ARCHIVES NÉERLANDAISES DES SCIENCES EXACTES ET NATURELLES PUBLIÉES PA K LA SOCIÉTÉ HOLLANDAISE DES SCIENCES à HARLEM, ET RÉDIGÉES PAR J. BOSSCHA, Secrétaire de la Société , AVEC LA COLOBORATION DE MM. D. Bierens de Haan, C. A. J. A. Oudemans, W. Koster, C. K. Hoffmann et J. M. van Bemmelen. TOME XXV HARLEM, LES HÉRITIERS LOOSJES. 1892. AkpÂï) h H.UOltÉïUM. I! A R V A li D l ' 1 V );: 1; S ) TABLE DES MATIERES. Programme de la Société Hollandaise des Sciences pour 1 année 1891. Jan de Vries, Polygones cycliques sur courbes cubiques planes.. Page 1. Jan de Yries, Sur un groupe de configurations planes régulières et quelques configurations planes connexes, de points et de courbes : " 33. Jan de Yries, Sur une configuration plane de vingt-quatre points et de dix-huit droites » 57. J. C. Kluwer, Sur des systèmes de rayons déduits de quatre droites données dans l’espace » 70. J. Tii. Cattie, Sur un cas de cohésion et de dialyse dans le cypripedium barbatum Lindley, var. superbum » 101 . H. A. 'Lorentz, Sur la théorie moléculaire des dissolutions diluées. // 107. II. Zwaardemaker Cz ., Sur la norme de l’acuité olfactive (olfactie). » 131. H. Zwaardemaker Cz., Anosmies d’origine nerveuse » 149. J. Bossciia, Les équations des nouvelles copies du Mètre des Archives „ 165. II TAULE DES MATIÈRES. M. W. Beyerinck, La biologie d’une bactérie pigmentaire. ... ..Page 227. W. C. L. van Schaik, Sur la production des sons dans les tuyaux à bouche » 281. E. Giltay et J. H. Aberson, Recherches sur un mode de dénitri- fication et sur le schizomycète qui la produit // 341. H. A. Lorentz, La théorie électromagnétique de Maxwell et son application aux corps mouvants „ 363. PROGRAMME DE LA Société hollandaise des sciences, à Harlem. ANNÉE 1891. La Société hollandaise des sciences a tenu, le 16 mai 1891, sa cent-trente-neuvième assemblée générale. Le Directeur-Président, Jhr. J. W. M. Schorer, dans son discours d’ouverture, rend hommage à la mémoire des direc- teurs D. Visser van Hazerswoude et A. van Stralen, et du membre J. E. R. van Laer, enlevés à la Société depuis sa dernière réunion générale ; il souhaite ensuite la bienvenue au directeur Jhr. J. W. G. Boreel van Hogelanden et aux membres M. J. de Goeje, K. Martin et M. W. Beyerinck, qui assistent pour la première fois à une séance de la Société. Dans l’année écoulée, la Société a publié: 1° Oeuvres complètes de Christiaan Huygens , Tome III; du Tome IV, en préparation, plus de la moitié des feuilles sont déjà tirées. 2° Archives néerlandaises des sciences exactes et naturelles , Tome XXIV, livraisons 2, 8, 4 et 5, et Tome XXV, livrai- son 1ère. Lecture est donnée des rapports de MM. T. Zaayer, W. Koster et C. K. Hoffmann sur un Mémoire portant la devise : Natura II PROGRAMME 1891. suum cuique donat , et adressé en réponse à la question n° VI du concours de 1891, conçue en ces termes: „ Faire une étude anatomique comparative des glandes sexuelles accessoires chez les mammifères.” Sur l’avis unanimement favorable de la Commission chargée d’examiner ce travail, les Directeurs proposent de décerner à son auteur la médaille d’or. Cette proposition ayant, été adoptée par l’Assemblée, l’ouverture du billet fait connaître que le Mémoire couronné est l’œuvre de: M. le Dr. J. T. Oudemans, agrégé à l'Université d’Amsterdam. A. M. Zaayer, qui avait proposé la question, est attribuée la médaille d’argent. L’Assemblée arrête ensuite quelques nouveaux sujets de prix, et nomme membres nationaux- de la Société: MM. P. P. C. Hoek, au Helder, N. de Roever, à Amsterdam, L. A. J. Burgersdyk, à Deventer. QUESTIONS MISES AU CONCOURS. Jusqu’au 1er janvier 18920 I. Déterminer expérimentalement, pour une ou plusieurs matières, l’influence que la compression, dans la direction de la force électromotrice et perpendiculairement à cette direction, exerce sur le pouvoir inducteur spécifique. IL Pour une nouvelle réduction des observations stellaires faites par La Caille au Cap de Bonne-Espérance et consi- gnées dans son Coelum stelliferum australe , il est nécessaire de connaître avec précision la forme des micromètres réticulaires dont il s’est servi. Pour l’un d’eux, la forme a été déterminée par Fabritius, dans sa dissertation: Untersuchungen uber La Caille’s reticulus médius , Helsingfors, 1873. La Société demande : 1° la détermination, aussi exacte que PROGRAMME 1891. III possible, de la forme des antres micromètres réticulaires em- ployés par la Caille; 2° la détermination, aussi exacte que possible, des positions que ceux-ci et le reticulus médius avaient pendant les soirées d’observation, en sorte qu’il soit facile de dresser des tables permettant de calculer d’une manière simple, au moyen des observations, les valeurs apparentes de l’ascension droite et de la déclinaison des corps célestes. A titre d’exemple, une pareille table devra être donnée pour chacun des micromètres en question. On signale à l’attention des concurrents le travail publié par M. Powalski dans le Report of tlie United States Coast Survey, 1882, et celui de M. Gould, Astronomical Journal , Vol. IX. III. Pour le calcul de l’influence que le volume des molé- cules exerce sur la pression produite par un gaz, M. van der Waals a donné une formule dont l’exactitude est suffisante tant que la densité reste assez petite. Il importe de posséder aussi une semblable formule pour des états de densité plus grande. La Société voudrait donc voir calculer, dans une forme rigoureuse et pratiquement utilisable, la pression d’un système de molécules sphériques égales, parfaitement élastiques, incom- pressibles et lisses, ayant comparativement à leurs distances mutuelles une grandeur quelconque, n’agissant les unes sur les autres que lors du choc, et douées d’une force vive déterminée. IV. Réunir et discuter, d’une manière aussi complète que possible, les résultats que l’expérience a fournis au sujet du rapport existant, chez les corps transparents, entre la densité et la composition chimique, d’une part, et l’indice de réfraction, d’autre part. V. Etudier par la voie expérimentale, pour un métal autre que le fer, la modification que la magnétisation produit dans l’état de la lumière réfléchie. VI. Décrire les méthodes employées pour obtenir et fixer de nouvelles variétés chez les plantes cultivées dans les champs et dans les jardins. VII. Faire des recherches exactes sur le rôle que les bactéries IV PROGRAMME 1891. remplissent dans la filtration des eaux potables à travers une couche de sable. Jusqu’au 1er janvier 1893 I. Donner une théorie moléculaire du frottement interne pour les gaz qui s’écartent de la loi de Boyle, et aussi, s’il est possible, pour les liquides. II. Après les recherches de M. Hertz, il est devenu très important de connaître la durée des vibrations électriques qui peuvent avoir lieu dans des conducteurs de différentes formes. La Société demande, en conséquence, que cette durée soit déduite, pour quelques cas, des équations du mouvement, ou bien, que les méthodes pouvant conduire à ce but fassent l’objet d’une étude spéciale. III. Essayer l’inoculation du Viscum album sur les pommiers et les poiriers, sur les tilleuls et les peupliers, et chercher les raisons qui déterminent la préférence de ce parasite pour certaines espèces d’arbres. IV. Soumettre à un examen critique les différentes opinions émises sur la structure et le mode d’accroissement de la paroi cellulaire, en ayant égard à la continuité, observée dans quelques cas, du protoplasma de cellules adjacentes. V. Eclairer, par de nouvelles expériences, la faculté repro- ductrice des parties de plantes et la polarité qu’on y observe. VI. Lorsque des flacons contenant des dissolutions de produits chimiques sont laissés longtemps en repos, il s’y développe fré- quemment des organismes inférieurs, — d’ordinaire sous la forme de filaments, — dont la présence, vu la nature de ces dissolu- tions, peut causer de la surprise. On demande l’étude biologique de une ou plusieurs espèces vivant dans ces conditions insolites, étude portant en premier lieu sur leur nutrition et sur la manière dont elles se comportent vis-à-vis des dissolutions concentrées de sels, d’acides et d’alcalis. VII. On demande, au sujet de la signification des peptones pour la circulation de l’azote dans la plante, un travail com- PROGRAMME 1891. Y prenant à la fois l’exposition raisonnée des résultats déjà acquis et la relation d’expériences nouvelles. VIII. Même après les recherches de M. Winogradsky et de M. Frankland, il reste encore beaucoup d’obscurité au sujet de l’oxydation que les sels ammoniacaux subissent dans la terre et d’où résulte leur transformation en nitrates. La Société désire que les expériences de ces deux savants soient répétées et qu’on résolve la question de savoir si les microbes décou- verts par eux existent dans le sol de la Néerlande. IX. Jusqu’ici, on n’a pas réussi à déceler le gaz des marais (méthane) comme produit de la vie de bactéries cultivées à l’état pur. La Société demande des recherches concernant l’organisme éventuellement impliqué dans la production de ce gaz, ou concernant les conditions dans lesquelles celui-ci se forme, s’il était reconnu que la vie n’a qu’une influence in- directe sur le phénomène. De nouvelles données seront en outre recueillies sur le dégagement du gaz des marais par le fumier, dégagement observé par des savants français. X. Dans l’ensilage des fourrages verts, il est possible d’a- mener et de maintenir la masse à un degré d’acidification plus ou moins élevé, ce qui donne lieu à l’ensilage doux et à, l’ensilage aigre . On demande l’étude bactériologique des mi- crobes impliqués dans ces phénomènes, et des données exactes quant aux variations, en rapport avec la température et le temps, de la proportion de sucre et du degré d’acidité. XI. La Société demande des recherches sur le développe- ment des Triclades. XXII. La Société demande des recherches sur le dévelop- pement de la rate. La Société recommande aux concurrents d’abréger autant que possible leurs mémoires, en omettant tout ce qui n’a pas un rapport direct avec la question proposée. Elle désire que la clarté soit unie à la concision, et que les propositions bien VI PROGRAMME 1891. établies soient nettement distinguées de celles qui reposent sur des fondements moins solides. Elle rappelle, en outre, qu’aucun mémoire écrit de la main de l’auteur ne sera admis au concours, et que même, une médaille eût-elle été adjugée, la remise n’en pourrait avoir lieu, si la main de l’auteur venait à être reconnue, entre- temps, dans le travail couronné. Les plis cachetés des mémoires non couronnés seront détruits sans avoir été ouverts, à moins que le travail présenté ne soit qu’une copie d’ouvrages imprimés, auquel cas le nom de l’auteur sera divulgué. Tout Membre de la Société a le droit de prendre part au concours, à condition que son mémoire, ainsi que le pli, soit marqué de la lettre L. Le prix offert pour une réponse satisfaisante à chacune des questions proposées, consiste, au choix de l’auteur, en une médaille d’or frappée au coin ordinaire de la Société et portant le nom de l’auteur et le millésime, ou en une somme de cent- cinquante florins; une prime supplémentaire de cent-cin- quante florins pourra être accordée si le mémoire en est jugé digne. Le concurrent qui remportera le prix ne pourra faire im- primer le mémoire couronné, soit séparément, soit dans quelque autre ouvrage, sans en avoir obtenu l’autorisation expresse de la Société. Les mémoires, écrits lisiblement, en hollandais , français, latin, anglais , italien ou allemand (mais non en caractères allemands), doivent être accompagnés d’un pli cacheté ren- fermant le nom de l’auteur, et envoyés franco au Secrétaire de la Société, le professeur J. Bosscha, à Harlem. TOME XX Y. lre Livraison. ARCHIVES NÉERLANDAISES SCIENCES EXACTES ET NATURELLES % PUBLIÉES PAR LA SOCIÉTÉ HOLLANDAISE DES SCIENCES A HARLEM, V ET RÉDIGÉES PAR J. B O S S C H A, Secrétaire de la Société , AVEC LA COLLABORATION DE MM. D. Bierens de Haan, C. A. J. A. Oudemans, W. Koster, C. K. Hoffmann et J. M. van Bemmelen. HARLEM LES HÉRITIERS LOOSJES. 189 J . PARIS GAUTHIER-VILLARS. LEIPSIG G. E. SCHULZE. ' - — , ' ARCHIVES NÉERLANDAISES DES Sciences exactes et naturelles. POLYGONES CYCLIQUES SUR COURBES CUBIQUES PLANES; PAR JAN DE VRIES. Lorsque trois points d’inflexion d’une cubique plane, situés en ligne droite, sont projetés sur la courbe d’un de ses points pris pour centre, on obtient trois points qui possèdent cette propriété, que chaque droite joignant deux de ces points con- tient le point tangentiel du troisième '). Dans les pages suivantes, je considère plus généralement des polygones qui sont inscrits dans une cubique de telle sorte que chaque côté passe par le point tangentiel du sommet précédent ; il en résulte que les sommets d’un pareil polygone cyclique appartiennent à des groupes involutifs connus. Le second § est consacré à l’étude de polygones cycliques pour lesquels le point tangentiel du sommet #ème est situé sur la droite qui joint les sommets ( i -h 2)ième et ( i 4- 3)ième, tandis que dans le § 3 sont considérés les cas où le point tangen- tiel se trouve sur le côté opposé, ou, quand le nombre des côtés est pair, sur l’un des deux côtés opposés. i ) On trouve une étude détaillée de ces systèmes de trois points dans l’ouvrage de Durège: Die ebenen Gurven driiter Ordnung (Teubner, 1871) ; ils y sont nommés Jnflexionstripel, et la première idée en est attribuée à Küpper (p. 286 etc.) Archives Néerlandaises, T. XXV. 1 2 JAN DE VRIES. § 1. 1. Les coordonnées homogènes de la courbe du troisième degré, à équation canonique a:,3 + x23 -(- .z33 = cx} x2 , (1) peuvent être représentées de la manière suivante par des fonctions doublement périodiques d’un paramètre réel u '): qx , —0 j QX 2 O | qx 3=:^, (u — (w— |(2o>+w («-|(2 »-»')) (u+lwjtf, ^tH-'(2o>+w')^6ll (w+|(2 co— ; les trois nouveaux points forment donc également un triangle cyclique. On a, en outre, ^1+^2 4" TT" w = A} ^2 “i” ^3 d” q_w = A} ^3 d~ # w, d" ^3 -+* 7TW = fl} ^2 d“ ^ i d“'7TC0;=: 0, U3 -+- 1 1 + 3 2 CO H=0 -0, 1 2 c’est-à-dire : des points d’inflexion — co et — co comme cen- O O très, les points ux, u2, u3 sont projetés successivement en v2, vs, v, et en ti3, d,, »2 (Küpper; comp. Durège, £. =u, — 5 £, de sorte que la quatrième congruence se transforme en 2 u, 6 £ = 2 Wj — 5 £ ou Il £ = 0 ; par conséquent : u 2 = u , U 4 ■ — U j EEE U j + n«o, 10 + îï aû> 3 + Iîac° 6 11 U (O (11) Les onze points u, que pour a — 0 jusqu’à « = 10 on obtient de u, “b « a>, satisfont à la relation 11 u + r = 0; ils forment donc un groupe osculatoire du quatrième ordre. De (11), on déduit: 4- u3 = 2 | (Wi } 1^13 | u2 -h ui = 2 | (“■ ( 8 > 1 =2«îi j u3 + us= 2 | r- + ïï“wy |=2k,î| ^4 + U , 2 j l“> + ïï“"J ( 9 \ 1 = 2 ut , | ur> + u2 = 2 1 1 «i + ff ““J | = 2 w. 2 c’est-à-dire: les diagonales d’un pentagone cyclique coupent 8 JAN DE VRIES. la courbe aux points tangentiels d’un second pentagone cy- clique, qui appartient au même groupe 0,r La relation entre ces deux pentagones est d’ailleurs réci- proque, comme le montrent les congruences suivantes: 2 U1 3 + 16 3 5 = 2ttj +g« CO = 2 U2 9 u2 4 u!kl = 2u1 H- yj ^ (o = 2 uz 0 w35 +tt52=2uj = 2w4 W4 j H- 3 EEE 2 U j H- yy" ** O) — ~ 2 U5 «52 + U24 = 2 Ux -I- a co =2ull Finalement, la connexion des deux pentagones avec le 4 onzième point du groupe 04, savoir u0 =«, ^aco, ressort nettement de : U1 3 U2 4 U3 5 «4, + w 4 = 2 u , + yy a w = 2 «q ■+■ u> 5 = 2 u j + yy a w = 2 Uq 8 -+-u1=2ul+j^ccco = 2u0^ (14) g 4~ w 2 == 2 Mj 4~ yy a w 1 2 w q g 4- u 3 = 2 4- jY « co = 2 u0 Tout groupe osculatoire du quatrième ordre renferme donc onze couples de pentagones cycliques ; lés deux pentagones de chaque couple sont en situation perspective par rapport au point tangentiel du onzième point du groupe et les diagonales de l’un des pentagones passent par les points tangentiels de Vautre . POLYGONES CYCLIQUES, ETC. 9 6. Pour un hexagone cyclique, la méthode ci-dessus em- ployée fournit le système 1 \ ■ +2Ï“W 20 2Ï“W 3 u^=u] -h « CO Uo = U (15) 16 u5=ul + “ co 11 u6=u 1 -h — a co Les 21 points u = ux -f-^yaco, (a = 0 jusqu’à 20), forment évidemment sept triangles cycliques, à sommets mi+^(|Î+7) «,+^+14)» (|î = 0 jusqu’à 6). Ils peuvent aussi être rangés en trois groupes fermés de sept points, savoir u 1 + gj /co u i + 2Ï (/ H" " u i + 21 (/ + ^) w 1 u ' ^ 21 1 21 1 (/ + 9) co (/ = 0, 1, 2) . . . (16) (y H- 12) co ui + 21 ^ H" 15^ ui + g! ^ “l~ 18) 10 J AN DE VRIES. Les points de chacun de ces trois groupes satisfont à la relation 7 u = 7 ux 4- -4- y co; si l’on pose 7 u + v -h w = 0 O et s + v h- w = 0, s est le paramètre du centre de l’involution déterminée, sur la courbe donnée, par les cubiques qui ont avec elles, en u, une osculation du septième ordre ; pour chaque valeur de /, le système (16) indique par conséquent un groupe central du troisième ordre, S3 1 ). Le groupe de 21 points, ci-dessus trouvé, prend donc nais- sance lorsqu’on complète les points d’une S3 de manière à former des triples d’inflexion (comp. la première note de ce Mémoire). 7. De (15) il suit maintenant: I o , 12 . 0 \ u{ + ui=2(ul 4- ^«w) = 2u14 , 21 \ 19 / u2 4- u- = 2 (u , — « co) = 2 u2 (17) [ u3 4- u6 = 2 (ul « w) == 2 u3 6 Comme on a u36=u2 5 4 — — w , ces trois O O points forment un triple d’inflexion, et il en est de même de leurs points tangentiels, qui sont déterminés par les diagonales principales de l’hexagone cyclique. Pour « = 3 (5, toutefois, les points ttJ4, u25, u36 se confondent, à cause 5 des relations itl4 = 4- -y fi œ = u2 s = u3 6, en un point unique tt0, et les diagonales principales se coupent au point tangentiel de u0. Le point u0 appartient alors, avec les sommets de l’hexagone, au groupe central indiqué par u , . Il y a, par conséquent , deux espèces d’hexagones cycliques : aux 3x7 hexagones à diagonales principales concourantes, qui peuvent être formés au moyen du groupe de points >) Voir Ver si. en Meded. 1. c. p. 238 ou Wiener Sitz. ber. l.c. p. 456. POLYGONES CYCLIQUES, ETC. 11 u = ui -h i ce co (a = 0, 1 jusqu’à 20), je donne le nom à1 hexagones de la première espèce. 8. De (15) il suit en outre: U , —J— "L6 3 = 2 (l6 j u., 4- i64 = 2 (ul U 3 4~ ^5 =2 (16, w4 H- u6 =2 (w, 165 -h = 2 (w, 166 -4- 16 2 = 2 (16, 10 \ __ C) 4- gT W W) = 2 U 1 3 2 \ o 4~ a œ)= A u2 4 18 n o i + 2Ïaco) — 2 gj «w) = 2mu + 2i « “) = 2 «5 1 6 \ __ O 4“ 2J « co) = 2 166 2 (18) Les six diagonales m w + 2 coupent donc la courbe aux points tangentiels des points ui, i + 2, qui appartiennent évi- demment au même groupe et forment à leur tour un hexagone cyclique. Or, pour ce nouvel hexagone, on a: «13 + «35=2(W1 u-2 4 4- M46 =2 (i6j w3 g -h «5 1 =2 (u.1 «4 6 + 2 === 2 1 «si 4- a, 3 = 2 (i6j «62 "h W24 =2 (l6, 14 21 15 21 13 21 a co) « co) 17 M + 2Ï “ _9_ 21 _4 21 4-5î«co) « co) I (19) En appliquant à l’hexagone cyclique, qui vient d’être trouvé, 12 JAN DE VRIES. le même procédé que ci-dessus, on retombe sur l’hexagone primitif de (15), et cela dans l’ordre uk u. uQ ux u2 u3. Pour a = 3(3, le système (18) devient: Ut 3 =Uj + y p CO = 1 2 3 U 24 + y P U=UB U3 5 ^1 IJ P*0 Ul 6 = ux + (5 a ) =ul 1 * - U5 I =tt, + y |5a, = n2 (20) ^6 2 = H- y Pœ = U. c’est-à-dire: l’hexagone dérivé est identique à l’hexagone primitif ; il en résulte un nouveau moyen de distinguer les deux espèces d’hexagones, puisque ceux de la seconde espèce peuvent être réunis en groupes de trois, de sorte que les trois figures dépendent cycliquement l’une dè l’autre. Pour a - r 3 |3 ± 1, on a u2 = ux H- i (1 co ± œ et « L JL U. 6 1 V § œ “F Tÿf œ) de sorte que trois sommets consécutifs ( Zl appartiennent à des S3 différents ; à cause d eui=u1 -h y « eo, 5 4 u-=u2 -+- y « a) et u6 =u3 + y«w, les sommets opposés sont toujours compris dans le même S3. Des 20 points différents, qui peuvent être adjoints comme u2 au point arbitrairement choisi ux, deux (« = 7 et «=14) déterminent avec ux un triangle cyclique, six autres (« = 3 (?, (1 = 1 jusqu’à 6) déterminent chacun un hexagone de la première espèce, les douze restants donnant chacun un hexagone POLYGONES CYCLIQUES, ETC. 13 de la seconde espèce. En résumé, on a donc l’énoncé suivant : 9. Au moyen du groupe de points qui naît lorsque les points d'un groupe central du troisième ordre sont complétés de manière à ce qu'il en résulte des triples d'inflexion , on peut former 21 hexagones cycliques de la première espèce et 42 hexagones cycliques de la seconde espèce. D'un hexagone de la première espèce, les sommets appartiennent au même groupe central et les diagonales principales concourent au point tangentiel du septième point du groupe, tandis que les autres diagonales passent par les points tangentiels des sommets. D'un hexagone de la seconde espèce, les trois couples de points opposés appartiennent à trois groupes centraux différents et les diagonales principales passent par les sommets d'un triangle cyclique . Chaque hexagone de la seconde espèce forme avec deux hexagones de la même espèce un groupe fermé, dans lequel les points tangentiels des sommets de chaque hexagone sont situés sur les diagonales accessoires d'un second hexagone, tandis que ses diagonales accessoires supportent les sommets du troisième hexagone. 10. De la congruence 2w, = + u3 il suit u3 — u2 = ( — 2) {u2 — w,). Si l’on pose, comme ci-dessus, u2 — ux=t, le système de congruences qui contient les conditions d’un polygone cyclique à n sommets fournit successivement: u3 — u2 — ( — 2) i \ «4 —u, =(— 2 )2 t,i ' (21) up— i — Up—2 = ( — 2 )?— 3 t \ up — Up—i = ( — 2 )p~2t Par addition, il en résulte Up — Ma = [(- 2 )?-?■ - 1] l, 14 JAN DE VRIES. par conséquent %=«, +y[l-(- 2)p— i] t (22) En ayant égard à cette congruence, on déduit de 2 Un — 1 = Un 4- u | pour t la condition: 2 m, + i-(2-2(-2)*-2)< = 2u, + y (1— (-2)»— 1) <, ou, après une réduction très simple, JL(2*_(_1)»)< = 0 (mod. œ) (23) O En posant, pour abréger, i. (2* — ( — 1)*) = g (n) , (24) on a pour le polygone cyclique à n sommets : u2 = ui + a co : q (n) u3 = u | — a œ : o (n) u 4 =u. -h 3 a co : o (n) I ' (25) Ui = u{ 4- ( — 1)* q (■ i — 1) a co : q (n) \ vm = u , 4- ( — l)n Q (n— 1) ccco : q (n) I A l’ensemble des q ( n ) points différents, qui pour a = 0 jusqu’à q (n — 1) sont déterminés par (23), je donne le nom de groupe cyclique. 11. En vertu de la relation 2 Ui =ui+l 4- Ui 4- 2, et en posant pour abréger a co : o (n) — v, on a 2ux 4- ( -iy.2vo(i — l)=2ul 4-(_l)*+l^)-h(— iy+*vQ{i+l), POLYGONES CYCLIQUES, ETC. 15 par conséquent: 2 q (i — 1) = q {i -b 1) — q {i) (26) ce qui est d’ailleurs confirmé par substitution directe. En général, chaque diagonale d’un polygone cyclique à n sommets coupe la courbe au point tangentiel d’un point appartenant au même groupe cyclique. En effet, on a Ui -h Ui + k = 2 u , (— 1)* v\ q(î -1) -h ( — 1)* Q (i+k — 1) j . . (27) et par conséquent, en faisant de nouveau usage de la notation ui H- m+k = 2 uî, »+*, 2ui,i + k = 2uî ±2 p œ : q (w), où 0 < (3 < q {n). Cette règle ne souffre d’exception que lorsque le point ui, i +k coïncide avec son point tangentiel ; en ce cas, on a ui + m + k -h uiti + k = 0y d’où il suit, sans difficulté, que ut est congruent avec un multiple d’une partie de œ et appartient par conséquent à un point pléthorique ; le polygone cyclique devient alors un polygone tangentiel '). 12. Les points Uij+k, que pour une valeur déterminée de k on déduit du n-gone cyclique des points ui, forment à leur tour un semblable polygone. De 2w,vi + * = 2ttj H- (- lYv \q(î— l)+(— l)i 2, on a : p — 1 aP-\- bv— {a 4- b)P — pab{aP~2+ br-%) p a2b1(aP—4'+bP-4') p — 1 p — 1 • • • - (refcr))” ’ * !<“+h ou, puisque tous les coefficients binomiaux sont divisibles par^?, av + bp = (a -h b)p — pz{a -\-b) (29) Lorsque a -p b est divisible par p, ap + bp peut évidemment être divisé par p2. Plus généralement: Lorsque a -\ -b est un multiple de pk, ap -h bP a pour divi- seur pk+1. A cause de 25 4- 1 =3 x 11, (25)1 1 + 1 pourra donc être divisé par 112; à cause de o( 55) = — (2" 5 -h 1), il y a par o conséquent des 55-gones cycliques dont les sommets appar- tiennent à un groupe formé de onze 0,t. Pareillement, de 2 2 +1 = 5 il suit que (22)5 +1, et par conséquent aussi ^(20)=~ (22 0 — 1), possède un facteur 25. O Finalement, on a 2 3 + 1 = 32, d’oû il résulte que ?(3*) = i j(2’)3* Vlj peut être divisé par 3L Il y a donc, en particulier, des ennéagones cycliques, dont les sommets sont formés par trois triples d’inflexion. Cela ressort facilement aussi de ui=ul + on trouve, en y effet, u , -h uA = 2 u7, uK H- u7 = 2 ulf u7 + ut = 2 u4. Par extension, il suit encore, de ce qui précède, que : Lorsque a -h b est un multiple de pk , contient (h + l) facteurs p . POLYGONES CYCLIQUES, ETC. 19 15. La droite qui joint les points tti+i.et ui+m+ 1 d’un 2 m-gone cyclique rencontre la courbe en un point w, pour lequel «=— 2«,+ (2i— (— 1»+ (~13)i+- (2«+»-(— iy+»K oc œ : q (w)), ou, après une réduction simple, 2 1 w=— 2m, — - «c»:ç(2m)-i- Q-( -l)*+™2*'(2™-+-( — l)^)«co:^(2m)..(30) O O Vu que p(2 m) = (2«*+ ( — l)m) ç(m), on n’aura qu’à prendre pour a un multiple de ç(m), pour rendre le membre droit de la congruence indépendant de la valeur de i ; en d’autres termes: dans tout groupe cyclique correspondant à un 2m-gone il y a des polygones dont les diagonales principales se coupent en un point de la courbe. Lorsque les diagonales principales d’un 2 m-gone ne con- vergent pas vers un même point, elles passent par les sommets d’un m-gone cyclique si m est un nombre premier, ou, dans le cas contraire, si « et ç(m) sont premiers entre eux ; quand, par exemple, m est un multiple de q, et ç(m) par conséquent un multiple de q(q), on peut toujours choisir pour a des valeurs telles que les diagonales principales déterminent un polygone cyclique à q sommets. 16. Chaque point de la courbe fait partie , comme sommet , de (— i)»)) n-gones cycliques différents, et forme avec leurs sommets un groupe involutif, qui est ou bien un groupe osculatoire, ou bien un groupe central , ou bien composé de pareils groupes . Il y a autant d’especes de polygones cycliques à n sommets que le nombre ^ (2n — ( — l)n) possède de facteurs différents. i)

+k -t- 4 ujc = m +1 +4 ui ....... (37) par conséquent, m+k — W4+/ = ( — 4) (uk — ui) et U4p+k — U4p+l = ( — 4 )P (Uk — Ul). Si maintenant l est remplacé par 1, et k successivement par 2, 3, 4, 5, il en résulte, eu égard aux abréviations introduites plus haut, U4p-\-2 === U4p-\-\ + ( — 4 )P t U4p+% = U4p+l + (— 4)P V I U4p-\-4 = U4p-\-\ — ( — k)P V i U4p-\-§ == U4p-\-\ -J- ( — 4)P (2 t v) (38) POLYGONES CYCLIQUES, ETC. 23 La dernière de ces congruences fournit évidemment iHp+i = u\ ~ [(— 4 )P — 1] (2 t + v). A l’aide de la notation *(!») = 4 [4*-(-l)i>] (39) on a donc mP.+i = u\ — (— 1)2> g {p) (2 t H- v) (40) 20. Pour le 4p-gone cyclique du second ordre on a = u\) donc, d’après (40) o(p)(2t + v)=0 (41) En outre, on a alors U4P+2 = U2] par conséquent, eu égard à (38) et (35), (— 4 )P t = t (mod. co), d’où t = a œ : 5 g (p) (42) Mais (41) donne 2 t -\- v = p œ : g ( p ), de sorte qu’il vient t> = (5/5 — 2 a) œ : 5 a (p) (43) Pour un 4p-gone cyclique du second on a donc: U2 = u\ + « co : 5 a (p) \ us = ui -h (5/5 — 2 a) co : 5 g ( p) U4< = u\ — (5/5 — 2 a) co : 5 g ( p) us = u\ -H /5 œ : a ( p) um+1 = ui — ( — 1)A (i (Æ) /5 co : g (p) uu+2 = n\ 4- [(— 4)* a — 5 (— 1)* a (k) /5] œ : 5 (T (p) U4k+z = ul + [( — 4) ^ (5/5 — 2 a) — 5( — l)k g (k) p'] co : 5 g (p) M4,Æ+4 = wi — [( — 4)Æ (5/5 — 2a) 4- 5 (— l)*(j (Æ) /5] : 5 . j De ces valeurs, les arguments des autres sommets se dé- duisent sans peine. 22. Les conditions u&p+z = u\ et «%+ 4 — M4/?+3 = £, qui doivent être remplies pour le (4p 4- 2)-gone cyclique, donnent — 4 (4*— (— l)f)(2* + ») + 4?® = o) — 2 (— 4)?a; = r d’où il suit facilement: -g- (4?v+l 4- 1) v = 0, POLYGONES CYCLIQUES, ETC. 25 p4r conséquent u2 = Wj H- ( — 1)?+1 2^+1 a co : (43/,+1 + 1) ) ° -.(49) u3=u1 + a a» : -i (4^+x -h 1) j Le groupe cyclique du (4 p H- 2)-gone est donc formé de -h 1) points, o 23. Pour le (4 p 3)-gone cyclique on a finalement Uép-i-é = W j et U4: 2%’+1 ] Il est à remarquer que le (4 p + 2)-gone cyclique du second ordre, après le choix d’un des sommets, ne dépend plus, tout comme les polygones du premier ordre, que d ’un seul para- mètre a, tandis que pour la détermination des autres poly- gones du second ordre on peut encore disposer, à volonté, du facteur (t. 26 JAN DE VRIES. 24. Aux polygones cycliques du second ordre s’appliquent, en ce qui concerne leur division en espèces, les remarques faites plus haut, à propos des polygones du premier ordre. Lorsque, par exemple, le polygone a un nombre de côtés égal à un nombre divisible, son groupe cyclique renferme les groupes cycliques correspondant aux diviseurs de ce nombre. C’est ainsi que le groupe du dodécagone, dont le nombre des points s’élève à (T (3) = 4* — (— l)3 = 65 = 5 x 13, est composé de 5 groupes cycliques pour l’hexagone, mais aussi de 13 groupes pour le tétragone; le facteur 3 ne compte pas, vu l’impossibilité de l’existence de triangles cycliques du second ordre. Les fonctions ci-dessus trouvées pour le nombre de points des groupes cycliques peuvent toutes être exprimées au moyen de la fonction < r ce qui prouve la légitimité de l’hypothèse. Si l’on prend les expressions correspondantes pour u.z et Un + 2, et qu’on les substitue dans la {n + 2)ième congruence, il vient, après réduction: i (1 + (— 3)») t = 0 (mod. c o) (55) En posant, pour abréger, -P(— '!)») = Z (n) (56) 30 JAN DE VRIES. on déduit, de ce qui précède, «*■ = «. + (— 1)B — * + 1 X (» — i + 1) au>-x(n)l /g7) M» + ; = «, H-[( — 1)* — ! / (n — i + 1) + 1 ]«(o : ]((n) i (où -i = 1 jusqu’à n). 29. Pour que le groupe cyclique d’un anti-2 w-gone fournisse aussi des anti-2 v-gones, il faut que le côté uv uv + 1 du 2 v-gone puisse être considéré comme le côté d’un #-gone parcouru m fois ; on doit par conséquent avoir v -h m . 2 v = n, ou ü = n:(2m + l). Le groupe de l’anti-octogone ne comprend donc pas de tétragones; on en rencontre, au contraire, dans le groupe du dodécagone. 30. Si, dans le groupe cyclique, ui,n + i est le paramètre du point dont le point tangentiel se trouve sur la diagonale principale m un + i d’un anti-2 w-gone, on a, d’après (57) : 2 ui,n + i = 2 u t -h a œ : / (n) ( 58) c’est-à-dire : les diagonales principales concourent en un point de la courbe. 31. De même que pour les polygones cycliques du premier ordre, on prouve aisément pour les antipolygones la propriété que les diagonales m m + k passent par les points tangentiels des sommets d’un nouveau polygone, appartenant au même groupe* L’intersection des diagonales principales du polygone dérivé est le point tangentiel du point v pour lequel tandis que 2 V = U\} 1 H- k H- Un + 1, n + 1 + K et 2 m, i + * = wi -h u\ + k 2 Un + 1, n + 1 + k = Un + 1 + Un -|- 1 + Æ, de sorte que : 4 V = (u , -h Un + l) {u\ + lf. 4- Un : -f- 1 + l) \ et par conséquent, d’après (58) 2 v = 2 u j -+- a co : % (n) (59) POLYGONES CYCLIQUES, ETC. 31 Ainsi: Tous les polygones dérives , au moyen des diagonales , d'un antipolygone d’un nombre pair de côtês} ont en commun avec le polygone primitif le point d’intersection des diagonales principales. 32. Pour l’anti-octogone on a m5=w, + a œ : 41. Si de l’octogone correspondant à une valeur déterminée de a on en déduit un second à l’aide des diagonales m m + 2, puis de ce second, de la même manière, un troisième polygone, et ainsi de suite, il se trouve que l’octogone ainsi obtenu au moyen du cinquième est identique au premier. En désignant les sommets de ces octogones par les coefficients de a œ : 41 dans l’expression de leurs paramètres, le groupe fermé des cinq anti-octogones en question est représenté par le tableau suivant : 0 23 13 12 16 28 34 10 24 9 5 3 11 20 25 40 27 38 35 6 1 19 29 30 26 14 8 32 18 33 37 39 31 22 17 2 15 4 7 36 Le 41ième point du groupe u , + — a œ est le point anti- tangentiel de l’intersection commune des 20 diagonales principales. 33. Que les antigroupes cycliques ne fournissent pas tous un semblable système de polygones à point d’intersection commun pour les diagonales, c’est ce dont on s’assure de la manière suivante. Si p est un nombre premier, le théorème de Fermât donne : Sp~ 1 = 1 (mod. p), d’où résulte l (p) =5 1 (mod. p). 32 POLYGONES CYCLIQUES, ETC. Lorsque n est une puissance de 2, en sorte que q>(n) — i n, de = 1 (mod. n ) il suit de nouveau X (n) = 1 (mod. n). En tout autre cas, on a, ou bien y(2n) = \ (S2/l — 1) -{- 1, ou bien y^+\) = | (32^+1 — 3) H- 1, et en outre, respectivement, 3? (2 n) -=z 1 (mod. 2 n) ou 3t(2« +!) = 1 (mod. 2 w + 1). Mais alors cp (2 n) n’est pas un diviseur de 2 n, ni q> (2 n + 1) un diviseur de 2 n + 1, de sorte que y, d’après le module 2 n ou 2 n 4- 1, est incongruent avec 1. CJn groupe fermé de po- lygones, tel que celui trouvé ci-dessus pour l’octogone, n’est donc possible que dans le cas où n est un nombre premier ou une puissance de 2. 34. Chaque point de la courbe appartient à qp(|(3w+ ( — 1)^)) anti-2n-gones différents; les diagonales principales de chacun de ces polygones se coupent en un seul et même point de la courbe. SUR UN GROUPE DE CONFIGURATIONS PLANES RÉGULIÈRES ET QUELQUES CONFIGURATIONS PLANES CONNEXES, 1)E POINTS ET DE COURBES. PAR JAN DE VRIES. § 1. 1. Trois couples de points 12,(12); 13,(13); 14,(14), placés sur trois rayons qui convergent vers le point 1, déterminent quatre couples de triangles perspectifs : 12, 13, 14 à (121, (13), (14) (12), 13 , 14 à 12 , (13), (14) 12 , (13), 14 à (12), 13 , (14) 12 , 13 , (14) à (12), (13), 14. Si l’on désigne par i k le point d’intersection des droites lik = Q% 1 k) et i k (1) = ((1 i), (1 Je)), et par (i k) le point d’intersection des droites 1 i (k) = (1 i, (1 Je)) et 1 k (i) = (1 k, (li)), les quatre axes de perspectivité contiennent successivement les points: 34, 42, 23 34 , (42), (23) (34), 42 , (23) (34), (42), 23. La figure contient maintenant, outre le point 1 et ses trois rayons, 6 points i k et 6 points (i k ), qui sont situés de telle Archives Néerlandaises, T. XXV. 3 34 JAN DE VRIES. sorte sur 16 droites (12 côtés de triangles et 4 axes) que, ou bien les points ik, il, Ici, ou bien les points ik, (U), {kl) se trouvent en ligne droite; les 4 droites de la première espèce seront désignées par i kl, les 12 droites de la seconde espèce par ik(l). Les 12 points et les 16 droites en question forment la configuration représentée par le tableau suivant. Droites. Points. 123 12 13 23 12(3) 12 (13) (23) 13(2) (12) 13 (23) 2 3(1) (12) (13) 23 124 12 14 24 12(4) 12 (14) (24) 14(2) (12) 14 (24) 2 4(1) (12) (14) 24 1 34 13 14 34 1 3(4) 13 (14) (34) 14(3) (13) 14 (34) 3 4(1) (13) (14) 34 234 23 24 34 2 3(4) 23 (24) (34) 2 4(3) (23) 24 (34) 3 4(2) (23) (24) 34. Il est facile de voir que cette configuration est identique avec celle, (124, 163) A, que j’ai considérée dans mes articles V0ver vlakke configuraties ” ( Versl . en Med., T. V, p. 105, tableaux A et B) et „ Ueber gewisse ebene Conügurationen ” {Acta mathematica , T. XII, p. 63). Evidemment, chaque (12 4, 16 3) A peut être construite comme ci-dessus, parce que ses 18 SUR UN GROUPE DE CONFIGURATIONS, ETC. 35 diagonales concourent, trois à trois, aux 12 points de la. con- figuration associée ( l . c .). 2. Lorsque n — 1 rayons menés par un point 1 portent successivement les n — 1 couples de points 1 i, (1 i), où i = 2, 3, 4 . . . n, la considération analogue des couples de de triangles 1 iJc, i k (1), li(Æ), 1 Jc(i) forment alors, avec les 2 (n — 1) points 1 i, (1 i) et les ( n — 1) ( n — 2) points ik, (ik), une configuration En effet, par chacun des points 1 i, (1 i) passent 2 ( n — 2) droites se rendant aux autres points collinéaires avec le point 1, tandis que chacun des points i k et (i k) (où i z=z 2 jusqu’à, n, k~ 3 jusqu’à n) est situé sur deux de ces droites de jonc- tion et sur n — 3 couples d’axes de perspectivité, correspondant aux n — 3 configurations (12 4 , 163)^1 auxquelles ce point appartient. Je représenterai la nouvelle configuration par le signe On ; comme le montre sa notation, elle est régulière et doit donc, outre le point 1, posséder encore d’autres points diagonaux multiples, de l’ordre n — 1. Or, les points 1, i k, (ik) sont les sommets accessoires du quadriangle complet à sommets 1 i, 1 k, (1 i), (1 k) ; la diagonale de cf. 1 i . (1 i) est donc coupée par la diagonale de cf. i k . (i k) en un point i, que le point 1 sépare harmoniquement des points 1 i , (1 i). Cela étant vrai pour chaque valeur de k qui diffère de 1 et de i, le point i supporte, tout comme 1, n — 1 diagonales de cf., et peut par conséquent, dans la construction de on, prendre la place de 1. 3* 36 JAN DE YRTES. 3. Si les centres de similitude de deux cercles à .centres i, k sont représentés par i k et (i k), et les axes de similitude de trois cercles i, k, l par i kl ou i k{l) suivant qu’ils contien- nent 3 centres de similitude extérieurs (i k) ou un point i k avec deux centres de similitude intérieurs (i k) alors, ces points et ces droites, pour n cercles situés dans un plan, forment évidemment une configuration dont les n centres sont les n points diagonaux multiples de l’ordre n — i. Réciproquement, toute an peut être considérée comme le complexe des centres de similitude et des axes de simili- tude de n cercles. En effet, si des points 1, 2. . . n comme centres on décrit des cercles avec des rayons r,,r2. . . rn, tels qu’on ait r, : = (1 . 1 i) : (i . 1 i), les points 1 i, (1 i) sont les centres de similitude déterminés par les cercles 1 et i, et comme la configuration an peut être construite sans équivoque au moyen de ces 2 (n — 1) points, elle est identique à la con- figuration qui correspond aux n cercles. 4. Dans la configuration an est naturellement comprise toute dp pour laquelle la notation des éléments exige p des nombres 1 à n. Pour la configuration 3, qui est désignée par les nombres 1, 2, 3, se trouve dans chacune des n — 3 cf. (7 -j dont la notation contient les nombres 1, 2, 3, i. teres com - Dans toute Gn sont compris (2 n — 5) quadrilath 2) de ces quadri- plets.; chaque point de g% entre dans (2 n — 5) [n - latéres, chaque droite dans 2 n — 5 d’entre eux. Parmi les o3 à quatre nombres, il y en a qui possè- dent uniquement des points i k, et par conséquent unique- ment des droites ihl , de sorte que leur notation est celle usitée pour une 7t4 ]); il y en a, ensuite, qui sont formées de trois points i k situés en ligne droite et de trois points (i k), tandis que les autres g3 possèdent chacune deux sommets opposés i k. i) Comp. mon Mémoire „Oye/* vlakke polyedrale configurât ies ” ( Ver si. en Med., T. VI, p. 8) ou ,,Ueber polyedrale Gonfigurationen " {Math. Analen , T. XXXIV, p. 227). SUR UN GROUPE DE CONFIGURATIONS, ETC. 39 7. Dans <% le point 12 est séparé de (12) et des (n — 2) (n — 3) points i Je, ( i Je), (où i = 3 jusqu’à n, Je = 4 jusqu’à n), par con- séquent aussi des droites iJcl, iJe {]), désignées par les nombres 3 à n; en d’autres termes: Toute (în—2 comprise dans est la figure résiduelle commune des deux points indiqués par les deux nombres qui n'entrent pas dans an- 2. 8. Avec les n — 2 droites 12 i de la configuration on et les points portés par ces droites on peut évidemment former a) configurations combinatoires tïp. Si dans le tableau de chacune de ces np on remplace une ou plusieurs droites 12 i par le même nombre de droites 12 (i), — en ayant soin de remplacer par des points ( i Je) autant de points i Je qu’il est nécessaire pour que la notation des droites, propre à an, soit conservée, — on obtient chaque fois une np appartenant à on. Par conséquent, le point 12 entre dans. (p-0i1+<^+(V>'"+C’72) =e=D- + ... + 1 2 P-2 configurations np. Comme on renferme n (n— 1) points, et que chacune des np qu’elle comprend est portée fois en compte lorsque la considération ci-dessus est appliquée à tous les points de la 4, parce que 4). 9. Au moyen d’une 7t4 on peut construire une ]). Si l’on supprime dans la configuration les 2 p (4 p — 4) droites qui se rencontrent en ces points, les 2 p(2 p—1) — 2 p autres points perdent chacun 4p (4p— 4) : 2p (2p — 2) == 4 droites et forment donc, avec les 9 IA -g- - 2 /> (2 — 1) (2 p — 2) -4p(2ÿ — 2) = -gp(p— 1) (p— 2) droites qui restent, une configuration o «)*-»■ s2(a> SUR UN GROUPE DE CONFIGURATIONS, ETC. 41 11. Par le signe (123) je représente la g3 qui exige les nombres 1, 2, 3 pour la notation de ses éléments. Dans la configuration Q)12)- 16. Les points de chaque (92,63)A appartenant à o4 for- ment, avec trois points de la 3, a4 ô4, de l’hexagone a2 &4 a?t b2 a4 ft3 concourent en c,, les droites du bitriple a2 b?t ' C1 «3 «4 sont six tangentes d’une conique. Or, ces six droites déterminent deux triangles (167, 178, 168) et (235, 245, 345) dont les six sommets sont conconi- ques. Donc: IX. Les seize droites de 125 423 b2 a 4 128 C Z 342 C2 127 «3 h 234 126 h a2 X 122 414 331 243 Vingt de ces points étant situés sur la quartique 1?4 , la droite 12 menée par les points 125, 126, 127, 128 comprend encore le point x. Cette propriété peut être reliée à l’énoncé VIII moyennant une notation nouvelle. Les points 111, 423, 342, 234, placées respectivement sur les droites 15, 18, 17, 16, seront indiqués par 159, 189, 179, 169, la droite complémentaire, qui les supporte, par 19, tandis que les points 122, 414, 331, 243 et leur droite seront représentés (18) 68 JAN DE VRIES. par 269, 279, 289, 259 et 29; alors le point x, étant l’inter- section de 19, 29 et 12, peut être désigné par 129. La nouvelle notation étant appliquée aux onze biquintuples que l’on peut former de la même manière, le biquadruple complémentaire B 4 sera représenté par: 159 169 179 189 259 269 279 289 359 369 379 * 389 459 469 479 489 (20) Puisque les douze points x sont chacun l’intersection de deux droites complémentaires et une droite accessoire, ils forment avec B 4 et la%cf. (563, 28 6) ci-dessus trouvée une - cf. combinatoire (84 3, 36 7/>, dont les éléments sont indiqués par les combinaisons, trois à trois et deux à deux, des chiffres 1 à 9. Donc : X. Les seize droites d’une 3 ^3 4 C2i ^2 4 £2 3 C.4 Ces groupes se rangent en six couples séparés, dont chacun donne lieu à un bisextuple de droites. SUR UNE CONFIGURATION, ETC. 69 Le tableau a, a2 P 2 y 2 ^ 1 2 ^2 3 ^,2^4 a3 a, «2 Ô2 -^3 4 ^2 3 -d 3 4 i? J 4 h BlACt , B 2 4 ^3 4 K ** y 3 «3 b13c\. B i 3 4 b 3 A x 3 C , 4 2 4 C, l?4 «4 ^ 1 3^2 3 2 4 ^2 3 C3 «4 A désigne un de ces bisextuples. Comme vingt- quatre de ces points sont situés sur la quartique H 4, on pourra relier les douze points restants par une conique. Or, les dix-huit droites de £ (diagonales de o4 et de ) et M. Voss * 2) ont montré que quatre tangentes quelconques d’une R 8 sont toujours liées entre elles par une relation invariante. En conséquence, ou bien les droites 1, 2, 3 et 4 ne seront touchées par aucune courbe ou bien elles le seront par toutes les courbes R 3 d’un système du premier ordre. L’invariant simultané F des quatre tangentes, qui dans le second de ces cas devient nul, a été calculé par M. Voss. C’est à l’occasion de ces résultats que je veux fixer l’at- tention, dans les pages suivantes, sur un groupe de systèmes de rayons covariants et de courbes Rz connexes à ces sys- tèmes, courbes qui, par la supposition r — 0, deviennent les courbes tangentes aux droites 1, 2, 3 et 4. U Kalkül der abzàhlenden Geometrie. p. 166. 2) Mathematische Annalén , XIII, p. 168, ,,Ueber vier Tangenten einer Raumcurve dritter Ordnung J. C. KLUYVER. SUR DES SYSTEMES DE RAYONS, ETC. 71 Le traitement analytique de ces figures conduit, en premier lieu, à une construction qui permet de décider par voie géo- métrique si quatre droites arbitrairement prises remplissent, oui ou non, la condition invariante r = 0. En second lieu, nous déduirons de ce traitement comment les courbes tan- gentes, au cas où elles existent, pourraient être construites; finalement, quelques-unes des propriétés de ces courbes feront encore l’objet d’un examen spécial. 1. La détermination de l’invariant F forme le point de dé- part naturel des considérations suivantes. Pour cette recherche, l’emploi des coordonnées homogènes de droites est indiqué. 8ix1} ylf zt, wt et x2, y2, z2, w2 représentent les coor- données homogènes de deux points donnés, les grandeurs P — Vi *2— V i 2,, q~zx x2~z2 x ,, r = a?j y2— x2 yt, s =xx w2 — x2w x, t—yiw2 — y1wl, u — zx w2 — z2wx désignent, dans la notation de M. Salmon, les coordonnées homogènes de la droite de jonction. Elles satisfont, comme on sait, à la relation identique ps + qt + ru — O. Lorsque deux droites g et h , aux coordonnées pg, . . . ug et se coupent, l’invariant pg Sh 4- p h sg + qg th 4- qhtg -f- rg Uh 4- Th ug s’annule. Un invariant de cette forme sera indiqué par le signe {g h) ou (h g). Tandis que M. Voss, pour une courbe donnée R3, repré- sente les coordonnées de la tangente par des fonctions biqua- dratiques d’un paramètre, et à l’aide de cette représentation démontre qu’il existe une relation invariante entre les coor- données de quatre tangentes, nous allons, au contraire, con- sidérer comme données quatre droites 1, 2, 3 et 4, et rechercher si elles peuvent être touchées simultanément par une courbe R3. En supposant qu’une semblable courbe ait été trouvée, 72 J. C. KLUYVER. on pourra construire une surface réglée du second degré, contenant, outre la courbe, les droites 1 et 2 De même, une seconde surface réglée est déterminée par la courbe et ses tangentes 3 et 4. Les deux surfaces se coupent encore suivant une corde z de i?3, corde qui, puisque 3 touche la surface (12 2), sera tangente à la surface réglée (321). Pour une raison toute pareille, les surfaces réglées (234), (314) et (124) auront également la corde 2 pour tangente. Réciproquement, il est clair que, si ces quatre systèmes réglés possèdent une tangente commune z, l’intersection de deux hyperboloïdes, tels que (12 a) et (34 z), fournira une R 3 tangente à 1, 2, 3 et 4. Cherchons donc à trouver des droites z qui présentent la propriété en question. Désignons par y une droite quelconque du système réglé (321), et remarquons que ses coordonnées Py, . . . % sont à considérer comme des fonctions linéaires des coordonnées px, . . . ulf p2, . . . u2 , p3^ . . . us des droites don- nées, de sorte que nous pouvons toujours admettre six rela- tions de la forme Vy = R , P, +R1P2+ R3p3, ny zr R ^ u , +i^2Wj+ R 3 u3. En effet, pour toute droite x, pour laquelle on a (1 x) zz 0, (2 x) = 0, (3 x) — 0, il en résultera (y x) zz 0. Les coefficients variables R1} R.2 et iü3, qui entrent dans ces équations, doi- vent toujours remplir la condition R2 Rz (23) + JR 3 R, (31) + ■Rl R2 (12) = 0, parce que, entre les coordonnées py, . . . uÿ) il existe la relation Pv % + h “b ry sy = 0* Chaque droite 2 coupe deux droites y du système réglé. On peut en effet, par la résolution des équations [y 2) z= Rx (1 z) + R2 (2 2) + R 3 (3 2) = 0, R2 R 3 (23) -h R, R, (31) + Rt R2 (1 z) = 0, obtenir deux systèmes de valeurs pour Rn R2 et R3. SUR DES SYSTÈMES DE RAYONS, ETC. 73 Ces deux droites ij coïncident lorsque la droite et la conique, représentées en coordonnées homogènes Rn R2 et B3 parles équations ci-dessus, viennent à se toucher, ce qui a lieu sous la condition 1^(23) (lz) + 1/(31) (2 z) + 1/(12) (3 z) = 0 ■). Les tangentes z communes aux quatre surfaces réglées (234), (314), (124) et (321) doivent donc satisfaire aux quatre relations V^(34)(2 z) -h l^(24K3Ï) + l^(23)(4z)==0 1/pXTz) +1/(T4X^)+1/(3ÎK4z)=0 / ) • • (-A-) Vx'(24)(lz) + Vx(14)(2z) +L/(12)(4z)=0 ^ 1^(23)07) + l^(3Îj(2i) + (Ï2)(3z) =0 ce qui ne peut arriver que lorsque le déterminant 0 1/(34) 1/(24) 1/(23) 1/(34) 0 1/(14) l/(3Ï) 1/(24) 1/(14) 0 1/(12) 1/(23) l/(3Ï) 1/(12) 0 s’annule. Far une réduction simple, ce déterminant se laisse mettre aussi sous la forme 0 1/(12) 1/(31) 1/(14) A = l/(Î2) 0 1/(23) 1/(24) l/(3Î) 1/(23) 0 1/(34) 1/(14) 1/(23) 1/(34) 0 Posons-y : a — (23) (14), b ~ (31) (24). c = (12) (34), st = a + 6 + c, s.2 = bc-hca-hab, s:î = ab c. i) M. Cayley a donné cette condition sous la forme de déterminant. Comparez Salmon, Geometry.o\ three dimensions , 4e éd., p. 419. 74 J. C. KLUYVEK. L’équation A = 0 prend alors la forme a H- 6 H- c — 2 F^bc — 2 l^ca — 2 V' a 6 = 0, qui finalement se laisse réduire a r — (s,2 — 4 $2)2 — 128 s, s3 = 0. Ainsi est obtenu l’invariant F, dont l’annulation ou la non- annulation décide de la possibilité de courbes R 3 tangentes aux droites 1, 2, 3 et 4. 2. Il ressort des équations (A) que dans l’hypothèse F = 0 la droite z est indéterminée, et de ces équations (A) on peut tirer par résolution, les grandeurs (1 z), (2 z), (3 z) et (4 z . Pour cela, il faut poser (1 z), (2 z), K (3 z) et (4 z) propor- tionnels aux premiers mineurs A k,i de A. Il en résulte, vu que A k,i = A /,* , b^(Tz) _ 1^(27) __ 1^(3 7) __ I7 (4z) ^*77 ~ ““ vâT, ’ OU (1 2) _ (2*) _ (32) 1^(12) (13) (14) _ 1/(21) (23) (24) _ 1/(31) (32) (84) _ (42) 1/(41) (42) (43)’ et plus brièvement (1 z) _ (22) _ (3 *) _ (4j0 P, P, P3 ' ' Ces équations font voir que les cordes 2 d’une R 3 tangente à I, 2, 3 et 4 sont situées dans certains complexes linéaires, qui doivent être considérés comme des figures covariantes des quatre droites données. A raison, toutefois, des signes différents qui peuvent être attribués aux radicaux P, un examen spécial de ces signes est nécessaire. 3. Remarquons, à cet effet, qu’aussi dans le cas général, où r diffère de zéro, les systèmes de rayons indiqués par les SUR DES SYSTÈMES DE RAYONS, ETC. 75 équations (B) ont une signification géométrique, dont nous avons à nous rendre compte. Considérons, par exemple, l’équation ( 1*) = ±£j (2*), qui peut aussi être écrite sous la forme (13) a z) -y (2*) V (31) (24) (14) ) (! *) — J24) (2 z) j = 0. I ' ' r (23) (14) Elle représente deux complexes linéaires, situés dans le fais- ceau de complexes que déterminent les deux complexes dé- générés (1 z) = 0, (2 z) = 0. Il résulte en outre, des deux formes sous lesquelles l’équation peut être écrite, que les complexes représentés par elle sont conjugués harmoniques dans le faisceau, tant par rapport aux dégénérations susdites que par rapport aux deux complexes (1*>-ü<22) = 0’ (lz) (14) (24) (2*)=0, qui peuvent être menés par les droites 3 et 4. D’après les équations (B), nous avons affaire à 12 complexes de ce genre, pour lesquels nous emploierons la notation suivante : K±a==(lz)± (4 *) = <>, K±b = (2 z) ± ^ (4 z) = 0, ■*4 * i K±c~{ 3*)±£i(4*) = 0, 4 K±ai = { 2*)±{l(8*) = 0, K+6i=(3 z)±^-(1z) = 0, 1 3 1 1 K±Ci = (1 z) ± ^ (2 z) — 0. Pour avoir une idée nette de la liaison caractéristique qui existe entre ces complexes, figurons-nous un tétraèdre quel- conque, à faces 1, 2, 3 et 4. Désignons par a, 6, c les arêtes 76 J. C. KLUYVER. limitant la face 4, et par a,, 6,, ci les arêtes opposées à a, b, c. La forme des équations K±a = 0, . . . K±Cl ~ 0 rappelle alors les équations qui, en coordonnées tétraédriques homo- gènes, représentent les plans bissecteurs des douze angles dièdres sur les arêtes a, b,\..cl , lorsque le tétraèdre en question est pris pour tétraèdre de référence. Entre la con- figuration des complexes K et celle des douze plans bissec- teurs il existe une analogie parfaite, se traduisant par les correspondances suivantes : 12 plans bissecteurs des dièdres . 12 complexes K ; 16 droites d’intersection des plans bissecteurs pris trois à trois 16 congruences, intersections des complexes K trois à trois ; 8 points d’intersection des plans bissecteurs six à six (centres de sphères inscrites et ex-inscrites) 8 hyperboloïdes R , intersec- tions des complexes K six à six ; 4 sommets du tétraèdre ... les systèmes directeurs des sys- tèmes réglés (234), (314), (124) et (321). De cette analogie il ressort, en outre, que les hyperboloïdes R sont situés deux à deux, avec le système directeur de l’un des quatre systèmes réglés (234), (314), (124) et (321), dans les 16 congruences. En effet, dans la figure correspondante, les centres des sphères inscrites et ex-inscrites sont situés deux à deux, avec l’un des quatre sommets du tétraèdre, sur 16 droites. Dans chaque congruence les deux hyperboloïdes R ont donc en commun deux directrices g ' et g" , qui sont en même temps génératrices de l’un des quatre systèmes réglés que déterminent trois à trois les quatre droites données. D’ailleurs, les deux transversales communes /' et /" de 1, SUR DES SYSTÈMES DE RAYONS, ETC. 77 2, 3 et 4 appartiennent aux génératrices de chacun des liyper- boloïdes 77, parce que ces droites /' et /" font partie de tous les complexes K. Les deux tableaux suivants sont destinés à donner un aperçu de la situation relative de ces huit hyperboloïdes 77,, 772 , ... 77g. Dans le premier tableau on trouve, dans la colonne à gauche, les hyperboloïdes 77, à la suite desquels sont inscrits chaque fois les six complexes K qui déterminent la surface. Dans la première colonne du second tableau sont placés les systèmes réglés (234), (314), (124), (321); en regard, dans la seconde colonne, se trouvent quatre couples d’hyperboloïdes 77, dont les directrices communes g' et g" font partie du système réglé. Hyp. Complexes. H, K+a K-i K-c K-a, K+i, K+c, H, K-a K+i K-a K+a, K-i, K+c, K-a K-/, K+c K+a, K+i, K-c, Ht K+a K+i K+c K-a, K-i, K-c, H, K-a K+i K+c K-a, K+i, K+c, H . K+a K-i K+c K+a, K-i, K+c, H 7 K+a K+i K-c K+a, K+t, K-c, K-a K-i K-c K-a, K-i, K-c, Systèmes réglés. Directrices communes de: (234) 1 1 H; | ! ■ j 1 1 He ! H7 ! • h6 i 1 H, I (314) K, | h7 j H, 1 ^ 1 h7 ) H . 1 1 H 5 ! i He ) (124) H , 1 H, , ! Hs | ! Hr‘ 1 #c ; 1 H, 1 1 H , 1 1 H, i (321) i __ ! ! ! ! Hz | ! Hi 1 H r, 1 He ! 1 n7 ! 1 77 ’ u 8 78 J. C. KLUYVER. De ces tableaux on peut déjà inférer que les surfaces //5, H„ Hr, Ha se distinguent en quelque sorte des autres, et cette différence ressortira encore mieux par la suite. A Hs corres- pond, dans la figure analogue, le centre de la sphère inscrite ; //7 sont conjugués les centres des trois sphères inscrites dans les „toits”. 4. Il est facile de représenter les hyperboloïdes H par des équations. Chaque directrice y d’une pareille surface coupe toutes les génératrices z et par conséquent aussi les deux transversales communes /' et /" des droites 1, 2, 3 et 4. Les coordonnées p y , . « . Uy de y peuvent donc toujours être considérées comme des fonctions linéaires des coordonnées de 1, 2, 3 et 4, et l’on peut notamment écrire: Py = R\V\ + R^Pi + Æ3P3 + RuPt, Uy= Riu1 H- R2u2 + R3u§ -h R^u^. Les coëfficients variables Rtf...R4, qui entrent dans ces équations, doivent satisfaire à la condition 2R2Rz (23) = R 2 R 3 (23) + R?RX (31)'+ RXR% (12) + + R XR 4 (14) + R 2 P 4 (24) + R3R ^ (34) zzz 0, parce qu’on a constamment Py Sy + qyty + T y Sy = 0. Mais nous avons en outre (y z) •= 0, d’où il suit, à l’aide de (B), £ R {P , zz: RlP1 + R2P 2 + R 3 .P 3 + i?4P4 0. Les six équations P y = ^ R i P j > * • • uy = ^ R i un avec les deux conditions ^ R2 R3 (23) = 0, A RlP1 = 0, dans lesquelles les signes des radicaux P sont à prendre tels que chaque hyperboloïde H l’exige d’après les tableaux pré- cédents, doivent être considérées comme la représentation SUR DES SYSTÈMES DE RAYONS, ETC. 79 analytique de ces surfaces. Les coefficients i?4 y font l’office de paramètres variables. 5, Nous chercherons maintenant une construction géomé- trique pour les droites g' et g " de l’art. 3 et en déduirons la construction des hyperboloïdes H. Comme il importe de bien distinguer l’une de l’autre ces huit surfaces, qui d’ailleurs doivent être trouvées toutes ensemble, il convient de faire reposer cette construction sur une base algébrique. Prenons donc le système réglé (321) et cherchons-y les droites g ' et g" qui, suivant le tableau de l’art. 3, sont suc- cessivement communes à //, et H 5, à H2 et Fl Q) à, H 3 et H7, à Z/4 et FF 8. Commençons par exprimer les coordonnées de chaque droite y du système réglé en fonctions linéaires des coordonnées des droites 1, 2 et 3. On y parvient, d’après l’art. 2, en posant Py — Pi + RiVi H" Uy zzr R i u j H- R 2u 2 -H R 3 u 3 , R2R3 (23) + R3Rl (31) + RtR% (12) = 0. A la dernière de ces équations il est satisfait par les coeffi- cients variables Jf?,, R2 et /?3, si l’on admet la relation R | R 2 ü3 _ 2'(7-l) (23) “ ^-iy (3T) ~ 20^-1) (12) ' Ces coefficients deviennent ainsi des fonctions quadratiques d’un seul paramètre y,, et nous avons Vy = — 2 (y, — 1) (23) p1 + {g2 — 1) (31) p2 -h 2 (g -h 1) (12)p3 uy = - 2 0*— 1) (23) u4 H- (g2— 1) (31) ^ + 2 (g + 1) (12 )u3. En même temps se trouve alors adjointe à chaque droite y une valeur unique de g, et réciproquement; aux droites 1, 2 et 3 correspondent respectivement les valeurs — 1, co et H- 1 du paramètre. Nous déterminons les deux droites h' et h " du système réglé qui coupent la droite 4, et posons donc 80 J. C. KLUYVER. 0 = (4 y) = — 2 fa - 1) (23) (14) + (g2 - 1)(31) (24) + + 2(^ + 1) (12) (34). Cette équation, qui suivant la notation de l’art. 1 se laisse écrire sous la forme g2 b -f- 2 g ( — ci -b c) (2 a — b -\- 2 c) 0, . . . (C) fournit les deux valeurs de g adjointes aux droites h' et h". De la même manière, nous cherchons les valeurs de g qui correspondent aux droites g' et g" . Posons 0 = (z y) = - 2 (n - 1) (23) (1 z) + (,«’ - 1) (31) (2 z) + ■P -2 fa -f- 1) (12) (3 z), où l’on a à substituer (1*) - (2z) _ (3*j ±P, ±P2 ±P3* Les signes des radicaux P sont réglés d’après le premier tableau de l’art. 3. Nous arrivons alors, après division par V^(23)(31)(12), aux équations g2 l^b +2g(l/â+^c)+{--2l/a— 1^4-21^0) = 0 P1 1 /b+ 2 l/cl+(_21/â-l/6-21/ô) = 0 / (D ^ â—VÛ)+{+2^l— 1/0-21^5=0 i’ ' ' ^2 1/6+2^— 1/â— l/c+)+2l/â— l^6+2W)=0 , qui donnent successivement les valeurs de g pour les droites g ' et g ", communes à H] et Pr>, à P2 et HG, à //3 et H7, à i?4 et 778. A l’aide de l’équation (C), on peut déterminer les éléments V et 1", m' et m", n' et ri' des involutions (23; h' h”), (31; h' h"), (12; VA"). Le calcul direct apprend qu’aux droites SUR DES SYSTÈMES DE RAYONS, ETC. 81 V et l" r m et m'Vcorrespondent les valeurs paramétriques ri et ri'i / + 1+21A V _b K a ± V'c |l^ a + c Pour chaque combinaison, prise arbitrairement, de cinq éléments 1, 2, 3, h' et h", les trois couples d’éléments doubles V et l", m' et m ", ri et ri' peuvent être groupés en triades qui forment une involution avec la triade 1, 2 et 3. Effectivement, on rencontrera ici les involutions (1 V; 2 m'; 3 ri), (11'; 2 m"; 3n"), (1 l"; 2 m ; 3 n"), (1 l" ; 2 m"; 3 ri). Pour le reconnaître, considérons, par exemple, les couples d’éléments il' ,2 m", 3 ri. A ces couples correspondent, d’après ce qui précède, les trois formes quadratiques binaires — 2^W — ( 1^6 + 21^0), -h 2 (2 -h 2 V^c), ^l^b — 2^a +(21^â— V'ô), dont le déterminant s’annule, ainsi que cela doit être. De la même manière, on se convaincra de l’existence des autres involutions. Par là se trouvent classés en quatre triades les six éléments V, V, . . . n". Considérons maintenant les quatre autres triades l" m" n ", l m n", V m" ri, 1" m n", qu’on peut former avec les mêmes éléments, et examinons les quatre groupes d’involutions suivants : ((11; m" n") é (11 ; m ri') é (11 ; m" ri) I (22; ri' V) , II (22; ri' V), III (22; ri V), ( (33 ; V m") ( (33 ; ï m) ( (33 î ï m!') ,(11; m ri) IV (22; ril"). ' (32 ; V m) Archives Néerlandaises, T. XXV. 0 82 J. C. KLUYVER. On peut démontrer que, n’importe de quelle manière soient pris les éléments 1. 2, 3, h' et h", les involutions de chaque groupe ont un couple d’éléments commun. Montrons-le, par exemple, pour le troisième groupe, et calculons en même temps les valeurs du paramètre pour ce couple d’éléments. Les valeurs de (u étant connues pour les éléments V , Z", . . . n'\ nous pouvons assigner les formes binaires qui correspondent aux couples m" n\ ri Z', Z' m", 11, 22 et 33. On trouve comme telles n‘l iybc 4- ^ ab) + 2 lu.(— — 1 ^ c a) 4-j +(2a+V/6c— 21^— ^aby, pourm'Vetll. u 2 \^bc - h 2 tu l^bc 4- l^ôc 4u2 b 4- 2 u ( — — 1 ^ab) 4- j 4- (— b— Z^bc+^m + Z^âb)^ pour n' V et 22, 0 . ,u 2 4r 0 . (u 4- g,2 (y'bc 4- ^ a b) 4- 2 g (— c — ^ ca — 1 ^ab) 4-j 4-(— 2c— ^^4-2^04-^06), | pour V m" et 33. g2 a6 — 2 g ^ ab 4- ^ ab En soustrayant, dans chaque couple de formes, la seconde de la première, on arrive, après une légère simplification, à g2 1^6 4- 2 fi (—l^â -l sQ) 4- (2 l^â— 1^6— 2 l^c). D’après les équations (D), les éléments indiqués par cette forme sont les directrices communes g' et g " des hyperboloïdes H 3 et H7. Ces droites sont donc les éléments communs des involutions du groupe III. On peut, sans beaucoup de peine, étendre cet examen aux autres groupes et parvenir à la conclusion que les éléments communs des involutions du groupe I \ ii/ 111 \ IV indiquent les directrices g' et g'\ communes aux hyperboloïdes | H i et i/5 \ H2 et 77 G I Ho et ti7 \ H n et II 8 SUR DES SYSTÈMES DE RAYONS, ETC. 83 Les éléments h ', h", Z', . , . . n", que nous avons rencontrés clans les considérations précédentes, peuvent être déterminés par construction géométrique. La recherche des droites g' et g" se laisse donc également exécuter par la voie graphique. Si les constructions nécessaires à cet effet sont répétées, mais cette fois par rapport au système réglé (124), on trouve quatre directrices de chaque hyperboloïde //; ces surfaces elles-mêmes sont alors construites. 6. Cherchons maintenant dans quelles circonstances les deux droites g' et g" d’un couple pourraient se confondre. Pour cela, calculons les discriminants tant pour les quatre équations (D) que pour les 12 autres, qui ont une significa- tion analogue par rapport aux systèmes réglés (234), (314), (124). Dans le tableau suivant sont consignés les résultats de ce calcul. Discriminants. (234) (314) (124) (321) a -f- b -f- c — 2 b c — 2 c a — 2 a b H, H, H,HS H, H, U, H, a -f- b -f- c 4- 2 b c- f-2 c a — 2 a b HtH, HtH, H.t H , a -|- b -f- c -f- 2 L 'b c — 2 c a- f-2 a b h„h6 HtH6 H,He ct~\-b -f- c — 2 b c- f-2 c a -f-2 a b H,HS h,h5 HtHr, Les 16 équations en question ne possèdent en tout que quatre discriminants différents, qui sont inscrits dans la pre- mière colonne. Dans les colonnes suivantes, on trouve indiqué, pour chacun des quatre systèmes réglés (234), (314), (124), (321), à quel couple d’hyperboloïdes H se rapporte le discri- minant placé en tête de ligne. Dès l’abord, il saute aux yeux que les quatre discriminants sont les facteurs de l’invariant F, et que les hyperboloïdes 17,, H e, H7 et Hs se comportent tout autrement que les autres. On reconnaît, en effet, que, pour L=0, il y a toujours une 6* 84 J. C. KLUYVER. de ces quatre surfaces dont les génératrices z toucheront les sjts- tèmes réglés (234), (314), (124) et (321). Les droites z des hyper- boloïdes Hn Ii 2, H3 et i?4, au contraire, ne peuvent jamais être des tangentes communes de ces systèmes réglés. Or, il est maintenant facile de voir comment on trouvera géométri- quement si quatre droites données peuvent être tangentes à une R3. On n’a qu’à chercher les directrices g' et g" qui sont communes aux hyperboloïdes H et au système réglé (321). Si, pour un de ces hyperboloïdes, par exemple pour //4 et Hè, les droites g' et g " coïncident, on achève la construction i/„. Prend-on ensuite sur Z/8 une génératrice quelconque z, les hyper- boloïdes (23z) et (14z), (31z) et (24z), (12z) et (34z) se couperont deux à deux suivant des courbes R*f tangentes à 1,2, 3 et 4. Le système complet de ces courbes s’obtient en faisant parcourir à la droite z la surface Hs. On peut du reste, comme le remarque M. Voss, déduire de l’une des R 3 tangentes, par une construction assez simple, toutes les autres. 7. Avant de passer, toutefois, à l’examen du cas particulier r = 0, nous signalerons une propriété assez intéressante des hyperboloïdes H. , //6, H7 et //8, qui met encore mieux en lumière la différence entre ces quatre surfaces et les quatre au- tres. Les quatre droites données peuvent être disposées par cou- ples de trois manières différentes. Chacune des combinaisons ainsi obtenues, par exemple (23 ; 14), détermine, comme nous le verrons, ce qu’on appelle un système focal d’ordre supérieur. En parlant de pareils systèmes, nous avons en vue un rapport par lequel à chaque point est conjugué un plan passant par ce point, à chaque plan un point situé dans ce plan. Le système focal est dit du premier ordre lorsque aux points d’une droite correspondent les plans d’un faisceau et réci- proquement. En ce qui concerne maintenant la combinaison (23 ; 24), observons que par chaque point passe une droite coupant 2 et 3, ainsi qu’une deuxième coupant 1 et 4. Le plan de ces SUR DES SYSTÈMES DE RAYONS, ETC. 85 sécantes peut donc être conjugué, comme focal, au point consi- déré. Inversement, dans un plan quelconque on rencontre une droite coupant 2 et 3, ainsi qu’une droite coupant 1 et 4. Le point d’intersection de ces droites peut être considéré comme le foyer du plan. On a ainsi un système focal déduit de la combinaison (23 ; 14). Il est facile de montrer que le foyer parcourt une courbe gauche R 3 lorsque le plan focal tourne autour d’une droite, et qu’aux points d’une ponctuelle, correspondent comme plans focaux, les plans tangents d’une surface développable de la troisième classe. Les choses deviennent encore plus simples quand on a affaire à une droite l reposant sur leè deux trans- versales /' et /" de 1, 2, 3 et 4. Aux points de l sont alors conjugués les plans passant par une certaine droite x qui rencontre également /' et /", tandis que, réciproquement, les plans passant par la droite l sont les plans focaux des points de la droite x. La correspondance entre l et x a un caractère involutif. Nous cherchons le lieu géométrique de x dans la supposition que l décrive un système réglé. Cette droite l restant constamment appliquée sur /' et on peut, comme dans l’art. 4, concevoir ses coordonnées déterminées par les six équations pi = 2 Ax px , ui ■= 2 A , u u dont les coefficients variables A1% . . . Aq sont assujettis à la condition, déjà mentionnée, 2 A2 A3 (23) = 0. Entre ces coefficients il existe toutefois, vu que l parcourt un système réglé, une seconde relation, et celle-là linéaire, qu’on peut écrire 2 n , A t — TT , A , ~~ TT 2 A 2 + 3 A3 + 7r4A4zz:0. Pour la droite x, conjuguée à l, on peut agir de la même manière et poser = SV, pit . . . ux = 2 V, u,, 2 V, V3 (23) = 0. 86 J. C. KLUYYER Remarquons, en vue de la détermination des coefficients V,, ... F4, que toute droite qui coupe 1, 4 et l, ou 2, 3 et l, rencontre aussi x. Cela exige V , — (J A. J , V 2 = G A 2: V 3 = 6 A 3, V 4 — -4 4 . La substitution de ces valeurs de F, , . . F4, dans l’équation 2’ V 2 V3 (28) = 0 donne q2A, Ai(l4) + ea\A3Al (31 ) + At A2 (12) + A2 A, (24) + -h A3 A4 (34) ] + a*A2A9( 23) = 0, et de celle-ci, combinée avec <2 A2 A 3 (23) = 0, il suit — ^ A, A, (14) - a A2 A3 (23) j = 0. Comme, tant que l et x ne coïncident pas, q et a sont différents, on arrive à la conséquence q z=z A2 A3 (23), a = At Ah (14), de sorte que finalement les coordonnées de x sont exprimées par six équations de la forme px — A , At A3 (23 )p, + At A, At (14) p2 + A , As At (14 )p3 + + AtAtA 4 (23)P) (E) Les coefficients variables Alf...A4f contenus dans ces équations, doivent satisfaire aux deux conditions. 2 A2 A3 (23) = 0,2 t r, A , =0. De tout ce qui précède, on peut conclure que la droite x a pour lieu géométrique une surface réglée unicursale FG du sixième degré, sur laquelle les droites données 1, 2, 3 et 4 se présentent comme génératrices doubles. En considérant que cha- que génératrice du système réglé (321) rencontre six droites x, tandis que chaque droite x ne coupe que deux de ces géné- ratrices, on reconnaît, en outre, que les deux transversales SUR UES SYSTÈMES DE RAYONS, ETC. 87 /' et /" sont des droites triples de FG. Cette surface repré- sente maintenant tant l’enveloppe des plans focaux des points de l’hyperboloïde décrit par l, que le lieu géométrique des foyers des plans tangents à cet hyperboloïde. 8. Mais, à côté de la combinaison (23 ; 14) se trouvent les deux autres (31 ; 24) et (12 ; 34), de sorte qu’à l’hyperboloïde décrit par l il correspond, non pas une surface FG unique, mais trois de ces surfaces. On peut se demander s’il est pos- sible de choisir l’hyperboloïde de telle façon que les trois surfaces réglées se confondent. Pour répondre à cette question, considérons les équations (E) et remplaçons-y d’abord 3 par 4, puis 2 par 3, ce qui fournira la représentation analytique des deux surfaces réglées auxquelles donnent lieu les combinai- sons (31 ; 24) et (12 ; 34). On trouve ainsi, parallèlement aux équations de la première surface réglée, V* = A, A2 A 3 (23) p, + A, A2 A 4 (14 )p3 4- A, A3 A,t (14)^s + + A3 A3 At (23 )pi, 2 A3 As (23) = 0,-£jr, A , =0, pour la seconde surface : P* = B 2 B 4 (24)p, + B, B2 B3 (31 )p2 + B% B 3 B 4 (24)^3 + + ^1 ^3 ^4 2’ B2 b 3 (23) = 0, 2 tt j Bt = 0, et pour la troisième : Px = C3 Ci (34) p { + C2 C3 04 (34 )p2 q- (7, C2 C3 (12)_p3 q- -h G, C2 C, (12) p„ 2 C2 C3 (23) = 0, 717, Ct =0. Or, pour que ces trois groupes d’équations puissent repré- senter les coordonnées de la même droite x, il faut que les coefficients variables A , , . . . A 4 , B , , . . . Bfl , Cj , . . . C4 satisfas- sent aux relations 88 J. C. KLUYVER. Bl B 2 B 3 B, .t A2 (23) (24) - A t (31) (14) “ A4 (14) (24) A3 (23) (31) Cx _ C2 __ C, _ c4 A, (23) (34) Ak (14) (34) - Ax (12) (14) A2 (23) (12) ‘ Dans cette supposition, en effet, il suit de A A2 A3 (23) ~ 0 que les conditions ^ B2 B 3 (23) 0, 2 C2 C3 (23) = 0 sont également remplies. Quant aux autres relations entre les coefficients, elles déterminent les quantités encore inconnues ? t1,...7t4. On trouve, en effet, TU j « «... ^ 2 _ ^ 3 _ TU ^ tt2 (31) (14) — 'fi j (23) (24) — (23) (31) — ?r3 (14) (24) ’ TU ^ TU q TU ^ TU ^ (12) (14) “ tt4 (23) (12) - vr, (23) (34) = n, (14) (34) • A ces équations il peut être satisfait en posant TU | TU ^ TU jj + l/a2T(13)Ô4) = ± v^(21) (23) (24) = ±ï>(31) (32) (34)== ^4 ± 1^(41) (42) (43)* Les signes des radicaux doivent être choisis de manière qu’on ait toujours TT , 7T 3 (24) = -+- 7T2 7T4 (31). Les radicaux eux-mêmes ont déjà été rencontrés dans l’art. 1, où nous les avons désignés par les lettres P,, . . . .P4. Il résulte de tout ce qui précède, que la droite l peut décrire quatre hyperboloïdes répondant à l’obligation imposée, hvperboloïdes qui sont représentés par les équations pi =. Z A , p , , . . . ui =: 2 A , u , , 2 A2 A3 (23) = 0, 2 A1Pl = 0, dans la dernière desquelles les signes de P,,...P4 doivent être pris tels que l’indique le tableau suivant : SUR DES SYSTÈMES DE RAYONS, ETC. 89 P, P î P 3 P 4 -h — — -b i ", 4- — 4- — ", 4- -b — — "7 -b -b H- ", En rapprochant ce résultat de ce qui a été trouvé à Fart. 3, on reconnaît que les droites l ne sont autre chose que les directrices des quatre hyperboloïdes i?5, i?6, H 7 et i?8. A ces hyperboloïdes seuls appartient donc la propriété, que l’enveloppe des plans focaux de leurs points, ou, ce qui revient au même, le lieu géométrique des foyers de leurs plans tangents, est toujours formé par la même surface réglée P6, quel que soit celui des trois systèmes focaux qui sert de point de départ. Les coordonnées des génératrices x de cette surface réglée sont déterminées par les équations px — ^ Vx pi} . . . ux “ 2 V{ ui3 V 3 (23) = 0, S y~jjr — 0- Les signes des quantités P,,...P4 se règlent d’après le tableau ci-dessus. 9. Aux droites 2' de l’un des quatre hyperboloïdes H en question sont maintenant adjointes, au moyen de l’un des trois systèmes focaux, par exemple de (12 ; 34), certaines courbes gauches P3, situées sur la surface P6 qui correspond à H . Les plans focaux des points de l’une de ces courbes enve- loppent la droite conjuguée z, la courbe elle-même a les droites 1, 2, 3, 4 et z pour cordes et devient, dans le cas F— 0, comme la remarque en a déjà été faite à l’art. 6, tangente à 1, 2, 3 et 4. 90 J. C. KLUYVEK. Dans le cas général r^O, les quatre couples de points où R3 coupe les droites 1, 2, 3 et 4 représentent quatre formes quadratiques binaires flt . . ./4, entre lesquelles il existe des relations invariantes, que nous allons étudier. Les quatre formes fi — a*2> fi — bx2 , f3 = Cx2, /4 = dx 2, possèdent les invariants communs 4| i rz(aa;2; ^423 ~(èc)2, R.13 "zzz A22A33 A2 2 3, i?2î4 = (6 c) (b d) ( c d), etc. En outre, il est toujours satisfait à l’identité 0 = ^234/1 “b i?3 14/2 + ^124/3 + ^321/4- Admettons que la droite z' détermine sur fi3 un couple de points représenté par la forme binaire /0 ; on a alors, vu que les formes /0, /, et f2 , aussi bien que les formes /0, /3 et /4 , sont en involution, / 0 — ^234/1 "b Ü314/2 — ^124/3 ^321/44 d’où il suit ^.0 =^2314^I2> ^20=^2 2 3 4 ^.2) ^30=^2 3 2l^ R 2 R 14 1 2 4 3 4 * En supposant provisoirement qu’il s’agisse de l’hyperboloïde Jï8, nous avons, d’après les équations (B) de l’art. 2, (lz) __ (2 z) _ (3 z) 1^(12) (13) (14) ~ 1^(21) (23)"(24) “ 1^(31) (32) (34) _ . (4 g) (41) (42) (43)* Mais les invariants (1 z), (12), etc. doivent évidemment être pris proportionnels aux résultantes Rl0, R]2> etc., de sorte qu’on obtient R R2 R2 1 2 4 E /?23/?24i?34 l^R3tRl4R37i R 12^14^24 R2 3 2 1 1^R23JR3i/?, (F) SUR DES SYSTEMES DE RAYONS, ETC. 91 Pour faire mieux ressortir la signification de cette relation triple entre quatre formes binaires, il convient de lui chercher d’abord une autre expression. De (F) il suit immédiatement R 3 2 1 fl .) o R ^ i H | 2 __ ^ ~ 2 3 4 ^ 2 3 1 4 ^ 2 1 2 4 ^14 ^2 4 ^34 La division par £4 R donne ^2 3-^3] 2 ^2 3 ^2 4 -^3 4 R2 R1 R2 n , 11 3 1 4 12 4 I) 3 2 1 n 1 4 ^ n, ri 2 3 * n 2 3 4 (G) Il est à remarquer que cette équation reste la même, quand on part des hyperboloïdes HG ou H7. Le second membre acquiert au contraire le signe négatif, lorsque la droite z est prise sur l’un des hyperboloïdes Hx , H2, H3 ou Hk. L’identité “^321/4 - ^234/1 +^314/2 + ^124/3 conduit à l’équation ^2 3 2 l^' 4 ^ 2 3 1 4 ^ 1 2 “b R~ j 24^3 ] 2 R 3 j 4 R | 2 4 ! 2 -4. 3 1 ^2 3 ^ I 1 b En combinant celle-ci avec l’équation (G), on obtient 0 = -R* 314**1 24^23+^, 24^2 3 4^3 ,+**„4** 2 -R2 2 3 4 P3 ! 4 Lj 2 4 (A j 2 A3 , A2 3 A J. D 3I4A12 L’échange cyclique de 1, 2, 3 fournit encore deux autres équations de la même forme, savoir : A R 2 R2 R R2 R2 R U n 314^ 1 24A23 ^ 12V1 2 3 4il3 I R 2 R 2 R Xl 2 3 411 3 1 4Xll 2 ^ 3 i 4 ^124^234 (^23^12 ^3 l ^22)) 0 P2 3 j 4P2 j 2 ,R2 3 R 2 R 2 R l 2 4Xl 2 3 4 Xl3 1 P* R2 R X 1 3 1 4xl l 2 2 P 2 1 2 4 ^2 3 4 ^ 3 1 4 3 1 ^23 ^12 ^33 )• 92 J. C. KLUYVER. Si, pour abréger, on pose a“ ^23, ^ |J C — 1 2 > / ”= ^12^31 ^ 2 3 ^ I 1 J 9 = ^23^12 ^31^22? /i ^3 | ^2 3 ^12 "^33* ces trois équations pourront être remplacées par les suivantes : 0— a R 3 1 4 ^124 ^12 4 ^2 3 4 # ^ 2 3 4 ^314 > 0— ^3 14 ^|24 +^^124 34 / ^ 2 3 4 ^3l4) ^ = 9 ^ 2 \ i ^124 /^1 24 ^2 3 4 + C ^2 2 4 ^34 4* Or, ces dernières équations ne peuvent subsister simulta- nément, à moins qu’on n’ait a — h — g A' = — à 6 — / =a6c — a/2 — 6#2 — cà2 — 2/#à === 0 . . . (H) -*-/ « I Par là, les relations (F) entre les quatre formes sont fina- lement ramenées à quatre conditions de la forme A' = 0, dans lesquelles il n’en entre chaque fois que trois. Ces quatre con- ditions n’équivalent, bien entendu, qu’à trois relations indé- pendantes. Il est facile d’indiquer des formes spéciales qui y satisfont; par exemple, en partant de la supposition f = g = h. Veut-on, dans ce cas, avoir des formes réellement différen- tes, dont les discriminants ne s’annulent pas, et dont il n’y en ait pas trois en involution, il faut prendre a = — 2, 2 f = -i-— on arrive alors aux quatre formes dites du cube *), O dont le produit est représenté par x y ( x 6 — 8 a?3 y3 — 8 ?/6), et qui satisfont aux relations identiques /, +/, +/3 +/« =0, / ,2 +U +/** = o. i ) Gordan-Kerschensteiner, Vorlesungen über lnvariantentheorie, II, p.16'1 , SUR DES SYSTÈMES DE RAYONS, ETC. 93 10. Jusqu’ici, toutefois, la signification géométrique des con- ditions invariantes (F) ou (H) n’est pas encore trouvée. Pour simplifier la figure à étudier, prenons, sur la courbe R 3 considérée dans l’article précédent, un point quelconque, et de ce point comme centre projetons sur un plan quelconque la courbe et ses quatre cordes 1, 2, 3 et 4. Par cette opération, on obtient une conique C2, avec quatre de ses sécantes 1, 2, 3 et 4. Les couples de points où 1, 2 et 3 rencontrent la conique déterminent de nouveau trois formes quadratiques binaires, entre lesquelles existe encore la relation (H). Il s’agit de savoir quelle est, en vertu de la condition (H), la situation particulière des trois droites relativement à C2. Admettons que, par rapport à un triangle de référence X Y Z, la conique C 2 ait pour équation X Y— Z2 = 0 . Les coordonnées des points de cette courbe seront exprimées de la manière habituelle, en fonction d’un paramètre sui- vant les équations x^_ _r __ f»2 _ i fi ' En supposant que les trois formes binaires, ci-dessus men- tionnées, soient Ii = ao P2 + 2a, /t -H «2, fi +2 bt p + b2J fi — co .u2 + 2 c, [a, 4- c2, nous trouvons pour les équations des droites 1, 2 et 3, par ordre successif, 0 — x — a q X -f- a 2 Y -h 2 a t Z, 0 = y=zb0X-{-b2 F+26, Z, 0 z^ z zz: ç 0 X -f- c 2 F H- 2 c, Z , d’où l’on déduit 94 J. 0. KLUYVER. x y z X y z x y z II a, 6, c, , Y — 2 j a0 b0 Cq , 2 = CL 2 b 2 C 2 CL 2 b 2 C 2 a, bx c, a0 &o co L’équation de la conique C 2 par rapport au triangle de référence ayant pour côtés les droites 1, 2 et 3, s’obtient en substituant ces valeurs dans X Y — Z2 =0. Comme résultat de cette substitution, on trouve, après quel- ques réductions a x2 -h b y2 + cz2 H- 2 fy z + 2 g zx 2 lix y = 0, où les coefficients a, b, c, /, g et h ont la signification que nous leur avons attribuée dans l’article précédent. Ce résultat étant rapproché de la condition (H), la traduc- tion géométrique de la relation invariante A' — 0 ne présente plus de difficulté. Un théorème connu ') nous apprend, en effet, que dans le cas A ' -=.ab c — a f1 — b g2 — ch2 — 2 fg h — 0, les six droites, menées des sommets du triangle de référence aux points d’intersection de la conique C 2 avec les côtés opposés, passent trois à trois par deux points. Les courbes B3} qui, au moyen des systèmes focaux con- sidérés dans l’art. 7, sont conjuguées aux génératrices z des hyperboloïdes H. , HG) Hn et , ont donc par rapport à leurs quatre cordes 1, 2, 3 et 4 une situation particulière, carac- térisée par la propriété suivante : Si l’on considère la conique et le quadrilatère obtenus en projetant une semblable courbe B3 et ses quatre cordes 1, 2, 3 et 4, d’un de ses points comme centre, sur un plan quelconque, alors, dans chacun des quatre triangles du quadrilatère en J) Salmon, Conic sections , 6e éd., p. 408, ex. 13. SUR DES SYSTÈMES DE RAYONS, ETC. 95 question, les six droites menées des sommets aux points d’intersection de la conique avec les côtés opposés passeront trois à trois par deux points. 11. L’étude précédente a donc fait voir comment on peut distinguer par une construction géométrique les cas r = 0, -T>" 0, et comment se trouvent les différentes figures cova- riantes qui, dans le premier cas, engendrent les courbes R3 tangentes aux droites 1, 2, 3 et 4. Peut-être y a-t-il quelque intérêt à nous arrêter encore un instant au cas r = 0. Admettons qu’aux génératrices z de l’hyperboloïde H% , dans chacun des trois systèmes focaux, soient adjointes des cour- bes tangentes à 1, 2, 3 et 4. Ces courbes forment, comme on l’a vu à l’art 9, une surface réglée unicursale FG , qui a les droites 1, 2, 3 et 4 pour génératrices doubles, et leurs deux transversales f' et /" pour droites triples. Mais ici, à cause de f = 0, la surface FQ présente une particularité nouvelle: les génératrices doubles sont devenues des arêtes de rebroussement. En effet, dans la droite 1, par exemple, deux nappes de la surface se rencontrent, et chacune des courbes R3 doit, au point où elle touche cette droite, pouvoir passer de l’une des nappes sur l’autre. Cela exige qu’en ce point les plans tan- gents aux deux nappes coïncident avec le plan osculateur de la courbe, d’ou résulte que la droite 1 devient effective- ment arête de rebroussement. En outre, les droites /' et / " sont, par rapport à chaque courbe P3, des polaires conjuguées, de sorte que chaque génératrice z de FG doit être considérée, pour toutes les courbes, comme un rayon d’osculation. Le plan osculateur en un point quelconque de l’une des courbes contient donc toujours une génératrice et est par suite, au point considéré, tangent à F 6. De là vient que, suivant la remarque de M. Voss, les courbes R3 forment les courbes asymptotiques de la surface F6 . 06 J. C. KLUYVER. Si Ton fait décrire par la courbe R3 la surface F c, les quatre points de contact de 1, 2, 3 et 4 parcourront évi- demment des ponctuelles homographiques, droites dont les intersections avec les transversales /' et f" formeront deux groupes de quatre points homologues. Par des considérations de ce genre, on est conduit à regarder deux courbes R 3 et R 3 comme des figures homologues dans deux systèmes collinéaires, dans lesquels la congruence (/' f") se correspond à elle-même. Une transformation homograpliique répétée suffit donc pour déduire de l’une des courbes R3 toutes les autres. Cette déduction peut toutefois, si l’on veut, se faire encore par une voie différente. Tient-on compte, en effet, de la circonstance que tous les complexes linéaires adjoints aux courbes R3 contiennent la congruence (/' /"), on peut démontrer que, dans le faisceau de complexes ainsi déterminé, il existe toujours un complexe K , par rapport auquel deux courbes R 3 et R' 3 sont des figures réciproques, de telle sorte qu’à un point de l’une des courbes, comme foyer, correspond un plan osculateur de l’autre, comme plan focal. Or, en partant d’une semblable correspondance, il est facile de prouver que pour la surface réglée F 4 du quatrième degré, décrite par celles des cordes de R3 qui appartiennent au complexe K , la courbe R'3 forme l’arête de rebroussement de la surface développable bitangente qui peut être construite autour de Fk . 12. De tout ce qui vient d’être dit il ressort suffisamment que, pour toutes les courbes R 3 de F 6, le rapport anharmo- nique des quatre tangentes 1, 2, 3 et 4 est le même. Nous allons faire voir encore comment ce rapport anharmonique l dépend des biquotients analogues V et l" , auxquels donnent lieu les deux groupes de quatre points d’intersection qu’on trouve sur les deux transversales communes / et /". A cet effet, nous représentons, ainsi que l’a fait M. Voss, les coor- SUR DES SYSTÈMES DE RAYONS, ETC. 97 données des tangentes d’une R 3 par des fonctions biquadra- tiques d’un paramètre variable Supposons que pour 1, 2, 3 et 4 ce paramètre prenne les valeurs p,,. ..p4. Il en résulte immédiatement que les invariants (23), (31), etc. doivent être pris proportionnels aux quantités (^ — ^3)4, (ju3 — ^,)4 etc. Pour le rapport anharmonique l on a donc: j 4 _/,»|— ,«-2 . mA 4 _ (12) (34) _c -\r-rr’n-rJ (31) (24) 6 • Rapprochons ce résultat de l’équation P2 b H- 2 ^ ( — a + c) + (2d-6 + 2c) = 0,... (C) qui a été établie à l’art. 5. Cette équation fournit les valeurs paramétriques fi' et fi’', appartenant aux deux droites h1 et h " du système réglé (321) qui sont coupées par 4, dans la supposition qu’à 1, 2 et 3 reviennent les valeurs paramétri- ques — 1 , oo , H- 1. Pour V on a, par conséquent, v — 1 — oo fi' — oo 1 — /a' “ - 1—1 :u^-T~~2 De même, pour P', de sorte que, d’après (C), = )(!-*•") = -J-. Entre les trois rapports anharmoniques considérés, il existe donc la relation très simple W = VX", qui nous apprend que, pour quatre tangentes quelconques d’une R 3, la quatrième puissance du rapport anharmonique est égale au produit des deux rapports analogues appartenant aux deux groupes de quatre points d’intersection qu’on ren- Archives Néerlandaises, T. XXV. 7 98 J. C. KLUYVER. contre sur les deux transversales communes de ces quatre tangentes. 13. Finalement, nous déterminerons encore, pour le système des courbes tangentes R 3, les nombres caractéristiques les plus simples. Comme tels, sont immédiatement connus les nombres v et v , qui dans la notation de M. Schubert 1 ) indiquent combien de courbes du système coupent une droite donnée ou font passer un plan osculateur par une droite donnée. D’après ce qui précède, on a v = v = 6. Nous avons déjà remarqué que la surface réglée F6 est unicursale, et par conséquent du rang 10. Chaque tangente de F6 est toutefois rayon d’osculation de la courbe R3 qui passe par le point de contact, et les rayons d’osculation forment donc un complexe du degré a — 10. Pour décider combien de courbes sont touchées par un plan donné, il faut considérer que les points où le plan est coupé par les courbes forment une involution cubique, située sur une courbe unicursale, intersection du plan et de la surface F6 . Une pareille involution possède quatre points doubles, et il y a par conséquent q = 4 courbes qui touchent un plan donné. Mais alors il y en a un nombre égal qui font passer une tangente par un point donné; donc, q =4. Il reste à déterminer le degré (5 du complexe formé par les cordes des courbes F3. Pour cela, nous adjoindrons à chaque point p de l’une des courbes tout autre point q de la même courbe, et au système ainsi construit, — système du troisième ordre de couples de points p, q, à droite de jonction g , — nous appliquerons la formule de coïncidence * 2) egp^zp3 -h q3 -h g» . Les signes p3 et q3, qui impliquent la condition que les i ) l. c., p. 163. 2) Schubert, l. c.. p. 44, forrn. 3. SUR DES SYSTÈMES DE RAYONS, ETC. 99 points p et q soient donnés, ont ici la valeur zéro. Le signe tgï o indique la condition que p et q coïncident et que la droite g passe par un point donné. D’après ce qui précède, il y a quatre courbes dont une tangente passe par un point donné. Mais, en outre, les transversales f et f" forment deux dégênérations, pour lesquelles les intersections avec 1, 2, 3 et 4 doivent être considérées comme des ^sommets.” Les droites menées du point donné à ces huit sommets sont censées remplir la condition tgp. On a donc egp = 12. Enfin, gs est le signe de la condition qui exprime que la droite g fait partie d’un faisceau donné. Or, chaque faisceau contient p cordes g , sur lesquelles se trouvent deux points de la courbe ; chacun de ces deux points peut être le point p , de sorte que pour gs on aurait à écrire la valeur 2fi. Mais, celles des droites du faisceau qui coupent f et f" satisfont chacune trois fois à la condition gs : nous avons donc gs = 2 fi -f 6. Dès lors, la formule donne = 3, résultat qu’il est facile de vérifier dans le cas particulier où l’on fait passer le plan du faisceau par l’une des droites/ et f". Ajoutons qu’on a la même valeur pour le degré / du complexe que déterminent les axes (intersections mutuelles des plans osculateurs) des courbes R 3. En résumé, dans l’hypothèse de r = 0, on a, suivant la notation de M. Schubert, T4 v — T4 / = 6 , T* z T4 Q' = 4, T4 , si l’on indique par S une somme à laquelle chacune des molécules contenues dans l’unité de volume fournit un terme. Supposons l’axe des x normal au plan considéré et les deux autres axes situés dans ce plan et perpendicu- 112 H. A. LORENTZ. § 6. Revenons maintenant à la dissolution soumise à l’influ- ence de forces extérieures, et prenons pour la surface S (§ 4) la surface du cylindre C dont il a été question préalablement (§ 3). On voit immédiatement que le mouvement moléculaire près de la surface cylindrique n’apporte aucun changement à la quantité de mouvement en direction verticale. Quant à l’in- laires entre eux. Alors, si vx, vtjl v2 sont les composantes (le la vitesse v il vient K=Smv\ Mais, puisque la dissolution possède dans toutes les directions les mêmes propriétés. S m v1 = S m v* = S m v1 : x y z chacune de ces expressions est donc égale au tiers de leur somme, de sorte qu’on obtient K = £ Smv', ce qu’il fallait démontrer. Le théorème peut d’ailleurs être étendu à des mélanges de plusieurs matières. Toujours, la partie de la pression cinétique qui dépend d’un seul des corps constituants est égale aux deux tiers de l’énergie cinétique que possèdent, en vertu du mouvement de leurs centres de gravité, les molécules de ce corps qui sont contenues dans l’unité de volume. Ce théorème est depuis longtemps établi dans la théorie cinétique des gaz. Il est toutefois indépendant de l’hypothèse que les molécules se meu- vent en lignes droites, et peut être appliqué à tous les états d’aggrégation. Dans la démonstration donnée, les trajectoires peuvent être des courbes quelconques. Il est vrai qu’il n’y a pas été question de changements brus- ques de direction durant le temps dt\ mais la possibilité en peut être admise, sans que le résultat se trouve modifié. Pour vérifier ce qui précède, je citerai un exemple simple. Imaginons une masse gazeuse dans laquelle sont plongés un grand nombre de corps solides immobiles, dont les dimensions et les distances mutuelles sont très considérables par rapport aux dimensions moléculaires du gaz et qui n’agissent sur les particules gazeuses qu’au contact immédiat. Si l’unité de longueur est prise beaucoup plus grande que la distance mutuelle des corps solides, la pression cinétique du gaz, pour une portion de surface de la grandeur 1, peut être déterminée par le théorème trouvé; elle doit donc avoir le valeur Z7, si U est l’énergie cinétique du gaz dans l’unité de volume. On arrive un même résultat par le raisonnement suivant. Si << est la fraction de l’unité de volume }ui est occupée par les corps solides immobiles, l'espace réellement rempli de gaz contient une énergie cinétique qui, calculée pour l’unité de volume, s’élève à La pression cinétique pour une surface plane de la grandeur w, située tout SUR LA THÉORIE MOLECULAIRE, ETC. 113 fluence des molécules B qui franchissent les bases inférieure et supérieure, elle se laisse représenter, tout comme dans une solution homogène, au moyen de la pression cinétique : seu- lement, il faut ici donner à cette pression, pour les deux bases, des valeurs différentes, K et K. La différence K — K ' fait connaître de combien s’accroîtrait, dans l’unité de temps, la quantité de mouvement des molécules B comprises à l’intérieur du cylindre, la direction de bas en haut étant prise pour di- rection positive. Si maintenant/, est de nouveau la force extérieure agissant de haut en bas sur la substance dissoute contenue dans le cy- lindre, et Q la force exercée sur cette substance, dans la même direction, par les autres molécules du système, /' H- Q sera la quantité de mouvement produite par les forces dans l’unité de temps, et on aura pour condition d’équilibre : A — K — / , q- Q. (3) § 7. La force Q se compose des forces Y et Z , qui provien- nent respectivement des molécules B environnant le cylindre et du dissolvant, et dont chacune peut encore être décom- posée d’une manière connue. En ce qui concerne d’abord la force Y, il est à remarquer que les molécules B situées à l’intérieur du cylindre peuvent être attirées par les molécules de même espèce qui l’environnent, et qu’en outre quelques- uns des chocs entre deux molécules B auront lieu de façon que l’une ait son centre de gravité en dedans du cylindre, l’autre en dehors. Les répulsions qui sont en jeu dans de 2 u entière dans le gaz, a par conséquent la valeur • D’un autre O 1 jfl côté une surface de la grandeur 1 traverse un grand nombre des corps immergés ; si la somme des intersections est r, il n’y a plus qu’une portion 1 — v qui reste accessible aux molécules du gaz. Il en résulte, pour la pression cinétique sur l’unité de surface entière, la valeur 1 — T — U, ce qui revient à U ; en effet on démontre facilement que u — v. 114 H. A. LORENTZ. pareils chocs devraient entrer en ligne de compte dans le calcul de la force Y. La question se simplifie quand il s’agit de solutions très étendues. L’attraction entre les molécules du corps dissous qui se trouvent de part et d’autre d’un plan quelconque est proportionnelle au carré de la concentration; il en est de même du nombre des collisions mutuelles. Les deux parties de la force Y peuvent donc être négligées si la concentration est regardée comme infiniment petite; on peut même ajouter que la force Y devient une quantité du second ordre quelle que soit la nature des actions réciproques. Par conséquent la formule (3) devient: K - K = /, -h ce qui conduit à l’équation (2) quand on fait les hypothèses suivantes : a) Une molécule du corps dissous possède, en moyenne, une énergie cinétique égale à celle que possède à la même température une molécule d’un gaz. D’après cette hypothèse, la pression cinétique devient, quelle que soit la concentration, égale à la „ pression gazeuse” (§ 3), de sorte que K = G, K = G'. b) On a Z = — /2, c’est-à-dire, la partie considérée de la matière dissoute éprouve, de la part du dissolvant, une force égale et opposée à la force extérieure qui agirait sur la quantité déplacée du liquide.1) i) Suivant cette proposition, on doit avoir Z = 0 quand aucune force extérieure n’agit sur le dissolvant. C’est ce que confirmera une légère mo- dification de l’exemple donné à la fin de la Note du § 5. Supposons, en effet, que les corps solides immergés dans la masse gazeuse, considérés dans cet exemple, — corps qui représenteront le dissolvant, — soient mo- biles, mais que leur masse soit infiniment grande. Si aucune force exté- rieure n’agit sur ces corps, ils ne pourront, une fois au repos, jamais entrer en mouvement. Admettons que le gaz, au contraire, est soumis à l’action de la pesanteur. Considérons un cylindre de hauteur h et de base 1, dont les dimensions soient beaucoup plus grandes que les intervalles entre les corps solides. SUR LA THEORIE MOLÉCULAIRE, ETC. 115 Si ces hypothèses, dont la seconde rappelle la loi d’Archi- mède, pouvaient être déduites des principes de la mécanique, la loi des différences de concentration serait expliquée parla théorie moléculaire. Dans l’état actuel de la théorie on peut regarder les propositions a) et b) comme des conséquences de la seconde loi de la thermodynamique, ou, plus exactement, l’une de ces propositions découle de cette loi dès que l’autre est admise. Dans ce qui va suivre les deux propositions seront appliquées toutes les deux. II. La tension de vapeur des dissolutions diluées. • § 8. La règle qui détermine la tension de vapeur d’une dissolution étendue, et qu’on peut obtenir au moyen de la thermodynamique,, peut être mise sous la forme sui- vante : L’abaissement de la tension de vapeur, produit par l’in- troduction dans un liquide d’un corps qui s’y dissout — mais ne s’évapore pas lui-même, — est à la pression osmotique de la dissolution, — ou à la pression cinétique du corps dissous, — Dans l’espace réellement occupé par le gaz, la pression obéit aux lois ordinaires de l’hydrostatique. Pour deux éléments plans égaux o>, situés l’un à la base inférieure du cylindre, l’autre à la base supérieure, et qui se trouvent tous les deux entièrement en dehors des corps solides la différence des pressions cinétiques est donc égale au poids d’une masse gazeuse qui serait contenue dans un cylindre de hauteur h et de base w, en admettant que ce cylindre ne renferme pas d’autres corps. Il suit de là que la différence des pressions cinétiques à la base inférieure et à la base supérieure du grand cylindre, — bases de chacune desquelles il n’y a à considérer qu’une portion 1 — *>, — est égale au poids d’une masse gazeuse du volume h (1 — v ). Or, à cause de l’égalité v = («, c’est là pré- cisément le poids des molécules de gaz qui se trouvent réellement dans le grand cylindre. Celles-ci ne sont donc pas soutenues par les corps solides, c’est-à-dire qu’on a Z = 0. 116 H. A. LORENTZ. dans le même rapport que le volume spécifique du liquide au volume spécifique de la vapeur saturée. Dans cet énoncé il n’est aucunement question d’une attrac- tion moléculaire; au contraire, l’abaissement de la tension de vapeur est mis en relation avec le mouvement des molé- cules. Je vais démontrer que la règle s’accorde cependant avec la conception ordinaire, suivant laquelle le corps étranger retient les particules du liquide et tend ainsi à empêcher l’évaporation. Dans les raisonnements qui vont suivre je me servirai d’une t^pothèse, non conforme, il est vrai, à la réalité, mais contribuant à simplifier l’analyse des phénomènes, sans trop changer leur véritable caractère. Elle consiste à regarder la distance la plus grande, à laquelle deux molécules du dis- solvant agissent encore l’une sur l’autre, comme très petite par rapport à la distance jusqu’à laquelle reste sensible l’attraction de molécules d’espèces différentes. On a ainsi l’avantage de pouvoir regarder comme parfaitement tranchée la délimitation du liquide et de la vapeur. L’épaisseur de la couche qui en réalité forme la transition de l’un à l’autre, est, en effet, du même ordre de grandeur que le rayon de la sphère d’activité des particules du liquide ; la question de savoir si cette épaisseur est négligeable ou non, dépend seu- lement des longueurs qui jouent un rôle dans les problèmes dont on s’occupe. Or, dans le problème actuel, la distance à laquelle s’attirent des molécules d’espèces différentes est une telle longueur; si elle a une grandeur suffisante, nous pouvons regarder la limite du liquide et de la vapeur comme une surface ma- thématique. Un raisonnement bien connu peut être appliqué à l’attrac- tion qui existe entre le liquide et une molécule du corps dissous i?. J’admets, conformément à ce qui précède, que l’attrac- tion agit encore à une distance dépassant de beaucoup celle qui sépare les molécules liquides voisines; je suppose, en outre, SUR LA THÉORIE MOLECULAIRE, ETC. 117 que les particules les plus rapprochées n’ont pas une part trop prépondérante dans l’attraction totale. Si ces conditions sont remplies, l’attraction résultante éprouvée par une molécule B est indépendante de l’arrangement accidentel des molécules voisines A ; elle est uniquement déterminée par la distance de la molécule à la surface. Les différentes forces auxquelles est soumise une molécule B située à l’intérieur de la disso- lution se détruisent mutuellement; mais les molécules B qui se trouvent au voisinage de la surface sont soumises à une force résultante dirigée vers l’interieur du liquide. La concen- tration diminuera donc près de la surface, et nous admettrons que cette diminution est assez rapide pour que, à la surface même, la concentration ait une valeur insensible. On s’ex- plique alors que les molécules B ne prennent point part à l’évaporation; si elles se trouvaient encore à la surface, quelques-unes d’entre elles devraient, à raison de leurs grandes vitesses, s’élancer dans l’espace occupé par la vapeur. § 9. Parallèlement à la surface F, qui sera supposée plane et horizontale, menons un plan V' par les points les plus élevés où la concentration ait encore la même valeur qu’à l’intérieur du liquide. De la „ couche superficielle” JT„ . c f comprise entre les deux plans, consi- dérons une portion cylindrique a b c d, a b à base 1. Soit Z la force totale, — 7 jp (â d f positive lorsqu’elle est dirigée vers la solution, — avec laquelle le liquide agit sur les molécules B contenues dans le cylindre. Dans l’unité de temps cette force donnerait lieu à une quantité de mouvement Z , si d’autres causes ne s’y opposaient. A cause de sa faible densité la vapeur n’exerce aucune attraction sensible et dans le cas des dissolutions très étendues, on peut négliger toutes les actions réciproques entre les particules du corps dissous. Si donc K est la pression cinétique à la base c d, nous obtenons pour condition d’équilibre : Z — K (4) Archives Néerlandaises, T. XXV. 9 118 H. A. LORENTZ. La force Z provient en partie de l’attraction qui est exercée par le dissolvant et que, pour la quantité totale du corps B contenue dans le cylindre, je désigne par Z, . En outre, parmi les chocs survenant entre une molécule B et une molécule A, il y a à tenir compte de ceux dans lesquels le centre de gra- vité de la première particule se trouve à l’intérieur du cylindre; en réunissant les répulsions résultant de tous ces chocs, on obtient une force Z2 , qui, jointe à Z { , constitue la force entière Z. Mais, pour les dissolutions très étendues, je vais montrer que cette force Z2 est négligeable. § 10. Sans rien changer au mouvement des molécules, on peut supprimer dans la pensée l’attraction entre les deux matiè- res, à condition de faire agir sur chaque molécule une force exté- rieure, précisément égale à l’attraction résultante qu’elle éprouve, en réalité, de la part des molécules d’espèce différente. Supposons, de plus, que l’espace au-dessus de la surface V soit rempli d’une masse du dissolvant pur. La distribution et le mouvement de la substance B ne seront pas par cela altérés si le liquide additionnel est également considéré comme dé- pourvu d’attraction sur cette substance. Il est vrai que les forces impliquées dans les chocs sont restées, mais elles ne donnent lieu à aucune perturbation, vu que la concentration dans le plan V est infiniment petite et que, par suite, la nouvelle masse de liquide n’arriye pas en contact avec la substance dissoute. Cette substance se trouvant maintenant dans une masse illimitée du liquide, et étant empêchée par des forces extérieures de se répartir uniformément, la proposition b (§ 7) devient applicable. A la vérité, les matières dont il s’agit actuellement ne sont plus telles que la nature les présente, puisque nous les avons dépouillées de leur attraction mutuelle et ne leur avons laissé que les forces intervenant dans les chocs; mais il n’est guère douteux que la proposition rappelée subsiste pour des corps dépourvus d’attraction moléculaire. Pour le cylindre considéré dans la section précédente (§ 3), nous prendrons maintenant l’espace marqué a b c d dans la SUR LA THÉORIE MOLÉCULAIRE, ETC. 119 figure. Des forces que nous avons désignées précédemment par Z et /2, la première est alors la force Z2 et la seconde devient égale à l’attraction que la matière dissoute exerce sur une quantité de liquide égale à la quantité déplacée. Mais, si la concentration est infiniment petite, cette quantité l’est également, de sorte que Z2 devient une grandeur du second ordre et que, dans la formule (4), on peut entendre par Z l’attraction du liquide sur les molécules B contenues dans le cylindre. §11. Il est facile de voir comment la formule détermine la quantité de la substance dissoute qui reste dans la couche superficielle. L’attraction Z, en effet, sera d’autant plus grande que cette quantité est plus considérable, tandis que la pression cinétique K est déterminée par la valeur de la concentration à l’intérieur de la solution. Si la concentration avait cette même valeur en chaque point de la couche superficielle, l’attraction Z aurait une certaine valeur Z0, et lorsque cette grandeur-ci est surpassée par la pression cinétique, un état d’équilibre, tel que celui que j’ai supposé, ne saurait exister, puisque un abaissement de la concentration dans la couche superficielle ne peut augmenter Z. Si, au contraire, Z0 > ÜT, l’attraction Z peut être amenée à la valeur K par une diminution convenable de la concentration au voisinage de la surface. A vrai dire, pour déterminer la distribution et le nombre des molécules B dans la région superficielle, il faudrait décomposer celle-ci en couches infiniment minces et appliquer à chacune d’elles un raisonnement analogue à celui que nous avons fait pour la couche entière. Mais, pour notre but, cela n’est pas nécessaire. § 12. Ce qui se passe dans l’évaporation est trop compliqué pour une analyse exacte. Nous pouvons nous contenter, toutefois, de remarquer que les phénomènes dont il s’agit s’accomplissent dans une couche dont l’épaisseur, suivant notre hypothèse (§ 8), est très petite par rapport au rayon de la sphère d’activité pour l'attraction de molécules d’espèces 9* 120 H. A. LORENTZ. différentes, et que les molécules B n’ont pas d’influence sensible sur les mouvements qui s’exécutent dans cette couche. Pour démontrer ce dernier point, soient qp, et qp2 les attrac- tions qu’une molécule A, située à la surface, éprouve respecti- vement de la part des autres molécules A et de la part des molécules B, et cela, en ce qui concerne qp2, dans le cas où la concentration a la valeur 1 ; désignons, en outre, par y , et q2 les distances les plus grandes auxquelles les deux sortes d’attractions existent encore. Or, si l’on veut faire passer une molécule A de l’intérieur de la solution à l’extérieur, il faudra, pour vaincre les forces avec lesquelles elle est retenue par le liquide lui-même et par le corps dissous, des travaux de l’ordre de grandeur qp , , et q2 qp2. Il est naturel de supposer que ces travaux sont du même ordre. Il en résulte que qp2 doit être de l’ordre qp,. Par conséquent, si C est Q 2 la concentration, la force exercée par les molécules B sur une molécule liquide placée à la surface, sera de l’ordre — qp , . Vis-à- Q 2 vis de qp,, nous pouvons négliger cette force, non parce que nous regardons C comme infiniment petite, — car dans toute cette étude il s’agit de grandeurs de l’ordre C, — mais parce que, d’après les suppositions faites, la distance ç>, est incom- parablement plus petite que ç>2. § 13. Il ressort de là que le corps dissous n’a pas d’influence sur ce qui a lieu à la surface du liquide. Il faut donc que dans l’état d’équilibre la tension de vapeur, immédiatement à la surface, ait la valeur ttù qui est propre au dissolvant pur. Cependant les mesures de la tension de vapeur de la dissolution ne nous donnent pas cette pression à la surface; ce qu’on mesure, c’est la pression n qui existe un peu plus haut, et cette pression doit être moindre que nQ. L’attraction du corps dissous s’étend, en effet, jusqu’à une certaine distance dans la vapeur même, et par suite, au voisinage de la surface, la ■ SUR LA THEORIE MOLECULAIRE, ETC. 121 pression de la vapeur croîtra à mesure qu’on s’en rapproche, de même que, sous l’influence de la pesanteur, la pression atmosphérique est une fonction de la hauteur. Soit V" (voir la figure) un plan horizontal, situé d’autant au-dessus de la surface F que le plan VJ est situé au-dessous, et soit ab/'e une partie, opposée au cylindre abcd , de la couche de vapeur comprise entre F et F". Comme a c ne peut être plus petit que le rayon d’activité pour l’attraction réciproque des molécules A et B , les molécules B ne peuvent point agir sur la vapeur qui se trouve au-dessus de V". Dans le plan V" existe donc la pression n qu’on observe. Si alors z est la force avec laquelle la vapeur occupant le cylindre a b e f est attirée par le corps dissous, la condition d’équilibre de cette masse de vapeur devient: tt 0 — n == z, (5) § 14. Entre l’attraction z et la force Z qui entre dans l’équation (4), il y a une relation simple, à laquelle on ar- rive par les considérations suivantes. a. ) Si l’espace supérieur au plan F était rempli du dis- solvant pur, sans que rien fût changé à la distribution des matières au-dessous de ce plan, une molécule B, dans le cylindre abcd , n’éprouverait de la part de la masse entière du dissolvant qu’une attraction résultante infiniment petite. La molécule, en effet, serait entourée de tous les côtés par le liquide, et bien que la densité de celui-ci, à l’intérieur de la sphère d’activité, ne soit pas tout à fait constante, — vu qu’elle devient d’autant plus grande que le nombre des mo- lécules du corps étranger est moindre, — les différences sont du même ordre de grandeur que la concentration. b. ) La quantité de la matière dissoute, dans le cylindre abcd, étant en outre infiniment petite, la force résultante qui agirait sur toute cette quantité est une grandeur du second ordre et peut par conséquent être négligée. Il en résulte que le liquide ajouté au-dessus de F exerce sur les molécules B, 122 H. A. LORENTZ. contenues dans l’espace a b c d, une attraction égale à celle du liquide situé au-dessous de F, c’est-à-dire, une attraction Z. c. ) L’attraction exercée par une quantité de liquide occu- pant l’espace a b ef sur toutes les molécules du corps B situées au-dessous de F a la même valeur Z. d. ) Si l’on se représente d’abord, dans l’espace ab ef\ la masse liquide dont il vient d’être question, et qu’ensuite on change sa densité dans le rapport n: 1, l’attraction que le contenu du cylindre éprouve de la part des molécules B diminue dans le même rapport. En prenant donc pour n le rapport entre volumes spécifiques du dissolvant et de la vapeur, on a Z c’est-à-dire, en ayant égard aux équations (4) et (5), K TV q " 7T ^ ' ' • n Or, cette équation contient le théorème que nous avons énoncé au début de cette section. Il faut remarquer encore que, dans notre raisonnement la vapeur renfermée dans le cylindre a b ef a été supposée homogène, ce qui n’est pas rigoureusement vrai. Toutefois, il n’en résulte pas d’erreur, car lorsque la concentration est infiniment petite, la variation de la densité dans le cylindre l’est également, et elle con- duirait donc, si l’on en tenait compte dans le calcul de l’at- traction exercée par une masse infiniment petite, à des quan- • tités du second ordre. Si, du reste, dans notre théorème il est parlé du volume spécifique de la vapeur saturée, on peut entendre par là, à volonté, la vapeur qui est en contact avec le dissolvant pur, ou celle qui est en équilibre avec la solution. § 15. L’explication précédente peut être résumée de la façon suivante. Bien que la cause immédiate de l’abaissement de la tension de vapeur doive être cherchée dans l’attraction entre SUR LA THEORIE MOLECULAIRE, ETC. 123 les molécules A et B, le degré auquel cette attraction s’exerce est réglé par le mouvement moléculaire de la matière dissoute. En effet, ce mouvement, ou, à mieux dire, la pression ciné- tique qui en dépend, détermine la quantité de la matière dissoute qui reste dans la couche superficielle et qui peut par conséquent agir sur les molécules de la vapeur. Tandis que l’attraction tend à retirer de la couche le corps étranger, le mouvement moléculaire l’y fait pénétrer. S’il était possible, sans rien changer à l’attraction, d’accélérer le mouvement moléculaire, le nombre des molécules B croîtrait dans la couche superficielle ; une plus forte attraction sur la vapeur et un abais- sement plus prononcé de la tension de vapeur en seraient les conséquences. De fait, un cas de ce genre nous est offert par les sels dont les molécules sont dissociées; le dédouble- ment des molécules augmente, en effet, la pression cinétique, tandis qu’on peut admettre que les nouvelles molécules sont, dans leur ensemble, attirées par le dissolvant avec la même force que les molécules qui ont été décomposées. III. Le point de congélation des dissolutions diluées. § 16. Quand on cherche à expliquer l’influence d’une sub- stance dissoute sur le point de congélation on rencontre des difficultés sérieuses. Il semble difficile d’indiquer la cause pour laquelle le corps dissous échappe souvent à la solidifi- cation et c’est précisément dans un tel cas que le point de congélation obéit à une loi très simple. Une explication, semblable à celle qu’on trouve dans la section précédente, est cependant possible pour les dissolutions aqueuses . Je me permets de l’indiquer ici brièvement, sans vouloir prétendre qu’elle soit conforme à la réalité. Figurons-nous qu’au-dessus du plan V de la figure il y ait de la glace, au-dessous de ce même plan une solution aqueuse 124 H. A. LORENTZ. d’un corps B , et, reprenant l’hypothèse du N°. 8, regardons de nouveau comme parfaitement tranchée la limite entre les deux états d’aggrégation. Une molécule J5, dans la couche superficielle (F, F) est alors attirée non seulement par le liquide, mais aussi, en direction opposée, par la glace. Si la première at- traction a la valeur § 17. Entre la glace et la solution il existe deux sortes de forces. En premier lieu, toutes les actions qu’exercent entre elles la glace et la couche liquide superficielle, formée d’eau pure, se composent en une pression que, pour l’unité de surface, SUR LA THEORIE MOLECULAIRE, ETC. 125 nous représenterons par p0. En second lieu, il y a attraction entre la glace et les molécules B . Nous réunissons les deux forces en une seule P — Po — Z , et remarquons que ce qu’on appelle simplement la pression de la solution est précisément cette force p, puisque, par pres- sion d’un liquide, nous entendons la force totale qu’il exerce sur l’unité de surface d’un autre corps, par exemple, de notre morceau de glace. Si maintenant la pression p est donnée et qu’ on demande le point de congélation de la solution sous cette pression, c’est-à-dire la température T' à laquelle elle peut être en équilibre avec la glace, il suffit de considérer que la glace, à proprement parler, est en contact avec de l’eau pure sous la pression p H- Z. Le point de congélation cherché est donc le point de congélation de l’eau sous la pression p Z, et il est par conséquent plus bas que le point de congélation T de l’eau sous la pression p. J’applique maintenant à l’eau la relation connue dp r d T ~ ~T JvZ-iïT 9 — où par T il faut entendre la température absolue et par r la chaleur de fusion, exprimée en unités de travail, — et j’en déduis Z r T — — TJÿZTv) ' En substituant dans cette équation la valeur de Z tirée de (6), on obtient T— T’ = K T v et c’est là effectivement la formule qui représente les résultats des observations. 126 H. A. LORENTZ. IV. Différence des pressions aux deux côtés d’une paroi semi-perm.éable. § 18. La théorie mécanique de la chaleur nous apprend que la différence de pression qui existe lorsqu’une dissolution est séparée du dissolvant pur par une paroi semi-perméable est indépendante des propriétés particulières de la paroi. A quels mouvements et à quelles forces cette différence est due, et de quelle façon, à l’un des deux côtés, le liquide et le corps dissous participent à l’action totale, c’est ce qu’on ne saurait dire en général, l’imperméabilité de la paroi aux molécules d’une espèce déterminée pouvant avoir des causes très différentes. Les phénomènes devraient être analysés dans chaque cas spécial, et pour cela ils sont ordinairement trop compliqués. D’après les lois thermodynamiques on peut toutefois affirmer qu’une hypothèse, capable d’expliquer la semi-permé- abilité, rendra compte aussi de la différence de pression. Pour justifier cette assertion je traiterai deux exemples simples, dont le premier est purement fictif, tandis que le second se rattache aux considérations des sections précédentes. § 19. Supposons que la paroi soit un plan mathématique, criblé de trous, de telle façon qu’il laisse passer toutes les molécules du liquide qui se présentent, mais repousse toutes les molécules B ; admettons, en outre, que la paroi n’agit sur ces dernières qu’au moment du choc et non à quelque distance. Les molécules du liquide n’arrivant jamais en èontact avec la paroi, elles n’exerceront alors aucune pression sur celle-ci; par contre, des chocs des molécules B il résultera à l’un . des côtés une pression, qui est évidemment égale à la pression cinétique de la substance dissoute. La pression ciné- tique à considérer est d’ailleurs celle qui correspond à la concentration à l’intérieur de la dissolution. En effet, la paroi n’ayant pas d’épaisseur, les molécules B sont constamment entourées de tous les côtés par le liquide. Elles ne sont donc soumises à aucune force résultante et restent libres dans SUR LA THÉORIE MOLECULAIRE, ETC. 127 leurs mouvements jusque tout près de la paroi. En consé- quence, la concentration est aussi grande à la paroi même qu’au sein de la dissolution. § 20. Supposons, en second lieu, que ]a paroi soit un disque solide; limité, du côté où se trouve la dissolution, par le plan F de notre figure, de l’autre côté par le plan V" ou par un plan qui se trouve au dessus de V". Figurons nous que dans la paroi il y ait des canaux très fins, dont l’ensemble ne forme qu’une fraction négligeable du volume total. La sub- stance de la paroi sera supposée ne pas attirer le corps dissous et n’agir sur les particules du liquide qu’à des distances très petites par rapport à a c. En suite de cette hypothèse et de celle faite au No. 8, le liquide aura, jusqu’au voisinage immédiat de la paroi, sa densité ordinaire. Le corps dissous, au contraire, ne se trouvera pas, dans la couche (F, F'), au même degré qu’à l’intérieur. Une molécule de ce corps n’étant attirée que par le liquide qui se trouve au-dessous de V, — le liquide situé de l’autre côté de la paroi est trop éloigné, et on peut faire abstraction de celui qui occupe les pores, — les molécules seront distribuées dans la couche (F, F') pré- cisément comme elles l’étaient dans le cas considéré dans la section II. J’admets de nouveau que. près du plan F la concentration est sensiblement 0, et j’explique donc l’imper- méabilité de la paroi aux molécules B par la circonstance que celles-ci, retenues par le liquide, ne peuvent atteindre la paroi. Dans l’état d’équilibre, l’équation (4) sera de nouveau applicable, la quantité Z étant égale à l’attraction qui existerait entre le corps dissous et une masse de liquide remplissant le cylindre abef (§ 14). § 21. Les molécules B situées dans la couche (F, V') attirent le liquide qui occupe les pores et le feront passer du côté où se trouve la dissolution, jusqu’à ce que la pression, dans la couche du dissolvant contiguë à F, surpasse d’une quantité déterminée la pression existant à l’autre côté de la paroi. Lorsque les canaux de la paroi sont suffisamment larges 128 H. A. LORENTZ. ou peut appliquer les lois ordinaires de l’hydrostatique au liquide qu’ils contiennent; il est alors facile de calculer la différence de pression produite par des forces normales à la paroi. Qu’on se figure, en effet, la paroi percée d’un trou ayant la forme d’un cylindre droit, à base située dans le plan V et de grandeur 1. La force qui agirait sur une masse de liquide remplissant ce trou nous donne la différence cherchée. J’appliquerai cette même proposition au cas actuel, bien que les canaux soient peut-être si étroits qu’ils ne puissent con- tenir qu’un petit nombre de molécules. ') La pression osmo- tique se trouve alors être égale à l’attraction existant entre les molécules B et la masse liquide dont il vient d’être parlé. Si la paroi a précisément l’épaisseur a e, on peut prendre pour le trou en question le cylindre a b e f, et si la paroi est encore plus épaisse, cela ne change rien aux choses, puisque a e est la distance maximum à laquelle l’attraction s’étend. Dans les deux cas on trouve, par ce qui a été dit à la fin du dernier numéro, la valeur K pour la pression osmotique. Celle-ci est donc déterminée encore par le mouvement moléculaire, bien que nous ayons cherché la cause immédiate dans les forces attractives. Pendant la rédaction de ce travail, j’ai eu connaissance d’un Mémoire récemment paru de M. Boltzmann 1 2), dans lequel l’auteur cherche à prouver en général que d’après 1) Pour justifier cette application on peut se servir de la proposition, se rattachant à la seconde loi de la thermodynamique, qu’un système moléculaire, sous l’action de forces extérieures pour lesquelles il existe un potentiel, prend un état d’équilibre où chaque élément de volume, considéré en entier, est en repos. Supposons, en effet, qu’un liquide (le dissolvant pur), sur lequel agissent des forces extérieures telles que celles spécifiées au No. 1, soit traversé par un diaphragme horizontal, percé à droite d’un large canal et à gauche de pores aussi fins qu’on le voudra. L’équilibre n’est possible que si la différence de pression entre les deux côtés du dia- phragme a la même valeur à droite et à gauche. 2) Zeitschr. fur physik. Chem., VI, p. 474, 1890. SUR LA THÉORIE MOLECULAIRE, ETC. 129 la théorie moléculaire la pression osmotique doit être égale à la pression cinétique du corps dissous. Un des pas de cette démonstration me paraît toutefois motivé d’une manière insuffisante. M. Boltzmann établit d’abord une équation, — l’équation (7), p. 478, — qui dans ma notation peut être mise sous la forme Sf + Sa = K, et dans laquelle S/ et Sa représentent les forces que les mo- lécules salines exercent sur le liquide et sur le diaphragme. Il remarque ensuite que le liquide, dans son ensemble, n’est poussé ni d’un côté, ni de l’autre. De là il conclut que la force Df que le liquide éprouve de la part du diaphragme a la valeur. — Sy; on obtient donc Sf — Fd, si Fd~ — Df est la force que le liquide exerce sur le diaphragme, et par suite Fd -h Sd = K , ce qui exprime la proposition à démontrer. Mais, lorsqu’il est question de la totalité du liquide et de la totalité des molécules salines, on ne doit pas perdre de vue que la dissolution, à gauche, et le dissolvant pur, à droite, sont limités par les pistons qui ferment le cylindre. Dans l’équation Sf h- Sd — K, il faut entendre par Sf la force que le liquide éprouve de la part du sel qui se trouve entre le diaphragme et le „plan critique”; or, ce n’est pas là la force exercée sur le liquide par la totalité des molécules salines. Ce que M. Boltzmann dit d’une molécule de sel située tout à fait à l’intérieur du liquide est exact, mais les molécules qui se trouvent tout près du piston gauche attireront le liquide vers la gauche. En outre, lorsqu’on veut établir la condition d’équilibre pour la masse liquide entière, il faut considérer que ce n’est pas seulement le diaphragme et les molécules de sel qui agis- sent sur cette masse, mais que les deux pistons le font également. 130 H A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE, ETC. D’après une communication que M. Boltzmann a eu l’obli- geance de me faire, il est parvenu à compléter ses raisonne- ments et à trouver, en partant d’une certaine hypothèse sur la sphère d’activité et la distance mutuelle des molécules du sel, une démonstration 1 ) plus générale que la mienne et, à ce qu’il me semble, à l’abri de toute objection. i) Zeitschr. fur physik. Chem ., VII, p. 88, 1891. \ SUR LA NORME DE L’ACUITÉ OLFACTIVE (OLFACTIE), PAR H. Z W AARDEMAKEE Cz. Les caractères et facultés de l’homme ont-ils une valeur normale, autour de laquelle les écarts individuels oscillent régulièrement? C’est une vieille question, qui sans cesse prend une forme nouvelle, La réponse est très différente, suivant les conditions qu’on pose. Si par norme on entend le type idéal, dont chaque personne en particulier reproduirait une image imparfaite, alors, naturellement, il n’existe pas de norme, car les hommes varient avec la race, l’âge, l’état social, et il serait souverainement arbitraire de donner la préférence à l’une de ces nombreuses variétés et de la regarder comme type. Si, au contraire, on appelle norme le type à traits larges, mais peu accentués, auquel répond la grande majorité d’un peuple à un âge déterminé, et dont l’individu particulier ne peut s’écarter que suivant les lois des probabilités, dans ce cas, la notion est de tout point justifiée. Il y a alors, cela va sans dire, autant de normes qu’on établit de groupes natu- rels. Dans ce groupement, à la vérité, le danger de former des combinaisons artificielles ne saurait être entièrement évité. Mais on peut se laisser guider pas des règles, ainsi que l’a indiqué, il y a quelques années, l’anatomiste Stieda. *) De cette manière, le risque en question est réduit autant que possible. De la „ norme”, telle que nous venons de la définir, il est 1 ) Stieda, Archiv. fur Anthropologie , T. 14, p. 167. 132 H. ZWAARDEMAKER CZ. journellement tenu compte dans la vie ordinaire Les médecins, eux aussi, font largement usage de la notion. Lors de la percussion, nous songeons toujours au volume normal des or- ganes, lors de la détermination du poids spécifique d’une urine, aux limites entre lesquelles, normalement, le chiffre oscille. En anatomie pathologique, nous ne procédons pas autrement, et, s’il était encore nécessaire d’insister, c’est d’après la „norme” que nous dosons nos médicaments. Ainsi, une «norme” se laisse fixer pour toutes les propriétés humaines. Les règles à suivre en cette matière ont été exposées ration- nellement, pour la première fois, par Quételet, ') et, assez ré- cemment encore, M. Thoma 1 2) a de nouveau développé, au point de vue des besoins médicaux, la doctrine du savant belge, en l’appuyant d’une riche série d’exemples. Pour M. Thoma, à la notion de «norme” correspond un chiffre concret, qui indique la grandeur ou intensité la plus ordinaire. Ce chiffre tient le milieu entre ceux des variétés individu- elles. Le plus souvent, il partage en deux parties égales l’espace entier dans lequel elles se meuvent. Moi-même j’at- tache à la notion de „ norme” une autre idée, qui me paraît mieux d’accord avec l’usage ordinaire de la langue. J’ai dé- veloppé cette manière de voir dans un Mémoire antérieur, purement anthropométrique, auquel je me contente de ren- voyer. 3) Ici, je m’en tiendrai entièrement à la terminologie, généralement reçue, de M. Thoma. La «norme” est la valeur qu’il y a le plus de probabilité de rencontrer dans l’une ou l’autre occasion future, tandis que la „moyenne” est la moyenne arithmétique de toutes les valeurs déjà obtenues dans les cas antérieurs. Pratiquement, la norme et la moyenne pourraient être dites identiques, parce que, d’après le calcul des proba- 1 ) Quéletet, Anthropométrie , Bruxelles 1870. 2) R. Thoma, Unters. ür d. Grosse und das Gewicht der anat. Bestand- theile des menschlichen Kôrpers im gesunden und im kranken Zustande , Leipzig, 1882. 3) Militair Geneeskundig Archief , 1885, 2e. cahier. SUR LA NORME UE L’ACUITE OLFACTIVE (OLFACTIE), 133 bilités, la valeur la plus probable de la norme est précisément la moyenne arithmétique en question. Il s’agit seulement de savoir si les lois du calcul des probabilités, que M. Thoma Appelle à son aide, sont pleinement applicables en cette matière. Elles ont été établies pour des cas dans lesquels on pouvait croire réalisées les conditions suivantes : 1°. probabilité égale pour des écarts également grands de la norme, d’un côté ou de l’autre; 2°. probabilité plus forte pour un petit écart que pour un grand ; 3°. existence d’une limite supérieure, que la valeur de l’écart ne peut dépasser. C’est seulement dans le cas où il est satisfait à ces hypo- thèses, que les raisonnements de M. Thoma gardent toute leur validité. Or, en ce qui concerne les propriétés humaines, il me semble que très souvent la première des trois conditions n’est pas remplie, et qu’on ne saurait donc, sans autre examen, regarder la moyenne comme la valeur la plus probable de la norme. Tant que la question reste en litige, j’estime qu’il convient de distinguer entre 1° la norme, c’est-à-dire, la valeur qui se présente le plus fréquemment ; 2° la moyenne 1 ) de toutes les valeurs déjà trouvées. Nous nous proposons, dans les pages suivantes, de calculer la !) Qu’il me soit permis d’éclaircir par un exemple ce qui vient d’être dit. Supposons qu’on veuille déterminer la norme et la moyenne du poids d’un enfant au second jour de la vie. Admettons que, dans notre pays, le poids normal d’un fruit venu à terme soit de 3,1 kilogrammes (Quételet) et que les différences individuelles, en plus et en moins, répondent exac- tement au calcul des probabilités. Imaginons, en outre, que les fruits dont le poids dépasse une certaine valeur, exprimée en chiffres, meurent au moment de la naissance. Dans ces conditions, fictives, il est vrai, mais nulle- ment inconcevables, il n’est plus question d’identité entre la norme et la moyenne au second jour après la naissance. Les enfants très grands sont tous décédés, et la moyenne, cœteris paribus , s’est donc notablement Archives Néerlandaises, T. XXV. 10 134 H. ZWAARDEMAKER CZ. norme de l’acuité olfactive. Il n’est pas douteux, en effet, qu’une norme doive se laisser découvrir pour nos facultés sen- sitives, comme pour toutes les autres propriétés humaines qui ont été successivement attirées dans le cercle de l’anthro- pométrie. Pour l’acuité visuelle, d’ailleurs, cela a déjà eu lieu depuis longtemps. M. Snellen a établi, il y a plusieurs an- nées, que la lecture de caractères imprimés, à distance sous un angle visuel de 5 minutes, est le maximum de ce qu’une vue normale peut accomplir. C’est ce qu*il a nommé : visus =r 1 . D’après ce module, M. Vroesom de Haan *) a trouvé pour l’acuité visuelle, à l’âge de 10 ans, la valeur 1,1, à l’âge de 40 ans la valeur 1,0, et à celui de 80 ans la valeur 0,5. Par suite de circonstances particulières, je suis amené, en me fondant sur de très nombreux matériaux statistiques rassem- blés par mes collègues, de montrer, une fois de plus, que la grande majorité de notre population mâle possède, dans le jeune âge, l’acuité visuelle indiquée par M. Snellen. Je crois qu’il ne sera pas inopportun d’insérer ici ces résultats ré- cemment obtenus. Pendant l’été de 1887, l’acuité visuelle a été déterminée, suivant 1a, méthode de M. Snellen, chez 3826 récrues. Parmi ces jeunes hommes, dont l’âge variait de 19 à 23 ans et qui tous, au jugement vulgaire, possédaient de bons yeux, on en comptait, ayant des deux côtés visus = 5/s 75% „ à un œil visus z=z 5/5 13 „ „ aux deux yeux visus diminué 12 „ Le nombre total des yeux examinés était de 7652. Ils se répartissaient de la manière suivante: abaissée. La norme, au contraire, continue à occuper parmi les variétés individuelles la place qu’elle possédait déjà antérieurement. Elle sera, par exemple, de 3 kilogrammes et surpassera de beaucoup la moyenne, i) Cité d’après Helmholtz, Physiol. Optik , 2e éd., 1887, p. 264. SUR LA NORME DE r/ACUITE OLFACTIVE (üLFACTIe). Ï35 yeux à visus = 5/5 n m » '/io et moins . . . 0,2 „ 1 ) De nouveau, il a donc été vérifié que la norme du pouvoir visuel est vz= 1. Parmi les organes visuels qui nous entourent, il n’y en a qu’un nombre relativement petit qui soient in- capables de distinguer à distance, sous un angle de 5 minutes, les caractères imprimés, et ces exceptions s’écartent de la norme d’un façon assez régulière. Au-dessus de la norme s’élèvent pareillement nombre de cas, ceux de personnes privilégiées, à vue plus perçante que la vue ordinaire. Quant à leur fré- quence, je ne possède pas de données. Sur les cartes sanitaires, ces cas sont compris parmi ceux à vue normale. Dans les derniers temps, des mensurations analogues ont aussi été exécutées pour l’ouïe, et cela avec la mesure auditive rationnelle, employée dans l’otiatrie moderne. Ce que l’imprimé est pour l’œil, la parole l’est pour l’oreille. Dans notre vie sociale, recueillir et comprendre le mot parlé est devenu peu à peu la fonction la plus importante de l’ouïe. C’est d’après cela, évidemment, qu’on évalue le pouvoir de l’organe sensitif. Il nous est passablement indifférent de savoir où se trouve, pour un sourd, le minimum perceptible (la Reizschwelle des Allemands) des sons simples, tandis que nous attachons au contraire du prix à pouvoir juger jusqu’à quel point il est en état de débrouiller et d’entendre les sons complexes du langage 2). 1) Statistique des cartes sanitaires, dressée par moi, sur l’ordre du Général-Major Inspecteur du service de santé de l’armée. 2) Ce n’est que dans les cas où il s’agit d’apprécier avec beaucoup d’exactitude la progression ou la guérison d’une surdité, qu’on a besoin de recourir encore à d’autres moyens. Pour plus de détails, voir, dans le 10* 136 H. ZWAARDEMAKER CZ. Or la voix chuchotante est le reflet de la voix parlée, dont elle contient tous les bruits et sons caractéristiques, mais avec une intensité beaucoup plus uniforme. C’est donc de la voix chuchotante qu’on se sert de préférence comme critérium de l’acuité auditive. La mesure directe de celle-ci est donnée par la distance à laquelle des mots sans liaison, prononcés en chuchotant, sont encore compris. M. Von Bezold a examiné par cette méthode 1918 écoliers de Munich. Des 3836 organes auditifs, 79 pour cent en- tendaient à plus de 8 mètres d’éloignement la voix chuchotée. C’est donc au-delà de cette distance que la norme doit se trouver. 1 ) La vue et l’ouïe sont les sens dont il doit être fait un usage continuel dans la vie sociale, non seulement pour saisir une impression sensitive simple, mais aussi, et surtout, pour la perception d’impressions très complexes. Celles-ci doivent, en premier heu, être décomposées par l’organe du sens. Suivant les énergies spécifiques qui sont mises en jeu, suivant les signes locaux dont l’impression était pourvue, la sensation initiale sera différente. Mais, avec son appréciation comme telle, la perception n’est pas accomplie. Un grand nombre de semblables sensations particulières, qui se succèdent lorsqu’on écoute, qui se présentent juxtaposées quand on regarde, doivent, par la pensée, être associées, comparées et liées à des notions. Par là, seulement, entendre devient comprendre, voir devient lire. Ce qu’on désigne sous le nom d’acuité visuelle ou d’acuité auditive est donc une faculté très complexe, à laquelle on ne saurait assimiler le fonctionnement relativement simple des autres sens. En admettant même que, pour ces derniers aussi, plusieurs énergies spécifiques coopèrent à une sensation unique, — chose assez probable, — il n’en reste pas moins que chacune de ces sensations a une existence indépendante et que très Militait' Geneeskundig Archief , 1889, cah. 3, mes ,,Klinische demonstraties” faites, en ma qualité de professeur de pathologie militaire, à l’hôpital d’Utrecht. ») Von Bezold, Zeitschr. f. Ohrenheilkunde , T. 14 et 15, anal, dans Archiv. f. Ohrenheilkunde , T. 23, p. 51; 1885. SUR LA NORME DE L’ACUITÉ OLFACTIVE (OLFACTIE). 137 rarement plusieurs d’entre elles s’enchaînent en séries. Lorsque cela arrive, tout se borne à de simples actions de contraste ou à l’association de deux ou trois impressions. Ce qui pour le sens de l’odorat s’appelle „acuité” de la fa- culté sensitive, c’est le degré de netteté avec lequel se font valoir des excitations très faibles et de petites différences d’in- tensité. L’aptitude à distinguer entre elles les différentes sortes d’excitants prend ici le nom de „finesse” du sens. !) Pouvons- nous, pour l’acuité olfactive ainsi définie, fixer une norme? Très souvent on entend manifester des doutes à cet égard. C’est une croyance assez générale, que l’air renfermé de nos appartements, et surtout la fumée de tabac, doivent exercer une action délétère sur l’organe de l’odorat. On oublie, toutefois, que des influences nocives analogues affectent aussi les autres sens. La mauvaise lumière artificielle et la poussière des villes et des grands chemins ne sont pas moins nuisibles à la rétine et à la conjonctive, que la chaleur et la fumée ne le sont à la muqueuse nasale. En outre, l’or- gane de l’odorat n’ést pas aussi dénué de protection qu’on l’admet habituellement. Le sens proprement dit a son siège dans la partie supérieure des fosses nasales, laquelle est sous- traite à l’action du courant respiratoire ordinaire. L’air qui pénètre dans les méats entre chaque fois en quantité si petite^ et si lentement, qu’il ne peut être question de refroidissement. De plus, il est largement pourvu de vapeur d’eau par la muqueuse des voies respiratoires nasales, et complètement dé- barrassé des grains de poussière un peu gros. On retrouve ces particules grossières dans le mucus qui s’élimine par les narines. Ce qui vient finalement en contact avec la mu- queuse olfactive est donc de l’air exempt de poussière et à un degré constant de température et d’humidité ; cela est encore le cas même quand l’air aspiré par le nez i) Von Vintschgau, Geruchsinn , dans Hermann, Handbuch der Phy- siologie, T. III 2, p. 270. 138 H. ZWAAKDEMAKER CZ. était primitivement froid, sec et chargé de poussières. Ces conditions ne sauraient donc faire grand tort à notre sens de l’odorat. Si l’on s’en exagère ordinairement l’importance, cela tient à ce qu’on est vivement pénétré du préjudice que le froid, la poussière et les micro-organismes causent aux voies respiratoires proprement dites; préjudice qui se rélève presque journellement dans ses conséquences : gonflements des cornets nasaux, hypertrophie de la luette et des amygdales, catarrhe du larynx et des bronches. Sans doute, ces troubles patholo- giques affectent quelquefois par continuité la région olfactive et produisent des anosmies essentielles ; mais il reste à savoir si, parmi la masse des hommes, ce cas se présente assez fré- quemment pour mettre quelque poids dans la balance statistique. Dans les idées courantes, la protection du sens par un appareil conducteur ne donnant accès qu’à l’agent spécifique est trop perdue de vue, tandis que trop d’attention est accordée aux nombreuses perturbations de la respiration nasale; il en résulte que les expressions „ mauvais nez” et „ mauvais odorat” sont regardées, comme synonymes. Cela peut s’excuser dans le langage ordinaire; dans les considérations scientifiques, c’est par trop incorrect. Maint malade affecté de rhinopharyn- gite chronique, avec végétations adénoïdes fortement déve- loppées, se trouve posséder un pouvoir olfactif passable, après que le nez a été débarrassé des masses de mucus sura- bondant. Nous sommes donc fondés à croire que l’immense majorité des hommes est encore douée d’un odorat normal, si inférieur qu’il puisse être à celui de beaucoup d’animaux et de quelques tribus sauvages ; celles-ci, selon toute probabilité, n’acquièrent leur grande acuité sensitive, qui reste bornée aux impressions d’une espèce déterminée, qu’ à la suite d’un long excercice. Il y a deux ans,1) j’ai fait à l’Hôpital militaire, dans ma clinique, une longue série de déterminations de l’acuité olfactive, i) Anosmie , dans Tijdschrift voor Geneeskunde , 1889, T. I., p. 18. Anosmie essentielle, à la suite de rhinite chronique. SUR LA NORME DE L’ ACUITE OLFACTIVE (OLFACTIE) . 139 tant sur des hommes normaux que sur des anosmiques, tous âgés de 18 à 23 ans. Les cas ne furent pas choisis, mais chaque malade qui quittait la section interne était examiné, une couple de jours auparavant, en tant qu’il s’agissait d’un odorat normal ou à peu près normal, au moyen d’un olfactomètre de caoutchouc 1 ), qui me procurait à moi-même un minimum d’impression lorsque le cylindre olfactomé- trique était avancé de 1 centimètre. Une partie moindre du cylindre ne me donnait aucune sensation d’odeur, une plus grande donnait une impression plus forte. La sti- mulation la plus faible que je pusse encore percevoir se pro- duisait tout juste avec une longueur de cylindre de 1 cm. Tel était du moins le cas à la température modérée des ma- tinées de l’été de 1888, pendant lesquelles ces déterminations eurent lieu. Outre l’acuité olfactive, on examina chez tous les sujets, au moyen des taches de buée formées par l’haleine, 2 ) la perméabilité du nez à l’air respiratoire, et tous aussi furent soumis à un examen rhinoscopique complet. Des organes ol- factifs examinés, 34 présentaient une image rhinoscopique entièrement normale et des taches respiratoires parfaites. Je me crois donc autorisé à regarder les organes en question comme exempts de troubles pathologiques. Us l’étaient cer- tainement en ce qui concerne l’appareil conducteur, et pro- bablement aussi quant au sens proprement dit.3) Les résultats de mes mesures sont réunis dans le tableau suivant. La première colonne contient le numéro des sujets, dans l’ordre où ils furent examinés. Dans la troisième colonne sont consignées les longueurs de cylindre donnant le minimum perceptible; quand les deux organes étaient normaux, le chiffre supérieur i ) Over het melen van den reukzin bij het clinisch onderzoek , dans Tijdschrift voor Geneeskunde , 1888, T. II, pag. 109, et Berliner klinische Wochenschrift , 1888, n°. 47. 2) Ademaanslag als diagnosticum der nasale stenose, dans Tijdschrift voor Geneeskunde , 1889, T. I, p. 297. 3) Comparez ; Anosmie , dans Tijdschrift voor Geneeskunde , 1889, T. I, p. 1. 140 H. ZWAARDEMAKER CZ. correspond à l’organe droit. Lorsqu’un seul organe olfactif était normal, la dernière colonne fait connaître le degré de l’anosmie existant de l’autre côté. Les 4e, 5e et 6e colonnes servent au calcul de l’erreur pro- bable suivant la méthode des moindres carrés, et peuvent donc être négligées par le lecteur; je ne les ai insérées que pour ne rien omettre et faciliter le contrôle du calcul. Minimum perceptible à l’olfactomètre de caoutchouc. N°. Indication du nom. Longueur de cylindre en cm. — X. -t-x. X 2. Observations. 1 Ar. 0,5 0,5 0,25 Autre côté: g. amm. — 2 Rt. 2,0 1,0 1- g. percha 1 2,0 1,0 1- 3 An. 2,0 1,0 1,- 2,5 1,5 2,25 4 Rr. 0,1 0,9 0,81 0,1 0,9 0,81 5 Rk. 0,5 0,5 0,25 0,5 0,5 0,25 6 V.D. 1,5 0,5 0,25 1,2 0,2 0,04 7 Ba. 1,0 Autre côté: caoutch. 3 8 As. 1,0 Autre côté:caoutch.l0 9 K. 0,5 0,5 0,25 1,0 10 V. 0,5 0,5 0,25 Autre côté: g. amm. — 11 T. M. 3,0 2,0 4- g. percha 0,5 3,0 2,0 4, — 12 V. B. 0,7 0,3 0,09 0,7 0,3 0,09 à reporter 24,3 i 4,9 9,2 16,59 SUR LA NORME DE L’ACUITE OLFACTIVE (OLFACTIE). 141 N°. Indication du nom. Longueur de cylindre en cm. — X. -\-x. xî. Observations . report. 24,5 4,9 9,2 16,59 13 Bs. 0,7 0,3 0,09 0,7 0,3 0,09 14 H. 1,0 1,0 15 S. 0,5 0,5 0,25 Autre côté : caoutch. 6 16 V. D. V. 0,7 0,3 0,09 0,7 0,3 0,09 17 V. D. V. 0,3 0,7 0,49 0,5 0,5 0,25 18 V. D. Vn. 0,7 0,3 0,09 0,7 0,3 0,09 19 D. G. 0,7 0,3 0,09 Autre côté: cautch.2,5 20 Be. 0,7 0,3 0,09 Autre côté: caoutch. 7 21 V. D.K. 0,5 0,5 0,25 Autre côté: caout. 1,5 Somme 33,7 9,5 9,2 18,55 Nous trouvons donc pour la moyenne de 34 observations, dont les résultats sont compris entre les extrêmes 0cm,l et 3cm, une valeur = lcm,9. L’erreur probable de cette moyenne s’élève à: v = 0,6745 =0,5, c’est-à-dire, que la moitié des organes olfactifs intacts ont une acuité sensitive correspondant à un minimum perceptible qui oscille entre 0cm,5 et lcm,5 du cylindre olfactométrique, Les résultats de nos 34 mensurations se laissent toutefois utiliser encore d’une autre manière. On peut les grouper d’après leur fréquence, ainsi qu’il suit: 142 H. ZWAARDEMAKER CZ. Mininimum perceptible trouvé à 0,1 du cylindre olfactométrique : 2 fois „ „ 0,5 „ 0,7 „ 1,0 ■ 1,2 „ 2,5 „ „ 3,0 „ Le minimum perceptible rencontré le plus fréquemment est donc = 0,7. D’après la définition de M. Thoma, c’est donc cette valeur qui -doit être prise pour norme. Le défaut de concordance entre la norme et la moyenne saute immédiatement aux yeux. On sera peut-être tenté de chercher l’explication de ce phénomène dans la fréquence relativement assez grande des cas où le minimum perceptible ne fut atteint qu’à 2 — 3 cm du cylindre olfactométrique. Parmi les 34 organes du sens, il n’y en eut pas moins de 6 qui offrirent une „Reizschwelle” relativement aussi élevée. Si ces cas sont déclarés anomaux, et qu’on n’en tienne pas compte dans le calcul de la moyenne, celle-ci s’abaisse notablement. Elle devient alors 0cm,7, tout comme la norme, et un accord par- fait est obtenu entre les deux valeurs. Inutile de rappeler, toutefois, que de pareilles pratiques sont absolument interdites. Le groupement, qui sert de base à une statistique, doit être déterminé par des raisons prises en dehors de cette statistique ; et après coup, quand les chiffres ont été obtenus, il n’est plus permis de faire des modifications à ce groupement. Dans l’occurrence présente, une fois admis les cas à „ minimum per- ceptible élevé”, nous ne pouvons plus, si tentant que cela soit, les considérer comme pathologiques ; d’autant moins que, sui- vant les remarques déjà faites plus haut; SUR LA NORME DE L’ACUITÉ OLFACTIVE (OLFACTIE). 143 1° l’aspect rhinoscopique était normal; 2° les taches produites par l’haleine étaient symétriques et de grandeur ordinaire; 3° l’anamnèse ne mentionnait aucune rhinopathie, ni n’in- diquait une affection nerveuse à laquelle aurait pu être attribuée une anosmie intracrânienne ou essentielle. Pour l’olfactomètre à caoutchouc, qui avait servi à cet examen, la norme était donc de 0cm,7 du cylindre olfactomé- trique. Ma propre acuité olfactive reste par conséquent un peu au-dessous de la norme, sans être toutefois anormale, puisque, comme on l’a vu plus haut, la moitié des organes olfactifs intacts tombent entre les valeurs 0cm,5 et lcm,5. Le stimulus olfactif qui correspond au minimum perceptible normal peut être pris pour unité servant à exprimer toutes les autres excitations olfactives de la même espèce. Il est même la mesure physiologique naturelle de ces impressions, à côté de laquelle une mesure physique pourrait seule être jugée ra- tionnelle. Malheureusement, cette dernière nous manque jus- qu’ici pour l’odorat, de sorte que nous devons bien nous con- tenter de l’unité physiologique, avec tout le cortège des défauts qui, de sa nature, lui sont inhérents. A cette unité physiolo- gique, déjà employée itérativement par M. Wundt pour différents sens, j’ai proposé de donner le nom à' olfactie. Par rapport au cylindre olfactométrique dont il est question dans ce Mémoire on a donc : minimum perceptible normal = olfactie = 0cm,7. Il va sans dire que, pour d’autres olfactomètres, la valeur numérique de l’olfactie sera différente. Sa valeur réelle, toutefois, reste constante; ce qui change, c’est seulement l’appareil ser- vant à la mesurer. Le clinicien qui veut déterminer au moyen de l’olfacto- mètre l’acuité de l’odorat chez ses malades névropathes, le spécialiste qui cherche à découvrir les causes locales d’une anosmie, ont l’un et l’autre intérêt à connaître la norme de leurs cylindres olfactométriques. Ce n’est qu’en comparant les 144 H. ZWAARDEMAKER CZ. résultats individuels avec cette valeur normale qu’on peut apprécier le degré exact de la déviation. Ainsi que je l’ai montré dans une occasion antérieure 1 ), ce degré s’exprime le mieux par une fraction. Soient o et o' les acuités olfactives à comparer, l et V les longueurs de cylindre trouvées respective- ment pour ces deux cas; on a alors, vu qu’entre ces données il existe une proportion inverse: l_ o V * Si o est l’acuité olfactive normale et l la longueur corres- pondante du cylindre olfactométrique, on obtient, en posant o = l: Au moyen de la notion d 'olfactie, ci-dessus introduite, les choses deviennent encore beaucoup plus simples. On a, en effet: minimum perceptible normal = olfactie = l ~ 1. Il en résulte que, si la fraction dont il s’agit a été réduite de manière que son numérateur soit =r 1, le dénominateur indique immédiatement de combien d’olfacties le minimum perceptible se compose dans un cas pathologique donné. Une personne d’acuité olfactive (olfactus) = 1, a son minimum perceptible à 1 olfactie ; une personne d’acuité olfactive (olfactus) — | a ce minimum à 2 olfacties ; une personne d’acuité (olfactus) = j l’a à 3 olfacties, etc. Il n’y a aucun inconvénient, et même il y avantage, à dis- poser l’echelle de l’olfactomètre en conformité de ce qui vient d’être dit. Au lieu de centimètres, on peut y marquer les olfacties. L’acuité de l’odorat se lit alors directement : le chiffre de l’échelle est aussi le chiffre de l’acuité olfactive, en ce sens qu’un minimum perceptibfe = n indique une acuité olfac- .. 1 tive = — n J) Over het meten van den reukzin bij het hlinisch onderzoeh , dans: Tijdschrift voor Geneeskunde , 1888, T. II, p.U4. SUR LA NORME DE l’ACUTTE OLFACTIVE (OLFACTIE). 145 Un pareil olfactomètre doit toutefois être composé d’une matière ayant un pouvoir odorant constant. La constance absolue, sous ce rapport, n’existe chez aucune substance; la quantité des particules odorantes cédées, dans un temps donné, à l’air qui passe sur la substance, varie plus ou moins avec la température 1 ). Pour certaines matières odorantes solides les différences sont très sensibles, même entre les limites de la température ordinaire de nos appartements. Abstraction faite de cette influence, une diminution lente du pouvoir odo- rant aura lieu à la longue. Il est vrai que dans les cylindres olfactom étriqués, grâce à la disposition fortuitement adoptée, les matières restent conservées à l’abri du contact de l’air ; mais néanmoins, à l'orifice antérieur de l’appareil et pendant l’emploi, elles sont exposées à une légère évaporation et des- siccation. Le pouvoir odorant doit donc nécessairement s’affai- blir peu à peu. Il en résulte que l’échelle des olfacties se déplace plus ou moins, de la même manière que l’échelle d’un thermomètre se déplace par suite des changements mo- léculaires du verre dont l’instrument est construit. Pour l’usage clinique, on devra, bien entendu, se servir exclusivement d’ olfactom êtres faits de matières qui ne soient sujettes à ces variations que dans une faible mesure. Telles sont le caout- chouc vulcanisé et le mélange de gomme ammoniaque et de gutta-percha que j’ai indiqué antérieurement pour cet emploi. Aux olfactomètres construits avec ces matières on pourra adapter, en toute confiance, une échelle d’olfacties. Seulement, au bout de quelques mois, il faudra contrôler l’instrument, comme on est obligé de le faire aussi pour les thermomètres, les galva- nomètres, etc. Dans les olfactomètres en ma possession, les variations révélées par ce contrôle étaient des plus insignifi- antes. Sur l’appareil en caoutchouc, l’échelle devra être divisée i) Feestbundel Donders- Jubileum, p.183. Il est probable que les diffé- rences de l’état hygroscopique de l’air déterminent des variations analogues (. Procesverbaal der Sectie-vcrgadering van het Provinciaal Utrechtsch Ge- nootschaj), 25 Juni 1889, p.14.). 146 H. ZWAARDEMAKER CZ. en olfacties, sur celui en gomme ammoniaque — gutta-percha, en centaines d’olfacties, parce que de cette manière la lecture devient le plus facile, les traits de la division s’espaçant alors d’environ 1 centimètre (un peu plus ou un peu moins, sui- vant l’espèce de caoutchouc ou le mode de préparation du mélange gomme ammoniaque — gutta-percha). Si, pour l’examen clinique, la disposition dont nous venons de parler peut être dite pleinement satisfaisante, on doit exiger davantage quand il s’agit de recherches rigoureusement scien- tifiques sur la physiologie de l’odorat. L’olfactomètre clinique est à peu près constant; complètement invariable pendant des mois et des années, il ne l’est pas. Mais on peut, sous ce rapport, donner à l’appareil toute l’exactitude désirable en le modifiant de la manière suivante. Le cylindre olfactométrique ordinaire (consistant, comme on le sait, en une matière odorante solide, entourée extérieure- ment d’une enveloppe de verre) sera remplacé par un cylindre de terre cuite poreuse. Celui-ci doit naturellement avoir les mêmes dimensions que les cylindres ordinaires, afin de s’adapter exactement sur le tube olfactif et, ramené en arrière ? de le recouvrir en entier. La maison ’t Hooft et Labouchère, de Delft, a eu l’extrême obligeance de faire fabriquer pour moi des cylindres de ce genre, avec les matières premières de la belle porcelaine qui a valu à sa fabrique un renom universel *). Ils sont en pâte kaolinique poreuse, qui, par elle-même, ne donne presque aucune odeur. La faible senteur de terre cuite, qu’on perçoit encore à l’origine, se perd com- plètement lorsque les cylindres séjournent une couple de jours dans une eau courante. Aux deux extrémités, coupées à angle droit, ils ont reçu une couverte vitreuse. Quant aux faces interne et externe, elles sont restées dans leur état primitif, c’est-à-dire, blanches et poreuses, facilement pénétrables aux liquides. Ces cylindres remplissent maintenant, dans mes i) Pour le service ainsi rendu, j’adresse à la maison, ainsi qu’à son ingénieur, M. Grundel, mes sincères remercîments. SUR LA NORME DE L’ACUITE OLFACTIVE (OLFACTIE). 147 appareils destinés aux recherches physiologiques’ le rôle de cylindres olfactométriques. Avant l’expérience, je les plonge dans un flacon à l’émeri , rempli du liquide dont l’odeur doit ^tre employée dans l’expérience. Ce liquide peut être, par exemple, une solution d’acide valérianique. La teneur en élé- ment odorant a été préalablement déterminée avec soin par voie acidim étriqué. Dans le flacon bouché à l’émeri les cylindres poreux sont laissés pendant plusieurs heures, de sorte qu’on peut admettre que le liquide a entièrement rempli les pores de la porcelaine, du moins dans les couches les plus voisines des surfaces intérieure et extérieure. Après avoir été retirés du liquide odorant, les cylindres sont essuyés en dedans et en dehors, puis placés sur l’olfactomètre. La détermination de l’acuité olfactive n’offre alors aucune difficulté et l’on est par- faitement sûr — en se servant du même cylindre — d’obtenir toujours, avec une même concentration du liquide imprégnant, le même chiffre pour la longueur de cylindre qui correspond au minimum perceptible. De plus, ce minimum perceptible est exprimé en données purement physiques, qui se laissent mesurer avec précision. Ces données sont: 1°. la longeur dont le cylindre olfactométrique a été retiré, 2°. la concentration de la matière chimique employée comme source d’odeur. Il y a constance complète de tous les autres éléments, tels que: les dimensions du tube olfactif, la distance à laquelle la source d’odeur se trouve de l’organe sensitif, les dimensions du cylindre poreux imbibé de matière odorante, la porosité de ce cylindre, qui ne doit être mis en contact qu’avec des substances entièrement solubles. Ce qu’il y a de variable dans l’olfactomètre clinique est éliminé du nouvel appareil. On n’y trouve plus que des don- nées fixes, pouvant être rétablies indéfiniment. A l’unité physiologique de l’acuité olfactive, une base physique a été fournie. 1 48 H. zwaardemaker cz. sur la norme de l’acuite, etc. Le lecteur s’attendra peut-être à voir suivre cette commu- nication d’une série de nombres donnant la valeur de l’olfactie en mesure physique, pour différentes matières odorantes solu- bles et chimiquement définissables J’ai effectivement déjà travaillé, depuis environ un an, à rassembler de pareils chiffres. 1 ) Mais, autant l’olfactomètre, avec ses trois parties constituantes: cylindre, tube olfactif et planchette, paraît un instrument simple, autant il exige d’études pour son emploi fructueux. Exécuter des déterminations approchées, n’est guère dif- ficile ; mais les mesures exactes demandent toute une série d’opérations préparatoires. Le pouvoir odorant de cylindres imbibés du même liquide, mais inégalement poreux ; l’affai- blissement de l’odeur par suite de l’évaporation du liquide odorant dans les couches superficielles; l’adhésion que les particules odorantes dégagées contractent avec la paroi du tube olfactif en verre, dans différentes conditions de température, d’humidité, de propreté; tous ces points doivent être con- trôlés et imposent des corrections. Ce que je pourrais donner ici, ce serait simplement les chiffres bruts, auxquels les corrections n’ont pas encore été appliquées. Ces résultats bruts n’ayant pas grande valeur, je m’abstiens de les faire connaître et me borne à insister sur les conclusions suivantes: 1°. La norme est une acuité d’odorat correspondant à une olfactie; autour de cette valeur oscillent les acuités olfactives qui, en clinique, peuvent être considérées comme normales; 2°. l’olfactie peut être exprimée en données physiques; 3°. cette expression est devenue possible par l’emploi d’un cylindre olfactométrique poreux, imbibé d’une solution odo- rante chimiquement définissable. i) Voir, sur une application: Compensation von Geruche , dans Fort- schrxtte der Medicin , 1889, n°. 19. ANOSMIES D’ORIGINE NERVEUSE, PAR H. ZWAARDEMAKER Cz. S’il était donné à l’homme de se rendre compte du cercle d’idées d’un des animaux supérieurs que Broca désigne sous le nom de mammifères osmatiques, nous y rencontrerions in- dubitablement des représentations mentales d’un tout autre ordre que celui où se meut notre propre entendement. Les re- présentations auditives extrêmement complexes dans lesquelles nous ressentons toute la puissance du langage, elles manquent presque complètement chez ces êtres, et à leur place apparaît un monde merveilleux de représentations olfactives, plus riche et plus varié que nous ne pouvons l’imaginer. Elles régissent probablement l’âme animale, de la même manière que le font chez nous les impressions reçues par l’œil et par l’oreille. Et à cela il n’y a rien d’étonnant, car elles sont intimement liées aux deux choses en lesquelles tout se résume pour l’animal : la nourriture et la sexualité. Qu’à l’odorat soit réellement départi un rôle si considé- rable dans l’esprit de la très grande majorité des mammifères, c’est ce qui ressort avec évidence de l’anatomie comparée, notamment du grand volume que possède, pour ce sens, l’organe nerveux central. Le bulbe olfactif et le tractus olfactif forment chez eux une section cérébrale particulière, dite le lobe olfactif, et le gyrus de l’hippocampe ainsi que la corne d’Ammon présentent aussi un développement de beaucoup Archives Néerlandaises, T. XXV. 11 150 H. ZWAARDEMAKER C Z. supérieur à celui des formes humaines. Comparé à cet état, notre appareil olfactif est un organe rudimentaire. Si le centre y est exigu, si le bulbe olfactif y est caché sous les grands lobes frontaux, la portion périphérique est également insigni- fiante. Elle est contenue dans un ethmoïde petit, étroit, rac- courci. Des rangées de plis olfactifs il n’est resté que la médiane, et même, dans cette série, les 5 cornets typiques sont réduits à deux. Tandis que la station verticale émancipait les extré- mités antérieures, les transformait en organes appropriés à des services multiples, tandis que le perfectionnement du langage rendait nécessaire une extension considérable de la surface cérébrale, et qu’en conséquence les lobes frontaux se développaient fortement, le centre olfactif diminuait manifes- tement en volume. La vue et l’ouïe devinrent les sens car- dinaux, l’odorat se dégrada, et si son étude forme encore un chapitre important de la physiologie de l’homme, c’est uni- quement parce qu’aucun autre sens ne montre une connexion aussi directe entre la nature de la matière et la sensation qu’elle provoque. La pathologie, toutefois, tire souvent profit et instruction de choses qui pour la vie normale sont d’intérêt secondaire. C’est ainsi que les troubles de l’odorat constituent parfois des sym- ptômes caractéristiques d’une affection nerveuse. Et cela se comprend, puisque l’olfactif est un nerf cérébral par excellence. Comme expansion primaire du lobe antérieur du cerveau, le bulbe olfactif se place sur la même ligne que la rétine, organe avec lequel il présente une grande analogie sous le rapport de la structure microscopique. L’appareil conducteur des sti- mulants olfactifs est d’un examen très facile, ce qui donne une netteté peu commune à notre diagnose de la nature des perturbations. Grâce à ces diverses circonstances, l’anosmie devient un signe précieux pour la détermination du foyer morbide. Mais, à part même toute localisation, l’importance du trouble olfactif nerveux n’est pas médiocre, car, comme organe rudimentaire, le sens en question est tout particulière- ANOSMIES D ORIGINE NERVEUSE. 151 ment exposé à des déviations pathologiques, soit congénitales soit acquises. En pareil cas, nous avons besoin en premier lieu d’une bonne méthode de recherche Partout où la mesure et le nombre font leur entrée, notre observation gagne en précision, notre jugement en exactitude. Je me suis donc proposé de trouver une méthode quantitative, et je crois y être parvenu au moyen de l’olfactomètre que j’ai décrit précédemment. Pour les recherches cliniques, c’est un appareil extrêmement simple, dont on peut se servir avec fruit presque sans préparation spéciale. En outre, il est pro- visoirement tout à fait indifférent de choisir pour le cylindre de l’appareil telle ou telle matière odorante solide, l’expérience ayant appris que la grande majorité des anosmies portent également sur toutes les sortes d’odeurs. Tel est le cas no- tamment pour les anosmies qui proviennent de sténose nasale ou d’altérations pathologiques dans la muqueuse olfactive. La seule précaution à observer dans l’olfactométrie clinique, c’est d’éviter les stimulants énergiques, vu que ceux-ci fatiguent le sens et l’émoussent pour longtemps. En outre, avec ces odeurs trop fortes, on est exposé à parfumer tous les objets qu’on touche et même le local tout entier dans lequel on opère. L’emploi de matières à émanations trop vives, acide acétique, ammo- niaque liquide, huiles essentielles et autres substances qu’on trouve indiquées dans les Traités, notamment dans ceux de Eichhorst et de Strümpell, est le défaut capital de la méthode antérieure. Par cela seul déjà, on s’est enlevé toute chance d’arriver à une connaissance exacte de l’anosmie. A l’aide d’olfactomètres convenablement construits, il n’est pas difficile de mesurer l’acuité de l’odorat. Le malade ayant introduit dans la partie antérieure de l’une des narines l’ex- trémité bien nettoyée de l’instrument, on l’invite à y flairer, sans qu’il soit nécessaire de boucher l’autre narine. Le petit écran dont l’olfactomètre est pourvu garantit suffisamment, si l’on s’est abstenu de toucher le bois avec des doigts imprégnés d’odeur. J’ai l’habitude de laisser le malade prendre d’abord 11* 152 H. ZWA ARDEMAKER OZ. connaissance de l’odenr qu’il devra observer, en lui faisant sentir un instant, mais un instant très court et très fugitif, le cylindre olfactométrique détaché. Ensuite, je cherche le mi- nimum perceptible, en passant alternativement d’excitations trop fortes à d’autres un peu trop faibles, et d’excitations trop faibles à d’autres légèrement plus fortes. L’observation doit surtout avoir lieu sans que le sujet y apporte beaucoup de contention; il doit sentir rapidement et simplement, comme on le fait aussi dans la vie ordinaire. Quelques personnes ont une tendance à aspirer de toutes leurs forces, d’une manière très peu naturelle, et le seul résultat qu’elles obtiennent ainsi est une excessive raréfaction de la matière odorante dans une très grande quantité d’air. Lorsque, toutefois, on aspire tran- quillement, naturellement, 5 ou 6 observations suffisent pour fixer la limite entre sentir et ne pas sentir l). La détermina- tion acquiert une exactitude extrême si de temps en temps on compare la sensation douteuse avec la sensation d’ino- dorité qui se produit lorsque l’olfactomètre est porté dans la partie postérieure de la narine. L’acuité olfactive s’exprime finalement par une fraction: olfactus = — v fl où le numérateur représente le minimum perceptible de lon- gueur de cylindre pour une personne normale, le dénominateur la longueur de cylindre trouvée. L’expérience m’a appris que les anosmies respiratoires et essentielles sont extrêmement fréquentes. Si donc on ne veut pas tomber dans des méprises grossières, on doit, lors de l’examen de névropathes, savoir exclure ces anosmies. Il va sans dire qu’un examen rhinoscopique minutieux sera alors d’une grande utilité Le but auquel je tends, toutefois, est d’indiquer une méthode plus simple, qui mette le médecin en • ) Sur l’influence du mode d’aspiration, voir Ned. Tijdschrift voor Ge - neeskunde , 1888, T. II, p.133. ANOSMIES D’ORIGINE NERVEUSE. 153 état de se former, aussi au lit du malade ou dans la poli- clinique, une opinion au moins provisoire. Encore que l’air inspiré ne passe pas directement sur la surface sensitive, il est clair qu’un large courant respiratoire est une condition sine qua non de la fonction olfactive. Or, la largeur du courant respiratoire peut être estimée d’après la masse d’air qui, lors de l’expiration, sort des fosses nasales. Cet air a été saturé de vapeur d’eau dans les poumons et laisse donc, sur un miroir métallique qu’il rencontre, un dépôt de vapeur condensée. Dans les conditions normales, les deux taches ainsi produites sur un miroir (par exemple, un réflecteur laryngoscopique ordinaire ou quelque autre surface métallique polie) qu’on tient, parallèlement aux narines, à la hauteur de la lèvre supérieure, doivent être symétriques. Chacune de ces taches respiratoires, à mesure qu’elle se dissipe, se partage d’elle-même en deux parties, une partie supérieure latérale et une partie inférieure médiane, dues probablement à la division en deux courants, que le cornet nasal inférieur fait nécessaire- ment subir à l’air expiré. Trouve-t-on des taches respiratoires symétriques, de forme normale, et qui, sous le rapport de leur étendue et de la rapidité avec laquelle elles se dissipent, ne diffèrent pas trop des taches de contrôle produites par l’observateur, alors on peut admettre que, à part des circonstances particulières, il n’existe pas pour l’odorat des obstacles respiratoires. Si la symétrie n’est pas parfaite, mais que l’écart soit faible, on peut, jusqu'à nouvel ordre, hasarder la même conjecture. Les anosmies respiratoires sont donc assez faciles à recon- naître. La difficulté est plus grande pour les anosmies essen- tielles. Toutefois, elles se rencontrent le plus souvent à la suite de rhinite chronique, de pharyngite chronique, etc. En général, on ne sera autorisé à les admettre que s’il existe de pareilles conditions étiologiques. De plus, ces anosmies essen- tielles sont ordinairement bilatérales et à peu près au même degré des deux côtés dans les cas non compliqués, en op- 154 H. ZWAARDEMAKER CZ. position avec les anosmies respiratoires, qui presque toujours présentent de grandes différences à droite et à gauche. Enfin, on doit considérer que les processus anatomo-pathologiques qui produisent les anosmies essentielles pourraient difficile- ment rester limités à la muqueuse olfactive, si bien cachée par sa situation. Lors donc qu’on ne trouve aucune altération dans les parties plus accessibles de la muqueuse nasale ou pharyngienne, cela seul est un motif de juger improbable l’exis- tence d’une anosmie essentielle, au moins de nature un peu grave 1 ). Ces recherches préliminaires concernant l’organe olfactif périphérique ne devront jamais être omises dans l’examen des troubles de l’odorat chez les névropathes. Néglige-t-on, lors de l’étude des troubles visuels nerveux, de s’assurer de l’état normal de la rétine ou de celui des milieux réfringents? Eh bien ! ce que la détermination de la réfraction et l’examen opthalmoscopique sont pour l’œil, l’examen de la partie in- férieure des cavités nasales l’est pour l’organe de l’odorat. Surtout les crêtes qui partent de la cloison, le cornet inférieur, le bord du cornet moyen, ont de l’importance sous ce rapport. La certitude, en ce qui concerne leur forme et leur dévelop- pement, s’obtient par la rliinoscopie antérieure et postérieure ; la probabilité et une opinion provisoire, par les moyens simples que je viens de décrire. Tout en étant moins fréquente que les anosmies respiratoires et essentielles, la perte d’odorat d’origine nerveuse n’est pour- tant pas rare. Dans ce que je vais dire à ce sujet, je m’appuierai principalement sur les résultats de mon expérience personnelle et ne citerai les travaux antérieurs, d’ailleurs peu nombreux, qu’en tant que cela sera nécessaire pour la juste appréciation des choses. Parmi les anosmies congénitales, la plupart ont certainement i) Pour plus de détails à ce sujet, voir mon article Anosmie , dans Ned. Tijdschr. v. Gen., 1889, n° 1. ANOSMIES D’ORIGINE NERVEUSE. 155 un caractère nerveux. Selon Kundrat, qui a écrit une excellente monographie sur les monstres privés d’appareil olfactif central, les arhinencéphales, des degrés plus légers de cette anomalie se rencontrent de temps en temps chez des individus par- faitement conformés quant au reste. L’éminent Claude Bernard lui-même, lorsqu’il était encore assistant de Magendie, a dissé- qué le cadavre d’une jeune femme, chez qui manquaient complètement les nerfs olfactifs. Le cerveau affecté de cette anomalie se trouve représenté dans les „ Leçons sur le système nerveux ”. Claude Bernard a pris la peine de rechercher les parents de la défunte et de les questionner sur ce qu’elle avait pu présenter de particulier dans le cours de sa vie. Leurs récits n’apprirent rien, il est vrai, touchant le manque d’odorat, mais on peut en tout cas en conclure qu’il n’existait absolument rien qui dénonçât une monstruosité. Quelques autres cas analogues se rencontrent encore, sporadiquement, dans la littérature spéciale. De l’écrit de Kundrat j’ai déduit qu’on aura le plus de chance de trouver des anosmies congénitales chez les individus à front étroit, vu que cette conformation peut tenir à un déve- loppement imparfait de la lame criblée de l’ethmoïde. D’autre part, il est probable que chez ces individus, au moins quand ils offrent des signes de parenté avec les arhinencéphales, le nez témoignera d’un dérangement dans sa croissance, de telle sorte que la cloison médiane sera courte et que le palais sera plus voûté que d’ordinaire. Bien que, chez toutes les personnes présentant ces caractères, j’aie cherché l’anosmie congénitale, je n’ai pu jusqu’ici en découvrir qu’un seul exemple. Il s’agit d’un homme intelligent, d’âge moyen, qui n’a jamais eu d’odorat. Ni dans sa jeunesse, ni plus tard, il n’a été capable de sentir une odeur. Les fleurs, le goudron, le gaz d’éclairage, rien de ce qui dans la vie journalière affecte le nez, ne lui a procuré une impression olfactive. Il va sans dire que -cet homme a un goût tout à fait à part. Les mets délicats d’un arôme agréable, exquis pour les gens civilisés ordinaires, lui 156 H. ZWA ARDEMAKER CZ. sont indifférents. Par contre, il est très sensible aux impressions que sa muqueuse buccale éprouve pendant la mastication. Plus fréquemment que les anosmies congénitales, on rencontre toutefois la perte totale de l’odorat survenue après que la première enfance était déjà passée. Il arrive souvent qu’on croie pouvoir écarter l’idée de processus pathologiques dans les cavités nasales, et que néanmoins il existe une anosmie ab- solue, qui s’est développée insensiblement au cours de l’ado- lescence. La possibilité doit être admise qu’elle dépende d’un développement imparfait de l’organe central de l’odorat, qu’elle représente par conséquent le degré le plus léger de l’arhinen- cépbalie. C’est au moins un fait digne d’attention que sur la table de dissection on trouve si souvent, sans l’avoir cherchée, la sclérose de la corne d’Ammon, organe cortical faisant in- dubitablement partie, comme on sait, du centre olfactif. Tou- tefois, dans le jugement clinique de ces cas d’anosmie, il faut être prudent. Jusqu’ici, l’occasion m’a été offerte d’en observer trois avec soin. J’ai perdu de vue l’un de ces sujets, mais les deux autres cas ont pu être soumis à un examen répété. L’un d’eux concernait une jeune personne de 17 ans, qui à l’âge de 4 ans aurait eu une diphtérite. Ni dans le pharynx, toutefois, ni dans la cavité nasale, on ne découvrait quoi que ce soit qui pût être considéré comme un reste de cette maladie. Au contraire, ces organes périphériques se montrèrent, par rhinoscopie antérieure, parfaitement normaux. Pour- tant, l’anosmie était complète. Je pratiquai pendant quelque temps des insufflations de strychnine, et le 17 avril 1889 les premières sensations olfactives purent être constatées. La distinction des odeurs laissait encore beaucoup à désirer; finalement, l’acuité de l’odorat, mesurée à rolfactomètre, s’éleva à 4 cm de racine de sumbul. Ce qui semblait d’abord une anosmie absolue n’était donc, vu de plus près, qu’une anosmie relative, non pas une perte d’odorat, mais une simple faiblesse d’odorat, dépendant sans doute d’une cause autre qu’un défaut de développement. Peut- être était-ce réellement une anosmie essentielle post-diphtéri- tique, peut-être aussi une des anosmies hystériques qui, d’après ANOSMIES D’ORIGINE NERVEUSE. 157 la pratique de M. Strümpell (non d’après la mienne), se pré- sentent si fréquemment Dans l’autre cas, il s’agissait d’un jeune homme de 24 ans, industriel, qui de sa 17e à sa 20e année avait peu à peu perdu l’odorat, sans que quelque autre phénomène pathologique se fût manifesté chez lui. Il ne percevait aucune odeur, même des plus fortes, parmi lesquelles je compte celles du sulfure d’allyle, de la benzaldéhyde, etc. L’examen rhinoscopique mit toutefois au jour, dans la cavité nasale du reste parfaitement saine, une notable accumulation de mucus à l’entrée de la fente olfactive. De la partie supérieure, ce mucus s’était évidemment porté plus bas, car dans l’image rétro-nasale on le voyait jusque tout près de la voûte. Nous aurions donc affaire ici au cas très rare d’une in- flammation circonscrite et catarrhale de la muqueuse olfactive. En général, les catarrhes de la cavité nasale se localisent dans la partie inférieure, là où le courant respiratoire apporte in- cessamment des causes d’irritation mécanique ou thermique, là aussi où les chances d’infection renouvelée sont le plus grandes ,). Il paraît, toutefois, que par exception la partie supérieure peut aussi avoir son tour, et cela, chose assez sin- gulière, bilatéralement. Des deux exemples qui viennent d’être cités, il ressort qu’une anosmie, en apparence absolue et simple, peut provenir de processus anatomo-pathologiques dans la fente olfactive, en d’autres termes, être une anosmie essentielle. En maints cas, où les circonstances et la durée de l’observation seront moins favorables, on devra donc rester dans l’incertitude quant à la vraie nature de l’affection. La contre-partie des anosmies congénitales se trouve dans les anosmies séniles Ma pratique consultative m’en a fourni quelques exemples très caractéristiques. Des hommes ou des femmes d’âge avancé, mais bien portants et encore relative- ment vigoureux, perdent peu à peu l’odorat, après avoir éprouvé des paresthésies très prononcées. Celles-ci sont trop • ) Voir Anosmies , dans Ned. Tijdschr. v. Gen ., 1889, n° 1. 158 H. ZWAARDEMAKER CZ. peu définies pour pouvoir être appelées des hallucinations. Elles sont intermittentes, surgissent brusquement, et dispa- raissent de même. Parfois aussi, elles sont continues, mais, alors même, sujettes à des aggravations et à des améliorations. Ordinairement la sensation est très forte et d’un effet assez fâcheux sur l’état normal. Tantôt le malade se plaint d’une odeur empyreumatique, tantôt d’une odeur désagréable mal déterminée, rappelant celle des matières fécales. Je n’ai jamais appris qu’elle empêchât le sommeil. Très gênante, dans ces cas, est la longue durée des perceptions consécutives, le malade restant plusieurs heures sans pouvoir se débarrasser d’une odeur qui du reste n’a rien d’extraordinaire, par exemple, celle des aliments ou des boissons. Au sujet de quatre de cés cas je possède des observations olfactométriques un peu complètes : I. Cas d’anosmie respiratoire gauche, compliquée d’anosmie sénile, de sorte que l’acuité olfactive est abaissée à droite jusqu’à à gauche jusqu’à x^ô* Comme minimum perceptible on trouve, en effet, à droite 2cm de caoutchouc, et gauche lcm, 5 du mélange de gomme ammoniaque et de guttapercha (l’odeur de ce mélange est environ 100 fois plus forte que celle du caoutchouc). Paresthésies de caractère mal déterminé, empyreumatique. II. Cas d’anosmie sénile chez un homme de 44 ans, qui présente aussi un raccourcissement précoce de l’échelle des tons • ). L’acuité olfactive est tombée à droite jusqu’à 1 / 5, à gauche jusqu’à 1/20. Paresthésies surtout pendant la nuit, lorsque celle-ci se passe sans sommeil. III. Cas d’anosmie sénile avec perceptions consécutives très prononcées. Bien que la cavité nasale soit parfaitement normale, l’acuité olfactive est descendue à droite jusquà 1/10, à gauche jusqu’à 1/50. Les paresthésies ont un caractère empyreumatique mal déterminé. 1Y. Cas d’anosmie absolue. Les paresthésies avaient d’abord le caractère d’une odeur vague de matières fécales: plus tard, après usage du bromure de potassium, elles ressemblèrent à l’odeur de drogues qui règne dans une pharmacie. Dans la première période, le malade ne percevait rien de l’odeur la plus pénétrante, alors même que celle-ci concordait avec sa paresthésie. Peut-être faut-il regarder comme proches voisins de ces 1) Comp. Ned. Tijdschr. v. Gen ., 1890, T. II, p. 737. • ANOSMIES D’ORIGINE NERVEUSE. 159 anosmies séniles les troubles passagers, mais très remarquables, de l’odorat, que j’ai rencontrés une couple de fois l’an dernier, en connexion avec l’influenza. Dans les deux cas, c’est à l’obligeance des médecins traitants que j’ai dû de pouvoir prendre connaissance de l’anosmie. La première malade était une femme de 30 ans, mère de quatre enfants. En janvier 1890 elle prit l’influenza, avec fièvre intense, qui dura 8 jours; douleur dans le ventre, ni odorat ni goût, au dire de la malade. Elle percevait l’amer, le salé, l’acide, le doux, mais rien de plus. La ma- lade assure n’avoir été nullement enrhumée à ce moment. Bien certaine- ment, elle ne l’était pas non plus au moment où elle fut soumise à mon examen. Aussi ne découvrait-on, rhinoscopiquement, aucune espèce d’anomalie. Néanmoins, l’acuité olfactive était au-dessous de Viooo de sa valeur normale. Huit jours plus tard, l’acuité de l’odorat était remontée à gauche jusqu’à 1/l00 ; au bout d’une nouvelle semaine, à gauche jusqu’à V10 et à droite jusqu’à 1/30o* Ie 19 mai elle était redevenue normale des deux côtés. Le second malade était un homme de 51 ans, père d’une nombreuse famille. Au moment de l’examen il présentait, avec un méat olfactif faci- lement accessible, à droite une acuité olfactive de J/150, ^ Sauche une acuité positivement inférieure à V5Ô0. Le soir, à ce qu’il me raconta, l’anosmie était complète, de sorte qu’il ne pouvait rien goûter convena- blement. Le champ visuel et le champ auditif de ce malade étaient parfaitement normaux. Quant à la signification de ces anosmies survenant à la suite de l’influenza, rien de certain ne saurait être dit. Invo- lontairement, on est tenté de leur chercher des analogies avec l’anesthésie de la rétine qui s’observerait après le typhus, etc. Les anosmies congénitales, séniles et d’épuisement-, dont il a été question jusqu’ici, ont, en certain sens, un caractère général. Sans doute, nous avons des raisons de supposer que les recherches ultérieures feront connaître pour chacun de ces troubles une localisation plus spéciale, mais, quant à présent, on ne peut proposer que des hypothèses. Pour l’anosmie congénitale, par exemple, un état rudimen- taire de la corne d’Ammon, entraînant un développement im- 160 H. ZWAARDEMAKER CZ. parfait du tractus olfactif, n’est pas improbable; pour l’anosmie sénile, il est possible que la cause prochaine en doive être cherchée dans une dégénération du bulbe olfactif, avec formation de corpuscules amylacés; pour l’anosmie d’épuisement, je voudrais admettre, précisément à cause de la prompte fatigue, que le siège proprement dit de l’affection se trouve dans l’épi- thélium sensitif. Mais ce ne sont là que des conjectures, et au point de vue simple, dégagé de toute idée préconçue, où doit se placer le clinicien, ces anosmies restent des troubles de l’odorat non localisables et dont il sait seulement qu’ils ne sont dus ni à des obstacles respiratoires, ni à des altéra- tions pathologiques de la muqueuse olfactive. Tout au plus, nos hypothèses peuvent-elles indiquer provisoirement, jusqu’à ce que l’expérience ait prononcé, une voie à l’action théra- peutique. Les anosmies nerveuses auxquelles j’arrive maintenant nous offrent, contrairement aux précédentes, une localisation anato- mique nettement circonscrite. Elles se présentent, comme symp- tômes cérébraux, à côté d’autres phénomènes, et rendent en beaucoup de cas possible la détermination du siège des lé- sions encéphaliques. Elles trouvent leur substratum anatomo-pathalogique : a. dans le bulbe et le tractus olfactifs; b. dans le tiers postérieur de la capsule interne; c. corticalement, dans la circonvolution frontale à laquelle se rattache la racine dite médiane du nerf olfactif (Zuckerkandl) et dans le gyrus hippocampi avec la corne d’Ammon. A. Des processus locaux, qui peuvent affecter le bulbe et le tractus olfactifs, se rencontrent assez fréquemment. En pre- mier lieu, ce sont les traumatismes, par exemple une chute sur la tête, qui peuvent rendre anosmique. Il se produit même de cette manière, comme l’a montré M. Ogle, une forme pathologique très caractérisée : une chute de cheval ou de voiture, par exemple, laisse pour seule trace persistante la perte de l’odorat. Cette anosmie atteint naturellement aussi ANOSMIES D’ORIGINE NERVEUSE. 161 la fonction gustative de l’odorat, ce qui, dès qu’elle devient absolue, la rend très gênante pour les malades. Jusqu’à pré- sent, on n’a remarqué que ces anosmies absolues. Mais il ne souffre aucun doute que des degrés moindres, le simple affaiblissement de l’odorat, ne se présentent également. On a parfois hasardé la supposition que ce sont les fibres minces et délicates du nerf olfactif qui, au point où elles tra- versent la lame criblée, seraient déchirées lors de la chute. Mais c’est là une pure hypothèse. Dans les rares autopsies qui ont été faites, on a toujours trouvé une fracture de la base du crâne, qui d’ailleurs dans les fosses crâniennes antérieures ne donne pas nécessairement lieu à des phénomènes nette- ment définis. Il serait donc très intéressant, et non sans im- portance pour le diagnostic, de faire, après un traumatisme un peu grave de la tête, un examen olfactom étriqué appro- fondi. A côté de ces lésions traumatiques, ce sont surtout les tumeurs qui menacent de danger le bulbe et le tractus ol- factifs. En raison des troubles de la vue, hémiopie (Leber) ou exophtalmie, qui les accompagnent, il ne sera pas rare que ces tumeurs viennent à être soumises à l’inspection de l’oph- talmologiste. Plus tôt que dans les hôpitaux, on les rencontrera donc dans les policliniques des oculistes, et c’est ainsi que, grâce à l’obligeance de M. Snellen j’ai eu l’occasion d’observer quelques cas d’anosmie par pression de tumeur. B. Des processus qui se passent dans le tiers postérieur de la capsule interne, ou qui y ont rapport, peuvent indubita- blement, en théorie, donner lieu à l’anosmie et alors, natu- rellement, à une anosmie unilatérale. Je ne sache pas que des cas avec autopsie aient été consignés dans la littérature mé- dicale; mais une forme pathologique très caractéristique, qui d’après la célèbre hypothèse de Charcot a très probablement la même localisation, c’est l’hémianesthésie hystérique. Comme élément de cette l’hémianesthésie, apparaît l’hémianosmie. Elle est dans ce cas entrecroisée, comme tous les autres 162 H. ZWAARTVEMAKER C!Z. troubles sensoriels. Parfois, néanmoins, j’ai observé aussi de l’autre côté, du côté non hémianesthésique, un affaiblis- sement relatif de l’odorat, phénomène qui d’ailleurs trouve ses analogues dans les autres sens. Je dois à l’amitié du pro- fesseur Talma et du Dr Winkler d’avoir pu faire ces obser- vations. C. Dans le domaine encore presque inexploré des anosmies corticales, on rencontre une forme pathologique parfaitement définie; qui se présente fréquemment. C’est l’anosmie accom- pagnant l’aphasie et l’hémiplégie du côté droit. Or, il est très remarquable que dans ces cas l’anosmie ne se trouve pas du même côté que la paralysie. Toujours, au contraire, on l’ob- serve du côté opposé. Tandis que l’hémiplégie est à droite, l’anosmie siège à gauche; la première est donc entrecroisée par rapport au foyer, la seconde ne l’est pas. Le centre cortical, qui dans ces cas est frappé en même temps que le centre du langage parlé et les centres moteurs, ne peut guère être autre chose que la circonvolution frontale avec laquelle se continue, d’après l’anatomie comparée, la ra- cine médiane du nerf olfactif (Zuckerkandl). Et alors on conçoit aisément que l’entrecroisement fasse défaut. Ce qui surprend davantage, c’est qu’il paraît exister une autre anosmie corticale, qui, elle, est entrecroisée relativement au foyer. Une partie des fibres du centre nerveux se rend donc à la périphérie sans entrecroisement, une autre partie avec entrecroisement. Il y a tout lieu de chercher cet entrecroisement dans la commissure antérieure, qui chez les mammifères osmatiques possède un développement énorme, et qui relie indubitablement les deux bulbes et tractus olfactifs, ou, comme on les appelle chez ces animaux, les lobes olfactifs. Cette commissure offre quelque analogie avec le chiasma. Dans le cas où cette comparaison n’exprimerait pas une simple ressemblance superficielle, mais aurait réellement pour base une analogie plus intime entre les deux nerfs cérébraux qui naissent d’expansions cérébrales, ces formes d’aphasie avec anosmie pourraient nous révéler un ANOSMIES D’ORIGINE NERVEUSE. 163 trésor de faits, aussi importants pour la théorie de l’odorat que pour la localisation cérébrale. A mon grand regret, je n’ai jamais eu l’occasion d’étudier un seul cas de ce genre. Les hommes jeunes et robustes qui entrent à ma section d’hôpital ne souffrent pas de ces maux de la vieillesse, et dans ma pratique consultative les apoplexies ne se présentent pas. Néanmoins, je me suis armé pour les éventualités possibles, et c’est par l’énumération des moyens d’étude matériels que je terminerai cet article. Dans les cas en question, et aussi dans les cas d’anosmies corticales d’origine dif- férente (gyrus de l’hippocampe), il sera nécessaire de limiter le champ olfactif, et c’est ce que permettent les olfactomètres destinés aux recherches physiologiques. Il y a une couple d’années, M. Haycraft a fait voir comment l’odeur se modifie progressivement dans les séries chimiques. Les molécules les plus complexes forment les termes inférieurs, les molécules les plus simples les termes les plus élevés. C’est ainsi du moins que je conçois ces relations incontestables, en les rattachant à mes hypothèses sur le classement des éléments sensitifs.1) S’il en est ainsi, et provisoirement ces hypothèses paraissent être les plus probables qu’on puisse se former à ce sujet, il faudra se servir pour les olfactomètres de matières chimiques pures, prises à un état de concentration connu. Ces matières devront être choisies dans les séries de Haycraft, de telle sorte que l’examen porte successivement sur un terme élevé de la série et sur l’un des termes inférieurs. Les résultats, comparés chaque fois avec les minima perceptibles normaux, fourniront infailliblement des matériaux dont la physiologie et la pathologie auront à tenir compte. L’outillage nécessaire pour l’étude de l’amblyosmie corticale se compose de: i) Bijdrage tôt de physiologie van den reuk, dans: Donders Feestbundel, 1888, p. 378. 164 H. ZWAARDEMAKER CZ. ANOSMIES D’ORIGINE NERVEUSE. a. un petit écran dans lequel se fixent, à vis ou à joint de baïonnette, les tubes olfactifs; b. une couple de tubes olfactifs en verre, qui, retirés de l’écran, peuvent être rincés sous un filet d’eau; c une couple de cylindres olfactométriques, de porcelaine dégourdie, glacés seulement aux deux bouts coupés, mais uniformément poreux aux faces intérieure et extérieure. Ces cylindres ont un diamètre intérieur de 8 millimètres. Ils sont livrés par la faïencerie de Delft, maison ’t Hooft Labouchère, au prix de 50 centimes la pièce; d. un fil de cuivre, servant de porte-ouate, pour sécher l’in- térieur des tubes olfactifs. Le tout se serre dans une trousse de toile cirée, qui peut être facilement nettoyée et n'a presque plus d’odeur propre. Le cylindre olfactométrique poreux est imbibé d’une solution aqueuse ou glycérique contenant un poids déterminé de l’une ou l’autre matière odorante, chimiquement définie. L’imbibition se fait le mieux en plaçant le cylindre dans une éprouvette remplie de la solution, puis fermant cette éprouvette par un bouchon de liège et l’abandonnant quelque temps à elle-même, par exemple durant la nuit. Avant de se servir du cylindre, on l’essuie extérieurement, pour « îe pas être gêné par le li- quide qui en dégoutterait. Tout est alors prêt pour la déter- mination olfactométrique. Quand il s’agit de mesures exactes, le cylindre doit être fréquemment replongé dans le liquide, et la détermination finale, en tout cas, doit avoir lieu avec le cylindre venant d’être retiré de la solution. LES ÉQUATIONS DES NOUVELLES COPIES DU MÈTRE DES ARCHIVES. PAR J. B O S S C H A. 1. Dans la Conférence générale de septembre 1889 le Comité international des poids et mesures qui, en 1875, avait pris la place de la Commission internationale du mètre et de son Comité permanent, a rendu compte du travail auquel le Gouvernement français avait, en 1869, convoqué les délégués scientifiques de tous les pays civilisés. Le but primitif de la Commission internationale fut la con- struction d’une copie identique du Mètre des Archives, des- tinée à remplacer cet ancien prototype du système métrique dans la construction ultérieure de nouveaux étalons de longueur. Cette copie constituerait un nouveau mètre international servant de prototype aux étalons nationaux qu’on se proposait d’en déduire, en nombre suffisant pour satisfaire aux demandes de tous les Gouvernements intéressés. Le Comité, dans la séance du 28 septembre 1882, a présenté aux Membres de la Con- férence 34 règles en platine iridié, soigneusement comparées entre elles et dont l’équation par rapport au Mètre des Ar- chives avait été obtenue au moyen d’une règle transitoire comparée directement avec le Prototype. Cette règle, — dé- signée par le signe I2 — en tous points conforme aux 34 nouveaux étalons, paraît avoir été destinée d’abord à servir comme nouveau mètre international. Toutefois, on a, plus tard, Archives Néerlandaises, T. XXV. 12 166 J. BOSSCHA. adopté comme tel la règle n° 6, dont la longueur parut se rapprocher le plus de celle du Mètre des Archives. Il en est résulté que ni le mètre international, ni aucun des nouveaux étalons nationaux n’a été comparé directement avec l’ancien Prototype. Des deux conditions, demandées par la Conférence géodésique internationale de 1867 en ces termes: „la longueur du mètre international devra différer aussi „peu que possible du Mètre des Archives de Paris et doit „en tous cas lui être comparée avec la plus grande exactitude”, on a, pour satisfaire à la première, qui est certainement la moins importante *), renoncé à la seconde. 2. Les opérations fondamentales qui devaient rattacher les nouveaux étalons de longueur à l’unité du système métrique avaient été confiées à une Commission mixte, composée de trois Membres du Comité international, MM. Broch, Fôrster et Stas et de trois Membres de la Section française, MM. Dumas, H. Tresca et Cornu. Sous la direction de cette Commission les comparaisons du mètre I2 avec le Mètre, des Archives ont été effectuées par MM. Benoit et G. Tresca, au moyen du compara- teur à mouvement transversal de la Section- française, installé dans un cabinet attenant à la salle des Poids et Mesures du Conservatoire national des Arts et Métiers. Un rapport, con- cernant ces opérations, a été rédigé par M. Fôrster et lu dans la séance du Comité international, le 4 octobre 1882. i) On avait évalué a 6 microns la différence de longueur du mètre J2 avec le Mètre des Archives, à 0“ celle du Mètre n° 6. Répartie sur les deux bouts des règles et mesurée avec les comparateurs du Bureau inter- national, cette différence équivaut à trois divisions (centièmes de révolution) du tambour des microscopes. Si l’on voulait, pour cette raison attribuer au mètre n° 6 une supériorité quelconque, il faudrait, pour en profiter, s’as- treindre à la condition de ne jamais employer, ni le mètre international, ni les étalons qui en dérivent qu’à des températures ne s’écartant de zéro centigrade que de % de degré, température à laquelle la dilatation a déjà produit un écart de 6 microns. La différence entre les deux règles revient, en définitive, à ceci, que l’unité du système métrique serait représentée par le n° 6 à 0°, par I2 à. — 0°,75. LES EQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 167 11 a été adopté par le Comité dans cette même séance. On en a conclu que la distance entre les traits dêlimitatifs de V étalon 12 à 0° est de 6,« plus grande que la longueur du Mètre des Archives à 0°. Sur la proposition de M. Forster, le Comité a ensuite adopté comme unité de longueur la distance comprise à 0° entre les traits délimitatifs de l’étalon I2, diminuée de 6«, et décidé que le Comité considérerait comme définitive- ment tracés tous les étalons du mètre, qui ne différeraient de la longueur définie ci-dessus au delà de 3U en plus ou en moins. Après que les dilatations absolues des mètres I2 et n° 6, ainsi que les dilatations relatives des 34 règles eurent été mesurées avec le plus grand soin par MM. Benoit et Guillaume, les équations des étalons nationaux par rapport aux deux premiers furent déterminées au Bureau international par MM. Boinot et Isaacbsen sous la direction de M. Broch. Les résultats numériques de toutes ces observations ont été réunis dans un exposé sommaire, rédigé par M. Benoit et présenté à la Conférence générale1). Quoique les détails, à publier ultérieurement, la description complète des méthodes mises en usage et des instruments employés, ainsi que les journaux d’ob- servations, doivent constituer la matière de plusieurs Volumes des Travaux et Mémoires du Bureau international, le Rapport de M. Benoit est assez complet pour permettre de vérifier les conclusions soumises à la sanction de la Conférence et de juger de la précision acquise dans ces travaux. Il est, en effet, peu probable que les résultats directs de l’observation, obtenus dans les mêmes conditions que ceux d’autres travaux déjà publiés dans les moindres détails, doivent subir quelque correction qui modi- fierait sensiblement les conclusions relatives soit aux équations définitives des divers étalons, soit aux valeurs des dilatations. i) Rapport sur la construction, les comparaisons et les autres opérations ayant servi à déterminer les équations des nouveaux prototypes métriques ; présenté par le Comité international des poids et mesures, rédigé par le Dr. J. René Benoit, Directeur du Bureau international des poids et mesures. Paris, Gauthiers-Villars et fils, Imprimeurs-Libraires, 1889. 12* 168 J. BOSSCH A.. 3. D’autre part, le Gouvernement néerlandais, n’ayant pu adhérer à la Convention du Mètre de 1875, avait confié à une Commission de trois Membres : MM. Stamkart, Bosscha et Oudemans, le soin de procurer deux étalons en platine iridié, satisfaisant à toutes les conditions prescrites par la Commis- sion internationale de 1872 et directement comparés avec le Mètre des Archives. Cette commission a terminé ses travaux en 1879. Dans son Rapport ')on trouve réunis et discutés tous les détails de ces mesures, ainsi que de celles que MM. Oude- mans et Bosscha avaient effectuées en 1880 pour vérifier les résultats précédemment obtenus. 4. L’appel, adressé par le Gouvernement français aux délé- gués de tous les pays afin d’établir, en collaboration avec les savants français, un nouveau mètre international, copie authen- tique et reconnue exacte du Mètre des Archives, a donc, en définitive, conduit à la création de deux espèces d’étalons, semblables de forme et de composition, presque identiques dans leurs propriétés physiques et mécaniques -), mais d’origine diverse en ce qui regarde les opérations fondamentales qui ont servi à déterminer leur longueur, et pouvant, par conséquent, différer en ce qu’ils ont de plus essentiel, savoir, l’exactitude avec laquelle ils reproduisent l’unité de longueur du système métrique. Cette conséquence des différends qui se sont produits au 1) Relation des expériences qui ont servi à la construction de deux mètres étalons en platine iridié, comparés directement avec le Mètre des Archives, par J. Bosscha. Rapport présenté au Ministre des travaux publics, du commerce et de l’industrie par la Commission néerlandaise. Annales de l’Ecole Polytechnique de Delft, Tome I, p.65- 144 et Tome II p.l — 122. Leide, E. J. Brill, 1885 et 1886. 2) Nous verrons dans la suite que les dilatations thermiques des deux- espèces d’étalons ne diffèrent que de 0U,02 par degré, celle des étalons néerlandais étant la plus faible. Le coefficient d’élasticité des règles du Comité international a été évalué au Bureau de Breteuil à 19500, celui des règles du Conservatoire à 21500. Pour la règle n° 19 j’avais obtenu la valeur 22800. Les étalons néerlandais sont donc un peu moins dilatables et plus résistants aux actions mécaniques que les étalons du Comité. LES ÉQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 169 sujet de l'organisation du travail international, bien loin d’être fâcheuse, ne peut que profiter au but commun. En effet, les deux espèces d’étalons peuvent se contrôler mutuellement. En cas de différence, un examen critique des deux systèmes de mesures peut conduire à la découverte de quelque erreur. S’il y a concordance, ou bien, si l’introduction d’une correction, due à l’erreur trouvée, rétablit l’unité, les résultats de deux déterminations entièrement indépendantes trouveront dans leur identité la sanction la plus décisive. C’est dans le but de tirer quelque avantage de la coexis- tence de ces deux systèmes que nous faisons connaître, dans les pages suivantes, les conclusions auxquelles nous a conduit l’étude des chiffres publiés dans les deux Rapports cités ci-dessus, ainsi que des détails des mesures que l’on a bien voulu nous communiquer. 5. Les observations de la Commission mixte se composent de 59 comparaisons, divisées en cinq séries effectuées à des températures différentes, ainsi que le montre le tableau suivant. TABLEAU I. Comparaisons de la Commission mixte. No. de la Série. Date. Nombre de comparaisons. Température. Valeur moyenne de I2—A. 1 1—16 sept. 1881. 24 18°, 45 -f- 0. ' ,240 2 24 sept. — 4 oct. 1 881 . 12 17°, 82 — 0 ,423 3 7 oct. — 19 oct. 1881 . 12 15°, 06 + 0 ,085 4 6 — 10 février 1882. 5 4°, 66 + 4 ,430 5 16-22 février 1882. 1 6 10°, 03 + 2 ,284 Après la première série on a retourné le Mètre des Ar- chives sens dessus- dessous ; après la deuxième on a encore retourné le mètre I2 bout par bout; dans cette dernière po- sition les deux mètres sont restés jusqu’à la fin des opérations. Toutes les mesures ont été faites à température ambiante : on n’a pas jugé nécessaire de faire marcher la machine frigorifique installée dans le laboratoire à côté du cabinet, et la circu- 170 J. BOSSCHA. lation de liquide refroidi, établies par la Section française pour servir dans les comparaisons à basse température. La tempé- rature de 4°, 66 de la quatrième série a été obtenue en faisant arriver, dans la loge en bois du comparateur, l’air froid du dehors; pour accélérer l’abaissement de température on a provoqué un courant d’air au moyen d’une cheminée d’appel. L’ajustement des microscopes à la distance requise pour obtenir la plus grande netteté de l’image a été opéré dans la première série de la manière ordinaire, c’est-à-dire en sui- vant de l’œil les modifications de l’image, tandis qu’on tournait les boutons des vis de mise au point, et en arrêtant, après quelques essais, le mouvement au moment de la vision la plus distincte. Dans les séries suivantes on a ajusté les organes de réglage à une mise au point chiffrée, obtenue par con- struction graphique d’après une méthode imaginée par M. Cornu. Il paraît que le perfectionnement qu’on espérait avoir réalisé par l’application de cette méthode a été le motif pour lequel on n’a pas fait entrer, dans le calcul final, les données fournies par les 24 comparaisons de la première série. On s’est servi exclusivement des quatre dernières, au résultat des- quelles, malgré le nombre très inégal de comparaisons qu’elles contiennent, on a attribué le même poids. C’est ainsi qu’on est arrivé à déduire de ces observations les équations suivantes : (J, — A)0 = + 6", 134 ; d{L‘^A)- = ~ 0,382. Si l’on s’abstient d’accorder a priori une préférence à cer- tains groupes d’observations, et si l’on attribue, en conséquence, à chaque comparaison le même poids, le résultat final s’expri- merait par les équations: (h -A)0 = + 5.“, 346 ; = ~ 0,302 ; qui diffèrent sensiblement des précédentes. 6. La Commission néerlandaise a comparé avec le Mètre des Archives les règles n° 19, n° 23 et n° 27, chacune en 8 expériences à la température moyenne de 17°, 61. En même LES ÉQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 171 temps elle a mesuré à la température moyenne de 15°, 95, par 24 comparaisons, les différences de longueur que les trois règles présentaient entre elles. Comme les comparaisons des mètres à traits entre eux se font avec une précision beaucoup plus grande que celles d’un mètre à traits avec un mètre à bouts et que, de plus, les règles n° 19, n° 23 et n° 27 ne montraient aucune différence de dilatation appréciable, l’en- semble de ces mesures peut être considéré comme équivalant à 24 comparaisons faites entre l’une quelconque de ces règles avec le Mètre des Archives, à la température moyenne de 17°, 61. Après ces opérations, on mit en marche l’appareil frigori- fique et la circulation d’une solution refroidie de chlorure de calcium dans les conduits et les réservoirs, placés aux quatre coins de la loge en bois qui renfermait le comparateur avec son enveloppe de cuivre. La capacité totale de ces réservoirs était d’environ deux mètres cubes. En trois périodes de marche, chacune de 8 heures, la température se trouvait abaissée à zéro. On effectua alors 5 comparaisons du mètre n° 19 avec le Mètre des Archives. Dans le cours de ces mesures la tem- pérature avait régulièrement monté de 2 degrés en 171 heures. La machine frigorifique fut alors de nouveau mise en marche, jusqu’à ce que l’on atteignit en deux périodes, la première de 6, la seconde de 7 heures, la température de — 2°. Une nouvelle série de 5 comparaisons fut ensuite exécutée entre la règle n° 23 et le Mètre des Archives; pendant cette série la température montait de 1°,27 en 13f heures. Ces comparaisons, combinées avec celles des mètres à traits entre eux, équivalent encore à 10 comparaisons de l’une quelconque des trois règles avec le Mètre des Archives, effectuées à la température moyenne de -h 0°,09. En attribuant à chaque comparaison, faite avec le Mètre des Archives, le même poids on en déduit: (n° 19 — A)0 = -+- 5M,81 ; (n° 23 - A)0 = + 5", 19 ; (n° 27 — A)0 = + 6",ll d{ n° 19 — A) ___ d(n° 23 — A) d{ n° 27 — A) dt dt dt 0,2386. 172 J. BOSSCHA. De ces trois mètres les n° 19 et n° 27 avaient été désignés comme étalons néerlandais. Le n° 23 est resté la propriété de la Section française : il avait été tracé directement d’après le Mètre des Archives à une température peu différente de zéro. 7. Les résultats obtenus, d’un côté par la Commission mixte, de l’autre par la Commission néerlandaise, peuvent être ramenés à une même équation au moyen de comparaisons, faites par M. G. Tresca au Conservatoire des Arts et Métiers en juin 1881. Après que l’équation fondamentale du n° 23 avait été éta- blie par les mesures de la Commission néerlandaise, ce mètre a servi au tracé de plusieurs autres étalons, et en premier lieu, du mètre transitoire I2. Comme le n° 23 s’était trouvé, à zéro, de 5 microns en excès sur le Mètre des Archives, on s’est efforcé, dans le tracé de 12, de rendre celui-ci plus court que le n° 23. Après le tracé on a procédé aux comparaisons entre les deux règles. Le tableau suivant contient les résultats, tels qu’ils m’ont été communiqués en 1883 par M. H. Tresca. Les données pour la correction due à la différence de température m’ont été récemment fournies par l’obligeance de M. G. Tresca. TABLEAU IL Comparaisons de I2 et n°. 23. Date. no 23 — J*. Température. Correction pour différence de température. ne 23— 12 corrigé. 7 Juin 1881 -f- lu, 41 8 16°, 91 — 0,086 + 1",332 8 ?i 55 + 1 ,652 84 0,194 1 ,458 9 n •5 1 ,680 71 0,172 1 ,508 10 15 •5 1 ,694 55 0,172 1 ,522 11 11 55 1 ,279 38 0,129 1 ,150 13 15 55 1 ,007 18 0,086 0 ,921 14 »î 55 1 ,127 15 0,172 0 ,955 15 55 >■) 1 ,033 15 0,172 0 ,861 16 55 55 1 ,595 19 0,108 1 ,487 18 15 55 + co O O 16°, 39 — 0,129 + 1 ,171 Moyenne 16°, 44 Moyenne l,i<2365 LES EQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 173 Pour obtenir une première vérification nous mettrons à profit la circonstance favorable, — uniquement due au hasard, — que la température moyenne des comparaisons n° 23— 12, 16°, 44, est exactement la même que la moyenne des températures 17°, 82 et 15°, 06 des séries 2 et 3 de la Commission mixte. Celles-ci ont donné : Série 2. (J2 — .4)17g2 — — 0ri,423, 12 comparaisons. Série 3. (I2 — X)1506 “ -f- 0.u,085, 12 comparaisons. On aurait donc, comme moyenne de 24 comparaisons: J(2- ^16,44 = -°“.169' Cependant, nous verrons plus loin qu’un calcul, qui nous paraît plus exact, conduit aux équations: (J2 — A)11SZ=~ 0^,42 (L-A6,06 = -°'tt>04- de sorte que nous admettons le chiffre, d’ailleurs peu différent, (^2 ^)i6,44 == 0U,23. Combinée avec le résultat du Tableau II (n° 23 — ^2)16,44 = + l‘w>24, cette équation donne (n° 23 — 16,44 “ + (^) D’autre part, les 24 comparaisons de la Commission néer- landaise, faites à température ambiante, donnent, d’après le Tableau XXV de la „Relation”, (n° 19 — -4)17j61 = -b 1^,60, et comme on a (Relation § 86) (n° 23 — n° 19) = — 0M,62, 11 suit (n°. 23 — X)1761 = + 0.“,98. ]ja réduction, de 17°, 61 à 16°, 44, de cette dernière différence s’obtient, avec une approximation certainement suffisante, au moyen du coefficient — 0,2386 de la Commission néerlandaise. 174 J. BOSSCHA. Une erreur, très peu probable, de 5 unités de la deuxième décimale ne donnerait dans la correction qu’une erreur, tout à fait insignifiante, de 0",06. L’addition de 1,17 x 0,2386 — + 0',28 conduit à (n° 23 - A)l(KU = + 1,2<; (B) Les deux équations (. A ) et (B) sont d’accord à un quart de micron près. 8. On peut encore faire servir à la même vérification le résultat fourni par la première série de la Commission mixte. Les lectures originales, calculées d’après une méthode qui me paraît plus rationnelle que celle employée par la Commission mixte, conduisent à l’équation : {L2 ^)lg 45 = H- 0M0. Nous montrerons plus loin J) que la différence des dilatations des mètres I2 et n° 23 doit être évaluée à 0.",02 par degré, la dilatation de 12 étant la plus forte. La valeur (n° 23 -I,)1M4= + 1^.24 serait donc à 18°, 45 (n°23-I2)18j45= + l;',20. La première série de la Commission mixte donnerait ainsi: (n° 23-^)18j45= + l" ,30, d’où il suit : (n°23-ü)1M4= + F,ï8 (C) L’écart avec la valeur (B) de la Commission néerlandaise n’est i) Voir l’Annexe. On y démontre que les nombreuses mesures, exécutées avec le plus grand soin par MM. Benoit et Guillaume, pour déterminer les coefficients de dilatation des règles, conduisent aux conclusions suivantes: Les règles construites en platine iridié de MM. Johnson, Matthey et Cie n’accusent entre elles aucune différence de dilatation appréciable dans les limites de température 0° à 20°. Il en est de même des règles construites en platine iridié du Conserva- toire. Lès règles de la première catégorie se dilatent de 0° à 20° un peu plus que celles de la seconde, la différence est de 0U,02 par degré. LES ÉQÜATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 175 encore que de 0.(',52. La moyenne des deux valeurs (A) et (C), savoir l.(,,40, présente avec ( B ) la différence de 0',14. Cette concordance est remarquable sous plus d’un rapport. Elle confirme les prévisions, basées sur la nature accidentelle des erreurs de mise au point propres à la méthode Fizeau, et montre que leur effet se trouve éliminé en grande partie dans la moyenne d’un grand nombre d’observations. 1 ) Mais, de plus, elle témoigne du degré de précision avec lequel on peut déduire du Mètre des Archives l’unité de longueur du système métrique. Quoique cette unité se trouve théoriquement définie sans aucune ambiguïté, comme étant la distance, à zéro, des extrémités de l’axe géométrique de la règle, il restait à prouver qu’elle peut être retrouvée matériellement avec une précision suffisante pour les besoins de la science. La planimétrie des bouts dans les parties centrales est-elle assez parfaite pour que l’incertitude possible dans l’orientation de l’axe ne puisse pas conduire à des erreurs, dépassant le demi-micron ou même le micron? L’effet moyen des réflexions qui, dans le procédé Eizeau, produisent l’image de la pointe, correspond-il à celui d’un plan moyen invariable, soit que l’on retourne le Mètre, soit que l’on procède à un autre ajustement des pointes limi- tatives, soit enfin que l’on change de microscope? Ce n’est, évidemment, que l’expérience qui puisse résoudre ces questions. Or, les trois chiffres, que nous venons de communiquer, paraissent concluants dans le sens affirmatif. Le troisième (C) a été obtenu à deux années de distance du deuxième (B), après qu’on eut modifié les microscopes en élevant de 15mm à 18mm la distance focale. De plus, dans cet intervalle de temps le réglage des pointes a, sans doute, subi quelque mo- dification. Le premier chiffre (A), obtenu après le troisième, i) „Le caractère essentiel des erreurs, résultant de l’incertitude de la mise au point, consiste en ce qu’elles sont des erreurs accidentelles; il y a autant de chance qu’elles tombent dans un sens que dans le sens con- traire. On peut donc atténuer leur effet en répétant les mesures après un nouvel ajustement des microscopes.” (Relation § 60.). 176 J. BOSSCHA. résulte d’observations faites après qu’on eut retourné sens dessus- dessous le Mètre des Archives, ce qui a rendu né- cessaire un réglage tout nouveau des pointes. 9. Il m’a semblé curieux d’examiner, jusqu’à quel point ces preuves favorables à l’égard de la parfaite définition du Mètre des Archives aussi bien qu’à l’égard du procédé Fizeau appliqué à un mombre suffisant d’observations, se trouvent confirmées par d’autres données qui peuvent apporter un témoignage particulièrement probant, à cause des circonstances dans lesquelles elles ont été obtenues. Elles résultent des premières comparaisons qui ont été faites d’un nouvel étalon avec le Mètre des Archives, avant que l’on eut connaissance de l’influence considérable qu’un défaut d’exactitude dans la mise au point exerce sur la précision des mesures. Ces me- sures ont été faites dans les conditions suivantes. Dans la nuit du 1er Janvier 1879 on avait tracé la régie no. 23 d’après le Mètre des Archives. On avait pris toutes les pré- cautions possibles pour bien faire réussir cette opération. Le comparateur longitudinal avait été bien réglé, la température avait été abaissée à zéro. Immédiatement après le tracé, on en a vérifié l’exactitude. La comparaison accusait une égalité parfaite des deux mètres. Mais, déjà le jour suivant, lorsque la température était montée à 3°, 5, on trouvait une différence de 2«,8. On continua ces expériences plusieurs jours de suite, — en laissant la température s’élever jusqu’à près de 10°, en l’abaissant de nouveau à — 0°,8 au moyen de la ma- chine frigorifique et en la faisant remonter encore, — avec ce résultat inattendu que les chiffres recueillis variaient d’une manière tout à fait irrégulière entre — 0“,2 et H- 5«,1. Les difficultés, rencontrées dans ces mesures, ont eu pour effet qu’on a examiné avec la plus scrupuleuse attention tous les détails de l’installation et tâché de les perfectionner encore. Il s’est trouvé que le Mètre des Archives se déplaçait par rapport aux pointes, de manière à les toucher et les déformer. On y a remédié et, pour pouvoir réduire la distance des pointes LES EQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 177 aux bouts du Mètre à un minimum constant malgré la dila- tation, on les a rendues solidaires du Mètre en les fixant sur des couvercles à fenêtre posés sur les bouts du Prototype. Les premiers abouts furent en laiton ; après leur application on a de nouveau abaissé la température jusqu'à — 1° et recommencé les comparaisons, qu’on a continuées encore jusqu’ au 15 mars. Les nouveaux chiffres variaient encore de -h 5«,80 jusqu’à H- lu ,69. Lorsque la Commission néerlandaise vint en avril 1879 à Paris, pour étudier avec la Commission française les causes de ces écarts, M. H. Tresca nous communiqua les résultats numériques, obtenus jusqu’alors. Après qu’on eut reconnu qu’un faible défaut dans la mise au point des microscopes devait causer une variation très sensible dans la longueur apparente du Mètre des Archives, la Commission néerlandaise procéda, en octobre 1879, aux comparaisons définitives des règles n° 19, n° 23 et n° 27. On avait cru jusque-là que le Mètre des Archives et la règle n° 23 ne devaient présenter aucune différence dans leurs di- latabilités. Les mesures d’octobre 1879 mirent, au contraire, en évidence que les nouvelles règles, pour un intervalle de 18°, se dilataient sensiblement moins que le Prototype, la différence atteignant 5 microns. J’examinai alors de nouveau les chiffres que M. H. Tresca nous avait communiqués et je reconnus bientôt que la plus grande partie des écarts, observés en mars, après qiCon eut amélioré l'installation des pointes, s’expliquait par cette différence de dilatation. En effet, si l’on en tenait compte, les erreurs résiduelles n’étaient guère supérieures à celles qui résultent inévitablement des incertitudes dans les mises au point, même les plus soigneusement ajustées. 10. Voici le tableau de ces mesures que l’on avait rejetées comme tout à fait provisoires. 178 J. BOSSCHA. TABLEAU III. Premières comparaisons provisoires du mètre n°. 23 avec le Mètre des Archives. Date. Température. n° 23 Observé — A Calculé Ecart. 7 mars 1879 — 0°,92 4- 5a ,80 4- 5,67 4- 0.13 ' M 5, + 1 ,14 4- 5 ,49 -b 5,18 + 0,31 8 „ „ + 4 ,37 + 5 ,08 4- 4,41 + 0,67 10 „ 8 ,08 4- 5 ,44 4- 3,53 4- 1,91 11 „ „ + 9 ,50 4- 2 ,15 4- 3,19 — 1,04 12 „ „ -h 10 ,75 4-1 ,87 4- 2,89 — 1,02 1^ » „ 4-11 ,80 4- 1 ,69 4- 2,64 — 0,95 14 „ „ 4- 12 ,51 4- 2 ,97 4- 2,47 -h 0,50 15 „ „ 4-13 ,18 4- 1 ,80 -t- 2,31 — 0,51 Moyennes 7°, 823 3« ,588 On a. en moyenne (n° 23 — A)782 — 4- 3^,59. Si, avec le coefficient, déterminé par la Commission néer- landaise, d (n° 23 — A) d t = — 0,2386, on calcule les différences de longueur aux températures ob- servées, on obtient les chiffres inscrits dans la quatrième colonne; la cinquième contient les écarts entre l’observation et le calcul. L’erreur moyenne d’une comparaison est de rk 0«q.98, celle du résultat moyen de 0^,33. La réduction à 16°, 44 donne: (n°. 23 _^)16>44=+ 1^,53 (D). ') i) On pourrait calculer la valeur de (n° 23 — A)i6,44 en n’employant que les données memes des observations de mars 1879. On trouverait ainsi -f-0.u,93, au lieu de 4-l.u,53. Ce calcul cependant est moins sûr, parce que la valeur cherchée devrait être obtenue par extrapolation. L’erreur moyenne du chiffre +0W,93 serait en conséquence de + 0!t,50. Comme la valeur du coefficient — 0,2386 comporte une erreur moyenne de + 0.',,022, celle de LES EQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 179 Les quatre valeurs que nous venons de calculer se trouvent récapitulées dans le Tableau IV, qui indique en même temps les conditions essentielles dans lesquelles les expériences ont varié. Nous désignons par / la distance focale, par n le nombre de comparaisons, par æ16>44 la différence n° 23 — A à 16°, 44. TABLEAU IV. Récapitulation de quatre valeurs de (n° 23 — A) à 16°, 44. Date. Compara- teur. f Abouts. Position de A. Observateurs. n *16, 44 Mars 1879. long. laiton normale >) G. Tresca 9 + lu, 53 Oct. 1879. transv. 15 „ platine normale Comm. néerl. 24 + 1 ,26 Sept. 1881. transv . 18 „ platine normale Comm. mixte 24 + 1 ,78 Sept. 1881. transv. 18 „ platine renversée Comm. mixte 24 4-1 ,01 .Si l’on attribue à chaque comparaison le même poids, le résultat moyen serait (n°. 23 — A)16>44 = H- 1^,37 avec les écarts 4- du,16, — 0U,11, 4- O.*1 ,41, — 0 Ceci étant admis, il est facile de calculer le rapport que les -résultats divergents des deux commissions présentent à l’égard de leur probabilité. En effet, chaque comparaison, faite à la température t entre un mètre à traits X et le Mètre des Archives A, fournit une relation : ✓ ix d (X — A) , P = (X— A)0 H —f. t = x„ +yt (a) Soient données quelques séries, composées respectivement de n,, n2 n 3 etc. comparaisons aux températures moyennes t{1 t2, 1 3 .. . etc., et ayant fourni les résultats moyens p,, p2, p3 . . . etc. Si l’on pose T=M’ r. =‘. — Ti r,=t,-T etc. la résolution des équations (a) d’après la méthode des moin- dres carrés donnera _ M . _ l>Pr] XT — [n] ’ y ~ [»r!] ' ' Le poids Pt de la valeur xT sera Pt — M, celui du résultat d’une comparaison simple étant = 1. Le poids d’une valeur xt, calculée avec Xt et y, sera exprimé par l’équation : [n][wr2] ]W2] + (T— ty [n] Pt = 190 J. BOSSCHA. Pour les observations de la Commission mixte, qui ont servi à calculer ( I2 — A)0, on a : [?i] = 35, [n r2] = 714,35, T= 13°, 66, ce qui donne pour le poids de l’équation fondamentale : P 0 = 3,5. Au point de vue de la certitude du résultat final, les 35 observations de la Commission mixte équivalent donc à trois ou quatre observations faites à zéro. Nous avons déjà remarqué que la température moyenne des dix comparaisons faites à basse température par la Commission néerlandaise, est de 0°,09. A cette température la valeur n° 23 — A ne peut différer de celle à zéro que de 0",02 à 0U,03, quantité négligeable. Le poids du résultat des comparaisons ne peut donc différer que d’une quantité négligeable de P o = 10* On voit par ces chiffres combien la circonstance fâcheuse, que la Commission mixte s’est bornée aux comparaisons à tempé- rature ambiante, a abaissé le degré de certitude qu’on peut attribuer à l’équation fondamentale qui en dérive. Celle-ci ne peut être déduite des observations que par une extrapolation, qui est d’autant moins sûre que le nombre des comparaisons faites aux températures extrêmes est plus restreint. L’adjonc- tion de la série de 24 observations à 18°, 45, indûment excluse du calcul de la Commission mixte, élèverait encore le poids P0 à 3,9. Il faut remarquer cependant qu’à l’égard des erreurs de mise au point, qui sont les plus considérables, les chiffres 3,5 et 3,9 sont encore trop élevés. On ne peut pas, à la rigueur, considérer la série 4, faite à 4°, 66, comme composée de 5 ob- servations indépendantes, parce que la seconde comparaison du 9 février n’a pas été précédée d’un nouveau réglage: on a simplement adopté la mise au point de la comparaison pré- cédente faite 5 heures auparavant. En comptant pour une ces deux déterminations, le poids 3,9 se trouverait encore réduit à 3,4. LES ÉQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 191 20. La considération des poids relatifs ne suffit pas cependant pour rendre compte de la différence de 2W,63 entre les résul- tats des deux commissions. Cette quantité est plus du double de la plus forte erreur moyenne qu’on puisse attribuer à une comparaison simple. De plus, la divergence signalée offre un contraste inexpliqué avec l’accord très satisfaisant que nous avons remarqué dans les comparaisons faites aux températures voisines de 16°, 44. 21. Après avoir épuisé toutes les conjectures qui pouvaient se présenter à l’égard de quelque cause d’erreur ou d’incerti- tude dans les mesures de la Commission néerlandaise, j’ai été conduit à soupçonner dans les mesures de la Commission mixte, spécialement dans la série faite à 4°, 66, quelque incor- rection, soit de calcul, soit d’observation. Ce soupçon se trouve justifié par ce fait, qu’il suffit de supprimer les 5 comparaisons de cette série pour obtenir, avec les 54 comparaisons restantes, les équations: x0 = (I2—A)0 = + 4^,23 y = _ o,239. Le poids de cette valeur de x0 est encore 2,1 ; cependant l’écart avec le chiffre calculé d’après les mesures néerlandaises se trouve réduit de 2*M,63 à 0M,73 et la valeur de y coïncide à très peu près avec celle qui résulte des équations précé- demment obtenues, savoir: d(n° 23 — A) _ _ 0 2386 dt ’ qui conduisent à d (I2 — n° 23) _ dt = + 0,02, d (I2 — A) dt — 0,219. Pour décider la question, j’ai consulté les chiffres originaux des observations et des calculs qui ont servi à établir le résultat (I2 — A)4,66 = 4^,430 de la 4me série. On a bien voulu me confier, à cet effet, les 5 feuillets qui contiennent ces données, telles qu’elles ont été revues, corrigées et défini- tivement établies par M. Broch. J’ai bientôt reconnu que la 192 J. BOSSCHA. manière de calculer le résultat moyen d’une comparaison, différait de celle de la Commission néerlandaise. En appliquant cette dernière et en introduisant quelques corrections qui me parurent indispensables, j’obtins (Jj — A) 4,66 = + 3^,58. Ce chiffre s’écarte sensiblement de 4‘w,43 admis jusqu’ici, il se rapproche, au contraire, de 3U,11 que l’on calculerait d’après les 54 comparaisons des autres séries. Pour reconnaître si ces dernières, calculées d’après la même méthode que j’avais suivie pour la série 4, modifieraient les résultats, j’eus encore l’occasion de consulter les chiffres origi- naux. Il en est résulté que j’ai, en définitive, compris toutes les déterminations dans un calcul d’ensemble, différant de celui de la Commission mixte en trois points principaux, savoir: 1. la manière de calculer le résultat brut de chaque compa- raison : 2. la correction pour différence de température ; 3. la correction de la mise au point d’après la méthode Cornu. 22. Nous allons premièrement indiquer les motifs pour les- quels j’ai suivi sous ces trois rapports d’autres règles de calcul. I. Calcul du résultat brut d’une comparaison. Dans chaque comparaison de deux mètres X et A, la différence X — A s’obtient par un nombre impair de mesures alternatives de X — D et A — Z), D étant la distance des axes des micros- copes. Ce nombre était de 7 dans les mesures néerlandaises, de 5 dans celles de la Commission mixte. Dans le cours d’une comparaison la position des microscopes est sujette à varier. Lorsque cette variation est proportionnelle^ au temps et qu’elle a sur la valeur observée de X — D et de A — D le même effet, celui-ci se trouve éliminé par suite de l’ordonnance symétrique des mesures, si l’on retranche de la moyenne des valeurs X — D la ^moyenne des valeurs A — D. Ce cas se pré- sente dans la comparaison de deux mètres à traits entre eux. Ce n’est, en effet, que la composante parallèle à l’axe des mètres LES EQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 193 qui, dans le mouvement des microcopes, en faisant varier D, affecte les valeurs X — D et A — D de quantités égales, sensiblement proportionnelles au temps, lorsque le maniement des microscope se fait avec quelque précaution et qu’il ne survient aucun trouble dans la marche régulière de l’expé- rience. C’est ce qui ressort pleinement de la série de 30 com- paraisons, exécutées en 1880 par deux Membres de la Commis- sion néerlandaise et M. G. Tresca. En introduisant dans le calcul de chacune de ces comparaisons une variation proportionnelle au temps et égale pour les deux différences X — D et A — D, on trouve pour leur erreur moyenne d’après les trois observateurs, 0“,152, 0U,134, 0U,176, alors que les erreurs moyennes d’un simple pointé sont déjà 0lt,123, 0a,112 et 0lt,120. Si l’on peut conclure de ces chiffres que la loi de variation adoptée exprime avec une approximation suffisante la marche de l’expérience, les détails des écarts montrent encore qu’il n’y a pas lieu d’admettre une formule plus compliquée et que, plus parti- culièrement, une variation proportionnelle au carré du temps n’est nullement indiquée par ces mesures. En effet, s’il en fût autrement, il faudrait que, dans les écarts des 7 mesures de chaque comparaison, il y eût une prépondérance de signe prononcée dans les trois premiers d’un côté et les quatre derniers de l’autre. Or, rien de tel ne se présente, puisque la somme des 30 x 3 premiers écarts n’est que de — 0",49, ce qui n’indique qu’un écart moyen de — 0W,005, valeur qui échappe à toute mesure. La régularité de la variation proportionnelle au temps est encore apparente dans les chiffres qui expriment la valeur de la variation de D , survenue dans l’intervalle de deux mesures consécutives. Les trois observateurs ont obtenu individuelle- ment: O'1, 066, 0,064 et 0,066. 23. Le cas est différent lorsqu’il s’agit de comparer un mètre à traits avec un mètre à bouts. La composante verticale du mouvement des microscopes fausse la mise au point et fait varier la longueur apparente A du mètre à bouts d’environ 194 J. BOSSCHA. un micron par centième de millimètre de déplacement du microscope. Cet effet ne se produit pas sur le mètre à traits. Il faut donc distinguer deux variations proportionnelles au temps : celle, a, de X — D et celle, p, de A — D, dont la dernière représente l’effet combiné des variations de D et de A. Les sept mesures consécutives d’une comparaison fournis- sent ainsi les équations X — D = /*, A — D + P “ /* 2 X — D + 2 « = u3 A — D -f- 3 p nz u4 X — D - 1- 4 a ==: /* g A — D 5 p — /* g X — D 6 a “ /*7. Dans ces équations A représente la longueur apparente du Mètre des Archives répondant à la mise au point du com- mencement des mesures, c’est-à-dire celle qui se rapproche le plus de la mise au point que l’on a jugée être la plus exacte. On en tire: X — A — } ([il + ^3+^5 -h/*7) — i + + 3 (P — «) «=Yü[3 0*7 — ^l) + <“5 — ^3 i P — T 1^6 ^2 I > de sorte que le calcul de Z — A revient, en définitive, à poser: X — A — - -g’jj 1 42/* j — 35/* ^ H- 24/* 3 — 20/* ^ -t- 6/* 5 q- 25/* g — 8/* 7 1 . Le mouvement en hauteur des microscopes provient de deux causes, savoir, 1°. d’un résidu d’élasticité qui fait continuer le mouvement des derniers réglages ; 2°. de la dilatation du corps des microscopes. La première peut agir tantôt dans un sens, tantôt dans l’autre ; la seconde est plus constante, parce que la présence de l’observateur produit toujours une élévation de température, appréciable même dans l’intérieur de la cloche de cuivre qui enveloppe le comparateur. Comme le mouvement descendant de l’objectif diminue la longueur apparente du mètre à bouts, il est probable que, dans la moyenne d’un LES ÉQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 195 nombre suffisant de mesures, les valeurs négatives de fi — « prédominent. Les 25 comparaisons de la Commission néerlan- daise, qui ont permis de calculer cette valeur, ont, en effet, donné en moyenne : (9 — a — — 0U,09. Pour les cinq mesures qui constituent une comparaison de la Commission mixte, on a X — A = ^ (fil A- p 3 + (W5) — y 0*2 + 2 ((? — «) l*= T 0*4 — M 2) « = T (#*5 — /*l)> ce qui revient à X — A ” -g- (5(u j — 9/4 2 -b 2/4 3 — r— 3^e4 — /4 5 ). Le nombre plus restreint des mesures rend moins sûre la détermination de /9 — «. Cependant, on trouve encore, en moyenne, (ï — a = — ffw,024. Dans le calcul de la Commission mixte, on a procédé d’une manière différente. On a supposé que la variation due au déplacement des microscopes était la même pour X — D et pour A — D , et on a, de plus, admis qu’elle s’exprime par une formule à deux termes at-\-cctt2, ce qui conduit à l’équation X — A = i (,<*! — 4^2 + 6 — 4 + fi5). La première de ces suppositions me paraît incompatible avec les causes qui produisent la variation, la seconde ne se trouve pas suffisamment confirmée par l’expérience. 24 II. Correction pour différence de température. Lorsque le comparateur a été laissé en repos pendant quelque temps, les thermomètres des deux règles accusent des températures à très peu près identiques. Dans les expériences de la Commis- sion néerlandaise, les différences moyennes, — sans égard aux signes, — ont été de 0°,001 à la température ordinaire, de 0°,021 aux basses températures. Dans le cours d’une comparaison, la marche ascendante de la température de l’enceinte peut causer des différences dans les deux thermomètres. Ces écarts s’ac- cusent encore au commencement d’une comparaison, lorsque celle-ci a été immédiatement précédée d’une autre. Il faut, 196 J. BOSSCHA. dans ces cas, nécessairement en tenir compte, en appliquant une correction au résultat d’une comparaison ; dans les calculs de la Commission néerlandaise on l’a évaluée à 0U,085 par centième de degré de différence. Pour la valeur de (n° 19 — ^4)i7,6i la correction moyenne a été de 0U, 045, pour (n° 19 — ^4)0elle a atteint — 0a,20. La correction pour différence de température a été entière- ment négligée par la Commission mixte. Presque insignifiante pour les séries 1, 2, 3, faites à la température ordinaire (18° à 15°), elle est assez considérable pour les séries à basse température, ainsi qu’il résulte des valeurs suivantes: Série 1, correction — 0,047 2 „ - 0,014 3 „ - 0,114 4 „ — 0,383 5 „ — 0,188 On a admis le coefficient 0,087 comme exprimant en microns et pour un centième de degré centigrade la dilatation moyenne des deux règles comparées. 25. Notons ici que la série 4, faite à 4°, 66, se signale par les conditions très défavorables à l’égard de l’équilibre ther- mique. L’élévation moyenne en dix minutes a été de 0°,093 pour le thermomètre de la règle i2, de 0°081 pour celui du Prototype. 1 ) Pendant les deux comparaisons du 9 février, les thermomètres se sont même élevés de 0°,27, ce qui correspond à un allongement des règles de 2W,30. Il est peu probable que, dans ces conditions, les deux mètres suivent avec la même promp- titude le mouvement ascendant de la température. La règle I2, ayant par unité de masse une superficie plus grande que le Prototype, doit se mettre plus facilement en équilibre de température avec l’air ambiant que ce dernier. Celui-ci, de plus, posé à plat sur une bande de velours, se trouve, pour 1 ) Dans les comparaisons faites à la température moyenne 0° par la Commission néerlandaise, ces variations ont été: 0°,025 pour le mètre à traits, 0°024 pour le Mètre des Archives. LES EQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 197 près de la moitié de sa surface, à l’état d’isolement thermique. Le thermomètre de la règle I2, couché dans la rainure supérieure et se trouvant ainsi presque entièrement enveloppé par la matière de la règle, ne peut pas s’écarter sensiblement de la température de cet étalon. Au contraire, celui du Mètre des Archives, appliqué contre la surface plane de la règle, prendra une température intermédiaire entre celles de l’air ambiant et du Prototype et pourra même, lorsque réchauffe- ment de l’enceinte est rapide, se rapprocher beaucoup plus de la première. ’) Il est clair que, dans ces circonstances, on attribuera au Prototype une température plus élevée qu’il ne possède réellement, ce qui doit conduire, en définitive, aune évaluation trop forte de la différence I2 — A. 26. III. Application de la méthode Cornu. L’influence d’un réglage défectueux des microscopes par rapport à la parfaite netteté des images, tant de l’objet visé que des fils du micro- mètre, a été étudiée dans l’Annexe I de la ^Relation” de la Commission néerlandaise. Le résultat de cette analyse peut être représenté par la construction géométrique suivante. Soient 00 \ la première surface réfringente du système optique, formé par le microscope et les milieux réfringents de l’œil, et PP, le plan de vision distincte, c’est-à- dire : le plan conjugué de la rétine par rapport au système optique. C’est dans le plan PP, que l’observateur estime apercevoir les objets dont les images sont formées sur la rétine. Lorsque le point visé se trouve en g, en dehors du plan PP „ la figure de diffusion i) Dans les opérations de la Commission mixte on n’a pas fait marcher le thermométrographe de Redier. qui permet de suivre assez exactement les variations de la température de l’air ambiant. Archives Néerlandaises, T. XXV. 14 198 .T. BOSSCHA. que les rayons, émanés de q, forment sur la rétine, apparaîtra à l’observateur comme une aire lumineuse placée en PP, ; cette aire est la section, par ce plan, du cône des rayons lumineux qui, partis de g, atteignent l’objectif. Dans l’application du procédé Fizeau la moitié CO, de l’objectif se trouve soustraite aux rayons incidents, la figure lumineuse sera donc un demi- cercle. Lorsque l’observateur, en réglant la distance Cq , laisse subsister l’erreur de mise au point q, il ne distingue pas les dimensions de l’aire de diffusion et estime apercevoir en PP, un seul point lumineux e. Le lieu de ce point dépendra de la manière dont la lumière incidente, venant de q, est distri- buée sur l’objectif. Je désigne par le terme : centre d'éclairement par rapport au point visé le point P, où la droite, menée par e et g, rencontre l’objectif. Il est très probable que ce point coïncide avec le centre de gravité de la surface éclairée, si l’on attribue à chaque élément de cette surface une densité propor- tionnelle au degré d’éclairement, dû aux rayons venant de q. Dans le cas où l’observateur a bien ajusté l’oculaire par rapport aux fils micrométriques, il est clair que le plan de ces fils sera le plan conjugué de PP, par rapport au système optique formé par la partie du microscope, qui est comprise entre la face extérieure de l’objectif et le réticule micrométrique. Si, au contraire, il a laissé subsister quelque erreur de mise au point de l’oculaire, le plan conjugué des fils tombera en dehors de PP,, par exemple en PP. De même que pour le point q) il se produira alors une erreur de vision et de jugement par rapport à la position du centre du réticule ; l’observateur estimera que ce centre coïncide, dans le plan de vision distincte, avec e,, point d’intersection de la droite qui joint l’image f avec le centre d’éclairement par rapport aux rayons qui semblent partir de. cette image. En raison de la distance toujours très petite de / et q, le dernier centre d’éclairement ne différera pas sensi- blement de P. Il en résulte que les deux points q et /, qui se trouvent en réalité sur l’axe optique et dont les images devraient, par conséquent, se couvrir au milieu du champ, se LES EQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 199 montreront en e et et, distants entre eux de e et qui sera l’er- reur Z due à la mise au point. En négligeant, par rapport à la distance focale p C du microscope, les petites distances p q et pf , on a EC. pC Lorsque, dans l’application du procédé Fizeau, la moitié libre de l’objectif est uniformément éclairée par les rayons passant 4 OC par q, E C sera égal à -x — ou 0,42 OC !). Pour les objectifs employés dans les comparaisons de la Commission mixte on a O C=z:3mm,5, p C = 18mm 2), d’où Z=0, 082 fq. 27. Pour obtenir une mise au point aussi exacte que pos- sible, M. Cornu déplace devant le microscope un écran à fente, parallèle à la direction des fils du micromètre, de manière que le centre de la bande lumineuse admise sur l’objectif occupe alternativement deux points G et Gr Nous désignerons par h la course constante de la fente. Il est clair que, lorsque l’on passe de l’une des deux positions G à l’autre Gtf la distance apparente du fil / au point visé q variera de y = l!lk. pC On mesure y dans cinq positions, à intervalles égaux, du mi- croscope; les valeurs observées y,, y 2/3? 20 2/ 5 sont por- tées comme ordonnées sur un diagramme, dont l’axe des abscisses représente les lectures régulièrement croissantes m,, m2, m3, m4 et m5 des tambours de réglage. On détermine 1) La vérification expérimentale a donné 0,47. Voir ,, Relation” §§ 58 et 59. 2) La distance focale des objectifs, employés en 1879 par la Commis- sion néerlandaise, a été calculée à lSm™ d’après les mesures faites par M. Oudemans. On a, en 1880, remplacé ces objectifs par d’autres qui ont élevé à 0.u,367 et 0.u,3851es valeurs, précédemment obtenues, 0W, 308 et 0.u, 316 d’une division du tambour des micromètres. Les nouveaux objectifs avaient donc une distance focale moyenne de 15mm = 18mm, 14* 200 J. BOSSCHA, ensuite le point où la courbe passant par les points (yt, mt) (y2, TOj), etc. coupe Taxe des abscisses. La lecture mc du tam- bour. représentée par ce point, indiquera la position du mi- croscope pour laquelle y , et par conséquent aussi fq , est zéro. On obtient ainsi un réglage, qui ne sera pas nécessairement celui de la vision la plus distincte, mais pour lequel il y a compensation des erreurs des mises au point de l’objet visé et des fils micrométriques, par suite de la coïncidence des points f et q. Avant de commencer les comparaisons on ajuste le microscope à la lecture mQ du tambour de réglage. H faut faire ces opérations consécutivement sur les deux bouts du mètre, d’un côté au moyen du microscope, de l’autre en abaissant on relevant la table qui porte le Mètre des Archives. Le procédé rend ainsi nécessaire la présence assez prolongée de l’observateur près de rinstrument, ce qui accé- lère toujours l’élévation de la température de l’enceinte. 28. A part cet inconvénient, la méthode de M. Cornu doit certainement améliorer considérablement les mises au point, lorsqu’elle est appliquée avec des moyens instrumentaux appro- priés. Sous ce rapport, malheureusement, les organes de ré- glage employés paraissent avoir laissé beaucoup *à désirer. Les vis des microscopes et celles de la table n’avaient pas été construites dan3 la prévision d’un emploi pareil. Destinées à servir simplement comme moyens de réglage, on les a, sans autre modification que l’application d’un cercle gradué sur la tête de vis, employées comme vis micrométriques. Comme telles elles ont dû fonctionner dans des conditions les plus défavorables: le microscope, fortement serré dans sa douille, se meut difficilement à frottement dur, et, pour la table, la tête divisée de la vis se trouve à l’extrémité d’une tige qui doit transmettre le mouvement à environ 80 centimètres de distance. Si l’on considère qu’une erreur d’un centième de millimètre dans l’évaluation de la position du microscope ou de la table produit une erreur de 0",82 dans la longueur apparente du Mètre des Archives, on ne s’étonnera pas que LES EQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 201 l'application de la méthode Cornu, dans ces circonstances, ait pu introduire, ainsi que le montrent les Tableaux VII et VIII, au lieu des erreurs accidentelles de la mise du point, d’autres tout aussi considérables. *) 29. Dans ses mesures d’octobre 1879 un des Membres de la Commission néerlandaise a éprouvé toutes les difficultés résultant de l’insuffisance des moyens improvisés pour obtenir une mise au point calculée. M. Oudemans, espérant améliorer la mise au point, en prenant la moyenne de plusieurs déter- minations, a cherché deux ajustements d’égale netteté en deçà et en delà de la vision distincte Cette opération fut faite cinq ou trois fois de suite pour chaque comparaison. La moyenne des dix ou six lectures des têtes de vis fut adoptée comme réglage définitif. L’effet de cette méthode est rapporté dans les termes suivants i) 2). „Les divergences assez fortes que présentent les résultats „ numériques de M. Oudemans sont plus difficiles à expliquer. „Les valeurs relativement faibles des erreurs moyennes des „pointés ainsi que des erreurs moyennes des mesures de M. „ Oudemans, que nous avons déduites des expériences du com- parateur longitudinal, montrent bien la précision habituelle „de ses observations. Il faut donc admettre que la méthode i) Il n’est que juste de remarquer qu’on a dû terminer en peu de jours l’installation complète de l’appareil qui devait servir à appliquer la nouvelle méthode. Pour le montrer, il suffira de rapprocher quelques dates. Les observations de la première série, faites d’après la méthode ordinaire ont été terminées le 16 septembre 1881 . La Commission mixte s’est réunie le 15 septembre (Procès-Verbaux du Comité international, 1881, p. 15) . D’après le rapport de M.Fôrster, ce fut à la suite de l’examen des observations de la première série que la Commission résolut d’appliquer la méthode Cornu. Les mesures de la seconde série ont été faites d’après cette méthode pen- dant la réunion du Comité international, 24 sept. — 4 oct. 1881, elles ont commencé 8 jours après la fin de la première série. Il est clair que, dans ces conditions, on a dû improviser un appareil avec les moyens qu’on avait sous la main. 2 „Relation” § 94. 202 J. BOSSCHA. compliquée, employée par cet observateur pour obtenir un „ ajustement exact, a exposé à des erreurs, soit parce qu’il „est difficile de juger si deux ajustements du microscope sont „ également défectueux mais de sens contraire, soit parce que „les parties du comparateur qui servent à régler la mise au „ point ne permettent pas d’obtenir avec une exactitude suf- „fisante une mise au point chiffrée. Nous avons remarqué, en „ effet, que le temps perdu des vis qui servent à ce réglage est „ considérable. Cela est surtout le cas pour celles qui servent à „ abaisser ou à relever les tables qui portent les mètres. Les „longues tiges qui transmettent le mouvement se tordent sen- siblement avant que la table suive le mouvement du bouton „ divisé. Le défaut d’une relation suffisamment constante entre w les lectures des cadrans divisés dans les différentes séries et „la véritable position des tables apparaît d’ailleurs avec évi- dence si l’on consulte les chiffres des mises au point dans „ celles des séries qui se rapportent à une même combinaison „de deux mètres. On reconnaît qu’il n’existe aucun rapport „fixe entre ces chiffres et les résultats numériques des séries, „ce qui cependant eût dû arriver si, aux mêmes lectures des „ cadrans de réglage, eût répondu un même ajustement de la „mise au point. Il est hien probable que, par les causes que „nous venons d’indiquer, on a perdu tout l’avantage qu’au „ point de vue théorique on était en droit d’attendre de la „ méthode qui consistait à chercher la moyenne de plusieurs ajustements consécutifs et de diminuer ainsi l’erreur probable „de la mise au point adoptée pour la comparaison.” 30. Dans l’emploi de la méthode de M. Cornu on a, pour éviter une trop longue durée des opérations préparatoires, chaque fois déduit la mise au point exacte d’une construction graphique sommaire qui ne pouvait fournir qu’un chiffre approximatif. On a ensuite corrigé le résultat brut de la com- paraison, pour tenir compte de la différence entre le réglage adopté m et celui, m0, calculé plus rigoureusement. La cor- rection de I2 — A est (m — m0) cp , où cp désigne la variation LES ÉQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 203 de longueur apparente que montre le Mètre des Archives lorsque, — la moitié de l’objectif étant découverte, — la lec- ture du cadran de réglage monte d’une unité. Aux deux bouts du Mètre ces coefficients sont différents; on avait trouvé par une série d’expériences préliminaires : au côté gauche (table du Mètre A) , = — 0^,8794 au côté droit (microscope) qp 2 — — 17^,2. 31. Dans le calcul de la lecture exacte m0, on a admis que la courbe qui représente y en fonction de m pouvait, dans sa partie moyenne, être considérée comme coïncidant avec une droite passant par les trois points (y2, m2) (y3, m3) et (y 4mJ- Les écarts que la détermination expérimentale de ces points présentait furent attribués à des erreurs accidentelles, de sorte que, d’après le calcul des moindres carrés, la droite représentative la plus probable dut passer par le centre de gravité des trois points, dans une direction parallèle à la droite menée par (y2, m2) et (y m4 ). Des deux intervalles entre les trois points nommés, l’un est censé être l’intervalle moyen, c’est-à-dire celui dans lequel la valeur y change de signe. Le point d’intersection de la droite calculée avec l’axe des abscisses fait connaître la lecture m0. 32. Ce mode de déterminer la lecture de mise au point exacte n’est pas sans offrir matière à objection. D’abord, il est peu probable, à priori, que la proportionnalité entre y et l’écart de la position de vision distincte se maintienne en dehors de l’intervalle moyen, et l’expérience montre, en effet, le contraire. Quoique les irrégularités dans le fonctionnement des organes de réglage s’accusent très fortement dans les chiffres qui ont servi à calculer la lecture m0, les moyennes d’un certain nombre d’observations donnent encore des résultats passablement constants. Pour le microscope (côté droit), dont les déplacements en hauteur, de lecture en lecture, ont atteint 55u, les valeurs ont été pour les trois intervalles successifs A h a , b, c, dont b représente l’intervalle moyen: 204 J. BOSSCHA. a. b . c. 2e Série (12 observations) 0,245 0,481 0,334 3e Série (12 observations) 0,350 0,422 0,376. On voit que pour l’intervalle moyen l’élément de la courbe est beaucoup moins incliné vers l’axe des abscisses que pour les intervalles extrêmes. L’écart que trois points consécutifs présentent par rapport à une droite unique peut bien, à cer- tain degré, être accidentel par suite d’erreurs de lecture, il est certain que, pour une autre partie, il est systématique par suite de la nature de la courbe: le calcul de m0 doit donc néces- sairement introduire une erreur systématique. 33. Une objection non moins grave concerne le degré d’ar- bitraire que présente la détermination de la correction qu’on applique au résultat brut de chaque comparaison. En effet, pour le second intervalle qui, combiné avec l’intervalle moyen 6, doit fournir les trois lectures servant au calcul, on peut choisir indifféremment soit a, soit c. Il est vrai que l’on pour- rait s’astreindre à la règle de choisir l’intervalle qui est le plus rapproché de la mise au point exacte, ou encore celui des deux A y qui donne la plus forte valeur de mais, en réalité, on n’a suivi aucune règle fixe. L’influence que ce choix peut avoir sur la correction et le degré de liberté qu’on s’est permis dans ce calcul apparaîtront clairement dans l’exemple suivant. Dans la première des comparaisons à 4°, 66 (Série 4) on a obtenu, pour la détermination de la mise au point exacte, les chiffres suivants : Côté gauche. Table du Mètre des Archives. Coté droit. Microscope. Lecture p de la tête Déplacement de Lecture m de la Déplacement de de vis. l’image. tête de vis. l’image. 40 + 18,0 1,00 + 8,0 35 H- 7,0 0,75 - i,o 30 -h 2,0 0,50 - 4,0 25 - 7,0 0,25 - 11,0 20 — 13,0 0,00 - 16,0 LES ÉQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 205 Les déplacements y de l’image sont exprimés en divisions du tambour du micromètre. En partant des lectures 35, 30 et 25, on trouve pour la lecture p0 de mise au point exacte, au côté gauche, p0 = 29,524. Les lectures 30, 25 et 20 donnent, au contraire, p0' = 29,000. Comme la lecture adoptée dans la comparaison a été p — 28,80, la correction serait d’après le premier calcul: (p0 — p) 0,8794= H- 0M,637 d’après le second calcul: (p0r — p) 0,8794= + 0^,176. Au côté droit, les lectures 1,00, 0,75 et 0,50 conduisent à m0 = 0,709. On voit que cette lecture tombe en dehors de l’intervalle moyen. Les trois lectures 0,75, 0,50 et 0,25, qui ne compren- nent pas l’intervalle moyen et qui, cependant, en ce cas ont été employées dans le calcul de la Commission mixte, donnent : mQ = 0,767. Le tirage adopté ayant été m = 0,75, la correction serait d’après le premier calcul (m0 — m) 17^,2 = — ~ 0/^,705 d’après le second calcul ( m0 — m) 17,a,2 = + 0^,292. Le résultat brut de la comparaison a été 12 — A = 3^,171. Pour la correction on a employé : au côté gauche, le chiffre du premier calcul, au côté droit, celui du second. Il en est résulté : I2 — A ~ -h 4^,100. Si l’on avait employé les deux autres chiffres, on aurait trouvé: 12 — A = + 2-M,642. La différence entre ces deux résultats, également admissibles, dépasse la plus grande valeur que l’on puisse attribuer à l’erreur 206 J. BOSSCHA. moyenne (Tune comparaison, exécutée en ajustant la mise au point de la manière ordinaire. 34. Que la correction apportée au résultat direct d’une com- paraison a été non seulement à un certain degré arbitraire, mais parfois décidément fausse, c’est ce qui ressort pleinement dans les cas où l’observateur, pour une des 5 lectures p ou m, est tombé, par hasard, sur un réglage qui ne donnait aucun dé- placement de l’image et qui, par conséquent, doit être considéré comme exact. Il est clair, qu’on n’avait alors qu’à conserver cette lecture pour la comparaison, et c’est aussi ce que les obser- vateurs, MM. Tresca et Benoit, n’ont pas manqué de faire. Cependant, on a encore appliqué le calcul de la droite passant aussi approximativement que possible par trois points consé- cutifs de la courbe y = / (m), et modifié le résultat de la comparaison par une correction qui, par exemple, pour la première des six comparaisons de la série 5 s’est élevée à -h l u 12. 35. Il me paraît que le calcul des lectures p0 et m0 est à la fois plus simple et plus sûr, si i’on procède par interpolation directe entre les deux lectures qui comprennent l’intervalle moyen, ce qui offre encore l’avantage d’exclure tout choix arbitraire de la part du calculateur, 36. C’est en partant de ces règles, 1°. par rapport au calcul du résultat brut d’une comparaison, 2°. pour la correction relative à l’inégalité de température des deux mètres, 3°. pour la correction des mises au point adoptées, que j’ai obtenu, comme résultats corrigés des cinq séries, ceux inscrits dans la quatrième colonne du Tableau suivant, qui contient de plus le calcul des valeurs de x0 = (I2 — A)Q et i/ = d(I2 — A) dt que l’on en déduit. d’après les observations corrigées de la Commission mixte. LES EQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 207 208 J. BOSSCHA. 37. Avec ces valeurs de x0 et y la somme des carrés des écarts que présentent les comparaisons isolées est [**] = 94,04, d’où l’on déduit: l’erreur moyenne d’une comparaison m = ± 1^,28 „ » de æi5,6 =(I2 — -4)15,6 rrir = + 0 ,17 „ „ „ æ0 =I2—A)0 ml)=±0 ,65 L’erreur probable de l’équation métrique de I2 serait donc de ± 0,w,44. Ce chiffre élevé ne peut pas surprendre si l’on considère les causes d’erreur auxquelles ces mesures ont été exposées et surtout le degré exagéré dans lequel, par suite de la distri- bution peu appropriée des séries à l’égard des températures, les écarts se font sentir dans la valeur de x 0. En effet, si nous conservons les notations du n° 19, les équations _ [wp r] _ [np] ■ V ~ [n r2] ’ ° ~ [îi] V donnent Ay Ax = [nVJ (jl +n2T,APl+e te.) I=K (”'A^'+”2AP2+etC')— [«^]("‘ l,AP' etc. )• c’est-à-dire : A y — -h 0,06560 ApI H- 0,02554 A p2 — 0,00646 A p3 — 0,05281 Ap4 — 0,03188 A p5 A x0 — — 0,61756 Ap y — 0,19561 A p2 + 0,30420 A pz -h 0,90954 Ap4 + 0,59949 A p5. Dans cette dernière formule, le coefficient le plus élevé ap- partient à la 4me série qui, en même temps, a été la moins nombreuse. Une erreur e d’une seule comparaison de cette série fait varier de 0,1 8* le résultat final des 59 comparai- sons. Or, cette série est caractérisée, non seulement par les conditions exceptionnellement défavorables à l’égard de la stabilité de la température, mais aussi par cette circonstance LES EQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 209 fâcheuse que les corrections de mise au point, source d’erreurs très importante, y ont été particulièrement élevées. C’est ce que montre le Tableau suivant où nous avons inscrit séparé- ment pour chaque comparaison les corrections relatives aux deux bouts du Prototype. TABLEAU X. Corrections de mise au point. Gauche. Droite. Gauche. Droite. Gauche. Droite. Série 2. Série 3. Série 4. + 0,065 4-0,264 4- 0,040 — 0,131 4- 0,078 4- 0,478 — 0,158 4-0,189 4-0;879 — 0,197 — 0,066 - 0,086 + 0,046 — 0,062 - 0,050 4- 0,025 — 1,637 4- 0,075 — 0,147 — 0,047 4-0,132 0,000 -1,637 4- 0,075 — 0,974 0,000 4- 0,484 4-0,139 4- 0,010 4-0,107 — 0,037 4-0,149 j 4- 0,055 - 0,032 Série 5. 0,000 — 0,029 - 0,059 4-0,043 - 0,055 0,000 0,000 — 0,140 ! 4- 0,086 - 0,209 - 0,022 4- 0,108 -{- 0,098 4-0,172 i — 0,233 - 0,074 - 0,172 0,000 — 1,353 0,000 4-0,377 — 0,143 - 0,070 - 0,134 4-0,147 — 0,266 4- 0,168 -0,074 4-0,550 — 0,221 4- 0,066 — 0,068 + 0,503 4-0,169 - 0,220 - 0,134 La plus forte correction atteint la valeur de 1 f/,637. Elle appartient à la série 4, la moins nombreuse, et, par un ha- sard regrettable, c’est justement celle qu’on a dû appliquer deux fois de suite, parce que les 3me et 4me comparaisons de cette série ont été exécutées avec le même réglage. Il en est résulté que la correction due à la mise au point du 9 février 2 fait, à elle seule, varier la valeur (J2 — A)0 de l/',637 x0,90954x^ soit de près de 0,«,60. Or, si ces corrections sont déjà très peu sûres, à cause des erreurs accidentelles dues aux organes de réglage, nous allons voir que les coefficients et cp2, auxquels elles sont pro- portionnelles, peuvent comporter une erreur constante qui, 210 J. BOSSCHA. pour le coefficient de gauche w,02 par degré supérieure à celle des règles en métal du Conservatoire. Nous avons ajouté, dans le Tableau qui comprend les nouvelles équations relatives, les équations fonda- mentales de toutes ces règles, y compris le mètre international, en diminuant, d’après le résultat de cette étude, de 2^,63 l’équation du mètre n° 6. Il résulte de ce tableau que parmi les 35 nouveaux étalons nationaux il y en a 17 dont l’équation s’exprime par un chiffre dépassant 3 microns. Le mètre qui se rapproche le plus du Mètre des Archives est le n° 30, échu à la Serbie ; la dif- férence ne serait que de — 03 M 25 — 3 n V 6,4 // 11 — 0 ,8 // v 6 ,0 // 26 — 4 ,o „ // 3,0 // 12 — 13 ,4 ,/ « 4 d // 27 4- 5 ,8 H // 4,5 ff 13 — 4 ,o // // 4 4 // 28 - 1 ,2 // // 4,2 // 14 — 4 ,6 // // 5 ,5 // 29 4-23 ,o // // 6,1 // 15 + 4 ,3 // // 6 ,3 // 30 —13 ,4 n // 4,9 // 16 + 1 ,6. 10-3 ±3 ,0 10-3 31 -h 7 ,0. 10- 3 ± 4,2 - Au sujet de ce tableau, M. Benoit remarque ce qui suit: „Le premier coup d’œil jeté sur les résultats de ces obser- i) Rapport de M. Benoit p. 48. 222 J. BOSSCHA. „vations montre que les dilations de toutes ces règles sont „ extrêmement voisines les Unes des autres, tellement voisines „que, dans bien des cas, les différences restent au dessous de „ leurs erreurs probables et que la réalité de ces différences „n’est, par conséquent, rien moins que démontrée.” Il nous semble qu’il faut faire un pas de plus vers la con- clusion que cette remarque laisse entrevoir. Ici encore, les différences de dilatation sont trop faibles pour pouvoir être constatées. L’ensemble des résultats obtenus n’aurait pas pu être autrement dans le cas où les 31 règles eussent eu des dilatations réellement identiques. En effet, dans le cas supposé, les erreurs inévitables de l’observation produiront des différences apparentes. Celles-ci peuvent servira calculer l’erreur probable de chaque détermination. L’erreur ainsi trouvée sera néces- sairement plus forte que celle qui se calcule par les écarts que présentent les 8 mesures de chaque détermination isolée, parce que le renouvellement de l’expérience, l’installation d’une nouvelle règle, un nouvel ajustement de l’appareil, le changement d’observateur peuvent introduire des différences d’une détermination à l’autre. De plus, les écarts que les 30 déterminations présentent par rapport à une dilatation moyenne, qui s’appliquerait à toutes les règles doivent suivre la loi des erreurs accidentelles savoir, 1°. le nombre des écarts positifs doit être égal à peu près à celui des écarts négatifs; 2°. la somme des écarts doit être sensi- blement nulle, c’est-à-dire, la dilatation apparente moyenne des 30 règles ne doit pas différer beaucoup de celle de la règle n°. 6 ; 3°. le nombre des écarts compris entre certaines limites x et x 4- Ax doit décroître à mesure que x est plus élevé. Or toutes ces propriétés se retrouvent dans les chiffres qui, d’après le Tableau, exprimeraient des différences de dilatation. En effet: 1°. Parmi les 30 différences il y en a 15 positives, 15 négatives. 2°. La dilatation moyenne des trente règles ne diffère de celle du mètre n°. 6 que de 2.10-3, c’est-à-dire 0*u,002 par de- LES ÉQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 223 gré, quantité trop faible pour pouvoir être déterminée avec quelque certitude. 3°. Parmi les différences il y en a: 13 comprises entre 0 et 5 X 10~3 8 „ » 5 et 10 „ „ 4 „ „ 10 et 15 „ „ 3 „ , 15 et 20 „ ,; 2 au dessus de 20 „ „ Enfin, la somme des carrés des différences, considérée comme erreurs accidentelles, fournit l’erreur probable d’une détermi- nation T^.IO-3, tandis que l’erreur probable d’une détermina- tion, déduite des 8 mesures qui composent cette dernière, varie entre 8^,10— 3 et 2^,1 0~3 et est en moyenne 5^,10“ 3. Dans ces circonstances, la seule conclusion qu’on puisse légitimément tirer de ces expériences peut se formuler en ces termes : Dans les limites de température 0° à 38°, les 30 métrés en métal de Matthey n’accusent soit entre eux , soit avec les métrés I2 et n°. 6, aucune différence de dilatation appréciable . A plus forte raison en est-il ainsi entre 0° et 20°. On a comparé de la même manière avec la dilatation du n°. 6 celle de 4 étalons en métal du Conservatoire. Les dif- férences obtenues ont été: d ( Xc — n°. 6) dt Écarts de la moyenne. Erreur probable de la détermination. no. 1 - (F, 0137 5^,4.10_3 8,4.1 0-3 3 — 0 ,0273 8 ,2 , 5,8 » 12 — 0 ,0174 1 ,7 // 7,8 // 13 - 0 ,0179 1 ,2 // 5,7 , moyenne : — 0 ,0191 Les écarts que ces chiffres présentent entre eux sont encore plus faibles que ceux du Tableau précédent. Par contre, la différence de dilatation avec le mètre n°. 6 ressort avec une certitude suffisante. 224 J. BOSSCHA. Il est donc très probable qu’on a, comme équation valable pour tous les mètres Xm en métal Matthey et tous les mètres Xc en métal du Conservatoire : d(Xu-Xc) _ + 0,«)02_ at On peut vérifier les conclusions, auxquelles nous sommes arrivé relativement à l’égalité des coefficients de dilatation dans les mètres de même métal, au moyen des 196 compa- raisons qui ont été faites pour établir les 31 équations des mètres nos. 1 à 31 avec I2. Toutes ces comparaisons ont été faites à des températures différentes, variant de 4°, 152 à 18°, 544. S’il y a lieu d’admettre que les dilatations des règles diffèrent entre elles, leurs équa- tions relatives varieront avec la température et il faudra né- cessairement, pour obtenir des résultats exacts, ramener les données fournies par les comparaisons à une température uni- forme. C’est, en effet, ce qui a été fait dans le calcul commu- niqué par M. Benoit. Toutes les différences de longueur ob- servées ont été réduites à 0° au moyen des coefficients delà page 221, et c’est avec ces chiffres corrigés qu’on a procédé au calcul d’ensemble des J 96 comparaisons. Or, il est évident que, si réellement les comparaisons permettent de distinguer des dilatations différentes, la réduction doit avoir amélioré le résultat et abaissé l’erreur probable. Un calcul exécuté en négligeant la correction, ou, ce qui revient au même, en attri- buant à toutes les règles des dilatations égales, peut donc servir à constater jusqu’à quel point des comparaisons faites avec les nouveaux étalons dans les mêmes conditions de précision que celles du Comité auront besoin qu’on tienne compte des différences dans les formules de dilatation. Il suffira, à cet effet, de comparer l’erreur probable déduite du calcul avec les éléments corrigés à celle que l’on obtient par le calcul avec les chiffres bruts. J’ai entrepris cette vérification donc voici les résultats. LES ÉQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. 225 La somme des carrés des 196 écarts est de 5,0248 d’après le calcul (Benoit) avec les chiffres corrigés, 4,8174 „ „ nouveau calcul avec les chiffres bruts. Les erreurs probables d’une comparaison diffèrent à peine; elles sont 0*w,1177 d’après le calcul de M. Benoit 0^,H48 „ nouveau calcul. Il en résulte que les 196 comparaisons, faites entre les nou- veaux étalons à des températures variant de 4°,1 à 18°, 5, dans les limites de précision qu’elles comportent, satisfont un peu mieux à l’identité de dilatation de tous les mètres qu’aux formules de dilatation du Tableau A. Les comparaisons des mètres en métal du Conservatoire ne peuvent pas fournir la même preuve, parce que les tempé- ratures ont été trop peu différentes. Elles ont toutes été faites aux températures de 4°, 4 à 4°,0, à l’exception des 4 compa- raisons avec le mètre n°. 6 ou M qui ont été faites de 8°, 2 à 8°, 4. Nous faisons suivre ici les équations des nouveaux étalons par rapport au mètre international M , telles quelles résultent du nouveau calcul; elles sont au moins aussi probables que celles sanctionnées par la Conférence et doivent être préférées lorsque l’on admet, conformément aux conclusions précédentes, que les différences de dilatation des étalons de même métal sont trop faibles pour permettre de les évaluer. Nous ajoutons les équa- tions des nouveaux étalons relatives au Mètre des Archives en posant, d’après le résultat de notre discussion, M = n°. 6 = Archives — 2^,63. La dernière colonne renferme les équa- tions métriques admises par la Conférence générale. 226 J. BOSSCHA. LES EQUATIONS DES NOUVELLES COPIES, ETC. Equations des nouveax étalons. N° 6 = mètre international. lm = mètre des Archives à 0°. Mètres en métal de Matthey. Equations relatives. Equations métriques. Valeurs admises. Nc ' 1 = N° 6 — l/'.OO — 1 m — 3^,63 — i-“,i » 2 » » — 1 ,27 jj jj — 3 ,90 — 1 ,5 JJ 3 jj n 4- 0 ,38 jj jj — 2 ,25 4 0 ,5 n 4 jj y — 1 ,08 jj jj — 3 ,71 — 0 ,8 jj 5 jj » + 2 ,27 jj jj — 0 ,36 4 2 ,3 JJ 7 jj + 0 ,24 jj jj — 2 ,39 4 0 ,3 jj 8 » » — 0 ,42 jj jj — 3 ,05 — 0 ,4 n 9 JJ » — 1 ,24 jj jj — 3 ,87 — 1 ,2 JJ 10 » » — 0 ,69 jj u — 3 ,32 — 0 ,8 jj 11 » » — 0 ,55 jj jj — 3 ,18 — 0 ,5 JJ 12 JJ — 0 ,40 jj jj — 3 ,03 — 0 ,3 jj 13 jj » -f- 0 ,19 _jj » — 2 ,44 4 0 ,3 jj 14 JJ » — 1 ,36 jj jj — 3 ,99 — 1 ,3 jj 15 jj >? + 0 ,95 jj jj — 1 ,68 4 0 ,9 jj 16 jj jj — 0 ,59 jj jj — 3 ,22 — 0 ,6 jj 17 jj jj 0 ,95 jj jj — 1 ,68 4 0 ,9 JJ 18 jj u — 1 ,17 jj jj — 3 ,80 — 1 ,o r> 19 JJ jj + 1 ,12 jj jj — 1 ,51 4 1 ,1 jj 20 jj jj + 0 ,96 jj jj — 1 ,67 4 0 ,8 jj 21 jj jj + 2 ,54 jj jj — 0 ,09 4 2 ,5 JJ 22 jj jj — 1 ,16 jj jj — 3 ,79 — 1 ,3 n 23 jj jj — 0 ,96 jj jj — 3 ,59 — 1 ,o jj 24 jj jj + 1 ,91 jj jj — 0 ,72 4 1 ,8 jj 25 » jj + 0 ,63 jj jj — 2 ,00 4 0 ,7 jj 26 V jj + 0 ,77 jj jj — 1 ,86 4 0 ,9 jj 27 n jj — 1 ,50 jj jj — 4 ,13 — 1 ,6 JJ 28 n jj + 0 ,47 jj jj — 2 ,16 4 0 ,5 jj 29 n jj — 2 ,52 jj jj — 5 ,15 — 2 ,8 n 30 V jj -h 2 ,59 jj jj — 0 ,04 4 2 ,8 jj 31 n jj + 0 ,62 jj jj — 2 ,01 4 0 ,6 h V jj + 5 ,94 jj jj H- 3 ,31 4 6 ,0 M n jj -h 0 ,00 jj jj — 2 ,63 4 0 ,0 Mètres en métal du Conservatoire. Ne > 1 — N° 6 + 8/*, 34 — 1?» -h 5.w,71 4 81*, 3 » 3 » jj + 2 ,68 jj jj 4 0 ,05 4 2 ,7 jj 12 » jj + 3 ,34 jj jj 4 0 ,71 4 3 ,3 jj 13 » jj H- 3 ,31 jj jj 4 0 ,68 4 3 ,3 Arch Neerl TomeXXV PI- 1- Cattie del. LitT\ ftririK &P injg'er. ■ ' * ♦ KWWb DEUXIÈME LIVRAISON. Dr. J. Th. Cattie, Sur un cas de cohésion et de dialyse dans le cypripedium barbatum Lindjey, var. superbum Page 101. . A. Lorentz, Sur la théorie moléculaire des dissolutions diluées » 107. . Zwaardemaker Cz., Sur la norme de l’acuité olfactive (olfactie) * 131. . Zwaardemaker Cz., Anosmies d’origine nerveuse » 149. Bosscha, Les équations des nouvelles copies du Mètre des Archives * 165. CONDITIONS DE L’ABONNEMENT. Les Archives Néerlandaises des sciences exactes et naturelles paraissent à des époques indéterminées, en livraisons de 6 à 12 feuilles d’impression, avec un nombre illimité de plan- ches coloriées et noires. Trente feuilles forment un volume. Avec la dernière livraison de chaque volume les souscripteurs reçoivent gratis une table des matières, un titre général et une couverture. Les abonnements engagent à un volume seulement. Les livrai- sons ne se vendent pas séparément. Le prix du volume, avec les planches, est fixé à fl. 6. — . On souscrit chez l’éditeur et chez tous les libraires des Pays-Bas et de l’étranger. Un certain nombre de collections des tomes I à XX (années 1866 — 1 886) sont mises à la disposition des Savants, Bibliothèques ou Etablissements publics au prix de 80 florins (168 francs, 134 Reichsmark). S’adresser directement au Secrétaire de la Société . hollandaise des Sciences à Harlem. . : - HARLEM. — IMPRIMERIE DES HÉRITIERS LOOSJES. TOME XXV 3me et 4me Livraisons. ARCHIVES NÉERLANDAISES DES SCIENCES EXACTES ET NATURELLES PUBLIÉES PAR LA SOCIÉTÉ HOLLANDAISE DES SCIENCES À HARLEM, ET RÉDIGÉES PAR B O S S C H A, Secrétaire de la Société , AVEC LA COLLABORATION DE MM. D. Bierens de Haan, C. A. J. A. Oudemans, W. Koster, C. K. Hoffmann et J. M. van Bemmelen. HARLEM LES HÉRITIERS LOOSJES. 1891. PARIS LEIPSIG GA OTHIERS-VILLARS. G. E. SCHULZE. ARCHIVES NÉERLANDAISES D£S Sciences exactes et naturelles. LA BIOLOGIE D’UNE BACTÉRIE PIGMENTAIRE; PAR M. W. B E Y E R I N C K. § i. Habitat et isolement dn Bacillus cyaneo-fuscus. „Colle forte noire.” „Fromage bien/’ En février 1888 je reçus de M. van Lookeren Campagne l), à cette époque chimiste de la fabrique de gélatine de Delft, un échantillon de colle forte colorée en noir et qui, d’après les essais auxquels il l’avait soumise, transmettait facilement par contagion cette couleur à une colle saine, qu’elle rendait ainsi impropre aux usages ordinaires. Je pus m’assurer de l’exactitude de cette observation, et remarquai en outre que, pour reproduire le phénomène avec la même intensité dans des expériences successives, il fallait augmenter progressive- ment la dose de matière servant à l’inoculation ; autrement, les bactéries étrangères faisaient obstacle par leur pullulation excessive. La colle noire exhalait une odeur particulière, rap- pelant celle du sulfure d’ammonium, et elle formait beaucoup plus difficilement gelée que la colle saine. Dans la fabrique, il fut bientôt reconnu que la cause delà calamité résidait dans un tuyau malpropre, à travers lequel 1 ) Actuellement directeur de la station agronomique à Hoorn. Arhives Néerlandaises, T. XXV. 16 228 M. W. BEYERINCK. avait passé de l’eau venant d’un des canaux de la ville, et qui ensuite avait été employé à conduire dans les bassins en tôle, pour s’y prendre en gelée, la dissolution de colle. Aussitôt que ce tuyau eut été nettoyé à fond, l’accident malencontreux cessa de se produire. Mes premières tentatives pour isoler la bactérie que je supposais être la cause déterminante du phénomène n’eurent aucun succès. Comme j’avais dès l’abord observé que l’accès de l’air favorisait la coloration en noir, de sorte qu’il ne pouvait guère être question d’anaérobiose, j’étais curieux de savoir pourquoi un organisme, si manifestement apte à vivre dans la gélatine, ne pouvait être isolé par la méthode de la gélatine. Mais l’explication de ce fait ne se présenta que beaucoup plus tard, après que d’autres sources m’eurent fourni une bactérie pigmen- taire au moyen de laquelle je pus provoquer artificiellement, avec des phénomènes identiques, la coloration en noir de la colle. Je reconnus alors que la contradiction apparente tenait à la facilité avec laquelle cette bactérie éprouve un affaiblis- sement de sa force végétative, à la suite duquel elle n’est plus capable de vivre sur une masse nourricière solide, tout en pouvant encore se développer très bien dans un milieu liquide. Je trouvai en outre que cet affaiblissement était dû à ce que les essais d’inoculation avaient eu lieu à environ 20° C, température qui pour peu de temps est à la vérité très favorable à l’accroissement, mais dont l’action prolongée détermine une dégénérescence. Telle a été ma première rencontre avec la bactérie pigmen- taire dont la description fera l’objet des pages suivantes et que je propose d’introduire dans la science sous le nom de Bacillus cyaneo-fuscus. Ce microbe est aussi la cause, ou du moins l’une des causes, d’une altération assez fréquente dans les fromages de Hollande, surtout dans ceux dits „d’Edam”, altération qui, sous le nom de „bleu”, est très redoutée des fabricants de ces produits et sur laquelle je reviendrai au § 8 du présent Mémoire. LA BIOLOGIE üWe BACTERIE PIGMENTAIRE. 229 Le fromage toutefois, pas plus que la colle forte, n’est le séjour naturel du Bacillus cyaneo-fuscus, car dans la masse caséeuse cette bactérie ne subit pas seulement un affaiblisse- ment, comme dans la colle, mais elle y meurt bientôt, par suite de la formation d’acide sous l’influence de ferments lactiques. L’habitat proprement dit doit donc se trouver ail- leurs, et mes recherches ont appris qu’à cet égard le premier rang, tout au moins, revient au sol et à l’eau. Abstraction faite des expériences exécutées avec du fromage, et dont il sera parlé plus loin, j’ai trouvé et isolé le Bacillus cyaneo-fuscus à six reprises différentes. Il ne me semble pas superflu de mentionner ces cas séparément, vu que j’ai à y rattacher quelques remarques assez intéressantes. La première fois, je rencontrai notre bactérie, en colonie unique, parmi une cinquantaine de colonies de quelques autres espèces, à l’occasion de l’examen d’une infusion colorée, obtenue en laissant séjourner dans de l’eau de conduite quelques racines de Vicia Faba !). La colonie s’était formée sur une gélatine nourricière qui ne contenait qu’une décoction assez concentrée de tiges de Fève et du sucre de raisin. Elle liquéfiait très fortement, et produisait une matière bleue diffusive, tandis que, dans la colonie elle-même, les bacilles morts étaient colorés en brun assez foncé. Dans deux autres cas, l’ensemencement eut lieu sur une gélatine contenant de l’extrait de malt. L’une fois, on avait opéré avec une eau ayant servi à nettoyer des cuves à fermentation; l’autre fois, avec une eau analogue, qui avait traversé un tuyau ordinairement employé à conduire de la drèche fermentée. L’eau provenait d’un des canaux de la ville. • ) La coloration bleue ou violette, qu’on observe si fréquemment lorsque des plantules vivantes de Vicia Faba ont été abandonnées à elles-mêmes dans une eau de conduite très légèrement alcaline, est due à une réaction tannique, exercée par un produit de décomposition des poils et des cellules épidermiques de la radicule sur les combinaisons ferrugineuses de l’eau, réduites par des bactéries. 16* 230 M. W. BEYERINCK. Les colonies présentaient les mêmes propriétés que dans le cas précédent et étaient caractérisées surtout par la teinte bleue de la matière colorante diffusive, qui doit peut-être les faire distinguer, comme variétés, de la forme suivante '). Des expériences directes, avec l’eau de canal, ont fourni dans un cas le Bacillus cyaneo-fuscus. La semence, c’est-à-dire l’eau, avait été versée à la surface d’une gélatine dissoute dans l’eau pure, sans la moindre addition de matière nutritive. La gélatine elle-même avait donc fonctionné comme aliment, et la matière colorante diffusée, au lieu d’être bleue comme dans les cas précédents, avait une couleur brun foncé. Sur un terrain de culture entièrement semblable à celui dont il vient d’être question, des colonies de Bacillus cyaneo- fuscus furent ensuite obtenues dans un seul cas en l’arrosant d’eau de conduite pure, dans d’autres cas par l’ensemencement d’une portion du contenu d’un vase de verre, consistant en eau de conduite additionnée d’un peu de carbonate de magnésie, de Vio% de sulfate d’ammoniaque, de traces de phosphate de potasse, et, comme matière infectante, d’une trace de terre humeuse. Dans ce vase, où les matières organiques provenant de la terre servaient d’aliment aux bactéries et où il se formait beaucoup de nitrite aux dépens du sel ammoniacal, notre bacille s’était manifestement multiplié, car on en obtint, par un seul ensemencement, une demi-douzaine de colonies. Cette observation conduisit à essayer de cultiver le B. cyaneo- fuscus directement au moyen de la terre, et par cette méthode aussi on obtint, dans un cas, un résultat positif. En considérant l’ensemble de ces différentes sources natu- relles, nous voyons que notre bacille pigmentaire, à l’état de liberté, se rencontre toujours dans des solutions nourricières très diluées. Comme les premiers des ensemencements ci-dessus mentionnés avaient toutefois eu lieu sur une gélatine assez concentrée, contenant de l’extrait et du sucre, il était d’emblée i ) Des expériences postérieures ont mis hors de doute que les bactéries pigmentaires de ces trois provenances sont différentes du B. cyaneo-fuscus. LA BIOLOGIE d’üNE BACTERIE PIGMENTAIRE 231 évident que ces terrains plus riches devaient également con- venir, au moins conditionnellement, à la végétation du bacille. Mais quand, sans connaissance spéciale de la biologie de celui-ci, j’essayai de faire, avec les colonies développées sur ces masses concentrées, de nouvelles inoculations, en laissant parfaitement identiques les conditions nutritives et thermiques, il se trouva que dès la seconde ou la troisième réinoculation la croissance avait entièrement cessé. Lorsqu’on réinoculait la matière première qui s’était développée sur le terrain nutritif peu concentré, les végétations pouvaient encore sup- porter plusieurs fois la rénovation; toutefois, dans ce cas aussi, elles finissaient par s’éteindre complètement, de sorte qu’après environ six semaines toute expérimentation ultérieure était devenue impossible, et que, pour obtenir de nouveaux matériaux d’étude, je devais en revenir au contenu du vase de verre et procéder à un nouvel isolement. Ce singulier résultat m’est resté assez longtemps énigmatique, jusqu’à ce que finalement une très remarquable influence thermique, donnant lieu à des changements héréditaires, fut reconnue, sinon comme la condition unique, — car la concentration de l’aliment exerce déjà par elle-même une certaine action, — au moins comme la condition essentielle de la perte de la faculté végétative. Nous verrons plus tard en quoi cette influence consiste ; ici, je me borne à noter que mes expériences d’alors étaient exécutées à la température ordinaire d’appartement en été, de sorte que les cultures eurent à subir parfois une chaleur de 25° C, et pendant un temps plus long des tempé- ratures voisines de 20° C, bien que le plus souvent je pus les maintenir au-dessous de 20° C, à savoir, aux environs de 17° C. § 2. Description de la forme active du Bacillus cy aneo-fuscus. Les bactéries directement provenues de leurs stations natu- relles, aussi bien que celles qui en ont été obtenues, dans 232 M. W. BEYERINCK. des conditions de température appropriées, par la culture sur diverses masses nutritives solides ou liquides, possèdent les propriétés suivantes. Les colonies (PI II, fig. 1), en s’accroissant, liquéfient la gélatine nourricière, avec une intensité variable, suivant que cette gélatine contient plus ou moins de peptone et suivant le degré d’activité végétative des bactéries elles-mêmes. Faisons, pour le moment, abstraction de cette dernière circonstance, et occupons-nous de l’influence exercée sur les phénomènes du développement par les matières nutritives. Avant tout, il faut dire que les expériences dont il va être question ont eu lieu à des températures qui ne dépassaient que de peu 6° C, le plus souvent même restaient un peu au-dessous de ce degré, et se rapprochaient rarement, et seulement pour peu de temps, de 10° C, limite qui ne fut jamais franchie. Pendant les mois d’été, ces basses températures, à variations très lentes, furent trouvées dans une cave, soit sur le sol pavé en briques, soit sur des tables de bois; en hiver, au contraire, on les trouvait dans le laboratoire, sur une table de pierre placée devant une fenêtre. Dans ces conditions, un accroissement très énergique et une très forte liquéfaction s’observent lorsque, pour toute nourriture, il n’est offert aux bactéries que de la gélatine, sans addition d’aucune sorte. Les colonies qui se forment ainsi sur des couches épaisses de gélatine, contenues dans des boîtes de verre, sont passablement fluides et consistent en gélatine liquéfiée dans laquelle est suspendue une masse bactérienne brun noirâtre ( b s, fig. 1) ; de cette masse fluide il se diffuse dans la gélatine une matière colorante brun pur (dz, fig. 1), qui toutefois n’est jamais vue jusqu’à de grandes distances, probablement parce qu’elle subit de la part de l’air une lente oxydation, dont le produit ne serait pas susceptible de diffusion. La colonie fluidifiée a manifestement un grand pouvoir d’attraction sur l’eau, grâce auquel elle arrive bientôt à faire saillie, sous forme de goutte convexe, au-dessus de LA BIOLOGIE d’üNE BACTERIE PIGMENTAIRE 233 la gélatine. Si toutefois cette dernière renferme un peu de peptone (a % est déjà suffisant), toute l’eau de la colonie est attirée dans la couche de gélatine, d’où il résulte, comme on le voit représenté dans la fig. 1, une cavité tapissée intérieure- ment d’une couche de bactéries. L’examen microscopique des colonies y fait distinguer trois ou quatre éléments figurés différents, à savoir: des bactéries en bâtonnet, vivantes, incolores, ordinairement mobiles; des corps bactériens morts, colorés en brun intense, des sphérites ou cristaux de carbonate de chaux, qui peuvent cependant manquer, et des grains de pigment. De ces derniers, il sera, plus loin, traité à part. Ici, je dirai quelques mots des bactéries elles-mêmes. Celles-ci sont des bâtonnets de longueur variable (a, fig. 5). Si, comme on l’a supposé, la gélatine a été leur unique aliment, elles sont passablement longues et d’une épaisseur (Ou,2 à 0',3) environ égale à la moitié de celle des bacilles du foin, de sorte qu’elles doivent être rangées parmi les espèces très déliées. Ce dernier caractère ressort encore plus quand on examine des cultures liquides, par exemple, des cultures peptonées («, fig 4 a) ; les bâtonnets, alors aussi très raccourcis et longs seulement de 0(,,3 à 0",6, n’y ont souvent plus que 0 ,15 d’épaisseur. Les mouvements et la forme n’ont d’ailleurs rien de caractéristique et rappellent, dans les cultures peptonées, le schème primitif donné par M. Cohn pour le Baderium termo. Le B. cyaneo-fuscus est une bactérie rigoureusement aérobie; les bâtonnets mobiles cherchent avec ardeur l’oxygène, ce qui occasionne souvent des rassemblements autour de bulles d’air accidentellement incluses dans les préparations microscopiques. Dans la profondeur des masses de gélatine ou de colle, ils ne croissent que si l’air peut y pénétrer librement. Vis-à-vis du bleu d’indigo soluble, ils montrent un pouvoir réducteur bien pro- noncé, mais pour le démontrer il faut recourir à des cultures qui sont déjà très riches en bactéries, et dans lesquelles, après l’addi- tion de la préparation d’indigo, — c’est-à-dire d’une dissolution 234 M. W. BEYERINCK. bien stérilisée d’indigosulfate de sonde dans l’eau, — l’air ne peut pénétrer que très lentement. Le bleu d’indigo ordinaire, insoluble, n’est pas attaqué. En ce qui concerne les bâtonnets morts, qui absorbent la matière colorante sécrétée ((?, fig. 4a, /S, fig. 5), je remarquerai seulement qu’ils se présentent dans toutes les nuances depuis le brun verdâtre ou jaunâtre jusqu’au brun noirâtre foncé. Comme masse nourricière nous avons employé, pour les expériences dont il s’agit ici, une dissolution de 10 % de gé- latine dans de l’eau de canal. Des dissolutions plus étendues, par exemple de 4 ou 5 % de gélatine, — dissolutions qui, on le sait, se prennent encore bien en masse lorsque la gélatine est de bonne qualité 1 ), — se laissent également employer avec succès pour les modifications plus actives du B. çyaneo-fuscus, et donnent des phénomènes tout semblables à ceux décrits plus haut. C’est là une circonstance très remarquable, car beaucoup d’autres bactéries, qui ne demandent également que de la peptone pour leur entretien complet, — et qui par con- séquent peuvent aussi vivre de gélatine seule, celle-ci étant peptonisée par un enzyme sécrété, — ne se développent que très peu dans les conditions indiquées, et exigent pour cela, en premier lieu, une addition de phosphate. Pour le B. cyaneo- fuscus, toutefois, une pareille alimentation phosphatée est non seulement inutile, mais plutôt, quand la dose ajoutée dépasse J/10 ou Vs °/o (suivant le plus ou moins d’activité des bac- téries), préjudiciable au développement de l’organisme aussi bien qu’à la sécrétion du pigment. On peut juger par là com- bien l’aliment doit être dilué pour que ce bacille pigmentaire s’en trouve le mieux. i) La gélatine dont on a extrait les dernières traces des sels au moyen de l’eau distillée, se prend encore tout juste en gelée quand elle est dis- soute, dans l’eau distillée, à raison de 2 à 3 °/0. Encore plus étendues, les solutions ne se solidifient plus et la gélatine se montre, après refroidisse- ment, en masses gélatineuses incohérentes. Dans l’eau froide la gélatine est parfaitement insoluble. LA BIOLOGIE d’üNE BACTÉRIE PIGMENTAIRE 235 Une propriété très remarquable des cultures sur plaques de gélatine pure, c’est de donner lieu à des accumulations de carbonate de chaux (*, Fig. 5), tant à l’intérieur de la masse fluide des colonies que dans l’étendue des zones de diffusion br unes (dz fig. 1), mais non en dehors de ces dernières. Lorsqu’on trace une simple ligne d’inoculation à la surface d’une large et épaisse plaque de gélatine, en sorte que sur une très grande masse de cette matière il ne se développe qu’un petit nombre de bactéries, on obtient au bout de quelques mois un si abondant dépôt de carbonate de chaux, que la gélatine, arrosée d’acide chlorhydrique, se couvre d’écume et se remplit de bulles de gaz. Ce carbonate de chaux provient du gypse de l’eau employée. Quant au composé sulfuré qui doit se former en même temps, je ne puis rien en dire. Ce serait ici le lieu de préciser les relations d’affinité de notre bacille. Mais, étant encore dans une profonde ignorance au sujet du système naturel des Bactéries, nous ne pouvons procéder que d’une manière empirique xet devrons, dans le cas actuel, nous appuyer principalement sur la production du pigment. Pour cette raison, il sera traité de ce point au § suivant. § 3. Le pigment du Bacillus cy aneo -fuscus. Division des bactéries chromogènes en espèces chromophores, chromopares et parachromophores. Un mot sur la relation des pigments des bactéries chromo- gènes avec leurs générateurs, et vice versa, ne me semble pas superflu, vu surtout que, à ma connaissance, personne n’a encore insisté compréhensiblement sur les cas très différents que l’on rencontre ici. On peut distinguer parmi ces bactéries trois groupes prin- cipaux, qui se laissent peut-être assez convenablement désigner 236 M. W. BEYERINCK. sous les noms de bactéries chromophores, b. chromopares et b. paraçhromophores . Chez les bactéries chromophores , la matière colorante fait partie intégrante du corps, auquel elle est unie de la même façon que la matière colorante chlorophyllienne l’est aux chromatophores des plantes supérieures, ou l’hémoglobine aux corpuscules du sang. Comme exemple de bactéries chro- mophores, je citerai les bactéries sulfurées pourpres, décrites par Ray Lankester, Warming, Cohn, Engelmann et Wino- gradsky. A ce même groupe appartiennent, en tant qu’elles me sont connues, les bactéries vertes, rouges, jaunes et brunes qui ne liquéfient pas la gélatine. Il ne peut y avoir aucun doute que, chez toutes ces formes chromophores, une signi- fication biologique déterminée, quoique le plus souvent encore inconnue, ne doive être attribuée à la matière colorante. Comme second groupe des bactéries chromogènes j’ai nommé les b. chromopares, qui pourraient aussi être appelées bactéries pigmentaires proprement dites. Celles-ci sont caractérisées par le fait que, initialement, le corps bactérien vivant est toujours incolore; la matière colorante est séparée comme telle ou comme matière chromogène incolore, et on ne doit y voir qu’un produit d’excrétion, sans utilité pour l’organisme. En accord avec ce fait, les bactéries chromopares se laissent amener tout aussi bien, ou même plus facilement, à l’état de cultures incolores qu’à celui de cultures colorées. L’exemple le plus connu de vraie bactérie pigmentaire est le Bacillus prodigiosus, dont la matière colorante ne se diffuse pas en dehors des colonies, mais s’unit à des particules albuminoïdes, formées peut-être par les bactéries. Il est à remarquer que les B. prodi- giosus morts ne fixent pas le pigment rouge, tandis que des cellules mortes de levure de bière diffusée dans les colonies, ou même dans les cultures liquides du: B. prodigiosus , le font avec beaucoup d’énergie, en devenant rouge carmin. Notre Bacillus cyaneo-fuscus appartient également à ce groupe, de même que les bacilles, plus ou moins alliés au B. cyaneo-fuscus, LA BIOLOGIE d’üNE BACTÉRIE PIGMENTAIRE 237 du lait bleu ( Bacillus cyanogenus ), du pus bleu (B. pyo-cyaneus) et des crachats verts (B. virescens). Chez ces quatre dernières espèces, le pigment est susceptible de diffusion, mais, à cause d’une transformation chimique (probablement une oxydation faisant naître un corps difficilement soluble) qu’il éprouve, cette diffusion ne s’étend pas à grande distance. Ce même pigment a beaucoup d’affinité pour certaines matières albumi- noïdes et se fixe avidement sur les bactéries mortes, qui par là sont colorées en brun foncé ou en noir. Le troisième groupe des bactéries chromogènes a été appelé celui des parachromophores. Elles se distinguent en ce que la matière colorante est, à la vérité, manifestement un produit d’excrétion, mais qui adhère au corps bactérien, comme chez les vraies bactéries chromophores, ne diffusant pas au dehors. A ce groupe se rapportent les Bacillus janthinus et violaceus , si abondamment répandus dans le sol et dans l’eau. La question de savoir si une espèce de bactérie est chromo- phore ou parachromophore se laisse ordinairement décider déjà par la circonstance que les vraies chromophores, cultivées dans les conditions les plus variées, se développent — à moins qu’il ne naisse des variétés incolores — en colonies colorées, tandis que chez les fausses chromophores cela n’arrive, pour ainsi dire, qu’à titre d’exception. Pour obtenir, par exemple, le Bacillus violaceus en cultures violettes, on doit le traiter dans des conditions exactement déterminées, notamment à basse température, et ne lui offrir pour tout aliment que des matières protéiques, avec très peu de phosphates; autrement, cette forme se développe comme une bactérie saprophyte incolore très commune. Les bactéries chromo- phores aquatiques non liquéfiantes, rouges ou jaunes, restent au contraire, lorsqu’elles arrivent à se développer, rouges ou jaunes. Je n’affirmerai certes pas que la division qui vient d’être établie soit une distribution naturelle, car pour cela je connais trop peu d’espèces chromogènes; bien plutôt, je suis porté à croire que dans l’avenir on reconnaîtra chez ces organismes 238 M. W. BEYERINCK. encore maintes autres différences, plus profondes, qui condui- ront peut-être à un groupement tout nouveau. Il est certain, en tout cas, que nos chromophores embrassent beaucoup de choses hétérogènes, tandis que, d’autre part, les vraies bacté- ries pigmentaires (à l’exception du Bacillus cyanogenus) ont, non seulement entre elles, mais aussi avec les parachromophores, une affinité si grande, que ces deux groupes peuvent sans in- convénient être réunis en une même famille naturelle. Ainsi qu’il a été dit précédemment, le Bacillus cyaneo-fuscus appartient aux chromopares, c’est-à-dire, aux vraies bactéries pigmentaires. Nous avons déjà vu que cette espèce excrète une matière colorante brune, diffusible. Si, toutefois, on étudie plus attentivement cette excrétion, par exemple, en cultivant la bactérie dans de l’eau de conduite additionnée de | à 2 pour cent de peptone sèche, on acquiert la conviction que le brun n’est qu’un stade avancé de la série des changements éprou- vés par un produit de sécrétion qui, à l’origine, était coloré tout différemment, ou peut-être incolore. En tout cas, la pre- mière coloration visible est un beau vert soluble dans l’eau (fig. 3 a), qui bientôt se présente accompagné d’un bleu d’ou- tremer (fig. 3 b). Au microscope (fig. 4 a), ce bleu se montre composé de sphérites solides, microscopiques (/, fig. 4 a), sur lesquelles nous reviendrons tout à l’heure. Plus tard seulement, le vert disparaît, pour faire place d’abord au brun (fig. 3 b), puis au gris (fig. 3 c), et enfin au noir brunâtre foncé (fig. 3 d). Les sphérites bleues sont beaucoup plus résistantes, mais peuvent pourtant se changer finalement en corpuscules brun foncé ou même noirs ( d , fig. 5). Je crois que tous ces changements de couleur doivent être ramenés à des degrés successifs d’oxyda- tion d’un seul et même chromogène, bien que, lors de la réduction de ces produits oxydés, on ne voie apparaître qu’un corps très légèrement coloré en jaune, sans que les divers stades de coloration, ci-dessus indiqués, soient parcourus en ordre rétrogade. Sous l’influence d’oxydants énergiques, tels que l’acide ni- LA BIOLOGIE d’üNE BACTERIE PIGMENTAIRE. 239 trique, l’acide chromique et le peroxyde d’hydrogène, la ma- tière colorante, qu’elle soit diffusible ou bien retenue par les sphérites, est rapidement et assez complètement décomposée et décolorée (fig. 3 é). Les corps à action plus faible, l’air entre autres, déterminent également la décomposition, mais exigent pour cela un temps beaucoup plus long. Veut-on, par exemple, décolorer une solution de peptone devenue noire par le déve- loppement du Bacillus cyaneo-fuscus , on y parvient aisément en quelques heures au moyen de l’acide nitrique dilué, tandis que le même effet n’est produit par l’air, et encore moins com- plètement, qu’au bout de plusieurs semaines Les belles sphérites bleues possèdent des propriétés très in- téressantes. On les obtient le mieux de la manière suivante. Une solution de 1 à 3 % de peptone dans de l’eau de conduite, après avoir été bien stérilisée par une ébullition trois fois répétée, est ensemencée de B. cyaneo-fuscus , puis abandonnée à elle-même, à une température plus basse que 10° C. Au bout de quatre ou cinq jours, la couleur jaune pâle de la solution de peptone se change en une couleur verte, qui est surtout intense à la surface, où l’air a librement accès. Très peu de temps après, commence la formation des sphérites, dont la matière colorante est évidemment un produit d’oxydation, car elle ne se montre que dans la pellicule bactérienne qui surnage le liquide, ainsi que dans un anneau touchant, à un niveau un peu inférieur, la paroi du vase de verre, là où se trouve le ménisque du liquide. Ce dernier phénomène est très caractéristique, vu que la couleur de l’anneau est d’un beau bleu, à reflet d’or comme chez l’indigo sec, et peut naturellement, quand on secoue le vase, être observée directement. L’anneau persiste d’ailleurs longtemps et se laisse encore reconnaître dans des cultures déjà assez âgées. Finalement, le changement général de la couleur du liquide, qui conduit d’abord au noir, puis au brun clair, atteint aussi l’anneau. Les sphérites sont plus ou moins solubles dans les acides forts, d’autant plus facilement que leur bleu est plus pur, d’autant plus incomplètement qu’elles sont de couleur 240 M. W. BEYERINCK. pins noirâtre. L’acide sulfurique surtout est un bon dissolvant ; il donne avec les sphérites une dissolution bleue, qui bientôt devient violette et finalement se décolore. Souvent on voit, pendant l’acte de la dissolution, se former d’abord des aiguilles de gypse et ensuite, à ce qu’il semble, des prismes de tyrosine. Le gypse provient du carbonate de chaux qui se trouve dans le liquide de culture et qui paraît s’accumuler dans les sphérites. Quant à l’origine des cristaux que je viens de désigner comme prismes de tyrosine, elle reste douteuse. En tout cas, cette substance ne forme pas la base proprement dite des sphérites, car alors celles-ci ne seraient pas solubles dans l’acide sul- furique. Comment faut il donc se représenter la nature des sphérites ? Je crois avoir trouvé la réponse à cette question dans l’expérience suivante. Les agents réducteurs énergiques, en particulier l’hydrosulfite de soude, Na HSO2 , découvert par M. Schützenberger et recommandé par lui pour le titrage de l’oxygène 1 ), décolorent complètement les sphérites. Si l’action se passe sous le couvre- objet, il est facile d’obtenir des corpuscules entièrement déco- lorés, qui correspondent aux sphérites. Donne-t-on alors accès à l’air, le liquide devient d’un beau bleu d’outremer, tandis que les sphérites peuvent rester incolores. Pour cette expé- rience, l’hydrosulfite doit être presque neutre, n’avoir qu’une réaction acide très faible; autrement, les squelettes incolores des sphérites se dissolvent complètement. On constate d’ailleurs aussi une différence de solubilité suivant que les sphérites ont pris naissance dans des solutions de peptone ou dans des liquides contenant d’autres corps protéiques. Notre expérience conduit à conclure que la question ci-dessus posée doit recevoir i) Schützenberger, Les fermentations , 4e éd. p. 92, Paris, 1884. Ce corps s’obtient en dissolvant du zinc dans le bisulfite de soude et ajoutant à la dissolution étendue du lait de chaux, jusqu’à sursaturation. La soustrac- tion d’oxygène a lieu par suite de la transformation de l’hydrosulfite en bisulfite, suivant l’équation Na HSO 2 + O = Na HSO 3. LA BIOLOGIE ü’uNE BACTERIE PIGMENTAIRE. 241 la réponse suivante: Les sphérites sont des sphérocristaux d’une matière colorante bleue; les aiguilles cristallines du sphérocristal ont pour support un squelette constitué par un corps protéique. En étudiant la formation des sphérites au microscope, on trouve qu’elle est analogue mais pas identique à celle des corpus- cules chromatiques irréguliers dans les colonies du Bacillus prodigiosus (voyez plus haut), c’est-à-dire, qu’elle a lieu dans notre cas par l’accumulation de la matière colorante dans les corps de bactéries en voie de dépérissement, corps qui gonflent alors fortement et peuvent prendre les formes les plus bizarres. Le corps protéique qui sert de base à ces sphérites, qui en constitue pour ainsi dire la charpente primitive, est donc le protoplasma bactérien lui-même. Cela étant, il n’y a pas lieu de s’étonner que d’autres corpuscules protéiques, pré- sents dans les cultures, puissent également, s’ils possèdent de l’affinité pour la matière colorante, se changer en sphérites. Il est à remarquer que les sphérites de l’hémialbumine, qui se déposent de solutions peptoniques étendues, ne se colorent pas. L’affinité des sphérites pour le carbonate de chaux remet en mémoire les remarquables calcosphérites découvertes par Harting !), qui consistent en un squelette d’un corps protéique, — appelé par lui, suivant les cas, calcoglobuline ou calcofi- brine, — dans lequel les aiguilles calcaires microscopiques, réunies en globules, sont disposées radialement. Pour accroître encore l’analogie, je rappellerai que Harting a pu imbiber ses calcosphérites de matières colorantes de la bile et leur com- muniquer ainsi une coloration intense * 2). Ces matières colo- rantes n’étaient toutefois pas accumulées dans les sphérites, comme c’est le cas ici, à l’état cristallisé, mais à l’état amorphe. Nous avons vu plus haut que les sphérites du B. cyaneo-fuscus 1) Recherches de morphologie synthétique sur la production artificielle de quelques formations calcaires organiques , Amsterdam, 1872. 2) l.c., p. 33. 242 M. W. BEYERINCK. se dissolvent complètement dans les acides et les alcalis ; leur base bactérienne, à laquelle on aurait supposé une plus grande faculté de résistance, analogue à celle du protoplasma bactérien en général, a donc subi une modification chimique. La matière colorante bleue rappelle à plusieurs égards le bleu d’indigo. D’abord, à l’égard de l’oxydation par l’acide nitrique, pendant laquelle se produisent les mêmes nuances de couleur, aboutissant finalement au brun jaunâtre. Ensuite, quant à l’action, ci-dessus décrite, de l’acide sulfurique concentré et des alcalis forts. Dans l’éther, l’alcool, la benzine, l’essence de pétrole, l’alcool amylique, le sulfure de carbone, le chloroforme froid ou bouillant, notre matière colorante se laisse tout aussi peu dissoudre que le bleu d’indigo. Mais l’analogie principale réside certainement dans la manière de se comporter vis-à-vis des agents réducteurs, et sous ce rapport je citerai encore une expérience très simple, qui se rattache étroitement à l’obser- vation microscopique dont il a été question plus haut. Lorsque le B . cyaneo-fuscus est cultivé dans de l’eau de conduite additionnée de 2 ou 3 % de peptone, il se forme à la surface du liquide une pellicule bactérienne très mince, mais pourtant assez consistante, d’une belle couleur bleue. Au microscope on y trouve, comme il est dit, disséminées entre les bâtonnets étroitement rapprochés, des sphérites bleues de toutes les grosseurs. Si une pareille pellicule bleue (fig. 4 b) est enlevée du liquide à l’aide d’un fil de platine, puis introduite dans une éprouvette remplie de dissolution d’hydrosulfite de soude, la couleur du petit flocon ne tarde pas à se changer, par suite de la réduction, en brun sale, et la cohérence des bac- téries est diminuée par l’alcalinité du liquide. Ce flocon relâché est-il alors retiré avec précaution de l’éprouvette, — et cela dès que la décoloration paraît accomplie, — puis transporté dans une goutte d’eau sur une assiette de faïence blanche, on voit la matière colorante, réduite et dissoute dans le flocon, redevenir d’un bleu intense sous l’action de l’oxygène contenu dans la goutte d’eau, exactement comme le ferait le blanc LA BIOLOGIE D’UNE BACTERIE PIGMENTAIRE. 243 d’indigo. En regardant ce liquide bleu au microscope, on reconnaît que le corps colorant ne s’y trouve pas dissous, mais suspendu en particules très ténues (peut-être globuleuses). Bien entendu, je sais parfaitement que ces données ne suffisent pas pour l’identification positive de notre matière colorante avec le bleu d’indigo; de nouvelles recherches, qui maintenant ne présenteront plus de difficultés particulières, devront trancher la question. Avant d’abandonner ce sujet, je dois encore faire remarquer que, dans celui des stades initiaux d’une culture (fig. 3a) qui est caractérisé par la couleur vert de vessie, on ne peut observer nettement aucun phénomène de réduction au sein du liquide, bien que près de la surface la couleur soit un peu plus foncée que ]à où l’air ne trouve pas un libre accès. En tout cas, les bacilles ne possèdent donc pas un pouvoir réducteur appré- ciable à l’égard de leur propre matière colorante. On peut se demander comment ils se comportent sous ce rapport vis- à-vis du bleu d’indigo soluble, et aussi, inversement, si d’autres bactéries, qui réduisent énergiquement le bleu d’indigo, sont capables de décolorer les cultures de B. cyaneo-fuscus. La première de ces questions doit être résolue en ce sens que des cultures vigoureuses de notre bactérie réduisent le bleu d’in- digo ' ) ; cela, toutefois, demande beaucoup de temps, et exige donc l’usage de vases où l’air ne puisse pénétrer que très lente- ment, par exemple, de ballons à col étroit. Le. B. cyaneo-fuscus ne réduit pas, au contraire, son propre pigment bleu-noirâtre, car on voit celui-ci, dans l’expérience avec le bleu d’indigo soluble, communiquer peu à peu, à partir de la surface, la coloration foncée originale à la dissolution qui contient du blanc d’indigo. Il serait inconsidéré, toutefois, d’en conclure que notre bactérie est absolument incapable de réduire i) Je ne connais encore aucune bactérie, liquéfiant la gélatine, qui ne réduise pas le bleu d’indigo soluble. Par contre, je puis citer plusieurs formes non liquéfiantes auxquelles ce pouvoir fait défaut, par exemple, le B. radicicola. Archives Néerlandaises, T. XXV. 17 244 M. W. BEYERTNCtf. son propre pigment. En effet, les sphérites bleues fussent-elles réellement composées principalement de bleu d’indigo *), il n’}r aurait pas encore lieu de s’étonner qu’un pareil corps coloré solide, précisément à cause de sa solidité ne pouvant pas se diffuser dans 1a. bactérie, ce qui semble pourtant nécessaire pour la réduction, reste inaltéré. • La seconde question, à savoir, si d’autres bactéries que j’ai soumises à cette expérience sont en état de réduire les pigments du B. cyaneo-fuscus, doit être résolue par la négative. Cela s’applique, notamment, aux ferments lactiques du fromage d’Edam, lesquels exercent une forte action réductrice sur le bleu d’indigo. On comprend ainsi pourquoi les taches foncées du fromage, qui sont dues à une infection par le B. cyaneo- fuscus , conservent invariablement leur couleur, bien qu’elles regorgent ordinairement de bâtonnets du ferment lactique. Au § 9 nous reviendrons d’ailleurs sur la matière colorante des taches bleues du fromage, quoique je n’aie pas grand’ chose à ajouter en fait de détails vraiment nouveaux. § 4. Nutrition du Bacillus cy aneo-fuscus. Notre bacille pigmentaire se range, sous le rapport des matières nutritives reconnues nécessaires, parmi les organismes à peptone, c’est-à-dire que, pour aliment plastique complet, suffisant au développement de tous les phénomènes biologiques, il ne demande, en dehors des sels, qu’un corps albuminoïde. Comme tel, on peut prendre la peptone sèche, la gélatine, le blanc d’œuf, la fibrine, le gluten, la caséine, et probablement toute une série d’autres corps protéiques. Dès que ce point eut été fixé, j’exécutai les expériences suivantes. i) Actuellement, je suis convaincu que le corps pigmentaire des sphé- rites de couleur bleu pur est bien réellement du bleu d’indigo, ou une matière très voisine; dans les sphérites colorées en d’autres nuances je soupçonne, comme dans les cultures liquides de couleur analogue, des produits de l’oxydation de l’indigotine. LA. BIOLOGIE d’uNE BACTERIE PIGMENTAIRE. 245 Un œuf cuit dur fut soigneusement dépouillé de sa coque, flambé à un bec de Bunsen, puis placé dans une boîte de verre bien propre. Il fut alors inoculé en différents points de la surface avec une culture de B. cyaneo-fuscus et abandonné à lui-même, à une température de 6 à 10° C. Au bout de trois jours, un développement se laissait déjà constater, et après trois semaines il s’était formé des taches noires larges d’un centimètre, qui continuèrent à s’étendre pendant plusieurs mois, jusqu’à ce qu’enfin la la surface entière de l’œuf fut couverte d’une couche noire de bactéries. Une semblable préparation, parvenue au stade moyen, se voit représentée dans la fig. 2. Les bactéries ne donnent lieu, évidemment par suite de la richesse en peptone du blanc d’œuf peptonisé, qu’à une liqué- faction insignifiante ; néanmoins, le centre de chaque tache est excavé et rempli de matière demi-liquide. Au microscope (fig. 6), on reconnaît que les bactéries des taches sont assemblées en pellicules, d’où il résulte que des masses grises cohérentes de- viennent visibles dans les préparations. La figure est très in- téressante encore sous d’autres rapports. On y distingue des bactéries vivantes, incolores, en forme de bâtonnets ou de fuseaux; des corps bactériens morts, bruns, qui ont accumulé la matière colorante brune; des corpuscules noirs, souvent à faces planes, provenus soit de bactéries mortes, soit d’autres particules dans lesquelles s’est déposée la matière colorante; enfin, quelques sphérocristaux de pigment, colorés eu bleu d’outremer. Le blanc d’œuf, à l’état cuit, constitue une ex- cellente masse nourricière. Cette dernière remarque s’applique aussi à la caséine. Celle que j’employai était d’un blanc de neige et avait été purifiée au moyen de dissolutions répétées dans le carbonate de soude, suivies de précipitations par l’acide acétique, et au moyen de l’éther. De cette préparation, je fis simplement bouillir 1 à 2 % dans de l’eau de conduite, jusqu’à stérilisation assurée. J’infectai alors avec le B. cyaneo-fuscus et abandonnai le liquide trouble à une tempéra- ture de 6 à 10° C. Au bout de quelques jours déjà, la dissolution 17* 246 M. W. BEYERINCK. de la caséine commença à devenir manifeste, et en même temps commencèrent les changements de couleur. Le vert et le bleu purent à peine être observés, si rapide fut la prééminence acquise par le brun et le noir. Les spbérites étaient identiques a celles qu’on trouve dans les taches du fromage, c’est-à-dire qu’elles n’étaient pas de couleur indigo, mais noirâtres. Avec la caséine j’ai encore exécuté une autre expérience. Du lait frais ayant été coagulé par la présure, la masse casé- euse obtenue, soit préalablement salée, soit non salée, fut infectée, tant à la surface qu’à l’intérieur, avec le B. cyaneo • fuscus. Le développement ne fut pas aussi vigoureux qu’il l’avait été dans l’expérience précédente; au bout d’une couple de semaines seulement, on put voir de petites taches bleu-noirâtre, remplies de corpuscules pigmentaires foncés, comme le montre la fig. 7. A l’intérieur aussi, le processus était reconnaissable ; mais dès que les bactéries étrangères, que je n’avais pas élimi- nées, eurent déterminé la putréfaction de la masse caséeuse, le développement du B. cyaneo-fuscus et la formation du pigment cessèrent entièrement. Des expériences analogues à celles qui viennent d’être dé- crites ont été faites avec du gluten de froment et ont donné les mêmes résultats. Il va sans dire que la vessie des animaux, leur chair et autres matières de ce genre se prêtent également, après lavage et purification, aux expériences sur le B. cyaneo- fuscus. Quant au tissu corné et aux fibres élastiques, la question de savoir s’ils peuvent être décomposés par notre bactérie et servir à sa nutrition, n’est pas encore résolue. Avec l’asparagine seule, je n’ai pu observer aucun développe- ment. Celui-ci est au contraire possible quand, outre l’aspara- gine, on donne de la glucose; on obtient alors une culture dont la couleur est d’abord le vert de vessie, puis le brun jaunâtre, mais cette culture renferme très peu de spbérites, et celles-ci sont colorées en vert, non en bleu. Dans ces con- ditions, le développement est lent et difficile; évidemment, LA BIOLOGIE I)’UNE BACTERIE PIGMENTAIRE. 247 les peptones, ou les corps protéiques liquéfiés par le bacille, surpassent de beaucoup en pouvoir nutritif ') l’asparagine mêlée de sucre. Le sucre, additionné de sels ammoniacaux ou de nitrates, a été trouvé impropre à la nutrition. Il en est de même du tartrate et du malate d’ammoniaque. Ces deux substances furent essayées parce qu’elles constituent un excellent aliment pour le Bacillus cyanogenus du lait bleu * 2). De tous ces résultats, le plus important est sans contredit celui d’après lequel les peptones, ou les corps protéiques liqué- fiés par l’enzyme protéolytique de la bactérie, suffisent à sa nutrition complète. Au reste, le B. cyaneo-fuscus n’est pas seul sous ce rapport ; je connais toute une série de bactéries douées de la même aptitude. Citons, par exemple, le Bacillus prodigiosus, les ba- cilles lumineux à peptone (Photobaderium, indicum et Ph. lumi- nosum), les bacilles du choléra et différentes bactéries saprophy- tes, parmi lesquelles les espèces de Proteus. Le fait est surtout remarquable en ce qu’il nous indique, pour l’acide carbonique de la respiration, une origine toute différente de l’origine ordinaire. Si l’on se reporte, en effet, au schème universellement admis du chimisme de la respiration, — d’après lequel l’acide carbonique dissocié de la matière vivante est incessamment remplacé par la fixation d’un hydrate de carbone, avec le concours de l’oxygène libre en cas d’aéro- biose, sans cette intervention en cas d’anaérobiose, — il est évident que, chez les organismes à peptone, nous nous trou- vons à cet égard en présence d’une source d’énergie non reconnue comme telle jusqu’ici. Cette conclusion, facile à 1) Par pouvoir nutritif j’entends le rapport entre le poids de l’aliment plastique offert et le poids de la substance vivante formée, les conditions étant d’ailleurs égales et l’activité végétative identique. 2) Je ne saurais ranger le Bacillus cyanogenus parmi les microbes à peptone, vu que cette espèce, bien que pouvant se développer aux dépens de la peptone seule, est alors incapable, sans accompagnement d’autres corps, d’engendrer de la matière colorante. 248 M. W. BEYERINCK. contrôler, vu que les matériaux nécessaires abondent clans tous les laboratoires, ne sera pas contestée, je pense, et il me semble que nous devons y reconnaître un élargissement très notable de nos idées sur les phénomènes biologiques en général. La première question qui s’impose, à ce nouveau point de vue, est celle du produit secondaire auquel doit donner nais- sance la nutrition purement peptonique. Cette question est double, la peptone fonctionnant à la fois comme aliment plas- tique et comme aliment respiratoire. En ce qui concerne la nutrition plastique, une simple addition de la peptone au protoplasme, au besoin avec polymérisation ou déplacement d’atomes, pourrait probablement être admise lors de la for- mation de la substance vivante nouvelle. Les produits secondaires mis en liberté avec la génération de la force nécessaire à cet effet, donc avec la respiration, - laquelle force doit être fournie par la décomposition d’une autre portion de la peptone, — c’est-à-dire, les substances excré- toires qui naissent à côté de l’acide carbonique par l’absorption de l’oxygène respiratoire, pourraient différer suivant les conditions expérimentales. A des températures plus ou moins élevées, et aussi dans d’autres circonstances défavorables, il se forme toujours, comme produit final, de l’ammoniaque, qui dans les cultures se présente très souvent à l’état de phosphate am- moniaco-magnésien. '). En cas de conditions nutritives plus favorables, par exemple si les sels, les acides, les alcalis et autres corps non assimilables se trouvent dans les proportions les plus avantageuses et surtout si les conditions thermiques sont le mieux appropriées à la vie, il pourrait au contraire >) Cette substance n’est nullement propre aux microbes à peptone; elle se trouve aussi comme produit d’excrétion chez des organismes dont le schème de nutrition est tout différent, par exemple, chez les bactéries à peptone et carbone, qui, outre la peptone, exigent encore quelque matière carbonée particulière, telle que le sucre, la glycérine, etc. A ce groupe appartiennent, entre autres, la bactérie lumineuse ordinaire (Photobcicterium phosphorescens). LA BIOLOGIE D’UNE BACTERIE PIGMENTAIRE. 249 se former, aux dépens de la peptone, des produits de dédou- blement moins avancés. Tout au moins, l’obtention de pro- duits de décomposition cristallins est alors beaucoup moins facile que dans le cas précédent. Peut-être cela tient-il en partie à l’enzyme albuminique sécrété par les bactéries à peptone, enzyme qui, surtout à des températures un peu élevées, agit très énergiquement et décompose même la pep- tone en leucine et en tyrosine. Une autre question qui, au point de vue de la nutrition exclusivement peptonique, paraît avoir de l’importance, est celle de la possibilité ou de l’impossibilité de l’anaérobiose dans cette forme d’échanges nutritifs. A cet égard, malheu- reusement, il n’y a pas grand ’chose à dire jusqu’ici. Je ne saurais encore décider si, dans le règne des microbes, un développement anaérobie peut à un degré quelconque avoir lieu, lorsqu’on leur offre seulement de la peptone ou des corps albumineux susceptibles de protéolyse 1 ) ; certains processus de putréfaction semblent, il est vrai, l’indiquer, mais ces pro- cessus n’ont pas encore été suffisamment étudiés 2). Chez le Bacillus cyaneo-fuscus , qui est strictement aérobie, il ne saurait naturellement être question d’un pareil phénomène. Mais le développement n’est qu’une des nombreuses fonctions vitales d’un organisme, et lors même que ce développement exige la présence d’oxygène libre, il ne s’ensuit nullement qu’il doive en être de même pour d’autres fonctions3); c’est ce que nous apprend d’ailleurs le fait de la réduction, par beaucoup de 1) Les anaérobies qui me sont connus d’un peu près demandent, comme sources de carbone et d’azote, deux corps différents. 2) Note postérieure. Le Bacillus putrefaciens coli peut se multiplier, fonctionner et produire des spores à l’abri des derniers traces d’oxygène libre, dans une solution qui ne contient que de la peptone. 3) Une réserve d’oxygène, c’est-à-dire une provision d’oxygène fixé, préci- pité en quelque sorte sur le protoplasme, est indispensable à tous lesaérobies, pour toutes les fonctions vitales; mais l’existence ne s’en laisse démontrer que par des expériences sur le développement. A l’observation directe, cet oxygène fixé sur la matière vivante reste jusqu’à présent inaccessible. 250 M. W BEYEKINCK. schizomycètes aérobies, du bleu d’indigo en blanc d’indigo, — réduction que nous avons trouvée aussi, à un faible degré, chez le B. cyaneo-fuscus, — ou du salpêtre en nitrite, réduction qui naturellement doit avoir lieu sans l’intervention de l’oxygène. D’autres bactéries à peptone peuvent également fonctionner, sans développement il est vrai, en l’absence d’oxygène libre, comme je pourrais le prouver par plusieurs exemples. § 5. Sur l’affaiblissement de la force végétative chez le Bacillus cy aneo-f uscus. Mon intérêt particulier pour la biologie du B. cyaneo-fuscus a été éveillé par la circonstance que cette bactérie pigmentaire m’a appris à connaître, avec une netteté extrême, certains phénomènes provoqués par des influences de température, fort analogues à ceux que plusieurs observateurs ont décrits en détail pour les microbes pathogènes et que moi-même j’avais retrouvés, plus ou moins distinctement, chez maints autres saprophytes. Ces phénomènes ont rapport à la perte de ca- ractères, surtout à l’affaiblissement de la force végétative et aussi, dans une moindre mesure, à la disparition de la faculté de produire du pigment et même de former de l’enzyme. Ces trois phénomènes sont, chez notre bactérie, dans une certaine corrélation, qui toutefois ne peut pas être regardée comme fondamentale, par la simple raison déjà qu’on n’en trouve pas trace chez des formes voisines, qui dans des con- ditions déterminées montrent également des pertes de caractères. Le point essentiel, dans ces phénomènes, a déjà été maintes fois mis en lumière; pourtant, on verra dans les lignes suivantes que les changements observés par moi renferment assez de neuf pour que l’exposition n’en paraisse pas superflue ; je crois même, en traitant de l’action prolongée des températures optima sur la végétation, toucher à un sujet d’intérêt général. Après ces préliminaires, considérons de plus près le phé- nomène lui-même. LA BIOLOGIE d’üNE BACTERIE PIGMENTAIRE. 251 Lorsque, en juin 1890, la température de mon laboratoire oscillant autour de 15° C., j’entrepris l’étude d’une culture de B. cyaneo-fuscus qui venait d’être isolée de l’eau de conduite, les ensemencements sur de l’eau de canal solidifiée par 10 % de gélatine se montrèrent très actifs. Pour obtenir des colo- nies de germes isolés, je procédai comme d’habitude : une trace de la matière d’ensemencement fut agitée dans un petit matras avec de l’eau stérilisée, puis cette eau fut versée sur une épaisse couche de gélatine figée dans une boîte de verre, après quoi on la laissa rapidement s’écouler, de sorte que çà et là seulement des germes isolés restaient adhérents à la surface de la gélatine. Les colonies de notre bactérie commencèrent à se développer au bout de trois ou quatre jours et continu- èrent ensuite à s’étendre lentement, en liquéfiant le terrain de culture. Dans la cage vitrée où se trouvaient les cultures, on eut soin de ne jamais laisser s’élever la température au-dessus de 22° C; le plus souvent elle restait au-dessous de 17° C. 1 ). Après avoir pratiqué avec ces colonies, dans les condi- tions indiquées, plusieurs réinoculations régulières, donnant lieu à un développement vigoureux, je remarquai, au com- mencement de septembre, en faisant la huitième culture, qu’il n’était plus possible d’obtenir la croissance sur gélatine. A la vérité, les cinquième, sixième et septième ensemencements avaient aussi déjà présenté, dans le retard et l’irrégularité de la croissance, des phénomènes d’affaiblissement, mais je n’en compris clairement le sens que lorsque, à la huitième répéti- tion, rien ne se développa plus. La première question qui se posait, était de savoir si la culture servant à l’ensemencement avait dépéri par l’une ou l’autre cause Pour résoudre cette question, de larges lignes d’inoculation furent tracées sur des plaques de gélatine, puis, au bout de plusieurs jours, examinées attentivement à la loupe. Cet examen y révéla non seulement une légère liqué- 1 ) Cette cage se trouve dans une partie de mon laboratoire où il arrive seulement de la lumière diffuse très faible. 252 M. W. BEYEKINCK. faction du terrain de culture, mais aussi l'existence de très petites colonies incolores, dont bientôt, toutefois, la croissance s’arrêta complètement, et pour toujours. D’une manière différente, et plus définitive, je réussis pourtant à mettre en évidence que la mort n’était pour rien dans le phénomène. En effet, lorsque les bactéries qui avaient cessé de pouvoir se développer sur la masse formée de 10% de gélatine et d’eau de canal furent portées dans des solutions de % de peptone sèche dans de l’eau de conduite, les phénomènes ordinaires se reproduisirent, de telle sorte que c’est à peine si quelque indice d’affaiblissement se laissait remarquer. Le liquide devint d’abord d’un beau vert, ensuite il se forma contre le verre un anneau méniscoïde bleu, et finalement le tout se colora en brun assez foncé; seulement, cette couleur finale n’atteignit pas la profondeur d’intensité qu’elle avait dans les cultures primitives, non affaiblies. Avec cette culture peptonique furent maintenant pratiqués de nouveaux ensemencements sur gélatine, mais ceux-ci ne donnèrent aucune trace de développement, preuve que l’affai- blissement était héréditaire. Lorsque, au contraire, une gouttelette de cette même culture peptonique fut introduite, à l’aide d’un fil de platine, dans une nouvelle solution de \°/Q de peptone dans de l’eau de conduite, tout redevint, en apparence, normal; la croissance et la formation du pigment semblaient aussi intenses que dans la culture précédente. Les autres conditions culturales avaient été maintenues, autant que possible, identiques; la température, en particulier, n’avait jamais dépassé 22° C. De nouveaux ensemencements eurent ensuite lieu à de courts intervalles, chaque fois avec la culture faite en dernier lieu. En quatre semaines de temps furent ainsi obtenues six cultures peptoniques, qui devaient évidemment embrasser une longue série de générations. Quand, au commencement d’oc- tobre, je pratiquai le septième ensemencement, je soupçonnai qu’il en résulterait quelque chose de nouveau, tellement le LA BIOLOGIE D’UNE BACTERIE PIGMENTAIRE 253 sixième ensemencement avait tardé à se développer normale- ment. Cette présomption était fondée: il se produisit, à la vérité, une végétation bactérienne très caractéristique, jaune orangé, grossièrement granuleuse, mais celle-ci était extrême- ment pauvre en substance, et, ensemencée à son tour, se montra incapable de développement ultérieur. La série de ces essais se trouva ainsi close. Comme mes expériences sur plusieurs autres bactéries m’avaient préparé à ce résultat, et que je savais qu’en certains cas une basse température prévient les difficultés culturales, j’avais, dès le mois de juin, établi quelques cultures dans la cave du laboratoire, à une température presque constante de 10° C, qui ne descendit au-dessous de ce point qu’au mois d’octobre. C’étaient aussi des cultures de B. cyaneo-f uscus dans des solutions à \ % de peptone sèche. Aussitôt qu’eut été obtenu le résultat d’affaiblissement ci-dessus mentionné, j’opérai, au commencement d’octobre, un ensemencement sur gélatine avec une des cultures établies dans la cave, culture qui datait du 10 juin. Au bout de trois ou quatre jours on put observer les premières traces de développement, et après dix autres jours j’étais de nouveau en possession d’une belle et très vigoureuse culture en colonies, sur eau de canal avec 10% de gélatine. Il ressortait en tout cas de là, sans la moindre ambiguïté, qu’un processus de dépérissement spontané ne pouvait être la cause de l’affaiblis- sement dont il s’agit. Mais dans la cave, à la basse température qui y régnait, et en l’absence de réinoculations, la division cellulaire avait été extraordinairement retardée. Comment se comporterait, à cette température, une lignée continuellement inoculée à nouveau et embrassant par conséquent aussi une longue suite de générations? Pour résoudre cette question, des cultures pures avaient été commencées dans la cave tout au début du mois d’octobre et furent continuées dans le laboratoire aussitôt que les froids de l’hiver se firent sentir; les boîtes de verre y étaient placées 254 M. W. BEYERINCK. sur une table de pierre, dont la température resta, en décembre, à environ 5° C. Dans ces conditions, la végétation était ralentie, mais pourtant très florissante. Pour donner la première im- pulsion au développement, les plaques de gélatine étaient, à chaque nouvelle inoculation, tenues pendant deux ou trois jours à une température de 12 à 15° C, puis portées sur la table de pierre dès que les colonies devenaient visibles. Après une douzaine d’inoculations successives, ainsi conduites, la croissance n’avait subi aucune atteinte, et des ensemencements de ces différentes générations, dans des solutions de peptone, s’y développaient normalement et leur communiquaient d’abord la couleur verte, puis la couleur noire. Par inoculation en retour, de ces solutions sur la gélatine, on obtint aussi, jusqu’à la fin, des colonies ordinaires. Dans le cas décrit plus haut, une influence thermique pou- vait donc seule être la cause de l’affaiblissement. Bien que ce résultat s’accorde en général avec ce que l'ex- périence a appris des bactéries pathogènes, dont les formes mitigées naissent de la matière virulente par l’influence d’une élévation de température, on ne saurait méconnaître que, sous un rapport important, les phénomènes décrits pour le Bacillus cyaneo-fuscus étendent la notion déjà acquise. Tandis que jus- qu’ici la chaleur n’avait été appliquée, pour ainsi dire, que comme agent de laboratoire, on reste, avec mes expériences, dans les limites climatologiques d’un été ordinaire. Ainsi M. Pasteur *), en 1880, et M. Chauveau * 2), en 1883, ont obtenu le bacille du charbon à l’état atténué en le cultivant à des tempé- ratures artificiellement élevées. M. Chauveau, ayant ensemencé du bouillon avec du sang de rate, laissa le développement s’opérer d’abord tout un jour à 42° C, puis chaulfa la culture pendant une heure à 47° C, ce qui donna un premier degré d’atténu- ation. En continuant à appliquer cette même chaleur de 47° C, ») Comptes rendus , T. 91, p. 673. 2) Ibid ., T. 96, p. 615. LA BIOLOGIE d’üNE BACTERIE PIGMENTAIRE. ' 255 il obtint au bout de deux heures un second degré d’atténuation, et au bout de trois heures une forme complètement privée de virulence D’après M. Chauveau, cette propriété était héréditaire. M. Pasteur 1 ) a également employé cette méthode pour obtenir le vaccin du charbon, et MM. Koch, GafFky et Loffler 2 ) ont constaté, de leur côté, les faits en question. Chez moi, au contraire la température active de l’affai- blissement n’avait pas, nous l’avons vu, dépassé 22° C. Il existe, toutefois, encore une autre série de recherches, qui se rapproche plus de la mienne et que je rapporterai succinctement. Ce sont les observations de M. Schottelius sur la perte de l’aptitude à former du pigment chez le Bacillus prodigiosus, la bactérie universellement connue du „pain saignant”. De cette bactérie, qui suivant M. Schottelius végète le mieux aux températures comprises entre 15 et 25° C, il obtint, simplement par la culture sur des tranches de pomme de terre, à 41° C, des modifications blanches, héréditaires. Quant à la température exigée, il remarque ce qui suit 3): „Au sujet de tous ces changements produits par la chaleur, il faut retenir que la durée de l’action et le degré de la tem- pérature sont dans une corrélation telle, que l’effet déterminé par une exposition plus courte à une température supérieure est également obtenu par un séjour plus long à une tempé- rature inférieure.” Moi-même j’ai décrit des changements analogues, observés chez les bactéries lumineuses à peptone 4). Je ne puis quitter ce sujet, sans dire encore un mot delà manière dont on doit se représenter l’action de la chaleur dans les cas en question. ' 1) Ibid., T. 92, p. 430; 1881. 2) Mitth. Gesundheitsamt, T. 2, p. 150, 1884. 3) Biologische Untersuchungen über den Micrococcus prodigiosus, Festschrift fur Kôlliker , 1887, p. 12. 4) Sur V aliment photogène et V aliment plastique des bactéries lumi- neuses, dans Arch. néerl., T. 24, p 369. 256 M. W. BEYERINCK. Rappelons d’abord qu'il existe plusieurs méthodes d’après lesquelles peuvent être produites des cultures atténuées ,). La première et, à ce que je crois, la plus importante décou- verte dans cette direction est due à M. Pasteur i 2 ), qui trouva que des cultures du bacille du choléra des poules avaient, an bout de 9 à 10 mois, perdu leur virulence et ne pouvaient plus donner lieu, chez les animaux inoculés, qu’à des symp- tômes locaux. Plus tard on a reconnu, pour toute une série de bactéries, que les vieilles cultures sont en partie dépouillées de leurs propriétés, pathogènes ou autres, c’est-à-dire que, si l’on en forme par ensemencement des colonies séparées, on obtient des formes différentes, se distinguant entre elles par la circonstance que les caractères spécifiques ne sont plus com- plets chez toutes. C’est ainsi que quelques-unes ou la totalité des colonies des bacilles du choléra, de l’érvsipèle, du typhus, de la morve perdent peu à peu leur virulence; celles du Photobacterium phosphorescens perdent leur pouvoir lumineux ; celles des bactéries butyriques du lactate de chaux, leur pou- voir de ferment. Ce qui donne à ces faits un intérêt spécial, c’est qu’on ne saurait douter que le changement ne soit dû à l’action exercée sur ces organismes par leurs propres pro- duits d’excrétion. Quant à vouloir expliquer cette action sur la matière vivante des bactéries, nous devons provisoirement y renoncer. Il convient seulement de remarquer que les faits cités conduisent à la conclusion, sinon nécessaire au moins très probable, que les influences thermiques ne sont pas nui- sibles directement, mais le deviennent en exaltant l’action nocive des „ produits d’excrétion”. Si j’emploie ce terme, ^pro- duits d’excrétion”, ce n’est nullement que je me figure les matières actives comme se trouvant nécessairement en dehors du corps des bacilles ; je crois, au contraire, qu’en cas de crois- i ) Un bon et court aperçu de ces méthodes a été donné par M. Elfving, Studien über die Einwirkung des Lichtes auf die Pilze , p. 135, Hel- singfors, 1890. 2) Comptes rendus . T. 91. p. 670; 1880. LA BIOLOGIE ü’üNE BACTERIE PIGMENTAIRE. 257 sance très vigoureuse, — cas si fréquent à une température un peu élevée, — les matières en question (sans doute des corps protéiques, ne diffusant que très lentement) ne s’élimi- nent pas avec une rapidité suffisante et deviennent alors tout particulièrement nuisibles, précisément parce qu’elles se trou- vent encore à l’intérieur des cellules bactériennes, où, à cause de la température, elles peuvent agir très énergiquement. D’après tout ce qui précède, je regarde l’action débilitante de la température, malgré sa haute importance, comme ne constituant que le facteur secondaire dans la production de cette forme la plus simple de la variabilité. § 6. Est- il possible de rendre leur activité aux cultures affaiblies du Bacillus cy aneo -fuscus? J’ai fait plusieurs expériences pour trouver la réponse à 1a, question posée en tête de ce paragraphe. Un résultat positif était évidemment à espérer de la culture longtemps prolongée, à basses températures, des bacilles affaiblis. Antérieurement déjà, j’avais recueilli quelques résultats d’expériences dans cette direction, au sujet de la bactérie lumineuse de la mer du Nord ( Photobacterium luminosum), qui perd très facilement sa faculté photogénique, — pour cela il suffit par exemple de la cultiver à la température ordinaire des appartements, — mais la ré- cupère par une longue croissance à des températures au-dessous de 9° C. Ces expériences avaient fait voir qu’il est particu- lièrement favorable d’établir des cultures dans lesquelles une grande masse nourricière ne reçoit qu’un petit nombre de germes, de façon que des divisions très nombreuses puissent avoir lieu avant que le terrain nourricier ne soit épuisé et avant que les produits propres des échanges nutritifs ne de- viennent nuisibles. Le Bacillus cyanogenus, la bactérie du lait bleu, m’avait donné des résultats analogues. A une forme qui, par suite 258 M. W. BEYERTNCK. de culture prolongée à une température dépassant 20° C, était privée de la faculté de produire du pigment dans le lait bouilli, j’avais pu restituer ce caractère en la cultivant long- temps à des températures inférieures à 15° C. Chez ces deux bactéries, j’avais déjà remarqué que, outre la température, il y a encore une autre circonstance dont il faut soigneusement tenir compte, à savoir, la concentration de la masse nourricière. Je trouvai avantageux, en effet, — et cela pourrait bien être d’une application générale aux mi- crobes plus ou moins difficiles à cultiver, — de ne donner l’aliment qu’à l’état dilué: l’affaiblissement est alors plus facile à prévenir que chez les cultures en terrain trop riche. Pour les expériences de stimulation du B. cyaneo-fuscus , je n’ai, en conséquence, employé que des dissolution de { % de peptone sèche dans de l’eau de conduite, et pour les cultures subsé- quentes sur substratum solide, j’ai fait usage d’une masse ne contenant que 10 % de gélatine, également dissoute dans de l’eau de conduite. L’effet de la condition dont il s’agit pourrait s’expliquer de la même façon que celui de la première; il tient peut-être à ce que, dans les solutions nutritives étendues, les produits d’excrétion, qui déterminent l’affaiblissement, interviennent eux aussi à l’état dilué, et agissent alors avec moins d’énergie 1 ). Pour le Bacillus cyaneo-fuscus , partant de celle de ses formes qui continuait encore à croître avec sécrétion de pigment dans J ) Pour plusieurs de mes bactéries, reconnues très faibles et difficiles à cultiver, j'ai cherché à les maintenir constantes en mettant une trace de la culture en suspension dans de l’eau de conduite, ou de l’eau de mer. Mais ces essais n’ont donné aucun résultat positif. Peut-être atteindrait-on le but en conservant à l’état sec les formes qui ont prouvé pouvoir sup- porter la dessiccation. J’ai entrepris des expériences dans cette direction. En ce qui concerne le Bacillus cyaneo-fuscus , je n’ai pas encore réussi à le dessécher de telle sorte qu’il reste en vie. Sous ce rapport, toutefois, il y a à tenir compte de beaucoup de circonstances, qui influent sur le ré- sultat de la dessiccation: la plus importante de celles-ci est la proportion des matières dissoutes dans la masse servant à l’expérience. LA BIOLOGIE D’UNE BACTERIE PIGMENTAIRE. 259 les solutions de peptone, mais qui ne pouvait plus être cultivée sur gélatine, je me proposai de lui rendre cette dernière propriété. Comme je ne suis pas encore parvenu à restaurer complètement l’activité amoindrie, et que la solution précise de la question, si simple que celle-ci paraisse au premier abord, laisse subsister maints doutes quand on y regarde de plus près, je ne veux pas me prononcer déjà définitivement. Pourtant, je suis, dans ce cas aussi, sur la voie qui conduit à des résultats positifs, et dès à présent je puis affirmer que les Bacillus cyaneo-fuscus affaiblis recouvrent leur activité, au moins partiellement, lorsqu’ils sont cultivés pendant longtemps à de basses températures, — assez élevées toutefois pour permettre encore une croissance sensible, — et lorsqu’en outre on fait usage de solutions nourricières étendues, renouvelées assez fréquemment. Il m’a été possible, en effet, après six semaines d’inoculations répétées dans des solutions à j % de peptone, à une température au dessous de 6° C.. de ramener une cul- ture, devenue incapable de vivre sur une gélatine à 10 %, à un état où elle se développait, sur ce terrain solide, en un mélange de petites colonies faiblement liquéfiantes, avec ou sans zone pigmentaire. Lorsque, en opérant ainsi sur d’autres espèces adaptées à des degrés de chaleur élevés, on les maintient pendant plusieurs semaines à une température très basse (voisine de 0° C., où la croissance est complètement arrêtée), on observe, après l’ensemencement sous des circonstances favorables au dévelop- pement pour les formes normales, une diminution qui ne disparaît qu’après une ou deux inoculations nouvelles sous ces circonstances favorables. J’appuie donc sur la remarque, déjà faite plus haut, que, là où il s’agit de réveiller par un abaissement de température l’activité des formes affaiblies, je regarde comme efficace unë température un peu supérieure au minimum encore tout juste suffisant pour la croissance, mais pourtant beaucoup plus basse que la température opti- mum de végétation des cultures fraîches. Sans croissance aucune’, Archives Néerlandaises, T. XXV. 18 260 M. W. BEYERINCK. le rétablissement de l’activité des bactéries individuelles affai- blies me paraît impossible. La conclusion pratique à tirer de ce qui précède, pour la culture des bactéries dans le laboratoire, est, essentiellement, qu’il faut veiller avec soin à ce que les préparations conser- vées pour des expériences ultérieures ne soient pas exposées à des températures trop voisines de l’optimum de croissance. Ces préparations doivent donc toujours être maintenues à de basses températures, qui peuvent toutefois être différentes, selon les espèces. L’action longtemps prolongée de tempéra- tures très basses doit également être évitée, vu qu’il peut en résulter une dépression — passagère, il est vrai, mais pourtant bien sensible et temporairement héréditaire — des fonctions les plus importantes. L’emploi d’aliment dilué est aussi à recommander. En suivant ces préceptes, il sera probablement tout aussi facile de cultiver, sans la moindre perte de viru- lence, les bactéries du choléra, de l’érysipèle, de la morve, du typhus, etc., qu’il l’a été, dans mes expériences sur le Bacil- lus cyaneo-fuscus , organisme si extraordinairement sensible, de maintenir intactes la production pigmentaire et la force vé- gétative. § 7. Déperdition de la force végétative chez les plantes supérieures et chez les animaux. Dans les lignes suivantes, je désire appeler l’attention sur une analogie qui me semblerait mériter un examen plus ap- profondi. Je n’apporte à son appui aucun résultat d’expé- riences personnelles; néanmoins, l’importance du sujet me fait croire que cette première tentative de généralisation, si imparfaite qu’elle soit, ne paraîtra pas inopportune. L’histoire des sciences biologiques citera indubitablement, comme la seconde œuvre capitale de Darwin, la longue série de ses recherches sur la nature de la sexualité. Le résultat général auquel il a été conduit, condensé en une proposition LA BIOLOGIE T)’üNE BACTERIE PIGMENTAIRE. 261 unique, se laisse énoncer en ces termes : La matière repro- ductrice des plantes et animaux supérieurs est susceptible d’éprouver une déperdition de sa force végétative; le rôle de la sexualité est de prévenir cette déperdition ou, si elle a déjà eu lieu, de la réparer '). Darwin fait voir que cette perte de force végétative, qui s’accompagne souvent de la régression d’autres caractères chez les descendants, peut être la conséquence d’autofécon- dation ou de reproduction végétative prolongée. Les recherches et les méditations de Darwin 1 2) l’amènent ensuite à conclure que l’essence de la sexualité est le fusion- nement de deux protoplastes de la même espèce végétale ou animale, lesquels protoplastes (gamètes, oosphère et sperma- tozoïde ou contenu du pollen) ne diffèrent l’un de l’autre qu’en ce qu’ils proviennent de deux plantes ou de deux animaux qui ont été engendrés et se sont développés dans des conditions vitales différentes. Ces découvertes, qui, combinées avec la théorie de la descendance, ont jeté une vive lumière sur des milliers de phénomènes naturels obscurs et de constructions organiques compliquées, constituent l’un des plus grands progrès que les connaissances humaines aient jamais faits, et rivalisent avec cet autre triomphe de la biologie expérimentale contem- poraine, la réfutation, par Pasteur, du dogme de l’abiogenèse Quand on se demande jusqu’à quel point les phénomènes d’affaiblissement végétatif, observés par Darwin à la suite de l’autofécondation, concordent avec les phénomènes analogues ci-dessus décrits pour les bactéries, il semble que le rapport 1) Ch. Darwin, The effects of Cross and Selffertilisation in the Vegetable Kingdom , London, 1876. — The Variation of Animais and Plants under Domestication , Vol. II, p. 92 seq , London, 1875. 2) The Origin of Species by means of Natural Sélection , or the Préservation of Favoured Races in the Struggle for Life, 6th ed., p. 76, 234, London, 1878. La vue en question se trouve aussi déjà dans la première édition, de 1859. 18* 262 M. W. BEYEETNCK. soit assez intime pour qu’on puisse les considérer à un même point de vue ; dans les uns et les autres, en effet, il ne s’agit que de deux catégories de faits, — abaissement de l’énergie de croissance et perte de caractères, — faits qui n’admettent qu’une interprétation unique, quelles que soient d’ailleurs les différences qui peuvent exister quant à leurs causes plus lointaines. Que chez les organismes supérieurs il n’ait pu se manifester, sous ce rapport, que des modifications relativement légères, cela est tout naturel, puisque chez eux, où les actes physiologiques sont si étroitement enchaînés et si complexes,, une régression un peu profonde serait incompatible avec la vie elle-même. Pour cette raison seule, déjà, il était à présumer que les microbes inférieurs, avec leurs conditions vitales simples, présenteraient les phénomènes d’affaiblissement sous une forme plus aisément accessible à l’observation et dans une extension plus grande. La facilité relative de l’institution des expériences et la rapidité du développement des bactéries contribuent également à faire de celles-ci des sujets d’étude extrêmement favorables pour ces recherches comparatives. En admettant maintenant que la déperdition dont il s’agit soit réellement une propriété générale des organismes, tant des plus élevés que des plus rudimentaires, la question se présente de savoir dans quelle mesure des conditions extérieures semblables peuvent déterminer aussi des effets semblables dans les sections les plus éloignées entre elles du système des êtres vivants. Pour obtenir une réponse non ambiguë, il faudra abandonner la voie de l’investigation biologique, suivie par Darwin, et revenir à l’enquête physiologique. Le premier point à décider sera évidemment celui-ci: Les influences de température ont-elles chez les plantes et les animaux supérieurs, en ce qui concerne les altérations hérédi- taires de leur énergie de croissance, la même importance que chez les bactéries? En d’autres termes, ces organismes supérieurs éprouvent-ils aussi un affaiblissement végétatif à la suite du LA BIOLOGIE d’üNE BACTÉRIE PIGMENTAIRE 263 développement et de l’accroissement, longtemps continués, aux températures qui doivent être considérées comme les plus favorables à cette fonction ? Chez les animaux à sang chaud, ce devrait être précisément la température du sang qui, par elle-même, causerait le pré- judice à la vitalité des cellules reproductrices/ préjudice pouvant être réparé par la fusion sexuelle avec un protoplaste d’origine différente ,). Chez les animaux à sang froid et chez les plantes, ce seraient les surélévations de la température du milieu extérieur qui devraient entraîner les effets nuisibles. Pour les bactéries, comme nous l’avons vu, s’imposait l’hypo- thèse que la température n’exerce qu’une action indirecte dans la production de l’affaiblissement ; ce seraient certains produits d’excrétion de la matière vivante qui détermineraient primai- rement l’altération proprement dite, héréditaire, du protoplasme, mais l’action de ces produits serait considérablement exaltée par l’élévation de la température. En supposant que cette hypothèse se laisse appliquer aussi aux plantes et animaux supérieurs, il est incontestable qu’une foule de relations et de caractères se trouveraient éclairés d’un jour tout nouveau. Si dans le dernier énoncé il ne s’agit que d’hypothèses, souffrant à peine un contrôle direct, le précédent se prête tout ou moins à l’institution d’expériences, qui, de haute importance si elles conduisaient à un résultat positif, ne pour- «) Un argument capital à l’appui de cette manière de voir est fourni, me semble-t-il, par le fait que. même chez les animaux à sang chaud (et plus encore chez les animaux à sang froid), toutes les fonctions n’ont pas le même optimum de température. C’est ainsi, par exemple, que dans le processus respiratoire la quantité d’acide carbonique s’élève certainement encore quand la température dépasse l’optimum pour la croissance, et des différences analogues se rencontrent probablement dans une foule d’autres actes physiologiques II ne paraît donc pas impossible que, dans le corps d’un animal à sang chaud, certains processus doivent s’accomplir, néces- sairement et continûment, à une température un peu supérieure à celle qui leur conviendrait le mieux dans la durée des temps. 264 M. W. BEYEK1NCK. raient être regardées comme inutiles dans le cas contraire. Sous ce rapport, le plus simple serait d’expérimenter sur des plantes, et cela de la manière suivante. Des individus d’origine identique seront cultivés, les uns au-dessus, les autres au-dessous de la température reconnue pour correspondre à l’optimum de végétation, mais dans des conditions d’ailleurs identiques, et telles, que ces individus soient réduits à l’autofécondation. Les descendants provenus des graines de ces deux séries de plantes seront placés dans des conditions égales sous tous les rapports, — égales aussi en ce qui concerne la température, — et abandonnés à eux-mêmes jusqu’à maturité. Finalement, le produit de la récolte sera apprécié suivant la méthode de mensuration de Darwin, c’est- à-dire que la hauteur et le poids des plantes entières, ainsi que le nombre des fruits et des graines, seront déterminés pour chacun des deux groupes et comparés de l’un à l’autre. Si l’hypothèse se confirme, les descendants par autofécon- dation des plantes soumises à la chaleur donneront, à la récolte, des nombres inférieurs à ceux que fournira la progé- niture, également obtenue par autofécondation, des parents cultivés à une température plus basse que celle de leur opti- mum de végétation. (Jn point essentiel, dans l’exécution de l’expérience, serait que cette température plus basse, à laquelle on cultiverait l’un des groupes de plantes, ne fût pas trop éloignée de celle de l’optimum. Il est probable, en effet, que l’action longtemps continuée de températures très basses déterminerait, tout comme chez certaines bactéries, un abaissement de l’énergie végétative, abaissement héréditaire, au moins pour quelque temps, même à la température optima réelle. Il est à présumer aussi, en ce qui concerne les plantes sou- mises à la chaleur, que des températures de beaucoup supé- rieures à celle de l’optimum donneraient lieu à un affaiblissement végétatif plus énergique que les températures voisines de ce point. On peut croire, enfin, que l’influence de la température LA BIOLOGIE D’UNE BACTERIE PIGMENTAIRE. 265 pourrait devenir sensible, probablement suivant la nature des espèces, ou bien dès la première nouvelle génération, ou bien seulement après un certain nombre de générations, dérivées les unes des autres par propagation asexuehe ou par autofécon- dation. Pour cette dernière raison, les recherches comparatives sur des plantes vivaces, cultivées à température supérieure et à température inférieure, offriraient peut être des chances particu- lières de succès. § 8. Sur la présence du Bacillus cy aneo-fuscus dans le fromage. Ce sujet demande, vu son importance pratique, à être traité à part; au point de vue de la science pure, il présente un certain intérêt, d’abord à Cause des phénomènes de coloration qu’on observe dans le fromage attaqué, puis à raison de l’état d’affaiblissement et de dépérissement où tombent les bactéries, par suite des transformations chimiques qui s’opèrent dans la masse caséeuse dès le début de la maturation, et peut-être aussi par suite des changements de température dont ces tranformations sont accompagnées. Quelques mots sur la structure microscopique du fromage ne seront probablement pas déplacés ici, car dans les ouvrages traitant de l’industrie laitière je n’ai trouvé, relativement à cette structure, que des données insuffisantes, de sorte qu’on doit la supposer peu connue. Ce que j’en dirai a principale- ment rapport au fromage „d’Edam”, très réputé aux Pays-Bas. La caséine du fromage mûr se présente au microscope sous l’aspect d’une masse compacte, amorphe, dans laquelle on ne découvre que par places des globules de graisse (/ fig. 7), et qui doit, en tout cas, être imprégnée par imbibition de cette dernière matière. Une coupe mince de fromage laisse encore reconnaître, outre ces gouttelettes de graisse, des bulles de gaz ( ^ fig. 7), disséminées dans la masse caséeuse. Par suite de l’inégalité 266 M. W. BEYERINCK. de pression, les gouttelettes de graisse et les bulles de gaz s’éloignent souvent beaucoup de la forme sphérique. Si l’observation de ces détails assez grossiers est facile, celle des autres éléments structuraux du fromage l’est un peu moins. Comme tels, un examen attentif m’a fait distinguer: 1° Des sphérocristaux (t fig. 7) d’une substance analogue à la tyrosine (peut-être, de la tyrosine elle-même), 2° Des cellules de levure (h) du Saccharomyces tyrocola. 3° Des bactéries en bâtonnets (m) du bacille de l’acide lactique. Parmi ces éléments, les plus importants, de beaucoup, sont les bactéries. Considérons chacun d’eux un peu plus en particulier. En ce qui concerne les sphérocristaux ( t fig. 7), je dois faire remarquer qu’on ne peut pas les rencontrer dans toute par- ticule de fromage, quelle qu’elle soit. Dans les fromages fa- briqués avec ce qu’on appelle du „petit-lait filant”, fromages qui mûrissent rapidement, les sphérocristaux sont extrêmement communs. La formation en dépend évidemment de causes lo- calisées, et je ne doute pas que l’accumulation, en certains points, des bâtonnets et microcoques lactiques ne joue sous ce rapport le rôle principal. Ces sphérocristaux possèdent, tout comme les grains d’amidon, une petite tache nucléaire, d’où rayonnent les petites aiguilles cristallines à peine visibles. Ce qui nous intéresse ici plus spécialement, c’est l’aptitude de ces corps à emmagasiner la matière colorante brune pro- duite par le Bacillus cyaneo-fuscus et à prendre ainsi une couleur presque noire; surtout le corpuscule nucléaire, ci- dessus mentionné, a une grande affinité pour la matière co- lorante, et il consiste peut-être en une substance protéique particulière, qui se trouverait par rapport à la caséine dans la même relation où la calcoglobuline de Harting 1 ) se trouve par rapport à l’albumine, dans les sphérites calcaires que ce savant avait obtenues par la précipitation de solutions albumineuses. Le Saccharomyces tyrocola (h fig. 7), qui a la propriété d’agir *) l. c ., p. 59. LA BIOLOGIE D’UNE BACTERIE PIGMENTAIRE. 267 comme ferment sur le sucre de lait et de le transformer en alcool et acide carbonique, se trouve disséminé, quoique assez irrégulièrement, dans toute la masse caséeuse, et n’est mani- festement actif que dans les premiers stades de la maturation. Les bacilles lactiques (m fig. 7) — dans les fromages pré- parés avec du „pertit-lait filant” je n’ai trouvé que des micro- coques, dont je n’ai toutefois pas essayé la culture *) — sont répandus en nombre immense dans la masse du fromage et se trouvent, pour ainsi dire, partout. Lorsqu’on prépare une gélatine au sérum de lait faiblement acide, et qu’on y trace, avec une aiguille de platine préalablement enfoncée dans le fromage, une ligne d’inoculation, on obtient souvent une file continue de colonies uniquement composées de ferments lac- tiques, mais seulement des colonies isolées, disséminées entre les premières, de la levure du fromage. En étudiant séparé- ment les colonies développées par le fromage d’Edam, j’y ai trouvé environ cinq variétés constantes, qui se laissent distin- guer au moyen de la forme des bâtonnets et se différencient encore par beaucoup d’autres particularités accessoires, mais qui toutes se ressemblent en ce qui concerne l’aptitude à transformer en acide lactique le sucre de lait, le sucre de canne, la maltose, la lévulose, la glucose et la galactose. L’acide lac- tique produit est l’acide de fermentation ordinaire, dont le sel calcique renferme cinq molécules d’eau de cristallisation. D’accord avec l’extrême abondance des bacilles lactiques dans le fromage, celui-ci renferme une très forte proportion d’acide lactique. Dans divers titrages directs, j’ai eu besoin de 15 à 20cc de potasse normale pour neutraliser 100 gram- mes de fromage, d’où résulte une teneur en acide lactique de 1,35 à 1,8 % * 2). Au premier abord, il paraît singulier que • ) Par contre, j’ai cultivé les bactéries du *petit-lait filant” lui-même, de sorte qu’elles me sont bien connues 2) Si, comme expression probable de la fermentation lactique du sucre de lait, on admet l’équation C**H%iOil + H1 0 = 4 C3H*03, 268 M. W. BEYERINCK. d’aussi fortes quantités d’acide se fassent si peu remarquer dans le fromage; cela tient évidemment à sa teneur en sel, substance dont le goût masque celui de l’acide. Qu’une pa- reille proportion d’acide détermine la mort complète d’un organisme aussi sensible que le Bacillus cyaneo-fuscus, il n’y a certes pas lieu de s’en étonner. Passons maintenant à ce qui concerne la présence de cette bactérie pigmentaire dans la niasse caséeuse, et commençons par examiner la structure microscopique des taches foncées qu’elle y produit '). Ces taches se distinguent, de la substance non altérée, en premier lieu par leur couleur. Celle-ci est due à la présence de grains noir bleuâtre ou bruns et d’une ma- tière colorante foncée diffusée dans le fromage lui-même, matière qui se trouve accumulée surtout dans les sphérites de tyrosine. En second lieu, les taches se distinguent de la masse normale par l’entassement, à leur centre, de bâtonnets du ferment lactique; il peut arriver, toutefois, que cet entasse- ment fasse défaut. Les bâtonnets du Bacillus cyaneo-fuscus lui-même ne sont, d’ordinaire, pas distinctement reconnais- sables dans les taches. Les grains de matière colorante noire sont identiques avec les sphérites de B. cyaneo-fuscus , telles que nous avons appris à les connaître plus haut. La réduction par l’hydrosulfite de sodium et l’oxydation par l’acide nitrique, le peroxyde d’hy- drogène ou d’autres agents d’oxydation, produisent sur eux la même décoloration que sur les susdites sphérites. La couleur disparaît aussi presque entièrement, surtout quand la tempé- rature est un peu haute, sous l’influence de l’air. M. Hugo de les nombres ci-dessus correspondent exactement aussi à une proportion de 1,35 à 1,8 °/0 de sucre de lait dans la masse caséeuse originelle; c’est à peu près la moitié ou le tiers de la proportion de lactose dans le lait, proportion qui ne s’éloigne pas beaucoup de 3 à 5°/0. i ) Des taches foncées peuvent naturellement se former dans le fromage par toutes sortes de causes. Quant à l’opinion que le rôle principal dans ce phénomène revient aux bactéries du lait bleu ( Bacillus cyanogenus), mes recherches ne l’ont pas confirmée. LA BIOLOGIE d’üNE BACTÉRIE PIGMENTAIRE. 269 Vries 1 ) a appelé sur ce point l’attention particulière des pro- ducteurs de fromage, auxquels il conseille, pour se débarrasser de l’altération tant redoutée, des essais avec l’oxygène sous pression, à une température modérément élevée, non nuisible au produit. Peut-être vaudrait-il encore mieux introduire les fromages attaqués, qui, — les taches bleues le démontrent elles-mêmes, — ne contiennent pas d’oxygène à leur intérieur, dans une en- ceinte où l’on ferait le vide ; les cavités du fromage laisseraient alors échapper peu à peu les gaz qu’elles enferment et, après la suppression du vide, elles se rempliraient d’air atmosphé- rique, lequel, se diffusant dans la substance, atteindrait les taches et les décolorerait. Ce serait aux praticiens de fixer la température à laquelle la masse pourrait être portée sans dommage pour le goût et la facilité de conservation. Des températures comprises entre 20 et 30° C donnant déjà lieu à une décoloration très parfaite, il n’y aurait pas à craindre, sous ce rapport, des difficultés insurmontables. Au reste, il serait naturellement bien préférable de prévenir entièrement la formation des taches, ce à quoi l’on parviendrait sans aucun doute au moyen d’une extrême propreté, et surtout par l’emploi exclusif de lait stérilisé, autant que possible, au sortir même du pis de la vache. Revenons, toutefois, aux changements de couleur qui peu- vent être observés dans les taches de fromage. Lorsqu’un fromage tacheté de bleu est coupé en morceaux et que ceux-ci demeurent exposés à l’action de l’air, on voit, en même temps que les anciennes taches se décolorent, s’en former de nouvelles, souvent en grand nombre. Toutes ces taches récentes restent petites. Je crois devoir expliquer ce phénomène de la manière sui- vante. Dans une masse caséeuse infectée de Bacillus cyaneo-fuscus , toutes les bactéries ne se développeront pas en colonies simul- tanément. Les colonies qui se forment les premières produiront les taches les plus grandes, et ces taches auront déjà pris leur J ) Over blaauwe kaas , dans Maandblad der Hollandsche Maatschappij van Landbouw , mai 1887, n° 5. 270 M. W. BEYERINCK. couleur définitive avant que l’oxygène inclus ne soit entière- ment consommé par les ferments donnant naissance à l’acide lactique '). D’autres colonies, d’origine postérieure, auront pu, avant la disparition de l’oxygène à l’intérieur du fromage, arriver au stade de la formation du pigment vert, mais non à celui de l’oxydation complète du pigment, à sa transforma- tion en pigment noir. Dans cet état, le manque d’oxygène et l’action de l’acide lactique, successivement produit pendant la maturation du fromage, feront mourir les bactéries ; par suite, les taches vertes resteront à peine visibles dans la masse, ou se déroberont complètement à la vue. Mais si un fromage pourvu de ces taches vient à être coupé en morceaux et exposé à l’influence de l’oxygène atmosphérique, la zone de diffusion, jusqu’alors inaperçue, prendra une couleur foncée, phénomène analogue à celui qu’on peut observer dans les so- lutions peptoniques infectées de B. cyaneo-fuscus, même quand elles ont été bouillies dans le stade vert et que les bactéries sont par conséquent tuées. Ces solutions peptoniques, tout comme les taches invisibles, demandent, pour prendre la coloration finale, l’action de l’air pendant un à trois jours. Je terminerai ces remarques par la description de l’expérience suivante, dont je dois la connaissance à M. van Lookeren Campagne. Un fromage sain et un fromage fortement marqué de taches bleues furent coupés par le milieu, puis les deux moitiés de l’un furent respectivement appliquées sur les deux moitiés de l’autre, dans le dessein d’apprendre jusqu’à quel point les morceaux sains, en contact avec les morceaux malades, se coloreraient. Après avoir été soigneusement enfermé dans une vessie de porc, chaque fromage composite fut laissé pendant environ six semaines à la température ordinaire d’appartement. Aux bords des surfaces de section, la masse s’était un peu contractée, de sorte que de l’air y avait pénétré et qu’une 1 ) Les ferments lactiques réduisent très facilement le bleu d’indigo soluble, mais n’ont aucun effet sur le stade noir du pigment du B. cyaneo-fuscus. LA BIOLOGIE d’üNE BACTÉRIE PIGMENTAIRE. 271 abondante végétation mucédinéenne s’y était établie ; au mi- lieu, le contact avait été bon, et manifestement il y était arrivé si peu d’oxygène, que la circonférence des surfaces limites seule avait pu en être saturée. Lorsque les deux moitiés eurent été séparées, on reconnut im- médiatement, à l’augmentation du nombre des taches, que l’oxy- dation des cbromogènes, précédemment invisible, avait eu lieu par la petite quantité d’air absorbé au moment de la coupûre; mais la couleur était restée exclusivement bornée à la moitié malade. Il ressort de là que ni le pigment vert, nile pigment oxydé et de couleur foncée, ne peuvent se diffuser; l’un et l’autre sont donc, pour ainsi dire, fixés chimiquement, ou du moins inclus à l’état solide dans la masse caséeuse. Indi- rectement, cette même expérience permet aussi de conclure que les B. cyaneo-fuscus sont morts dans toutes les taches; c’est d’ailleurs ce qui sera démontré, dans la section suivante, par des expériences directes. § 9. Comment on isole le B a ci II us cyaneo-fuscus des taches du fromage. Origine de l’in- fection du fromage. Le traitement par le „petit-lait filant”. Ce n’est qu’après avoir acquis la connaissance complète de l’histoire biologique du B . cyaneo-fuscus et avoir appris à régler convenablement l’influence de la température et les conditions nutritives, que j’ai réussi à isoler ces bactéries du fromage malade. Qu’on ne s’imagine pas, toutefois, que cet isolement puisse se faire au moyen de toute tache quelconque ; loin de là, car la très grande majorité des taches ne renferment que des bactéries mortes, ou des bactéries dans un état d’affaiblis- sement tel que la culture en est impossible.. Il faut remonter à des fromages très jeunes et pratiquer, de la manière qui va être décrite, de nombreux ensemencements, pour obtenir par-ci par-là un résultat positif. La pleine conviction que le 272 M. W. BEYERINCK. B. cyaneo-fuscus est la cause principale de la maladie des taches n’a été acquise, —je ne veux pas négliger de le dire, — que lorsque, dans une masse de caséine préparée en faisant cailler du lait frais au moyen de la présure, j’eus réussi à provoquer expérimentalement, par l’inoculation du B. cyaneo-fuscus , l’ap- parition des taches, avec toutes leurs propriétés. De quelle manière le B . cyaneo-fuscus se laisse-t-il isoler des taches? Pour répondre à cette question, je commencerai par décrire les résultats de l’application aux taches du procédé ordinaire à la gélatine. Cent centimètres cubes de lait de vache, à 35° C, furent additionnés d’un peu de présure en poudre 1 ) et, après coagu- lation, filtrés. Le liquide filtré était parfaitement clair, semblable à du petit-lait à fluorescence verdâtre. On y mêla 1 % de peptone sèche, 1 % de glucose et 7 % de gélatine, puis le tout fut bouilli, filtré et stérilisé. La réaction était amphotère, par suite de la présence de phosphates. Cette gélatine fut coulée en plaques épaisses dans des boîtes de verre, puis utilisée de la façon suivante. D’abord, à l’aide d’une aiguille, on enleva une parcelle de la masse interne d’un fromage d’Edam, vieux et sain 2). Cette parcelle fut écrasée à la surface de la plaque de gélatine et étendue en lignes d’inoculation ; d’autres fois, elle était délayée dans l’eau, puis cette eau servait à arroser la surface de la gélatine, qu’on laissait ensuite égoutter parfaitement. Les germes susceptibles de se développer sur un terrain contenant du sérum de lait apparaissaient au bout de quelques jours, soit dans les lignes d’inoculation, soit en colonies isolées. i; Voyez la Note 1 pag. 276. 2) Pour extraire d’une substance un peu de la matière intérieure, sans emporter en même temps quelque chose de la surface, il faut en rompre rapidement un gros morceau, afin d’obtenir des surfaces de cassure fraîches, sans glissements internes. Cela est à recommander surtout lorsqu’il s’agit de l’examen d’échantillons de terre, de parties de plantes et, en général, de substances cassantes. LA BIOLOGIE d’üNE BACTÉRIE PIGMENTAIRE. 273 Dans un assez grand nombre d’expériences, le fromage sain ne m’a donné de cette manière, — ce qui est d’accord avec les résultats d’observation microscopique rapportés plus haut, — que deux espèces bien caractérisées, à savoir: une levure du sucre de lait, que j’ai nommée Saccharomyces tyrocola, et cinq variétés, appartenant à une seule et même espèce, de bactéries lactiques baculiformes ; ces dernières sont identiques aux ferments lactiques qui sont les agents essentiels dans la fabrication de l’acide lactique industriel au moyen des céréales, aussi bien que dans la préparation de l’acide du commerce au moyen du lait mélangé de sucre de canne et de fromage putréfié. Les variétés se distinguent l’une de l’autre par la différence de longueur des bâtonnets, assez constante à la reproduction, par la couleur plus ou moins jaunâtre des colonies et par une aptitude différente à produire de l’acide avec le sucre de canne, le sucre de lait et la glucose; mais toutes ces différences sont si peu importantes que je n’ai pas à m’en occuper davantage en cet endroit, d’autant plus qu’il a déjà été question ailleurs de la formation d’acide dans le fromage. Quand, au lieu de la masse saine du fromage, on choisit pour ces recherches bactériologiques les taches bleues, on obtient les mêmes résultats; seulement, dans ces taches bleues, les bactéries de l’acidè lactique sont souvent très fortement accumulées. Cette accumulation doit être expliquée de la manière suivante. Les bactéries en question appartiennent au groupe des organismes à peptone-carbone, c’est-à-dire que pour leur nutrition elles exigent, outre la peptone, l’un ou l’autre composé carboné, par exemple, le sucre de lait Comme elles ne sécrètent pas d’enzyme tryptique, la caséine ne peut satis- faire à leur besoin d’azote. Elles en sont donc réduites, pour cela, aux peptones de la masse caséeuse. Or, le Bacillus cyaneo- fuscus exerçant une très forte action protéolytique et transfor- ment alors la caséine en peptone, les taches bleues sont, précisément à cause de la peptone qui s’y forme en abondance, 274 M. W. BEYERINCK. des lieux de reproduction très favorables pour les bactéries de l’acide lactique. — De bactéries d’autre espèce que les ferments lactiques, je n’en ai pas trouvées dans les taches. Par ce qui précède, il avait donc été bientôt établi qu’au moyen de la gélatine nourricière indiquée il n’était pas possible d’isoler le Bacillus cyaneo-fuscus. J’ai alors étudié les taches de deux autres manières : premièrement , en opérant sur la masse provenant d’une dissolution de 10% de gélatine pure dans de l’eau de canal, sans addition d’au- cune autre matière : en second lieu, par l’ensemencement direct des taches dans des solutions de peptone diluées. Ces nou- veaux essais laissaient espérer un résultat plus favorable, surtout par la raison que, comme nous l’avons vu, ces milieux de culture sont excellents pour le Bacillus cyaneo-fuscus , tandis qu’ils excluent complètement les ferments lactiques, dont la croissance exige, en outre des corps azotés susdits, la présence d’une espèce saccharine. Les cellules de levure sont, elles aussi, tout à fait incapables de se développer sur la gélatine pure ou dans une solution de peptone pure. Pourtant, même ainsi instituées, les expériences de culture du B. cyaneo-fuscus ne réussirent pas à l’origine, et cela, aussi longtemps que j’y employai du fromage vieux. Mais quand je m’avisai de mettre à l’œuvre du fromage tout à fait frais, qu’un marchand m’avait spécialement fourni à cet effet, le résultat de trois ensemencements différents révéla que le B. cyaneo-fuscus peut parfois se trouver encore à l’état viable, et sans affaiblissement trop prononcé, dans les taches du fromage. Je dois insister, toutefois, sur la circonstance que la teneur en acide de ce fromage jeune était petite, car elle correspondait tout au plus à 5CC de solution potassi- que normale, pour 100 grammes de fromage. La condition d’une aussi faible proportion d’acide me paraît essentielle pour la réussite des expériences. Il n’y a point de doute, en effet, que l’abondance croissante de l’acide libre, due à la transformation du sucre de lait par les bâtonnets de l’acide LA BIOLOGIE ü’üNE BACTERIE PIGMENTAIRE. 275 lactique, ne cause la mort du B. cyaneo-fuscus, ce qui explique pourquoi les taches du fromage vieux donnent toujours un résultat négatif dans les essais de culture. Ainsi qu’il a été dit, ce sont surtout les solutions pepto- niques diluées qui conviennent au développement de notre bactérie pigmentaire; aussi, est-ce avec elles que j’ai obtenu les résultats positifs sus dits. La culture directe sur gélatine, en partant du fromage, ne m’a jamais réussi. Mais lorsque, ayant obtenu au moyen du fromage des cultures de B. cyaneo-fuscus dans la solution de peptone, je les laissai, en décembre 1890 et janvier 1891, croître pendant des semaines à des tempéra- tures variant de 1 à 5° C, en répétant, dès que les liquides verdissaient distinctement, l’ensemencement dans une nouvelle solution nourricière, je parvins finalement à activer une culture au point que la croissance put ensuite s’opérer sur une gélatine à 10 °/0 dans de l’eau de conduite, avec ou sans addition de peptone. Les cultures ainsi réalisées étaient, sauf un certain degré d’affaiblissement, parfaitement identiques aux formes spontanément isolées de l’eau. Il m’intéressait tout particulièrement de savoir si le B. cyaneo- fuscus ainsi obtenu peut se développer dans le lait; que la croissance est possible dans la caséine séparée du lait par la présure, c’est ce que m’avaient déjà appris des expériences antérieures. J’ai trouvé que le lait, bouilli ou non, peut effec- tivement, à basse température, fournir un bon aliment au B. cyaneo-fuscus. Les phénomènes de coloration qui se pro- duisent dans ce liquide sont comparables à ceux qui ont lieu dans les solutions de peptone: d’abord le vert, puis le bleu, ensuite le brun et finalement le noir brunâtre. Ce n’est qu’au bout d’un temps assez long que le corps foncé s’oxyde aux dépens de l’oxygène atmosphérique ; il laisse alors au lait une teinte brun sale, perceptible pendant des mois, mais qui, com- parée à celle des solutions de peptone, pâlit très fortement. De ce qui vient d’être dit, il ressort la possibilité que quelques rares bactéries de notre espèce, entrées dans le lait, s’y Archives Néerlandaises, T. XXY. 19 276 M. W. BEYERINCK. multiplient avant la coagulation par la présure. La lenteur de leur croissance explique pourquoi, dans le fromage mûr, le nombre des taches est, d’ordinaire, relativement petit. Mais d’où viennent les germes isolés de B . cyaneo-fuscus qui causent l’infection première du lait? D’après ce qu’on a vu au § 1, la réponse à cette question ne saurait être douteuse. Les germes arriveront dans le lait par l’eau dyant servi à nettoyer les seaux et autres ustensiles de la laiterie, ainsi que par toutes les causes de souillure amenant dans le lait des matières humides, exposées à l’in- fection spontanée par le B. cyaneo-fuscus. J’appuie sur la remarque que le contact du lait avec des matières humides est particulièrement à craindre. Plusieurs expériences, en effet, ont eu pour but de décider jusqu’à quel point le B. cyaneo-fuscus peut être desséché sans que la mort s’ensuive. Des bandelettes de papier à filtre et des fils de platine furent chargés de culture de ce bacille, séchés, puis introduits dans des solutions de peptone. Comme je n’ai pas réussi, de cette manière, à revivifier l’organisme, je dois ad- mettre que le B. cyaneo-fuscus ne se trouve pas non plus à l’état vivant dans les poussières de l’air, et que par conséquent l’infection du lait doit toujours avoir pour point de départ des objets humides *). Les solutions très étendues de corps albuminoïdes, — par exemple le lait mêlé d’eau, — qui ont été longtemps abandonnées à elles-mêmes à basse température, seraient tout spécialement à suspecter comme foyers d’infec- i ) Les bactéries de la présure, au moyen de laquelle s’opère la coagu- lation du lait, ne me sont qu’imparfaitement connues. J’ignore si le B. cyaneo-fuscus peut vivre dans la présure; la forte proportion de sel ainsi que la présence de l’acide borique dans cette substance rendent la chose improbable. En tout cas, il est à recommander de se servir, pour la fabrication du fromage, de présure en poudre sèche, qu’on fait dissou- dre, à la température convenable, dans du lait ou dans de l’eau pure, préalablement bouillie; dans cette poudre, le B. cyaneo-fuscus est certaine- ment mort. On peut se procurer une préparation excellente dans la fabrique de produits de lait du docteur H. Graefe, à Alkmaar. LA BIOLOGIE d’üNE BACTÉRIE PIGMENTAIRE. 277 tion. Comme sources originelles, toutefois, le rôle principal paraît devoir être attribué, de même que dans mes essais d’isolement, à l’eau de conduite ou de canal, ainsi qu’aux particules de terre. La pratique a donc à tenir compte de pa- reils habitats, et le seul moyen absolument sûr de rester à l’abri des atteintes de cette bactérie et de toutes les autres espèces nuisibles serait l’emploi général et exclusif de lait retiré à l’état stérile du pis des vaches. Dès l’année 1878, M. Lister a fait voir 1 ) que le lait des vaches saines est stérile, et que l’opération de le recueillir en cet état exige à la vérité des soins, mais est à la portée de tout le monde. Une prescription légale à cet égard, d’ailleurs parfaitement justifiée par l’importance hygiénique de l’opération, aurait promptement raison du préjugé de l’impossibilité de celle-ci. Pour certains buts déterminés il faudrait alors, naturelle- ment, ajouter quelque culture de bactéries. C’est ce qui se fait déjà actuellement en Nord-Hollande, où l’on emploie, dans la fabrication du fromage, le petit-lait dit „ filant” (culture, dans le petit-lait, d’un microcoque mucipare de l’acide lactique) 2); un grand progrès est ainsi réalisé, en tant que l’industrie fromagère, encore très primitive au sens bactériologique, peut maintenant combattre avec succès différentes maladies dange- reuses, qui attaquent ses produits. De ce nombre est aussi la maladie des taches; dans les fromageries où elle apparaît, 1) Transactiotis Pathological Soc. of London, T. XXIX, 1878. 2) En Hollandais vlange wei ”. J’ai examiné cette matière remarquable par les méthodes bactériologiques, et j’ai trouvé que l’organisme muci- pare est un ferment lactique qui produit aussi un arôme agréable, et dont la propriété la plus intéressante est de perdre bientôt, dans les cultures pures, la faculté de rendre le petit-lait filant; elle se change alors en un ferment lactique ordinaire Je n’ai pas encore eu l’occasion de rechercher la cause de ce phénomène. Voyez aussi : H. Weigmann, Der Organismus der sogenannten „lange Wei ”, dans: Milchzeitung , Jahrg. 8, p. 982, 1889. C’est un simple paysan d’Assendelft qui a découvert, il y a un quarantaine d’années, l’utilité et l’usage de cette substance, devenue populaire seule- ment dans les derniers temps par les efforts de Mr. Roekel. 19* 278 M. W. BEYERINCK. le petit-lait filant apporte une amélioration considérable. L’ac- tion exercée dans le fromage par ces bactéries mucipares n’est pas encore complètement expliquée, pas plus que n’est élucidé, d’ailleurs, le processus de la maturation en général. Pour ce qui concerne, toutefois, leur antagonisme par rapport au B. cyaneo-fuscus , on s’en rend aisément compte. Il dépend de deux facteurs, à savoir, de la production d’acide lactique et de l’absorption complète d’oxygène par l’immense quantité de bactéries mucipares qu’on mêle avec la masse caséeuse. Que les acides empêchent la croissance du B. cyaneo-fuscus , nous l’avons déjà vu précédemment. Quant au nombre des bac- téries, pour s’en faire une idée, il suffit de savoir qu’aux 25 litres de lait, employés à la fabrication d’un fromage d’Edam, on ajoute, en même temps que la présure, V2 litre de „petit- lait filant” ; or, cette substance ne consiste pour ainsi dire qu’en une agglomération de bactéries excessivement petites, lesquelles, lorsqu’on fait écouler le petit-lait, restent presque toutes, à cause de leur nature mucilagineuse et gluante, enfermées dans le fromage, dont le volume n’atteint pas trois décimètres cubes. Qu’une pareille masse de bactéries, accumulée dans un si petit espace, puisse, tant par la formation d’acide lactique que par l’absorption d’oxygène, entraver ou prévenir le développe- ment de bactéries aussi sensibles que le B. cyaneo-fuscus , il n’y a certes pas lieu de s’en étonner. Laboratoire Bactériologique de la Fabrique Néerlandaise de Levure et d’Alcool à Delft. Explication des figures. (Planche II). Fig. 1. Couche de gélatine (10°/o de gélatine et XA °/0 de peptone dans de l’eau de conduite), avec colonies de Bacillus cyaneo-fuscus, dans une boîte de verre, gw Paroi de la boîte, dg couvercle tourné vers le bas. Les colonies, fortement liquéfiantes, consistent en LA BIOLOGIE D’UNE BACTÉRIE PIGMENTAIRE. 279 une couche de bactéries bs , appliquée sur la gélatine ge ; tout autour, se trouve la zone brune dz de la matière colorante diffusée dans la gélatine, avec cristaux disséminés de carbonate de chaux. Fig. 2. Œuf cuit dur et dépouillé de sa coque, avec plages d’inoculation du B. cyaneo-fuscus , liquéfiées au centre. (Comp. fig. 6) Fig. 3. Cultures de B. cyaneo-fuscus dans de l’eau de conduite contenant % °/Q de peptone, à la température de 6° C. a. Premier stade, ou stade vert, au cinquième jour après l’ino- culation. b. Stade bleu, au septième jour; la teinte brune est produite par oxydation à partir de la surface et se change bientôt en gris. c. Stade brun, du neuvième jour. d. Stade noir, au treizième jour. e. Culture décolorée par l’oxydation lente sous l’influence de l’oxygène de l’air; dérivée du stade noir, au bout de deux mois, à la température de 6° C. Fig. 4. Aspects des bactéries des cultures peptoniques. a. Le liquide bleu du petit matras b fig. 3. a, Bactéries incolores, vivantes, souvent mobiles. g. Bactéries brunes, mortes. y. Corpuscules de matière colorante bleue. ô. Corpuscules de couleur foncée, à facettes cristallines. b. Pellicule bactérienne, provenant d’une culture d fig. 3. Toutes les bactéries sont vivantes et très uniformément unies en une pellicule continue, dans laquelle on voit disséminées les sphérites de matière colorante bleue. Fig. 5. Cultures de B. cyaneo-fuscus sur gélatine (10°/o) dissoute dans de l’eau de conduite. «. Bactéries vivantes 3. Bactéries mortes, brunes. y. Sphérites bleues. J. Corpuscules de matière colorante bleue, à facettes planes. s. Aiguilles cristallines de tyrosine (?) et druses cristallines de carbonate de chaux. Fig. 6. Culture sur l’œuf cuit de la fig. 2. Les bactéries sont fréquemment agglomérées en masses membraneuses ou zoogléiques; on voit figurées deux lamelles ainsi produites, colorées en gris uniforme. Du reste, la masse est composée de bactéries vivantes, fusiformes ou baculiformes, de corps bactériens morts, bruns, de corpuscules de matière colorante noire, à facettes planes, et de sphérocristaux du pigment bleu d’outremer. 280 LA BIOLOGIE D’UNE BACTÉRIE PIGMENTAIRE. Fig. 7. Représentation demi-schématique de la structure du fromage et d’une partie d’une „tache bleue” formée par le Bacillus cycmeo- fuscus. l. Cavités remplies d’air. m. Ferment lactique. y. Corpuscules de matière colorante noire et sphérites. f. Gouttelettes de graisse. h. Cellules de la levure Saccharomyces tyrocola. t. Sphérites de tyrosine, elles-mêmes de couleur intense, en tant que situées dans la tache. SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX À BOUCHE, PAR W. C. L. VAN S C H A I K. (Mémoire couronné par la Société batave de philosophie expérimentale). Le Mémoire suivant contient le résumé d’une étude expé- rimentale qui a paru dans les actes de la Société Batave ,). Les expériences qui y sont décrites se rapportent principale- ment à la production du son dans les tuyaux sonores à bouche. Je me suis occupé surtout du courant injecté par la lumière du tuyau. On peut observer les différentes phases de ce courant comme il a été indiqué dans le Chapitre VII. Ces phases montrent distinctement une asymétrie par rapport à la bissec- trice de la figure entière décrite par le courant en vibration, asymétrie qui est en relation avec la production du son. L’étude vibroscopique du courant injecté permet de donner une description exacte des courants observés par MM. Lootens et Van Triclit. Un autre phénomène, cité par M. van Tricht, s’explique par l’expérience avec le „tuyau sensitif” parlant par réson- nance (Chap. VI). Cette expérience peut montrer le rôle que joue la résonnance dans la production du son. Dans le Chapitre VIII on trouve la description des vibra- tions composantes du courant aérien. Certaines particularités 1) Uber die Tonerregung in den Labialpfeifen (Janvier 1890). Rotterdam, Van Hengel, 1891. 282 W. C. L. VAN SCHAIK. concernant ces mouvements indiquent la cause d’un phéno- mène remarquable et bien connu, que montrent les tuyaux à bouche quand on renforce graduellement le courant aérien. CHAPITRE I. Introduction. Le son des tuyaux sonores à bouche offre, au point de vue physique, un double intérêt. En premier lieu, c’est l’onde stationnaire, due à l’interférence de deux systèmes d’ondes courantes, qui a été l’objet des recherches des physiciens depuis D. Bernouilli et Lagrange. La description mécanique de ces ondes forme un problème particulier, qu’on peut dis- tinguer d’une autre question, relative à la manière dont le courant injecté produit et entretient les vibrations de l’air. C’est ce dernier problème que M. Gripon a en vue lorsqu’il dit: „I1 n’est pas facile, dans l’état de la science, d’expliquer clairement comment la veine d’air qui s’échappe d’une fente et qui rencontre à une distance convenable un biseau, peut mettre en vibration la colonne d’air qui remplit en tuyau sonore”. ( Journ . de Phys . 1876, p. 321). En réalité, les deux questions se combinent, dans le phé- nomène du tuyau sonore, en un seul problème, qui, du point de vue mathématique, est assez compliqué. En effet, il s’agit de vibrations entretenues par le courant d’air injecté, tandis que ces vibrations elles-mêmes règlent les forces qui sont exigées pour l’entretien du mouvement. C’est une question analogue à celle d’une horloge, où le pendule règle le mouvement de de l’échappement, qui de son côté permet à l’énergie du poids remonté d’actionner le pendule. Suivant cette analogie, la colonne d’air en vibration dans le tuyau sonore forme le pendule régulateur, tandis que le courant injecté joue le rôle de l’échappement. Etudier les mouvements de ce courant aérien, c’est étudier l’échappement du mécanisme en question. SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 283 Les équations différentielles pour l’accélération de cette classe de mouvements contiennent, outre les résistances et la force réglant la vibration du système supposé libre, la force qui restitue l’énergie perdue. Les particularités du cas dans lequel cette dernière force est de la forme E cos pt , ont été étudiées amplement. Les observations indiquent cependant que le courant aérien exerce sur les vibrations dans les tuyaux à bouche une force dépendant du temps d’une manière plus compliquée. J’ai préféré la voie expérimentale, et dans ce qui suit je me suis borné essentiellement à l’étude des mouvements de la lame d’air qui forme la partie active du courant injecté. On sait que les théories de la production du son dans les tuyaux à bouche se divisent en deux groupes. Suivant l’une de ces théories le mouvement vibratoire de la lame d’air ré- sulte directement de la rencontre du courant aérien, avec la lèvre supérieure, de sorte que cette vibration peut exister in- dépendamment de celle de la colonne -d’air du tuyau. Dans ce cas on s’occupe des sons de ^frottement” ( vReibungstône ”) étudiés par Masson, Sondhauss, Kohlrausch, Strouhal et autres. Le tuyau joue alors le rôle de résonnateur; il renforce par résonnance les sons de frottement qui correspondent à ses pro- pres .sons. Cette opinion est soutenue aussi par M. Melde. Sans vouloir introduire ici un „frottement” proprement dit, on peut conserver ce nom, jusqu’à ce qu’on ait acquis une notion plus précise du mouvement de l’air dans lequel consistent ces vibrations. Suivant les autres théories, le courant, sortant de la fente entre le biseau et la lèvre inférieure, communique à la co- lonne d’air une certaine impulsion, d’où naît une onde stationnaire, qui ensuite règle le mouvement périodique de la lame d’air elle-même. De cette classe sont la plupart des théories exposées dans les cours. Je m’occuperai, en premier lieu de la production des sons par le frottement. 284 W. C. L. VAN SCHAIK. CHAPITRE IL Production du son par le frottement. Résonnance périodique d’un tuyau. Pour démontrer le renforcement par résonnance des sons dus au „ frottement”, on se sert par exemple d’une règle taillée en biseau, L (voir la fig. 1. PL III), qu’on peut placer à une distance convenable d’une fente K, d’où s’échappe un cou- rant d’air étalé en plan. L représente ici la lèvre supérieure du tuyau, K la ^lumière”. On règle la distance de ces deux parties, ainsi que l’intensité du courant, de telle manière qu’on entende un son distinct, dont la hauteur corresponde à celui d’un résonnateur, qu’on approche ensuite peu à peu de l’ap- pareil. On observe qu’à une distance de quelques cm. le ré- sonnateur parle très-bien, tandis que l’intensité du son a crû continuellement avec la diminution de la distance. Si le ré- sonnateur a un son fondamental d’une hauteur très différente, il ne parle qu’au voisinage de l’apparail décrit, de sorte que le son fondamental est alors changé en même temps. M. Melde a fait connaître un phénomène intéressant, qu’on peut appeler la résonnance périodique d’un tuyau à bouche, et qui est bien propre à appuyer sa théorie sur la manière dont le tuyau commence à parler. Avec un tuyau ouvert d’une longueur de quatre pieds, et à base carrée, il trou- vait, qu’en augmentant peu à peu l’intensité du courant aérien, les sons suivants se faisaient entendre dans l’ordre indiqué : 1. ) Après un murmure profond et doux, dont la hauteur augmente lentement, on entend le son fondamental, Ut2. 2. ) Celui-ci diminue en intensité, faisant des battements avec l’octave. 3. ) Le son fondamental seul pour la deuxième fois, un peu plus fort que d’abord. 4. ) Duodécime avec le son fondamental. SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 285 5. ) Son fondamental pour la troisième fois, 6. ) faisant des battements avec l’octave. 7. ) l’Octave. 8. ) Son fondamental pour la quatrième fois, en pleine force. Le tuyau sonna donc quatre fois au ton fondamental. Le phénomène, que ce son ainsi que les aliquotes se font entendre et disparaissent plusieurs fois, a été formulé par M. Melde de la manière suivante : „ Jeder Oberton einer Orgelpfeife kann „erklingen, so oft er Oberton zu dem Reibungston des Anbla- „sestromes wird; die Tonstârke eines Pfeifentons aber steigt „um so mehr, je mehr dieser Ton ein Ton stàrkster Reso- „nanz, d.h. unisono mit dem Reibungston ist. Das gleichzeitige „Erklingen zweier oder mehrerer Obertône einer Pfeife ent- „spricht aufs genaueste dem Gesetz der Resouanz.” ( AJcustik , page 252.) J’ai répété l’expérience de M. Melde plusieurs fois, avec des tuyaux de différente taille. En premier lieu, je prendrai un tuyau ouvert d’une longueur de 4 pieds, à base rectangulaire (8,5 x 7 cm.), et du son fondamental Ut2. En augmentant peu à peu et soigneusement l’intensité du courant aérien, je trouve les sons suivants: 1. ) Le son fondamental (Ut2), d’abord un peu plus bas, mais s’élevant peu à peu. 2. ) Le son fondamental a disparu; des sons très-bas (La,) se font entendre doucement, et s’élèvent jusqu’à la hauteur du son fondamental. 3. ) Celui-ci pour la deuxième fois, plus fort qu’à l’ori- gine, s’élevant toujours, et 4. ) faisant des battements avec l’octave (Ut 3 ou presque Ut%) Tous les deux disparaissent. On entend un son très- bas (à peu près Ut,.), s’élevant. 286 W. C. L. VAN SCHAIK. 5. ) Son fondamental pour la troisième fois, avec la duodécime (Sol3). Celle-ci seule 6. ) Tous les deux ont disparu. Le son fondamental apparaît de nouveau avec l’oc- tave. Quelquefois on entend la deuxième octave (Ut , J. 7. ) Silence; on perçoit des sons très-bas (La, ) s’élevant jusqu’au 8. ) son fondamental, qui se produit ainsi pour la cin- quième fois. 9. ) Son normal, timbre plein, avec les aliquotes Ut3 et Sol3. Vient ensuite le phénomène compliqué de l’oc- taviation, que, pour le moment, je passe sous silence. Pour comparer les diverses phases du son par rapport à la pression, je note ici les indications du manomètre ouvert à eau, communiquant avec le pied du tuyau : 1.) lj mm., 3) 2^ mm., 4) d’abord 3f plus tard 4 mm., 5.) 4.J mm., 6.) 52L à 6 mm., 8.) 9 à 16 mm., 9.) 40 mm. Quand le tuyau parlait normalement, le pression dans le sommier était de 86 mm. Série des sons observés de la même manière avec un tuyau ouvert en étain, l’Ut3 du Diapason: 1. ) Ut3 très-doux. Disparaît. 2. ) Un son un peu plus bas que le son fondamental, s’élève jusqu’à Ut3 et plus haut encore. 3. ) Il s’y joint l’octave. Tous les deux disparaissent. 4. ) Ut5 et de nouveau Ut3. 5. ) Ut3 et Sol4, puis ce deuxième son seul. 6) Ut4, s’élevant peu à peu. 7. ) Silence. O11 perçoit le son fondamental, qui fait des battements avec les aliquotes. 8. ) Son normal. SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 287 Dans cette série j’observai donc quatre fois le son fonda- mental Toutes ces expériences ont été répétées plusieurs fois. Série des sons observés avec un tuyau ouvert en étoffe, l’Ut2 du Violon: 1. ) Ut2, s’élevant un peu. 2. ) Silence. On perçoit distinctement un son très-bas, à peu près Ut,, qui disparaît. 3. ) La duodécime Sol3. 4. ) Celle-ci disparait; on entend Ut3, et très-doucement le son fondamental, ainsi que la deuxième octave. 5. ) Ces sons ont disparu. On entend des sons plus bas, à peu près La,, qui s’élèvent jusqu’à 6. ) Ut2, son normal. Le son fondamental a été observé trois fois. Série des sons successifs observés avec l’Ut2 du Bourdon, en étoffe. 1. ) Ut2, un peu plus haut. 2. ) Disparu. Un murmure doux, avec le ton Sol , s’élevant à 3. ) Ut2, plus fort que d’abord, s’élève et disparaît. 4. ) Des sons plus bas. commençant à peu près avec 5. ) Re,, et s’élevant à 6. ) Ut2, son normal. Plus tard je reviendrai sur les sons qui se produisent lorsque le courant d’air croît au-dessus de l’intensité normale. (Chap. VIII.) Les expériences mentionnées montrent qu’en renforçant gra- duellement le courant d’air, on peut produire trois, quatre et même cinq fois le son fondamental, qui, de même que ses aliquotes, est devenu plus fort après chaque pause. En même temps, on observe que les sons en question sont d’une hauteur très- variable, ce qui est bien connu pour le son normal. Tou- iours il se produit aussi des sons très bas; après que le son 288 W. C. L. VAN SCHAIK. fondamental a disparu, on entend souvent un son qui est l’octave basse du fondamental, et qui s’élève toujours jusqu’à ce qu’il acquière la hauteur de celui-ci. Le phénomène s’ac- corde bien avec les vues de M. Melde. La théorie complète de ces sons dus au frottement s’occupe essentiellement de deux questions : la production du son et le renforcement de celui-ci par la résonnance du tuyau. Ce renforcement consiste dans l’action et la réaction de la colonne d’air et du courant aérien. Pour le moment je laisserai de côté cette action réciproque, parce qu’il en faut tenir compte aussi dans les autres théories, dont je parlerai plus loin. En quoi consiste cependant la vibration de l’air due au „ frottement” ? Une expérience bien simple, avec l’appareil fig. 1. (employé sans résonnateur) montre que le „frot- tement” de l’air contre le prisme est accompagné de vibrations qui sont rectangulaires par rapport à la lame d’air. En fixant un fil (barbe) de duvet à la fente, ou en soufflant de la poudre de magnésie par celle ci, on reconnaît que l’air dans le voi- sinage du prisme entre en vibration „ transversale”. Cette vi- bration croît continuellement si l’on répète l’expérience avec le résonnateur décrit ci-dessus. Lorsqu’on souffle un tuyau très- faiblement, de sorte qu’il ne parle pas, on peut observer des vibrations très lentes, par. ex. 3 ou 4 par sec.; l’observation est facile si l’on emploie un tuyau dont la bouche a une hauteur convenable, p. ex. 3 cm. Ces vibrations transversales existent du reste, comme on sait, quand le tuyau parle nor- malement. Ces expériences indiquent la route qu’on peut suivre pour rechercher la cause des sons produits par le frottement de l’air contre la lèvre supérieure. Je décrirai maintenent quel- ques expériences qui sont bien propres à élaircir ce phénomène. En même temps, elles montreront l’importance spéciale de certains principes hydrodynamiques pour l’étude de l’acous- tique. SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 289 CHAPITRE III. Sur quelques mouvements provenant de changements périodiques de la pression aéro- dynamique. Le frottement de l’air contre la lèvre supérieure du tuyau. Deux prismes mobiles P et Q sont disposés l’un près de l’autre, au dessus d’un tube, comme l’indique la figure 2. En soufflant de l’air par le tube, on observera que les prismes sont poussés l’un vers l’autre. On trouvera aussi, en répétant l’expérience avec un prisme unique, que ce corps, placé d’abord un peu à côté de l’ouverture du tube, vient se mettre directement en face de celle-ci. Les conditions correspondent essentiellement à celles de l’expérience connue de Venturi, et le résultat se conçoit aussi d’après un principe aérodynamique analogue à celui de D. Bernouilli. Ces principes indiquent une diminution de la pression hydrodynamique ou aérodynamique, diminution par laquelle les expériences de Venturi et de Clément-Desor- mes ont été expliquées depuis longtemps *). Les expériences suivantes se rapportent pour la plupart à des cas où la pression mentionnée subit des changements périodiques. Nous verrons aussi que les phénomènes de cette classe doivent être attribués en grande partie à l’entraînement de l’air ou du liquide, qui se produit toujours dans le voisinage de la veine liquide ou gazeuse. Nous fixons un prisme rectangulaire à un ressort plat F (figure 8), et nous le tenons devant l’ouverture d’un tube d’où s’écoule une veine d’air, de sorte que le prisme peut osciller dans un plan faisant un angle droit avec la direction du cou- rant. Si le prisme se trouve d’abord un peu à côté du courant, il sera poussé vers le milieu, et l’on observera bientôt qu’il acquiert, dans cette direction, une vibration intense. L’expé- rience se fait aussi très-bien avec des corps d’une autre forme, par ex. avec des demi-cylindres dont le plan passant par l’axe *) Ann. de Ghim. et de Phys. T. 36 [1872] p. 69. 290 W. C. L. VAN SCHAIK. est parallèle à l’ouverture du canal, ou avec des cylindres dont la base y est parallèle. Cette expérience indique que la force motrice dépend du sens du mouvement, et non pas seulement de la position du corps. Pareille remarque s’applique, comme on sait, à tous les cas où il y a des résistances à vaincre. Dans le cas actuel, la force motrice est la résultante des pressions atmosphérique et aérodynamique et de l’élasticité du ressort. Or, si le prisme occupait successivement les positions A, B, C, de la fig. 4 avec une vitesse zéro, ces forces ne dépendraient que de la position du corps. La résultante d’un tel système de forces augmenterait l’énergie sur une partie AC du chemin et la diminuerait de la même quantité pendant le mouvement op- posé CA, de sorte que l’énergie perdue par les résistances ne pourrait être restituée. Le corps serait donc, comme on sait, dans le cas du pendule sans échappement dans un milieu résistant. Pour démontrer d’ailleurs que la force motrice dépend ici du sens du mouvement, on peut construire le moulinet que la fig. 5 représente au tiers de la grandeur naturelle Quatre tiges montées sur un axe portent chacune un prisme. Ces prismes peuvent se mouvoir à travers le courant aérien, comme celui qui a été décrit ci-dessus, et comme l’indique la figure. En communiquant au système une faible rotation positive ou négative, on le voit prendre un mouvement rotatoire accéléré dans l’un ou l’autre sens, de sorte que l’expérience prouve que le signe de la force motrice dépend de celui de la vitesse initiale. Si le prisme (fig. 6) traverse le courant d’air en se mouvant dans le sens de la flèche F, la pression aérodynamique sur la face ^antérieure” x est moindre que pendant le mouvement opposé. On le démontre au moyen d’un prisme percé d’un canal xy, qui communique par z avec un manomètre et est fermé en y. En faisant passer- ce prisme très-lentement à tra- vers le courant, on peut constater pour chaque position une SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 291 pression déterminée ; si an contraire on le fait osciller avec une vitesse notable et constante, on observe une forte évacuation pendant le mouvement dans le sens de la flèche, et une di- minution insignifiante pendant le mouvement opposé. Pour égaliser les deux vitesses contraires, on fixe le prisme à un pendule, que la figure 7 montre au 5ième de la gran- deur naturelle. Le mouvement de ce pendule, qui peut tra- verser la veine d’air verticale L, est ainsi entretenu par un échappement pneumatique. Je trouve par ex. : diamètre in- térieur du tube L 12 mm., distance minima du prisme et de l’ouverture du tube 3 mm., diamètre du canal xy 2 mm., in- dication du manomètre à eau communiquant avec la soufflerie 80 mm., durée d’une oscillation simple 1 sec., pression né- gative” en x pendant le mouvement F 3 mm. (eau), pendant le mouvement opposé 0,5 mm. De telles expériences, répétées pour différentes positions de l’ouverture x , mettent en évidence la force qui entretient le mouvement. Quelle est maintenant la cause de cette différence de pres- sion, dépendante du sens du mouvement? On comprend qu’il faut un certain temps pour que le courant d’air, après avoir été traversé par le prisme, regagne son intensité primitive, de sorte qu’il est plus intense près de la face „ antérieure” c.- à- d. en x (voir la figure 8), que près de la face „ postérieure” (en y). L’évacuation produite en x sera donc plus forte que celle en y. Dans le cas d’une veine d’air limitée tout autour, cette différence est très-grande; au voisinage du courant, des masses d’air sont continuellement entrâinées, et l’évacuation produite en xy au moment où le prisme rencontre brusquement le courant aérien, sera très énergique. Ce cas a d’ailleurs une certaine complication, qu’on évite en plaçant le moulinet de la fig. 5 dans un courant d’air cylindrique, comme l’indique la figure 9. Les prismes ne peu- vent pas sortir de ce courant, qui par suite est indéfini dans le sens du mouvement. Cet appareil montre une rotation ac- Archives Néerlandaises, T. XXV. 20 292 W- C. L. VAN SCHAIK. célérée positive ou négative, ayant le signe de la vitesse an- gulaire qu’on lui à communiquée par la main. En fixant des fils de duvet aux arêtes du prisme, ou en expérimentant avec de la poudre de magnésie, on constate que la surface limite du courant aérien a près de la face „ antérieure” du prisme (en x) une autre forme qu’en y , comme on le voit dans la figure 10. En x le courant s’incline plus vers le prisme que près de la face „postérieure” (en y), ce qui s’explique aisément. Cette différence dans la direction du cou- rant aura pour effet que la pression aérodynamique en x sera plus petite que celle en y: Un prisme P est placé dans le courant L (figure 11.), qui rencontre la face AC et dont la surface bordante se prolonge vers D. Le manomètre commu- niquant avec le canal xz indique une certaine pression, qu’on peut diminuer en soufflant dans la direction Lx , c.-à-d. en pres- sant un peu le courant AD contre la face AB au moyen du courant Lx, comme l’indique l’expérience. On le montre aussi avec le prisme rectangulaire de la figure 12. La diminution de la pression sur la face postérieure AB d’un prisme (fig. 10), placé dans un courant L, est un fait bien connu. Les expériences décrites ci-dessus montrent comment cette pression peut dépendre du mouvement du corps au tra- vers du courant, et qu’elle est plus petite lorsque la face AB précède dans le mouvement que lorsqu’elle est tournée vers le côté opposé; du moins, si la vitesse ne surpasse pas une certaine limite. La pression sur la face AB en repos est in- termédiaire entre les deux valeurs mentionnées. La différence en question dépend du changement de l’intensité et de la direction du courant rasant les faces du corps. Ces phénomènes indiquent la cause de beaucoup de mou- vements périodiques entretenus par des courants, et forment ainsi une contribution à la doctrine des vibrations hydrody- namiques, inaugurée par Bjerknes et d’autres. Le courant d’air, rendu visible par la poudre de magnésie, SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 293 se courbe, vers la face d’un prisme qu’on en approche, comme l’indique la figure 16. La cause en est évidente: des masses d’air sont continuellement entraînées le long de la surface du courant ascendant ; tant que le corps solide n’est pas dans le voisinage, ces masses sont fournies par l’air ambiant, qu’on empêche d’affluer du côté où l’on place le prisme, de sorte qu’il se développe une évacuation latérale, dont on prévoit le résultat. Le courant étant dévié vers le prisme, l’évacuation peut augmenter considérablement, comme il suit de l’expérience avec le prisme de la figure 11. En approchant par ex. un cylindre d’une veine d’air ver- ticale, on voit le courant se courber suivant la surface du corps, et l’évacuation susdite peut être mise en évidence au moyen d’un canal latéral xz communiquant avec le manomètre (fig. 14). Le cylindre suspendu légèrement a côté du courant est poussé vers celui-ci par la différence des pressions, et se trouve en équilibre stable au milieu du courant, ce qui démontre la cause du phénomène de la sphère flottant dans un courant ascen- dant. 1 ) Avec des tiges minces cylindriques, on peut de nouveau constater les vibrations transversales, comme cela a été dé- montré par lord Rayleigh pour les cordes de la harpe éolienne. 2) La forme des corps exécutant les vibrations mentionnées n’est pas une chose indifférente. Par ex. le prisme de la figure 8 présente, dans une position retournée, des vibrations d’une intensité moindre et qui souvent ne se produisent que sur le côté du tube. Placé alors au milieu du courant, le prisme se trouve en équilibre instable, ce qui se comprend aisément. Cependant, des prismes en forme de biseau aigu, placés dans des lames d’air, peuvent de nouveau exécuter les vibrations trans- versales ; on les introduit, à cet effet, dans un courant sortant d’un tube aplati, comme l’indique la figure 15. Toutes ces vibrations sont souvent d’une fréquence extrême, *) Comparer, sur ce phénomène, Reuleaux, Annales de Poç/gendorff\l,9,,\81G. 2) Phil. Mag. 1879. 20* 294 W. C. L. VAN SOHAIK. ce qui prouve que les évacuations peuvent se faire en un temps très-court. Les surfaces courbes des courants se prolongent souvent en tourbillons, qui peuvent renforcer les mouvements décrits. En fixant par ex. au moulinet de la figure 9 des prismes de la forme indiquée dans la figure 13, où le mouvement a le sens de la flèche F, on peut constater que le courant ascendant en A peut descendre en partie sur la face postérieure CB. Les prismes montrent une rotation très-rapide. Toutes ces rotations se distinguent de celles décrites par MM. Neesen 1 ) et Dvorak, 2) qui se rapportent à des mouvements produits dans la direc- tion des courants. L’approche des corps solides, observée dans l’expérience de Clément-Desormes, a été appliquée par Decharme dans son hydrodiapason 3) ; d’autres phénomènes, comme celui de l’expérience de Marx4), ainsi que les sons fréquemment pro- duits par les robinets des conduites d’eau, se déduisent du même principe. On peut maintenant se former l’idée suivante de la ma- nière dont se produit le son dû au „frottement” de l’air contre la lèvre supérieure d’un tuyau. Soit C, fig. 17, un prisme placé dans le courant d’air. A la rencontre, le courant se divisera et il se formera des évacuations aux côtés du prisme, comme il a été dit ci-dessus. Ces évacuations auront en général quelque différence ; or, si la pression en x est plus petite que celle en 2/, le courant partiel en x sera un peu plus poussé vers le prisme, de sorte que la partie supérieure du courant se déviera un peu vers le côté B. Par suite, l’intensité du courant sur ce côté ainsi que l’évacuation en y augmenteront un peu, et prépareront de nouveau un mouvement opposé au premier. *) Ann. de Wiedemann 1886. a) Ann. de Wiedemann 1878. 3) Ann. de Ghim. et de Phys . V. T. 25. 4) Melde: Akustik , p. 115. SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUY, ETC. 295 Puisque l'évacuation exige un certain temps, les forces qui agissent sur la lame d’air dépendront du sens du mouvement et cela de telle façon que les vibrations en seront entretenues. De très-petites différences de pression suffiront pour produire des vibrations dans la veine d’air; ces vibrations peuvent aussi se former d’un côté du prisme. Le son dû à ces variations de pression (ou, comme on dit, dû au frottement) sera d’au- tant plus pur qu’il y aura sur la largeur de la lame d’air plus de courants partiels ayant la même période. Suivant cette théorie, le „frottement” du courant contre la lèvre supérieure serait un phénomème réciproque de celui du prisme vibrant de la figure 15. Si l’intensité du courant est augmentée, les variations de pression se produiront dans des temps plus courts, de sorte que les sons monteront, ce qui est conforme à l’ex- périence. CHAPITRE IV. Sirène à vibration et Vibroscope pneumatique. Sirène vibrante. Les phénomènes décrits dans le chapitre précé- dent conduisent à la construction d’une sirène ou d’une anche de forme particulière. A une petite distance de l’ouverture d’un tube aplati se trouve un prisme métallique porté par un ressort, de sorte que l’ouverture est à demi couverte par le prisme. La disposition est représentée dans la figure 18. Si l’on souffle de l’air par le tube, le prisme entre en vibration. De même que dans la sirène, le courant d’air est périodiquement inter- rompu par un corps se mouvant transversalement à travers ce courant. L’anche, figurée en grandeur naturelle, donne Ut Le tube est ouvert et fermé une fois pendant une vibration double. En prenant un prisme d’une largeur moindre, on fait ouvrir le tube deux fois par vibration double ; dans ce cas, l’octave acquiert une plus grande intensité. Je me suis servi de cette disposition pour mes recherches 296 W. C. L. VAN SCHAIK. sur le mouvement de Pair dans les tuyaux sonores, ainsi que je l’expliquerai bientôt. Quant à la production du son, on démontre facilement que celui-ci résulte non pas directement de la vibration du prisme, mais de la périodicité du courant d’air, comme cela est aussi le cas pour les autres anches et pour la sirène. Les forces qui entretiennent le mouvement du ressort se déduisent des phénomènes étudiés dans le chapitre précédent, comme nous l’apprend le pendule aérodynamique. Cependant, on pourrait penser que ces vibrations résulteraient directement des con- densations et des dilatations qui se succèdent dans le système d’ondes sonores partant de l’anche et traversant l’air ambiant, de même que cela a été supposé dans le cas des anches bat- tantes et libres. Mais, en éloignant lentement du tube le ressort avec le prisme vibrant, et le promenant dans la direction même du courant, on peut constater que l’amplitude des vibrations ne change pas beaucoup et qu’elle atteint souvent un maxi- mum à une distance de quelques millimètres du tube. On l’intensité du son ainsi que les condensations et les dilatations sonores ont été diminuées considérablement pendant cette ex- périence, de sorte que le son a presque disparu. Cette sirène à vibration peut être aussi mise en mouvement par un courant d’eau, sortant au-dessous delà surface du liquide, comme dans la sirène ordinaire. Souvent je l’ai fait parler au moyen d’un jet de vapeur à haute tension. Dans les deux cas je me suis servi de ressorts en acier d’une épaisseur de 1 à 3 mm. La pression de l’air peut subir une variation beaucoup plus grande que dans le cas des anches ordinaires, battantes ou libres, qui se ferment bientôt si la pression de l’air augmente. L’amplitude d’oscillation de la disposition décrite peut donc surpasser de beaucoup celle des autres anches Vibroscope pneumatique. La méthode vibroscopique indiquée par Plateau a été perfectionnée par M. Mach, qui remplaça le disque tournant par le diapason électro-magnétique. Par SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 297 cette modification la période de la lumière intermittente a été rendue constante sans l’intervention d’un mécanisme trop compliqué. Cette constance de la période est, comme on sait, nécessaire. Car les phases de l’objet étudié peuvent être observées aussi bien dans un sens direct que dans un sens rétrograde. Le premier cas se présente par ex. lorsque la pé- riode de la lumière intermittente est un peu plus grande que celle de l’objet, le second cas se trouve dans les conditions opposées. D’ailleurs, on veut souvent contrôler ces conditions et régler la période des oscillations apparentes rendues lentes par le procédé optique. Le vibroscope à diapason électro-magnétique a été employé par Tôpler et Boltzmann dans leurs recherches sur les tuyaux sonores. L’amplitude du diapason étant médiocre, on fait les fentes lumineuses très-étroites, ce qui n’est pas un obstacle si les mouvements sont projectés au moyen d’une lumière très-intense. Lorsque cette intensité est moindre, et aussi dans le cas de l’observation subjective, la petite largeur des fentes n’est pas désirable. Je me suis construit la disposition indiquée dans la figure 19 en grandeur naturelle. Un ressortvA B porte à son extrémité A un petit prisme ou une lame mince re- courbée à angle droit. De plus, une autre lame très-légère P, où est pratiquée la fente O, est fixée sur le ressort. Dans une plaque Q, se trouve la fente immobile, d’une largeur un peu plus petite. Le bord de la lame P est en partie recourbé, pour la rendre plus solide. L’air est amené par le tube R au moyen d’un tube en caoutchouc. La touche correspondante à la soupape de la soufflerie est pressée par un coin à angle aigu, de sorte qu’on peut régler l’intensité du courant et l’amplitude du ressort A B. L’extrémité du ressort est encastrée dans une pièce de métal C, et le ressort lui-même peut être serré entre deux pièces mobiles D, qui servent à l’accorder. Dans la position figurée, l’instrument donne l’Ut— 1, et l’amplitude de l’ou- verture O s’élève à 20 mm. avec un courant d’air très-faible. 298 W. C. L. VAN SCHAIK. L’appareil est vissé devant l’objet à étudier ou bien tenu à la main. La période peut rester constante pendant longtemps, de sorte qu’une anche d’un ton déterminé, soit Ut , , est observée en repos à travers la fente O. L’amplitude du ressort étant assez grande, la constance de la période doit tenir à ce que la courte impulsion qui entretient le mouvement est donnée au moment où la vitesse est maximum ; comme c’est le cas pour l’échappement des chronomètres. Dans l’emploi de l’appareil il faut avoir égard à l’erreur parallactique du vibroscope, étudiée par Tôpler. Or, cette er- reur dépendant de l'angle entre la direction de la vibration de l’objet et celle de la vibration du vibroscope, on peut, en tournant celui-ci, se convaincre si on l’a éliminée suffisam- ment par les moyens connus. J’ai trouvé le vibroscope pneumatique propre à l’observation de mouvements d’environ 30 à 300 vibrations doubles par seconde; on conçoit que, l’amplitude n’étant pas trop petite, le vibroscope peut être accordé à un ton de une de deux ou de trois octaves plus bas que celui du corps étudié. Il est facile d’adapter un tel vibroscope à la projection par une lumière de médiocre intensité. Je me sers à cet effet d’un appareil à projection de Duboscq, avec lequel les rayons lumineux, avant de former l’image, se concentrent en un faisceau de trois mm. de diamètre. La direction du courant d’air fait un angle droit avec la longueur du ressort, comme dans la figure 3. La largeur de la fente lumineuse est de trois mm. Un tuyau sonore est placé entre la lentille de la lanterne et le système optique de projection ; on a enlevé une petite partie des parois près de la bouche du tuyau, pour faire passer la lumière, émanant d’une lampe de Drummond. On fixe des fils de duvet dans le courant d’air; comme on le verra plus tard (Chap. VII), ces fils peuvent montrer les mouve- ments du courant. Le vibroscope est ensuite placé entre le sy- stème optique et l’écran. Le tuyau donne par exemple Ut1} et le SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 299 vibroscope un ton un peu plus bas que Ut_i. Au moyen de cette disposition, les mouvements de la lame d’air sont rendus visibles à grande distance. *) CHAPITRE V. Production du son par une impulsion dont la fréquence est due directement à l’onde sonore. Les théories, qui attribuent la vibration du courant aérien au „frottement” de l’air sont opposées à celles suivant les- quelles cette vibration est occasionnée dès le commencement par l’onde sonore. L’explication du phénomène, telle qu’on la donne dans la plupart des cours * 2), appartient à cette der- nière classe de théories. De ce type est aussi l’explication qu’on trouve dans le célèbre traité de M. Helmholtz 3); on peut y ranger ensuite les théories de M. Sonreck, de M. H. Smith, au moins en ce qui regarde le partie essentielle, et peut-être l’explication de M. van Tricht. Expériences de M. Sonreck. Suivant M. Sonreck 4 ), le courant aérien sortant de la lumière du tuyau, et se dirigeant un peu en dehors, entraîne une partie de l’air intérieur, et évacue donc la partie inférieure du corps du tuyau, jusqu’à ce que la différence entre les pressions atmosphérique et intérieure soit devenue assez grande pour refouler la lame d’air en dedans ; ainsi, l’évacuation est en partie compensée. Ces impulsions font naître une onde qui parcourt la colonne d’air, est réfléchie au bout, et, revenant à la bouche, exerce une influence sur le courant, de sorte que l’évacuation susdite se 1) Des vibroscopes à projection sont construits, suivant les principes exposés ci-dessus, par M. van der Zwalm, mécanicien de la Société Batave à Rotterdam. 2) Par ex Biot: Traité de Physique , p. 114. 3) Lehre von den Tonempfindungen , 4e édition (1877). 4) Pogg . Ann., T. 158, p. 129. 300 W. C. L. VAN SCHAIK. répétera suivant la période même de Fonde stationnaire ré- sultant de l’interférence des deux systèmes qui traversent le tuyau. Lorsque le courant est dirigé d’abord plus en dedans, le premier effet est un entraînement de l’air vers l’intérieur du tuyau. Dans ce dernier cas, M. Sonreck constate une petite élévation permanente de pression à l’intérieur du tuyau, dans le premier cas, une petite évacuation permanente. L’expérience indique en effet que, dans ce premier cas, le courant entraîne de l’air du tuyau. Cela se comprend immédiatement pour les tuyaux fermés; les expériences de M. Sonreck l’amènent à conclure qu’aussi dans le cas des tuyaux ouverts une masse d’air, à peu près égale à celle du courant injecté, s’échappe de la bouche du tuyau. Suivant M. van Tricht, la pression permanente à l’intérieur d’un tuyau parlant est toujours ou plus grande ou plus petite que la pression atmosphérique, selon que le tuyau est fermé ou ouvert. Ceci se trouve donc partiellement en opposition avec les résultats de M. Sonreck. Expériences de M. H. Smith. On sait que la théorie conduit à admettre que la masse du courant injecté est périodique- ment déchargée en dehors et en dedans, et que le courant même fait ainsi des vibrations analogues à celles de la lan- guette d’un tuyau à anche; car les vibrations ,, longitudinales” de la colonne d’air s’opèrent près de la bouche dans une di- rection qui fait à peu près un angle droit avec la direction initiale du courant: „ainsi, dans tous les modes d’oscillations „que pourra prendre la colonne d’air vibrante, la lame mince „ d’air qui affleure son orifice, et que l’on peut considérer „ comme sa première couche, ne fera qu’entrer un peu dans „le tuyau, et en sortir tour à tour.” (Biot, Physique , p. 114.) M. H. Smith a démontré l’existence de ces vibrations, en tenant des feuilles minces de papier ou de bois dans le courant. Il dit: „It has been customary with me for several years, „wlien occasion invited it, to demonstrate to my musical friends SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 301 „the pliysical action existing in the sounding organ-pipe, to ,,show them, taking up a chance woodshaving lying on the „floor of the workshop or a strip of tissuepaper, that, hete- ,.rodox thongh the teaching be, the stream of air at the m outil „of the organ-pipe constitutes a free reed ; visible before them „the filmlike woodshaving is drawn into the motion of the „air, then to show them that the air-moulded tongue obeys „every law of the free reed, has its own definite rate of vi- bration, that the cnrrent is so directed, that it shall pass „not strike the lip, that it is an air-moulded or aeroplastic „reed as definitely fashioned in substance, strength, proportion „and form as métal reeds are to produce a required deter- „mined rate of vibration” 1 ). — La direction de ces vibrations se trouve, comme on sait, en pleine harmonie avec les thé- ories connues. Nous verrons cependant que la lame d’air doit se mouvoir d’une manière beaucoup plus compliquée que la languette d’un tuyau ou d’un harmonium. D’ailleurs M. Smith, comme M. Sonreck, attribue une grande importance à l’évacuation. Il dit: „The reed must be bent „ before it will vibrate. To cause this flexure the only alter- native is raréfaction. The act of rarefying occupies time, „it takes place within the pipe ” 2). La notion de cette évacuation, introduite séparément par chacun des deux expé- rimentateurs, est, sans contredit, ce qu’il y a de plus marquant dans leur théorie. Expériences de MM. Lootens, van Tricht , Schneebeli et Kiessling. Les recherches de MM. Lootens et van Tricht 3 ) ont montré que la partie du courant, qui est dirigée à l’intérieur du tuyau, se meut d’une manière particulière. Le courant, après avoir rencontré la lèvre supérieure, se divise ordinairement en deux parties; l’une, le „courant principal”, se dirige à l’extérieur, l’autre, le courant dérivé, se meut vers la paroi postérieure, D Nature , 1873. 2) Nature , 1874, p. 162. 3) Journal de Physique , 1877, p. 53. 302 W. C. L. VAN SCHAIK. et en descendant retourne vers la bouche du tuyau, de sorte qu’elle décrit une ligne courbe en forme de boucle. La figure 20 représente la marche des courants. Si le tuyau ne parle pas, le courant dérivé sortant par la bouche ne jaillit pas au dehors, mais se mêle insensiblement et se fond avec le courant principal; c’est le cas auquel se rapporte la figure 20. Si au contraire le tuyau parle norma- lement, le courant dérivé ne se mêle pas avec le courant principal; il prend une position distincte et plus inclinée, de sorte qu’on voit les deux courants se traverser l’un l’autre, comme l’indique la figure 21. La saillie du courant dérivé est ainsi liée au phénomène sonore. A cette direction particulière du courant se rapporte une expérience de M. Smith: „Place within the pipe at the back „of the mouth some fine filament of cotton, or fluff, or down ; „advance them from the interior to the inner edge of the „windway, and you will see them shot with energy not up- „ward into the pipe, but outward full in your face with an „unmistakable trajectory”. *) Pour ces expériences on insuffle de la fumée ou une poudre dans le tuyau ; ou bien on se sert de corps légers suspendus à l’intérieur. En décrivant la direction particulière du courant dérivé, M. van Tricht observe avec raison que la saillie de ce cou- rant est un phénomène périodique. Puis il continue : „Mais „si la saillie du courant dérivé est régulièrement intermittente, „il se trouve qu’en fait le courant injecté est interrompu, à „des intervalles de temps égaux entre eux, par le passage du „ courant dérivé; en d’autres termes, que le courant dérivé „ sortant fait sur le courant injecté l’office du plateau inter- rupteur d’une sirène.” Cette représentation du phénomène me paraît cependant peu probable. En effet, les masses d’air qui se suivent dans 1) Nature , 1874. SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 303 le courant dérivé n’auront certainement pas une résistance suffisante pour arrêter périodiquement le courant injecté, dont l’intensité est relativement grande. D’ailleurs les variations de la pression près de la bouche du tuyau sont presque in- signifiantes, ce qui ne serait pas le cas si le courant injecté était périodiquement interrompu. Nous verrons plus loin que l’aspect des deux courants qui se traversent mutuellement résulte de la vibration de la lame aérienne et de l’entraînement de l’air le long de ce courant. Je rappellerai encore une belle expérience de M. Schneebeli 1 ), confirmée par M. Kiessling 2). Si l’on dirige le courant injecté un peu en dehors, en forçant la lèvre supérieure un peu en dedans, on arrive à un certain point où le tuyau ne parle plus quand on le souffle de nouveau. En excerçant alors une pression extérieure sur la lame d’air, on produit subitement le son, et le tuyau continue ensuite à parler, même lorsque la pression cesse. Cette expérience est certainement très propre à éclaircir le phénomène de la production du son. Un pareil tuyau à lèvre recourbée offre encore un phéno- mène fort intéressant, qui a été communiqué par M. Kiessling 3). Si, après avoir conduit l’air au tuyau, on frappe celui-ci énergi- quement, le son se produit tout d’un coup. Un tel fait était déjà connu de MM. Lootens et van Triclit4): „On observe „ce fait sur des tuyaux singuliers, qui, revêches aux courants „ aériens les plus intenses, exigent pour parler qu’on mette „ violemment leurs parois en vibration par un choc vif, un „coup de marteau par exemple, appliqué en plein milieu d’un „ventre.” U Ann.de Pogg., T. 163, page 301. 2) Beiblàtter z.à. Ann. der Phys.u. Chem., T. 9, page 713. 3) l.c. 4) l.c . 304 W. C. L. VAN SCHAIK. CHAPITRE VI. Expériences sur la pression et les courants intérieurs. Tuyau sensitif, dont le son se produit à distance. Les courants. En premier lieu, je m’occuperai des courants décrits par MM. Lootens et van Tricht. La figure 22, au quart de la grandeur naturelle, représente ces courants dans un tuyau ouvert, dont la paroi postérieure est en verre; longueur du tuyau = 65 cm., côté de la base carrée = 6,1 cm. Le courant dérivé s’élève à 7 cm. au-dessus du biseau, puis, descendant le long de la paroi postérieure et glissant sur le biseau, il traverse le courant principal, comme il a été dit. Une partie du courant dérivé suit un cours à part, en formant à une hauteur de 18 cm. une seconde cyclone. La figure 23 montre en grandeur naturelle une partie des courants dans un tuyau ouvert de seize pieds, l’Ut grave (Ut— i) d’une contre-basse. On peut les suivre facilement à l’aide de fils de duvet attachés à des tiges minces métalliques. Dans la figure 24 sont représentés en grandeur naturelle les courants existant près de la bouche d’un petit tuyau fermé, PUt8 d’un bourdon. Us ont été rendus visibles en déposant de la poudre de magnésie dans le pied du tuyau. On peut constater qu’une partie du courant dérivé, après avoir „ traversé” le courant principal, descend et retourne à la bouche, où elle s’ajoute à l’air injecté. Le courant dérivé, en sortant de la bouche, entraîne le long de sa surface des masses d’air, de sorte qu’il se fait une évacuation partielle, d’où s’explique la forme curviligne du courant de retour S. L’expérience suivante est bien propre à faire voir que les courants en question sont liés à la production du son; en même temps, elle peut indiquer la différence entre le son pro- duit par le frottement de l’air et le renforcement de ce son par le résonnateur. SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 305 Une petite plaque, sur laquelle se trouve un peu de poudre de magnésie, P (figure 25), est portée près de l'appareil re- présenté dans la figure 1. La poudre n’est pas encore entraînée par l’air passant par le tube de l’appareil. De l’autre côté de celui-ci approchons maintenant un résonnateur R. Dès que le résonnateur parle, la poudre s’envole, une partie se mêle avec le courant injecté par le tube, une autre partie est jetée dans le résonnateur. Le courant qui pénètre dans l’intérieur est ici bien distinct. En posant de petits corps légers devant la bouche de tuyaux parlants, on constate fréquemment qu’ils sont jetés dans les tuyaux, où ils décrivent des courbes analogues à la cj^clone inférieure de la figure 22. Naturellement, on préfère pour cet effet des tuyaux de grandes dimensions. Nous tenons encore une tige métallique, garnie de fils de duvet, près des endroits marqués par M (dans les figures 23 et 24) ; les fils s’y enroulent rapidement autour de la tige, dans le sens des flèches. Avec les grands tuyaux ouverts, de 32 pieds, ces courants sont très-intenses, la tige métallique tenue légèrement à la main est entraînée dans le tourbillon, de façon à décrire une surface conique. Dans la figure 26, on trouve une représentation plus com- plète des courbes et des „ cyclones”. L’observation strobosco- pique, ou la photographie instantanée, nous apprendra de quelle manière doit être considéré l’entre-croisement des courants. La pression intérieure. Quant à la mesure des pressions de l’air intérieur, desquelles se sont occupés MM. Sonreck, Lootens et Van Tricht, elle est rendue un peu difficile à cause des cou- rants. Je me suis borné à mesurer la pression au-dessus du biseau et, dans les tuyaux bouchés, aussi près du bout supérieur. Je donnerai ici quelques-uns des résultats obtenus. Les chiffres (p) indiquent la différence entre la pression intérieure 306 W. C. L. VAN SCHAIK. et la pression atmosphérique, en millimètres du manomètre ouvert à eau. Souvent je me suis servi d’un manomètre à capsule. Tuyaux ouverts. 4 pieds, Ut2 p — — i mm* 2 pieds, Ut3 p = — { „ 1 pied, Ut, ....... p = — | „ l pied, Ut3 P = — H » Tuyaux bouchés. 2 pieds, Ut2, au dessus du biseau p = + mm., au bout sup. p — + £ mm . 1 pied, Ut3, // h n p — — f- 1- " * » u p — - f-1 // £ pied, Ut4, // // // p = - \-\{u u n n p — - f-2 // petit tuyau, Sol 4, // n n p = + 1| // n /> n p = + 2 » pression dans le sommier = + 85 mm. Dans ces exemples se trouve donc confirmée la règle don- née par M. van Tricht, à savoir que, dans les tuyaux ouverts, la pression de l’air près de la bouche est plus petite que la pression atmosphérique, tandis que dans les tuyaux bouchés la première de ces pressions surpasse la seconde. D’ailleurs, la différence est d’autant plus grande que le tuyau est plus court. J’ai aussi trouvé le même résultat avec d’autres tuyaux. Pourtant, cette règle n’est pas générale, comme il ressort de l’expérience suivante. Je prends un petit tuyau bouché donnant le Sol4, et je mesure la pression au moyen d’un tube encastré dans le couvercle ; la différence de la pression est à peu près = -h 2 mm. Je recourbe la lèvre supérieure un peu en dedans, la différence de pression se réduit successivement à -h 1mm., à imm., et à zéro; à ce dernier point, la pres- sion est donc — 1 atm. ; le tuyau parle maintenant très-mal ; je continue à forçer la lèvre, le tuyau parle de nouveau, et la diff. de pression devient égale à — |, — 1, — l}mm.; ainsi, la pression intérieure est alors plus petite que celle de l’at- mosphère. Cela concorde avec les résultats de M. Sonreck. SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 307 Nous envisageons toutefois la pression mesurée comme la som- me algébrique de grandeurs positives et négatives se succédant à chaque vibration de la colonne aérienne ; et de ce point de vue l’expérience indique que la valeur absolue de la somme des gran- deurs de même signe change avec la position de la lèvre supérieure. Les recherches du chapitre suivant confirmeront cette manière de voir. Au reste, la grandeur de la pression mesurée ne me semble pas de beaucoup d’importance. La même remarque s’applique à la direction d’un faible courant qui peut traverser un tuyau ouvert suivant sa longueur. On sait aussi qu’une membrane tendue au milieu d’un tel tuyau ne l’empêche pas de parler. Influence des parois. — Selon M. van Tricht, les parois du tuyau ont une importance spéciale pour la production du son. Il fait des expériences très-intéressantes pour prouver que ces parois sont en vibration tant que le tuyau parle. On sait d’ailleurs que les tuyaux de grandes dimensions ne laissent aucun doute sur ce point. C’est ce qu’on pouvait prévoir. En effet, l’existence des ondes dans la colonne aérienne est intimement liée à la résistance que les parois offrent aux vibrations de l’air. Or les changements périodiques des pressions dans les nœuds sont assez grands, *) de sorte que le résultat se comprend. Pour que le tuyau parle bien, il faut aussi que les parois soient d’une solidité suffisante. A proprement parler, la théorie ne saurait être complète si l’on n’a égard à tous les milieux ambiants. On devrait donc étudier non seulement les vibrations de l’air intérieur et extérieur, mais aussi celles de la substance des parois ; il s’agit cependant de décrire les causes dont l’importance pour la production du son est dominante. Or la vibration des parois est un phénomène appartenant au mécanisme de l’onde so- nore qui résulte de l’interférence de deux ondes se mouvant en sens opposés ; et il serait quelque peu partial de dire que les vibrations de l’air sont produites par celles des parois. 0 Kundt, Ann. de Pogg. T. 134. Archives Néerlandaises, T. XXV. 21 308 W. C. L. VAN SCHAIK. En premier lieu, M. van Tricht remarque que la saillie du courant dérivé est liée au son normal du tuyau: tant que le tuyau ne parle pas, ce courant se mêle avec le courant prin- cipal. Ensuite, il démontre qu’un coup, appliqué à la paroi mince d’un tuyau parlant mal, pousse en dehors le courant dérivé. Il rappelle encore qu’il y a des tuyaux qu’on peut forcer à parler en les frappant, et que les parois des tuyaux rendant un son normal sont en vibration, puis il demande: „ Serait-il téméraire, en présence de ces faits, de considérer „le jailissement du courant dérivé sortant comme une suite ^nécessaire et immédiate de la vibration des parois du tuyau „sonore?” Cette manière de considérer le phénomène conduit ensuite à la théorie mentionnée dans le chapitre précédent. Tuyau sensitif, parlant à distance. — Qu’ est- ce que produit le coup appliqué à la paroi du tuyau? Ce sera un mouvement ondulatoire de l’air, traversant la colonne, et se réfléchissant aux bouts de celle-ci. On sait, en effet, qu’un pareil coup fait entendre pendant un temps court le son fondamental d’un résonnateur quelconque, c’est-à-dire qu’il s’y forme une onde stationnaire. Or ce son fondamental se forme aussi dans le résonnateur lorsqu’on fait entendre à distance un son d’égale hauteur. Si maintenant l’action particulière du coup faisant sonner le tuyau consiste en la production d’une telle onde, il sera possible aussi de faire parler ce tuyau en émettant à quelque distance le son fondamental. C’est ce que nous allons faire. Prenons un tuyau ouvert en étoffe, de quatre pieds de lon- gueur et de faible section, l’Ut2 d’un violon, et recourbons la lèvre supérieure un peu en dedans, de sorte qu’en souf- flant le tuyau nous trouvions qu’il ne parle plus. Amenons l’air au tuyau et soufflons légèrement sur la bouche, de façon que la lame d’air soit pressée dans l’intérieur ; aussitôt le tuyau parle. Le son disparaît si l’on souffle dans le bout ouvert. C’est l’expérience de M. Schneebeli. Nous faisons aussi parler ce tuyau en le frappant. La lame SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 309 d’air étant dirigée trop en dehors, l’expérience de MM. Lootens et Van Tricht semble indiquer déjà que la production du son doit être attribuée dans ce cas à une onde sonore sta- tionnaire. Car si l’action du coup consistait à expulser un peu d’air, ou s’il n’occasionnait qu’un mouvement dirigé en dehors, la direction de la lame d’air deviendrait encore plus dé- favorable. Après un temps très court l’impulsion initiale cau- sera toutefois, comme on sait, un mouvement vibratoire, qui forcera la lame de rentrer dans le tuyau. . * Nous conduisons de nouveau l’air au tuyau muet. A une distance de trois ou quatre mètres nous soufflons un tuyau du même son (Ut2), soit un bourdon, un principal ou un tuyau à anche. Aussitôt, le tuyau modifié parle, et il continue à parler après que le son extérieur a cessé entièrement. Nous trouvons même que, pour faire parler le premier tuyau, il suffit de produire l’octave (Ut3) à quelque distance. Au-dessus de la lumière du tuyau modifié nous fixons un fil de duvet bien flexible, qui rendra visibles les mouvements de la lame aérienne. Tant que le tuyau ne parle pas, on en- tend un doux murmure, et le fil effectue des oscillations très- petites, qui ne s’étendent pas jusqu’à la lèvre supérieure. Main- tenant, on produit à plusieurs reprises le son fondamental à distance, en augmentant très graduellement la force; les os- cillations du fil devrennent plus grandes, et aussitôt que le son extérieur a une hauteur et une intensité suffisantes, on les voit atteindre et dépasser la lèvre, et le tuyau parle. Il faut que le son extérieur soit d’une hauteur bien déter- minée. Souvent on peut produire un son de grande intensité, mais dont la hauteur diffère un peu de celle du son du tuyau? sans que celui-ci parle. Ces expériences sont bien propres à éclaircir le principe de la théorie. Car c’est ici l’onde stationnaire, développée dans la colonne d’air, qui force la lame aérienne de faire des vibrations de la même période ; lorsque celles-ci sont devenues assez grandes pour dépasser le bord de la lèvre su- 21* 310 W. C. L. VAN SCHAIK. périeure, le courant injecté devient la source de l’énergie qui renforce et entretient les vibrations de la colonne d’air. Sou- vent on peut déjà entendre très-distinctement le son fonda- mental dans le murmure qui se produit avant que le tuyau ne parle. Ainsi la source sonore extérieure est capable d’évo- quer le son normal du tuyau, alors que le frottement de l’air à la lèvre supérieure ne sera pas en état de le faire parler. Il est en général très-facile de construire un „tuyau sensitif”, mais il arrive souvent qu’on n’atteigne pas le plus haut degré de sensibilité en se bornant à recourber la lèvre supérieure. Je décrirai ici, comme exemple, la construction d’un tuyau très- sensitif. On prend un tuyau ouvert en étoffe, de deux pieds (Ut3) et de menue section (diamètre intérieure 3 2 mm.) On le met sur le sommier, en ayant soin qu’après l’opération il reste l’occasion de régler la pression de l’air. La lèvre supérieure est alors recourbée uniformément en dedans, jusqu’à ce que le tuyau soit devenu un peu sensitif; puis on règle la largeur de la lumière et en même temps de nouveau la position de la lèvre supérieure, de telle sorte qu’on perçoive légèrement la duodé- cime (Sol4) dans le murmure qui se fait entendre, et que le tuyau soit près de parler. Ensuite, on portera la sensibilité au degré convenable, en réglant la pression de l’air. On peut facilement faire parler un tel tuyau à une distance de vingt ou trente mètres, en produisant le son fondamental au moyen d’un tuyau à bouche ou à anche. Cette expérience, dans laquelle l’onde excitée dans la colonne d’air fait vibrer transversalement la lame aérienne, forme un pendant aux expériences connues de M. Tyndall, où une onde traversant l’espace ambiant fait vibrer longitudinalement des flammes ou des jets de fumée. Pour la construction du tuyau sensitif il est préférable de prendre un tuyau dont le biseau ne soit pas muni de ces petites entailles qu’on y trouve souvent sur le bord antérieur. Il est également possible de construire le tuyau sensitif en SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUXAUX, ETC. 311 forçant la lèvre supérieure un peu en dehors ; mais, dans ce cas, je n’ai pas trouvé la sensibilité aussi grande. Je donnerai ici un aperçu de quelques expériences, nouvelles ou connues, qui se rapportent à ce sujet. Le tuyau sensitif à lèvre recourbée en dedans est amené à parler: 1°. au moyen d’un son extérieur de hauteur convenable, et produit soit en chantant, soit au moyen d’un tuyau, d’un diapason avec résonnateur, etc.; 2°. en soufflant légèrement sur la bouche (expérience de MM. Schneebeli et Kiessling), 3°. en frappant le tuyau (exp. de MM. Lootens en Van Tricht,) 4°. en aspirant l’air au bout supérieur, 5°. en mettant une lame métallique sur la lèvre supérieure, 6°. en tenant une flamme près de la lèvre inférieure. On comprend aisément les deux derniers effets. On fera taire le tuyau parlant: en soufflant légèrement dans le bout supérieur, — en aspirant l’air à la bouche; — en tenant une lame ou la main près de la bouche, ce qui cause aussi une évacuation (voir la fig. 16), — en dirigeant une lame d’air de haut en bas sur le bord de la lèvre supérieure; etc. Le tuyau à lèvre recourbée en dehors montre des relations inverses. Une expérience intéressante consiste à faire taire le tuyau sensitif à l’aide d’une source sonore extérieure. A cet effet, prenons encore le tuyau Ut3, rétrécissons un peu la lumière et mettons à quelque distance un tuyau bouché Ut3. Nous condui ons l’air aux tuyaux après avoir désaccordé un peu le bourdon. Le tuyau sensitif ne parle pas : nous altérons le ton du tuyau bouché, en changeant la hauteur du couvercle. On entend de très faibles battements, qui se ralentissent gradu- ellement. Tout à coup, le tuyau sensitif parle, mais seulement pendant les maxima d’intensité sonore. Lâchons la touche 312 W. C. L, VAN SCHAIK. correspondante au bourdon pendant que l’intensité est mini- mum: le tuyau a cessé de parler. Un fil de duvet, fixé au- dessus de la lumière, montre pendant les maxima d’intensité une oscillation maximum. C’est un phénomène d’interférence. Il existe encore, entre deux tuyaux, une influence mutuelle d’une tout autre nature, et que je veux rappeler ici pour la distinguer de celle dont il vient d’être question. — On con- naît l’expérience de M. Kônig, avec les deux tuyaux ouverts du même ton, placés l’un à côté de l’autre sur le même som- mier. Au reste, tous les facteurs d’orgue savent que deux tuyaux placés l’un auprès de l’autre peuvent altérer nota- blement la hauteur ainsi que l’intensité de leur son, ce qui se présente surtout lorsque le son fondamental et la taille des tuyaux ne diffèrent pas beaucoup. C’est un vaste champ de phénomènes très-intéressants. Par exemple, en prenant deux de mes tuyaux bouchés, dont l’un rend le Ré, et l’autre le Ré, dièse, je trouve que le second, dont le son n’est qu’un peu plus fort, influence d’une manière remarquable le son du premier. Si je fais parler d’abord le Ré-dièse et ensuite le Ré, le son de celui-ci monte d’un demi-ton, de sorte qu’on entend Ré-dièse sans aucun battement. Si au contraire je fais parler le tuyau Ré et en- suite l’autre tuyau, on entend des battements, qui bientôt cessent, les deux tuyaux sonnant alors le Ré-dièse, comme dans le premier cas. Ces tuyaux sont placés l’un à côté de l’autre sur le même sommier : mais on peut aussi constater une semblable influence lorsque les tuyaux reçoivent l’air de souf- flets différents. On pourrait expliquer cette influence en remarquant que l’air sortant de la bouche d’un des tuyau pénètre dans l’autre : en effet, on peut faire monter le son notablement en soufflant dans la bouche. (Si, au contraire, on dirige un courant plan sur le bord de la lèvre supérieure,- on fait descendre le son). Mais en accordant le son le plus fort de telle manière qu’il soit un peu plus haut ou bien un peu plus bas (à peu près SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 313 d’un quart de ton entier) que l’autre tuyau, ce dernier adoptera le son du premier. On comprend que, dans tous ces cas, le son résultant ne sera pas rigoureusement égal à l’un des sons donnés. Lorsque, par ex., de deux tuyaux de son différent, le son le plus bas était le plus fort, je trouvais que le son résultant était encore un peu plus bas que celui-ci. Dans ces dernières expériences c’est la vibration de l’air existant près de la bouche d’un des tuyaux, qui domine le courant sortant de la lumière de l’autre, surtout si l’intensité du premier mouvement est relativement grande. Nous allons maintenant étudier cette vibration de la lame d’air dans un tuyau parlant. CHAPITRE VII. Vibration et phases du courant aérien injecté. La vibration transversale. Le mouvement vibratoire de la co- lonne aérienne conduit nécessairement à admettre que le courant plan injecté fait des vibrations transversales, de sorte qu’il se dirige périodiquement en dedans ou en dehors du tuyau. Par ce changement de direction le courant d’air va périodiquement renforcer les vibrations dirigées en dedans aussi bien que celles de sens opposé, comme il a été remarqué depuis longtemps. Cependant, l’explication du phénomène ne saurait être suffi- sante si l’on ne fait voir comment les forces dépendent du sens du mouvement qu’elles doivent entretenir; ainsi qu’il suit d’un principe de mécanique bien connu 1 ). Or, cette dépendance résulte des particularités concernant la constitution et la courbure du courant. Supposons, par ex., que la lame aérienne OA (figure 27) *) Comparez la théorie du diapason électromagnétique dans le célèbre traité de lord Rayleigh ( Theory of Sound , § 64). 314 W. C. L. VAN SCHAIK. suive les vibrations sonores tout comme une languette très- légère et parfaitement flexible; les forces, dans ce cas, ne dépendraient pas du sens du mouvement. En effet, soit AB l’amplitude des vibrations de la colonne près de la bouche : le mouvement CB, étant dirigé en dedans, serait renforcé par l’air qui est maintenant soufflé dans le fc^au; mais pendant le mouvement opposé BC , l’air injecté offrirait une résistance à la vibration, qui est dirigée en dehors. En supposant que la languette d’air se meuve un peu après les vibrations so- nores, l’action serait encore plus défavorable. Quelques particularités de la courbure de la lame d’air se laissent prévoir au moyen de la composition des mouvements. Soit AB (figure 28) une partie du courant à une époque où l’os- cillation est encore dirigée en dehors. Pendant que l’air de la colonne parcourt un petit chemin B B 2 en sens opposé, une molécule d’air sortant de la lumière, sans être sous l’influence de cette vibration, suivrait le chemin AB, de sorte qu’elle arrive réellement en B2. Une autre molécule, étant en P, irait à P, par sa vitesse initiale ; en réalité elle arrive à C2 ; etc. Le cou- rant prendra donc une forme AB2C2; et une forme suivante sera AC3D3. Ces lignes courbes sont asymétriques par rapport à la bis- sectrice de la figure totale décrite par la lame vibrante. Si la période d’une vibration simple est très-grande par rapport au temps dans lequel l’air passe la hauteur de la bouche, la po- sition la plus latérale de la lame se présentera à peu près au moment où la vitesse de la colonne vibrante est maximum. Peu après, avant que la vibration de la colonne change de signe, la partie inférieure du courant prendrait une forme plus rectiligne. L’inflexion du courant monte, comme on le voit, de la lumière vers la lèvre supérieure. Si ce mouvement demande un temps à peu près égal à la période d’une vibration simple, on peut prévoir des formes comme celles représentées dans la figure 32. Si, au contraire, le temps que l’inflexion de la SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 315 lame exige pour passer la hauteur de la bouche. est égal à deux ou trois fois la période d’une vibration simple, on doit s’attendre à plusieurs inflexions, comme le montrent les figures 40 et 41. La méthode vibroscopique et la photographie instantanée peuvent nous instruire sur ce point. L’observation vibrosco- pique directe nous montrera les phases de la lame d’air et nous apprendra des particularités qui peuvent éclaircir le phénomène en question. Observation des phases de la lame aerienne. En premier lieu, prenons un tuyau qui donne le son fondamental sans les harmoniques, ainsi un tuyau bouché de grosse taille, par ex. l’Ut2 du bourdon. Sur les côtés on place des écrans noirs /S et S, percés d’ouvertures O et O, ; voir la figure 29. La lumière d’une lampe L passe par l’ouverture O dans la bouche M sous un angle très-aigu, comme on le voit dans la pro- jection horizontale, figure 30. En V on fixe un vibroscope pneumatique (décrit dans le Chap. IV), et en A se trouve l’œil de l’observateur, qui reçoit la lumière suivant la direc- tion OxA. S’il est nécessaire, on peut enlever une partie de la paroi du tuyau près de la bouche. L’appareil P sert à in- troduire une poudre légère et blanche dans le pied du tuyau. Conduisons l’air au vibroscope, qui donne l’Ut — , ou l’Ut,, ainsi qu’au tuyau, que nous accordons à Ut2 ; puis abaissons le couvercle du tuyau, de sorte que le ton monte un peu et que l’on entende des battements lents. Mettons ensuite l’œil devant le vibroscope, et faisons passer un peu de poudre dans le pied du tuyau. Aussitôt, les phases du courant injecté deviennent visibles. Il est avantageux de prendre l’angle entre les directions LO et O XA aussi grand que possible, et l’on place les écrans de telle manière que l’œil ne reçoive presque pas d’autre lu- mière que celle qui est diffusée par la poudre. On voit alors le courant projeté en blanc sur un fond noir. La matière qui 316 W. C. L. VAN SCHAIK. m’a paru la plus propre à rendre visibles les courants aériens, c’est la poudre de talc. Les figures 31 et 32 montrent en grandeur naturelle les résultats de l’observation vibroscopique. Les lèvres supérieure et inférieure du tuyau sont indiquées respectivement par LS et LI. Entre ces deux parties on voit les différentes phases de la lame d’air. Les flèches p marquent le sens des vibrations, ralenties par le procédé optique; la succession directe des phases est d’ailleurs indiquée par des chiffres. Comme on le voit, la partie inférieure du courant est essen- tiellement conforme à ce qu’on pouvait attendre (figure 28); l’inflexion s’avance de la lumière vers la lèvre supérieure, de sorte que d’abord la partie inférieure de la lame passe par la bouche. Quand la partie supérieure a pris sa position la plus latérale (5, figure 31), la partie la plus inférieure se meut déjà un peu dans un sens opposé. Quoique ces phases soient bien visibles, il est souvent avan- tageux d’employer un moyen pour éviter l’addition répétée de poudre. A cet effet, je prends un fil de duvet très-flexible, d’une longueur à peu près égale à la hauteur de la bouche, et je le fixe au-dessus de la lumière. Un pareil fil acquiert toujours une certaine tension, qu’on ne trouve pas dans la lame aérienne, de sorte que ces deux systèmes ne peuvent théoriquement pas offrir des formes identiques. Par l’expérience nous pouvons toutefois comparer les formes du fil de duvet avec celles des phases du courant; cette comparaison sera d’ailleurs nécessaire si l’on veut pouvoir compter sur les in- dications du fil. La figure 34 représente le fil de duvet oscillant, observé à l’œil nu. Les figures 35 en 36 montrent l’analyse vibrosco- pigue de la figure totale ; les flèches p indiquent la succession des phases. On retrouve ici essentiellemeut les mêmes formes que dans les figures 32 et 31. Seulement, les phases de ces figures-ci sont un peu plus arrondies que celles des figures 35 en 36 ; en outre, elles précèdent les formes du fil d’une très- SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 31 7 petite quantité, comme on peut le voir en employant à la fois le fil et la poudre de talc. Le fil de la longueur indiquée offre donc un moyen suffisant pour étudier les oscillations du courant injecté. Ces mouvements peuvent facilement être pro- jetés pour un auditoire, ainsi qu’il a été dit dans le chap. IV. L 'entre-croisement des courants. Nous voulons encore examiner, au moyen du vibroscope et de la poudre de talc, l’espace devant la bouche du tuyau. Après que l’extrémité supérieure de la lame aérienne s’est recourbée relativement vite, en allant de la position 3 à la position 5 de la figure 31, il se forme devant la bouche un petit courant tourbillonnant dans le sens de la flèche /, (voir la figure 33) et qui s’élargit dans la direction f. En jt la masse de la poudre se concentre, et maintenant la lame d’air va osciller à l’intérieur du tuyau, en montrant les phases de la figure 32. C’est une chose très intéressante que de voir ces courants se former et osciller dans le temps d’une à deux secondes. Plaçons maintenant dans la bouche du tuyau, et contre la paroi, une mince plaque de bois noircie, sur laquelle sont fixées des pointes métalliques portant de petits fils de duvet (voir la figure 37). Nous observons l’appareil au vibroscope, pen- dant que le tuyau parle. Lorsque le courant est dirigé en dehors, les petites girouettes du champ PQ ont la direction des flèches P et Q. Pendant la position opposée de la lame aérienne, les fils de duvet du champ RS suivent la direction des flèches indiquées par ces lettres. Le duvet a possède un mouvement de rotation de la période des vibrations sonores. On peut varier cette expérience en remplaçant la plaque de bois par une mince lame de plomb revêtue, sur toute sa surface, de duvet fixé au moyen d’un vernis. Cette lame flexible s’applique aisément à telle partie qu’on voudra de la paroi voisine de la bouche. L’aspect de cet appareil, regardé au vibroscope, rappelle un champ de blé où le vent fait tourbil- lonner et onduler les tiges d’une manière régulière. 318 W. C. L. VAN SOHAIK. Ces expériences font voir clairement qu’une partie de l’éner- gie du courant injecté est transportée sur l’air ambiant, qui est entraîné dans le mouvement; ainsi, le tuyau est périodi- quement en partie évacué ou rempli par le courant, ce qui est conforme aux vues de MM. Sonreck et Smith. D’ailleurs on peut le démontrer aussi en déposant un peu de poudre de talc sur le biseau et en analysant l’ensemble au vibroscope. Les mouvements que nous venons de décrire se trouvent en concordance avec les résultats de MM. Lootens et Van Tricht; nous croyons cependant devoir interpréter ces résul- tats d’une manière différente. Comparons à cet effet la figure 24 avec son analyse vibros- copique (la figure 33). Le courant „ dérivé” sortant, de la figure 24, est constitué essentiellement par les masses d’air s (figure 33) qui se suivent dans la direction de la flèche /, et par l’air entraîné. De même, la partie entrante du courant dérivé est formée par les masses d’air qui sont poussées et entraînées vers l’intérieur du tuyau aux moments où la lame aérienne est recourbée en dedans autant que possible. Le courant dérivé, se dirigeant dans l’intérieur du tuyau évacuera plus ou moins l’espace au dessus du biseau. Au reste l’air de cet espace sera en partie entraîné en dehors, dans la direction P Q de la figure 37, aux moments où la lame a acquis sa position la plus extérieure. A cause de cette évacuation latérale, le courant dérivé sera recourbé vers le biseau et la paroi postérieure. ‘ ) Le courant prendra ensuite part au mouvement de l’air entraîné dans la direction PQ; il glissera sur le biseau et sortira par la bouche, suivant la direction qui vient d’être indiquée. Cette saillie du courant, observée à l’œil nu, fait alors l’i]lusion d’un entre-croisement des deux courants (figure 26). Les courants d’un tuyau à timbre composé offrent encore des particularités qui se rapportent aux vibrations spéciales de l’air et sur les- quelles nous reviendrons. q Comparez aussi l’expérience à laquelle se rapporte la figure 16. SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC 319 Tant que le tuyau parle mal, la lame d’air, en passant de- vant la lèvre supérieure, ne montre que des vibrations trans- versales insignifiantes; les masses d’air du tuyau ne sont pas entraînées et jetées à travers la bouche. La forme de la boucle inférieure du courant dérivé (figure 20), moins prononcée dans ce cas, s’explique encore par une évacuation latérale d’une intensité moindre. En frappant un tel tuyau, on le fait résonner à chaque fois, c.-à.-d. on y développe une onde sonore qui agrandira l’am- plitude de la lame aérienne, de sorte que le „ courant dérivé” saillira à chaque coup, comme on peut le prévoir d’après la description ci-dessus. Le passage périodique des deux courants à la bouche d’un tuyau n’est pas de la même nature que l’interruption du courant d’une sirène. Il consiste essentiellement dans la vi- bration transversale de la lame aérienne et dans l’entraînement de l’air ambiant. L’expérience avec le tuyau sensitif parlant à distance, ainsi que l’entraînement de la poudre (figure 25), s’expliquent aisé- ment. Quant aux tourbillons M (figures 23 et 24), ils se déduisent des changements de direction que présentent le courant aérien et les vibrations sonores. Si l’on place l’un près de l’autre deux tuyaux parlants, d’un son un peu différent, de sorte qu’on entende des battements, les fils de duvet fixés dans la bouche montrent des vibrations dont l’amplitude varie d’une manière qui se laisse prévoir d’après le principe des interférences ; la description de ce phénomène, du point de vue que nous avons pris, donne l’explication du fait qu’à chaque battement le courant dérivé sortant forme un angle plus grand avec la lèvre supérieure. Tous ces phénomènes se trouvent en parfaite harmonie avec le principe connu d’une théorie étudiée expérimentalement dans ce mémoire. 320 W. C. L. VAN SCHAIK. Vibration de la lame aérienne 'pendant la résonnance périodique. La résonnance périodique a été considérée dans le Chap. II. Nous allons étudier le mouvement du courant pendant ce phénomène. Si la force du vent augmente graduellement, le tuyau Ut2 du bourdon employé dans les recherches précédentes fait en- tendre trois fois le son fondamental, comme il a été mentionné au Chap. II. Tant que l’intensité du courant n’est que très-faible, la lame aérienne fait de très-lentes vibrations, comme l’indique le fil de duvet fixé à la lumière du tuyau; la forme de ce fil res- semble encore à celle d’une languette métallique. Le courant d’air augmentant, la période des vibrations devient de plus en plus petite (voir la fin du Chap. II.), jusqu’à ce qu’on entende pour la première fois le son fondamental. Alors la figure totale décrite par la lame prend la forme indiquée dans la figure 38. En renforçant toujours le vent, nous faisons disparaître cette forme ainsi que le son fondamental ; et lorsqu’on entend celui-ci pour la deuxième fois, la forme totale du courant vibrant est celle de la figure 39. Le son peut disparaître encore une fois, et s’il se reproduit dans le son normal, le courant montre la forme indiquée par la figure 34. L’analyse vibroscopique donne les phases, dont nous n’avons reproduit que deux dans les figures 40 et 41. La première se rapporte à la figure totale 38, la seconde à la figure 39. Ce sont des lignes sinueuses, où l’on remarque en général plusieurs inflexions, qui sont plus courtes dans la première figure que dans la seconde. J’ai constaté aussi l’existence de telles formes au moyen de la poudre de talc. Ces formes s’expliquent par la vitesse relativement petite de l’air dans le courant injecté. Dans ces cas, en effet, la même masse d’air, en passant la hauteur de la bouche, peut osciller plus d’une fois, comme il a été indiqué dans la première partie de ce chapitre. Les vibrations du courant s’opèrent alors sou- vent d’un côté de la lèvre supérieure. SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 321 Il est encore intéressant de démontrer que les sons très-bas, dus au soi-disant frottement de l’air (Chap. II), se rapportent réellement à des vibrations déterminées de la lame aérienne. A cet effet, j’accorde le vibroscope à Ut,, et je prends encore le tuyau bouché Ut2. Après que le son fondamental a disparu pour la seconde fois, on entend des sons très bas. En aug- mentant le courant d’air, je fais monter les sons à idi,, c.-à-d. à la quarte supérieure du vibroscope, ou la quinte inférieure du tuyau. Alors se voit le fil de duvet en général triple, ce qu’on s’explique aisément par le rapport des vibrations. En partant d’une des figures totales (38 ou 39), on com- prend, et l’observation le confirme, qu’elle se rétrécira de plus en plus si l’intensité du courant augmente. Il s’ensuit que la direction des positions extrêmes de la lame aérienne fera un angle plus grand avec celle des vibrations sonores de la colonne d’air auprès de la bouche ; le courant exercera donc sur cette colonne une influence moins favorable, et par là s’explique l’affaiblissement du son fondamental. Production du son en gênerai. Résumé. Les expériences in- diquent suffisamment l’idée qu’on peut se former du phénomène. Si le courant n’est encore que très-faible, il fait naître dans la lame aérienne de lentes vibrations transversales (fin du Chap. II), qui deviennent de plus en plus vites lorsque l’in- tensité du courant augmente (fin du Chap. III), c.à.d. le son dû au „frottement” monte. Si celui-ci devient presque égal à l’un des sons propres du résonnateur, le courant peut dé- velopper et renforcer dans le tuyau une onde stationnaire, qui réagit de nouveau sur la lame aérienne, comme il a été montré ci-dessus : le tuyau parle. Les vibrations transversales de la lame sont maintenant causées essentiellement par la réaction de l’onde sonore, et non par le „frottement”, car l’observation fait voir clairement que l’inflexion de la lame ne commence pas à la lèvre supérieure, mais au contraire à la fente par laquelle on insuffle l’air. J’ai remarqué de même, 322 W. C. L. VAN SCHAIK. que, la partie supérieure de la lame aérienne ayant pris sa position extrême, la partie inférieure se meut déjà un peu dans un sens opposé (page 316) ; c’est sans doute la suite d’une évacuation qui se produit surtout du côté où l’air est entraîné en plus grande quantité. Renforce-t-on le courant, son action sur la colonne d’air devient plus défavorable (d’après ce qui a été remarqué dans la partie précédente de ce chapitre) ; en même temps, le frotte- ment acquiert de nouveau une certaine prépondérance. Si enfin le tuyau donne le son normal, l’observation indique que le cause des vibrations transversales de la lame n’est pas située au bord de la lèvre supérieure (comparer la progression de l’inflexion, par ex. dans la figure 31) ; ce n’est pas le frot- tement de l’air, c’est l’onde sonore qui recourbe périodique- ment la lame aérienne, de sorte que celle-ci peut entretenir de son côté les vibrations de la colonne d’air. La production du son avait cependant commencé par le frottement. Sera-ce la règle générale? Nous avons pressé gra- duellement la touche du clavier; mais on sait que pour faire parler un tuyau sonore, on ouvre ordinairement la soupape très- vite. On peut toutefois remarquer que le temps très- court exigé par ce mouvement, peut amplement suffire pour la production des phénomènes de la résonnance périodique. Le soi-disant frottement de l’air, expliqué dans le Chap. III, con- servera son importance pour le commencement de la vibration. Il est encore un autre fait qui causera la production du son. Aussitôt que le courant s’échappe de la lumière, il en- traîne l’air ambiant, qui remplit ou évacue plus ou moins la partie inférieure du tuyau; comme il a été remarqué par M. Sonreck. Une telle impulsion agira sur la colonne aérienne et la mettra en vibration. On sait, en effet, qu’il suffit de souffler pendant un temps très-court dans l’ouverture d’un résonnateur (d’une bouteille par ex.), ou d’en aspirer l’air, pour y produire pour un moment le son fondamental. C’est comme si l’on tirait ou pressait d’un seul coup un ressort à SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 323 spirale suspendu. L’impulsion, mettant bientôt en jeu une action qui la détruit partiellement, sera assez courte, de sorte que la production de l’onde stationnaire peut se comprendre. Or, l’expérience avec le tuyau sensitif, parlant à distance, nous apprend qu’une onde extrêmement faible et de courte durée, excitée dans le tuyau, suffit pour recourber la lame aérienne (dont la position était rendue défavorable) vers l’autre côté de la lèvre supérieure. Dans le cas qui nous occupe, l’onde faible existant dans le tuyau suffira certainement pour recourber la lame aérienne (dont la position est normale) et pour la faire osciller d’un côté à l’autre de la lèvre supéri- eure, de sorte que le mécanisme sera mis en train. En réalité, deux choses peuvent produire la vibration ini- tiale de la lame d’air: le frottement à la lèvre snpérieure, et l’onde permanente causée par la première impulsion; celle-ci sera d’ailleurs bien suffisante. Dès que le tuyau parle norma- lement, le frottement à la lèvre n’est d’aucune importance. Les phases du courant aérien montrent alors une asymétrie distincte par rapport à la bissectrice de la figure totale. Pour expliquer le fait que le courant renforce et entretient les vi- brations de la colonne d’air, il faut indiquer la raison pour laquelle les forces agissant sur l’air du tuyau dépendent du sens de la vibration, comme il a été remarqué au commen- cement de ce chapitre. L’expérience avec l’appareil de la figure 37 nous fait voir qu’aux positions extrêmes le courant injecté entraîne avec lui des masses d’air considérables. Ceci a été confirmé en ré- pandant de la poudre de talc sur le biseau et en observant au vibroscope. Cet entraînement me semble d’une importance particulière ; en effet, les vibrations sonores de la colonne d’air ne pourraient être bien entre tenues par l’impulsion directe d’un courant plan. L’énergie se distribuant sur l’air entraîné, la section du courant s’élargit pour ainsi dire, de sorte que ce courant agira sur une plus grande surface des tranches d’air près de la bouche du tuyau. Archives Néerlandaises, T. XXV. 22 324 W. C. L. VAN SCHAIK. Considérons maintenant les phases pendant une vibration simple, par ex. pendant que le mouvement est dirigé en de- * dans (voir la figure 32). D’abord la vibration de la colonne est contrariée par la lame aérienne, qui entraîne encore des masses d’air hors du tuyau, c.à.d. dans une direction opposée à celle de la vibration même. L’espace entre la lèvre supé- rieure et la lame d’air se rétrécissant ensuite dans la première partie de la vibration, celle-ci n’est plus contrariée autant qu’au début. Ce n’est toutefois que lorsque la lame aérienne est suffisamment recourbée (dans la position 5 de la fig. 32), que le courant renforcera la vibration supposée, dont il a pris alors la direction. Le passage entre la lèvre et le courant étant maintenant ouvert, l’énergie de celui-ci sera distribuée sur les masses de l’air ambiant, qui est entraîné facilement par cette ouverture, et la force vive, communiquée durant cette phase à la colonne d’air vibrante, sera plus grande que la perte de force vive dans la première partie de la vibration. Les mêmes observations s’appliquent au mouvement opposé. De cette manière la colonne d’air reçoit son énergie du courant injecté. Quant au mouvement de celui-ci, il est réglé par l’onde sonore et en partie par l’évacuation latérale susdite (page 322). Cette dernière cause explique le fait que la hauteur du son monte si l’on renforce le courant. Il est à remarquer que l’action accélératrice du courant sur la colonne d’air se présente dans la dernière partie de la vibration. C’est à cette circonstance que j’attribue une pro- priété bien connue de ces vibrations, savoir la tendance à s’écarter de la vibration simple harmonique. Il a été supposé que la cause de cette propriété serait le passage brusque de la lame mince d’air d’un côté à l’autre de la lèvre supérieure ; mais cette hypothèse est rendue invraisemblable par l’observation de la forme prise par le courant pendant sa vibration. On sait d’ailleurs que les oscillations d’un pendule jouissent de la même propriété lorsque les impulsions de l’échappement s’opè- rent aux moments de la plus grande élongation. SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 325 La position dans laquelle la lame aérienne entretient le mieux une vibration de la colonne d’air, fait un angle assez grand avec la direction initiale du courant injecté. Si l’on ren- force celui-ci, l’intensité du son croîtra jusqu’à une certaine limite, dépendant de la fraction de l’énergie sonore dispersée dans le système entier. Ainsi il peut se comprendre que les vibrations sonores deviendront moins capables de recourber le courant, que l’on continue à renforcer, de sorte que l’in- tensité du son diminuera. Le courant étant plus intense, sera droit sur une partie plus grande de sa longueur, et par suite empêchera, de plus en plus, les vibrations sonores qui lui sont perpendiculaires. Une diminution graduelle du son est donc à prévoir. Ceci est conforme à l’expérience. Mais, en renforçant toujours le courant d’air, on arrive à un certain point où le son dis- paraît pour ainsi dire subitement. Alors des sons d’ordre supérieur se sont déjà produits, et, suivant l’opinion répandue, le tuyau soufflé avec tant de force ne rendra plus le son fon- damental. En étudiant ces phénomènes de plus près, nous verrons, au contraire, que ce son peut se produire encore plus d’une fois. Passons pour cela aux tuyaux d’un timbre plus composé. CHAPITRE VIII. Vibrations composantes du courant aérien. Disparition successive du son fondamental et des aliquotes. Sons harmoniques. La théorie des résonnateurs cylindriques, donnée par Helmholtz, exige que dans les cylindres larges les sons propres d’ordre supérieur soient plus hauts que les har- moniques du son fondamental; tandis que dans les tuyaux étroits les sons propres sont à peu près égaux à ces harmo- niques. Il s’ensuit que dans les tuyaux de grosse taille les sons 22* 326 W. C. L. VAN SCHAIK. harmoniques ne sont guère renforcés par la résonnance du tuyau, et qu’au contraire la colonne aérienne d’un tuyau de menue taille se subdivise, par la résonnance, plus facilement en parties aliquotes. ') Or nous avons vu, dans le Chap. précédent, que l’impul- sion donnée à la colonne d’air vibrante se produit aux der- niers moments de la vibration même, d’où résulte la tendance de ces mouvements à prendre un caractère plus compliqué. On comprend donc ce fait connu, que, surtout dans les tuyaux étroits, les vibrations sonores entretenues par les impulsions du courant se composent bientôt de plusieurs vibrations simples, correspondant aux harmoniques du son fondamental. Il est à prévoir que ces diverses vibrations simultanées agi- ront chacune sur la lame aérienne qui fournit l’énergie du système. Peut-être même les mouvements composants du cou- rant auront-ils de nouveau une influence assignable sur les vibrations sonores. Voyons ce que nous apprendra l’expérience. Vibrations composantes du courant aérien. Prenons quelques tuyaux de timbre différent, et examinons les formes vibratoires de la lame aérienne. Dans les figures 34, 42 à 46 (PI. VII) et 60 on trouve ces formes telles qu elles se dessinent au moyen de fils de duvet attachés au-dessus de la lumière du tuyau. La figure 34 se rapporte, comme nous avons vu, au bourdon. Cette espèce de tuyaux, rendant le son fondamental, est l’exem- ple d’un timbre à peu près simple. Les figures 42 et 43 se rapportent au jeu principal ; la fig. 42 a été observée à l’Ut, , d’une octave-basse, la fig. 43 à d’autres tuyaux du jeu en question. Toutes ces figui es sont en grandeur naturelle. La lame d’air vibrante du jeu principal , comme celle des bourdons , montre des positions A et B, bien marquées, où la vitesse de la lame est miniina. Mais, en outre, on ob- 1) Lehre von den Tonempfindungen , 4e Edit, page 156. SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 32 7 serve dans la figure vibratoire du principal une position in- termédiaire C , où la vitesse aura encore une valeur minima. Si l’on souffle un tel tuyau doucement, de sorte qu’il rende le son fondamental presque seul, on ne voit pas la position C ; celle-ci existe quand le tuyau parle normalement, et elle se produit à peu près au moment où l’octave devient très-pro- noncée. On sait d’ailleurs que ce son harmonique est un composant essentiel du timbre de ce jeu. Dans les figures 44 et 45 sont représentées les formes vi- bratoires du courant chez le quintaton. Les tuyaux bouchés de ce jeu de menue taille rendent, comme on sait, le son fondamental distinctement accompagné de la duodécime. On trouve dans ces figures quatre positions A B D E, où la vitesse de la vibration est minima. Dans ce cas aussi, on démontre que la duodécime se fait entendre distinctement à peu près au moment où l’on voit se produire les positions intermédiaires D et E. Les figures 46 et 60 se rapportent à des tuyaux ouverts, la première à un violon de menue taille, la seconde à un tuyau du jeu salicional , de taille moyenne. La lettre P indique une lame métallique dont on munit souvent ces tuyaux, pour obtenir l’intonation convenable. En analysant ces figures au vibroscope, nous trouvons que la vibration du courant aérien, chez les tuyaux du principal, s’opère de la manière suivante : le mouvement AB s’effectue d’un seul coup, la vibration BA au contraire se divise dans les deux mouvements BC et CA, de sorte que ces vibrations se suivent dans l’ordre AB, BC, CA, AB, etc. En évaluant la durée des mouvements et représentant le résultat graphi- quement, on obtient la figure 47, qui en donne l’image distincte. Les particularités du phénomène dépendent aussi de l’intensité du courant injecté. Je me suis convaincu encore que la lame d’air oscille vrai- ment de cette manière, en opérant avec de la poudre de talc. Quant aux figures 42, 43, 46, je remarquerai que la partie 328 W. C. L. VAN SCHAIK. inférieure de la position C , indiquée par le fil comme entière- ment isolée des positions extrêmes, est souvent un peu plus large et se mêle plus à la position B, comme dans la figure 60. Un mouvement analogue, mais un peu plus compliqué, se présente dans les tuyaux plus étroits, comme ceux du sali- cional, auquel se rapporte la figure 49. Ces expériences ont été faites avec des tuyaux en étoffe. Dans les flûtes ouvertes en bois, de grosse taille, la position intermédiaire C est souvent évanouissante. L’analyse vibroscopique appliquée au courant aérien des tuyaux du quintaton révèle une vibration plus compliquée. Les diflérents mouvements se suivent ici dans l’ordre AE , EB, BD, DA, AE, etc., ce qui est représenté dans la figure 48. Pendant chacun des mouvements partiels, la partie supé- rieure de la lame d’air montre des courbures, qui ressemblent aux phases du courant dans les tuyaux à timbre simple. Dans la figure 48, l’analyse de la figure 44, on reconnaît la composition du son fondamental avec la duodécime, suivant le principe connu représenté dans la figure 51 . On y remarque en même temps une certaine différence de phase entre les deux vibrations composantes, différence qui dépend d’ailleurs de l’intensité du vent et de l’intonation. La vibration de la lame d’air dans un tuyau du principal rappelle la composition du son fondamental avec l’octave, comme on peut le voir en comparant les figures 47 et 50; la différence subsistant encore entre ces figures se déduit en partie de ce que la lèvre supérieure ne peut être une position d’équilibre. J) Ces expériences suffisent pour démontrer l’existence des vibrations composantes dans le mouvement de la lame aérienne. Phénomènes résultant des vibrations démontrées. Octaviation. Timbres différents. Les mouvements dont il vient d’être parlé D Les vibrations composantes montrent ici une certaine différence de phase, qu’on na pas indiquée dans la figure 50. SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 329 me semblent avoir une importance spéciale pour la production du son. En soufflant un tuyau peu à peu plus fortement, on fait accroître le premier son aliquote, de sorte que la figure vibratoire éprouve la division ci-dessus décrite ; à partir de là on observe que l’intensité du son aliquote augmente beaucoup plus vite. Cela semble donc indiquer que les vibrations com- posantes contribuent à la production des aliquotes mêmes. La vibration totale consiste encore dans les deux périodes où l’air est entraîné hors du tuyau ou soufflé en dedans; mais puisque l’intensité de l’entraînement de l’air, notamment dans les positions extrêmes, dépend de la direction de la lame d’air *), l’évacuation, aiijsi que le remplissage du tuyau, acquerra une périodicité qui favorisera la production des sons harmoniques. De ce point de vue essayons de prévoir et de décrire quelques phénomènes. Pour cela, nous nous occuperons de la disparition successive du son fondamental et des aliquotes, qu’on obtient en soufflant le tuyau de plus en plus fort. Ce phénomène me semble parfaitement répondre au but proposé. En effet, on l’explique souvent d’après la théorie du frottement ; mais le fait que le son fondamental, après avoir diminué lentement, disparaît très vite et presque subitement, est resté inexpliqué. Considérons, par exemple, la superposition du son fonda- mental et de l’octave, représentée daus la figure 50, où les deux amplitudes sont dans la proportion de 2 à 1, et supposons que l’octave soit graduellement renforcée ; nous obtiendrons alors la figure 52, où la ligne courbe coupe quatre fois par vibration double l’axe du temps. Il pourrait arriver alors que la position C de la figure 47 ou 49, en s’élargissant comme dans le cas de la figure 52, se rapprochât de la lèvre supé- rieure, et dépassât cette limite, de sorte que pendant la période totale du son fondamental l’air serait amené deux fois dans le tuyau, et deux fois en dehors. Or, l’onde sonore de l’octave ayant déjà acquis une intensité notable, elle peut avoir une 1) Voir la dernière partie du Chapitre précédent. 330 W. C. L. VAN SCHAIK. force suffisante pour faire osciller le courant. Le son fonda- mental disparaîtra alors, et le tuyau octa viera (L’expérience avec le tuyau sensitif nous a déjà montré que le passage de la limite de la figure vibratoire au-delà de la lèvre supérieure a une importance spéciale). A cet effet, nous prendrons un tuyau étroit assez grand, le Ré , dièse d’un salicional ; longueur du corps 2,1 mètres. Nous éloignons la lame métallique qui se trouve devant la bouche, et observons les particularités des figures vibratoires qui se pro- duisent lorsque le tuyau est soufflé de plus en plus fort. En premier lieu se présentent les formes indiquées dans la série I à V de la figure 53. Au numéro I la pression dans le sommier est de 1 cm. du manomètre à eau; le son fon- damental, d’abord doux, est renforcé graduellement, et si la figure prend la forme II, on entend très-légèrement la duodé- cime et l’octave. En augmentant la pression dans le sommier jusqu’à 4 cm., nous entendons l’octave très-distinctement, et alors se présente la forme III, où l’on observe la position C. La pression devenant de 6 cm., la position C s’élargit, comme le montre la figure IV, et l’octave est très-prononcée; si la pression s’élève à 6,2 cm. nous voyons la limite C, de la figure intermédiaire dépasser le bord de la lèvre supérieure; le son fondamental, étant déjà diminué, disparaît tout à coup, et la figure prend la forme V. Le tuyau est octaviant. Analysant la figure IV au vibroscope, nous trouvons que les divers mouvements s’opèrent suivant la série AB , RC,, C,C2, C2A, AB, etc.; cette vibration composée est représentée dans la figure 54. Les expériences ont confirmé nos prévisions. C’est donc bien la vibration RC,, qui, atteignant la lèvre supérieure, a causé l’octaviation. Ainsi, dans la figure IV, relative au son fondamental et à l’octave renforcée, nous voyons en quelque sorte deux sec- teurs RC, et C2A , qui se couvrent en partie dans l’aspect de SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 331 la figure vibratoire. C’est comme l’aspect d’une surface conique transparente ayant une partie C2C^B repliée en dedans, telle que la représente la figure 55. Suivant cette analogie, la figure deviendrait le schéma de l’octaviation si la partie C2CXB, s’a- grandissait, de façon à remplir le pli C2AB. Partons maintenant de la forme V (fig. 53 et 56), qui s’était présentée à la pression de 6,2 cm. Si l’on fait croître la pression jusqu’à 8 ou 9 cm., la figure devient un peu plus large et prend la forme VI; augmente-t-on la pression jusqu’à 12 cm., la duodécime se fait entendre très-distinctement, et peu après on entend le son fondamental. En même temps, des sec- teurs se sont formés aux bords de la figure, de sorte que la forme VII ressemble un peu à la figure 44. La pression s’élève- t-elle encore, un de ces secteurs latéraux atteint la lèvre su- périeure, le son fondamental et l’octave ont disparu, et le tuyau rend la duodécime (figure VIII). J’ai encore étudié l’octaviation avec d’autres tuyaux ; le phénomène se produisait toujours quand la limite Ct de la figure se trouvait près de la lèvre supérieure. Puis le son du tuyau obtient une certaine stabilité, c.-à-d. qu’il reste à peu près constant pendant que la pression augmente. Si les ampli- tudes étaient égales, la vibration de l’octave présenterait aux points homologues des vitesses deux fois aussi grandes que celles de la vibration fondamentale; par conséquent, lorsque l’amplitude de l’octave n’est qu’un peu plus grande que la moitié de celle du son fondamental, les vibrations de l’octave peuvent régler le mouvement du courant, si la vibration du son fondamental ne suffit plus à cet effet. J’ai constaté la disparition du son fondamental dans les tuyaux du quintaton au moment où la position E (figure 44) se trouve près de la lèvre supérieure. Ces tuyaux rendent alors, comme on sait, la duodécime. Je décrirai ici encore quelques expériences qui peuvent confirmer les vues ci-dessus développées. Prenons un petit tuyau ouvert de menue taille (longueur 332 W. C. L. VAN SCHAIK, presque deux pieds), rendant le son fondamental Ré3, et ren- forçons le courant d’air de telle sorte que le tuyau soit sur le point d’octavier. Si maintenant l’octaviation dépend d’une position particulière de la lame aérienne, et si le phénomène se produit au moment où la position C , dépasse la lèvre, on pourra le provoquer en soufflant légèrement dans la bouche du tuyau. Nous faisons cette insufflation, et soudainement le son fondamental disparaît. En aspirant légèrement à la bouche du tuyau, on en soufflant au bout supérieur, on rétablit le son fondamental. Nous avons rapporté plus haut une observation intéressante, à savoir, que le grand tuyau, après avoir octavié et avant de passer à la duodécime, fît entendre un moment le son fonda- mental. Or, on peut remarquer que ce son est le son diffé- rentiel de l’octave et de la duodécime, ainsi que de la troisième et de la quatrième harmonique, etc , et que le son fondamental résultant des deux sons donnés pourrait faire résonner le tuyau et vibrer la lame aérienne. D’autre part, on comprendra que dans le mouvement composé correspondant à la superposition de l’octave et de la duodécime, la lame d’air peut acquérir une inflexion maxima intérieure et une inflexion maxima ex- térieure pendant la période totale du son fondamental, ce qui favorisera ce son. Ainsi, nous devons nous attendre à ce qu’un tuyau ouvert, passant de l’octave à la duodécime, fera entendre un moment le son fondamental, et à ce que ce son se produira aussi quand le tuyau passe de la duodécime à la seconde octave, et peut-être encore lors de passages ultérieurs. Cette présomption se vérifie aisément avec des tuyaux étroits. Il y a de l’intérêt, toutefois, à démontrer que le son fon- damental produit de cette manière n’existe pas seulement comme son différentiel, mais est vraiment rendu par le tuyau lui-même. A cet effet, je prends un tuyau de menue taille (diamètre intérieur 20 mm.), qui donne le son fondamental Sol3 quand on SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 333 le souffle doucement. .Je le fais octavier, et en renforçant encore très-lentement le courant d’air, j’entends d’abord quelquefois la duodécime, puis le tuyau rend un son à timbre de quin- taton, où dominent le son fondamental Sol3 et la duodécime Ré5. Ce timbre est très-instable, et le tuyau ressemble main- tenant sous quelques rapports au tuyau sensitif. En soufflant légèrement dans le bout supérieur, ou en approchant la main de la bouche du tuyau, je fais disparaître le son fondamental, de sorte que la duodécime reste seule. Alors, je souffle à quelque distance un tuyau rendant l’octave Sol.* ; immédia- tement notre tuyau Sol3 émet de nouveau le son fondamental, et le timbre particulier Sol3 R,és s’est rétabli. Ici la duodécime du tuyau et l’octave rendue par une source extérieure don- nent naissance au son fondamental persistant. Il est également possible de reconstruire le timbre susdit en employant un second tuyau donnant la duodécime, si le premier tuyau octaviant est sur le point de passer à la duodécime. Ces phénomènes, ainsi que les propriétés du tuyau sensitif, font voir que le même tuyau, sans être modifié, et avec la même pression du vent, peut rendre différents timbres. C’est un exemple du fait que le même système est capable de se prêter à différents types de vibration, quoique la position des parties extérieures, dont dépend l’énergie du système, soit restée invariable. Toutes ces expériences indiquent que la description la plus simple de ces phénomènes partira de ce point de vue, que les positions particulières ainsi que les vibrations composantes de la lame d’air sont d’une importance spéciale pour la for- mation du timbre des tuyaux. Moyens pour prévenir V octaviation. Frein harmonique. Il est à remarquer que les facteurs d’orgues ont depuis longtemps tiré parti de l’octaviation pour obtenir encore d’autres timbres. Mais c’est à M. Cavaillé-Coll qu’on doit l’introduction de toute une. classe de jeux nouveaux, connus sous le nom de jeux 334 W. C. L. VAN SCHAIK. harmoniques. A leur aide, il sait en outre donner aux dessus des claviers une vigueur comparable à celle des basses. Ces tuyaux sont construits et soufflés de différentes manières, de sorte qu’ils sonnent à l’octave ou à une autre harmonique. On possède aussi des moyens pour prévenir l’octaviation des tuyaux de menue taille soufflés avec assez de force. Ce sont des lames en métal ou en bois, de forme différente, et qui, sous divers noms, ont été en usage pour ce but depuis longtemps. Une des formes les plus fréquentes est une lame fixée dans une position oblique devant la bouche du tuyau, comme on le voit dans la figure 57. Aujourd’hui on rencontre souvent une lame de ce genre fixée à un ressort et s’ajustant à l’aide d’une vis. Cette disposition porte alors le nom de „frein harmonique” ou „frein Gavioli.” Le son fondamental est rétabli par ce moyen, de sorte que le courant aérien d’un tuyau octaviant changera ses vibrations dès qu’on tient une pareille lame devant la bouche. C’est ce que M. H. Smith démontre en fixant une mince feuille de papier à la lumière du tuyau. Il remarque avec raison que le courant aérien se dirige alors plus en dehors, par suite de l’évacuation latérale. Comment faut-il expliquer le rétablissement, par le frein harmonique, du son fondamental ? On en a cherché la cause dans l’agrandissement de l’amplitude de la lame aérienne et dans l’abaissement du son qui en résulterait directement. Cette explication n’est pas admissible, car l’observation montre que l’amplitude du courant vibrant peut s’agrandir en même temps que le son du tuyau monte. (Voir l’expérience à laquelle se rapportent les formes I et II de la figure 53). D’autre part, le frein harmonique appliqué à un tuyau octaviant détermine un abaissement du son, d’une octave à peu près. En rap- prochant du tuyau la lame métallique P (fig. 58, 59, 60), on observe souvent que l’amplitude diminue d’abord, tandis que la figure vibratoire prend une direction plus inclinée en dehors. Finalement, la partie A de cette figure montre une SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 335 certaine instabilité (fig. 59), de nouvelles positions de vitesse minima se présentent devant la lèvre supérieure, et le son fondamental se rétablit (fig. 60). Le phénomène est donc assez compliqué. L’asymétrie de la figure vibratoire par rapport à la lèvre supérieure me semble avoir quelque importance ; en dirigeant d’en haut un courant plan sur le bord de la lèvre supérieure, on fait aussi, ordinairement, cesser l’octaviation. Les expériences décrites dans la partie précédente de ce chapitre indiquent l’explication de l’action particulière exercée par la lame métallique fixée au tuyau. En effet, nous avons vu que l’octaviation apparaît lors du passage de la position C (de la fig. 53) au-delà de la lèvre supérieure, de sorte qu’on doit s’attendre à ce que, cette position étant rendue stable, le tuyau n’octa viera plus. Nous avons vu aussi que le petit tuyau Ré 3, sonnant au Ré7l, regagnait le son fondamental par une légère aspiration à la bouche du tuyau. Or, en souf- flant un tuyau octaviant, il faut toujours un certain temps, si petit soit-il, pour que le courant d’air acquière sa force normale ; il se produira donc d’abord pendant un temps très- court un état vibratoire où le son fondamental, quoique très- faible, sera représenté Si maintenant ce tuyau est muni d’un frein harmonique, le courant d’air, notamment dans une position telle que C, où la vitesse de la vibration est minima, causera l’évacuation latérale connue 1 ) ; — cette position sera donc retenue vers le frein et empêchée de dépasser la lèvre supérieure, de sorte que l’existence de la vibration initiale sera assurée. Le courant d’air s’inclinant, dans son inflexion extérieure, vers la lame métallique, se rapprochera plus de la direction de la vibration du même sens, de sorte que cette vibration sera renforcée davantage, et préparera une vibration plus forte dans le sens opposé. La partie inférieure du courant aérien sera donc recourbée plus énergiquement que sans le secours du frein. 1) Comparez l’expérience se rapportant à la figure 16, Chap. HT. 336 W. C. L. VAN SCHAIK. Prenons un tuyau de taille assez menue, l’Ut2 d’un violon- prestant, et faisons-le octavier. Dans l’intérieur, un peu au- dessus du biseau, plaçons une lame de plomb convenablement inclinée ; le son fondamental se rétablit, et — la position C se présente maintenant au côté intérieur de la lèvre supérieure. Notre point de vue est ainsi confirmé par l’expérience. On peut encore remarquer que les impulsions du courant d’air d’un tuyau octaviant causeront toujours une résonnance correspondant au son fondamental, quoique celle-ci soit peut- être trop faible pour être entendue ; c’est là, en effet, l’action de tout souffle qui se produit près de la bouche. Cependant, les conditions sont telles que l’onde sonore correspondant à ce ton ne règle plus les vibrations du courant, qui est main- tenant recourbé par les vibrations de l’octave. Mais la résonnance en question, bien que très-faible, tendra toujours à mettre en train le mécanisme aérien, comme nous l’avons vu avec le tuyau sensitif ; et si les conditions sont telles qu’elles permettent le développement de ce mode d’oscillation, le son fondamen- tal sera restauré. Ceci peut indiquer en gros l’explication du phénomène qu’on observe en approchant une lame, ou simplement le doigt, de la bouche d’un tuyau octaviant. L’octaviation d’un tuyau consiste dans la succession de divers états de vibration du système, et les expériences décrites dans ce chapitre ont montré de quelle manière s’opère cette suc- cession. Or, pendant le développement de cette série, un de ces états peut être rendu stable par quelque moyen mécanique, tel que le frein fixé au tuyau. L’existence d’un type particulier de vibration est ainsi assurée. C’est un cas analogue à celui que nous rencontrons dans plusieurs phénomènes physiques. SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 337 APPENDICE AUX CHAP. III et IV. Sur la vibration des anches. En observant le mouvement des appareils décrits dans ces chapitres, on est conduit à supposer que ce sont les mêmes forces qui entretiennent la vibration de la sirène vibrante et celles des anches battantes et libres dépourvues de résonnateur. Il a été supposé déjà que le mouvement de ces anches se déduit es- sentiellement d’un principe analogue à celui de Bernouilli. En effet, M. H. Smith dit: „The action of this instrument (le hautbois) is best explained under the law of least pressure,... „we hâve an air current passing between two sensitive reeds „down a narrow strawlike tube into the main body of the pipe. „The velocity in the little tube im médiate ly causes least pres- sure in the interior, efïecting approach and closure of the „pair of liplike reeds and so on.” ( Nature 1873.) Les vibrations des anches ordinaires sont expliquées de deux manières différentes. D’abord, on rencontre des théories suivant lesquelles la force motrice (les résistances exceptées), résultant de la pression de l’air et de l’élasticité du ressort, dépendrait essentiellement de la position du système vibrant et non du sens du mouvement ; une telle hypothèse n’est pas admissible. Les autres théories, qui regardent les ondes sonores traver- sant l’air, ne présentent pas ce défaut ; c’est aussi le cas pour l’explication proposée dans ce mémoire, en faveur de laquelle parlent les expériences suivantes. En premier lieu, nous dirigeons un courant plan d’air sur une anche libre ou battante, de façon qu’il passe entre la languette et la gouttière; nous trouvons que l’anche est très bien mise en vibration. L’expérience réussit aussi avec une anche d’harmonium (voir la fig. 61), et le courant d’air plan L peut avoir une direction parallèle à celle de la monture ; les vibrations se produisent également si la languette porte sur sa face supérieure un prisme en métal. Chaque fois que 338 W. C. L. VAN SCHAIK. nous donnons le vent, la fente entre la monture et la languette se rétrécit. En second lieu, nous fixons une anche d’harmoninm sur un petit sommier, de manière que la face „intérieure” de la lan- guette (c.-à-d. celle qui est dirigée vers la monture) se pré- sente à l’extérieur et que nous puissions la voir. La direction des courants d’air sera rendue visible au moyen de poudre de magnésie ou au moyen de duvet fixé aux bords de la monture et sur la languette. Nous conduisons l’air à l’appareil, qui sonne à l’Ut,, et ob- servons au vibroscope accordé à un ton un peu plus bas que Ut_i, de sorte que la succession des phases observées sera directe. Chaque fois que la languette se meut hors de la monture, c.-à-d. dans la direction BCA de la figure 61, nous voyons que le courant passant par l’ouverture suit la direction p, qui fait un atigle d’environ 60° avec la languette; dès que celle-ci va retourner (en A), le courant d’air passant prend une di- rection g, de sorte qu’il s’incline plus vers la languette et fait avec elle un angle d’à peu près 20°; c’est ce qu’on pouvait prévoir. Or, on comprend que dans ce dernier cas l’éva- cuation produite par le courant sera un peu plus grande, c.-à.-d. que la pression aérodynamique sur la face intérieure de l’anche sera plus petite que dans le premier cas; pour cela, on n’a qu’à se rappeler les expériences du Chap. III et spécialement l’expérience avec le prisme de la figure 11. C’est le changement de l’intensité et de la direction du courant d’air passant qui fait que, pour le mouvement A C, la pression résultante dans le sens du mouvement sera plus grande que la pression résultante qui s’oppose au mouvement CA. Dans un tuyau à anche, les ondes sonores peuvent influencer le courant injecté, comme il suit de l’expérience suivante. Je prends une sirène vibrante à ressort en acier d’une épaisseur de 3 mm., et j’ajuste l’appareil de manière qu’il ne parle que très difficilement par la vapeur d’eau à la pression de 5 at- mosphères. Au-dessus de cet appareil je dispose un tuyau SUR LA PRODUCTION DES SONS DANS LES TUYAUX, ETC. 339 conique en zinc, d’une hauteur de 108 cm., de sorte que le son fondamental de ce résonnateur soit à peu près égal à celui de la sirène, c. à. d. Ut2. Aussitôt qu’on ouvre le robinet, le jet de vapeur fait résonner un peu le tuyau conique, et en même temps la sirène parle et on entend le son intense de ce tuyau à anche. Cela s’explique de la manière suivante. Le jet de vapeur produit d’abord dans le résonnateur une onde de faible intensité; les condensations et dilatations qui se rapportent à cette onde communiquent au courant une certaine périodicité, de sorte que les faibles impulsions, que le ressort reçoit déjà du courant, acquerront la période indi- quée par le résonnateur. L’expérience a ainsi une certaine analogie avec celle du tuyau sensitif. Je rappellerai encore l’intéressante sirène construite par lord Rayleigh '). Elle consiste essentiellement en un rectangle de laiton, qui peut tourner autour d’un axe passant par les milieux de deux côtés parallèles, et fermer ainsi une ouverture de la même forme. La section se voit dans la figure 62. Amène-t-on l’air d’un côté de l’appareil, le rectangle prend une position telle qu’il ferme l’ouverture autant que possible. Ordinairement on observe déjà des vibrations, et si l’on imprime à la plaque un mouvement rotatoire, elle continuera à tourner. En donnant au rectangle la position arbitraire montrée dans la figure, une partie du courant, dirigé par exemple de haut en bas, passera sur la surface inférieure de la plaque et en- traînera en partie l’air qui se trouve au-dessous de celle-ci. L’entraînement sera le plus grand en a;, c’est-à-dire près du bord le plus élevé du rectangle; car en x la surface du courant vient raser la face inférieure (postérieure), de sorte qu’il se produit en ce point l’évacuation la plus forte, comme il suit de l’expérience avec le prisme de la figure 11. Par là se comprend non seulement un certain mouvement rotatoire de l’air, mais aussi le signe du moment des forces qui déter- 23 ') Phil Mag. 1880, page 281. Archives Néerlandaises, T. XXV. 340 W. C. L. VAN. SCHAIK. SUR LA PRODUCTION, ETC. minent la position de l’équilibre. Cette position ressemble essentiellement à celle d’une plaque ou d’un disque soutenu en son centre et placé dans un courant indéfini '). Un tel disque, placé dans un résonnateur, se dirige normalement aux vibrations de l’air, ainsi qu’il a été découvert par lord Rayleigh. Les vibrations de l’air se comportent comme un courant de sens alternatif ; le résultat peut se comprendre par l’évacuation latérale qui se produit toujours sur la face postérieure et tout près du bord que le courant rencontre le premier; d’ailleurs, le signe du moment statique sera indépendant du sens du courant aérien, comme il suit de l’explication ci-dessus. Quant à la rotation de la sirène en question, elle me semble pouvoir être expliquée par le principe des anches libres, spé- cialement des anches dont le bout passe entièrement par la monture, comme c’est souvent le cas pour les anches des harmoniums américains. En effet, il se présente ici une ana- logie suivant laquelle le rapport existant entre la sirène de Rayleigh (fig. 62) et l’anche de l’harmonium (fig. 61) est le même que celui entre le moulinet aérodynamique (fig. 5) et la sirène vibrante (fig. 18). 1) Comparez sur ce sujet l’intéressante étude de M. Hagen : Uebcr die Stellung welche drehbare Plansclieiben in strômendem Wasser annehmen. Berlin 1878. RECHERCHES SUR UN MODE DE DÉNITRIFICATION ET SUR LE SCHIZOMYCÈTE QUI LA PRODUIT, PAR E. GILTAY et J. H. ABERSON. A l’occasion d’une étude sur l’action que les bactéries exer- cent dans le sol, nous nous sommes occupés assez longuement de la réduction des nitrates par les schizomycètes. Il n’y a pas encore longtemps que cette action bactérienne est connue tant soit peu exactement. En 1868, M. Reiset 1) attira l’attention sur le fâcheux dé- veloppement de vapeurs nitreuses dans la fermentation alcoo- lique du suc de betterave. Selon l’auteur, ce phénomène avait déjà souvent été regardé comme dû à la réductien de nitrates; mais lui-même ne pouvait partager cette manière de voir, parce qu’alors, à son avis, il serait incompréhensible que l’ad- dition de 2 gr. d’acide sulfurique par litre de jus empêchât infailliblement l’apparition des susdites vapeurs. M. Reiset pensait que le dioxyde d’azote provenait d’ammoniaque, et que l’acide sulfurique ajouté fixait cette ammoniaque, de telle sorte qu’elle ne se laissait plus décomposer. M. Schloesing, toutefois, s’éleva contre cette explication 2). L’un de ses prédécesseurs à l’Ecole des Tabacs, M. Ch. Rey, avait observé que lorsque du jus de tabac fermente en vase clos, il se dégage de l’oxyde d’azote. M. Schloesing, en colla- J) Comptes rendus , T, LXI, p. 227. // u n II h 237 . 20* 342 E. GILTAY ET J. H. ABERSON. boration avec M. Rey, détermina donc la proportion des nitrates dans le jus avant et pendant la fermentation; de ces dosages il conclut que le dégagement d’oxyde d’azote s’accompagne toujours de la disparition de nitrate, et réci- proquement. Quand le jus ne contient pas de nitrate, aucune production d’oxyde d’azote n’a lieu. De l’urine, à laquelle on avait ajouté du nitrate, donna en se putréfiant de l’oxyde d’azote et du dioxyde d’azote. De l’eau sucrée, amenée à fermenter par l’addition d’un peu de fromage, donnait C02, iV, NO et N02 lorsqu’à la solution il avait aussi été ajouté du nitrate, mais seulement CO 2 et H quand le nitrate manquait. Dans des solutions de nitrate où l’on avait mis des débris de plantes, il y eut également décomposition de nitrate aussitôt que la fermentation se fut établie. L’obstacle que la présence d’un acide apporte à la produc- tion de N ou de gaz contenant N, fut reconnu aussi par M. Schloesing. Il n’obtint même jamais la décomposition des nitrates avant que les liquides ne fussent devenus neutres ou alcalins. Son explication, toutefois, est autre que celle de M. Reiset. Il cherche la cause du phénomène dans ce fait que la fermentation s’opère ordinairement dans des milieux neu- tres ou alcalins, et qu’en général les matières organiques fer- mentantes exercent une forte action réductrice. La réduction des nitrates, aux yeux de M. Schloesing, n’était donc pas elle-même un processus de fermentation, mais sim- plement une conséquence d’un pareil processus. En 1873, M. Schloesing J) trouve, dans la terre, une dé- composition de nitrates s’opérant de façon que de l’azote seul est mis en liberté; mais l’action qui avait lieu en ce cas ne consistait pas uniquement en réduction des nitrates, car il se dégageait plus d’azote que le nitrate n’en contenait. En 1875, M. Meusel 2) observa, dans des eaux naturelles, 1) Comptes rendus , T. LXXVII, p. 353. 2) Journal de Pharmacie et de Chimie , 4eSér.,T. XXII, p. 430. SUR UN MODE DE DENITRIFICATION ETC. 343 la formation de nitrites aux dépens de nitrates; il attribue cette transformation à des organismes inférieurs, vu qu’elle est empêchée par l’action de substances antiseptiques. L’apparition du monoxyde d’azote par réduction de nitrates sous l’influence d’un peu de terre, fut constatée aussi, en 1882, par MM. Dehérain et Maquenne. 1 ). En 1879, M. Warington 2) avait publié une étude sur la nitrification. Il en résultait qu’aux dépens du chlorure d’am- monium il peut se former aussi bien du nitrite que du nitrate, en proportions variables. La raison de ces différences lui était restée inconnue: Il présume seulement que „la condition du ferment” y jouait un rôle. M. Duclaux 3) pense à cet égard, en 1883, que là où des nitrites prennent naissance à côté de nitrates, il a dû intervenir aussi bien un ferment nitrifiant qu’un fermant dénitrifiant. Les recherches les plus importantes dont nous ayons à parler sont celles de MM. Gayon et Dupetit 4). Selon ces auteurs, la plupart des microbes possèdent plus ou moins le pouvoir de former des nitrites aux dépens des nitrates. Ils ont même trouvé une bactérie qui, dans un bouillon contenant 1 % de nitrate, réduit tout ce sel à l’état de nitrite. Plus particulièrement, toutefois, ils se sont occupés de la dénitrification dans laquelle il se dégage des produits gazeux. Les décompositions étudiées étaient dues à deux organismes, qu’ils distinguent comme Baderium denitrificans a et Ces organismes furent cultivés surtout dans du bouillon nitraté et dans un liquide nutritif artificiel contenant outre 10 % de nitrate, principalement de l’acide citrique, de l’as- paragine, du phosphate de potasse et du sulfate de magnésie, 1) Comptes rendus , T. XCV, p. 691. 2) Journal of the Chemical Society , Juill 1879. 3) Chimie biologique , p. 714. *) Recherches sur la réduction des nitrates par les infiniment petits. Nancy, Berger-Levrault & Cie, 1886, 344 E. GILTAY ET J. H. ABERSON. puis de petites quantités de chlorure de calcium, de sulfate de fer, de sulfate d’alumine et de silicate de soude, et autant d’ammoniaque qu’il en fallait pour neutraliser le liquide. Le Bacterium denitrificans a, avec le liquide nourricier arti- ficiel, donne toujours, comme produits de décomposition gazeux, de l’azote et du monoxyde d’azote; lorsqu’il n’y a pas d’as- paragine, il se dégage seulement de l’azote; dans le bouillon nitraté il se forme des nitrites, lesquels manquent dans le liquide nourricier artificiel ; cette bactérie agit avec plus de force que la seconde, tout le nitrate du liquide nutritif, dans lequel elle vit, pouvant être décomposé. Le Bacterium denitrificans p ne donne toujours que de l’azote et laisse intact beaucoup de nitrate ; aussi bien dans le bouillon nitraté que dans le liquide nutritif actificiel, il forme des nitrites. Les auteurs expérimentèrent surtout avec la forme a, à cause de son activité plus grande. Une température d’environ 35° C. est très favorable à la dénitrification. L’intervention de l’air diminue la quantité de nitrate qui est décomposée Dans une fermentation épuisée, l’énergie vitale des bactéries décroît très rapidement. En ce qui concerne l’influence de la propor- tion de nitrate, la fermentation dans le bouillon se montrait la plus active lorsque celui-ci contenait environ l°/o de nitrate. L’opération se faisait dans une espèce de petits matras où il ne restait, au-dessus du liquide, qu’une très petite quantité d’air „une quantité absolument négligeable”, selon les auteurs. Sur le rapport dans lequel se forment l’azote et le monoxyde d’azote, différentes circonstances ont de l’influence. La propor- tion de N O était plus forte à 35° qu’à 15°, plus forte en cas d’ensemencement léger qu’en cas de semis abondant, plus forte aussi quand le liquide nutritif était plus concentré. La signification du processus est aussi devenue mieux connue à la suite des recherches de MM. Gayon et Dupetit. Us ont fait voir que leurs bactéries réductrices, en cas de manque d’oxygène, ne se développaient bien que si, outre les autres matières nutritives, il y avait des nitrates dans le liquide. SUR UN MODE DE DENITRIFICATION ETC. 345 La décomposition du nitrate ne pouvait donc être quelque chose de secondaire, un effet accessoire de la fermentation ; elle devait avoir de l’importance pour la vie des bactéries. M. Heraeus ') a étudié l’action de différentes bactéries sur des matières contenant de l’azote. Il en a trouvé deux qui ramenaient l’acide nitrique à l’état d’acide nitreux et d’am- moniaque, l’urée à l’état de carbonate d’ammoniaque ; une troisième consommait les nitrates sans réduction et transformait l’urée en sels ammoniacaux; une autre consommait également du nitrate sans le réduire à l’état de nitrite, mais ne formait pas de sels ammoniacaux aux dépens de l’urée; il y en avait une qui n’exerçait aucune action sur les matières azotées, tandis qu’une autre laissait inaltéré l’acide nitrique, mais transformait l’urée en sels d’ammoniaque. Avec d’autres formes encore, il observa une faible oxydation du carbonate d’ammoniaque. Le fait de la réduction ou de l’oxydation fut trouvé indépen- dant de l’accès de l’air; les bactéries réductrices, dans de minces couches de liquide, ne produisaient toujours que la réduction, jamais d’oxydation. L’action réductrice d’un très grand nombre (32) de mi- croganismes, pTovenant de l’air et de l’eau, fut examinée, en 1888, par M. Frankland 2) Avec aucun d’eux, l’auteur n’ob- tint la réduction complète de l’acide nitrique, et jamais même la réduction n’alla plus loin que la formation d’acide nitreux. L’ammoniaque qui apparaissait était toujours, d’après l’auteur, dérivée de la peptone du liquide nourricier. La réduction fut reconnue indépendante de l’accès ou de l’exclusion de l’air. Nos propres recherches ont porté sur l’action dénitrifiante d’une espèce de bactérie qui dans nos alentours est souvent très généralement répandue, tant dans le sol que dans l’air. Nous avons isolé ce schizomycète de la terre, par la mé- 1) Zeitschrift fur Hygiene, herausgegeben von Dr. R. Koch und, Dr. C. Flügge, T. I, 1886, p. 193—231. 2) Journal of the Chemical Society , p. 373 — 391, 346 E. GILTAY ET J. H. ABERSON. thode habituelle, au moyen de cultures gélatineuses. La masse nourricière consistait le plus ordinairement en une infusion à 0,2 pour cent de terre dans l’eau, mêlée avec 10 % de gélatine. On peut toutefois employer également bien du bouillon gélatine ordinaire; dans l’une et l’autre masse nourricière le champignon se développe en colonies de même aspect. Pour le recueillir de l’air, nous abandonnions librement à lui-même, dans un laboratoire de l’Ecole d’agriculture de Wageningen, du liquide nourricier contenant des nitrates. La fermentation dénitrifiante s’établissait-elle dans ces con- ditions, la bactérie active était obtenue à l’état de pureté de la même manière que lorsqu’elle avait été extraite du sol. Nous parlerons d’abord de la forme extérieure de ce cham- pignon, auquel, pour abréger, nous donnerons un nom, celui de Bacillus denitrificans. Partons d’une culture en gélatine et infusion de terre. Au moyen d’un fil de platine, préalablement rougi à la flamme, une gouttelette d’une colonie est déposée sur un porte-objet. Comme la bactérie rend la gélatine fluide, le transport se fait très facilement si l’extrémité du fil de platine a été conve- nablement recourbée en anneau Beaucoup des bactéries s’agitent vivement. Même chez celles qui sont immobiles, la forme n’est pas facile à étudier, parce qu’elles tranchent très peu sur le reste du champ. Aussi avons nous, pour notre examen, fait usage surtout de préparations colorées par la fuchsine. La fuchsine s’emploie en solution aqueuse étendue ; nous laissons agir celle-ci sur les bactéries pendant 1 3 jours. L’étude des préparations se faisait toujours avec un objectif apochro- matique de Zeiss à immersion dans l’huile, de 2mm de distance focale et de 1.30 d’ouverture numérique, et avec les oculaires à compensation qui se rapportent aux lentilles apochromatiques. La forme qu’on rencontre le plus communément est celle de bâtonnets doubles, tels que les fig. 1, 2 et 3 (PI. IX) les représentent en contour. La longueur totale du bâtonnet double est d’environ L<,5 à 3.". Les deux articles ne se trouvent or- SUR UN MODE DE DENITRIFICATION ETC. 347 dinairement pas dans le prolongement l’un de l’autre, de sorte que l’ensemble paraît plus ou moins courbé. L’épaisseur de bâtonnets est d’environ (V,5. Outre ces bâtonnets doubles, on rencontre aussi des bacilles simples. Les plus petits de ceux-ci sont longs d’environ 1^ (fig. 4), les plus grands atteignent une longueur de près de 1^,5 (fig. 5 et 6). Parmi ces derniers, toutefois, il y en a beaucoup qui montrent déjà des indices de division. Dans quelques cas, on trouve des filaments composés de plus de deux articles (fig- 7, 8). Lorsque les bâtonnets doubles unis bout à bout présentaient tous les deux une courbure mani- feste, nous avons toujours vu celle-ci dirigée en sens différent. Dans les liquides que nous avons employés, et dont il sera parlé plus loin, la bactérie acquiert une forme ressemblant sous beaucoup de rapports à celle qui vient d’être décrite. Ici également, on trouve des bâtonnets simples (fig. 9, 10, J 1), qui parfois sont notablement plus épais à une extrémité qu’à l’autre; les formes les plus fréquentes sont de nouveau des bâtonnets doubles (fig. 12, 13, 14) et l’on rencontre aussi des doubles bâtonnets doubles (fig. 15, 16), où toutefois les sépa- rations des cellules ne sont souvent qu’indistinctement visibles. Mais les dimensions ne sont pas les mêmes que chez les*bac- téries développées dans l’infusion de terre gélatinée. En pre- mier lieu, ces bactéries sont ordinairement plus longues : les bâtonnets simples atteignent, par exemple, plus de 2«, les bâtonnets doubles de 3(< à 4^,5 ; ensuite, l’épaisseur est moins uniforme chez les différents individus, comme on peut s’en assurer en comparant les fig. 14 et 15 aux fig. 9, 10, 1 2 et 13. Une première question qui se présente, à l’occasion de cette description, est celle de savoir si notre bactérie est morpho- logiquement identique avec celle de MM. Gayon et Dupetit, la seule bactérie dénitrifiante qui, à notre connaissance, ait été décrite avec soin. En ce qui concerne l’épaisseur, il y a accord; celle-ci, en effet, est de O7, 4 — 0W,6 pour le Bacterium denitrijîcans «, de 348 E. GILTAY ET J. H. ABERSON. 0,5 — 0M,7 pour le B. denitrificans p de Gayon et Dupetit, et de 0W,4 — 0-a,7 pour notre bacille. Il y a similitude aussi sous le rapport de la difficile visibilité des bactéries non colorées. Mais l’accord n’existe plus quant à la longueur. MM. Gayon et Dupetit ont donné pour celle-ci 2 à 4a. Nous aussi, à la vérité, nous trouvons des filaments de cette longueur; mais, pour beau- coup de ceux-ci, il est douteux s’ils ne sont pas composés de 2 cellules, et la longueur la plus ordinaire des filaments qui sont indubitablement des bâtonnets doubles s’élève pré- cisément à 2 — 4.w. Il est certain, en outre, que quantité de nos bâtonnets ont une longueur notablement moindre que 2^. La fi- gure qui accompagne le Mémoire de MM. Gayon et Dupetit, figure faite d’après une photographie, est trop peu nette et à grossisse- ment trop faible pour donner des éclaircissements suffisants. Nos figures ont été exécutées avec soin, à l’aide de la chambre claire, d’après des préparations colorées par la fuchsine. L’emploi de la chambre claire, pour le dessin des bactéries, paraît être peu usité ; pourtant, avec les moyons appropriés, il est très possible et très recommandable. En premier lieu, il faut naturellement un système fortement grossissant. Nous nous sommes servis, comme il a déjà été dit, de l’objectif aprochromatique de Zeiss à immersion homo- gène, de 2mm de distance focale et de 1,30 d’ouverture. Quand cet objectif était employé avec l’oculaire à compensa- tion 18, l’image projetée sur la table au moyen de la chambre claire était grossie 2500 fois. Une amplification aussi consi- dérable ne fait pas, il est vrai, voir plus que ce qu’on peut déjà observer à un grossissement beaucoup moindre *);mais, lorsqu’il s’agit de dessiner de très petits objets, un pareil surgrossissement offre une grande commodité. Pour les objets i) Voir les importants résultats, encore trop peu connus, des recherches de M. Abbe : Beitràge zur Théorie des Mikroskopes und der mikrosko- pischen Wahrnehmung , dans Max Schultze, Archiv. für mikroskopische Anatomie , T. IX, 1873. Pour un exposé succinct, on peut consulter: E. Giltay, Sept objets regardés au microscope , Leide, E. J. Brill, 1890, septième objet. SUR UN MODE DE DÉNITRIFICATION ETC. 349 tels que des préparations fortement colorées de bactéries, son usage est d’ailleurs sans inconvénient, vu que ces préparations permettent un éclairage très intense. Cherche-t-on maintenant, sur du papier éclairé de la ma- nière ordinaire, à suivre avec un crayon les contours des bac- téries, on y éprouve une grande difficulté, parce que la pointe du crayon tranche trop peu sur le reste du champ. Il est très facile, toutefois, de parer à cet inconvénient, en plaçant tout près du papier une lampe vivement éclairante On a soin d’intercepter, à l’aide d’un écran, la chaleur rayonnante, qui pourrait gêner pendant l’exécution du dessin. Le contraste entre le papier et la pointe du crayon devient alors très marqué. A la vérité, l’image du papier fortement éclairé rend moins distincte l’image des bactéries, mais un léger défaut de netteté se supporte beaucoup mieux chez l’objet à calquer que chez la pointe du crayon. En tout cas, il est maintenant facile de trouver, par le réglage de l’intensité lumineuse du papier, le point optimum, où le crayon se détache d’une manière suf- fisante, tant par rapport aux bactéries que par rapport au reste du champ 1 ). Après que le contour a été tracé, il est bon de déplacer légèrement le papier, de façon qu’en se servant de la chambre claire on voie l’un à côté de l’autre l’objet et le dessin, puis de les comparer entre eux. Cette comparaison gagne consi- dérablement en sûreté lorsque la figure a été dessinée tout près du bord du papier. Le petit glissement à imprimer à celui-ci peut alors se faire de telle sorte que la rétine, à l’en- droit où tombe l’image de la bactérie, ne reçoive pas d’image du papier. En ce cas, la grande clarté de l’image du papier ne vient pas nuire à l’observation de l’objet lui-même. L’objet i) "Voir, pour des détails plus précis concernant le réglage de l’intensité lumineuse dans l’emploi de la chambre claire: E Giltay, Inleiding tôt hel gebruik van den microscoop , Leiden, E. J. Brill, 1885, p. 187 et suiv., ou bien: Théorie der Wirkung und des Gebrauches der Caméra lucida, von Dr. E. Giltay, Zeitschrift fur wissenschaftliche Mikroskopie; Bd. I, p.ll etsuiv. 350 E GILTAY ET J. H. ABERSON. et le dessin se voient donc tous les deux très nettement et se prêtent à une comparaison minutieuse ; le dessin peut être corrigé jusqu’à ce qu’il présente avec l’objet le degré d’accord nécessaire. En ce qui concerne le mode de culture, nous avons déjà dit comment nos cultures pures ont été obtenues. Comme milieu liquide, nous avons employé surtout le bouillon et un liquide nourricier artificiel, préparé d’abord suivant le précepte de MM. Gayon et Dupetit, ensuite sous deux formes modifiées. La première de celles-ci, qui sera aussi la première dont nous dirons comment les bactéries s’y comportent, contenait, par litre d’eau, 2 grammes de nitrate de potasse, 1 gr. d’as- paragine, 2 gr. de sulfate de magnésie, 5 gr. d’acide citrique, 2 gr. de monophosphate de potasse, 0,2 de chlorure de cal- cium et une couple de gouttes de perchlorure de fer. L’acide était neutralisé par l’addition de potasse. La, modification apportée au liquide nourricier consistait donc essentiellement dans l’emploi de moins de nitrate et dans la neutralisation par la potasse au lieu de l’ammo- niaque. Les motifs de ces modifications étaient, en premier lieu, que 10 % de nitrate dégageaient trop de gaz, ce qui présentait des inconvénients eu égard à la capacité de no- tre étuve pour cultures ; en second lieu, que, pour mieux pouvoir étudier le changement subi par le N du nitrate lors de la fermentation, nous ne voulions pas introduire dans le processus, par l’addition d’ammoniaque, des complications éventuelles. Pour cette même raison, l’asparagine aussi fut plus tard remplacée par la glycose, comme nous le verrons. Le mode de préparation du liquide nourricier, mode qui n’est pas indifférent au point de vue de l’obtention d’une dissolution limpide et incolore, était le suivant. Dans un pre- mier vase à précipité le nitrate de potasse et l’asparagine étaient dissous dans environ 250cm,c d’eau; dans un second vase, les autres matières, dans environ 500cmc d’eau. Dans SUR UN MODE DE DÉNITRIFICATION ETC. 851 ce dernier vase on neutralisait d’abord l’acide citrique par la lessive de potasse, puis les deux liquides étaient mélangés dans un matras de jauge, refroidis jusqu’à 15° C. et portés, par l’addition d’eau, au volume de 1 litre. Lorsque la dissolution du nitrate de potasse et de l’aspara- gine est opérée simultanément avec celle des autres sels, une décomposition se produit entre l’acide citrique et le nitrate de potasse, et l’acide nitrique mis en liberté exerce une action oxydante sur les matières organiques du mélange. Le liquide se colore en brun et contient de l’acide nitreux. Le second liquide nutritif artificiel renfermait, au lieu d’as- paragine, de la glycose, à savoir, 2 grammes par litre. Dans ce liquide surtout, il faut neutraliser très exactement par la potasse, vu que le moindre excès de celle-ci détermine de l’humification quand on stérilise le liquide. A ces matières nutritives liquides nous avons ordinaire- ment, surtout la seconde année de nos cultures du Ba- cillus denilrificans, ajouté un peu de carbonate de chaux pul- vérisé. La première année, une action réductrice suffisante avait à la vérité été obtenue même sans cette addition; plus tard, néanmoins, nous en avons presque toujours fait usage, parce que la réduction en était manifestement favorisée. Que le carbonate de chaux ne joue pas un rôle indifférent dans la vie des schizomycètes, c’est ce qui ressort encore du fait que, dans le dépôt, la bactérie se développe en application directe sur les petits cristaux de ce carbonate 1 ), comme le représente la fig. 17. Dans cette figure, plusieurs bacté- ries sont placées plus ou moins obliquement par rapport i) La fig. 17 est dessinée à trop petite échelle pour que nous puissions répondre, au même degré que dans les fig. 1 — 16, de la parfaite exacti- tude des formes et des dimensions des bâtonnets. Aussi est-elle destinée seulement à montrer la situation relative des bactéries et des cristaux. — Un recouvrement du même genre a été observé par M. Winogradsky, dans ses cultures pures de bactéries nitrifiantes, par rapport à de petits cristaux de carbonate basique de magnésie (Annales de V Institut Pasteur, 1890, p. 226) 352 E. GILTAY ET J. H. ABERSON. aux arêtes des cristaux; mais cela paraît tenir à ce que, pendant la préparation, il y en a toujours quelques-unes qui sont dérangées de leur position primitive. Nos premières cultures datent de l’hiver de 1889 — 1890. Elles n’eurent que peu de succès. A l’origine, il était facile d’obtenir la réduction. Nous n’avions qu’à abandonner un peu de liquide nutritif au contact de l’air, pour voir la fer- mentation apparaître au bout de quelques jours. Elle s’établissait encore plus rapidement quand le liquide nutritif recevait une addition de terre, et les cultures pures dans la gélatine se faisaient aussi sans aucune peine. Mais, avant que toutes les difficultés qui se présentaient dans l’étude quantitative du pro- cessus de réduction eussent été surmontées, nos cultures se mirent à fermenter de moins en moins, et finalement elles ne fermentèrent plus du tout. Ni par l’ensemencement avec la terre, ni par l’exposition à l’air, une réduction tant soit peu notable ne put plus être provoquée. D’un grand nombre de manières, entre autres en apportant à nos liquides des modi- fications très variées, nous cherchâmes à obtenir de nouveau des cultures douées de l’activité primitive. Toutes ces ten- tatives échouèrent. Aussi, des résultats trouvés à cette époque, nous ne mentionnerons qu’un seul. Quand par une culture on fait passer sans interruption un fort courant d’air stéri- lisé, nulle décomposition de nitrate ne s’opère. MM. Gayon et Dupetit avaient d’ailleurs déjà reconnu que lorsque la culture a lieu dans une mince couche de liquide nutritif, la dénitrification diminue dans une très forte mesure, bien que, de cette manière, une partie du nitrate soit encore toujours décomposée. Dans l’hiver de 1890 — 1891, nous fûmes plus heureux. Au commencement du mois de novembre dernier, nous pûmes de nouveau obtenir facilement en culture pure, tant aux dépens de l’air que de l’eau, une bactérie fortement dé- nitrifiante, dont l’aspect extérieur concordait avec celui du microbe que nous avions cultivé l’année précédente. SUR UN MODE DE DÉNITRIFICATION ETC. 353 Nos expériences portèrent principalement sur la descendance d’une culture pure qui avait été obtenue d’un tube à liquide nutritif dans lequel la dénitrification était apparue à la suite de l'exposition à l’air. Outre cette série, il y en avait toutefois encore d’autres en culture. Chaque jour, le plus souvent, une nouvelle culture était faite dans chacune des séries ; la semence était presque toujours fournie par la culture du jour précédent. Une culture en liquide nourricier contenant du nitrate était ordinairement trouble en moins de 24 heures et avait alors déjà commencé à dégager du gaz; au bout de deux fois 24 heures, la fermentation avait atteint son maximum. Pour plus de sûreté, on intercalait de temps en temps entre les cultures en milieux nutritifs liquides, une culture sur gélatine. Probablement, toutefois, cette mesure de précaution a été superflue. Jamais, en effet, nous n’avons pu découvir de cette manière des impuretés dans nos cultures. Les fermentations avaient lieu dans une étuve d’élevage, où la température, de 30 u C. pendant le jour, s’abaissait or- dinairement la nuit jusqu’à 10° — 20° C. Bien que, dans ce second hiver, nous ayons pu accomplir au moins une partie nettement circonscrite de la tâche que nous nous étions imposée, le cours des recherches fut pourtant interrompu une couple de fois par un affaiblissement con- sidérable de l’énergie des fermentations. Mais, contrairement à ce que nous avions éprouvé l’hiver précédent, ces pertur- bations furent simplement passagères. La cause nous en est d’ailleurs restée inconnue, tout comme celle des premières. Pour l’étude quantitative des fermentations nous avons fait usage, après divers essais, de petits matras d’une forme par- ticulière (voir PL IX, fig. 18) que M. Geisler, de Bonn, construisit pour nous avec son habileté bien connue. La partie A a une capacité d’environ 100 cmc. Elle porte latéralement une tubulure b, munie d’un petit robinet k. En haut, elle présente un col, sur lequel s’adapte exactement, usé à l’émeri, un petit tube à ampoule F. Ce tube est à 354 E. GILTAY ET J. H. ABERSON. son tour recouvert d’un bouchon rodé, qui se termine en un tube plus étroit b'. Sur ce dernier s’adapte un tube abducteur en caoutchouc à parois épaisses, à l’autre extrémité duquel se trouve encore un petit tube recourbé b". Le matras A est rempli du liquide nitritif, ordinaire- ment jusqu’à la ligne pointillée 1. A l’aide du pycnomètre, on détermine exactement le poids spécifique du liquide nu- tritif, de sorte que le volume de celui-ci, introduit dans le matras, se trouve par la pesée. L’appareil entier est stérilisé dans un courant de vapeur d’eau, après qu’un tampon de ouate a été lié sur le petit tube b". Lorsque le matras a été ensemencé, on ajoute au liquide nutritif un peu de carbonate de chaux stérilisé. Comme nous nous proposions d’étudier la fermentation surtout en cas d’ab- sence ou du moins d’accès très faible de l’oxygène, on ache- vait de remplir le matras, jusqu’à la ligne pointillée 2, avec de l’huile stérilisée. Le reste de l’appareil était laissé rempli d’air; nous verrons tout à l’heure comment on déterminait le volume de celui-ci. Le gaz emmené par le tube abducteur est recueilli dans un eudiomètre, sur le mercure. Lorsque la fermentation est terminée, tout le gaz encore contenu dans l’appareil en est chassé par l’ébullition dans un bain de chlo- rure de calcium, et également recueilli sur le mercure. Pour empêcher que dans cette opération du gaz ne s’échappe, les différentes parties de l’appareil sont maintenues serrées les unes sur les autres par des ressorts à boudin en cuivre, atta- chés en dessous et en b'. L’ampoule V servait à prévenir que durant l’ébullition le liquide nutritif dilaté ne rencontrât subitement le tube abducteur très étroit, à obtenir par con- séquent une ébullition paisible, et, en outre, à empêcher qu’une trop grande quantité du liquide ne passât dans l’eudiomètre. Finalement, on analyse aussi le gaz chassé par l’ébullition et, au besoin, on soumet encore le liquide à un examen ultérieur. Pour savoir en quelle proportion les gaz recueillis ont été développés par la fermentation, et en quelle proportion ils SUR UN MOUE DE DÉNITRIFICATION ETC. 355 existaient déjà dans l’appareil avant ce processus, il faut na- turellement déterminer d’abord la capacité de l’espace conte- nant de l’air, puis la quantité de gaz qui se trouve en dis- solution dans le liquide nutritif. La capacité de la partie de l’appareil non remplie dë liquide se trouvait en introduisant d’abord de l’eau dans le matras jusqu’à la seconde ligne pointillée, et en y faisant ensuite arriver de l’eau, à l’aide d’une burette reliée au tube b , jusqu’à ce que l’appareil en fût entièrement rempli, l’eau affleurant à l’embouchure du tube b". Quand l’opération est exécutée avec soin, les résultats des déterminations répétées concordent toujours jusqu’aux dixièmes de centimètre cube. La quantité de gaz que le liquide nutritif tient en dissolution dépend du temps écoulé entre la stérilisation et le début de la culture. A raison de cette circonstance, on détermina pour quelques matras, qui avaient été remplis et stérilisés de la manière ordinaire, mais qui ensuite étaient restés non ense- céens pendant des temps inégaux, la quantité de gaz dissous ; des résultats ainsi obtenus on déduisit, par le calcul, les don- nées nécessaires. Le gaz recueilli pendant la fermentation consistait toujours en un mélange d’azote, d’acide carbonique et d’oxygène. De l’absence d’hydrogène nous nous sommes assurés en faisant jaillir dans le gaz, préalablement mêlé d’oxygène, des étincelles électriques. L’absence d’hémioxyde d’azote fut con- statée, dans quelques analyses, en abandonnant, le gaz dégagé après absorption de l’acide carbonique par la potasse solide, au-dessus de l’alcool, dans lequel le gaz hilarant se dissout facilement. La preuve que le gaz ne contenait pas de dioxyde d’azote résultait d’abord de ce qu’il était incolore et ensuite de ce qu’un peu d’eau, qui avait été quelque temps en contact avec lui, ne donnait pas de réaction avec la diphénylamine ; le monoxyde d’azote aurait été converti par l’oxygène en dioxyde, de sorte que ce gaz non plus n’existait pas dans le mélange. L’oxygène qui au début d’une culture se trouve dans l’ap- Archives Néerlandaises, T. XXV. 24 356 E. GILTAY ET J. H. ABERSON. pareil, au-dessus du liquide , ne se retrouve par tout entier à la fin de l’expérience. Nous avons reconnu que cette absorption d’oxygène doit avoir été produite, au moins en très grande partie, par l’huile, et non par le liquide que celle-ci recouvrait. En effet, lorsque dans notre étuve nous placions des eudiomètres qui contenaient, au-dessus du mercure, ou bien une petite couche d’huile, ou bien une couche semblable recouvrant un peu de lessive de potasse et d’acide pyrogallique, la différence en absorption d’oxygène était une quantité qui tombait entre les limites des erreurs d’observation. Pour déterminer la quantité d’azote, l’acide carbonique et l’oxygène étaient absorbés par la lessive de potasse et par l’acide pyrogallique. Après l’ébullition, le liquide nutritif était filtré, puis la dissolution limpide était essayée quant à la présence de l’am- moniaque par le réactif de Nessler, quant à celle de l’acide nitreux par le sulfate de naphtylamine et l’acide sulfanilique, et quant à celle de l’acide nitrique par la diphénylamine. Dans cette dernière réaction, le mélange avec une quantité quadruple d’acide sulfurique doit être opéré dans un vase for- tement refroidi, parce que, sans cette précaution, le liquide se colorerait en noir. Pour les fermentations qui furent étudiées quantitativement, nous avons d’abord fait usage du liquide nourricier contenant de l’asparagine et 2 grammes de nitrate (voir p. 350). Avec ce liquide furent obtenus les résultats suivants : Liquide nourricier contenu dans les matras, en cmc. Analyse 1. Analyse 2. Analyse 3. Analyse 4. 97 94,1 92,4 101,5 De ce contenu on obtint successivement en azote, réduit à 0° et à 760mm de pression barométrique: SUR UN MODE DE DENITRIFICATION ETC. 357 a. dans le gaz échappé du matras durant la fermentation: 17,75 18,99 19,02 19,36 , b . par l’ébullition du contenu du matras: 15,98 18,29 15,46 15,62 , soit, ensemble: 33,73 37,28 34,48 34,98 . Azote des gaz contenus dans les appareils, réduit à 0° et 760mm de pression barométrique: a. dans l’air au-dessus du liquide: 11,85 12,98 11,85 11,94 , dissous dans le liquide : 0,48 0,35 - 0,25 0,41 , soit, ensemble : 12,33 13,33 12,10 12,35 , de sorte que, pour la quantité d’azote dégagée par la fermentation, on trouve : 21,40 23,95 22,38 22,63 L’azote du nitrate contenu dans le liquide nourricier s’éle- vait, sous forme de gaz à 0° et 760mm, à: 21,44 20,97 20,42 22,43 . La fermentation achevée, le liquide nourricier ne contenait dans aucun des appareils de l’acide nitrique ou de l’acide ni- treux, mais dans tous de l’ammoniaque. Le nitrate ayant donc été partout décomposé complètement, et la quantité de l’azote dégagé par la fermentation étant dans trois des quatre cas notablement supérieure à celle que pouvait fournir le nitrate, il faut qu’une partie de cet azote provienne de l’asparagine, Mais, comme il s’est aussi formé de l’ammoniaque, il reste de l’incertitude quant à la manière dont l’azote du nitrate s’est comporté dans la fermentation. Pour savoir si le nitrate peut se dédoubler de telle sorte que tout son N apparaisse 24* 358 E. GILTAY ET J H ABERSON. à l’état de gaz, nous avons expérimenté aussi avec un liquide nourricier dans lequel le nitrate était la seule combinaison azotée, et où, comme matière organique, se trouvait, outre l’acide citrique, de la glycose. Les résultats ainsi obtenus sont les suivants: Liquide nourricier contenu dans les matras, en cmc. : Analyse 5. Analyse 6. Analyse 7. Analyse 8. 97,4 93,04 93,1 101,6. De ce contenu on obtient successivement en azote, réduit à 0° et à 760mm de pression barométrique: a. dans le gaz échappé du matras durant la fermentation; 18,50 18,22 16,34 19,53 , b. par ] L’ébullition du contenu du matras : 16,26 14,45 16,02 16,33 , soit, ensemble : 34,76 32,67 32,36 35,86 . Azote des gaz contenus dans les appareils, réduit à 0° et à 760mm de pression barométrique: a. dans l’air au-dessus du liquide : 13,40 11,99 11,59 13,42 , /3. dissous dans le liquide: 0,19 0,19 0,21 0,21 , soit, ensemble : 13,59 12,18 11,80 13,63 , de sorte que, pour la quantité d’azote dégagée parla fermen- tation, on trouve: 21,17 20,49 20,56 22,25 . L’azote du nitrate contenu dans le liquide nourricier s’éle- vait, sous forme de gaz à 0° et 760mm, à: 21,52 20,57 20,77 22,45 . SUR UN MODE DE DENITRIFICATION ETC. 359 La fermentation achevée, on ne trouve, dans le liquide nourricier soumis à l'ébullition, ni acide nitrique, ni acide nitreux, ni ammoniaque. A très peu de chose près, la quantité d’azote dégagée par la fermentation concorde maintenant avec la quantité de cet élément contenue dans le liquide nourricier; la différence, en effet, n’est que de 0,4 à 1,1 %. Dans les quatre cas, la première de ces deux quantités est un peu moindre que la seconde. Cela conduirait peut-être à croire qu’il s’était pourtant formé un peu d’ammoniaque, et que celle-ci ne s’était pas retrouvée dans le liquide bouilli parce qu’elle avait passé à la distillation. Mais cette idée ne saurait être admise, vu que, même après des fermentations non étudiées quantitativement et où le li- quide n’avait pas subi l’ébullition finale, la présence de l’am- moniaque ne put jamais être constatée dans ce liquide. Le léger déficit en azote doit être attribué en partie à l’as- similation de cet élément pour la constitution du plasma de la bactérie, et une faible quantité peut aussi s’être échappée par le tube de caoutchouc. De tout ce qui précède, résultent les conclusions suivantes: 1. A Wageningen, dans l’automne de 1889 et de 1890, il se trouvait, très répandue dans la terre, dans l’eau et dans l’air, une bactérie capable de réduire complètement les nitrates. Ce fait nous paraît mériter une mention spéciale, surtout si l’on considère que M. Frankland 1 ), qui pourtant étudia 32 bactéries, recueillies dans l’air et dans l’eau, au point de vue de la décomposition des nitrates, n’en trouva pas une seule qui exerçât une action aussi énergique. Lors même que la décomposition avait lieu, celle-ci, dans les cas où ce point fut examiné, n’alla pas plus loin que la réduction à l’état de nitrite. i) Voir ci-dessus, p. 345. 360 E. GILTAY ET J. H. ABERSON. 2. La bactérie en question, que nous nommerons Bacillus denitrificans tant qu’elle n’aura pu être identifiée positivement avec quelque espèce déjà connue, présente, sous le rapport de la forme, plusieurs analogies avec le Bacterinm denitrificans a et (3 de Gayon et Dupetit ; les données ne permettent pas, toutefois, de se prononcer définitivement au sujet de l’identité morphologique. 3. La présence du carbonate de chaux favorise l’action dé- nitrifiante. Le schizomycète, en se développant, recouvre les petits cristaux du carbonate. 4. La fermentation occasionnée par notre bactérie n’est pas la même que l’une des autres fermentations déjà décrites. Elle se rapproche le plus des décompositions qu’ont étudiées M.M. Gayon et Dupetit. Dans un liquide nourricier contenant du nitrate et de l’as- paragine, le Bacterium denitrificans « de Gayon et Dupetit donnait toujours la décomposition totale du nitrate, sans for- mation d’acide nitreux, et comme produits gazeux l’azote et le monoxyde d’azote: le Bacterium denitrificans (t des mêmes auteurs laissait, dans le susdit liquide nutritif, beaucoup de nitrate inattaqué, donnait toujours du nitrite et, comme pro- duit gazeux, rien que de l’azote. Notre Bacillus denitrificans , au contraire, décompose tout le nitrate, ne forme pas de nitrite et, comme produit gazeux, ne fournit que de l’azote. La question de savoir si tout l’azote du nitrate apparaît sous forme gazeuse, n’est pas facile à trancher quand le liquide nourricier contient de l’asparagine, parce que celle-ci renferme également de l’azote, et parce que. avec elle, la fermentation forme aussi de l’ammoniaque. Mais lorsque l’asparagine est remplacée dans le liquide nourricier par la glycose, on ne trouve pas d’am- moniaque après la fermentation, et la quantité de l’azote dégagé correspond à celle de l’azote du nitrate. En ce qui concerne la signification physiologique du phé- nomène, on est conduit, eu égard à des données thermochi- miques connues, à admettre que la décomposition du nitrate SUR UN MODE DE DENITRIFICATION ETC. 361 est une manifestation dn processus par lequel le Bacillus déni - trificans sait se procurer de T énergie en cas d’accès insuffisant de l’oxygène. Le processus tout entier consisterait alors en ceci, que le schizomycète peut brûler de la matière organique au moyen du salpêtre, en émettant, comme produit accessoire, de l’azote. Cette décomposition fait songer, dans une certaine mesure, à l’explosion de la poudre à canon. Une petite partie du nitrate du liquide nourricier peut, naturellement, fournir aussi l’azote nécessaire à la substance corporelle du champignon. L’explication du recouvrement des particules calcaires par le bacillus reste provisoirement obscure; à moins de supposer notre bacille tellement sensible à toute réaction acide, que le contact direct avec une matière neutralisante lui facilite la vie. r • •••• ■. ^ ! li' ' ' ' ■ w- Pi I I . Arch.Neerl. Tome XXV WBeyerznck dél- it,- latte lïth ■ Berlà/v . Bacillus cyaneo-fuscus. Arth.Neerl T. XXV El. Fig 1 ir.Sc]iaïk.Del. Arc! i .N e erl T. XX Y PI.IV. v. SchatkDel. Utk.fi.J.^qgaept^,BrtaU/. . Avnh.Ncei‘1. T.XXV. Pl.V. v Sckaik Del. Arch.JN e eri . ' l . AA V. 1 '1.V1. v. Schaih.Del. litk.A -J Boqaerts Breda Dedans. .Dehors. mwhhmmbi . /• ■■■■■■■■ MhùkdMtâaerts, Bteedg. jrU'Cii.iYeerj. i,aav, PI. V11J Arcli.Neerl, Tome XXV. PL IX 2. • 3. 7. ‘ 8. » É 1 î 5.. 0 6. r o I ) 0 0 10. ■ 11. 12. 13. 14\ 15. 16 n I 1 0 0 Il ! î (1 u 1 J § 0 Q i J 1) 1-16. 2500 :i 17. Li th.E nir ik & Bing er . ARCHIVES NÉERLANDAISES DES Sciences exactes et naturelles. LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL ET SON APPLICATION AUX CORPS MOUVANTS. PAR H. A. LORENTZ. Introduction. Hypothèses fondamentales . § 1. Dans un des plus beaux chapitres de son Traité de l’électricité et du magnétisme, Maxwell fait voir comment les principes de la mécanique peuvent servir à élucider tes questions d’électrodynamique et la théorie des courants induits, sans qu’il soit nécessaire de pénétrer le secret du mécanisme qui produit les phénomènes. L’illustre savant se borne à un petit nombre d’hypothèses, que tous les physiciens connaissent et dont on me permettra de rappeler ici les principales. Les anciennes théories opéraient avec un ou deux fluides électriques, qui seraient en repos dans les phénomènes élec- trostatiques et dont le déplacement constituerait un courant. Maxwell admet également que les systèmes dont on s’occupe en électrostatique se trouvent en repos et que ceux où il y a des courants sont le siège d’un véritable mouvement ; mais, selon lui, ce dernier n’est pas simplement le déplacement d’une matière électrique et ce qui se passe dans les fils con- ducteurs ne constitue pas le mouvement entier. C’est là un point d’une importance fondamentale. On sait I que Maxwell , en suivant la voie tracée par Faraday , cherche à expliquer par l’intervention du milieu toutes les actions qui Archives Néerlandaises, T. XXV. 25 364 H. A. LÔRENTZ. semblent s’exercer à distance, le milieu étant tantôt l’éther qui transmet les vibrations de la lumière, tantôt un corps, pondérable. Si des fils de métal sont parcourus par des cou- rants électriques, les particules du milieu, ambiant sont ani- mées d’un certain mouvement, que j’appellerai le mouvement électromagnétique et qui consiste probablement en une rotation autour des lignes de force magnétique. Selon Maxwell, la force vive de ce mouvement est précisément l’énergie électromagné- tique dont, indépendamment de toute théorie, les expériences ont révélé l’existence et fixé la valeur et que la théorie répartit d’une manière déterminée sur les différentes parties de l’espace. Remarquons, dès à présent, que dans un même élément de volume un courant électrique et un mouvement électroma- gnétique peuvent exister simultanément. § 2. Dans une autre hypothèse de Maxwell il est question des liaisons entre les différentes parties du système mobile. Figurons-nous un certain nombre de circuits linéaires qui se déplacent d’une manière quelconque et supposons pour un moment qu’il n’v ait aucun courant électrique. Si les fils conducteurs sont entourés d’un milieu pour lequel ils ne sont pas parfaitement perméables, leur mouvement donnera lieu à un déplacement de ce milieu; en outre, dans une théorie générale, il faudrait admettre que des corps quelconques, placés dans le voisinage des conducteurs, peuvent se mouvoir indé- pendamment de ces derniers. Toutefois, pour simplifier, je me bornerai au cas où, tant qu’il n’v a pas de courants, le mou- vement du système entier est connu, lorsque celui des circuits est donné. Si maintenant, sans rien changer au mouvement des con- ducteurs, on y établit des courants électriques, les choses se compliqueront davantage : outre les mouvements qui existaient déjà, ceux que nous avons appelés „ électromagnétiques” prendront naissance. Je désignerai par P les points matériels qui prennent part à ce nouveau phénomène et je supposerai que, pour un certain moment t0, on connaisse la position de chaque la théorie Electromagnétique de Maxwell. 365 circuit et celle de tous les points P. Cela posé, l’hypothèse de Maxwell peut être exprimée en ces termes : En vertu des liaisons qui existent dans le système, les posi- tions des points P à un instant ultérieur t sont entièrement déterminées dès qu’on connaît les nouvelles positions des cir- cuits et, pour chacun d’eux, la quantité d’électricité qui, entre les moments t0 et t, a traversé une section. Cette quantité d’électricité est ici regardée comme une somme algébrique, les signes + et — étant employés pour indiquer si l’électricité se déplace dans un sens ou dans l’autre. Lorsque i est l’intensité d’un courant prise avec un signe qui en déter- mine la direction, la quantité dont je viens de parler peut être représentée par l’intégrale f idt et l’hypothèse elle- J t,0 même revient à ce qui suit: (A). Si deux mouvements différents du système s’accordent en ce qui concerne la position primitive du système tout en- tier, la position finale des circuits conducteurs et les valeurs des intégrales ces deux mouvements conduiront aux mêmes positions finales des points P. Un état de repos peut être envisagé comme un cas parti- culier de mouvement. Or, un tel état, sans aucun courant électrique, peut être substitué à l’un des deux mouvements dont il vient d’être question; pour que cela soit permis, il suffit que dans l’autre mouvement toutes les intégrales J i dt ^s’annulent et que ce mouvement reconduise les circuits à leurs positions initiales. On arrive ainsi à cette conséquence : (B). Si, à la suite de déplacements quelconques, tous les circuits se retrouvent dans leurs positions primitives et que, dans le cours de ces déplacements, chaque section ait été traversée dans les deux directions opposées par des quantités égales d’électricité — c’est-à-dire si pour chaque circuit jidt— :0 25* 366 H. A. LORENTZ. — toutes les particules qui prennent part aux mouvements élec- tromagnétiques se retrouveront clans leurs positions primitives. Du reste, cet énoncé n’est pas seulement une conséquence de l’hypothèse (A); l’inverse a également lieu. Un raisonne- ment bien simple conduit à la proposition (A) si on prend pour point de départ l’assertion (B). Pour abréger ce raison- nement, je désignerai par la lettre U les positions des circuits et par W celles des points P. Remarquons d’abord que la proposition (B) conduit immé- diatement au corollaire suivant: Si, dans un certain mouve- ment, les circuits et les points P ont les positions initiales U et W et les positions finales U' et IF', tandis que les in- tégrales j i.dt ont les valeurs c, le renversement du mouvement des circuits, c’est-à-dire le déplacement U' — ► U , lorsqu’il est accompagné de courants tels que j idt — — e, impliquera nécessairement le déplacement TF' — ► IF. Cela posé, on peut considérer deux mouvements I et II qui commencent avec les mêmes positions U0 et W0 et qui aboutissent, le premier aux positions 17, et B7,, le second aux positions 17, et JF,, l’intégrale jidt ayant, pour chaque circuit, la même valeur t dans les deux cas. Or, en com- mençant par les positions 17, et IF, , on peut d’abord renverser le mouvement I, ce qui rétablit les positions U0 et JF0 , et on peut faire suivre le mouvement II, ce qui conduit aux positions 17, et TF,'. Les circuits se retrouvent alors dans leurs positions primitives 17, et une section d’un d’entre eux a été traversée d’abord par 1a, quantité d’électricité — t et ensuite par la quantité -h t. La proposition (B) exige donc que les positions TF, et TF,' coïncident et voilà précisément ce que Maxwell suppose dans la proposition (^4). Cette hypothèse, qu’on peut à volonté présenter sous l’une ou l’autre des formes (A) et ( B ), a un défaut. C’est qu’il est LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 367 difficile d’imaginer un système matériel dans lequel les choses se passent de la manière supposée. Cependant, elle ne semble contenir rien d’impossible. C’est du reste un point sur lequel je reviendrai. Après avoir posé les principes que je viens de résumer, Maxwell applique les équations de Lagrange ; il arrive ainsi à des formules bien connues pour les forces électrodynami- ques et pour l’induction des courants. Les forces extérieures qui entrent en jeu sont d’abord des forces ordinaires qu’on fait agir sur la matière pondérable des conducteurs, en second lieu les forces électromotrices telles qu’elles existent dans les éléments voltaïques et les couples thermoélectriques, enfin la résistance qui s’oppose au mouvement de l’électricité et qui peut être comparée à un frottement. § 3. Les équations qui déterminent les mouvements de l’é- lectricité dans des corps à trois dimensions ne résultent pas, dans le livre de Maxwell , d’une application directe des lois de la mécanique ; elles reposent sur les résultats qui ont été obtenus pour les conducteurs linéaires. De plus, elles n’ont pas la forme la plus simple que l’on puisse leur donner; il est même difficile d’y voir clair, à cause d’un certain nombre de quantités auxiliaires qu’on en peut éliminer. C’est ce qu’a remarqué, il y a déjà quelques années, M. Heaviside ')• Récemment, M. Hertz 2) a repris le problème; il a établi, d’abord pour des systèmes en repos, et ensuite pour des corps mobiles, un système d’équations, de forme très-simple, qui peuvent rendre compte des phéno- mènes observés. Il y a une différence essentielle entre la méthode de M. *) Heaviside, On the self-induction of wires , dans Phil. Mag ., 5 th ser., vol. 22, p. 118 (1886). 2) Hertz, Ueber die Grundgleichungen der Electrodynamik fur ruhende Kôrper , dans Wied.Ann ., Bd. 40, p. 577 (1890); Ueber die Grundgleichungen der Electrodynamik fur bewegte Kôrper , Wied. Ann., Bd. 41, p. 369 (1890). 368 H. A. LORENTZ. Hertz et celle de Maxwell. M. Hertz ne s’occupe guère d’un rapprochement entre les actions électromagnétiques et les lois de la mécanique ordinaire. Il se contente d’une de- scription succincte et claire, indépendante de toute idée pré- conçue sur ce qui se passe dans le champ électromagnétique. Inutile de dire que cette méthode a ses avantages. Cependant, on est toujours tenté de revenir aux explica- tions mécaniques. C’est pourquoi il m’a semblé utile d’appliquer directement au cas le plus général la méthode dont Maxwell a donné l’exemple dans son étude des circuits linéaires. J’avais encore un autre motif pour entreprendre ces recherches. Dans le mémoire où M. Hertz traite des corps en mouvement, il admet que l’éther qu’ils contiennent se déplace avec eux. Or, des phénomènes optiques ont depuis longtemps démontré qu’il n’en est pas toujours ainsi. Je désirais donc connaître les lois qui régissent les mouvements électriques dans des corps qui traversent l’éther sans l’entraîner, et il me semblait difficile d’atteindre ce but sans avoir pour guide une idée théorique. Les vues de Maxwell peuvent servir de fondement à la théorie cherchée. Toutefois, avant d’aborder les questions qui m’intéressaient plus spécialement, j’ai cru devoir consi- dérer les cas que M. Hertz a aussi étudiés 1 ). 1 ) Après avoir achevé ce Mémoire, j’ai lu une publication récente de M. Boltzmann , intitulée: "Yorlesungen über Maxwell' s Théorie der Elec- tricitâl und des Lichtes ” ( Ier Theil , Ableitung der Grundgleichungen fur ruhende, homogène, isotrope Kôrper ) dont l’objet principal est l’explication mécanique inaugurée par Maxwell. Bien que nous ayons été guidés, M. Boltzmann et moi, par la même idée fondamentale et que plusieurs de nos résultats soient équivalents, nous avons souvent employé des méthodes différentes et les questions que nous avions en vue n’étaient pas en géné- ral les mêmes. LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 369 Le principe de d’Alembert. § 4. Comme je me servirai à plusieurs reprises du prin- cipe de d’Alembert , je commencerai par lui donner une forme propre aux applications spéciales que je me propose. Considérons un système matériel dont les points sont as- sujettis à certaines liaisons, En vertu de ces dernières le système ne peut pas prendre toutes les positions ou configu- rations imaginables, et, une position déterminée étant donnée, les points matériels ne peuvent pas recevoir des déplacements arbitrairement choisis. Je nommerai m, , m,, ... les masses de ces points, xly yly z,, x2, y2, z2, . . . leurs coordonnées, Xti F,, Zlf X2, F2, Z2 . . . les composantes des forces auxquelles ils se trouvent soumis, et je supposerai que toutes les variations infiniment petites ôx , , dytt Szn ôx2y . . . qui peuvent avoir lieu à partir d’une position ^déterminée par xx ,y , , z, , x21y2, z2,... satisfont à un système d’équations homogènes et linéaires: a , d x , H- b , Ô y , 4- c , ô z , 4- a 2 ô x2 + . . . . = 0 \ a ! , ' è x , -h b , ' ô y x H- c , ' ô z , 4- a2 ' ô x2 -h . . . . = 0 . . . . . (1) Les coefficients a, b, c dépendront de la position, c’est-à-dire des coordonnées x , y, z , mais je supposerai que le temps t n’y entre pas explicitement. J’indiquerai par aq, yly zn z2, .... les vitesses et par •xi> zn les accélérations des points matériels dans le mouvement qu’on étudie. Alors le principe de d’Alembert exige que l’on ait: 2 (X d x 4- F ô y 4- Z ô z) = X m ( x ô x 4- y à y 4- z ô z) pour toutes les valeurs des variations qui sont compatibles avec les conditions (1). La dernière formule peut être mise sous la forme: è' A z=z £ m ( x ô x 4- y ô y 4- z ô z), (2) Ô A étant le travail des forces qui correspond aux déplacements virtuels è x, d y, ô z. 370 H. A. LORENTZ. § 5. L’équation renferme seulement les valeurs de ees dé- placements relatives au temps t. On peut cependant attribuer une variation infiniment petite non seulement à la position qu’occupe le système à cet instant, mais aussi aux autres positions qui se succèdent dans le cours du mouvement réel. Les variations des coordonnées doivent dans ce cas être con- sidérées comme des fonctions de t , fonctions que je supposerai continues, et on peut imaginer un mouvement dans lequel le système prend à chaque instant la position variée dont il vient d’être question. Ce nouveau mouvement sera nommé le mouvement varié. La variation que subit une fonction quelconque des coordonnées et des vitesses, si, en laissant le temps con- stant, on passe du mouvement réel au mouvement varié, sera désignée par le signe ô. Mettons l’équation (2) sous la forme: ( . d /*«. *v *v\ . * d Ô x dA=z^2m(xdx -h yoy +zoz) — 2 ÿdjy V dt • ddz , z-di] et représentons par T l’énergie cinétique du système . 2 2’ ^ m (x -+-i/ -f- z ). Comme on a d S x _ • d è' y • d ü z ~Jt=àx>TT = dy’ -Jt=dz’ on trouve „ / • d d x • d Ô y *d ô z\ v „ Vm{xsr+y-w + i-dT )=ST- D’autre part, l’expression 2 m (x Ô x -h y 6 y 4- z Ô z) est évidemment la variation qu’on donnerait à T si on imposait aux vitesses x, y , 2 les variations d x, ô y, d z que subissent en réalité les coordonnées. En indiquant par ô' T cette vari- ation de T, on trouve ÔA = d d’ T d t — â T. (3) LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 371 Dénominations et signes mathématiques employés dans ce mémoire. § 6. a. La direction d’une rotation dans un plan et la direc- tion d’une normale à ce même plan seront dites correspondre l’une à l’autre si le premier mouvement est opposé à celui des aiguilles d’une montre posée sur le plan et ayant le cadran tourné vers le même côté que la normale. b. Les axes des coordonnées, OXi OY , OZ, seront choisis de manière que la direction de OZ corresponde à celle d’une rotation de 90° de OX vers OY. c. Un espace, une surface et une ligne seront désignés res- pectivement par r, (i, et s, les parties infiniment petites dans lesquelles ils peuvent être divisés par dv , da, ds. d. La normale à une surface quelconque a sera toujours dirigée vers un côté déterminé qu’on nommera le côté positif. Dans le cas d’une surface limitée, la direction de la normale et la direction positive le long du contour s seront liées l’une à l’autre par la règle suivante: Dans un point P de la surface, tout près du bord, la direc- tion de la normale doit correspondre à celle de la rotation que subit la ligne PQ si le point Q parcourt dans le sens positif la partie du contour qui se trouve dans le voisinage de P. e. La normale à une surface sera toujours désignée par la lettre n, et une direction quelconque dans le plan tangent par la lettre h. f. Nous aurons à considérer un grand nombre de fonctions qui dépendent des coordonnées x , y , z et peuvent dépendre en outre du temps t. La distribution d’une telle fonction, c’est- à-dire la manière dont elle varie d’un point à l’autre, sera déterminée par des équations de deux sortes, les unes rela- tives aux points de l’espace, c’est-à-dire à tous les points où il n’y a aucune discontinuité, et les autres relatives aux points des surfaces qui séparent deux corps ou milieux différents et où des discontinuités peuvent se présenter. 372 H. A LORENTZ. Pour distinguer dans ces dernières équations les quantités qui se rapportent au premier ou au second corps, on fera usage des indices 1 et 2. Ainsi la continuité d’une fonction (fj sera exprimée par l’équation : 9, = qp2. La normale sera toujours dirigée vers le côté qui est indiqué par l’indice 2. g. Un vecteur sera représenté en général par une lettre grasse et la composante . d’un vecteur A suivant la direction l par le signe A/. Pour connaître la distribution d’un vecteur A il faut que l’on connaisse la distribution des trois composantes A ,, A,,, A*. Un vecteur aux composantes X, Y, Z sera aussi représenté par le signe (A, Y, Z). h. La distribution d’un vecteur A sera dite solénoïdale lorsque dans tous les points de l’espace les composantes sont égales à celles de la vitesse dans un mouvement possible d’un fluide incompressible. Pour qu’il en soit ainsi, il faut que à A a- d A y 0 As “TF- + T7 + ~sT = 0 et (*„). = (AJ,. i. L’intégrale I A ( d, r sera nommée l’intégrale du vecteur A étendue à la surface ■ j. Le signe A aura la signification suivante: v _ D2 O2 O2 A ~ âF*- + + TF"' Je. L’expression M (=) N signifiera que les quantités M et N sont du même ordre de grandeur. LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 373 CHAPITRE I. Mouvements électriques dans des corps qui se trouvent en repos. Valeur de l’énergie cinétique. § 7. Considérons un système quelconque de corps, conduc- teurs ou diélectriques, homogènes et isotropes ou non et remplissant l’espace infini, l’un d’entre eux pouvant être l’éther de l’optique. Dans tous ces corps, même, suivant les idées de Maxwell , dans l’éther, le phénomène qu’on appelle un courant électrique peut avoir lieu. Le courant mesuré en unités élec-, tromagnétiques sera représenté par C, et pour abréger j’écrirai u , v , w, au lieu de C*, Cy, C*. Avec Maxwell je supposerai que la distribution du courant est toujours solénoïdale. Il faut donc que l’on ait: = 0 (4) du d V d W d X d y d Z (C^)j — (Crc)2 (5) § 8. L’explication des phénomènes d’induction au moyen de la masse des particules qui prennent part aux mouvements électromagnétiques constitue un des traits caractéristiques de la théorie de Maxwell. Or, dans l’équation (3) qui exprime le principe de d’Alembert, la masse des points matériels est im- plicitement renfermée dans le second membre; on est donc amené à considérer en premier lieu la valeur de l’énergie cinétique T dans un système où il y a des courants électriques. Suivant Maxwell , cette énergie n’est autre chose que celle désignée par le nom d’énergie électromagnétique. La valeur en peut être calculée au moyen de deux vecteurs qu’on appelle la force magnétique et l’induction magnétique. La force magnétique et ses composantes seront représen- tées par H, a, (j, /, l’induction magnétique et ses composantes par B, a, 6, c. 374 H. A. LORENTZ. § 9. Voici les propriétés de ces deux vecteurs qui servent à les déterminer dès qu’on connaît la distribution du courant électrique : 1. La distribution de l’induction magnétique est solénoïdale. 2. L’intégrale de la force magnétique, prise le long du con- tour d’une surface limitée quelconque, est égale au produit par 4 TT de l’intégrale du courant électrique étendue à cette surface. 3. A chaque point de l’espace les deux vecteurs sont liés l’un à l’autre par des équations linéaires : a — a ' I b a G dans lesquelles on a toujours: u a ‘ x,x U * x,y O + px,,r> a u 1 y, * -h u r y, y p -P y y. 1 y,*'’ y a * Z, X y 1 z, y p H- il y, * z, z / ’ , - u , u ... x>y y»x y tz z,y’ z> x x> z Les coefficients y sont des constantes dépendant des pro- priétés magnétiques du corps dont il s’agit; ils peuvent varier d’un point à l’autre. Dans un corps isotrope, yx x, yy y et u „ ont une valeur commune a et les autres coefficients sont nuis. Dans l’éther on a y = 1 ; les deux vecteurs H et B se confondent par suite en un seul. En adoptant les équations (6) nous avons exclu les cas où l’aimantation n’est pas proportionnelle à la force magnétique’ et ceux où il y a du magnétisme permanent. Quant aux propriétés de l’induction et de la force magné- tiques que je viens de rappeler, elles se traduisent par les formules suivantes: ■ (6) (?) v a d X 0 b d C d y d Z = o, (B*), =(Bn)„ dy di3 . D a zn 4 n U, — - — — 0 z 3| ? 02 0 y . \ -r = 4 71 V, J CX I (S) (9) (10) V = 4 TT W, d x o y (Ha), = (H*)a .. (11) LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 375 Par un artifice mathématique que je passerai sous silence on démontre que les vecteurs B et H sont complètement déterminés par les conditions 1, 2 et 3. § 10. Une fois la force et l’induction magnétiques connues, l'énergie cinétique est donnée par la formule: T = J (a a -+■ b (3 -j- c y) d t (12) L’expression — (a« + 6(5+c/)rfr représente l’énergie O TC cinétique qui se trouve dans l’élément d r. Cette manière de voir implique deux conditions. Il faut d’abord que la force et l’induction magnétiques aient une telle signification physique qu’elles puissent déterminer le mouvement électromagnétique dans chaque élément de volume. En second lieu, les coefficients (w dans les équations (6) doivent être tels que l’expression a« + ^ + c/ soit toujours positive. Dans tous les cas connus cette condition est satisfaite. L’intégrale (12) doit être étendue à l’espace infini, et il en sera de même de plusieurs autres intégrales que nous ren- contrerons. Je supposerai que toutes les fonctions qui servent à déterminer un dérangement de l’état naturel du système, telles que u, v, w, a, [3, y , a, b, c, sont nulles à l’infini, et qu’à une grande distance elles diminuent même si rapidement que des intégrales telles que celle de l’expression (12) restent finies. J’aurai plusieurs fois à appliquer l’intégration par parties à des intégrales relatives à un espace. Si cet espace est contenu dans une surface fermée S, cette opération conduit, comme on sait, à une intégrale étendue à cette surface. Or, je sup- poserai, une fois pour toutes* que dans les cas que nous aurons à étudier cette intégrale tend vers la limite 0 si les points de la surface S s’éloignent vers l’infini. Enfin, dans l’énumération des propriétés qui servent à déterminer telle ou telle fonction, la condition qu’elle s’évanouit à distance infinie sera souvent tacitement admise. 376 H. A. LORENTZ. Variation de V énergie cinétique. \ § 11. Supposons que les composantes u, v, w du courant électrique subissent des variations infiniment petites du, d v, â iv qui sont elles-mêmes les composantes d’un vecteur à distribution solénoïdale. Indiquons par le signe â les variations correspondantes des quantités qui dépendent de u% v , w et calculons la valeur de ô T. L’équation (12) donne: ê' Tz=z i f (aôa-hbdfi-j-cdy-i-c, élément fixé dans l’espace, la quantité Cn t d a représente ce qu’on appelle la quantité d’électricité qui, pen- dant le temps r, a traversé cet élément dans la direction po- LA THEORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 379 sitive. Pour l’unité de surface la quantité analogue devient C n r. On voit donc que les produits u' x, vf x, w' x ne sont autre chose que les quantités d’électricité, rapportées à l’unité de surface, qui ont traversé des éléments perpendiculaires aux axes des coordonnées. En désignant ces quantités infiniment petites par ©a-, ©y, 6 z on trouve: Ô X — £ (A 6a- + B 6y -J- C 62), \ dy = £(A'e* -f B' ey + 0' e*), ( (18) ô z = ^ (A"e* -h B"zy 4- C"ez). ) Remarquons que le temps plus ou moins long que les quantités ©#, ©y, ez mettent à traverser les éléments de surface dont il vient d’être question, n’entre plus dans ces formules. § 16. Ce sont les quantités ex, ey, ©2 qui nous serviront à définir un déplacement virtuel du système. Elles doivent être regardées comme des fonctions de x, y et z. La nature du système leur impose la condition que la distribution du vec- teur ©, dont elles sont les composantes, doit être solénoïdale. Du reste, e#, ©y, Cz peuvent varier avec le temps. Dès que ces quantités ont été choisies comme des fonctions de x, y , z et t, on peut se former une idée du mouvement varié dans lequel se change le mouvement réel qu’on désire étudier. En effet, on peut en pensée arrêter tous les points mobiles dans les positions qu’ils occupent au temps t dans le mouvement réel. A partir de cette configuration on peut déplacer les points de la manière déterminée par ex, ©y, ez ; on obtient alors la position variée pour le temps t. La position variée pour tout autre moment s’obtient de la même manière, et le mouvement varié n’est autre chose que la succession de toutes les positions variées. J’ai déjà remarqué que l’équation fondamentale (2) renferme seulement les valeurs de Sx , dy , ôz relatives au temps t. Il en est de même de la formule (3), qui n’est qu’une transformée de l’équation (2). En effet, les dérivées de ôx , dy, ôz parrap- Arhives Néerlandaises, T. XXV. 26 380 H. A. LORENTZ. port au temps, qu’on trouve dans les deux termes du second membre, disparaissent si on développe ces termes. Il en résulte que les conséquences qui découlent du prin- cipe de d’Alembert sont indépendantes de la manière dont ôx, ôy, ôz, ou, dans le cas qui nous occupe, e*, ey, e* varient avec le temps. Dans l’application qui va suivre, ces dernières quantités sont supposées indépendantes de t. Voici encore une remarque importante. Si l’on admet que le seul moyen par lequel on puisse déplacer les points du système consiste à y établir des courants électriques, on ob- tiendra tous les déplacements virtuels possibles en donnant aux quantités e ey et ez toutes les valeurs dont elles sont susceptibles. Application du principe de d’Alembert . § 17. Pour appliquer la formule (3) je considérerai successi- vement les variations ô'T, ôT et le travail M. Par ô'T nous avons représenté la variation que subit l’é- nergie cinétique si les vitesses des points matériels éprouvent des variations égales à celles qui sont apportées en réalité aux coordonnées. Or, dans le problème actuel, cette con- dition se trouve réalisée si, tout en maintenant constante la configuration qui se présente dans le mouvement réel, on augmente de e*, ey, e* les composantes du courant. En effet, si dans les formules (16) les coefficients A, B , C, A', ... . demeurent invariables et que les composantes du courant électrique reçoivent les accroissements e*, ey, e*, les variations de £, y et £ seront: 2 ( A ex + B ey -b C ez), 2 (A' ex -b B' ey -h C'ez ), 2 {A"ex -h B"ey -b C"ez ) ; elles deviennent égales aux valeurs que les équations (18) donnent pour ôx, ôy, ôz. LA THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 381 On voit donc que la variation d' T peut être calculée au moyen de la formule (15) ; il faut pour cela remplacer du, dv, ôw par e*-, ©y. ©*. Comme ces quantités sont supposées in- dépendantes du temps, on trouve: dd'T CfdF d G dH dt — j e'r+ e,!, + ~dte* d F d G d H les valeurs de — — — — — se rapportant au mouvement dt ’ dt ’ dt réel. § 18. La variation d T devient 0, si l’on introduit l’hypothèse suivante, analogue à celle dont Maxwell s’est servi dans sa théorie des circuits linéaires. (§ 2). La position de chaque point matériel se trouve déterminée par les quantités d’électricité qui, à partir d’un moment fixe arbitrairement choisi, ont traversé les éléments de surface qu’on peut faire passer par les différents points de l’espace; ou, ce qui revient au même: Si, après une série de mouvements, chaque élément de sur- face a été traversé dans les deux directions opposées par des quantités égales d’électricité, tous les points matériels se trou- vent ramenés à leurs positions primitives. Il est presque superflu de dire que la quantité d’électricité qui traverse un élément d a pendant un certain temps dans la direction positive est représentée par l’intégrale J Cndt . da et qu’on parle d’une quantité d’électricité e qui est passée vers le côté négatif, si cette intégrale a la valeur : — e. L’hypothèse mentionnée donne lieu à ce théorème: Si les quantités e*, ey, sont indépendantes du temps, le mouvement varié, bien qu’il diffère du mouvement réel par les configurations qui se succèdent, consiste en un système de courants dans lequel u, v, w ont les mêmes valeurs que dans le mouvement réel. 26* 382 H. A. LORENTZ. Or, l’énergie cinétique dépend uniquement des valeurs de u, v et w; on trouve donc Ô T= 0. § 19. Voici comment on démontre le théorème du paragraphe précédent. Soient TF, et W2 les configurations qu’occupe le système dans le mouvement réel aux moments t et t-\-dt, TF,' et W2' les configurations variées correspondantes. Le mouvement varié est celui qui fait passer le système de la position TF, ' à la position W2 ', ce passage s’accomplissant dans le temps d t et tous les points décrivant des lignes droites, infiniment petites. Si donc on commence par la position W2 ‘, et qu’on donne successivement au système les déplacements: TF2'— TF2, TF2 — TF,, TF, — TF,', le mouvement varié est celui par lequel la position primitive W2 se rétablit après un temps d t. Pendant les trois déplacements, des éléments de surface perpendiculaires aux axes ont été traversés successivement par les quantités d’électricité: ©*, 6y, e*, — udt, — v dt, — w dtj + + ©*, toutes ces quantités ayant été rapportées à l’unité de surface. Si donc, à partir de la position W , ', on fait exister pendant un temps d t des courants u , v, w, la somme algébrique des quantités d’électricité qui ont traversé un élément devient 0 et d’après notre hypothèse le système est ramené à la position W2. Le système des courants u, v, w constitue donc bien le mouvement varié TF,' — W2. § 20. Reste à considérer le travail b A. Lorsqu’on en veut calculer la valeur, on peut passer sous silence toutes les forces qui servent à maintenir les liaisons du système, c’est-à-dire les forces qui sont mises en jeu, parce que la distribution du courant électrique doit être solénoïdale et parce que l’indue- LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 383 tion et la force magnétiques qui déterminent les mouvements électromagnétiques sont liées aux courants de la manière qui a été considérée au paragraphe 9. Les forces dont il faut bien tenir compte ne sont pas les mêmes dans des corps de nature différente. Cependant, comme on le verra plus loin, on peut dans tous les cas indiquer pour chaque point de l’espace trois quantités X, Y, Z, telles que — J (X e* + Fey + Z e,) d x (19) représente le travail des forces pour le déplacement virtuel défini par e.r, ey, e*. La formule (3) devient donc: J (X ex h- Y ey -h Zez) d r = dG dt dH dt Bz ) (20) relation qui renferme à elle seule toutes les équations du mouvement. Pour en tirer toutes les conséquences, il suffit d’exprimer que la formule doit être vraie pour toutes les va- leurs admissibles de e*, ey, e*. Cependant, avant de procéder plus loin, il sera utile d’étudier les valeurs de X, F, Z dans des cas particuliers. Valeurs de X, Y et Z pour les diélectriques . § 21. Lorsque quelques-unes des forces qui agissent dans le système dérivent d’une énergie potentielle, le travail de ces forces est égal à la diminution de cette énergie. Or, suivant les idées de Maxwell , les forces qui agissent dans les corps non conducteurs ou diélectriques possèdent cette propriété. Dans les diélectriques il existe un état d’équilibre naturel qui est dérangé par tout mouvement de l’électricité, et un tel dérangement donne lieu à une certaine énergie potentielle. 384 H. A. LORENTZ. Appelons /, g et h les quantités d’électricité qui, à partir de l’état naturel, ont traversé des éléments de surface perpendi- culaires à O X, O Y et O Z, ces quantités étant ramenées à l’unité de surface ; alors on peut écrire pour l’énergie poten- tielle par unité de volume 5- [vx, x j 2 + vy,y g2 ■+• v z, z h2 -+- 2 vx, y f g 2 vy} z g h 4- 2 vz,x hf), (21) où les coefficients v dépendent des propriétés physiques du corps. Dans le cas des diélectriques anisotropes il est en général nécessaire de connaître les valeurs des six coefficients. Pour les corps isotropes la chose est plus simple : les coefficients vx,y, vy>z vz,x s’évanouissent eL, les trois autres ont une valeur commune v. Pour augmenter la symétrie des formules, j’écrirai quelque- fois Vyt X) Vz, tji Vx,z 3>U. lieu de Vx}y) Vy,Z) Vz, x> § 22. Les quantités f, g et h peuvent être regardées comme les composantes d’un vecteur que je représenterai par D et que Maxwell nomme le déplacement diélectrique. En se rappelant la définition de /, g et h on s’assure facilement que la distri- bution de ce vecteur doit être solénoïdale, ce qui s’exprime par les formules: 1 * *) 3_/ 3, DJ = dx^ dy^ dz (D»), — (Dw)-2 (22) (23) S’il y a mouvement de l’électricité, les valeurs de /, g et h changent avec le temps et les composantes du courant sont évidemment données par les formules: 0/ dg U ~~ d t' V 0 1 9 dh w= il (24) D’une manière analogue, les quantités e.r, ey, e2 qui déter- minent un déplacement virtuel doivent être considérées comme des variations de /, g et h. 1) Ces formules cessent d’être vraies s’il y a une ^charge électrique” à l’intérieur d’un isolateur ou à la surface qui sépare deux de ces corps. Je reviendrai sur ce cas au paragraphe 43. LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 385 § 23. Cette dernière remarque conduit à la valeur suivante de ô A, en tant que ce travail dépend des forces qui agissent à l’intérieur d’un diélectrique : f I ^Vx* xf~V Vx* y 9 Vx> z Qx H- ■+■ ( Vy , xf Vy, y Ç H“ Vy, z h) ©y + [vZ, X f + Vz,y Ç 4~ VZ, ^ 7i) ©~ | d T. En identifiant ceci avec l’expression (19), on trouve X ” Vx, xj 4” Vx, y Ç Vx, z h, j Y = vy> xf + vy, y g H- vy} z h, ; (25) Z Z=Z Vz, xf H~ Vz, y g “h Vz, z h. '• Valeurs de X, Y et Z pour les conducteurs . § 24. Le développement de chaleur qui accompagne les courants électriques dans les conducteurs prouve que dans ces corps il y a des causes qui tendent à diminuer l’énergie électromagnétique. Il faut donc admettre qu’il existe des forces, comparables au frottement de la mécanique ordinaire, dont le travail est négatif dans tous les mouvements réels. La quantité de chaleur qui est dégagée dans un fil conduc- teur étant proportionnelle au carré de l’intensité du courant, il est naturel de supposer que dans un conducteur quelconque le développement de chaleur est une fonction homogène du second degré de u, v et w. J’écrirai donc pour le travail de la résistance par unité de volume, pendant le temps d t, — (üx,x U2 -\-Xy,yV2 4- XZ,ZW2 -f- 2 Xx,y U V 2 Ky, z V W + 2 Hz, x W u)dt OU — [.{xx, x U + Xx,y V-\-Xx, z w) U d t-\-(x,ytx u~\~*y,y V-px^, z w') V d t -+- + {*z, x U + Kg, y V + Xz, z w)w d $], les constantes x dépendant de la nature du conducteur et *y,x, üz, y , Xx, z désignant la même chose que xx,y, *y, z, xz, x. Si le conducteur est isotrope, on a xx,y = xy, z — *z, x = 0, et les coefficients *x,x, *y,y et xZ)Z ont une valeur commune x. 386 H. A. LORENTZ. Les produits udt, v dt, w dt représentent pour le mouve • ment réel ce que nous avons indiqué dans le cas général par fcr, er. On voit donc que, tant qu’il s’agit d’un mouvement réel, le travail des forces peut être calculé au moyen de la formule (19) si l’on pose: X — X,x} x U — p 'Ax, y V “t~ Xx, z VJ , ï — Xy, x U -b Xy, y V -+* Xy} z W, Z XZi x U X.z, y V ~\~ Xz, z VJ. Or, je supposerai que, si on emploie ces valeurs, le travail des forces dans un déplacement virtuel peut également être mis sous la forme (19); hypothèse, du reste, qui est confirmée par le fait que les conséquences qui en découlent s’accordent avec l’expérience. Il n’y a qu’un seul cas où l’on a eu recours à des valeurs de X, Y et Z différentes de celles que je viens d’indiquer. Pour expliquer le phénomène de Hall, qui se produit dans des feuilles métalliques placées dans un champ magnétique, on a ajouté aux derniers membres des équations (26) des termes de la forme: l 3î) — l2 w, l , iu — l3 u, u — l , v. Mais le phénomène de Hall ne sera pas considéré dans ce mémoire. Équations du mouvement. § 25. Revenons maintenant à l’équation (20), qui peut être remplacée par edz — 0, si on désigne par p, q et r les cosinus directeurs du vecteur e dont e.r, ey, e2 sont les composantes. Il faut appliquer cette condition à tous les déplacements LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 387 virtuels qui sont compatibles avec la condition que la distri- bution du vecteur e doit être solénoïdale. Concevons un tube annulaire d’une section infiniment petite ; l’axe de ce tube, c’est-à-dire la ligne fermée s qui passe par les centres de gravité de toutes les sections droites, peut être de forme quelconque. Désignons par w la surface d’une de ces sections, et prenons e = 0 dans tous les points à l’extérieur du tube. Supposons aussi qu’à l’intérieur le vecteur e ait partout la direction d’une circulation le long de la ligne s, que e ait une même valeur dans tous les points d’une même section droite et que le produit e œ ne change pas d’une section à l’autre. On reconnaîtra immédiatement que la distribution de e est alors solénoïdale. En substituant dans la formule précédente : d t — 10 d s et en divisant par e œ, on trouve ds= 0, (27) équation qui doit être vraie pour une ligne fermée quelcon- que, et dans laquelle p , q, r sont maintenant les cosinus di- recteurs d’un élément de cette ligne. § 26. Si l’on prend pour la ligne fermée le contour d’un rectangle infiniment petit dont les côtés sont parallèles à deux des axes des coordonnées et qui n’est pas coupé par une surface de discontinuité, on trouve: dz dy d t\d y d Z )’ dZ SdF dH\ dx dz dt dx)’ d_X *J\. dy dx d t \d X dy) On peut considérer en second lieu une ligne fermée qui se trouve moitié d’une part et moitié d’autre part d’une surface de discontinuité. Soit s une ligne quelconque non fermée située dans cette surface; le contour auquel j’appliquerai la formule 388 H. A. LORENTZ. (27) sera composé de deux lignes s, et s2, situées des deux côtés de la surface à une distance infiniment petite de la ligne s, et de deux lignes infiniment petites qui joignent les extrémités de s, et s2. Comme les fonctions F, G et H sont continues (§ 12), la formule (27) revient à la condition que les intégrales du vecteur ( X , Y, Z ), prises le long des lignes s, et s2, doivent être égales entre elles. Or, ceci exige que, si R représente ce vecteur, on ait pour toute direction h située dans le plan tangent : (Ra), =(Ra)2 (29) Il est facile de s’assurer que la condition (20) sera remplie pour tous les déplacements admissibles, dès que les compo- santes X , Y, Z satisfont aux équations (28) et (29). Nous avons donc trouvé le système complet des équations de mouvement. § 27. En ayant égard aux formules (14) on peut donner aux équations (28) la forme: 0 F Z Z Z a Z z Z y Z t ’ Z Z Z X Z b Zx Z z Z t ’ oz_o_y__ a_c Z y Z x Z t’ ce qui présente l’avantage que les fonctions F, G et H ont disparu. Tous les problèmes spéciaux peuvent être traités au moyen de formules qui ne contiennent que le courant élec- trique, le déplacement diélectrique, les fonctions X, Y et Z et enfin la force et l’induction magnétiques. Les équations (4), (5), (6), (8), (9), (10), (11), (22) et (23) expriment les liaisons entre les parties du système ; les équations (24) résultent de la définition même de /, g et h) dans les formules (25) et (26) on a résumé ce que l’expérience nous apprend sur les forces agissant dans le système ; enfin les relations (30) et (29) sont les équations du mouvement proprement dites. Tout comme dans la mécanique ordinaire, elles nous font connaître la dé- pendance mutuelle des forces et des accélérations. En effet, LA THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 389 les valeurs de la force et de l’induction magnétiques déter- minent les vitesses des mouvements électromagnétiques; les accélérations se trouvent par conséquent renfermées dans les § 28. S’il y a équilibre électrique, on a u — vz=w = 0, et par conséquent la force magnétique, l’induction magnétique et le vecteur (F, G, H) disparaissent. La formule (27) exige alors que pour toute ligne fermée on ait condition qui se laisse encore énoncer comme il suit: Pour toutes les lignes qu’on peut mener entre deux points A et F l’intégrale doit avoir la même valeur. Prenons pour A un point situé à l’infini ; la valeur de l’intégrale prise avec le signe — est alors appelée le potentiel au point P. Cette fonction sera représentée par cp. De cette définition et de la circonstance qu’à l’intérieur d’un conducteur X, Y, Z ont, dans le cas de l’équilibre, la valeur 0, on déduit les propositions suivantes : a. Le potentiel est 0 à distance infinie. b. Dans tous les points d’un même conducteur il a la même valeur. c. Il est continu à chaque surface de discontinuité d. Les fonctions X, Y et Z sont données par les formules : dérivées d a d b de 07’ 07’ 07 * Formules de V électrostatique. J (X p -h Y q -h Zr) d s = j FL d s — 0, . . . . (31) X — y _ dx ’ 390 H. A. LORENTZ. § 29. Les équations (25) peuvent être mises sous la forme : f = V x, t X V x,y 1 -H V u, z Z, g — v'y.jc X -I- V y,y Y -h Vy, z Z , h V z, x X v z, y Y V z,z Zt les coefficients / étant déterminés par les valeurs des coeffi- cients r, et /y,*, /z,y,v'x,z étant respectivement égaux à /*, y, v y, z , v'z, X. En substituant dans ces formules les valeurs de X, Y et Z données dans le paragraphe précédent et en portant les valeurs de /, g et h dans les équations (22) et (23), on trouve des équations différentielles qui, jointes aux conditions déjà trou- vées, suffisent à la détermination du potentiel qp dès que la valeur en est connue pour chaque conducteur du système. Dans le cas d’un diélectrique homogène et isotrope, la for- mule (22) conduit à l’équation connue de Laplace. § 30. Supposons qu’au moyen des valeurs de qp dans les différents conducteurs du système on ait calculé pour tous les points de l’espace les valeurs de qp, /, g et h. Quelle est alors la grandeur de la charge de chaque conducteur? Ce qu’on appelle ainsi, c’est la quantité d’électricité E qu’il faut enlever au conducteur, au moyen d’un fil métallique par exemple, si l’on veut ramener le système à l’état naturel. Soit (7 une surface fermée, enveloppant le conducteur et traversant le fil conducteur qui sert à opérer la décharge. Distinguons par les indices d et f les intégrales qui se rap- portent aux parties de la surface situées dans le diélectrique et dans le fil. En vertu de la propriété fondamentale des courants électriques, il faut qu’à chaque instant pendant la décharge : J C n d( (S - h J’ On d (7 0 , ou bien, comme dans le diélectrique n d D» LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 391 Je suppose la normale n dirigée vers l’extérieur de la surface. Multiplions par d t l’équation précédente et intégrons sur toute la durée de la décharge. Le premier membre devient alors égal à la charge que possédait le conducteur, et, en entendant par D le déplacement diélectrique qui existait avant la décharge, on trouve E — J' d (T. Par des raisonnements qu’il est superflu de reproduire ici, on s’assure que la formule est encore vraie si le conducteur est maintenu isolé et que l’intégration soit étendue à toutes les parties d’une surface fermée enveloppant le conducteur. Dans ce qui a été dit dans les trois derniers paragraphes ou reconnaîtra immédiatement des propositions bien connues de l’électrostatique. Hypothèse du fluide électrique. § 31. Plusieurs des raisonnements qu’on trouve dans ce mémoire peuvent être rendus plus clairs au moyen d’une hypo- thèse qui est une de celles dont M. Poincaré s’est servi dans son exposition *) de la doctrine nouvelle et que je vais présenter sous une forme un peu différente. On peut supposer que tous les corps, y compris l’éther, sont imprégnés d’un fluide incom- pressible, dont le déplacement constitue les phénomènes élec- triques. Dans les corps diélectriques, les particules de ce fluide doivent être regardées comme liées à des positions d’équilibre, vers lesquelles elles sont ramenées dès que la force qui causait un déplacement cesse d’agir; dans les conducteurs, au contraire, il ne peut être question d’une position d’équilibre et ces corps 1 ) Poincaré, Électricité et Optique (1890), T. I. Chapitre II. 392 H. A. LORENTZ. peuvent se retrouver dans leur état naturel après des dépla- cements du fluide. très considérables. Selon cette manière de voir, les composantes u, v et w du courant électrique ne sont autre chose que les quantités du fluide incompressible qui traversent des éléments de surface perpendiculaires aux axes des coordonnées, ces quantités étant toujours rapportées à l’unité de temps et à l’unité de surface. Ce que nous avons appelé la quantité d’électricité qui a franchi une surface quelconque pendant un certain temps est précisé- ment la quantité du fluide incompressible qui a passé d’un côté de la surface à l’autre. Pour cette dernière raison, il convient de donner le nom même d 'électricité au fluide hypothétique, bien que la pré- sence à elle seule de cette substance ne donne lieu à aucun phénomène particulier 1 ). Du reste, il ne faut pas attacher à l’hypothèse trop d’im- portance Elle est utile en tant qu’elle nous permet de nous former une image de ce qui était d’abord caché sous les symboles mathémathiques, mais le langage de ces derniers sera toujours préféré par ceux qui désirent se borner à ce qui a été démontré par les observations et à ce qu’il y a de nécessaire dans les hypothèses. C’est ainsi que les équations (4) et (5) ont pour la théorie de Maxwell une importance fondamentale. En élevant l’électricité au rang d’un fluide incompressible, on leur donne une inter- prétation qui ne laisse rien à désirer sous le rapport de la clarté, mais on dépasse le domaine des suppositions nécessaires. § 32. Voyons maintenant ce que c’est dans l’hypothèse du fluide, qu’une charge électrique. Un conducteur étant relié à un autre corps, à la terre par exemple, par un fil métallique, on peut faire agir des forces „ électromotrices” sur le fluide électrique contenu dans ce fil. Si ces forces sont dirigées vers x) M. Poincaré donne le nom de fluide inducteur au fluide incompres- sible qu’on suppose dans les diélectriques, et celui à' électricité au fluide contenu dans les conducteurs. LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 393 le conducteur, il en résultera une charge que je nommerai positive. Une nouvelle quantité d’électricité entrera dans le conducteur, mais, en vertu de l’incompressibilité, une quantité égale en dépassera la surface et chassera devant elle le fluide contenu dans le diélectrique ambiant. La charge sera mesurée soit par la quantité d’électricité qui a traversé une section du fil, soit par celle qui s’est déplacée dans le diélectrique vers l’extérieur d’une surface fermée quelconque enveloppant le conducteur. En renversant la direction des forces électromotrices on obtient une charge négative. Le déplacement de l’électricité prendra alors dans tous les points du système une direction opposée à celle qu’il avait dans le cas précédent. Le déplacement du fluide dans le diélectrique donne lieu à des forces qui cherchent à le ramener vers la position primitive et qu’on peut réunir sous le nom d’ élasticité diélectrique. Si la charge est positive, ces forces tendront à repousser l’électricité vers le conducteur ; il en résultera dans le fluide de ce dernier un surcroît de pression et un état permanent aura été atteint dès que la pression augmentée fait équilibre aux forces élec- tromotrices dans le fil. De la même manière, il y aura diminution de pression dans le conducteur, si la charge est négative. La pression peut cependant rester positive si dans l’état naturel du système elle avait une valeur suffisamment grande. § 33. Bien que nous ayons regardé le fluide électrique comme remplissant tout l’espace, il faut admettre que d’autres matières y peuvent également trouver place, soit que ces substances différentes soient des manifestations diverses d’une matière unique, soit qu’une constitution atomique leur permette de se pénétrer mutuellement. U y a d’abord la matière pondérable ; en second lieu, il faut que l’éther contienne une matière capable de retenir l’électricité et de la ramener vers la posi- tion d’équilibre; enfin les points matériels qui sont chargés des mouvements électromagnétiques doivent être regardés 394 H. A. LORENTZ. comme n’appartenant pas au fluide électrique lui-même. On risquerait d’être entraîné en de vaines spéculations si on voulait se former une idée précise de ce mécanisme compli- qué; aussi me bornerai-je aux distinctions que je viens d’in- diquer. Inutile de dire que cette analyse des phénomènes n’est que provisoire et pourra être modifiée profondément dans une théorie plus avancée. J’indiquerai par M à la fois la matière pondérable et la substance qui retient l’électricité contenue dans l’éther, par N la matière qui est le siège des mouvements électromagnétiques. § 34. Pour fixer les idées je supposerai que la matière M est immobile et qu’elle ne fait point partie du système auquel nous avons appliqué le principe de d’Alembert. Ce système est donc composé du fluide électrique et de la matière N. Les conditions qui en limitent la mobilité reviennent à l’incom- pressibilité du fluide, d’une part, et à ce que, d’autre part, tout mouvement de ce fluide donne lieu à un mouvement électro- magnétique parfaitement déterminé. Tout comme dans la mécanique ordinaire, certaines forces sont mises en jeu en vertu de ces liaisons et servent à les maintenir. Il existe une pression dans le fluide et entre celui-ci et la matière N un système de forces sur lequel je reviendrai bientôt. Je supposerai que ces forces, qui sont provoquées par les liaisons et qui n’accomplissent aucun travail, sont les seules qui s’exercent entre les différentes parties du système : fluide électrique -h matière N. Si, de plus, on admet que la matière M n’agit pas directement sur la matière N, il faudra dans la formule fondamentale (3) entendre par d A le travail des forces que le fluide électrique éprouve de la part de la matière M. § 35. Au paragraphe 20 nous avons admis l’existence de trois fonctions X, Y et Z , telles que le travail ô A peut être calculé au moyen de la formule (19). Au point de vue où nous nous sommes placés maintenant, on peut voir dans ces fonctions, prises avec le signe négatif, les composantes de la LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 395 force avec laquelle la matière M agit sur l’unité d’électricité. En effet, lorsqu’on écrit — X, — Y, — Z pour ces composantes, un raisonnement très-simple conduit à l’expression (19) pour le travail. Soit k la quantité invariable d’électricité, exprimée en unités électromagnétiques, qui se trouve dans l’unité de volume. Alors la force qui agit sur l’électricité contenue dans l’élément d r a les composantes : — X Je d t, — Ykd r, — Z Je d t, (34) et, si x, y et z sont les projections du déplacement infiniment petit d’une particule du fluide, le travail de cette force devient : — (X x + Y y + Z z) H t. Mais évidemment k x = g*, k y = ©y, k z = g*. La dernière expression devient par conséquent (X G# + Y Qy + Z 0>z) d T, ce qui donne pour le système entier à A — — J (X G^ •+• Y G?/ -f- Z G2) d t, § 36. Il est clair quel sens il faut attacher maintenant aux équations (25) et (26). En changeant le signe des seconds membres, on trouve les composantes de l’élasticité diélectrique et de la résistance, c’est-à-dire de la force qui, dans les di- électriques, cherche à ramener vers sa position d’équilibre le fluide électrique, et du frottement qui s’oppose au mouvement de l’électricité dans les conducteurs. Pour les corps isotropes ces composantes deviennent. — f f, — v g, — V h, X U, XV, X w. Ce sont les valeurs auxquelles on est conduit par les hypo- thèses les plus simples qu’on puisse imaginer. § 37. S’il y a équilibre électrique on peut faire abstraction de la matière N. De plus, le principe de d’Alembert se réduit alors à celui des vitesses virtuelles; on arrive à la formule Archives Néerlandaises, T. XXV. 27 390 H. A. LORENTZ. fondamentale de l’électrostatique, l’équation (31), en exprimant que le travail des forces — X , — Y, — Z est nul pour tous les déplacements imaginables du fluide électrique, par exemple pour une circulation dans un tube annulaire (§ 25). La valeur du travail è A peut être déduite des équations (19) et (25) ; il peut également être considéré comme la diminution de l’énergie potentielle (21). Cette dernière est comparable à l’énergie poten- tielle qui est développée dans les corps élastiques ordinaires par un dérangement de leur équilibre. Du reste, les problèmes d’électrostatique admettent un autre traitement, qui consiste à exprimer directement l’équilibre des forces qui agissent sur le fluide électrique contenu dans un élément de volume d r. On a d’abord les forces (34); il y faut ajouter celles qui résultent de ce que la pression p du fluide n’a pas la même valeur tout autour de dr. Ces forces sont évidemment — 'J d T, —^dr. — 0 X dp d y à P J C Z et la condition cherchée s’exprime par les formules - Xk — ^ =0, — Y h — =0, — Z le — ^=0. d X d y d Z Soit p0 la pression qui existe à l’état naturel du système, et définissons le potentiel par la formule les dernières équations se réduisent alors aux formules (33) que nous avons trouvées précédemment. On voit ainsi que, dans l’hypothèse du fluide électrique, le potentiel est intimement lié à la pression. Cela est du reste fort naturel, car on comprend immédiatement que la pression peut jouer le rôle qu’on attribue au potentiel. Si deux con- ducteurs sont reliés l’un à l’autre par l’intermédiaire d’un fil métallique, il y aura équilibre lorsque la pression a la même LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 397 valeur dans les deux corps; s’il n’en est pas ainsi, le fluide électrique tendra à se mouvoir vers le côté où la pression a la valeur la plus basse. Courants invariables. § 38. Lorsque deux points d’un corps métallique C sont reliés aux pôles d’un élément voltaïque, il s’établit un régime permanent, dans lequel u, v, w et par conséquent la force et l’induction magnétiques sont indépendants du temps. En toute rigueur, la théorie que nous avons développée jusqu’ici ne suffit pas à l’étude complète d’un tel cas, parce qu’elle ne tient aucun compte des forces électromotrices qui sont enjeu dans les combinaisons voltaïques. Cependant les équations (30) n’en sont pas moins applicables, pourvu seulement qu’on se borne aux parties de l’espace où il n’existe pas de forces élec- tromotrices, par exemple au corps C et au diélectrique en- vironnant. Mais, si a, b et c ne varient pas avec le temps, ces équations se réduisent à: d_Y dz__d_z ai_3i d Z dy 0 X d Z d y d X On en déduit de nouveau le théorème que l’intégrale (32) a la même valeur pour toutes les lignes qu’on peut mener du point A au point P. Seulement, il faut ajouter la condition que les lignes dont il s’agit doivent être situées entièrement dans une région exempte de forces électromotrices. Cela posé, on définira le potentiel cp de la même manière qu’au paragraphe 28, et on aura encore les formules (33), dans lesquelles on substituera les valeurs (26) si l’on veut étudier la distribution du courant électrique dans le corps C. § 39. Je n’insisterai pas sur les questions que présentent les courants permanents. Cependant, il importe de remarquer que la théorie du fluide électrique arrive d’une manière fort simple 27* 398 H. A. LORENTZ. aux équations fondamentales si on introduit deux hypothèses, à savoir, que la matière N n’a aucune influence sur un mou- vement stationnaire de l’électricité et que le fluide électrique lui-même n’a qu’une masse insensible. .Cette dernière hypothèse nous permet d’égaler à 0 la force résultante qui agit sur l’électricité contenue dans un élément de volume, sans nous préoccuper des changements en grandeur et en direction que la vitesse d’une particule déterminée du fluide électrique subit en général, même dans les courants constants. En vertu de la première hypothèse, les forces en question consistent dans celle qui dérive de la pression et qui a pour composantes : -Itd __2p , D x w d y r’ et dans la force aux composantes: d p d Z d t — X h d r, — Y lcd Z k dr, X , Y et Z ayant les valeurs (26). On revient donc aux for- mules (33). Quant aux hypothèses précitées, la première est vérifiée par la théorie générale, vu que les seconds membres des équations (30) s’annulent, et la seconde est à la base de toute la théorie. En effet, si le fluide électrique lui-même avait une masse ap- préciable, il aurait aussi une énergie cinétique, dont la valeur — par unité de volume — serait proportionnelle à (u2 -hv2 -hw2). L’expression (12), qui se trouve en accord avec les expériences, serait donc inexacte ou du moins incomplète. Le phénomène de la dispersion de la lumière semble indiquer l’existence de petites masses qui se déplacent en même temps que l’électricité, et introduisent dans l’expression de l’énergie cinétique un terme proportionnel à ( u 2 -t- v2 -h w2), mais il faut admettre que ces masses ne sont pas assez grandes pour se faire sentir dans les expériences sur les courants qu’on peut observer comme tels. LA THEORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 399 Courants variables. § 40. Dans l'explication des phénomènes électrostatiques et de la distribution des courants permanents il n’y a pas lieu de faire intervenir les mouvements électromagnétiques. Dans le premier cas ces mouvements font défaut, dans le second cas ils ont une intensité invariable et sont par cela même incapables de réagir sur l’électricité. C’est dans les courants variables que se manifeste l’influence des mouvements électromagnétiques. Ce n’est pas ici le lieu de nous étendre sur les phénomènes qui peuvent être expliqués au moyen des formules générales, d’autres physiciens en ayant amplement démontré l’applicabi- lité. On me permettra cependant de citer un seul exemple. Figurons-nous qu’un condensateur aux armatures A et B ait été chargé; la première armature ayant reçu une charge positive. Il y a alors déplacement diélectrique suivant toutes les lignes de force électriques, mais principalement dans T isolateur qui sépare les deux armatures. Ce déplacement est dirigé de A vers B; il donne lieu à une élasticité diélectrique dirigée en sens inverse, et l’équilibre exige que la pression à l’intérieur de A surpasse celle qui existe à l’armature B. C’est là la différence de poten- tiel. Que se passera-t-il maintenant si on relie par un fil con- ducteur les deux armatures? La différence de pression fait naître dans ce fil un courant qui décharge le condensateur, l’électricité qui se trouve dans la couche non-conductrice re- venant vers sa position d’équilibre à mesure que la pression diminue dans l’armature A. Cependant, le courant engendré dans le fil métallique donne lieu à un mouvement électro- magnétique dans le milieu ambiant et dans le fil lui-même. Si ce dernier n’avait aucune résistance, le mouvement serait accéléré tant qu’il y a une différence de pression qui pousse de A vers B le fluide contenu dans le fil, et au moment où cette différence se trouve épuisée, c’est-à-dire où le conden- sateur est sans charge, le mouvement électromagnétique aurait pris sa plus grande intensité. Cela étant, on comprend faci- 400 H. A. LORENTZ. lement qu’en vertu des liaisons entre la matière N et l’élec- tricité du fil cette dernière doit continuer de se mouvoir. Le condensateur reçoit ainsi une charge opposée à celle qu’il avait au commencement et en définitive on aura le phénomène bien connu de la décharge oscillatoire. Il est clair que la force qui ralentit le mouvement — le courant électrique et les mouvements électromagnétiques qui en dépendent — et finit par le renverser n’est autre chose que l’élasticité diélectrique excitée dans la couche isolante, et que le mouvement peut continuer d’autant plus longtemps dans une même direction qu’une plus grande masse est en jeu. La masse dont il s’agit doit être cherchée dans la matière N et non pas dans le fluide électrique. § 41. On pourrait comparer ce dernier à une tige dentée qui se déplace en sens longitudinal, et la matière N à une roue dentée s’engrenant avec cette tige; en effet, une résistance quelconque, qui s’oppose à un mouvement donné de ces organes, ne les amènera pas instantanément au repos ; il faudra pour cela un temps d’autant plus long que la masse de la roue est plus considérable. Lorsque, dans la mécanique ordinaire, on applique le prin- cipe de d’Alembert à un tel système — supposé libre de tout frottement — on emploie des formules dans lesquelles ne figure pas la pression existant entre les dents qui se trouvent en contact. D’une manière analogue, nous avons développé la théorie générale des mouvements électriques et nous pourrions établir la théorie spéciale de la décharge oscillante sans nous préoccuper de la réaction que l’électricité éprouve de la part de la matière N. On ne saurait nier, toutefois, que cette méthode a quelque chose d’artificiel. Si l’on veut comprendre complètement le mouvement de la tige et de la roue dentées, on désirera se rendre compte non seulement du mouvement du système entier, mais aussi de celui de chaque organe considéré sépa- rément. On ne sera satisfait qu’après avoir saisi la relation LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 401 entre la rotation de la roue et la force avec laquelle elle agit sur la tige. Relation bien simple, du reste, si la roue n’est soumise à aucune force extérieure et n’est liée à aucun autre organe ; elle tendra alors à faire avancer la tige si son propre mouvement est ralenti, et elle s’opposera au déplacement de la tige dans le cas contraire. Ces considérations nous conduisent à étudier séparément le mouvement du fluide électrique et à introduire les forces qui servent à maintenir les liaisons. On arrive ainsi à une méthode dans laquelle les forces qui seules accomplissaient un travail ôA sont reléguées au second plan. Force électrique. § 42. Considérons une quantité infiniment petite e du fluide électrique, située à l’intérieur d’u.i corps pondérable ou de l’éther. La force qu’elle éprouve de la part de la matière M a pour composantes: — Xe, — Ye, ~Ze, et j’écrirai : X' e, Y ' e, Z' e pour les composantes de la force qui est due au fluide am- biant et X" e. , Y" e , Z" e pour celles de la force qui est exercée par la matière N. Comme nous négligeons la masse du fluide, toutes ces forces doivent se tenir en équilibre, c’est-à-dire qu’on aura: X' -h X" — X, F + Y" = Y, Z' + Z' — Z. On voit donc que le vecteur (X, Y, Z) représente la force qui agit sur l’unité d’électricité en vertu des liaisons du système. Cette force fait équilibre avec celle qui est due à la matière M, c’est-à-dire avec l’élasticité diélectrique ou le frottement, et on dit souvent qu’elle sert à vaincre ces dernières forces et 402 H. A. LORENTZ. qu’elle produit ainsi un déplacement diélectrique ou un courant. Suivant cet ordre d’idées, on regarde dans les équations (25), (26) et (30) comme la cause ce qui auparavant était considéré comme l’effet, et inversement. Jusqu’ici — X, — Y , — Z étaient les forces avec lesquelles la matière M agit sur l’élec- tricité dès qu’il y a un déplacement diélectrique ou un courant ; ces forces déterminaient les accélérations que contiennent les seconds membres des formules (30). On peut dire tout aussi bien que ces dernières formules déterminent la force {X. Y} Z) qui est exercée sur l’unité du fluide par le fluide ambiant et par la matière N, et que cette force fait naître un déplacement diélectrique ou un courant suivant les lois qui sont exprimées par les équations (25) et (26). Cette force (X, Y, Z) ou R (§ 26) est appelée la force élec- trique. Elle se compose de deux parties, dont la première, aux composantes : X' = d Cf) Ô~x’ Y'— — D cf) d y’ D cf) d Z (35) peut être appelée force électrostatique et la seconde (X", Y", Z") force inductrice . Ces deux forces, que les anciennes théories attribuaient à des actions à distance, sont causées, l’une par la pression du fluide, l’autre par la réaction de la matière N. Des formules (35) on tire : d Z' D Y' _dX' d Z' d Y' DX'__0> d y d Z d Z d X d X d y on voit donc que, dans les formules (30), on pourrait enten- dre par X, Y et Z les composantes de la force inductrice seule. Je continuerai cependant à désigner par ces lettres la force électrique totale. LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 403 Charge électrique au sein d’un isolateur. § 43. Je vais terminer par quelques additions cette étude des mouvements électriques dans les corps immobiles. Et d’abord quelques mots sur les charges qu’on peut se figurer dans les diélectriques. Je dis „se figurer”, parce qu’il nous est impossible de produire une telle charge dans un milieu entièrement dépourvu de conductibilité. Dans un diélectrique qui se trouve à l’état naturel, chaque particule du fluide électrique occupe sa position d’équilibre. Or, on peut imaginer que, en dehors de ce fluide que le corps renferme dans son état naturel, il en contienne une certaine autre quantité, qui y trouve place en refoulant devant elle le fluide qui sans cela se trouverait dans sa position d’équilibre. Ce dernier déplacement est le déplacement diélectrique, et l’excès lui-même, que j’ai supposé, constitue une charge posi- tive. Il est clair que, pour toute surface fermée, on aura : j On d a — E , (36) la normale étant dirigée vers l’extérieur et la charge qui se trouve à l’intérieur de la surface étant représentée par E. Une charge négative se conçoit d’une manière analogue; et la même équation peut être employée dans ce cas. Au lieu d’un excès, c’est maintenant un certain déficit en fluide électrique qu’il faut se figurer : si l’on admet qu’une partie quelconque de l’espace doit toujours rester remplie du fluide incompressible, il faut alors qu’à la surface a il y ait un dé- placement diélectrique tel que l’intégrale J 0n d o soit négative. En appliquant l’équation (36) à un élément de volume et en indiquant par q dr la charge contenue dans cet élément, on trouve: d f d g d h -Z — d zr — 4“ zz — Q • ox d y D z La quantité q est appelée la densité de la charge électrique. 404 H. A. LORENTZ. On voit donc que la distribution du déplacement diélec- trique n’est plus solénoïdale. Tout de même, le courant élec- trique n’a pas perdu cette propriété. En effet, la charge élec- trique d’un élément de volume doit être regardée comme restant constante pendant toutes les variations possibles de /, g et h. On aura donc: IfifV JLY ^JL\ ■ JL n 3 x \ dt J 2y\ d t dz \ Zt J~ ’ ou bien: d u d x + d v dy d W HT = 0 . § 44. Ce qui précède peut être mis sous une forme indépendante de l'hypothèse d’un fluide électrique. On se servira à cet effet des propositions ou hypothèses suivantes: a. Dans chaque corps diélectrique il peut exister un dé- rangement de l’état naturel qui est de la nature d’un vecteur et qu’on nomme le déplacement diélectrique ; à ce dérange- ment correspond une énergie potentielle qui est donnée par l’expression (21). b. Les variations de ce déplacement diélectrique constituent le phénomène qu’on appelle un courant, les composantes du courant étant données par les formules (24). c. La distribution du courant électrique est toujours solé- noïdale. Par conséquent, l’expression df dg dh — - -4- — -- -j 0 X dy d Z doit avoir en chaque point une valeur constante o. Si cette valeur n’est pas 0, on dit qu’il y a une charge électrique et on nomme q la densité de la charge. Corps qui possèdent en même temps les propriétés d’un conducteur et celles d’un diélectrique. § 45. Maxwell a supposé qu’une force électrique peut pro- voquer dans le même corps un déplacement diélectrique et LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 405 un courant comparable à ceux qu’on considère dans la théorie ordinaire des conducteurs. Ces deux phénomènes seraient donnés en fonction de X, Y et Z par les formules (25) et (26), et les composantes du courant total, dont dépendent la force et l’induction magnétiques et par conséquent l’énergie cinétique du système seraient M. Potier 1 ) a remplacé cette hypothèse par une autre, qui revient également à une combinaison des propriétés que pos- sèdent les corps conducteurs et les isolateurs. Je ne m’étendrai pas ici sur cette question, qu’on ne saurait traiter' à fond qu’en étudiant assez minutieusement les propriétés optiques des métaux. § 46. Plusieurs causes, parmi lesquelles on peut citer des différences de température, des défauts d’homogénéité, et des actions chimiques, donnent lieu à des forces qui agissent sur l’électricité et dont on n’a pas tenu compte dans les équa- tions des paragraphes précédents. Je réserverai à ces forces le nom de forces électromotrices et je représenterai leurs com- posantes par 3£, 3), 3- Dans l’hypothèse du fluide électrique, ces lettres indiqueront les forces auxquelles se trouve soumise l’unité du fluide ; ou plutôt, % Je dr, 3) Je dr, $ Je d t seront les forces qui agissent sur le fluide contenu dans un élément de volume. Le vecteur (3£, 3), 3) sera regardé comme distribué sur un certain espace, dans lequel il a partout une valeur finie. Il est vrai que dans un grand nombre de cas cet espace se réduit à une couche très mince, telle que celle dans laquelle ont lieu les actions entre le zinc et l’acide sulfurique de nos éléments, et qu’on peut simplifier le problème en négligeant l’épaisseur de la couche et en supposant la force infiniment *) Poincaré, Electricité et Optique, T. I, p. 190. a t> Forces électromotrices. 406 H. A. LORENTZ. grande ; mais c’est là un artifice mathématique auquel je ne m’arrêterai pas. § 47. Indépendamment de l’hypothèse du fluide électrique, on peut dire que le travail des forces électromotrices, qui correspond à un déplacement virtuel du système tel qu’il a été considéré aux paragraphes 15 et 16 est donné par l’intégrale : J (X VT + 3) e„ + ,3e.-) d r. Si l’on entend maintenant par X' , Y', Zf les fonctions de /', g et h ou de u, v et w qui sont définies par les formules (25) et (26), c’est-à-dire si l’on pose: X — ~ Vx,x f H- Vx,y g 4~ Vx,z h, j Y' — l’y,xf 4- vy,y g 4- Py,z 11, Z — Vz,x f 4~ p z, y g 4“ V z, z à. ou, dans le cas d’un conducteur, X ITT y.x,x U 4“ %x,y V 4~ %x,z ) 1 == *y,x U 4“ *y,y V 4~ *y,z W, Z = ytz,x u 4- %z,y V 4“ Kz,z w, on devra substituer dans la formule fondamentale (3) : (37) (38) 3 A = - f j (X — X > e* + ( r — 3)) ey + {Z — £) e* | d r et dans les équations de mouvement (29) et (30) : Xz^X'-X, Y-Y' — 3), Z=Z- 3. § 48. Les mêmes choses peuvent être exprimées de la façon suivante. Les formules (29) et (30) déterminent toujours les compo- santes X, Y et Z de la force électrique qui provient de l’in- compressibilité du fluide électrique et des liaisons entre ce fluide d’un côté et les particules qui prennent part aux mouvements électromagnétiques de l’autre. Tant que des forces électromotrices n’existent pas, les forces X, Y, Z seules pro- duiront des déplacements diélectriques ou des courants de conduction qui obéissent aux formules (25) ou (26). Dans le cas contraire, c’est une force (X 4- 36, Y -h 9), Z 4- 3) sera la cause de ces phénomènes; en posant alors LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 407 x + x = x\ r + n = r', z + ^ — z\ on retombe sur les équations (37) et (38). Vitesse de la lumière dans V éther. § 49. On reconnaîtra facilement que nos formules sont au fond identiques à celles qu’on trouve chez Maxwell et chez MM. Heaviside et Hertz 1 ). Elles doivent donc conduire aux résultats bien connus sur lesquels Maxwell a établi sa théorie électromagnétique de la lumière. Je ne m’étendrai pas ici sur les fondements de cette conception importante et je me bor- nerai à déduire de mes formules la vitesse de propagation de la lumière dans l’éther. Pour ce milieu, les équations (25) prennent la forme: X = »of, Y="o9, Z=v0 h, vQ étant la valeur commune des coefficients Vx, X, Vy} y, Vz, Z J comme, de plus, la force et l’induction magnétiques se con- fondent en un seul vecteur, les formules (30) deviennent: *9 dh\ i —da dz h) ^ —ït’ ’3 h 2A 3 X dzj 1 “ o t ’ 3/ 3 g\ _0/ .2 y dxj 5 tm Des deux dernières on tire : rA , o /o/ *g o/A i o/o/ os\ "0LA^ O* \3* + 3y + 3 z) J~~;HV2y 3z)’ ou bien, en ayant égard aux formules (22), (10) et (24), t — 4 „ 3 */. "o N J) Il faut citer encore un mémoire de M. Gohn , Zur Systematik der Electricitâtslehre ( Wied . Ann. Bd. 40, p. 625, 1890), dans lequel des équations semblables sont prises pour point de départ. 408 H. A. LORENTZ. Cette équation et celles qui lui sont analogues donnent pour la vitesse de propagation des vibrations électriques transver- sales, c’est-à-dire pour la vitesse de la lumière, On a donc y0 = 4tt Va\ et l’énergie potentielle de l’éther par unité de volume peut être représentée par 2 tt Vol (f 2 + g2 H- h 2). \ LA THEORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 409 CHAPITRE IL Phénomènes électromagnétiques dans des corps qui se trouvent en mouvement et qui entraînent l'éther contenu dans leur intérieur. Valeur de V énergie cinétique. § 50. Dans ce chapitre ') je nommerai matière tout ce qui peut être le siège des courants ou déplacements de l’électricité et des mouvements électromagnétiques. Ce nom sera donc appliqué à l’éther tout aussi bien qu’à la matière pondérable. Dans les cas que nous allons étudier, il y aura deux classes de phénomènes, bien distinctes. D’une part, nous aurons affaire aux phénomènes électriques, tels qu’ils peuvent se présenter aussi dans des corps immobiles; d’autre part, il y aura un mouvement indépendant de toute action électrique et qui sera appelé le mouvement de la matière. En suivant l’exemple donné par M. Hertz dans son second mémoire, je supposerai que l’éther contenu dans les espaces intermoléculaires d’un corps pondérable participe au mouve- ment de ce dernier. En d’autres termes, si à un moment quelconque on fait cesser subitement tous les mouvements qui constituent les phénomènes électriques, il restera un mou- vement dans lequel tout ce qui est contenu dans un élément de volume est animé d’une vitesse commune. Les composantes de cette vitesse seront représentées par £, y, Ç. Elles seront regardées comme des quantités données, le mouvement de la matière étant supposé connu. Du reste, je me bornerai aux cas où £, 7;, f sont des fonctions continues des coordonnées. Cela implique que deux corps qui se trouvent 1) Je me permets d’avertir le lecteur que les trois derniers chapitres de ce mémoire sont entièrement indépendants de celui-ci et du troisième. 410 H. A. LORENTZ. en contact ne doivent pas glisser l’un sur l’autre et que, par exemple, un corps pondérable sphérique, placé dans un espace d’ou l’air a été éloigné, communique un certain mouvement à l’éther environnant, non seulement lorsque le centre se dé- place, mais aussi lorsque le corps tourne autour de ce point. § 51. La position de la matière pourra être déterminée par un certain nombre de coordonnées générales, que jè nommerai p , , p2 . . .p/c, et il est clair que, s’il n’y avait aucun phénomène électrique, les composantes de la vitesse d’un point matériel quelconque P seraient données par des expressions de la forme Q, Pi d- Q2P2 d- . . . . d - Qk pk, Q' \P\ + Q' 2 P 2 d- • • • • d- Q'kpjc , Q" 1 P 1 d- Q"oP2d- .... d- QTkpk, les coefficients Q changeant avec la configuration du système. Si, en revanche, la matière se trouvait en repos, mais qu’elle fût le siège de courants électriques, aux composantes u, v et w, on aurait pour les vitesses de ce même point P, comme au paragraphe 13, 2 (A u -f- P v •*{“ O 2 (A' u B' v H- C' w), 2(A"u + B"v + C" w). Or, je supposerai que, dans le cas où les courants électriques u, v, w existent dans la matière qui est en mouvement, les composantes de la vitesse d’un point matériel ont les valeurs : Q, pt + . . . +-:Qt p*-t- 2(A u + B v d- C w ), Q' 1 P 1 d- . . . d- Q'k p/c d- 2 ( A ' u + B' V -h C' w), Q'r , p , d" • • • d - Q ' 7c pic 2 ( A u B v -b C w). § 52. En partant de ces expressions, on trouve pour l’énergie cinétique une valeur de la forme : T= T T, + T2 + T,. Le terme T, est ici indépendant des courants électriques, tandis que T3 ne contient aucune des vitesses p , . . .pic de la matière. Dans le second terme se trouvent les premières LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 411 puissances de ces vitesses multipliées par les mêmes puissances de u, v et w. Dans les questions dont je m’occuperai, le terme Tx ne joue aucun rôle et j’admettrai, comme le fit Maxwell dans sa thé- orie des circuits linéaires, que le terme T2 s’annule. Je n’aurai donc à parler que de l’énergie T%, que je représenterai doré- navant par T et qui est évidemment l’énergie que posséderait le système si la matière était mise en repos sans que les cou- rants en fussent changés. Cette énergie peut donc être calculée de la manière que j’ai exposée aux paragraphes 7 — 10. Il importe toutefois de remarquer que, si on effectuait ce calcul pour des époques successives, on obtiendrait pour T des valeurs différentes, non seulement parce que la distribution des courants ne restera pas la même, mais encore parce que, en vertu du mouvement de la matière, les coefficients p changent d’un instant à l’autre dans un même point de l’espace. Quantité d'électricité qui traverse une surface. § 53. Dans les considérations du chapitre précédent, les composantes du courant déterminaient les quantités d’électri- cité qui se déplacent à travers des surfaces ayant une position fixe dans l’espace. Dans le cas qui nous occupe actuellement, elles nous donnent d’une manière analogue la quantité d’é- lectricité qui traverse une surface qui est liée fixement à la matière et se déplace avec elle , et dont, par conséquent, la forme et les dimensions changent continuellement 1). *) Je crois pouvoir présumer que tous les physiciens sont d’accord sur ce point. Si deux conducteurs sont reliés l’un à l’autre par un fil métal- lique dans lequel il y a un courant de l’intensité i, la charge de l’un subira par unité de temps une augmentation i, et celle de l’autre une diminution égale; il en sera ainsi quelle que soit la vitesse d’un mouve- ment qu’on imprime au système tout entier. On dira donc qu’une surface séparant les deux conducteurs est traversée dans l’unité de temps par une Archives Néerlandaises, T. XXV. 28 412 H. A. LORENTZ. Si un élément d’une telle surface coïncide à l’instant t avec un élément d a dont la normale a pour cosinus directeurs p, q , r, cet élément mobile sera traversé entre les moments t et t + dt par la quantité d’électricité (p u -b q v + r w) d a d t. Selon la théorie de Maxwell , la distribution du courant élec- trique doit toujours être solénoïdale, ce qui s’exprime par les équations (4) et (5). Dans le chapitre précédent, cette condi- tion impliquait l’égalité des quantités d’électricité qui entrent et qui sortent par une surface fermée, immobile dans l’espace ; maintenant, la condition exige la même chose pour une surface fermée qui se déplace avec la matière. § 54. Comment concilier les idées que je viens d’exposer avec l’hypothèse d’un seul fluide électrique imprégnant toute la matière? Il faudra, en premier lieu, admettre qu’un courant électrique consiste, non pas dans le mouvement absolu d’un tel fluide, mais dans son mouvement relatif par rapport à la matière. En second lieu, il faudra renoncer à l’hypothèse de l’incompressibilité et lui substituer une autre plus géné- rale. En effet, la matière peut se mouvoir sans qu’il y ait des courants électriques, et elle peut subir pendant ce mou- vement un changement de densité. Dans ce dernier cas, le volume limité par une surface fermée qui passe toujours par les mêmes particules de la matière n’est pas invariable, et cependant aucune quantité d’électricité ne franchit cette surface. Au lieu de dire que le fluide électrique est incompressible, il faudra donc admettre qu’une partie déterminée de la matière en contient toujours la même quantité. quantité d’électricité i ; pour cette surface on peut prendre une section du. fil qui passe continuellement par les mêmes particules métalliques. Mais, évidemment, la même chose ne sera pas, en général, vraie pour une surface immobile. LA THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 413 Application du principe de d’ Alembert. § 55. C’est de nouveau l’équation générale (3) qui va nous fournir les équations du mouvement. Comme il ne s’agit pas de trouver les lois qui régissent le mouvement de la matière, je me bornerai à des déplacements virtuels auxquels elle ne prend point part. Ce n’est que l’électricité et les particules animées des mouvements électro- magnétiques qui en seront affectées, et les changements de position seront déterminés au moyen des quantités e*, ey, e2, absolument de la même manière que dans le chapitre précé- dent. Il est facile de s’assurer que la variation ô' T est toujours donnée par la formule 8’ T = J (Fe* + Gey + Hez)dr, (39) les fonctions F, G et H étant déterminées, comme auparavant, par les formules (14). § 56. Cependant, dans le calcul de la dérivée dô' T dt 7 je ne supposerai plus qu’à l’instant t -+- dt les quantités , ey, ez aient les mêmes valeurs qu’à l’instant t. Il est vrai que, tant que la distribution du vecteur e demeure solénoïdale, on est entièrement libre dans le choix des composantes et qu’elles pourraient par conséquent être prises indépendantes du temps, mais le calcul du terme d T dans la formule (3) en deviendrait assez difficile. Il est plus commode de donner aux composantes relatives au temps t q- dt de telles valeurs e'*, e'y, e'*, qu’un élément de surface quelconque, qui se déplace avec la matière, soit tra- versé par la même quantité d’électricité en vertu du dépla- cement (e*, ey, e*) à l’instant t et en vertu du déplacement (e'*, e'y, F z) à l’instant t H- dt. On reconnaîtra immédiatement, d’abord, que le vecteur (eV, ey. e'z) se trouve ainsi complètement déterminé dès que le vecteur (e.r, fy, e*) a été choisi, le mouvement de la matière 28* 414 H. A. LORENTZ. pendant le temps d t étant connu, et, en second lieu, que la distribution de l’un des deux vecteurs est solénoïdale si l’autre jouit de cette propriété. § 57. Grâce au choix que je viens de faire, le terme 8 T dans l’équation fondamentale s’annule, si du moins on adopte l’hypothèse suivante, qui n’est autre chose qu’une généralisa- tion de celle de Maxwell (§ 2): Si, après des mouvements quelconques, la matière est ra- menée à sa configuration primitive, et si, dans le cours de ces mouvements, chaque élément de surface qui est fixement lié à la matière a été traversé par des quantités égales d’électricité en directions opposées, tous les points du système se retrou- veront dans leurs positions primitives. § 58. Pour démontrer que cette hypothèse donne effectivement 8 T = 0, je donne aux signes Wxt IP2, W\, W 2 les mêmes significations qu’au paragraphe 19 et je me représente de nouveau la suc- cession des déplacements W\ -*W2, W2 TF,, WX->W\; (40) le mouvement varié sera alors celui qui ramène le système à la configuration W2 dans un temps d t. Or, on voit immédiatement que le mouvement varié de la matière ne diffère pas du mouvement réel. D’un autre côté, un élément de surface quelconque, qui se déplace avec la matière, est traversé par des quantités égales d’électricité pendant les déplacements TP, — ► H7', et W2 — ► W' 2. Si donc, après avoir donné au système les déplacements (40), on fait en sorte qu’un tel élément soit traversé par la même quantité d’électricité que dans le déplacement Wx — > W2, la somme algébrique des quantitées d’électricité qui ont succes- sivement traversé l’élément sera 0 et, en vertu de notre hy- pothèse, la position W'2 se sera rétablie. Il en résulte que les composantes du courant ont dans le mouvement varié les mêmes valeurs que dans le mouvement réel et que, par conséquent, 8 T=0. LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 4 1 5 § 59. Soit de nouveau J (X ex -f- d h- Z e2) d t xle travail des forces pendant le déplacement virtuel (e.r, ey, eM alors l’équation (3) devient : — f (Xe* + Y + Zez d r = (■F’e->- + ®«V + Se*) d r (41 ). Supposons que le vecteur e soit distribué de la façon par- ticulière indiquée au paragraphe 25. Si l’on fait se mouvoir avec la matière le tube annulaire dont il fut question dans ce paragraphe, l’axe coïncidera après le temps dt avec une nouvelle ligne fermée et, au lieu de œ, le tube aura une section droite œ . D’après ce qui a été dit sur e'*, e y, e'*, il faudra que le vecteur e', dont ces quantités sont les compo- santes, soit borné au nouveau tube, qu'il ait la direction du nouvel axe s ' et que le produit e' œ soit partout égal au produit e co dans le tube non déplacé. Or l’intégrale j (F e* + (x 6y - H 62) d t prend (§ 25) à l’instant t la valeur: e co J (F p -h G q -t- H r) d s, et à l’instant t -h d t elle devient e' co' J (F p h- G q -h Hr)ds\ l’intégrale étant étendue à la ligne primitive dans la première expression et à la ligne déplacée dans la seconde, et les valeurs de F, G et H se rapportant respectivement aux mo- ments t et t -t- dt. Il s’ensuit qu’au lieu de d dt ©# d~ G Cy -f- H e z) d T il est permis d’écrire 416 H. A. L0KENTZ. e œ iït / ^ P + O q Hr) d s, où le signe d indique l'accroissement total de l’intégrale causé par la variation de F, G et H et par le déplacement de la ligne s. Le premier membre de l’équation (41) se transforme en — e œj* (Xp Y q 4- Zr) d s, et la formule devient: — j(Xp+ Yq + Zr)ds=§ij(Fp+ Gq + Br)dë. Elle se simplifie encore si l’on conçoit une surface a limitée par la ligne s et se déplaçant également avec la matière. En vertu des relations (14), on a f (F p + Gq + Hr)ds=f B* d a, ce qui donne: -f (Xp + Yq + Zr)ds— ~j B ud« ...... (42) Ici encore, le signe d indique le changement total de l’in- tégrale. Pour le calculer, il faudra tenir compte, d’une part, du changement de l’induction magnétique, et, d’autre part, du déplacement de la surface -«)+. Qi^ïï) (vf— + ï( vh) dt = 21 dt dh w =: (&■ (!* Tjh) — dx w-*» ■df dx f dx dy dh\ + r.) £(y+»j+»). \dx dy d Z J d d Z d_ dt ' dx Si l’on introduit ces valeurs dans les équations (10) celles-ci deviennent identiques aux formules (L) établies par M. Hertz dans son second mémoire. Après avoir ainsi reproduit les formules fondamentales de M. Hertz , il est juste de mentionner que ce n’est qu’après avoir lu son mémoire que j’ai entrepris cette étude des corps en mouvement. J’avais ainsi l’avantage de connaître d’avance les résultats qu’il faudrait chercher à obtenir. LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 421 CHAPITRE III. Examen d’une hypothèse qui a été faite aux chapitres précédents. § 64. Il n’est pas inutile de considérer de plus près la sup- position dont Maxwell s’est servi dans sa théorie des circuits linéaires et que j’ai reproduite, sous des formes plus générales, aux paragraphes 18 et 57. Même dans le cas que j’ai traité au premier chapitre, cette hypothèse n’est pas aussi plausible qu’on pourrait le croire au premier abord. En effet, il y a dans la mécanique ordi- naire des cas bien simples où une supposition analogue con- duirait à des résultats erronés. Considérons, par exemple, le mouvement d’un fluide incom- pressible dont la densité est o. Désignons par u d a dt, v d a dt, w da dt les quantités du fluide, exprimées par le volume qu’elles occupent, qui, pendant le temps d t, traversent des éléments de surface, respectivement perpendiculaires à O X, O Y et O Z et eux-mêmes immobiles; u, v et w seront alors les composantes du courant. Représentons par Xdt, Y d t, Z d t les compo- santes de la force extérieure qui agit sur un élément de volume, et cherchons à établir les équations du mouvement en partant de la formule générale (3). Les variables u , v , w, X, Y et Z seront regardées comme des fonctions de t et des coordonnées x, y , z d’un point immobile. Un déplacement virtuel peut être défini au moyen des quantités infiniment petites du fluide qui traversent des élé- ments de surface perpendiculaires aux axes des coordonnées ; rapportées à l’unité de surface et exprimées par le volume du liquide, elles seront indiquées par e*, ey, e*. Elles doivent satisfaire à la même condition que les quantités analogues du premier chapitre et il est évidemment permis de les regarder comme indépendantes du temps. On aura alors: 422 H. A. LORENTZ. dd' T r/d U d V d W \ 7 e,J + Yt^)dT- § 65. Si, après des mouvements quelconques pendant lesquels chaque élément de surface immobile a été en somme traversé dans des directions opposées par des quantités égales du fluide, chaque particule se retrouvait dans sa position primitive, on pourrait démontrer que ôT z= 0, comme dans le premier cha- pitre. Cependant cette hypothèse ne se vérifie pas et ô T prend une valeur que nous allons calculer. Donnons à Wlt W2, W W2 la signification que nous connaissons déjà et nommons x, y et z les coordonnées d’une particule du fluide dans la position \Vr Alors les coordonnées de ce point seront : dans la position W2 : x -f- udt, y + v dt, z q- w dt, dans la position W/: x -i- e*, y + fy, z -h ez, et dans la position W2: j , {à Qu- d 6x d Sx \ -, , X U d t Sx ( -r — U H V r — W ) d t , V dy d z J 7 j C» d Gy 3 Gy \ 7 « y+vdt + s# + [ i~u - h ^ v -h w )d t, a J \dx dy o z J i j /d Sz 0 Gr d 02 \ 7 . z -h tv d t + ez H- ( -z— u -h -r— v -h — w ) d t. v y dz J Il a fallu ajouter les termes: / d 3 Sx d Sx >\ 7 j , ( r— U H- -r— V H- "r w ) d t, etc. \dx dy d z J parce qu’il s’agissait des valeurs de e*, Gy, sz au point où la particule considérée se trouve dans la position W2. Les expressions précédentes donnent pour les vitesses de la particule dans le mouvement varié: LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 423 W 0 02- d X l ey 0 x 0 02 dx 0 0.r dy D e* Tzw’ 0 ©?/ 0 ©?/ w -h v -b w, 01/ 02 0 ©2 0 02 02/ 0 2: (44) Or, si en un même point de l’espace les vitesses étaient les mêmes dans le mouvement varié et dans le mouvement réel, on aurait dû trouver au lieu de ces expressions: d U du du u H- - — 0# -J- x — 0?/ H- x — 02, etc. d x 0 y J d z § 66. Après avoir obtenu les valeurs (44) on peut procéder comme il suit. On a d’abord 8 T f \ ( 2 0 0# 0 0# 0 ©.r\ = o I ’ [U2 -X h uv — f -UW xr— }"b J I \ dx dy d Z J f 0 Cy « 0 ©y 0 ©y\ H- ( WU — ^ +VW xr^ ) -b \ dx dy d Z J f 0 02 0 02 2 0 ^ J \ 0 x d y dz J ) T. Ici, on peut intégrer par parties. En supposant qu’aux limites du fluide e.r = ey ■= e~ = 0 et se rappelant que : du d V d W _ x b x h xr— = 0, 0 X dy dz fi J / du d U 0 U\ Q / 0./' ( u — + V b W x J i -b ' J f ^ d X dy dz J f dv d V 0 ' + 0y ( u — -b v x b W x— ) + ^ dx 0^/ 02! ^ J ( d W 0 w 0 k 1 3 -b e.. | U — ^ d X fl-'T y +W — dy 0 z ) \ \d T. on trouve : 424 H. A. LORENTZ. En fin de compte, l’équation (3) devient: J ( X Qj- -h T Gy Zj d t — d u\ Jz) d V \ dJj ) fi /d U d u ?j/ G 1 -h u d X i n V d V •+ ( J + u d X w d W -1- i G J H- u d X V V d u 0 y d V dy d w dy e, ey + d w' d~z &z i d r. du du v- H u) t y etc. dy dz Il est facile d’en déduire les équations du mouvement sous leur forme ordinaire. On s’apercevra que l’hypothèse en ques- tion, loin d’être vraie, conduirait à l’omission des termes d U U — d X § 67. Si cette hypothèse ne peut pas être admise dans le cas d’un fluide ordinaire, elle ne pourra non plus être appliquée au fluide électrique. Cependant, cela n’empêche pas que nos équations du mouvement ne puissent être exactes. En effet, la masse de ce dernier fluide a été supposée négligeable, et dans le calcul de la variation è T il ne s’agissait que de l’énergie cinétique qui est propre aux mouvements électromagnétiques ; il suffira donc que les points matériels qui sont chargés de ces mouvements, et qu’il ne faut pas confondre avec l’élec- tricité elle-même, jouissent de la propriété de revenir aux mêmes positions si pour chaque élément de surface la somme algébrique des quantités d’électricité par lesquelles il a été traversé, est 0. Or, on est entièrement libre d’essayer sur le mécanisme qui produit les phénomènes électromagnétiques telle supposition qu’on voudra, et tout en reconnaissant la difficulté d’imaginer un mécanisme qui possède la propriété désirée, il me semble qu’on n’a pas le droit d’en nier la possibilité. § 68. Cependant, cette hypothèse que nous discutons, est- elle vraiment inévitable si l’on veut voir s’annuler le terme è T, ce qui semble nécessaire pour obtenir des équations LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 425 qui s’accordent avec les expériences? Je vais démontrer, en me bornant pour le moment aux corps immobiles, qu’on peut au besoin recourir à une autre suppositon. Revenons pour cela aux formules (16). ^ Les coefficients A j B, C, A', . . . . qu’elles contiennent changeront avec la con- figuration du système et on peut indiquer par ô A, d B, ô C , ô A\ . . . . les changements qui surviennent pendant le dépla- cement Wt — ► W et par d A, d B, d C, d A' . . . . ceux qui ont lieu pendant le mouvement réel Wt — » W2. Cela établi, on peut écrire pour la première coordonnée d’une particule déterminée : dans la position Wt : x ; dans la position W2: x-\- 2 (A u-\-Bv-\-Cw)dt; dans la position Wt ': x -p Z (A e* -p R©y -p Ce*), et enfin dans la position W2 : x -p Z (A u H- B v -h Cw) dt -p ~h (A e.r -f- B ©y C ©2) {d A. ©.^ -j- d B. ©y -f d C. ©2). Il en résulte que le déplacement de la particule dans la direction des x est, pendant le mouvement varié: à ( A u B v O w ) d t -|- £ [d A. ©^- -P d B. ©y -p d G. ©2) . (45) D’un autre côté, on peut indiquer facilement quel serait ce déplacement si, à partir de la position W x\ il existait dans le système, pendant l’intervalle d t , un système de courants (u, v, w ) identique à celui qu’on trouve dans le mouvement réel. A la position W x correspondent les valeurs: A + ÔA, B + d B, et le déplacement qu’il s’agit d’indiquer serait donc: A (A u -p Bv -p C w ) d t -p £ (è A. u -p ô B. v -P d C. vi) d t (46). § 69. Si les expressions (45) et (46) sont identiques, et s’il en est de même des expressions analogues par lesquelles on peut représenter des déplacements parallèles à O Y et OZ, le mouvement varié sera celui auquel se rapporte l’expression (46) et on aura d T = 0, parce que l’énergie cinétique est dé- terminée par les composantes du courant. L’hypothèse du 426 H. A. LORENTZ. paragraphe 18 conduit à cette simplification parce qu’elle donne lieu à l’égalité : Z (d A. e? q- d B. çy + d C. e~) — z (8 A, u -h 8 B. v 8 C.w)dt. Pourtant, il n’est pas nécessaire que cette égalité existe. Les vitesses de la particule considérée, dans le mouvement réel, sont x = Z(Au -h Bv -h Cw), y — Z (A' u +■ B’ v -h C w), z = ^ (A" u + B" v h- C" w), et si les vitesses dans le mouvement varié sont x + îîV, • • • • y + 8 y, z -h S z, l’expression (45) donne d B d C \ dt e-y dt y . • T(àA Sx=*{tï G.r (47). Les variations 8 y et 8 z peuvent être mises sous une forme analogue, et on peut calculer la valeur de 8 T — Zm(x8x + ydy + z8z) (48). Voici maintenant un système d’hypothèses qui donnent pour cette variation la valeur 0: a. Il y a deux systèmes de particules qui prennent part aux mouvements électromagnétiques* systèmes qui seront in- diqués par les lettres N et N'. b. A chaque moment, une particule quelconque appartenant à l’un de ces systèmes se trouve dans le voisinage immédiat d’une particule de masse égale qui fait partie de l’autre. c. Les deux systèmes ont toujours des mouvements égaux en sens inverse, ou, pour nous exprimer plus exactement: Si deux mouvements de même durée commencent avec les mêmes positions initiales et ne se distinguent que par le signe des composantes du courant électrique, et si P et P' sont des points appartenant aux systèmes N et N' et coïncidant dans la configuration initiale, le point P' atteindra, dans le second mouvement, la même position finale que le point P dans le premier mouvement. v la THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 427 Cela implique évidemment qu’au moment de la coïncidence les points P et P' ont des vitesses égales et opposées. En effet, en changeant les signes de u , v, w, on renverse la vitesse du point P (§13); mais, selon la dernière hypothèse, cette . vitesse doit alors devenir égale à celle qu’avait d’abord le point P'. Remarquons encore que, dans le cours d’un certain mou- vement, ce sera chaque fois une nouvelle particule P' qui coïncide avec une particule déterminée P. Deux roues juxta- posées, qui ont des rotations égales et opposées autour du même axe, peuvent servir d’exemple. § 70. Pour démontrer que [ces hypothèses conduisent à Ô T — 0, nous allons comparer deux mouvements différents du système. Les lettres TF,, TF2, TF/, TF/ seront appliquées au premier cas et les signes (TF,), (TF2), (TF/) et (TF/) indiqueront les mêmes choses pour le second cas. Supposons que les positions TF, et (TF,) soient identiques et que, dans les deux mouvements, chacune des quantités u, v , wf e*, ©y, e? ait les mêmes valeurs, mais des signes opposés. Alors les mouvements TF, — ► TF/ et (TF,) — > (TF/) se dis- tingueront l’un de l’autre de la manière qui a été indiquée dans la troisième hypothèse du paragraphe précédent; il en sera de même des mouvements qui consistent, l’un dans la succession des déplacements TF, — * W2 et TF2 — > TF/, l’autre dans la succession de (F7,)— ►(TF2) et ( TF2 ) — ► ( TF2 '). Il en résulte que, si deux particules P et P' coïncident dans la po- sition TF, ou (TF,), l’une de ces particules se déplacera dans le mouvement varié TF/—* TF/ de la même manière que l’autre dans le mouvement varié ( TF/) — ► ( TF/) ; comme, de plus, les masses de P et de P' sont égales, le mouvement varié aura, dans les deux cas, la même énergie cinétique. On trouve donc: ar=(ir), (49) Archives Néerlandaises, T. XXV. 29 428 H. A. LORENTZ. où les deux membres se rapportent aux deux cas que nous voulions comparer l’un à l’autre. D’un autre côté, on peut appliquer les formules (47) et (48). On se rappellera que, pour une particule déterminée qui prend part aux mouvements électromagnétiques, les coefficients A, B, (7, etc. sont des fonctions des coordonnées. Les dérivées ^=4, etc. qu’on trouve dans les dt dt dt • • équations (47) et dans les expressions analogues pour d y, ô z seront, par conséquent, des fonctions homogènes et linéaire' de u, v , w , et comme il en est de même de x, y , z, la formule (48) conduit à ô T= — (ô T), ce qui, avec l’équation (49), donne Ô T= 0. § 71. Les hypothèses dont je viens de me servir introduisent dans la théorie un certain dualisme, auquel on est amené si souvent par l’étude des phénomènes électriques. En effet, elles ressemblent un peu à l’ancienne idée de deux fluides électriques qui se déplacent avec des vitesses égales et oppo- sées. Seulement, il ne s’agit pas maintenant de fluides élec- triques, mais des mouvements électromagnétiques. Si, comme il est fort probable, ces mouvements sont des rotations autour des lignes de force magnétiques, les hypothèses reviennent à ce que, dans un espace quelconque, il y a toujours des rota- tions de directions opposées et qu’il ne peut exister aucun effet qui serait causé par des rotations dans une seule direction. § 72. Dans les cas où la „matière” elle-même (Chap. II) se déplace, l’hypothèse du paragraphe 57 donne lieu à quelques remarques nouvelles. Soit s un circuit linéaire et fermé, dont le mouvement est tellement restreint que la position peut être déterminée à l’aide d’un seul paramètre p ; soient, de plus, e la quantité d’é- lectricité qui, à partir d’un certain moment fixe, a traversé LA THEORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 429 une section passant toujours par le même point du conduc- teur, et x la première coordonnée d’un des points matériels P du milieu. L’hypothèse exige que l’on ait : *=/(?» *)• Cela posé, je donne au système, l’un après l’autre, les dé- placements suivants : a. Tandis que le conducteur se trouve dans le voisinage du point P (position I), une quantité d’électricité a est amenée à . travers chaque section. b. Le conducteur est éloigné à une très grande distance du ; oint P. c. Pendant que le conducteur est retenu dans la nouvelle position (position II), on fait passer à travers chaque section une quantité d’électricité — a. d. Le circuit est ramené dans la position I. Si les déplacements b et d n’ont été accompagnés d’aucun courant électrique, la coordonnée x aura repris la valeur ini- tiale. Donc, si A a x, Ai x, etc. sont les variations successives de cette coordonnée: Aa x -h Ai x + Ac x + Ad x = 0. Or, comme la distance du circuit au conducteur est beaucoup plus grande dans la position II que dans la position I, la variation Ac x sera beaucoup plus petite en valeur absolue que la variation Aax ; les déplacements Abx et Aax ne sauraient donc être 0. C’est là, du reste, une chose très naturelle dans une théorie qui suppose que le conducteur ne peut se mouvoir sans pousser devant lui l’éther ambiant. Ce qu’il y a de remarquable dans le résultat obtenu, c’est que le déplacement du milieu qui est causé par un mouvement du conducteur doit être tel qu’il peut compenser le déplacement dû à un courant électrique. § 73. Si toutes les coordonnées des points mobiles du milieu sont des fonctions de p et de a, on trouve pour les trois par- ties dans lesquelles l’énergie cinétique peut être décomposée: 29* 430 H. A. LORENTZ. Tt T \ T3 = p2 X m — p i X m — l i2 X m m^c4) [ d x d x d y d y dp de d p d 6 V p [G-O’-Gî) + (H)]- d Z d Z~l *dp êTfJ ’ 00’] ■ où on a mis i au lieu de è. De ces trois expressions, la deuxième doit être 0. Voici deux hypothèses par chacune desquelles on peut satisfaire à cette condition. a . Chaque point mobile du milieu se trouve toujours jux- taposé à un autre d’une masse égale. Les liaisons dans le système sont telles que ces deux points sont déplacés égale- ment et en directions opposées par un mouvement électrique, mais qu’ils se meuvent de la même manière si ce n’est que le circuit qui se déplace. En distinguant par les indices 1 et 2 ce qui se rapporte à l’un ou à l’autre de deux points coïncidents, on a : d Xx d X2 ? y, _ d_Jh DS, d Z-2 dp Jp’ dp S p ’ dp dp d Xj d X2 ty, _ dVî dzx d Z2 JT ““ JT’ St ~~ St’ d * ~~ ~~ JT' ce qui fait : T 2 = 0. b. Dans les cas qu’on peut réaliser, les produits p p • d Z . . p - — sont si petits par rapport aux quantités : . d Z . d X lJ7 A d ê de qu’ils peuvent être négligés. Alors, bien que T2 ne s’annule pas rigoureusement, il sera permis de négliger cette partie de l’énergie cinétique vis-à- vis de la dernière partie Ts. A plus forte raison, on pourra négliger T, . C’est un avantage de cette seconde hypothèse, que la première ne présente pas. LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 431 • 0 x Il est facile de s’assurer que p — peut être beaucoup moin- dre que i — . Prenons par exemple X — y y, où 9 est une fonction de p et ip une fonction de t. Alors on aura : d (fi • d X dp dp p f(P +g> +h*)dr, V étant la vitesse de la lumière dans l’éther. Dans tous les points extérieurs aux particules on aura df dg dh A d X d y d Z (50) mais je suppose (§ 43) qu’à l’intérieur d’une particule cette équation doit être remplacée par 0/ ZJi__ d d y d Z '’ (51) où q désigne quelque quantité propre au point considéré de la particule et à laquelle il nous est impossible de rien changer. Cette quantité q sera appelée la densité de la charge électrique. LA THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 435 Pour simplifier les calculs, cette densité sera regardée comme une fonction continue des coordonnées ; on supposera donc que la valeur de o, 0 à l’extérieur d’une particule et positive ou négative à l’intérieur, ne présente pas une transition brusque à la surface. Cette dernière hypothèse nous donne le droit de regarder comme continues toutes les variables qui dépendent des coordonnées. Du reste, x, y et z désigneront les coordonnées d’un point immobile dans l’espace. En général, toutes les quantités vari- ables seront des fonctions de x , y, 2 et du temps t. c. Les particules se comporteront comme des corps rigides ; elles ne pourront donc avoir d’autre mouvement qu’une translation et une rotation. Dans ce mouvement, chaque point d’une particule conservera la même valeur de q. Les valeurs de /, g et h dans l’éther, lui-même immobile, doivent changer de telle façon que ce soit chaque fois dans un nouveau point de l’espace qu’il est satisfait à l’équation (51). d. Je désignerai par J, y et £ les composantes de la vitesse d’un point d’une particule chargée, et je supposerai que le „courant électrique” — c’est-à-dire le vecteur qui donne lieu à une énergie cinétique de la grandeur à indiquer tantôt — a pour composantes: . df d g d h /c?ox u — v — Q v ■*” ' w — £ £ A l’appui de cette hypothèse, que j’ai empruntée à M Hertz, on peut rappeler l’expérience bien connue de M. Rowland, dans laquelle la rotation rapide d’un disque chargé a produit les mêmes effets électromagnétiques qu’un système de courants circulaires. Elle a démontré que le déplacement d’un corps chargé constitue un vrai courant électrique, ce qui d’ailleurs est conforme à la théorie généralement acceptée de l’élec- trolyse. Or, on mesure toujours les composantes d’un courant par les quantités d’électricité, rapportées à l’unité de surface et à l’unité de temps, qui traversent des éléments de surface per- 436 H. A. LORKNTZ. pendiculaires aux axes des coordonnées. Si donc l’unité de volume d’un corps chargé, animé de la vitesse (£, y, f), con- tient la quantité d’électricité q. les composantes du courant seront q |, q y, q Ç. D’un autre côté, on admet dans la théorie de Maxwell que les variations du déplacement diélectrique constituent un cou- rant aux composantes ^ . Les équations (52) expri- o t d t ut ment donc que le vecteur dont dépend l’énergie cinétique est composé des deux courants dont nous venons de parler. Ce „ courant total” a la propriété importante que la distri- bution en est solénoïdale. En effet, dans le mouvement d’un corps rigide on a: dj d x et par conséquent: !-’-4£=o, u y dz (53) du d V d W . do d X d y d Z d X do dp VTy+lrz ou bien, en vertu de la formule (51), du d v d X d y ■*" dt u \dx^dy^dzj’ dw_dQ dQ do dç ~z — — T-r -b Ç r b rj z b Ç z — . dz dt d X d y dz Ici le second membre représente la variation par unité de temps de la densité électrique dans un point qui se déplace avec la particule; l’expression s’annule donc en vertu de 1 hypothèse c. e. Grâce à la propriété que je viens de démontrer, on peut admettre que la relation entre le courant électrique (u, v, w) et l’énergie cinétique est toujours celle que nous avons appris à connaître dans le premier chapitre. Comme il s’agit des phénomènes dans l’éther il n’y a pas lieu de distinguer la force et l’induction magnétiques; je déterminerai donc la force magnétique (a, /5, y) par les équations: LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 437 et j’attribuerai à l’énergie cinétique la valeur: +P +-/2)dr. On obtient ces formules en posant a “ b z= (3, c = y dans celles des paragraphes 9 et 10 ; on fera les mêmes substi- tutions dans les équations (14) qui servent à définir les fonctions auxiliaires F, G et H . /. Enfin, je supposerai que la position de chaque point qui prend part aux mouvements électromagnétiques est déterminée dès qu’on connaît la position de toutes les particules chargées du système et les valeurs de /, g et h dans tous les points de l’espace. C’est une hypothèse analogue à celle que j’ai discutée au chapitre précédent et présentant les mêmes dif- ficultés. Valeur de la variation 8' T. § 76. Cette fois encore, j’aurai recours à la formule générale (3) pour trouver les équations du mouvement. Je commence par la variation 8' T. Désignons par x', y', z' les coordonnées d’un point quelconque qui prend part aux mouvements électromagnétiques, et par x, y, z celles d’un point quelconque d’une particule chargée. Un déplacement virtuel du système peut évidemment être défini au moyen des variations 8 x, 8 y, 8 z d’une part et des variations 8f, 8 g, 8 h de l’autre, et les quantités 8x,8y',8z seront des fonctions linéaires et homogènes de toutes les va- 438 H. A. LORENTZ. riations ô x, ô y, fi z, cl y, è' /i. Les coefficients de ces der- nières quantités seront des constantes tant qu’il s’agit d’une position initiale déterminée. En remplaçant, dans les fonctions dont il vient d’être question, Sx, d y, ô z, d /, ô g, dh par x, y, z (ou J, y, £), /, y, on aura les valeurs de x', y', z' et, en y remplaçant de nouveau J, 77, Ç, / y, h par ô S, d y, d Ç, 5/, d y, d X, on trouvera les variations correspondantes des vitesses x', y', z', la configuration étant toujours regardée comme constante. Il en résulte que si, sans rien changer à la configuration, on donne à y, Ç, /, g . ^ les accroissements d x, à' y, à' z, à'/, d y, 5 h. les vitesses de tous les points du système subiront précisément les variations dont il était question dans la dé- finition de T. Or, ces variations de ?, y, J, /, y, h donnent lieu aux va- riations suivantes des composantes (52) : q d x H- dff q d y + 8 g, q d z -f- d h, et on aura par conséquent (§ 12): fl' T=j j F (q Sx. + $f) + G ( W / et W2 — > W2' n’affec- 442 H. A. LORENTZ. tent pas les valeurs de g et de h, les dérivées g et h seront dans le mouvement varié ce qu’elles étaient dans le mouve- ment réel. d. Le cas est différent pour f. Si, en un point déterminé de l’espace, la première composante du déplacement diélectrique a la valeur / dans la position Wn la valeur sera f-hf dt dans la position W2if se rapportant au mouvement réel. La valeur dans la configuration W x' sera (§ 78) f-Qàx (59) et on obtiendra la valeur variée, pour le moment t -h d t, en ajoutant à / fdt ce que devient — q 8 x à ce moment dans le point de l’espace considéré. Il est clair que q y est devenu : et la variation 8 x ne change pas avec le temps. On peut donc écrire pour la valeur de / dans la configuration W2': / + + • (60). En divisant par d t la différence des expressions (59) et (60) on trouve la valeur de / dans le mouvement varié. La vari- ation de / devient o i? dx ’ 7 d y ce qui, joint aux expressions (58), donne: u = \- g(gl) d X 0 lQ_ d X V ap. dy 8 v — ^ 5 x, d X _ 3 (g 0 W — 8 x, 8 T d X Jr ' T + dx + v dy+l dz) — G dy 0 (g y) à g 0 z d X H a (g 0~ 0 a; . LA THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 443 Il est clair que c’est seulement dans l’espace occupé par la particule M qu’il y aura des variations de u, v et w ; l’in- tégrale doit donc être étendue à cet espace. L’équation peut être transformée au moyen d’une intégration partielle. En ayant égard aux formules (14) et (53) et à la circonstance que Q = 0 à la surface de la particule, on arrive à la formule assez simple : ÔT=ôxj’()(v/ — /3) d t. On n’a plus qu’à substituer cette valeur et celles de 8 A et ô' T (§79) dans l’équation (3). Voici les valeurs définitives des composantes de la force cherchée : X = 4 TT F2 T = 4tt F5 Z = 4 n F2 fçfdr H- [(ffoy — çp) dr, ) I f Q9 dr + f q (Ça — Ç y) d t, ^ - • • fçhdr 4- J Q (£ fi — va) d T- (61). Moment du couple qui agit sur une particule chargée . 1 ) § 81. Je considérerai les particules comme de petites sphères dans lesquelles la densité électrique q est une fonction de la distance r au centre et je choisirai ce dernier pour le point d’application de la force (X, Y, Z)- Quelles sont alors les com- posantes L, M, N du couple qui provient des actions exercées par l’éther? Pour les calculer, j’aurai recours à un artifice, analogue à celui qui nous a servi au paragraphe 78. Dans le cas où la masse de la particule M peut être négligée, — L, — M, — N doivent être les composantes du couple qui dérive des forces extérieures, et si on prend pour le déplacement A) On peut comprendre toutes les applications de la théorie sans avoir lu les paragraphes 81—89. Archives Néerlandaises, T. XXV. 30 444 H. A. LORENTZ. virtuel une rotation infiniment petite co autour d’un axe pas- sant par le centre et parallèle à O X, le travail de ces forces sera — L CO. Comme la densité q dans un point déterminé de l’espace n’est pas changée par la rotation, on peut supposer que le déplacement virtuel n’atteint pas les valeurs de /, g et h. On aura donc ô A — L œ, et en considérant co comme indépendant du temps on s’assure facilement que Ô T = 0. Reste à calculer <5' T. Si x, y et z sont les coordonnées d’un point de la particule M , prises par rapport au centre, on aura 8 X = 0, d y =: — co z, ô z nr -f- co y, et, par la formule (56), d'T = œjQ (Hy — G z) d t. On finira par trouver pour les composantes du couple : M= Jjf q(Hx — F7.) dr, (62) N=^jjg(F y-Gx)dr, où les intégrales doivent de nouveau être étendues à l’espace occupé par la particule considérée. Vitesse de rotation d’une particule. § 82. Soient: m la masse d’une particule, l son rayon d’inertie par rapport à un axe passant par le centre, #.r, fy, d’- lès vitesses de rotation autour de trois axes qui sont parallèles LA THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL 44 5 à 0 X, 0 Y et O Z. Supposons que les forces extérieures ne donnent pas lieu à un couple. Alors on aura d &.r d t m V A d t J (j (Qz — Hy) d r, etc. d’où l’on tire: d r, etc. (63). Il n’est pas nécessaire d’ajouter des constantes, si on admet, comme cela est bien naturel, qu’antérieurement aux mouve- ments que nous étudions, le système a été à l’état de repos sans qu’il y eût des courants électriques. Alors, dans cet état initial, les quantités F, G , H , 0>, 0>, O* ont toutes été ,0. § 83. Pour transformer les intégrales, je désigne par r la distance du centre au point (x, y, /), par R le rayon de la parti- cule, et je définis une fonction auxiliaire i au moyen de la formule : rR X=J q r dr. En introduisant cette fonction, qui dépend de r seulement, on trouve: ou bien, en intégrant par parties et en se rappelant que, pour r — R, y — 0: Si, dans toute l’étendue de la particule, la densité q a le même signe, il en sera de même de la fonction y et on peut écrire, en représentant par ü une certaine valeur moyenne, ou, après quelques transformations, 30* 446 H. A. LORENTZ. 4 « f* 3 71 ml*] J d r. Si q était la densité de la matière pondérable, la dernière intégrale aurait la valeur 3 8 -ml'1. Maintenant que q représente la densité de la charge élec- trique, on aura d’une manière analogue rR 3 i si e est la charge totale et V une longueur qui est déterminée par la distribution de la charge, tout comme l est déterminé par celle de la matière pondérable. On arrive ainsi aux for- mules xbi « e V 2 _ Pel'2 Xty 6 r- 2 ml11 2 ml* ’ 2 ml'1 Si la particule ne possédait aucune masse, ces équations exigeraient « = ? = ï = 0, c’est-à-dire que la particule tournerait alors si vite et dans une telle direction que la force magnétique moyenne à l’in- térieur en deviendrait 0. Cependant, je ne négligerai pas la masse; je lui attribuerai même une telle valeur que les rotations n’aient pas d’influence sensible. Influence des rotations sur les valeurs des forces X, Y et Z- § 84. La vitesse (|, ?/, Ç), dont les composantes entrent dans les derniers termes des formules (61) peut être décomposée en deux parties, la première étant la vitesse (?0, ?/0, Ç0) du centre, c’est-à-dire la vitesse de translation, et la seconde, que LA THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 447 je représenterai par (?,, £,) étant due à la rotation. Pa- reillement, on peut distinguer dans la force magnétique totale H ou (a, p, /): 1°. la force magnétique H0 qui existerait si la particule considérée était en repos, 2°. celle (H,) qui est due à la translation dont elle est animée, et 3°. celle (H2) qui est causée par la rotation. Ces divisions conduisent à regarder X, T et Z comme com- posés de plusieurs parties, que nous allons considérer succes- sivement. § 85. Si, d’abord, on se borne à la force magnétique H 0 , et si l’on suppose qu’elle a la même valeur et la même direc- tion dans tous les points de la particule, ce qui est évidem- ment permis quand cette dernière est suffisamment petite, on est amené à des intégrales telles que les intégrales j q rj , d r, etc. s’évanouissant, parce que la dis- tribution de la densité q est symétrique autour du centre. Tant qu’il s’agit de H0 seulement, on peut donc faire ab- straction de la rotation ; et si est la partie de la force (X, T, Z) qui correspond à H0, on aura évidemment (§ 6, k) : v étant la vitesse de translation. § 86. A cette force $ il faut ajouter: 1° une force qu’on obtient en combinant, de la manière qui est indiquée dans les formules (61), la force magnétique H, et la vitesse v ou (|0, £0); 2° une force g*11 qui résulte de la combinaison de H , avec (£i. v,, Si); j Qt]y0dT = -/0 j e()70 + ti,)dr, etc. Elles peuvent être remplacées par £(=)H0ev, (65) 448 H. A. LORENTZ. 3° la force qui dépend en même temps de H2 et de (£o> Vo> £o)> 4° la force ^IV qui est déterminée par H 2 et (g , , rj , , £ , ). Cependant, nous n’aurons pas à nous occuper de g*1, parce que c’est l’effet d’une rotation que nous désirons connaître. Pour simplifier encore davantage, je n’essayerai pas de déterminer rigoureusement g*111, ^IV; cela exigerait des calculs bien laborieux, parce que H, et H2 dépendent, non seulement du mouvement actuel de la particule, mais aussi de sa translation et de sa rotation antérieures. Je prendrai pour H, et H 2 les valeurs que ces forces magnétiques au- raient si la particule était animée d’une translation ou d’une rotation constante; il semble qu’on peut ainsi obtenir une idée suffisante de l’ordre de grandeur des quantités cherchées. Or, après avoir introduit cette simplification, on peut dé- montrer que, pour des raisons de symétrie qu’il semble super- flu de spécifier, ^IV — 0. Il nous reste donc à évaluer g111 et § 87. Considérons une particule qui est animée d’une vitesse de translation v, le centre décrivant une ligne droite, et construisons, à l’intérieur, un cercle de rayon r, dont l’axe coïncide avec cette ligne. Ce cercle indiquera la direction de H, et sera, en même temps, le lieu géométrique des points où ce vecteur a une valeur déterminée. Or, en se rappelant la pro- priété fondamentale de la force magnétique (§ 9, 2) et en ayant égard à ce que le courant qui détermine H , est du même ordre de grandeur que q v, ou que — ~} R étant le rayon de la particule, on trouve 2., H, 1^, OU LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 449 Lorsque, en second lieu, la particule tourne autour d’un dia- mètre avec une vitesse angulaire d-, elle peut être divisée en un système d’anneaux à sections infiniment petites, qui ont tous pour axe ce diamètre. Si l’un quelconque de ces anneaux a le rayon r et la section d a, il y existera un courant dont l’intensité i, prise dans le sens ordinaire du mot, est du même ordre de grandeur que le produit q & rdo. Un tel courant annulaire produit, comme on sait, à son centre une force magnétique ^ - (=) 2 n q d- d . LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 457 Force électrodynamique agissant sur un élément d’un circuit linéaire. § 95. Dans l’étude des courants électriques qu’on peut ob- server par les moyens ordinaires, il ne faut pas perdre de vue que la plus petite partie d’un conducteur sur laquelle on puisse opérer contient toujours une multitude énorme de particules chargées ; on peut même concevoir une partie de l’espace qui satisfait à cette dernière condition et qui peut néanmoins être regardée comme infiniment petite dans une théorie ayant pour objet, non pas le mouvement des parti- cules individuelles, mais les effets d’ensemble qui sont acces- sibles à nos sens. Un tel élément de volume sera représenté par Dr, pour le distinguer d’un élément d r qui est infini- ment petit dans le sens mathématique et peut par conséquent trouver place même à l’intérieur d’une seule particule. Or, il est clair qu’en suivant une ligne droite de petite longueur, tirée dans un conducteur, on rencontrera en succes- sion rapide des valeurs très différentes des fonctions j, g , h , u, v, w, a, /, la droite se trouvant tantôt dans le voisinage immédiat ou même à l’intérieur d’une particule chargée et tantôt à une distance plus grande. Cependant, ces variations ra- pides n’ont aucune influence sur les phénomènes considérés; ce qu’on peut observer dépend uniquement des valeurs moy- ennes, qu’on peut définir de la manière suivante : Si l’on conçoit un élément sphérique B r ayant pour centre un point quelconque P, et qu’on prenne la valeur moyenne ip qu’une fonction xp présente à l’intérieur de D r, cette valeur xp sera nommée la valeur moyenne au point P. Evidemment, on aura l’intégration s’étendant à la sphère D r. Le résultat sera une 458 H. A. LORENTZ. fonction de t et des coordonnées x% y, z du point P, et on démontre facilement les relations suivantes : d xp d Xp d xp D Xp d Xp t) i p d x p d X{i dt dt ' d X dx ’ d y d y 1 d Z D z * Il en résulte que les équations h dy d X D y d Z U 0 Z =. 4 TT Uj D « 0 Z D/ A ~ = 4 7i v, 0 x DJ D x D a dy =r 4 tc w I i • • • (67) auront toujours lieu, si l’on entend par a, (3, /, u, v et wles valeurs moyennes. Il est clair du reste que xp = xp si la fonction xp ne présente pas de variations rapides à l’in- térieur de l’élément D r. § 96. La valeur moyenne de u (§ 75, d) est: M==Fï/e? — f y, — î z> f étant une constante qui dépend de la structure de la mo- lécule. Du reste, ce coefficient et la charge e seront regardés comme ayant les mêmes valeurs dans toutes les molécules d’un même isolateur homogène. Si (3£, 2), 3) esf la force que toutes les particules chargées qui se trouvent au dehors de la molécule considérée exercent sur une particule à unité de charge placée au point P, la particule mobile sera en équilibre si x=eX v==«8 /==e_3 et on aura m* = -y$, ra, = -|-D, m, = -j3 (70) § 102. Voici le problème qu’il faut résoudre pour se rendre compte de l’influence d’un diélectrique homogène et isotrope dans les phénomènes électrostatiques. Un système de conducteurs est placé dans un diélectrique qui s’étend à l’infini, et chaque conducteur est maintenu à un potentiel donné. Déterminer les charges. Remarquons d’abord que le potentiel cp en un point quel- conque d’un conducteur, c’est-à-dire la somme LA THEORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 465 peut être décomposé en deux parties cp{ et 2, l’une étant produite par les particules chargées qui se trouvent sur les conducteurs eux-mêmes, et l’autre par la „ polarisation” des molécules du diélectrique. Je commencerai par calculer la valeur de qp2 dans un point Q extérieur au diélectrique, et, pour m’exprimer avec plus de clarté, je désignerai par D s, D <7, D v des éléments dont les dimensions sont très grandes par rapport aux distances moléculaires Soient x , yi z les coordonnées d’un point dans le diélec- trique, x, y\ z' les coordonnées du point Q , r la distance de ces deux points, N le nombre des molécules par unité de volume, nu, Nty, nu les valeurs moyennes (§ 95) de nu, l%, nu au point (x, y , z), N nu = M*, N 1% = M/7) N nu = IVb- Le vecteur M est alors ce qu’on peut appeler le moment électrique rapporté à l’unité de volume. Un calcul très simple donne pour la partie de qp2 qui est due à une seule molécule et pour celle qui provient d’un élément D v La valeur cherchée sera donc et, en intégrant par parties, on arrive à l’expression suivante : — _ F ( M- U ci — V (-1 ( y*f + + ~ ) D T. J r J r\d x d y o z J Dans ce calcul, on s’est borné au cas où la plus petite valeur de r est encore très grande par rapport aux distances 466 H. A. LORENTZ. moléculaires. Cela n’empêche pas que cette valeur ne puisse être tiès petite par rapport aux dimensions des conducteurs; la formule peut donc être appliquée à des points Q qui se trouvent dans le voisinage immédiat de la surface. La première intégrale doit être étendue aux surfaces qui limitent le diélectrique, la normale n étant dirigée vers l’inté- rieur de ce corps. Du reste, la formule peut être interprétée ainsi: En ce qui regarde les actions exercées sur des points exté- rieurs, le diélectrique peut être remplacé par un système or- dinaire de particules chargées, distribuées d’une part sur l’espace r occupé par l’isolateur, d’autre part sur les surfaces ' — x) (?/' — y) _ — *) te' — g) _ 0 (77) r5 r ~ ■ ■ \ ) 2' 3 te' — æ)2 — r2 _ ^ 3 ( V ' ~ ÿ)2 — rj fy* D — ~r" . . (78) Les trois dernières expressions seront par conséquent égales à la troisième partie de leur somme qui est 0. Dans les diélectriques amorphes, les molécules sont dissémi- nées d’une manière moins régulière. Cependant, en se bornant aux corps isotropes, on arriverait encore à la conclusion: 3E' = y = 3' = 0 (79) s’il était permis de remplacer dans la somme (76) toutes les valeurs de m*/, m/, m* par de certaines valeurs moyennes et d’admettre encore les égalités (77) et (78), qui expriment que la distribution des molécules est symétrique par rapport aux trois axes. Même si on voulait mettre en doute la conclusion (79) on pourrait remarquer que l’influence exercée par le diélectrique dépend, non pas de l’état des molécules individuelles, mais des valeurs moyennes m#, my, m*. Or, après avoir calculé 470 H. A. LORENTZ. 36', 5)', 3 P0U1‘ une molécule il 1, on peut faire la même chose pour une autre molécule, en décrivant, bien entendu, autour de cette dernière une sphère B égale à celle au centre de laquelle se trouve M. A chaque molécule appartiendront donc des valeurs spéciales de 36', 3)', 3 ’ et» on peut considérer les valeurs moy- ennes 36', 3)', 3' de ces fonctions dans un élément de volume D v. Il est clair qu’on obtiendra m*, m y et m* si, dans les formules (75), on remplace 36', 3)', 3" Par 36', 3)', 3>etPour arriver aux simplifications qui découlent des équations (79) il suffit que S' = f = 3' = o. Ceci pourrait être vrai même dans le cas où la position accidentelle des molécules M' les plus voisines du centre de la sphère donne lieu à des valeurs positives ou négatives de 36', 3)', 3'. En effet, la ligne qui joint une molécule à celle qui en est le plus rapprochée aura toutes les directions pos- sibles ; il se pourrait donc que la distribution irrégulière et le défaut d’isotropie qui existent dans une seule des sphères B ne se fissent plus sentir dans les valeurs moyennes 36', 3)', 3 • § 106. On connaît les erreurs auxquelles on s’expose dans les théories moléculaires en se servant des „ valeurs moyennes” et de raisonnements aussi superficiels que les précédents. Aussi me semble-t-il préférable de ne pas supposer nulles les valeurs de 36', 3)', 3 • Les considérations suivantes peuvent cependant nous fournir quelques renseignements sur ces valeurs. a. Chaque molécule M se trouve en général soumise à deux forces électriques, l’une (36, 3), 3) étant due à tout ce qui se trouve au dehors de la sphère B, l’autre (36', 3)', 3 ) aux molécules situées à l’intérieur de cette surface. Supposons que 3) = 3 — 0 et que la force 36 ait la même valeur quelle que soit la molécule M pour laquelle elle est calculée. Alors le moment électrique prendra dans chaque molécule une grandeur et une direction déterminées, qu’on pourrait trouver si on con- LA THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 471 naissait parfaitement la distribution des molécules. Comme, dans les corps amorphes, cette distribution est fort irrégulière, les moments électriques présenteront des changements brus- ques si on passe d’une molécule à une autre, et ils n’auront pas en général la direction de la force 36- Cependant, tout s’arrangera d’une telle façon que m.r = y (X + X'), 1% = -y 2)', ni: = y 3' • • • (80) b. Les forces 36', 3)', 3 sont des fonctions linéaires des moments m/, m/, m/ excités dans les molécules voisines de M. Il en résulte que, si on change la grandeur de la force 36, tous les moments changeront dans la même proportion, en conservant les directions qu’ils avaient. c. Il existe entre les valeurs moyennes la relation suivante : m* = y (X + X'), 1% = y 2)', m* = e- Mais il est clair que dans un corps isotrope r% = me = 0 et par conséquent: f = 3' = o. Quant à m,, ce moment moyen doit être proportionnel à la force 36, parce que cette proportionnalité existe pour les moments de toutes les molécules individuelles. Il y a donc également proportionnalité entre 36' et m,r ou M*, ce que j’ex- primerai par 36' = s F2 M,, le coefficient s étant constant pour un diélectrique donné, mais variable avec la densité. d. Si 3) et 3 ne sont Pas 0, mais que la force (36, 3), 3), constante dans toute l’étendue du diélectrique, ait une direction quelconque, on aura de la même manière 32' = «PM,, 3)'=sy2My, 3 = 8 V‘ IVb; , . . (81) 472 H. A. L0RENT2. on s’en assure en introduisant pour un moment des axes des coordonnées dont l’un ait la direction de la force (36, 3), 3). e. Les relations (81) subsisteront encore si la force (36, 3), 3) varie d’une molécule à l’autre, pourvu que cette variation soit si lente qu’il faille passer sur un grand nombre de molécules avant qu’elle devienne sensible- f. Voici encore une remarque qui nous sera utile dans la suite, et qui est vraie dans tous les cas où 36', 3)', 3' ne s’annulent pas. Supposons que, sans modifier la distribution des molécules, on en puisse changer la nature et donner ainsi à la constante f une valeur nouvelle. Alors, même si on augmente ou diminue convenablement la force 36 qu’on trouve dans les formules (80), il est impossible que les moments électriques des molécules conservent tous les mêmes valeurs. Il est également impossible qu’après le changement de f les composantes de tous les moments soient proportionnelles à leurs valeurs primitives. Il en résulte que le coefficient s ne reste pas le même si f vient à changer. § 107. En vertu des formules (75) et (81) on trouve: M, - N-f(— + y *■ v ‘ M,r + s F2 M,), etc , ou bien, si on pose : A' Ve 2 f — iVe2(|7r + s)F2 ~~q’ m ^ M dqp M M „ = — g— M,/ = — q —, M~ = 1 d x J d y D cp qVz Ensuite, les équations (72) et (73) deviennent (1 +AuqV)^ = — i7tVS (82) et a cf) “ 0 (83) § 108. Cette dernière formule, jointe aux valeurs de cp pour les différents conducteurs que je regarderai comme données et à la continuité de 9 21 f*2> Y 2 pour le cas où une autre particule se déplace à travers l’éther, cette autre particule étant à son tour regardée comme la seule qui existe. Alors, il est clair que les valeurs : f— /, + fit 9 — 9\ + 9-n h=h, 4- cc z= a , + a2, (i — p , + pit y = / , + /2 satisferont à toutes les conditions du problème, si les deux particules existent simultanément. Ce théorème peut être étendu à un nombre quelconque de particules chargées. On cherchera, pour chaque particule, un système de valeurs de /, g , h, a, (?, /, qui soit compatible avec son mouvement — en raisonnant comme si les autres par- ticules n’existaient pas — et on combinera toutes ces solu- tions par simple addition. Du reste, il ne faut pas croire qu’on trouverait ainsi l’état réel de l’éther. En effet, aux valeurs de /, g , h, a, y , on peut toujours ajouter des valeurs quelconques qui satisfont aux équations (85). § 111. On peut trouver deux étatg différents de l’éther qui sont compatibles avec les vibrations d’une particule chargée. Dans le premier, la particule est le centre d’un ébranlement qui se propage en dehors; dans le second, des vibrations de l’éther se dirigeront de tous côtés vers la particule dont elles chercheront à maintenir les oscillations. Nous nous occu- perons seulement des solutions de la première espèce, qui se présentent immédiatement à l’esprit. En effet, supposons qu’une source lumineuse commence à un certain moment à émettre des vibrations. Ce mouvement se propagera dans l’éther et at- teindra à un instant déterminé la première particule chargée du diélectrique. Aussitôt, les forces déterminées par les formules (I) (§ 90) entreront enjeu ; elles déplaceront la particule et, conjoin- Archives Néerlandaises, T. XXV. 32 476 H. A. LORENTZ. tement avec les autres forces auxquelles elle est soumise, en dé- termineront le mouvement. Mais, en vertu de son agitation, la particule devient elle-même le centre d’un ébranlement qui se propage dans toutes les directions et se superpose à l’état de l’éther déjà existant.. Au moment où elle est atteinte par les vibrations électriques de l’éther, chaque molécule suivra l’exemple de la première, et en définitive des vibrations éma- neront de toutes les particules chargées. Il importe cependant de remarquer qu’on peut opérer avec une solution particulière quelconque qui s’accorde avec le mouvement des particules, pourvu seulement qu’on rétablisse la généralité nécessaire en ajoutant à cette solution une autre, qui satisfait partout aux équations (85). Si, dans les pages suivantes, il est question du mouvement que „produit” une particule vibrante, cela servira simplement à indiquer une solution particulière qui est compatible avec les oscillations. Vibrations dans Vétlier produites par une seule molécule. § 112. Des équations (II) — (V) (§ 90) on peut éliminer cinq quelconques des variables /, g, h , «, (5, /. On trouve ainsi: F2 A / 11 1 _ J72 3 <2 3 x Hs 5) 3 t etc. F* A « - = 4 n V* d £ D Q Yz ~dy ). etc. • (86) • (87) En appliquant ces formules à une molécule qui contient une particule mobile P, je me bornerai à un cas bien simple ; c’est celui où les écarts de la position naturelle sont infini- ment petits par rapport aux dimensions de la particule elle- même. Hâtons-nous d’ajouter que les résultats resteront vrais LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 477 si Y amplitude des vibrations est beaucoup plus grande, pourvu seulement qu’elle soit très petite en comparaison des dis- tances moléculaires. Cette extension de la théorie ne se trouvera pas dans le chapitre présent ; elle sera reléguée à la „Note additionnelle” qui terminera ce mémoire 1 ). J’ai pris ce parti dans l’espoir de faciliter ainsi la lecture et de faire mieux ressortir les traits essentiels de la théorie que je désire proposer. § 113. Soient: x, y, z les projections du déplacement de la particule mobile et o() la densité électrique au point {œ, ?/, z), dans le cas où elle a sa position naturelle. Alors, on aura dans les formules (80) et (87) 1_15? d X — y Vo dy I - — dt’v — d t ^ dt • . . (88) . . . (89) et, comme ces dernières quantités sont, par supposition, infini- ment petites, ainsi que x, y, z, F2 A/ — ‘-J — V 2 O. 0' d2 x 0 d<2 0 x ? y dxdzj etc. (90) V2 A a 0 t‘ = 4 7 T V2 fdy d Qo _ \d t d z . 32 (o z)/ f OzD t 3ÿ 3 C , etc. . (92) On y satisfera en introduisant quatre fonctions auxiliaires co, %2> 1 3> au nioyen des conditions: 02co F2 A co D t2 fo > (94) F’ A 31ll_ 3«2 ~ F’ 4 *.-%’ = »•>• = ■ 0») et en posant f = V2 — ^ 2 Z i | OiC ( d X2 d X d y d X d Z )~r d t2 a = 4n F2 ! 3* ) a: 32 X* Xî + 32 y.3 | 32 -, 32 Xs j etc. fi > etc (96) • (97) 1 d Z d t d y d t 1 La densité oQ est indépendante du temps; il en sera donc de même de la fonction co, et elle sera déterminée par la relation : A co — y2 q0. (98) On s’assure facilement que les valeurs (96) et (97) satisfont aux équations primitives (II) — (V). On trouve, par exemple, ^ + ^ + ^ = F2a»-tM V2 ax,-^4M d X d y d Z d X ' A 1 d t2 \ D . 02 y Al ‘ t 2 > os ' or2 v“ 0 a; 3 Q0 à Q0 y^— — z = 0. 0 y d z 0 En effet. oc est indépendant du temps, et x, y et z sont indépendants de æ, y , z. LA THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 479 § 115. D’après les formules (96), les fonctions/, g et h con- tiennent les termes y 2 3» y2 y2 3® d x’ d y’ d Z 9 (99) qui sont indépendants du mouvement de la particule. Or, tant que cette dernière est maintenue dans sa position d’équi- libre, la molécule entière dont elle fait partie n’exerce aucune action sensible en des points qui sont situés à quelque dis- tance, par exemple, dans une molécule voisine. Il s’ensuit qu’en de tels points les parties immobiles de la molécule produisent un déplacement diélectrique égal et opposé à celui qui a pour composantes les expressions (99). Si donc on con- vient d’entendre par f, g , h, «, (1, / les valeurs qui sont dues à la molécule entière , on aura à quelque distance, f — y'2 \ c Xi v \ dx> h d X d y X 3 I d X d Z l d t2 ’ etc. (100) = 4 7 T V2 U X 3 ( d z dt d y d t \ etc. . . . (101) Quant aux fonctions elles peuvent être déterminées à l’aide des théorèmes qu’on trouvera dans les deux paragraphes suivants. Théorèmes mathématiques . § 116. Soient: x un espace limité par une surface quelconque (t; dx un élément de volume situé au point variable (x, y', z); (x, y , z) un point qui est situé dans l’espace x' et qui est regardé comme fixe si on veut effectuer les intégrations dont il s’agira tout à l’heure ; U (x\ y', z\ x , y , z) une fonction qui est finie et continue pour toutes les valeurs des coordonnées, excepté pour x = x, y' z= y, z! = 2. Considérons l’intégrale : 480 H. A. LORENTZ. 1 = jr U {x', y', z', x, y, z) d x', où l’indice r indique qu’il faut exclure du champ de l’intégra- tion une sphère b, à rayon r, ayant pour centre le point (a?, y , z ), le rayon étant toujours le même quelle que soit la position de ce dernier point. L’intégrale sera une fonction de x, y et z, et on a le théorème que voici: r, = -\l«-*'>üdb+lrïjd'’ <102> où la première intégrale est étendue à la surface de la sphère. Démonstration . Soient : A le point ( x,y,z ), B le point (x -h ô , y , z), ô étant une longueur infiniment petite, Ia et 1b les valeurs de l’intégrale relatives à ces deux points. Il s’agit de calculer: D I _ 1B- 1a d X ô Supposons qu’en déplaçant le point (x, yf z) de A vers B on donne, en même temps, une translation égale à tous les éléments d x . L’ensemble des éléments déplacés, que je nom- merai ( d r'), constitue un espace qui est limité à l’intérieur par la sphère b décrite autour du point B , c’est-à-dire par la sphère jusqu’à laquelle il faut étendre l’intégrale Ib , et à l’ex- térieur par une surface ■ (a) qui n’est autre chose que la sur- face a déplacée sur une distance ô. Il en résulte que, pour changer lj en Ib, il faut d’abord remplacer, dans la fonction U, x et x par x + d et x + ô ; de la valeur ainsi obtenue il faut retrancher l’intégrale ( U (x, y’, z', x, y, z)dr étendue à la zone qui se trouve à l’intérieur de (cr) et à l’ex- térieur de a, et il y faut ajouter une intégrale analogue relative LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 481 à la zone qui est à la fois extérieure à (z)- Démonstration. Le théorème précédent donne : si = Î^TFï Um [7/ X~T^~ F«~V’ *’ y'’ z'] d b] - - HTT2 / ÔT I ï F(‘~? yl’ z'} i d T'- Pour déterminer la limite, on peut, dans le premier terme, remplacer F (t — ÿ, x', y', z' ) par F (t, x, y, z). On voit alors que ce terme s’évanouit et que K1 = — 2~ T/7 f V" i — F (( — V > x'> V> z') !<* d’où il suit, par une nouvelle application de la formule (104), ^ = 47TïLim [t/(* “ T’*’y'’*)\dh] 1 f D2 (1 r , , n F2 J 2 x* i r V’X,y’ z1) dv' . • (105) Soit F' (t} x} y } z ) la dérivée de F(t, x, y , z) par rapport à t. Alors: j)_ d x \ r \ F {t — ~ , x, y’, z) j = X — X (. r , , , . x —x / r , , \ (t — -y, *> y, 2 )— jry F y— y> x>y,z b ce que, dans le premier terme du second membre de (105), on peut remplacer par: — ~Ï~ F (<• x> y> z) — ~ry F' (<) x> y> «)• En définitive: LA THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 483 Il y a des formules analogues pour V * ï-f et V1 . 2 , dy2 d z1 et comme : 32X. d i2 ' on trouve : 1 f 0 2 i 1 r / . r , , , J , , ^l^\rF{t-V’X’y’2)\dl’ V‘ ax— = F (<> y . *) — vt à - £> ) >'• » i ; Or, un calcul direct nous apprend que i ^ î''- »')! =0;-C'06> donc : F’ A i-Ç^ = F(t,x,y,z). C.Q.F.D. § 118. La proposition que je viens de démontrer peut être regardée comme une extension du théorème de Poisson , qui joue un rôle si important dans la théorie du potentiel et auquel on revient en supposant que la fonction F ne renferme pas le temps t. De même, la formule (106), que, sans en diminuer la généralité, on peut remplacer par (P4-&)lry(,-T)l = 0---<107> est analogue à l’équation de Laplace pour la fonction-. Cette formule (107) est connue depuis longtemps; après l’avoir trouvée, il est tout naturel de rechercher ce que devient A j±F(x’,y’,3')dT' 1 r F(*'> y z>) si on y remplace 484 H. A. LORENTZ. par Détermination de % , , /2> Z 3 de /, g , 7&, «, /5, /. § 119. Le théorème du paragraphe 117 conduit immédia- tement à une solution des équations (95). Soient: A le point (x, y, z) situé à l’extérieur de la molécule et pour lequel on veut calculer les valeurs des fonctions relatives au temps t, B un point de l’espace occupé par la particule mobile, d r un élément de volume au point B, q0 la densité électrique en B lorsque la particule a sa position naturelle, r la distance A B , (x, y, z) r le déplacement à l’instant t — ■== • On aura : vibrante. A la rigueur, ni r, ni, par conséquent, x, y. z n’auront les mêmes valeurs pour les différents éléments d r . Vu, cependant, l’extrême petitesse, par rapport à la distance A B , que nous attribuons à la particule, on pourra remplacer tous les r par la distance de 4 au point où se trouve le centre de la particule dans sa position naturelle. C’est cette distance qui sera dé- signée par r dans les formules qui vont suivre. En représentant par (m m'y. m'*) le moment électrique r .(§ 101) à l’instant t — -y , on trouve: où les intégrales doivent être étendues à toute la particule et finalement, au lieu des expressions (100) et (101), LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 485 Ces expressions peuvent encore être appliquées lorsque, contrairement à la supposition du paragraphe 112, l'ampli- tude des vibrations est plus grande que le diamètre de la particule, tout en restant beaucoup plus petite que la distance r. C'est ce qu’on verra démontré dans la Note additionnelle. Intensité de la force qu'une particule vibrante éprouve en vertu de l'état de la molécule dont elle fait partie. § 120. Les valeurs (109) et (110), portées dans les formules (I) (§ 90), peuvent servir à déterminer la force que l’une des molécules exerce sur la particule mobile qui appartient à une autre; nous en déduirons bientôt (§ 125) l’action qu’une par- ticule déterminée P subit de la part de toutes les molécules environnantes. Cependant, avant d’aborder ce calcul, nous allons considérer la force à laquelle elle est soumise en vertu de l’état de l’éther qu’elle excite elle-même. A cet effet, il est nécessaire d’étudier les valeurs que les fonctions /, g , h, «, /, déterminées par les équations (92) et (93), présentent à l’intérieur de la particule. On peut toujours employer les formules (96), (97) et (108); seulement, ces dernières se simplifient, parce que, dans le pro- blème actuel, r est tout au plus égal au diamètre de la par- ticule, et, par conséquent, extrêmement petit par rapport à la r longueur d’onde. La quantité y n’est donc qu’une fraction in- signifiante du temps d’oscillation et il est permis, dans les formules (108), de remplacer x, y, z par : « 486 H. A. LORENTZ. x r V v — r . yy Z r V Z ) si l’on convient d’entendre par x, y, z, x, y, z les valeurs rela- tives au temps t. Comme, d’après la formule (98), CO — 1 f Q » j_. — 4 n V2J r ’ on trouve l <■=-4 VF)'/?''' -I/' ^ I p0 d T ^ = X (O xe ■> etc. 4 TT F3 Substituons dans les formules (I), en ayant égard à la rela- tion (88) et à ce que x, y, z sont regardés comme infiniment petits. Il vient pour la première composante de la force cherchée, si on remplace x par J, Ici, la première intégrale est 0, parce que la distribution des fonctions qq et œ est symétrique autour du centre ; il en est de même des trois intégrales suivantes, puisque oQ s’annule à la surface de la particule. On trouve, par conséquent, pour les composantes de la force cherchée : 4 7T V2 % j oQ to d t -] — , etc. . . . . . (111) Si le mouvement de la particule est une vibration simple, les signes des dérivées y, Ç sont opposés à ceux des vitesses 5, rj, Ç. La force aux composantes \ e2 7] e2 £ e2 T"’ HP 'Y s’oppose donc au mouvement. Il est naturel qu’il y ait une LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 487 telle „résistance” ; sans cela, en effet, la particule ne pourrait céder de Fénergie à l’éther. Aussi bien que les formules (109) et (110), les expressions (111) restent applicables lorsque les excursions de la particule sont plus grandes que le diamètre. (Voir la Note). § 121. Quant à la force avec laquelle les parties immobiles de la molécule agissent sur la particule qui est déplacée de sa position d’équilibre, je m’en tiendrai à l’hypothèse du para- graphe 101. Les composantes en seront représentées de nouveau par — f*, — fy, — fz (H2) Détermination de la force totale qui agit sur une particule vibrante. § 122. Le calcul de la force que la particule mobile contenue dans une des molécules éprouve de la part de toutes les autres molécules ressemble beaucoup à celui qui nous a servi à l’évaluation du pouvoir inducteur spécifique. Je désignerai de nouveau par miæ*, niy, ÏTl^r les valeurs moyennes de m*, l%, m- (§ 102) et par IVL = N mx, = N my, IVL = N mz les composantes du moment électrique rapporté à l’unité de volume. Ces composantes seront des fonctions du temps et des coordonnées; elles ne présenteront plus les changements brusques et irréguliers (§ 106, a) qu’on trouve dans les mo- ments m*, i%, m*. Il importe de remarquer que, lorsqu’il s’agit de fonctions 0 0 0 telles que IVL, M;/, IVL, on peut attacher aux signes — , — , --- une signification un peu différente de celle qu’ils avaient on peut considérer 0 x jusqu’ici. Pour obtenir, par exemple, 488 H. A. LORENTZ. une ligne P D x, parallèle à Taxe des x, et qui, loin d’être infiniment petite dans le sens rigoureux du mot, est beaucoup plus grande que les distances moléculaires. Il suffira que, dans l’étendue de cette ligne, le changement de W.r soit très petit par rapport à ce moment lui-même; alors, on pourra prendre pour - -'r le quotient qu’on obtient en divisant par Dx la différence des valeurs de M.? aux points P et Q. Evidemment, dans les problèmes qui nous occupent, la condition à remplir revient à ce que Dx doit être une très petite fraction de la longueur d’onde. Un signe spécial pour indiquer les différentiations prises dans ce sens nouveau me semble superflu ; dans chaque cas particulier on comprendra facilement ce qu’il faut entendre 0 0 0 par — , —, — . 1 d x d y d z § 123. Je considère un diélectrique pondérable, homogène et isotrope, qui est limité par une surface K, (x q, Pq} Yo les composantes du déplacement diélectrique et de la force magnétique qui existent indépendamment des molécules in- cluses dans la surface a. Les équations (85) démontrent que les rapports ao Po etc J 0 JO sont de l’ordre V, ce qui donne lieu à la même simplification que j’ai fait connaître au paragraphe précédent. Je prendrai donc pour les composantes de la force qui est due à cet état de l’éther: 4 TT F2 ef0 , 4 n V2 e g0 , 4 n V2 e h0 (119) Archives Néerlandaises, T. XXV. 33 492 H. A. LORENTZ. § 127. Je représente par mV, m'y, m'z les valeurs, au mo- ment t, des moments électriques d’une des molécules M' qui se trouvent à l’intérieur de la sphère B , et par (m7*), (m'y), (m'«) T ces mêmes moments, à l’instant t y ’ r étant distance au centre (x, y, z) de la sphère. Si, dans la formule (109), on remplace m'*, m'y, m'* par (m'*), (m'y), (mV), on obtiendra la première composante du dépla- cement diélectrique que cette molécule M produit à l’intérieur de M. Mais : , v r dm x (m'*) — m'x — y- "h • • • » etc., d’ où l’on tire : en omettant des termes de l’ordre 1 d 2 m x V2r d t 2 On s’assure facilement que ces derniers termes donnent lieu à une partie de la force 4 n V2 e f qui peut être négligée par rapport au premier terme de l’expres- sion (118) et qu’on peut également laisser de côté les forces eivr—ZP), etc. produites par les molécules M\ Ces molécules intérieures à la sphère B exercent donc une force dont la première composante a la valeur: ji L r0 x- \ r J y D xd y Cette somme a la même forme que l’expression eX que nous avons rencontrée dans le calcul du pouvoir induc- teur spécifique. Elle sera même égale à e si, dans les deux cas, M», M,, M, ont les mêmes valeurs. En effet, l’expression LA THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 493 (120) nous fait voir que des molécules très rapprochées les unes des autres agissent mutuellement, comme elles le feraient s’il y avait équilibre électrique. Les variations irrégulières de rrn, my, nu sont donc les mêmes dans les deux problèmes. Équations du mouvement d’une particule . § 128. La force totale qui agit sur une particule mobile se trouve entièrement déterminée parles expressions (111), (112), (118), (119) et (120). Elle doit être égale au produit de l’accé- lération de la particule par sa masse m. La première équation du mouvement est donc: m f = — fx — j— 4 tt / V2 £ | Q0(odr y - ï g-7 r V- e Mr V2e B 1 V* T W J d Xd y d xd Z 4- 4 n V2 e fQ H- e 36' (121) Pour la simplifier, je fais remarquer d’abord que les termes e1 •• 4 yr-l et -g- tt V2 e M.? sont du même ordre de grandeur que les expressions et V'eNm. Le rapport de ces dernières est Nd- 3 V\ ce qui représente le nombre des molécules qui se trouvent dans un cube ayant pour côté la longueur d’onde. Le terme peut donc être négligé. Je poserai encore : m — 4 n V2 J qq ü) d 33* 494 H. A. LORENTZ. je prendrai les valeurs moyennes (§ 95) de tous les termes, je diviserai par e V et j’introduirai la valeur de 3£' (§106) et la constante q (§ 107). Tout ceci nous fournit l’équation — M, + g » îml _ y o2 ait. Ne*1 V dt2 L O*2 dxdy~^~dxdz — ~ÿï -^] + 4 nVfQ ... (122) Propagation de la lumière. § 129. Voici, comment on peut déduire de cette formule une équation différentielle contenant seulement M.r, My, M*. Appliquons à tous les termes l’opération indiquée par le signe 1 32 F2 d t2 ' Alors, le dernier terme disparaît parce que fQ satisfait à l’équation 1 02\ A_ T2 âî2) fo=0- Pour les autres termes du second membre. / 1 a2\a»3K, / 1 3*\c- -Wy * (A F>3(V îï1 ’ (A POlVîxDÿ’ e c'’ on peut écrire: a2 / 1 a2 \ ™ a2 / 1 a2 x a®2 \A F2 a i2/^* ’ a xZy \A F2 a <2J ^ ’ etc- Mais, d’après la formule (115) et les deux autres qui lui sont analogues , ( 1 A 3Jtr = — 4 7T D Vi )», = -!. H. + J(a-p£,) (*)*■ F2 0 t 2 Grâce à la signification de Mr (§ 124) et en vertu de formule (107), la fonction LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 495 M* r jouit de la propriété exprimée par Donc (A - h = “ 4 et finalement : (123) Ne1 X D f2) (A 1 32 \ P 3(? + . P) + (: D 3 ’ ) < P 3æ Ki 0 a _0_/ ( ( ° 3 \ i f . 0 Z 0 # 4 7T j | 5Ï + \1>7 “ "P 3V) 4( dJ_ 0 a ? ? + / ^ 3 \ h J , ! 0 X 0 y — 4"| \07 " 'P ôï) 4 7T F2 = (’ 3 \ — v ^ — ) «, \ \0 2 3 y/ \3 t ^ 0#/ J 4 7T V2 | -3-T) = (' * 3 \ — V t* 1 P, 1 \0 Æ dz) F dx ) i 4 7T F2 (1/ V>y *9) dx> = (- V 3.< -»*■) \ y- i (V') § 1 34. Tant que les particules chargées n’ont d’autre mou- vement que la vitesse commune de la matière pondérable on 500 H. A. LORUNTZ. aura ^ = 17 =: Ç = 0 et la densité dans un point (x, y , z) sera indépendante de t. Il n’en sera plus ainsi lorsque les molé- cules sont le siège des vibrations électriques dont je me pro- pose d’examiner la propagation. Dans cet examen je suivrai pas à pas la voie qui a été tra- cée dans le chapitre précédent. Seulement, comme la méthode et les hypothèses resteront les mêmes, je pourrai m’exprimer plus concisément. Remarquons encore que si, dans cette étude, il est question d’un point ou d’une surface immobile, cela signifiera: «im- mobile par rapport aux axes”, ou, ce qui revient au même, „par rapport à la matière pondérable”. Pareillement, on en- tendra par le déplacement (x, y, z) d’une particule le déplacement qu’elle a subi relativement à cette matière. Vibrations produites par une seule molécule. § 135. On trouvera d’abord, au lieu des équations (86) et (87) : D9=viïj+(h-pL) 1 •• (128) Q-t-p&) lpt1, □ « = 4* . □<»-4Wpjc^-(s+p)|îj ( / \ 0 Q 0 y) 1 Dy = An V> J (l+p) j * Dans ces formules, ainsi que dans plusieurs autres qu’on rencontrera plus loin, le signe □ est employé pour indiquer l’opération LA THÉO Kl K É L KCTROM AGN ÉTJ QU K DK MAXWELL. 501 F2a (1,-4)’ § 136. Portons dans les équations (128) et (129) les valeurs (88) et (89), et supposons que x, y, z, g, ?/, g soient infiniment petits. Comme x, y, z sont indépendants de x , ?/, z tandis que qq est indépendant de t , on trouvera, après quelques transfor- mations, 3 ((J , — ■S) . 3*(«oO i04 (çox) 0 a? + 3 F 1 l dxdt 3 (e0 — ■S) Ï3*(fc>y) 0 °2 ( G30) □ l\ = Qo x> □Z2=:?o y> □ Xs = Qo z- • • • G31) et soit 3 Xi + + ^JCi _ g, 0 i» 0 ^ 0 2 (132) On aura alors: 502 H. A. LORENTZ. f=(V2-p2) *(< h—V2 ($ =■ 4 7T V2 — 4nV ’-S') A'x> A ) X 2t 2 r d (co — «') . 3’x» 2y 3 t2 d .(co — S') , ^ X* d Z dt2 A* u 1 1 d Zdt dydt) ’ P’Xs 12x2 t — — v d Zd t ^ \*'X, 12 y 2 t O2 1 , 2x2t + P *2X, .3&I d xd t d t d xd t U — rxlll 3 P 0(c d Xd t’ -s')i \ 2z ) 2 (co — S')j (133) (134) ty t ' Comme la densité qq est indépendante du temps, l’équation (130) peut être remplacée par / ( V 2 - p2) d X‘ V2 ( d2 dj2 œ = Qo ... (135) Du reste, les valeurs (133) et (134) satisfont à toutes les équations (II') — (V'). § 137. Je supposerai que, tant que la particule mobile P se trouve dans sa position d’équilibre, la molécule entière dont elle fait partie, ne fait naître, en des points éloignés, ni un déplacement diélectrique, ni une force magnétique, et cela même dans le cas, où cette molécule est animée de la vitesse p. Alors, pour obtenir les valeurs de /, g , h, a, p, y dues à la molécule entière et relatives à des points qui se trouvent à quelque distance, il suffit de supprimer, dans les équations (133) et (134), les termes qui dépendent de co. C’est ce qu’on reconnaîtra par un raisonnement semblable à celui qu’on trouve au paragraphe 115. LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 503 Théorèmes mathématiques qui serviront à déterminer Xi> U et Xs- § 138. Je commencerai par chercher une solution de l’équation □ V» = 0, (136) ou V +V*diy-+V^-^+2 ^ — 0 3 y2 3 z2 4>*3 t 3 <2 (F2 — p2) 0 x- 0 s‘ A cet effet, j’introduirai d’abord au lieu de x une nouvelle variable V X = et je poserai yi. P P V^V'-p2 L’équation devient alors F2 f3^ -Æ + p?~\ + 2 f V Le) £2 0 y2 0 z- J 0 2 ip diedt ^ =0. 0 *2 La fonction xp qui est regardée ici comme une fonction de y, z et t peut aussi être considérée comme dépendant de E, 2/, 2, et t' = t — yl. Si on se place à ce nouveau point de vue, il faut remplacer 0 0 6 0 3£par 3Ë~ Vdt” et enfin 3? Par ~2 _32 3J: 2 4 3 7/ + F 3 j 3 t’ F2 3 <'2 ’ 3 , 32 3 x 32 - et FF Par ü 6t s7ï> dt dt O2 dt' O2 OçO* par 0£0«' F0f! 504 H. A. LORENTZ. On obtient ainsi O2 ip D2 xp d2 V2 V 2 y , à2 xp d2 y-] LTF a*»"] ~ 1 (1 + ° 57^ = °- ou bien (V2 — p2 d2 XfJ d2 \p 02î/;l O2 ' L d r2 0 y2 diri d V — Q 0z2J d tf 2 Cette équation a la même forme que la formule (107); elle admet donc la solution */' = - F ( V - — \ X \ \/ y ‘2 — p2 J dans laquelle F est une fonction quelconque et r = i - v Il en résulte que y2 H- z2 = 1A7 V2—p‘ x2+y2+z2..{ 137) F f (t — r V V^F2 — p2 J est une solution de l’équation (136). On obtient une solution plus générale si on remplace x, y, z par x — x\ y — y\ z — z', x, y ', z' étant les coordonnées d’un point fixe. Cette nouvelle solution peut être mise sous la forme : t + * (x — x ')' X V l^F2 — p2 ) \^V2 —p si l’on attribue à r la signification suivante : (138) r V 2 — x') -b (y — y'Y 4- (z — z)2 ..(139) § 139. La fonction (138), analogue à la fonction du chapitre précédent, jouera un rôle important dans la thé- orie que nous allons développer. En effet, elle est propre à représenter la propagation dans l’éther d’un ébranlement qui LA THEO RI B ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 505 part d’un centre unique (x, y, z). Les particularités de ce mouvement se réfléchiront dans la forme de la fonction F et le lieu géométrique des points (x, y, z) où cette dernière a une valeur déterminée peut recevoir le nom de ^surface d’onde”. Or, l’équation X H- * ( x — x') = const. représente une sphère dont, si R est le rayon, le centre est situé au point (x' — ^ R, y, z ^ . Un ébranlement émis au moment tQ par un point P de la matière pondérable et se propageant dans l’éther, aura atteint, à un moment postérieur quelconque £, la surface d’une sphère, ayant pour rayon V (t — tQ) et pour centre le point de l’éther qui coïncida avec le point P à l’instant tQ. C’est un résultat auquel on aurait pu s’attendre. Dans les paragraphes suivants on trouvera des formules plus compliquées et applicables aux cas où la source des vi- brations a une certaine étendue. § 140. Soient: t un certain espace qui se déplace avec la matière pondé- rable et dont par conséquent chaque point a des coordonnées x\ y\ z' constantes, d t un élément de volume situé au point (x\ y\ z'), F (t, x', y\ z ') une fonction finie et continue. D’après ce qui précède, la fonction satisfera à l’équation (136) et, si le point (x,y,z) est situé à Mais, lorsque (x, y} z) est un point intérieur, on n’aura plus C’est ce que nous allons démontrer, en entendant toujours l’extérieur de l’espace r', il en sera de même de l’intégrale par J la limite de l’intégrale J (voir le paragraphe 116). 506 H. A. LORENTZ. § 141. En appliquant la formule générale (104) on trouve d’abord : H-= - [t fr'O « ')«] + Pour calculer la limite on peut, dans le premier terme, rem- placer F par F [t, x , y , z). Ce terme devient par conséquent : F(t, x, y, *)[i f*-=£db], ce qui s’annule à la limite. Donc lJ — ( ) — F (t — r + f ~ , x', y', z'V dr' . (140) dx JZxlx \ xy'Yi — pi )\ Appliquons de nouveau la formule (104) en y substituant cette fois* ci U = ~ ' - F (t — l+ii? Û, x', y', A 2xt x \ l/Vt-p* J Si, pour abréger, la fonction qu’on trouve dans les deux dernières formules est indiquée par F, il vient: D=- Lim [jjV-*) D-r(^)d6] + +/&(J)dr = — — Fil, *,y, s) Lim [y/f1' — + +I&G)" <“» On a pareillement l~f> = - F ft ». ». !> Li“> [7/ V — ») 4(t) d6] + . O2 y et une équation de la même forme pour - — J . En outre : d Z 2 LA THEORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL 507 H=tè(4)" et, en vertu de la formule (140), = (TW d xd t J D X d t \X J Substituons toutes ces valeurs dans l’expression □ X=(F2 P1) ^ Z _i_ 17^2 _ X Oæ2 ^ O^/2 O2 â~a?D < dt2 32 V 3^J bz2 0 ~ y 02y 2P^h~*i I- Comme on a □ (0 =»• et, à la surface sphérique, — z, -A (I) + F. (»'-!/> A (A) + F'â(7) = r’F>- on obtient □ x = — F2 *. y, z). Lim J\- f ~J = — — 4n Fl^F2 - pxF(t,x,y,z). 11 en résulte que la fonction l — 1 fl ri(j t -h £ [x — a; ) , , A , , - - - -Fp , x .y ,z\dr 'V* — p2JV ' l^V2 — p2 / 4tt y v^y* _ F a la propriété exprimée par □ X = F (<, *, y, 2). Archives Néerlandaises, T. XXV. 34 508 H. A. LORENTZ. Détermination de %lf /2, et de f, g, h , «, /5, /. § 142. Employons les mêmes notations qu’au commencement du paragraphe 119, avec cette différence, cependant, que nous entendons maintenant par (x, y, z) le déplacement de 1a, par- ticule à l’instant f t e (x — x') l /'F2 — p2~ ’ x\ y\ z' étant les coordonnées du point B et x étant défini par la formule (139). Alors, si on pose L = 4 TT Fl/'F* — p2 , (142) on aura, au lieu des formules (108), 1 1 J_ f _£o* LJ r dr’.x-. = J f QoJ LJ x X 3 _L 7Ji r d r (143) Lorsqu’il s’agit de l’effet qu’une molécule produit à quelque distance, il est de nouveau permis de regarder t, x, y et z comme ayant les mêmes valeurs dans tous les éléments. Les intégrales peuvent par conséquent être calculées de la même manière qu’au paragraphe 119. En substituant dans les équa- tions (133) et (134), après y avoir omis les termes dépendant de o>, et en posant 3 /mV\ d /mV\ d x \ x / dy \ x J on trouve, au lieu des équations (109) et (110), V*—p*dS" 1 D* /m'A D2 /m'A L dx Ldt2 V X ) ^Lfdxdt V X ) — Y1 dJ?l _ _L il f . £_ 9 L dy Ldt2\x)+L dxdt \X )’ , F2 d_S" _ _1_ d^ /mA p d^_ / mA L dz Ldt* \x J+L dxdt V r )’ d_S"( 3 t \ LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 509 __ 4 7T V2 \ D2 d2 /mV\ ) U L }dydt\X ) DzO^Y^/-’ _ 4 TT F2 ^ O2 / m V\ D2 / m A 0 S" j ? ~ L I 2z0t \X J 0 xZt \x ) P dz \ ’ _ 4 jt F2 ^ O2 /m'A S2 /m'A d S" ) 7 ~~ L \dxdt\x) dySt\x)+Pdy\' Ici, m Y, m y et mY désignent les moments électriques de la molécule agissante, à l’instant V -h * (# — x') a', y, z étant les coordonnées du point où elle se trouve et t étant toujours défini par la formule (139). Du reste, les équations obtenues ont encore lieu lorsque l’am- plitude des vibrations surpasse le diamètre de la particule mobile (voir la Note additionnelle). .(146) Valeur de la force qui est produite par la moléculq elle-même dont la particule considérée fait partie. § 143. Pour trouver, comme au paragraphe 120, la réaction de l’éther sur la particule vibrante, il faut, au moyen des équations (133), (134) et (143), calculer les valeurs de /, g, h, «, p, y à l’intérieur de la particule elle-même, pour les porter ensuite dans les équations (P) (§133). Dans les formules (143), x, y et z représentent les déplacements au moment / _ * + * (a — aQ _ / t p (x — x') _ V2 — p- ' l^V2 — p* T2— P2 ’ ces lettres x, y, z doivent donc être remplacées par x X • p(x — x') • — x — ir x , etc., V^J72__p2 F2— p2 ’ ’ si l’on veut entendre par x, y, z, x, y, z les valeurs relatives au temps t. 34* 510 H. A. LORENTZ. On trouve ainsi: .=-1/ Q-° d t' H x r L\y 72 _ v- P L (F2 / go (*~ *') d etc. Quant à la fonction a>, qui est déterminée parla condition (135), elle peut être représentée par =-1/ ^dr'. ï § 144. C’est ici le lieu d’introduire une simplification qui nous sera très utile dans tout ce qui suit. Elle consiste à regarder la vitesse p de la matière pondérable comme si petite, en comparaison de la vitesse de la lumière, que le carré de 0T) peut être négligé. Cela nous permet d’écrire V 2 au lieu de V 2 — p2, r ou ^ (x — x'Y -h (y — y')2-4-(z — z')2 au lieu det, et 4 n V2 au lieu de L , ce qui nous donne Xi = X 4 ttV2 f^dr'-h J r x e 4lTFT px f 4 TT F4 J £0 ^n^ldr’, r etc. CO “ 1 4VW Après avoir effectué les substitutions nécessaires, entre les- quelles je citerai encore la substitution (88), et après avoir supprimé tous les termes en p2, on remarquera dans les ex- pressions pour les composantes de la force dont il s’agit maintenant deux groupes de termes, les uns indépendants de p, et les autres en contenant la première puissance. Je vais démontrer que ces derniers termes s’annulent et que, par conséquent, les composantes cherchées ont les mêmes valeurs que dans le cas où le diélectrique ne se déplace pas, c’est-à- dire les valeurs (111). Cette démonstration repose sur un théorème général, qui fera l’objet des paragraphes suivants. Préalablement, je fais encore LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 511 observer que tous les termes qui contiennent la première puissance de p renferment également un des facteurs x, y, z, x, etc. En effet, dans les formules (133) et (134), il n’y a que la fonction œ qui soit indépendante du mouvement vi- bratoire ; mais dans les fonctions /, g, h les dérivées de cette fonction ne sont pas multipliées par p , et bien qu’elles le soient dans les expressions pour fi et /, ces dernières se trouvent multipliées, dans les formules (!') (§133), soit par une des vu tesses x, ÿ, z, soit par la vitesse p elle-même. Du reste, nous ne ferons aucune attention aux termes dans lesquels p est multiplié par un carré comme x2, ou par un produit comme x y, parce que x, y, z, x, etc. sont toujours regardés comme infiniment petits. § 145. Concevons un système de particules chargées qui se déplacent au sein de l’éther en excitant dans ce milieu des mouvements électriques, conformément aux équations (II) — (V) (§ 90). Soit E un plan fixe et imaginons un second système, composé de particules chargées et d’éther, et dont l’état est relié à celui du premier système de la manière suivante : Si P et P' sont deux points, l’un dans le premier système et l’autre dans le second, et qui sont symétriquement situés de part et d’autre du plan E, on trouvera dans ces points, à tout moment, a. la même valeur de q; b. des vitesses (5, rj, £) et (£', rj\ £') qui sont l’image l’une de l’autre ; c. des déplacements diélectriques D et D entre lesquels il y a la même relation; d. de telles forces magnétiques H et H' que la seconde est égale et opposée à l’image de la première. Le nouveau système qui se trouve ainsi défini, satisfera, aussi bien que le premier système, aux équations (II) — (V). Pour s’en assurer, on peut rapporter les deux systèmes à des axes des coordonnées de la même direction et supposer que le plan E soit perpendiculaire à l’axe O X. 512 H. A. LOKENTZ. Alors, les variables f, g , h , «, |î, /, 0 # etc , qui ont toutes la propriété de présenter les mêmes valeurs absolues en P et P peuvent être rangées en deux groupes, le premier contenant les quantités qui, en P et en P', ont le même signe, et le second étant composé de celles qui y ont des signes contraires. Au premier groupe appartiennent, par exemple, g,h,^ , f , u OC 0 X et au second groupe/, \ et 3. On verra facilement, et c’est là le point essentiel, que tous les termes qui sont réunis dans une même équation font partie d’un même groupe. Voilà pourquoi les équations ne cessent pas d’être satisfaites si on passe du point P au point P'. § 146. Si, comme il a été dit plus haut, on trouve toujours, en des points correspondants, des valeurs égales de £, cela implique évidemment que les systèmes de particules dont il s’agit dans les deux cas présentent entre eux la relation qui existe entre un objet et son image. Cependant, nous avons seulement démontré que, lorsque le mouvement supposé pour le premier système peut réellement exister, il en sera de même du second mouvement, en tant que ce dernier satisfait aux équations du mouvement de l’éther. Il y faut ajouter la con- dition que des forces convenablement choisies doivent être appliquées aux particules chargées elles-mêmes. Or, il résulte des équations (I) (§ 90) que le vecteur qui re- présente la force exercée par l’éther sur une particule du second système est, à tout moment, l’image de la force qui agit sur la particule correspondante du premier système. En eâet, si l’on s’en tient à la direction choisie pour le plan P, on verra facilement que tous les termes dont se compose X changent de signe quand on passe du premier au second mouvement, mais que les signes dans les expressions pour T et Z ne changent pas. § 147. L’application de ces considérations au problème qui nous occupe est bien simple. Si, dans le premier système, une LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 513 particule est animée à la fois d’une vitesse de translation p et d’une vibration dans laquelle le déplacement est (*, y, z)j la particule correspondante du second système aura une vitesse qui est l’image de p et un écartement qui est celle de (x, y, z). En vertu de notre théorème, on peut affirmer que les forces que les deux particules éprouvent de la part de l’éther sont également symétriques par rapport au plan E. Dans le cas où ce plan est perpendiculaire à 0 X, chacune des quantités y, z, y, z, etc. sera, dans les deux systèmes, affectée du même signe, mais le contraire aura lieu pour p , x, x, etc. Il faut que la composante X se trouve dans le dernier cas , l’expression par laquelle elle est représentée ne peut donc contenir aucun des produits px, px, etc. En appliquant un raisonnement de la même nature aux composantes T et Z, et en supposant que le plan E soit per- pendiculaire à O F ou 0^, on achèvera de démontrer ce qui a été avancé au paragraphe 144. Du reste, dans la Note additionnelle, je donnerai un examen plus général de la réaction de l’éther sur une particule vibrante. § 148. J’admettrai encore que la force aux composantes -K — f y, -f«, qui est exercée (§ 121) sur la particule vibrante par les autres particules de la même molécule, est également indépendante de la translation de la matière pondérable. C’est une hypothèse que nous ne saurions justifier, puisque nous regardons comme entièrement inconnu le mécanisme qui produit ces forces in- térieures. Tout au plus, on pourrait faire voir que le chan- gement apporté par la translation est de l’ordre si les for- ces peuvent être représentées, en deux systèmes correspondants (§ 145), par des vecteurs qui sont l’image l’un de l’autre. 514 H. A. LORENTZ. Détermination de la force totale qui agit sur une particule vibrante. § 149. En reprenant les questions dont nous nous sommes occupés à partir du paragraphe 122, je commencerai par la force qui est due aux molécules extérieures à la sphère B. Soient, de nouveau, x , y , z les coordonnées du centre, où se trouve la molécule M contenant la particule P et ayant le moment électrique (mr, l%, m*), D r' un élément de volume situé au point (x\ y\ z) extérieur à la sphère, X la fonction (139), M'.r, MV, M* les composantes du moment électrique rapportées à l’unité de volume et relatives au point (#', y', z) et à Finstant t X t (x — x') y^v1 — pn- Cela posé, on aura les valeurs de /, g, hi «, et y que Félément D r seul produit au centre de la sphère, si on remplace, dans les formules (144), (145) et (146), m'*, m y, m* par M'r-Df, M'y D r, M z D r et une intégration sur l’espace extérieur à la sphère nous fera connaître les valeurs de /, g, h , «, p, y qui sont produites par toutes les molécules de cet espace. Si, dans les coefficients, on écrit V2 au lieu de F2 — p2 et 4 n V2 au lieu de L, et si on pose _D_ /IVFA dx V t J dy\ X J dz\X ) — S" ) on trouve : f — 1 [ 1 2 ( !ÜL?\ J ~~ 4 J L dx F2 dt2 \ r J _ 1 f p)Sw JL Jf/M A 9 ~4j [ ?;/ “ V2 3 t2\ v ) /,—A.îPJl JL 4t t) L 3 z V2 3<2 v r ) JM 3* V2ldxd't p d2 V 2 dxdt p d2 + Fî3"æ3 1 D, i \ (147) LA THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 515 0 D2 dzdt p J t0z2( V r J dx2t — /T 02 f“V\ 7 —J i0x2(\ t ) 0 y d t D Dr'. ..(148) § 150. Soit, pour simplifier, 3K* = f-D r', m,=f^ Dr, 9JÏ* = f~D r; ces intégrales, qui se rapportent à l’espace extérieur à la sphère B et dans lesquelles M'*, M'y, M'* sont toujours les valeurs des moments électriques au moment t -H c (x — x') t " V^F2 — p2 seront des fonctions de x, y, z et t. Ecrivons, pour un moment, M i = F (t, x, y, «)> et, par conséquent, M ’*= F ( X + * (x — x') t ■ ■ — , y I ^v2 — p‘ L’intégrale 3JL devient par cela analogue à l’intégrale / du paragraphe 140 et on trouve 3 = ( — ( — \ D r d x J 2x \ r / et a5 3R, d X2 jff(x' - x)y-x (I)W^(tK • • ■ (149) Il est vrai que le rayon R de la sphère B n’est pas infini- ment petit, comme l’était celui de la sphère b du paragraphe 116, mais il a été supposé si petit qu’on peut, à la surface B , remplacer M ^ par M*. En négligeant des termes de l’ordre p2, on peut, dans la première intégrale, remplacer V par la distance r, ce qui nous donne : 516 H. A. LORENTZ. a», d X2 Pareillement : etc. Enfin 22m,___[ o2 /ivpa d Xd y J d Xd y \ X ) T 32 % f 32 /M'A n , T^ = Jop{tJ Dt’ 32 3R, r j>»_ /M' A „ , a^a* ~) dxdt \ x ) Vt' etc. § 151. Ces relations conduisent à écrire, au lieu des expres- sions (147) et (148), f=-*r + A = g «IL- + rai 1 p 1 [ a2 3R, 3 2- 11 LTâT y> 3(» + F2 | f 3 35 0 i 0 i . J 1 r 3 2' 1 3 2 3Ry +- P 32S«A | 4 7T | La y F2 0 t2 P 3 x 3 i J 1 ’ _L i r 3 2 1 32$l* _4_ P 322K,] | 4 7T | La» F* a t2 P 3 x 3 t J 1 ’ a _ 32 3JL o23Ry d y d t d zd t a _322)î. 32 % 3 2 -r - * 2 z2 t 2 x2 t 2 3 * _ 323«y 3 2 art . 3 2 r 2x2 1 dydt~^^dy ’ ou „ agit o art 2= -r h J- a x a y a 2 § 152. Il nous reste à porter ces valeurs dans les équations (P) (§ 133), qu’on peut préalablement simplifier en regardant / , g , h , a, /5, / comme constants à l’intérieur de la particule LA THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 517 P. Les composantes de la force exercée par la partie du diélec- trique qui se trouve au dehors de la sphère B deviennent ainsi d nu ï,= 4.1 '' >1 > -TÎ !■ d nu dt Y , — 4 n V2 eg H- « ~jt 7 — VeYt Z , = 4 n V 2 eh + d m d nu dt d my . . . (150) pep. (=) jî ’ etc- d t dt Avant d’effectuer les substitutions (§ 153), j’appellerai l’at- tention sur l’ordre de grandeur des différents termes. Confor- mément à ce qui a été dit au paragraphe 125, on a m X2 ’ De plus: /L(=) V&. Donc, si on désigne par les parties des six fonc- tions qui ne contiennent pas le facteur p et par /2 ...... y2 celles où il se trouve, fi i—^di (=)^2 (=) 4 ~~ÿî ’ m “.(=)!». (=)M=) Pi (=)/i (=)PÿT5ï- Passons rapidement en revue les termes qui paraissent dans les expressions pour X , » Y , , Z , . a. Les produits 4 n V2 e 4 n V2 egx et 4 tt V2 eh1 con- tiennent des parties qui sont du même ordre de grandeur que e_m &2 à l lîiy . . e ô ~dT "fl7 9 b. Comme 518 H. A. LORENTZ. les termes de la forme d ~dt y sont comparables à V tf3 ils peuvent donc être négligés en présence des produits pré- cités, et cela parce que l’amplitude <5 est beaucoup plus petite que la longueur d’onde & V. c Les expressions 4 n V 2 ef.î} etc. sont de l’ordre: p e 3)î (151) Ces termes devront être conservés, parce que ce sont eux qui détermineront l’influence de la translation du diélectrique. d. Au contraire, on peut omettre toutes les quantités de la forme en effet, on obtient une idée de leur grandeur au moyen de l’expression p e Ô 3Ji qui est très petite en comparaison de la fraction (151). e. Les termes peyx et peftx doivent être retenus, parce qu’ils sont de l’ordre pe 3JÎ V&2 et, par suite, comparables aux termes que nous avons nom- més en troisième lieu. /. Enfin, on peut naturellement négliger pey2 et pe/S2, ces produits étant proportionnels à p2. LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 519 § 153. Voici maintenant le résultat final des substitutions: V2 t n F2 M O V2 M + F F2 d 2 0 .r 0 2 Zy 3 2' 0 z 02Wr ot2 om, 3 t2~ 329ftz s»*aw, p(dxdt i TT \ ] •+• P P~* d2 e â'î leurs valeurs moyennes, les seules dont nous aurons besoin, seront déterminées — du moins dans un diélectrique donné — dès que l’on connaît pour chaque instant les valeurs de Mc, M y, M* au point considéré (x, y, z). En effet, la sphère B est très petite par rapport à la longueur d’onde ; on peut donc faire abstraction du changement que subissent M^, My, M~~ quand on passe d’un point à l’autre C’est ainsi que, pour un milieu immobile, on pourrait écrire (§§ 127 et 106): e 3E' = iM/, e = 4 Mi/, e 3 ' = A M* (153) A étant une constante, dont la valeur n’aura du reste aucune importance pour ce qui suivra. Quelle est maintenant l’influence de la translation imprimée au diélectrique? Elle pourra donner lieu à des termes qu’il faut ajouter aux composantes (153), et qui forment des séries ordonnées suivant les puissances ascendantes de la vitesse p. Nous nous bornerons aux termes du premier degré. Un coup d’œil sur les formules (I'), (145) et (146) suffit pour comprendre que tous les termes dont il s’agit doivent être des fonctions linéaires de M*, M?/, etc. Si donc d M nous désignons par (M./) une fonction linéaire de M^, , etc., en attachant un sens analogue aux signes (My) et (MU, on aura, au lieu des composantes (153): « X' = AHL+p j (M,), +(My), +(M*), | , j e 2) = A My -h p | (M,)2 h- (M,)t 4- (M*)2 j , | . (154) e 3' = A M* 4- p | (M^) 3 4- (My)3 4- (Ms)3 [ . Or, dans le cas d’un diélectrique homogène et isotrope, tous les termes en p doivent s’annuler. C’est ce que nous démon- trerons dans les deux paragraphes suivants; après cela, nous reviendrons à l’étude du piouvement des particules (§ 158). LA THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 521 § 156. Pour arriver à la simplification que je viens d’indi- quer, on peut se servir d’un raisonnement analogue à celui qu’on trouve dans les paragraphes 145 et 146. Après avoir choisi un plan fixe E , on peut concevoir un système N' qui soit à tout moment l’image exacte du diélectrique considéré N, et cela, non seulement en ce qui concerne l’état de l’éther et la dis- tribution des particules chargées, mais aussi en ce qui regarde les autres parties constituantes de la matière pondérable; en effet, nous nous figurerons qu’à chaque point matériel du premier système corresponde, dans le second, un point qui est doué des mêmes propriétés. Nous avons déjà vu que le nouveau mouvement est compatible avec les équations (II) — - (V). Ajoutons maintenant que, si le premier système satisfait aux équations qui déterminent le déplacement des particules chargées, il en sera de même du second corps. La raison en est que non seulement les vecteurs qui, dans les deux corps, représentent les accélérations des particules, mais aussi ceux qui indiquent les forces, s’accordent entre eux comme des objets et des images correspondantes. C’est ce qui a été dé- montré au paragraphe 146 pour les forces qui sont exercées par l’éther; et il est naturel d’admettre la même chose pour celles qui sont en jeu à l’intérieur de molécules correspon- dantes. § 157. Un corps amorphe et parfaitement isotrope est tellement constitué qu’il possède les mêmes propriétés qu’un corps qui en serait l’image; du moins, il en sera ainsi tant qu’on se borne aux phénomènes dépendant d’un grand nombre de molécules. On pourra donc prendre pour N' un corps qui est absolument identique à N et qui est orienté de la même manière, et non pas en sens inverse ; dans ces deux corps, il pourra toujours exister des mouvements qui sont l’image l’un de l’autre en ce qui regarde Mr, IVb et les forces moyennes agissant sur les particules. Je rapporterai les corps N et N' à un même système de coordonnées, et je supposerai, en premier lieu, que le plan E 522 H. A. LORENTZ. soit perpendiculaire à l’axe des x. Alors, les quantités M/y et IVb auront, en deux points correspondants, les mêmes valeurs et les mêmes signes, mais IVL et p (la translation étant tou- jours dirigée suivant 0 X dans le premier corps) auront, à valeurs égales, des signes contraires. D’un autre côté, les forces e e 2)', e auront, dans les deux corps, les mêmes valeurs absolues, mais ce ne sont que les deux dernières qui auront également, en N et N', les mêmes signes. Comme, du reste, les coefficients dans les fonctions linéaires (Mr),, etc. seront les mêmes dans les deux cas, il faut que le terme p (IVL) , s’annule ; en effet, ce terme aurait, dans les deux corps, le même signe. Les termes p (My)2, p (M*)„ P( My)3, P (M Z) 3 doivent s’annuler pour une raison semblable, et, en considérant l’image du mouvement par rapport à des plans perpendiculaires à 0 Y et 0 Z, on démontre la même chose pour les termes p (My), , p( IVL),, p (M.r)2, p(IVL)3. On peut donc toujours se servir des équations (153). Équations du mouvement d’une particule . § 158. En rassemblant les données dispersées dans les pa- ragraphes 144, 148, 153, 154 et 155, on voit que la formule (121) et les deux autres que nous aurions pu lui ajouter doi- vent être remplacées par . . r e2 •• r4 m I = — fx-p 4 n V2 ? I Q0œdT-\- y Ç + e n V2 tA? -+- a . / e2 •• r4 mrj — — f y -f- 4 tt F2 ?j I Q0(odr y V~h C I g n V2 M?/-b ^ ^+p^+4„V>e9o-peya+eV, (155) + 1/2 3 y 3 V ml — f Z -t- 4 7T V2l j Qq codr -|- y £+ 6 0 V‘2 M DI d2m, • . 023JÎ* V2 — — D z D t2 p L^j+47r V*eh0 + pe(lc+e3‘. LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 523 Je ferai subir à ces formules les changements qui ont été indiqués au paragraphe 128 — en divisant cependant par e et non pas par e V — et, pour abréger, je réunirai en un seul terme tout ce qui résulte de chacun des trois groupes — m \ \ x + 4: n V' % j q0 m d t e | n F2 e M.<-, etc. En ayant égard aux formules (153), on trouve pour ces trois groupes 4 t/2 ■ A Ne — f\M * 32 M TwF + Ne* , etc. Je me bornerai à des vibrations simples de la période &. Dans ce cas: 4 7 T2 O2 M* dt 2 & IVD, etc. Donc, si 011 pose 4 yi Nei + A tfe—f +1^1? o O1 2 = 4 7T Q, Ne 2 les trois groupes deviennent 4 7r Q IVDj 4 7 r Q My, 4 n Q IVI z. 11 n’est pas nécessaire de nous occuper de la valeur de Q; il nous suffit que pour un corps et une durée de vibration donnés, cette quantité est une constante, indépendante de la vitesse p. En somme, les équations (155) prennent la forme 4?r QM,. H- V 4 TT Q IVL + V% 3 2 , (029Jl.r <>£ 3 x dï + P ( dxdt d t +Vx +4®r*/.=o, 3 2 329)L , „ S2^* 3 y 3 i2 4:nQM F2 3y3< 3 2 323K, . _ 32 a». 0 z d t‘ -HP dzdt -\-4ltt V‘lgQ pyo—0, (156) =0. I + 4 nV2h0+ppc Archives Néerlandaises, T. XXV. 35 524 H. A. LORENTZ. Équations différentielles qui déterminent IVL, My, Mz. § 159. Dans le chapitre précédent, nous sommes parvenus à ces équations en soumettant la formule (122) à l’opération 1 D2 A — V1 d t1 Maintenant que les équations (156) se rapportent aux axes mobiles O X, 0 Y , 0 Z , c’est l’opération d = f*a-(tï— qu’il leur faut appliquer. On fait disparaître ainsi fof gQ , hQ> aQ , po, yof parce que Ofo = 0, □ a0 = 0, etc. Comme, de plus (§ 150), □ ^ = — 4 7T M,, □ = — 4 TT My, □ = — 4 TT Mz, il vient nrnU t/2 dr , 32 M, D /■ ’ i n Q □ — Y2 x— -h — — p i - — -h ~^~7 ( — o, d X d P 1 d Xdt d t \ T/20 r, 32 A Q D y 5^ + TT ~ p djdt = °* ^ u y/2 ^ É ^ ^ Mz O2 M, n ^âï+âir -PâiT, = ^ où nous avons posé d M, 0 M, D x dij 3 M.. D 0 Entraînement des ondes lumineuses par la matière pondérable . § 160. Concevons d’abord des ondes planes qui se propagent dans la direction de O X. Les moments électriques sont alors indépendants de y et de z et on peut satisfaire aux équations LA THEORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 525 en supposant qu’ils ont partout la direction de 0 Y. En effet, en posant M.r = IVL — 0 et en supposant My indépendant de y et de z, on satisfait à la première et à la troisième des équations; la deuxième se réduit à Q □ M, P2 My _ 0 t 2 - = 0, ou bien, si on néglige toujours les termes en p2, à vi d2 3 x* 2 p P2 M P x P t !> - q =o. 3 t' OÙ La fonction M;/= C cos <2=1- 2 Q * ?o-») satisfait à cette équation, si TF’ TF V d’où l’on déduit pour la vitesse de propagation, en négligeant de nouveau les termes en p2, V p Q W ■=. -h (157) i/g Pour p =r 0, cette valeur devient ± -JL. V'Q" la vitesse TFoî dans le cas où le diélectrique se trouve en repos, est par conséquent donnée par w = — ° Q et n’est autre chose que l’indice de réfraction v. La formule (157) devient par cela: W == ± WQ- JL . 35* 526 H. A. LORENTZ. C’est la vitesse de propagation par rapport à la matière pondérable. Pour obtenir celle du mouvement relatif des ondes lumineuses par rapport à l’éther, il y faut ajouter la vitesse p. On obtient ainsi : Quel que soit le sens dans lequel les ondes se propagent — c’est-à-dire quel que soit le signe qui précède WQ — on voit que le mouvement de la matière pondérable avec la vitesse p imprime toujours aux ondes une vitesse qui est une fraction déterminée de p. Le facteur est précisément le coefficient d’entraînement que Fresnel a introduit dans la théorie de l’aberration et qui peut servir à rendre compte des expériences de M. Fizeau 1 ), répétées dans ces dernières années par M M. Michelson et Morley **), sur la propagation de la lumière dans une colonne liquide qui se déplace. Remarquons encore que, d’après notre théorie, la valeur (158) est applicable à chaque espèce de lumière homogène, si seulement on entend par v l’indice de réfraction qui lui est propre 3). § 161. Lorsque la direction de propagation des ondes est per- pendiculaire à celle dans laquelle se déplace le milieu, il faut distinguer deux cas principaux. Dans le premier, les vibrations électriques sont normales au plan qui contient les deux directions indiquées ; dans le second cas, elles sont parallèles à ce plan. Q Comptes rendus. T. 83, p. 349; Pogg. Ann., Erg. 3, p. 457. 2) American Journal of Science , 3d Ser., Vol. 31, p. 377. 3) Dans un Mémoire qui parut en 1880 ( Phil . Mag. 5th Ser., Vol. 9, p. 284). M. J. J. Thomson s’est occupé de la propagation de la lumière dans un diélectrique qui se déplace. Cependant, dans cette étude, il n’est aucunement question de la perméabilité pour l’étlier et, suivant l’auteur, le coefficient d’entraînement aurait toujours la valeur (158) LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 527 a. Le premier cas se présente si IVL = = 0 et M z=Ccos~ Les trois équations se réduisent à: $ D = 0 ’ mais l’opération □ équivaut maintenant à Jl. 3 y'1 3 t1 ' L’équation ne contient donc plus jp et la vitesse W devient indépendante du mouvement du milieu. b. Dans le second cas, les vibrations ne peuvent plus être rigoureusement transversales ; elles feront avec la direction de propagation un angle dont le complément est de l’ordre y. . Cependant, la vitesse de propagation reste wo = -Z= . ° l 'Q En effet, on peut satisfaire aux équations du mouvement par les valeurs: 2 n M r = C COS & V2 My = — CCOS ('-*)• 2 71 (F M, = 0. Il est facile d’étendre ces résultats à une direction de pro- pagation quelconque. 528 H. A. LORENTZ. NOTE ADDITIONNELLE. Pour simplifier autant que possible les considérations qu’on vient de lire, je me suis borné au cas où l’amplitude des par- ticules vibrantes est plus petite que leur diamètre. Je vais démontrer maintenant que les résultats obtenus subsistent encore lorsque les excursions sont beaucoup plus considérables. C’est le théorème du paragraphe 141 qui nous permettra d’arriver à cette théorie plus générale. Valeurs générales de /, g, h, a, (I, y. 1. Reprenons d’abord le problème d’une seule particule mobile (§ 135). Les composantes du déplacement diélectrique et de la force magnétique qu’elle produit dans l’éther satis- feront partout aux conditions (128) et (129), les derniers mem- bres étant des fonctions connues de x , y, z et t} si on regarde comme donné le mouvement de la particule. Représentons par % (<, », y, z). © (t, ». y, z), § (t, », y, z), (t, x, y, z), S (t, x, y, z), Ê (t, x, y, z) ces fonctions, qui, du reste, sont 0 dans tous les points que le corpuscule n’atteint pas. Alors, on satisfait aux équations (128) et (129) par les valeurs : /= ^fj®(t-x,x',y',s)dr', h = — — *> *’ y'> z) d T ’ ' * ' ' « = — x/j31 (<— x, »'. y, z) d r', ? =— \ /y® (<— : *, » y’> z) d T'y y = -^jjQ(t-x,x,y,z')dT', (160) LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE MAXWELL. 529 OÙ r = ]/^ ÿi K_ pt (x — x'y +(y — y'Y + (z-z'y, — r + * (x — x’) — r p {x — x') * ~~ l>y2"Z rpr ” 1/ v2 v2 — p2 et L — in Vl^V2 — ~ p 2. Rappelons encore que, dans les formules (159) et (160), et dans celles qui vont suivre, le signe J a toujours la signifi- cation de Lim f (I H6). Avant d’employer les valeurs trouvées, il est nécessaire d’examiner si elles satisfont aux équations primitives (II') — (V') (§ 133). Je n’écrirai pas au long toutes ces vérifications ; je me contenterai de faire voir que dj d_g d_h_ dx d y d Z Vérification de la formule (II'). 2. Si la fonction U dont il fut question au paragraphe 116 devient 0 à la surface si par le signe ÏM on indique une différentiation dans laquelle r et x sont regardés comme constants. De ces formules on déduit l~ L /r [o æ'] *>x'>y'>z')dr'> 3/ 3 530 H. A. LORENTZ. avec des expressions analogues pour ^ et ^ Posons : 3 3f (<> g» y > g) 0 # 3 ©(«,», y. «) ^ 3 $(<,*, y, 2) 3y 0 2 = //ft a?, y, 2). Alors, 0 / d g d h dx~^~ d y d Z X, ®', y', z) d r' . (161) En se rappelant que, dans les formules (128), x,y,z sont les coordonnées d’un point immobile par rapport aux axes et que, par conséquent, 3? _ 0 « on trouvera n(1,w)=(F.-r.)g + r.(p + |l|) O2? 02? + 2p Soit alors : D xd t d t2 * ? = #(<> », y, 2); + F2 [ + 2 p ["à] r< ~ \ 9 (t~ *’ *• y’’ z) ’ où les crochets signifient la même chose que ci-dessus. Mais, en écrivant & au lieu de & (t — x, x, y, z), on a d & d & d* r d a-i JtM+ Lo^J’ 32 » _ _ 39-3^* 32» /3x\ 2 3 H»-! 3» 3a;'2 37 3a;'2 + 312" V^ï7/ ~J0( \,2 x' \ dx + LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 531 Au moyen de ces relations on peut éliminer les dérivées: [HJ ■ [Hî] • ce qui nous donne \n(t- *,x,y,z)= | [( K + V'1 4 + r + -h - & ] i [(P-P-) dx2 d d^x dy'2 } d2 & dj- Yt Pi* \dxdt dy'dy'dt dzdz :3 d») y* d \ dy' d & ) Y) + Yÿ' \ r Ô7 j 4‘ + \2 ^ 0 ) d Z d & dz' t d t j Dans la formule (161), cette expression donne lieu à des termes dans lesquels l’intégration par rapport à l’une des variables x , y', 2 ' peut être effectuée. Le résultat est la limite, pour Lim r = 0(§116), de l’intégrale suivante, étendue à la surface sphérique b : s d X v1 (y —y) d X 4- V 2 (z — z) —, 4 - p (x — x) J d b. 532 H. A. LORENTZ. On voit facilement que cette limite est 0 et que, par con- séquent, l’équation (161) devient 3. La dernière formule devient, par une intégration partielle réitérée, 3_A = _1 r r ^ fiV dx ' î) y dz L] [} P d x'2 \X J H- V2 -h d-L(l\ à y 1 \ t / i Lim l3/i(p-pî) + V2- d2 d Z X' — X d & X dx7 (*)]" + y' — y d» P 3 y' p - — - y^[db X dz S ] -iLil” [lli’7'-”’ ><*-*>« (t)+ >"<» -»>5? ({) + + v. («'-.) ,4 (|)!«]. Le deuxième terme est 0 et dans le troisième on peut remplacer &(t — x, x' , y' , z') par la valeur de cette fonction pour x' = x} y' =z y, z == z, c’est-à-dire, par »(t, x, y, z) ou Q. Ce terme devient ains’ : y2 o Lim Po , P"P- ~L~ V P2 _ — Q. D’un autre côté: donc dy2 dx^ày^dz + ^ + ^ = q,C.Q.F.D. LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 533 Déplacement diélectrique et force magnétique quune particule vibrante produit à quelque distance. 4. Prenons pour origine le point où se trouve le centre de la particule lorsqu’elle occupe sa position naturelle. Alors, les valeurs de x , ij , z pour lesquelles les fonctions : ^ — z ), etc (162) diffèrent de 0, seront très petites par rapport à la longueur d’onde. Elles le seront également par rapport à x, y, z et t, si le point (x} y , z) pour lequel on veut calculer /, g , /i, a , (3, y est situé dans une autre molécule, même lorsque celle-ci est une des plus voisines. Cela posé, on peut développer les fonctions (159) et (1 60) en séries rapidement convergentes. Soient tQ et xQ les valeurs qui correspondent à x = y = z =r 0, et désignons par J J , etc. des différentiations dans lesquelles on regarde comme constants les x , y , z' qui entrent explicitement dans ces fonctions et comme variables seulement 1* et x. Alors: Y , y', z')= % (■< — *0> * . v i *' ) + + x' jÿY j [ F ^ ~ *> x' . y' . z' )] + + y ! ïÿ | •z> *'» />*' ) J + etc- En effectuant les différentiations indiquées dans le second membre, on est conduit à des expressions contenant des dé- rivées de — $ (f — x, x , y' , z ) par rapport à t et à x, mul- tipliées par des dérivées de t et de x par rapport à x , y' , z\ Dans les dérivées de la première espèce, on remplacera X et x par XQ et x0; dans celles de la seconde espèce, on substi- tuera en outre x — y' z — 0. 534 H. A. LORENTZ. Or, tout cela peut être exprimé bien plus simplement. En effet, pour les fonctions dont il s’agit ici, d | 0 j 0 / 0 dx * I D y' ) dy * ( D z' 0 dx' _D_ Tz ’ et, lorsqu’il est question des dérivées par rapport à x, y, z , la substitution de tQ et pour X et x peut avoir lieu avant la différentiation. Donc : (i — ■*'> y'.2') = -4 3W — *« y', 2') — i ~k [è s + + § ^ [% — *<»*'> ÿ’’ *' ') ] + etc (163) et, d’après les formules (159) et (160), f=~z(hfSdT’ -Si W1' z d "] - f, K/»' -'] - - F, &' * " '] + F ST- [£/*" S '*'] + ■•■•). el° <‘«> ' = - ï (i/* “< '■ -S [^/' 51 J ] + ' ' •te' (ie5) où, pour abréger, on a écrit f$f, 21, S3, S au lieu de %(t~ *o> V , *)> @ (< “ *o> V, *')> etc (166) 5. Si on entend par q la densité de la charge qui existe, au moment dans le point ( x , y’ , z), et par (£, y, Ç) la vitesse dont la particule est animée à ce même instant, on aura : LA THÉORIE ELÉCTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 535 — (? + p)2] (i +v)r>^ - , Je dg (I + ^)ÇÔ5' + ? j-t (167) La même expression peut être prise pour la première des fonctions (166), pourvu seulement qu’on prenne pour q, £, 17, £, ^ les valeurs relatives au temps t — x0. Recherchons ce qui en résulte pour les intégrales de la formule (164). a. Valeur de ! %dr'. On a évidemment: et cela parce que la densité q est une fonction continue des coordonnées qui s’évanouit aux confins du champ d’intégra- tion *). D’un autre côté: I q d t — e. Si donc on entend par (m.r, my, m*) le moment électrique, à l’instant t — xQ, de la molécule dont la particule vibrante fait partie, on aura b. Valeurs de f y' $ d T, fz'ffd T. En intégrant par parties, on trouve D Ce champ sera limité par une surface fixe quelconque enveloppant la particule oscillante. 536 H. A. LORENTZ. fx ^dr'= — fod T = ] dx J s aura f x ^ dx' = 1 f , Zq 1 x — d r J Zy J I Zz De plus, on aura et, x étant la première coordonnée du centre, J X Q d T = x J gd T —ex . Vu, cependant, que nous avons pris pour origine des coor- données la position naturelle du centre, on peut écrire donc J X Q d T = m.r : l*%d r' =-e [f*— + Pareillement f y' % d — e (I + v) v + % || jz'ftd T=e « + p)f + m* . c. Valeurs de etc. Dans le calcul de ces intégrales nous nous servirons des formules ÏTIt, Jx'^dx =—2jx'ÿdx' = — 2 f x ^ d 1 /= — f y q d r = — i%> e^c* Le terme principal ( F2 — p2) de l’expression (167) ne con- tribue en rien aux intégrales: LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 537 jy'^dr', jz'%dT',f9'ï%dT, mais, dans les intégrales f x 2 ^ dx\ J x y' 3 dx\ J x z ^dr, il introduit les termes — 2 (V2 — p2) m.r, — (F2 — p2) r%, — (F2 — p2) nu. . (168) Ce sont ces expressions qui joueront un rôle dans le résultat final. Tout ce que les autres termes de l’expression (167) fournissent aux intégrales dont il s’agit maintenant peut être négligé. En effet, nous admettrons que l’amplitude des vibra- tions n’est qu’une fraction insignifiante de la longueur d’onde et que, par conséquent, les fractions _£ jl v ’ v* v ont une valeur insensible. En vertu de cette supposition, nous n’aurons pas à nous oc- cuper des termes -(V + dQ dx' (S + P)y 3? 3 y' t1 Z les parties correspondantes des intégrales cherchées étant extrê- mement petites par rapport aux produits (168). Quant au dernier terme de la formule (167), il introduit dans fx'2$dr', j y2 3 dr' , J z'2 $dr' les termes suivants: di d t f Q x' 2 d t', etc. Désignons de nouveau, par d l’amplitude et par & la durée d’une vibration. Alors, les derniers termes sont du même ordre de grandeur que 538 H. A. X.ORENTZ. d*_ tTlr et peuvent, par conséquent, être négligés par rapport aux expressions (168). Le terme principal de l’expression (167) est donc bien le seul dont il faille tenir compte dans le calcul des intégrales d t', etc. et, dans le développement (164), il n’est pas nécessaire de nous occuper des dérivées d’un ordre supérieur au deuxième. 6. En résumant ce que nous venons de trouver, et en écrivant t au lieu de ro, on obtient : e(V2 — p2) 0 / ! \ L dx \ V ) m+km + + Par un raisonnement que nous avons employé plusieurs fois (§ § 115 et 137), on démontre qu’il faut omettre le terme e (F2 — p2) D /1\ L dx \r J si l’on veut obtenir la valeur de / qui est due à la molécule entière dont la particule vibrante fait partie. Cette valeur de- vient donc: LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 539 où la fonction S" est celle qui a été définie par la formule (144). 7. Pour que ce résultat s’accorde avec la première des équations (145), il faut qu’on néglige les termes 0 0 y m 4(¥)j + + l\yco ( y) 3 + 3y (¥; )+£(¥)] l 3 r d ( 3 /rriîlN "J L 0 t LO x vu ) i+32/( v r J + dz\ V )\ . (170) Or, ces termes sont les seuls dans lesquels les moments rth, lîL/, nb se trouvent multipliés par une des composantes de la vitesse vibratoire ; on en diminuera les valeurs autant qu’on voudra en supposant suffisamment petites l’amplitude et la vitesse des vibrations. Ce degré de petitesse nécessaire est-il atteint dans les cas qui se présentent en réalité? Pour répondre à cette question, nous considérerons de plus près l’ordre de grandeur des termes. Remarquons d’abord qu’une différentiation par rapport à t introduit le facteur — . Au contraire, une différentiation par rapport à x dorme lieu à deux termes différents. D’un côté, dans les fractions dont il s’agit, le dénominateur X est une fonction de x, et, en ce qui regarde l’ordre de grandeur, les dérivées V (~ ^peuvent être rem - dx \ x /’ 0 y\ x /’ dz V x )v !) Dans cette équation, les signes nu, i%, nu représentent ce qui a été indiqué, au paragraphe 14 par m'a?, m y, mV. Archives Néerlandaises, T. XXV. 36 540 H. A. LORENTZ. placées par 1 Mais, d’un autre côté, les numérateurs, tels que m./- ou nu I, dont les valeurs doivent être prises pour l’instant t — x, sont par cela même fonctions de x , y , z. Si on désigne par A un quelconque de ces numérateurs, on aura d_A d X 0 A Tt d X d x ;=)4r k ' & Li o r F2 p2 y1 — p- Cette dérivée se compose donc de deux parties, l’une de l’ordre P ] et l’autre de l’ordre A & V A p &V2' Si, dans l’expression (170), on omet pour un moment les termes de cette dernière catégorie, il ne reste que des quantités comparables à d m 8 1 L & m m 8 et 1 & V * & m 8 (171) r2 L &2 X2 L & X ~ L&*Vv D’autre part, dans la première des formules (145), le premier terme donne lieu à des expressions qui sont du même ordre de grandeur que T/2 m P m m (172) V2 m L V3 ’ L & v2 ’ L &2 x et le terme _1_ / m,A “ T dl2 V X J est du même ordre que la troisième de ces expressions. En divisant la première des fractions (171) par chacune des fractions (172), on obtient 8x 8_ JT9 l ’ r ’ l étant la longueur d’onde & F, et la seconde des fractions (171) conduit de la même manière à dX2 8 X 8 LA THEORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE UE MAXWELL. 541 Il n’y a aucune difficulté à admettre que r et - sont des k r fractions négligeables et que, par conséquent, les quantités (171) peuvent être négligées par rapport à celle des expressions (172) qui est la plus importante. Si, pour se mettre à l’abri de toute objection, on désire que les termes (171) soient très petits par rapport à chacun des termes (172), il faut que r ou, ce qui revient presque à la même chose, la distance pour laquelle on veut calculer l’action d’une molécule, soit petit par rapport à l/?=*l Lj (173) Vu l’extrême petitesse de d par rapport à X, cette limite peut être un multiple très élevé de la longueur d’onde et dans la déduction des équations du mouvement on peut se borner à une partie du diélectrique, dont les dimensions soient beaucoup plus petites que la longueur (173). En effet, on se rappellera que nous n’avons rien supposé sur ce qui se trouve à l’ex- térieur de la surface + m.r(? + ^)~| . En portant ces valeurs dans l’équation (174), on obtient: 1°. les termes qu’on voit dans la deuxième des formules (146) ; 2°. le terme 4 7 T V2 0 / 1 \ LA THÉORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL. 543 qui est indépendant du mouvement vibratoire et qui dispa- raîtra, par conséquent, dans la valeur de (t produite par la molécule entière; 3°. le terme 4 n V2 1 ri. i i 3 1 1 H El 1 , i./'M :\ + ±( L \ La^ i 1 dx ' ^ r J 1 + dy V r ) + dz V a ( 0 /m,g\ , 0 /|%?\ , 3 il “ail âïVT; + âÿV“r~/ t J U’ qu’on peut négliger pour les mêmes raisons qui ont conduit à l’omission des termes (170). Détermination de la force qu’une particule vibrante éprouve en vertu de l’état de l’éther qu’elle excite elle-même. 9. Pour calculer cette action, il faut recourir de nouveau aux formules (159) et (160); cependant, on les simplifiera cette fois-ci en ayant égard à ce que x est un intervalle de temps très court. Commençons par rappeler les valeurs des fonctions etc. En désignant maintenant par q la densité électrique et par , —7 , ^ les valeurs des dérivées pour l’instant r d x d y d z r t — n et le point ( x , y' , z' ), on peut écrire : 3 (t — sc, x' , y' , z' ) = £ V1— (| + p)1 J _ — y jj, — (I + v) sf-y + I ?' > ® (* - ». y’> z') = - (f + j») v II +(V2-y'iiy' - -vZ^j + ve , §(*—*, y\ O = - (S + P) 1 - v t + d X a y +{V2-y)dïÇ + U’- 544 H. A. LORENTZ. %{t — x,x ,y , z' ) =4 n V1 Q, — Ç |^r ) , j 33 V) = 4* F2 [î -(5 + P)-!], -.(176) ©(<- *, *',y',«') = 4w F2 jjl+p) — î — ïfp]- Dans ces expressions, il faut entendre par 77, £ les com- posantes de la vitesse vibratoire à l’instant t — x. Mais, dans le cas qui nous occupe actuellement, les valeurs de x — x , ij — ÿ, 2' — 0 sont très petites par rapport à la longueur d’onde et le temps x le sera par rapport à la durée d’une vibration. Il est donc permis d’écrire £ = St — * lt , y = W—*yt, s — st- Ait, où l’indice t indique les valeurs relatives au temps t. De plus, les termes x St , * yt , peuvent être traités comme des infini- ments petits, ce qui nous donne: (S + py — (I t + pY — 2 X {St 4- p) St, etc. ^ r C’est ainsi que tous les coefficients de —7 , etc. peuvent être exprimés en St, yt, St, St, yt, St- Pareillement, nous rem- placerons | q' , 7] q' , £ ç' par [St — x îù) ç>' , etc. Ensuite, les valeurs qu’on trouve pour $ (t — x, x' , y ,z ), etc. doivent être portées dans les formules (159) et (160), et ce qu’on obtient pour f, g , h, a, |5, y sera substitué à son tour dans les équations (P) (§ 133). Il importe de remarquer que, dans ces dernières, les lettres |, y, S indiquent précisément ce que nous venons de représenter par St, yt, Su II est donc permis de sup- primer l’indice t; de plus, nous simplifierons en réunissant les différents termes. LA THEORIE ELECTROMAGNETIQUE DE MAXWELL- 545 On a, par exemple, X=jQ[in V>f+vy-tp] et 4W r*/+ï/-t/J= — [4 tt + dr, où 3*. ©, 35 sont les fonctions $ (t — x, x' , y' , zr ), etc. qui se trouvent déterminées par les formules (175) et (176). Posons, pour abréger, Uid')d’’ J‘=hU¥éd’)d’’ j‘=hŒ3A“’)i’ et indiquons par J\ , J\ , /3, J\ ce que deviennent ces in- tégrales si on y remplace par Alors x = - 4 TT F2 |j, + [p-(ê4-i>)W-£2] -/• — ÏJ\ + [2 (I + p) I + nv + E t] J", + + ($ +P)ÿj'z + {ï + p)kJ\ j, V _ 4 TT T 2 ( • I — ? — ! v J 1 +■ L - 7] ,2-ï2— ï2 ] h~ Z = [172— (l+ÿ) J| + £ (I + p) t + 2 ^ 7/ -1- £ £ J J'3 + + Tj'ç, J'h + 7j \ J\ J , iüZ!j ç/t + jV’-d+ÿ)2-,2-?;2] J4- -ï/, + [(? + P)l + W + 2çç] j; + + Ç ê ^2 + Z y J' 3 | • (177) 546 H. A. LORENTZ. 10. Quelles sont maintenant les valeurs de 498. Note additionnelle « 528. CORRECTION. Dans la note rlu paragraphe 50: Au lieu de trois derniers lisez quatre derniers. CINQUIÈME LIVRAISON H. A. Lorentz, La théorie électromagnétique de Maxwell et son application aux corps mouvants . Page CONDITIONS DE L’ABONNEMENT. Les Archives Néerlandaises des sciences exacte et natur elles paraissent à des époques indéterminées, en livraison de 6 à 12 feuilles d’impression, avec un nombre illimité de plan ches coloriées et noires. Trente feuilles forment un volume. Avec la dernière livraison de chaque volume les souscripteur reçoivent gratis une table des matières, un titre général et \in couverture. Les abonnements engagent à un volume seulement. Les livrai! - sons ne se vendent pas séparément. Le prix du volume, avec les planches, est fixé à fi. 6. — . On souscrit chez l’éditeur et chez tous les libraires des Pays-Bas et de l’étranger. Un certain' nombre de collections des tomes 1 à XX (années 1866 — 1886) sont mises à la disposition des Savants, Bibliothèques] ou Etablissements publics au prix de 80 florins (168 francs, 134 Reichsmark). S’adresser directement au Secrétaire de la Société hollandaise des Sciences à Harlem. HARLEM. — IMPRIMERIE DES HERITIERS LOOS.IES. V