition des premières cloisons chez toutes les Actinies dont on connaît le développement. Elle ne saurait en outre se concilier avec la disposition par paires et bilatérale de ces cloisons. Il faut qu'en admettant la sériation que nous venons d'indiquer les deux auteurs précédents aient été guidés par la supposition d'une sorte de paral- lélisme numérique entre les Tealia et les Hexactinies chez lesquelles on compte communément 0-+-6H-12-I-24 4-48 tentacules. Leur erreur s'explique, il est vrai, aisément, car ce n'est que par l'étude du développement qu'il est possible d'arriver à l'interpréta- ne L. FAUROT. tionljde la symétrie qui préside à la distribution des cloisons et des tentacules des Tealia. Je vais, en elTct, montrer que, chez ces Acti- nies, quatre paires de cloisons faisant normalement partie du second ordre acquièrent des proportions assez considérables pour se ranger avec les six paires primitives dans le premier ordre. Il en résulte que le nombre des loges de premier ordre et par conséquent des tenta- cules de premier cycle est porté de six à dix. On comptedonc 6 + 4 ou 10 tentacules de premier cycle, 10 de second, 20 de troisième et 40 de quatrième. A ces quatre rangées s'ajoutent, sur les indi- vidus dont la colonne mesure 5 à 6 centimètres de diamè!re, un certain nombre de tentacules de cinquième cycle. Je n'ai pas observé ce cinquième cycle complètement formé. La formule tentaculaire des Tealia sera donc chez un individu à 5 cycles : 10+10 + 20 + 40 + 80=1(30. Les quatre premiers cycles correspondront, d'après la règle com- mune aux Hexactinies, aux quatre premiers ordres de loges, et le cinquième cycle aux quatre-vingts interloges. DÉVELOPPEMENT DES LOGES ET DES TENTACULES. Cette étude a été entreprise à l'aide de deux embryons qui furent recueillis sur des fragments de coquilles recouvrant la surface de la colonne de deux Tealia felina de moyenne taille (4 centi- mètres de diamètre). Us furent pris tout d'abord pour de jeunes Actinia rnesembryanthemum ; mais le bord réfléchi de leur colonne, les saillies longitudinales qui apparaissaient à la surface de celle-ci et surtout la sériation des tentacules gros et courts montrèrent qu'il s'agissait de jeunes Tealia qui, très probablement, étaient issus de la cavité gastrique des individus adultes sur lesquels ils furent recueillis. D'ailleurs, sur la grève rocheuse de Landemer (Calvados), où vivaient les deux embryons, j'ai observé un très grand nombre d'autres Tealia felina. L'un des embryons était pourvu de vingt-six tentacules, l'autre de ÉTUDES SUK LES ACTINIES. 177 viugt-huil. Ces appendices étaient de longueurs inégales sur un même embryon, mais présentaient (abstraction faite des deux tentacules qui existaient en plus chez l'un d'eux) une sériation absolument semblable sur les deux embryons. Le premier fut conservé vivant dans l'eau de mer pendant quatorze mois. Du 4 mai 1891 au 30 mai 1892, il fut alimenté et observé dans les conditions qui ont été indi- quées au sujet de Vllyanthus parlhe- , no'peus. Quant à l'embryon à vingt-huit tentacules, il fut fixé peu de jours après avoir été examiné, afin que son anato- mie pût être étudiée au moyen de cou- pes transversales. Très heureusement, sa colonne ne subit aucune rétraction dans la solution chromique. Ces deux embryons peuvent être considérés comme ayant été trouvés à une même phase de leur développe- ment, car le premier, à vingt-six tenta- V '^^^-^'^^ loculaires du premier cycle. ^ ' o 2, tentacules loculaires du second cycle. cules, ne tarda pas à en acquérir deux «et''- tentacules interiocuiaires. nouveaux ayant une situation identique à celle occupée par les deux appendices homologues que le second embryon avait d'abord en plus. Nous verrons par la suite que ces vingt-septième et vingt-huitième tentacules étant interloculaires, leur poussée ne pouvait correspondre à de nouvelles cloisons. Le nombre de celles-ci était donc égal chez l'un et l'autre embryon au moment où ils furent examinés poui' la première fois. Nous avons vu en outre que la sériation de leurs ten- tacules était seinblable.il résulte de ces deux faits que les cloisons devaient être, chez tous les deux, ordonnées d'une manière identique. C'est pourquoi l'examen des coupes transversales de l'embryon à ' Dans cette figure, de même que dans les suivantes, les loculaires sont numérotés d'après l'ordre d'apparition du cycle auquel ils appartiennent. Les interloculaires seuls ne sont pas numérotés, car il en naît à tous les cycles; ils ont été indiqués par la lettre t accentuée d'une ou deux virgules, suivant qu'ils ont apparu en même temps que le premier, ou le second, ou le troisième cycle. Fi g. 18. — Tealia felina. Embryon agrandi huit fois '. ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — S-^ SÉRIE. — T. III. 1895. 12 ils L. FAUROT. vingt-huit tentacules a pu me guider dès le début dans l'interpré- tation des rapports qui existaient entre les tentacules, les loges et les interloges de l'autre embryon. Ces rapports étant connus m'ont permis en outre de discerner chez ce dernier le côté ventral du côté dorsal. La figure iS représente le disque tentaculaire de l'embryon aux premiers jours des quatorze piois pendant lesquels il fut mis en obser- vation. On y voit que dix tentacules sont plus grands et plus gros que les seize autres, de manière à constituer un premier cycle. L'examen des coupes transversales ' pratiquées dans la partie supé- rieure de la région œsophagienne de l'autre jeune Tealia m'a mon- tré que ces dix tentacules prolongeaient dix grandes loges dont six étaient formées par les douze cloisons primitives et quatre par huit autres cloisons qui, par leur situation, correspondaient à quatre des six paires de second ordre des Hexactinies. Les vingt cloisons disposées en dix paires et formant les dix grandes loges sont figurées en traits gras au centre de la figure 19 et les dix tentacules qui prolongent ces dix loges sont représentés par dix petits cercles figurant le premier cycle. Formation du premier ordre de cloisons, composé des six paires pri- mitives et de quatre autres paires appartenant à une période ultérieure au développement. Ces dix paires forment 6-}- 4 loges se prolongeant en dix tentacules loculaires de premier cycle. A. —Six loges de premier ordre se prolongeant en six tentacules de premier cycle. Sur les coupes transversales, les plissements unilatéraux des douze cloisons primitives sont peu développés, aussi ne sont-ils pas dis- tincts sur les photographies 1, 2, 3, 4 (pi. Vil), faiblement agrandies, mais ils sont visibles sur les préparations examinées à un fort grossissement (fig. 10, pi. II). Leur orientation est la même que celle de leurs homologues chez les embryons d'Hexactinies. Les 1 Planche VII, phot. 1, 2, 3, 4. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 179 photographies de la planche YII, reproduisant quatre coupes faites à travers l'embryon à vingt-huit tentacules, passent : les deux pre- mières par la partie supérieure de la région œsophagienne de la colonne, la troisième par la partie moyenne de la même région et la quatrième au-dessous de l'œsophage. On voit (phot. 2) douze plus larges cloisons s'étendant de la paroi à l'œsophage, et plus bas (phot. 3, même planche et fig. 10, pi. II), parmi ces douze, huit seulement présentent les mêmes rapports. Les quatre autres cloi- sons, en effet, homologues à celles désignées par les chiffres 5,5 et 6,6 chez VHalcampa chrysanthellum (phot. 2 et 3 de la pi. VIII), le Peacida hastata (fig. 12, texte), diminuent progressivement de largeur à partir d'un niveau plus élevé que pour ces huit cloisons. D'après ce qui a été dit au sujet de leur ordre d'apparition ', les deux cloisons 6,6 (fig. 10, pi. II; comparer avec la phot. 3, pi. VII; qui sont les plus rapprochées de la paire commissurale ventrale sont apparues les dernières, c'est-à-dire le sixième des six couples pri- mitifs et leurs plissements sont tournés du côté des plissements des deux premières cloisons de l'embryon. De même, les deux cloisons 5,5 plus éloignées que les deux précédentes de la paire commissurale ventrale sont, par leurs plissements, placées vis-à-vis des cloisons apparues les secondes des six couples primitifs. Ces rapports per- mettent donc : r d'homologuer les douze plus larges cloisons de l'embryon de Tealia avec les douze cloisons primitives des Hexacti- nies; 2° de reconnaître parmi les dix tentacules de premier cycle quels sont les six qui prolongent les six loges primitives de l'embryon. Ils vont aussi aider à déterminer quelle est, par rapport au côté ven- tral ou dorsal de l'Actinie, la situation exacte des B. — Quatre paires secondaires formant 4 loges se prolongeant en 4 tentacules de premier cycle. On remarque, entre chacune des six paires de cloisons primitives (phot. 2 et 3, pi. VU) du Tealia, six paires d'inégales dimensions ' Première partie. Développement des douze premières cloisons. iSO L. FAUROT. homologues aux six paires de second ordre qui, chez ïJlyanthus paj'thenopeus et toutes les Hexaclinies, correspondent à six tenta- cules loculaires de second cycle. Parmi ces six paires secondaires, deux, placées dans les interloges primitives dorsales, sont larges ; deux, placées dans les interloges primitives ventrales, sont petites, et deux, placées dans les interloges primitives médianes, ont des dimensions intermédiaires entre celles des quatre paires précé- dentes. Les deux paires secondaires dorsales et les deux paires secon- daires médianes sont, au sommet de la région oesophagienne (phot. 1, pi. Vil), à peu près aussi larges que les six paires primi- tives. Elles forment des loges qui se prolongent en quatre tentacules prenant place dans le premier cycle, qui se trouve ainsi composé de dix tentacules au lieu de six, nombre normal chez les Hexactinies. La largeur des deux paires secondaires dorsales, d'abord très grande, diminue peu à peu vers le bas et devient à peu près égale à celle des deux paires secondaires médianes (phot. 3, pi. VII, et tig. iO, pi. II). Ces quatre paires, devenues à peu près égales à l'extrémité infé- rieure de la région œsophagienne, conservent, jusqu'à la base de l'Actinie (phot. 4, pi. VII), une largeur toujours plus considérable que celle des deux paires secondaires ventrales. Formation du second ordre de cloisons composé c?e 10 paires. Nous avons vu que les deux paires secondaires ventrales étaient les moins développées. Elles occupent le milieu de deux des six interloges primitives (les deux ventrales), les divisant chacune en trois parties : une loge et deux interloges. Les deux loges secon- daires qu'elles forment, trop petites pour pouvoir être rangées dans le premier ordre, conserveront, dans la suite du développement, des dimensions constamment inférieures à celles des quatre autres loges secondaires qui, ainsi qu'il a été dit, se sont rangées dans le premier ordre, portant le nombre des loges de six à dix. Elles reste- ront cependant plus grandes que les paires de troisième formation ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 181 qui vont maintenant apparaître, car les deux tentacules loculaires pig. 19. — Teaiia \elma. Rapports de disposition des cloisons et des tentacules. Les deux interloges primitives venlrales sont figurées ayant même largeur que les quatre autres interloges primitives, ainsi que cela existerait chez une Hexaotinie à développement normal. Chez le Teaiia, ces deux interloges sont en réalité un peu plus petites que les quatre autres pri- mitives et un peu plus larges que les huit interloges secondaires placées : quatre entre les cloi- sons 1. V; I, V; et quatre entre les cloisons II, II. Dans cette Actinie, les deux interloges primitives ventrales renferment quatorze paires de cloi- sons, dont deux paires secondaires qui, avec les huit paires tertiaires, composent le second ordre de loges se prolongeant en tentacules du second cycle. Total : 10 loges et 10 lenlacul-is. — Quatre paires tertiaires qui, avec seize paires de quatrième formation, composent le troisième ordre de loges se prolongeant en tentacules de quatrième cycle. Total : 20 loges et 20 tentacules. — Huit paires lie quatrième formation qui, avec trente-deux paires de cinquième formation apparaissant à une période plus avancée du développement, composeront un quatrième oidre de loges et se prolongeront en tentacules de quatrième cycle. Total : 40 loges et 40 tentacules. Les seize interloges tertiaires comprises dans ces deux interloges primitives ventrales seront pro- longées à une période plus avancée du développement, en tentacules interloculaires constituant un cinquième cycle avec soixante-quatre autres interloculaires dont trente-deux sont actuelle- ment placés dans le quatrième cycle. qui les prolongent, de même que les quatre tentacules interlocu- laires voisins {i, i\ fig. 18), se montrent déjà relativement longs, au iS'î L. FAUP.OT. côté ventral du disque du jeune Tealia. Cinq semaines plus tard (fig. 20), ces six prolongements atteindront les dimensions relatives qu'ils doivent toujours conserver. Fig. 20. — Tealiu felina. (Pour les chiffres et lettres, voir fig. 21.) Dans cette figure 20, les deux tentacules loculaires ventraux 2 sont destinés, on le voit, à faire partie d'un second cycle, c'est- à-dire d'une rangée difléreutede celle à laquelle appartiennent leurs congénères beaucoup plus grands et prolongeant les quatre autres loges secondaires en quatre éléments du premier cycle. Les deux ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 183 paires de cloisons correspondant aux deux tentacules loculaires des- tinés au second cycle sont donc elles-mêmes de second ordre. Elles sont placées dans le milieu de deux des dix interloges qui séparent les dix loges de premier ordre (six primitives et quatre secondaires). 11 se formera donc huit autres paires prenant place dans les huit autres interloges qui séparent ces paires de premier ordre. On remar- quera que ces nouvelles paires sont de troisième formation, tandis que les deux premières sont de seconde. Le second ordre de paires de cloisons est donc composé de deux paires de seconde et de huit paires de troisième formation. Ainsi que le montrera le développement des tentacules, le troisième ordre de cloisons se formera par la production de vingt paires nou- velles dans les vingt interloges qui séparent les dix paires de premier ordre des dix paires de second ordre. Le quatrième ordre se formera de même par la production de quarante paires nouvelles dans les quarante interioges qui résultent de la production des vingt paires de troisième ordre. En raison du mode d'apparition du premier ordre de loges, les paires de cloisons du second, troisième, quatrième ordre qui doi- vent constituer les deux systèmes latéro-ventraux naîtront toujours auant celles des huit autres systèmes. En elfet, les paires latéro- ventrales sont de seconde formation au second ordre, de troisième lormaLion au troisième ordre, de quatrième formation au quatrième ordre; tandis que toutes les autres paires sont de troisième forma- lion au second ordre, de quatrième formation au troisième ordre, de cinquième formation au quatrième ordre. Le sommaire suivant et la ligure 19 rendront la remarque précédente plus facile à saisir. &0 paires de cloisons en quatre ordres dislincls d'après leurs largeurs relatives. 6 primitives -|- ^ secondaires = 10 paires île premier ordre. 2 secondaires ventrales -f 8 tertiaires =: 10 paires de second ordre. 4 tertiaires ventrales + 16 quaternaires = 20 paires de troisième ordre. 8 quaternaires ventrales + 26 de cinquième formation=40 paires de quatrième ordre. Cette énumération aide, en outre, à comprendre comment la 184 L- FAUROT. symétrie hexamérale des Hexactinies se transforme, chez le Tealia felina, en symétrie décamérale. On remarquera, en effet, que, dans cette espèce, de même que dans celles du groupe précédent, il est apparu six paires primaires, plus six paires secondaires, plus douze paires tertiaires, etc. DÉVELOPPEMENT DES TENTACULES DU PREMIER, SECOND, TROISIÈME CYCLE. J'ai suivi ce développement sur l'embryon à vingt-six tentacules dont il a été question plus haut. L'observation en a été faite depuis le 4 mai 1891 jusqu'au 30 mai 1892. Durant ce laps de temps, vingt- deux nouveaux tentacules apparurent. Leur production s'est faite d'une manière à peu près continue, aussi ne la diviserai-je pas en stades, comme pour Vllyanthus parthenopeus, mais en phases, mot qui n'implique aucun arrêt dans le développement. Pour exposer clairement ces phases, il est utile de montrer : 1° quels sont, pour 3hacune d'elles, les rapports de nombre qui existent entre les nou- velles loges et interloges et les nouveaux tentacules ; 2° quels sont, au terme de chaque phase, ces mêmes rapports pour l'en- semble des tentacules apparus depuis le début du premier cycle. Première phase. — Il apparaît dix loges de premier ordre se pro- longeant en dix tentacules de premier cycle. Ces dix loges sont séparées par dix interloges se prolongeant en dix tentacules inter- loculaires. A la fin de cette phase, la disposition numérique des tentacules est donc 10 loculaires H- 10 interloculaires = i20. Deuxième phase. — Il apparaît dix loges de second ordre se pro- longeant en dix tentacules loculaires de second cycle. Entre ces dix loges sont dix iulerloges se prolongeant en dix tentacules interlo- culaires. A la fin de cette phase, la disposition numérique des tentacules est donc 10 -\- 10 loculaires -+■ 20 interloculaires = 40. Troisième phase. —Il apparaît vingt loges de troisième ordre se ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 18S prolongeant en vingt tentacules loculaires de troisième cycle. Entre ces vingt loges sont vingt interloges se prolongeant en vingt tenta- cules interloculaires. Chez le Tealia, de même que chez toutes les Hexactinies, les ten- z Fig. 21. — Tealia feiina. Développement de l'un des^dix systèmes. 1,1, tentacules du premier cycle loculaire ; 2, tentacules du second cycle loculaire ; 3, 3, tentacules du troisième cycle loculaire ; i, interloculaire du premier cycle; ?■', interloculaire apparu en même temps que le loculaire 2 du second cycle ; i", interloculaire apparu en même temps que le loculaire 3 du troisième cycle. tacules interloculaires ', quoique apparaissant à diverses phases, sont destinés, au terme du développement, à former exclusivement le dernier cycle. Ces appendices étant toujours en nombre égal à celui des loculaires, la disposition numérique, à la fin de la troi- sième phase, sera donc de ^0 + 10 -4- 20 loculaires + 40 interloculaires = 80. ' Première partie. Développement des tentacules. 18G L. FAUKOT. La figure i9 reproduit schématiquement les rapports de nombre et de situation entre loges, interloges et tentacules, au moment où toutes ces parties ont acquis leurs dimensions relatives à la fin de la troisième phase. Pour simplifier l'énumération précédente, il a été pris comme exemple un Tealia à quatre-vingts tentacules, bien que les individus adultes de taille moyenne (4 à 5 centimètres de dia- mètre) en possèdent fréquemment un plus grand nombre, par suite de la formation d'un quatrième ordre de cloisons. Je n'ai pas observé de Tealia chez lesquels ces tentacules, plus nombreux, fus- sent apparus en nombre suffisant pour constituer un nouveau cycle entier ; mais leur mode d'apparition, absolument semblable à celui des éléments des trois premiers cycles loculaires, ne me laisse au- cun doute sur l'existence d'une quatrième phase, pendant laquelle il apparaîtrait quarante loges de quatrième ordre se prolongeant en quarante tentacules de quatrième cycle. Ces loges seraient séparées par quarante interloges se prolongeant en quarante tentacules inter- loculaires. A la fin de cette phase, la disposition numérique des ten- tacules serait 10 -h 10 + 20 + 40 loculaires -h 80 interloculaires, ces derniers constituant le cinquième et dernier cycle. PREMIÈRE PHASE. Formation des 10 éléments du premier cycle et de 10 tentacules interloculaires. Cette phase a été décrite au sujet de l'ordre d'apparition des paires de cloisons. Je rappellerai que parmi les dix tentacules locu- laires, six prolongent les douze loges primitives, et quatre prolon- gent quatre loges formées à la seconde période du développement des cloisons, pendant laquelle elles apparaissent par paires au lieu d'apparaître par couples. Sur le jeune 7'ealia à vingt-six tentacules (fig. 18), on reconnaîtra les dix tentacules du premier cycle à leur plus grande longueur et à leur plus grand volume ; ils alternent avec les dix tentacules interloculaires i, occupant le milieu de chacun des ÉTUDES SUR LKS ACTINIES. 187 dix futurs systèmes auxquels les premiers serviront de limite. Il y a cependant exception pour quatre de ces systèmes, dans lesquels les interloculaires i sont rejetés deux contre le tentacule de premier cycle latéro-ventral, deux contre le tentacule de premier cycle latéro-dorsal. Ce déplacement est causé par la présence de six plus jeunes tentacules, dont il sera question à la phase suivante. Il est à remarquer que les dix loculaires 1 du premier cycle sont de même taille, et qu'il en est de même pour les dix interloculaires i. Ce fait semblerait indiquer que le disque tentaculaire du Tealia n'a pas passé, comme celui des Hexactinies, par une phase à douze appen- dices. L'apparition des quatre paires de cloisons secondaires aurait donc suivi immédiatement celle des douze cloisons primitives. A cette phase, on ne remarquera pas de différence entre les dix loculaires; mais, plus tard, quatre sont légèrement plus petits. DEUXIÈME PUASE. Formation des \0 éléments du second cycle et de 10 interloculaires nouveaux. Dans chacun des deux systèmes ventraux, il apparaît une paire de tentacules composée d'un loculaire et d'un interloculaire. Dans chacun des huit autres systèmes, il apparaît ensuite autant de paires semblablement composées. Il peut arriver qu'il y ait une grande avance dans l'accroissement du loculaire sur l'interloculaire. C'est ainsi qu'à l'époque où l'embryon fut examiné pour la pre- mière fois (fig. 18), 4 mai 1891, on apercevait dans chacun des deux systèmes médio-latéro-dorsaux un loculaire du second cycle non encore accompagné de son interloculaire ; mais, le 14 juin de la même année (fig. 20), ces interloculaires i' avaient pris place, de même que tous ceux qui naissent dans la seconde phase, entre le loculaire 1 et le loculaire 2. Dans cette figure 20, les dimensions relatives des éléments qui composent ces deux systèmes médio-latéro-dorsaux sont, on le 188 L. FAUROT. voit, les mêmes que présentaient, cinq semaines auparavant (fig. 18) les éléments des deux systèmes ventraux qui, de leur côté, ont maintenant subi dans leur longueur des modifications importantes. La figure 20 montre aussi que, dans ces deux systèmes ventraux, la croissance de l'interloculaire i de la première phase est restée à peu près stationnaire, de sorte que l'interloculaire i' de la seconde phase est maintenant aussi long que lui. Quant au loculaire 2, sa longueur a dépassé celle de l'interloculaire i de la première phase de manière à atteindre son rang définitif, qui est au second cycle. D'autre part, dans les autres systèmes, toutes les paires de tentacules delà seconde phase, qui étaient en retard, ont apparu, mais sont encore très courtes. Ce n'est qu'au 22 mai de l'année suivante (fig. 22) que ces paires ont atteint, en subissant des modifications identiques, le même degré de développement que les deux paires des systèmes ventraux dont nous venons de parler. Disposition numérique des tentacules à la fin delà seconde phase 10 loc. + 10 loc. + 20 interl. = 40. TROISIÈME PHASE. Formation des 20 tentacules du troisième cycle et de 20 interloculaires nouveaux. Je n'ai pas observé jusqu'à son complet achèvement la formation du troisième cycle, mais la connaissance des transformations de longueur qui se sont produites pour les tentacules du cycle précé- dent ne laisse aucun doute sur son mode de développement. Dans chacun des deux systèmes ventraux (fig. 22), il apparaît deux pauses de tentacules, chacune de ces paires étant constituée comme dans la phase précédente par un loculaire et un interloculaire. La situation de ces paires est imparfaitement symétrique d'un côté à l'autre du disque. C'est ainsi qu'à gauche une de ces dernières prend place entre le loculaire 2 du second cycle et l'interloculaire i du premier cycle, tandis qu'à droite la paire homologue prend place ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 189 entre l'interloculaire i du premier cycle et le loculaire 1 du même cycle. A la phase précédente (fig. !20), on constate, dans les deux systèmes médians, un défaut de symétrie tout à fait comparable. De même que dans la seconde phase, il existe une avance dans la crois- sance des loculaires sur celle des interloculaires. Fig. ±î. — Tealia felina. Bien qu'il ne m'ait pas été possible d'observer la suite du déve- loppement, il ne paraît pas douteux qu'à cette troisième phase : i" il serait apparu, dans chacun des huit autres systèmes tentacu- laires du Tealia, deux paires semblables à celles des systèmes ven- traux; 2° que les nouveaux tentacules loculaires se seraient allongés de manière à former un troisième cycle complet; 3° que les nou- 190 L. FAUROT, veaux inteiiocLilaires se seraient placés au quatrième rang avec tous les autres interloculaires apparus dans les deux phases précé- dentes. Disposition numérique des tentacules à la fin de la troisième phase : 10 loc.+ 10 loc. + iJO loc. 4- 40 interloc. = 80. Il est très fréquent d'observer des Tealia possédanl cette disposi- tion et de constater, en outre, sur leur disque tentaculaire, l'appari- tion de paires nouvelles de tentacules destinés, sans aucun doute, à former un quatrième cycle loculaire et à augmenter les éléments du cycle des interloculaires. Ces cinq cycles se formuleraient ainsi : 10 loc. -h 10 loc. H- 20 loc. H- 40 loc. +80 interloc. = 160. Il est à remarquer que chez ces Tealia (le fait est facile à constater sur les gros individus), quatre tentacules, parmi les dix du premier cycle, sont un peu moins volumineux que les huit autres'. Ils sont toujours placés symétriquement deux de chaque côté de l'un des commissuraux et deux suivant le plan diamétral perpendiculaire à l'axe qui réunit les deux commissures. La situation des quatre ten- tacules concorde avec celle des quatre paires secondaires de cloi- sons apparues dans la première phase et qui, ai-je dit, sont un peu moins larges que les six apparues au commencement de la même phase. Il est évident que ces quatre tentacules moins volumineux prolongent les quatre moins grandes loges de premier ordre for- mées par ces quatre paires secondaires dont deux sont voisines de la paire commissurale dorsale (fîg. 19). Il en résulte qu'il suffit de voir la situation des quatre tentacules qui les prolongent pour déter- miner immédiatement la place du commissural dorsal, et, par con- séquent, du commissural ventral. C'est probablement, trompés par le plus petit volume de ces quatre éléments du premier cycle, que Gosse et Dixon avaient admis une première et une seconde ' Il est probable que cette paiiicularité doit exister chez toutes les Tealia h. partir de la première phase du développement, mais qu'elle n'était pas assez distincte chez les deux embryons étudiés, en raison de la petitesse des tentacules du premier cycle, pour avoir attiré mon attention. ÉTUDES SUK LES ACTINIES. 191 rangée à cinq tentacules, ce qui, je l'ai montré, est inadmissible. Une remarque plus importante à laquelle donne sujet l'examen des Tealia dont le quatrième cycle loculaire est en voie de dévelop- pement, c'est que les premiers-nés des tentacules de ce cycle sont constamment situés, de même que les premiers tentacules du second (fig. 18) et du troisième cycle (fig. 2'2), dans la partie ventrale du disque. Il est vrai que, pour le quatrième cycle, la situation des nouveaux tentacules n'est pas aussi exactement limitée que pour les deux cycles précédents aux systèmes ventraux et qu'il en appa- raît parfois dans les latéro-ventraux. Malgré cette légère différence, il est certain que la naissance des tentacules de deuxième, troisième et quatrième cycle, et, par conséquent, des cloisons de deuxième, troisième et quatrième ordre commence toujours par le côté ventral de l'actinie. SAGARTIADÉES. Le naturaliste anglais Gosse (1860) a désigné, sous le nom de Sagartiadées, les Actinies qui sont pourvues û.'acontia. Hertwig(i888) les a caractérisées ainsi : Hexactinies pourvues d'acon/ia, d'un muscle circulaire mésodermal. Leur six paires de cloisons princi- pales (c'est-à-dire les douze cloisons primitives) sont seules stériles. D'après mes observations, ces six paires de cloisons peuvent ne pas être stériles, mais chez les jeunes Sagartia seulement. SAGARTIA PARASITICA GOSSE, CALLIACTIS EFFŒTA VERILL, CALLIACTJS POLYPUS KLUTZINGER. Cette espèce est très commune dans la Méditerranée et l'Océan. Klutzinger (18'S'ï) en a observé une variété dans la mer Rouge, que j'ai retrouvée dans l'océan Indien (golfe de Tadjourah). La situation des cinclides au tiers inférieur de la colonne est son principal carac- tère spécifique. Les cinclides sont des orifices ouverts dans la paroi et mettant la cavité générale en communication avec l'eau de mer extérieure. A mon avis, ils n'ont pas pour but unique de donner i92 L. FAUROT. issue aux acontia, car fréquemment ceux-ci ne s'échappent que par la bouche, La coloration des tentacules et particulièrement de la colonne dis- tingue aussi très nettement le Sagarlia parasitica de tous les autres Sagartia. Toujours la colonne offre de larges bandes brunes longitu- dinales alternant avec des bandes jaunâtres. Quant aux tentacules, ils sont le plus souvent blanc grisâtre et très fréquemment ornés de deux séries parallèles de petites taches brunes linéaires ; mais on rencontre aussi des individus à tentacules complètement orange. Plus rarement, j'en ai observé dont les disques oraux étaient en- tourés de six groupes de tentacules brun foncé alternant avec six autres groupes de tentacules gris clair, La disposition de ces groupes de couleurs différentes n'avait aucune relation avec la symétrie bilatérale de l'Actinie, car les groupes brun foncé étaient disposés quatre d'un côté de l'axe commissural et deux de l'autre. Les cinclides sont percés dans les bandes jaunes, qui sont au nombre de quarante-huit sur les individus de dimension moyenne, c'est-à-dire mesurante à 8 centimètres de haut et 4 à o centimètres de diamètre. Douze de ces bandes, plus larges, correspondent aux six loges de premier et aux six loges de second ordre; elles seules se continuent jusqu'au sommet de la colonne. Douze, de largeur un peu moindre, correspondent aux douze loges de troisième ordre, et les vingt-quatre autres correspondent aux vingt-quatre loges de quatrième ordre. Les trente-six dernières bandes (12 4-24) ne s'étendent pas au-dessus du tiers inférieur de la colonne. Si, quelque- fois, elles occupent une plus grande longueur, c'est qu'une dilata- tion partielle s'est produite, plus considérable dans la moitié infé- rieure que dans la moitié supérieure de la colonne. Chacune des quarante-huit bandes n'est jamais percée de plus d'un cinclide, mais le niveau où se trouve situé cet orifice est diffé- rent, suivant l'ordre de loges auquel correspond chaque bande. J'ai observé que les cinclides les plus éloignés du bord du disque pédieux sont au nombre de dix sur dix des douze bandes loculaires de pre- ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 193 mier et second ordre. Les plus rapprochés de ce disque sont au nombre de vingt-quatre sur les vingt-quatre bandes loculaires de quatrième ordre. Douze enfin sont dans une situation intermédiaire sur les douze bandes loculaires de troisième ordre. Il y a donc deux bandes qui sont privées de cinclides ; ce sont celles qui correspondent aux deux loges commissurales *. Sur les S agartia par asitica de petite dimension, mesurant au maxi- mum 2 centimètres de haut et 1 centimètre de diamètre, il n'existe qu'une seule rangée de cinclides, ceux-ci au nombre de dix, sur les bandes loculaires de premier ordre. Le nombre des rangées dépend donc de la taille et, par conséquent, de l'âge de l'Actinie. Il n'existe pas, d'ailleurs, de cinclides sur les très jeunes Sagartia parantica. Cette Actinie est assez fréquemment observée vivant isolée, mais il n'est pas douteux que son habitat normal est sur les coquilles abri- tant certains Pagures. Ce sont le Pagurus bernhardus, dans l'Océan ; le P. striatus et P. angulalus, dans la Méditerranée. Gosse a remar- qué que les petits Sagartia parasilica se trouvaient commensaux avec le Pagurus bernhardus sur les Turitella terebra, Trochus magus, T. zizyphinus, qui sont des coquilles de dimensions relativement petites, et que les grands S. parasitica habitaient invariablement sur les gros Buccinum undalum. Dans la Méditerranée, c'est le Cassi- daria echinophora qui est la demeure habituelle des deux commen- saux ; mais on les recueille encore habitant divers autres gros Gas- téropodes qui, d'après P. Fischer (iSSï), sont Murex brandaris, M. trunculus, Cass/s sulcosa, etc. On a aussi signalé le Sagartia para- sdtca sur les Maia ; mais on sait que ces Crabes chargent indiffé- remme)it sur leur dos tout ce qui est à leur portée. Le nombre des Sagartia parasitica vivant sur une coquille qui sert d'abri à un Pagure n'est limité que par l'étendue de cette Il n'y a donc que quatre cinclides de premier ordre. Je ferai remarquer que les deux loges qui ne sont pas pourvues de ces orifices sont les seules dont les cloisons n'aient pas leurs muscles unilatéraux orientés comme ceux de toutes les autres loges de l'Actmie. J'émets, en outre, cette opinion que les cinclides peuvent se comparer à des orifices d'organes segmentaires et que leur disposition est métamérique. AUCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 3C SÉRIE. — T, III. 1895. 13 lOi L. FAUKOT. coquille. C'est ainsi qu'on peut en observer jusqu'à sept ou huit, et, dans ce cas, les bords des disques pédieux se touchent et s'interca- lent sans jamais se recouvrir. Les plus gros correspondent géné- ralement aux côtés droit et gauche du Pagure, et lorsque la coquille ne sert de support qu'à un seul Sagarlia, c'est sur l'un ou l'autre de ces côtés qu'il tend à se placer. 11 semble, d'ailleurs, que cette situa- tion soit plus avantageuse que toute autre pour l'Actinie, dont les tentacules se trouvent ainsi plus rapprochés des débris d'aliments qui s'échappent des pattes du Pagure. J'ai entrepris, au laboratoire Arago, des expériences sur l'associa- tion des Sagartia parasitica avec les Pagurus stt^iatus et angulatus. Après avoir vérifié cette observation de Percival Wright, d'après laquelle un Sagai^tia parasitica abandonne la coquille d'oii l'on a extrait le Pagure, et cela dans un temps relativement court, trente-six heures au plus, j'ai vu, en faisant l'expérience inverse, que le Pagure n'était pas indifférent, lui aussi, à la perte de son compagnon. Lorsqu'en effet, après avoir enlevé les Sagartia parasi- tica fixés sur une coquille abritant un Pagure, on met ce dernier en présence d'une autre coquille vide et recouverte de ses .\ctinies pré- férées, on voit bientôt le Cruslacé sortir de son gîte. Dans ce cas, bien plus rapidement que s'il avait affaire à des coquilles complè- tement privées de Sagartia parasitica^ il en explorera l'intérieur avec ses pattes et y fera pénétrer son abdomen terminé par deux pattes- crochets, avec lesquelles il agrippera le dernier tour de spire. Lorsqu'un Pagure habitant une Cassidaire d'où l'on a arraché les Sagartia était mis en présence d'autres Sagartia, ceux-ci étant fixés soit sur les parois de verre de l'aquarium, soit sur des pierres, il m'est arrivé plusieurs fois d'être témoin des manœuvres à l'aide des- quelles le Grustacé parvenait à s'associer ces Actinies. Une de celles-ci est saisie par les pattes-pinces et les pattes-marcheuses du Pagure qui les agite comme s'il avait à contenir la résistance d'une proie capable de s'échapper. Ces mouvements, longtemps continués, dé- terminent d'abord la rétraction de l'Actinie et font ensuite cesser *: ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 195 l'adhérence de son disque pédieux à l;i surface sur laquelle elle était fixée. J'ai remarqué que, durant cet acte, les Sagartia n'émettent jamais d'acontia. Dès que l'Actinie est détachée, le Pagure l'enserre entre ses pattes et la Gassidaire, jusqu'à ce que le disque pédieux se soit fixé sur la demeure du Pagure. Il est à remarquer qu'à ce moment la situation du Sagartia pam- sidca, par rapport au Pagure et à la Gassidaire, est identique à celle qu'occupent les Adamsia palliata associés aux Pag ur us Prideauxi. Cette situation correspond au bord interne ou columellaire de la coquille et à la face ventrale du Grustacé. Mais si, au bout de vingt- quatre ou quarante-huit heures, on examine de nouveau les deux animaux maintenant associés, on constate que l'Actinie a aban- donné sa place primitive où, emprisonnée entre le sol, la Gassidaire, le thorax et les pattes du Pagure, elle ne pouvait ni allonger sa colonne ni épanouir son disque tentaculaire ; elle est située plus ou moins haut sur la coquille, et le plus souvent sur un des côtés, dans le voisinage du céphalo-thorax du Pagure. L'observation précédente, renouvelée plusieurs fois, m'a toujours donné des résultats sem- blables. Je n'en ai pas entrepris avec des Pagures qui fussent déjà associés avec un ou plusieurs Sagartia parasitica, mais il est pro- bable que les choses se seraient passées d'une manière identique. Dans ces conditions cependant l'observation aurait sans doute été beaucoup plus longue que dans celles où je m'étais placé. La demeure du Pagure était, je le rappelle, complètement privée des commensales habituelles. Percival Wright, dans son unique observation à laquelle nous avons fait allusion, rapporte qu'un Sagartia parasitica alla se fixer directement sur la coquille d'un Pagure. Il ne m'a pas été possible de vérifier cette assertion. ADAMSIA PALLIATA BOHADSCD. Sagartiadée munie de cinclides. Le disque pédieux et la colonne offrent une déformation particulière résultant de la fixation sur une 196 L. FAUROT. coquille de Gastéropode abritant le Pagiirus Prideauxi/iàmâis un autre Pagure. La coquille, ou souvent le débris de coquille, est géné- ralement trop pelile pour abriter à elle seule le corps du Pagure et pour servir de point de fixation à la surface tout entière du large disque pédieux de VA damsia. Il en résulte que c'est ce disque pédieux qui devient le véritable gîte du Cruslacé. Cette partie du corps est revêtue, sur sa face en rapport avec le Pagure^ d'une cuticule mem- braneuse constituée par du mucus solidifié, semblable à celle qu'on observe sur d'autres Actinies {Sagartia parasitica, Chitonaclis coro- nala, etc.), qui vivent longtemps fixées au même point sans se dé- placer. La déformation caractéristique de VAdamsiu est surtout causée par la situation de son disque tentaculaire à la face inférieure et en arrière de la boucbe du Pagurus Prideauxi. J'ai observé (18S5), en effet, de très petits Adarnsia palliata cylindriques non encore dé- formés. D'autres, un peu plus âgés, ont montré divers degrés de déformations. Elles indiquent que l'Actinie, après avoir atteint un certain volume sur le bord interne de l'ouverture de la coquille, s'étale à droite et à gaucbe, en suivant le bord externe de cette der- nière, mais sans le recouvrir. On voit donc que le début de la défor- mation a pour résultai d'augmenter la capacité de la coquille et, par conséquent, la grandeur du gîte du Pagure. Ce n'est que plus tard, par suite de la croissance du disque pédieux, que la coquille de Gas- téropode est recouverte par VAdaitisia. Les Adarnsia palliata et les Pagu?'us Prideauxi vivent réunis en grand nombre sur des fonds vaseux de 30 à 40 mètres de profon- deur, que fréquentent également des Ophiures et des Holothuries. Il n'est pas, à ma connaissance, de localité où ces animaux se pèchent en aussi grande quantité qu'à Banyuls-sur-Mer. C'est au nombre de cent à deux cents à la fois qu'ils sont recueillis. On les rencontre aussi à des profondeurs plus faibles, mais ils y sont alors rares et dispersés. L'association de l'Actinie et du Grustacé est constante, et ce n'est qu'exdeptionnellement et pour une durée très courte que, durant ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 197 mes expériences, j'ai observé VAdamsia pa/liata abritanl une autre espèce de Pagure que le Paguriis Prideauxi, ou celui-ci associé avec une autre espèce d'Actinie. Aussi celte association sert-elle à carac- tériser Tun et l'autre animal. De même que V Adamsia palliala diîïere de toutes les autres Actinies par une conformation extérieure mani- festement adaptée à la forme du corps du Pagurus Prideauxi, de même celui-ci diffère de tous les autres Pagures par des particula- rites qui paraissent nécessiter un abri, tel que celui qui lui est fourni par r.4. palliala. De tous les Pagures, en effet, il est celui dont les mouvements sont les plus agiles et dont les allures sont les plus variées. Quand il marche en avant, il tient ses pattes largement étendues sur les côtés, à la manière des Crabes, et, de même que ces derniers, il peut se mouvoir latéralement ; il peut aussi marcher et bondir en arrière. Enfin, pour se mettre sur la défensive, il tend en avant ses pinces ouvertes, ce que font rarement les autres Pa- gures. Ceux-ci, comme on sait, ont généralement la démarche lente et vacillante, en raison du poids plus ou moins considérable de leur demeure où ils se dissimulent complètement à la moindre alerte. La transformation subie par le disque pédieux et la colonne de VAdamsia palliata rend son association avec le Pagurus Prideauxi beaucoup plus étroite que celle qui réunit le Sagarlia parasitica avec d'autres Pagures; mais aussi l'avantage (nourriture abondante) que la première Actinie retire de cette association est-il lié à des services à rendre, plus importants que ceux que les autres Pagures reçoivent des S. parasitica. Si ces Pagures {Pagurus bern/iardus, P. striatus, P. angulatus), en effet, ont rassemblé sur leurs coquilles un plus ou moins grand nombre d'Actinies, ce n'est pas que leur abri soit d'une capacité insuffisante; ce ne peut être, il me semble, que pour mieux le dissimuler et le pourvoir de gardiens bien armés pour la défensive. Aussi les Sagarlia parasitica peuvent-ils vivre fixés partout ailleurs que sur des coquilles habitées par des Pagures, et ceux-ci peuvent également abandonner les mêmes Actinies sans que ni les uns ni les autres paraissent souffrir de leur séparation. 198 L. FAUROT. Dans l'associalion de VAdamsia palliata el du Pagurus Prideauxi, les conditions sont bien difTérentes : une seule Actinie enveloppe le corps du Crustacé à la manière d'un manteau ni trop large ni trop élroit dans lequel les flexions dos articulations des pattes, celles de l'abdomen sur le cépbalo-thorax peuvent s'effectuer sans aucune gêne. Ce manteau semble remplacer la carapace abdominale, ab- sente chez les Pagures, beaucoup mieux qu'une coquille de Gasté- ropode, lourde et embarrassante pour la marcbe. D'un autre côté, ÏAdamsia palliala ne se contente pas, ainsi que le Sagartia parasilica, du superflu du Crustacé; il est boucbe à bouche avec son hôte et in- gère parfois la plus grande partie de la proie que celui-ci s'efforce de diviser en morceaux assez menus pour les faire pénétrer entre ses pattes-mâchoires. Mais aussi VAdamsia palliata ne peut vivre soli- taire et ne se sépare-t-il jamais du Pagurus Prideauxi. Il arrive bien que les pêcheurs ramènent dans leurs chaluts les Actinies privées de leurs compagnons habituels; mais, dans les mêmes filets, se trou- vent des Pagurus /'rirfeawj;/ soit vivants, soit morts, qui, évidemment, ont été séparés accidentellement des premières. Lorsque les Adamsia palliata, séparés de leurs Pagures, sont mis en observation, on constate que le disque pédicux se détache de la cuticule membraneuse et se fixe sur le fond de raquariiini. En outre, quelque soin qu'on prenne à les alimenter, ces Actinies dépérissent et meurent dans le courant du deuxième ou du troisième mois qui suit leur séparation d'avec les Pagurus Prvleauxi. Aucune ne reprend la forme originaire cylindrique; on voit bien les expan- sions latérales du pied et do la colonne se raccourcir considérable- ment, mais la forme générale du corps n'est pas essentiellement modifiée. Il est donc certain que la société du Pagurus Prideauxi est d'une nécessité absolue à la conservation de la vie de V Adamsia pal- liata. 11 m'a semblé que l'association du Pagure avec l'Actinie est d'une nécessité moins urgente pour le Crustacé. C'est ainsi que les Pagurus Prideauxi non adamsics peuvent vivre fort longtemps dans l'aquarium de Banyuls, où l'eau de mer est constamment renouvelée. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 199 I.ans ces conditions, ils paraissent même plus résistants que les Adamsia palliata au changement d'existence résultant de la cap- tivité K Si l'on place des Pagurm Prideauxi non adamsiés en présence de grandes Cassidaires vides, ils s'y abritent aussitôt. Bien que leurs nouvelles demeures soient à parois plus résistantes que celles qui leur sont habituelles et qu'ils puissent s y abriter complètement, ils les abandonnent si, dans le voisinage, on a soin de placer des Adamsia récemment séparés de leurs hôtes. Ils se revêtissent de ces Actinies quand bien même elles ne seraient pas proportionnées à leur taille, de sorte que souvent, pareilles à des habits trop courts, elles laissent à découvert une grande partie du corps. Les Pagurus Pi'ideauxi, ai-je dit, supportent longtemps la captivité ; ils ne la sup- portent pas cependant aussi bien que les Pagures associés aux Sa- (jartia parasUica; il est donc probable que, de même qu'aux Adamsia^ certaines conditions d'existence leur font défaut. En étudiant le commensalisme des Sagartia parasitica, j'ai exposé de quelle manière ces Actinies étaient saisies et se fixaient aux co- quilles de Gastéropodes habitées par les Po.gurus striatus et P. angu- latm. Les choses se passent absolument de même pour V Adamsia pa/liata. C'est ainsi qu'un Pagurus Prideauxi auquel on a laissé seu- lement pour abri une coquille nue s'emparera d'une Adamsia, la mainliendra à l'aide de ses pinces en arrière de ses pattes-mâchoires, et la contraindra de cette façon à se fixer sur le bord interne de l'ou- verture de la coquille. Il ne me paraît pas douteux que cet acte ne se produise dès le début de l'association des deux êtres, alors que la colonne et le disque pédieux de la jeune Actinie sont encore cylin- driques. • Les Adamsia palUala vivent plus longtemps que les Pagurus Prideauxi dans une eau de mer non renouvelée. C'est l'inverse qui se produit dans une eau maintenue constamment pure. Celte différence peut s'expliquer ainsi : dans le premier cas, V Adamsia est plus résistante que le Pagure à l'empoisonnement par l'eau putréfiée; dans le second cas, c'est le Pagure qui est plus résistant que V Adamsia au clian- geraent de milieu (profondeur, aération, nourriture, etc.). 200 L. FAUROT. ZOANTHiDES. Les Zoanlhides, d'après Milne Edwards et J. Haime (iSôt), ont pour caractères : Polypes agrégés par un cœnenchyme, se multi- pliant par bourgeonnemenls basilaires; téguments et cœnenchyme incrustés de grains de sable. Ces mêmes naturalistes divisaient le groupe en deux genres : ZoaiUhides dont les Polypes ) des stolons radiciformes. Zoanihus (Cuvier). sont portés sur. . . ) une lame tapeli forme Pa/i/'Aoa (Lamouroux). Les caractères, empruntés aux dimensions et à la couleur du corps des Polypes, du cœnenchyme, des tentacules ainsi qu'aux difTérents nombres de ceux-ci, leur avaient servi à distinguer quatre espèces de Zoanthus. Douze espèces de Palylhoa étaient établies sur les mêmes bases que celles du genre précédent, et, en outre, sur deux particularités dépendant du cœnenchyme réunissant les Po- lypes : 1° le mode de réunion des Polypes par le cœnenchyme (par leur base ou par toute leur hauteur) ; 2° l'épaisseur plus ou moins grande de ce cœnenchyme. Milne Edwards et J. Haime, en atta- chant à ces deux derniers caractères une importance secondaire, avaient supprimé les deux genres Corticifera et Mamndh'fera créés parLesueur. Gosse (ISGO) accorda une valeur encore bien moins grande à la forme et à l'épaisseur du cœnenchyme; car il ne recon- naît, dans la famille des Zoanlhides, que le seul genre Zoanthus. Pour lui, les deux formes du cœnenchyme considérées comme caractéristiques des Zoanthus et des Palythoa peuvent se montrer dans la même espèce, et il conteste également la valeur des carac- tères génériques des Corticifera et des Mammilifera. La forme, la couleur et la taille des Polypes sont seules utilisées par le natura- liste anglais, pour la distinction de ses trois espèces anglaises de Zoanthus. Gependanl Veiill (iS'î»), en se basant uniquement sur les caractères extérieurs du cœnenchyme, fit une nouvelle classilica- ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 204 lion* des Zoanthides, dans laquelle il admet l'ancien genre Mammi- lifera, ainsi que le nouveau Epizoanthus. La plupart des recherches qui, dans la suite, furent entreprises sur les Zoanthides eurent pour but la connaissance de leur ana- tomie et la distinction des divers types par les différences de struc- ture. G.-V. Koch (1880) étudia la disposition des cloisons du Paly- thoa axinellx.^ et G. Millier (I884j celle de plusieurs espèces des genres Palythoa ai Zoanthus. Tous les deux montrèrent que les cloi- sons mésentéroïdes y étaient disposées différemment que chez les autres Acliniaires. Elles sont, il est vrai, disposées par paires, mais la plupart de ces paires sont formées d'une petite et d'une grande cloison, c'est-à-dire d'un microsepte et d'un macrosepte. MùUer, par l'élude qu'il fil de quatorze espèces, s'efforça de les caractériser ana- tomiquemenl. Il eu identifia quatre à des espèces déjà décrites, et dix restèrent innoniées el insuftisamment caractérisées. On reconnaît cependant, dans les figures qui accompagnent son travail, les deux types analomiques très distincts, qui furent plus tard signalés par Erdman (1886) et Hertwig (1888). Ces deux naturalistes poursui- virent le même but que Millier, et arrivèrent à fixer les caractères analomiques et embryogéniques qui distinguent nettement les Zoanthides de tous les autres Acliniaires. Voici ces caractères: Il existe, chez les Zoanthides, deux sortes de cloisons ayant cha- cune une grandeur différente : les plus grandes pourvues de bour- relet entéroïde et de cellules sexuelles, ce sont les macroseples ; les plus peliles privées de bourrelet entéroïde et de cellules sexuelles, ce sont les microseptes. Un macrosepte et un microsepte forment • Verill. ' Cœnencliyme formant d'étroits l stolons Zoanthus. Tégument mou.... < Cœnenchyme en forme de slo- I Ions avec tendance à former Zoanthides. l ! '^'^^ lamelles Mammilifera. Cœnenchyme lamelleux. Polypes libres , Epizoanthus. Tégument incrusté, l „ , ,,. , c ■ Polypes complètement entonces dans le cœnenchyme Palythoa. 202 L. FAUKOT. généralement une paire, o'est-à-dire que leurs côtés pourvus de plissements musculaires longitudinaux sont tournés l'un vers l'autre. Il y a deux paires commissurales, l'une formée de deux microseptes, l'autre de deux macroseptes. Comme chez les autres Actinies, les cloisons qui forment ces paires ont leurs plissements musculaires tournés en sens inverse des autres paires. Le côté correspondant à la paire de microseptes commissuraux est nommé dorsal ; le côté opposé correspondant à la paire de macroseptes commissuraux est nommé ventral. Dans les six genres de Zoanthides admis par Hertwig, les quatre Fig. 23. — Disposition microtype. Fig. 24. — Disposition macrotype. cloisons situées de chaque côté de la paire commissurale dorsale sont disposées suivant deux modes distincts. Dans le premier (fig. 23], appelé microtype, ces quatre cloisons forment, à gauche et à droite, deux paires symétriques composées d'un macrosepte et d'un micro- septe. Dans le second (fig. 24), appelé macrotype, ces mêmes cloi- sons forment aussi deux paires symétriques, mais différentes l'une de l'autre : la plus rapprochée de la loge commissurale dorsale étant composée d'un macrosepte et d'un microsepte, et la plus éloignée de deux macroseptes. La disposition, soit microt^'pe, soit macrotype, est constante dans toutes les espèces d'un même genre. D'après Erdman, ces deux dispositions représentent chacune une première phase du développement des Zoanthides. Les douze cloisons de cette phase, orientées comme les douze primitives des Ilexactinies, ÉTUDES SUK LES ACTINIES. 203 conservent, chez l'adulte, les mêmes rapports. Dans une seconde phase du développement, l'apparition des nouvelles cloisons n'a lieu que dans les deux interloges situées une de chaque côté de la paire veiiLrale commissurale. Elles se composent alternativement de mi- croseptes et de macroseptes, les premiers placés du côté dorsal, les seconds du côté ventral. Les cloisons les moins âgées sont toujours les plus rapprochées de la paire commissurale ventrale. Erdman et Hertwig ont cherché des caractères génériques * et même spécifiques dans l'étude de l'anatomie et de l'histologie des Zoanthides provenant, en grande partie, de l'expédition du Chal- lenger. « J'ai jugé, dit Hertwig, qu'il n'était pas admissible qu'une telle discordance dût exister dans la nomenclature des espèces et des genres de Zoanthides, discordance due principalement au fait que les formes décrites ont été tout à fait insuffisamment étudiées... C'est pour cette raison que j'ai prié Erdman d'examiner les Zoan- thides au point de vue des importants caractères suivants : 1° nature (structure) du cœnenchyme; 2" disposition des cloisons mésenté- roïdes; 3" structure du muscle circulaire (sphincter) ; 4° nature (con- dition) du tégument; o» formation en colonie. » Dans son travail sur ' Voici le tableau des caractères génériques des divers genres des Zoanthides, principalement basés, d'après Erdman et Hertwig, sur l'anatomie et l'histologie. GENRES. Disposition ' des CLOISONS. SPHINCTER. COENENCHYME. TEGU- MENT. SEXE. Zoanthus Cuvier. Miorotj'pe. Mésodermal double. Stolons. Non incrusté. Herma- plirod. Mammilifera Lesiieur. Id. Mésodermal simple. Semblable à des stolons avec une tendance à former des lamelles. Id. Corticifera Lesiieiir. Id. Id. Polypes enfoncés dans le cœnenchyme jusqu'à leur e.xtrémité supé- rieure. Incrusté. Sphenopklce Steenslrup. Id. Id. Absent. Pas de colonie. Id. ? Epizoanthus Vei-ill. Macrotype. Id. Unissant tous les Polypes. Lamellaire. Id. Dioïquiv Pahjthoa Lamouroux. Id. Endodermal Ressemblant à un ruban. Id. 9 204 L. FAUROT. les Zoanthides du Challenger {\^^S), Hertwig compléta les résultats obtenus par son élève. De ces résultats, il ne ressort pas à mon avis que, seule, l'étude anatomique et histologique puisse fournir des caractères d'une importance prédominante pour la diagnose des genres et des espèces. En ce qui concerne les caractères génériques, on voit que ce sont surtout ceux tirés de l'aspect extérieur du cœnenchyme qui ont été mis à contribution ; ces caractères sont cependant qualifiés de secondaires par les deux naturalistes alle- mands^ Si, maintenant, nous examinions les bases sur lesquelles sont établies les douze espèces de l'expédition du Challenger, nous constaterions que ce sont encore les particularités extérieures qui ont été les plus utilisées pour leur délimitation. Ce sont, entre autres, la nature de l'incrustation (foraminifères, sable), les dimen- sions, la couleur des Polypes, la présence de sillons, le nombre de ces derniers et celui des tentacules, etc. ; puis viennent, en seconde ligne, la structure du cœnenchyme et celle du sphincter. Je n'entreprendrai pas ici de rechercher les caractères extérieurs, anatomiques ou histologiques, qui pourraient servira une meilleure classification des genres et des espèces de Zoanthides, caries maté- riaux que j'ai rassemblés sont encore trop incomplets pour me per- mettre d'aborder ce sujet. Dans l'étude qui va suivre, il ne sera qu'incidemment question de la valeur systématique de certaines particularités extérieures : bractées, rangées tentaculaires, incrusta- tion. Je décrirai seulement trois espèces : le Palylhoa arenacea Délie Chiaje, le Zoanthus Perd Audoin et le P. sulcata Gosse. Au sujet de ce dernier, je ferai connaître quelques faits ayant rapport à l'ordre d'apparition des cloisons. ' Erdman (1886) : a Wie die bisherigeu Eiulheiiungen der .\clii)ien, da aie auf zu umbedeuteude,ausserliche mei-kmale fussten,alle einekiare définition ilirer iinliT- glieder vermissen iiessen, so enlbehrle anch die Abtheilnng der Zoanliieen ganzlich einer festen Abgrenzung. » Voii- le tableau au bas de la page précédente. ETUDES SUR LES ACTINIES. 205 PALYTHOA AHENACEA DELLE CHIAJE. Cette espèce se trouve dans l'Océan et dans la Méditerranée. Je l'ai toujours observée (Roscoff, Arcachon, Banyuls, Nice) adhérant à la face supérieure des coquilles vivantes de Chenopus pes pelicani, Mollusque gastéropode. Les Polypes sont de grosseur inégale, cl généralement la situation des plus gros cl des plus longs correspond à l'extrémité antérieure et à l'extrémité postérieure du Mollusque. G. Millier aurait observé des colonies de Pahjlhoa arenacea envelop- pant complètement des branches d'Antipathe. Le sommet de leur colonne est couronné par des denticulations ou bractées, dont le nombre est exactement moitié de celui des tentacules. Ces derniers sont disposés sur deux rangées dont les éléments sont en nombre égal, c'est-à-dire que sur trente-six tentacules, chiffre maximum chez cette espèce, il y en a dix-huit dans la première rangée (interne) et dix-huit dans la seconde rangée (externe). Chacune des dix-huit bractées correspond à chacun des éléments de la première rangée. Ces caractères extérieurs, deux rangées tentaculaires et nombre de bractées égales à la somme des tentacules, ne sont pas particu- liers au Palythoa arenacea. Je les ai observés sur des Polypes épa- nouis de Pahjilioa sulcata, P. axinellœ, ainsi que sur un Epizoanthus de la Méditerranée, non encore décrit, et sur le Corticifera lulea [P. tufjerculosa, Klulzinger) de la mer Rouge. J'ai également reconnu la présence de deux rangées tentaculaires sur le Zoanthus Perii Au- doin de la même mer. Ce doit être, d'ailleurs, un caractère com- mun à tous les Zoanthides^ de ne jamais posséder un plus grand nombre de ces rangées, car dans ce groupe il n'existe pas, comme dans les Hexactinies, plusieurs ordres de loges. Nous verrons plus loin que, chez le Palythoa arenacea et P. sulcata, les tentacules internes correspondent à un rang de loges, et les tentacules externes aux interloges. Dans toutes les espèces désignées ci-dessus, on trouve, dans une même colonie, des différences dans le nombre des tentacules appartenant aux divers Polypes. Ce nombre, on le con- 206 L. FAUUOT. çoit, est toujours en rapport avec l'âge de ces derniers. Mais cet âge n'en a aucun avec le diamètre et la hauteur des individus. La colonne des Polj^pes ainsi que les bractées et le cœnenchyme ont une couleur brun foncé qui est due, en partie, à l'incrustation sableuse des tissus. La couleur des tentacules est blanchâtre; celle du disque, grise. La bouche a une forme beaucoup plus allongée que chez les autres Actiniaires. Sur des Polypes bien épanouis, elle occupe le diamètre presque entier du disque. La hauteur de ces Polypes est de 2 à 5 millimètres, et leur largeur de I à 3 mil- limètres. Il est probable que ces dimensions dépendent du voisi- nage plus ou moins immédiat des autres individus composant la colonie ; elles ne sont pas, ai-je dit, en rapport avec le nombre des tentacules. Millier, Erdman, Hertwig, ne font pas mention des bractées qui, cependant, peuvent servir à caractériser les Zoanthides. Cette omis- sion provient, sans doute, de ce qu'ils n'ont examiné que des ani- maux contractés dans l'alcool. Ces appendices remplissent un rôle important, car ils sont destinés à protéger le disque oral et les ten- tacules lorsque ces parties se rétractent. Chacun d'eux présente la forme d'un triangle isocèle dont la base se confond avec le sommet de la colonne cylindrique ; de telle sorte que lorsque toutes les brac- tées sont infléchies horizontalement, elles sont toutes en contact, et par leurs extrémités, et par leurs deux longs côtés. L'occlusion est alors parfaite, sans que la contraction du sommet de la colonne ait à intervenir aussi activement que chez les autres Actiniaires à tenta- cules rétractiles. Chez le Palythoa ai^enacea et P. sulcata, et d'autres Zoanthides, cette contraction peut cependant devenir assez forte pour déprimer en ombilic le sommet de la colonne et introverser complètement les bractées dans la cavité du corps. Mais chez l'Epi- zoanthus de la Méditerranée, dont l'incrustation est extrêmement compacte et rigide, l'inclinaison en dedans des bractées ne peut se faire au delà d'un angle droit. Le rapprochement de leurs bords suffit, en ellct, pour limiter cette inclinaison ; c'est pourquoi, chez ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 207 ce Zoanlhide, le sommet des Polypes contractés est toujours plan, jamais ombiliqué. Malgré son incrustation de sable, la colonne peut être assez facile- Pig. 23. ~ Palylhoa arenacea. Schéma montrant les rapports des loges, interloges, avec la base des tentacules. On a conservé aux coupes transversales de ces tentacules l'aspect qu'elles avaient sur les préparations. Le calibre des inlerloculaires est plus étroit que celuf des loculaires et s'ouvre un peu plus haut que celui de ces derniers dans la cavité générale. C'est pourquoi la partie interne de la base des inlerloculaires n'est pas figurée. ment coupée dans sa longueur, ce qui permet d'observer sur les plus gros Polypes le nombre, la disposition et la structure des cloisons tels que les a signalés G.-V. Koch. Tous les microseptes sont stériles et dépourvus d'entéroïdes ; tous les macroseptes sont 208 L. FAUROT. fertiles et pourvus d'eutéroïdes. Sur les coupes transversales, ces particularités sont bien plus évidentes. Dans le but de montrer les rapports des deux rangées tentaculaires avec les loges et les interloges, la figure 25 a été composée d'après deux coupes transversales faites à deux niveaux dilTérents. L'une passait à la base des tentacules, et l'autre au niveau de la partie médiane de la région œsophagienne. On voit que les loges corres- pondent aux bases des tentacules internes, et que les interloges correspondent aux bases des tentacules externes. Les cloisons y sont disposées d'après le mode macrotype que j'ai décrit plus haut. L'œsophage présente, du côté ventral, un sillon très profond et relativement étroit. Ce sillon est plus rapproché de la paroi du corps, au niveau des commissures buccales, qu'au niveau de la partie médiane de l'œsophage. Les tentacules de la rangée externe qui, sur l'animal vivant, pa- raissent avoir la même grosseur que ceux de la rangée interne sont, sur des coupes passant par leurs bases, d'un calibre beau- coup plus étroit'. Cette différence est causée par les dimensions des interloges, qui sont moins grandes que les loges à leur termi- naison supérieure ; mais il est à noter que, à très peu de distance au-dessous du disque oral, loges et interloges paraissent mesurer des largeurs exactement semblables. Il n'existe aucune trace de plissements musculaires unilatéraux dans la partie supérieure des cloisons; ils ne s'aperçoivent, sur les coupes transversales, que vers le milieu de la région œsophagienne. Ces plissements n'apparaissent d'abord que sur une très petite étendue de la cloison, près des bases des tentacules. De ce point ils occupent, en largeur, une portion de plus en plus grande des cloisons et finissent, à la partie médiane du Polype, par s'étendre jusqu'aux bords internes de celles-ci. Les plissements sont très peu ' La différence de largeur entre les loges et les interloges est très nette snr les pliotographies 1 et a, pi. X, reproduisant des coupes transversales du Palythoa sulcata. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 209 saillants et ne forment pas, comme chez beaucoup d'Hexactinies, des bourrelets ou faisceaux de feuillets. Si l'on considère le côté dorsal et le côté ventral de cette coupe (fig. 25), ou voit que, conformément à ce qui a été dit par Erdman, les plissements unilatéraux orientent les cloisons de deux manières différentes : i" à droite et à gauche de la paire dorsale de direction, les deux premiers macroseptes ont leurs plissements dirigés du côté ventral, le premier microsepte a, au contraire, ses plissements diri- gés du côté dorsal ; 2° tous les autres macroseptes ont leurs plisse- ments dirigés dorsalement, tandis que tous les autres microseptes les ont dirigés ventralement. Sur des coupes longitudinales de la colonne, la face interne de la couche mésodermale est pourvue de saillies circulaires, comme chez les autres Actinies. A l'extrémité supérieure du Polype, ces saillies deviennent brusquement beaucoup plus fortes et se rami- fient; elles constituent ainsi l'organe nommé par Rerlwig sphincter entodermal, et qu'Erdman considère comme caractéristique pour le genre Palythoa. Par suite de l'incrustation très compacte du cœnen- chyme, il ne m'a pas été possible d'en examiner plus complètement la structure. ZOANTHVS PERIl AUDOIN *. J'ai recueilli des colonies de cette espèce sur des algues calcaires {Melobesia) qui végètent au niveau de la mi-marée, en arrière de l'un des récifs de Polypiers qui abritent le port d'Obock. Les Polypes, de couleur jaunâtre, ont des colonnes lisses, molles et non incrustées. On aperçoit, au travers de leurs parois transparentes, les attaches des cloisons, sous l'aspect de stries longitudinales blanchâtres. Ces Polypes sont assez régulièrement cylindriques, mais dans l'état de contraction, la plupart d'entre eux se renflent à l'extrémité supé- rieure \ leur hauteur est de 4 à 10 millimètres, et leur diamètre de 2 à 4 millimètres. Je n'en ai pas observé dont les tentacules fussent 1 AuDom, Explication des planches ; Savigny, p. 48; Savigny, t. II, pi. ii, ng. 4, el KLiiTZiNGER, Taf. IV, fig. 6. ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — S" SÉRIE. — T. lU. l8Uo. li 210 L. FAUKOT. complètement épanouis, mais sur des coupes transversales on compte deux rangées de ces organes. De même que les Polypes, le cœnenchyme est complètement dépourvu d'incrustations ; sa surface basilaire se détachait facilement des Melobesia, et les expansions de cette base s'étendaient, sous forme de minces stolons, entre les saillies du végétal, mais çà et là se prolongeaient aussi en lamelles. Ces lamelles, il est vrai, ne sont jamais très larges. Les algues calcaires formaient, en arrière du récif, des bancs de o à 10 mètres carrés, sur lesquels vivait, à côté du Zoanthus Periiy une autre .espèce (indéterminée) de Zoanthide, dont les tissus sont très fortement incrustés de sable calcaire. Ce fait semble indiquer que l'incrustation ou la non-incrustation des différents types de Zoanthides n'est pas soumise à des conditions d'habitat et de milieu, et dépend, sans doute, d'une structure particulière du cœnenchyme et des parois des Polypes'. La disposition des cloisons est microtype, caractère qui, d'après Erdman et Hertwig, appartient en commun aux genres Zoanthus, Manimilifera, Corlicifera et Sphenopidae. Sur les photographies 6,7,8, pi. X, reproduisant des coupes faites sur un même Polype de Zoan- thus Péril, on voit que le deuxième microsepte compté à partir de la paire (microseptes) commissurale dorsale, au lieu d'être suivi, comme c'est la règle, d'une paire de cloisons composée d'un mi- crosepte et d'un macrosepte, est, au contraire, suivi de trois autres microseptes. Sur un individu de la même espèce, j'ai constaté une irrégularité analogue répétée en quatre places non symétriques de la cavité du corps. Une de ces places était entre les deux premiers macroseptes dorsaux de l'un des côtés et, par conséquent, dans la partie du Polype qui, selon Erdman, correspond à la première phase du développement. ' Le Palyllioa tuberculosa oal, de même que le Zoanthus Perii, dépourvu d'incrus- tations, et cependant il vit à Ohock sur ia partie des récifs la plus exposée au ressac et sur laquelle le sable calcaire très meuble donne un aspect laiteux à la mer, lorsque celle-ci est agitée. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 2H Les plus gros Polypes de Zoanthus Perii ont de ciiiquante-deux à cinquante-quatre cloisons. Sur celui dont une des coupes transver- sales est reproduite par la photographie 6, pi. X, on voit, de chaque côté de la paire commissurale ventrale, des cloisons inégales qui sont moins larges que les autres, ce sont les dernières formées ; il y en a six à droite et quatre à gauche, un jeune macrosepte associé à un jeune microsepte constituant une paire. Parmi ces plus jeunes cloisons, ce sont les plus petites et les plus voisines des deux macro- septes commissuraux ventraux qui sont les dernières apparues. De même que chez tous les Zoanthides, chacune des paires droites et gauches a son macrosepte placé du côté ventral. Les macroseptes et les microseptes sont, chez le Zoanthus Perii, dépourvus de plisse- ments musculaires unilatéraux. Leurs faces latérales apparaissent, à un fort grossissement, comme striées longitudinalement, mais les stries ne sont pas plus profondes sur Tune ou l'autre de ces faces. Au-dessous de l'œsophage, les entéroïdes revêtent le tiers environ de la largeur des cloisons, et leur aspect, sur des coupes transver- sales (phot. 7 et 8, pi. X), est foliiforme. Cet aspect ne s'observe ni dans le Palythoa arenacea ni dans le P. sulcata. Le cœnenchyme est formé, ainsi que les parois des Polypes, par une substance hyaline englobant, de place en place, des amas cellu- laires et de larges lacunes, sur les parois desquelles on observe fré- quemment des prolongements courts et épais qui, peut-être, sont des cloisons rudimentaires. Il est possible que ces lacunes soient l'origine de bourgeons destinés à former de nouveaux Polypes. Ni dans le cœnenchyme ni dans les parois des Polypes, il n'existe de ces canaux que Hertwig a signalés chez plusieurs espèces de Zoan- thides. POLYTHOX SULCATA GOSSE. Ce Zoanthide avait été attribué au genre Zoanthus qui, nous venons de le voir, possède un cœnenchyme en stolons, des téguments non incrustés et une disposition microtype des cloisons. Aucun de 212 L. FAUROT. ces caractères ne s'observe chez le Palythoa sulcata, dont les Polypes prennent naissance sur des expansions basilaires plus ou moins larges, dont les téguments sont incrustés et dont la disposition des cloisons est macrotype. L'incrustation sableuse des tissus est loin d'être aussi serrée et compacte que chez le Palythoa arenacea, et Gosse qui, le premier, a décrit le P. sulcata, considère comme un caractère spécifique l'ab- sence de sable à la partie supérieure de la colonne. Cette incrusta- tion n'est que superficielle, car elle a disparu complètement sur-des colonies que j'avais conservées pendant un mois. Chaque fois, en effet, que l'eau de mer dans laquelle vivaient ces colonies était renouvelée, une certaine quantité de sable provenant du cœnen- chyrae et des colonnes s'amassait au fond des bocaux, et cela jusqu'à ce que l'inscrustation fût presque complètement désagrégée. Aussi m'a-t-il été possible d'étudier la disposition des cloisons au moyen de coupes transversales (phot. 1, i2, 3, 4, 5, pi. X). Le Palythoa sulcata n'a jamais été signalé dans la Méditerranée. Il a été trouvé dans l'Océan (Angleterre; en France à Piriac, au Croi- sic, à Arcachon). Je l'ai recueilli à Morgatt (Finistère), un peu au- dessous du niveau delà mi-marée. Le plus souvent, les Polypes sont entremêlés avec des Éponges, des tubes d'Annélides, des Arca, qu'il faut enlever complètement si l'on veut conserver les colonies vi- vantes. Les dimensions des Polypes sont, à ma connaissance, les plus petites de toutes celles qui ont été mesurées chez les Zoan- thides. Leur hauteur est de 3 à 5 millimètres, leur diamètre de 2 millimètres. Ils sont très rapprochés les uns des autres. Leur cou- leur et celle du cœnenchyme sont brun froncé. Les tentacules trans- lucides sont piquetés de points bruns. La colonne est pourvue de sillons longitudinaux dont le nombre est égal à celui des tentacules disposés en deux rangées, comme chez tous les Zoanthides. Ce nom- bre, très fréquemment de vingt-deux, a été indiqué par Gosse comme un caractère spécifique. Celui des cloisons est cependant assez va- riable. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 213 Les niacroseptes et microseptes ne sont pas en quantité égale d'un côté et de Taulre du plan commissural. Voici d'ailleurs quel était leur nombre sur quatorze Polypes. Pour chacun de ceux-ci, j'ai représenté l'ensemble des cloisons par deux chiffres réunis deux par deux par un trait, de telle façon que le total des cloisons gauches soit distingué du total des cloisons droites. Parmi ces quatorze Polypes, quatre seulement possédaient, de chaque côté, un nombre égal de cloisons : 24-24; 12-12; 12-12; 8-8. Sur les neuf autres, il y en avait cinq avec 10-12 cloisons; deux avec 12-10; un avec 12-14 et un avec 14-12. Les différences fré- quentes du nombre des cloisons gauches et droites sont dues à ce que ces organes apparaissent irrégulièrement par paires à une pé- riode du développement qui a été assimilée avec raison, par Millier et Erdman, à la seconde du développement des Hexactinies. Les photographies 1, 2, 3, 4 et 5 de la planche X reproduisent des coupes faites à travers deux Polypes de Palythoa sulcata, l'un à 10-12 cloisons, l'autre à 8-8 cloisons. Chez le premier (phot. 1 , 2, 3), le disque buccal, les tentacules et le sommet de la colonne s'étaient introversés, La coupe 1 passe parce sommet, elle montre au centre la paroi rétractée en dedans; extérieurement on aperçoit la portion non infléchie de la même paroi, et, dans Fintervalle, vingt-deux cloisons comprenant, ainsi que nous le verrons plus bas, neuf mi- croseptes et treize macroseptes limitant d'étroites interloges et de larges loges. La coupe 2 a été faite au-dessous de la précédente, mais elle passe en réalité par une partie du Polype située au-dessus, puisque, dans ce Polype, le disque tentaculaire est introversé. On dislingue les coupes des tentacules loculaires, qui sont plus gros, de celles des tentacules interloculaires, qui sont plus petits. Ces der- niers se sont intercalés entre les loculaires de façon à occuper une situation complètement différente de celle qu'on observe sur les Polypes épanouis ; c'est-à-dire que la rangée tentaculaire interne est devenue externe, et inversement. Ce changement de rapport s'ex- plique par la contraction du sommet de la colonne, qui a rabattu 2U L. FAUROT. les tentacules externes par-dessus les tentacules internes. La coupe 3 a été faite à travers la région œsophagienne, à un niveau auquel les loges et interloges sont de même largeur. 11 existe dix cloisons à gauche et douze à droite, c'est-à-dire vingt-deux, parmi lesquelles on compte quatre microseptes et huit macroseptes dont la disposi- tion réalise le stade macrograndform , tel qu'Erdman l'a figuré (flg. 24), sans cependant l'avoir observé. Il l'a déduit très exacte- ment de ses observations. « Les stades, dit Erdman, qui seraient assez jeunes pour montrer la disposition des premières cloisons ap- parues n'ont pas encore été examinés. On peut cependant arriver à les connaître en réfléchissant aux observations déjà faites. Il résulte de celles-ci que, chez tous les individus, la zone dorsale est toujours complète et comprend constamment cinq paires de cloi- sons. D'un autre côté, dans la zone ventrale, le nombre des cloisons est en rapport avec l'âge des animaux. Si donc les paires de la zone dorsale, même chez les plus jeunes individus, sont toujours au com- plet, le nombre des paires ventrales, chez ces derniers, sera d'autant moindre qu'ils seront moins âgés ; par conséquent, on peut admettre un très jeune stade dans lequel la zone ventrale sera au minimum, c'est-à-dire réduite aux macroseptes commissuraux, qui appartien- nent toujours aux cloisons primitives de l'embryon. Ce stade com- prend six paires de cloisons, dont cinq constituant la zone dorsale et une la paire ventrale commissurale. » Les coupes 4 et 5 (pi. X) ont été faites sur un second Polype à 8-8 cloisons. La première a été pratiquée à l'extrémité inférieure de la région œsophagienne qui, à un niveau plus élevé, présentait la disposition macrotype représentée par la coupe précédente 3. Le nombre total des macroseptes est de six au lieu de huit qu'ils étaient plus haut. La coupe 3 a été faite tout à fait à l'extrémité inférieure du même Polype; on y compte seulement deux macroseptes, car les quatre autres ne descendent pas aussi bas. En raison de la lon- gueur et de la largeur de ces deux cloisons qui parviennent jusqu'à la base du Polype, ou peut les considérer comme 'les premières ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 215 apparues. On remarquera que leur situation est dorsale par rap- port aux deux autres cloisons dont nous avons constaté la dispari- tion par la coupe précédente, Bt qui, dans l'ordre d'apparition des macroseptes (compté d'après les longueurs relatives), seraient les quatrièmes. J'ai observé, sur la base d'un autre très jeune Polype, une disposition identique à celle de la coupe 5 (pi. X) ; mais, pas plus que la précédente, elle ne m'a donné d'éclaircissement sur l'ordre d'apparition des microseptes. Les parois des Polypes deve- nant épaisses et irrégulières à proximité du cœnenchyme, il en ré- sulte qu'il est impossible de distinguer avec certitude les extrémités inférieures, très étroites, des cloisons d'avec les débris arrachés ac- cidentellement à ces parois. Le résultat de mes recherches sur les longueurs relatives des macroseptes du Palythoa sulcata se réduit donc à la connaissance de la situation des deux premiers (premier couple) et des deux quatrièmes (quatrième couple) macroseptes qui, d'après ces lon- gueurs, seraient apparus chez l'embryon. Il importe maintenant de résumer les observations qui ont été antérieurement faites au sujet du développement des Zoanthides par E. Van Beneden (1890) et Mac-Murrich f-isoi). Ces deux naturalistes ont étudié, au moyen de coupes transversales, des larves recueillies dans des pêches pélagi- ques et qu'ils ont considérées comme appartenant à des Zoanthides. L'unique larve examinée par E. Van Beneden était, vers son extré- mité orale, de six macroseptes et de six microseptes disposés comme dans la ligure 23, laquelle est, pour les macroseptes, comparable à la coupe 4 (pi. X). Ses conclusions principales sont que, chez cette larve, les microseptes sont de formation plus récente que les ma- croseptes* et qu'il existe dans le cours de l'évolution des Zoan- thides un stade prolongé caractérisé par la présence de six cloisons primaires. L'ordre d'apparition des six premiers couples serait le ' Dans les coupes figurées par E. Van Beneden, deux microseptes se prolongent usqu'à l'extrémité aborale, alors que quatfe microseptes se sont terminés à un niveau supérieur. 216 L. FAUROT. suivant, que j'indique par des chiffres correspondant à cet ordre \ les couples commissuraux y sont réunis par un double trait : V=V (dor- sal) ; II-II ; IV-IV ; I-l; VI-VI; III =HI (ventral). Les couples V=V; IV-IV; VI-VI sont composés de microseptes, et les trois autres de macroseptes. Mac-Murrich n'admet pas ces conclusions. D'après lui, les micro- septes ne doivent pas être considérés comme plus jeunes que les macroseptes, pour l'unique raison qu'ils font une moindre saillie dans la cavité du corps, et il démontre qu'il n'existe aucun motif pour croire à un stade prolongé à six macroseptes. Il fait remarquer que si l'on trouvait des larves de Zoanthides macrotypes à douze cloisons dont huit macroseptes ', il serait aussi permis d'en conclure « en s'appuj'ant sur le même raisonnement que le distingué natu- raliste belge», que ces larves ont passé par un stade de longue durée caractérisé par huit cloisons primaires. Les larves examinées par Mac-Murrich étaient pourvues de six macroseptes et de six micro- septes disposés de la même manière que dans la larve de Van Bene- den. Il admet, en se basant sur la similitude de la disposition de ces cloisons avec celle qu'on observe chez les larves d'Hexactinies, qu'il est très probable que leur ordre d'apparition est identique à celui de ces dernières. Cette opinion, on le voit, n'est basée que sur une analogie; elle est, en outre, contredite par la disposition des cloi- sons que j'ai observée chez les très jeunes Pabjthoa sulcata. Chez ces derniers, les six microseptes dont il vient d'être question se prolongent très bas en conservant des largeurs égales, tandis que ces largeurs diminuent sur tous les macroseptes avant qu'ils aient atteint l'extrémité inférieure. D'après mes observations sur VHal- carnpa chrysanthellum, on serait en droit d'en conclure que, chez le Palythoa sukata, les six macroseptes sont d'âge plus récent que les six microseptes, et, par conséquent, il n'est pas possible de s'ap- puyer sur la similitude de disposition des cloisons pour admettre > Ce serait une tlisposUion semblable (pour les macroseptes) à celle que montre la photograpliie 3, pi. X. ETUDES SUR LES ACTINIES. 217 l'ordre d'apparition identique des douze cloisons primitives des Zoanthides et des Hexactinies. En outre, si l'on se reporte à mes observations exposées plus haut et aux photographies 3 et 4 (pi. X), on verra que parmi les huit macroseptes primitifs^ il en est deux qu'en raison de leurs largeurs relatives on peut considérer comme étant les quatrièmes dans l'ordre d'apparition. Ces deux macro- septes, d'après la supposition faite par Mac-Murrich, seraient appa- rus les cinquièmes, et, d'après E. Van Beneden, les sixièmes. CÉRIANTHIDE. CERIANTHUS ME3IBRANACEUS GMELIN ; TVBULARIA SPALLANZANI, t784 ; TUBULARIA MEMBRANACEA GMELIN, 1789. Délie Chiaje, en 1829, décrivit cette Actinie sous le nom de Cerian- thus et en distingua trois espèces, que J. Haime a réunies sous le nom de Ceriant/ms membranaceus (1854). Ce naturaliste en donna la diagnose complète ainsi que la description anatomique. Il reconnut que chacune des chambres intercloisonnaires était en continuité avec deux tentacules, l'un labial, l'autre marginal, et que le plus grand nombre des cloisons mésentéroïdes ne descend pas jusqu'au fond de la cavité viscérale ; de telle sorte que, dans sa portion infé- rieure, la cavité du corps n'est pas divisée en chambres, comme sa portion supérieure. A la surface interne de l'œsophage, il remarqua deux sillons verticaux opposés, dont l'un est étroit et peu prononcé, tandis que l'autre est large et profond. Ce dernier correspond à deux lames mésentéroïdes qui, seules entre toutes, descendent jus- qu'à l'extrémité inférieure. Il vit enfin qu'entre le sillon grand et large et le sillon étroit, les cloisons étaient de moins en moins longues. Par l'ensemble de ces caractères, J. Haime montra que le Cérianthe devait constituer, parmi les Actiniaires, une division très distincte. 0. et R. Hertwig (1879) ont publié une étude détaillée sur l'histo- logie du Cérianthe, mais n'ajoutèrent rien de nouveau à la connais- sance anatomique de cette Actinie. La même année, Heider signala 218 L. FAUROT. deux particularités qui avaient échappé à J. Haime : la présence d'une paire de petites cloisons entre les deux grandes lames mésen- téroïdes et Talternance de grandes et de petites cloisons ; les unes génitales, les autres uniquement pourvues de filaments. Heider figura h tort les lames du Gérianthe comme étant également déve- loppées dans les deux parties qui correspondent à chacun des deux sillons. Les observations de J. Haime, à cet égard, sont beaucoup plus exactes. Ces préliminaires résument, d'une façon à" peu près complète, le résultat des recherches qui avaient été faites, jusqu'à présent, sur l'anatomie du Gérianthe. J'exposerai plus loin les importants faits anatofniques que j'ai observés. Caractèi'es extérieurs, — La colonne mesure, au maximum, 28 cen- timètres en longueur et 3 centimètres dans son diamètre. Elle est cylindrique et s'amincit en pointe mousse à l'extrémité inférieure, munie d'un orifice. Le disque oral est élargi en forme d'entonnoir plus ou moins évasé, suivant le degré de contraction. Les tentacules, non rétractiles, sont disposés en deux couronnes, l'une marginale et l'autre buccale. Cette dernière occupe exactement la place corres- pondant au bourrelet buccal des autres Actinies. Ce bourrelet buccal n existe donc pas chez le Gérianthe. Entré les deux couronnes tentacu- laires, le disque est parcouru par des sillons péristomiaux allant des tentacules buccaux aux tentacules marginaux. L'ouverture de la bouche a une forme ovale très allongée ; ses extrémités correspon- dent à la terminaison supérieure des deux sillons décrits par J. Haime. L'un de ces sillons, le plus large, est surmonté par un ten- tacule buccal, tentacule impair de Fischer (1889) ; l'autre sillon se termine non pas à la base de l'un des tentacules buccaux^ mais à un intervalle entre deux de ces appendices qui, le plus souvent, sont beaucoup plus courts que tous les autres appartenant à la même couronne. On trouve également, dans la couronne marginale et dans la môme situation par rapport aux deux sillons, un tentacule mar- ginal impair et, à l'opposé, un intervalle relativement large entre ÉTUDES SUR LES" ACTINIES. 219 deux petits tentacules marginaux. C'est dans les deux intervalles, le buccal et le marginal, que naissent tous les nouveaux appendices. La colonne est d'une couleur qui varie entre le violet clair, le brun acajou et le brun très foncé ; on y remarque souvent des vergetures linéaires de couleur claire ou foncée. La coloration des tentacules ainsi que celle du disque sont plus variables que celle de la colonne. Le plus souvent, les tentacules buccaux sont d'une teinte uniforme, brune, grise, vert clair ; chez un Cérianthe provenant de Roscoff, ils étaient blanc ivoire. On peut, je crois, considérer comme exception- nelle la variation observée par P. Fischer, consistant en ce que cha- que tentacule buccal présentait deux bandes longitudinales noi- râtres. Les appendices marginaux, au contraire, sont presque tou- jours ornés d'anneaux, de taches ou de points se détachant sur un fond de couleur brune ou violacée. Les variations individuelles sont très fréquentes ; c'est ainsi que, sur trois Cérianthes provenant d'un même envoi de Roscoff, un avait les marginaux grenat foncé, sans aucune marque ; un autre les avait bruns, avec quatre à cinq anneaux blancs, le cycle externe étant formé de tentacules alterna- tivement vert clair et blancs ; le troisième enfin avait tous les élé- ments de la couronne marginale brun clair, avec quatre à cinq anneaux bruns. Sur une cinquantaine de Cérianthes du bassin d'Ar- cachon, un très petit nombre étaient absolument comparables les uns aux autres, sous le rapport de la couleur et de la disposition des marques. Si nous ajoutons que, sur un individu de cette espèce con- servé durant six mois, il fut constaté que les tentacules, primitive- ment brun foncé, devinrent en partie vert clair, on jugera qu'il faut renoncer à classer et à dénommer, à l'exemple de Gosse, des variétés d'après les colorations. Les tentacules marginaux sont toujours de plus grande taille que les buccaux, et leurs longueurs varient suivant la rangée à laquelle ils appartiennent. Les buccaux, au contraire, sont tous de même taille ; ils diffèrent aussi des précédents par une extrémité moins effilée. Le nombre des appendices, chez le plus petit des Cérianthes 220 L. FAUROT. quej'ai examinés, était de vingt-sept ; il était de cent quarante-cinq chez le plus gros; presque toujours ce nombre est impair. Leur disposition, qui sera décrite plus loin, est très différente de celle qu'on observe chez les autres Actiniaires. J. Haime a montré que le tube dont s'enveloppe le Cérianthe était composé de nématocystes et de mucus, et qu'il était sécrété parl'ec- toderme. Ce tube a exactement la longueur de l'Actinie non con- tractée, les appendices de la couronne marginale étant tous relevés et réunis en un faisceau dans l'axe du corps. Il en résulte que le Cérianthe peut s'y dissimuler complètement, sans qu'il ait pour cela à raccourcir son disque tentaculaire ni à rétracter son extrémité infé- rieure. En comparant les dimensions d'un Cérianthe en état d'extrême contraction avec celles de son enveloppe, on constate que cette con- traction peut le réduire au quart et même au sixième de sa longueur primitive. Il est difficile d'extraire cette enveloppe de la grève sans en déchirer l'extrémité inférieure, profondément enfoncée dans la vase parmi des pierres ou des racines de zostères. A celte extrémité, la cavité du tube se rétrécit en un canal très court, très étroit et non perforé. A l'autre extrémité correspondant à l'orifice, sa paroi est très mince, transparente, et son calibre est plus étroit que celui de la portion moyenne du tube. L'ensemble de la cavité a donc la forme d'un fuseau très allongé. La plus grande épaisseur de la paroi mesure environ \ centimètre et demi. A sa face interne, cette paroi est lisse, luisante et de couleur ardoisée. Elle se laisse diviser en lamelles qui, examinées au microscope, se montrent remplies de nématocystes englobés dans une substance absolument transpa- rente, légèrement élastique, qui est du mucus devenu solide. Les lamelles sont parallèles et concentriques, ce qui indique que le tube a été formé par des couches successives de mucus. La surface externe de ce tube, bien que conservant une forme à peu près cylin- drique, est très irrégulière et rugueuse, en raison de la grande quan- tité de débris de toutes sortes qui s'y trouvent englobés. Divers ani- maux, tels que des Ascidies, y adhèrent parfois, et j'y ai même ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 221 observé un Cériauthe de petite taille ainsi qu'une Edwardsia Beau- teynpsi. Le Ce?'ianthus membvanaceus a été recueilli dans la Méditerranée, à Trieste, Naples, Mahon, Marseille, Banyuls, et sur les côtes océa- niques de France, au Fret, à Penpoul (Finistère) et à Arcachon. Gosse, Danielssen (*8î6), Mac-i\Iurrich ('1890), ont décrit des Cé- rianthes sous le nom de Cerianthus Lloydii, C. borealis, C. ameri- canus ', d'après des caractères basés sur le nombre et la grandeur relative des cloisons. Mais ce nombre, chez le Cerianthus membrana- cens, variant suivant l'âge des individus, et ces longueurs ne pou- vant être exactement appréciées que sur des animaux non contrac- tés, il sera permis de douter de l'existence de ces nouvelles espèces. Dans l'état de contraction, les cloisons très minces se rétractent plus ou moins haut et inégalement; leurs longueurs relatives peuvent alors varier d'un individu à un autre. Il arrive même qu'elles se détachent de la paroi, y laissant des fragments portant, ainsi que l'a ligure Heider, des ovules ou des débris d'entéroïdes. Quant au Cerian- thus soUtarius de la Méditerranée et des côtes océaniques françaises, il a été (1890) considéré, avec juste raison, comme un jeune C. membranaceus. Les Cériantlies vivent sur des fonds vaseux^ et à des profondeurs variables. A Arcachon, d'où m'ont été envoyés la plupart des spéci- mens utilisés pour ce travail, on les trouve à mi-marée en très grande quantité. A Banyuls, on les recueille à 1 mètre environ de profon- deur, dans un herbier de Posidonies, au pied de la jetée de la sta- tion zoologique. Il en a été aussi dragué par 55 mètres au nord du cap Bearn. A Penpoul, au Fret, les Cérianthes ne sont à découvert qu'aux basses mers d'équinoxe. On les conserve longtemps en captivité, à moins que leur tube, et ' Il a élé aussi décrit un Cerianthus brachysoma {Bulletins de l' Académie royale de Belgique, 189!, Cerfontaine). — D'après le texte et la ligure qui s'y rapportent, il n'est pas douteux qu'il s'agit d'un Cérianthe extrêmement contracté, 2 On trouve aussi, mais plus rarement, des Cérianthes logés dans des anfractuo- sités, sur des fonds exclusivement rocheux. 222 L. FAUROT. c'est le cas le plus fréquent, ne soit imprégné de vase. Il est alors nécessaire d'enlever ce tube et d'y substituer une éprouvette cylin- drique de même dimension; car la vase, en séjournant dans l'eau, en provoquerait la putréfaction rapide. Lorsque plusieurs Cérianthes sont placés horizontalement dans des bacs pleins d'eau de mer, il en est qui abandonnent leurs tubes et s'introduisent dans ceux de leurs voisins. Ou peut ainsi trouver jusqu'à trois Cérianthes dans un même tube. Gomme ce fait peut se produire dans l'obscurité la plus complète, il semble démontrer que'ces tubes ont exclusivement pour but d'isoler le corps de l'Actinie du contact des objets extérieurs. Les Cérianthes sont, d'ailleurs, peu impressionnables à la lumière, et s'ils se rétractent sous l'influence d'un brusque éclairage, ils ne tar- dent pas à s'épanouir de nouveau. Lorsqu'on touche leurs tentacules, la colonne se contracte par saccades successives. Ces contractions rapides et répétées ont été également observées par J. Haime sur les embryons de Cérianthes, puisqu'il compare le mode de progression de ces embryons à celui des Méduses. Cette observation méritait d'être rappelée, car elle contribue à augmenter la vraisemblance de l'opinion que j'émets à la fin de cette étude, d'après laquelle, dans le cours de leur développement, les Cérianthes passent par une phase larvaire en tout semblable à un Arachnactis, Actinie qui, elle aussi, a été vue progressant à la façon des Méduses. Dépouillés de leur tube, les Cérianthes se revêtent d'une mince couche de mucus grisâtre et translucide, premier rudiment d'un nouveau tube. C'est à la partie supérieure de la colonne que com- mence cette sécrétion, pour se continuer jusqu'à l'extrémité infé- rieure. Parfois elle se limite autour de la région œsophagienne de la colonne. D'après J. Haime, les mouvements des Cérianthes, lorsque ceux-ci sont hors de leurs tubes, se produisent au moyen de contractions et d'allongements de la colonne et avec l'aide des tentacules, mais sans s'aider de la partie postérieure de cette colonne. 11 m'a semblé, au contraire, que c'était avec cette partie que s'effectuaient les mou- ETUDES SUR LES ACTINIES. 223 vemeQts les plus étendus de ces Actinies. Souvent, il est vrai, celles- ci se meuvent en s'agrippant avec leurs tentacules ; mais la portion médiane de leur corps ne présente jamais les constrictions annulaires que j'ai décrites chez le Peachia et qui s'observent également chez VHalcampa et Vllyanlhus. C'est surtout par des déplacements laté- raux de leur extrémité aborale que les Cérianthes parviennent à se traîner sur le sol sans se diriger de préférence soit du côté éclairé, soit du côté obscur de leur prison. Lorsqu'on les place sur une épaisse couche de sable, ils ne réussissent jamais, comme les Acti- nies précédentes, à s'y enfoncer complètement, et si on les y enfouit profondément dans la situation qui leur est habituelle, c'est-à-dire la bouche en haut, on les voit bientôt en sortir. Dans ce cas, ce ne sont pas les tentacules qui, le plus souvent, apparaissent en pre- mier lieu à la surface du sable, mais l'extrémité postérieure de la colonne. Ce fait paraît confirmer mon opinion que c'est sur- tout avec cette extrémité que le Cérianthe exécute ses mouvements de déplacement. D'ailleurs, ainsi que l'a remarqué J. Haime, la contractilité paraît être moins énergique autour de l'œsophage et des cloisons que dans les deux tiers inférieurs de la colonne. ANATOMIE. L'existence de deux couronnes lenlaculaires ainsi que les autres caractères extérieurs constituent des particularités pouvant faire présumer qu'il existe chez le Cérianthe une disposition des organes internes, c'est-à-dire des cloisons, très difierente de celle qu'on ob- serve chez les autres Actiniaires. J. Haime, en effet, a observé que ces cloisons ne sont pas «géminées », comme chez les Hexactinies, et qu'en ou Ire leurs dimensions sont d'autant plus petites qu'elles sont plus voisines du sillon commissural le plus étroit. Quant aux rapports des cloisons entre elles, il avait seulement fait la remarque qu'elles étaient alternativement inégales. Pour étudier la structure et la disposition de ces organes, il est 224 L. FAUEOT. nécessaire de recourir à un procédé permetlanlde tuer lesGérianthes sans les faire contracter. Heider se contentait de les ouvrir dans leur longueur et de fixer les bords coupés avec des épingles. « Ainsi préparé, dit-il, un animal se contracte bien environ de la moitié de sa longueur, mais pas dans sa largueur. >> Je puis affirmer que, par ce moyen, il est impossible d'obtenir une connaissance exacte des rapports des cloisons, car la contraction est bien plus considérable que ne le prétend Heider*. Il n'existe pas, à ma connaissance, de réactifs permettant d'ob- tenir à coup sûr la mort d'un Cérianthe sans provoquer en même temps la contraction de la paroi du corps. La méthode qui m'a réussi est empirique et n'agit que d'une manière incertaine. Em- ployée sur un grand nombre de Cérianthes, elle a réussi chez quel- ques-uns sans qu'il m'ait été possible de discerner le motif qui l'avait fait échouer chez les autres. La voici exposée en détail : sur le fond d'une très large et haute cuvette de verre en partie remplie d'eau de mer, une vingtaine de Cérianthes, dépouillés de leur enveloppe, sont soutenus debout au moyen d'éprouveltes proportionnées à leur taille. Après avoir attendu que toutes les parties du corps soient complète • ment épanouies, on laisse tomber à la surface de l'eau, goutte à goutte et à intervalles très longs (une demi-heure à une heure) une solution d'acide chromique et d'acide picrique à saturation. On a soin de disperser les gouttes sur toute la surface du liquide en évi- tant un contact trop brusque de la solution avec le corps de ces Actinies. Après une durée de quarante-huit à soixante-douze heures, lorsque la contractililé des Cérianthes paraît avoir diminué, ce que l'on peut soupçonner à l'immobilité de plus en plus grande des ten- tacules, on ajoute de plus fortes quantités de la solution que l'on chasse sur le fond du récipient de verre au moyen d'une pipette. Pour terminer, on y laisse tomber des cristaux d'acide chromique ' s. BiANCO [Mitlheilungen ans des Zool. Stal. zu Neapel), après avoir fi.xé les Cérianthes par l'acide acétique, les suspend par la base dans l'alcool faible. Je n'ai pas employé ce procédé qui, d'après son auteur, éviterait la contraction. Fig. 26. Cerianthus membranaceus ouvert entre les deux plus jeunes cloisons (petit sillon). ARCn. DE ZOOL EXP. ET Hm — 3" SÉRIE. - T. III. 1 89d. 13 ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 227 jusqu'à ce que l'eau de mer ait pris la coloration d'une forte solu- tion (10 à 15 pour 100) de cet acide. En ayant soin d'agir avec lenteur et sur un grand nombre d'ani- maux sans blessures, on a chance d'obtenir, par ce procédé très simple, quatre à cinq Cérianlhes (sur vingt), qui restent épanouis et dont les tissus durcis, sans être cassants, sont dans d'excellentes conditions soit pour l'examen macroscopique, soit pour des coupes transversales. Pour l'examen macroscopique, il suffit d'ouvrir les Gérianthes longitudinalement avec des ciseaux à lames très minces, en coupant suivant une direction aussi parallèle que possible au tra- jet d'une cloison. On fixe les bords avec des épingles. Pour les coupes transversales qui sont nécessaires à l'étude de la sériation des cloi- sons, j'avais choisi des Gérianthes dont le diamètre des colonnes n'excédait pas 1 centimètre. Ge sont les plus faciles à inclure dans la paraffine, à condition toutefois de n'employer que des portions de 2 centimètres environ de longueur. Dans le but d'orienter plus aisément les coupes suivant un plan aussi perpendiculaire que pos- sible à l'axe longitudinal des colonnes, je les ai toujours faites en com- mençant par les disques tentaculaires. Voici maintenant les résultats obtenus au moyen de ces deux modes d'investigation anatomique. Sur les Gérianthes ouverts longitudinalement, on observe distinc- tement, à la surface de l'œsophage, les deux sillons commissuraux signalés par J. Haime, l'un profond et large, l'autre étroit. L'œso- phage descend plus bas du côté du profond sillon que du côté du sillon plus étroit, d'où les dénominations de grand et petit sillon. Entre les deux, l'œsophage est parcouru par des stries longitudi- nales et parallèles correspondant à l'attache des cloisons et plus rap- prochées les unes des autres au voisinage du petit sillon qu'à celui du grand. Au bord de l'orifice buccal, à la place où chez les autres Actinies existe une saillie circulaire désignée sous le nom de lèvres, on aperçoit une couronne de tentacules dits tentacules labiaux. La sériation de la couronne buccale ainsi que celle de la couronne mar- ginale située à une certaine distance au-dessus (fig. 26), sera dé- 228 L. FAUROT. crile lorsque j'aurai fait connaître la disposition des cloisons. Sur l'œsophage ouvert, on peut encore observer deux particularités aux- quelles j'ai déjà fait allusion : 1° au-dessus et dans le prolongement du grand sillon, on aperçoit, dans chacune des deux couronnes, un tentacule dit tentacule impair (fig. 26). C'est du côté de cette loge que se trouvent les cloisons les plus longues et les plus âgées ; 2» au- dessus du petit sillon, il n'existe pas de tentacules, mais un inter- valle (fig. 28) qui correspond à deux ou trois cloisons incomplète- ment développées, c'est-à-dire non encore réunies par leurs bords libres à la face externe de l'œsophage. Les chambres incomplètes formées par ces cloisons ne se prolongent pas encore en tentacules; elles sont comprises entre deux lames plus développées limitant un espace auquel on a donné le nom de loge de multiplication^ {C Vogt). Au sujet du mode de formation des cloisons, nous verrons que le côté dorsal du Cérianthe correspond au petit sillon, et, par consé- quent, à cette loge de multiplication, et que le côté ventral corres- pond au grand sillon et à la loge impaire. Loge de multiplication est donc synonyme de loge dorsale^ et loge impaire, synonyme de loge ventrale. Sur les coupes transversales faites dans la région œsophagienne (phot.4,pl.VI), onvoit que, du côté dorsal, les loges deviennent plus étroites et plus nombreuses, et que, du côté ventral, une loge est remarquable par ses grandes dimensions et sa forme particulière. A chacune des cloisons correspond un pli de la couche épithéliale revê- tant la surface interne de l'œsophage ; on voit cependant qu'un certain nombre de ces lames, situées près de la grande loge ven- trale, se fixent aux parois très épaisses du grand sillon œsophagien. Sur des coupes passant par la partie inférieure de cet organe, le nombre des lames fixées à ces parois diminue graduellement, car le • Chez les Cérianthes, les cloisons n'étant pas pourvues de muscles unilatéraux, on ne peut y distinguer des loges et des interloges comme chez les Hexactinies. Le mot loge, chez les Cérianthes, est donc synonyme de chambre ou d'espace inter- doisonnaire. -O. Fig. 27. — Schéma montrant les six cloisons primitives (en rouge) et six quatroseptes du Cerianthus membranaceus numérotés : IV, V, VI, VII — VIII, IX, X, XI — XII, XIII, XIV, XV. ETUDES SUR LES ACTINIES. 231 grand sillon, au voisinage de la cavité viscérale, devient de plus en plus étroit. A son exlrémité inférieure, il se termine par une lan- guette à laquelle restent fixées les deux cloisons qui limitent la loge ventrale. L'examen des coupes passant au-dessous du bord inférieur de l'œso- phage montre que les cloisons ne se détachent pas toutes au même niveau de la face postérieure de cet organe ; ce sont les plus petites d'entre elles qui sont les premières dont les bords internes devien- nent libres et flottants dans la cavité du corps. Sur un Gérianthe ou- vert longitudinalement (fig. 26), de même que, sur ces coupes, on voit, en outre, que les cloisons sont, ainsi que l'a figuré J. Haime, plus longues du côté de la loge impaire que du côté de la loge de multiplication. Aussi est-ce à tort qu'Heider soutient que les lames finissent toutes vers le bas à une égale hauteur, et qu'il attribue l'opi- nion de J. Haime à ce que celui-ci n'aurait examiné que des Gérian- thes contractés. DISPOSITION DES CLOISONS. — Quatroseptcs. J'ai déjà fait connaître (i89«) la disposition des cloisons, par groupes de quatre (quatroseptes) chez le Cerianthus înembranaceus. Cette particularité anatomique n'a été signalée chez aucune autre espèce d'Actiniaire adulte. Ajoutée aux autres caractères déjà très spéciaux de cette Actinie, elle contribue à justifier la création du groupe des Gérianthides qui, avant J. Haime, était confondu avec les autres Actinies pivotantes. Dans mon premier travail, je décrivais un premier quatrosepte très difl"érent des autres et j'étais dans l'in- certitude au sujet des grandeurs relatives des éléments des deuxième et troisième quatroseptes. Depuis, par une étude plus approfondie du Gérianthe, j'ai acquis la conviction que la distinction des groupes de quatre cloisons ne pouvait être faite qu'en éliminant de ces groupes les trois cloisons placées de chaque côté de la loge ventrale. De cette élimination, il résulte que tous les quatroseptes sont cons- titués de la même manière et que le point de départ, pour la numé- 232 L. FAUROT. rotation de leurs éléments, devra être la quatrième cloison' comptée à partir de la loge ventrale. Il en résulte que, à droite et à gauche de cette loge ventrale, il existe trois cloisons, au total six, qui, par leur situation et leurs dimensions relatives, sont en dehors des quatroseptes. De la dispo- sition particulière de ces six cloisons, je déduirai, ainsi que je l'ai fait, pour VHalcampa chrysant hélium (pi. VIII et XI), l'ordre probable suivant lequel elles se sont développées. Nous verrons, à propos du développement, que non seulement cet ordre est identique à celui qui a été trouvé chez Y Ai'achnadis, par Mac-Murrich et Van Beneden, mais qu'en outre toutes les autres cloisons du Cérianthe se déve- loppent de la même manière que les cloisons correspondantes de ces mêmes Arachnactis. D'où cette conclusion que ceux-ci seraient des larves de Cérianthes, ce qui, d'ailleurs, avait été soupçonné par le zoologiste anglais Gosse ^. Dans la figure 27, on voit que la loge ventrale est limitée par deux petites cloisons III-III stériles et de longueurs égales ; leur présence a été reconnue par Heider. D'après mes observations, faites sur un grand nombre d'individus, ce sont les seules cloisons qui, chez le Cérianthe, ne soient pas munies de bourrelet entéroïde ; leurs bords libres sont bien un peu renflés au-dessous du niveau auquel elles se détachent de l'cesophage, mais, dans leurs portions inférieures, ce bord a la même épaisseur que le reste de la cloison. Viennent en- suite, à gauche et à droite de la loge ventrale, pour former de cha- que côté deux nouvelles loges formées par : 1° deux très grandes cloisons M observées déjà par J, Haime, et qui, seules, atteignent l'orifice aboral. Elles sont fertiles dans une grande partie de leur étendue et jusqu'à un niveau plus bas que les autres cloisons fer- tiles. Les bourrelets entéroïdes de ces deux grandes cloisons présen- tent, depuis le point où cessent les cellules génitales jusqu'à l'ori- fice aboral, des ramifications irrégulières et des prolongements en ' Celle qui est numérotée IV sur la figure 27. 2 Gosse {British sea-anemones, p. 266). ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 233 forme de filaments. Cette particularité ainsi que la très grande lon- gueur de ces deux cloisons les distinguent très nettement de toutes les autres. 2" Deux autres cloisons II-II, un peu plus longues que les deux petites désignées comme limitant la loge ventrale. Ainsi que les deux cloisons III-III décrites en premier lieu, elles sont stériles, mais elles en diffèrent en ce qu'elles sont pourvues, sur une très courte portion de leurs bords libres, de filaments beaucoup plus rap- prochés les uns des autres que ceux que je viens de signaler sur les deux grandes cloisons I-I. Ces petits amas de filaments s'observent aussi sur les cloisons qui composent les quatroseptes. Telles sont les six cloisons qui, ainsi qu'il a été dit plus haut, ne peuvent être rangées dans les quatroseptes en raison de leurs lon- gueurs relatives. A droite et à gauche des cinq loges limitées par ces six cloisons commencent les groupes de quatre cloisons, ou quatro- septes. Ils se répètent jusqu'au voisinage de la loge dorsale, en nombre d'autant plus grand que le Cérianthe auquel ils appartien- nent est plus âgé. Chacun des quatroseptes est formé de cloisons de quatre gran- deurs différentes, dont les deux plus grandes ou macroseptes sont fertiles, et les deux plus petites ou microseptes sont stériles. Elles sont disposées de telle façon qu'un grand macro&epte sera voi- sin d'un grand microsepte, et qu'un petit macrosepte le sera d'un petit microsepte. En somme, chaque quatrosepte peut être assimilé à un groupe de deux paires de cloisons ayant une taille différente. Chacune de ces paires est constituée comme le plus grand nombre de celles qu'on observe chez les Zoanthides, c'est-à-dire par un macrosepte fertile et un microsepte stérile. Chez les Cérianthes, cependant, contrairement à l'opinion ;de Hertwig et de Boveri, les paires de cloisons ne sont pas munies, comme chez lajplupart des Zoanthides, d'épaississements musculaires longitudinaux se faisant vis-à-vis dans les loges. Sur la figure 27, on voit, teintées en rouge, les six cloisons ven- trales du Cérianthe ; au centre est la loge impaire. A droite et à 234 L. FAUROT. gauche de ces six cloisons, trois quatroseptes se succèdent, la lon- gueur de leurs éléments se raccourcissant proportionnellement, de quatre en quatre, dans la direction de la loge dorsale. Les chiffres indiquent l'ordre probable d'apparition sur lequel je reviendrai plus loin. Structure des cloisons mésentéroïdes composant les quatroseptes. Il résulte de la composition des quatroseptes que le Cérianlhe contient des cloisons alternativement fertiles et stériles. Heider avait remarqué cette alternance ; c'est ainsi que ses filamentsepta cor- respondent à mes microseptes, et ses genitalsepta à mes macroseptes. Il décrit les premiers comme stériles, ayant la forme d'un trapèze, le côté libre étant le plus court et portant de nombreux filaments con- tournés et ramifiés. Les seconds, au contraire, comme leur nom l'indique, sont fertiles ; ils sont aussi plus grands que les précédents, entre lesquels ils s'intercalent sans cependant atteindre le même développement en largeur. Ils s'en distinguent^ ajoute-t-il, par un épais bourrelet qui ourle leur bord libre et qui, dans le voisinage de leur extrémité inférieure, se transforme en un petit nombre de fila- ments entéroïdes. Je puis confirmer cette définition de Heider, sauf cependant pour ce qui a rapport à l'entéroïde qui, d'après lui, our- lerait uniquement le bord libre des genitalsepta et dont seraient, au contraire, privés les filamentsepta. Ce bourrelet entéroïde s'observe, au contraire, dans toutes les cloisons, à l'exception seulement de la paire qui limite la loge ventrale. J'ajouterai que la forme en trapèze provient de l'élargissement considérable de la partie inférieure des microseptes. Cet élargissement est plus accusé sur les petits micro- septes que sur les grands et se remarque aussi, quoique à un degré beaucoup moindre, à la partie inférieure des petits macroseptes, et moindre encore à la terminaison des grands macroseptes. En somme, la largeur des cloisons du Cérianthe^ à leur partie infé- rieure, est d'autant moins grande que les cloisons sont plus longues. On remarquera, parmi les caractères différentiels indiqués par ÉTUDES SUK LES ACTINIES. 235 Heider, que de nombreux filaments contournés et ramifiés sont sus- pendus au bord libre des fdamentsepta^ et qu'au contraire un petit nombre de ces filaments garnit celui des genitalsepta. Heider consi- dérait les premiers filaments comme des acontia, et les seconds comme des craspeda ou entéroïdes. Cette distinction me semble erronée ; tous ces filaments sont, en réalité, des prolongements, des ramifications du bourrelet entéroïde, ainsi qu'il est facile de s'en assurer à l'œil nu et sur les coupes transversales. Jules Haime avait déjà signalé de semblables ramifications sur toute l'étendue du bord des cloisons du SaccanthusK Hertwig, qui les a aussi observées sur le Cerianthus membranaceus, les considère comme une modification du mésentéroïde ne survenant que chez les Gérianthes de très grande taille. D'après ce naturaliste, ces filaments, « en partie simples, en partie ramifiés, se multiplient dès leur ori- gine et forment ainsi de petits buissons [Baûmchen) n . D'après mes observations sur des Gérianthes de diverses longueurs, toutes les cloisons des quatroseptes sont bordées par un bourrelet entéro'ïdien qui, à sa terminaison inférieure correspondant à la partie élargie des cloisons, se ramifie en filaments simples ou composés. Sur les Gérianthes non contractés et ouverts longitudinalement, on distingue aisément cette partie des cloisons. Elle a l'apparence d'appendices ramifiés, de pelotons de filaments embrouillés les uns avec les autres. Ges pelotons, comme il a été dit plus haut, sont très volumineux sur les microseptes, et ce sont même les seules parties de ces petites cloisons qui soient bien distinctes au-dessous de l'œsophage. Sur la figure 26 et sur la figure 27, au-dessous des pelotons ra- mifiés des plus petits microseptes, on voit ceux qui sont suspen- dus aux plus grands microseptes, et au-dessous de ces derniers, à deux niveaux différents, d'abord les pelotons des petits macroseptes, et ensuite les pelotons des grands macroseptes. De la comparaison ' Genre qui, d'après J. Haime, serait très voisin du Cerianthus membranaceus, mais très probablement décrit d'après un Cériantlie contracté. Il n'a été trouvé qU'utie seule fois. 236 L. FAUROT. des longueurs de ces pelotons sur les quatre éléments des quatro- septes, il résulte que, dans un même quatrosepte, l'espace occupé sur une cloison par les pelotons ramifiés est d'autant plus grand que cette cloison est plus petite. On peut résumer ainsi les caractères de structure de chacun des quatroseptes : quatre cloisons, alternativement fertiles et stériles, diffèrent entre elles : 1" par leurs longueurs relatives ; 2° par la saillie plus ou moins forte que leur partie inférieure fait dans la cavité du corps, et 3° par l'étendue plus ou moins grande qu'occu- pent, sur ces cloisons, les pelotons ramifiés. En considérant le rap- port qui existe entre les deux derniers caractères et les quatre diffé- rentes longueurs des cloisons du Cérianthe, on en déduit la règle suivante : Dans un quatrosepte, la largeur de la partie inférieure de chaque cloison ainsi que l'étendue qu'y occupent les filaments ramifiés sont toujours en raison invei'se de la longueur de la cloison considérée, DISPOSITION DES TENTACULES. La description que J. Haime a faite de la sériation de la couronne marginale est très confuse ; il reconnaît cependant que la disposi- tion des éléments y est différente de celle qu'on observe chez les autres Actiniaires. Suivant lui, les tentacules marginaux ordonnés en quatre rangées seraient égaux numériquement sur un même individu \ mais, dans ces quatre rangées, il va jusqu'à supposer six et même sept cycles. V. Heider et P. Fischer ont figuré différem- ment la disposition des tentacules, bien que tous deux admettent également trois cycles buccaux. P. Fischer, contrairement à J. Haime et à Heider, a vu que, dans la couronne marginale et dans la couronne buccale, les différentes rangées ne sont pas formées d'un nombre égal de tentacules, le total des tentacules buccaux étant cependant le même que celui des tentacules marginaux. D'après le même auteur, le nombre des tentacules marginaux est toujours impair, par suite de la présence, à l'un des deux angles de la bouche, de l'un de ces appendices. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 237 Ces divergences résultent de la très grande difficulté qu'il y a à reconnaître, avec certitude, non seulement le nombre des rangées d'appendices, mais aussi les rapporls de ces rangées entre elles. En effet, un Cérianthe épanoui n'étale jamais son disque tentaculaire suivant un plan parfaitement horizontal, de manière à laisser voir tous ses tentacules dans leur entière longueur. Le plus souvent, ce disque est peu évasé, infundibuliforme, ce qui a pour effet de rap- procher presque au contact les bases des tentacules marginaux, et de ne laisser apparaître que la pointe des prolongements buccaux, qui semblent ainsi d'une longueur à peu près identique. J. Haime n'ayant probablement examiné que des Cérianthes à disques ainsi conformés, ne fait pas mention de l'ordre suivant lequel les tenta- cules buccaux sont sériés, car seules les bases des marginaux pou- vaient être bien visibles. Dans le but d'étudier les rapports de la couronne marginale avec la couronne buccale, j'ai placé un certain nombre de Cérianthes dans une situation verticale, au moyen de tubes de verre étroits ayant tout au plus le diamètre des colonnes dépouillées de leurs gaines. La longueur de ces tubes était un peu inférieure à celle du corps des animaux à observer, de sorte qu'une fois épanouis et en partie paralysés par la solution chromique, les bords des disques tentaculaires pouvaient s'infléchir en dehors des récipients et s'étaler suivant un plan horizontal. Sur une quinzaine de Cérianthes traités de cette façon, quatre seulement ouvrirent leur disque assez largement pour que l'examen en fût relativement facile. C'est ainsi qu'il m'a été possible de contrôler les faits observés par Heider et P. Fischer. Pour un examen limité seulement à la couronne marginale, les Cérianthes vivants et normalement épanouis suffisent. Dans les deux cas, la quatrième rangée d'appendices admise par J. Haime est très peu distincte ; elle se confond aisément avec la troisième. Elle n'existe d'ailleurs qu'à une période avancée du développement, car 238 L. FAUKOT, sur deux Gérianthes, 1 un à vingt-sept, l'autre à trente-deux tenta- cules, je n'ai observé que deux de ces rangées. Lorsque chacune des couronnes est composée de quatre rangs de tentacules, ces rangs renferment toujours un nombre différent de ces appendices. C'est ainsi que dans le Gérianthe représenté dans la figure 26 il existe : /4e rang 14 tentacules. „ . , 1 3* rang 16 — Couronne marginale / i 2e rang 12 — l l^Tang 15 — Total 57 tentacules. 4e rang 14 tentacules. P, u 1 ) 3e rang 11 — Couronne buccale < I 2e rang 16 — Werrang 16 — Total 57 tentacules. P. Fischer, qui n'admet que trois rangées, a signalé avant moi cette inégalité de nombre (1889). Elle est causée par la disposition singulière de quelques tentacules buccaux et marginaux situés à proximité du tentacule impair ou ventral (fig. 26). En effet si, fai- sant abstraction de cette région ventrale, on ne considère dans le corps du Gérianthe que les portions droites et gauches comprises entre le deuxième quatrosepte et les cloisons voisines de la loge de multiplication, on constate que les rangées tentaculaires correspon- dantes y possèdent un nombre égal de tentacules. Ces deux portions réunies constituant la colonne presque entière, on voit donc que la différence, dans le nombre des éléments des rangées, est due à la sériation particuUère des tentacules ventraux. Il n'existe aucune concordance entre la situation des tentacules buccaux d'une rangée et celle des tentacules marginaux de la rangée correspondante, bien que cependant, pour les premiers comme pour les seconds, la sériation se répète toujours la même, au-dessus de chacun des quatroseptes. En outre, cette sériation ne ressemble en rien, comme on peut s'en assurer par l'examen de la figure 26 ETUDES SUR LES ACTINIES. 239 et de la figure 27, à celle qu'on observe chez les Actiniaires à plu- sieurs cycles de tentacules. Il est difficile de trouver la cause de ce mode particulier de sériation ; on peut cependant la rechercher dans le développement des tentacules. Les nouveaux appendices situés du côté dorsal, adroite et à gauche de la loge de multiplication, n'ayant pas encore atteint leur taille définitive, s'étagent les uns au-dessus Fig. 28. — Cerianthus membranaceus. Formation des tentacules au-dessus du petit sillon, chez l'adulte. des autres par rang d'âge, en attendant qu'une nouvelle apparition d'appendices les refoule sur les côtés. C'est ce refoulement latéral, agissant toujours au même endroit du disque, qui provoque, sans doute, la sériation spéciale des tentacules du Cérianthe, et l'on con- çoit facilement qu'il ait un effet tout autre que la formation des tentacules qui, chez les Hexactinies, se produit en difTérentes places symétriques autour d'une circonférence. J'ai observé que les tentacules marginaux naissaient avant les buc- caux (fig. 28). G. Vogt (1888) a fait la même observation sur les 240 L. FAUROT. Arachnactis. Cette avance dans l'apparition des tentacules margi- naux est due à ce que les nouvelles cloisons naissent entre les bases des plus jeunes de ces tentacules marginaux, et qu'elles s'accrois- sent de haut en bas dans la direction de la couronne buccale. On comprend ainsi que les prolongements supérieurs (tentacules mar- ginaux) des loges nouvellement formées aient poussé avant leur prolongement buccal ou inférieur. L'avance, dans la croissance des tentacules marginaux, sur celle des tentacules buccaux, est une nouvelle cause qui intervient pour s'opposer à ce que ces appendices soient disposés d'après le même ordre dans l'une et l'autre couronne. Il est aussi à remarquer que le diamètre de la couronne marginale étant beaucoup plus grand que celui de la couronne buccale, les éléments de la première peuvent se répartir sur une surface plus large et d'une manière régulière, analogue à celle qu'on observe chez les Hexactinies. Tout autre est la sériation de la couronne buccale qui, bien que composée d'ap- pendices en nombre égal à ceux de la couronne marginale, est rela- tivement très étroite. Elle paraît formée de tentacules alternant deux par deux. Un couple plus grand alterne avec un couple plus petit, et les bases des tentacules, de l'un à l'autre couple, sont inverse- ment placées. Je me suis efforcé de trouver une relation entre la sériation des tentacules et la disposition des cloisons en quatroseptes. Cette rela- tion n'est pas possible à établir pour la couronne buccale, mais il en est autrement pour la marginale. C'est ainsi qu'aux tentacules mar- ginaux du premier rang correspondent de grands macroseptes ; aux » tentacules marginaux de second rang correspondent de petits ma- croseptes ; à des tentacules marginaux de troisième rang correspon- dent les grands microseptes, et enfin, à des tentacules marginaux de quatrième rang correspondent les petits microseptes. Ces rela- tions de la couronne marginale sont comparables à celles qu'on observe chez les Hexactinies. Chez ces dernières, en effet, les cycles sont d'autant plus éloignés ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 241 de l'orifice buccal que les cloisons qui leur correspondent sont plus petites. HISTOLOGIE. Ainsi que chez les autres Actinies, Ventoderme est principalement formé de cellules épithéliales à cils vibratiles ainsi que de cellules glandulaires qui se désagrègent très rapidement, même après fixa- tion par des réactifs énergiques. De même, la structure de Vectoderme et du mésoderme ne diffère pas essentiellement de celle qui a été décrite ' ; elle présente cependant quelques particularités remar- quables. Ces particularités se rapportent surtout aux némalocystes pour la première de ces deux couches, et à une disposition en feuillets longitudinaux pour la seconde. L'ectoderme est constitué par deux plans de tissus bien distincts. Le plus externe est composé de très longues cellules épithéliales à cils vibratiles, entremêlées de cellules glandulaires et de nombreux nématocystes à divers états de développement. Le plan interne {ec^, phot. 6, pi. IV) a l'apparence, en se servant d'un fort grossissement, d'un réseau très serré de fibrilles. Hertwig considère ces fibrilles comme nerveuses, aussi désigne-t-il ce plan sous le nom de Nervens- chicht. Heider le nomme Interbasalnetz. Au disque tentaculaire, l'ectoderme, le mésoderme et l'entoderme ont des épaisseurs à peu près égales ; mais dans la plus grande éten- due de la colonne, c'est-à-dire la partie qui, chez le Gérianthe vivant, est enfermée dans la gaine, l'ectoderme acquiert une épais- seur considérable. Dans cette région, son unique fonction paraît être de fournir les matériaux dont cette gaine est construite. Ainsi que cela a été dit plus haut, ces matériaux sont constitués par du mucus et des nématocystes qui, à ma connaissance, sont les plus volumineux qu'on puisse observer dans la classe de Cœlentérés. Leur longueur, mesurée sur ceux dont le fil est complètement ' Première partie. Histologie. ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. - 3« SÉHIE. ~ T. IIl. 1895. 16 242 L. FAUROT. déroulé, atteint juscju'à 5 millimètres. Le grand nombre de ces nématocystes et la dureté de leur enveloppe sont cause qu'il est impossible de les étudier sur des coupes ; ils fuient sous le rasoir du microtome, ainsi que des spicules d'Alcyonnaires, en décbirant les tissus. Par des dissociations, on peut les isoler et examiner leurs états divers de développement. Jourdan (1889), dans des recherches sur ce sujet, a vu, à la partie profonde de l'ectoderme, des cellules ovoïdes semblables, dit-il, à des éléments épithéliaux, et qu'il con- sidère comme le stade le plus jeune des cellules urticantes. A un état plus avancé, ces éléments prendraient une forme en raquette, leur protoplasma se diviserait en deux parties dictinctes, dont l'une se colorant en noir intense, sous rinfluence de l'acide osmique, serait destinée à devenir le futur nématocyste. Cet histologiste n'a pas poussé plus loin ses investigations. Ëri dissociant des fragments d'ectoderme macérés dans l'alcool faible, j'ai observé, soit enfermés dans des cellules en forme de ra- quette, soit accolés à des filaments anastomosés, de petits corps sphériques. Ces sphérules se rencontrent aussi à la base de longues cellules épithéliales semblables à celles qu'Hertwig a décrites dans l'ectoderme des tentacules sous le nom de Sinneszellen. Les sphé- rules sont opaques, de couleur brun foncé; elles mesurent de 2 à 5 millièmes de millimètre et conservent une forme régulière lors- qu'on comprime fortement la lamelle couvre-objet. Elles sont desti- nées, comme le démontre de nombreux états intermédiaires, à se transformer en nématocystes. En même temps que le volume de ces sphérules augmente, on voit, au tiers ou à la moitié de leur surface, une scissure peu profonde et étroite, qui se creuse et s'élargit de plus en plus, de sorte que les petits corps, d'abord sphériques, de- viennent réniformes et ensuite prennent une forme presque droite (pi. I, fig. 9). Arrivés à cet état, les futurs nématocystes deviennent moins opaques, et, à travers leur enveloppe, on distingue confusé- ment une sorte de peloton très embrouillé formé par un filament. De rectilignes, les nématocystes deviennent ellipsoïdes, avec une ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 243 extrémité plus renflée que l'autre, et leur eilVelopise, devenue très transparente, laisse voir, à l'aide d'un grossissettiënt de 900 diamè- tres, une dépression où adhère un des bouts du fihiinent. Cette dé- pression est située à l'extréLiiité là plus étt-oité de l'enveloppe. Les nériiatocystes sont maintenarit coiilplèteiîiciit formés sans qu'au- cune cellule épithéliale les ait accompagnés dans leurs transforma- tions, comme cela a été observé par Bedot (1886) sur les Vélelleset les Physalies. En raison du petit volume, de l'opacité et de la dureté de ces organes, il rie iii'a pas été possible d'observer le mode de formation des filaments. L'issue de ces filaments hors du nématocyste se fait saris rup- ture dé la paroi. Elle se produit par exlroversion de la dépression située à l'extrémité la pliis étroite de l'organe. 11 se produit ainsi une sorte de goulot étt-oit, et le nématocyste prend la forme d'une cornue dont le col s'allonge plus ou moins brusquement jusqu'à atteindre \ niilliiîiètres de longueur. Les parois des nématocystes et le fila- ment lui-même, d'opaques qu'ils étaient sont alors devenus aussi transparents que le verre qui supporte la préparation, et les contours n'en deviennerit visibles que pftr l'ombre qu'ils projettent. 11 résulte de ce qui précède, que le filament n'est qu'un prolongement des parois du nématocyste et qu'il est primitivement enfermé entre ces parois. Le second plan ec ^ (phot. 6, pi. IV) de l'ectoderme ne présente pas un développement plus considérable dans une région du corps que dans une autre. Pour Hertwig, c'est une couche nerveuse dans la- quelle il a observé des Cellules ganglionnaires. Dans l'épaisseur du péristome, il n'a pu décider, dit-il, si la Neruënschickt est munie d'Uiie plus grande abondance de ces cellules ganglionnaires, et si elle y représente une sorte d'organe central nerveux. Le mésoderme correspond à la tUiiique musculaire (J. tlaime). Celle de ses deux faces qui est recoiivertë par l'entoderrtie paraît à peu près lisse sur des coupes transversales. Sul* des coUpes longitudi- nales, cette même face présenté, au contraire, de même que chez 244 L. FAUROT. toutes les Actinies, des saillies circulaires. Ces saillies, qui ont été considérées soit comme une couche indépendante de muscles cir- culaires, soit comme le résultat de la contraction du mésoderme, existent constamment aussi bien sur les Cérianthes dont la colonne est contractée que sur ceux chez lesquels elle est épanouie. Elles font partie intime du mésoderme. Sur les coupes transversales faites au niveau du disque tentacu- laire, la face de ce mésoderme, qui est recouverte par l'ectoderme, paraît dentelée; cet aspect est dû à des prolongements mésodermi- ques longitudinaux et parallèles (phot. 6, pi. IV). Lorsque après une macération prolongée d'un fragment de colonne d'un Cérianthe, on est parvenu à en détacher complètement l'ectoderme, on distingue facilement à l'œil nu ces prolongements accolés comme les feuillets d'un livre et s'étendant de l'extrémité supérieure à l'extrémité abo- rale de l'Actinie. J. Haime les considérait comme des muscles lon- gitudinaux. Ces prolongements, d'après Hertwig, sont revêtus de fibrilles épithélio-musculaires courant parallèlement à leur surface et disposées en couche continue [Muskelslratum). Les fibrilles se- raient, en outre, en connexion histologique avec l'ectoderme. Sur la pholographie 6, on aperçoit assez nettement, surtout en s'aidant de la loupe, des stries partant des prolongements mésodermiques de la colonne et qui traversent les deux plans ec^ et ec^ de l'ectoderme. Ces stries, d'après Hertwig, réunissent les fibrilles musculaires du Muskelstratum aux cellules épithélialesectodermiques. C'est dans la région du corps qui, chez le Cérianthe, se con- tracte avec le plus d'énergie, c'est-à-dire dans la région moyenne et surtout inférieure de la colonne, que le mésoderme offre son maximum de développement (phot. 5, pi. IV). Ses prolongements parallèles s'y allongent en lames minces d'une largeur égale à en- viron la moitié de l'épaisseur totale de la paroi du corps. Près de l'extrémité inférieure, ces lames vont s'amincissant jusqu'à l'orifice aboral dépourvu de sphincter. Sur des coupes passant transversalement par l'extrémité supé- ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 245 Heure de la colonne, ou constate à l'endroit très limité oii naissent les cloisons (loge de mulliplication) que le mésoderme est d'une épaisseur beaucoup moins grande que dans les parties munies de cloisons plus anciennes. Cette particularité montre qu'en ce point il doit y avoir production nouvelle, non seuienient de cloisons, mais encore de paroi. Cloisons. — Au sujet de la disposition des cloisons, il a été dit que, dans chacun des quatroseptes,deux de ces organes, les macroseptes, étaient fertiles, et que deux autres, les microseptes, étaient stériles. Ces cloisons sont formées par des lames mésodermiques recouvertes par l'entoderme sur leurs deux faces. Les entéroïdes présentent des ramifications, des prolongements filamenteux, dont le nombre, pour chacun des quatroseptes, est, ainsi que je l'ai indiqué, d'au- tant moins grand que les cloisons sur lesquelles ils sont fixés ont des longueurs plus grandes'. Ni l'une ni l'autre des faces latérales des cloisons n'est pourvue, ainsi qu'on l'observe chez la plupart des Actiniaires, et comme le prétendent Herlwig et Boveri, de plis méso- dermiques longitudinaux ; aussi les cloisons ne sont-elles pas dis- posées par paires, à la manière, du moins, dont le dernier de ces naturalistes l'a figuré. Sur les cloisons fertiles, l'hermaphrodisme est la règle ; cepen- dant, dans les nombreux Cérianthes que j'ai examinés, il m'a paru y avoir prédominance, chez les uns de cellules-œufs, chez les autres de cellules à spermatozoïdes. DÉVELOPPEMENT. Dans la cavité générale d'un Cérianthe adulte, J. Haime trouva des larves à quatre tentacules. Ces quatre tentacules primaires n'étaient pas égaux; deux étaient plus gros et plus longs. Sur la ligne médiane, entre les deux tentacules plus grands, il a vu se dé- velopper un nouveau tentacule. « Ce tentacule impair, fait-il remar- ' Figures aO et 27. — U y a exception pour les di.'ux grandes kinies se lerniinanl à l'orifice arborai. 246 L. FAUROT. quer, qui succède immédiatement à la formation des quatre tenta- cules primaires, doit correspondre à la chambre comprise entre les deux longues lapies verticales dans les individus adultes. » Les em- bryons observés par J. Haime vécurent de dix à douze jours et attei- gnirent ! millimètre et demi de longueur. Le corps, entièrement cilié, était devenu très contractile. Ils nageaient librement à la ma- nière d'une Méduse, la bouche en arrière, au moyen d'allongements et de raccourcissements du tronc, et par le reploiement des tenta- cules. En septembre 1861, A. Agassiz trouva sur les côtes du Massa- chussets des Actinies nageantes qu'il rapporta au genre Arachnactis (Sars). Il en suivit le développement jusqu'à seize tentacules. Il constate que les jeunes, mesurant 3 millimètres (1/8 de pouce) res- sc.mblaient aux larves de Cérianthes figurées par J. Haime : «Il y a, dit-il, d'abord quatre tentacules, dont deux sont beaucoup plus grands que les autres, et entre les deux plus larges se forme le ten- tacule impair que J. llaime considère copime un tentacule de second cycle, ti^ndis que j'ai montré qu'il reste toujours impair chez les Arachnactis. » La fin de cette citation renferme une erreur, puisque, en réalité, ainsi qu'on peut le lire plus haut, J. Haime ad- met que le cinquième tentacule apparu est impair. Il considérait, il est vrai, ce tentacule comme devant être placé au second cycle ; niais cette situation, vraie ou fausse, n'a aucune importance dans la comparaison des larves à'Arachmetis avec celles du Gér}{inthe, A cette période du développement, les cycles ne peuvent êlre distincts, et Agassiz lui-même n'jndique pas auquel de ces cycles le tentacule impair appartient. Il n'est donc pas douteux qu'au moment oîi ils sont pourvus de cinq prolongements, les Arachnactis ne diffèrent pas, comme le pen- sait Agassiz, mais sont, au contraire, identiques aux larves des Çé- rianthes. Plus tard, en 1873*, dans une lettre adressée à M. le profes- seur de Lacaze-Duthiers, Agassiz ajoute de nouveaux détails au ' Archives de zoologie expérimentale et générale, 187 H. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 217 développement des Araclmactis : « De bonne heure, écrit-il, il se forme huit cloisons courtes... Les jeunes tentacules se forment tou- jours vers une des extrémités, à l'extrémité opposée de la bouche où se trouve le tentacule impair... » C. Vogt (1888) a publié sur les genres Arachnactis et Ceriantkus une étude comparative d'où il résulte que « tout se retrouve chez Arachnactis et Cerïanthus, avec cette seule modification que le nombre des tentacules est relativement peu considérable chez Arachnactis, tandis qu'il paraît illimité chez Cerianthus. » Il constate ([ue, chez l'un et l'autre, les cloisons et les tentacules ne se multi- plient qu'à un des coins de la bouche, en un point qu'il nomme loge de multiplication. « Les Arachnactis, dit-il plus loin, sont, en un mot, des Cérianthes nageants, » Il ne conclut pas cependant que les premiers soient les larves des seconds, et les considère, au contraire, comme deux espèces distinctes. Les plus grands exemplaires recueillis par G. Vogt avaient une lon- gueur de 4 centimètres, et comptaient douze tentacules marginaux et douze buccaux ; il les considère comme des a animaux adultes arrivés au terme de leur développement d. Il en donne comme prouves la présence de planules dans leur cavité cœlentérique, et l'existence, à leur extrémité inférieure, d'un pore semblable à celui des Cérianthes. Ces preuves sont loin d'être « irrécusables », suivant l'expression employée par C. Vogt, car il est possible que les larves des Cérianthes, ainsi que celles de beaucoup d'autres larves d'Acti- nies, puissent vivre longtemps dans la cavité maternelle et ingérer des planules. Je rappellerai, à ce propos, que les embryons décrits par J. Haime et par Jourdan furent trouvés dans l'intérieur du corps d'un Cérianthe. Quant à la présence d'un pore aboral, elle ne cons- titue pas une preuve d'un état adulte, mais une particularité dia- gnostique très importante, qui manquait aux descriptions anté- rieures des Arachnactis, pour établir leur identité avec le Cérianthe. C. Vogt néglige de dire si les cloisons de ses Arachnactis étaient pourvues de cellules sexuelles, et, jusqu'à présent, aucun naturaliste 248 L. FAUROT. n'est venu combler cette lacune. Jamais, dit encore C. Vogt, dans la Méditerranée où les Gérianthes abondent, il n'a été trouvé d'A7'achnactis. On ne peut douter, cependant, que les observations de J. Haime, faites aux Baléares, ne se rapportent à des embryons qui, sauf une différence de taille, ressemblent complètement aux Araclinactis décrits par Agassiz, et à ceux qui, ainsi que nous le verrons plus loin, ont été décrits par Mac-Murrich et Van Beneden^ A Naples, d'après S. Bianco, il n'a pas été possible de confirmer l'assertion de Schmidtheim, d'après laquelle les Gérianthes se mul- tiplient abondamment en automne dans l'aquarium de la station zoologique. Ni à Banyuls ni à Arcachon, où ces animaux sont très abondants, je n'ai observé de larves dans leur cavité viscérale. 11 est certain cependant, d'après les observations de J. Haime, que les Gérianthes, dans le cours de leur développement, mènent une vie libre plus ou moins prolongée, comme cela a été d'ailleurs constaté chez beaucoup d'Actinies. De ce qui précède, il me semble résulter que les caractères qui ont servi à établir le genre Arachnactis ne peuvent être attribués à une Actinie adulte ayant subi tout son développement, et que ces caractères sont semblables à ceux des larves de Gérianthes. Je vais maintenant exposer brièvement les recherches récentes qui ont été entreprises sur le développement des Arachnactis; ces recherches complètent celles de J. Haime et d'Agassiz. En faisant connaître l'ordre d'apparition des premières cloisons. Van Beneden et Mac- Murrich ont montré que cet ordre, pour les huit premières de ces cloisons, est le même que celui qui a été observé chez un certain nombre d'Hexactinies. Je rappellerai ensuite la disposition particu- lière des huit cloisons ventrales des Gérianthes, telle que je l'ai exposée dans la partie anatomique de ce travail, et après l'avoir » FoRBES, d'après Gosse {Sea-anemones, p. 226) aurait trouvé en abondance, dans les mers de Grèce, une espèce du genre Arachnactis. Un peu pins haut, même page, Gosse se demande si l'Araclinaclis n'est pas un Cériantlie non encore arrivé à l'état adulte? ÉTUDES SUR LES ACTINFES. 249 comparée avec la disposition des cloisons correspondantes des Ara- c/inactis, il apparaîtra très vraisemblable que ces derniers sont des larves libres et nageantes des Gériantbes. Presque à la même époque, Idans le cours de février 1891, E. Van Beneden et Mac-Murrich publièrent leurs observations sur le déve- loppement de très jeunes larves d'Arachnaclis (iso-i). Le premier les avait reçues d'Angleterre conservées dans l'alcool, c Elles ros- Fig. 29. — Arachnactis brachiolala. Coupe transversale, d'après Mac-Murrich. semblaient étonnamment, dit Van Beneden, aux plus peiils Arachnac- tis brachiolata décrits par Agassiz. » Le second naturaliste les aurait observées vivantes sur les côtes d'Amérique, et les rapporte, sans hésiter, à la même espèce que Van Beneden. Cette espèce, ainsi que je l'ai démontré plus haut, n'a point de caractères qui la distinguent des embryons de Gérianthes observés par J. Haime. Les deux natu- ralistes précédents réussirent, chacun de leur côté, à l'aide de coupes transversales et en se basant sur les grandeurs relatives des cloisons de ces larves, à déterminer leur ordre d'apparition. On voit, sur la figure 29 empruntée au travail de Mac-Murrich, que toutes ces cloisons, au nombre de dix, auraient apparu par couple, une à gauche 2S0 L. FAUHOT. et l'autre à droite du côté ventral ^ Les deux derniers couples IV-IV et V-V ont apparu l'un près de l'autre au côté dorsal, et l'on peut déduire des observations d'Agassiz et de G. Vogt, que tous les ten- tacules et toutes les cloisons à naître se placeront à leur suite, tou- jours de ce même côté dorsal et entre les deux cloisons du dernier couple V-V. Les trois premiers couples, au contraire, ont apparu, par rapport à l'extrémité ventrale correspondant au tentacule impair, dans l'ordre suivant: Ill-lll, I-I, II-II. Ainsi que le constate Mac-Murrich, cet ordre d'apparition est le même que celui qui a été observé chez les Hexactinies. Si Ton considère, en outre, que le quatrième couple de cloisons IV-IV de ces Hexactinies apparaît, comme celui des Arachnactis ^, au côté dorsal du couple II-II, on pourra conclure que les huit premières cloisons se sont formées, chez les unes et chez les autres, dans un ordre identique. Cette assertion est pleinement confirmée par Van Beneden ^ et les nombreuses reproductions de coupes qui font suite à son travail sont plus probantes que celles de Mac-Murrich. En effet, ce dernier, dans le but de démontrer que les cloisons III-III, limitant la loge impaire ventrale, sont d'un âge plus récent que le couple II-II, s'appuie sur ce que les premières seraient encore dépourvues d'entéroïdes, alors que les secondes en possè- ' De môme que chez le Cérianllie, le côté ventral correspond, d'après ces natu- ralistes, à la Injj'e et au tentacule inipair, de même le côté dorsal correspond ii la loge de multiplication, c'est-à-dire l'intervalle entre les deux plus jeunes tentacules. Sur la figure 39, les chiffres indiquent l'ordre d'apparition des cloisons. 2 BovERi (1889) a décrit comme Arachnactis des larves ayant huit tentacules mar- ginaux, deux tentacules labiaux et point de tentacule impair. Les parois du corps de ces larves seraient pourvues de fibrilles musculaires longitudinales. D'après Van Beneden, il semblerait que Boveri n'est pas certain que ces larves soient des Arach- nactis. 3 Le texte du zoologiste belge, p. 210, concorde avec ses planches. Aussi ne s'expliqqe-t-on pas que, page 2U9, le môme auteur ail écrit : « Si on désigne par I les cloisons directives, par II, III, IV, V et VI les autres paires, ces numéros d'ordre indiquant leur degré d'écartement de la paire directrice, l'ordre de formation chez les Hexactinies est 111, V, I, VI, II, IV, tandis que chez les Cérianlhes l'ordre de succession est au contraire II, III, I, IV, V, VI. » ÉTUDES SUB LES ACTINIES. 251 dent. Or, j'ai montré que cette même paire III-III, cbezle CéHantbe, se distingue de toutes les autres cloisons par ses bords libres, qui, toujours, sur les petits Gérianthes de même que sur les plu3 grands, sont privés d'entéroïdes. L'âge n'a donc, chez le Gérianthe, aucun rapport avec l'absence de ces organes sur la paire ventrale. Van Beneden, au contraire, ne figure pas d'entéroïdes sur les cloisons de cette paire, et il en démontre l'ordre d'apparition, en se basant sur leurs longueurs relatives. J'ai montré que les longueurs et la disposition des cinq premiers tentacules sont semblables chez V Arachnactis et les larves des Gé- rianthes. Il me reste maintenant à faire connaître que, chez ces deux Actiniaires, le développement des cloisons se fait en à&\x% phases tout à fait comparables. Première phase. — Chez le Gérianthe, les si.x cloisons ventrales teintées en rouge dans la figure 27 et dans la figure 26 sont placées en face de la loge de multiplication; elles sont donc les premières apparues. Leurs longueurs relatives correspondent exactement h celles des cloisons semblabiement situées chez V Arachnactis, et qui, ainsi qu'on l'a vu plus haut, apparaissent aussi en premier lieu. Leqr ordre d'apparition est, chez V Arachnactis, en rapport avec leurs longueurs différentes; il doit donc en être de même chez le Gérian- the, c'est pourquoi elles soûl désignées, dans l'une et l'autre Actinie, par les mêmes chiffres, Les très grandes cloisons [-1 sont donc apparues les premières, les cloisons II-TI les secondes, les cloi- sons IlI-III les troisièmes. Deuxième phase. — Chez les Arachnactis, toutes les cloisons qui se forment après les six primitives apparaissent successivement les unes à la suite des autres au côté dorsal, dans la loge de multipli- cation, et s'ajoutent par couple, une à gauche, l'autre à droite, aux plus anciennes placées du côté ventral. Chez les Gérianthes il paraît en être de même, car les cloisons les moins développées sont toujours placées au côté dorsal. Je me suis assuré, par l'examen de coupes transversales faites sur un grand 252 L. FAUROT. nombre d'individus, que ces plus jeunes cloisons sont de grandeurs différentes, sans que ces grandeurs soient cependant en rapport avec leur ordre d'apparition. J'ai observé la même particularité pour toutes les cloisons apparues après les six primitives, en les consi- dérant isolément, non groupées en quatroseptes. C'est là un fait paraissant en contradiction avec ce qui se passe dans la première phase, mais qui ne me semble pas cependant s'opposer à la compa- raison que j'établis entre V Aracknactis et le Cérianthe. En décrivant les quatroseptes, j'ai montré, en effet, que leurs longueurs allaient graduellement en décroissant, du côté ventral au côté dorsal (loge de multiplication). Il en résulte que, si les longueurs de chacune de ces cloisons ne sont pas en rapport avec leur ordre successif d'ap- parition, les quatroseptes présentent, au contraire, des dimensions exactement en rapport avec cet ordre. Chez les Arachriactis , on n'a pas encore observé, entre les lon- gueurs des cloisons apparues durant la seconde phase, des diffé- rences comparables à celles qui sont propres aux éléments des quatroseptes, mais les plus âgés des Arachnactis qui aient été examinés, ceux que G. Vogt considère comme adultes, n'avaient que douze tentacules. (jC chiffre correspond à un nombre trop res- treint de cloisons, pour que la disposition en quatroseptes y ait été reconnaissable. Chez tous les Cérianthes adultes, il existe d'ailleurs, au voisinage de la loge de multiplication, un certain nombre de jeunes cloisons qui, tout en mesurant des longueurs différentes, ne sont pas encore ordonnées en quatroseptes II faut sans doute un temps assez long pour que chaque cloison ait atteint sa taille définitive. Dans la note (1892) à laquelle j'ai déjà fait allusion au commen- cement de ce travail, j'ai mentionné deux particularités assez im- portantes pour mériter d'être reproduites ici. Elles ont rapport à des irrégularités de disposition des cloisons apparues durant cette seconde phase. i° Les nouvelles cloisons peuvent être produites en plus grand nombre d'un côté ou de l'autre du Cérianthe. C'est ainsi que, sur ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 233 un individu provenant du laboratoire de HoscofF, il existait d'un côté : cinquante-trois cloisons, tandis que, de l'autre, il y en avait quatre- vingts. Les nombreux Cérianthes qui m'ont été fournis par la sta- tion zoologique d'Arcachon étaient moins âgés; aussi les différences de nombre entre les deux côtés étaient-elles moins considérables. Deux de ces Cérianthes seulement avaient un quatrosepte de plus à gauche qu'à droite. 2° La disposition en quatroseptes d'un côté est indépendante de celle de l'autre côté. Les différences que je viens de mentionner dans le nombre des cloisons en sont déjà une preuve, mais, en outre, j'ai constaté, sur un spécimen, une anomalie dans la distribution des éléments de tous les quatroseptes du côté gauche seulement. Ces quatroseptes anormaux y étaient au nombre de onze (quarante- quatre cloisons) ; il étaient ainsi constitués : à un petit macrosepte faisait suite un grand microsepte, et à un petit macrosepte fait suite un petit microsepte. Dans la même note, j'ai signalé les affinités qui existent entre les Cérianthes et les Zoanthides, et celles beaucoup moins nettes qu'on peut lui trouver avec les Coralliaires rugueux {Tetracorallia). La note se terminait par la supposition d'un premier stade larvaire durant lequel le Gérianthe est pourvu d'un très petit nombre de cloisons. L'existence de ce stade paraîtra très vraisemblable après les consi- dérations que j'ai émises, en comparant la disposition des cloisons primitives de VAraclinactis avec les cloisons ventrales du Gérianthe. LISTE DES OUVRAGES CITÉS. 1851. HoLLARD, Monographie du genre Actinia {Annales des sciences naturelles, t. XV, 3« série). 1H54. Haime (J.), Mémoire sur le Gérianthe {Annales des sciences naturelles, 4« série, t. I). 1855. Gosse, Peachia hastata {Transactions of Linnean Soc. of London, p. 267). 1856. Sars, Koren, Danielssen, Fauna littoralis Norwegias. 185Î. MiLNE Edwards et Haime (J.), Histoire naturelle des Coralliaires. 1860. Gosse, Actinologia britannica. Sea-anemones. 2-)4 L. FAUiiOT. 1862. Agassiz (A.), On Arachttactis bhichiolàta [Journ. of Boston Sot. hat. Hist., vol. VII). * SG'ï-'l 8'ï'l . Verill, Rcview of the Corah andPolyps of the tvest coast of Ame- rica [Transactions Connect. Acad.). 18'tfl . 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Fischer (P.), Nouvelle contribution à Pactinologie française {Société lin- néenne de Bordeavx). — Mac-Murrich (J.-Pl.), Cerianthus americanus (Journ. o/"ifor;)/i., toI. IV). — Van Beiseden (E.), Une larve voisine de la larve de Semper {Archives de biologie de Van Beneden et Van Bambecke, t. X). 1891. Mac-Murrich (J.-Pl.), Contributions on the jnorphology of the A.ciinozoa (Journ. of Morphology, vol. V). — Cerfontaine, Note sur le développement du Cereactis aurantiaca {Bulle- tin de l'Académie royale des sciences de Belgique). — Van Beneden (E.), Recherches sur le développement des Arachnactis {Bul- letin de r Académie royale des sciences de Belgique). 1892. Faurot (L.), Note sur le Cerianthus membranaceus {Mémoire de la Société de zoologie de France, t. IV). H.XPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE I. FiG. 1. Coupe transversale de sept cloisons à! Âureliana augusta. 2. Partie d'une coupe transversale de tentacule de Chitonactis coronata ']Q\me . 3. Coupe transversale d'une cloison d' Edwardsia Beauteinpsi {Gv. 30 fois), au-dessous de la portion génitale ; un, faisceau unilatéral de feuillets musculaires; pr, pr, faisceau paiiélal de feuillets musculaires; en, entéroïde. 4. Coupe transversale de cloison d'Eloactis Mazeli, mêmes lettres que figure 3 (Gr. 30 fois). 5. Face loculaire d'une cloison complète d'Adatnsia palliala; or, orifice dans la cloison ; sph, sphincter; pr. faisceau pariétal de feuillets muscu- laires; un, faisceau unilatéral ; en, entéroïde ; a, acontium. 6. Face interloculaire d'une cloison incomplète de Sagarlia beiUs,pb, muscle pariéto-basilaire. 7. Lambeau de colonne d'une Peachia hastata. Structure lamelleuse de la couche moyenne. 8. Fibrilles détachées du faisceau unilatéral d'une cloisun de Peachia. (Gr. 20 fois). 9. Granulation et corpuscules de l'ectoderme chez le Cérianthe. 10. Cellules glandulaires de l'ectoderme de la colonne du Peachia. H. Cellules glandulaires îi cil unique. Très nombreuses dans l'entoderme des entéroïdes. Peachia hastata. 12. Cellules de l'entoderme de l'extrémité inférieure de la rainure œsopha- gienne du Peachia. La partie renflée de ces cellules étant très fortement colorée par le picro-carmin ne laissait distinguer ni granulations ni noyaux. ETUDES SUR LES ACTINIES. 257 FiG. 13. a, b, c, cellules épithéliales de rectoderme, mesurant parfois un demi- millimètre de longueur. 14. Nt'matocystes des tentacules, forme rare. Peachia haslata. 15. Nématocystes de l'ectoderme des tentacules de la même Actinie. La forme a paraît la plus fréquente; longueur : un millimètre. PLANCHE II. FiG. i. Planula de Peachia hastata. Au point où doit se former la bouche, la surface extérieure ciliée présente un aplatissement auquel correspond une partie plus sombre de la masse cellulaire interne. (Gr. 60 fois). 2. La bouche est formée ainsi que la cavité du corps. 3. Le même embryon, son péristome extroversé. 4. Embryon nageant d'Actinie. Les deux entéroïdes des deux premières cloisons contractées sont visibles par transparence; ils sont difficiles à observer en raison de la progression et de la rotation rapides des embryons. Lorsque ceux-ci se contractent fortement, les deux entéroïdes font saillie à l'extérieur par la bouche. 3. Embryon qui, étant resté immobile pendant vingt-quatre à trente-six heures, fixé par son extrémité aborale, s'est détaché et de nouveau s'est remis à nager. Il a conservé sa houppe de cils. L'embryon étant com- plètement épanoui, les deux premiers entéroïdes ne sont pas rétractés comme dans la figure précédente. 6. Le même fixé et contracté. Sa surface externe est creusée de huit sillons longitudinaux. 7. Disque tentacuiaire au stade 8. Deux tentacules sont un peu plus petits que les six autres. 8. Disque tentacuiaire au stade 12. Quatre rayons péristomiaux sont plus petits que les huit autres. Six tentacules sont un peu plus petits que les six autres. 9. Coupe transversale d'un embryon fixé dCAdamsia falliata. Les plissements des cloisons sont orientés comme ceux des huit cloisons de l'Edwardsie (fig. 2, pi. VI). 10 . Coupe transversale d'un embryon de Tealia felina. Les huit cloisons fixées à la paroi du corps et à l'œsophage sont homologues aux huit cloisons de la figure 9. Les couples 5,5 et 6,6, un peu moins larges, correspondent par leur situation avec ceux qui, chez VActinia mesembryanlhemum, apparaissent le cinquième et le sixième pour former le stade 12 (D, côté dorsal; V, côté ventral). 11. Coupe transversale au-dessous de la région œsophagienne d'un embryon A" Adamsia palliala k huit tentacules. L'endoderme n'est pas encore distinct. 12. Coupe de planula d'Adamsia palliata (Gr. 80 fois). AtlCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — S^ SÉRIE. -- T. III. IS'JiJ. 17 258 L. FAUROT. PLANCHE 111. Phot. 1. Sagartia bellis. Portion moyenne d'une cloison rendue transparente pa;' l'enlèvement au pinceau des cellules épithéliales qui recouvraient ses deux faces. Le faisceau unilatéral apparaît sous forme de fibres longi- tudinales. La séparation, faite intentionnellement (en haut et à droite), de l'extrémité supérieure d'un certain nombre de ces fibres d'avec la lame sous-jacente montre qu'elles y adhèrent faiblement. Agrand. 2 fois. i. Halcampa chrysanlhellum. Coupe transversale du faisceau unilatéral d'une cloison. Les feuillets de ce faisceau sont enveloppés d'une gangue de cellules entodermales. Agrand. 30 fois. 3, Peachia hastaia. Coupe longitudinale faite parallèlement au côté locu- laire d'une cloison. (Voir photographie S, planclie IX, coupe trans- versale d'une cloison semblable), .\grand. 60 fois. 4. Sagartia bellis. Coupe transversale de l'extrémité inférieure des cloisons chez une Actinie très épanouie. Agrand. 15 fois. 0. Peachia hastaia. Lamelle isolée par dissociation de l'un des feuillets composant les faisceaux unilatéraux, .agrand. 80 fois. 6. Cerianthus membranaceus . Lamelle isolée par dissociation de l'un des feuillets du mésoderme de la colonne. Agrand. 80 fois. PL.ANCHli IV. Phot. 1. Tealia felina. niés, mésoderme de la paroi; en, entoderme. Coupe transversale du sphincter annulaire et longitudinale de la paroi du corps. Les saillies circulaires de celte paroi ont l'aspect de petites denliculations irrégulières. Agrand. 60 fois. 2. Chitonactis coronata. Coupe longitudinale d'une portion du sphincter et de l'attache d'une cloison à la paroi du corps, a, paroi (mésoderme); b, orifices intermédiaires entre la cloison et la paroi; c, cloison. Agrand. 80 fois. 3. Âdamsia 'palliaiu. Coupe longitudinale d'une portion du sphincter, a, paroi. Agrand. 80 fois. 4. Sagartia parasitica. Coupe longitudinale dune portion du sphincter, a, paroi. Agrand. 80 fois. '6. Cerianthus membranaceus. Coupe transversale des lames musculaires de la colonne, .'^gr.ind. 60 fois. 6. Coupe transversale passant par le disque Icntaculaire et par la paroi du corps chez la même Actinie ; quatre cloisons séparent ces deux parties. Le disque est en haut et la paroi de la colonne en bas. ec', cellules épithéliales de l'ectoderme; ec-, couche profonde de l'ectoderme; m, mésoderme avec ses prolongements lamelleiix; en, entoderme. Si les prolongements mésodermaux du disque sont plus longs que ceux de la colonne, c'est que la coupe des premiers est oblique transversa- lement. Cette obliquité est duc à la forme en entonnoir du disque. Agrand. 70 fois. ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 289 PLANCHE V. PiiOT. 1. Eiuaclis Mazeli. Cliez cette Actinie les tentacules non rétractiles sont le plus souvent inclinés à angle droit sur la colonne, de sorte que cette coupe faite suivant la longueur de ces appendices se trouve être transversale pour la paroi du corps, les cloisons et l'œsophage. Au bas de la coupe, on voit une des deux gouttières commissurales œso- phagiennes et les deux cloisons qui y sont fixées. En haut et sur le côté, un des deux tentacules commissuraux (chez i'Eloactis, parexcep. tion, les tentacules commissuraux sont, de même que tous les locu- laires, plus petits que les interloculaires) montre, sur la face interne de sa paroi, des dentelures qui sont les sections des saillies circulaires. Le grand tentacule (interloculaire) situé en haut de la photographie a été coupé tangentiellement à sa paroi; aussi les saillies circulaires apparaissent-elles sous forme de tractus transversaux. Les plis longi- tudinaux du côté ectodermal de la même paroi ont l'aspect de tractus longitudinaux. Agrand. 20 fois. -2. Eloactis Mazeli. Sur le côté, gouttière œsophagienne formée de trois couches, quatre cloisons déformées par la contraction. 3. Peachia hastata. Coupe longitudinale de rattache d'une cloison à la paroi du corps. 4. Peachia haslata. Coupe transversale de la colonne passant par un pli de contraction. La face entodermale correspond au côté concave lisse. Les cellules épithéliales de l'ectoderme revêtent les deux côtés du pli de contraction. Agrand. 35 fois, b. Peachia hastata. Coupe transversale des trois couches de la rainure œsophagienne. La couche la plus large est l'entoderme. Agrand. 40 fois. 6. Peachia hastata. Coupe longitudinale faite radialement. Mésoderme de la colonne. A la face entodermale, les lames parallèles sont plissées en saillies irrégulières et ramifiées. Ces saillies circulaires existent aussi bien sur les Actinies épanouies que sur les Actinies contractées. Agrand. 35 fois. PLANCHE VI. Phot. 1. Ëdwarsia Beautempsi. Coupe transversale au niveau de l'extrémité infé- rieure de l'œsophage. Les cloisons de la paire commissurale dorsale sont les premières dont les bords internes deviennent libres. Les entéroïdes sont formés par des prolongements de l'œsophage. Agrand. 12 fois. 2. Edwardsia Beautempsi. Coupe transversale faite un peu plus bas que la précédente. La rainure ventrale se prolonge plus profondément dans la cavité du corps que la rainure dorsale. Agrand. 12 fois. 3. Edwardsia Beautempsi. Coupe faite près de l'extrémité inférieure de la colonne chez un individu très allongé par l'épanouissement. Les quatre 260 L. FAUROT. larges cloisons latérales sont celles dont les entéroi'des sont les plus longs. Agrand. 12 fois. PnoT. t,. Cerianthits membranaceus. Coupe transversale de la colonne et de l'œso- phage. En bas, large loge commissurale ventrale. En haut, les cloisons sont en un point plus étroites et plus serrées. C'est en ce point que les nouvelles cloisons apparaissent. Agrand. 20 l'ois, ii. Edwardsia Adenensis (n. sp.). Coupe transversale de cloisons dans leur portion génitale. (Voir fig. s, texte). Agrand. 30 fois. 6. Peachia hastata. Ovule recouvert de soies. L'opacité est due à Taction de l'acide osmique. A l'état frais, on observe facilement les gra- nulations vitellineSj la vésicule germinative et la tache germinativc. Agrand. 180 fois. PLANCHE VII. PiiOT. 1 et 2. Tealia felina. Coupes transversales d'un embryon fixé. — 1, immé- diatement au-dessous du disque tenlaculaire. — 2, au milieu de la région œsophagienne; 16 cloisons sont plus larges, 4 sont plus étroites. Agrand. 25 fois. 3. Tealia felina, même embryon. Coupe transversale au niveau de l'extré- mité inférieure de l'œsophage. (Voir fig. 10, pi. II). Agrand. 25 fois. 4. Tealia felina, même embryon. Coupe transversale au-dessous de l'œso- phage; 20 cloisons plus grandes, 4 plus petites. Agrand. 25 fois. 0. Peachia hastata. Orifice d'une des douze larges cloisons. Face interlocu- laire. Par transparence, on voit le faisceau unilatéral. Agrand. 15 fois. 6. Edwardsia Adenensis (n. sp.). Coupe transversale des cloisons à leur extrémité inférieure. (Voir photographie 5, pi. VI, et fig. 0, texte). PLANCHE VIII. Halcampa chrysanlhellum. Coupes transversales. Comparer avec la planche XI. Agrandissement, 12 à 15 fois. PiiOT. 1. Tiers inférieur de la région œsophagienne. 12 cloisons primitives fixées à l'œsophage et 12 secondaires très étroites. 2 et 3. Au-dessous de l'œsophage, tiers moyen. Les cloisons 5,5 et 6,6 deviennent plus étroites. 4 et 5. Tiers inférieur. Les cloisons 5,5 et 6,6 sont dépourvues d'entéroïdes. Les cloisons 4,4 et 3,3 deviennent à leur tour plus étroites et ne sont plus bordées d'entéroïdes. 6. Extrémité inférieure de la colonne. Les cloisons 2,2, qui, déjà à un niveau plus élevé (photographie 5), avaient diminué de largeur, sont dépourvues d'entéroïdes. Des douze cloisons primitives, le couple 1,1 est seul qui, à ce niveau, soit muni d'entéroïdes. Dans ces photographies, on voit le faisceau unilatéral de chacune des douze cloisons primitives diminuer de volume; en même temps, les cloisons elles-mêmes diminuent de largeur. Les douze petites cloi- sons, placées deu,\ par deux dans chacune des six iuterloges primi- ÉTUDES SUR LES ACTINIES. 261 tives, conservent au contraire des largeurs égales dans toute leur étendue. PLANCHE IX. Peachia hasiata. Coupes transversales. Comparer avec la planche XII. PnoT. 1. Extrémité supérieure de la région œsophagienne. L'œsophage n'est pas central. Douze larges cloisons et huit très étroites; à l'œil nu, la cavité du sillon commissural paraît divisée en deux parties, mais l'examen à la loupe montre que cette apparence est due ?i l'accolement des côtés latéraux de l'organe. Agrand. 4 fois. i . .'\u-dessous de l'œsophage. 3 . Extrémité inférieure de la région génitale. Paire commissurale dorsale entre deux cloisons restées fertiles. Cette paire, en devenant stérile, a diminué de largeur. Agrand. 50 fois. 4. Tiers inférieur de la colonne. Deux des douze larges cloisons : les cora- missurales dorsales (c'est-à-dire la paire figurée photographie 3), sont, à ce niveau, réduites aux mêmes dimensions que les huit cloisons étroites situées dans les interloges médianes et ventrales. Six seule- ment sont munies d'un long entéroïde. 5. Extrémité inférieure. 6. Extrémité inférieure à un niveau plus bas que celui qui est représenté par la photographie 5. L'ouverture centrale n'est pas un orifice, mais résulte de la coupe de l'extrémité basale de la colonne introversée dans la cavité du corps. PLANCHE X. Photographies 1, 2, 3, 4 et 5. Palythoa suica/a;^ Agrandissement, 40 à 50 fois. Phot. 1. Extrémité supérieure d'un polype rétracté à 22 cloisons. Les 11 larges intervalles correspondent aux loges, les 11 plus étroits aux interloges. 2. Coupe transversale du même polype passant par les tentacules intro- versés. 3. Même polype à 22 cloisons (deux de plus d'un côté que de Tautre). Coupe passant par le milieu de la région œsophagienne. Huit cloisons sont restées larges. 4. Extrémité inférieure de la région œsophagienne, six cloisons sont restées larges. 0. Coupe près de la base. Deux cloisons seulement ont, ii ce niveau, conservé leurs dimensions. Photographies 6, 7 et S. Zoantlius Perii (Audoin). Agrandissement, 16 fois. 6. Région œsophagienne. Du côté ventral, 10 étroites cloisons. 7. Au-dessous de l'œsophage, du même côté ventral, le nombre des cloisons plus étroites a augmenté de deux. 8. A un niveau plus bas et toujours du côté ventral, le nombre des cloisons plus étroites a augmenté de quatre. 262 L. FAUROT. PLANCHE XI. Halcampa chrysanlhellum ouvert loiigitudinalement entre les deux cloisons commis- surales dorsales. PLANCHE XII. » Peachia hasiaia ouvert longitiidinalement entre les deux cloisons commissurales dorsales. OBSERVATIONS MŒUfiS DU GOBIUS RUTHENSPARRI FRÉDÉRIC GUITEL Docteur es sciences, préparateur iï la Sorbonne (Laboratoire de Roscoiï). AVANT-PROPOS. Lgs mœurs curieuses du Gobius nnnulus, que j'ai eu l'occasion d'observer au Laboratoire de Roscoff pendant l'été de 1891 (-if), m'ont donné la pensée d'étudier celles du Gobius Ruthensparri, Euphrasén. Cette jolie petite espèce est très bien caractérisée au point de vue zoologique, ce qui m'a dispensé de reprendre sa description ; mais j'ai cru devoir énumérer ses caractères sexuels, car quelques-uns d'entre eux semblent avoir com.plètement échappé aux auteurs qui m'ont précédé. J'ai fait suivre l'exposé de mes observations d'un court chapitre consacré à l'analyse de quelques travaux qui m'avaient échappé lors de la publication de mon mémoire sur le Gobius minutus, ou qui ont paru depuis la publication de ce mémoire. Mes recherches ont été faites au Laboratoire de Roscoff pendant le mois d'août 1894. On verra plus loin qu'elles n'auraient pu être entreprises sans la parfaite installation de l'aquarium de la station. Je suis heureux d'adresser ici à mon maître illustre, M. de Lacaze- Duthiers, mes plus vifs remerciements, car c'est à lui que je dois d'avoir pu mener ù bonne fin les quelques observations qui consti- tuent le présent petit travail. 2G4 FRÉDÉRIC GUITRL. I DIFFÉRENCES SEXUELLES. Elles sont du môme ordre que celles qui permettent de distinguer les sexes chez le Gobius minutus, et se rapportent à la papille uro- génitale, aux nageoires impaires et au système de coloration. Papille uro-génitale. — Chez le mâle, la papille uro -génitale est longue, conique, très légèrement tronquée à son extrémité libre. Dans beaucoup d'individus, elle atteint la base du premier rayon de la nageoire anale ; chez d'autres, elle se termine à une distance de ce rayon, toujours plus petite que la moitié de sa propre longueur. Chez la femelle, au contraire, la papille uro-génitale est courte et cylindrique ; son extrémité libre est séparée de la base du premier rayon de l'anale par une distance égale à sa propre longueur, et cette extrémité esl percée d'un large orifice dont la lèvre supérieure est légèrement plus longue que l'inférieure. Seconde nageoire do?'sale. — Dans le mâle, les rayons articulés de la deuxième dorsale, surtout les postérieurs, augmentent progressi- vement de longueur d'avant en arrière, de telle sorte que le dernier d'entre eux est en général notablement plus long que le premier. Dans la femelle, il n'en est pas de même. Si l'on fait abstraction du premier rayon qui, comme chez le mâle, est simple et plus court que le second, on peut dire que, chez presque tous les individus, les rayons articulés de la seconde dorsale diminuent progressivement de longueur d'avant en arrière, le dernier étant beaucoup plus court que le premier. Il résulte de ces dispositions- un caractère permettant de distin- guer facilement les deux sexes du Gobius Ruthensparri , même sur des individus conservés dans l'alcool. Cependant, les proportions que je viens d'indiquer ne sont pas d'une constance absolue. Ainsi, on rencontre des mâles chez les- quels tous les rayons de la seconde dorsale, postérieurs au premier, sont d'égale longueur. Le même fait se produit, mais beaucoup plus iMOEURS DU GOBIUS RUTHENSPARRI. 26S rarement, chez les femelles. Il en résulte cependant que certaines femelles ne pourraient être facilement distinguées de certains mâles par la seule comparaison des nageoires dorsales postérieures. Nageoire anale. — Chez le mâle, les rayons articulés de l'anale sont tous sensiblement égaux entre eux, ou bien augmentent un peu de longueur d'avant en arrière, tandis que chez \a femelle, ils dimi- nuent progressivement dans le môme sens, comme ceux de sa deuxième dorsale. Les exceptions dont j'ai parlé, à propos de la deuxième dorsale, ont lieu aussi pour l'anale, c'est-à-dire qu'on rencontre des individus dans lesquels cette nageoire a tous ses rayons articulés sensiblement égaux. Coloration chez le môle. — La moitié supérieure de la (/'te est d'un gris pâle lavé de rose quand l'animal est calme ; elle devient noire lorsqu'il est surexcité. Cette coloration de la tête est nettement limitée en arrière, au niveau de l'insertion des deux pectorales. La moitié supérieure du co?'ps est marbrée de noir et de gris très pâle. Sur la ligne médiane dorsale se trouvent cinq taches en forme de selle, dont la grandeur décroît d'avant en arrière. La première est située à la hauteur du milieu de la base de la première dorsale, la seconde au commencement de la deuxième dorsale, la troisième vers la fin de cette nageoire, la quatrième entre la deuxième dorsale et la caudale, et la cinquième au niveau des premiers rayons de cette dernière. Ces taches ont à peu près la même teinte que le dessus de la tête et portent un fin sablé d'or. On ne les distingue bien que lorsque l'animal est calme, car lorsqu'il est surexcité, les chromatophores noirs qu'elles renferment se dilatent, les rendent plus foncées, et, par suite, moins différentes du fonds sur lequel elles reposent. La moitié inférieure de la tête et du corps est uniformément blanche. La hmite qui sépare la moitié supérieure colorée du corps de sa 266 FKÉDÉUIC GUITEL. moitié inférieure incolore est marquée par une rangée horizontale de petites taches bleues à éclat métallique^ qui sont surtout très brillantes lorsque l'animal est excité. Un peu en arrière de l'insertion du rayon supérieur de la pecto- rale se trouve une large tache noire, arrondie ou légèrement allongée dans le sens vertical. Cette tache, située au-dessous des deuxième, troisième et quatrième rayons de la première dorsale, occupe l'in- tervalle qui sépare la deuxième et la troisième tache bleue de la rangée dont il a été parlé plus haut. Une autre tache noire, de même grandeur, se trouve sur le tronçon de la queue, à la naissance de la caudale. Comme la première, elle est située sur la même ligne que les taches bleues et un peu en ar- rière de la dernière de ces taches. Quelques taches bleues, plus petites et plus rares que celles de la ligne latérale, forment une rangée peu visible à égale distance de la ligne médiane dorsale et de la rangée principale. Quand l'animal est calme, les nageoires ;jee^om/es, ventrales et anale sont presque complètement transparentes ; mais quand il est excité, elles prennent une teinte noirâtre, d'autant plus foncée qu'on con- sidère la nageoire plus près de son bord libre. La première nageoire dorsale porte quatre bandes bleues longitu- dinales, séparées par trois bandes d'un rouge marron. La seconde nageoire dorsale est marquée de cinq bandes bleues longitudinales, alternant avec quatre bandes rouges de même teinte que celle de la première dorsale. Les bandes bleues sont générale- ment moins larges que celles de la première dorsale; quelquefois, la proximale fait défaut. D'autres fois, entre les bandes bleues prin- cipales, on observe d'autres bandes de même couleur dissociées en taches rangées longitudinalement. La nageoire caudale porte plusieurs bandes bleues alternant avec des bandes d'un blanc jaunâtre, d'autant plus larges et plus dis- tinctes, qu'elles sont situées plus près de la racine de la nageoire. Le coloris des bandes bleues et rouges des deux dorsales et de la MŒURS DU GOBIUS RUTHENSPARHF. 267 caudale est soumis à de grandes variations d'intensité, qui sont sous la dépendance immédiate de l'état des chromatophores qui les cons- tituent. Lorsque ces petits organes atteignent leur surface minima, les bandes colorées des nageoires disparaissent presque complète- ment et celles-ci deviennent alors presque aussi transparentes que le sont celles des femelles. Coloration chez la femelle. — Les couleurs do la tôte et du corps sont, à très peu près, les mêmes que celles du mâle; mais elles sont beaucoup moins vives. Les taches bleues surtout sont atténuées et s'effacent presque complètement lorsque les chromatophores sont très contractés. La tache post-pectorale est beaucoup moins noire que celle du tronçon de la queue ; elle disparaît même entièrement dans beaucoup d'individus lorsqu'ils ne sont pas surexcités. Les nageoires pectorales, ventrales et anale sont absolument trans- parentes. Dans les àexxx dorsales, les membranes interradiaires sont complè- tement dépourvues de pigment. Sur leurs rayons, se trouvent de très petites taches noires allongées, séparées par des intervalles transpa- rents. Ces différentes taches forment, sur les deux nageoires, plu- sieurs bandes noires, largement interrompues par les membranes interradiaires transparentes. La nageoire /^awf/a/e porte, comme celle du mâle, des bandes blan- ches alternant avec des bandes rouges. En résumé, les différences sexuelles sont les suivantes : i° La papille uro-génitale du mâle est longue et conique ; celle de la femelle est courte et cylindrique ; 2° Chez le mâle, les rayons articulés de la seconde dorsale et de l'anale sont, en général, d'autant plus longs qu'ils sont plus posté- rieurs ; chez la femelle, ces mêmes rayons sont d'autant plus courts qu'on les considère plus près de la fin de la nageoire à laquelle ils appartiennent ; 3° Chez le mâle, les deux dorsales sont marquées de bandes alter- nativement bleues et rouges, d'un éclat très vif quand l'animal est 268 FRÉDÉRIC GUITEL. surexcité ; chez la femelle, ces deux nageoires ont leurs membranes interradiaires complètement transparentes ; leurs rayons seuls por- tent de petites taches noires allongées, très étroites ; 4° Chez le mâle, les nageoires pectorales, ventrales et anale sont noirâtres quand il est excité ; celles de la femelle restent toujours transparentes. Heincke (3) adonné quelques détails sur les caractères sexuels du Gobius Ruthensparri. Dans la diagnose de cette espèce, il écrit (p. 310) : « Secundâre Geschlechtscharakt des cf. Jederseits ein schwarzer Brustfleck. Anale mit schwarzem Anfluge. » Quelques hgnes plus loin (p. 31 1 ), il ajoute : « Nicht minder bezeichnend ist der schwarze Brustfleck des Mànnchens sowie eine Reihe grunschillernder Flecke lângs der Sei- tenlinie. Die beiden Rilckenflossen sind mit farbigen, schillernden Langsbàndern geziert, welche besonders beim c? in der Laichzeit eine prâchtige Zierde bilden. -> Dans les Gobim Buthensparri de Roscoif, la tache noire située derrière la pectorale n'est pas spéciale au mâle, mais elle est plus marquée chez lui que chez la femelle. Il en est de même des taches de la hgne latérale ; elles existent dans les deux sexes, mais elles sont très atténuées chez la femelle. Ces taches, au lieu d'être vertes comme dans les animaux de la mer Baltique, sont bleues. Heincke passe sous silence les longueurs relatives des rayons de la seconde dorsale et de l'anale dans les deux sexes ; il ne parle pas non plus de la différence de forme que présente la papille uro-génitale. II OBSERVATIONS ET EXPÉRIENCES. A Roscoff, il est très difficile de se procurer de nombreux exem- plaires du Gobius Rulhemparri adulte. Pendant l'été, on le trouve dans les souches anfractueuses de la grande Laminaria bulbosa MCKUKS DU GOBIUS KUTHENSPAKUI. 269 Lamouroux, où il vient déposer ses œufs. La femelle les colle de manière à tapisser, sur une certaine étendue, la paroi interne de la souche, et le mâle les garde ; mais les individus qu'on peut ainsi se procurer en explorant, lors des plus grandes marées, les souches de laminaires, sont en trop petit nombre pour satisfaire à des recher- ches suivies ; il fallait donc trouver un procédé permettant de re- cueillir des animaux en plus grande abondance. Si les adultes sont difficiles à se procurer, il n'en est pas de même des jeunes. A marée basse, on les trouve nageant par bandes nom- breuses dans les flaques profondes à fond de sable fin, bordées d'algues et de zostères. Ces jeunes vivent très bien en captivité, et grandissent rapidement si l'on prend soin de leur fournir une abondante nourriture. C'est en procédant de celte manière que j'ai pu avoir à ma dispo- sition une quantité suffisante de Gobius Rut hensparri adulies. Mes observations ont été faites au mois d'août 1894, sur des ani- maux récoltés au mois de mars précédent. A cette époque, les plus grands de ces jeunes poissons n'avaient que 25 millimètres de lon- gueur. Il est extrêmement probable que ces alevins étaient nés pen- dant l'été de 4803. Ce qui n'est pas douteux, c'est qu'ils n'étaient pas encore aptes à la reproduction, au moment de leur capture. Le subslralum que choisit le Gobius Ruthensparri pour fixer ses œufs est très variable. Gomme je l'ai déjà dit plus haut, à RoscofF, je n'ai jamais trouvé la ponte de ce petit poisson ailleurs que dans les souches de Lami- naria bulbosa; mais Heincke (3) dit qu'il dépose ses œufs sur les pilotis, les ponts, les bouées et probablement aussi sur les herbes marines. F. Day (6, p. 161) rapporte qu'au dire de Roberts le Gobius Ruthensparri fixe ses œufs à la face inférieure des coquilles de Girrhipèdes. Petersen (9, p. 9 et 10)|déclare n'avoir trouvé que quatre fois la ponte du Gobius Ruthensnarri : une première fois sur le thalle d'une 270 FRÉDKUIC GUITEL. Laminavla saccharina^ puis sur des feuilles de Zoslem, et enfin sui- des pieux soutenant une nasse à crevettes. 11 ajoute qu'il lui est impossible, d'après cela, de décider où s'effectue normalement la ponte de cette espèce. Pries, Ekstrom et Sundevall (la, p. 255)' disent que la femelle du petit poisson qui nous occupe fixe ses œufs aux coquilles des Mollusques et des Balanides. Les Gobius Ruthenparri sur lesquels ont été faites les observations rapportées plus loin étaient placés dans des bacs à fond plat recou- vert d'une épaisse couche de sable fin. L'eau des bacs, constamment renouvelée, renfermait toujours une grande quantité de Mysis vivantes, servant de nourriture aux animaux en expérience. Ceux-ci vivaient en captivité depuis le mois de mars 1894 et, grâce aux soins que leur avait donnés le dévoué gardien du Laboratoire, Charles Marty, ils pondaient déjà depuis plusieurs mois quand je commençai mes observations, c'est-à-dire le 6 août. Je place dans un bac un mâle et deux femelles de Gobius RuthenS' parri, avec une coquille A'Haliolis et une à'Arlemuia, car, de tous les corps choisis par ce petit poisson pour la fixation de ses œufs, les coquilles sont ceux qui se prêtent le mieux aux observations qu'on peut faire sur des animaux en captivité. Le mâle s'introduit sous la coquille d'Hallotis, et, par de rapides mouvements de sa queue, très souvent répétés, il chasse au dehors une grande partie du sable qu'elle contient. Ce sable, violemment projeté au dehors, sort avec rapidité sur tout le pourtour de la coquille; il en résulte que celle-ci se trouve bientôt située au fond d'une sorte d'entonnoir irréguher, creusé dans le sable autour d'elle. Contrairement à ce qui a lieu pour le Gobius minutus, le G. Ruthensparri ne sait pas recouvrir de sable la coquille qu'il a choisie pour en faire son nid. Les Gobius Ruthensparri sont beaucoup plus nageurs que les 1 Voir page 283, la cilalioii in extenso. MOEURS UU GOBIUS RUTHExNSPARKI. 27i G. minutus, et au lieu, comme ces derniers, de rester sur le fond lorsqu'ils ne progressent pas, ils se tiennent presque constamment entre deux eaux ; cependant, ils savent aussi s'ensabler, et il leur arrive, comme aux G. m'mulus, de rester de longues heures dans cette situation, ne laissant voir souvent que leurs deux yeux. Le mâle sort à chaque instant de son nid pour inviter les femelles à venir pondre chez lui. Pour cela, il s'élance vers l'une d'entre elles, ses nageoires impaires fortement hérissées et sa gorge gonflée ; il nage à son côté, en progressant par petits bonds rapides, et en inclinant son corps vers elle; souvent même, pour mieux se faire comprendre, il la frôle à plusieurs reprises. La plupart du temps, la femelle reste indifférente, ou même s'en- fuit le plus vite qu'elle peut ; le mâle, alors, regagne son nid, mais avant d'y rentrer, il revient plusieurs fois à la charge réitérer ses pressantes invitations. Pendant tout le temps que dure ce manège, ses couleurs acquièrent un éclat remarquable, et lui forment une magnifique livrée. llentré dans son nid, son excitation se traduit par une agitation continuelle. Tantôt il reste à la porte de son gîte, laissant passer sous le bord de la coquille sa tête devenue toute noire, agitant con- tinuellement ses pectorales et sa queue et respirant avec une grande rapidité ; tantôt,, au contraire, il se retire sous son toit, chasse violemment avec sa queue le sable qu'elle contient, se renverse au plafond de son nid qu'il parcourt en tous sens, en s'y collant au moyen de sa ventouse, ou bien encore apporte dans sa bouche du sable ou de gros fragments de pierre qu'il rejette sur le pas de sa porte. 11 ne reste généralement pas longtemps ainsi dans son nid. Au bout de quelques minutes ou même de quelques secondes, il le quitte pour recommencer ses démarches auprès des femelles. Celles qui lui ont été données comme compagnes de captivité ne sont pas encore arrivées à terme ; malgré cela il ne cesse de les provoquer. 272 FRÉDÉRIC GUITEL. et je l'ai vu, dans l'espace de quarante minutes, quitter trente fois sa coquille et s'approcher d'elles quatre-vingt-dix fois dans l'inten- tion non équivoque de les attirer chez lui. Quelquefois une femelle se laisse séduire et suit le mâle jusqu'à son nid, en frétillant à son côté. Celui-ci, plongé dans une grande surexcitation, pénètre chez lui, fait plusieurs fois le tour de son logis et vient vile se placer à l'entrée de sa maison. Son inquié- tude est extrême, sa tète toute noire, sa respiration précipitée, et il agite rapidement sa queue et ses pectorales. Malheureusement la femelle n'est pas prête à déposer ses œufs et ne tarde pas à s'enfuir. Cependant il arrive quelquefois que celle-ci pénètre dans le nid pour en ressortir quelques secondes après; le mâle alors la poursuit et, avec une infatigable persévérance réitère ses provocations dans l'es- poir de la ramener chez lui. Les scènes que je viens de décrire durèrent pendant cinq jours avec quelques courtes accalmies. Enfin, le sixième jour, une partie de la face interne de la coquille était uniformément tapissée d'une jolie ponte jaune pâle. Notre petit mâle est maintenant père d'un certain nombre d'œufs sur lesquels il veille avec la plus grande solHcitude, ce qui ne l'em- pêche pas de continuer à poursuivre les femelles, car sa coquille est assez grande pour recevoir encore une ou deux pontes. Ses efforts ne tardent pas à être couronnés de succès, et la seconde femelle vient bientôt déposer ses œufs à côté de ceux de sa compagne de captivité. Ceci montre que le mâle du Gobius Ruthensparri est polygame. L'incubation des œufs dure neuf jours, et de même que chez le Gobius minulus, les embryons sont abandonnés à eux-mêmes dès le premier moment de l'éclosion. Pendant tout le temps que dure l'incubation, le mâle reste gardien de sa progéniture. Il agite con- stamment ses pectorales el sa queue pour créer des courants qui re- MŒQRS DU GOBIUS RUTHENSPARRI. 273 nouvellent l'eau sous la coquille et il empêche les autres mâles de s'emparer de ses œufs. De temps à autre, il rentre dans son nid, se renverse la face ventrale tournée vers le haut et parcourt le plafond de son logis en palpant ses oeufs au moyen de la ventouse que for- ment ses deux nageoires ventrales. Comme les mâles n'attendent pas l'éclosion des œufs sur lesquels ils veillent pour en féconder d'autres, il en résulte qu'en liberté ils doivent avoir des pontes à surveiller pendant toute la durée de la saison de la reproduction, c'est-à-dire depuis le mois de mai jus- qu'au mois d'août. Les femelles pondent un grand nombre de fois pendant la saison des amours. L'une de celles dont il a été question plus haut a pondu le il août puis le 17 et enfin une dernière fois le 27. Le premier in- tervalle est de six jours et le second de dix, mais les dernières pontes sont toujours en retard et nous verrons plus loin que le chiffre qui doit être adopté pour l'intervalle séparant deux pontes est très voi- sin de six jours. Cet intervalle est en moyenne de sept jours chez le Gobius minutus. Expériences. — Au bout de quelques jours que le mâle dont il a été question plus haut veillait sur ses œufs, j'entrepris les expé- riences suivantes : L — Je chasse le mâle, je transporte la coquille abritant sa ponte à quelque distance de la place qu'elle occupe et je la remplace par une coquille de Mya arenaria non tapissée d'œufs. Le mâle ne tarde pas à revenir à l'endroit oii était son nid, s'introduit sous la coquille de Mya, l'explore en tous sens, et agite rapidement sa queue, qui chasse le sable dans toutes les directions ; mais il la quitte presque aussitôt et parcourt le fond du bac de côté et d'autre d'un air inquiet, sans beaucoup s'éloigner de la coquille. 11 y rentre bientôt de nouveau, se renverse au plafond du toit qu'il croit être le sien, s'agite de tous côtés et sort encore pour rentrer peu d'instants après. ARCH. DK ZOOL, EXP. Eï GÉN. — 'i'^ SÉUIE. — T, 111. 1 89o. • 18 274 FRÉDÉRIC GUITEL. A plusieurs reprises, il lui arrive de sortir de la coquille par un point de son bord tout différent de celui qui correspond à la porte d'entrée du nid, ce qui n'a jamais lieu lorsqu'il n'est pas inquiété. Ces allures particulières indiquent nettement qu'il s'est aperçu de la disparition de la ponte qu'il gardait. Ce qui le prouve, c'est qu'à quelque temps de là je le retrouve définitivement installé sous la coquille à'Haliol/'s abritant sa famille. II. — Une fois le mâle chassé de son nid, je retourne sa coquille, la concavité tournée vers le haut. Lorsqu'il revient, il tourne avec persistance autour de sa maison renversée. De temps à autre, il s'in- sinue sous son bord, plonge dans le sable et la soulève de quelques millimètres, mais jamais il n'essaye de la retourner comme le fait le Gobius minulus. Quelquefois il s'introduit dedans, puis il la quitte au bout d'un instant pour s'ensabler à côté ; mais il ne reste pas long- temps en repos, et recommence bientôt à s'introduire dessous. Cette agitation continuelle dure tant que la coquille n'est pas réta- blie dans sa situation normale. Aussitôt qu'on la replace la conca- vité en dessous, le mâle reprend sa place de gardien. III. — Je chasse le mâle de sa coquille et la pose verticalement, la partie inférieure de celle-ci élant légèrement enfoncée dans le sable. Quelques instants après, il revient auprès de son nid, tourne autour, s'ensable à côté, puis s'en éloigne pour y revenir bientôt et recommencer. Il reste ainsi pendant deux heures et demie sans même essayer de faire tomber la coquille sur sa concavité, ce que n'aurait pas manqué de faire un Gobius miniitus ; cependant son inquiétude est visible et se manifeste à la fois par ses allées et venues continuelles autour de son nid, et par la contraction de ses chromatophorcs qui lui donne une livrée très pâle. Après deux heures et demie d'attente, je rétablis la coquille dans sa position, et le mâle reprend aussitôt sa faction interrompue. Le changement de couleur dû à la contraction des chromatophores noirs eut lieu aussi dans les deux premières expériences. 11 est remarquable par la teinte très pâle que prend la tête, et il se pro- iMŒUHS DU GOBIUS RLTHENSPAHllI. 275 duit souvent lorsqu'on inquiète un mâle en le privant des œufs sur lesquels il veille. J'ai répété plusieurs fois sur le même mâle les trois expériences décrilcs plus haut, cl j'ai toujours obtenu les mêmes résultais. Deux mâles et une femelle sont placés dans un même bac avec trois coquilles. Les deux mâles ne tardent pas à choisir chacun une coquille et invitent tour à tour la femelle à venir pondre chez eux. Toutes les fois qu'ils s'approchent, leurs nageoires impaires se héris- sent, leurs couleurs prennent tout à coup une vivacité éclatante, leur gorge se gonfle, et ils se tiennent côte à côte, à une très courte dis- tance l'un de l'autre, tout prêts à la riposte en cas d'attaque. Quoique j'aie vu beaucoup de mâles se tenir ainsi en respect, jamais je n'en ai vu se battre, et si la chose leur arrive quelquefois, elle doit être beaucoup moins fréquente que chez le Gobius minutus^ dont l'humeur est des plus irascibles. La femelle a pondu le 14 août, puis le 20 août, c'est-à-dire six jours après ; la ponte du 14 août est éclose le 23 et celle du 20 le 29. Expériences. — Les expériences qui ont été faites sur le mâle dont il a été question précédemment, ont été répétées sur les deux mâles qui nous occupent ; elles ont donné les mêmes résultats. En voici une autre : l'un des mâles garde une ponte, l'autre a en- core sa coquille vide. Je les chasse tous les deux et je permute leurs coquilles. Quelques instants après, chacun d'eux revient sans hésiter sous la coquille occupant la place qu'avait précédemment la sienne. Le mâle qui n'avait pas d'œufs à surveiller, et qui maintenant en a, ne paraît pas surpris de la substitution; mais celui qui se trouve privé de sa famille ne reste pas un instant en repos. 11 explore le plafond de son logis au moyen de sa ventouse, puis il sort de son nid pour y rentrer presque aussitôt. 11 agite vigoureu- sement sa queue et chasse violemment le sable, qui s'échappe dans toutes les directions, sous le bord de la coquille. Sorli de nouveau, il ne tarde pas à rentrer, pour recommencer les mêmes manœuvres. 276 FRÉDÉRIC GUITËL. Son agitation continuelle montre, à n'en pas douter, qu'il s'est aperçu de la disparition des œufs confiés à sa garde. Une heure après le commencement de l'expérience, son inquiétude semble avoir disparu ; mais il n'a pas retrouvé ses œufs. L'expérience suivante complète et explique la précédente : La coquille tapissée d'œufs ayant été rendue à son légitime pro- priétaire, le mâle qui n'a pas de famille à surveiller est retiré du bac, puis les deux coquilles sont permutées comme précédemment. Deux heures après, je retrouve le mâle sous la coquille qui abrite ses œufs. La première expérience montre que le mâle gardien des œufs s'était très bien aperçu de leur disparition ; le seconde donne la rai- son pour laquelle il n'en avait pas repris possession. Le Gobius mmutus mâle qui garde ses œufs ne se laisse pas ainsi intimider par la présence d'un autre mâle sous la coquille qui abrite sa progéniture, et il n'hésite pas à livrer une bataille acharnée pour reconquérir son bien. J'ai répété, sur plusieurs mâles, l'expérience précédente. Jamais aucun d'eux n'a repris sa coquille lorsqu'elle était occupée par un autre. Outre les femelles dont j'ai parlé précédemment, plusieurs autres ont pondu dans mes aquariums. Les intervalles séparant leurs pontes ont toujours été de six jours, et les œufs sont toujours éclos vers le neuvième jour de lincubation. m HISTORIQUE. J'ai réuni ici les renseignements, d'ailleurs peu nombreux, que j'ai pu trouver dans la bibliographie sur les mœurs du Gobius Ru- thensparri. A ces renseignements, j'ai joint ceux que j'ai pu me pro- curer sur quelques autres espèces du genre. En se reportant à mon mémoire sur le Gobius minutus (**), on trouvera l'analyse détaillée (p. 543 à 549) de la plupart des travaux MŒURS DU GOBIUS UUTHENSPAHUl. 277 antérieurs à l'année ^891. Ceux qui m'avaient échappé à celle épo- que : Malm (i), Schmidtlein (s), Day (6), Saville-Kent (7), sont ana- lysés ici. J'espère ainsi être parvenu à réunir ce que nous savons actuellement de plus important sur les habitudes des poissons du genre Gobius. Schmidtlein (2) a vu s'apparier un couple de Gobius niger dans un bac de l'aquarium de Naples. La femelle pondit une première fois le 18 avril et une seconde fois le 6 mai. Il n'y eut pas de nid construit (probablement, dit l'auteur, par suite de l'absence de matériaux né- cessaires), et les œufs furent fixés à l'une des parois verticales du bac. La femelle abandonna ses œufs aussitôt après les avoir déposés et les laissa à la garde du mâle. Celui-ci les défendit avec une constance admirable contre les attaques incessantes d'un grand nombre de Gi- relles [Julis) vivant dans le même aquarium que lui. L'espace me manque pour citer in extenso l'observation de Schmidt- lein; mais il m'a semblé intéressant de reproduire ici les quelques lignes de son travail qui se rapportent à la manière d'être des deux sexes pendant la ponte, car elles dénotent une analogie remarquable entre les habitudes de deux espèces du même genre, le Gobius niger et le Gobius minutus. Voici le passage en question : « Es war ein fesselndes, anmuthiges Bild, das sich mir darbot. Das Kleinere Weibchen hing, mit Eierlegen beschaftigt, miltelstdes Bauchflossentrichters an der Wand . Schwârzlich gefarbt vor Erregung und convulsivisch mit den Rûckenflossen zitternd schwebte es an der senkrechten Flàche mit aufwàrts gekehrtem Kopfe umher und heftete die aus der Analpapille hervotretenden Eierchen nebenei- nander in. Die Mànnchen aber spielte unablâssig und unter eigen- thumlichen zàrllichen Geberden um seine Gattin her. Bald um- kreiste er sie und strich mit den Kopfe ûber ihren Leib, bald biss er sie sanft in die Seite, als wollte er sie aufmuntern, in ihrem Eifer forlzufahren. Dann wieder lagen beide mit den Kopfen vertraulich aneinandergeschmiegt, bis das Weibchen sein Gescbaft wieder auf- nahm und der Gatte zur Abwechslung wie loi! auf ein paar Julis 278 FRÉDÉRIC GUITEL. losfuhr, die sich zu neugierig erwiesen halten. So wàhrte das inté- ressante Treiben durch raehrere Stunden. » Heincke (3), en parlant du Golnus Ituthensparri, s'exprime de la manière suivante : « Die Uauptlaichzeit fâllt in die Monale Mai und Juni; sie beginnt, wenn die jungen Triebe des Seegrases eine ansehnliche Hôhe erreicht haben und die ersten BlUthen ansetzen. Die Eier sind klein und werden in Hâufchen mittelst kleiner Stiele an Pfâhle, Briicken, Bojen und wahrscheinlich auch Seegras geklebt. Im Juli trilt die 0,01-0,02 m. lange Brul massenhaft auf. » Il est inexact de dire que les œuls du Gobius Riithensparri sont attachés au moyen d'une petite tige; leur mode de fixation est le même que celui des œufs du Gobius niinutus. Dans son grand ouvrage sur les Poissons de la Grande-Bretagne et de l'Irlande, Francis Day (6) cite plusieurs faits concernant les mœurs des Gobius. A propos du Gobius Ruthensparri^ il écrit page 162 : « M. Roberts observed that when the female had deposited her eggs in the shell of a barnacle, the maie took possession of the deposit, and was continually working his fins in and ont of the shell and drove other fish away. On the sixteenth day the young fish were hatched, but were destroyed by the other fish in the vivarium. » A Hoscoff, comme on a pu le voir plus haut, la durée de l'incuba- tion des œufs du Gobius Ruthensparri ne fut jamais que de neuf jours au lieu de seize. Dans les quelques lignes de généralités que F. Day (6, p. 159) consacre au genre Gobius, il s'exprime dans les termes suivants : (( M. A. Walkcr, of Chester, bas kindly sent me the following interesting information. « There is one species (? G. Ruthensparri) « that is common in the shallow gutters of the Dee, whose habits are « worth noting. It lays its eggs in the inside of an empty valve of Mya a arenaria, one end of which it then contrives to bury in the sand, « leaving the other end (in which the eggs are laid) stickingup. The « goby then places herself inside, with her head looking out, and MŒURS DU GOBIUS RUTHENSPAURI. 279 « thus keeps guard over her eggs and protects them from the crus- u tacea, such as shrimpsand Eurydice pulchra (a small butvoracious « Isopod, extremely common in the Dee). If the shell isturned over (( and the fish driven away, thèse crustacea attack the ova at once, (t l)ut as soon as the parent is permitted, she returns, drives them « away, and by burrowing wilh her head under one end of the shell, « soon gets it into its place again » (M S S. March 2nd 1881). » Comme je l'ai fait remarquer plus haut, je n'ai jamais pu obtenir des Gobius Ruthensparri que j'ai observés en captivité qu'ils retour- nassent leur coquille quand elle se trouvait renversée la convexité en bas. Je suis donc porté à croire que l'observation de Walker ne se rapporte pas au Gobais Ruthensparri. Le point d'interrogation que l'auteur précité a eu soin de placer devant le mot G. Rulhens- /)fl?'r<' parle en faveur de cette hypothèse. Fries, Ekstrom et Sundevall (-12, p. 247 et 248), analysant une observation de Saville-Kent {'71) sur le Gobius niger, s'expriment de la manière suivante : « The Black Goby is frequently met with beneath large stones at low water, it selecting such a habitat not only as an ordinary domi- cile, but as a nursery where it may safely deposit and hatch its spawn. The eggs, as frequently observed by the writer, are of very fiingular shape, being elongate, ovate or fusiform^ about three times as long as broad, and are attached verticnlly by one of the smaller ends in a single, closely approximated layer, Ihat may extend over an area of many square inches of the under surface of the rock selected. Over thèse eggs the maie fish nov^-mounls guard, vigorously repelling ail wouldbe intruders with whom he can cope on equal terms, and in those instances in which the disturbing influences are apparently too strong for him — such as human interférence — resorting, in self-defence, to an artful slratagem. On several occasions, when shore — coUecting in the Channel Islands, the writer bas, in fact, on turning the rocks over in scarch of spécimens, dislodged what at first sight, frora the apparently large size of its 280 FRÉDÉRIC GUITEL. head, was taken for a Biillhead [Cotlm) but on doser examination proved lo be an example of Ihe Rock Goby, with its opercula and branchioslcgal membranes abnormally dislended, with the évident intention of passing itself off as one of those spiny-headed Cottidae which are not to be handled with impunity. » Dans leur Fische der Oslsee, Mobius et F. Heincke (8) disent (p. 56) en parlant du Gohius Ruthensparri : <( Die Eier werden in Maufchen mittelst kurzer Sliele an werschie- dene Gegestânde angeklebt. » J'ai déjà dit plus haut que le mode d'attache des œufs du Gohius Ruthensparri est le môme que celui des œufs du Gobius minutus. A propos du Gobius minulus, var. minor, les mômes auteurs (p. 55) écrivent : « Die Eier sind birn- oder spindelforming und werden einzeln an- geklebt. !> Les œufs du Gobius minutus ne sont jamais fusiformes et sont tou- jours nombreux et pressés les uns contre les autres dans les pontes normales. Ces inexactitudes ont déjà été relevées par Pelersen dans le tra- vail que j'analyse plus loin (9). La phrase des mêmes auteurs concernant le Gobius niger renferme des erreurs du même ordre : H Die Eier sind birnfôrmig und werden durch einen kurzen Sliel am stumpferen Pol an Pflanzen, Muscheln, Steinen oder Holz fest- geklebt. » Les œufs de Gobius niger sont piriformes et totalement dépourvus d'un pédicule à leur pôle tronqué ; leur mode de fixation au subs- tratum qui les porte est le même que celui des œufs des Gobius mi- nutus et Ruthensparri. Petersen (9) a décrit et figuré les œufs des Gobius niger, microps, minutus et Ruthensparri. Il a indiqué en même temps où ces Pois- sons les déposent. D'après cet auteur, le Gobius niger fraye dans le fjord d'Holbaek MŒURS DU GOBIUS KUTHENSPARRI. 281 (île Seeland) depuis la seconde quinzaine de mai jusqu'au commen- cement d'août. Il y dépose ses œufs soit à la surface des pieux rete- nant des engins de pêche, soit sur la Ciona canina, soit encore sous des pierres (p. 243 et 246). Dans le Petit Belt, Petersen a trouvé les œufs du Gobius niger fixés sur le thalle du Fucus vesiculosus, ou sur la face concave des coquilles de Mytilus ; mais là encore, les pieux et les différents objets déposés par la main de l'homme étaient, en raison de leur surface lisse, choisis de préférence aux autres. C'est dans le Petit Belt que l'auteur a observé des Gobius niger gardant leurs œufs. Quand il y avait sur le fond une pierre ou tout autre objet sous lequel il était possible d'enlever une quantité de sable assez grande pour donner asile à un Gobius, on était assuré d'en trouver un veillant sur ses œufs. Cependant le Gobius niger est considéré par Petersen comme un gardien moins fidèle que les G. microps Qi minutus {^. 230 et 231.) L'auteur que je viens de citer a figuré les œufs des quatre Gobius qu'il a étudiés et les a décrits très succinctement. Celui du Gobius niger est claviforme et muni à son pôle proximal d'un appareil fixateur réticulé tout à fait analogue à celui que j'ai décrit (n) dans l'œuf du Gobius minutus (Petersen, p. 244 et 245). Petersen s'est contenté de figurer cet appareil fixateur qui existe dans les quatre espèces dont il s'est occupé ; mais il ne donne de détails ni sur la manière dont il adhère à l'œuf, ni sur son mode de développement. J'ai eu l'occasion d'observer, à RoscofT, l'œuf du Gobius birolor Gmelin. Sa forme se rapproche de celle de l'œuf du Gobius niger qu'a figuré Petersen ; mais au lieu d'être claviforme comme ce dernier, il est régulièrement fusiforme. Son extrémité proximale porte une petite troncature à laquelle adhère un appareil fixateur identique à celui de l'œuf du Gobius minutus. Le micropyle est percé au centre de la partie discoïdale pleine de cet appareil fixateur. Ainsi que tous les auteurs Scandinaves, Petersen considère le Go- bius microps Kruyer comme une espèce distincte. Il l'a trouvé en 282 FRÉDÉRIC GUITEL. grande abondance dans le fjord d'Holbaek et il a constaté que ce petit poisson colle ses œufs sur la face concave des coquilles de Mya arena?'ia. La coquille, la face convexe tournée vers le haut, est à moitié enfoncée dans le sable, et le mâle, dont la tête passe au dehors, veille sur la ponte. La saison de la reproduction dure depuis le mois de mai jusqu'au mois d'août (p. 246, 2-48). Les détails que donne Petersen sur le Gnbius minutus diffèrent très peu de ce qu'il dit sur le Gobius microps, aussi bien en ce qui concerne les habitudes de ce petit poisson qu'en ce qui a trait à la forme de ses œufs (p. 248 et 249). J'arrive maintenant à la partie du travail de Petersen qui concerne le Gobius Rulhensparri . L'auteur dit avec raison que cette espèce préfère les eaux claires et fraîches de la région des Zostères à celle des fjords fermés. Elle vit à une plus grande profondeur qu'aucune des trois espèces pré- cédentes. Cette circonstance rend impossible l'observation directe du Gobim RuthenspaiTi à l'état de liberté. Néanmoins Petersen ayant trouvé, sur une Laminaria saccharina, un groupe d'œufs de Gobius différant à certains points de vue de ceux des trois espèces pré- cédentes, pensa qu'ils pourraient bien appartenir au G. Riithensparri. L'examen des œufs contenus dans les ovaires de quelques femelles gravides vint donner à cette conjecture la valeur d'une certitude. Les nombreuses pontes que j'ai obtenues en captivité m'ont per- mis de reconnaître la justesse des observations de Petersen, et je puis dire que la figure 9 de sa planche V donne une idée assez exacte de la forme de l'œuf du Gobius Rnlhensparri. Comme je l'ai déjà dit (p. 269), Petersen n'a trouvé que quatre fois (en juin et juillet) la ponte du Gobius Ruthensparri. Malm (*), cité par Petersen (9, p. 234), a figuré l'œuf d'un Gobius d'espèce inconnue avec son appareil fixateur. La ponte était déposée sur une coquille de Modiola modiolus. Petersen, d'après la forme de l'appareil fixateur de ces œufs, pense qu'ils devaient appartenir au Gobius Ruthensparri. MŒURS DU GOBIUS RUTHENSPARRI. 283 Malm déclare aussi avoir trouvé des œufs de Gobius nigerûxés sur une tuile et gardés par un poisson de celle espèce. Enfin, il prétend avoir vu des œufs de Gobius microps sur un poêlon en terre. Fries, Ekstrôm et Sundevall (i») ne disent que quelques mots des habitudes du Gobius Ruthensparri : « The spawning-season occurs in sunimer, from May to August. The female attaches the eggs to the shells of dead shellfish or Bala- nids, and Ihe maie keeps faithful and courageous guard over then. » En 1880, M. de Saint-Joseph fil paraître, dans le Bulletin de la So- aélé philomatique de Paris (4), une petite note sur les œufs du Gobius minutus. J'analysai cette note dans mon mémoire sur les mœurs de ce petit poisson (it), en contestant l'exactitude de certaines asser- tions formulées par l'auteur. Depuis, le même auteur a publié une nouvelle note sur le môme sujet (5). Dans ce travail, il s'exprime de la manière suivante : « Depuis 1880, j'ai pu me rendre compte qu'outre le mode d'en- fouissement de la coquille que j'avais décrit, et dans lequel le mon- ticule qui la recouvre est parfaitement lisse, il y en avait un autre, celui décrit par M. Guitel, le mien s'appliquant aux petites coquilles, les seules que j'eusse rencontrées en 1880, le sien aux grandes co- quilles qui se trouvent concurremment avec les autres. « 11 est probable que les petites coquilles sont 1res suffisamment recouvertes de sable par le mouvement de la marée, comme on le voit si souvent sur les plages sablonneuses, et qu'il ne reste plus d'au- tre travail au poisson que de percer son trou. Il y a bien trois traî- nées divergenles aboutissant à ce trou, qui est placé sous le bord de la coquille ; en y introduisant le doigt, on fait sauter la coquille en la retournant et l'on trouve le mâle dessous. » Il n'est pas douteux que le Gobius minutus mâle choisit parfois des coquilles recouvertes de sable par les courants ou par les lames \ car ^ Il arrive aussi fréquemment, quand on suit la nier descendante, qu'on rencontre des coquilles complètement mises à nu par le jusant. Dans ce cas, le mâle ne tarde pas à réparer le dommage causé à son nid en traçant de nouveaux sillons tout autour de celui-ci, de manière à le dissimuler sous un nouveau monticule de sable. 284 FRÉDÉRIC GUITEL son bnl unique semble toujours être de trouver pour ses œufs un abri qu'il puisse dissimuler, s'il ne l'est pas déjà. Cependant, le mon- ticule lisse qui recouvre certaines coquilles n'en est pas moins, la plupart du temps, l'œuvre du Gobi'us, et ce monticule a été édifié exactement de la même manière que ceux qui portent des sillons rayonnants, seulement, dans le cas qui nous occupe, ces sillons ont été effacés. Deux causes amènent fréquemment la disparition des sillons tracés par le Gobius. Ce sont d'abord les courants et les lames (jui nivellent rapidement le sable meuble dans lequel sont creusés ces sillons; puis les Mf/sis qui, en se promenant continuellement sur le sol, tra- cent elles-mêmes un grand nombre de très petits sillons, qui font bien vite disparaître les inégalités du fond, môme dans l'eau la plus calme. Le Gobius minutus n'a donc qu'un seul et unique procédé pour enfouir son nid ; mais quand il rencontre dans le sable une cavité suffisamment dissimulée et dont les parois sont susceptibles de rece- voir ses œufs, il l'adopte et y fait élection de domicile, sans qu'on puisse pour cela considérer chacun de ces cas, très particuliers, comme des modes spéciaux d'enfouissement, car alors le Poisson n'est pour rien dans la manière dont son nid est dissimulé. C'est ainsi que j'ai trouvé des mâles, gardant des œufs, collés à la face infé- rieure de grosses pierres reposant sur le sable. Le même cas se présentait quand je donnais à mes animaux en captivité des verres de montre en guise de coquille, car la trans- parence du verre m'obligeait à ensabler moi-même le futur nid ^ En ce qui concerne les sillons divergents aboutissant à l'orifice du nid, il est possible qu'on puisse en compter plus d'un, puisque le Gobius les trace dans toutes les directions autour de sa maison; mais il n'y en a jamais qu'un seul destiné à ses entrées et à ses sorties, 1 On rencontre parfois aussi des mâles qui ne recouvrent pas leur nid, même lorsque ce nid n'est qu'une simple coquille posée sur le fond; mais le fait est excep- tionnel. MŒURS DU GOBIUS RUTHENSFÂHRI. 285 les aulres ne servent jamais à cet usage, et c'est tout à fait par ha- sard qu'on les voit aboutir au trou du Gobiiis. G'estpar suite d'un lapsusque j'ai écrit (i*, p. S49) : « Il u'yaqu'uu seul sillon aboutissant au trou servant de porte d'entrée...» Je voulais dire : « Il n'y a qu'un seul sillon destiné aux entrées et aux sorties du Gobius. » Ce sillon a d'ailleurs une forme particulière, générale- ment très différente de celle des sillons tracés par le mâle pour en- fouir sa coquille. Les sillons rayonnants, je le répète encore, sont creusés par le Gobius dans le sens centrifuge et dans le but unique de recouvrir sa coquille ; il ne parcourt jamais leur trajet qu'une seule fois, et du centre à la circonférence. 11 en est tout autrement pour le sillon destiné aux entrées et aux sorties du Gobius. Ces faits sont faciles à contrôler quand on peut observer des Gobius vivant en captivité; mais on peut aussi, plus difficilement il est vrai, les observer sur les animaux vivant en liberté loin du niveau des plus basses mers. IV RÉSUMÉ. 1" La papille uro-génilale du mâle est longue et conique. Quand son extrémité distale n'atteint pas la base du premier rayon de l'anale, l'intervalle qui l'en sépare est toujours très petit. 2° La papille uro-génitale de la femelle est courte et cylindrique ; son extrémité libre est séparée de la base du premier rayon de l'anale par une distance égale à sa propre longueur. 3° Chez le mâle, les rayons articulés de la seconde dorsale, sur- tout les derniers, sont d'autant plus longs qu'ils sont plus posté- rieurs. Chez la femelle, au contraire, ces rayons diminuent progres- sivement de longueur d'avant en arrière. 4° Chez le mâle, les rayons articulés de l'anale sont tous sensiblement égaux, ou bien augmentent un peu de longueur d'avant en arrière, 286 r-KÉDÉRIC GUITEL. tandis que chez la femelle ils diminuent progressivement dans le même sens. 5° Les deux dorsales du mâle sont marquées de bandes longitudi- nales alternativement bleues et rouges, d'un éclat très vif quand l'animal est surexcité; chez la femelle, ces deux nageoires ont leurs membranes interradiaires complètement transparentes, leurs rayons seuls portent de petites taches noires, allongées, très étroites. 6" A Roscoff, je n"ai jamais trouvé la ponte du Gobius Ruthensparri que dans les souches anfractueuses de la Laminaria bulbosa. Les animaux que j'ai élevés en captivité ont pondu dans des coquilles de Lamellibranches {Mya, Artemisia, etc.) ou de Gastéropodes [HaliotiSf etc.). 7° Le mâle qui a fait élection de domicile sous une coquille com- mence par l'aménager à sa convenance. 11 la débarrasse du sable qu'elle contient en excès par une agitation très rapide de sa queue ; il sait même saisir de petits graviers dans sa bouche, et venir les rejeter sur le pas de sa porte ; mais il ne sait ni recouvrir de sable sa coquille, ni la retourner quand elle est renversée, comme le fait si adroi- tement le Gobius minutus. 8° Le mâle, par ses provocations, cherche à décider les femelles avenir pondre dans son nid. Il les poursuit avec une persévérance infatigable, et ne s'arrête que lorsque ses efforts ont été couronnés de succès. Quand il s'approche d'une femelle, ses couleurs deviennent éclatantes; sa gorge se gonfle, ses nageoires se hérissent, il progresse à ses côtés par petits bonds saccadés, et souvent la frôle pour attirer plus sûrement son attention. \)° La ponte déposée, la femelle abandonne le nid, laissant les œufs à la garde de leur père. 10° L'incubation dure neuf jours. Dès l'éclosion, les jeunes sont abandonnés à eux-mêmes et mènent la vie pélagique. Quand la grandeur du nid le permet, le mâle n'attend pas l'éclosion des œufs sur lesquels il veille pour provoquer d'autres femelles et obtenir de nouvelles pontes. MŒURS DU GOBIUS KUÏHILNSPARRI. 287 li° Pendant la période d'activité sexuelle, qui commence en mai et qui finit en août, les femelles pondent, en général, tous les six jours. 12° La forme de l'œuf du Gobius Ruthensparri se rapproche beau- coup de celle de l'œuf du Gobius minuius. Il est piriforme, mais son extrémité distale, au lieu d'être régulièrement arrondie comme dans cette dernière espèce, se termine en cône très surbaissé. En outre, cette extrémité porte un étranglement plus prononcé que celui de l'œuf du Gobius minutiis. L'appareil fixateur de l'œuf est identique à celui qu'on observe chez le Gobius minutus. Le micropyle de l'œuf est percé au centre de la calotte qui recouvre son pôle germinatif. 13° Lorsqu'un mâle veille sous la coquille renfermant ses œufs, si on l'en éloigne, il la retrouve bientôt. 14° Si, après avoir chassé un mâle de son nid, on déplace sa coquille et on la remplace par une autre ne renfermant pas d'œufs, il revient d'abord sous cette dernière; mais, au bout d'un certain temps, il finit toujours par reprendre celle qui abrite sa progéni- ture, à moins, toutefois, qu'un autre mâle ne s'en soit emparé. LISTE DES OUVRAGES CITÉS. i. Malm (A.-W.), G'ôtehorgs och Bohiisldns Faiina, Gôteborg, 1877, cité^par Petersen (9, p. 254). 2. ScHUiDTLEiiN (Richard), Beobacktungen ûber die Lebensweise einiger See- thiere innerhalb der Aqnarien der zoologischen Station [Mittheilungcn aus der zoologischer Station zu Neupel, 1. 1, 1878, p. 1 à 27). 3. Heincke (Friedrich), Die Gobiidx und Sgngnathidœ der O'itsee neb^t bio- logischen Bciaerkungen [Archiv fur Naturgcschic/ite, 1880, p. olOj. 4. Saint-Joseph (dk), Note sur les œufs du Gobius minutus, var. minor, Heincke, Gobius microps, Kroyer {Bulletin de la Société philoma/ique de Paris, séiince du 27 novembre 1880, p. 30). 5. — Note complémentaire sur les œufs du Gobius niinulus L., var. minor, Heincke, Gobius microps, Krôjer, et Remarques sur quelques autres œufs de Poissons osseux [Ibid., 8° série, t. V, 1893, n» 4, p. 189). 6. Day (Francis), The Fis/ies of Great Britain und Ireland, 1. 1, Lornion, 1881 . 288 FRÉDÉRIC GUITEL. 7. Saville-Kent, British Marine and Freshwater Fishes [Handbooks issued in connection vnth the Great International Fisheries Exhibition), cité par Pries, Ekstrom et Sundewall (*2, p. 247 et 248). H. MoBius (K.) et HeiiNGKe (Fr.), Die Fische der Ostsee, Berlin, 1883. 9. Petersen (C.-J. John), Om vore Kutlingers (Gobius) ^g og Ynglemaade [Videnskabelige MeddeleLser fra den naturhistoriske Forening i Kjoben- havn for Auret, 1891). 10. GuiTEL (Frédéric), Sur l'ovaire et l'œuf du Goh'ms mmutus {Comptes rendus des séances de l'Académie des sciences, t. CXIV, n° 11 (14 mars 1892), p. 612-616. ■l-l. — Observations sur les mœurs du Gobius minutus {Archives de zoologie expérimentale, 2« série, t. X, 1892, p. 499 à 555). 12. Fries (B.), Ekstrom (C.-U), and Sundevall (G.), A History and scandina- vian Fishes, deuxième édition revue et complétée par F. A. Sniitt, in f*, Stockholm, Paris. REMARQUES A PROPOS DE L'ÉVOLUTION DES CÉTACÉS V. PAQUIER. Des différents ordres de Mammifères, les Cétacés sont l'un de ceux dont l'origine reste encore obscure. Plusieurs théories ont été pro- posées à ce sujet et, à toutes, on peut faire la même objection de ne tenir compte que de quelques-unes des données fournies par l'ana- tomie comparée et la paléontologie. A la suite de recherches sur les Cétacés fossiles et vivants, j'ai été conduit à aborder ce sujet, en tâchant de distinguer plus nettement qu'on ne l'avait fait jusqu'ici les caractères primordiaux des carac- tères acquis, et ce sont ces quelques remarques que je désire pré- senter en ces pages. Des diverses interprétations relatives à cette question controversée, la plus imprévue est assurément celle qui présente les Cétacés comme les descendants des Hydrosauriens ou des Pythonomorphes, en un mot, des grands Reptiles marins de la période secondaire. Due à G. Vogt', elle repose sur l'existence, chez ces animaux, d'une dentition homodonte et en apparence monophyodonte^ sur l'absence de cavité médullaire dans les os longs, et enfin sur la ressemblance qu'offre leur membre avec celui des grands Reptiles nageurs. Or, la • C. VoGT, les Mammifères, 1884, p. 293. * On sait que les recherches de M. W. Kùkenlhal ont montré chez les Cétacés actuels l'existence réelle do deux dentitions (Anat. Anz., J.sgi ; Biol. Centralbl., 1892;. AKCH. DE ZUOL. EXP. ET UÉN. — 0'= SÉRIE. — T. 111. 1895. 19 290 V. PAQDIER. dentition homodonte et monophyodonte, en apparence, du moins, l'absence de cavité médullaire dans des os longs, s'observent égale- ment chez certains Édentés pour lesquels on n'a pas songé à invoquer une origine reptilienne. Quant à l'analogie des membres antérieurs dans ces deux groupes, simple phénomène de convergence, comme on le verra plus bas, elle est loin d'être complète, puisque les diffé- rents os du carpe et du métacarpe sont presque indiscernables chez les derniers Hydrosauriens, tandis que chez les Cétacés, au contraire, le carpe, qui montre toujours moins de huit os, est, par ses différents caractères, un carpe de Mammifère légèrement réduit et, à ce propos, un rapide coup d'oeil sur l'évolution des Reptiles marins est assez instructif. On peut remarquer avec MM. Baur et Gaudry que les plus anciens Ichthyosauriens, les Mixosaurus du trias, ont le rhembre relativement peu modifié, tandis que la complication et le raccourcissement de cet organe vont en croissant à mesure qu'on s'élève dans la série des terrains, si bien que, chez VOpthalmosaurus, le raccourcissement des os de la jambe atteint son maximum. Ces Reptiles dérivent, d'après M. Baur, d'un type terrestre, à membre normal, dont ils sont une branche récurrente. Guidé par des considérations du même ordre, M. Seeley a conclu pour l'origine des Plésiosauriens en faveur d'ancêtres continentaux. Enfin, M. Dollo * voit également dans les Pythonomorphes des La- certiliens adaptés à la vie aquatique. De tout temps, les formes marines de Vertébrés semblent donc avoir constitué des séries parallèles dont les caractères communs s'expliquent uniquement par une évolution convergente. C'est sans doute par un phénomène de cet ordre que les Cétacés reproduisent dans leur organisation quelques-uns des traits des Reptiles marins, dont ils sont les remplaçants et non les descendants, s'étant substi- tués à eux au sein des mers, comme les Mammifères terrestres ont pris la place des Reptiles sur les continents. 1 Dollo, liuUelin de la Société géologique belge, 1890. REiMARQUES A PROPOS DE L'EVOLUTION DES CÉTACÉS. ;2«J1 Létude sommaire des Cétacés les plus anciens fournit, par contre, sur l'origine de ce groupe, des renseignements d'une sérieuse valeur. Parmi ces formes, le Zeuglodon de l'éocène d'Amérique et d'Egypte montre une région cervicale libre et non réduite; il possédait l'arti- culation du coude et ses cinq doigts, sans phalanges surnuméraires, jouissaient d'une certaine liberté. De plus, sa dentition diphyodonte témoigne dans le sens d'une parenté avec des Carnivores par son allure générale et par la présence de molaires biradiculées'. Quant au Squalodoii '^ du miocène, il n'est connu que par son crâne, qui nous offre, avec la plus grande netteté, l'association d'une dentition de Zeuglodonte avec la tête osseuse des Platanistidés réalisée ici dans toutes ses particularités, jusqu'à l'asymétrie qui commence à se manifester. Ces faits montrent que dès le miocène inférieur il existait des types alliant les caractères des Denticètes à une dentition de Carnivore et, de plus, à en juger par le Zeuglodon, ils provenaient d'ancêtres offrant des affinités avec des Carnivores terrestres. 11 semble, dès lors, logique de conclure pour les Denticètes en faveur d'une parenté avec des Carnivores primitifs, dont ils seraient une branche récur- rente. Les Zeuglodontes et les Squalodontes marquent alors quel- ques-uns des stades par lesquels ont dû passer les Odoncètes dans leur adaptation à la vie aquatique; ils nous indiquent également par quel processus a pu s'effectuer cette accommodation. Cette origine avait, d'ailleurs, été indiquée par Huxley ' pour le groupe des Cétacés tout entier et, à propos de cette iiliation hypo- thétique, on peut remarquer que la dentition en apparence mono- phyodonle des Denticètes semble en voie de réalisation chez les Pho- cidés, où la substitution des dentitions s'opère à une époque peu ' Fl. Ameghino, Conti ibucion al Conocimento de los Mamiferos FosHes de la Hepu- blka Argentina, 1888. * Outre les travaux de P. van Beneden et de Gervais, voir V. Paquier, Études sur quelques Cétacés du miocène {Mémoires de la Société géologique de France. Paléonto- logie, 4csér., t. IV, 4« fasc, 1894). 3 Tu. Hu-XLEY, Éléments d'anatomie comparée des Vertébrés, 1875, 292 V. PAQUIEB. avancée de la vie foetale. A cette interprétation, quelques auteurs ont cru pouvoir objecter la presque contemporanéité des premiers Denticètes et des Squalodontes. Or, cette association est à ajouter à la liste déjà longue des faits du même ordre offerts par la Paléonto- logie, et qui tous enseignent que l'apparition de formes nouvelles n'entraîne pas l'extinction immédiate de types anciens. Les Squalo- dontes, à ce point de vue, doivent donc être considérés non comme étant eux-mêmes les ancêtres des Denticètes, mais bien plutôt comme des formes autorisant la conception d'un groupe de passage entre les Carnivores primitifs et les Denticètes; le Squalodon ne serait alors que le dernier représentant de ces êtres, attardé jusque dans le pliocène. Avant de quitter ces derniers Cétacés, il n'est peut-être pas déplacé d'insister sur certains d'entre eux considérés comme des types aber- rants, et qui ne sont autres que ceux par lesquels le groupe tout entier paraît avoir débuté; il s'agit de la famille des Platanistidés (Flower). Ce sont les plus anciens Denticètes signalés ; ils apparaissent dès le miocène inférieur, dans des dépôts marins, avec tous leurs carac- tères, et ne semblent avoir abandonné l'habitat marin qu'après le pliocène supérieur. Ils ont eu leur apogée marquée vers la fin des temps tertiaires et sont actuellement en complète décadence. Ré- partis, comme on le sait, entre les trois genres : Platanista, Inia, Pontoporia, et cantonnés dans les estuaires ou le cours des grands fleuves des régions chaudes de l'Asie et de l'Amérique, ils ne sont plus représentés que par des formes beaucoup moins variées et de taille moins considérable qu'aux temps tertiaires, et l'habitat des eaux douces n'est peut-être pas sans avoir hâté l'atténuation des dimen- sions de ces intéressants Cétacés. Leur région cervicale est composée de vertèbres libres et encore peu modifiées, peu réduites en épais- seur; de ce fait, la nageoire antérieure se trouve reportée à une cer- taine distance de la tête, tandis que, chez les Physétéridés, elle en est beaucoup plus voisine parla réduction considérable et la soudure REMARQUES A PROPOS DE L'ÉVOLUTION DES CÉTACÉS. 293 des cervicales. Ainsi se trouve réalisée une disposition avantageuse pour le mode de vie de ces animaux, et qui s'observe, d'ailleurs, chez le Poisson, oti la ceinture scapulaire vient s'insérer à la suite du crâne. Cette modification est déjà nettement indiquée chez les Del- phinidés, où les premières cervicales sont souvent unies. Enfin, tandis que Physétéridés et Delphinidés au crâne franchement asy- métrique présentent, avec l'immense majorité des Denticètes, un grand nombre de phalanges, les Platanistidés, faiblement asymé- triques, surtout dans les formes anciennes, ne nous offrent très généralement que trois phalanges. Si l'on considère l'ordre d'appa- rition de ces différentes familles, on voit que les Platanistidés appa- raissent les premiers dans le miocène inférieur; puis vers le miocène supérieur et surtout le pliocène inférieur se montrent des Delphini- dés, et, vers la fin du pliocène, débutent les vrais Physétéridés. II paraît donc vraisemblable d'interpréter les particularités offertespar les Platanistidés comme des caractères de moindre adaptation qu'il est rationnel de rencontrer chez les formes anciennes, et si enfin on remarque avec P. Gervais que leur cavité cérébrale est de mé- diocre capacité, il résulte de l'ensemble de ces faits que les Plata- nistidés, qui sont les premiers Denticètes connus, en sont très probablement le type le moins spécialisé, comme il y avait lieu de le penser, et qu'ils nous en représentent le type le plus primitif connu jusqu'à ce jour. Si l'étude des premiers Denticètes jette quelque lumière sur leur origine, il n'est rien de pareil pour les Mysticètes, qui, dès les ter- rains miocènes où ils se rencontrent pour la première fois, se mon- trent avec tous leurs caractères, sans qu'aucune de leurs particularités puisse nous éclairer sur leur phylogénie. La forme la plus ancienne qui soit suffisamment connue et dont on possède le crâne est le genre Cetothe^'ium. Assez voisin des Balénoptères, il est déjà tout à fait analogue aux Mysticètes actuels, dont il ne difl'ère guère que par sa plus grande longueur et ses dimensions plus réduites. Les Mysticètes, dès le 2!H V. PAO'IIER. miocène inférieur, possédaient donc l'ensemble de leurs caractères actuels, tandis qu'à cette époque les Denticètes étaient représentés par leurs formes les moins spécialisées, qui avaient à peine fixé leurs principaux traits et, à côté d'eux, subsistaient encore des types ar- chaïques, tels que les Squalodon. Ces deux sous-ordres différaient donc entre eux bien plus qu a l'époque actuelle, et il est fort malaisé de voir comment le plus ancien aurait pu donner naissance à l'autre. De plus, le type Mysticète apparaît comme plus ancien que le type Denticète, et sa masse cérébrale, infiniment plus réduite que chez les Odontocètes, les caractères d'une adaptation plus complète, tels que la présence de diverticules à l'appareil pulmonaire, permettent de le considérer comme plus primitif que l'autre, mais mieux adapté par suite de son antiquité plus considérable. Il semble donc peu vraisemblable de voir, avec M. W. H. Flower*, dans ces deux di- visions, les rameaux divergents d'une souche commune, puisque, actuellement, leurs différences sont moindres qu'aux époques pas- sées et, bien que le groupe des Cétacés soit d'apparence homogène, les deux sous-ordres révèlent néanmoins, à un examen sommaire, des caractères différenciels bien tranchés et tels que P. Gervais et P. van Beneden- ont judicieusement fait observer qu' « ils ne laissaient entrevoir aucune forme de passage dans la nature actuelle et pas davantage parmi les fossiles ». A côté de ces nombreuses divergences qui affectent un grand nombre de points, les analogies se présentent pour la plupart avec l'apparence de caractères acquis, ce qui donne à penser que les Mysticètes, plus anciens que les Denticètes, poiïr^ raient aussi provenir d'une souche différente. Hunter, Flower et d'autres encore ont mis en lumière un certain nombre de faits qui, à leurs yeux, permettraient de rapprocher les Cétacés des Ongulés et, bien que quelques-unes au moins de ces particularités, telles que la complexité de l'estomac et surtout la disposition du larynx, semblent être des caractères d'adaptation, il 1 IVhales past and présent and their probable Origin (Nature, XXVIII, t883). 2 Ostéographie des Cétacés, p. 297. REMARQUES A PROPOS DE L'ÉVOLUTION DES CÉTACÉS. 205 est cependant possible que ce rapprochement soit justifié, surtout en ce qui concerne les Mysticètes, qui se seraient différenciés avant les Denticètes et aux dépens d'Ongulés primitifs peu spécialisés. De cette plus grande antiquité résulteraient leurs caractères d'infériorité relative et aussi leur plus complète adaptation, qui semble, d'ailleurs, s'être effectuée, au moins vers la fin, suivant le processus indiqué plus haut pour les Denticètes, puisque les genres anciens, Mega- ptera et Balœnoptera, voisins des Cetotherium et des Plesiocetus, pos- sèdent une région cervicale formée de vertèbres libres et moins réduites que dans le genre Balœna qui, bien plus récent, montre, au contraire, ses cervicales considérablement réduites et soudées. Les deux groupes, fort différents à leurs débuts, par leur adaptation à l'habitat marin auraient acquis, grâce à un développement conver- gent, la plupart de leurs caractères communs et les différences si nettes qu'ils offrent encore ne seraient qu'un écho de leur origine diphylétique. Je ne puis me dissimuler que la phylogénie des Cétacés conçue de la sorte peut paraître au moins surprenante ; cependant, il convient de remarquer que, tandis qu'à la suite d'Huxley, les uns attribuaient aux Cétacés une parenté exclusive avec les Carnivores, d'autres, avec M.Flower, faisaient dériver l'ordre tout entier des Ongulés et, ré- cemment, M. W. Kiikenthal, à la suite de ses remarquables recher- ches sur divers points de l'organisation des Cétacés, est arrivé également à les concevoir comme issus de deux souches diffé- rentes. L'hypothèse que je viens d'émettre n'est pas à l'abri de toute cri- tique, les documents manquent sur bien des points pour les formes vivantes elles-mêmes, et la rareté des fossiles surtout anciens laisse des lacunes parfois difficiles à combler ; cependant, elle paraît, en l'état de nos connaissances, seule compatible avec la singulière évo- lution des Cétacés, elle est vérifiée par les récents travaux de l'ana- tomie comparée, enfin elle permet d'expliquer les nombreuses particularités qui, depuis longtemps, ont attiré l'attention des céto- 290 V. PAQUIEH. logues, et ce sont toutes ces raisons qui m'ont décidé à la présen- ter ici. En somme, les considérations que je viens d'exposer et les conclu- sions auxquelles elles conduisent peuvent se résumer comme suit : L'origine reptilienne des Cétacés doit être définitivement écartée, et c'est par un pur phénomène de convergence, joint à un dévelop- pement régressif, que les Cétacés présentent des caractères de Rep- tiles marins. La série d'Odontocètes constituée par les Zeuglodontes, les Squa- lodontes et les Denticètes proprement dits rattache ces derniers à des Mammifères terrestres, probablement à des Carnivores. Les Mysticètes se présentent comme plus anciens, plus primitifs et mieux adaptés que les Denticètes. Comme, d'autre part, les difi'é- rences irréductibles que présentent les deux sous-ordres de Cétacés ne font que s'accroître chez les formes fossiles, il y a lieu de conclure à deux rameaux d'origine différente convergeant progressivement par suite d'un commun mode d'existence. RECHERCHES LE BYSSUS DES LAMELLIBRANCHES LOUIS BOUTA N Maître de conférences de zoologie à la Sorbonne. INTRODUCTION. Depuis longtemps déjà, on sait que presque tous les Acéphales se fixent sur les corps étrangers à l'aide d'un organe appelé byssus ; il suffit d'examiner avec attention un paquet de Moules, comme on en apporte communément sur nos marchés, pour apercevoir les nombreux filaments qui constituent l'appareil fixateur de ce Lamel- libranche. Le byssus est même si généralement répandu parmi les Mollusques acéphales, que les naturalistes, frappés par la persistance de cet organe adhésif, ont cherché à en faire une caractéristique du groupe. Tous les adultes n'en sont pas pourvus, mais on le retrouve à l'état larvaire dans beaucoup de ces animaux. Un appareil aussi facile à distinguer, aussi caractéristique, devait nécessairement donner lieu à des études nombreuses ; aussi, depuis longtemps, des mémoires ayant pour but de nous renseigner sur l'origine et la structure du byssus ont-ils été publiés. Parmi beaucoup d'autres, un travail de M. Théodore Barrois ^ nous > Les Glandes du pied et les Pores aquifères chez les Lamellibranches, par Tliéodore Barrois. Lille, imprimerie Danel, ISSS. 298 L. BOUTAN. a fourni des renseignements très complets sur l'anatomie de l'appa- reil byssogène, qu'il a étudié chez un grand nombre de types. On sait maintenant que l'organe fixateur des Lamellibranches est le produit de la sécrétion de glandes volumineuses, dont la posi- tion et les éléments ont été nettement définis. Mon intention, dans le cours de ce mémoire, n'est donc pas de fournir une nouvelle étude sur l'anatomie du byssus. Quelques dé- tails demandent seuls à être élucidés et étudiés de nouveau ; mais il m'a paru intéressant d'envisager l'appareil byssal à un autre point de vue. Si l'on connaît les différentes formes qu'affecte le byssus dans les différents types de Mollusques acéphales, si l'on n'ignore pas l'ori- gine de la sécrétion qui lui donne naissance, je crois qu'il est un point sur lequel nos connaissances sont loin d'être aussi étendues et 011 les renseignements que nous pouvons puiser dans les mémoires déjà publiés sont nettement insuffisants. Le mode de fixation du byssus sur les corps étrangers, le méca- nisme à l'aide duquel s'opère cette fixation, les moyens employés par l'animal pour régénérer l'appareil lorsque, sous une influence quelconque, il s'est rompu ou simplement détérioré, me paraissent très insuffisamment connus. Cette ignorance presque complète qu'on constate dans nos connaissances sur le mode d'adhérence du byssus tient évidemment à ce que les renseignements en ces matières ne peuvent être obtenus qu'à l'aide d'une série d'expériences, en pla- çant les animaux dans des conditions biologiques convenables. Pour instituer ces expériences, il faut de toute nécessité que le naturaliste ait à sa disposition les moyens nécessaires pour mettre les animaux dans des conditions identiques à celles qu'ils rencontrent lorsqu'ils vivent librement dans les profondeurs de la mer. Ces moyens de travail ne se trouvent réunis que dans les laboratoires maritimes installés de longue date, et pourvus de toutes les res- sources nécessaires aux recherches scientifiques. Si j'arrive donc à fournir quelques renseignements nouveaux sur RECHERCHES SUR LE BYSSUS DES LAMELLIBRANCHES. 299 les points que je viens de signaler, si je parviens à élucider certains faits incomplètement connus, si je puis, en un mot, réaliser mon but qui est de montrer que le mécanisme de la fixation chez les Acéphales est le même quelle que soit la forme de l'appareil consi- déré, je devrai ce résultat bien moins à mon propre mérite qu'à l'ensemble des moyens mis à ma disposition dans le laboratoire Arago de Banyuis-sur-Mer, avec une libéralité scientifique dont je ne saurais trop remercier le savant fondateur de cette belle station /oologique. HISTORIQUE. ^ M. Théodore Barrois, dont j'ai déjà cité l'important travail dans mon introduction, a présenté un historique très complet de la ques- tion; il est donc inutile de reprendre en entier cet historique, et je me contenterai de rappeler après lui, seulement quelques-unes des opinions émises, en renvoyant à son travail pour un exposé plus complet. Après ce résumé rapide, je m'étendrai davantage sur les quelques travaux qui ont été publiés depuis 1885 sur le même sujet. Sans remonter jusqu'aux Grecs et aux Romains qui utilisaient le byssus de quelques Acéphales pour la fabrication de tissus précieux, mais qui se préoccupaient peu de l'origine de cet appareil, nous pouvons arriver directement à Antoine von Heide * qui, dans un court mémoire publié au dix-septième siècle sur l'anatomie de la Moule, a cherché à expliquer la production des filaments du byssus chez l'animal qu'il étudiait. Cet essai d'explication n'aboutit pas, il faut bien le reconnaître, à une théorie sérieuse ; le vieil auteur, au lieu de considérer ces filaments comme une production de l'animal, pensait que cette sorte de chevelure qui fixe la Moule sur les corps étrangers croissait et se développait à la façon d'une plante en en- fonçant ses racines dans l'intérieur du pied du Mollusque considéré. * Antoine von Heide, Anatomie Mytuli, Amst., 1683. 300 L. BOUTAN. Réaumur \ dans une étude publiée dans VHistoire de l'Académie royale des sciences y au commencement du dix-huitième siècle, fit faire un grand pas à la question. Avec sa sagacité habituelle, le savant naturaliste avait institué une expérience qui lui permit de se rendre compte, jusqu'à un cer- tain point, du mode de développement de l'appareil byssal. Ayant placé quelques Moules dans un récipient, après avoir tran- ché tous les filaments, il vit, à l'aide d'une observation patiente, l'organe se régénérer peu à peu. Il étudia alors la région oîi prenaient naissance les filaments et constata qu'ils sortaient tous d'une espèce de langue, partie noire qui occupait la face ventrale de tanimal, et qui n'est autre chose que le pied. « Le sillon longitudinal qui occupe une partie du pied, dit M. Théo- dore Barrois, est décrit avec beaucoup de soin par Réaumur, ainsi que le canal renfermant le tronc que l'auteur, dans un naïf langage, désigne sous le nom de tuyau creux. Réaumur distingue deux parties bien nettes dans le byssus de la Moule : le tendon rond (tronc) et les fils déliés (filaments terminaux). Il y a quelque apparence^ dit Réau- mur, que le gros fil est une espèce de gros cheveu qui croU comme les nôtres. Pour les filaments, le sagace observateur les considère comme sécrétés par les parties glanduleuses entourant le tuyau et propres n fil- trer la liqueur gluante destinée à les composer. » Plus loin encore, M. Théodore Barrois cite une phrase qui résume admirablement l'opinion de Réaumur sur la question : « Les Vers, les Chenilles, les Araignées, tirent de leur corps des fils aussi longs qu'il leur plaît, en les faisant passer par un trou de filière ; leur procédé ressemble à celui des tireurs d'or. Le procédé des Moules, au contraire, ressemble à celui des ouvriers qui jettent les métaux en moules. » Cet extrait de Réaumur est fort intéressant, car il montre que le ' RÉAUMUR, Histoire de r Académie royale des sciences, 1711. RECHERCHES SUR LE BYSSUS DES LAMELLIBRANCHES. 301 savant naturaliste s'était rendu exactement compte des faits et que son opinion se rapproche si bien de la vérité que nous n'aurons pas grand'chose à y changer par la suite. L'opinion de Réaumur, si séduisante cependant, si bien déduite des faits qu'il avait observés, ne fit pas longtemps autorité dans la science. Plus tard, de Blainville professe une opinion toute différente. Le byssus n'est plus pour lui qu'un assemblage de fibres muscu- laires desséchées. « Une des singularités des plus remarquables, dit de Blainville ' dans son Manuel de malacologie, qu'offrent les Mollusques acéphales, c'est que, dans plusieurs espèces, un plus ou moins grand nombre de fibres des muscles adducteurs peuvent être attachées ou s'aggluti- ner par leur extrémité élargie aux corps étrangers de manière à servir de point d'appui extérieur à l'animal, c'est ce qui constitue le byssus dans les Jambonneaux, les Moules, et le pied tendineux des Tridacnes et de certaines espèces d'Arches, etc., byssus qui n'est réellement pas formé, comme quelques auteurs l'ont dit, d'une ma- tière sécrétée par une glande et filée dans une rainure du pied, mais qui n'est qu'un assemblage de fibres musculaires desséchées dans une partie de leur étendue, encore contractiles, vivantes à leur ori- gine, et qui même l'étaient dans toute leur longueur à l'époque où elles ont été attachées. « Les deux opinions que nous venons d'exposer furent tour à tour soutenues et combattues par J. Muller^ von Siebold^ Leydig*, Vaillant ^ etc., lorsque M. Théodore Barrois ^ entreprit presque si- ' De Blainville, Manuel de malacologie, Paris, 1823. 2 J. MuLLER, De gland. Structura, Lipsiae, 1830. ' Von Siebold, Anatomie comparée, 1850. ^ Lkyoig, Manuel d'histologie, Paris, 186G. ^ Vaillant, Recherches sur la famille des Tridacnidie (Annales des sciences natu- relles, se sér., t. III, 1863). ^ Théodore Barrois, Les Glandes du pied et les Pores aqiujeres des Lamineli- branches, Lille^ 1885. 302 L. BÛUTAN. multanémeut avec Carrière* une série de recherches qui aboutirent du reste, dans leur ensemble, au même résultat. Les deux auteurs, vers la même époque, arrivèrent à établir d'une manière qui me paraît irréfutable que, chez presque tous les Lamellibranches, il existe des glandes byssogènes qui donnent réel- lement naissance au byssus, et que dans les Mollusques acéphales qui en sont dépourvus, on retrouve des vestiges plus ou moins dé- gradés de l'appareil byssipare. Dans le mémoire de M. Théodore Barrois que nous analysons maintenant, l'auteur a étudié un très grand nombre d'espèces de Lamellibranches, et de ce travail considérable, il arrive à tirer les conclusions suivantes : Le byssus est un organe de fixation sécrété par un appareil glan- dulaire complexe situé à la face inférieure du pied et formé aux dépens d'une invagination de l'ectoderme. Les glandes byssogènes trouveraient leurs homologues dans les glandes pédieuses des Gas- téropodes. Ce byssus est un organe caractéristique, pour ainsi dire, du type Lamellibranche; on en retrouve les traces dans presque toutes les familles et même dans presque tous les genres. D'après les recherches qui précèdent, l'appareil byssogène, dans son complet état de développement, se compose : 1° Du byssus; 2» Du sillon; 3" Des glandes du sillon ; 4° Du canal du byssus; 5° De la cavité du byssus ; 6° Des glandes de la cavité ; 7° Des muscles du byssus. Chacun de ces organes peut se développer d'une façon plus ou moins considérable suivant le degré de différenciation de l'animal ; ' J. Carrière, Die Driïsen im Fuss der Lamellibranchialen [Arb. aus dem Zool. Inst., Wiiisburg;, t. V, J879). RECHERCHES SUR LE BYSSUS DES LAMELLIBRANCHES. 303 chacun d'eux peut également disparaître ou se modifier suivant le degré de régression de Tanimal ou suivant son genre de vie. Le byssus et les muscles manquent les premiers, le reste de l'ap- pareil demeurant intact; c'est la forme qu'on observe le plus sou- vent : Pecten maximus, Corbula insequivalvisK Voici ensuite, en suivant, comme le dit l'auteur, la progres- sion décroissante, les principales modifications que nous avons constatées : 1» Disparition du byssus, de ses muscles et du sillon : Cardium pygmseum, Mya arenaria; 2° Disparition du byssus, de ses muscles, du sillon et de ses glan- des : Cardium norvegicum, Tellina solidula, Donax anatinum, Scrobi- cularia piperata; 3° Disparition de tout l'appareil glandulaire ^ il ne reste que le sillon et la cavité : Nucula nudeuns, Montacuta ferruginosa; 4° Disparition de tout l'appareil glandulaire; il ne reste plus que le canal et la cavité : Psammobia vespertina, Unlo CaUlaudl (Car- rière); 5" Il ne reste plus que le sillon : Mallelia Norrisii, Pectuncidus luù- costaius, Pisi'dium pusillum; 6° Il ne reste plus qu'un simple sac revêtu d'épithélium cilié, fermé de toutes parts et isolé au sein de la masse pédieuse : Ajw- donta anatina et Uni'o plicata (Carrière); T Enfin, comme dernier terme de la série, les espèces où ne se retrouve plus la moindre trace d'appareil byssogène : Soloi ensis, Pholas candida, Venus rudis^ etc., etc. Après le travail de M. Théodore Barroiset de M.J. Carrière l'étude du byssus semble entrer dans une phase nouvelle; les deux auteui^ précédents ayant élucidé la question anatomique, ceux qui se sont » J'ajouterai une remarque à ce propos, dit M. Tb. Barroiy, c'est que j'ai rencontré souvent un byssus très délicat chez nombre de types qui passaient pour en être dé- pourvus. Je suis persuadé qu'un examen attentif de certains Lamellibranciies dans leur milieu normal augmenterait d'une notable façon le nombre de ces espèces. 304 L. BOUTAN. occupés de l'organe adhésif des Lamellibranches laissant de côté les détails déjà connus, ont cherché à expliquer le fonctionnement de l'appareil. C'est ainsi que Gattie* dans deux mémoires publiés à peu d'inter- valle, cherche, dans la Moule et dans la Dreyssène, à montrer com- ment est constituée la matière byssale. Dans son premier travail, l'auteur décrit la surface adhésive des filaments de la Moule et cherche à établir qu'ils sont constitués par deux sortes de substances, l'une, la substance fondamentale, formée par des granulations nombreuses, représentant la sécrétion de la glande du byssus, cimentée par une sorte de colle unissant entre eux les éléments fondamentaux. Ces sortes de traînées de granula- tions se poursuivent d'après l'auteur dans l'intérieur des lilamenls qui viennent se souder avec l'axe principal du byssus. Dans son second mémoire Caltie entre plus avant dans l'étude histologique de la question, il arrive à celte conclusion, que nous croyons d'ail- leurs exacte, que la substance du byssus est sécrétée par des cel- lules glandulaires et que toutes les parties du byssus, lames, tronc et filaments, ont une origine commune et forment une masse unique. Je ne ferai que signaler le travail d'Osborn'-' sur l'organe byssal des Lamellibranches, pour opposer au travail de Cattie un mémoire de ReicheP dirigé dans le même sens, mais aboutissant à des con- clusions différentes. Cattie avait signalé que dans les espèces qu'il avait étudiées, lors- que l'animal voulait se déplacer, il était obligé de rompre les fila- ments de son byssus ; Reichel, au contraire, déclare que les Acéphales ne se déplacent pas en déchirant ou en décollant les filaments du ' J.-F. CattiEj De la manière dont les Lamellibranches s'attachent à des corps étrangers ; tes Lamellibranches recueillis dans les courses du Villen Barents, durant les mois de mai à septembre 18S0-1881, Bijdr. Dierk., t. XIII. * H.-L. OsBORN, The byssal organ in Lamellibranchs {An. Nat., t. XX). 3 L. Reichel, Uber das Byssusorgan des Lamellibranchiaten {Zool. An., I. X, p. 4S8-490,\ KECHEKCHliS SUK LE BYSSUS DES LAMELLIBRANCHES. 303 byssus, mais qu'ils sont obligés de se débarrasser de l'organe tout entier en rejetant le tronc et les racines. Quoique les deux auteurs professent des opinions en apparence contradictoires, ils ont cependant raison tous les deux. Chez la Moule, le déplacement s'effectue d'ordinaire à laide de la rupture des filaments ; dans d'autres types, comme l'Arche, par exemple, le dépla- cement n'a lieu qu'à l'aide d'une expulsion totale de l'organe fixateur. Enfin, dans les Dreyssènes, le procédé peut être mixte; les jeunes changent de place tantôt en détruisant les filaments, tantôt en expul- sant le byssus tout entier. Là, où l'opinion de M. Reichel me paraît inadmissible, c'est lors- qu'il prétend que le rejet du byssus chez la Dreijssena polymorpha est un phénomène analogue à la mue des Arthropodes. Pour lui, le byssus n'est pas le produit de la sécrétion de glandes spéciales ; il le considère comme une formation purement cuti- culaire. Le tronc avec ses racines constituerait un épaississement de la cuticule dans la cavité du byssus, et les filaments dans la gouttière du pied ; il nie par conséquent l'existence des cellules glandulaires spéciales, et pense qu'à la suite de l'arrachement du byssus, la forme de la cavité se simplifie et qu'une partie des cloisons disparait. Cette conception, qui ne manque pas d'originalité, se heurte ce- pendant à l'évidence des faits et ne supporte pas un examen sérieux. Une étude histologique bien faite de l'épaisseur des lames montre, avec la dernière évidence, que les éléments glandulaires existent réellement et que les glandes versent leur produit entre les lamelles. Les supprimer, comme le fait Ludovic Reichel, est une solution radi- cale, mais peu conforme à l'existence réelle des faits. — Un peu plus tard, M. J. Ryder ' a publié une note sur le byssus de VUlya arenaria, qu'il a observée fixée avec des Ascidies sur des bois flottants. ' Ryder, The Byssus of the yung of Ihe common dan (Ulya arenaria), R. mia. Soc, 1889. AKCH. DE ZUUL. EXH. ET UÉN. — o'i SÉHIE. — T. 111. 18U5. 20 306 L. BOUT AN. Nous devons signaler également une note de W. 8aville-Kent',qui fournit d'utiles indications sur l'expulsion du byssus chez les jeunes Meleagrines dont on a essayé l'élevage dans le Queensland, et une autre de Sverki sur la présence du byssus dans VUnio. Mais ces travaux ne rentrent pas directement dans notre sujet. — En 1892, M. le docteur Jobert^ a publié une note de quelques pages sur le byssus. Il donne des détails sur l'appareil byssogène dans les Pinna. A la partie antérieure des muscles rétracteurs du pied se trouve une ca- vité, d'où émergent les filaments du byssus. D'après lui, ce ne serait pas seulement les lamelles placées verticalement dans l'intérieur de cette cavité qui sécréteraient l'appareil adhésif : « L'organe sécréteur du byssus, dit-il, s'étend de l'extrémité antérieure du pied jusqu'à l'extrémité du long muscle rétractéur postérieur de cet organe, c'est-à-dire jusqu'au point d'insertion de ce muscle à la coquille qui est en contact avec le muscle transverse chargé de fermer la coquille. » La description de l'auteur est assez obscure, n'étant pas accom- pagnée de figures. « A mesure, dit-il, que l'on s'éloigne de l'extrémité extérieure du pied pour se rapprocher de la cavité du byssus, on voit la glande du pied se diviser d'abord en deux lobules, puis en quatre, et ces glandes viennent se placer au milieu du muscle rétracteur posté- rieur, dans le fond d'un sillon placé dans la masse musculaire entre les faisceaux de fibres. Dans ce sillon, on trouve les lames du byssus colorées en brun, qui sont composées de fils de formes plus ou moins cylindriques de directions parallèles. Le muscle, sur les pa- rois de ce sillon, est tapissé par une membrane anbyste, creusée de gouttières. » * W. Saville-Kekt, On the expérimental cuUivation of Ihe Mother of Pearl Schell. Meleagrina margarilifera, in Queensland Rep. Austr, asi., t. II. * Docteui- JûBERT, De la formation du byssus chez quelques Mollusques acéphales {Revue des travaux scientifiques, lx'J-2. t. XII, p. 390-398), KECHKKCHliS SUR LE BYSSUS DES LAMELLIBRANCHES. 3U7 D'après M. le docteur Jobert, ces gouttières servent de moule aux tilaments du byssus. D'après lui, si j'ai bien compris sa pensée, le byssus serait doue i'ondamentalement formé de filaments, au lieu d'être constitué par des lamelles, et cette disposition s'observerait non seulement chez les Plnna, mais encore chez les Mytilus et chez les Ai'ca. Nous sommes obligé de conclure de nos propres observations que les faits ont été inexactement interprétés par l'auteur et que le byssus est sécrété non pas sous la forme de filaments, mais sous la forme de lamelles. Les coupes de série ne peuvent laisser aucun doute à cet égard. S'il existe des filaments dans la partie extérieure du byssus des Pinna et des Mytilus, cela tient non pas à la sécrétion primitive^ mais au moulage qui s'opère dans le sillon superficiel du pied. — Nous n'insisterons pas plus longtemps sur le travail précédent. Celui de Sluiter ', Ueber die Beivegung einiger (ropischen Mollusken, mérite de nous arrêter davantage. L'auteur décrit le byssus dans la Barbatia; il indique qu'il est sécrété par les glandes byssogènes unicellulaires, qui déversent leur produit entre les plis des lamelles, et il signale l'absence de glandes sur les parois latérales de la cavité du byssus. La partie la plus intéressante du mémoire est celle qui a rapport à la loco- motion de l'Acéphale qu'il a étudié. La Barbatia, d'après l'auteur, se déplace à l'aide de son pied par un mécanisme analogue à celui qu'emploient les Gastéro- podes. Le pied, au moyen de ses muscles, est intimement ap- pliqué sur la paroi des corps auxquels il adhère ù laide du mucus sécrété. Dans ces conditions, le byssus est brisé brin par brin et régénéré au fur et à mesure des besoins, sans qu'une mue intervienne. Pour donner plus de solidité au byssus et empocher son arrachement, * Sluitkh, Ueber die Beivegung einiger tropischen Mollusken ( Tydschr, Nederl. DietL, l. 111). 308 L. BOUTAN. l'animal utilise le rappiocheraent des deux valves de la coquille ^ qui presse l'appareil dans sa partie moyenne et empêche le décollement possible. Il y a là un mécanisme analogue à celui que M. de Lacaze-Duthiers '^ a décrit depuis longtemps, dans ses cours publics, chez la Moule. Au moment où le savant zoologiste français étudiait le développe- ment des branchies chez les Acéphales, il avait été frappé des moyens employés parles Moules pour se déplacer dans les cuvettes où il les mettait en observation. Voici ce qu'il avait observé : Pow grimper le long des parois du verre, les jeunes animaux fixaient aussi haut que possible un filament byssal ; puis, lorsque le filament était solidifié, ils se hissaient le long de cette sorte de corde, après avoir rompu à l'aide d'un mouvement brusque du pied le filament qui s'opposait à leur ascension. — M. Paul Pelseneer^, qui s'est beaucoup occupé des Lamelli- branches et qui est grand amateur de théories, a voulu expliquer la forme du pied des Acéphales en la faisant dériver des formes les plus primitives des Mollusques. D'après lui, si l'on trouve chez les Lamellibranches les plus ty- piques le pied en forme de carène, cela tient à la production du byssus. Primitivement, le pied avait la forme d'un disque ; mais le développement du byssus a rendu l'usage du disque pédieux im- possible, d'où disparition de cette forme particulière du pied. La carène, dit-il, napu devenir disque ; on peut donc considérer cette * Ce procédé de consolidation du byssus est employé par tous les animaux à byssus compact. 11 est facile de le constater expérimentalement. Si l'on tire brus- ([uement sur la coquille d'un animal dont les valves sont écartées, le byssus est iUTaché sans eflort et entraîne avec lui les lamelles. Si l'on prévient en quelque sorte l'animal par quelques tiraillements préparatoires, il faut actionner fortement le byssus et on le déchire presque toujours au niveau des bords de la coquille. L'échancrure de la coquille des Arca tetragona permet la compression du byssus sans que la réunion des valves puisse produire une rupture complète. - De Lacaze-Duthiers, Cours professé à la Sorbonne, ls79, Paris. ' P. Pelseneer, Contribulion à l'étude des. Lamellibranches (Archives de biologie, 1891, t. XI, p. 233.) RECHERCHES SUR LE BYSSUS DES LAMELLIBRANCHES. 30!) dernièi'e disposition comme primitive, d'autant plus quelle est celle des Placophores et de tous les Anisopleures les moins spécialisés. L'affirmation est nette et précise ; mais, dans les sciences natu- relles, il ne suffit pas d'affirmer, il faut démontrer. M, Paul Pelseneer en a senti la nécessité, et il apporte sa preuve à l'appui. Malheureusement, cette preuve est loin de nous paraître aussi démonstrative que le voudrait l'auteur, et n'est guère de nature à justifier une affirmation aussi précise. D'après M. Pelseneer, il existe actuellement chez les Lamelli- branches, non seulement des types chez lesquels l'appareil byssal est en régression', mais aussi d'autres représentants du groupe oii Vap- pareil byssal est incomplètement formé : ^dl a, dit-il, constaté cette dis- position, ce stade peu avancé, chez la Nucula et chez Leda, Yoldia, peut-être chez Malletia et chez Solenomya, où les glandes byssogènes et un byssus existent, mais où le sillon byssal n'est pas représenté. Comme la Nucula a un pied de forme discoïde, la preuve est faite pour M. Pelseneer, qui tire de cette constatation des conclusions d'une importance telle, que je crois qu'il est bon de les rapporter in extenso. « On peut donc tracer, dit-il, comme suit l'histoire du développe- ment phylétique de l'appareil byssogène : « 1" Pied à face ventrale, plane, discoïde, sans sillon ; une invagi- nation postérieure, à diamètre intérieur constant ; « 2° L'invagination est encore comme ci-dessus, pas de cavité ni de canal bien distincts l'un de l'autre ; mais, au fond du cul-de-sac, une lame très peu saillante, quelques glandes byssogènes et un byssus peu développé ; (! 3° Disparition de la surface plantaire du pied ; séparation d'une cavité byssale et d'un canal; accroissement du nombre des glandes et de la force du byssus ; 1 Ainsi qiip l'a montn' Théodore Bnrroij:. .Tin r. BOUTAN. (( 4° Ultérieurement, naissance d'un sillon en avant de l'orifice, c'est-à-dire dans le sens où se dirige le byssus; production de glandes muqueuses du sillon ; déplacement de l'orifice du byssus plus en avant, etc. » Ainsi, pour M. Pelseneer, il est hors de doute que les Lamelli- branches, qui dérivent, toujours d'après lui, non pas des Rhipido- glosses, mais des Prorhipidoglosses, qu'il crée de toutes pièces et qui représentent, dans l'arbre phylogénétique des Mollusques, un stade entre les Ghitons et les Rhipidoglosses, ont eu primitivement un pied discoïdal. Mon intention n'est pas de discuter longuement cette opinion théorique. Il est possible, après tout, qu'à l'origine les Lamelli- branches aient eu un pied en forme de disque ; mais si la chose est possible, le contraire ne l'est pas moins, et malgré sa belle assu- rance, M. Pelseneer arrivera difficilement à convaincre les scep- tiques. Aux preuves qu'il prétend apporter, il suffit de répoudre en invo- quant l'embryogénie dont il fait vraiment trop peu de cas. Dans un travail ^ déjà ancien, j'ai étudié le développement de la Fissurelle, et j'ai montré que les larves ttr'S jeunes de cet animal étaient franchement enroulées comme les Gastéropodes typiques. Depuis, j'ai constaté le même fait chez les Parmophores et les Haliotides. Il semble donc difficile, d'après l'étude des larves, de rapprocher ces formes de Rhipidoglosses des Acéphales, et l'on peut dire, avec autant de vraisemblance, que les ressemblances extérieures que l'on con- state chez les adultes avec le type symétrique acéphale proviennent d'une régularisation secondaire, ou sont dues à des phénomènes de convei'- gence. D'ailleurs, pour en revenir uniquement aux Lamellibranches qui nous occupent, on peut faire une autre objection tirée également de ' BouTAN, Recherches sur le développement et fanatomie de la Fissurelle (Archives de zonloqie expérimentale, 2'' ppt., t. ITI, supplément). RECHERCHES SUR LE BYSSUS DES LAMELLIBRANCHES. 3H l'embryogénie. M. Pelseneer prétend que, primitivement, le pied des Acéphales était discoïdal, parce que, chez la Nucula, oii l'organe a cette forme, l'appareil byssal est incomplètement développé ; mais on peut lui répondre que les larves jeunes d'Acéphales représentent, à coup sw\ un stade plus primitif que n'importe quel LamelU branche adulte. Or, on sait depuis longtemps que chez les Huîtres', où le pied n'est pas discoïdal et pour cause, les jeunes embryons possèdent un byssus. Donc, l'existence du byssus est, pour employer le langage théorique de M. Pelseneer, plus primitive que la forme discoïdale du pied. Il ne serait pas, du reste, difficile de montrer que c'est précisément dans les espèces où le byssus est le moins développé que lepied atteint son maximum d'allongement, par exemple dans les Solen. Il faudrait donc admettre que, chez ces animaux, puisque le pied est très allongé, le byssus a été autrefois très développé, ce qui est une pure hypo- thèse, ou plus simplement que le pied s'est allongé pour faciliter la progression de l'animal, ce qui tend à prouver que le byssus n'est pas le facteur principal de l'allongement du pied chez les Acéphales et de sa forme en hache. — Thiele^ dans un mémoire intéressant sur la phylogénle de l'ap- pareil byssal des Lamellibranches, donne des détails précis sur la sé- crétion du byssus de YArcaNoe. La distinction qu'il établit entre les glandes qui sécrètent la matière gluante et l'épithélium proprement dit, qui revêt les lamelles, me paraît exacte; ce qui me paraît plus difficile à admettre, c'est Thomologie qu'il cherche à établir entre les glandes postérieures du pied des Haliotides et les glandes bysso- gènes des Acéphales. * On pourrait objecter que les Ostrea sont des formes acéphales relativement récentes, puisqu'elles n'apparaissent qu'i\ partir du carbonifère, tandis qu'on constate la présence des Nucula depuis le silurien ; mais les Arca dont le système byssal est si remarquablement développé se rencontrent également dès le silurien inférieur (Zittel, Traité de 'paléontologie, Paris, 1887, t. I, p. M). 2 Thiele, Zur Philogenie des Byssus apparats der Lamellibranchier ( f^erh. deutsch. Zool. gen,, t. IT). 312 ï >• BOUTAN. Les différences présentées par les formes larvaires enroulées des Haliotides et les formes larvaires des Lamellibranches sont telles qu'il me semble presque inutile, étant donné l'absence de tout fait positif, d'essayer, ainsi que je le disais plus haut, d'établir une ho- mologie quelconque entre des parties aussi dissemblables. Quant au rôle du mucus, au point de vue de l'adhérence du pied des Haliotides sur les corps où rampe l'animal, il me paraît très accessoire. Le pied des Haliotides adhère fortement, parce qu'il fonctionne à l'aide de ses muscles comme une double ventouse, et ce sont les muscles du pied et non le mucus qui lui permettent d'arriver fi un pareil résultat. En résumé, l'étude des travaux jusqu'ici publiés montre que l'anatomie proprement dite de l'organe formateur du byssus est actuellement connue. Les auteurs les plus récents, à peu d'excep- tions près, sont d'accord pour reconnaître que le byssus est le pro- duit de la sécrétion d'une glande byssale, dont les éléments sont faciles à mettre en évidence par les procédés histologiques. Le mode d'adhérence, le mode de fixation du byssus, les moyens employés par l'animal pour régénérer l'organe, n'ont jamais été étu- diés d'une manière générale, et nous n'avons que des données in- complètes à ce sujet, I MŒURS ET HABITAT DE l'aRCA TETRAGONA. VArca teiragona est un acéphale relativement commun dans les fonds de 100 à 150 mètres de Banyuls-sur-Mer. Pendant les nombreux dragages effectués dans les environs du laboratoire Arago, et qui ont fourni des matériaux pour la carte zoologique du cap Creux, de nombreux spécimens de ce mollusque ont été recueillis et mis à ma disposition. ]'Arrn teiraqonn vit remarquablement bien dans les aquariums et RECHERCHES SUR LE BYSSUS DES LAMELLIBRANCHES. 343 ne paraît pas se ressentir de la différence de pression entre son ha- bitat habituel et celui qu'on lui donne artificiellement lorsqu'on la met en expérience; elle se prête donc très bien à une étude expéri- mentale. Voici, d'après Bucquoy', les caractères spécifiques de l'espèce que j'ai spécialement étudiée. Diagnose. — Coquille (diamètre umbono-ventral, i3 millimètres; diamètre antéro-postérieur, 29 millimètres; épaisseur, 16 millimètres), équivalve, très inéquilatérale, assez solide, de forme transverse, sub- quadrangulaire. Sommets saillants, incurvés, très écartés, séparés par une aire cardinale, large, plane, de forme losangique. Bord ven- tral arqué, bâillant vers son milieu; côté postérieur obliquement tronqué, rectiligne. Surface nettement divisée par une carène aiguë qui part des sommets et aboutit au point de jonction du bord pos- térieur et du bord ventral. La région antérieure qui comprend toute la surface depuis la carène jusqu'à l'extrémité antérieure, est garnie de côtes rayonnantes fines, nombreuses et serrées, un peu plus for- tes à l'extrémité antérieure et coupées par des stries d'accroissement qui déterminent une réticulation dans laquelle dominent les côtes rayonnantes. La région postérieure comprise entre la carène et le bord cardinal ne présente que trois ou quatre côtes rayonnantes, larges et peu saillantes. Intérieur des valves lisse et luisant. Bord cardinal rectiligne, pourvu d'une série de dents, petites et perpen- diculaires au milieu, plus fortes et divergentes aux extrémités. Bord postérieur rectiligne, pourvu de trois ou quatre ondulations obsolè- tes. Bord ventral et bord antérieur finement denliculés. Impressions musculaires semblables à celles de VArca Noe. Ligament externe très mince et appliqué sur l'aire cardinale, dont il ne recouvre qu'une faible partie. Il est de plus séparé en deux régions subtrian- gulaires ou saglttées, dont les sillons disposés en losanges emboîtés forment ordinairement une série distincte dans chaque région. Bys- > BucQuoY, Dantzbenberg et Dollfus, les Mollusques marins du Roussillon, t. Il, Ti» fasc. Paris, 1891. 314 L. BOUTAN. sus épais, solide. Épiderme squameux, ne persistant d'habitude que le long du bord ventral et sur les carènes. Coloration d'un blanc sale passant au brun ferrugineux du côté postérieur. L'aire cardinale présente des lignes fauves, obliques sur un fond gris clair. Coloration interne des valves blanche, lavée de brun clair du côlé postérieur. Le type de l'ylrm tetraqona est la forme méditerranéenne régu- lière, rectangulaire et tronquée presque à angle droit du côté pos- térieur. Les Arca letragonn vivent fixées sur les rochers ou sur les larges valves des coquilles mortes de Pecten; elles se collent à l'aide d'un byssus massif qui apparaît à l'extérieur de la coquille sous l'appa- rence d'une masse d'un vert brunâtre. KUes semblent rechercher l'obscurité, et dans les aquariums, où on les met en expérience, elles se fixent presque toujours du côté de l'ombre, à la face inférieure des corps solides. Elles paraissent préfé- rer une eau peu aérée contrairement à la plupart des Mollusques, et s'éloignent du courant lorsqu'elles se trouvent dans le voisinage de l'eau projetée dans l'intérieur des bacs. D'ordinaire on trouve ces Acé- phales réunis en véritables paquets autour des pierres ou des co- quilles qu'on ramène du fond ; ils ne se fixent que très rarement les uns sur les autres, mais vivent groupés autour de la surface du corps étranger. Cette espèce est rendue particulièrement précieuse pour l'expé- rimentateur, non seulement à cause de sa vitalité exceptionnelle, mais aussi à cause de la forme particulière de ses crochets, qui per- mettent de fixer aisément l'une des valves, en laissant à l'autre la liberté de ses mouvements. ■< II EXPÉRIENCES RELATIVES A l'aRCA TETRAGONA. Dans les dragages effectués à bord du Roland, le vapeur du labo- ratoire Arago, sous la direction de M. Pruvot, le savant professeur RECHERCHES SUR LE BVSSUS DES LAMEIJJBRANCHFS. .SIS de la Faculté de Grenoble, de nombreux exemplaires de VArca tetragona m'étaient fournis presque journellement pendant la cam- pagne de 1894. J'avais été frappé de la facilité avec laquelle les Arches que je pla- çais dans les aquariums se débarrassaient de leur byssus, pour se fixer ensuite dans les endroits qui leur paraissaient les plus favo- rables. J'instituai alors une série d'expérioiices pour contrôler le méca- nisme de la fixation *. (^est le résumé de ces expériences que je vais exposer dans ce chapitre. Première expérience. — Le o mai 1894^ dix Arca tetragona adultes, auxquelles le byssus a été soigneusement arraché, sont isolées dans une cuvette et placées dans le voisinage d'un courant d'eau. Résultats. — Trois jours après, toutes les Arches sans exception ont régénéré un nouveau byssus et sont fixées sur les parois du ré- cipient. Deuxième expérience. — Le 9 mai 1894, un nouveau lot de dix Arm tetragona adultes sont préparées de manière à ce que les byssus, dé- collés à l'aide d'un scalpel delà surface où ils adhéraient, soient, cependant, conservés intacts. Les animaux ainsi préparés sont isolés et mis en expérience dans les mêmes conditions que les précédents. Résultats. — Deux jours après, huit Arches ont rejeté leur byssus ; deux se sont déjà fixées à l'aide d'un nouvel appareil récemment sécrété. Dans les jours suivants, les deux dernières rejettent également l'ancien byssus, et la totalité des Arches se trouve fixée à l'aide d'un byssus de seconde formation. ' Le résumé de ces expériences a été inséré aux Comptes rendus de l'Académie des sciences, t.. CXX, janvier 1895. p. 20«. .116 L. BOUTAN. Troisième expéiience. — Le 12 mai 1894, une douzaine d'Arches provenant d'un nouveau dragage sont préparées de la façon sui- vante : A l'aide d'une paire de ciseaux, le byssus est sectionné dans son milieu à l'aide d'une incision horizontale, et les animaux ainsi mu- tilés sont isolés dans les mêmes conditions que précédemment. Résultais. — Trois jours après, huit Arches ont rejeté l'ancien byssus et en ont sécrété un nouveau. Les quatre autres se sont fixées à l'aide de l'appareil mutilé. Quoirième expérience. — La quatrième expérience, qui avait été mise en cours pendant les précédentes (9 mai 1894), a porté non plus sur des individus adultes, mais sur des formes jeunes ne dé- passant pas fi à 7 millimètres. Sept de ces jeunes animaux dont les byssus avaient été décollés avec soin, à l'aide d'un scalpel, de la paroi adhérente, et qui par conséquent avaient conservé leur organe adhésif intact, avaient été isolés dans l'intérieur d'une cuvette. Résultais. — Au bout de deux jours, trois seulement avaient rejeté l'ancien byssus, tandis que les quatre autres s'étaient fixés à l'aide de l'ancien appareil. Cinquième expérience. — La cinquième expérience, commencée le 14 mai 1894, a porté également sur des formes jeunes. Le byssus avait été sectionné (comme dans l'expérience n" 3) à peu près dans son milieu. Résultats. — A la fin de la deuxième journée, toutes les jeunes Arches placées dans ces conditions s'étaient fixées sur les parois du récipient, en utilisant l'appareil adhésif mutilé. Sixième expérience. — La sixième expérience a porté sur quatre Arca tetragona adultes provenant des expériences précédentes, et qui avaient régénéré un nouveau byssus depuis plusieurs jours. KECHEKCHES SUK LE BYSSUS DES LAMELLIBKANCHES. 317 Le 17 mai, ces animaux turent mis en observation, après arrache- ment du nouvel appareil byssaL Résultats. — Trois jours après, ces animaux avaient régénéré un byssus de troisième formation. L'expérience poursuivie sur un seul échantillon nous a montré que, dans l'espace de quinze jours, l'animal pouvait renouveler son appareil byssal jusqu'à cinq fois. Quelles conclusions est-il possible de tirer de la série d'expé- riences et d'observations que nous venons de décrire, et qui ont été contrôlées et confirmées par d'autres observations qu'il est inutile d'énumérer ici, puisqu'elles n'ont fait que montrer la constance des résultats précédents? La première expérience prouve que les Arches adultes, chez les- quelles l'organe byssal a été brutalement arraché, peuvent le régé- nérer dans un temps très court et se fixera l'aide d'un nouvel appa- reil sécrété pour les besoins nouveaux de l'animal. La deuxième expérience démontre que les Arches adultes ne peuvent utiliser l'ancien byssus pour se fixer, lorsque celui-ci a été décollé en entier de la surface à laquelle il adhérait. Pour que les Arches adultes se fixent une seconde fois, il leur est nécessaire de rejeter l'ancien byssus. La troisième expérience est moins concluante, puisque la section du byssus dans le voisinage de la partie médiane permet tantôt à l'animal de se fixer directement sans former un nouvel appareil; tantôt, au contraire, l'oblige à rejeter l'ancien byssus pour sécréter un nouvel appareil fixateur. L'étude de la structure du byssus de l'Arche nous permettra ce- pendant d'expliquer, dans le chapitre suivant, ces résultats en appa- rence contradictoires. La quatrième expérience, qui a porté exclusivement sur des jeunes, donne également un double résultat et indique que, tantôt les jeunes animaux se fixent directement à l'aide de l'ancien byssus, 318 L. BOUTAN. laiitôl, au cuiilraire, se débarrassent de l'appareil primitif et le remplacent par une nouvelle formation. Pour être expliquée, celte expérience aura besoin également du contrôle de l'anatomie de l'organe chez les Arches jeunes. La cinquième expérience ne laisse pas de place à l'indéGision. Toute Arche jeune, dont le byssus a été sectionné dans le voisinage de sa partie médiane, se lixe sans avoir besoin de sécréter un nouvel appareil. Enlin, la sixième expérience démontre que la régénération du byssus est un procédé sinon habituel, au moins possible à effectuer autant de fois que les Arches adultes, sous une influence quel- conque, ont été séparées de la paroi sur laquelle elles étaient fixées. Dans le chapitre suivant, nous étudierons la disposition de l'appa- reil byssal dans l'Arche adulte et dans l'Arche jeune, pour essayer de trouver l'explication des résultats obtenus dans les expériences que nous venons d'exposer. III SUR LA STRUCTURE ANATOMIQUE El' mSTOLOGUjUE DU BYSSUS DE l'aRCA TETRAGONA. (Juand on considère une coquille intacte d'Arca letrago7ia,oacon- state que les bords libres des valves, munis d'une sorte de ciliation grossière, ne se rejoignent pas exactement sur la ligne médiane. Même lorsque les abducteurs fonctionnent, il reste toujours dans la partie correspondante à la face ventrale de l'animal une ou- verture par laquelle le byssus peut faire saillie à l'extérieur. A ce niveau, il existe sur la coquille une série de dents peu accu- sées qui jouent un rôle important et donnent un point d'appui à l'ap- pareil fixateur lorsque l'Arche est contractée. (Juand on incise les ligaments de la coquille et qu'on sectionne les muscles, en enlevant le manteau etla branchie, comme cela a été figuré dans la planche Xlll, Ug. 1, on aperroil une masse muscu- RECHERCHES SUR LE BYSSUS DES LAMELLIBRANCHES. 319 laiie considérable qui se poursuit du côté de la bouche, sous la forme d'une languette divisée en son milieu par un sillon. C'est le pied de VAf-ca tetfagona; la partie ventrale de cette masse musculeuse, celle qu'on a sous les yeux lorsqu'on entr'ouvre les valves, est occupée tout entière par le byssus. Getappareiljmassif de couleur verte chez l'adulte s'enlonce^ d'une part, dans l'intérieur du pied et s'étale, d'autre part, par son extré- mité distale, à la surface des corps étrangers. Cet aspect du byssus a été traduit schématiquement dans là figure 1, chez ÏArca tetragona adulte, et dans la figure 2, chez VArca tetragona ÏQViWQ. Le pied P, muni deisa languette p\ est situé à la partie supérieure de la ligure, tandis que le byssus B prend son in- sertion sur une coquille cp, placée à la partie inférieure de la figure. Il me semble préférable d'examiner d'abord la structure du byssus avant de passer à l'étude du pied. Lorsqu'on tire vivement sur l'appareil byssal d'un animal épa- noui dans l'eau et dont les valves sont légèrement entr'ouvertes, on arrache sans difficulté l'appareil fixateur tout entier. Il se présente alors, vu de profil comme dans la figure 3, pi. XIII, sous la forme d'une masse quadrilatère assez régulièrement disposée. La partie adhérente s a l'apparence d'une lame plus ou moins frangée. La portion t' en contact avec le pied et opposée à la précédente a un as- pect tout différent. Elle est constituée par une série de lamelles rap- prochées et presque parallèles entre elles. La figure 10, qui représente une coupe sagittale du byssus à l'âge adulte, montre la disposition de ces lames qui sont soudées à une de leurs extrémités et libres à l'extrémité opposée. Étudions la structure du byssus chez l'adulte. Si l'on coupe le byssus à l'aide d'une section transversale, selon la direction ab, fig. 3, on a l'aspect représenté dans la figure 5 et l'on constate que le byssus de l'Arche adulte est formé par une série de lamelles libres dans la partie la plus voisine du pied {h'), in- 320 L. BOUT AN. timemenl soudées dans la portion distale [h). Si l'on coupe au con- traire le byssus horizontalement selon la direction ef, fig. 3, dans le voisinage du pied, on obtient l'aspect représenté dans la figure 8 : les lamelles soudées à un bout sont libres du côté opposé. Si l'on coupe, également, toujours à l'aide d'une section horizontale, le byssus selon la direction cd, fig. 3, dans le voisinage de la surface d'adhé- rence, on a l'aspect représenté dans la figure 7 où les lamelles sont soudées à leurs deux extrémités et même souvent dans toute leur étendue. En résumé, le byssus à l'âge adulle est. constitué par une série de lamelles, libres dans la partie en contact avec le pied et qui se soudent de plus en plus intimement à partir de la région moyenne. Tout différent est le byssus quand on l'étudié dans YArca tetru- gona jeune (fig. 2). Vu de profil, l'appareil fixateur a une forme triangulaire. L'un des côtés du triangle est constitué par la ligne d'adhérence s, le second côté par le bord libre du byssus et le troisième par les lamelles /', fig. 4, pi. XIII. A cette différence d'aspect extérieur correspond une différence de structure intime que les coupes mettent facilement en évidence. Si l'on fait une section transversale selon la direction a!b\ fig. \, on obtient l'aspect représenté dans la figure 6. Les lamelles h! h" h sont nettement distinctes dans toute leur étendue et n'ont pas toutes la même structure. Les lamelles externes sont déjà dures et cornées, tandis que la partie interne représentée en pointillé dans la figure 6 reste molle et plastique. Sur les coupes horizontales, l'apparence doit donc être différente de celle que nous avons constatée chez les Arches adultes; dans toute l'étendue du byssus, aussi bien dans la partie proximale que dans la partie distale, les lamelles restent libres à l'une de leurs extrémités. En résumé, le byssus chez les jeunes arches est constitué par une série de lamelles qui se soudent incomplètement à partir de la région moyenne. Telle est la structure du byssus chez l'Arche adulte et chez l'Ar- KECHERCHtiS SUK LE BVSSUS DES LAAJELLlBHÂiNCHES. 321 che jeune. Il reste maintenant à étudier la structure de la glande byssogène, qui a donné naissance à cet appareil fixateur. Pour me rendre compte de la structure anatomique et liisLolo- gique du byssus, j'ai fait de nombreuses séries de coupes portant tour à tour sur des formes jeunes et des formes adultes. Les matériaux étaient fixés à l'aide du sublimé acétique, colorés en masse à l'aide du carmin boracique ou de l'hématoxyline glycérique acide, montés par les procédés ordinaires dans la paraftine après passage dans la série ordinaire des alcools. Les préparations étaient recolorées sur coupe à l'aide du vert de méthyle', qui fait élection dans les diverses parties du byssus. Uuelques coupes ont été figurées dans la planche XIV et portent sur des échantillons adultes ou des échantillons jeunes. Dans la description qui va suivre, je désignerai sous le nom de lamelles les divisions inférieures du byssus, et sous le nom de lames la portion qui appartient en propre à la glande byssogène. Ouand ou a arraché brutalement le byssus, on u l'aspect très caractéristique déjà noté par Théodore Barrois - et par Thiele ^ Sur la face ventrale du pied, on distingue au milieu d'un enfoncement dis- coïdal une série de lames parallèles, entre lesquelles venaient s'em- boîter les lamelles du byssus. A l'une des extrémités de l'enfon- cement discoïdal, du côté de la languette pédieuse, vient s'ouvrir un sillon qui s'étend jusqu'à l'extrémité de la languette, comme cela a été figuré planche Xlll, fig. 2. Si l'on fait une coupe sagittale de la cavité, parallèlement à la direction des lamelles et de manière à intéresser l'une délies, on a l'aspect figuré planche Xlll, fig. 1^. La figure 12 représente un fragment de lame avec le fragment de lamelle en continuité avec elle. La lame est constituée par une * Le vert de niélliyle a la propriété de colorer fortement la portion du byssus qui n'est pas encore durcie et qui n'a pas subi l'action de l'eau ; il laisse au contraire intactes les parties durcies et déjà cutiuisées. * Th. Barrois, loc. cil. ' Thiele, loc. cil. AUGH. DE ZOOL. EVP. liT (JÉ.N. ■— 3'' bÉHlli. — T. 111. ISDj. al 322 L. BOUIAN. couche de tissu conjonctitau milieu de laquelle se trouve un nombre considérable de glandes unicellulaires {gl). Ces glandes sont constituées par une cellule volumineuse pré- sentant un gros noyau et encombrée de granulations. Elles abou- tissent, à l'aide d'un prolongement souvent très considérable, au ni- veau de l'épithélium {ep) sous-jacent à la lamelle. Ce sont ces glandes qui sécrètent la matière collante ; à peu près tous les auteurs sont d'accord sur ce point. Au-dessus de l'épithélium, en contact avec le produit sécrété h', on aperçoit une striation très nette [si] qu'on serait tenté de prendre, au premier abord, pour des cils vibratiles ; en réalité, ce ne sont que des petits bâtonnets de matière sécrétée, absolument immobiles. La lamelle proprement dite présente deux zones distinctes, une pre- mière zone h' très granuleuse se colorant fortement par le vert de méthyleetpar le carmin boracique, et une zone h striée longitudi- nalement et insensible à l'action des colorants. La structure histologique des lames de la glande byssogène est sensiblement la même chez l'adulte et chez le jeune. La figure 22 de la planche XIII représente une coupe transversale intéressant le sommet de plusieurs lames ; on y retrouve, d'ailleurs, tous les élé- ments que nous venons de décrire. La figure 18, pi. XIll, qui représente une coupe transversale du corps tout entier d'une jeune Arche, passe au niveau du pied et de la glande byssogène. Cette coupe est intéressante à considérer, parce qu'elle nous montre les rapports des muscles avec les lames de la glande byssale. Ils forment une masse volumineuse sous- jacente à la glande, et leur contraction tend à rapprocher le byssus de la face dorsale. Cetle coupe montre également que le pourtour du pied, sur la face ventrale, entoure complètement la base du byssus. Enfin, dans la même figure, on voit que, chez la jeune Arca telragona, la partie centrale du byssus reste molle et granuleuse. La figure 19 et la figure 20 représentent, à un faible grossissement, une section horizontale du pied passant au niveau des lames et des UKCHliKCHliS SUR LE BOSSUS DES LAMELLIBRANCHES. 323 lamelles dans ÏArca letragona adulte. Elles sont destinées à inon- lier, d'une part, le rapport et l'emboîtement des lames et des la- melles, et d'autre part, la disposition des lamelles soudées à l'une de leurs extrémités, libres dans la portion la plus voisine du sillon qui occupe la face ventrale de la languette. Vax résumé, l'élude histoloyique du byssus montre que les lamelles hijssales sont le produit de la sécrétion de ylandes unicellulaires renfer- mées dans l'intérieur des lames. Cette sécrétion reste molle au niveau des lames. IV FON'CTIONNEAIE.NT DU BYSSUS DANS LES FOHMES JLUMiS ET DANS LES FORMES ADULTES. Les connaissances que nous venons d'acquérir sur la structure aiiatomique et histologique du byssus vont nous permettre de nous rendre compte du fonctionnement de l'appareil chez VArca tetra- fjona. Deux cas sont cependant à considérer : d'une part celui de la l'orme jeune, d'autre part celui de la forme adulte. Dans l'étude de la forme jeune, nous avons constaté que le byssus n'était homogène dans aucune portion de son étendue. Ainsi que nous le montre la figure G de la planche XIII, il est facile de s'as- surer que, dans les formes jeunes, les lamelles ne sont endurcies, soUdiflées en quelque sorte, qu'à la périphérie. Au centre, la ma- tière byssale, la substance collante, conserve sa plasticité, et, sous l'action des contractions de l'animal, peut s'injecter dans les inter- valles restés libres. Chez les adultes, au contraire, qui rentrent dans le second cas, les diverses lamelles qui constituent le byssus sont soudées à partir d'une certaine hauteur. U n'existe plus entre ces lamelles de matière plastique, la soliditi- cation est complète et la matière byssale ne trouve plus de chemin (juvert dans l'intérieur du byssus pour s'évacuer vers l'extérieur. La constatation de ces faits nous permet maintenant d'inlerprélcr 324 L. BOUTAN. avec plus de rigueur les résultats des expériences que nous avons rapportées dans un des chapitres précédents. Les Arches adultes auxquelles on avait arraché brutalement le byssus (première expérience) l'ont régénéré presque aussitôt parce (jue les lamelles byssales, conservées après le rejet du byssus, ont continué à sécréter et ont pu reproduire un nouvel appareil. La deuxième expérience, où des Arches adultes avaient été mises en observation avec leur byssus intact, va s'interpréter de même très aisément. Chez les adultes, l'intérieur du byssus est formé de lamelles sou- dées; lorsque les lames sécrètent la matière byssale, cette colle ne peut s'évacuer entre des lamelles. Dans ces conditions, l'ancien byssus constitue \\n obstacle à la fixation; il proémine au-dessus du pied, gène le fonctionnement de ce dernier et l'empêche d'adhérer fortement sur les corps solides pour y déposer de la colle fraîche. Ce byssus, devenu inutile, doit donc être expulsé avant que l'animal puisse songer à se lixer de nouveau. Il est aisé également d'interpréter la troisième expérience et son double résultat. On avait incisé horizontalement le byssus des animaux vers son milieu; une partie des Arches avaient rejeté le byssus, les autres s'étaient fixées à l'aide de l'organe primitif conservé. Ce résultat tient à ce que, dans le premier cas, l'incision avait intéressé seulement la partie compacte du byssus, tandis que, dans le second, la section avait porté sur la région oii les lamelles sont encore incomplète- ment soudées. Les premiers animaux avaient rejeté leur byssus, parce qu'il ne laissait pas filtrer la matière colorante; les seconds l'avaient con- servé, parce que la condition contraire était remplie. La quatrième expérience portant sur des formes jeunes s'explique de même sans difficulté. Dans cette expérience, un certain nombre de jeunes Arches tétra- gones élaiciil arrivées à se fixer directement, quoique le byssus eùL RFCHERCHES SUR LE BYSSUS DES LAMELLIBRANCHES. 32^ été conservé intact ; il suffît de considérer la figure 6 de la plan- che XIII pour comprendre le fait. Les jeunes Mollusques avaient con- servé leur byssus intact sans la rejeter, parce que la matière byssale avait pu s'infiltrer librement parla partie centrale de l'organe. Celles qui avaient procédé comme les Arches adultes et avaient rejeté leur byssus, y avaient été obligées à cause de l'état plus avancé de l'or- gane et de la soudure prématurée des lamelles. Ce qui le prouve d'une façon péremploire, c'est le résultat de la cinquième expérience où le byssus de plusieurs jeunes avait été sec- tionné vers le milieu de la hauteur. Dans ce cas, la matière byssale avait un large chemin ouvert devant elle, et tous les jeunes Mol- lusques se sont fixés sans sécréter un nouvel appareil adhésif. Nous pouvons conclure de ce qui a été dit plus haut que le fonc- tionnement du byssus suit deux phases successives dans les Arches : 1° Chez les jeunes, le pied s'applique exactement sur la surface des corps auxquels les jeunes Mollusques vont s'attacher. Une pre- mière sécrétion a lieu; elle durcit au contact de l'eau sur toute la périphérie lorsque le pied se rétracte, mais la partie centrale de la masse reste, sinon liquide, au moins plastique. Pendant quelque temps, l'accroissement du byssus se continue par la partie centrale de l'organe, et une sorte d'injection a lieu dans l'intérieur du canal ainsi virtuellement constitué et complété en avant parle sillon du pied. Les nouvelles masses de colle injectée refoulent devant elles les anciennes incomplètement solidifiées, et la partie supérieure du byssus s'étale en formant une sorte de champignon terminal '. 2° Plus tard, le byssus se solidifie, la matière gluante ne peut plus cheminer dans son intérieur ; il faut cependant que le byssus con- tinue à s'accroître et garde ses proportions relatives avec l'animal. Le sillon situé à la face ventrale de la languette pédieuse qui, * Ce fait est très facile à saisir dans l'ensemble des coupes portant sur des byssus mtiers d'Arches jeunes ; mais il m'a paru inutile d'<»n donner une figure. 326 !.. BOUTAN. jusque-là, n'avait joué qu'un rôle effacé, intervient d'une façon plus importante '. Les lamelles ne sont jamais soudées jusqu'à la base ; elles ne sont réunies qu'à une extrémité de l'organe. Du côté du sillon, elles res- tent libres jusqu'à une certaine hauteur. C'est par là que la matière sécrétée continuellement par les cel- luleslglandulaires des lames trouve une issue; mais au lieu de s'éva- cuer à l'extérieur, elle tombe dans le sillon qui la recueille, la pro- tège contre l'action de l'eau et la dirige. La languette du pied se relève le long du bord du byssus solide- ment fixé ; le sillon est entraîné dans ce mouvement et embrasse la face correspondante de l'organe fixateur. La matière sécrétée glisse ainsi à l'abri de l'eau jusqu'à la surface du corps étranger, vient fortifier le byssus et consolider l'appareil fixateur. V LES PRINCIPALES FORMES DU BYSSUS CQEZ LES ACÉPHALES LAMELLIBRANCHES. Ce que nous venons de dire dans les pages précédentes montre clairement le fonctionnement du byssus dans VArca tetragona, mais rien ne nous autorise pour le moment à considérer les faits que nous venons d'exposer comme ayant une portée générale et pou- vant s'appliquer à l'ensemble des Lamellibranches. L'appareil adhésif des Acéphales présente, en effet, des apparences très diverses, et il est rare de trouver l'aspect massif que nous avons constaté chez VAj'ca tetragona. Le plus souvent, en effet, le byssus se dissocie en quelque sorte et est constitué par des filaments nombreux dont chacun représente un appareil fixateur individualisé au moins en apparence. Les formes du byssus sont si variées que Muller- avait adopté une ' Pour simplifier cet exposé, nous avons, à dessein, négligé d'indiquer la struc- ture du sillon. En réalité, il contient, lui aussi, un grand nombre de glandes à mucus dont la sécrétion joue un rôle accessoire dans la consolidation du byssus. - A. Muller, Ubpr die Pyssusder Acephalen (Arch.f. Naturgetch , t. ÎIl, 1838). RECHERCHES SUR LE BYSSUS DES LAMELLIBRANCHES. .127 classification pour distinguer les différentes formes, classification qui a été adoptée par M. Théodore Barrois, dont nous avons déjà eu occasion de citer le travail. Muller classait ainsi les byssus : r Byssus pourvus d'une gaine: a, Byssus constitués par des filaments, Mytilus eduUs; b, Byssus dépourvus de filaments, .4?'m bnrbata; 2" Byssus dépourvus de gaine: a, Racines lamelleuses; b, Racines non lamelleuses. Nous ferons observer tout d'abord que VArca telragona, qui sem- ble rentrer dans la première catégorie de byssus établie par Muller, ne présente pas une gaine comme l'entendait Muller. Si, chez les jeunes, en eff"et, la matière gluante filtre au travers des lamelles, nous avons vu que, chez les adultes, il n'en est pas de même, et que la colle s'évacue plus tard par l'intermédiaire du sillon. La seconde division établie par Muller dans les byssus dépourvus de gaine n'a pas non plus une grande importance, puisque tous les byssus peuvent être considérés comme ayant des lames ou des lamelles ; la différence porte seulement sur la réduction du nombre des lames ou des lamelles qui peuvent se réduire à une seule. Mon intention n'est pas de donner dans ce mémoire des détails sur les différentes formes du byssus chez les Acéphales ; la chose n'est pas nécessaire, puisque ce sujet a déjà été étudié par les au- teurs cités dans l'historique. Pour voir si les résultats obtenus sur ÏArca tetragona pouvaient être généralisés avec quelque apparence de raison, il nous a paru suffisant d'étudier un autre type de Lamellibranche, et nous avons choisi entre tous celui chez lequel l'organe adhésif semblait s'écarter le plus de l'aspect présenté par le byssus de l'Arche tétragone. La Moule, avec son appareil byssal constitué par des filaments sans nombre, nous a semblé représenter un type extrême qu'il serait utile d'opposer à l'exemple déjà observé. nSS L. BOU.TAN. Dans le chapitre suivant, c'est donc l'étude, au point de vue parti- culier qui nous occupe, de l'organe byssal chez la Moule que trou- vera le lecteur. VI LE BYSSUS DE LA MOULE. La Moule qui a clé prise comme type dans les expériences faites au laboratoire Arago vit en abondance sur toute la côte rocheuse du cap Béarn ; mais on ne trouve à fleur d'eau que des échantillons de très petite taille, les coquilles de grandeur moyenne étant immé- diatement récoltées par les habitants qui en sont très friands. Pour se procurer des échantillons de bonnes dimensions, il est nécessaire, soit d'avoir recours aux dragages sur les rochers, soit de profiter des basses mers pour explorer les roches qui ne découvrent que rarement. Cette Moule, répandue sur tout le littoral de la Méditerranée, est spécifiquement différente de celles qu'on trouve sur les côtes de l'Océan ou de la Manche. Voici, d'après Bucquoy ', la description du Mytilus gallo-provincia/is : Diagnose. — Coquille (diamètre dorso-ventral, 40 millimètres ; diamètre antéro-postérieur, 73 millimètres ; épaisseur, 29 milli- mètres, dimensions relevées par M. Locard sur l'échantillon-type de Lamarck) équivalve, de forme subquadrangulaire, allongée, renflée en avant, comprimée en arrière et du côté dorsal. Fente byssale étroite, allongée. Sommets terminaux incurvés et un peu écartés. Test assez épais dans la région antérieure, beaucoup plus mince vers les bords dorsal et postérieur. Épidémie très adhérent, plus ou moins luisant. Stries d'accroissement nombreuses, assez fines. Inté- rieur des valves lisse, peu brillant. Bord ligamentaire court, presque droit, incliné en avant et formant un angle bien marqué à sa jonc- tion avec le bord dorsal. Bord dorsal rectiligne ou faiblement si- 1 Bucquoy, Dautzenbeko et Dollfus, les Mollusques marins du Roussillon (Pele- cypofla), t. II, 4*^ fnsrioiile. RECHERCHES SUR LE BYSSUS DES LAMELLIBRANCHES. 329 mieux, se reliant au bord postérieur par une courbe régulière. Bord postérieur arrondi. Bord ventral droit ou légèrement renflé dans sa partie moyenne. Charnière pourvue de trois ou quatre petites denti- culations, parfois obsolètes. Ligament interne peu épais. Impres- sions du muscle adducteur antérieur des valves petites, situées sous les crochets ; impressions de l'adducteur postérieur des valves grandes, arrondies; impressions des muscles adducteurs du pied, petites, étroites et profondes, situées près des sommets, un peu au- dessous du ligament ; impressions palléales bien marquées. Colora- tion externe d'un noir uniforme, passant au roux ferrugineux dans le voisinage des sommets et dans la région ventrale. Coloration in- terne d'un gris bleuâtre, parfois légèrement irisé, passant au blanc opaque du côté antérieur et laissant à découvert une zone marginale noirâtre. Le Mytilus galln-provincialis a été regardé par beaucoup de natura- listes comme une variété du M. edulis Linné ; mais M. Kukenberg a fait connaître qu'il existe des différences anatomiques suffisantes entre ces mollusques, pour justifier le maintien des deux espèces. Si l'on se place exclusivement au point de vue conchyliologique, la question est difficile à résoudre, car il existe des formes étroites et allongées du Mytilus gallo-provincialis qui se rapprochent du M. edulis, et des formes courtes et larges du M. edulis qu'il est diffi- cile de distinguer du M. gaUo-provincialis. » Le byssus de la Moule est, en apparence, beaucoup plus compliqué que le byssus massif de l'Arche. L'appareil fixateur de ce Mollusque se présente, en effet, tout d'abord comme un enchevêtrement de filaments sans nombre, tous terminés par une petite plaque adhé- sive ; mais une observation attentive permet de se rendre compte très rapidement que cette complication n'est qu'apparente et qu'il existe deux parties nettement distinctes : 1» L'axe ; 2° Les filaments. 130 L. RODTAN. Nous les étudierons séparément : L'axe se compose d'une masse verdâtre ou jaunâtre, conique et terminée en pointe mousse dans sa partie la plus éloignée du pied. Dans la portion distale, au contraire, on distingue, après arrache- ment, une série de lamelles disposées exactement comme dans l'Arche. Sur une coupe sagittale, on voit que ces lamelles se soudent rapi- dement entre elles, lorsqu'on s'éloigne de la portion pédieuse, de manière à former une masse unique (voir fig. 13, 14 et 15, pi. XIII. En somme, nous pouvons nous représenter cette partie centrale du byssus de la Moule comme l'homologue du byssus tout entier de VAi'ca tetragona. Les seules diflerences, considérables il est vrai, qu'on observe sont l'allongement du byssus en hauteur et l'absence d'une surface adhésive à son extrémité. A cette partie centrale du byssus viennent s'ajouter les filaments nombreux. (Juoique cette disposition ne soit pas générale, nous pouvons nous représenter les filaments comme prenant tous naissance le long de l'axe sur une même ligne, ainsi que nous l'avons figuré sché- matiquement dans la ligure 13, pi. XIII. En réalité, dans presque toutes les Moules considérées, les fila- ments, au lieu de prendre naissance sur une seule ligne, peuvent saillir en des points différents, soit dans le voisinage de deux lignes très rapprochées, soit selon les deux côtés opposés de l'axe; mais ce sont là des formes aberrantes que nous expliquerons plus loin, et que nous laissons de côté pour le moment (voir fig. 1, 2 et 3 du texte). Il existe donc dans le byssus de la Moule quelque chose de plus que dans le byssus de l'Arche : des filaments indépendants, souvent très développés et tous terminés par une petite plaque adhésive. La glande byssogène, au contraire, dans l'intérieur de laquelle vient s'implanter ce byssus, offre une ressemblance remarquable avec l'appareil que nous avons décrit chez X Arra tetragona. RECHERCHES SUR LE BYSSIJS DES LAMELLIBRANCHES. 3:^1 Comme dans ce dernier Mollusque, nous retrouvons une série de lames qui contiennent dans leur intérieur des glandes unicellulaires et qui sécrètent les lamelles du byssus (fig. 23, pi. XIY). La structure de ces lames est tellement semblable à celle des lames de la glande byssogène des Arches, qu'une nouvelle descrip- tion est tout à fait superflue et qu'il nous suffit de renvoyer le lec- teur, pour une étude plus complète, an chapitre précédent. Fi6.\ Fiô. Fiô.S Diverses dispositions des filaments du byssus de la Moule. Ces lames sont renfermées dans l'intérieur d'une cavité beaucoup plus profonde et beaucoup plus nettement accusée que chez l'Arche; mais cette cavité communique également avec un sillon qui suit la languette du pied dans toute son étendue. Tandis que le sillon se termine librement à Textrémité du pied chez l'Arche, dans la Moule, au contraire, il aboutit, avant l'extrémité de la languette, dans une cavité semi-circulaire, sorte de dilatation terminale du sillon. Telle est la description rapide du byssus et de l'appareil liysso- gène chez le Mylilusgallo-provincialis. Dans le chapitre suivant, nous allons montrer quelles sont les ùifférences essentielles qui les dis- tinguent du byssus de VArca Noe. 332 L. BOUTAN. VII COMPARAISON DU BYSSUS DE LA MOULE ET DE l'aRCHE. Depuis longtemps on sait que les filaments du byssus de la Moule se constituent par l'intermédiaire du sillon. Cependant, je crois que les faits ont besoin d'être précisés. Jai fait à ce sujet quelques expériences sur le Myiiliis gallo-provin- cialis. Si l'on place dans une cuvette en verre transparent des Mou- les de moyenne taille, on ne tarde pas à les voir constituer quelques lilaments adhésifs qui les fixent soit sur le fond, soit sur les parois. Noussavons déjà, grâce aux observations deM.deLacaze-Duthiers', rapportées dans l'historique de ce mémoire, que les Moules peuvent cheminer en utilisant ces filaments. Comment la Moule arrive-t-elle à fixer les filaments ? L'observation directe permet de répondre à cette question : Le Mollusque allonge la languette pédieuse jusqu'à l'endroit pré- cis où il veut fixer la plaque adhésive qui termine le filament; la languette est tournée de manière à ce que la cavité semi-circulaire soit placée ;\ la surface du corps étranger sur lequel l'adhésion va se produire. C'est de la cavité demi-circulaire que provient la plaque adhésive. En regardant par transparence à travers les parois du verre, on voit très nettement sortir de l'intérieur de la cupule un liquide blan- châtre et pâteux que l'animal étale en couches minces à l'aide de mouvements musculaires répétés. Pour employer une comparaison qui fera bien saisir le l'ait ob- servé, l'action produite par l'animal est la même que lorsque nous faisons couler de la cire à cacheter à la surface d'une enveloppe et que nous la pressons ensuite à l'aide d'un cachet. D'où vient cette matière collante ? Elle est contenue dans l'intérieur du sillon. * Dr Lacaze-Duthiers, Conrx prnfpusf' à In f^or-liùtme, ls79. Paris. RECHERCHES SUR LE BYSSUS DES LAMELLIBRANCHES. 333 On voit, eu effet, ranimai, après avoir malaxé la matière adhé- rente, retirer progressivement la languette et entr'ouvrir le sillon. On constate alors qu'un filament blanchâtre continu réunit la plaque adhésive à l'axe du byssus. Le fait est facile à mettre en évidence à l'aide de l'expérience sui- vante : Si, au moment où l'animal est occupé à iixer l'un des iilaments, on glisse au-dessous de la languette une lame de ciseaux et que, par un mouvement brusque, on sectionne transversalement la lan- guette, on constate, en faisant ensuite des coupes sur la partie déta- chée du corps de la Moule,. la présence du filament dans toute la longueur du sillon. L'expérience réussit chaque fois et donne des résultats très nets, comme nous l'avons figuré, fig. 24, pi. XIV. Cette expérience prouve donc qu'au moment où la plaque adhé- sive est appliquée par frottement à la surface des corps étrangers, le filament est déjà tout entier formé dans l'intérieur du sillon. Nous devons nous représenter le filament comme issu de la glande byssogène. La matière collante sécrétée a été injectée dans l'intervalle des lamelles, au niveau du sillon, et s'est renforcée à ce niveau de la sécrétion des glandes de la paroi du sillon. Maintenant que nous connaissons les particularités du byssus de la Moule, nous pouvons le comparer à lorgane adhésif de l'Arche. Malgré la présence des filaments distincts et séparés, nous ne voyons pas de diff"érence essentielle entre les deux organes. L'appareil byssal de la Moule nous paraît construit exactement sur le même plan que chez l'Arche, il est seulement un peu plus perfectionné ou difierencié. Le sillon de la languette existe, comme dans l'Arche adulte, et contient le produit de la sécrétion de la glande byssogène, mais au lieu d'appliquer cette sécrétion contre le byssus déjà formé, d'éta- blir une soudure intime entre la partie centrale de l'organe et cette J34 L- BOUIAN. sécrétion nouvelle, le sillon de la languette, chez le Mytilus (jallo- provincialis, constitue un véritable moule où la sécrétion est étirée et prend la forme d'un filament. L'origine du filament byssal est la glande byssogène médiane ; cependant il est certain que, dans lintérieur du sillon, les matériaux fournis par la glande byssogène sont augmentés et complétés par la sécrétion des glandes unicellulaires qui débouchent dans l'épithé- lium du sillon. Nous avons supposé, dans le dessin schématique donné figure \3, pi. XllI, que tous les filaments sortaient de l'axe du byssus selon une même direction; mais en réalité, ainsi que nous l'avons déjà noté dans le chapitre précédent, les filaments dérivent tantôt de chaque côté dune partie médiane, tantôt des deux côtés opposés de l'axe principal du byssus (voir les figures 1, 2 et 3 du texte). Cette disposition déjà remarquée par M. Thiele ', l'avait beaucoup frappé, et il déclare ne pouvoir y trouver aucune explication ration- nelle. Si l'évacuation s'elTectue, en elfet, au niveau du sillon et provient, comme nous l'avons dit, de la glande byssogène, il faut, pour que l'écoulement de la matière sécrétée puisse avoir lieu, que le sillon, le moule dans lequel s'effectue la sécrétion soit placé dans la même direction que les lamelles pour que celles-ci ne s'opposent pas à l'évacuation des produits sécrétés; or, les lamelles étant toutes dirigées parallèlement entre elles, il n'y a que deux points opposés par où la sécrétion puisse sortir : d'une part, dans la partie dirigée vers la bouche; d'autre part, dans la partie immédiatement opposée. Pour expliquer la disposition des filaments que nous avons repré- sentés figure I, 2, 3 du texte, il faut donc admettre, ce que l'on peut du reste constater par l'observation directe, que le sillon peut tourner de 180 degrés autour de l'axe du byssus restant fixe, et que la sécré- tion peut sortir allernativement par les deux extrémités opposées. ' TiiiiiLE, l'Iiylogéme îles Oyasus apparats, loc. cit. RECHEKCllIiS SUR Lbl BVSSUS DES LAMELLIBRANCHES. 3;^5 J'avais d'abord suppobé que ce n'était là qu'une apparence et que les filaments qui se soudent sur une partie peu étendue de l'axe jus- qu'au niveau du sillon sortaient tous dans la région tournée vers la bouche et s'accolaient selon une ligne courbe pour venir sortir au côlé opposé dans l'intérieur du sillon. En réalité il n'en est rien et des observations directes m'ont prouvé que la première interpré- tation était la seule bonne. RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS. En résumé, dans ce mémoire, nous avons cherché à établir que la disposition du byssus était fondamentalement la même, dans deux types aussi opposés que possible au point de vue de la forme de l'appareil, d'une part le Mytiliis gallo-provincialis, d'autre part VArca tetragona. Nous avons laissé systématiquement de côté, pour la clarté de l'exposition, les formes intermédiaires et des formes aberrantes telles que celles de la Lime et des Cardes, où la sécrétion du byssus est utilisée seulement pour constituer une sorte de nid, pour don- ner plus de solidité au sable ou à la vase dans l'intérieur desquels s'enferme l'animal. Le fonctionnement du byssus s'effectue de la manière suivante : Chez les formes jeunes de l'Arche, la matière byssogène sécrétée par les glandes unicellulaires s'injecte entre les lamelles déjà formées et peut ainsi arriver à l'extérieur. Plus tard, chez l'adulte, la sécrétion byssale s'injecte par l'intermédiaire du sillon de la languette du pied. Les arches jeunes, détachées des corps où elles étaient fixées, peu- vent se coller de nouveau à l'aide de l'ancien byssus; plus âgées, elles doivent d'abord expulser l'ancien byssus qui forme un obstacle et empêche le pied d'adhérer à l'endroit propice. Nous croyons avoir établi aussi que, chez les Acéphales, c'est tou- jours par l'intermédiaire du pied et en particulier à l'aide du sillon ;i36 L. BOUTAN. que s'opère la tixalion, tantôt à l'aide de la partie élargie du sillon, qui entoure la glande byssogène principale, tantôt par la partie ter- minale du sillon dilaté sous forme d'un enfoncement semi-circulaire, comme chez la Moule. Dans le premier cas, le byssus reste compact et forme une masse unique, solide et résistante. Dans le second cas, à cette masse principale vient s'ajouter une série de iilaments terminés chacun par une plaque adhésive. Dans tous les Acéphales où le byssus fonctionne normalement, le sillon représente un moule dans lequel s'entasse la matière sécrétée jusqu'à ce que l'animal l'ait façonnée à sa guise et puisse la livrer à l'action durcissante de leau. Je me suis demandé, en terminant, ce que devenait la sécrétion byssale lorsque l'animal était placé dans des conditions telles qu'il ne pouvait plus se fixer sur des corps étrangers. Les expériences donnent chez la Moule des résultats curieux. L'animal isolé au milieu de l'eau est suspendu par la charnière de la coquille à une licelle imprégnée de cire à cacheter. Ne trouvant plus à sa portée de corps solides, il fixe les filaments sur sa propre coquille, mais il reconnaît rapidement que cette manœuvre ne lui fournit aucun point d'appui sérieux; il rejette alors le byssus tout entier et recommence sur l'autre valve. Il en arrive à rejeter ainsi régulièrement son byssus dès qu'il a fixé quelques filaments. La sécrétion et l'expulsion du byssus deviennent, en quelque sorte, intermittentes. Ces expériences méritent, je crois, d'être étendues à d'autres types d'Acéphales et feront l'objet d'un prochain travail. EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE xni. STRUCTURE DU BYSSUS. Fig. 1. Vue générale du byssus de i'Arca tetragona adulte. (Le pied étalé dans la valve droite est disposé de manière à montrer le byssus fixé sur un corps étranger.) Dessin demi-schématique. RECHERCHES SUR LE BYSSUS DES LAMELLIBRANCHES. 337 B, byssus ; C, coquille; cp, corps étranger ; m, manteau indiqué seu- lement par une ligne poiutillée; ms, muscle abducteur inférieur des valves; P, pied; p', languette du pied montrant le sillon. FiG. 2. Vue générale du byssus de VArca tetragona jeune. (Même disposition que dans la figure 1, même lettres.) 3. Byssus entier, séparé du pied de VArca tetragona adulte, s, surface d'adhérence du byssus; i', lames byssales. ab, coupe transversale représentée dans la figure 5. cd, coupe horizontale représentée dans la figure 7. ef, coupe horizontale représentée dans la figure S. 4. Byssus entier, séparé du pied de VArca tetragona jeune. s, surface d'adhérence du byssus ; l', lamelles byssales. a'b', coupe transversale représentée dans la figure 6. c'd', coupe horizontale représentée dans la figure 8. e'f, coupe horizontale représentée dans la figure 9. 5. Coupe transversale selon ab (fig. 3) du byssus de VArca tetragona adulte. (Le byssus est représenté schématiquement dans ses rapports avec les lames qui le sécrètent et qui sont figurées par un simple trait noir.) h, partie solidifiée du byssus; h', partie fluide du byssus; l, lames sécrétrices. 6. Coupe transversale selon a'b' (fig. 4) du byssus de VArca tetragona jeune. (Le byssus est représenté schématiquement dans ses rapports avec les lames qui le sécrètent et qui sont figurées par un simple trait noir.) /), partie solidifiée du byssus ; h', partie fluide du byssus ; h", partie intermédiaire aux deux précédentes ; l, lames sécrétrices. 7. Coupe horizontale du byssus de VArca tetragona adulte selon cd (fig. 3). 8. Coupe horizontale du byssus de VArca tetragona adulte et jeune, selon ef ^fig. 3) et c'd' (fig. 4). 9. Coupe horizontale du byssus de VArca tetragona ieune, selon e'f (fig. 4). iO. Coupe sagittale du byssus de VArca tetragona adulte se rapportant à la figure 3. n, portion pleine et solidifiée ; l', lamelles byssales. 11 . Coupe sagittale du byssus de VArca tetragona jeune, se rapportant à la figure 4. n, portion solidifiée ; l', lamelles byssales. H 2, Coupe transversale fortement grossie de VArca tetragona StàMe pa.s3a.iit par une lamelle byssale et une lame sécrétrice. c, conduits glandulaires ; ep, épithélium de la lame sécrétrice ; gl, amas de cellules glandulaires ; h, portion durcie du byssus ; h' , por- tion plastique du byssus ; st, stries ayant l'apparence de cils vibratiles ; l.c, tissu conjonctif. 13. Figure théorique destinée i\ montrer la disposition des filaments du byssus de la Moule [Mytilus gallo-provincialis) et leurs rapports avec le pied. (Le pied est fragmenté pour laisser voir le filament.) op, bouton terminal du filament; ft, filament; P, pied ; p', languette du pied ; s, sillon ; T, tige ou axe du byssus. ARCII. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 3<= SÉRIE. — T. UI. 1893. 22 338 L. BOUTAN. FiG. 14. Portion de la tige ou de l'axe du byssus de la Moule. fl, filaments coupés ; C, lamelles byssales; T, tige. 15. Coupe sagittale théorique de la tige ou de l'axe du byssus de la Moule. (Mêmes lettres que dans la figure précédente.) 16. Disposition irrégulière des filaments sur la tige du byssus de la Moule. (Mêmes lettres que dans la figure précédente.) 17. Disposition d'un filament présentant les traces du sillon externe s. (Mêmes lettres que dans la figure précédente.) PLANCHE XIV. StRUCTURE DU BYSSUS (sUITE). FiG. IcS. Coupe transversale du corps d'une jeune Arca tetragona (le manteau n'a été représenté que d'un côté) passant au niveau du pied et du byssus. br, coupe de la branchie située entre le manteau et la paroi du corps; gl, glandes; h, portion durcie du byssus; h', portion molle du byssus; h", portion intermédiaire aux deux précédentes; /, lames sécrétrices du byssus: m, manteau; ms, muscles rétracteurs du byssus; P, pied ; t.d, tube digestif. 19. Coupe horizontale d'une partie du pied (portion antérieure) de VArca tetragona adulte montrant la disposition des lamelles byssales et des lames sécrétrices. ep, paroi du pied; h', lamelles byssales; l, lames sécrétrices; sp, fente pédieuse. 20. Coupe horizontale d'une portion du pied (partie postérieure) de l'^lrco tetragona adulte montrant la disposition dans cette région des lamelles byssales et des lames sécrétrices. (Mêmes lettres que dans la figure pré- cédente.) ai. Coupe transversale du pied d'une Arca tetragona adulte, trois jours après l'arrachement du byssus. h', byssus de nouvelle formation; h'' et h", lamelles byssales en voie de formation; l, lames sécrétrices; ms, muscles; P, parois latérales du pied. 22. Coupe transversale du byssus de VArca tetragona montrant le rapport entre les lamelles byssales et les lames sécrétrices. ep, épithélium des lames sécrétrices; ^ri, glandes; /i',/i", lames bys- sales ;(. c, tissu conjonctif; st, stries présentant l'aspect de cils vibratiles. 23. Coupe transversale du pied d'une jeune Moule passant au niveau du byssus. gl, glandes; h, portion durcie du byssus; h', portion molle; l, lames sécrétrices; m, manteau; ms, muscles; t.d, tube digestif. 2^. Coupe transversale de la languette du pied de la Moule montrant le fila- ment dans ses rapports avec le sillon. ep, épithélium de la paroi de la languette; gl, glandes pédieuses; fl, filament ; sp, moule du filament. MATERIAUX FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS PAR G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. PREMIÈRE PARTIE. INTRODUCTION. Le matériel scientifique du laboratoire Arago ayant reçu récemment son complément naturel avec l'acquisition d'un vapeur et des instru- ments nécessaires pour les sondages etles dragages à toutes distances et à toutes profondeurs, M. de Lacaze-Duthiers a pu reprendre utile- ment son projet d'une exploration méthodique de la région, en vue de dresser peu à peu l'inventaire, aussi complet que possible, des richesses zoologiques de la côte catalane. Notre éminent maître nous a confié l'étude des Annelides; nous tenons, avant tout, à lui en exprimer notre vive gratitude. Gomme la Méditerranée est de beaucoup la mer qui a été le plus fouillée en tous sens, que ses Annelides notamment ont donné lieu à une foule de publications des spécialistes les plus autorisés, nous devions ne faire qu'un travail de faune, noter chaque espèce, son habitat, son extension, ses mœurs s'il y a lieu, et en présenter brièvement en une fois le tableau comparatif. Mais nous avons dû reconnaître que bien des formes laissent encore place au doute, et pour d'autres, nous avons été amenés à interpréter autrement que nos devanciers les parties qui fournissent les caractères zoologiques. 340 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. Aussi nous a-t-il paru nécessaire de faire précéder la liste générale des espèces de Banyuls d'un travail préalable où seront notées toutes les observations morphologiques ou systématiques auxquelles elles auront donné lieu. Mais dans le but d'empêcher tout malentendu, pour mettre sous les yeux du lecteur toutes les pièces du procès, et aussi pour faciliter les déterminations dont il faut trop souvent chercher les éléments épars dans un grand nombre de publications, nous croyons devoir rompre avec l'habitude générale des annélidologues de ne mention- ner, pour les espèces connues avant eux, que le ou les caractères qui leur paraissent sujets à observations, et, au risque d'allonger le texte, nous donnons toujours une description aussi précise et aussi complète que possible de toutes les espèces dont nous nous occu- pons, c'est-à-dire non seulement des formes nouvelles, mais aussi de toutes celles qui nous semblent, à tort ou à raison, présenter encore quelque obscurité ou quelque difficulté d'attribution, quoique appartenant parfois aux espèces les plus répandues. Nous passons, en revanche, complètement sous silence tous les types pour lesquels nous n'avons rien à ajouter aux connaissances déjà acquises, et qui seront simplement mentionnés à leur place dans le catalogue final, avec leur habitat et leur extension. Nous nous sommes efforcés d'employer presque exclusivement les termes descriptifs usuels et de les prendre dans une acception tou- jours rigoureusement la même. Mais, étant donné l'absence d'une nomenclature universellement adoptée encore, et pour éviter les obscurités et les redites, il est nécessaire de préciser d'abord la manière d'envisager les difl'érentes parties du corps ou des appen- dices à laquelle nous nous sommes arrêtés, et de définir les termes employés. Nous avons dû établir quelques expressions nouvelles, soit pour éviter des périphrases, soit pour rendre les descriptions plus aisé- ment comparables en désignant les parties homologues toujours sous le même vocable. Mais nous supplions qu'on ne nous attribue FAUNE DES ANNÈLIDES DE BANYULS. 341 pas la prétention d'avoir découvert les Annélides et leurs appen- dices, alors que nous n'avons que l'ambition modeste d'atteindre à la clarté dans les descriptions. En dehors de toute théorie, nous considérons le corps d'une Anné- lide comme formé de trois parties entièrement distinctes : 1° Le lobe céphalique ; 2° Le corps proprement dit, ou série des segments ; 3° Le pygidium. La longueur totale est toujours comptée de l'extrémité antérieure du lobe céphalique à la pointe du pygidium. Mais lobe céphalique et pygidium ne sont pas des segments; l'un et l'autre sont toujours exclus des nombres qui les représentent. Ces trois régions portent souvent des productions saillantes qui peuvent être de deux sortes principales : les unes purement épi- dermiques, les autres constituées par l'ensemble des couches qui forment la paroi musculo-cutanée du corps. i° Les premières, que nous appellerons s(7jlodes, sont des produc- tions filiformes ou subglobuleuses, parfois assez nombreuses pour former au corps un revêtement complet et lui donner un aspect velouté (face ventrale de \di Psammolyce arenosa, par exemple), mais qui, dans d'autres cas, sont moins nombreuses et rigoureusement spécialisées dans leur nombre et leur position {Sphœrodorum, Eury- syllis, certains Cirrhatuliens). La portion terminale, épidermique, de tous les appendices cirrhiformes (antennes, cirrhes parapo- diaux, etc.), nous semble appartenir à cette catégorie et sera désignée par le suffixe style. Les stylodes peuvent porter à leur tour d'autres saillies épider- miques d'aspect différent : les unes toujours microscopiques, courtes et transparentes, traversées par une fibre nerveuse et surmontées d'un poil sensitif, sont les papilles tac: des (exemple : flg. H3 p)\ les autres, moins générales, ne se rencontrant guère que sur les élytres des Aphroditiens, sont les franges, quand elles en bordent le pourtour, et les scabrilles, quand elles se présentent à leur surface 342 G. PÏIUVOT ET E.-G. RACOVITZA. sous forme de petites éminences chitinisées, parfois transformées en véritables épines. 2° Les productions saillantes, formées par l'évagination de toute l'enveloppe musculo-cutanée, sont les branchies (exemple ; Eunice, fig. 41 />r) et les lobes creux si variés des parapodes de beaucoup de formes (exemple : Lumbriconereis, fig. 23 /). Il faut aussi rattacher à cette catégorie la portion basilaire creuse des appendices cirrhiformes qui sera désignée par le suffixe phore. Nous croyons devoir substituer cette expression à celle d'article basilaire, ordinairement employée ; ce terme ayant l'inconvénient d'établir une identité morphologique avec Varticle terminal, de structure toute différente, qui est à lui seul tout l'organe sensoriel, et, d'autre part, de le séparer de ses véritables homologues, élytro- phore, etc... Le lobe céphaliqiie, région préorale occupée par le cerveau, peut porter des organes sensoriels de plusieurs sortes, qui doivent être soigneusement distingués : 4» Lesi palpes, qui reçoivent leur nerf du cerveau antérieur. Ce sont des prolongements saillantsi de la totalité de la paroi soma- tique, présentant une cavité centrale réelle, et alors en connexion avec la cavité générale, ou virtuelle, oblitérée par des tissus méso- dermiques. Autour, une double couche musculaire, longitudinale interne et circulaire externe, puis l'épiderme revêtu de sa cuticule. Ils renferment donc à la fois dea tissus ectodermiques et mésoder- miques, sont contractiles, capables de mouvements propres et leur nerf est excentrique. D'ordinaire, le palpe est constitué de cette façon dans toute son étendue, mais il peut arriver (exemple : Podarke, fig. 77) qu'il soil biarticulé. La portion terminale est alors composée seulement d'éléments épidermiques, et, en conséquence, diépourvue de cavité centrale. Cette partie est le palpo&tyle, par opposé à la partie précé- dente ou palpophore. Même quand lepalpostyle est le mieux formé, FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 343 le palpophore l'emporte toujours de beaucoup sur lui et constitue la majeure partie du palpe. 2° Les antennes, qui reçoivent leur nerf du cerveau moyen situé en arrière et au-dessus du précédent. Elles sont formées, dans la règle, d'un cératophore basilaire et d'un cératosti/le terminal. Mais, à l'inverse des palpes, c'est la partie dis- taie, le cératoslyle, qui est toujours la partie la plus développée et la plus importante de l'antenne. Le cératophore représente lui aussi un étirement de toute la paroi du corps et montre aussi son nerf rejeté à la périphérie, une cavité centrale et une double couche de muscles capables d'imprimer des mouvements en différerits sens au cératostyle qu'il supporte. Celui-ci, simple cylindre de cellules épidermiques, au-dessous de l'insertion duquel les tissus mésodermiques passent ininterrompus, est donc dépourvu de cavité, de tissu conjonetif et de muscles, par- tant de mouvements propres, et son nerf est axial. 3° Les yeux, dont le nombre le plus général est quatre et qui sont innervés également par le cerveau moyen. 4° Les organes nucaux^ variables de forme et de nombre, mais tou- jours situés sur la portion la plus reculée du lobe céphalique et en connexion avec le cerveau postérieur. Les segments du corps proprement dit sont toujours comptés y compris le segment buccal, celui en avant duquel s'ouvre la bouche, quelles que puissent être d'ailleurs sa réduction ou les modifications et les connexions secondaires de ses appendices. Chaque segment porte sur les côtés une paire de parapodes fondamentalement composés de deux rames, une ventrale ou neurale et une dorsale ou hœmale. Chez presque toutes les Annélides errantes, elles se déta- chent toutes deux d'une base commune (parapodes monostiques , par opposition aux parapodes distiques qui se rencontrent chez toutes les formes sédentaires), et une rame au complet présente à décrire les parties suivantes : 344 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. 1° Le mamelon sétigère, de l'extrémité duquel émergent les so?es. Son extrémité distale peut être compliquée par la formation d'un lobe aciculaire (exemple : Sthenelais, fig. H2 la), qui marque le som- met morphologique de la rame et renferme la pointe de Vacicule, et de bractées parapodiales (exemple : fig. 113 A, U), sortes de lèvres ou d'expansions membraneuses, de formes et de dimensions variables, plus ou moins découpées, qui recouvrent la base des soies en dehors de leurs lignes d'insertion, sans parler des stylodes arrondis ou al- longés et des lobes parapodiaux déjà mentionnés qui peuvent être répandus plus ou moins irrégulièrement sur sa surface. 2° Les soies, nées dans le bulbe séligère, au centre de la rame. On distinguera le ou les acicules qui, dans la règle, sont situés suivant l'axe de la rame, ne percent pas le tégument et n'ont qu'un rôle de soutien des soies proprement dites, plus faibles, qui émergent du para- podesuivantunelignedroiteoudiversementsinueuse.Pourlesformes si variées de ces dernières, nous suivrons, autant que possible, la nomenclature de Grube (lo, p. 264-267). De plus, pour abréger les descriptions, nous distinguons dans les soies de forme aplatie, c'est la grande majorité, le dos ou bord épais, du tranchant ou bord aminci. Quand les soies simples sont courbes, c'est toujours le tranchant qui forme le bord convexe et c'est lui qui porte les spi- nules ou les denticulations quand elles n'existent que d'un seul côté. Dans les soies composées, la partie basilaire ou hampe a, le plus souvent, le côté du tranchant prolongé en une pointe saillante, le rostre. L'article terminal, ou la se^'pe., est d'ordinaire courbé sur le tranchant, qui est alors pectine ou non, porte ou non une dent accessoire, et la dent terminale est la prolongation du dos, qui est toujours lisse. Les soies sont homogomphes quand le sommet de la hampe où s'ar- ticule la serpe est symétrique, et hétérogomphes quand un des côtés de la fossette d'articulation est plus développé que l'autre. 3° Le c/rrhe parapodial, dorsal ou ventral suivant la rame envisa- FAUNE DES ANNÉMDES DE BANYULS. 345 gée, auquel s'applique de tout point ce qui a été dit de l'antenne. C'est dire qu'on doit réserver ce terme à une production dont au moins la majeure partie, le cirrhostyle, est purement épidermique, non musculaire, à nerf axial et dépourvue de cils vibratilcs. Il peut être sessile ou porté sur un cirrhophore constitué comme le support de l'antenne. 4° En dehors de ces parties fondamentales, le parapode présente, dans beaucoup de cas, des formations ciliées de nombre, de forme, de position extrêmement variables, parmi lesquelles il faut encore établir une distinction. Le nom de branchies est réservé à ceux de ces appendices ciliés qui sont creux, à axe occupé ou non par des vaisseaux sanguins, mais toujours par un diverticule de la cavité générale. Le terme de cténidies, créé par Ray-Lankester pour dési- gner, indépendamment de tout rôle physiologique, les organes vibra- files de la cavité palléale des Mollusques, peut, par opposition, être attribué à de petits organes semblables en apparence, ciliés aussi à leur surface libre, mais sans cavité centrale et formés seulement par du tissu épidermique, organes qui peuvent varier dans des limites très étendues, des simples mouchets vibratilcs de certains Syllidiens aux volumineux cuillerons céphaliques des Sthenelais, par exemple. La rame dorsale s'atrophie ou mieux subit un arrêt de développe- ment dans certaines familles, et, bien qu'on puisse toujours en re- trouver quelque trace, l'expression de parapode unirème est trop commode pour devoir être rejetée. Mais tous les degrés d'atrophie peuvent se rencontrer avec des transitions insensibles. Nous croyons qu'on aura suffisamment fixé les états les plus importants en appe- lant : Parapodes birèmes, ceux chez lesquels toutes les parties essen- tielles, mamelons sétigères, soies et cirrhe sont aussi normalement développés à la rame dorsale qu'à la rame ventrale (exemple : Sthe- nelais, fig. 123); Parapodes subbirêmes, ceux où, à côté du cirrhe dorsal toujours nor- malement développé, les soies et le mamelon sétigère existent encore. 346 G. PRUVOT ET K.-G. RACOVITZA. mais ont subi une notable réduction (exemple : Podarke, fig. 78); Parapodes sesquirèmes, les parapodes où le mamelon dorsal a en- tièrement disparu, mais où il persiste encore, à la base du cirrhe hœ- mal alors implanté directement sur la rame neurale, une ou plu- sieurs soies, au sens le plus large du mot,acicules ou soies proprement dites (exemple : Staurocephalus, fig. 3); Parapodes um'rèmes, ceux où le cirrhe représente seul les forma- tions de la rame hœmale (exemple : Syllidiens, Phyllodociens). Les tout premiers segments sont construits sur le même plan que les segments normaux dont nous venons de parler, mais en diffèrent d'ordinaire dans le développement relatif de leurs parties; d'une ma- nière générale, les mamelons s'atrophient, tandis que les cirrhes prennent un développement exceptionnel. La pièce qui persiste la dernière est le cirrhe dorsal. Il disparaît parfois lui-même au premier segment ou segment buccal. Les modifications en ce sens peuvent s'échelonner sur un certain nombre de segments, au point que, chez les Phyllodociens, par exemple, la limite entre ces, segments tentacu- laires et les segments nouveaux est difficile à établir. D'autres fois, le deuxième parapode ne diffère des suivants que parle développement exceptionnel de son cirrhe ventral (Aphroditiens). Mais les appendices du premier segment ou segment buccal sont toujours modifiés quand ils n'ont pas disparu entièrement. Nous distinguons par l'appellation un peu élastique de cirrhes tentaculaires les cirrhes du ou des pre- miers segments tant qu'ils diffèrent par leur taille ou leur forme des cirrhes normaux des parapodes suivants. Ces appendices des segments tentaculaires, n'étant jamais que des cirrhes parapodiaux, ne peuvent être au nombre de plus de deux de chaque côté par segment, un cirrhe ventral et un cirrhe dorsal, et, quand leur nombre paraît plus considérable, c'est toujours le résul- tat soit de la fusion secondaire de deux segments, soit d'une soudure plus ou moins étendue avec le lobe céphalique. A défaut de l'em- bryogénie, l'anatomie et, en particulier, les connexions nerveuses donnent toujours la clef de ces anomalies apparentes. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BÂNYULS. 347 La troisième partie du corps, \e pygidmm, porte l'anus, ordinaire- ment sur sa face dorsale; il peut être nu ou plus souvent présenter deux ou quatre appendices cirrhiformes, les cirrhes caudaux ou anaux, qu'il est préférable d'appeler uriies (divisés en urophore et urostyle, d'après la même règle que pour les autres appendices), car ils ne représentent pas des cirrhes parapodiaux; ils sont plus déve- loppés que les cirrhes parapodiaux voisins et de formation beaucoup plus précoce, le pygidium étant contemporain du lobe céphalique. C'est, avec ce dernier, la seule partie de l'Annélide qui puisse porter un appendice impair. L'orifice buccal s'ouvre toujours au bord antérieur du segment buccal, juste au-dessous du lobe céphalique ; quand il est plus re- culé, c'est par suite d'un déplacement des premiers pieds qui se sont portés en avant, La première portion ectodermique du tube digestif a un déve- loppement fort inégal suivant les familles. Nous lui réservons le nom de trompe (exemple : Panthalis, fig. 84) quand elle est protractile sous forme d'un cylindre plus ou moins long, très musculeux, i\ cu- ticule épaisse et couronnée à l'état de protraction d'une rangée de papilles. C'est un bulbe pharyngien (exemple : Eunice) quand elle n'est pas susceptible d'être projetée au dehors et que la pointe seule des dents peut faire saillie par l'orifice buccal dilaté. Chez beaucoup de familles, trompe ou bulbe pharyngien sont armés de mâchoires qui fournissent des caractères précieux pour la systématique. Malheureusement, il est encore impossible, dans l'état de nos connaissances, de les homologuer avec certitude chez les dif- férents types ; peut-être même une véritable homologie n'existe- t-elle pas, chaque forme d'Annélides ayant acquis ses mâchoires sous la pression de la même nécessité, mais isolément, après sa sé- paration de la souche émaxillée. Quoi quil en soit, le terme général de mâchoires est suffisant pour les désigner quand elles sont peu nombreuses et de forme semblable. Pour le cas plus complexe oti 348 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZÂ. elles sont différentes et étagées sur plusieurs plans, nous renvoyons au chapitre des Euniciens, seule famille chez laquelle le cas se pré- sente. Il est entendu que ces quelques définitions concernent seulement les Annélides franchement errantes. Ce serait un leurre que de vou- loir enfermer toutes les Annélides sans exception dans un même schéma étroit. Quand nous nous occuperons des sédentaires, certaines des expres- sions consignées plus haut n'auront plus leur emploi et il y aura heu d'en établir d'autres pour les formations spéciales commandées par leur genre de vie même, chez les formes essentiellement tubicoles. En ce qui concerne les dispositions typographiques adoptées au cours du présent travail, conformément aux règles de nomenclature établies dans les congrès internationaux, les noms d'auteurs placés à la suite des désignations spécifiques sont mis entre parenthèses quand l'auteur a fourni seulement le nom d'espèce, sans parenthèses quand c'est lui qui a. créé à la fois le nom du genre et celui de l'es- pèce. L'indication bibliographique qui figure immédiatement au-dessous du titre pour chaque espèce déjà connue est celle du premier travail où l'espèce a été décrite d'une manière reconnaissable. Quand il y en a deux, la seconde indique le travail dans lequel la véritable place zoologique de l'animal a été reconnue pour la première fois. La pre- mière donne donc l'origine du nom spécifique, la deuxième celle du nom générique. La diagnose brève en petit texte donne seulement les caractères spécifiques différentiels et laisse de côté ceux du genre et de la famille. La description qui vient ensuite mentionne, au contraire, tous les caractères visibles. Mais toute discussion en est exclue, celle-ci, quand il y a lieu, trouvant place dans un chapitre spécial, à la suite. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 349 Dans le tableau de synonymie qui suit la description d'une espèce ne ligurent, outre l'indication des espèces que nous rattachons à celle-ci pour la première fois, que les auteurs qui ont réellement ajouté aux connaissances acquises avant eux et ceux qui ont donné eux-mêmes un tableau de la synonymie. Quand nous renvoyons à un ouvrage pour ses dessins, dont nousavonspu vérifier l'exactitude et qui nous ont dispensé de figurer à nouveau les mêmes parties, l'indication bibliographique est suivie de la mention : {pr. fig.). Les ouvrages auxquels nous renvoyons pour un tableau plus complet de la synonymie que celui que nous donnons sont suivis de la mention : {pr, si/n.). Fam. EUNICEA. STAUROCEPHALUS RUBROVITTATUS GR. I800. Siaurocephalus rubroviltatus Grube (H), p. 07, pi. III, fig. 8-12. (Pi. XV.) Palpes sans palpostyle. — Aiiteunes ayant jusqu'à quatre articles. — Une ou deux bandes rouges sur chaque segment sétigère. — Cirrhe parapodial dorsal incolore pourvu d'un cirrhostyle très nettement séparé du cirrhopliore par un sillon. — Deux sortes de soies seulement : les dorsales simples, à sommet droit denté, les ventrales composées. Longueur maxima, 29 millimètres. La taille ordinaire varie entre 15 et 20 millimètres. Largeur du corps dans la région moyenne, 2 à 3 miUiraètres sans les parapodes. Le nombre des segments ne dé- passe pas 70; il y en a en général 40 à 50. Le corps est légèrement atténué aux deux extrémités, mais plus du côté postérieur que du côté antérieur. Des aires et des bandes ciliées se trouvent irréguliè- rement distribuées sur tout le corps. hdi coloration est très constante. Le lobe céphaHque est jaune avec une tache rouge orange du côté dorsal. Le premier segment porte sur la face dorsale quatre bandes transversales rouge orange, et le second segment trois; ces bandes sont plus ou moins distinctes. 350 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZÂ. Tous les autres segments ont deux bandes transversales de la même couleur. Les individus très jeunes ont des bandes disposées delà même manière, seulement leur couleur est vert jaunâtre. Une va- riété de cette espèce ne porte qu'une bande sur la face dorsale des segments sétigères, mais toujours colorée en rouge orange chez les adultes et en jaune verdâtre chez les jeunes. La face ventrale, dans les deux variétés, est uniformément colorée en jaune très pâle. La coloration disparaît complètement chez les animaux conservés dans l'alcool. Lobe céphalique (Qg. ï ) moins long que le second segment, de forme sensiblement ronde, ayant la face dorsale légèrement bombée et la face ventrale plane. Le bord antérieur est très faiblement infléchi en son milieu et porte plusieurs poils raides probablement tactiles. La largeur est d'un tiers plus faible que celle du premier segment. Laté- ralement et du côté ventral sont insérés àe.\\%palpes (P). Ce sont des appendices volumineux, sans palpostyle, dont la longueur dépasse celle de la tête. Ils sont ordinairement recourbés en arrière, pré- sentant ainsi un bord convexe, lisse en avant et, en arrière, un bord concave le long duquel se trouve une gouttière ciliée. Sur la face dorsale et un peu en arrière de l'insertion des palpes se trouvent insérées deux antennes (A) cylindriques sans cératophore, moins longues que la tête. Chez les jeunes, elles sont non articulées; mais, chez les adultes (fig. 2), elles peuvent avoir jusqu'à quatre articles. Quatre ?/etode dnStaurocephalusriibrovitlufus. Coupe transversale passant par la région proxi- male du bulbe séiigère au niveau des cellules sétigènes. Ac, acicule ; Frf, soies du faisceau dorsal ; Yv, soies du faisceau ventral ; a, cellules séligène ou formatrice de la soie ; b, réseau polygonal formé par la membrane propre ; c, noyaux du péritoine. X 1 000. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BÂNYULS. 361 dorsal, elle forme des soies simples (faisceau dorsal) et l'aciciile, du côté ventral les soies composées (faisceau ventral). Cette disposition est la môme que celle que nous décrirons chez la Slhenelaïs et elle doit être générale chez toutes les Annélides à faisceaux de soies eu forme de bouquet. Au point de vue histologique, la glande correspond exactement à la description que donne Eisig (52, p. 507 et suiv.) du même organe chez les Capitelliens. La glande est entourée d'abord par le tissu péritonéal et ensuite par une membrane propre, épaisse, hyaline, qui n'est bien nette que du côté interne. De la membrane partent des prolongements qui forment des alvéoles polygonales, dont l'in- térieur est occupé soit par des soies, soit par des cellules à plasma granuleux suivant le niveau par où a passé la coupe. Cette structure étant presque identique dans deux groupes aussi différents doit nécessairement être générale chez tous les Polychèles. Les observations de Malaquin (G2, p. 99 et suiv.) sur les Syllidiens paraissent contredire notre manière de voir; seulement, les faits exposés par cet auteur sont tellement inattendus qu'ils méritent confirmation. La coupe (fig. 2) montre aussi que l'acicule est entouré par la membrane propre de la glande, et qu'il est situé dans une alvéole analogue à celle des autres soies. Il faut donc considérer l'acicule comme une soie plus grande que les autres, et non comme une for- mation tout à fait différente. De tout ceci, il ressort qu'il n'y a morphologiquement qu'un seul faisceau de soies dans le mamelon du Staurocephalus rubrovittatus, puisque la glande est unique. Nous avons donc toutes les raisons possibles pour considérer ce mamelon comme la rame ventrale. La rame dorsale n'est représentée que par un acicule ayant une glande sétigène propre, et par un cirrhe pourvu d'un cirrhophore très développé. Le tableau ci-contre résume la discussion et montre comment on doit interpréter les différentes parties du parapode. 362 G. IMIUVOT ET E.-G. lUCOVlTZA. c Cirrhe dorsal contenaat dans le cirrliophore Rame dorsale.. . ] . . , ( un mince acicuie. ' Mamelon sétlgère bifide. \ Un acicuie se trouvant au milieu de deux Ramo venlralc. . < faisceaux de soies ayant leur origine dans / la même glande sétigène. * Cirrhe ventral. Les figures données par les auteurs (Keferstein, Claparède, Mac- intosh) montrent que la constitution du parapode, telle qu'elle vient d'être décrite pour le Slawocephalus rubrovillatus, est générale dans tout le groupe des Staurocéphalidés. La seule exception était juste- ment le Staurocephalus rubrovittatus ; mais nous avons vu qu'elle re- pose sur une erreur d'observation d'Ehlers. Cet auteur avait pour- tant bien figuré le pied du Staurocephalus Budolphi, puisqu'il ne lui attribue qu'un seul acicuie parapodial et un seul acicuie dans le cirrhophore. Le tableau qu'on vient de lire montre aussi que le parapode des Staurocéphales ne diffère en rien de celui desEunices, par exemple. Toutes les parties sont représentées, dans les deux genres, par des organes qui ne diffèrent que par des détails insignifiants. Faut-il donc considérer le parapode du Staurocéphale comme biramé, uni- quement parce que le mamelon sétigère est légèrement bifide? A ce compte, les Nephthydiens et les Néréidiens seraient pourvus de pieds à quatre ou six rames. De tout ceci, il résulte que la famille des Funicea, prise dans le sens large (Grube-Ehlers), ne comprend que des formes à porapode monastique sesquirème. En outre, comme l'homologie entre les cir- rhes dorsaux des Staurocéphales et des Eunices est démontrée, nécessairement les branchies des derniers sont de nouvelles acqui- sitions ', n'ayant pas de représentants dans le parapode des Stau- 1 Ceci est démontré non seulement parla raison morphologique qui vient d'être exposée, mais encore par des raisons anatomiques. En effet, comment peut-on faire dériver un organe produit par une évagination de toute la paroi dermomusculaire comme la branchie d'un organe purement, épidermique comme le cirrhe"? l\ faudrait supposer que le cirrliophore s'est transformé en branchie en perdant complètement FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANVULS. 363 rocéphales, et ne sont pas des cirrhes dorsaux transformés, comme le soutient Malaquin (62, p. 433 et suiv.). L'exemple pris par cet auteur : le Slaurocephalus Chïaji (non Chiagii) était pourtant bien mauvais pour sa tliéorie, puisque Claparède, qu'il cite pourtant, déclare (s^, p. 427, llMig.) que celte Annélide a les pieds uniramôs. Trompe. — Nous ne reviendrons pas sur la distinction que nous avons établie dans notre introduction entre la trompe et le bulbe maxillaire, 11 s'agit maintenant d'appliquer ces règles de nomen- clature au cas spécial qui nous occupe. Si cela n'offre pas de diffi- culté pour les Euniciens en général, qui tous ont un bulbe maxillaire typique, il n'en est pas de même pour l'appareil pharyngien du Stau- rocéphale. Chez cet animal, en effet, se trouve réalisée une forme de passage, et si nous avons appliqué le terme trompe à son organe maxillifère, c'est plutôt pour marquer la différence qu'il présente avec l'organe homologue des autres Euniciens. Un bulbe maxillaire typique, comme il se présente dans le genre Eunice, par exemple, est formé par une invagination du plancher ventral du vestibule pharyngien; ce n'est pas un organe rétrover- sible, l'axe de sa cavité n'est pas sur le prolongement de la lumière du tube digestif et les pièces dures maxillaires sont les seules par- ties qui soient projetées à l'extérieur de l'orifice buccal. Chez le Staurocéphale, l'appareil maxillaire est bien situé dans une poche du plancher ventral du vestibule pharyngien, seulement cette poche fortement plissée n'est pas nettement délimitée et se présente plutôt comme un élargissement, comme une augmentation de la surface de cette paroi. Aussi jouit-elle des propriétés d'une véritable trompe, c'est-à-dire qu'elle peut être évaginée au dehors. Si, à l'état inva- giné, l'axe de la cavité délimitée par ses plis n'est pas dans le pro- longement de la lumière du tube digestif, au moment de l'évagination l'article terminal, ce qui n'a jamais été constaté, bien au contraire, puisque très souvent le cirrlie est sessile, sans cirrhopliore. Et même, si cela était possible, la présence des acicules dans les cirrhopliores des Eunices et leur absence dans les branchies auraient dû empêcher la naissance de la théorie que nous combattons. 364 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. par contre la cavité de la trompe et colle du tube digestif forment une cavité cylindrique rectiligne. De forme assez irrégulicre, la trompe se présente dévaginée, comme un court appendice, à la face inférieure du lobe cépba- lique ; on remarque du côté dorsal, sous le bord antérieur céphalique, deux petits plis de chaque côté de la ligne médiane; ensuite vient l'orifice de la trompe, fente située dans le plan sagittal du corps. Elle est limitée par des bords plissés. Du côté ventral, une partie très volumineuse présentant deux paires de très grands plis. Les deux paires de plis dorsaux représentent le plafond du vesti- bule buccal dévaginé ; les deux très grands plis ventraux, avec leurs nombreux plis secondaires, en représentent le plancher. Toutes les pièces maxillaires sont situées sur la partie ventrale de la trompe. Les rangées maxillaires et mandibulaires, ainsi que la rangée des paragnathes, forment un triple arc de cercle de chaque côté sur le pli supérieur. Le plan dans lequel sont disposées ces rangées est le plan horizontal du corps. La proie, lorsqu'elle est saisie, se trouve ainsi serrée entre deux roues dentées dont les dents sont tournées dans le même sens, mais qui sont animées d'un mouvement qui, pour celle de gauche, est celui des aiguilles d'une montre, et pour celle de droite, dans le sens contraire. C'est un mouvement d'en- grenage extrêmement efficace pour introduire les aliments dans la bouche. Le labre se trouve situé sous le pli inférieur. L'cxtroversion de cette trompe n'est pas aussi complète que celle des Néréidiens, par exemple. Le liquide cavitaire joue un rôle, mais beaucoup moindre ; des muscles, qui seront beaucoup plus déve- loppés chez les Eunices, accomplissent en partie ce mouvement. Des muscles rélracteurs très puissants montrent déjà une disposi- tion et un développement qui rappellent celui des formes pourvues de bulbe maxillaire typique. Tous ces caractères montrent qu'il s'agit bien d'une forme de pas- sage entre la trompe et le bulbe maxillaire. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 365 Formation' des macuoires. — L'épithélium, qui revôt la face interne de la trompe, est d'origine cclodermique. Il a donc, à l'origine, une constilution identique à celle de l'épiderme. Les différences qu'on trouve chez les animaux complètement développés ne sont produites que par la différence de fonction que doivent accomplir ces deux couches ectoderiuiques. Il est pourtant facile de retrouver, dans l'épilhélium de la trompe, les éléments qui entrent dans la consti- tution de l'épiderme. Ce dernier est composé, comme on sait, de cellules de soutien d'éléments glandulaires et de cellules nerveuses. Dans la trompe, les cellules de soutien forment la plus grande partie de l'épithélium. Elles se présentent, dans les cas ordinaires^ sous la forme d'une couche unicellulaire à éléments aplatis. Elles sécrètent, comme à la surface du corps une cuticule, mais plus épaisse '. L'aspect de ces cellules (fig. 20) change dans la région où sont les mâchoires. Elles sont plus longues, et leur hauteur augmente progressivement pour arriver à un maximum à l'endroit coiffé parla dent (oc?). Les noyaux, qui dans les cellules aplaties étaient ronds (e/)), prennent un contour elliptique {od). Cette couche est la matrice des dents. Comme elle est en continuation directe avec la couche des cellules aplaties et comme il y a tous les intermédiaires entre les deux sortes de cellules, il n'est pas douteux que la matrice des dents ne soit formée par des cellules de soutien modifiées. Les dents {ma et md) aussi ne sont que des productions cuticu- laires. Le bord des apophyses est en continuation directe avec la cuticule {eu), qui est beaucoup plus épaisse autour des dents que < Ou sait que Eisig (58) soutient que la cuticule est sécrétée par les cellules glandulaires. Hatscliek (57, p. 424) dit expressément que ce sont les « Sliitzzellen » qui la sécrètent. Nous nous rallions provisoirement à cette dernière opinion, car autrement on ne pourrait pas expliquer la présence de la cuticule dans les régions où les cellules glandulaires manquent complètement, ni la formation des mâchoires, productions manifestement cuticulaires, quand leur matrice est entièrement formée de cellules qui ressemblent beaucoup aux cellules de soutien. Cette question est trop importante pour être traitée dans un travail de faune, aussi nous réservons-nous d'y revenir plus tard. 366 G. PUUVOT ET E.-G. RACOVITZA. sur le reste de la paroi du bulbe'. Celte augmentation d'épaisseur est parallèle à l'augmentation de hauteur de la paroi cellulaire. Les dents sont sécrétées comme la eu ticule, c'est-à-dire par couches successives. Eisig (5S, p. 305 et suiv.) a montré que la cuticule de beaucoup d'Annélides est formée de fibres croisées extrêmement minces. Jourdan (53), chez l'Eunice, trouve que la cuticule est anhiste, déposée par couches et, sous l'influence de certains réactifs, elle paraît striée. La strialion doit correspondre à une structure fibril- laire, comme l'a montré Eisig. La cuticule n'est donc pas anhiste chez les Euniices et, probablement aussi, chez le Staurocéphale.Quoi qu'il en soit, fibrillaire ou non, la cuticule est déposée par couches successives^ et la couche la plus ancienne doit être la plus externe. La forme de la dent dépend naturellement de la forme du pli ou du tubercule épithélial qui lui donne naissance. Chez le jeune, l'es- pace qui sécrète est petit. Il doit s'étendre avec l'âge, produisant ainsi une modification dans la forme de la dent, modification qui doit marcher du sommet vers la base. Si la majeure partie d'une dent est formée par la couche sous-jacente d'odontoblaste, la paroi de la trompe, qui dans l'organe invaginé recouvre les pièces de la mâchoire, doit jouer aussi un rôle dans leur confection, comme le montre le grand développement de sa couche épithéliale.Nous avons représenté, pour la Lumbriconeveis (voir p. 380), une coupe longitu- dinale du bulbe maxillaire ; cette figure convient très bien aussi au Staurocéphale. On voit que la paroi supérieure possède des plis for- més par de hautes cellules épithéliales. Les plis représentent en creux la forme des dents qu'elle recouvre. Il est donc certain que ces plis servent au moins de moule aux pièces de la mâchoire ; il est possible, en outre, qu'étant donné que l'épithélium de cette paroi est presque dépourvu de cuticule et que les cellules qui la forment 1 Spengel (46, p. "i'^) dit aussi à propos de la Lumbricomreis : « Auf Schnitleii sielit mann selir deiUlicli, dassdie KiefersUicko rmr modificirte Theile der allge- meinen Gulicula des Kiefersackes sind, und zwur ist ilire Grenze nur durch dass meistens ziemlich unvermilteUe auftreten des duuklcn pigments bezeichnet. » FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 367 sont du même type que les odonloblastes, il est possible, disons- nous, qu'elles puissent contribuer par leur sécrétion à l'augmenta- tion et au modelé des pièces maxillaires et mandibulaires. Les dents se formeraient alors de la manière suivante : un petit pli de la couche d'odontoblaste donnerait naissance à une petite éminence conique, la sécrétion se moulerait dans les plis de la paroi supé- rieure. Au fur et à mesure que la surface sécrétante augmenterait, la dent serait modifiée et agrandie non seulement par la couché d'odontoblaste, mais aussi par la membrane de la paroi recou- vrante. Les cellules glandulaires de l'épiderme sont aussi représentées dans l'épithélium de la trompe, mais on les trouve sous deux formes diffé- rentes. Dans le tiers antérieur de la trompe (base du bulbe déva- giné), c'est-à-dire autour de l'oritice buccal, les cellules glandulaires se présentent sous le môme aspect que dans l'épiderme. Elles ont les mêmes dimensions et la môme structure que dans la paroi externe du corps. Dans les autres parties du bulbe maxillaire, ces cellules disparaissent presque complètement et la paroi est formée uniquement de cellules de soutien, àl'exception de la région moyenne de la mâchoire supérieure, où l'on trouve des éléments glandulaires d'une forme particulière. En effet, dans cette région (fig. 20), entre la rangée maxillaire et la rangée mandibulaire, se trouvent de grosses cellules {d) pyriformes contenant un plasma très granuleux se co- lorant fortement par l'éosine. Le noyau, légèrement ovoïde, est presque entièrement dépourvu de chromatine et ne contient qu'un nucléole se colorant par l'éosine. Les cellules sont pourvues d'un canal excréteur {k) très fin, qui s'ouvre à la surface entre les pièces mandibulaires et maxillaires et à leur base. On ne trouve, en général, sur la même coupe (au centième), que deux cellules séparées par un pli formé par les cellules de soutien. Autour des grandes cellules s'en trouvent d'autres {d'), généralement deux ou trois, ayant la môme structure, seulement de taille plus réduite. On trouve aussi des cellules particulières (/') situées à côté de celles décrites. Nous 368 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. les considérons, à cause de la structure de leurs noyaux, comme des stades jeunes des grandes cellules. Leurs noyaux, en effet, sont plus grands que ceux des cellules de la matrice de la dent, et ils ont des points chromatiques moins nombreux et plus fins que ceux des cel- lules susnommées. 11 vient s'y ajouter, en outre, plusieurs nucléoles qui se colorent fortement par l'éosine. Le plasma de ces cellules présente, en outre, de très fines granulations. Toutes ces cellules si particulières doivent être considérées comme des glandes salivaires qui, peut-être, sécrètent un poison servant à l'animal pour tuer sa proie. Ehlers (38, p. 431) dit que, dans ses notes sur le Staurocephalus rubrovitlatus vivant, il avait marqué que « dans la face interne de sa (du bulbe maxillaire) paroi musculaire se trouvent enfoncées des cellules cylindriques que j'hésite à considé- rer comme des boyaux glandulaires unicellulaires. » Il est probable que les cellules d'Ehlers sont les mêmes que celles qui viennent d'être décrites. Ces glandes, avec la matrice des dents, forment un renflement de l'épithélium de la trompe, qui est limité du côté inférieur par la membrane basale. En dessous, on trouve un tissu musculaire dont les éléments ont des noyaux de petite taille, arrondis, pourvus de nombreux points chromatiques. Les libres musculaires [M) très déve- loppées s'insèrent sur la membrane basale même. Les autres régions de la mâchoire ont leur matrice constituée de la même manière, seulementles cellules glandulaires leur fontdéfaul. Nous n'avons pas découvert des cellules nerveuses dans la paroi de la trompe du Slaurocéphale. Spengel (46, p. 21 et suiv.) en a décrit chez les IJ alla, où elles forment de petites fossettes probablement ciliées. Chez les Staurocéphales, les éléments nerveux doivent être représentés aussi, seulement ils ne forment pas encore d'organes distincts. On peut donc retrouver dans la paroi de la trompe tous les élé- ments d'un épiderme typique, ayant subi cependant des modifica- tions demandées par le rôle difl'érent qu'ils ont à accomphr. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 3G9 Mucosité. — L'animal sécrète un mucus très abondant. Son épi- derme contient une quantité énorme de cellules à mucus. Les cel- lules de soutien sont en nombre très restreint et forment un véritable réseau dans les mailles duquel sont enchâssées les grosses cellules glandulaires. L'épithélium de cette espèce ressemble beaucoup à celui de Ophryotrocha puerilis (Glprd. etMeczn.), qui mène à peu près le même genre de vie. Ces deux formes, du reste, sont voisines. Elles se ressemblent par le nombre des appendices céphaliques, par la forme des parapodes, par la complication de la mâchoire et enfin par le revêtement cilié du corps. Filiation. — Gomme on a pu le voir dans le paragraphe traitant des parapodes, Ehlers considère implicitement le groupe des Stau- rocéphalidés comme dérivé du groupe des Euniciens proprement dits. Cette manière de voir s'exprime aussi dans les travaux d'autres auteurs, quoique personne, à notre connaissance, ne se soit occupé d'une manière spéciale de la phylogénie des Euniciens. 11 nous semble que les Staurocéphales doivent être considérés non comme une forme dérivée, mais, au contraire, comme la forme la plus rapprochée de la souche qui a donné naissance à tous les Euni- ciens, et nos raisons sont les suivantes : 1° Les Staurocéphales ont seuls, parmi les Euniciens, des palpes très longs et pourvus d'une gouttière ciliée. Ce caractère se rencontre chez les formes de Polychètes qu'on est à peu près unanime à con- sidérer comme primitives ; en efTet, une partie des Archiannélides, les Spionidiens et certains groupes de Girrhatuliens en sont pourvus. Ces appendices ne se présentent plus avec ce développement ou sont à l'état rudimentaire dans les autres genres d'Euniciens. 2" L'organe nucal, sous la forme la plus simple et la plus primitive, se présente comme une aire ciliée située à la partie postérieure de la tête. Le contact avec l'extérieur se fait donc par toute sa surface. Cette disposition primitive se rencontre, en effet, chez le Staurocé- phale. Chez les autres Euniciens, au contraire, il se forme des poches plus ou moins profondes, pourvues d'appareils protecteurs fournis ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — S^ SÉRIE. — T. III. 'I8'J5. 24 370 G. PllUVOT ET E.-G. RACOVITZA. par le bord antérieur du premier segment. Cette tendance de la paroi antérieure du premier segment à recouvrir l'organe nucal se montre déjà quelque peu chez le Staurocéphale, mais ce n'est que dans les genres Eunice, Lijsidice, Lumbriconereis, etc., qu'il se mani- feste d'une manière complète. 3° On peut ramener avec la plus grande facilité les parapodes de tous les Euniciens à la forme sesquirème, qui, par ce fait, devient la forme typique du parapode dans cette famille. Le groupe des Staurocéphales est pourtant le seul dans lequel tous les caractères du parapode sesquirème sont représentés d'une manière parfaite et sans addition de nouveaux organes. Chez tous les autres Euniciens, il a subi des modifications, soit par acquisition d'organes nouveaux (exemple : Eunicé) ou par réduction dans le nombre et la forme de ses parties constituantes {exemple : Lumbriconereis). 4° Nous avons suffisamment insisté au chapitre Trompe sur la posi- tion intermédiaire qu'occupait l'organe du Staurocéphale entre les véritables trompes des Polychètes et le bulbe maxillaire des Euni- ciens. Or, il est certain que l'appareil pharyngien primitif ne peut être le bulbe maxillaire si compliqué comme structure, mais bien la trompe, simple évagination de toute la partie antérieure du stomo- dœutn. D'après cet organe aussi, le Staurocéphale est donc plus pri- mitif que le reste des Euniciens. 5° Il est naturel de penser que les mâchoires ont dû se montrer d'abord sous forme d'épaississements de la cuticule du stomodœum, épaississements disposés en séries ayant tous la môme forme. Ce n'est que plus tard qu'une différenciation a dû intervenir pour aug- menter la grandeur ou modifier la forme de certaines de ces pièces et en faire disparaître les autres. La disposition primitive nous paraît donc être celle qui est réalisée dans l'appareil maxillaire du Stauro- céphale; les deux rangées mandibulaires et maxillaires se trouvent formées par un grand nombre de pièces semblables. Si l'on compare en outre cet appareil avec les mâchoires des Eunices, par exemple, on peut facilement, nous semble-t-il, faire dériver les dernières du FAUNE DES ANNELIDES DE BANYULS. 371 premier. La rangée supérieure ou rangée maxillaire du Staurocé- phale aurait disparu chez l'Eunice presque entièrement; seuls, les pinces maxillaires elles supports du Staurocéphale auraient persisté comme pinces et supports chez l'Eunice. La rangée mandibulaire formée de pièces nombreuses chez le Staurocéphale, donnerait alors les cinq maxilles de l'Eunice ; les labres seraient naturellement strictement homologues. Il est à remarquer aussi que la mâchoire du Staurocéphale est entièrement formée de chitine. Chez les autres Euniciens, il se produit un perfectionnement par le calcaire qui vient s'y ajouter. Nous ne voulons pas prétendre que les Euniciens vrais sont les descendants directs des Staurocéphalidés ; nous croyons seulement que ce groupe est bien plus près de la souche primitive que tous les autres. Les Euniciens sont, paléontologiquement, très anciens, et la diflerencialion à l'intérieur de cette famille est faite dès les temps secondaires, puisqu'on a décrit des formes très voisines du genre Eunice {Eunlcites) dans les schistes lithographiques de Bavière. Tous les groupes d'Eunices, qu'ils soient restés plus près de la forme primitive ou qu'ils aient rapidement évolué, ont subi des chan- gements plus ou moins considérables qui nous empêcheront pro- bablement toujours de connaître d'une manière absolue la souche primitive. Syn. l8oo. Staurocephalm ruhromttatus Grube (*i), p. 07, pi. 111, fig. 8-12. 1868. Staurocepludus rubrovittatus Ehlers (28), p. 424, pi. XVIII, fig. 1-16. 1888. Staurocepludus rubrovitlatus Saint-Joseph (54), p. 235, pi. X, lig. 99 (pr. syn.). 1866. Staurocephalus'Êjmcxfûrum Maliugren (24), p. 184. 1867. Staurocephalus erucœformis M.ilmgren (25), p. 177, pi. IX, fig. 50. 1880. Staurocephalus erucxformis Langerhans (43), p. 299, pi. XVI, fig. 33. Les différences qui existaient entre le Staurocephalus rubrovittatus et le S. erucacformis consistaient d'abord dans l'absence d'article ter- minal aux antennes et aux cirrhes parapodiaux dorsaux. On a vu 372 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. plus haut que la non-articulation des antennes ne constitue pas un caractère spécifique. L'absence d'article terminal au sommet du cirrhe parapodial doit être attribuée à une erreur d'observation. Le cirrhe parapodial des Staurocéphales se compose de deux parties qui ne sont pas du tout homologues. L'une est le cirrhophore qui est formé par toute la paroi du corps, et qui contient naturellement un prolongement de la' cavité générale. Cette partie peut seule contenir un acicule. Le cirrhostyle, par contre, est une production purement épidermique, ne pouvant pas contenir de prolongement de la cavité générale et n'ayant jamais d'acicule. Malmgren décrit dans la rame supé- rieure (?) « setis binis omnino inclusis » . Cette phrase se rapporte évidemment à l'acicule du mamelon et à l'acicule du cirrhe qui se trouvent chez tous les Staurocéphales. Il y a donc chez l'espèce de Malmgren forcément un article basilaire dans le cirrhe, puisqu'il y a un acicule et tout aussi forcée est alors la présence de l'article terminal. Ce dernier peut exister sans son cirrhophore, simplement placé sur la rame, mais alors il n'y a pas d'acicule. Nous pouvons citer comme exemple \e Stawocephalus Kefersteini {Ma.c-ln.siosh, 30, p. 417, pi. XVI, fig. 11). Du reste, cette espèce appartient à un au- tre groupe que les deux formes dont il est question, groupe carac- térisé par la nature des soies, le nombre des yeux et la situation des cirrhes sur les parapodes K 1 Outre l'espèce citée, il y en a encore deux qui appartiennent au même groupe : Staurocephalus atlanticus ( Mac-Instosh, 49, p. 232, pi. XXXVI, fig. 4 et 5, pi. XVII A, fig. 5-S) et Staurocephalus brachyceros (Grube, 43, p. Ho). Cette dernière est évi- demment le jeune du Staurocephalus Kefersteini. Quoi qu'il en soit, ces deux ou trois formes ne peuvent rester dans le genre Staurocéphale ; mais Mac-Instosh (49, p. 232) a eu tort d'appliquer le genre Prionognathus (Kefersteiu) à son Staurocephalus Kefersteini, la dénomination générique de Keferstein ayant été créée par lui (i 9, p. 99) pour le Prionognathus cilialus qui est un Staurocéphale typique. Le nom de Prionognathus tombe donc en synonymie et Ton n'a plus le droit de l'employer. Comme nous ne possédons pas d'échantillon de ce groupe et que les descrip- tions de Mac-Instosh sont par trop insufllsantes, nous nous bornons à rectifier la nomenclature de cet auteur, assez coutumier de ces sortes d'erreurs. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 373 Langerhans rapporte im des Staurocéphales trouvés à Madère au S. erucxfoi'tnis, quoique les cirrhes dorsaux aient un article terminal et qu'il y ait quatre fossettes ciliées représentant l'organe nucal. Seulement il croit que Malmgren n'ayant eu que des individus dans l'alcool, a pu ne pas voir ces caractères. Sa description diffère de celles du Staiirocephalus riiby^oviltatus qui existaient de son temps, par les points suivants : antennes sans article terminal, absence de paragnathes, organe nucal représenté par quatre fossettes. On sait à quoi s'en tenir au sujet des deux premiers caractères. Quant au troisième, c'est justement la disposition qui se rencontre chez le rubroviltatus et qui a été mal interprétée par Ehlers. La rectification que nous avons eu à introduire dans les descrip- tions des auteurs et la synonymie que nous avons établie nous ont forcés de donner une description complète de cet animal. Sur plu- sieurs points, la description d'Ehlers est plus longue que la nôtre (même trop longue croyons-nous). Nous avons essayé de la résumer et la compléter en élargissant un peu la valeur de certains carac- tères. Les figures des pièces de la mâchoire exactement dessinées à la chambre claire permettront des comparaisons fructueuses avec les mâchoires des autres types, car il n'est pas douteux que ces or- ganes ne donnent un bon caractère spécifique. Malheureusement les figures des auteurs sont trop insuffisantes pour nous permettre ces comparaisons, mais déjà l'on peut prévoir la séparation prochaine des Staurocéphales typiques en deux groupes : Le groupe du Staurocephalus rubroviltatus avec les palpes inarti- culés et un premier type de mâchoires. Et le groupe du Staurocephalus chiaji avec des palpes à article terminal et un second type de mâchoires. 374 G. PRUVOT ET E -G. RACOVITZA. LUMBRICONEREIS COCCINEA. (reN.) 1804. Nereis coccinea Renieri (t), p, 19. 1864. Lumbriconereis coccinea Grube ' (SO), p. 80. (PI. XVI, fig. 21-37.) Couleur rouge orange à jaune orange. — Tête globuleuse presque aussi longue que les trois premiers segments. — Premier segment deux fois plus long que le second. — Mamelon ventral du parapode-court, arrondi, non cirrhiforme. — Soies composées remplaçant dans les segments antérieurs les soies à cro- chet des segments postérieurs. — Maxille I de quatre à six dents. — Maxille II à deux dents. — Maxille III à une dent. Longueur maximum, 170 millimètres. Taille ordinaire, 80 à 60 mil- limètres. La largeur ne dépasse pas 2 millimètres avec les parapodes. Nombre moyen des segments ; jusqu'à 140. Face dorsale légèrement bombée, face ventrale plane. Le corps a la même largeur sur les trois quarts antérieurs de la longueur, mais il s'atténue rapidement dans le quart postérieur. Couleur depuis rouge orange très foncé jusqu'à jaune orange très pâle, uniformément distribuée sur tout le corps, et sur la face dor- sale comme sur la face ventrale. Le pigment orangé est soluble dans l'alcool et dans ce cas montre une belle fluorescence bleue. Les ani- maux qui se desséchaient au bord des cuvettes devenaient d'abord violet pourpre très foncé puis complètement noirs. Lobe céphalîque (fig. 20 et 22) arrondi. Chez l'animal conservé dans l'alcool, il est globuleux presque rond et aussi long que les trois premiers segments. La face dorsale est bombée, la face ventrale plus plate. Du côté dorsal entre le lobe céphaliqueet le premier segment, une fossette ciliée, ronde, dévaginable(?), de chaque côté de la ligne médiane représente l'organe nucal {nu). Dans les cas ordinaires, cet organe esta moitié caché par le bord antérieur du premier segment. Le premier segment (fig. 21) est un peu plus large que la tête, mais ' C'est Grube qui lui a donné pour la première fois son vrai nom de genre, et non Elilcrs, comme le dit Carus (4 8). FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 375 aussi large que les segments suivants; il est plus long du côté dorsal que du côté ventral ; il est dépourvu d'appendices et de soies. La bouche ventrale est limitée en arrière par le bord antérieur de ce seg- ment qui est marqué de plusieurs sillons longitudinaux limitant des plis. On trouve en outre un sillon médian plus profond et plus large qui se continue sur le second et le troisième segment. De l'intérieur de la bouche sortent de chaque côté de la ligne médiane deux coussi- nets buccaux {cb) ovoïdes, dont la longueur dépasse le quart de la longueur de la tête. Le second segment est nu comme le premier, mais il est deux fois plus court que lui. Les autres segments ont à peu près les mêmes dimensions dans les trois quarts antérieurs du corps. Leur longueur et leur largeur di- minuent dans le quart postérieur. Au lieu d'avoir les bords latéraux arrondis comme les deux premiers segments, ils ont un contour va- guement hexagonal. Leur face dorsale est bombée, leur face ven- trale est plane. Les parapodes (fig, 23) sesquirèmes sont des petits mamelons très courts par rapport à la largeur du segment. Ils présentent du côté ventral un prolongement digitiforme(/) qui ne peut pas être considéré comme un cirrhe, car il contient un diverticule de la cavité générale, Lesso?es jaunes transparentes sont peu nombreuses dans tous les parapodes. Elles sont de trois sortes : 1» Soies simples à sommet aplati (fig. 24), 'légèrement recourbé; pourvues sur le tranchant d'une aile plus ou moins large et finement striée. On rencontre quelquefois ti côté de cette forme une autre (fig. 23) plus petite et irrégulière. Les soies de ce type sont toujours situées dorsalement par rapport aux autres; 2° Soies composées à hampe hétérogomphe (fig. 26) dont la serpe très courte se termine par un crochet ayant plusieurs dents (5 à 6) au sommet. La serpe et le sommet de la hampe sont com- plètement entourés par une gaine bivalve {g) h contour sinueux et recouverte à la surface de très fines spinules; •■ne G. PRUVOT ET E.-G. RAGOVITZA. 3" Soies simples terminées par un fort crochet (fig. 27) ayant 5 ou 6 dents au sommet. Le sommet de la soie est complètement entouré d'une gaine bivalve (<7), spinuleuse. La grandeur du crochet terminal et de la gaine est très variable dans le même parapode mais conserve fidèlement le même type. Les soies composées varient beaucoup moins de grandeur. La distribution de soies varie suivant le numéro d'ordre du para- pode. Celte distribution n'est elle-même pas constante chez les dif- férents individus de cette espèce, et la variation est surtout en rap- port avec l'âge de l'animal. Nous allons donner la distribution des soies chez un jeune et chez un adulte. Un échantillon de 40 millimètres : Soies capillaires du IIP (1*^' sétigère) au XXIX" segment ; Soies composées du IIP (1*='' sétigère) au X' segment ; ' Soies simples à crochet du XP jusqu'au dernier segment. Un échantillon de 60 millimètres : Soies capillaires du IIP {]'' sétigère) au XLIP segment j Soies composées du IIP {{"' sétigère) au XXIIP segment ; Soies simples à crochet du XXIV" jusqu'au dernier segment. Les animaux très jeunes (jusqu'à 24 segments environ) n'ont pas de soies composées ; tous les parapodes sont pourvus de soies ca- pillaires et de soies simples à crochet. Deux acicules (fig. 23, an) à pointe conique se trouvent placés dans le milieu du parapode, entre des soies. Ils ont la même cou- leur et la même apparence que ces dernières, et sont situés l'un à côté de l'autre. Un groupe de petits acicules très fins [ah] est placé du côté dorsal. Le pygidium et ses quatre urites varient dans leurs formes, suivant l'âge des animaux. Chez les jeunes (fig. 30), le premier présente une partie antérieure renllée et, du côté postérieur, quatre urites {U) très courts, ovoïdes, presque foliacés, sensiblement égaux. Chez les adultes (fig. 29), la partie antérieure {j) s'est séparée du reste par un sillon circulaire, ce qui donne l'apparence d'un segment antéanal FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 377 nu. Les urites se sont beaucoup allongés; ils présentent une base renflée, qui se continue par une partie plus mince et beaucoup plus longue. Les urites dorsaux sont plus courts que les ventraux. L'anus est terminal. hdi mâchoire se compose d'un labre (fig. 31) formé de deux pièces translucides. Leur bord antérieur est régulièrement arrondi chez les jeunes. Chez les adultes, ce bord présente des contours saillants, occasionnés par l'usure. Les deux pièces du labre sont réunies l'une à l'autre par une grande partie de leurs bords internes. La rangée mandibulaire (fig. 32) est représentée par le support [z) et par les pinces {md) ressemblant aux pièces homologues du genre Eunice.La portion médiane des pinces est noire et opaque; l'extré- mité antérieure et la région postérieure sont blanches et transpa- rentes. Cette pièce repose sur un support formé de deux parties de couleur noire, accolées sur leur bord interne. La rangée maxillaire est représentée par trois pièces. La maxille I est tout à fait transparente chez le jeune (fig. 33). Chez l'adulte (fig. 32 ma'), elle est d'une teinte plus ou moins foncée et présente de quatre à dix dents, sans compter un fort prolongement posté- rieur. En avant sont les maxille II (fig. 32, ma^, et fig. 34) et maxille III (fig.32,?na*, et fig. 35), formés par une pièce massive et triangulaire. La maxille II a deux dents ; la maxille lil, une dent. A toutes les pièces énumérées (le labre excepté) viennent s'ajouter des râpes (fig. 32-35, r). Les pinces mandibulaires en ont une en forme de languette, attachée du côté convexe (externe). Les pièces maxillaires en ont aussi chacune une; la maxille I, le long de son bord externe, sous forme de bandelette allongée et les deux pièces antérieures en ont des plaques plus grandes, de forme plus ou moins arrondie. Il existe, en outre, une râpe (fig. 32, r') de chaque côté, ayant une forme vaguement carrée, qui n'est pas en rapport avec les pièces de la mâchoire et qui est située en dehors et en face de l'espace qui sépare les deux pièces maxillaires antérieures. Les ani- maux très jeunes (24 segments environ) n'ont pas encore de râpes. 378 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. Ces animaux sécrètent un mucus très abondant et incolore. Nous les avons trouvés en très grande abondance dans les colonies mortes des Dendrophyllies et Amphihélies. Ils habitent les vieux tubes de Serpules et les crevasses et canaux qui traversent les coraux. Les plus grands échantillons trouvés avaient les produits sexuels très peu développés aux mois de mai et juin. Parapodes. — Cet organe, qui paraît si simple, doit cependant être considéré comme sesquirème et non comme unirème. Il dérive, en effet, d'un pied sesquirème type, de celui du Staurocéphale par exemple, par la disparition des cirrhes. La présence du paquet d'aci- cules dorsaux décèle la présence d'un rudiment de rame dorsale, comme chez le Staurocéphale et les autres Eunieiens. Le petit lobe ventral du parapode ne doit pas être considéré comme rudiment du cirrhe ventral, car il est formé par une évagination de toute la paroi dermo-musculaire. C'est une formation sans valeur morphologique, comme les lobes du mamelon du Staurocéphale. La présence de soies à crochet et de soies composées dans les parapodes de celte espèce n'a rien d'exceptionnel. Gomme on le verra plus loin, chez les Eunices, on trouve aussi à partir d'un cer- tain nombre de segments, à côté des soies composées du faisceau ventral, une soie à crochet désignée sous le nom de soie aciculaire. 11 est naturel de penser que, phylogénétiquement,Ies soies simples sont plus primitives que les soies composées. Dans le cours du dé- veloppement, on voit aussi que les soies composées commencent par être d'une seule venue et que, plus tard seulement, la serpe se détache de la hampe. Cette hiérarchie phylogénique se manifeste aussi dans l'ordre d'apparition des différentes sortes de soies chez la Lumbriconereis coccmea. Chez les jeunes (24 segments environ), les soies composées manquent complètement dans tous les para- podes ; on n'y trouve, à tous les segments, que des soies capillaires et des soies à crochet. Les soies composées n'apparaissent que beau- coup plus tard dans les premiers segments, et elles s'étendent de FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYÙLS. 379 proche en proche, d'avant en arrière, au fur et à mesure que l'animal avance en âge. On comprend ainsi que, pour la spécification, le nu- méro du segment où apparaît une soie n'a dé valeur que si elle est rapportée à la taille de l'animal, et encore la valeur de ce caractère est très relative à cause des très grandes variations individuelles. Mâchoire. — Les noms que nous avons donnés aux différentes par- ties de la mâchoire de cette espèce montrent suffisamment com- ment nous interprétons cet appareil, et comment nous établissons l'homologie avec lès pièces de la mâchoire des Staurocéphales. On voit que, de la rangée mandibulaire, il ne reste que les supports et la pince; de la rangée maxillaire, que trois pièces dont les antérieures ont subi une réduction notable. Les paragnathes du Staurocéphale ne sont pas représentés dans la mâchoire des Lumbriconereis ; par contre, un perfectionnement nouveau, spécial à ce genre, se trouve réalisé dans les râpes. On ne peut être tenté d'homologuer ces formations aux paragnathes, car elles ne forment pas une rangée linéaire et indépendante. Elles sont, en effet, rattachées aux différentes pièces de la rangée mandibulaire et maxillaire. Chez les jeunes (moins de 24 segments), les râpes font complètement défaut. Elles apparaissent dans le cours de la crois- sance de l'animal comme des petites taches pigmentées et granu- leuses, prenant un développement de plus en plus considérable. Les granulations deviennent de plus en plus distinctes, aussi les râpes des animaux adultes se présentent comme de petits aiîias (flg. 36) de cinq à dix sphérules accolées. Chaque amas est séparé des amas voi- sins par un petit espace. Au milieu de la râpe, les sphérules sont colorées en brun très foncé; mais cette couleur devient beaucoup plus pâle vers la périphérie. La coupe représentée dans la figure 3 (texte) montre la structure de la première maxille et de sa couche d'odontoblastes. C'est un fragment d'une coupe sagittale passant à travers le bulbe maxillaire invaginé. Gomme l'a déjà dit Spengel, et comme on l'a vu pour le Staurocéphale, les mâchoires ne sont que des productions cuticu- 380 G. PRUVOT ET E.-G. KACOVITZÂ. laires en continuation directe avec la cuticule. Elles sont sécrétées, comme celte dernière membrane, par la couche de cellules épider- miques sous-jacente [O.di], qui s'est pourtant un peu modifiée. La modification du reste se manifeste principalement sur la grandeur des cellules, la masse qui doit être sécrétée étant plus considérable. o.a.. Fig. 3. - Bulbe maxillaire de la Lumbriconereis coccinea. Coupe longitudinale de la région de la première maxille. La dent reposant sur sa couche d'odontoblastes est recouverte par un pli de la paroi du bulbe maxillaire. M, maxille I; O.rfl, couche d'odontoblastes de la matrice dentaire; 0.rf2, couche d'odontoblastes du moule ; en. épiderme du pli ; ep', épiderme passant insensiblement aux odontoblastes ; G, cavité centrale de la dent; x, région de la cuticule où commence à apparaître le pigment; m, fibres musculaires vues en long ou coupées en travers. X 300. Comme on peut le voir dans la figure, la couche de cellules épi- dermiques {0.d2) qui recouvre la mâchoire a subi la même modi- fication; il est donc certain qu'elle joue un rôle dans l'accrois- sement des pièces maxillaires. Elle doit servir aussi, comme l'indique la disposition de ses plis, à donner la forme, à servir de moule aux différentes pièces de la mâchoire. La couleur foncée des pièces est produite par le dépôt de fins FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 381 granules noirs à l'intérieur des couches successives de la cuticule. Sur les bords (x) des mâchoires, cette disposition est très nettement visible; mais, dans le corps des mâchoires, ces granules sont accu- mulés en telle quantité qu'on ne voit plus qu'une masse compacte de couleur noire. Toutes les pièces font effervescence quand on les place dans un acide. Cela est dû à la présence du calcaire, qui est très abondant dans les mâchoires à.&?> Lumbriconereis. Cette substance occupe la partie centrale de toutes les pièces de la mâchoire. Dans la figure, cette partie centrale a été désignée par la lettre C. Après l'action de l'acide, toutes les pièces gardent plus ou moins leur forme antérieure, ce qui montre que la chitine forme la partie la plus externe. Le labre est formé par de nombreuses couches trans- parentes de chitine, entre lesquelles s'est déposé le calcaire. Les pinces, comme on peut le voir sur la figure (fig. 37), sont formées par un manchon chitineux jaune, rempli de calcaire. Du côté ventral et postérieur, une place beaucoup plus claire que le reste (o) montre un espace non recouvert de chitine et qui forme un large orifice lorsque le calcaire est parti. Cet orifice donne accès dans la cavité interne de la pince, qui débouche au sommet de cette pièce. Le calcaire remplit le tout et sort môme par l'orifice du sommet. Les autres pièces ont toutes des cavités débouchant au sommet des dents et complètement remplies de calcaire. Les gros orifices posté- rieurs des cavités internes et leur bord sont les seuls endroits par où les pièces de la mâchoire sont en contact direct avec la paroi du bulbe maxillaire. Le bord de ces orifices est, en effet, en continuité avec la cuticule qui recouvre la face interne du bulbe. Les granules qui forment les râpes contiennent aussi un peu de calcaire à leur intérieur. D'après ce qui vient d'être dit de la structure intime des mâchoires, il ne reste plus place pour les prétendus canaux à venin, décrits par beaucoup d'auteurs (Langerhans [45], Saint-Joseph [54], etc.), dans les mâchoires des Lombriconères. Comme la cavité interne des dents est étroite, et comme le calcaire qui les remplit est plus réfrin- 382 G. PUUVOT ET E.-G. KAGOVITZÂ. gent que la chitine environnante, on peut, à première vue, croire qu'on a sous les yeux un canal creux ; mais il suffît de casser une pièce de la mâchoire pour voir que le prétendu canal est plein. Les Eunices ont leurs mâchoires constituées de môme, et personne n'y a décrit de canal. D'ailleurs, il n'y a pas trace, dans les environs de la dent, de glandes quelconques qui puissent jouer le rôle de glandes à venin. Filiation. — Il n'est pas douteux que les Lmnbriconereis soient des formes dérivées et non des formes d'Euniciens primitifs, comme pourrait le faire croire la simplicité de leur organisation externe. On a vu que le parapode est loin d'être un parapode simple, quoiqu'il se présente scus la forme d'un simple mamelon sans appendices. La présence d'organes rudimentaires à son intérieur montre qu'il a subi des modifications régressives. Les mâchoires, par la présence d'un organe spécial à ce genre, montrent, par contre, un phénomène d'évolution progressive, mais qui a pour effet aussi d'éloigner ce genre du type primitif des Euniciens. Le lobe céphalique avec ses organes nucaux, pourvu d'un ganglion extrêmement spécialisé et d'un appareil protecteur formé par le bord antérieur du premier segment, montre encore une différenciation très avancée. Nous sommes tentés de voir dans les Lumbriconef^eis le terme de l'évolution d'un rameau du genre Eunice. La série : Eunice, Marphysa, Lysidice^ Zuraéncont^ms, indiquerait, dans ses grandes lignes, la marche des modifications successives. Nous ne croyons cependant pas qu'on puisse représenter cette évolution par une ligne droite Syn. 1804. Nereis coccinea Reaieri (*), p. xix. 1828. Lumbricus coccineus Délie Chiaje (4), t. 111, p. 170 et 178, pi. XLII, fiç. 3-10 et lo. (?) 1838. Nerinella coccinea Nardo {lide Garus, 48). 1841. Lumbriconereis coccineus Délie Chiaje C?), t. III, p. 83, pi. XGVI, fig. 3-10 et 1K,Ï.V, p. 98. 1847. Nereis coccinea Reaieri (9), p. 20, pi. X. 1864. Lu7nbriconereis coccinea Grube (20), p. 80. 181)0. Lumbriconereis Vnsco Quatrefages («3), p. 364. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BÂNFOLS. 383 1868. Lumbnconereis coccinea Ehlers (28), p. 389, pi. XVII, fig. 3. (?) 1884. Lumbriconereis coccinea Langerhaas (47), p. 237. Nous adoptons la synonymie proposée par Ehlers et Grube, malgré les descriptions tout à fait insuffisantes de Délie Chiaje et Renieri. Pour les deux espèces créées par Quatrefages, la Z!,i-lo'» 8. 0.4 29 60 1 130 Manquent (?) llo 9. 120 140-150 405050 14-15 10o-38 2-3 derniers 3" 30° 1 Auteurs ayant fait V observation : 1. Audouin et Milne Edwards (5), p. 140-144 ; 2. De Oiiatrefages (23), p. 307-309 ; 3 et 4. Grube (34), p. 90, note; Langer- hans (45), p. 294; 6, 7 et S. Saint-Joseph (541, p. 197-201; 9. Pruvot et R.ico- vilza. — Quelques-uns des auteurs cités considèrent les deux premiers segments nus comme un segment unique. Nous avons donc modifié les chiiïre» de ces auteurs pour les rendre comparables aux autres. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 385 Le tableau ci-dessus indique suffisamment les dimensions de cette espèce. Le corps a partout la même largeur, excepté du côté postérieur où il s'atténue légèrement. La face dorsale est bombée, la face ventrale plane. Coloration. — La teinte générale du dos varie depuis le rouge brique jusqu'au rouge violacé. Le lobe céphalique est blanc sur le bord antérieur et rouge vers le milieu. Autour de la ligne d'insertion des antennes se trouve une bande blanche. Le premier segment porte trois taches en forme de losange, une médiane et les autres latérales. Ces trois taches se continuent avec la même forme sur les autres segments du corps, seulement il vient s'y ajouter plusieurs petites taches en avant des parapodes. Le second segment porte une ligne blanche transversale sur laquelle sont insérés les cirrhes tenta- culaires. Vers la partie postérieure du corps, la coloration est moins nette. La face ventrale est uniformément couleur de nacre irisée. Le lobe céphalique (fig. 48 et 49) est bombé du côté dorsal et se ter- mine en avant par deux lobules arrondis dont le sillon de séparation atteint à peine un quart de la longueur de la tête ; chacun des lobules présente, en outre, un sillon très bien indiqué, qui les divise en un petit lobule dorsal (palpe frontal, F) et en un grand lobule latéral ou ventral (palpe labial, P). Du côté postérieur, sur une ligue repré- sentant un arc de cercle à concavité antérieure, se trouvent insérées cinq antennes. Ces appendices, placés sur des cératophores très réduits, présentent des bandes brunes, faiblement indiquées, au nombre de six à huit. L'antenne impaire est plus de deux fois aussi longue que l'antenne externe ; rabattue sur le dos, elle arrive jusqu'au huitième segment. Les yeux^ de couleur bleue, sont situés entre les antennes moyennes et externes. Les oi-ganes nucaux ne sont pas visibles à l'extérieur, mais sont cachés parle bord antérieur du pre- mier segment. Le 'premier segment est aussi long que les trois suivants. Il présente, du côté antérieur, un pli [k) ayant l'aspect d'un anneau incomplet, ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉNi — 3» SÉRIE. •— T. 111. 189b. 25 386 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZÂ. s'aiTêtant au milieu des faces latérales; à cet endroit, se trouve aussi un sillon formant la limite de la bouche, qui a la forme d'une fente allongée, et se trouve située en dessous et en arrière du lobe cépha- lique. Elle est limitée en arrière par le bord antérieur plissé du pre- mier segment. De son intérieur sortent deux coussinets buccaux très réduits. Le second segment est bien indiqué du côté dorsal et ventral, mais il est peu marqué latéralement. Il porte, du côté dorsal, deux cirrhes tentaculaires faiblement annelés, pourvus d'un cirrhophore réduit. Leur longueur ne dépasse pas celle du premier segment. Les troisième^ quatrième et cinquième portent des parapodesdont le mamelon sétigère est plus ou moins réduit, mais dont les cirrhes dorsaux, faiblement annelés de brun, sont plus longs que dans les autres segments. Les mamelons sétigères sont situés plus près de la face ventrale que ceux des autres segments. Les autres segments ont des parapodes normaux et des cirrhes non annelés. A partir du quatrième, cinquième ou sixième commen- cent les branchies. Un parapode normal (fig. 50) pris dans la région des trente premiers segments se compose des parties suivantes : un cirj'he dorsal (Ch) subulé à base légèrement renflée. Le cirrhophore, extrêmement réduit, n'est pas séparé du cirrhe par un sillon. Du côté dorsal par rapport au cirrhe, se trouve une branchie {br) ayant un nombre plus ou moins grand de filaments. Dans le cirrhophore est implanté un faisceau d'acicules jaunes (ah) à extrémité recourbée. Le mamelon sétigère est arrondi. De son extrémité sortent deux faisceaux de soies qui ont leur origine dans un bulbe unique. Le faisceau dorsal contient des soies de deux sortes : des soies simples ailées, en forme de sabre, de couleur jaune, à bord convexe denté, à lame finement striée, et des soies en spatule (PI. XVIII, fig. 69), incolores, à sommet aplati, frangé, pourvues d'un long filament sur un des côtés. Le faisceau ventral contient des soies composées (fig. 52), dont la serpe, terminée par un double crochet, est protégée du côté du tranchant FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYDLS. 387 par deux valves formant une gaine (^) qui ne protège que la moitié de cette région. La largeur de la serpe prise dans son milieu est comprise en moyenne trois fois dans la hauteur du tranchant. La hampe hétérogomphe porte des stries sur la partie du tranchant qui avoisine le rostre. A partir d'un nombre de segments variables sui- vant la taille (27 à 30 par des longueurs de 70 à 120 millimètres) (fig. 51), il vient s'y ajouter la soie simple aciculaire (fig. 53) pourvue d'un crochet bifide protégé par une demi-gaine {g). Cette soie est jaune comme les autres soies et comme les deux acicules (an) pré- sents à tous les pieds. Le curhe ventral, jusqu'au trentième segment (fig. 50, Cn) environ pour une longueur de 120 millimètres, est formé par un cirrhophore globuleux, surmonté d'un cirrhostyle dont le sillon de séparation est peu marqué. A partir du trentième (fig. 51 , Cn), le cirrhophore s'amincit et prend une forme subulée. Dans les cinq ou six derniers segments, le mamelon sétigère devient plus ou moins rudimentaire et ses cirrhes s'allongent. Les branchies [hr], qui com- mencent d'abord sur le quatrième (rarement), cinquième ou sixième segment par un ou deux filaments, prennent rapidement leur plus grand développement, qui est réalisé entre le quatorzième et le trente-septième pour une longueur de 120 millimètres. A partir de ce dernier, les filaments diminuent en nombre, mais les branchies continuent jusqu'à quelques segments en avant du pygidium ou même jusqu'à l'avant-dernier segment du corps. Le pygidium, arrondi, présente, du côté dorsal, l'anus, qui appa- raît comme une fente à bord plissé, et, du côté ventral, deux urites très longs, subulés, avec des anneaux bruns faiblement indiqués. Le labre (fig. 54) présente en avant une lame blanche {i) et cal- caire ; son bord antérieur est coupé obliquement. Les dents, plus ou moins indiquées sur ce bord, sont ducs à l'usure et ne peuvent donc avoir aucune constance. Le manche, de couleur noire, formé par des couches chitineuses et calcaires, présente un pli diagonal qui n'intéresse que la moitié antérieure de la pièce. Les pinces mandibulaires (fig. 55) présentent une crête longitudi- 388 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZÂ. nale médiane ; leur bord externe est légèrement infléchi en dedans, formant ainsi une gouttière. Les supports [h] dépassent la moitié de la longueur de la pince. Voici le nombre des dents des pièces maxillaires (fig. 56-58) : A gauche : Maxille I : 5-6 ; II : 8 ; 111 : 5 ; IV : 1 ; V : 0. A droite : Maxille I : 5-6 ; II : 7 ; IV : 1 ; V : 0. Malgré le nombre des individus examinés provenant de la Médi- terranée et de l'Océan, il nous a été impossible de constater la pré- sence de variétés caractérisées. Chez tous les individus examinés, la description que nous avons donnée s'appliquait parfaitement. La seule chose paraissant plus sujette à varier, c'est la coloration, et encore la variation s'exerce sur la teinte générale et non pas sur la distribution des taches blanches qui restent constantes. L'habitat de cette espèce est assez variable. Elle habite de préfé- rence dans les pierres calcaires remplies de crevasses, ou encore sous les croûtes formées par les Diaslopora et les Éponges à la surface des tiges de Cystoseires. En tout cas, ces Annélides ne descendent pas plus bas que les algues, qui leur servent de nourriture. Le contenu de l'intestin de ces animaux nous a montré, en effet, qu'ils sont loin d'avoir un régime exclusivement Carnivore. Ces Eunices fabriquent, à l'aide de leur sécrétion épidermique, des tubes minces parchemi- nés. L'animal les fabrique très facilement et en très peu de temps. Synonymie. — N'ayant rien à ajouter ou modifier à ce sujet, nous renvoyons à Saint- Joseph (54, p. 197). Comme on a pu voir d'après le tableau publié page 384, beaucoup de caractères employés par les auteurs n'ont qu'une valeur relative. Ainsi, le numéro du segment oii commence la soie aciculaire et le nombre de filaments branchiaux varient suivant l'âge de l'animal. Ce caractère n'a donc de valeur que si l'on indique en même temps la taille. L'apparition des branchies peut varier dans la limite de trois segments. Les soies en spatule existent dès le premier faisceau de soies et les branchies arrivent jusqu'à l'extrémité postérieure, quoi qu'en disent les auteurs. Par contre, le numéro du segment où il y FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 389 a le maximum des filaments branchiaux paraît constant, même quand la taille varie dans des limites assez larges. Nous allons reve- nir sur tous ces caractères dans un chapitre spécial à la fin de la description des autres Eunices. 11 s'agira de déterminer alors les bons caractères spécifiques. EUNICE TORQUATA QTRF. 1863. Eimice torquata Quatrefages (23), t. I, p. 312-313. (PI. XVII, fig. G;i-67. Pl.XVIlI, fig. 70-75.) Teinte générale brun acajou. — Sixième segment toujours coloré en blanc sur sa face dorsale. — Antenne impaire aussi longue que les quatre premiers seg- ments. — Tous les appendices moiiiliformes ayant tous leurs articles pourvus d'un anneau brun. — Branchie à partir du cinquième segment n'allant pas jusqu'à l'extrémité postérieure du corps (environ 2o segments abranches chez les animaux à 140 segments). — Maximum des filaments branchiaux sur les branchies du septième au trente-huitième segment environ pour une taille de 10 centimètres et le nombre maximal ne dépassant jamais 10 pour la même taille. — Soies en spatule avec un long filament des deux côtés. — Soie aciculaire sans gaine, de couleur noire, présente à partir du trente- deuxième ou trente-troisième segment (10 centimètres de taiUe). — Acicules noirs. — Support dépassant en ilongueur le tiers de la pince mandibulaire. « tH tJD •= il S-2 c c o s s C:3 II -a c 2 g i •3 = 5 «1 2 ^6 a J3 .J s ■" ai "^ S a> " — "3 « « S O o o. 220 160 50 6- s 180 175 o» 8 ICO G 190 5» 12 120 4,;j 180 5» 12 100 5 140 y» 7 7-34 3 a a 2 g 2 m u 3 27-30 27-30 Quatrefages (8 3), t. I, p. 312-31:1. Quatrefages (23), t. I, p. 314-313, JElilers(a»), p. 312-344. 32-33 Prnvot et Racovitza. Le tableau ci-dessus indique suffisamment les dimensions de cette espèce. Le corps a partout la même largeur, excepté du côté postérieur où il s'atténue légèrement. La face dorsale est bombée, la face ven- trale plane. 390 G. PRUVOT ET E.-G. R.\C0VITZÂ. Coloration. — La teinte générale du dos est brun acajou. Le lobe céphalique est blanc sur le bord antérieur et brun vers le milieu. Autour de la ligne d'insertion des antennes se trouve une bande blanche. Des bandes blanches, qui peuvent s'étendre sur toute la face dorsale du segment, se trouvent sur les quatrième et cinquième (rarement] ou sixième segments (toujours), mais manquent toujours dans les segments postérieurs. En général, c'est le si.xième qui est seul coloré en blanc. Souvent, les autres segments portent sur le bord antérieur une étroite bande blanche et deux taches blanches au-dessus du cirrhe hœmal. La face ventrale est blanc nacré. Tous les appendices sont annelés de brun. Le lobe céphalique (fig. 70) est bombé du côté dorsal et se ter- mine, en avant, par deux lobules arrondis dont le sillon de sépara- tion est plus long que le quart de la longueur de la tête ; chacun des lobules présente, en outre, un sillon qui les divise en un tout petit lobule dorsal (palpe frontal, F) de forme presque triangulaire, et en un grand lobule arrondi ventral (palpe labial,/*). En arrière, sur une ligne représentant un arc de cercle à concavité antérieure, se trouventinsérées cinq antennes moniliformes. Ces appendices (fig. 71) placés sur des cératophores [cp] très réduits présentent un nombre variable d'articles, plus arrondis du côté proximal, plutôt ovoïdes du côtédistal, qui tous portent à la base un anneau brun. L'antenne impaire a presque le double de longueur de l'antenne externe et, rabattue sur le dos, elle arrive presque au cinquième segment. Les deux yeux noirs à reflet bleu sont situés entre les antennes moyennes et externes. Les organes nucaux ne sont pas visibles à l'extérieur, mais sont cachés par le bord antérieur du premier segment. Le premier segment est aussi long que les trois ou quatre suivants. 11 présente, du côté antérieur, un pli (fig. 70, k) ayant l'aspect d'un anneau incomplet s'arrêtant au milieu des deux faces latérales. A cet endroit aussi se trouve un sillon formant la limite de la bouche, qui a la forme d'une fente allongée et se trouve située en dessous et en arrière du lobe céphalique. Elle est limitée en arrière par le bord FAUNE DES ANNÉLIDES DE BÂNYULS. 39! antérieur faiblement plissé du premier segment. De son intérieur sortent deux coussinets buccaux très réduits. Ce segment est unifor- mément coloré en brun. Le second segment est plus long du côté dorsal que du côté ventral, et le sillon intersegmentaire qui le sépare du premier est complet. Il porte en général, le long de son bord antérieur, une étroite bande blanche. Les deux cirrhes tentaculaires, qui y sont insérés, sont pour- vus d'un cirrhophore très réduit. Ils sont moniliformes, et leur lon- gueur ne dépasse pas celle du premier segment. Les troisième, qua- trième et cinquième segments sont pourvus de parapodes dont le mamelon sétigère, plus ou moins réduit, est situé plus ventralement que ceux des autres segments. Les cirrhes parapodiaux en sont pourtant plus longs et moniliformes. Les autres segments ont des parapodes normaux (fig. 63), formés par les parties suivantes : Viïicirrhe dorsal {Ch), subulé et moniliforme. Le cirrhophore très réduit n'est pas bien délimité. Du côté dorsal par rapport au cirrhe se trouve, à partir du cinquième segment, une branchie [br) ayant un nombre variable de filaments. Dans le cirrhophore est implanté un faisceau d'acicules jaunes {ah) h extrémité recourbée. Le mamelon sétigère est arrondi. De son extrémité sortent deux faisceaux de soies, qui ont leur origine dans un bulbe unique. Le faisceau dor^ sal contient des soies de deux sortes : des soies simples et ailées en l'orme de sabre. Elles sont jaunes, ont le tranchant convexe et fine- ment strié. Les autres (fig. 13) sont incolores. Elles ont le sommet aplati, frangé, pourvu d'un long filament de chaque côté. Le faisceau ventral contient des soies composées (fig. 74) dont la serpe, terminée par un double crochet, est protégée par les deux demi-valves d'une gaine striées sur le tranchant. La largeur de la gaine atteint à peine le tiers de la largeur de la serpe et la largeur de cette dernière est comprise en moyenne trois fois dans la hauteur du tranchant. La hampe hétérogomphe porte des stries sur la partie du tranchant qui avoisine le rostre. A partir d'un nombre de segments variable 392 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. suivant la taille (32 à 33 pour une taille de 10 centimètres), il vient s'y ajouter une soie simple aciculaire (fig. 72 et 75), pourvue d'un crochet bifide. Celte soie est noire, commeles acicules (an) au nombre de deux ou trois (rarement) qui se trouvent à tous les pieds entre les deux faisceaux de soies. Le clrrhe ventral, dans le tiers antérieur du corps (fig. 63, Cn), est formé par un cirrhophore globuleux, surmonté d'un cirrhostyle dont le sillon de séparation est bien marqué. Dans le reste du corps (fig. 72, 6'n), le cirrhostyle et le cirrhophore s'amincissent et pren^ nentune forme subulée. Dans les quatre ou cinq derniers segments, le mamelon sétigère devient plus ou moins rudimentaire, mais ses cirrhes s'allongent. Les branchies (fig. 63 et 72, br), qui font leur apparition sur le cin- quième segment, n'ont d'abord qu'un ou deux filaments, mais ar- rivent rapidement à leur plus grand développement, qui est réalisé entre le septième et le trente-septième pour une taille de 10 cen- timètres. Ensuite, les filaments diminuent en nombre et les branchies disparaissentcomplèlement dansles vingt à trente derniers segments. Le pygidiwn (fig. 64), arrondi, présente du côté dorsal l'anus (a), qui apparaît comme une fente à bords plissés, et, du côté terminal et ventral, quatre urites moniliformes à anneaux bruns dont les deux plus dorsaux sont quatre ou cinq fois plus longs que les ven- traux. Le labre (fig. 65) présente en avant une lame blanche {i] et cal- caire; son bord antérieur est coupé obliquement et présente quel- ques dents plus ou moins bien indiquées, dues à l'usure plus ou moins forte de l'appareil. Le manche, de couleur noire, présente un pli diagonal, qui s'étend sur plus des trois quarts antérieurs de sa longueur. Les pinces mandibnlaires (fig. 66) présentent une crête longitu- dinale médiane. Les supports {h) sont plus longs que le tiers de la pince. Le nombre des dents des pièces (fig. 67) maxillaires est le suivant : FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 393 A gauche : maxille I : 5-6 ; II : 6-7 ; III : 3-S; IV : 1 ; V: 0 ; A droite : maxille I : 5-6 ; II : 8-10 ; IV : I ; V : 0. Cette espèce ne présente pas de variétés bien caractérisées. La teinte générale est constante, mais les taches blanches sont variables. Le plus souvent, ce n'est que le sixième segment qui est coloré en blanc. On trouve aussi, mais rarement, la même disposition sur les quatrième et cinquième. Quelquefois, les petites taches blanches des segments disparaissent, et alors l'animal n'a que la tête tachetée de blanc et une bande blanche sur le sixième segment. Le nombre des articles des appendices est aussi sujet à de grandes variations. Cette espèce ne descend que rarement au-dessous de 100 mètres. Elle vit dans des anfractuosités des pierres sous-marines et sur les algues encroûtées de Bryozoaires. Les tubes qu'elle fabrique à vo- lonté sont minces, transparents et temporaires. On trouve cette espèce, qui est très commune dans la Méditer- ranée, mais très rare dans l'Océan, dans les mômes endroits et les mêmes conditions que VFunice Harassii, mais elle est loin d'avoir l'agilité de cette dernière. Syn. 1826. Leodice fasciata Risso (3), t. IV, p. 421. 1838. Eunice Harassii Grube («), p. 38. 1844. Eunice sanguinea (Luurillard non Montagu) Guérin-Meneville (8), pl. V, f.g. 2. 1864. Eunice Harassii Glaparède (18), p. 118-120, pl. II, fig. 5. 186o. Eunice torquata Quatrefages (23), t. I, p. 312-313. 1863. Eunice Laurillardi Quatrefages (S3), t. I, p. 314-3l'ô {pro parte). 1865. Eunice Claporedii Quatrefages (23), t. II, p. 652-6b3. 186o. E U7iice annulicornii iohï\s[on (21), p. 131-132. 1865. Eunice antennata Johnston (21), p. 132. 1868. Eunice Harassii Ehlers (28), p. 312-344, pl. XIII, fig. 15-21, pl. XIV et pl, XV, fig. 1-3. 1870. Eunice torquata Grube (33), p. 293-294. 1870. Eunice Laurillardi Grube (33), p. 294. 1872. Eunici: torquata Grube (34), p. 90 et 91 en note. 1874, Eunice Claparedii von Marenzeller (35), p. 57-59. 1873. Eunice Claparedii Marion et Bobretzky (3'7), p. 11 et 12. Cette espèce a été longtemps confondue avec VEunice Harassii 394 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. d'Audouin et Milne Edwards. C'est Quatrefages (23) qui la dislingue pour la première fois, en donnant le nom de Eunice lorquata aux échantillons de l'Atlantique qu'il a pu examiner, et le nom de E. Cla- paredii aux Eunices de Port-Vendres décrites par Claparède (*8). On trouvera dans Marenzeller (35) l'historique complet de cette question. Cet auteur, cependant, hésite à considérer V Eunice tor- quata et VE. Claparedii comme synonymes, à cause des difierences que présente VE. io7'qiiata, d'après la description de Quatrefages, avec la forme méditerranéenne. Nous sommes de l'avis de Grube et de Marion et Bobrelzky, qui n'admettent pas cette distinction. En effet, les quatre ordres de différences que trouve von Marenzeller ne résistent pas à la critique. Les différences présentées par la mâchoire même, si elles étaient réelles, ne pourraient constituer des carac- tères spécifiques, et la différence de longueur des segments du corps et du premier segment ne peuvent entrer en hgne de compte, car ces rapports dépendent de l'état de contraction des animaux qui ont été examinés et qui tous étaient conservés dans l'alcool. Nous avons aussi souvent eu l'occasion de constater l'inexactitude des chiffres donnés par Quatrefages. Guerin-Meneville (8) figure une Eu- nice provenant de Nice, sous le nom à' Eunice sangm'nea, et qui n'est autre que VE. lorquata. 11 ne faut pas la confondre avec la Nereis san^Minea Montagu, qui est une xMarphyse. Grube (33) a montré que, sous l'étiquette Eunice Laurillardi, Quatrefages avait placé dans le même bocal des échantillons de VEunice lorquata et de VE . vittata D. Gh., donnant ainsi encore un exemple du soin apporté par l'au- teur en question à la détermination de ses échantillons. D'après Grube (33), VEunice fasciata de Risso est la même que VE. lorquata. La même chose peut se dire pour VEunice annulicornis de Johnston, qui provient de Spinola.Ce même auteur détermine un échantillon, provenant des mers anglaises, commeV E umce antennata de Savigny, en déclarant que « spécimen is in bad condition, but its identification with Savigny's species cannot be doubted ». Nous nous permettons de ne pas être de son avis, et nous considérons son Eunice comme FAUNE DES ANNÈLIDGS DE BANVULS. 39S un bad spécimen d'Eunice torquata, les appendices moniliformes le prouvent. La véritable Eunice antennata de Savigny, quoique très rapprochée de la torquata, présente des caractères différentiels sérieux et n'a été trouvée que dans la mer Rouge (Savigny), à Tahiti (Grube, 89) et aux Philippines (Grube, 4a). Nous parlerons, à propos de V Eunice Rousseaui^ de la question de savoir si elle pourrait être considérée comme l'adulte' de VE. tor- quata. EUNICE FLORIDEANA POURT. 1869. Marphysa florideana Pourtalès (31), p. 108. 1887. Eunice florideana (51), Ehlers, p. 88-90, pi. XXII, fig. 1-7. (PI. XVII, fig. 59-62. PI. XVIII, fig. 6-2.) Couleur rose pâle. — Antenne impaire aussi longue que les dix ou onze pre- miers segments. — Antennes munies d'anneaux peu distincts de couleur brune, — Tous les autres appendices non annelés. — Branchies à partir des huitième (rarement) et neuvième segments jusqu'à l'extrémité postérieure. — Maximum des filaments branchiaux sur les branchies du U-eizième au quaran- tième environ pour une taille de 150 millimètres et le nombre maximal ne dépassant pas 10 millimètres pour la même taille. — Soies en spatule avec un long filament d'un seul côté. — Soie aciculaire à demi-gaine bivalve, de couleur noire à partir du trentième segment (loO millimètres de taille). — Acicules noires. — Longueur du support comprise trois fois dans la longueur de la pince. s. 'S s s il t. ^ bo •a o c .2 1 grand r lilamei trouve 1 segm( rt Z lit Auteurs. .3S a a S "g " «.a ll^f c a o o - ^ " i a o Z o Z _ g î .j 92 130 9" 90 7-S 1 .3-32 2 27-31 Ehlers (51), p. 88-90. Von Marenzeller (63) , p. 31-33. 55 3V2 95 9° 3 13-26 3 30 ] 75 4 115 9» 4 13 30 3 31 (Pruvot et Racovitza. 150 5 147 S" 5 13-40 3 40 165 7 160 90 8 14-42 2 31 ) 1 Nous ne prenons pas ici le mol adulte dans son acception ordinaire. L'Eunice torquata de 10 centimètres est tout aussi adulte que VE, Rousseaui de 30 centimètres, puisque les deux peuvent se reproduire par voie sexuelle. 396 G. PRUVOT ET E.-G. HACOVITZA. Le tableau ci-dessus indique suffisamment les dimensions de celte espèce. Le corps a partout la même largeur, excepté du côté postérieur où il s'atténue légèrement. La face dorsale est bombée, la face ven^ traie plane. Coloration. — La teinte générale de la face dorsale est rosée uni- forme; celle de la face ventrale, couleur de nacre irisée. Un échan- tillon présentait la face dorsale teintée en brun rougeâtre très pâle, mais le sixième segment était blanc. Un autre portait plusieurs taches brun acajou, déformes variées et irrégulièrement distribuées sur les segments antérieurs. Les segments postérieurs étaient ornés de tout petits points bruns. Le lobe céphaligiie esthombé du côté dorsal et se termine en avant par deux lobules arrondis {palpes labiaux), dont le sillon de sépara- tion dépasse la moitié de la longueur de la tête. Les palpes frontaux sont à peine indiqués par un léger sillon. Du côté postérieur, sur une ligne représentant un arc de cercle à concavité antérieure, se trouvaient insérées cinq antennes. Ces appendices, placés sur des cé- ratophores très réduits, présentent une dizaine de bandes brunes faiblement indiquées. L'antenne impaire est plus de deux fois aussi longue que l'antenne externe ; rabattue sur le dos, elle arrive jusqu'au dixième ou douzième segment. Les yeux, de couleur bleue, sont si- tués entre les antennes moyennes et externes. Les organes nucaux ne sont pas visibles à l'extérieur, mais cachés par le bord antérieur du premier segment. Le premier segment est aussi long que les trois suivants. Il présente du côté antérieur un pli ayant l'apparence d'un anneau incomplet s'arrêtant sur le milieu des faces latérales; à cet endroit se trouve aussi, un sillon constituant la limite de la bouche, qui a la forme d'une fente allongée et se trouve située en dessous et en arrière du lobe céphalique. Elle est limitée en arrière par le bord antérieur fortement plissé du premier segment; de son intérieur sortent deux coussinets buccaux très réduits. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 397 Le deuxième segment est séparé du précédent par un sillon presque toujours bien marqué, sur les deux côtés du corps. Il porte, du côté dorsal, deux arrhes tentaculaires non annelés, pourvus d'un cirrhophore réduit ; rabattus en avant ils ne dépassent que de peu le bord antérieur du premier segment. Les troisième, quatrième et cinquième segments sont pourvus de pa- rapodes à mamelon sétigère plus ou moins réduits et plus ventraux que les autres. Les cirrhes atteignent une plus grande longueur qu'aux autres pieds. Les autres segments ont des parapodes normaux; leurs cirrhes, comme ceux des trois premiers, ne sont pas annelés. A partir du huitième ou neuvième segment apparaissent les branchies. \}n parapode normal, pris dans la moitié antérieure du corps, se compose des parties suivantes : le cirrhe dorsal subulé, à base lé- gèrement renflée. Le cirrhophore, extrêmement réduit, n'est pas séparé du cirrhe par un sillon ; un faisceau de trois ou quatre acicules jaunes, à extrémité généralement droite, est implanté dans le cirrho- phore. Du côté dorsal par rapport au cirrhe se trouve la branchie pourvue d'un nombre variable de filaments. Le mamelon sétigère est arrondi; de son extrémité sortent deux faisceaux de soies qui ont leur origine dans un bulbe unique. Le faisceau dorsal contient des soies de deux sortes : des soies simples, ailées en forme de sabre, de couleur jaune, présentant des stries diagonales sur la lame et des soies simples en spatule, incolores, à sommet aplati et frangé, pour- vues d'un long prolongement sur un des côtés. Le faisceau ventral contient des soies composées (fig. 39). La serpe, très large, est pro- tégée, du côté du tranchant, par les deux demi-valves d'une gaine dont la largeur dépasse de beaucoup la moitié de la largeur de la serpe. L'extrémité antérieure se termine par deux fortes dents et le tranchant est finement denté. La largeur de la serpe est comprise une fois et demie dans la hauteur du tranchant. La hampe hétéro- gomphe porte des stries sur la partie du tranchant qui avoisine le rostre. A partir du trentième segment environ (pour des tailles 398 G. PRUVOT ET E.-G, RAGOVITZA. variant entre 53 et 150 millimètres), il vient s'y ajouter une ou deux (rarement) soies simples aciculaires (fig. 60) terminées en crochet bi- fide protégé par une demi-gaine bivalve. Ces soies sont noires comme les acicules, au nombre de deux ou trois, qui se trouvent placés entre les deux faisceaux de soies de tous les pieds. Le cirrhe ventral se compose d'un cirrhophore globuleux et d'un petit cirrhostyle cylindrique. Le sillon de séparation est peu marqué. Dans la moitié postérieure du corps, le cirrhophore s'amincit pro- gressivement, et tout le cirrhe prend une forme subulée. Dans les cinq ou six derniers segments, le mamelon sétigère devient plus ou moins rudimentaire et les cirrhes parapodiaux s'allongent. Les branchies, qui commencent au huitième (rarement) ou neu- vième segment par un ou deux filaments, prennent rapidement leur plus grand développement, qui est réalisé entre les treizième et qua- rantième pour une longueur de 150 millimètres. Puis les filaments diminuent en nombre, mais les branchies continuent jusqu'à quel- ques segments (2 à 3) avant le pygidium. Le pygidium présente, du côté dorsal, l'anus, qui apparaît comme une fente vaguement circulaire à bords plissés. Les urites sont au nombre de quatre : deux terminaux, aussi longs que l'antenne impaire, subulés, à cirrhophore très réduit, et deux ventraux très courts, filiformes, sans cirrhophore. Mâchoire. — Le labre présente en avant une lame blanche formée uniquement par du calcaire. Son bord antérieur, plus ou moins ar- rondi, porte quelquefois des dents irréguHères dues à l'usure. Le manche noir, chitineux et calcaire en même temps, présente un pH diagonal sur lequel passent les stries d'accroissement. Les pinces mandibulaires noires présentent une crête longitudi- nale médiane très peu marquée. Leur bord externe est légèrement infléchi en dedans, formant ainsi une gouttière peu profonde. La longueur des supports est comprise trois fois dans la longueur de la pince. Les maxilles sont moins foncées que les pinces; celles de la première paire sont fortement concaves. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 399 Voici le nombre de leurs dents : A gauche : Maxille I : 5-6; II : 5-7 ; III : 7-8; IV : I ; V : 1. A droite : Maxille I : 3-6; II : 8-10; IV : 1 ; V : 1. Des descriptions des auteurs et de nos propres observations sur plus de vingt individus, il ressort que l'espèce, telle qu'elle vient d'être décrite, est très constante dans ses caractères et ne présente pas de variétés définies. L'habitat de cette espèce est très particulier. On la trouve à plus de 300 mètres de profondeur, habitant les colonies rameuses de Lo- phohelia et Amphihelia, SlU^û bien dans l'Atlantique que dans la Mé- diterranée. Ces animaux fabriquent des tubes parcheminés, très larges, ayant plusieurs orifices antérieurs, mais fermés du côté pos- térieur. Les tubes sont recou- verts par le cœnenchyme sécrété par les Madréporaires. L'Eunice, repliée en deux, fait sortir par pig. 4. _ Anomalie de segmentation ,, .„ j . i , ^ , à^YEunice florideana. 1 orifice du tube les antennes et ,„ „„ .,. . , , , , 10, 20 et 21, segments vus par la face ventrale ; ] -, 20a, 20 6 et 20c, les trois moitiés de seg- les urnes. ments de gauche. X 6. Monstruosités. — Buchanan (60, p. 174, pi. IX, fîg. 4) signale un échantillon qui avait deux cirrhes tentaculaires à droite au lieu d'un seul. Ehlers (5f , p. 89, pi. XXII, fig. 3) a trouvé une fois deux fila- ments branchiaux bifurques. Nous n'avons trouvé, parmi 20 indi- vidus de toute taille, qu'un seul présentant une malformation. Entre le dix-neuvième et le vingt et unième segment constitué norma- lement, le vingtième segment était normal à droite, mais à gauche il possédait trois demi-segments fusionnés à des distances variables avec la moitié droite (fig. 4 texte). Le parapode du demi-segment 20 c est à peu près de la même taille que ceux des segments normaux, mais les parapodes des demi-segments 20 a et 20 6 sont beaucoup plus petits quoique constitués comme les parapodes ordinaires. Le sillon intersegmentaire qui sépare le demi-segment 20 c du demi- segment 20 b est complet du côté dorsal comme du côté ventral, 400 G. PRUVOT ET E.-G. RÂCOVITZÂ. mais celui qui sépare le demi-segment 20 b du demi-segment 20 a est très réduit du côté ventral et manque du côté dorsal. Habitat. — Cette espèce fabrique un tube parcheminé très solide qu'Ehlers (51, p. 89) rapproche de celui de YEunice conglomerans, tout en faisant remarquer qu'il s'en distingue par des orifices laté- raux entourés de bords lobés. C'est à cela que se borne la description de cet auteur, qui n'a eu, du reste, que des échantillons conservés dans l'alcool. Nous avons eu plusieurs exemplaires vivants à notre 'disposition, ce qui nous permet de compléter les notions qu'on a sur l'habitat si particulier à cette Annélide. Ce qui frappe au premier abord, lorsqu'on examine le tube enfoncé dans une colonie d'Amphihelia, c'est le nombre inusité d'appendices qu'on voit sortir d'un des orifices. On compte, en effet, sept filaments qui, toujours en mouvement, explorent les environs. On se demande à quelle Annélide on peut bien avoir affaire, quand la sortie de la tête de l'animal vous donne la clef de l'énigme. On aperçoit une tète or- dinaire d'Eunice à cinq antennes et, à côté, le pygidium muni de ses urites. L'animal vit donc replié en deux dans son tube, ce qui n'est pas sans lui procurer de nombreux avantages. D'abord, cela permet d'occuper moins de place en longueur; ensuite, le tube peut être fermé du côté postérieur, par où l'animal pourrait être surpris par l'ennemi. En effet, chez tous les exemplaires entiers recueillis, nous avons trouvé le tube (fîg. 5 texte, A) toujours fermé du côté qui corres- pond à la position de la région moyenne du corps, puisque l'animal est plié en deux. Lorsque le tube est déchiré, l'animal le répare en sécrétant un petit tampon arrondi (fig. 5 texte, B et C) qui le rebouche. Du côté antérieur, cependant, on trouve plusieurs orifices. La position de l'animal à l'intérieur du tube lui permet aussi d'uti- liser ses urites en même temps que ses antennes pour explorer les environs de l'orifice et lui permet aussi de rejeter les excréments directement au dehors. La largeur du tube ne représente donc pas la largeur de l'animal, mais au moins le double de cette dimension. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 401 Les bosselures qui s'observent à la surface du tube doivent être attribuées au cœnenchyme qui le recouvre. La paroi parcheminée fabriquée par l'Annélide est, en effet, recouverte complètement par la sécrétion du Madrépore sur lequel il est fixé, comme l'ont constaté déjà et en même temps Buchanan (60, p. 174) et von Marenzeller (63, p. 33). Le premier figure une branche de Lophohelia proliféra {l. c, pi. XI) pourvue d'un de ces tubes calcaires. De son inté- rieur, on voit sortir par les deux extré- mités des lambeaux du tube parche- miné. D'un côté aussi fait saillie une extrémité antérieure d'Eunice pourvue de six ou sept antennes (?) et d'un cirrhe tentaculaire sur le troisième segment, tandis que, par l'autre extrémité, sort la queue. Celte figure « kindly drawn for me by M. E.-T. Brown » est destinée à montrer « the relation between the worm and the coral » ! Le second auteur donne une très bonne figure (/. c. , pi. II, fig. 5, D) d'une branche du même xMadrépore, mais, n'ayant que des pièces conservées, il s'abstient d'in- troduire des Eunices à six antennes dans le tube qu'il représente. Buchanan croit que « the worm is commensal on the coral, and to some extent modifies its growth, the coral growing round the worm-tube which thus becomes embedded in the cœnenchyme ». Von Marenzeller conclut de la manière suivante : « Die junge Eunice florideana benutzt demnach in diesem Falle in Ermanglung einer anderen Unterlage (Schwâmme, etc.) die genannten Polypen- stôcke, um ihre anfangs kleine KOhre hineinzubauen, und die Poly- AhCH. DE ZOOL. EXP. Kï GÉN, — 3* SÉKIE. — T. HI. 1893. 26 Fig. 5. — Tube parcheminé de VEunice florideana. A, tube normal et entier : oo, les ori- fices antérieurs ; F, extrémité pos- térieure arrondie et fermée du tube. B, région postérieure d'un tube dont le fond a été déchiré et réparé en- suite. C, coupe longitudinale du précédent ; F', pièce surajoutée qui a servi à rebouclier le tond arraché du tube. Toutes les figures sont de grandeur naturelle. 402 G. PRUVOT ET E.-G. KACOVITZA. pen verfolgenmitihrer geschëftigenThàtigkeit das allmàhlich wach- sende fremde und stôrende Gebilde. Vor vôlliger Einmauerung weiss sich aber der Wurm frei zu halten. Die seitlichen und terminalen OfTnuiigen "werden nicht von den Korallencemente verlegt. ». Les Lophohelia et Amphihetia vivent sur la vase. Ces Coraux ne sont pas fixés sur un support solide. Le Polype initial issu de l'œuf doit se fixer sur un débris dur quelconque se trouvant à la surface de la vase ; puis la colonie se forme. Les individus jeunes ont comme support les adultes qui les bourgeonnent. La masse totale augmente et s'étend en plaque à la surface du fond ou, plus rarement, se dresse verticalement. Dans les deux cas, les individus en contact direct avec la vase meurent et servent de support à la partie vivante de la co- lonie. C'est sur cette dernière que les jeunes Serpules ou les jeunes Eunices viennent se fixer. Les tubes qu'elles fabriquent sont englobés au fur et à mesure dans le cœnenchyme. Tout ceci ne peut faire l'ombre d'un doute, seulement il reste un point que nous n'avons pas pu résoudre en consultant les travaux originaux sur les Coralliaires. D'après Orlmann^ ,VAmphihelia oculata [L.), là seule que nous ayons eue à notre disposition, possède un accroissement acrogène à bour- geonnement pariétal. Il se forme ainsi des colonies allongées avec les calices alternes placés à droite et à gauche d'un axe idéal sinueux. Le cœnenchyme remplit l'intervalle entre les calices, noyant leurs bases dans la masse commune. Des soudures se produisent à diffé- rents niveaux entre les troncs ainsi formés, ce qui donne à la colo- nie un aspect fenêtre. Les tubes de Serpules ou d'Eunices sont fixés sur les troncs, et comme on peut le voir sur la photographie (fig. 62), assez loin quelquefois de tout Polype, ce qui ne les empêche pas d'être recou- verts par le cœnenchyme. Le tube de Serpule z est très démonstratif sous ce rapport. En outre, sur la nappe de cœnenchyme, il n'est pas rare de trouver des Polypiéritcs loin de tout Polype antérieur * Die Morphologie des Skeleltes der Sleincoralien in bezieliung zur Koloniebildung [Zeilschr. f. Wiss. Zool, t. L, p. 296, tS90). FAUNE DES ANNÈLIDES DE BANYULS. 403 ayant pu lui donner naissance. La coupe (fig. 68) passant par un tronc normal, avec un tube de Serpule accolé et recouvert par la masse calcaire dans lequel se trouve aussi un calice isolé, le montre tout aussi bien que la figure 6. Et cependant la matière vivante dans Fig. C. — Fragment d'une colonie d'Amphihelia oculata pourvue d'un lube de cœnen- chyme ayant contenu le tube membraneux de VEunice (lorideana. A gauche est une branche normale du madréporaire, à droite se trouve le tube volumineux dont un des orifices se voit très nettement du côté inférieur. A la surface du tube sont disposés des calices isolés qui, étant donné leur situation, n'ont pas pu provenir par bourgeonnement d'un autre calice. La figure est la reproduction d'une photographie sur nature et de grandeur naturelle. les Polypes paraît (il est vrai d'après un examen superticiel) limitée exclusivement au calice! Il n'en est pas moins certain que le cœnen- chyme se forme aussi bien loin des calices et que les Polypes peu- vent bourgeonnera sa surface aussi bien que sur les parois des Polypes préexistants. Faut-il admettre pour V Amphiheliaoculata ce qu'Ortman {Le, p. 293) admet pour la Lophohelia proliféra (Pall.), c'est-à-dire 40i G. PRUVOT ET E.-G. KACOVITZA. que : « Die Weichtheile der verschiedeneu Zweige der Kolonie bleiben sehr lange in Zusammenhang und iiberziehen die einzelnen Asie bis weit herab. Dadurch wird eine sekundare Verdikung der Kelchwânde nach Aussen ermoglicht, die auch in sehr angedehnter weise staltfindel. » (!) Et pourtant, chez les Dendrophyllies, le tronc est beaucoup plus gros que les branches dans les grandes colonies, quoique les parties molles colorées en jaune intense, et dont on peut voir les limites avec précision à cause de cela, soient strictement loca- lisées au sommet des rameaux. L'énorme différence de largeur entre le tronc et les branches ne peut s'expliquer aussi que par un accroisse- ment continu du premier, car on ne peut admettre l'hypothèse de Heider' qui considère l'individu issu de l'œuf, le fondateur de la co- lonie, comme pourvu d'une grande énergie de croissance, pouvant produire un grand Polypiei', tandis que les individus bourgeonnes perdraient de plus en plus cette énergie et formeraient des Polypiers de plus en plus réduits. Très vite, la colonie cesserait de s'accroître, caries jeunes ne posséderaient plus l'énergie nécessaire pour sécréter du calcaire. Leur rôle se bornerait à reproduire l'espèce par voie sexuelle. Cette hypothèse (car l'auteur n'apporte aucune observation à l'appui) est très attrayante, mais inacceptable. Les branches laté- rales sont aussi épaisses que les terminales plus jeunes. La grosseur des troncs est en rapport avec la grandeur de la colonie, car toujours des colonies avec un petit nombre de branches ont des troncs beau- coup plus minces que cellesqui en ontbeaucoup. Les colonies de Den- drophyllies peuvent atteindre de très fortes dimensions. On en con- naît dont les troncs ont un diamètre dix et vingt fois plus grand que celui des Polypiers, et l'on n'a jamais vu des individus isolés ou des jeunes colonies ayant un diamètre aussi considérable. Toutes ces considérations ne nous permettent pas d'adopter l'explication de Heider. La question reste donc non résolue et, comme elle n'a pas d'importance au point de vue où nous nous plaçons, nous nous bor- nons à attirer sur elle l'attention des spécialistes. ' Kurallensludien [Zeilmhr. Wiss. /.no'., t. Xf.IV, I88i!, p. 519 en note). FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYUlS. 40S Filiation. — On a vu que le Staurocephalus rubrovittatus hioltta- tus, ayant élu domicile dans les Coraux profonds, au-dessous de la limite des algues, a donné naissance, par décoloration, à la variété univittata. Chez d'autres Annélides qui seront étudiées plus tard, nous avons pu observer le même phénomène de décoloration. On peut donc se demander si V Eunice florideana n'est pas dans le même cas, c'est-à-dire si elle n'est pas issue d'une Eunice littorale colorée. Nous pouvons hardiment répondre par l'affirmative, car nous avons trouvé d'abord un individu à taches brunes irrégulières, restes d'une coloration générale, et ensuite un autre échantillon coloré unifor- mément en brun très pâle avec le sixième segment blanc. Quelle espèce colorée faut-il lui attribuer alors comme origine? La réponse à cette question est assez délicate, car la séparation de V Eunice flo- rideana de la forme originelle a dû être bien plus précoce et bien plus marquée que pour le Staurocéphale à une bande, par exemple. Nous lui attribuons pourtant comme souche VEunice torquata qui, comme on peut s'en convaincre en comparant les diagnoses courtes, s'en rapproche beaucoup. La structure des palpes, la forme et la dis- tribution des branchies, la couleur des acicules, la couleur blanche du sixième segment et même les mouvements lents et lourds qui contrastent tellement avec l'agilité des autres Eunices, leur sont communs. Les différences se rapportent à la forme des appendices et à la forme des soies en spatule. Buchanan (60, p. 176, pi. IX, fig. 2, et pi. X, fig. 7) a décrit et figuré une Eunice florideana ayant une antenne et un cirrhe dorsal moni- liforme. Nous ne sommes pas de l'avis de l'auteur, qui, se basant sur les faits exposés, reproche à Grube d'avoir donné trop d'importance en spécification aux annelures des antennes, mais nous nous servons des faits qu'il a trouvés pour démontrer que, dans le cas qui nous occupe, VEunice florideana à appendices lisses ou faiblement annelés peut très bien dériver de VEunice torquata, qui a des appendices mo- niliformes. Il ne reste plus comme différence que la présence de deux longs filaments aux spatules de l'une et d'un seul aux spatules de 406 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. l'autre. Cela peut-il suffire pour séparer phylogénétiquement les ani- maux? Pour le moment, nous ne savons pas quelle importance il faut attribuer à cette disposition, mais il est probable qu'elle n'est pas considérable. Nous avons trouvé une fois, chez une Eunice Harassii^ des soies en spatules pourvues les unes d'un, les autres de deux filaments. Nous supposons donc que Y Eunice torquata a donné naissance, en habitant en profondeur, à une variété décolorée qui, dans la suite des temps, a perdu l'aspect moniliforme de ses appendices et la forme de ses soies en spatule pour se transformer en une espèce distincte. Celle-ci a pu étendre son habitat à toutes les zones à Amphihelia et Lophokelia de l'Atlantique ; mais sur les côtes de la Floride, elle commence à émigrer vers les régions moins profondes et arrive même à la zone littorale (Ehlers [5«], p. 89, « Key West. depth 1-2 falhoms »), exécutant ainsi en Amérique un mouvement inverse de celui qui lui a donné naissance en Europe. Syn. 1869. Marphya florideana Pourtalès (3i), p. 108. 1887. Eunice florideana Ehlers (51), p. 88-90, pi. XXII, fig. 1-7, p. fig. 1893. Eunice florideana voa Marenzeller (63), p. 31-33, pi. II, fig. 5, p. fig". 1893. Eunice philocor allia Buchanan (60), p. 173-176; pi. IX, fig. 2-6; pi. X, fig. 7-9 ; pi. XI. La description si précise et si bien faite de von Marenzeller, comme sont du reste toutes celles qui sont dues à la plume de cet auteur, nous a permis d'identifier avec assurance notre Eunice à celles qu'il a trouvées par 760 mètres au cap Santa-Maria di Leuca.Il ne peut y avoir de doute non plus sur l'identité de nos Annélides avec celles si bien décrites et si bien illustrées dans la superbe mo- nographie d'Ehlers. Les difficultés qu'on rencontre dans la systéma- tique des Annélides ne tiennent pas au manque de caractères précis chez ces animaux, mais aux descriptions mal faites des auteurs. La meilleure preuve, c'est la satisfaction qu'on a d'avoir affaire à des auteurs consciencieux et guidés par l'esprit scientifique, comme Ehlers et von Marenzeller. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 407 Pour nous justifier d'avoir placé en synonymie VEunice philoco- rallia, nous nous contenterons de citer le passage dans lequel Buchanan prétend justifier la création de cette nouvelle espèce : « The species would seem to be most nearly allied to the Eunice /?orirfeana ofEhlers, but differs from itin the greater length of the dorsal cirri and in the possession of a smaller nuniber of branchial filaments, also somewhat in the shape of the maxillae. » EUNICE ROUSSE AU I QTRFG. 1863. Eunice Rousseaui Quatrefages («3), t. I, p. 309-3H, pi. X, fig. 1-4. (PI. XVI, fig. 38-47.) Couleur générale brua marron. — Sixième segment blanchâtre. — Antenne im- paire aussi longue que les trois ou quatre premiers segments. — Antennes, cirrhes tentaculaires, urites et cirrhes parapodiaux dorsaux des trois ou quatre seg- ments antérieurs munis d'anneaux bruns, mais n'étant pas moniliformes. — Cirrhes parapodiaux lisses, — Branchies à partir du dixième ou onzième seg- ment jusqu'à l'extrémité postérieure. — Maximum des filaments branchiaux sur les branchies du trentième au cent cinquantième pour une taille de 3 mè- tres et leur nombre maximal dépassant toujours 33 pour la même taille. — Soies en spatule avec un long filament d'un seul côté. — Soie aciculaire dépourvue de gaine, de couleur noire, à partir du quatre-vingt-dixième au centième segment (3 mètres de longueur). — Acicules noirs. — Support plus court que la moitié des pinces mandibulaires. Trois exemplaires de cette espèce ont été trouvés àBanyuls : 1° Un exemplaire entier en deux fragments mesurant ensemble ym 32 ({m i5_j_2>nj7j^ ^ygç ^^iQ largcur de 16 millimètres, sans les parapodes, et 879 (368 +511) segments ; 2" La région antérieure d'un autre individu. Ce fragment mesure l",tO, avec une largeur de 16 millimètres, sans les parapodes, et 310 segments. Les dimensions de l'animal complet devaient être les mêmes que celles de l'échantillon n"" 1 ; 3° Enfin, une région postérieure mesurant 35 centimètres de lon- gueur, avec une largeur maxima de 11 millimètres, sans les para- podes. Ce fragment appartenait à un exemplaire plus petit que les deux autres. 408 G. PKUVOT ET E.-G. RACOVITZA. Le corps a partout la même largeur; il ne s'atténue légèrement qu'à l'extrémité postérieure. La face dorsale est bombée, la face ventrale plane. La coloration naturelle n'a pu être observée, les animaux étant dé- colorés par un long séjour dans l'alcool. Des restes étaient conservés seulement sur les branchies \ on pouvait constater encore une ligne longitudinale rougeâtre, le long du côté externe de la tige de la bran- chie, des points bruns à la base et entre chaque filament branchial, et deux lignes brunes parallèles tout le long du filament. La teinte générale est grise, et la cuticule est très fortement irisée. Voici, d'après Quatrefages (S3, p. 310), la coloration de l'animal vivant : « La coloration générale est d'un brun marron très chaud et velouté, avec des reflets d'or et d'azur d'une richesse incroyable. Le quatrième anneau * seul est d'un blanc terne, piqueté de violet. Les antennes, de plus en plus foncées vers leur extrémité qui est presque noire, présentent quatre anneaux clairs. Les tentacules, d'un blanc jaunâtre dans toute leur étendue, sont, au contraire, an- nelés de brun sur deux points et à leur extrémité. Les cirrhes, assez longs pour dépasser les branchies (?), sont violacés à leur base et ont l'extrémité d'un jaune d'or. Les branchies d'un rouge vif, sans cesse en mouvement et se tordant en Sou en hélice, font ressortir cet ensemble dont la peinture la plus parfaite aurait peine à donner une idée exacte. Mais l'alcool détruit toute cette parure. » Le lobe céphalique (fig. 38, 39 et 40), bombé du côté dorsal, était fortement rétracté sous le bord antérieur du premier segment. En avant, un profond sillon le divise en deux lobules (palpes labiaux, P) • Quatrefages considérant les deux segments nus comme un segment unique, c'est donc« le cinquième «qu'il faut lire. Sur le dessin, Le, pi. X, fig. 1, c'est le sixième qui est coloré en blanc. Nous admettons plutôt ce nombre, car le dessin est fait sur nature. En outre, sur le même dessin, les cirrhes parapodiaux des quatre ou cinq segments antérieurs sont annelés de brun, et la description n'en parle pas. D'après ce que nous savons de VEunice torquala, c'est le dessin qui doit avoir raison sur la description. FAUNE DES ANNELIDES DE BANYULS. 409 plissés. Deux autres sillons profonds séparent, du côté supérieur, deux lobules plus petits (palpes frontaux, P'). Les antennes, au nombre de cinq, placées sur des cératophores très réduits, s'insèrent sur un arc de cercle à concavité antérieure. Ce sont des appendices subulés, lisses, dont la longueur ne dépasse pas celle des quatre premiers segments. Les différences de longueur entre eux sont faibles, et, sur les deux échantillons examinés, leurs proportions sont les suivantes : antenne moyenne > antenne im- paire, > antenne externe. Délie Chiaje, Quatrefages et Ehlers ont trouvé que l'antenne impaire était la plus longue. Gomme cette disposition est la règle chez les Eunices, nous attribuerons la diffé- rence trouvée par nous à l'état de conservation des pièces exa- minées. Entre les antennes moyennes et externes se trouvent deux yeux petits, noirs, avec un reflet bleuâtre. Les organes nucaux ne sont pas visibles à l'extérieur. Le premier segment est plus long que les trois suivants. Vers son milieu, sa largeur dépasse un peu celle du corps. II présente du côté antérieur, sur la face dorsale, une annelure ressemblant aune moitié de segment. En arrière se trouve un sillon plissé, qui est en conti- nuation directe avec le bord antérieur ventral du segment. Ce der- nier, évasé en forme d'arc de cercle, limite la bouche en arrière et présente des plis assez réguliers, qui s'étendent sur presque toute la longueur du segment. L'état de contraction de l'animal ne nous a pas permis de constater la présence de coussinets buccaux. Vorifice buccal [b) est une large fente semi-circulaire, qui s'étend transversalement sur presque toute la largeur de la face ventrale du segment. Le deuxième segment est interrompu du côté dorsal et peu marqué du côté ventral. Il est au moins quatre fois plus court que le pre- mier et porte, du côté dorsal, deux cirrhes tentaculaires, qui ne dé- passent pas en longueur le premier segment. Ce segment, comme le premier, est dépourvu de parapodes. 410 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. A partir du troisième ']usq\i' àu dernier, tous les segments sont pour- vus de parapodes. Les trois ou quatre seguients antérieurs sont pourvus de parapodes plus ou moins rudimentaires placés plus ven- tralement que sur les autres segments; leurs cirrhes dorsaux sont faiblement annelés et plus longs que ceux des autres segments. Les segments qui viennent ensuite ont des parapodes normaux, auxquels viennent s'ajouter, à partir du dixième ou douzième, des branchies. Wn parapode (fig. W) normal, pris dans la moitié antérieure du corps, est composé des organes suivants : Un cirrhe dorsal {Ch)^ subulé, à base légèrement renflée. Le cirrho- phore est extrêmement réduit et n'est pas séparé du cirrhe par un sillon. La branchie est insérée du côté dorsal, et sa base est con- fondue avec celle du cirrhe. Dans le cirrhophore est implanté un faisceau d'acicules jaunes, à extrémité recourbée. Le mamelon sétigère est arrondi. Il présente, à son extrémité dis- taie, une surface déprimée d'où sortent les faisceaux de soies ayant leur origine dans un bulbe sétigère unique. Il y en a un dorsal de soies simples et un double faisceau de soies composées, insérés dans des replis allongés et parallèles. Les soies simples dorsales sont de deux sortes : des soies jaunes à extrémité aplatie et ailée en forme de sabre, légèrement recourbée et très finement dentée sur le bord convexe qu'on rencontre chez la plupart des Euniciens, et des soies en spatules (fig. 42) à bord frangé. Ces dernières sont incolores, transparentes, à extrémité fortement aplatie. Elles ont huit à dix franges ou filaments ; sur un des côtés, il y en a un beaucoup plus long et beaucoup plus fort que les autres. Les soies composées (fig. 43) ont une serpe terminée par un crochet bifide, protégée par une demi-gaine bivalve dont la largeur égale celle de la serpe. La largeur de cette dernière est comprise trois fois et demie dans la hauteur du tranchant. La hampe hétérogomphe porte des stries sur la partie du tranchant qui avoisine le rostre. Les acicules sont noirs et forment un groupe de deux ou trois FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. m entre les faisceaux de soies. Une ou deux soies aciculaires se mon- trent à partir du quatre-vingt-dixième ou centième segment (taille de 3 mètres). Elles sont noires, légèrement recourbées; l'extrémité distale présente un double crochet peu marqué, sans gaine. Le cMV'Ae ventral dans la moitié antérieure du corps est formé par un cirrhophore globuleux, surmonté d'un petit article conique. Ces deux parties du cirrhe ne sont pas nettement séparées l'une de l'autre. Dans la moitié postérieure, le cirrhophore s'amincit et tout le cirrhe prend un aspect subulé. Dans les segments tout à fait postérieurs, les parapodes, ou mieux leur mamelon, deviennent de plus en plus rudimentaires, en même temps que les cirrhes s'allongent. Les branchies (fig. 4<, ér), qui commencent au dixième, douzième segment par un très petit nombre de filaments, arrivent rapidement à en avoir le maximum. Pour la taille de 3 mètres, c'est entre le trentième et le cent cinquantième que ceci se réalise. La branchie qui a 9 millimètres de longueur porte plus de trente-cinq filaments. (Le chiffre 37 paraît être assez constant, mais il peut être dépassé.) Au deux centième segment, il y en avait encore vingt-quatre. Les branchies persistent jusqu'à l'extrémité postérieure du corps. Le pygidium manquait à tous nos échantillons. Mâchoire. — Le labre (fig. 43) présente une lame calcaire arrondie. Le manche est traversé par un pli diagonal (qui atteint la moitié de la longueur totale du labre) sur lequel passent des stries d'ac- croissement. Les pinces mandibulaires (fig. 45) sont plus de deux fois aussi longues que les supports. Leur bord externe est légère- ment infléchi en dedans, formant ainsi une gouttière. Les maxilles I (fig. 46) portent 4 ou 3 dents. A gauche, les autres maxilles (fig. 47) en ont le nombre suivant : maxille II, 6 ou 7 ; III, 4 ou 5 ; IV, 4 ; V, 2 toutes petites. A droite, maxille II, 1 ; IV, 1, et V, 2 toutes petites. Les deux échantillons incomplets ont été trouvés sur le rivage, rejetés par la mer. C'est presque toujours ainsi qu'on s'est pro- curé les Eunices géantes, ce qui n'est pas une raison pour dire. 412 G. PRUVOT ET E.-G. HACOVITZA. comme Qualrefages (23, t. I, p. 309), que « cette belle espèce doit être essentiellement pélasgique». L'exemplaire compléta été trouvé à l'occasion du creusement du vivier du laboratoire. En soulevant une très grosse pierre reposant sur de la vase, et qui se trouvait en- viron à 3 mètres de profondeur, les ouvriers découvrirent l'animal dans une dépression dont les parois lisses attestaient son long sé- jour. Les trois échantillons étaient des femelles. Monstruosités. — Depuis le travail de Cori (58) sur les anomalies de segmentation chez les Annélides, l'attention des annélidologues a été attirée sur ce sujet, et l'on possède déjà beaucoup de documents. Ehlers * constate que certaines familles y sont plus sujettes que d'autres, et Buchanan (6«) en fournit la preuve dans un travail où sont consignés un grand nombre défaits en ce qui concerne les Am- phinomiens et les Euniciens. L'auteur, devant le grand nombre des anomalies dans la première de ces familles, est tenté de les consi- dérer plutôt comme des variations normales que comme des mon- struosités, ce qui certes est exagéré. Par contre, la famille des Euniciens paraît plus rebelle à ces mal- formations. Cori (/. c.) en a trouvé chez les genres Lumbi^iconereis^ Halla et Diopatra, et Buchanan (/. e.) chez les Lumbriconereis et Halla. Par contre, ce dernier auteur n'en a pas trouvé chez les genres Eunice Marphysa, Diopatra et Arabella. Nous n'en avons pas trouvé non plus chez Staurocephalus, Lumbriconereis coccinea^ Eunice Harassii et torquata ; c'est pourquoi il nous paraît intéressant de signaler une anomalie de segmentation chez V Eunice Bousseaui, qui sera, avec celle décrite chez VE. florideana, la première qui ait été notée dans le genre Eunice. Gomme le montre la figure 7 (texte), entre deux segments nor- maux (N N') se trouvent quatre segments (I-IV) normalement consti- tués à gauche, mais dont les sillons intersegmentaires convergent * Cité par Cori, loc. cU,, p. 569, note. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 413 vers le flanc droit, du côté dorsal comme du côté ventral. Le rudi- ment de parapode (P) doit correspondre au segment I, le moins anormal des trois. Du côté gauche, les parapodes sont tout à fait normalement constitués. Ce cas se rapproche de celui trouvé par Buchanan (61, p. 534, Mg. 5) dans l'extrémité postérieure d'une Amphinome; seulement, la malformation de noire Eunice se trou- vait en arrière du soixante-dixième segment, c'est-à-dire dans le tiers antérieur de l'ani- a mal. Gori (58), pour expli- quer ces anomalies, sup- pose que, pendant le développement, il s'est formé plus de segments primoTd\aux{Ursegmente) d'un côté que de l'autre. Ces segments supplémen- taires se seraient déve- loppés isolément, ou deux segments d'un côté se seraient soudés avec un seul de l'autre côté. Dans le cas présent, quatre segments primordiaux ont dû se souder avec un seul du côté opposé, ce dernier restant rudimentaire. Nous croyons que, dans le cas exposé, la théorie de Gori ne satis- fait pas complètement l'esprit. Ehlers' pense que, souvent, les mal- formations sont dues à la régénération des blessures. Nous sommes tentés d'admettre cette manière de voir pour notre exemple, car on a réellement l'impression que les parapodes et la paroi de droite des quatre segments ont été enlevés d'une manière violente, et que la blessure s'est simplement cicatrisée. On expliquerait de cette manière Fig. 7. — Anomalies de segmentation de VEunice Houssenui. Cniiloiirs de quelques segments anor- maux de !a région antérieure du corps. Les para- podes normaux n'ont pas été figurés. Grand, nat. A, face dorsale ; B, face ventrale ; C, face latérale droite ; NN, segments normaux ; I-IV, S'jgments anormaux ; p, pa- rapode rudimentaire des segments anormaux. ' Cité par Cori, loc. cit., p. 569, note 414 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. plus facilement la présence du rudiment de parapode qui se trouve de ce côté, et l'aspect du côté droit. Peut-être, le cas observé par Bucha- nan et cité plus haut pourrait s'expliquer de la même manière? Nous nous garderons bien pourtant d'être trop affirmatif sur ce sujet. Une autre anomalie (fig. 8, texte) se trouve réalisée sur une branchie. Sur la tige princi- pale (T) se trouvent deux ti- ges secondaires (T' T"), pour- vues aussi de filaments d'un seul côté. Les bandes de pig- ment qui se trouvent sur la tige principale et sur ses fila- ments manquent sur les ti- ges secondaires. Ces bran- ches sont, sans aucun doute, homologues des filaments. Elles sont placées du même côté et occupent la place de deux filaments normaux. Le segment qui portait cette branchie était normal. c.d Syn. 1825. Nereis giyantea Délie Chiaje (f«), t. II, pages 389 et 424, pi. XXVII, fig. 1-8. 1 841 . Eunice gigantea Delle Chiaje (17), t. III, p. 93, pL XCVII, %. 1-5-7, 14 et 15, pi. CXLII, liç. 7-9 et 13, et t. V, p. 100. 1865. Eunice Rousseaui Quatrefages (23), 1. 1, p. 309-311, pi. X, fig. 1-4. 1865. Eunice maxima Quatrefages (23), t. I, p. 330. 1867. Eunice validissima Grube (26), p. 67, note. 1868. Eunice maxima Ehlers (28), p. 310-311, pi. XV, fig. 30-34. 1878. Eunice (Eriphyk) Rousseaui Grube (4-1), p. 98. 1889. Eunice Rousseaui Remy Saint-Loup (55), p. 412. Fig. s. — Anomalies de V Eunice Rousseaui. Branchie droite du cinquantième segment vue par l'arrière 6. T, rachis branchial présentant des traînées de pigment brun ; T' et T", rachis secondaires qui se sont déve- loppés à la place de deux filaments ordinaires (F) ; Crf, cirrlie dorsal. Syn. FAUNE DES ANNFLIDES DE BANVULS. 415 Plusieurs Eunices géantes ont été décrites depuis Pallas (1788), qui en décrivit une pour la première fois sous le nom de Nereis aphroditoïs. Le nom de y'tgantea, appliqué à tort et à travers par les anciens auteurs, a produit une confusion extraordinaire dans la no- menclature de ces animaux. Quatrcfages et p]hiers ont établi la sy- nonymie, et nous renvoyons à ce dernier pour l'historique de toute cette question. Il ne restait, après l'enquête de ces auteurs, que trois Eunices géantes : VEunice aphroditoïs de Pallas (mer des Indes), VEunice maxima de Quatrefages (Méditerranée) et VEunice Rousseam du même auteur (Atlantique). Les deux dernières sont manifes- tement la même espèce, car il n'est pas possible de trouver un seul caractère sérieux qui puisse servir à les distinguer. Il ne reste donc qu'une forme habitant la mer des Indes, et une autre l'Atlantique et la Méditerranée. Les différences sont très faibles entre ces deux Annélides, et n'était l'habitat si différent, on serait tenté de les réunir. Nous croyons cependant qu'il faut pour le moment les séparer, jusqu'à ce qu'on ait résolu une question fort importante pour leur position systématique, qui ne paraît nullement avoir préoccupé les auteurs. Il s'agit de la forme jeune de ces animaux, car nous croyons qu'il n'est venu à l'idée de personne que ces animaux sont nés avec plusieurs mètres de longueur, comme paraissent pour- tant le faire supposer les descriptions systématiques. Nous ne pou- vons, malheureusement, apporter aucune lumière sur ce point. Les Eunices, qui ont été décrites, présentent des caractères diffé- rentiels avec VEunice maxima, comme on peut s'en convaincre en consultant les diagnoses courtes. Quoique très voisine de ces formes, la grande Eunice paraît ne pouvoir s'identifier avec aucune et paraît présenter plutôt des caractères intermédiaires entre VEunice Harassii et VEunice torquata. Elle se rapproche le plus de la dernière. Peut- être, les différences qu'on constate ne sont-elles dues qu'aune diOé- rence d'âge? Mais, comme nous n'avons pas trouvé d'intermédiaires entre ces formes, la question, pour le moment, reste en suspens. Nous n'admettons pas le genre Eriphyle (Kinberg), parce qu'il 416 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. est très mauvais, n'étant basé que sur un caractère sans valeur morphologique, ce qui amène une classification tout à fait artifi- cielle des espèces d'Eunices. Placer dans le même genre ou sous- genre les Eunice torquata et lœnia, et séparer en même temps la première de VEunice Rousseam, c'est montrer qu'on ne tient aucun compte des affinités naturelles de ces animaux. Nous allons, du reste, revenir sur ce point dans le chapitre commun à toutes les Eunices décrites. QUELQUES OBSERVATIONS SUR LE GENRE EUNICE. Lobe céphalique. — Les éludes d'Ehlers (88), de Spengel (46), de Pruvot (50), de Jourdan (53), permettent de retrouver dans le cerveau des Euniciens les trois centres cérébraux des Polychètes et rendent possible l'homologation des organes si variés qui s'y trou- vent placés. Ainsi, les quatre lobules, plus ou moins distincts, du lobe céphalique des Eunices, et qui sont les dépendances du cerveau antérieur, sont respectivement homologues des palpes frontaux et labiaux des /T^fl/mœcm, comme l'a montré Pruvot (50, p. 03) pour les palpes labiaux et comme nous avons pu nous en convaincre pour les palpes frontaux. Du cerveau moyen dépendent les yeux et les antennes. Ces der- niers organes, comme l'a montré Pruvot (50, p. 52 et 53) pour Vffyalinœcia, sont formés par un long flagellum d'origine purement épidermique, ne pouvant exécuter de mouvements propres, et d'un cératophore contenant les muscles moteurs du flagellum. Chez les Eunices, le cératophore est très réduit, mais il existe néanmoins avec ses caractères typiques. L'organe niical, dépendance du cerveau postérieur, a été étudié par Jourdan (53). 11 ne peut servir à la spécification, d'abord parce qu'il est très semblable chez toutes les Eunices, et ensuite parce qu'il n'est pas visible à l'extérieur. C'est, en effet, une poche qui se trouve profondément enfoncée sous le bord antérieur du premier FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 417 segment. Plus large en avant qu'en arrière, elle est séparée en deux par un sillon longitudinal bien marqué, situé dans le plan sagittal du corps. Cet organe est l'homologue des quatre fossettes vibratiles du Staurocephalus et des deux fossettes de la Lumbriconereis. Segments teintaculaires. — Après les travaux de Pruvot (50, p. 79 et80)j on ne peut plus considérer le segment qui porte les cirrhes tentaculaires comme un simple anneau faisant partie du premier seg- ment. Comme son innervation le montre, c'est bien un vrai segment un peu modifié. Les Eunices ont donc, comme les autres Euniciens, deux segments post-céphaliques, qui ne ressemblent pas aux seg- ments ordinaires du corps. Parapode. — Cet organe est formé chez le genre Eunice, comme chez tous les Euniciens, par une rame ventrale complète et une rame dorsale rudimentaire. Voici un tableau comparatif des homologies à établir dans les trois genres qui nous ont occupés : Staurocéphale. Lumbriconei-eis. Eunice. M f O O Branchie. % t« 1 Cirrhe dorsal avec O Cirrhe dorsal avec ci ^ f § V un acicule et bulbe. Acicules et bulbe sétigère. aciculea et bulbe sétigère. ^ / Mamelon sétigère. Mamelon sétigère. Mamelon sétigère. w < \ Bulbe sétigère avec Bulbe sétigère avec Bulbe sétigère avec S (S ; g g j acicules et soies. acicules et soies. acicules et soies. > \ Cirrhe ventral. O Cirrhe ventral. Comme nous l'avons déjà dit (p. 362), la branchie des Euniciens doit être considérée comme une nouvelle acquisition et non comme un cirrhe parapodial transformé. A première vue, le cirrhe dorsal paraît être dépourvu de cirrho- phore, car rien à l'extérieur ne décèle sa présence. Il n'en existe pas moins (pi. XVIII, fig. 76, cp), et presque toute la partie renflée proxi- male du cirrhe peut être considérée comme représentant le cirrho- phore. En effet, la présence d'un diverticule de la cavité générale et la présence des muscles moteurs du cirrhe l'indiquent suffisam- ment. Il y pénètre, en outre, le sommet d'un groupe d'acicules {ah) naissant dans un bulbe sétigère (As'), rempli de pigment brun foncé. ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 3^ SÉRIE. ~ T. lU. 1895. 27 nS G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. Cet amas de pigment fut considéré par Ehlers (28) comme l'organe segmentaire, et par Claparède (3») comme un œil. Spengel (46, p. 21), d'abord, Jourdan (53, p. 296-298) ensuite, montrèrent sa véritable nature. Les efforts très méritoires de Saint-Joseph (54, p. 199) pour combattre l'opinion d'Ehlers étaient donc inutiles, puisqu'on savait depuis longtemps à quoi s'en tenir. Les deux faisceaux de soies sont implantés dans un bulbe unique {bs') dont la structure est identique à celle du bulbe du Staurocé- phale. Les acicules font aussi partie du faisceau dorsal, mais la soie acJculaire appartient au faisceau ventral. Les soies simples et ailées en forme de sabre ne peuvent donner de bons caractères spécifiques, car elles sont très semblables chez les différentes espèces et ne sontpas caractéristiques du genre, ni même de la famille. Il en est tout autrement pour l'autre forme de soies qui se trouve dans le faisceau dorsal. Ces soies sont caractéristiques du genre Eunice et sont très utiles pour la distinction des espèces. For- mées par une lame de chitine mince et incolore dont le bord ter- minal se résout en minces lanières, elles ont les bords latéraux légè- rement rabattus en dedans. L'extrémité de la soie est donc plate, mais du côté proximal les deux bords se réunissent en cornet. Chaque lanière est enroulée sur elle-même, ce qui lui donne l'aspect d'un filament cylindrique. Cette disposition a été dessinée pour la soie de V Eunice Rousseaui (fig. 42). Von Marenzeller (63, p. 32, pi. [I, fig. 5, A) est le seul qui ait donné un dessin et une description dé- taillée de ces sortes de soies. Mais sa figure n'est pas tout à fait exacte, et il n'a pas vu l'enroulement des lanières. Celles qu'il des- sine ont les bords simplement rabattus. Généralement, la frange la plus externe d'un côté ou des deux côtés est beaucoup plus développée que les autres. Cette dispo- sition est très variable dans les diflerentes espèces du genre Eunice, mais la forme de ces soies est très constante pour les individus de la même espèce. Les soies composées sont très uniformément constituées dans le FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 419 groupe des Eimices. Les différences qu'elles présentent d'espèce à espèce sont 1res peu marquées, aussi ne peuvent-elles être em- ployées d'une manière pratique en spécification. Ces différences, en effet, ne se manifestent que dans la hauteur et la largeur de la serpe, et quelque peu dans la forme de la gaine. Beaucoup d'auteufs otit mal figuré ces soies, parce qu'ils n'ont pas vu que la gaine n'entotl- rait pas complèlement la serpe. Les deux valves s'arrêtent, en effet, vers le milieu de la largeur de cette dernière partie, rie formant ainsi qu'une demi-gaine. Par contre, chez les Staurocephahis et les Liimbriconereis, la gaine dépasse le dos comme le tranchant de la serpe. On a vu dans toutes les descriptions spécifiques qu'une soie par- ticulière venait s'ajouter, à partir d'un certain nombre de segments, au faisceau ventral. Cette soie a été considérée à tort par tous les auteurs comme un acicule, quoique ni sa forme ni sa position ne justifient cette manière de voir. Un acicule est toujours rattaché à une rame, soit normale, soit rudimentaire. Le pseudo-aciculc dont il est question est la soie la plus ventrale du faisceau ventral. Sa direction est la même que celle des soies composées. Elle coupe la direction des acicules vrais presque sous un angle droit ; on ne peut donc pas la considérer comme faisant partie du faisceau d'ad- cules parapodiaux. Il faut la considérer alors comme indépendante, et comme il existe aussi un faisceau d'acicules à la base du cirrhe dorsal, le parapode des Euniciens contiendrait alors les éléments de trois rames dans la moitié postérieure du corps. Cette simple consi- dération aurait dû faire hésiter les auteurs à interpréter cette soie comme un acicule, car les Polychètes à parapodes triramés sont en- core à trouver. Les considérations tirées de sa forme mènent exactement au même résultat. Cette soie, en effet, présente une extrémité pourvue de deux crochets et d'une demi-gaine bivalve, presque identique à celle de la serpe des soies composées. Au point de vue du dévelop- pement, ces dernières commencent aussi, comme on le sait, par être -420 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZÂ. simples, et ce n'est que dans la suite du développement que la serpe se détache de la hampe. Il n'est donc pas étonnant de trouver des soies simples parmi des soies composées. En dehors des raisons ontogéniques, l'exemple des Lumbriconereis est là pour nous l'ap- prendre. L'étude de la structure intime du bulbe sétigère montre, de même, que si les acicules font partie de la rangée des soies du faisceau dorsal, la soie aciculaire est la dernière du faisceau ventral. Les différences que cette soie présente chez les différents Eunices fournissent de bons caractères spécifiques. Souvent, chez les grands individus, cette soie, très proéminente, perd son crochet terminal. Sa couleur est toujours celle des acicules parapodiaux. Ces faits expliquent jusqu'à un certain point l'erreur des auteurs. On a vu que l'aspect du cirrhe ventral change suivant les régions du corps où on l'examine. Dans la région antérieure, le cirrhophore est globuleux ; dans la région postérieure, au contraire, il est subulé. Cela tient à la présence ou à l'absence de la « poche globuleuse » , décrite pour la première fois par Claparède (3», p. 398, pi. II, fig. 6,/"), et dont Jourdan (53, p. 295-296, fig. 29) a déterminé la véritable nature. Cet auteur cependant fait erreur, lorsqu'il dit « qu'elles se rencontrent avec des dimensions presque égales dans tous les seg- ments, surtout dans ceux des régions moyennes et postérieures ». Ces organes manquent complètement dans un nombre plus ou moins grand de segments postérieurs, suivant les espèces, et ont leur maxi- mum de développement dans la région antérieure. Ces organes (fig. 76, gl) forment une masse arrondie, située dans la cavité du cirrhophore, qu'elle remplit presque entièrement. Cette masse est formée par des cellules glandulaires épidermiques très allongées, [qui prennent la forme de bouteilles à très long goulot. Il n'est pas rare de trouver, chez les Chœtopodes, des cas où des cellules glandulaires épidermiques, prenant un grand développe- ment, arrivent à pénétrer dans la cavité générale, constituant ainsi une masse de forme variable, enveloppée par le péritoine refoulé. Nous aurons, dans la suite, à signaler de nombreux exemples. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 421 C'est cet appareil glandulaire qui, chez les Eunices, est surtout chargé de fournir les matériaux nécessaires à la confection du tube. Plus l'espèce est habile à fabriquer une demeure, plus ses glandes sont développées et plus elles envahissent les cirrhophores de l'extré- mité postérieure. Ainsi, chez XEunice torquata^ elles ne se trouvent que dans une trentaine de segments antérieurs ; chez XE. Harassii, elles envahissent presque tous les segments de la moitié antérieure, et enfin chez VE.florideana, qui fabrique des tubes très résistants et épais, plus de la moitié des parapodes en sont pourvus. Signalons encore, à propos des parapodes, la tendance à la dispa- rition des mamelons sétigères de quelques segments antérieurs. Cette réduction s'accompagne le plus souvent de l'allongement des cirrhes parapodiaux. On a là l'indication de la manière dont se sont formés les segments tentaculaires. Pygidium. — L'anus est nettement dorsal. Les urites sont constitués comme les antennes ; nous n'y insiste- rons donc pas. Ils sont typiquement au nombre de quatre, tous ven- traux, mais une paire plus dorsale que les autres. Ces deux paires n'ont presque jamais le même développement. Quelquefois, les dor- saux sont moins développés ; le plus souvent ce sont les ventraux. Chez les Eunices, les dorsaux seuls prennent toujours un déve- loppement très considérable. Si, chez VEunice torquata, les ventraux sont assez bien représentés, chez VE. florideana, ils sont réduits à deux petites papilles sessiles et, chez VEunice Harassii, ils man- quent complètement. Maceoires. — Les pièces de la mâchoire sont exactement consti- tuées comme chez le Lumbriconereis, seulement la partie chitineuse est plus épaisse et, naturellement aussi, la proportion de calcaire moins forte. La cavité interne ne débouche pas au sommet des pinces et des dents de la première maxille comme chez la Lumbriconereis, aussi les pointes ne sont-elles pas revêtues de calcaire comme dans la mâchoire de cette dernière. Les autres maxilles cependant font exception, du moins chez VEunice florideana où leurs dents ont, au 422 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. sommet, un revôtemenl calcaire. La lame du labre est formée presque uniquement de calcaire. Peut-être pourrait-on voir, dans quelques endroits du voisi- nage des maxilles où la cuticule est plus épaisse et de couleur noire (lig. 47, :;), les homologues des râpes des Lumbriconereis. Classification. — Parmi les nombreux caractères qu'on peut tirer de la description d'une Eunice, on peut trouver des caractères im- portants et des caractères qui, pour le moment, ne paraissent pas l'être, quoique de nouvelles découvertes puissent leur fournir un jour de l'importance. Pour le moment, voici, croyons-nous, les principaux caractères qui sont utiles dans la distinction des espèces actuellement connues : 1" couleur; 2° longueur des antennes; 3» aspect de ces appendices : moniliformes ou lisses ; 4" numéro du segment où commencent les branchies; 5" nombre maximum des filaments branchiaux rapportés à la taille ; 6" forme des soies en spatule ; 7° largeur et hauteur de la serpe et largeur de la gaine des soies composées ; 8^ forme et couleur de la soie aciculaire ; 9° forme de l'extrémité et couleur des acicules ; 10° nombre des segments abranches postérieures ; 11° rapport de longueur entre les supports et la pince; 12" nombre et longueur des urites. En laissant de côté le sous-genre Marpftysa, qui a tous les droits à être élevé au grade do genre, les Eunices sont divisées en deux sous- genres : Eriphylt et Leodice, qui se distinguent soi-disant par la présence ou l'absence des palpes frontaux. Comme nous l'avons dit déjà, cette distinction est tout à fait arbitraire, parce que toutes les Eunices ont des palpes frontaux, mais plus ou moins développés, ce qui n'a aucune importance morphologique. Nous avons trop peu de matériaux dans cette première contribution pour proposer une clas- sification plus rationnelle. xNous nous réservons pour une autre occa- sion. On peut cependant voir très clairement, parmi les Eunices, des types, sortes de centres autour desquels viennent se grouper des formes plus ou moins nombreuses. Les affinités des Euniciens entre eux ne paraissent pas pouvoir s'exprimer par des candélabres plus ou FAUNiï DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 423 moins ramifiés, mais plutôt par des ondes circulaires, qui se coupent en différents points. h'Eunice Harassii paraît un de ces types -, VE. torquafa, un autre, autour duquel se grouperaient VE. Rousseaui et r^". florideana. Fam. HESIONEA. PODAUKE PALLIDA (cLPRD). 1864. Oxydmmm jmllidm Claparède (18), p. 521-522, pi. ÏV, fig". 1. 1874. Podarke pallida von Marenzeller (35), p. '25. (PI. XVIII, fig. 77-83.) Lobe céphalique qundrangulaire. — Trois antennes dont la médiane lisse est plus courte que les externes articulées. — Deux palpes lisses pourvus d'un palpostyle trois fois et demi plus long que le palpophore. — Quatre yeux rouges. — Cirrhes tontaculaircs et parapodiaux hicmaux articulés, les cirrlies neuraux lisses. — Parapodes subbirèmes. — Soies de la rame ha'Uiale unique (deux ou trois [?] ) bifide et dentée sur le tranchant. Claparède n'a pu avoir de cette espèce qu'un seul exemplaire mâle; nous en avons eu deux femelles. Ces trois exemplaires sont les seuls qui aient été trouvés jusqu'à présent. A une longueur de 3 millimètres correspondent 19 segments (Gla* parcde) et 3.'1 segments pour une longueur de 7 millimèlres. Le corps est partout de môme largeur, excepté dans la région des cinq ou six derniers segments où il est légèrement atténué. La face dorsale, comme la ventrale, présente une légère convexité. Coloration. — Les appendices et le corps sont transparents. Ces animaux ou sont incolores (Claparède), ou présentent une teinte verdâtre. La coloration est produite par un pigment vert formant, sur chaque segment, des traînées transversales. Sur les segments antérieurs, ces traînées sont moins distinctes que sur les postérieurs. Sur les trois derniers segments s'étend une grande tache d'un blanc crétacé. ho. lobe céphalique {^i^. 11) ^ nrve, forme quadrangulaire. Il est un peu plus large que long. Ses limites sont indiquées par un sillon bien 424 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. marqué, qui est cependant interrompu sur la ligne médiane dorsale. Sur le bord antérieur du lobe céphalique et du côté dorsal se trouvent insérées trois antennes. L'antenne impaire (Ai) est placée un peu plus en arrière que les deux autres. Elle est lisse, renflée à la base, effilée au sommet, et présente un cératophore à peine indiqué et non individualisé. Sa longueur est moindre que la moitié de la Ion- gueur du lobe céphalique. Les antennes paires (Ae) sont presque une fois et demie aussi longues que le lobe céphalique. Le cératophore n'existe pas. Leur base est renflée, et leur extrémité subulée, divisée en six à huit articles, diminue de largeur vers l'extrémité, ce qui donne à cet appendice un contour scalariforme. Des poils sensitifs se trouvent disposés au sommet des articles. Du côté ventral sont insérées deux palpes lisses (P). Ces appendices ont un court palpophore (le vrai palpe) et un long palpostyle dont la forme rappelle celle de l'antenne impaire. La longueur du premier est comprise trois fois et demie dans celle du second. La longueur de tout l'appendice dépasse celle de la tête. Quatre yeux rouges sont disposés en trapèze sur la face dorsale du lobe céphalique. Les antérieurs sont plus gros et plus éloignés que les postérieurs. Tous les quatre sont pourvus d'un cristallin. L'organe nucal (nu) est représenté par un bourrelet cilié très peu développé de chaque côté de la région postérieure du lobe cépha- lique. La bouche ventrale se présente comme une petite fente transver- sale, entourée de lèvres plissées. Les trois py^emiers segments (fig. 77) ne ressemblent pas aux segments ordinaires du corps. Ils ne portent pas de soies et sont pourvus de deux cirrhes tentaculaïres de chaque côté. Le premier segment est plus long du côté ventral que du côté dorsal. Il est deux fois plus court que le second, et trois fois plus court que le troisième qui a la même longueur que les segments sétigères suivants. Les cirrhes tentaculaires ont la même forme et la même articulation que les FAUNE DES ANNELIDES DE BANYULS. 425 antennes externes, seulement leur région proximale est plus mince. Ceux du premier segment sont un peu plus longs que les antennes externes, mais ils sont plus courts que les cirrhes des deuxième et troisième segments. Les cirrhes de ce dernier sont insérés plus ven- tralement que ceux du second et du premier. Chacun de ces appen- dices présente un cirrhophore très net, dans lequel pénètre un aci- cule. Les cirrhophores des deuxième et troisième segments mon- trent une annelure médiane, qui manque à ceux du premier segment. Tous les autres segments portent des parapodes subbirèmes, dont la grandeur diminue progressivement vers l'extrémité postérieure. Les parapodes (fig. 78) sont formés par les parties suivantes : Le cirrhe dorsal (Ch) articulé ressemble aux cirrhes tentaculaires et possède la même longueur que les cirrhes du troisième segment. Son cirrhophore, nettement indiqué, n'a pas d'annelure médiane. Le mamelon sétigère unique représente, en réalité, le mamelon sétigère hœmal, confondu avec le neuraL Du côté distal, un petit renflement hfemal représente le reste du mamelon hsemal, comme l'indique la soie qui en sort. Du côté neural, une partie proéminente en forme de bec crochu reçoit l'acicule. Les soies de la rame haemale (tîg. 79) sont au nombre de deux ou trois (Claparède), ou d'une seule. Elles sont très fines, et leur som- met présente une disposition très particulière. L'extrémité est bifide, mais la branche qui est placée vers le tranchant est moitié aussi longue et bien plus mince que l'autre. Sur le tranchant, en arrière de l'endroit où la bifurcation commence, se trouvent une dizaine de dents très bien marquées. L'acicule hœmal (fig. 80) est très mince et légèrement recourbé au sommet. La rame neurale possède un faisceau de nombreuses soies com- posées (fig. 81 et 8-2). La hampe hétérogomphe présente, lorsqu'elle est regardée à plat, des stries obliques très marquées du côté anté- rieur et des stries transversales, alternativement claires et sombres, 426 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. du côté postérieur. La serpe est ou courte (fig. 82), large et nette- ment dentée sur le tranchant, ou très longue (fig. 81), mince et à tranchant paraissant lisse. On trouve tous les intermédiaires entre les deux formes. La serpe est toujours terminée par un crochet aigu et recourbé. L'acicule neural (fig. 83) à extrémité droite et conique présente, du côté antérieur, des stries transversales alternativement claires et obscures, et du côté postérieur, des stries longitudinales. Il est, comme toujours, placé au milieu du faisceau des soies. Le cirrhe neural (fig. 78, Gn) non articulé, dépourvu de cérato- phore, est conique. Il est inséré presque à l'extrémité distale du mamelon. Le pygidium, très court, arrondi, porte deux urilesdont la lon- gueur est deux fois celle des antennes externes. La trompe inerme est courte et cylindrique. Le bord de son ori- fice est pourvu de filaments nombreux et très longs. L'intestin com- mence au huitième segment; sa couleur, jusqu'au vingtième seg- ment, est jaune opaque. Ces animaux très agiles nagent avec une vitesse remarquable. Claparède n'indique pas à quelle profondeur il a trouvé son échan- tillon de Port-Vendres. Les nôtres proviennent du rech Lacaze- Duthiers, par 240 à 333 mètres, dans les fonds à Amphihelia. L'ani- mal doit probablement habiter ces coraux. Au mois de juin, nos femelles avaient des groupes d'oeufs non miîrs à la base ;des parapodes, surtout dans les segments posté- rieurs. Palpes, — Il est certain que les deux appendices insérés sur la face ventrale du lobe céphalique des Podarke sont des palpes homologues aux palpes bien caractérisées des Hesione, Magalia, Oxydromus, etc. Le maximum d'appendices céphaliques que peut avoir unHésionien est cinq \ desquels toujours deux ventraux, les palpes, et trois * Les seules exceptions paraissent être les Cirrosyllis {Pseudosyllis de Quatre- FAUNE DES ANNÉUDES DE BANYULS. 427 dorsaux, les antennes. Il n'y a aucune raison pour qu'il en soit au- trement chez les Podarke. Ce qui a induit les auteurs à considérer les palpes comme des antennes, c'est la ressemblance extérieure de ces deux sortes d'appendices. La distinction que nous avons établie entre la partie purement épidermique (le style) et la partie mus- culo-cutanée (le phore) permet de se rendre compte de cette res- semblance apparente. En effet, chez les Podarke, le palpostyle a pris un grand développement; mais le palpophore (partie principale du palpe) n'en existe pas moins. Dans les antennes, le cératostyle (partie principale de cet appendice) ressemble, en effet, au style du palpe ; mais, ici, le cératophore est très réduit et manque même aux antennes externes. Il y a là, dans le groupe des Podarke^ une évolution convergente de deux appendices différents, mais non identité au point de vue morphologique, La situation différente de ces appendices, nécessitant une innervation par des régions céré- brales différentes, le montre aussi. Yeux. — Les yeux postérieurs, comme les antérieurs, sont pour- vus de cristallin. Du reste, d'après les travaux de Graber, Andrews et d'après notre propre expérience, tous les yeux proprement dits des Polychètes ont un cristallin. CiRRBES TENTACULAIRES. — La préseucc d'un acicule dans le cirrbo- phore de chacun de ces appendices est encore une preuve qu'ils ne sont que des cirrhes parapodiaux. Les acicules sont, en effet, les restes des rames heemales ou neurales disparues. Les cirrhes parapo- diaux n'en possèdent point, car les deux acicules sont à leur place dans le mamelon sétigère. Syn, 1864. Oxydromus pallidus Claparède (i8), p. 321-522, pi. IV, fig. 1. 1874. Podarke pallida von Marenzeller (35), p, 2û. 1880. Oxydromus pallidus Grube (44), p. 228. fages), Ceylanica et vittata Schmarda (16, p. 78) qui auraient huit appendices céplialiques, tous dorsaux. Cela doit cerlainement provenir d'une erreur d'obser- vation. L'auteur a dû prendre des cirrhes tentaculaires pour des antennes, d'autant plus qu'il ne trouve que deux cirrhes tentaculaires, ce qui ne correspond pas avec ce qu'on connaît de la majorité des Hésioniens. 428 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. Il y a quelques différences entre la description et les figures que donne Claparède et celle qu'on vient de lire. Nous allons en donner un tableau : Claparède. Pruvot et Racovitza Dimension 3 millimètres. 7 millimètres. Nombre des segments 19 33 Couleur Incolore. Verdâtre. Palpes , Articulés. Lisses. Acicules hœmaux 1 ou 2 1 Soies haemales 2 ou 3 1 L'intestin commence au.. .... . 7^ segment. S^ segment. La différence présentée par les palpes doit être attribuée à une erreur de Claparède, d'autant plus qu'elle n'est marquée que sur le dessin très mal fait de la planche IV, fig. 1. Quant aux autres diffé- rences, on pourrait peut-être les attribuer au dimorphisme sexuel, puisque Claparède n'a décrit qu'un mâle et que notre description ne porte que sur deux femelles. Que cet auteur se soit trompé en mettant son espèce dans le genre Oxydromus, il n'y a là rien d'étonnant, ce genre étant très mal délimité de son temps. Mais il est curieux que Grube la maintienne dans ce genre, même après que von Marenzeller lui a assigné sa véritable place. Et encore cet auteur fait justement remarquer l'er- reur dans laquelle est tombé Claparède, en figurant douze cirrhes tentaculaires et en n'en indiquant que huit dans sa description, ce qui ne l'empêche pas de laisser cet animal à douze cirrhes dans les Oxydromes, qu'il caractérise lui-même, un peu plus haut, comme Hésioniens à seize cirrhes. Fam. APHRODITE a. PANTHALIS LACAZH N. SP. (PI. XIX, fig. 84-104.) Une large bande brune transversale par segment. — Antenne médiane renflée ;\ la base et ne dépassant pas les ommatophores. — La cinquième élytre est la plus grande. — Des tubercules pseudo-branchiaux sur la face dorsale d'un certain nombre de segments à la région antérieure. — Glandes fileuses à FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 429 partir du huitième segment, — A partir du même segment, la rame hremale est aplatie, rabattue en avant de la rame neurale et porte seulement quelques fines soies capillaires spinuleuses. — A la rame neurale s'adjoint aux soies aristées et au faisceau ventral de soies serrulées courbes un faisceau dorsal de longues soies droites pileuses, mélangées de soies beaucoup plus fines bipec- tinées. Un tronçon de 15 centimètres et demi, comprenant les soixante- seize premiers segments. Largeur maximum, y compris lesparapodes et les soies, au niveau de la région de la trompe, vers le trente-cin- quième segment : 22 millimètres. Largeur à ce niveau, sans les para- podes : 14 millimètres. A l'extrémité postérieure du tronçon, vers le soixante-dixième segment, elle n'est plus que de 9 millimètres. Epaisseur maxima : 17 millimètres. Coloration. — A chaque segment, sur la face dorsale, une bande transversale brun violacé foncé de 1 millimètre de large, s'arrêtant à la base des parapodes qui sont incolores, et séparée de celle des segments voisins par un mince liséré blanc. Ces bandes pâlissent et s'atténuent progressivement à la région tout à fait antérieure oii le dos est recouvert presque en entier par les élytres (fig. 84). Les pre- mières élytres (fig. 87) sont peu colorées, uniformément lavées de brun violet pâle; puis la pointe se fonce peu à peu (fig. 88) et dans la région moyenne, quand elles ont atteint la forme en gousset carac- téristique (fig. 89), elles montrent leurs bords antérieur et postérieur lisérés de violet foncé presque noir, qui passe insensiblement à la teinte générale de l'élytre vers la pointe interne. Le centre, autour du point d'insertion sur l'élytrophore, est toujours incolore. A la face ventrale, chaque segment montre encore une large bande comme à la face dorsale, mais moins foncée, jaune brun et inter- rompue sur la ligne médiane au niveau du sillon nerveux. Elles ont leur maximum de netteté du vingtième au quarantième segment en- viron, et deviennent de moins en moins distinctes vers la tête comme du côté de l'extrémité postérieure. Le lobe céphalique n'est pas détaché et distinct des ommatophores. 430 G. PRUVOT ET E.-G. HAGOVITZA. On ne voit, du moins, comme pouvant lui appartenir, au-dessus de la base de ceux-ci, qu'un petit tubercule rond de O"",?, se pro- longeant antérieurement en l'antenne médiane (fig. 85, Ai), et sur lequel un petit point de pigment noir situé au-dessous du tégument figure peut-être un œil rudimentaire appliqué sur le cerveau. En réalité, la partie basilaire commune des ommalophores appartient au lobe céphalique dont elle forme la plus grande partie, et le tuber- cule qui porte l'antenne n'en est que la portion dorsale et anté- rieure. Les ommalophores, près de trois fois aussi longs et deux fois aussi larges que le tubercule en question, sont cylindriques et simplement arrondis à l'eitrémité. Appliqués étroitement l'un contre l'autre par leur face interne, incolores dans leur partie basilaire, ils sont forte- ment pigmentés de noir dans leur moitié terminale (fig. 86, œ). U antenne médiane dépourvue de cératophore, lisse, subulée et ré- gulièrement effilée Ters la pointe, atteint sans la dépasser sensible- ment leur extrémité antérieure. Les antennes latérales (fig. 86, Ae), de même forme et de même grandeur que la précédente, se détachent des ommatophores sur la face ventrale et vers le tiers de leur longueur. Palpes (fig. 86, P) relativement peu développés, ayant à peine deux fois la longueur des ommatophores. Le segment buccal bien visible dorsalemenl, mais plus étroit de moitié que le suivant, porte la première paire de parapodes. Rudi- mentaires, coniques, n'arrivant en avant qu'au niveau de l'inser- tion des antennes latérales, ils supportent les cirrhes tentaculaires (fig. 86, Th et Tn) qui sont égaux, un peu plus gros et plus longs que les antennes^ et entre eux un faisceau de quelques soies peu dé- veloppées. Les parapodes du deuxième segment (premier élylrigère) sont éga- lement coniques, un peu plus longs et plus grêles que les suivants, et leur cirrhe neural (fig. 86, Cn), très développé comme c'est le cas le plus fréquent chez les Aphroditiens, a une fois et demie la Ion- PAUNE DES ANNËLIDES DE DANYULS. 431 gueur des cirrhes tentaculaires et dépasse comme eux sensiblement l'extrémité des ommatophores. Au delà, les parapodes deviennent lamelleux, comprimés d'avant en arrière, et leur cirrhes se raccourcissent de plus en plus, ainsi que le montrent les figures 90 et 91 qui représentent, au même grossissement de cinq diamètres, le troisième et le vingt-quatrième parapode. Le cirrhe heemal notamment, qui, à la région tout à fait antérieure, dépassait franchement la pointe du parapode, en vient à ne plus dépasser en longueur le cirrhe neural très réduit lui- même, et en même temps se renfle peu à peu à sa base de manière à prendre l'aspect des figures 91 et 92. Au point de vue de la disposition des rames pédieuses et des soies, les parapodes des sept premiers segments difl'èrent des sui- vants : Le deuxième parapode est franchement birème, bien que les deux rames soient peu séparées. La rame hœmale montre un faisceau de soies fines et souples, sans élargissement au delà de la hampe, mais légèrement spinuleuses d'un côté dans leur portion dislale (fig. 95). Le faisceau unique de la rame neurale est formé de soies extrême- ment allongées, atteignant près de 1 millimètre de longueur, à por- tion initiale droite, puis légèrement élargies et courbées (fig. 96), et portant sur le côté convexe de fortes spinules qui deviennent de plus en plus fines et rapprochées vers la pointe. Au bord le plus ventral du faisceau, trois ou quatre soies beaucoup plus fines et plus courtes, droites, sans élargissement, fortement barbelées des deux côtés (fig. 97). Aux segments suivants, du troisième au septième, la rame neurale prédomine et forme la presque totalité du parapode (fig. 90). Tron- quée obliquement, elle est divisée dans toute sa hauteur en deux lèvres peu prononcées par un sillon du fond duquel émergent les soies. L'acicule jaune, de 0"'",15 de diamètre, aboutit vers le mi- lieu de la rame. Au-dessous, un faisceau d'une trentaine de soies courbes, élargies au delà de la portion initiale et fortement spinu- 432 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZÂ. leuses, puis atténuées en pointe fine et régulièrement pectinée (fîg. 90, s', et fig. 104). Au troisième parapode seulement, on trouve encore mélangées à elles, du côté ventral, trois ou quatre petites soies du type de la figure 97. En outre, sur toute la hauteur de la fente pédieuse s'échelonnent, en une rangée unique, cinq ou six soies beaucoup plus fortes et d'un jaune foncé comme l'acicule, lé- gèrement dilatées au-dessous de la pointe, les setœ aristatse de Kin- berg (fîg. 90, s). Cette pointe elle-même est très variable ; on peut trouver dans le même parapode des soies surmontées d'une longue pointe plumeuse (fig. 100), d'autres (fig. 101) où cette pointe/) est émoussée, réduite à sa portion basilaire, d'autres qui ne montrent plus que quelques barbules chitineuses, d'autres enfin où toute trace de cette portion terminale a disparu. Ces soies, malgré leur apparence, ne sont pas des soies composées, car il y a continuité de substance sur toute la ligne de jonction entre la portion basilaire et la pointe plumeuse, et celle-ci n'est pas susceptible de mouve- ments sur la première. Au troisième pied, nous avons rencontré et figuré (fîg. 98) une de ces soies d'aspect un peu différent, régulière- ment effilée en pointe et faiblement spinuleuse sur un côté ; elle pa- raît être la forme primitive, car on trouve aux parapodes suivants des Intermédiaires entre elle et la forme de la figure 99, formes où les barbules s'allongent et où s'établit une ligne de démarcation de plus en plus tranchée entre la partie basilaire lisse et jaune et la pointe plumeuse et incolore. La rame hsemale forme au-dessus de la précédente, à la base du cirrhe hsemal, un petit tubercule (fig. 90, rh) où s'engage la pointe de l'acicule hsemal, beaucoup plus petit (0'°"',06 de diamètre) que l'acicule neural, jaune foncé également, et au-dessous de lui émerge un faisceau d'une trentaine de fines soies capillaires spinuleuses, droites [sh], toutes semblables aux soies dorsales du deuxième seg- ment. A partir du huitième segment, les parapodes conservent la même forme générale, seulement la rame haemale semble avoir entièrement FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 433 disparu (fîg. 91). Mais, si l'on examine le parapode par la face anté- rieure après avoir éclairci les tissus à l'aide de la potasse (fig. 92), on constate un changement notable. A la rame neurale, garnie toujours d'une rangée verticale de huit à dix soies aristées et d'un faisceau de soies courbes pectinées, setœ serrulatx (s'), au-dessous de l'acicule, s'est adjoint au-dessus de celui-ci un nouveau faisceau composé de soies [s") de deux sortes mélangées : les unes relativement grandes, légèrement jaunes, droites, un peu élargies et couvertes, au delà de l'élargissement, d'un revêtement dense de barbules (fig. 102), et d'autres beaucoup plus petites, transparentes, barbelées (fig. 103). Une sorte de lèvre charnue, qui n'existait pas aux pieds précé- dents, descend sur la face antérieure du parapode de la base du cirrhe heemal jusque vers le milieu de la hauteur de la rame neu- rale. Elle renferme à sa partie supérieure l'acicule hœmal, et porte, près du point où elle se termine inférieurement, une dizaine de pe- tites soies souples, finement spinuleuses d'un côté, entièrement semblables à celles de la rame dorsale des pieds précédents (fig. 95). Nous devons donc la considérer comme représentant la rame hse- male du parapode, aplatie et rabattue en avant de la rame neurale. Les parapodes se succèdent jusqu'à l'extrémité postérieure du tronçon, sans changement notable, sauf l'augmentation de taille et de nombre des grosses soies aristées qui sont, vers la fin, une ving- taine à chaque parapode. Avec ces modifications dans les parties constitutives du parapode apparaissent, à partir du huitième segment, les singulières produc- tions signalées pour la première fois par Claparède chez le Polyo- dontes maxillosus (S'y, p. 395), les Spinndrusen des auteurs alle- mands. Chacune de ces glandes fileuses (fig. 92, gl) a la forme d'un long boyau cyhndrique, de {y^'^,'2. de diamètre, terminé en pointe à son extrémité interne ; celle-ci est libre dans la cavité gé- nérale où elle arrive jusque vers la ligne médiane. La portion interne est pelotonnée sur elle-même, puis devient rectiligne et s'accole à l'acicule hsemal qu'elle quitte, près de sa pointe, pour ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — • 3* SÉRIE. — T. IH. 1895. 2J8 434 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. atteindre le tégument au niveau du petit faisceau de soies capillaires spinuleuses susmentionnées ; elle appartient par conséquent à la rame hœmale. Son contenu est formé d'un nombre immense de filaments transparents très fins, atteignant à peine I \x de diamètre, et qui, pressés les uns contre les autres, donnent à l'ensemble de riches reflets métalliques, comparés déjà par Glaparède à ceux des franges latérales des Aphrodiles.Sur notre exemplaire, les filaments sécrétés ne dépassent pas le tégument dans la région antérieure du corps; mais, à partir du trente-cinquième segment environ, ils s'échappent au dehors (fig. 92, /) formant à chaque pied un éche- veau qui peut atteindre jusqu'à 3 centimètres de longueur, s'emmê- lant avec ceux des pieds voisins et qu'on pourrait prendre au pre- mier abord, souillés qu'ils sont de limon, pour une production étran- gère à l'animal. Élytres portées sur les segments 2, 4, 5, 7, 9, 11, etc., alter- nant régulièrement avec les pieds munis de cirrhes hsemaux jus-? qu'à la fin du tronçon, imbriquées de chaque côté du corps, mais laissant à nu la plus grande partie du dos, sauf les deux premières paires qui se croisent légèrement sur la ligne médiane. La première est suborbiculaire, prolongée postérieurement en un petit lobe arrondi (fig. 87). Les suivantes sont ovalaires (fig. 88), dirigées de plus en plus obliquement en avant; leur insertion sur l'élytro- phore (i) est beaucoup plus rapprochée du bord postérieur que du bord antérieur et, la portion de l'élytre en avant de son support étant plus grande que l'intervalle entre deux élytrophores consé- cutifs, c'est forcément l'élytre postérieure qui recouvre l'antérieure, à l'inverse de ce qui a lieu dans les autres tribus des Aphroditiens. La cinquième est la plus grande, presque parallèle à l'axe du corps, s'étendant encore jusqu'au segment tenlaculaire en avant, alors qu'en arrière elle ne recouvre plus que le segment cirrhigère sui- vant. La sixième, portée sur le onzième pied, ne recouvre déjà plus en avant que le septième segment à peine. Puis elles continuent à décroître, s'imbriquent alors à la manière normale, c'est-à-dire FAUNE DES ANNÉLIDES DE RANYULS. 435 d'avant en arrière, et ont leur grand axe transversal ; mais, à partir de la vingt-deuxième environ (quarante- troisième segment), le bord externe, qui devrait s'étendre au-dessus du parapode, se recourbe dorsalement de manière à former une sorte de gousset (fig. 89, q) caractéristique du genre Panthalis. Toutes sont entièrement glabres, sans franges ni scabrilles d'aucune sorte. A partir du douzième segment, le bord dorsal de chaque parapode, lisse jusque-là, montre en dedans du cirrhe hœmal ou de l'élytro- phore quelques petits tubercules, quatre ou cinq, ovoïdes, transpa- rents, parfois légèrement pédicules (fig. Ul, st), semblables aux petites productions signalées sous le nom de tubercules brancUiaux par AudouinetMilnc-Edwards (5, p. 100, pi. Il) chez VAcoetes Pleei. Nous avons pu les suivre avec une entière netteté jusqu'au vingt- huitième segment ; puis, au delà, ils s'atténuent peu à peu et s'ef- facent. Orifice buccal élargi un peu transversalement, fortement plissé pour livrer passage à la trompe dans Textroversion, sans tubercule dorsal. Trompe extrêmement large et musculeuse, aplatie dorso-ventrale- mentet bilabiée (fig. 84, t?-). Les deux lèvres sont semblables. Sur la ligne médiane de chacune d'elles, une forte papille triangulaire (fig. 93, pa'}, un peu aplatie, légèrement colorée en bleu ardoisé, insérée en dehors du bord même de la lèvre. Le bord de celle-ci présente de part et d'autre de la papille médiane une série de neuf papilles (/ja) hyalines, légèrement comprimées latéralement; les plus externes sont peu distinctes. Quatre fortes mâchoires adossées deux à deux près de la ligne médiane en une paire dorsale et une ven- trale. Toutes semblables, elles se terminent par un crochet recourbé, séparé par une profonde échancrure de la lame masticatrice qui est lisse dans sa moitié postérieure et porte, dans sa moitié antérieure, six denticules émoussés et peu marqués (fig. 94); du côté opposé se trouve une forte apophyse (g), pour l'insertion du ligament unis- sant les deux mâchoires d'une même paire. 436 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. Nous n'avons pas de renseignements suffisamment précis sur l'habitat de cet animal, qui a été pris à la ligne en notre absence au mois de novembre. L'imbrication à rebours des premières élytres, obstacle à la progression dans le sable ou même à sa surface dans l'eau, donne à penser qu'il doit vivre dans un tube sécrété par lui, comme c'est le cas pour VAcoetes Pleei Aud. et Edw., VEuarche tubifex (Ehl.), le Panthalis Œrstedi Kinb,, VAcoetes lupina (Stimp.) et probablement tous les Acoetides dont toutes les espèces connues présentent la même disposition des élytres. Discussion spécifique. — Déjà par son mode de capture si excep- tionnel pour une Annélide, on serait tenté d'attribuer cet animal au Polyodontes maxillosm Ranz. H. Eisig (5«, p. 325) nous apprend, en effet, qu'à Naples où l'on. recueille en moyenne trois ou quatre Po- lyodontes par an, ils sont toujours pris aux hameçons des palangres et qu'on ne les obtient jamais qu'à l'état de tronçons de la région antérieure. R. Saint-Loup a eu aussi entre les mains un tronçon d'un grand Acoetide pris de la même manière aux environs de Mar- seille, et qu'il a rapporté également au Polyodontes maxillosus (55). On peut concevoir d'après cela, et d'après les études en particulier d'Eisig sur le produit des glandes flleuses, le genre de vie de ces grands Aphroditiens. Ils doivent habiter des tubes enfoncés dans le sol, de préférence dans les fentes des rochers, puisque les dragues et les chaluts n'en ramènent jamais, et que les palangres ou lignes de fond qui les capturent sont d'habitude tendues dans les fonds ro- cheux. Très carnassières, comme le fait présager leur trompe et leurs fortes mâchoires, ces Annélides doivent se tenir à l'affût à l'entrée de leur habitation. Elles se jettent comme sur une proie sur l'appât des lignes qui vient tomber à leur portée, mais elles n'aban- donnent pas leur tube, se cramponnent aux parois, comme toutes les AnnéHdestubicoles, et se laissent briser, quand la ligne est reti- rée, plutôt que de céder. L'animal qui nous occupe ressemble encore au Polyodontes maxil' FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 437 losus, tel que l'ont fait connaître Délie Chiaje (■*) et Claparède (27), par la taille, les caractères de coloration, la forme générale du corps et des appendices. Mais la description et les figures de Claparède montrent déjà des différences sensibles. C'est ainsi que l'espèce na- politaine a les élytres planes et non campanulées, beaucoup plus petites encore que chez notre espèce, celles du même côté n'arri- vant pas même à se toucher par leurs bords. La forme des soies est toute différente, la rame dorsale en est dépourvue, et ce caractère est confirmé par H. Eisig (52, p. 326). Une autre différence encore : Eisig figure (52, pi. XXXVl, fig. 4) les Spinndrusen du Polyodonte à partir du cinquième segment au moins, tandis que, chez notre indi- vidu, elles ne commencent qu'au huitième segment. Enfin, Délie Chiaje attribue seulement quatorze papilles à chaque lèvre de la trompe en outre de la longue papille médiane. Mais une différence bien plus importante se montre dans les appendices céphaliques. Grube pour le Polyodonf.es gulo (Gr.) de la mer Rouge, Délie Chiaje et Claparède pour le P. maxilloms Ranz., sont très catégoriques : les Polyodontes sont dépourvus d'antenne médiane; et Grube, dans sa revision des Aphroditiens (38), fait de ce caractère la définition même dugenre Polyodontes. ^ous ne pou- vons donc avoir de doute à ce sujet; les Polyodontes représentent parmi les Acoétides ce que sont les Sigalions parmi les Sigalionides. Et la même confusion s'est établie. De même qu'après la découverte de Sigalionides à antenne impaire, les Sthenelais de Kinberg, Milne- Edwards a cru simplement rectifier une ancienne erreur de sa part en attribuant à son Sigalion primitif une antenne qu'il n'avait jamais eue, de même Buchanan vient de représenter (64) le Polyodontes maxillosus orné d'une longue antenne médiane à laquelle le genre n'a pas droit. L'individu figuré provenait de Naples. Il n'est pas im- possible que ce soit l'espèce que nous venons de décrire. Malheu- reusement, le dessin, assez sommaire du reste, n'est accompagné d'aucune description ; toutefois, l'antenne impaire est figurée à peu près deux fois aussi longue proportionnellement qu'elle l'est chez 138 G. PRUVOT ET K.-G. UACOVITZA. notre individu, et les palpes sont aussi beaucoup plus développés. Ce qui nous a fait longtemps hésiter à ériger cet animal en espèce nouvelle, c'est que nous ne connaissons aucune ligure acceptable de la région céphalique d'un Polyodonte, aucune confirmant les descriptions et montrant sans ambiguïté possible qu'il existe bien des Acoétides dépourvus réellement d'antenne médiane. Buchanan a représenté dans le môme travail un type très proche allié, Eupolyo- dontes Corm'shii, qui se caractérise par une paire d'yeux latéraux, énormes et très saillants. Les antennes latérales naissent, comme dans la règle ordinaire, en dessous de deux lobes frontaux qui repré- sentent manifestement les deux ommâtophores habituels, et il est au moins probable que c'est également un type dépourvu d'antenne impaire. L'auteur en indique une, cependant, dans la description : « A minute médian prostomial tentacle situated on the posterior part of the proslomium and jusl in front of a slightly raiscd part of the back wich forms a kind of caruncle. » A l'examen de la figure, nous ne pouvons nous défendre de l'idée qu'il n'y a là rien autre chose qu'un repli cutané médian appartenant au bord antérieur du segment buccal, et comme imprimé dans l'angle que forment les bords internes des deux élytres de la première paire. Nous ferons connaître un cas tout à fait semblable chez un Sigalionide. Un autre embarras se dresse pour l'attribution générique de celte espèce. Buchanan a proposé dans le même mémoire un remanie- ment complet de tous les Acoétides, et, à accepter ses conclusions, nous aurions affaire encore à un Polyodonte. Mais la classification proposée ne paraît pas devoir être acceptée sans réserves ; on peut douter même qu'elle constitue un progrès. L'auteur supprime réso- lument les g^enres Acoeles, Eupompe, Panthalis, Euarche, pour faire rentrer la plupart de leurs espèces dans le genre Polyodontes. Le seul genre ancien qui ait trouvé grâce est le genre Eupanthalis Mc-Inl., qui n'est peut-être pourtant pas le mieux caractérisé. Il lui est attri- bué, outre l'espèce type, Eupanthalis Kinbergi Mc-Int., YEuarche tubifex Ehl. et le Panthalis hicolor (Gr.) pro parle. La revision est FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. i3<) complétée par l'établissement du genre nouveau, Eupolyodontes^ dans lequel rentre, avec l'espcce nouvelle, Eupolyodonles Cornishn Buch., V ancien Pohjodontesgulo (Gr.) de la mer Ronge. Pour effectuer cette révolution, Buchanan a substitué aux carac- tères anciens, tirés des élytres et des appendices céphaliques, ceux tirés uniquement de l'état sessile ou pédoncule des yeux; du moins, aucun des autres caracLères qui trouvent place dans sa définiLion des genres n'est-il général : Eupolyodonles. — Peduncles of eyes arising laterally from the base of the prostomium. Polyodontes. — Peduncles of eyes arising from the front of the prostomium. Eupanthalis. — Sessile eyes, 4 in number. Y a-t-il avantage à cette substitution de caractères? Le nouveau ^enre Eupolyodonles montre déjà combien les derniers proposés sont d'un usage délicat. Il semble, en effet, d'après les définitions, qu'il y a une opposition complète : chez Polyodontes, les ommatophores naissent du bord antérieur de la tête, tandis que, chez Eupolyo- donles, ils naissent sur les côtés. Or, les deux figures de l'auteur montrent avec évidence que ces productions frontales, qui sont les ommatophores, se rencontrent aussi, et dans les mêmes rapports, avec les antennes latérales notamment, chez l'Eupolyodonte. Ils semblent bien n'être pas terminés par une coupole pigmentée, mais c'est le cas aussi chez l'espèce suivante que nous décrivons et qui est néanmoins un véritable Panthalis, c'esl-ii-dire un Polyodontes au sens de l'auteur anglais. En réalité, quelques-uns au moins des genres anciens sont très bien définis, notamment par le nombre des appendices céphaliques, qui, chez tous les Aphroditiens, et d'une manière générale chez toutes les Annélides, est considéré presque unanimement comme fournissant des caractères de premier ordre pour l'établissement des genres, et les descriptions d'Acoétides données jusqu'ici établis- sent sans difficulté trois sections : 440 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. A. Pas d'antenne médiane. Une paire d'ommatophores. — Polyo- DONTES Ranz. Le genre Eupolyodontes Buch. appartient, selon toute vraisem- blance, à cette section et peut être conservé, caractérisé par ses deux gros yeux latéraux, en dehors des ommatophores frontaux et ses branchies bien développées. B. Une antenne médiane. Pas d'ommatophores. — Euarche Ehl., EuPANTHALis Mc-Tnt. (?) G. Une antenne médiane. Une paire d'ommatophores. — Acoetes Aud. el Edw., Eupompe Kinb., Pantiialis Kinb. Acoeles et Eupompe ne diffèrent que par l'extension plus ou moins grande des élytres, qui se croisent sur la ligne médiane dorsale avec celles du côté opposé chez le premier, tandis qu'elles laissent à nu le milieu du dos chez le second. Mais toutes les observations tendent de plus en plus à prouver que cette extension est sujette à une très grande variabilité chez la plupart au moins des Aphrodi- tiens, dans les limites non seulement d'un même genre, mais par- fois aussi d'une même espèce. Et parmi les Acoétides même, V Acoetes lupina (Slimp.) de Gharleston Harbour, quoique probablement iden- tique à VAcoetes Pleei Aud. et Edw. des Antilles, a les élytres trop petites pour se croiser sur le dos. Même chez l'espèce type du genre Eupompe, V Eupompe Grubei Kinb., les élytres ne laissent la ligne dorsale à nu que dans la région antérieure du corps et se croisent dans le tiers postérieur. Même cas pour le Panthalis nigromaculata (Gr.) où les élytres ne recouvrent le dos entièrement qu'à partir du trente-cinquième segment. Ce caractère est donc insuffisant pour justifier une distinction générique, et Eupompe, plus récent, doit tomber en synonymie dJ Acoetes. En est-il de même pour Panthalis? Kinberg a donné comme ca- ractère différentiel entre ses deux genres : Eupompe et Panthalis, les élytres toujours planes chez le premier, campanulées à l'exception des premières paires chez le second. A ce caractère qui semble précis et, en tout cas, d'une apphcation facile, Grube (38, p. 70) a tenté FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYDLS. 441 de substituer un autre : les Eupompes auraient toutes les élytres im- briquées en sens inverse de l'imbrication ordinaire, se recouvrant d'arrière en avant, tandis que, chez les Panthalis, ce mode d'imbri- cation à rebours ne se présenterait qu'à la région tout à fait anté- rieure, les élytres se recouvrant ensuite de la manière normale, c'est-à-dire d'avant en arrière ; et d'après ce principe, il range parmi les Panthalis son P. melanotus des Philippines, malgré ses élytres planes. L'imbrication est la même chez notre espèce où, à partir du trente-cinquième segment (dix-huitième élytre) environ, l'insertion de l'élytre sur l'élytrophore est assez reportée en avant pour que le bord postérieur de l'élytre dépasse le niveau de l'élytrophore suivant. Quelque soit celui de ces caractères auquel on s'arrête pour définir les deux genres, nous avons donc affaire ici à un \ érilRhle Panthalis, et il se distingue facilement de toutes les espèces connues qui ne sont qu'au nombre de quatre : il diffère des Panthalis Œrstedi Kinb. et P. gracilis Kinb. par les palpes beaucoup plus courts, les tuber- cules pseudobranchiaux dorsaux, surtout l'absence de soies pénicil- lées autour de l'orifice des glandes fileuses et la présence d'un fais- ceau dorsal de soies droites, symétriques, à dense revêtement pileux au bord dorsal de la rame ventrale. La taille plus grande, la colora- tion, les élytres campanulées, probablement aussi la forme des soies, dont on ne peut se rendre un compte exact d'après les descriptions non accompagnées de figures de Grube, le séparent des /^a/îMo/Zs me- lanotus {Qx- .) et P. nigromaculatus (Gr.). Il est à remarquer que les parapodes et les différentes formes de soies présentent, en revanche, une ressemblance frappante avec ceux de VEupompe australiensis (xMc-Int.), espèce de grande taille égale- ment, mais qui se distingue immédiatement par les proportions et la forme toutes différentes des appendices céphaliques, les élytres planes, les franges qui bordent les élytres des deux premières paires. 442 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. PANTHALIS MARENZELLEFaT^. SP. (PI. XIX, fig. 105 et pi. XX, fig. 106-110.) Longueur, 42 millimètres ; largeur, 5 millimètres. — Anteune médiane ayant * en longueur une fois et demie la largeur du lobe céphalique, atteignant la pointe des antennes latérales. — Parapodes du deuxième segment profon- dément biraniés, plus longs et plus grêles que les suivants. — Glandes fileuses et soies pénicillées à partir du neuvième segment. — Soies du fais- ceau ventral de la rame neurale, spinuleuses, asymétriques, à double cour- bure. Un tronçon seulement de 16 millimètres de long, renfermant les vingt-cinq premiers segments avec les treize premières élytres. Lar- geur du corps, y compris les soies : 2 millimètres. Couleur. — A l'exception du lobe céphalique coloré en jaune mar- ron clair, le corps est d'un blanc pur légèrement rosé; élytres trans- parentes et incolores. Lobe céphalique un peu plus large que haut, légèrement échancré en arrière, prolongé en avant par deux ommatophores cylindriques un peu plus courts que lui, capables de diverger et de se rapprocher ; ils présentent en arrière de leur portion terminale, arrondie et transparente sur le vivant, un cercle blanc crétacé opaque, mais aucune trace de la pigmentation noire habituelle chez les autres Acoétides. Antenne médianeifig. \Od,A/) fine et grêle, sans cératophore visible, régulièrement effilée vers la pointe, insérée vers le milieu de la hau- teur du lobe céphalique et dépassant les ommatophores d'une fois leur longueur. Antennes latérales {Ae), de même forme et de même diamètre que la précédente, mais un peu plus courtes, arrivant par leur pointe au même niveau qu'elle. Elles naissent à la base des ommatophores, sur leur face ventrale et un peu en dedans. Palpes P coniques, glabres, ayant au moins quatre fois la lon- gueur de l'antenne médiane. Parapodes de la première paire coniques, portant chacun au FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANVULS. 443 sommet qnelf[iies longues soies capillaires et une paire de cirrhes ienlaeulaires [Th) et {Tn) subniés, longs du double de l'aulenne médiane. Parapodes du deuxième segment (premier élytrigère, fig. 107) notablement plus longs et plus grêles que les suivants^ à rames profondément séparées. La rame dorsale [rh) à peu près cylindrique porte une dizaine de longues soies capillaires. La rame ventrale^ plus longue et plus forte, se termine par une lamelle cordiforme horizon- tale, à la pointe de laquelle arrive le sommet de l'acicule. An-des- sous d'elle une bractée parapodiale {bp), sous forme d'un lobe charnu, légèrement aplati, figurée rabattue sur le dessin comme elle se présentait du côté gauche de notre exemplaire. Elle com- plète avec le lobe aciculaire précédent une sorte de calice du fond duquel émergent la plupart des soies. Le cirrhe ventral inséré tout à la base du parapode le dépasse et atteint par sa pointe le sommet des ommatophoi'cs sur le vivant ; il paraît encore plus long après la contraction de l'extrémité céphalique dans l'alcool. Aux parapodes suivants, la rame dorsale s'est réduite à un petit tubercule arrondi muni d'un acicule de 13 \j. seulement de diamètre et dépourvu de soies. La rame ventrale montre à son bord inférieur une petite lèvre charnue au-dessus de laquelle s'élèvent les soies. Son acicule mesure 40 p. de diamètre. Le cirrhe ventral, subulé et légèrement renflé dans sa partie basilaire, atteint à peu près la pointe du parapode. A partir du neuvième segment, les pieds subissent quelques mo* difications (fig. 108). C'est à ce niveau qu'apparaissent les glandes fileuses (/), boyaux cylindriques bourrés de longs filaments de 1 t^- de diamètre, semblables à celles de l'espèce précédente, comme elles pelotonnées à leur partie initiale et accompagnant ensuite l'acicule dorsal. La rame dorsale forme une sorte de lèvre {rh) aplatie, ap- pliquée contre la rame ventrale de même que dans l'espèce précé- dente, mais à l'inverse de celle-là, elle est appliquée contre sa face postérieure. Elle est dépourvue de soies; son acicule, très grêle et 444 G. PRUVOT ET E.-G. RAGOVITZA. courbé [ah), détermine une petite saillie à son bord supérieur. La pointe de l'acicule se montre brisée en un certain nombre de frag- ments sur toutes les préparations. On ne voit à aucun pied les fila- ments produits par les glandes fileuses saillir au dehors en longs écheveaux, comme chez l'espèce précédente. Le cirrhe dorsal, inséré immédiatement en dedans du point où aboutit l'acicule, est un peu plus long et plus gros que le cirrhe ventral et dépasse notablement l'extrémité du parapode. La rame ventrale, qui forme la presque totalité du parapode, est conique et comprimée d'avant en arrière ; elle montre ventralement une petite lèvre qui remonte un peu sur la face postérieure du pied où elle se perd bientôt sans avoir de connexion avec celle qui re- présente la rame supérieure. L'acicule {an), jaune paille, droit, plus fort que l'acicule dorsal, traverse la rame en son milieu et aboutit à sa pointe. De part et d'autre de lui s'étendent les soies en une rangée verticale de grosses soies aristées [s) aboutissant à un faisceau dorsal [s') et à un faisceau ventral (s") de soies toutes différentes. Foi^mes des soies. — A la rame dorsale du deuxième parapode, la seule sétigère, les soies, au nombre d'une dizaine, sont capillaires, nullement élargies au commencement de leur portion distale, lisses dans la première moitié environ de leur longueur, puis finement dentelées comme celles de l'espèce précédente (fig. 95). A la rame ventrale, soies de deux sortes : du fond du calice formé par la lamelle médiane et la bractée ventrale (fig. i07) s'élève une touffe de soies fines, transparentes, à portion distale dilatée, spinu- leuses, semblables à celles de la figure 96. Du côté dorsal de la la- melle, cinq ou six soies beaucoup plus fortes, jaunes, droites, à portion élargie, lisse et prolongée en une pointe finement spinuleuse. A tous les parapodes suivants, la touffe la plus ventrale est formée uniquement de soies transparentes, à double courbure en faucille, portant à leur partie élargie quelques spinules courtes et espacées, puis à pointe régulièrement pectinée , figurées exactement par von Marenzeller (63, pi. IX, fig. 2b, a, reproduite en b de la figure 9 FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 44S dans le présent texte). Mais les soies de la région dorsale sont dif- férentes avant et après le huitième segment. Du troisième au huitième parapode inclus, les soies de la touffe dorsale sont semblables aux précédentes du faisceau ventral, mais moins nombreuses, trois ou quatre seulement. Entre les deux touffes dorsale et ventrale, une rangée de cinq à six fortes soies jaunes, soies aristées, surmontées d'une pointe très effilée et très souple, entourée à sa base d'une touffe de longues barbules qui naissent toutes au même niveau (fig. 110). A partir du huitième pa- rapode, celles-ci prennent sans intermédiaires la forme figurée par von Marenzeller (63, pi. I, fig. 2b, d); les barbules au-dessous de la pointe s'échelonnent sur une certaine longueur d'un côté de la soie. Au faisceau dorsal, les soies en faucille des pieds précédents ont fait subitement place à quelques longues et transparentes soies péni- cillées reclilignes (von Marenzeller, 63, pi. I, fig. 2b, c). £'/?/fres transparentes etincolores,entièrementlisses.Celles des trois premières paires plates, orbiculaires, prolongées en arrière et en dehors en un petit lobe arrondi, peu marqué, sont largement croisées sur le dos. La troisième recouvre encore presque entièrement le lobe céphalique. Les suivantes, imbriquées de chaque côté, laissent à nu le milieu du dos ; elles sont relevées en gousset à leur bord externe. Von Marenzeller attribue cette forme campanulée à une altération post mortem, due à une mauvaise conservation dans l'al- cool ; mais nous l'avons trouvée parfaitement évidente sur le vivant. La trompe n'a pas été observée dans l'extroversion. Mais on voyait sur l'animal vivant saiUir par l'orifice buccal fermé et à pourtour for- tement plissé, un long processus effilé (fig. 105,/Ofl) qui arrive en avant jusqu'à l'extrémité des ommatophores et représente, sans aucun doute, la papille médiane dorsale de la trompe. Sa longueur consi- dérable, sa saillie hors de la bouche à l'état de repos doivent en faire un organe sensoriel au même titre que les antennes. Habitat. — Milieu du rech Lacaze-Duthiers. Profondeur : 560 mè- 446 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. très ; vase profonde bleue avec débris de coquilles et de coraux à la surface. Une femelle mûre. Ommatophores. — Von Marenzeller a refusé chez celle espèce la valeur d'yeux aux coupoles hémisphériques qui terminent les pro- longements antérieurs du lobe céphalique, et, à s'en tenir à l'obser- vation directe, on se rallierait d'autant mieux à cette opinion que notre exemplaire ne montre même pas trace du pigment noirâtre observé en ce point chez plusieurs individus par le savant autrichien, et que montre en abondance l'espèce précédente. Pour établir la signification morphologique de l'organe, il faut avoir recours aux coupes, comme celles de la figure lOG, pi. XX, qui représente une coupe sagittale de tout le lobe céphalique passant par le tiers ex- terne de l'ommatophore. On voit que la calotte terminale est séparée du reste par un diaphragme nulle part interrompu, qui correspond à l'anneau blanc crétacé opaque que nous avons signalé sur le vivant. La chambre postérieure, le pédoncule oculaire proprement dit, en large communication avec la cavité céphalique, est occupée en grande partie par un gros cordon (<) de substance nerveuse fibril- laire, en connexion postérieurement avec la substance ponctuée intra -cérébrale (c') et coiffé antérieurement d'une masse pressée de très petites cellules nerveuses (c) à noyaux ronds, très fortement colorés par le carmin. Cette masse représente le lobe le plus anté- rieur du cerveau qui existe avec les mêmes caractères chez tous les Aphroditiens et n'émet aucun nerf; il est ici seulement plus allongé et plus nettement dégagé de la masse générale du cerveau. La coupe intéresse également la portion externe du lobe postérieur [c") qui doit, comme toujours, pourvoir à l'innervation de l'organe nucal. Entre les deux, la substance ponctuée commissurale qui unit les deux moitiés du cerveau moyen est comme d'habitude, mais ici peu distinctement, divisée en deux cordons transversaux, et c'est dans le plus dorsal des deux que viennent se perdre les fibres des FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 447 nerfs anlennaires, aussi bien des antennes latérales que de l'antenne impaire. C'est lui aussi qui fournit, chez les Aphroditiens pourvus d'yeux, l'origine réelle des nerfs optiques. Or, c'est de lui que part également, au-dessous de l'écorce cellulaire (ec) du lobe cérébral moyen, un trajet nerveux («) qui court sur la face dorsale du lobe antérieur précédent et va s'étaler contre la portion centrale du diaphragme. En ce point est appliquée contre celui-ci une couche de cellules cylindriques (o) à noyaux ovales, clairs et présentant quelques points isolés de chromatine. Ces cellules forment un disque occupant seu- lement la région centrale et un peu dorsale du diaphragme, tandis que dans sa partie périphérique, ce dernier est doublé par des cel- lules toutes différentes [d), plus petites, à petits noyaux homogènes, qui ont la plus grande ressemblance avec les cellules épidermiques ordinaires. Nous n'avons pu établir avec une certitude absolue si chaque cellule centrale se continue avec une des fibres du nerf, mais la chose ne peut guère faire de doute, puisque les limites du disque cellulaire central sont exactement celles du faisceau nerveux étalé contre lui et qu'on voit sur un certain nombre de coupes, quelques-unes au moins des cellules s'effiler par leur extrémité profonde et se continuer par un fin prolongement qui se perd au milieu des fibrilles nerveuses. La chambre antérieure de l'organe, qui correspondrait à l'œil lui- même, est occupée à sa base contre le diaphragme par un reti- culum granuleux dans lequel on dislingue des noyaux vésiculeux avec quelques rares et très petits points de chromatine, et tout en avant, contre l'épiderme terminal, par un amas de grosses cel- lules {y) de taille et de forme irrégulières, fortement colorées par l'éosine et munies d'un noyau rond homogène, avec gros nucléole. Il résulte de là que la portion terminale de l'ommatophore pré- sente une réelle différenciation, que si l'absence de revêtement pigmentaire empêche de lui attribuer avec certitude le rôle phy- siologique d'un organe de la vision, le fait d'être relié au cerveau us G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. par un trajet nerveux propre, montrant les mêmes connexions que les nerfs optiques habituels des Aphroditiens, doit néanmoins le faire regarder comme un œil qui, fonctionnel chez les Acoétides à ommatophores pigmentés, s'est ici atrophié secondairement et déco- loré par suite de Thabitat en eau profonde. Les ommatophores eux-mêmes ne sont pas des appendices. Puisqu'ils renferment les lobes antérieurs du cerveau qui sont chez les autres Aphroditiens logés dans la capsule céphalique même, ils font partie intégrante du lobe céphalique. Ils résultent de l'exagé- ration du sillon médian qui entaille chez beaucoup de types le bord antérieur de la tête. Ils représentent les deux protubérances plus ou moins chitinisées de beaucoup de Polynoides et les antennes latérales montrent avec eux les mêmes rapports qu'avec les pro- tubérances des Barmothoe, Lagùca, etc.. Cette homologie est d'au- tant plus manifeste que chez quelques types de Polynoides, les Harmothoe, la Polynoe scolopendrina surtout, les yeux de la paire antérieure sont reportés très en avant, presque à la pointe des pro- tubérances frontales. Glandes pileuses. — Elles commencent au neuvième segment; mais on ne voit en aucun point les filaments sécrétés saillir en long faisceau hors du corps, comme chez l'espèce précédente. Quand on observe un parapode éclairci par l'action de la potasse, ainsi que le montre la figure 108, la glande ne parait même pas atteindre le ni- veau du tégument. Le faisceau des filaments (/"), après avoir accom- pagné l'acicule dorsal [ah) jusqu'au point où celui-ci se recourbe en haut pour atteindre le sommet de la lèvre charnue qui représente la rame dorsale, se rétrécit sur une petite longueur, puis s'épanouit soudain, éparpillant ses filaments dans toute l'étendue de la rame. La figure suivante (fîg. -109) représente en coupe transversale du corps, c'est-à-dire intéressant le parapode suivant sa longueur, la portion terminale d'une glande fileuse. La glande proprement dite a la forme d'un manchon cylindrique qu'enveloppe une membrane propre très mince et semée de noyaux aplatis. Les cellules constitu- FAUNE DES ANNÉLIDES PE BANYULS. 449 tives de la glande sont effilées, très pauvres en protoplasma, avec petit noyau allongé fortement colorabIe,et l'on voit chaque filament sécrété en continuité directe avec une cellule. Ceux-ci occupent seuls en un faisceau serré la cavité centrale de la glande et la rem- plissent- L'organe est de calibre égal et libre de toute attache dans la plus grande partie de sa longueur. Mais au voisinage de sa termi- naison contre le tégument, il se renfle brusquement (fig. i09, gl), sa membrane devient plus épaisse et quelques petits muscles (w), déta- chés de la paroi du corps, viennent s'y attacher du côté ventral. La glande présente alors une cavité réelle, irrégulière, encombrée en partie par les éléments cellulaires qui restent massés surtout du côté dorsal, et les filaments dissociés se répandent partout entre les cellules. Une invagination du tégument assez profonde et étroite y pénètre obliquement, et l'on voit sur toutes les coupes un certain nombre de filaments (i) s'échapper au dehors isolément entre les cellules épidermiques de son plancher. Enfin, l'acicule dorsal, qui était jusque-là complètement indépendant de la glande fileuse, s'y accole à ce niveau, la traverse de bas en haut dans sa partie anté- rieure en avant de l'invagination et ne s'en dégage que par son extrême pointe {ah) pour venir buter contre le tégument de la rame dorsale, où il détermine la petite saillie déjà mentionnée. 11 résulte de là que la glande tileuse représente morphologique- ment une partie de la glande parapodiale sétigène de la rame dor- sale. La portion antérieure de cette glande s'est allongée et enfoncée pour former, comme d'ordinaire, la gaine sécrétante de l'acicule qui montre, d'ailleurs, ici une structure fibrillaire très évidente. La partie postérieure, au lieu de rester compacte et de donner nais- sance à des soies, s'est démesurément allongée aussi et sécrète des filaments qui restent indépendants les uns des autres. Ces filaments sécrétés sont de même nature que les soies ordinaires, avec les- quelles on trouve des intermédiaires dans les grandes franges laté- rales irisées des Aphrodites. Ce sont comme elles des productions cuticulaires, mais détournées de leur rôle habituel et utilisées pour AUCII. DE ZOOL. tXP. ET GÉ.\. — 3« bÉKlE. -- ï. 111. lii'Jo. 29 4S0 G. PRUVOT ET E.-G. RÂCOVITZA. la confection du tube dans lequel vit l'animal, ainsi que l'a démon- tré Eisig pour le Polyodontes maxillosus. Et chez l'espèce même qui nous occupe, von Marenzeller a reconnu que le tube d'habitation est formé également pour la plus grande partie de fins filaments entre- croisés. Syn. 1893. Pani/ia/w Œ'niet/î von Marenzeller (63, p. 28, pi. 1, fig. -2), non Kinberg. Cette espèce est incontestablement celle rencontrée par von Ma- renzeller au nord-ouest de Jaffa, par 758 mètres de profondeur, et nous n'avons pu que compléter quelques points de sa description. Mais nous ne pouvons nous résoudre à son identification avec le Panthalis (JErstedi de Kinberg (13). Sans insister sur la brièveté re- lative de l'antenne impaire et de la papille médiane de la trompe chez ce dernier, ni sur l'absence de soies entre les cirrhes tentacu- laires (elles ont dû échapper à Kinberg, car elles ont été signalées à peu près chez tous les Acoétides décrits depuis), la taille beaucoup plus petite de l'espèce méditerranéenne qui ne paraît pas dépasser 42 millimètres de longueur sur une largeur de 5 millimèlres, au lieu de 100 millimètres sur 14 millimètres de large, et la forme différente des soies du faisceau le plus ventral, sont de nature à les faire dis- tinguer. Kinberg, en elfet, figure ces soies droites et s'atténuant ré- gulièrement vers la pointe au lieu de la forme à double courbure accentuée qu'il assigne pourtant dans la même planche à un type voisin, Euijomfje Gruùei, où il les appelle serrulatae subspirales, par oppo>ition aux subidatx serridaix de son Panthalis. On pourrait faire observer aussi qu'il ne mentionne pas les petites soies délicates presque capillaires qui sont mélangées aux soies pénicillées dans le faisceau dorsal, et qu'il présente leur absence comme uu autre ca- ractère dilférentiel d'avec Eupompe Grubei. Mais ce doit être une simple omission due à ce qu'elles ne dépassent pas ou dépassent à peine les téguments, car elles ont été retrouvées par Mac-Intosh sur un échantillonnes îles Shetland. En revanche, les proportions relatives du corps (largeur d'un sep- FAUNE DES ANNELIDHS DE BÂNYULS. ibl lième à un huitième de la longueur) et des appendices, la forme des élytres et des soies aristatx et bipennato-penicillatx concordent en- tièrement, et il serait peut-être plus prudent de réserver tout juge- ment définitif jusqu'à ce que la grande forme des mers du Nord ait été retrouvée et décrite d'une façon plus , complète. Pourtant, Mac-Intosh a eu entre les mains un exemplaire de grande taille A pris dans les eaux anglaises, aux îles Shet- land, par 75 brasses de profondeur (40, p. ^89]. 11 lui consacre seulement quelques mots qui, en l'absence de dessins, n'ajou- tent que peu à nos connaissances. Mais il dit toutefois des soies du faisceau ventral : « Inferiorly are elongate subulate bristles, which are boldly serrated at the commen- cement of the terminal région, then gra- dually laper to a finely serrated exlremity, » description qui s'accorde avec la ligure de Kinberg, mais nullement avec les soies dis- symétriques courbes de la forme méditer- ranéenne. Pour faire apprécier cette différence, nous représentons sur la ligure ci-jointe (fig. 9, texte), en A, la forme de ces soies copiée sur le dessin de Kinberg (13, pi. VII, fig. 34 g), et en B celle des mêmes soies empruntée à Marenzeller (63, pi. 1, lig. 2 b, u) et que notre individu présentait identique. On a ain-si les caractères dilTérenliels suivants: Pantualis OErstedi Kinb. — Longueur : 100 millimètres; largeur : li millimètres. Antenne impaire près de moitié plus courte que les latérales, ne dépassant pas l'extrémité des ommatophores. Soies du faisceau ventral droites, symétriques, bipectinées de plus en plus tiiiement vers la pointe. — Mers du Nord. y. y. — A. Soie ventrale du Panthalis iErstedi, d'a- près Kiubei g; B. Soie ven- trale du Panihalis Œrstedi ( = P. iWare/izei/eri), d'a- près von Marenzeller. 452 G. PRLVOT ET E.-G. RACOVITZÂ. Panthalis Marenzelleri n. sp. — Longueur : 42 millimètres; largeur : 5 millimètres. Antenne impaire au moins aussi longue que les latérales. Soies du faisceau ventral asymétriques, à double cour- bure en faucille. — Méditerranée. GENRE STHENELAIS KINB. Characl. emend. — Une antenne médiane à cératophore muni de deux cféui- dies latérales. — Une paire d'antennes latérales soudées dans leur partie basi- laire avec les parapodes de la première paire d'oîi la pointe seule émerge sous l'apparence d'un cirrhe tentaculaire surnuméraire. — Une paire de cté- nidies buccales formées de la lamelle prébuccale embrassant la base du palpe et du cuilleron céphalique cilié. — Parapodes de la première paire birèmes avec soies simples aux deux rames et un acicule seulement à la rame dorsale. Soies ventrales des autres parapodes composées, à serpe longue, creuse et multiarticulée. — Des cténidies parapodiales, une sur la face dorsale du pre- mier parapode, plusieurs sur les suivants entre la rame dorsale et la base de la bronchie. Les auteurs anciens attribuaient aux Sthenelais trois antennes portées sur un même article basilaire et confondaient sous la dési- gnation commune de cirrhes tentaculaires tous les appendices plus ou moins cirrhiformes qui sont groupés en un faisceau au-dessous du lobe céphalique, entre lui et l'orifice buccal. Ehlers ajouta (■!», p. 123) aux trois paires de ces appendices connues avant lui une paire d'organes en forme de pinces se regardant par leur concavité de part et d'autre de la ligne médiane, et Claparède reconnut («7, p. 398) qu'il s'agit là, en réalité, de deux lamelles verticales qu'on voit seulement par la tranche quand on regarde l'animal soit par la face dorsale, soit par la face ventrale. Il leur donne le nom de cuil- lerons céphaliques, mais il considère que « cette membrane est atta- chée au lobe céphalique suivant une ligne arquée qui commence sur le dos auprès de la base de l'antenne impaire » , et que « la partie supérieiire de chacun des cuillerons est ce que les auteurs ont appelé les antennes externes; la partie inférieure correspond aux organes en pince d 'Ehlers », et conformément à cette interprétation, il des- •anOnvHdHD aaoi •ivDona iN3K9as 0) — » ^- *5 H =o a "^ 0) H o «3 I— t tn 00 O X N -5 OO V t ' o ■? 3 « a o _; 11 = — i "u ^ eu O .2 •- to « 2 *C-i 1 — 3 O ■o !l 3 ni .J "S c; c: o s o a ^ 4S4 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. sine le cératophore de l'antenne sans appendices latéraux (4). Malm- gren avait, du reste, émis déjà («4, p. 87) des doutes sur la valeur d'antennes attribuée à ces petits appendices [papilla brevis,... an- fenna dicta, utrinque ad basim tentandi affixa], et pourtant dans le travail le plus récent que nous ayons sur les Aphroditiens, de Saint- Joseph (54, p. 188) les désigne encore sous le nom A' antennes laté- rales. Du reste, un simple coup d'œil sur le taiileau de la page précé- dente où nous avons indiqué la signification attribuée aux appendices par les différents auteurs, suffit à montrer quelle confusion règne encore dans la nomenclature et quelle difficulté en résulte, non seu- lement pour les déterminations, mais encore pour l'intelligence de la région antérieure des Slhenelais et la comparaison avec les autres Aphroditiens. La dernière colonne du tableau est réservée à l'inter- prétation que nous proposons et qu'il nous reste maintenant à jus- tifier. Nous n'avons pu nous adresser, pour étudier la question, aux formes méditerranéennes trop petites ou dont nous n'avons obtenu jusqu'ici qu'un trop petit nombre d'exemplaires. Nous avons fait choix du grand Stkenelais Idunœ (Rath.) de la Manche, particulière- ment abondant à Roscoff, sous le laboratoire même, qui a l'avantage de montrer le maximum de développement et de complication des appendices connu jusqu'ici dans le genre Stkenelais, on pourrait dire dans tous les Aphroditiens. Du reste, à part quelques différences insignifiantes dans les rapports de taille des appendices, tête et pa- rapôdes sont en tout semblables à ceux du Stkenelais minor ; c'est ' Grube, d.ms sa révision du genre Slhenelais (36, p. 19), établit une section spéciale pour les quatre espèces de Ciaparède qui auraient connme caractère d'être dépourvues de folioles à l'arlicle basilaire de l'antenne. Or, chez deux au moins, elles e.\istenl : chez Sthenelais leiolepis (Clap.) qui est ideniique à Slhenelais limico'a (Ehl.) et chez Slhenelais fuUginosa (Clap.) uù Marenzeller les a retrouvées. Et, d'autre part, on peut même les reconnaître sur la figure de Ciaparède, relative au Sihenelais clenolepis (Clap.) [pi. IV, fig. 1], où. conformément à son interprétation, il les montre détachées de l'antenne; ce sont les petits lobes figurés k la base des cuillerons céphaliques. Il est plus que probable qu'aucune espèce de Sthenelais n'en est dépourvue. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 43S aux figures de cette espèce (fig. 111 et suiv.) que nous renverrons, en dehors des dessins dans le texte, pour faciliter la description. Le lobe céphalique arrondi arrive en contact en arrière avec le bord antérieur du deuxième segment (premier élytrigère), le premier, ou segment buccal, n'étant pas visible dorsalement. Il présente à son tiers antérieur, au milieu du carré formé par les quatre yeux (fig. 10, texte, y), Vanlenne mé- ^ \ , / rf?a/2e, le seul appendice ^~x^' \ A\ sur lequel il n'y ait pas divergence d'opinion, ^\<>^'\\\W\\\\l/////f^' ^-^ Son cératophore porte de chaque côté une des a c rr^^^^^^^^^ Y^| .\- ce. prétendues antennes la- V^ \ 4\ / '^ _\ .-\v tà'ato(f]g.lu, texte, et '=^'-- ^^ , fig. 111, et), sous forme et:-- d'une petite foliole pé- y^ ^-® Cl ^^ donculée, ovale, dres- / ^' \\\ «PP vprtipfllpmpnt la ^"'S- '"•— Extrémité antérieure du Sthenelais Idunœ s,ee veiULdieiuciiL la (Ralti.), vue de profil, les appendices du côté droit pointe en avant, et dont ayant été enlevés. Gross. 20 d. ^ î/, yeux ; p, palpe; a, antenne médiane ; a. e, antenne externe, I K ri "nforioiir mnntrp ^f/, cirrlie tentaciilaire dorsal ; <«, cinhe tenlaculaire ven- leDOrainierieur HlOnire tial; «.c, acicnle dn premier parapode ; l p, lamelle pré- buccale; ce, cuilleron céphalique ; ci. cténidie anteunale; une rangée unique de et', cténldie dors.Ue du premier parapode. forts cils OU mieux de flagella qui vibrent avec énergie ;' la présence de cils vibratiles suffit déjà à faire retirer à ces appendices toute va- leur d'antennes. Leur signification morphologique est dévoilée par la présence d'organes tout semblables, les cupules ciliées connues depuis longtemps, sur tous les parapodes. Aux segments de la ré- gion moyenne, il en existe trois particulièrement développés, deux très allongés sur le bord dorsal du parapode entre le point d'émer- gence des soies de la rame dorsale et l'élylrophore, l'autre sur le prolongement de la même ligne, mais inséré directement sur l'ély- lrophore ; en outre, un plus petit, en forme d'éventail, à pédicule étroit et placé au milieu de la face postérieure du pied tout près de sa racine, et quatre ou cinq plus réduits encore, formant une rangée 436 G. PRUVOT ET E -G. UACOVITZA. transversale qui remonte sur le dos du parapode et du segment en arrière de l'élytrophore ; enfin, un dernier, en forme d'éventail aussi, se remarque sur le bord ventral du parapode en dedans du cirrhe ventral. Leur nombre diminue aux tout premiers segments ; au deuxième parapode, celui de la face ventrale a déjà disparu, ceux de la face postérieure ne sont plus qu'au nombre de deux, et nous n'en avons trouvé que deux également sur le bord dorsal entre l'élytrophore et la pointe du pied. Le premier parapode n'en montre plus qu'un seul très allongé occupant la majeure partie de son bord dorsal (fig. 111, et'). Tous ont la même structure : ils sont unique- ment formés de cellules épidermiques très allongées, coniques, appliquées par leur base contre la cuticule amincie et dont les pointes forment le pédicule de Torgane. Certaines sont chargées de granulations brun jaunâtre excrémentitielles, et tout le long du bord distal de l'organe court une rangée unique de forts flagella qui paraissent conslitués par des cils vibratiles soudés. Ces appendices ne montrent pas de terminaisons nerveuses particulières, pas de ca- vité, et leur rôle est ici, sans aucun doute, un adjuvant de la respi- ration, destiné à assurer le renouvellement de l'eau sous les élytres. On peut, pour la facilité du langage, attribuer à ces petits organes le nom de cténidies créé par Ray-Lankesler pour désigner chez les Mollusques les formations ciliées analogues de la cavité palléale, in- dépendamment de leur rôle physiologique branchial ou non. Les lamelles foliacées de la base de l'antenne leur sont identiques de tout point, et nous les désignerons sous le nom de cténidies an- tennales. Outre l'antenne impaire et les quatre yeux, le lobe céphaHque montre encore dorsalement, tout à sa partie postérieure, masqués en partie par le rebord du deuxième segment, une paire à'organes nucaux sous forme de deux boutons ronds, légèrement excavés au sommet, tranchant chez l'animal vivant par leur couleur brun ver- dàtre sombre sur le fond rouge vif de la tête. Les ;7a?'fl/)or/es de la première paire (fig. 10, texte) sont, comme d'ha- FAUNE nES ANNELIDES DE BANYULS. 457 bilude, dirigés en avant, parallèlement à l'axe du corps, et parais- sent, quand on les regarde par la face ventrale, soudés l'un à l'autre par leurs bases au-dessous du lobe céphalique et au-dessus des palpes. Nous verrons plus loin la raison de cette apparence. Ces parapodes sont manifestement biramés, renfermant deux III \ j w .7 ^ Me I. Coupe par l'extrémité antérieure des pnrapodes de la première paire, au ni- veau du pointd'émergence de l'antenne latérale. II. Coupe par le milieu des mêmes para- podes. III. Coupe par le bord antérieur du lobe céphalique. Fig. 11. — Trois coupes transversales des appendices de la région antérieure du Slhenelais Idunœ (Ralli.). Gross. 80 d. (Les coupes sont légèrement obliques et les appendices du côté droit de la figure ont été intéressés à un niveau plus anté- rieur que ceux du côté gauche.) Le, lobe céphalique; a.e, antenne externe: et, cténidie antennale ; et', cténidie dorsale du premire parapode; et", ciénidie buccale; ce, cuilleroQ céphalique : l.p, lamelle piébuccale ; ae, acicule du premier parapode. n.a, nerf de l'antenne médiane; 71. ae, nerf de l'antenne latérale 71. c.; nerf du cuilleron cépha- lique ; n.p, nerf du palpe ; >i.t, nerf du premier parapode. bulbes sétigères absolument indépendants l'un de l'autre, comme le montre la coupe I (Pig. l\, texte); mais la rame dorsale est seule pourvue d'un acicule (fig. 10, ac) dont la pointe détermine une petite saillie tout à la base du plus volumineux et du plus terminal des cirrhes tentacul aires {t. d.). Celui-ci représente le cirrhe dorsal des pieds typiques ; seulement, par suite d'un léger déplacement, im G. PRUVOT ET E.-G. RAC0VITZ4. comme si le parapode s'était replié sur lui-même et avait rabattu son bord supérieur en dehors, il est devenu un peu externe par rap- port au faisceau des soies dorsales qui le débordent en dessus, et cela explique l'erreur de Claparède qui le considérait pour cette raison comme appartenant à la rame ventrale. Le cirrhe ventral [t. V.), qui se détache du parapode à son bord inférieur et un peu plus près de sa base, a conservé sa position normale par rapport aux soies de sa rame. Le nerf du parapode (fig. H, I, II, III, n. t.), formé presque exclu- sivement par la fusion des deux nerfs axiaux du cirrhe dorsal et du cirrhe ventral, court le long de la lace externe du parapode, con- tourne en dehors le palpe et vient se jeter au côté externe d'un ganglion situé juste à la base du parapode, le côté interne du même ganglion émettant le court connectif œsophagien. C'est le pre- mier ganglion sous-œsophagien remonté le long du connectif et n'ayant pas de connexion commissurale directe avec son congé- nère du côté opposé, comme c'est le cas chez toutes les Annélides à trompe protraclile volumineuse, qui détermine par sa projection une dilatation considérable du pourtour de la bouche. Le palpe (fig. 10, p), conformément à la définition générale que nous en avons donnée, renferme toutes les couches qui forment la paroi du corps ; il présente même à sa base une petite cavité cen- trale en communication avec la cavité générale ; mais bientôt elle est comblée par du tissu conjonclif mésodermique. Autour, on trouve une couche épaisse de muscles longitudinaux, puis une couche de fibres musculaires circulaires séparée du tégument par •une membrane basale. Son nerf (fig. H, I, II, III, n. p.) court, en dehors de cette membrane basale, sur la face dorsale du palpe, passe au-dessus du premier ganglion œsophagien dans l'angle formé par le nerf parapodial et le connectif œsophagien et aboutit au cerveau. Les tissus du palpe se continuent directement avec ceux de la face inférieure du lobe céphalique; c'est donc, comme chez toutes les Annélides, un appendice céphalique qui n'a, en dépit des FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 4j9 apparences, qu'une relation de simple voisinage avec le premier parapode. Le premier parapode porte, outre les deux cirrhes tentaculaires ffig. 10, t. d. et 1. 1'.), dont nous venons de préciser la signification, un troisième appendice cirrhiforme(a. e,), ici court, légèrement ren- flé à sa base et dépourvu de cirrhophore. Il se détache du bord supé- rieur du pied un peu en dedans; c'est le plus dorsal de tous les appendices, et pour cette raison la plupart des auteurs le regardent comme le véritable cirrhe dorsal du premier parapode. Sa présence est embarrassante pour la morphologie, un véritable parapode n'ayant droit qu'à deux cirrhes, le ventral et le dorsal. Mais l'exa- men d'une série de coupes comme celles représentées sur la figure H dans le texte éclaire cetle anomalie apparente. En aucun point, le cirrhe en question (fig. 11,1, II, III, a. e.) n'est en continuité de substance avec le parapode. En arrière de l'endroit où il semble s'en détacher, on peut reconnaître qu'il y a simple- ment adossement des deux épidermes, quoique sans cuticule inter- posée. Cette union relativement intime, au niveau de laquelle passe le plan de la coupe I,du côté gauche, n'a pas lieu sur plus de 2 cen- tièmes de millimètre de trajet. Mais l'appendice se continue en arrière de cette base apparente, et on le retrouve sur toute la lon- gueur du parapode (coupe II, a. e.) sous forme d'un petit cordon indépendant, logé dans une dépression en gouttière de l'épiderme du bord interne du parapode, séparé de lui par une couche de cuti- cule. Seules, les deux couches cuticulaires de l'appendice et du pa- rapode sont fusionnées, de sorte qu'à l'observation directe, sans coupes, le contour du parapode apparaît continu et rien ne permet de reconnaître cette séparation des deux parties. Quand le parapode arrive par sa base au niveau de la tête (coupe III), l'appendice cesse de le suivre et va se continuer direclement avec le tégument du bord antérieur du lobe céphalique (/. c). Il a la môme structure que les cirrhes ou les antennes, formé uni- quement d'une couche de cellules épidermiqnes avec nerf axial, et IGO G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. nous avons pu suivre celui-ci à travers la substance du lobe cépha- lique jusqu'à la substance ponctuée centrale du cerveau qu'il atteint au même point que le trajet nerveux intracérébral destiné aux yeux. Il n'y a donc pas de doute que ce troisième cirrhe tcntaculaire n'appartient nullement au premier parapode, c'est-à-dire an seg- ment buccal, comme les deux autres ; c'est un appendice cépha- lique, V antenne latérale habituelle des Aphroditiens à laquelle le pre- mier parapode est venu s'accoler secondairement. Il reste, pour compléter les appendices de cette région antérieure, à parler du manchon basilaire du palpe (fig. 10, /. p.) et du cuilleron céphalique {c. c.) qui s'allonge en dedans des appendices précédents. Ces deux formations ne paraissent distinctes que par suite d'une échancrure du bord antérieur, et surtout d'un pli qu'ils forment en s'insinuant dans l'intervalle entre le palpe {p.) et le premier para- pode. En réalité, c'est une membrane unique qui naît sur la base du parapode comme un repli de son tégument, contourne, en s'al- longeant progressivement, la face interne puis dorsale du palpe, qu'elle embrasse dans sa concavité à la manière d'un cornet incom- plet. Arrivée vers le milieu de la face dorsale du palpe, elle se réflé- chit, épouse alors le contour de la face ventrale et interne du parapode et se termine, vers le milieu de sa hauteur environ, par un bord rectiligne horizontal, épaissi et portant une rangée de gros flagella vibratiles ; il n'y a pas d'autres cils vibratiles sur sa surface. Sous l'action des réactifs, ces différentes courbures s'effacent, et, sur les coupes transversales (fig. H , II et III), on reconnaît qu'il s'agit bien d'une lamelle continue. La coupe la plus antérieure I passe, du côté droit, en avant du fond de l'échancrure, et montre séparées les parties dorsales {c. c.) et ventrale {l. p.) de la lamelle. On peut tou- tefois conserver les deux noms de lamelle prébuccale (Ehlers) et de cuilleron céphalique (Claparède), mais seulement pour la commodité des descriptions ; il doit être bien entendu qu'il s'agit d'un organe unique. Cette lame est un simple repli de la paroi ventrale basilaire du FAUNE DES ANNÈLIDES DE BANYULS. 461 premier parapode, entre les deux feuillets épidermiques duquel s'insinuent un peu de tissu conjonctif et quelques fibres muscu- laires; mais tissu conjonctif et fibres musculaires ne s'étendent pas dorsalement au-dessus du point rétréci qui sépare l'épaississement cilié du reste de l'organe. Toute la portion au-dessous de ce point est garnie sur la face interne d'une cuticule remarquablement épaisse et qui s'amincit brusquement, au point d'être à peine per- ceptible sur le bourrelet cilié dorsal (flg. H, coupe I, cl"). Cette par- tie ventrale est parcourue par un nerf relativement fort {n. c.) qui, postérieurement, aboutit au premier ganglion sous-œsophagien, au point où arrive également le nerf parapodial. Le bourrelet dorsal, par contre, est formé exclusivement d'épi- derme ectodermique ; la séparation entre les deux couches interne et externe passe beaucoup plus près de cette dernière, c'est-à-dire que les cellules de la face externe sont courtes, comme celles de l'épiderme ordinaire, tandis que celles de la face interne, qui for- ment le bourrelet saillant, sont extrêmement allongées, et c'est cette face interne qui porte la rangée des gros flagella ici encore formés de cils agglutinés. La signification morphologique de ce petit appareil semble claire. Le bourrelet dorsal, par sa cuticule subitement amincie, sa consti- tution exclusivement ectodermique aux dépens de cellules de l'épi- derme très allongées, sa rangée longitudinale unique de flagella, rappelle de tous points les cténidies parapodiales ; toute la partie ventrale de la lamelle n'en est que le support. La continualion de sort tissu avec la paroi du premier parapode, son nerf qui aboutit au premier ganglion sous-œsophagien au même point que le nerf parapodial dont il n'est qu'une branche interne, prouvent que les cuillerons céphaliques appartiennent non à la tète, mais au segment buccal ; ils nous paraissent représenter les cténidies ventrales de la première paire de parapodes, celle qui se montre aux pieds suivants entre le cirrhe ventral et la base du pied. On peut leur donner le nom de cténidies buccales, qui a l'avantage d'indiquer leurs homo- 462 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZÂ. logies avec les cténidies parapodiales et antennales. Leur rôle est certainement, comme Claparède l'a déjà reconnu, de déterminer un courant d'eau énergique dans laçage céphalique formée par les soies longues et abondantes de la première paire de parapodes, et d'amener par là les particules alimentaires flottantes jusqu'à la bouche. En résumé, l'extrémité antérieure des Sthenelaïs nous paraît de- voir être interprétée de la manière suivante : Le lobe céphalique présente, comme chez la majorité desAphro- ditiens, deux palpes et trois antennes, l'impaire naissant sur sa face dorsale en arrière des deux latérales qui sont implantées tout à fait sur le bord frontal. Les parapodes de la première paire, dans leur mouvement pour converger en avant, se glissent entre le palpe en dessous et la portion antérieure du lobe céphalique en dessus, ren- contrent chacun l'antenne correspondante et s'y soudent, de sorte qu'ils semblent soudés à leur base entre eux et naître de la face ven- trale du lobe céphalique, en avant de l'orifice buccal. L'antenne laté- rale étant plus longue que le parapode, sa pointe dépasse encore en avant le sommet de ce dernier et simule un troisième cirrhe ajouté aux deux cirrhes tentaculaires normaux, dorsal et ventral. De plus, la paroi ventrale de la base du parapode se soulève en une lamelle qui épouse en dedans le contour du palpe et du pied. Enfin, des cténidies se sont développées comme sur les parapodes normaux ; la cténidie ventrale du premier parapode est entraînée au bord supé- rieur de la lamelle en question, les cténidies dorsales sont repré- sentées par une seule, allongée sur le bord supérieur du parapode, et une dernière a pris naissance de chaque côté sur le cératophore de l'antenne impaire. Les parapodes normaux méritent aussi d'être analysés. La figure 12 représente en A le parapode vu de trois quarts par sa pointe et sa face antérieure, et en B la projection schématique sur un même plan des diverses parties saillantes du parapode. La rame dorsale (r. d.) ne présente pas de difficulté d'interprétation ; elle est consti- tuée par un mamelon central qui renferme l'acicule (ac.) et autour FAUNE DES ANNÉLlDlïS DE BANYULS. i463 duquel les soies émergent, formant dans leur ensemble un croissant à concavité inférieure et dont la corne postérieure descend un peu plus bas que la corne antérieure. Quelques gros stylodes(5f.) plus ou moins nombreux dessinent par leur distribution une rangée courbe, une sorte de calice, juste en dehors de la moitié antérieure du crois- sant formé par les soies. Pour la rame ventrale (r. v.), les auteurs décrivent soit deux, soit Fig. la. — A, vingt-huitième parapode droit du Sthenelais Idunœ liatli, vu de trois quarts par la face antérieure. Gioss. 30 d. — B, diagramme sciiémutique du même. Le bord dorsal est en haut et la face antérieure à droite. R. D, rame dorsale; r.v, rame ventrale; ac, acicule ; st, slylades : s, soies en [.rojeclion : hr.p, bractée par:ipodale postérieure; hr.s, bractée antéro-supérieure ; br.i, bractée antéio- inférieiire. trois faisceaux de soies de formes différentes {faisceau inférieur, moyen, supé7ieur).En réalité, leur répartition est différente. 11 n'existe qu'un seul bulbe sétigère entourant l'acicule central {ac) de toutes parts, sauf un petit espace tourné vers la face antérieure. A la pointe du parapode, on trouve un petit mamelon conique au sommet dti- (juel arrive l'acicule ; passé les tout premiers segments, un seul sty- lode ovoïde est visible près de son sommet. Les soies (s) émergent autour de ce mamelon en une rangée unique, suivant une ligne continue qu'on ne peut mieux comparer qu'à un fer à cheval placé dans un plan perpendiculaire à l'axe du parapode. L'ouverture du fer achevai est tournée vers la face antérieure du pied, et les deux 464* G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZÂ. branches sont recourbées en dehors à leur extrémité. Les soies sont différentes aux deux extrémités et au milieu : les soies de la brancbe réfléchie dorsale sont les soies simples bipectinées qui constituent le faisceau supérieur des auteurs, celles de la branche réfléchie ventrale sont les soies composées, à longue serpe bidentée multiarticulée {faisceau inférieur), et celles de la portion moyenne du fer à cheval sont les fortes soies à serpe bidentée, courte et inarticulée (faisceau moyen). La ligne d'émergence des soies est bordée partout, en dehors, par une série de folioles membraneuses, ou bractées parapodiales, dont \e diagramme B montre la disposition : une collerette postérieure [br.p.) embrasse toute la portion moyenne du faisceau des soies, lui for- mant un calice ouvert seulement du côté antérieur, mais divisé en deux lamelles par une profonde échancrure au milieu de la face postérieure ; sur la face antérieure, une autre {br. s.), très réduite, recouvre la base des soies réfléchies supérieures ; enfin, une dernière {br. i.), attachée un peu plus près de la base de la rame, recouvre de même la base des soies les plus ventrales. Son bord n'est pas con- tinu, comme celui des précédentes, mais se montre lacinié, divisé en douze à quinze petites élevures coniques dont le bord et la partie terminale surtout sont hérissés de petites papilles tactiles de la forme ordinaire, hyalines, globuleuses et terminées par un poil sensitif. Autant qu'on en peut juger d'après les types que nous avons eus entre les mains et eu interprétant les figures données par les au- teurs pour les autres, tous les Sthenelais, et probablement la ma- jeure partie des Aphroditiens, ont le parapode construit sur le même plan : à la rame dorsale, les soies forment un croissant ouvert iuférieurement ; à la rame ventrale, elles dessinent une couronne plus ou moins complète entre un lobe aciculaire et un calice externe plus ou moins découpé en bractées parapodiales différentes de nombre, de formes et de dimensions, et capables de fournir des ca- ractères utiles pour la spécification. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 46S ST HE NE LAI s MINOR N. SP. (PI. XX, fi^. 111-121.) Corps et élytres incolores. — Lobe céphalique coloré en rouge, portant piès du bord antérieur quatre yeux noirs presque égaux, rapprochés et séparés seu- lement par la largeur du cératophore. — Trois cténidies, outre les branchies, sur le bord dorsal des pieds normaux. — Une cténidie ventrale en dedans du cirrhe ventral du troisième au sixième parapode. — Soies de la rame ventrale peu nombreuses, toutes composées, à article terminal bidenté. — Élytres transparentes, couvertes de petits tubercules, agglutinant des grains de sable et garnies au bord externe de franges simples espacées entre lesquelles est une rangée de très petites papilles tactiles. Longueur inconnue, plus de 45 millimètres. Largeur, avec les soies : 3 millimètres ; largeur sur la face ventrale, sans les para- podes : \ millimètre. Lobe céphalique coloré en rouge sombre parle cerveau, de même que le sillon ventral par la chaîne nerveuse; l'un et l'autre se déco- lorent très vite dans l'alcool. Corps blanc jaunâtre uniforme, élytres incolores, parfois légèrement teintées de gris sur la portion non re- couverte. Elles sont semées sur toute leur surface, comme celles des Psammolyces, de petits grains de sable adhérents. Lobe céphalique rond, portant quatre yeux noirs à peu près égaux, relativement grands (5 centièmes de millimètre, fig. Ml, œ), dispo- sés en rectangle dans le tiers antérieur du lobe céphalique, séparés seulement par la largeur du cératophore de V antenne médiane. Celui-ci n'atteint pas tout à fait en longueur la moitié de la largeur de la tête et porte, près de sa base, les deux cténidies latérales habituelles du genre (c/), fortement ciliées sur leur face externe {antennes latérales des anciens auteurs). Le cératostyle [Ai) de l'antenne est subulé, aussi large à la base que le cératophore, et a près de deux fois en longueur la largeur du lobe céphalique. Les palpes (P) ont deux fois et demie environ la longueur et l'épaisseur de l'antenne ; ils sont à demi enveloppés à leur base par la lamelle prébuccale peu élevée. AUCH. DE ZOOL. EXP, ET GÉN. ~ 3? SÉRIE. — T. III. 1 S95, 30 46^ G. PRUVOT ET E.-G. RACOVlTZA. Le corps proprement dit et la base des parapodes sont entière- ment glabres, ne montrant pas les stylodes si fépandus chez certains Sigalionides. Les parapodes de la première paire, dirigés en avant et coalescents par leurs bases entre le lobe céphalique et les palpes, ont environ la longueur du lobe céphalique et sont biramés; mais les deux rames sont peu distinctes. Chacun porte sur son bord dorsal une cténidie [cl') ovale, allongée suivant l'axe du parapode, légèrement rétrécie à sa base d'insertion et ciliée à la surface. La rame dorsale se ter- mine en avant parle cirrhe tentaculaire dorsal (Th), un peu moins gros et plus court que l'antenne, porté sur un large et court cirrho- phore à la base duquel se voit, du côté interne, une petite éminence où s'engage la pointe de l'acicule. Du côté dorsal, un petit appendice pyriforme (Ae), ayant l'apparence d'un stylode particulièrement dé- veloppé ; c'est Textrémité de ïanienne latérale^ et les soies de la rame dorsale (s) rayonnent autour d'elle disposées en un entonnoir ouvert seulement du côté interne. La rame ventrale est à peu près réduite au cirrhophore du cirrhe tenlaculaire i>enir«/(7'n). Elle est dépourvue d'acicule, et ses soies (s') se détachent de sa base entre elle et la rame dorsale. Le cirrhe tentaculaire ventral est plus grêle et plus court d'un tiers au moins que le cirrhe dorsal. Enfin, sur le bord interne du parapode se trouve encore une paire d'appendices [eu] qui, sur l'animal vu de face, apparaissent cirrhiformes, garnis de cils énergiques sur toute la longueur de leur bord interne ; ce sont les cuillerons céphaliques qui atteignent, sans le dépasser^ le bord an- térieur du parapode. Gomme il a été établi au chapitre précédent, ils sont constitués par le bord dorsal hbre, épaissi et cilié {cténidie buccale) d'une membrane qui se continue avec la collerette {lamelle prébuccale) entourant le palpe dans sa moitié interne et qui va se perdre au-dessous de lui sur les côtés de la bouche. Les deux par- tics sont séparées par une échancrure assez profonde, au point où ce voile membraneux se réfléchit entre le parapode et le palpe. Le deuxième parapode, qui porte la première élytre en e, flg. IH, FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 167 est un peu plus grêle que les suivants. Son cirrlie ventral (c??), inséré tout à la base, est plus long que le parapode et dépasse même un peu la pointe du premier pied. A partir du troisième segtnent, les parapodes ont acquis à peu près leur forme générale définitive. La figure 112, qui représente le sixième parapode gauche, peut servir de type. Le parapode est for- tement allongé, presque cylindrique, mais un peu comprimé d'avant en arrière et très nettement biramé. La rame ventrale, qui constitue l'axe du parapode et en forme la plus grande partie, se termine par un lobe aciculaire {la) où s'engage la pointe de l'acicule ventral et surmonté de deux gros stylodes ovoïdes couverts eux-mêmes, sur- tout près de l'extrémité, de très petites papilles tactiles (fig. 113, p), hémisphériques, transparentes, terminées par un poil sensitif. La ligne d'émergence des soies dessine autour du lobe aciculaire un arc de cercle ou un fer à cheval ouvert du côté antérieur, mais dont les branches ne se recourbent pas en dehors comme chez le Sthe- nelais Idunœ. Sur la face postérieure du parapode, la base d'implan- tation des soies est recouverte par trois bractées parapodiales, une supérieure à bord lisse (fig. H2, è), une inférieure [b') triangulaire, prolongée par un stylode ovoïde avec papilles tactiles identiques à celles du lobe aciculaire, et une ventrale {b") plus réduite dont le bord libre se montre comme finement dentelé : chaque denticula- tion est formée par une papille tactile, transparente, étranglée en forme de gourde et munie d'un poil sensitif (fig. 114). Le cirrhe ventral est inséré vers le milieu de la hauteur de la rame ; son très court cirrhophore supporte un cirrhostyle subulé, qui présente à sa base une courte dent obtuse et dont la pointe atteint à peu près l'extrémité du parapode. En dedans du cirrhe, une cténidie, qui n'a pu trouver place sur la figura, est implantée sous forme d'un petit tubercule pédicule et cilié, à mi-chemin entre la racine du parapode et le cirrhophore. La rame dorsale arrive presque jusqu'à la pointe de la rame ven- trale. Elle est presque cylindrique et tronquée obliquement à son 468 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. extrémité ; elle se termine par une petite éminence pour la pointe de l'acicule, autour de laquelle sont disposés trois gros stylodes ovoïdes pareils à ceux de l'autre rame. Les soies sont insérées à une certaine distance de la pointe de la rame, suivant un arc de cercle ouvert intérieurement et qui descend plus bas sur la face pos- térieure que sur la face antérieure. La rame porte, enfin, sur son bord dorsal une rangée de trois cténidies (et) à peu près équidistantes, ovales, pédiculées, légèrement déprimées en coupe à leur surface qui est garnie de très forts cils vibratiles ; la plus interne, qui n'a pas trouvé place sur la figure, est remontée sur le bord du mamelon branchifère, qui représente ici l'élytrophore des pieds à élytres. Les parapodes varient peu dans leur forme. Pourtant, aux pieds suivants, la rame dorsale est moins détachée de la rame ventrale, le cirrhe ventral (fig. tl5) est plus court et sa pointe ne dépasse pas le niveau delà bractée inférieure. Les stylodes ovoïdes terminaux di- minuent aussi de nombre : au troisième parapode, nous en comp- tons quatre à la rame dorsale et six à la rame ventrale ; au sixième parapode, trois seulement aux deux rames, et au vingt-cinquième (fig. H5), il n'en persiste plus qu'un (st) à l'extrémité de chaque rame. En revanche, les cténidies dorsales, au nombre de deux seu- lement au deuxième parapode, sont portées au nombre de trois à tous les suivants. La cténidie pédiculée ventrale, en dedans du cirrhe ventral, ne se montre qu'à partir du troisième parapode et cesse après le sixième. Formes des soies. — Au premier parapode, les soies sont semblables aux deux rames, souples et courbes, capillaires avec une serrula- tion peu accusée sur une de leurs faces. Ces soies persistent sans changement à toutes les rames dorsales de tous les pieds. Dès le deuxième segment, les soies de la rame ventrale sont toutes composées. Celles du deuxième parapode ne diffèrent guère les unes des autres que par leur taille (fig. 416) ; la hampe des plus grandes, qui appartiennent surtout à la portion la plus dorsale du faisceau, montre à son extrémité six à sept rangées de spinules ; FAUNE DES ANNÈLIDES DE BANYULS. 469 l'article terminal très grêle, très allongé et légèrement recourbé, est creux, divisé en cinq segments décroissant progressivement de lon- gueur de la base à la pointe, qui est extrêmement fine et bifide ; au niveau des pseudo-articulations qui les séparent, la serpe est légère- ment renflée du côté du dos et montre sur le tranchant un brusque épaississement de sa paroi, qui va ensuite en s'amincissant de plus en plus au point de devenir à peu près invisible au niveau où com- mence l'article suivant. Les soies les plus ventrales sont en général plus petites, leur hampe ne porte plus que trois ou quatre spinules à peine visibles, l'article terminal plus court n'est plus divisé qu'en trois ou quatre segments. Les soies de ce type sont très souples et se montrent souvent pliées sur le tranchant au niveau des pseudo- articulations, n'ayant pas à ce niveau l'épaississement dorsal qui se rencontre, par exemple, chez le Sthenelais Idunae. Dès le parapode suivant, le troisième, les soies se raccourcissent ; la hampe montre la même variété dans sa spinulation, mais les arti- cles terminaux sont plus forts, plus élargis et terminés par une pointe bidentée, à dent supérieure forte et recourbée, à dent infé- rieure droite, beaucoup plus délicate. A partir du quatrième segment, toutes les soies sont bidentées et oscillent autour de deux formes principales : les unes (fig. 118) sem- blables aux précédentes, à hampe encore nettement spinuleuse, mais à serpe composée d'un nombre de segments de moins en moins grand, à mesure qu'on descend dans la série des parapodes, sont surtout placées au bord inférieur du faisceau, et à la région la plus dorsale apparaissent des soies beaucoup plus fortes et plus trapues, dont la hampe conserve encore à peine une trace de spinulation et dont la serpe n'est plus divisée en segments. Elle est creuse encore jusqu'à la base de la dent supérieure fortement courbée et comme pliée en deux, et il s'y ajoute du côté du tranchant un léger limbe transparent, qui se continue directement avec la dent inférieure. Au plus petit de nos exemplaires, qui n'atteignait pas tout à fait 2 millimètres de large, soies comprises, et qui n'était pas mùr sexuel- i70 G. PRUVOT ET E.-G. RÂCOVITZA. lement, les soies de la rame ventrale sont encore moins variées ; toutes appartiennent au type grêle, à serpe multi-segmentée ; la serpe augmente de longueur des plus ventrales aux plus dorsales et passe de deux seulement à six et même sept segments; la hampe aussi, qui ne montre que deux ou trois spinules aux soies les plus ventrales, en a jusqu'à une dizaine aux soies les plus dorsales de l'éventail. Les acicules jaune pâle sont sensiblement égaux aux deux rames. ^/?//res portées comme d'habitude sur les segments 2, 4, 5,7,9,... 25, 27, 28, 29, 30, etc., et ainsi de suite à tous les segments de la région postérieure, largement imbriquées et croisées, recouvrant en- tièrement le dos et ne laissant à nu, en dehors, que l'extrême pointe des parapodes. Celles de la première paire sont orbiculaires ; les suivantes (fig. 119), jusqu'à la quatorzième, sont à peu près aussi hautes que larges, légèrement échancrées au bord antérieur, puis, à partir de là, dans la région postérieure où elles existent à tous les segments, elles n'ont plus environ que la moitié de leur hauteur pri- mitive, sont alors franchement réniformes, presque symétriques, profondément échancrées au bord antérieur. Toutes sont délicates et transparentes, et ont l'insertion sur l'élytrophore (/) à peu près exactement en leur milieu. La face dorsale est garnie d'un serais presque uniforme de petits tubercules (fig. 120, t) chitinisés, réfrin- gents, coniques et un peu plus forts sur la première paire, simple- ment arrondis et peu saillants sur les suivantes ; entre eux, çà et là, quelques processus cylindriques, un peu renflés au sommet, agglu- tinant des grains de sable (r) qui couvrent l'élytre. Le bord externe est garni aux élytres antérieures d'une trentaine, aux postérieures d'une quinzaine seulement de franges {/?') simples, légèrement coni- ques, espacées, qui décroissent progressivement d'avant en arrière et disparaissent vers le milieu du bord postérieur. Leur axe est occupé par un cordon fibrillaire à la base duquel est un petit amas cellulaire, probablement de nature nerveuse et en connexion avec le réseau nerveux de l'élytre. Entre elles, mais à une certaine dis- FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 471 tance du bord, une rangée des très petites papilles en massue {p) terminées par un poil tactile, très répandues sur les élytres des Aphroditiens. Les branchies commencent au quatrième segment. Au segment précédent déjà, le mamelon, qui représente ici rélytrophore,se ter- mine par un petit bouton (fig. 111, /) arrondi, peu saillant, dirigé en dehors et situé juste à la place qu'occupent les branchies aux pieds suivants. Celles-ci, attachées au sommet et en dehors de l'ély- trophore ou du mamelon qui le représente aux pieds dépourvus d'élytres, atteignent presque la moitié de la longueur du parapode; elles se prolongent à leur base en une sorte d'éperon ventral, et leur face inférieure légèrement concave est seule garnie de forts cils vibratiles, comme les cténidies ciliées qui leur font face sur le dos du pied. Trompe bilabiée avec treize papilles coniques à chaque lèvre. Mâ- choires (fig. 121) réunies deux à deux sous chaque papille médiane ventrale et dorsale. Elles se prolongent en un long manubrium grêle formant la face extérieure; la face tournée vers l'intérieur de la trompe est étalée en un limbe très transparent, à bord non denté. Habitat. — Un exemplaire a été trouvé près de la côte, au cap du Troc, par 35 mètres de profondeur, dans les interstices remplis de sable des conglomérats coralligènes ; un autre, aux roches Cerbère, par 43 mètres, dans la vase grise autour des rochers, et le troisième, à l'extrémité du rech Lacaze-Duthiers, profondeur ; 240 à 333 mè- tres, dans la vase profonde avec coraux et débris de coquilles brisées, auprès des roches Fountaindrau. Discussion. — Parmi les Sthenelais à élytres bordées de véritables franges simples, trois seulement appartenant aux côtes d'Europe pourraient être confondus avec cette espèce : S. Idunge (Rath.), S. fuliginosa (Clprd.) et S. ctenolepis (Clprd.). Encore ce dernier doit-il être mis hors de cause, en raison de la position plus re- 472 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZÂ. culée des yeux, de ses élytres bordées de plusieurs rangées de dents qui donnent au bord externe une apparence pectinée, de l'absence de cténidies sur le bord dorsal des parapodes et surtout de la forme toute différente des soies. Par contre, \e Sthenelais fuh'ginosa, surtout après la description et les figures rectificatives données par von Ma- renzeller (35, p. 15, pi. I), se rapproche beaucoup plus de notre espèce, mais s'en distingue encore par les bandes et taches brunes des élytres, la présence d'une lamelle foliacée verticale à la rame dorsale' et surtout de soies simples à la rame ventrale. Enfin, on pourrait peut-être la considérer comme une forme naine et déco- lorée, dans les mers méridionales, du q^rand S tkene lais Idimge [Râili.) des mers du Nord avec lequel elle offre d'incontestables affinités. Langerhans a déjà attribué (45, p. 27(3, pi. XIV, fig. 6) a.\i Sthenelais Idunge un petit Sthenelais de Madère incolore, de 2 millimètres de large, qui semble aussi très voisin de notre espèce ; mais celle-ci s'en distingue encore, comme des espèces sus-mentionnées, au moins par l'absence de soies simples spinuleuses à la rame ventrale et ses élytres incrustées de sable. Par ces deux caractères, elle offre quelque ressemblance avec ce que dit Grube (36, p. 21) de son Sthenelais di- plocirrus provenant d'Upolu, qui a comme elle des élytres transpa- rentes et uniquement des soies composées à pointe bifide à la rame inférieure. Mais, sans parler de la disposition des cténidies qui n'est pas la même, cette dernière espèce présente la dent du cirrbe ven- tral bien plus développée, puisque Grube dit qu'il est comme four- chu, d'où le nom de Sthenelais diplocirrus, et montre en dedans de lui deux autres appendices plus courts, mais pareils; de plus, la branchie des pieds sans élytres porte au^^si au-dessous de sa pointe quelques petites papilles. 1 Celle lamelle ou bractée parapodiale est figurée sur le dessin de von Marenzeller (3 5, pi. I, fig. 2) et mentionnée expressément dans sa description. Mais un exem- plaire de Sthenelais fvliginosa capturé pendant l'impression du présent mémoire ne montre, en réalité, aucune trace de bractée à la rame dorsale ; il n'y a là qu'une apparence produite par la transparence de lii partie inférieure de la rame au-dessous de la masse sombre formée par la glande sétigène et la base des soies. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 473 STHENELAIS LIMICOLA. EUL. (PI. XX, fig. 122-123.) 1864. Sifialion limkola Ehlers (i9, p. 120, pi. IV, fig, 4-7 et pi. V). Une bande transversale brune sur chaque élytre. — Antenne médiane et palpes très longs. — Des stylodes parapodiaux cirrhiformes et nombreux à l'extré- mité des premiers parapodes, diminuant ensuite en arrière de taille et de nombre. — Rame ventrale des parapodes de la région moyenne munie d'un lobe supérieur en massue surmonté d'un stvlode unique. — Une seule cténidie parapodiale dorsale à partir du quatrième segment. — Première élytre arron- die; les onze suivantes triangulaires, à angles émoussés et poitant au bord externe quelques digitations bifides ; les élytres suivantes réniformes avec une profonde échancrure au bord externe. Longueur totale : 93 millimètres. Largeur maximum, soies com- prises : 4 millimètres. Largeur du bord externe d'une élytre à l'autre ; 2 millimètres et demi. Cent quatre-vingt-deux segments. Coloration. — Corps transparent, incolore ; mais chaque élytre montre dans sa moitié postérieure une large tache transversale brune, dont la teinte s'atténue et s'efface vers le bord externe et le bord postérieur. En raison de l'obliquité des élytres, ces taches for- ment avec celles du côté opposé comme autant de chevrons ouverts en arrière, très marqués dans la portion antérieure du corps, puis s'atténuant progressivement et finissant par disparaître dans la ré- gion postérieure. Lobe céphalique arrondi et un peu élargi transversalement, portant quatre yeux noirs (fig. 112, œ), disposés en carré et dont les deux antérieurs, un peu plus gros que les postérieurs, sont en partie mas- qués par le large céralophore de l'antenne qui occupe tout l'inter- valle entre eux. Les palpes {P) grêles et effilés, lisses, très contrac- tiles et s'enroulant en tous sens, peuvent atteindre, renversés en arrière, le douzième ou le treizième segment à leur maximum d'ex- tension. Leur base est, comme d'habitude, enveloppée du côté interne par la lamelle prébuccale en continuité directe avec le cwlleron cépha- m G. PRUVOT ET E.-G. RÂGOVITZA. Uqiie {eu) ; celui-ci dépasse en avant le premier parapode de la moitié environ de sa longueur et est fortement échancré au sommet. Van- tenne impaire {Ai) est remarquablement longue ; son cératostyle a trois fois et demie en longueur la largeur du lobe céphalique ; de son cératophore se détache, à une faible distance de l'insertion, une paire de fortes cténidies antennales {et) presque aussi longues que lui, comprimées latéralement, portant une rangée de flagella vibra- tiles le long de leur bord ventral. Les antennes latérales (Ae), fusion- nées pour la plus grande partie de leur longueur avec les para- * podes de la première paire, s'en détachent en dedans et un peu en arrière de l'insertion du cirrhe tentaculaire dorsal {Th) ; leur partie libre équivaut à peine à la moitié du diamètre du lobe cé- phalique. Le segment buceal n'est pas visible dorsalement, le lobe céphalique étant limité et même légèrement recouvert à l'état de repos par le bord de la première paire d'élytrophores (e), qui appartiennent au deuxième segment. Les parapodes de la première paire bien déve- loppés et presque aussi volumineux que les suivants portent, outre l'antenne latérale sus-mentionnée, une cténidie dorsale {cl') allongée et se continuant par une légère crête jusqu'à la base du parapode, deux faisceaux de soies simples et les deux cirrhes tentaculaires habi- tuels, le dorsal {Th) presque aussi gros et long d'un tiers de moins seulement que l'antenne médiane, le ventral {Tn) plus grêle et n'ayant que les deux tiers de la longueur du précédent. Parapodes birèmes; mais ceux des tout premiers segments ont la rame dorsale rudimentaire. Au deuxième parapode, la rame dorsale est réduite à un petit tubercule peu saillant, surmonté d'un long stylode et de la base duquel part le faisceau de soies. A un examen superficiel, le stylode et le tubercule qui le supporte simulent, à s'y méprendre, un cirrhe dorsal avec son cirrhophore. La rame ventrale se termine par trois lobes égaux portant chacun un bouquet de sty- lodes et un peu moins développés que le stylode dorsal, au nombre de deux au lobe postérieur et de quatre à chacun des lobes antérieur. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYUî,S. 47îi inférieur et supérieur. Le cirrhe ventral a à peu près la dimension du cirrhe tentaculaire ventral, dépasse le sommet du mamelon pé- dieux, mais n'est pas sensiblement plus développé que celui despara- podes suivants. I.e troisième parapode a la rame dorsale pareille à celle du pied précédent; mais à la rame ventrale, le lobe supérieur est plus détaché, subglobuleux, et porte cinq stylodes. Puis les parapodes se modifient progressivement. La rame dor- sale (fig. 123, rh) se développe et montre un lobe aciculaire où s'en- gage la pointe de l'acicule ; le stylode unique fait place à quatre ou cinq plus petits et égaux {st). Bientôt la rame ventrale (m) se montre terminée par un lobe aciculaire conique ; au-dessus, le lobe supé- rieur (/) a pris une forme caractéristique en massue surmontée d'un seul stylode et, au-dessous, le lobe postérieur s'est transformé en une petite bractée parapodiale aplatie. Le cirrhe ventral iCn), subulé, à peu près de la même longueur que le parapode, s'insère vers le mi- lieu de sa face ventrale. Les soies des deux faisceaux qui représentent les deux rames du premier parapode sont simples, longues et souples, capillaires et spinuleuses d'un côté. A tous les autres parapodes, les soies de la rame dorsale ont la même forme. A la rame ventrale, on trouve, du côté le plus dorsal, deux ou trois soies simples, très petites, droites, à portion terminale un peu élargie au-dessous de la pointe et gar- nie de chaque côté d'une rangée de spinules, comme celles de la figure 103. Toutes les autres sont composées, à hampe lisse, mais à serpe extraordinairement variée : les unes courtes et trapues, à extré- mité fortement bidentée, comme celles de la figure H7 ; les autres, à pointe bifide également, mais très longues et très grêles, de la forme de celles de la figure H6 et pouvant présenter jusqu'à dix arti- cles ; d'autres, enfin, grêles et multiarticulées également, mais à pointe simple et droite, comme la plus grande de celles figurées par Ehlers (19, pi. V, fig. 5), et l'on trouve à chaque pied tous les inter- médiaires entre ces formes extrêmes. Les émnc^î'es cirrhiformes, ciliées sur leur face inférieure, égalant 476 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. à peu près en longueur la moitié du parapode correspondant, exis- tent à partir du quatrième segment à tous les parapodes insérés sur le bord supérieur et externe de l'élytrophore ou du mamelon qui le représente aux pieds dépourvus d'élytres. Mais au troisième seg- ment, ce mamelon (fig. 122, j) se termine déjà par un processus conique qui occupe exactement la place de la branchie, seulement il est plus court et dépourvu de ciliation. Une cténidie parapodiale dorsale (fig. 123, et) se montre également à chaque parapode, à partir du quatrième, entre l'élytrophore et la rame dorsale. Sur la face ventrale, une autre est apparue au troi- sième parapode, à mi-distance entre la base du pied et le cirrhe ventral ; elle diminue au pied suivant et disparaît au huitième ; mais, à partir de là, d'autres cténidies, plus petites, globuleuses, se mon- trent au nombre de deux ou trois de chaque côté du corps, entre deux pieds consécutifs. Les élylres sont beaucoup plus différentes que d'habitude chez les Sigalionides, entre la région antérieure et la région postérieure. Elles recouvrent entièrement le corps. La première est circulaire, et les onze suivantes, légèrement triangulaires, à angles émoussés, en- tièrement lisses à leur surface, ont la partie moyenne de leur bord externe découpée par quatre ou cinq échancrures en autant de lobes bifides assez irréguliers. A partir de la treizième, elles sont moitié moins hautes, réniformes, divisées par une large et profonde échancrure antérieure en deux portions, dont l'interne est beaucoup plus petite que l'externe. Le bord externe n'est plus dentelé, mais profondément échancré en son milieu, les deux bords de l'échan- crure se rapprochant et même se recouvrant un peu pour la trans- former en un trou. Entre l'élytrophore et l'échancrure antérieure, un amas de petits tubercules irréguliers entièrement incolores et non chitinisés; ils sont plus nombreux, plus régulièrement arrondis et plus serrés, les uns contre les autres, aux élytres les plus posté- rieures. Les élytres ont été exactement figurées par Ehlers (I9,pl. V, tig. 3 et h). FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 477 Habitat. — Un exemplaire recueilli au large de Port-Vendres, dans la vase côtière de la plaine du Tech. Profondeur : 50 mètres. Syn. 1864. Sigalion limicola Ehlers («9, p. 1-20, pi. IV, fig. 4-7 et pi. V). 1868. Sthenelais kiulepis Claparède (2^, p. 406, pi. IV, fig. 3 et pi. VI, fig. Ij. 1869. Sthenelais limicola Mac-Intosh (30, p. 410), La description qui précède s'écarte notablement de la description et des figures données par Ehlers; mais il nous paraît hors de doute que les différences les plus importantes proviennent de l'imperfec- tion des figures et de l'interprétation défectueuse de la région anté- rieure du corps, dues, selon toute vraisemblance, à ce que le savant allemand n'a observé la région céphalique de ses deux échantillons que par transparence à travers les élytres de la première paire qui la recouvrent entièrement, et empêchent de reconnaître exactement le nombre des yeux et les rapports des appendices si compliqués des Sthenelais. Mac-Intosh, qui a observé de nombreux exemplaires pro- venant des îles Shetland, a déjà reconnu que les yeux sont, en réa- lité, au nombre de deux paires, la paire antérieure étant masquée à la vue par la base de l'antenne. Ehlers a figuré l'antenne médiane comme naissant du bord antérieur et même un peu sur la face ven- trale du lobe céphalique; de plus, deux antennes latérales foliacées et arquées s'élèveraient juste en avant des yeux. 11 est bien certain que ce sont là les cténidies antennales habituelles des Sthenelais, et que si leur relation avec le cératophore n'a pas été reconnue, c'est parce que la partie tout à fait basilaire de l'antenne, qui doit être prolongée jusque sur la face dorsale du lobe céphalique, presque entre les yeux, a échappé à l'observateur. La cténidie dorsale du premier parapode doit aussi avoir été méconnue. Sur la face ven- trale, les palpes sont indiqués comme portés sur une courte pièce basilaire qui constituerait un caractère bien exceptionnel, unique même chez les Aphroditiens. Aussi est-on fondé à croire qu'il s'agit également d'une observation imparfaite, d'une simple apparence due à la lamelle prébuccale du cuilleron céphalique qui doit, comme 478 G. PRUVGT ET E.-G. RAGOVITZA. che^ tous les Sthenelais, embrasser la base du palpe et qui n'est pas mentionnée. Enfin, Mac-Intosh a déjà rectifié la forme des soies com- posées dont la serpe se termine par un crochet bidenté. Si toutes les particularités qui feraient de l'espèce d'Ehlers un type exceptionnel, invraisemblable peut-on dire, parmi ]es Sthenelais, peu- vent être ainsi interprétées aisément, d'autre part, tous les carac- tères spécifiques, sauf une différence peu importante dans la taille (95 millimètres de long et 182 segments chez notre exemplaire, au lieu de 57 millimètres et 128 segments), concordent entièrement. Tels sont notamment la coloration générale si particulière, la lon- gueur considérable de l'antenne impaire et des palpes, la forme des parapodes avec leurs longs stylodes, le lobe en massue de la rame ventrale, le cirrhe ventral inséré au milieu de la longueur du pied, la cténidie dorsale unique, etc., et surtout la forme si caractéristique des élytres avec leur différence tranchée entre celles des douze pre- mières paires et les suivantes. Dès lors, en tenant compte des rectifications qui précèdent, il est impossible de distinguer du Sthenelais limicola le i^. leiolepfs de Cla- parède. Coloration, parapodes, soies, élytres de larégion postérieure, sont identiques. Les deux seuls caractères qui pourraient faire hési- ter sont, d'une part, que Glaparède ne mentionne pas les découpures du bord externe des douze premières élytres, et, de l'autre, qu'il figure les quatre yeux comme plus reculés, situés en arrière de l'in- sertion de l'antenne. Pour le premier caractère, les incisures des élytres peuvent lui avoir d'autant mieux échappé qu'elles sont sou- vent assez irrégulières et repliées sous la face inférieure de Télytre, ainsi qu'Khlers les a figurées. Pour le second, il est au moins pro- bable que Glaparède, comme Ehlers, n'a vu que la portion distale du céralophore et non la partie proximale qui s'avancerait entre les yeux, ce qui est confirmé par le fait que Glaparède n'indique pas non plus les cténidies latérales que doit porter ce dernier et qu'il n'a reconnues, du reste, chez auciin des Sthenelais qu'il a figurés. FAUNE DES ANNELIDRS DE BANYULS. 479 INDEX BIBLIOGRAPHIQUE* 1. 1804. Renieri (St. -A.), Prospetto délia Classe dei Vermi. 2. 1825. Delle Chiaje (St.), Memorie sulla storia e notomia degli animali senza vertèbre del regno di Napoli, t. II [11+ i-}-(i 85-444) p., pi. XIII-XXX; Napoli. Siamperia délia Societa iipografica]. 3. 1826. 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Cn, cirrhe parapodial neural. a, anus. ait, aclcule de la rame haemale. an, acicule de la rame neurale. b, bouche. bp, bractée parapodiale. br, branchie. bs, bulbe sétigère. cb, coussinet buccal. cp, cirrhophore. es, cirrhostyle. et, cténidie. eu, cuticule. fp, épiderme. g, gaine des soies. gl, glande. P, palpe. T, cirrhe tentaculaire. Th, cirrhe tentaculaire liiemal. Tn, cirrhe tentaculaire neural. U, urite. /, lobe parapodial. la, lobe aciculaire. ma, maxille. md, mandibule. n, nerf. nu, organe nucal. œ, œil. pa, papilles de la trompe. rh, rame haemale. m, rame neurale. s, soies. sa, soie aciculaire. st, stylode. tr, trompe. PLANCHE XV. STAUROCEPHALUS RUBROVITTATUS GR. FiG. 1. Extrémité antérieure d'un jeune de la variété bivittata, vue du côté dorsal. Gr., 54 d. Cette figure montre le lobe céphalique muni de ses quatre boutons ciliés {nu.) à l'état dévaginé. Les antennes {A) ne sont pas encore arti- culées. Les palpes [P) sont repliés en arrière, dans la position que leur fait prendre l'animal pendant la marche. Il n'a été représenté que les deux premiers segments nus. Le premier sépare les quatre fos- settes de l'organe nucal par des plis (j), de sou bord antérieur. 2. .Antennes Iriarticulées d'un adulte (var. umvittata). Gr., 108 d. 484 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. FiG. 3. Esquisse d'ua parapode de la région moyenne du corps d'un adulte (var. univittata), vu du côté postérieur, Gr.,22 d. 4. Esquisse d'un parapode de la région moyenne du corps d'un individu de taille moyenne (var. bivittata), vu d'en haut. Gr., 54 d. Cette figure montre le lobe parapodial (/) divisé en deux par un sillon profond. 5. Extrémité distale d'une soie simple du faisceau supérieur d'un adulte (var. biviltata). Gr., 1000 d. 6. Extrémité distale d'une soie composée, de forme moyenne, du faisceau inférieur d'un adulte (var. bivittata). Gr. i 000 d. 7. Labre d'un adulte (var. bivittata) vu par sa face dorsale. Gr., 108 d. 8. Pièce raandibulaire de forme moyenne, vue du côté dorsal. Gr., 2-20 d. Elle provient du milieu de la rangée mandibulaire de la mâchoire d'un adulte (var. bivittata); a, apophyse dorsale; a', apophyse ventrale. 9. Pièce postérieure de la rangée mandibulaire, vue du côté dorsal. Gr., 108 d. Cette pièce se distingue par la grande longueur de la dent médiane. Elle provient delà mâchoire d'un jeune (var. bivtV/a/a) ; a, apophyse dor- sale; a', apophyse ventrale, lu. Pièce antérieure de la rangée mandibulairi^, vue du côté ventral. Gr., 108 d. Cette pièce, munie aussi d'une dent médiane très allongée, provient du même animal que la précédente; a, apophyse dorsale ; a', apophyse ventrale. 11. Pièce postérieure de la rangée mandibulaire, de forme ordinaire, prove- nant de la mâchoire d'un adulte (var. univittata), vue de profil. Gr., 220 d. a, apophyse dorsale; a', apophyse ventrale. 12. Une des pièces initiales de la rangée mandibulaire d'un adulte (var. uni- vittata), vue de profil. Gr., 220 d. a, iipophyse dorsale; a', apophyse ventrale. 13. Pince mandibulaire d'un adulte (var. univittata), vue du côté dorsal. Gr., 220 d. 14. Grande pièce de soutien d'un adulte (var. univittata), vue du côté dorsal. Gr., lOS d. q, région où vient s'appliquer la petite pièce de soutien. 15. Petite pièce de soutien d'un adulte (var. univittata), vue du côté dorsal. Gr., 108 d. 16. Pièce moyenne de la région maxillaire d'un individu adulte (var. bivittata), vue du côté dorsal. Gr., 220 d. a, apophyse dorsale; a', apophyse ventrale. 17. Pièce moyenne de la région maxillaire d'un adulte i^var. biviltata), vue du côté ventral. Gr., 220 d. a, apophyse dorsale; y.', apophyse ventrale. 18. Extrémité postérieurs de la rangée maxillaire d'un individu adulte (var. bivittata), vue du côté dorsal. Gr., 2^0 d. a, apophyse dorsale; «■', apophyse ventrale. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 48S FiG. 19. Pièce de forme moyenne de la rangée des paragaathes d'un adulte (var. bivittata), vue du côté dorsal. Gr., 410 d. 20, Portion d'une coupe longitudinale de la trompe dévaginée d'un individu adulte (var. bivittata), fixé au sublimé acétique, double coloration au carmin aluné et à l'éosine. Gr., 410 d. Cette coupe est destinée à montrer la structure des mâchoires et l'his- tologie de la paroi sous-jacente; md, coupe d'une pièce mandibulaire ; mo, coupe d'une pièce maxillaire ; ai, cuticule ; ep, épiderme non modifié; od, odontoblaste; d, grande cellule salivaire; d', petite cellule salivaire; k, conduit salivaire; /, cellule salivaire jeune; M, muscles rétracteurs de la trompe; h, tissu lâche. PLANCHE XVI. LUMBRICONEREIS COCCINEA (rEN.). FiG. 21. Extrémité antérieure d'un individu détaille moyenne, vue par la face dorsale. Gr., 22 d. Les organes nucaux {nu) sont plus distincts dans le dessin qu'ils ne le sont en réalité chez l'animal vivant. 22. Même extrémité vue par la face ventrale. Gr., 22 d. Cette figure montre la bouche et la forme des coussinets buccaux (c6), ainsi que le sillon médian ventral des trois premiers segments. 23. Esquisse d'un parapode de la région moyenne du corps d'un adulte, vu par sa face postérieure. Gr., 108 d. Le lobe parapodial (i) est bien développé. 24. Soie simple supérieure, de forme moyenne, provenant d'un adulte. Gr., 410 d. 25. Soie simple supérieure, de forme particulière, provenant d'un adulte. Gr., 410 d. 26. Soie composée inférieure, de forme moyenne, provenant des segments antérieurs d'un adulte. Gr., 1 000 d. 27. Soie simple à crochet, de forme moyenne, provenant des segments posté- rieurs du corps d'un adulte. Gr., 1000 d. 28 . La même, vue par le dos, pour montrer l'insertion des valves de la gaine {g). Gr., 1000 d. 29. Extrémité postérieure du corps d'un adulte, vue par la face dorsale. Gr., 108 d. j, faux segment; U, urite; U', urite inférieur présentant l'anomalie, très rare, d'être bifurqué. 30. Extrémité postérieure du corps d'un jeune individu. Gr., 108 d. j, faux segment non encore bien délimité; V, urite ayant une appa- rence foliacée. 31. Labre d'adulte vu du côté dorsal. Gr. , o4 d. a2. Mâchoire supérieure d'un adulte, vue du côté dorsal. Les rapports natu- rels des différentes pièces ont été conservés sur le dessin. Gr., 54 d. 486 G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA. md, pince mandibulaire; z, support do la même; ma', première maxiile; ma-, seconde maxille; ma*, troisième maxille ; r, râpe ; r\ râpe latérale indépendante. FiG. 33. Première maxille d'un jeune, vue à plat du côté dorsal. Gr., 108 d. r, râpe. 34. Seconde maxille d'un jeune, vue à plat. Gr., 108 d. o, région plus claire oii se fait l'union avec la couche d'odontoblaste; r, râpe. Xr,. Troisième pièce maxillaire d'un jeune, vue à plat du côté dorsal. Gr., 108 d. o,région plus claire où se fait la jonction avec la couched'odontoblaste; r, râpe. 36. Quelques amas des sphérules qui forment les râpes, vus à un très fort grossissement (1200?). 37. Pince mandibulaire décalcifiée d'un adulte; il n'en est resté que la partie chitineuse. Gr., lo8 d. 0, orifice qui est resté après le départ du calcaire; x, bord chitineux, se continuent avec la cuticule qui revêt la paroi de la trompe. EUNICE ROUSSEAUI QTRFG. FiG. 38. Extrémité antérieure, vue par sa face dorsale. Le lobe céphalique est rétracté sous le bord antérieur du premier segment. L'antenne impaire a été figurée plus courte que les autres comme elle se présentait chez les animaux que nous avons eus à notre disposition. Il est pourtant probable que cela est dû à l'état de conservation de nos échantillons. Grandeur naturelle. k, pli antérieur du premier segment; T, cirrhe tentaculaire. 39. La même, vue par la face ventrale. Grandeur naturelle. P, palpe labial; 6, bouche, 40, La même, vue par sa face antérieure. Grandeur naturelle. P, palpe labial; F, palpe frontal. 41 , Parapode du ISO" segment environ, vu du côté postérieur. Le nombre des filaments branchiaux est exceptionnel; en général il y en a 37. Gr.,6 d, 42, Soie en spatule, frangée, de forme moyenne. Gr., 1000 d. 43. Soie composée, ventrale, déforme moyenne, Gr., Vlo d, g, gaine, 44. Moitié gauche d'un labre, vu du côté dorsal. Gr., 3 d. i, lame calcaire. 4a, Pince mandibulaire gauche, vue du côté dorsal. Gr., 3 d. h, support, 46, Première maxille de gauche, vue du côté dorsal. Gr., 3 d. 47, Seconde (ma'), troisième (ma»), quatrième {ma*} et cinquième (ma^) maxille de gauche dans leurs rapports naturels. Gr., 3 d, 3, endroit où la cuticule est épaissie et de couleur noire. FAUNE DES ANNÉLIDES DE BANYULS. 487 PLANCHE XVII. EUNICE HARASSI AUD. M.-E.. FiG. 48. Extrémité antérieure d'un individu de taille moyenne, vue de profil. Les antennes et les cirrlies tentaculaires n'ont pas été représentés dans toute leur longueur. Gr., 7 d. k, anneau incomplet formé par le bord antérieur du premier segment. 49. La même, vue du côlé ventral. Gr., 7 d. .•iO. Parapode droit du seizième segment d'un individu de 10 centimètres de long, vu par sa face postérieure. Gr., ti d. Le bulbe sétigère de la rame dorsale rudimentaire (6s) a été supposé vu par transparence. 51. Parapode droit du quarante-cinquième segment d'un individu de 10 cen- timètres de long, vu du côté postérieur. Gr., 22 d. bs, bulbe sétigère de la rame dorsale rudimentaire. • 32. Soie composée, de forme moyenne, du faisceau inférieur. Gr.^ 410 d. g, gaine. 53. Soie aciculaire des segments postérieurs. Gr., 410 d. g, gaine. 54. Labre d'un adulte, vu par sa face dorsale. Gr., 14 d. «, lame calcaire, ao. Pince mandibulaire gauche, vue par sa face dorsale. Gr., 14 d. h, support. 56. Première maxille de gauche, vue par sa face dorsale. Gr., 14 d. 57. Série de maxilles de gauche. Gr., 22 d. »na2_, seconde maxille; ma^, troisième maxille; ma*, qualrièmc maxille; ma*, cinquième maxille. 58. Série de maxilles de droite. Gr., 22 d. wo», seconde maxille ; ma*, quatrième maxille; ma>, cinquième maxille. EUNICE FLORIDEANA (POURT.). FiG, 59. Soie composée du faisceau inférieur. Gr., 410 d. g, gaine de la soie. 60. Soie aciculaire des segments postérieurs. Gr,, 108 d. g, gaine de la soie. 61. Troisième maxille, dessinée de manière à montrer la région (o) oii la maxille est en connexion avec la couche d'odontoblaste. Gr., 22 d. 0, endroit oîi la pièce est en contact avec la couche d'odontoblastes. 62. Photographie représentant une colonie à'Amphihelia occulala, moitié de grandeur naturelle. Le cœnenchyme entoure en certains endroits [xx') des tubes de l'Eunice dont on voit un des orifices en o: z, tube de serpule qui pré- sente certaines parties libres, mais d'autres enveloppées par le cœnen- chyme sécrété par les polypes. 488 G. PRUVOT ET E.-G. RAGOVITZÂ. EUNICE TORQUATA QTRFG. F]G. 63. Parapode droit du seizième segment d'un échantillon de 10 centimètres de long, vu par la face postérieure. Gr., 14 d. bs, bulbe sétigère de la rame dorsale rudimentaire. 64. Extrémité postérieure d'un échantillon de taille moyenne. Gr.,22 d. L'anus («), tout à fait dorsal, est entouré d'un bord plissé. 6o. Moitié gauche du labre, vu du côté dorsal. Gr., 14 d. i, lame calcaire. 66. Pince mandibulaire gauche d'un adulte, vue du côté dorsal. Gr., 11 d. /i, support. 67. Première maxille de gauche d'un adulte, vue par sa face dorsale. Gr., Il d. PLANCHE XVIII. 68. Coupe transversale d'une branche d'i4mp/t?/ieHa occM/aro'drosid.e (p. 512). Genre Chondrilla Schmidt, C. nucula Schm., C. austmliensis diri., C. didincta F.-E. Sch., C. mixta F.-E. Sch., C. secunda Lend., C. papilhta Leud., C. corticata Lend., C. globulifcrn Kell. Genre Chondrosia Nardo, C. renifonnis Nardo, C. plebeja Schm., C. Ramsayi Lend., C. spurca Cart. Genre Thytnosia Topsent, 1\ Guernei Tops. Si, jetant un coup dœil rétrospectif, on vient à comparer ce tableau avec celui des Carnosa dressé par Carter en 1881 («2), on ne peut manquer de constater entre eux une grande ressemblance, ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIKES DE FRANCE. ol5 puisque quinze espèces se retrouvent en commun sur les deux listes. Quelques-unes ont même conservé leur nom générique : Chondrosia reniformis et C. plebeja, Chond7'iUa nucula, C. auslraUensk , C. mixta et C. distincta, Corticium candelabynim et C. versatile. D'autres, par contre, en ont changé : HaUsarca lobularis, H. cruenta et H. bassan- gustiarum sont maintenant des Oscarella, Corticium abyssi et C. Kil- lonii sont des Tlirombm, C. stelligerum est une CoiHicella et C. pli- caliim un Dercitiis. Les noms qui manquent sur notre tableau en ont été rayés pour des raisons diverses : Les uns faisaient double emploi : HaUsarca mimosa Giard et Chon- drosia tuberculata Schm., synonymes de Oscarella lobularis; HaU- sarca gultula Schm., synonyme de HaUsarca Dujai'dini ; Gummina gliricauda Schm. et G. ecaudala Schm., synonymes de Chondrosia reniformis ; et Chondrilla embolophora Schm., synonyme de Chondrilla nucula. D'autres appartenaient à des Éponges dont la place est marquée aujourd'hui parmi les Monaxonides : Chondrilla phyllodes Schm. [Spirastrella) et Latrunculia corticata Cart. sont des Spirastrellides; Chondrilla sacciformis Cart. {Magog) et Columnitis squamata Schm. [Tetliya) sont des Téthyides ; Osculina polystomella Schm. n'est autre chose que la forme massive d'une Clionide, Cliona viridis (Schm.); enfin, Grayella cyalhophora Cart. [Yvesia] est une Pœciloscléride. Sarcomella médusa Schm. reste une énigme ; Corticium parasi- ticum Cart. ne se rapporte à aucune section des Carnosa; HaUsarca Uvjardini Johnst. et H. rubilingens Cart. n'ont pas encore de place assurée dans la classification. Qui sait même si la dernière ne serait pas une Oscarella ? Enfin, F.-E. Schulze n'a pas eu de peine à faire admettre que les noms de Cellulophana Schm. et Lacinia stellifica Selenk. s'appli- quaient non à des Spongiaires, mais bien à des Tuniciers. SI6 E. TOPSENT. CARNOSA DE FRANCE. Jusqu'à ces derniers temps, deux Camosa seulement avaient été signalées sur les côtes de France : Chondrosia reniformis Xardo, par Marion, à Marseille (»5); Oscarella lobularis (Schm.) Vosm., sous le nom de Halisarca mimosa^ par Giard, àRoscofr(i5), et, sous celui de Halisarca lobularis, par 0. Schmidt, à Cette (31), par Ch. Barrois, à Wimereux et Saint- Vaast (i), et par Marion, à Marseille («5). On pouvait, en outre, mentionner, d'après Rowerbank (2), l'exis- tence aux îles normandes, à Guernesey, où M™* Buckland en avait recueilli un spécimen, de Hymeniacidon ou Baltersbyia Bucklandi Bow., correctement Dercitus Bucklandî{Bov,\) Gray. Mais c'était tout. D'après mes recherches, aujourd'hui la faune française comprend onze espèces de Carnosa ainsi réparties : Sous-ordre Migrotri/ENOSa. 6. Placina Irilopha F.-E. Sch. 1. Dercitus Bucklandi (Bow.) Gray. ^- ^'"^'''•'" *''"P^^^ ^.-E. Sch. 2. - plicalns (Schm.) Lend. «• Pl'^cinantrelia copiosa F.-E. Sch. Sous-ordre Microsclerophora. Famille Oscarellid^. Famille CorticiD/E. 9- Oscarella lobularis (Schm.) Vosm. 3. Corticium candelabrum Schm. Sous-ordre Oligosilicina. Famille Placinid^e. Famille Chondrosid^. 4. Placina monolopha F.-E. Sch. 10. Chondrosia reniformis Nardo. 5. — di/o;i/ia F.-E. Sch. M. Thymosia Guernei Tops. Presque toutes se rencontrent dans la Méditerranée. II n'y a d'ex- ception que pour Dercitus Bucklandi (Bow.), trouvé seulement jus- qu'à ce jour dans la Manche et sur la côte occidentale d'Irlande, et pour Thymosia Guernei Tops., récemment découverte au large de Goncarneau. De ces neuf espèces méditerranéennes, je ne suis en mesure d'en citer que deux qui se répandent aussi sur nos côtes de l'Océan et de la Manche : Placina monolopha F.-E. Sch. et Oscarella lobularis (Schm.). Cela ne signifie pas toutefois que les sept autres se can- tonnent exclusivement dans la Méditerranée. On sait, en effet, déjà que Corticium candelabrum Schm. vit aux îles Philippines, et que ÉTUDE iMONOGRAPH[QUË DES SPONGIAIRES DE FRANCE. 317 Chondrosia reniformis Nardo s'étend au moins, d'une part, jusqu'au Kattégat, et de l'autre, dans l'océan Pacifique, jusqu'aux îles Gala- pagos ; et rien ne prouve que d'autres encore ne jouissent pas d'une dispersion semblable. Le genre Dercitus, avec deux espèces, représente seul, dans nos eaux, le sous-ordre des Microtriœnosa. Cependant, j'ai décidé de redonner ici la description et les figures de deux autres Microtrisenosa, dont M. le Révérend A. -M. Norman m'a offert des préparations et un fragment desséché. Je veux parler de Thrombus abyssi (Cart.) et de Coriicella stelligera (Schm.) Soll. Pour le moment, Co7'ticella stelligera ne peut pas figurer sur une liste d'Epongés de la faune française ; elle n'a été signalée nulle part dans nos eaux. A vrai dire, sa large distribution dans la Médi- terranée (Adriatique et côtes d'Algérie) rend probable sa présence en quelque point de la Provence ou du Roussillon, mais je ne veux pas anticiper sur les découvertes futures, et, si j'ai pris le parti d'en parler, c'est d^abord parce que j'ai jugé urgent de relever de graves erreurs commises tout dernièrement par Lendenfeld à son pro- pos (34), puis, parce que l'occasion se présentait trop belle d'accom- pagner d'exemples choisis mon étude du sous-ordre Microlriœnosa. C'est surtout pour ce dernier motif que j'ai entrepris de faire aussi connaître au lecteur Thrombus abyssi. La provenance de cetle Éponge pouvait d'ailleurs, jusqu'à un certain point, m'y autoriser. Thrombus abyssi, en effet, a été dragué par le Porcupine dans des eaux neutres, déjà loin de terre, mais à l'embouchure de la Manche, à peu près à la latitude de Brest. Nous sommes bien plus riches en Microsclerophora.h&'s, familles des Corticidse et des Oscarellidœ comptent chacune un représentant im- portant. La famille des Placim'dœ, elle, se montre même au grand complet sur notre liste. Dans les Oligosilicina, nous ajoutons un genre nouveau, Thymosia. Par contre, nous avons le désavantage de ne pouvoir citer aucune Chondrtlla; c'est un type intéressant qui nous fait défaut. Si8 E. TOPSENT. En définitive, pour que notre faune contienne toutes les Carnosa reconnues jusqu'à ce jour dans les mers de l'Europe occidentale, il reste à découvrir, sur les côtes de France, les cinq Éponges sui- vantes : Corticella stelligera (Schm.) SoU. et Thrombus abyssi (Gart.) Soll., indiquées plus haut, et à la détermination desquelles le lecteur se trouvera déjà préparé ; puis, Chondrosia nucula Schm. ', de l'Adriatique, caractérisée par ses euasters (sphérasters et oxyas- ters), Chondrosia plebeja Schm. -, des côtes d'Algérie, qui diffère de C. reniformis par l'irrégularité de sa surface et par l'accumulation de corps étrangers dans sa masse, et Triptolemus intextus (Gart.) Soll. *, des côtes du Portugal. Toutes nos Carnosa viventà de faibles profondeurs; ce sont, pour la plupart, des Éponges littorales. Dans la région océanique, c'est toujours à marée basse qu'on a recueilli Dercitm Bucklandi. C'est à la grève aussi qu'il faut chercher de préférence Osca7'ella lobularis et Placina monolopha; elles sont plutôt rares dans les dragages. Au Portel, Oscarella lobularis s'étend en plaques sous les pierres de la digue du port en eau profonde de Boulogne; à Luc, elle s'établit sous les roches surplombantes du Quihoc; à Roscoff, elle abonde sur les souches de Gystoseires de la passe, sous les dalles du parc du laboratoire et tout autour de l'île Verte. Thymosia Guernei semble faire exception; le spécimen type provient d'un dragage sur roche au large de Concarneau ; j'ignore toutefois par combien de mètres d'eau. Dans la Méditerranée , toutes les Microsclerophora se fixent, à peu de distance du rivage, sur les souches de Posidonies et de Gys- toseires ; la drague les arrache encore, avec leur support calcaire, en compagnie de Percitus plicalus et de Chondrosia reniformis, aux fonds coralligènes de la broundo provençale et aux conglomérats à ' Consulter surtout h son sujet F.-E. Scliulze (35, p. 24, pi. IX). 2 Consulter 0. Sclimidt (S I , p. 1). 3 Un spicule caractéristique de celte Éponge, un mésolri.Tiie, est figuré eu /i, p. 502 du présent mémoire. ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. 519 Mélobésiées du golfe du Lion, par une profondeur qui varie de 25 à 60 mètres tout au plus. Des trois Carnosa de la Manche, Oscarella lobularis est de beau- coup la plus commune; j'ai eu l'occasion de l'étudier dans les trois laboratoires où j'ai travaillé; mais Roscoff m'a paru, en ce qui la concerne, une localité privilégiée. C'est à Roscoff aussi que j'ai d'abord constaté l'existence de Placina monolopha hors de la Médi- terranée ; toutefois, cette Éponge s'y montre bien moins fréquente que la précédente; sa présence sur le littoral de l'Océan m'a été ré- vélée par un spécimen faisant partie d'un lot d'Épongés de la grève de Guéthary que m'envoya le docteur H. Viallanes. C'est à Roscoff, enfin, et là seulement, que, après bien des recherches, j'ai réussi à découvrir Z?(??'«7ms Bucklandi, àhus la grotte qu'on appelle le Trou d'argent. A l'exception de Placina dilopha, dont l'unique spécimen en ma possession m'a été adressé jadis de Bandol (Var), par le professeur Eugène Eudes-Deslongchamps, en même temps que d'autres Éponges draguées sur la ôroundo, toutes les Carnosa des eaux méditerra- néennes de France se rencontrent en abondance sur les conglomé- rats à Mélobésiées du cap l'Abeille, près de Banyuls; Placina mono- lopha, Corticium candelabrum et Dercilus plicatus, notamment, y pullulent. Oscarella lobularis, dans les mêmes parages, paraît se plaire surtout au milieu des Gorgones et des Muricées du cap Peyreflte. Plusieurs de nos Carnosa possèdent des caractères extérieurs qui en rendent aisée la détermination à première vue. Oscarella lobularis forme des plaques, souvent très étendues, dont les lobes cérébri- formes (pi, XXIII, fig. U), qui lui ont valu son nom spécifique, atti- rent presque toujours l'attention. Massive, coriace, mais compres- sible, lisse et luisante, en partie noire ou tigrée, avec, le plus souvent, un oscule solitaire, Chondrosia reniformis (pi. XXIII, fig. \) ne peut guère se confondre avec une autre Éponge, sauf peut-être, quand elle est subsphérique, avec Caminus Vulcani; encore, dans ce cas, 520 E. TOPSKNT. l'illusion ne dure-t-elle qu'un instant, Caminus acquérant par son écorce sterrastrale la dureté de la pierre. Déprimée en plaques minces et molles, criblée d'orifices inégaux et fixée au support seu- lement par quelques stolons grêles, Placina monolopha revêt toujours un aspect particulier. Corticium candelabrum se perce, il est vrai, d'orifices assez semblables, mais, même dans le jeune âge, sa forme est plus massive, globuleuse, comparable à un bouton pédicellé, à un nodule intact sur ses bords, ou enfin irrégulière, épaisse et lobée (pi. XXII, fig. 2 et flg. -12, c). Dercitus Bucklandi, en plaques étendues, lisses, du plus beau noir ou veinées de brun, offre souvent une ressemblance trompeuse avec certaines Algues en- croûtantes en décomposition. Quant à Dercilus plicatus, pour en donner le nom de prime-abord, il faut, j'en conviens, un peu d'expé- rience, mais, après en avoir déterminé deux ou trois échantillons au microscope, on arrive à reconnaître sans peine, dans l'épaisseur des conglomérats à Mélobésiées, et parmi une multitude d'Epongés saxicoles, presque toutes douées d'une certaine mollesse que leur habitat favorise, ses branches fermes et résistantes, blanches ou vio- lettes, moulées sur les anfractuosités de la roche (pi. XXII, fig. 6). Il est plus difficile de distinguer Tune de l'autre Placina trilopha, Placortis simplex et Placmastrella copiosa; sans doute, chacune d'elles porte sa marque spécifique, mais les différences restent mi- nimes et d'appréciation délicate. Je ne parle que pour mémoire de la physionomie originale du spécimen type de Thymosm Guernei, me gardant bien de proclamer la constance de caractères extérieurs qu'on n'a observés qu'une seule fois. Sous le rapport de la couleur, on peut diviser nos Carnosa en trois catégories. Chez les Microsclerophora^ les choanocytes contiennent du pigment. Les variations du jaune pâle au brun fauve dominent dans les Corticidx et les Placinidx. Elles se retrouvent chez Osca- rella lobularis, mais ici, les régions éclairées prennent fréquemment une coloration tantôt rouge vif et tantôt vert bleuâtre. Placina mo- nolopha et P. trilopha reçoivent quelquefois de même une teinte ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. 521 rosée. Placina dilopha, blanche à Triesle, a, dans la broundo proven- çale, une variété verle. Chez les Bercitus, comme chez les Sfryphnus et les Ancorina, la couleur dépend de lipochrômes qui s'emmaga- sinent dans d'énormes cellules sphéruleuses tout à fait semblables à celles des Sanidastérines (pi. XXII, fig. 8 à 10). Des deux Dercitus, celui du nord est noir en dehors, au point que Carter l'a décrit sous le nom de Dercitus niger, l'autre, ordinairement blanc, se montre fréquemment violet. Enfin, c'est par suite d'une accumulation, en proportions variables, de cellules à pigment granuleux, de même type que celles de Pacliymatisma fohnstonia, de Caminus Vulcani, etc., que l'ectosomede Ckondrosia reniformis, blanc nacré dans les points obscurs, devient violacé et même noirâtre sur les faces exposées à la lumière. La surface de la plupart des Carnosa est glabre; cela découle de la disparition des mégasclères, qui, d'habitude, rendent les Eponges plus ou moins hispides. Ckondrosia reniformis est même lisse au point de glisser de la main. Cependant, à cause de leurs micro- tritenes à clades dressés vers l'extérieur, les Dercitus sont un peu rudes au toucher. La structure générale du corps varie. On peut observer des cas extrêmes en examinant des Eponges de sous-ordres différents, en comparant, par exemple, \es Placina et Osca^^e/Za, à structure remar- quablement lacuneuse, aux Oligosilicina, à structure dense au plus haut degré; mais ils se retrouvent aussi chez des types d'un même groupe, rien ne ressemblant moins, sous ce rapport, à une coupe de Placina (pi. XXI, fig. 6) qu'une coupe de Cortrcium (pi. XXII, flg. 4). Le mésoderme, rare chez les Carnosa lacuneuses, se déve- loppe à l'excès chez les autres et devient sarcenchymateux ; il em- piète sur la lumière des canaux et enfouit de plus en plus les cor- beilles vibratiles dans sa masse. On peut donc voir chez les Carnosa trois sortes de corbeilles vibra- tiles : \° celles qui communiquent largement avec les canaux aquifères, comme chez les Placina (pi. XXI, fig. 6); on les dit eury- S22 E. TOPSENT. ptjleuses; 2" celles qui, commençant à s'en écarter, restent en rap- port avec eux par un conduit court et relativement large {Dercilus, Corticium); elles sont aphodales; 3" celles enfin, qui, profondément situées, sont munies d'un canalicule étroit et très long [Chondrosia, Thymosia); je propose de les RpT^e]ev doUchodales. Cette nomenclature diffère notablement de celle de SoUas que j'ai donnée dans mon mémoire sur les Tétractinellides de France (46, p. 285). Gela tient à ce que les corbeilles envahies par le mé- soderme ne me paraissent nullement desservies, comme le suppo- sait Sollas, par deux canaux, l'un d'entrée, l'autre de sortie. Dans mes figures de coupes de Tétractinellides, de système aphodal, je n'en ai marqué qu'un seul, d'après mes observations, mais je crai- gnais d'avoir mal vu. Mes doutes se sont bientôt dissipés; je me trouvais d'accord avec Lendenfeld, qui, lui, niait formellement l'exis- tence d'un second canal. L'étude des Oligosilicina, qui devait tran- cher la question, m'a confirmé dans mon opinion; mes coupes de Chondrosia reniformis, comme celles à'Oscarella lobularis^ me dé- montrant l'inexactitude surprenante des dessins de Schulze. Le système diplodal, au sens classique, n'existe pas; chez Osca- rella lobularis, les corbeilles présentent, il est vrai, fréquemment plusieurs orifices, mais cela provient de ce que, dans cette Éponge • lacuneuse, elles se trouvent à cheval sur plusieurs canaux contigus de même ordre (pi. XXIII, fig. 11). Du même coup, l'expression cor- beilles aphedales change de sens et ne désigne plus des corbeilles à deux voies. L'ectosome des Carnosa est aussi conformé de diverses façons. Comme celui des Stryphnus , celui des Dercitus se décompose (pi. XXII, figi 8) en un ectochrote mince, chargé de microrhabdes épineux, et en une zone collenchymateuse qui occupe presque toute son épaisseur; dans cette dernière s'entassent les grosses cel- lules sphéruleuses dont il a déjà été question. Chez Chondrosia reni- formis, l'ectosome, comparable à celui des Sterrastrosay moins la couche sterrastrale, atteint une grande épaisseur (1 à 3 millimètres) ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCK. S23 et un degré de complication extrême; chargé de suppléer la spicu- lation absente, il acquiert, en devenant fibreux, une solidité remar- quable. Chez les Microsclerophora, l'ectosome est chondrcnchyma- leux, c'est-à-dire formé de cellules sphéruleuses parsemées dans une substance fondamentale anhiste. Il reste assez mince à la face supérieure du corps, mais prend une plus grande importance à la face inférieure, pour constituer les stolons de fixation et pour limiter et cloisonner un curieux système de lacunes, Vhypophare, où se dé- versent les canaux afférents du système aquifère,et d'où remontent presque en droite ligne les canaux efférents jusqu'aux oscules. Les pores, disséminés sur toute la surface libre chez les Oligosili- cina et les Dercitus, se localisent, chez les Microsclerophora, à la face supérieure du corps. Suivant les cas, ils communiquent avec le mi- lieu ambiant soit par des euthuchones, soit par des plagiochones, aux- quels ils s'abouchent directement ou par l'intermédiaire de cavités préporales. Ces termes nouveaux exigent une explication. Les cavités préporales sont ce que l'on a longtemps désigné sous le nom à.Q cavités sous-dermiques (v. 46, p, 278), et pour lesquelles Delage (i4) a proposé celui de cavités superficielles. L'ancien terme était défectueux, en effet, en ce sens que l'ectosome, au-dessous duquel peuvent s'étendre ces cavités, plus ou moins vastes suivant qu'il adhère plus ou moins au choanosome, n'est pas comparable à un derme. Le nom de cavités superficielles présente un autre incon- vénient, celui de laisser dans l'esprit une certaine confusion entre ces lacunes sous-ectosomiques et les lacunes qui, fréquemment, s'établissent dans l'épaisseur même de l'ectosome, sur le trajet des chones aquifères. Pour préciser leur situation, je préfère appeler les premières cavités préporales ^ parce qu'elles servent toujours d'atrium à un pore ou à un groupe de pores; le nom de cavités intra corticales convient parfaitement aux autres. 11 arrive souvent que l'ectosome, surtout quand il est épais, s'ap- plique largement sur le choanosome; les cavités préporales, réduites à un minimum, deviennent alors indistinctes; le pore lui-même 524 E. TOPSENT. conserve à peu près le calibre du chone aquifère auquel il fait suite, et en paraît la continuation directe; leur séparation n'est marquée que par un diaphragme contractile, plus ou moins évident, chargé d'ouvrir ou de fermer le canal qui pénètre dans le choanosome. Que les cavités préporales soient vastes ou virtuelles, le chone aquifère peut descendre d'un stomion unique ou d'un groupe de stomions; dans le premier cas, il est dit,fcomme on sait, uniporal; il est cribriporal dans le second. Mais il y a une autre manière d'envi- sager les choses. Les chones uniporaux descendent, d'ordinaire, en droite ligne, jusqu'au pore ou jusqu'à la cavité préporale : ce sont des chones directs ou euthuckonesK Le trajet des chones cribripo- raux, au contraire, varie beaucoup. Tantôt, comme dans \esGeodîu, ils descendent aussi en droite ligne, presque sans changer de calibre. Tantôt ils se divisent en deux régions très nettes, l'externe, ecto- chone, oii s'opère progressivement, et souvent sur une grande lon- gueur, la réunion des canalicules issus des stomions, et l'interne, endochone, qui, sous la forme d'un canal simple provenant de cette fusion, traverse les couches profondes de l'ectosome ; c'est ce qu'on voit, par exemple, chez Chondrosia renz/oj'mz's (pi. XXIII, fig. 3), comme nous l'avions déjà observé chez Pachyniatisma johnstonia et chez Caminus'Vulcani. Quelquefois enfin (nous en avons trouvé des exemples en étudiant Cramella cranium, Sanidaslrella coronata, etc.), les chones cribriporaux se répandent dans l'épaisseur de l'ectosome en lacunes irrégulières. En somme, les chones issus de stomions multiples peuvent être directs ou indirects; ce sont, suivant les cas, des euthuchones ou des plagiochones^. Ces expressions ont l'avan- tage de s'appliquer aussi aux chones exhalants; le chone exhalant à un seul proction de Chondrosia reniformis ou de Caminus Vulcani est un euthuchone; de même, le chone exhalant à proctions multiples des Geodia est un euthuchone; celui des Ancoi^ina est, au contraire, un plagiochone. 1 EÙ9Û;, direct. 2 nxà^io;, indirect. ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. S25 Les oscules d'Oscarella lobidaris s'ouvrent au sommet des lobes les plus hauts (pi. XXIII, flg. 9); ceux de plusieurs autres Carnosa forment des papilles éparses, ordinairementpeu nombreuses. Placi- nastrella copiosa (pi. XXI, fig. 8) et Chondrosia reniformis (pi. XXIII, flg. 1) n'ont, d'habitude, qu'un seul oscule, surélevé. Dans les Pla- cina, Placorlis et Corticmm, les oscules ne se distinguent pas des pores extérieurement, si ce n'est, peut-être, par leur diamètre sou- vent un peu plus grand; il faut se garder de prendre, comme on l'a fait quelquefois, les stolons fixateurs de ces Éponges pour des tubes exhalants. Il n'existe pas de mégasclères diactinaux dans les Carnosa (excepté chez les Ti'iptolemus). Quelques-unes sont tout à fait dépourvues de spicules; l'écorce fibreuse de Chondrosia reniformis, les fibres de spongine en rognons de Thymosia Guernei (pi. XXIII, fig. 7 et 8) en tiennent lieu; mais Oscarella lobularis n'a d'autre soutien que son chondrenchyme. Chondrilla nuculanom manque, malheureusement; elle nous fournirait un exemple d'Epongé ne possédant d'autres spi- cules que des asters. Dans les Corlicidx et les Placinidai, les seuls spicules présents sont des microsclères, typiquement des microcal- thropses. Chez les Placina et Placlnastrella, ces microcalthropses, en forte proportion, se réduisent à trois actines ou à deux actines seu- lement, se transformant ainsi partiellement en microlriodes et en microxes (pi. XXI, fig. H). La transformation est complète chez Pla- corlis simpi ex (pi. XXI, fig. 7). Inversement, dans les Placina et chez Corticium candelabrum, les microcalthropses superficiels se com- pliquent, ramifient et couvrent d'ornements une ou plusieurs de leurs actines, ou toutes les quatre à la fois, et deviennent des candé- labres ou lopliolrixnes caractéristiques, mono-, dl-, tri- ou tétralo- phés, suivant les cas (pi. XXI, fig. 2, 3, 5, et pi. XXII, fig. 5). Enfin, dans les Uercitus, il y a des mégasclères tétractinaux et des micro- sclères; mais les premiers sont des calthropses ou des tnicrotrimnes, à rhabdome aussi court que les clades ; les microsclères sont des microrhabdes épineux (pi. XXII, fig. 7 s), tels que ceux des Sanidas- 526 E. TOPSENT. térines, et, en plus, chez Bercitus Bucklandi, des loxes (46, pi. XIV, fîg. 5, f), qui dérivent d'oxyasters à rayons grêles. On ne connaît rien de ce qui peut se rapporter à la reproduction des Dercitus et des Oligosilicina. Notre ignorance sur ce point n'a d'égale que celle dont nous nous étonnions à propos des Tétracti- nellides. J'ai étudié, pour ma part, à plusieurs reprises, Bercitus phcatus et Chondroaia reniformis, du mois de novembre au mois de mars, sans y trouver de traces d'éléments sexuels ; je n'ai pas eu, il est vrai, l'occasion de les examiner durant la belle saison. Par contre, les renseignements abondent au sujet des Microsclerophora ; on sait, par exemple, que Corticium candelabrum, Placina monolopha et P. trilopha sont hermaphrodites, et que, au contraire, Oscarella lobularis a les sexes séparés; on a constaté que la ponte, chez ces Éponges, s'accomplit le plus souvent à la fin de l'été ou en automne, et que les larves, qui se développent dans l'épaisseur du chondren- chyme, constituant le plafond de l'hypophare et la paroi des canaux larges du voisinage, sont, au moment de leur mise en liberté, petites, oviformes, creuses, entièrement et à peu près uniformément ciliées, avec, d'ordinaire, une calotte postérieure colorée. F.-E. Schulze a décrit, en outre (36), chez Oscarella lobularis, un mode de multiplication par gemniiparité qui mériterait de nouvelles observations attentives. Bien que les Carnosa de la faune française, donljc me propose de retracer la description dans les pages qui vont suivre, soient en nombre restreint, je pense, en les disposant en un tableau dicho- tomique, fournir au lecteur un guide pour la détermination rapide de quelques-unes d'entre elles. TABLEAU .\NALYTIQUE. ( Ni desmas, ni tritenes à long rhabdotuc, ni mégasclères diactinaux ; des ( calthropses ou pas de spicules du tout Ordre Carnosa 2. [ Des calthropses 3. f Pas de spicules du tout 8. ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. 527 Calthropses affectant en grand nombre la forme de mierotriaines à rhab- dome court (plagio- ou dichotriaenes, pi. XXII, fig. 7, o, cl), et accom- pagné!?, à titre de microsclères, de microrhabdes épineux (pi. XXII, fig. 7, s), sans spirasters ni amphiasters (46, pi. XIV, fig. 4, a). Genre Dercitus 4. Calthropses de petite taille (raicrocalthropses), n'ayant pas d'habitude la forme de plagiotriéenes ni de dichotritenes, non accompagnés de micro- rhabdes épineux 5. Microtriifnes à clades simples (plagiotriaenes) ; outre les microrhabdes épi- neux, il existe des toxes (46, pi. XIV, fig. 5, t).. Dercitus Bucklandi. Microtriœnes à clades simples ou bifides (plagiotriaenes ou dichotriaînes, pi. XXII, fig. 7, 0, d) ; pas de toxes avec les microrhabdes épineux. Bercitus plicatus. Microcalthropses en partie modifiés par complication ou par réduction. 6. Microcalfhropses tous modifiés, par réduction, en microtriodes et en mi- croxes (pi. XXI, fig. 7) Genre Placortis; P. simplex. Microcalthropses en partie modifiés, seulement par complication, les plus superficiels se transformant en candélabres à trois pieds (pi. XXII, fig. 5). Genre Corticium ; C. candelabrum. Microcalthropses en partie modifiés, seulement par réduction, en micro- \ triodes et en microxes; pas de lophotriœnes; spicules de trois grandeurs (pi. XXI, fig. 11) Genre Plucinu.streJla ; P. copiosa, Microcalthropses modifié», en partie par réduction en microtriodes et mi- croxes, et en partie par complication, les plus superficiels se transformant en lophotriîpnes (pi. XXI, fig. 2,3,5) Genre Placina 7. ' Lophotria'nes monolophés (pi. XXI, fig. 2, c) Placina monolopJia. Lophotii;enes typiques dilophés (pi. XXI, fig. 3, c) ; ils se trouvent ordi- nairement mélangés de lophotri;enes anormaux Placina dilophu. Lophotriîenes trilophés et tétralophés(pl.XXI,fig. b,c, ?<). Placi)in trilopha. Des fibres verticales de spongine en rognons (pi. XXIII, fig. 7 et 8) ; Eponge massive, dense, sans écorce bien distincte. Genre Thyniosia; T. Gucrnci. Pas de fibres de spongine 9. Ecorce bien distincte, épaisse de 1 à 3 millimètres et très coriace ; surface unie ; structure dense (pi. XXIII, fig. 2) Genre Chondrosia ; C. rcniformis. ' Pas d'écorce ; structure lacuneuse ; consistance molle ou semi-cartilagi- neuse ; corps en plaques lobées, cérébriformes ; cellules épithéliales fla- gellées (pi, XXllI, fig. 9) Genre Oscarellu ; 0. lobularis. > Rappelons qu'il exisle des Éponges sans squelette dans d'autres groupes que celui-ci, mais les caractères de ce tableau ne leur conviennent pas, car elles n'ont ni écorce épaisse et coriace, ni lobulation serrée, ni cellules épithéliales flagellées. Il n'y a donc pas matière à confusion. S28 E. TOPSENT. DESCRIPTION DES ESPÈCES. I. Sous-ordre Microtrœxosa. Genre Dercitus Gray. Microtriœnosa pourvues d'orthotrisenes ou de dichotrisenes (quel- quefois les deux ensemble) à rhabdome court, à cladome lisse, et de microrhabdes épineux quelquefois accompagnés de toxes. Dercitus Bucklandi (Bowerbank) Gray *. Syn. : 1861. Halina Bucklandi, Bowerbank '^ 1866. Hymeniacidon Bucklandi, Bowerbank (2, vol. II, p. 226). 1867. Dercitus Bucklandi (Bow.), Gray (-16, p. o42). 1870. Pachastrella Bucklandi (Bow.), Schniidt f32. p. 76). 1871. Dercitus Jiiger, Carter (4, p. 3; pi. IV, fig. 1-6). 1874. Battersbyia Bucklandi, Bowerbank (*, vol. III, p. 346). 1882. Dercitus Bucklandi (Bow.) Gray, Norman (2, vol. IV, p. 93). 1888. Dercitus Bucklandi {Bo\s'.) Gray, Sollas (40, p. 108). Eponge encroûtante, informe, en grandes plaques d'épaisseur variable (2 cen- timètres et davantage). Surface lisse, un peu rugueuse à l'état sec, assez régu- lière, quelquefois plissée sur les bords et formant ainsi des crêtes assez sem- blables à celles des Placospongia. Oscules simples, cratériformes, solitaires ou par groupes ; pores petits, dispersés sur toute la surface. Ectosome coUenchy- mateux. Spicules. — I. Mégasclères : 1. Microtriœnes (/. c, fig. b, e) méritant soit le nom de calthropses, soit, surtout dans les régions périphériques, celui de plagio- triœnes ; actines lisses, coniques et pointues, droites ou courbées et dirigées par trois dans le même sens, de manière à simuler un cladome, longues de 310 à 320 (^., et épaisses à la base de 38 à 4o a. II. Microsclères : 2. Microrhabdes épineux (lig. 5, s), longs de 21 à 27 u., épais de 6 à 8 f.. 3. Toxes (fig. 5, t) lisses, longs de 7o à 90 [a, épais de 2 à 3 (i.. Couleur. — A l'état frais : noire uniformément, ou noire veinée de brun, ou brun noirâtre à la surface, grise en dedans, avec la paroi des larges canaux aqui- fères en brun. Après dessiccation : noire à la surface, gris jaunâtre à l'intérieur. Habitat. — Torquay, Devon ; île Guernesey (Bowerbank). Budley-Salterton, Devon (Carter). Westport-Bay,\Vest-Ireland (Norman). Côtes de Bretagne : Roscoff. Espèce littorale. 1 Voir, pour les spicules de cette Éponge, 46, pi. XIV, fig. 5. - Bowerbank (J.-S.), List. Brit. Marine Invert, {lirit. Assvc.},p. 7U. ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. 529 Longtemps, Dercitus Bucklandi ne m'a été connu que par des fragments de spécimens reçus en communication de l'illustre spon- gologiste Carter, qui les avait recueillis à Budleigh-Salterton,et qui, croyant avoir affaire à une variété noire du Spongiaire fort impar- faitement décrit par Bowerbank, les avait fait connaître sous le nom de Dercitus niger. Comme il a été découvert aux îles anglo-normandes et signalé en deux localités du Devon, je l'ai cherché avec soin sur notre littoral de la Manche et j'ai fini, tout récemment, par le trouver à Roscoff, tapissant de plaques grandes comme la main une petite grotte connue sous le nom de Trou d'argent, sur le rocher de Menanet. Peut-être suis-je, ailleurs, passé plus d'une fois devant lui sans y prendre garde, tant il ressemble, déprimé, luisant et noirâtre, à cer- taines Algues encroûtantes lorsqu'elles entrent en décomposition. Les détails anatomiques notés par Carter sont d'une parfaite exactitude ; ils olî'rent l'avantage de rester faciles à observer après dessiccation. La limite de l'ectosome et du choanosome apparaît très nette. Le premier, constituant une écorce épaisse, se laisse décomposer en trois couches : l'externe, mince et incolore, litté- ralement chargée de microrhabdes épineux; la moyenne^ la plus épaisse, purement collenchymateuse, remarquable par une accumu- lation de grosses cellules sphéruleuses olivâtres, à matière colorante contenue dans des grains ovoïdes plus ou moins pressés les uns contre les autres ; l'interne, enfin, présentant, une fois desséchée, l'aspect d'un liséré blanc, parce qu'elle contient surtout des micro- trieenes serrés dans une trame sarcodique pauvre en cellules sphé- ruleuses. Le choanosome est gris jaunâtre ; les cellules sphéruleuses s'y montrent plus rares; les calthropses, sans ordre, y sont aussi plus clairsemés; les toxes, en revanche, y deviennent relativement nombreux. L'existence de ces toxes dans une Eponge à mégasclères tétracli- naux peut être considérée comme le caractère le plus frappant de Dercitus Bucklandi, On ne l'a pas constatée ailleurs, dans les Tetrac- ARCH. DE ZuOL. EXP. ET GÉK. — 3<= SÉRIE. — T. 111. 1895. 34 530 E. TOPSENT. tinellida vraies, ni chez les Carnosa. A tel point qu'O. Schmidt n'hé- sitait pas à formuler cette opinion que ces microsclères, d'habitude caractéristiques du groupe des Desmacidines, avaient dû se trouver accidentellement mêlés à la préparation. De son côté, Sollas, ne doutant plus qu'ils fussent bien en place, a tenté d'expliquer l'ori- gine de ces organites inattendus. Il les a considérés comme des microxes modifiés par croissance curviligne. A mon avis, Sollas est passé à côté de la vérité : après avoir rappelé que, chez Caminus ajnarium Schm. (32, pi. VI, fig. 4), on observe aussi des spicules comparables à des toxes et dérivés évidemment d'asters réduites à deux actines, il s'est trop empressé de repousser toute assimilation avec les toxes de Dercitus Bucklandi. Dans un genre d'Épongés dont je crois avoir su ffisamment démontré la proche parenté avecles Cliona et, par suite, la position naturelle parmi les Clavulida, où les toxes manquent d'ordinaire, chez les Thoosa, en un mot, nous rencontrons des exemples palpables de la transformation d'oxyasters en toxes. Thoosa FischeiH (43, p. 58-2, pi. XXII, fig. -16) possède des oxyasters à quatre, trois ou deux actines flexueuses; celles à deux actines, tricurvées, conservent un rudiment de la troisième actine atrophiée. Thoosa Letellieri{loc. c/^, fig. 17) n'a que des oxyasters à deux actines et tricurvées, les unes avec rudiment de la troisième actine frappée d'atrophie, les autres sans épaississement médian et, par suite, ne différant en rien de toxes méritant ce nom. Enfin, chez Thoosa circumflexa [loc. cit., fig. 10), il n'existeplus que des toxes sans centrum apparent, aussi purs, par conséquent, que ceux de Bercitus Buck- landi, et dégénérant à leur tour en microxes. Ainsi, les Thoosa pro- duisent leurs toxes aux dépens de leurs oxyasters, par simplification, leurs autres microsclères caractéristiques, qui sont aussi des asters (des amphiasters et des pseudosterrasters), conservant leur forme. Est-il déraisonnable d'admettre que les toxes de Détritus Bucklandi proviennent, de même, d'oxyasters à rayons longs et grêles, telles que celles de Corticella stelligera, par exemple ? ETUDE MONUGBAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. 331 Dercitus plicatus (Schmidt) Lendenfeld. (PI. XXII, fig. fi-lO.) Syn. : 1868. Corticium plicatum, Schmidt (S-l, p. 2; pi. III, fig-. 11). 1888. Calcabrina plicata (Schin.), Sollas (40, p. 281). 1894. Dercitus plicatus (Schm.), Lendenfeld (S4, p. 17; pi. II, fig. 10,et pi. TII, fig. 43). Eponge informe, encroûtante, le plus souvent enfoncée dans les anfractuosités des pierres et cachée sous les Mélobésiées. Consistance ferme. Surface libre, peu étendue, assez régulière, légèrement rugueuse. Oscules simples, solitaires, ayant l'aspect de petites papilles coniques ; pores sans crible stomial, non surélevés, étroits, invisibles à l'œil nu. Ectosome coUenchymateux. Spicules. — I. Mégasclères : 1. Microtria^nes figurant soit des calthropses (fig. 7, c), soit des plagiotritenes (lig. 7, o, o'), soit enfin des dichotricenes(fig. 7, (/, d'), le tout en proportions variables suivant les individus. Les actines simples de cesj spicules mesurent, dans leur état de complet développement, 170 à 200 \j. de longueur sur 2o à 30 {/. d'épaisseur à la base. IL Microsclèrcs : 2. Microrhahdes épineux (fig. 7, s), longs de 12 à 15 p., épais de 2 à 3 p.. Couleur. — Blanche à la surface, jaune pâle à l'intérieur. Il n'est pas rare non plus de la trouver violacée à l'état frais ou de la voir virer au violet après immersion dans l'alcool étendu. Habitat. — Côtes d'Algérie (Schmidt) ; Naples (Vosmaer) ; Lésina, Adriatique (Buccich). Côtes méditerranéennes de France : Bandol ; Banyuls, cap l'Abeille. Dercitus plicatus est extrêmement commun à Banyuls, notamment dans les parages du cap l'Abeille ; on n'y drague guère de bloc un peu considérable des conglomérats à Mélobésiées qui n'en abrite quelque échantillon. Dissimulée sous un tapis d'algues calcaires, cette Éponge s'enfonce profondément dans les moindres anfractuo- sités de la roche et les emplit, se moulant sur elles. Aussi ne par- vient-on jamais à la dégager tout entière, à moins d'employer les acides. En se servant du marteau et du ciseau à froid, on ne réussit qu'à la morceler; elle jouit, il est vr^i, d'une consistance relative- ment très ferme, mais les caprices de sa retraite l'obligent presque toujours à se diviser en branches trop grêles pour résister à une traction un peu énergique. On en obtient, par ce procédé sommaire, 532 E. TOPSENT. des fragments comparables à celui dont j'ai donné la photographie (pi. XXII, fig. 6). La surface de ces ramuscules se montre, on le conçoit, fort irrégulière, et c'est elle, sans nul doute, dont Schmidt a parlé. Au contraire, la surface libre du corps, celle qui, portant les orifices du système aquifère, communique directement avec la mer, est plane et seulement un peu rude sous le doigt. Il n'est pas toujours aisé de la découvrir, car elle est d'ordinaire peu étendue et se couvre fréquemment d'un dépôt de matières étrangères. D'habitude, Dercitus plicatus est blanc, du moins il apparaît tel à travers la couche serrée de microrhabdes épineux qui limite sa sur- face libre et ses ramifications souterraines ; sous ce revêtement, lectosome, collenchymateux, possède une teinte jaunâtre due à la coloration propre de ses grosses cellules sphéruleuses. Toutefois, il arrive que le contenu de ces cellules passe de lui-même au violet. Bien des fois, j'ai trouvé, au sortir de la drague, de ces Dercitus ainsi teintés, au moins dans leurs régions superficielles. Bien souvent aussi, j'ai vu des spécimens tout blancs devenir violets peu de temps après leur immersion dans l'alcool étendu. Ce phénomène traduit quelque modification chimique subie de la part d'une substance emmagasinée surtout, sinon exclusivement, dans les cellules en question ; il rappelle celui qui, dans des conditions identiques, se produit chez certains autres Spongiaires tels que Aplysina aeroplioba^ Aplysilla sulfurea, etc., et qui peut être interprété comme l'effet d'une oxydation. Notons cependant cette différence qu'il ne se ma- nifeste pas d'une façon constante chez notre Dercitus. 0. Schmidt a seul parlé de visu de Dercitus plicatus, l'appelant Corticium plicatum. La description assez succincte qu'il en a donnée (31, p. 2) pèche même par plusieurs inexactitudes. J'ai déjà relevé celle ayant trait à l'état de la surface ; j'aurai plus loin l'occasion de rectifier ce qui concerne l'anatomie et la spiculation. Sollas (40, p. 281) s'est forcément borné à traduire les quelques lignes de Schmidt. En créant pour ce prétendu Corticium le nouveau genre Calcahrina^ qu'il a placé dans ses Microsclerophora^ il n'a pas soup- ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. S33 çonné ses affinités pourtant évidentes, d'une part, avec Dercitus Bucklandi, dont il fait une Pachastrellide, et d'autre part, avec le Samus simplex Carter, pour lequel il est allé jusqu'à établir encore un autre genre, le genre Stœba, parmi ses Theneidx. Lendenfeld a comnaencé ce rapprochement si naturel en supprimant le genre Cal- cabrina : mais, amené par la découverte qu'en fit Buccich, à Lésina, à fournir, dans sa monographie des Spongiaires de l'Adriatique, quelques détails au sujet de Dercitus plicatus, il s'est trouvé, faute de matériaux, dans la nécessité de répéter aussi, avec ses erreurs, la description primitive. Schmidt supposait que, par ses parties molles, l'Éponge doit res- sembler aux Corticium et Chondrosia. Présentée en ces termes vagues, l'hypothèse ne signifie rien ; formulée d'une façon plus précise, elle manquerait de fondement. Avec son écorce très épaisse percée de plagiochones (pi. XXIII, fig. 3), avec ses corbeilles vibra- tiles fort petites et pourvues d'un canal de longueur exceptionnelle (pi. XXIII, fig. 4), Chondrosia reniformis diffère profondément de Corticium candelahrum, remarquable, de son côté, par ses grandes corbeilles et par le revêlement épithélial de son système aquifère (pi. XXII, flg. 3 et 4). Or, Dercitus plicatus (pi. XXII, fig. 8 et 10) ne lient, sous ces divers rapports, ni de l'un ni de l'autre. C'est avec Dercitus Bucklandi que la comparaison s'impose. La limite de l'ectosome et du choanosome n'est pas aussi tranchée chez Dercitus plicatus que chez son congénère parce que les micro- triaenes s'avancent de proche en proche et sans ordre jusqu'au voi- sinage de la surface. L'ectosome ne constitue donc plus une écorce détachable et se réduit à deux couches (pi. XXIl, flg. 8), l'externe, mince et incolore (e), chargée à profusion de microrhabdes épineux, et l'interne, épaisse, collenchymateuse, composée de plusieurs assises de grosses cellules sphéruleuses (s) dans une trame conjonctive (o), et armée de microtriasnes (m). La ressemblance de part et d'autre reste plus frappante que la différence, toute de détails. Remarquons aussi combien Tectosome des Dercitus rappelle celui S34 E. TOPSENT. des Stryphnus^ : dépourvu de zone fibreuse interne, il se compose de même essentiellement d'une masse importante de coUenchyme à cellules sphéruleuses énormes, creusée de chones inhalants irrégu- liers (pi. XXII, fig. 8, i] et limitée au dehors par un ectochrote où s'accumulent les microsclères. Le choanosome présente également des deux côtés une constitution identique^ : un sarcenchyme el des corbeilles petites, à canal court et large. Le système aquifère est construit sur le même type. Seule, au premier abord, la spiculation paraît par trop dissemblable, mais, en y regardant de près, on re- connaît que les microrhabdes des Dercitusi correspondent, non pas peut-être exactement aux amphiasters des Stryphnus (quoique celles-ci passent souvent aux sanidasters), mais aux sanidasters de tant d'autres Sanidasterina. En dehors des mégasclères monaxiaux qui ont bien pu, ici, comme chez les Thoosa^ disparaître par adapta- tion à un mode de vie assez particulier, il ne manque aux Dercitus que des oxyasters pour posséder tous les spicules des Stryphnus. Mais il n'est pas douteux que ces oxyasters ont existé primitivement, car nous en retrouvons la trace sous forme de toxes chez Dercitus Bncklandi. Le mystère de leurs affinités réelles pourrait bien, de la sorte, se trouver éclairci : les Dercitus seraient des Sanidastérines dégénérées. Par leurs dimensions extraordinaires, les cellules sphéruleuses de Dercitus ph'catus attirent immédiatement l'attention dans les coupes et dans les fragments examinés sur le vif. Elles atteignent en moyenne un diamètre double de celles de Stryphnus mucronatus (46, pi. XVI, fig. 12, /?, d), soit environ 70 \i et n'ont guère d'égales que celles d'/sops intuta (46, pi. XVI, fig. i21, v). Il va sans dire qu'elles ne se confinent pas exclusivement dans l'ectosome et que l'on en trouve aussi d'éparses dans le choanosome, le long des principaux canaux aquifères. A l'état frais, elles se montrent réellement formées de » Voir 46, p. 372. - Comparer, à ce propos, 46, pi. XVI, la figure 12 et, dans le présent mémoire, la figure 10, pi. XXir. ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCR. S3ÎJ sphérnles, non réfringentes et jaunâtres (pi. XXII, fig. 9), mais sur les coupes, elles changent complètement d'aspect; ce sont alors des vésicules dont le contenu s'est condensé en un amas granuleux autour d'un beau noyau nucléole (pi. XXII, fig. 10, s). Tandis que les microtriœnes s'entre-croisentdans toutes les parties de l'Éponge, les microrhabdes se localisent dans l'ectochrote. Quelques-uns s'éparpillent aussi, mais sans s'avancer jamais bien loin, sur la paroi des canaux inhalants. Les mesures qu'on en avait données sont inférieures à celles que j'ai prises sur de nombreux individus. Schmidt ne leur a trouvé que 8 ]j. de longueur ; Lendenfeld ne leur en accorde que 6 à 7 sur 1 [;. et demi de largeur. Ils atteignent en réalité 12 à 15 (j. de longueur sur 2 à 3 [>. d'épaisseur, en comptant les épines. Les microtrifenes sont sujets à des variations dont il était difficile de donner une idée dans la diagnose de l'espèce. Les plus abondants dans tous les spécimens que j'ai examinés sont, conformément aux indications de Schmidt, ceux à cladome simple (fig. 7, c, o), cal- thropses ou plagiotrisenes. Quelquefois même, il ne s'en produit pas d'autres. Ou bien il existe en même temps des dichotriœnes (fig. 7, d) en proportion variable, quelquefois en très petit nombre, plus rarement en quantité plus considérable que les calthropses; ils se disposent, en général, au voisinage de la surface et au pourtour des canaux larges; ils y sont, bien souvent, de taille plus petite (rf') que les callhropses internes, et s'y montrent tantôt seuls et tantôt accom- pagnés de calthropses grêles comme eux (o'). Constatons que Schmidt et Lendenfeld ont figuré ces dicholriaenes avec des proto- clades plus longs que les deutéroclades, alors que l'inverse est con- stant. De plus, en ce qui concerne les dimensions moyennes des cal- thropses qui constituent la masse fondamentale de sa charpente, Dercitus plicatus subit des variations individuelles. Et cela explique un peu comment Schmidt et, sans doute d'après lui, Lendenfeld ont relevé sur ces microtriaenes des mesures si faibles : la longueur des 536 K. TOPSENT. actines serait, d'après eux, de 60 ix. J'ai trouvé, pour ma part, celles des beaux calthropses des échantillons à squelette robuste longues de 170 à 200 \). et épaisses de 25 à 30 ^ à la base. Par sa couleur, par ses dichotrisenes, par son ectosome armé de microtriaenes et par les dimensions moindres de ses mégasclères et microsclères,Z)em^ws/3//eaa.5wcA'/«n6?2. C'est encore, jusqu'à présent, une espèce exclusivement méditerra- néenne. J'éprouve cependant quelque hésitation sur ce dernier point. De Dercùus simplex (Carter), du golfe de Manaar, on ne connaît que les spicules et ceux-ci, parleur forme comme par leur taille (les micro- rhabdes ont 1^2 à 13 [j. de longueur et le rhabdome des dichotrisenes mesure 210 1^. de long sur 42 de large), ressemblent singulièrement à ceux de D. plimtus. Pour séparer ces deux espèces, il n'y a pas d'autre motif à invoquer que l'absence des calthropses chez Dercitus simplex. La variabilité déconcertante du squelette de Dercitus plicatus ôte, on en conviendra, beaucoup de sa valeur à ce caractère. Nous ne pou- vons oublier l'exemple de Geodia conchilega, chez qui les trisenes sont tantôt rien que des orthotriaenes, tantôt rien que des dicho- triœnes, ou enfin un mélange en proportions variables de ces deux sortes de mégasclères. Quant à la dernière espèce du genre, Dercitus exostoticus (Schmidt) des côtes d'Algérie, elle semble caractérisée par ses microrhabdes irréguliers, à moins qu'elle n'ait été créée hâtivement d'après un D. plicatus monstrueux. C'est toujours d'octobre à mars que j'ai recueilli et examiné Der- citus plicatus. Je n'y ai point observé d'éléments reproducteurs. Genre Thrombus SoUas. Microtrisenosa pourvues de trichotrisenes épineux, et quelquefois {Thrombus abyssi) d'amphiasters pour microsclères. ÉTUDE iMONOGRAPHlQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. 537 Thromhus abyssi (Carter) Sollas. (PI. XXII, fig. 11.) Syn. : 1873. Corticmm abyssi. Carter (5, p. 18 ; pi. I, fig-. 1-9 et i'6). 1888. Thromhus abyssi (Carter), Sollas (40, p. 282). Éponge informe, enveloppante, massive. Consistance semi-cartilagineuse. Sur- face lisse, régulière. Oscules nombreux, petits, de forme variable, groupés sans ordre çà et là. Pores microscopiques, simples, uniformément répandus sur toute la surface. Spicules. — I. Mégasclères : 1. Trichotrisenes épineux (t,t',m) abondants dans toutes les parties de l'Éponge, mais plus serrés à la périphérie, où ils se dis- posent, le cladome en dehors, en une assise de soutien de l'ectosome. La corde de leur cladome mesure environ oo y,. Leur rhabdorae, muni d'un renflement constant, ne dépasse guère 60 \j. de longueur au-dessous du cladome ; il se pro- longe au-dessus en un bouton épineux longuement pédoncule. La forme grêle de ces microtria^nes est lisse {t') et n'a que des pointes aiguës. II. Microsclères : 2. Amp/iiasters («) excessivement petites, puisqu'elles n'at- teignent que 5 a de longueur ; leur axe, droit et grêle, porte à chaque extrémité quatre épines recourbées vers lui. Il y en a par tout le corps, mais elles abondent surtout autour des larges canaux aquifères. Couleur. — Gris jaunâtre pâle. Habitat. — A l'entrée de la Manche (campagne du Porcupine, 1870, Stn. 3), par 48^31' de latitude N. et iOoS' de longitude 0., et par 500 brasses de profon- deur, sur des Lophohelia. De cette Éponge, draguée seulement par le Porcupine, à une dis- tance déjà assez considérable de nos côtes, je n'ai vu que les spi- cules (pi. XXII, fig. 11); encore suis-je redevable de cette bonne for- tune à la générosité de M. le Révérend A. -M. Norman, qui m'a fait don de préparations prélevées sur le type spécimen. Gomme l'espèce ne peut être qu'indirectement rattachée à la faune française, je renvoie le lecteur, pour complément d'informa- tions, à la longue description que Carter en a faite (5, p. 18-22), notamment pour tout ce qui concerne l'histologie. Je rappellerai à ce propos que Sollas, qui a fourni des détails (40, p. 276) accom- pagnés de figures (pi. YIII), sur l'anatomie fine de Thrombus Chai- lengeri, a conclu à la similitude de la chair de ces deux Éponges. 538 E. TOPSENT. Des caractères anatomiques de Thrombus abyssî,']e ne veux retenir ici que les suivants : le mésoderme, très développé, est coUenchy- mateux, et les corbeilles, à canal long et vaste, ont de faibles dimen- sions. Cela suffit à prouver que Thrombus abyssi n'a aucun rapport de parenté avec les Hexactinellides. Sa spiculation pouvait, jusqu'à un certain point, faire naître le doute sur des affinités plus ou moins lointaines dans cette direction. Ses amphiasters offrent quelque res- semblance avec les amphidisques des Hyalonematidœ, dont elles au- raient représenté un diminutif; le prolongement apical et le renfle- ment médian du rhabdome de ses microtrisenes attiraient aussi l'attention par leur constance. En fait, ces amphiasters rappellent bien davantage les isochèles des loti'ochota, Sans d'ailleurs que la moindre liaison se perçoive entre les Thrombus etcesDendoricines.On ne les retrouve pas dans les espèces voisines, et je ne juge pas qu'elles indiquent quant à présent les affinités réelles des Thrombus. Parmi les Tétractinellides, on voit les Pachastrellidx posséder souvent des amphiasters avec passage aux spirasters, mais la forme de cesmicrosclères n'y atteint pas un aussi haut degré de différenciation que chez Thrombus abyssi; ces Éponges ont bien aussi un mésoderme collenchymateux, mais leurs corbeilles vibratiles sont d'un type tout différent. Quant, au renflement du rhabdome des trichotriaenes, très accusé, même sur les spicules grêles (fig. 11, t'), il manque, ainsi que le prolongement apical, chez les autres Thrombus, en particulier chez T. Challengeri, dont SoUas a observé les Irichotrisenes jeunes (ou grêles). Peut-être ne doit-on le considérer que comme une parti- cularité spécifique de mince valeur, au même titre, par exemple, que celui dont s'orne d'ordinaire la tige des tylostyles de Latrunculia insignis; cependant, comme sa position est constante, il pourrait avoir une importance réelle et représenter un rudiment de cladome secondaire, comparable au petit cladome des amphilriœnes hétéro- polaires de Samus anonymus, qui sont un acheminement vers les amphitriaenes purs. ÉTUDE iMONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. 539 On conçoit bien plus aisément, dès maintenant, la signification du prolongement aplcal du rhabdome, parce qu'on le retrouve mieux développé sur les mésotriaenes des Triptolemus. Dans la spi- culation de Thrombus abyssi, qui, plus compliquée que celle des autres espèces du genre, devrait nous guider particulièrement dans la recherche de la place naturelle de ces Eponges, un tel vestige n'est certes pas négligeable; mais la filiation qu'il permet de soup- çonner reste vague et nous laisse indécis. Il est impossible, en tout cas, d'admettre l'opinion de Sollas, qui, croyant reconnaître aux spicules grêles de Thrombus Chal/engeri une ressemblance suggestive avec les lophotriaenes de Placina trilo- pha Sch., inscrivit les Thrombidx dans les Microsclerophora, ni celle de Lendenfeld, qui, abusé sans doute par cette appréciation par trop superficielle, n'a tenté rien moins que la fusion du genre Thrombus dans le genre Placina. Genre Corticella Sollas. Microtrisenosa pourvues de triœnes semblables à des calthropses, et de véritables asters (euasters de deux sortes) pour microsclères. Corticella stelligera (Schmidt) Sollas. (PI. XXII, fig. 1.) Syn. ; 1868. Corticium stelligerum, Schmidt (31, p. 2o ; pi. III, fig. 6). 1888. Corticella stelligera (Schm.), Sollas (40, p. 281). 1894. Corticella stelligera (Schin.), Lendenfeld (34, p. 18 ; pi. II, fig. 11 ; pi. 111, fig. 49). Éponge irrégulière, revêtante. Surface glabre. Oscules inconnus. Pores petits, très nombreux. Ectosorae très spiculeux constituant une écorce mince. Choano- sorae charnu, très pauvre en mégasclères. Spicules. — I. Mégasclères : 1. Microtrisenes {m, m', n) affectant la forme d'or- thotri('enes. Trois de leurs actines, situées dans un même plan, constituent le cladome ; elles sont droites, simples, pointues et mesurent, d'un spicule à l'autre, de 130 à 400 jx de longueur sur 12 à 30 {x de largeur à la base. La qua- trième actine, dirigée dans un plan perpendiculaire au premier, représente le rhabdome ; elle est droite aussi et de méuie longueur que les clades. S40 E. TOPSENT. II. Microsclères : 2. Chiasters (c) de l'ectosome, ;i 8-12 actines épineuses, dont la taille, suivant la règle, varie en raison inverse de leur nombre ; ainsi, longues de 7 }/. et larges de 1 {j. et demi h la base sur une aster à huit rayons, elles n'atteignent plus que 4 à 5 ja sur une autre qui en possède douze. 3. Oxyasters [o] du choanosome, ordinairement à 6 actines (rarement 5 ou 4) grêles et fragiles, finement épineuses à la pointe, longues de 30 (a environ et larges de 1 (a et demi à la base. Couleur. — A l'état sec : ectosome blanc, choanosome jaunâtre. Habitat. — Côtes d'Algérie; Sebenico (Adriatique). Sur des Coraux ou des Mélobésiées. Il est vraisemblable, à en juger par la dislance qui sépare les loca- lilés où Schmidt l'a signalée, que Corticella stelligera est répandue dans toute la Méditerranée. Quoi qu'il en soit, je ne l'ai pas rencon- trée sur nos côtes, même en fouillant minutieusement les conglo- mérats à Mélobésiées du cap l'Abeille, qui sembleraient pourtant devoir si bien lui convenir. Je ne l'ai pas vue non plus parmi les Éponges des fonds coralligènes de la Provence (Bandol et la Ciolat) que m'envoya jadis le professeur E. Eudes-Deslongchamps ou que me communiqua, tout dernièrement, M. le professeur R. Kœhler. Jusqu'à présent, elle n'appartient donc pas à la faune française, et si je m'en occupe ici, c'est parce que le lecteur qui viendrait à la découvrir dans nos eaux et qui n'aurait pas sous les yeux un frag- ment ou une préparation des spécimens étiquetés par Schmidt lui- même, éprouverait un grand embarras pour la déterminer. 0. Schmidl a décrit son Corticium stelligerum un peu succincte- ment peut-être et n'en a figuré que les microsclères. Malgré tout, cela suffirait si Lendenfeld n'avait inconsciemment jeté une certaine confusion sur ce sujet en traçant (24) une autre description, qui se recommande par sa date toute récente, mais dont l'exactitude se trouve gravement compromise par suite de l'omission de l'un des traits caractéristiques de la spiculation. Grâce à M. le Révérend A.-M. Norman, je possède un beau mor- ceau desséché d'une Corticella stelligera recueillie par Schmidt dans l'Adriatique. Son ectosome, d'aspect chagriné, par suite de la mul- ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIKES DE FRANCE. 541 titude de pores, étroits et simples, qui le criblent, est très spiculeux, blanc, assez ferme, mais non rigide, en raison de son manque d'épaisseur. Il débute par un ectochrote mince, où s'accumulent les chiasters épineuses {c) ; puis vient la couche des microtriaenes, qui le constitue en majeure partie. Le choanosome tranche sur lui par sa coloration jaunâtre et aussi par sa mollesse ; il ne contient guère, en fait de spicules, que des oxyasters, et, çà et là, quelques microtriaenes, ou bien encore quelques chiasters dispersées sur la paroi des canaux larges. 0. Schmidt n'avait pas remarqué que la pointe des actines des oxyasters se couvre de fines épines ; ce caractère, de mince impor- tance, à la vérité, ne se reconnaît qu'avec beaucoup d'attention, et puis les actines sont si fragiles que, dans les préparations, bien peu d'oxyasters restent intactes. Sollas et Lendenfeld ont désigné les mégasclères sous le nom de callhropses. A vrai dire, entre les calthropses et les microtriaenes il existe plus de ressemblance que de différence, et, comme on sait, dans beaucoup d'Épongés une transition insensible s'établit d'une forme à l'autre. Je tiens à faire remarquer cependant que le nom de microti-isenes convient d'une façon toute particulière aux spicules de la Corticella. Les quatre actines de calthropses véritables non seule- ment se ressemblent, mais prennent chacune une direction indé- jtendante de celle des trois autres (pi. XXII, fig. 7, c). Chez Corticella stelUgera, les quatre actines des mégasclères se disposent, au con- traire, presque invariablement en deux groupes : trois d'entre elles s'étendent dans un même plan de manière à constituer par leur en- semble un cladome; la quatrième, perpendiculaire à ce plan, repré- sente le rhabdome. C'est le résultat d'une différenciation évidente. Je dirai plus : assez souvent l'une des actines s'alrophie et se réduit à un simple bouton; or, dans ce cas, absolument comme pour les orthotriaenes de Pœcillastra amygdaloides, il s'agit toujours de l'ac- tine solitaire qui, sans contredit, figure donc bien un rhabdome. Le cladome est presque horizontal; quand on l'examine par en dessous. 542 E. TOPSENT. à un grossissement de 180 diamètres, il est à peine besoin de chan- ger le point pour voir avec netteté toutes à la fois les pointes de ses trois clades. En un mot, ces spicules sont des orthotrisenes à rhab- dome court. Ils s'entassent pêle-mêle dans la couche profonde de l'ectosome ; seuls, les plus superficiels semblent aifecler une orientation déter- minée et appuient leur cladome tangentiellement à l'ectochrote. Le défaut de la description de Lendenfeld consiste en l'absence de toute mention des oxyasters, pourtant figurées par Schmidt, qui avait noté leur abondance dans le choanosome (Sarcodensubslanz), Cette omission s'explique sans doute par ce fait que Lendenfeld, d'après sa propre déclaration, ne possédait à sa disposition qu'un petit frag- ment de spécimen, probablement un mince morceau de l'ectosome, car il le décrit « blanc, à l'élat sec ». De la sorte, les oxyasters, locali- sées dans le choanosome, auraient pu lui échapper. Par exemple, je ne comprends pas qu'il ait trouvé une longueur de 20 \j. aux actines épineuses et tronquées des chiasters; elles ne me paraissent guère dépasser 7 à 8 [x, soit à peine le tiers des belles actines des oxyasters. Dans le choanosome de l'échantillon que j'ai étudié, j'ai rencontré, en quantité notable, des oxes relativement grêles, lisses, courbes ou légèrement flexueux, très acérés, longs de 580 à 670 [x et larges de 8 [J., dont personne n'a parlé. Je me demande s'ils sont étrangers à l'Eponge. Jusqu'à présent on ne sait rien de l'histologie de Corticella stelli- gera. Des indications sur ce sujet seraient très désirables, car elles éclaireraient les tentatives de classifications. En attendant, cette Éponge n'occupe dans aucun de nos systèmes une position natu- relle ; je lui conteste, par exemple, à cause surtout de ses mi- crosclères, toute proche parenté avec les Pachaslrella, dont veut la rapprocher Lendenfeld ; il me semble encore moins juste de la ratta- cher, avec Sollas, aux Corticidae. Seules, parmi les Tétractinellides, quelques Stelletlidse de la sous-famille Euaslerina possèdent, comme elle, simultanément deux sortes d'euasters de rôle distinct. Ses alii- ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. 543 nités seraient-elles de ce côté, et doit-on la considérer comme une Euastérine dégradée? II. Sous-ordre Microsclerophora. Famille des CoRTiciDiB Vosmaer. Mic)'oscleropho7'ah choanosome sarcenchymateux, dense, et à ec- tosome chondrenchymateux, épais; les spicules sont des microcal- thropses et des lophotriaenes ou candélabres, ces derniers localisés à la surface du corps. Genre Corticium Schmidt. Caractères de la famille des Corticidœ. Corticium candelabrum Schmidt. (PI. XXII, fig. 2-0 et fig. 12, c.) Origine : Corticium candelabrum, Schmidt (28, p. 42; pi. III, fig. 25j. Petite Eponge massive fixée aux rochers par une base étroite ou simplement par quelques stolons grêles. Globuleuse dans le jeune âge, en forme de bouton pédicellé, puis déprimée, à contour suborbiculaire ou, moins fréquemment, lobé. Surface lisse, luisante, irrégulière à la face supérieure, qui est toute crevassée, unie, au contraire, sur la face inférieure qui, plus ou moins convexe, ne pré- sente pas d'orifices. Pores et oscules appai'ents, inégaux. La masse charnue centrale, opaque et sarcenchymateuse, se trouve complètement entourée par une enveloppe de chondrenchyrae translucide qui acquiert parfois un développement considérable dans toute la région inférieure du corps. Spicules tous tétractinaux, de deux sortes. Les uns, de beaucoup les plus abondants, et répandus dans toute l'Éponge, sont des microcalthropses (fig. ^,p] à actiaes lisses et courbes, longues de 36 à 38 ja et épaisses de 3 à 4 y. à la hase; la plupart du temps, l'une des actines se distingue des trois autres et demeure droite (fig. o, t, t), comme pour représenter le rhabdome d'un microtrioene. Les autres, tout à fait caractéristiques, sont des lophotrisenes, couramment appelés candélabres (fig. 5, c, c'); ils se localisent immédiatement au-dessous de la surface générale et dans la paroi des canaux les plus larges du système aqui- fère. Leurs quatre actines sont ramifiées, mais elles se disposent en deux grou- pes ; trois d'entre elles, qui restent lisses, composent le pied du candélabre, tandis que la quatrième en forme les branches. Celle-ci, toujours dirigée vers l'extérieur (Sollas l'appelle pour cette raison Vécactine), produit un plus grand nombre de clades que les autres (actines internes ou csuctines de Sollas) et, de Mi E. TOPSENT. plus, les orne d'épines sur leur bord convexe ; elle atteint aussi une longueur un peu plus considérable, 21 y. au lieu de 17. Couleur. — La couleur varie du jaune d'ocre clair au brun noirâtre ; souvent uniforme, elle peut aussi différer d'intensité sur les diverses parties d'un même individu. Habitat. — Adriatique ; Naples ; Cébu et Ponapé. Côtes méditerranéennes de France : Provence (Bandol), Roussillon (Banyuls). Corticium candelabrum a été décrit pour la première fois en 1862, par Schmidt, qui l'avait découvert à Sebenico, dans l'Adriatique. C'est un type si particulier que son nom primitif n'a subi aucune altération, l.a descriplion originale fait connaître les caractères exté- rieurs et les spicules qui, à eux seuls, permettraient de déterminer l'espèce, et établit avec soin une distiuction entre les deux couches qui composent le corps. Schmidt a voulu, en 1866 (30), faire mieux comprendre encore cette structure anatomique, à l'aide d'une figure de l'animal, en coupe sagittale. Comme tous ceux qu'il a consacrés aux Spongiaires, le mémoire de F.-E. Schulze, sur Corticium candelabrum (38), est, pour ainsi dire, devenu classique ; il contient cependant certaines inexactitudes auxquelles Lendenfeld a récemment apporté (34) les corrections indispensables. Celte Éponge compte donc parmi celles que l'on a le plus étu- diées. Elle est, d'ailleurs, des plus intéressantes, comme aussi, par bonheur, des plus reconnaissables et des plus faciles à se procurer. Elle paraît répandue dans toute la Méditerranée. Elle jouit même d'une dispersion bien autrement vaste, puisque Schulze a signalé son existence aux îles Philippines. Commune sur nos côtes, elle abonde parmi les conglomérats à Mélobésiées du cap l'Abeille, si précieux pour la Station zoologique de Banyuls. C'est toujours une espèce de petites dimensions; j'ai figuré (pi. XXII, fig. la, c), réduit d'un tiers à peine, le plus gros des spé- cimens que j'ai eu l'occasion d'examiner. Au dire de Lendenfeld, elle pourrait atteindre 1 centimètre à 1 centimètre et demi de large ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANGE. 545 sur 4 et même sur 6 centimètres de long ; mais cette taille est excep- tionnelle. Les individus tels que ceux de la figure 2, pi. XXII, se rencontrent le plus fréquemment en pleine possession de leurs facultés génitales. On peut presque toujours les détacher sans leur causer grand dommage, parce qu'ils n'adhèrent à la roche que par une base étroite ou, plus souvent même, par quelques racines (on en voit une en r, fig. 2) grêles et fragiles, issues de la portion basilaire de l'en- veloppe chondrenchymateuse. Leur forme se modifie avec l'âge; d'abord globuleux, ils se dépriment, puis s'allongent et se lobent sans la moindre régularité. Tous leurs orifices se percent sur la face supérieure ; pores et oscules communiquent librement avec l'extérieur, par des euthu- chones béants et à ce point inégaux qu'il est, d'habitude, difficile de présumer lesquels aspirent et lesquels rejettent l'eau du torrent cir- culatoire. Quand on regarde un Corticium par sa face inférieure, on aperçoit généralement par transparence la lumière de canaux plus on moins larges, ouverts dans les lacunes de sa portion basilaire chondren- chymateuse ; ces canaux appartiennent au système efférent; les uns descendent vers les lacunes, après s'être formés de proche en proche aux dépens du système afférent; les autres remontent presque tout droit et vont aboutir aux oscules. Mais, contrairement à ce qu'on dit souvent, il ne se perce pas d'oscules à la partie infé- rieure de l'Eponge. Cette disposition anatomique est, en somme, identique à celle qu'on observe chez Oscarella lobularis et chez les Placina (pi. XXI, fig. 6, et pi. XXIII, fig. 10). Sollas a désigné ces bases lacuneuses sous le nom d'hypop/iare, réservant celui de spon- gophare à la masse charnue du corps. La surface de Corticium candelabrum est lisse et limitée par une cuticule. De ce dernier fait, je puis t'ournir la preuve au moyen de la figure 4 de la planche XXII, reproduction photographique d'une coupe où un lambeau anhiste {d) s'est trouvé détaché par le rasoir. ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉiN. — 3<= SÉRIE. — T. 111. 1893. 35 o46 E. TOPSIiNT. Dans l'intérieur de l'Éponge, toutes les cavités sont, au contraire, tapissées par un épithélium à cellules hautes, très faciles à voir. De face, ces cellules apparaissent polygonales (pi. XXII, fig. 3, jo), par compression latérale réciproque; mais leur sommet libre est bombé (fig. 3, e). Au contraire de ce qu'on observe chez les Oscarellidœ et les Placimdœ, l'épithélium est ici dépourvu de cils. Limité en dehors par une cuticule, relativement peu épais du côté supérieur du corps, et appliqué directement au choanosome sans interposition de cavités préporales, l'ectosome se compose d'une masse fondamentale anhiste, claire, semi-cartilagineuse, parsemée de cellules sphéruleuses. Par sa vague ressemblance avec le tissu cartilagineux véritable, ce tissu mérite le nom de chondrenchyme, sous lequel Sollas l'a désigné. Il double aussi (pi. XXII, fig. 3, c) la paroi épithéliale des canaux les plus importants du système aquifère, et c'est lui, avec le même revêtement cellulaire, et avec une struc- ture identique, qui constitue la masse lacuneuse de l'hypophare. Les cellules du chondrenchyme (pi. XXII, fig. 3, s) n'ont pas été bien décrites. De faibles dimensions, elles sont formées de sphérules assez petites et nombreuses, qui, incolores et brillantes pendant la vie, perdent beaucoup de leur éclat après immersion dans l'alcool, mais demeurent quand même perceptibles ; le noyau est petit, sans nucléole visible ; le contour, godronné, présente fréquemment des prolongements lisses, clairs, irréguliers, qui ne sont autres que des pseudopodes de protoplasma hyalin. Elles ressemblent à celles de Chondrosia reniformis (pi. XXIII, fig. 5), à celles des Placinidx, à celles de Penares canditata (46^ pi. XVI, fig. 10), etc. Elles offrent, en un mot, l'aspect le plus ordinaire de ces éléments, présents chez presque tous les Spongiaires, que j'appelle cellules sphéruleuses. Il ne faut pas oublier que les portions chondrenchymateuses de Corticium candelabt'um sont pourvues à la fois des deux sortes existantes de spicules, micr.ocalthropses et candélabres, ces derniers placés immédiatement au-dessous de la surface générale ou de la paroi des canaux larges et des lacunes; les stolons, qui, servante la ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FKANCE. 547 fixation de l'Éponge, ont besoin d'une solidité spéciale, se montrent particulièrement spiculeux. Notons aussi, pour en finir avec ces régions claires du corps de l'Éponge, que l'hypophare, contrairement à ce que laisseraient sup- poser les descriptions deSchmidt et de Lendenfeld, n'acquiert pas constamment une grande importance. Je ne l'ai jamais trouvé aussi développé que le figure Schmidt, par exemple (30). Sous ce rapport, il faut admettre des variations individuelles. Ainsi enveloppé par du chondrenchyme de toutes parts, le choa- nosome se reconnaît à l'œil nu, même sur les coupes macrosco- piques, en raison de son opacité. Il se compose de cellules méso- dermiques et de cellules flagellées, groupées en corbeilles vibratiles. Les premières, fortement granuleuses, à noyau nucléole (pi. XXII, fig. 3, m], rappellent ce que nous avons vu chez la plupart des ïétractineliides vraies. Elles constituent un sarcenchyme aussi dense que celui des Geodia, des Caminus, des Isops, ou encore, pour prendre un point de comparaison dans la série des Carnosa, que celui des Chondrosia. Ce sarcenchyme englobe, pour ainsi dire, les corbeilles et, empiétant sur les canaux du système aquifère, les éloigne du torrent circulatoire et les oblige à s'y relier par un diverlicule assez long. Vers la périphérie, on voit ainsi des corbeilles vibratiles isolées, entourées d'une aréole sombre, sarcenchyma- teuse, au milieu du chondrenchyme. Les corbeilles sont rondes ou ovales et de grande taille (28 à 30 \j. de diamètre en moyenne); leur canal de communication avec le système aquifère est large, à parois revêtues de cellules épithé- liales (pi. XXII, fig. 3). Schulzelesa considérées comme appartenant au type diplodal, mais, pas plus que Lendenfeld, je n'ai réussi à leur trouver un pfosodus et un aphodus. Je me suis expliqué plus haut à ce sujet : je suis d'avis que le système diplodal, tel qu'on l'a d'abord admis, n'existe pas chez les Eponges. Nous en aurons une autre preuve en étudiant Chondrosia reniformis, chez qui l'on a long- temps puisé l'exemple classique de ce prétendu système. 548 E. TOPSENT. Au milieu du sarcenchyme, entre les corbeilles, se disposent de nombreux microcalthropses. Il n'existe plus ici de lophotriœnes. Cependant, au voisinage de la surface et des cavités vastes, les micro- calthropses subissent une différenciation manifeste et marquent tous les termes de passage entre les microcalthropses purs et les candélabres (pi. XXII, fig. 5, i). Celle de leurs aclines qui, par sa position, représente le rhabdome d'un microtrigene, s'orne d'une ou de deux épines latérales, ou bien se divise franchement en trois ou quatre actines secondaires lisses. C'est là, à n'en pas douter, l'homo- logue de l'écactine des candélabres. De sorte que les lophotrisenes figurent, en réalité, des microlrisenes à actines ramifiées, dont le rhabdome, plus hautement différencié que lesclades, contrairement à ce qui se passe dans les ïétraclinellides vraies, modifie aussi du tout au tout son orientation habituelle et tourne sa pointe vers le dehors, tandis que le cladome s'épanouit tout entier vers l'intérieur de l'Eponge. Il reste à parler des éléments reproducteurs de Corticium candela- brum. F.-E. Schulze a pu observer les spermatoblastes, les œufs et les larves, et constater que l'animal est hermaphrodite. Tous les individus que j'ai étudiés ont été recueillis durant l'hiver; beaucoup d'entre eux contenaient cependant en abondance des œufs non encore segmentés, logés au voisinage de larges canaux aquifères dans l'épaisseur du chondrenchyme (pi. XXII, fig. 3 et 4, o) et en- tourés d'une coque de cellules contractiles (Hg. 3, b). Je n'ai pas trouvé trace de spermatoblastes. La reproduction s'accomplit pro- bablement dès le printemps; mais il est possible aussi que, comme chez Oscarella et chez les Placina, elle dure une bonne partie de l'année. Famille îles Placinid/E F.-E. Sclmlze. Microscterophora à choanosome lâche et lacuneux, à ectosome chondrenchymateux peu développé, à épithélium des canaux flagellé; les spicules sont des microcalthropses et leurs dérivés par réduction ÉTUDE MONOGHAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANGE. 549 (microtriodes et microxes des trois genres actuellement connus) ou par complication (lophotriœnes superficiels des Placina). Genre Placina F.-E. Schulze. Placinidx dont les microcalthropses se réduisent souvent, dans l'épaisseur du corps, en microtriodes et microxes, et se compliquent, au contraire, à la surface, en lophotriœnes présentant, seloa l'es- pèce, un à quatre clades différenciés. Placina monolop ha F.-E. Schulze. (PI. XXI, fig. 1 et 2; pi. XXII, ûg. 12, d.) Origine : Plakina monohpha, F.-E, Schulze (S'y, [i, 407). Éponge de petite taille, déprimée, mince, charnue et molle, à contour subor- biculaire ou diversement lobé. Face supérieure plane ou légèrement concave, lisse, irrégulière, mamelonnée, percée de nombreux orifices aquifères, fort iné- gaux, pour la plupart très apparents, mais sans qu'on puisse à l'œil nu distin- guer les pores des oscules. Face inférieure lisse, plane ou légèrement convexe, imperforée, émettant quelques stolons grêles qui seuls fixent l'animal au support. Ectosome constituant une enveloppe chondrenchynaateuse, peu épaisse et très spiculeuse qui, à la partie basilaire du corps, limite un système fort simple de lacunes [Vhypophare). Choanosome à mésoderme très peu développé, à corbeilles vibratiles de type eurypyleux. Spicules. — Ce sont des microcalthropses typiques, ou présentant soit des réductions, soit des complications. On voit ainsi, sans tenir compte des innom- brables termes de passage : 1. des asters tétractinales (pi. XXI, fig. 2, m) ou microcalthropaes vrais ; 2. des asters triactinales (fig. 2, t) ou microtriodes ; 3. des asters diactinales (fig. 2, d) ou microxes ; 4, des candélabres, caractéris- tiques, lophotriœnes monolopliés (fig. 2, c). Les trois premières sortes de spicules sont répandues par toute l'Éponge ; la quatrième se confine à peu près exclusivement dans l'ectosome, et s'oriente, à la surface, en dirigeant vers l'extérieur l'unique acline différenciée, l'écactine. Couleur. — Blanche, jaune d'ocre, brune ou brun rosé. Habitat. — Adriatique (Trieste, Lésina); golfe de Naples. Côtes de France : Méditerranée (Bandol, Banyuls); Océan (Guéthary); Manche (Roscoff). F.-E, Schulze, qui l'a découverte, a donné de cette Éponge une description magistrale. Vosmaer (48), Sollas (40) et Lendenfeld («4) n'ont rien ajouté à son histoire. S50 E. TOPSENT. Le premier, je l'ai signalée au dehors de la Méditerranée (41, p. 231). Je l'ai recueillie dans la Manche, à Roscoff, où elle est loin d'être rare. On la rencontre notamment en retournant des pierres, sur le rocher du Béclem, dans la baie de Morlaix, à un niveau assez élevé, au-dessus de la zone des Laminaires. La drague l'a aussi rap- portée delà profondeur, relativement considérable, de 65 mètres, au voisinage d'Astan, au nord de Roscoff. J'en ai reçu du docteur H. Viallanes un spécimen trouvé en grande marée à la grève de Guéthary. J'en ai vu des échantillons provenant de nos côtes de Provence (Bandol), mais c'est surtout à Banyuls que je l'ai étudiée. Elle abonde dans cette dernière localité, sur les souches de Posidonies et de Cystoseires de la baie, et, par 25 à 40 mètres de profondeur, sur les conglomérats à Mélobésiées du cap l'Abeille. La coloration des individus semble beaucoup dépendre de l'inten- sité des rayons lumineux qui les frappent; en général, les moins éclairés sont les plus pâles. 11 est toujours facile de les détacher du support sans provoquer d'autre lésion que la rupture des stolons qui assurent seuls leur fixation (pi. XXI, fig. 1, s) et qui sont, comme ceux de Corticium candelabmm, des prolongements de la portion basilaire de l'enve- loppe chondrenchymateuse. Placina monolopha n'est donc pas encroûtante, mais massive, déprimée, en plaques arrondies ou lobées, irrégulières, pouvant at- teindre une superficie de plusieurs centimètres carrés tout en n'excé- dant guère 2 millimètres d'épaisseur. C'est surtout dans le jeune âge qu'elle se montre disciforme (pi. XXI, fig. 1) et que, ses bords se relevant en une crête assez saillante, sa face supérieure paraît le plus sensiblement concave. Le chondrenchyme n'acquiert pas ici, à beaucoup près, le même développement que chez Corticium candelabrum ; en dessus comme en dessous, l'enveloppe qu'il constitue reste mince. La masse fonda- mentale, anhiste et hyaline, se réduit à peu de chose, mais les cel- ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. Sol Iules sphéruleuses incolores qui s'y répandent diffèrent à peine de celles de Corticiwn. L'homologie est évidente. Dans le choanosome, le mésoderme forme un maigre revêlement àlacharpentesqueletlique. C'est, par conséquent, lesystèmeaquifère qui occupe le plus de place. L'épithélium qui tapisse la paroi de ses vastes canaux entre les corbeilles vibratiles et qui se continue dans les lacunes de Thypophare offre beaucoup d'intérêt, parce que, en dehors des Placimdx et des Oscarellidse , il n'en existe pas de sem- blable chez les Spongiaires : chacune des cellules épilhéliales est ici munie d'un flagellum long et fort, plus robuste que celui des choa- nocytes. Les corbeilles vibratiles, grandes et sphériques (60 ]}. de diamètre environ), communiquent par un large orifice avec le canal adjacent; elles appartiennent donc nettement au type eurypyleux. Des canaux, les uns, afférents, descendent des pores jusqu'à la base de l'Éponge, se réunissent de proche en proche, et débouchent dans l'hypophare. Les autres, efférents, remontent assez directement de l'hypophare jusqu'aux oscules. On ne peut pas confondre sur la coupe ces canaux exhalants avec les plis du spongophare, car leurs parois, à épithélium flagellé, sont dépourvues de candélabres. Nous retrouverons la même disposition chez Placina trilopha (pi. XXI, fig.6). Dans toutes ses parties, l'Éponge est très spiculeuse, mais ses divers organites, tous de petite taille, microcallhropses et leurs dé- rivés, ne peuvent être considérés que comme des microsclères. Les asters diactinales {microxes, pi. XXI, fig. 2, d, i) et triactinales {microtriodes, fig. 2, i, t) prédominent et atteignent les plus grandes dimensions ; les microxes tels que d mesurent de 70 à 90 [x de lon- gueur et 3 à4 (A d'épaisseur au centre ; les actines des microtriodes [t) sont longues de 25 à 30 [x et épaisses de 2 à 3 t». à la base. Les mi- crocalthropses purs ont une tendance à diminuer de taille et cette tendance s'accentue davantage encore chez les lophotriaenes. 11 n'y a là rien d'exceptionnel ; nous savons, en efi'et, qu'il est de règle que les actines des asters grandissent quand leur nombre normal subit riS2 E. TOPSENT. une réduction. A noter encore que la différenciation de l'écactine des candélabres ou lophotrisenes ne s'accomplit pas toujours au même degré ; des ternies de transition s'observent, au contraire, entre les microcalthropses et les candélabres ; l'écactine des uns ne possède que deux ou trois branches grêles et aiguës, tandis que celle des autres, les plus parfaits, présente deux à cinq branches tronquées et ornées de quelques épines à leur extrémité. Des lopho- triaenes des diverses Placina, ce sont ceux de P. monolopha qui rap- pellent le plus les candélabres de Corticium candelabrum, puisque constamment trois de leurs actines (les ésactines) demeurent simples, pointues, courbes ou flexueuses, comme les actines des microcalthropses et des microtriodes. Ces lophotrisenes, ainsi mono- lophés, suffiraient à eux seuls à caractériser l'espèce. D'après Schulze, Placlna monolopha est hermaphrodite. La repro- duction s'accomplit durant l'été et jusqu'à la fin de l'automne. Je n'ai pas réussi à voir de spermatoblastes, mais j'ai souvent observé les œufs et les larves. Les œufs se cantonnent pour la plupart à la base du choanosome, dans l'épaisseur du chondrenchyme constituant le plafond de l'hypophare; cependant, la paroi des canaux larges peut aussi en contenir quelques-uns, à des hauteurs variables, jus- qu'au voisinage de la surface; ils se transforment en larves petites, oviformes, roses ou violacées, très semblables à celles di'Oscarella lobularis. Pour plus de détails sur ce sujet et sur le développement de la jeune Éponge, je ne puis que renvoyer le lecteur au mémoire de Schulze (37). Placma dilopha F.-E. Schulze. (PI. XXI, fig. 3.) Origine : Plakina dilopha, F.-E. Schulze (37, p. 422). Éponge de petite taille, en plaques minces, molles, irrégulières, attachées au support par quelques points seulement de leur face inférieure. Surface lisse, brillante, parsemée d'oritices arrondis, petits, inégaux, représentant les pores et les oscules. Ectosome et choanosome de même type que chez P/acina monolopha. ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANGE. 533 Spicules. — Ce sont des microcalthropses, avec leurs dérivés par réduction ou par complication. Ou distingue, indépendamment des formes intermédiaires : i. des asters tétractinales (pi. XXI, fig. 3, m) ou microcalthropses ; 2. des asten triactinales (fig. 3, t) ou microtriodes ; 3. des asters diactinales (lig. 3, d) ou microxes ; 4. des candélabres, caractéristiques, lophotriœnes dilophés (fig. 3, c). Les trois premières sortes de spicules sont répandues dans toute l'Eponge ; la quatrième se confine à peu près exclusivement dans Tectosome en dirigeant obli- quement vers la surface ses deux actines différenciées. Couleur. — Blanche ou verdâtre. Habitat. — Adriatique (Trieste). Côtes méditerranéennes de France (Bandol). Des trois Placina, P. dilopha paraît la plus rare. F.-E. Schulze en a tracé une description bien plus détaillée que celle que je serais en mesure de faire, puisque je n'ai eu l'occasion d'en étudier qu'un seul exemplaire assez exigu. Encore dois-je m'estimer heureux de pouvoir fournir de visu quelques détails à son sujet, Sollas (40) et Lendenfeld (24) ayant été, faute de matériaux, réduits à analyser le mémoire de Schulze. L'unique Placina dilopha que je possède provient dun lot d'Épongés que m'envoya, en 1888, de Bandol (Yar), mon regretté maître, le professeur Eug. Eudes-Deslongchamps. Je l'ai observée vivante, mais, n'en ayant point fait de coupes, je devrai aussi re- courir à la monographie des Placmidse de Schulze pour compléter les notions que le lecteur peut chercher à cette place. L'Éponge s'étend en plaques de faibles dimensions, couvrant tout au plus, d'après ce que l'on sait, une superficie de 4 centi- mètres carrés. Elle se distingue à première vue de Placina monolopha par sa surface moins crevassée. Les spécimens provenant de Trieste, qui ont servi de types à Schulze étaient blancs. Celui de Bandol, dragué sur les fonds coralligènes, en différait par sa couleur ver- dâtre, très accentuée, que j'ai soigneusement notée sur le vif. Cette coloration particulière était due aux choanocytes des corbeilles vi- bratiles ; les cellules sphéruleuses, plus abondantes dans le chon- drenchyme que chez Placina monolopha, se montraient parfaitement incolores. A n'en pas douter, il s'agit d'une variété viridis de Pla- su E. TOPSENT. cina dilopha, comparable à la variété cœruka de Oscarella lobularis. Le mésoderme àePlacina dilopharesle rare et l'hypophare présente la même simplicité que dans l'espèce précédente. Le système aqui- fère n'a subi aucun degré de complication. Seul, le chondrenchyme est un peu plus développé ; l'ectosome acquiert un peu plus d'épais- seur et contient, ainsi que la plaque basilaire, davantage de spicules et notamment une plus grande quantité de lophotriœnes. Schulze a découvert à la surface du corps une mince cuticule telle que celle dont je parlais plus haut à propos de Corticium can- delabrum. Les spicules de mon spécimen sont, dans l'ensemble, plus ro- bustes que ceux des nombreuses Placina monolopha que j'ai exami- nées. Les microxes (fig. 3, d) dépassent 90 [>. de longueur et atteignent 4 à 5 [X d'épaisseur; les actines des microtriodes (t) mesurent plus' de 35 [A de longueur. Mais ce qui m'a surtout frappé, c'est d'abord la rareté relative des microxes, contrastant avec ce qui existe chez mes Placina monolopha et P. trilopha et avec ce que Schulze a observé sur ses échantillons, puis, l'extrême variabilité des lopho- triaenes. A ce dernier propos, je dois rappeler que Schulze a figuré (37, pi. XX, fig. 9), nettement dilophés, sept iophotriaenes de cette espèce (ce sont, on le sait, les spicules caractéristiques) et qu'il n'a pas fait mention de Iophotriaenes d'une autre forme quelconque. Or, dans le spécimen de Bandol, les lophotriœnes dilophés, typiques (pi. XXI, fig. 3, c), avec leurs deux écaclines ramifiées, à pointes grêles et aiguës ou tronquées et couronnées d'épines, ne sont pas aussi nombreux que les lophotriœnes anormaux. Ceux-ci sont tantôt monolophés (fig. 3, a), comme chez Placina monolopha, et tantôt, au contraire, trilophés (P), comme chez P. trilopha; dans ces cas, il s'agit de microcalthropses plus ou moins différenciés ; toutefois, il existe aussi une forte proportion de lophotriœnes à trois actines, dérivés de microtriodes, et qui sont les uns monolophés (y) et les autres dilophés (3). ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. 555 Si la spiculation de Placina dilopha possède d'habitude des carac- tères plus fixes, mon spécimen offre réellement beaucoup d'intérêt, puisque, tenant à la fois de P. monolopha et de P. triloplia, il marque en quelque sorte un terme de passage entre les diverses espèces du genre Placina. Je ne connais par moi-même rien de la reproduction de Placina dilopha. Schulze nous a appris qu'elle s'effectue en automne et que les larves, rosées, plus allongées que celles de Placina monolopha, se distinguent en outre par une calotte de pigment noirâtre à leur pôle postérieur. Placina trilopha F.-E. Schulze. (PI. XXI, fig. 4, 5 et 6.) Origine : Plakina trilopha, F.-E. Schulze (37, p. 427). Éponge de petite taille, en plaques minces, assez coriaces, irrégulières, fixées au support en quelques points seulement par des prolongements racliciformes grêles de leur face inférieuj'e, et, par suite, faciles à détacher d'une seule pièce. Surface égale, marquée de légers sillons et parsemée d'orifices aquifères puncti- formes. Ectosome et choanosome de même type que chez Placina monolopha et P. dilopha, mais atteignant d'habitude un degré supérieur de complication. Spicules. — Microcalthropses typiques ou modifiés. Sans s'occuper de formes intermédiaires, on peut distinguer : 1. des asters tétractinales (fig. 5, m) ou mi- crocalthropses ; 2. des asters triactinales (fig. 5, t) ou microtriodes ; 3. des asters diactinales (fig. 5, d) ou microxes ; 4. des candc'labres, caractéristiques, lopho- trisenes trilophés (fig. 5, c); 5. enfin des candélabres ayant leurs quatre actincs ramifiées, lophotriœnes tétralophés (fig. S, n). Les trois premières sortes de spicules sont répandues dans toute l'Éponge ; les candélabres se localisent dans l'ectosome en tournant vers l'extérieur trois actines différenciées. Couleur. — Blanche, jaunâtre ou rosée. Habitat. — Adriatique (Lésina) ; golfe de Naples. Côtes méditerranéennes de France : Bandol (Var) ; Banyuls (Pyrénées- Orientales). Décrite par F.-E. Schulze d'après plusieurs spécimens provenant du golfe de Naples, Placina trilopha a été signalée récemment par Lendenfeld («4) à Lésina. Je l'avais déjà retrouvée (4-1) sur une 5S6 E. TOPSENT. pierre des fonds coralligènes deBandol. Depuis 1891, j'en ai vu, en hiver, de nombreux spécimens à Banyuls, où elle est assez com- mune sur les souches de Posidonies de la baie et sur les conglo- mérats à Mélobésiées du cap l'Abeille, par une profondeur de 2S à 40 mètres. Bien différente de Placina monolopha par son aspect, elle se fait aussi remarquer par sa consistance notablement plus ferme, déter- minée par une densité plus grande de toutes les parties du corps. Schulze, qui en a fait l'anatomie avec soin, nous montre l'ectosome plus épais encore que dans l'espèce précédente et percé de chones inhalants sinueux, puis son hypophare composé d'un réseau de lacunes, enfin son choanosome parcouru par des canaux à diverti- cules profonds. Je pense néanmoins qu'il doit se présenter des variations indivi- duelles, peut-être dépendantes de l'âge et de l'épaisseur du sujet, car les coupes que j'ai pratiquées dans une Placina trilopha, et dont la figure 6 de la planche XXT reproduit une photographie, ne m'ont pas décelé une pareille complication et ne diffèrent pas très sensi- blement de celles que j'ai faites dans des P. monolopha; je ne vois guère que l'ectosome supérieur qui acquière réellement un peu plus d'importance ; encore n'y aperçois-je pas le système de chones observé par Schulze. Les spicules de toutes sortes abondent. A l'exception des lopho- triœnes, ils ressemblent tout à fait à ceux de Placina monolopha par leurs formes et par leurs dimensions. Les microxes, en particulier, sont aussi nombreux ici que chez Placina monolopha et que chez P. dilopha typique ; souvent, leur renflement médian, rudiment d'une troisième actine atrophiée, manifeste une tendance à se cou- vrir d'épines, comme si cette actine, frappée d'un arrêt de dévelop- pement, avait été destinée à se transformer en une branche de candélabre. Ce qu'il y a de plus remarquable dans la spiculation de Placina trilopha, c'est le mélange, parfois par parties égales, de lophotriœnes ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. 537 trilophés elde lophotriœnes tétralophés. Ces derniers ne seraient-ils pas l'indice de l'existence d'une Placina tetralopha encore inconnue? Celle hypothèse n'a, après tout, rien d'invraisemblable, puisque, par la variabilité de ses lophotriœnes, Placina dilopha var. viridis aurait sulfi à faire pressentir l'existence de P. monolopha et de P. Iri- lopha; mais ce n'est qu'une hypothèse- toute gratuite, l'expression d'une conception théorique. Les trois écactines des candélabres caractéristiques (fig. 5, c) me- surent environ 15 '^ de long; l'ésactine atteint 25 \j.. Dans les lopho- Irisenes tétralophés, l'ésactine, qui se ramifie aussi, ne devient pas plus longue que les écactines. Comme ceux des espèces précédentes, les divers candélabres ont, les uns, des branches grêles et aiguës, et les autres, des branches plus épaisses et garnies de dents au sommet. Peu de chose à dire, quant à présent, de la reproduction. Schulze en a, seul, vu les éléments; il a constaté que l'Éponge est herma- phrodite, comme sa congénère Placina monolopha, mais il n'a pas réussi à en découvrir les larves. Genre Placo^'tis F.-E. Schulze. Placinidae sans lophotriœnes; les microcalthropses simples man- quent eux-mêmes, et les seuls spicules présents sont des asters triactinales et diactinales, qui en dérivent. Placorlis simplex F.-E. Schulze. (PI. XXI, fig. 7.) Origine : Plakoriis simplex, F.-E. Schulze (Sî, p. 430). Éponge de petite taille, en plaques minces, irrégulières. Surface lisse, ne por- tant que des oritices punctifornies. Spicules. — Ce sont des microcalthropses réduits à l'état lïasters triactinales (fig. 7, t) ou microtriodes et d'asters diactinales on microxes [d], ces dernières de beaucoup les plus abondantes. Les deux sortes de spicules sont répandues par tout le corps. Les microxes mesurent IciO u. de longueur et 5-6 (a d'épaisseur au centre; les actines des microiriodes atteignent 43 à 50 [* de longueur et 3 jji 5o8 E. TOPSENT. d'épaisseur à la buse. Il existe en outre une assez forte proportion de luicro- triodes et de microxes grêles (<'(/'). Mais on ne trouve ni microcalthropses vrais, ni candélabres ou lophotrisenes. Couleur. — Brunâtre au dehors et blanche en dedans. Habitat. — Naples ; Banyuls. Personne, depuis Schulze, n'avait revu Placortis simplex. L'espèce n'est pas rare à Banyuls ; je l'ai recueillie sur des roches de Posi- donies de la baie, sur les trottoirs de l'île Grosse et sur les pierres du cap l'Abeille. J'ai pu me convaincre sur le vif de l'existence d'un épilhélium flagellé semblable à celui des Placina et des Oscarella. J'ai noté aussi la présence de cellules sphéruleuses abondantes, de 15 [A de diamètre, incolores, à sphérules généralement bien mar- quées et brillantes. N'ayant pas pratiqué de coupes à travers mes spécimens, c'est là tout ce que je suis en mesure d'ajouter à la description détaillée de Schulze. L'ectosome se double d'un système de vastes cavités préporales. L'hypophare est réduit. Les corbeilles vibratiles tiennent le milieu entre le type aphodal et le type eurypyleux. Le mésoderme du choa- nosome se charge de granules et tend à devenir sarcenchymateux. Les candélabres manquent et les seuls spicules présents sont des asters triactinales et diactinales. L'espèce unique, quanta présent, du genre Placortis est, par l'en- semble de ces caractères, mais surtout par sa spiculation, d'une dé- termination facile. On ne connaît rien de la reproduction de cette Éponge. Genre Placinastrelfa F.-E. Schulze. Limité par une sorte d'ectochrote chargé de petits spicules et sur- tout de microxes dressés qui le rendent iinemenl hispide, l'ecto- some se creuse d'un système compliqué de lacunes préporales. L'hypophare est indistinct. La mésoderme du choanosome, plus t ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. 559 sarceuchymateux que dans le genre précédent, se développe aussi davantage, mais les corbeilles vibratiles continuent à se montrer plutôt eurypyleuses qu'aphodales. Le revêtement épilhélial des ca- naux aquifères est encore flagellé. Les candélabres manquent et les spicules présents, microcalthropses ou leurs dérivés, sont de trois grandeurs. Placinastrella copiosa F.-E. Schulze. (pi.xxr, fig. 8-11.) Origine : Plakinastrella copiosa, F.-E. Schulze (39, p. 433). Eponge de petite taille, encroûtante, peu épaisse, irrégulière, portant d'ordi- naire en son point culminant un petit oscule tubuleux (fig. 8). Surface lisse, assez égale ou marquée de légers sillons. Stomions microscopiques (fig. 9, s). Spicules. — Microcalthropses ou leurs dérivés. On peut facilement, d'après leur taille, les grouper en trois catégories : Les plus gros sont des calthropses vrais (fig. i \ , m), des triodes [t) à actines pouvant acquérir et même dépasser 320 ^ de longueur sur 30 à 35 [jn d'épaisseur à la base, et des diactines (c/j ou oxes centrotylotes, longs de 600 à 700 ;•<. et larges de 30 à 3o p- au centre. Les moyens, à peu près égaux aux spicules des autres Placinides, sont des microtriodes [t') et des microxes [d'), avec formes intermédiaires. Les plus petits sont des microcalthropses (cj, des microtriodes [a] et des mi- croxes (o) ,' ces derniers n'atteignent que 25 à 40 (a de longueur sur 1 à 2 u. d'épaisseui' ; les actines des microcalthropses et des microtriodes ne mesurent pas plus de 8 à 12 u.. Les différentes sortes de spicules s'entre-croisent par tout le corps, mais les plus petites formes sont surtout abondantes dans l'ectochrote et au pourtour des lacunes préporales, et les plus grosses renforcent en grand nombre les piliers profonds de l'ectosome. Couleur. — Blanche ou jaune pâle. Habitat. — Naples ; côtes méditerranéennes de France (Banyuls). F.-E. Schulze n'avait vu qu'un seul spécimen de Placinastrella copiosa, provenant de Naples. A Banyuls, j'en ai recueilli plusieurs sur les conglomérats ù Mélobésiées du cap l'Abeille, par 25-40 mètres de profondeur. J'ai pu constater chaque fois, sur le vif, que l'épithélium des ca- naux aquifères (fig. 10, /') est flagellé. Cette observation, de la pre- 560 E. TOPSENT. mière importance, prouve que l'Éponge est une vraie Placinide et que Schulze ne s'est pas trompé sur ses affinités naturelles. C'est l'accumulation des plus petits spicules dans les régions su- perficielles de l'ectosome qui a conduit SoUas à placer par la suite (40, p. lOH) le genre Placinastrella dans les Theneidae. Cet auteur, toutefois, n'a pas dissimulé son incertitude ; l'orientation des mi- croxes perpendiculairement à la surface générale et l'absence ab- solue de spirasters sont deux caractères qu'il ne retrouvait dans aucune de ses Thénéides. En voulant étendre la définition du genre Placinastrella pour l'in- troduire dans les Pachastrellidse, Lendenfeld (24) s'est vu forcé d'ad- mettre l'existence d'euasters dont il n'y a réellement pas trace, La différenciation du squelette de Placinastrella copiosa est sans doute remarquable, mais il demeure bien évident que ses éléments ne diffèrent pas essentiellement de ceux de Placortis simplex et des Placina. La disparition des candélabres, déjà complète dans le genre Placortis, ne fait que se maintenir dans le genre Placinas- trella. La taille des microtriodes et des microxes moyens corres- pond tout à fait à celle des mêmes spicules de Placortis simplex ; les plus grands et les plus petits sont de même type et n'ont fait que s'adapter plus complètement au rôle de soutien ou de protection qui leur est dévolu. L'épaisseur de Placinastrella copiosa est souvent inférieure à celle du type spécimen étudié par Schulze (o millimètres) et n'excède guère, d'habitude, celle de Placortis simplex et de Placina trilopha. La présence d'un oscule un peu surélevé (fig. 8) m'a paru assez cons- tante. La consistance de la masse est toujours ferme à cause de la multitude de spicules entre-croisés, qui rend aussi les coupes diffi- ciles à pratiquer. J'ai malgré tout obtenu des préparations pas- sables me révélant la structure du choanosome. Le mésoderme (fig. iO, m), plus développé que chez les autres Placinides et de na- ture plus sarcenchymateuse, laisse quand même subsister un très riche système de vastes canaux (fig. 9, c); n'empiétant pas beaucoup ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANGE. 561 sur la lumière des conduits aquifères, il n'en écarte guère les cor- beilles vibraliles; de sorte que ces dernières (tig. 10, v) appartiennent plutôt au type eurypyleux qu'au type aphodal. En somme, une portion du choanosome telle que xx (pi. XXI, fig. 9) ne dilTère pas très sensiblement de ce qu'on voit, par exemple, dans la partie droite de la coupe de Placina trilopha (fig. 6). Des cellules sphéru- leuses claires, de petite taille, abondantes dans les régions ectoso- miques, se répandent aussi dans le choanosome. En ce qui concerne la reproduction, je ne sais rien de plus que Schuize; j'ai seulement observé en automne, çà et là, des œufs non segmentés (fig. 10, o), en rapport avec les canaux elférents. Famille des (Jscarellid^ Lendenfeld. Microsclerophora sans squelette. Genre Oscarella Vosmaer. Caractères de la famille. Oscarella lobularis (Schmidt) Vosmaer. (PI. XXIII, fig. 9-11.) Sy.\. : 1862. Halisarca lobularis, Schmidt (28, p. 80). 1868. Chondrosia tuberculata, Schmidt (31, p. 24 ; pi. V, fig. 4). 1873. Halisarca mimosa, Giard (15, p. 488). 1873. Halisarca de Roscoff, Giard (15, p. 488). 1884-1887. Oscarella /o6u/am (Schmidt), Vosmaer (48, p. .326). Eponge en plaques plus ou moins étendues, irrégulières, quelquefois molles, mais d'habitude semi-cartilagineuses, nullement visqueuses, formées de lobes arrondis, lisses, plus ou moins bien marqués, plus ou moins serrés, concrescents entre eux par leur hase. Pores très petits répandus sur toute la surface. Oscules contractiles, percés au sommet des lobes les plus allongés. Ectosome chondren- ohymateux. Hypophare très développé. Choanosome à mésoderme rare ; cor- beilles vibratiles grandes, communiquant souvent avec plusieurs canaux à la fois; canaux aquifères à épithélium flagellé. Pas de spicules. Couleur. — Jaunâtre ou brunâtre uniformément ; ou bien jaunâtre ou bru- nâtre k la base et teintée de rouge ou de vert dans ses parties les plus élevées ARCH. UE ZOOL. EXP. ET UÉN. — 3"^ SÉRIE. — T. lU. 1895. 36 562 E. TOPSENT. ou les mieux éclairées ; ou encore presque entièrement rouge ou verte ; ou enfin (d'après Schulze) bleue ou violette. Habitat. — Côtes océaniques et méditerranéennes de l'Europe occidentale. Oscarella lobularis se rencontre partout sur les côtes de France, soit à la grève, dans la Manche et l'Océan, soit dans les dragages par de faibles profondeurs sur le littoral méditerranéen. 11 importe de ne pas la confondre avec Halisarca Dujardini, qui, représentant, également sans spicules, d'un autre groupe, abonde aussi dans toutes nos eaux. L'ffaiisarca, blanche, jaune d'ocre ou brunâtre, n'offre jamais de colorations vives; sa masse se montre parfois plus ou moins lobée, mais ses lobes, bien plus étendus que ceux à.'OscareUa, ne sont pas aussi dégagés. Ses oscules, à leur état de complet épanouissement, forment des tubes membraneux surélevés, courts et étroits. Ces caractères extérieurs, dans certains cas, peuvent devenir d'une appréciation difficile, car Oscarella lobularis reste souvent jau- nâtre ou brunâtre, et souvent ses lobes s'affaissent ou demeurent indistincts. De telles variations ont certainement nui à la rectitude des dé- terminations de Giard (15). A en juger par sa couleur rouge brique variée de jaune orangé, son Halisarca mimosa, bien qu'étendue « en plaques assez minces à surface plane », doit être identique à Osca- rella lobularis. 11 en va sans doute de même, étant donnée sa sur- face mamelonnée, cérébroïde, de son Halisarca de Hoscotf, dont la ressemblance supposée avec H. gultula Schm. (simple synonyme de H. Dujardini) paraît au contraire fort problématique. D'ordinaire, on peut constater encore d'autres différences entre Halisarca Dujardini et Oscarella lobularis. Les deux Éponges fraîches sont de consistance semi-cartilagineuse et à peu près incompres- sibles entre lame et lamelle; mais la première laisse bientôt suinter de toutes parts une mucosité claire qui jamais ne s'écoule de la seconde. La surface de l'une et de l'autre est lisse, quel que soit d'ailleurs ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. o63 le contenu de la masse; cependant, la surface de VHalisarca paraît uniforme, polie, luisante, et non pas veloutée comme celle de VOscarella où l'ectosome, chondrenchymateux et peu épais, permet d'apercevoir par transparence les corbeilles plus opaques et plus colorées du choanosome. Ces nouveaux caractères ne jouissent toutefois, pas plus que les précédents, dune valeur absolue; chez Oscarella, ils varient d'im- portance, comme nous le verrons plus loin, suivant le degré de dé- veloppement du chondrenchyme. Lin cas d'incertitude, ce qu'on doit prendre en considération principale ce sont les caractères micros- copiques : dans VHalisarca, pas d'hypophare, pas d'épithélium fla- gellé; en revanche, des cellules sphéruleuses en quantité énorme et de longs tractus conjonctifs dans la substance fondamentale. Oscarella lobularis a été l'objet de nombreux travaux. 0. Schraidt l'a fait connaître (28, p. 80); F.-E. Schulze l'a décrite en détail (34, p. 10 ; pi. 1-IV) ; Carter (6), Barrois (i), Schulze (34), Sollas (39), Heider (l'î) ont étudié son développement ; Leudenfeld (23) s'est livré sur elle à des recherches de physiologie expérimentale. Longtemps inscrite, en l'absence de toute spiculation, à côté de Halisarca Dujardini^ elle en fut séparée génériquement par Vosmaer et Sollas ; mais c'est à Lendenfeld que paraît revenir le mérite d'avoir éloigné les deux genres l'un de l'autre, en déterminant la position naturelle du genre Oscarella parmi les M icrosclerophora. Si certaines Halisarca ou Oscarella exotiques ne se confondent pas avec elle, les synonymes de Oscarella lobularis ne sont pas nombreux ; le plus inattendu est, à coup sûr, cette Chondrosia tuberculata Schmidt, avec raison rayée par Schulze, dans laquelle Schmidt n'avait pas su reconnaître son Halisarca lobularis. F.-E. Schulze (34, p. 13) a, d'après la couleur, distingué six variétés di Oscarella lobularis : var. cserulea, violacea, rubra, purpurea, brun- nea et pallida; toutefois, il a pris soin de noter qu'on pourrait à la rigueur n'en conserver que deux, des termes de passage reliant entre elles, d'une part, les deux premières, et d'autre part, les 564 E. TOPSENT. quatre dernières. Voici, sur ce sujet, le résultat de mes observations personnelles. Dans la Manche, au Portel, à Luc, à Roscoff, j'ai trouvé Oscarella /oèw/arî's jaunâtre ou brunâtre uniformément, ou bien jaunâtre ou brunâtre à la base et teintée de rouge dans ses régions supérieures ou les mieux éclairées, ou enfin presque entièrement rouge ; la co- loration rouge est surtout très vive sur les innombrables spécimens qu'on recueille à Roscoff, devant le laboratoire, sur les souches de Cystoseires ; elle est moins intense — ou moins répandue — sur ceux qui vivent sous les pierres; elle semble bien dépendre de la radiation solaire, et je crois légitime la fusion des variétés puiyurea, rubra, brunnea et pallida en une seule. A Banyuls, j'ai vu Oscarella lobularis jaune ou brunâtre uniformé- ment, comme dans la Manche, ou, plus souvent, jaune ou brunâtre à la base et teintée de vert ou de violet dans ses points les plus élevés ou les mieux éclairés. J'y ai aussi trouvé fréquemment, dans les pierres du cap l'Abeille, des individus à peu près entièrement verts^ d'un vert assez foncé. Sans avoir observé la variété violacea pure, je suis convaincu qu'elle se confond par tous ces intermé- diaires avec la variété aerulea. En somme, Oscarella lobularis, qui, à l'obscurité, reste jaunâtre ou plus ou moins brunâtre, se pigmentant sous l'influence de la lumière, deviendrait, suivant des conditions à déterminer, rubescens ou cyanescens. Jusqu'à présent, on n'a pas signalé la variété cyanes- cens dans la Manche. L'alcool, qui rend toujours Halisarca Dujardini méconnaissable, déligure bien moins Oscarella lobularis; il conserve relativement bien à cette Éponge son aspect lobé, cérébriforme. 11 détermine quand même, on le conçoit, une contraction notable de la masse, et, pour prendre une idée exacte de la forme de Y Oscarella, il faut l'observer vivante, en place, ou bien la recueillir avec son support et l'abandonner quelque temps au repos dans de l'eau de nier bien pure et ï-uflisamincnt aérée; on la voit alors se gonfler peu a peu; ses lobes ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. S6o se distendent et se dressent et les oscules apparaissent au sommet des plus hauts d'entre eux (pi, XXIII, fig. 9). Quand le support n'est pas transportable, on peut essayer d'en détacher l'animal. On y réussit assez souvent, sans trop l'endommager, grâce à l'existence d'im hypophare, dont la plaque basilaire ne contracte avec le sub- stratum que des adhérences éparses et assez lâches. C'est là un ca- ractère commun à YOscm^ella et aux Placinides; il prouve, de même que la nature particulière du tissu conjonctif et de l'épithélium des canaux aquifères, combien sont étroites les affinités des diverses Microsderophora entre elles. Comme celui de Corticium candelabrum^ de Placina monolopka^ etc., le tissu conjonctif (pi. XXIII, fig. H, c) se compose d'une masse fon- damentale, anhiste, claire, semi-cartilagineuse, parsemée de cel- lules sphéruleuses (fig. Il, s) incolores, brillantes, à noyau petit et sans nucléole distinct : c'est un chondrenchyme. Il forme à lui seul la charpente de tout le corps; aussi, de son degré de développement, dépend la consistance de l'Éponge. Très épais d'ordinaire dans l'ec- tosome (pi. XXIII, fig. iO, c), il double toujours la paroi des canaux larges (fig. U, e ), remplit, dans le choanosome, les intervalles entre les corbeilles et constitue enfin la lame basilaire (fig. 10, h) et les cloisons des lacunes de l'hypophare (fig. 10, cl et fig. Il, h). Toutes les cavités sont tapissées, comme chez les Placinidœ, par un épithélium à cellules pourvues d'un long flagellum. Dans un fragment d' Oscarella fvRÏche, comprimé entre lame et lamelle, on peut, sans risque de les confondre avec les cils des choanocytes, observer ces longs fouets animés de battements énergiques. Outre qu'ils sont groupés en corbeilles, les choanocytes se dis- tinguent bien de ces pinacocytes flagellés par leur noyau, gros éga- lement, mais nucléole, par leur cil plus grêle, par leur collerette, par leurs granulations abondantes, et, parfois, par leur couleur. C'est, en effet, dans les choanocytes que se localise le pigment des indi- vidus rubescents et cyanescents. Suivant les cas, toutes les corbeilles du choanosome sont donc colorées, ou bien seulement les plus b66 E, TOl'SENT. superficielles, ou enfin celles seulement d'une région plus ou moins étendue. Les cellules granuleuses du mésoderrae n^existent qu'en très faible proportion; elles semblent se transformer toutes en œufs et en spermatoblastes. Dans son ensemble, Oscarella lobularis se montre très lacuneuse. Les pores (fig. 10, p), orifices très simples, conduisent dans des canaux afférents spacieux qui traversent le choanosome, en se rami- fiant et s'anastomosant, et se déversent dans l'hypophare. Les cor- beilles se trouvent en relation avec ces canaux par un conduit ordi- nairement étroit, à cause des empiétements du chondrenchyme, rarement par une large embouchure ; comme, par suite de la richesse du système inhalant, les piliers mésodermiques où elles sont enchâs- sées ne possèdent souvent que peu d'épaisseur, il arrive fréquem- ment qu'elles communiquent avec deux ou trois canaux à la fois (fig, 11, y); elles subissent, de ce fait, des déformations très sen- sibles. Cette disposition n'a aucun rapport avec ce que l'on a consi- déré comme un système diplodal, au sens de Sollas. Pas plus que je n'ai reconnu deux voies aux corbeilles de Corticium candelab7mm, je p'ai jamais observé chez Oscarella lobularis rien qui rappelât les cor- beilles à longs prosodus et aphodus représentés par Schulze dans les figures 16 et 20 de son mémoire (34). L'hypophare acquiert un grand développement et redevient, comme chez Corticium candelabrum, une région importante de l'Éponge. Il se creuse d'un vaste système de lacunes, dans les cloi- sons duquel mûrissent les éléments sexuels. Il ne s'étend pas seu- lement à la base du corps, mais remonte dans les lobes et en occupe la portion centrale. Une coupe transversale d'un lobe osculifère montre, de la sorte (fig. 10), un anneau relativement mince de choanosome, que revêt en dehors l'ectosome mal différencié, et que double en dedans une bande épaisse d'hypophare caverneux; une grande cavité axiale (fig. 10^ o) reçoit le torrent circulatoire qui, émanant des lacunes de {l'hypophare, va s'échapper en haut par ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. o67 l'oscule. C'est la voie que suivent aussi, après avoir déchiré leur coque, les larves mûres pour une vie libre. Oacai^ella lobularis, d'après Schulzc (34, p. 24), ne "serait pas her- maphrodite ; il y aurait des plaques mâles et des plaques femelles, que, d'ailleurs, ne distinguerait aucun caractère extérieur. Le développement des spermatoblastes serait un peu en avance sur celui des œufs. Schulze a trouvé des spermatozoïdes du milieu de juillet au commencement d'août, et des œufs segmentés de la fin de juillet aux premiers jours de septembre. ARoscoCf, la ponte s'ef- fectue abondamment dans le courant du mois d'août. Les larves, petites (longueur 270 [j. environ), sont creuses (fig. 10, emô), ovoïdes, avec le gros bout antérieur, entièrement couvertes de cils de lon- gueur à peu près uniforme, et, tout au moins dans la variété rubes- cens, colorées en rouge sur leur tiers postérieur. Semblables à celles des Placina, elles témoigneraient, à défaut de toute autre preuve, de la proche parenté des Oscai^ellidx et des Placinidœ. J'ai dit plus haut avec quel soin leur développement a été suivi par divers auteurs, et surtout par Heider (i'î). Les résultats acquis sur ce sujet me paraissent résumés dans l'argumentation suivante, empruntée àDelage (14, p. 404) : « Ici, la larve est creuse, toutes les cellules de la blastula sont ciliées et presque identiques ; l'inva- gination est postérieure, et le feuillet iiivaginé forme la cavité exha- lante et les corbeilles Il faut, je crois, voir, dans la blastula des Oscarella, un seul feuillet encore indifférent, contenant en puissance l'endoderme et l'ectoderme, qui se différencieront l'un de l'autre seulement après la fixation, par suite des conditions différentes dans lesquelles ils se trouveront à ce moment. La preuve que, mal- gré la très légère différence signalée par Heider entre les cellules du pôle postérieur et les autres, la différenciation des feuillets n'existe pas chez la larve libre, c'est que, si l'invagination a lieu par le pôle antérieur (et la chose arrive quelquefois), la partie qui aurait dû former l'endoderme devient l'ectoderme et inversement, et le déve- loppement ne s'en poursuit pas moins jusqu'à donner une Oscarella 568 E. TOPSENT. normale. Eu somme,.,, si la larve d'Oscarelln ne se laisse pas aisé- ment ramener au type des Sycandra et des Éponges siliceuses, cela tient surtout à ce que les différenciations de feuillets sur lesquelles pourrait s'appuyer la comparaison n'existent pas encore au moment de la fixation. » F.-E. Schulze a décrit, en outre (36), chez Oscarella lobularis, un mode de multiplication par gemmipaiité. Il se produirait, à l'occa- sion, sur l'Éponge, des excroissances particulières qui, se détachant peu à peu, nageraient quelque temps à l'aventure, puis tomberaient au fond et reconstitueraient autant d'individus nouveaux. Il serait intéressant de réobserver ce phénomène, car la description qu'on en possède n'explique pas comment deviennent capables de nager ainsi ces bourgeons de 2 à 3 millimètres de diamètre, dont la surface est, paraît-il, revêtue d'un épilhélium plat dépourvu de cils. III. Sous-ordre Oligosilicina. Famille des CnoNDROSiDiE F.-E. Schulze. Carnosa sans spicules tétractinaux, quelquefois sans spicules du tout {Chondï^osia, Thymosia). Les seuls organites siliceux présents sont des microsclères (sphérasters, oxyasters) caractéristiques du genre Chondrilla. Genre Chondrosia Nard ). Chondrosidse sans spicules et sans fibres. Chondrosia reniformis Nardo. (PI. XXIII, fig. 1-5; pi. XXII, fig. 12,6.) Syn. : 1833. Chondrosia reniformis, Nardo (27). 1862. Crummina gliricauda, Schmidt (28, p. 38). 1862. Gummina ecaudata, Schmidt (28, p. 38). Éponge massive, plus ou moins arrondie, à peine lobée, pouvant atteindre la grosseur du poing, tantôt dressée sur une base étroite et tantôt étalée. Surface remarquablement lisse et luisante. Ectosome fibreux, épais, ferme, élastique. Choanosome compact, à corbeilles vibratiles elliptiques communiquant avec les canaux inhalants par de longs canalicules. Pores invisibles du dehors, alimentés ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIIŒS DE FRANCE. S69 par des plagiochones à stomions microscopiques. Oscilles simples, larges, entourés d'un rebord saillant, solitaires. Pas de fibres de spougine ni de spicules. * Couleur. — Chair blanc jaunâtre ; écorce blanche, nacrée, à la base et sur les côtés du corps à l'abri de la lumière, colorée, au contraire, en brun \iolacé d'intensité variable dans les régions les mieux éclairées. Habitat. — Méditerranée (Adriatique, golfe de Naples, côtes d'Algérie, golfe de Gabès ', côtes de Provence et du Roussillon) ; océan Pacifique (îles Galapagos); Kattégat (baie d'Aalbaek ^). Le nom de Chondrosia renifoi'mis est classique et n'a pas varié depuis son origine; l'Eponge qui le porte, répandue dans toute la Méditerranée, a été décrite par Nardo (87), puis par Schmidt (88) ; F.-E. Schulze en a fait une étude magistrale (35), dont il n'y a peut- être à modifier que ce qui concerne les rapports des corbeilles avec le système aquifère. Bien qu'elle soit, au dire de Nardo, connue vulgairement dans l'Adriatique sous le nom de Rognone di mare, Chondrosia reniformis n'affecte, en réalité, que par hasard la forme d'un rein. Il est plus juste, pour tenir compte de ses variations sans nombre, de la décrire comme irrégulièrement massive, à contours arrondis, sans lobes marqués. Elle manifeste une forte tendance à se dresser plutôt qu'à s'aplatir sur son support et à ne développer qu'une base d'insertion restreinte; Nardo a même parlé d'échantillons vivant complètement libres, mais c'est une assertion qui me paraît, comme à Schulze, inadmissible. Quelquefois, la production de stolons aux dépens de l'écorce des flancs et de la face inférieure corrige l'insuf- fisance de l'attache principale. F.-E. Schulze a figuré (35, fig. 2) une Chondrosia ainsi constituée, pour montrer comment cette parti- cularité .avait conduit Schmidt à créer sans utilité, sous le nom de Gummina glù-icauda, une espèce nouvelle. D'autres fois, l'Eponge 1 ToPSENT (E.), Campagne de la Melila, 1892. Éponges du golfe de Gabès {Mémoires de la Société zoologique de France, vol. VIII, p. 37, 1894). * Levinsen (G.-M.-R.), Annulata, Hydroidx, Antliozoa, l'orifera, saertryk af « det videiiskabelige Udbylle af Kanonbaaden Hauchs, Togler I, 1S83-86 », Kje^beii- havn, 1893. b70 E. TOPSENT. s'accroît surtout en étendue, et forme des plaques peu épaisses, mais à bords toujours arrondis et fuyants en dessous. Nardo et Schulze ont trouvé souvent les Chondrosia déprimées plus pâles que les échantillons dressés ou bulbeux. De même, à Banyuls, sur les pierres du cap l'Abeille, j'ai recueilli de petits indi- vidus, presque sphériques, très foncés, uniformément colorés, et d'autres (en plus grand nombre) plus étendus et plus pâles, pig- mentés seulement par taches, comme tigrés (pi. XXIII, fig. i). A ces tendances individuelles s'ajoute, naturellement, l'influence de la lumière : le côté le plus éclairé se montre, dans la règle, le plus coloré; an contraire, dans les régions du corps à l'abri de la radia- tion solaire, le pigment devient plus rare ou même fait tout à fait défaut, de sorte que l'écorce, fibreuse et collenchymateuse, y appa- raît d'un blanc nacré. Il n'existe d'habitude qu'un seul oscule, simple, marginé, large souvent de plusieurs millimètres, et presque toujours situé dans un point culminant. La surface générale est tellement lisse pendant la vie que parfois, en voulant saisir une Chondrosia, on la laisse glisser. Elle se con- tracte fortement et se fronce dans l'alcool. L'écorce, épaisse et coriace, a une limite interne très nette et tranche visiblement sur la chair opaque et dense qu'elle enveloppe ; la consistance de la masse rappelle celle du caoutchouc. A eux seuls, ces caractères macroscopiques serviraient à distinguer Chondrosia reniformis des autres Éponges sans spicules qui vivent dans nos mers. La ressemblance est plus grande avec les représen- tants du genre ChondriKa, mais on n'en a encore rencontré aucun sur nos côtes, et si l'on venait â en découvrir quelqu'un, les asters de son Êctosome rendraient toute confusion impossible. L'ectosome de Chondrosia reniformis acquiert, selon la taille ou l'âge des individus, une épaisseur variant de 1 à 3 millimètres. Il se compose de trois sortes d'éléments : 1° Des cellules fusiformes, allongées, ayant laspecl de fibres et ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. S71 représentant, à mon avis, une modification des cellules ectosomiqiies ordinaires; c'est surtout dans la portion profonde de l'écorce et au pourtour des orifices aquifères, où leur action contractile est néces" saire, qu'elles se difierencient le mieux et qu'elles se serrent le plus. Elles constituent, en somme, le tissu fondamental de l'ectosome et lui valent ses propriétés spéciales; grâce à elles, il devient coriace au point qu'on éprouve une réelle diffirulté à le déchirer avec des pinces; grâce à elles, il acquiert une forte tonicité, qui se manifeste par le retrait immédiat des bords de toute section nette pratiquée à l'aide d'un scalpel. 2° Des cellules vésiculeuses incolores (pi. XXIII, fig. 5), de taille assez faible, à sphérules inégales, claires et rclViiigentes. Elles sont surtout abondantes dans la portion externe de l'ectosome qui tend à devenir, par le fait de leur accumulation, presque autant collen- chymateuse que fibreuse. Schulze, qui les a parfaitement vues, les considère comme des cellules à réserves nutritives. Nous en avons signalé de semblables dans les pages qui précèdent, chez toutes les Microsclerophora. Elles correspondent aux cellules vésiculeuses de Pachymatisma johnstonia (46, pi. XVI, fig. 2, y}, de Penares candidata (46, pi. XVI, fig. 10) et de tant d'autres Spongiaires. Comme elles restent claires et que les cellules fusiformesdu tissu fibrillaire fon- damental sont très granuleuses, l'ectosome, dans les régions inco- lores, conserverait une certaine transparence, n'était son épaisseur exceptionnelle. [V Enfin, sur les faces éclairées, mais en quantité variable, et dé- terminant par cela même l'intensité de la coloration, des cellules contractiles qui s'emplissent de grains d'Un pigment brun violacé. Nous avons déjà étudié ces éléments Q\\QiCaminusVulcani{fkQ, p. 3''2I) et chez Pachymatisma johnstoma (46, p. 323 et pi. XVI, fig. % p) ; le pigment qu'ils emmagasinent ici est le même que chez ces deux Sterrastrosa et produit les mêmes nuailces, depuis le gris violacé jusqu'au violet noirâtre. Les cellules à pigment s'accumulent avec les cellules vésiculeuses au voisinage de la surface, dans la paroi 572 E. TOPSENÏ. des chones inhalants, et à la limite du choanosome (pi. XXIII,'fig. 3,/9.) La chair, blanc jaunâtre, est opaque et dense. Les canaux aqui- fères la traversent en tout sens. Sur une coupe macroscopique, on s'aperçoit bien vite que les plus larges d'entre eux possèdent une paroi épaisse, coriace et semi-transparente, douée, en un mot, des caractères de l'écorce. Ce sont des conduits efférents, qui, de proche en proche, s'unissent pour gagner l'oscule; leur paroi (pi. XXIII, fig. 4, f) est, en effet, en continuité avec l'ectosome et présente comme lui une trame fibreuse où des cellules vésiculeuses et des cellules à pigment se répandent, et surtout se groupent en bordure (fig- '^/^)- Sur les coupes fines, la distinction entre les canaux inhalants (pi. XXIII, fig. 4, i) et les canaux exhalants (fig. 4, e) n'offre pas de difficulté sérieuse; les premiers n'ont pas de paroi fibreuse, mais seulement une ceinture de cellules vésiculeuses (fîg. 4, s), sans mé- lange de cellules à pigment; leur lumière, irrégulière, s'irradie dans les canalicules qui desservent les corbeilles. Les pores ont la même structure (fig. 3, i) que les canaux effé- rents. Ils ne sont pas précédés de cavités préporales et reçoivent directement l'apport de plagiochones' à endochone droit (fig. 3, b) et à ectochone rameux et sinueux (fig. 3, a), issu de stomions mi- croscopiques (fig. 3, o). Les corbeilles vibratiles affectent une forme ovoïde ; le mésoderme, sarcenchymateux(fig. 3 et 4, ., épais de 3 [i. au centre. 4. Spirasters [a) à actines grêles, longues de 10 p. environ, passant au type am- phiaster, très peu nombreuses, plutôt rares. Habitat. — Conglomérats à Mélobésiées du cap l'Abeille ; profondeur, 25 à 40 mètres. Cette Éponge, si commune à Banyuls, se distingue facilement de Pœcillaslra compressa par la rareté et la simplicité de ses streptas- ters, et de P. amygdaloides par la localisation habituelle de ses trisenes en petite quantité à sa surface et par la forme variable de ses mégasclères tétractinaux, dont le rhabdome, du moins, est toujours bien développé. Elle présente aussi très fréquemment un caractère qui n'a pas été observé jusqu'ici dans les Éponges de la même fa- mille : elle produit des bourgeons externes, et, par leur nombre et leur aspect particulier, ces bourgeons décèlent souvent sa pré- sence dans les interstices des pierres où elle vit enfoncée. Pœcillaslra amygdaloides (Carter) SoUas. Syn. : 1876. Pachastrella amygdaloides, Carier ^. 1882. Dercitus amygdaloides (Carter), Norman^. 1888. Pœcillastra amygdaloides (Carter), Sollas ^. 1892. Pachastrella debilis, Topsent*. ' Carter (H.-J.), Descriptions and figures of deep-sea Sponges and Iheir spicules from the Atlantic Océan {Ann. and Mag. ofnat. Iiist., 1876, p. 406, pi. XIV, fîg. 22)^ 2 BowERBANK (J.-S.), A Monogvaph of the british Spongiadœ, vol. IV, London^ 1882, p. 94. 3 SoLLAS (\V.-.J), Report on the Tetraclinellida? (Report on the scientific results of the voyage ofU. M. S. Challenger during the years 1873-1876, Zoology, vol. XXV, part. 63). * ToPSENT (E.), Contribution à l'étude des Spongiaires de l'Atlantique nord [Résul- S86 E. TOPSENT. Éponge massive on plus ou moins encroûtante sur des pierres anfractueuses dont elle remplit les cavités. Surface libre lisse, seulement un peu rude au toucher. Pas d'écorce distincte. Choanosome collenchymateux renfermant une grande quantité do cellules sphéruleuses incolores à grosses sphérules réfrin- gentes, entourées d'une matière fluente, spumeuse, dans laquelle il faut voir sans doute un produit de leur sécrétion. Spkules. — I. Mégasclères : 1. Oxes, peu nombreux, grêles, légèrement courbes, longs de l^^jS, épais de 13 à 15 (a. 2. Calthropses trifenoïdes répandus dans toute l'épaisseur de l'Éponge et remarquables par l'atrophie constante de l'actine qui représente le rhabdome ; celle-ci se réduit à un simple bouton, tandis que les trois autres, bien développées, presque égales et comprenant entre elles des angles à peu près égaux, s'étendent dans un même plan perpendiculaire au sien. Longueur de ces actines, 500 u.; largeur à la base, 23-27 f*. II, Microsclères : 3. Microxes finement tuberculeux, pour la plupart non cen- trotylotes, extrêmement abondants, mesurant 33 à 130 p. de longueur sur 3 u. d'épaisseur, ceux des régions superficielles étant ordinairement les plus faibles. 4. Spirasters assez nombreuses, à actines droites, grêles et longues de 10 à 12 (a. Couleur. — Blanc pur en dedans et en dehors. Habitat. — Parages du cap Saint- Vincent, 292 brasses (Porcupine) ; Açores, autour de l'île Pico, 318 et 736 mètres {Hirondelle); Banyuls, conglomérats à Mélobésiées du cap l'Abeille, 23 à 40 mètres. Les dimensions des spicules notées dans la diagnose précédente sont celles que j'ai relevées sur de nombreux spécimens recueillis à Banyuls. Celles des mégasclères sont plus considérables dans le type décrit par Carter et dans les trois échantillons provenant des Açores dont l'examen m'a été confié ; les oxes y mesurent 1°"",6 de lon- gueur et les actines des calthropses y atteignent 650 à 700 \y de long sur 35 à 55 ]i. de large à la base. Ce sont là simplement des varia- tions individuelles, peut-être en rapport avec le développement relatif du corps; le spécimen du Porcupine et ceux die, V Hirondelle sont, en eflet, massifs, le premier en forme d'amande, les aulres sous celle de longues papilles épaisses, tandis que, au cap l'Abeille, l'Éponge apparaît surtout comme un remplissage des cavités de la roche. Les microxes ont parfois une ornementation si fine qu'elle peut passer inaperçue pour qui n'est pas prévenu. Carter a donné tais des campagnes scientifiques du yacht l'Hiiondelle, fasc. 2, Monaco, 1892, p. 42, pi. III, fig. 8 et pi. VIII, fig. 8). ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. 587 comme note de couleur : yellowish ivhite. L'un des Pœcillastra amijg- daloides de Pico, que j'ai fait figurer ', était en partie taché de violet; cette coloration lui était étrangère; je l'ai retrouvée, ainsi par taches, sur d'autres Tétractinellides et sur beaucoup d'Hexactinel- lides, même décharnées, de la même région; elle est due à une substance particulière dont la nature et la provenance restent à élucider. Pœcillastra amygdaloides est déjà fort bien caractérisée par ses calthropses trieenoïdes à rhabdome atrophié; elle se distingue en outre de nos autres Pœcillastra par la sécrétion spumeuse qui s'écoule de ses cellules sphéruleuses. Pour mettre au point, par suite de cette addition, le tableau ana- lytique des Tétractinellides de France ^, il suffit de le modifier de la sorte en ce qui concerne les Pœcillastra : Genre Pœcillastra 19. Calthropses triaenoïdes à rhabdotue toujours avorté, abondants dans tonte i l'Éponge Pœcillastra amygdaloides. Calthropses n'ayant pas constamment une actiuc atrophiée, peu nombreux et d'habitude localisés au voisinage de la surface 20. [ Streptasters abondantes et de types variés Pœcillastra compressa. ' \ Streptasters rares, sous forme de spirasters très grêles. Pœcillastra suxicola. EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE XXI. FiG. 1. i'iacinu nionolopha (p. 549). Microphotographie d'un spécimen vivant, grossi environ vingt fois. s, un des stolons de sa face inférieure servant à sa fixation. i2. Placma monolopha. Spicules, x S40. m, trois microcalthropses ; t, microtriode ; d, microxe ; i, formes in- termédiaires entre les raicrotriodes et les microxes ; c, quatre candé- labres ou lophotriœnes monoloptiés à écactine de complication variable. 3. t'iacina diloytia (p. 552). Spicules de la variété viridis recueillie à Bandol, X 340. » Loc. cit., pi. m, fig. 8, 1892. 2 Loc. cil., p. 311, 1894. 588 E. TOPSENT. m, microcallliropse; /, microtriode ; d, microxes ; c, deux candélabres typiques ou lophotriœnes dilophés normaux, possédant deux aclines internes (ésactines) simples et deux aclines externes (écactines) rami- fiées ; a, lophotrisene monolophé ; 3, lophotriaene trilophé ; 7. lopho- trjœne monolophé dérivant d'un microtriode; 5, lophotriaene dilophé dérivant d'un microtriode. FiG. 4. IHacina trilopha (p. 555). Un spécimen de grandeur naturelle. 5. Plarina trilopha. Spicules, X 340. m, microcallhropses; /, deux microtriodes; d, microxes; c,* candélabre caractéristique ou lophotriaene trilophé ; n, lophotriaene létralophé. 6. Plarina trilopha. Microphotographie d'une coupe sagittale de l'Éponge. e, ectosome supérieur; b, ectosome basilaire; h, lacunes de l'hypo- phare ; 0, canal exhalant remontant de l'hypophare h l'oscule ; i, canal inhalant; v, corbeilles vibraliles, de type eurypyleux; m, charpente du choanosome. 7. hlacortis simplex (p. 557). Spicules, X 340. /, microtriodes; d, microxes; l' , microtriode grêle; d, microxe grêle. 8. Placinastrella copwsa (p. 559). Un spécimen, de grandeur naturelle. Vers le milieu de sa surface s'élève un oscule lubuleux. 9. Placinastrella copiosa. Portion, un peu schématisée, d'une coupe sagittale, X 60. s, stomion ; e, ectochrote chargé de microxes dressés; p, lacunes préporales ; i, limite interne de l'ectosome, couverte aussi de microxes; c, canaux aquilères ; v, corbeilles vibratiles ; xx', portion du choano- some prise comme terme de comparaison avec la partie droite de la figure 6 (coupe de Placina trilopha). 10. Placinastrella cupiosa. Portion d'une coupe à travers le choanosome (reconstitution), X 180. f, épithélium flagellé des canaux aquifères ; v, corbeilles vibratiles ; m, mésoderme sarcenchymateux ; s, cellules sphéruleuses; d, spicules brisés par le rasoir ; 0, œui'. 11. Placinastrella copiosa. Spicules. m, t, d, X 180; t', d', 0, a, c, x 340. m, grand callliropse ; t, grand triode ; d, grands oxes centrotylotes. t', microtriodes, etd', microxes, de la série moyenne. c, microcalthropse ; a, microtriode; 0, microxes, de la plus petite sorte. 12. Pœcillastra saxicola (p. 584). Photographie d'un spécimen, peu réduit. L'Éponge n'est visible qu'en e, mais ses bourgeons, nombreux et d'un beau blanc, sont très apparents. PLANCHE XXII. FiG. l. Corticella stelligera (p. 539). Spicules. m, m', n, X 60 ; 0, c, X 340. m, nï, microtricEnes vus par en dessous ; n, microtriaene vu un peu obliquement ; c, chiaslers de l'ectosome ; 0, oxyasters du choano- some. ÉTUDE MONOGRAPHIQUE DES SPONGIAIRES DE FRANCE. S89 FiG. 2. Corlicium candelabrum (p. 543). Trois spécimens, très peu réduits, pho- tographiés au sortir de l'eau, r, un stolon de la face inférieure, servait h la fixation. 3. Corticium candelabrum. Coupe à travers le choanosome, au voisinage de larges canaux aquifères, x 340. e, paroi épithéliale des canaux ; c, substance fondamentale translucide du chondrenchyme ; s, cellules sphéruleuses ; o, œuf; b, sa coque de cellules contractiles ; m, sarceuchyme ; v, corbeilles vibratiles ; a, leur canal, tapissé d'épithélium. 4. Corticium candelabrum. Microphotographie d'une coupe sagittale de la région supérieure de l'Éponge, faiblement grossie. d, lambeau de cuticule détaché par le rasoir; l, couche des candé- labres ; f, microcallhropses ; e, paroi épithéliale des canaux ; c, chon- drenchyme ; 0, œufs ; m, mésoderme sarcenchymateux ; v, corbeilles vibratiles. 5. Corticium candelabrum. Spicules.'x 340. c, candélabres ; c', forme grêle de ces lophotriœnes ; p, microcal- thropse ; tt', microlriaenes ; i, termes de passage des microtriaenes aux lophotrisenes. 6. Dercilus plicalus (p. 531). Photographie, à peu près de grandeur naturelle, d'un fragment de cette Éponge en partie dégagée de la roche où elle vit enfoncée. On voit l'Éponge en trois places, à gauche, à droite et eu bas de la figure. 7. Dercitus plicatus. Spicules. o, o', c, d, d', x CO ; s, x 340. c. callhropse; o, plagiotriaene ; o', plagiotriaene grêle ; d, dichotriaenej d', deux dicholriaenes grêles ; s, microrhabdes épineux. 8. Dercilus ■plicalus . Coupe à travers l'Éponge, x 105. e, eclochrote chargé de microsclères ; i, canaux inhalants ; p, cavité préporale ; a, trame conjonctive de la zone collenchymateuse ; s, cel- lules sphéruleuses ; m, microlriaenes brisés par le rasoir; c, choanosome. 9. Dercilus plicalus. Aspect d'une cellule sphéruleuse vivante, x 180. 10. Dercilus plicalus. Coupe à travers le choanosome au voisinage d'un large canal aquifère, x 340. a, tissu conjonctif ; s, cellule sphéruleuse ; p, sarceuchyme ; v, cor- beilles vibratiles. 11. Tiirombus abyssi (p. 537). Spicules. m, x 60; 1,1', X 180 ; a, x 340. m, I, Iricholriaanes épineux, vus dans différenles positions ; l', un tri- chotriaene grêle ; a, amphiasters. 12. Photographie, réduisant d'un tiers environ les dimensions réelles, d'un groupe de quatre Éponges réunies à dessein sur une même pierre. a, un jeune Caminus Vutcani ; b, une Chondrosia reniformis de petite taille; c, un beau Corlicium candelabrum ; d, une Placina monolopha d'assez faibles dimensions. 590 E. TOPSENT. PLANCHE XXIII. FiG. 1. Chondrosia reniformis (p. 568). Spécimen vivant, un peu réduit par la pho- tographie. 2. Chondrosia reniformis. Section longitudinale d'un petit spécimen, de grandeur naturelle. 0, l'oscule ; s, surface du corps ; e, ectosome ; c, choanosome avec la coupe des canaux aquifères ; r, le support. 3. Chondrosia reniformis. Coupe à travers l'ectosome, X 60. 0, stomioii ; a, branches de l'ectochone ; 6, endochone ; i, pore ; c, commencement du choanosome avec les corbeilles vibratiles, v ; s, cellules vésiculeuses, éparses dans l'ectosome ou groupées avec les cellules à pigment, p, autour des canaux et à la limite externe du choa- nosome ; /, aspect fibreux de la portion interne de l'ectosome et de la paroi des larges canaux aquifères. 4. Chondrosia reniformis. Coupe à travers le choanosome, x 60. t, canaux afférents ; e, canaux afférents ; c, mésoderme sarcenchyma- teux; V, corbeilles vibratiles; d, leurs longs canalicules, qui les relient aux canaux afférents ; s, bordure de cellules vésiculeuses incolores dans les canaux afférents; f, paroi fibreuse, à bordure de cellules vésiculeuses et pigmentées, p, des canaux efférents. 5. Chondrosia reniformis. Cellules vésiculeuses, x 340. 6. Thymosia Guprnei (p. 574). Portion du spécimen type, à peu près de gran- deur naturelle (photographie). 7. Thymosia Guernei. Pqrtion terminale d'une fibre squelettique, x 180. 8. Thymosia Guernei. Fragment de l'Éponge, en coupe sagittale, ayant ma- céré longtemps dans la potasse, pour montrer la disposition des fibres, X«. g, amas de grains ferrugineux ù la base ; f, fibres. 9. Oscarella lobularis (p. 5G1). Photographie, de grandeur naturelle, d'un spécimen vivant recueilli à Roscoff, à marée basse. 10. Oscarella lobularis. Microphotographie d'un segment de coupe transver- sale d'un lobe osculifère. c, chondrenchyme ; p, pores 3 », canaux inhalants; v, corbeilles; h, lame basilaire de l'hypophare ; cl, cloisons qui divisent l'hypophare en lacunes ; emb, larve dans sa coque ; 0, cavité centrale du lobe, abou- tissant à l'oscule. 11. Oscarella lobularis. Détails d'une coupe à travers le choanosome, d'après un pliotogramme dû à la générosité de M. le professeur P. Francotte, de Bruxelles. i, canaux aquifères; e, épithélium flagellé; v, corbeilles avec leurs canalicules de nombre variable ; c, chondrenchyme ; s, cellules sphéru- leuses ; /i, cloisons de l'hypophare ; /, lacunes de l'hypophare. ÉTUDE DES GLANDES LYMPHATIQUES DE QUELQUES MYRIAPODES PAR A. KOWALEVSKY Membre de l'Académie des sciences de Saiut-Pétersbourg Correspondant de l'Institut de France. Dans mon article : Études expérimentales sur les glandes lymphatiques des invertébrés (i) , j'ai donné une courte description des glandes lym- phatiques des Scolopendres, sans présenter des détails très précis sur leur nombre, leur disposition et leur structure. Pendant le courant de IH94, j'ai eu l'occasion de m'occuper de nouveau de cette ques- tion et je dispose maintenant de plusieurs faits qui peuvent présenter quelque intérêt. Comme les glandes lymphatiques ont une certaine relation avec les organes excréteurs, au moins dans ce sens qu'elles peuvent enle- ver du sang les substances nuisibles ou étrangères à l'organisme et les retenir un certain temps, quelquefois pendant toute la vie de l'animal, je parlerai dans la présente note aussi de quelques glandes dépuratives du sang, qui sont si souvent, comme chez plusieurs Insectes', assez intimement réunies avec les précédentes; je veux dire les cellules péricardiales des Insectes et leurs glandes lympha- tiques qui sont disposées les unes auprès des autres, ou qui même, comme chez certains Locustidœ, sont agrégées de telle sorte que les cellules lymphatiques entourent les cellules péricardiales. ' Page 45b. 5. d'épais- seur. Elle est surtout inappréciable pour obtenir une série de coupes, dans des buis morphologiques, de grands embryons ou d'animaux 618 PAUL MITROPHANOW. entiers. De telles coupes peuvent être très bien conservées dans de l'alcool à 70 degrés et présentent des matériaux parfaits et préparés d'avance pour les exercices pratiques avec les étudiants. L'objet peut être coloré d'abord, ou bien on colorie ensuite les coupes sé- parées. Pour la pénétration, il vaut mieux employer successivement une série de solutions : un demi pour 100, 1 et demi pour 100, 3 pour 100, 5 pour 100. On peut abréger la manipulation, mais c'est moins dési- rable. Le temps pendant lequel la pénétration a lieu dépend de la grandeur de l'objet ; il suffit de le tenir un jour dans les premières solutions; mais, dans celles à 5 pour 100, il faut le laisser quelque- fois plusieurs semaines, jusqu'à ce que la photoxyline pénètre entiè- rement l'objet et se condense, par suite de l'évaporation de l'alcool et de réther, jusqu'à la consistance de cartilage ; puis il durcit défi- nitivement avec l'objet dans l'alcool à 70 degrés. On fait des coupes avec le microtome d'un système quelconque, en arrosant continuel- lement le rasoir et les coupes avec de l'alcool à 70 degrés à l'aide d'un gouttamètre placé à côté *. 2° Dans le procès de Venrobage double d'objets qui sont très petits et qui s'émiettent facilement d'abord dans la photoxyline et puis déjà dans la paraffine. On employait aussi en partie et depuis longtemps, dans ce but, la celloïdine (BoUes-Lee et A. Henneguy, Ti^aité des mé- thodes techniques, 1887, p. 279; Loukjanow, Atxh. f. mikr. Anal., 1889, etc. ; enfin, dernièrement, H. H. Field et J. iMartin, Contribu- tion à la technique microtomique, Bulletin de la Société zoologique de France, 1894). La pratique de huit ans dans mon laboratoire a démontré que, dans ce cas, la photoxyline ne laisse rien à désirer. La méthode de son application a été exposée d'une manière générale dans la note du ci-devant assistant du laboratoire zootoraique de l'Université de 1 Un tel gouttamètre peut être fait d'un entonnoir en verre à support avec un tuyau en caoutchouc, ayant au bout aussi un tube en verre à petite ouverture. Un serrement automatique du tuyau peut régler le degré de l'écoulement du liquide. LA PHOTOXYLINE. 619 Varsovie, E. Meyer (Protocoles de la section biologique de la Société des naturalistes à Varsovie, Biolog. Centralblatt, 1890). L'auteur y a admis, cependant, une inexactitude : il recommande d'employer une solution comparativement concentrée de photoxylinc (jusqu'à 6 pour 100) avant d'enrober dans la paraffine et admet l'évaporation excessive de l'éther et de l'alcool. Cette circonstance a été la source de tentatives infructueuses de la part de beaucoup de savants qui désiraient appliquer la méthode comme l'a décrite Meyer. Ayant dû plusieurs fois indiquer moi-même cette inexactitude, j'ai fait exposer cette méthode à mon assistant Kontzewitsch ( T'raî;^»^; du la- boratoire zootomique de V Université de Varsovie, VIII, 1893). Malheu- reusement, cette rédaction n'est pas aussi répandue que la première, vu qu'elle n'est imprimée qu'en russe. Voilà les traits essentiels de ce procès. L'objet, privé d'eau dans l'alcool absolu, est durci selon la grandeur, pendant un à trois jours, successivement dans des solutions d'un demi pour 100 ou de \ pour 100 de photOxyline. La marche suivante dépend des buts qu'a en vue le savant. Si l'on désire donner une certaine direction aux coupes et étudier l'objet d'abord in toto, ce dernier est transporté de la photoxyline sur un verre de montre ou simplement sur un porte- objet dans une petite quantité de photoxyline, lequel reçoit bientôt, par suite de l'évaporation sur la surface, une pellicule endurcie. Alors, on met pour quelques heures le verre avec l'objet et la pho- toxyline dans de l'alcool à 70 degrés et, quand la photoxyline est assez dure, on en découpe ensemble avec l'objet une plaque d'une forme quelconque, laquelle, vu sa transparence absolue, permet de faire une étude aussi complète de l'objet in toto que dans le baume du Canada, d'une part, et de donner à l'objet qu'on enrobe dans la paraffine la direction voulue. Ce dernier procès s'accomplit de la manière habituelle à l'aide de Tessence d'origan ou de bergamote, ou bien, enfin, à l'aide du chlo. roforme. La plaque de photoxyline est placée dans un des réactifs nommés, 620 PAUI. MITROPHANOW. après avoir été privée d'eau dans l'alcool à 9o degrés. Il faut éviter l'emploi de l'alcool absolu, parce que la photoxyline s'y gonfle ^ C'est utile de changer une ou deux fois l'essence d'origan ou de bergamote et d'y ajouter ensuite peu à peu de la paraffine à une température de 35 à 38 degrés centigrades. Dans ces conditions, la pénétration graduelle avec la paraffine s'accomplit dans l'étuve du- rant quelques heures ou même pendant vingt-quatre heures, ce qui dépend directement de la grandeur de l'objet; et déjà ensuite on renferme la plaque de photoxyline avec l'objet dans de la paraffine pure fondue de 48 à 52 degrés centigrades. On prépare les coupes, comme de coutume, avec le microtome de Minot, sans difficulté, jusqu'à une épaisseur de 2 \j.. Le mieux est de les coller sur le verre avec du blanc d'oeuf préparé avec de la glycérine et dans les conditions suivantes : on met sur le porte-objet une mince couche de blanc d'œuf et l'on y place une goutte d'eau distillée. La bande de coupes ou les coupes séparées se mettent, dans un ordre déterminé, à la surface de l'eau et, ensuite, on pose le verre sur l'étuve, dont la température intérieure ne dé- passe pas 40 degrés centigrades. Par suite du chauffage, l'amollis- sement de la paraffine et l'étendage des coupes ont lieu. Quand cela s'accomplit, on éloigne l'eau superflue et les coupes sont séchées dans l'étuve jusqu'à une température de 55 degrés centigrades. Tout le procès peut être achevé en un quart d'heure et, ensuite, les coupes ne se décollent jamais lors des manipulations suivantes, quelque compliquées qu'elles soient, tandis que cela arrive souvent quand on ne colle les coupes qu'avec de l'eau. Une telle combi- naison de blanc d'œuf et d'eau vaut mieux que le blanc d'œuf seul, parce que, dans ce cas, les coupes roulées ne sont pas étendues. Si 1 Dans le laboratoire zootomique de l'Université de Varsovie, la manipulation réussissait le mieux avec l'essence d'origan, laquelle, îi ce qu'il paraît, ne doit pas être trop liquide. A Banyuls, l'essence d'ovigan de la Piiarmacie centrale de France dissolvait très bien la photoxyline et, par conséquent, ne pouvait être appli- quée, mais en revanche les manipulations avec l'essence de bergamote réussissaient très bien. LA PHOTOXYLINE. 6-21 l'on désire ensuite éloigner les traces de photoxyline dans les pré- par'alions, le mieux est d'utiliser, dans ce but, l'essence de girofle. 3° La photoxyline peut être employée avec un grand succès pour conserver les fines préparations macroscopiques, les embryons et de petits animaux dans un certain ordre pour les musées et les dé- monstralions sur des plaques en verre ou bien dans ces dernières. Dans le premier cas, une fine préparation anatomique, les coupes macroscopiques, la série d'embryons ou d'animaux séparés, étant d'abord privées d'eau dans l'alcool absolu, sont placées, dans l'ordre désiré, sur la plaque de verre et arrosées, à la surface, avec une so- lution à 2 pour 100, de sorte que la photoxyline forme au-dessus d'elles une mince couche. Quand cette dernière est durcie à la sur- face, la plaque de verre est placée, avec tout ce qui se trouve dessus, dans un cylindre avec de l'alcool à 70 degrés, et la préparation est prêle. La photoxyline devient bientôt tout à fait transparente et la préparation paraît seulement posée sur le verre. On peut surtout recommander cette méthode pour des collections scientifiques. 11 est utile de laisser la préparation après l'alcool, avant de la coller, pendant quelques heures dans une solution à un demi pour 100 de photoxyline. Dans le second cas, la manipulation est plus compliquée. 11 faut pénétrer l'objet successivement et assez longtemps avec des solu- tions de photoxyline jusqu'à la plus grande concentration. Puis on dispose, dans cette dernière solution, dans sa couche épaisse sur le verre, la préparation ou la série d'embryons. Alors, un durcissement de photoxyhne a lieu à l'air et dans l'alcool à 70 degrés jusqu'à la consistance de cartilage. Dans l'alcool, la plaque de photoxyline avec la préparation se détache du verre, peut être conservée dans l'alcool à 70 degrés et, en cas de nécessité, en peut être aussi extraite. Celte modification est plus compliquée que la précédente, sans avoir cependant de grands avantages. Liihoratoire Arago, le 18 novembre 1893. NOTE SUR lA DIVISION DES lOÏAIIX DE rlïAT ÏÉGÉIAIIf CHEZ LES SPHÉROZOAIRES PAR PAUL MITROPHANOW Pi'ofesseur à l'Université de Varsovie, Directeur du laboratoire zootomique de l'Université. L'étude des particularités de la division cellulaire indirecte est d'un profond intérêt théorique ; on a l'espoir, en les éclaircissaut, de comprendre le mécanisme compliqué des fonctions cellulaires et de s'approcher de la résolution des problèmes biologiques les plus importants, comme l'ont en vue les théories contemporaines sur l'hérédité. Sous ce rapport, les recherches insuffisantes concernant les organismes inférieurs unicellulaires présentent une lacune scien- tifique très essentielle. La division indirecte, chez les Radiolaires, n'a été décrite que tout dernièrement par Karawaiew \ mais, malheureusement, pas assez complètement. Ses observations concernent les Aulacantha ; mais les Radiolaires formant des colonies ne sont pas étudiés sous ce point de vue. Profitant de l'hospitalité du laboratoire Arago, grâce à l'amabilité de M. le directeur de Lacaze-Duthiers, j'ai reçu, pen- dant une des rares journées calmes de cet automne, plusieurs colo- nies de Sphérozoaires et je les ai étudiées sur de minces coupes ' Karawaiew, Bevbachtungen ûber die Structur und Vermehrung von Aulacantha scolymantha {ZooL Anzeiger^ n» 480-481). 62-4 PAUL MITKOPHANOVy. (2-5 [).), faites avec le microtome auLomalique de Minot, à l'aide des meilleurs objectifs à immersion et d'un traitement correspondant. Le tableau général de la division des noyaux de l'état végétatif, chez les Sphérozoaires, est représenté en détail par K. Brandt \ dont les observations ont été insuffisantes seulement parce qu'il insiste sur l'homogénéité complète des noyaux. C'est, du reste, tout à fait compréhensible, si les noyaux ont été étudiés m toto ou sur des coupes relativement épaisses ; vu leurs petites dimensions et la capa- cité de recevoir avidement les réactifs colorant les noyaux, ils devien- nent, par suite de la coloration, très intenses et peu transparents. Une des méthodes les plus simples pour obtenir des tableaux très nets de la division des noyaux chez les Sphérozoaires, c'est le traite- ment avec une solution à 3 pour 100 d'acide nitrique et la colora- tion intense à l'aide de solutions aqueuses de safranine. Dans ces conditions, on aperçoit tout de suite que leur composi- tion n'est pas homogène et que la plus grande partie du noyau acquiert une nuance presque violette, tandis que la plus petite en a une comparativement rose clair. Évidemment, cette particularité appartient seulement à ces noyaux, parce que ceux des prétendues cellules jaunes [Zooxanthellx) qu'on observe parallèlement acquièrent seulement une coloration rose. Comme le protoplasme fondamental (sarcode intracapsulaire) n'est presque pas coloré, les noyaux ressortent d'une manière très dis- tincte. Au premier coup d'œil, leur forme est très variée et n'est soumise à aucune régularité ; cependant, en les étudiant davantage, on remarque qu'un cycle déterminé de phénomènes y a lieu, lequel se rapproche entièrement du schéma général de la division indirecte et dont les formes fondamentales expliquent parfaitement l'irrégu- larité aperçue dès le commencement. A propos, les petits corpuscules allongés et granulaires qu'on 1 K. Brandt, Die Kolonienbildendeti Radiularien des Golfes t^on Neapel, 1S8o. DE L'ÉTAT VÉGÉTATIF CHEZ LES SPHÉROZOAIRES. 62o observe parmi les noyaux sont colorés en rouge et ont, comparati- vement aux noyaux, un tout autre caractère. La forme qu'on peut considérer comme le premier stade du repos présente habituelle- ment une petite masse irrégulière, aux contours arrondis des deux côtés, diamétralement opposés, de laquelle on observe de petits appendices d'une nuance rose pâle. Ainsi, les deux parties consti- tutives du noyau s'y déterminent tout de suite : la chromatine. en forme d'une petite masse arrondie, et l'achromatine, qui a l'aspect de deux appendices coniques. On n'observe pas, dans les conditions indiquées, de noyaux où cette division ne fût pas plus ou moins claire. La chromatine apparaît homogène et reçoit aussi avidement jusqu'à la nuance intense le vert de méthyle, cette couleur nucléaire qu'aiment de prédilection quelques histologues. L'achromatine peut \ être, en très petite quantité, observée seulement d'un côté et peut avoir un caractère légèrement granulaire ou faiblement fibrillaire. On peut remarquer maintenant que le caractère des deux parties constitutives du noyau reste aussi, dans les phases de la division sui- vante, plus ou moins le même. Divers stades de division mitotique des noyaux végétatifs. CoUozoum inerme (demi-schématique). C'est dans la phase suivante, indiquant la division qui se prépare, que le noyau apparaît légèrement allongé. La masse de chromatine, ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — 3^ SÉRIE. — T. III. 1895. 40 626 PAUL MITROPHANOVV. ayant acquis l'aspect d'un court cylindre avec un étranglement annulaire à peine perceptible au milieu, en forme, comme aupara- vant, la partie principale, L'achromatine se trouve aux deux bouts de ce cylindre en forme de petits cônes, dont la base est moindre que la coupe transversale du cylindre. Plus tard, l'étranglement du milieu s'agrandit, les deux moitiés du cylindre de chromatine s'éloignent l'une de l'autre et l'étrangle- ment entre elles acquiert une nuance rose. Les deux moitiés de chromatine se séparent peu à peu, reçoivent une forme rappelant les reins, et, alors, leurs superficies convexes sont tournées l'une vers l'autre et les concaves entourent les bases des cônes d'achromatine qui sont maintenant le plus distincts. Si l'on compare, à ce stade, le noyau des Collozoum avec le diaster ou le dispirem d'un petit noyau pris, par exemple, des tissus d'un mammifère, on ne peut ne pas remarquer leur ressemblance par- faite. Les cônes d'achromatine correspondent évidemment aux pré- tendus demi-fuseaux, et la liaison des parties filiales de chromatine aux fibres réunissantes. Souvent même cette dernière a leur carac- tère, en présentant plusieurs faisceaux séparés et parallèles les uns aux autres. Lors du plus grand éloignement des noyaux filiaux, les fibres réu- nissantes se déchirent, leurs moitiés se rassemblent vers les masses de chromatine et le noyau filial acquiert le caractère primitif du noyau mère. Nous n'y voyons pas de distribution compliquée de chromatine dans la base d'achromatine, de même que de procès préparatoires à sa division, ainsi qu'on le voit dans la caryokinèse normale. Tous les procès de la division des noyaux de l'état végétatif, chez les Col- lozoum, présentent, pour ainsi dire, un schéma raccourci de mitose, ce qui dépend apparemment des rapports plus simples dans lesquels s'y trouvent l'une envers l'autre les parties constitutives du noyau. La simplification deviendra claire, si nous considérons la masse de chronialiiie comme une chromosome unique. Si nous avons, dans DE l.'ETAT VÉGÉTATIF CHEZ LES SPHÉKOZOAIKKS. 627 quelques noyaux seulement, quatre ou même deux chromosomes, pourquoi ne pas admettre l'existence d'un noyau n'en ayant qu'une? Dans ce cas, il est intéressant que les deux parties constitutives du noyau, étant organiquement liées l'une à l'autre, restent, première- ment, à un certain degré, tout de même séparées, et, secondement, que, dans les phases suivantes, la chromatine change de place dans l'achromatine. Comme nous l'avons déjà remarqué, le protoplasme fondamental reste, lors du traitement indiqué, non coloré et, par conséquent, tous les changements dans les noyaux en sont séparés. Cette circonstance indique directement que le fuseau d'achromatine, de même que les fibres réunissantes, se forme aux dépens de l'achromatine (linin) du noyau. On n'a pas remarqué d'indication quelconque concernant les centrosomes. Il s'ensuit, de tout ce qui a été exposé, que, malgré toute la sim- plicité du procès de la division des noyaux chez les Collozoïuu, il présente un vrai acte de la division indirecte simplifiée. Les obser- vations futures devront prouver s'il offre, dans le développement général, une des formes primitives de la caryokinèse, ou bien si ce procès est occasionné seulement par des conditions physiologiques. Laboratoire Arago, le 18 novembre 1893. eOUP D'OEIL SUR LA DISTRIBUTION GÉNÉRALE DES INVERTÉBRÉS DANS LA RÉGION DE BANYULS (GOLFE DU LION) PAR G. PRUVOT Professeur à la Faculté des sciences de Grenoble. Les dragages méthodiques, avec relèvement précis des stations et des profondeurs, qui sont poursuivis depuis plusieurs années au laboratoire Arago, sous la haute direction de M. de Lacaze-Duthiers, permettent de prendre, dès maintenant, une connaissance générale de l'habitat et de la répartition des formes animales les plus remar- quables de notre région. Un premier travail \ basé sur les résultats de cent soixante-quinze sondages environ, a établi la topographie, les caractères physiques et la composition des différents fonds; il appelle, comme complément naturel, le recensement et la distribution de leurs habitants. L'étude détaillée et aussi complète que possible de cette faune se poursuit actuellement ; elle exige des efforts collectifs et soutenus pendant une série d'années. Ce n'est donc pas faire double emploi avec ce travail de longue haleine ni en préjuger les résultats que d'essayer de lui fournir une base en traçant, dès maintenant, les grandes ' G. Pruvot, Essai sur la topographie et la constitution des fonds sous-marins de la région de Banyuls (Archives de zoologie expérimentale et générale, 3« si^rie, t. II, 1894). 630 G. PRUVOT. lignes de la répartition tant horizontale que bathymétrique des In- vertébrés de Banyuls. Je me bornerai ici à considérer seulement les formes animales qui sont le plus exactement localisées et celles qui, répandues en appa- rence plus uniformément, sont remarquables par leur abondance extrême en certains points. Ce sont celles, en effet, qui donnent véritablement à chaque faune sa physionomie propre et les seules sur lesquelles on puisse légitimement tenter de baser une classifi- cation naturelle des fonds au point de vue faunistique. Si la première tentative pour diviser en zones superposées, carac- térisées par les associations animales qui s'y rencontrent, les fonds sous-raarins que le mouvement des eaux ne laisse jamais à décou- vert, a été faite, dans la Méditerranée, par Forbes, à la suite de ses dragages dans la mer Egée (184.1-1842), les travaux subséquents ont eu pour objet plus particulièrement les fonds de l'Océan et des mers septentrionales. La concordance queSars, Lôven, etc., ont reconnue, au point de vue de la faune, entre les régions, même les plus éloi- gnées des côtes océaniques, les a fait choisir comme type pour la distribution bathymétrique des êtres vivants, et Forbes lui-même substitua bientôt à sa classification première en huit régions les quatre zones suivantes, devenues classiques, qui furent étendues à toutes les mers d'Europe : 1° Zone littorale, comprise dans le balancement des marées ; 2" Zone des Laminaires, du zéro des cartes marines, limite infé- rieure des marées, à 27 mètres (15 brasses) de profondeur ; [i° Zone des Corallines, de 27 mètres à 9,1 mètres (50 brasses) ; 4° Zone des Coraux de mer pi'ofonde, à partir de 91 mètres jusqu'au point d'extinction de la vie animale. Les dragages de Forbes lui avaient montré, en eflet, qu'à partir d'une certaine profondeur, de 180 mètres (100 brasses) environ, le nombre des espèces animales recueillies diminuait progressivement, et, ce fait venant à l'appui de considérations théoriques basées sur DISTRIBUTION DES INVERTÉBRÉS DE BANYDLS. 631 la stagnation des eaux profondes, l'absence de lumière et, par con- séquent, de végétaux, l'avait amené à conclure à un « zéro de vie animale » qui devait être placé dans toutes les mers vers 400 mètres au maximum. Cette idée était admise sans conteste, malgré un certain nombre de faits antérieurement signalés, quand, en 1861, le câble télégra- phique tendu entre l'Afrique et la Sardaigne, de Bône à Cagliari, s'étant rompu, des fragments retirés de profondeurs exactement mesurées, variant de 2000 à 2 800 mètres, et soumis à M. Milne Edwards, lui révélèrent la présence d'animaux qui s'y étaient fixés, parmi lesquels il releva : Ostrea cochlear, Peclen ojiercularis, Pccten testx, Monodonta limbala, Fusus lamellosus, Caryopfu/l/ia m'cuala, Caryophyllia electrica, Thalassiotrochm telegraphicus, Salicornurta farciminoides et deux Serpules indéterminées. Tous sont des ani- maux sédentaires et leur base d'attache moulée exactement sur les torons du câble témoignait qu'ils s'étaient réellement développés à cette profondeur considérable. Depuis, les expéditions scientifiques du Travailleur et du Talisman, du Porcupine, du Challenger, du Blake, etc., ont fait connaître toute une riche faune abyssale, par- ticulièrement développée dans les océans ouverts, comme, par exemple, dans le golfe de Gascogne et sur les côtes de Portugal, pour ne citer que les régions les plus voisines de nous, mais bien plus appauvrie, absente même sur de vastes espaces, dans les bas- sins fermés, tels que la Méditerranée. Cette immense étendue nouvelle conquise à la zoologie est aussi subdivisée maintenant en deux ou trois zones. M. Vaillant' arrête la dernière zone de Forbes à 300 mètres, vers la limite inférieure de la végétation, et divise la «région abyssale» qui s'étend au-dessous en : i° Zone abyssale supérieure, de 300 mètres à 1 000 ou i 500 mètres, point où s'arrêtent les Elasmobranches hypotrêmes et les Pleuro- nectes ; 1 L. Vaillant, Poissons du Travailleur et du Talisman, 1S88, p. 6. G32 G. PRUVOT. 2° Zone abyssale inférieure, à partir de \ 300 mètres. D'autre part, M. Thoulet * donne, en utilisant pour les régions abyssales les travaux de Murray et Renard sur les sédiments recueillis par le Challeiiger, les successions suivantes : I. Dépôts côtiers. — 1° Zone littorale, soumise au jeu de la marée ; 2° Zone des Laminaires, du niveau des basses mers jusqu'à 27 mètres ; 3° Zone des Corallines, de 27 à 92 mètres, renfermant les grandes régions de pêche ; 4° Zone des Coraux de mer profonde, de 9-2 à 200 mètres environ. IL Dépôts terrigènes. — Boues grises ou bleues, depuis 200 mètres jusqu'à 1 300 mètres, et plus dans les bassins fermés. III. Dépôts d'eau profonde océanique. — Yase à Globigérihes et vase siliceuse à Diatomées, à peu près exclusivement caractéristiques de l'Atlantique, comprises entre 450 et 3 500 mètres en moyenne. IV. Dépôts d'abîmes. — Argiles plastiques rouges ou brun chocolat, à partir de 5000 mètres. Ces deux dernières divisions faisant défaut dans toute la Méditer- ranée, nous n'avons pas à nous en occuper. Pour les autres, sauf l'addition de la région abyssale, on voit que rien n'est changé aux divisions de Forbes, qui paraissent encore adoptées universellement, et elles sont employées d'une manière courante, même pour la Méditerranée. Toutefois, cette dernière étant dépourvue de marées, la zone littorale, en tant que définie par la marée même, ne s'y laisse pas caractériser aisément, et les diffé- rences dans l'extension que lui assignent les auteurs témoignent d'un certain embarras pour l'assimilation de cette région supérieure des côtes océaniennes et méditerranéennes. Forbes admettait que la région de la Méditerranée, qui représente la zone littorale de l'Océan, va de 0 à 3"',65 ^2 brasses). Cette étendue > J. TnouLET, Trailé d'océanographie, 1890, p. 165. DISTRIBUTION DES INVERTÉBUKS DE BANYULS. 633 paraît trop considérable à Fischer \ qui la réduit « à la courte zone comprise entre le flux et le reflux », ce qui ne lui donnerait pas, pour notre région du golfe du Lion, plus de 40 à 60 centimètres de hauteur verticale. M. Joubin^ la fait descendre jusqu'à 1 mètre. M. Marion', sans, d'ailleurs, établir de comparaison avec les mers à marée, arrête, dans le golfe de Marseille, la zone littorale immergée à 2 mètres, au point où commencent, en général, les prairies de Zostères. On peut dire pourtant qu'il n'existe peut-être pas une seule espèce* qui, vivant à 1 ou 2 mètres de profondeur, ne se re- trouve couramment et aussi abondante à 5, 6 mètres et même plus profondément, suivant les conditions locales. Au delà, la superposition des faunes est toujours établie unique- ment d'après la profondeur. Pourtant, la profondeur non seulement n'est pas le facteur unique, mais n'est même pas en elle-même un facteur de la distribution des animaux. On est même surpris de la facilité avec laquelle les Invertébrés marins des grands fonds. Co- raux, Brachiopodes, Crustacés, Vers, Échinodermes, continuent à vivre et s'acclimatent dans les aquariums, passant brusquement, sans paraître s'en apercevoir, de la pression de 40 à 50 atmosphères à laquelle ils sont habitués, correspondant à une profondeur de 400 à 500 mètres, à la pression de quelques centimètres d'eau dans les bacs. Inversement, M. Regnard '" a montré que les animaux littoraux peuvent être soumis expérimentalement à des pressions considé- rables sans paraître en souffrir. Tous les animaux mis en expérience » p. Fischer, Manuel de Conchyliologie, 1887, p. 183. 2 L. JouBiN, Recherches sur les Turbellariés des côtes de France {Archives de zoologie expérimentale et générale, 2" série, t. VIII, 1S90, p. 472). 3 A. -F. Marion, Esquisse d'une topographie zoologique du golfe de Marseille [Annales du musée d'histoire naturelle de Marseille, t. I, 1S83, p. 43). * Exception faite pour les animaux qui passent à sec une partie de leur vie, et pour lesquels il faut admettre la « zone subterrestre », presque toujours émergée, proposée par M. Vaillant. " P. Regnard, Recherches expérimentales sur les conditions physiques de la vie dans les eaux, 1891, p. 155 et suivantes. 63i G. PRUVOT. ont supporté, sans inconvénient appréciable, au moins iOO atmo- sphères, équivalant à une colonne d'eau de mer de i Of)0 mètres ; ce n'est guère que quand la pression arrive aux chiffres énormes de 300 atmosphères (3 000 mètres) pour les plus sensibles, de 500 et même plus pour les autres, que les patients tombent dans une tor- peur qui entraîne la mort en se prolongeant. De même, l'observation directe surplace montre que, dans des cas particuliers, l'aire d'extension verticale des animaux peut s'étendre bien au delà des limites qui leur sont assignées d'habitude. LeSym- podium coralloùles, caractéristique de la zone des Gorallines (27 à 91 mètres) dans la Méditerranée, s'élève, en dedans de la jetée d'entrée de l'avant-port de Port-Vendres, dans des eaux remarqua- blement abritées, ainsi que les autres animaux qui l'accompagnent d'ordinaire, à 50 centimètres à peine au-dessous du niveau de l'eau, reproduisant ainsi, à un niveau qui devrait être attribué à la zone littorale la plus superficielle, les groupements animaux caractéris- tiques des fonds coralligènes qui ne se rencontrent ailleurs qu'à 30, 50, 70 mètres. De même, dans le mouillage très abrité de Rosas, où la vase arrive jusqu'à la ligne du rivage, on rencontre à fleur d'eau, le long de la plage, les habitants ordinaires des fonds vaseux de 40 et 60 mètres. Le Corail même, qui, sur les côtes droites, sans abri, perpétuellement battues, de l'Algérie et de la Tunisie, n'est pas péché à moins de 75 mètres et l'est, d'habitude, aux environs de 150 mètres^, remonte sur les rivages plus découpés qui avoisinent le cap de Creus jusqu'à 20 mètres à peine au-dessous de;la surface (il a été recueilli même à 13 mètres contre le cap Rœderis) et, depuis longtemps, les gens de la région l'y pèchent à l'aide du scaphandre. La région de Banyuls n'est donc pas favorable au découpage des fonds en tranches horizontales, d'épaisseur uniforme. Partout nous avons trouvé les associations animales en rapport, non avec la pro- ' H. DE Lacaze-Duthiers, Histoire naturelle du Corail. 1864, p. 220. DISTRIBUTION DES INVERTÉBRÉS DE BANYULS. G3S fondeur absolue, mais avec la nature même des fonds et, secondai- rement, avec les conditions physiques, repos ou agitation, des eaux. D'après cela, une classification «laturelle de nos fonds, au point de vue faunistique, doit comprendre des zones largement étendues, dont les limites supérieure et inférieure doivent conserver une grande élasticité ; et chaque zone doit être divisée en faciès distincts, la séparation étant presque absolue pour un même niveau entre les associations animales qui habitent les parties rocheuses et les par- ties sableuses d'une même côte, les habitants des herbiers n'étant pas les mêmes que ceux de la vase ou du sable pur. Le tableau de la page suivante montre les divisions générales que j'ai été conduit à adopter et leur ordre naturel de succession en un certain nombre de points de la côte choisis comme les plus ty- piques. Première zone. — La zone suhterrestre est 'caractérisée par le fait que les êtres qui l'occupent passent la plus grande partie de leur vie réellement à sec, exposés à l'air et aux rayons du soleil. Elle forme au rivage un mince liséré émergé d'habitude, mais maintenu humide par l'embrun des petites vagues sur les roches et, sur les plages sablonneuses, par l'eau qui s'y infiltre, en vertu de la capil- larité. C'est le point de contact des faunes terrestre et [marine ; les rats s'y aventurent dans les rochers à la recherche des débris rejetés parle flot et y poursuivent parfois un petit crabe, le Pachygrapsus marmoratus. Sur la plage de Rosas, les Gicindèles chassent avec ardeur les Talitres, dont elles font Jeur nourriture, et la pelle, re- tournant le sable, met à jour ceux-ci, pêle-mêle avec des fourmis. Les espèces y sont peu nombreuses, mais les individus sont abon- dants. Ce sont, sur les rochers et les trottoirs : Pachygrapsus marmo- ratus Stimps., Lygia Italica Fabr., Chthamalus stellatus Ranz., parmi les Crustacés ; les Liltorina neritoides L., Patella lusitanica Gm., repré- sentent les Mollusques. Des Amphipodes, au premier rang desquels il faut citer le Talitrus locusta L., sautent parfois en quantité pro- C3 >> < 03 Q O O « PC *s! tJ co ^: -aï Q co & o» o o l-J o o N C/3 O N C/3 (=) & <3 .J 03 •a 18 o S. o a •Cl o '~6 a> .S 60 J2 •a Ai o 5 < o S 1 « > à b / . B 3 .0) _io c: u oi "rt Q 'c 5) o o X 0. c "« •a o u f- C ■^ a 1 M OJ u tr n: § •1 Sa ) ■" o P3 «1 O a TO "rc C^ < o S -c J3 O ce a o C c Cb 2 ^ c := a c c ffi a »1 J p; g .a •c V. o 1 5 -S 1 c c o ci c .2 o > t î_ > u b. ? ûî "" •et < 1 6 's 2 C ^ E O o 13 Ci X p 6 ai 3 > CÛ < il 61 S 3 13 m -a) a w T Q o ■fc E S ÏJ '? O O a- < o < a. 1- 5 o o s f/; .^ •— .^ » td 1 t^ s =13 S) t. 02 es J3 o '■12 ^ s^ 'W c IM, — -s -^ >' z -- „ ■w ° ^ c ît ^ o e- o o c3 tn Û a Z -^ tn » o a ;;; ■a ^3 ■a ■3 r]o c C3 o o « o C c c c c c o o o o o 5 N n: N3 N N N o « o o o ©^ — Cl t:l -* iO "• ■ — ' • -^^-.. — ^ .^•^^ '^-' a <û a ■a .2 *^ n (— ' 'C35 ^ ^ "Sî 'SS - 'Ss « .-S PS -g an =- DISTRIBUTION DES INVERTÉBRÉS DE BANYULS. 637 digieuse, à la surface des plages et font, en retombant, un bruit ana- logue à celui de la pluie. Deuxième zone. — La zone littorale proprement dite est la plus riche en Invertébrés de toutes sortes ; elle montre mieux que toute autre combien, pour un même niveau, les associations animales sont différentes suivant la nature du sol, et combien il importe de tenir compte des faciès locaux. Elle présente quatre faciès différents: sable pur des plages, sable fin couvert d'herbiers, trottoirs et roche vive couverte d'algues. Le sable ne forme que des plages peu étendues dans les environs immédiats deBanyuls. Les petits Pagures, ^'M/ja^wws anachoretusRis., Diogenes varians Ilell., courent à sa surface ; la Gebia littoralis Ris. y creuse ses galeries sous le laboratoire même, accompagnée de Vers relativement nombreux: Ne?'eis cultr/fera Gr., Arenicola Grubei Glprd. (dans les parties un peu vaseuses), Cephalotrix hnearis llath., Lineus yesserensis 0. Mull. et lacteus Mont., Cereùratulus margina- tus Ren. La faune y est pauvre en Mollusques ; mais, plus au nord, sur les plages du Roussillon et du Languedoc, se rencontrent en abondance les Acéphales, Tellina, Modiola, Solen, Corbula, Tapes divers, etc., qui en sont caractéristiques. Un peu plus bas (horizon moyen), on rencontre, dans la baie de Banyuls : Echinocardium cor- datum Gray, Psammolyce arenosa D. Ch., et plusieurs fois le sca- phandre a permis d'y capturer, ainsi qu'à l'entrée du goulet de Port-Yendres, de beaux individus de Pinna nobdis L. Les herbiers qui appartiennent aussi à l'horizon moyen, étant par- tout, sauf au mouillage de Rosas, séparés de la ligne du rivage par la bande de sable de l'horizon supérieur, abritent une foule de Vers, de Crustacés, d'Ascidies composées, d'Épongés, etc., dont de longues énumérations ont été données par M. Marion * pour le golfe de Mar- seille. Je n'aurais qu'à les répéter : la physionomie générale de la > A.-F. Mauion, Esquisse d'une topographie zoologique du golfe de Marseille {Annales du musée d'histoire naturelle de Marseille, t. I, 1883, p. 55-61). 638 G. PRUVOT. faune est la même qu'à Marseille, un peu moins développée pour- tant à Banyuls. Le faciès rocheux de cette zone littorale présente, en revanche, sur les falaises de notre région, un beau développement. Disons d'abord que les trottoirs d'algues calcaires, à la surface presque toujours émergée desquels courent les animaux de la faune sub- terrestre, abritent, dans leurs anfractuosités, les habitants ordi- naires de la roche adjacente. Quelques espèces y établissent pour- tant leur retraite de préférence ; les Gadinia Garnofe Desh., Fissurella grxca L., les Ghitons, les petits Phascolosomes, y sont particulière- ment abondants. La roche a, depuis le niveau de l'eau jusqu'à la dernière profon- deur qu'elle atteint, partout le même aspect, le même revêtement touffu d'algues, parmi lesquelles dominent les Cystoseires. Pour- tant, certains animaux qui fréquentent la région la plus superficielle ne se retrouvent pas plus bas. Il n'y a guère à douter qu'ils sont attirés dans cette station élevée par l'attrait d'une eau particuliè- rement agitée. Ce sont tous, en efl'et, des animaux qui sont pourvus de moyens énergiques d'adhérence ou qui vivent solidement fixés dans les fentes des rochers. Il faut donc distinguer au moins deux niveaux ou deux horizons dans la roche littorale. L'horizon supérieur est caractérisé essentiellement par le Sti'ongy- locentrotus lividus Lmk., les Balanus perforalus Brug. et ùalanoides Poli, de véritables tapis d' Anemonia sulcata Penn., accompagnée de VActinia equina L. Comme Mollusques: Chiton olivaceus Speng. et mm^ginatus 'Penn. , Acanthochites fascicularis L., Patella lusitanica Gm. et cœrulœa L., Mytilus galloprovincialis Lmk. et ctnspus Cantr. Parmi les Vers : Sabellareniformis Leuck., Polymnia nebulosa Mont., Bonel- lia viridis [loi. Deux gigantesques Eunice liousseaui Quatr. y ont été capturées dans les fentes du rocher, lors du creusement du vivier du laboratoire ; d'autres fragments de la même espèce ont été rejetés sur la plage à différentes reprises, à la suite de violents coups de vent. Une larve de Diptère, qui est peut-être le Ciunioadriaticus Sch., se DISTRIBUTION DES INVEKTÉBRÉS Dli BANYULS. G39 montre en abondance au milieu des Ulves, dans l'anse du Fontaulc. Ce premier niveau s'étend jusqu'à la profondeur de 2 ou 3 mètres en moyenne. Au-dessous, dans l'horizon moyen, l'Oursin comestible est remplacé, mais moins abondamment, par le Sphxrcchinus gra- nularishmk., les Anemonia sulcata etActinia equina par des Sagartia diverses, bien moins abondantes également ; les Ghilons deviennent rares; les Balanes, les Patelles ont disparu. En revanche, apparais- sent les Ascidies de la famille des Gynthiadées et la Gorgonia verru- cosa Pall., qui tapisse parfois entièrement la roche dans les endroits les plus abrités. Outre ces espèces ainsi localisées, la roche littorale abrite partout, dans les algues qui la couvrent, une majorité considérable d'ani- maux répartis également dans les deux horizons. Citons, comme les plus importants et les plus caractéristiques de la roche littorale prise dans son ensemble : ÉcHiNODERMES. — Holotliuria tubulosa Gm., Asterias glac/alis O.-F. MuU., Asterma gibbosa Forb., Amphiura squamata Sars. Mollusques. — Octopus macropus Ris. eivulgaris Lmk., Cerithium vulgatum Brug. et rupestre Kis., Cotiimbella rustica L., Conus niedi- terraneus Brug., Murex corallinus Scac, Trochus varias L., umbili- catus Mont., turbinatus Born., etc.; Nassa reticulata L. et incrassala Str., Pisania maculosa Lmk., Cyprxapulex Gray, Aplysia depilansL., Haliolis lamellosa Lmk., Elysia viridis Ver., Runcina Hancocki Forb., Eolis exigua Aid. et H. NÉMERTES. — Ampiliporus lactifloreus Johnst. et vittalus Hub., Dre- panophorus crassus Quatr., Telrastemma flavidum Ehr. et melanoce- phalum Johnst., Cerebratulus aurantiacus Gr. Annélides. — Polynoe Grubiana Glap., C hrysopetalum fragile KhL, Euphrosyne Audouini Cost., Micronereù vajHegata Ciap., jSereis Du- merilii Am\. et M.-Edw., Polyophthabnus pictus Duj., Eulalia viri- dis Sav. eipallida Glap., Syllidiens particulièrement nombreux (plus d'une trentaine d'espèces), Potamilla reniformis Leuck., Amphiglene mediterraneaCXdiT^,^ OriaArmandi Glap. 640 G. PRUVOT. Crustacés. — Eriphia spinifrons Sav., Pim Gibsi Leach, Xantho 7'ivulosus Ris., Pilumnus hirtellus Leach, Hippolyle Cranchii Leach, Caprella xquilibi'a Say, acanthifera Leach, etc.; Sphœroma serralum Leach. La roche se continue, en certains endroits, avec les mêmes carac- tères et la même faune jusqu'au point oîi elle disparaît sous les dépôts vaseux ou sableux de la deuxième région. Mais il est rare pourtant que la roche littorale, continuation sous les eaux de la falaise émer- gée, à flancs irrégulièrement abrupts comme elle, passe sans transi- tion à la nappe vaseuse à peine inclinée. En effet, sous l'influence des agents atmosphériques pour la partie émergée, de l'action des eaux et aussi des animaux qui les peuplent pour la portion toujours im- mergée, la falaise rocheuse est désagrégée, des blocs s'en détachent, un émiettement continuel se produit, les débris plus ou moins gros, mêlés aux dépouilles des habitants, roulent jusqu'au bas de la roche et s'arrêtent sur le lit sensiblement horizontal que forme la vase à son pied. Comme il y a toutes raisons de penser que la limite supé- rieure de la vase est déterminée par le niveau, variable suivant les circonstances locales, au-dessus duquel le mouvement continuel des eaux empêche le dépôt de sédiments fins, ces débris ne peuvent, pas plus que la roche au-dessus, et pour la même raison, être recou- verts complètement par des apports vaseux ultérieurs.' Ils forment donc là une bande plus ou moins large de matériaux plus ou moins grossiers, plus ou moins mélangés à la vase adjacente. Ces dépôts correspondent aux a fonds coralligènes » de M. Ma- rion. lin certains points, notamment à la station déjà célèbre du cap l'Abeille, ils revêtent au plus haut degré le caractère des « fonds vifs ». Les débris nullement vaseux sont réunis, cimentés par quan- tité d'algues calcaires, d'Épongés, de Bryozoaires, de tubes d'Anné- lides, et constituent des concrétions volumineuses que la drague arrache à grand'peine et qui recèlent dans leurs anfractuosilés une faune remarquablement riche et intéressante. Au cap l'Abeille, ils sont développés surtout vers 35-40 mètres de profondeur ; mais ils DISTRIBUTION DES INVERTÉBRÉS DE BANYULS. 641 remontent contre la roche elle-même dans ses ressauts, dans les amas de sable ou de graviers qui remplissent ses interstices, en. diminuant progressivement d'importance jusqu'à i25 mètres environ. Voici la liste des formes les plus abondantes ou les plus caracté- ristiques qu'on y rencontre : Spongiaires*. — Stelletta hispida Bucc, Cydonium conchilegum Schm., Erylus stellifer Tops., hops intuta Tops., Stryphnus mucvo- natus Schin., Penares Hellein Schm., Pachaslrella monilifera Schm., Hircinia variabilis Schm., Halisarca Dujardini Johnst., Desmacidon fruticosus Johnst., Rhabderemia mi7iutula To\>s., Reniera fulv a Tops. ei parietalis Tops., Damiria cavernosa Tops., Acheliderma lemniscata Tops., Acai'nus lortilis Tops., Hymeniacidon pallescens Tops., Axi- nella polypoides Schm,, Ute glabra Schm. Hexactiniaires. — Heliaclis bellis EU. et Sol., Aiptasia mutabilis Grav., Phellia elongata D. Ch., Palythoa axinellse Schm., Balano- phylliaitalica M.-lidw. et H., Flabellum anthophyllum M.-Edw. et H., Cladocora cœspitosa M.-Edw. et H., Gerardia Lamarcki Lac.-D. Alcyonnaires. — Corallium rubrum Lmk., Gorgonia verrucosa Pall., Sympodmm coralloides Pall., Muricxa chamaeleon Koch, Paralcyonium elegans Lmk. Bryozoaires. — Myriozoum truncatum Pall., Frondipora reticu- lata L., Escharafoliacea Lmk., Retepora cellidosa Jam., Schizoporella linearis Hass., Cellepora pumicosa L., Cellaria fistulosa L. [Salicor- naria farcbninoides), Diachoris magellanica Busk, Bugula flabellala Thomps., Membranipora pilosa L., Crisiadées nombreuses, Pedicel- lina echinata Sars. Brachiopodes. — Argiope decollata Chemn., Cistella neapolilana Scac, Crania anomala O.-F. Mull. ' On aura idée de l'abondance des Spongiaires en cette sLalion en ra|>[)elant que M. Topsent, dans ses notes diverses, bien que mentionnant seulement les formes d'un intérêt particulier, y a signalé déjà un nombre d'espèces qui dépasse quarante. Il a constaté notamment, dans son Élude monugraphique des Spongiaires de France, que le groupe des Tétractinellides, le seul paru encore, est représenté ici par qua- torze espèces sur les seize en tout qui ont été rencontrées dans la Méditerranée. ARCn. DE ZOOL. liXP. ET GÉN. — 3*= SÉRIE. — T. III. 189o. ',1 642 G. PRUVOT. TuNiciERS. — Cyntkia pnpillosa L., Ciona Savignyi Herd., Clavelina nana Lab., Perophoy^a banyulensis Lab., Leptoclinwn commune D. Yall. , Amaroucium fuscum Dr, Presque tous les animaux qui précèdent sont assez exactement cantonnés à ce niveau et lui donnent sa physionomie propre. Grâce à eux, on peut reconnaître, sous les variations locales, la bande que forment dans notre région les fonds coralligènes proprement dits, bande discontinue, d'épaisseur et de profondeur variables, mais toujours interposée entre la base de la roche et les sédiments meu- bles du plateau. La grande majorité des formes suivantes, au con- traire, se montrait déjà dans les deux horizons précédents de la roche littorale. On remarquera que ce sont presque tous des animaux vagabonds ou du moins non fixés. 11 serait facile d'en allonger les listes, le nombre étant grand des animaux qui viennent chercher abri et nourriture abondante dans les concrétions coralligènes. Je me borne aux formes les plus communes : Mollusques. — Ils sont relativement peu abondants, beaucoup moins que dans les fonds correspondants de Marseille, qui sont plus étendus, plus dilatés en quelque sorte et toujours assez fortement vaseux : Rissoa et Trochus nombreux, Turbo rugosus L., Murex coral- linus Se, Columbella scripta L., Nassa incrassata MulL, Cyprxa eu- ropxa Mont., Haminea hydatis L., Fissurella gibba Phil. Les Lamelli- branches sont plus caractéristiques : Lithodornus lithophagus L., Vene- rupis irus L., Merelrix rudis Poli, Venus casina L., Peclen multistriatus Poli et opercularis L., Arca barbata L., Pectunculus bimaculatus Poli, Chama gryphoides L. ÉcHiNODERMES. — Echiuus microtuberculatus Bl. et melo Lmk., Echi- naster sepositus Mull. et Tr., Ophiothrix fragilis Abild., Ophiopsila aranea Forb., Cucumaria brunnea Forb. Némertes. — Euborlasia Elisabethx Me Int., Cerebi'atulus trislis Hub., C. hepaticus Ruh., C. fasciolatus ^hv.^Amphiporusdubius'Unh., A. marmoratus Hub., Drepanophorus spectabilis Qualr., Tetrastemma flavidum Ehr., T. candidura O.-F. Mull. DISTRIBUTION DES INVERTÉBRÉS DE BANYULS. 643 Annélides. — Polynoe Grubiana Glap., P. areolata Gr., Hermadion variegatum Gr. et Kr., Euphrosyne Audoumi Costa, Chrysopetalum fragile Ehl., Eunice Harassi kudi. et M.-Edw., E. /«nia Glap., E. tor- quata Qualr., Lysidice ninetla Aud. et M.-Edw., Lumbriconej^eis Gru- biana Glap., L. impatiens Glap., L. coccinea Ren., Staurocephalus rubrovittatus Gr., Psamathe cirrhata Kef., Syllis hyalina Gr., ^. au- ranliaca Glap., »S. Krohnii Ehl., Haplosyllis hamata Glap., Trypano- syllis zébra Gr., Tr. cœliaca Glap., Amblyosyllis lineata Marenz., Eusyllis lamelligera Mar, et Bob., Odontosyllis fulgurans Glap., Eurysyllis tuberculata Ehl., Spkserosylh's hystrix Glap., Aulolytus rubropunctatus Gr,, A. /jïc/ms Ehl., ^. aurantiacus Glap., Phyllodoce laminosa Guv., Eulalia macroceros Gr., £'. ynicroceros Glap., Glycera tessellata Gr., Sclerocheilus minutas Gr., Chœtopterus variopedatus Ren., Polydrrus paltidusCldip., Vermilia infundibulum Ph'û., Pota7no- ceros triquetroides D. Gh. Les espèces suivantes paraissent plus ca- ractéristiques : Lepidaslhenia elegans Gr., Fallacia sicula D. Gh., Eulalia velifeim Glap., Polydora flava Glap., Salmacina incrustans Glap., Jasmineira sp., Leptochone œsthetica Glap. (élégante variété d'un rouge vif). Crustacés. — Aucun n'est particulier à ce niveau : Pilumnus hir- tellus Leach, /*/sa corallma Ris., //«'a nucleus Herb., Ebalia Pennanti Leach, Lambrus massena Roux, Pirimela denticulata Mont., Maia verrucosa M. Edvv., Eriphia spinifrons Sav. Vers la pointe du cap ''e Greus, contre l'île Masa de Oro, les fonds coralligènes descendent plus bas, jusque vers 70 ou 80 mètres. La faune est la même, mais moins concrétionnée. Les formes rameuses et dressées y dominent : Axinella damicornis Schm,, Gorgonella sar- menlosa Lmk., Gorgonia Cavolini Koch, Bebryce moUisVhW., Clado- cora csespitosa L., Flabellum, Halecium halecinum L., Antennularia ra- mosa Lam., Sertularella polyzonias L., Lafoea dumosa Flem., Eschara cervicornis M. Edw., Myriozoum truncatum Pall., Frondipora reticu- lata L., Retepora cellulosa Johnst. On y trouve aussi, avec une abondance caractéristique, diverses 644 G. PRUVOT. Synascidies, le Palmipes memhranaceusX). Ch., des Crisiadées, parmi lesquelles de beaux Dlastopora patina Lmk., et obelia Johnst., le Corail et toutes les variétés de coloration du Sympodium coralloides Pall. 11 pouvait être intéressant de rechercher si la nature minéralo- gique même de la roche exerce quelque influence sur le choix des animaux. A cet effet, deux dragages ont été effectués dans les roches calcaires néocomiennes des Mèdes, au sud du golfe de Rosas, par des profondeurs comprises entre 45 et 60 mètres. Les listes de leurs espèces que j'ai sous les yeux sont identiques à celles fournies par les schistes de Masa de Oro. En plus ou en moins seulement, quel- ques espèces vagabondes qui, en raison de leur grande extension et de leur adaptation à toutes les conditions, ne prouvent rien et ne donnent pas une physionomie particulière à une faune. Là encore, ce sont les grands Bryozoaires rameux qui dominent avec les Gor- gones ; et, au milieu de leurs débris et des algues, qui sont aussi les mêmes, Cystoseires, Udotées, etc., se retrouve la même popula- tion d'Hydraires, de Coraux, d'Annélides, de Brachiopodes, etc. J'ai rattaché les fonds coralligènes à la région littorale dont ils forment l'horizon profond, parce qu'ils passent insensiblement en haut à la roche littorale ordinaire, que les animaux non sédentaires y sont en grande partie les mêmes, Annélides, Crustacés, la plupart des Mollusques, et que, d'autre part, la limite est nettement tran- chée avec la vase côtière qui les borde inférieurement presque par- tout et qui constitue la deuxième région. Et, d'autre part, ce faciès coralligène se retrouve en d'autres points du rivage beaucoup plus haut. Nous avons trouvé des amas concrétionnés tout semblables, à une dizaine de mètres de profon- deur, dans la baie de Paulilles ; d'autres encore plus au nord, contre les roches Cerbère, au milieu des graviers vaseux qui les entourent. Mais là ils ont un caractère un peu particulier : ils sont, comme je l'ai déjà indiqué dans le travail précédent, formés uniquemcnl de débris animaux. Bryozoaires en plaques superposées et surtout tubes de DISTUIBUTION DES INVERTÉBRÉS DE BANYULS. 6iS Serpiiliens. Aucune algue, calcaire ou non, ne s'y rencontre, ce qui s'explique peut-être par l'éloignement de la côte rocheuse. Enfin, dans l'avant-port de Port-Vendres, les blocs de béton qui forment le soubassement de la jetée offrent, à quelques mètres à peine de profondeur, la même faune remontant presque jusqu'au niveau de l'eau, mélangée aux types de la roche littorale la plus superficielle et reposant, au-dessous, sur la vase du port. Le calme de l'eau et la faible profondeur en permettent aisément l'accès au scaphandre. C'est un des plus beaux spectacles qu'il soit donné à un naturaliste de contempler. Les énormes cubes de béton entassés irrégulièrement laissent entre eux des vides, des grottes, où se perd la lumière. Pas un pouce de la muraille qui ne soit tapissé des plaques éclatantes des Éponges et des Synascidies; la Cynthiapapillosa, rouge sur sa face extérieure, blanche du côté opposé, semble un fruit mûri par le soleil, contrastant avec la livrée sombre de VAscid/a fumigala; au milieu des Cystoseires brunes, les rameaux blancs des Gorgones, tachetés par leurs polypes marrons, les Sympodium violets, roses, blancs, voilés de leurs polypes neigeux, forment des forêts en mi- niature, traversées par les petits Poissons de roche multicolores ou inclinées par le passage lourd des Maia; les Lima, dérangées, volent autour du plongeur comme des papillons roses. Mais il faut aller admirer cette féerie au printemps ; dès le commencement de l'été, les longues algues filamenteuses, qui se développent partout dans les eaux abritées et peu profondes, jettent une housse glauque sur le revêtement fleuri. On retrouve là les Axinelles, les Gorgones, les Sympodium, les Ophiothrix, Ophiopsila, les Cynlhia papillosa, Ascidia fumigata Gr., la Lima hians Gm., des Annélides nombreuses, les Mollusques et les Crustacés ordinaires. Il faut aussi rattacher au même horizon, en la considérant comme représentant, au-dessous des plages de sable et d'herbiers, les fonds coralligènes qui bordent la roche, une étroite bande de graviers grossiers, formés, pour une bonne part, de fragments de coquilles, d'opercules de Turl/o, de tests à'£chinocyamuspusiUusO.-F. Mull., G4G G. PRUVOT. de tubes de Ditrupaarietina. C'est l'habitat d'élection de V Amphioxits et du Polygordius ; on y rencontre assez fréquemment aussi le Sipun- culus nudus L. Ces graviers se trouvent notamment au cap l'Abeille, par 40 mètres environ. Non loin de là, mais à une profondeur moindre (20 à 25 mètres), bordant en dessous la bande de sable et d'herbiers qui vient en s'effîlant de la baie de Banyuls jusqu'aux envi- rons du cap du Troc, et empiétant là sur la base de la roche, se trou- vait, en 1883, une bande de sable également grossier. Elle a disparu, complètement enlevée à la suite de violentes tempêtes. C'est à regret- ter, car elle nous avait fourni, entre autres, une faune remarquable d'Annélides dont plusieurs types n'ont pas été retrouvés depuis dans notre région. En voici la liste, telle que je la retrouve dans mes notes de cette époque : Lepidasthenia elegans Gr., Polynoe Grubiana Clap., Sthelenais dendrolepis Clap. , Psammolyce [Lepidopleurus) inclusa Clap. , Sigalion Buski Me Int., Eunice vittata D. Ch., Hyalinœcia rubi^a Lan- gerh., Notocirrus Hilairi D. Ch., Nephthys scolopendroides D. Ch., Eulalia velifera Clap., Amhlyosyllis lineata Marenz., Glycera sipho- nostoma H . Ch., Polydora Agassizii CXsl^., Owenia filiformisB. Ch., Ophelia 7'adiata D. Ch., Amphiclene auricoma Mull., Ditrupa arietina MuU. Troisième zone. — La vase côtière^ qui succède aux fonds précé- dents, montre un changement radical dans les associations animales. Elle renferme partout dans notre région, en abondance plus ou moins grande : TuiNiciERS. — Microcosmus imlgaris Hell., Styela glomerata Aid., Polycarpa varians llell., Clenicella appendiculata Lac.-D., Phalhma matnillata Cuv., Rhopalœa neapolitana Phil., Polycycliis Renieri D. Ch. Crustacés. — Pilumnus hirtellus Lcach, Portunus depuralor L., Dorippe lanata Bo&c, Ewynome aspera Leach, Ethusa mascarone^ Herbst, Mata verrucosa M.-Edw., Pisa Gibsi Leach, Stenorhynchus longirostris U.-Edw., Inachus thoracicus Roux et scorpio Latr., Porcel- DISTRIBUTION DES INVERTÉBRÉS DE BANYULS. 647 lana longicornis Penn., Galathèa nexa Embl., Typton spongicola Costa, Pagurus striatus Latr. et Eupagurus excavatus Herbst (charriant tous les deux sur les coquilles qu'ils habitent leur Actinie commensale, Sagartia parasilica), Eupagurus Prideauxii Leach (portant souvent de même VAdamsia paUiata), Scalpellum vulgare Leach. Annélides. — Aphrodila aculeata h., Hermione hystrix Sav., La- gi'sca extenuata Gr., Spinther miniaceus Gr., Eunice vittata D. Gh., Ophiodromus vittatus Sars, Autolytus Edivardsi St.-Jos., ,4. macroph- thalmus Marenz., Polymnia nebulosa Mont., Spirographis Spallanzani Viv. (variété à panache branchial décoloré), Sabella pavonina Sav., PotamUla reni f (mnis Leuck., Protula tubularia Mont., Filograna im- plexa^Qvk., Pomatoceros Iriquetroides, Phil., Sternaspis sculata Ren. Bryozoaires. — Cellaria fistulosa L. {Salicornaria farciminoides Johnst.). Mollusques. — Sepia elegans d'Orb., S. bisserialis Ver., Sepiola Petersi Stenstr., iS". Rondeleti Leach, Eledone AldrovandiYer., E. mos- chata Lmk., Turritella communis Ris., Capulus hungaricus L., Murex brandaris L., Cassidaria echinophora L., Aporrhais pes-pelecani L., Trochus granulatus Born., Lamellaria perspicua L., Scaphander ligna- rius, L., Gastropleron Meckelii Kos,, Philme aperta L., Pleurophyl- lidia undulata Meck., Oscanius membranaceus Mont., Doris tubercu- laiai}u\.,Idah'a e le g ans Leuck., Avicula hirundo L., Anomïa epkippium L., Pecten varias L., Modiolaria marrnorata Forb., Arca tetragona Poli. EcHiNODERMES. — Eckinaster sepositus^ Mull. et Tr., Astropecten squamatus Mull. et Tr., A. aurantiacus L. (cachant d'ordinaire dans ses sillons ambulacraires VAcholoe aslericola D. Gh.), Luidia ciliai'is Phil. (portant de même parfois V Ophiodromus vittatus Sars), Ophio- thrix echinata Mull. et Tr., Ophioglypha lacertosa Penn., Cucumaria Planci Màrenz., C. Kiixksbergi Màrcnz., C.pentactes Ltg, C. serges- tina Sars, Holothuria impatiens Forsk., H. Poli D. Gh., Thyone fusus O.-F. Mull., Th. aurantiaca Marei)z..f Stichopus regalis Guv., Antedon rosacea Norm. 64S G. PRUVOT. Hexactiniaires. — Heltactis bellis EU., Gephyra Do/rnn Koch.,Ilian- thiis diaphanusY). G., Eloactu Mazeli Andr., Phelliopsis nummus Andr., Chitonactis coronala Gos., Sagai'iia viduata O.-F. Mail., Sagartia mi' niata Gos., S. parasiiica Couch., Adamsia palliata Boh., Gonac- tinia proliféra Sars, Pal]p,hoa arenacea D. Ch., Caryophyllia clavus, M.-Edw. eL H. Alcyonnaires. — Alcyonium palmatuinVa.W., Veretillum cynomorium Pall., Stylobelemnon pusillum Phil., Virgularia mullifloraKner. Hydraires. — Aglaophenia myriophyl.lum L., Antennularia ramosa Lmk, Sei'tularella polyzonias L., Lafoea dumosa Flem. Spongiaires. — Suberites domuncula, S. carnosus, Polymnstia mamil- laris, Esperella syrinx, E chinodictyum Lacazei, Stylotella Marsilii, Cliona celata^ Hircinia fcelida, Reniera simulans, Spongelia elegans, Sp. fragilis, Aplysilla sulfurea. Sur ce fond commun, caractérisé en général par l'abondance des Ascidies simples, des Crabes, des Échinodermes (sauf les Our- sins), des Alcyons, des Vérétilles et des Éponges, se superposent des variations locales dues surtout à la prédominance de telle ou telle forme animale et qui, sans altérer la jphysionomie générale de la faune, peuvent servir à caractériser un certain nombre de sta- tions. Voici, en allant du nord au sud, les plus typiques de ces modifi- cations. Dans la plaine du Tech, en face de l'embouchure de la rivière de ce nom, les apports des eaux douces ont amené la formation d'un grand banc d'huîtres, aujourd'hui envasé et à peu près détruit. Au large de lui dominent les Cellaria, et surtout avec un développe- ment remarquable les grands Hydraires, Aglaophenia, Lafoea, Sertu- larella. Ils portent sur leurs rameaux les Avicules, Gephyra, Scalpel- lum, donnent asile également à la Leplochone xsthetica Clap. et surtout à un grand nombre de Néoméniens, Dondersia banyulensis Pr., D. f avens Pr., Proneomenia aglaophenix'Kovj . et Mar., Pr. sopita V\\, /'r. vagans Kow. et Mar., Paramenia impexa Pr.,et grâce à eux. DISTRIBUTION DES INVERTÉBRÉS DE BÂNYULS. 649 la plaine du Tech représente une des stations connues les plus re- marquables de ces rares Solénogastres. Le beau Pleurobranche Osca- niiis 7nembranaceus y àiteini une taille considérable; on rencontre fréquemment aussi le Thethys fimbriata L., et le Sip/ionostoma di- plochœtos Otto; nous y avons recueilli le SphxrodorumperipatusCia.^. et le Cerianthus membranaceus Gm. Un peu au sud du même endroit, dans les débris rejetés autrefois lors du creusement duport de Port-Vendres, c'est le règne des grandes Ascidies simples : le Microcosmus vulgaris commence à diminuer par suite de la pêche intensive qui en est faite ; mais chaque coup de chalut ramène encore les Ctenicella et les Polycarpa par milliers, et au milieu d'elles, le charmant Nudibranche, Idalia elegans, qui leur fait une guerre acharnée. Ces Ascidies, du reste, comme les Suberùes et les Veretilles, affec- tionnent les régigns caillouteuses et diminuent, en conséquence, dès qu'on s'éloigne du rivage. A l'entrée de la baie de Banyuls, le caractère dominant de la faune est l'abondance extrême des Ophiothrix echmata MuU. et Tr., qui fai- saient presque défaut plus au nord. Un seul coup de chalut en a ra- mené 2 230, accompagnant 4770 Ctenicella. C'est là aussi que se rencontrent avec la plus grande abondance les Eupagurus Prùleauxii, avec leurs Adamsia palliata, les Pleurophyllidies, le Murex brandaris eiV Hyalinœcia tubicola O.-F. MuU. Dans le golfe de la Selva dominent encore les Cténicelles, asso- ciées à un grand nombre de Stichopus regalis. Abondance de Cépha- lopodes, Eledone Aldrovandi et surtout Sepia elegans (120 une fois dans un coup de filet). Enfin, hors des limites du golfe du Lion, le golfe de Rosas, envahi aussi par les eaux douces et les apports vaseux qu'amènent laFluvia et la Muga, montre de nouveau la même faune que la plaine du Tech, avec ses bancs d'Huîtres, son abondance d'Ascidies, de Turritelles, d'Annélides, d'Holothuries. Toutefois] les Bryozoaires y sont rares, les grands Ilydraires presque absents, et parmi les Céphalopodes, 6o0 G; PRUVOT. VEledone moschala remplace, comme abondance, VEledone Aldro- vandi ^ Au mouillage même de Rosas, à l'abri de la pointe de la Santa- Trinidad. la bande littorale, qui devrait faire suite à ces fonds, a des caractères très particuliers. Le fond y est très vaseux, de maigres touffes dePosidonies implantées dans de la vase presque pure remon- tent jusqu'au niveau de l'eau, et sur ce fond exceptionnel on ra- masse, tout contre le rivage, sous quelques centimètres d'eau, avec la grande Aplysia fasciata Gm., les Turritelles, les Pagures, les Cii- cumaria, Hololkuria. Astropecten, Ophiotrix echinata, E chinaster sepo- situs, qui sont si communs dans la région précédente, alors que plus loin, vers la plage de San-Pedro-el-Pescador, largement exposée en face de l'embouchure du golfe au milieu de sa hauteur, le sable ne recèle, au contraire, que les habitants ordinaires des plages, Némertes, Annélides, Mollusques, surtout beaucoup de Lamelli- branches et VEchinocardium meditei^raneum Gray. > Voici, du reste, îi titre d'exemple, et pour servir de comparaison avec la vase côtière de la côte française, le dépouillement d'un coup de chalut donné dans la vase du golfe de Rosas, en son milieu, un peu au sud du banc d'Huîtres indiqué sur la carte : Crustacés. — 4 Dorippe lanata, Pilumnus hirtellus, 3 Slenorhynchus phalangium, 2 Inacims scorpio, Maia squinado, Galathea nexa, Porcellana longicornis, Pagurus excavaius, Scaipellum vulgare. Annélides. — 3 Spirographis Spallanzani, Thelepus Renouardi, Serpula Philippi, Polamoceros Iriquelr aides, Polamilla reniformis, Acholoe astericola, Serpula infundi- bulum, Amphilrite cirrata, Protula tubularia, Trypanosyllis zébra, Sclerocheilus mi- nuius, Ophiodromus vittatus, Ëunice vittala, Polycirrus aurantiacus. — Carinella polymorpha. Ascidies. — 240 Clenicella appendiculata , 112 Phallusia mamillata, 11 Microcosmus vulguris. Mollusques. — 16 Eledone moschata, 2 Eledone Aldrovandi, 4 Sepia Fillouxi, 2 Loligo marmorœ, 3 Apori'hais pes-pelecani. Murex brandaris, Turritelta communis. Huîtres, Anomia epitippium, Arca fetragona. ÉcniNODERMES. — 120 Stichopus regaiis, 14 Cucumaria Planci, 7 Asiropecten squa- matus, 1 Astropeclus aurantiacus, 1 Luidia cUiaris, I Astehas glacialis, 4 Ophioglypha lacertosa. Cœlentéiiés. — 12 VerettUum cynomoriutn, Antennularia ramosa, Heliaclis bellis, Anemonia sulcata, Sagarlia parasitica, Suberites carnosus, Spongelia elegans, Ctiona celala. DISTRIBUTION DES INVERTÉBRÉS DE BANYULS. 651 Comme j'ai déjà trouvé dans la vase pourtant très appauvrie du port de Port-Vendres quelques espèces qui semblent assez exacte- ment cantonnées dans la vase côtière de la deuxième région, je se- rais tenté, provisoirement au moins, en attendant une investigation plus minutieuse, de rattacher au point de vue faunistique le fond des mouillages très abrités et des ports non à la zone littorale su- perficielle, comme on le fait d'habitude, mais à la deuxième région, à la zone de la vase côtière, qui pourrait ainsi, dans des cas parti- culiers, porter son bord supérieur bien au-dessus de sa limite ordi- naire et remonter jusqu'à la ligne du rivage, réduisant à rien ou presque rien la zone littorale elle-même. Quatrième zone. — La faune des sables du large montre une cer- taine ressemblance avec celle de la vase côtière. Bon nombre de formes leur sont communes et justifient la réunion des deux zones en une même région (région côtière). On appréciera mieux leurs différences par comparaison que par une sèche énumération d'es- pèces. Les Mollusques, les Vers et les Crustacés sont les mêmes; mais on rencontre de plus ici la Dromia vulgaris, s'abritant sous une Éponge ou;uneSynascidie qu'elle retient avec ses pattes postérieures fortement remontées sur le dos. Parmi les Bryozoaires, le Retepora cellulosa Johnst. ; parmi les Ascidies, les gros cormus de Polycydus Renieri D. Ch. et de Diazona violacea Sav. sont communs. Mais ce sont les Échinodermes et les Cœlentérés qui sont le plus caractéristiques. ÉcQiNODERMEs. — Lcs Oursius, qui manquent dans la vase pure, sont représentés ici par une abondance extrême à'Echinus acutus Lmk., associés à des E. melo Lmk., beaucoup plus rares. On ren- contre aussi le Brissopsis lyrifera A. Ag., le Spatangus purpureus Lesk., particuhèrement commun dans le sable à l'ouest de la roche Fountaindrau; VAntedon rosacea Norm., très commun encore par 652 G. PHUVOT. endroits, s'associe en d'autres points à une quantité au n:ioins égale à'Antedo7i pha/angium Mar., inconnu dans la zone précédente ; le Palmipes membranaceus Retz, est aussi bien moins rare. Alcyonnaires. — Les Vérétilles diminuent et manquent dans les régions franchement sableuses ; leur place est tenue par les Penna- tules, Pleroides gi'iseum KolL, Pennatula phosphorea L., P. rubra EU. L'élégant Kophobelemnon Leuckarti Koll. est propre à ce niveau. Spongiaires. — Les Éponges abondent partout, mais surtout sur le bord des plateaux où le sable est plus fin. Les espèces les plus carac- téristiques par leur abondance sont : Thetya lyncurium, Esperella syrinx (renfermant souvent dans ses longs tubes le Spintlier minia- ceus et le Typton spongicola), Cliona celata, Myxilla banyulensis, Ré- mora simulans, Spongelia fragilis et avara, plusieurs Suberiles^ Ute capillosa. Les bancs concrétionnés répandus sur le plateau (Ruine, Canna- lots, Ouillals) ne paraissent pas différer par leur faune des sables et des graviers purs. Voici, d'ailleurs, sommairement, le caractère dominant de quel- ques stations les plus remarquables : Roches Cannalots. — Abondance extrême d'Échinodermes et de Pennatules. Un même coup de chalut, par 90 mètres, a ramené 1 500 Antedon rosacea, 170 Antedon phalangïum, 650 Echinus acutiis et 600 Ptei'oides gi'isewn. Pourtour de la roche Fountaindrau. — Echinus acutus très abon- dants, Spatangus purpureus communs, Stichopus regaiis également, Holothwna nigra, Cynthia scutellata Hell., Apomatus ampulli férus Phil., beaucoup d'Épongés. Mollusques assez nombreux : Pinnapec- tinata L., Cardium oblongum Chemn., Pecten jacobœus L., Hadriania Brocchn Mirs., Neptunia antiqua Mor., Scaphander lignarius L., Gas- tropteron Meckelii Kos. Roches Ouillals. — Brissopsis lyrifera, Kophobelemnon Leuckarti, quelques Vérétilles, abondance relative des grands Hydraires de la zone vaseuse, peu d'Épongés. Ce banc rocheux, peu dense, que la DISTRIBUTION DES INVERTÉBRÉS DE BANYULS. G53 drague traverse presque toujours impunément, a le fond général sableux, mais très fortement mélangé de vase. Bord duplateau Roland. — Sable très fin, tassé, ne renfermant ni Alcyons, ni Pennatules, ni Bryozoaires. Mais les petits Crustacés, GalatheanexaYimh\., Emnjnome aspera Leach,y sont très abondants. Surtout un intéressant Céphalopode, Rossia macrosoma D.Ch., paraît exclusivement cantonné dans ces parages. A la limite du golfe du Lion, le banc de sable qui borde, à partir du cap de Creus,le plateau espagnol, montre un caractère particu- lier. Au plateau du Cap, dès qu'on a dépassé la roche littorale et les fonds coralligènes proprement dits de Masa de Oro, on rencontre un plateau peu incliné qui rappelle de près, semble-t-il, les « fonds coralligènes profonds » de l'est de Marseille. 11 est couvert de dra- gées de quartz jaune, et sur ces galets sont fixés en quantité prodi- gieuse les tubes d'un très bel Hydraire, la Tubularia indivisa L., que nous n'avons rencontré dans aucune autre station, et la drague se remplit en outre, au point de céder parfois sous le poids, de grandes coquilles mortes, très fragiles, appartenant à des espèces réputées rares ou absentes actuellement de la Méditerranée : Cyprina xqua- lis, Modiola Marlorelli i^.), Mytilus galloprovinclalh [\àv. Herculxa). Mya truncata, Lulraria elliptica, Isocardia cor. Sur elles sont fixées àesCalyptraeachmensish. d'une taille exceptionnelle. Les autres co- quilles vivantes sont : Fususcorrugaius Lmk, Capulus hungaricus L., Aporrhais SerresianusVhW. , Pectenjacobœiis L., P. clavatusVoli, Venus fasciata Don., Meretrix rudis Poli, etc. Elles rattachent, ainsi que les Echinus acM<î jDu/twt/iJrt . ANATOMLE_ HALCAMPA CHRYSANTHELLUM Xi6rairie CJÎeinwu/d HC\ Ai-'ch. de Zool.Exp^.^ et Génl® ^'r Sepie.VoLIIIPl.IX. ^^^olJ.J'aitfoe jf/e/io- C. iieùui>a/d & C. le ^4- r.A^le Arch.de Zool.Exp^.® et Gén' 3^Serie.Vol.II[.Pl.XIII ^ , /" +^^ — ,y *4^_- •;,...' ; d^^ m- L BozUcun,, oiel, . Structure du BYSSUS E Oudiot ^o •l.Elxn^.^ et Ger/!" ? l'^'^..^'il:/^^Av^--w M/Nl^'l fdi ' %\ .£.Gia/Zcl. L Sti>'uctur>é du BYS SUS isiute,' ^ch de ZooLE;Vel Gën^^ 3^ Série Vol. IIL PI :xy, S js ^, I FIG.l-20. STAUROCEPHALUS RUBROVITTATUS. Lihrau-ie C.Eeinwald 3:C^f . \rch.de Zool.Exp'.^ et Gen^^ L'J 3^ Série .Vol.IIlPLXVI 38 X 39 / \ / / x\ V \ // Autorej- tiei I "1 y y FIG. 21-37. LUMBRICONEREIS COCCIl^EA. FIG, 38-47, SUNICE ROUSSAEL Librairie C.Jieinmald 8: Cf . Arch.de ZoolExpl*^ et Ger?-^ à8 ^ 3^ Série, Vol, III.PIXVII, FIG- 48-58. EUNICE HARASSIl FIG 09-62. EUNICE FLORIDEANA, FIG 63-67, EUNICE TORQUATA. SMiot^.Diuardùt . ZiArairte C.Jleinivald &' C\' r^.^le. „f ri^le Zool.Exp .^ et Gén 3^ Serie,Vol.IlI,Pl.XVIIl. S/ AuéorAr del . Seiio^. Dufariiin . FIG. 68-76. EUNICES DIVERSES. EIG, 77 83.P0DARKE P/lLLIDA. Zibrairie C.liecnwaU &■ C '. :^ch,deZooi.Exp^,^etGen^^ 3<=Série,Vol.iri,Pl.XIX. Ai, Ac '*'' ■ 1 ~Tlv JTéàog. Uufa/tlÙL FIG, 84^-10 4., PAMTHALIS LACAZII, FIG. 105 PANTHALIS MARENZELLERI Libr,urie CJiei,uo,iU S: C. f Arch.de Zool.Exp^P et Gén-^.^. 3=Série,Vol.in.PlXK 106 î> 47/ "M- -j HéluHjDujarMi. \ FIG, 106-110. PANTHALIS MARENZELLERI. FIG, 111-121. STHENELAIS MINOR. FIG. 122-123. STIÎENELAIS LIMICOLA. J.,hrmr„- C. llemiv.,/,/ ,H: ch . Arch.de ZooLExp, et Gén 3^Serie,Vol.III.Pl.XXI. E. l'optfenl detTiT. el phot Méliog . Diifordii SPONGIAIRES DE FRANCE, £iJ>r,iù-œ C./ieinioald &■ C" . Arcli.de Zûol.Exp^f et Ge '^ S6rie,Vol.III,PLXXlL ^-^, ^N \!9 -ï-JI, y/ t-» i'^ ^. Topd'ent, cfetTJ*. el phot HèUo^. Dufardir SPONGIAIRES DE FR^'^NCE Librairie C.lieùuvaU H-f- le Zool.ExT^'^^et Gén',^ . '6': 3érie,Vol III, PI. XXIII, k K Topà'ent .({e,rif.ot phot ■ J/r/wq. JJu/'arJi/i ■ SPONGIAIRES DE FRANCE Liirairie C.Jieimvald rî- ("^ . ,ilJ -^* XXV. ». -> j .,/ >:M:îè^ ^^^ é^ 0^ .>:^■' /^.t rarCà. y Kou^aet hth DUES MYRIAPODES Arch.db Zool. Exp^^etGén^" o. oevie GLANDES LYMPHATIQUES DE OUELQUES MYRIAPODES. Librairie ^t C"' / : fi^m.::/ lilh Gén" »• • • ••» 3-^ Séne.Vol. lll.Pi.ZWIÎl —-'■'•-:% *=«s3M^^'S^3^?*' .-^^t^!^'^î^S^^^**--^^^cP^ ?®.~^A i*'« ^<*' '» ."^^^ '-^ , !■*■'**■" /.^ • • • • • ^/ , 1!^ • • • ■k-. GLANDES Jmp. A. L a/on Im «^' ^'i/ïi, farù> »é **•• • * . 2-'/ ©> «^ ■>oo-- -- — w. Jiûttiktel lith. T\/IVPTAPnr)F;F^ , }r,A„H-x Z,H,f. 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