BIBLIOTHEQ.UE BRITANNIQUE, 0 u HISTOIRE DES OUVRAGES DES SCAVANS DE LA GRANDE-BRETAGNE: Pour les Mois d'AVRIL,MAY et JUIN. M. DCC. XL III. TOME VINGT-UNIEME, PREMIERE PARTIE. ' A LA HAYE, Chez PIERRE DE H.ONDt M. DCC. XLIIL TABLE DES ARTICLES. Akt. I. La Divinité de la MiJJîon de Moyfe démontrée 5 &?c. par i\/r. Guillau- me Warburton. Troilicme Ex- trait. Pag. i. IL Les Commentaires de Jules-César, touchant la Guerre des Gaules , £f la Guerre Civile ; comme aujji ceux d'AuLus Hirtius, & d'autres Ecrivains , fur les Guerres d'A- LÉXANDRIE, d\AFRIQ.UE, ê? d'EspAGNE. Avec les Notes 6? les Remarques ' de Air. T h o m a s Bentley, qui y a joint les Con- jectures & les Corrections de Mr. Jaques Jurin. 47. III. Hiftoire du Schah Nadir. Troifié- me & dernier Extrait. 68. IV. Remarques fur la Résurrection de Lazare 3 raportée da?is le Chap. XL de l'Evangile de St. Jean. 105. * 2 Art, TABLE des ARTICLES. Art. V. Récit hiftorique de la Vie & du Règne de David Roi d'Ifraël. Par V Auteur de /'Examen defintérelTé de la Révélation. Pag. 138. VI. Chronique des Rois d'Angleterre écri- te en Anglois fuivant le Stile des An* ciens Hijtoriens Juifs, par Nathan Ben Saddi, Prêtre de la même Na- tion , 6? traduite en François fuivant le même Stile. 163. VII. Les quatre Livres des Mémoires de Xenophon; En Grec 6? en La- tin. 186. VIII. Nouvelles Littéraires. 205. On trouve a la Haye chez P. de HONDT* STatue Antiche Grecbe , e Romane , cbe nelV Antljala délia Libreria di San Marco ; e in altri luogbi publia di Venezia fi trovano. Venet. 1740. très Grand Papier , avec de très belles Figures, Mémoire du Marquis de Lcmgallery , Lieute- nant-General des Armées de France, 6f Ge- neral-Feld- Maréchal- Lieutenant au Service de V Empereur Charles VI. Hifloire interef- Jante 9 écrite par lui même dans fa Prifon a ■ Vienne en Autriche, a la Haye 1743. 12. Oeuvres de Machiavel > Nouvelle Édition 9 augmentée de V Anti - Machiavel , Ê? autres Pièces, a la Haye 1743. 6 V°L 12. BIBLIO- BIBLIOTHEQUE BRITANNIQUE, o u HISTOIRE DES OUVRAGES DES SCAVANS DE LA 3RANDE-BRETAGNE. 'our les Mois d'Avril, Ma* et Juin; MDCCXLIII. ARTICLE PREMIER. 'he Divine Légation of Me/es, &c. (a)> Çcft à dire; * Divinité de la MtJJïon de Moyfe démon- trée *) Vcjeg. le Titre' entier dans U Tome XI, de Bibiiorhéfjuc, fars, l-pag. 7f. XXI, Pan. L A 2 Bibliothèque Britannique* trée , £SV. par Mr. Guillaume War- burton. Tome IL Troifiéme Extrait. [On peut voir le Premier dans la Se- conde Partie du Tome XVII. de cet- te Bibliothèque, & le Second dans la Première Partie du Tome XX.] NOus avons rendu compte des quatre premiers Livres de ce Volume: Le cinquième traite de la Théocratie des Juifs. Mr. Warburton y explique la nature de ce Gouvernement , & il y prouve aufîl que le Dogme d'une Vie a venir ne faifoit point partie de l'Oeconomie Mofaïque. Ce Livre elt divifé en fix Se&ions. Dans la première l'Auteur pofe pour Principe, que „ Les Ifratlites ont été fé- ,, parez de tous les antres Peuples , afin „ que par ce moyen le Dogme de l'Unité 3, de Dieu fut cônfervé dans un Monde ,, Idolâtre & Polithéïfle. " Comme cet- te réparation fervoit en même tems à ac- complir la Promette faite à Abraham le Père des Juifs , les Déifies en ont prisoc- cafion de cenfurer l'Oeconomie Mofaïque, & ont prétendu qu'elle fait tort aux Attri- buts moraux de l'Etre Suprême , parce qu'elle le repréfente , difent ils , comme- partial en faveur d'un peuple particulier , au même tems qu'il abandonne toutes les autres Nations de la Terre. Mais, dit là defîus Mr. Warburton, on ne fauroit nier qu'il fut digne de la Sagetto & Avril, May et Juin. 1743. 3 & de la Bonté de Dieu de conferver dans le Monde le Dogme de l'Unité de la Na- ture Divine. Or on ne pouvoit l'y confer- ver, qu'en réparant une Partie du tout, en choififiant un Peuple unique pour en faire l'Objet particulier de la Protection de Dieu ; Protection qui ne pouvoit manquer d'être accompagnée des plus grandes Bénédictions temporelles. Je ne fais fi les Déifies accorderont aifé- ment à nôtre Auteur, ce qu'il avance ici» Il a fait voir lui-même dans fon premier Volume , que le Dogme de l'Unité de Dieu s'eû confervé dans le monde par le moyen des Myftéres Eleufiniens : Et d'ailleurs fî tous les Peuples avoient été honorez d'une Révélation Divine , comme les Juifs, 11 cette Révélation avoit été renouvellée de tems en tems , à mefure que l'éloignement commençoit à en affoiblir les preuves, il le Culte des faux Dieux avoit été puni par des chatimens exemplaires , qui euiïent porté des Caractères vifibles de la Maia de l'Etre Suprême , il femble que ces moyens auroient été très efficaces pour prévenir l'Idolâtrie , ou du moins pour en arrêter les progrès, & l'étouffer dans fa naiiTance* Pourquoi donc Dieu n'a-t-il pas fuivi cette Méthode ? C'eft ce dont il ne nous appar- tient pas de juger, mais il eft certain que nous courons toujours rifque de nous éga- rer , lors qu'en voulant raifonner fur la Conduite de l'Etre Suprême, nous lui attri- A 9 buons 4 Bibliothèque Britannique, buons des vues & des defleins, qu'il ne nous a pas clairement révélez. Quoiqu'il en foit, nôtre Auteur foutient que cette réparation des Juifs s'efl faite, non pour l'amour de ce Peuple en particu- lier, mais pour l'amour de tout le Genre- humain en général; & que c'eft en ce fens qu'il faut entendre les paroles d'Ezécbiel , oh Dieu, après avoir promis qu'il rétabli- roi t dans leur Païs les Ifraè'lites difperfez, marque , fuivant Mr. Warburton , le but qu'il s'étoit propofé en les féparant des au- tres Peuples. Voici comment Dieu parle au Prophète : (a) Di à la Mai/on '£ Ifraël , Aïnfi a dit le Seigneur , l'Eternel , je ne le fais point à caufe de vous, 6 Mai/on rf'Ifraël , mais à caufe du Nom de ma Sainteté , que vous avez profané parmi les Nations , au milieu dé/quelles vous êtes venus. Et je fanai fierai mon grand Nom, qui a été profané parmi les Nations , £f que vous avez prefané parmi elles; &'les Nations J auront que je fuis le Seigneur, l'Eternel, quand je ferai fànëlifié en vous en leur préfence. îl faut , ce me femble , avoir beaucoup de Sagacité , pour voir dans ces paroles, que le but, pour le- quel les Juifs avoient été féparez de tous les autres Peuples, étoit de conferver dans le Monde le Dogme de l'Unité de Dieu. Le . PafTage que Mr. Warburton cit« du Nou- veau (a) Ezéchiel XXXVI. 22, 25. Avril, May et Juin. 1743- 5 veau Teflament ne paroit guère plus ex- près , malgré l'efpéce de Paraphrafe qu'il en donne. „ Ce que Dieu die du Peuple „ (ce font les Expreflions de nôtre Au- „ tcur) S. Paul le dit de la Loi. (a) A „ quoi donc ferî la Loi ? Elle a été ajoutée à „ caufs des Tranfgreffions , jufques à ce que „ vint la Semence , à l'égard de laquelle la „ PromeJJe avoiî été faite. Elle a été ajoutée 9 „ dit l'Autre; à quoi? Ceft certainement „ à la Religion naturelle. Et pour quelle „ reifoiiF A caufe des Tranfgreffions, Ceft „ à dire , à calife de l'Idolâtrie dans la- „ quelle tous les Peuples étoient tombez, „ & à laquelle les Ifraelites eux-mêmes al- „ lofent fe livrer. Ils ne pouvoientenêtre „ détournez que par cette Addition, qui les 5, tenoit féparez de tous les autres Peuples, „ & conlervoit chez eux le Dogme de „ TUnité , jufques à la venue de la Semence „ promife. " Dans' la féconde Se&iou Mr. JVarburton prouve que le Gouvernement des Juifs écoit TJjéocratique. Quand Dieu, dit il, eutdé- Jivré les Juifs de l'Efclavage d'Egypte, il leur parla par la bouche de Moyfe en ces termes, (b) Si vous obéïffez exactement à ma voix, fcf fi vous gardez mon Alliance , vous ferez auffi d'entre tous les peuples mon pkts pré- cieux joyau , quoique toute la Terre ni appar- tienne. (*) Gai. III. i* \b) Exode XIX. f, A3 6 Bibliothèque Britannique, tienne. Le Peuple promit (a) d'obéir , & en conféquence de cette Promette Dieu lui marqua les Conditions de fon Alliance, dans les deux Tables de la Loi. Mais comme les Ifr délites ne pouvoient devenir vifiblement le Peuple particulier de Dieu, qu'autant qu'ils feroient féparez de tout le refte du Genre-humain , Dieu pour les en féparer leur propofe delechoi- fîr pour leur Roi,- il veut bien devenir leur JMagiftrat en vertu de leur propre choix : & en cette qualité il leur dorme des Loix civiles & eccléfiaftiques , & établit chez eux la Conititution entière tant de l'Etat que de l'Eglife. Quand Dieu fut ainfi de- venu leur Roi , d'ans le fens propre de ce mot, la République des Ifr délites fut une véritable Théocratie, dans laquelle par con- féquent les deux Sociétez, la Civile & la Religieufe dévoient être entièrement incor- porées l'une avec l'autre. Ceft ce que l'on n'a pas bien compris, fuivant nôtre Au- teur; de là vient que ceux qui par coutu- me appellent le Gouvernement des Juifs une Théocratie, ne le confidérent pourtant que comme Arijiocratique fous les Juges, & comme Monarchique fous les Rois ; au lieu que ce n'étoit ni l'un ni l'autre, mais une TJjéocratie proprement ainfi nommée. Voici un autre argument que Mr. IVar- lurton allègue pour prouver qu'il étoit né- celTaite (#) La-m4mt vf. S. Avril, May et Juin. 1743. 7 eefiaire que les lfraëlïtes v édifient fous un Gouvernement Théocratique. Les Juifs , dit il , avoient un prodigieux penchant à fe mêler avec les Nations voifines, & à en imiter le Culte idolâtre : Le feul moyen humain par lequel il étoit pofllble de 'les empêcher de fuivre ce penchant, étoit de faire des Loix rigoureufes contre l'Idolâ- trie : mais toute Loi pénale faite par le Ma- giftrat en matière de Religion, efl mani- ieftement injuftc: il faloit donc trouver quelque voie pour rendre de pareilles Loix équitables,* car on ne fauroit fuppofer que Dieu ait voulu ordonner rien qui fût con- traire aux Régies éternelles de lajuftice: Mais ces Loix ne font juftes que fous un Gouvernement Théocratique ; donc ce Gou- vernement étoit nécelfaire. Pour prouver donc la Juftice des Loix pénales , en matière de Religion, fous un Gouvernement Théocratique, Mr. Warhur- ton examine & réfoût une Objection que l'on fait contre la Tolérance, & qui paroic avoir embarrafle l'illuOre Mr. Bayle. „ On „ peut la tirer, dit celui-ci Ça)? de ce que „ la Loi de Moyfe n'avoit point de To- „ lérance pour les Idolâtres & pour les „ faux Prophètes , & de ce que fit le Pro- ., phéte Elie contre les Prêtres de Bahaly u qu'il fit mourir fans miféricorde : d'où il „ s'enfuit (*) Commentaire Philofophique , Part, II* Cha^ IV, A 4 8 Bibliothèque Britannique, 5, s'enfuie, que toutes les Raifons que j'ai „ étalées dans la première Partie de ce „ Commentaire- ne prouvent rien , parce 3, qu'elles prouvent trop, favoir quelefens „ litcral des Loix de Moyfe a cet égard „ feroit impie & abominable. Or puilque 5i Dieu a pu fans blefTer l'Ordre comman- „ der aux Juifs de faire mourir les faux 5, Prophètes , il s'enfuit évidemment qu'il M a pu fous l'Evangile commander défaire s, mourir les Hérétiques. ,, Je n'ai pas l'Efprit , ce me femble, ., afTez gâté par la contagion controverfifte 5, pour'faire le fier fur cette Objection , & „ pour la traiter d'un air dédaigneux & ai méprifant, comme l'on fait d'ordinaire „ lors qu'on fe fent incapable de bien ré- „ pondre. J'avoue de bonne foi que cette s, Objection eft forte & qu'elle femble être „ une marque que Dieu veut que nous ne ,, fâchions prefque rien certainement, par ,, les exceptions qu'il a mifes dans-fa pa- ,, rôle à prefque toutes les Notions com- ,â mubes de la Raifon. Je connois même ,, ces gens qui n'ont point de plus grandes 55 difficultez, qui les empêchent de croire ,, eue Dieu (bit l'Auteur des Loix de ,, Àîoyfe & de toutes ces Révélations qui ont 5, fait faire tant de carnages, que de voir „ que cela eft fl contraire aux idées les ,, plus pures de l'Equité. " Mr. I! répond à cette Objection par un Paflage de Mr. Locke, qui a écrit ;-n faveur de la Tolérance prefque en mê- me Avril, May ft Juin. 1745. p nie tems que Mr. Bayléi voici ce que die Je favant Anglais. „ (a) Pour ce qui re- „ garde le cas des Ifraïlites, qui ayant: été „ initiez dans les Cérémonies Mo'faïques, ,, & faits Citoyens de la République des ,, Juifs, venoieuc dans la fuite à apoftafier , ,, & à renoncer au Culte du Dieu àl „ il faut remarquer que l'on procédoit „ contre eux comme contre des Rebelles „ & des Traîtres, qui étoient coupables» „ du Crime de Léze-Majefté : Car la Ré- „ publique des Juifs, différente en cela „ de toutes les autres, étoit une Théocra- ,, tie abfolue; il n'y a voit, ni ne pouvoit ,, y avoir aucune différence entre l'Etat ,, & l'Eglife. Les Loix , qui y étoient éta- ,, blies touchant le Culte du "feul Dieu in-» ,, vifible, étoient les Loix civiles de ce „ Peuple, & faifoienc parrie de fon Gou- ,, vernement politique, dont Dieu lui „ me étoit le Législateur. " Nôtre Auteur adopte cette Réponfe de Mr. Locke, & il la regarde comme l'uni- que folution qu'on puifle donner de la diffi- culté que Mr. Bayle étale dans le paffage que nous venons de rapporter. Et pour mieux faire 1 en tir combien il étoit jufte de punir les Idolâtres fous la Théocratie, Mr. Wàrburton remarque que comme Dieu étoit ïe Dieu Tutclaire, National & Local des m*, (4) Lotke Letter concemmg Tôteration , fsj, M xo Bibliothèque Britannique, Juifs, aufii bien que leur Magiftrat civil % il faloit nécessairement que chez eux le Gouvernement civil fut étroitement lié a- vec la Religion , & pour ainfî dire incor- poré avec elle, & que toutes les Loix ci- viles tendiflent également à la Conferva- tioD de l'un & de l'autre: Rejetter l'Etre Suprême comme Roi , c 'étoit le rejetter comme Dieu, & le rejetter comme Dieu c'étoit le rejetter comme Roi : L'Idolâtrie par laquelle on le rejettoit comme Dieu, étoit donc un Crime de Léze-Majefté, & puniffable par les Loix civiles ; c'étoit le plus grand Crime qu'on pût commettre contre l'Etat, puifque par des conféquen- ces inévitables il tendoit à en renverfer la Conftitution; car comme le feul Dieu étoit le Magiftrat Suprême , c'étoit dans le Culte du feul Dieu que confiftoit la Conf- titution de l'Etat. Comme le Gouvernement Théocratique étoit nécelTaire, aulTi a-t-il pu s'établir très facilement, parce qu'il étoit fondé fur la tlateufe idée des Divinitez tutelaires & lo- cales, alors univerfellement reçue. Dieu a bien voulu fe prêter aux préjugez de fon Peuple à cet égard ; il s'eft repréfenté d'a- bord comme le Dieu d'une famiJle parti- culière, le Dieu d'Abraham > d'Ifaac & de Jacob; enfuite comme une Divinité loca- le , qui avoit préféré la Judée à tous les autres Païs ,& 1 avoit choifie pour le Lieu particulier de fa réûdence ,• de là- vient que ce Avril, May et Juin. 1743. u ce Païs eft fouvent appelle le Païs ou la Terre de V Eternel. Mais au même tems que Dieu témoigne cette Condefcendance pour les préjugez de fon Peuple, il accompagne aufli l'Etablif-. fement qu'il fonde là deffus de certains ca- ractères , qui font voir que c'eft lui qui en eft l'Auteur. Premièrement, fur cette Idée d'un Dieu tutelaire il établit le Gouverne- ment Théocratique ; il veut bien dev. nv le Jloi des Israélites ; au lieu que chez les Payens c'étoient les Rois qui devenoieni des Dieux. En fécond lieu, il interdit toute efpéce de Communion ou d'Aflbciation du Dieu d'Ijraèl avec les Dieux des Nations ; il dé- fend expreflement qu'on joigne leur Culte au lien , & qu'on les reconnoifle pour de véritables Divinitez. C'étoit encor là dif- tinguer leslfraelites de tous les autres peuples d'une manière très marquée. Car il y a voit une efpéce de Commimion entre les Divini- tez tutelaives des différens peuples Payens; chaque peuple reconnoilToitpourde vérita- bles Dieux ceux de fes voifins; & tous les Pavens regardoient le Dieu à'Ifraèl comme un "Dieu tutelaire: Mais il étoit défendu aux Juifs d'avoir la même complaifance pour les autres Nations; il ne faloit point qu'il y eût de Communion entre Dieu & Belial , quoiqu'il pût y en avoir entre Belial & Dagon. Une autre marque cara&ériftique , qui diftingue la Religion Mofaïque de toutes les Religions 12 Bibliothèque Britannique, Religions Payennes, c'eft qu'elle étoit fon- dée fur une Religion antérieure , favoir fur celle des Patriarches, au lieu que les Religions Payennes étoient indépendantes de toute Religion antérieure ; C'efl ce que Mr. Warburtw prouve ici contre le fameux Antoine Collins Auteur du Livre intitulé, Ça) Les Fondement ôf Raifons de la Religion Chrétienne, qui a foutenu que la Méthode ordinaire d'établir une nouvelle Religion, vraie ou fauflfe, étoit de la fonder fur quel- que Révélation précédente. On fait voir jci qu'il n'y a que la Religion Chrétienne, & la Religion Mofaïque qui aient été fon- dées fur une Révélation antérieure; mais que cela n'a jamais eu lieu par rapport aux: Religions Payennes, qui ont été établies avant le Chriftianifme : Mr. Warbwton relève ici fort vivement les faux raifonne- mens & les artifices de I\lr. Collins. ■ Il fait voir enfuite, que les mêmes pré- jugez touchant les Divinitez locales & tu- teiaires, îefquels facilitèrent l'établilTement du Gouvernement Théocratique , ont été caufe auffi que les Juifs en ont aifément violé les Loix, & font tombez dans l'Ido- lâtrie. Car premièrement, ces Divinitez tutelaires étant regardées comme de véri- tables Dieux, non feulement parleurs pro- pres adorateurs , mais aufïi par les autres peuples (a) The Grounds and Reafons of th.e Chriftian Religion* îm[rmi pour la ptmiére fois en 171$* Avril, May et Juin. 1743. 1* peuples , il y avoit toujours une efpéce de CommunioD entre eux, & s'ils nerendoienc pas un Culte Religieux aux Divinitez de leurs Voifins , au moins ne jnanquoient ils pas de leur témoigner du Refpe€t. Ce préjugé fut la première fource de l'idola- trie des Juifs. En fécond lieu, comme les Prétentions de toutes ces Divinitez étoient admifes mutuellement par tous les peuples, il eft arrivé que quelques uns de ces Dieux, paT les heureufes circonftances oîi fe trouvè- rent leurs Adorateurs, font devenus plus célèbres que les autres ; de là vient que les Peuples voifins ont voulu imiter les Céré- monies que l'on prariquoit dans le Culte qu'on leur rendoit; & c'eft là la féconde fource de l'Idolâtrie des Juifs; ainfi qu'il paroit par l'Erection du Veau d'Or, & en général par leur attachement pour toutes les Superftitions des Egyptiens. En troifiémelieu, il y avoit deux ETpé- ces de Divinitez tutelaires,* les unes étoient attachées à certaines familles ou à certains peuples , les autres étoient attachées à certains Païs particuliers. Ceux qui fe rendoient Maitres de ces Pais étoient obli- gez d'en maintenir les Divinitez dans la j'ouïfTance de leurs honneurs accoutumez ; ce quelques Dieux qu'ils amenaient avec eux, il faloit toujours que le Dieu local du Païs eût part au Culte des nouveaux venus. On regardoit même comme des Impies ceux qui étant dans un païs étran- ger , 24 BlBLÎOTHÉQ>UE BRITANNIQUE* ger , n'adoroient pas les Dieux du Païs (a) ; c'étoit pour munir les Ifrae'lites contre ce Préjugé que Moyfe leur défendit de recher- cher les Dieux du païs dans lequel ils dé- voient être conduits , afin de les fervir de la même manière que le faifoient les habitans qu'ils en auroient chaflèz (b). David fait allufion au même préjugé, lors qu'il fup- pofe qu'être chalTé dans un païs Idolâtre 9 c'efl la même chofe, qu'être obligé d'en fervir les faux Dieux : car voici comment il parle à Saîil. ,, Maintenant donc je te „ prie que le Roi mon Seigneur écoute les „ paroles de fon Serviteur. Si c'efl: l'E- „ ternel qui te pouffe contre moi, que ton ,, Oblation lui foit agréable; mais 11 ce „ font les hommes, ils font maudits de- 35 vant l'Eternel: car aujourd'hui ils m'ont „ ebafle afin qui je ne me tienne point joint à „ V Héritage de l'Eternel, & ils m'ont dit, „ va , fers les Dieux étrangers (c). C'efl au même préjugé que Dieu fait allufion dans ces paroles de Jéré?nie; Je vous transporte- rai dans un païs que vous n'avez point connu, ni vous ni vos pères , £? là vous fervir ez jour & nuit à d'autres Dieux (d). Ce n'efl pas qu'on dût les forcer à adorer les Divinitez de ce païs là; car il étoit très rare alors que l'on contraignit perfonne en matière de (a) Voyez. Sopbocl. Oetlip. uift. i. (b) Dcutéron. XII. 29, 30. (c) Samuel XXVI. 19. (d) Jérémie XVI- 13* Avril, May et Juin. 1743. *5 de Religion : mais c'eit que la crainte fu- perftitieufe de s'expofer à la Colère de ces faillies Divinitez, porteroit les Ifraë- lites à leur rendre un Culte religieux. Cette Vengeance imaginaire, que Ton fuppoibit que le Dieu tutelaire d'un païs exerçoit contre ceux qui négligeoient de l'adorer, le vrai Dieu l'exerça enfin réel- lement fur les Cutbéens idolâtres , qui a- voient été tranfportez dans le païs des Ifraëlites. Car comme par condescendan- ce pour les Juifs il avoit bien voulu pren- dre la qualité de leur Dieu tutelaire & lo- cal, il étoit à propos qu'il en exerçât les fondions, & que par quelque marque, éclatante de fa puiflance , il fe diftinguat des faufles Divinitez , comme il fit à l'é- gard des Cutbéens , ainfi qu'on le peut voir au dixfeptiéme Chapitre du fécond Livre des Rois. Ce fut ce refpeft fuperftitieux pour les Divinitez tutelaires & loca'es qui jetta les Ifraëlites dans l'Idolâtrie , & les engagea à fervir les Dieux des Pais ou ils habitoient. D'oii Mr. Warburton conclut que leur Ido- lâtrie ne confiftoit pas à abandonner l'E- ternel comme s'il n'eût point été Dieu, ni à rejetter la Religion Mofaïque comme fauf- fe, mais feulement à admettre dans leur Culte des cérémonies étrangères , & à joindre au Culte du vrai Dieu celui des Divinitez payennes. C'efl ce que nôtre Auieur prouve par plufieurs paffages de l'Ancie» i6 Bibliothèque Britannique, l'Ancien Tcftament, qu'il accompagne de quelques Remarques. Il finit cette Section par une obfervation qui mérite d'être rapportée. Quoique les Juifs fuilènt extrêmement enclins à imiter le Culte de leurs voifins, à adopter leurs Céré- monies religieufes , & à adorer leurs Dieux , il ne paroit ni par î'Hiftoire fainte , ni par l'Hiftoire profane que les Payens aient ja- mais emprunté les Cérémonies des Juifs, ni qu'ils aient été difpofez à joindre le Culte du Dieu d'Ifra'ël à celui de leurs Di- vinitez. Bien loin de là ; l'Ecriture nous apprend pofitivement qu'ils ne l'ont point fak (a). D'où vient cela, vu qu'ils adop- toient aifément les Dieux des autres Na- tions ? Voici ce que Mr. Warburton dit là deffus : Les Peuples voifins des Juifs fa- voient que le Dieu d'Ifraèï abhorroit tou- te efpéce d'afîbciation ou d'alliance avec les Dieux des Gentils. Ce caractère info- ciable de voit faire craindre aux Payens ( qui regardoientleDieu d'Ifraè'l comme un Dieu tuîelaire très puiflant ) que s'ils l'aflbcioient à leurs Divinitez, cette Aiïbciationneleur fût incommode , ou même dangereufe, comme quelques uns l'avoient déjà éprou- vé à leurs dépens ; je veux dire les Pbilif- tins, lorfqu'ils eurent fait conduire l'Ar- che de Dieu à Afàoà (b). Dans la troifîéme Section nôtre Auteur ex»- (a) ï^iEzéchicl XVI. 34. Jsréraic IL 11 • (b) Voyez 1 Samuel V. Avril, May et Juin. 1743. I7 examine combien de tems la Théocratie des Juifs a duré. Il foutient d'abord qu'elle n'a point fini avec les Juges. Lorfque le Gou- vernement Monarchique fut établi , le Prince n'étoit proprement , fuivant Mr. Warburton , que le Viceroi , ou le Lieute- nant de Dieu; ce qu'il prouve par les rai- ions fuivantes: 1. Le Roiavoitun Pouvoir fans bornes tel qu'il convient à un Viceroi de Dieu. Mais il n'avoit point l'Autorité de faire des Loix , laquelle aucun Viceroi ne peut avoir. 2. Les Rois étoient établis ou dépofez de Dieu, félon Ion bon-plaifir: ce qui s'accorde très bien avec la Qualité de Viceroi , mais non pas avec celle d'un Souverain élu par le Peuple. 3. Ceux qui maudiflbient le Roi étoient punis de la mê- me manière que ceux qui biafphémoient contre Dieu; c'eit à dire , qu'on les lapi- doit. Nous en voions la Raifon dans ces Paroles d'Abifaï, ne fera-t-on point mourir Simhi, puifqiCil a maudit /'Oint de l'E- ternel {a). Ce titre qui écoit donné à tous les Rois de Juda & d'Ifraè'l exprime manifeftement leur Office de Vicerois. 4. il eft déclaré en mille endroits de l'Ancien Teftament que le Throne & le Royaume de Juda, font le Throne & le Royaume de Dieu ; ce qui prouve que Dieu étôit en- cor le Roi de Ton Peuple , & que les Prin- ces n 'étoient proprement que fes Vicerois. 5. Enfin les Loix pénales contre Tldola- trie (a) i Samuel XIX. n. Tome XXL Part. L B iS Bibliothèque Britannique, trie ont fubfi'fté fous les Rois, & ont été exécutées par les meilleurs Princes, & mô- me par des hommes infpircz: ce qui feul démontre que le Gouvernement Théocrati- que duroit toujours , puifque ces Loix font abfolument injuftes fous toute autre efpéce de Gouvernement. Quand au titre de Roi qui eit perpétuellement donné aux Princes des Juifs , on n'en peut rien conclurre con- tre le Sentiment de nôtre Auteur, puis que ce Titre eft auflidonnéà Moyfe (a), qui n'étoit certainement que le Député de Dieu. Nôtre Auteur réfute enfuite ce que Mr. le Clerc a avancé (b) pour prouver que la Théocratie n'a fubfifté quejufques à l'Eta- bliiïement des Rois ; il tache aufll de renverfer l'Opinion de Spencer, qui pré- tend que la Théocratie s'efl établie'par de- grez, & a été abolie de même. Mr. JVarburton fait voir après cela, que la Théocratie a continué , ou pour mieux di- re, qu'elle fut rétablie après le Retour de la Captivité. Il le prouve par ces paroles du Prophète dggée. Maintenant donc toi , Zoroba- bel, fortifie toi;anffi toi, Jéhofuah J?/.r de Jé- hotfadak , grand Sacrificateur fortifie toi; vous aujfî, tout le peuple du Pais, fortifiez vous,& tra- vaillez, car je fuis avec vous , dit l'Eternel des Armées (a) Peuteron. XXXIII. 4, 5-. (b) Dz-ns [es Senrinu'ns de quelques The'olo* gicn> de Hollande, c? dans U Défaite de ces Sen- timens. Avril, May et Juin. 1743. 19 Armées y Suivant (a) la parole de l'Al- liance QUI: JE TRAITAI AVEC VOUS , QUAND VOUS SORTITES D'EGYPTE ; ET MON ESPRIT DEMEURE AU MILLIEU D£ vous : ne craignez point (b). Qu'elle étoit cette Alliance ? C'eft , dit: nôtre Auteur, qa'Ifraè'l feroit le Peuple de l'E- ternel, Ôc que l'Eternel feroit Ton Dieu & Ton Roi. Cela ne peut donc pas ligni- fier Amplement que Dieu feroit le Dieu des Ifraè'lites , & qu'ils feraient fon peuple ; car ce B'étoit là qu'une partie de l'Alliance. Cela ne peut pas fignirier non plus , que les Juifs feroient conduits par une Provi- dence particulière, comme lors qu'ils forti- rent d'Egypte, & durant les premiers Pério- des de la Théocratie, car ce n'étoit là qu'un effet de l'Alliance ; 6c l'on fait d'ailleurs que cette Providence particulière ceflà peu de tems après le Rétabliilement des j Le fens du PalTage qu'on vient de rappor- ter eft donc , que l'Eternel feroit le Roi des Ifraè'lites aufll bien que leur Dieu. Le Lecteur jugera fi ce Raifonnement eft bien folide. Mr. Wàrburton s'attache enfin à montrer que la Théocratie a fubfifté jufques à la ve- nue de Jéfus-Cbrift. Voici les preuves. 1. En quelque tems que le Gouvernement Théo- (a) Ce mot Suivant n'eft peint dans l'Original , ni dans nôtre Verfion Françoi/e', mais je me con- forme ici à la Verfion Angloife. (è) Aegée II. 4, 5-. B 2 20 Bibliothèque Britannique, Théocratiqueait été aboli, il faut qu'il l'ait été d'une manière aufli folemnelle , qu'il avoit été établi ; car il importoit infiniment à un Peupic aufli étroitement obligé à l'O- béïlTance que Tétoient les Juifs , de ne pas fe tromper fur la nature du Gouvernement, fous lequel il vivoit. L'Equité naturelle cx.ge que toutes les Loix civiles foient é- tablies & abrogées avec la même Solemnité. Or puifque la Théocratie n'a jamais été abo- lie de cette manière, il faut en conclurre, qu'elle a toujours fubfiflé. 2. Elle n'auroit pu être abolie en aucun tems fans renverfer & dilToudre entière- ment toute la Conftitution de la Républi- que: car toutes les Loix de l'Etat, & tou- te la forme du Culte Religieux fe rappor- toient à Dieu en qualité de Gouverneur civil; ces Loix n'étoient équitables ,jufles, & utiles , qu'en fuppofant la Théocratie. Mais puifque l'EtabiilTement Civil & Reli- gieux n'a iubi aucun changement depuis le tems de M y), jufques à ce qu'il ait été aboli par Jefiu-Ctnifi , il fuie de là que la Théocratie a fubfiflé durant tout ce tems là. Car rien n'efl plus abfurde que de fuppofer que des Loix Nationales, toute? faîtes par rapport à une certaine forme de Gouverne- ment , demeurent en force , tandis que le Gouvernement même eft changé. Ce que l'Auteur de l'Epitre aux Hébreux dit du Sacrificateur, doit s'entendre auifi du Roi, dans un Etat ou la Société civile eft incor- porée avec la Société religieufe. La Saari- :fur? Avril, May et Juin. 1743. 21 f.cature étant changée , il eft néceffaire aufii qu'il y ait un changement de Loi Ça/. 3. C'eft de Jéfus-Chrift qu'il eft parlé dans ce paffage ; & comme il a fait le chan- gement en queftion en qualité de Sacrifica- teur, il faut qu'il l'ait fait aufli en qualité de Roi : Car il eft venu pour fuccéder im- médiatement, en qualité d'Héritier de Dieu, au Royaume de ion Père , comme nous l'apprenons par fHiftoire de fon Miniftére : Mais il n'y a point eu d'Interrègne; Dieu lui a remis le Royaume, dont il étoit alors actuellement en "pofleflion ; & par confé- quent la Théocratie a dure jufques à la venue de Jéjus- Ccrifi. Ceci fournit à nôtre Auteur une expli- cation afïez ingénieufe de ce célèbre Ora- cle de Jacob, Le Sceptre ne fe départira point tf^Juda, ni le Légifateur d'entre /es pieds , jufques à ce que le Scilo vienne. C'eft à dire , fuivant Mr. Warburton , „ la Théocratie „ fubfiftera parmi les Juifs, jufques à ce „ que le Cbrift vienne prendre poiTeffion „ du Royaume de fon Père. " Car quel autre Légiftateur y a-t-il jamais eu en Ju- da, jufques à la venue de Jêfv.s- Cbrijl , Il ce n'eft Dieu lui-même, parle Miniftére de Moyfel La quatrième Section eft deftinée à mon- trer qu'en conféquence de la Theocratie,l'E- criture Sainte nous repréfente la Républi- que des Juifs comme gouvernée par une Provi- («) Hébreux VIT. iz. B 3 22 Bibliothèque Britannique, Providence extraordinaire («). C'eft ce que l'Auteur prouve par l'Hiftoire des Mi- racles que Dieu a opérez en faveur de Ton Peuple durant Je tems que ia Théocratie a fubfifté. Il remarque là defîus que c'eft la continuation des Miracles qui prouve que les Juifs étoient fous la conduite d'une Providence extraordinaire & particulière. Car lors que les Miracles ne font opérez qu'au commencement de Fétabliflement d'une Religion, comme cela eft arrivé à l'égard du Chriftianifmc , on ne doit les regarder que comme IzsLettres de Créance des Prédicateurs de cette Religion. A in fi les Apôtres ont fait des Miracles auiTi bien que Moyje & les Prophètes : mais ils ne repré- fentent les Chrétiens que comme vivant fous la conduite d'une Providence généra- le & ordinaire , comme le refte du Genre- humain; au lieu que les Prédicateurs de la Loi déclarent conftamment que les Juifs ior.z fous une Providence particulière. A l'occafion des Miracles nôtre Auteur lance quelques Traits contre Spinofa , & con- trc fon Difciple Toland; & comme Spino- (a) Mr. Warburton fe corrente Je prouver ici, que c'eft là l'idée que l'Ecriture Sainte nous don- ne ; il promet de montrer ailleurs , que cette idée eft véritable , c'eft à dire, que les juifs ont été réellement fous une Providence extraordinaire Se miraculeufè. C'eft: là fans doute un des Sujets qu'il fc propofe de traiter dans fon troiiiéme Vo- lume. Avril, May et Juin. 1743. 23 fa a prétendu que l'Hi ftori en Jofeph n'ajou- coit point foi aux Miracles rapportez dans l'Ancien Teftament, cela engage Mr. War- burtm dans une aïïez longue DigrefTion fur cet Hiftorien Jtàf, qu'il juftifie ou excufe autant qu'il peut. Mais comme cette di- greflion n'a pas beaucoup de rapport avec le Sujet principal de cet Ouvrage, je ne m'y arrêterai pas, je dirai feulement que je ne doute point qu'on ne la life avec "plaifir. Suivant l'Ecriture la Providence ex- traordinaire avoit pour objet , 1. l'Etal en général; 2. les Particuliers. Dieu en qua- lité de Dieu Tutelaire des Juifs devoit naturellement étendre l'es foins fur l'Etat, ùc en qualité de Roi ou de Magiftrat fu- préme il ne pouvoit pas manquer de faire fentir aux particuliers les effets de fon au- torité par une Providence extraordinaire. Nôtre Auteur ne s'arrête pas à faire voir que l'Etat en général étoit l'objet de cette Providence; lachofe efh trop claire, dit il, pour avoir befoin de preuves. Mais à l'é- gard des Particuliers il le prouve première- ment par la Prière que Salomon adreffa à Dieu Jors de la Dédicace du Temple de Jérufalem (a). Cetre Prière eft trop lon- gue pour la copier. Nous remarquerons feulement qu'elle prouve également que la Providence de Dieu s'étend fur l'Etat en général, & fur les Particuliers. Mais je doure (a) 1 Chron VI. 14., & fniv. B4 24 Bibliothèque Britannique> doute que tout le monde y découvre cette Providence extraordinaire & miraculeufe que nôtre Auteur veut établir. Salomon de- mande à Dieu qu'il exauce les Prières qa'on lui adreflera dans Ton Temple ; que lors que deux perfonnes feront en procès, & qu'on leur aura fait prêter ferment, il pu- nifle le coupable , & recompenfe l'innocent ; que lors que le peuple en général aura pé- ché , & aura été à caufe de cela vaincu par fes Ennemis , & mené en captivité , ou puni par la famine, &c. s'il fe repent, Dieu lui pardonne, le rétablifTe dans fon pais , lui renvoie des faifons fertiles , &c. Il me femble qu'en fuppofant une Provi- dence qui prend foin foit des Etats en gé- néral, ioit des (impies particuliers, & qui dirige tous les événemens, il n'y a point de Chrétien qui ne puiife parler à Dieu comme fait Salomon dans cette Prière, i. Nous prions tous les jours pour les Prin- ces, pour les Magiftrats, pour laprofpérité de l'Etat, pour les particuliers ,* nous de- mandons à Dieu la Santé de nos Frères , nous le prions de leur accorder les Biens tem- porels, comme les Biens fpirituels; mais dans tout cela nous nefuppofons point que Dieu fera des Miracles pour nous exaucer. Je ne vois donc pas qu'on puifle inférer de la Prière de Salomon , que Dieu gouver- nait les Juifs par une Providence extraor- dinaire & miraculeufe. Les autres PafYages que nôtre Auteur ci- te de l'Ancien Teuament ne me paroiiTent guère Avril, May et Juin. 1743. -25 guère plus concluans. Il rapporte entre autres ces paroles du Pfeaume XXX VI, (a) J'ai été jeune ,& f ai atteint larcieille(]e , mais je n'ai point r. II. 2, 3. B5 2 il déclara en même tems que la Loi qui „ puniflbit les Enfans pour les Crimes des 5, Pérès feroit alors abolie. Jérémie , par- 5, lant de cette nouvelle Oeconomie , „ s'exprime en ces termes. En ces jours „ là on ne dira plus , les Pérès ont mangé le „ fruit aigre 9 & les dents des Enfans en 3, font agacées: Mais chacun mourra pour fin 5, Iniquité : tout homme qui mangera le fruit 3, aigre , fes dents en feront agacées. Voici 3, les Jours viennent dit l'Eternel , que je „ traiterai une nouvelle Alliance avec la Mai- „ fin d'Ifraël, £f avec la Maifon de Juda: „ non pas félon V Alliance que je traitai avec 3, leurs Pérès } au jour que je les pris par la „ main 9 (a) Exode XX. f. Nous avons donne il y a quelques Années une autre explication de cette menace, que le Lecteur pourra voir dan5; la Bi- bliothèque Raifonnée 3 Tom> IX, Pari. IL pag. Avril May et Juin. 1745. 37 „ main y pour les faire for tir du Vais d'È- „ gypce,c!fc. (a). Ezécbiel parle de la mê- 3, me Oeconomie lorsqu'il dit, Je ferai 3, qu'Us n'auront qu'un Cœur, £f je mettrai „ au dedans d'eux un Efprit nouveau,,... ,, Mais quant à ceux dont le Cœur va après 3, leur? infamies , .... je leur rendrai „ leur train fur leurs têtes (b). Et ailleurs „ il s'exprime ainfi,- Que voulez vous dire, „ vous qui ufez ordinairement de ce Proverbe „ touchant le Pais d'Ifraël , en difant, les „ Pérès ont mangé le fruit aigre , &f les dents „ des Enfans en font agacées 1 Je fuis vivant „ dit le Seigneur l'Eternel, que vous n'uferez 3, plus de ce Proverbe en Ifraël ; Voici tau- 3, tes les Ames font à moi: l'Ame de l'Enfant „ ejl à moi comme l'Ame du Père; &? l'Ame n qui péchera fera celle qui mourra Çc). 33 Et ce qui prouve plus clairement en- 33 cor que l'Abolition de cette Loi n'efl: 33 due qu'à la nouvelle Oeconomie, c'eft 3, que quand l'ancienne Oeconomie Ju- ,3 daïque eft le fujet des Difcours des 3, Prophètes , ils parlent de cette Loi 3, comme iubfiftant encor dans toute fa ,3 force. Voici par exemple ce que dit 33 Jérémie. Tu fais gratuité juj qu'en mille 3, générations , £? tu rends l'iniquité des Pérès 33 dans le fein de leurs Enfans après eu?c (d) . Et „ Ofée (m) Térémie XXXI- 29, 33, U>) Ezéch. XI. 19, 21. (0 Ezéchiel XVIÏI.2-4. M Jércmie XXXII. 18- C 3 38 Bibliothèque Britannique, 5, Ofée dit , Puis que tu as oublié la Loi „ de ton Dieu , moi aujji j'oublierai tes En- 5, fans. " Mr. JFarburton conclut de tout cela, que,, L'Auteur de l'Oeconomie Mo- „ faïque connoiflbit très bien l'importance ,, du Dogme des Peines & des Recompen- „ fes d'une autre Vie , & qu'il a parfai- „ tement bien fuppléé au défaut de ce M Dogme. " Nôtre Auteur fait voir enfuite que com- me ce Dogme ne fait point partie de l'Oe- conomie Mofaïque , auiïî le Peuple Juif n'en a point eu connoifiance : Il le prou- ve par cette considération,- c'eft que quoi- que les Livres de l'Ancien Teftament con- tiennent l'Hiftoire desAttions& de la Con- duite de toute forte de gens , dans tou- tes les Circonftances poffibies, cependant on ne voit pas qu'ils aient jamais été déter- minez par le motif d'une Vie avenir , ni qu'ils aient témoigné la moindre efpérance, ni la moindre crainte fur ce Sujet. A cette preuve négative il ajoute des Paffages exprès de l'Ancien Teftament , qui font voir pofkivement que le Peuple n'attendoit ni Réfurre&ion , ni Vie avenir. La Femme Tékohite dit à David; Certaine- ment nous mourrons , fi? nous fommes fembla- bles aux eaux qui s'écoulent fur la Terre, -lies on ne ramaffè point (a). Et Job ; Comme la Nuée je diffipe fi? s'en va , ainfî celui qui defcencl au Sépulcre ne remon- tera (#) i Samuel XÏV. 24, Avril Ma y et Juin. 1743. 39 tera plus (a): & ailleurs,* Si un arbre ejt s il y a de Vefpétànde qu'il pouffera ci &? ne manquera pas de rejetions : Quoique fa racine /bit enfévelie dans la terre, & que j'on tronc J'oit mort dans la poufiiére, dès qu'il fentira Veau il regermera, c? produira des branches comme un arbre nouvellement planté. Mais l'bemme meurt & perd toute fa force; il ey puis où eji il? Comme les eaux s'écou- lent de la Mer , & une Rivière fe dtffèche c? ; ainji l'homme eji couché par terre , £? ne fe relève point ; jufqu'à ce qu'il n'y ait point de Cieux ils \ seilleront point , &f ne feront point réveillez de leur Someil (b). Le Pfalmifte ne tient pas un autre lan- ï. Il n'eft point fait mention de toi en la mort y dit il , & qui efl ce qui te célébrera le fépulcre (c). Quel profit y aura-t-il um'Jàng, Ji je defeens dans la fqffe? La poudra te célébrera-t-elle ? Prèchera-t-elle ta Vérité (d)? Fer as -tu un miracle envers les morts? Ou les trèpaffezfe relèveront ils pour te célébrer? Raconter a-t-on ta gratuit? dans le fépulcre , £? ta fidélité dans le tombeau? Cm- noitr a-t-on tes merveilles dans les Ténèbres 3 £f tajuflice aupaïs d'oubli (e) ? L'Auteur du Livre de V Eccléfiajle s'expri- me d'une manière plus pofitive encor. Cer- tainement (a) Job. VII. 9. (h) lob. XIV. 7-rz. (c) Pfeaume VI. 6. («0 Pf. XXX. m- (0 Pf. LXXXVIII. ii-i3. C4 40 Bibliothèque Britannique, tainement les vivons favent qu'ils mourront , ter morts ne favent rie?i9 & ne gagnent plus rien (a), car leur mémoire eji mye en oubli (b). Le Roi Ezécbias parle de la même ma- nière dans l'Action de Grâces qu'il rend à Dieu pour faguérifon miraculeufe. Le Jè- : ne te célébrera point, dit il , la mort ne te louera peint , ceux qui descendent dans la ne s' attendent plus à ta vérité : Mais U le -vivant eji celui qui te célébrera, comme moi aujourd'hui (c). Enûsx Jérémie dit dans fes 'Lamentations (d). Nos Pérès ont péché fcf ne font plus , & 'nous avens porté leurs Iniquité*. 'Ce qui fuppofe que comme les Pérès e- toient morts ils ne portoient aucune partie de la peine de leurs crimes , mais que les Enfans' feuls en étoient chargez. Àuroft on pu faire une pareille fuppoGtion i, fi le Peuple avoit été inftruit du Dogme des Peines & des Recompenfes d'une autre Vie? On voit donc le même langage par tout, & dans toutes les Circonftances de la Vie; dans la tranquiie Philofophie de l'Auteur de YEccUfiafte , comme dans les dérreiïcs du PfaJmifte , & dans les Actions de Grâces du Roi Ezécbias. Un Peuple inftruit (a) Il y a dans la Verfipn Ar«!otre , coufor-r merr.cnt a la Vulgate , ils n'ont plui aucuns Re- COMPENSE. (b-. Eccléf. IX. p (c) Efaïe XXXV II;. iS, 10. (0 Chap, V. 7. Avril May et Juin. 1743. 41 inftruit dû Dogme de la Vie & de l'immor- talité auroit il pu tenir un pareil Langage? Éo voit on un féal mot, dans quelque oc- calion que ce foit , chez les Auteurs du Nouveau Teftament, fi ce n'eit lors qu'il s'agit de le réfuter, & de le condamner. Air. Vi\:"burton ne doute point , que ceux qui favent réfléchir, ne regardent ce qu'on vient d'avancer , comme une preuve convainquante de la Théfe qu'il vouloit établir : ce qui renverie , pourfuit il , le iubterfuge de ceux qui difent , qu'à la vé- rité Moyje n'a point établi le Dogme d'une Vie avenir dans Tes Ecrits , mais qu'il l'a enfeigné de bouche , de forte que ce Dog- me s'eft confervé parmi les Juifs par le moyen de la Tradition. Car on voit que bien loin de l'avoir enfeigné, il a pris foin de le cocher, il a même pourvu au défaut de ce Dogme : & tant s'en faut que ce Dogme ait eu quelque influence fur la con- duite des Juifs , qu'ils n'en avoient pas même la moindre Idée. Dans la fixiéme & dernière Sec- tion de ce Livre Mr. Warburton fait voir que les Ecrivains du Nouveau Teflament ? fleurent pofitivement que le Dogme des Reconmenfes & des Peines d'une autre Vie neTaifoit point partie de l'Oeconomie Mofaïque. Ils déclarent premièrement que les Pei- nes 6c les Recompenfes temporelles étoient la Sanction de l'Ancienne Loi : S. Paul en foutenant dans fonEpitre à Timotbée, con- C 5 tre 42 Bibliothèque Britannique, tre certains Chrétiens Judaïzans , que l'ob- ier vation des préceptes de la Morale eit préférable à celle des Cérémonies, dit que V Exercice Corporel eft prof table a peu de ebo- fes 9 mais que la piété eft profitable à toutes cbojés ; ayant les promejjes de la Vie préjente , £? de celle qui eft à venir (a). „ C'eft à di- ^ re, fuivant l'Explication de nôtre Au- „ teur, que quoique la Loi eût ordonné „ un grand nombre de Cérémonies, & 3, qu'il faille néceflairement qu'il y en ait ,, quelques unes fous l'Evangile par tout ou 3, il y a une Eglife , cependant elles ne „ font que d'un très petit avantage en com- „ paraifon des préceptes de la Morale. „ Sous l'une & l'autre Religion il y a des iy Recompenfes particulières attachées à „ la pratique de ce que chaque Religion 5, ordonne, favoir, fous la Religion Judaï- 35 que les Recompenfes^ la Vie préjente , ,, & fous la Religion Chrétienne celles ,, de la Vie avenir. " Cette explication paroitra fans doute étrange ; cependant nôtre Auteur entre- prend de prouver que dans le PalTage de S. Paul qu'on vient de citer, ces Expref- fions de la Vie préfente ne fauroient fe rap- porter à l'Oeconomie Evangélique. 11 le prouve particulièrement p# un au- tre PalTage du même Auteur facré, où il déclare expreilèment que les Chrétiens n'ont point les promeffes de la Vie préfente. Car en (a) i Tiiioth. 17. S- Avril, May et Juin. 1743. 43 en parlant de la Condition de ceux qui fui* venc yéfus-Cbfifi > il dit aux CoriHtl que fi nous ïïavvns éCefpérancé en C&rift que pour cette Vie feulement nous famines les plus miférables de tous les hommes (a). „ Pour „ fentir la force de ce Raifonnement, dit „ Mr. Wcir'ourlra , il faut confidérer que „ S. Paul l'adrciïe aux Convertis d'entre „ les Juifs , qui étoient infectez de Sa- ,, ducéi'fme, & qui vouloient appliquer à „ la Religion Chrétienne les Principes de ,, l'Oeconomie Mbfafque. Et comme ils ,y foutenoient que celle-ci n'enfeignoic „ point le Dogme d'une Vie avenir, ils ,, en concluoientque l'Evangile ne l'enfei- „ gnoit pas non plus. Ils fondoienc leur „ Raifonnement fur ce que les Peines & ,, les Recompenfes temporelles étoient la „ feule Sanction de la Loi. L'Apôtre, fui- ,, vant fa coutume, raifonne avec eux fur ,, leur propre principe. Vous niez, leur 3, dit il, la Réfurrection des morts, ou les 3, Peines & les Recompenfes d'une autre ,, Vie. Pourquoi cela? C'eft parce que la „ Loi ne renferme point ce Dogme. Et „ comment le prouvez vous ? C'eft que „ les Recompenfes & les Peines tempo- ,, reiles é:oient la feule Sanction de la Loi. ,, Je vous l'accorde: mais je réfute vôtre ,, conféquence par vôtre propre principe. „ Vous reconnoiflez que les Juifs avoient 3, un équivalent pour les Peines ex les Re- „ compenfes :Cor. XV- I?. 44 Bibliothèque Britannique, 33 compenfes avenir ; favoir celles de cet- 3, te Vie. Mais les Chrétiens n'ont point a, de pareil équivalent: bien loin de là; 3, ils font par rapport à cette Vie , les 5, plus miferables de tous les hommes. 3, Puis donc qu'ils n'ont point d'équivalent 3, pour une Vie avenir, il faut néceflaire- 33 ment qu'ils aient droit à cette Vie ave- 33 nir. " Voilà, pourfuit nôtre Auteur, ce qui donne beaucoup de force au Raijbnnement de V Apôtre. Et il par oit par là, non feule- ment que les Chrétiens ?i'avoient point les pro- meffes de la Vie préfente , mais aufji que les Juifs les avoient ^ Mr. Warburton rapporte enfui te lesPaf- fages du Nouveau Teftament , qui prouvent félon lui , que le Dogme d'une Vie ave- nir ne faifoit point partie de l'Oeconomie Mofaïque. Il cite d'abord ces Paroles de S. Paul ; Comme par un feul homme le péché eft entré au monde , la Mort y eft auffi entrée par le péché; & ainfi la Mort eft parvenue fur tous les hommes , parce que tous ont péché. Car jufqu'à la Loi le péché étoit au monde .-1 Or le pé- ché n'eft point imputé quand il n'y a point de Loi: Mais la Mort a régné depuis Adam jufqu'à Moyfe(a).,, Le But de l'Apôtre, dit „ nôtre Auteur , eft de montrer que la 3, Mort eft venue par Adam par le moyen „ du péché, & qu'elle eft ainfi parvenue 3, fur tous les hommes; & que la Vie eft j, venue par Jéfus-Chrift. Mais comme il „ a voit (a) Rem V. 11-14. Avril, May et Juin. 1743. 45 l, avoit die, que le péché qui fait venir la ,, Mort n'eft point imputé là où il n'y a j, point de Loi, de peur que cela ne parut ,, contredire ce qu'il venoit d'avancer , ,, que la Mort étoit parvenue fur tous les „ hommes , il ajoute que la Mort avoic ,, régné depuis Adam jufqu'à Moyfe, perfua- „ dé qu'on conclurroit fuffifamment de là, „ qu'elle doit auffi avoir régné depuis ,, Moyfe jufques à Jéfus-Crift. Or je ,, demande, comment S. Paul a pu dire, ,, que la Mort a régné fous l'Oeconomie ,, Mofaïque, files Juifs ont eu la Con- „ noifiance d'une Vie éternelle, quidevoit „ être procurée par un Rédempteur ave- „ nir?.,.. Auffi le même Apôtre appel- „ le - 1 - il ailleurs la Loi des Juifs un „ Miniftére de Mort , & un Mïniftére de „ Condamnation {a). " Nôtre Auteur allègue en fécond lieu un Pafîage de la féconde Epitre à Timotbée , qui paroit beaucoup plus pofitif. C'eft celui où S. Paul dit , que Jéfus-Chrift^ a détruit la xmrt , e? qu'î7 a mis en lumière la Vie c? l'Immortalité par l'Evangile (fc). „ Or fi Jéfus-Chrift a détruit la Mort, il „ eft certain qu'elle a régné jufques à ce » qu'il vînt. Et cependant il eft certain j, qu'elle n'a pu régner qu'auffi longtems „ que les bonnes Nouvelles de l'Evangile „ étoient cachées, parce qu'on convient ,1 que r (*) 1 Cor. HT. 7, & 9- \h) iTiiu» !• 10. 46 Bibliothèque Britannique, 3, que la mort de Jéfns-Chrift a un effet 3, rétroactif. Doù il fuit que ceux qui ont „ vécu fous iaLoi n'ont point eu connoiflTan- 5, ce de la Visai de l'Immortalité. De plus , _,, puis que fa Vie & l'Immortalité ont été mi- 5, fes en lumière par l'Evangile, ilfautqu'el- „ les aient été cachées & inconnues juf- 33 qu'es à la prédication de l'Evangile. Mais 35 fi Mayfe & les Prophètes ont enfeigné 3, cet e Doctrine, comment peut on dire, 5, qu'elle a été tùifc en lumière par TE- 5, vangiîe? Aurli voyons nous que la „ Fie avenir eftfouvent appeliez le Myftére „ de Vhvangïle Ça); c'étoit un Myfiére , „ jufqu'à ce qu'il eût été divulgué par les „ Difciples de Jêjus-Cbrift ; un Myftére, i} qui avait été caché dans tous les fiéclts £f 3, dans tous Un il qui eft maintenant via- 3, nifejlé auz Saints (h). " Mr. lirarburton allègue encorqt-.elques autres Paiïages pour confirmer fa Théfe , mais comme ils ne font pas fi exprès que le dernier que nous avons rapporté , nous nous contenterons de les indiquer à la marge (7), ce nous di- rons feulement que nôtre Auteur finit fes Rerlections fur ûètGe matière en remar- quant eue fi la Loi avoir enseigné le Dogme d'une Vie avenir, non feulement il n'y au- roit eu rim à ms l'O économie Mo- faïque, mais elle auroit même été plus par- faite que rOeconomie Ewmgélique, puis que (V Ephéf. VI (c Col f, 1. 16. {c) Hébr, VII. 19. X. 1. VIII. 6, 7. Avril, May et Juin. 1743. 47 que elle auroit eu les Promejjes de la Vie pré' fente , & de celle qui efi.à venir , au lieu que l'Evangile n'a que celles-ci, au moins iui- vant Mr. Wàrburton, Nous rendrons compte une autre fois du fixiéme & dernier Livre de ce Volume* ARTICLE IL C a j 1 Juliï Caesaris de Bello Gai- lico & Civil' , nec non A. Hir- tu aliorumque de Bellis Alexandri- no y Africano , & Hifpanienfi Com- mentarii. Notas & Animadverfwnes addidit Tho. Bentleius. Accef- fete Conjectura & Emendaîîones Ja- C O B I J U R I N I. Ceft-à-dire ; Les Commentaires de Jules-César, touchant la Guerre des Gaules, £5* la Guerre Civile; comme aujjl ceux «f Au tus Hirtius, &f d'au- tres Ecrivains , fur les Guerres d' A- LÉXANDRIE , d'AFRIQ^UE, &f d' E s p a c N e. Avec les Noces £? les Remarques de Mr. Tho :î as Bent- ley, qui y a joint les Conjeélures £p les Corrections de Mr. Jaques Ju- Rin. En grand octavj , pagg- 572. fans 48 Bibliothèque Britannique,, fans Y Index des matières. A Londres ± chez Guillaume Innys 8c Richard Man- by, 1742. IL n'y a guéres d'Anciens Auteurs, dont on ait autant d'Editions, que des Coin* mentaires (ou Mémoires) de Jules- Cé- sar, &de quelques autres Ecrivains qu'on y joint , comme aiant continué l'hiftoirc des Guerres de ce grand Capitaine. A la vérité , pendant long tems, ces Auteurs gagnoient peu , ou perdoient même , à être Couvent rimprimez. Mais, depuis le commencement de ce Siècle, il s'eft trou- vé trois Savans Critiques, deux en Angle- terre, & un en Hollande, qui ont revu le Texte avec beaucoup de foin, fur toutes les Collations de Manufcrits déjà produi- tes, & à l'aide de divers autres Manufcrits dont on n'avoit pas encore fait ufage. Le pre- mier eft feu Mr. D a vies, dont l'Edition in quarto, parut à Cambridge , en 1706". Lé fécond, feu Mr. Clark e, qui donna fix ans après fon Édition magnifique in folio , impri- mée à Londres. Le dernier, Mr. Oudendorp, devenu depuis ProfelTeur à Leide 9 ou il avoit publié en 1737. fon Edition, (a)quira(Temble tous les avantages des deux précédentes , & y joint ceux que de nouveaux fecours ont (a) On trouve un Article fur cette Edition, ctam 1 ancienne Bibliothèque Raifonnêe , Tom.XIX. pag. ij-3. & fuiv. : Avril, May et JyiN. 1743. 49 Ont fournis à l'Editeur, qui même a donné en 1740. une féconde Edition, en petite forme, du Texte feul, revu de nouveau. Après tout cela, il femble qu'on ne de- voit pas s'attendre à voirfi tôt quelque au- rre Editeur fe mettre fur les rangs. Mais H dition de Londres, dont il s'agit, n'eft prefque qu'une rimprelfion du Texte de Mr. Oudeudorp, accompagnée par-ci par-là des Notes Critiques de deux Savans Ànglois 9 comme il paroît par la Préface très- courte de l'Editeur, Mr. Thomas Bentley. Il n'auroit jamais penfé , dit-il , à don- ner une Edition de Jules - Céfar , s'il n'y eût été exhorté & follicité fortement par un ancien Ami , à qui il ne peut rien refu- fer. Cet Ami, Mr. Jurin, aulïï grand Philologue & Critique, que Philofophe & Médecin, avoit lu pour le moins dix fois, avec beaucoup d'attention , d'un bout à l'autre , les Mémoires de l'Uluftre Romain , dont il fait fes délice*, & à force de mé- diter fur les endroits qui lui paroifToienc corrompus , il lui étoit venu dans l'efprit bien de nouvelles Corrections. Il en com- muniqua quelques-unes , en converfation , à Mr. Bentley 9 qui les jugea pour la plu- part il claires & fi fûres, que cela le fit hâter de travailler à cette Edition , pour mettre à profit tant de belles découvertes, dont il a fouvent parlé à fes Amis, com- me donnant lieu de penfer que le bonheur qui avoit toujours accompagné Céfar pen- dant fa vie , le fuivoit encore, après fa Tome XXI. Par{. I. D ~~~1noh. jro Bibliothèque Britannique mort, puis qu'il trouvoit aujourd'hui Mr. Jurin , pour Correcteur des fautes qui s'é- toicnt gliffées dans fes Mémoires, & un Editeur qui fe chargeât de publier les Cor- rections de ce Savant, MwBentley fe mit donc • à lire lui-même deux fois les Mémoires de Cé- far dans cette vue ; &en les relifant une troi- fiera e pendant le cours de l'impreflion, il vit qu'il reftoit encore bien des difficultez. Il a donné aux Imprimeurs pour Copie les feuilles de l'Edition de Mr. Oudendorp , qu'il fuit toujours , à moins qu'il n'en aver- tille dans fes Notes. Mr. Jurin croie, que cet Editeur a fouvent changé en pis le Texte de Davies , & qu'en bien des en- droits l'ancienne leçon doit être préférée à la nouvelle. Mais, félon Mr. Bentley , les changemens font beaucoup plus fou- vent faits avec raifon, que mal-à-propos. Voilà tout ce qu'il nous dit. S i l'on parcourt fes Notes , on trouvera que le nombre des palTages, oh il avertit qu'il n'a pas fuivi le Texte de Mr. Oiiden- dorp , eft très-peu confidérable. Pou" ce qui eft des nouvelles Conjectures, ou Cor- rection*, on en voit fur plufieurs endroits, d-ms lefquels nos deux Critiques, fur tout Mr. Jwrm3 trouvent quelques fautes, ou Quelques çlofes des Copiftes , dont per- fonne n'avoit encore eu le moindre foup- çon. Quelauefois, au contraire, ils pré- tendent qu'il n'y ariej de fautif dans cer- tains paflages que les Éditeurs & les Inter- prètes Avril, Ma y et Juin. 1743. 5* prêtes précedens ont voulu corriger. Sur d'autres enfin, ils avouent de bonne foi, qu'il n'y a pas moien de trouver rien qui fatisfafle. Le filence de FEditeur fuffit pour donner lieu de croire , que ni lui , ni Mr. Jwn'n, n'ont fait ufage d'autres Col- lations de Manufcrits, que de celles qui fe trouvent dans les Editions précédentes. Je n'ai apperçû qu'une feule Note , où (a) le dernier cite un Manufcrit appartenant à Mr. le Docteur Richard Mead, pour auto- rifer une leçon , fur laquelle on peut voir que Ço) Mr. Oudendorp, qui ne la fuit pas, a indiqué d'autres Manufcrits, & quelques anciennes Editions. Je vais donner quelques exemples de* Corrections, ou Conjectures, de nos deux Savans ; par où l'on pourra juger du goÙC de l'un & de l'autre. De Bell. Gallic. Lib. I. Cap. 29. In caf- tris Helvetiorum tabula repertœ Jïint liîeris Grœcis confectœ , &f ad Cœfarem relatœ ; qui* bus in tabulis nominatim ratie eonfefîka erat , qui numerus dovio exijjet eorum , qui arma ferre pojjent ôcc. L'Auteur dit-là claire- ment, qu'après la défaite des Helvétiens (ou anciens Suffis) on trouva dans leur Camp des Liftes du nombre de gens en é- tat de porter les armes, qui étoient fortis de 00 r*g- SI- Sur le II. Liv. de BtlL CalL Cap îv. U) L:t. O. Var. Left. p*g. m. D 2 5a BlBILOTHEQUE BRITANNIQUE, de leur païs &c. Les Interprêtes ne con- viennent pas fur ce" qu'il faut entendre par les lettres Gréques (literis Grœcis) dont on s'étoit fervi pour drefTer ces Liftes. Les (a) uns veulent , qu'il n'y eût que les caractè- res qui fuflent Grecs; les autres (b) qu'on eût employé & les caractères & la langue des anciens Grecs. Mais ce n'eft point là- deffus que roule la Note de nôtre Editeur, qui ne s'eft propofé d'expliquer les chofes mêmes, qu'autant que le demanderoient fes Conjectures fur la manière de lire. Il eft choqué ici de voir un mot répété dans la même période, tabules confect^e, & ratie confecta. Il lit donc tabules c o n- script^e; & il cite là-defliis un paflage tout femblable de S u et o n e : (c) Inventa eft [ tabula aenea ] conferipta literis verbif- que Grœcis &c. Je m'étonne, que nôtre Editeur, qui, à l'exemple de fes prédécef- feurs, fait ufage ailleurs delà Verfion Gré - que, (*)Glareanus, CeUarIus, Daviïs, Se Mr. Oudendûrp. Les deux derniers ne s'expliquent là-deiîus , que par occafion , dans un autre endroit, fur Lié. VI. Cap' 14. (h) Rhellicanus , Alde Manuce, François H o t o m a n , dont on peut voir les Nores dans l'Edition de Jungetmin. C'eft auflî l'opinion cIcDenys Vossius, in Lib. V. Cap. 48. Et Philippe Cluvier foutient au long la même chofe, dans fa Germxni* Antiaaa? Lih. T. Cap. j« (0 Vie. Jnl, Cdf*r. Cap. 8r- Avril, May ej Juik. i?43. 53 que , pour appuierles manières de lire qu'il approuve ou qu'il invente , n'ait pas remar- qué que ce Traducteur paroît avoir trouvé confcriptœ fur les Manufcrits dont il Te 1er- voit : car il dit , *EAA«"rî y*yç*w«'»*« ivçimç *»*k*ç &c. Il pourroit bien être que (a) Julius Celsus eût lu de même, à en juger par un verbe fort approchant dont il Fe Fert pour exprimer la choFe : In caj- tri s inventa funt tabula , quibus Hdvetiorum mimer us. . . . literis Gratis inscriptus erat. D'ailleurs, il me Femble que confcrip- ta convient beaucoup mieux ici , que con- feftœ. Céfar diftingtte manifeflement récri- ture des Tables , confidérée en elle-même , Foit qu'on la refîreigne aux caractères , ou qu'on yrenFerme auîfi la langue Gréque; d'a- vec ce qui étoit écrit de cette manière , ou la lifte du nombre de gens Fortisde chez eux pour aller s'établir ailleurs. Confecîa quadre très-bien avec ratio, qui expri- me ce dénombrement : mais tabula confeà a ne pourroit guéres avoir lieu ici, à moins que Céfar n'eût voulu indiquer la matière dont les tables étolem faites ; de quoi il ne parle point. Par toutes cesraiFons, il me Femble que la correction de Mr. Bentley eft bien Fondée ; d'autant plus que la reF- Femblance de confcriptœ avec le confefîa qui Fuit à peu de diftance, pouvoit aifc- ment tromper les Copiftes. Mais il y a divers autres patTages, dans lefquels, uni- quement (a) ?*g. i§. Eilit. GtavU. D3 54 Bibliothèque Britannique, quement pour faire difparoître une répéti- tion , nôtre Editeur efface quelques mots par pure conjecture , ou y en fubfiituë d'autres, dont l'écriture ell fouvent fi dif- férente, qu'il eft difficile de te perfuader que les Copiftes aient mis à leur place ceux qu'on profcrit. Les Savans ont prou- vé par (a) un allez grand nombre d'exem- ples, que les meilleurs Ecrivains de l'An- tiquité ne fe font pas toujours mis en pei- ne d'éviter ces repétitions qui nous cho- quent; & elles doivent d'autant moins fur- prendredans les Mémoires de Céfar , qu'on lait qu'il les avoit (£) écrits fort à la hâte. Lie. III. Cap. 26. Mi , ut erat imper a- tum , eductis quatuor cohortibus , quœ 9 prcefî- dio caflris reliàœ , intégra ab labore erant &c. 11 s'agit-là d'une occafion , où Crajjus , Commandant du la Cavalerie, voulant li- vrer bataille aux Aquitains , donna ordre de faire marcher quatre Cohortes, qu'on avoit laiflees pour la garde du Camp , & qui n'étoient point fatiguées , ïntegrce ab labore. C'eft ainû que portoient les Edi- tions , r (m) Voyez une longue Note Je Mr. Draken- r>RCH fur Tite Live , Lib I« Cap. 3. mm- 9, où il produit un très-grand nombre d'exemples de ce: H/ft' rien feul. (h) Comme le témoigne Hjrtius , dans iaTré- face fur le VIII. Livre die la Guerre dei Gfinki3 où il en achève l'hiftoire* Avril, May et Juin. 1743. 55 tiens, avant celle de Mr. Oudendorp, qui a mis inîritœ , quoi qu'il remarque lui mê- me que (a) Julius Celsus avoit lu in- tégra. Mais le dernier mot ne fe trouve dans aucun Manufcrit; au lieu que l'autre en a pour garants quatre , dont la leçon paroît confirmée par celle du plus grand nombre des autres, quoi que corrompus, dans lefquels , auliî bien que dans quelques anciennes Editions, on voit intentez , ou bien interrita. Sur ce fondement , le docte Çb) ]. Frideric Gronovius, Sa- vant lui Grute r, ont cru, qu'intrita eft le vrai mot que Céfar avoit écrit; & Mr. Oudendorp n'a fait aucune difficulté de l'in- férer dans le Texte. Mais Mr. Bentley y a remis int:-grœ9 comme chafle de là injui- tement. Il y a, dit-il, quelque chofe de trop recherché dans cet intrltœ , que l'on prétend lignifier non tritœ ; cela ne con- viendroit point au flyle fimple de Céfar. D'ailleurs , on ne trouve ailleurs aucun exemple é'intritus , pour dire , qui n'eft point fatigué, ou harafTé. Et qui plus eft, à fuivre l'idée que donne la lignification naturelle de ce mot, il en réfulteroic \*n fens tout- à -fait contraire à la penfée de l'Auteur ; on lui feroit dire que les Cohor- tes (a) A vufoerièns dans l*£dtfjfrn* fed pœne ne re/piceret quidem quifquam; ac tum omnes acerrime for- tijffimequs pugnarent. L'Auteur loue ici la bravoure & la fermeté à toute épreuve, que montrèrent les Soldats de (a) Quintus Cicéron , afiiégez dans *leur Camp par les Nerviens , qui commençoient à efealader les retranchement. Il pleuvoit de tous cotez des baies ardentes d'argille , & des dards enflammez: le feu confumoit tous les ba- gages & tous les effets des Soldats, dans leurs huttes couvertes de paille. Cepen- dant aucun d'eux non feulement ne fortit des remparts demigrandi caufia (pour déferter ou (a) Lieutenant de G^frj Si Frère qu'on lui donne, ne convient point ici , & ne lauroïc venir de la plume de l'Auteur , dont la peniee fe découvre aifément par la fuite du d.fcours. Non feulemeiil aucun ne jortit ûes remparts : cela, dit-il, doit renfermer quelque chofe qui fe rapporte à ce qui précède immédia- tement, comme le mais , qui répond à 7207? feulement , y a un rapport très-manirelte. Or Céjar venoit de dire , que les Soldats fav oient qu'ils alloient être entièrement rui- nez par le feu qui avoit pris à leur bagage & à leurs cabanes. Il exprime ici énergi- quement leur indifférence pour cette per- te: elle les touchoit fi peu, qu'à peine tournoient- ib tant foit peu la tête, com- me font du moins ceux qui fe voient fur le point de perdre quelque chofe qui leur tient au cœur, fed pœ?ie ne rejpiceret quidem quijquam. Que pouvoicnt faire les Soldats . Ôc qu'auroient-ils fait, s'ils euflent été dil- pofez alors comme le font ordinairement ceux de leur ordre? N'étoit-cepas de cou- rir à leurs bagages, ce de chercher prom- tement à fauver ce qu'ils pourroient ? C'eiï ce qui étoit arrivé depuis peu dans une au- tre occafion, comme Céjar (a) nous l'ap- prend 'a) Prttertn a ce Mit 9 quod fieri ntcejîfe erai» ut ôo Bibliothèque Britannique, prend lui-même. Mr. Jurin croit donc , que les Copiir.es ont fait ici demigrandi, de quelque autre mot, comme , démenai, de- trabendi, (c'eil- a-dire , impedimenta) & il liroit volontiers aliquid abripiendi , li cela ne s'éloignoit trop de l'écriture du terme qu'il ne fauroit foufFrir ici. Je vois, que D'Ablancourt a traduit ce paffage d'une manière à exprimer la penfée de l'Auteur félon le fens que nôtre Savant Critique prétend qui devrait fe trouver dans le mot à deviner dont demigrandi a pris la place: Le Soldat Romain (dit le Traducteur François) défendit les retranchement à travers Us flammes & les dards , avec beaucoup de cou- rage & de réfolution , fans tourner feulement la tête , ni quitter la place pour Junger àfauver quelque chofe de fin équippage. Cependant, comme il n'y a pas la moindre variation, ni dans les Editions , ni dans les Manuf- crits , je doute fort qu'il foit néceflaire de regarder le verbe demigrandi comme fau- tif : & il me femble qu'on peut expliquer tout le palTage , en forte que , fans y rien changer, on trouve que Céjdr y a fuffi- famment donné à entendre par la nature même de la chofe , ce que l'on a tout lieu de croire qu'il penfoit. Mr. Davies à cité un vers de Plaute, (a) où ce Poëte, décrivant vulgo milites ab figrits difcederent ; c^ua quifque eo* rum cariffima haberet , ab impeJimentts petere , Mt« que sbripere properaret. Cap. 3$. eod. Lib. (») Amphitryon, Afl. I. Scco. I. verf. 8/» Avril, May et Juin. 1743. tft décrivant une Bataille, dit, que les Sol- dats perdoient la vie en combattant, fans bouger de leur pofte: Anwmn omitiuîit, priufquam focoDEMi- G R E N T. Voilà précilement le même mot demi- grare , appliqué à une occaOon toute femblable : & fi Céjar n'y joint pas loco, cela le foufentend allez, puis qu'il ajoute , de vallo decederet nemo. Mr. Jurin objecte là-deflus , qu'un Soldat ne pouvoit fortir des remparts , fans avoir deflein de quit- ter fon pofte, & qu'ainli il auroit été en- tièrement fuperflu d'ajouter ici demigrandi cauJTd. Mais quelques Soldats ne pouvoient- ils pas être obligez de fortir des remparts, par l'impoflibilité de s'y maintenir dans leur polte, ou à deffein d'aller chercher quelque chofe dont ils avoient befoin pour fe défendre, & pour agir plus vigoureufe-j ment contre l'Ennemi? En ces cas-là, & autres femblablcs qu'il eft aile de conce- voir, ils ne le propofoient pas de quitter leur pofte , ils ne le quittoient que malgré eux , fans n'en faire contre leur devoir, & tout prêts à revenir aulii tôt qu'il ferait poflible. Àinfi Ce far , en difant qu'il n'y eu: pas un feul Soldat qui fortît des remparts pour quitter fon pofte, infinuë manifeste- ment qu'aucun n'eut envie de le quitter, pour aller éteindre le feu , & fauver ce qu'il pourroit de fes effets; puisque, com- me il l'ajoute , aucun même ne témoigna prcfqtff .n regrec k h perte qu'il faifoit. § YJz 6i- Bibliothèque Britannique, De Bell. Civil Lib. III. Cap. 32. Eraî plena liclmwu & imperiorum provincia , dif» ferta prœceptis atque exaàoribus : qui , prœter imperatas pecunïas 9 Jv.o etiam privato compen- dio ftudebant &c.~ L'Auteur repréfente ici les grandes vexations, exercées en Afie pendant la Guerre Civile. „ La Province , „ dit-il , étoit remplie de Licteurs & de „ Gouverneurs , pleine de commandemens „ (prœceptis) & d'Exa&eurs , qui, ne fe „ contentant pas d'exiger l'argent des con- „ tributkns impofées , cherchoient enco- „ re à s'enrichir eux-mêmes en faifant des „ profits particuliers. " Il y a là un mot corrompu , pra>cept;s , qui fe trouve néan- moins dans tous es 'Vanufcrits, & dans les plus anciennes Editions ; à caufe de quoi Mr. Ouôendorps dont on fuir le Texte, Ta préféré à celui de prœfeSlis , que les E- ditions communes portoienc depuis long .tems; parce , dit -il, qu'il fignifieroit la TTïême chofe qu'iniperiorum , qui précède. Mais Mr. BemU\ juge cette manière déli- re viavifeftevaent ah tir de. Je vois néanmoins , que l'Editeur Hollandes a cru y trouver un fens convenable: prœceptis , id eft , edic- tis9 mandatis. 11 auroit dû en alléguer quel- que exemple. Pour moi , je ne crois pas qu'aucun Auteur de la bonne Latinité ait dit Prteceptum, pour exprimer un Editt ou une Ordonnance de quelque ,Magi{irat? D'a'Heurs, il s'agit de Çerfmnes, 6. non de cbcjes , dans tout ce qui fuir & oui précède. îl faut donc néceiïairement chercher à dé- couvrir Avril, May et Juin. 1743. 63 couvrir le mot , que des Copifles ignorans onc ainfi défiguré. Le nouvel Editeur croie J'avoir deviné, & il donne fa conjecture pour très-beureufe. Il lit, differta pr^edi- bus atque exacîoribus. Cela convient oar- faitement au fujet dont il s'agit. Prœdes lignifie ici les Répondant 9 qui, comme on fait que c'étoit la coutume, fe rendoient cautions pour les Débiteurs du Public: & les Exacteurs font ce que nous appelions Collecteurs , qui lèvent les deniers des taxes. Mr. Bentley rapporte à cette occafion un paflage de'TÉRP.NCE, (a) ou le même mot, corrompu d'une autre manière , a été rétabli par la fagacité du grand Critique de même nom , du célèbre Richard Bent- ley , qui lit prees fit, au lieu de pofeit. Mais il n'a eu garde de l'imiter , en infé- rant fa Correction dans le Texte de Céfar , comme l'Editeur de Térence a fait & en cet endroit, 6c en une infinité d'autres des An- ciens Auteurs qu'il a publiez. Bien loin de là: il fe déclare hautement contre une tel- le licence. Voici fes paroles. „ Il feroit à „ fouhairter, pourledireenpaflant,quece „ grand Critique [qu'il appelle ailleurs (b) le Prince de tous les Critiques , préfens , paf- (a) Htautontimor. Atf. III. Scetl. Ul.vsr/.^r > (&) lll< omnvtrti Criticnrum ffimçtl ? , non mod» Tmr cerrap , (td &" fo+$fihm 7r$o t* l'irritr Sec. Pag. 401 dans u. e Noie lue ce m*,uc Livre de Bell» Civil* , Cap. 91, 64 Bibliothèque Britannique, fez, £? à venir'] „ fe fût contenté , fans „ rien changer au texte, de propoferdans „ fes Notes cette conjecture tout-à-fait „ admirable, parce qu'il peut fe faire qu'il1 „ n'aît pa« bien rencontré. Que fi la véri- „ table leçon eft encore cachée fous le mot 5? de pofcit corrompu , cette leçon étant „ perdue, tout moien de la rétablir eft „ perdu enmêmetems. " Cela veut dire, que les Conjecturés les plus doctes, les plus ingénieufes , ne font après tout que des Conjectures, de la vérité defquelles on ne fauroit raifonnablement avoir une entière certitude, & que par conféquent on n'eft jamais autorifé à chafler du Texte une leçon fondée fur les Manufcrits & les Editions , pour y fubflituer de fon chef d'autres mots , qui , quelque convenables qu'ils paroilTent, peuvent être différens de ce que l'Auteur avoit écrit. Ajoutez à ce- la, qu'il n'eft pas toujours fur que le Texte foit fautif, comme on fe l'imagine , & a- lors on court rifque de le corrompre , en voulant le corriger. C'elt ce que plufieurs Critiques, de différentes nations, croient être allez fouvent arrivé à Mr. le Docteur Bentley. Je ne décide pas , s'il eft en droit de méprifer & de recufer leur jugement. Ce qu'il y a de certain , c'eft que [a Ré- publique des Lettres eft un païs de liber- té, ou l'on ne reconnoît point d'autorité defpotique, à laquelle on foit obligé de fe foûmettre, & ou l'on regarde comme s'é- rigeant en Dictateurs, ceux qui coupent, tranchent , Avril, May et Juin. 1743. 6S tranchent, changent à leur fantaifie tout ce qui ne leur plaît pas dans le Texte d'un Auteur. Ieid. Cap. 86. tnunciavit [Pom- peius] ut paraît in pofterum; Ci? quoniam fieret .':' poteftas , ul fœpe co- gïtavifjent , ne rum opiir.G- r.em f allèrent. Quelques jours avant la fa- meufe Bataille de Pbar ah , Pompée , qui jufques-là n'avoit pas jugé à propos de chercher à en venir aux: mains , fe laifla enfin perfuader par les follicitations réïte- rées de tous ceux de Ton Armée. Il leur déclara alors, qu'ils n'avoient déformais qu'à fe tenir tout prêts , & les exhorta , puisque l'occallon, qu'ils avoient fi fou- vent fouhaittée, fe préfentoit, à ne point tromper la bonne opinion qu'on avoit d'eux. Ceft ce qu'on voit bien que Céjar lui fait dire ici: mais le Texte eft conçu d'une manière à donner tout lieu de croire qu'il s'y eft gîiffé quelques fautes. Mr. Davies avoit déjà remarqué, qu'au lieu de cogita- vijjent, il faut lire, optavijjent : & le nou- vel Editeur, qui avoit d'abord (a) approuvé cette conjecture, y préfère enfuite flagita- nt9 d'autant plus volontiers que Mr. Ms.rk'and s'eft trouvé d'accord avec lui fur ce (4) Parce, difeit-i', qu'on lit dans [uliosCel- sus . a.iefl eccr ntbis tecafiù auxm feinter optavi- mu* fmptanit. Mais Ce'fas met ces paroles dans Ja bouche de Ce:Ur , 5c non de Po>npét , pag. 1/3. T$m; XXI Part. I. E 60 Bibliothèque Britannique, ce point. Mais Je même Savant lui- a communiqué une autre correction plus con- sidérable, lui* les paroles Suivantes : ne usu manu que reliquorum opinionem f allèrent. De- nys Vossius , & après lui Duvies , ont foupçonné qu'il yavoit là quelque choie de fautif : mais , fans chercher à découvrir la véritable leçon , ils fe contentent d'indiquer , chacun pour fa part, une variété de lectu- re des Manufcrits dont ils avoient fait ufa- ge. Mr. Jurin trouve la leçon reçue très- ridicule (" ineptijfima ) mais il n'en allègue aucune raifon , non plus que l'Editeur. Voici, à mon avis, celles qui ont pu la leur faire juger telle. Si l'on explique les paroles, félon le fens qu'elles préfentent, elles fi g ni fi croie nt : qu'ils ne trompaient point , par leur expérience c? par leur bravou- re , ropinioîi que les autres avoient d'eux , comme l'explique Mr. Clarcke ; à quoi Mr. Ouâenâorp fouferit. Or ce n'étoit point par leur expérience & par leur bravoure, qu'ils pouvoient tromper cette opinion avantageu- fe , mais au contraire faute d'expérience & de bravoure , ou du moins faute d'en faire ufage dans cette occafion. D'ailleurs , pée vouloit-il parokre n'avoir pas lui- même bonne opinion d'eux? Et cependant il î'infmueroit , en parlant feulement des autres, reliquorum. Ces raifons , jointes qjux vefhges de la leçon du Manufcrit de Cujas, où Voffiv.s avoit trouvé ne uju ma- ri cec. ont apparemment fait conjectu- rer à Mr. JMarklancl , qu'il faut lire: ne SUAM Avril, May et Juin. 1743. fy suam omniumque reliquorum opinionem f al- lèrent, qu'ils ne trompaflent pas l'opinion que lui & tous les autres avoient d'eux; ce qui naturellement ne peut s'entendre que d'une opinion avantageufe. On cite là- deffus un partage tout ferablable des Mé- moires fur la Guerre d'Alexandrie , attribuez à Hirtius: (a) Nefuamatque omnium /al- ler et opinionem &c. Et on y en joint deux de Céfar (b) même , pour ce qui regarde la conf- truclion de Juam omniumque. Mr. Bentley, après avoir d'abord approuvé, fans balan- cer, la correction de Mr. Markland , ne s'oppofe pas beaucoup à ce qu'on life ne suam ducumque reliquorum , comme Mr. Jurin témoigne qu'il aimeroit mieux , ou ne Juam atque reliquorum &c. Cela revien- droit au même pour le fond: mais juam nuque approche beaucoup plus desvef- tiges de la leçon corrompue des Manuf- crits. Et je m'étonne que Mr. Bentley y préfére l'une des deux autres manières de lire, par la raifon que reliquorum & omnium paroiitent ne pouvoir pas bien être joints enfemble, comme fi omnium étoit fuperflu. Il n'eir. rien moins que rare de voir ormes reliqui, ou reliqui omnes , joints enfemble. En voici un exemple, qui me tombe fous les (a) Cap. i<5. (b) De fu.% omr.ium'jue fritte cum eo agere U» ceret. De Bell. Gallio. Lib. I. Cap. 31. Ut Je fut m: jneomn-.um feinte &c. Bell. Ci>r. Lib. III. Can. 15», F, a 6$ Bibliothèque Britannique» les yeux, dans les Mémoires de la Guerre à Alexandrie : (a) Quod fi alla effet litoris JEgyptii natura atque omnium r eu quo- rum &c. Il y en a deux dans un feul Cha- pitre de Ciceron: (b) Si unus omnibus r eli qui s magiftratibus imper abit &c. . . . ut ei reliqui magiftratus omnes^ reant &c. ARTICLE III. History of Nadir Shah , former- ly called Thamas Kuli Khan, ttie prefent Emperor of Persia &c. Histoire d» Schah Nadir, aujourdhui Empereur de Perse &c. [Troifiéme & dernier Extrait. On a vu les deux premiers dans le To- me XX. Partie I. Articl V. & IL Part. Articl. III.] LE Schah Nadir étoit arrivé le 7 de Mars 1739. aux Jardins de Schalîimar , tout près de Debli, comme nous l'avons dit à la fin de l'Extrait précèdent. Le lendemain, Ça) par Ton ordre , le Grand Moghol fut mis dans une Litière Roiale, Tous un Dais, & conduit au Château, avec deux (a) De Bell. Alexandrin. Cap- 8. (S) De Leftb. Lib. III. Cap. 7. Avril, May et Juin. 1743. 69 deux Etcndarts , & une fuice d'environ deux-cens de Tes propres Domeftiques àpié ojà cheval, & de quatre-mille Cavaliers de la Milice des Kuzzlebqfcbes. On lui donna pour appartement un quartier nommé Su- liman Bourge , c'eft-à-dire , la Tour de Salomon. Le Scbah Nadir aiant ouï dire que les Habitans de la Ville étoient d'une humeur féditieufe & turbulente , ne voulut pas y entrer de nuit. Mais le matin de ce même jour, il marcha vers leChàteauavcc toutes les précautions imaginables, à la tê- te de vint-mille hommes de Cavalerie , laiflant le refte de Ton Armée campé hors de la Ville. Quand il eut mis pié à terre, l'Empereur vint le féliciter de Ion arrivée, & ils déjeunèrent .enfemble. Ils furent en converfation juiquau foir,- & pendant tout ce tems-là Nadir agit d'une manière à donner en apparence les plus grandes mar- ques de complaifance & d'affection pour le Moghol. Il fit défendre aux Soldats d'une manière très-expreiTe, de maltraiter ou in-' fulter aucun Habitant; & enjoignit aux Ça) Prévôts d'armée, de couper le nez & les oreilles, de battre jufqu'à la mort, & d'u- fer de toute autre forte de punition contre ceux qui commettroient quelque défor- dre. Le 9 au foir, aiant appelle auprès de lui (a) Apre' 'ez Ntffikhis , Officiers chargez cte conr.oîue 16S. On a dl: ïi.lcurs ce que vaut une Routie, Avril May et Juin. 1743. 71 les Prévôts, & en même terns plufieurs de la Milice des KuzzLtbafcbes , qui étoient venus acheter du Blé. Après le coucher du So- leil, on rit courir le bruit que le Scbab Na- dir avoit été mis en prif. ; & quelques- uns difoient même, qu'il avoit été empoi- ionné. Là-defïus , le tumulte n'eut plus de bornes: les Mécontens te raïTemblérent de tous cotez, avec toutes les armes qui leur tomboient fous les mains , & fondi- rent, comme un torrent , vers le Château. Le Schah Nadir avoit porté quelques Trou- pes au pié de la Forterefle : une partie fe re;ira dedans; les autres marchèrent à la Place nommée (a) Reti? qui elï entre le Château & la Rivière; & plufieurs furent tuez. Ceux de la Milice des Ki&zlebû qui avoient pris leurs quartiers au Palais de Khandoran , & dans d'autres grandes Mai- fons, firent bonne garde toute la nuit. On tira de là & du Château quelques coups de Canons, d'Arquebufes 6c de Moufquets, pour tenir la Populace éloignée. Mais pendant tout ce tems-là elle s'attroupa & devint furieufe de plus en plus. Le lendemain u. le Roi de Perfe> irrité au dernier point, fortit du Château, mon- té à cheval, fur les huit heures du matin; & aiant ap perçu fur fon chemin un grand nombre de Corps de fes propres gens, qui avoient été tuez pendant la nuit , il envoia un (a) Qui ficn:fie $aèit9 en Langue JndUnn*- E I 72 Bibliothèque Britannique, un gros détachement de Tes Troupes , pour tâcher d'appaifer le tumulte. 11 leur permit, au cas qu'ils ne puffent en Venir à bout par des voies de douceur, ou par de fimples menaces, de faire main batte fur les Séditieux, fans chagriner en aucune ma- nière les autres qui n'auroient point de part au foûlévement. Mais la Populace , bien loin de revenir de fa fureur, devint plus -hardie & plus infolente , quand elle vit que les Soldats ufoient de paroles douces , & elle commença à tirer fur eux, tant avec des Arcs, qu'avec des Armes à feu. Le Scbab Nadir étant venu en perfonne à une Mofquée , ceux du voifinage montèrent fur leurs terrafles , & fe mirent à jetter des pierres. D'une de ces terralfes , ou d'une fenêtre des environs , on lâcha directe- ment fur le Roi un coup de moufquet, qui l'aiant manqué , tua un de fes Officiers à côté de lui. Nadir s'abandonnant alors à fa paffion, ordonna un maffacre général. Les Soldats à l'inftant commencèrent à piller & à tuer de rue en rue, & de maifon en maifon. Ils mirent le feu en quelques endroits, & n'épargnèrent ni féxe , ni âge. Les Bêtes même n'échappèrent pas à leur furie. Nadir étoit retourné au Château, après avoir donné ces ordres barbares. Sur les deux heures, le Grand Moghol, & Nizam, allèrent auprès de lui , pour in- tercéder fortement en faveur de la Ville. Il eut égard à leurs prières, & fit publier, au fon du tambour , que les Soldats euflent Avril May et Juin. 1743. 73 eufibnt à laifler les Habicans en repos. Le maflacre (a) dura depuis huic heures du matin jufqu'à trois après midi. Il y pé- rit cent-vint-mille Habitans ; d'autres en comptent cent- cinquante -mille. Si un Indien reftoit i'eul de la Famille, comme il fe trouva dans plufieurs Maifons, il entaf- foit trente ou quarante Corps morts, & les brûloit. Ces pauvres gens faifoient la mê- me chofe dans les Rues , qui avec tout ce- la furent fi fort pavées de Cadavres pen- dant un tems confidérable, qu'il n'y avoit pas moien d'y palier. Les premiers ai - teurs du foûlévements'étoient retirez, aufli tôt que le maflacre commença , & avoient laiiTé les Marchands, & plufieurs Familles d'honnêtes gens , en proie à la rage des Kuzzlebafcbes. Quelques Indiens, pour fau- ver l'honneur de leurs Femmes , les tuè- rent, & fe tuèrent enluite eux-mêmes. 11 y en eut un, qui voiant les Soldats appro- cher de fa Maifon , brûla environ vint Femmes de la Famille; après quoi il atten- doit à chaque moment que les Soldats en- tra fient pour le maflacrer. Par hazard ils paflerent fans toucher à cette Maifon. Le malheureux Indien fortit alors , & fit re- broufier chemin à quelques uns , pour en- trer chez lui, où il leur dit qu'ils trouve- roient beaucoup d'argent & d'autres effets. Les Soldats ne manquèrent pas d'aller pil- ier la Maifon , mais ils en refibrtirent fans faire 00 p*£. .187, 6»/«/v. 74 Bibliothèque Britannique, faire d'ailleurs aucun mal à cet homme. Il en fut li fort au défefpoir, qu'il fe donna la mort à lui-même. Grand nombre de gens , fur tout de Femmes & d'Enfans , périrent par le feu dans leurs Maifons. Il y eut environ mille Femmes, qui fe jetté- rent dans des Puits , dont quelques-unes furent tirées de là encore en vie deux ou trois jours après. Le lendemain de cette horrible boucherie , cinq-mille, hommes ou femmes , que l'on s'étoit contenté de faire prifonniers , fuient relâchez & re- conduits dans leurs Maifons par ordre de Nadir. Le Mogbol, & fes Sujets, ne pouvoient être délivrez de la fâcheufe vifite du Vainqueur, qu'en lui fourmillant les fom- mes prodigieufes qu'il exigeoit à titre de (a) Préfent promis. Le 17 du même mois de Mars, Sirbullmd Khan eut ordre de fe rendre auprès de Nadir 3 qui lui dit, „ Qu'il étoit bien afluré, que, fous pré- „ texte de fon grand âge & de fes infirmi- „ tez, il ne fe mettoit pas en peine de ,, ramafler cet argent, mais qu'il lui con- „ feilloit de s'y prendre avec plus d'acïi- „ vite, & de terminer au plutôt l'affaire. " Ce Seigneur, après avoir été jufqu'au foir dans le Palais de Nadir , y revint le lende- main 18. & y fut jufqu'à "midi , avec Ni- %am , & le Viiir Kummir '0 dm Khan. Com- me Tbamas Khan & Mujlapba Khan infif- toient (a) Fifhêufcb* Avril, May et Juin. 1743. 75 toienc fut ce qu'on prcflat la levée de l'ar- gent, (a) Sirbuîlind dit à Nitami „ Il y a long tems que j ai prévu cette difgrace, & Louveot repréfenté à l'Empereur , qu'avant que les chofes fuiTent fans re- „ méde , il devoit prendre quelques me- ,, lures , & ne pas fe livrer a une fécurité „ qui lui fit regarder aucun accident com- 35 me ne valant pas la peine d être préve- nu. Je le priois alors demploier quei- „ ques peribnnes fidèles & expérimentées, M avec plein pouvoir de faire en forte „ que, moiennant une ibmme d'argent & „ autres choies de prix , on put terminer „ les affaires, éviter le malheur dont on ,, étoit menacé, & vivre en amitié, corn- ,, me auparavant, avec le Scbab. Chacun „ s'imaginoit, que j'avois en cela quelques „ vues "d'intérêt particulier : cependant „ ceux qui m'en aceufoient, ne penfoient „ pas eux-mêmes à chercher aucun expé- „ dient, ni ne vouloient s'en rapporter à ,, ceux que d'autres propofoient ; jufqu'à „ ce qu'enfin les chofes en font venues à „ cette déplorable extrémité. " Ni%amy qui fentoit bien que cela le regardoit, ne répondit pas un feul mot. Tbamas Kban> s'adreflant alors au Vizir , lui repéta en iubftance ce quele Scbab Nidir avoitdit(2y à l'Empereur , dans la première entrevue" qu'ils («) Paç. 191, {> fniv, (b) l'-ai rapporté icut le difeours dans le fécond Extrait. 76 Bibliothèque Britannique, "• qu'ils eurent. Après quoi il ajouta: „ Il >5 ne faut plus rappeller le ibuvenir de ce „ qui s'eft pafic. Le Schab mon Maître „ a befoin d'argent. Ramaffez-en , com- „ me vous pourrez , par tous les moiens „ que vous avez en main, & ne vous ex- „ pofez pas, en ufant de remife , à de 5, nouvelles difgraces ." CERTAiNtMENr, „ répondit alors Sirbullind , nous ne man- „ querons pas de chercher & de lever l'ar- „ gent par tout où il s'en trouvera. " Mais „ n'en avez-vous pas vous-même? lui dit „ Thamas. " Si j'en avois eu, répondit Sir- 9> bullindy je vous l'aurois envoie à Kanda- „ bar , & vous aurois épargné la peine 3, de venir ici. " En un mot, par ce qui le pafla dans cette Conférence , on apprit que le Scbab Nadir , après fa victoire, dont jes fuites le mirent en état de donner la loi aux Vaincus, avoit demandé à Nizara vint Crores de Roupies, c'eft-à-dire, vingt- cinq millions de livres fterîing, fans comp- ter les Joiaux ?r les ouvrages d'argente- rie garnis de pierres précieufes , & autres pareils effets du Grand Moghol & des Emirs , dont il s'étoit faifi. Nizam devoit tirer cet- te grofle fomme d'argent, de la meilleure ma- nière qu'il fe pourroit , en partie du Tréfor de l'Empereur, en partie de fes propres biens , de ceux de tous les autres Emirs, & de tout ce qu'il y avoit de gens riches parmi le Peu- ple ou les Habitans. Les Coffres du Roi , & les effets des Emirs, nç fuffifoient pas pour faire la fomme ftipulée. Il n'y avoit que trois Avril, May et Juin. 1743. 7? trois (a) Crores d'or & d'argent rnonnoié, dans le Tréfor Roial. Mais on en trouva beaucoup plus dans quelques Voûtes fou- terraincs, qui, depuis bien des années, étoient fermées & fçellées, fans que per- lonne fût ce qu'elles contenoient, ni par qui l'argent y avoit été mis. Nizam con- tribua pour fa part un (b) Crore & demi, enjoiaux, argent, & autres effe es, Kum- mir '0 din Khan fournit la même valeur. Le défunt Emir Saadit Khan s'étoit engagé h paier un Crore , & en avoit déjà aiîûré trente (c) Lacks , qui étoit tout ce qui a- voit échappé au pillage,- promettant d'en- voier le refte de fon Gouvernement. Sir- bullind, à caufe de fa pauvreté, futdifpen- fé de toute contribution. On réfolut de lever trois Crores fur quelques-uns de ceux qui avoient (d) des Offices, &fur les Habi- tans riches, chacun à proportion de fes fa- cultez. Saadit Khan avoit été chargé de ramailer l'argent : cette commiffion fut donnée après fa mort à Sirbullind , & aux autres Emirs. Tbamas Khan, dans l'Ailem- blée dont je parle , les preflbit de hârer l'exécution. Ainfî il fut convenu , que Ton aflembleroit f» CYfl-j-Hire, trois millions %t-cens cin- quante-mille libres fterlino. {b) Un million , huit-cens feptante c'nq mills livrs frerling. '0 "I "ro s. cens feptanrc- qui! fe le Fortune, qui n'eft fujette à aucun dé- „ clin. Comme Sa Haute Majefté , qui „ eft aufîî puifTante que (a) Jumfcheid , & 3, le plus grand des (b) Turcomans , eft la „ fource de la Bonté & de la Valeur ; „ moi, comptant fur fa bonne foi, & me „ confiant en ion fupport, j'ai eu la fatif- „ faclion d'une Entrevue, & le plaifir d'ê- „ tre reçu dans fa compagnie, qui eft ,, comme celle du Paradis. Après quoi, ., nous fommes venus enfemble à (c) ,, Schajehanabad , ou j'ai expofé devant fes „ yeux , & je lui ai prcfenté , avec les cé- „ rémonies convenables , tous les Tré- ,, fors, Joiaux, & autres précieux effets, ,, des Empereurs de YHindofian. Sa Ma- „ jefté , aiant égard à ma prière , en a ac- „ cepté quelques-uns: & par un effet de ,, fa grandeur d'ame & de fon extrême .,, bonté , en confidération de l'Illuftre Fa- „ rfirille de (a) Gourgan, & pour l'honneur „ de {a) Un àes anciens Rois de Ferfe t fameux par a grandeur & ia pui(î?nce. (I) Nadir eft forti d'une Tribu de Turcêrrans, eemme on l'a die au commencement de THiftoTcr. (c) Nom moderne de la Ville de Debli , com- me en l'a die ailleurs. (& „ de Nala Sunkra, je les ai annexées aux „ Etats de ce puilTant Souverain , en „ forte que déformais fes Agens & Servi- „ teurs pourront pourvoir au gouverne- „ ment & à la défenfe des dits Territoi- „ res, prenant en main le commandement „ de chacune de ces Places, Tribus, Ha- „ bitations ; qui feront toutes évacuées par „ mes Officiers, Serviteurs &c. comme „ étant féparées de mes Etats , d'autant ,, que je renonce entièrement à tout droit ,, que j'ai ou que j'ai pu avoir ci-devant, „ d'y commander, d'en exiger ou tirer „ quelques revenus : mais le Château & la „ Ville de Lobry Bundar , avec toutes ies „ Contrées qui font à l'Orient de \ Attok , „ du Scind, & de Nala Sunkra, appartien- „ dront, comme auparavant, à l'Empire „ de YHindqflan. Donné à Scbajebcmabad > „ le 4 de Mobirrim, 1152. Cette datte répond au 2 d'Avril 1739. (à) Le 1 de Mai, tous les Emirs eurent ordre, de la part du Scbab Nadir, de fe trouver à cinq heures du matin auprès du Grand Mogbol , où ils reçurent des préfens qu'il y avoit envoiez pour eux , aux uns plus, aux autres moins, félon leur rang. Sur les huit heures, l'Empereur s'en aiia, dans fa Litiéve , julau'à la porte du Divan particulier, oh le Scbab Nadir étoit, & là étant defcendu, il entra, laiflant dehors pluiieurs (a) pag, 204, C fmv. Avril, May et Juin. 1743. 85 plufieurs Emirs qui l'accompagnoient. Les deux Monarques s'étant cmbraflez l'un l'autre , déjeunèrent enfemble ; & on fit donner auflî à déjeûner aux Emirs. Un peu après , on apporta les préfens pour l'Empereur. Ils conûiloient en fept piè- ces ; favoir, une Couronne garnie de joi- iaux: une Bande (a) à- mettre autour du Turban ; un Bracelet ; une Ceinture ; le tout garni de même : une Epée , dont la poignée étoit auflî femée de bijoux: une autre Epée , à lame étroite , nommée Dboup , com- me celles que portent la plupart des gens du Djccan ; un Cuttari , efpéce de Poignard , émaillé. Le Roi de Perfe mit la Couronne de Tes propres mains fur la tête du Grand Moghol , & rit en même tems l'apologie de la conduite qu'il avoir tenue à ion égard. Il lui donna enfuite quelques avis, dont la fubftance étoit: „ Premièrement , vous ,, devez vous failli* de toutes les Terres „ (b) dont les Emirs tirent les revenus en „ forme de falaire, & les paier en argent „ comptant de vôtre Tréfor , chacun à „ proportion de leurs Emplois & de leur „ rang. (a) Appellée Sirpech. {b) C'cft ce que fignific le mot Jaguîry dont le Schab fe fervot , comme nôtre Auteur l'expli- que pag. 45. c'ans la z Nore : & cet ufage avoit lieu dans quelques Provinces, au lieu que dans les autres, ceux qui avoient Wes Emplois étoient paies des deniers du Trefor de l'Empereur. 86 Bibliothèque Britannique, „ rang. Ne fouffrez pas qu'aucun d'eux ,3 entretienne à Tes dépens aucun Corps de 5> Troupes : mais vous - même aiez toû- 3) jours fur pié foixante-mille Cavaliers d'é- 3, litre , à foixante Roupies par mois, l'un 3, portant l'autre, & que chaque dixaine 5, d'hommes foit commandée par un (a) 3, Dcobacbi; chaque dixaine de Delba- „ fciAs , par un Sudival ; chaque dixaine ,-, de Sudivals , par un Hazarri. Il faut 35 que vous foiyez bien informé du mé- ,, rite de chacun, de leur nom, de leur 3, famille, de leur nation ,; 6c que vous ne 5, permettiez à aucun, foit Officiers, Sol- „ dats, ou autres, d'être pareiïeux ou in- 3, dolent. Quand quelque occafion le re- ., querra, détachez un nombre fuffifant, 3, de Troupes, fous le commandement 3, d'unfeul, fur la conduite, le courage, 3, & la fidélité duquel vous puiffiez vous 3, repofer: & lors que l'affaire fera faite , 33 rappellez-le inceffamment , fans biffer 3, trop long tems le Commandement à qui 3, que ce foit , crainte des fâcheufes con- 3, féquences. Gardez-vous fur tout de Ni- 3, zam al Mulucb , par la conduite duquel 33 j'ai reconnu que c'eft un homme plein 3, derufes, attaché à fon propre intérêt, 53 & plus ambitieux qu'il ne convient à un „ Sujet. * (a) Ce nom , & le> frivans , {îgnicenr un Offi- cier qui ce amande a un cr.in nombre d'hom- me» • ou d'autres Officiers fubordonnex le» ufrw? aux autre». Avril, May et Juin. 1743. 87 „ Sujet." L'Empereur reçut ces avis dom- ine une preuve du bien que lui vouloit Nadir , ce lui en témoigna beaucoup de re- eonnoiflance. Rajouta, que, comme Ton Empire dépendoit de lui , il le prioit de nommer ceux qu'il jugeoit les plus propres à remplir les principaux poftes. ,, Cela ,, ne conviendrait nullement à vôtre inté- ,, rêt, (repondit le Roi de Per/e): des OiR- ,, ciers de ma nomination n'auroient que „ peu de refpecl: pour vous en mon abfen- ,, ce. Difpofez vous même de chaque Em- „ ploi, quand je ferai parti, en faveur de „ ceux que vous jugerez en être les plus „ dignes : & fi queicun d'eux vient à le ,, rebeller, au premier avis que vous m'en ,, donnerez , j'envoierai queicun de mes ,, gens pour le châtier. Oue s'il eil né- „ ceiïaire , je vous fournirai des Troupes: „ ou même , dans l'occafion , je pourrai „ venir en perfonnede Kandabar , enquin- „ ze jours. Mais , à tout événement , „ comptez que je ne ferai pas loin , &que ,-, je vous prêterai du fecours le plutôt ,, qu'il fera poflible. " Après tous ces dif- cours les deux Monarques fe dirent adieu, & le Grand Moghol s'ea retourna à fon Ap- partement du Château. Le lendemain, 2 de Mai, aiant fait ve- nir auprès de lui Nizam , Sirbullmd , & les autres Emirs , il leur ordonna d'obéir à l'Empereur , avec menaces de les punir, s'ils fe rebelioient. Apres quoi , il prit congé. F 4 On 88 Bibliothèque Britannique, On raconta alors, qu'il avoit dit en pré- fence de quelques Emirs, qu'il reconnoif- foit avoir agi imprudemment en deux cho- fes: l'une, d'avoir rendu l'Empire au Scbah Mahommed , qui n'étoit pas capable d'un Gouvernement fi difficile, ce qui donnoic lieu de craindre que les affaires des Indes n'allallent plus mal encore que par le palTé ; l'autre, d'avoir épargné la vie de Nizam, homme fi artificieux & fi fourbe , qu'il é- toit plus que probable qu'il ne manquercit pas de caufer de nouveaux défordres : mais qu'aiant donné fa parole à l'un & à l'autre, félon les Décrets de la Providence , & par un effet de leur bonne fortune, il ne pouvoit pas s'en dédire. Il alla enfin aux Jardins de Schalimar , le 5 du même mois, & donna ordre que tous les Soldats de fon Armée qui étoient enco- re dans la Ville, en fortifient ce jour-là. On peut bien croire, que fa retraite ne fe fit pas fans quelques pillages & quelques meurtres pendant la marche. Quand on fut venu près de Cornai , ou il avoit rem- porté la Victoire qui eut de il grandes fui- tes, il fît préfent de cinq-mille Roupies au (V) Commandant de cepaïs-là, pour bâtir un Village dans le même endroit où la Ba- taille s'étoit donnée; & il lui ordonna d'ap- pellerce Village Fatteb Abad, c'eft-à-dire, habitation de la Vtdtoire. Le dommage, que l'Empereur & fes Su- jets (*) P**. 212. Avril, May et Juin. 1743. 89 jets fouffrirent depuis cette funefte Batail- le, félon 1 eilimation qu'on nous en donne, cft quelque chofe de prodigieux. Ça) On le fait monter à près d'un Arrib ae Rou- pies , c'eft-à-dire , cent-vint-cinq millions de Livres fterling. Le Scbab Nadir en emporta foixante- dix Crores , enjoiaux, bijoux, ou autres effers, ce qui fait la va- leur de quatre-vint-lept millions, ce demi: & fes Officiers ou Soldats , dix Crores , 00 douze millions & demi de Livres fterling. Mais ce qu'il y a de plus affreux , c'eft le grand nombre d'Habitans de l'Empire, qui périrent depuis l'encrée du Roi de Perje, 6c à l'occafion de fes hoftilitez. Selon la fup- puration, que l'on donne pour laplusjulle, il en coûta la vie à deux-cens mille âmes. Le maffacre général, fait à Debli, allafeul jufqu'à cent -dix -mille. On compte fepe- mille, foit de ceux quife donnèrent h mort à eux-mêmes, ou de Femmes qui le noierent ou fe brûlèrent de propos délibéré ; foit de gens qui moururent de faim, ou de quelque autre accident caufé par le trille état ou on les avoit réduits. Croiroit-on que tout cela ne fut pas ca- pable de faire prendre à l'Empereur & à fes Miniftres, des fentimens, tels que leur devoir & les circonllances préfentes les demandoient? Il s'étoit pafTé près de deux: mois depuis le départ du Scbab Nadir, fans qu'on eût encore rien fait ni propoie , pour mettre F 5. £o Bibliothèque Britannique, mettre ordre aux affaires de l'Empire. Voi- ci ce que dit là defîus l'Auteur du Journal, (a) Secrétaire de SirbulUnd Khan : (b) „ Ce „ terrible coup du Ciel , qui furnt pour 5, donner une idée de la Trompette du ,, Jour du Jugement, n'a pu reveiller le ,, moins du monde du profond fommeil „ de leur fécurité, & d'une léthargie d'in- „ dolence , des gens fi fort enivrez d'un „ vin d'orgueil & de bonne opinion d'eux- ,, mêmes. Ils s'accordent tous à fe vou- „ loir du mal l'un à l'autre: tous leurs 99 difcours, toutes leurs converfations, ne 3, refpirent qu'envie & que médifance. ". . „ Les Habitans , comme des gens poiïé- „ dez, font entièrement ftupéfiez, parl'é- „ pouvante où ce malheur les a jettez: ils „ ne reviennent point encore à eux-mê- ,, mes,* &, ce qui eft encore plus étrange, „ malgré les oppreffions & les difgraces „ que le Peuple de cet Empire a efluiées 3, depuis le départ du Scbab iW//r,lacon- „ verfation, dans toutes les Compagnies, 5, roule toujours fur les expreffions indé- „ centes (a) Nomme Mirza Zurnan. Il cnvoioit ce Journal , aufii bipn que les Lettres , dont on a parlé ci-deflus , & l'Acfte de la ceiTion de quelques Provinces , à Akmed-ab.%d> & c'eft de celui à qui il communiquoit tout cela, appelle hùvz.a Moghol» que Mr. Traftr , qui étoit devenu fôn intime «mi, tient ks Originaux, dont il nous donne la tra« du&ion en fa langue. (é>) Pag. 2ij, 116, Avril, Mat et Juin. 1743. 91 „ centes & les vilaines actions de Tes Sol- „ dats: on fe divertie à les raconter , com- ,, me fi on y prenoit pîaiiir ; fans être le „ moins du monde touchez de quelque ré- ,, flexion fur le.s malheurs pafiez. Au con- „ traire , il femble qu'on foit fâché de ne „ plus voir ici ce Prince &c. Finijjuns nos Extraits de cette Hiftoire par un morceau curieux qui termine aulTila collection de diverfes pièces dont nôtre Auteur a compofë fon Ouvrage. C'efl le portrait du Scbab Naiiry de la même main fa) qui a fourni le récit des exploits de ce fameux Conquérant, antérieurs à fon Ex- pédition dans les Indes. Quoi que ce por- trait foit un peu long, on le flatte que les Lecteurs ne feront pas fâchez de le voir ici traduit tout entier. ,, Le Schab Nadir eft âgé d'environ 3, cinquante-cinq ans. -Il eft d'une taille ,, haute de plus de fix piez , & bien pro- ,, ponionnée,d'uneconllitu.ion très-robuf- „ te; fanguin, & aiant quelque difpofition „ à devenir gras, mais la fatigue, à la- „ quelle il fe donne, l'en empêche. Il a ,, de beaux yeux, grands & noirs, & des „ fourcils (V D'un Gentilhomme qui eft préfe' „ mandent qu'il s'y applique fortement, „ il néglige alors fes repas, & fe conten- „ te, pour appaifer fa faim, de quelque ,, peu de pois fecs , qu'il porte toujours „ dans fes poches , & d'un verre d'eau. „ Qu'il foit au Camp, ou dans la Ville, il „ paroît prefque toujours en public: & ,, quand il eft en fon particulier , qui que ce „ foit (a) La Vtrçj eft me mefure à'AnJmrre , qui Contiens tr^is Picz. Avril, May et Juin. 1743. 93 (bit peut lui envoier quelque lettre ou quelque mefiage, ou bien obtenir au- dience. 11 fait lui-même la revue, le paiement , & la fourniture de l'habille- ment de Ion Armée : il ne fouffre point que fes Officiers faifent aucuns profits lur les Soldats , fous quelque prétexte que ce foit. 11 reçoit tous les mois des Relations de l'état où font les chofes dans toutes les parties des païs de fa do- mination : & il a dans chaque lieu des Efpions , avec qui il entrerient corref- pondance. De plus , il établit dans cha- que Province & dans chaque Ville , un Infpedteur , nommé Hum dildm, qui eft chargé de veiller fur la conduite du Gouverneur, & de tenir regître de [es actions: il ne s'y peut traiter d'aucune affaire de quelque conféquence , qu'en préfence de cet Officier, qui, outre la Relation que le Gouverneur doit expé- dier tous les mois, envoie fon propre Journal par une voie à part, quand il le juge à propos , fans le laifTer voir au Gouverneur. Cependant il n'a point de falaire, ni de don gratuit, qui foit fixe: mais il eft recompenfé de fes peines, ou puni de fa négligence , félon que le Mo- narque juge qu'il le mérite. Par cette précaution extraordinaire, le Scbàb Na- dir empêche beaucoup que les Gouver- neurs n'oppriment le Peuple, & ne conf- pirent ou ne fe rebellent contre lui-mè- Ce Prince eft extrêmement gêné- „ reux, 94 Bibliothèque Britannique, 5, reux, fur tout envers les Soldats, & il ., récompenfe libéraiemeRt tous ceux qui i3 font à ion fervice, s'ils fe conduifent 3, bien. Mais en même tems il eft très-ri- }, gide & très-févére fur ce qui concerne „ l'obfervation de la Difcipline. Il punit 3J de mort les grandes fautes, & fait cou- 99 per les oreilles à ceux qui en commettent 33 de plus légères. Il ne pardonne jamais, „ de quelque rang que foient les Coupables,* 35 &, quand une fois il a examiné l'affaire à 3, fond, il fe fâche extrêmement, fi quel- _,, cun ofe intercéder en leur faveur: mais, „ avant cela, on peut lui dire fon fenti- „ ment avec liberté. „ Pendant qu'il eft en marche , ou en „ campagne, il mange, boit, & dort, ,, tout comme un fimple Soldat, & accou- tume tous fes Officiers à ia même rigueur de difcipline. Il eft fi fort endurci à la fatigue, qu'on l'a vu fouvent dans un- tems qu'il géloit, palier la nuit, couché à terre en plein air, enveloppé de fon manteau, & n'aiant qu'une felle pour chevet ; fur tout lors que , méditant quelque entreprife extraordinaire quide- mand'oit une promte exécution , il avoit laiffé derrière fon bagage, pour aller tom- ber fur l'Ennemi au moment qu'on s'y attendoit le moins. Il n'eft jamais con- tent, que quand il fe trouve en campa- gne: il regrette le tems qu'il eft obligé de palier dans quelque Ville pour rafraî- chir fes Troupes ; J& en cela, comflîfe „ en - Avril, May et Juin. 1743. 95 ,, en toute autre chofe , il fe dépêche le „ plus qu'il lui eft poiîîble. Ses Repas font „ achevez en moins de demie-heure ; a- „ près quoi il fe remet aux affaires; en „ forte que les Domeftiques , qu'il a au- „ près de lui ordinairement , fe relèvent „ trois ou quatre fois par jour. Il ne fe „ permet aucune forte de recréation pen- „ dant toute la journée: mais, à Soleil „ couchant, il ne manque jamais de fe re- ,, tirer dans un Appartement particulier, „- où fe débarrafîant tout à la fois de fes occupations, il foupe avec trois ou qua- tre Favoris, & boit une Quarte, ou tout au plus trois pintes de vin; aiant, pen- „ dant tout ce tems-là , les manières les „ plus obligeantes^ & les plus enjouées, >j 55 55 55 55 „ en tout autre tems , avec plus de fami- „ liarité que ne le font fes égaux. Deux 55 Dans ces converfations particulières, il n'efl permis à perfonne de parler d'au- cune chofe qui fe rapporte aux affaires publiques: & aucun ne doit lé flatter, à caufe de la liberté qu'il a alors, d'agir , de ces Compagnons du foir s'étant un „ jour émancipez à lui donner des avis en „ public, il les fit étrangler fur le champ, „ en difant: ,, Ces foux ne méritent pas de „ vivre, pws qu'ils ne favent pas dijîinguer ,, entre Nadir Schah c? Nadir Kuli. „ Il a beaucoup de bonté pour ceux qui ,, luiplaifent dans la converfation particu- „ liére , & qui fe conduifent d'ailleurs en „ public avec la décence & le refpecl „ convenables,* 96 BIBLIOTHEQUE BRITANNIQUE, „ convenables,* car alors il ne les regarde pas „ plus, & ils n'ont pas plus de crédit au- „ près de lui , que les autres de même » rang. „ Quelque tems après qu'il fe fût faiû „ de la perfonne du Roi Ton PrédécefTeur; 33 fa Mère, qui vivoit encore en 1757. 3, follicitée par quelques perfonnes atta- „ chées à la Famille Roiale , le pria de 33 vouloir bien remettre ce Prince fur le 3, trône, ajoutant qu'il ne devoit pas dou- „ ter que Sa Majeflé ne le fatiffît ôc lere- „ compenfât autant qu'il pouvoit fouhait- „ ter , en le créant Généralifîime à vie. „ Qu#nd la A4 ère eut achevé de parler, le „ Fils lui demanda, fi ce qu'elle difoit, elle „ le pert.'oit bien férieufementl Comme elle „ eut répondu qu'oui", Si j'éîois une vieille ,, Femme , repliqua-t'il , je ferois peut-être w difpqfé àpenjercle même. Après quoi, il la 55 pria de ne plus fe mêler d'affaires d'Etat. „ Il avoit époufé une Tante du Schab 3, Thamas, la plus jeune Sœur du Schab „ Sultan Hussein; de laquelle il a eu une 3J Fille, à ce que j'ai ouï dire. Il a d'ailleurs „ plufieurs Eî.'fans encore jeunes de fes 35 Concubines; & deux Fils d'une première 35 Femme, mariée avec lui pendant qu'il 33 vivoit encore dans Tobfcurité. L'aine 3J des derniers , Ruza Kuli Mirza , eft âgé 5, d'environ vint Ox ans. Il a été élevé , 33 dès fon enfance, dans l'Armée, où3 du 33 rang de fubalterne, il s'avança par de- ,3 grez jufqu'à celui de Général; & il fut „ établi Avril, Ma Y et Juin. 1743* 97 3, écabii Vice-Roi de PerJ'e, pendant l'Ex- ,, pédition de Ton Père dans les Indes. Le ,, fécond Fils, nommé Nefr Allah Mirza, 3, âgé d'environ vint & un an, eft Gou~ 3, verneur titulaire de Mufchad & de la 3, Province de Khorajan , ou une autre 3, perfonne a la direction des affaires en fon 3, nom. 3, Pendant que l'Aîné n'étoit encore ,, que Lieutenant, il n'eut que fa paie pour ,, fubfifter ; &, dans tous les autres pof- 3, tes auxquels il parvint depuis , Tes re- ,, venus n'allèrent jamais au delà des ap- 5, pointemens attachez à fon Emploi. Le „ Père n'avoit pas plus d'égards pour lui, ,, que pour les autres Officiers , & il lui „ permettoit de faire fociété avec eux, lui ,, déclarant, que, s'il commettoit quelque 3, crime , ou manquoit à fon devoir en 3, quelque chofe, il feroitpuni avec autant: 3, de rigueur qu'aucun autre. Comme ce „ Fils le concluait bien , non feulement il 3, l'avança, mais encore il conçut pour lui 3, un plus haut degré de tendrefie paternel- „ le. Ceux qui connoiiïent ce jeune Hom- 3, me, que je n'ai jamais vu, jugent qu'il 55 fera une aufli grande figure dans le mon- „ de, que fon Père; aiant donné des preu- ,, des fignalées de bravoure & de conduite 3, en diverfes Batailles , & de grande capa- 3, cité à d'autres égards,pendant que leSchab ,, Nadir étoit dans les Indes. Je fuis in- ,, formé par mes correfpondans de Perfe, „ qu'il gouverna l'Empire avec beaucoup Tome XXI Part. I. G >, de ç8 Bibliothèque Britannique, ,, de fagcfle , & qu'il y maintint une tranquil- „ lité parfaite juiqu'au retour de Ton Père. ,, Entre les taïens extraordinaires du „ Set ah Nadir s fa mémoire n'eft pas ce „ que l'on doit le moins admirer. Il n'y ,, a guéres de chofes de conféquence qu'il „ ait jamais dites ou faices, dont il ne fe ,, fouvienne. Il peut fur le champ appel- ,, 1er par leur nom tous les principaux Offi- „ ciers de fon Armée nombreufe. Il con- ,, noït la plupart des fîmples Soldats qui „ ont fervi fous lui en quel tems aue ce „ foit, & il rappelle d'abord dans Ion ef- 5, prit, quand & pourquoi il a puni ou re- „ compenfé tel ou tel. Il dicte à un ou ,, deux Secrétaires , & donne en même ,, tems fes ordres fur d'autres affaires, a- ,, vec toute la régularité & la promtitude „ imaginables. ,, Dans le tems d'une Aclion, à ce que j'ai appris, il fait paroitre quelque choie d'auffi furprenant. Il eft prefque incroia- ble , combien vice il découvre les avanta- ges de l'un ou l'autre Parti, & avec quel- le activité il marche ou envoie au fecours de fes Troupes, par tout où il en eft be- foin. Si quelcun de fes Officiers Géné- raux plie, fans y ùzre contraint par une grande fupériorké de forces , il court, au (n tôt à lui , & l'afTomme avec une Hache d'armes qu'il rient toujours à la main; après quoi il donne le comman- dement au premier Officier du rang qui fuit. Dans toutes les Batailles, Èfcar- „ mouches , Avril, May et Juin. 1743. gç 3, mouches, ou Sièges, quoi que d'ordi- ., naire il charge lui-même à la tête de fes ,, Troupes, il n'a jamais recula moindre „ bleflure ni la moindre égratignure: ce- „ pendant il a eu plufieurs Chevaux tuez ,, fous lui, &fon armure fouvenc effleurée „ par des baie*?. ,, Je pourrois ajouter plufieurs autres „ chofes remarquables , que j'ai vues ou ,, entendu dire de ce grand Héros, dont ,, les actions jufqu'ici luffifent pour con- ,, vaincre toute la Terre qu'il y a peu de ,, fiécles qui en aient produit d'égal. Puis ,, qu'il a fait tant de merveilles, dans des ,, tems où il avoit peine à trouver de l'ar- „ gent ou des hommes, que ne peut-on ,, pas attendre de lui , maintenant qu'il „ polTéde de fi immenfes tréfors ? Selon ,, toutes les apparences, il peut vivre en- ,, core treme ans: & dans cet efpace de ,, tems , (i fes entreprifes ont lemêmefuc- „ ces qu'elles ont eu jufqu'ici , à quel ,, point de grandeur un homme comme „ lui , dont l'ambition & le courage font „ fans bornes, ne peut-il pas parvenir? " On voit par cette conclufion que le Scbah Nadir eft le Héros de l'Auteur du Portrait: & il faut avouer, qu'à en juger par les idées du Vulgaire , terme qui ne renferme que trop de gens de tout ordre, cet homme extraordinaire peur êtr-e mis au rang des Héros les plus vantez. Mais, fé- lon les idées de la droite Raifon, les quali- tez les plus rares , les olus eftimables en G 1 «lies- iCO B'In'LIOTirEnUE ijLÛTANNïQjtJE, elles-mêmes, ne feront jamais un véritable Héros, quand elles n'auront pour régie & pour but qu'une ambition fans bornes, qui ne c'onnoit ni Humanité, ni Bonne Foi, ni Juftice, toutes les fois qu'elle ne peut au- trement fe fatiffaire , ou qu'elle voit jour à avancer fes projets. Ce que nous avons rapporté des aclions du Scbab Nadir , fuffit pour convaincre les Lecteurs éclairez & ron prévenus, qu'il n'a fait ufage de fa bravoure, de fon habileté & de fa condui- re , que de concert avec fes vues ambitieu- ies ; qu'il n'a refpeclé aucun des Devoirs les plus facrez de la Société Humaine & Civile, pour mettre à profit ou pour ame- ner les circonftances qu'il croioit lui four- nir , quelquefois même fans beaucoup d'ap- parence, les moiens de s'élever à quelque point de Grandeur, toujours au denous de fes défirs ; qu'il s'eft livré enfin à des mou- vement furieux de colère & de vengean- ce, dans des cas môme où la modération lui eût fait honneur, fans lui porter ai préjudice. Pour ce qui efl du fuccès de fes armes dans les Indes , il en a été plus rc vable à l'indolence procligieuie & à lu rfàu- vaîfe conduite du Grand Mbgbol & de Çqurtifahs, qu'à fa propre valeur & à habileté. L'Expédition de rUfurparcuv du Rpiaume de Perfe d'aujourdhui , peut être \ 'cet égard comparée avec celle d'ALé- •: andre U Grand côiître le dernier Roi de l'ancien Roiaume de Perfe. En vain pré- -.endroit-on relever d'ailleurs le mérite du Héros Avril, May et Juin. 1743* 101 Héros moderne, par la reftitution volon- taire qu'il 5c au Grand Moghol de l'Empire des Indes y dont il auroit pu le dépouiller ; au lieu qu'Alexandre n'en ufa pas de même à l'égard de Darius. Cette action du Schab ir9 quelque éclat qu'on y trouve, ne renferme pas plus de vraie générofité, que li un Voleur, après avoir enlevé une gran- de partie des biens de quelcun, lui laiflbit le refte. 11 n'y a ici qu'un trait de pruden- ce , dont l'ambition même étoit le princi- pe. Le Conquérant, qui n'étoit en pofTef- lion que depuis trois ans du Trône de Per- fe9 d'où il avoit chafTé le Roi légitime & fait exclure tous ceux de la Famille Roia- le ; avoit affez de peine à s'y maintenir pailiblement, fans fe charger encore du far deau d'un vafte Empire, où il ne pouvoir que craindre de trouver beaucoup plus de difficulté à le rendre maître de tant de Peu- ples de mœurs différentes , de tant de Princes & de Grands Seigneurs, accoutu- mez à vivre prefque dans une entière indé- pendance. Il couroit grand riique ce. de n'être pas en état de conferver cette con- quête , ce de perdre en même tems le Roiaume où fa domination ufurpée n'étoit pas affez affermie pour le mettre à l'abri de quelque révolution. On fent qu'il envifa- geoit ainfi les chofes, par la manière dont nous avons vu qu'il s'exprima, en propo- fant quelques difficultez aux Traîtres qui i'appelloiem dans les Indes, Pour ne pas s'expofer atout perdre, il fe conwntationc G 3 d'extor îo2 Bibliothèque Britannique, d'extorquer tout ce qu'il put, d'emporter des Indes d'immenfes richeftes , & d'-augmen- ter Tes Etats de Perje par la ceffion qu'il exigea de quelques Provinces frontières. S'il eil vrai, comme on l'a dit, qu'il parut fe repentir d'avoir rendu l'Empire à M a- hommed Schah, à caufe de l'intérêt qu'il témoignoit prendre au bien de fes Su- jets, ce n'étoit qu'un dehors affeclé, fous lequel il cachoit tes véritables motifs; com- me le mauvais é:at des affaires fut le pré- texte dont ceux qui l'appeliérent dans les Indes 9 & qui lui en ouvrirent l'entrée, cou- vrirent leurs parlions & leur intérêt particu- lier. Mais laifTons aux Lecteurs le foin de faire de plus amples réflexions fur le carac- tère du Schah Nadir; à quoi toute l'hiftoire de fa vie, examinée attentivement, four- nit une abondante matière. Il eft tems de finir, après avoir dit quelque chofe de la dernière Pièce, qui fe trouve jointe à ce Volume paroccafion. Auffi a t'ellefon titre particulier , de manière qu'elle peut faire une (a) brochure détachée , dont on a tiré apparemment des exemplaires à part. C'est le Catalogue d'un bon nombre de Manuscrits Orientaux , que Mr. Frafer , comme nous l'avons déjà dît , a aquis & apporté en Angleterre. La plupart font é- crits en Perl an , ou en Arabe; & on les rapporte à fept clalTes, félon les matières dont ils traitent, i. La première,, qui eft ta (a) De quarante pages. Avril, May et Juin. 1743. 103 la plus longue , contient les Livres d'Hif- toire , de Géographie (Sec. 2. La féconde , ceux de Po'êfie. 3. La troiiiéme, ceux de Morale & de Politique, les Romans &c. 4. La quatrième, les Livres qui concernent les Arts & les Sciences. 5. La cinquième , les Dictionnaires , ou Vocabulaires &c. 6. La fixiéme , les Lettres , les Formulaires d'Actes Publics ou d'autres Écrits. 7. La dernière, les Livres de Théologie. On donne au long le titre de chaque Manufcrit ; on en indi- que la forme, & on détaille les différentes Pièces qu'il renferme, qui font quelquefois en grand nombre. Par ces titres feuls on peut juger, qu'il y a là une ample moiffon à faire pour ceux qui entendent ces Langues Orientales , foie en matière de faits hiftoriques, de meeurs , de coutumes , foit pour s'inftruire des con- noiffances 6c des idées de ceux qui paflent pour Savans parmi ces Peuples Orientaux. Entre les Livres de Théologie , on voit une Traduction Perfane de ce qui refte des Ecrits du fameux Zeratufht , le Zoroajlre des anciens Auteurs Grecs. Mais les plus ra'-es Manufcrita, ce font ceux qui fe trouvent, fans diftinclion des divers fujets, dans une lifte qui termine le Catalogue. Ceux-ci font en langage & en ca- ractères appeliez Sanfkerrit , &que Ton croit être ceux des anciens Brabmins, ou Brachma- nes. Le Savant Voiageur Berniér-, (a) qui parle (a) Mémoirts,Ti.>m. Il.tatg.m. 164,182,183 8cc. G 4 104 BlBlLOTHEQUE BRITANNIQUE, parle de cette Langue , dit toujours le Hanfcrity & Mr. La Croze écrit d'une autre manière , le (a) Samfcret. Mais il faut s'en rapporter là-defTus à nôtre Au- teur , puis qu'il fait cette Langue , que les autres ignoroient. Pendant qu'il étoit à Cambay, il eut pour maître un docte Brah- mm , qui lui donnoit trois heures par jour ; & c'eft par fon moien qu'il trouva à ache- ter les Manufcrits en Sanfkerrit, dont il a une Collection , la première , à ce qu'il croit, qui ait jamais été portée en Europe. On y voit, entr'autres , une partie du (fc) Vedh, ou des anciens Livres Sacrez, dont les Brahmins fe refervent la lecture; & des Glofes pu Commentaires fur ces Livres, par oh Ton peut être inftruit en détail des divers poims de la Religion des Brahmins , &de leur ancienne Hiftoire, Outre une taille douce, où efl le Por- trait de l'Empereur de YHindoftan, qui au- roit fans doute été accompagné de celui du S chah Nadir , fi on eût pu le donner; on a mis à la tête de cette Hiftoire une Carte de l'Empire du Grand Moghol , & d'une partie de la Tartane. Cette Carte n'eft pas tout-à-fait nouvelle: on afuivi une des plus correctes qui ont été publiées jufqu'ici, & qui (a) Hi(t. du Cbriftir.mfme des Indes» pag. 419, 441, 5-00 &'C. (b) La Cro7E, ukifuft. allonge ce mot, & éj; cric Ved.im, rag. 45.7, 447. Avril, May et Juin. 1745. I05 qui eft , dit-on , aiTez exacte , à quelques diftances près. Mais il s'y trouvoit quan- tité de noms défigurez , dont on a rétabli la véritable écriture. ARTICLE IV. R E M ARQUES Sur la RÉSURRECTION de Laza- r e , raportée dans le Chap. XI. de l'Evangile de St. Jean. Jésus-Christ étant dans la Galilée eut la nouvelle de la maladie d'un Homme qu'il aiinoit beaucoup. C'étoit le frère de Marthe & de Marie , nommé Lazare, qui demeurait avec elles dans le Bourg de Bé- thanie. Il paroit dans l'Evangile que le Sauveur avoit quelquefois logé chez elles, & qu'il honoroit cette famille d'une amitié particulière. Dès que la maladie parut dan* gereufe, les deux fœurs en donnèrent in- ceffamment avis à J. C. Elles lui envoié- rent un Exprès avec ces deux mots, Sei- gneur ,celui que vous aimez eft malade Ça). Elles s'atendoient qu'il viendrait au plutôt opé- rer chez elles une guéri fon miraculeufe. Cependant elles n'oient pas lui rien pref- crire à cet égard. Ce qu'elles lui mandent eft acompagné d'une fage diferétion. On a remarqué avec raifon que rien n'elT G 5 plus 00 *. 3. ïo(5 Bibliothèque Britannique, plus fimple & plus modefte que cette Priè- re, & on nous la propofe même pour mo- dèle. Quand nous demandons à Dieu quel- que grâce temporelle , nous devons nous contenter de lui expofer humblement nos befoins. St. Auguftin eft, je crois , un des premiers qui a tiré cette moralité de la ma- nière difcréte dont ces deux fœurs repré- fentent leur fituation , & il a été iuivi de bien d'autres. Le Père De la Rue fait fur tout bien faire valoir cet exemple dans fon fetmonfur la Prière. ,, Quoi que nous demandions pour nos „ intérêts temporels, dit-il, attendons en „ l'effet avec une parfaite indiférence. „ Contentons nous d'ouvrir à Dieu no- „ tre cœur , en lui déclarant nos be- ,, foins, fans violenter fa Providence. Il „ fait ce qu'il nous faut , ce nous ne le fa- ,, vons pas. Imitons la (implicite des deux ,, faintes fœurs de Lazare, qui dans l'ex- „ trémité de la maladie de leur Fiére bor- „ noient toute leur Prière à repréfenter fon ,, état à J. C. Elles ne difent point com- „ me ce Père alarmé du péril de fon Fils, ,, Venez dans ma mai/on , Seigneur , avant „ qu'il f oit mort (a). II leur fufït de favoir „ que Jêfiis aime leur Frère , perfuadées „ qu'il n'abandonne point ce qu'il aime. " J e foufcris , de tout mon cœur , à cette excellente Morale. Mais fans vouloir rien oter à la piété de ces deux fœurs , je dou- te que cet exemple foit bien choifi. Les fages {a) Jeun IV. 47. Avril, May et Juin. 1743. 107 fages difpofitions qu'on leur fupofe , & qu'on nous donne pour modèle , doivent néceflairemcnt fupnmer les plaintes lors qu'on n'cit pas exaucé; & l'on fait qu'il en a échapé à l'une & à l'autre de ces fœurs. Cette eipèce d'indiférence que le Prédica- teur leur prête fe trouvera mal foutenue à l'arivée de J. C. chez elles. Elles lui di- fent toutes deux, avec quelque vivacité, que s'il avoit bien voulu le rendre chez elles quand elles l'en avoient prié, leur Frère leroit encore en vie. Mais n'antici- pons point fur notre Hiftoire. Jéjus répondit à ceux qu'on lui avoit en- voiez que cette Maladie neferoitpas mortelle (a). Il veut dire qu'elle ne feroic pas fuivie d'u- ne Mort telle que les fœurs de Lazare la craignoient , que * 'il en mouroit , ce ne feroic pas pour ne plus reparoitre fur la terre , que cette Maladie ne termineroit pas fes jours. Une Mort de quelques jours feulement, & fuivie d'un retour G prochain à la vie, n'eft pas proprement ce que nous entendons par le mot de Mort. Mais voions Ja Réponfe de J. C. toute entière. Cette Maladie ne doit point finir jes jours , dit-il , Étais elle doit fervir à la gloire de Dieu, afin que le Fils de D;eu en foit glorifié. On peut très bien donner à cette Réponfe un fens de comparai fon , qui a lieu dans tant d'au- tres Paflàges de l'Ecriture Ste. Le Sauveur voudra dire eue il Dieu avoir envoie cette maladie à Lazare, c'étoit moins pour ter- miner toS Bibliothèque Britannique, miner fa vie, que pour être l'ocafîon d'un Miracle fignalé qui devoit prouver fa Mif- Con divine. Alors tout efl exactement vrai dans cette propofition. J'avoue qu'el- le renfermoit quelque obfcunté pour ceux qui l'entendirent. Mais J. C. avoit fes rai- ions pour ne pas parler plus clairement a- vant que le Miracle fut fait. Il faut ra- porter au même but ce qu'il ajoute dans la fuite. Jéjus dit à fes Difciples, Lazare no- tre mni dort , mais je vai pour le réveiller Ça). Le Fils de Dieu donne à la mort de La- zare le nom de Sommeil. On demande là delTus fi ce n'eft pas là une de ces Equivo- ques dans le langage que les Cafuiites fé- véres ont condanées. Ce n'eft pas la feule ocaf on où le Sauveur a emploie des ex- prellions ambiguës. Dans le commence- ment de ce même Evangile, il eft raporté que lors qu'il chafla du Temple ceux qui y traquaient, il dit aux Juifs, Détruifez ce Temple 5 &f je le relèverai en trois jours (£). Ils l'entendirent de l'Edifice, & lui de ion Corps. Je répons que ceux qui blâment les équivoques dans nos difeours ordinai- res , veulent proprement proferire celles qui fe font dans de mauvaifes vues , un langage captieux tourné d'une manière à tromper le prochain & à le furprendre; ils corvdanertt feulement les équivoques que l'on peut regarder comme desMenfon- ges ralliez, ici ri n'y a rien de femblabîe. On A vu il, May et Juin. 1743. 109 On ne fauroit trouver dans les paroles de ce caractère de duplicité qui rend f équivoque cdieufe. C'eiï tout au plus un langage figuré familier aux Orientaux. Rien de plus commun chez eux que d'a- p-ier la Aiurt un Sommeil. Les Païens eux mêmes emploioient des figures fem- pour déûgner la Mort , mais par rai ton un peu diférente. C'croit pour • de prononcer un mot qui leur pa- i\,iflbit fâcheux , & de mauvais augure. il cil vrai que quand J. C dit que Laza- re dor:;:o;l , fes Apôtres s'y mépnrcnt. Ils crurent que cela vouloit dire que ce Mala- de commençoit à repofer , & ils en con- clurent que c'étoit une marque de guérifon. Mais c'étoit une grande (implicite, pour ne pas dire qu'il y avoit de la ftupidité, à ne pas entendre une façon de parler fi ufi- tée chez les Juifs. Quand J. C. ajoute qu'il va p 'éveiller 9 cela devoit oter toute équivoque. Comment : ou voient ils s'imaginer que IcurMaitre entreprit un voia- ge, un voiage lui* tout qu'ils regardent eux mêmes comme fort périlleux (a), & cela Amplement pour réveiller un homme en- dormi ? Il fa'oit fommeiîler foi même Dour ne pas entendre ce que J. C. vou- loit dire. Cependant voiant qu'ils avoienr mal pris fa Dentée, il ne les laîiîe pas long *-ems dans l'erreur. Il leur d.. :ent, Lazare eji mert (b). Le 110 BlRLlOTHEQ^UE BRITANNIQUE, Le Père Hardouin, dans fon Comment aire fur le Nouveau Teftament imprimé il n'y a pas long tems en Rolande , a faic une Remarque allez finguliére fur cette façon de parler Orienta- le qui défignela .Mort par le Sommeil ;c'eft que cette Figure ne convient qu'à des Morts qui le font depuis peu. „ L'Ecritu- „ re Ste. dit -il, ne donne pas le nom de „ Sommeil à une Mort qui feroit arivée de- „ puis plufieurs années. Pour pouvoir di- „ re d'un Mort qu'il dort , il faut ou l'a- voir devant fes yeux nouvellement ex- piré , car alors un Homme mort & un Homme endormi fe relTemblent beau- coup ; ou au moins il faut que le Ca- davre n'ait pas encore effuié la pourri- ture , & qu'il foit dans fon entier. " Il appuie fa Remarque de ce paffage de St. Paul auxTheiïalonicicns , A l'égard de ceux qui dorment , dit cet Apôtre, je ne veux pas que vous vous abandonniez à rafliëlion com- me des gens qui n'ont point d'efpérance (a). Il s'agiiToit de quelques Parens .que l'on a- voit perdus il n'y avoit pas long tems , & dont les Corps dévoient être encore entiers , car , dit le Père Hardouin , on fait que dans ces cas -là l'afiiclion eft bientôt finie. Tout cela eft ingénieux, & tend à donner plus de juftelTe à cette Figure. Mais je doute qu'il faille cher- cher cette précifion dans les façons de parler figurées eue l'Ecriture Ste. emploie. J. C, (a) I. rtêjfallV. 12. Avril, May et Juin. 1743. m J. C. eft apelé les Prémices des Dormans , dans la Première Epitre aux Corinthiens (a), & il ne paroi t pas qu'il s'agifle là d'une Mort récente. J. C. pour Cuivre la figure du Sommeil par oii il avoit défigné la Mort de Laza- re y ajoute qu'il va à Bétbanie pour l'éveil- ler. On a fait fur cette expreiTion une Ré- flexion qui mérite d'être raportée , c'eft que voilà une manière bien limple d'expri- irîÊr le Miracle fignalé qu'il alloit opérer. On doit reconnoitre ici le langage du Maître de la Nature à qui il femble qu'il ne coûte pas plus de reflufciter un Mort que de réveiller un Homme endormi. Les . faux Prophètes promettent beaucoup , & font fore peu; J. C. promet peu , & fait des prodiges inouïs. Jéfus étant arivé à Béthanie, Marthe lui dit , Seigneur, fi vous enjffiez été ici, mon Frère ne fer oit pas mort(b). Elle fait entendre allez clairement au Sauveur que s'il avoit bien voulu fe rendre chez elle , pendant la maladie de Lazare, comme on l'en avoit prié, il Pauroit guéri miraculeufement , comme il en avoit guéri tant d'autres; que s'il avoit daigné faire cette démarche pour elles, comme elles avoient lieu de s'en flater & par l'amitié qu'il avoit toujours té- moignée à leur Frère, & à elles auiTi, el- les ne feroient pas dans l'afliclion où elles fe voioient ploagées. 1. Corintb. XV, 10. (&) t. IX. ii2 Bibliothèque Britannique, Je Jai même à préfent , ajoute- 1- elle, que tout ce que vous derrumderez à Dieu , il vous Vacordera (a). Ces paroles ne font pas auiii claires qu'on fe l'imagine ordinairement, j'ofe avancer que c'eft parce qu'on n'en a pas compris le fens , qu'il refle encore quelque obfcurité dans ce Chapitre. Il eft donc important de tâcher de les éclaircir. La manière dont on entend ces paroles impoie d'abord. On croit qu'au travers des expreffions un peu générales dont fe fiwt Marthe, il n'eft pas dificile de pénétrer fa penfée. On voit allez, dit-on, qu'elle in- iinue au Sauveur qu'il n'avoit qu'à deman- der à Dieu la Rél'urreclion de fon Frère, & que Dieu la lui acorderoit. Si elle ne# parle pas plus clairement, c'eft par dif-' crétion. Elle û'ofe pas demander pofitive- ment une fi grande faveur. Elle fe con- tente de lai fier entrevoir ce qu'elle a dans l'efprit. Ce qu'elle dit au Sauveur revien- dra donc à ceci; Seigneur, vous auriez pu empêcher la Mort de mon Frère fi vous étiez arivé à tems. Mais quoi que nous Vaïons per- du , tout n'eft pas encore defejpéré. Il feroit encore tems de remédier à nos maux, fi vous le vouliez bien. Dieu ne refufe rien à vos priè- res. Si vous lui demandiez donc de rendre la vie à Lazare , je fuis perjuadée que nous joui- rions encore de fa préfence. La Réponfe de T. C. femble apuier cette Paraphrafe. jêfus lui répondit, Votre Frère rejfuj'citera. C'eft comme (a) r. 11, Avril May et Juin. 1743. 113 comme s'il lui avoit dit, ,, Vous voulez: ?, m'iniinuer que û* je demandois à Dieu la ,, Réfurrection de votre Frère 3 je pour- „ rois l'obtenir. Je vous déclare donc qu'il ,, reliai citera. " Jufque-ià tout paroit bien lié; mais malheureuiement la fuite ne peut plus s'a* corder avec cette explication. Déjà la Ré- plique que Marthe fait au Sauveur nous dé- route entièrement. Je J'ai bien, lui dit elle, qu'il rejjiij citer a au dernier jour (a). Eil-ce là répondre à la promeiTe que J. C. lui fait de rellulciter ion Frère , en conféquence de la demande que l'on veut que Marthe lui en ait faite elle même? En confon- dant ainii le fort de Lazare avec celui de tout le genre humain, elle fait affez voil qu'elle n'avoit pas cru que dans la déclara- tion de J. C. il r eut rien de particulier pour fon Frère. Elle s'imagine qu'il a Am- plement voulu dire que Lazare reflufcite* roit avec les autres à la Réfurre&ion gé- nérale. Il y a beaucoup d'aparence que Marthe regarda ce que J. C. lui venoit de dire de. la Réfurrection de fon Frère comme une de ces Confolations que nous donnons en- core aujourd'hui aux afligez qui pleurent une perfonne chérie. Nous leur difons que celui qu'ils viennent de perdre n'eft pas le* paré d'eux pour toujours, que la Réfurrec- tion le leur rendra. Ce qui revient à la reflé- ta) t- 24. Tom$ XXL Part. L H iT4 Bibliothèque Britannique, réflexion de St. Paul que nous avons déjà eu ocafion de citer, que les fidèles qui meurent ne font qu'endormis, & qu'on ne doit pas les pleurer comme (I Ton ne de- voit jamais les revoir (a). Je /ai qu'il reffuf citera au dernier jour , dit- elle !à djffu*. ,, Je fuis très permadée de ,5 cette Réfurreélion générale que vous „ nous avez fait connoitre, & je ne dou- „ te point qu'alors mon Frère ne recouvre 3, la vie. Je fens bien encore que c'eft là 55 une penfée confolante;& propre à adou- 5, cir notre afliclion. Mais après tout cet- ,, te considération ne fait pas tarir nos lar- „ mes. Le dernier jour eft encore bien „ éloigné. Nous voilà privées de ce cher „ Frère pour le relie de notre vie, & en- ,, core un coup il n'a tenu qu'à vous de „ nous épargner cette amertume. " Erafme dans fa Paraphrafe fur cet Evan- gile, "paroit aiTez embaraflé à lier cette Ré- ponfe de Marthe , je foi que mon Frère ref- fufeitera au dernier jour , avec la promette que le Sauveur vient de lui faire de refluf- citer Lazare. Il n là deffus une penfée fort ingénieufe, mais extrêmement recherchée. Il croit que Marthe lui parle de la Réfur- reclion générale pour l'engager à s'expli- quer plus clairement fur ce qu'il vouïoit faire pour fon Frère. ,, Il y avoit eu de ,5 l'ambiguïté 3 dit ce Savant, dans les dif- 55 cours précédens de J. C. Il avoit com- 55 mencé (a) I TheJ' *ï* «• - 5î Avril, May et Juin. 1743. JIS ,, raencé par donner le change au Mefla- 53 ger que ces deux fœurs lui avoienc en- „ voie pour l'avertir de la maladie de La- ,, zare. Il avoit dit que cette maladie n'étoit 5, pas mortelle (a)> & cependant le malade ,, en étoit more. Elle craint donc quelque „ nouvelle équivoque dans la promette que n i. C lui fait de reiTufciter fon Frère, „ Quand vous me promettez que mon Frért „ Tejjty'ciîera, veut -elle dire, fi vous Ven- 5r tendez /triplement de la Réjurreàion gêné* „ raie au dernier jour , la chofe n'ejl pas dou- ,. têtue. Mus la grâce que je vous demande ,, c'ejl une Résurrection préfente fi? actuelle; fe? c'ejl là deffus que nous voudrions bien que vous vous expliquajfiezy clairement £? ,; fans détour. " Ce moien de conciliation paroit d'abord imaginé fort heureulèment. Le mal eft que fi Marthe a voulu par là faire parler plus clairement J. C. elle n'y auroit pas réufîî. Que lui répond le Sauveur? Je fuis la Réfur- rection & la vie (b), c'efl: à dire , je fuis l'au- teur de la Réfurre&ion, & la fource de la vie. C'efl moi qui refïiifciterai le genre- humain au dernier jour, & qui mettrai en pofTefîion de la vie éternelle ceux qui en feront dignes. Celui qui croit en- moi vivra, quand .même il fer oit mort. Ces leçons va- gues, ces Réflexions générales fur le bon- heur futur de ceux qui croient en J. C. ne promettoient encore rien de préfentà Mar- the (4) f. 4. (*) t. Hy H z 'ii6 Bibliothèque Britannique, îhe, & la laiffoient dans fa première in- certitude. Je crois que la véritable raifon pourquoi J. C. ne parle pas plus pofitivement k Mar- the, c'cft, comme je Tai déjà dit, qu'elle ne lui demandoit point la Réiurrech'on de fon Frère. On a beau dire que l'événe- ment paroit être un bon Commentaire de ce qu'elle avoit dans l'efprit, cette preu- ve n'efr, nullement concluante. Le Sauveur peut avoir reflufeité Lazare, fans que fes iœurs l'en aient prié. Et l'on n'a qu'à lire cette Hiftoire jufqu'au bout pour fe per- fuader qu'elles ne l'ont pas fait. Parcou- rons en quelques circonilances , & nous ver- rons qu'elles détruifent le fentiment ordi- naire que Marthe s'atendoit que J. C. dut relTufcker fon Frère dans la journée même. Il elt dit, par exemple, que Jéjïis pleura la mort de Lazare Ça). Quand Marthe jufque -lk auroit eu quelque foupçon que le Sauveur pourroit lui rendre lbn Frère, ces larmes auroient fut! pour faire évanouir cette ef- pérance. Ces atendriïYemens n'étoient plus de faifon fi Lazare alloit refiufciter. II eft vrai que J. C. avoit déjà rendu la vie à quelques Morts, mais il eft remarqué dans l'Evangile que , fur le point d'opérer ce Miracle, il avoit toujours paru ferme & plein de confiance. Quand il reflufeité le Fils de la Veuve de Naim, il prend foin de raflurer la Mère troD atendrie, & loin de Avril, May et Juin. 1743. 117 de pleurer avec elle, il l'exhorte d'un air ferein, à ne point s'afliger (0). De même quand il rend la vie à la fille de Jaïrus, ce Chef de la Sinagogue, il défend aux Pa- rens de répandre des pleurs (fc). Mais à Béthanie Jéfus s'atendrit avec ces deux fœurs afligées. Il mêle fes larmes avec les leurs. Il y en avoit là aflez pour écar- ter la penfée de la Réfurredtion de Lazare. Il ne faut pas difîlmuler que la Réfurrec- tion de la Fille de Jaïrus donne lieu à une objection qui paroit a(Tez forte contre moi. Vous ne voulez pas, me dira-t-on, que Marthe , déjà fort inftruite de la doctrine du Sauveur , lui ait demandé , fur la fin de fon Miniftére , la Réfurrettion ce Lazare. Cependant il paroit dans l'Evangile que ce Chef de laSinagogue, lui avoit demande la Réfurrettion de fa Fille , dès le com- mencement de fa prédication. Ma Fille efi morte maintenant, lui dit-il; Mais venez lui impofer les mains, &? elle vivra (c). Mais fi l'on examine bien cette Hiftoire , on verra clairement queyai'n^demandoit fim- plement au Sauveur la guérifon miraculeufe de fa Fille, qui étoit à l'extrémité. S'il la repréfeme comme morte, c'eft là une de ces exagérations aiïez communes dans ces cas-là. Les autres Evangeliftes nous apren- nent d'une manière précife, qu'elle n'étoit pas encore morte. Ma Fille eft à l'extrémité , ci; (n) Lue. VIL tt. (h) Luc VUU %'%\ (c) Mztth. IX. 18. tf 3 n8 Bibliothèque Britannique, dit l'Evangile de St. Marc (a). Et un peu après il reçut la nouvelle qu'elle étoit ef- fectivement morte (b). C'efl ce qui parok encore dans le Chap. VJII. de St. Luc (c). La Verfion de Genève a fort bien tradujt la demande du Père dans St. Matthieu. Ma Fille doit être morte à l'heure qu'il ejl &C Il exagère le danger où le trouve fa Fille afin d'engager J. C. à fe hâter. Bailleurs cette manière de raifonner n'efl pas tout à fait exacte. On veut prouver par l'exem- ple de Jaïrus que Marthe a pu demander la Réfurreclion de fon Frère. Il ne s'agit pas de ce qu'elle a pu faire, mais de ce qu'el- le a fait* effectivement. Or nous avons plu- sieurs preuves qu'elle n'a point fait une fem- blable requifition au Sauveur. C'efl ce qui va paroi tre encore plus clairement par quel- ques autres circonftan ces de cette Hiftoire. Quand Jéfus fut arivé au fèpulcre, & qu'il eut fait oter la Pierre qui le couvroit, Marthe lui repréfente que fon Frère eft de- puis plufieurs jours dans le tombeau , & qu'il/ent déjà mauvais (d).On voit clairement fa penfée ; Elle veut dire par là , Pourquoi remuer cette pierre? Ce Corps va exhaler une odeur fort incommode. Il en forcira une puanteur qui nous infectera tous. Mais pouvoit-elle faire cetee dificulté dans le fiflème ordinaire? Y avoit-il quelque corn- paraifon entre cet inconvénient & le bien qui (a) Marc. V. 23. (b) t. jjf. Ce) Luc. VUL 41. [d) f. 39. . Avril, May et Juin. 1743. 119 qui en dévoie réfultcr? Maïs Marthe s'jma: ginoic que Jéj'us ne demandoit à voir en- core une fois Lazare, que pour donner à fon Cadavre cette dernière marque de l'a- fection qu'il avoit eue pour lui. Dans cec- te pentes elle eft fondée à lui infinuer que ce fpedacle feroit plus propre à lui donner de l'horreur, qu'à fatiffaire fa tendre fie. Malgré toutes ces démarches de J. C. malgré tous ces acheminemens au Miracle qu'il va opérer , Marthe ne L'entrevoit point encore. Le Sauveur eft obligé de l'y pré- parer de nouveau. Ne vous ai- je pas dit , ajoute t-il, que fi vous cruïez vous verrez la gloire ce Dieu (a) , c'eft à dire un effet de fa puiflànce? ,, Ne vous ai-je pas aflez fait „ comprendre par tout ce que je vous ai „ dit jufqu'a préfept, que pourvu que Vous „ eufliez une entière confiance en ma puif- „ fance & en ma bonté, je ferois éclater „ aujourd'hui à vos yeux la puiffcnce infi- 3, nie de mon Père, par un Miracle fignalé y, en votre faveur? " Comment acorder cette Cenfure avec la fupofition que Mar- tbe avoit demandé la première la Réfurrec- tion de fon Frère , & qu'elle s'y atendorc d'un moment à l'autre? Si elle avoit eu cette penfée flateufe, auroit-il falu revenir à tant de reprifes, pour lui faire entendre que le Sauveur alloit mettre la main à l'œu- vre , & rendre inceffamment la vie à fon Frère. Il paroit donc par toutes les cir- conftances (*) t. 40. H 4 120 Bibliothèque Britannique, confiances de cette Hiftoire, quand on l'examine avec un peu de précifion, que ni Marthe, ni Marie fa fœur,ni les Apôtres eux mêmes qui acompagnoient leur Mai- tre, ne s'atendoient nullement que Jéfus dut refiufciter Lazare. J'afliftai un jour à un Sermon, ou plutôt à une Paraphrafe fur ce Chap. XL de St. Jean. Le Prédicateur fupofa, comme on le fait ordinairement, que Marthe après la plainte qu'elle avoit faite au Sauveur, de fon retardement, avoit bien eu intention de lui demander la Réfurrection de fon . Frère. Mais aïant enfuite examiné plu- fieurs circonflances de cette Hiftoire, il avoua qu'elles ne quadroient point avec cette demande; il reconnut fur tout que les réponfes de Marthe n'ayoient plus de raporc avec ce qu'elle avoit eu d'abord dans l'ef- prit, & qu'on ne voioit prefque point de liaifon dans tout ce qu'elle dit au Sauveur depuis qu'elle lui eut fait cette demandée Il voulut enfuite donner quelque rai fon de ce que les difeours de cette fœur afli- gée étoient fi peu liez, & il en chercha la caufe dans fon aflidtion même. Ne pourroit- on point foupçonner, dit-il, que l'excez de fa douleur ne lui laiiïa pas alors toute la liberté de fon efprit, & jetta un" peu de defordre dans fes idées? Il prétendit expli- quer par là le peu de fuite qu'il y a dans ce qu'elle dit au Sauveur dans cette trifle circonf!:ance. Mais avant que de hazarder une femblable folution , il me femble qu'il faut Avril May et Juin. 1743. I2* faut fe tourner de tous les cotez. Le F é dicateur fe commettoit un peu en nous Je fai menu à préfent que tout et que Avril, May et Juin. 1743. 123 que vous auriez demandé à Dieu en faveur de mon Frère, dès que nou> vous avons aver- ti de fa maladie, Dieu vous V aurait acordé. Un Homme riche qui écoit venu vers J. C. pour lui demander la guérifon de fon Fils, reconnut qu'il fut guéri a la même heure que le Sauveur lui die, Votre Fils vit (a). Le Cencenier qui demandoit à J. C. la guérifon de fon ferviceur, avoit eu de bonne heure cette idée de l'étendue de fon pouvoir. Vous n'avez au à dire un mot, £p mon firvlteur fera guéri (b); c'efl à dire, Vous n'avez qu'à commander, fans avoir la peine de vous rendre chez moi , vos or- dres fenls rufiront pour la guérifon de mon Domeflique. Marthe informée de ce pou- voir extraordinaire de J. C. marquera donc ici de nouveau fa furprife. Sur l'afeclion qu'il avoit témoignée à fa famille > elle a déjà témoigné de i'étonnement de ce qu'il ne s'étoit pas rendu chez elle dès qu'il eut apris la maladie de Lazare\ mais ce qui le redouble, c'eit que fans fe tranfporter fin- ies lieux il pouvoit guérir le Malade. Il pouvoit conrmanderà la Maladie, du lieu même où il fe trouvoit, ou au moins il pouvoit demander à Dieu cette guérifon. Je foi même à prijent , dit- elle, que Dieu vous i*auroit acordée , & qu'il ne vous refufe rien. Elle ne comprend rien dans cette in- diférenec du Sauveur, li faut convenir qu'en raportant ainû au pafle ce difeours de Marthe (a) Jctn. IV. 4$. (£) Luc* VIL 7. 124 Bibliothèque Britannique, Marthe, tout eft aplani dans ce Chapitre Ses paroles & fes actions fe trouvent par- faitement liées. Refte à examiner fi cette explication ne fait point de violence au Texte. Il y a dans le Grec, \aaa« tuà >Zi &k in ia-et en àitifl^ rot $101 , $û au Subjonctif. Ces deux mots fe relTembleiît fi fort qu'il eft aifé de prendre l'un pour l'autre. Mais il n'eft pas néceflaire d'en venir là, nous n'avons qu'à fupofer un Hébraïfme dans ces paroles de Marthe, & nous aurons ce qu'il nous faut. Ceux qui entendent l'Hébreu favent qu'il n'y a point de Subjonftif dans cette Lan- gue , & qu'on y fuplée par le Futur. On en trouve des exemples fréquens dans l'Ancien Teftament. Dans le Pfeaume XXXVII. Si ambulavero in medie angufiiœ (b). Il y a dans l'Hébreu. Siambulabo&c. De même au Pfeaume CXXX. Si iniquitates objet* (*) « elle ,, fe jetta à fes piez, 6c lui dit, comme fa „ feeur l'avoit déjà fait, que s'il avoit vou- ,, lu venir à Béthanie fur la nouvelle de la ,, Maladie de leur Frère, .il l'auroit empê- M ché de mourir. " Mais de quelque ma- uiéie qu'elle fe foit exprimée, elle en aura allez Avril, May et Juin. 1743. *27 afTez dit pour juftifier la remarque que j'ai faite dès le commencement, qu'il faudroit peut-être un peu moins apuier, que ne le font les Moraliftes , fur la manière réfervée dont ces deux fœurs implorent le fecours de J. C. en faveur de leur Frère Malade, & fur leur parfaite réfignation à la Volonté de Dieu dans cette ocafion. Il eft bon d'obferver encore que dans ce que Marie dit à J. C. on n'entrevoit rien qui laide croire qu'elle fe flate de voir reflufciter Lazare. On dira peut-être, qu'il n'eft pas fort important de favoir fi précifément ce que ces deux fœurs avoient dans l'efprit dans cette circonftance ; qu'il eft bien plus ef- fentiel de bien entrer dans le fens des le- çons que J. C. leur donne. J'en conviens; cependant il me femble que pour ne pas donner prife à l'Incrédulité, il faut tâcher de lier un peu mieux les difcours & les Faits contenus dans ce Chapitre que l'on ne le fait ordinairement. 11 eft à craindre que ceux qui voudraient concéder le Miracle même de la Réfurredtion de Lazare , n'ef- farent de faire voir que toute cette Narra- tion manque de liaifon, & n'eft pas a fiez fuivie. Après avoir éclairci ces petits in- cidens , il faut venir à l'événement princi- pal , je veux dire au Miracle éclatant que j. C. opère. Jéfus (a) arivé près du fépulcre ordon- ae '») t. m> 128 Bibliothèque 13 r i tannïqtte, ne de lever la pierre qui le couvroit, & élevant lès yeux au Ciel il fait fa Prière à Dieu, ou pour mieux dire, il le remercie de ce qu'il l'a exaucé. En même tems il ; eîâ le More par Ton nom, qui forcit ifi- ceflamment du tombeau, On le délie des bandes dont il étoit envelopé, & il parle, il marche, il eft vivant, & furvit plufieurs années à lés premières funérailles. Voilà une preuve de la Million divine de Je/us, qui eft décifive. À cette marque, on pouvoit aiférnent reconnoitre s'il étoic le rVJeflïe, ou s'il prenoic ce titre à faux. Il prie fon Père dans cette circonftance,de déploier fa puilfance en fa faveur, afin de convaincre les Hommes qu'il eft Envoie du Ciel. Il lui demande la Réfurrection de Lazare. S'il l'obtient, la Queftion eft décidée. Dieu ne fauroit faire part de fa puiflance à un Impofteur qui auroit pris à faux le titre d'Envoié de Dieu. Cependant depuis peu d'années , il a pa- ru un Ouvrage, où il y a de bonnes cho- fes d'ailleurs, qui a oie avancer ce hardi Paradoxe que les Miracles font des armes ujées qu'il eft aifé de repouffer. Un Mort ref- Jufcité , des Malades guéris, qiCeft-ce que cela prouve? dit cet Auteur. Peut-être eft-ce l'ef- fet de quelque jvpercterie. Si ce ri eft pas celay rien riemptebe que ce ne fuit l'effet de quelque caufe naturelle {a). C'en à dire que u J. C. fut (a) Lettres fur U Religion ejfentitlh à l'Homme, Votez t 'Introduction, Avril* May et Juin. 1743. 129 fut venu guérir Lazare malade , il n'y au- roit eu qu'à dire qu'il n'y avoit point là de Miracle, & qu'une heureufe crife l'a- voit fauve. S'il prend le parti de le ref- fuiciter, il n'y a rien là non plus de fur- naturel. La chofe peut s'expliquer autre- ment. Mais qu'on examine bien cette Ré- furre&ion en particulier , & l'on y verra l'empreinte d'une puiflance infinie. Le Mort dont il s'agit, étoit couché depuis quatre jours dans le tombeau. Ses membres fe reflentent déjà de la corruption du lieu où il étoit enfermé. Pour lui rendre la vie, il s'agiffoit non feulement de réchau- fer , de ranimer des membres fans a&ion , d'ouvrir cette multitude de canaux afaif- fez, ou plutôt de réparer ceux qui étoient déjà détruits , y envoier de nouveaux ef- prits pour tout remettre en mouvement. Il faloit encore réunir à cette Maffe de boiie organifée , une fubftance fpirituelle qui penfe, qui raifonne. Il faloit que ces deux Etres fi dilTemblables recommençaf- fent leur union ce leur correfpondance. Cefl là un prodige d'une efpèce fi viilble- ment furnaturelle , qu'on ne fauroit l'atri- buer qu'à un Etre infirr. Cefl: là une opération qui aproche de trop près de la première Création pour pouvoir l'atribuer à d'autre qu'au Créateur de l'univers. Mais peut-être que cette prétendue Ré- furrection eft Y effet de quelque Jupercberle. On voit allez que c'eft à quoi ^notre Au- teur voudroit s'en tenir. ïe répons que Tome XXL Part. L *I l'eue i^o Bibliothèque Britannique, l'état oli étoit ce Corps exclut entièrement une femblable défaite. Quand un Cadavre eîl déjà corrompu, on ne peut pas foup- çonner que celui dont ii s'agit ait eflaîé de contrefaire le Mort. Dai Heurs Jéfus vint au iepulcre acompagné d'une foule de Juifs , fort intéreïTez à éclairer toutes fes démar- ches. Ces énemis implacables de la nou- velle Doctrine se manquèrent pas de bien examiner la chofe. Mais fi l'on en croit l'Auteur de la Religion ejjentielle , il n'y re- gardèrent pas de 11 près. Ceux qui crurent que Lazare étoit reflufei té, étoient de bon- nes gens qui fe laiflerent furprendre , & qui prirent les aparences pour la réalité. Si notre Auteur avoit été de ce tems-là, on ne lui auroit pas ainfi impofé II ne laiiTe pas, avec un femblable langage, de fe dé- clarer le Protecteur de la Religion contre les Incrédules. Il feint de venir comme un bon Ami , à fon fecours. Tandis qu'il fait main bafle fur toutes fes plus fortes preuves , qu'il veut renverfer fes plus foli- des apuis, il veut qu'on le croie zélé pour l'Evangile. On s'eft étonné avec raifon qu'il puilTe jouer ce perfonnage dans un Livre oii il effai'e de ramener toutes les vertus à l'Equité & à h bonne foi. Les Miniflres de l'Evangile, lors qu'ils traitent cette matière , doivent examiner avec foin toutes les Circonftances de cette Liïftoire, pour bien conflacer le Miracle. Un des principaux defTcins qu'eut le Sau- veur en reflufei tant Lazare 9 fut de prouver iucon- Avril, May et Juin. 1743. I3I inconteftablement fa MifTion divine. On doit donc toujours expliquer ce Chapitre de l'Evangile, dans ce point de vue. Il me femble qu'on doit lavoir mauvais gré aux Prédicateurs de l'Eglife Romaine de négliger autant qu'ils le font le fens li- téral dans leurs fermons fur cette Réfur- rection. Tous ceux que prêchent le Carê- me font apelez à traiter cette matière, la feraaine qu'on apeile de la PaJJicn. Ils ont tous la coutume de laifler leur Evangile à coté, & de le jetter dans le fens Miftique. Il ne faut pas leur prêter en cela de la mau- vaife intention, mais ils paroilTent un peu blâmables de ne point faifir une fi belle preuve en faveur de l'Evangile, pour en faire bien fentir la force. J'eus ocafion d'entendre autrefois à Paris le Père Ou;;iquet, fameux Prédicateur Théa- tin. L'Évangile du jour étoit la Réfurrec- tion de Lazare. Il nous parla uniquement de la Converfion du Pécheur, dont cette Réfurreclion cft l'image. En voici quel- ques traits. Celui que vous aimez , efi malade (a). C'eiï l'Eglife, dit-il à fes Auditeurs, qui tient ce langage à Dieu fur le trifte état où elle vous voit. " Elle lui demande par là votre Con- verfion. // dort (T) , répond J. C. Oui , ce n'eft qu'un alToupiflement. Le Sauveur cfpére que nous nous réveillerons, & il travaillera lui (*) 1. 3. (}) t. ii. I 2 132 Bibliothèque Britannique, lui même à nous tirer de ce dangereux fom- rtieîl. Il fent déjà mauvais (a). Ici il décrivit fort pathétiquement la corruption des Pé- cheurs. Il la fit envifager comme une vé- ritable infection. Otez la pierre. Il faut pour guérir les Pé- cheurs que la lumière éclaire ces tombeaux, que le grand jour expofe cette corruption aux yeux du Public. Quand on connoit vos d'ébauches . alors vous en êtes honteux. Quand vos fraudes, vos extorfions font connues de tout le monde, vous en êtes confus , & cette confufion peut vous deve- nir faîutaire. Alors vous fongez à changer. Déliez-le, & le laifez aller (b). Le Pré- dicateur parla à cette ocafion de la Grâce qui vient rompre les liens du Pécheur. Mais il n'oublia pas de faire remarquer dans ces paroles un argument en faveur de l'Abfolu- tion que le Prêtre donne au Coupable dans le Tribunal de la Pénitence. Solvite illum ; T. C. parle ici aux Prêtres. Deliez-le, c'eft à dire, pardonnez les péchez au Pénitent qui s'eft confeffê Voilà comment le Prédicateur allégorifa fon Evangile depuis le commencement juf- qu'à la fin. Quand fouis fon Texte je m'a- tendois à voir déveloper de bonnes preu- ves de la Divinité de l'Evangile, fujet fort jntérciTam pour tous les Chrétiens. Au lieu de cela je n'eus que des Allégories , ou de mauvai- (*) *• 39- (*) * 44- Avril, May et Juin. 1745. 133 mauvaifes preuves d'un Dogme particulier à l'Eglife Romaine. Quelques jours après ce Sermon j'eus un entretien là defliis avec un Religieux de ma connoiffance , qui avoit aufii aquis de la ré- putation du coté de la Chaire. Je lui mar- quai ma furprife de ce que le Théatin aïant en main cette preuve triomfante en faveur de l'Evangile, il l'avoit entièrement négli- gée pour fe jetter dans le fens Miftique, qui lui avoit fourni des penfées bien alam- biquées. Voici comment il fit l'Apologie de lbn Confrère. ,, Il eit vrai, dit-il, que c'eft là notre „ Métode à tous. Si notre Evangile ra- ,, porte la guérifon d'un Aveugle, nous „ traitons la matière de l'aveuglement fpi- ,, rituel. De même fi nous avons pour „ texte la Réfurredlion de Lazare, nous ,, failbns aufii rouler notre fermon fur la „ Réfurre&ion fpirituelle, c'eft à dire fur „ la Converfion du Pécheur dont ce Mi- ,, racle eft un emblème. La raifon que „ nous avons de laifTer le fens litéral, c'eft „ que fi nous fuivions le grand chemin ,, battu, nous dirions tous à peu près la „ même chofe ; au lieu que le fens Mifti- „ que varie félon le tour d'efprit, plus ou „ moins fécond , de celui qui le manie. On ,, permet à l'imagination de faire fon jeu, „ & cette liberté jette une agréable variété ,, dans le dévelopement d'une Hiftoire qui ,, prife à la lettre, n'ofriroit qu'une unifor- ., mité ennuieufe aux Auditeurs. " 13 Je 134 Bibliothèque Britannique, Je lui répliquai que fi j'avois un Confeil à lui donner > c'eft lors qu'il traiterait ce iu- jct de s'en tenir au fens litéral, & cela par la raifon même qu'il venoit d'emploier. Vous ne voulez pas, dites vous, vous ren- contrer avec les autres Prédicateurs. Us s'atachent tous conflamment au fens caché 6: Miftiquc. Chacun prend quelque route écartée, & tâche de s'ouvrir quelque fon- der peu connu. Vous n'avez donc qu'à reprendre le grand chemin abandonné & le fuivre. Cela donnera à votre fermcn un ca- ractère original , & un air de nouveauté. Mais ce qu'il y a de plus important & qui devroit feul vous déterminer, c'eft que par là vous aurez l'avantage fur tous les autres d'être bien entré dans les vues de l'Ecrivain facré qui nous a confervé un fa;t auffi incé- rellant que la Réfurreclion de Lazare. Il ne faut pas oublier que ce Prédicateur, entêté comme les autres de la métode Mif- tiquc, me dit qu'ils la tenoient des faints Pé"es,que c'étoient là leurs Guides, ce que perfonne n'ignore qu'ils ont prefque tous prêché de cette manière. Après cette auto- rité, il ne s'agiffoit plus de concerter da- vantage. Le Père Gijbert dans fon Eloquence Chré- tienne donne une bonne leçon aux Prédica- teurs. „ Ce ferait bien peu refpecler la „ Parole de Dieu, dit-il, que de lui atri- 3, buer inconsidérément des fens qu'elle n'a „ pas. Il ne nous ert pas permis de lui „ en donner d'autres que ceux que le St. 3, Efpric Avril, May et Juin. 1743. x59 „ Efprit a prétendu lui donner. Toute „ explication purement arbitraire , toute 3, aplication ou le Prédicateur ne cher* „ che qu'à faire briller fon bel efprit , eft „ indigne de la Majefté de la divine Pa- M rôle (a). " Il eft vrâi que par reipecl pour l'Anti- quité, le Père Gifbert excepte de fa Règle les arJîjcations ingénieufes que les faints Pérès font de l'Ecriture dans leurs fermons, & les fens miftiques qu'ils lui donnent fi fréquemment. Mais , pour dire les chofes comme elles font , ils font les premiers coupables. Rien n'efl plus forcé que leurs Allégories. C'cft à leur imitation que les Prédicateurs qui font venus enfui te , ont violé la fage Règle de ne pas donner à l'Ecriture des Explications arbitraires. Il y a fur tout un grand inconvénient, quand on explique quelque Miracle de J. C. , à abandonner le fens litéral pour le miftique , c'eft que par là on afoiblit en- tièrement la preuve qu'il fournit pour la Million divine du Sauveur. Sien expliquant la Résurrection de Lazare on nous parle toujours uniquement de la Converfion du Pécheur j il fe trouvera des gens qui abu- feront de cette leçon. Ils prétendront que le ^cit de l'Hiftorien facré ne doit point être pris à la Lettre, que cette narration doit être regardée comme une Allégorie où («) Eloquence Chrétienne, pag. 297. I 4 136 Bibliothèque Britannique, St. Jean a voulu nous aprendre d'une ma- niére un peu ornée , que Jéfus tira Lazare do la corruption oîi il avoit croupi auparavant. Cette crainte ne doit pas être regardée comme chimérique. On fait que Woljlon a eflaïé d'ataquer par là les Miracles de J. C. Pour énerver les preuves que nous en ti- rons en faveur de la Religion Chrétienne, il s'eft imaginé qu'il n'y avoit qu'à les tour- ner en Allégories , & il a cité hardiment les Pérès comme les aïant envifagé de cet- te manière. Un femblable abus devroit donc rendre les Prédicateurs un peu plus circonfpecls. Par cette baterie , ce violent & fougueux adverfaire a cru de pouvoir renverfer les principaux faits miraculeux de l'Evangile. Cependant quoi qu'il ne garde aucun mé- nagement dans les ataques , il n'a pas pouffé l'éfronterie jufqu'à ofer apliquer ici fa métode ordinaire. Il a bien fenti que la voie de l'Allégorie ne lui réuifiroit pas pour oter aux Chrétiens le Miracle de la Réfurredtion de Lazare. La narration de l'Evangile eft trop fimple, trop litérale & trop chargée de circonftances , pour pou- voir avec quelque pudeur , la réduire au fens Miftique. Il a donc cru devoir fe pofter autrement. Le parti qu'il a pris c'eft d'effaïer de rendre cette Réfurredtion fuf- pe&e , par la raifon que St. Jean eft le feul qui la raporte. D'où vient, dit -il, que les trois autres Evangeliftes qui ont é- cric Avril, May et Juin. 1743. 137 crit avant St. Jean n'ont rien dit du plus brillant des Miracles de J. C. ? On répond qu'encore que dans les Pro- cédures ordinaires de la Juftice , on de- mande pluiieurs Témoins pour bien cons- tater un Fait, il peut y avoir quelquefois des Témoins d'un ordre Supérieur , donc la dépofition feule fufit ,* que St. Jean eft de ce genre , qu'il y a quantité d'autres Faits dans ion Evangile, qu'on ne trouve pas dans les précédens, que le fien eft pro- prement le fup'ément des trois autres. On ajoute qu'il n'étoit pas néceffaire que St. Mathieu, & les deux autres Evangeîiitcs publiaient cette Réfurrechon , parce que quand ils écrivirent leurs évangiles, c'étoit un Fait de notoriété publique, & qui a voit été porté dans le Sanhédrin. Il y avoic encore du danger à le faire. Woljhn in;i- nue malignement que St Jean a acendu , pour parler de cette Réfurrechon, que tous ceux qui auroient pu en être témoins fuflent morts. Mais d'habiles Critiques ont remar- qué que il pour écrire cette Hiftoire , cet Apôtre a attendu la mort de quelcun, c'eft feulement celle de Lazare. Grotius a re- marqué qu'il ne convenoit pas , pendant qu'il vivoit encore, de rendre publique fa Réfurrection de peur de lui atirer la per- fécution des Juifs. On voit dans ce même Evangile qu'ils avoient eu la penféc de fai- re mourir Lazare (a). Ils s'imaginoient de pouvoir M Je*n XII. 10. IS§ Bibliothèque Britannique, pouvoir abolir la mémoire de ce Miracle, en otant au peuple cette preuve vivante de la puiflance de J. C. Les premiers E- vangeliftes qui publièrent leurs Evangiles pendant la vie de Lazare ^ durent donc a- voir la prudence de ne point divulguer cet- te hiltoire, pour ne pas aigrir davantage contre lui les Conducteurs de la Sinagogue; mais St. Jean qui n'écrivoit qu'après la mort de Lazare n'eut plus le même motif de ménagement. ARTICLE y. An historical Account of tbè Life and Reign of David &c, C'eil - à - dire : Récit hifiorique de la Vie , & du Règne de David Roi (FIfraël ; entremêlé de diverfes Conjectures , Digrefïlons & Recherches : où l'on examine entr'au- tres chofes , la Critique que Mr. Bayle, a faite de la conduite & du caractère de ce Prince. Par l'Auteur de Y Exa- men defintérejje de la Révélation. A Londres y chez Birt , Dodd , C. Hitch , Rivington &c. 1742. 8. Tome IL pagg. 280, Tome III. pagg. 358. Sans les Epitres Avril, May et Juin. 1743. 139 Epitres Dédicatoirts , une Introduction & les Tables des Chapitres. [On trou- vera l'Extrait du Tome I. de cet Ou- vrage dans le Tome XIV. de ce Jour- nal, à l'Article Deuxième de la Se- conde Partie.] NOus avons en quelque manière pré- venu nos Lecteurs fur ce que les deux derniers Tomes de cet Ouvrage con- tiennent , par la Traduction , que nous a- vons donnée, dans la Partie précédente de cette Bibliothèque, de la Table des Cha- pitres , que chaque Volume contient. Il ne s'agit plus que d'en choifir les endroits les plus remarquables , & nous nous bor- nerons prefqu'entièrement à ceux où Mr. Delauny a relevé la critique , ou , pour mieux dire, les chicanes de Bayle (a) fur la conduite & fur le caractère de David. Jufques ici l'Auteur a retracé les circonf- tances principales de la vie privée de ce Frince,& des exploits glorieux qui précédè- rent Ton élévation fur le thrône d'Ifrael à la place de SaiïL Maintenant une fcèjie plus brillante s'ouvre; mais la dificulté du fujet augmente , les objections de l'incré- dulité fe multiplient ; a THiltorien a de plus grands efforts à faire que jamais pour défendre (a) Bayle T>ici. Htfl. & Crit. Edit. de Gerùv*. 1 7 < 5-. Sirtulê de David. I40 Bibliothèque Britannique, défendre la mémoire du Monarque félon le cœur de Dieu , contre les calomnies en- venimées des ennemis de la Religion. (a) On fait, que bientôt après la mort de Saiil, David reçut ordre de Dieu d'aller à Hébron , qu'il y fut reconnu Roi , par cette Tribu ; mais que les autres gagnées par Abner , fe déclarèrent pour Ifbofetb der- nier fils de Saiil. Cet Abner étoit parent $ Ifbofetb , il avoit commandé fous Saiil dans toutes les expéditions que ce Prince avoit faites contre David , & il pouvoit d'autant moins fe flatter de tenir le pre- mier rang fous le nouveau Monarque, que Joab avoit déjà fa faveur & le Généralat de fcs Troupes. Ainfi l'ambition , l'envie , l'intérêt, & une pique perfonnelle, contre David qui l'avoit tant de fois battu, le dé- terminèrent à la révolte. Ifbofetb , réfidoit à Mahanaïm , ville de la Tribu de Gad. Deux ans fe paflerent fans qu'on en vint aux armes. Enfin Abner entra en campa- gne , Joab marcha contre lui , & remporta une vicloire qui n'empêcha pas que la di- vifion ne dura encore , trois à quatre ans. Pendant ce tems-là,le parti de la maifon de Saiil s'affoiblit peu à peu, & celui deDfl- vid fe renforça, d'autant plus que ce Roi devint fuccefïjvement Père de fix fils (b). Abner étoit l'unique foutien d' Ifbofetb (c). Ce (a) Ch*p. L & IL (£) Cbxp. III, 'c) i S*m. III y 6> Avril, May et Juin. 1743. 141 Ce Prince s'avifa un jour de lui reprocher vivement d'être venu vers une des concubines que Saiil avoic laiffées (a). C'étoit vérita- blement un attentat, & Mr. Delauny con- jecture , de cette circonftance combinée avec ce que l'Ecriture dit du grand crédit d'Abner , que ce Minifhe vifoit au thrône , & qu'il n'attendoit que le moment favora- ble pour lever le mafque. Irrité donc, du reproche d'ifbojètb , mais ne fe Tentant pas probablement encore aflez fort pour s'ap- proprier le diadème en l'en dépouillant, il lui déclara par ferment, qu'il alloit prendre le parti de David , & il envoya en effet fecrétement vers David pour l'aflurer de fes intentions. Le Roi accepta volontiers les offres d'Abner\ cependant il y mit cet- te condition que Mie al fa légitime époufe lui feroit rendue Çb). Elle étoit fille de Saiil y qui pour faire à fon gendre le plus ianglant affront, la lui avoit ôtée & l'avoit donnée à Palticl fils de Lais, Il fallut y dit malicieufement Bayle , il fallut pour la lui rendre , la ravir à un mari , qui Vaimoii beau- coup & qui la juivit aujji loin qu'il étoit pojji- ble pleurant comme un enfant (Y). Quelle cruauté au Mi , que d'aller troubler un adul- tère dans la poiTeiTion de fes amours ! quel- le injuftice que de redemander abfolument la reititution d'une époufe légitime, enle- vée (*) î Sam. JIL 7. (h) x S*m. 111, i}. &*' (r) Article de Uayid , Ntt$ H. §. x. 142 Bibliothèque Britannique, vée par force contre toute équité ! On peut croire à ce trait, que Bayle n'auroit •approuvé ni les mouvemens de Melenaûs , contre le raviiïeur & Hélène, ni ceux &A- gamemnon contre le corrupteur de Clytiém- neflre. Apparemment que ce grand Criti- que confuké , pour favoir , s'il eft permis à un honnête homme, de répéter un bien quelconque qu'on lui auroit enlevé, n'au- roit pas manqué de répondre que non. Ifbofeîh en jugea autrement. David reçut Mical par fes ordres, des mains d'Abner, & après avoir conclu à Hébron la réunion des Tribus fous un même Roi , du conien- teïtietït des grands (a), de la Cour d'I/bo- fetfy Aimer repartit pour hâter l'exécution de "cette grande affaire; mais Joab ayant ap- pris ce qui fe pafibit, rit courir après ce Général , & l'aiTaiilna de la façon la plus indigne, foit pour venger la mort de fon frère Hajael , qu' Alvier avoit tué à la ba- taille de Gabaon, foit auffi pour fe défaire d'un rival, qui lui auroit peut-être enlevé le commandement des Troupes. Quoi qu*il en foit , ce coup exécrable , jetta David dans une confternation qu'il ne cacha point, & faillit à faire échouer le projet de la réu- nion. Tout étôit fufpendu, (b) quand deux fcélérats ofèrent lever par un nouveau cri- me, les obftacles qui s'oppofoientàla paix. Ils furprirent L'ho/eto profondément endor- mi , le tuèrent, lui coupèrent la tête , & pouf- fèrent (a) 2 Sam. III, 17. £?f. [b) Chap. 17. Avril, May et Juin. 1743. 14-5 fèrent l'audace jufqu'à venir la préfenter à David, qui Parti d'une jufte horreur à la vue de ce trifte objet, fin fouffrir une mort hon- teufe à ces abominables afiaiîins, & com- manda d'enterrer Ifbofetb honorablement à Hébron , dans le même fépulchre ou l'on a voit enféveli Aimer par Tes ordres {a). Je ne toucherai point aux réflexions Poli- tiques & Morales que Mr. Delauny fait fur ces lugubres événemens ; mais je ne fau- rois me réfoudre à fupprimer les glofes que Dayïe y a faites , & les réflexions dont nô- tre' Hiïtorien les accompagne. Ecoutons d'abord l'Oracle des Incrédules Modernes. sfoner )èàt-\\ (b) , mécontent du Roi fin maître, Jonge à le dépouiller de Jes Etats & à les livrer à David. David prête l'oreille à ce perfide fcf veut bien gagner un Roiaume par des intrigues de cette nature. Peut on dire que ce fixent des actions d'un faint ? J'avoue qu'il n'y a rien là qui ne f oit conforme aux préceptes de la politi- que £f aux inventions de la prudence ; mais on ne me prouvera jamais que les Loix exactes de l'équité & de la Morale févère d'un bonfervi- teur de Dieu , puiffent approuver cette conduite. Notez , que , David ne prétendait pas que le fils de Saul régnât par ufurpation. Il conve- noit que c'était un homme de bien £? par con- féquent un Roi légitime. Voilà la Critique du redoutable Lexico- graphe, & voici la réponfe de Mr. Delauny; que tout Lecteur impartial y fafie attention. „ N'eft- (â) i Sam IV. (/■) l*-m*mt ,Xote H. §. z. 144 Bibliothèque Britannique, M N'eft-il pas trille, s'écrie -t -il , que des „ gens qui ont de Fefprit & du lavoir, ne 3, daignent pas fe donner la peine d'exami- „ ner les chofes avec quelque foin & un 3, peu de candeur avant que de décider! » I/bofetb ne pouvoit il pas être un homme 3J de bien , fans être un Roi légitime ? Qui 99 fait , fi , prévenu par fes Courtifans (gens 99 incapables de dire aux Princes des véritez „ qui leur déplaiient), il ne croioic point 5, férieufement que David n'avoit pas été 9y deftiné par le Ciel à monter fur le thrô- „ ne, & fi par conféquent ce n'étoit pas „ dans des intentions droites qu'il s'oppo- 5, foit à fon élévation? Qui peut dire qu'à 3, caufe des préventions d'Ij'bofetb , David ,, fe rendit coupable en maintenant fes „ propres titres fur la couronne, & Abner 3, criminel en revenant à la fourmilion qu'il 5, devoit à fon légitime Souverain? Et 11 5, on ne peut pas le dire avec fondement, „ ou eft le fujet de blâmer David, de ce 3, qu'il prêta l'oreille à Abner , pour recou- 3, vrer par fon entremife des droits qu'on „ lui conteftoit avec injufticef „ Mais je veux , pourfuit nôtre Auteur , „ qu7/ bojetb convaincu dans le fond de fon ~99 ame que c'étoit le Ciel même qui avoit 99 appelle David à la couronne , fut cou- 3, pable envers ce Prince, d'où fuit il de 3, là qu'il n'étoit pas un homme de bien par 3, raport à Recab & à Babana qui raflaflï- 3, nèrent? Ou en le fuppofant enfin pref- >3 que fans reproche à l'égard de David o- ,, feroit Avril, May et Juin. 1743. 145 5, feroit on dire qu'à la rigueur il étoit un „ homme droit & un Roi légitime ? Si le thrône étoit dévolu par la mort de Saiil à un Prince de fon fang, Mepbibofeth fils de Jonathan l'ainé d'Ifbofetb étoit plein de vie. Celui-ci ne pouvoit pas l'igno- rer. Mepbibofeth étoit blejje aux pieds (a) , mais cette infirmité accidentelle n'alté- roit point Tes droits à la couronne, & je ne fâche pas que les Loix divines écar* tafient du thrône les boiteux , ainfi que l'Oracle prétendu des Spartiates les en exclut dans la fuite. ,, Les Commentateurs eftiment , que lî la defcription de l'état de Mepbibofeth , eft inférée ici dans la relation de Tafiaf- finat de fon Oncle, c'eft pour infinuer, que ce fut en partie afin de venger ce jeune Prince , que Recab & Babana tei- gnirent leurs mains homicides , du fang de celui qui aveie profité de fon infirmi- té pour le priver du diadème. Je ne veux point examiner à préfent cette penfée ; mais de quelque manière qu'on envifage la chofe & quelque tour qu'on y donne, j'ofe dire qu'il fuffit d'avoir des yeux pouf s'affurer en quel fens David a pu appel- 1er îfbofetb un bomme de bien. Il eft irès- ,, probable qu'il n'étoit pas tel à l'égard de ,, David, & très -fur qu'il rétoit encore moins pas raport à Mepbibofeth. " (b) On fçût à peine la mort & Ifbofetb due toutes (m) 1 Ssm. n% 4. (h) Chap. P, VL VII, VllU Tenu KXL Part. I. K y.< 146 Bibliothèque Britannique, toutes les Tribus, fe hâtèrent de reconnoi- tre David pour leur Roi. De Ton coté, ce Prince afluré de leur afFe&ion & tranquille polfeifeur de la couronne , llgnala d'abord fon courage, en enlevant aux Jebufiens , la citadelle de Jérufalem , qu'ils pofledoient encore, & qu'ils croioient imprenable. Cet- te conquête lui coûta peu. David y établit fa réfidence, il la repara, il retenait, il y fit de confidérables embeliiiTemens,& pen- dant enfuite à multiplier encore fa famille pour mieux affermir fon thrône, il prit de nouvelles concubines, quoiqu'il en eût dé- jà plufieurs. Le grave Bayle affecle d'en paroi tre fcandalifé. On ne fauroit bien ^ dit- il , (a) excufer la polygamie de David , car en- core que Dieu la tolérât en ce temslà , il ne faut pas croire qu'on pût V étendre bien loin, fins lâcher un peu trop la bride à fa fenfnalitê, David ne fit point fcrupule de s'allier avec la fille d'un incirconcis , éf quoiqu'il eût des en- fans de plufieurs femmes , il prit encore des concubines à Jérufalem. Il choififfoit fans dou- te les plus belles qu'il rencontroit ; ainfi l'on ne fauroit dire , que par raport aux voluptez de V amour il ait eu beaucoup de foin de mé- contenter la nature. On ne dira pas aufîi , je penfe, que l'Auteur du Dictionnaire Hif- torique £? Critique, ait eu beaucoup de dc- licatefTe dans les jugemens qu'il porta d'au- nrui , ni qu'il fe foit piqué de modeflie, dans iu mafiière de débiter les calomnies odiéu- fe« (a) La même, Note H §. i. Avril, May et Juin. 1743. 147 fes contre celui que le St. Efprit a appelle r homme félon le cœur de Dieu. Mais envifageons fes aceufations de fens froid. Qu'eft-ce qui choque ici Mr. Bayle. Ce n'eft pas la polygamie de David confi- dérée en elle - même , car il avoue , que Dieu toléroit la Polygamie en ce teins -là. Qu'eft-ce donc? Ce font, û je ne me trom- pe, ces trois chofes; premièrement , le grand nombre de concubines que prit David ; fe: condement , le peu de fcrupule qu'il fe fît d'époufer la fille de Talmaï Roi de Gue- Jur (a) , qui étoit Paycn ; & troifîèmement, le motif de ces mariages , qui n'étoit au jugement du malin Lexicographe , qu'un relâchement fenfuel. Qu'on nous permette néanmoins de le dire. 1. Le premier de ces reproches dé- pend abfolument du troifième. Si David ne multiplia les concubines que par des vues honnêtes & licites dans un tems où la Polygamie étoit tolérée, le nombre ne fait rien" a la choie, parce que jamais ce nom- bre ne fut limité par aucune Loi. 2. Il y a un peu plus d'apparence à trouver de l'irrégularité dans l'alliance que David con- tracta avec la fille du Roi de Guefur. Les Loix de la Religion y étoient contraires, „ mais ces Loix, comme l'obferve Mr. De- ,, launy, (b) IburTroientdiverfes exceptions, „ Un 'Juif pouvoit époufer (en y obfervant >, certaines formalitèz), une elclave qu'il „ auroit (4) 2 Sxm. Il !} 3. (b) ?ag. 82. ' 'K 2 BlfrÇIOTHEQUE BR I T A • aurait fait oière pendant la gi re; à plus : fon pouvoit il epou- , fer une profélytc. Dama écoic autorifé L à faire ce qu'A fi: tan: par l'exemple de •n J . & de Mnfe, que par celui de fes Ancêtres Ci). Et pourquoi Dieu au- roic il refuie de fe fervir ce Mabaca ., (Y; :; . . la filk . -: Talmaï) pour „ lui donner des enfans, après en avoir „ donné à Boaz par le moyen ce Ruîb. " 3. Au lieu de l'indigne motif, que I prête aux nombreux mariages de D.: il eft tout autrement naturel de juger, que ,, ce Prince ne s'y porta principalement . que dans la vue 'de groiïlr la famille & '.. probablement aufîi par Politique. Après „ trois ans de mariage David n'avoit point ., encore d'enfans ce Mical, quand on la „ lui enleva pour la donner à un autre, „ 6: perfonne ne pouvoir dire qu'il en au- roit furement d'elle. Au moins ne niera- t-on pas que la voyant dans les bras d'un autre époux, il n'eut le droit de fe rema- rier. Il le fit. Il épou&Abin:>bJm9& cel- le-ci étant auffi peu féconde que M il lui aflbcia AMgaïl. Mais il ne fur pas plus heureux avec ce:te dernière, & qi il vint à Hébron il n'étoi: pas encore Pè- re, quoique marié depuis cinq ans. Ce- pendant il fentoit l'importance de le de- venir pour appuyer fon thrône. Dieu lui avoit promis que le Rmmme d'Ifrafl -. [m] Km. V, se, si. Avril, May et Juin. 1743. 149 „ roit ferme entre fes mains (a) ; pour cela ,, il falloit qu'il eût des enfans; le meil- „ leur moyen d'en avoir étoit vraifembla- „ blement de prendre plufieurs femmes; & ,, comme ces femmes le trouvoicnc plusin- „ téreilees que perfonne, à la fortune, il ,, efl très-poflible pour ne rien dire de plus 9 ,, qu'il ne leur enaflbeia de nouvelles qu'a- „ près en avoir reçu leur contentement. „ Que 11 , peu iatiffait de ces obferva- tions , on poulie plus loin les recherches , on trouvera que Dieu avoit promis à Da- vid d'affermir fon tftrône non feulement par raport à fa perfonne, mais encore pour les defeendans. C'eft, félon tou- tes les apparences, à caufe de quelque promette expreiïe & bien connue fur ce fujet, quy Abigaïl difoit à David, l'Eternel ne manquera point d'établir une maifoq fer- me à mon Seigneur (b). Puis donc que la polygamie étoit actuellement tolérée de Dieu"; puifque les promeffes de ce grand Dieu dévoient être accomplies, puiiqu'à parler humainement elles ne pouvoienc pas s'accomplir, à moins que David, ne fe donna des époufes plus fécondes; puif- qu'enfin la faine politique vouloit, que ce Prince appuya fon thrône par de nou- velles alliances qui lui donnafient du crédit, & qu'il ne pouvoit mieux parve- „ nir à cette tin, qu'en contractant de nou- ,, veaux0 (a) 1 Sa m. XXIV, 21. (b) 1 Sam. XXV, 28. K3 i5o Bibliothèque Britannique, ., veaux mariages; on peut hardiment con- 3, clurre que le parti qu'il prit de les con- Sy tra&er, étoit tout ce qu'il pouvoit faire „ de plus fage & de plus prudent, pour „ s'établir une mai/on ferme. " Il n'en faut pas, je croi, d'avantage, pour juftifîef la polygamie de David & pour montrer, qu'il n'y entra ni libertinage, ni fenfualité. La politique en fut le principal motif. Quelques perfonnes ajoutent qu'on peut même regarder la multiplicité des mariages de ce Prince , comme un effet de fa piété. Mais Mr. Delauny ne va pas fi loin. Perfuadé que David faifoit fagemenc de fouhaiter l'accompliflément des promet fes divines, il eftime que fesvœux auroient été plus purs, & fa conduite plus irrépro- chable , s'il étoit entré un peu moins de mondanité dans fes intentions. „ Après ,, tout, fi , Mr. Bayle , ajoute-t-il , avoit fait ,, ces réflexions , il fe feroit épargné en gran- ,, de partie la peine d'une critique vaine & „ & ignorante; mais d'un autre coté il au- „ roit fallu, qu'il fit le facrifice du plaifir „ malin, qu'il prenoit à mordre fur la con- ,, duite de David. " Cette malignité n'eft nulk part plus frap- pante, que dans la manière dont l'Auteur du Dictionnaire Hijlorique parle du reproche 9 qui fut fait à David par Mie al fur f équipage ^ ou il s'étoft mis en danfant publiquement 6.. * V Arche (a). Perfonne n'ignore ce que l'E- critùre (a) Bayle là-même. Note H & 6. Avril, May et Juin. 1743. 151 criture nous en apprend, (a) David , vain- queur des Pbilijlms & jouiffant d'une heu- reufe paix, prit la refohuion, de placer à Jêrufalem l'Arche de l'Eternel qui depuis trente huit ans étoit demeurée à Kii Jebarim. La févère punition d'Uza frappé a mort dans cette circonftance , le déier- mina à la laifter pendant trois mois dans la maifon à'Obed-edom, mais enfin rafluré de fes craintes, il ordonna quelle en fût tirée. On la tranfporta avec un appareil pompeux dans la fainte Cité. David voulut être lui-même de cette proceTion. Il y prit fa place immédiatement devant l'Arche, & ceint d'un Epbod de Un il fautoit de toute fa force devant V Eternel... avec des cris de joye & au fin des trompettes. Mical le vit; elle crue que fon Mari manquoit de décence, & lorf- qu'il rentra dans fon Palais, loin de parti- ciper à fon allégreffe elle courut à fa ren- contre pour lui dire d'un ton railleur, Qjte le Roi SIfvael ïeft fait aujourd'hui un grand honneur en je découvrant aujourd'hui devant les yeux des fervantes de fes ferviteurs , comme feroit un homme de néant fans en avoir boute ! Mais David lui répondit, qu'il Je rendroit encore plus abjeftune autrefois devant V Eter- nel & qu'il s'ejiimeroit encore moins , fans crain- dre de fe def honorer, par des marques de joie 11 bien placées. Et Mical, ajoute l'HiT- terien, n'eut point d'enfans juj qu'au jour du (*) Delauny Chat. IX, X, x;, Xl!3 XIII. K .', %$i Bibliothèque Britannique, fa mort (a). C'eft-à-dire, qu'elle n'en eut plus , & que Dieu la punit de fes railleries indiferétes & orgueilleufes par une honteu- fe ftérilité. Peut-être n'ya-t-il aucun trait dans toute l'Hiftoire Sainte fur lequel les Libertins fe foient plus égayez, que fur celui-ci. Mr, Bayle y brille à leur tête. Mais comme Mr. Delauny ne fe pique ni d'être court dans fes remarques, ni d'être avare, de digref- flons, il entre dans tout le détail pofTible, pour couvrir de honte les admirateurs aveu- gles du Lexicographe, & de fon indigne façon de badiner fur les chofes les plus facrées. Mr. Bayle , dit-il , difeute le fait & il en- tre en matière par une diftindtion digne de fa pénétration ordinaire & prefque a- dorée. Il prononce que fi David avoit découvert fa nudité, fon action pour r •oit paf 39 fer pour mauvaife moralement parlant , mais ,, que s'il ne fit autre ebofe, que de fe rendre ., méprifable par fes pojîures , £f enfoutenant „ mal la majejîé de fin caractère , ce fut tout „ au plus une imprudence 6? non pas un crime. „ Il femble enfuite , vouloir gravement en- „ gager fes Lecleurs , à confidérer que la ,, circonftance juflifioit les excès de la „ joye que David fit éclater. Immédiate- „ tement après il cite un paflage d'un Au- i9 teur moderne qui a voulu juftifier la nu- „ dite («) 2 S*m. VI } 14- 23, 5» 35 35 55 Avril, May et Juin. 1743. 153 „ dite de François à'Affxfe par celle de Da- 3, vid. Et il conclut le tout, en difant avec 3, cette candeur, qui cara&érife tout ce „ qu'il a écrit fur la perfonne & fur la con- 3, duite du Monarque d'Ifra'ël , qu'on trouve- „ roit fort étrange , par toute l'Europe, fi un „ jour de procejfion du St. Sacrement, les Rois „ dan/oient dans les rues n'ayant qu'une petite 3, ceinture fur le corps. " Tel eft effectivement le tour malin, que Bayle a donné à la conduite de David. Il fait d'abord femblant, de douter, fi David a été prefque nud ; mais un moment après il l'affirme de la façon la plus décifive , & perdant toute pudeur il ne rougit point de juftifieren ces termes les reproches infolens de Mkai , qui en fut châtiée par le Ciel même ; il y auroit bien des Dames qui méri- îeroient d'être Jlériles , s'il ne falloit pour cela qu'avoir le goût de Mical. Nous ne prétendons point mêler ici nos réflexions à celles de Mr. Delauny fur cet endroit du Dictionnaire Hifîori- que. C'efl lui-même qui doit parler, & c'cil à nous à rendre fidèlement fes ter- mes. La feule liberté que nous nous ré- fervons en le faifant, c'eft de les reflfer- rer un peu. Voici donc comment il ré- fute, les infinuations calomnieufcs , du Lexicographe. „ Je pourrois , dit - il , faire remarquer ,, d'abord, combien il fied peu à Mr. Bay- „ le, h l'apologiite des infamies des CynU K 5 „ que. 154 Bibliothèque Britannique, 35 ques (a), d'infulter comme il le fait à la „ conduite de David danfant devant l'Ar- 3, che ; mais je me contente d'obferver que „ ce grand Génie , décide là-deffus en Ca- 3, fuïîle critique & hiftorien trois points prin- 3, cipaux , que je vai prendre la liberté 3, d'examiner avec la ibumhTion conve- 3, nable. 3, ]' ofe premièrement en appeller au juge- 3, ment de tout homme inpartial, en parti- ., culier à celui de tous les Médecins & de 3, tous les Chirurgiens de l'Univers, & je 33 demande fi c'eft, en foi une action mora- 3, lement mauvaife de découvrir fa nudité, 3, ou, û en ce cas la fingularité des cir- .3 confiances & la droiture de l'intention 3, ne fuffifent pas pour l'excufer? Un Cafui'fle 3, vulgaire ne balancera pas fans doute à répondre affirmativement. Par conféquent 3, la décifion du fubtil Lexicographe fur 5, ce fujet n'aboutit à rien , & fes admira- teurs me permettront de dire avec le refpecl qui leur eft dû, que loin de don- ner quelque jour nouveau à ce qui eft en litige, cette décifion ne fait qu'y répan- dre des ténèbres,- ou pluftot quelle por- M 3? 35 J5 3) 33 te en l'air, & ne fauroit être d'aucun 3, ufage, foit à la charge foit à la déchar- 33 ge de David. „ Je demande, fecondement, û le cas de „ St. (a) Voy. le Di£l Hift. & Crir. aux art. de Dio= gène c? d'Hipparchia ,, /* texte &> les Note:. Avril, May et Juifr. 1743. 155 St. François d'Affilé , étoit exactement parallelle à celui de David, ou s'il ne l'étoit pas ? Dans la première iuppofî- tion , il femble que l'habile Critique n'au- roit pas dû manquer de le dire, dans la féconde , il femble que l'amour de la vé- rité auroit dû l'engager à fpécifier les di- férenccs qui fe trouvent entre les deux faits. L'un & l'autre entroient également dans le plan d'un Ouvrage tel que le fien. Cependant il a pi û à Mr. Bayle de ne faire ni l'un ni l'autre. Au lieu de ce- la, il badine, il raconte une hiftoire dont le ridicule faute aux yeux, à def- fein d'en répandre fur l'action de David. Mais encore une fois quelles lumières, donne - 1 - il par là à fes Lecteurs ? Et fur un procédé pareil que faut il que nous pendons de fa droiture , ou de Ion exac- titude ? „ Refte troifiémement enfin, la comparai- ion que Mr. Bayle fait de la danfe de David devant l'Arche, avec celle d'un Roi Européen qui un jour deproceflîon du St. Sacrement danferoit dans les rues prefque nud& n'ayant qu'une petite cein- ture fur le corps. Que dirons nous de ce nouveau trait? C'eft bien l'image la plus infâme qu'on pût tracer d'une indé- cence folle & grolTière. Mais reflemble- t-elle à David cette image, & peut on dire de bonne foi, qu'on y trouve quel- que conformité, avec ce "que l'Ecriture nous apprend de Faction que Mr. Bayle , 3, s'efforce 156 Bibliothèque Britannique, „ s'efforce de tourner en ridicule? Il eft j, bien dificile de retenir Ton indignation » 5, quand on voit de pareils attentats con- 3, tre la vérité du Texte facré. L'infulte „ mériteroit d'être vigoureufement relevée. „ Tâchons néanmoins de nous modérer ; & „ demandons feulement à tout honnête „ homme, même d'entre les admirateurs „ de Mr. Bayle, s'il pardonneroit à tout „ autre qu'à lui une conduite fi injufte , „ & fi dans tout autre cas, il n'accuferoit ,, pas hautement un Critique qui aurait fi „ mal jugé des chofes , d'avoir donné a ,, gauche par une ignorance groflïère & par „ une inattention impardonnable à la dépo- ,, fition des Auteurs Divins, ou, de s'être „ defhonoré par une malice déteftable & „ par une fiupide boufonnerie, de manière „ qu'il efr. également facile d'abufer de fes „ termes & de les réfuter? „ Pofons le cas, que Samuel n'eût dit au- „ tre chofe , finon que David ceint dun E- „ phod de lin danfoit devant l'Arche, pour- „ roit on en conclurre que David étoitnud; „ & ne devroit on pas en conclurre pré- „ cifément le contraire? Je veux (ce qui „ efl pourtant faux) que YEpbod ne fut „ qu'une ceinture, y au^oit il lieu de foup- „ çonner, qu'on fe le fût jamais mis feul ,3 fur le corps? L'ufage d'une ceinture, „ efl de ceindre ou de fermer un vêtement 3, dont on fe couvre; c'étoit celui de YEpbod; „ ainfi, bien loin que de ces mots, ceint ,3 d'un Epbod de lin, on puiffe inférer „ que Avril, Ma y et Juin. 1743. I57 que David étoit nud, il s'enfuit au con- traire de la fa^on la plus claire qu'il étoic habillé, & même habillé de vétemens dont la qualité ne fauroit être ignorée. Grâces à Dieu nos Sacrez Auteurs ont mis la chofe hors de doute. Il ne fauc qu'ouvrir leurs Ecrits, pour demeurer convaincu que David fut au defliis de tout foupçon & de tout reproche à cet égard , & qu'à l'exception de Mical per- fonne ne s'avifa de lui en faire. ,, Y a-t-il quelqu'un qui fe Toit jamais avifé de foutenir que quand Do'ég tua qua- tre vingt cinq hommes qui portoient VEpbod de lin (a), c'efl-à-dire quatre vingt cinq Sacrificateurs , ces vénérables Prêtres é- toient actuellement nuds & n'avoient autour de leur corps qu'une légère cein- ture? Eft il jamais monté à l'efprit de qui que ce foit , que lorfgu'il cil dit, que Samuel fervoit en la préfence de l'Eter- nel , étant jeune garçon vêtu d'un Epbod de lin (b), cela lignifie qu'il fervoit tout nud dans le Tabernacle, n'ayant fur le corps qu'une petite ceinture'? . . Peut on avoir lu l'Ecriture & être encore à fa- voir , qu'il n'y eut jamais de Culte au mon- de, où le fervice divin fe fit avec autant de décence que dans celui des Hébreux? Outre le Pectoral* VEpbod, le Rocbet, la Tunique, 6? la Ceinture dont les Sacrifi» ,, cateun (a) 1 Sam. XXIU 18. (b) I Sam. IL iS. ï5S Bibliothèque Britannique, „ cateurs étoient revêtus, ils portaient une „ chemife de fin lin immédiatement fur leur „ corps, avec des caleçons de lin, tenant de- „ puis les reins juf qu'au bas des cuiffes , & fans „ lefquels il leur étoit défendu fous peine ,, de mort, d'entrer au Tabernacle ou d'ap- „ procher de V Autel pour faire le fervice dans „ le lieufaint (a). „ Puis donc que David faifoit aftuelle- „ ment le fervice dans un folennité des „ plus religieufes 5 puifqu'il y paroilloit „ ceint d'unEpbod de Zm, eft il croiable qu'il „ eût négligé de fe revêtir des autres ha- „ bits Sacerdotaux, fans lefquels il étoit 3, il févèrement défendu de fe préfenter „ devant le Seigneur ? Témoin de la ri- ,, gueur, avec laquelle Dieu avoit puni „ Uza, pour une faute, ce femble, beau- „ coup plus légère, ce Prince ne fe feroit il 3y pas étudié à éviter jufqu'à la moindre „ violation du cérémonial? S'en feroit il ,, moqué au rifque de fes jours? Permis à „ Mr. BayledelQ croire; mais je ne le croi- „ rai jamais. .... ,, Une autre réflexion toute fîmple, c'eft „ que de même que quand il eft dit des 5, Princes & des Magiftrats , qu'ils quittent „ leurs Robes de cérémonie, il ne vient à „ l'efprit de perfonne d'en conclurre, qu'ils ., fe font mis tout nuds,ainfi quand même il „ ne feroit pas dit exprefïement , que David „ marchant devant l'Arche étoit vêtu d'un „ Ephod (a) ExoJ. XXVI1L Avril, Mat et Juin. 1743. *59 j, Epbod de fin lin (a) , c'efl • à - dire , d'une „ chemife de lin arrêtée par une ceinture „ ou par un Ephod de même matière; ôc „ quand nous n'aurions pas autant de rai- „ fons que nous en avons de préfumer „ qu'il étoit revêtu de tous les habits pro- pres aux Lévites, le bon fens ïuffiroit tout feul, pour nous faire comprendre, que quand ce Prince fe dépouilla de fa Robe Royale , il relta habillé comme il }y rétoit ordinairement par deiïbus. Quel- „ le apparence en effet qu'à moins d'être ,, fou, un homme qui avoit paffé quarante „ ans, eût voulu s'expofer tout nud aux ,, injures de l'air dans une faifon déjà avan- „ cée , car l'hy ver avoit fuccédé à l'autom- „ neP Quand'Ia bienféance ne l'en auroit „ pas empêché, le foin de fa fanté ne l'au- ,, roit il pas retenu? „ Difons tout, le reproche que Mical ofa „ faire k David, s'explique fuffifamrnent , ,, en fuppofant que ce religieux Monarque , „ s'étoit dépouillé de fes habits Royaux, ,, pour paroitre avec l'habit des Lévites, „ ce n'eft qu'en ce fens qu'il s'étoit âécou- „ vert , ou def habillé. ,, Qu'on juge donc à préfent du procédé „ de Mr. Bayle; que nos Lecteurs pronon- ,, cent, qu'ils décident fi dans la manière ., dont il a repréfenté l'action de Davidson m reconnoit l'écrivain judicieux & droit ,j d'un Dictionnaire HiJlorique&> Critique ou „ pluitor (*) 1 Ckrsn. X;\ 27, iô*o Bibliothèque Britannique, pluflot fi l'on n'y voit pas un homme qui le contente d'effleurer négligemment Îe9 matières & qui facriâe tout fans pudeur au plaifir de dire des faletez? „ Si j'avois quelque chofe à ajouter, ce feroit uniquement, que les reproches pi- quans de Mical, & les fades railleries de Mr. Bayle doivent fervir de leçon à tou- te perfonne ienfée , pour leur faire con- cevoir, combien il efl aifé de prendre les éclats d'une fuperbe colère, ou les mauvaifes plailanteries d'un efprit rail- leur, pour autant de véritez incontefta- Bles. " Voilà de quelle manière Mr. Delauny re- poufie les traits injurieux du Lexicographe de Rotterdam. Il ne s'en tient pas même îà. Après une digreflîon fur l'endroit de Jérufalem où l'Arche du Seigneur fut pla- cée, il revient à la danfe de David ,& d au- tant plus zélé à la juflifier, qu'à Ton gré les Commentateurs Chrétiens, ne s'y font pas allez appliquez (peut-être parce "qu'ils ont crû que la chofe n'en valloit pas l'a peine) il donne une DilTertation de vingt pages (a) fur la Danfe ^ en afiurant le Lecleur que c'eft là le fruit d'une longue & profonde méditation fur ce iujet. Je ne le fuivrai point cependant, dans cette digreiTion, & j'efpère qu'on ne le trouvera pas mauvais- Tout y eft rangé fous deux chefs. Premiè- rement Mr. Delauny trouve la Danfe origi- nairement (*) Tom. Il, p*g. i52 -i8j. Avril, May et Juin. 1743. 161 nairement aflbciée aux rites de la Religion des Hébreux, pratiquée par Marie fceur de MoiJ'e, recommandée par l'exemple de Da- vid, & en quelque force ordonnée de Dieu même Deut. X\ 1, 14. dans tes paroles: Tu te réjouiras en ta fête Jblennelle , ou, comme porte l'original , en ta canje Jblennelle. Il mon- tre 1. que la danfe peut être d'une gravité très-compatible avec les cérémonies de la Religion. 2. Qu'elle eft utile à la famé, propre à infpirer une joye innocente,. & même à nourrir des fentimens de piété & de vertu ; d'où il conclut que quand les Philofophes l'ont condannée, ils ne l'ont condannée qu'entant qu'elle avoit dégé- néré , & que fans en interdire Tufage, ce n'eft que l'indigne abus qu'on en a fait qu'ils ont prétendu flétrir. De là l'Au- teur paile à faire voir Jecondement que, de la Religion des Hébreux la Danfe s'eft in- troduite dans les Cultes du Paganifme, il recueille ce que les Poètes ont chanté fur fon origine, il y ajoute les Oracles des So- crateSyéesPlatons & des plus anciens Philo- fophes pour l'autorifer, & après avoir rap- pelle les coutumes & les Loix qui y furent favorables parmi les Nations dans l'Antiqui- té la plus reculée, il achève de fignaler fon zèle pour une danfe grave & bien réglée en s'écriant avec feu : ,, Que Mr. Bayle donc avec toute la co- „ horte de fes imitateurs & de feî admira- „ teurs, fe moque de David & lui infulte, „ de ce qu'il aflbcia la danfe au chant des Tome XXI. Part. I. L „ louan- JÔ2 BlB LÏOTHEQUE BRITANNIQUE, ,, louanges divines, mais que les fages d'E- ,, gypte,du Midi & de l'Orient fe joignent „ pour l'approuver! Qu'Apollon, Htrcule, „ Caftor & Pollux, Minerve,& les Mu, es fe „ réunifient pour lui applaudir! Que ** & „ *** & *** noms refpe&abies dont je ne „ fuis pas allez vain pour ofer orner mon „ Ouvrage, fatyrifent ce Prince à leur gré ; „ mais qu'il Toit permis kMujee, à Orphée, „ à Homère, à Héfiode , à Simonide , & à „ Pindare de le célébrer ! Que Cyrus , Léo- „ nidas , Cléomène , & Scipion l'Ancien fuient „ Tes Apoiogiftes! Que Socrate , Platon, ,, Plutarque, Strabon & Lucien même de- „ viennent Tes défenfeurs! Et ce qui eft ,, infiniment au deflus de tous ces fuflrra- „ ges réunis , que le Dieu des d'eux jufti- ,, lie la conduite de nôtre faint Monarque „ par tes ordres, & par Ton approbation! " j'appréhende qu'il ne fe rencontre des gens d'allez mauvaife humeur pour trouver ce tranfport de Mr. Delatmy un peu outré. La plufpart desEccîéfiafïicues regardent la Danfe comité un des écueils les plus fu- neftes à la vertu. Ceft, difoit un fameux Théologien, c'efl une compofition ou Syrop Magiflral de toutes fortes de Poifon , que le Diable a inventé peur avec un plus grand ef- fort frapper les cœurs , y efteindre la crainte de Dieu, &f les f -nier de toutes crdes C? vilaines cupiditez; c'eft un appas fait aux '■jeux , aux oreilles, bref ,1 têus les J'ens , afin de les féduire à? (ce t nwne co'nf- pi rati&n) leur fairejsnfèmbk cueillir , & porter dedans Avril, May ri Juin. 1743. l63 . l'ame le pécbé (û). Quantité de Pré- dicateurs tiennent aujourd'hui le même lan- A les entendre la Danfe eft un grand Crime. J'ai connu un Miniftre EcofTois qui 3a regardent comme un acte d'Idolâtrie; 1 j'en connois d'autres qui traitent- de de bagatelles toutes les décla- mations de leurs confrères fur ce fujet com- me fur bien d'autres. Etranges excès du main! Quand eft ce que les uns .ont de corrompre la Morale Chrétien- ne par un indigne relâchement , &les autres . rendre haïflable par une ievérité in- £el Ici comme en toute autre choie, les plus fages tiennent un jufte milieu. Me- ARTICLE VI. Chronique des Rois d'Angleterre , écrite en Anglois fuimnt le Stile des Anciens Hijloriens Juifs , par Nathan Ben Saddi, Prêtre de cette Nation , & tra- is dans le même Stile. A Londres, chez Th. Cooper 1/43. in 8- , & fe débite à la Haye chez Pier- re de Kondt. A Traduction Françoife, qu'on vient de ,Lj publier de ce petit Ouvrage, exige na- turellement (-0 Lxmlft Danesu dans le Dicï. de Ba)U Ar;. de ||a Al.iezor.de Not M, L 2 iô*4 Bibliothèque Britannique turellement qu'on en fafle mention dans cette Bibliothèque , & c'eil ce qui nous a déterminés à en faire le iujet du prefent Article. Le Titre feul annonce allez quel efl ledefTein& le pian de l'Auteur. On iera cu- rieux fans doute de lavoir comment il l'a exécuté; car on voit allez, que l'idée qui lui efl venue" de compofer un Abrège Chro- nologique de l'Hiitoire d'Angleterre lui- vant le Stile des anciens Hiltoriens Juifs, eft tout-à-fait nouvelle & originale en fon efpèce; & peut-êcre que cette fingularité n'a pas peu contribué à faire entreprendre une Traduction Françoife de cet Ouvrage, auffi bien que le Nom illuftre de l'Auteur auquel on l'attribue; car il court un certain bruit fourd que ce petit Ecrit efc forti de la Plume d'une Perfonne , qui n'eft pas moins diftinguée par faNaifiance & par fon Rang , que par fon mérite & fon efprit. Quoiqu'il en foit, L'Auteur de cette Chronique a divifé fon Ouvrage en deux Livres à l'imitation apparemment des Livres des Chroniques des Rois d'Ifraè'l £f de Juda, qu'il femble parti- culièrement s'être propofés pour Modèles ; comme il paroit par la manière dont il com- mence & finit fes Sections, ou les Articles de chaque Roi. Le premier Livre com- mence à Guillaume le Conquérant , & fe termine au Règne d'Elizabeth inclufive- ment. Après quoi fuit un Poflcrit, où l'Au- teur allègue plufieurs Raifons pour fe jufli- fîer de ce qu'il ne contiuuë pas plus loin fon Avril, Mav et Juin. 1745. 105 fon Hiftoire. Cependant, le fécond Livre vient enfuite en ion rang, il commence au Règne dejacquel. , & va jufqu'à celui de George IL actuellement régnant. Il faut remarquer, à la vérité, que ce fécond Li- vre n'eft daté que de l'An 1741 , au lieu que le premier l'eft de 1740. L'Auteur nous apprend lui-même, dans une courte Préface ; qu'ayant formé le def- fcin de raconter par ordre certaines chofes qui fe font palTées depuis la Conquête de Guillaume de Normandie , il a choifi le Stile des anciens Hiftoriens Juifs préféra- blement à tout autre; parce que cette ma- nière d'écrire eft non feulement la plus con- cife, mais auffi la plus vénérable & la plus majeftueufe. Il témoigne au même endroit, qu'il feroit bien fâché que fon Entreprife déplût en la moindre efaofe à fes Lecteurs, & qu'ils defaprouvaffent la Liberté qu'il a prife d'imiter ce? Sublimes Originaux , mais fur- tout qu'ils le foupçonnaiïent d'avoir fait choix de leur Stile par un Efprit de Raille- rie ou de Prophanation; de quoi il protefte qu'il eft fort éloigné. On ne peut nier, que la Méthode, qu'a choifie cet Auteur, ne foi t fort propre pour un Abrégé Chronologique de la nature de celui qu'il a entrepris, pour les deux Rai- fons qu'il en aporte lui-même en fa Préface. Il faut convenir de plus , que ce Stile gra- ve, fententieux, & fou vent figuré, eft ex- trêmement énergique en fon genre , qu'il peint vivement les Chofes & les Faits, & L 3 qu'il 166 Btrltotheq.ue Britannique, qu'il les imprime profondément cl: moire. C'eit ce que favent par leur propre Expérience ceux: qui ont lu les anciens E- crivains que notre Auteur s'eiî propofes pour Modèles: & je juge par moi-même, que ceux , qui liront avec quelque atten- tion la Chronique dont il s'agit, éprouveront aufli la même chofe. Une des Circonftances, qui contribué le plus à foutenir cette Gravité & Majefté de Stile dans les anciens Hiftoriens Juifs, eft la Coutume qu'ils ont de raporter immé- diatement à Dieu certains Evénemens, qui ne font pourtant arrivés le plus fouvent que félon le Cours ordinaire des Chofes humai- nes, & par l'intervention des Caufe s fécon- des. Or, l'on s'attend bien que l'Auteur de notre Chronique n'a pas manqué de les imiter en ce Point important, & qu'il n'a pas négligé d'emploïer cette façon de par- ler , quand le fujet en a été fufceptible. Aufli , lorfqu'un Prince a remporté quelque Victoire fignalée , il a grand foin de nous marquer que k Dieu fart combatif pour lui, ou que le Bras de l'Éternel fut (fisc lui. Au contraire, fi un Prince a été vaincu dans une Bataille, & a eu le malheur d'y être fait prifonnier, ceft l'Eternel qui l'a livré entre les Mains de fes Ennemis. Les Mala- dies même des Princes ne paroiiïent fouvent être que l'Effet d'un Arrêt particulier du Ciel. Par exemple , à l'Article de Guil- laume IL, dit le Roux y après avoir dit que ce fut un méchant Prince , dont le Cœur étoic . Avril, May et Juin. 1743. l67 .enclin à mal faire en tout tems, qu'il méprifoit les Dieux de Tes Pérès , & qu'il n'y croyoic point ; qu'il bannit même les Prêtres, & qu'il convertit les Revenus Sa- crés à Ton propre ufage; il ajoute:,, C'efc pour- ,, quoi l'Eternel le Frappa de Maladie , & fa 'aladie parut être à la mort. Alors ion ,, Cœur devint tremblant au dedans de lui „ même, & il fe repentit de fespéchfez, & „ il envoya vers le Grand-Prêcre & le fup- ,, plia, difant: j'ai fait le mal devant l'E- „ ternel , en faifîflant les Revenus des E- ,, véchez vacans; Çeft pourquoi reprens, ,, je te prie, ce qui appartient à FEglife, „ afin qu'il foit bien fait à mon Ame , & ,, que je puiffe vivre. Cependant , après ,, que la Maladie l'eût quitté , il oublia ,, tout ce qu'il avoit promis, ex retourna à „ fon méchant train. " Dans l'Article de Marie I. , après avoir dit que fa Mémoi- re eft odieuse jufqu'à ce jour, à caufe de Ion Génie perfecuteur, & à caufe de tout le Sang qu'elle fit répandre , il ajoute que „ l'Eternel la frappa de Maladie, & qu'elle „ fut arrachée de deiïus la face de la terre „ comme une Ronce qui étouffoit le boa „ grain. " Il y a plufieurs autres chofes encore, qui fervent merveilleufement à maintrenir cette grave Elévation ..cette majeflueufe Subli- mité de Stile dans les anciens Auteurs Juifs, comme les Harangues directes, & les Figu- res de Rhétorique dont leurs Difcours font entremêlés; car, ils fe fervent très -fouvent L 4 de i68 Bibliothèque Britannique, de Métaphores, d'Hiperboles, & d'Allé- gories. Notre Auteur, en qualité de leur fidèle Imitateur, a fort bien fû dans l'oc- cafion emploïer , à leur Exemple , ces grandes & nobles Images, & n'a pas même omis l'ufage des Harangues dire6t.es, quand le Sujet l'a permis ou exigé. Nous avons déjà fait mention de celle qu'il met en la bouche de Guillaume le Roux } lorfqu'il en- voya chercher le Grand- Prêtre pendant fa Maladie. On trouve encore plufieurs au- tres Harangues de ce Genre répandues en divers endroits de fon Ouvrage. Nous nous contenterons d'en citer ici quelques- unes des plus 'remarquables. Les Prêtres, dit notre Auteur à l'Article d'Henri IL , étant extrêmement indignés de l'Attentat commis contre leur Ordre en la perfonne de Thomas Becquet , ils en- voyèrent auflitôt des Députés au Pape , pour aceufer le Roi du Meurtre de cet Ar- chevêque. Lorfque ces MelTagers furent arrivés devant le Pape, ils fe profternerene très-humblement à fes pieds, & lui adref- fèrent ce Difcours: ,, ô très-Saint Père, à 3, qui coût Pouvoir a été donné dans le Ciel 5, & fur la Terre, & qui es établi fur les 3, Royaumes & fur les Nations pour char- 5, ger'leurs Rois de Chaînes & pour garot- „ ter leurs Nobles avec des Liens de fer, „ confîdere & voi comment le Sanglier de „ la forêt a ravagé la Vigne de l'Eternel „ des Armées. Si la rage de la Tirannie ,, ofe ainG enfanglanter le Saint des Saints, „ quel Avril, May et Juin. 1743. 16g „ quel Lieu (pourra être à l'abri de fa fu- w reur ? Ce ft pourquoi , ô Très -bénin „ Confervateur des Remparts de Jerufa- 3, lem , arme toi de toutes les Foudres de „ l'Eglife, prens en main PEpéedeS. Pier- 3, re, & venge la mort de ce S. Martir, „ dont le Sang élevé fa voix jufqu'au Ciel „ en faveur de toute l'Eglife , ôc dont la ,, Gloire célefte eftdéja manifeftée par des „ Miracles. " Cette Harangue produifit l'Effet qu'ils prétendoient; car, le Pape, qui étoic bien aife de proricer de cette Occalion pour hu- milier la Majefté Royale, envoya fur le champ de fon côté des Meifagers au Roi d'Angleterre, pour lui ordonner de le juf- tiner du Crime dont il étoit aceufé. Henri protefta de fon Innocence , mais en vain. Les paroles qu'il avoit proférées, (lavoir, celles-ci qui font raportees plus haut, N'y aura-t-il donc perfonne qui me délivrera de ce Prêtre infolent Êf feditieux?) ces paroles, dis je, dépofoient contre Lui ; & il fut con- traint d'expier fa Faute, réelle ou préten- due, au Tombeau de Becquet. Voici com- ment l'Auteur décrit (a Pénitence qui lui fut impofée. ,, Le Roi fe revêtit d'un habit ,, de laine & fe mit en chemin pour fe ren- „ dre dans l'Eglife ou Becquet avoit été ,, tué. Lorfqu'il fut arrivé à la vue" de cet- „ te Eglife , il defeendit de cheval , &, „ aïant ôté fes fouliers , il marcha nuds „ pieds jufqu'au Tombeau du Grand Prê- ,, ire défunt j & après s'être profterné de- L 5 ,, vanc 170 BïBlioTJîFQ/nE Brïtanniquï, vant la Ghafle qui renfermoit les os de ce nouveau Saint, il fit fa prière, & of- frit de fore riches Préfens. De plus, il fe dépouilla lui-même de fes, habits, & reçut la Difcipline de la main des Moi- '9i nés, qui le frappèrent fi rudement avec „ des baguettes qu'ils lui firent ruiileler le „ fang des épaules. " Voici encore un autre Exemple de Ha- rangue directe. Jean fans Terre s'étant brouillé avec le Pape au fujet de la Nomi- nation à l'Archevêché de Cantorbcri , il fut excommunié , & tout fon Royaume fut mis en Interdit. Jean ne rabatit pourtant rien de fa fierté pour tout cela: au contrai- re, il jura par les dents de Dieu quMl fe ven- geroit du Pape ôc de fes Adhéran?; comme il fit en effet, en banniilant plufieurs Eve- ques du Royaume , & en confifquant les terres & les biens de tous les Prêtres qui a- voient obéï à l'Interdit. Le Pape, voyant donc que le Roi Jean fe moquoit de fa Bul- le , & qu'il meprifoit fes Foudres , réfolut d'avoir recours à d'autres Armes. C'eft pourquoi il envoya des Mefiagers cà Philip- pe Roi de France ; & ces Meffagers étant arrivés à la Cour de ce Roi, ils lui parlèrent delà forte félon notre Auteur: „ ô Philip- *, pe ! ainfi a dit le Pape , fi tu fais cas du Sa- „ lut de ton Ame , & de la Rémihlon de „ tes Péchés , alTemble au plutôt ton Ar- „ mée & chaiTe le Roi Jean du Trône d'An- „ glcterre: & toi, & tes enfans après roi, 5, le poiTedercz à jamais. „ Ce commande- ment m., Ma* et Tvnf. 1743. Ht mène du Pape étant conforme aux intérêts m de Ph celui-ci ooeït ers; e\, s une bonne : pied, il fe d 1 envahir l'An - srre. Mais il ne trouva pas ion comp- te en cette expe du côté du Pape , qui ce;r. orifer. Car le Roi Jean qui perdit to la v". raads préparatifs de Philippe, s'humilia devant le Pape, jufque-là même qu'il lui rit hommage de fa Couronne , & qu'il ss a par ferment de payer , Lui àc fes Succeffeurs, un Tribut annuel de mille Marcs d'argent au S. Siège. A ces condi- tions Jean fut reçu au Giron de l'Èglife ; & s'étant toujours "montré depuis un fils tre>- obéïfiant , le Pape devint fon Protecteur déclaré & le, foutint même dans les entrepri- {qs les plus injuites & les plus tiranniques contre les Sujets: car le Roi Jean, qui fe rioit fur cette protection , à ce que remar- que notre Auteur , en abufa pour accabler tous les jours fes Sujets de nouveaux Im- pôts. Quant aux Métaphores & Hiperboles, on er. a des Exemples aux Articles des Rois qui ont fait de grands Exploits de Guerre, ù qui fe font acquis beaucoup de gloire par la force & le fuccès de leurs r- . mais fur-tout à celui de la Reine Eli- sabeth: car l'Auteur^ après avoir dit qu'el- le fut remplie de la Sageflê d'enhaut, & puiflant lui donna L'efprit d'In- : mteenfuite , . qu'elle fondit fur VA, 17s Bibliothèque Britannique, YJrmido (a) des Efpagnols comme un vio- lent Tourbillon, & que, comme une piaf- fante Tempête , mêlée de foudres & d'é- clairs , elle les abîma au fond de la Mer. . . Que lorfqu'elle ouvroit la bouche, c'étoit aufTi-tôt la guerre; mais que fi elle retirent fa main, les Nations demeuraient en paix. . . Que la Sagefle & la Force éroient en fa main droite, & que la Gloire & l'Abondan- ce étoient en (a Gauche &c. Pour ce qui eft enfin des Allégories , l'Auteur en a fait un fréquent ufage dans fa Chronique. Lorfqu'il eit obligé , par exemple, de faire mention de certains Fa- voris que les Rois d'Angleterre ont élevés aux premières Charges du Royaume , & auxquels ils ont confié le Gouvernement de l'Etat, il en parle ordinairement fous l'emblème de ces Idoles, ou Statues des faux Dieux , que plufieurs Rois d'Ifraël & de Juda placèrent dans les Hauts-Lieux , ou en d'autres endroits confacrés au Culte Di- vin , comme il eft raporté fi fouvent dans les Livres des Rois & des Chroniques. C'eft ainfi qu'à l'Article d'Edouard IL il dit que ,, ce Roi fe départit de la Religion de „ fes Pères, & qu'il fe fit à lui-même deux „ Idoles , dont l'une s'apelloit Gavefton , „ & l'autre avoit nom Spencer ; qu'il les „ plaça (a) Terme confacre' chez les Espagnols pour fîgnifier leur Flotte invincible , & dont l'Autan fe iert dans le même fcv.s. Avril, May et Juin. 1743. *73 „ plaça dans les Hauts-Lieux, &coinman- ,, da au Peuple de les adorer: :' ce que ré- futèrent pourtant de faire quelques-uns des Grands & des Nobles, d'où il s'en- fuivit de grands Troubles. Dans l'Arti- cle fuivan:, parlant de la Reine Ifabeile, femme d'Edouard II. & mère d'Edouard III., qui prit la Régence du Royaume, pendant la Minorité de fon fils , il écrit que „ le cœur de cetee PrincelTe étoit fort „ porté au Culte des Idoles , & qu'elle fui- „ vie touces les abominations de fon Mari: „ Entre autres, qu'elle fe fit une grande „ Idole qu'elle apella Mortintr, & qu'elle „ fe profternoit devant cette Idole & l'ado- „ roit avec beaucoup de zeie & d'ardeur ,, jour & nuit. " Dans l'Article d'Henri VIII., parlant de la fortune Cvde l'élévation furprenante duCar- dinal de Wolfey, il t'exprime aimi: „ Or „ Henri le n: une Idole, à laquelle „ il n'y en avoit pas de femblable dans le „ Ciel en "haut, ni fur la-Terre en bis; car „ elle porto.it fa tête jufque dans 'es nues, „ & elle é en doit fes bras fur tout ie Roy- „ aume. Pareillement fea jambe ëtoient „ comme une Arcade étendue fur toutes ,, les Portes d es Emj ois Publics; ce il fa- „ loi t que oc ient , eu qui „ fortoient , paiiàffent par deflbus , 6c qu'ils „ baifafîènt avec un refpecl idolâtre les „ deux batans de la Po:re"d- derrière. Et ,, tout le Peuple , tant les Grands que les „ Petits, fe profternoient devant cette I- „ dole 174 Bibliothèque Britannique 5, dole Royale & Fadoroient; parce qu'ils „ redoutaient ion pouvoir. Les Prêtres „ même & les Evêques portaient l'éguiére „ L le baflin , pour lui donner à laver ; & „ les Ducs & les Nobles tenoient la fer- „ viette. Cependant ce prodigieux CololTe „ tomba du faite de fa Grandeur, & il fut „ bnie comme un Vailieau de terre. Air.îi, „ que celui qui eft debout prenne garde de ,, ne pas tomber! " Il défigne encore fouvent la Profeflion de la Foi & du Culte de i'Egiife Romaine év la Pratique de les Cérémonies fous les noms de Paillaràijes ce de F / i : ' & cela , pour fe conformer au Langage des Ecrivains qu'il fait prof effion d'imiter; car en fait aflez , que c'eft ainfi que s'expri- ment les anciens Auteurs Juifs en parlant eu Culte des Idoles & de la Pratique des Cérémonies Payennes: Or, l'Auteur de la prefente Chronique a eu d'autant plus raifon d'imiter le Stile de ces anciens Ecrivains en cette occafion , que la plupart des Cé- rémonies , qui font aujourd'hui en ufage dans i'Egiife Romaine , font dérivées, du moins félon les Proteitans , de celles duPaga- niime. Pour faire voir de quelle maniéré noire Auteur a fait l'Application de ces façons de parler des anciens Prophètes en ces for- tes de rencontres , nous importerons ici ce qu'il dit en parlant de l'Archevêque - l'Article de Charles I. Voici 'ce qu'on m cet endroit fur le Chapitre de ce Pri- mat. Avril, May et Juin. 1743, 175 mat. „ Il y eut en ces jours-là de grands ,, Troubles en Angleterre au fujet de la „ Religion. Plufieurs , charmez de la ,, Beauté fardée de l'Eglife Romaine, cou- ,, roient après Tes Dieux , & proftituoient „ leurs Cœurs à Tes Abominations. Et l'on „ croyoit que l'Archevêque Laud s'étoit „ laifle corrompre par Tes Fornications, „ qu'il flcchilToic le Genou devant Tes Ido- ,, les, & que fon Cœur étoit enivré du Vin „ de les Paillardifes. Il eft confiant du ,, moins qu'il étoit fort poncluël à obferver „ Tes Poftures & fes Geftes fuperfb'rieux , „ fes Génuflexions, fes Luftrations & Con- ,, fecrations, & qu'il aimoit fort à fe parer „ des Vétemens & Ornemens de diverfes „ Couleurs, dans lefquels la Paillarde vé- „ tue d'Ecarlate fe plait fi fort. Cet Arché- ,, vêquefen attira piufleurs à fon Parti, &• „ il occaGouna par -là beaucoup de Trou- „ bies dans le Royaume, auiTi bien que ,, beaucoup de Difputes frivoles & d'Opi- „ nions abfurdes. De plus, on le foupçon- ,, noit de débaucher l'Efprit du Roi , & d'à- ,, bufer de la Facilité de ce Prince pour le „ porter à aimer le Fard & les Mouches de „ la Paillarde Romaine. C'efl pourquoi le „ Peuple fe fouleva contre Latid; &a dans „ la Furie de IeurZcle ils le mirent à mort. „ Or, ces Chofcs arrivèrent afin que fut ,, accompli ce qui avoit été dit par le Pro- „ phete : Bienheureux celui q:-i a veillé & j> 3» tentent , de fèur d'être „ obligé 176 Bibliothèque Britannique, „ obligé de marcher nud, &? qu'on ne vît fa ,, Turpitude. " Immédiatement après fuit une autre efpè- ce d'Allégorie, qui porte fon explication avec elle. „ Il arriva environ dans le mê- „ me tems, dit notre Auteur , que tout le „ Royaume fut poiledé par deux mauvais „ Efprits, favoir par l'Efprit de Prélature „ & par l'Efprit de Fanatifme: & ces deux Efprits s'entrefirent la Guerre avec gran- de furie,* & tout le Pais fut rempli de Sang & deConfufion. Cependant, l'Ef- prit" de Fanatifme prévalut à la fin. Le Roi fut vaincu; & fes Ennemis l'ayant fait prifonnier, il fut renfermé dans la ,, Prifon du Château de Carisbrook en rifle „ de Wight. " Outre les Allégories qui viennent d'être raportées, en parcourant cette Chronique nous en avons encore rémarqué deux au- tres, qui méritent, à ce qu'il nous femble, de trouver ici leur place. Nous n'entre- prendrons pas de donner la Clef de ces Al- légories , parce que nous fommes bien per- fuadez, que les Lecteurs n'en auront pas bcfoin. AiTurément, ce feroit leur faire in- jure, que d'avoir une autre idée de leur Pé- nétration à cet égard : vu qu'il s'agit - là d'E- vénemens très-connus , & arrivez dans notre Siècle; & que d'ailleurs le Voile, dont no- tre Auteur les couvre, n'eft rien moins qu'impénétrable. Voici la première de ces Defcriptions Al- légoriques: Avril, May et Juin. 1743. 177 légoriques: „ Or il arriva en ces jours-là, 33 [fous la Reine Anne] que tout le Païs „ fut divifé entre deux fameux Géants, ,, dont l'un avoit nom IViganza, & l'autre 3, s'apelloit Toribondos ; ce il y avoit une „ grande inimitié entre lesPartifans de JVi- 33 ganza & les Partifans de Toribondos 9 de 3, forte qu'ils parloient fort mal les uns des 3, autres, & qu'ils fe faifoient de grands re- 3, proches. 3, Et le Géant Toribondos fe fervit d'un 3, mauvais Efprit, qu'il envoya parcourir le 3, Païs fous la figure d'un Prêtre, & il lui 3, impofa nom Sacbeverel; & quand ce mau- 3, vais Efprit fe fut mis en crédit & qu'il 33 eut acquis de la réputation parmi le Peu- 3, pie, alors il fe mit à débiter fes rêveries 3, fur les faux Frères , fur la mauvaife Com- 3, municavon, fur l' Obêïffance paffive , fur la 3, Non-Réfiflance , & pîufieurs autres Abfur- 3, dites. Et le Parti de Toribondos l'ado- 3, roit comme un Dieu, & on en tira plu- 3, (leurs Portraits qui furent difperfés de 33 tous côtés,* & il fut traité avec tant de „ diftinction que l'on grava même fa figu- „ te jufque dans le fond des pots de cham- ,, bre, ck: les pluyes d'honneur tomboient „ tous les jours à verfe fur lui. Il y eut ,3 auiTi pîufieurs hardis Champions qui s'en- 3, rôlerent fous fes Bannières, & qui com- 3, bâtirent pour fes intérêts avec une ardeur 3, & une furie defefpérées. 3, Cependant il iortit enfin de la Tribu 3, de Wiganza un vaillant Héros, nommé Tome XXI. Pars I, M ,, Benja- 178 BîBLrOTHEQ_UE B R I T A N NIQ^U E , „ Benjamin ; & il fe couvrit du bouclier dé „ la Raifon , & prenant en main l'epée de „ la Vérité, il s'avança d'un pas ferme & „ d'un air réfolu vers l'Armée de Toribon- ,, dos, & la mit en déroute. Il en tomba „ plufieurs fous fes coups, & les autres ,, cherchèrent leur falut dans la fuite: En „ un mot leur défaite fut fi entière, qu'ils „ n'ont pas été en état depuis ce tems-là „ de fe remettre en campagne. " Venons prefentement à la féconde Allé- gorie qui eft telle: ,, Or il arriva en ces „ jours -là [fous le Roi George I. ,J qu'une „ forte illulion s'empara des Efprits & que „ tout le Peuple du Pais fut frappé de Fo- „ lie. Ils avoient les yeux tournés vers la „ Mer du Sud, & voilà qu'une Bouteille „ d'eau d'une grandeur furprenante parut 5, fur la furface de la Mer; fa circonferen- „ ce rempliffoit tout le Firmament, & fa 3, hauteur atteignoit jufqu'aux nues. Et au „ milieu de cette Bouteille , on voyoit en ,, apparence des Châteaux magnifiques , des 3, Jardins délicieux, des Carofles dorés, 3, des monceaux d'Or & d'Argent, des Pier- „ res précieufes en grande quantité, & en- 3, fin tout ce que le cœur de l'homme peut 3, defirer. Et tout le Peuple courut en fou- 33 te pour confiderer tant de belles chofes , 3, fe difant les uns aux autres: Nous ferons 3, tous riches, mus ferons tous des Seigneurs & „ des Princes de la terre. „ Cependant l'illufion commença infenfi- rt blement à diminuer; & pendant qu'ils é- 33 toienc Avril, May et Juin. 1743. 170 „ toient encore à regarder, voilà que la 5, Bouteille d'eau vint iubitementà crever , „ & toute cette belle apparence s'évanouit ,, pour toujours & fut réduite en écume. ,, Ce ne furent alors que pleurs, que ge- ,3 miflemens, & que lamentations améres par tout le Pais. Celui dont les Songes illufoires l'avoient flatté qu'il polTederoit bientôt des Jardins délicieux & des fomp- tueux Palais , s'éveille en furfaut & fe trouve logé dans un méchant grenier, ou „ fe voit obligé de ratifier & de nettoïer ,, ces Allées qu'il avoit plantées en imagi* ,, nation pour lui-même: Celui qui s'étoit ,, repu de la vaine efpérance d'avoir, avant ,, qu'il fût peu de tenas , une Livrée lefte „ & brillante à fon Service , fe trouve con- ,, traint de la porter lui-même, afin de pou- „ voir fubfifter,* & celui qui fe nourriffoit ,, de Venaifon à cinq guinées par repas, „ eft réduit prefentement à dîner pour „ deux fols dans une méchante Gar- „ gotte. Mais, malheur à vous, Inventeurs du Syftème! Malheur à vous, Promoteurs de Y Agio i Malheur à vous, Directeurs de la Banque! Car, voilà, les miféres du Païs font à vos portes , & les cris des Pauvres s'élèvent contre vous; l'extrê- me difette, olj font réduits tant de mil- liers de gens que vous avez ruinés, les 92 5> •n 3) 55 „ oblige de vous maudire; & la vengeance 3, du Ciel ne manquera pas de tomber tôt „ ou tard fur vos têtes criminelles. " M * On 28oBlBLIOTHEQ_UE BRITANNIQUE, On a déjà vu par divers traits, qui font femés par-ci par-là dans les endroits que nous avons extraits de cette Chronique, que l'Auteur a eu le fecret d'égayer quel- quefois les fujets qu'il traite , malgré cette fevére gravité que fa Méthode l'oblige de garder par-tout. A quoi nous devons ajou- ter qu'il a trouvé le moyen de mêler en fon Ouvrage divers traits de railleries, qui pi- quent d'autant plus agréablement, qu'il ne s'écarte pas pour cela le moins du monde de cette même gravité, à laquelle il eft aftreint par le genre d'écrire qu'il a choifi. Nous en citerons ici quelques exemples. Après avoir raporté, que félon le bruit commun , qui s'étoit répandu par-tout dans ce tems-là (a), il fe faifoit un grand nom- bre de Miracles au Tombeau de Thomas Becquet Archevêque de Cantorberi, ,, Or, „ entre ces Miracles, ajoute-t-il, n'eft-il pas „ raporté qu'il fe leva de fa Bière , & qu'il „ alluma lui-même les Cierges à fon En- ,, terrement; & que, quand la Cérémonie 3, des Funérailles fut finie, il leva dere- „ chef la tête, & qu'il bénit le Peuple. „ Que celui qui croit ces chofes, continue „ de les croire ! & que celui qui ne les „ croit pas, refte dans fon incrédulité & „ foit damné! " Dans l'Article de Jacque I. , il raconte ainli l'Hiftoire d'un certain Impofteur , nommé Richard Hadock, qui entreprit en ce tems- là ( * ï Scus U Re?w d' Henri IL Avril, May et Juin. 1743. igr là de faire accroire au Peuple qu'il prêchoic pendant Ton Sommeil : „ Quoiqu'on l'apel- , lût à haute voix , quoiqu'on le pinçât & , quon le tirât par les bras ou par les pieds, , il paroiflbit ne rien entendre & ne rien , fentir. Et il continua de jouer ce manè- , ge devant plufieurs Perfonnes, qui s'af- , fembloient en fa maifon pour l'écouter; , de forte qu'en peu de tems fa réputation , fe répandit par tout le Pais fous le nom , du Prédicateur dormant. Et plufieurs s'i- , maginerent que les Prédications touchan- , tes & pathétiques, qu'on lui entendoit , prononcer pendant fon Sommeil préten- , du, étoient faites par Infpiration du Ciel: „ Tantum Relligio potuit fuadere Folo- ,, ru m! , Mais le Roi découvrit la fourberie, & il , obligea le Prédicateur dormant de paroi tre , dans toutes les Places publiques de la , Ville, & d'y déclarer à haute voix qu'il , étoit un Impoftcur. Malgré cela, ajou- , te-t'il, la Race des Révérends Dormeurs , n'efl pas encore éteinte dans le Royau- , me jufqu'à ce jour; au contraire ils acca- , blent continuellement le Public par de , gros & péfans Volumes, dont l'ennuyeu- , fe Lecture feroit capable d'endormir ceux , qui ont le moins de difpofition au Som- , meil. " Notre Auteur fe moque, en divers en- droits du même Article, de la faufle Polici- M 3 que, i8a Bibliothèque Britannique, que, de la SagefTe puérile, & du Savoir pé- dantefque, que Jacque I. affe&oit en toute rencontre ; & voici enfin comme il le con- clut: ,, Or le refte des Faits du Roi Jac- „ que, fa SagefTe, fa haute Suffifaace, fon „ profond Savoir, & tous les Livres qu'il „ a compofés, voilà, vous pouvez les „ trouver dans les boutiques des Epiciers, „ ou chez les Beuriéres , jufqu'à ce jour. ?J Il conclut à peu près de même les Arti- cles de Charles II. & de la Reine Anne. Voici comme il parle dans l'Article du pre- mier: ,, Or le refte des Faits de Charles „ IL , fon efprit , fes galanteries & toutes ,, fes intrigues, voilà, vous pouvez les ,, trouver dans la Chronique lcandaleufe „ jufqu'à ce jour. 5' Et quant à la Reine Anne, à la fin de fon Article on lit les paroles fuivantes: ,, Or 3, le refte des Faits de la Reine Anne, & ,, toutes fes glorieufes conquêtes,* fa Piété 3, aufli envers le Clergé, & les cinquante „ Eglifes qu'elle a fait bâtir,- voilà, fi vous „ vivez allez long-tems pour les voir, ,, vous mourrez apparemment fort vieux. " Nous croyons même qu'il eft à propos d'avertir ici qu'il fe trouve plufieurs autres railleries, ou ironies, répandues par-ci par- là dans fa Chronique, qui font beaucoup plus couvertes , & qu'il n'eft pas aifé de les apercevoir du premier coup d'œil ; de forte qu'on a befoin de toute fon attention pour diftinguer fi l'Auteur parle férieufement ou ironiquement, jufque-là même que l'on eft quelque- ♦> Avril, May et Juin. '743* *83 quelquefois contraint de fufpendre Ton ju- gement à cet égard & de refier dans le doute. Les Lecteurs feront fans doute curieux de favoir comment eft conçu l'Article du Roi régnant; il eft facile de contenter leur curiofité là-defllis , vu que cet Article eft fort court, & que l'Auteur n'y paroit for- mer que des vœux pour la longue profperi- té du Règne de George II. , ainfi que l'on va voir. George étoit âgé de quarante -quatre ans , lorfqu'il commença à régner ; & voilà qu'il tient encore le Septre en fa main , qu'il porte la Couronne fur la tê- te, oc qu'il eft afTis fur le Trône de la Majefté jufqu'à ce jour. „ Or , afin qu'il puifTe l'occuper long- tems avec beaucoup de puiflance & de gloire , prions Dieu que fes Miniftres foient juftes & bien - intentionnés , que fes Confeillers foient fages & avifés, que fes Capitaines foient braves & courageux: de cette façon il deviendra le Fléau de l'Efpagne, la Terreur de la France, & l'Admiration de toute l'Europe. ,, Alors nous viendrons joyeufement au pied de fon Trône lui rendre nos actions de grâces , & nous entrerons dans fa Cour avec fes louanges en la bouche : Nous lui témoignerons en pareil cas notre très^ humble reconnoiflance par toutes fortes de voyes , nous bénirons fon Nom & n'en parlerons jamais qu'en bien. " M 4 L'Arti- 184 Bibliothèque Britannique L'Article eft fort fuccint , comme l'on voit; l'Auteur n'entre dans aucun détail fui les événemens qui font arrivés fous le Rè- gne prefent. Apparemment qu'il a été en- gagé à en ufer de la fbrte par quelques unes des Raifons, qu'il allègue lui-même dans le Poftcrit, qu'il a mis à la fin de fon premier Livre , pour s'excufer de pouffer fon Hif- toire plus loin que le Règne d'Elifabeth ; & entre autres, par celle-ci, qu'il produit comme la principale , favoir , ,, que les 3, Vies & les Caractères des glorieux Suc- „ ceffeurs de cette Vierge Royale font fi 3, merveilleux , fi fubîimes & "fi relevés, s, qu'il n'apartient pas à un Oifon de s'éle- ,, ver jufque-là par fon vol. " Ou peut- être a-t-il pris ce parti, pouffé par cette autre Raifon qu'il ajoute enfuite , qui eit , que 3, les Rois , par un Privilège qui leur eft 3, particulier, n'ont jamais rien fait qui foit „ digne de blâme, que cent ans après leur s, mort. " Immédiatement après l'Article du Roi ré- gnant , on trouve-une Généalogie des Rois d'Angleterre, qui remonte depuis George II. jufqu'à Guillaume le Conquérant. Cette Généalogie fait laConclufion du fécond Li- vre & de tout l'Ouvrage; nous l'inférerons ici pour mettre fous les yeux du Lecteur une Lifte fuivie des noms des Princes dont il eft parlé dans cette Chronique. ,, Geor- „ ge Second, qui eft Fils de George Premier, ,, qui fut Coufln d'Anne , qui fut Belle- v Sœur de Guillaume Trois, qui fut Gendre « de Avril, May et Juin. 1743. *8> „ de Jacque Second, qui Tac Frère de Char- ,, hs Second , qui fur Fils de Charles t'ré- „ mier , qui fut Fils de Jacque Premier < ,, qui fut Coufin d'Elijaoetb , qui fuc Sœur ,, de Marie, qui fut Sœur à1 Edouard Six, „ qui fuc Fils à" Henri Huit , qui fuc Fils ,, û'Henri Sept, qui fut Coufin de Richard „ Trois , qui fuc Oncle d'Edward Cinq, „ qui fut fils d'Edouard Quatre , qui fut ,, Coufin d'Henri Six, qui fuc Fils .Henri „ Cinq, qui fut Fils d Henri Quat e, qui „ fut Coufin de Richard Second , qui fut 3, Petit- FjIs d'Edouard Trois, qui fuc Fils „ d'Edouard Second, qui fuc Fils d'Edouard „ Premier, qui fut Fils d'Henri Trois, qui „ fut Fils de Jean, qui fut Frère de Ri- „ ebard Premier, qui fut Fils d'Henri Se- „ cond, cfui fut Coufin d'Etienne , qui fut ,, Coufin d'Henri Premier, qui fut Frère de „ Guillaume le Roux, qui fut Fils de Guil- 3, laume le Conquérant , qui fut Fils de P n A Hn 'fi l finit , ajoute l'Auteur, la Chronique des Rois d'Angleterre. Nous ne doucons prefque pas que les Mor- ceaux détachés, qu'on vient de produire 3 de ce petit Ecrit, n'infpirent aux Lecteurs le defir de voir & de parcourir l'Ouvrage même, & que cela n'engage ceux qui n'en- tendent point l'Anglois , à recourir à la Tra- duction Françoife pour concerter J >ur eu- rioficc. Car, à parler franchement, il n'efl prefque pas polîible de faire un Extrait ré- gulier d'un Oavrage de la Nacure de cefai- ci, ni d'en donner une idée compiette; vu M s eue i8ô* Bibliothèque Britannique, que les Matières & les Faits y font entaffés, pour ainfi dire, les uns fur les autres ,& fou- vent fans avoir d'autre liaifon entre eux, que celle du tems où ils font arrivés. D'ail- leurs , il en eft de certains Ouvrages d'Ef- prit comme des Tableaux des grands Maî- tres,* chacun veut les voir par fes propres yeux, parce que chacun fe flatte d'y faire les découvertes particulières. ARTICLE VII. phontis Memorabîliitm Socratis Dictorum Libri IV. Grœcè & Latine , cum Notis in- tegris Ernefti , aliorumque felcclis ; Niinc variis etiam novis Obfervatiombus adauài £5? illufirati. Huïc Editioni accédant Ca- pitum , Verborum &? Phrafmm Indices locupletiffimi. Oxonii, è Tbeatro Shel- doniano , impenfis Jacobi Fletcher Bi- bli. Oxon. Vena.es profiant Londini a- pud C. Rivington , & P. Knapton. R. Manby ; J. Nourfe , & Gui. Thurl- bourn. Cantab. 1741, (*) C'eft - à - dire : Les quatre Livres des Mémoires de Xeno- phon; En Grec & en Latin. A Oxford j 1741. (*) Ce Livre fe trouve à U H&ye chez P. de Hondt. Avril, May et Juin. 1743. l87 1741. 8V0- Pag. 349. fans compter la Préface , & les Indices , l'un des Chapi- tres, & l'autre des Phrafes. IL y a r. à 6. ans que Mr. Ernefîi fit im- primer, à Leip/îck, en petit Octavo, cet Ouvrage de Xenopbon, dont il donna le Tex- te fort correct, accompagné d'un petit nom- bre de Notes utiles Perfuadé que l'on ne pouvoir mettre , entre les mains de la Jeu- neflè, un monument de l'Antiquité Payen- ne , qui fut plus propre tant à la former aux bonnes Mœurs qu'à lui donner le vrai goût de l'Elégance Aitique , il eut princi- palement en vue de lui en rendre l'Edition agréable & commode. Le Papier, les Ca- ractères, la Correction, en un mot tout ce qui dépendoit de l'Imprimeur , étoit d'un ordre à contenter les plus difficiles , & furpafïoit de beaucoup ce que Y Allemagne produit d'ordinaire- en ce genre. Ce que l'Editeur y avoit contribué , de fa part, étoit tout d'un vrai Savant , qui travaille bien plus pour les autres que pour lui mê- me. Sans charger fes Notes de cette Eru- dition faftueufe que la plupart des Com- mentateurs étalent, par pure oftentation, il fe borna dans les tiennes, à faire fentir toutes les finefTes de la Langue Greque^de même qu'a faciliter l'intelligence de fon Texte, ou à en fixer la véritable Leçon. Cette Edition fut fi bien reçue , qu'il fal- lut bientôt en donner une féconde, qui pa- rut l88 BlELIOTHE^UE BRITANNIQUE, rut en 1742. , dans la même Ville, & dans le même format. Elle eut de commun, a- vec la précédente , une fingularité qui ne put que frapper bien des gens. C'eil qu'il n'y avoit que le Texte Grec, fans aucune Vérfion Latine ni a côté , ni au bas des Pages , ni à la fuite, comme cela s'eft pra- tiqué depuis très longtems. Mr. Ernejli qui n'ignoroit pas que cela pourrait bien ne pas avoir l'approbation générale, prit là-deiTus les devans d'une manière à faire juger que c'étoit par choix, & par raifon qu'il avoit fuivi cette Méthode. Voici de quelle ma- nière il s'en exprime dans la Préface de fa féconde Edition. ,, Nous n'avons pas cru, dit-il, qu'il fal- lût ajouter une Verfion Latine non feule- ment pour ne pas groffir le Volume, & pour en diminuer le prix, mais encore pour les mêmes raifons qui ont fait croi- re à Gefiier , dans la Préface de fa Cbreftoma- îbie , & à d'autres que ces Verfions La- tines dévoient être bannies des Editions, fur tout, de celles qui font deftinées à ], l'ufage de la JeunefTe. Quelques perfon- nes penfent à la vérité, qu'il faudroit les ajouter en faveur des Maîtres, qui, em- barrafles dans les Endroits difficiles, ne peuvent s'en tirer, faute de ce fecours qui leur manque. Mais cette confidera- tion, qui voudroit que l'on ajoutât une Traduction , à caufe d'un petit nombre de difficultés, eft , après tout, peu de choie, d'autant plus que les Verfions or- „ dinaires Avril, May et Juin. 1743. 189 3, dinaires ont le défaut capital d'être, el- „ les mêmes , très défe&ueufes dans les En- „ droits où le fens de l'Original n'efl pas ,, clair. . . . D'ailleurs ce que l'on feroit „ pour les Livres Grecs, devroit aufli fe „ faire pour les Latins , & qui verroit, ,, fans peine , les Commentaires de Cefar a- „ vec une Traduction Allemande à côté , „ fous prétexte qu'il y a des Endroits 011 ,, les Savans eux mêmes fe peuvent trou* ,, ver accrochés? Ce qu'il y a de fûr,c'efl „ que de fait notre Méthode a été fort ap- „ prouvée d'un grand nombre de gens de „ lavoir, & de quantité de Regens. " On accordera, fans difpute, à ce Savant Editeur que fi les Traductions n'étoient fai- tes que pour entendre tous les Mots de l'O- riginal, il n'y en auroit peut-être point qui ne fût inutile*. Cela feroit encore plus vrai de celles qui fe bornant , en général , au Sens, ne s'attachent qu'à l'élégance & qu'à la pureté du Langage. A cet égard , par exem- ple , la Verfion d'Herodicn, faite par Poli- tien 00 a fubi juftement la cenfure de quel- ques Uluûres Critiques. Dès la première Période de cet Hiftorien on voit un In- terprète, qui arrange & qui dit les chofes à fon goût bien plus qu'il ne les traduit. Afin que les Perfonnes qui entendent les deux Langues, puilTenc en juger, par la confron- tation , fans avoir la peine d'ouvrir cet Au- teur, (a) Voyez Raillct , Jug. des Savans ofc, Tom. m« Page 3* Ed. 4°. 190 Bibliothèque Britannique, teur , doanons ici cette Période entière tant en Grec qu'en Latin. Voici celle de l'Original (a). 'Oi nxXçot tm Treç) (rvyy.û^Y,-) içoçiccç ÙT^dM^evrm , tviavle 7rx- àxt yty6to]m , juvjjwjjv Jc-X76xi (r7rxoourot,v]m , 7VUf èilcKi xAe®^ ci'iiïiov y^a/Aevoi , ottuç W 7Tï)Crotv7et; Xec- êotei tiç 70v 7roXuv ofitfov ecaiey.ay.evoi , tjjs y.ev ùXqûeietç iv 7ccïç ùfiyyvo-so-iv àXiyâpqa-otv , &% r,Kiçu ce e7rey.ehïtêvrxv (Pçuo-sà»; 7i 7^ êvÇ)uviu<; , êuppîtv7eç . a>$ et 71 ttj y.vêaèeç Àeyotev , to y.tv veu 7qç oLKÇowreaç àvrot x*tp7rârov]eti y 70 è'eLtcçtfieç tjjç i\é]*G-i nomenque juum conantur ab injuria oblivionis af* ferere, minus fane multam, in veripervejtigatione, quam in exornanda componendaque oratione , in- dujiriam pojuerunt ; ratifeilicet , nequefi quid in rébus à fuo fœculo remotijjimis falfi proderetur , pojje refelliy 6? Je tamen Jiiavitate narrationis amplijjimum laboris , ingeniique frufoum percep- turos. La penfée ne peut être fans doute mieux exprimée , & peut - être qu'Herodien auroit parlé comme fon Traducteur, s'il eût écrit en Latin* Mais quel fruit pourroit tirer, de cette Traduction , un jeune hom- me qui voudroit s'en fervir enguife de Dic- tionnaire pour entendre le Grec? Cependant auiïi peut on dire de bonne foi que l'ufage des Editions Greques- Latines ait eu pour premier , & pour principal ob- jet (*) Herod. Lib, I. Ei. Bafil. ij6i- Avril, May et Juîn. 1743. 191 jet les Collèges? Avant & après l'invention de l'Imprimerie, on commença la publica- tion des anciens Auteurs de la Grèce par les Traductions, que divers Savans en don- nèrent, parce que la Langue Greque étoit encore ou tout à fait étrangère dans notre Occident, ou du moins très peu connue, & ce fut par là qu'yfmm, Bejfarion, Lupus, December, Perot , lralla, Gaza, Pbilelpbe, George de Trebizonde, Argyropile , & tant d'autres femblables, rendirent les fervices les plus fignalés, à la Republique des Let- tres, en y produifant, par le moyen des Verfions, un grand nombre de beaux Ou- vrages Grecs que^ prcfque perfonne n'auroit encore pu lire fans eux. Peu à peu les chofes changèrent de face. La Grammai- re Greque de Lafcaris parut en 1476. & fut le premier livre imprimé en cette langue , (a) autant qu'on peut le favoir. Le premier Auteur de confequence que l'on imprima fut Homère que l'on publia en Original à Florence en 14S8. Celui-là fut inlènfible- ment fuivi de plufieurs autres dont les Edi- tions étoient toutes Greques , parce qu'el- les n'étoient faites qu'en faveur des perfon- nes qui pouvoient lire les Originaux , les Latines n'étant que pour les gens qui n'en- tendoient que la langue Latine, jufqu'à ce qu'enfin (a) Mai taire, Ann. Typ. Tom. I. Part. I. pag. 34. & |a Monnoye Note fur Baillée y Jug de* Sav. Tom. I. Pag. 347- £d. 4°. i$2 Bibliothèque Britannique, qu'enfin pour la commodité des uns & des autres, on réunit les deux Langues dans le même Volume. Pour fe convaincre de la vérité de ce que je dis , il n'y a qu'à jecter les yeux fur la Bibliothèque Greque de Mr. Fabricius , ce fur les Annales Typographiques de Mr. Maittaire. On y verra t'es clairement que les Impri- meurs ne fongerent d'abord à rien moins qu'aux befoins des Ecoliers, dans les Edi- tions qu'ils publièrent des Hiiloriens , des Philofophes, des Orateurs £cc. de la Grèce ; que les Editeurs n'y eurent en vue que l'uti- lité générale de tous ceux qui s'attachoient aux .Lettres ; que l'on commença par l'im- preffion des Verflons , parce que c'étoient encore les feules que l'on entendit; qu'en fuiie on donna les Ouvrages purement en Grec pour la fariffaclian de ceux qui pou- voient profiter de la lecture des Originaux; & qu'enfin comme il y a voit toujours des Lecteurs de ces deux Claïiés , on crut de- voir travailler pour leur contentement com- mun par le moyen des Editions Greques- Latines , oh chacun ti ouvoit ce qui l'accom- modoit. Il fermVe donc que la raifon de cette dernière Méthode iubliftant toujours, plus eu nioms, l'ufage en doit être d'au- tant plus maintenu , que les yeux y font fans ôc qu'une coutume, à prefent établie depuis plus de ;co. ans, en a fait une efpe- ce de Loi. Accordons feulement, à Mr. Erreft' , que 'a profeription devroit avoir toujours lieu par rapport aux Livres Grecs, qui Avril, May et Juin. 1745. 193 qui ne font imprimés que pour les Ecoles. C'eft ainfi fans doute que doit en avoir jugé le (avant Anglais qui publia cet Ouvra- ge de Xempbon en 1741. à Oxford. Il fuivit, dans Ton Edition, la première que le Doc- te Allemand avoit donnée à Leipfick, ou du moins il nous allure, dans fa Préface, que c'eft la feule qui ait été fon objet princi- pal, tant pour la correction du Texte, que pour la beauté de l'impreffion. Scias , die il au Lecteur , id potijjlmum fuiffe in votis 9 ut hune libellum no-vo Ctdtu , & , ut fpero , pulchriori , quam quo antè ornât us erat , gxbi- : , feu Textus puritatem , feu Typographies nitorem fpecîes. Qua de cauja unam Editio- nem prœcipuè fecuius Jum , illam feilicet quam expolivit & cajligavit Vit Cl. Erneflus. Mais comme ce nouvel Editeur, qui fe nomme Bolton Simpfon , n'a point borné fes vues aux be foins de la JeunefTe qui eft encore dans les Ciafîes , il a rétabli la verfion Latine , que fon Modèle avoit fupprimée , chacun d'eux ayanc fes raifons pour la différence de ces arran- gemens. Difons tout d'un temps que la Tra- duction Latine qu'il a confervée , & placée au deflbusdu Texte Grec, eft celle de Leun- clavius retouchée par Mr. JVells , dans la belle Edition de tout Xenophon qu'il publia en 1703., à Oxford, 8vo. cinq Volumes. Quant au relie le nouvel Editeur, de cet Ouvrage du Philofophe Grec, ne s'eft pas tellement modelé fur celui de Leipfick, qu'il n'ait fongé à le furpafier. Non feulement l'on Texte eft en plus beaux Caractères , & parcage en Chapitres , ou Sections, ce que Tome XXL Part L N l'autre 194 Bibliothèque Britannique, l'autre n'eft pas , mais encore fes Notes "font en plus grand nombre , puis qu'à celles de Mr. Ernejli , il en a joint, quoiqu'avec choix, de Leunchz lus , de Portas , de Wells, & des Tiennes. Néanmoins en cela même il efl parfaitement entré dans l'efprit du Docte Allemand, Car l'inutile & faflueufe oftencation de lavoir, efl. entièrement ban- nie de toutes ces Notes. Il n'y a que le ilmple neceiïaire, ou pour fixer la meilleu- re leçon , ou pour éclaicir ce qu'il y a d'obf- cur dans le Texte, & dans ces occafions là même la concifion ne peut être plus grande , fi tant efl même que quelquefois elle ne le foit pas trop. Donnons en quel- ques Exemples, & pour éviter l'embarras du triage, tirons les du premier Livre, en com- mençant par le Titre général de la Pièce. On fe fera fans doute apperçu que , dans la Traduction Françoife , que j'en ai don- née, je l'appelle feulement, les Mémoires de Xenopbon, au lieu que dans la Latine ce font les Dits mémorables de Sourate. J'ai un peu heuté îà-deiîus, parce que cette der- nière a pour elle l'ufage approuvé par Leun- ■", & défendu par une Note que Mr. on lui attribue en ces termes. Ri Libri m ctrû/avftéfevfmjtn Zuxçet]uç babent, quod So- cratis Mores ac vivendt ratio, cum ils, qu$ adfamliares fuos dijferere foleret, in eis ex- fonvitur. Eqyukm bos £*•/**&££/**!*, dixi ïvl e m o r a s i l i u m Lïrros, quia fie loquï efyét âaeàpnjfwevet*! 9 dijtii'.:, fa&umoe me Uir. Comme je n'ai que l'EditiOù de Bafîe de Avril, May et Jctn. 1743. iqj de 1595., oh cette Note ne fe trouve point parmi celles de Leunclavius , je ne fai fi elle ne feroit point plus longue ôc plus raifon- née dans l'Edition de 1569. Il me femble feulement qu'elle auroit dû l'être. Car 1. il effc faux que le Titre original de cet Ou- vrage ait été «wcfmfMtviA&lwi 2#x£*7*ç. Il ne porta jamais fimplemenr. que celui d'«xê= wnonuuxT*: il n'en a point d'autres dans le Texte Grec de toutes les Editions ancien- nes & modernes, & pour dire quelque chofe de plus , les anciens ne lui en connurent point d'autre. Nous ne pourrions en don- ner de plus fur garand que Diogene La'ër- et ouand il parle de cette Pièce de Xenophon. (a) Tlpa7oç , dit 11 , vTOTr.fj.nuToiutvti tu, >jycf*n*9 itç ùvêpetTXi; y/yuy£v:>cî'prou)!r,u.oievu.ei7ei (Ttyçccr^Xf. C'eft- à-dne:,, Il elt le premier qui ait communi- „ que au Public ce que les gens fe difent,- ,, en l'intitulant <*roiurttuonuy.XTd, " (b) Et plus bas fpecifiant les Titres des principaux Ouvrages de ce Philofophe, c'eft le feul qu'il donne à celui-ci. 2. Tout ce qui efl ajouté, dans la Note, ne_ juflifîe en aucu- ne façon la Traduction Latine de ce Ti- tre, Memora \>cratis Dictorum. Il effc vrai que le verle KTroftrvuovsveTêxt , fîgnifie eonferver , eu rappeîler lu mémoire des ebofes dites ou faites; il efl vrai encore que, dans ce Livre, Xencpbon rapporte ce que Socrate avoit, à fon avis , fait ou dit de plus mé- morable : mais il ne l'eft point du tout que le (a) Dioe. Lsërt. Lib. II. {T. 48. (b) IbiJ. il. c7. N 2 io6 Bibliothèque Britannique, le feul Mot Grec 'AvéfAwimtufutT» doive être traduit par les Dits Mémorables de Socrate ,à moins que ce ne foit par voye d'Eclairciffe- ment & de Paraphrafe , & il ne l'cft pas da- vantage qu'il ne s'agifle ici que des Dits Mé- morables de ce Philofophe. 3. Ce que les Grecs appelèrent ' A^fM^tn^x* , furent les Libri Memoriales des Latins , & ce que nous qualifions en François, de Mémoires , le me- murabile ne fe difant que des cbofes , & non des Livres qui les contiennent , ainfi que (a) Mr. Burman l'a judicieufement obfer- vé. En effet Aulu Gelle , fe propofant, dans- fa Préface , de juftificr le Titre de Nuits Attiques qu'il donnoit à fon Ouvrage, v raf- femble la plupart des Titres que les Grecs s'étoient avifés de donner , arbitrairement , aux leurs , & dans ce Catalogue , (b) eft , dit ï\,qui Memoriales titulum fecerit. J'avoue que la Leçon de cet Endroit n'eft pas la même dans toutes les Editions , puis qu'il y en a plufleurs qui portent, Memorabiles. Mais un (c) favant Commentateur a foutenu , avec beaucoup de raifon , que cette der- nière n'eft pas recevable. C'eft conftam- ment Memoriales qu'il faut lire, & la chofe eft fi vraye que dans un autre Endroit ou le même Aulu- Gelle parle, dire&ement , de l'Ouvrage de Xenopbon & le délïgne par fon fujet principal, il lui donne le Titre de fes Commentaires , qui eft celui que l'on donne en Latin à ce que nous nommons en Fran- çois (a) In Suetonii Casfar. C. 7- (6) A. Gel!. Nc&. Air. JPrxf. Ce) I. Frcd. Gronovius in Joe- Avril, May et Juin. 1743. 197 çois des Mémoires, (a) Xenophon in Libriss quos diâorum atque faàorum Socratis Commen- tarios compofuit. 4. Enfin fans trop appro- fondir ce que (b) Diogene Lairce iniinue , que Xenophon fut le premier qui fe fervit de ee Titre, il eft fur que ce Philofophe n'y eut en vue que de chercher, dans fa Lan- gue, un mot général qui défignât le Recueil qu'il fe propofoit de donner de diverfes chofes qui n'étoient liées que par la perfon- ne, ou l'objet qu'elles regardoient en com- mun. Ce mot parut en effet (Y) fi com- mode qu'il fut, dans la fuite , adopté par d'autres Auteurs pour des Recueils (d) de toutes les fortes , comme par Arifiode- me , pour des contes à rire , & par Lyn- cée de Samos pour l'Hiftoire, ou que plu- tôt on le reçut dans l'ufage pour marquer tous les Recueils Hiftoriques. De là vient que Jujlin Martyr (e) s'en eit fervi pour ex- primer le Corps de nos faints Evangiles. 'ot y*ç à y.xAsÏTctt Evctyyeï.tu , £7*'$ irocçsèeûKotv CvC. Mais c'en ett allez & peut-être trop fur cette première Note. Pour en trouver une autre que j'aurois cru mériter plus d'eten- duë, je n'aurai pas loin à courir. Elle fe prefen- (a) A. Gel! No<3. Articae. Lib. XIV. C. 3. {b) TJbi. fup. Lib. II. (c) Cependant celui (J'w9ro^««T«« fut toujours plus ufîté parles Aurus- (d- Les deux Exemples que j'en cite font tire's d'Jtbenée. (e) juft. Martyr Apcrl. I. Cap. 86. Pag. 150, Edit. Qxon. 1709. N 3 ip8 Bibliothèque Britannique, prefente à la 2dc. Page, & regarde le Cha- pitre 3. Là Xenopbon qui fe propofe de juf« tifier Socrate de l'accufation , qu'on lui avoit intentée, d'innover dans la Religion des athéniens 9 en n'en admettant point les Dieux, pour leur fubftituer d'autres Divinités nou- velles, répond que cette accufation n'étoit pas fondée , parce que fon Maitre n'intro- duifoit rien de plus nouveau que ce que faifoient d'autres perfonnes qui admettoient la Divination. 'O èe ûiïev xetivolepoi lii 5 s£ Ç>ifJLeu$) xeci G-vy.ôotetç nui êvrlaiç. Il articule là quatre efpeces différentes de Divina- tion, que Socrate admettoit & refpe&ok comme d'autres, & la quellion eft de fa- voir quelles font celles que l'Auteur fpe- cifie. On s'attend donc à le trouver dans une Note. Auffi Mr. Simpfon en a-t il fait une de fa façon là-delTus. 11 y dit, ce qui faute aux yeux, que les 'Otavoït fe doivent entendre de l'Art des Augures , & que les ®vrUtç déiignent celui des Arufpices. Il y ajoute, ce qui eft auiïi très probable, que les Zwp_jSôA* renferment tous les moyens de deviner qui ne font fondés que fur la Con- jecture, telles que peuvent être les confe- quences que l'on tire des Songes , des Evene- mens finguliers , des Prodiges,& d'autres cho- fesfembiables;efpece de Divination que (a) Cicer on di (lingue de celles qui ont des règles, quce funt pofita in monumentis £? difciplim , en difant de celle-ci que les chofes s'y expli- quent fur le champ par la feule conjectu- re, (a) Cicero. De Divinat. Lib. I. Cap. 31. Avril, May et Juin. 1743. J9? re, fubito ex tempore conjeàura explicantur. Mais il refte la quatrième forte, qui efl exprimée par le mot de Qfo*tç9 fur laquelle le Commentateur propofe d'abord le fenti- rr.ent de Mr. Spanbeim qui croit (a) que ce- la doit s'entendre des Oracles que l'on aîîoit à confulter en divers lieux de la Grèce. Ce- pendant il donne la préférence à l'avis de Levnclavius qui a traduit ce mot par celui d'Omim, ou de Préfages , entendant par là ceux qui fe tirent de certaines choies que l'on entend dire aux hommes fortuitement. L'Autorité qu'il en produit e(t 1. celle de Sex. Pompejtu Fefius , (b) qui dit, Omn9 vehtt O reme::, quod fit ore , mais il ne gne pas prendre la moindre connoiilance de ce qui fuit immédiatement ces paroles. Au- ra quod avibus, aiiove modo fit; ce qui îuppofe que l'Omen des Latins le difoit de tous les préfages, à moins que l'on n'ad- mette dans le Texte la Correction que Sca- liger a placée à la Marge , quod non avibus (Sec. & qui reftreint pourtant la lignification de ce mot beaucoup plus que ne le demande J'ufage. La 2de. Autorité, que Mr. Simpfon allègue, efl celle de Ciceron dans les paro- les fuivantes. (c) Neque folum Deorum voces obferuitavernîit Pythagorœi ,fed etlam bominum quœ (a) Notae in Juliani Opéra png. 97. Cette Note très favante, & trïs curieufe regarde un endroit de la première Oraifon de l'Empereur fu'.un. (£) S. Pom. Fcftas, de Verb. fignîf. p2g. 139. Edit. Santand. 157)-. l'Article n'eft pas fa*Fe/iui. mais de Ton impertinent Abbriviatcur , le Diacre BauL (c) De Divin. Lib. I. Cap. 4f. N4 2co Bibliothèque Britannique, quœ vocant omina. Mais cela dit il en effe'- que le QÎw des Grecs foit YOmen des Là- tins! La troiiieme autorité eil celle de Xï- nopbon lui même qui dit dans la 12. Se&ion de Y Apologie de Socrate-^ »«/ ô< $>t*.*is âvfyvini* xpauew, diftinguant cette voix de celle des Vieux dont il venoit de parler. Quelque décifif que cela paroiffe, il ne l'eu point effectivement, parce que dans l'endroit des Mémoires , où il parle de cette efpece cie Divination, il ne la détermine point, com- me il le fait dans celui de Y Apologie. Dans l'un il y a 0«V*'« en général , dans l'autre il y a çiftuiç uvêpd>7rm9 diflinguée en particulier de la voix des Dieux , & puis que le même mot (a) fe dit de l'un & de l'autre , pour- quoi Mr. Simpfim veut il que le fentiment de Leunchvius foit préféré à celui de Mr. Spmbeim? Ne vaudroit il pas mieux les ad- mettre tous deux à la fois, puis que rien n'oblige à les feparer,& qu'il paroit que So- crate ne renvoyoit pas moins aux Oracles, qu'il n'étoit attentif aux Préfages? Xenophon s'en explique fi clairement un peu plus basa la Section 6. que l'on ne fauroit en douter. Ces deux Exemples fuffifcnt pour faire fentir le défaut des Notes 011 l'on affecte trop la brièveté. Tantôt on patte en fil en - ce des ebofes que tout le monde n'entend pas; tantôt on les éclaircit par des Renvois à U) On ne ùuto'v le prendre autrement , dans un Endroit tJe la Cyropedie Liv. VIII p. 6^- de ;'RJit d'Oxf. 1717. Voient là-deflTus ja No'edeMr. gutcb'mfon Ajoute* y les Sçholies (reques , furies V^n tf\*& 161- de l'Oeuf. Tyran-, de $opkcfk< Avril, May et Juin. 1743. 2ot à des Ouvrages que le Lecteur peut ne pas avoir, ou qu'il ne peut confulter fans laitier fa lefture ,* & tantôt on ne difeute qu'à de- mi les chofes les plus importantes Ceft îe revers de ces Commentaires prolixes qui ne font, la plupart du tems, que Compila- tion indigefte & que Verbiage inutile. Ces derniers fatiguent ordinairement fans inf- truire, & les autres ehagrinent par des de- firs qu'ils fontnaitre, àc qu'ils ne fatiffonc pas. Bien d'autres en ont fait l'obfervation avant moi , &qu'y ont ils gagné? Le Monde va fon train , & nous laide dire. Laiiïbns donc là les Notes, & difons un mot de l'Ouvrage, Ces Mémoires ne font pas moins d'honneur au Difciple qu'au Maitre. L'un y dit de fi belles chofes fur les Vertus , fur les Vi- ces , fur les Devoirs de la Vie , fur la Natu- re des Loix, fur la fin des Gouvernemens &c. , ce l'autre les lui fait dire avec tant de douceur , tant d'élégance, tant de naïveté, tant de force, & tant de fineïTe , que l'on ne fait qui des deux doit être le plus admi- ré. Il faut néanmoins convenir que fi le plus grand Philofophe, de l'Antiquité Pay en- ne, mérita que l'on érigeât un monument éternel à fa gloire 5 il eut le bonheur fingu- lier que les deux plus beaux Efprits de ion vSiecle travaillèrent, après fa Mort, comme à l'envi, l'un de l'autre, à le vanger du peu de juflice que les Athéniens lui avoient rendu pendant fa Vie. On fait bien que je veux parler de Platon & de Xenophon, les deux Elevés de Socrate , qui fe fignalerent avec le plus de chaleur, pour la défçvXe N 5 de. 202 Bibliothèque Britannique, de fa Réputation , & qui par leurs Ecrits ne contribuèrent pas peu, fi non à rendre fon nom plus illuftre , au moins , à en confer- ver dans tout fon éclat la Mémoire. Mais lorfque j'ai dit qu'ils y travaillèrent tous deux comme à l'envi, ce n'efl point au hazard que j'ai parlé de la forte. L'Anti- quité nous les reprefente comme deux Ri- vaux, qui ne fe regardoient pas de bon œil, & qui firent éclater quoique tacitement leur jaloufie aux yeux du Public. C'efl ce que nous apprenons fingulierement lYAuIu- Gel- k. (a) Qui de Xenopbonte 9 dit il, Plalonif- que Vite £? moribus pleraque onmia exquifiiijji- mèfcripfere , non abfuijje ab eh motus quofdam tacitos , cif occultos fimultatis œimdationifque inutiKS putaverwit. Il ajoute pourtant que l'on ne put en juger que par des conjectures tirées de leurs Ecrits, ôc dont la première eft qu'ils n'y ont jamais parlé l'un de l'au- tre; ce qui n'efl pas auffi exactement vrai, quAulu-Gelle le dit; car le nom de Platon le trouve mentionné dans le III. Livre de ces Mémoires y ch. 6., quoique d'une maniè- re bien feche. Bien que les autres raifons, que l'Auteur Latin allègue, foient en appa- rence mieux fondées, il ne laifle pas de fou- tenir qu'il y eut , entre ces deux illuflres , plus de noblie émulation que de baffe jalou- fie. Athénée (b) ne femble pas en juger tout à fait aufTi favorablement pour ce qui regar- de Platon dont il rapporte divers traits qui lui font peu d'honneur. A cela près c'efl en (m) Au. G IL Nc& An. Lib. XIV. Cap. ;. (b) Athcn. Uipnol. Lib. XI. p. J04.. Ed. Lugd, 1612. Avril, May et Juin. 1743. 203 en gros la même chofe , tant pour les principes de la jaloufie, que pour les preu- ves conjecturales que l'on en donne. Qu'importe après tout de favoir avec pré- cifion,de quelle nature fut leur émulation, ou quels en furent les Motifs, quelles en furent les fources ? Difons feulement que fi ces deux grand> hommes écrivirent, com- me à l'en/m^ pour ia glorie de leur commun Maitre, & s'ils le firent même avec une aflez grande diverfité de fh'le, de tour, & de luccez, on eft généralement convenu que Xenophon l'a fait d'une manière qui tient plus de la vraifemblance, ou qui même a tout l'air de la vérité Chez lui Socrate par- le, comme un Philofophe qui a de grandes lumières, & qui polTede toutes les beautés de fa Langue , parlerait dans la Converfation ou dans une Ecole. Platon au contraire , eft toujours grand & pompeux dans fes Expref- fions , fub lime & profond dans fes longs rai- ibnnemens, riche, abondant, & fleuri dans fes idées. On ne parle ainfi que la plume à la main, & que dans les Livres. L'un eft un Hiftorien , & l'autre n'eft qu'un Orateur. La chofe eft fi vraye qu'à cet égard , Jonfius (a) a bien voulu confentir que ces quatre Livres du premier fufTent mis au rang des Hiftoires. C'eft une con- ceflion qu'il fait à l'occafion d'une groife beveue que Suidas a commife. Ce Lexi- cographe dit dans l'Article de Xenophon qu'il eft ,, le premier qui ait écrit la Vie „ des (4) J. Jonfius,dc Script, Hift. Phil. Lib. IC7. Pag. 44. td. ïca. 1716. 204 Bibliothèque Britannique, „ des Philofophes , " ^7©- «Vf *+* /Swç ^a«- r«p*». Et l'Auteur fait très bien vojr que c'eft une faute de négligence, pour n'avoir pas bien compris ce qu'avoji dit Diogene Daè'rce y (a) içoçw pttoriçw *•£&!<& 'éy^u-^e , qu'il fut „ Je premier des Philofophes qui ait 3, écrit l'hiftoire. " Les Réflexions que Jonfius fait , Jà-deflus, pour démontrer l'er- reur de Suidas & de ceux qui l'ont copié, font excellentes, & fes raifons invincibles, Mais le P. Du Cerceau (b) n'auroit pas man- qué cette occafion de faire fentir que la Lan- gue Françoife eft plus correcte, dans la conf- truclion de fes Phrafes, que la Greque qui par le renverfement, qu'elle admet, donne lieu à quantité de faux lens. Le Docle Al- lemand qui n'avoit garde de faire cette ob- fervation , fe contente de conclure, que fi J'on veut néanmoins prétendre que Xenopbon ait écrit la vie d'un Philofophe, parce qu'il a publié ce qu'Aulu-Gelle, appelle les Com- mentaires des Dits £f Faits de Soçrate , il ne s'y oppofera point pourvu qu'on lui accorde suffi que Suidas , pour parler avec exactitu- de, auroit dû dire, que Xenopbon a été le pre- mier des Philofophes, qui ait écrit la Vie d'un homme de cet Ordre. Au refte quoique V Apologie de Socrate ne foit pas annoncée dans le Titre général de ce Volume, elle ne laiffe pas de s'y trou- ver , à la fuite des Mémoires , imprimée dans le même goût, & partagée en 34. Sec- tions qui font toutes extrêmement courtes, ARTI- (») Diog. Laêrt. Lib. IL fl", 48. le) Voi. les Reflexions fur la Poë'fic Françoife &c. par le R. P. du Cerceau , Chap. \. Avril, May et Juin. 1743. 205 ARTICLE VIII. NOUVELLES LITTERAIRES. De Glascow. jDObert Foulis vient d'imprimer PhilofophtA Mo- falis Infiitutto compendiari*, Ethices & JuriÇ- pudent'u Naturalis Elément* continent, Lib. III» Auftore Francisco Hutcheson, in Acade- mià Glafcuenft p. p. Un Vol. in 12. de 329. paJ ge-. Mr. Hutchcion divife la Morale en ce qu'il appelle Ethica propre d'ici* , par où il entend cette partie de la Morale qui régie les Mœurs ou i'inte* rieur des H «mines ; 8c Jmi(fruJenti* nxturalis. Cel- le-ci fe fubiivifc eu trois parties: I. Jur'iÇpruàtnt'i* privata, q'û enfegne les Loii & les Droits qui ont lieu dans l'état tie la Liberté* naturelle i 2. Oecoao* mie* , qui apprend les Droits 5c les Devoirs des Fa- milles j 3. Pollue*, qui traite des difTerens Etats, & de leurs droits réciproques. Mr. Hurchefon expli- que Its Elemeos & les Principes de toutes ces Par- ties de la Morale. On trouve ici les mêmes idées fur le fe ns moral , qu'on a déjà vues dans les autres Ouvrages de l*Il!uftre Auteur. Il femble que pour juuifier ces idôes il fuffife d'en appeller au Cceur de l'homme, 5c à ce que chacun fent 8c éprouve chez foi. Nous copierons ici deux paflages de notre Au- teur , qui ferviront d'exemple, & qui pourront faire connokre ks fentimens à ceux qui n'en font pasin£ truies. „ (a) Sunt & fubtiliores alii fenfus, dit il, „ & uriliores ; cualis eft Sympatkia , five fenfus cora- „ munis, cujus vi fuper aliorumconditione c^mmo-* „ ventur homines j ex aliorum felicirare g-udi-jin, ,, ex infortunio mœrorem colligentcs; prout 8c ri- „ denribus arrident, & jfiemibus collâchrymant, e- „ tiam ubi nul.'a fuse conditionis liabebatur ratio Un- P> de fit ut nemo fatis beatus efle pouat, ex eo folo >» qwod {*) Lit. I, Csf. I. s IX, *06 BrBLIOTHEQtJEBRITAWN'IQUEj „ quod fibi fuppetant omnia, ad vitas copiam &: ju- 3i cunditatem facientia Hoc eti'am expàit cjuiique, ^ ut fuppetant ea , quae & aliis fibi cari* « itam prsef- „ tarepoflint beatrmj horum enim mi eria omnîs ,, virae fi/ae ftatus perturbabitur " „ (4) Quod vero attinet ad vires ariimi iiiuftrio- „ res, voluntatis motus, & graviora agen. i confi- 3, lia, iniïtus eft omnium divinissi m us ille 3, Sens us, déco um, pulchrum, honeilum , in ,, animi ipfîus motibus, ccnfiliisj dicfrs , fa&ifque „ cernens. Hcc fenfu certum hcmini ingenium, & 33 indoles, quoddam agendi genus , v'ux ratio quae- i3 dam & inftitutio , ab ipsâ N a t u r£ commcn- 33 datur, arque in confentaneis cfôciis peragendis & „ recordandis fenfu mens pertentatur laetiilimo; 3, contrariorum vero omnium pudet, pigctque. A- >3 liorum etiam facla £c confîJïa hcnefta favori pro- „ fequimur & laujib* s , eosque in qu tus eft vir- ;, tutis {'gnifîcatio majore ampltctimur b-.nevolentia „ Sccaritate: Contraria aliorum racla aut confiJia „ damnamus 8c deteflamur. Qua; hoc fenfu com- „ probantur recta dicuntur & puichra, & vjrtuium 3, ncmine app»llantur;quae damnantur fceda dicun- „ tur, aut turpia, aut viriofa. " Voilà ce Sens Mo- rai, ou cette efpéce d'inflincl , qui nous fait approu- ver lebenu, l'honnête, le vertueux, 5c condamner le honteux, le defhonnêté, le vicieux, comin* mal- gré que nous en aions. D' E D I N B O U R G. Mr. H. Home a publié il n'y a pas îongtems, The Decïfior,s of the Court of Sejjlonfrom it'sfirft /»- ftitut.cn to the présent time', abridged, and di/ejîed unJer proper Heads in Torm of a Dicrionxry, Çre» C'eft à dire ,• ,, Les Décidons de la Ccur de Juftiee 3, (en EcctTe) depuis ion Etabliflement jufqucs à 3, prcfent, abregcts 8c redoras fous les Chefs ccn- ., ver.ables, en forme de Dictionaire. Le tout re- 35 cueilli (<*) ibid. g, i. Avril, May et Juin. 1743. 207 3, cueilli d'un grand nombre de Manufcrits,quin'a» „ voient jaamis été publiez. Se des Dccifions im- ,, primées. ' En deux gres Volumes in folio. On trouve d'abord à ja tête de cet Ouvrage une Lifte des d fferens Recueils dont l'Auteur s'eft fervi pour dretfer celui-ci. Cela eft luivi d'une Préface, où Mr. Home rend compte de Ion Ouvrage. Il dit d'abord qu'en Ecolfe on n'a que peu de Loix écri- tes, âc que les Jutes fe règlent pour l'ordinaire fur la Pratique comuiunc,cV fur ce qui a déjà été déride*. De forte qu'il ne peut être que trè- utile de rafïem- bler methodiquement en nu feul Corps les Dédiions des Cour*. Souveraines, Se de les range.: dans un or- dre commode, d'autant plus, qu'elles étoient deve- nues fi nombriufes, qu'on ne pouvei: y avoir recours fans un embarras extrême. En lime i'Aureur fait voir l'utilité ue ce Droit Coutumier tel qu'il efi éta- bli en Ecollc: [1 Soutient même qu'il eft préférable au Droit écrit, c'eft à d rc aux Loix établies pir les Àôes de Parlement. Ces Loix, quoiqu'elles (oient faites à l'occafion c!e q.- [que cms particulier, s'éten- dent prefque t> ùjour^ * .eu- e Cas fêmblablesi de la vie^t que comme on ne (auioit prévoir tous les cas pcflibles , (ouvert en remédiant à un mal , on en Ccuic un plus grand. Au lieu qu'une Cour de Jufti- ce, qui n'eft point gênée par des Loix eenres, ne e rien en gênerai, «Scproporri nrefes Décifïons à tous les Cas particuliers, à mefure qiril fe préfen- icnt. Mais , s'il m\it p mi- >.Je le dire, il faut pour qu'on n'ait point !ie:j de fe plaindre, que les Juges foient très de(intérerez 6c très équitables. Car n'étant point penez par des Loix écrites, rien ne le empêche de p'on>r,cer des Senrences injuftes. îl ne lero:t peut-ê;re pas impoiiîb'e d'en citer des Exemples 4e la Chance! rie d'Angleterre, au moins des tems qui ont piecedé celui ..le l'Illuftre Talbot («j, dont (j) Il eft mort Hy a quelques années, & Ml îc Chevalier Philippe ïoik, maintenant Bacon de Haid-vick , lui a fucecdê. to8 Bibliothèque Britannique, dont on pleure encor la mort. Car comme cette Cour eft une Cour d'Equité, le Chancelier n'ift pas obligé île fiiivre toujours à la Lettre les Actes de Par- }emcnt,& Tes Sentences n'ont pas roûjoms été con- formes aix Régie*, de l'Equité; aufli JaCbambred<3 Seigneurs à laquelle on peut en appcllcr de la Sen- tence du Chancelier, a-t-clle fouvent caffé fis Dé- crets. Mais ces Appels coûtent des fommes irn- menfes , aufli bien c]ue toutes les Procédures eu Chancelerie. Pour revenir à l'Ouvrage de Mr. Home, nous â'outeronsi qu'on trouve encor à la tête de chaque Vo'ume une ample Table de tous les Titra dont il y eft traité, avec leurs fubdivifions , & des renvois aux pages où il*en eft parlé. Cet Ouvrage eft fuit eftimé des Gens du Métier. De Londres. A. Millar Libraire à PEnfeigne de Buchanan dans le Sfand, vient de publier une quatrième Edition de YHiJloire delà Pbilofopbie du fameux Stanley. Thé Hificty ûf Philo fophy, contatmng thé Life, Opinians, uiclions andDifcôurfés ofthe Philo (opbits ofeve*y Serti &c. On a corrigé dans cetie Edition les fautes qui s'étaient gli {fées dans toutes les précédentes, tant dans le Texte, que dans les Notes. On a aufli comparé exactement les Citations & les Renvois avec Us Ori- gnaux, Ôc avec la Traduction Latine imprimée à Leipfic. Cette nouvelle Edition eft en un Volume in 4,to. de8z8pags en deux Colomnes , & t.'ès bien im- primée, comme tous les Ouvrages que Mr. Millar donne au Public. On trouve chez le même Libraire une feeonde Edi- tion in 4t0- du Syfeme Jntelleâîuelj du célèbre Cud- worth. C'eft Mr Thomas Birch qui a pris foin dé cette Edition. Il a marqué au bas des Pages les En- droits où Te trouvent les Pafiages que Cudworth ci- te , ce qu'on n'avoit point fait dans la première Edition* îl a mis aufli à la tête de celle-ci un Récit de la Vie k Avait, May et Juin. 1743. 205 & des Ouvrages de l'Auteur , dont plufieurs font en- cor en Manufcrit. Nous rendrons compte de cette Vie dans un de nos Journaux fuivans. Le même Libraire a aufli imprimé depuis peu The Odes, Epcdts, and Carmen feeuhre of Horace in La- tin and Englifh , avec des Notes Critiques tirées îles meneurs Commentateurs de ce Poète tant Latins que F rançois : Par Mr. P hilippe Francis ,Mi- mftre. La Traduction , qui eft en Vers, eft eftime'e des ConnoMcurs. On trouve au bas des Pages non feulement des Noces qui fervent àédaircir le Texte, mais aufli lesPaflages femblabies ou parallèles des au- tres Poètes qui ont imité Horace, ou qu'il a imité lui- . Pluiieurs de ces PaiTages ont été tradu'ts en Vers par Mr. Dunkin, Minière, qui a aufli traduit un grand nombre des Odes d: Horace. La nouvelle Edition des Oeu res du célèbre Robert Foyle, que nous avons annoncée dans un de nos Journaux fa), eft adir^lement imprimée, & on com- mencera à la débiter vers la fin de ce mois (b). Elle eft en cinq Volumes in folio, & elle renferme pluiieurs Traitez a- mis , qui n'ave ient point encor pr.ru, outre une nou- velle Vie de Mr. Boy le e'erite par Mr. Thomas Bircb, en partie fur Ici Mémoires que Mr. Boyle avoit dref- fei lui-même. Cette Edition fe trouvera chez AMI- lar , qui pub'iera au fil dans peu , Mifcellanies , by Hen • ry Fielding, Efq. C'eftàdire, „ Oeuvres mêlées de „ Mr. Henri Fieliing, en trois Volumes in 8vo. Le ,, premier Volume contiendra toutes fes Oeuvres en „ Vers . & quelques courts EflTays en Profe: Le fe- „ con !, fon Voyage de ce Monde à l'autre, & le „ troifîéme l'Hiftoirsdc Jonathan Wi'd (c)Ecuyer, ,, perfon- (*) Biblioth. Britan. Juillet , Uoht & Septembre 1742, /•'£• 417, 41?. (b) De Mars, 174J. (c) Fameux Voleur & Rccclcur3 qui fut pendu à Londres il y a quelques années. Ime XXI. Part /. O oio Bibliothèque Britannique, ,, perfbnnage renommé à jufle titre. Dans cette Hif- ,, tcireon mettra dans fon véritable jour, non feu- ;, lement fon Caractère à lui , mais auifi celui de plu- j, (ieurs grands hommes de fon iiécle." Cette derniè- re pièce eft i:ne Satire extrêmement vi e & piquante. N'oublions pas d'avertir que le même Libraire a achetté tous ies Exemplaires qui reftoient de la belle Edition que S- Bi.ckley publia il y a quelques années de l'Hiftoire de Mr. de Thou en fept \ oluimsin folio* Mr. Grove lavant Jurifconfuke a publié il y a quelque tems le premier Volume d'un Ouvrage, qui fera curieux & intéreffant: il a pour titre ihe Htftoty of the Life and Time of Cardinal Wolsey , Frime- M inifter of Henry VIII. „ Hiftoire de la Vie ,7 & du Siècle du Cardinal Wolfey , premier Miniftre ,, t!e Henry VllI. , Contenant I. un expofe de fon „ Origine, 8c des différens degrez par lefquels il fe „ pouifa dans le monde. On y fait auîïi l' Hiftoire ,i d'Angleterre 3c des Pais étrangers depuis la mort ,» d'Edouard IV. jufqu'à la fin du Règne deHenry VII. ,, IL L Hiftoire de la Conduite du Cardinal pen- 5, daat qu'il fut premier Minière, commençant avec „ le Régne de Henry VIII. ,& continuant par veye „ d'Annaïesjuf ju'à la diigrace & à la mort deWolfey. », III. Mémoires des Régnes de Charles Quint» ,, de Henry VIU. 5c de François I., depuis la mort „ du Cardinal jufqu'à cel'ede chacun de ces Princes. ,, IV. Hiftoire fecrette du Cardinal \Volrey e'eri- 3, te par George Çavendif fa un des Genrilshommes ,, de fa Chambre, fous le Regns de Philippe & Marie."' Cet Ouvrage renferme aufij l' Hiftoire d? la vie 8c des actions remarquables des perfonnages les plus diîh'ngucz de ce tems là , 6c eft entremêlé de Réflexions Morales & Politiques. Le rout recueilli d'anciens merumens , des Hiirorïens , & d'autres Mémoires tant imprimez que manuferics, & orné de Tailles-douces. A Londres chez J. Stagg 3 ]. Crindley, Sec. in Svo. Ce Avril, May et Juin. 1743. 211 Ce Volume contient 401 pages, 6c s'étend depuis ia Naiiîance de Wolfey , juiques à [a more de Kenri VU. Il ne s'agit guère de Wolfey dans ce premier Tome , fi ce neft au commencement cù l'Auteur rapporte fa Naiflance & ion Education , & vers la fin ou ce £rand homme commence à pa- roitre fur le Théâtre du Monde. M.lis le refte n'en cft pas moins intdreiTant , puifque Mr. Grove y fait un récit fort ne:, ôc quoique concis, aiïez détaillé des Guerres d'Italie, êc des événemens le* plus re- marquables qui font arrivez en Europe durant le Pé- riode que fon premier Volume rentcime. Il paroit e'erireavec beaucoup d 'iir.r & f^s Reflex ioni qui ne font ni trop longues ni trop fréquentes , (ont pour l'ordinaire jufhs ck bien fondées. Le feco~>d Volume qui effc imprimé paraîtra dans quelques jours (<*). L'Ouvrage entier lera de quatre Vo- lumes, qui coûteront une Guinée en blanc. Nous donnerons l'Extraie des deux premiers Volumes dans notre Journal fuivant. Jcnn Whiflon (b) Libraire dans FleetfVeet débite aâuellemenc le Recueil que nous avons annoncé dans un de nos journaux precedens {c) , & qui a pour . Original Letters and Paf>trs of State adref. fed to Oliver Cromvvell by the tnoft emintnt j.er- for.s of the'ir time ; on peut voir le Titre en François dans l'endroit de cette Bibliothèque que nous avons cité à la marge. Nous ajouterons feulement que ce Recueil coule neuf Cheiins en blanc , c'eft à dire, entre neuf Se dix francs urgent de France. Voici une autre Collection qui peut fervir à e'claircir une Partie de l'Hiftoire d'Angleterre. A Co.leclion (a) On éciit ceci le 15 de Marc, 174? . M eft fils du célèbre Guillaume V/liifton , Aftronome & Mathématicien, & plus connu peut-être parlons ifroc. (C) Biblioth Siiun. J*. 1 4iC Û 2T2 Bibliothèque Britannique, Coihftion of State Letters of the honorable Roger Boyle the firjl Eatl of Orery , &c- » Recueil de 3? Lettres d'Etat de Roger Boyle premier Comte o d Orery, & PreGdent de Munftcr en Irlande; „ contenant une Correfpondcnce fuiyic entre lui Se ,, le Duc dO/mond, depuis la Reftauration jufqu'à j, l'an 1668; avec pluueurs autres Lettres, & diver- 33 {($ p e'ces d un autre genre , Se en particulier la „ Vie du Comte d'Orery écrire par fon Chapelain , „ Mr. Thomas Morrice. ,J Un Volume in folio, chez J. Stagg , dans la Salle de Weftmunfter: le prix cû de dîxhuît Chelins. Les Knaptons près de S. Paul ayant fait graver pir Mefffs. huera- en & Venue les Portraits des plus ilîuftres Peifonr âges de la Grande- Bretagne, d'après les Originaux cjui fe trouvent dans les Pa- lais du Roi on chez divers Seigneurs & autres par- tiliers , ils ont engagé Mr. Thomas Birch à corn- pofer fa Vie ou l'Eloge de ces perfonnes. Il vient donc de publier les Eloges de quatrevingt de ces grands hommes en un Volume in folio, fous ce Titre: The Lives and ChxraBcrs of eighty illuf- trious Ferfonsy tohoje Heads are engraved by Mr* Hou- braken and Mr. Verrue. Mr. Birch fuit à peu près la Méthode de Mr. Perrault, avec cette différence pourtant que celui-ci ne cite prefque jamais les Au- teurs , au lieu que Mr. Birch a fo'n de marquer exactement au bas ds pages les Ecrivains de qui i! a emprunté les partkularitez qu'il rapporte. F I N. BIBLIOTHEQUE BRITANNIQUE, 0 U HISTOIRE DES OUVRAGES DES SCAVANS DE LA GRANDE-BRETAGNE: Pour les Mois de JUILLET, AOUT et SEPTEMBRE* M. DCC. XL III. TOME VINGT-UNIEME, SECONDE PARTIE. A LA HATE, Chez PIERRE DE H 0 N D T, M. DCC. XUII. TABLE DES ARTICLES. Art. I. Pensées Libres fur la Création des Brutes , ou Examen de l'Amufe- ment Pbiloj l'optique du P. Bougeant fur le Langage des Bêtes. Par Mr. Hildrop. Pag. 213. 1 1. Remarques fur VHiftoire d'Angleter- re , tirées des Papiers Manufcrits de Humfroi Oldcajlle. 244. III. Récit Hijlorique de la Vie £f du Rè- gne deDavidRoi d'Ifracl. Par V Au- teur de /'Examen defîntérefle de la Révélation. Tom. III. 290. IV. Tr anf actions Philofophique s de la So- ciété Royale de Londres. N°. 464. 465. 4Ô6. 33i> V. Dictionnaire Hijlorique de toutes les Religions , depuis la Création du Mon- * 2 d? TABLE des ARTICLES. de jufques à aujourd'hui. Par Mr. Thomas Broughton. Pag. 362. Art. VI. Lettre à Mr. E. . . . Pafteur de la S. . . , fur les Ouvrages de Mr. ARLAUD, célèbre Peintre de Genève. 378. VIL L'Orthopédie, ou VArt de préve- nir & de corriger dans les Enfans les difformités du Corps, le tout par des moyens à la portée des Pères c^ des Mères, ê? des perfonnes qui ont des Enfans à élever. Par Mr. Andry. 405. VIII. Defiription de la Hollande, ou •Etatpréfent des Provinces-Unies, contenant une Relation particulière de la Haye, &c. 417. IX. Nouvelles Littéraires. 425. BIBLIO- BIBLIOTHEQUE BRITANNIQJJE, o u HISTOIRE DES OUVRAGES DES SÇAVANS DE LA GRANDE-BRETAGNE. Pour les Moisde Juillet, Août et Septembre, MDCCXLIIL ARTICLE PREMIER. upon thé Bntte-Creat'.on. Or ï.xamination of Father Bougeante Pbilofopkical Amufement &c, In two Lettcrs to a Lady. By John Hildrop , M. A. Rector 0/Wath , near Rippon York-Shîre, and Chaplain to the ïigbt konorab e Charles , Earl of Ai- Iefbury and Jklgin. Londen: Printed XXL Pan. IL P for ^BIBLIOTHEQUE Br IT AN N I Q.UE3 for jR. Minors , Bookfeller and Sta- tioner , in St. Clément' s Church Yard 1742. Ceft-à-dire, penfées Libres fur la Création des Brutes * ou Examen de YAmufement Philofophi- que du R. P. Bougeant fur le Langage des Bêtes. Par Mr. Hildrop , Maître es Arts , Recleur de Wath , £§ Chape- lain de Mylord Ailefbury. A Londres 1742. 8vo. En deux Lettres. Pages pour la ire. 64. & pour la 2de. 88» Bien des gens avoient crû qu'un badina- ge , tel que YAmufement Philofdpbiqiie fur le Langage des Biles , n'auroit jamais dû être autre chofe. Voici pourtant qu'el- le devient férieufe & qu'un Ouvrage , dont on n'a guère fait que rire en France , pa- roit un objet à l'Eiprit libre & profond des Arigloïs. On peut en juger par l'idée gé- nérale que Mr. Hildrop donne d'abord de l'Auteur & du Livre. Après avoir dit qu'il avoit trouvé , chez un Libraire , la Tra- duction Angloife de YAmufement , „ j'en' 3, pris , a joute- t-il , un Exemplaire, que je î, portai 'chez moi, & le lus tout entier , r, plus d'une fois, avec -h plus grande at- ,, tendon, Juillet, Août et Septembre. 1743.215- - „ tendon , & la plus grande impartialité. „ Je dirai fur le tout, que s'il n'eût pas ,, dit lui-même qu'il eft: Jéfuite, je n'au- „ rois jamais foupçonné cet Ecrivain de „ l'être, & moins encore d'être un f mieux t% Jéfuite. 11 n'a point fait d'honneur à „ ion Ordre ; les Membres de 1? Com- „ pagnie lui doivent fa voir peu de gré; d'or- „ dinaire ces Meilleurs fe tirent mieux „ d'affaire, fur quelque fujet qu'ils s'excr- „ cent. Celui-ci eft beau , & il l'a traité „ d'une manière vague & fuperficielle; „ pour n'en rien dire de pis, car je pour- „ rois ajouter, d'une manière indifcréteôc „ profane, &fi j'avois été fon Supérieur, „ au lieu de le renvoyer à la Flèche, je „ l'aurois condamné auxFetites-Maifons. " Ce début eft vif, & trës peu obligeant ; je n'entreprendrai point de le combattre ou de le modifier. Je remarquerai pour- tant que l'Examinateur y avance unechofe dont la preuve lui feroit peutêtre alTez difficile , & en fuppofe , gratuitement, une autre , qui , pour n'en rien dire de plus fort , eft certainement très dou- teufe. La première qu'il avance , avec une grande apparence de témérité, c'eft que l'Auteur de VAmufement Pbilofopbique , a dit lui-même qu'il eft Jéfuite, & fameux Jéfuite y & qu'il s'appelle Bougeant. 11 eft fur que l'en ne trouve rien de pareil dans toute la Pièce , & que cette Pièce a paru P 2 anonyme ai6BlBLI0THEQ_UÉ BRITANNIQUE, anonyme en François, tant dans l'Edition de Paris que dans celle de la Haye. On fut bientôt, à la vérité, par le grand bruit qu'elle fit en France , qu'elle venoit du R.P. Bougeant, que Tes Supérieurs éloignè- rent, afin de donner quelque fatiffaclion au Public, c'eil à dire aux Darnes qui pri- rent feu pour leurs petits Chiens, &pour leurs beaux Perroquets. Mais à cela près, il eft abfolument faux que ce Père ait dit lui-même, dans fon Livre, qu'il fe nomme Bougeant, ou qu'/7 eft Jéjùite , & plus en- core, qu'il fe foit donné le titre de fameux Jéfuite. Cela vient fans doute de fon Traducteur Ariglois, qui l'aura fait fans le confulter, & je ne conçois pas comment Mr. Hiidrop a pu fe croire autorifé à le placer fur le compte de ce Père. D'ailleurs la manière , dont l'Examina- teur s'exprime, fuppofe , auffi téméraire- ment, a mon avis, que Y Amufement Pbiïo* fopbique &c. eft mdigne d'un "Jéfuite; que 1 honneur de l'Ordre en fouffre,- & que, par conféquent , les Membres de cette Com- pagnie ne s'émancipent jamais ni à badiner nia rire. C'eft là le faire une plaifante idée de la Compagnie] Elle ne traite que des Sujets graves! Elle approfondit tous ceux qu'elle manie! Elle ne s'y égaie , & ne s'y divertit jamais aux dépens du Public! En vérité c'eft bien la connoitre que d'en juger de la forte, & que diroit donc notre Ecri- vain /inglois , s'il lîfoit les PoëGes du R. P. Du Cerceau, & qu'il y trouvât le Cou- rier JurLLET, AOUT-ET SEPTEMBRE. 1743-2*7 lier du Mans , les T.fons & les Pâtés ? Mais que dis-je3 & comment s'eft-il fait que Mr. Hildrop, qui ne paroit manquer ni de eu- riofité ni de lecture, n'ait pas fû que dès la fondation de leur Société, les Jéfuites fe font plû aux Paradoxes & fur tout à ceux qui tiennent le plus du Comique & du Ba- dinage. Ceir. au moins ce que nous en apprit il y a près de joo. ans le fameux lus Cornélius Eurhpéus , qui connoiiToit à fond cet Ordre, dent on a Hure qu'il é- toit membre lui-même, ce même un Mem- bre très conOdérabîe. Ce qu'il dit à ce fil? jet vient ici trop à propos pour n'en pas régaler le Public, (a) „ Sur les Matières ,, de Phiîofophie , & de Théologie , dit-il , „ la liberté de penfer eft grande dans la „ Société , & l'on y tient pour illuftre, „ celui , qui , fans aucun égard pour le ,. vrai, fuit fes idées particulières en enfei- „ gnant, & réuflit à en inventer , pour- ,, vu qu'il avance quelque chofe de nou- ,, veau , & qui n'ait point encore été ., dit. . . (b) Les queftions Philofophiques qu'ils f.j) Luc Gorre1 Europxi Monarchie S Utrum in fpatiis irnaginari's pofïît inftitui Navi- gatio. Utrum Inrejligentia B irach d&a habeatvir- rutem digerendi ferrum. Utrum anima? Deor.nr. fint coloratae. An Dcmcnum exercmenta fîm alex- reria hominibus in o&avo çra fu. An tympana corio A fini inféra dcieâent InteiJigemias. (<) Cap. XV. pa. ioj Fuit qui inventait a fe novum qutftionem profligaturus , uritus anni dtfpen ïto Difcipulos onf-ravit. jdusrebat "vero, an l-irba fcAis unjus effet fpeciei , cum probofeide Eîeph:rrî;. Juillet, Août et Septembre, ij^. ug „ ça une année entière fcs Difcfples fur „ une queftion nouvelle qu'il avoir in\en- ,, tée. Cette queftion confiftoit à fa voir, ,, fi la Barbe du Chat eji de la mime ef- „ péce que la Trompe de l'Eléphant? " Le même Auteur venoit de dire , avant ces dernières paroles , que (a) fi les Jêfui- ies inventent quelque chofe de neuf , tout y re- gorge de Paradoxes, comme la Mer de Ce» quilles. 11 s'en faut donc de beaucoup que le Cenfeur Anglo;s n'ait été fondé à prétendre que Y Amufement Pbihfopbique eft indigne d'un Enfant de St. Ignace , & defhonorê fa Compagnie Si ce Cenfeur eût étudié & connu Tefprit & le caraclère de l'Ordre, il en auroit porté un jugement tout contrai- re, ou du moins il n'auroit pas crû un Je- fuite renfermable dans les Petites-Maifons pour avoir érigé en Diablotons les âmes de toutes les Bétes. Car enfin à ne prendre la Pièce que pour un (impie jeu d'Efprit, ou, fi l'on veut, pour un Paradoxe de pure faillie, pourquoi faut il que pour l'a- voir faite un Jéfuite foit taxé de folie? Mais, dit Mr. Hildrop , cette Pièce eft peu mefurée & profane. C'eft une autre chofe , & fi elle eft vraie, le Jéfuite a fi grand tort qu'il méritoit quelque chofe de plus que (a) I.lem. Cap. XV. p. ior- Si qttid ipfi novi fuo Marte cit iunt , paradexis {catet, ut Mure Con~ chihii. 220 Bibliothèque Britannique, que d'être relégué à IsiFlécbe. Il s'agit donc de fournir les preuves d'une accufation (1 grave, & c'eft ce que l'Examinateur fe propofe. ,, J'avoue ingénuement , dit-il , que l' Au- 5, teur a répandu , par ci par là, danstou- „ te la Pièce, un grand nombre de cho- „ fës fort juftes&fortfpiritueiles; maiseî- „ les fe relTentent plus de la vivacité du ,, François , que de la piété, & de la folidi- „ té du fhilofophe Chrétien. C'eft avec „ autant de juftefleque de force qu'il tour- „ ne en ridicule le Galimathias incompré- >y henfible du Méchanifme, de l'Inftintt, „ des Formes Subftantielles, &que dirai- ,, je encore de ces autres Principes Àrijlo- _,, téliciens & Cartêftcns , qui femblables aux „ Qualités occultes, ne font que.de granid$ ,, motsvuidesde fens, ce dont l'affectation 3) ne fert qu'à déguifer l'ignorance ? Ce- ,, pendant qu'a-t-il mis à leur placeP ,Vrai- ,, ment , quelque chofe qui eft suffi ab- „ furde, mais qui n'eft pas fi innocent; quel - ,, que chofe qui choque le Phiîofophe & „ qui révolte le Chrétien; quelque chofe „ qui eft en contradiction directe avec ia 3, Raifon, & avec la Révélation , comme „ je tâcherai de le montrer. D'ailleurs il ,, n'a pas moins manqué de goût & de ,, délicateffe; car fes Idées& fes Pentimens „ font f uvent d'une il grande ba(î< „ fes Images fi peu décentes , fes Expref- „ lions û groflières que l'on aurait eu de ,, la peine à s'y attendre, de la part d'un François JriLLET, Août et Septembre. 1745. 221 ,, français poli ,6c d'un Eecléfiaftiquë écri- ,, vant à une belle Dame, qu'il ne laide pas ,, de nous repréfenter comme une Peribnne „ de Difcernement & deDiftincuon. " Pour tenir fa promeflè , Mr. Hildrop par- coure fucceffiyeraent le*; trois Parties dans lefquelles l'Auteur de YAmufment Phïlojo- pbique avoit divifé Ton Ouvrage, & com- mençant par celle qui traite . '• C fe.net des Bêtes, je ne vois pas qu'il y trou- ve fort à redire. Il déclare d'abord qu'à fon avis, les Brutes „ ont certainement de „ la ConnoifTance, au moins à un degré „ fuffifant pour leur Etat , pour le rang ,, qu'elles occupent dans l'Univers , 6c ,, pour les différent devoirs , de même ,, que pour les différentes fonctions à quoi ,, le. Créateur les a dcfhnées. " D nscette idée il s'échauffe contre le Syftéme Car- . qui ne leur laifle qu'un jeu de Ma- chine. „ Quand tous les PhiIofoph.es du , s'accorderoient à débi- ,, ter, & à ibûrenir cette opinion, pour ,, peu nue l'on penfe avec liberté, cha- ,, cun fent au dedans de foi -même une „ conviction intérieure du contraire , ne ,, fût on pas môme en état de réfuter ce ,, fentiment, ou de défendre le lien , & il ,, n'yacù, aflnrément, que la Fan ité d'un v oui ait jamais pu s'attendre ,, qu'un Syftême fi abfurde pafïat dans le „ Monde pour faine Raifon , & pour vraie ilofophie. Pour moi je m'attendrois auffi tôt à voir deux Montres qui fe font P 5 „ l'amour, >j 222 Bibliothèque Britannique, ,., l'amour, ou deux Moulins qui fe bat- 3, tenc. " Sans avoir la moindre envie de rompre ici une Lance à l'honneur de Dès-Cartes s Mr. Hildrop me permettra de lui repréfen- ter, qu'il fort des bornes de la Décence en parlant de ce Philofophe. Quelques dé- fauts qu'il y ait eu dans laPhilofophieCar- téjknne , on lui a pourtant des obligations eflèntielles, quand ce ne feroit que celle de nous avoir affranchis du joug iïArijlo- te> & rompu la glacé pour ouvrir les voyes à la liberté de penfer. Ce grand fervice, fût-il le feuî , eft fi confîdérabie que l'on ne fait que penfer d'un Homme qui s'é- mancipe à traiteï fi cavalièrement ce rare & beau Génie, que toute V Europe admira dans fon temps , & dont la Mémoire atti- rera toujours le refpett des Penbnnes fen- fées. Mais Des-Cartes étoit François de naûTance, & je m'imagine que c'eft là fon grand crime aux yeux de Mr. le Recteur (a) de Watb près de Rippon; car on a déjà vu quelques traits de îon efpéce d'averfion pour la France. Il n'aime ailleurs ni la Vi- vacité Françoife , ni la PoliteJJe Françoife , & c'eft ici la Vanité Françoife qui le choque. C'eft un grand malheur pour notre Nation que celui de lui déplaire. Mais devroit-il le dire avec 11 peu de ménagement , & Il mal (a) C'eft une Cure de village dans la Provin- ce d Ycrk. Juillet , Août et Septembre. 1743. 223 mal à propos? Ne craint il point que quel- que Compatriote de Des- Cartes n'oppofe la Vanité Angloije à la Vanité Françoije , ne l'accule d'imprudence & d' Impoliteffe de ren- dre ainfi nationale une querelle purement Philofophique, & ne le taxe même de pué- rile ignorance, puisqu'il femble avoir crû que le Syftême Cartéfien eft le feul , ou a été le premier, qui ait converti les Bêtes en Machines? Il me femble, à dire le vrai , que ces airs de mépris & d'infulte n'échaperoient point à un Anglois qui feroit poli, & qui auroit vu le monde, d'autant plus qu'ils ne font rien à l'affaire. Quand on a des rai- fons , les injures font toujours déplacées, & peut on manquer de raifons contre le Syuême Machinifte? On n'en manque pas non plus contre celui de l'injlinfit, puisque ceux qui y recourent ne peuvent définir ce qu'ils entendent par le terme , & que par conféquent ce n'eft plus qu'un mot de jar- gon. D'ailleurs l'Ecriture Sainte décide, puifque l'Auteur des Proverbes , au Chapi- tre XXX. attribue aux Fourmis, aux La- pins , aux Sauterelles , & aux Araignées , une Connoiflance à laquelle il donne même le nom de Sagejfe. A ces quatre Efpéces l'Auteur Anglois joint les Abeilles , en ver- tu des Expériences qu'il en rapporte d'après le Spectacle de la Nature, d'où il conclut que le principe d'intelligence, que l'on ne peut contefter à la Brute, doit être imma- tériel. " Si les diverfes Efpéces des Bru- 31 tes 224 Bibliothèque Britannique, „ tes, dit-il, ont une intelligence qui pen- „ fe , qui raifonne, qui forme des pro- „ jets , & qui exécute dans la Sphère de leur „ Vie,& de leur Activité, dans une jufte & due proportion avec ce que nous fai- fons dans la notre , on doit convenir qu'elles ont, au dedans d'elles, quelque Principe immatériel, dans lequel ces Fa- cultés font inhérentes, '& par lequel el- les font dirigées. Or, félon mon petit jugement, la Connoiffance fans une A- me, ce une Ame qui n'eft pas Efprit, paroiiTent des chofes auiïï absurdes que le feroit !a Lumière fans Flame, ou la Flame fans Feu. " Mais comme on pour roi c objecter à ce- ci , ou que, comme Mr. Loch l'a crû, Dieu petit! faire que la Matière penfe, ou que î'on met la Relig;on en danger dès que l'on donne une intelligence fpirituelie aux Bê- tes , ou que l'on fauve toutes les difficul- tés en adoptant le Syilême de l'Auteur de YAmufement PbHqfapmqué ccc. qui place des malins Efprîts dans le Corps" des Brutes, Mr. Hildrop combat férieufement l'Opinion de Mr. Loch, auquel il donne le titre de Grand, parce qu'il étoit Anglois fans dou- te, ce renvoyé "l'examen des deux autres à un endroit qui lui paroi tra plus commode. Avant que d'en venir la , il palfe à la 2de. Partie de .l'Ouvrage dont il a entrepris la Critique. 11 s'y agit , de la NéceJJité d'un Lan- gage entre Us Bêtes , ce qui conduit naturel- lement à la 3me. où l'on détermine ce Lan- Juillet, Août et Septembre. 1743. 225 gage. L'Examinateur, pour n'en pas faire a deux fois, réunit ces deux chofes,& pa- roit y être parfaitement d'accord avec ie Pbilojbpbe amufant a jufque là même qu'il lui fait la grâce de dire, .que c'eft le (eul en- droit de la Pièce où il ait parlé en Philofo- phe. La feule chofe qu'il n'y ait pas goû- tée eft une preuve tant ae la témérité à condamner, que de la négligence affreufe, avec laquelle la plupart des Traductions fe travaillent. Rapportons ce qu'il dit, afin de mettre au fait les Lecteurs. ,, Au mi- „ lieu de ces Recherches , dit-il , notre 5Î Auteur a laide tomber une Expreflîon, „ dont je ne puis comprendre le iens,par- „ ce qu'elle n'a aucun rapport au fujet, ,, & n'eft liée ni avec ce qui fuit, ni avec ,, ce qui précède; il dit que les Anges je „ parlent les uns aux autres , cff que cepen- „ éant ils n'ont point de Voix. Que cette 3, Expredîon eft hardie ! qu'elle eft indi- ,, gefte ! qu'elle eft peu Philofophique ! ;, Quoi ! les Anges qui ont une voix pour „ nous parler , n'en auraient point pour ,, fe parler les uns aux autres! " Cette furprife , & ces exclamations ne font pourtant fondées , que fur la précipi- tation, ou peutetre fur l'ignorance du Tra- ducteur Anglois de Y Amufement y qui n'a pas rendu Ion Original avec fidélité. Il y a, s cet Original , en reprenant d'un peu s haut, ce qu'on va lire. „ Ne peuc , fans ce fecour» [d'une Langue à l'articulation de? Mots'i fe „ fiife 22SBlBLIOTHEqUE BRITANNIQUE, 3, faire bien entendre & parler véritable- „ ment?C,eft dequoi on ne fauroit douter. „ Les Anges fe parlent ,& n'ont point TOr- „ gane de la Voix, " Il n'y a donc rien dans le François qui .donne prife à l'éton- nement du Cenfeur, & puis qu'il a fenti lui même, que la Traduction Anglo;.fe re- préfentoic un fens qui n'avoit point de fui- te , n'auroit-il pas dû fe défier que le fens en étoitfaux, & confulter ià-deiTus quel- qu'un qui eût entendu la Langue Françoi- fe , avant que de fe récrier, ci que de con- damner comme il fait ? A cela près , je le répète , Mr. Hildrop entre parfaitement dans les idées du Philo- fopbe amiifant, & s'amufe longtemps, je ne fai pourquoi, à confirmer ce qu'il dit, par de longues tirades du Spectacle de la Nature , & de YAmufement Pbilofopbique même. Il a crû apparemment qu'il devoir, lui être per- mis de mettre à profit quelques-uns de fes Recueils fur l'Intelligence & la Sagacité des Bêtes, ou de donner un air de Philofophie aux Obfervations de l'Auteur François , en les tranfcrivant dans fes Lettres. Quoi qu'il en foit, la Conformité des idées nefefou- tient pas jufqu'au bout. Elle cefle dès qu'il s'agit d'expliquer le Phénomène de la Con- noiffance & du Langage des Brutes , & d'en définir le Principe. On a déjà vu que ie grave Anglois veut que ce foient des Ames Immatérielles , proportionnellement de la nature des nôtres, & l'on fait que le Bel- Efprit François prétend que ce foat des ma- Juillet, Août et Septembre 1743. 22 y lins Efpriîs condamnés à fervir d'arae à ces portions de Matière. Ça) „ Ce que je „ prétends conclure , dit-il, c'eft qu'en at= tendant le jour du jugement dernier, Dieu , pour ne pas laiiTer inutiles tant de Légions d'Efprits reprouvés, les a répan- dus dans les divers efpaces du Monde 5 pour fervir aux deffeins de fa Providence, £ & faire éclater fa Toute-PuilTance. Les by uns lailTés dans leur Etat naturel s'oc- „ cupent à tenter les hommes Des au- „ très Dieu en a fait des millions de Bê- „ tes de toute efpéce , qui fervent aux u- „ fages de Thomme . qui rempliflent l'U~ „ nivers, & font admirer la SageUe & la „ Toute -Puifiance du Créateur. Par ce „ moyen je conçois fans peine comment „ d'une part les Démons peuvent nous ten- „ ter , & de l'autre comment les Bêtes ,, peuvent penfer, connoitre,fentir,& a- „ voir une Ame fpirituelle fans intérefTer ,, les Dogmes de la Religion. * Mr. Htldrop qui juge, au contraire, que ce Sentiment intérelïe extrêmement la Re- ligion, s'applique à le combattre de toutes fes forces , & commence , à fon ordinai- re, par le Pathétique, comme par l'endroit le plus propre à émouvoir la perfonne à laquelle il adrefle fes Lettres; car c'eftaufii ime Dame , & ces deux Meilleurs ont fans dôme encuodu nr.eiie a faire entrer, dans leur (a) ■ Ih'ùof. P-ec 32, cfeïEtl dslfl Hiy?, 228 BIBLIOTHEQUE B R I T A frNiqUE 5 leur querelle, le Sexe qui prodigue le plus facilement les baifers aux Bêtes favorites. 3, Votre Cœur, Madame, dit V Anglais à ,, lafierme , ne fe foulève-t-il pas contre „ une Idée II monfcrueufe ? De quelque ,, côté que vous l'envifagiez, pouvez vous 5, la confidérer fans horreur, & fans aver- „ lion? Dans la manière de produire „ & de foûtenir cette caufe , il règne une „ 11 grande confunon de fentimens, un li ,3 grand mélange de Lumières & de Ténè- „ bres , de Vrai & de Faux , de Raifon 3, & d'Imagination, que l'on ne fait par où 3, commencer, ni quel ordre fuivre pour 3, débrouiller le vrai du faux, pourféparer „ le précieux du méprifable, pour diftin- „ guérie diètamen delà SaineRaifon& delà „ Philolorhie, des extravagantes faillies 3, de l'Imagination & du Caprice No- 3, tre meilleur & plus court chemin fera 5, d'examiner la bonté du Fondement, & 3, de voir s'il y a dans l'Ecriture ou dans „ la Raifon quelque chofe qui l'appuyé. " Il fe prévaut donc d'abord, contre le Syf- tême du François, du témoignage de Moife qui dit (a) queDieuayant tiré del'Eau le* Peifîbtis & les Oiieaux, & delà Terre le relie de^ Brutes, trouva que tout ce qui en a- voit été fait, était bbny & qui marque très clairement que toutes ce<= Créatures avoier: été faites pour lufage de l'Homme , (b) pui^ - (a) Gen. I. 20-2?. (b) Geh.I.aôï 27. IL 19- P&. VÏH, 4-8, Juillet, Août et Septembre. 1743. 229 que Dieu , les mit lui-même dans fa dé- pendance. 11 en conclue que les Bêtes , placées, avec l'Homme, dans le Jardin d'Heden, y durent jouir , avec leur Supé- rieur, de toute la félicité qui convenoic a leur Nature , & par conféquent comme lui y être immortelles. C'eft donc auiîi fa pen- iée qu'elles ne furent aiîlijr tties à la Mort, de même qu'aux maux difrérens de la Vie, qu'en conféquence du Péché de l'Homme, dont la fentence de condamnation s'éten- dit fur toutes les chofes vifiblesqui avoient été faites pour lui, (Se qui avec lui dégéné- rèrent, extrêmement, de leur perfection primitive, ce qu'il prétend confirmer par un T'aTage de St. Paul qu'il traduit, & qu'il paraphrafe de la manière fuivante. (a)„ La „ Créature [toute la Création] a été rendue ,, Jùjette à la Inanité , non volontairement , ,, [non par aucune faute qu'elle ait com- $, mife,] mais à caufe [pour l'amour, ou „ par le péché] de celui qui les a ajjujetties ,, dans rèfpérance^ [d'Adam qui étoit leur „ Seigneur, & leur Gouverneur immédiat,] ,, car nous /avons que toute la Création foupi- i, ret êf travaille en douleur, [que le Syftô- j, me entier de la Création vifibîe fympati- j, fe& foufFre avec l'on Maitre rebelle. ] " Ajoutons à ceci, que félon notre Examina- teur 0) R.em. VII!. 2o. 21. n. L'Auteur expli- quera, dans la fuite, les paroles qu'il a palTécs :d es trois VerfetS. Tome XXI Part. IL G 130 BIBLIOTHEQUE BrIT ANNIQ^UE j teur , l'Homme reftreint dans^ fon Inno- cence, (a) à ne vivre que de Fruits & que de Légumes, n'eut après le péché, la per- million de tuer des Bêtes que pour les Sa- crifices , & ne l'obtint entière (£) pour Aliment, qu'après le Déluge. A l'aide de ces Vérités , ou de ces Sup- positions, il ravit, au Pbilofopbe amufant 9 tous les avantages qu'il a prétendu tirer, pour Ton Syftême, de la malignité de quel- ques Bêtes , & des maux fans nombre aux- quels elles font toutes aiTujetties. Ces vi - cieufes inclinations qu'on leur remarque , & ces fouffrances il grandes & fi diverfes, auxquelles elles font expofées, jufqu'à la mort inclufivement , ne font que les fui- tes , que les trilles effets du péché de l'Hom- me. Les Bêtes font devenues malheureufes par notre faute & non parla leur , non plus une par le premier derfein de leur Création. De îà vient que la Révélation nous impo- fe pour devoir de les traiter avec douceur, au lieu d'agraver îeurMifère, &c'efï à quoi l'Auteur rapporte divers PaiTages de l'Ecri- ture (c) que nous renvoyons au bas de la Page. De là vient aufli que l'on exaggère les chofes , lors que l'on impute au Créa- teur la férocité de certaines Brutes, lama- lice (a) Gsn. I. 29. 30. O) Gen. IX. 1. 3. (c) Prov. XII. 10. Bxod. XXfîI. 4. 1-ii.lva XIV- 5- ^t. XII h. Dent. XXV. 4, Jonas, IlL 7- S. IV. 11, Homb. XXII. 28. Juillet, Août et Septembre. 1743.231 lice de quelques autres &c. puis qu'il eft inconteftable , par l'Expérience , que la Corruption de l'Homme n'a produit en el- les que des effets qu'elle a produits en lui- même. ,, Tout homme qui eiî dominé par „ des Defirs impérieux , par une Pafllon jï violente , par des Vues intéreiTées , eft „ une Brute par rapport à ceux qui le croi- „ fent, qui traverfentfes defleins, qui em- „ barraflent Ton Plan, & qui combattent 3, par quelque endroit fa Paillon favorite ^ „ & les defirs de Ton ame. Jettez les yeux „ fur les divers Rangs , fur les divers Or- „ dres, fur les diverfes Sociétés, «Se furies „ diverfes Compagnies , & û vous en ex- ,, ceptez les Cours , & les Cercles des ,, Dames, où il n'y a que vérité, qu'hon- „ neur, que politeîfe & que vertu, vous y „ trouverez plus de trahifon, plus d'injuf- „ tice , plus de fraude , & plus d'infidieu- „ fe fubtilité que parmi les Ëêtes des ,, Champs , ou que parmi les plus fauva- „ ges habitans des Déferts. " Tant de vi- ces ne prouvent point que des Diables a- niment les Corps Humains,* pourquoi prou- veroient - ils plus pour ceux des Tigres , des Chats, & des Singes? Il faut pourtant leur donner un Principe d'intelligence , & Mr. Hildrop , qui avoir déjà fait voir , contre les idées de Mr. Lock , que ce Principe d'intelligence dans les Bâtes, ne peut être Matériel, revient de nouveau à la charge, & n'oublie rien de ce que l'on peut dire fur ce fujet. Après a- Q 2 voir 232 Bibliothèque Britannique, voir terrafle cet Adverfaire, il s'imagine ê- tre en plein droit de conclure, comme il l'avoit fait auparavant, que Y Ame des Bru- tes eft fpirituelle , £? immatérielle , propor- tionnellement à la notre, & chacun s'ap- perçoit alors de la foule de Difficultés, ti- rées de la Religion , que l'Auteur trouve en face. Donc les Ames Brutes font immor- telles de leur Nature ; donc la Terre au- roit été furchargée de Brutes fi leurs Corps ne fùffent pas devenus mortels avec l'Hom- me pécheur; donc il auroit fallu admettre une tranfplantation pour elles , comme pour l'Homme perfévérant dans fon Etat d'Innocence ; donc il faut pour leurs Ames comme pour les nôtres un lieu de récep- tacle après la mort* donc enfin les Bêtes pourront reflufciter de même que les Hom- mes. Un autre feroit peutétre étonné à la vue de ces conféquences. L'Ecrivain Anglais ne s'étonne de rien. Il digère tout, il adopte tout , & cela néanmoins fans que la Religion, à ce qu'il dit, en puilTe fouffrir. Et d'abord l'Immortalité des Ames Bru- tes lui paroit clairement établie dans ces paroles de St. Paul, (a) Par unfeul homme le péché eft entré dans le monde, c? la Mort par le péché. Ce qu'il lui plaît de prendre dans un fens univerfel, & qui porte fur tous les animaux, fans faire attention aux paro- les (*} Rmii. V. tu Juillet, Août et Septembre. 1743 233 les fuivantes qui femblent avoir limité ce fens à la feule efpéce des hommes. Ainfi la Morteft parvenue fur tous les hommes , parce qu'ils ont tous péché. Paflant là-dsffus avec un profond filence , il fe jette en de va- gues réflexions fur îabontéinfiniedeDieu, qui s'étendant fur tous fes Ouvrages , ne peut avoir confenti à rendre aucune Créa- ture malheureufe & mortelle, à moins que par quelque endroit elle n'eût mérité de le devenir. Les Bêtes, dit-il, le méritèrent, quand l'homme eut péché, par une fuite de leur dépendance, & ce fut alors qu'elles, devinrent (a) ajfujetîies à la Inanité. Mais auparavant il falloit félon lui, qu'elles par - ticipaffent proportionnellement , dans le Jardin d'Heden , à toute la félicité , & à toute l'Immortalité d'Adam leur commun Maitre, Il y a des Théologiens, à la vérité > qui pour juftifler la Providence, à regard des Bêtes que les hommes traitent fi dure- ment, qu'ils égorgent, qu'ils rotilTent, qu'ils mangent, prétendent qu'elles n'ont aucun fujet de s'en plaindre , puis qu'elles ne fu- rent originairement faites que pour cet ufage, & quec'eft uniquement à ce prix qu'elles re- çurent la Vie. C'eft en particulier le tour que prit Mr. Jean Clarke dans fes Lectures de Boyle pour les années 1719 & 1720. Mais fans nommer ce Docteur, Mr. titidrop fe moque M Rom. VIII. 20. Q3 234 Bibliothèque Britannique, moque ouvertement de cette penfée. „Qui 5, eft ce , je vous prie , dît-il , qui leur a „ dit cela ? Où eit ce qu'ils ont appris , „ cette Philofophie ? La Raifon ou la Ré- „ vélation appuyent elles une propolition „ fi hardie? Tant s'en faut, qu'elle fem- „ ble être en contradiction avec l'une ôc „ l'autre. Le Sage Prêcheur nous a donné „ unePhilofophie plus fûre & plus profonde, „ lors qu'il dit, (a) Je fai que ce que Dieu „ fait) il le fait pour toujours, rien n'y peut „ être ajouté, rien ne peut en être retranché , „ & Dieu le fait afin que les hommes le crai- ,, gnent. " Si l'on réplique que Dieu a pu affujet- tir les Bêtes à perdre la vie par un adte arbitraire de fa Volonté , notre Théolo- gien oppofe à ceci l'Immutabilité de l'E- tre Suprême , (b) par devers lequel il n'y a ni variation, ni ombre de changement, 6c (c) qui efl le même hier , aujourd'hui & éternelle- ment, & lors qu'on lui repréfente quec'eii prodiguer la penfée, l'immatérialité, &par con=. (a) Eçckf. VIÏÏ. 14. L'Auteur fuit ici la Tra- duction Angloiïe, à laquelle fe rapporte la Vulga- te3 DiJici , quoJ omnia opern, qu* fecit Deus , per- ftvtrent in perpttuum: Son pcfjfimus iis quidqxam ndùere , nec auftrre , yit fecit Deus, ut timeretur. Les 70 ont traduit de même 5 mais notre Traduc- tion de Genève donne un fens différent , 8c rap- porte à Dieu ce que les autres font cire de les Ou« v rages. 1 r*j Jaq. ï. Vf. (c) Hebr. 2111. 8. Juillet, Août et Septembre. 1745. 235 conféquent l'Immortalité, que d'en donner aux Cirons , il répond que ces productions de la SageîTe & de la Puiffance de Dieu, pour être fi petites , n'en font que plus ad- mirables. Mais fi les Ames des Brutes ne meurent point avec leurs Corps, fi elles ne font point anéanties, que deviennent elles., & ou font elles dans cet état de féparation? La queftion eft naturelle , & qui l'expli- quera? La Raifon ni l'Ecriture ne difent rien là-deiTus Qu'eft ce donc qu'en dit notre Auteur? Le voici. ,, Quel intérêt a- „ vons nous à rechercher ce que ces Ames „ deviendront dans leur état de féparation ? ,, Que nous importe-t-ildefavoir la difpo- „ ficion qui en fera faite après la diflblu- „ tion de leurs Corps? Le Pouvoir infini, „ qui les forma, fans demander notre avis, „ ne peut-il pas en difpofer de même ? Ce „ qui me paroit certain , c'eft qu'étant im- „ matérielles, & par conféquent immortel- ,, les , après avoir animé certains Corps „ dans cette vie , & y avoir été des prin- „ cipes d'action, elles ne peuvent cefler „ d être actives après qu'elles en auront „ été féparées, ci qu'elles doivent avoir „ une fphère particulière de vie & d'act-ï- „ vite fans leurs Corps, comme elles en „ avoient eu dans leurs Corps. Concevez ,, vous, Madame, ce que feroient deve- „ nus les nombreux Defcendansdes diver- ,, fes Efpéccs d'Etres fi par le péché ?) d'Adam la Mort ne fût pas entrée au Q 4 „ mon ^Bibliothèque Britannique* 3, monde ? Pouvez vous fuppofer que ce- „ lui qui les avoit faits pour croître & „ pour multiplier , n'avoit pas ménagé un 3, lieu convenable pour les recevoir? Et 3, penfez vous que la même Sagefle & la 33 même Pui fiance ne leur ménage pas en- 3, core le même réceptacle ? Quelqu'un 3, pourroit-ii me dire quel eft l'Etat des 33 Ames féparées,oii3quels & en quelle quan- 3, ti té, font les différentes demeures, 6c les 3, divers Réceptacles des Morts? .... 3, Quant à ce que l'on demande fi les 3, Ames des Brutes feront fufceptibles de 5, bonheur, ou de mi i ère dans leur état ,3 de féparation?Pouvquoi non,auîfi bien qu'à 3, préfent? .... Qu'eil ce qui empêcheroit 3, même qu'elles ne puffent parvenir à un 3, plus grand degré de bonheur , dans le 3, monde invifible, puis qu'elles en jouirent 53 dans le Paradis. " Quelque longquefoitce paffage, j'ai cru devoir le traduire, pour ne laifler rien per- dre à mes Lecteurs François delà hardieife avec laquelle l'Auteur Anglois décide fur des queftions fi délicates Car enfin peut- on dire de bonne foi qu'il ne nous impor- te pas de favoir ce que deviennent les Ames des Brutes, en les fuppofant fpiri- tuelles & immortelles? La chofe eft pour nous d'une telle importance, uue nos crain- tes & nos efpérances pour l'Etat à venir en dépendent en grande partie. Nousmou- rons "comme les Bêtes ; leurs âmes font immortelles comme les nôtres , comme les nôtres Tuîllet, Août et Septembre. 1743. 237 nôtres elles font après la mort fufceptihles, de vie , d'activité , de bonheur & de mal- heur. Quelle eft donc la différence entre elles & nous ? Cette différence, réplique Mr. Hildropr fe tire de la nature des chofes. Les Bêtes ne font pas des Agens Moraux, & nous le fommes. Cela eft bientôt dit. Cependant il en faudrait des preuves, & la feule, que l'Auteur nous en donne ici , elt la grada- tion qu'il doit y avoir entre les Intelligen- ces, iémblable à celle que l'on remarque entre les Corps. Il a beau s'étendre fur cette gradation, pour en prouver l'exiiten- ce , & pour y faire admirer la SagefTe & la Puiflance , également inépuifables , du Créateur. Je n'en comprends pas mieux que l'Homme foit la feule Intelligence Morale, & capable de chatimens & de re- çompenies dans une autre Vie. Je Je com- prends d'autant moins que cet Auteur après avoir rapporté l'Hiftoire du Perroquet du Prince Maurice , (a) que Mr, Lock a donnée dans (a) Mr. Loch avoît lire ceci '.les M émoire s de Mr. le Chevnlkr Temple, eu il fe trouve à la page 66. de lE-iitioii Franc, rie i6çz. Voici pourtant le fait, tel qu'Oui *e '*£ ^an^ a Traduction Francoifg de PO e Mr. Lock , par Mr. Ctf//e, pacr. 2J7. E.f. d'Ami. 1729. „ J'avois toujours eu en- ,, vie Je lavoir de la propre bouche du lJiinceMau- „ rice i!c NalTau, ce qu'il y avoit de vrai dans une ,, Hiftcirç qu~ favois ou» oire plufieurs fois au „ fujet d'un Perroquet qu'il a s'oit pendant qu'il 3^8 Bibliothèque Britannique, dans Ton Eiïai fur l'Entendement humain ; rcconnoit qu'il eft très probable , à fon a- vis, que les Bétes jouiflent en quelque de- gré du privilège de la Raifon, & favent même en faire plus d'ufage que ne le font bien des hommes. Il iemble après cela qu'il ne refte plus qu'un pas à faire en fa- veur des Brutes , pour les mettre de ni- veau avec nous , qui feroit d'étendre juf- qu'à „ était dans fon Gouvernement du Bréfîl.. Je le 5, priai de m'en éclaircir Il me dit que 3, 'ors qu'il vint dans le Bréfil , il avoit ouï par- 5> 1er de ce Perroquet, & que ... il avoit eu li J5 cr.riofite de l'envoyer chercher ... 6c eue lorf- }y qu'il vint dzns la Salle où le Prince eroït avec ,, plufieurs HoVandois auprès de lui , le Perroquet „ dit, des qu'il les vit, quelle compagnie d'btmmes , blancs eft celle-ci. On lui demanda en lui mon. „ trant le Prin;e, qui il et oit ? Il répondit que 3> c'était quelque Général. On le fie approcher, ,', & le Prince lui demanda , a* ou venez vous} Il on ir, de Marinmn. Le Prince, à quiètes vous? ,3 Le Perroquet, à un Portugais. Le Prince, que tu làrLe Pei roi\u.it,jegarde les Poules. Le Prince „ fc naît à rire & dirions gardez, les Poules: Le Perro- >3 quet repondit, Ont, mot, & je (ai bien faire •3, ckuc, chue, ce qu'on a accoutumé dtfvirequand ,5 on appelle les Poules, & ce que le Perroquet rt- „ peta plufieurs fois. Je rapporte 'es paroles de 5} ce beau Dii'ogus en François, comme le Prince „ me les dit. Je lui demandai encore en quelle lan- sî guc p^rlpît le Perroquet. Il me répondit que ,, c'étoit en Bra/ïùcn . . âc qu'il avoit eu foin d'av;,ir „ deux Interprètes^ on Brafîlien qui parloitHollan- a dois ,& l'autre Hollandois qui parloit Brafilien. \ Juillet, Août et Septembre. 1743. 23g qu'à elles les effets de la Rédemption par notre Seigneur Jesus-Christ, & qu'à les inclure dans les promefles d'une Réïurrec- tion générale. Aufîl Mr. Hildrop ne manque-t-il point de le faire, & comment n'accorderok-il pas la faveur à tout le Monde Animal puis qu'il ne la refufe pas à tout le Monde des Végétaux, aux Plantes, & aux Fruits mê- me? ,, Après tout, dit-il, quelle difficul- „ té y a-t-il à comprendre, ou quel dan- „ ger" peut-il y avoir à foûtenir, que tou- „ tes les parties inférieures de la Création, „ qui tombèrent avec & dans notre pre- „ mier Père, & qui foufrrirent pour no- ,, tre tranfgreïïion , feront enfin rétablie? „ dans leur félicité primitive. " Sa preu- ve générale fe tire des Endroits de l'Ecri- ture (a) qui promettent de nouveaux Cieux « une nouvelle Terre , & [b) un renouvellement de la Face de la Terre, ,, Ce qui renferme , à ,, fon avis, un renouvellement de toutes les „ Puiflances féminales, de toutes les di- „ verfes productions des Fruits, des Fleurs, ,, des Animaux, & de tous les divers h:i~ „ bitans des di verfes Régions de la Natu- „ re. " Car il ne peut confentir que ces Exprefllons foient prifes dans un fens de figure , parce qu'il s'en tient inébranlable- mène (*) Aft. III. 19-21. EfaieLXV. 17.LXVI.22, ». Pier. III. 13. i. Cor. XV. ai. ai. A-oc.XXl. (*) Pie. C1V. 30. *4.o Bibliothèque Britannique, ment à Ton Principe , que toute la Nature vifible ayant fouffert de la faute d'Adam , elle doit aufîi fe refleurir des effets de fa grâce. „ Par une parité de raifon , dit-il, „ nous devons conclure que le Monde des 5, Végétaux, comme celui des Etres ani- „ mes, doit avoir un degré proportionna- „ ble de la même bénédi&ion que THom- „ me; & participer à fa gloire; deforte „ que toutes les bénédictions qui furent o- „ riginairement accordées au Monde des „ Végétaux , dans la première Création , 3, lui feront rendues , lors que tous les 3, Fruits, & toutes les Fleurs du Paradis, „ qui furent créés pour la nourriture, & ,, pour le plailir des Corps de nos premiers 3, Parens, jouiffant encore dans le Para- „ dis du bonheur de leur Innocence, re- „ prendront le goût, l'Efprit,& la vie qu'ils eurent à leur Origine, pour deve- nir l'Aliment fpirituel de la Nature Hu- „ maine renouvellée ; c'effc , a)oute-t-il% ce que notre Seigneur nous dit claire- ment , lors qu'en célébrant fon dernier Souper , (a) il alfûre fes Difciples , que „ déformais il ne hoir oit plus du Fruit de la „ Vigne , jufqu'au jour qu'il le hoir oit now „ veau avec eux dans le Royaume de fon „ Père. " Je ne fai fi Mr. Hildrop a bien pefé les feules Conféquences Phyfiques de fa Pro- ppfkion. Quantité de gens font déjà fort m (*) Malt. XXVI. 25?, Juillet, Août et Septembre. 1743. 241 en peine ou placer , commodément , fur toute la Terre, tous les Hommes reflufci- tés, mais que fera ce fi tous les Arbres ref- fufcitent aufli , fi toutes les Plantes , fi tous les Légumes, fi toutes les Fleurs, fi tous les Fruits reviennent au monde ? Oli trou- ver de l'efpacePOii les mettre? Ne faudra- t-il point aufli qu'ils foient tranfplantés en quelque autre Région de la Nature , ou quelle autre Région aura aflez de vuide pour les re- cevoir.^ e ne dis rien desConféquencesThéo- jogiques, parce que je ne me fouciepas de les faire appercevoir à certain ordre de Lec- teurs qui en feroient embarraiTés , & qu'il efl aflez inutile de les indiquer aux Perfonnes plus fermes ou mieux inftruites. Comment pourrois-je diilimuler néanmoins la fur- prife ou je fuis que le Théologien Ànglois ait crû pouvoir avancer tout ceci, aufli crue- ment qu'il le fait, fans préjudicier en rien à la Religion? C'eft pourtant dans cet Ef- prit qu'il paroit l'avoir fait, & la charité ne permet pas d'en juger autrement, lors que l'on confidère, avec quel férieux, il produit l'Ecriture, en faveur de fon Sys- tème, dans fes diverfes Parties. ,, La certitude de ce grand événement, ,, dit-il, le rétabliflement de tout leMon- ,, de vifîble dans fa Perfection Originale, ,, efl clairement, & pleinement atteftée par „ St. Paul, lors qu'il dit, (a) Le grand £s? ,, ardent (a) Rom. VIII. 19-22. Jai traduit fur la Veifion Angloiiè, qui eft celle de l'Auteur. 9.42 Bibliothèque Britannique 9 ardent defir de la Créature efl Vattente de la manifejtation des Enfans de Dieu. Car la Créature a été ajjujettie à la Vanité , non volontairement 9 mais pour la caujé de ->> ,., celui qui ïy a ajjujettie en ejpérance , par- Î5 ce que la Créature J'era aujji délivrée de l'ef- clavaj>e de la Corruption 9 pour entrer dans la glorieujé Liberté des Enfans de Dieu\ \\ car nous /avons que toute la Création Jou- „ pire &f travaille enjembie en douleur juj'ques 3> à préjént. " Comme le vrai fens de ces paroles' dépend de celui qu'il faut donner aux Exprefîions de la Créature, & de toute \g%Créatim9 Mr. Hildrop foûtient que cela ne peut s'entendre que de la totalité des Êtres créés qui font vifibles, & veut aufîl par conféquent qu'on le prenne au même fens, dans l'endroit de St. Marc, où No- tre Seigneur ordonne à fes Difciples (a) de prêcher V Evangile à toute Créature. „ Ce- „ ci, dit -il, a fourni à quelques Légen- 3, daires de l'Eglife Romaine h juftification 33 de leurs Saints qui ont adreifé leurs Ser- 33 mons aux Oifeaux, aux Bêtes, auxPoif- 3, fons , donnant par ce moyen un tour „ ridicule aux Préceptes , & lai fiant aux 3, Incrédules & aux Sots une Occafion de 3, rifée. Mais dans mon idée, cet Ordre „ préfente un fens clair & naturel. Al- ,, lez dans le monde , & y portez un MeJJage 33 de Rédemption qui doit être un Jujet de joye ,i pour toutes les Créatures. " A (*) Marc XVI. 17. Juillet, Août et Septembre. 1743. 243 A cela je répondrois volontiers , prouvez moi votre Thèfe, & j'admettrai votre Ex- plication. L'Auteur a bien fenti que cer- taines gens pourroient le lui dire , & pour parer le coup, il tâche d'alléguer des PaiTa- ges qui femblent marquer explicitement que les Brutes doivent avoir part aux heureux effets de l'Alliance de Grâce, c'eft à dire être rétablis avec les Hommes dans la pre- mière Condition de l'Etat d'Innocence. C'eft ce qu'il conclut des Endroits 011 Efaïe pré- dit (a) que le Loup doit habiter avec l'A- gneau , le Léopard avec le Chevreau , le Veau avec le Lion; qu'un Enfant conduira les uns& les autres; que l'Enfant à laMam- melle jouera fur le trou de l'Afpic , & où Hoféc (/?) parle d'une Alliance que Dieu doit traiter avec les Bêtes des Champs, avec les Oifeaux des d'eux, & avec les Reptiles de la Terre. Il refte pourtant toujours à favoir fi ces images ne font point figurées, 6c fans s'embarrafler de cela, Mr. HUdrop qui les prend le plus rigoureufement à la lettre, termine parla fes Réflexions & fes Preuves. Donc, dit-il, les Bêtes féroces „ perdront „ leur Malignité , qui avoit fervi à châtier „ leur Seigneur rebelle. Toute Inimitié „ ceflèra entre les Créatures; les Proprié- ,, tés divifées, les mouvemens difcordans 3, desElémens feront entièrement abforbés „ dans une Harmonie, dans une Paix, & „ dans («) Ffa XI. 6-9. LXV. 2-. (*) II. 18. £44BïBLIOTHEQUE Britannique, „ dans une Amitié Univerfelle , (a) Et la ,, gloire du Seigneur durera éternellement , , le „ Seigneur fe réjouira dans/es Oeuvres. " Au reite on voit ici une preuve, ajoutée à tant d'autres, des extrémités où les Hom- mes fe jettent 5 & combien il leur eft diffi- cile de tenir un jufte milieu. S'il n'y avoit eu pourtant que cette leçon à tirer de mon Extrait, je ne croi pas que je me fùfîe don- né la peine de le faire. J'avouerai donc, fans détour, que trouvant, moi-même, la Matière fort importante, je me fuis flatté que mon détail, pourroit infpirer, à quel- ques-uns de nos habiles Théologiens, la noble envie de nous donner des Eclair- ciflemens là-deiTus. Je n'en demande point à l'Auteur de YAmuJement Philosophique fur le Langage des Bêtes; car il feroit piqué au jeu, & il auroit jufte fujet de l'être. Peut- être que pour la même raifon , aucun François ne devroit fe charger de la Tâche. Que fait-on? Mrs. les Anglois ne s'aiment pas tant entre eux, que leCenfeur du Pbi- lofopbe amufant ne puilTe en trouver un , à fon tour, dans le fein de fa propre Patrie, ARTICLE IL Remarks on the Hiftory of England, From the Minutes of Humphrey Old- caflle, Ëfq: C'efl - à - dire , Remarques fut O) Pfe. CIV. jt. Juillet, Août et Septembre. 1743. 245 fur VH'iftoire d'Angleterre , tirées des Fa- piers manufcrits de Humfroi Oldcaftle , Ecuyer. A Londres, chez R. Franc- klin , dans le Ruffel-Streec , 1743. Pag, 328. CEt Ouvrage contient vingt-quatre Let- tres, qui ont été écrites à Toccafion des difputes & des conteflations qu'on a vues , il n'y a pas long-tems , en Angleterre au fujet du Miniiïére & de l'Adminiitration des Affaires publiques. L'Auteur s'y pro- pofe de prouver par des raifons & par des exemples tirés de l'Hiftoire d'Angleterre, que la Liberté, dont joui'iTent les Anglois, ne peut être confervée que par un efprit de vigilance, de jaloufie, & de fermeté à la maintenir en toute occalioh. Il a dédié Ton Livre à un Certain Lord, qu'il ne nomme point; mais il le defigne aiîez clairement pour faire connoitre que cette efpèce d'E- pitre dédicatoire s'adrefle à un Seigneur, qui étoit à la tête de l'un des deux Partis qui divifoient alors les Efprits de la Nation. Or, comme il paroit mamfeftement, par les Lettres dont il s'agit en cet Article , que leur Auteur étoit du Parti contraire, il eft aifé de concevoir que les Louanges , qu'il fait femblant de donner à ce Lord, ont un fens ironique & fatirique. Dans fa Préfa- ce , il témoigne que la Raifon , qui l'a pouffe à publier ces Lettres, eft qu'elles lui pa- roiflent auffi néceflaires oue jamais dans la Tome XXL Part, IL  R Conjonc- 246BlflLIOTHEQ.UËBRITANNIQ.UE# conjoncture préfente. Il prétend que le Pou- voir n'eft pas plus difpofé, qu'il ne l'étoic auparavant, à favorifer les intérêts de ceux pour l'utilité defquels il a été inftitué,* c'eft pourquoi il juge que le feu, qui n'avoit été allumé d'abord que comme un Signal pour donner l'alarme, doit être entretenu dans le même état, afin que le danger foit tou- jours vifible,& que les inftructions ne man- quent point à ceux, qui auront la générofi- té de s'expofer à la brèche, avec une fer- me réfolution de vaincre ou de mourir pour la Défenfe de la Liberté. „ Si jamais on a „ eu befoin , ajoute-t-il^ de diftinguer foi- „ gneufement l'efprit de Liberté d'avec ce- „ lui de Fa&ion, c'eft à préfent; û jamais „ une pierre de touche a été néceflairepour „ aider à faire cette diftin&lon avec plus „ de fureté, c'eft à préfent,* fi jamais le „ Peuple a eu intérêt de connoitre la véri- „ té & de la fuivre, c'eft à préfent. Juf- „ qu'ici la Libercé, femblable à l'huile, a „ couvert toute la furface, pendant que le ,, Vinaigre de la Faction a peut-être rongé „ la constitution intérieure & les entrail- „ les. n Dans les trois premières Lettres , l'Auteur rend compte à celui auquel il écrit, d'une converfation où il dit avoir été préfent, Elle avoit roulé fur les Ecrits compofés de part & d'autre au fujet de la difpute , dont nous avons fait mention ci-deffus. Entre autres Difcours tenus fur cette matière, il y eut un des Interlocuteurs qui blâma fort ceux Juillet, Août et Septembre. 1743. 247 ceux qui avoient publié les Ecrits en ques- tion ; parce qu'avant cette publication toyit le monde étoit tranquile, perfonne ne mur- muroit , perfonne ne cenfuroit le Gouver- nement ; au contraire chacun paroiflbit l'aprouver, par le filence général qu'on gardoit à cet égard. ,, Au lieu qu'à pré- ,, fent , dit-il , la difpofitioii des Efprits fem- „ ble toute changée; tout le monde paroit „ inquiet, chacun s'informe avec emprel- ,, fement & juge avec beaucoup de liber- >, té. On voit des gens de tout ordre qui „ font bien plus attentifs que par ci-devant „ au cours des Affaires publiques , & qui i, difent leur avis fur les plus importantes „ avec bien moins de referve que de cou- ,, tume. Or l'on ne peut fe promettre ,, rien de bon de cette altération des Ef- „ prits, dont le Craftman doit être regar- „ dé comme le principal Auteur; il eft „ vifible au contraire qu'il en pourroitnaî- „ tre plufieurs inconveniens. " Là-deiïus un vénérable Vieillard , que notre Auteur érige en Caton, & dont il fait l'oracle de cette Compagnie, prit gra- vement la parole pour témoigner à celui qui venoit de parler qu'il étoit d'une opinion directement oppofée. à la fienne. „ J'avoue, lui dit -il, que le calme étoit ,, aulli grand que vous l'avez repréfenté , „ quand notre honnête contemporain Ca- ,, leb d'Anvers a pris la plume en main. ,, Non feulement nous étions tranquiles, ,, mais il fembloit qu'il y avoit lieu des'at- R 2 ,, tendre 248 B:r>LroTHFQ_UE Britannique, ,, tendre que cet acquiefcement implicite dureroit éternellement parmi nous. Je conviens encore que depuis ce tems là les choies ont changé de face, & que tout le monde eft, pour ainfi dire, fur le qui vive. Mais, grâces à Dieu, ce n'eft pas un efprit de fureur aveugle , ni de faction , qui anime nos Compa- triotes. C'eft un efprit qui vient d'in- formation & de conviction, & qui s'eft répandu parmi des perfonnes de tout ordre, & même de tout parti. Ceux- là mêmes , qui lui font les plus oppofés au fond, l'encouragent du moins à l'ex- térieur. On ne peut pas lui donner le nom de Torifme, puifqu'il y a tant de „ Wigs, qui fe declarent'pour lui. On ne 3, peut point non plus Fapeller IVigifme, „ vu qu'il y a un grand nombre de Torts qui l'aprouvent. Celui qui voudrok le , nommer Jacobitifme , fe rendroit ridicu- le , & une telle abfurdité ne mériteroic ,, pas de réponie. Qu'eft ce donc? Pour ,, moi, je crois que c'eft un renouvelle- ,, ment de l'ancien efprit de nos Pérès, 3, puifqu'il n'a d'autre but que l'intérêt gé- „ néral de la Nation. Eft jam una vox „ omnium ; mais j'efpére qu'on n'aura jamais 3, lieu d'ajouter , inagis odio firmata qttam 3, prœfidio. „ Or voilà, félon moi, ce qui juflifie pîei- „ nement le Craftman , quand il n'auroit ,, eu d'autre raifon pour écrire comme il „ a fait, que l'affoupiflemect général , où „ il v >5 Juillet, Août et Septembre. 1743. 246 , il voyait que !a Naci n croit plongée , par raport à les intérêts politiques; & , je foutiens qu'il mérite à cet égard des , remerçimens de la part de tout bon An- , glois. Fermer ez moi d'appliquer ici u- , ne réflexion qu'a faite Miiord Bacon en , parlant fur un autre fujet. Un Peuple 5 , qui veut maintenir fa Liberté, doit prier , pour avoir part à la Bénédiction de Ju- , du & pour éviter le fort d'Ifjachar, la , plus grande malédiction qui lui puifle ar- , river. Bien loin de fouffrir , à la façon , des Anes, qu'on le charge de tous les , fardeaux que l'on voudroit, un tel Peu- , pie doit conferver quelque chofe de la , fierté du Lion, & faire entendre fon ru- , gifiement, à l'exemple de ce coura : , animal, lorfqu'il efl injurié, ou qu'il cil , feulement menacé de l'être. " Le Vieillard ajoute enfuite , qu'en par- lant de la forte , il ne prétend pas re- commander l'efprit de Faction ou de Ré- bellion , qui n'eft propre qu'à jetter le trouble & la confufion dans l'Etat & qu'a le renverfer; qu'il n'a pasdefleîn non plus d'aprouver cette humeur chagrine & om- brageufe du Peuple, qui dérange quelque- fois toute l'harmonie du Corps politique ; mais que fon intention cfl feulement d'af- firmer qu'un Peuple ne peut s'alïïirer de jouir Ion r-tems de fa Liberté , s'il ne veil- le continuellement & avec beaucoup de jalcufie à fa confervation, & s'il n'eft con!' tamment réfolu de la défendre à quelcue * 3 2p Bibliothèque Britannique 3 prix que ce foit. Ce Principe doit être fixe & permanent dans l'efprit des Peuples li- bres , & ils doivent toujours y être égale- ment attachés, mais l'application ou l'u- fage de ce Principe doit être proportion- né à l'exigence des cas particuliers. Les cent yeux d'Argus n'étoient pas toujours ouverts, mais ils n'étoient jamais tous fer- més à la fois Le corps d'une Nation peut être aufll jaloux de fes Droits & de fes Li- bertés , qu'un Particulier le peut être de fon honneur. Cette Nation peut toujours être dans une généreufe réfolution d'affron- ter toutes fortes de dangers, s'il eft nécef- faire, pour défendre fes Libertés; de mê- me que cet homme peut toujours être dif- pofé dans le cœur à rifquer fa vie pour maintenir fon honneur. Mais, comme il y a beaucoup de différence entre le Caractère de ce Particulier & celui d'un Querelleur de profeflion , on doit aufîi faire une grande diftin&ion entre cet efprit de vigilance & de fermeté, que nous recommandons ici, & celui de facîion ou de fédition, dans un Peuple. La Liberté eft une rendre Plante, qui ne fauroit fubfifter ni croître en quelque endroit que ce foit, fi la nature du terroir n'y eft propre, & aucun terroir ne peut y être long-tems propre, s'il n'eft cultivé a- vec un foin continuel. Varia illudunt Pef- tes. Il y a plufieurs fortes de maux à crain- dre', & Ton peut dire qu'il n'y a point de faifon dans ia Révolution de l'Année Poli- tique, Juillet , Août et Septembre. 1743. 251 tique, ou la Libercé foie tout à-fait exemp- te de dangers , (bit prochains , ou éloi- gnés. En toute forte de Gouvernement , il faut néoeflairement confier certains Pouvoirs entre les mains de quelques Perfonnes ou de quelques Corps particuliers , pour le bon ordre & la confervation de la Société en- tière. Or les Limites, dans lefquelles font renfermés ces Pouvoirs, font aufîi celles qui féparent les Prérogatives des Princes, ou des Magiftrats, d'avec les Privilèges du Peuple. Ainli toutes les tentatives que fait le Prince ou le Magiftrat, pour outrepaf- fer les bornes de fon Pouvoir, font autant d'entreprifes contre la Liberté publique. D'où il eft aifé de juger à combien de pé- rils la Liberté eft expofée, fi l'on confi- dére fur - tout que l'amour de la domina- tion eft naturel aux hommes, & que l'ar- deur qu'ils ont pour augmenter le Pouvoir qu'ils pofTédent déjà, eft infatiable II eft donc évident par la nature même du Gou- vernement que la Liberté eft toujours me- nacée de quelque danger. L'Expérience ne confirme pas moins la vérité de ces Principes, que la fpéculation. Il eft clair que toutes les formes de Gou- vernement en fuppofent la certitude ; car nous voyons que dans tous les Gouverne- mens, qui ne font pas des Monarchies abfoluës, on a pris toutes les précautions imaginables, du moins autant que l'ont pu permettre leurs diverfes conftitutions , pour R 4. prévenir ^Bibliothèque Britannique, prévenir ce mal. Dans les parfaites Dé- mocraties, ces précautions ont été prifes dans le plus haut degré, & cependant el- les n'ont pas toujours été efficaces. On les avoit pouflees fi loin dans la forme du Gou- vernement Athénien , que ce Peuple pa- rqiflbit être plus en danger de tomber dans l'Anarchie, que d'être fournis à la Tiran- nïe; cependant un de leurs Magiflrats trou- va moyen de devenir leur Tiran, & il tranfmit fon Pouvoir à fes Succefieurs. Dans les Gouvernemens mixtes, la Li- berté court encore plus de péril. Nous pouvons ranger dans cette clafîe le Gou- vernement de Rome, tant fous les Rois, que fous la République: Qr fûrement il n'y a point d'Hiftoire plus fertile en exem- ples , par raport aux dangers auxquels la Liberté fe trouve expofée par ce defir na- turel & confiant que les hommes ont de maintenir & d'étendre leur Pouvoir , que l'eft l'Hiftoire Romaine depuis le dernier de leurs Rois jufqu'au premier des Empe- reurs. Mais 3 fi la Liberté, généralement par- lant, court de plus grands périls fous les Gouvernemens mixtes que fous les parfai- tes Démocraties il n'eft pas moins vrai de > dire qu'entre toutes les formes de Gou- vernemens mixtes , il n'y en a point ou elle foit plus expofée que fous les Monar- chies limitées , telle qu'eit celle d'Angle^ terre. La raifon en eft qu'un Prince Sout verain, qui gouverne dans une Monarchie limitée, Juillet, Août et Septembre. 1745. 253 limitée , a bien plus d'occaûons &de com- modités de faire des entreprifes fur la Li- berté du Peuple, que n'en ont les Magis- trats dans les Républiques. Les Pouvoirs, qui font confiés à ces derniers, font fou- rnis à des contrôles immédiats; l'exercice qu'ils en font, ell fujèt à revifion dans la fuite , & il eft limité à un certain tems , ordinairement fort court. C'eft pourquoi , fî ces Magiftrats attentent fur la Liberté du Peuple avec quelque efpérance de fuccès , cela ne peut arriver , que lorfqu'ils font en état de contre-balancer les defavantages des circonflances politiques, 011 ils fe trou- vent, par leurs grandes qualités perfonnel- les, par la fuperiorité de leur génie & de leur courage , & par des vertus extraordi- naires , du m«»ins en apparence. Il y a peu d'hommes par conféquent qui foient propres à de pareilles entreprifes. Mais il eft bien plus facile à un Prince Souverain, qui gouverne avec un Pouvoir limité, d'opprimer la Liberté publique, qu'il ne l'eft aux Magiftrats dont on vient de par- ler ; parce que fa Dignité eft à vie , & qu'el- le le revêt de Pouvoir bien plus étendus que ne font ceux des autres Magiftrats. Ainfi, pour entreprendre fur la Liberté , il n'a pas befoin de grandes qualités perfonnelles: Il pourroit même être fujèt à tous les vices & à toutes les foiblcfles, oppofés aux vertus qui font requifes en l'autre cas, & néan- moins ê:re capable de détruire la Liberté du pfos brave Peuple du monde. Sa lituation R 5 & 254 Bibliothèque Britannique, & les prérogatives dont il jouît, lui fournif- fent dès prétextes pour cacher Tes defleins, & des fecours pour les exécuter, dont les Magiftrats dans les Républiques fe trouvent abfolument dépourvus ;& ces avantages fu- pléent abondamment à ce qui pourront lui manquer du côré de Ton caractère perfon- nel, & peuvent l'afTûrer du fuccès de fon entreprife, fuppofé que le Peuple foit de- venu moins vigilant ou plus mou dans la défenfe de fa Liberté. Ainfi tout homme, en pareille fituation, efl capable de tenter ces fortes d'entreprifes avec fuccès. „ Si ces Réflexions générales, ajoute le ,, yieillard , prouvent clairement que la „ Liberté eft toujours en quelque danger „ fous quelque Gouvernement que ce foit, ,, & que ce danger augmente à proportion , que le Pouvoir Souverain eft confié à ,, moins de Perfonnes & pour de plus longs „ termes, il eft ai fé d'en conclure qu'elle „ n'eft jamais à l'abri de tout péril , même „ fous notre excellente Conftitution : ec „ qui montre évidemment la néceiTité qu'il ,, y a d'entretenir & de fomenter cet efprit „ de jaloufie , qui eft le vrai Gardien de la „ Liberté publique. Par conféquent, il ne „ faut point d'autre raifon que celle-là pour 3, juftifier les efforts qu'a, faits le Craftman „ pour réveiller la Nation de la fatale Le- ,, thargie, oh il avoit remarqué qu'elle étoit „ tombée à cet égard. " Le Vieillard, ou plutôt l'Auteur fous le Bom du Vieillard, éclaircit enfuice quelques doutes Juillet, Août et Septembre. 1743. 255 doutes & répond à quelques objections qui lui font propofées fur cette matière. Dans la féconde & troifième Lettre , il juftîfie ce Principe général, favoir qu'un Peuple ne peut conlerver long-tems fa Liberté, fans une vigilance perpétuelle & fans une fer- meté inébranlable à la défendre en toute occafion; il établit, dis-je, ce Principe gé- néral, dans les deux Lettre? qu'on vient de citer, par des exemples tirés de l'Hiftoire Romaine. Dans les Lettres fuivantes , il s'attache à prouver & à confirmer la même Propofition , & quelques autres qui lui font relatives, par des Remarques fur l'Hiftoire d'Angleterre , qu'il parcourt d'un bout à l'au- tre. Nous nous bornerons ici à rendre comp- te de ces dernières Remarques , tant pour abréger, que parce que le titre de cet Ou- vrage fait allez connoitre qu'elles font le principal but que l'Auteur s'eft propofé dans les Lettres. Pour remonter avec l'Auteur jufqu'à l'ori- gine de la Nation Britannique, nous obfer- verons après lui qu'il y a eu très -peu de Gouvernemens, qui ayent été fujèts à tant de Révolutions, ck qui ayent flotté fi fou- vent entre les Prérogatives des Princes & les Privilèges du Peuple, que celui delà Grande Bretagne. Si la Nation Britannique eft encore aujourd'hui un Peuple libre, c'eft que l'efprit de la Liberté n'a jamais pu être entièrement éteint parmi elle. Elle a été plus d'une fois réduite par la force dans une fituation qui relie mbloit fort à un pur efcla- 2.56 Bibliothèque Britannique, efciavage. Mais ces ufurpations ne purent jamais s'établir folidement, ni être de lon- gue durée. Elles jetterent la confufion & le defordre dans l'Etat, mais elles n'étoufFe- rent point les Principes d'un Gouvernement libre: Semblables aux nuées du matin, elles furent bientôt difîlpées, & le Soleil de la Liberté parut derechef avec une nouvelle force & un nouveau luflre. Les Romains, qui s'étoient laifle cor» rompre depuis long - tems par le luxe de la Grèce île. Cependant la Nation eut encore patien- ce pendant quelque tems. Il y a toute ap- parence que Richard & ceux de fa Faction : avèrent que le Peuple feroi: dar.; néceffîtè* ablcîue de fouffrir leurs oppref- fioos jufqu'au bout, vu que toute la Lég:f- e étoit unie contre lui. Mais les Fa- voris furent trompés dans leur attente. \d le Parlement prenait le par:: pie, le Peuple a fon tour s'attachoi: au Parlement & fe conduifoit par iesji*::^ lorfqu'ife n'a voient plus riefl à efpérer du co:é du Parlement , ils firivoient le pi : juillet, Août et Septembre. 1743. i6ç> premier etendart qui paroiflbit en campa- gne contre ia Cour & contre ie Roi. Ce même efpric de Liberté , qui avoit ( patient & ii modéré jufque-là, agit avec la plus grande vigueur lorfqu'on s'y atten- doit le moins. Le Roi étoit à la tête d'u- ne Armée enEcone, le Duc d'Yor. trouvoit à la tête d'une autre Armée en Angleterre , & le Comte de Salilbury en commandoit une troifieme. Tout cela néan- moins fut inutile pour le fervice du Roi. Ces Armées ne voulurent point combatre contre leur Patrie. Ainfi toute la Nation abandonna Richard, eu plutôt le deciara contre lui. Quelques-uns de fes Miniltres furent exécute>, ce entre autres ceux qui avoien: e:é les principaux inftrumens de Topprelllon publique. Peu de tems après, le Roi fut obligé lui-même de renoncer à ja Couronne & de fi_ner un Atte par le- .connoifloit indigne de gou- verner. Il eit très-remarquable que Richard IL tomba dans cette extrémité déplorable , dans un tems où tout paroiifoit confpirer à le maintenir dans l'exercice du Pouvoir ar- bitraire qu'il avoit ufurpé par violence. Ceux oit eu le plus lujèt de crain- dre , morts ou bannis; les autre* étoient attachés a fes intérêts par des Pla- ces, ou par :2 fc.vei.r dont ils joui'iToien: à la Cour. Le> çrands Offices de la Cou- ronne & tout-. ^arges de Magiftratu- rc étoient remplis par fes Créatures ou par S 5 celles a^o Bibliothèque Britannique, celles des Favoris. De plus, il avoit un Parlement tout à fa dévotion. Cependant toutes ces circonftances avantageufes ne purent empêcher fa ruine: ce qui juftifie pleinement la réflexion de Mr. Rapin fur la trille Cacaftrophe de ce Règne & de ce- lui d'Edouard II. Dans un Gouvernement tel que celui de l'Angleterre, dit cet Hiftorien, toutes les démarches que fait un Roi pour Je rendre àbfolu , font autant de pas qu'il fait vers fa chute. L'Auteur pafle rapidement fur les Rè- gnes des Princes des Maifons d'Yorck & de Lancaftre , parce que ce furent des Règnes de Faclion ; & s'il fait quelques pau- fes en certains endroits , ce n'eft que pour faire des remarques utiles ou néceffaires à fon deiTein. Le Parti de Richard II. , mê- me après la Mort de ce malheureux Prin- ce , fe révolta fouvent contre Henri IV. ; mais tous leurs efforts furent inutiles, & la plupart des Chefs de cette Faclion pé- rirent dans ces fortes de rencontres. S'il n'y avoit eu qu'eux qui en euflent fouifert, le mal n'auroit pas été fort grand; mais il faut ici remarquer une fuite aufîl néceflaire que funefte & cruelle des Factions. Non feulement elles oppriment la Liberté pu- blique , lorfqu'elles réùfTiflent en leurs def- feins, mais de plus elles entraînent fou- vent la Société entière dans leur propre rui- ne, lorfqu'elles viennent à tomber. Les attentats faits fur la Vie & fur la Couron- ne d'Henri IV. obligèrent ce Prince de fe maintenir Juillet, Août et Septembre. 1743. 27x maintenir par la force des Armes. Il eft fore vraifemblable quecesraifonsjuftifioienc dans fefprit du Peuple la Sévérité de fon Gouvernement, & qu'elles les portoient à exeufer la plupart de Tes actions tiranniques & contraires aux Loix; comme, par exem- ple, de ce qu'il empiétoit fur les Privilè- ges du Parlement, du moins en ce quicon- cernoit le Point des Elections , & de ce qu'il obtenoit par ces moyens l'impofi- tion de fréquentes Taxes qui étoient fort onereufes au Public. Car le Peuple eft capable de fuporter patiemment diverfes oppreffions , tandis qu'il demeure perfuadé qu'il ne fourTre tout cela que pour défen- dre fon propre choix, & que pour mainte- nir ce qu'il a lui-même établi ; mais , s'il vient à découvrir que ce n'efl qu'un pré- texte dont on fe fert pour conferver un Pouvoir, qui n'efl point néceffaire à fa fure- té, & qui met au contraire la Liberté en dan- ger , on ne doit pas fe promettre en ce cas que fa patience dure fort long-tems. L'Auteur remarque enfuite , que Henri IV. avoit deffein , au commencement de fon Règne, de montrer fa clémence, en n'infligeant qu'un châtiment doux & mo- déré aux Mini (1res du dernier Règne, qui étoient univerfeliement haïs à caufe de leurs malverfations; mais, comme on al- légua, pour les exeufer, que Richard les avoit contraints de faire ce qu'ils avoient fait, le Parlement en prit cccafion de paf- fer un Acle , par lequel il fut déclaré qud Vaveniï la contrainte ne feroit point admi/è en jufticc 2*72 Bibliothèque Britannique, jujlice comme une excitje légitime ni comme une jujiijication fuffifanîe pour des Actions contrai- res aux Loix. Cet Avrèt, ajoute l'Auteur > paroit jufte & raifonnable; vu que c'efl un Devoir indifpenfable pour un Mini lire de difluader fon Maître de rien entrepren- dre qui foie contraire aux Loix; & s'il ne peut venir à bout de l'en détourner, il doit quitter fon f-'ofte plutôt que de fervir d'inftrument à de pareilles injuftices. D'ail- leurs , fi le commandement du Prince pou- voit être allégué comme une exeufe ou une juitirication fuffifante en pareil cas, la Prérogative de n'être cas obligé de ren- .dre compte s'étendroit juiqu'aux Minières.; & ainîï perfonne ne pourroit être recher- ché ni puni pour la mauvaife Adminiftra- tion des Affaires publiques. Pendant le court , mais triomphant ,. Règne d'Henri V. l'efprit de Faction fut tenu en échec ; & l'efprit de Liberté n'eut pas oçcafion de fe maiiifefter, du moins a- vec vigueur ni avec éclat, fous un Prince modéré, jufte, & pieux leîon la Keligion de ces tems-là. Le Règne de fon Fils fuc un Règne de Faction, & on v découvre une horrible fcène d'iniquité, de folie & de rage. La mauvaife Adminifrration des Affaires , qui caufa beaucoup de pertes & encore plus de defhonneur à la Nation , occasionna des foulevemens & des révol- tes. Le caractère méprifable de celui qui étoit affis fur le Trône, fit revivre les pré- tendons de la Maifon d'Yorck. Les Grands & les hommes les plus intriguans& les plus aaifa Juillet, Août et Septembre. 1743. 273 actifs de la Nation étoient attachés à l'un ou à l'autre Parti par des motifs d'intérêt uu de paiiion Ainfi, à la hon*C de laJNation, 1' ntcrêt public etoit oubl e,<^ l'on necomba- toîcque pour) 'in lé; et purt.culierde deux Fa- milles. Il femble, à la vér"té,que les Parle- mens fuivoient des Principes tout différées & qu'ils le foucioiefft fort peu quel Prince fut fur le Trône , pour\u c;uj1s puilent main- tenir la Conftitutiun du Gouvernement. Avant que de quitter le Période de tems, où nous en fommes , il eft encore à pro- pos de faire une autre obfervation avec l'Auteur. Les Règnes de Richard IL & d'Henri IV, avoient fait voir les fuites dan - gereufes du Pouvoir que la Cour avoic u- iurpé dans les Elections des Membres du Parlement. Le vigilant efprit de la Li- berté en prit d'abo d l'alarme, & il agit avec allez de vigueur , pour obtenir qu'on y aportut les remèdes convenables. C'en: pourquoi l'on fit fur cefujetdes Réglemens, ■qui parurent fuffifans en ces tems-là pour prévenir de femblables abus à l'avenir. On trouve ces Réglemens en diverfes Loix faites fous les Règnes des trois Princes de la Maifon de Lancaftre; & on procède en- core aujourd'hui , du moins en bonne par- tie, dans les Elections félon la forme pref- crite en ces Statuts. A la vérité , on y a quel- quefois fait quelques altérations , & il eft néceflaire même d'y en faire, lorfque le changement des circonftances l'exige. Mais ces altérations ne doivent être fanes qu'en v ù trouverait en état par ce moyen, fans ê- tre oblige de demander de nouveaux Sub- fides au Peuple, de défendre le Royaume contre les in valions que la Cour fiifoic Semblant d'aprehenler, & dont on avoit fait courir le bruit exprès/ Ces prétendues, invafiens n'arrivèrent pas; & cependant , l'année fuivante , non feulement il reçut en prefent du Clergé de la Province de Cantorberi la cinquième partie de leurs Revenus, Don qui lui fut confirmé par le Parlement; mais il demanda de plus en mê- me ;ems un Subfide à la Chambre Baffe, Une demande li extravagante ne pouvoit pas manquer de rencontrer quelque oppo- sition ; les Communes eurent néanmoins la lâcheté de lui accorder un Subfide auffi confidérable , que fi la Nation avoit été engagée dans une dangereufe Guerre. Les Raifons qu'ai leguoienc les Partifans de la Cour pour preïlèr l'Octroi de ce Subfide, étoient des plus burlefques. Ils difoic-iit que le Roi arJoit dépenfé de grandes S faire garderies Cotes, & que les Frais qu'il avoit été obligé de faire pour qjjilrer la prix ôj lulcndance à fes Sujets , lui ai [lus coûté que ri aur oit fait lapins or.e\ Guerre. Mais , fi ces raifons étoient - blés , il s'enfuivroit de -là qu'il faudrait convertir en Aides ordinaires du Gouver- nement ces Taxes onereufes, qui ne doi- vent ccre impofées que dans des occafions & des nccclTités extraordinaires. Cet Empire abfolu, qu'Fïcnri VIII. ex- T 5 a8ô* Bibliothèque Britannique, erçoit fur les Bourfes, fur la Liberté, la Vie , & les Confciences de fcs Sujets , étoit un effet delà Dépendance fervile, ou il avoit trouvé le moyen de réduire les deux Chambres du Parlement. Ainfi la Tirannie étoit actuellement établie par les Loix. Si l'on recherche la véritable cau- fe de cette Dépendance, on la trouvera, comme Ta très-judicieufement obfervé Mr. Rapin , dans les Divifions qui régnoient alors au fujet de la Religion. Le Parti qui s'oppofoit à toute Réformation , par un attachement fuperftitieux à la Difcipli- ne, auffi bien qu'à la Doctrine de l'Eglife de Rome , fournifîbit dos prétextes au Roi pour fe faire ajuger tels Pouvoirs qu'il jugeoit à propos , & pour tirer de l'Ar- gent de fes Sujets. Outre ce Parti , il y en avoit encore deux autres, qui s'accor- doient jufqu'à un certain Point , c'eft-à- dire, qu'ils aprouvoient , du moins exté- rieurement , tout ce que le Roi avoit fait contre le Pape & le Clergé Komain: mais ils fe divifoient enfuite,* les uns voulant qu'on s'en tînt là & qu'on ne fît point d'autre changement dans l'ancienne Reli- gion , & les autres deGrant qu'on pouffât la Réformation beaucoup plus loin. Le Roi paroiffoit tenir un certain milieu entre ces deux Partis; tantôt il témoignoit quelque penchant à favorifer ceux dont les Princi- pes tendoient à une parfaite Réformation ,* tantôt il fe montroit fort zélé pour les an- ciens Dogmes, de même que pour certains Articles Juillet, Août et Septembre. 1743. 287 Articles de la Difcipline introduite par les Conciles & les Papes. A juger de fa croyan- ce par la manière dont il fit iouvent exé- cuter le Statut de Sa?ig, ou la Loi des Six Articles , il y a tout lieu de croire qu'outre les confidérations politiques, il reftoit en- core attaché par préjugé aux Dogmes de la Religion, en laquelle il avoit été élevé. Quoi qu'il en foit,il fut toujours parfaite- ment obéi, & chaque Parti s'empreflbit à témoigner la fourmilion la plus parfaite à toutes Ces volontés; les uns, par la crain- te qu'il ne les abandonnât tout-à-fait ; & les autres, par l'efpérance qu'il poufferoit enfin la Réformation jufqu'au bout. Une pareille Emulation formoit fans contredit la conjoncture la plus périlleufe, où la Li- berté puifle être expofée. Quand les mo- tifs de deux Factions oppofees font fondés fur l'avarice & l'ambition particulière, le danger eft grand; mais il l'eft encore bien plus, lorfque le zélé de la Religion fe joint à ces motifs, & que le Fanatifme con- court à la même fin avec l'efprit de Fac- tion. Il fe trouve alors une infinité de gens, qui font tout difpofés, les uns par folie, les autres par friponerie, à facrifier la Li- berté publique à leur Syftème particulier de Superflition. Telle étoit la trifte fituation, oùfetrou- voit la Liberté des Anglois , lorfque Hen- ri VIII. mourut. S'il avoit laiiTé un Suc- cefléur d'un âge mûr , & qui eût été d'un caractère aufïï hardi ce aufil entreprenant que 23S Bibliothèque Britannique, que lui , il y a beaucoup d'apparence qu'elle auroit été éteinte pour toujours. Mais ia Providence difpofa les choies au- trement , & brifa ces liens de fervitude que les Anglois s'étoient forgés à eux-mê- mes : Bel exemple qui doit leur apprendre à ne biffer jamais empiéter fur la Liberté & les Privilèges du Peuple , fous quelque prétexte que ce foit! Heureufement pour eux, une Minorité fuivit ce Règne defpo- tique & turbulent. Le Gouvernement étoit foible & la mefintelligence régnoit parmi les Regens. Le Peuple profita de cette conjoncture pour fe tirer de l'efclavage, où il s'étoit précipité lui-même. En quoi le Duc de Somerfet le fervit par inclina- tion , & le Duc de Northumberland fit la même chofe par Politique. Les Anglois font redevables au premier d'avoir établi la Réformation fur les ruines du Papifme , & d'avoir aplani toutes les voyes pour le rétablifiément d'un Gouvernement Libre. Dès la première année de fon Adminiflra- tion , il fit cafTer plufieurs Adtes , paffés fous les Règnes d'Henri VIII. & de quel- ques-uns de fes.Prédécéfleurs,qui tendoient à l'opprefîion du Peuple & de la Liberté , ôc entre autres cet Acte abfurde , qui don- noit aux Proclamations la force de Loix. La Loi desfix Articles fut aufîi révoquée. Il y en eut d'autres qui furent expliquées & dont le fens fut limité. Enfin on publia plufieurs nouveaux Statuts en faveur de la Liberté, tant Civile qu'Ecclefiafiique. Le Jl'tllet, Août et Septembre. 1743; 2S9 Le violent choc , que la Liberté & la Religion eurent à fouffrir fous le Règne de .Marie , ne fut pas de longue durée. Cet- te courte Perfécution ne fut pas capable de détruire la Réformation, qui avoit dé- jà jette de profondes racines, elle la con- firma plutôt. Il eft vrai que la Révolte mal concertée de Wyat donna de nouvel- les forces à la Faction qui dominoit à la Cour, & qu'elle découragea pendant quel- que tems ceux qui ne manquoient pas de bonne volonté pour s'oppofer à la Tiran- nie. De plus Marie avoit un Parlement tout à fa dévotion. On avoit travaillé ii ouvertement à corrompre les Députés , qu'on favoit même publiquement combien d'argent chacun d'eux avoit reçu pour ven- dre fa voix à la Cour. 11 n'efl donc pas étonnant qu'un tel Parlement ait rétabli l'Autorité du Pape, ni qu'il ait aprouvé le Mariage de Marie avec Philippe. Mais le» chofes ne pouvoient durer long - tems en cet état. La Nation n'écoit pas difpojee à fouffrir que fes intérêts fuflent continuelle- ment facrifiés aux Cours de Rome & de Madrid. Le Parlement même, tout cor- rompu qu'il étoit, commençoit à fe foule- ver contre la Cour. L'efprit de Liberté s'étoit réveillé , &c cet efprit , de même que celui de la Réformation , avoit fait plus de progrès, qu'on ne croïoit, & qu'il ne paroilToit extérieurement. D'ailleurs, on vit dès lors paroitre quel- ques-uns des effets que devoit naturelle- ment 2ço Bibliothèque Britannique, ment produire la Politique , qu'avoient eue Henri VII. & Henri VIII. , comme on l'a remarqué un peu plus haut. Les Ricbef- ies de la Noblefle & du Clergé étoient di- minuées , & celles des Communes augmen- tées. Le Commerce avoit été exercé a- vec beaucoup plus de fuccès depuis la dé- couverte des Indes Occidentales. Les ïréfors immenfes , qu'on avoit tirés de ces Païs-là , avoient fort augmenté les profits des Marchands & par conféquent leur induftrie. Henri VIII. avoit vendu à fort bas prix une grande partie des terres de l'Eglife , pour intéreiTer le Corps de la Nation à le foutenir dans fa querelle contre le Clergé Romain. Les Commu- nes avoient fait leur profit de ce trait de Politique, & s'étoient fervi de cette occa- fion, ainfi que de plufieurs autres, pour acquérir beaucoup de biens en fonds. Ma- rie ne prévit pas les fuites de ce change- ment, qui étoit arrivé dans les PoiTeiïions des trois Etats, & qui alloit tous les jours en augmentant; & elle ne vécut pas allez long-tems pour s'en inftruire par fa propre expérience. Mais les conféquences natu- relles d'un fi grand changement n'échape- rent pas à la pénétration d'Elizabeth. El- le remarqua non feulement l'altération qui s'étoit déjà faite dans l'état des PoiTeiïîons, mais fon bon fens lui fit prévoir que les mêmes cauies , qui l'avoient produite , l'augmenteraient encore de jour en jour; & comme elle n'ignorait pas que le Pou- voir Juillet, Août et Septembre. 1743. 20* voir & l'Autorité fuivent toujours la ri- chefie & l'étendue des Pofleffions , elle ajufta tout le Syftème de fon Gouverne- ment à ce Principe. C'efl pourquoi, au lieu d'avoir recours à des expediens qui n'étoient plus de faifon , elle choiût le feul qui lui reftoit pour gouverner heureufe- ment, qui étoit de s'attacher, comme elle fit , à gagner le cœur & la confiance de Tes Su- jets. Ce Syftème de Politique,fifimple en lui- même, rendit fon Règne glorieux & triom- phant , tant au dedans qu'au dehors. L'Augmentation des Richeflés parmi les Communes donna plus de crédit & d'Autorité à leur Corps répréfentatif dans le Gouvernement. La Chambre des Com- munes devint plus puiflante, non par l'ac- quifition de quelque nouveau Pouvoir, mais par la manière en laquelle fon Indépendance , effet de fes Richefles , la mit en état d'ex- ercer celui dont elle jouïflbit déjà. Dans les premiers tems de la Monarchie , comme le remarque notre Auteur , le Roi avoit des Biens immenfes , & une grande partie du Païs lui apartenoit en propre. Les Lords étoient en petit nom- bre , & n'étoient guéres moins puiflansque le Roi. Quelques-uns même poflëdoient une fi vafte étendue de Terre, & pouvoient difpofer d'un fi grand nombre de Vaflaux, qu'un ou deux de ces Seigneurs étoient en état de foutenir la Guerre contre leur Mo- narque. Pour les pauvres Communes, à peine étoient -elles en ce tems -là un Peu- ple *9* Bibliothèque Britannique, pic Libre, (Se elles ne poffédoient prefque point de biens en fonds. Les choies onc bien changé de face depuis ce tems-là. Les Pvois onc renoncé â des branches confidc- xables de leurs Droits, & tout le monde fait que les Biens de la Couronne ne font rien au prix de ce qu'ils ëtoieiK autrefois. Les Lords font en grand nombre, & pla- ideurs d'entre eux ne font pas fort riches. L'Eglife n'a que fort peu de Terres, de ce qu'elle polléda il y a quelques Siècles: & le Tiers Etat eft en polfeiTion des trois quarts de tout le Païs. La Conititution Angloife eft toujours ef- fentiellement la même, qu'elle a toujours été, & la Souveraineté réfide autant que jamais dans les trois Etats , le Roi , les Lords , & les Communes ; mais lorfque Ton conlidére les grands changemens qui font arrivés dans les PoifeiTions de ces trois Puiiïances, il feroit abfurde de prétendre , qu'elles fiflerit valoir chacune leurs Droits de la même manière qu'autrefois II y a eu un tems , ou le Roi & le Corps "des Pairs du Royaume, tous deux formidables par leur puîiTance & continuellement ja- loux l'un de l'autre, faifoient tous leurs efforts pour s'empêcher mutuellement d'op- primer les pauvres Communes , qui n'étoient point en état de fe défendre elles-mêmes. Mais le cas eft tout différent aujourd'hui. Les deux premiers Etats n'ont plus la moindre rai Ton de fe craindre réciproque- ment, & les Forces de tous les deux réu- nies Juillet, Aour ht Septembre. 1743. 193 nies ne feraient pas fuperieures à celles du Peuple. Or le Pouvoir & l'Autorité fui- vent toujours la Richeffe , & là où elle manque, il eft difficile, pour ne pas dire impratiquable , de fe maintenir long- teins en poiïeffion dés autres. On ne fauroit inférer par conféquent, dS l'Empire abfolu qu'ont exercé les Rois d'Angleterre, & de la grande Autorité dont les i^airs ont été revêtus dans des tems plus reculés , qu'une branche de la Souve- raineté ne rélidoit point dans les Commu- nes, & qu'elles n'avoient pas la même Por- tion dans le Pouvoir Légiflatif dont elles jouïflfent à préfent. Tout ce qu'on peut en conclure , eft qu'elles n'avoient pas les forces nécerfaires pour maintenir & faire valoir leurs Droits. Quand les Rois & les tarons faifoient la Guerre à leurs propres dépens, ils n'avoient que faire de conful- ter les Communes, qui ne pouvoient les aiîifter que de leurs bras; & ils pouvoient s'en fervir comme de leurs Varfaux, fans en demander la permifiion à un Parlement, A préfeix il faut équiper des Fiotes, le- ver & entretenir des Armées, donner du bien à des Généraux, enrichir des Miriif- tres ; & tout cela fe tire de la bourfe du Peuple. C'eft le Peuple encore qui fournit aux dépenfes de la Cour, & ceux, qui tirent penfion du Roi , font prefque tous paies par les Communes. Par conféquent on ne fauroit fe prlTer d'elles , & il n'efl pas furprenant qu'on ait pour elles une confédération proportionnée à ce qu'el- Tme XXL Par; IL " V les 194 Bibliothèque Britannique* les contribuent aux frais de l'Etat , & qu'on les laiffe jouïr de la portion qu'elle» peuvent prétendre dans le Pouvoir fu- prêrae. Ce qu'il y a de plus grand & de plus beau dans la Constitution du Gouverne- ment Britannique , c'eil que les trois Etats, dont chacun eit revêtu d'une fi grande par- tie de la Souveraineté , ne iàuroient ja- mais avoir le moindre conflit de Jurifdic- tion , tant qu'ils s'en tiendront à l'Autori- té Sacrée des Loix. Non-obftant les por- tions du Pouvoir fuprême poflfédées par les deux Chambres, les Anglois rendent le même refpeâ: & le même hommage à leur Roi , que celui dont on honore dans d'autres Pais les Monarques les plus abfo- lus; tout comme s'il n'y avoit pas chez eux le moindre partage dans la Souverai- neté & dans le Pouvoir Législatif. Il eft Arbitre de la Paix & de la Guerre, il crée les Evêques , il eft la Source de toutes les Grandeurs , & il n'y a que lui qui puifle donner des Titres & des Dignités. Il nomme tous les Officiers, tant Politiques, que Militaires , & fait fraper toute la Mon- noye à fon coin. Il poiTéde , indépen- damment des Pairs & des Communes, le Droit de faire des Alliances avec les au- tres Etats, de ménager les Affaires poli- tiques étrangères & les intérêts de la Na- tion par raport aux autres Peuples. Pouree qui regarde le Gouvernement des Sujets, le Roi eft le Surintendant de toutes lc& Loix ; il Juillet > Août et Septembre. 1745. 29f a toute l'Autorité néceflaire p©ur les fai- re exécuter, & la Juftice eft adminiftrée en Ton nom. Ces haute* Prérogatives & plufieurs au- tres apartiennent au Roi , & font des mar- ques indubitables de fa Souveraineté; mais il n'y en a pas une feule qui puiiTe fervir à le rendre Tiran & à réduire la Nation à ï'efclavage. Les Droits & les Privilèges du Parlement, & la Liberté du Peuple, font des branches aulîî facrées de laConiti- tution Britannique , que tout ce qui con- cerne l'Autorité Royale. Si quelque Sujet commet un Crime , il eft jugé par la Loi , & non par la volonté arbitraire du Prince, ou de fes Miniftres. Celui qui viole le3 Loix , elt fouvent puni aufli rigoureufe- ment, que s'il avoit defobéï à la volonté abfoluë du Tiran le plus defpotique ; mais, dès que les Loix fe taifent, il n'y a point: de Supplice à craindre, parce qu'il n'y a point de tranfgrcflion. Pareillement, fi l'on vient demander à un Anglois , au nom du Roi , de l'Argent qu'au- cun Acte du Parlement ne l'oblige de don- ner, & qu'on extorque de lu; cet Argent par force 4 il a Droit de citer en jugement ceux qui lui ont fait cette violence, fins que l'ordre du Roi puiflfe les mettre à l'abri delà Sévérité des Loix, non plus que l'or- dre du Grand Turc. Mais fi, fur le refus que fait ce Particulier de donner l'Argent qu'on exige de lui en cette manière, on le net en prifoii, fans vouloir le relâcher fou- V 2 CiUt'.Q3 2p6Bir.LIOTHEQ.UE BRITANNIQUE, Caution fuffifante; fi on ne lui permet pas ce plaider fa Caufe conformément aux Loix ; ou fi l'on inftruit fon procès devant une Cour de Juftice destituée de l'Autorité des Loix; il eft certain qu'en tous ces cas l'on empiète fur les Droits du Peuple, & qu'on viole manifeftement l'Acle babeas Corpus. Cependant, toutes ces injuflices peuvent fe- commettre fans que le Roi en foit coupable lui-même; il fe peut qu'il ignore tous ces Faits, & que fes Miniftres abufent de fon Autorité à fon infçû. Mais, fi après plu- sieurs Remontrances adreflees au Roi, ou à fon Confeil, ces Griefs ne font pas re- dreiTés, & que les Auteurs, bien loin d'en être punis, relient en faveur; fi l'on difibut ie Parlement, ou fi on ne le convoque pas dans le temsfixé parles Loix; en un mot, fi l'on employé les moyens les plusinjuftes, pour mettre ces Minières à l'abri de la pu- nition , fans s'inquiéter des plaintes géné- rales du Peuple,* c'eft alors que le Roi viole formellement le Contrat qu'il a fait avec fes Sujets. Il ne fauroit jamais le faire, que cette rupture ne faute aux yeux de tout le monde. Or c'eft alors au Parlement à s'op- pofer à ce defordre & à pourvoir au Salut du Public,- il doit en ce cas faire ufage du Pouvoir qui lui a écé confié pour défendre les Libertés & les Privilèges du Peuple, & pour empêcher que les Sujets ne foient op- primés. Les Remarques qu'on vient de faire, mon- tent que le Gouvernement Britannique eft de? Juillet, Août et Septembre. 1743. 207 des plus logement conftitués, & qu'il n'eit guéres poiîible d'imaginer quelque Inftitu- tion humaine plus parfaite , puifque les Droits & les Prérogatives des trois Etats font li clairement établis & diftingués par les Loix, qu'aucun de ces Etats ne peuc empiéter fur les Droits des deux autres, que l'ufurpation ne foit aulli-tôt aperçue d'un chacun. De plus, en cas que ce defordre arrive, ces mêmes Loix ont abondamment pourvu au remède, par ce jufte contrepoids de Pouvoir qu'elles ont mis entre ces trois Etats ; de forte que le Roi ne court aucun danger, humainement parlant, de perdre les Prérogatives de fa Couronne, ni le Peu- ple d'être dépouillé de fes Privilèges , à moins que ce ne foit par leur mauvaife con- duite & par leur propre faute. On dira peut-être que ce partage de, la Souveraineté en plufieurs branches , dans un Gouvernement tel que celui d'Angleter- re, allbiblit l'Autorité Royale , & prive le Monarque de cette plénitude de Puiflance, qu'il eft quelquefois néceilaire d'exercer, même pour le Bien général de la Société. L'Auteur répond, que, quand cette objec- tion feroit bien fondée, un petit nombre d'inconvemens , qui ne peuvent arriver que rarement, ne méritent pas d'être prévenus par des remèdes , qui expoferoient conti- nuellement la Liberté 6: les Biens des Sujets à être facrifiés à l'avidité, ou aux caprices d'un feul homme; niais que le Règne d'E- lizabeth prouve invincible ment , qu'un Prin- V 3 ce , 5o8 Bibliothèque Britannique, ce, qui fait les mêmes Maximes qu'elle, peut jouïr, à la tête du Peuple le plus libre qui foit au monde, de toute la Puiflance & l'Autorité néceflaires, pour gouverner glo- rieufement, pour alTûrer le repos de fon Peuple, & pour triompher de les Ennemis ce de ceux de l'Etat, tant au dedans qu'au dehors. Ainfi toutes les objections , que l'on peut faire contre la Conftitution du Gouvernement Britannique, fe réduifenc à ceci, lavoir, que l'Autorité Royale y eft bridée de telle façon, qu'il n'eft'point aifé à un Prince, qui voudroit s'arroger un Pou- voir arbitraire & gouverner en Tiran, de venir à bout de Ces Defleins. Un Prince qui ne le pare jamais fon inté- j-cc de celui de fon Peuple, & qui choillc les voyes les plus propres à procurer l'un & l'autre , jouira du Pouvoir le plus étendu dans une Monarchie limitée. Mais un Prin- ce, qui fuit des Maximes contraires, & qui cherche fes avantages particuliers au détri- ment de ceux du Public, excitera la jufte >rid gnation de {qs Sujets contre lui ; puif- qu*îl agit directement contre 2a fin du Gou- vernement, qui eft le Salut du Peuple. A:n(î i'efprit de Liberté ne manquera pas ce s'oppofer avec vigueur à fes pernicieufes éntrëpnfes; & en ce cas ce n'eft pas le Peu- . înais le Prince, qui ett refponfable de- vant Dieu & devant les hommes de toutes iv- fâclieuies fuites, que peut avoir une pa- ••. [fc 'querelle. L'Au:eur s'attache enfuite à confirmer la vérité Juillet, Août et Septembre. 1745. 29& vérité des Principes , qu'il vient de pofer, par des exemples pris des Règnes d'Eliza- beth & defes deux Succefleurs immédiats; & c'eft ce qui fait la madère de Tes Lettres depuis la treizième jufqu'à la Vingt -quatriè- me & dernière. Les Remarques qu'il fait fur ces Règnes , font intéreflan tes & fort inf- truftives; mais, comme cet Article fe trou- ve déjà afTez long , l'importance des matiè- res nous ayant infenfiblement engagés à l'étendre beaucoup plus que nous n'en a- vions d'abord formé le deflein, nous fom- mes obligés de renvoyer l'Analife de ces Remarques jufqu'au Journal prochain. ARTICLE III. An Historical Account of the Life and Reign of David &c. C'eft -à- dire: Récit Hijîorique de la Vie, & du Règne de David Roi d'Ifraël, entremêlé de diverfes Conjectures, Digrefîions & Recherches ; où Ton examine entr'au- tres chofes, la Critique que Mr.Bayïe a faite de la conduite & du caractère de ce Prince. Par l'Auteur de Y Exa- men defintérejfé de la Révélation. A Lon- dres, chezU/Vr, Dodd, C.Bitcb, Ri- Y 4 vingt on e- luuny en retrace les circonflances odieufes & en décrit les funefles fuites, d'une ma^ nîèrc très-propre à faire fentir au Lecteur, combien les perfonnes les mieux affermies d&rts la piété, doivent veiller fur elles-mê- mes, craindre les faillies de leur cœur & tenir en bride leurs parlions (V). Il ne re- lève pas avec moins d'élégance & de force les traits toi: ch an s de pénitence que le cou- pable fit éclatter, 3ux premières dénoncia- tions de la juftice divine; mais on fent af- fes que ce font là des morceaux qu'il faut voir (*) Chip, h v. uf. Juillet, Août et Septembre. 1743. 301 voir dans l'original. Je ne pourrois que leur faire perdre infiniment de leur prix , û je me hazardois à les traduire ou à les abréger. L'Auteur conjecture avec beaucoup de vraifemblance , que la paiîion de David don- na aux Hammonites un fuccès qu'ils n'au- roient pas eu fans cela Ça). Joab avoit mis le fiége devant Rabba leur capitale. Mais aîant des ordres fecrets de faire périr Té- poux infortuné de la Makrefle du Roi, il y a grande apparence, qu'il facrifia bien du monde, & peut-être des plus braves de l'armée, pour s'acquiter plus fu rement de cette cruelle çommiflîon. Les Hammordtes rirent une fortie, où ils eurent d'abord du deflbus; on ne fe contenta pas de les re- poufTer, on les pourfuivit indifcrectemenc jufqu'aux pieds de leurs murailles, & Uriz ne fut pas le feul des Serviteurs de David, qui y perdit la vie en combattant. Cet avantage ne pouvoit qu'animer les eipéran- ces des affiégcz, 6c que faire trainer le liè- ge en longueur. Mais enlin après environ deux ans de réfiftance, il fallut céder. Juab emporta la baflc ville, & bientôt il ailoit de même emporter la haute , fi par une gé- nérofké peu commune, il n'avoit vôufU en biffer l'honneur à David. Ce Monarque ex- cité par les prières de fon Général , accou- rut devant Rabba. Les foldats enflammez par fa pré Pence , montèrent à l'affaut , & for- cèrent la place, Hanun Roi des Hammonites fut (a) Chttp IV. 502 Bibliothèque Britannique, fut détrôné, coût fon pais faccagé, & Da- vid, dit l'Hiflorien facré, David emmena un fort grand butin de la Ville. Il emmena aujji le peuple qui y étoit fi? le mit fous des f des , & fous des berjes de fer, £f jous des bâches de fer , &f il Us fit paffer par un fourneau , où Von euit les briques , fif il en fit ainfi à toutes les Villes des enfans de Hammon (a). Mr. Bayle , que nôtre Auteur n'a pas trouvé à propos de nommer ici , s'eft don- né carrière fur ces paroles. Qui ne connoi- troit pas fon caractère , pourroit aifément s'en former une idée , en lifant les ré- flexions qu'il s'eft permifes à cette occa- fîon. >, Peut on nier , s'écrie-t-il , que „ cette manière de faire la guerre ne fait „ blâmable ? Les Turcs & les Tartares „ n'ont ils pas un peu plus d'humanité ? „ Et (i une infinité de petits Livrets crient „ tous les jours contre âes exécutions mi- „ litaires de nôtre tems, dures à la vérité „ & fort blâmables, mais douces encom- „ paraifon de celles de David, que ne di- „ roient cas aujourd'hui les Auteurs de ces 5, petits Livres , s'ils avoient à reprocher „ les fcies , les herfes , les fourneaux de 9i David (b) ? " On ne peut nier que la remarque & la manière dont elle efl faite, ne foyent parfaitement dans le goût de l'Auteur de Y Avis aux Réfugiez. Le tout en cft digne de lui ; mais le pourroit il qu'il (a) iSam. XII, 30, $1. (*) Bayle Ditt. Htjh&Crù.Att.Je David. Juillet, Août et Septembre. 1743. 303 qu'il y eût des gens aflez dupes pour s'en laitier impofer, par des traits de ce genre? Soit inattention, (bit mépris, Mr. Delauny n'a pas feulement daigné le fouvejiir du ti- tre de fon Livre, pour prévenir le Letteur contre cette fortie du malin Lexicographe; cependant il n'a pas négligé d'approfondir l'accufation qui y eft intentée à David, & après avoir confefTé qu'il n'eu: point content des Commentateurs fur ce fujet, il ne né- glige rien pour luppléer à leurs imparfaites Apologies. A entendre quelques Interprè- tes, il faut avouer la dette, David fit une adlion des plu> barbares en mettant les Hammonïîes fous des berjes , fous des bacbes> & en les faifant palTer fous un fourneau ; mais il le fit dans un tems où abruti par fa pafïion pour Batbféba, il étoit endurci au mal & capable des plus grandes fautes. L'excufe eft , comme on voit , des plus fingulières, ou plutôt ce n'eft pas une ex- eufe, c'eft un aveu formel du crime impu- té à David, aveu qu'on croit adoucir, en remarquant que ce Prince ne fut barbare que dans l'yvrefTe d'une paflion qui le per- vertit entièrement, comme fi cela même n'achevoit pas de le noircir au dernier point. D'autres Interprètes fefontjettez dans l'extrémité oppofée; ils ont foutenu que le Texte ne dit autre chofe fi ce n'eft que David condanna les Hhmmonites au tra- vail des feies , des herfes, des haches de fer, & des fourneaux; Mr. Ddauny recon- noie dans une nore que cette explication to'eft 304 Bibliothèque Britannique, n'eft point improbable, que fi l'Hiftorien, qui a écrit: le premier Livre des Chroniques, dit félon nos Verfions que David les J'cia, favoir les Hammonites , avec des feies & des berfes de fer (a), l'Hébreu porte fim- plement quï/ Jcia avec des Jcies , deforte qu'on pourroit traduire, &P il emmena aujfile peuple qui y étoit & il ( ce peuple ) Jcia a- vec des jcies, c'eft-à-dire, il fut fournis aux fcies , ux travaux pénibles que l'on fait avec ces inftrumens ; moyennant quoi la dificulté fe trouve entièrement levée,* ce- pendant il préfère l'opinion vulgaire ; il conçoit que David fit feier ou tailler en piè- ces ou brûler les Hammonites vaincus, & il ne voit rien dans ces fupplices horribles qui déroge à l'humanité la plus vertueufe. J'en jugerois peut-être aufli delà forte, fi je voiois quelque fondement à ce qu'avan- ce l'Auteur, qu'il eft probable que David ne traita fi rigoureusement, que ceux qui s'étoient retirez avec Hanun dans la haute ville de Rabba, & qui étoient les complices & les inftrumens de fa Tyrannie. Mais cette penfée effc infoutenable, parce que l'Hiltorien dit expreflëment que David en fit ainjî à toutes les Filles des enfans de Ham- mon (b ). Mr. Delauny abandonne lui-mê- me cette conjecture, & fe retranche à ob- ferver, que, les fupplices de tefeie, de lt berfe, & du feu, étoient très u fi te z en Orient, (a) r. Chrcn. XX, * (ô) 2. Sam. XII, 12, Juillet* Août ex Septembre. 1743- 205 Orient , que les Hammonites méritoient d'autant plus d'y être condannez, qu'ils "é- toient d'une barbarie affreufe, qu'ils avoient violé le droit des gens dans la perfonnedes AmbaiTadeurs de David avec une brutalité fans égale , que déjà fous le règne de Saiil ils avoient montré la cruauté la plus féro- ce (a), & qu'après tout en les exterminant fans pitié , David ne fit qu'exécuter con- tf'eux, la fentence portée contre tous les peuples de la Paleftïne & des lieux voifins qui refuferoient de fe rendre aux IjraUites. Il ajoute, & prétend prouver par les paro- les du Seigneur dans le PJèaume XXI Çb)9 que les Hammonites s'étoient propofé de faire fouffrir aux fujets de David les fup- plices rigoureux que ce Monarque leur rie fubir après leur défaite; que parconféquenc il les punit félon la teneur de la Loi du Talion, & qu'on ne doit pas plus lui en faire un crime , qu'on n'en a fait un au Peuple àiAgrigente d'avoir brûlé Pbalaris dans le Taureau de bronze que ce Tyran a voit imaginé , ou à Tbéj'ée d'avoir fait fouffrir au brigand Procrujîès les mêmes tourmens auxquels il expofoit ceux qui a- voient le malheur de tomber entre fes mains. Enfin il conjecture qu'en particu- lier le fupplice des fourneaux fut infligé aux Hammonites , parce que cruels & inlo- lens comme ils l'étoient, ils avoient fans douts (4)1. Sam. X3 2. 3©6Bibliothequé Britannique, doute condanné plus d'une fois les Hé- breux à la même peine en leur reprochant le travail des briques auquel ils avoientété afTujettis durant leur efclavage en Egypte , à quoi Mr. Delauny croit que le St. Éfpric fait allufion dans un palîage des Pfeawnes Ça), oh j'avoue ingénument que je n'apperçois rien de femblable. Ce dernier trait mis à part , on peut di- re que nôtre Auteur , a fçu répandre les couleurs les plus fpécieufes fur l'Apologie que l'on fait communément du procédé de David. Il prouve , ce me femble , par- faitement bien que fi jamais la cruauté pou- voit ceflèr d'être un vice, David auroit été dans cette rencontre cruel fans repro- che , & barbare même avec équité. Mais pourquoi rejetter une explication plus fimple & qui fans faire violence aux paroles de PHiflorien, épargne à l'Inter- prète la peine d'une Apologie forcée? La conjecture que quelques Anciens Commen- tateurs avoient hazardée (b) & que Danzius a mife dans un fi beau jour, mais que Mr. De- launy ne fait qu'indiquer, porte tant de ca- ractères de vraifemblance, que je ne com- prends pas d'où vient qu'il ne la pas honorée de fon fuffrage Ce), Cet habile Critique traduit U) H Lxvnr. i> {&) VU. Milvcnda inComfntnt. adl Sxm. XII, 31. (eut-êire que Joféphe (/?), les (*) i Sam. VII, n. (*) Jofcph. A. J. Lié. VIL Cap, 7. Juillet , Août et Septembre, 1745. 3O0 les Anciennes Verfions , & tous les Rab- bins, ont pris la punition des Hammoniies dans le fens le plus rigoureux. Mais que prouve cela? Ce n'eft'ni la p'-emiere ni la feule bévue qu'ils ont faite. La vanité & l'efpnt de vengeance eurent apparem- ment beaucoup de part à celle ci. On fait Ja haine des Juifs cnncre les Nations Idolâ- tres. S'agi liant ici d'un peuple qui avoit ou- tragé leurs Ancêtres de la manière la plus oftenfante, ils n'ont pas trouvé que le fup- plice de la feie fût tr^p févère pour expier cet attentat. Guidez par leur prévention , ils ont vu dans les paroles de Samuel les Hammonites , feiez , déchirez, hachez en piè- ces , jettez dans des fourneaux ardens; & les Interprètes Chrétiens les ont fuivis fans Te donner la peine d'examiner. C'eft affez la coutume des Commentateurs. Ils fe co- pient. Ce que l'un a dit, l'autre le répète, cet Echo en produit un fécond, puis un troifième, puis un quatrième, & ainlî de fuite, jufqu'à ce qu'enfin il fe trouve des Danzius qui ont aifez de pénétration pour entrevoir l'erreur, & allez de courage pour la relever. C'eft de la forte, comme un homme d'efprit l'a remarqué, qu'à la fuite des Qiiintiliens & des Aidu-Gelles, tant de Jurifconfultes ont enfeigné que la Loi des XII. Tables, permettok àuu Créancier de mettre en p'éces le corps d'un Débiteur infolva- kle, jufqu'à ce qu'enfin l'Illuflre Préfident de Bynkersboeck, ce grand homme donc la République des Lettres pleure fi jufk-mcnc Tome XXL Part, IL X la 3io Bibliothèque Britannî^uEj la perte encore récente, a démontré que cette Loi bien examinée, autorifoit Ample- ment le Créancier à la vente de fon Débi- teur, & à une répartition du provenu. Mais je ne m'apperçois pas, que j'oublie infenfi- blement Mr. JDelawiy. Je lui en demande pardon ainû* qu'au Lecteur, & je reviens à l'Hiftoire de David. Ce Monarque fut puni, en bien des ma- nières, des crimes que fa pafllon pour Bath- Jéba lui avoit fait commettre. Sans parler des abominations qui- defhonorèrent fa fa- mille, des tragiques évènemens qui enfan- giantèrent fa maifon, & de la funefte guer- re d'Abjalom qui lui caufa tant de chagrins à lui - même , je m'arrêterai uniquement à la cruelle maladie dont il fut frappé. Laraifon de ce choix, cil que Mr. Delauny , nous donne fur ce fujet une conjecture nouvel- le^). Au moins ne me rappelle -je pas de l'avoir vue dans d'autres Auteurs. Il croit que cette maladie fut probablement la pe- tite wrokï & ce qui le détermine à le croi- re, ceft que les defcriptions que David nous a laillées de fon état (b), convien- nent félon lui parfaitement aux fymptomes de ce mal dangereux. // n'y a rien d'entier en ma chair, s'écrioit David. Mes meurtrij- Jures /ont pourries. . Mes aines font remplies d'inflammation. . Je/uis affoibli & tout brifé. . ma firce m'abandonne cf aujji la clarté de mes (a) Ddauny. Liv. III Chap. 7. (*) H. XXXViil, XXXIX, XL, XLÏ. Juillet, Août et Septembre. 1743. 31 1 yeux. . Ceux qui m 'aiment &f 'même vies intimes amis fe tiennent loin de ma playe (a). Aufti tôt que tu châties quelqu'un en le redarguant pour j on iniquité, tu cunjumes foji excellence , ou fa beauté , comme la teigne confume un ha- bit (b). Voilà, s'il faut en croire Mr. Dclauny , des lymptomes qui ne fe trouvent réunis dans aucune autre maladie que dans la petite vérole. Cec abattement , ces in- quiétudes, cette inflammation, cette pour- riture, cet aveuglement paiïager, & fur tout cette beauté confumée, comme la tei- gne confume un habit , tout cela défigne à fon avis fi fenfiblement la petite vérole qu'on ne peut pas s'y méprendre. Il croit d'ailleurs que la maladie de David fut cer- tainement la même que celle de Job, (fup- pofé au moins que ce dernier ait été atteint d'un mal actuellement connu dans le mon- de;) & pour prouver que la petite vérole étoit véritablement la maladie de Job , il infifte non feulement fur ce qui eft dit que Job a voit un ulcère malin depuis la plante du pied iuiQu'aufommet de la tête(c), mais en- core fur ce qu'il dit lui-même qu'il ne lui r>(le d'entier que la peau de/es dents (d) ,que fa peau eft pleine de crevaffes (e), que Dieu bercé Us reins , & quantité d'autres cho- (a) Pf XXXVTII, 4. 6. 8, 9. i». 1* (b) l >f. XXXIX, ïz. (e) lob. II, 7. (d) Job. XîX, 10. » \ Job. VII, s X 2 $12 Bibliothèque Britannique^ fes toutes femblables aux expreflions donc David fe fert , pour décrire fon état. Ou- tre cela il appuyé fa conjecture fur les Pfeaumes oii David rend grâces à Dieu de fa convalefcence. II infifte furce que ce faine homme déclare que Dieu a renouvelle fa jeuneffe comme celle de l'aigle (a}, il compa- re la manière dont la peau d'un homme qui a été maltraité par la petite vérole fe renouvelle, à la manière dont l'aigle, perd & reprend fes plumes ; il trouve dans ce que St. Epbipane & St. Augujlin affurent que l'aigle dans fa vieillefle a une maladie au bec qui rincrulte d'une efpéce de tuf ou de talc , deforte qu'elle ne peut manger qu'avec peine, jufqu'à ce qu'à force de fe frotter contre les rochers elle s'en foit net- toyée, il trouve là une image de ce qu'on lui a dit qui arrive fouvent aux perfonnes qui ont la petite vérole, favoir que leurs lèvres fe couvrent tellement de galle , qu'il leur eft allez long- tems impoflîble de man- ger, il croit que Veft la guérifon de cette incommodité que David célèbre dans ces paroles du même Pfeaume : Mon ame béni l'Eternel . . . qui rafjafie ta bouche de biens , auxquelles font immédiatement ajoutées celles ci , ta jeunejje eft renouvelée comme cel- le de l'aigle, & il allure que tout cela fe trouve manifeftement confirmé ailleurs par d'autres expreflions du Pfalmifte ( b ). Enfin (a) PC. CM, p (à) P£ CXLVI. i, 2, 7. *< Juillet, Août et Septembre. 1743. 3-3 Enfin ce qui achève de le perfuader, c'eft que de toutes les maladies dont un homme peut être atteint il n'y en a aucune qui puifle donner plus de facilité que la petite vérole à une confpiration ou à une révol- te. On eft pendant quelques jours aflbupi & comme en léthargie , mais on entend pourtant tout ce qui lé dit. Mr. Delauny le fait d'un homme d'honneur actuellement vivant, qui lui a fait confidence que fe trouvant dans cet état, il ne perdoit pas un mot de tout ce qu'on marmottoit im- prudemment autour de lui,* c'étoient appa- remment des héritiers qui le croyoient à l'article de la mort & qui faifoient tout bas le partage de fa dépouille en fe réjouif- fant de fa finr prochaine ; mais, ajoute Mr. Delauny , il avoit le bonheur d'entende tout cela avec un parfait mépris pour l'i- gnorance & la flupidité de tous ces babil- lards indiferets; & voilà juftement ce qui étoit arrivé à David. Mes ennemis , s'é- crie-t il, dans un de fes Pjeaumes, mes en- nemis me fouhaitant du mal difent, quand mour- ra-t-il , cj3 quand périra Jpn nom ? Si quelqu'un d'eux vient me vifiter il parle en menfonge , fin cœur s'amajje de quoi me fâcher . . . Tous ceux qui m'ont en haine murmurent fourde- ment contre moi . , Quelque fait, difent ils, tel que les méchans garnemens commettent , le tient enferré, & cet homme qui eft couché ne Je relèvera plus (a). Et ailleurs , veux qui cherchent (#) Pf. XLI, 6-ç. X 3 314 Bibliothèque Britannique, cherchent ma vie m'ont tendu des lacs , 6? ceux qui pourcbajfent mon mal parlent de calamitez rj fongent des tromperies tout le jour. Mais moi je n'entends (c'eft- à-dire, je parois n'en- tendre) non plus qu'un fourd, & je fuis comme un muet qui n'ouvre point fa bouche. Je fuis* dis -je, comme un homme qui n'entend point cf qui n'a point de réplique en fa bouche (a). Qu'un Commentateur efr. heureux quand il a des amis, qui lui expliquent ainii les paflages des Auteurs Anciens par des faits tirez de leur propre expérience ! A moins d'avoir eu lui-même la petite vérole, (Se de la plus mauvaife efpéce , Mr. Delauny ne pouvoit mieux tomber. Mais on voit aflez à la manière dont il en parle, qu'il n'a ja- mais paiTé par cette rude étamine, & que le fort des Job & des David lui fait un peu peur. Je connois un célèbre Profefîeur dans nôtre Ifle, & Mr. Delauny peut le connoitre aufïï bien que moi, qui devenu borgne peu à peu, a regardé la perte de fon œil comme une grâce que Dieu lui a accordée, par les expériences & par les découvertes, qu'il a faites fur la lumière à cette occafion. J'avoue pourtant que j'ai- merois mieux être moins favant, que d'a- cheter le favoir à ce prix là. Sans fouhai- ter de mal à perfonne je préfère en ce gen- re les expériences d'autrui aux miennes, ex je fuis charmé qu'un homme aulîï utile au public que l'efl nôtre Auteur , n'ait fçu que (s) H- XXXVIII. 13, 14». rç. Juillet, Août et Septembre. 1743. 315" que par Tes amis que les plus fâcheux fymp- tomes de la petite vérole refTemblent li fore à ceux de la maladie de David. PuifTe-t-il être long-tems dans la même ignorance à l'égard de" toute autre maladie, qui iroit à abréger fcs jours ou lui rendre la vie amere 1 Au refte qu'on ne croye pas que Mr. Deldimy entêté de fes conjectures , n'ait point fenti les diflcultez que Ton peut y oppofer. Il les rapporte lui-même & il y répond modeftement. On peut objecter î. que la petite vérole étoit un mal incon- nu avant dix ou onze fiécles; mais on peut répliquer , que Dieu en vifita Job & David pour éprouver leur foi par une maladie extraordinaire, & pour confirmer la nô- tre en nous faifant voir que ce qui paroit inexplicable & incompréhensible dans un tems, s'explique & fe démontre dans l'au- tre. On peut objecter 2. que dans la defeription des fymptomes de la maladie de David il y en a qui ne conviennent point à la petite vérole, comme les douleurs dans les os & les ulcères dans les reins ; mais Mr. Delauny répond à cela , que David a- voit beaucoup fatigué dans fa jeunefle, que la petite vérole eft une maladie fort com- pliquée & bizarre dans fes fymptomes, & qu'il ne fauroit après tout rendre raifon au- jourd'hui des caufes phyfiques qui la ren- dirent û cruelle fur la perfonne du Roi Prophète. On peut objecter 3. enfin , que Divid paroit avoir compofé les Pfeaumes ou il décrit fa maladie, dans le tems me- X ^ me 3i(5 Bibliothèque Britannique,, me qu'elle étoitadtuelîementà Ton plus haut période ; mais on fait que les Poètes pei- gnent les objets tout autrement que ne le feroient des Médecins , & que rjour don- ner plus de force aux traits de leur pin- ceau, ils décrivent ordinairement les cho- fes comme fi elles leur étoient préfen- tes ; d'ailleurs David en dit allez pour faire comprendre que c'eft du patte qu'il parle (a). Un habile Médecin , à qui Mr. Delauny a communiqué tout ceci, lui a répondu que pour lui il ne croyoit point que la maladie de Job & de David eût écé une maladie ex- traordinaire, mais qu'à fon avis c'était YE- lephantiafo des Anciens. On donnoit en effet ce nom à une maladie qui paroiiToit premièrement par des puftules & dans la- quelle enfuite il furvenoit une g^lle diffor me qui rendoit la peau ridée comme celle d'un éléphant, après quoi les pieds, les mains & le refte du corps s'enfloient & de- venaient d'une gro fleur monftrueufe. Mr. Delauny en a examiné fcrupuleufement tous les fymptomes ; & fur les détails où il en- tre,'on voit affez que Y Eléphant ia fis , ne peut avoir été ni la petite vérole, ni la ma- ladie de David. Il eipère qu*t)n fera con- tent des preuves qu'il en donne & qu'on ne fera pas fâché qu'il n'en ait pas donné d'a- vantage. Nous efpérons de nôtre coté que nos Lecteurs ne trouveront pas mauvais que (a) Vty. par exemple V£. XXXViU, u, 12, 1$. Juillet, Août et Septembre. 1743. 3*7 que nous les ayons arrêtez quelques mo- mensàla finguliere diflèrtation de l'Auteur, diflertation qu'il termine d'une façon aulîi ilngulière que tout le refte. Car après avoir modeitement déclaré qu'il ne donne tout ce qu'il vient de dire que pour des conjec- tures, il finit ainli. „ Au fond il le peut „ que tous les Pfeawnes où David traite „ de fa maladie, ne foyent que des del- ,, criptions allégoriques, de l'état de lbn ,, ame, malade par lés péchez. Cette fup- „ polition femble fondée fpécialement lur ,, ces paroles , qu'il adrelîé à Dieu dans le „ Pjeaume quarante & unième, Eternel aye „ pitié de moi, guéri mon ame , car j'ai pécbé ,, contre toi (a). On fait d'ailleurs que le ,, Péché eft fouvent décrit dans le langage „ des Prophètes fous l'emblème d'une bief- „ fure , d'une meurtri/Jure & d'une playe „ pourrie (b). " C'eft ainfi que Mr. Delauny conclut ce Chapitre. Si le favant & ingé- nieux Journalise de Hollande, qui paroic avoir trouvé mauvais qu'il ait pris le Dr. Trapp pour lbn guide ordinaire, avoit ici fous les yeux les Commentaires de ce Doc- teur fur le Pjeaume trentehuitième , il verroit que Mr. Delaurry fait aufll marcher tout feul. Trapp fait de D.roid un lépreux & même quelque chofe de pis. Non con- tent ce le dire en proie il le dit en vers, & après avoir cité Abeii-Ezra> il fe fert de la (m) PC XLI, f. {!>) Eh I. 6 X ;7 gi8 BIBLIOTHEQUE BRITANNIQUE, la plume d'Ovide pour fe faire mieux en- tendre. Principiumdulce ejî ,fed finis Amoris amarus. Lœta vcnîre Venus, irijiis abirejolei. j'avois réfoîu en commençant , de ne païfer fur aucun des endroits ou Mr. Ddau- ny réfute les calomnies de Bayle fans en donner le précis ; mais les deux articles que je viens de toucher, m'ayant emporté pref- que tout l'efpace que je peux donner à cet Extrait, il faut nécciTairement que je me refferre pour la fuite. On n'y perd pas éga- lement à tous égards. L'Auteur n'a rien de particulier fur la plupart des matières. Peut-être même y aura-t-il des gens qui defapprouveront que pour défendre David d'avoir employé Ciifaï à furprendre sîbfa- lom (a) Mr. Delatiny fe foit érigé en Apolo- gifte de toutes fortes de trahifons contre un ennemi public traitre & rebelle. „ Cufaï, dit il, ne fut pas plus coupable en le trompant (Jbfalom) pour faire avorter fes abominables projets, qu'il ne l'auroit été en trompant un chien enragé peur s'em- pêcher & pour empêcher fes meilleurs amis d'en être mordus (b). " La guerre pourtant a fes Loix, & l'humanité a fes droits qu'il nedevroit jamais être permis de violer. Ab/alom étoit coupable au premier chef, ( a, ) * Sam. XV, g» ,& fitiv. (è) Ddaucy Liv. III. Chap. XI. pcg. 157. Juillet, Août et Septembre. 1745, 319 chef, mais la queftion eft de favoir fi Ton peut tout fe permettre fans crime, contre un homme à qui aucun crime ne fait peur? Un autre article encore, auquel des gens dificiles pourroient trouver à redire, c'elt celui où Mr. Delauny traite du dénombre- ment que David fit de fon peuple & qui at- tira le fléau de la pelle fur la Nation. Cet habile homme pôle pour certain avec la foule des Commentateurs, que Dieu avoit ordonné que toutes les fois qu'on dénom- breroit le peuple, on exigeroit de chaqu'un de ceux qui entreroient dans ce dénombre- ment, & qui dévoient tous être agez de vingt ans & au deflus jufqu'à foixame, une capitation d'un demi ficle fous peine d'être frappez de quelque playe (a). Mais eft il bien certain que ce fût là une Loi perpé- tuelle, un tribut impofé pour toujours, & payable à chaque dénombrement? Je n'en fais point de preuve. Mr. Delauny n'en donne aucune, & cependant bâtiflant fur ce principe, comme fur une chofe avérée, il en conclut que ce qui attira à David le courroux du Ciel , c'eft la faute qu'il fit, de dénombrer fon peuple, fans en exiger le Tribut pour le Seigneur, Rendons lui néan- moins juftice, il a entrevu & indiqué la vé- ritable raiion de l'indignation que Dieu té- moigna dans cette occafion contre le Mo- narque û'Ifrael, car il remarque que Joab en exécuta (a) Exol XXX, 12, »5, 14, 13. 310 Bibliothèque Buitanniq^uk, exécuta l'ordre à contre cœur (a) & n'acheva pas le dénombrement, ,, parce que Dieu „ ayant promis aux Ifraè'lites de les multi- 3> plier comme les étoiles des Cieux, & „ comme le fable de la mer, ce Général „ eftima qu'il étoit impie d'entreprendre „ un dénombrement exact des perfonnes „ de tout rang & de tout âge Çb). " Tel fut en effet le crime de David. Il étendit par vanité fon dénombrement au delà des bornes prefcrites, en y faifant comprendre ceux qui avoient moins de vingt ans & qui en avoient plus de foixante , & par là il montra qu'il comptoit moins fur la promette du Seigneur que fur fes propres forces. Mr. Delauny réuiTit beaucoup mieux, û je ne me trompe , à juftifier , la politique de David envers Joab ôc Si?nei\ fa Polygamie, & le confentement qu'il donna au choix du remède iingulier que fes Médecins employè- rent, pour ranimer fa chaleur naturelle preft qu'éteinte. On juge bien que ce dernier trait de la Vie du Monarque d'Ifraèl n'a pas échappé à la fatire mordante du Lexicogra- phe de Rotterdam. §a plume 11 fouvenç trempée dans le fiel des Ciniques ne pou- voit guères laifïer palTer cet événement fans y répandre les plus noires couleurs. Un vieillard qui permet qu'on le ranime en lui amenant la plus belle fille que l'on peut trouver (a) i Chron. XX, 6. comar. avec i Chrnn. XXVII, 4, M- (b) Uchunj Liv, III. Chap. XVIL pctg. 144.. Juillet, Août et Septembre. 1743. 321 trouver (a) , commet au jugement de Mr. Bayle un crime énorme. ,, Peut on dire „ (s'écrie-t-il en affettant d'abord des ex- 3, preflions adoucies) que ce foit l'a&ion ,, d'un homme bien chafte ? Un homme „ rempli des idées de la pureté & parfaite- „ ment réfolu de faire ce que Tordre, ce ., que la belle morale demande de lui, con- ,, fentira-t-il jamais à ces remèdes ? Peut „ on y confentir, que lors qu'on préfère les ,, inftin&s de la nature & les incérêts de la ,, chair, à ceux de l'efprit de Dieu (i?)? " je veux croire pour un moment que celui qui parle de la forte, ne préfère point le plailir de mordre & l'inftincl d'un cœur fatirique , aux intérêts de l'efprit de Dieu, mais qu'il me foit permis de demander à ceux qui l'admirent, s'ils trouvent en con- fcience que fa cenfure foit fondée? Je leur accorderois volontiers plus que ne fait nô- tre Auteur (c). Je conviendrois fans peine que fi du tems de David on avoit eu des idées plus nobles & plus pures de la chafte- té, que celles qu'on en avoit, les Méde- cins de ce Prince n'auroient jamais ofé lui propofer de permettre, que la belle Suna- mite fût employée a lui procurer une cha- leur, que les habits dont on le couvroit ne pouvoient lui rendre. Mais ignore-t on que la polygamie paflbit généralement pour une chofe (a) 1 Rois f ] 1-4, (£) Dtcl. Hiji. & Cri:, ib. (c ) Dclûuny Liv. l'A. C*f tXi f*«. i8o. 322 BibliothequeBritanniq^ue, chofe permife?Ec fi elle l'étoit, quel crime y avoit il à fe fervir d'une femme plutôt, que de tout autre moyen naturel , pour ra- nimer les forces d'un vieillard en l'égayant? L'Ecriture dit expreflement que David n'a- bufa pas du remède (a). Au refle fi ce Prince âgé feulement de foixante & dix ans mourut épuifé par les fatigues de la guerre qu'il avoit tant de fois efluyées & par les chagrins de toute efpéce dori fa vie avoit été empoifonnée,il lailTa fon Royaume dans une opulence qui paroit au- jourd'hui prefqu'incroyable. L'Auteur du I. Livre des Chroniques attefte, qu'il avoit amaffé pour la conftruction du Temple, trois mille talens àyor , de l'or d' Opbir, £f fept mille talens d'argent affiné (b). Somme fi pro- digieufe que divers Savans ont cru que les talens qui en expriment la valeur, étoient inférieurs au talent Mofaïque. Car félon les Calculs du Dr. Prideaux, ce que David lai fia pour la conftrucnon du Temple 3 & ce que les principaux Officiers de la Cour y ajoutèrent, (c) monteroit, fi ç'avoient été des talens Molaïques , à plus de huit cens millions de Livres fterling, ce qui auroit fuffi , pour bâtir un Temple d'argent mafllf égal à celui de Salomon dans fon étendue & dans fes dimenfions (d). D'autres Criti- ques (a) i Rois î, 4- H) iChron. XXIX, 4- (c) iChron. XXIX, 6-8. (d) Prideaux Htft. des Juifs Icm. 1. f*g S, tfc 9* dans iei Notes. Juillet, Août et Septembre. 1743 B23 ques ont pris le parti de dire , qu'il s'étoit glifle quelque erreur dans le Texte hébreu par l'inattention des Copiftes. Mais nôtre Auteur ne goûte point cts expédiens, & il faut avouer , que les réflexions qu'il fait fur les thréfors de David, font également intéreflantes & vraifemblables (a). D'abord il raflemble divers faits, dont il lui paroit qu'on doit convenir fur ce fujet, favoir, que la valeur du Talent n'a point varié parmi les Hébreux jufqu'au tems de la captivité de Babylone , que ce Talent pe- loit trois mille ficles, que David avoit ra- malïé, foit en or, foit en argent, foit en matériaux, des richeiTes immenfes pour la conftruction du Temple, que les Auteurs facrez ont rapporté fcrupuleufement les fommes préciles qui y furent employées, que félon leurs narrations David fit très-peu de dépenfes les dernières années de fon règne, n'ayant guères que fes troupes à en- tretenir, ce qui ne lui coutoîc pas grand' cho- fe , parce que chaque Tribu y fourniflbit fon contingent, ce que dans les cas extraor- dinaires, les conquêtes ce le butin com- penfoient bien la dépenfe ; à quoi il faut ajouter qu'il eft démontré d'ailleurs que les contrées de l'Orient regorgeoient d'or dans ces cems anciens, témoin la fable de Mi- das & l'hiftoire de Crœfus dont les richef- fes en or îeulement étoient infinies félon l'expre^- [a) CkUuoy Liv. III. chap, $, 324 Bibliothèque Britannique, j'expreflion de Pline (a) ; témoin ce que le même Auteur nous apprend de Saluées & d'EfuboJès Rois de Colcbos qui avoient des chambres entières remplies d'or & d'ar- gent (b) ; témoin encore ce que die Dio- dore de Sicile que les peuples de l'Arabie beu- reufe donnoient l'or à poids égal pour du fer (c) , & Hérodote que les Macrobiens peu- ple d'Ethiopie chargeoient leurs efclaves de chaines d'or (d); témoin enfin ce que Cte- fias attefte des thréfors prodigieux de Sar~ dmaple(e), & quantité d'autres faits fem- blables, defquels il réfulte, qu'il n'y arien d'impoflible & d'incroyable dans la fuppo- fition des Richeflès immenfes que l'Hiito- rien facré donne à David. On demande à la vérité, quelles en fu- rent lés fources , mais fi la queftion eft na- turelle, la réponfe n'eft pas dificile. David groiïit fes thréfors , des revenus que lui donnèrent pendant quarante ans, la Culture des terres , les Conquêtes , le Commerce , & les Tributs qu'on lui payoit. î. La Culture des terres ne pouvoit que lui rendre beaucoup. La Paleftine aujourd'hui 11 flérile, tant à caufe des révolutions qui l'ont défolée, qu'à caufe du cara&ère des peuples qui la pofFèdent depuis tant de fiécles , étoit an- ciennement (*) Mfl. NAt Lib. XXIII. t. 3. (6) lbid. (r) Oiod. Sic Lib. III. §. 13. (J) Hiftojiar. LiU. II!, o *?. (*) Apud Athin. Ddpnofoph. Lib.XII. p. ^19. Juillet, Août et Septembre. 1743. 325 dénuement un païs très - fertile i en bled> en vin, en huile, en gros & menu bétail , ainfi qu'on le voit par le Chapitre vingt- feptième du premier Livre des Chroniques* En vain Toknd & Tes pareils, ofentla repré- ienter comme une région des plus diigra- ciees, qui ne contenoit que des rochers & des défères. Il faut avoir bu toute honte pour avancer un paradoxe ii infoutenableu Cent fois on a relancé ces Meilleurs comme ils le méritent , mais ils ne rougi fient de rien. Fades copifles les uns des autres , ils répè- tent fans pudeur les mêmes faïuTetez, avec autant d'allurance que 11 perfonne ne les avoit jamais réfutées. 2/ Une autre fource des richeiles de David ce fut la Guerre, ce furent fes Conquêtes. QLl'on penfe que ce Prince gagna près de vingt batailles fur les plus riches ennemis qu'il y eût au monde, oc qu'il étendit fes conquêtes de la Mer Rou- ge au Sud, jufqu'au Mont Liban vers le Nord; & de ÏEupbratt au Levant, jufqu'à la Médi- terranée au Couchant. A quelles fommes ne dut point monter la dépouille de tant de vaincus, avec leurs armes alors 11 riches, avec leurs caifTes militaires, avec leur* Ido- les d'or & d'argent, & avec tant d'autres choies précieufes, qu'on portait alors à l'ar- mée? Quels thréfors ne durent point pro- duire tant de provinces &de villes pillées? Et que ne pourroit on pas ajouter encore, fi on vouloit faire entrer en ligne de comp- te, tout le butin que David avoit fait, fur les Pbiliflins & fur les Hamalécites, avant Tome'XXLPart.IL Y que j26 Bibliothèque Britannique, que d'être monté fur le thrône, La 3^. four- ce desrichefl'es de ce Monarque c'étoit le Commerce. Quelques perfonnes ont beau dire qu'elles ne fauroient croire que la na- vigation des Juifs fût de quelque étendue & leur négoce un peu considérable iùr l'O- céan. La peine que les Compagnies de commerce ont aujourd'hui à faire des éta- bliffemens folides ou à les foutenir, ne prouve abfolument rien contre la vérité d'un fait dont les circonftances nous font inconnues. David ayant conquis le Royau- me d'Idumée , fe trouva par là en polTeflion à'Elatb & d'Efiongeber. C'étoient deux ports fur la Mer Rouge (V), d'où il envoya à Ophir des flottes , qui lui rapportèrent un profit immenfe, & une quantité d'or pro- digieufe (b). Il n'y a pas même lieu de douter qu'il n'eût intérêt dans le négoce de la Méditerranée y puifqu'il étoit maitre d'une partie de la cô"te;& fi l'on ne peut pas éva- luer les fommes que toutes ces branches de commerce faifoient entrer dans Tqs coffres , au moins peut on aifément comprendre, qu'elles étoient très • confidérables. 4. Enfin une dernière fource abondante des richeffes de David c'étoient les Tributs qu'on lui payoit. Qu'on en juge par les dépenfes que fit Salomon, & par les revenus qui groflif- foient annuellement fon thréfor. L'état ftoriflant où le Fils fe trouva, efl la pierre de (*) 1 Rois IX, 16. iChron.VHÎ, 16. t>) 1 Chron. XXIX, 4. Juillet, Août et Septembre. 1743, 327 de touche de l'opulence que le^Père fçut lui aflurer; parce qu'à l'exception delà feule ville de Gezer, Salomon ne fie pas d'acqui- fition. Mais d'un coté à quel point la dépenle n'étoit elle pas portée à la Cour de ce Monar- que? Ou pour mieux dire , quelle Cour fut ja- mais aufil brillante , aufiî fplendide , auffi ma- gnifique que la fienne? On n'a qu'à jetter les yeux, fur l'état des fraix que coutoic feulement la Table du Roi pour en prendre quelque idée (a\ D'un autre coté quels revenus ne dévoient pas produire à Salomon les Tributs annuels des PuifTances qui lui étoient foumifes, YIdumée, les trois Ara- bles, les deux Syries, d'en deçà & d'en delà de YEupbrate (b) ,avec la côte de la Palefîi- nel 11 y avoit des mines dans la Paleftine; il y en avoit dans YIdumée; & le commer- ce de Y Arabie & de la Syrie rendoit peut- être encore plus que ces mines Çc). Mais, replique-t-on, quand bien il feroit vrai, que David auroit amafTé les thréfors immenfes que le Texte de l'Ecriture, tel qu'on le lit aujourd'hui, affigne à ce Prince, eft il donc probable que fon Fils ait pu ef- fectivement employer à la conitru&ion dii Temple d'aufli grofTes fommes ? Mr. De* launy répond premièrement, que les fraix pour l'entretien du Temple doivent entrer dans ce calcul & que ces fraix étoient exor- (m) i Rois IV, 21, (ire. (b) i Sam. X. i6} 19. ( c) 1 Rois X, 14, if. Y a 52S Bibliothèque Britannique, exorbitans, ainfî qu'on peut s'en convain- cre en consultant Villalpand & îe P. Lami; jecondemeni , que Salomon n'employa dans là 'conftruètion du Temple que ce qu'il y avôit de plus riche &de plus parfait dans fon gen- re parmi les matériaux que David avoit ra- maiTez, & qu'il confacra le refte à l'embel- liflement de Jérujalem & des environs; troi- fièmcment , que les pierres précieufes qui en- ;.rèrcnt dans les ornemens de la Maifon de l'Eternel durent prodigieufement coûter; & quatrièmement enfin, que Salomon mit dans le thréfor de cette Maifon Sainte, les fem- mes qui refièrent entré fes mains quand fout l'ouvrage fut fini (a). Tels font" les détails dans lefquels l'Hif- torien moderne du Roi Prophète effc en- tré dans cet Ouvrage pour nous donner o- ne idée auilî haute de la magnificence de ce Prince , que celle qu'il y donne de fes vertus eft fublime. Il faudrait avoir un i'tile aufll élégant & auffi fleuri , que celui de l'Auteur pour rendre fidèlement en nôtre langue le beau panégyrique qu'il fait de Da- vid , en le mettant en parallèle avec les Alexandres , les Céfars & les Sapions , ou plutôt en montrant combien ces Héros du paganifme lui furent inférieurs (b). L'en- droit , par exemple, où il compare le pro- cédé de David envers Abïgaïl , avec la conduite de Sa'pion envers l'époufe à'Mlw cius, (/û 1 Ms VII, it. ( b) Ddîuwy Lh. III. Ch.ip. 26. Juillet, Août et Septembre. 1745. 329 cius9 eft touché avec beaucoup de délica- teffe. ,, Jamais, dit Mr. Dtlauuy, on ne ,, mérita pius de gloire par une acr.ion.he- ,, roïque, qu'en acquit Scipion par la con- „ tinence qu'il fit paroi tre à la fleur me- ,, me de fa jeunefie, lors que le fort des .v- armes l'ayant rendu mai tre d'une fille de ,, la première qualité, dont les charmes „ égaloient la naiffance , il eut la généro- ,, lité de la rendre au Prince à qui elle é- ,, toit fiancée, fans lui avoir fait la plus ,, légère violence , & fans en exiger la ,, moindre rançon. D'où vient donc que ,, jufqu'à prêtent on n'a point pente à ce- ,, lébrer comme on le doit, la retenue, non moins vertueufe, avec laquelle David traita Abigaïll La modération deScipiov fut un coup de politique, qui lui valut une alliance avantageufe, mais la con- duite de David parfaitement defintéref- fée ne fut que vertu toute pure. Sci- piûn fe faifoit un ami par fa retenue, David ufoit de retenue envers la femme d'un ingrat. Scipiôn rcfpecïa l'époufe d'un jeune Prince qui aimoit ck qui étoit aimé , David ménagea la femme d'un homme trop ftupide pour avoir de là tendreiTe. Il y avoit de la compaffionà rendre à Mlucius fon époufe, & peut- être y en auroit il eu a ne rendre pas- Migoiïl à Nabal. On ignore fi la belle jiok toucha le cœur du Romain , mais on fait par l'événement quelafem- Y 3 ,. me 33o Bibliothèque Britannique, „ me âuMabonùe (a) parut très-aimable, „ au fils d'Ifaï. Difons tout; Scipion fut ia- ,, ge par politique , par humanité , par „ compaifion , & peut-être même par in- „ diférence , & David ne le fut que par at- 3, tachement au devoir. " Mr. Delauny termine Ton Ouvrage par un Tableau oh fe voyent raflemblées tou- tes les vertus du Monarque dont il avoit entrepris d'écrire l'Hiftoire. L'habileté du Peintre y eft frappante dans la noblefle des traits de fon pinceau & dans l'heureux mélan- ge des couleurs qu'il a fçû aflbcier. C'efl: dom- mage qu'un Auteur fi favant n'ait pas profité de la cenfure que le fameux Critique qu'il a fi bien refuté, faîfoit de la Vie de Da- vid écrite par Mr. l'Abbé de Choifi. Cet Ouvrage efi bon, difoit Bayle, mais il fer oit beaucoup meilleur fi en avoit pris la peine de marquer en marge les années de chaque fait ,&? les endroits de la Bible ou de Joféphe qui ont fourni ce qu'on avance. Un Lecteur n'efi pas bien aife d'ignorer fi ce qu'il lit vient d'une four ce facrée ou d'une four ce profane (b). (a) i Sam. XXV, i. ( b ) D.ft. Htji. O Crit. Art. de David. ARTICLE Juillet, Août et Septembre. 1743. 33: ARTICLE IV. Philosophical Transac tions &c. Ceft-à-dire: Tranfa&ions Philofophiques de la Socié- té Royale de Londres N*. 464. 465. 466. ^ Londres. Chez T. Woodward âf C« Davis Imprimeurs de la Société in 40. IL nous eft revenu de plus d'un endroit dans les pays étrangers , que diverfes per- ibnnes fe plaignent , de ce qu'on ne trou- ve plus dans cette Bibliothèque, l'Extrait des Tran [factions Pbihfopbiqats, dont la So- ciété Royale de Londres enrichit de tems en tems le public. La plainte paroit d'autant plus raifonnable,que l'annonce & l'expofé de ce précieux recueil , appartiennent en quelque manière de droit , à un Journal Literaire de la Grande Bretagne. Nous nous ferons déformais un devoir d'y être atten- tifs. A mefure que les Cahiers de la So- ciété Royale s'imprimeront, ou du moins à chaque femeftre, nous en donnerons la Notice, fur le même pied qu'on l'a fait ci- devant, & pour ne point diférer à tenir nôtre parole , nous allons inférer en cet endroit le précis de ce que contiennent les Y 4 trois 332 Bibliothèque Britannique, trois derniers Numéros qui ont été publiés peur Tannée paflëe. MAI, JUIN, JUILLET, 1742. N°. 464. I. J. Caftillioneus D'19. DeMontagny V. C, Phïlofcphiœ Profejjori in Academia Lauzan- nenzi, Régime SociETATisLondinenfis Membro dignîjjimo, S *. E-vangclii Mimjtro &c tic. S. P. D. C'eft-à dire, Lettre de Mr. J. Chatillon à Mr. DeMontagny, célèbre Pfofeffmr dans V Académie de La'uzanne , très-digne Membre de la Société Royale, Mi- rjjlre du St. Evangile &c. &c. Il s'agit dans cette Lettre d'une démonnration de ]a formule du Chevalier Newton pour éle- ver un polynôme quelconque à telle puif- ïance qu'on voudra par le moyen d'un bi- nome donné. IL Hiftokes de deux Cancers internes c? des obfervaîion s faites en les dijjécant ,par Mr. Guillaume Burton Docteur en Mé- decine. III. Enarratio Obfervatiomm circa Rorem deciduum , faàarum Medioburgi in Zeelan- dis, à Leonardo Stocke, M. D. fin per aperta planitie plumbea Turris Afironomi- cœ joh. Munkii Arcbitetïi publia tempore noclurno inter 25. fif 26. Julii 1741. N. S. cum figuris Floccorum Nivalium Jan. 1742. ibidem objérvatorum. C'efl- à-dire , Relation des Observations faites à Middeibourg enZè- lande Juillet, Août et Septembre. 1743. 313 lande par Mr. Léonard Stocke, Doc- teur en Médecine , Jur platte -fur me de plomb de ïObfervatoire de Mr. Jean Munk architecte de la Ville jur la RoCée qui tom- ba la nuit du 25-. au 26. Juillet 174;. Nou- veau Stile; avec les figures des Floccons de Neige qui tombèrent en Janvier 1742. Çf qui furent obfervés au même endroit, il y a déjà quelque cems que les Naturaliftes, fur tout le célèbre Mr. van Mujfcbenbroek , ont com- muniqué au public des obfervations tout à fait fmgulières, fur la diferente aptitude qu'ont divers corps à recevoir ou à ne pas recevoir la Rofee & à s'enimbiberpius ou moins, quand on les y expofe. Voici ce que Mr. Stocke eut le plailir d'expéri- menter lui-même à Middelbourg dans le tems & dans le lieu qu'on vient de lire. Il trouva que Sur le verre de toute cfpéce il tomboktant de rofée que tout en étoit mouillé. Sur le cuivre ou leton bien poli, très-peu. Sur le même non poli & brut , un peu d'a- vantage. Sur le fer blanc , peu. Sur le même peint de bleu, beaucoup. Sur le même non poli, extrêmement. Sur le même bien poli, pretque poinr. Sur le même rouillé , point/ Sur le vif argent épuré , point. Sur Yétain poli , point. Sur le plomb brut, beaucoup. Sur le môme poli, peu. Sur V argent blanchi , point. Sur l'argent poli, point. Y 5 S* 334 Bibliothèque Britannique, Sur V argent dore , point. Sur ld. porcelaine bleue, beaucoup. Sur une tuile de pierre , beaucoup. Sur une petite corbeille de fin rofeau des Indes, allez peu. Sur un morceau de bois de chêne poli cj * blanc, extrêmement. Sur un morceau de même bois , mais noir , beaucoup moins. Lejàpin bien raboté n'étoit qu'humide , blan- chi il prit un peu de rofée. Tout papier enfin s'en humecta. Mais ce qu'il y a à remarquer, c'efl qu'en élevant les corps qui prenoient le plus de rofée , à deux ou trois pouces au defîus de l'endroit ou la rofée étoit déjà tombée , cet endroit de la platte - forme féchoit , pendant que ces corps demeuroient tout mouillés defîus & deflbus. Il n'y avoit que l'argent & l'étain qui élevés de même que les autres corps , féchoient auffi bien que la platte-forme. Nous ne difons rien des Floccons ou plutôt des particules de neige que Mr. Stocke décrit. Il faudroit en avoir la rigure fous les yeux. IV. Lettre de Mr. Martin Trie- wald' Membre de la Société Royale, Archi- tecte Militaire du Roi de Suède, à Mr. C. Mortimer , Dotteur en Médecine , &f Secrétai- re de la Société Royale , concernant la végé- tation de quelques Semences de Melon vieil- les de quarante deux ans. De vingt & quatre grains de Semences de Melon de l'année 1700. femés chaqu'un féparément le 21. Février Juillet, Août et Septembre. 1743. 33* Février de l'année 1741. il y en eut vingc & un qui donnèrent d'exceilens fruits à Mr. Triewald. V. Sam u élis Christiani H o l- MANNi Log. Met. c? Tbeolog. Natural. in Regia Georgia Augufl.a P. P. O. ad Crom- wellum Mortimerum M. D. Regalis So- ciet. Secr. Epiltola de differentiis Altitudinum Barometrorum. C'eft-à-dire, Lettre de Mr. S C. IIolmann ProfcJJeur Ordinaire en Logique, en Met aphyfique , £? en Théologie Naturelle dans l'Académie Royale de Gottin- gen, à Mr. C. Mortimer Secrétaire de la Société Royale , fur les différens degrés de hauteur du Vif Argent- dans les Baromètres. Ce font des expériences fur la vérité du fait. VI. Lettre de Mr. Jean Huxham Doc- teur en Médecine, à Mr. le Or. Mortimer Secrétaire de la Société Royale , concernant des Polypes attachés au cœur deplufieurs Ma- telots tout récemment venus des Indes Occi- dentales & débarqués à Plymouth. VII Extrait d\me Ré lia ion Topogrâpbique de Bridgnorth dans le Canton de Saiop,cotfz- mmiqué à la Société Royale par Mr. Stack- house, Minijîre de Ste. Marie Madelaine dans ce bourg , & contenant une defeription de la Situatim, du Terrein, de V Air , du Nombre des Perfonnes qui nai[]ent c? de celles qu'on en- terre dans ce lieu, ainjî que de quelques Tom^ bes anciennes qui fe trouvent dans le voifir: ge. VIII. Fragment d'une Lettre de Mylurd Petre Membre de la Société Royale, à Mr. M. Folkes Préjïdent de la Société' , touchant quelques 33<5 Bibliothèque Britannique, quelques effets extraordinaires de la foudre. IX. Relation d'un Météore vu à Peckham le onzième Décembre 174 ï. par Mr. Thouas M 1 lner Docteur en Médecine. X. Quelques Conjectures fur ^'Electricité c? /zir^/'Elévation des Vapeurs par Mr. Desaguliers cxc. Pour entendre cet ar- ticle , il faut d'abord fe rappeilcr avec l'ha- bile & ingénieux Phyfîcien qui en eft l'Au- teur , que ce qu'a "avancé Mr. du Fay , „ qu'il y a de deux forre s d'Electricité, eft „ démontré par des Obfervations & par „ des Expériences , & qu'en effet les corps „ doués d'une Electricité vkrée fe repouf- „ fent mutuellement, pendant qu'ils at- tirent ceux qui ont une Electricité ré- fmeufe ; & que ceux dont rElectrici- té eft réfineufe fe repouffent entr'eux & attirent ceux dontPEledh-icité eft vitrée. 5, Je fuppoie donc , dit Mr. Desagu- liers, que les Particules d'un Air pur, font des corps Electriques d'une Elec- „ tricité permanente, & vitrée*, 1. parce „ que les Particules dont cet l'Air eft com- „ pofé fe repouifent mutuellement, ainfi que ., l'expérience l'a fait voir. 2. Parce que, „ quand l'Air eft bien fec un Tube de Ver- ,, re frotté ou fimplement chauffé lance „ fes Effluvia que Air repoufie contre \c 5, Tube, lequel les lance de nouveau ,m:us ,, qui font auffi de nouveau repouflés , d'où ,, réfulte un mouvement de vibration en ,, dedans & en dehors qui perpétue leur „ Electricité. 3. Parce que le Duvet ren- du Juillet, Août et Septembre. 1743. 337 ,, du Electrique au moyen du Tube àc ,, poulie ou dardé par le Tube conferve „ long- tems fon Electricité dans un Airiec; „ au lieu que dans un Air humide il perd „ cette Electricité en attirant ies parties „ humides qui ne lont pas Electriques; ce „ qui arrive au Tube même dans un allez „ court efpace de tems. ,, Or ces obfervations pofées, onpeut ce „ femble expliquer fans peine la fameuie „ Expérience de Mr. Ha^kj'bee. Voici com- 5, ment elle fe fait. On prend un Globe de ,, Verre, on en pompe L'Air, on le fait eniuite 3, tourner rapidement fur fonAxe par le moy- ,, en d'une roue , & dans le tems qu'il tourne „ avec le plus de viteiTe on y applique la „ main. AuiTî tôt paroit dans L'intérieur „ du Globe une grande lumière de couleur „ pourpre fans qu'on obferve ni lumière ni „ attraction extérieurement. Mais fi pen- 5, dant la rotation du Globe on ouvre le ,, Robinet pour y introduire l'Air de nou- ,, veau, la lumière fe rompt, s'aftbiblit , „ & difparoit peu à peu dans l'intérieur du ,, Globe , & pafle à fa furface extérieure „ où elle eft accompagnée d'attraction. „ D'où vient cela? Ne l'eroit ce pas que „ l'Air extérieur réfute aux Effluvia du „ Verre, lefqueis trouvât cette "ïéfiftance „ au dehors du Globe, refluent dedans où „ ils en trouvent moins, jufqu'à ce que „ l'Air y étant admis derechef, il les en „ chalTe & les poulTe dehors. Et fi la 3, chofe cil ainfi, comme l'expérience fem- ble 338 Bibliothèque Britannique, „ ble le prouver, ne s'enfuit il pas, ajou- „ te Mr. Defaguliers , que ma conjecture 3, efl vérifiée, lavoir que l'Air eft Elec- 3, trique? 3, On voit par diverfes Expériences que „ le Dr. Haies a faites & qu'il a rappor- „ tées dans fa Statique des f/régêtauxi que 3, l'Air efl abforbé & perd de fon Elaftici- ,, té dès qu'on y mêle des Vapeurs Sul- „ phureufes , jufques là qu'on le diminue „ d'un quart par ce moyen dans un Vafe „ de Verre après l'y avoir renfermé. Mais ,, ce phénomène encore ne s'explique-t-il 5> pas aifément par la diférente Electricité „ du Souphre & de l'Air? Les Rfflwuia ou ,, Ecoulemens du Souphre étant Elettri- 3, ques fe repouiïent mutuellement ; les par- „ ties de l'Air l'étant auilî fe repoufientde <>, même. Mais l'Electricité de l'Air étant vi- „ trée , & celle du Souphre étant réfineufe , „ les parties de l'Air attirent naturellement „ celles du Souphre , ôc les Molécules qui ré - „ fultent de leur union , ceiTant d'être Elec- „ triques , perdent leur force répulfive. „ On avoit cru jufqu'ici généralement, ,, que les Vapeurs aqueufes qui s'élèvent 3, dans la Région de l'Air & qui y forment „ les Nuées, s'y élèvent (quoique l'Eau 5, foit en elle-même plus pefante que l'Air,) 3, lorfque dilatées en forme de bulles, ou 3, de fphères creufes, & remplies d'un Air 3, plus raréfié que l'Air extérieur, elles ac- 33 quièrent par cette dilatation une plus 3, grande légèreté fpécifique que celle „ d'wn Juillet, Août et Septembre. 1743» 339 ,, d'un pareil volume de l'Air dans lequel ,, elles nagent. Mais aujourd'hui les Phy- „ ficiens ont abandonné cette opinion, ou, „ s'il en elt encore qui la retiennent indi- ,, reclcment, on trouvera des raiibns fuf- ,, fifantes pour les en faire revenir dans les „ Tranfaàions PbiloJ optiques > N°. 407. ,, Ne Te pourroit il point que l'Eleclri- ,, cité fût la véritable caufe de l'Eléva- ,, tion des Vapeurs , en la manière iui- „ vante ? „ L'Air qui coule fur la furface des Eaur ,, efl Electrique ;& il l'eft d'autant plus que ,, la chaleur eft plus grande. N'arrive- .*, roit il donc point, que les plus petites „ particules de l'Eau, dont la gravité fpé- „ cifique fe trouve moindre que celle de „ cet Air, s'élanceroient contre cet Air, „ de la même manière qu'on voit de (èm- „ blables particules d'Eau , s'élancer en sy haut, contre le Tube Electrique, &yad- „ hérer. En ce cas l'Air en mouvement, „ emportant, élevant ces particules & le* „ rendant en même tems Électriques, el- „ les fe repoufleroient les unes les autres, „ & elles repoufleroient les particules de „ l'Air même. C'efl pour cela fans dou- „ te qu'un pouce cubique de Vapeurs „ eft plus léger qu'un pouce cubique „ d'Air, ce qui ne feroit pas , s'il étoit „ vrai que les Vapeurs no- fufTent portées „ en haut que dans les pores de J'Air. „ Dans cette dernière fuppofition un pou- „ ce cubique d'Air chargé de Vapeurs de- „ vroic 340 Bibliothèque Britannique, „ vroit avoir une pefanteur fpécitique 3j plus grande que celle d'un pouce cubi- ^ que d'Air pur & iec. Or le contraire 5, eft démontré par l'expérience. On voit „ au Baromètre que l'Air imprégné de Va- M peurs eft toujours plus léger que l'Air 3> iec. " XL Relation concernant Marguerite Cut- ting jeune fille actuellement vivante à Wiek- ham-Market dans la Province de Suffolck, & qui parle facilement & intelligiblement quoi- qu'elle ait perdu fa Langue. Le fait commu- niqué à la Société Royale par Mr. Henry Baker , qui le te n oit de Mr. Benjamin Bod- dington Marchand à Ipfwicb , parut'li extraor- dinaire à cette Illuftre Aflemblée, qu'elle chargea Mr. Baker de faire toutes les en- quêtes polîibles pour le conftater. Pour cet effet if écrivit à Mr. Boddington qu'il le fup- plioit de fe tranfporterà IVickam-Market , de prendre avec lui quelques perfonnes éclai- rées , & de ne rien négliger pour découvrir , s'il n'y avoit point d'impofture dans le cas de Marguerite Cutting. 11 fit plus , non con- tent de lui demander la grâce , d'examiner foigneufement la bouche de cette fille, & la manière dont elle articuloit les fons ce les mots où la pointe delaLangueparoitle f>îus néceflaire; il envoya à cet ami, une ifte des fons, des lettres, des fyllabes, & des paroles , qu'il croyoit les plus dificiles à prononcer fans Langue. Le phénomène valoit certainement la peine d'être exami- né de près. On fait allez avec quelle habi- leté Juillet, Août et Septeiut.re. 1743» 34 fi- leté le fexe fait faire ufage de fa Langue , mais on ne favoit pas encore communé- ment qu'il pût porter cette dextérité jul- qu'à parler même fans Langue, & la choie méritoit par plus d'une raifon d'être bien approfondie. I\lr. Boddington répondit aux vœux de Mr. Bâter avec toute la diligence & toute l'exac- titude poffible. Il fe rendit ftlpjkvicb à Wic- kvr.-Market qui n'en eft éloigné que de dou- ze milles. Mr. NbtcuttMimfbre favant&cu- ricux, Ô£ Mr. Hannmnd Apoticaire parfaite- ment verfé dans l'Anatomie , l'accompa- gnèrent. Ils firent enfemble les recherches qu'on avoit fouhaitées, & de retour à Ipf~ ivicb, voici le certificat qu'ils envoyèrent; à Mr. Baker autentiquement ligné. ,, Ipfwicb ce 9. Avril 1742. ,, Nous nous fommes, Monfieur, tranf- „ portés aujourd'hui à W11 ikam-Markst pour ,, fatiffaire vôtre curiofité au fujet deMar- ,, guérite Cutting, jeune fille dont on nous „ avok appris le talent de parler & de dif- ,, courir fans avoir de Langue. ,, Elle nous a dit, qu'elle étoitagée d'un ,, peu plus de vingt & quatre ans, née à ,, Turnjhall village'de la Province de Suf- „ jr>lck à quatre milles de Wickam-Market,& ,, que c'étoit làqu'à l'âge de quatre ans elle >5 a^oit eu le malheur de perdre fa Langue ,, par un Cancer don: elle y avoit été atta- „ quée. Une petite tache 'blanche parut à Tome XXL Part. IL Z „ la 34-2 BlBLIOTHE Q.UE BRITANNIQUE, „ la furface fupérieure de ce membre ; mais ,, dans peu elle s'étendit & gagna jufqu'a la ., racine. Mr. Schotchmore Chirurgien de „ Saxmundham appelle pour la traiter jugea „ bientôt le mai incurable. Il mit ce- ,, pendant tout en œuvre pour fauver la ,, malade. Mais un jour qu'il la féringuoit, 99 quel ne fut pas Ton étonnement? La Lan- „ gue fe, détacha tout d'un coup de la ra- ., cine, on la reçut dans un plat, & au „ moment même la jeune fille élevant fa ., voix s'écria: Ne vous effrayez pas Marna , ,, elle recroîtra bien ! Au bout de quatre mois „ elle fut guérie. ,, Nous avons examiné fa bouche avec ,, toute l'attention dont nous fommes ca- „ pabîes; mais nous n'y avons découvert ,, aucun veftige de la Langue, ni même de ,, la Luette. Nous y avons remarqué feu- . „ lement une excroiifance de chair fur la „ mâchoire gauche & inférieure, qui pa- ,, roiflbit large d'un doigt & qui s'étendoit ,, prefque jufqu'à l'endroit ou la Luette efl ., fituée. La fille nous a allures que cette ., excroiifance ne s'étoit formée que quel- „ ques années depuis fa guérifon. Elle efl 3, abfoîument immobile & attachée aux „ parties contigues. Le pafiage ou l'ouver- „ ture du gofier, à l'endroit où la Luette ,, devroit être , ou un peu vers la droite, ,, efl: un trou rond allez grand, pour qu'on ,. puifie y introduire une noix mufcade. Quoique privée de fa Langue, cet or- gane fi nécefiaire dans l'opinion commu- ;, ne. >i Juillet, Août et Septembre. 1743. 343 3, ne, ibit pour parler foie pour faciliter la 3, déglutition, la Ctittiiig fait l'un & l'autre. 3, Nous l'avons vue avec admiration , ava- 3, 1er des folides & des fluides aufii bien 3, que nous le pourrions faire & de la mê- 5, me manière. Quant à l'ufage de la pa- 3, rôle , elle l'a auffi libre & auiïi coulanc ,, qu'on peut l'avoir. Elle nous fembloit 3, néanmoins parler un peu du né; mais ,3 elle nous dit que c'étoic parce qu'elle étoic 5, fort enrhumée. Elle articule les Lettres 3, & les Syllabes très- distinctement. Elle 3, prononce les Voyelles en perfection, & 3, non feulement les Voyelles, mais encore 3, les Confonnes , les Syllabes , & les Mots , 3, où l'opération de la Langue femble le ,, plus néceflaire (a) . . . Elle a lu en nô- 3, tre préfence dans un livre, & très -bien. 3, Nous avons pourtant remarqué, qu'elle ., prononçoit quelques fois les mots qui fe „ terminent en atb comme s'ils fe termi- ,, noient en ef, end comme emb, ad com- „ me eib , mais à moins d'une attention ex- ,, trème on ne fauroit s'en appercevoir. 3, Elle chante fort joliment, & prononce „ en chantant comme à l'ordinaire. Enfin , 33 ce qui eft plus étonnant encore , elle a le 33 il, {*) CW-ient les Voyelles, les Confonnes, & le 3 Mots, que Mr. Eaker avoic, envoyés 3 ds /, n, r, r,*t , al, ath, a/h , chu , la , tM 3 ja- The Utile Dcg d>d r.ot eat tread. - Tottch de Tcoth. - Try to Ught th$ Candie. - Jhrice Thirty tkrte. - Let tht Urgt Cat/cateb iit littk Dcg. &c. Z 2 344 B I H L I O T H E Q.U E B R I TA N N I Q_U E , 99 le goût excellent, 6c même très -fin, dil- 53 tinguant jufqu'aux moindres diférences s dar.s la faveur des alimens, fans avoir cette Langue que les Anatomiftes & les Phyiiciens regardent généralement, com- me le principal organe du Goût, fi même elle n'en eit pas le feul organe. „ Nous fouffignés attelions que la Réla- ,, tion précédente eft conforme à la vé- „ rite- ,, Benjamin Boddington, ,, William Notcutt , Miniftre. „ William Hammond, Apoticaire ." Depuis la réception de cette Lettre, Mr. Baker en a encore reçu d'autres de Mr. Bod- dington ou tout confirme les détails qu'on vient de lire. 11 s'eft entretenu avec un Mr. J. Bennis Marchand à Londres qui a vu plu- sieurs fois la Cutting & qui a confirmé de même l'atteflation de Mr. Boddington & de fes compagnons de voyage. On voit par tous ces témoignages réunis, que ce n'eff, bî l'excroiflànce de chair que cette fille a dans la bouche, ni le fecours de Ces dents peu nombreufes & mauvaifes,qui lui aident à parler & à avaler. Au moins fi l'excroif- frnee y contribue , ainfi que Mr. Bod- dington le foupçonne, l'on ne fauroit dire comment. Pour faire plaifir à Mr. Baker, Mr. Dennis écrivit un jour à la Cutting , qu'on ne vouloit par croire à Londres qu'elle par- lât fans Langue, & qu'il fbuhaiteroit fort qu'elle ne le fit pas une honte de J'attefter elle- 'crr.LET, Août et Septembre. 1743. 345 elle-même par écrir. Sa réponfe ne tarda pas. Elle écrivit à Mr. Dennii le Billet fui- vant qui montre affez qu'elle ne manque pas de génie. „ MONSIEUR, ,, Cette occafion étant la première qui fe ioic préferitée pour répondre à vôtre Let- tre , je vous allure que je n'ai pas à pré- fent plus de Langue dans la bouche que lorfque vous m'avez vue , c'eft - à - dire , que je n'en ai point ; mais , grâces à mon Dieu, j'ai eu toujours le bonheur de pou- voir parler depuis qu'elle m'elt tombée quand j'avois environ quatre ans. Que perfonne n'en doute, car je n'ai point de „ Langue , & cependant je parle fort bien. ,, Ceci eft de ma propre main. Je n'ai pas „ honte d'écrire fur ce qui me regarde, „ mais bien d'écrire fi mal. Je n'ajouterai „ pas autre chofe finon que je fuis Votre 3, très -humble fervance. „ Marguerite Cutting, " La Soc:écé Royale conferve tous ces Bil- lets, & toutes ces Lettres, pour fervir de monumens à la vérité. L'Hiftorien ajoute, que le cas de Marguerite Cutting n'eit pas fans exemple. Il cite le Traité de la peti- te Vérole du célèbre^ Drelincourt où cet ha- bile Médecin rapporte qu'un enfant de huit /. 3 ans 2\6 Bibliothèque Britannique, ans ayant perdu la Langue dans cette cruelle maladie continua de parler auflî bien qu'au- paravant à la grande îurprife de l'Univerlité de Saumur où la chofe arriva, comme on peut le voir dans le 3me. Volume des Epbe- merides Qermaniçœn fous le Titre d'Jgloffo- ftomograpbia. Il cite de même Tulpius qui a fi lire avoir vu à Wefop en Hollande, un homme qui ayant été mutilé de fa Langue par les Turcs depuis trois ans, parloit lans là moindre dificulté quoiqu'il en eût beau- coup à faire la déglutition & qu'il dût s'y aider en pouffant du bout du doigt les ah- ineris folides pour les faire entrer dans l'Oe- fophaghe. Enfin il allègue des exemples plus anciens encore, & tirés de ce que dit V Empereur Juftin dans le Code Tit* de Of. Prœf. PrcBt. Af. qu'il a va un homme auquel on àvoit coupé là Langue à la racine & qui ne \t pas d'exprimer d'un ion lugubre les douleurs qu'il avoit fiuffertes ; & enfuite que quelques autres à qui Honorichius Roi des Vandales ûvèîtfait couper la Langue à la ra- cine , avoient pourtant continué de parler, ef parfaitement. Qu'il nous foie permis d'ajouter qu'on trouve un excellent Ecrit du célèbre Mr. ce Juffim fur la manière dont une fille née fans Langue s'acquitoit des fonctions qui dépendent de cet organe, dans les Mémoires de V Acadé- mie Royal? des Sciences pour l'année i*'8. pag. 6/de PEdit. d'Amft. Tout le monde fait avec quel fuccès Amman ofa entrepren- dre de faire parler les muets. XII. Jtillet, Août et Septembre. 1743. 347 XII. Conformation fingulière dans un enfant, par Mr. C. Warwick Chirurgien à Truro en Cornouaille. OCTOBRE ET NOVEMBRE, 1742. N°. 465. I. Copie fidèle d'un papier écrit de la propre main du Coevalier Isaac Newton, &f trou- vé parmi les papiers du feu Dr. Halley, con- tenant la description d'un Infiniment pour ob- ferverfur Mer ladifiance de la Lune aux Etoi- les Fixes. IL Les Effets du Froid, avec des Obfcrva- tions fur h Longitude, la Latitude, & la Déclmaifon de /'Aiguille au Fort du Prince de Galles fur la Rivière de Churchill dans la Baye de Hudfon , en /'Amérique Scptentrio- n aie , par le Capitaine Ch r i sto p h l e M 1 o - dlzton Membre de la Société Royale, c? Cbw- 'int du VoAffeau de Sa Majeflé la Four- naife , 174 1 - 2. Cette Lettre contient diver- fes particularités curieufes. Nous nous bor- nerons à en extraire quelques endroits. Mr. \eton rapporte , nar exemple , qu'au Fort du Prince de Galles , dès que Je mois de Septembre eiï venu ou pour le plus tard en Octobre , on voit les Lièvres, les Renards, les Perdrix &c. perdre leur couleur natu- relle & devenir blancs comme la neige; que les Lacs qui n'ont que dix à douze pieds de profondeur y font gelés en hyver jufqu'au fond; que les Bœufs , les Cochons, les Moutons, & toute forte Venaifon, & les Poif- Z 4 f0DS 348 BirliothequeBritannique, fons mêmes, tués à l'entrée de l'hyver, s'y confervcnt mangeables, pendant frx à fept mois , à la faveur du Froid qui les gèle ; que l'Air y eft rempli de petites particules de Glace aiguës & perceptibles à la vue ; que la Bière' forte , le Brandevin & rÉfprit de V in expofés à l'air s'y convertifîent en glace dans moins de quatre heures,* que la Terre y eft gelée très-profondément & qu'il l'a trouvée telle jufqu'à douze pieds, fans pouvoir dire jufqu'ou cela s'étend; que les murailles des maifons y font toutes de pier- re , épaifles de deux pieds, les fenêtres fort petites & munies de volets de bois aufii très- épais & qu'on tient fermés dixhuit heures fur vingt & quatre pendant l'hyver ; que l'on conferve le Vin, la Bière, le Beurre, le Fromage, dans des Celliers profonds; qu'on y allume chaque jour quatre feux dans des braziers faits exprès, que dès que le bois y eft réduit en charbon l'on ferme la cheminée avec une plaque de fer, qu'ainfi on entretient la chaleur & force fumée dans les chambres, mais que fi au bout de quatre ou cinq heures on ne recommence pas, les murs fe trouvent intérieurement revêtus de trois à quatre pouces de glace, qu'il faut couper à coups de haches. On peur aifément penfer de quelle façon l'on s'habille dans un Pais ou le Froid èft fi ter- rible. Malgré tout cela ceux qui fortent re- viennent avec les mains, les pieds ou le vi- fage gelé d'une manière qui leur fait fouf- frir des douleurs cruelles, & dont la mort eft Juillet, Août et Septembre. 174-;. 349 eft Couvent la Cuite. A ces obCervationsMr. le Capitaine Middleton en ajoute d'autres Cur la fréquence des Parhélies, des Couronnes, des Aurores Boréales qui font d'une Cplen- deur admirable dans ce Païs là. Il entre dans un plus grand décail encore Cur les Montagnes de Glace qu'on voit dans la Bayé & dans le Détroit de Hudfon & donc quelques- unes font d'une hauteur & d'une écendue ti conCidérables qu'il ne csaint pas d'avancer, qu'il Caudroit pluiieurs centaines d'années pour ies diflbudrc , les moindres de ces malles s 'étendant pîuCieurs lieues dans l'O- céan ce ayant de quatre à dix bralTes, c'eft- à-dire, de vingtquatrc à Coixante pieds de profondeur. Que îi l'on demande d'où vient que le Froid eft Ci exceffif dans ce Climat à la même Latitude que Cur les Côtes de la Norvoègue, Mr. Middleton répond que la di- férence vient du Vent de Nord , qui ibuflîu au moins pendant Cept mois à la Baye de Hudfon d'entre le Nord-Efl: & le Nord-ÔueCt après avoir traverCé une grande étendue de Païs & quantité de hautes Montagnes; au lieu qu'en Norwègue9k Drontbem par exem- ple,le Vent clt Nord &Nord Nord-Oueit & y arrive Cans avoir trouvé dans Ca roule Cur l'Océan les rades Montagnes de Glace don: on vient de parler. III. Rr : Commit té , nomme par la Société Royale pour examiner quelques Qiief- tions far l'Art nu Canomer. IV. i d'u n ?> îcteore vu près de Hol- kara . ymté de Norfolk j en Août 17^., Z 5 35o Bibliothèque Britannique, communiqué* par Mylord Lovel Membre de ui Société Royale. V. Proportions des Poids &Mefures cV An- gleterre avec les Poids & Mefures de France prïjesfur les Etalons des uns & des autres par la Société Royale. VI. Manière de donner la Couleur d'Or à la P'aijjelle de Terre , communiquée à Mr. Pier- re Collinson Membre de la Société Royale dans une Lettre Latine de Mr. Godefroi Heinsius Profejjeur dC Agronomie à St. Pe- terfbourg. NOVEMBRE ET DECEMBRE, 1742. N°. 466. I. Excerpta ex Ephemeridibus Meteoro- logicis Romanis Anni 1741- obfervante Di* Paco de Revillas, Abbate Hieronymlano in Romana Accademia Mathejeos Profejfore , Régime Societatis Londinenfis , nec non Academiœ Inftit Scient. Bonon. Sodali. C'eft- à-dire 9 Extrait des Ephéménàes Météorolo- giques de Rome pour l'Année 1741. par Mr. Didaco de Revillas &c. IL Extrait d'une Lettre de Mr. J. T. Grondvius Docteur en Médecine àLeyden, écrite en Novembre 1742. à Mr. Pierre Col- linfon Membre de la Société Royale, concer- nant un Infecte Aquatique , qui coupé en àifêf entes parties, donne tout autant d'Ani- maux parfaits. Cet Infecte eft le Polype de ï\ir. Trembley dont il a été parlé dans le Tome précédent de cette Bibliothèque Part. Juillet, Août et Septembre. 1743. 351 Parc. 2. Arc 6. Mr. Gronwius n'en ap- prend rien de plus à Mr. Collinfon que ce que xMr. Baker en dit là fur la loi de Mir« Charles Bentinck, dont on a abufivement attribué la Lettre au Comte de tstnunck fon frère aîné L'équivoque n'eft pas fort cunfidérable. On peut dire fans fiatene de ces deux Seigneurs , que du co>e des lumières auiîi bien que du cote de la naif- fance, ils font véritablement: par nubile Fra- . Pour revenir à Mr. Gronoviw , il ne diffimule pas, qu'il y eut force incrédules à Leyden , fur la réalité de rexiftence du Singulier Polype , jufqu'à ce que les expé- riences réitérées de Mrs. Albinus , iïiuf- febenbroek, & Allemand , obligèrent les plus obftinés à fe rendre; ,, mais après tout, „ dit-il, je ne faurois croire que ce F „ foit un animal parfait; je penfe plutôt , „ que c'eft une forte d'Uvce Marina, de v Hoiotburia, ou de Zoopbyîa qui font réel* ,, lement vivans au moment qu'on les ,, faifit. De cette même efpéce fon: les ,, Pennée Marina décrites par Barrelierus ,, Tab. 1273. & 1774. ce les Fungi Marini ,, Tab. 1293. 1294. J'ai fouvent trouvé . ces derniers fur nos côtes, & j'y ai ,, fenfiblement remarqué quelque choie de ., vivant " Nous re doutons point que depuis la datte de cette Lettre Mr. G n'ait change de itiment. Il n'eft plus douteux que le pelype de Mr, Trem- ne foit un vrai Animal. Ce $$•2 Bibliothèque Britannique, Ce. que nous ne devons pas omettre ici, c'efl que l'illuilre Auteur des Transac- tions Pbilojbpbiques nous apprend dans une note, que Mr. Buffon de l'Académie des Sciences de Paris fut le premier qui donna connoiflance de la découverte du nouvel Infecte , à la Société Royale dans une Let- tre adreffée le iS. Juillet 1741. N. S. à Mr. Folkes aujourd'hui digne Président de cette refpe&able Compagnie. Il fait en- fuite mention de la Lettre de Mr. Charles Bentinck écrite au même. Il ajoute, que Mr. Lewenboeck , avoit déjà découvert en 1703. de petits animaux de même efpéce que le nouveau Polype; qu'on en trouve la defcripcion & la ligure donnée par ce fameux Naturalise dans le N°. 283. des Tranfaàions ; qu'un Anonyme en inféra des Figures encore plus exactes dans le N°. 288. ; que ces figures répondent fort bien à celles que Mr. Bentinck a envoyées; mais que ni Mr. Lewenboeck ni l'Anonyme , ne s'étoient point avifés de couper l'Infecte par morceaux, quoique le dernier en eût vu diftinctement un petit, pouffer du corps d'un autre & en fortir comme un rejetton fort d'une plante. Nous avons crû devoir rapporter toutes ces particularités parce qu'elles appartiennent à THiftoire Lice- rai re. III. Conjectures fur la pofition du Colure dans là Sphère Ancienne, communiquées à Mr . Mortimer Secrétaire de la Société Royale &c, par Juillet, Août et Septembre. 1743. 353 par une Lettre de Mr. Erenezer Latham Docltur en Médecine Ê? Minijlre du St. £- vangile. IV. Cas cVune Hydropifie extraordinaire, communiqué à Mr. Mortimer Secrétaire de h Société Royale &c. dans une Lettre de Mr. Tho. Short Doâeur en Médecine. V Fragment d'une Lettre écrite de Cam- bridge, à un Membre delà Société Royale, fur /'Infecte dont il a été fait mention ci-def- fus. §. IL C'eft un Mémoire que le cé- lèbre Mr. de Réaumur a lu dans une des aflemblées de l'Académie des Sciences , touchant le nouveau Polype qui a donné occafion à cette Lettre. L'ingénieux Ano- nyme qui Ta écrite, témoigne la plus vi- ve impatience de voir les obfervations de ce grand homme fur un phénomène aufîi fingulier. En attendant il ne cache pas qu'il n'eft nullement du nombre de quel- ques Savans , qui trop attachés aux notions Mctaphyfiques dont ils ont été de bonne heure imbus , font des raifonnemens à pêne de vue contre la poffibilité du fait. Hé combien de fois effectivement ce qui ne paroit pas vraifemblable fe trouve t-il vrai dans la réalité! L'Hiftoire Naturelle offre tous les jours de nouveaux prodiges qui déconcertent les plus beaux Syftèmes, & qui devroient bien guérir de la maladie d'être trop facile à en former ce trop obf- tiné à les défendre. Qui connoit précifé- ment les forces de la" Nature? Qui peut dire toujours fans témérité, ceci eft poffi- blc3 354 Bibliothèque Britannique, ble, cela ne l'eft pas? Et quel autre par- ti on homme fage, a-t-il à prendre en u- ne infinité de rencontres que celui de fûfpendre fon jugement ? Les Animaux s'engendrent régulièrement par la copula- tion des deux fëxes, cependant il en eft plufieurs qui font hermaphrodites comme les Limaçons y les Moules, les Vers de te\- re &c. , & il en eft d'autres où l'on ne dé- couvre point de fexe comme dans les A- Mlles. Les Plantes fe multiplient réguliè- rement par leurs femences, cependant on en trouve quantité qui viennent Amplement par bouture, & pourquoi n'y auroit il pas aufli des Animaux de cette dernière ef- péee? Il y a long-tems qu'on a découvert une étonnante analogie entre ces deux claiTes d'Etres, les Animaux & les Plantes. Tous les jours on en remarque de nouveaux traits , & probablement il y a dans la Na- ture une gradation infenfibfe des Animaux aux Végétaux , des Végétaux aux Co- raux, aux Minéraux, & aux Pierres mê- lues. Mais dans cette gradation ou eft l'homme afkz hardi pour ofer dire, ici fi- nit la Vie Animale, & là commence la Vie Végétale? Ou, ici finiffent certaines opé- rations & la précifément en commencent d'autres?- Ou bien encore, la vie dans tous jes Animaux eft une chofe toute diférente de la vie dans les Végétaux? Quedis-je? Pourroit on feulement trouver mauvais , qu'un l'hilofophe douta: modeftement 3 fi les Juillet, Août et Septembre. 1743. 355 les Plantes ou les Végétaux ne font point des Animaux- imparfaits, & fi les Animaux au contraire ne font point des Végétaux de l'ordre le plus fublime ? Il efl vrai, comme le remarque encore l'Anonyme, que ce qu'il y a de plus mer- veilleux dans le Polype récemment décou- vert, c'eft de voir qu'en le coupant en au- tant de parties qu'on veut, chaque partie continue de vivre & donne un Polype nou- veau. La merveille néanmoins ne conûf- te pas tant en ce que les parties continuent de vivre après leur féparation, que dans la prompte guérifon de la blefTure qu'elles reçoivent & dans la reproduction des or- ganes néceflaires à l'exiftence de l'Animal. L'Auteur a vu le cœur d'une Vipère conti- nuer fes battemens pendant lîx heures de la façon la plus régulière , après avoir été arraché de fon corps, & le corps fe re- muer pendant tout ce tems là comme îî îe cœur n'en avoit point été féparé; il a vu une Guêpe dont il avoit coupé la tête, le promener encore le lendemain contre fes fenêtres , & des Papillons efTayer de voler plufieurs jours après avoir fubi une pareil- le opération. Les Poulets & je s Pigeons à qui on abbat la tête tout d'un coup , s'agitent & donnent des lignes fenfibles de douleur dans ieu/s deux parties iéparées. La mê- me chofe arrive fou vent aux criminels qu'on décapite, & les er.fans n'ignorent pas, que des Vers de terre coupés en morceaux don- nent des marques de vie plus long-tem? qu'on 356 Bibliothèque Britannique, qu'on n'a la patience de les examiner. On croit vulgairement que leurs parties fe re« joignent & à en juger par leurs mouve* mens on diroit que chaque partie peut vk vre leparée du tout (a) Ariftote l'a remar- qué fpécialement fur la Scolopendre ou le Mille-pieds. St Anguftin en a fait aufli Tob- iervation , & l'Anonyme rapporte un paffage de ce Père, ou le phénomène eft décrit d'une manière fi naïve & fi vive, que nous croyons faire un vrai plaifir à une partie de nos Lecteurs de le tranferire en entier au bas de la page ( b). Non (a) C'eft au fi U vérité, & tes Vers de terre ne font pas les Jeuls Animaux à qui la chofe arri- ve, romme Mr. de Réaumur /'* fait voir. Note du Joii rnali lie. (a) Me revocat quid bis baufi oculis . . Cv.m enim nuper in aero ejfemus Liguria » noflri illt ado- lefcentes , qui tune mecum erant ftudiorum fuorum gratta* anima dvtr te- unt humi jacentes , in opaco lo- co , reptanïem beftwlam muhipedem , longnm dico quendam vermiculum : vulgo notus efti hoc tamzn qttod dicam nun^uam exptrîus eratn j verfo namque jiylo quem fir/e babebat unus iilorum , animal n.e- a.um percuffif. tttm amb* partes corporis ab Me vulnere in contraria difeefferunt , tant a pedum celé- ritate , ac nthilo imbecilltore nifu , quam fi duo bu- jtifcemodi animants* forent. ®)uo miraculo exter- riti, cxuif&que cunofi , ad nos, ubi fimulego cr A- lypius cor.fzjebatnusy alacriter , viveatia Ma frufta dettticrunt. Neque nos pa*um commoti> ea carrée in tabula qu^quaverfum poterint , cernebamusy at- que Juillet, Août et Septembre. 1743. 357 Non feulement on a une infinité de preuves de faic, qu'il eil poiïibie que des Animaux coupés en pièces continuent: de vivre affez long-tems dans cet état; l'expérience en- core démontre que plus un Animal eft iiri- parfait & plus il eft dificilè de lui faire des blejfures .mortelles , ians doute parce que Forganifation en eit pluo fimpie, 6c que les principes vitaux font plus répandus dans toutes les parties des Animaux de cet ordre qu'ils ne le font dans les autres. Et pouf ce qui eft de la cure & de la reproduction des organes néceflaires à la vie animale, per- fonne n'ignore avec quelle facilité elle fe fait dans les Ecrevijjes tant de mer que de; rivières, dont une jambe rompue, fe re- nouvelle en peu de tems avec toutes les jointures ce lesmufc'es qui y appartiennent, „ ce qui, ajoute le Savant de Cambridge, pa- „ roit bien plus dificilè que de rejoindre la „ tête 6c la queue de certains Fers* Car „ leur organifation étant aufîï (impie qu'el- „ le l'eft, & confiftant principalement, ou ,, même que unum tyforHm fïyh tétcl/tm , contor^Ktl^t fe ai (io.or : iocnmy nihil fenïiÇnt? *.io , .ic fuos alsôi mo- tus ftersgtmte. j£hiii plan? Tentavimta q»r,:ir:<: iJvxler.ii arque vermicuïnm , imo jam vermtruhs in multas.fâttes c§nciiimu$: ita otnr.es tnaytédnt/tr, ut nift à r.oiis illad faaum ejer,& comparèrent vu!- tier* recentm, totiJêm Uiosfeparatifn mtosy ,c fibi cjuetnquxm vixijfe crehrimuu Aug ;ft. Lib. *ie Quanticatc Aoiinaé. tme XXI Part. IL 358"BlBLIOTHEQUE B R IT ANN I QUE d „ même uniquement dans un feul Boyau ou „ Conduit lequel s'étend de leur bouche à „ leur anus, ils n'ont ce femble befoin ., pour fe reproduire que d'une fimple con- „ trattion de la partie bleflee , en quoi ils ,, font toujours aidés par les Mufcles qui ,, meuvent les anneaux dont leur corps efl ,3 compofé, & qui dans leur état naturel 3, font toujours les mêmes mouvemens, fa- ,, voir les mouvemens néceffaires pour la ,, fuccion & pour l'éjection. " C'eft à re- gret que nous fupprimors divers autres traits répandus dans cette Lettre pleine d'ouver- tures ingénieufes; mais nous devons nécef- iairement nous refferrer. VI. Abrégé du Calcul du Paflage de Mer- cure devant le Difque du Soleil, le 25. Octo- bre 1742. , par Mr. Jean Catlyn. VII. Lettre de Mr. R.obert Campbell de Kern an , à Mr. le Docteur Mbrtimer &c. concernant un homme qui n'a vécu que d'eau pure pendant dixhuit ans. Jean Fergltison de la Paroi fie de Killmellfoord dans la Com- té û'Argyle , Pâtre ou Berger de profeffion , s'étant extrêmement échaufé à courir après fon troupeau, vint fe defaltérer 6c fe ra- fraichir à un petit raifleau qui arrcfoît le pied de la montagne. Après avoir bû co- pieufement de l'eau bien froide, il s'endor- mit & ne s'éveilla qu'au bout de vingt & quatre heures, mais avec une grofTe fièvre. Durant le paroxyfme & depuis, fon efto- rriac perdit h faculté de retenir tout autre aliment que de l'Eau, ou du petit lait cla- rifié , Juillet, Août et Septembre. 1743. 35-9 rifié, chofe très -rare, & qu'il ne peut fe procurer que fort dificilement la plus gran- de partie de l'année, de forte qu'on peut dire, qu'il ne fe nourrit que d'Eau. Une perfonne de confiance l'a gardé fous la clé pendant vingt jours, & ne lui a don- né qu'autant d'Eau qu'un homme en boic ordinairement. Il s'elt toujours bien porté pendant ce tems là. Il a à préfent trente fix ans; fa taille eft de moyenne hauteur,- il eft plus maigre que gras; il a l'air fain, & il ne fe pafle-guères de jour qu'il ne faffe quatre à cinq milles dans les moncagnes où il mène paitre le troupeau qui lui eil confié. Il ne fe fert point de Tabac. Il crache na- turellement autant qu'un autre fans avoir* befoin de s'y exciter. La douceur de fa peau annoncé que la perfpiration fe fait en lui comme dans le relte des hommes. Il a auflî d'abondantes fueurs après un exercice violent. On n'a pas de preuves qu'il rende des excrémens grofîlers, mais on a lieu de préfumer le contraire, car le peuple qui ^'imagine qu'il y a du furnaturel dans fon fait ne manqueroit pas de lui objecter des évacuations de cette nature comme incom- patibles -avec l'habitude de n'ufer que d'Eau pour fa nourriture. ,, Le cas, dit Mr. Campbell, eft comme „ ont voit des plus finguliers, & des plus ,, dignes de l'attention des Gens de Let- „ très. C'eit une preuve de fait que la Al 2 „ plupart 360 Bibliothèque Britannique, h plupart des Aiimens greffiers donc nous „ faifons 11 grand ufage, ne font pas né- „ cefiaires pour fuftenter notre vie ; & qu'au 3, contraire l'Eau a des qualités qui nous 3, font encore inconnues, puifqu'elle a fuffi 3, pour entretenir Ferguifon en bonne fanté 3, pendant tant d'années ,& fourni à toutes 3, les Evacuations néceflfaires pour l'entre- „ tien de Fœconomie animale. VIII. Relation abrégée des Obfervations Météorologiques qui ont été communiquées à la Société Royale pour les Années 1731 , 1732 , *733> *734> I735- Par Mr. Geo. Hadley Ecuyer c? Membre de la dite Société. IX. Idée d'un Livre intitulé, Traité des Sens publié à Rouen in 8°. en 1740. par Mr. LE Cat Docïeur en Médecine , Membre de la Société Royale 9 &f Expofition du Plan de ce Livre par Mr. Jaques Parsons Doâeur en Médecine &c. Cet excellent Ouvrage eft trop bien connu au delà de la Mer pour que nous devions en parler. Il y a long-tems que la bonne Phyfîque n'a rien produit de plus in- génieux & de plus fenfé. X. Obfervationes s of Adoration , Deities and Idols. Of the Perfons dedicated to the Sacred Fonction ; Priefts and Religious Orders. Times and Places of Divine Worfhip ; Farts , Feitivals , Temples, Churches, and Mcfques. V. Of Sacred Books and Writing; the VeiTmens of Religious Ordres , and a Defcrip.tion of ail de Utenfils em- îcd in Divine Offices. VI. The Changes ploy< Juillet, Août et Septembre. 1743. 363 Changes and Altérations, which Reli- gion has undergone both in Ancient and Modem Times. CompiJed from the befl Authorities. By Thomas B r 0 u g h t 0 n A. M. Re&or of Sti- bington in Huntïngtonfhïre. London. Printed for C. Davis , overagainfl Gray's - Inn - Gâte , Holbourn ; and T. Harris on London - Bridge, mdccxlii. Ceft - à - dire ; Dictionnaire Historique de toutes les Religions, depuis la Création du Monde jufques a aujourd'hui ; Contenant /. Une Expofition de tous les Syjlèmes de Théologie des Payens & de leur Origine , des Coutumes fuperjti- tieufes du Pagunifme , de Je s Cérémonies & de Je s Dogmes. IL Les Principes de la Religion Judaïque , de la Chrétienne & de la Mahomet an e , avec les Loix Ecclc- fiafiiques , £f les Faits Hijloriquss qui y appartiennent. III. La Naiflance & les Progrès des diférentes Sectes, Hèréfies , £f Opinions qui ont éclaté en divers Tems &f en divers Lieux y avec des Eclair- cijfemens tant fur ceux qui en ont été les Auteurs que fur ceux qui ks ont répan- Ad, 4 364 B I B h I O T H E QU E B R I T A N N I Q |_U E , tfodT. iK £7«£ Defcription des difèrens Objets de r Adoration des peuples y de leurs Divinités S de leurs Idoles ; des Fer/on- nts cmfacrées au Service Divin , foit Prê- tres fnt Religieux ; des Tenu & des Lieux affectas ou Culte Pub ic , des Jeunes , des têtes y des Temples , des Eglifis & des Àiqjquccs. F. Des Livres Éf des Ecrits Sacres ; des Habits propres aux Ecclèfiaf- tiques &? des Utenciles employés dans le Service Religieux. VL Enfin , les Chan- gement & les Altérations que la Religion a fouffert dans les divers Ages du Monde. Le tout tire des meilleures Sources par Thomas Bkoughton Maine es Arts Reéleur de Stibington, dans la Province de Huntington. A Londres pour C. Davis & T, Marris 1742. 2 vol. fol. Fol I. pagg. 606. Fol. II. pagg. 563. fans h Préface , les Tables &un Indice. PArmi les Arts qui fe font perfectionnés dans notre fiécle, celui de mettre aux Livres qu'on publie, des Titres qui les faf- fent valoir, n'eft pas un des moins confidé- rables. Grâces aux foins laborieux de quel- ques favans, cet Arc originairement fort iimple eft déformais une" affaire d'étude. Je compte que dans peu, les Titres des Li- vre s Juillet, Août et Septembre. 1743. 365 vres feront autant de Préfaces qui en déve- lopperont tout le plan, & qui épargneront aux Lecteurs d'un certain ordre l'ennui de parcourir ou de feuilleter les Ouvrages donc ils le font un plaifir de parler, fans vouloir prendre la peine de les lire. Cependant comme les plus belles choies ont leurs in- convéniens, il elt à craindre que dans l'Ar- chitecture Literaire auflî bien que dans l'Architecture Méchanique, ces fronnfpi- ces ne le chargent peu à peu de trop d'or- neroens, & que le goût n'en devienne à la fin Gothique. Quand le Dictionnaire de Mr. Brougbkm parut en 1737. il étoit déjà décoré d'un riche & long Titre, dont les premiers mots étoient Bibliotbcca Hijlorico- Sacra , ou Bibliothèque H'ftorique des 1 r paies Matières qui ont du à la Reli- gion Ancienne & Moderne ccc. ; mais ayant changé de Maitre ce paiïé des mains dû Sr. Reily , ou plutôt de l'Auteur qui l'avoit fait imprimer par foufeription , dans celles des SIS. Davis & Marris, ces Meilleurs, ont cru de voir l'annoncer d'une manière plus ample & plus méthodique. Peut-être auflî eft-ce à Mr. Brougbton lui-même que nous fom- mes redevables de ce changement. Quoi- qu'il en foit, un Journaliite auroit mauvaise grâce d'y trouver à redire ; & en cetre qualité je me félicite de voir l'analvfe du Livre que j'annonce toute faite dans* le Titre mê- me qu'on lui a donné. De cette manière le Lecteur n'a plus befoin de mon afliftanee pour iirvoir ce que l'Ouvrage contient, & A a 5 pourvu $66 Bibliothèque Britannique, pourvu que je dife, foit en général foie par voye d'exemple dans quelques articles , de quelle manière le plan en eft exécuté , j'aurai ce me femble rempli ma fonction dans toute Ton étendue. En général, le DefTein de l'Auteur très- excellent en foi -même eft auflî heuveufe- ment exécuté. Le Nouveau Dictionnaire des Religions embrafle une variété prodi- gieufe d'objets intérefîans, il les expofe avec clarté, il en montre les fources, il étale partout une Litérature confidérable, une Lecture immenfe des Anciens & des Modernes , & l'Auteur a eu l'art d'y rafTem- bler quantité de chofes curieufes, qu'on y trouve facilement au moyen d'un bon In- dice, & de fix ou fept Tables des Matiè- res qui préfentent à l'œil dans un ordre Al- phabétique, tout ce qui eft répandu dans le corps de l'Ouvrage fur les diférens fujets qu'on voit énoncés dans le Titre. Cepen- dant comme un Dictionnaire ne peut fe per- fectionner qu'à la longue, il y aura, bien des améliorations à faire dans celui-ci. L'Au- teur en le publiant a été obligé d'accom- pagner chaque volume d'un petit fupplé- ment qu'il faudra ranger dans le corps de l'Ouvrage. En fe chargeant de ce Travail , on aura encore à fuppléer à quantité d'arti- cles omis, principalement dans tout ce qui concerne le Droit Eccléfiaftique moderne , & les termes tant de Rituel que de Prati- que. Pour empêcher que les volumes ne fe multiplient il faudra retrancher, une infi- nité Juillet, Août et Septembre. 1743. 3^7 nité de longues citations des Poètes Grecs , Latins, & Anglois, qui emportent des pa- ges entières ce qui groififlent l'Ouvrage fans néceiîlté. Enfin ce qui eft plus important encore, il faudra rendre quelques citations un peu moins vagues, en marquant toujours les Livres des Auteurs où l'on puile & même tant que la chofe fera pofîible l'endroit pré- cis d'où l'on a pris ce qu'on avance. Mr. Brougbton eft plus exact, là dellus qu'on ne Fefl ordinairement, mais il eft impoflible que dans un grand Ouvrage , où l'on eit fou- vent obligé de citer fur la foi d'autrui , l'on ne tombe dans quelques méprifes. Qui eft ce d'ailleurs qui a la commodité de pouvoir vérifier tant de citations, & de fe procurer tous les Auteurs nécefiaires peur cet effet? Je voudrois que ces impitoyables Cenfeurs des moindres fautes qui échappent en ce genre, fuflent condannés à écrire quelque Ouvrage de Litérature. Ils verroient ce qu'il encoure pour être à peu près exact, & ris apprendroient par leur expérience qu'il rj pofîible de l'être à tel point, que les Arijlarques & les Zoïles n'y aient rien à redire. Quant aux chofes mêmes, on lent afTez combien il eft délicat d'écrire fur la Reli- gion de tous les Peuples du Monde, & de donner une jufteidéc desSentimens de cha- que Secte. Il eft au deiïus de l'humanité de ne s'y. point méprendre, toit par préju- gé, foit'par inattention, foit par le défaut 4es guides que l'on choific. Je doute un peu par $68 Bibliothèque Britannique, par exemple que les Puritains, les Prefby- tériens, . Or. Juillet, A*ut et Septembre. 1743. 371 Heber. On invoquoic cette Divinité prin- cipalement pour obtenir la grâce de voyager heureufement. " ,, Lazarites ou Pe'res de St. Lazare. Ceft une Congrégation Religieufe de Clercs Réguliers inflituée en France dans le XVII. Siècle par Mr. Pincent. Ils prennent leur nom d'une Maifon qu'ils ont à Paris au Fauxbourg Saint Laurent. Le Séminaire qu'ils y entretiennent s'ap- pelle le Séminaire des bons enfans. Leurs vœux font très-fimples. Ils s'en font difpenfer fort aifément. " „ Touquôa. (a) Nom d'une Divinité mal- faifante que les Hottentots du Cap de bonne efpérance adorent. Ces Idolâtres difent que Touquoa eft le principe & la caufe de tous \qs maux imaginables. Ils croyent que cet être eft un Capitaine in- férieur, petit, mal bâti, trop méchant pour les laiffer long-temsen repos. C'eft, difent ils, afin de 1 appaifer& de fe met- tre à couvert de fes méchancetés, qu'ils l'adorent & qu'ils lui facrifient de tems en tems un bœuf ou une brebis. Quel- ques Hottgntots prétendent avoir vu Tou- Ils le dépeignent comme un monf- cîeux tout hérifle de poils , diffor- me, & terrible, qui a la tête & les pieds d%on cheval , & la peau blanche. " Voilà quelques-uns des Articles les moins confidé- (a ) P. K9&en P^fent fia te pf the Cape of Cooi Huit, c B. 372 Bibliothèque Britannique, confidérables du Dictionnaire de Mr. Brougo- ton. Il y en a de fort travaillés & de fore étendus. On peut voir par exemple ce qu'il a recueilli fous les mots iuivans , Azyle , Baé- rLus, Bible, Chrétiens , Eglife , Cierge, Epi- ires de St. Paul, Eucbarijtie , Enfer, Feu, Funérailles , Dieu , Dieux , Hérétiques , Juifs , Images, Inquifition, Junon, Jupiter , Litur- gie, Luther, Miracles, Mifjionnaires , Ma- bométans , Mois, Nopces , Oracles, Pape, Prière, Religion, Sabbatb, Sacrifices, Ser- mont) Sybilles , Synodes, Temples , Venus &c. L'Article des Epitres de St. Paul par exem- ple, eft d'environ huit pages & contient entr'autres chofes, le précis de chacune de ces Epitres tiré de Mr. Locke. Au mot Litur- gie fe trouve en abrégé rh.iit.oire de la Litur- gie de l'Eglife Anglicane. Au mot Religion l'Auteur trace dans quinze pages, l'Etat préfent dc:> Religions du Monde. Au mot Synode il en employé vingt & quatre à don- ner le (brumaire des dixhuit Conciles que l'Eglife Romaine regarde comme Oecumé- niques , & ainfi du relie. Ce n'eft pas une chofe faifable que d'en- trer ici dans la difcufïion des Matières, que Mr. Brougbton a recueillies fous ces Titres & fous divers autres , ni même de la forme qu'il leur y a donnée. Chaque Lecteur en jugera à fa guife, félon fa profeifion & fes befoins. C'eft a fiez le fort des Dictionnai- res ; tel Article qui y paroit aux uns peu cu- rieux, le paroit infiniment à d'autres. 7'el qui y efr, trouvé long & ennuyeux par quel- cueb i Juillet, Août et Septembre. 1743» 373 ques perfonnes mal in (truites, ne paroit pas allez étoffé, au jugement des perfonnes qui font plus éclairées fur ce qui en fait le fu- jet. Il n'eit pas poflible que tout le monde s'intéreflé également aux mêmes matières. On doit pourtant avouer qu'il y a certai- nes chofes remarquables que tout Lecteur tant foit peu inftruit s'attend de trouver dans les Articles auxquels elles fe rappor- tent nature llcment. On cherchera par exem- ple au mot Sabbatb , ce que c'étoit que^ VAn* née Sabbatbique des Juifs , & l'on fera je m'affure un peu étonné, que Mr. Brougbton ait prefque entièrement gardé le filenCe fur une conltitution aufli remarquable dans l'Hiftoire du Peuple de Dieu. Ce qu'il en dit efh renfermé dans cinq ou fix lignes, ou il fe borne à exprimer le fait, fans aucune recherche , fans aucune indication d'Au- teurs, fans aucune réflexion, foit pour conf- tater la vérité de la chofe, foit pour faire fentir les conféquences qui en réfultent en faveur de la vérité de la Religion de Moïfe. Il auroit pu néanmoins trouver d'excellens fecours là deflus dans les Auteurs mêmes dont il fait fouvent uflige. A leur défaut laLeitre qu'un Savant fît inférer il y a quel- ques années dans la Bibliothèque Germant- qiie 00, lui auroit richement fourni, fur le fujet dont nous parlons, dequoi contenter' fes Lecteurs 3 & orner fon Dictionnaire. J'ai (a) Biblïoth. Germanique. Vol XKX. Arr. %* Tome XXI. Pan. IL Bb 374 Bibliothèque Britannique, J'ai de même été furpris, en lifant ce que Mr. Brougbton a recueilli fous le mon de Feu de n'y rien trouver fui le crime de Nadab & d'Abibu le [quels furent fl févèrement pu- nis pour avoir offert devant le Seigneur un feu étranger (V). L'Auteur fait entrer dans cet Article des particularités qui ne me pa- roiifent pas à beaucoup près auffi intéreflan- tes. Il y emprunte de Jurieu, d'Outram, de Buxtorf, de Virgile, de Dryden , de Hy- de, & de Maunârell, les Fables des Juifs fur le Feu Céleîle, l'opinion des Payens fur le Feu Perpétuel, celle des Mages & de Zoroajire fur ce prétendu Symbole de la Divinité, & tout le détail de la Cérémonie que les Arméniens & les Grecs appellent au- jourd'hui la Fête du Feu Sacré. Mais en définiflant ce qu'étoit ce Feu miraculeux parmi les Juifs , & en rapellant ce que Moïfe nous apprend de fon origine, n'auroit il pas été naturel de dire au moins en deux mots ce qui fc paffa dans une rencontre, ou il femble que Dieu ne fe montra fi févè- re que pour apprendre de bonne heure à fes Miniftres, qu'il ne prétendoit pas qu'ils ofaiTent employer dans les Cérémonies oh le feu étoit néceflaire, d'autre feu que ce- lui qu'il avoit lui-même envoyé du Ciel. Je parle comme on voit en fuppofant avec la foule des Critiques que le crime de Na- dab & ôCAbihUy confifïa, en ce que voulant commencer les fonctions de leur Miniftère eu (a) Ltvit. Jtt i. &c. ]uij;let, Août et Septembre. 1743. 375 en offrant de l'encens au Seigneur, foie er- reur foie négligence ils ne prirent point des charbons du Feu qui bruloit fur l'Autel des Holocauftes mais apparemment de quelque autre feu qu'on entretenoit dans le Parvis du Tabernacle pour l'ulàge des Sacrifica- teurs. Je penfe toutefois, qu'on ne fera pas fâché de favoir, qu'un Théologien de Frij'e qui a depuis peu approfondi la matiè- re dans un Traité Latin de fa façon imprimé kHarlingue l'année derniè e (Y), a fait deux objections considérables contre cette fuppo- fition. Il remarque 1. que Moïfe donne d'a- bord au Feu dont les deux fils û'Aciron fe fervirent le nom de feu fans aucune qualifi- cation, & qu'il ne l'appelle feu étranger , qu'après avoir dit qu'ils y mirent du parfum. Voici en effet les paro'es de cet Hiftorien, Or les enfant d1 Aaron Nadab & Ablhu , pri- rent chacun kur encenfoir, cf y ayant mis du feiiy ils nvrent dejfus du parfum & offrirent devant l'Eternel un feu étranger, ce qui ne leur avoit point été commandé (b). A ce tour d'expreflion il femble que le Feu dont Na- dab & Abihu fe fervirent, n'était pas en lui- même un feu étranger , & qu'il ne le devint que lorfque les deux Sacrificateurs y eurent mis du parfum. 2. Mr. Scbeltinga (c'eft le nom du Théologien Frifon) obferve que le verfet (a) Thiolori ^ch'Jti'gn de Tatz Nz.Ubi & Abi- hu , ! 16 (Uns fn'u'arisy ad Levtt. X> l. &c. ttu- l'ngse 1742 Ociavo. (ô) Le vit. Xt 1. Bb 2 376 Bibliothèque Britannique, verfet qui précède immédiatement celui qu'on vient de rapporter , détruit l'Inter- prétation ordinaire. 11 y eft dit , que le feu jbrtit de devant l'Eternel, £? conjuma fur l'Au- tel VHolocaufte & les graiffes , ce que tout le peuple ayant vu ils s'écrièrent de joye £f fe proflernèrent le vifage contre terre Ça). A quoi Moïfe ajoute d'abord, Or, ou Et , les enfans à Aaron &c. Qu'on y prenne bien garde. Ceci infinue allez clairement qu'auffitot que le feu du Ciel fut tombé fur l'Holocaufte , & fur les grailles, en préfence de tout le peuple , fous les yeux d Aaron & de fes fils , alors, immédiatement alors, ceux ci prirent chacun leur encenfoir & y mirent du feu. Or quelle apparence que fur le champ même ils euffent par négligence ou par erreur, pris pour leur oblation, d'un autre feu que de celui qu'ils attendoient,&dont il eft lî pro- bable que "Dieu leur avoit déjà commandé expreffément de fe fervir? Mais pourquoi donc Moïfe appelle- 1 -il ce feu un feu étranger, & quel aura été dans la fuppofition de Mr. Scheltinga le crime de Nadab & d'Abibu? Il conjecture que leur crime confifta, en ce qu'ils mirent fur le Feu Sacré , de l'encens , d'un autre maniè- re que Dieu ne le leur avoit prefcrit , fe pré- cipitant trop à le faire , avant que d'entrer dans le Tabernacle; félon lui il faut tra- duire le Texte en ces termes , Et les Fils, ou Alors les Fils , d'Aaroli Nadab & Abïbu prirent chacun (a) Uvit> IX, 24. Juillet, Août et Septembre. 1743. 377 chacun leur encenfoir 6? y ayant 'mis du feu (Sacré) ils y mirent deffus du parfum. Ainfi ils offrirent devant V Eternel un feu étranger , ce qui leur avait été défendu. Cette ingénieufe conjecture efb aufïï vrai- femblable quelle elt fimple. 1. Il eft cer- tain que c'étoit dans le Lieu Saint & fur l'Autel d'Or que les Sacrificateurs dévoient allumer l'encens. Exod. XXX, 7, 8. Les Rabins(V), & Maimonidès (b) entr'autres, y font exprès. 2 II eft vifible par le Texte âe Moi]e9 que Nadab & Abïhu, mirent le parfum fur le feu de leur encenfoir avant que de venir devant le Seigneur, la con- nexion & la conftruction des termes de l'O- riginal mènenc là. 3. Enfin, Mr. Scbeltin- ga, fait voir que l'Ecriture donne fouvenc ■ le titre d'étranger à ce o/ii eft joint ou mêlé à des chofes auxquelles il ne doit pas l'ê- tre (c); ainfî un faux culte, rendu au vrai Dieu, y eft appelle un culte étranger, âinfî une proftituée, y eft appellée une chair ou une femme étrangère Prov. VII, 5., ainfî l'encens compofé d'une autre manière que Dieu ne l'avoit ordonné foitpar raport à la quantité foit par raport à la qualité des drogues Exod. XXX, 34. eft fréquemment appelle un encens étranger. Ici donc de mê- me un feu étranger , c'étoit du feu Sacré ren- du étranger ou impur par l'allociation d'un encens (a) Voy. Brairait' s Sel. Sxcr. Lie.4-.c1. />. 368. ( b) De Sdcrtf. Jug. & ExtraorJ. Cap* 3. §. I. 0 Vcy. Gatakcr Aàv. Mtfc, Cap. 15-. p. 560. Eb 3 378 Bibliothèque Britannique, encens qui y avoit été mis Contre les règles 5 au mépris des ordres que Dieu avoit fans doute donnés quoique Moije ne les rappor- te pas. Nous efpérons que le Lecteur nous par- donnera une digreflion qui ne peut que fai- re plaifiràtous ceux qui ont à coeur d'enten- dre l'Ecriture Sacrée dans fa lignification iitérale. Il y auroit bien d'autres chofes à prendre dans les Livres des Théologiens étrangers pour enrichir & perfectionner le Dictionnaire de Mr. Brongbtvn. ARTICLE VI. LETTRE ut Monp. E. . . . Pafteur de la S. . . , fi les Ouvrages de Menf. ARLAUD, 'célèbre Peintre de Genève. MONSIEUR, VOus avez apris la mort de Monfr AR- LAUD, que nous avons perdu il y a un peu plus d'un mois. Vous le connoifnez fur le pic d'un très habile Peintre en Minia- ture. Niais vous fouhaitez qu'on vous infor- me un peu en. détail des principaux Ouvra- ges qu'il a faits, & de quelques particulari- tés de fa vie. Vous auriez pu vous adrefTer à quelque autre, qui auroit été beaucoup plus Juillet, Août et Septembre. 1745. 379 plus en état de vous fatiffaire. Ce n'eft pas que je n'aie connu trcs particulièrement cet lllultre Peintre, & que je n'aie été en droit de le mettre dans la Claffe de mes Amis. Mais pour parler d'un Homme qui a excel- lé dans la Peinture, il faudroit entendre cet Art, & j'avoue que je ne le connois guère. Je ne laiiTerai pas de me mettre en devoir de vous fatiffaire. Je vai donc vous dire, à ma manière, tout ce que je fai fur le Chapitre de cet habile Homme. JAQUES ANTOINE ARLAUD na- quit à Genève le 18. Mai 1668. Il y fît fes premières études fort régulièrement jufqu'à Page de feize ou dix fept ans, & il a con- fervé jufqu'à la fin de fa vie beaucoup de goût pour les Belles -Lettres. Il avoit la conception aifée & une excellente mémoi- re. Il fe feroit deftiné à la Prédication fi la forte raifon de Rcs angufta domi, ne l'eût engagé à avoir d'autres vues. Il fe tourna donc du coté du Dcffein & de la Peinture, pour laquelle il fe fentoit aufli de l'inclina- tion. Il fit en peu de tems de grands pro- grez dans cet Art, & Ton peut dire, pref- que fans Maître. On fait qu'il n'aprit à deffiner que pendant deux mois, & que tout le refte il l'a aquis par lui même. A l'âge de vint ans, fe fentant déjà allez fort pour le Portrait, il quita Genève. Il alla d'abord à Dijon, où il peignit diverfes per- fonnes de diltinclion , pendant environ une année. Le gain qui lui revint de ce Tra- vail le mit en état de faire le voiage de Bb 4 Paris. 380 Bibliothèque Britannique, Paris. Là il fe mit aum* à faire quelques Portraits, Pendant le jour il manioit le Pin- ceau, & une partie de la nuit le Craïon pour fe perfedtionntr dans le Deflein. Son talent fe dévelopant tous les jours avec beaucoup de rapidité, fon mérite ne tarda pas à être connu. Dans peu d'années il eut une répucation des plus brillantes. Outre la finette & la délicatefie de fon Pin-, ceau, la beauté du Coloris en quoi il a ex- cellé , il avoit lu donner à la Miniature une force qu'elle n'avoit point eu jufqu'à lui. JMonf*. le Duc d'Orléans Régent difoit, les peintres en ce genre n'ont fait juf qu'ici que des Images. Arlaud leur a apris à faire des Por- ira.ts. Sa Miniature s'exprime aujji fortement que la Peinture à huile. Ses Portraits étoient reflemblans, mais il (avoit fur tout leur donner de la vie. Il s'a* pïiquoit principalement à peindre l'ame. Ce qui l'aidoit beaucoup à y réulîir, c'eft qu'il étoit excellent Phifionornifte. 11 favoit dé- couvrir, prefque au premier coup d'ceil , le caractère des gens. Le moindre gefte di- foit beaucoup pour lui. A cet égard, il étoit en quelque manière redoutable. Ses yeux perçans fembloient pénétrer jufque dans l'intérieur. Quoique la Cour foit le Païs de la diffimulation , bien des Courti- fans étoient tranfparens pour lui. Deux de ces Meilleurs s'en plaignoient un jour avec vivacité ; Ce Diable tf"' Arlaud , dit l'un d'eux , voit jiifque dans le fond de notre Ame. Fort Juillet, Août et Septembre. 1743. 381 Fort au delTus de ceux qui fe me; oient de Miniature à Paris, pluiieurs grinces &Prin- cefies de la Cour de France vou u>ent avoir leur Portrait du fa main. Son Art lui don- na peu àpiu accez chez les Perfcnnes du plus haut rang. Ii étoit fur toui furt bien vu au Palais Roial. MADAME, Princefle Palatine, Mère du dernier Récent, avoic beaucoup de bonté pour lui. Elle s'eft dé- clarée , dans toutes les ocations, fa géné- reufe Proteéhice. En 1718. Elle lui donna fon Portrait en grand, avec une riche Bor- dure. Il l'a légué par fon Te/tamenc à la Bibliotéque publique de Genève , avec d'autres beaux Monceaux de Peinture. Monf*. le Duc d'Orléans fon F ts, l'affec- tionna aufîi beaucoup. Ce Prince, comme tout le monde fait, avoit un goût décidé pour les beaux Arts. Il aimoit fur rou la Pemture, ôl étoit un excellent Conno'fïeur. Il dcffinoit très bien , & manioir q êrne quelquefois le Pinceau. Afin de fe perfec- tionner encore plus le goût, il trouva à propos de s'atacher Mr. Arhud. Pour l'a- voir fous (à main il lui donna même un apar- tement dans fon Chnreau de Saint C'o id. Là ils peignoient enfemble , & ce Prince lui faifoit l'honneur de l'apeler fon Maigre en Peinture. Il trouvoit que notre Genevois encendo't fon art foncièrement, qu'il étoit en état d'en déveloper les véritables prin- cipes , & qu'il favoit auiïi en tirer les con- féquences qu'il avoit bien étudié les Rè- gles de la Peinture, & qu'il favoit en-o-e Bb 5 mieux 382 BieliothequeBritannique, mieux les apliquer. Cette préférence, dans une ville ou il y a tant d'habiles Peintres, & ou l'on peut choifir fur un li grand nom- bre, dit beaucoup en faveur de notre Com- patriote. Il y en a allez qui ont la prati- que , mais à qui la Théorie manque. Plu- fieurs pallent pour très habiles, qui n'ont cependant que la main. Il ne faut pas leur demander laraifon de ce qu'ils font de bien. Ce font, par manière de dire, des Natures Plafiiques, qui organiferont bien un Hom- me, un Animal, une Plante, mais fans la- voir ce qu'elles font. MonP. A. étoit en état de rendre raifon de tout. Il étoit ex- trêmement fort fur YErudition Piîtorefque , & c'eft ce qu'il faloit avec le Duc d'Orléans , génie fupérieur qui vouloit toujours apro- fondir un fujet, dès qu'il s'en ocupoit. Ce Prince avoit des Tableaux pour de très grofles fommes. Il fie Faquifition de tous ceux qu'avoit pollédé autrefois la Rei- ne Cbriftine de Suéde, & qui étoient de tous Jes plus exceilens Mai très. Après la mort de cette Reine , un Prince Romain en fit Faquifition. Il les a gardés julqu'à fa mort , mais Ton Fils qui aimoit plus l'argent que la Peinture, les vendit au feu Duc d 'Orléans , pour un milion. Ce furent là de beaux fu- jets à étudier pour le Difciple & pour le Maître. lis s'ocupérent lontems de ces beaux Originaux. MonP. A. a dit fouvent que c'eft là l'Epoque qu'il avoit commencé à ftvoir quelque chofe en Peinture. Dès que fa fortune le lui permit, il vou- lut Juillet, Août et Septembre. 1743. 383 lut aufll avoir en propre quelques bons Ori- ginaux. Il en rit un fi bon choix que Ton Cabinet paflbic pour une de.> Curioficés qu'un Etranger devoit voira Paris. Briceà. quelques autres qui ont donné la Defcription de Pa- ris , n'ont pas manqué d'en faire mention. %3, Dans la rue de Condé, dit l'un d'eux, „ elt l'apartement de Jaques- Antoine AR- ,. LAUO, qui réufîit (i heureufement dans ,, les Portraits en Miniature, qu'aucun au- ,, tre Maître ne lui peut à prêtent difputcr ,, en ce genre fi dincrie. Son Cabinet efT ,, rempli de Tableaux excellens du Titien, ,, d'Aîinibal Carncbe , de Rubens , & des „ autres Peintres en réputation; mais on ,, ne trouvera dans aucun autre Cabinet un ,, plus beau choix de Paifages de Forêt > & ,, d'une perfection plus exquife (a). " Monf1. A. ne fe bornbit pas au Portrait, quoiqu'il y réuilit (i bien , & qu'à peine pouvoit • ii fufire à ceux qu'on lui deman- doit. Les grands Peintres aiment fur touc travailler à quelque morceau d'Hidoire. C'elr. là qu'ils dévelopent le mieux leur gé- nie. Il elt vrai que c'eft proprement le dé- partement des Peincres à huile. Monfr. A. n'a pas laifTé de donner dans fon genre de Peinture , àes fujets hiftoriques. Nous avons ce lui entr'autres la Famille Sainte, c'eft-à- dire l'Enfant Jcfus, la Ste. Vierge & Jofeph; nous avons encore une Madelaine peinte dans (a) Btice, Dcfcriot. dt F iris. 6'. Edit. 1713. Tcr.2. Ul. pag. 73. .384 BIBLIOTHEQUE BRITANNIQUE, dans le commencement de fa Converfion , & qui eft d'une beauté parfaite. Ces deux Pièces font les plus grandes que l'on fa (le en Miniature. Il les a léguées à la Biblio- téque publique de notre ville, ou elles font l'admiration des Connoifleurs. Mais le morceau de. Peinture le plus fir> gulier qui foit forti de fes mains, c'eft fa fameufe Léda. C'eft celui qui a le mieux fait connoitre fes talens. En voici l'hiftoi- re en peu de mots. Notre Peintre vit à Pa- ris dans le Cabinet d'un Curieux, un Bas- relief de Michel - Ange , qui lui parut de la dernière beauté. C'étoit un Marbre bLanc d'environ deux pies de large, fur une hau- teur proportionnée. On y voioit Jupiter changé en Oigne qui eft auprès de Léda. L'envie lui prit de copier cet Original . & précifément de la même grandeur. Il le pro- pofa que fa Copie, qui devoit être fur du Papier, fit fur l'œil du fpectateur le même effet que le Marbre même. Il travailla prin- cipalement à l'Encre de la Chine,* mais il y emploia bien d'autres couleurs qui pointil- jées avec un art & une délicateiTe infinie font devenues imperceptibles. De *ce tra- vail il a réfulté une Copie fi femblabîe à l'Original» que ce Papier étoit devenu du Marbre, & les Figures un Relief effectif. La plupart de ceux qui voioient ceT'ableâu pour la première fois commençoient par y porter la main pour s'aiTurer par Patouche- ir.ent de ce qu'ils voioient. Je le vis à Paris peu de tems après qu'il fut achevé , & je jouai Juillet, Août et Septembre. 1743. 385 jouai aufîl des doits. Mettez moi, fi vous voulez, au nombre des Badaux tatonneurs. Je vous répondrai pour ma juilification que des Sculpteurs eux mêmes, y avoient été trompés avant moi. Ce qui fait le mérite diftinclif de ce Ta- bleau, à ce que difent les Connoiffeurs , c'eft que le Clair - Obfcur y eft mis en œuvre avec toute l'intelligence poffible, que les gradations y font parfaitement obfervces, ce qui rend les figures tout à fait (aillantes. La Peinture a fon harmonie comme la Mu- iique. Il y doit avoir une force & une dé- gradation de lumière prefque imperceptible. C'eft par cette diftribution enchanterelTe des jours & des ombres que notre Peintre Genevois avoit fu ainfi faire illuûon aux fens. Tout Paris avoit admiré la Léda dans le Cabinet de Mr. A. Le Duc de la Force l'aïant aufli voulu voir, ne s'en tint pas à la fimple admiration. Frapé de fa beauté , il penfè à la poiïéder. Le voilà donc rival de Jupiter. Pour jouir de ce bel Objet il crue devoir imiter l'artifice de ce Dieu pour fai- re la conquête de Danaé. Comme lui notre Duc rit pleuvoir l'or & l'argent. Il alla jus- qu'à ofrir douze mille Livres pour avoir Léda à fa difpofition. Vous jugez bien qu'if l'obtint à ce prix. Cependant un fâcheux contretems traverfa cette négociation & l'empêcha d'avoir lieu. Immédiatement après cette^ Convention arriva la Chute du Mijjifipi) qui dérangea entièrement la for- tune 35(5 Bibliotheq.uk Britannique, tune de ce Seigneur. Il donna trois ou qua- tre mille Livres de dédommagement au Peintre & lui rendit fon Tableau. En 1721. Mr. A. fit le voiage d'An-leter- re. Un de les Frères, auffi Peintre en Mi- niature, s'étoit établi à Londres, & y écoît eftimé". Mais il écoit mort depuis une année ou deux. Il îailîbir une veuve, qui eli une Femme de mente, & qui entron pour beau- coup dans le fujet du voiage. Notre Voia- geur s'étoit muni d'une excellente Leitre de recommandation pour être bien reçu en Angleterre. MADAME avoit eu la bonté d'écrire en fa faveur à la Princeiïe de Gal- les, devenue dans la fuite Reine d'Angle- terre. Ii ne pouvoit pas manquer d'être vu ce fort bon œil à la Cour. Les Ouvrages qu'il y produifit, foutenus de cette forte recommandation , le rirent regarder tout autrement qu'un Peintre du commun. On îe gratifia de pludeurs belles Médailles d'or, qui à la mort, ont aufll verié dans iiotre Bibliotéque, & qui ferviront de mo- nument de la manière difiinguée dont il fbt reça En 17.^0. il quita Paris & fe retira dans fa Patrie. Il nous aporta ces beaux Tableaux des Peintres Anciens & Modernes qui or- noient fon Cabinet à Paris, mais fur tout fa Chère Léda. Depuis ce téms - là tout ce que nous avons eu d'Etrangers font tou- jours allé voir exactement ces Peintures, & les ont regardées comme une des principa- les curioiités de notre ville. Mais entre tous Juillet 3 Août et Septembre. 1743- 337 tous ces excellens Originaux on demandoit régulièrement la Léda. C'eft à elle qu'on en voulcic principalement. Les uns vou- loient la voir pour la beauté de l'ouvrage, & quelques jeunes gens la demandoient aufli pour le lujet même qui eftun peucrop libre. L'attitude duCigne auprès de Léda donnoit quelquefois lieu à des Imaginations un peu trop égaiées de s'échaper. Cela bleiîbic fort le Maître du Cabinet, & il chercha à y aporter du remède. Le parti qu'il prit fut de la fuprimer. De- puis 1738. elle a entièrement difparu. Cha- cun en demandoit des nouvelles, fans que perfonne pût dire ce qu'elle étoit devenue. Avec le tems ce miftére fe débrouilla , & l'on fut que Mr. A. l'avoit mife en pièces. Cette vivacité fut d'abord généralement condannée, & donna lieu à des Réflexions de bien des fortes. Voilà une boutade de Peintre, difoient les uns, la Verve Pittoref- que afes accez & Jes fureurs, comme la Verve Poétique. Te me trouvai un jour dans une Compa- gnie où l'on tâchoit de deviner le motif d'une action fi extraordinaire. Il eft revenu à Mr. A. , dit le premier qui s'expliqua là deflus, qu'il y a des gens qui ont répandu que la Léda n'étoit pas de lui, ou au moins qu'il ne l'avoit pas àejjinée. Ce mauvais bruit Va piqué au vif , la pauvre Léda a joufert de fa mauvaijé humeur g? a été mife -m pièces, ~Je me décriai fortement là deilus , & je com bâtis 388 Bibliothèque Britannique, combatis cette Conjecture que celui qui la raportoic fembluit un peu trop apuier. & Vous prêtez là, lui dis -je, un beau „ moien de juitiheation à Mr. A.l On „ prérend que la Léda eft de quelque au- 3, tre, & pour repoufler la calomnie, vous „ vouiez qu'il l'ait facrifiée. Avez vous 5, oublié ce qui fe paffa au Jugement de 5, Salomon? Dans le fcrocez agité devant „ ce Prince entre deux Femmes qui récla- „ moienr chacune un Enfant , celle qui „ confentit que cet Enfant contefté fut mis „ en pièces, fut jugée la faillie Mère par „ cela même. " Le Comte de Lautrec étoit à Genève lorf- que fe pafla cette icène tragique de la Léda. 11 avoit vu ce beau Tabieau, & l'avoit ad- miré. Quand on lui dit qu'il étoit détruit, il alla incefiamment pour s'en aflurer. Mr. A. avoua le fuit, & ne difoit point de bon- nes raifons pour fe juftifier. Ce Seigneur le poufia vivement. Il lui dit qu'aïant été envoie par le Roi comme Médiateur pour pacifier ie^ troubles de la Réoublique, une partie de fa Commifîion étoit d'empêcher qu'il ne fe commit ni excez ni violence pendant qu'il étoit chez nous, que fon em- portement contre la Léda étoit un manque de relpeci pour fon Caractère. Il lui dit enfuite fort férieufement qu'il devoit la lui avoir donnée, qu'il l'auro't emportée à Pa- ris, & que c'étoit afTez de la dépaïfer, s'il avoit quelque grief contre elle. On Juillet, Août et Septembre. 1745. 3^0 On n'a lu qu'après la mort de Mr. A. le vé- ritable motif du facrifice. Le voici. Te vous ai déjà infinué, MONSIEUR, que dans ce Tableau le Cigne tenoit Léda de fort près, & que cette Peinture pouvoit paflev pour un Objet lafeif. Notre Pein- tre devenu feptuagénaire envifagea ce Ta- bleau avec d'autres yeux que trente ans auparavant. Témoin plus d'une fois des mauvais effets qu'il avoit produits, il vou- lut en arrêter le cours. Nous avons apris depirs peu qu'avant que d'en venir là, il s'étoit ouvert à un fage Eccléfiaftique à qui il avoit communiqué Tes fcrupules. Il eft vrai que le Directeur confulcé ne porta pas la févérité jufqu'à condanner entièrement Ja Léda. Son fentiment étoit qu'il faloit la fuprimer, & non pas la gâter. Et même fans la luprimer entièrement il confeilla d'en ufer avec diferétion. Il étoit d'avis qu'on ne la fit voir qu'aux Initiés , c'eiî a dire aux Experts en Peinture. Cette dif- tinction paroit fort fage, mais un peu difi- cile dans l'exécution. Comment fe défaire de tant de demandes importunes à quoi cet- te réferve auroit expofé notre Peintre? Il étoit fort délicat fur le menfonge à quoi il auroit été prefque continuellement obligé de recourir pour fe débaraffer des Curieux indiferets. Peut-être qu'il porta fa vue encore plus loin que le Cours de fa vie, & qu'il craignit que ce Tableau dangereux ne tombât entre les mains de quelque PofTef- feur qui le feroit voir indiféremment à tou- Toms XXL Part. IL C c tes 7ço Bibliothèque Britannique, tes fortes de perfonnes. Il s'arma donc de courage, ce animé du même efprit que ces Anciens Romains û vantés aans THifloire, pour n'avoir pas épargné leurs propres En- fans, lors qu'ils étoient en faute 3 il pro- nonça la fentence contre fa Léda coupable & l'exécuta lui-même. Le Public ne lui a pas allez rendu indice là deiîus, & la délicateffe de Mr. A. ne lui a pas fait l'honneur qu'elle dévoie lui faire. J'en apelle à votre Tribunal, perfuadé que vous prononcerez comme le fage Rollin. 3, Nous avons naturellement allez de pen- sy chant au mal , dit - il. A quoi faut il donc 3, s'atendre quand la Peinture, avec toute 3, la délicatefie des couleurs, vient alumer „ une Paflion déjà trop ardente par elle- 3, même? Quels ravages ne caufent point „ dans l'imagination des jeunes personnes, 3> ces nudités indécentes que les Peintres ap fe permettent fi communément? Elles 3, peuvent bien faire honneur à l'Art, mais „ elles defhonorent pour toujours PArtifte. 33 Les Sages du Paganifme ont déjà con- 3, danné ces Peintures licentieufes. Séné- 33 que dégrade la Peinture & la Sculpture, 3, & leur ote le nom d'Arts Libéraux , dès ., qu'elles prêtent leur Miniftére au vice. 3, Il n'efl pas jufqu'aux Poètes qui fe dé- 3, clarent vivement contre ce defordre. „ On ne voioit point , dit Prudence, ces in- 5, décentes figures chez nos Ancêtres , £^ 3, les Murailles de leurs apartemens , petites ,j par des mains imputes 9 ne mettaient point 3, ain/ï Juillet, Août et Septembre. 1743. 391 ,, ainfi le crime en honneur 9 £f ne le donnoient „ point enfpectacle (a). " Mr. A. qui a voie beaucoup lu pouvoir encore avoir été animé contre fa Léda par ce traie que l'on trouve dans la vie des Peintres. L'un d'aux, & des plus fameux d'Italie, avoic fait autrefois pour le Duc de Ferrare un beau Tableau repréfentaoc de même une Léda avec Jupiter mécamor- phofé en Cigne. Il trouva qu'on ne faifoit pas afléz de cas de fon Ouvrage dans fon Pais, & il chargea un de fes iJifciples de le porter à François I. Protecteur des Beaux Arts. Ce Prince l'acheta, & il a orné pen- dant pîufieurs Règnes un des Palais des Rois de France. Mais enfin on fut choqué du fujet du Tableau. On le trouva dange- reux, & propre à exciter des idées impu- res. Mr. DesNoiers, Minière d'Etat fous Louis XIII. fit brûler cette Peinture, par un principe de confeience. Malgré ces autorités & ces exemples on a plaint notre Léda, on s'efl atendri fur fon fort. La plupart des gens ont paru fâ- chés de la voir ainfi la victime de ce zèle Iconoclafte, & le Sacrificateur n'a pas été épargné. Quoique je me fois déjà fort étendu fur ce morceau de Peinture, parce qu'il étoir dans un goût tout nouveau , je crois ne devoir pas omettre une petite particula- rité qui m'a paru finguliére. On a fu que Mr. (a) Rollin, Hijl. Ancienne, Tom. XL p. lûj- Ce 2 392 Bibliothèque Britaî^tique, Mr. A. détruifant fa Léda ne le fit pas avec H précipitation & la fougue que bien des gens lui ont atribuée, mais qu'elle fut cou- pée avec quelque atention, & même avec art. Ce fut par manière de dire une diflec- tion Anatomique. Il en fubfifte encore pluiieurs Morceaux que l'on regarde com- me précieux. Monfr. de Cbampeaux , Réfi- dent de France dans notre ville, a eu la tête, une Dame une main, une autre un pié. Ainfi tout n'eft pas abfolument perdu, & pour parler Proverbe, on en a tiré pié ou, aile. Admirez, je vous prie, cette efpéce de vénération pour ces reftes de la Léda après qu'elle a été facrifiée. Elle eft à peu près traitée comme une Sainte dont on dé- pecé les membres pour fatiffaire la dévo- tion de ceux qui en veulent avoir des Re- liques. La mémoire de la Léda fe confervera en- core autrement que par ces fragmens. On a placé dans notre Bibliotéque publique, & dans un endroit fort en vue, le Por- trait de Mr. A. peint par le célèbre de YArgtliére, fon ancien ami. Il eft repré- iente la palette à la main , & travaillant actuellement à fa Léda. Je voudrois que pour Pendant de ce Portrait , un habile Homme en fit un autre où l'on verroit Mr. A. beaucoup plus âgé, mettant en pièces fa Léda. Ce font les deux actions de fa vie qui méritent le plus, à mon fens, d'être confevées à la Poflérité. Mr. A. s'étoit aùffi peint lui-même en Miniature , Juillet, Août et Septembre. 1743. 393 Miniature, & il s'y écoit repréfenté dans la même attitude que dans le Portrait fait par fon ami de l'Argiiiére, je veux dire tra- vaillant à fa Léda. Cette Miniature a été placée d'une manière encore plus honora- ble que le Portrait à huile. Le défunt Grand Duc' de Tofcane , je parle de Jean Gafton le dernier des Médicis , avoit fait ramaflér dans fa Galerie de Florence, les Portraits des Peintres choiiïs Anciens & Modernes, mais faits par eux mêmes. Ce Prince aïant été averti qu'il pourrait avoir celui de Mr. A. Jui fit l'honneur de le lui faire de- mander en 1756. Il a été placé avec les autres, & il en eft revenu à Mr. A. une très grande Médaille d'or, eftimée quatre cens Livres, & qu'il a donnée par fon ±ef- tament à la Biblioréque de notre ville. Voilà , MONSIEUR , à peu près , tout ce que j'avois à vous dire des Ouvrages de notre Peintre. Vous vous atendez encore à quelques petites particularités de fa vie. Te vous ai déjà dit qu'aiant fait une fortu- ne confidérable à Paris, il fe retira parmi nous il y a douze ou treize ans, Il ne peignoit "plus après fa retraite & il en don- noit pour raifon qu'il avoir reçu un coup à la Temple £ Paris qui l'empêchoit de s'a- pliquer. Il falut donc fe faire un nouveau plan de vie. Il s'en fit un où la lecture des bons Livres, la converfation de fes amis, & la promenade l'ocupoient & Tarnu- foie: .Kivement. Ce 3 Permettez 354^IBLIOTHEQ-UE^RITANNI(^UE» Permettez moi de vous raporter à cette ocaiion ce que me die un jour Mr. Sllvejîre à Londres. C'étoit comme vous le favez un Médecin François , Homme d'efpric qui a travaillé avec Mr. des Mai/eaux à la belle Edition in 40. des Oeuvres de St. Ev remont. Outre ion habileté dans fa pro- fefilon, il avoit encore beaucoup de goût pour la Peinture & pour les Beaux Arts. 3, Savez vous, me difeit il un jour, l'idée 3;) que je me fais d'une ville comme la vo- 3, t're? Genève e(t bon pour y naître, & 3, pour y recevoir une éducation conve- 3, nable. On peut s'y former heureufe- 3, ment l'efprit & le cœur. Mais quand 3, on eft formé & que l'on fe fent quelque 3, génie, il faut fe jetter enfui te dans quel- 3, que grande ville, comme Paris ou Lon- 3, dres ,pour y déveloper fes talens, & ga- 3, gner du bien , faaf à fe retirer dans fa 3, Patrie quand on vieillit pour y trouver 3, une tranquilité dont on ne jouit guère 3, dans ces grandes villes fi bruiantes; 3, pour y jouir de la Converfation de fes M amis, & fe préparer tout doucement à 3, la mort. Votre Genève convient enco- „ re fort bien dans ce dernier période de 3, la vie. " Voilà le plan qu'a fuivi exac- tement Mr. A. fans que Mr. Silvejlre le lui eût difté. Retiré à Genève, il trouva qu'une Maifon de Campagne lui conviendrait , & il en acheta une. Il la choifjt fort près de la ville Juillet, Août et Septembre. 1743. 395 ville afin d'y revenir plus aifément toutes les fois que la fantaifie lui en prendroit. Rapelez vous, je vous prie, cet endroit de Térence. Ex meo prophiquo rure boccapio commzdi, Neqtu agri, ?ieque arbis oàium me unquatn percipit , Uoijaiias cœpit fieri , commit o locum. On trouve la même penfée dans une jolie petite Pièce d'Aujbne, qu'il a intitulée fail- li dit de même que fa Maifon de Campagne eft voifine de la Ville, & que cette fituacion le préferve de l'ennui. Nom quoties mutare locum faftidia cogunt Tranfeo: £f alternis rure vel urbè fruor. Cela a bien l'air d'être imité de Térence. Mr. /. pouvoit apeler fon fond Vïilula comme ^ Poète, car il étoit fort petit. Mais c'uv ainfi qu'il les faut aux Peintres & aux Gens de Lettres. Toutes les fois que j'allois promener à la Maifon de Campagne dc-oTeAmi, je me rapelois une Lettre de Pline x dont Mr. Rollin nous a donné la traduction & dont il admire la délicatefle. Il s'agiiTo:t de faire acheter à Suétone, peur qui il s'intcreiïbit, une petite pof- fefllon qui pût l'amufer. „ Elle convient, --il, à mon Ami par plus d'un en- ,, drOic, fon peu de diltance de la ville, Ce 4 „ la 99 2q6 Bibliothèque Britannique, „ la commodité du chemin , la nature des „ Batimens, les dépendances plus capa- „ b!es d'amufer que d'ocuper. Il ne faut „ aux gens de cette forte que le terrain j, néceflaire pour les délafler de leur tra- \> vail, & réjouir leurs yeux. Il ne leur faut qu'une Allée pour fe promener, qu'une Vigne dont ils puifTent connoitre ,, tous les feps, qu'une allez petite quan- ô, tité d'Arbres pour qu'ils puifient en fa- „ voir le nombre. " Voilà précifément ce qu'étoit la Maifon de Campagne de Mr. A. avec fcs petites dépendances. Mais une circonflance re- marquable que Pline relevoit dans fa Let- tre à Bebius , c'eft d'être placé dans un lieu propre à réjouir les yeux. La fnuation de la Maifon de notre Ami étoic des plus rian- tes. Vousfavez, MONSIEUR, que nous avons de fort belles vues d -ns les envi- rons de notre ville, mais celle dont il s'a- git l'emporte encore fur les autres. Cette Maifon de Campagne domine fur le Lac Léman qui préfente au fpeclateur un ma- gnifique baiTm avec la plus belle eau qu'il y ait au monde; tout autour, des Coteaux très bien cultivés. Le Païfage frape tous ceux qui le contemplent, mais notre habi- le Peintre y apercevoit des beautés qui échapoient à des yeux moins eonnoifieurs. Le Maitre de cette jolie pofTeiïion y paf- foit ordinairement la belle faifon. Là il nourriiïbït fon efprit de bonnes Ledtures. Je pourroîs fans le fîatcr, vous le Juillet, Août et Septembre. 17431 397 le donner pour un Homme de Lettre* IL connoiflbit bien les Beaux Arts. Outre la Peinture, il avoir encore bien étudié ia Sculpture , l'Architecture & la Muiique. Il entendort bien les Auteurs Latins, oc parloit cette Langue avec facilité. Four la Religion, il l'avoit étudiée dans Tes vé- ritables fources, & la connoilloit par les beaux cotés. Il étoit d'une Société com- pofée principalement de Théologiens, qui le voioient un jour de la femaine, & qui traicoient régulièrement des matiére> de Religion. Mr. A. difoit Ton avis à fon tour, avec beaucoup de jullefle , quoique toujours avec beaucoup de modeftie, infi- rmant fréquemment que ces Queftions n'é- toient pas tout à fait de fon reflbrt. Il ex- ur les matières de Morale, & il paroi (Toit avoir une grande connoilTance du cœur humain. Ce qui l'avoit fort aidé à bien connoitre les Hommes, c'éft qu'il avoit eu ocalion d'en fréquenter de toutes fortes de caractères, 6c comme il le difoit lui-même, depuis le fceptre jufqu'â h h te, & qu'il les avoit fréquentés avec un efprit à réflexion. Je pourrois encore vous le donner peur Philofophe. Il raifonnoit bien naturelle- ment, & s'exprimoit avec précifion & avec juftefle. Il entendoit affez bien l'Hutoire Naturelle & fe plaifoit beaucoup à la Phï- fique Expérimentale. Il raifonnoit en maî- tre fur les Couleurs & fur leurs aparences. Il en parloit non feulement en habile Pein- Cc 5 tre. 5»?3 Bibliothèque Britannique, ne , mais encore en bon Philicien. Je ne dois pas oublier de dire à cette ocafion que dans fon voiage d'Angleterre , il vit aflez fouvent le célèbre Newton, & qu'il avoit trouvé le fecret de fe faire aimer & cftimer de ce grand Homme. De retour à Paris , il reçut de lui une Lettre très pou*e ; voici à quelle ocafion. On de- voit imprimer à Paris la Traduction de Y Optique de ce grand Agronome, traduite par Mr. Code, mais retouchée par Mr. de Moivre. L'Auteur pria Mr. A. de donner le deflein de la Vignette qui de- voit paroître à la tête du Livre, & en gé- néral d'avoir infpeclion fur les autres Fi- gures. Il s'en aquita très bien. Mr. New-. ton pour lui en marquer fa reconnoiflance, lui fit préfent d'un bel Exemplaire, relié en maroquin rouge & doré fur tranche. C'en: Mr. Varignon qui fut chargé de le lui remettre. Cette Edition , comme vous favez, eft in 40. Le préfent fut accompa- gné d'une Lettre des plus gracieu es , en date du 22. Octobre 1722. L'un & l'autre fe voient dans notre Bibliotéque. A la Lecture, notre Peintre Philofophe faifoit fuccéder la promenade. Il parcou- roit fon petit domaine , toujours avec des yeux atentifs à quelque Merveille de la Nature. Quand il avoit pris un exercice fufifant, il revenoit dans fon Cabinet, qu'il aveit pris foin d'orner des Tableaux des meilleurs Maîtres. „ Là il trouvoit les „ grâces de YAlbane, & la finette du Cor- „ rège, M ») M Juillet, Août et Septembre. 1743. 399 rège> la légèreté de Téniéres, & le colo- ,, ris de Rubens, la précifion du Pou£lny & les exprefiïons de Le Brun. Enfin ees Tableaux enchanteurs étalement tour à tour leurs merveilles à Tes yeux. Il lui fembloit en les admirant, que les prefli- ges de l'Art renchérifibienc fur la Nature. Mais il changeoit d'avis lorfque quel- ques heures après, il jettoit fes regards ,, fur la Campagne. Quelquefois il étoit frapé, d'une manière particulière*, de la force du Pinceau de Forêt, qui avoin repréfenté dans un de fes Païfages , le Point du Jour. Mais le lendemain les beautés naturelles que dépîoioit l'Aurore naiflance éfaçoient entièrement dans fon efprit tout ce que l'Art humain s'étoit \\ éforcé d'imiter & d'embellir. " L'année dernière Mr. A. eut un nou- veau plaifîr à la Campagne. Il avoit ce fie de peindre en quitant Paris, ce j'en ai dit la raifoo. Il s'avifa l'Eté précédent, de reprendre le Pinceau. Il travailla à quel- ques Tableaux où l'on trouve la même dé- licatefîe & la même force qu'à ceux qu'il avoit faits il y a trente ans. Il étoit re- tourné au commencement du Printems dans fon joli fond pour y palier, félon fa coutume, la belle faifon. Il avoit eflaié de travailler encore au Portrait, & il s'é- toit au fii retrouvé la même juflefiè ce le même feu pour ce genre de Peinture. Ii avoit commencé le Portrait de fon Frère, & la tête étoit à peu près achevée, lorf- que 4oo Bibliothèque Britannique, que la mort le fur prit au milieu de la nuit , le 25. Mai dernier. Il ne fut malade qu'en- viron une demi heure & fa mort fut des plus douces. Il étoit âgé de 75 ans ; ainfi fa Courfe étoit à peu près achevée. Son Teflament a répondu à l'idée avan- tageufe qu'on avoït de lui. Il établit fon Frère Rentier , qui aura une fuccefîîon confidérable. Il fait des Legs à d'autres Parens, & des Préfens à divers Amis tous gens de Lettres. Mais l'endroit par oh il s'eft le plus difringué, c'eïl par les dons qu'il fait à la Bibïiotéque Publique. Ce qu'il lui lègue en Médailles, Tableaux, Recueil d'Eftampes & Livres, monte à une fomme confidérable. Je fai, MON- SIEUR, combien vous vous' intéreffez à fon embelliflement. Il étoit donc naturel de vous informer de la libéralité de notre Bienfaiteur. Vous voulez bien que nous difions auflî un mot de fes Mœurs. Il a toujours été regardé comme un parfaitement honête Homme. Il étoit oficieux & charitable. Il s'étoit fait des Règles allez févéres fur Pil- lage des plaifirs. Il ne s'en permettoit que d'innocens. H a pziïé fa vie dans un chafte Célibat. Sa Table étoit honête, mais (im- pie. Il en avoit profcrit les ragoûts com- me des poifons. Il n'aimoit pas plus le jeu que la bonne chère. Il ne vouïoit point d'autre divertiflement que ceux de la Pein- ture, de la promenade & de la conven- tion des gens éclairés. La Juillet, Août et Septembre. 1743. 401 La fîncérité étoit fon Caractère , on peuc même dire fon Caractère diftin&if. Au mi- lieu de la Cour, qu'il avoic beaucoup fré- quentée autrefois, il avoit fu conferyer cette (implicite de mœurs qui y efl fi rare. Quand il avoit l'honneur d'aprocher les Grands, fa franchife ne fe démentoit point. Voici un trait là deflus qui mérite d'être ra- porté. LOUIS XIV. lui avoit fait dire de venir dans fon Cabinet, avec quelques- uns de fes meilleurs Ouvrages. Il s'y ren- dit à l'heure marquée, Le Roi étoit feul, & examina tout fort atentivement. Il mar- qua fa fatiffa&ion au Peintre d'une maniè- re fort flateufe pour lui. Ce Prince en par- la fur ce ton -là à quelques Seigneurs de fa Cour. L'un d'eux aïant encore trouvé Mr. A. à Verfailles, lui dit que SaMajefté avoic fort loué fes Ouvrages. Mais notre Pein- tre répondit avec ingénuité, Le Roi méfait bien de Vhonneur , mais il me permettra de dire que V Académie s'y connoit encore mieux. Sur quoi ce Seigneur, qui l'honoroit de fon amitié, s'écria aufîitôt en lui frapant fiir l'épaule. Voiez donc ce Républicain qui ne femhle prefque pas fenfible aux éloges d'un grand Roi! Mr. A. fe diflinguoit non feulement par fa probité, mais encore par fa Piété. Il lifoit tous les matins fort régulièrement l'Ecriture Sainte, & dès qu'il a été retiré parmi nous , on l'a vu afiidu aux exercices facrés. Quand il écoutoit un fermon , il y étoit tout entier. Il fui voit le Prédicateur fans 402 Bibliothèque Britannique, fans jamais le perdre de vue. Il ne con- noiflbit point les diftraclions. Quand il for- toit d'un fermon ou il y avoit eu de l'ordre & de la précifion il en rendoit raiibn auiïi exactement qu'il l'auroit fait de quelque Tableau d'un habile Peintre. Tout cela, direz vous, fent un peu l'O- raifon funèbre , c'eft à dire un Difcours ou, à quelque prix que ce foit, on veut tou- jours montrer en beau celui qui en fait le fujet, & où Ton ne fe pique guère de fin- eéfité. Je vais donc préfentement en faire mes preuves, afin de diflïper les doutes que vous pourriez avoir fur tout le bien que je viens de dire de notre Compatriote. Puifqu'il fe piquoit de franchife, il en faut auffi avoir en parlant de lui. Je vous avouerai donc ingénument qu'il avoit quel- ques défauts que je ne prétens point difîi- muler. L'Illuftre Monfr. De Fonteneile en faifant l'Eloge des Académiciens après leur mort, a toujours eu pour règle que s'il y avoit eu quelque tache qui eût obfcurci les belles qualités de ces Savans, on de- voit les lailTer entrevoir. Je ne dois donc pas héfiter à fuivre un il bon modèle, d'au- tant plus que c'eft le feul coté par oh je le puis imiter. J'ai dit que Mr. A. lorfqu'il difoit fon avis fur des matières de Religion, devant des Théologiens, le faifoit ordinairement avec beaucoup de modeftie, & je lui ai rendu juftice là defliis. Le rcfpecl: que je dois à la vérité m'engage à avouer que dès qu'il Juillet , Août et Septembre. 1743. 403 qu'il parloit Peinture, oc ne retrouvoic plus chez lui ces fentimens modeftes. Il fentoit tout ce qu'il valoir, & il le faifoit un peu trop fencir aux autres. 11 parloic fréquemment de lui & de Tes talens, ce cela a\ ec un peu trop de complaisance. On remarquait en lui une grande envie d aplaudi. Il y a aparence que le 3 : zr.car de la Cour de France fe méprit lo. le crut indiférent aux louanges que le Roi venoit de donner à Tes Ouvrages. La Ré- ponfe de Mr. A. fignifioit feulement que que'que fenfible qu'il fût à l'aprobation du Roi, celle de quelque excellent Connoif- feur, comme feroit un des Profefîèurs de l'Académie de Peinture, le rlateroit encore davantage. Notre Peintre ne fe contentoir pas des louanges de fes Contemporains , il afpiroit encore à celles des gens qui lui fur- vivroient. Il fembloit avoir hérité des an- ciens Romains le déiïr d'immorralifer fon nom. Il faut convenir qu'il y a là dedans un peu de foiblefiê, & que fur cet article Mr. A. n etoit pas a (fez Phiiofophe. Cependant l'équité veut que nous ne le jugions pas trop à la rigueur. .Si c'a été là un endroit foïbte chez lui, il a eu cela de commun avec pref- que tous les grands Hommes. D'ailleurs le défîr de la gloire eft un inftirct eue le fage Auteur de la Nature a trouvé à propos de nous donner en naiffant. C'eft une pièce néeeflaire dans la fociété & dont on ne fau- roic fe palier. J'avoue que cette efpéce d'immor- 404 Bibliothèque Britannique, d'immortalité dont on prétend jouir après la mort n'eft qu'une Chimère. Mais com- bien de beaux Ouvrages n'a pas produit une femblable vue, & qui ont enrichi le Public? On peut ajouter que la foif de la réputa- tion , & un peu trop d'amour propre a pref- que toujours été le foible des grands Poètes & des habiles Peintres. On diroit que la vanité fe trouve atachée à ces Arts plus qu'à tout autre, je vai finir par une Re- marque qui m'a paru allez finguliére. On a longtems fait honneur aux Peintres & aux Sculpteurs d'une prétendue modeftie que l'on croioit voir dans la manière dont ils aprenoient au Public que c'étoit tel & tel Maître qui avoit fait un Ouvrage. Pra- xiteles faciebat , difoient ils, & non pas /. S'. Tome %XL Part, IL Dd 4C6 BlBLIOTHEOUE BRITANNIQUE, & de corriger dans les Enfans les dif- formités du Corps, le tout par des moyens à la portée des Pères & des Mères, & des perfonnes qui ont des Enfans a élever. Par Mr. Andry Confeiller du Roi, Ledleur & Profef- feur en Médecine au Collège Royal , Docteur Régent, & Ancien Doyen de la Faculté de Médecine de Paris. &c. Avec Figures. A Londres pour A. Millar à la Tète de Bachanan vis à vis Catherine - Street , dans le Strand. 1743. 2 vol. 12. Vol. I. pagg. 230. Vol. IL pagg. 310, fans les Tables des Chapitres & celles des Matières. JE ne fai qui a traduit en Anglois cet Ou- vrage, mais aflurément on doit lui fa- voir gré de la peine qu'il a prife, pour ap- proprier à la Nation un Traité aufli curieux & aufli utile. „ Nous fommes nés les uns „ pour les autres, dit fort bien Mr. Andry 5, dans fa Préface (a), il faut éviter d'a- „ voir rien de choquant, & quand on fe- s, roit feul dans le monde, il ne convien- „ droit pas de négliger fon corps au point „ de le laifler devenir difforme; ce feroit ,, aller contre l'intention même du Crea- ,, *teur. C'eft fur ce Principe qu'efl fondée „ cette {*) §. 4. pag. 50*. Vol. I. Juillet, Août et Septembre. 1743. 407 3, cette Orthopédie. " L'Auteur fuppofe que les Parens ne font pas tous comme „ cette „ bizarre Mère, qui voyant de très-belles „ dents à une jeune fille qu'elle avoit, lui 3, fit arracher les plus belles de peur que 3, la jeune perfonne n'en tirât vanité, & „ que ce ne fût un obftacle à fon falut. 3, Ce procédé lui rapelle, celui d'une au- 3, tre Mère aufli infenfée, qui ayant une 5, fille extrêmement bien faite l'exhortoit 3, fans celle à pancher la tête , à avancer le 5, col & à marcher les pieds en dedans, lui 3, difant pour raifon qu'il falloit éviter de 3, plaire au monde. J'écris , ajoute le célè- „ bre Médecin, j'écris pour des Parens ,, plus raifonnables. " Et traçant enfuite lui-même le plan général de fon Ouvrage 5 il avertit qu'il contient quatre Livres. „ Le premier eft une Introduction aux 3, trois autres , & renferme une notion gé- „ nérale de l'extérieur du Corps. „ Le fécond, a pour objet l'art de pré- 3, venir & de corriger en particulier les 3, difformités de la Taille par rapore au 3, Tronc du Corps; dans lequel je com- 3, prends auiTi la Tête, mais feulement eu ' „ égard à la manière de la tenir; car pour 3, la forme de la Tête, pour la Chevelure ,3 & pour le Vifage, ce font trois articles 3, qui n'ont rien de commun avec la Taille „ & que je traite à part. „ Le troifiéme Livre , concerne les dif- 3, formités de? Bras , des Mains 3 desjam- ,3 bes & des Pieds. Dd^ „ lî 408 Bibliothèque Britannique, „ Il s'agit de la Tête dans le quatrième, „ içavoir premièrement des difformités de ,, la Tête proprement dite; fecondement „ de celles des Cheveux; troifiémement „ de celles du Vifage. 3, Je confidère le Vifage d'abord en gé- 3, néral, pour ce qui concerne la Mine, ,, puis en détail pour ce qui concerne les „ diférentes parties qui le compofent5dont 3, les unes fe préfentent d'elles-mêmes „ comme le Front, les Sourcils. .. & dont ,3 les autres font moins apparentes comme 3, les Gencives, les Dents & la Langue. . . 3, Je ne confidère dans tous ces Articles 3, que les défauts extérieurs , je veux dire „ ceux qu'on ne fauroit cacher, & qu'il eft „ en même tems au pouvoir des Pères & 3, des Mères de prévenir & de corriger dans 3, leurs enfans, par les moyens que j'en- „ feigne ici. . J'envifage premièrement „ les parties dans leur perfection naturel- 33 le, & j'enfeigne à les maintenir dans cet 3, état de perfection , puis je les confidère 3, par raport aux difformités auxquelles el- „ les peuvent être fujeites,& j'enfeigne à ,, corriger ces difformités depuis celles qui „ attaquent la taille & le vifage, jufqurà 33 celles qui attaquent les ongles & les che- „ veux . . débutant comme je l'ai dit par une 3, notion générale de l'extérieur du corps. „ C'eft une efpéce d'inventaire que je fais ,, de toutes les parties dont je dois parler 3, dans la fuite. " Voilà le plan du favant Auteur. Il l'exé- cute TjjiixETj Août et Septembre. 1743. 409 cute en homme également confommé dans fa profefijon Ôc habile dans l'arc d'écrire. Tout cet Ouvrage qu'une grande méthode accompagne , cït orné de beaucoup d'ob- fer varions Médicinales, de faits hiftoriques & littéraires toujours relatifs au fujet qui y efi traité. L'agréable y eit partout mêlé a l'utile, & partout TinduHrie la plus ingé- nieufe y paroit aflbciée à un favoir profond. C'eft véritablement un Maître qui parle, mais qui parle comme on le doit quand on veut fe faire entendre à tout le Monde, &; le rendre utile à tous ceux qu'on inftruit. Les gens du Métier en ont jugé de la for- te (a). Plus V Orthopédie fe répandra, plus on en fentira l'utilité. Et je ne doute point que toutes les perfonnes qui ont à cœur la beauté & la bonne grâce du corps de leurs enfans ou de leurs élèves, ne regardent bientôt ce Traité comme un Ecrit néceffai- re dans toutes les familles. Ce qu'il y a de fur, ç'eft qu'on travaille à le rendre aufïï public en Hollande qu'il l'efl en France, & c'eft une obligation qu'on aura au Libraire de cette Bibliothèque qui en a tout récem- ment annoncé une Nouvelle Edition. Afin que chaque Lecleur puiiTe juger par lui-même du prix de l'Orthopédie je vai en détacher quelques endroits, pris indiférem- ment dans l'un & dans l'autre Volume. Celui qui tombe d'abord fous mes yeux , fe (a) Voyez L'Aïprdlation de M", Mon?:n fr Ccutier uans l"Editian Tr*nçoife de ce: Ouvrage. Bd 3 4ïoBlBLIOf HEQ^UE BRITANNIQUE, fe trouve ibus le titre des difformités des Mains (a) La beauté des mains eft un des plus grands agrémens du Corps. Aufîî Mi- gnaruy en faifanc le portrait de la Reine Mère qui les avoit extrêmement belles, & libelles quelle ne les regardoit jamais qu'a- vec une iecrètte complaifance dont elle avoit peine à fe cacher, crut devoir s'appli- quer particulièrement à les peindre dans la perfection admirable où elles étoient. C'eft dommage que fi peu de gens puiflent avoir cet ornement; mais d'un autre coté, il en eft peu auiîi qui par le moyen de quelques foins ne puiflent avoir les mains exemptes de certaines difformités qui les enlâidtflent. Telles font par exemple les Engelures. Voici ce qu'en dit l'Auteur. ,, Comme cette dif- 3, formité vient d'une matière tranfpirabîe „ retenue fous la peau des mains par le 5, froid qu'on a enduré, laquelle ne pou- „ vant s'échaper fait foulever la peau, & „ fouvent jufqu'au point de l'obliger à fe „ fendre, il eft aifé de voir que le moyen ,, foit de guérir foit de prévenir les enge- lures , c'eft de recourir à des remèdes qui puiflent favori fer dans les mains la tranf- piration qui y eft rallentie. . . L'Expédient le plus fur pour cela c'eft de fe frotter les ^5 3J ..Jns dès 'le mois d'Octobre avec du vm v blanc où l'on ait fait infufer de la roquette „ l'efpace de deux jours. On met dans „ deux livres de ce vin flx onces de feuii- „ les (a) Tgï77. I. Liv. 3. Juillet, Août et Septembre. 1743. 41 r j, les de roquette coupée menu & récem- ,, ment ceuillie; on les y laifîe infufer le ., tems que nous venons de dire, & Ton „ remue pluiieurs fois la bouteille qui ne „ doit être bouchée, qu'avec un morceau „ de papier percé par deflus de plufieurs ,y petits trous d'épingle, lln'eii point né- ,, cefTaire d'oter l'herbe avant que le vin „ foit ufé, mais lorfque la bouteille eiï „ vuide, il faut y remettre du vin avec ,, d'autre roquette pour faire une nouvelle ,, infufion. Ces infufions au refte fe doi- „ vent préparer à froid. On fe frotte les ,, mains de ce vin deux fois par jour , le j, matin en fe levant & le foir en le cou- 5, chant; il ne faut point le faire chauffer, ,, & en général c'eft une règle , que lorf- 3, qu'il s'agit de prévenir ou de guérir les 5, engelures des mains, il ne faut jamais 3, tremper les mains dans rien de chaud. . , ,, Ce remède doit être continué pendant „ tous les mois d'Octobre & de Novembre. „ Si l'on n'a pas eu foin de prévenir le mal 3, & qu'on s'en trouve attaqué , le même re- 3, mède fuffira, en ajoutant toutefois à la „ roquette deux ou trois onces de perficaïre 3, & autant de menthe 3 l'une & l'autre récem- 3, ment ceuillies. 3, Si les engelures font ouvertes ayez flx ,, onces d'eau de vie, jettez y un demi gros 3, d'aloè's & autant de camphre, laiflez infu- 3, fer le tout Tefpace d'une heure. Puis 3, trempez un linge dans cette liqueur ce ap- 3, pliquez ce linge fur les engelures 3 après Dd 4 „ le* 412 Bibliothèque BRiTAN.NiQ_UEa ,, les avoir légèrement graiffées avec un „ peu d'huile de jaune d'œuf; continuez huit ja' à dix jours. Il eft inutile d'avertir que 3, ces remèdes n'auront aucun effet fi l'on •5, n'a pas foin de garantir Tes mains de l'im* „ preffion du grand froid (a). " Une autre difformité aux mains, c'efi de les avoir toujours fuantes, Plufieurs jeunes perfonnes ont cette incommodité , elles laiflerit partout , des marques de leur fueur. Quand elles vous touchent les mains, elles vous les mouillent. Si elles vous préfen- tent un couteau, des cifeaux &c. vous les trouvez tout dégoûtons de fueur. Mr. An- dry dit qu'il a connu un jeune Eccléfiaftique qui étoit Prêtre depuis peu, &qui avoit les mains fi fuantes, qu'il ne pouvoit en Eté célébrer la MefTe. Confulté par cet Ecclé- fiaftique, il l'avertit de fe garder bien de rien faire qui pût repoufler une humeur dont il falloit exciter la fortie; mais il s'en tint là parce qu'il n'avoit pas encore con- noilTance du remède que voici, & qu'il don- ne pour fur. ,, Ayez de la toile cirée ver- 5, te, la plus ancienne que vous pourrez ,, trouver; coupez en des femelles; appli- „ quez une de ces femelles à la plante de 59 chaque pied à nud , puis mettez le chauf- 35 fon par deffus; laiflez les jour & nuit; ,, mais tous les foirs en vous couchant, & 3, tous les matins en vous levant eiTuyez ,3 les avec un linge; efiiryez' de même" la 1 55 plante (*) Là -même. N°. 12. Juillet, Août et Septembre. 1743. 413 „ plante de chaque vous trouve- ,, rez toute baignée d'eau,- continuez tous ,, les jours à porter de ces femelles , que „ vous ne renouvellerez que lorfqix'elies 53 commenceront à perdre leur force, ce „ qui n'arrivera guères qu'au bouc de dix 35 à douze jours. Comme chaque femelle „ prend la forme du pied, il faut éviter ,, dès le fécond jour, de mettre à l'un cel- ,, le de l'autre parce qqe fans cela elles n n'embrafferoient pas fi bien le pied. Ce ,, remède , au bout de quelques mois, fait ,, diminuer fenliblement la fueur des mains ; 3, & après fix mois ou environ , il eft rare , 53 qu'on ne foit pas guéri. Au refte, ces 3, femelles tiennent les pieds frais en été, 3, & chauds en hyver. Le fait eft confiant par l'expérience (V). " Des Mains on me permettra de pafTer à la Tête. L'Auteur comme on l'a vu con- facre le quatrième Livre de fon Ouvrage aux difformités qui y furviennent. Elles font nombreufes. Les Yeux feuîs en ont jufqu'à fept pour leur compte , dont ia pre- mière eft le Strabijme ou YQeil loncbe. C'eft la feule dont je parlerai. Elle eft incurable quand elle eft invétérée, mais au commen- cement voici deux moyens d'y remédier. 3, Le premier, c'eft de "ne laifler jamais les 3, enfans regarder rien de trop près, ou 3, trop de coté ou qui foit fi tué trop direc- ,, tement au deffûs de leurs yeux. . . Par » CQnfé" (a) La- même. N . S Dd 5 5î 414 Bibliothèque Britannique, ,, conféquent le moins qu'on peut les ap- „ pliquer à laLeclure c'eil le mieux. L'au- 3, tre moyen qu'on doit employer, c'eft de faire" pendant pîufleurs jours matin & foir environ l'efpace d'un quart d'heure chaque fois contempler à l'enfant lou- che fes propres yeux dans un miroir; 93 39 39 „ avec cette précaution que chaque œil ne S) contemple que celui qui lui répond dans 3, le miroir, c'eil à dire que le droit ne re- 3? garde que le droit, & que le gauche ne „ regarde que le gauche. Ce peut afTujet- „ tiflenvnt-n'eft pas grand cho'e. Cepen- „ dant, dit l'ingénieux Médecin, l'on ne fau- 3, roit exprimer combien il efl efficace pour ,3 redrefler la vue (a). " Ses Confeils pour conferver les Dents & pour les embellir méritent d'être lus & re- lus. Il veut entr'autres qu'on fe les lave tous les matins avec de l'eau gypfée qui le fait ainfl. „ On prend quatre onces de bon „ plâtre bien réduit en poudre ; on met ce „ plâtre dans une livre d'eau; on l'y laiflc „ cinq ou fix heures, puis on verfe l'eau 5, doucement dans un vaiiTeau bien propre ,, pour s'en rincer les dents. On la renou- „ veîîe quand elle efl finie. Le même plâ- „ tre ne peut fervir qu'une fois (b), " A propos des dents, notre Auteur par- lant de l'influence que doit avoir fur la ibr- tie des dents aux petits enfans le lait des Nourri- (a) fom. 77. Liv. 4. (b) Là -même. pag. 16S. Juillet, Août et Septembre. 1743. 415 Nourrices, au fujet defquelles tout cet Ou- vrage eft plein d'excellentes remarques, fait une oblérvation qui paroitra fans doute curieufe à bien des perfonnes. Lorfque l'enfant eft bien malade des dents, il veut qu'on aide Faftion du lait par la friction gé- nérale de tout le corps de la Nourrice, Cette friction doit, dit-il, fe faire le ma- tin avec des linges un peu rudes. Il en ,, eft du lait dont il s'agit comme de celui des animaux; celui d'anelTe, celui de chèvre, celui de vache font beaucoup plus lains lorfque ces animaux ont été broffés. Leur lait pèfe moins alors fur l'eftomac des malades & efc moins fujjec à s'\ figer. Le goût même en eft diie- , rcnt, & même fi diférent, comme l'ob- ,, ferve Van HAmont par raport à l'aneflc, „ qu'on peu: connoitre par là fi l'anëfle a „ été brofféc ou non (ch. " L'Article du Teint n*eft pas un de ceux que Mr. Andry a le moins travaillé; mais je ne fai fi les Parifiennes s'aecomodcron:, de ce qu'il en dit. Jamais lè'fard ne fut fi honni & fi maltraité. Il n'y a pas jufqu'à ïa Po'fie que le Vénérable fioyen de U culte ne foulève contre lui (/?). Il eft vrai que les vers qu'il cite à cette occafion mé- ritent quelque grâce de la part du fexe en faveur del'efprit qui y brille 6c je penfe que je ne nique rien à les copier à mon tour. Oeil (a) Ik-rrcms. p?.c. i6i. {6) La miJhé. pasj. 116. 416 Bibliothèque Britannique, C'eft le fard lui-même qui y fait fon por- trait. Les voici Ça). Partout où Von inemployé on me cache avec foin 3 Le grand jour m'eji un peu contraire. SI je fers d'abord fans befoin, Je me rends bientôt nécejfaire. Tant que je fuis caché bienfouvent mon emploi M'attire des cajoleries. Mais je fur prends des flatteries Oui ne s'adreffent point à moi. Je fers en apparence e? je fais mille maux > Je fuis d'un fâcheux voifinage. Et je ronge enfin jufqu'aux es Ceux que je flatte davantage. Mr. Anâry fait pafTer en revue tous les fpé- cirlques qui ont été imaginés pour confer- ver aux Daines la blancheur & l'éclat de leur teint. Mais aux légères frictions près il n'y en a point qui mérite en tout fon ap- probation. J'en excepte le fuivant. „ On lit, dit -il, dans l'Hiiloire de l'Empire des Chcrifs que Nuclei Ifna'él R.oi de Tafilst avoit un teint tout diférent fé- lon la paillon qui le dominoit; la joye le lui rendoit blanc & le moindre mou- vement de colère le lui rendoit tout noir. „ je faij ajoute- 1 -il , de jeunes perfonnes „ du ( * ) Fcefes de Mr. de Brifiar.î de Montancy Con- feïlier an Préfldial de Bourg er. B-e,Ce. Juillet, Août et Septembre. 1743. 4*7 „ du fexe,à qui la même chofe arrive qu'à 3) ce Roi. Ainû* le meilleur confeil que M j'aye à leur donnera à leurs femblables, „ c'eftde nefe jamais mettre en colère. Je 3, ne fâche pas de meilleur remède que ce- „ lui là pour leur conferver le teint blanc „ lorfqivelles l'ont tel ; mais ce remède „ n'elt pas facile à toutes, & en général „ on peut dire de la plupart d'en tr'el les ce „ qui eft dit de la nation des Poètes qu'il „ faut peu de chofe pour les irriter. Genus 5, irritabilè Vatum (a). " On voit à ce trait que Mr. Andry quoi- que dans un âge avancé n'a rien perdu de ce feu & de cette vivacité qui paroiflent dans tout ce qui eft forti de fa plume. Les Additions qu'il a attachées au fécond Volu- me de cet Ouvrage, qui font deflinées à le défendre contre les Critiques un peu amè- res de quelques Savans, en Contiennent bien d'autres preuves. ARTICLE VIII. A Description of Holland, or the Prefent State o/^United Pro- vinces; wberein is contained a parti- cular Account of the Hague, and ail the principal Cities and Towns of the Re- publicky with îheir Buildings , Curïojîiîes &c Of the Marner and Cujioms of the D (a) Tcm, IL Livre 4, jdg, 129, 413 BlRL 10 THE Q_UE BRITANNIQUE, Dutch ; their Conflit ut ion , Legflature ,- Sovereign Courts, Miniflry , Revenue, Forces by Sea and Land, Navy y Admi- rdlty , Bank , £#/£ - India Company , ÀT Minières ont publié en forme de Lettres, The Duty and A Avantage of Religious So~ cictics jro-Jed frem Scripture and Reafon, c'eft-à-? d,;c. Le Devoir & l'Utilité des AfiembUes Reli- gitufes prouvés par ï Ecriture & par la Riifon. Le Nom de l'un cft Wilhfon, ëc ceùui de l'autre Bmtnar, Jaques FerguJJon a imprimé depuis peu, Th* A(lronomia Ôic. Ce font ûx planches cù fe voyenç les lieux du Soleil, dç la Lune &. des noeuds de l'Lc'yptique , Page de la Lune, lesEclyptes de ces deux Aibes, le tems. des Marées &c. le tout cal- culé depuis Tan 1730. jufiu'à l'an 1800. Une Société de perlbnnes curieufes Se qui ont toutes ues fonds plus ou mpin% copûdéral les à la Campagne a fait imprimer] SeUcl Iranfacîions of the Society of tmprovement of the Knowledge of A- griculture in Sccthnd, c'eft- à-dire, Obfervaticm ch.'.jies aune Société peur l'avancement de la Con- Ee 2 noijjancê 426 Bibliothèque Britannique, notjfance de ï Agriculture en Ecojje. C'tft un 4°. du prix de 7 fchellings. On dit qu'il y a bien des chofes curieules. Glasgow. Les Frères Touhi viennent de donner in 8°. une nouvelle Edition de l'Ouvrage qui porte commu- nément le Nom de Demetrius Phalereus difciple de Theophrafte , mais que Mr. Eabricius après le lavant Hudfon attribue à Demetrius Halicarnapus , qui fioriflbit parmi les Rhéteurs fous le règne de Marc AntorÀn. Voici le titre de cet Ouvrage, De- metrius Phalereus wep) l prêtas de Elocuticne five DiBione Rhetorica. Gr&c. & Lat. Cette nouvelle Ediiion paro t très -bien faite. Les caractères Grecs en font d'une beauté 3 qui approche, de celle des caractères des Etiennes. Oxford. Le cc'lèbre Mr. Hunt vient de publier une Dif- ferraiion de fa façon fous ce titre, A Differtation en Proverbsôcc. C'eft- à -dire, DiJJertation fur Pro- verb. VII, ix , 23. ou Ejfay de quelques Difftrta- tions Critiques fur les Proverbes de Salomon j a- drejjé aux jeunes gens qui étudient l'arabe & les autres Langues Orientales dans l'Univerfité d'Ox- ford, Par Thomas Hunt M. A. & Erofeffeur en Arabe au Collège de Hertford. Imprimé au Théâ- tre pour Richard Cléments & fe trouve à Lon- dres chez les Knajiton, J- Rivington, J. Roberts- 4°. 1743. Cette Difïcrtation qui n'eft que de feize pages, ert précédée d'une Epitre dédicatoire a- dre{fée aux Difciples de Mr. Hunt qui en contient huit, Le feyant Profeifeur y recommande l'étude de Juillet, Août et Septembre. 1743. 427 de V Arabe, comme la clé la plus nécefaire pour entendre parfaitement le langage & le ftile des Auteurs Sacrés du Vieux Teftamcnt. Il voudroit que ùs élèves fe initient en c'tat de lire, l'Hif- toire des Dynafties d'Abulpharage , la Vie de Ma- hommed d'Abulfedat la féconde partie de l'Hif- toire générale à'Al-Makin, l'Hiftoire d Egypte d'Al-Macrizi, la Géographie d' 'Abulfed* , 6c la première partie de l'Ouvrage à' Al - Makin en ma- nuicrit; qu'enfuite ils fe formaflent à confulter le Jauhartus» le Firouzabadius , le Zammachfha- rius , tous Dictionnaires Arabes y moyennant quoi il les adure, qu'il n'y auroit prefque pas de mot dans la Bible qu'il n'entendirent aifément. Mr. Hunt ajoute qu'il en parie fur fa propre expé- rience ; que cette étude l'avoit conduit à entre- prendre une Nouvelle Traduction de Job* qu il y a Iong-tems travaillé, mais que ûs occupa'ions journalières ne lui permettant ulus de pouffer un Ouvrage fi difi iie, il la enfin abandonné pour travailler fur des Partages détachés du Li>re des Proverbes, ce qui a produit plufîeurs Diiïcnations dont il donne à priant un eifay. Il s'agit dans les paroles de Salomcn , des rifques que court un homme affez. malheureux pour fe iaifler prendre aux carelTes d'une femme infidéic à ion époux- Au lieu que les Verfions ordinaires, celle de Ge- nève par exemple, expriment air.fi la penfee du Fils de David, Il s'en alla continuel. ement afr&s elle comme le bœuf s'en va à la boucherie & com- me le fou aux ceps pour être châtié. Tant que la flèche lut eut tranfpercé le foye, comme l'oifeau qnt fe hâte ven le filet, ne fâchant point qu'on L'a ten- du contr: fa v.e. Mr. Hunt prouve qu'il faudroit rendre le Texte de cette manière, Il s'en va après elle m efj arriment, comme le bœuf s' m va k la bon- E e 4 chérie , 428 B I E L I O T H E QU E B R I TA N N I Q_U E , chérie , ou comme un cerf fe débat dans des fttts jufqu'à ce que la flèche lui ait tranfpercé le fcye. Commç l'eifeau qui Je bâte vtrs le filet ne fâchait pas qu'il efl là centre fa- vie. R fie Siens &c Réflexions fur le fondement naturel de h haute Antiquité, /oit du Gouvernement , {oit des Arts , O* des £c;ences en E:ypte. Au iheatre chez Jaques F' et cher. Cette petite pie'ce qui n'eft que de 21 pa- ^e> in b°. cit écrire avec beaucoup u'cipr.t & ce moiefle. Le deiTein cie l'Auteur eft ce confirmer par des preuves de raif mnernent les preuves de fait que l'un donne de l'Antiquité du Gouverne- ment & des Sciences en Egypte j pour en conclure en tr 'autres que ce pays fcmble avoir été' prépare par hs mains de la providence, pour faciliter la ' lication de la pofterité des patriarches, au milieu même de la fèrvitude. Si l'on ne goûte pas cer- fuppofitions , d prie îe Lecteur de fe fou- \euir qu'elles regardent l'Egypte , & que \*E et devenue en quelque forte le pais des fictions & dus conjectures. L O N D R E S. On va imprimer par foufeription en un volume in quarto l'Ouvrage fuivant, A Critical Commen- t**y &c. C'eft- à - dire , Commentaire Critique fur le Livre de la Sapience de Salomcn, dans lequel on explique les faffages obf.urs & dtficiles de ce Li- vre, on fcit femït l'élégance & l* fidélité de la Traduction qui s'en trouve dans la Bible Aaglàife* en comparant foigneufement cette TraJuclion , avec l.i Vul-ate & les autres Traductions Latines; avec le Texte Grec c les Verfions Orientales; avec Us Anciennes Tt aduûions AngUifes j avec les remarques us Mejfteurs du Port -R(J al cr des Critiques 3 &* Juillet, Août et Septembre. 1743. 429 où l'on rétablit \*r ce moyen la véritable Ufon de divers pajfuges. On y examine de même le Texte Grec avec toute l'exactitude Aont la Critique la pins attentive efl capable \ on en collattonne C compare les diféren:.2S Editions > on fait voir que la leçon préftnte de quantités à' endroits y efl fautive, & l'on propofe dtverfes conjectures pou* fendre, a l'Ori- ginal t me fa pureté. Par Richard Ainauld B.D. Rideur de lhurcaflon en Leiccjïer/bire &c Ce Commentaire donc l'Auteur pafie pour un habile homme contiendra envirv n quarante feuilles. On donne 3 fchellinçs en foufenvant, de l'on en don- nera autant en recevant 1 Ouvrage. Bickerton Libraire dans le Fleet-ftreet débite, A Revus» of the Moral and Poluical Lift and Ad- mmifiraiton of the Patriarch Jofepb &c. C'cft-à- dire , Revue de la Vie tant Morale que Politique & du Gouvernement du Patriarche Jcfepht' Avec des remarques (ut la route qu'il prit gt* fur les moyens qu'il emply.% pour s'ajfcrvir les Egyptiens, & quelques réflexions fur hs^Loutumes ey fur Us Ceremcnies des ancieis Egyptiens ey des lfraèlites. C'eà une brochure de fi pages in 120. où l'Au- teur a pris le malin & indigne plaifir de s'etudier à donner tin mauvais tour, à toute la conduite de Jofeph dans e Gouvernement de l'Egypte pour pouvoir infu ter plus a fon aifj au dernier Minis- tère de la Grande-Bretagne. 11 cft fort apparent iju'on lui cft encore redevable de la Brochure fui- vante, An Enqtury &c. Recherches fur les déplo- rabis cir confiance s ou la, Grande- Bretagne fe trou- ve , & fur l'état ou 10m actuellement teint de fa- milles ty de particuliers y fait Génitif hommes , fait Eccléftalliquts, fou Fermiers, foi! Marchands , fait îsé:ocianst fott Artifans Sec. Avec des Obferva- ùons fur la nouvel! i marStre de vivre , & de s'oc- Ec 5- r'it'r 430 Bibliothèque Britannique, cuper tant a la ville qu'à la campagne i des Reme- des pour prévenir la ruine des familles; & des Re- marques fur notre Commerce en général; fpéciale- ment fur le Commerce tant des chofes qui ne fervent qu'au luxe» que de celles qui vont à faire dépérir nos manufactures. A quoi Von ajoute quelques avis pour arrêter les progrès de la Pauvreté qui va fans ceffe en croijjant dans la Nation. On débite chez. Henry Lintot, An Account &c. Relation de la Vie ey des Ecrits de Herman Boerhave Douleur en Philo fophie &c. in 8°. pagg. 2.11. Ce morceau eft très- bien écrit. L'Auteur y a d'ail- leurs recueilli tout ce qui a paru jufqucs à préfent de plus curieux fur la Vie & fur les Ouvrages du grand homme dont il fait l'éloge. 1ht Reformation Reformed&c. La Réformation ré- formée, eu Ejfay pour unir tous les Trot eft an s dans ut même fentiment tant par raport au Gouvernement que par raport à la Religion &c. Rien n'eft fi facile pour- vu qu'on fuive les principes de l'Auteur, qu'on fafTe main balfe fur tou&ies Dogmes, & qu'on foit de bonne composition Tur le refte. Cette brochure fe trouve chez Cox près de la Bourfe. Elle eft de 60 pages in 8°. A Letter fhewing vhy our En^hfh Bibles &c. Let- tre dans laquelle on montre pourquoi la Traduction Angloife de la Bible difère fi confidéraùlement de la Verfion des LXX. , quoique faites l'une & l'autre fur l'Original Hébreu. Chez J. Robin fon au Lion d'or, en Ludgate-Jlreet. 8e. pagg. 71. L'Auteur de cette Lettre lignée T. 13. répond d'une manière très- claire & très-folide à la queftion propofée dans le titre. Nous pourrons y revenir à quelque heure. En attendant nous devons avertir qu'il promet de fembîablcs dilfatations fur le Pentateuque Samari- tain) fur les Paraphrafes Chaldaïques , fur la Ver' fien Juillet, Août et Septembre. 1743. 431 fion Syriaque & fur les autres Verfions Anciennes que Walton a fait entrer dans fa Polyglotte. H. Woodfall débite les deux derniers Tomes de X'HiJloire Abrégée de la Ri formation & dts Eglifes Réformées de France, par Mr. Etienne Abel Laval, l'un ùa Pajîeurs des Chapelles réunies de Caftle -Jireet & de Berwick ftreet. in 8°. Le dernier Tome qui eft le fixième & qui termine l'Ouvrage, finit à la fameufe époque de la Révocation de l'Edit de Nantes. Mais l'Auteur y a ajoute' un Supplément de cent dixfept pages fur les diférentes méthodes dont Louis XIV. fe fervit pour forcer fes iujetsl3ro- teftans à abjurer leur Religion .après avoir abroge cet Edit dont l'observation a voit été R folenndle- ment jurée par lui-même Ces Méthodes furent la Dragonade , les Cachots , Y Hôpital de Valence , les Galères , le Tranfport en Amérique , divers genres de Mort & toutes fortes de fureurs exercées fur les cada- vres. Sur chacun de ces Articles Mr. Laval a raf- fcmblé divers faits curieux pour éternifer la mémoi- re de l'abominable perfécution que les M^imbourg , le> Brueys , & d'autres plumes vénales ont ofé repré- fenter au public avec les couleurs les plus adoucies mais les plus trompeufes. Si quis ante ocuios pomre veltt , fubitum minium accurfum y convulfa januet clauftrti, m'mactm vocem, truces vultus , fulgentia arma, rtm vera &Jlimatione profequetur. Valer. Maxim. Lib. VI. Cap. 8. §. 6. TABLE TABLE DES M A T I.E R E S. A. AGgee II. 4, f. Sens attribué à ce Pafïage. 19, Agriculture } Obfervations cboi/ies d'une Société pour V avancement de la Connoiffance de l Agriculture en Ecojje Aif. Aigle 5 Explication de cette expreflîon , Tajeuntffe ejl rcnoivtllee comme celle de L'Aigle. Vf. CIIÏ- < . ;i2. Jlir'i Voyez Electricité. V Air cft abforbé Scperd de fon Elaliicité dès qu'on y mêle des Vapeurs Sul- phureuies.3 -8. Explication de ce Phénomène ibid. Andty ; Voyez Orthopédie. Angleterre ', Chronique des Rois d'Angleterre écrite fui- vant le Stile des Anciens Hifioriens Juifs f parNatban £enSaddi.i6$.&fuiv Réflexions fur ce Stile i6f- 16%. Harangues tirettes répandues dans cet Ou* ra- ge. 167. ï68 , 169. 170. Métaphores 8c hiperboles. 171 • 17*- Allégories. 172.179, Railleries. 180-182. Article de George 11. 1 83 . Remarques fur l'Hifioire d'Angleterre y tirées des Paiirs manufcrits de H. Oldcaftle. 244. & fuiv. Occafîon , 6c But de cet Ouvrage. 24$. Sa Ne'ceflité. 247 , 246. Préroga- tives â.s Rois d'Angleterre. 294. Voyez Anglots y . Se Bretagne, 5c Britannique, & Communes. An**'* TABLE DES MATIERES. Anglois? Dans une Confiitutiov t telle que celle dès AngloiSj la fureté de la Société entière dépend d$ l'Equilibre des Parties du Gouvernement , $> cet Equilibre conjifie dans leur mutuc le lnuépendance. 174. La Souveraineté chez les Anglais réfide dans les trois Etats dt la Narion. ijf. Changement ar- rive' dans les Poiieilions <:eces trois Etats, iyo. & dansleur Crédit 8c leur Autorité. 191. Voyez Liberté. Animaux* On a découvert une étonnante analogie entre les Animaux 6c les Plantes. 3,-4. Anne , Reine d' Angleterre 5 Raillct.e fur (on I 182. " A7rou*r:y.6uvuciiK. ; Signification de ce mot. io£. Ufa- ge u o e a fait. 197 . Arabe ; I/htude de cette Langue recomtmnde'e. 416. Arhud (Mr ) habile P intre en V'iniature , de Genè- ve j Le-tre jur ies Ouvrages 378. &fuiv. Sa NaiiTan- ce. ^79. 11 va a Dtj n icid. a Paris. iHd. Son Ha- bileté dans la Miniature. 380. 11 et £1 excellent Phifionomifte. ibid. iMr. le Duc d Orléans fe l'at- tache. 381. Mr. Arlaud errendoit Ton art fonciè- rement. ?8i , 382. Son Cabinet ^c Peinture. 383. Quelques - uns de fes Ouv âges. 385, 384 \ç\z % 393. 399. Hiftoin ■ c^e fa Léda. 384-392. Il fait le Voyage d'An leterre. 386. Il (e retire dans fa Tatrie. '386 Quelques Particularitez de fa Vie. 393- (T îHîx" $cs Lumières. 397. Si Mort. 400. Son Teftamenr 2c ùs Legs à la Bibl;otheque Pu- blique de Genève. 400 381. 384.393. Voyez auflî 386 392. & 398. Ses Mœurs. 400, 401 Ses Dé- fauts. 402 ,403. Arnauld (Mr. R.) Voyez Satience de Salomon. Ajfemblées Religteufesi Le Devoir & l'Utilité des Af- femhlées Religieufes prouvez par l Ecriture c pur la Raifon Pat Mrs. Wditfon 8c Bonnar. 425. /.ftronome (L') Sec. ou , Planches où fe voyent les lieux duSoîçil, &c. 425-, Augtip.tn TABLE DES Atêgufiin (St.) cité. 312.$?$. Aulu-Gelle cité. 196. 202. 30p. Attfone cite. 39*. B. 15 A c on (Milord) cité. 249. Bayle (Mr.) cité. 7- 14*» J43- »4^- *?o, ija, i?2- 302. 2i». 320. 404, 40$. Voyez David. Beequet (Th.)i Raillerie fur fes Miracles. 180. Bentley (Mr. ih.) Voyez Jules -Cefar. Bentley (Mr. R.) loué & critiqué. 63 , 64. 2té/*J> Examen de ï ' Amufement Philosophique du P. Bougeant fur le Langage des Bêtes. Par Mr. Hil- drop. 213. &fuiv. Les Bêtes ont de la Connoif- fance. 221. 123. Leurs Ames font des MalinsEf- prits, fJon le V. Bougeant. 226,227. Selon Mr. Eildrop, ce font des Ames Immatérielles, pro- portionnellement de la nature des nôtres, 223, 324. 226. & Immortelles. 232. Les Bêces durent, félon Mr. Hildrop» être Immortelles dans le Jar- din A'Heden, & ne furent affujetties à la Mort, de même qu'aux Maux différcns de la vie, que par le Péché de l'Homme. 229. Duquel Péché leurs Inclinations Vicieufes font les fuites. 230. Leurs Ames frparées de leurs Corps, doivent être acti- ves fans leurs Corps.23?. Différence entre les Be- tes & les Hommes. 237. Les Bêtes reffufeiteront. 2,29. Et les Végétaux aufli. 239. 240. Toutes les Parties Inférieures de la Création feront rétablies dans leur félicité primitive. 239. Les Bêtes Féro- ces perdront leur Malignité. 243. B'itch (Mr. Th. ); Sa Vie de Mr. RcberîBoyle. 209. Ses Vies & Carafteres de qujtrevingts Perfonnes ilfojlres (de la Grande -Brttagm). zn.. Voyez Cudtporth. Boerhave {UiM^ktien defa Vit Scde fes F -its.^o. Btnnnr MATIERES. Bonnar (Mr.); Voyez AJfemblées Rdigieufiû Bougeant (Le P.) j Voyez Bêtes. Boy le (Mr. Robert), Nouvelle Edition de fes Oeu- vres. 209. Boy le {Roger); Voyez Etat. Bretagne (Grande) j Très peu de Gouwnemens ont été fujets à tant de Révolutions que celui de la Grande Bretagne. i?j. Voyez Britannique , & Angleterre. Brochure contre le dernier Miniftè- re de la Grande Brstagze. 42 9. Autre Brochure intitulée , Recherches fur les déplorables circcnftances ou U Grande Bretagne fe trouve, Ôcc. ibid. Bretons (Les anciens) iLeur attachement à 1a Liber- té, ifô. défendus, ibid. Brice cite?. 383. Briffard de Montaney (Mr. de) cité. 416". Britannique', Beauté' de la Conititution du Gouver- nement: Britannique. 194-197. Objection réfutée. 297. Voyez Bretagne, ôc Liberté, & Parlement* Broughtcn (Mr.); Voyez Religion. Brutes', Voyez Bêtes. V^A mpbell (Mr. R.) ; Voyez Batt. Cary a. Fête à l'honneur de Diane. 270. Céfar -, Voye? Jules - Céfar. Céfar ciré. 2 <6. Charles IL, Roi d1 Angleterre-, Raillerie fur fbn fujet. 1S2. deux', Sens attribue' à ces Exprefiions de l'Ecriture: Nouveaux Cieux. Nouvelle Terre. Rensuveiletr.i^t de la Taie de la Terre. 139. Clarke (Mr.); Voyez Jules- Céfar. Clerc (Mr. le) refuté. 18. Code (Le ) cité. 246. G?///»; (Mr. .*.) réfute'. 12. Comment lire ,- Voyez Sapi.nce de Salomon. Comment TABLE DES Commentateurs-, Ils fe copient. 309. Communes d' Angleterre ; Augmentation fie leurs Ri- chcffes,29o. 6c du Crédit & de l'Autorité de leur Con>s repréleotatif dans le Gouvernement. 291. Corrections j On ne doit pas les inférer dans le Texte àes Auteurs. 63. Cour de Juftice; Voyez Décifions. Crafimw (Le) défendu. 247-254. Cudrvorthi Nouvelle Edition de fon Sifièmê Intellec- tuel. Par Mr. lh> Birch. 208. Cutting ( A4.) j Voyez Langue, D, Ane au (I.) cité. 162. Danfe', DilTert2tion de Mr. Ddauny fur la JD4«/i. 160-162. L. Daneau cité fur ce Sujet. 162. Sen- timent d'un Mi ni (Ire Zcojjois fur la Dan/e. 163. Dfinzius ci é. 306. David i Le Second & le Troifiéme Tome du &*- cit Hiftorieue de fa Vie & de fon Règne. 158. & fuiv. z$9. o* /«y. Ce Prince juftifîé contre JBayle. 141, 142. 145-145% 146- iyo. 150-162. 302-310. 320-522. Penfee de Mr. DtUunj fur la Maladie dont il fut frappé & fur c lie de Job. 310, 31 r. 317. Penfée d'un habile Médecin là demis. 316. RichefTes que ce Prince laifla. 322. Sources de ces RichefTes. 324. Comment Salomon pu' employer à la Cot uruclion du Temple de fi groifes lomme-. 327. David mis en parallèle arec Scipion. 528-330. Davies (Mr.)j Voyez Jules -Céfar. Décïîiênsi Recueil des Décifions de la Cour de Jufli- ce (en EcoJfe)> en forme de Diciionaire. Par Mr. H. H*we. 206. DeUuny (Mr. ; Le Second & leTroific'me Tome de fon Récit Eip.oriaue de la Vie & du Règne de David. 138 matières; & fuiv. 199. & /"**• Voyez David 3 & Dttnfe] rius thalereus; Voyez ElocHtio. Voyez Eau, & Lait, diers (Mr.) 5 Ses Conjectures fur YEleilricité jr V Elevât ion des Vapeurs. 336. nnaire'i Voyez Décifions , & Religion* mité-, Voyez Orthopédie. Caffius cite'. 156. 7«m Mêlées. 209. France; Les deux derniers Tomes de \'Hi(loirede la, Réformation & des Eglifes Réformées de France, par Mr. E. A. Laval. 431. Transis (Mr. P.); Voyez Horace. Frafer (Mr. )j Voyez Nadir. Manufcrits Orien- taux, que Mr. Frafer a apportez en Angle- terre. 102. MATIERES. froid; Relation des Effets du Froid dans h Baye de Hnclfon, par Mr. le Capic. C. Midleton. 347. G. vÏAlates III. 19. Sens attribué à ce Pat fige. f. Ge»èy« XLIX. 10 Explication de ce PaOage. 21. George II ; Voyez Angleterre. Gifdert (Le P.) cité. 124. G/*/î (Mr. 7.; j Voyez Sang. Grec; Comment on commença & continua la pu- blication des Anciens Auteurs Grecs. 191. Gronovius ( Mr. J.T.)i Voyez Folype. Grove (Mr.); Voyez Wolfey. H. JTIAdock (R.), Impofteur. 180. HJiffedbahj Faulïe Divinité. 370. Hammonites ; Penfées de Mr. Delauny fur le Trai- tement que David leur fit, rapporté 2 Sam.Xlt. 30, 31. 303. Ce PalTage explique autrement. 306. 207, 308. Hardoum (Le P.) ; Voyez Ssmmeil. Havukfbee (Mr.), Voyez Expérience. Haye ( L* ) j Voyez Hollande. Henri VIL, Roi d'Angleterre; Efperance de Paix 6c de Profpérité fous ion Règne 3 vaine & illufoire. 280. Le Règne de ce Prince Se celui de fon Fils ont été des plus abfolus. Cependant ils ont jette eux mêmes les fondemens, fur lcfquels la Liberté' du Gouvernement a c'eé établie p'.us folideuient que inmais. 281. Henri VII l. , Roi d'Angleterre -, Règne abfolu de ce Prince ce comp'ai!ance fervile du Parlement pour H z fec T A fc L E D " E S .'.s volontez. i8?-a8<. Caufe de cette compiàï- [mcc.1^6. Jugement £ur fa croyance. 287. Voyez Henri VIL Hérodienh Voyez Foliiietf. Hildrop (Mr.)i Voyea B^«. H'mdoftan j Afte d'un Traité, par lequel l'Empereur de VhinJoftan cède au S<:6aA 2vW/> quelques Ter- ritoires de fes Erats. 80-84. Dommage que l'Em- pereur 8c {b Sujets fouffrirent depuis la Vi#< ire du Schah Nadir 5 & Nombre des Habitans de l'Empire qui pe'rirent depuis fou. entrée. £8, 89, Ind -îence de l'Empereur & de fes Minifrns mal- gré cela, Se étrange difpofition d'efurit des Ha- bitans. 8ç-$r. Bijlcire Naturelle; Elle offre tous les jours de îio'.t. veaux prodiges qui déconcertent les pius beaux Systèmes. 2? 2. H:llande ; Defcriptien de la Hollande , eu Etat pré-' fent des Provinces -Unies , contenant une Relation particulière de la Hâve, &c. 417. &> fuizi. H -me ( Mr. H. ) j Voyez Décifions. ', Edition de quelques -unes de fes Oeuvres en Latin Se en Anglais. Par Mr. P. Francis. 20;.» Ho/Ze IL 18. Sens attribué à ce Paifage. 245. Hudfcn {Baye de) ; Voyez Froid. Hum (Mr. ifr.Jj Voyez proverbes VII. 22, 23. Butcbefon (Mr. J.); Voyez Fhilofopbte. I. J A que s I«» Roi d' Angleterre ; Raillerie fur fun fujtt 182. 7. Avis qu'il lui donne. 8j, 86. Il part de Débit. 88. Portrait du Scbab Nadir. 91-99. Réflexions fur ion Caractère. 99-101. Deux Fils de ce Prince. 96, 97. Voyez Hindojtan. Nathan Ben SadUti Voyez Angleterre. normands ; Leur efprit de Liberté. 259. O. O înt ^ l'Eternel; Ce que ce Titre expri- me. 17. Oldcaflle (H.); Voyez Angleterre. Orthopédie (V) , ou l'Art de prévenir & de corriger dans les Enfans les dtjformittz. du Corps. Far Mr. Andry. 40J. Oudendorp (Mr.); Voyez Jules -Céfar. JL Aulement; Modèle ou Patron Original du Parlement Britannique. 257, 258. Adte de ce Parlement. 271. Faytusy Ils n'ont pas joint le Culte du Dieu d'I/ra'ét à celui de leurs Divinitez, & pourquoi. 16. Ferroquetj Hiftoire d'un Ferroquet. 237. dans la Note. Fbilofophie ; Infiitution abrégée de la Fhilofophie Mo- rale. Par Mr. F. Hutchefon. 20?. Quatrième Edition de ÏHifioire de U Fkilojophic de Stanley, 208. Filate ( ABes de). 369. Flatonh Voyez Xénophon. Fine cité. 325, 324. 39;. 404. Folitien \ Remarque fur là Verfion à'Hérodien, 169. matières: Tc'ype ; Extrait d'une Lettre de Mr. J. T. Groncvita fur cet Infcâe. 350. rr2gment d'une autre Lettre fur ce fujer. jfj. portrait du Scbab Nmir. 91 -99- Portraits des pius illuibes Pcrioanages de la Grande Bre:a:r.:. 21:. Prédicateur dormant, toi. Prédicateurs de tEgtifi Rmaixe critiquez. Igl. Proverbe VIL 22, 23. DijJ'ertation fur ce Paflage. Par Mr. Th. Hunt. 426. v/ITinqjjet (Le Père) critiqué. 131, 132. R. •t^ApiK (Mr.) cité. 270. 274. *86. Réformttion\ Voyez Frayée. La Réfirmation ré 'fer u ;«*>, #m B/p*y pour «»> ro«; /e; Proteflans 8cc. 430. ReLgtcn; Voyez 7*//i. La Religion Mofaiqae & la Chrétienté feules ont été fondée- fur une vcla:ion ante'Je'irc. 12. L'Auteur d'un Livre in- titulé, Lettres fur la Reltïion ejJenttelU à l'Homme, futé. 12S Dictionnaire Hïftorique de tomes les Rtligiêus . Hrokghton.i6i.& [M- L'Arti- cle Prefrytériens. 368. Sources où l'Auteur a put-. fé. i Richard IL , Roi tf AniUte-rr* ; Pvègn? Tirannique de Malhcuicux de ce 1 rince. 265 - 270. Rclli.i (>.;r.) cité. 390. 395. m V. u. cter.du ai >: et s 232. . :; VIII. 19-22. expliqué. 219. 241, 242. Rofée; O' tic Mr. -L. Stocke fur la - 2:: 5 i m u- TABLE DES MATIERES. y/olfy (Le Cardinale; Allégorie fur fon éléva- tion. 173- Hi/lolre de j* Vie & de fon Siècle. Par Mr. Grove. a 10 IVolJîon refuté. 136-133. X Enophonj Nouvelle Edition de fes Mémoi- res', en Grec Ôc en Latin. (Par Mr. Bolton Simp- fon. 19}-) 1 86. & fuiv. Editions de cet Ouvra- ge par Mr. Ernejii. 187. Xér.ophon & Platon ac« eufez, de ialoufïe. 202. Différence dans leur ma- nière d'écrire. 205. Fin de la Table. f