BIBLIOTHEQUE BRITANNIQUE, O U HISTOIRE DES OUVRAGES DES SCAVANS DE LA GRANDE-BRETAGNE: Pour les Mois D'AVRIL, MAY et JUIN. M. D C C. X L I V. TOME FINGT-TROISIEME, PREMIERE PARTIE. A LA HATE, Chez PIERRE DE HOXD T, M. DCC, XLIV, TABLE DES ARTICLES. Art. I. L* E m p i R E des Anglais dans l'A- mérique. Tome I. Seconde Edition. Pag. i. II. La SainîeBible,ou leffeux £f k Nou- veau Teflament ; avec un Cêmmen- taire Littéral compo/é de Nutes Codi- fies & tirées de divers Auteurs An- glois. Tome I. &Tome IL Part.L 36. III. Lettre à Mr fur V Abus qu'on fait des Termes de l'Écriture. 64. IV. Le Veau d'Or , ou Recherches Phyfico ■ Critico -Patbeoldgico- Mora- les fur la Nature âf l'Efficace de l'Or: avec la Relation des Mer" veilles du Miroir Pfychoptique , in- venté depuis peu par Joakiis Philander, Auteur de ce Li- vre. 83. V. Remarques fur une Brochure , où l'on prétend prouver que le Chrif- tianifme n'eil pas fondé fur des * 2 Preuves TABLE des ARTICLES. Preuves du refTort de la Raifon. Parle Dr. J. Leland. Pag. 104. VI. Lettre de Mr. B. à Mr conte- nant quelques Particularitezcurieu- fes fur Mr. Pocock Auteur du Volage en Égipte dont on trouve V Extrait dans le Tome XXII de ce Journal y Part. /, Art. III. 118. VIL Explication de Deutéronome XXIX. 29. 125. VIII. V Agronomie & la Chronologie des Dames. Par Mr. Jasper Charl- ton. Seconde Edition. 146. IX. Hifloire de V Ancien Paganifme , tel qu'il nous a été confervr par Eu- sebe, Êfç. 148. X. Lettre à Mr. Wareurton , où Von établit, contre le Sentiment de cet Auteur , la Foi de l'ancienne Eglife Juive touchant le Dogme d'une Vie à venir. L'on y a ajouté quelques Confédérations fur l'Ordre 9 donné à Abraham , de facrifier fon Fils Ifaac. 158. XI. Cinq Cens Articles concernant VA- griculture. Par Thomas Tus- ser. A quoi Von a ajouté des No- tes & des Obfervations. 193. XII. Hijlcire Naturelle de quelques OU féaux. Par George Edwards. 203. XIII. Nouvelles Littéraires; 213. BIBLIO- BIBLIOTHEQUE BRITANNIQUE, O U HISTOIRE DES OUVRAGES DES SÇAVANS DE LA GRANDE-BRETAGNE. Pour les Mois d A vril, May et Juin, MDCCXLIV. ARTICLE PREMIER. The Britifh Empire in America , containing îhe Hijhry ofthe Difcovery , Seîtlemeni , Progrcfs , and State of the Britifh Colo- ries , on the America. Vol. I. being an Account of the Country , Soil , Cantate , Producl and Trade of Neicfoandland , V$Wr England > New - Scotland , i\Va>- jTfltïi , New - ?>r/h' , Penfyhania , Ma- Tome XXIII Part.L A ryîand , 2 Bibliothèque Britannique , :ind , Virginia , Carolina , Gec^ Iiudfons-Bay. Second Edition, correc- and amende d. JVitb îhe continuation of tbe Hijlory and Variation in tbe State ; Trade of tbofe Colonies front tbe Tear j-io to the .prefent time. Including oc- tal Remarks , and moft feafibk and fui Metbods, for tbeir improvement ' fecurity. Jjmdon MDCCXLI. Prh> for J.'B , J. Clarke 6?c Ceft-à-dire: LE FAmérîq VWfloire : Dec verte, de ÎEtabliffement , des Progrès S âe VExat prefent des Colonies Angloifes. Tome L Ton trouve la Ûefcription du I Terroir , du Climat , des Productions £f C minerce de la Terre Neuve, de la Nouvelle Angleterre, de la : E- /r, de la Ni , de la î vellt Jerfcy , de la . . Ma- ry land , de la / . i Confine, la Géorgie , f$ de la Baye de Hudfon. Seconde Edition , revue li c C? des Chan rts arrhes dans la Confiituti dan? Avril, May et Juin. 1744, S ■ dans le Commerce de ces Colonies depuis. V Année 17 10 jufques à prèfent , £? di- ver/es Remarques fur la Méthode a plus1 praticable & la plus facile pour en ameil- lorer fcf pour en affurer la pojfeffwn. A Londres. Imprimé aux dépends de J-. Bro- therton , de J. Clarke en Duck-Lane, de A. IVard, de J. Clarke à la Bourfe, de C. Hitch , de J. Ofbourn , de E. IVick- fteed , de C. Bathurft , de Timoîhée Saun- ders , tj de T. Marris. MDCCXLL En grande, pagg. 567. fans compter la Pré- face , f Introduction , &f diverfes Cartes. PEndant que la Nation Britannique fe cou- vre de gloire par les généreux efforts qu'elle fait pour affurer la liberté de fon Commerce en Amérique, il eft naturel que les Etrangers , foient curieux de favoir, quelle eft l'étendue de l'Empire des Anglois dans ce nouveau Monde , & nous ne croyons pas pouvoir mieux y fatiffaire qu'en don- nant le précis de l'Ouvrage dont on vient de lire le Titre. Mr. Oldmixon qui en eft l'Auteur, le publia pour la première fois en. 1708, & depuis ce tems là, il y a fait des additions très confidérables, fur la foi de pluficurs Mémoires authentiques, qui lui ont été communiqués. C'eft de toutes les Relations que nous avons de l'Amérique Angloife, la plus exadte & la plus com- A 2 plette. 4 Bibliothèque Britannique, plette. Il feroit à fouhaiter que les autres Nations euffent des Hiftoires auflî abrégées & auflî fidèles de leurs Colonies. Comme nous ne fommes pas les maîtres, de nous étendre , autant que nous le fou- bâfrerions, & que nos Extraits doivent a- voir des bornes aiïez étroites, nous nous contentons d'indiquer ie Premier Volume de cette curieufeDefcription, & nous nous refervons à parler du Second, dans la Par- tie fui vante de ce Journal. Après une courte Dédicace, à Mr. Jo- nathan Blenman Ecuyer ce Procureur Géné- ra! ce la Barbade, l'Auteur expofe en dé- tail dans une Préface les foins qu'il s'eft donnés pour parvenir à une connoiffance exacte des Pais qu'il entreprend de décri- re, Un des principaux Négocians de Terre Neuve lui a fourni des Mémoires inftruc- tifs fur tout ce qui concerne l'état préfent de cette Ile. Il a pris dans l'Hiftoire écri- te par Mr. Mather ce qu'il y a de plus inté- reflant fur la Nouvelle EcbfTe. Il a puifé dans la même Hiftoire, dans la Relation de Mr. Neal, dans celle de Mr. Dummers & dans quelques Manufcrits non moins curieux & très authentiques ce qu'il nous apprend de la Nouvelle Angleterre. Aux lumières que le Capitaine Congreve lui avoit don- nées touchant la Nouvelle Yorck, il a ajou- té dans cette féconde Edition diverfes re- marques importantes tirées des Traités pu- blics. Meiïîeurs Docwra, Cox, & Pen , l'ont inftruit fur la Nouvelle Jerfey & fur la Avril, May et Juin. 1744. 5 laPenfylvanie. Quant au Maryland, il avoue qu'il ne donne ce qu'il en fait, que parce qu'il ne trouve rien de mieux, quoique dans le fond il ne voulût pas en être toujours ga- rant. Les Relations de la Virginie ne nous manquent pas. Mr. Oldmixon en a profité , furtout de celle du Colonel Bird, car il ne paroit pas faire grand cas des autres. Il doit aux Traités manuferics & imprimés de Meilleurs Archdaale & Boone ainfi qu'aux bontés de Mr. johnfton ci devant Gouver- neur de la Caroline tout ce qu'il produit de plus curieux fur cette Province. Ce font aufli les Mémoires de ce Gouverneur & les Papiers de la Société Royale, qui l'ont par- ticulièrement inftruit de certains détails fur la Géorgie. Le Journal de la Faftorie & ceux de quelques Gouverneurs de la Baye de Hudfon,font les principales fources où il a puifé tout ce qui regarde cette Contrée. En un mot, il n'a négligé ni foins ni peines pour s'inftruire & pour inftruire le public; & pendant vingteinq ans depuis la premiè- re Edition de cet Ouvrage, il a pris la pei- ne d'extraire tout ce qu'il a pu déterrer de meilleur dans les Livres & dans les Mémoi- res qui lui font tombés entre les mains. C'eft la Baye de Hudfon qui borne au Nord les Pofleflîons des Anglois dans le Continent de l'Amérique, & des extrémi- tés les plus Septentrionales de Terre Neuve jufqu'aux extrémités les plus Méridionales de la Géorgie, notre Auteur ne compte pas moins de iô à 1700 milles. Il y faut A 3 ajouter 6 BIBLIOTHEQUE BRITANNIQUE , ajouter la Baye même de Hudfon & un Pais fitcé le long de la Rivière de Mifiiflîpi, donc on ne parle point dans cet Ouvrage , parce que les Anglois n'y ont encore aucun établifTement, grâce aux traverfes que les François leur y ont fufeitées. Quoiqu'il fo'it facile de fe faire une idée du grand intérêt qu'a la Nation de protéger & d'afiurer fon Commerce en Amérique , il y a bien des gens en Angleterre qui regar- dent les Colonies qu'on y a fondées, com- me la ruine de la Grande Bretagne. Le peuple, dïfent ils, eft la richeile d'une Na- tion ; !a dépeupler c'eft l'appauvrir ; peu à peu l'Angleterre fe dégarnit, le nombre de fes habitans diminue, l'Amérique les en- glouti:, ce l'on fe trouvera épuifé, quand il n'y aura plus de remède. Notre Auteur a cru devoir confacrer une Introduction de quelques png'es à réfuter ces objections, plus fpécieufes à fon avis qu'elles ne font folidev 11 eft bien. vrai que le peuple fait la richeiTe d'une Nation ; mais il faut pour ciîa cjue e. pni'ple ait de rinduftrie,puifTe l'exercer & aime le travail. Tout homme qui gagne moins qu'il ne confume, eft à charge à toute perfonne qui confu- me ce - gagne , n'enrichit point fa pa- Si donc on prouve que quantité de bras ou îrru :il ou à charge à l'Angleterre, vent à .s'occuper utilement peur elle, nies qu'elle pofî ède en Améri- q , p] a prouvé par cela même que cls Colonies lui font réellement avantageu- ses 5 Avril, May et Juin. 1744. 7 fes , & qu'il elt heureux au Royaume de perdre une partie de fes habitans,puifqu'au lieu qu'il les nourrifibit ou fans profit ou à pure perte, il lui en revient un gain réel & effectif. Or c'eft ce que deux raifons en- tr'autres démontrent d'une manière fort fen- iible. Premièrement, la Grande Bretagne étant une Ile, ce n'efl que par le moyen de la Navigation qu'elle peut répandre au dehors ce que la Terre y produit, & ce que les Manufactures y donnent. Ce n'eft que par fes Flottes qu'elle peut fe faire con- fidérer des autres Nations , & fe rendre for- midable à fes ennemis. Mais comment les en- tretenir ces Flottes? Comment équiper beau- coup de Vaifleaux ? Comment les fournir ai- fément de matelots? Le meilleur moyen pour cela elt d'avoir un grand Commerce,de favo- rifer les Marchands, de protéger laNaviga- tion;&pour tout cela rien de plus efficace-,que de faire fleurir autant qu'on le peut les éta- bliflemens des Colonies. Le Commerce eft la pépinière des matelots , les matelots font le reffort de la Marine, la Marine eft à fon tour l'appui du Commerce, & rien ne fournit plus au Commerce que les Co- lonies. Secondement , on croit pouvoir démontrer qu'un habitant laborieux des Colonies de l'Amérique rapporte plus de profit à la Nation qu'aucun habitant du Royaume ne le peut en cultivant fes terres avec toute l'afliduité dont il eft capable. Selon les calculs du Chevalier Dalby , la Nation retire de fes Colonies à Sucre plus A4 de S Bibliothèque Britannique , de quatre millions de Livres Sterling par an , & en fuppofant qu'elles nourriffent foirante mille Blancs , ioic hommes foie femmes , foit petits enfans , chaqu'un de ces Blancs rapporte par tête à l'Etat foixan- te Livres Sterling, au lieu qu'à juger des chofes par le revenu des terres de la Gran- de Bretagne , à peine les habitans de ce Royaume rapportent ils douze Chellings par té:e l'un portant l'autre, de forte que les premiers donneraient cent trente fois plus que les féconds. Il eft vrai que de- puis le tems du Chevalier Dalby d'un coté Je nombre des Blancs s'eit co'nfidérable- ment accru dans les Iles Angloiiés de l'A- mérique, & que de l'autre le produit des vSucre«à eonfidérablement baifie à caufedes établiflémens des François. Cependant no- tre Auteur prétend qu'encore aujourd'hui chaque Blanc y donne par tête quarante fois plus que ceux'qifi s'appliquent à faire valoir les terres de la Grande Bretagne. Il entre Jà defius dans des détails très curieux. IL allure que la Nation achetoit autrefois an- nuellement des Portugais pour quatre cens mille Livres Sterling de Sucre , qu'elle é- pargne aujourd'hui & même bien au delà, vu le débit qu'elle fait au dehors des Sucres que les Colonies lui produifent. Il prétend qu'elle épargne plus d'un million par an fur ie Tabac. Il iniïfte fur la confommation qui fe fait des denrées de la Grande Bre- tagne dans les Colonies, fur le nombre im- rnenfe de bras que ce Commerce fait mou- voir, Avril, May et Juin. 1744. 9 voir, fur la multitude innombrable de bou- ches qu'il nourrit, fur les fommes prodi- gieufes qu'il fait entrer annuellement dans le thréfor & fur quantité d'autres confidéra- tions femblables, qui lèvent parfaitement, ou pour mieux dire , qui anéantiflent en- % tièrement la difficulté propofée. La Bar- bade feule, paye cinquante mille Livres Sterling par an à l'Echiquier , quoiqu'elle ne lbit pas feulement deux fois plus éten- due que le Comté de Rutland, & qu'un A- cre de terre cultivé y vaille à peine dix Cheliings. D'ailleurs quantité de raifons de politi- que fe joignent ici aux raifons d'intérêt , pour encourager le Gouvernement à pren- dre un foin particulier des établiffemens que la Nation a dans les Iles. Les revenus que la Couronne ce la Nation en retirent, fuflent ils beaucoup moins confidérables qu'ils ne le font en effet, il y auroit une imprudence extrême à n'en pas protéger le Commerce. Laiflbns parler Mr. Oldmixon lui même fur ce fujet. Ce qu'il en dit n'eft pas long & ne fauroit manquer de pa- roitre inttreiTant , du moins à bien des per- fonnes. „ Eft ce, dit ■ il , que la fituation de nos lies, Il favorable pour croifer le Com- merce des François & des Efpagnoîs en Amérique, ne doi: pas fumre pour nous engager à la confervation de ces Iles , ce pour y veiller même avec autant de foin aue lï elles nous fervoient de barrière P A 5 De io Bibliothèque Britannique, „ De quelle importance n'eft point la Bar- „ bade feule? Se pourrait il que nous fuf- „ (ions allez négligeas pour lalaiffer expo- „ fée à quelque invalion de la part des ,, François? Si après avoir tenté déjà plu- ,, fieurs fois de fe rendre maitres de cette 3, lu, ils y réufliiToient enfin, qu'en arri- „ verok il "P Bientôt la Conquête de toutes 3, les lies fous le Vent feroit la fuite de „ celle de la Barbade, & la Jamaïque mê- „ me ne tiendroit pas longtems. LesFran- „ çois partant du petit Guiave l'oblige- ,, roienc en peu de mois à fe rendre. En- ,, fuite la perce des Iles entraineroit infail- „ libîement ceile de nos Colonies dans le „ Concinent de l'Amérique, & nous per- „ drions par là les avantages infinis que 3, nous en recirons en Tabac, en Macs, en „ Bois de charpence 6c en tant d'autres ,, chofes néceiTaires aux Mariniers & à la }, Navigation. On fait que toutes ces Co- „ lonies à l'exception de la Virginie & du „ Maryland dépendent des Iles a de laja- ,, maïq'ue pour la pêche & pour la plufparc ,, des chofes néceflaires dans le ménage. „ On fait de même que la Nouvelle An- „ gleterre, la Nouvelle Yorck , la Nou- „ velle Jerfey, la Penfylvanie & la Caro- ,, Une ne font prefque point de Commerce ,, en droiture avec la Grande Bretagne , ,, que leur Commerce paile par nos Iles, 3) & qu'il nous en revient un très grand 3, profit. Tout cela tomberoit du même 53 coup , & en moins de rien le grand tiers ,, de Avril, May et Juin. 1744. Ji „ de la Marine de la Nation feroit ruiné. „ Il n'cft pas néceflaire de dire combien , „ nos Marchands , nos Manufacturiers , „ nos Ouvriers, nos Mariniers &c. en fouf- ,, friroient. Chaqu'un peut aifément s'en fai- „ re une idée... D'ailleurs, quel Porc „ nous refleroit pour entrer dans l'Améri- ,, que Efpagnole ? N'eft ce pas par le „ moyen de la Jamaïque que nous forilmès ,, toujours en état de traverfcr le Commer- „ ce des Efpagnols & des François P Cet- „ te Ile n'eft elle pas pour nous la Clé de ,, St. Domingue &de tout le Continent A- „ méricain ?.. La Guerre que la Nation ,, Britannique pouffe maintenant avec tant 5, de vigueur contre l'Efpagne dans cecte „ partie du Monde nous difpenfe de ré- ,, pondre à ces queftions. " L'Auteur ne finit pas néanmoins fans a- voir repréfenté à les compatriotes avec quelle vigilance les autres Nations travail- lent à maintenir leurs Colonies, folt au:c Indes Orientales , foit en Amérique. 11 faic en particulier de grands éloges du zèle oc. de ^activité des Hollandois a cet égal- ât peut-être ce qu'il dit des foins , des dé- penfes , & du fuccès des François pour af- fermir & pour étendre leurCommerce dans toutes les parties du Nouveau Monde, eft il encore plus véritable. Si les PuilTances Maritimes n'y prennent garde, la France leur coupera fi bien l'herbe fous les pieds dans toutes les Indes qu'elle s'attirera finalement tout leur Commerce, & ruinera leur Ma- rine , 12 Bibliothèque Britannique, rine, en détruifant peu à peu le Trafic de leurs Colonies , ou en le reduifanc à rien. Nous renvoyons malgré nous à l'Auteur même, ceux que l'amour du bien public anime encore allez, pour leur faire fouhai- ter de s'inltruire à fond fur ces matières. Il eft tems de commencer l'Extrait des Dé- tails où Mr. Oldmixm entre dans ce Vo- lume , fur chaqu'une des Colonies qui font nommées dans le Titre. I. La Nouvelle Founàhnd ou Terre pleu- ve eft la première de ces Colonies qu'il dé- crit. C'eft une lie auflî grande que l'Irlande, à peu près triangulaire, fituée entre le 46 ce le' 5-0 Degré de Latitude Septentrionale, & à environ 6co lieues de l'Angleterre. Se- baftien Cabot, que le Roi Henri VII avoit envoyé en Amérique, la découvrit en 1497 , quatre ou cinq ans après que Chriflophle Colomb eut découvert ce nouveau Mon- de, de forte que les Anglois font les pre- miers de tous les Européens qui ont fait des établiflemens dans le Continent de l'A- mérique. Ils négligèrent pourtant l'Ile de Terre Neuve. Les François & les Portu- gais s'en prévalurent. Mais enfin le Cheva- lier Humphrey Gilbert, demi frère du fa- meux Chevalier Raleigh, en prie pofTefïion pour la Reine Elizabeth en 1583 , & défen- dit aux autres Nations d'y pêcher. Il n'y fonda pourtant pas de Colonie. L'honneur en étoit refervé à un Marchand de Briftol nommé Jean Guy , qui en 1609 réufïït à former une Compagnie de Commerce dans cette Avril, May et Juin. 1744. *% cette vue, & qui arrivé en vingt jours de navigation à Terre Neuve débarqua à la Baye de la Conception, & y fit quelques habitations qui dans la fuite des tems fe font coniidérablement augmentées* Les François y firent auffi quelques établiflè- mens fur la Côte Méridionale , & peu s'en fallut qu'ils n'y ruïnaffent entièrement ceux des Anglois ; mais enfin ceux ci font reftés les maitres, & notre Auteur affure qu'il y a aujourd'hui environ fix mille âmes de la Na- tion. Quand les François occupoient la Partie Méridionale de Terre Neuve, la Vil- le de Plaifance étoit leur Capitale, & St. Jean celle des Anglois. A prélent tout obéit au même Maitre. Avec tout cela la France a (i bien manœuvré qu'en cédant tout ce qu'elle pofTédoit dans cette Ile , elle n'a prefque rien perdu , puifqu'elîe s'eft refer- vé la liberté de pouvoir y pêcher de la Morue , & même d'y dreflér des échafauts & des cabanes pour y préparer , fécher , faler , & encaquer le poiflbn fur les grèves de l'Ile depuis le Cap de Bonavifta jufques à la Pointe Riche, de forte qu'elle a confer- vé tout le profit qu'elle faifoit de la pêche & a laiiïe aux Anglois une Ville à garder qui leur coûte beaucoup & qui ne leur rend rien. Mr. Oldmixon fe plaint amère- ment du Miniflère qui fe prêta à un accord fi préjudiciable à la Nation. En effet toute la richeffe de Terre Neu- ve confifte dans la pêche qu'on y fait de la Morue. L'Ile eft couverte de monta- gnes, i4 Bibliothèque Britannique , gnes , de forêts impraticables , & de landes ïtériles , pluftot couvertes de moufle que d'herbe. Le fol n'en eft bon à rien. C'eft un fond mêlé partout de gravois de fable , & de pierres. D'ailleurs , quoiqu'il y fafle fort chaud en été, le froid y eft extrême en hyver à caufe des Vents qui y foufflent après avoir pafle fur les Montagnes de Neige &fur les Lacs glacés dont la Pointe Septen- trionale de l'Amérique eft remplie. Mais la Côte abonde en poiflbn , & la pêche de la Morue qui s'y fait prefque toute l'année depuis le Printems jufqu'en Oftobre,y donne un revenu très conlidérable. Cette pêche fe fait le long des Côtes , fur tout au grand Banc, qui n'eft ni un écueil ni un fable mou- vant, mais un terrein ferme mêlé de fable & de gravier qui a plus de 300 milles Angloi- fes du Nord au Sud & de 75 de large en quelques endroits. Il n'eft éloigné que de 20 lieues du Cap Race, & il eft toujours couvert de 20 à 25 braifes d'eau quand la Mer eft haute , de forte que les plus gros Vaifleaux peuvent s'y hazarder, à un feul endroit près ou ils périffent. C'eft là que fe pêche la Morue verte ou blanche , qui y eft en fi grande abondance qu'on ne fait que jetter la ligne & retirer le poiflbn qui s'y eft pris. Il n'eft pas fans exemple qu'un feul homme avec une feule ligne en pêche cent dans une heure. Aufli quoique prefque toutes les Nations de l'Europe y envoyent des Vaifleaux, & qu'il y ait telle année oli l'on y compte jufqu'à fix ou fept cens voiles, notre Avril, May et Juin. 1744. 15 cotre Auteur ne diiïimuie pas que les An- gîois y font un très grand profit, foie par la Troque, ou par l'échange des déniées . Auifi n'y a-t il guère mons de 70 miiie âmes dans cette Colonie IX. La Caroline fut déeouverte par les Espagnols en i>- 12 , nteis ceux c\ layjnt né- gligée, & les François qui s'y établirent en 1562 & 1564 fous Charles IX, n'ayant pu s'y maintenir, Charles II Roi d'Angleterre penfa à en prendre poiTefiion , & à proté- ger ceux de fes fujets que la cruauté des In- diens de la Virginie & de la Nouvelle An- gleterre avoit obligés de s'y réfugier en 1622. On l'appelioit la Floride Françoife, mais Charles lui donna le nom de Caroline & en céda la propriété en 1663 à quelques Seigneurs , entre lefquels étoit le Lord Affî'ey, depuis Comte de Schaftsbury & Grand Chancelier d'Angleterre , qui aidé du fameux Locke en drefla les Configu- rions & lesLoix, parmi lefquelles il y en a de très remarquables, foit à l'égard de la Religion, foit à l'égard du Gouvernement, témoin l'Article 80 qui eft couché en ces termes , La multitude des Commentaires aujjt bien que celle des Loix , étant Ju jette à de gr wcontoénimr9 toute forte de Commentaires ou d'Explications des Loix fondamentales de la Ca- roline efi entièrement défendue; témoin enco- re l'Article 06 qui ftatue entr'autres chofes, qûefeptrperfonnes d'accord dans leurs fenti en matière de Religion [affront peur former une Congrégation ou uns Eglife à laquelle ils feront tenus Avril, May et Jutk. 1744. 31 tenus de donner un Nom pour la difiinguer des autres. La Caroline elt îituée entre les 31 ci 30 Degrés de Latitude Septentrionale. Le climat en cft admirable & rép nd à ce- lui de la Terre de Canaan. Elle a au Weft & au Sud la Floride, au Nord la Virginie & à l'Eft la Mer du Nord. Il n'y a point de Pais plus fertile, il n'y en a point de plus commodément placé pour la naviga- tion à caufe du grand nombre de Ri v ères qui l'arrofent de proche en proche. Char- les -Town qui en elt la Capitale & le feul Port Franc du Pais, eft une des plus pro- pres & des plus jolies Villes de l'Amérique. On y trouve de beaux édifices, une Biblio- thèque publique &plus de3coo âmes. Tou- te la Colonie en contient au delà de 12000, & n'aura jamais rien à craindre félon notre Auteur ni de la part des François établis dans le miférable Pals du Mifliffipi,ni d'au- cun autre coté, pourvu qu'on la protège, comme on le peut aifément. I a Cour en racheta la propriété en 1728 à Pevception d'un huitième que Miîord Carteret s'efteon- iervé à lui & à fes héritiers après lui. C'efi dans ces derniers temps que le Colonel Pur- ry Neuchntelois s'établit avec plufieurs fa- milles de Strifle fur la Rivière deSavanah& y fonda la Ville de Purrysburgh. Elle eft allez bien bâtie, & contient près de cent maifons. Comme on trouve dans la Caro- line quantité de Meuriers blancs, on a ef- fayé d'y nourrir des Vers à foie, ce qui a bien réuftî. Les autres marchandifes qui 3« Bibliothèque Britannique , qui y entretiennent le Négoce, font outre les Denrées les Grains de toute efpéce & d'excellens Vins, des Pelleteries, du Co- ton, de l'Indigo, du Tabac. On y appor- te d'Angleterre les marchandifes qui y man- quent & qu'on y échange contre ces produc- tions naturelles". Du reftela Colonie a auiTî Tes YailTeaux qui fréquentent toutes les Co- lonies de la Côte, ce les Iles Antilles, & qui viennent jufques dans Londres. On compte que par communes années, il vient plus de vingt Vaiileaux de la Caroline dans la Tamife, qu'il en part de Charles -Town plus de foixante pour divers endroits de l'Afrique & de l'Amérique, & que l'on y en charge plus de 2co de toutes fortes de Denrées, furtout de Ris dont la Grande Bre- tagne reçoit par an pour au delà de qua- trevmgts mille Livres. Outre cela les ha- bitans de cette Colonie trafiquent beau- coup avec les Apalachitcs, Peuples Indiens qui habitent aux extrémités de la Floride vers les Monts Apalaches, ce qui îeurfournif- fent par voie d'échange les plus précieu- fes Fourrures , quelques Gommes aromati- ques, & d'autres marchandifes encore. X. Au Sud de la Rivière de Savanah, fur laquelle eft Purryfburgh , efl la Géorgie. Cette nouvelleColonie,ainC nommée à l'hon- neur du préfent Roi de la Grande Bretagne qui l'érigea en Province en 1732 , s'étend le long de la Cote en droite ligne par delà 70 milles depuis la Caroline jufqu'à la Rivière d'Alatamaha qui la féparede la Flo- ride • Avril, May et Juin. 1744. 33 ïide Efpagnole , & dans les terres jus- qu'aux Monts Apalaches qui font bien à 300 milles de la Mer. Les foins du Géné- ral Oglethorpe, & les contributions géné- reufcs de plufieurs particuliers y ont déjà fait des établi fiemen^ aflez considérables. Outre la Ville de Savanah que ce GénéraL fonda fur !a Rivière de même nom dès le mois de Février 1733 , & qui avoit déjà près de 140 maifons en 1740; environ cent cinquante EcofTois s'établirent en 1735 à douze milles de la Mer fur la Rivière d'A- latamaha, donnèrent à leur Colonie le nom deDarien,&y bâtirent un petit Fort qu'ils appellerait Frederica ce qui en Avril 1736 étoit déjà achevé. A peu près dans le mê- me temsune Peuplade de Sakzbourgeois fè fixa au defius de Savanah dans un lieu qu'ils nommèrent le Nouvel Eben Ezer par op- polirion à l'endroit où ils avoient d'abord planté leurs habitations, & auquel ils laiflé- rent le nom de Vieux Eben Ezer. D'au- tres commencèrent la Ville d'Augufta au déflus du Nouvel Eben Ezer; & fans doute la Colonie naiiTante le feroit étendue bien d'avantage, fi le Général Oglethorpe avoii eu autant de fuccè3 dans fon expédition contre le Fort de St. Auguftin la principale Place de la Floride , qu'on allure que le fameux Whitfteld en a dans la Million qu'il a entrepriîè de ces corés là. Quoi qu'il en foit, on peut véritablement confi- dérer la Géorgie comme le rempart de la Caroline. Il n'y a de Charles-Town à Sa- Tontc XXIIL Part. /. C vnDar\ 34 Bibliothèque Britannique, vanah en ligne directe que vingt à vingt- cinq lieues, & de la même Ville à St. Au- guftin que cinquante. La Nation ne fauroit faire trop d'efforts pour pouffer Tes établir* femens dans une Tolonie, quiefl pourainfi dire à laporte du Mexique, & d'où il lui feroit fi facile de brider les Miffiffipiens. D'ailleurs la Géorgie eft en état de fournir de fon cru les mêmes richeffes que la Ca- roline. Quelques Vaudois y ont déjà nourri des Vers à foie, & avec tant de fuccès, que la foie qu'ils ont filée, a été jugée à Londres par les experts fupérieure en beauté même à celle que l'Italie fournit. XI. Il ne nous refte plus qu'à dire un mot fur la Colonie de la Baye de Hudfon qui eft la partie la plus Septentrionale de l'Améri- que Angîoife. Le Capitaine Martin Fro- bifcher qui cherchoit un paffage par îe Nord-Oueft pour aller à la Chine en 1576, fut le premier qui découvrit la Terre de Labrador, où il efïaya en vain déformer quelque çtabïifiement. Six ans après, fa- voir en 1585, il pouffa plus avant, mais revint de même fans fuccès. En 1607, 1608, 1610, & itfn, Hudfon pénétra jufqu'au 80 Degré & même cent lieues au delà, mais il périt dans ce dernier voyage, en laiffant fon nom au Détroit & à la Baye qui le por- tent. La même année 161 1 'le Chevalier l'hoir as Button pouffa encore plus loin que Hudfon vers le Sud Oueft , découvrit je Nouveau PaVs de Galles, donna fon nom à la Baye de Button , paffa l'hyver dans un Port £vril, May et Juin. 1744. 3f Port qu'il appella Nelfon, & revint à l'Ile de Dig. Ce ne fut qu'en 1667 9ue deux François qui avoient été en Canada , con- duifirent un Vaifleau Anglois jufqu'au fond de la Baye de Hudfon. Une Compagnie érigée en 1670 par Charles II y établit a- vec bien de la peine quelque Commerce de Pelleteries en cinq endroits diférens, favoir fur la Rivière d'Albanie, dans l'Ile de Hayes, fur la Rivière Robert ainfî appelléedunom du Prince Robert le Chef des Intéreffés à la nouvelle Colonie, au Port Nelfon & au Nouveau Severn. Mais en 1686 les Fran- çois craignant pour leur Négoce de Cana- da chaflerent les Anglois de la Baye , où malgré des efforts continuels & tantôt heu- reux tantôt malheureux, ils ne font pleine- ment rentrés qu'à la Paix d'Utrecht. Il faut que les profits de ce Commerce foienc confidérables , puifqueni les périls incroya- bles de la navigation dans cette Baye ni le froid & la ftérilité extrêmes de ce mauvais Païs n'ont pas rebuté la Nation d'y tenter & d'y affermir Ces établiffemens. Mr. Old- mixon avoue pourtant que la Compagnie étoit fort déchue il y a quelque tems, par la décadence du Commerce des Poils de Gaftor; mais comme il n'a pu parvenir à avoir des Mémoires fûrs touchant fon état préfent , il s'arrête aux Articles 10 & il du Traité d Utrecht. C 2 ARTICLE 3 6* Bibliothèque Britannique ^ ARTICLE II. La Sainte Bible, ouïe Vieux & le Nouveau Teflament ; avec un Corn- ment aire Littéral compofè de Notes ChoU fies & tirées de divers Auteurs Anglais. To. I. contenant le Premier Livre de Mo'ife, ou la Genèse. A h Haye chez Pierre Paupie. 1742. Avec Privi- lège de Nos Seigneurs les Etats de Hol- lande & de Wcfl'Frife. To. II. Pre- mière Partie , contenant le Second Livre de Moïfe , ou l'Exode. 174.3. C'eil un in quarto $ dont le I. To. contient 416 pp. & 158 pour le Difcours Préliminaire , & la Préface ; & le II. 386 , & 24 pour Y Averti/Je- nient & les Préfaces. QUoique cet Ouvrage n'ait pas été im- prime en Angleterre, il n'en efh pas •moins du reflort de ce Journal. La Traduction des Livres Anglois fait nécef- fairement partie de l'Hiftoire Littéraire de la Grande-Bretagne; puis que ce n'eft au- tre chofe que les Penfées des Savans de cette Nation , exprimées dans une autre langue. D'ailleurs , comme on ne traduit que les Livres dont on fait cas, il elt vrai de dire dans ce fens qu'une Traduction fait toujours AtfRiL, May et Juin. 1744. 37 toujours honneur à fon Original: or tout ce qui tourne à l'avantage des Auteurs An- glois, ne paflera jamais pour étranger à cet- te Bibliothèque. Ajoutez à cela qu'il y a un grand nombre de Livres en Angleterre, antérieurs à la datte du commencement de ce Journal , & dont par cela même on n'a point eu occafion de parler: quand donc on vient à ies traduire dans une autre langue , ce n'efi: pas nous écarter de nôtre plan que d'en rendre compte dans un Ou- vrage ou Ton fe propofe de faire connoitre les bons Livres Anglois. Mais outre ces raifons générales, il yen a qui regardent ce Commentaire en particulier. A en juger par le plan de l'Auteur, il doit pafler pour un Ouvrage purement Anglois, dont les di- vers morceaux répandus dans les Livres de grand nombre d'Auteurs de cette Nation, Fe trouvent ici réunis pour la première fois. Il ne veut puifer que dans ces fourecs , pour en faire une Compilation, qui, ayant toutes les grâces de la nouveauté , mérite par conféquent bien d'occuper ici un Arti- cle. Entre les Auteurs, dont on fait ufage, Patrick tient le premier rang. On le tra- duit prefque entièrement , fans s'aftreindre pourtant à emprunter de lui ce qui a été mieux exprimé par d'autres, ou à le fui- vre fcrupuleufement dans l'expofition des rêveries creufes des Rabbins, ou à rendre en François jufqu'aux fautes qui lui font échappées. Viennent enfuite JVillet; Ains- C 3 rtb • 3$ Bibliothèque Britannique, ivortb; la Bible Angloije avec les Notes de divers Théologiens que le Parlement char- gea de cet Ouvrage en 1640; Polus; Kid- der; Henry; Parker; JVels', Pyle; Wall; Stackbouje dans fa Nouvelle Hiftoire de la Bible; Pocock; Hammond; & Lowtb. On a auiïî mis à profit les Remarques Criti- ques de divers Ecrivains Modernes, tels que font UJJerius , Prideaux , Ne-vcton , Sbuckford, Bcdford, Selden, Spencer , Alede , Dougtée ,Wbitby , JVaterland , les Lectures de i?o}7? , Lrcw , Delany, Cbandler, Sber- lock9 & Y Hiftoire Univerjèlle . Dans le Se- cond Volume l'on s'eft fervi de- divers Au- teurs , dont il n'eft fait aucune mention dans le Premier. Les principaux font l'Ou- vrage du Dr. Arbutbnoî fur lesMonnoyes, les Poids & les Mefures des Anciens"; & celui de Cartwrigbt. Quelque vafte que fbit le champ dans le quel nôtre favant Auteur fe propofe de glaner , il me femble qu'il auroit dû lui donner encore plus d'étendue. En s'aftrei- gnant à puifer principalement dans les E- crivains Anglois, il devoit fe conferver la, liberté de faire ufage de ce qu'il trouveroit de bon chez les Etrangers. Quoique le bon fens & la faine Critique régnent en Angleterre autant & plus que dans aucun endroit du Monde, les autres Nations ont aufli leurs Savans , qui ont répandu beau- coup de jour fur nos Ecrits Sacrés. Pour- quoi donc fe faire une Loi de ne point met- tre à profit leurs découvertes? Si tous les Critï- Avril, May et Juin. 1744. 39 Critiques Anglois ont mal-enrendu un Paf- fage ; & qu'un Etranger en ait donné le vrai fens, laiffera-t-on le Le&eur de ce Commentaire dans Terreur , parce qu'on s'eft trompé en Angleterre? Cela ne feroit pas raifonnable. Je voudroia donc qu'on confultât les Critiques de toutes les Na- tions; & qu'on ne fe fît aucune peine de les afîbcier aux Anglois , quand il eft vifî- ble qu'ils ont mieux réiifli qu'eux. 11 fem- ble que nôtre judicieux Compilateur ait fenti la néceffité d'altérer un peu fon pian à cet égard. On voie, du moins, au bas des pages du Second Volume les noms de di- vers Auteurs étrangers à la Grande-Bretagne. Peut-être s'affranchira-t-il dans la fuite en- tièrement du joug qu'il s'eft impofé ; c'eftà quoi nous ne faurions aflez l'exhorter. Il n'eft pas apparent que cela augmente beau- coup fon travail,* puis qu'on s'apperçoit fans peine qu'il ne laifTe pas de confulter ces Commentateurs & ces Critiques qu'il ne nomme point. Il eft obligé de le faire, tant pour remonter aux fources où puifent fouvent les Ecrivains Anglois , & vérifier leurs Citations,* que pour fe procurer à lui même de plus amples éclairciflemensiqu'eft- ce dbnc qu'il lui en couteroit de faire ufa- ge de leurs penfées, en les nommant, lorf- qu'elles font différentes de celles- des Au- teurs qu'il fuit? Nous aurons, peut-être, occafion de faire voir, dans la faite de cet Extrait, par queîques exemples , la né- ceiïîté de cette méthode ,* mais avant que C 4 d'en 40 Bibliothèque Britannique, d'en venir là, il eft à propos de faire con» noitre plus particulièrement la nature d# l'Ouvrage. ]l y a trois chofes principales qui méri- tent nôtre attention: le Dijcours Prélimi- naire, avec les autres Pièces qui en dépen- dent ; le Texte, & la manière dont on la difpofé; enfin les Notes, ou le Commen- taire proprement ainfi dit. L'Auteur nous apprend lui même, (a) que „ le Dijcours Pré- „ liminaire eft compofé de deuxPiéces difFé- 3, rentes qu'on a crû devoir réunir en un 3, corps. La première eft une Traduction 3, de la belle Introduction que Mr. Slack- 3, houfe a mife à la tète de fa Nouvelle Hij- 3, toire de la Bible de l'Edition de 1740 en 3, deux Volumes in folio. On en a retran- 3, ché quelques endroits qui ne pouvoient ,, intéreiTerque des Lecteurs Anglois;mais 3, on y a ajouté quelques morceaux tirés ,, de YHifloire des Juifs du Dr. P rideaux & 3, des Antiquités Judaïqîies de Mr. Lewis La „ féconde Pièce eft la favante Préface, „ dont le célèbre Mr. V Enfant avoit en- 3> richi l'Edition de la Bible de Mr David 3, Martin , faite à Hannover & à Leipzig in 3, Svo. en 1728. " Le but général de ce Dijcours eft de dé- fendre la Vérité & l'Autorité, la Perfection, & l'Excellence, l'Antiquité & le Stiïe de l'Ecriture contre les injultes attaque* des In- crédules ; & de fixer le' Nombre & indiquer Je Sujet des divers Livres qui compofent cet incom (a) A vert, p. 4. Avril, May et Juitf* 1744. 41 incomparable Recueil. Pour cet effet, a- près avoir fixé le fens du terme de Révéla- tion 9 on en fait voir la pqffibilité , Improba- bilité, & la nécejfité. Ces principes étant pô- les, l'on examine la Nature de VLypiration; ai l'on indique les 1 aractères auxquels on peutconnoitre qu'une perfonneeftinfpirée, pour en faire enfuite l'application au Légis- lateur des Juifs, & à leurs Prophètes. De là , on pafle à la manière dont le Canpn des Livres du V. Teftament fut formé par Ef- dras fous la direction de l'Efprit de Dieu ; & l'on montre qu'il n a fouffert depuis lui aucune altération considérable. Le Stile & la Méthode des Ecrivains Sacrés ayant eu le malheur de déplaire aux Incrédules Moderaes,on fait diverfes réflexions pour les juftifier de tout reproche à ces deux égards. Il étoit naturel dans un Ouvrage comme celui ci de dire quelque chofe des Verfions auiTi parle-t-on de celle desLXX, de la Syriaque , de celle d'Aquih, des Tar- tans , de l'Italique & de la Vulgate. Enfin, vient la Préfaça de Mr. L'Enfant qui traite de chacun des Livres de l'Ecriture Ste. A la fuite de ce DiJ cours Préliminaire 9 l'on a ajouté une Préface fur le Pentateuque en général, & fur la Genèfe en particulier. L'Auteur s'y propofe de prouver queMoife a ccritles cinq Livres qui portent fonnom. Les principales raifons qu'il en allègue; c'eft que ce Chef des Ifraciites fe donne pour en être l'Auteur; que les juifs ont, conilaram entreconnu qu'ils étoientfon Ou- C 5 v rage; 42 Bibliothèque Britannique, vrage,- qu'il eft impoflîble qu'on ait pu fuppofer un tel Livre ; & qu'on n'y trouve rien qui donne lieu de croire qu'on l'ait falfifié malïcieufement depuis qu'il eft for- ti des mains de ce Législateur. Ce qu'on y dit touchant la GenéJ'e n'eft pas fort éten- du. L'on en examine le Sujet & le But; l'on recherche le Tems dans le quel elle a été écrite; on fait l'éloge de fon Stile; enfin on fixe la Chronologie des principaux événemens qui y font rapportés. Cette Préface eft tirée du Pentateuque que le fa- vant Evêque Kidder publia en 1694,' de la Bibliothèque de la Bible du Dr. Parker , qui parut en 1720; des Ouvrages de Mrs. Jeu- Un , Prideaux , JVels & Lewis ; enfin , des Annales à'UJj'eriuï , dont on a exactement fuivi la Chronologie. La Préface particu- lière fur Y Exode eft écrite dans le même goût. Il auroit été à fouhaiter que l'Au- teur fe fût attaché dans cette dernière à nous donner une idée auffi exacte qu'il eft poffible de l'état des Ifraëlites en Egypte. Les remarques générales, qu'il auroit faites fur ce fujet, répandroient un grand jour fur tout ce Livre, qu'on auroit lu avec plus de fruit. Les détails , où l'on eft obligé d'en- trer fur des matières de cette nature, font mieux placés dans une Préface que dans le Commentaire même, oîi il faut nécef- fairement fe refierrer. C'eft par la même raifon que je fouhaiterois que, dans celles qu'on mettra à la tête des Livres fuivans, on donnât une idée jufte de la Police & du Gouver- Avril, May et Juin. 1744. 43 Gouvernement des Hébreux , de même que de leur Culte Cérémoniel , tels qu'ils furent établis par Moïfe. Il feroit mê- me à propos que dans celles fur les Juges & fur Samuel, Ton prît foin de faire remar- quer les altérations qui fe firent dans le Gouvernement de cette Nation. Il nous rei'ce à parler d'une dernière Piè- ce particulière au Commentaire fur Y Exode : c'eft la Table des Mej lires , des Monnoyes9& des Poids , qui étoient anciennement en ufa- ge parmi les Hébreux. Elle eft tirée du Li- vre que le Dr. Arbuthnot a écrit fur cette, matière. Mais comme ce favant Médecirï n'en a fait la réduction qu'aux Mefures, aux I Monnoyes & aux Poids d'Angleterre, fes Tables toutes feules n'auroient pas été d'u- ne grande utilité hors de la Grande-Breta- gne. Il étoit donc queftion de les rendre, d'un ufage plus univerfel en les réduifant à celles de France & de Hollande. „ Dans „ ce qui regarde la France, dit notre judi- „ deux Auteur, (a) on s'en eft rapporté 3> aux évaluations du favant & laborieux ,, Dom-Calmet... Pour ce qui regarde la yJ Hollande, on a eu le bonheur d'être aidé „ des lumières d'un Homme des plus ver- ,, fés dans tout ce qui appartient àlaScien- „ ce des Nombres , & que fes Ecrits ,, ont déjà rendu célèbre non feulement „ dans les Journaux Littéraires , mais en- s, core dans les Mémoires d'une desprémiè- >i res (btioibtauc p. 173, où le nom de ce Seyant le trouve. .Avril, May et Juin. 1744. 45* cimes: à celles de Londres, un Pied , neuf Pouces & 888 décimes: enfin, à celles de Hollande , un Pied de Rhinland, neuf Pouces & 189 décimes. Les Tables des autres efpéces de Mefures , de même que celles des Monnayes & des Poids , font fai- tes de la même manière. En parcourant celles des Monnoyes on s'apperçoit bien- tôt qu'il y manque une chofe , fans la quelle il n'eft pas poflible de fe former une idée jufte de la Valeur des Monnoyes d'Or: je veux parler de la proportion qu'il y avoit entre l'Argent & ce Métal. Mais c'eft là un point fur le quel il n'eft pas poffible de rien dire de fixe; par ce que cette propor- tion n'a pas toujours été la même , y ayant eu autres-fois , tout comme aujourd'hui , beaucoup de diverfité à cet égard. L'Or en effet a été, & eft encore, une efpéce de marchandife qui haufle & baille de prix félon les circonftances. Il faut donc s'en prendre à la nature du fujet , & non à neu- tre Auteur, s'il ne nous donne pas là def- fus toutes les lumières que nous délire- rions. La Verfion Françoife de là Bible, donc on a fait choix , eft celle de Mr. David Martin, Elle méritait cette préférence , nous dit on, par ce qu'elle eft comme confacrée par Vufage public qu'on en fait dans le Service Di- vin \les Eglifes Wallonnes. Toute confacrée que foit cette Verfion , elle a un grand nombre de défauts, qui en font défirer de- puis long-tems une nouvelle. Il eft fâ- cheux 4<5 Bibliothèque Britannique , cheux.qu'il ne s'en foit pas trouvé une meil- leure pour fervir de Texte à cet excellent Commentaire. Elle auroit épargné à fon Auteur un grand nombre de Notes , dcfti- nées uniquement à relever les fautes du Traducteur. Mrs. les Pafteurs & Profef- feurs de Genève nous en promettent une depuis plufieurs années. Je ne fais fi ce travail eft fort avancé: il eft, du moins, certain qu'ils n'ont pas publié leur Traduc- tion du Nouveau Teftament aufli prompte- ment qu'on fe l'étoit imaginé. Mais c'eft le fort de tous les Ouvrages auxquels des Sociétés de Savans , tous indépendans les uns des autres, travaillent. Rarement pa- roilTent ils auffî tôt qu'on les fouhaiteroit. Comme il y a plufieurs Editions de la Bible de Mr. David Martin , nôtre Auteur s'eft déterminé pour celle in folio, dont il a copié fidèlement le Texte , qui fe trou- ve toujours au haut de la page , où font les Notes qui lui fervent de Commentaire. L'unique changement qu'on s'eft permis à cet égard, en regarde la difpofition. Au lieu de recommencer la ligne à chaque Verfet, on n'alaiilé qu'autant & Alinéa qu'il en falloit pour répondre à la divifion des Chapitres telle qu'elle eft énoncée dans cha- ue Sommaire. ^ Perfonne n'ignore que les PaiTages Parai - *elles de l'Ecriture s'écîairciflenc récipro- quement les uns les autres. C'eft donc un grand avantage que d'avoir une Edition de la Bible , où ils foyent marqués exacte- ment. .Avril, May et Juin. 1744. 47 ment. Mr. Martin en a indiqué plusieurs , qu'on a eu foin detranfcrire ici. Maiscom- me ils ne font pas toujours exacts , & qu'il en a omis un grand nombre, on auroit, fans doute, vn avec plaifir que nôtre favant Auteur eût remédié à ces deux défauts. Il n'a cependant pas jugé à propos de le faire directement de peur d'augmenter fon tra- vail; mais il y a fuppléé d'une autre ma- nière, en faifant ufage dans les Notes des principaux Paflages Parallelies qui pou- voient fervir à réclairciffement du Texte; ce qui, au fond , revient à la même chofe. A côté du Texte , on trouve toujours l'Année du Monde & celle avant Jéfus Chrift, qui répondent aux Faits dont il y eft fait mention. Ces Dattes contribuent beaucoup à éclaircir la partie Hiftorique de l'Ecriture Sainte. Il n'eft prefque pas néceflaire de dire que la Chronologie qu'on afuivie pour cela, eft celle d'Uflerius. On n'a pas négligé , pour vérifier les Calculs de ce Savant, de faire ufage de ce qu'ont écrit Mrs. Wels ScBedford, fur tout de l'Ou- vrage de ce dernier. Les Notes font la partie la plus confidé- rable de l'Ouvrage: c'eft auffi de quoi il eft important de rendre un compte éxacl à nos Lecteurs. Je commence par les Som- maires , ou Argwnens , qui fe trouvent à la té e de chaque Chapitre-, que je ne fais pas difficulté de regarder comme faifant partie des Notes. Mr. Martin en avoit mis dans fon Edition de la Bible; & Mr. Ojhrvald en 48 Bibliothèque Britannique, en a auflî publiés à part avec des Réfléxi Ceux qu'on trouve ici, ne font copiés ni de l'un ni de l'autre; mais compofés de nou- veau avec un très grand foin. Us contien- nent une Analyfe plus exacte & mieux dé- veloppée de ce que chaque Chapitre ren- ferme. Tranfcrivons un de ces Sommaires, pour fervir de preuve à ce que nous venons d'avancer. Celui du X Chapitre de la Ge- néj'efe préfente à l'ouverture du Livre. Voi- ci ce qu'on y lit. „ Ce Chapitre eft confi- „ dérable par plus d'un endroit. Non feu- „ lement on ne connoit point de Monu- „ ment auflî ancien & aufîî autcntique de „ l'Origine des Peuples, il fert, outre ce- ,, la, à nous inftruire des foins de la Pro- „ vidence dans le Gouvernement du Mon- >5 de & del'Eglife; à conflater la diftinc- „ tion perpétuelle de la Famille oh le „ Chrift devoit naitre ; à vérifier la Pré- „ di&ion de Née touchant les deftinées de „ fes trois fils ; & à éclaircir diverfes Pro- „ phéties poftérieures , ainfi qu'on le ver- „ ra dans la fuite. I. Après avoir répété ,, les noms des fils de Noè\ vf. i. II. Moïfe ,, race la Généalogie de Japhet, vf 2—5. ,, III. Enfuite celle de Cam9 vf. 6—2' ,, IV. Enfin celle de Sem9 vf 21— 31. V. „ D'où il conclut que tous les Habitansde „ la Terre font fortis de la même Tige, „ vf 32. " Pour ce qui eft des Notes , proprement ainfi dites, voici ce que le judicieux Au- teur de ce Commentaire cous en apprend foi .Avril, May et Juin. 1744. 4$ lui même dansfon Avertjffement. ,, Enrap- ,, portant les différences explications dé „ ces Auteurs (Anglois), fo^t Interprètes a) foit autres , fans prétendre les adopter ,, ou s'en rendre reipônfable, 1. on a „ foin de les arranger de manière que des „ Lecteurs attentifs pourront voirfanspei- „ ne celle qu'on préféreroit,fi l'onétoitap- „ pelle à dire l'on fentiment. 2, Quand ,, la matière demande quelque difculfion, „ Ton tâche de comprendre fous des Chefs 3, généraux & diftincts ce qu'on doit prin- 3, cipalement y obferver, & l'ordre qu'on ,, doit y tenir." 3. On évite , autant qu'il „ eftpoffible, tout ce qui pourroit fentir ,, la Controverfe & écarter du fens lkté- 3, rai, fans s'interdire néantmoins les ré- „ flexions morales qui paroiflent venir à „ propos au fujet. 4, Lorfque l'Auteur „ ou les Auteurs dont on fait ufage , le 3, trouvent déjà traduits en nôtre langue, 3, on fe fert de ces Traductions. . . , ou fi l'on „ eft obligé d'en ufer autrement , on aura „ foin d'en avertir, j. On eft dé même 3, attentif a indiquer les Editions des Ou- ,3 vrages & des Traités particuliers, donc 3, on a pris quelques Notes. 6. Et pour 3, ce qui eft enfin des Citations faites foie „ par les Commentateurs foit par les Au- 3, teurs dont on fe fert , quoiqu'on les laif- 3, fe fur leur compte, on s'oblige néant- ,3 moins à les vérifier quand on le pourra j, & qu'on aura les Livres mêmes dont elle „ font tirées. " Tome XXIII. Part. I. D Ce 50 Bibliothèque Britannique, Ce que l'on vient de lire fait aifément comprendre , que ce Commentaire n'eft ni une Traduction ni un Ouvrage abfolument neuf. C'cft proprement un Recueil de ce que les Anglois ont dit de meilleur pour l'intelligence de l'Ecriture , que l'Auteur a digéré & s'eft rendu propre, pour l'expo- fer enfuite dans un bon ordre, en emprun- tant quelques-fois les termes mômes de l'E- crivain qu'il fuit, & en l'exprimant d'au- tres-fois à fa manière. Cela feul fait fentir toute la difficulté de ce travail. D'un cô- té, il exige une grande lecture, pour cher- cher dans une multitude d'Auteurs l'expli- cation qu'ils ont donnée , je ne dirai pas de quelques morceaux de l'Ecriture, mais fou- vent d'un feul Paflage, qui fe trouve com- me enfévelie fous un tas d'obfervations é- trangère> , & ou l'on ne foupçonneroit pas qu'elle fut renfermée. Il faut enfuite avoir une grande netteté d'Efprit, pour faiûr ces différentes explications , qui ayant quel- ques-fois beaucoup d'affinité entr'elles ne iaiiTent pas de différer à certains égards; $ pour leur donner, en les exprimant fur le papier , l'ordre & l'arrangement le plus convenable. Enfin, il eft néceilaire d'avoir du goût à. du difcernement , pour faire choix de ce qu'il y a de plus vraifembla- blc & déplus judicieux, dans tant d'Ou- vrages ou le faux & le mauvais fe trou- vent mêlés avec le vrai & le bon , & où permi des réflexions folides il y en a un fi ârand nombre de puériles & d^anuyantes. A tUL, May et Juin. 1744. 5* A jugerde nôtre favanc Compilateurparleè deux Voiumes de Ton Ouvrage , que nous annonçons, il paroit qu'il réunit en fa per- i on ne tous ces divers Talens. Parfaitement au fait de la Littérature Angloife , il puile toujours dans les fources les plus pures: il cxpofe les fentimens des Auteurs, dont il fait choix , avec un fi grand ordre & tant de netteté , qu'on s'apperçoit fans peine qu'il les conçoit très bien: tout ce qu'il dit enfin eft en général de bon goût ; & ne peut être que fort utile. , Je remarquerai feule- ment à ce dernier égard , que l'Auteur au- roit bien fait d'omettre un plus grand nom- bre de penfées & d'explications de Rab- bins , qu'il n'a fait, En général elles font peu folides,* & pour une qui fera de quel que utilité, il y en a cent dont on ne peut faire aucun ufa'ge. Il ne faudrait donc ad- mettre ici que celles qui font marquées au coin du bon fens. J'en dis autant des ex- plications allégoriques, dont on trouve Quel- ques-unes dans ce Commentaire, Le fon- dement fur lequel on les bâtit eft d'ordinai- re fi peu folide, qu'on peut les renverfer avec la môme facilité qu'elles ont été éle- vées. J'en excepte neantmoins celles que les Ecrivains Sacrés , ceux du Nouveau Teftament en particulier, nous ont fait ap: percevoir. Je ne conferverois abfolument: que les dernières. remarques générales ? il ne fera pas inutile, pour mieux faire connoi: tre la 4e cet Ouvrage de donner ici r> 2 52 Bibliothèque Britannique, un exemple des diverfes Notes qui le conv pofent. commençons par celles qui re- gardent le vrai fens & la force des termes de l'Original. Voici ce qu'on trouve fut ces mots les deux fi? la Terre, Gen. I. vf. i. „ La conftruftion de ces termes dans 3, l'Original , efl d'une énergie particulière a, au langage des Hébreux, à peu près, dit ,3 le fameux Rabbin Maïemonidès (a) 3 corn- 33 me s'il y avoit: Dieu créa les Cieux avec 3, toutes les cbofes qui y font , fi? la Terre s, avec toutes les cbofes qu'elle contient. La 33 vérité eft, que ces deux mots les Cieux 3, fi? la Terre fignifient précifément ce que 3, nous appelions d'un feul mot le Monde. 33 Aàes XVII. vf. 24. Patrick. Il y a ce- 3, pendant aujourd'hui divers Interprètes 3, qui eftiment que par les Cieux gf la Terre 33 on ne doit entendre que nôtre Syfthème 3, Solaire avec toutes les Planètes qui y 3, ont le Soleil pour centre commun. Il „ y en a même qui bornent entièrement à 3, nôtre Globe, ou nu Monde Sublunaire, ,, tout ce que Mohe dit de la Création, „ Hifto're Ùnivtrfelh' Tom. I. Introd. p. „ f>— 72. Le plus apparent eft, à nôtre 3, avis, qu'il faut entendre ici par les Ci e ux , ,, le« étoiles fixes avec tout ce qui eft au ,3 delà; & par la Terre , nôtre Syfthème »•• Planétaire, dont Mo'ije explique le dé- 13 veloppement dans la fuite. Cétoit la 3, peûfée («) More Nevoc. Fart. z. O/». $•'. Avril, May et Juin. 1744. 53 „ penfée de Théophile d'Antioche (a), &de „ Pi»feli Oi). Patrick. " A ce premier exemple , joignons en un fécond qui regarde la Verlîon donc on a fait choix pour former le Texte. Je lui fe- rai une aide femblable à lui, eft il die Gen. II. vf. 18. „ Pour lui procurer de plus en 3, plus les douceurs & les agrémens de la „ vie , dit le Commentateur , je lui donnerai ,, une compagne qui pourra y contribuer. „ 11 y a dans l'Hébreu, une aide devant lui, ,, c'eft à dire, qui lui conviendra, qui lui „ fera aflbrtie , non feulement dans fon 9, corps , mais auffi dans fon ame , dans fes „ fentimens , dans les affections, en un „ mot dans tout ce qui eft effentiel pour „ former un commerce tendre & intime. „ On pourroit traduire , une aide qui fera „ ce qu'il défirera , ou comme s'exprime un „ Auteur Hébreu , cité par Hackjpan (c), „ une aide qui aura toujours fes yeux fur lui „ pour Vobferver & pour le fervir. Voyez ci „ deflbus vf. 25. Patrick. Tout cela,' com- „ me le remarque Luther, met une diffé- ,, rence capitale entre la femme & les fe- 3, meiles des autres animaux , qui n'ont 5, guères de fociété avec leurs mâles que 3, pour un teins. Willet. " Quoique les Notes Théologiques foientpeu du reflbrt de ce Commentaire, on a été obligé (a) Ad Antolyc Lié. i. c*. 18. (h) De M«nd. Opif. p. j. (0 Ncrt. Philol. Tu, I. f. Jîi 54 Bibliothèque Britannique, obligé d'y en mettre quelques-unes, lorl- que la néceffité y a contraint. Elle ne fau- roiect faire de la peine à perfonne; puif- que , quand il s'agit de Controverfe , on rapporte les divers fentimens avec toute la fidélité requife, en Te déterminant néant- moins pour celui qu'on juge le meilleur. On en trouve un exemple dans la Note fur ces mots , faifons l'homme. Cette ma- nière de parler en pluriel a été différem- ment expliquée par les Théologiens. Les uns ont crû y trouver la pluralité des Fer- fonnes Divines: les autres fe font imagi- r,é que Dieu s'addrefToit aux Angos , ou % laTerre: quelques-uns enfin ont dit que la Divinité parloit ici à la manière des Sou- verains. JNôtre favant Auteur s'efh déter- miné pour la première interprétation, qu'il établie , tant par des preuves directes, qu'en réfutant les partifans des deux autres. Quand il s'agit de quelque Oracle dans le Texte, la Note qui en dépend cft tou- jours deftinée à en faire voir Paccompliffe- ment. Gen. IX. sg£2$. No'ë prédit que Ca- naan fera ferviteur dus fer vite ur s de fes frè- res. Après avoir établi qu'il s'agit ici uni- quement de la poftérité de Canaan , petit fils de Noëy l'Auteur ajoute: ,, Ceci fut 3, accompli huit cens ans après par les If- 3, raëlites, defceâdaas de Sem, qui con- ^ quirent le Pais des Cananéens , fubju- 33 guèrent trente de leurs Rois , firent àS paiïer au fil de Tepée la plupart des ha- £ faitsg&s» chargèrent les autres. dMmpots* Avril, May et Juin. 1744. 55 „ & attachèrent les Gabaonites aux fervi- „ ces les plus vils pour l'ufage du Taber- ,, nacle , dont ils continuoient encore à „ s'aquitter du tems de David, qui chan- ,, gea leur nom en celui de Netbinéens , Ef- ,, ciras VIII. vf 20, c'eft à dire, de gens ,, qui s* étoient venus rendre a" eux mêmes , com- „ me en effet, ils fe rendirent à Jofué 9 a- ,, près l'avoir furpris. Salomon enfui te fou- „ mit tout ce qui reftoit des Cananéens aux ,, travaux les plus pénibles, iCbron. VIII. „ vf. 7— 9, & Jojepbe (a). Ils devinrent, „ après cela, fucceflivement la conquête „ des Grecs & des Romains, iflus de Ja* „ pbetj qui détruiûrent les principales Vil- „ les que les Phéniciens avoient fondées , „ comme 7V , Tbèbes , Cartbage. Patrick, „ & Mr. WMfton-y dans Stackboufe To. I. „ p. if«.; Chacun fait que l'intelligence de divers Paffages dépend fouvent & la connoiffan- ce des Mœurs & des Ufages des Anciens: on n'a pas négligé ici cette fource d'éclair- ciflemens. Rapportons en un exemple. Gen. XVIII. vf. 6, Abrabam ordonne à fa Femme de faire des gâteaux : „ C'étoit , ,, nous apprend on , des gâteaux qu'on fai- „ foit cuire fous la braife , ou fous la cen- „ dre, & fur des pierres brûlantes, au lieu ,, de platines. On cuit encore aujourd'hui le 4, pain de cette manière en divers endroits de „ l'Orient. (a) Ant. Jud. Lib. 8. Can. 2. E>4 56 Bibliothèque Britannique , l'Orient. Un célèbre Voyageur (a) rap^ porte qu'étant arrivé dans un endroit qui eft entre la Méfopotamie & la Médic 3 une femme fit au plus vite des gâteaux pour le régaler. Ils étaient de la gran- is ;) „ Heur d'une affiette & de l'épaifleur d'un ,, doigt. Elle les mit fous la braife & la ,, cendre, fur de grandes plaques de pier- Ji res brûlantes. Le goût de ces gâteaux étoit excellent. Willeî. Polus. Patrick. " LesFaits, rapportés dans l'Ecriture Sain- te, ont fourni matière à plufieurs* objec- tions de la part des Incrédules. Ce Com- mentaire eft en partie defbiné à. répondre à ces fortes de difficultés 3 qui deviennent de jour en jour plus communes. L'ordre que Dieu donne à Àbraban , Gtn. XX1Ï. vf. 2, de lui facriiîer fon fils Ifaac , eft un de ces Faits que les Libertins allèguent d'un air de triomphe , comme 11 ce précepte é- toit incompatible avec les Perfections de cet Etre Suprême. Voici les réponfes de nôtre Auteur à ces difficultés. ,, i. Dieu ^ a un droit fouverain & inconteftable fur 35 la vie de {es Créatures, & bien loin que 3, l'exercice de ce droit fait nécefiairemenc 3, en oppofition à* fa Juftice & à fa Bonté , „ il y eft au contraire vifiblement fondé, j, loffqu'il 1 exerce , en demandant le fa- 3, crifice de quelque particulier pour le plus 3, grand avantage du Genre-Humain , de- ,, meurant toujours le maitre de rendre ce „ particulier 0) Rauwoif Far. t. Ch p. Avril, May et Juin. 1744. 57 3> particulier à la vie par une réfurreftion 3, miraculeufe, ou de lui procurer en é- „ change une félicité infinie. 2. Ce que „ Dieu peut vouloir de droit, & fans dé- „ roger à fes rerfections , il peut le faire „ exécuter à telle de ïes Créatures qu'il lui yy plait, & dételle manière qu'il le trouve ,, convenable ; d'où il fuit qu'étant parfai- tement lemaitre de la vie d'I/oac, ilpou- voit fe fervir juftement des mains de fon propre Père pour la lui ôter. 3. Si l'on fuppofe Abraham pécheur & criminel 3 Dieu pouvoit lui donner l'ordre d'im- moler IfaaCj afin de le punir; & fi on le fuppofe vertueux & innocent , il pou- voit le lui donner , & le lui faire exécuter pour perfectionner fes "vertus en les exerçant. 4. L'événement à fait voir que l'intention de Dieu n'étoit pas que le commandement d'immoler Ifaac fut éxé- , cuté; cet ordre n'étoit donc qu'une é- ,, preuve, qu'un moyen que fa Sagefle & „ fa Bonté lui avaient fuggéré pour ren- v dre la foi d'Abraham plus précieufe que „ l'or par rapport à lui, & plus exemplaire „ par rapport à nous. 5. Ce mémorable évé- ,, nement efl la condamnation la plus au- ,, tentique de l'impiété monftrueafe des >y Sacrifices humains 6. Enfin, la Sa- „ geiTe & h Bonté de Dieu brillent vifibïe- ,, ment dans cette Hiftoire , parce qu'on, ,, ne peut s'empêcher de découvrir dans „ Pob^ïflance d" Ifaac un type frappant & v illuftre de l'oîplation volontaire que f s 5 ;, t\ 53 BrBLIOTHEQUE BRITANNIQUE, 3, C. a offerte a Dieu fur la croix pour Je „ falut du Genre -Humain. Deh?iy (a). „ Stockboufe To. I. p. 450. Voyez auffiP. „ Middieiôn (b). n Les queltions qui regardent la Chronologie & la Géograptni n'y font pas traitées avec moins de foin. Nous allons tranfcrire deux Noces qui y font relatives ; & qui., en même tems, nous donneront occafion de faire deux remarques. La première eft fur ces paroles d'Exode XII. rcf. 2. Ce Mois vous fera le premier des Mois de l'Armée. ,, Ces ,, paroles, ait i'/îuteur ,inûnuent aflezclai- „ rement que jufqu'à ce moment , l'An- „ née avoit eu un autre commencement. „ En effet , les Hébreux commençoient j, leur Année , après PEquinoxe d'Autom- >i >i >5 53 3) ,, la Vie Civile ,* mais dans tout ce qui 3, concerna la Religion & les Fèces, le Mois ,, de Ni an fut leur premier Mois. Ainil „ ils eurent deux commencemens d'An- 5, née : celui de VÀnnée Eccléjlïftique en „ Mars , & celui de YAnn . Civile en Sep- 3, îembre. Voyez Exode XXIII. rcf. 16. 3, XXXIV. vf. 82. &LevU XXV.vZ.8-io. I, Ces Paflages démontrent que l'ufage de ,, commen- (m) Revel. tta&iined T. 2. Die. 7, I. H} The Ciir o£ . «>»c, ne , par le Mois qu'ils appelloient Tifri, ce qui tomboit en partie fur nôtre Mois de Septembre , & en partie fur celui d'Oc- tobre. Ils continuèrent même conftam- ment à en ufer de la forte par rapport à Avril, May et Juin. 1744. 59 5, commencer l'Année en Septembre , ne „ céda point par l'inftitution de l'Année „ Reiigieufe. L'Hiftorien Jofepbe l'attef- iy te (a) formellement .... Ainfwortb. „ Polus. Kidder. Patrick. " Je ne prétens pas nier la réalité de ce double commencement d'Année ; mais il auroit écé à propos d'avertir dans cette Note, que tout le monde n'en convient pas. Mr. des fignoles , daus fa Chronologie de l'Hijloire Sainte ( b ) , a combattu l'opi- nion commune par des raifons qui ne fonc rien moins que méprifables. Une des prin- cipales eft , que le l'adage de Y Exode ne doit pas être traduit par le futur, ce Mois ■vous fera, mais par le prêtent, ce Mois vous eft. 'Oeil: ainii que les LXX ont fuppléé ce verbe fubftantif , qui n'eft pas dans l'O- riginal. De forte qu'avant l'inftitution de la Pâque les Hébreux commençoient déjà leur Année par le Mois de Ni/an ; ce qu'ils, continuèrent dans la fuite. Nôtre favanc Commentateur n'ignoroit pas ce que Mr. des Fignoles a écrit là dedus ; mais comme cet Ecrivain eft Etranger à l'Angleterre , & qu'il ne voyoit rien^dans les Ecrits des Anglois fur ce'fujet, fon plan l'a fans dou- te oblige à le taire. Cette réflexion jufti- fie donc bien ce que nous avons avancé ci .-; , pour faire voir la néceflicé qu'il S (a) Ant. Jud. Lib. I. Ca. 3. ( é) To. I. Liy. lli. p. 5<5;—i«?.Q. éo Bibliothèque Britannique , y avoit d'altérer un peu Ton plan à cet égard. La Route que tinrent les Ifraëlites en fortant & Egypte, leur Paiïage par la Mer Rouge, & leurs différentes Stations dans le Défert, fournirent de nouvelles preu- ves de ce que je viens de dire. Quelque excellentes que foyent les Notes de nô- tre Auteur fur tout cela , on auroit été charmé , qu'il eût fait ufage des nouvelles Conjectures d'un Ecrivain Moderne, qui méritent quelque attention: je veux parlei de Mr. Hafius , ProfefTeur en Mathémati- ques à Wittemberg. Il nous a donné en 1739 une Defcription Géographique & Hi (torique du Royaume de David & de Salomon, dans la quelle il fixe la Partie de l' Egypte où habitoient les Hébreu* ; & la Route qu'ils tinrent, pour en fortir, en paiïant, non au travers de la Mer Rouge, comme on le croit communément , mais par le Lac Syrbon ou Syrbonis. Peut-être fe trompe-t-il ," & peut-être aufîl qu'il a mieux rencontré que d'autres ; mais quoi qu'il en foit, fes Conjectures fur tout cela auroient fait plaifir à plus d'un Lecteur. Terminons ces exemples de Notes par un dernier, pris de celles qui fervent de Com- mentaire à quelque Loi. Nous choifirons celle qui fe trouve Exode XXIII. vf 4, comparée avec celle du vf 1. du même Chapitre. Par celle ci il eft ordonné de fai- fe reflituer cinq Bœufs s ou quatre Agneaux, t Avril, May et Juin. 1744. 61 à celui qui , ayant dérobé un Bœuf ou ua Agneau, les aura tués ou vendus: par celle là on borne la reititution à rendre le dou- ble, loriqu'on reltitue vivant au proprié- taire l'Animal volé. Il efl queftion de re- chercher la caufe de cette différence. Voici le Commentaire de l'Auteur. „ Les „ raifons de cette mkigationdelaLoifone 5, fenfibles. 1. Dans le cas, dont il s'a- „ git, on pouvoit préfumer que le Voleur ,, avoit quelque delTein de reftituer ce qu'il „ avoit dérobé; ou du moins qu'il étoit „ encore novice dans l'art de voler , & „ que par conféquent il ne méritoit pas u- „ ne fi grande rigueur. 2. Le propriétaire „ recouvroit fans beaucoup de peine ce „ qui lui avoit été enlevé. 3. Le Larron „ n'étoit dans ce cas que Ample Larron ; „ au lieu que dans le premier cas il ajou- „ toit au vol la fraude & des précautions ,, qui aggravoient fon crime. Polus. Pa- „ trick. " Qu'il nous foit permis de dire nôtre pen- fée fur ce fujet. La véritable raifon de la différence entre la Loi du vf. 1. & celle ci, eft indiquée, ce femble, dans le fé- cond chef de la Note qu'on vient de lire; mais d'une manière trop fuccinfte pour en fentir toute la force. Dans la première Loi on ne peut plus refb'tuer l'Animal vi- vant ; & dans la féconde on fuppofe que cette reftitutiofl fe fait. Or, en ne refti- tuant pas l'Animal volé, il pouvoit arriver que le propriétaire faifoit une perte confl- dérable. 62 Bibliothèque Britannique ^ dérable, foie par le fervice qu'il retirai de cet Animal , foie par l'arTettion qu'il lui portoit : ce que le Légiflateur juge à propos de compenfer, en ordonnant une reftitution plus forte que quand le Voleur rend l'Animal. Cette remarque rend en même tems raifon pourquoi il faut reflituer cinq Bœufs, tandis que la Loi n'exige que quatre Agneaux ou quatre Chevreaux, lorf- qu'on a volé quelqu'une de ces Bêtes. L'on fait que ces animaux font d'un grand fecours pour le Labourage ; & la Culture des Terres pouvoit fouffrir parle vol qu'on faifoit d'un Bœuf , & caufer par là une plus grande perte au propriétaire , qu'il D'auroit fourTerte fi on ne lui avoit déro- bé qu'un Mouton. D'ailleurs , il y a beau- coup de différence dans la Donté des Bœufs. Celui qu'on avoit volé pouvoit être d'un plus grand fervice que quatre autres: voi- là pourquoi il en falîoit reflituer cinq. Four achever de rendre compte de ce Commentaire, il ne nous refle plus qu'à dire qu'on y a joint les Cartes Géographi- ques nécellaires ; le Plan du Tabernacle, la Figure de Ces principaux Utenciles & celle des Habits Sacerdotaux; enfin une bonne Table des Matières, qui n'efl ni trop am- ple ni trop abrégée. Les Cartes Géogra- phiques font au nombre de fîx. La I. of- fre trois Syfthèmes différens fur laFofition du Jardin d'Êden; favoir ceux de Heidegger , de Sanfon & de Calvin. La II. fait con- loitre les premiers écablifîeraeas de Japbet Avril, May et Juin. 1744. 63 & de tesfept Fils, foit dans Y /f fie Mineure, foit dans Jes Pais qui s'étendent depuis le Pont-Euxin jufqu'à la Mer Cafpienne, avec les Colonies qui en fortirent dans la fuite» La III. concerne les établi fie m en s de la Famille de Sem. La IV. ceux des De£~ cendans de Cam. La V. repréfente la Ter- re de Canaan & les Pais VoiHns, pourfer- vir à l'Hiftoire des Patriarches. La VL enfin, qui fe trouve à la fin du Commen- taire fur Y Exode , elt relative au Voyage des Ifraëlites dans le Défert, depuis leur fortie d'Egypte jufqu'au Jourdain. Toutes ces Cartes font copiées de celles de la Géographie de l'Ancien 'J'eftament du Dr. Wells. On les a traduites fans y rien chan- fer, fi ce n'eft dans la Carte du Paradis 'erreftre, 011 l'on a tâché de rendre plu? fenfibles les principaux Syfthèmes des Sa° vans fur la Situation de ce'Jardm délicieux, Des deux Planches dont nous avons par- lé; la première a été tirée de divers Au- teurs ; & la féconde de Braunius: mais ap- propriées l'une & l'autre aux idées de Pa- trick , & des principaux Commentateurs que l'on a fuivis fur ces matières. L'Auteur de ce Commentaire, auffi mo- dette que favant & judicieux, terminera vertijjement qu'il a mis à la tête du Premier Volume d'une manière qui mérite bien d'ê- tre tranfcrite ici. Les termes qu'il employé font tout à la fois une preuve de fa Capa- cité & de fa Modeftie. ,, En formant le pro- v, jet , dit il , d'un Commentaire aufiî im- portant *4 Bibliothèque Britannique, ^, portant, aufîl étendu & aufli pénible, ori „ ne s'eft nullement flatté de l'exécuter „ d'une manière qui ne lailTe rien à fou- „ haiter aux Connoiffeurs. On n'a que 5, trop fenti au contraire qu'on auroit grand „ befoin de leur indulgence, foit par rap- ,, port aux ebofes, foit par rapport au fti- 5, le; & l'on fe promet bien de profiter ., de leurs avis avec docilité, s'ils daignent „ les accorder, comme on les en prie. II „ iemble qu'un Ouvrage de la nature de „ celui ci devrait moins être l'objet d'une „ critique amère , que des encouragemens „ & des confeils des perfonnes qui aiment „ la Religion. Mais quoi qu'il en puifle „ arriver à cet égard, on fe difpofe à le „ continuer fans relâche & avec toute l'ap- ,, plication dont on eft capable. Veuille „ l'Auteur de la Sageiïe, accorder pour cet 3, effet les Lumières & les Forces dont on „ a befoin; répandre fa bénédi&ion fur ,, un travail entièrement confacré à fa ,, Gloire; & le faire véritablement fervir „ à l'Edification de TEglife! " Nous nous unifions à lui avec beaucoup de plaifirpour former les mêmes vœux. ARTICLE III. A Letter to , . . . . concerning the Abufe of Scripture-Terms ; occafio- ned by fome late extraordinary Per- formances. London , printed for J. Roberts * Àvéil, May et Juin. 1744. 6$ Roberts, near the Oxfurd-Arms in Warwick-Lane, 1743. Cefl-à-dire, Lettre à Mt fur l'Abus qu'en fait des Termes de V Ecriture , écrite à locca- Jion de quelques Ecrits extraordinaires , qui ont paru depuis peu. A Londres , chez J. Robert s , proche les Armes d'Ox* fordy dans la Rue de Warr&\ck> 1743. in 8°. 27. pag. Quoique l'Abus , dont fe plaint l'Au- teur de cette Lettre, ne (bit pas fi commun dans les autres Païs de l'Eu- rope qu'il paroit l'être en Angleterre, il eft toujours prudent d'oppofer le plus de barrières que l'on peut à la contagion du mauvais exemple. C'eft dans cette vue que nous donnerons ici la Traduction Fran- çoife de la Lettre dont nous venons d'an^ noncer le Titre; d'autant plus qu'elle n'eft pas fort longue , & qu'elle roule fur une matière , qui mérite l'attention du Lec- teur. En voici donc le contenu, „ Monsieur, „ Quoique les Vices , qui régnent le 3, plus aujourd'hui dans la Société , foienc 3> un des fujets les plus ordinaires de la E „ çonverfe- 66 Bibliothèque Britannique, „ converfation , il eft très - remarquable „ néanmoins, que, parmi les diverfes Cri- „ tiques que l'on en fait, il eft aflez rare „ d'en trouver une, qui ne foit trop exa- „ gérée. Les jugemens , que la plupart des „ hommes forment fur cette matière, font ,, fondés fur l'intérêt qu'eux ou leurs Amis „ y prennent, & fur les dommages qu'ils „ ont foufferts à l'occafion de ces Vices. „ C'eft pourquoi, (i l'on écoute les uns, „ l'Ivrognerie eft le Vice régnant de no- „ tre Siècle; félon d'autres, c'eft le Jeu; „ & un tiers Parti, qui eft pour le moins „ auffi nombreux, aifûre la même choie „ touchant l'Impudicité, ou la Débauche „ à l'égard des Femmes. Et chacun de „ ces différens Partis dépeint le Vice , au- ,, quel il en veut particulièrement, fous „ les couleurs les plus noires, & prétend „ qu'il eft il univerfellement répandu, qu'au „ fortir de leur converfation , on feroit 5, tenté de prendre chaque homme, que „ l'on rencontre , pour un Ivrogne , pour „ un Joueur , ou pour un Voluptueux. „ Je ne prétens pas décider ici quel eft „ le Vice dominant de notre Siècle , ni „ déterminer au jufte quels font ceux qui „ ont le plus ou le moins de partifans. „ Quoique chaque état de la vie , ou cha- 9, que profefTion, foit expofé à des ten- „ tations particulières, à. qu'il puifle por- 5, ter les hommes à une certaine efpéce 3, de crime plutôt qu'à une autre, il n'y a 3, rien pourtant de plus injufte , ni par „ confé- Avril, Mai et Juin. 1744. 67 9) conféquent de plus fcandaleux, que de iy décrier en général certains Corps, ou iy les Perfonnes d'une certaine Profeflion, 5, comme s'ils étoient plus fujets que d'au- ,, très à certains Vices particuliers, & de „ les en accufer, à caufe de la mauvaife „ conduite de quelques-uns de leurs Con- ,5 frères. Si les mœurs des hommes s'ac- „ cordoient toujours exactement à leur „ profeffion, on pourroit jufb'fier enquel- „ que forte la rigueur de cette cenfure. „ Mais l'influence du Vice reffemble aux: ,, dons de la Fortune, en ce qu'elle fe „ répand indifféremment fur des Perfon- „ nés de toutes fortes d'état & de condi- ,, tion. Ne découvre-t-on pas quelque* „ fois autant d'ambition dans le plus vil ,, Artifan, que dans un Miniftre d'Etat? „ L'efprit de tirannie ne paroit-ilpas quel- „ quefois autant dans la conduite d'unpe- „ tic Maître d'école, qu'en celle du Mo- „ narque le plus defpotique? En un mot, „ ne remarque-t-on pas tous les jours des „ pallions auflî vives fous la bure que fous „ la foie P „ Mais , quoique ]es hommes foient or» „ dinairemenc peu judicieux dans leurs w Cenfures , & injufles dans la diftribution „ inégale qu'ils font des Vices , je crois „ néanmoins , qu'on pourroit indiquer a§ ,, fez aujufte le principal Défaut de no- „ tre Siècle, & qu'il ne feroit point diffi- „ cile de prouver que la Bannière: du Scan- >, dale eft le grand Etendarc fous lequel B 2 „ prefque 68 Bibliothèque Britannique, 5, prefque tout le Monde doit être en- 3, rôle. 3, Le defordre , dont j'ai deffein de 3, vous entretenir , n'eft pas borné à un 3, certain ordre particulier de gens, mais 33 il s'étend généralement à tous les états 3, 6c à toutes les profeffions. On peut affir- 33 mer, à ce qu'il me femble , qu'il eft 3, plus univerfellement répandu qu'aucun 33 autre, puifqu'on le remarque en certaines 5, perfonnes, qui font exemptes des autres 3, Vices plus grofliers, & dont la conduite 33 eft tellement réglée à d'autres égards , ,, qu'on pourroit les prendre pour desmo- 33 délies de Piété & de Vertu. 3, Le defordre, dont je veux parler, eft ., l'Abus qu'on fait des Termes de FEcri- 3, ture. On y tombe en différentes ma- 33 niéres , comme par exemple i. en l'in- 3, troduifant dans les Conventions ordi- 33 naires , & dans les Lettres familières 3 3 qu'on écrit à fes Amis ; & c'eft le dé- 33 faut que j'ai eu particulièrement en vue 3, dans mon dernier Paragraphe. Je ne „ doute pas que le Lecleur, au feul nom de ., cette énorme impiété , ne fe rapelle 3, auffi tôt en mémoire plufieurs Perfonnes ,, de fa connoiiïance qui s'en rendent ha- ,3 bituellement couoables, quoiqu'elles ne 5, s'imaginent pas fans doute , que la fau- 3, te, ou elles tombent, mérite un nom fi ,3 odieux. 3, Toutes les Perfonnes fenfées convien- ,3 dront fans doute qu'on ne doit jamais parler Avril, May et Juin. 1744. 69 5, parler de l'Ecriture qu'avec un profond „ refpecl:, ni en raporter les paroles que ,, d'une manière grave & férieufe; cepen- „ dant ceux donc nous parlons, fe don- „ nenc la licence, prcfque en toute ren- „ contre, de citer des Partages de l'Ecri-, „ ture, & d'en faire une application bur- ,, lefque au fujet delà Converfation. Tan- „ tôt ils en font ufage pour embellir „ quelque fbt conte , pour appuyer une „ opinion frivole, ou pour donner plus „ de pointe à un trait fatirique qu'ils lan- ,, cent contre le prochain: tantôt ils en ,, placent quelques citations à la fin d'une „ longue hiftoire , pour en rendre lacon- „ clufion plus vive & plus brillante. Com- „ bien de femmes , qui ne voudroientpoint, „ pour rien du monde, avoir la réputa- „ tion de fe fervir jamais d'aucune expref- „ fion libre ou indécente , & qui cepen- „ dant partent des heures entières en des „ Convcrfations , où elles appliquent à tors ,, & à travers les Partages de l'Ecriture à ,, tous les fujets dont elles parlent? Com- „ bien d'hommes , qui ont une très-mau- ,, vaife idée de ceux qui jurent, ou qui ,, font des imprécations; & cependant ils „ ne le font eux-mêmes aucun fcrupule „ d'avoir toujours à la bouche les noms ,, de Pierre & de Paul , de citer à tout mo- „ ment des Partages de ces Apôtres, &de ?1 les ajurter à la matière du Difcours d'une „ façon baffe & ridicule? „ Je n'aurois jamais fait, fi je voulois E 3 „ vous 70 Bibliothèque Britannique, „ vous raporter toutes les Expreflions ouïes ,, Phrafes particulières de l'Écriture , aux- „ quelles on amiférablement donné la tor- 35 ture , pour les faire fervir à un ufage fi in- „ décent. Cependant, pour en produire 3, ici quelques exemples ? je vais tranfcri- „ re ici quelques endroits d'une Lettre , „ que j'ai entre les mains, & qui n'eft que „ trop féconde en ces fortes d'applications „ abufives. Mon cher Ami , J'ai reçu la votre avec bien du plaifir , d'au- tant plus , qu'elle m'apprend que vous êtes enfin arrivé à bon port , & que vous êtes heureufe- ment échapé des dangers que vous avez courus , j'entens vos périls en mer. . . Vous vous fou- venez encore de Vavanture que je vous ai ra- contée touchant le Peintre , que nous avons jette du haut en bas des efcaliers , &f qui s'eji rompu deux cotes. Nous avons accommodé cette af- faire , moyennant quatre guinées pour chaque cote; de quoi le Compagnon a été fort content. Ainji nous avons fait que les os, qui é- toient caiTés, fe font réjouis. . . J'ai afjiflé la nuit d'avant celle-ci à l'enterrement du Con- feiller D. . . . Il fe faifoit plus jeune de dix ans qu'il n'êtoit. Fous faurez donc que tout le tems qu'il a vécu, fut j6. ans, puis il mourut. . . . y ai vu la bande joyeufe de nos jeunes Egrillards à H. ... la femaine der- nière ; ils vivent toujours à leur manière accou- tumée; Us ne fç marient point 3 ni ne font point Avril, May et Juin. 1744. ji point donnés en mariage. . . . Je vous prie de dire à Mr. F. . . , que Wbitefield conti- nue toujours d'avoir des Auditoires nombreux 9 compofés de gens du commun ; je m'y fuis ren- du la nuit dernière, & fui remarqué que le Peuple l'écoucoit avec grande joie. . Mar- di dernier 9 j'ai été trouver le Gouverneur G. . . , pour avoir de l'argent. Je lui dis fort librement mapenjée: Urne répondit d'abord avec beaucoup de fierté ; mais je lui répliquai fur un ton encore plus haut, de forte que le Gouver- neur fuegrandemenc étonné. . . MadUe- Hen- riette avoit le cœur gros , lor f qu'elle ejl partie pour la Campagne. Mylady écrit qu'elle nepeut revenir fi-tot à la Ville , c? avoue qu'elle avoit trop de paffion pour l'Opéra. Ainfi la pauvre Fille n'a pas la mine d'entendre de long-tems la voix des Chanteurs ni des Chanteu- fes . . . Saluez toutes nos Belles , &? en parti- culier la Dame Dorothée, dont je fuis TEf- clave & que je fers. Le votre à perpétuité &c. P. S. Je viens d'apprendre que la Famille du Curé T. . . eft encore augmentée d'un Garçon. C'efl l'onzième enfant que fa Femme lui donne : Les Arbres de l'Eternel font pleins de Sève. ,, Je ne doute pas que cette Lettre n'ait „ été lue avec admiracion comme une Pié- ,, ce très-ingénieufe , & que fon Auteur „ n'ait paiïé pour un homme d'efprit. Peut- E 4 être 72 Bibliothèque Britannique, „ être même qu on en aura ciré plufîeurs ,, Copies, & qu'on les aura diftribuées par „ la Ville aux Mrs. & Dames, qui ont du >,, goût pour ces fortes d'Ecrits. Car il y 3, a des gens qui fe font une fête de publier „ de femblables Pièces , fur-tout lorfque „ l'efprity brille, & qu'elles font tournées „ d'une manière auflî agréable que la Let- „ tre qu'on vient de lire. ,, Cette coutume abufive d'employer les 3, Termes & les Phrafes de l'Ecriture dans 5, les Lettres & lesConverfations familières, ,, a donné naiiTance à une autre ejpéce d'A- ,, bus, qui eft aujourd'hui fort à la mode _,, parmi des gens d'un cara&ére licen- ,, tieux, qui n'ont pas plus d'efprit que de y, Religion. La nouvelle Méthode , dont 3, je parle, confiile à emprunter de longs 5, PaiTa^es de l'Ecriture & à les adapter à ^ l'Hiftoire & aux Evénemens modernes. „ On a publié depuis peu un grand nom- 5, bre de Satires, fur-tout fur les matières ,, politiques, qui font compofées dans ce ,, goût. La Production enfantine , qui a „ pour titre: , Leçons pour la conduite pen- 55 dant le jour , eft un échantillon de ce „ nouveau genre d'écrire. Les Litanies 5, de l'Eglife Anglicane ont aulTi été eftro- „ piées de la même façon , pour en ajuftcr- „ les termes à un autre Pjjet; & dans cet „ état on les a débitées avec grand fuccès „ dans les rues de Londres, le ueuple ac- „ courant en foule & de toute part , pour 5, les entendre chanter. Mais, ce qui eft; „ plus Avril, May et Juin. 1744. 73 ,, yjlus indigne encore, on a poulie la ro- ,, fanation jusqu'à traveftir & tourner en ,, ridicule le Simboledes Apôtres dans une n Satire faite contre le d^rmer Miniftére. 3, L'Oraifon Dominicale n'a pas été plus 3, épargnée; & je fai de bonne parc qu'on „ lui a fait fubir le même fort, quoique de j3 toutes les Formules de Prières, qui font 5, en ufage parmi les Ch ériens ce fût j, fans contredit celle qui méntoit le plus d'être refpcftce. „ Peu de jours après, le 7e-Deum parut ,, de même habillé a la nouvelle mode, ,,avec un Avertiflement à la têce ; mais ,, tout l'ufage, que l'Auteur d'un Ecrit fi ,, fcandaleux fût faire de la fublimité de „ l'Original, fut d'en employer les Termes 3, pour compofer & publier un horrible a- „ mas de Blafphèmes , mêlés d'une Satire „ auffi bafié qu'injurieufe , auffî dcftituée „ de vraifemblance que de bonfcns. Auiîi „ cette miférable Pièce fut-elle mépriféé ,, de tous ceux qui avoient le fens commun, ,, & condamnée par des Perfonnes de rous ,, les Partis, comme un Ecrit qui n'étoït ,, propre qu'à couvrir fon Auteur de honte ,, & de confufion: ou du moins , fi elle ,, lui acquit queîaue réputation, ce ne fut. „ que parmi des gens, qui lui reflembloient ,, de mœurs & de caractère. „ Chacun fait qu'il a paru beaucoup „ d'autres Ecrits de ce Genre, dont les ,, Evprefiions étoient tirées de l'Ecriture v ou de la Liturgie. Les uns ont été im? E 5 „ primés; 74 Bibliothèque Britannique, „ primés ,* & à l'égard des autres, ons'eft ,, contenté d'en délivrer des Copies manuf- „ crites , qui ont couru de main en main. „ C'eft un fait û notoire, que les Auteurs „ & Fauteurs de ces Ecrits ne le peuvent „ nier. Ainfi vous voyez , que l'Abus, 3, dont je me plains, n'eft pas imaginaire, „ mais qu'au contraire il n'eft malheureu- „ fement que trop réel. „ On ne peut guéres révoquer en doute , „ que ce ne foit l'ambition de pafler pour 3, de beaux Efprits, qui engage ces Mef- 3, fleurs à employer leur tems à ces fortes 3, de Comportions ,* &, fi la peine, qu'ils s, fe donnent pour acquérir ce titre, pouvoit „ leur tenir lieu de mérite, il faut avouer „ qu'ils n'en manqueroient point : mais , 3, malheureufement pour eux, l'expérien- 3, ce fournit tous les jours des exemples, 3, qui prouvent qu'il en coûte beaucoup „ aux petits Génies pour fediftinguer; qu'ils „ ne peuvent venir à bout de faire parler „ d'eux, que par la hardiefle & l'extra va- 5, gance de leurs entreprifes ; & que leurs „ chétives Productions tomberoient bien- „ tôt dans l'oubli, fans les blafphèmes & „ les cruelles Satires dont elles font rem- „ plies. „ Je n'ignore pas qu'on tâche de jufti* 3, fier quelques-unes de ces Pièces , en di- 3, fant qu'elles n'ont pas été écrites à mau- , vais defléin , ni par un efprit de raillerie „ & de profanation. Mais, outre qu'on 3) auroit beaucoup de peine à perfuader les „ autres Avril, May et Juin. 1744. 75 „ autres hommes de cette droiture d'in- „ tendon , je trouve que la bonne inten- „ tion ne fignirle pas grand' chofe dans le „ cas dont il s'agit, û-non par raport aux ,, Auteurs mêmes: carie crime, ou l'im- „ piété de ces fortes d'Ecrits coalifte dans „ le mauvais effet, qu'ils font natureiie- „ ment propres à produire fur l'efpric du „ Peuple , comme il feroit facile de le ,, prouver, puilque cette application bur- „ lefque 6c comique des Palfage^ de l'E- „ criture tend d'une manière vilible & di- „ re&e à expoler au mépris cette Parole , „ pour laquelle on auroit toujours dû con* „ ferver la plus haute vénération. „ Cette Méthode d'écrire n'écoit pasen- „ core inventée , ou du moins elle étoit „ encore enfon enfance , du temsde Mr. „ Addifon; autrement il n'auroit pas man- „ que d'en faire mention dans l'Hiftoire „ qu'il a faite des différentes fortes d'Ef- „ prit, tant de bon que de mauvais alloi , 3, qu'on remarque dans les Ouvrages des „ Anciens & des Modernes : fur quoi il eft „ entré dans un détail fort inftru&if Ça). „ Il nous parle entre autres d'un certain ,, Efprit qu'il appelle mixte ; & je crois „ qu'il auroit rangé celui dont nous par- ,, Ions en cette clalfe; & s'il avoit eu place ,, en fon Allégorie, je ne doute pas qu'il „ n'eût été obligé de prendre la fuite & „ de difparoitre à l'approche de la Vérité , „ de (a) S>e#4t, Difc, *$ç *}6 Bibliothèque Britannique, 3, de même que toutes les autres fortes d'Ef- 3, prit de mauvais alioi. lime fembie aulli *, qu'il auroit été facile à cet ingénieux Au- 3, teur de dépeindre cetEfprit iousfes pro- 5, près couleurs & d'une manière conforme ,, au refte de l'Allégorie; & ily adel'appa- 3, rence qu'il auroit repréfenté les Auteurs 3, de ces Ecrits fous la forme de Satyres, 3, de Singes, de Diables , &c. qui prenaient ., l'extérieur & l'habit des Patriarches, des « Sacrificateurs, des Apôtres & des Mar- ;, tirs. „ On jugera fans doute qu'il y a de la ,, témérité de ma part de prétendre ajouter 3, quelque chofe aux Ecrits de Mr. Addi- 3, fon; mais, lorfque je confidére les voies 3, extraordinaires, que certaines Cens ont 3, choilies pour faire briller leur efpritj'ef- 33 père qu'on voudra bien me pardonner la „ liberté que j'ai prife, de donner en quel- 3, que manière des leçons à un des plus 3, grands Maîtres dans l'Art d'écrire qui ait 3, jamais paru dans le monde , & de lui „ tracer le Plan qu'il auroit pu fuivre, en „ critiquant la Méthode dont il s'agit. 3, On ne manquera point de m'objecler „ que Mr. Swift & Mr. Pope ont quelque- ,, fois employé les Termes de l'Ecriture 3, de la manière que je blâme , & que je ,, n'oferois pourtant pas leur refufer le ti- „ tre de Beaux -Efprits. A quoi je répons 3, que je n'ai jamais ouï dire que le Doyen 3, Swift ait jamais entrepris d'appliquer fy d'une façon burlefque des Paflages en- „ tiers Avril, May et Juin. 174.].. 77 „ tiers de l'Ecriture. Je conviens à la vé- „ rite qu'on a accufé Mr. Popj d'en avoir 3, ué de la forte en deux ou trois occa- ,, ûons; mais il le nie fortement; ainïi l'é- ,, quitéveut qu'on le tienne pour innocent, ,, Il e(t vrai qu'ils appliquent quelquefois y, d?ns leurs Lettres les Exprefîions de „ l'Ecriture , de la même façon qu'el- ,, les font employées dans la Lettre rapor- 5, tée ci-deiïus; mais ils ne fe font jamais 3, a viles de coudre enfemble divers r/afla- 5, ges de l'Ecriture, pour en former des ,, Ouvrages de la nature de ceux dont nous ,, parlons. Et, quand ils l'auroient fait, ., une pareille conduite n'en feroit pas plus ,, digne de Louange. C'cir. donc en vain „ qu'on allègue l'exemple de ces deux „ grands Hommes, puilque ieur Autorité „ ne feroit pas fuffi'ante pour juftiâer un 3, femblable ufage des Termes de l'Ecri- 3, ture. Ainfi . quand même ce qu'on leur „ attribue feroit véritable , il n'y au^oit „ pas plus d'efprit à les imitera cet égard, ,, qu'il y en auroit à contrefaire leurs „ défauts ou leu^s infirmités corporelles, „ & à affecter, par exemple, d'être fourd „ comme l'un, ou d'être difforme comme „ l'autre. ,, L'Efprit, qu'on remarque en ces for- „ tes d'Ouvrages, confille, dites-vous, à „ donner un nouveau tour & un nouveau „ fens à des termes 7 auxquels on avoic „ auparavant coutume d'attacher des idées „ toutes différentes: de forte qu'à la pre- 78 Bibliothèque Britannique, ., miére lecture l'ancienne idée fe préfente ,, d'abord à l'efprit; mais elle e(t bientôc „ chaflee par la nouvelle , qu'on attache ,, en ces Ecrits à des Expreflions , dont „ on ne s'étoit pas fervi jufque-là en ce ,, fens. Cette nouveauté frappe & caufe „ de la furprife,- & c'eft en cela que con- M fifte l'Efprit & le mérite de ces fortes „ de Compactions, & d'où vient le plaifir ,, que l'on goûte en les lifant. ,, Je ne trouve pourtant pas qu'il y aie „ rien de fort fpirituel à employer dans un ,, fens burlefque des Paroles, dont on n'a- „ voit jamais fait ufage auparavant que ,, pour exprimer des chofes graves & fé- ,, rieufes. Je voudrois vous demander , „ Monfieur, fi vous n'avez jamais vu des ,, Ramoneurs de cheminées revêtus d'un „ manteau, & parés^ d'un rabat & d'une „ longu? perruque: je fai bien du moins ,', que le premier jour de Mai il n'eft pas „ rare d'en rencontrer plufieurs acoutrés „ de cette façon , qui courent dans les „ rues de Londres avec leurs perches fur „ l'épaule. Or je foutiens que les Ramo- ,, neurs de cheminées auroient autant de ,, droit , en cet équipage, de prétendre être ,, regardés comme des Perfonnes de méri- ,, te & difringuées du commun , qu'en „ peuvent avoir les Auteurs des Ecrits „ dont nous parlons. Carn'ya-t-iî pas au- „ tant d'Efprit à prendre un manteau, ,, un rabat , & une perruque , (qui „ ont toujours, paile pour des marques ,, de Avril, May et Juin. 1744. 79 „ de Sageiïe & de Gravité , ) & à s'en fer- », vir pour couvrir des vêcemens fales & ,, mal-propres, qu'il y en a dans la con- „ duite de nos prétendus Beaux-Efprits, ,, qui employent dans un fens burlefque „ un certain ordre de Phrafes & de façons M de parler , qui font confacrée.-. par un ,, long ufige à exprimer des matières gra- „ ves & leneufes? „ L'ingénieux Ecrivain, qui en a ufé fi „ libremeut à l'égard d'une partie delaLi- ,, turgie, auroit pu traveltir de même tou- „ tes les autres parties; & j'ofe aiTûrer ,, qu'il ne lui feroit pas difficile de tourner „ le refte en ridicule, ni d'ajufter le tout „ à des fujets politiques , comme il a déjà „ fait par raport à la partie indiquée. Les „ Collettes lui fourniroient une grande va- ,, riété de matières pour exercer fes talens. „ Il lui feroit aifé pareillement de faire ufa- „ ge des Rites & des Cérémonies ufités „ dans l'adrniniftration duBatême,dans la cé- „ lébration du Mariage & des Enterremens, „ en les appliquant à d'autres fujets félon „ l'efprit de la nouvelle Méthode. S'il lui „ prend envie d'aller plus loin, l'Ancien „ Teftament lui fournira le langage dont „ il aura befoin pour décrire les Evéne- „ mens publics , auffi bien que les Hiftoi- „ res particulières. En quoi je crois qifau- „ cun de fes Camarades les Beaux- Efprita „ n'entreprendra de le fqpplançer , & qu'il „ n'y aura pas même d'Ecolier, de Char- „ latan, ni de Baladin, qui veuille entrer » en 8o Bibliothfque Britannique, „ en concurrence avec lui, ni qui s'avife „ de le contrequirrer. ,, Mais on ne doit pas fuppofer qu'en ,, parlant de la force, mon deÎTein foie de „ condamner tout TJfage ou toute Citation „ des Termes de l'Ecriture. Je fai qu'ils ,, font un très bel effet , & qu'ils ornent „ admirablement le difeours, lorfqu'on les ,, applique à propos & d'une manière fé- it rieufe, Ci que l'on s'en fert comme d'un ,, moyen pour défendre & maintenir la cau^ „ fe de la Religion & de la Vertu. Le feul „ but, que je me propofe en cette Lettre , ,.. comme je l'ai déjà déclaré, eft de com- „ batre l'Abus qu'on fait des Expreflions f, de l'Ecriture j en les citant fur des fu- v jets frivoles , & les employant dans un „ fens bas & comique. Car je fuis perfua- „ dé au'on ne peut rendre un plus mauvais „ fervice à la Religion Chrétienne, que de „ travailler à infn>er du mépris pour la Parole , fur laquelle ce^te Religion eft „ fondée: or je foutiens que c'eft à quoi ,, tend naturellement cet ufage familier & ,, indécent des Termes de l'Ecriture, que „ je critique. ,, Quant à l'autre Abus , dont j'ai fait ,, mention enfuite, il eft encore bien plus „ condamnable, & ceux qui s'en rendent ,, coupables, montrent encore d'une ma- „ niére plus efficace leur haine contre Dieu „ & la Religion. En effet, dans la plupart ,, des autres péchés , nous ne faifons le „ plus fouventtort qu'à nous-mêmes r c'eft „ nous- 5Î Avril, May et Juin. 1744. 81 „ nous-mêmes que nous offenfons & à qui ,, nous nuifons ; mais en celui ci nous „ traverfons les defleins de notre Créateur 3 ,, nous nous oppofons à la grande fin qu'il ,, fe propole dans le Gouvernement du „ Monde, nous ruinons & fappons par le „ fondement le plus magnifique & le plus „ glorieux de Tes Ouvrages; en un mot ,, nous prenons le parti des PuifTances de ,, l'Enfer, & unifions nos eifortsaux leurs „ pour mettre obftacle au Salut commun ,, du Gjnre humain. ,, Je ferois bien fâché de chercher que- „ relie ou de fufeiter de mauvaifes afFai- „ res à qui que ce fût, ni de jetterenfon ,, chemin une pierre de fcandale pour le ,, faire trébucher : qu'on me permette „ néanmoins de propofer ici une queftion: ,, fuppofé qu'il y ait aujourd'hui quelque ,, péché contre le S. Efprit, je voudrois „ bien favoir fi l'on pourroit en nommer ,, quelque autre qui méritât mieux ce titre ,, que celui de tourner en ridicule & de „ rendre méprifable cette Parole qui a é- ,, té écrite par fon aïMance & fon infpi- „ ration. „ Je fuis, Monfieur, &c, \ Londres, le 17. Novembre, 1743. " On me permettra d'ajouter ici une rai- fon , omife par notre Auteur, & qui fera pourtant de quelque poids, fi je ne me ipe , auprès de ceux qu'il a eu de/Tein F" de %2 Bibliothèque Britannique, de ccnfurer en fa Lettre. Ce n'eft pas que celles qu'il allègue ne foient belles abon- nes ; mais , comme il fuppofe des Princi- pes dont quelques-uns de ces Mrs. ne con- viendront peut-être point, il pourroit auf- fi arriver qu'ils ne fiflent pas de Tes raifons tout le cas qu'elles méritent : au lieu que celle, que j'ai deflein de propoferici, eft propre à faire impreiïlon fur tous ceux qui admettent du moins les Principes de la Re- ligion Naturelle. La voici exprimée dans les paroles mêmes d'un Théologien fort habile (a) : „ Quoique l'on prenne pour „ matière de jeu une Cérémonie Reli- ,, gieufe ufitée dans une Eglife dont nous „ condamnons les Superftitions , on ne „ laille pas de violer en cela le refpecl ., que l'on doit à Dieu. La vûë d'un faux „ Culte, qu'on lui adrelTe , doit exciter en 3, nous l'idée du vrai Culte, que nous de- „ vocs lui rendre. Quand même ce fe- ., roient les Cérémonies Religieufes ces ,, Payens que l'on s'attacheroit à contre- „ faire , je n'apeilerois pas ce jeu un Di- „ vertiffement badin (Comme avoit fait, à „ ce qu'il dit , un Théologien célèbre , ,» contre lequel il difpute. ): je l'apellerois ,, un Divertijj'ement impie &f profane. Je 3, fuis perfuadé que tous ceux, qui ont „ tant foit peu de délicatefle à l'égard de „ ce qui touche l'honneur de Dieu, en „ forme» (a) Voyez, U Tré/Ace de l'Ouvragt, qui * pon* Titre; Doctrine de ia Trinité éclaircie. Avril, May et Juin. 1744. 83 ,, formeront le même jugement. " Le Théologien , que nous venons de citer, fait cette réflexion au fujet d'un certain Formulaire, qui eft en ufage, à ce qu'on dit, parmi quelques Etudians d'une Uni- verfité Proteftante. Ce Formulaire confif- te à imiter & contrefaire d'une façon bar- lefque la Cérémonie que l'Egiife domaine obferve dans l'Elévation de la Coupe. Or chacun voit affez la rellèmblance qu'il y a entre la conduite de ces Etudians, & cel- le des Ecrivains qui donnent un lens bur- lefque aux Phrafes de l'Ecriture. Il n'efl pas néceflaire par conlequenc de nous ar- rêter ici à prouver que ces derniers méri- tent pour le moins la même ceniurequeles autres, ARTICLE IV. The Golden C a l f , the Idol of Worfhip. Being an Enquiry Phyfico- Critico - Patheologico - Moral into the Nature and Efficacy of Go ld : Shew- ing the wonderful Power it has o- ver, and the prodigious Changes it caufes in the Minds of Men. IVïth an Account of the Wonàers ofîbe PfychoI tic Looking - glafs , lately invented by île Alithor , J O A K I N P H I L A N D r. R , M. A. London: Printed for M. Cooper, F 2 at 84 Bibliothèque Britannique, at the Globe in Pater-Nofter-Row. in 8°. 1744. Ceft - à - dire , Le Veau d'Or, ou Recherches Phy- fico-Critico-Patheologico- Morales fur la Nature &f f Efficace de l'Or,* qui montrent Je merveilleux Pouvoir de ce Métal , & les prodigieux Change- mens qu'il opère fur l'Efprit des Hom- mes : avec la Relation des Merveilles du M.roir Pfychoptique , invente depuis peu par Joakin Philander, Auteur de ce Livre. Cefi un in 8°. de 250 p. T 'Ouvrage, dont on vient de lire leTi- J__/ tre, eîl écrit dans le goût de ceux du Dr. Swift: il femble même que l'Auteur fe foit propofé cet Ecrivain pour modèle. Iî i'a allez bien imité dans le Titre fingu- lier de ion Livre ; dans les Railleries qu'il fait de la race des Auteurs fes Confrères ; & dans fes Digrefïïons perpétuelles. Quoi- que les idées ne me paroiflent pas tout à fait auffi originales , on ne peut cepen- dant lui refufer la juïtice d'avoir écrit a- vec beaucoup de bon fens, & dans le def- fein de rendre les Hommes meilleurs. L'on trouve à la tête une Lettre à fon Imprimeur ,dans la quelle il lui recom- „ mande , Avril, May et Jqin. 1744. 85 mande, entre autres choies , de n'employ- er aucun artifice, pour procurer le débit, de fon Livre. Il veut qu'il fe foutienne par lui même; & s'imagine que l'idée, où l'on fera , que c'eft ici fon premier Ouvra- ge, engagera nombre de perfonnes , par pur amour pour la nouveauté, à l'acheter & à le lire. ,, Car enfin., dit il , (à) qu'y ,, a-cil de plus agréable au public que la „ nouveauté? Ne voit on pas toujours la ,, Ville entière courir après tout ce qui eft „ nouveau ? Avec quel empreflèment ne „ court on pas après un nouvel Equipage , „ qui traine un Fat de nouvelle datte ? Pour- „ quoi un nouvel Auteur ne divertiroit „ il pas aufîi bien le public qu'une nou- „ velle Farce ? Et s'il eft permis de com- „ parer les grandes chofes aux petites, le „ premier Difcours d'un nouveau Membre „ de la plus Augufte des AfTemblées n'eft ,, il pas écouté avec plus d'attention qu'on „ ne faic les fui vans, ou que ceux des per- ,, Tonnes qui ont accoutumé d'y parler? „ Pourquoi donc ne pourroit on pas lire ci ,, acheter , ce qui eft tout ce que vous „ iouhaitez, le premier Livre d'un Au- ,, teur, aufll bien que celui d'une perfon- ,, ne qui en a déjà compofé beaucoup ? En ,, un mot , je pancherois à croire que les ,, Ouvrages de divers Ecrivains fe débite - „ roient mieux, s'ils les donnoient fous un ,, nouveau nom. Pour ce qui eft de mon „ érudition , U) p. 2,3. 86" Bibliothèque Britannique, 5, érudition, elle paroitrafuffifamment dans „ ce Traité. L'on y trouvera diverfes ex- 3, preflions étrangères , grand nombre de „ mots rudes , beaucoup de Grtc & de „ Latin, plufleurs termes d'Art. . . & ,pour „ tout dire, auffi peu de clarté en divers 3, endroits, que dans les Livres des plus „ grands Docteurs. " Quoique rien ne recommande autant un Livre auprès de certaines gens , que de parler contre la Religion ; contre le Gou- vernement ; ou contre quelque Ordre en particulier, foit dans l'Etat Toit dans l'E- glife , l'Auteur n'a pas jugé à propos de faire ufa-.e de ce moyen. ,, J'aime trop „ mon Ame & mon Corps, dit il, (a) „ pour attaquer Dieu ou mon Roi. Je laif- „ fe cette audace aux Libertins en matiè- „ re de Religion & d'Etat. Et dans l'Epi- ire à /on Imprimeur: (b) ,, Je n'en veux „ dans cet Ouvrage à aucune Perfonne en ,, particulier: j'attaque feulement des Vi- ,, ces qui me paroiiTent trop communs; fans „ connoitre perfonne à qui je puifle ap- j, pliquer en particulier les caractères que „ je trace. Enfin , je ne l'ai point écrit, pour „ rendre méprifable quelque Dignité, E- 3, tat. Vocation, ou Genre de Vie, quel „ qu'il foit: mais feulement pour reformer 3, les abus oui s'y rencontrent , en em« 3, ployant pour cet effet le badinage. „ riàen- ( * ) p- 8. ( b ) p. 3 , 4. Avril, May et Juin. 1744. g7 „ ■ • rident em dicere Verumy „ Quidvetat? " A tous ces égards l'Auteur dent exacte- ment parole. Le premier Chapitre eft deftiné à l'expli- cation du Titre de cet Ouvrage. Les Au- teurs , qui affectent de la fingularité à cet égard , ou qui mettent à leurs Livres des Titre* trompeurs , n'y font point épargnés. Nôtre Docteur ne traite pas mieux le pu- blic , qui méprifant les routes battues & fimoles, demande toujours de l'extraordi- naire, & tombe dans le ridicule à force de le fingularifer. Au refte, il a donné le Titre de Veau d'Or à Ton Traité; „ par- „ ce qu'on fait que la Nation la plus reli- „ gieufe du Monde rendit un Culte Divin „ à ce ftupide Animal. Ce fut , fans dou- ,, te , le brillant éclat de ce métal, qui „ la fit tomber dans cette idolâtrie: au- „ jourd'hui même que l'on eft fî raffiné, il „ continue à être le véritable objet du ,, Culte religieux d'un grand nombre de „ perfonnes, en dépit de tous ]es doctes ,, argumens, par lesquels les Efprits Fons „ ont prétendu prouver qu'il n'y a point „ de Religion. Eux mêmes, j'en fuis fur, ,, rendent des homages religieux à cette „ idole (a). " Mr. Philander rend encore raifon des autres Titres qu'il a donnés ( a ) p. u, U. F4 88 Bibliothèque Britannique, donnés à Ton Livre; & explique d'une mi- nière plus détaillée le but qu'il s'y eft pr;> pofé. Il veut nous apprendre les caufes du Changement que les Richefles apportent dans l'Efprit & le Cara&ère de ceux qui les pofledent. ,, L'on eft furpris , par éxern- „ pie, dit il, (a) de voir un homme avec „ qui Ton étoit de niveau, par raport ajx „ Biens de la Fortune, &, peut-être, fu- ,, périeur du côte des qualités de l'Efprit, „ parler tout d'un coup fentences, com- „ me un Philofophe. Il raifonne, & pro- „ nonce définitivement fur des points d'E- „ rudition, de Théologie, de Controver- „ fe , d'Hiftoire, de Poëfie,de Politique, ,, de tout en un mot, d'un air de fuftfan- „ ce qui étonne. Mais d'oii vient ce: é- „ tonnement? C'eft parce qu'on n'a pas „ lu ce Traité , ou l'on montre que cela ,, vient uniquement de ce qu'il a aquis des , Richefles. En voici un autre, dont vous \ étiez l'ami intime. Vous le croyiez d'un ', bon cara&ère ; plein de fens ; d'une ,, converfation aifée & libre,* ayant un „ grand ufage du Monde; enrichi'de con- „ noiflances autant qu'il en faut à un hon- ,, nête homme; & d'un jugement allez fo- ,, lide pour n'être pas pédant: en un mot, „ vous vous imaginiez que, Il jamais il é- „ toit riche, cet homme feroit honneur à », fon païs , & feroit utile à fes amis. C'eft „ la précisément en quoi vous vous trom- 35 Pez \ ( * ) p- i7- »» Avril, May et Juin. 1744. 89 „ pez: car il n'a pas plutôt un carotte bien „ doré & de beaux équipages , qu'il de- ,, vient fier, hautain, dédaigneux,* & qu'il „ oublie les obligations qu'il vous a , & ,, fera vôtre Ennemi fi elles font grandes. „ Il eft bourru, impérieux, fan talque juf- „ qu'à l'extravagance , donnant dans le ri- tJ dicule des gens de qualité, & auffi Fat „ que l'orgueil & l'amour propre puiiTent „ rendre. A la vue de tout cela vous êtes ,, tout honteux d'avoir porté un jugement „ fi faux de cet homme. Mais vous vous „ trompez encore. Il étoit réellement ce ,, que vous le croyiez être alors; & il eft „ réellement ce que vous le voyez être au- „ jourd'hui. C'eft l'Or tout feuf qui a fait „ cette étonnante métamorphofe. Com- ,, ment l'opère-t-il? C'eit ce qu'on verra „ dans la fuite. " Après ces remarques , il pofe dans le Chapitre fécond certains Principes d'une vé- rité inconteftable , dont le principal eft que les Richefles,& quelques-fois les gran- des Dignités , opèrent ces merveilleux Changemens dans la nature & la constitu- tion des Hommes. ,, "Je pourrois prouver „ cela, dit il, (a) par la pratique généra - „ le & la conduite ordinaire des Hommes „ envers les perfonnes que l'Or a ainfi ,, métamorphofées. Ne voyez vous pas des „ gens de bon fens, qui ont du favoir, de „ l'éducation & la connoiflance du Mon- „ de; ( * ) P- 2JT- V 5 po Bibliothèque Britannique , „ de,- ceux mêmes du plus haut rang, ou ,, qui exercent les fondions les plus facrées .', dans la Société, avoir des déférences & „ un refpeft outré, pour des perfonnes , „ dont tout le mérite fe borne à avoir „ cette qualité qui donne du prix à tout, „ je dirois prefque qui les déifie; fanss'in- „ former par quels moyens elles l'ont a- „ quife? L'on m'a dit, que c'étoitla cou- „ tume parmi les perfonnes de la première „ diftin&ion dans une Nation voifine de „ demander, quand il entre un Etranger de „ façon dans une Compagnie, qui eft ce ,, Monlîeur? Après qu'on lui a répondu, „ c'eft un tel ; il ajoute : eft il noble ? Si 5, on lui répond que oui'; il donne un pe- ,s tit ligne d'admiration; & demande enfin „ s'il eft riche? S'il fe trouve qu'il pofTé- „ de de grands biens , le refpeéï qu'il con- „ çoit pour lui s'imprime fur fon vifage , „ & il conclut par dire , c'eft un gallant *, homme! Dès qu'ils font informés qu'u- „ ne perfonne eft riche, ils n'en deman- „ dent pas d'avantage , ayant aflez de dif- ,, cernement pour voir qu'il ne lui man- „ que aucune qualité. De tout teirs les ,, hommes fe font conduits de la même „ manière. Pour s'en convaincre l'on n'a 9) qu'à confulter l'Hiftoire, les coutumes „ & les mœurs des anciens Peuples. Quant >, à moi, ajoute-t-il, je ne faurois me ré- „ foudre à condamner le jugement des ,, Créatures de mon efpéce,*fur tout quand ?) il eft fi univerfel. Il vaut donc mieux 3, croire 3 Avril, May et Juin* 174.4. 91 „ croire , que l'Or donne aux gens riches „ ces qualités brillantes qu'on leur attri- „ bue fur cela feul qu'ils pofledent de ,, grands b ens. " L'on trouve dans ce même Chapitre une Digrejjion, dont l'Auteur fait le fujet, Il décrit fa perfonne, éiale Tes qualités, & nous apprend le genre de vie pour le quel il s'efl déterminé. ,, Après avoir fini mes „ études, dit il ,(ci)\\ futqueltion depren- „ dre un parti dans le Monde. D'une „ taille courte à ramalïée , je fentis fort „ bien qu'il ne me convenoit pa^ de vou- ,, loir paffer pour un Homme du bel -air: „ quoique j'aye vu des perfonnes auflî mal- faites que moi , non feulement préten- dre à cette qualité, mais croire la pof- féder réellement. D'ailleurs , j'aimois la Lecture, & à m'entretenir en com- pagnie fur des fujets utiles; deux cho- ies qui n'entrent point dans la compolî- tion des gens du bel-air d'aujourd'hui. .. ,, Quoique l'Affabilité, la PoiitefTe , la „ Modeftie, l'Humilité, un Caractère gé- „ néreux & obligeant, de la Douceur dans ,, la Conduite de la vie & dans la Con- „ verfation , qui porte à ne donner au- 3, cun fujet de plainte à perfonne; en un 3, mot , toutes les belles qualités de l'Ef- 3, prit, plutôt que celles du Corps, foyent 3> les principaux ingrédients qui entrent 3, dans la compofition d'une Perfonne du „ bel» c 4 ; p. 19* 92 Bibliothèque Britannique, 5, bel-air: cependant l'Extérieur, la bon- „ ne Mine, la Manière de fe mettre, du ,, beau Linge, des Habits chamarrés, & „ un certain Air d'Aflurance quand on en- „ tre en compagnie,- c'eft tout ce que le „ commun des Hommes juge néceflaire 3, aux Perfonnes de cet ordre . . . Néant- „ moins je ne penfe pas que de beaux Ha- ,, bits, ni l'Adrefle du Corps, fans les en> „ belliffemens de l'Efprit , puiflent les „ faire paffer que pour des Brutes bien or- „ nées. " Mr. Philander pafie ainlî en revue divers autres états de la vie, à chacun des quels il reproche fes défauts. La Jurifprudence, la Poëfie, la Médecine, PHiftoire, la Critique & la Théologie ne furent point de fon goût; ce qui fit qu'en- fin il fe détermina pour laPhilofophie. Le quatrième Chapitre eft deftiné à répondre à cette objection : comment fe peut il que les RichelïesfafTent d'un Sot un Homme de bon fens; & d'un Homme de bon fens un Sot ? N'y a-t-il pas en cela de la contradiction ? La pre- mière réponfe à cette difficulté ne contient que des railleries fur la manière dont les Ecri- vains répondent d'ordinaire à leurs Anta- gonifles. Il traite le lien de Fou , & taxe fon objection de puérilité & de manque de bon fens. Après cela, il remarque qu'il y a bien de la différence entre les raifons pourquoi une chofe arrive, & la manière dont elle arrive. ,, Par exemple, dit il, sî (a) Je Pms D^en rendre raifon pourquoi 3, UQ (a ) p. 4?< Avril, May et Juin. 1744. 93 „ un homme qui a plus d'argent que fa „ partie gagnera Ton procès: cependant je „ ne iàurois dire au jufte par quels reflbrts ,, cela fe fait ; ni comment l'argent agit „ fur l'efprit du Juge, pour lui faire voir „ la juftice d'une caufe qu'il ne voyoit „ pas auparavant. Voici tout ce que j'en ,, fais: c'eft qu'il y aune liaifontrès étroi- ,, te entre les fens externes ft le cerveau; „ & que l'attouchement ou la vue de l'Or, „ faifant grande impreflion fur les fens, „ ceux ci en font aufîî fur l'entendement: „ d'où il faut conclure que ces fenfations „ aident plus que toute autre chofe à bien „ juger. Cependant encore nous ne fau- „ rions dire comment tout cela eft pro- M duit. Je puis bien dire encore comment „ une jeune Demoifelle qui fréquente cer- ,, taine Compagnie perdra fa Réputation , fi fi ce n'eft pas quelque chofe de plus: ,» mais je ne faurois dire par quelles intri- „ gués, ou par le moyen de qui, cela ar- „ rivera... De môme, quand je recher- „ che les raifons pourquoi de grands biens ,, font d'un Fol un Homme de bon ,, fens, il n'efb pas néceflaire de montrer „ comment cela fe fait. Bien plus, ce v qui paroitra fort hardi, je défie qui que „ ce foit en Angleterre, excepté moi, de „ montrer comment cela eft produit. Car ,, il eft fur que les grands biens ne don- ,, nent pas un fcrupuîe de Cervelle de „ plus à un Homme, que ce qu'il en avoit „ auparavant, " C'eft ce que nôtre Doc- teur 94 Bibliothèque Britannique , teur prouve fore en détail par la diffe&icn du Cerveau de deux Gentils Hommes, qui s'étoient tués en duel. Ils étoient tous deux devenus Riches,* & les Richeffes a- voienc produit dirïérens effets fur leur Ef- prit. De Sot que l'un avoit été, il étoit devenu Homme d'Ei'prit,* tandis que l'au- tre qui avoit été Homme de bon fens étoit devenu un Sot. Quelque curieufe que foit cette Diffcction , nous ne nous y arrête- rons pas ; non plus que fur le Chapitre cin- quième , qui contient diverfes remarques relatives à cette expérience. Dans le Chapitre fuivant, l'Auteur mon- tre que, quelque avantageufes que foyenl les Richeffes, elles font fouvent fuivies de grands inconvénient. Cette considération l'a porté à y chercher du remède. A for- ce de méditations , il a enfin inventé un Miroir , dont les effets font merveilleux pour cela. Voici la defeription qu'il en donne. ,, Laperfonne, qui s'y regarde, s'y „ voit tout d'un coup in puris naturalibus. „ Toutes les Maladies de l'Ame y font ,, peintes des plus vives couleurs ,• & il „ montre le fond des moindre^ replis du „ Cœur. Les Défauts y paroiffent dé- 5, gagés de tous les déguifemens qu'ils em- 3, pruntent de l'Artifice, de la Grandeur, „ de la Pompe, de laDiffimulation,desMaxi- ,, mes corrompues du Monde, de l'Amour „ propre , &c. ; & ils y paroiffent dans „ toute leur laideur. ... Le revers of- „ fre un fpectacle tout différent: ce font „ l€« Avril, May et Juin. 1744. 95 „ les Beautés qui naiflent de la vraye Hu= „ manité, de la Modeftie, de l'Humilité, „ de la CompaiTion pour les maux d'au- „ trui, de la XeconnoifTance pour les bien- ,, faits reçus, de la Condefcendance, de „ la Politefle, de l'Affabilité, de la Gé- „ nérofité, de la Vérité, de la Sincérité, „ & de toutes les autres qualités qui fonc „ le Caractère d'un Honnête Homme (a). " Les Cures que l'Auteur a faites avec ce Miroir Pfycboptique font en grand nombre & meryeilleufes. Tout le Chapitre Vil eft employé à rapporter les Certificats des Ma- lades mêmes qui ont été guéris par ce moy- en. Ils font , pour le moins , auflï cu- rieux que ceux des perfonnes guéries par l'Abbé Paris ; & qui font une fi belle figu- re dans le grand Ouvrage de Mr. de Mont- geron. L'on en jugera par le premier en ordre, que nous allons traduire. ,, Moi, fouflïgné, certifie à un chacun, qu'ayant fait un héritage confidérable auquel je ne nYattendois pas, je tombai tout d'un coup dans une Maladie d'Elpric fi terri- ble, qu'il m'eft prefque impofilble de la décrire. Je conçus une grande idée de ma Perfonne & de mon Mérite; je me remplis d'orgueil & de fierté; je me laif- fai aller à des fentimens de mépris pour tout le monde, fur tout pour ceux qui avoient moins de bien que moi ; l'in- gratitude s'empara fi bien de mon Ef- » prit , i ) p. 80, Si. 96 Bibliothèque Britannique, „ prie , que j'oubliai tous les bienfaits que „ je pouvois avoir reçus ; & cela d'autant „ plus aifément que je m'imaginois qu'il „ étoit au deflbus d'un Homme de façon* „ comme moi , d'être reconnoiflant , & „ de fe croire redevable à quelqu'un. Mais „ en me regardant fréquemment dans le „ Miroir Pfycboptique , nouvellement in- „ venté par l'ingénieux Mr. J o a c h i H „ Philander, je fuis, grâces à mon „ étoile, & aux travaux incomparables de ,-, cet Honnête Homme, fi bien guéri, que ,, je regarde la reconnoiflance envers les „ perfonnes du plus bas ordre qui m'ont „ fait plaifir , comme une qualité bien- » féante aux perfonnes du plus haut rang; ,, & que je crois réellement que ceux qui ., n'ont pas du bien peuvent avoir d'aum* „ beaux Talens , & autant de Mérite que „ moi même. Etoit figné , Pelfy Penny- „ > 83. Avril, May et Juin. 1744. 97 a produits , & fur Tes Cures. Nou< n'en rapporteront au'une feule. C'eft la répon- fe à cette auetticn: Pourquoi dans ces Cer- tificats n'elt il fait mention de la guérifon d'aucune Femme, & pourquoi n'y eft il parlé que d'un ieul Lord? ,, Quant au „ premier pomt , dnil, (a) la raifon en „ eft, que l'Orgueil, la Vanité, l'Amour „ propre, le Mépris pour les autres ,1'En- „ vie qu'on leur porte , & une é::ange „ circulation de Bagatelle^ de Co!:fichecs „ dans leur tète , font prefque naturels „ aux Femmes dès le berceau , fans que „ le fecours de l'Or foit néeelTaire pour „ les fdire naître; ce qui rend leur guéri- „ fon trop difficile pour être entreprise . . . „ D'ailleurs , les Femmes ont accoutumé „ d être flattées depuis leur enfance ; de ,, forte que leur naturel ne fauroit fup- „ porter qu'on les repréfente au jufte „ comme elles font. Je dois cependant :, dire, pour leur rendre juftice , que je „ n'ai pas remarqué qu'une grande & fubi- „ te Fortune produife chez elles de fi grands „ Changemens,que chez les Hommes .... ,, Quant au fécond. point, continue-t-il , (b) „ j'avoue que j'ai guéri fort peu de Lords,* >, & cela avec de grandes difficultés. „ Je ne fais ce qui en eft , mais Tes ,, perfonnes de qualité d'aujourd'hui , „ fonc de fi difficile accès pour qui- ,5 conque ( a ) p. 107. ( h ) p. 108. TmsXXÏII. Part. L G 9 8 Bibliothèque Britannique, , conque n'a pas un carotte à fix che- „ vaux , qu'un homme de médiocre for- »î tune, quelque orné que foit fon Efprit, „ ne peut pas être admis à avoir avec eux „ une converfation un peu familière , à ,, moins qu'il ne dépenfe la moitié de fon », revenu annuel pour faire cette vifite. „ Ils regardent comme au deflbus d'eux de „ faire quelque attention à ce que dit une •„ perfonned'un rang inférieur au leur ... Il „ eft vrai que 11 vous pouvez ramper, & » applaudir à tout ce que dit Mylord;oUj „ par vos bouffonneries, vous rendre vous „ même ridicule à tout le rerte de la com- „ pagnie; ou enfin, vous rendre néceflai- „ re dans de certaines chofes , aux quelles ,» un homme d'honneur n'oferoit toucher ,, tïe peur de fe falir; l'on fera attention , à vous pendant quelque tems. " L'Auteur juftifie tout ce qu'il vient d'a- vancer fur le compte des Grands par une aventure qu'il eut dans une Hôtellerie a- vec quelques Seigneurs. Nôtre Docleur y étoit arrivé le premier, dans un équipage honnête , & avec un laquais en livrée neuve. Il étoit donc en poiTeflîon de la meilleure place auprès du feu, & du feul fauteuil qu'il y eût dans le logis, lorfque ces Meilleurs arrivèrent. On ne l'en débuf- qua point; &, en conféquence, il eut le haut bout de la table à fouper. Duranr je repas, ces Seigneurs qui ne le connoif- foient point, eurent beaucoup d'égard pour tout ee qu'il difoic j & faifoienc cas dé Avril 9 May et Juin. 1744. 99 fon jugement, s'en rapportant volontiers à fes décidons. Mais , fur la fin , chacun s'étant fait connaître , les Lords n'eurent plus que du mépris pour lui, quelque dé- férence qu'il eût pour leur rang. Toute cette Digrefiion eft afiaifonnée de railleries fines & délicates fur les manières des Grands. L'on trouve en divers endroits de cet Ouvrage des Avtrtijjemens , dont il ne fe- ra pas inutile de donner ici un Echantil- lon. 3, Il y a fur le tapis , efi il dit dansVun „ d'eux, (a) un Projet de Soufcription , pour ,, tranfplanter nôtre NobleiTe de lui) S „ de l'autre Sexe dans un Pais nouvelle - „ ment découvert fous le Pôle Arctique , „ où elle aura l'avantage de ne point voir „ le Soleil pendant fix mois, (Se de dormir du- ,, rant les lix autres, Ce Projet eft fondé „ fur ce que pendant toute l'année la No- „ bleiïe trouvant à peine le jour allez long „ pour dormir, & la nuit aflez longue pour „ fe divertir, elle n'aura pas le même in- „ convénient dans cette Région , oh il . n'y a jamais qu'un jour & une nuit. " La nouvelle invention de Mr. Philan- der ayant fait du bruit , elle lui attira un grand nombre de Lettres de la part de di~ verfes perfonnes, tant connues qu'incon- nues; qui le confultoient fur plufieurb Ma- ladies d'Efprh à la mode, le priant, fi te' choie ctoit poiîible, de faire ufage de 118. ^ ïoo Bibliothèque Britannique, Miroir, pour les guérir: ces Lettres, a- vec les remarques de nôtre Auteur, font la matière du Chapitre IX. La première eft d'un honnête Eccléfiaftique , qui le follici- te à entreprendre d'arrêter les progrès d'u- ne Maladie qui caufe bien du ravage par- mi les Grands :c'eft unePhrénéfie Athéïfti- que, qui s'eft emparée de leur cerveau, & les porte à violer fans pudeur tous les De- voirs de la Morale. Sur quoi Mr. Phi- lander remarque, que Ion Miroir peut bien difpofer ces perfonnes à fouffrir d'ê- tre guéries, mais c'eft là tout. Il propofe donc cet autre remède. Comme ces Mef- fieurs n'ont de crainte que pour la Poten- ce & les Bourreaux , il ne doute pas que s'ils fe faifoient une peinture bien vive de l'un & de Fautre , ceia ne leur fit du bien. Et pour augmenter l'efficace du remède, il feroit bon que , chaque matin , Maître Ja- ques Te trouvât a leur lever, pour leur de- mander civilement quand ils auront befoin de fon fervice. Nous ne faurions parcourir toutes ces Lettres dans un Extrait: bornons nous donc à la cinquième y dont le fujet eft très inté- reflant. La voici, (a) „ Ne pourriez „ vous point, Monfieur, par vôtre addref- „ fe, ou au moyen de vôtre Miroir, gué- „ rir une Maladie tout à fait extraordinai- „ re qui s'eft emparée des facultés de nô- », tre jeune NoblefTe, tant de la Ville que „ de ( * ) p. K>4, i6f. Avril, May et Juin. 1744. ioï de la Campagne. La plus grande par- tie de ceux qui la compofent a totale- ment perdu l'ufage de la Parole , & pref- que la faculté de penfer Il eit vrai qu'ils peuvent encore former des fans articules, mieux que de certains Ani- maux, pour exprimer le befoin , qu'ils ont de manger ou de boire , ou quel- qu'autre néceflité de la partie animale. Mais cela ne s'étend pas au delà de ce que les autres Brutes lavent faire. Lorf- qu'its font enfemble, ils peuvent aufli former un gazouillement bruyant fort fin- gulier , pour exprimer, à. la façon des autres Animaux, leur joye ou leur cha- grin: mais pour ce qu'on nomme Langa- ge humain, ou Converfation, il ne faue pas le chercher parmi eux. La fubftan- ce de ce qu'ils bégayent l'un à l'autre revient, comme je l'ai dit, à exprimer leurs appétits déréglés , ou à raconter leurs infamies : tout le relie n'eft que Juremens , Malédictions, Blafphèmes, Obfcénités, & Vilenies. De forte que , vous feriez avec eux jour & auie , fans rien entendre qu'on pût appeller Con- verfation^ vous préféreriez d'être fourd ou muet , à entrer dans des entretiens , auflî fcélérats. Quoique , quand ils font , enfemble ils foyent les Brutes les plus , bruyantes du monde ; cependant lorf- , qu'ils ié trouvent en compagnie de gens , de bon fens, ils font muets comme des .» poiflbns. Ils font tout à fait ignorans G 3 „ dans 102 Bibliothèque Britannique, ... dans ce qui regarde les Sciences, l'hii- ;, toire, le Gouvernement, l'Etat, ou ,, même les affaires les plus communes de „ la vie. Une Donzetle , un Chien, un ;. cheval , font les iujets principaux fur les quels ils s'étendent : en un mot , ,, Mcnlieur , le babil d'une troupe de „ Corneilles e(t beaucoup plus naturel & i plus 'inftruftif. '' Terminons cet Extrait par les judi- eieufes réflexions de Mr. Philander fur cette Lettre. Il remarque d'abord que Ton Miroir feul ne fauroit guérir cette Ma- ladie ; parce qu'outre des facultés natu- relles, il faut, pour foutenir une Çonver- fation, avoir une bonne provifion de feien- ce dans la tête. ,, Or i nôtre jeunelTe , -,, dit il\ (a) a un grand foin de ne faire „ aucun amas de cette nature ; & de fe „ moquer de toutes les belles connoiiîan- „ ces. Ils vous diront avec la plus gran- „ de impudence, qu'il effc inutile de favoir ,', les règles de la Morale, puifque leur „ principal foin eft de vivre dans ce mon- „ de fans règle : parler de Science en corn- s, pagnie, c'eft pure Pédanterie: l'Hiftoi- ,> re ne nous apprend rien que nous ne oyions de nos jours ,..La Philcfophie » n'eft que pour les gens graves, qui ne „ font bons à rien autre chofe: les Ma- h thématiques font devenir fou : le Gou- font au tf- ? Avril 3 Ma Y et Juin, 1744. I03 a, mon des affaires : la Religion n'eft qu'u- „ ne fourberie des Prêtres : les affaires de 3, la vie ne regardent que ceux qui ont 3, befoin de faire fortune : c'eft ainfi qu'ils 3, banniflent tout ce qui pourroit fournir 3, matière à une Converfation raifonna- 3, ble. " La première chofe donc qu'il leur confeille; c'eft d'apprendre à penfer: enfuite ils doivent Je former le goût fur ce- lui des Anciens : enfin , il faut tâcher de leur faire comprendre tout ce qu'il y a de délicieux à confidérer „ la fuite des v Royaumes ; les Révolutions des Etats » & des Empires ; la Forme des divers „ Gouvernemens, vus de leur bon & de » leur mauvais côté; la diverfité des Cou- 3, tûmes , des Loix & des Mœurs des dif- n férens Peuples du Monde,* & la prodi- 3, gieufe Viciflïtude , que la fortune d'un „ côté 3 & la fagefle d'un autre 3 occafion- >, nent dans les événemens. .. Tout cela „ leur ouvrira l'Entendement, & leur ren- „ dra facile l'application aux Sciences plus » fublimes. Alors, ils feront charmés de » fe rendre attentifs' au bel arrangement „ qui règne dans les œuvres de la Nature ; ,>& à cette merveilleufe encliainure de „ caufes & d'effets. Mais puifque nous ne ,, nous fommes pas donné l'éxiftence nous t, mêmes, combien ne feroit il pas indigne v d'une Créature raifonnable d'ignorer ce? ^ grand & glorieux Auteur de tous les E- >, très? Ne faut il pas être dénaturé pour ,. biatbhémer fon Nom , & méprifer fes G 4 ,3 Loix? ï©4 Bibliothèque Britannique, vr Loix? Quelle injuftice & quelle ingrati-. „ tudc de ne pas lui témoigner nôtre re- „ connoifiance pour tous fes Bienfaits 7 ,, N'eft il pas tout à fait raifonnable de „ nous inftruire de fa Volonté? Avec quel » emprefièment ne doit on pas lui rendre „ le Culte qui lui eft dû? Combien n'eft ^ il pas néceflaire de le connoitre; & dan- » gereux de le lui refufer? Si nos jeunes », gens, co7itinue-t-il , vouloient s'appliquer „ à des fujets fi nobles & fi vaftes, & fe „ familiarifer avec eux en s'en entretenant » enfemble; ils parviendroient enfin à a* >, voir l'ufage de la Parole , fans cela a » ils ne parleront toujours que comme des », Perroquets. " ARTICLE V. Remarks on a late Pamphlet 9 intit!ed> Chriftianity not founded on Argu- ment. In a Letîer to a Friend. By John Leland, D. D. Londen : printed for R. Hett , at the Bible and Crown in the Pouîtry : and fold by J* $ragg in Wejlminfter-Hall. 1744. Ceft-à-dire: Remarques fur une Brochure 9 ou F on prétend prouver que le Chriftianifme n'eft t>as Avril, May et Juin. 1744. I0f pas fondé fur des Preuves du r effort de la Raifon : Ecrites en forme de Let- tre , parle Dr. J, Ljiland. C'eft une Brochure in 8°. de 84. pp. La Se- conde Lettre en contient 102. SI la Religion eftmalicieufement attaquée en Angleterre y elle y eft auiB défendue avec beaucoup de force & un grand zèle. L'Incrédulité ne fait aucun effort qu'il ne fe préfente inceflamment plufieurs Théolo- giens pieux & favans , pour repouflér fes injuftes attaques. Nous avons rendu comp- te dans la dernière Partie de ce Journal (a) d'un Ouvrage, donc l'Auteur femble avoir eu pour but de fapper la Religion par fes fondemens les plus folides. Il n'eut pas plutôt paru, que Mr. B enfin fe mit à la brèche,* & réfuta folidemerit cet Ecrivain. Nous avons aufli donné l'Extrait du Livre de ce Théologien (b). D'autres ont en- core pris la plume contre le même Auteur. De ce nombre eft Je Dr. Leland, déjà connu par la favante Réponfe qu'il a faite au Cbriftianifme aujjî ancien que le Mon- de , de Tindal\ & par la Béfenfe de l'Auto- rité du V. & du N. Teftamcnt, contre le Pbilo/opbe Moral. Lorfque Mr. Leland é« çrivit ces Lettres, il n'avoit vu aucune des Répon- ( a ) T. XXIÏ. Part. 1. p. 249. ( b ) ibid. p. 263. G 7 106 Bibliothèque Britannique , Réponfes qu'on a faites à l'Auteur qu'il ré- fute. Dès lors, il en a lu une partie,* ce qui lui avoit fait prendre la réfolution de iupprimer fon Ouvrage, déformais inutile, à ce qu'il lui paroiflbit : mais des perfon- nes , au jugement des quelles il défère beaucoup , ayant penfé tout autrement , il s'eft rendu à leurs imftances. Comme l'on a été partagé en Angleterre fur les vues de cet Auteur, qui a prétendu que le Cbrifiianifme lïétoit point fondé fur des Preuves du r effort de la Raijbn , Mr. Ben- fon s'êtoit abftenu de décider fur ce fujet. Il n'en eft pas de même du Dr. Leland. En parlant de cet Ecrivain, voici com- ment il s'exprime: „ Il parle fréquemment 3, avec de grandes apparences de refoefr 3% de nôtre Sauveur , de la Foi , de la Gra- „ ce de Dieu & de fon St. Efprit. Il fait ,, beaucoup d'ufage de certaines phrafes ^ „ employées dans un bon fens par des „ perfonnes pieufes: mais il eft clair qu'il „ îp'-en agit ainfi ., que pour expofer laRe- „ ligion & la Foi aux railleries & au mé- s, pris des Hommes. En un mot , il me ,, femble que le but de fa Lettre eft de „ détruire toute Religion & la Rai fon elle „ même ; & de renverfer tous les princi- „ pes fur les quels l'une & l'autre font é- „ tablies (a). " C'eft ce que Mr. Le- land s'attache à prouver, en expofan: e manière claire & fimple le Svfthçme. de Avril* May et Juin. 1744. 107 de cet Auteur. Comme nous avons déjà eu occasion de le faire connoitre, il feroit fu- perflu d'y revenir de nouveau. Il ne fera cependant pas inutile de tranfcrire ici la comparaifon qu'il fait de ce Syfthèmeavec celui de l'Ecriture Ste. „ Selon l'Anonyme , dit Mr. Leland, (a*) „ la Foi & la Religion ne jont pas de nature „ à être enfeignées : mais félon l'Evangile la „ Foi eft ordinairement l'effet des inltruc- „ tions que l'on entend (b). Selon lui , la „ Foi devient tout d'un coup parfaite, dans „ un injlant , & ce n'efl point par degrés qu'on „ l'aquiert: mais félon l'Evangile , elle „ peut être fincère quoique foible; elle a „ fes degrés & fon accroiflement , & il faut a, d'ordinaire du tems & des peines pour „ la former & la faire croitre (c). Dans „ fon plan, toutes leslnftru&ions externes „ font parfaitement inutiles ; & les Chié- „ tiens ne doivent point s'inftruire l'un „ l'autre: mais dans celui de l'Evangile, „ les Inftru&ions de cet ordre font né- ,, ceflaires ; & \qs Chrétiens y font ' exbor- ,, tés à s'enfeigner & a s'avertir réciproque- „ vient... La Foi recommandée dans l'E- „ vangile eft fondée fur la ConnpilTance , „ & l'Entendement du Fidèle doit être é- m claire (d): mais celle de cet Auteur eit fane (a) p. If, 16. (h) Rom.X. vf.14. Matth XXVÏU. vf. ï9,zo (c) Rom. XIV. rf. 1. 2. Theff. I. xi. ïude vf. 20. ri) Phil. X. vf. 9 * Gbl!. I. vf. o, to i©8 Bibliothèque Britannique, ,, fans Connoi flan ce; & l'Entendement n'y ,, a aucune part. Selon lui encore, le Zeie ,, pour la Foi profeiTée par les Chrétiens eft „ un Zèle fans Connoi (Jane e : au lieu que l'E- „ vangile defaprouve le Zèle de cet or- ,, dre(V). Dans Tes idées, on ne rend & „ l'on ne fauroit rendre aucune raifon de fa „ Foi: mais l'Evangile iuppofe le contrai- ,, re; puifqu'il exige des Chrétiens d'être „ toujours prêts à rendre raifon de leurs Efpé- „ rances (b) Selon lui, l'Examen & les ,, Recherches font abfolument incompati- „ blés avec la nature de la Foi Chrétien- ,, ne: mais félon l'Evangile, il faucrecher- ,» cher & examiner (c)... Enfin , félon „ lui , la Foi Chrétienne n'eft en aucune „ manière l'effet des Miracles ni des au- „ très Preuves externes que le Sauveur a ,, données de fa Miflion , non plus que ,, d'aucun des Faits extraordinaires rappor- ,, tés dans l'Evangile: au lieu que l'Ecri- „ ture en appelle toujours aux: Miracles de „ J. C. comme à une preure autentique ,, de la Divinité de fa Million (d). " Après cette comparaifon générale, Mr. Leland entre dans un examen fortéxadi des preuves que l'Auteur a données de fon Syfthème. Il les prend l'une après l'autre ; & en montre le peu de foîidité. La Pre- mière (» Rom. X v(. i. (à) i. Pier. III. vf. if. (.;) i. ThdT. V. vf. Zl. Aft. XVII. Yf. H, il *d) Jean XX. vf. ?i, ÀVRiio May et Juin. 1744. 109 mière Lettre eft uniquement dellinée à 1 exa- men de la Première Partie du Plan de cet Ecrivain; où il a prétendu montrer, qu'il ejl impoffible que la Raijon puijje être , foit par ja nature , jcit par celle de la Religion , le Principe par k quel Dieu a eu intention de co?i~ duire les Hommes à lavraye Foi. Il employé la Seconde à l'examen des deux autres Par- ties de fon Plan général. L'on ne s'attend pas que nous fuivions nôtre Auteur dans tous les Raifonnemens qu'il fait contre fon Adverfaire ; puifque, à divers égards , ils font les mêmes que ceux de Mr. Ben/on , dont nous avons déjà rendu compte. Ce- pendant comme il s'y trouve plufieurs ré- flexions nouvelles, l'on ne fera pas fâché d'en voir ici l'Extrait. Si la Foi des Chrétiens, dit l'Auteur de la Lettre, devoit être fondée fur des rai- Ions, elle feroit l'effet d'un férieux Examen des preuves qui en établiflent la vérité: mais, pour faire cet Examen, il faut que l'Efprit foit en fufpens ; & demeure, pendant quelque tems , incertain 11 l'Evangile eft une vraye ou une fa ufle Doctrine: or, cec état de Sufpenfion , n'étant autre choie qu'une véritable Incrédulité, eft en lui mê- me très criminel,* & peut durer fort long- tems: car qui peutdécerminer quand l'Exa- men fera fini? De forte que fi la Révéla- tion exige que Ja Foi foit établie furlaRai- fon , elle recommande, par conféquenc, l'Incrédulité i_our un tems; ce quj l'on né faui i io Bibliothèque Britannique , fauroit concevoir. Telle eft l'obje&ion: voici Ja réponfe de Mr. Leland. Tout ce raifonnement , dit il , (a) efl bâci fur lafaulTe fuppofition, que tout Exa- men fuppofe une parfaite Neutralité dans i'Efprit de celui qui le fait , & une Incré- dulité pendant qu'il dure. Mais n'éxaminc- t-on pas tous ies jours grand nombre de chofes j de la vérité des quelles on ne dou- te pas, afin de les connoitre d'autant mieux, & d'en avoir des idées plus juftes? Toute îa Neutralité, ou l'Incrédulité, nécefTaire a- îors confifte dans la difpofitionfincèred'em- brafler la Vérité de quelque côté qu'elle fe trouve: mais cette Neutralité ne peut elle pas fe trouver dans une perfonne, qui, en entreprenant d'examiner quelque chofe, a plus de raifon de la croire vraye, que de Ja croire fautie. Tout le Doute qu'il peut avoir alors fe réduit à la pofiibilité qu'il y a, que la chofe foit autrement qu'il ne l'a- voit d'abord crue: mais ne peut on pas croire qu'il eft polTible qu'une chofe foit fauffe , & avoir cependant de fortes rai- fons de îa croire vraye? „ Si, par éxem- 3, pie, une perfonne'avoit été élevée avec „ foin dans la croyance qu'il y a un Dieu 5 ;, une Providence & de la différence entre le », Bien & le Mal ; & qu'en même tems on ,, lui eût enfeigné les raifons fur les quei- ;s ces principes font fondés ; il ne fe-. fc pas néceflaire , pour les examiner ft de W P. -7, jtf, R& Avril, May et Juin. 1744. ni K de nouveau, d'être parfaitement "indiffé- „ rent à leur égard, ou même de ne les pas „ croire. Elle pourroit procéder à cet Exa- „ men, fans que fa Foi enfouffrîtrien; par- „ ce qu'à melure que cette perfonne avan- „ ceroit dans fes recherches, fa Foi pour- „ roit trouver un nouveau degré d'éviden- „ ce , & fa conviction devenir plus forte. j, Mais, fuppofons, dit il encore (a) , que „ le Doute ou l'Incrédulité foitinféparable ,, de l'Examen, il ne s'enfuit pas de ce qu'il ,, efl légitime pendant un certain tems, „ qu'il le foit toujours ; ni , de ce qu'il efl ,, innocent avant l'Evidence, qu'il le foit ,-, aufli quand on l'a toute entière. L'on „ ne fauroit railbnnablement nier , qu'en „ plufieurs cas le Doute ne foit une mala- „ die de l'Ame, & le fruit de principes cri- „ minels . . Quand l'Evidence efl: allez gran- ,, de pour lever les Doutes; & qu'on de- „ meure dans l'Incrédulité par unemauvai- „ fe difpofition d'Efprit elle e il alors „ vicieufe & déraifonnable , & pendant „ qu'elle dure l'on efl criminel & compta- ,. ble de fa conduite au Juge Suprême, qui „ connoiiTant les fecrettes difpofkions du v cœur de l'Incrédule , peut l'en punir avec „ juftice. " Une autre objection de TAdverfaire de •Mi. Leland, efl que, fi l'intention de Dieu avoit été de faire naître la Foi par ■■men des raifons qui lui fervent de fnn de:: ïi2 Bibliothèque Britannique, dément, il auroit rendu tous Jes hommes capables d'un tel Examen: mais comme la plupart font hors d'état de le faire , il en conclut que le but de la Divinité n'eft pas de produire la Foi dans leur cœur par ce moyen. Nôtre Auteur nie d'abord le principe qui fert de baie à cette objection. II montre que le plus grand nombre des Hommes, & même tous , tandis qu'ils font dans leur bon fens, ont les facultés nécefTaires pour fe diriger dans la conduite ordinaire de la vie; & qu'ils en font ufage pour pofer des principes & en tirer des concluions. Or, ii n'en faut pas d'avantage pour examiner les Vérités principales de la Religion, cel- les qui font absolument nécefTaires au Salut. Il eftvrai qu'il y en a d'autres , dont l'Exa- men requiert une plus grande capacité ; mais la connoiiïance n'en eft pas d'une né- cefiité abfolue, & Dieu ne l'exigera jamais de ceux qui n'ont pas les facultés nécefTaires pour les connoitre. S'il s'en trouvoit même qui fulfent hors d'état de fe former de juftes notions des Vérités Fondamentales de la Ré- vélation, & des preuves qui les établirent, il ne faut pas douter que le Dieu de Mifé- ricorde n'ait égard à leur foiblefle. Une Foi , fondée fur des raifons , dit en- core l'Anonyme , ne produira jamais les ef- fets que l'Evangile attribue à la vraye Foi. Elle fera deflituée du Zèle , de la Perfévé- rance , &de la Satisfaction intérieure qui en doivent être les fuites; & elje n'aura jamais Avril, May et Juïn. 1744. rrg h force de foumettre nos appétits déréglés & nos paffions , beaucoup moins encore celle de nous portera fouftrir le martyre. Comme cette difficulté eft fondée furies faufles idées , que fon Auteur fe forme du Zèle & de la Persévérance Chrétienne, Mr. Leland tâche d'abord de les reclifier. Le Zélé du Chrétien ne doit pas être fans Connoiffance; ni la Per/évérance une aveugle Opiniâtreté à retenir follement ce qu'il a une fois chauffé. Mais l'un & l'autre doivent être l'effet d'une conviction, fondée fur des preuves claires & diftinctes. 11 ne faut pas craindre qu'une Foi , établie fur un tel fon- dement, (bit précaire fcF fujetté à changer ; & hors d'état, par conféquent, de procu- rer à celui qui la poiTéde cette joye inté- rieure, fruit de la pleine certitude qu'il a d'avoir la vraye Foi : car enfin on peut être fuffifamment allure de la Vérité, pour avoir un jufte fujet d'être fatiffait , Iorfqù'aprèè un mûr examen , on la juge fondée fur de folides raifons, quoique en même tems on fâche fort bien qu'on n'eft pas infaillible & qu'on peut fe tromper. Si dans les Af- faires de la Vie cette entière Certitude é- toit toujours néceflaire pour agir, Ton ne fe détermineront jamais dans les ch'ofes fur les quelles l'on n'a qu'une Evidence Mora- le: mais comme cette Evidence fuffit pour cous faire agir dans le cours des Chofes du Monde, elle eft aufi! fuffifante dans celles qui concernent la Religion. Cette feule ré- flexion renverfe la féconde partie de la dif- Tmt XXIII. Part. I H ficulté H4 Bibliothèque Britannique, ficulté propofée. Car enfin, cette Evidence Morale a un degré de force aflez grand , pour nous faire triompher de nospanchans les plus forts, & pour nous engager à fai- re le facriflee de notre vie s'il en ell be- foin. La Seconde Lettre eft employée à l'exa- men des deux dernières Parties du Plan de l'Auteur Anonyme ; dans les quelles il a prétendu montrer, que , félon V Ecriture % la Foi ne peut pas être l'effet du Raifonnement ; & qu'elle propofe un autre moyen pour parvenir à la comioifjance & à la perjuafion des Vérités de la Religion: moyen, qui confifte dans l'Action immédiate de l'Efprit de Dieu fur le cœur des Fidèles. Donnons encore l'Extrait de quelques-unes des réflexions de Mr. Leland fur chacun de ces deux chefs. Cet Auteur a avancé que, ni J. C. ni les Apôtres, n'ont employé des raifons pour faire naitre la Foi dans le cœur de ceux qui les écoutoient; & qu'ils ne fe font fer- vis pour cela que de leur fimple autorité : ils éxigeoient qu'on crût , & l'on coyoit. Sur quoi Mr. Leland remarque qu'on n'a qu'à lire l'Evangile, pour fe convaincre delà faufleté d'une pareille aflertion. Nôtre Sau- veur & fesDifcipîes ont conftamment don- né des preuves de la Divinité de leur Mif- fion; & c'efl en vertu de ces preuves qu'ils éxigeoient qu'on ajoutât foi à ce qu'ils en- feignoient. Cette propofition eft établie ici d'une manière claire, folide & bien détail- lée: AvrviL, May et Juin. 1744. nj lée: après quoi Ton examine chacun des Paflagcs en particulier , qui ont été allé- gués par l'Auteur pour foutenir ce Para- doxe. Comme il eit aife d'y répondre en faifant attention aux circonftances , qui doivent en déterminer le fens , nous ne croyons pas devoir nous y arrêter. Cet Auteur a bien fënci qu'on ne man- queroit pas de lui objecter les Miracles de J. C. , qui étoient tout autant de preuves' delà Divinité de fa Miffion: aufli remaï- que-t-il que le Sauveur ne les a jamais fait envifager fous cette face ; & que , quand bien même il auroit voulu les faire fervif de preuve, ils n'auroient rien prouvé ^par- ce que les faufles Religions ont auffi eu leurs Miracles. Pour répondre à cela, Mr. Le l a nd montre d'abord la faufleté de la première partie de l'objection , en prou- vant que J. C. en a appelle diverfes fois à fes Miracles pour autorifer fa Miffion. En- fuite il compare les Oeuvres extraordinai- res du Sauveur avec celles, qui ont été o« pérées par des Impofteurs, pour abufer le Peuple ; & fait voir qu'il y a entre elles une fi grande différence, qu'il eft impoiTi- blc de les mettre dans la même ckfie, La Troifième Partie de la Lettre de l'A- nonyme eft deftinée à prouver que la Foi eft l'effet de l'Action immédiate & irréfif- tible du St. Efprit. Mr. Leland n'ou- blie pas de faire appereevoir la contradic* rion qu'il y a ici dans le Syfthème de l'Au- teur ; & que nous remarquâmes lorfque H 2 nous ii(5 Bibliothèque Britannique * flous en rendîmes compte (a). Elle con- fiftc en ce que, fi l'Action du St. Efprit eft irréfirtible , il ne fauroit y avoir d'In- crédulité ; parce qu'on ne peut pas réfif- ter à Dieu. Après cette remarque, il exa- mine les Partages , allégués par fon Ad- verfaire pour établir cette prétendue Ac- tion du St. Efprit; & montre qu'il a con- fondu deux chofes très diftindr.es, en re- gardant ce qui eft dit des dons extraordi- naires, comme il cela dévoie durer dans toute la fuite des fiécles. C'eft en faifant ufage de cette même diftinction que Mr. Leland répond aux exemples de Con- verfion momentanée & de Foi produite dans un inftant, fur les quels cet Ecrivain a prétendu appuyer fon Syfthème. C'étoient des événemens miraculeux, qui ne tirent point à conféquence pour l'avenir. A cet- te réflexion générale , il en ajoute plufieurs particulières, relatives à divers PalTages, ou'on ne fauroit expliquer par le moyen de cette clé. Enfin , il termine ce qu'il s'étoir propofé de dire fur ce fujet par cet- te importante remarque. ,, Après tout , „ dit il 9 (b) en accordant tout ce qu'on „ peut raifonnablement demander , que „ dans cet état d'obfcurité & de corrun- „ tion le fecours de Dieu nous eft nécef- „ faire, pour nous engager à croire & à ,, recev oir la Religion , & à lui faire pro- „ duire ( a ) Tom. XXIÎ. Far a. p. i0o. ( l ) p. *8, 69. Avril, May et Juin. 1744. 117 ,, duire du fruit fur nos cœurs ; & que j, Dieu eft difpofé à l'accorder à ceux qui „ le lui demandent dans de bonnes difpo- „ (irions, & qui défirent iincèrement de M connoitre fa Volonté,- c'eft une bonne „ raifon pour nous porter à recourir à lui „ par la prière, mais ce n'eftpasunepreu- ,, ve que nos efforts foyent inutiles: car ,, enfin, le but de Dieu, en nous accor* ,, dant ce fecours , n'eit pas d'exclure w l'ufagc de nos facultés, mais plutôt de „ nous exciter à nous en fervir. Il ne ,, s'enfuit pas non plus de là , que la Re- „ ligion ne ibit en elle même quelque cho- „ fe de raifonnable , puifque toutes les „ preuves fur lesquelles elle eft fondée de- „ meurent dans leur force. D'ailleurs , „ les fecours, que Dieu dans fon infinie ., bonté daigne nous accorder pour fuve- J, nir à nôtre foiblefle , doivent nous ren- „ dre plus attentifs à faire tous nos efforts, ,, pour bien entendre la Religion & pour ,, pratiquer les Préceptes qu'elle renfer- „ me: dans quel cas, ces fecours de Dieu „ nous feront infiniment avantageux. Mais ., fi par orgueil, par opiniâtreté, ou par „ d'autres mauvaises difpofitions, nous ne „ nous rendons pas à l'Evidence, & que „ nous réfiftions à la Grâce, cela augmen- „ tera le crime & aggravera nôtre con- ,, damnation. " La manière, dont Mr. Leland répond aux autres difficultés de fon Adverfaire, n'eft pas moins triomphante. Il n'en omet H 3 aucune. n8 Bibliothèque Britannique, aucune , & les examine l'une après l'autre avec un très grand foin. Il le fuit pas à pas; au lieu que Mr. Benfon femble avoir eu defleio de le réfuter d'une manière plus fy (thématique. ARTICLE VI. Lettre de Mr. B. à Mr. . . . contenant quelques Particuhritcz curieujesjur M:- Jleur Pocock Auteur du Voiage en Egipte dont on trouve l Extrait dans le Tome XXII de ce Journal , Première Par- fie , Article III. M O N S I E U R3 J'Ai lu un peu tard le Tome XXII de la Bib!ictéque Britannique. J'y ai vu avec 'beaucoup de pîaifir l'Extrait d'un Voiage de Monfr. Pocock dans l'Orient & en parti- culier en Egipte. Il eft rempli de parti- cularirezintéreiTantes. J'ai fait fur cet Ex- trait une petite Remarque que j'ai cru de- voir vous communiquer pour la faire par- venir aux Journaliftes, û vous le jugez à propos. Voici de quoi il s'agit. Monfr. Pocock décrit un Voiage qu'il fît fur le Nil en Décembre 1737. Le 8. du Mois n'étant pas aidé du vent, fes Com- pagnons de Voiage & lui trouvèrent à pro- pos de s'arrêter au Couvent de St. Antoine. Avril, May et Juin. 1744. 119 Là, dic-il , comme dans la plupart des autres Monaftères de VEgîpte, les Prêtres font tous des J'éculiers qui ont avec eux Femmes £f En- fans (a). Notre Voiageur dit enfuite en parlant des Coptes ; A la referve des Défert s de St. Antoine y de St. Macaire &f d'È/he, on ne trouve dans leurs Couvsns qu'un ou deux Prê- tres , qui font ordinairement mariez. Leur Patriarche cependant doit obferver le Célibat , &? c'ejl pour cela qu'ils le tirent d'un des Mo- naftères , que je viens de nommer (b). En ra- prochant ces deux Pafiages , on a cru y trouver de la Contradiction. Cela ne s'a- corde guère , dit-on dans une Note, avec ce que l'Auteur avoit dit plus haut , qu'à St. An- toine les Prêtres font tous mariez. Quand le Journalifte a trouvé ce Voia- geur ainfi en opofitionavecluimcme,ilne s'eft pas Convenu qu'il y a en Egipte deux Couvens de St. Antoine, l'un fur le Nil,& l'autre dans le Défert. C'eft de ce dernier que l'on tire le Patriarche, qui demeure enfuite ordinairement au Caire , & qui prend le titre de Patriarche d'Alexandrie. Le Couvent où Ton cft marie , c'eft St. An- toine du Nil. Ces deux Monaftères font diltans de plufieurs journées, l'un de l'autre. Si Ton veut s'inftruire plus en détail de la manière de vivre des Moines de St. An- toine du Défert , on n'a qu'à confulter la Re- lation (a) Tibliot. Britann. Tom. XXII* p. I04, (b) ?a$. 118. H 4 *20 Bibliothèque Britannique, lation du Père Sicard Jéfuite inférée dans les M liions du Levant. 11 place ce Cou- vent allez loin du Nil, & à l'aipecl de la Mer Rouge, il dit que les Religieux ont pour règle de garder l'obéiiïance, la pau- vreté & la chalteté; qu'on doit leur ren- dre la juftice que leur vie eft tout à fait pénitente (a). Il n'y faut donc chercher ni Femmes ni Enfans, quoiqu'il y en ait dans le ' ou vent de St. Antoine du Nil. Si vous me demandez, MONSIEUR^ quel intérêt je pren* à Mr. Pocock & à fori Ouvrage, je pourrois vous répondre que le nom qu'il porte eft déjà rcfpedtable dans la République des Lettres. 11 eft de la fa- mille du célèbre Edouard Pocock , habile ProfeOeuren Langue Arabe dans l'Univer- fité d'Orford , qui avoit une inclination particulière pour les Voiages. Il alla allez jeune en Orient, tant pour fuivre fon pen- chant, que pour aprendre les Langues 0- rientales. Mais voici une raifon plu* par- ticulière de nous afectionner pour le Voia- geur Moderne. Il paflà à Genève en 1741. Iî y féjourna quelque tems, oc nous eûmes di vertes Converfations avec lui fur fes Voia- ges. Il nous parut toujours fort fage & fort exact en nous rendant raifon de'fes difé- rentes Courfes. ConnoifTant notre Pai's comme vous le connoifTez, vous ne ferez pas fâché d'ê- tre informé d'un petit Voiage qu'il fit dans nos (a) lïiffions du levAntt Tom, F. p. 148. Avril, May et Juin. 1744. 121 «OS q , pendant le féjour qu'il y iitcz juger par là de Ton Car h voulut voir tout ce qui même l'at- tention d'un Voiageur. Sa curiolke le tourna principalement du coté de quelques Montagi \ipes extrêmement hau- tes , que l'on voit de notre Ville, à notre Levant d'hiver , ex qui paroiflent toute l'année chargées de glaces & de neige. Toutes les fois que fe promenant dans nos environs il voioit ces Cimes chenues, l'en- vie le prenoit de les aller vifiter de plus près, on lui repréfentoit que c'étoit une Courfe des plus pénible^ ; mais un peu de fatigue ne rebutoit pas un homme qui en avoit bien efliiié d'autres. Ces diflcultez ne faifoient qu'irriter fa Curiofitc. A avoir parcouru le Levant, après avoir vi- fité fur tout les Piramides d'Egipte , ces prodiges de l'Art, & ces fameux Obelif- ques fi vantez par les Antiquaires, il crut qu'il ne pouvoit pas fe difpenfer de vifiter aufTi les Piramides naturelles & les façons d'Obelifques de la plus hau^e antiquité, qui percent les nues dans les Alpes. Il fit parT tie pour cela avec quelques Gemii^hom- me< a peu près aulfi curieux &auf? fi courageux que lui. La Troupe compofée des Maîtres & des Domeitiques fe trouva aflèz nombreufe. MeDacez des mauvais chemins & des mau- vais gites, ils prirent les précautions née re<. Ils menèrent avec eux une efpéced'ho- télerie ambulante , c'eft à dire phifieurg II 5- Chevaux 122 Bibliothèque Britannique, Chevaux de bât chargez de provisions. 11 s'agiiîoit de traverfer une Province de Sa- voie connue fous le nom du Faucigni. Vous connoiflez allez ce Pais-là pour favoir que c'eit un des plus rudes & des plus efcar- pez. Quoique le trajet ne foit que de trois ou quatre jours, nos Voiageurs ne laide- rent pas de foufrir. Après une mauvaile JDurnée , les Chevaux extrêmement las , jpaflbient quelquefois la nuit au piquet , faute d'écurie , & ne trouvoient ni foin ni avoine. Leurs Maitres n'etoient guère mieux. Ils couchoient fur la paille dans une Grange, & fans le Bijjac de Sancbo > ils auroient très mal foupé. Ces Meffieurs ne laifToient pas de fe di- vertir fur cette route, toute mauvaife qu'el- le étoit. Us favoient tirer parti de tout ce qui pouvoit tant foit peu contribuer à les mettre de bonne humeur. Vous en pourrez juger, MONSIEUR, par ce trait-ci. La Caravane Angloife étant arrivée près de Salenchc , petite Ville du Faucigni, ne trouva pas à propos d'y entrer. Us aimè- rent mieux camper dans une belle Plaine, à la portée du fufil du Bourg. On drefla la Tente, & on fit les préparatifs du diner. Pendant que le relie de la Troupe fe pro- menoit dans le voifinage , notre Voiageur Pocock, qui avoit dans fes Hardes fon ha- bit Arabe, l'endoila en fecret. Ces autres îvleflieurs entrant dans la Tente eurent peine à le reconnoitre. Ce travefh'ffement fournit Avril, May et Juin. 1744. 123 fournit matière à fe divertir. D'abord on le traite comme quelque grand Seigneur venu du Levant. On place une fentinelle, Tépée à la main, à la porte de la Tente > & chacun eft dans le refpect devant lui* Les Habitans de Salenche aïant aperçu quel- que chofe d'extraordinaire , acoururent aulTi-tou En moins de rien prefque toute la Ville fe rendit autour de la Tente de cet- te Altefle Levantine, & vint lui faire le Salamalec. L'Emir Pocock foutenoit à mer- yeille fa nouvelle dignité. Il crachoit de tems en tems quelques mots Arabes, que l'on prenoit pour des ordres donnez à les gens, & qui s'exécutoient fort ponctuelle- ment. Quelques Dames de confidération voulurent aufïï avoir part au fpe&acle , mais un peu plus tard que les autres. On ne crut pas devoir les laifler longtems dans l'erreur. On leur avoua que cttte fcène Orientale écoit un pur badinage,à peu près femblable à celle de Molière dans Ton Bour- geois Gentilhomme. Arrivez au pié des Alpes pour bien voir ce qu'on apelle les Glacières, qui font dan$ des gorges de Montagne, il s'agiiïbit de gagner le haut d'une des plus hautes & des plus efearpées. Ce fut une marche de quatre ou cinq heures des plus rudes & des plus pénibles. Voici commentées Meilleurs nous ont décrit ce qu'ils virent de cette hauteur. „ De la Cime de cette Montagne, nous „ voyions la Glacière en entier. Elle's'o- froit 124 Bibliothèque Britannique, „ froit à nous à plein, & dans toute fofi „ étendue. On peut avoir couru le monde „ Iongtcms fans avoir jamais rien vu de „ femblable à ce fpeclacîe. On eft allez „ embarafle à en donner quelque idée. La „ defeription que nous font les Voiageurs 3, des Mers de Groenland paroi t en apro- 5, cher un peu. Il faut s'imaginer le Lac S9 Léman agité par une violente Bize , & 35 gelé tout d'un coup. Cette comparaifon 5, donne quelque idée de cette Glacière. „ Nous defeendimes enfuite la Montagne, „ & nous nous trouvâmes fur la Glacière 5, même. Si dans un grand éloignement , J5 eile paroit un Lac gelé tout à coup, au 3, fort du plus violent orage , dès qu'on 5, en aproche cette comparaifon paroit 5, fort foible. Ces prétendues vagues de- „ viennent d'une hauteur étonnante, & il „ y en a de plus de 40 pies. " Un de ces Meilleurs a donné une Rela- tion très curieufe de ce petit Voiage. On l'a imprimée dans le Journal Helvétique de Neuchatel , du Mois de Mai 1743- C'eftun morceau d'Hiftoire Naturelle ou il y a des particularitez très intéreflantes. Mais un plus grand détail ne feroit pas ici dans fa place. Je fuis ccc. à Genève ce 5. Mai 1744. ARTICLE Avril, May et Juin. 1744. 125 ARTICLE VII. EXPLICATION De ces paroles du Deutéronome , Les chofes cachées apartiennent à Dieu , mais les révélées font pour nous , & pour nos Enfans. Cbap. XXIX. vf. 2y. ON ne manque guère de citer ce PaiTa- ge toutes les fois que Ton traite la Queflion des Miftères de la Religion. On l'alègue pour prouver que nous ne devons pas chercher à pénétrer les fecrets que t)ieu a voulu nous cacher, & l'on metdans ce rang quelques Dogmes profonds & ab- flraits qui font trop au deflus de notre por- tée pour entreprendre de les fonder. D'au- tres difent que ces Articles fi fort au deflus de nos lum.ères , ne doivent pas être re- gaidez comme des Articles de Foi,&~pré- tendent fe fervir de ces paroles mêmes de t pour le prouver. Il efttrifte devoir ce fujet devenir une fource de difputes îères , on entend des Dogmes incompré- henfibles , on peut avancer qu'il n'y en a point de cet ordre dans la Religion. Dire qu'un Dogme eft révélé , & dire qu'il eft incomprchenfible , font des proportions qui ne fauroient s'allier. Nous révéler un Dogme , c'eft nous en donner des idées. La Sagefle de Dieu ne lui permet pas de propoter à notre Foi des Véritez que nous ne pouvons pas concevoir. Il nous feroic même impoflible de les croire. Croire uq Dogme c'eft lier les idées qu'on peut s'en former, & l'on n'en a aucune d'un Dogme incomprchenfible. On doit faire le même jugement , à plus forte raifon, des Dogmes contradictoires. Ce font là d2 prétendus Mi (lères qui ne fauroient avoir lieu dans la Révélation divine. Il eft impofTibîe que Dieu qui eft l'Auteur de notre Raifon, nous enfeigne dans fa Parole des chofes directe- ment contraires à celles qu'il nous dicte d'un autre coté, par desraifonnemens clairs & évidens que forme notre efprit fur quel- que matière. Les idées que l'on prétend unir dans un Dogme contradictoire, ne fauroient être jointes. Elles fe dérruifent réciproquement. Il eft donc impoflible de les croire , puis que croire c'eft joindre enfemble certaines idées. Si quelque Communion Chrétienne s trop T28 Bibliothèque Britannique , trop chargé de Miftères la Religion , iï y en a d'autres qui donnent dans l'extré- mité opofée, & qui voudroient les retran- cher entièrement. Ils difent que l'on ne fauroit faire une plus grande injure au Chriftianifme qu'en donnant pour des Arti- cles eflenciels ces Dogmes oblcurs & qui paiTent notre capacité. Si les Véritez Chré- tiennes font inacceffîbles, difent ils, l'E- vangile nous exhorte inutilement, ou plu- tôt ils fe joue de notre foiblefTe , quand il nous exhorte à fonder les Ecritures, & à en rechercher les fecrets. Ils ajoutent que la plupart des Miftères dont on a fait dans la fuite des Articles de Foi, n'ont été d'abord que des Expref- fions Oratoires ou Figurées qu'on emploioit pour embellir les Difcours de Religion, & pour lui attirer plus de refpecr, , & qui dans la fuite ont été prifes à la lettre, ou par préjugé ou par erreur. En introduifant dans la Religion ces Dog- mes oblcurs, on a voulu exciter l'admira- tion de la multitude , qui manquant de lu- mières & de goût, a acbutumé de trouver beau ce qu'elle n'entend pas. Les Miftères y ou plutôt les Expreffions Miftéricufes, plai- fent toujours au Peuple , parce qu'elles fem- blent renfermer quelque chofe de grand & de fubîime. Elles plaifent aux Savans, parce qu'elles fiatent leur vanité. Les Théolo- giens, dans la vue de s'ériger en Docleurs, ont fu réduire la (Implicite de la Religion en Art dificile & en Science épineufe.'Les Prédicateurs Avril, May et Juin. 1744. 125* Frédicateurs fur tout trouvent leur compte dans les Miftères , parce qu'ils donnent beau champ à l'éloquence & fouvent à la déclamation. L'Auteur de ta Religion ejencielle à V Hom- me , Ouvrage des plus hardis qui aient paru de longtems , ell un de ceux qui s'en le plus hautement déclaré contre les Miniè- res. H les regarde comme des inutilitez & des fources de difputes. Dans le deffein de Amplifier tout à fait notre créance, il n'a pas manqué d'écarter tout ce qui e(t au deflus de l'intelligence humaine. Il veut une Religion de p!ain-p;é, & dégagée de tout Dogme trop abftrait. Il commence par définir les termes. Un Miftère , dit-il, ejl quelque çbofe de caché , d'impénétrable , c? que Dieu s' ejl réfervé par devers foi. Monfr. de Roches, dans fa Lettre XXL lui répond que perfonne ne fe fait cette idée des Miftères. On dit à la vérité que ce font des chofes qui furpaffent à plufieurs égards , l'intelligence humain: , &? qui ont en- core divers coUz cachez pour nous : mais les Théologiens n'ont jamais dit que ce font des chofes cachées, abfolument parlant, £? impénétrables ; moins encore des chofes non révélées , &f que Bleu réferve par devers foi. Une chofe peut être révélée , quoiqu'elle foie pas de manière à n'avoir rien de caché pour nous. On en alègue pour exem- ple le Dogme de la Réfurredlion. Pour s'autorifer à ne rien recevoir com- me révélé, qui ne (bit parfaitement clair, Tome XXIII, Part, L I l'Auteur 130 Bibliothèque Britannique, l'Auteur de la Religion ejjencielle alègue les paroles de Moïje dont il s'agit préfen cé- ment, Les cbojès cachées apartiennent àV Eter- nel notre Dieu. Monfr. de Roches , s'en te- nant à la Verfion ordinaire, lui répond par une fage diftincb'on que l'on pourra voir dans le Livre même. Il faut fupofer qu'il n'a pas voulu s'écarter de fa matière; au- trement il auroit pu prouver par les Règles d'une bonne Critique, que ces paroles de Moïje fignifient tout autre chofe , & qu'il ne s'agit point du tout dans cet endroit de ce qu'on apelle les Miftères de la Reli- gion. Le célèbre Fofter s'eft aufli déclaré con- tre \qs Miftères dont les Théologiens ont chargé le Chriftianifme ; mais il le fait d'u- ne manière plus fage & plus ménagée que l'Auteur de la Religion ejjencielle. A parler exactement, dit-il, il n'y a point de Mijlère dans la Religion. Les Véritez qu'elle renferme font fi claires qu'il efi jur prenant qu yon y 'veuil- le encore chercher du Mijiérieux. A plus forte raifon n'y trouvera -t- on rien de contradic- toire fa). Dans fon Sermon fur ces paroles du Deu^ téroîiome que l'on aplicue aux Miftères , il fait voir „ que c'eft une foie curiofké „ que de s'atacher à découvrir ûqs chofes j, qu'on ne peut pas comprendre, qu'il eft „ de la fagefle de borner nos recherches „ aux chofes qui font à la portée de nos „ facultés C A ) Fcjler, Strmon VII. fur Demer, A'XIX. 2$, Avril, May et Juin. 1744. 131 j, facilitez naturelles, & qu'une curiofité j, qui ne fe renferme pas dans ces bornes, „ conduit au Pirrhonifme, oc détourne d'u- ,, ne étude plus importante. 11 ajoute en- ,, fin que les Dogmes qui ont produit „ les plus aigres difputes parmi les Chré- „ tiens, ont roulé fur des matières qui ne ,, font pas à notre portée, & par confé- „ quent qu'on ne doit pas regarder comme ,, fort eltencielles. * On a beaucoup vanté ces Sermons. Les Journaliftes qui en ont donné des Extraits, en ont tous parlé avantageufement. L'Au- teur de la Bibliotéque Britannique dit que Monjr. Fojler fait main baffe fur les Sfièmes particuliers des Théologiens , qu'il ramène la Religion aux principes évitL-ns de la droite rai- fon , £f à ce qui peut fe déduire légitimement des expreffions claires de V Ecriture Sainte (a). Ce qui caractérife ces Difc&uts, dit un autre Journaîifte, c'eft qu'on y trouve une grande force de raisonnement 9 & que V Auteur prend foin de ne rien établir que fur des principes in- 'ccnteflabîes de la raijhn, & fur une interpré- tation naturelle des Libres Sacrez (b). Le Public a foufai à ce jugement; on re- Ctmnott dans Monfr. Fbfter un habile Crici- quequi dévelope fort heureufement le fens d'un Paflàge de l'Ecriture Sté. Si un Texte femble quelquefois ne nous préfen ter qu'u- ne proportion générale 3 il a l'art de laref- treindre (a) Eièliot. Eritann. Tcmt II. FartieLp. 66- là) Bièltot. k-xiïnnit >'î ,m X'/L tmrè. L Art. Il, [ 2 J32 Bibliothèque Britannique, treindre & de lui donner un fens précis & particulier, qui convient parfaitement au but de l'Ecrivain Sacré. Je n'en citerai pour exemple, que la manière dont il explique ces paroles de Jérémie XVII. o. Le cœur de Ibemme efl trompeur &c. Il a lu donner à ce qui femble d'abord n'être qu'une fenten- ce générale, un fens particulier & parfaite- ment adapté aux vues du Prophète (a)» Mais il femble que fur le Texte du Deutéronome , il n'a pas fait paroitre la même dextérité. Il a bien eflaié de mon- trer que cette propofition , toute vague qu'elle paroit d'abord, ne hifibit pas de convenir au difcours de Moïfe ; voions comment il s'y efl pris. ,, Dans le Chapitre d'où ces paroles font ,, tirées , dit-il , Dieu menace des plus fé- ,, veres jugemens les Ifraélites, s'ils aban- 3, donnent fon véritable Culte. Mais com- ,, me onauroit pu demander pourquoi Dieu „ feroit tomber de fi rudes peines fur ce ,, Peuple, tandis qu'il épargneroit des Na- ,, tions idolâtres &plus corrompues , Moi- ,, fe pour prévenir cette Queltion , dit ,, dans ce Texte, qu'en plulieurscas, nous ,, ne pouvons pas découvrir les véritables ?, raifons de la conduite de Dieu. " Monfr. Fofter ne dit là rien de particu- lier , & qu'on ne trouve dans la plupart des Commentateurs. Monfr. Martin dans les Notes fur la Bible , y met précifé- menc ( * ) Sermons de Fojîer fag% 197. Avril, May et Juin. 1744. 133 ment la même liaifon. Quand Moïfe dit que les chofes cachées apartiennent à Dieu* c'ejl une Réflexion qui tendoit à prévenir la Jurprife où les Ifraéïiies aur oient pu être en en- tendant toutes ces menaces contre un Peuple qui ctoit le Peuple de Dieu , qui eft que le Seigneur a toujours des raifons pleines defageffe fi? de jus- tice dans tout ce qu'il fait ; mais que nous ne devons pas entreprendre de les aprofondir. Voilà comment Monfr. Fofter a cru, a- vec le gros des Interprètes , que Moïfe a pu enchafler cette fentence à la fin de ce Chapitre , quoique d'abord elle y paroiiïe un peu déplacée. Voions préfentement , fi l'on ne pourroit point la rendre un peu plus précife , & s'il ne feroit pas pofïïble d'expliquer ces paroles d'une manière qui les amenât encore plus naturellement dans l'endroit où elles fe trouvent. Une Remarque que l'on a faite il y a longtems, & qui pourra nous être d'ufage, c'eit qu'on a manqué le fens de bien des Paifages de l'Ecriture , par le penchant que l'on a à en faire des Maximes ou des Sen- tences détachées. Dans bien des endroits des Livres Sacrez , on trouveroit tout au- tre chofe que le fens que les Interprètes y donnent , fi l'on avoit un peu plus d'égarâ à ce qui précède & à ce qui fuit. Monfr. Le Clerc a remarqué fort judicieufement, dans la Préface de fa Verfion du Nouveau Testament, que la coutume que Von a de couper en Verfets toute l'Ecriture, comme en autant de Paragraphes , empêche fouvent de I 3 bien 134 Bibliothèque Britannique, lien entendre la fuite du Difcours. Car enfin y ajoute t-il, tous les Livres de V Ecriture ne font pas comme les Proverbes deSalomon, qui font compqfèz de Sentences détachées, ef fui n'ont ordinairement que peu, m point 4e raport les uns avec les autres , en forte que pour les entendre , il faut les jéparer. Tout le monde doit convenir que la cou- tume que l'on a de féparer, fur tout dans un raifonnement, ce qui devroit être joint, cmpècbe de le bien entendre. On en peut aléguer pour exemple ces paroles de St. Paul , Toutes cho,es me font permifs (af 11 s'en faut bien que tout ne lui fût permis. 11 étoit gêné par les mêmes Lois que lesfim- pies Chrétiens , & loin que la qualité d'A- potre l'en afranchît, elle l'y aflujettilToit encore davantage, puis qu'un Prédicateur de l'Evangile cil engagé d'une manière par- ticulière , à être en bon exemple. Que veut donc dire St. Paul quand il dit que tout lui eft permis? On ne s'y méprend pas; l'abfurdité qu'il y a dans une propofition fi généraie fait qu'on cherche d'abord à ref- rreindre cette permiffion aux chofes dont il venoit de parler, qui étoient indiféren- tes de leur nature, qu'il auroit par confé- quent bien pu fe permettre. Il s'agifibit de manger des viandes facrifiées aux Idoles. Il déclare donc que quoiqu'il pût bien en manger , il con venoit qu'il s'en abfîint, pour édifier davantage. On n'héfite donc plus (a) i Cor. X. 23. Avril, May et Juin. 1744. 135 plus aujourd'hui à traduire ; Toutes ces cbo- fis , c'eft à dire celles donc je viens de parler, me feroient bien permifes , mais je ne dois pas cependant me prévaloir de cette permiflion, à caufe des inconvéniens qu'il y auroit. Toutes ces cbofes me font permifes , mais tout n'édifie pas. Je fai qu'à regarder la chofe en foi même , manger des viandes immolées n'eft pas un péché, dit-il ; mais il n'eft ni convenable ni édifiant des'afîeoir à table avec des Païens, pour manger les reftes de leurs facritices. Ce feroit des- honorer le Chriftianifme & fcanrialifer les foibles. Quoique ce Paffage de St. Paul n'em- barrafle plus perfonne aujourd'hui, on a cru devoir s'y arrêter un peu, parce qu'il peut beaucoup aider à éclaircir celui du Deutê- ronome , que peut-être Ton n'entend pas bien encore. On peut à certains égards les mettre l'un & l'autre dans la même clafTe. La diférence qu'il y a entre ces deux Textes, c'eft que celui de St. Paul, pris dans toute Ton étendue , & fans aucune li- mitation, renferme une abfurdité , & par cela même porte Ton correctif Celui de Moïfe au contraire , tel qu'il eft dans no- tre Verfjon , & conlidéré fans aucun raport à ce qui précède , forme un très beaufens, fort capable d'impofer. Voilà pourquoi on s'en eft tenu là, fans faire aucune recher- che ultérieure. Les cbofes cachées apartiennent à V Eternel I 4 notre 136* Bibliothèque Britannique, notre Dieu , mais les cbofes révélées font pour nous & pour nos enfans à jamais &c. On croit que ce Paflage traduit de cette ma- rv'ère, fignifie qu'il ne faut pas vouloir pé- nétrer les Décrets de Dieu, & qu'il ne faut le mettre en peine que de ce qu'il a révé- lé ; que nous ne devons pas chercher à con- noitre ce que le Seigneur a voulu nous ca- cher. Rien n'eft plus beau que ce fens, re- gardé en lui même ; mais quelque fage que foit cette Maxime, il y a lieu de croire que Moijc a voulu dire tout autre chofe. On feroit de cette Morale un beau Prover- be de Salomon , & li ces paroles étoient ti- rées de ce Livre Sententieux, il n'y aper- fonne qui ne dût aquiefeer à cette expli- cation, fans en chercher une autre. Mais ce fens, quelque inftiuttif qu'il foit, ne for- mant aucune liaifon, m avec ce qui précè- de dans ce Chap. du Deutéronome , ni avec ce qui fuit, on eft comme forcé d'en cher- cher un qui foit une fuite de ce que ce Lé- gislateur vient de dire. Au lieu donc de cette proportion univerfelle , toute belle qu'elle eft , la liaifon du Difcours en de- mande néceflairement quelque autre un peu plus particulière. Pour trouver ce que nous cherchons, il faut remarquer que dans notre Verfion , on a fupléé quelques mots qui ne font point dans l'Original. Le fens eft fufpendu dans l'Hébreu , ce qui fait que l'on peut tradui- re de plus d'une manière. En voici une fort naturelle 3 & qui a l'avantage de don- ner Avril, May et Juin. 1744. 137 ner la liaifon qui manque dans notre Ver- lion. Ces cbojei ont été cachées dans le Jlsin de Dieu , mais maintenant il nous les a décou- vertes , à nous &f à nos Enfans pour jamais , afin que nous exécutions toutes les paroles de cette Loi. Ces choies qui avoienc été ca- chées jufqu'alors , c'étoit le châtiment fé- vère dont Dieu devoit punir les Infrac- teurs de lés Lois , & dont il les a avertis dans tout ce Chapitre. Dès le commence- ment on y voit un renouvellement d'Al- liance entre Dieu & le Peuple d'ifraël. En- fuite Moïj'e fe volant fur la fin de fa vie, les exhorte vivement à garder toutes les con- ditions de cette Alliance. Pour les y porter, il commence par un détail des bienfaits de Dieu , & enfuite il vient aux menaces. Il leur défend fur tout, fous de rigoureufes peines , d'adorer les Dieux des Nations , vf. 18. Il déclare à ces Idolâtres qu'ils ne doi- vent point fe flatter de l'impunité, & qu'ils fe trouveront acablez de toutes les malédic- tions qui font écrites dans ce Livre, vf. 20. La punition fera fi févère, ajoute- t-il, que les Peuples qui en feront témoins feront dans l'étonnement, & marqueront leur fur- prife par diverfes queftions, auxquelles on leur répondra, que Dieu a chajjé de leur Païs ces Ifraélices defobéiifans, qu'il les aenvoiez bien loin dans uneTerre étrangère , à caufe de leur Idolâtrie. Après les menaees d'une fem- blable difperiion , Moïfe leur dit donc, ces ebofes avoient été cachées auprès de Dieu , c'eft à dire, „ Jufqu'àpréfentonne vousavoitpas I 5 „ parlé 138 Bibliothèque Britannique, f, parlé fi clairement des malheurs qui vous menacent , (i vous abandonnez votre Dieu. On ne vous avoit pas fait con- noitre dans ce détail , les fléaux qui doi- vent acabler ceux qui mépriferont les Lois du Seigneur. Cette févérité avoit été une efpéce de fecret jufqu'à préfent. Elle avoit été comme renfermée dans le Confeil de Dieu. Mais il ne veut plus vous laiiTer ignorer ces malheurs. Il vous déclare ouvertement de quel le ma- nière il f râpera les Rebelles, afin que 3, vous régliez là deflus votre conduire. ' Le feul miftére , la feule obfcurité qui reftoit encore dans ces menaces, c'eft que Dieu ne détermine pas précifémentîe tems que ce Feuple doit être expole à ces terri- bles fléaux du Ciel; mais on voit allez 'a raifon pourquoi il ne marque pas quand ce- la arrivera, c'eH: afin de les engager encore mieux à s'atacher à la Religion. Il leur dit feulement que ces maux fondront fur eux quand ils cefieront d'obéir à Dieu. Jl faut donc, leur dit-il, lui être toujours fi- dèles , fuivre lès Lo;s avec beaucoup d'exactitude, afin que cette défolation n'ar- rive pas de notre tems. Ce fens n'eft pas moins lié avec ce qui fuit qu'avec ce qui précède. Dans les ma- tières de cette importance, on ne doit pas craindre les répétitions; elles font nécef: faires. Motfe qui a à cœur le falut de ce peuple , revient donc dans le Chap. fui- vant, à leur defobéiïTance > & aux funeftes fuites Avril, May et Juin. 1744. 139 fuites qu'elle doit avoir. Il prend encore le ton menaçant , afin de jetter la terreur- clans leurs e.prits. S de Dieu , ff qù ailliez pas l'écou I me demeurerez pas \ tems dans la Terre r. vf. i~, 18. Et il finit de cette ai propof ion& la mai . C'eit qu'il leur avoit mis van: les yeux le bonheur de ceux qui ob- fervent les Lois du Seigneur 6c les malheurs qui attendent ceux qui les trar.r C'eit là ce qui avoit été ce que Dieu leur faifoi: révéler alors pour de- là règle de leurs aérions. Il ne faut pas oublier de remarquer que r a heureufement traduit no:re Paffa- ge, & relativement a ce qui précède, & à ce qui fuit. Voici fa Verfion; Ces rbées par devers b font r ions &c. Cahnet a aufll très bien dévelope ce PafTa^e. Cr les a fait „ parler dans les cinq verfecs précédées, 3, les Peupî. dans la furprife „ dont ils feroien: uiûs , en voiant les ,, maux : Ti tfraèï, reprend la 3, fuite de fon Difcours, & dit aux I 3, ïtes , que toutes ces choies qu'il 1 3, de leur propofer 5c de leur prédire, é- 33 toienc des mifteres ctctai pour leurs Fè* 140 Bibliothèque Britannique, 3, res , mais que Je Seigneur a bien voulu s, les leur révéler par Ton moien, afin que „ la crainte de tant de malheurs les retint „ dans leur devoir. ARTICLE VIII. The Ladies Astronomy and Chrong- logy. By Jasplr Charlton , Officer of Cuftoms in the County of Lincoln : and piihlijhed by auihority of the King's Royal Order for Leîters Patent , for the term of fourteen years. The fécond E- dition. London , printed by T. Gard- ner in Bartholomevù-Cloje , for the Au- thor: and fold by J. Whifion at BoyWs Head , near IVater-Lane , Fleet- Street; and by T. Scadlethorp Bookfeller at Gainjbrough , Lincolnjhire , 1738. Ceft- à-dire: L'Astronomie 6f la Chronologie des Dames. Par Mr. Jasper Charlton. Ceft un in Svo. de 158 pp. SI les grands Hommes, qui ont contri- bué à former les Sciences & à les ré- duire en Syfthème, s'étoient étudiés à a- biéger & à'applanir les chemins qui ycon- duifent. Avril, May et Juin. 1744. 141 duifent , ils auroienc rendu un grand fer- vice au Genre-Humain. L'on voit cous les jours diverfes perfonnes , propres pour les Sciences , fe rebuter par les difficultés qu'elles trouvent dès l'entrée ; & renoncer à une Etude dans la quelle elles auroient peut-être fait beaucoup de progrès fans ce- la. D'ailleurs, nous nous plaignons allez fréquemment de l'ignorance qui règne par- mi les Femmes, cette partie fi aimable du Genre-Humain : mais a qui devons nous nous en prendre qu'à nous mêmes? Si la route qui conduit aux belles ConnoifTances étoit moins hérilTée de ronces & d'épines, elles prendroient du goût pour les Sciences, qui , paflant parleurs mains, recevroient de nouveaux ornemens , & ne manque- roient pas de devenir une affaire de mode. L'on ne fauroit donc avoir trop d'obliga- tion aux perfonnes qui veulent bien fe donner la peine de mettre ainfi les Scien- ces à la portée du Beau-Sexe. Quoique le fuccès ne réponde pas toujours à leur in- tention ,on doit cependant leur tenir comp- te de leur bonne volonté. L'Ouvrage , qui a donné lieu à cette réflexion , parut pour la première fois ea 1735 ; avec une Machine de l'invention de l'Auteur, à l'aide de la quelle on rend ai- fément raifon de tous les Phénomènes des Corps Célefles. Mr. Charlïon en- (eigoe dans fon Livre la manière dont il faut fe fervir de cette Machine : mais com- me cela tout feul auroit paru trop fec, il a 142 Bibliothèque Britannique, a jugé à propos d'entrer dans quelques dé- tails fur les principales queftions de Y As- tronomie & de la Cbmiokgîe. Il s'y eft pris d'une manière ii (impie & fi aifée , & a ré- pandu tant de clarté fur tout ce qu'il dit , que c'eft avec fondement qu'il déclare écrire pour les Dames. Avant de parler de ce Traité, rappor- tons ici la Defcription que l'Auteur nous donne de cette Machine de fon inven- tion. ,, Elle repréfente , dit il, (a) les „ Etoiles Fixes , le Soleil , la Lune , ,, la Terre, &c. & exécute les Mouve- ,, mens de ces divers Corps de la même ,, manière qu'ils fe font dans les Cieux. ,, L'on peut faire mouvoir cette Machine „ par un refibrt, pareil à celui d'une pièce „ d'Horlogerie ; mais comme il faudroit „ une année pour en appercevoir tous les „ Phénomènes , on la meut avec la main : „ de forte que d'une feule fois qu'on voit „ la Machine l'on peut aifément fe mettre „ au fait du Syfthème des Cieux .. Cet- „ te Machine "a un avantage par defluscel- 4, les qui ont été inventées fur î'Hypothè- „ fe de Ptoïomée , ou celle de Copernic : „ c'eft qu'elle peut fervir pour Tune & „ pour l'autre, répondant également aux „ deux Syfthèmes. " Tout l'Ouvrage eft diviie en quatre Par- ties ; dont Mr. Charlton donne lui iiiême un abrégé dès l'entrée. „ Dans la Première, ( «) p. î , Si M Avril, May et Juin. 1744. 143 Première, dit il, (a) j'ai expliqué fuc- cin clément, & d'une manière aifée, fa- milière & pleine, ce qu'il efl néceflaire ,, de favoir du Soleil, des Planètes & des „ Etoiles Fixes. J'y ai indiqué les Cau- „ Tes naturelles des Eclypfes de Soleil & „ de Lune; j'ai recherché le Tems où el- ,, les arrivent ; & marqué la Figure de „ l'Ombre qu'elles forment: d'où j'ai pris „ occafion de prouver que le Soieil é:oic „ plus grand que la Terre , & celle ci plus „ grande que la Lune. Dans le mê- „ me endroit , j'ai auiïi rendu raifon du „ Flux & du Reflux de la Mer. L'on y trouvera encore une Deicription des Globes Terreftre & Céîefte, & des Li- gnes, Cercles, &c. qu'on y remarque; de même que de la manière dont elles font repréfentées fur la Machine. Dans la Seconde Partie , j'ai expliqué le Syf- „ thème de Ptolomée, & indiqué les r'ai- ,, fons du Jour & de la Nuit, de leur Ac- ,, croiffement & de leur Diminution ? des ,, différentes Saifons , de l'Hyver Ce de ,, l'Eté, du Froid à du Chaud; des Phafes ,, de la Lune; & des Ecîypfes de Soleil ,, & de Lune. Dans la Troifième, j'ai ex- ,, pliqué de la même manière le Syflhème „ de Copernic; & j'ai rendu raifon des mê- ,, mes Phénomènes félon les principes de „ cet Aftronome . . . Dans la Quatrième ,, enfin , j'expofe les Elémens de la „ Chronologie, & mon.;e l'ufage des Ca- ,, lendriers* ( « ) p. 7, & fui M M 144 Bibliothèque Britannique, 3, lendriers , des Cycles & des Périodes. „ Je m'y fers de piufieurs exemples, pour „ réfoudre tous les Problèmes de l'Alma- „ naq , & ceux qui font les plus utiles ., dans la Navigation fitTAflronomie; com- „ me aufli pour trouver la Variation de ,, l'Aiguille & la Latitude, & pour expli- ,, quer le Syithème des Planètes & des „ Comètes. " Nous n'entrerons pas dans un plus grand détail de chacune de ces Parties. Il fufïï- ra pour nôtre but de choifir quelques en- droits, propres à donner une idée de la manière, dont notre Auteur exécute Ton plan. Prenons dans la Première Partie ce qu'il dit du Flux & du Reflux de la Mer. 3, Une longue expérience, dit il, f a) nous 9i a appris que l'Eau de la Mer monte & 3, defeend deux fois dans Tefpace de vingt- „ cinq heures. J'ai obfervé ce Flux & ce 3, Reflux, & examiné 5 en même tems, 3, les Mouvemens & le Lieu du Soleil, de 3, la Lune & des autres Planètes; & je me 3, fuis apperçu , que tout grand corps , fur „ tout le Soleil & la Lune, a de l'influen- 3, ce fur les Eaux de la Mer, quand il leur 3, eft vertical. Le Soleil donc, quoiqu'à 3, une grande dillance de la Terre , a ,, beaucoup d'influence fur les Eaux de 3, la Mer, au deflus des quelles il fe trou- 3, ve verticalement placé: mais l'influen- 33 ce de îa Lune efl encore plus grande; „ parce ( * ) P- *3> Avril, May et Juin. 1744. 145 3, parce qu'elle eft beaucoup plus près de ,, la Terre. . . Lorfque le Soleil & laLu- „ ne font en conjonction ou en oppoti- ,, tion , ils agifTenc en même tems fur le ,, même endroit, & le Fiux doit être plus ,, grand: il eft cependant plus grand dans ,, de certains endroits que dans d'autres, „ félon la Latitude & la Situation du 35 Lieu, & la Déclinaifon du Soleil & de ,, la Lune, ce qui caufe une grande di- „ verfîté. " Voici un autre exemple tiré de la Secon- de Partie, où Mr. Crarlton veut prou- ver que le Soleil eft plus près de nous à Midi qu'il ne t'eft le Matin ou le Soir. „ Il „ eft évident, dit il, (a) que tous les Ha- ,, tans de la Terre ont chaque jour à Midi „ le Soleil à leur Méridien,* & que cet Af- ,, tre eft à une égale diftance du Centre de „ notre Globe , mais non pas de chaque ,, lieu particulier de fa Surface. Si nous ,, vivions fous l'Equateur, & que le So« ,, leil parcourût la Ligne , il feroit plus ,, près de nous à Midi , que dans aucune ,, autre heure du jour ou de la nuit: car „ à Minuit, il feroit plus éloigné de nous „ d'un D'amètre entier de la Terre ; & ,, quand il feroit fur l'Horizon, cet éloi- „ gnement ne feroit plus que d'un demi „ Diamètre, & ainfi de fuite félon la La- „ titude des Lieux & la Déclinaifon du. „ Soleil .... Mais 11 le Soleil eft plus- ( a ) p. 48» 4*. Tome XXIÎL Pan. L K prer 146 Bibliothèque Britannique , „ près de nous à Midi, que dans tout au- ,> tre teras , d'où vient qu'il nous paroit „ plus grand le Matin & le Soir, qu'à Mi- „ di? C'eft parce, dit il, que les Rayons du „ Soleil tombent plus perpendiculairement ,, lorfqu'il efl à nôtre Zénith, que quand „ il panche vers l'Horizon. " Nous ne nous arrêterons point fur la Troifième Partie , dont quiconque a la moindre teinture d'Aflronomie peut aifé- ment fe former une idée. Il fuffira de re- marquer que l'Auteur y donne hautement la préférence au Sy (thème de Copernic fur celui de Ptolomée. "S'il a parlé de ce der- nier, ce n'efl que pour en donner une idée, & faire fentir combien le premier efl plus fîmple & plus conforme aux Loix de la Nature. La dernière Partie efl remplie d'un aflez grand nombre de Calculs, capables d'ef- frayer bien des Dames d'une première vue. Cependant en les examinant de près, el- les les trouveront à leur portée. Nous n'en donnerons qu'un exemple. La Ré- volution annuelle de la Terre autour du Soleil efl de 365 jours & environ fix heu- res; & douze Révolutions Lunaires ne font que 354 jours. De forte qu'il y a onze jours de différence entre l'Année "Solaire & la Lunaire; ce qui fait la diflinclion entre le Vieux & le Nouveau Stile. „ Ces on- „ ze jours de différence font ce qu'on nom- ,, me YEpacle. Le Cycle Lunaire , ou le „ Nombre d' Or > efl une Révolution de ip * ans, Avril, May et Juin. 1744. 14} ;, ans, dans le quel efpace Je Soleil & 1$ „ Lune finiflenc à peu près toutes leurs Di- 5, verfités d'Afpcft. Le Cycle Solaire eft ,, une autre Révolution de 28 ans, au bout „ de la quelle les Lettres Dominicales re- „ viennent , & l'Année Biflextile recom- ,, mcnce... Le Cycle Pafchal eft formé „ des Cycles Solaire éc Lunaire ; & voici „ comment. L'on multiplie l'un de ces „ Cycles par l'autre, ce qui fait la fomme ,, de 552 ans , au bout des quels non feu- „ lement la Nouvelle & la Pleine Lune ré- ,, viennent au même jour du mois , mais ,, encore le jour du mois revient au même „ jour de la femaine ; & les Lettres Domi- „ nicales & les Fêtes Mobiles recommeri- n cent dans le même ordre (a). " . Après que Mr. Charlton a ainfi ex- pliqué ces divers Cycles, il donne des rè- gles pour les trouve'r. Si l'on veut favo'ir^ par exemple, le Nombre d'Or d'une telle Année, il n'y a qu'à ajouter un à cette Année, & divifer enfuite le Total par io; puis ce qui refte fera le Nombre d'Or, mais s'il ne refte rien ce Nombre fera iç. Au refte la rai ion pourquoi il faut ajouter un ,■ c'eft que l'Ere Chrétienne commence la fé- conde Année de ce Cycle. Il en eft de même du Cycle Solaire. Pour le trouver , l'on n'a qu'à ajouter neuf £ l'Année oh l'on eft, & divifer la fomme par 28; ce qui reftera marque le Cycle,1 &f «'il t'à-yfi-êi: » K 2 148 Bibliothèque Britannique , s'il ne refte rien c'efl: une preuve qu'on en eft à la dernière Année. 11 faut encore remarquer ici qu'on ajoute neuf ,• parce que ce Cycle avoit commencé neuf Ans a- tant l'Ere Chrétienne. ARTICLE IX. The Histort of Axcient Pa- ganism, as delivered by Eusebius , l$c. vnth Critical and Hijlorical Notes. Shevoing , firft , its Or i gin , Progrefs , Decay and Revival , throug a mijcon- trued Chriftianity. And fécond Iy , a Phaenician and Egyptian Chronology , from the firft M an , down îo the firft 0- lympiad , agréable îo the Script ure Ac- cowiî. The whole interfperfed with Refle&ions on Superfiition and Arbi- trai^ Power, whereby a clofe and necef- fary Connexion is difcovered between both,and a right Notion of trueReligion andCivilGovernementeftablifned.Lon- don : printed for the Author^andfoldby M. Cooper,7»Pater-Nofl:er-Row; J. Jolife, in St. JaroesV Street ,* andby the Bookfei- 1er s of London tfwAVeftminfter. 1743. C'eft-à-dire r Histoire de l'Ancien Paganisme , te4 Avril, May et Juin. 1744. 246 tel qu'il nous a été confervé par E u- sebe, &c. avec des Notes Critiques & Hiftoriques ; 'pour en montrer /'On- gine , les Progrès , la Décadence &f le Renouvellement dans un Chriftianijme malentendu. Le tout accompagné de Réflexions fur la Superftition & le Pou* voir Arbitraire , où Ton fait voir la Liaifon néceffaire qu'il y a entre Tu- ne & l'autre , & où Ton donne de juftes Idées de la vraye Religion & du Gouvernement Civil. C'eil un in %V9, de 128 pp. & 7 pour la Préface, LA raifon pourquoi nous n'avons traduit qu'une partie du Titre Anglois, eft que dans la réalité l'Ouvrage ne contient que ce que nous avons exprimé en Fran- çois. En mettant le Titre à fon Ouvrage, l'Auteur avoit compté de donner une Chro- nologie de l'Hiftoire de Pbénicie & d'Egyp- te , conforme à celle de l'Ecriture, de- puis le premier Homme jufqu'à la première Olympiade. Mais quand il s'eft agi d'exé- cuter ce deflein, il s'efl apperçu qu'il avoit befoin de certains fecours qui lui man» quoient ,• de l'ufage de quelques Livres , imprimés dans les Païs Etrangers , que , malgré tous fes foins, il n'a pu fe procu* rer; & de diverfes Remarques que fes A- mis dévoient lui communiquer fur ce fu- jet. De forte que cette partie de fon Ou- K 3 vrage ?50 Bibliothèque Britannique 9 vrage eft renvoyée de quelque tems ; & s'il eft permis de dire ce que nous enpen- fons , nous ne la verrons jamais. En é- crivant foo Livre , l'Anonyme a eu un tout autre but, que celui de s'embarraflér dans des difcufîions Chronologiques , d'où il ne fe feroit pas tiré fans peine. L'on en jugera par le compte que nous allons ren- dre de ion Ouvrage. Le fiijet en eft tiré d'un Fragment de Sanchoniaton , que Eu/èbe nous a confervé dans le Chapitre dixième du Premier Livre de la Préparation Evangélique. Il y a long- tems que les Savans regardent ce Morceau comme fufpect; & le mettent fur le comp- te de Pbilon de Byblos , Grammairien du fécond fiécle , qui forgea ce Roman. Dod- wel publia une Diflertation à Londres en j68o , pour en prouver la fuppofkion. Van Date n'en jugea pas plus favorable- ment dans une Diflertation fur le même fu- jet, qui parut en i?of ; & Mr. Le Ckrc 9 qui en rendit compte dans fa Bibl. Cboi- fit (a) , approuva non feulement les idées de ce Savant, mais ajouta encore de nou- velles raifons aux llennes. Mr. Mofheim eft encore revenu à la charge dans fes No- tes fur la Verfion Latine du Syflbème In- telleàuel de Cudwortb (b). L'on peut voir pe que le favant Fabricius a dit fur ce fu- ( a ) To IX. p. 241, & fuiv. ( b ) p. 27. Note 7. Avril, May et Juin. 1744. 151 jet dans fa Bibliothèque Grecque (a). D'un autre côté l'Autenticité de ce Fragment a auflï eu les deffenfeurs. Le lavant Evê- que d'Avrancbes, Mr. Huet; de même que Mr. Cumberland , Evêque de Peterborougb , n'ont pas douté qu'il ne fût de Sancbonia- ton. Il eft vrai que ce dernier fe conten- te de le croire fans en alléguer aucune rai- fon. Nôtre Anonyme femble l'avoir imité en cela: car, quoiqu'il touche cette cuef- , tion dans fa Prtface , il n'entre dans aucun détail des raifons de fes Adverfaires; & fe borne à dire que fi ce Fragment avoit été fuppofé , Porphyre & Evfèbi s'en feroient apperçus, & n'auroient pas manqué défai- re remarquer la fraude: au lieu que ces deux Savans ne forment pas le moindre doute fur ce fujet. Sans entreprendre de décider cette queftion , bornons nous à faire voir l'ufage que nôtre Auteur fait de ce Fragment. Il contient la Cofmogonie de Thot , l'un des plus anciens Monarques d'Egypte. Cet- te Cofmogonie diffère de la Genèfe de Moïfe; en ce que ce dernier a pour but d'élever les Hommes de la connoidance de l'Uni- vers à celle d'un Etre Intelligent , qui en eft l'Auteur: au lieu que Thot s'attache à montrer que le Monde eft une production purement naturelle , qui doit fon éxiften- ce & fa forme au Hazard, & aux Loix du Mouvement d'une Matière prcéxiftan- te. ( a ) To. I. Lib. i. Cap. 28. K4 ï52 Bibliothèque Britannique , te. De forte que, de la formation de l'U- ni vers dans fon Syfthème, l'on ne pouvoir, pas remonter à cette Caufe Intelligente ? fource de Tout, dont il ne fait pas la moin- dre mention: ce qui ne pouvoit manquer d'introduire tous les défordres de l'A- théïfme. Mais , comme l'Homme eft conftitué de telle manière qu'il lui faut une Reli- gion, Tbot en forma une à fa manière , & propre à foutenir le Pouvoir Arbitraire qu'il vouloit ufurper fur fes fujets. Les Plantes, & les Hommes, qui durant leur vie avoient été utiles à leurs femblables, étoient l'objet du Culte religieux des Egyp- tiens , îorfqiie Tbot entreprit fa réforme. Ec comme cette idée ne tendoit qu'à entrete- nir des fentimens d'Humanité & de Bien- veillance entre les Hommes; ce qui n'étoit rien moins que propre à les difpofer à PEfclavage; il n'eft pasfurprenant s'il cher- cha à fubftituer un autre objet de Culte à celui là. Pour cet effet, il choifit les Af- tres & les Elémens, qu'il: fit envifager à fon Peuple comme tout autant de Divini- tés , aux quelles il attribua une parfaite ConnoifTance de tout ce qui fe paite dans les Cieux & fur la Terre; & la direction des événemens à l'avantage de leurs vrais adorateurs. Cependant pour ne pas révol- ter les Efprïts, il conferva le Culte des Plantes rouve encore d'une manière plus détax- ée dans le relie de fon Ouvrage. Dans ce deflein il examine de nouveau la Cofmo- gonie de ce Roi Philofophe,- & montre que c'eft un Athéïfme tout pur. Après quoi, il fait voir qu'il devoit néceifairement établir un pareil Syfthème, pour établir le Defpo- tifme; parce qu'un Gouvernement Arbitrai- re eft incompatible avec la vraye Religion. Il s'étend beaucoup fur cet Article, qui pa- roit être le principal but de fon Ouvrage, Les réflexions qu'il fait ne nous paroiflent pas toutes également folides; & il en a omis quelques-unes beaucoup plus preflanr.es, que celles dont il fait ufage. D'ailleurs, tout ce qu'il dit fur ce fujet ne femble pas trop lié, & manque de méthode. Enfin, une dernière raifon qu'il employé , pour établir fon opinion ; c'eft le témoignage des anciens Hiftoriens,tant Sacrés queProfa- nes , qui s'accordent à dire que ces anciens I- doiatres n'a voient aucune idée du vrai Dieu, De toutes les réflexions, qui compofent cet Ouvrage, l'Auteur tire deuxconféquen- çes, que nous allons traduire pour termi- ner cet Extrait. „ La première concerne ?, la Religion, & confifte à ne regarder corn- ,, me Héréfie, que ce qui s'oppofe au Pré- „ cep te d'c dorer le Père en Efprit ef en ,v Vérité; ou, ce qui revient' à la même „ chofc , de faire aux autres ce que nous vou- „ ion* Avril, May et Juin. 1744, 157 5Î Ions qu'ils nous f offert. Les plus grands 3, Hérétiques du Monde , ou plutôt les feuls, ,, l'ont donc ceux qui voudroient déraciner ,, ce Principe de l'Efprit des Hommes;& qui ,, exigent une aveugle fourmilion à certai- ,, nés Propofitions obfcures, myftérieufes „ & inintelligibles, qui ne contribuent en „ rien à nous rendre plus fages ou meiï- „ leurs,- mais feulement à établir un Pou- „ voir fans bornes, plus oppofé au bien „ du Genre-Humain, & plus Tyran-nique :, à l'égard de leurs Droits & même de „ leurConfcience , qu'aucun de ceux que „ Jéfus Chrift ait aboli Ça). ,, La féconde regarde le Gouvernement 5, Civil. Suivant les Principes établis dans „ ce Difcours, il n'eft pas permis à aucurr „ Prince de faire des Conquêtes, ni deré- „ duire dans l'Efclavage aucune Nation; „ à moins qu'elles ne faflent le métier de „ Bandits , & n'exercent le Brigandage. „ Dans ce cas, les Princes font obligés de „ leur faire tout le mal qu'il leur cft pofïî- ,, ble , & même de les détruire, pour le „ bien de leurs fujets: mais il ne faut pas „ que cet Eiclavage dure plus Iongtems, „ que le motif qui l'a occa(ionné;puifque, „ félon les Loix de la Nature, l'effet doit „ ceffer avec la caufe. Les Enfans de ces „ malheureux ne doivent donc pas porter y, l'iniquité de leurs Pères; à moins qu'ils „ n'imitent leur méchanceté. Sans cela les M Peuples (* ) p. 121. 158 Bibliothèque Britannique , „ Peuples ce les Nations, qui n'appartien- nent qu'à Dieu, deviendroient le Do- maine particulier des Princes; cequife- roit envahir les Droits les plus eflentiels du Créateur, ce violer la Loi qui doitfer- vir de Règle aux Souverains auili bien qu a leurs fujets (a). " ARTICLE X. An Exami nation of Mr. War- burton's Second Propofition > in his projeéïed Demonllration of the Divine Légation of Moses. In vohich the Faith of the ancient Jeiuish Cburcb , touebing the Doctrine of a Future State y is qjjerted and clcarcd from the Authors Objections. In an Epiftolary Diilerta- tion addrefled to the Author. To wbicb is addedj an A pp. ndix : containing Confl- agrations on the Command to Abraham to nffer up his Son Ifaac. London : prin- ted for M. Cooper at the Globe in Pa- ter-Nojler-Ro'i\). 1744. C'efl-à-dire : Lettre à IMr. Warburtox, où Ton examine la Seconde Propofition âr ( « ) p. r». Avril, May et Juix. 1744. 159 de l'Ouvrage dans le quel il fe propofe de démontrer la Divinité de la Million de Moïse; & ou l'on établit, con- tre le Sentiment de cet Auteur, la Foi de l'ancienne Eglife Juive tou- chant le Dogme d'une Vie à venir. L'en y a ajout? par voye $ Appendice quelques Confui rat ions fur F Ordre > don- ne a Abraham , de Jacrifier fan Fils Ifaac. C'efl un in 8'9. de 149. pp. j LA manière , dont Mr. JVarburton s'y efl pris , pour prouver la Divinité de la Million de Meïfe, tient fi fort du para-" doxe, qu'il n'efr pas éronnant qu'on fe (bit élevé contre lui. Les Délites l'ont vive- ment tttaqué dans un Outrage, dont on a rendu compte dans ce Journal {a). Ces Meilleurs reconnoiffent avec lui, qu'il efl néceffaire, pour le bien de la Soc;é:é, de preiTer le Dogme des Récompenfes & des Peines d'une Vie à veni- ; & que toutes les Nations les plus fages de l'Antiquité l'ont fait, à l'exception des Juifs, dans la Loi des quels il n'en efl fait aucune mention: mais ils nient qu'il s'enfuive de là, eue la Loi de Afoïe fo;t d'institution Divine; C'efl à faire voir que Mr. WarburUm steft trompé à cet égard , qu'ils ont defliré leur Ouvrage. Les Lecteurs peuvent voir dans les ( « ) Tocs. XXII p-. yj. & 5^. 160 Bibliothèque Britannique , les Extraits , aux quels nous avons renvoyé* ]a manière dont ils ont rempli leur tâche, L'Auteur du Livre , que nous annonçons préfentement, a un tout autre but que ces Meilleurs ; & eft dans des fentimens bien différens des leurs. Il foutient , contre fon Adverfaire , que l'Eglife Judaïque croyoit le Dogme des Récompenfes & des Peines après cette Vie;' & dans tout ce qu'il dit à cette occafion il paroit être fermement perfuadé de la Divinité de la Révélation : ajoutons même qu'il fe montre par touc Théologien profond, très bien verfé dans l'Etude de l'Ecriture ,• & Logicien habile par la manière dont il relève ce qu'il y a de fophiftique dans les Raifonnemens de fo& Adverfaire. Il réduit à trois points tout ce que Mr. Warburîon a prétendu prouver dans le Se- cond Volume de fon Ouvrage, i. Le Dog- me d'une Vie à venir ne fait pas partie de l'Oeconomie Mofaïque ; & ce Légifla- teur n'avoit pas commifTion de le publier, ni de l'enfeigner. 2. Non feulement Moïfe n'étoit pas autorifé à enfeigner ce Dogme, mais encore il n'a pas inilnué la moindre des chofes , par ou le Peuple pût comprendre qu'il étoit naturel de le croire: au contrai- re, il le lui a caché à defTein, de môme que tous les principes qui auroient pu l'y conduire; afin qu'il ne pût rien favoir ni rien croire fur ce fujet. 3. Par une confé- quence nécéiTaire , le Peuple Juif ignora lôtalement ce Dogme du vivant de Moïfe ,• & Avril, May et Juin. 1744. 16 1 & depuis lui jufqu'au tems de la Captivité de Babylone. L'Anonyme convient du premier point avec Mr. irarburton, & remarque que cet Auteur raifonne toujours d'une manière fo- phittique, en confondant ces trois chofesj qui doivent cependant être foigneufement diflinguées. En effet , de ce que le Dogme des Peines & des Récompenfes à venir' ne fait pas partie de l'Oeconomie Mofaïque , ce que Moîfe n'a point eu commiiTion de l'cnfeigner , il ne s'enfuit pas que ce Légif- lateur n'en ait rien infinué dans Tes Ecrits; & qu'il l'ait caché à defleinau Peuple, qui , depuis lui jufqu'à la Captivité, a été dans une parfaite ignorance fur ce fujet. Car enfin , Moïfe pouvoit ne point parler de ce Dogme ; parce qu'il étoic univerlellement reçu de fon tems. ,, Depuis Adam jufqu'à i9 Aîoïft , dit V } Anonyme (a), il y avoic ,, une Alliance entre Dieu cclesHommes* ,, par laquelle il étoitfïipulé, que la Semen- ,, ce de la Femme brijeroit la îéte du Serpent i ,, é? tte Semence tenues les Nations de ,, la Terre ferc s a fait men- tion de cette Alliance, que les Théolo- giens Chrétiens envifagenc avec raifon comme une PromeiTe, que Dieu fait, de 9 y 5) ,, délivrer le Genre-Humain de la Malé- „ diction à_ la quelle il étoic aiïujetti de- là puis la Chute. C'eft auiïî le fens que St. ,, Paul lui donne Gai III. vf. 8. L'Ecriture „ prévoyant 3 dit cet Apôtre, que Dieu juf- ,, tifieroit (a ) p. 24 , & fijiy. T ie XXIIL Part. I. L \C: BlSLIOTHEQUS BMtANNIQUE , ,,;■-'"■::<.■:•'•: r ... : :;" fa Foia \, :.• - A- ,, braham: C :. Comment VE~ , - - r peut ii avoir été annonce à A- m Vt is cette Promette, fi elle ne ., renferme pas le? effk isces que doi .', l'Evangile? Je fuis aflèz heureux de voir „ que vous é:es de 1a même opinion que moi fur ce fuie:. Car vous dites p. 6C4 & 605-, que la Ptomçjjefattt à Abraham. . . M 53 5, dt 1 1 J>... a Gtr.re-E \ :r U .. -V;";, Myltique, ou non, cela ne fait 5? rien à prelen:. II fûffit qlic vous conve- niez qu'elle renferme la PromeiTe de 1a Rédemption. Mais 6 cela eiï, elle ren- , ferme aufil celle d'un Etat à venir, fana ., la quelle Ton ne comprend rien à i'ou- ,j vrage de la Rédemi :ion. Or, il L'Allian- „ ce faite avec Abraham renferme l'efpé- ,, note d'un Etat à venir. . . il s'enfuit que 3, celle faite avec Adam & avec Noé ren- „ ferme la même efpérasce: car ce n'eft „ qu'une feule & même Alliance , fous dif- „ ferentes reilridtior.s. ,, Sans cette efpérance , cwUisim n ton â . A ' :.r. comment la Religion fe ieroic elle confervée dans l'ancien Monde. . . / une vie courte & miferable , il frlloit retourner dans la poudre. Quel encou- .erz une telle vue pouvoit elle donner ? Cependant il en faut avoir. Nous ne fervons pour néant ni les Hom- mes ni Dieu, L Apôtre nous 2pprend, Ptpk Avril, May et Juin. 1744. 163 3, Heb. XI. vf. 6. que celui qui vient à Dieu „ doit croire qu'il éxijîe &? qu'il eft le Re- ,9 munerateur de ceux qui le cherchent: ce >* qui lignifie, qu'il eft aufli déraifonnabîe j, de fervirDieu fans efpérer de récorapeû- 3, fe , que de le fervir fans être perfua- ,, dé de ion éxiftence. Il eft certain que ,, lesHabitans de l'ancien Monde avoient ,, une Religion. . . Or , pour le foutien 3, d'une Religion commune, il faut qu'il y ait „ quelque ejpérance commune: mais quelle „ étoit cette efpérance? Ce n'eft pas l'éx- „ emption de la mort: Dieu donna de „ bonne heure des preuves de laréfolution ,, ou il étoit d'exécuter cette partie de la 3, Malédiction , dans la mort d'Jbel , le pré- 3, mier jufte qui foie né. Ce n'eft pas non 33 plus l'exemption des maux de cette vie, 3, qui font communs aux bons aufli bien 3, qu'aux méchans. ... et qui ne fauroient ,, être enlevés fans que les uns & les autres 3, en foyent également participans : mais f, les efpérances que donne la Religion ,, doivent être particulières aux gens de ,, bien, & fervir à diitinguer leur fort de i9 celui des méchans. Quelles pouvoient ,, donc être leurs efpérances , h ce n'eft „ qu'il y avoit une autre Vie après celle ,, ci, & que s'ils n'étoientpasrécompenfés „ dans ce Monde, ils le feroientdans Pau- „ ne? » Il eft vrai que Mr. Warburton fuppofe aue Dieu avoit révélé aux Patriarches le Dogme des Récompenfes & des Peines à i6.\. Bibliothèque Britannique, venir, à condition qu'ils ne le communi- queraient le ni à leur Polie- rite. Mais, il avance cela fans preuves; & il devroit nous apprendre fur quels princi- pes la Religion commune de ce tems là etoit appuyée. Il ferait for: embarr; le faire, lui qui dans fon qu'on lit à la tête du Secoc Ouvrage , déclare en termes exprès, que le Dogi .' - ..-.". es eft Religion. Or, s'il eft efîcntiel, ne fauroic fubfifter fins lui: d*c e, félon fes pi la Loi or: croyoit ce Dogme, or. I la Religion de ce tems manquoit d'une ebofe elle. D'ailleurs , il convient que cette Doctrine étoit reçue par toutes les Nations, ces les tems les plus rec. D'où vient que le Peuple Juif ell: le feul, qui n'en ait eu aucune connoiflance? I voit il pas, tout comme les autres, les Lumiè . ies au moyen des que il pouvoit la découvrir? N'a-t-il pas vécu au milieu des Égyptiens, qui rece voient ce Dogme, & fefaifoient un devoir d'en éten- dre la connoi iffi loin qu'il leur étoit i for- . le Peuple Juif n'avoit point . Dieu avoit trai avec ù$ . . n t en ju- ger par les termes de la Commiflion de Jtfoïfe: ma s • fe (ouvenoit de cette Al- liance, il ne devoir pas ignorer le Dogme des Récompenfes & des Peines, qui en eft une Avril, May et Juin. 1744- i€$ une fuite néceflaire, comme nous l'avons déjà remarqué. De tout cela nôtre favant Anonyme con- clut, qu'il ne s'enfuit point, de ce que Moïfe n'a pas énfeigné dans fa Loi le Dog- me des Récompenses ce des Peines à venir, que le Peuple Juif n'en eut aucune con- noiflance. Il tenoit ce Dogme de fes An- cêtres par une Tradition confiante; & il n'étoit pas néceflaire que fon Légiflateur l'en- feignât de nouveau. Difons plus : fa Com- miïïïon ne portoit point qu'il le propofat au ; Hébreux. „ Pour bien entendre ceci , „ il faut remarquer, dit nôtre Auteur (Y), ,, que l'Alliance faite avec Abraham avoit „ deux parties : l'une confifteit dans la ,, I romeiîe d'une Semence, dans la quelle ,, toutes les Nations de la terreferoient bénies ; „ ce qui conftituoit l'Alliance Spirituelle: „ l'autre étoit la Promefle de donner la „ Terre de Canaan à fa Pollérité; & c'eft ,, là l'Alliance Temporelle. Moi je étoit le „ Miniftre de cette dernière Alliance ; mais ,, l'accompliflement de la première, étoit „ refervé à une perfonne beaucoup plus ,, excellente que lui. Je dis l'accomplie- if; car les Hommes en eurent d'abord ,, une connojfiance a/fez grande pour faire ,, nai:re dans leurs coeurs cette ejpérance % :i devoit fervir de fondement à leur 3, Culte raifonnable, comme je viens de le 3, montrer. Mais rentière manifeftation de „ cette Alliance étoit refervée au Fils de „ Dieu5. ï p. 51» & fui*- I- 3 i66 Bibliothèque Britannique, >, Dieu , qui devoit être manifefté en 3, chair... Moïfe ne fut donc envoyé que ,, pour accomplir la partie Temporelle de ,, l'Alliance avec Abraham. Mais alors , „ qu'avoit il à faire avec l'Alliance Spirl- 5, tuellel Rien aiïùrément, que de la laif- s, fer dans l'état ou ii l'avoit trouvée.., „ jufques à la venue du Prophète, qui en ,, devoit être le Miniftre. C'efl àufll ce a, qu'il a fait. Car dans les quatre derniers s, Livres duPentateuque, il ne dit rien que ,, de relatif à l'Alliance Temporelle : au 5, lieu que dans le Livre de la Genèfe, qui 5, e(t i'H.floire de la Providence de Dieu 3, jufqu'à lui , il parle des deux parties de „ cette Alliance, dont Tune eft le fonde» î, ment de fa Million, & l'autre de leurs ,, efpérances à venir Quoique Moïfe ne 3, fût point autorifé à enfeigner le Dogme s, d'une Vie à venir, cela ne faifant pas 3, partie de fa Commifïîon: cependant en 3, qualité d'Hiftorien, il a eu la liberté de 3, parier de la Foi des Anciens auflî en dé- 3, tail qu'il l'a jugé à propos. Il eft même 5, tout à fait probable, que, fi fes Frères ,, avoient perdu la connoiîTance de ce 3, Dogme, il fe feroit étendu fur ce fujec, 9, & auroit fait ufage de toute l'Autorité a, de leurs Ancêtres , pour le leur perfua- „ der: ce qu'il auroit très bien pu faire j, fans fortir des bornes de fa Commiiïion. 3, Mais, dans la fuppofition que l'ancienne 3, Foi à cet égard écoit encore parmi eux: 3, dans toute fa vigueur, il étoît plus na- iy turel à Moïfe de s'en tenir à des infinua- 3, tions Avril, May et Juin. 1744- lCï „ tions éloignées, que de s'étendre là dcf- „ fus; parce que tout Hiflorien évite de „ charger Ton Hifloire de chofes connues „ & familières aux perfonnes qui vivent „ dans le tems où il écrit. " Entre tous les Paffages de la Genèfe, dont nôtre Auteur fait ufage, pour prouver que les anciens Juifs croyoient un Etat à venir de Récompenfes & de Peines; & que c'é- toic auiTi la Foi de Moïfe , de même que de tous les Ifraëlites fes Frères , nous ne fe- rons mention que de la réponfe de Jacob à Pbarao. Elle le trouve Genifi XLVI1. vf. 9. Le Roi ayant demandé au Patriarche, quel âge il avoit , il lui répondit cent-trente ans, difant que fa vie, & celle de fes Pè- res n'étoit qu'un Pèlerinage ; ce qui fuppofe qu'il avoit égard à la Vie à venir. Cette manière même de s'exprimer indique, qu'on croyoit communément alors , tant parmi les Juifs que parmi les Egyptiens , que les Hom- mes n'étoient ici bas que des Voyageurs, qui tâchoient d'arriver à leur véritable Pa- trie. Sans doute que Moïfe, en rapportant cette réponfe, l'entendoit dans le même fens que Jacob & Pbarao ; & que les Juifs , en faveur de qui il écrivit cette Hiltoire, ne lui en donnoient pas un autre. Il eft vrai que Mr. IVarburton croit, que cette filon ne fe rapporte qu'au féjour de '' dans des Tentes. Mais n'auroit il pas été ridicule au Patriarche de faire men- tion de cette particularité, que le Roi n'i- gnoroit pas, dans le tems qu'il lui deman- L 4 de i<58 Bibliothèque Britannique, de le nombre de fes années? D'ailleurs, il appelle âufli Pèlerinage la vie de fes Pères, qui n'avoient pas tous habités dans des Ten- tes. - à cela que l'Auteur de ï Epi- ire aux Hébreux donne à cette cxprcflîon \p même fens que nous lui donnons. Voyez Heb. XI. vf 13 & fuivans. Si Mr. / burton dit que cet Ecrivain Sacré donne un Çensjpirituel aux paroles de Jacob, on lui répond que c'eft là une pure défaite. Car enfin l'Apôtre raifonne fur h force naturelle ÉÎe cette exprefiion, difarit que les te, mêmes rendent fon raifonnement évident Ça). Ce qui mec hors de doute ce que nous ve- nons d'avancer, c'efl que le Pialmilte, fai- îarit fans doute allufiôn à la réponfe de Ja- cob , dit de lui môme ce que ce Patriarche difoit de lui & de fes Ancêtres à PL Voyez Pfeau. XXXI. vf. 12, & CXIX. vf. 9. 5, tes deux Paffagcs, continue notre 3, Auteur (b) , montrent dans quel fens 3, les anciens Juifs prenoient l'exprefïion 3, de Jacob, fur la quelle nous fommes en 3, difpute. Peut-être en donnerez vous de ,, nouvelles interprétations: car, pour vous rendre juftice, vous avez toujours des moyens prêts pour lever les diffi- cultés que vous rencontrez en chemin. Je me flatte cependant que vous ne nous direz pas que David & tous fes Ancêtres habitoient dans des Tentes. . » J'éfpère, ( a ) e^Çxvi^c-i>t. { e ) p. 15.- ml, May et Juin. 1744. 169 „ J'cfpère, aJQUte-t'ili : cet Arti- cle Ç . :ei réflexions rendront tout à faïc probable la iuppoiition , que, du tems de _~ , les lfraëlites étoient en pqflTeflion du Dogme d'une Vie à venir, l'ayant reçu par Tradition de leurs An- -. Je di , Monfieur, &ne vais pas plus loin. Car dans ce cas la (impie pr me fuffit , & prouve contre vous beaucoup plus que vous ne voudriez. En effet, quand il y a. . côcé , il ne fauroit jamais y avoir de Démcîijlration de l'autre. Mais tout ce que je viens de dire recevra une nouvelle force , & renverfera totalement vôtre Syfthème, fi Ton trouve dans le Vieux Teitament des preuves que le Dog- me d'une Vie à venir fut l'objet de la Foi de l'Eglife Judaïque dans les tems poftérieurs à Moife, & avant aucune nou- velle Révélation : car alors cette Foi n'aura pu c:re fondée que fur une ancienne , qui s'étoit toujours confervée parmi eu::. 11 convient donc d examiner les tems | - ; - ïfe, & de voir jue les Juifs d'alors "croyoient filr ce fujet. " Four ce: enety il faut d'abord remarquer, ienc perfuadés que l'Aine fûbfiftoit . (truânon du Corps. C'elt ce qu'on peut conclure decesexpreffions, fa- à l'Ecriture, rendre V Efprit9& être rxueilli 1 ) p. 58. L 5 170 Bibliothèque Britannique , recueilli vers fes Pères: c'efr ce que prou» vent encore cette partie de l'Hïftoire de SaUly où il entreprit d'évoquer l'Ame de famuel; & la manière dont David s'expri- me 2 Sam. XII. vf, 23, en parlant de fon fils qui venoit de mourir. A quoi l'on peut ajouter que Mr. Warburton lui même con- vient que les Juifs étoient dans ces idées. Voyez p. 474 & 475 de fon Ouvrage. Mais en "même tems qu'il accorde cela, il ajoute qu'ils ne s'embarrafToient du tout point de l'état où fe trouvèrent leur Ame après cet- te réparation , & qu'ils ne formoient pas la moindre Spéculation intérejjante là def- fus. Les preuves qu'il en allègue ne font pas des plus concluantes. Elles font tirées du Livre de V Eccléfioflt , où l'Auteur expofe l'o- pinion des juifs de fon tems fur cette matière. L'on voit Çbap. III. vf. *i. IX. vf.f.&LXlh vf* 7. • qu'ils fe bornoient à croire que l'E retourne à Dieu qui Va donné; & que > q: on ejl mort, Vonnefaiî rien & Von n'a aucune ipenfe. Sur quoi l'Anonyme remarque d abord , que Mr. Warburton âuroit dû prou- ver, que le feus de ces expreffions , les morts n'ont aucune récompenfe , exclut abfolu- ment un Etat à venir; ce qu'il n'a point fait, ni ne fauroit faire; parce qu'il parois évidemment par la fuite eue cela n'eft re- latif qu'aux chofes de cette Vie. Il falloit enfuite nous dire quelle eft cette éxiftence avec Dieu qui riintéreffe point l'Homme; & en quoi l'Ame de l'Homme qui monteen diffère y Avril, May et Juin. 1744. 171 diffère , dans cette fuppofition, de celle de la Bête , qui defcend en bas en terre. Retour' ner à Dieu emporte certainement quelque chofe de plus qu'une fimple éxiflence avec cet Etre. Celui qui va vers Dieu, y va pour quelque chofe,- & pourquoi feroil ce que pour recevoir la réconipenfe de Tes ac- tions? Ce fi: ce que Salomon lui même nous apprend dans ce même Chapitre vf. 14; comme il l'avoit déjà fait plus haut Cbap. III. vf 10", 17. & XI. vf. 9. Il enfeigne la même Vérité Prev. XIV. vf. 32, ou il die que le jufie a efpêrance dans fa mort. Mr. Ifarhurton, il eftvrai, n'entend ici par la mort que de grands dangers ; & pour prou- ver aue c'eft là le fens , il allègue Pf. XXXULvf. 19. & LVI. vf. 13, ou le Pfal- mifte dit que Dieu délivre de la mort ravie de ceux qui le craignent. Mais il y a bien de la différence entre être délivré de lamcrt, & avoir efpêrance dans la mort. Cette dernière expreÎTion lignifie avoir efpêrance dans le îems de fa, mort: ce qui emporte qu'on ef- père quelque chofe après la mort, puifque c'elt là le terme de toutes les cfpérances de ce Monde. L'on ne fauroit entendre ces paroles autrement, fans s'éloigner du fens. littéral , pour leur donner fans railbn un Jens figuré. Dans i'efpace qui s'eft écoulé depuis JMoïfe jufqu'aux Prophètes , nous trouvons principalement les Ecrits de David & ceux de Salomon. Nous venons de voir ce que penfoit ce dernier fur l'Etat de l'Ame après la 172 Bibliothèque Britannique, la more,- remontons à prélent jufqu'à Da- vid, & examinons fi , dans les Pjèaumes > nous ne trouverons rien qui prouve que les Juifs croy oient qu'après cette Vie il y au* roit un Etat de Récompenfes & de Peines. Nôtre Auteur convient d'abord qu'il n'y a qu'un petit nombre d'endroits relatifs à ce Dogme; tout le refte n'ayant pour objet que les çbpfes de ce Monde. La raifon en eil, que les Auteurs de ce Livre, de mê- me que des autres qui compofent le Vieux Teftainent, vivoient fous Y Alliance Tempo- relle , où Dieu s'étoit fait connoitre fous l'idée de Protecteur des Juifs dans ce Mon- de. Faut il donc être furpris fi les Biens & les Maux de cette Vie faifoient le fujet principal de leurs Méditations; tout com- me fous Y Alliance Spirituelle les Récompen- fes & les Peines d'une Vie à venir occu- pent principalement les Fidèles? Quoique Mr. War.burton ait déclaré qu'il examinèrent tous les Paflages du V. T. oh l'en croit communément qu'il eft fait men- tion d'une Vie à venir , il n'a pas exacte- ment tenu parole. Nôtre Auteur allègue d'abord les Pjèaumes XXXIX & XC,dont il n'a pas dit le moindre mot. Ils font ce- pendant fi décififs,* qu'il eft perfuadé que fi fvh\ Wàrburton lifoit de femblables raifon- nemens dans quelque Ecrivain Chrétien , il en conclurait auffi-tôt que cet Auteur parle des Récompenfes & des Peines d'une autre Vie. Dans Je premier de ces deux pj canine s , David remarque que la Vie de VHc Avril, May et Juin. 1744. 173 r Homme en général , confidence du plus beau coté, n'eft que vanité & une frivole appa- rence: c'eft pourquoi il ne fe confie en au- cune des ch.ofes de ce Monde, ne mettant .nce qu'en Dieu J'eul. Mais quelle elt cette efpérance qu'il met en Dieu , les . chofes de ce Monde mifes à part? Elle ne peut abfolument regarder que la Vie à ve- nir. Après cela il prie D^eu de le délivrer des afflictions qui l'accablent, non parce que Tes efpérances fe bornent à cette Vie, mais afin que les méchans n'en prennent pas occafion de lui faire des reproches , & de blâmer la Providence. Ceux qui ne por- tent pas leurs vues au delà de ce Monde, étoient difpofes à juger de lui par le fort qu'il éprouvoit dans cette Vie; mais il les traite de fous à caufe de cela, ce qui indi- que fuffifamment que Tes efpérances ne fe bornoient pas à fa durée fur la Terre. C'eft ce qu'il exprime clairement dans le vf. 12; & dans le lui van t il parle de fa mort , priant Dieu de lui accorder le tems néceflhire pour s'y préparer: mais s'il n'efpéroic rien après cette Vie, qu'avoit il belbin de pré- paration ? Ce que nous venons de dire fîiffit pour connoitre la méthode de nôtre Auteur dans l'explication des Pfsaumes qu'il rap- porte en faveur de fon opinion. Nous ne nous arrêterons donc plus fur la Parapbrafé qu'il donne de quelques autres : tels que font le XC, le XVI & le XLIX. .Nous remarquerons feulement que Mr. IVar- 174 Bibliothèque Britannique $ burton ayant expliqué ces deux derniers à fa manière, on s'attache ici à faire voir le peu de folidité de fon explication. Ce Sa- vant avoue p. 564 & 568, ,, que le St. 3, Efprit s'eft exprimé dans le PJ\ XVI , & „ dans quelques autres endroits du V. T. , 3, d'une manière à mettre préjèntement dans 5, la dernière évidence, que ces Paflages ont 9, un fens plus relevé ce plus Jublime. " L'Ano- nyme ne demande rien de plus que cet a- veu. „ Je crois, Monfieur, dit il, que vous 3, m'accordez dans ces paroles tout ce que 3, je puis demander. Ce fens relevé , Jubli- 3, me Sc/pirituel, que vous dites fe trouver 3, dans ces Paflages , ne peut être autre chofe que celui que je foutiens s'y trou- ver, favoir le Dogme d'un Etat à" venir. Et il ce fens eft, comme vous le dites, de la dernière évidence à préfent , vu la force des termes employés parle Pfaîmif- „ te; il doit avoir été auflî de la dernière 3, évidence dans le tems que ce Pfeaume 3, fut écrit,* à moins que vous ne préten- „ diez que les Juifs n'entendoient pas la 3, force de leur Langue auffî bien que „ nous (a). " Nous ne devons pas omettre une Re- marque générale de nôtre Auteur, qui ren- verfe l'explication , que Mr. Warburton donne d'ordinaire des Paflages qu'on allè- gue contre fon opinion. Il les entend tous des Récompenfes & des Peines de cette Vie: («) p. 50. Avril, Mày et Juin. 1744. 17? Vie; parce que la Loi ne faifoit aux Juifs que des Promefîes & des Menaces de cet ordre. Mais cette raifon même renverfe to- talement ion Syfthème. Cette Providence particulière, qui récompenfoit & puniiloit dans cette Vie, n'avoit que les Juifs pour objet. 11 n'enétoit pas de même des autres Nations , que Dieu gouvernoit par une Providence générale, & qui ne dévoient être récompeniees ou punies que dans un autre Monde. Cependant, quand le Pfal- mifte parle desRécornpenies & des Peines, il les fait fréquemment envifager comme devant être diftribuées également à toutes les Nations de la Terre. Voyez Pf. XLIX. vf. 1-3. XXXIII. vfi 5. 14,15. IX vf.7i 8. LXVII. vf 4.XCVI. L. & LXil.x;/". 12. Il n'entend donc pas par là des Récompen- fes & des Peines Temporelles. Tout comme l'Enlèvement à1 Enoch a- voit été avant la Loi une preuve d'un Etac de Récompenfes & de Peines après cette Vie,- celui d'Elie fervit au même ufage a- près qu'elle eut été publiée. Mr. War- burton énerve toute la force de la preuve qui fe tire de l'Hiftoire d'Enoch, en difaut qu'elle eft racontée d'une manière fiobfcu- re qu'on ne fait qu'en croire: mais il n'en eft pas de même de celle d'Elie. Tout y eft clair, & l'on voit que le but de l'Hifto- rien étoit de préparer les Juifs à voir les premiers rayons de la Lumière, qui dévoie leur découvrir le Dogme d'une Vie à ve- nir. Ii fembïe que , par cet aveu , Mr. JVarburton 176 Bibliothèque Britannique, Warburton trahit fa caufe. Car fi cette Hiftoire indique qu'il y a des Récompenfes & des Peines à attendre après cette Vie^ il s'enfuit inconteftablement que dans l'in- tervalle qui s'eft écoulé depuis Moïfe juf- qu'aux Prophètes, les Juifs ont eu des idées d'une Vie à venir. Mais tout cela ne l'em- bar-raffe point; parce , dit il, que le Livre des Rois , où cette Hiftoire fe trouve, n'a été écrit que vers le tems de la Captivité; or, il convient que vers ce tems là les Juifs avoient de telles idées. Tout cela ii'eft cependant qu'une pure fubtilité. Car enfin , ce n'eft pas la Narration de l'Hifto- rien qui nous fait appercevoir une Vie à venir dans l'Enlèvement d'Elie; mais c'eft le Fait en lui même qui nous la montre. Dans la fuppofirion donc que cette Hiftoi- re n'a été écrite que vers le tems de la Captivité, néantmoins le Fait eft plus vieux de trois cens ans, il étoit connu de ceux qui vivoient alors , & on en avoit confer- vé la mémoire, foit par Tradition foie par écrit. De forte que les Juifs auront été préparés à voir les premiers rayons de la Lri- mière, qui devait leur découvrir une Vie à ve- nir , trois cens ans plutôt que ne le veut Mr. Warburton; & environ cent ans après Salomon (a). Comme Mr. Warburton a prétendu prou- ver par des Paflages poficifs tant du V. que du N. Teftament, que les Juifs n'avoient aucune ( a ) p. $7, & fuiv. AviiIL, May et Jltin. 1744. 177 aucune connoiffance du Dogme des Récom- penfts ce des Peines d'une autre Vie , il eit de la dernière importance pour Ton Ad- vcriaire d'examiner les Pallagcs qu'il a allé- pour cet effet. C'eft auffi à quoi il s'actache avec beaucoup de foin. Nous ne rapporterons point ici les ralfonnemens que Mr. • ton fait, fur cesPafiages, ni les explications qu'il en donne. On peut les voir dans une des Parties de ce Journal (a). Nous nous bornerons uniquement aux réponfes ce auxrériéxions de nôtre Auteur. Mr. Warburton prefle d'abord ces Pafla- ges, où les Mores font repréfentés comme couchés dans la Terre , d'où ils ne Je relèvent plus ; femblables aux Eaux qui s'écoulent fur li Terre , c? qu on ne ràmajje point ; ou bien à la Nuée qui & s'en va (h). Mais toutes ces cxprellions marquent feulement, que les Mores ne reviendront plus fur la Terre dans l'état, où ils y auront été au- paravant. C'eft ce qu'emportent les com- paraifons tirées de Y Eau & de la Nuée, qu'on ne peut plus remettre dans leur pre- mier état; & qui cependant ne font pas a- néanries pour tout cela. Une preuve que c'eft là le fens de ces Paflages; c'eft qu'a- avoir comparé celui qui defeenà au jé- re à la Nuée qui fe diffipe, Job ajoute im- médiatement après. Une reviendra plus en f* ( a ) îom. XXI. Part. I. P. 38 , & fui*. { b ) i Sam. XIV. vf. 14. Job. VIl.vC 9. Se XIV. vf 7-iz. Tme XXUL Par:. I. M 178 Bibliothèque Britannique, yim&fen lieu ne le reconnoitra plus (a); paroles que Mr. Warburton n'a pas jugé à piopos de citer. Dans l'autre PaiTage du même Livre, i'Ecrivain Sacré fixe un ter- me pour le Réveil des Morts: JufqiCà ce qu'il n'y ait plus de Cieux , dit il, ils ne fe r rc cil1 er ont point (b). Mais cela ne prouve- t-il pas que quand les Cieux & la Terre feront paflës, les Mores fe relèveront. Il y a un autre ordre de PafTages, ou il eft dit que les Morts ne fauroient louer Dieu (c). Mais fi on prend ces exprefiions dans le fens de Mr. Warburton , il faudra convenir que les Chefs du Peuple de Dieu , & les Prophètes ne croyoient point un Etat à venir , ce qui eft contraire' à les idées. Ils 11e dévoient pas , dit il p. 481, publier ce qu'Us en favoient , mais d'un autre coté ils ne devient pas nier la vérité de ce qu'ils connoif jbient. C'cfl à lui à concilier cette contra- diction. Quant au fens même des Paflages , tout ce qu'ils lignifient, c'eft que les Morts ne peuvent plus louer Dieu en préfence des Ho-m- mes, m publier je s louanges fur la Terre. Un dernier PafTage eft celui de Jérémie dans Tes Lamentations (d) , où le Prophète dit: Nos Pères ont pécbé e? ne font plus , e? nous (a) îob. VII. vf. 10. 0 job. XIV. vf. la. (c) PC VI. vf. s. XXX. vf 9. LXXXVIII.vf. 10. & fui*. Eccïcf. IX. vl. $. ôc Efaïe XXXVIII. vf »8, 19. ; Çhap. y. vf y. Avril, May et Juin. 1744. 179 nous avons porté leurs iniquités; ce qui fup- pofe , dit Mr. Warburton, que les Pères, étant morts, neportoient aucune partie de la Peine de leurs crimes. Mais c'efteeque l'Ecrivain Sacré ne dit point. Les Pères pou- voient être punis dans l'autre Monde, tan- dis que les Ecrans fouffroient dans celui ci des fautes de leurs Ancêtres. Il faut , dit l'Anonyme, avoir autant de pénétration que Mr. Warburton , & même davantage , pour trouver dans ces Paroles que l'Eglife Juive ne croyoit pas le Dogme des Peines & des Récom- fenjes d'une autre Vie. Le Théologien Angîois n'a pas moins donné à gauche dans l'explication des Paf- fages du Nouveau T. qu'il a allégués pour foutenir fon Hypothèfe. Indiquons en quel- ques exemples." St. Paul dît 1 Tïm. IV. vf, 8. que la Piété a les Promeffes de la Vie pré- fente & de celle qui efi à venir. Ce fi: à dire, la Lui fait les premières Promefics; & YE- ■le les fécondes. Sans chicaner fur cet- te explication , on lui accorde qu'elle eft jufte: mais on nie qu'il s'enfuive de là, que les fécondes Promeiïes ne fu fie ne pas con- nues fous la Loi. Pour en être convaincu, il faut feulement ferappeîlerla diftinenon , que nous avons faite ci defïus, en deux partie?, de l'Alliance faite avec Adam, uf- qu'à l'autre Vie. Nous ne devons pas omettre ici , que nôtre Auteur trouve dans ce Faflage de quoi appuyer ce qu'il a avancé plus haut, que le Dogme d'un Etat à venir ne faifoit pas partie de la Difpenfation Mofa'ique, mais que cependant Mo'fje en avoit parlé. C'eft dans la manière dont St. Lac s'exprime qu'il Je trouve. Or , que les morts rejfufcitenty Moï- fe même Va montré auprès du buiffbn, dit cet Evangélifte. Ce qu'il paraphrafe ainfi : Quoi- que Moïfe ne fût pas le Miniftre de ï Alliance Spirituelle , comme je le fuis \ mais feulement de la partie Temporelle de cette alliance: cependant lui même a montré le Dogme de la Réfurrec- tion. A ce Paflâge, il en ajoute deux autres: Ja Parabole d'un Homme riche &de Lazare; & l'Ordre de rechercher les Ecritures, dans les quelles les Juifs croyoient avoir la Vie Eter- nelle (a). Dans le premier le Mauvais Ri- che demande à Abraham d'envoyer quel- qu'un à Tes frères, pour les avertir, qu'il y avoit dans l'autre Vie un Etat de Ré- compenfes & de Peines. A quoi Abraham répond , qu'ils peuvent s'inflruire de cette Vérité dans les Livres de Aîoïfe & ceux des Prophètes; & que s'ils n'y ajoutent pas foi , ils ne croiroient pas à la relation d'un mort. Dans le fécond le Sauveur renvoyé les (a) Luc XVI. vf. i$-$\. & Jean V. vf. j^HQ. Avril, May et Juin. 1744. 185 les Juifs à l'Ecriture, comme contenant les Termes de l'Alliance traitée avec leurs Pè- res, & le défignant pour remplir toute Té- tendue des Promcrfes qu'elle renferme. „ Ces Paflages, dit vôtre Auteur (1) , ne }, décident pas tout à fait la queftion. „ Tout ce qu'ils prouvent c'eft que dans ,, le V. T. il eft parlé du Dogme d'une ,, Vie à venir; & que Moije & les Propbè- 3, tes ont rendu témoignage de cette Vérité. „ Nous favonscela de la bouche de J. C. ,, lui même, dont l'Autorité eft au dciTus 3, de toute exception. Mais il refte enco- „ te une chofe à décider, (avoir ce que ,, les anciens Juifs connoifibient de ce ,, Dogme, & quelle étoit l'étendue de leur ,. Foi à ceté^ard. Car, quoique la Promef- ,, fe d'une Vie Eternelle foit renfermée „ dans ces Paflages , ils pouvoient n'y pas „ faire attention, ou prendre mal le fens „ des termes , comme ils ont fait à d'au- ,, très égards. Le Chapitre XI des Hébreux 39 nous fournira fufhTamment de quoi éçlair- „ cir cette queftion (fc). Vous l'appeliez par i9 raillerie le Palladium de vos Adverfaires; „ mais il eft réellement ce que vous le ,, nommez par mépris: car auflî longtems ,, que cette Epitre reftera dans le Canon , „ la caufe que je deffends fera à l'abri de „ vos attaques. " Le PafTage de cette Epitre eft fi clair, que (*) p. 04. (è) vf. 13-17. M| i$6 Bibliothèque Britannique, que Mr. Wàrburton en conclut que les Patriarches reconnoiflbient un Etat à ve- nir ; mais que cette connoiflance fe bor- noit à eux feuls. Cependant il n'y a rien de tel d'infinué dans les paroles eu Tex- te. Car enfin fi l'Apôtre ne fait mention que des Patriarches, Ton deflein n'eft pas d'exclure le Peuple. Il les nomme parce qu'ils étoient les plus confîdérables ; & qu'étant la Tige & les Chefs de la Nation , il étoit naturel de croire qu'ils n'avoient pas négligé d'inllruire leurs Enfans & leur Famille d'un Dogme aufil important. Ce n'eft pas aux Paflages de l'Ecriture feuls qu'on aceufe le Théologien Anglois d'avoir donné un fens détourné: il en aufé de même à l'égard du VII Article de la Confeffion de Foi de l'Egîife Anglicane; & de quelques expreiïions dont le favant Evêque Bull s'étoit fervi. Nôtre Auteur s'attache encore à lui faire voir qu'il s'eft trompé à ces deux égards; & que, bien loin que cet Article & l'Evêque Bull favorifent? fon opinion, ils font dans des idées tout oppofées. L'on convient de part & d'autre que , du tems des Macchabées , la Doctrine des Ré- compenfes & des Peines dans une autre Vie étoit un Dogme National ,• mais on n'eft pas d'accord d'où il tiroit fon origine. Mr. IVarburton croit que les juifs le tenoientdes Prophètes , ce qui fournit à fon Adverfaire de nouvelles armes contre lui. Car enfin quel Prophète leur avoit enfeigné cette Doctri- Avril, May et Juin. 1744. 187 zieP Ce n'efl pas ceux qui ont vécu avanc EJ'dras; puifque cet Ecrivain dans le Livre de Job , que Mr. Warburton fuppofe écre fon Ouvrage, parle direètement contre la Réfurrecnon. Ce ne peuc donc être que JÏggée , Zacbariô & Malsicbie. Mais malheu- roulement ces trois Prophètes ne dilèntrien du tout ni de la Réfurreclion , ni d'un Etat à venir. „ Je ne veux pas pénétrer, „ continue notre Auteur (a) , dans la penlee de 5, perfonne ; & j'efpère, Monfieur, que vôtre „ but dans cet Ouvrage efttel que vous l'a- ,, vez exprimé: mais iîeft bien fur que (i vous ,, aviez eu intention d'expofer la Religion ,, aux railleries des Incrédules, vous n'au- „ riez jamais pu vous y prendre d'une ma- „ nière plus propre a réulTir. " Dans la iuppofition cependant que ces Prophètes ayent parlé d'un Etat à venir , l'Anonyme demande encore, comment il eit poffîble, dans la fuppofition de Ton Adverfaire, que cette Doctrine ne foit devenue un Dogme National , que deux cens ans après dans le tems des Macchabées? „ Eft il vraifem- blable que les En/ans ayent appris des Prophètes morts ce qu'ils n'avoientpoinc enfeigné à leurs Pères durant leur vie ? Les Ecrits des Prophètes ont toujours fubfiflé depuis le tems de leurs Auteurs rcfpeclifs ; pourquoi donc les Juifs ne fe feroienr.ilspasinftruits d'abord de cet- te Doctrine aufîi aifément que leur Pof- térité longtems après ? " ' Cette ( * ) -p. "+- 288 Bibliothèque Britannique, Cette Difficulté n'a point lieu dans le Syfrhème ce nôtre Auteur. Le Dogme dé la Réfurrecbon eft beaucoup plus' an- cien que les Prophètes; &, étant fondé fur l'Alliance faite avec Abraham , il s'eft conlervé par Tradition depuis qu'il eft fait mention de cette Alliance, c'eft à dire depuis la ' Jiùte. Aufii voyons nous dans le 2 Lircre des Macchabées , Ch. VIL vf. 50", que les Juifs de ce tems fondoient leurs Efpéranccs a- près cette Vie fur V Alliance de la Vie Eter- nelle, qui n'eft autre chofe que celle que Dieu traita avec Adam , Noé & Abraham. Et comme ils ont toujours eu les Termes de cette Alliance , il s'enfuit qu'ils on: toujours crû ce Dogme. AuiTi avons nous vu qu'il en étoit allez fouvent fait mention dans les Livres du V. T. L'Anonyme termine fa Lettre, en s'ad- dreffant à l'on Adverfaire en ces termes: ,, Telles font, Monileur, les difficultés „ que j'avois à vous propofer , pour mon- 5, trer la fauffecé de vôtre Seconde Propo- „ fition. Si vous pouvez les lever, &met- 3, tre la Vérité dans tout fon jour, je vous 3, conjure de le faire. Comme c'eft la Vé- „ rite uniquement que je cherche , je ne ,, fouhaite que de la voir triompher , de „ quel des deux côtés qu'elle le trouve. 5, Si je vous ai caufé quelque embarras , ,, c'eft parce aue je vous crois dans l'er- 9i reur. Il s'agit d'un point 011 l'honneur 3? de la Religion eft intéreiTé,- mais quoi- è> que vous à. moi convenions qu'il eft de ,, nôtre Avril, May et Juin. 1744. 189 nôtre devoir de le procurer , cependant ,, nous nous y prenons pour cela d'une manière directement cppofée. Vous en- vifagez l'ignorance des Juifs fur le Dog- me d'un État à venir, comme une des plus fortes preuves de la Divinité de la Révélation : & moi , d'un autre côté , je „ crois que cela tourneroit au deshonneur de cette même Révélation Je luis ami du Chriftianifme & de tous ceux qui „ travaillent pour les intérêts. Si vous pou- „ vez donc , au moyen de la Difptnjation Mofaïque , répandre du jour fur nôtre Foi , vous méritez la reconnoillance pu- blique. Je ne fais fi vous continuerez vôtre Ouvrage, ou fi vous vous attache- rez à quelque fujet moins conforme à vôtre Caractère d'Eccléfiaftique : mais 3J ?■> ,, permettez moi de vous dire,Monfieur, „ que vous êtes obligé de vous aquitter envers le Public, Cx que vous lui devez quelques exeufes pour le tort que vous avez fait à la Religion à cet égard ;puif- que au lieu d'établir le Chriftianifme fur un fondement folide, vous n'avez fait que donner plus de prife aux Incrédules. Car quelle idée ces gens là fe formeront ils de la Révélation, quand on leur dira que , depuis la Création jufqu'à la venue 1, de J. C. , elle n'a fait que remplir de té- „ nèbres l'Efprit de la plupart de ceux qui „ l'ont reçue, au lieu de l'éclairer? S'il y a ,, quelque Efpérance digne d'une Créature ,, ralfon- 190 Bibliothèque Britannique, „ raifonnable c'eit celle d'une meilleure ,, Vie après celle ci qui eft fi courte & ac- ,, compagnée de tant de traverfes. Les 5, Philofophes Payens, du moins queîques- 3, uns d'entr'eux, entretenoi-ent cette EC- „ pérance. .. & elle étoic pour eux une „ fource abondante de confondons. Mais, ., fi l'on veut vous en croire, les Juifs, '„ quoique Dieu prît un foin particulier de „ ce Peuple & qu'il fût fous fa Direction ^, immédiate , avoient un voile fur les „ yeux, qui empêchoit l'efTet des Lumiè- „ res naturelles, de peur qu'ils n'appriffent „ par ce moyen à fervir Dieu d'une maniè- „ re plus pure & avec plus de fmcérité. „ Car enfin , vous nous dites que les Biens „ & les Maux de ce Monde leur étoienc „ difpenfés, pour borner leurs Efpérances „ à cette Vie, & les empêcher de porter ,, leurs vues plus loin. Doctrine étrange, „ & jufqu'ici inconnue ! Croyez vous que „ ce Portrait de la Révélation guériffe les „ Incrédules de leurs préjugés? Ne leur ,, fournira-t-il pas plutôt matière à de nou- „ velles difficultés? Si quelque choie cm- „ pêche qu'il ne produife cet effet , ce ne „ peut être que l'abfurdité même de l'opi- ., nion fur la quelle il eft fondé. . . „ Je finirai cette Difiertation , en vous af- „ fûrant que , quoique je trouve que vous „ vous êtes trompé dans la Seconde Pro- „ pofition, je ne prétends point décider de ., vôtre Plan Général. Je le laifTc préfente- «, ment tel qu'il eft; cV j'attendrai que vô- » ire Avril, May et Juin. 1744.. rpr M tre Ouvrage Toit fini pour en juger. Si „ vous avez intention de l'achever; & que „ ce ne foit pas trop préfumer de moimê- ., me que de vous faire part de mes avis, je ,, vous confeillerois de tirer vos preuves, „ non de ce que les Juifs n'avoient aucune 5, connoijfance d'un Etat à venir; mais de „ ce que la Loi de Moïfe n'eji pas fondée fur „ ce Dogme. Si vous n'avez befoin que de ,, ce Principe , il eft aifé de rétablir. . . . ,, Mais fi le premier vous eft abfolumcnt „ néceflàire, vous avez formé une entre- „ prife dont le iuccès ne fauroit répondre , à vos cfpérances. Car quand même il ne „ feroit pas clair que les Juifs croyoienc ,, un Etat avenir, il vous fera toujours im- ,, pofiible de prouver qu'ils ne le croyoient ,, point. " Pour terminer cet Extrait , nous n'a- vons plus qu'un mot à dire des Confi- dérations de l'Anonyme fur l'Ordre que Dieu donna à Abraham de lui offrir Ion Fils Ifaac en facrifice. Comme cette Hif- toire a fourni aux Incrédules matière à plufieurs difficultés , Mr. JVarburton croit pouvoir les lever toutes au moyen d'u- ne nouvelle explication. Ce Sacrifice , dit il, ne fut qu'une Action Symbolique, par la quelle Dieu révéla au Patriarche le DefTcin ou il étoit de racheter le Genre- Humain par la mort de fon Fils unique , au quel il rendroit enfuite la vie. C'eit de cette Révélation dont J. C. parle quand il difois 192 Bibliothèque Britannique, difoit aux Juifs (a) qu'Abraham arcoit vu fa journée & s'en étoit réjoui. Cette explication ne plaît pas à nôtre fa- vant Auteur , qui s'en tient à l'ancienne. Il croit , avec la plupart des Interprètes, que Dieu donna cet Ordre au Patriarche pour éprouver fa Foi , fans lui faire porter les vues fur le Sacrifice du Sauveur. Il ne nie cependant pas qu'Ifaac ait été un Type de ce Rédempteur des Hommes; mais il eft plutôt Typique pour nous, qu'il ne Pétoic pour Abraham. En même tem? qu'il établit fon opinion, il renverfe celle de Mr. War- burtoni& lui montre que, pour lever des difficultés aux quelles il eft aifé de répon- dre , il en fait naitre d'infurmontables, met- tant l'Ecriture en contradiction avec elle même. En effet, fi cette Action eft pure- ment Symbolique , Abraham ne pouvoit pas croire qu'il aîloit ôter la vieàfonFils. Mais alors que deviendront les Eloges que l'E- criture donne à la Foi qu'il marqua dans cette occafion (7?)? D'ailleurs, cette ex- plication renverfe totalement le Syfthème de Mr. Warburîon\ & il eft étonnant qu'il ne s'en foit par- apperçu. Les Incrédules difent que cet Ordre, pris dans le fens or- dinaire, autorife les Sacrifices Humains ; mais cette difficulté n'a plus lieu , dit on, en prenant cette Hiftoire pour une Révéla- tion («ï Tenn VÏII vf <;<. (b) Heb. XI. vf 1--10. Avril, May et Juin. 1744. 193 tion du Sacrifice de J. C, & non pour un Ordre pofitif de facrifier Ifaac. L'on ne pou- voir pas être induit dans l'erreur dès qu'on iavoit qu'il ne dévoie pas être mis à more. Tout ceia clt exactement vrai ; mais alors il faudra convenir ^Abraham révéla à fa Fa- mille tout le Myftère du Sacrifice de Cbrift. Car s'il garda cette Révélation pour lui , fans en faire part à perfonne , fa Poftérité aura ignoré ce qu'il y avoit de Symbolique dans cette Hiftoire, & fe fera imaginé que Dieu éxigeoit des Victimes Humaines. Si donc les Defccndans û'Al n'ont pas pu tomber dans l'erreur , en expliquant cette Hiftoire comme le fait Mr. Wtirburtony il faut que ce Patriarche leur ait révélé ce qu'elle fignifioit ; & s'il le leur a révélé^ ils auront été inltruits d'un Etat avenir de Récompenfes & de Peines: ce qui eft l'op- pofé de l'Hypothefe que ce Théologien veut établir/ ARTICLE XL FlVE HUNDRED POINTS of Hus- bandr y: Directing what Corn y Grafli &c. is properto befown; what Tr'ees to be planted ; how Land is to be ita- proved : with whatever is fît to be done for the benefit of the Farmer in every month of the year. By Tho« Tome XXIIL Part. L N ma* ip4 Bibliothèque Britannique, mas Tusser, Efq. To whicb are acldcd , Nutes and Obf ovations expîaining many obfolete Tenus nfed therein , and nbat is agréable îo tbe prefent Praàice in feveral Counties of this Kingdom. A woïk ver y neceflary and ufeful for Gentlemen , as well as Occupiers of Land , whether Wood-Groundor Til- lage and Pafture. London. Printed for M. Cooper in Paîer-Nofter-Row ; and fold by J. Duncan in B erkïey- Square 3 near Grovefnor- Street. 1744. Ceft- à-dire : Cinq Cens Articles concernant l'Agricul- ture : ou Von enfeigne quel Bled il faut femer , quels Arbres II faut planter , &f comment il faut améliorer fon Terrein ; avec tout ce mon doit faire pour le bien d'une Ferme dans chaque mois de Vannée. Par Thomas Tusser. A quoi Ton a ajouté des Notes & des Obfervations, pour expliquer plufieurs Termes hors d'ufage , & pour rapporter ce qui fe pratique préfentement en plufieurs Comtés de ce Royaurne. Cefi un in %; de 150 pp. L'Auteur Avril, May et Juin. 1744. 195* T 'Auteur de ces Préceptes d'Agriculture JL/ a vécu foui, les Règnes de Htnri lrIIIy d'Edouard VI , de Mrrie & d' EUzabetb» Ji paiYa la plus grande partie de fa vie dans les Com.es deNurfilk, Suffolk & EJJex. Son Ouvrage fut imprimé pour la première fois en 1590. Quoique T usser parle quelques- fois de jours de jeune & d'abftinence , il étoit cependant fort bon Proteftant: mais il faut remarquer que c'étoit la coutume fous le Règne d'EUjabetb de jeûner le mé- credi , 'le vendredi & le famedi ; coutume qui s'eft infentiblement abolie. C'eft là tout ce que l'Editeur de i'Ouvrage de Tusser nous en apprend en divers endroits de fon Commentaire: car il n'a pas jugé à propos d'y mettre le moindre AveriiJJement à la tête, "Comme Ton s'attache beaucoup à l'Agri- culture en Angleterre , il a paru depuis quel- ques années divers Ouvrages excelîens en ce genre. Quelques Auteurs même fe fonc appliqués à recueillir ce que les Anciens ont écrie de plus fenfé fur ce fujet. De ce nombre eÛ Mr. Bradley , Profeiïeur en Bo- tanique à Cambr .dge. Il nous donna en 1725 un Etat de l'Agriculture des Anciens, tiré - de Caton , Farron, Columella , Virgile, & de plufieurs autres Ecrivains de l'Antiquité. En 1727 il publia encore un Corps com- plet d'Agriculture, dans le quel il inféra grand nombre de Remarques de Fitz-Her- barde, le premier Anglois qui ait écrit fur cette matière. L'Ouvrage de cet Ecrivain N i fe îq6 Bibliothèque Britannique , fut compofé vers l'an 1500. C'eft fans dou- te à limitation de Mr. Bradley que l'A- nonyme vient de publier les Préceptes de Tusser, accompagnés d'un Commentai- re aflez ample. Des Ouvrages de cette na- ture , réunifiant ce qu'il y a de meilleur dans les Anciens aux découvertes des Mo- dernes, ne peuvent qu'être d'une grande utilité. Tusser a écrit Tes Préceptes en vers; & ils renferment ce qu'un Fermier doit faire chaque mois de l'année. Le Commen- taire fuit immédiatement le Précepte L'on y explique les Mots du Texte qui ne font plus en ufage, & les Allufions de l'Auteur aux Coutumes & à l'Hiftoire de fon tems; l'on y rectifie les fautes, qu'il peut avoir faites"; & Ton y ajoute les découve. tes des Modernes. Il n'eft guères poffible de don- ner un Extrait fuivi de tout cela ; aufii nous bornerons nous à traduire quelques endroits de cet Ouvrage , au moyen des quels on pourra fe former une idée du Tout. Tusser dit qu'il faut femer les Pois & les Fèves, dans le tems que la Lune décroit. Sur quoi le Commentateur remarque (V), „ qu'en Agriculture , l'on attribue beau- y9 coup, & peut-être trop , à l'influence ,; des Planètes, fur tout à celle de la Lune. ,', II faut cependant convenir, ajoate-t-il, „ que fi la Lune n'eft pas la caufe de plu- „ fleurs effets furprenans, elle les indique, » du ( * ; p. 1*. Avril, May et Juin. 1744. 197 ;, du moins, d'une manière bien jufte: c'eft >, de quoi les Pois & les Fèves nous four- „ nident une bonne preuve. Si on lesfé- „ me lorique la Lune croie, la Pailie en efl ,, trop forte; & li c'eft dans le décours, ,, la ColTe en eft trop épaifie : tous ceux ,, qui s'appliquent à l'Agriculture convien- „ nent de ce fait; &, moi même, je l'ai „ expérimenté; cependant je ne voudrois „ pas nier, que cette règle ne fût fujette „ à des exceptions. " Tusser recommande aux Païfans de man- ger du Poifïbn dans le mois de Février. ,, Cet Article, dit le Commentateur (b) , eft ,, préfentement fort négligé par les Gens „ de la Campagne. Je fuppofe que c'eft „ de peur de donner dans la fuperftition& „ le Papifme. Mais , mettant cela à part, „ confultons nôtre intérêt, & voyons ce ,, qu'exigent nôtre fanté & larecon'noifian- ., ce. Ceux qui favent penfer n'auront pas ,, de peine à avouer, qu'il feroit à fouhai- „ ter, dans cette faifon , que le Peuple ,, mangeât moins de Chair & plusfouvenc „ du Poiflbn ; fur tout dans les Lieux voi- ,, fins de la Mer, où il y en a abondam- „ ment. Il eft de l'intérêt de la Nation ,, d'entretenir des Gens de Mer , pour oc- „ cuper grand nombre de perfonnes à la „ Conftrudtion des fiâtimens & à tout ce „ qui eft néceflaire à un Vaifleau; cV pour „ employer les pauvres à faire des Filets , « &c ( i )y. if. N 3 ip3 Bibliothèque Britannique, „ (Sec. ce qui leur donne occafion d'occu- j, per utilement leurs enfans, dès le mo- „ ment qu'il font en âge de travailler. Il „ elt encore de nô:re in.e:*êt particulier de „ vivre frugalement , à quoi l'on parvien- „ dra en encourageant la pèche, nôtre Iile „ étant fituée le mieux du monde pour „ cela. En effet , il ne faut pas s'imaginer ,, que les Mersde//o/t,:7?r./efoyentplus poif- „ fonneufes que les nôtres ; parce qu'il fe „ vend plus de PoiiTon à Amjïerdam qu'à ,, Londres , qui eft pour le moins quatre „ fois plus grand: mais c'eft parce qu'il y „ a plus de Pécheurs , plus de gens qui „ mangent du Poiffon, & qu'ii n'eft pas o permis à de certaines personnes de l'a- „ cheter tout & d'en jetter une partie, 3i pour tenir l'autre à un prix exceiTif. 3, Dans ce Païs chacun va au marché. 3> J'ai vu moi même un BourgmaitredV „ terdam y aller avec un filet à la main , 3, pour y" mettre le PoiiTon qu'il vouloir „ acheter. Si le Peuple de Londres fe don- ,, noit donc la peine d'aller à Billingfgale. ,, pour cela, l'on ne tarderoit pas à y voir ,, du Poifîbn en plus grande abondance, ,, qu'il n'y eft présentement. On ne re- „ garderoit plus alors ce beau préfent de ,, la Divinité, comme quelque chofe de j, fort rare; mais il feroit un foulagement „ réel pour les pauvres, & une nourritu- „ re peu à charge aux riches. Pour ce „ qui eft de la fanté, il eft certain que la Sî Viande eft un Aliment plus pernicieux „ dans Avril, May et Juin. 1744. 199 „ dans ce tems que dans un autre. Nôtre „ fang étant plus difpofé à Ja fermenta - 5, tion , le Poiflbn lui fert d'un rafraichif- ,, fement utile. D'ailleurs , il efb jufte „ que le Fermier fafle vivre le Pécheur , „ gui achète fon Bled , & quelques-fois ,, ion Bœuf & fon Mouton. Enfin , la ,, reconnoiflance que nous devons à Dieu ,, pour nous avoir placés dans une fituatiorz „ li avantageufe, exige que nous ne nous y, faifions point de fcrupule de profiter de „ l'abondance de Poiflbns qui nous envi- ,, ronnent. " Le Commentaire de nôtre 'Commenta- teur, fur ce que fon Auteur dit des Com- munes, me paroit fi judicieux, que je ne faurois m'empécher de le tranfcrire encore ici. Jl fe propofe de prouver que le droic qu'ont les pauvres d'y faire paitre leurs Beftiaux, bien loin de leur être avanta- geux, leur eft nuifible. D'abord, „ le Lait, que donne une Vache qui pait dans des Lieux ou l'Herbe eft fi courte, eft très mauvais: enfuite, il faut que la femme de ce pauvre homme fafle matin & foir un mile & quelques-fois d'avantage pour traire fa Vache: ajoutez à cela que s'il a des Enfans, il eft fur que l'Aine ne peut rien entreprendre , jufques à ce qu'iPne foit plus bon à rien; parce qu'il doit avoir foin de la Vache, ou garder la Maifon & les petits Enfans, tandis que fon Père eft à l'ouvrage , <5c que fa Mère eft allée traire fa Vache. S'ils N 4 „ font 200 Bibliothèque Britannique , 9> font un peu de Beurre pendant la fe- ,, maine, ils perdent un jour pour le por- „ ter au marché ; & il y a dix à parier ,, contre un, qu'ils le vendront à un bas ,, prix, & qu'en échange ils rapporteront „ de la mauvaife Viande. Quand l'Hy- ,, ver efl venu, ils n'ont qu'un Veau, bien „ fouvent, pour toute provifion ; & s'il „ arrive quelque accident à leur Vache, 3, les voilà ruïnés. Je fuis fur qu'un fort 5, petit Jardin leur tourneroitplus à comp- ,, te (a). " Dans un autre endroit (/?), le Commen- tateur recommande très fort aux pauvres gens de la Campagne d'accoutumer leurs enfans au travail & de les faire à la fat > gue. ,, Un pauvre homme, dit il , fe plaint de la dureté de fon fort, & envie celui de gens qui, étant plus à leur aife, font, félon lui , plus heureux. Cela lui fait prendre la réfolurion de tirer fon fils de cet Efclavage; &, quoiqu'il lui en coûte, il veut qu'il fâche quelque chofe. De cette manière , au lieu que ce fils auroit été utile, il le rend vain, orgueil- leux & aflez impertinent pour fe croire favant , parce qu'il fait lire & écrire , & que fon Père ne fait ni l'un ni l'autre: il va même jufqu'à le méprifer, & à re- , garder le travail au deflbus de lui. Ces 55 55 53 31 53 35 33 3) 3* 3) 13 33 i> gens font la Pelle de tout Gouvernement „ bien. ( a ) p. 4.6. (Op. *$• Avril, May et Juin. 1744. 201 9, bien réglé , & vrai Gibier de Potences. „ 11 feroit à ïouhaiter que chacun fût lire „ & écrire: cela renciroit la chofe plus „ commune & diminuerait le mérite que „ quelques-uns en prétendent tirer; & les „ hommes en devicndroient plus utiles. ,, Mais il feroic encore plus à ïouhaiter „ qu'avec cela l'on apprît quelque Art Mé- „ chanique, où la Ledlure & l'Ecriture ,, pûfient être utiles; ou, du moins, qu'on „ fit comprendre aux Enfans l'ufage qu'ils „ en doivent faire. " Al'occafionde ce que Tusser dit fur la manière de cultiver le Houblon5le Commen- tateur remarque (a), „ qu'il commença à ,, être en vogue du tems de cet Ecrivain. 3, Car, quoiqu'il eût été en ufage fous le „ Règne de Henri VIII , d'abord après ,, fon expédition contre Tournai , cepen- 5, dant il avoit, comme toutes lesnouveau- ,, tés, rencontré bien des obftacles. Mais ,, plus on s'en fervit , mieux on le connut; „•& plulieurs commencèrent à en planter, j, du nombre des quels fut nôtre Auteur. " A la vue des malheurs que les Armes à feu peuvent occafionner, fur tout quand on les met entre les mains des Enfans, l'Ano- nyme fouhaiteroit qu'on reprit l'ufage de l'Arc. D'un côté il eft fujet à un beau- coup moins grand nombre d'inconvéniens; il eft également amufant; &ily a longtems , ajouce- ( * ) p- 7*. N5 202 Bibliothèque Britannique, ajoute-t-il (a) , que les Médecins ont remarqué^ que rien n'ejl plus fain que cet exercice, pour dégager la Poitrine , dilater les Poumons , &c. T u s s e r recommande de tenir les Che- minées propres: cela donne occufion au Commentateur de parler de l'ufage qu'on peut faire de la Suye. ,, Il y a apparence, 3, dit il Çb) , que nôtre Auteur ignoroit 9y le grand avantage qu'on peut retirer de „ la Suye. Il n'y a rien de meilleur pour 3, fertiliTer les Terres pefantes & froides, 3, tant les labourables que celles qui font 5, en prairies; & en particulier pour dé- 5, truire la Moufle de ces dernières: il n'y „ a point de plus excellent fpécifique con- 5, tre cette maladie. " En voilà allez pour faire connoitre ce petit Ouvrage; ou, comme on le voit, il n'y a rien de fort recherché. Il ne laiflc pas d'avoir fon utilité pour les Gens de la Campagne, qui en profiteront plus qu'ils m feroient de quelque gros Volume, qui les efFrayeroit au premier abord ; & où l'on entre fouvent dans des détails plus curieux qu'utiles. Ce feroit un grand bien û , dans chaque Païs, les Gens qui entendent l'Agri- culture faifoient part au Public des Con- noiflances cu'ils ont acquifes fur ce fujet. Il faudroit fur tout s'attacher à décréditer de mauvaifes Coutumes, qui fe tranfmet- tent de Père en Fils, & dont perfonne n'a la force de s'éloigner. ARTICLE ( * ) p. 13?. ( ' ) p. i)'o. Avril, May et Juin. 1744. 203 ARTICLE XII. A Natural History of Birds, mo/l of winch bave not been figur'd or defcriFd , and otbers very lit le knovon from obfcure or to bricf Descriptions witlh ont Figures, or from figures very ill defigrid. Containing , tbe Figures of Six- ty Birds and Two Quadrupèdes , engravd on Fifty-t'joo Copper- Plates , after curions Original Drawings from Life , and exactly coiour'd. IVith full and accura- te Defcriptions. By George E- dwards. Natura femper eadem, fed Artes funt varice. London. Printed for tbe Author at tbe Collège of Phvficians in Wwick-Lane. MDCCXLIIL C efl-à-dire , Histoire Naturelle de quelques Oiseaux, dont plujieurs- riavoient été jufques ici ni deffinés ni décrits , £f dont les autres ne font encore que peu connus , foit far des Defcriptions ou obfcure s ou trop courtes & fans Figures, J oit par des Figures très mal deffinées. On y trou* liera Soixante Oifeaux £? Deux Quadru- pèdes , t©4 Bibliothèque Britannique, pèdes , gravés en Cinquante & deux Plan* ches fur d'exccllens Dejjèins tirés d après Nature , proprement enluminés à? ac- compagnés de Defcriptions exactes & complétées. Par Georg Kdvvards. A Londres. Imprimé pour ï Auteur , au Collège des Médecins en Warwick-Lane. 174.3. -4°. pagg 53 pour la Préface, le Catalogue des Noms des (Jifeaux , &c, &? pagg. 52 pour les Defcriptions. CEt Ouvrage dédié à la Société de Mef- fieurs les Médecins de Londres, qui par leur émulation à fouferire pour en fa- ciliter la publication doivent en être regar- dés comme les Pères, mérite d'être placé clans le Cabinet des Naturalises entre les Chefs-d'Oeuvre de l'Art. II efl,du moins en partie, le fruit précieux d'un travail de plus de vingt ans. Touché des beautés de la Nature , ou le Créateur a étalé fes Perfections à nos yeux avec tant de magni- ficence , Mr. Edwards nous apprend qu'il en a fait fon étude favorite. Mais comme on ne peut pas s'attacher à tout, & comme d'ailleurs chaqu'un a fon goût, il s'eft infenfiblement livré au plaifir d'em- ployer fes talens pour le deflein, à repré- fenter des Oifeaux au naturel. Il s'eft at- taché principalement à s'en procurer des efpéccs étrangères les plus rares, que les Curieux de fa connoiffance apportoient de tems Avril, May et Juin. 1744. 205 tetns en tems à Londres foie morts ibit en vie, , de donner à mon propre travail le plus „ de netteté & de clarté qu'il m'a été poiîl- „ ble. " Une autre dificulté bien plus confidéra- blc que la précédente tenoit encore en fuf- pens notre Auteur. C'étoit l'impuifiance de fuffire aux fraix indifpenfables pour faire gra- ver les DefTeins. 'Mais fon induftrie & les foins obligeans du célèbre Mr. Catesby ont levé cet obftacle. Ce dernier a appris à Mr. Edwards la manière de graver lui mê- me fes DefTeins à l'eau forte , & il a 11 bien profité des directions de cet habi- le homme , qu'il fe trouve en état de don- ner ici d'utiles leçons à tous ceux qui gravent dans le même goût & qui veu- lent porter leur travail au degré de perfec- tion néceflaire pour la plus grande beauté des Enluminures. Il ne nous convient pas de le fuivre dans ce détail. Il faut le laifîer aux gens du métier, feuîs capables de rendre fidèlement la penfée de l'Au- teur & d'apprécier fes avis. Nous nous contenterons de dire qu'au jugement des Experts on n'a encore rien vu en ce genre d'auffi heureufement exé- cuté que l'Ouvrage de Mr. Edwards, foit peur le Deffein , foit pour la Gravu- re , foit furtout pour la Beauté & le Mé- nagement des Couleurs , foit pour l'Art & le Goût de tout le Travail. Les Attitudes des Oifeaux qui y font repréemés, font toutes naturelles, gracieuses, & avec cela diverûfiées de la façon la plus agréable. 11 y Avuil, May et Juin. 1744. 207 y a partout de l'invention & de l'élégance. Après s'en êcre amufé vingt fois on y re- vient prefque avec autant de plaifir que 11 lefpedcacle étoit nouveau, tant il eft animé, riant , & varié! Quant aux Defcriptions qui répondent à chaque Planche , elles ont aufïï leur mérite , beaucoup de clarté & de précifion. Un exemple mettra le Lecteur en état d'en ju- ger. Nous choifirons pour cet effet laDei- cription de l'Oifeau fingulier que repréfeu- te la Planche 48, & que Mr. Edwards appelle, la Poule d'Eau à Ailes éperonnêes. Voici ce qu'il en dit. „ Cet Ôifeau efl de l'efpéce des Poules „ d'Eau. Wîllugbby en a décrit un qui en „ approche alTez pour la Figure, mais qui ,, endifère pour les Couleurs. On voit ce- ,, Jui-ci deffiné dans fa Grandeur naturelle. ,, Il a le Bec jaune d'environ un pouce & „ demi de long , & les Narines placées de „ chaque coté à peu près au milieu. A la „ racine de la partie fupérieure de ce Bec, ,, efl une ?eau rafe & fans poil comme ,, dans toutes les Poules d'Em, avec cette „ diference que dans celle-ci, ce n'eft pas „ une Per.u adhérente , mais une efpécede ,, Crète qui a prois découpures à la poin- „ te , & efl attachée de l'autre coté au „ fommet de la Tête. Cette Peau efl aulli „ jaune. Te crois pourtant qu'elle étoit rou° ,, ge quand l'Animal vi voit encore ; comme ,, dans ces Oifeaux que Margrave trouva au „ Bréjil, Le Sommet de la Tête de celui - 268 Bibliothèque Britannique, „ ci cil brun , avec des taches noirâtres.- ,, Des deux coins du Bec part une Ligne ,, noire qui s'étend le long des Yeux juf- „ ques derrière le Col. Sur les Yeux font „ des Rayes blanches. Le defibus de la „ Tête, le devant du Col, la Poitrine, le „ Ventre, les Cuifles, & le deffous de la „ Queue font blancs , mais les cocés du ,, Ventre & des CuilTes font un peu tache- 3, tés de rouge. Le defîus du Col e(l noir, „ mais d'un noir qui va en s'éclaircilTant „ & fe change en brun à mefure qu'on ap- „ proche du Dos. Pour le Dos , le Crou- „ pion, & le deffus de la Queue, ils" font „ d'un rouge qui tient ou du pourpre ou „ de la couleur de rofe. Les petites Plu- „ mes qui couvrent le deiTus des Ailes au- ,, tour de l'Epaule font d'un clair brun, les „ groffes jufqu'au bout des Ailes font d'un „ beau verd bordé de noir, à l'exception „ des plus grêles qui touchent au Dos & ,, qui font brunes ; celles du premier rang „ & qui couvrent les grofles font d'abord ,, noires, puis en remontant brunes , & à ,, la fin couleur de rofe ou pourpres. En „ dedans de l'Aile les petites Plumes font „ d'un brun rougeatre. Mais ce qu'il y ,, a de plus remarquable dans ces Oifeaux, „ c'eft qu'ils portent fur ta jointure decha- ,, qu'une de leurs Ailes une efpéce d'éperon „ fort, épais, court, & un peu tourné en „ dedans, de forte que la pointe de l'un ,, regarde la pointe de l'autre. Leurs Jam- ,, bes font fort longues & fans Plumes au def- ,, fus Avril, May et Juin. 1744. 209 J9 fus des Genoux. Ils ont l'Orteil du milieu „ de la longueur de la Jambe. Ceux des „ cotés font un peu plus courts, mais ce- „ lui de derrière, qui eft aflez long, eft 5, armé d'un Ongle droit, fait en aiguille „ & plus long que l'Orteil même; l'Ongle „ & l'Orteil pris enfemble font plus longs ,, que la Jambe. Cet Orteil de derrière 5, n'a qu'une jointure , celui de dedans en „ a deux , celui du milieu en a trois, & „ l'Orteil extérieur quatre. ]'en fais ex- 3, près la remarque, parce que Wîllugbby ,, donne toujours dans fes Defcriptions „ quatre jointures à chaqu'un des Orteils „ des Poules d'Eau. Du relie les Orteils ,, de devant de celle-ci font tous trois garnis ,, d'Ongles longs, minces, & allez poin- „ t«s, & fes Jambes, fes Pieds, &fes On- 3, gles , font d'une couleur cendrée & „ bleuâtre. ,, Cet Oifeau a été depuis longtems con- „ fervé dans de l'efprit de vin par Mr. le ,, Chevalier Sloane qui a eu la bonté de me ,5 le prêter pour le deffiner. On lui a aflu- 3, ré qu'il étoit originaire de Cartagène „ dans Y Amérique Méridionale. " On voit par cet échantillon que Mr. E- dwards ne néglige rien de ce qui peut don- ner une idée claire & diftin&e des Oi- féaux, qu'il a défîmes avec tant d'exacl:itu« de, gravés avec tant d'art & enluminés a- vec tant de goût. S'il ne dit que ce qui eft néceflaire, ce n'eft pas qu'il ne fût en état de donner plus détendue à fon Ouvrage. Tome XXIII. Part. I. O Sa 2io Bibliothèque Britannique, Sa Préface montre aflez de quoi il eft ca- pable. Il y fait entr'autres quelques re- marques fur les Oifeaux & autres Animaux de Paflage, & je penfe qu'on ne fera pas fâché d'en trouver ici un morceau. ,, Il feroit à fouhaiter , dit Mr. E- 3, dvvardSj que les Voyageurs s'informaf- ,, lent de la qualité des Oifeaux & autres „ Animaux qui fe trouvent dans les Païs „ Etrangers, de la faifon de l'année oii „ ils y paroiflènt, dutems de leur départ, „ & de celui de leur retour. Par le moyen ,, de ces obfervations , on parviendroit à „ favoir à peu près les iieux d'où viennent 3, les Animaux de Paflage qu'on voit en 3, Angleterre, & ailleurs, feulement dans 3, certaines îaifons de l'année. Ceux qui 35 33 3> 3> 33 33 croyent qu'il n'y a pas des Animaux de Paflage dans les Climats éloignés com- me dans le nôtre, fe trompent fort. Je tiens de gens dignes de foi , & actuelle- ment établis dans nos Forts à la Baye de Hudfon , que dans ce Païs-îà les Bêtes Fau- ,, ves paffent au Nord dès que l'Eté com- 5, mence & reviennent vers le Sud aux ap- 3, proches de l'Hyver, que leur route eft 3, également connue des Indiens & des 3, Anglois, qu'ils les y attendent & qu'ils 3, en tuent quantité au pafTage pour avoir „ leurs peaux. Les gens du Païs aflurent 3, qu'en Eté ces Animaux pénétrent fort 3, loin dans le Nord , & qu'en Hyver ils ,, s'avancent du coté du Sud jufques dans 5> les Climat* Tempérés. Les recherches 33 que Avril* May et Juin. 1744. 211 „ que j'ai faites fur les Oifeaux, m'ont ap- ,, pris que quelques-uns de ceux que nous „ avons en Angleterre dans de certaines ,, faifons , fe trouvent aufli à Bengale , & „ qu'on en voit de même en d'autres Ré- gions de l' Europe qu'on a à Bengale pa- reillement. Je ne lai s'ils y font des Oi- feaux dePafiage, comme ils en font chez nous; ce feroit une affaire à obforver, & dont il coûtèrent peu à quelqu'un de , nos Curieux qui rélident à Bengale de s*in- ,, former.. . . „ On nepeutguères douter que tous ces Oifeaux qui difparoiflenc annuellement de nos Contrées pour un certain tems , ne pajTent dans d'autres Païs. Plufieurs y font forcés, parce que la nourriture leur manque, comme les Faifans, les Bécaf- fes ,les Grives , &c. Je m'imagine qu'ils vont chercher à manger vers le Nord, de même qu'en Eté nous envoyons tant d'autres arriver du Sud dans l'éfpérance de faire meilleure chère dans nos cam- pagnes; apparemment que ces derniers retournent en Hyver dans les Climats du Midi d'où ils étoient venus, où ils font plus à l'abri des rigueurs du froid, & où ils retrouvent la nourriture qui leur eft naturellement propre ; pendant que les Païs Septentrionaux nous en fournif- fent d'autres qui viennent palTer l'Hyver avec nous. Je n'ignore pourtant pas que bien des gens font dans lapenfée que ces O 2 „ Oifeaux 212 Bibliothèque Britannique, ,, Oifeaux devenus crop gras pour pouvoir ;, voler un peu loin dans le tems qu'ils 3, difparoifient, loin de retourner vers le 3, Midi, fe retirent dans les Trous des Ar- 3, bres, dans des Cavernes, &c. & qu'ils y 3, tombent dans un profond fommeil ^ ,, mais je croirois plutôt que la Providence 5, a difpofé les chofes de manière que ces ^, Oifeaux, font plus gras quand le tems de 3, leur retour approche, afin qu'ils puiflent ^ voîer plusieurs jours de fuite fins en être 3, entièrement épuifés. Ce qui me perfua- 3, de furtout que tout ce qu'on dit de leur 3, fommeil n'eit que* chimère, c'eft qu'on 3, n'a jamais trouvé de ces Oifeaux endor- 3, mis, ou qu'au moins tout ce qu'on débi- 3, te îà defïus eft trop incertain pour que 35 l'on puifle y faire fond. S'il écoit vrai que 3, des Oifeaux fe retirafTent par troupes 3, dans des Trous , dans des Creux ce 5, dans des Cavernes, lachofe, loin de de- 3, meurer problématique, feroit démontrée 3, il y a longtems; les Pai'fans & les gens „ qui travaillent dans les Forêts en trouve- „ roient tous les jours d'endormis comme ,, ils en ont fouvent trouvé d'éveillés en n'eft pas 11 parfaitement exact qu'il ne leur arrive quelques fois de fe laiiter fuv- prendre par une froide Automne. C'efl peut-être ce qui arrive aux Hirondelles. Ayant laide échapper le moment favo- „ rabîe Avril, May et Juin. 1744. 213 5, rable à leur Pafiage, la foibîefTe Icscon- ,, traint à fe jetter dans des Trous eu elles ,< périflent " On laiiîe à décider aux Lecteurs fi l'Au- torité de Mr. Edwards doit l'emporter fur celles que Pilîiiftre Derbam a produites dans ra Théologie Phyfique pour prouver que les Hirondelles paflent l'Hyver dans des Creux: ou fous l'Eau (a). Autre chofe cft d'exceller dans ledeiTein ce autre chofe d'ê- tre habile Naturalise. ARTICLE XIII. NOUVELLES LITTERAIRES. De Londres. A U milieu du bruit res armes 'es BeUesLettrei vont *-*• leur tnin. Sans pa; 1er d'un-, multitude innombra- ble de Brochures Polùiques parmi lefçuelies il y en a de trè<-cnricvfc6 j quoique la plupart compa- rée-, à la hâte n'ayer t nbfol-rmnt d'au tic mérite que cclti ;Je la Nouveauté , les Libraires pou ent avec rigueur pi .fieurs Ouvrages importans. }\s font aclueMemcnt à met: re fovs prefïe la VII Tome •Je ÏUnrvtrfsl Htjiory , & dans peu rie jours nous aurons eufij le III Volume des Veyajes de BUinville. On voie toutes les femaines quatre à'fércnies Ccctinuatio: 5 de Voyages qui fe donnent par teuilkj , ( a ) Lit. VIT. Chsp. 3. pag. 491. de ledit, de 7jO. O ~ 21.]. Bibliothèque Britannique, feuilles, autant de divers Syftèir.cs ou Dictionnai- res Géographiques, la nouvelle Hilioire cf Angleter- re :r Sec. 01 Réfutation* de l'Ouvrage de Air. War- biuion fur la Mijîon Divine de Moi )e% par Th. Bott. Le Dr. Sykts vient aufli de l'attaquer dans les for- O 4 mes 2i 6 Bibliothèque Britannique, mes enpubliwt Examination ofMr. Waiburton *sAc~ count ofAncient l.e-tflature, ou Examen de s Principe s de Mr. Warburton fur l'Ancienne LégiÇ.amre, chez Knap- lon. De fou cote cet habile homme a publie de nouveau Vctnzrhs en fierai R'flexians , in anfacr to Dr. ïvîMdlcron, c'eft à dire, Remarques fur quelques In- flexions , in réponfe au Dr. Middleton. Le iujet de là difptite entre ces deux Meflicurs, roule fur Ja conformité' des Cérémonies du Papifme avec les Rites de l'Ancien Paganiime. Mr. Warkmton s\- toit avifé de foutenir dans ion fameux Ouvrage fur la MiJJîon Divine de Moïfe que quoiqu'il y *ir une refTemblance furprenanre dans quantité d'ufages religieux du Papilme avec ceux du Paganifme, on ne fiuroit dire néanmoins que Rome Chrétienne ait emprunté fljs Supcrfti ions de Rome Payennej le Docteur Middleton avoit fait quelques réflexions également moJcircs & judicieufes fur ce paradoxe dans un Pofcfcript à fa Lettre écrite de Rome, & c'eft apparemment une Réplique à ces réflexions que nous annonçons , car nous ne connoirTons en- core POu/rage de Mr. Warburton que par le Ti- tre. La Lettre du Dr. Middleton avec fon Poftfcript va être plus connue que jamais delà la Mer. Une perfonne de diftinclion , mais moins rofpe&able encore par fa naiflàncc que par fon érudition, par fon goût pour les Belles Lettres & par le zèle avec lequel elle a toujours favorifé le progrès des Scien- ces & encouragé les Savans, vient tout récemment d'en procurer une excellente Traduction en Fran- çois. Elle c(r imprimée à Amflerdam chez May- nardUytvperf in 8. à la fuite d'une Nouvelle Edi- tion du Traire' des Conformités des Cérémonies Mo- dernes avec Us Anciennes y Ouvrage très-citimé 5-: de la façon de Fierre Mvjfard natif de Genève Ôc Minif- Avril, May et Juin. 1744. 217 Mîniftrc à Lyon, qui fe réfugia dans ce Royaume & mourut ici Pafteur de l'Eglife Françaife de la Savoyc en 168 r. Un autre Ouvrage important, dont on atten- doit la fuite avec impatience, c'eft celui du Dr. LarJner, nous voulons parler de fon Credibility of Cofpel. Not>n en débite la f Partie. Il pamit encore pour la Théologie A Letter t& the Honùl' Col. Jcbn. . in Flanders on the fukjeti of Religion , ou Lettre au Col John,, en Flandres jur le fujet de U Religion. Cbrijlixn Faitb a Rational A[jent &c. Traité dans lequel on prouve que U Foi ejl une Ferfttafion Raifonnêe , en réponfe au Livre in- titulé Jhii le Chrilianifme nejl pas fondé fur le Rationnement , par Mr. Randolph. Une Nouvelle Edition des Oeuvres de Tillot/on en 12 vol. 8. Re- itgio Statua , or tbe Harmony Sec. C\ft à dire, La ihéùlogie Statique ou Harmonie des Oeuvres £J» ds la Parole de Dieu, pc:itc Brochure qui fe de- bile chez Roùerts. ReaJin: no preacbing &c. C'cft à dire, £)ue ce n'eji pas prêcher que de lire les Ser- mons , ou Lettre écrite à un jeune Eccléfia^i" que par un de (es amis de Londres , touchant ïinexcu fable coutume de lire l'Evangile au lieu de le prêcher. Cette Lettre imprimée pour l'Auteur <5c mife en vente chez J. Ofwald, n'eft que d'environ 37 Pagc^ «n 8, mais le caractère en cil petit. I! y a beaucoup de paroles ?c de feu. Quelle bizarre- rie ! Tout ce qu'il y a de gens fages parmi les Pre'- dicateurs , dans lei Pais étrangers, envient aux no- t'es le bonheur qu'ils ont de pouvoir donner tout hur tems & toutes leurs forces à la compoiition de leur* Sermons fans être réduits à s'épuifer pour le; apprendre , ôc cependant fi nos Prédicateurs en croyoient l'Anonyme, ils renonceroient à la liberté dont ils jouiflent, pour s'affermir comme les autre» à fii 8 Bibliothèque Britannique, à un joug des plus dificiîes à porter. Selon lui rien de iï pernicieux, rien de fi funefte à la Religion, 6P des Succejftons difputées. 8°. 287. Art. V. Les Oeuvres de C. Corneille Ta- cite , telles que les a données J. Fred. Gronovius. 120. 301. VI. Réflexions fur la Trabifon de Ju- das. 305. VII. Vidimus d'une Lettre du Roi Guil- • laume au Comte de Portland ,par la Cour d'Hollande. 326. VIII. Défenfe de Mr. Boerhave, contre l'Article VIL de la Bibliothèque Raifonnée pour les Mois de Juillet y Aout>& Septembre , M. dcc. xliv. ïîC Hifloire de Mr. Rapin-Thoy- ras, continuée , depuis la Révolu- tion , jufqu'à l'Avènement de Geqr- ge II. au Tbrone a par Mr. N. Tindal. 4°. 367. X. La Spectatrice. 8®. 395. XI. Lettre fur un Article des Mémoi- res de Trévoux contre feu Mr. Bur- net, Evêque de Salisbury. 41& BIBLIO- BIBLIOTHEQUE BRITANNIQUE, o u Histoire des ouvrages des sçavans de la GRANDE-BRETAGNE , Pour les Mois de Juillet, Août, et Septembre, M. DCC. XLIV. ARTICLE PREMIER. AIAIANOÏ nïPI ZttGN IAI0THT02 bibaia 12. iEliani de Naturà Ani- malium Libri XVII ; cum Animadver- Jionibus Conradi Gesneri, & Danielis W il H EL mi Tril- llri: Curante Abrahamo Gro- novio, qui & fuas Adnotationes ad- jecit. Londini , excudit Gulielmus Bowyer , fumptibus Societatis ad Lic- Tomc XXIII. Paru II P teras 222 Bibliothèque Britannique, teras promovendas inflitutae : Projîant vénales apud J. Whifton in Fleet- ftreet , J. Osborn in Pater - Nofler- Row , É? Fran. Changuion in the Strand , Bibliopolas Societatis. Ànno 1744. Ceft - à - dire. Les XVII Livres d'JElien de laNature desAnimaux; avec les Notes de Mrs. Conrard Gesner,& Daniel Guillau- me Triller: Publié par les Soins de Mr. Abraham Gronovius, qui y a ajouté f es Remarquse. A Lon- dres , aux dépens de la Société pour V Encouragement des Belles Lettres. C'efl un in quarto de 1128 pp; fans YE- pitre Dédicatoire & la Préface de Mr. Gronovius , les Prolégomènes de G e s n e r , & les Indices , qui en contiennent 174 (*). IL y a environ douze ans que Mr. Abra- ham Gronovius nous donna une nou- velle Edition des Hijloires di-verfes d'JÉLiEX. L'applaudiflement avec lequel elle fut re- çue du Public, & le cas que les Savans en firent alors, &en font encore, furent, fans doute , d'un grand poids pour le détermi- ner (*) Cet Ouvrage fc débite à Ltidvn chez B**ci. Juillet, Août, et Septembre. 223 ner à publier le Traité de la Nature des A- nimaux du même Auteur. Accoutumé au fhle cI'jElien, & fait à Tes façons de par- ler , perfonne ne pouvoit guères nous le donner dans un meilleur état. Il avoit d'ail- leurs de fon Père la Collation d'un M S. de cet Auteur, qui fe trouve à Florence dans la Bibliothèque de Medicis, dont les pré- cédens Editeurs n'avoient point fait d'ufa- ge. Aidé de ces fecours, & de tous ceux qu'une vafte érudition peut fournir , Mr. Gronovius travailla à l'Ouvrage que nous annonçons. Son travail étoit achevé Jorfqu'il fe vit obligé, par des raifons qu'il ne dit point , d'en renvoyer l'imprerTion à un autre tems. Il y a apparence quecefonc les Libraires de Hollande qui y apportèrent: des obftacles. Ils n'aiment pas à imprimer des Livres, dont le débit n'eftpas prompt, & qui ne font pas à l'ufage de tout ordre de Lecteurs. Heureufement pour les perfon- nes qui aiment les Belles-Lettres, Mr. Ri- chard Mead propofa à nôtre favanc Auteur de lui envoyer fon M S. pour le faire imprimer à Londres , aux dépens de la Société qui s'y eft établie depuis quel- ques années pour l'Avancement des Scien- ces (a). Cette propofîtion fut goûtée de Mr, Gron ovius; & fon Ouvrage paroic au- jourd'hui avec une magnificence digne des illuftres Membres qui compofent cette uti- le Société. L'on ne peut rien ajouter à la beauté (») VoyçzBièliçtb. Uritannlei ., Tom* IX* ». xf 4 c? J*& P 2 224- Bibliothèque Britannique, beauté du Papier & à celle des Caractères , non plus qu'à la netteté de FImpreflïon. Le Texte eil accompagné d'une Verfion Lati- ne, qui fe trouve fur la première page; & le G:ec fur la fuivante , vis à vis du La- tin. Pour les Notes, on les a renvoyées à la fin. Cet arrangement ne plaira , peut-être , pas à tout le monde. Le Texte auroit dû , ce femble, précéder la Verfion; & les No- tes auroient été placées plus commodément au bas des pages. Mais fi c'eft là un défaut, il eft peu confidérable, & largement com- penfé par les choies qui rendent cette Edi- tion recommandable. Voici ce que Mr. Grono vi us nous en apprend lui-même dans fa Préface. „ Aidé du fecours du M S. de Medicis , dit 3, f/,j'ai donné le Texte Grec beaucoup _,, plus correct, queneFavoh fait le favant 3, Conrard Gesner. J'ai auffi corrigé „ la Verfion Latine de Gyllius & du 3, même Gesner. Je me fuis fervi pour 3, cela âts Corrections mêmes de ce der- 3, nier ,• & ai fuivi la route qu'avoieht tra- ,, cée les favans Pantinus & Bo- 5, c h art. Ce travail a été très pénible. 3, Je me faifois fcrupule de rejetter tout à „ fait la Verfion de Gyllius, corrigée „ par Gesner, & il étoit extrêmement 3, difficile d'y changer quelque chofe;par- 3, ce que Fun & l'autre s'étoient plutôt 5, attachés à rendre le fens, que les termes j, mêmes de leur Original ; & que les mots 3, étant liés entr'eux, iln'étoit pas aifé d'en 3È retrancher, Juillet, Août, et Septembre. 225 retrancher, d'en ajouter ou d'en fubfti- tuer d'autres. J'ai cependant fait tout ce qu il a dépendu de moi , pour remplir cette tâche. J'ai eu foin dans les Notes d'éviter la trop grande longueur. J'ai ajouté aux miennes celles du favant Ges- „ ner, qui fe trouvent dans l'Edition de ,, Zuricb; auili bien que celles qu'il avoit „ écrites à la marge de fon Exemplaire , ,, & qui m'ont été communiquées par Mr. ,, Jean Caspar Hagenbuchius, ,, homme d'une grande érudition, & mon ,, ami particulier. Mr. Jean Jaques „ Trillerus, ayant aufli appris que je „ travaillons fur cette partie des Ouvrages ,, d'iE lien, m'a envoyé fes Remarques & „ fes Corrections , dont j'ai enrichi l'E- ,, dition que je publie. Enfin , j'y ai joint ,, les Indices néceffaires. Le premier con- „ tient les Noms Grecs & Latins des Ani- „ maux dont M l i e n parle : le fécond ren- „ ferme les mêmes Noms en Latin & en „ Grec: le troifième & le quatrième of- „ frent les Noms des Plantes dans le mê- ,, me ordre : le cinquième contient les „ chofes les plus mémorables du Livre : „ le fixième & le dernier eft un Catalogue ,, des Auteurs cités dans le corps de l'Ou- La Préface, d'où uous avons tiré ce qu'on vient de lire, cil précédée d'une Epitre Dé> âicatoire à Mr. Richard M e a d , qui a eu tant de part à la publication du Livre que nous annonçons. L'Eloge, que Mr. Gro- n o v 1 T: S 226 Bibliothèque Britannique, novius fait de ce Savant , ne paroitra point outré à quiconque connoit un peu l'Hiftoire Littéraire de la Grande - Breta- gne. Son goût déclaré pour les Sciences , les grands progrès qu'il y a faits, & la protec- tion dont il honore lesSavans, font quefon nom fetrouve fréquemment dans les diver- fes Parties qui compofent cette Bibliothè- que. Difonsen autant de Mr. Jean Ward , ProfefTeur de Rhétorique au Collège de Gresbam. Mr. Gronovius le remercie publiquement des fecours qu'il lui a fournis pour la compofition de cçt Ouvrage, & des foins qu'il s'eft donnés pour en diriger i'im- preffion. Ilafuppléé, ajoute-t-il, par fon éru~ diîion & fon habileté à mon peu de capacité, Cet aveu, auffi modeïte que peu commun, fait trop d'honneur au favant Anglois , pour être fupprimé dans un Ouvrage de la natu- re de celui-ci. Mr. Gronovius ne dit rien, ni delà Perfonne , ni des Ecrits de fon Auteur. Cela auroit été en effet fuperflu après ce qu'on en lit dans les Prolégomènes que G b s- i-j er a mis à la tête de fon Edition. On les trouve en entier dans celle-ci. Il fuffit d'en avertir les Lecteurs, fans qu'il foitnéceflai- re d'entrer dans aucun détail des faits qu'ils renferment. Les Notes, dont on a enrichi cette Edi- tion, font de pure Critique. Elles font prin- cipalement deftinées à rendre raifon des Corrections que le favant Editeur a faites dans le Texte ; & à indiquer les Auteurs dans les Juillet, Août, et Septembre. 227 ]çs quels il femble que jElien aie puifé, ou qui ont die les mêmes chofes que lui. Des Remarques de cet ordre font , fans dou- te , utiles. Elles tendent à rendre à JEli en fa beauté primitive; & fournirent aux Cu- rieux les EclaircifTemens que Ton peut tirer des Anciens fur les Faits qu'il rapporte. Mais bien des perfonnes trouveront, que ce n'eft pas allez. Les Découvertes des Modernes fur l'Hiftoire Naturelle nous apprennent que JEli en s'eft trompé à bien des égardsc N'auroit il donc pas été à propos de le re- lever , lorfqu'on voit évidemment qu'il nous débite des Contes? Mr. GronoviusT* fait quelques fois , mais pas aufîi fouvent que fes Lecteurs le foubaiteroient. En effet, fans cette précaution, l'on ne fait que mul- tiplier les Erreurs, en multipliant les Edi- tions. J'avoue qu'il n'eft pas ordinaire aux Critiques de travailler dans ce goût ; & que pluficurs mêmes méprifent ce genre de tra- vail : mais en font ils mieux fondés pour cela? C'eft ce que j'ai de la peine à me per- fuader. Quoi qu'il en foit, tâchons de don- ner une idée un peu plus diftincTte des No- tes, qui accompagnent cette Edition. Pour cet effet rapportons en quelques-unes au ha- zard. Remarquons d'abord, que le Titre de l'Ou- vrage eft différent de celui fous le quel Gesner l'avoit publié. Nous apprenons de Suidas , que nôtre ^lien étoit natif de Prcsnefte, Ville d'Italie, & qu'il fenommoit •\ Le favant Zuricois, ayant choifi cet P 4 Auteur 228 Bibliothèque Britannique, Auteur pour guide, enpritoccafion de don- ner les dix-Jept Livres de ïHiftoire des Animaux TOUS Ce Titre : K>.etv£i& A\A<*vë 7& ùxo Upectveer^ ?ïç lr«*/«* xtp %*>"> 'Mr7rr&>. Mr. GroNO- vi us a beaucoup abrégé tout cela; & n'en retient abfolument que ces mots : aJaww vtç) Zaon'lhÔTiïl©*. L'on trouve Lime I Cbap. VIII l'Avan- ture d'unChafleur, nommé Nicias , qui s'é- tant laifle tomber dans le feu d'une char- bonnière , fes Chiens ne l'abandonnèrent point. Ils pouiïbient des plaintes & des gé- miiTemens fur le malheur arrivé à leur mai- tre; & , fans s'éloigner du lieu où il étoit, ils alloient de côté & d'autre, jufques à ce qu'ayant rencontré des gens, ils les mordi- rent par leurs habits pour les forcer à ve- nir au fecours de Nicias. La Leçon ordinai- re porte : tkùttH M *• **é&> , ce qui à la lettre fignifie: les trainans vers V accident qui étoit arrivé. Mr. Trille r fait fur ce dernier mot une conjecture fort ingénieu- fe. „ Quoiqu'on puhTe fort bien îeconfer- 3, ver, dit il ; & que JEhen s'en ferve „ Liv. II Cbap. X, & ailleurs : j'aimerois 3, cependant mieux , en changeant une 3, feule lettre fort aifée à confondre, lire 3, Ç«0©-; comme û l'Auteur eût fait allufion 3, au gouffre dans le quel Nicias étoit tom- 3, bé. „ Dans le Cbap. XXXV du même Livre , £lien raconte que les Animaux Brutes favent fe garantir des maléfices des Magi- ciens par divers moyens naturels. L'Aigle, par. Juillet, Août, et Septembre. 229 par exemple, employé à cela la pierre qui porte Ion nom. A quoi il ajoute que cette même pierre eft. boune pour les femmes grojfes > & prévient les faujje s couches. La leçon vul- gaire femble ici être corrompue. Elle por- te l xiysTctt iïe ùr^ ô tuô^ xiit yvietiÇt Kioicstii xyuêèv fdh JE.LiEtfLiv.il Cbap. Vftue lesSerpens. Le (avant Rocbart, citant cet endroit de nôtre Auteur Hieroz. To. II P 5 Liv. III 230 Bibliothèque Britannique , Liv. III Cbap. IX, le rapporte félon l'Edi- tion de Genève , où l'on J]t ***$&(*; termes qui, dans cet endroit, ne font aucun fens. Cela lui fit conjecturer qu'au lieu de *i^W, il faudroit lire xetvçoç ou xtcvrhq. Mais il n'eft point néceflàire d'en venir là. C'eit une faute de l'Edition de Genève, qui n'efl ap- puyée fur aucun fondement. La véritable ieçbn elï al<&> , qui fignifie J'ec. jElien Juj même a employé ce terme dans ce fens Liv. I Cbap. XLVII & Liv. Il Cbap. XXXVI. Voyez Mr. Paaw ad HorapolL p. 27f- Mr. Gronovius rétablit encore fort heureufement, à l'aide du M S. deMedicis, un Pafiage du Cbap. VI de ce même Livre, qui faifoit un fort mauvais fens. Il s'agit de l'amitié des Dauphins pour les jeunes gar- çons. Parmi les exemples qu'il en rapporte, il cite celui d'un bel enfant, dont il parle en ces termes : ?* yt p.u ù r-Àa vncp t* «-«/^ tki yuXQ , xtc) 7t)<; ^/ff*s ciVrQ xeit 7y £eàÇiïv&'. Ce mot p*f*$ forme un lens infupportable, tout à fait éloigné de la penféede ./Eli en, qui a écrit vfoç. Le Paflage devient clair par cette correction , & exprime une idée plus naturelle. JElien raconte Liv. II Cbap. LVI, qu'allant de Naples à Pouzol, il eiïuya une pluye mêlée de Grenouilles, qui lui tom- boient fur le corps. Ce fait donne occafion à Mr. Gronovius de remarquer, que le favant Ifaac Voffius ne s'étoit pas fouvenu de ce Paflage, quand il dit dans fes Obfer- vaciani Juillet, Août, et Septembre. 231 v zùons far Pompoiîius Mêla, Lib. I Cap. IX, qu'il voudroic bien favoir, pourquoi, de tant de perfonnes qui ont écrit qu'il avoit plu des Grenouilles, il n'en e(r aucune qui dile les avoir vu tomber. Parmi les Notes de G e s n e r , il y en a , comme l'on fait, un grand nombre qui ren- ferment d'ingénieufes & de favantes Con- jectures pour rétablir le Texte de fon Au- teur. Elles font d'autant plus d'honneur au favant Zuricois , qu'une grande partie fe trouve préfentement appuyée de l'autorité du M S. de Medicis. Mr. Gronovius n'oublie jamais d'en faire appercevoir fes Lecteurs dans fes Notes. C'eft ainfi que ce qui jufqu'à préfent n'avoit été qu'un foup- çon , devient une certitude par les foins du Savant de Leyden Liv. III Cbap. XLII, il eft parlé d'un ©ifeau rare & d'une grande beauté, que les plus friands d'entre les mortels n'ont jamais fait fervir fur leurs tables. Parmi les gens de cette clafle, ./Eli en nomme un cer- tain "Ak« a@- , perfonnage inconnu. Ges- ner avoit crû qu'il falloit lire 'At/x;^. Mr. Triller trouve qu'il n'eft guères probable qu'un Copifte fe foit oublié jus- qu'au point d'écrire "axoa®- pour 'AvUt®*: ce qui lui fait conjecturer qu'il faut lire ^koW«», par où jElien aura entendu A- picius , cet illuftre friand. Il renvove là deflus à Pline, Hifl. Naî. Liv. XC'iap: XL VIII. & IX Cbap. XVII. A quoi Mr, Gronovius ajoute, que le Grammairien Appion 232 Bibliothèque Britannique, Appion avoit écrit , au rapport & Athénée Liv. VII Cbap. XII 5 un Livre du Luxe d'Apicius. Il femble cependant ne pas ap- prouver la conjecture de Mr. Triller, puifqu'il en propofe une autre. Il foup- çonne que iÉLiEN avoit écrit Àmk#à*m, d'où par corruption fe fera forme 'a«a«. Il conferve néantmoins ce dernier mot dans le Texte ; mais dans la Verfion il fuit Gesner & Triller, & traduit Api- ci us. Le Cbap. LU du Livre IV traite des Anes des Bides. Une de leur qualités c'eft d'être plus légers à la courfe, non feule- ment que les Anes ordinaires, mais même que les Chevaux; à quoi la leçon ordinaire ajoute: £ fatQûmn. Il eft vifible,que c'eft une faute; puifque Y Eléphant n'eft pas re- commandable par la légèreté de fa courfe. Mr. Gronovius croit donc qu'il faut lire lXM les Cerfs; terme qui convient beau- coup mieux ici. Il ne l'a cependant point in- féré,ni dans leTexte,ni dans laVerfion. Com- me cette correction n'eft pas de lui, il y a apparence qu'on ne la lui a communiquée qu'après l'impreiTion de cet endroit. Au refte le premier, qui lui a fait appercevoir cette faute, eft Ion Imprimeur; & Mr. Ward a appuyé la correction de fon fuf- frage. il y a fur la fin du dernier Cbap. du Li- vre VII un PalTage que Gesner n'a point entendu. Il auroit pu faire comme bien d'autres j je veux dire paflfer cet endroit- fans Juillet, Août, et Septembre. 233 fans s'y arrêter : mais il a mieux aimé a- vouër Ton ignorance à cet égard , que de chercher à en impofer au Public. Sa mo- deftie auroit dû, ce femble, lui attirer plu- tôt les louanges que le blâme de Mr. Tril- ler. C'eil cependant ce qui n'eft point arrivé. Il regarde cet aveu comme indigne d'un fi grand homme ; & l'accufe,en quel- que manière, de ftupidité, pour n'avoir pas vu la même chofe que lui. Après quoi il pro- pofe d'un air de triomphe fon explication, il s'agit dans ce Chapitre de la Mémoire que les Animaux confer?ent des Bienfaits. JElien rapporte à ce fujet l'exemple d'un Lion, qui pendant quelques années nourrit dans fon Antre un Efclave , dont il avoit éprouvé le fecours dans unbefoin prenant,- &qui, quelque tems après, lui* fauva la vie dans l'Amphithéâtre. Après quoi il a- jOUte : Kxt a-viuêit roTç irç*$tçi)[*éyotç , t$ h 7» mÔto à'içit fy'J«»T@- f* 77] ILetfAéi îsr< t£ x/£JfyoT(^ At»m fva-H v«utÇ»i76 cev >£ 7» $ fuivanr. Mr, Gronovius n'a pas fait entrer dans le Texte les Corrections de Mr. Triller; mais il y a conformé fa Traduction ; ce qui ne laide pas de la rendre un peu différente de l'Ori final. Liv. IX Cbap. XVII jElien compa- re la Srmclure du Nid de Y Alcyon à celle d'une Cuifà'flfe ronfacrée à Minerve de Lin- dos: oi7rtç fcv ùv*êi~vai 7y 'Aêwx, 77i A» il as. ue-ftuo-iv aïutri Tannegui le tevre , Epijt. Crit. ôo Part. I pag. 205 avoit foupçonné , qu'au lieu d'ierpeew il falloit "An*™, nom propre d'un Roi d'Egypte. Cette conjecture fe trouve ici appuyée du^ fuffrage de Mrs. Triller & Gronovius. Ce dernier ne fe oentente pas d'une fimple alTertion : il prouve par le témoignage d'Hérodote, Liv. IlCfcflp.CLXXXII, & par celui de Pline 9 Hift. Nat. Liv. XIX Cbap. I, que le Roi Amafis confacra réellement une femblable ÇuiraiTe z Minerve. Chacun des fils, qui la formoient , dit Pline, étoiteompofé de 365 autres. Il appuyé cela du témoignage de Micianus , Confiai Romain , qui en avoic \ù les relies à Rhodes, peu de tems aupa- ravant. Mr. Gronovius a inféré dans Ces No- tes fur le Cbap XXIII du Liv. XIV les Fragmens de deux Lettres de Mr. Ha- genbuchius, qui méritent bien que nous nous y arrêtions un moment. En mê- me Juillet, Août, et Septembre. 235 me cems qu'ils éclaircifTent un PafTage fort obfcur d'jELitN, ils contiennent quel- ques particularités Littéraires affez intéref- fantes. L'Ecrivain Grec parle du Danube, qui prend fa fource aux pieds des Alpes, ITf«$ UVlUtV fiôpftCI VIT* 7îj «fXTO) X7» KiX>Jj7Ul y ytv©- ie 701*70* ÏTfTiKci uvfytç. G E S N E R aVOÏ t foup- çonné qu'il y a quelque chofe d'omis dans ce PafTage ; mais, il s'en étoit tenu à ce foupçon, fans chercher à fuppléer à ce qu'il croyoit y manquer. Mr. Hagen- buchius a fait ce qu'il auroit dû faire. Selon lui , c'eft le nom d'un Peuple qui manque dans cet endroit ; & ce Peuple doit avoir habité vers les îources du bo- mbe , & s'être diftingué par fon addrefle à manier les Chevaux. À ces deux ca- ractères, dit il, l'on ne fauroit méconnoi- tre les Marcomans. Velleius Paterculus & Tacite s'accordent à dire , que cette Nation étoit originaire du lieu dont pale ici ./Eli en; & il fe peut qu'il y en eût en- core de fon tems. Qu'ils ayent été bons Cavaliers, c'efl ce qu'indique le nom#ie- me fous le quel ils font connus. Marc , dans l'ancienne Langue des Celtes, Cgnifie un Cheval ; & Man un Homme ; ainfi que l'ont reconnu Cambden , Cluvier, Bocbart , Meyer , & Scaliger. De là vient qu'on ap- pelle encore aujourd'hui en Allemagne une Ecurie Marcbftall , & celui qui a foin des Chevaux Marchflaller. Ces principes étant pofés , on peut corriger le PafTage ea 2$6 Bibliothèque Britannique, en queftion de différentes manières, nfii civspiov (ioppccv v7roKe(v]ui Mxçko/hkm. KeKÀKlxt Si y«®- r*iS]m mm*** *uïç «$. Ou bien : n/o$ — m*^- KOfutvot. o'vlcj xéx?wl*i. r«©-&&c. Ou encore: O'vlû) Se xéxtoflcu yev<& THÎflw. Si l'on VOliloiC conferver les mots m % *ç*]», qui femblenc cependant ne dire rien de plus que $m/tm poppù; & n'être que des vertiges de l'an- cienne leçon Mêtgxoputvot , on pourrait les con- ferver en les plaçant immédiatement après poppù. Au relie , nous apprenons par ces Lettres, que Mr. Hagenbuchius tra- vaille à un Ouvrage où il fe propofe de ralTembler tout ce qui nous refte de l'an- cienne Langue des Celtes. Je ne fais iî c'efl dans le même Livre qu'il traitera de l'Origine des Marcomans. Il promet du moins ici de démontrer quelque jour , que ces Peuples étoient originaires de la SuifTe; d'où ils fortirent à titre de Colonie, du tems de Tarquin l'Ancien , peur s'établir vers les fources du Neker & du Danube. Dans la fuite, ils quittèrent cet établiffement, pour oemiper le Pais des Boiens , qu'ils en chaïïcrent. A l'occafion du Rhinocéros , dont JEli- e n parle Liv. XVI Chap. XX, Mr. G r o- novius nous donne la Notice d'un M S. de la Bibliothèque du Vatican > qui ne peut du moins qu'exciter la curiofité de ceux qui aiment l'Hiitoire Naturelle. L'Auteur fe nomme Peîrus Candidus ; & il vivoit du tems de Louis de Gonzague , Marquis Juillet, Août, et Septembre. 237 de Mcmtoue, à qui il dédie Ton Ouvrage» Voici le Titre & le contenu de ce Livre , tel que nous le donne Mr. Gronovius, d'après ce que lui en a écrit le Cardinal Va* lc?iti de Gonzague. „ De la Nature & des ,, Formes des Animaux, &c. en cinq Li- „ vres , dont le premier contient la Delcrip- „ tion de cent-fix Animaux à quatre pieds: 3) le fécond traite de la Nature des Oi- 3, féaux ; & il y eft fait mention de cent- ,, feize efpéces différentes: dans le troifiè- 3, me il s'agit des Monftres Marins au nom- „ bre de cinquante-deux; & des PoifTons, „ tant de Mer que de Rivière au nombre „ de cent-deux: le quatrième concerne les „ Serpens & les Vers , au nombre de cin- „ quante-un : le cinquième & dernier eft def- „ tiné à rapporter les chofes les plus re- ,, marquables touchant les Animaux en gé- ,, néral. „ Tout l'Ouvrage eft écrit fur du Velin. L'on en trouve ici la Préface en en- tier ; & le Chapitre qui traite du Rhinocéros. Terminons cet Extrait en remarquant, que Mr. Gronovius femble nous faire efpérer qu'il publiera quelques autres Ecri- vains de l'Hiftoire Naturelle des Animaux. Il nous apprend du moins, qu'il a employé le tems, qui s'eft écoulé depuis qu'il a eu fini fon travail fur £lien jufques à fon impreffion , à travailler fur quelques Auteurs anciens qui avoient écrit dans le même goût. Il en nomme deux en particulier aux quels il paroit s'être le plus appliqué: je veux parler des Ouvrages d'A ldhelme, Evê^ Tome XXIII. Part. IL Q que 238 Bibliothèque Britannique, que An^lois; & des Homélies de Jean Xiphjlin, Patriarche de Cjnftar.tino- ple. Il eft à fouhaiter, que nô:re favant Au- teur communique au Public Tes Remarques fur ces deux Ecrivains; de même que fur tanc d'autres qu'il n'a pas étudiés avec moins de foin. ARTICLE II. AnEssay on Comparative A- natomy. London, printed for John Kourfe , an the Lamb y without Temple- Bar» 1744. Ceft-â-dire. Essai fur l' A n a t o m 1 e des B e t e s , comparée avec celle de I'Homme. G'eft un in Octavo de 138 pp. fans un AvertiJJemenî de l'Editeur , & une Let- tre d'un Médecin , qui en contien- nent 22» L'Ouvrage, dont on vient de lire le Ti- tre, a été trouvé parmi les papiers d'un Médecin, mort depuis peu. Il fut envoyé au Sr. Jean Nourje, à qui l'on donna en même tems la liberté de le faire imprimer. Ce Libraire ne jugea pas à propos d'en fai- re un tel ufage , qu'auparavant il ne l'eût fait examiner Juillet, Août, et Septembre. 23^ examiner par des Connoifleurs. Il chargea donc deux favans Médecins de Londres de cet Examen; & le refultat fut, qu'il falloic rendre cet Eflai public. Une Lettre , que l'un d'entr'eux écrivit à ce fujet , fert de Préface à l'Ouvrage , dont elle taie connoî- tre la nature, le but, & l'utilité. L'Auteur de cet Eilai y fait une Defcrip- tion Anatomique des principales Parties du Corps des bêtes à quatre pieds , des Oi- feaux , & des Pojllbns ; qu'il compare en même tems à celles de l'Homme , pour en montrer la différence, & indiquer les rai- fons de cette diverfité. Les premiers, qui fe font attachés à l'Anatomie, n'ont d'a- bord diflequé que des Bêtes. Le refpecl: qu'on avoit pour les Cadavres Humains, & le préjugé qu'il feroit contraire à l'humanité d'en faire la Difleclion , furent caufes que les premiers Anatomiites s'en tinrent uni- quement aux Bêtes. Ce fut fur les Ani- maux de cette efpéce, que Démocrite , Hip- pocrate, & Galien , s'exercèrent. Nous ne Taurions même bien entendre aujourd'hui les Defcriptions des deux derniers, ni être en état de relever les fautes qu'ils ont faites, fans une connoiflance éxacle de l'Anatomie des Brutes, comparée k celle de l'Homme: les Ouvrages mêmes de pluûeurs Anatomif- tes Modernes, qui ont fuivi cette Métho- de des Anciens , feront obfcurs pour nous fans cette précaution. Mais, la plus gran- de utilité de cette Anatomie comparée , c'efl: le jour qu'elle répand fur diverfes fondions Q % du 24-ô Bibliothèque Britannique* du Corps Humain , qui jufques ici ont été un f'ijet de difpute entre les plus habiles Anatomiftes. Ces difficultés font en gran- de partie levées par l'expofition de la S;ruc- ture des mômes Fardes dans différens Ani- maux; & par la comparaifon des divers Or- ganes employés pour opérer la même ac- tion, qui dans les Hommes fe fait d'une manière plus compliquée. Comme il y a un fi grand nombre d'efpé- ees différentes parmi les Brutes , l'on ne s'attend pas à trouver dans cet Eflai l'Ana- tomie de chacune en particulier. On peut les divifer en quatre Gaffes : celle des Qîiadrupedes ; celle des Oifeaux ; celle des Poijfons; & celle des Injeftes. L'Auteur ne dit' rien de cette dernière ,* parce que la connoiflance de cette forte d'Animaux n'eft que d'une très petite utilité pour le but qu'il fe propofe. Parmi les Quadrupèdes & les Oifeaux, les uns fe nourriîïent de Chair & les autres de Plantes; ce qui les fait distin- guer en Carnivores & Granivores. Cette différence d'Alimens en met aufli dans la Structure de leur Corps; ce qui oblige l'A- nonyme à faire l'Anatomie d'un de chaque espèce. Entre les Quadrupèdes il choifit le Cbien , & le Bœuf ; oc entre les Oifeaux le Coq, & un Oifeau de Proye. Il y a deux efpéces générales de Poifïbns: les uns ont des Poumons, & les autres n'en ont point. Les premiers ne différant pas beaucoup des Animaux à quatre pieds & y ayant beau- coup de difficulté à fe les procurer, l'on n'en Juillet, Août, et Septembre. 241 n'en dit rien ici ; & Ton s'attache unique- ment à la féconde efpéee. Avant d'entrer dans aucun détail de la Structure des différens Animaux , dont il eft ici traité, nôtre Auteur parle de leur Fi- gure, de leur Manière de vivre, des Ali- mens qu'ils prennent; ce qui rend raifonde la Diverfné qu'il y a dans leurs Organes, & de leur plus ou moins de Conformité a- vec ceux de l'Homme. A quoi nous pou- vons bien ajouter, que cela nous donne une grande idée de la Sagefle & de la PuiiTance du Créateur qui a fû & pu donner à cha- que Animal les Organes néceflaires pour le Genre de vie qu'il devoit mener. En parlant des Quadrupèdes en général , l'Anonyme remarque, qu'ils font couverts de Poil , de Laine , &c. pour les défendre des injures de l'air. L'épaiiTeur de cette Couverture varie fuivant les SaifonsdeTAn- née , & la nature du Climat que l'Animal habite. Ceux de Rufjîe & des Parties Sep- tentrionales ont des Fourrures fort épaifies & fort chaudes; tandis que les petits Chiens d'E/pagne , & les Bœufs de Barbarie, n'ont que peu , ou point , de Poil. Le Derme & V Epidémie font, à peu près, femblables à ceux de l'Homme : la feule d.fférence qu'il y ait entr'eux eft, que ceux des Bê- tes font plus éîafliques. Sous ces deux Peaux eft une fubftance , nommée Cutiafr lus Pannojus , commune à tous les Quadru- pèdes, excepté aux différentes efpéces de Porcs. Elle couvre le tronc du Corps; & Q 3 242 Bibliothèque Britannique, fert à faire rider Ja Peau , pour chafler lés Infectes ; ce que ces Animaux n'auroient pas pu faire aifémenc avec la Tête & la Queue. Ils n'ont point de Clavicules, ex- cepté les Singes , & les Ecureuils. Ceux-ci * défîmes à fauter de branche en branche, avoient befoin de ce fecours,qui auroit été un obflacle au mouvement des autres. La Peau des Chiens a ceci de particulier, nu'elle ne laifle que peu, ou point, de paf- îage à la Sueur. Quand ils font échauffés, les matières , qui forment cette humidité fuperflue , fortent par les Glandes Salivaires ; ce qui fait qu'ils ont ordinairement ia Gueu le ouverte, & la Langue pendante. L'Omentum de cet Animal s'étend juf- qu'à YOs Pubis. Cette Partie fervant à la fécrétion d'une Liqueur huileufe , qui faci- lite le Mouvement périftaltique des Inteflins, dtt.voit ainfi être fituée dans les Bêtes à qua- tre pieds , afin que cette Liqueur pût fe ré- pandre également par-tout. II n'y avoit pas la mêmenéceffité que cela fûtainû dans l'Homme ; parce que la pofture droite faci- lite la defcente de cette Huile jufques dans la partie des Inteftins la plus bafle , qui fe trouve fouvent être la plus haute dans les Quadrupèdes. D'ailleurs, s'il avoit été fitué- de la même manière chez nous , nous au- rions couru fans ceiïe le hazard d'une E- piplocele, à quoi les Chiens ne font point expofés, parce que leurs Vifceres ne pref- fent pas autant les Anneaux des Mufcles de V Abdomen. Les Juillet, Août, et Septembre. 243 Les Inteftins des Animaux Carnivores font plus courts & ont moins de capaci'é que ceux des Animaux qui fe nourrifTenr de Plantes, La raifon de cette différence fem- ble devoir fe tirer de la diverfité des Ali- mens. La Viande, non feulement fe chan- ge plus aifément en Cbyle , mais eft encore plus fufceptible de putréfaction. Si elle reftoit donc trop longtems dans les Inteftins , cette pourriture y occafionneroit de fâcheux accidens. Pour' les prévenir, Dieu a don- né aux Animaux qui s'en nourriiïent des In- teftins plus courts & moins gros. Les Vé- gétaux au contraire fe convertiflem plus difficilement en la fubftance de l'Animal: il étoit donc néceflaire de donner aux Ani- maux , aux quels ils fervent d'Aîimens , des Inteftins qui euffent plus de longueur & plus de capacité; afin que, fortant moins vite du Corps , cette converfion eût le tems de fe faire. Et comme nos Inteftins appro- chent pour la longueur & pour la capacité de ceux des Animaux Granivores, nôtre Auteur conclut de là, auffi bien que de la forme de nos Dtnts, que l'Homme eft un Animal deftiné à fe nourrir principalement de Plantes D'ailleurs, l'Homme étant une Créature fociable, il auroit été fans cefle obligé de manquer aux bien-féances pour fe décharger le Ventre , fi les Inteftins n'a- voient pas eu plus de capacité ce de lon- gueur, que ceux d'un Chien. Le Foye de l'Homme , du Cheval , du Bœuf, & de tous les Quadrupèdes, qui ont Q 4 l'Epine 244 Bibliothèque Britannique, l'Epine du Dos ferme & immobile , n'a poin: de Fijjures ou de Divisions: au lieu que ce- lui du Chien , du Lion , du Chat , & de toas ceux qui ont une grande flexibilité dans l'E- pine du Dos , eft divifé , de même que les Poumons, en divers Lobes, dont les Divi- sons font fort profondes. Il n'eft pas diffi- cile de rendre raifon de cette différence. Les violens mouvemens de l'Epine du Dos de ces derniers auroient froiïïe ou déchiré Je Foye, s'il avoit été tout d'une pièce; cç que la Nature a fagement prévenu en le formant de plufieurs Lobes , qui s'arran- geanc l'un fur l'autre, prennent facilement toutes les formes occafionnées par la pref- fion de l'Epine du Dos. La même Sagefle , qui a fait les Inteftins des Animaux Carnivores plus petits que ceux des autres, leur a auffi donné une plus petite Veffie; afin que leur Urine, char- gée de Sucs plus acres, y féjournât moin* longtems. Aufîi voit on qu'ils font obli- gés de la vuider plus fouvent. C'eft dans l'Acreté des Humeurs de ces Animaux, que nôtre Auteur trouve la caufe de la Rage , à la quelle ils font plus fujets que ceux qui fe nourriflent de Plantes; qui ont rarement, ou jamais, cette maladie, à moins qu'ils ne l'ayent contractée par infedtion. Voici fon. Raifonnement (a). ,, Si ces Animaux, dont „ les Fluides tendent toujours à la putré- „ factïon, font expofés à la Chaleur ou à ( * )V' 3°» & 3î. Juillet, Août, et Septembre. 245 „ la Faim, il faut que les Humeurs entre- „ tiennent pendant longtems Fattion des „ VaiiTeaux qui les renferment, & qu'elles ,, circulent fréquemment fans recevoir de ,, nouveaux rafraichiflemens : or, comme „ cette Circulation augmente de plus en „ plus FAcreté de ces Humeurs, il arrive ,, que l'Animal tombe dans une Fièvre putri- „ de, fuffifante pour occafionner la Ra- » g'- n L'on fait que Y Allant o'ù eft une Membrane fine & tranfparente , qui , de même que le Cborion & YAmnios > entre les quels elle fe trouve placée , fert d'envelope au Fœtus, Dans les Cavalles, les Chiennes, & les Chat- tes, cette Membrane couvre entièrement YAmnios ; dans les Vaches , les Brebis , & les Chèvres, elle n'en couvre qu'une partie; & dans les Lapins & les»Truyes , elle en couvre encore moins. C'eft un fujet de dif- pute, fi cette Membrane fe trouve dans le Fœtus Humain. Ceux , qui font pour la né- gacive, difent qu'iU ne Font jamais pu trou- ver; & quelques foins que noire Auteur fe foit donné* avec un de Ces Amis pour la cher- cher dans quatre Cadavres qu'il dilléquoit dans cette vue , fes recherches ont été inu- tiles- Mais, il attribue modeftementeela à fon manque d'habileté, plutôt qu'à la non- éxiflence de cette Membrane. Car enfin , elle eft nécefiaire à l'Homme tout comme aux autres Animaux. Enfuite , l'on trouve conftamment de FUrine dans la Veflie du Foetus, la quelle ne peut venir que de cette Q 5* Membrane, 24<5 Bibliothèque Britannique, Membrane. Si les Uretères font bouchés, l'Urine fort alors par Je Nombril, fans quoi elle tomberont dans la Cavité de l'Abdomen, Ajoutez à cela que les Sages- Femmes ob- fervent ordinairement deux fortes d'Eau qui fbrtent dans le tems de l'Accouchement. Mais enfin , ce qui met la chofe hors de tout doute, Mr. Littre a fait prefent de cette Membrane à l'Académie de Sciences de Paris; Mr. Haie , à la Société Royale de Londres; Mrs. Ferbeyen, Hefter, Keill, difent l'avoir trouvée dans divers Fœtus; & Mr Albinns, célèbre ProfefTeur en Ana- tomie à Leyden, la montre, dit on, chaque année dans fes Collèges. Les anciens Anatomiftes , qui ont divi- fé r Aorte en Afcendante & Defcendante , ne l'ont fait que fur la DifTe&ion d'un Bœuf ou d'une Vache. Du moins eft-il fur, que cette divifion n'efl véritablement jufte que dans cet Animal; & fi on la retient encore, en parlant de l'Homme ou du Chien , ce n'eft que par abus ; puifqu'à parler exacte- ment ni Fun ni l'autre n'ont d'Aorte Afcen- dante. C'eft pour fe garantir des injures de l'air, & pour voler , que la Nature a donné des Plumes auxOifeaux. L'on remarque, que ces Plumes font parfaitement adaptées au Genre de vie de chaque efpéce. Elles font plus ou moins longues, & les Mufcles qui les font mouvoir plus ou moins forts , à proportion de la proximité ou de l'éloigne- ment de leur nourriture. Les Plumes de ceux Juillet, Août, et Septembre. 247 ceux qui vivent dans l'Eau font toujours en- duite*» d'une certaine Huile , qui empêche l'Humidité de pénétrer jufqu'à leur Peau. Quoique les Ailes ne foyent pas placées au milieu du Corps, les Oïfeaux favent néant- moins, à l'aide de la Tête, du Col, de la Queue, & d'une certaine quantité d'Air dont ils fe remploient , fe mettre dans un par- fait équilibre. Les Oileaux de Proye ont de fortes Griffes pour retenir ce dont ils fe font faifis : ceux qui vivent dans l'Eau ont une Membrane , qui , en s'étendant , leur fert de Rame, pour avancer : tous en gé- néral ont les Pieds formés d'une manière admirable. Quand ils étendent les Jambes ou que le p«>ids de leur Corps repofe def- fus, tout le Pied alors s'ouvre; au lieu que quand ils les retirent , il fe ferme. Un tel méchanifme étoit abfolument néceflaire à ceux qui nagont , fans quoi ils auroient autant reculé en retirant leurs Jambes , qu'ils avoient avancé en les étendant.' La même néceffité a lieu pour ceux qui fe perchent fur des arbres, & qui fe juchent pour dormir. Sans ce méchanifme le vent les auroit abattu^; ou, durant le fommeil que tous les Mufeles font relâchés , ils fe- roient infailliblement tombés. L'on remar- que encore. beaucoup de diverflté dans la Figure du Bec des Oifeaux ; différence ce- pendant dont il eft toujours très aifé de ren- dre raifon, en faifant attention au Genre de vie de chaque efpéce , & à la manière dont il pourvoit à fa nourriture, La 243 Bibliothèque Britannique, La Digeftion fe fait chez les Oifeauxpar Attricion; &, pour la faciliter, ils avalent de petites Pierres raboteufes, qu'ils rendent enfuite lorfqu'elles font devenues trop po- lies pour cet u'fage. Quelques perfonnes croyent qu'elle ferait de même dans l'Hom- me: mais, (ï elles n'ont pas d'autre raifon que l'Analogie pour foutenir cette opinion, Ton auroit autant de raifon de dire qu'elle fe fait au moyen d'un Diffïivant , puifque c'eft ainfi qu'elle fe fait dans les Poif- fons. La Trachée Artère des Oifeaux fouffre une grande contraction; & c'eft ce qui forme leur Voix. C'eft ce dont il eft aifé de s'ap- percevoir dans un Coq. Le bruit qu'il fait en chantant ne vient pas du Gofier; mais d'un endroit plus bas. Si on lui coupe le Tuyau qui forme la Trachée Artère , à qu'on fouffie par l'extrémité inférieure , il en ré- fultera un bruit, à peu près, femb'.able à celui du Chant du Coq. I .es Cartilages , qui la forment, font tout à fait ronds : au lieu que dans les Quadrupèdes & l'Homme, la quatrième partie eft formée d'une Mem- brane , qui en réunit les deux bouts. Il faut encore obferver, qu'elle n'eft pas aufli fortement attachée aux Vertèbres que dans les autres Créatures. Ce méchanifme leur étoit abfolument nécefifaire. Expofés à de fréquentes inflexions du Col . elles auroient à chaque inftant arrêté leur Refpiration, fi la Trachée Artère n'avoit pas eu cette ftruc- rure. L'on Juillet, Août, et Septembre. 249 L'on croit communément , que les Oifeaux ne rendent point d'Urine ; mais c'eft une erreur. Cette fubftance blancheâtre qui couvre leurs excrémens, & fe change en craye, eft leur Urine. Elle fort des Pleins , *& entre dans un Canal , qui fe ter- mine à l'extrémité du Corps. Ce Canal eft leur Uretère ; & leur tient lieu de Veffie. L' EJlomacb , ou le Géfier , des Oifeauxqui fe nourrilTent de Grains , eft formé de deux Mufcles très forts; tandis que celui des Oi» féaux de Froye eft d'une fubftance. mem- braneufe. Cette différence vient de ce que laDigeftion des Alimens de ces derniers fe fait plus aifément. Par la même raifon , ils n'ont point de ces Inteftins , nommés Cœca, dont les autres ont une paire. Les PoiJJons ont le deilus du Corps cou- vert de petites Ecailles, rangées comme le font les Tuiles fur les toifts. C'eft une des raifons qui engagent nôtre Auteur à croire que V Epidémie de l'Homme eft d'une ftruclure écailleufe. V Abdomen eft couvert dans fa partie inférieure d'une Membrane femblable à nôtre Péritoine. Us ne fe fer- vent pas de leurs Dents, pour mâcher les alimens: elles leur tiennent lieu de petits Crochets pour retenir leur proye, qui ne peut plus fortir de leur Bouche dès qu'elle y eft une fois entrée. L'Oefopbage n'eft prefque point féparé de V EJlomacb, où les alimens fe digèrent au moyen d'un DifToî- vant. La preuve de cela eft, qu'on y trou- ve quelques fois de petits PoifTons , qui femblent 250 Bibliothèque Britannique* femblent êcre dans leur forme naturelle , mais qu'on apperçoit bien tôt être réduits en gelée , dès qu'on les touche. Les Anatomiites n'ont pas encore pu dé- terminer au jufte l'Ufage de ]a ttatte. L'A- nonyme nous propofe fa penfée fur ce fu- jeten deux mocs. Après avoir obfervé,que cette Partie eif. placée dans les PoJfons près du Dos , & expofée à la preffîon de la l^ejjie d'Air qui eii dans fon voilinage , il ajoute {a): ,, Puifque, dans tous les A - 3, nimaux que nous avons dilîéqués , nous 5, trouvons la Ratte attachée à quelque Par- 39 tie j qui peut la preflèr ; comme le Dia~ 3, pbragme dans l'Homme &. les Quadrupe- 3, des ; Y Epine du Dos > le Foye , & VEJlomacb, „ dans les Oifeaux; & la f^ej/ied' Air dans „ les PoilTons: & puifqu'elle a divers Vaif- 3, féaux qui fervent à y porter le Sang, qui 3) de là le rend dans le'Foye,* ceferoitmal 3, raifonner de regarder la Ratte comme un 3, Poids qui ne fert qu'à tenir l'Animal en 3, Equilibre, au lieu de l'envifager comme 3, une Partie deûinée à préparer le Sang ,3 pour paiTer dans le Foye. „ Les PoilTons ont les Organes de l'Odorat d'une grande finefle. C'ell par leur moyen qu'ils découvrent ordinairement leur Proye. Une preuve de cela, c'eft qu'en jettant un Ver, fraichement pris, pour les appâter, ils fe rendent en foule vers l'Hameçon : mais , fi cet appât a demeuré quelque tems dans (*) p. i*7 & 128. Juillet, Août, et Septembre. 25* dans l'eau, les Poiflbns ne viennent plus y mordre , parce qu'il a perdu fbn O- deur. Le moyen de les rappeller eft de faire des incitions au Ver , pour donner paflage à une nouvelle Odeur. Après cet- te précaution ils reviendront comme au- paravant autour de l'appât. Il eft fore incertain s'ils font doués des Organes de l'Ouïe. Ils n'ont rien qui en approche qu'un petit Os, gros comme la moitié d'u- ne Fève commune , Je quel eft d'une itruc- ture toute particulière, & placé à côté du Cerveau. Mais , on ne fauroit décider fi c'eft au moyen de cet Os qu'ils entendent, ou fi l'Air frappé par le Son communique fon mouvement à l'Eau qui les environne, & pafTe de-là au Corps de l'Animal. ARTICLE III. An E s s a 1 on the S c h e m e , and Cok* duct, Procédure, and Extent of Man's Rédemption : wbe- rein is /bzven from the Holy Scriptures , îhat tbis great Work is îo be accompli- fbed Gradually. To wbicb is an- nexée! a DiJJh-tation on the Defing and argumentation of tbe Book of Job. By William Worthington, M. A. Vicar of Blodwel in Shropfhire. LondorL t$2 Bibliothèque Britannique, London, printed for Edward Cave, al St. John's Gâte. 1743. Cefbà-dire: Essai fur le Plan, l'Exécution, les Progrès, & l'Etendue de l'Ouvrage de la Rédemption: dans le quel on montre par C Ecriture , qu'il de- voit s'accomplir par Pègres. L'on y a joint une DiiTertation fur le But & la Nature des Raifonnemens du Livre de Job. Par Mr. Worthington, Ficaire de Blodwel. Cejt un in 8*°. de 534 pp. & 10 pour la Préface. ,, /^Uoiqu'il fe foit déjà écoulé plufieurs ,,^V^ Siècles depuis la Venue de J. C. , „ le Criftianifme, dit V Auteur de cet Ou- „ vfàge (a), bien qu'on l'ait déjà envifagé ,5 à divers égards, qui n'ont pas peu con- 3, tribuéà y répandre du jour, n'a cependant 3Q pas encore été examiné fous toutes fes ,, faces. Dans les premiers Siècles de l'E- „ vangile, les Apologiftes&les Défenfeurs ,, du Chriftianifme eurent à combattre les ,, Juifs & les Païens d'un côté , & plufieurs 5, Hérétiques d'un autre» A peine cette Re- >, ligion - I ( a ) Préface p. 8, 9. Juillet, Août, et Septembre. 255 ,, ligion commençoit-elle à s'établir qu'el- „ le fut déchirée par des Schifmes. Bien- „ tôt après , toutes les Sciences , Divines ,, & Humaines, furent, en quelque forte , ,, bannies du Monde; & les Hommes ne „ s'appliquèrent dès lors qu'à corrompre „ nôtre lainre Religion, jufques à ce qu'il „ ait plû à la Providence de la rétablir par „ le moyen de la Réformation. Enfui te, ,, les Sectaires commencèrent à paroitre,& ,, il fallut difputer avec eux fur le Culte, ,, ta Difcipline , & d'autres Points particu- ,, liera, dont quelques-uns étoient allez peu ,, importans. Mais, comme l'on n'avoit ja- ,, mais mis en queftion, li le Chriitianifme „ eftraifonnable& excellent en lui-même, ,, l'on en convenoit de part & d'autre, „ fins entrer dans un Examen fort détaillé „ de ce fujet. On ne commença à s'y ap- „ pliquer, que quand on vit les efforts du „ Soc iniani fme & de V Incrédulité , qui feréii- „ niflbienc pour fapper la Religion par les ,, Fondemens. C'eft ce qui donna lieu à „ mieux approfondir les chofes, & à éta- 'ir h Religion fur une baze folide ,' ainfi on le voit en tant d'cxcellens Traités , i auroient efficacement contribué à .onneur & aux progrès du Chriftianif- ,, me , fi d'autres obftaclcs n'étoient venins 3, à la traverfe. „ Cependant, l'on n'eitpas encore allé auflî Loin qu'il eir. poiïîble , & il refte là-defius bien des cliofes à fainr Mr. Wokthincton fe propofe dans cet de fuppléer en partie à ce qui nous m XX in. Part, Il R manque 254 Bibliothèque Britannique * manque fur ce fujet. Il y envifage la Reli- gion Chrétienne fous une face , qui lui pa- roit propre à ôcer aux Incrédules tout pré- texte de la taxer d'Imperfection. Le Butefl des plus louables , & tout à fait digne d'un Miniftre de l'Evangile. Voyons comment cet Auteur s'y prend pour y arriver. Le Mal, tant Moral que Phyfique, qu'il y a dans le Monde , eft un fujet qui a exer- cé de tout tems les plus grands Philofo- phes. La Raifon & îa Révélation s'accordent a nous apprendre, que Dieu, dont la Bonté & la Sainteté n'ont point de bornes, n'en fauroit être l'Auteur. Conformément à ces Idées, Moïfe nons enfeigne, que la Divini- té créa l'Homme faint & innocent; & que tout ce qu'elle avoit fait étoit bon. Mais, on eft furprïs de voir, que nos premiers Parens foicntfi-tôc déchus' de cet Etat de Bon- heur , & ayent paiïe à un Etat de Mifere & de Corruption. Les Théologiens & les Philofophes à ï'envi ont cherché à conci- lier cela avec les Idées que nous avons de la Bonté & de la Sainteté de Dieu,* & tout ce qu'ils ont dit , félon Mr. Worthing- ton (a), fe réduit prefqueà nous appren- dre, qu'on ne fauroit venir à bout de cette Conciliation , & que le parti le plus fage eft d'avouer fon Ignorance, & de foumettre fa Raifon à celle de Dieu. Sans blâmer les ef- forts de ceux qui fe font appliqués à é- elaircir cette queftion, nôtre Auteur s'éton- nr (Oh. Juillet, Août, et Septembre. 255 ne cependant, qu'on en ait entièrement né- gligé une autre , qui a beaucoup d'affinité avec la première. La voici , telle qu'il la propofe. „ Puisqu'il a plû à Dieu de per- „ mettre que le Mal fe foit introduit dans „ le Monde, combien de temsdurera-t-il? „ Continuera- t-il jufqu'à la Deftru&ion fina- „ le de toutes chofes, ou bien prendra-t-il „ fin plus tôt? Le Genre-Humain n'arri- „ vera-t il pas à un tel Degré de Perfection „ fous la Difpenfation Evangélique , qu'il „ ne refte plus de Mal, de quelque efpé- j, ce que ce foit, dans le Monde; de for- ,, te que la Nature Humaine, auffi bien „ que la Nature en général , foit rétablie ,, dans l'Etat de Perfection , où elle avoit „ été créée? " Mr. WoRTHiNGTONprend l'affirma- tive fur cette queflion; ce, pour l'établir, il fait trois chofes. Il examine 1 l'Etat origi- nel dans lequel l'Homme a été créé: 2 comment , & jufqu'à quel point , il en efl déchu: 3 enfin, de quelle manière la Ré- demption, que Jéfus Chriftnous a méritée, rétablit le Genre-Humain dans l'Etat où il avoit été créé; & jufques où ce RétablifTe- ment s'étend. Comme le Sentiment de cet Auteur efl nouveau; & qu'il y a dans fon Ouvrage un grand nombre de chofes, fi- r.on vrayes, du moins fingulières & curieu- fes , l'on ne fera pas fâché que nous nous y arrêtions un peu. En parlant des Perfections d'Adam dans fon Etat d'Innocence , nôtre Auteur cher- R % cbe ±$6 Bibliothèque Britannique, che à éviter deux Ecueils, également dan- gereux: l'un eft d'en trop dire,- & l'autre de n'en pas dire allez. L'Idée, que l'onfe forme de l'Image de Dieu à la quelle Adam fut créé, ne doit pas être un obftacle à une Chute , que l'Evénement à juftifice. ,, Ses 5, Perfections étcient, fans doute , grandes; '„ mais, cen'étoicnt toujours que les Perfec- „ tions d'un Homme. . . . Son Ame étoic ,, douée des mêmes Facultez, & fon Corps „ des mêmes Inclinations, que le refte de „ Ton Efpece. Il avoit aufli mêmes Befoitfs >5 que nous. . . , & Dieu lui avoit auiTiim- pofé lanéceflîté de travailler: il n'y avoit de différence entre lui & nous à cet égard, que dans le degré du Travail. . . . Puif- qu'il étoit fujet à manger du Fruit dé- fendu, il n'y a aucune Abfurditéà lefup- pofer afluj'ctn à de moindres Fautes. S'il l$ pouvoit violer ce Devoir volontairement , il pouvoit bien s'écarter de quelques au- tres par ignorance, par foiblefïe, ou par furprife. Cependant, nous ne voyons pas que la Perte du Paradis, & la Peine de Mort , ayent été attachées qu'à ce feul Pé- ché. D'où l'on peut conclure, que l'Etat d'Innocence dans le Paradis n'étoit pas incompatible avec des Péchés moins grands, & d'une nature à pouvoir être ^, plus aifément pardonnez. „ A quoi Mr. Worthington ajoute , que tout ce qui eft créé a des Imperfections , le Créateur étant le feul Etre parfait: jufques-là que les Anges ne font pas purs devant lui , Job IV Vt Juillet, Août, et Septembre. 257 vf. i3 & XV vf. 15. C'écoic pour réparer les Defordres naturels & moraux, tant du Corps que de l'Ame , que l'Arbre de Vie avoit été planté au milieu du Jardin. L'Hom- me devoit avoir recours à Ton Fruit , pour y remédier,- jufques à ce que, par un longufa- ge de ce remède , fa perfonne entière eût aquis aflèz de Perfections oour être trans- portée du Paradis Terreflre dans celui du Ciel. Nos premiers Parens négligèrent de manger de ce Fruit, préférant de fe nour- rir d'autres plus agréables aux yeux & au goût. Cette Négligence leur fut funefte. Bien loin de perfectionner leur Nature, elle déchut infenfiblement , jufques au point de donner prife au Tentateur. Mais, pourdécheoir ainfi par dégrés , il faut néceflairement fuppofer , que la Durée du Séjour d'Adam dans le Paradis a été plus longue, qu'on ne le croit communément. Auiîi Mr. Worthington la fait-il de fept mois. Durant ce tems, Adam connue fa Femme: elle étoit déjà aufeptième mois de fa Groflefle , quand elle eut envie de manger du Fruit défendu. Elle le fatisfît; mais, la Douleur qu'elle eut d'avoir défobéï à fon Créateur, & la crainte qu'il n'éxécutàt lés menaces, cauferent chez elle une fi grande révolution, qu'elle occafionna une faufle Couche. Cette Envie toute feule ne fut pas la Caufe de fa Défobéi fiance. Le Démon \ fous la figure d'un Mefiager célefle , envoyé pour expliquer la Défenfe de De point man- R 3 ger 258 Bibliothèque Britannique, ger du Fruit de l'Arbre de Science de Bien & de Mal , perfuada à Eve , que le DeiTein de Dieu n'étoit pas de leur en interdire Tu- fage; qu'elle pouvoit en goûter, en toute fureté; & que fes effets étoient merveil- leux, pour éclairer l'Efprit, & donner la Connoiifance du Bien & du Mal. Cet Ef- prit infernal avoit pris la forme de cette efpéce de Serpent qu'on nomme Serapb , fous la figure du quel les Intelligences cé- leftes, nommées Séraphins , avoient coutu- me de fe manifefter à nos premiers Parens. Eve put donc plus aifément prendre le change. Tout ceci eft éclairçi par une Hiftoire femblable, qu'on lit i Rois XIII. Cette DéfobéïlTance eut des Suites bien funeftes. Sans parler des Maux qu'elle attira à l'Homme , Mr. Worthington s'i- magine, qu'il y avoit une Liaifon û étroite entre toutes les Oeuvres de la Création , que le Dérangement, arrivé à une des par- ties de ce tout, put néceffairement caufer un grand Desordre à toutes les autres. Il appuyé cette Opinion fur la Doclrine que St. Paul établit Rom. VIII vf. 19-22. Il prétend donc, que toute la Partie animale de la Création fe refl'entit du Péché d'A- dam. Tous les Animaux ont dégénéré de leur premier Etat, font devenus fauvages, & fe font fouftraics à l'Empire de l'Homme. Les Etres inanimés mêmes ne furent plus ce qu'ils étoient auparavant: la Terre per- dit fa fertilité ; l'Air ne fut plus aufli pur ; il y eut de l'Irrégularité dans les Saifons;& toute Juillft, Août, et Septembre. 25<> toute la face de la Nature fut extrêmement changée. Le Péché à? Adam , Source de ces Desfordres, ayant paflëe à fa Poilérité, ils continueront tandis qu'il en reliera des Traces dans l'Ame defesDefccndans. Pour juftifier cette Imputation du Péché d'Adam, nôtre Auteur fuit trois Réflexions. 1 . Nos premiers Parens , étant Pécheurs , du- rent nécessairement avoir des Enfans de mô- me nature qu'eux; c'eft à dire, corrompus. Or, comme le Mal Phyfique eft une Suite inféparable du Mal Moral, il s'çnCtit» que tous ceux, qui participent à la Nature cor- rompue à' Adam , doivent aufli participer aux Maux qui en font la Suite. 2. Ce Péché originel ne fut d'abord tranfmis qu'aux Defcendans immédiats à! Adam: ceux-ci le tranfmirent à leur Poftérité ; & ainfi de fuite: de forte que chacun a eu le pouvoir d'augmenter ou de diminuer leDégré de Cor- ruption , qu'il a reçu de fes Ancêtres. C'eft à ce pouvoir, qu'on doit attribuer les bon- nes ou les mauvajTes qualités , qui font com- me héréditaires dans de certaines Familles; & le plus ou le moins de Corruption qui a régné dans certains Tems , & parmi certains Peuples. ,, Je ne faurois même m'imagi- n ner , continue Mr. WorthingtûN ,, (a), que , fi chaque Père de Famille % „ depuis Adam jufque* à nos jours, eût fait ,, ufage de tous les Moyens qui font en fa , puiffance, & de la Grâce de Dieu, pour „ purifier ( a) p. 4j. R4 z6o Bibliothèque Britannique, „ purifier fa Nature , la Tache du Péché „ originel fût fi profonde, quelle n'eût „ pu être fi bien effacée, pendant ui fi „ grand nombre de Générations , par le ., Sang de Jéfus-Chrift, qu'il n'en reliât y, plus la moindre trace. „ 3. Enfin , les Perfections de Dieu ne nous permettent pas de croire , qu'aucun Homme foit damné pour ce Péché originel ; à moins qu'il ne l'approuve & ne le ratifie , autant qu'en lui eft, par des Péchés actuels dont il ne le repent point. Puifque la Chute de l'Homme devoit ainfi bouleverfer la Nature, pourquoi Dieu J'a-t-il permife ? A cela Mr. Worthi n g- ton répond, qu'il ne pouvoit pas l'empê- cher. Voici comment il le prouve (a). Toute Créature eft dépendante : cette Dépendance emporte la Nécefîlté d'un Secours: en accordant ce Secours, Dieu le conduit par des Loix fondées fur la Nature des Chofes&des Relations qu'el- les foutiennent entr'elïes; & aux quelles il conforme fa conduite dans la dernière exactitude. Auffi ces Loix font-elles'in- violables; parce que leur violation em- porteroit une foiblelTe & une légèreté indignes de Dieu, & que ce feroit ren- ver fer la Rai ion & la Nature des Cho- fes. Une de ces Loix , c'efr, de gouver- ner toutes les Créatures conformément à leur Nature : une autre , c'efl que les „ Secours f * ) P- *!»545 Juillet, Août, et Septembre. 261 , Secours accordez foient proportionnez , aux Befoins qu'elles en ont, & à l'Etat , aulTi bien qu'a la Nature de celles qui , les reçoivent. D'où il fuit, que les Se- , cours accordez aux Agens libres doi- , vent être tellement proportionnez à leur , Liberté, que, réunis avec elle, ilsfoyenc , fuffifans pour les conferver dans l'État , où ils font placés, & même pour l'amé- , liorer; fans que néantmoins ils gênent en , rien leur Liberté. Ce qui fait voir, que , ces Secours doivent être fubordonnez à , la Liberté , & de nature à lui être fou- , mis: parce que, s'ils avoient la force de , contrebalancer la Liberté, ou feulement: , de la tenir en équilibre, ils en détrui- , roient la nature; ce qui feroit contraire , aux Loix précédentes, fuivantlefquelles , Dieu le gouverne. ,, Pour rendre ce Raiibnnement encore plus, fenfible, l'Auteur compare (a) i'Ame Hu- maine à une Main, qui tient une Balance; l'un des BaiTins panche vers le Bien , 6; l'autre vers le Ma!. Il y a outre cela deux Poids de différente Pefanteui , dont le moin- dre, qui eft la Grâce, eft toujours placé dans le BafTin du Bien; & l'autre, qui eft le plus pefant,fe place indifféremment dans le Ballin du Ma! , ou dans celui du Bien: ce Poids eft la Liberté , qui dépend de la Main qui tient la Balance, & qu'elle pla- ce R 262 Bibliothèque Britannique, ce ou elle juge à propos , fûre de la faire pancher du cô:é où elle le met. De tout cela , Mr. Wohhing- ton tire les Corollaires fuivans ( a ). y, i. Chaque Agent libre reçoit, en en- trant dans la Vie, une certaine portion de Liberté, i. Cette Liberté doit natu- „ Tellement être envifagée fous deux faces: „ la Liberté de faire le Bien, & celle de „ faire le Mal. Car enfin, û elle n'a pas ,, le pouvoir de fe déterminer pour l'un ou 3, pour l'autre , ce n'eft plus Liberté, mais >, Nécefîité. 3. Cette Liberté, de même „ que toutes les autres Facultez de l'Ame, ,, eft fufeeptibie de Perfection ou de Dé ,, périiTement; c'eft à dire, qu'à proportion „ de l'Ufage qu'on en fait» elle a plus ou ,, moins de facilité à fe tourner au Bien , 3, ou au Mal. 4. Chaque Degré de Perfec- 5, tion, que la Liberté acquiert pour faire ?1 le Bien, eft un Degré de Diminution de ,, celle qui porte au Mal ; & vice ver/a. 5. 3, La première impreffion de la Grâce, 'de „ même que toutes celles qui la fuivent, 3, eft un pur Don de la Divinité, toujours ,, proportionné à la portion de Liberté que ,, poilède le fujet. 6. Ses progrès marchent „ d'un pas égal avec la Liberté ,• c'eft à ,,, dire , qu'elle augmente ou diminue en „ raifon de l'AccroifTement ou de la Di- „ minution de la Liberté pour le Bien. 7. „ Comme la Grâce fe renferme dans les „ bornes ( « j p. 5-7 & jS. Juillet, Août, et Septembre. 263 „ bornes que lui prefcric la Liberté, plus 5i la Liberté pour le Bien s'accroic , plus ,, aulfi la Grâce prendra d'Accroifïement „ dans la même proportion , & étendra tes „ bornes: & chaque Degré de Diminution ,, de Liberté pour le Bien elt un Degré de ,, Diminution de Grâce. De même, cha- ,, que Accroiflement de Liberté pour ie „ Mal elt autant de Diminution de Grâce; ,, & chaque Degré de Diminution de la „ Liberté pour te Mal elt un Degré d'Ac- „ croisement de Grâce. 8. La Liberté pour „ le Bien s'accroiiFant à l'infini , la Liberté „ pour le Mal diminuera à l'infini; c'eit à „ dire, fera détruite : au contraire, l'Acçroif- „ fement de la Liberté pour le Mal allant „ a l'infini, la Liberté pour le Bien fera „ entièrement détruite. 9. La Liberté pour „ le Bien s'étant accrue à l'infini, la Grâce „ fera aulTi augmentée à l'infini; & la Li- „ berté pour le Mal s'étant accrue à l'infi- ,, ni, la Grâce fera aufli détruite. 10. En- „ fin, la Liberté pour le Mal étant totale- ,, ment détruite , la Grâce & la Liberté „ rendent les Rechûtes auMalabfolumenc ,, impofïibles: au contraire, la Grâce ô\ ,, la Liberté pour le Bien étant entièrement ,, détruites, le Retour au Bien devient im- „ pofiible, fans détruire la Nature de la „ Libené. ,, Il réfulte de ces Propofitions , qu'il eft Eoffible , que les Agens libres abufent de leur ibertépour faire le Mal, au point d'anéan- tir la Grâce & leur Liberté pour faire lç Bien ; 264 Bibliothèque Britannique, Bien; &, parmi le grand nombre, il n'efl pas étonnant que quelques-uns le faflTent. D'un autre côté , il n'eft pas impoflible , qu'ils perfectionnent leur Liberté pour le Bien , au point d'augmenter la Grâce à un tel Dé- gré, que de concert elles détruifent la Li- berté pour le Mal: & il eft très probable, que le gros des Hommes en viendra enfin là. De forte qu'avant la fin du Monde le tëien prévaudra fur le Mal ,1e Genre-Humain fe relèvera de fa Chute , & fera rétabli dans fa Perfection originale. < Pour établir cette Opinion , nôtre Auteur fait „ i quelquôsRemarques fur l'Etat duGen- 3, re-Humain après la Chute ; par où il pa- 3, roit, que, dès le commencement, Dieu 3, a eu en vue fon RétablifTement : il éxa- 5, mine la Conduite qu'il a tenue pour ce- 3, la, & les Raifons,aufïi bien que les Cau- „ fes, pourquoi ce RétablifTement n'a pas 3, eu lieu plus èôt. Il montre i , que les ,, Difpenfations de la Providence, dans „ les divers Ages du Monde, tendent ma- 3, nifeftement à cette fin ; & qu'elles ont s, eu plus ou moins d'effet , pour rendre „ le Genre Humain meilleur, tant dans ce „ qui regarde la Religion que le Gouver- ,, nement Civil , à proportion du bon ou 3, du mauvais Ufage qu'il en a fait. Il éxa- „ mine 3 les Idées & les Efpérances que ,, les anciens Juifs, les Payens, &les Chré- 3, tiens, avoient de ce RétablifTement & de 3, ce Renouvellement du Monde. Il fait „ voir 4., que cette Doctrine eft conforme ,, aux Juïllet, Août, ït Septembre. 26$ „ aux Perfections de Dieu , à la Nature de l'Homme ; & à celle des Chofes. Il prou- ve 5 , que ce Rétabliflement de l'Homr me dans fon Etat primitif eft le But gé- néral delà Religion Chrétienne. Il mon- tre 6 enfin , par plufieurs Paffages , tant du Vieux que du Nouveau Teftament, que ce ,, RctablitVement aura lieu (V).„ Parcourons chacun de ces Articles, en nous arrêtant fur ce qui paroitra le plus nouveau & le plus curieux. Si l'on examine la Nature de la Punition, que Dieu infligea à Adam, l'on verra, que c'étoit bien moins un Châtiment qu'un Re- mède, & un Moyen pour le ramener à l'E- tat d'où il étoit déchu. „ Le Travail, dit „ Mr. W o r t h 1 n g t o n (b) , efl une cho- „ fe abfolument néceflaire, non feulement „ pour conferver la fanté & prolonger le ,v vie, mais encore pour donner de la vi- „ gueur à l'Ame, & la formera l'Exercice „ de plufieurs Vertus. La Stérilité de la ,, Terre rendoit l'Homme induûrieux ; & „ la Néceffité, Mère de l'Invention, lui ai- ,, guifoit l'Efprit,&le portoit à inventer ,, plufieurs Arts utiLes , comme autant de ,, Moyens pour furraonter la Malédiction „ de "la Terre. La Qualité des Aliuiens, „ moins bons qu'avant la Chute, & la Du- ,, reté du Travail , auquel il fut condam^ ,, né, amortirent PImpétuofké de fes Paf- „ fions , ( « ) p. 6r » 6z. ■ è ) p. ,<4 • i " 266 Bibliothèque Britannique, „ fions, qui fans cela l'auroit porté aux 5, derniers Excès. Comme Ton Crime l'a- %9 voie réduit à la Néceflité de quitter „ ce Monde , la Malédiction prononcée „ contre la Terre, le rendoit moins déû- 3) rable à Tes yeux, i'empéchoit d'y placer „ Ton cœur , & !e lui faiioic quitter avec _,, moins de regret. Les Douleurs , aux 3, quelles la Femme fut afTujcctie, font un 99 Frein , qui l'empêchent de fe livrer fans „ retenue aux Plaifirs de la Chair,* & un „ motif à conferver fa Chafteté. L'Afiujct- ,, tiiTement à fon Mari met une Subordma- 5, tion ablblument néceflaire entre les deux ,, Sexes, qui prévient les Difputes infinies 3, que l'amour de la fupériorité aurait fait ,, naitre entr'eux. La Sentence, prononcée „ contre le Serpent, donnoit à l'Homme „ l'Efpérance générale d'un Remède à fes „ Maux; entretenoit dans fon Efprit des ,, Sentimens de Religion,- ce manifeftoit le „ Dedcin où Dieu étoit de le rétablir dans ,, fon Etat primitif par l'Ouvrage de la 3, Rédemption. „ La Providence mit encore en ufage avant le Déluge divers autres Moyens pour ache- miner les chofesau grand Ouvrage du Réta- bïiffement. Elle punit îévérement le Meur- tre $Abel\ elle montra, en la perfonne d'E- noch , qu'en fe garantilTant des fouillures de ce Monde ,1'on fe garantifibit aufli des Sui- tes funeftes du Péché: elle fît prêcher la Repentance par fon Serviteur Noé : mais, fur-tout, elle fit voir, que le Mal Phyfi- que Juillet, Août, et Septe^bri. 26? que augmentent en proportion de l'AccroiiTe-- ment du Mal îYloral ; comme on le voit, dans la Sentence contre Caïn, Gen. IV, vf. 12; dans la Prophétie de Lantech, Cb. V ,yf. 29; & enfin dans le Déluge même, qui fut l'Ef- fet de l'extrême Corruption des Hommes. Une partie de la Malédiction prononcés contre la Terre nefubfifta plus après le Dé- luge. Cette étonnante Révolution lui rendic une partie de fa Fertilité originale ; & , de cette manière, Dieu tira le Bien du Mal mê- me. D'ailleurs, le petit nombre de peribn- nes, qui avoient échappé à la Vengeance divine, étoit recommandablepar fa piété: il fallait donc que le Mal Phyfique dimi- nuât en raifon de l'Accroifle ment du Bien Moral. C'eft ce que Lamecb avoit prédit lors de la nai fiance de Nos , Gen. V, vf. 20. Cette Prédiction n'emporte pas une Prômef- fe, que la Malédiction de la Terre feroii: entièrement ôtée, comme le croît le favant Evêque Sherlock (a) ; mais, feulement un Soulagement dans le Travail occafionné par ta> Malédiction de la Terre. C'eft encore ce qu'in- dique allez clairement la Promette que Dieu fit à Noé au fortir de l'Arche, Gen. VIII, vf. 21 , 22. Enfin, en fuppofant que le Dé- luge ait rendu la Terre plus fertile qu'elle n'avoit été depuis la Chute, on rend aïfé- ment raifon de l'Yvrefle de Noé. Ce faint Homme avoit bû du Vin avant le Déluge : il en voulut boire de celui que la Terre avoic produi" (a) Ufagi & Fins Jet Froîbities: Di/c. IW *6S Bibliothèque Britannique 9 produit après ce terrible Evénement; mais, il fe trouva beaucoup plus fort , que celui qu'il avoit accoutumé de boire auparavant: & la même quantité , qui jufques-là ne l'a- voit point incommodé, lui rit perdre la Raifon. Les Maux, caufezpar la Chute, avoienî; cependant jette de trop profondes racines , pour en être fi- tôt délivré. L'Etat, où fe trouvoit le Genre-Humain après ie Déluge, & dans les Tems pofténeurs à cet Evéne- ment, étoit celui de l'Enfance du Mon- de. Les Hommes n'étoiem pas encore ca- pables de ce Degré de Perfection nécefïaire pour recouvrer leur Etat originel: il fal- îoit les y amener par Dégrés. Si l'Ecriture fait quelques -fois l'Eloge delà Piété du Peuple juif, & de certaines perfonnes de cette Nation, il ne faut prendre cela que dans un fens de comparaifon , & non pas comme s'il s'agilToit d'une Sainteté abfolue. Ils étoient beaucoup meilleurs que d'autres Peuples, & d'autres Particuliers ; mais, ils n'étaient pas parfaits. Quoique le Mal Moral & le Mal Phyfi- que eulTent diminué après le Déluge, on ne remarque cependant pas, que cette Di- minution ait continué à fe faire , dans la fuite, dans une Proportion fi jufte, qu'on puifle en marquer tous les degrés. La Rai- fon en eit, que l'Homme , étant un1 Agent libre , fe détermine au Bien ou au Mal par fa propre Volonté; de forte que , dans un certain Age & parmi certains Peuples , on Juillet, Août, et Septembre. 26*9 on a fait des progrès vers h Perfection , tandis que, dans un autre Tems, de parmi quelques Nations, l'on s'en eft éloigné. A quoi il faut ajouter, que l'Ennemi de nôtre Salut s'eït aufli mis de la partie, & a ap- porté de tems en tems de grands obftacles S ce Rétabliflement de la Nature Humai- ne. Enfin, le But de Dieu n'étoit pas d'o- pérer le grand Ouvrage de la Rédemption dans ces Tems-là. Il vouloit feulement ache- miner les chofes à ce merveilleux Evéne- ment. C'eft ce qu'il a exécuté par divers Moyens. D'abord Noé, dont l'Autorité étoit ref- peûable à tous fes Defcendans , conferva au milieu d'eux, durant fa vie, la Religion dans fa Pureté. Enfuite,la Difperfion de» Hommes, faifant échouer l'infenfé projet d'une Monarchie univerfelle, empêcha la Corruption qui en auroit été infaillible- ment la fuite. L'Idolâtrie ayant pris naif- fance parmi les Cbaîdéens, Dieu tira Abra- ham de ce lieu , pour le rendre Dépofitai- re de la vraye Religion. Les divers Voya- ges , que ce Patriarche & fes Defcendans fi- rent dans la Paleftine & en Egypte , leur donnèrent occafion d'y porter Ta Connoif- fance du vrai Dieu. Leurs Efclaves, inftruits par des Mai très fi pieux, répandirent les mêmes Connoiflances dans les Pais dont ils étoient originaires. Leurs Enfans, de mê- me que ceux de Lot, formèrent des Eta- bliflemens fi confidérables, qu'ils pouvoienç palier pour des Royaumes: & l'on ne doit Tome XXIIL Paru IL S pas 270 Bibliothèque Britannique, pas douter, qu'ils n'ayent eu foin de rendre meilleurs les Peuples qui leur furent fou- rnis. La Deftruction des Villes de la Plaine fut un Châtiment bien propre à donner de l'éloignement pour le Crime. AuiTi voit-on des Effets de la vraye Religion bien fenfi- bles dans Melchifedecb , d^ns Abimélech , & & dans Job & fes Amis. La Publication de la Loi fut encore un Moyen bien efficace, pour conferver la vraye Religion , non feulement parmi les Hébreux , mais en- core parmi les autres Nations. David, Sa- lQvjon96ic. , la firent connoitreàplufieursde leurs Voifins. Les diverfes Captivitez des Ifraëlites & des Juifs, & la Difperllon fi univerfellede ce Peuple, en répandirent en* core davantage la ConnoilTance. Un Roi d'Egypte fit même traduire en Grec cette Loi ,• ce qui en facilita davantage la Lec- ture. Tous ces Moyens ne furent pas in- fructueux. Ils fervirent à convaincre les Gentils de leur Corruption, & de Plmpoffi- bilité où ils étoient de s'en tirer. Ce qui les faifoit foupirer après un Libérateur. Ils étoient même periuadez , que Dieu leur en enverroit un : & fi nous en croyons Tacite & Virgile , cette Efpérance étoit prefque univerfelle vers le tems où le Sauveur eft venu. La Venue de ce Rédempteur a beaucoup contribué à rapprocher le Genre-Humain de fa Perfection originale. La vraye Religion a été beaucoup plus répandue, qu'elle ne l'étoit fous la Loi: & elle le feroit bien da- vantage Juillet, Août, et Septembre. 27 r vantage, fans les obflacles que Je Démon a apporté à fon EtabliiTement. Quand on conlidere ce qu'il a fait pour la détruire , on fent, que Tes efforts n'auroient pas été inutiles, 11 Dieu n'avoit pris un Soin parti- culier de fon Eglife. Il efl même bien re- marquable, que l'Evénement a juftifîé avec tant d'exactitude les Prophéties qui carac- térifent l'Antechrift, l'un des principaux Suppôts de Satan, qu'il ne faut pas douter que cet exact: Accompliïïementne devienne un jour un Moyen très efficace pour con- vaincre tous les Hommes de la Vérité de la Religion. Si depuis la Venue de J. C. il y a eu des Siècles ténébreux, où le Soleil de Juflice fembloit être obfcurci , la Réforma- tion a difilpé ces Nuages. Il efl même vrai dédire , qu'il y a plus de Lumières aujour- d'hui parmi les Chrétiens, qu'il n'y en a jamais eu. Tous les jours l'on éclaircit da- vantage la Religion : les Catholiques Ro- mains mêmes commencent à avoir Honte des Abus de leur Eglife; &, par leurs Ex- plications , cherchent à les ramener à quel- que chofe de plus raifonnable. Il n'y a peut-être pas parmi nous la même Pureté de Mœurs, que dans les premiers Siècles du Chriftianiline; mais, nous l'emportons fur eux par rapport aux Connoiflances. Quant à ce qu'on objecte, que les Chrétiens font en général plus mauvais que les anc-iens Payens y que les Mahométans , que les Chinois, que les Américains , c'eft une Erreur. Il ne ré- gne pas parmi nous cette Idolâtrie grofïïe- S 2 re 2^2 Bibliothèque Britannique., re; ni ces Vices énormes, qui ont eu cours parmi eux. Si quelques-uns ont été meilleurs que des Chrétiens , c'eft au Chriftianifme même qu'ils en font redevables , lequel a refplendi jufqu'à eux. Mr. Worthing- ton renvoyé fur ce Sujet à un Auteur 5 au quel nous renvoyons aufli (a). Ce n'eft pas du côté de la Religion feu- lement que le Monde a gagné depuis la Venue de J. C. : il s'efl aufli beaucoup per- fectionné dans ce qui regarde Jes Affaire* Civiles. „ N'ya-t-il pas eu un Tems, dit „ Mr. Worthincton (£)> oii les Arts 3, & les Sciences n'éxiftoient point? Ne „ connoit-on pas le Nom de la plupart de 3, ceux qui les ont inventez? N'avons-nous „ pas l'Hiftoire de l'origine , des progrès, 3, & de la perfection du plus grand nom- „ bre? L'Utilité qu'on retire de tous n'eft- „ elle pas allez bien connue, fans qu'il (bit „ néceflaire de le prouver? Chaque Gêné- 5, ration, profitant des Découvertes de ccl- „ les qui l'ont précédée, & y ajoutant les 5, fïennes,,, devient plus induftrieufe , plus habile , & plus en état de remédier aux Maux que le Péché a introduits dans le Mon- de: Les Scieaces font préfentement culti- vées par un beaucoup plus grand nombre de Perfonnes , qu'elles n'ont jamais été : à quoi (*) Cnre ef Dtifm. Vol. I. p. io8,&c Voyez aufli la ade. Lettre pgjlortk de TEvêque de Lia- ères. Juillet, Août, et Sebtembre. 273 quoi l'Invention de l'Imprimerie n'a pas peu contribué. De forte que nous vivons dans un Siècle des plus éclairez. Les Loix, en ufage dans les divers Gouvernemens , font la plupart excellentes ; & les Princes, bien différens en cela de ceux des anciens Tems, préfèrent de terminer leurs différens par la voye des Négociations à celle des Armes. Us n'en viennent-là qu'à l'extrémité. Nous ne fommes cependant pas encore au Point de Perfection, ou nous devons atteindre. Il faut efpérer, que les Hommes y arriveront enfin ; &, qu'avant la fin du Monde, ils feront rétablis dans leur Etat originel. Les Juifs, les Philofophes Payens, & les premiers Chrétiens , ont eu cette Ef- pérance, comme le Dr. Éurnet l'a fait voir- dans fa Tbé.;ris de la Terre. Mr. Wor- thinoton fait ufage des Autoritez allé- guées par ce Savant, les accompagne de Çqs Remarques » & y joint de nouvelles Preuves. Ce n'eft pas fans raifon, qu'ils avoient formé de telles Efpérances. Ce Rétablilîe- ment eil un Ouvrage parfaitement digne de Dieu. Il eftdefa Sagefle de ramener le* chofes auBut pour le quel elles ont été créées: il eil de fon Honneur & de fa Bonté de ne pas abandonner fon Ouvrage: il eft de fa Sainteté & de fa Jufcice de ne laiiTer pas prendre le deflus au Mal , mais de le fur- monter par le B,;en: enfin, l'Autorité, qu'il doit r.voir fur fes Créatures , ne fauroit avoir lieu , s'il ne le» ramène à leur Etat primitif. S % La. 274 Bibliothèque Britannique, La Nature même des Chofes confirme ces Raifonnemens. Nous voyons, que tout tend à fa Perfedtion. Le Monde feul feroit - il excepté de cette Règle générale? Pourquoi Dieu Tauroit-il confervé fi longtems, & le conferveroit-il encore, fi Ton Butn'étokpas de l'améliorer. Difons-en autant de la Na- ture de l'Homme. Puifqu'il eft déchu de Ton premier Etat, il peut le recouvrer; parce qu'il n'y a pas plus de diftance depuis la Chute au Recouvrement, qu'il n'y en a de- puis l'Etat originel jufqu'à la Chute. Si l'Homme n'avoit pas les Facultez néceflaires pour fe procurer ce Rétabliflement, l'on pourroit en douter: mais, aidé du Secours de Dieu, il ne lui manque rien pour cela. Perfonne cependant n'eft mieux fondé à former de fi glorieufes Efpérances , que les Chrétiens; parce que Dieu leur a révélé, qu'il rétabliroitun jour toutes chofes. C'eft ce qui paroit „ par le But général du Chrif- 3, tianifme; le Caractère & l'Exemple de „ nôtre Rédempteur ; la Nature & le But „ des Préceptes de l'Evangile ,* le Soin 3, de leur Auteur pour en procurer l'Obfer- „ vation; & les Moyens &les Secours qu'il ,, employé pour cela (a),* ,, tout autant de Preuves que Mr. Worthington em- ployé ici pour établir fon Opinion. Il paroit d'abord, que le But général du Chriftianifme eft de purifier nos Ames, & de les réformer à l'Image de Dieu , félon la ( * ) p. zti. Juillet, Août, et Septembre. 275 la RefTemblance du quel elles avoienc d'a- bord écé créées. C'eft ce qui fe prouve clai- rement par divers PafTages de l'Ecriture. Voyez Vite II vf. 15. Coll. III vf. 10. & I vf 22. La même chofe paroit encore p^r les termes de Régénération, de Renouvelle- ment , de Nouvelle NaiJJance , de Nouvelle Création , & de Jujlification , qui fe prend fouvent félon la force du terme. Mais, ce qui achève de mettre cela dans fon jour, c'eft que le But de l'Evangile eftde rendre les Hommes aufli parfaits qu'ils en font fufceptibles. Voyez Heb. Vil vj. il. 19. & X vf. 14. 2 Tint. III vf. 17. Eph. IV vf. 12, 13. Il les exhorte même à tendre vers cette Perfection. Voyez Heb. VI vf. 1. Ja- ques I vf. 4. 1 Pierre V vf 10. Coll. IV vf. 12. Matt. V 0/*. 48. Aufîi voyons nous , que c'eft pour nous y faire atteindre, que Jéfus eft venu au Monde, Dan. IX vf 24. Tite II vf. 14. 1 Jean Wlvf. 5. 8. C'eft ce qu'emportent les Idées de Rédempteur & de Rédemption. Nous étions les Efclaves du Péché , <5c aflujettis à tous les Maux qui font une fuite de cet Efclavage. Il ne fauroit donc y avoir dq parfaite Rédemption , fi J. C. ne nous a pas entièrement affranchis de ce Joug. Il ne refte plus rien à faire , pour en être entiè- rement libre, que ce que l'Evangile exi- ge de nous; c'eft à dire, imiter l'Exemple du Sauveur, & obferver fes Loix. Si nous le faifons , nous ferons auiïl parfaits qu'on peut l'être ici bas, & nous nous trouverons rétablis dan* l'Etat où Dieu nous avoit S 4 créez. 2^6 Bibliothèque Britannique, créez. Il mec en ufage tous les Moyens pof- fiblesjpour nous porter à cela. Il nous inf- truït de fa Volonté dans fa Parole: il nous accorde l'Ufage des Sacremcns: il nous or- donne de recourir à lui par la Prière: enfin, il nous promet de puifîans Secours , pour nous aider à faire de nôtre côté ce que nous fommes obligés de faire pour parvenir à cet Etat de Perfection. Tous ces Raifonnemens font quelque- cho- fe au But de Mr. WoRTHiNGTON,-mais, cependant, ils ne décident pas la Quefliono Il veut prouver „ qu'avant la fin de la Dif- „ penfation Evangélique & la Confomma- p tion de toutes chofes, le Genre-Humain „ fera totalement affranchi du Péché , des s> Afflictions, des Maladies ,& de toutes les „ autres Mifères de cette Vie, Suite de la „ Çhûte de nos premiers Parens; & enfin ,, de la Mort même , étant tranfporté du Pa- „ radis Terreftre , dont il jouira encore „ une fois , dans le Ciel qu'il poiTèdera pour „ toujours. De forte que Dieu remédiera à s, tous les Defordres de la Nature , & que ,, toutes les Créatures feront rétablies dans a, leur Etat primitif , de même que l'Hom- „ me, qui en eft îe Seigneur (a). „ Un Evénement de cette nature eft trop impor- tant, pour qu'il n'eu foit pas clairement fait mention dans l'Ecriture. Voyons les Paf- fages où nôtre Auteur croit qu'il en eft parlé, Les Juillet, Août, et Septembre. 277 Les Prophètes parlent en plus d'un en- droit d^ l'Uni verfalité du Règne du Mef- fie, qui s'étendra fur tous les Peuples de la Terre. Ce Royaume ne fera pas abfolu- ment temporel , comme fe l'imaginant les Juifs ,• ni purement fpirituel , comme le croyent quelques Théologiens Chrétiens. Ce fera un Mélange de tous les deux ; comme il paroi t par la manière dont Da- niel en parle Cbap. II & VII. Tous les Hommes étant devenus Chrétiens, J. C. régnera fur eux d'une manière vifible; & fon Règne fera une vraye Théocratie. Cet- te Converfion au Chriftianifme ne fera pas extérieure feulement ; mais , le Cœur & l\Ef- prit y auront le plus de part , Efaïe LX vf 2i. LU vf 1. Apoc. XXI vf 27. Jerem. L vf ?o. 6c Zacb. XIV vj. 20. De forte que, félon la Remarque de St. Paul, Epb. IV vf 12-16 , tous les Hommes feront aloTs parvenus à la Perfection , que Dieu re- quiert de nous. A quoi ne contribuera pas peu l'Abondance des Dons du St. Efprit , que Dieu répandra alors fur toute chair, Joël III vf î8. Car , quoique cette PromefTe ait eu une partie defon Accompliflement le Jour de la Pentecôte, elle ne fera cepen- dant bien accomplie , que quand Dieu aura répandu les Dons au long & au large fur tous ceux qu'il appellera , Aftes II vf 30. Or, comme nous ne voyons pas cette Uni verfa- lité du Règne de Chrift, ni cette fijncère Converfion de tout le Genre -Humain , il S 5 tau; 278 Bibliothèque Britannique, faut cfpérer, qu'elle arrivera un jour, ainû que les Prophètes l'ont prédit. Mais , comment peut-on concilier cet E- tat de Perfection avec l'Ecriture, qui dit qu'il n'y a point d'Homme jufte fur la Terre, Eccl. VII vf. 20? On peut le faire , die Mr. Worthington, en fuppofant que l'Ecriture l'entend des Hommes deftituez du Secours de Dieu; ou bien de ceux, qui vivoient du tems de l'Ecrivain Sacré ; ou enfin de ces légères Foiblefles, que nous avons vu ne pas être incompatibles avec l'Etat d'Innocence. L'on objecte encore deux Paflages , Luc XVIII vf 8 & Matt. £111 1;/. 30, où il eft dit, qu'au Retour du Fils de l'Homme, il y aura un grand Nom- bre de Méchans fur la Terre. Mais, quant au premier, il eft évident qu'il s'agit de la Venue de Jéfus, pour détruire la Nation Juive & le Temple : quant au fécond , il s'agit du Tems de la Réfurrection , où l'on verra les Méchans de tous les Ages, mêlez parmi les Gens- de-Bien. Après avoir recouvré nôtre Etat de Pu- reté originel , nous rentrerons , par une fuite néceflaire, en pofTeflion de nôtre Bon- heur primitif. Cela paroit d'abord par les magnifiques Defcriptions que les Prophete-s font delà Gloire de PEglife dans ce Tems. Fuyez Pfeau. XLV vf. 14-16. Efaïe LXI vf. 10. Apoc. XIX vf. 7, 8. Cantiq. IV vf. 7. & Epb. V vf. 27.' Enfuite par la profonde Paix dont elle jouira. Voyez Efaïe Juillet, Août, et Septembre. 279 II vf 4. Micbée IV vf 4. Efaïe LXVI vf. 11. & XI vf 6-9. Enfin, par ce que St. Pierre y Aiïes III vf. 19-21, nous a promis que ces Tems feroientdej Tems de Rafraicbif- fement pour les Hommes , & un /tétablifle- vient univerfel de toutes cbojès. Mais, com- me tout cela pourroit paroître trop vague , Mr. Worthington entre fur ce fujec dans de plus grands Détails. St. Jean nous apprend , Apoc. XX. vj. i-6 , qu'il viendra un Tems, ou le Diable fera lié pour mille Ans, pendant le quel ef- pace les Fidèles régneront avec Chrifl, Chacun fait, que les Sentimens , tant des Anciens, que des Modernes, ont été fore partagés fur la Nature de ce Règne. Nô- tre Auteur s'en tient à celui de JVhitby , tel qu'il l'a exprimé dans fon Traité fur le Règne de mille Ans. ,, Ce Règne commen- „ cera , dit il (a) , lorfque Satan fera ref- ,, ferré dans fon Pouvoir de féduire les „ Peuples, &que TAntechrifl fera détruit ; „ de forte que l'Idolâtrie & les Impiétez de ,, l'Eglife Romaine, ni les Impoftures de ,, Mahomet, ne feront plus un Obilacle à I'E- ,, tablilTement du Chriftianifme. Alors, les j> Jutf5 & les Gentils fe feront Chrétiens ; ,, jouiront d'un très grand Bonheur tempo- ,, rel ; feront enrichis de tous les Dons „ céleftes ; <3c vivront dans cet heureux „ Etat pendant mille Ans, fous la Direction „ de Jéfus leur Chef , qui ne les honorera „ cependant ( * ) P- il6 * 337. 23o Bibliothèque Britannique, M cependant pas de faFréfence perfonnel- ,, le. Les Juifs en particulier feront réta- „ blis dans leur Fais, où ils rebâtiront Je- „ rufalem & le Temple, pour y fervir Dieu ,, félon le Culte Evangélique: ils auront „ même quelques Avantages pardeiTus les 3, autres Chrétiens, durant cette nouvelle „ Théocratie. „ Ce merveilleux Evénement doit arriver après la Ruïne de l'Antechrifl, comme il paroit par les Prophéties de Daniel <5c de St. Jean (a). Les mêmes Prophè- tes s'accordent à faire durer fon Règne douze cens foixante Ans. Pour déterminer donc le commencement du Règne de mille Ans , il n'eft queflion que de fixer le com- mencement de celui de l'Antechrifl ; & d'y ajouter le Tems de fa Durée. Or, St. Jean nous apprend, Apoc. XIII */#<*/. XV-XX. Juillet, Août, et Septembre. 2 81 qu'il faudra trente Ans, pour achever cet Ouvrage. Dans le ver/et fuivant , le Prophè- te ajoute : heureux celui qui parviendra â 1335 Jours ! Son Bonheur confiftera, fans 'doute, en ce que le Règne de mille Ans commencera alors. Mais, fi cela eft, fon Commencement tombera fur l'An de J. C. 2001. Il femble cependant, qu'il ne doive pas s'établir tout d'un coup. La Converfion des Gentils ne pourra pas fe faire fi fubite- ment, non plus que celle des Juifs, fl faudra du tems à ces derniers , pour fe ren- dre à Jérujalem de tous les Coins de la Ter- re, & pour y rebâtir leur Temple & leur Ville. Il fe pourroit donc bien, qu'il faut renvoyer plus loin le parfait Etabliflement de ce glorieux Règne. L'on trouve Da- niel VIII vf. 13 &fuiv., que le Sandluaire ne fera entièrement purifié qu'au bout de 2300 Jours. Mr. Worthincton les compte depuis la Ruine de Jérufalem par Tite. Or, comme elle arriva l'An 70 de J. C. , cette Purification pourroit bien n'être compiette qu'en l'An 2370. Au relie, nôtre Auteur ne donne tout cela que pour des Conje&ures, plus ou moins vraifemblables. Pendant ces mille Ans que le Démon fe- ra enchainé, l'on ne doit pas douter, que les Hommes ne fafiènt de grands Progrès dans la Sanctification. Ils ne feront cepen- dant pas encore arrivez au Point de Per- fection où ils doivent être. Pour les y a- mener, Dieu permetrra de nouveau au Dé- mon de forcir. Il fera fes derniers Efforts pour 282 Bibliothèque Britannique, pour féduire le Monde; mais, ils ne feront pas de longue Durée, & le Seigneur le pré- cipitera dans l'Etang ardent de Feu & de Soufre. Voyez Apuc. XX. Après cela, paraîtront de Nouveaux Cieux & une Nouvelle Terre, Apoc. XXL C'eftici la Defcriptionde la Félicité dont le Genre- Humain jouira , quand il fera parvenu à fon Etat de Perfection originel. Elle eft toute femblable à celle qu'on lit Efaïe XLV vf. 17 6? fiùv. & 2 Pierre III vf. 13. Mr. Worthington s'attache à prouver, que l'Etat défigné ici elt différent du Règne de mille Ans, auquel il fuccèdera. Nous De le Cuivrons pas dans fes Preuves. Nous nous contenterons de remarquer, qu'il aura lieu dans ce Monde , & avant la fin de toutes choies. On peut le conclure des termes mêmes que St. Jean employé pour le décrire. Ils expriment tous de's Idées de chofes de ce Monde. Ce font des deux; une Terre; une Ville; des Rois qui s'y ren- dront; un Arbre de Vie , femblable à celui du Paradis Terre ftre ; des Maifons £f des Terres pour les Habitans : enfin , l'Agneau en fera Roi ; ce qui prouve , que fon Office de Médiateur ne fera pas encore fini. Voyez jlpoc.XXl, XXII. EfaïeLXLvf. 21. Conv me ce Syfthème eft fort différent de celui du Dr. Éurnet, nôtre Auteur répond aux Difficultez de ce Savant, & établit fon Opi- nion fur les Ruines de celle de fon Adver- faire. St. Jean nous avant tracé les Caractères de Juillet, Août, et Septembre. 283 de l'Etat dans le quel le Genre-Humain fe trouvera alors, Mr. Worthingtoh les examine chacun féparément. Le pre- mier eft contenu Apoc. XXI vf 3. Il con- fifte en ce que Dieu habitera avec les Hom- mes , &converferaaufli familièrement avec eux, que dans l'Etat d'Innocence. Le fé- cond, c'eft que le Péché n'aura point d'En- trée dans ce nouveau Monde, trayez Apoc. XXI vf. 8. 27. Le dernier enfin, c'eft que tous les Maux, & la Mort même, auxquels nous fommes affujettis depuis la Chute , n'auront plus lieu , Apoc. XXI vf. 4 & XXII vf. 3. Ce dernier Article, étant ce- lui qu'on a le plus de peine à fe perfuader, mérite que nous nous y arrêtions un peu. Le Mal Phyfique étant un Effet du Mal Moral , dès que la Cauie ceffera , il faut que l'Effet celle. D'ailleurs, comme il eft un Remède , que Dieu employé pour rétablir les Hommes dans leur Etat primitif, dès qu'ils feront parvenus à ce RétablifTement, ils n'auront plus befoin de Remède. L'E- criture nous confirme tout cela. Voyez Rom.VlUvf 192s. £/owO«/:a-XXXV. LV vf 13. AmoslXvf 13. Joël III vf. 18. Ofée II vf 18. Efaïe XI vf. 8, 9. «5c XLIX vf. 10. Jerem. XXXI vf 12. 14. & Efaïe LXvf 17. & LXV vf 11-21. XXXIII vf 24. & XL vf. 31. Toutes chofes étant ainfi rétablies dans leur Etat primitif, les Hommes prolongeront la Durée de leur Vie, autant qu'ils le faifoient avant le Déluge. L'Exemption des Maladies, la Pureté de l'Air, 234 Bibliothèque Britannique, l'Air, la Bonté des Alimens, le Genre dé Vie, &c. tout contribuera à conferver leur Corps durant longtems. C'eft ce qu'em- porte la Prophétie d'Efaïe LXV vf. 20. 22; & celle du Pfeaume CHI vf. 1,2. Ilfemble que nous commencions déjà à préfent à re* couvrer à cet égard ce que nous avions per- du en Adam. 11 eft vrai , que nous ne deve- nons pas plus vieux que nos Pères; mais* nous paflbns beaucoup plutôt qu'eux de l'Etat d'Enfant à celui d'Homme -fait. Si nos premiers Parens n'avoient pas péché , Dieu les auroit tranfporté du Paradis Ter- reftre dans le Ciel , fans les faire mourir. Il en a donné une Preuve, dans la Perfon- ne $Enocb> & celle d'Elie. Comme ils avoient atteint le Degré de Perfection au quel la Nature Humaine peut parvenir % Dieu les exempta de la Mort , & les fît pafTer tout d'un coup de cette Vie dans l'autre. Puis donc que les Hommes de cette dernière Génération feront tous parve- nus à un pareil Degré de Perfection , com- me il a été prouvé , il s'enfuit , qu'ils ne mourront point , mais qu'ils feront tous tranf- portez dans le Ciel. Le PafTage des Hébreux^ Cbap. IX vf. 27 n'eft point contraire k cette Opinion. L'Apôtre ne dit pas, qu'il foit ordonné à tous les Hommes de mourir; mais aux Hommes; 'c'eft à dire, à la plus grande Partie d'entr'eux. Une Preuve, qu'il faut l'entendre dans ce Sens , c'eft que St. Paul dit en termes exprès, que nous ne mourrons pas tous , i Cor. XV vf. 51, 52. & i Tbejf. IV Juillet, Août, et Septembre. 2S5 IV vf 15-17. D'ailleurs, J. C. promet po- fitivement, que ceux qui croyent en lui ne mourront jamais , Jean XI vf. 25 , 26. VI vf. 49, 50. VIII vf. 51 , 52. «5c X. vf 10. De forte qu'on pourra dire alors , qu'il a détruit l'Empire de la Mort, Heb. II vf. 14, 15. 1 Cor. XV vf. 24-26, & 54 58. Tel eft en abrégé le Syfthème de Mr. Worthington. Il ne le donne pas comme une chofe abfolument vraye, mais feulement comme une Opinion qui mérite l'Examen desSavans. Il les prie même d'y faire attention , & de contribuer par leurs foins à en démontrer la Vérité ou la Faufie- té. C'eft dans la même Vue, que nous en avons donné un Extrait affez étendu, afin que ceux, qui n'entendent pas la Langue de l'Auteur, puiffent en juger. Il ne nous refte préfentement, qu'à dire un mot de la Differ- tationfur le Livre de Job. Nôtre Auteur le regarde comme un Poème Allégorique & Pbilofopbique en même tems. „ Job , nous dit on (a) , y repréfente le Gen- „ re-Humain: dans fa Vie particulière nous ,, avons en petit une Image de la Nature „ Humaine en général. Car, quiconque con- ,, fidere le Plan de cette Hiftoire, avec at- ,, tention, y découvre une vive Repréfenta- ,, tion des différens Etats de l'Homme, & „ des diverfes Révolutions aux quelles il „ eft & fera expofé dans cette Vie. LaFé- „ licite & l'Innocence de Job, dans fonpré- „ mier ( a ) p. 4-n. 49<- Tome XXIII. Part IL T 286 Bibliothèque Britannique 5 ?) mier Etat, eft une Peinture de celui de j3 nos premiers Parens dans le Paradis : „ ceux-ci, auflî bien que ^ofr, furent tentez „ par le Diable. Le trifte Etat de ce der- „ nier, après que Satan eut obtenu la Per- ,, million de l'attaquer, eft une Image de ,, la malheureufe Condition de l'Homme „ après fa Chute, qui fe vit privé des Ri- ,, cheiTes de la Grâce de Dieu, & couvert „ des Ulcères du Péché, beaucoup plus nui - ,, fibie à l'Ame, que les pius facheufés Ma- 5, îadies ne le font au Corps. De même, le 3, RétablifTemert de Job dans un Etat le dou- 3, ble plus heureux que le précédent; & la ?, prolongation de fa Vie au de-là du ter- „ me de ce [le d;s hommes de fon tems; 3, font une Peinture bien naturelle du fu- 3, tur Rétabliflement de la Nature Humai- ,, ne dans un Etat aulTi heureux, Il ce n'efl 3, davantage , que celui de nos premiers 3, Parens. ,, ARTICLE IV. The Parallel: or a Collection of extraordinary Gafes, relating to cou* cealed Births , and difputed Succeffîons. The Second Edition. London, printed for J. Roberts , near the Oxford* Ams , in Warmch-Lane. 1744. Ceiî-à-dire. Les Parallèles: ou Recueil de Cas Juillet, Août, et Septembre. 2$j Cas extraordinaires , concernant des Naif- fane es cachées & des Succeffions difpntées. A Londres , chez jF. Robert s. I744« C'eil une Brochure in Octavo de 56 pp. LE Gros du Genre Humain peut fe divi- fer en deux Clafles: les uns admirent touc, & les autres n'admirent rien. A l'ouïe d'un Fait extraordinaire, &qui femble tenir du Merveilleux, les premiers ne balancent point d'y ajouter foi, par cela feul qu'il eft extraordinaire; tandis que cette même Rai- Ton eft un Motif pour le faire regarder com- me faux par les derniers. Les uns & les autres n'agifient pas en Philofophes. Un Fait , qui femble être hors du Cours ordi- naire des chofes , peut être vrai, &il peut aufli être faux: & cette Propriété, qu'il a d'être peu commun , ne doit pas être une rai (bn pour nous le faire recevoir comme une Vérité, ou rejetter comme un Menfon- ge. Pour combattre ce dernier préjugé , nô- tre Auteur a raflfemblé ici cinq Cas extrê- mement finguliers, de la Vérité defquels Penne fauroit douter , après les Recherches qui ont été faites pour la conftacer. Le premier efl l'Hifloirede Richard Plan- ' tagenet , Fils de Rkbàtd III, qui exerça le Métier de MalTon jufqu'à fa mort. Le fé- cond Cas efl celui de Marie Co?not , que le Parlement de Paris déclara Héritière de Joachim Cognot , Médecin de la Reine, quoi- que fon Père & fa Mère ne la reconnurent point pour leur Fille. Le troifieme efl celui T 2 d'un s8B Bibliothèque Britannique, d'un Gentil-homme Savoyard , qui fut changé à nourrice. Le quatrième efl celui du Com- te de Saint-Geran, qui, fans être connu, ni de Ton i^ere ni de fa Mère , fut élevé chez eux en qualité de Page; & enfuite reconnu pour leur Fils. Le cinquième, enfin efl le RétablifTement du Baron Sutton de Dudley , que le fameux Duc de Northumberland avoit privé de fon Titre. Comme ces Cas font allez curieux, & que quelques-uns même font peu connus, l'on ne fera pas fâché que je m'y arrête un peu. Je ne dirai ce- pendant rien du troifleme , dont divers Au- teurs ont parlé; ni du quatrième, que Mr. Gaiot de Pituval a rapporté allez au long dans fon Recueil des Caufes Célèbres £f Inté- rejjantes, Richard III efl fameux dans THifloi- re & Angleterre. Dans le tems qu'il n'étok que Duc de Glocefter , il eut en 1469 un Fils d'une Dame de Qualité. Cette même année 9 Edouard fon Frère ayant été fait prifonnier, & Henri VI rétabli , Richard ne crût pas que la circonflance fût propre pour recon- noitre l'Enfant qui venoit de naitre. Il le fît donc élever feercttement dans un Village , après lui avoir fait prendre fon Nom lorf- qu'on le batifa. Les quatre années fuivan- tes furent des tems de troubles & de con- fufion, où il y auroit eu du danger pour le jeune Richard d'être reconnu pour Fils du Duc de Glocefter. La cinquième, il époufa la Veuve d'Edouard, Fils de Henri VI; ce qui fut une nouvelle raifon pour tenir ca- ché l'Enfant qu'il avoit eu de fa Maitrefle. Il Juillet, Août, et Septembre, sfr) Il ne laiflbit cependant pas d'en prendre foin. A l'âge de fepe ans, il le fie tirer des mains de fa Nourrice, pour le mettre dans une Penfion près de Lutter-wortb , dans le Comté de J^eicefter. Il y demeura entre huit à neuf ans , durant lefquels il fit de grand» progrès dans les Belles-Lettres. Sa Naii- lance écoit toujours un Myftère pour lui; & , pendant tout cet intervalle , il ne vie qu'un Gentil homme, qui venoic payer ré- gulièrement fa penfion, & lui donner de l'argent pour fes menus plaifirs. Le jeune Richard avoit environ quinze ans , lorfque ce Gentil homme, qui avoit eu foin de lui, le vint chercher, & le mena dans une fort belle mai fon; ou, après avoir pafié par une file de magnifiques chambres , on l'intro- duifit dans un cabinet où il trouva une Per- fonne richement vêtue, portant l'Ordre de la Jarretière, qui l'examina foigneufement; lui fit mille queftions, accompagnées de gran- des marques de tendreffe; & en partant lui donna dix pièces d'or, dt; la valeur de dix fcheliings chacune. Cette Perfonne , revêtue de l'Ordre de la Jarretière, étoit fans doute Richard III, qui venoit de perdre le Prince de Galles, l'unique Fils qu'il avoit de la Reine. La perte de ce jeune Prince réveilla toute fa tendrefie pour Richard; & il ne put réfîfter à l'envie de le voir. Mais, comme la Reine vivoit encore, il ne voulut point le recon» noitre pour fon Fils. Sa mort, qui arriva quelques mois après, lui laifla la liberté de le faire. Il le fit venir près de Leicefter > oh fon Armée le crouvoit en préfence de celle Ti de 2go Bibliothèque Britannique , de Henri de Lancajlre , qui lui difputoit la Couronne. On introduifit le jeune Ricbonl dans la Tente du Roi ion Père; qui, après l'avoir reconnu pour Ton Fils, lui parla en ces termes: „ Mon Enfant, je dois demain „ combattre pour la Conlervation de ma „ Couronne. Soyez fur, que fi je ne puis „ pas la conferver,je perdrai la Vie; mais, „ je me flatte d'un heureux Succès. En at- „ tendant, demeurez dans cet endroit (lui „ montrant un lieu où il étoit hors de dan- „ ger)- Si je fuis victorieux , venez d'a- „ bord auprès de moi, & je vous recon- ., noitrai publiquement pour mon Fils : mais, >, fi je perds la Bataille, prenez la fuite, & ., g-rdez-vous bien de jamais dire que je Si fuis vôtre Père , parce qu'on ne vous ., feroit aucun quartier. „ Richard III ayant perdu la Bataille & la Vie, le jeune homme s'enfuit à Londres. Il y vendit fon cheval & les habits, & fe mit en ApprentifTage cbezunMaflbn. C'eft dans l'Exercice de ce Métier, qu'il paffa fes jours jufqu'en 1546. Cette année-là, il étoit occupé à bâtir une mai fon à Eaflrcel , dans le Comté de Kent, pour Mr. Thomas Moyle. Comme il avoit toujours confervé du Goût pour .es Poètes Laefàs , & en particulier pour Horace , il profuoit de tous fes momens de îoifir pour lire cet Auteur. Un jour, qu'il s'étoit endormi fon Horace à la main, Mr. Moyie eut la curiollté de voir quel Livre ce vieux Malien lifoit. Sa Surprife fut grande quand il l'eut vu; mais elle redoubla, lorf- qu'après avoir lo'ngtems queltionné ce bon homme Juillet, Août, et Septembre. 291 homme ,il lui eut fait cormoitre fa NaiiTarr ce, fut la quelle il avoit conftamment car- dé îefecret. Touché de Ton Sort Mr. Moyie , lui offrit fa Mai Ton pour le refte de Tes jours , l'aiïurant qu'il pourroit y vivre en toute liberté. Kicbard n'accepta point cette offre,* parce que, accoutumé à mener une vie retirée, il auroit eu de la peine à vi- vre dans une Maifon où il y avoit autant de monde que dans la tienne. * Il le pria donc de lui permettre de bâtir une Chambre dans un terrein, allez éloigné de fa Maifon pour y vivre en folitaire, & affezprès pour pro- fiter de fesBontez. Mr. Moyle lu: ayant ac- cordé fa demande, Richard eut bien-tôt éle- vé fon Palais, oh 1! eft mort fur le milieu de Décembre de l'An 1550. Cette Terre de Mr. Moyle eft paflee entre les mains de la Branche' ainée de la Famille Finch \ & c'eft au Comte de Wincheljea, qu'on doit les Par- ticularitez , dont je viens de donner l'Extrait. Le fécond Cas, rapporté par nôtre Au- teur, n'eft pas moins ungulier que celui-là. Otgnot époufa , à l'âge dé foixante ans, M \rh Néflier, qui en avoit environ vfoge- neuf. Ce Mariage fut cé'ébré à But Seine en 1590. Ils eurent pKifieuTS Enfans, qui moururent tous en bas âge à l'excep- tion de Claude, pour le quel ils avoient une extrême tendrefle. Le Père, qui étoit Dofteur en Médecine, lai fiant fa Femme à Bar fur Seine, alla, fans qu'on en fâche J a raifon , s'établir à Fonts/:r: h Comte en Pot- îoh. Ce changement de demeure fe fit en T 4 "5975 292 Bibliothèque Britannique, 1597; &, fur la fin de l'année fuivante , Ma- rie Nqffier fa Femme l'ai la joindre. Sept mois après Ton retour, elle accoueha d'une Fille, que le Père jugea être trop vigou- reufe, pour être venue avant le terme. Il ne fit cependant point de bruit; fe préfenta pour Père; & la mit lui même à nourrice. En 1601 il s'établit à Paris, où, fe voyant en train d'amaffer du Bien , il forma là ré- futation de le laiifer tout à fon Fils au pré- judice de fa Fille. Pour cet effet, il cher- cha, du confentement de fa Femme, à s'en défaire pour toujours. Dans cedefièin, il ia remit entre les mains de la Femme de Jean Buutet , Maitre Serrurier, demeurant dans un des Fauxbourgs de Paris, avec la quelle il s'accorda pour la Penfion ; lui di- fant, que la petite Fille fenommoit/War/e, & qu'elle avoit trois ans. Il s'étoit déjà écou- lé une année , lorfqu'il prit fantaiûé à Ma- dame Cognot d'aller voir fa Fille. Les mar- ques detendrefle, qu'elle fitéclatter durant cette vifite, firent foupçonner à la Femme de Bout et 9 que c'étoit la Mère de l'Enfant ; & elle ne fe fit aucune peine de dire ce qu'elle penfoit à Madame Cognot, qui lui foutint que fa Conjecture étoit faufle. Elle ne jugea cependant pas à propos de s'esr- pofer davantage, & ne retourna plus voir fon Enfant. Vers l'An 1609, la Boulet , étant tombée ians la mifere, mit, malgré elle, la petite Cognot à l'Hôpital de la *" Trinité , oh elle l'alloit voir régulièrement, pour lui procu- rer Juillet, Août, et Septembre. 293 rer tous les fecours qui dépendoient d'elle. Fendant cet intervalle, le Fils de nôtre Mé- decin mourut , fans que cette n ort déter- minât ni le Père ni la Mère à reprendre leur Fille. La Femme avoit une rai Ton particu- lière, pour étouffer ainfi toute la tendrette maternelle. Son Mari avoit amalTé du Bien , & elle étoit beaucoup plus jeune que lui : elle efpéroit donc pouvoir le remarier un jour , & le faire plus avantageufement fi elle écoit propriétaire du Bien , fans avoir d'enfant à la charge. Dans cette vue , el- le engagea le bon homme Cogmt à faire un Contract, par lequel le deinier vivant fe- roit maitre de tout. 11 s'étoit écoulé treize ou quatorze ans depuis que cette Fille avoit été mife en penfion chez la Boulet, lorfqu'elle rencon- tra un jour par hazard le Médecin Cognot. Quoiqu'elle ne l'eût vu qu'une fois /elle n'eut pas de peine à fe le remettre ; parce qu'il étoit d'une figure fort reçonnoifîable. Elle l'arrêta , pour lui demander ce qu'il pré- tendoit faire de cette Fille qu'il avoit mife en penfion chez elle ,• & s'il n'étoit pas bien-tôt tems de lui en payer la penfion ? Cognot fut frappé du coup ,• & , bien qu'il niât qu'elle fût fa Fille, il en demanda cepen- dant des nouvelles , ce l'alla voir deux fois en qualité de Médecin chez un Maitre d'E- criture , où elle étoit Servante & malade de la fièvre. La Boulet , ayant appris la demeure de Cognot, n'étoit point chiche de fes vifites. T ^ Pour 294- Bibliothèque Britanniquj; , Pour y mettre fin, le Mari & la Femme ré- fol urent de prendre chez eux la petite Cognot, qu'on nommoit Marie Croisant. Quand el- le v fut domiciliée , la Èouîet demanda la Penfion de cette Fille durant les années qu'elle avoit été à fa charge. Au lieu de la fatisfaire , le Médecin l'envoya prome- ner. Sur quoi , cette Femme îe fit citer de- vant le Bailli de Saint- Germain. Pour pré- venir l'éclat, Cognot s'accommoda avec el- le, & lui donna quatre cens Livres. L'on en paiTa un Contrat par devant deux No- taires, dans lequel il étoit dit, que cet ar- gent étoit donné par charité; en confidéra- tion de Marie Croijjant , Servante du Méde- cin Cognot> & parce qu'il s'étoit trouvé pré- fent , lorfqu'on avoit chargé la Boulet du foin cFélever cette Fille. Le Plan du Médecin & de fa Femme é- toit de traiter Marie Croijjant comme leur Servante. Mais, elle fût fi bien gagner leur affection , qu'à l'arde de la cendreïTe qu'on a naturellement pour fes enfans, elle eut la même Autorité dans la maifon,que s'ils l'avoient reconnue pour leur Fille. Enfin, Ccgnot mourut en 1625,* 6c comme il s'étoit referve, par le ContracT: dont nous avens parlé, la difpofition d'une certaine fomme , }1 légua fix cens Livres à fa Servante, pour la récompenfer de fes bons fer vices. Elle continua à demeurer dans la maifon de fa Mère fur le même pied qu'elle y avoit été auparavant , jufqu'à ce que la Veuve Co- snot iugea à propos de la marier. Dans le 6 Contrat Juillet, Août, et Septembre. 295 Contrat de Mariage , elle la fir pafier pour fa Filleule, & lui fit en conféquence une petite Dot. Mais, un jour que cette pré- tendue Filleule étoic occupée) par ordre de Ta Marreinc, à examiner des Papiers; elle trouva une Le:cre, en datte de 1601, que Madame Cughoî écrivoit à l'on Mari, pour lui recommander d'avoir foin de leur petite Mark. Cela la confirma dans l'idée oli el- le étoit depuis îongtems, qu'elle étoit plus que la Filleule de Kir. & de Mad™. Cognot. Elle fe difpofoit à empocher cette Lettre, lorfque fa Marreinc l'*en empêcha. Cette petite Conteftation donna cependant lieu à d'amples Eclairciflemens , qui fe terminèrent par reconnoitre que la jeune Femme étoit cette Marie en queftion ; mais que, pourtour au monde, il nefalloitpas qu'elle paifât pour Fille du défunt Médecin: que fi elle vou- loit garderie filencelà-deflus, on auroit foin qu'elle ne manquât jamais de rien; mais que, fi elle parloit , on étoit réfolu à nier forte- ment qu'elle fût ce qu'elle vouloitétre. Ce Difcours produifit fon effet pour quelque- tems , juîques à ce que la Veuve Ccgnot s'étant remariée, & favorifant les Enfans de fon Mari plus qu'il ne lui convenoit, la prétendue Filleule lui intenta un Procès par devant le Bailli de Saint- Germain. Quoique la Marreine eût fait ferment qu'elle n'étoit point Mère de cette Femme, elle ne laiffa pas d'être condamnée le 11 de May 1629 à la reconnoitre pour fa Fille. Elle appella de cette Sentence au Parlement de faris , i$6 Bibliothèque Britannique, oii le Procès fut plaidé de part & d'autre par les plus habiles Avocats,- & le Jugement du Bailli de Saint -Germain confirmé le 8 de Décembre 1634. La dernière Hiftoire, rapportée par nôtre Auteur, a ceci de fingulier, qu'il fembie n'avoir compofé Ton Livre, que pour avoir leplaifir de la raconter. Sans cherchera pénétrer fes Vues, nous nous contenterons d'en donner un Extrait fidèle, laiiïant à nos Lecteurs le foin de faire les Réflexions qu'ils jugeront à propos. „ Tous ceux , qui connoifTent l'Hiftoire de 3, nôtre Païs, dit V Anonyme , favent corn- 3, bien nous avons fouffert, fous certains M Règnes, des Intrigues, des Artifices, & 3, de l'Ambition fans bornes desDudleys . . . 3, Ils attirèrent à Henri VII le Reproche 3> d'Oppreflion , & à Henri VIII celui de 33 Cruauté: ils fouillèrent le Règne d'M- 3, douard VI par leurs criminelles Jaloufies, 3, & le glorieux Gouvernement de la Rei- 3, ne Elizabeth par leur Politique Macbia- 3, qui perdit par ce moyen la Dignité de Pair. Les choies changèrent bien de face après ia Juillet, Août, et Septembre. 299 la Mort d'Edouard VI. Marie, étant montée fur ie Trône, fit décapiter le Duc; & ren- dit au vieux Sutton ion Titre de Baron de Dudley. 11 eue l'Honneur d'afïifter en cette Qualité au premier Parlement que la Reine fie affembler. Mais, il ne jouît pastongtems de cet agréable Changement de Fortune ; puifqu'il mourut bien-tôt après. Marie n'ou- blia cependant pas ton Fils. Elle lui rendit le Château de Dudley, rebâti par le Duc de Northumberland ; avec un grand nombre de magnifiques Terres , dans les Comtés de Stafford & de Warwick, qui étoient dévo- lues à la Couronne par laTrahifon du Duc. „ Tels font les changemens arrivez dans ,, ces deux Familles en fort peu de tems. ,, Si le Baron Sutton étoit mort dans l'obf- ,, curité, & qu'il n'y eût eu aucun inter- 3J valle entre la grarrcleur du Duc de Nort- „ humberland & celle de Tes Fils, les Com- ,, tes de IVarnjcick & de Leicefter; ou bien, ,, fi le Fils de Sutton étoit relié mineur juf- ,, qu'au Règne d'Elizabetb , & qu'il ne fe ,, fût pas fournis paifiblemenc à fonSort, ,, il auroitpaiTé pour un Impofteurqui vou- ,, loit s'arroger an Titre qui ne lui appar- ,, tenoit point, & auroit vu le Châtean de „ Dudley, Héritage de fes Pères, entre les „ mains d'une autre Famille qui n'y avoit „ de droits que ceux que la Fraude & la „ Violence peuvent donner. C'eft un pur 5, effet du hazard , ou, pour parler plus ,, chrétiennement, de la Providence, que ,, la chofe n'ait pas été ainfî. Mais, alors, ,, on 300 Bibliothèque Britannique, 3, onauroit vu un Evénement des plus ex- ,, traordinaires & des plus merveilleux: j, c'eft qu'un homme a la Hardieflbdepren- „ dre les Armes, le Titre, & la Dignité 3, d'un Pair d'Angleterre, du vivant même ,, de celui qui en efl le véritable Pofleflèur. ,, Nos Généalogiftes , & ceux qui s'attachent 35 à notre Hiftoire, favent aflèz ce que je )5 viens de raconter; mais, le gros de la „ Nation l'ignore totalement; & j'ofe mê- 3, me aflïirer, qu'il y a bon nombre de Lé- 3, gifles , qui , fur le firnple expofé des 33 Faits, & fans nommer les Perfonnes , dé- 3, cideront hardiment que la chofe eft im- 3, poiTible. „ Cela cependant doit nous apprendre à être fore retenus à prononcer fur les Cas extraordinaires qui fe préfen- tent de nos jours , & à ne fe point faire de feru- pule de les examiner foigneufement. ,, Nous ,, vivons dans un Siècle, où l'Avarice, l'Am- ,3 bition, & la Soif depofleder cequiappar- M tient légitimement à autrui , dominent 3, autant que jamais. Mais, fi nous entrete- 3, nons une lâche Indifférence pour éxami- „ ner ce qui nous paroit obfcur & embar- ,, rafle; une honteufe crainte d'irriter les 3, Riches & les Puiflans, qui , peut-être, ,, ne font devenus tels que par leurs Injuf- ,, tices; & une politique Appréhenfion d'ex- „ cirer de nouveaux Procès par un Jugement ,, contre le préfent Poflefleur: îfenreful- 3, tera, & cela en peu de tems, un Ren- „ verfement total de l'Ordre, un Boulever- 3, fementdans lesSucceflions ,& un Anéan- „ tifîement Juillet, Août, et Septembre. 301 „ tiffement abfolu de la Paix & de la Sûre- }) té dans la Société. Il eft donc abfolu- 3, ment néceflaire de s'oppoftr à ce Genre „ de Scepticifme , qui prend fi fortledef- 3, fus aujourd'hui ; à moins que nous ne ,, prenions la Refolution de facrifier le Droit 3, des Perfonnes vivantes & la Sûreté de nos „ Defcendans à la chimér que Crainte des 3, Apparences extérieures. Qu'y a-t-il de 3, plus jutte, que d'examiner avec foin les 3, Prétentions de Perfonnes, qui, fe trou- „ vant dans de fâcheufes Circonftances , „ s'expofent aux plus grands Dangers pour „ obtenir Juftice? Ce Defir qui les anime 3, eft fi louable , & en même tems fi natu- ,3 rel , que les Juges ne fauroient l'éteindre, ,, fans s'expofer eux-mêmes, car , quiconque ,, favorife les Injufticesd'autrui fe prive du 3, Droit de lés faire redrefier , quand on lui 3, en fait à fon tour. ,, ARTICLE V. C, Cornel 11 Taciti Opéra, qunc extant , omnia, ad Editionem optiniam Joh. Fred. Gronovii accuraîè exprejja. Glasgu^, Typis Rober- t 1 Ù r 1 e & Societatis ,* Sumptibus Johann is Barry, apud quem vc- neunt. Edinburgi, apud Gavi- NUM HAMILTON & JOHANNEM Tome XXUL Part. IL V 302 Bibliothèque Britannique, Balfouk. Londini , apud An- DREAM, MlLLAR. I743. C'eft-à-dire: Les Oeuvres de C. Cornehli Tacite, telles que les a données J. F ré p. Gronovius. En deux Vo lûmes in duodecimo: pp. 367 pour le I Tome 293 pour le II, & 24 pour YIndice. L'Edition de Gronovius, que l'Edi- teur de celle-ci dit dans le Titre avoir fuivie, eft celle qui parut à Leyden en 1722. Les foins de ce Savant, pour donner le Texte de Ton Auteur dans toute fa Pureté, répondirent trop bien à la belle Réputation qu'il s'étoit aquife dans la République des Lettres, pour ne pas lui mériter l'Approba- tion des ConnoifTeurs. C'eft donc avec beaucoup de Raifon,que le Sr. Barry, fe propofanc de donner une nouvelle Edition des Oeuvres de Tacite, s'eft aflreint à fuivre fidèlement celle du Savant de Ley- den. Auffi fe per pour un Profete donc les Mœurs & la Doc- trine écoient li pures. Tant de Miracles en- core, opérez fur-tout pour le Soulagement des Malheureux , lui avoient donné un grand Crédit dans î'Efprit de la Multitude. Judas pouvoit donc fe flater, que cesDifpohtions favorables retiendraient lairjauvaife Volon- té des Sacrificateurs & des Dateurs de la Loi, & qu'ils n'oferoient rien attenter de funeile contre Jéjus. On fait ce qui coûta proprement la Vie au Sauveur : à parler humainement,ce fut l'ar- tificieufe Politique du Confeil des Juifs de le dénoncer au Gouverneur Romain, & de le lui livrer comme un Criminel de Léze- Majefté, qui avoit voulu ufurper les Droits de l'Empereur. Judas ne devina pas cet Artifice diabolique: & il n'elt pas furpre- nant, qu'il ne Jui vint point dans l'Efprit. Concluons , que la Mort de J. C. , amenée par de fcmblables Détours, étoit un Evéne- ment , que ce Traître ne pouvoit pas pré- voir ; fur-tout fi l'on fupofe , comme on doit le faire, qu'il fut aveuglé par fon Avarice. Cette Paflion , bien loin de lui permettre d'envifager ce qui pourroit arriver de finif- tre à fon Maître, par quelque Cas extraor- dinaire, l'empêcha même devoir les cho- fes dans leur véritable point de vue, & de confidérer avec un peu de Réflexion les Suites naturelles que pouvoit avoir fon Trai- té avec les Juifs. Enfin , je croi pouvoir me fervir de cette Avarice même, comme d'un principe qui n'eft Juillet, Août, et Septembre. 317 n'eft pas conrefté, pour prouver que Judas n'avoit pas prévu que cette malheureufe Convention duc coûter la Vie à Ton Maître. Il écoit fouverainement Avare: il étoit de plus Larron , comme nous l'apprennent les Evangéliftes(a). Infidèle dans l'Adminiftra- tion de la Bourfe commune dont il étoit le Dépolkaire , il en décournoit une partie, qu'il emploioit à les Ufages. Le Parfum répan- du aux Pies du Sauveur, il y avoit peu de jours, par Marie Sœur de Lazare, réveil- la Ton Ardeur pour ce Gain illicite. Il trai- te cela de Profufion. Il auroit mieux va- lu le vendre, & en remettre le Prix entre feS Mains. Il n'eut pas manqué d'en tirer fon Tribut fecret, félon fa Coutume. Fruf- tré de ce Profit, & chagrin d'avoir manqué une Occafîon de s'approprier une partie de ce Dépôt, fi on le lui avoit remis , il veut s'en dédommager. Il va trouver les Chefs de la Sinagogue , avec qui il conclut fon Marché ; & bientôt après il exécute ce à quoi il s'eft engagé. Il femble que, de fon Avarice & de lés Infidélitez,on peut con- clure, qu'en livrant fon Maître aux Juifs, il ne crut pomt lui caufer la Mort. La Conféqucnceeft fenfible. Judas pou- voit vivre fans Travail de ce Fond de rJéné- fîcence qu'il avoit entre les mains, &doht il favoit faire de temsen tems des Souftrac- tions fecrettes. Etoit-il donc de fon Inté- rêt de tarir tout d'un Coup, par la Mort de ( m ) Jean XII. 6. Terne XXIII. Part. IL X 3ift Bibliothèque Britannique, de Jéjus, le Cours de cette Bénéficence % Non feulement il tiroit fa Subfiltance de cette Bourfe commune, mais par Tes Artifi- ces frauduleux il fé faifoit un petit Fond, dont il pou voit difpofer en propre. Tren- te Pièces d'Argent, qui montoient au plus à quinze ou feize Ecus , l'enrichiflbient- elles affez , pour le mettre au deflus des Be- foin* à venir? Pouvoient elles le dédom- mager fufifamment de ce qu'il y avoit à perdre pour lui à la Mort de fon Maître? Il faut convenir, que fi Judas eût prévu qu'il lui alloit faire perdre la Vie, cet Ava- re tût bien mal entendu le Sifteme de l'A- varice. Il feroit aifé de fortifier ce Raifonne- ment par des Efpénnces encore plusflateu- fes, que ce Difciple pouvoit avoir pour la l'Avenir. Judas , comme les autres Apô- tres, croioit que le Meflie devoit dans la fuite jouir d'un Roiaume des plus fl or if- fans. Puis qu'on lui avoit confié la Bourfe en petit, & qu'il comptoit que fes Infidé- litez n'étoient point connues , il pouvoit fe fia ter, que Jêfus , devenu un Prince puif- fant, le feroit Tréforier de fon Roiaume; & que, dans ce Pofte , il pourroit tout au- trement fatisfaire fon Avidité pour l'Argent. Comment fe figurer, qu'avec de femblables Efbérances, une Somme très modique l'eût déterminé à confpirer contre la Vie de fon Maître ? Toutes ces Conjectures femblent confir- mées par la grande Surprifc de ce Difciple icfi^ Juillet, Août, et Septembre. 319 infidèle, lors qu'il voit Ton Maicre condan- né à Mort. Quand on fuie avec quelque Attention tout ce qui fe pafle chez lui , on apperçoitaifément, qu'il ne s'attendoit poinc à une femblable Cataftrophe. Quand il vie que les Sacrificateurs Juifs alloient plus loin qu'il n'avoit penfé, & que Jéfus avoit été jugé à perdre la Vie , qu'on l'alloit livrer aux Romains pour être crucifié, Judas fe trou- va dans une Conlternation inexprimable. On ne iauroitprefque douter, qu'une par- tie de Ton Trouble, quand il vit ion Maître condamné au dernier Suplice, ne vint de ce qu'il fe voïoit, par cet Evénement im- prévu, réduit, pour fubfifter, ou à un dur Travail , ou à une honteufe Mendicité. C'é- toit fi peu pour lui, c'étoit une fi miférable Reflburce, que ces trente Pièces d'Argent qu'il venoit de toucher , qu'il n'en fait plus aucun Cas, dès qu'il s'apperçoit de ce qu'il va perdre. Il les dételle même , & va dès le matin les jetter aux Pies des Sacrifica- teurs dans le Temple, après avoir paffé la Nuit dans les Agitations les plus cruelles. Mais, il ne remédie à rien par cette Démar- che. En voulant tromper les autres, il s'étoit lourdement abufé lui-même. Ce Mé- chant , comme dit l'Ecriture, a fait -une Oeu- vre qui le trompe. En expliquant de cette Manière la Révo- lution , qui fe fit chez lui, je ne prétens pas en exclure les Mouvemens de la Con- science, qui ne- put que fe réveiller dans X 2 un* ^20 Bibliothèque Britannique, une Circon (tance fi frapante Mais , les Gonûdérations temporelles vont ordinaire- i;-en ;es prémiero chez les Pécheurs ; & les Maux , qu'ils le font attirez , leur ou- % ent en lui te les Yeux fur leurs Crimes. m ia d on »e voîtdans une trifte Situation, u ors on penfe à Tes Péchés qui l'ont cau- fëe . & on ne peut que les condamner. C'eft- JàleFçuit ordinaire del'Adveriité. Judas, Te it réduit à la Miiére par Ton Avarice, par (on Avidité même pour le Gain, fe re- proche vivement Ton Imprudence; mais, d'un autre côté, fa Confciencefe réveil le, & iu: reproche en même tems FEnormité de fon Grime* 11 efr. tout d'un coup frapé de •jur de fon Attentat, On voit fouvent des Révolutions fembla- blés dons les grands Pécheurs. Dans le Fore de la ParTion, &dans la Chaleur du Cri- ïr.et ils s'en cachent à eux-mêmes l'Enor- mité, & ils s'aveuglent pour n'en pas en- vifcger tes Suites. Le Bien apparent, qu'ils y Trouvent , leur dérobe la Vue du Mal qu'il traîne après foi; mais, après que le Péché eft commis, ils fe trouvent quelque- fois plongé- dans des Maux qu'ils n'avoient pas prévus , & qui leur caufent les Amertumes les plus vives. Leur plus grand Tourment vient encore alors de la part de la Con- fcience, qui ne manque pas de leur faire fentir fes Pointes les plus vives. Ceft ce qu'on pfeuf voir dans Judas, d'une manière bien marquée. Il y avoit trop de Noirceur éwm Juillet, Août, tt Septembre. dansfaTrahifon, pour quefaCoofç eocç mcurât dans le lilence. Il fe fènni tour* mente de mille Remors. Dès qu'il t\ Je Sanhédrin étoit aflembîé, i! y alla tôt, pour fe décharger entre leurs Poids qui Paccabîoic , & leur remeif e gent qu'il avoir, reçu pour le Pafemen* fon Crime. Il ne penfe plus alors aa temporel, qu'il s'eftcajfé à lui-même D:sRe- proches tout autrement cu;fan> ont (accé- dé aux premiers. Une dit plus, J'ai trahi mes Intérêts,* mais , j'ai trahi le Sang ntuh cent {a). En rendant ainfi Témoignage à l'In- nocence de Jéfus , il voudrait, s'il était poflible, tenter de lui fauver la Vie, Mais, il étoit trop tard. Il voit clairement, qu'il n'y a plus de Remède , ni au Mal qu'il s'érok caufé à lui même, ni à celui qu'il a cnufé à fon Maitre. Ceft ce qui fait la Grandeof de fon Trouble, & l'Horreur de fon De^s- poir. Frapé des Suites funeftes de fon in- fidélité, il ne peut plus fe foufrir lui-mê- me, la Vie lui devient infuportabîc, & il eft fon propre Bourreau. // alla s'étrarigkr, dit l'Evangélille. Voila, ce me fembie, comment on peut envifager la Trahifon de Judas , en creu- fant un peu dans fon Intérieur. Dans cet Examen, on ne s'eft point propofé d'ex eu- fer ce Miférable. Judas fera toujours TH r- reur de tous ceux à qui il refte, non feu: > menç ( a ) lUtt. XXVJh 4, X 3 322 Bibliothèque Britannique , ment quelque Sentiment.de Religion, mais même d'Humanité. Son Avarice, faPerri* die, Ton Impudence, fonDefespoir, touc eft. afreux dans ce Monftre. Mais, il s'a- gifîbit d'expliquer fes Démarches, quifem- blent d'abord incompréhenfibles. Il s'agif- foit d'en donner la Clé; & c'efl ce que l'on vient d'eflaïer. En entamant cette>Matiere, une des Rai- fons, que j'ai emploiées pour exculér ou pour jultifier un femblable Choix , c'eft qu'on pouvoit tirer de la Trahifon de Judas , & de (on Defespoir,des Inftru&ions "impor- tantes. Me voilà donc engagé à en indi- quer quelques-unes. Pour cela , il n'y a qu'à rapeler ce qu'on trouve là-deflus dans de bons Auteurs qui ont traité la Morale. On nous avertit , à l'occafion de cet Exem- ple de Judas & de Ton Avance, combien il efl dangereux de laifTer prendre pié à quel- que Paflion femblable , par de foibles Com- mencemens , par des Progrès impercepti- bles. ,, Rien de plus dangereux , ditunba- „ bile Direfteur , qu'une Paffion mal gou- „ vernée, & à qui peu à peu nous laif- s, fons prendre l'Afcendant fur nous. C'efl „ une Etincelle, qui s'entretient fous la Cen- s, dre , mais qui peut caufer un terrible In- „ cendie. Le perfide Judas fera dans tout â, les Ages un Exemple mémorable de cet- s> te terrible Vérité. Il a trahi le Sauveur „ du Monde, en le livrant à fes Ennemis. n Voilà de tous les Crimes le plus grand: „ mai* Juillet, Août, et Septembre. 323 ,, mais, quel en a éré ie Principe? Si les ,, Evangéliiles ne nous l'avoient pas mar- ,, que en Termes exprès, nous aurions fur ,, cjla formé bien des Conjectures , fans „ pouvoir découvrir la Cauie d'u e fi de- ,, teftable Entreprife. Voïant un Difcipie „ fe tourner contre fon Maitre, & travail - 3, 1er à le perdre, nous aurions cru, qu'il „ s'étoit déterminé à cet Attentat par quel- „ cun de ces violensTranfports, qui aveu- ,, glent l'Efprit& troublent les Sens, par un „ Emportement de C olere , par une Ardeur „ de Vengeance dans le Rellentiment vif & „ tout récent d'une Offenfe reçue, à l'oc- ,, cafion peut être d'une Ccnfure trop for- ,, te, faite en public, & capable de !•_• di- ,, famer. Mais non ; Judas a trahi le Fiis „ de Dieu fans Emportement, fans Efpric ,, de Vengeance, fans aucun Sentiment de „ Haine. 11 n'avoit reçu que des Grâces de „ fon Maitre , & aucun mauvais Traitement. „ Comment donc facrifia t il fi indignement ,, fon Bienfaiteur? Un Efpric d'intérêt, un ,, petit Gam qu'on lui offrit , voilà ce qui „ corrompit le Cœur de ce Difcipie. S'il ,, trahit fi lâchement fon Maitre, c'eft fim- ,, plement parce qu'il préféra l'Argent à Quand on iit la Trahifon de Judas, & fes lunettes Suites,bien des Gens s'imaginent, que cet Exemple ne convient qu'à des Scé- lérats confirmez. Cependant , quand on exa- mine avec aiccruïon les Inclinatior>s & les % A „ In- 324 Bibliothèque Britannique, Infidélitez de ce malheureux Ditciple, on trouve encore bien des Chrétiens d'aujour- hui,qui lui reflemblent fans s'en apercevoir. „ On fe croit fort éloigné de fembîables „ Excès , dit là - defjus un autre Moralifle ; ,, mais , on l'eft moins qu'on ne penfe. La „ Paffion de s'enrichir, & le Secret de la „ bien conduire , fait encore autant que „ jamais une des principales Affaires de la ,, Génération préfente. Il eft vrai, que, ti- „ mide dans les Commencemens , cet Ef- „ prit d'Intérêt n'infpire pas d'abord des „ Sentimens déterminez à tout ôfer , & à „ tout faire; & qu'auiîl-bien que Judas on „ fait fon AprentifTage fur de légères Injufti- ,, ces. Mais , quand une fois la Tentation „ a pris le Defïus , fortifiée & enhardie par 5, ces Couns d'EfTai , elle s'emporte enfin „ aux dernières Extrémitez. Elle ne ref- ^, pe&e , non plus que dans Judas , ni les „ Droits les plus facrez de la Nature, ni ,, les Chofes les plus faintes de la Religion. „ Aufll déterminez que lui , quand on laif- „ fe prendre Racine dans le Cœur à cette „ Paffion, & s'étendre peu à peu, il ne le „ trouve plus, ni J uftice , ni Pudeur, qui tien- „ ne contre l'Intérêt : s'il faut trahir un A- „ mi pour s'établir fur fes Ruines , cela n'eft „ rien; s'il faut fuplanter un Homme-de- „ Bien, pour profiter de fes Dépouilles, c'eft „ peu de Chofe. Fourberie , Lâcheté , Par- „ jures, tout fera mis en Oeuvre. Pour réveiller cotre Vigilance, on nous a ver- Juillet, Août, et Septembre. 525 avertit encore à cette Occafion , qu'une feu- Je ParTion peut nous perdre, & qu'il n'en faut qu'une pour faire en nous d'étranges Ravages. Il ne paroit pas que Judas eût d'autres Défauts que d'être intéreiTé. Il y en eut- là allez pour l'engager dans l'Intri- gue la plus criminelle. Enrin , la dernière Leçon , qu'on tire de-Ià , c'eft pour nous exhorter à nous préparer à nous voir peut-être un jour trahis nous-mê- mes de la Manière la plus lâche. Combien de Mai très vendus par l'Avidité d'un Do- meflique, qui s'eft laifTé corrompre? Com- bien d'Amitiés violées par les plus lbrdides Conventions? S'il arrivoit que quelques-uns de ceux que nous regardons comme nos Amis nous trahifient , pour diminuer notre Surprife, rapellons ce Baifer de Paix, que Ju- das donna autrefois à J. C. On ne doit pas entièrement compter fur l'Amitié & fur la Fidélité des Hommes , pendant qu'on voit un Apôtre en manquer pour fon Maitre. Voilà des Leçons, qui peuvent être fort utiles. Mais,ce n'cft pas ici le Lieu de les pouffer davantage. Il fufit de les avoir in- diquées, pour montrer que l'on peut méditer utilement la Trahifon de Judas, X 5 A R- £20 ElBLIOTHEQUE BRITANNIQUE, ARTICLE Vit. Vidimus d'une Lettre du Roi Guillaume au Comte de portland, par la cour de Hollande. LE Public verra fans doute avec d'autant plus de Plailir la Pièce fui vante, que c'eit un Acte juridique , qui, non feulement; fait voir l'Autenticité d'une Lettre du Roi Guillaume au Comte de Portland du \l Jan- vier 1690, mais même prouve démonltra- tivement la Faufl'eté & l'Impofture d'une Lettre de pareille Date, malicieufement fa- briquée, iniquement attribuée à ce Prince en Vue de dénigrer fa Mémoire, & frauduleu- fement inférée pages 440-445 d'un Livre, intitulé Hijiorifcb formai over den Iaaren 1572 ende 1672 en 1673 3 door Bernard us Kosterus, & imprimé à Leide , ctoês Con- rad fi? Juriaan Wisboff, en 1736, in 40. Cet Acte, émané de la Cour de Hollande fur la Requête à elle préfentée par la Famille du Comte de Portland, pour faire vidimer îa première de ces Lettres , avant que de la rcnvoi'er au Duc de Portland, qui conferve actuellement toute la Correfpondance du Roi avec le Comte , écrite de la propre Main de ce Prince : cet Acte , dis-je , a été imprimé en Hollandoi*, fous le Titre de Vidimus &c. , à la Haie y cbés Matthieu Gaillard , en 1739? in A°; & en voici une exacte Traduction. VI- Juillet, Août, et Septembre. 327 V I D I M U S, PAR LA COUR DE HOLLANDE, DUNE LETTRE DE GUILLAU- ME III, ROI DE LA GRANDE- BRETAGNE, AU COMTE DE POR'T- LAND , DU il JANVIER M. DC. XC. Anne-Marguerite Bentinck, Dr uairiere de feu ArptBaron de Wassenaer, en Ton vivant Sei- gneur de Duyvenvoorde , Voorfchoo- ten, & Veur, Membre de l'Ordre des Nobles de Hollande; Guillaume Bentinck, Seigneur de Roon & Pen- dregt, Membre dudit Ordre des Nobles de Hollande ; & Charles Bentinck, Capitaine de Cavalerie au Service de cet: Etat ; ayant par Requête repréfenté & donne à connoitre à la Cour de Hollan- de : Qu'il y a quelque temps que fut pu- blié certain Livre, intitulé Dijcours Hijio- rique&c, par Mr. Bernard Coste- r us, imprimé à Leyde , chez Coenraed & Juriaeîi Wisbof,en 1736: Que les Repré- ientans & Supplians avoient , avec ia dernière Surprife & Indignation, trouvé dans icelui , parmi les Pièces y jointes pagg 440, 44 1, 442, 443> 444> & 44J» la prétendue Copie d'une Lettre, laquelle aurpic é<é écrire par feu Guillaume III, „ Roi 328 Bibliothèque Britannique, Roi de la Grande-Bretagne de glorieu- se Mémoire, au feu Comte de Portland, Père des Repréfentans & Supplians, con- cernant la Difpute , au fujet de la Nomi- nation & Election des Echevins, entre la Ville d'Amfterdam , & ledit Seigneur Roi comme Stadhouder ,dattée à Withal le 20 Janvier 1600: Que lesdits Repré- , fcntans & Supplians étoient très per- M fuadez, que ladite Lettre étoit fuppofée H & forgée, & ont été confirmez dans cet- „ te Perfuafion par pluOeurs Raifons ccn- „ vaincantes. „ I. Et , premièrement , parce que le- 3, dit Seigneur Roi n'avoit jamais Coutu- me de mettre , à la Têre des Lettres qu'il a écrites au Père des Repréfentans & Supplians , les Parotes fuivantes , Guil- laume Roi, ou William Rex, ni même de les ligner Guillaume: Que les Repréfentans & Supplians ont en Main quelques Lettres , écrites par Sadite Majefté au fus-nommé Comte de Portland, que les Repréfentans & Sup- plians produiraient à la Cour, à la Têce defquelles'les fufdites Paroles, Guillau- me Roi, ou William Rex , ni fa- , dite Signature Guillaume, ni même „ aucune Signature, ne fe trouvent: Que les Supplians pourroient en produire un grand Nombre de pareilles : Qu'en parti- culier , une feule Lettre, écrite en Fran- çois, par Sadite Majefté elle-même, au- dit Comte de Portland , & lignée , au „ Bas Juillet, Août, et Septembre. 329 „ Bas d'icelle , n'a pas pour Signature 3, Guillaume Roi, mais William ,, R.: Qu'ainli, il étou éviuent par-là, que „ ceux , qui avoient forgé ladite Let- „ tre , avoient crû ,- que ledit Seigneur ,, Roi , dans lés Lettre* qu'il écrivoit en „ particulier & de fa propre Main, obfer- „ voit la Méthode, que l'on obierve dans ,, celles qui font dépêchées du Bureau ,, des Secrétaires d'Etat , à la Tête def- „ quelles elt la Signature dudit Seigneur Roi ,, William R: mais, on nepourroiten „ produire aucun Exemple dans celles é- „ crites de la propre Main de Sa Majelté; „ & fur-tout dans celles qu'il écrivoit à „ quelqu'un de {es Amis de Confidence, „ comme étoit le Père des Repréfentans <5c Supp'ians dans ladite Année 1690. „ 11. En fécond Lieu, que la Fauflété de ladite prétendue Copie de. Lettre paroiiToit d'autant plus évidemment, que ,, ledit Seigneur Roi y nomme ledit Corn- „ te de Portland, à la Tè:e & à la Clotu- ,, re d'icelle , Mon Cousin,* ce dont „ on ne pourroit pareillement produire aucun Exemple: Outre que les Paroles Mon Cousin ne fe trouvent point ,, dans des Lettres pareilles, que les Re- préfentans & Supplians avoient en Main , & produiroient de même; & que ces mêmes Paroles ne fe trouvent point non „ plus dans une grande Quantité de Lettres ,, de la même Sorte , qui font entre les ., Mains du Duc de Portland, » m- j> 55 330 Bibliothèque Britannique, „ III. En troifleme Lieu , que, dans „ toutes les Lettres du feu Roi , écrites .,, au Père des Repréfentans & Suppiians , ^, & qu'ils avoient en Main , la Date n'é- „ toit pas marquée au Bas, ainfi que cela „ fe trouve dans ladite Copie falfîfiée ; ,, mais, qu'au contraire, Sa Majefté avoit „ Coutume de mettre la Date à la Tête. ,, IV. En quatrième Lieu, qu'on lit, au 3, Bas de ladite Lettre forgée , les Pa- ,, rôles, Donnée à JVUbal> comme ûc'étoit ,, un Diplôme, ou autre Acte public, ex- 3, pédié de la Secrétaire d'Etat ; lequel 3, Mot Donné ne fe trouve au Bas d'aucu- „ ne Lettre écrite par Sa Majefté defapro- „ pre Main , & feroit effectivement du „ dernier Ridicule. „ V. En cinquième Lieu , qu'il paroi- „ troit clairement, par une Lettre véritable „ ci-après inférée , que ledit Seigneur Roi „ n'étoit pas à Withal le 20 Janvier 1690, ,, mais à Kenfington. ,, VI. Enfin, & en fîxieme Lieu , que „ les Lettres y écrites par le Roi au Père des ,, Repréfentans & Suppiians, ont été foi- ,, gneufement gardées par ledit Comte de 5, Portiand, enfuite par fon Fils le feu Duc „ de Portiand , & pi éfentement par fonPe- ,3 tit-Fils le Duc de Portiand d'à préfent , 3, >qui en a encore en Main plus de quatre „ cent; & que, par cette Raifon, il n'eft „ pas concevable d'où les fusnommez 3, Coenraed & luriaen Wishof , ou bien 3, l'Auteur dudit Livre , auroient pu a- 3, voir Juillet, Août, et Septembre. 331 ,, voir une Lettre originale, écrite par Sa-1 ,, dite Majefté au Comte de Portland , ou „ une Copie véritable d'icelle , laquelle „ on ne pourroit jamais produire. „ Que quiconque éxamineroit ladite „ Copie , d'un Oeuil impartial & definté- „ reflé, en découvriroit très aifément la „ Faufleté; mais que, néanmoins, les Re« „ préléntans & Supplians avoient crû „ devoir mettre à couvert de tout Bla- „ me la Mémoire de feu leur Père ", „ même à l'égard des Lecteurs les moins „ attentifs & les plus ignorans; & ne laif- „ fer aucun Lieu de foupçonner,que leur- „ dit Père eut eu Connoillance , & parfon „ Silence eut approuvé , une Réfolution „ aufil déraiibnnable que celle dont laMé- >s moire du feu Roi étoit noircie par ladi- „ te Lettre forgée. ,, Que , par cette même Raifon,ils avoient >, fait rous leurs Lfforts, pour mettre cet- ,, te Affaire dans tout fon Jour,* & que >5 dans cette Vue ils avoient examiné les „ Lettres écrites par Sa Majellé au Père „ des Repréîéntans & Supplians , parmi „ lesquelles s'efl trouvée la véritable Lettre „ de Sa Majellé au feu Comte de Port- ,, land, écrite le fusdit 20. Janvier, diffé- , rente , & conçue en Exprefilons toutes 1, différentes de celles de ladite Lettre , forgée. „ Pour toutes les Raifons fusdites , te* , Repréfentans & Supplians déclarent re „ gnr. 332 Bibliothèque Britannique, $y garder & confidérer ladite Copie im- „ primée d'une prétendue Lettre écrite „ par ledit Seigneur Roi le 20. Janvier, „ au Père des Repréfencans & Supplians, „ comme forgée & inven ée; fe réfervanc 3, leurs Actions d'Injure contre ceux qui ont 5> forgé ladite Copie, ou fon prétendu O „ riginal , pour inftitùër leur Action , auffi- i3 tôt qu'ils auroient découvert l'Impofteur. ,, ETconfidéré, que ledit DucdePort- „ land redemande inftamment ladite Let- 3, tre véritable , pour la conferver avec les ,, autres originales de la propre Main de ,, Sa Majeité: afin qu'il puiffe confier à ,, la Pollérité, que le Père des Repréfen- yy tans & Supplians aétéfaulTement calom- „ nié, lesdits Repréfentans & Supplians fe ,, font adrefTés à cette Cour ; requérant , 55 qu'il plaife à la Cour de vidimer ladite „ Lettre véritable , du 20. Janvier 1690 ; „ de confronter les Caractères d'icelle a- 5, vec ceux de plufieurs autres Lettres du- y> dit Seigneur Roi au Père des Repréfen- ,, tans & Supplians, & avec quelques Ac- ,, tes flânez par Sa Majefté , & en partie „ écrite par Elle-même ; lesquelles feront ,, produites à la Cour; & d'en délivrer des 5, Lettres de Viàimus , en y inférant cette ,, Déclaration des Repréfentnns & Sup- ,, plians ; le Tout dans les Formes ordi- „ naires. ,, La Cour, aïant examiné le Contenu de l) la fusdite Requête , comme auffi ladite Let- ,* tre Juillet, Août, et Septembre. 333 „ tre du J| Janvier 1690 exhibée à la Cour „ par les Reptéfentans & Supplians, la- „ queile contient ce qui fuit. ,, A Kinfington ce g de Janv. 1690. » J'ay une extrême impatience d' 'avoir de vos „ nouvelles cP vous /avoir beureujement arrivé „ en Hollande, il n'y a point de pofte venu , de- ,, puis que je vous ay efcrit par Jan Verbaeft , ,, lequel je crains cft encore a Harwick attendent ,, un Bacquett Boot pour fonpaffage , nous man- „ quons prefentement deus ordinaires de Vendre - ,, di& Mardi dernier. Ceft aujourd'hui le grand jour à la Cb. Bas. fur le Bill des Corpora- tions , à la fin de ma lettre je vous en mande- rés ViJJue puis que je vous efcris a prefent a- vent midi. Je trouve que les gens commen- cent a eftrefort en peine de mon Voyage en Ir- lande ijur tout les Wigs , qui ont peur de me 5> perdre trop toft avent qu'Us n'ayent fait avec ,, moy ce q ''ils veulent , car pour leur amitié 3, vous favs ce qu'il y aàconterladejfus en ce ,, Pats ici . jen'ay encore rien dit de mon de/- ,, fin au Parlement , mais je croi de le faire la ,, femaine prochaine , cepenâent je commence a „ faire préparer mon Equipage & tout le monde ,, en parle publiquement , il fera necejfaire que „ vous âifies a Mr. de Ginckel e? autres offi- „ ciers ,qui doivent revenir ici avec ce qui leur „ eji neccffaire de recrues tant d'bommes que de „ cbezaus s'ils en achètent en Hollande, de ce préparer a parti de la au commencement de Fe- Tum. XXIIf. Part. IL Y „ vrier >■> ?> 334 Bibliothèque Britannique^ vrier vieujiile,puifque certainement ilscom* f, menceront de marcher d'ici au commencement 3, de Mars. Ayent efcrit jufques ici la pofte ,^ d' Hollande arme du io. J'ay un extrême ^fyjagrin ae voir la chicane que Mef. d'Amfter- dam vous veulent faire , qui ne procède que du mal qu'ils me veulent ^fejpere que vous le pou* res fur monte £f que les autres villes vous main- tiendront , fi l'affaire pour V Election des Ef- chevins s' accomode félon l'expédient que je vous ay mandé , qui eft lefeul que je veus admef- tre, j'entens que vous y foies compris , fans „ quoi je ne veus point d'accommodement. Je vous envoyé ici joinêt une lettfe de demiffion pour le Sr. Ravens , à Mejf. de Leyden , &? un a lui de fa charge d'Efchevin ,fans quoi il ne peut ejîre établi Penfionaire ffi le Sr.van der Maes juge neceffaire qu'elle foit rendu vous n'avês qu'a le envoyer ouïes garder, peut efire qu'il pouroit fervir en cette A jfemblée fi l'on a intention\]de s'en fervir jamais. Il eft a prefent onze eures de nuit , éf a dix eures la Cb. Bas. efloit encore enfemble , ainfi je ne vous puis écrire par cette ordinaire ï'iffue de l'affaire. Les previos queftions les Toris l'ont emporté de cinq vois , ainfi vous pouves juger que la chofe eft bien difputée , j'ay fi grand fommeil , £p mon tous m'incommode , que je ne vous en faurois dire d'avantage. Jufques a mourir a vous, M Et a ladite Cour confronté les Ca- ractères de ladite Lettre avec plu- „ fleurs Lettres écrites de la Main pro- Juillet, Août, et Septembre. 335 „ pre dudic Seigneur Roi au Père des „ Repréfentans & Supplians , & avec „ quelques Aëtes lignez par Sa Majefté , „ & en partie écrits de fa propre Main, ,, exhibez à laCour,favoir : „ I. Une Lettre datée a Loo le 27. de ,, Septembre 1700, non (ignée, au Dos de ,, laquelle étoit Rec. a Windjor le 27. Sep- 3, tembre 1700. „ II. Une Lettre , datée a Loo le 30. ,, d'Août 1701 , lignée William R. ; & „ deflus l'Enveloppe , avec la propre ,, Main du Roi , fur tbe Earle of Portland ; „ & en dehors , Receu a la Haye le 31. „ d'Aouft 1701. ,, III. Un Mémoire, de trois demi-Feuil- „ les5pliées, & écrites in Quarto ,' conte- „ nant neuf Propofitions faites au fusdit „ Roi , avec la Réponfe de Sa Majefté en ,, Marge à chaque Article , écrite de fa „ Main propre. „ IV. Un Teflament clos en Original du „ Roi Guillaume III. , du 18. d'Octobre „ 1695. ; avec l'A£te de Sufcription du ,, 19. Odtobre i69f : dans lequel Tefta- ,, ment Tlnflitution de l'Héritier efl écrite „ de la propre Main du Roi. „ V. Une Nomination d'Exécuteurs d'un ,, Teflament antérieur du Roi Guillaume 5 „ étant en ce temps-là Prince d'Orange ,* „ écrite & fignée de fa Main , avec une 3, Enveloppe cachettée de deux Cachets „ de Sa Majefté & fuferite de la même „ Main, Y 2 „ Et tgStf Bibliothèque Britannique, „' Et a été trouvé,que la fufdite MiJJivev'r ,, dijnée , en Date |£, Janvier 1690 , ci- ,, devant Mot à Mot inférée , efl confor- „ me à la Signature très connoiiïable & „ indubitable de Sa Majefté Guillaume 5, III, dont la Signature eft très recon- „ noiflable & indubitable. „ Fait dans le Confeil le 29. Juin 1739. }y Plus bas , En Connoiiïance de moi. E* „ tvitfigné, Jan Parker. ARTICLE VIIL . Défense de Mr. Eoerhave, contre l'Article VII delà Bibliothèque Rai- f année pour les Mois de Juillet , Août , & Septembre , m. dcc. xliv.- IL y a déjà quelque Tems , que les Au- teurs de certains Journaux ont eu la Bonté de divertir les Savans par de ridi- cules Eloges. Perfonne n'ignore 2 préfent, que de tels Eloges ne doivent pas être pris à la Lettre ; mais , qu'ils renferment un Sens caché. Je veux dire , qu'on tache par-là de faire valoir la Marchandise. C'eft comme une Affiche publique , pour aver- tir, que certaines Gens , Poflefleurs de tel ou tel Livre , feroient bien aifes , qu'on leur fît le Plaifir de les acheter. Ce Pro- cédé, a fiez pardonnable en d'autres Ren- contres, devient criminel, quand cesMel- fieurs tendent à leur But aux Dépens d'au- trui. Juillet, Août, et Septembre. 337 crui. Cependant, il n'efl pas rare de trou- ver des Gens, qui ne cherchent que leur Profit, à quelque Prix que ce (bit. Cette Hardiefie s'eft même étendue jufque-Ià',' qu'on a ôfé infulter la Mémoire de Mr. Boerhave dans la Bibliothèque Raifonnée , à l'occafion d'un Commentaire de Mr. H al- ler fur les Inftitutions de ce Grand-Hom- me. Éut-on loué ce Commentaire , l'eut on loué beaucoup au deflus de Tes Mérites , perfonne n'en auroit été fâché,- chacun auroit donné à ces Louanges le Sens, qu'on leur attache ordinairement : mais , qu'on l'ait loué, en manquant au Refpeft, qui eft dû à la Mémoire de Mr. Boerhave , c'eft-là un Procédé très malhonnête, & abfolument impardonnable. Tous ceux , qui ont connu de près cet Homme incom- parable , condamneront fans doute une tel- le Conduite , puifqu'ils n'auront pu fe faire Illufion fur fes grandes Qualitez: mais ceux, qui ne l'ont connu que par Réputation, ou par quelque courte Converfation , ceux-là , dis-je , pourroient avec moins de Peine fe laifîer féduire par une Opinion defavanti- geufe. C'eft pourquoi j'ai jugé utile , & même néceflaire, de réfuter les Calomnies , par lefquelles on a tâché de noircir la Ré- putation de Mr. Boerhave. 11 faudra pour cela , je l'avoue, en venir aux Prifes avec un Ecrivain mercenaire , qui , fous le Voile de {'Incognito, ne rougit point d'être gagé, pour compofer des Extraits dans le Goût de ceux qui le paient pour écrire. Y 3 Mais, 338 Bibliothèque Britannique, Mais, cette Considération ne doit pas tou- jours nous faire garder le Silence. Il eft bon de démafquer quelques-fois ces fortes des Gens, pour que le Public n'en foit pas la Dupe, & pour les tenir en Refpecl: à l'avenir. Venons au Fait. L'Auteur ouvre la Scène par l'Eloge fuivant de Mr. Boerhave. Ce Grand- Homme, dit-il, avoit lu une Infinité des Cbo- fes 3 6? une Mémoire prodigieuje les lui confier- voit fidèlement. Il étoit éclairé par les Mathé- matiques , qu'il a enfieignées dans fa Jeunefife 5 & fur-tout par cette fine Anatomie , que lui ap- prenoient les Préparations de Ruyfch ; par la Cbymie , qui lui décompofoit les Liqueurs ; £? par la Pratique , dans laquelle il a excellé. Son puijjant Génie embrafifoit une Etendue prodigieu- je de Sciences , qui s* éclairent £f fie Joutiennent mutuellement. Avec ces Avantages, Mr. Boer- have Je propofia de donner un Abrégé delaPby- Jïologie &f des Principes les plus généraux de la Pratique (a). Il s' étoit propofié d'être court : perfionne n'a jamais mieux fiu l'être. Pas une Parole de perdue: les Particules mêmes , qui fer- vent à lier les Dijcours , n'y font admijes qu'à regret ; chaque Mot exprime une Chofe. Ce Li- vre , traduit en Stile ordinaire , deviendroit un in Folio. Il a trouvé un Accueil prodigieux (b). Cependant , il n'efiî qu'un Abrégé. Mais x l'Auteur yfuppléoit par Jes Leçons annuelles. Là, ( « ) Bibliothèque Raifcnnée, pour les Mois it Judltt, Août, & Septembre, 1744, pag. 36, ( b ) Ibià p*g. 37. Juillet, Août, et Septembre. 339 Là, il r apportait les Faits , fur le/quels il avoit fondé fes Vues : il y avançoit des Hypothe/és. Mr. Boerhave en avoit de fort brillantes. Son Génie heureux J'ai oit appliquer les Faits, &f tirer d'une Expérience d'Anatomie , muette, pour ainft dire , £? propôfée à d'autres Fins , des Concluions de Phyfiuhgie d'une Facilité &f d'une Régularité Jurprenantes (a). L'Eloquen- ce mâle y avec laquelle il les débitoit, étoit join- te à tout l'Agrément , dont la Matière étoit fuf- ceptible. Il avoit orné j on Efprit par la Lectu- re des Hijîoriens £f des Poètes : les Grâces V accompagnaient par -tout. Mais, de toutes fes Leçons , celles de Pbyfiologie étoient les plus recherchées. Il y avoit tant de Nouveau , tant à' Exactitude , que les Auteurs immédiatement antérieurs à Boerhave paroiffent avoir écrit dans un autre Siècle (b). Jusqu'ici tout va le mieux du Monde, Il eft heureux pour la Mémoire de Mr. Boerhave, que ce foient-là autant de Véritez connues de tous ceux qui l'ont fré- quenté , ou qui le connoilTent feulement pour avoir lu fes Ouvrages, ou affifté à fes Collèges. Si cela n'étoit pas , notre Jour- nalise n'auroit eu garde de tenir un tel I angage; à moins qu'en fe parant d'un Ex- _jr d'Impartialité , il n'eur voulu par-là n ieux difpofer fes Lecleurs à avaler touc le Venin , qui fe trouve dans ce qui fuit. Voici comme il continue , en parlant de Mr. ( a. ) lbid pa£. 38. ( b ) Iûid pag. 39. y 4- 340 Bibliothèque Britannique , Mr. Halle r. \\ fit > dit-il, deux Cours a Leidefous ce grand Maître, £f s'y procura des Cahiers des Leçons de Boerhave, lesquels il confronta avec deux autres ManujcriU des mê- mes Leçons, &f en forma un DÏJ cours Juivi , ou un Commentaire de Mr. Boerhave yW Jes propres Inftituîions (a). Dans un autre En- droit , j'aurai beaucoup à redire fur ce Cha- pitre ; mais, à préfent, patte encore tout cela. Or, Mr. Hâllcvneje borna pas-là. Boer- have n'avoit eu aucun Maître en Médecine: il avoit appris fon Anatomie dans les bons Livres , dans quelques Démonstrations publiques, tou- jours fort courtes , & qui n'embraffent qu'une petite Partie du Corps humain , àfj'ur des Pré- parations de la Main de Kuyfch. Une Infini- té de Pofitions, de Figures , de Vaiffeaux , de Nerfs , lui manquait : il ne les avoit jamais vus ; fcP il étoit obligé de les tranfcrire de quel- que Auteur. Ce Défunt revenait à chaque Page, Falloit-il livrer le Lecteur à V Erreur ? Mr. Haller aimait trop la Vérité , pour la Sacri- fier à un Précepteur. Il fe dégoûta de rectifier les Détails a' Anatomie : il aima mieux en faire de nouveaux , crayonnez fur le Corps humain, £? enrichis de tout ce que les Maîtres de V Art avoient de plus précis £? de plus exact. Une Leàure opiniâtre, & une Abondance extrême de Corps humains , le Soutinrent dans Vun ê? l'autre (b). Quant à la Phyfique , Mr. Hal- ler a imité fon Maître dans ce Travail: il a même ( a ) Ibid. pag. 39, 40, 4r. ( 9 ) [ag. 41, 42, 42. Juillet, Août, et Septembre. 341 même eu quelque Avantage , par les Progrès , que la Pbyjique fait tous le i jours 9 & par une Lecture plus étendu.. D'ailleurs, Mr. Haller n'a aucun Syfteme de fa Façon. Il rieft pas tenté de faire Ujage d'un Fait douteux , d'un Raifonnement problématique. Il ejl par-là plus libre d'aller droit au Vrai , que Jon Maître même , qui arcoit des Hypotbejes à orner , £? un Syfteme à défendre. On s'appercevra aifé- ment de cette Différence du Maitre & du Dif- ciple. Celui-là a/es Viles & fin But en rapor- tant des Faits: il fer oit facbé d'en trouver -de contraires ; & peut-être tacbe-t-il de les recufer. Celui-ci les reçoit avec un Plaijïr égal de la Main de la Nature , quel que puiffe être leur But. Il ne peut mener qu'à la Vérité : c'efi ce Chemin de la Vérité , qu'il fuit conjlammenî, fans jamais s'en détourner (a). Voila' le fcandaleux Tableau, que no- tre mercenaire Ecrivain a ôfé faire de Mr. Boerhave. Mr. Haller en rougira fans doute. J'ai trop bonne Opinion de fa Modefïie, pour n'être pas perfuadé, qu'il aura Honte de fe voir mis, non feulement en Parallèle, mais même fortaudeflus d'un des plus Grands-Hommes que notre Siè- cle ait produit. L'Encens, qu'on lui pro- digue à pleines Mains, eft trop groiîier, pour qu'il puiffe lui plaire. Ainfi, je me flatte, qu'il ne me faura point mauvais Gré , Ci je fais fentir au Public toute l'Ex- travagance, j'ai prefque dit l'Infolence, de ce ( * ) t*S- *4 . 4* y s 342 Bibliothèque Britannique, ce Journalifte,* & fî, par conféquent, j'en- tre dans quelque Détail fur Ton Ouvrage. ]e n'aurois jamais penfé à en faire la moin- dre Critique, fi j'avois pu fans cela rendre à Mr. Boerhave la Juftice qui lui eft due. La Néceiîîté me fervant donc ici d'Excufe , je reviens au Journalifte. I. Premièrement, il fait de Mr. Boerhave un grand Ignorant en Anato- mie; &, effectivement , où l'auroit-il ap- prife ? Il n'eut aucun Maître. Il avoit puifé dans les Livres la plus grande Partie de ce qu'il enfavoit. Il ne vit que quelques légères Dé- monftrations , fep les Préparations de Ruyfchu Auffi lui manquoit-il une Infinité de Clxifes ; &f ce Défaut Je trouve à chaque Page. C'eft à-peu-près-là ce qu'on pourroit dire d'un jeune Etudiant, qui ne feroit que commen- cer fon Anatomie. Ce Langage eft, non feulement une Preuve de la Témérité , mais encore de la Mauvaife-Foi , de notre Fai- feur d'Extraits ; car , je vois fur quoi il fonde ce qu'il dit ici : c'eft fur VOraifon fu- nèbre prononcée par Mr. Schultens. Celui-ci , parlant des Progrès fuccefïïfs de Mr. Boerhave, fe borne aux feuls Com- mencemens de fes Etudes Anatomiques. Il raporte , comme une Chofe prodigieufe, qu'il n'eut aucun Maître: & il ajoute, Qu'il commença en lifant Vesale, Fallope, £f Bartolin; qu'il dijféqua fouvent des Animaux ; qu'il affifla régulièrement aux Dif- férions publiques de Mr. Nuck. Mais , Mr. Schultens ne donne cela, que comme un Juillet, Août, et Septembre. 343 un Commencement- Aufli perfonne , pas même notre journalifle , ne fera allez fou de croire, que Mr. Boerhave n'avoit jamais lu que ces trois Auteurs , & qu'il n'avoit jamais aflifté qu'aux Difièclions de Mr. Nuck. Il eft certain, qu'il difféqua lui-même des Hommes , ce qu'il fut affidu dans les Diflettions publiques des Profef- feurs de fon Tems. Mais, c'eft ce qu'on pafle fous Silence: & l'on étend maligne- ment à toute la Vie de ce Grand-Homme les Paroles de Mr. Schultens, qui ne regardent que les premiers Traits de fon Apprentiflage. Je vai en tracer un Portrait plus reflembîant, compofé en partie des Expreflions du même Mr. Schultens, & en partie de ce que je tiens de fort bon- ne Main. Mr. Boerhave commença, par lire Vesale,Falloppe,&? Bartho- lin. Il difféqua feuvent des Animaux: il fut affidu dans les Biffections publiques de Mr. Nuck. Enfuit e , il lut presque tout ce qu'on avoit écrit fur VAnatomie. Il difféqua , de tems en tems, jufqu'àfa Mort , plufieurs Corps hu- mains , & continua auffi l'Examen des autres Animaux. Il fréquenta toujours les Demonf- îrations publiques, même encore fous Mr. Al- binos. Il fit Amitié intime avec plufieurs Anatcmiftes du premier Ordre , fur-tout avec Mr. Ruysch, V Homme pour V Anaxomie le plus laborieux du Monde : il eut avec lui un Commerce réglé , fuit de vive Voix , fuit par Lettres ; il l'mterrogeoit touchant fes Découver- tes ; il examinait toutes fes Préparations; il le trou- 344 Bibliothèque Britannique , trouvait toujours prêt , lorf qu'il s'agiffbit de mettre la Main à l'Oeuvre , pour éclair cir quelque Difficulté : auffi , profitant déjà Bon- ne- Volonté y il travailloit très fouve?it avec lui , & jamais ne lacboit Prij'e , qu'après être pleine- ment injlruit de ce qu'il Jouhaitoit. Enfin , il fit tout ce qui lui étuit poffible , pour acqué- rir la Connoijfance la plus approfondie de l'A- jiatomie : âf 5 en effet , il y réuffit fi bien , que toute Perfonne verfée dans cette Science, £? qui jugera fans Prévention, devra avouer, que VAnatomifle le plus accompli n'auroit pu alors donner un Traité plus achevé à tous Egards , que le fie n. Depuis ce Tems là, comme c'ejl le Sort de toutes les Sciences, c? de l'Anato- mie principalement , on a fait plufieurs Dec ou- vertes. Mr. Boerhave en tiroit Parti pour V Injiruâion de fes Difciples : il les corn- muniquoit , pefoit , approuvoit , réfutoit , dans fes Collèges, avec une Exactitude , une Pru- dence , âf un Dijcernement , jufqu'ici fans Exemple. Voila' le véritable Portrait de Mr. Boerhave, quant à l'Anatomie. Eft-il tombé dans quelque Faute à cet Egard ? Le Corps humain , pour me fervir des Paro- les du Joumalille, renferme tant de Cantons , qu'après avoir vieilli dans l'Art , on trouve tou- jours encore quelque Coin où Von efl étranger ; & heureux qui ne l'efl qu'en quelques Coins (a). C'eft-là ce qu'il a eu de commun avec tous les Hommes. Quel feroit même à préfent l'Ana^ ( a ) ibid pag> 43. Juillet, Août, et Septembre. 345 l3Anatomifte le plus expert, qui ôfat fe fi- gurer, que tout ce qu'il dit, ou qu'il écrit, eft, & fera, entièrement irréprochable? Si quelqu'un étoit allez vain, pour préten- dre à une telle Infaillibilité, il s'expoferoit à la Ritée de tout ce qu'il y a de Gens fen- fez. Quiconque a tant foit peu d'Expérien- ce n'eit que trop convaincu de la Foiblefle humaine: il ne fait que trop, qu'elle efl la Caufe de plufieurs Bévues, commifes par les PrédécefTeurs, par fes Contemporains, & par lui-même. Il feroit ridicule d'avan- cer , que Mr. Boerhave fut exemt d'Erreur. 11 fut Homme, & par-là même fujet à fe tromper, comme tous les autres: mais ceux, qui ont quelque Connoiiïance de l'Anatomie, feront certainement perfua- dez , que les Fautes, 011 il eft tombé, ne font pas à beaucoup près , ni fi grandes , ni fi nombreufes, que notre mercenaire E- crivain i'a voulu faire croire; &, qu'eu é- gard au Tems dans lequel il écrivit fon Ou- vrage , elles font très pardonnables. Quel- le Infamie n'y a-t-il donc pas à vendre fa Plume , pour relever le Foible de ce Grand- Homme, fur un tel Fondement? Une pa- reille Action tourne entièrement à la Con- fufion de fon Auteur; puifque, pour toute Récompenfe , elle ne peut qu'être fuivie de l'Indignation des Honnêtes-Gens : fur-tout fi l'on fait, qu'elle n'a eu pour But que de procurer le Débit d'un Livre, ou il ne fe- roit pas difficile de faire voir des Bévues beaucouD plus grandes & plus nombreufes, Je 346 Bibliothèque Britannique, Je n'avance rien, que je ne fufle en E- tat de prouver, fi les Egards, que j'ai pour Mr. H aller, ne m'impofoienc pas Si- lence. Je ne faurois cependant m'empécher de donner un fèul Echantillon de cette Vé- rité. Il me le pardonnera , j'efpere , après ce que j'ai remarqué ci-devant fur la Né- ceflîtc où je me trouvois d'entrer dans quel- que Examen de Ton Livre. Il dit donc , que , dans les jeunes Oeufs , le Placenta prend fin Origine de l'Amnios , d'oùfortent les Vaif- feaux qui le compofent ; mais que , dans l'Oeuf plus avancé y le Cborion fe fend , fip qu'une de fes Lames enveloppe avee l'Amnios la Partie concave du Placenta (a): que l'autre Lame monte fur fa Partie convexe Çb); £? qiCainfi le Placenta fe trouve alors entre la Duplicature du Cborion (c). C'eft un Anatomifte de Pro- fefiion, qui nous conte cette belle Hiftoi- re. Pour moi, qui n'en fuis pas un, je me flatte cependant d'être afTez bien inflruit îà-deflus, pour ôfer aflurer, que jamais un Obfervateur exacl n'a pu voir une Chofe (î contraire à la Nature. J'en prens à Té- moins tous les plus habiles Anatomiftes ; & je fuis certain, qu'après un Examen plus attentif , Mr. Haller en conviendra lui- même. Les Vaiiîeaux du Cordon umbili- cal fe diflribuent fous le Chorion : ils tra- ver- ( a ) Prœ'câiones Acad. Tcm. V. fartez. pa£. 178, 2î9> 267 é* 168. ( b ) Ibid p*g. 268. ( e ) laid l'Ag. 282. Juillet, Août, et Septembre. 347 verfent le Chorion ; ils étendent leurs Ra« meaux fur la Surface extérieure du Cho- rion ; & c'eft amfi , qu'ils forment le Placen- ta. L'Amniosn'y a aucune Part. Ceft-là un Fait généralement reconnu, & qui a conftam- menc lieu. Je l'ai vu fi fouvent , tant dans les petits que dans les grands Oeufs; & cela fi clairement, que je fuis très convaincu, que s'il y a une Chofe inconteftable dans le Monde, c'eft celle-là. D'ailleurs, corn-' ment concevoir avec Mr. H aller, que le Placenta eft arraché de l'Amnios, pour pafler entre la Duplicature du Chorion ? Cela feul ne fuffit-il pas, pour déciller des Yeux tant foit peu Anatomiques? Il efl ai- fé de fentir l'Impofîibilicé d'un tel Dépla- cement. Voilà, fi je ne me trompe, un Exemple bien décifif d'une Faute très fen- fible ; & cela, fur une Chofe très connue. Que notre Journalifte me faffe voir un feul Endroit, où Mr. Boerhave, avec tou- te fa prétendue Ignorance en Anatomie , ait échoué fi malheureulément. J'ôfe le dé- fier de me produire rien de femblable. S'il avoit été lui-même un peu plus verfé dans i'Anatomie, & s'il avoit agi de meilleure Foi , il auroit trouvé mille Raifons pour ne pas outrer ainfi les Défauts de ce Grand- Homme, & le Mérite de fon Commenta- teur. Il n'a pas mieux réùlïi, en attribuant à Mr. H aller une Lefture plus étendue, qu'à Mr. Boerhave. Il a oublié fans dou- te, que quelques Pages plus haut il avoic dit, 348 Bibliothèque Britannique, dit , que Mr. Boerhav e avoit lu une In- finité de CLofes. Il faut lire beaucoup, pour lire plus qu'une Infinité de Cbofes. Je félicite Mr. H aller d'avoir pouflé fi loin l'Ap- flicatiôn. Mais, Badinage à part, notre aifeur d'Extraits ne voudroit-il point di- re , par fa Lecture plus étendue , que Mr. Haller a lu depuis que Mr. Boerha- ve n'a plus été en état de lire? Dans ce Cas, il aRaifon. Pendant fa Maladie, ce dernier vraifembiabiement n'a lu que fort peu; &, après la Mort, certainement rien du tout. Au contraire, Mr. Haller lit peut-être encore. Si c'eft là le Sens, qu'il faut donner à ces Expreffions, pour qu'el- les ne fe contredifent pas, je ne lui envie point fa Manière d'écrire. Au refte, je ne veux diminuer en rien la Lecture de Mr. Haller. Je reconnois , qu'il en aune très vafte. J'accorderai même, fi l'on veut, qu'il a plus lu, que Mr. Boerhav E. Qu'en pourra-t-on conclure? Qu'à l'égard de la Lecture , Mr. Haller l'emportoit fur Mr. Boerhav eP Nullement. La véri- table Lecture dépend moins de la Quanti- té, que de la Qualité, de Lecture. Or, Mr. Boerhav e ayoit une Mémoire prodi- gieuje^qui lui confervcit fidèlement ce qu'il avoit lit: & cette Fidélité de Mémoire fupofe nécessairement une grande Attention à la Lecture; deux Chofes, qui font une Sour- ce abondante de folides Connoiflances. Auifi le puijjant Génie de Mr. Boerhav e embrcujoit'il une Etendue prodigieufe de Scien- ces, Juillet, Août, et Septembre. 349 ees% qui s'éclairoient & foutenoient mutuelle- ment. Si, dans un Age avancé, félon l'Or- dinaire de la Vcilleile , fa Mémoire lui a joué quelques-fois de mauvais Tours dans les Collèges, il a été en garde contre ce- la dans les Ouvrages imprimez. En peut-on dire autant de Mr. H aller? Parlons clair. La Lecture de Mr. Halle r eft trop précipitée. On trouve , dans ion Li- vre, de fréquentes Preuves d'un grand Dé- faut d'Attention. Je pourrois citer grand Nombre de Chofes, qu'il attribue mal-à- propos aux Auteurs, même de la plus frai- che Date. Mais, pour ne pas être trop prolixe, je me bornerai à un feul Auteur, qui vient de publier tout nouvellement un Traité fur la GroflefTe de la Matrice. Je veux parler de Mr. Noortwyk. Mr. Haller le cite fouvent : & il femble qu'il le devroit citer jufte,- puifque les Im- preflions , que ce Livre a fait fur lui , font encore toutes récentes. Cependant, j'ai été frappé de le trouver différent chés Mr. Haller de ce qu'il m'avoit paru en le lifant. Soupçonnant, que je Pavois mal lu, je me fuis mis à le relire: il ne m'en a pas coûté beaucoup ; c'efl un petit Ouvrage. Mais, cette féconde Lecture m'a convain- cu, que c'étoit Mr. Haller, qui avoit mal lu , & non pas moi. En voici la Preu- ve. Tome XXIII Part. Il Z Nqort- 350 Bibliothèque Britannique, Noortwyk chés Mr. Haller, i. Il a vu dans l'O- vaire un petit-. Creux ridé , qui menoit par quelque Trou vers la petite Eminence , qui étoit à côté j 6? Jépa- rée de la Cicatrice. Praelefh Acad. Tom. V> Farte 2. pag. 157. Confer ibid.p. 139 è? 140. 2. L'Enfant avan- cé remplit toute la Ma - triée, pas. 2^2. 3. L'Enfant étoit prefqu'à Terme, pag. 230, 268. 4. La Partie exté- rieure fongueufe du Cborion n'efl peut-être qu'un AJfemblage de Vaiffeaux non remplis. pag. 231. 5. Il a vu , que les grands Sinus du Pla- centa devenoient plus étroits vers la Matrice. pag, 233. C. L'Oeuf & chés lui-même. 1. Il a vu dans l'O- vaire un petit Creux ridé , £? un Trou , qui fembloit aller oblique- ment de la Surface ex- térieure de l'Ovaire vers ce Creux. La pe- tite Eminence étoit à côté de ce Trou 9 &? n'avoit rien de com- mun , ni avec le Creux, ni avec le Trou De Utero,/>ûg.8,e>Tû&. 4 Fig. 4. 2. L'Oeuf remplit toute la Matrice, pag. 10. 3. L'Enfant étoit prefqu'à Demi- Terme , pag. 5- „ 4. La Partie inté- rieure fiiamenteufe du Cborion n'efï ^eut-être qu'un AJfemblage de Vaiffeaux non remplis. P^ 13- 5. Il lui fembloit ainfi ; mais , il n'ôfe Vaf- furer. pag. 11. 6, Je Juillet, Août, 6. L'Oeuf alloit com- me eu Pointe dans le Col de la Matrice. Le Fœtus étoiî affis dans cette Pointe , pag. 246. 7. Son Expérience montre aufji , que les Sinus de la Matrice font fort grands > & les Filamens de V Ar- rierefaix fort petits : qiCainfi, ils ne répon- dent pas manifeftemenî entfeux. pag. 257. 8. // vit un Exem- ple d Hêmorrbagie , où le Sang dijlilloit par les Trous du Cborion étendu fur le Placenta, pag. 259 & 260. 9. il ET SEPTEMBRE. 351 6, Je ne trouve ce- la nulle parc. L'Au- teur ne fut jamais dans ce Sentiment. 7- Son Expérience montre , que les Ouver- tures de le Matrice è toi dit petites, g* loi Sinus de V Arrierefaix fort gra?ids ; mais que > cependant, la Commu- nication eft manifefle. pag. 11. 8. // jugeoit , que vraifemblablement cet' S* Hêmorrbagie étoit fiée , parce que le pla- centa s'étoit plus ou moins fié taché de la Ma- trice. pag. 28. Mais, il ne décide point , que iesTrous du Cho- rion étendu furie Pla- centa y aient contri- bué. Il femble , qu'il auroiteuplus de Rai- fonde l'attribuer à la Rupture de quelques- uns de ces grands Si- nus, qui fe trouvent dans la Couronne du Placenta. Quoiqu'il en foit, l'Auteur ne Z 2 rfd! 352 Bibliothèque Britannique, s'eft pas déclaré là- deflus. 9. // doute 9 s'il n'a pas vu aajji quelques Productions membra- neuses ; & ne fe fie pas entièrement à J on Sujet, pag. 27. 9. Il rapporte uni- quement aux Vaiffeaux la Connexion de la La- me intérieure du C ho- rion avec la Partie con- cave du Placenta, pag. 2(58. 10. La même Lame y étoit plus milice , que le Rejîe du C horion. pag. 2Ô8. il. Il a feparê le Chorion de VAmnios iuf qu'au Cordon, pag» 268. 12. Il confirme , que la Membrane extérieu- re du Placenta lïeft différente en rien du Rejle du Chorion. pag. 270. 13. Il rapporte la Membrane moïenne à VAmnios pag. 272. La Membrane moïenne cbés lui ejl VAmnios. pag. 2$4> 302. Il prend fô Membrane moï- 10. Elle y étoit min- ce , entièrement fembla- ble au Refte de la Lame intérieure du Clmion. pag. 27 il. Dans la Situa- tion de fon Sujet, il devoit au contraire féparer VAmnios du Chorion ; & c'efl aufll ce que dit l'Auteur pag. 290. 12. Il dit , qu'elle fut plus mince éf/er- rée , dans VEtat natu* rel. pag. 14 & 26. 13. Quelle Confu- fion! Il dit, qu'il a jéparé VAmnios en deux Lames pag. 21 , 29; 6? qu'il eft très certain, que ce n'efl qu'une vé- ritable Duplicature de l'Am- Juillet, Août, moïenne peur une La- me de VAmnios. pag. 34*. 14. Le Réfeau, qui fait le Fondement du Placenta , eji la Diftri- bution des VaiJJeaux fous le Chorion. pag. 294. 15. Il a démontré, que VOuraque de Mr. A le 1 nus ejl plutôt un des VaiJJeaux um- bilicaux. pag. 370. et Septembre. 353 VAmnios pag. 170. Il ne reconnut jamais la Membrane moïen- ne: au contraire , il la combat par-tout. 14. Ce Ré/eau ejl formé par des Rame- aux , qiii , fortis de cet- te Dtjlribution , ont dé- jà atteint la Surface extérieure du Chorion. pag. 19. 15. L'Auteur n'a pu fe fatisfaire fur cet Article pag. 203 ; & il n'a rien décidé pag. 204. Il me feroit aifé de grofîlr encore ce Catalogue de plufieurs autres Fautes de cet- te Nature; mais, en voilà allez pour mon But. Or, je vous prie , feroit-il poffible, qu'un Savant, tel que Mr. H aller, qui auroit lu depuis peu avec Attention un auf- i] petit Ouvrage, que celui dont il s'agit , eut la Mémoire allez malheureufe , pour qu'elle lui fit faire tant de Fautes û fenfi- bles? La Chofe n'eft nullement vraifembla- ble. Convenons donc, que c'eft-là l'Effet d'un grand Défaut d'Attention. Mr. Hal- : Eli a lu à la hâte, & par conféquent a mal lu. Chacun fait, qu'une telle Leclu* re n'eft accompagnée d'aucun Fruit avan- tageux: elle cit, au contraire, une Source Z 3 Je 354 Bibliothèque Britannique, de Confufion , & de Connoiflances mal di- gérées, qui ne forment qu'un monflrueux Cahos d'Erudition. Elle'donne, il eft vrai, la Facilité d'accumuler Notes fur Notes, mais fans Goût, fans Discernement, & où l'on ne remarque, ni Suite, ni Liaifon. Au- tant vaudroit aux Lecteurs de ce Genre ne parcourir que les Indices des Livres. Sû- rement, ce n'eft pas ainfi que Mr. Boer- have lifoit. Il ne fe piquoit pas, à la vé- rité, de faire Parade d'une Erudition hors d'Oeuvre: mais, toutes fes Lectures étoient accompagnées de Réflexion & de Choix. Cela paroit par tous fes Ouvrages : & fi Ton avoit mieux étudié cet excellent Ori- ginal , on en verroit de meilleures Copies. Si Mr. Halle r avoit marché plus îcru- puleufement fur les Traces de ce Grand- Homme , il y aurait moins de Citations dans fon Commentaire, mais auiTi feroient- elles plusjuftes; & les Eloges, que lui don- ne le Journalifte, ne feroient pas 11 dépla- cés, j'ai afiez bonne Opinion de fa Modef- tie, pour être perfuadé, qu'il en convien- dra lui-même , & qu'il verra de mauvais Oeuil , qu'on lui ait donné la Préférence fur un Maître , qu'il a trop bien connu , pour ne pas fentir combien il lui eiî inférieur. Mais, que dirons-nous touchant le Ref- te du Parallèle, où l'on peint Mr. Boer- ha.ve des Couleurs les plus noires par ra- port à la Candeur. Il avoit, dit-on, des Hypotbefes à orner , & un Syfîeme à défendre ; 6? par -là il avoit fes Vues fcp fin But en ta* por- Juillet , Août , et Septembre. 355 portant des Faits. Il fer oit fâché d'en trouver de contraires ; &> peut-être tacbe-t-il de les récufer. C'eft-à-dire , que Mr. Boerhave ctoit entêté de Tes Sentimens, prévenu en faveur des Chimères qu'il s'étoit mifesdans la Tête , & de la plus Mauvaiie-Foi du Monde. En vérité, c'eft pouffer lom l'Im- pudence, que d'ôfer tenir un pareil Langa- ge , dans un Tems où la Mémoire de Mr. Boerhave eft encore toute récente, ÔC dans un Païs ou il y à tant de Gens en E- tat de faire connoitre toute la Noirceur de cette Calomnie : Calomnie d'autant plus condamnable dans le JoumaJifte, qu'il ne peut pas s'être fait Illufion fur cet Article^ puifqu'il fait bien rendre Juftice à Mr. Boerhave , lorfqu'il ne croit pas que l'Intérêt de fon Libraire demande qu'il le déprime. Auflï n'ai-je befoin , pour raflurer l'Honneur de Mr. Boe rhave à cet £• gard , que de fes propres Paroles. Il avoit un Syfteme, il avoit des Hypethefes, je l'avoue; mais, comment fe comportoit-il ]à-deffus ? Dans le Livre de Mr. Boerhave les Conjectures, dit notre Journalifle , nepa* roiffent que fous la Forme de Soupçons. Dans fes Collèges 9 il rapport oit les Faits fur lef quels jït fondé fes Vues. Il y avançait aujfides Hypotbefes , qu'il vJauroit ofé bazarder ia 'wprhnê. Mais, de quelle Trempe étoieoc ces Hypothefes ? Elles étoient de celles, qui fort fouveni nous fervent de Ponts $ pour arriver à des Véritez éloignées , ou VEx- is encore pu atteindre. Mr.Boev- Z 4 bave 35<5 Bibliothèque Britannique, hâve en ùvoit de fort brillantes. Sun Génie heureux favoit appliquer Us Faits , 6? tirer fuite Exp r ence , muette pour ainji dire , £jp propoee à d'autres Fins , des Conclu/ions d'u- ne Facilité & d'une Régularité fur prenant es. La Théorie des Ir.fic.mmatlons en peut fervif d'Exemple. Elle je fonde, d'un coté , fur quel- ques Faits , raportez par Mr. Leuwen- hofk, qui n'en avoit pas préccu les Ufages ; & , de Vautre , fur des Injetïions de Mr. Ruysch, qui n'y avoit pas fongé non plus. Mr. Boerhave réunit les Morceaux détachés , £f en compofa un Syfteme , qui, de fin Vi- vant, a été reçu à peu près par toute l'Europe Ça). Croiroit-on, que c'eft le même Hom- me qui parie f Voilà donc Mr. Boerha- ve entièrement juftifîé, même par Ton En- nemi. Il fondoit les Hypothefes fur les Faits , & défendoit Ton Syfteme, de forte qu'il remportoit de fon Vivant l'Aveu à peu près de toute l'Europe. Il n'y eut donc prefque perfonne , qui n'approuvât fe^ Vues & l'on But dans le Raport des Faits. Mais, qu'il auroit été fâché d'en trouver de con- •traires , ou qu'il auroit taché peut-être de lesrecufer, ce font des Soupçons abfolu- mont infoutenables.: &, tandis que le Jour- nalifte ne nous apprendra pas à pénétrer dans le Cœar de l'Homme, on ne pourra jamais regarder ces mauvais peut-êtres, que comme des Médifances, préméditées fans au- (a) Eibiioth.Ra:fon. Juillet, AtnttS}t. 1744., m- s8- Juillet, Août, et Septembre. 357 aucun Fondement, qui tourneront toujours au Deshonneur de celui qui les débite. Mais, il falloit donner de l'Encens à Mr. HALLtR, qui, certainement, n'en fera pas faûsfait à ce Prix, quoique le Jour- nalifte ait épuifé route Ton Eloquence, pour lui faire fa Cour, & étaler le iV'érite de fon Ouvrage, auquel cet exorbitant Eloge furement ne convient pas. Il nous propofe ÏVir. H A L l e r , comme n'ayant aucun Syf terne : n'étant pas tenté de faire Ufage d'un Fait douteux, d'un Rationnement problémati- que ; & , par -là , plus libre d'aller droit au Vrai , que fon Maître mime: ne pouvant me- ner qu'à la Vérité : fumant toujours conjlam- ment le Chemin de la Vérité, fans jamais s'en détourner ,. ) Ibïi. p*?. 44, 45-, z 5 358 Bibliothèque Britannique, s'il n'a aucun Syfteme de fa Façon, en re* vanche on voit chés lui force Hypothe- fes; Hypothefes fondées fur des Fans dou- teux , fur des Raifonnemens problémati- ques, fur des Erreurs palpables. Il eft aifé de le prouver par des Exemples. ÎLjèmble, dit Mr. Halle r, que V Artè- re &f la Veine umbilicales mt été dans le pe- tit Vermiffeau V Organe, par lequel il dépofoit les Humeurs Juperflues , & en attiroit d'autres de la Liqueur Jéminale même , qui lui étoient nécejjaires (a). Voilà l'Hypothefe de la Nu- trition duVermiiTeauparl'Umbiiic. Elle eft foDdée fur ce Fait , que le Cordon appartient au Fœtus , & qu'il Je trouve déjà dans le petit Vermijjeau fpermatique (b). Il eft vrai , que Mr. Haller a jugé, que ce Fait étoic hors de Doute (c) : mais , on n'a qu'à pefer 3e Texte du prétendu Commentaire de Mr. B o f r h a v e en ce même Endroit , pour être convaincu, que Mr. Haller s'eft trom- pé fur cette Certitude; qu'on y trouve juf- ou'ici des Difficultez infurmontables; que les Argumens, tirez de l'Analogie des Plan- tes, &c. , qu'il allègue, ne fauroient don- ner tout au plus qu'une -Probabilité fort lé- gère , parce qu'ils ne donnent aucun Eclair- eifiement fur \2$ Difficultez fusdites ; & qu'on pourroit aifément répliquer par au- tant d'Argumens contraires. C'eft donc un Fait ( * ) Prsel. Acad. Tan. V, Fart ;. f*g. H2' ( i> ) Jbtd pag. 241, 241. ( c ) :iid. Juillet, Août, et Septembre. 359 Fait abfolument douteux, que Mr. Hal- le, r employé ici comme le Fondement de ion Hypothefe. Aulîi voit-on, qu'il n'a pas été trop bien perfuadé de fa Certitude, & que l'Analogie des Plantes ne lui a pas toujours paru un Argument bien convain- cant. Le Moyen, fans cela, qu'il eut ja- mais pu dire, qu'il y a certainement un Teins, dans lequel le fœtus vraifemblablement ne /au- roit prendre aucun Aliment , que par la Bou- che ; /avoir . quand il vit fous la Forme de Vermi£\eau\ qu'alors , il efi plus que probable, qu'il rejjemble à tous les petits Animaux aquati- ques , qui Je nourijfent par la Bouche (V). Comment concilier ce Langage avec le précédent? Il eft des plus ridicules , Il Ton iiipofe vrai le Fait , dont il vient d'être parlé. Comment donc excufer Mr. Hal- ls r ?Se eontrediroit-il ainfi lui-même de Gaïeté de Cœur ? Je n'ôferois le penfer. Voici , (i je ne me trompe , la Solution du Problème. C'efl à fa Mémoire, qu'il faut s'en prendre. Elle acte moins frappée d'un Fait doutteux, qu'elle ne l'auroit été d'une Chofe certaine : ainfi , elle a pu aifémcnt lui fournir le Pour & le Contre, fans qu'il s'en foit apperçu. Voilà donc une Hypo- thefe bâtie fur un Fondement très peu lolide. Je pourrais facilement démontrer, que ce n'efl pas la feule de cette Efpece , oui fe trouve dans l'Ouvrage de Mr. Halle R ; mais, je me contenterai de cel- 360 Bibliothèque Britannique, celle-là , qui fuffit à mon But, & je paf- ferai à autre chofe. La Pûr^> extérieure du Place?iîa , félon Mr. Haller, eft toujours enveloppée par la Production memhraneufe du C horion , mêity dans les Oeufs les plus petits , logés encore dans V Ovaire (a). Cette Hypotheie eft fondée en quelque manière fur l'Expérience, qui a appris à l'Auteur, que dans les Oeufs cbortifs de fix Semaines , il y avoit déjà une telle Membrane (b). Mais, comme ees'Oeufs avancés jufque-làne prouvent pas toute l'Hypothefe , & qu'il refte à l'Auteur quel- que Scrupule, fi la Membrane, qu'il avoit •nue , n'etoit point artificielle (c): auquel Doute il n'ôfe répondre , qu'avec beau- coup de Circonfpeclion ; Marque éviden- te , que l'Expérience n'eft pas affez con- vaincante, quoiqu'il oublie ailleurs tous les Sujets de Doute (d); Mr. Haller aime mieux avoir recours à un Raifonnement le plus problématique , que jamais perfonrse ait bazardé. S'il m'etoit permis, dit il, de rr'oppojer à prefque tous les Anatomijles , j'ai- léguerois des Raifons à priori, par le [quelles je prouver ois , qu'on ne fauroit attribuer aux Membranes , fans les fuppofer expofées à des Bleffures & à des Effujions d'Humeurs très fréquentes, des Faiffeaux longs £? bfancbus , tek (a) lbid p. ij6. (é>) lbid, p. 219. (c) lbid. _(d) lbid. p. 1-1. Juillet, Août, et Septembre. 361 tels que ceux , qui , fuivant le Sentiment com- mun , fartent de toutes les Parties de ïEnve» loppe extérieure de VOeuf; par confequent , qu'il faut , que ce qui a Jurement lieu, dans le Placenta parfait * je trouve aujji dans le Pla- centa, & dans r Oeuf , lorfqtï 'ils commencent à je former: c'efl-à-dire , qu'il doit s'y trouver une Membrane compofée de Vaiffeaux courts , par laquelle ils Joient premièrement adhérents à i 'Ovaire, £f enfuite à la Matrice (a). Quoi! C'eft Mr. Haller, qui tient ce Langage? Lui, qui ne fait aucune Difficulté de fup- pofer, que les Troncs de ces Vaifleaux ont leur Ouverture dans le Cordon (b}[ Comment efl-il fi fcrupuleux, lorfqu'il s'a- git de leurs différentes Ramifications? Les Troncs ouverts feroient-ils peut-être ex- emts de cette EfTufion d'Humeurs , que fouffriroient les Extrémitez? Difons vrai. Pour les uns & les autres, dans les Com- mencemens, il y a vraifemblablemenr fore peu à craindre de ce côtè-là. On voit, dans toutes les Cavitez du Corps, des Vaiffeaux ouverts, qui déchargent & attirent les Hu- meurs fans aucun Péril. Mais, peut-être l'Auteur veut-il feulement parler de la Perte d'Humeurs, qui fuivroit une Bleflure. Or, comme cette Bleiïure vraifemblablemenc n'arrivera jamais, aufïï la Perte ne pourra intimider perfonne. Les Anatomifles enfei- gnent ordinairement, que, dans les Com- men- ce îhid. ;• 276. (k) Vbïiz ùjeffus la Ckntim (a) jefopage ;;8. 3#2 Bibliothèque Britannique, mencemens, on trouve la Matrice remplie de quelque Humeur, dans la quelle l'Oeuf nage hors d'Atteinte. Il n'y a donc aucun Frottement, par conféquent aucune BlefTu- re, aucune Perte. On voit même dans les Boyaux , que les VaiiTeaux , qui , flottans dans leursCavitez, fouffrent beaucoup plus de Frottement par le Mouvement periltal- tique, n'en font bleffés que rarement dans quelques Maladies : & , dans les petits Oeufs , ces VailTeaux font allez courts pour ôter toute Crainte. Les Raifons, fur les- quelles on établit l'Exiflence de cette IVIembranc dans les petits Oeufs, font donc fans Force, & n'en prouvent nullement la Néceiïité. Ma Foi ! C'eft un Coup bien hardi , que d'ôfer s'oppofer à l'Expérience de prefque tous les Anatomiftes , fur un Raisonnement auffi foibîe ! Quelque porté que je fois à pardonner les Fautes de Mr. Haller, je ne faurois lui cacher, qu'à mon Avis, il y a dans cette Entreprise une Témérité inexcufable pour un Homme auflî verfé en Anatomie. Au moins eft-ce-là un Exemple fort extraordinaire d'Hypothefes fondées fur des Raifonnemens très problé- matiques. Je dois encore raporter un Exemple d'Hypothefes bâties fur des Erreurs palpa- bles. Sans me donner pour cela beaucoup de Peine, j'en trouve un dans l'Article mê- me, que le Journaîifte nous donne comme un Echantillon de l'Habileté de Mr. Haï- LEK Juillet, Août, et Septembre. 363 ler (fi) Il y eut , dit-il , une Difpute entre Mrs. M E R Y fi? (/«Verney fi?c , touchant la Circulation du Sang par le Fœtus. Mr. Boerhave fi déclara en faveur du der- nier, fi? allègue un Argument ajjez convain- cant; mais y Une rendoit aucune Rai/on de la Grandeur excejfive de V Artère pulmonaire , Ar» gunient principal de Mr. Mer y. Perfonne aujji il' a fatisfait fur cette Difficulté 5 car , Mrs. Mery, du Verney., Tauvry, Bus- siere, Sylvestre, de Littre, Rouhault, Winslow, Verheyen, Morgagni, fi? Treu, ont écrit pour fi? contre fur cette Qiiefîion. C'ejl le féal Mr. Haller, qui a trouvé la Raifon de cette. Grandeur dans l'Amtomie. Voilà donc Mr. Haller tout- à -fait fur le Trône. Je ne lui difputerai point ce haut Rang, quoique je doute fort , que lui-même y prétende. Je dirai feulement, que notre Journalifte a eu très mauvaife Grâce de choifir, pour le maintenir dans cette Place , l'Endroit peut-être le plus foible de tout l'Ouvrage. C'eft affronter les Gens , que de les louer de la forte. Voïons ce PaflTage chés Mr. Haller: il nous mettra en Etat de juger du peu de Goût du Faifeur d'Extraits , en même tems qu'il nous mettra devant les Yeux un Exemple d'Hypothefes fondées fur des Erreurs palpables. Je m'étonne fort 9 dit il , que Perfonne n'ait remarqué une Solu- tion fi aifée. Le Trou ovale ote en effet quelque Par- {a) Biblioth. Raifon. Jmll. Août, Sept, 17+4» 364 BlELIOTHïEQUE BRITANNIQUE, Partie du Sang du Cœur droit; ce qui-devroit diminuer le Diamètre de V Artère pulmonaire : mats , le Trou o-vale ejl beaucoup plus petit , que le Conduit artériel; êf c'eft V Artère pul- monaire , qui reçoit le Sang de ce Conduit : l'Aorte ne le reçoit point. Quelle Merveille donc* que la Pulmonaire foit prejque de la Moitié plus grande (a). Eft-ce là, jevouspric, eft-ce-là ce Chef- d'Oeuvre inconnu à tant de Grands- Hommes? Je ne fuis pas furpris, qu'ils ne l'aient point apperçu: mais, je plains Mr. Baller d'avoir été allez infortuné, pour débiter avec tant de Confiance une fembia- ble Bagatelle. S'il efl vrai, comme il pré- tend, que la Solution de ce Problème foit fort aifée , je lui aurois fouhaité plus de Talent pour s'expliquer; parce que, dans une Chofe fi aifèe , fes Termes femblent bien équivoques. Je crois pourtant, que le Sens aboutit à ceci. Le Trou ovale ôte quelque Partie du Sang, qui efl apporté dans le Sinus droit. Ainll, le Cœur droit, & l'Artère pulmonaire, reçoivent moins de Sang, que le Cœur gauche & l'Aorte: d'où il fuit, que l'Artère pulmonaire % moins di- latée , nefauroit avoir autant de Diamètre, que l'Aorte; mais la Pulmonaire gagne en revanche tout le Sang , qui lui eft porté du Cœur gauche par le Conduit artériel , la Quantité duquel eft beaucoup plus gran- de , & celui-ci n'entre point dans l'Aorte . par conféquent , la Pulmonaire, eft conti- nuel- (i?) Prxletf. Acad«Z"37»' V.Part, i t*g-$i9> 33?- Juillet,- Août, et Septembre. 275 nuellement expofée à une plus grande Di- latation. Quelle Merveille donc, quelle foie prefque de la Moitié plus grande! Seroit-ce-là le véritable Sentiment de Mr. Haller? Je voudrois, que non; mais, ce qui fuit m'en perfuade encore davantage: car , il ajoute peu après , que le Conduit ar- tériel ôte beaucoup plus du Sang du Cœur gau- che, qu'il n'en reçût par le Trou ovale (a). Eft-il pofïible, qu'un favant Homme fe puifle égarer ainfi ! Ne diroit-on pas, qu'un peu de Lumière fuffit, pour fe garder d'une telle Chute? Toute l'Hypotbefe, qui fait cette prétendue Solution du Problème, eft bâtie fur ce Fondement, que le Chemin naturel du Sang , qui vient au Cœur gau- che, eft de pafler en grande partie par le Conduit artériel dans l'Artère pulmonaire. Or, c'eft une Erreur directement oppofée au Bon-Sens, & à l'Opinion univerfelle- ment établie. La vraie Phyfiologie enfei- gne au contraire , que le Conduit artériel aboutit à V Aorte: qu'ainfi 9 il y a un Chemin continué de V Artère pulmonaire , comme de l'Aurte , au Tronc defeendant de l'Aorte; mais , qu'il n'y a aucun Chemin de V Aorte à V Artère pulmonaire , à moins qu'il n'y ait quel- que Caufe , qui empêche le Sang d'entrer dans le Tronc defeendant , & qui le contraigne de regorger dans V Artère pulmonaire : & c'eft a uffi ailleurs la Penfée de Mr. Haller^ chéa (4 ) lia. p. 330. XX£IJU£4rt. II A a 36*6 Bibliothèque Britannique , chés qui on la trouve ainfi de Mot en Mo£ fous l'Article ou il eft parlé du Conduit artériel (b). Le Moïen de concilier des Contradictions fi étranges , & de compren- dre comment l'Auteur , fâchant la Vérité, ait pu donner dans une Erreur fi palpable! A l'égard d'autrui , cette Inadvertance mé- riterait le Nom de Légèreté: à préfent, la Di traction nous pourra fervird'Excufe; &, par Refpecl: , nous la laiderons palTer fous ce Titre. Vo il Ax des Exemples d'Ignorance en Ana* tomie , de LeSture précipitée , & d'Hypotbefes mal fondées. J'ôfe aflurer , qu'on ne me fera rien voir de femblable dans les véritables Ouvrages de Mr. Boi-rhave. Je dis les véritables: car, dans les Ouvrages fuppo- fez , que quelques-uns de fes Difciples ont fait imprimer fous fon Nom, il y a une infinité d'Extravagances, qu'on ne pour- rait, fans la plus criante Injuftice, mettre fur le Compte de ce Grand-Homme Le Commentaire même, que Mr. H aller vient de publier, n'en eft pas exemt. Je le prouverais dès-à-préfent, fi je ne craignois pas d'abufer de la Patience des Lecteurs , qui n'aiment pas à voir de fi longues Piè- ces dans les Journaux: mais, c'eft ce qu'entr'autres Chofes j'aurai Occafion de prouver dans le Volume fui van t. Qu'on juge maintenant, qui, de Mr. Boekhave, ou de Mr. H aller, mé- rite (*; Uiï.pag. 334, 33/. Juillet, Août, et Septembre, 30*7 rite la Préférence. Je fais beaucoup de Cas de l'Erudition de ce dernier; mais, loin de le placer au deflus de fon Maître, je croirois choquer impudemment fa Modef- tie , fi feulement je le mettois en Parallèle avec lui. A Londres, ce 13 Mars fj$* ARTICLE IX. The Hiflory of England , by Mr. Ra- pin-Thoyras , concinued from the Révolution to the Acceiîlon of King George II, byN.TiNDAL, M. A. Reftor of Alverftoke in Hamp- Shlre , and Chaplain to the Royal Hof- pital at Greenvich : illuflrated with the Head of the Kings , Qens , and fève* rai eminent Perjons ; aifo with Maps 9 Medals , and other Copper- Plates. Vol. III. London , printed for John and Paul Knapton , at the Crown , inLudga- îe-Strete. 1744. Ceft-à- dire. Hiftoire d'Angleterre de Mr. Rapin- Thoy *as , continuée , depuis la Révo- lution jufquà l'Avènement de George 1 1 au Tbrone , par Mr. IV.Tindal, &c. &c : enrichie des Portraits des Rois 9 des Reines,^ de plufieurs autres Per- Aa 2 fou- 368 Bibliothèque Britannique, fonnes îlluftres , aujfi-bïen que de Car- tes , de Plans de Batailles , de Mé- dailles, &? autres Planches. Cet Ou- vrage s'imprime en François, a la Ha- ye chez J. van Dur en & P. de Hondt ; en 3 vol. in Quarto. CET Ouvrage s'imprime par Soufcrip- tion ; ôf on en publie toutes les Se- maines quatre Feuilles in folio, qui forment un Cayer coufu dans du Papier bleu, Je quel fe vend fix Sols d'Angleterre. Le pre- mier de ces Cayers parut au Commence- ment de May 1744; & depuis lors on n'a g as difcontinué à publier régulièrement cet ►uvrage. Comme la Traduction Angloife de YHifioire d'Angleterre par Mr. Rapin a été imprimée en deux Vul urnes in folio & en quinze Volumes in 8vo ; fa Continuation s'imprime dans ces deux Formats , & fera auffi étendue que l'Hiftoire à laquelle elle fcrt de Suite, Les Portraits, de même que les autres Planches, fe vendent à part ; & l'on paye fix Sols pour les premiers , & la Moitié moins pour les autres. La Gravure en eft belle ; & l'on peut dire de tout l'Ouvrage, qu'il efb magnifiquement exécuté. Quant au fond môme de l'Hiftoire , le Nom de l'Auteur forme un grand Préjugé en fa Faveur. Ses judicieufes Remarques fur YHifioire d'Angleterre par Mr. Rapin fonc fuffifamment eonnoitre, qu'il ne manque d'à Juillet, Août, et Septembre. 369 çune desQualkez uécefiaires à un bonHif- torien. La Continuation , qu'il nous donne aujourd'hui de cette Hiftoire, ne peut donc qu'être favorablement reçue du Public. Et comme les Anglois fe font appropriés l'Ou- \rage de Mr. Rapin, en le traduifant en leur Langue, on ne fera point furpris de voir les François ufer du même Droit fur celui de Mr. Tindal; & fe donner, au moyen de cette Continuation, une Hiftoi- re complète de Y Angleterre. C'eft auflî le Deflein des Libraires qui ont le Droit de Copie de l'Ouvrage de Mr. Rapin. Ils font travailler à une Traduction de celui de Mr. Tindal, qu'ils feront paroitre le plutôt; qu'il leur fera poiïible. La Partie de Y Hiftoire d'Angleterre , qui fait l'Objet de cette Continuation , eft infini- ment plus interreflante pour nous , que celle qu'a traitée Mr. Rapin. Ce dernier en étoit refté à l'Avènement de Guil- laume 111 au Thrône de la Grande-Ere" tagne\ &. n'avoit parlé que de chofes aux- quelles la plupart des Lecteurs prennent moins d'Intérêt, parce qu'elles ne fe font pas paflëcs de leurs Teîns: au lieu que Mr. Tindal, prenant les Chofes là où Mr. Rapin les avoic laiflées , n'entretient les Lecteurs que d'Evénemens dont la Mémoi- re eft encore fraiche , & des moindres Cir- conftances desquels la Curiofité fait qu'on délire d'être inftruit. Mais, fi la Tâche de Mr. Tindal eft plus interreiTante que cel- le de Mr. Rapin , il nous paroit, qu'il eft A a 3 37© Bibliothèque Britannique, bien plus difficile de la remplir. Il eft fou- vent dangereux d'être trop fincère en ra- contant des Faits dont les Auteurs, ou des Personnes qui leur touchent de près, vivent encore , & font allez puiflans pour s'en ref- ientir. Il faut un Courage & un Amour pour la Vérité peu communs, pour fe mettre au deiïus de la Crainte qu'infpire le Danger qu'on court par fa Sincérité. D'ailleurs, il n'eft pas auffi facile qu'on fe l'imagine de démêler exactement la Vérité des Faits mo- dernes. La Multiplicité des Relations qu'il en paroit caufe de l'Embarras à l'Hiftorien , & fait que fouvent il ne fait à quoi s'en te- nir. Il leur faut un certain Tems pour fe débarrafier des Circonftances fabuleufes, & pour donner lieu à ceux qui font bien inf- truits de fe produire , & d'éclaircir ce que les Faits peuvent avoir d'obfcur & d'en> brouillé. Tout fe réduit donc à favoir fi Mr. Tin- pal s 'eft bien acquité de fa Tâche. Nous a- vons deux Moyens pour nous en aflurer. L'un eft de confidérer la Nature des Se- cours qu'il a eu , & la Méthode qu'il a fuivie : & l'autre d'examiner fonHiftoire. Quant au premier, voici ce que nous apprenons dans un Avertiffement a qu'il ne fera pas inutile de tranferire ici. 3, Mr. Rapin , dit-on, étant mort avant „ d'avoir fini fon Hiftoire, le Traducteur a 3, tâché d'y fuppïéer en écrivant l'Hiftoire a, des Règnes de Guillaume III. & de s, Marie, de la Reine Anne, & de ,% Geor- Juillet, Août, et Septembre. 371 „ G e o r g e I. Pour cet Effet , il a lu avec „ foin les divers Ouvrages qu'on a publié „ fur ce Sujet depuis la Révolution , auili ,, bien que les Manufcrits qui lui ont été ,. communiqué. Et comme les Auteurs qu'il ,, a confulté ne font pas toujours d'accord „ dans la Narration de mêmes Faits , il a ,, inféré dans le Corps de l'Hiftoire celle qui ,, lui paroiflbit la meilleure & la plus im- „ partiale, faifam de l'autre la Matière d'u- „ ne Note, quand la Chofe en valoit la „ peine. Cette Méthode a l'Avantage de ,, faire connoitre aux Lecteurs les diffé- „ rentes Manières d'envifager un même „ Fait, félon les Principes, ou l'Efpric de „ Parti, dont les divers Ecrivains ont été „ animez. On ne s'efl fait aucune Peine de „ tranfcrire des Morceaux entiers des Au- „ teurs qu'on a eu en Main, lorfqu'on a „ crû rendre par-là cette Hiftoire plus uti- „ le, ou qu'on n'avoit aucune Raifondeles „ changer, ou de les abréger. ,, Afin qu'on puifle mieux juger de ce qui ,, a occafionné les Evénemens qu'on raD- „ porte dans cette Hiftoire, on l'a fait ,, précéder d'une Introduction, 0C1 l'on mon- ,, tre l'Origine des différens Partis qui di- „ vifoient le Royaume lors de la Révolu- „ tion , & les Progrès que chacun d'eux „ avoit fait ; auflï bien que le véritable ,, Etat de nos Différens en Matière de Re- ,, ligion , qui ont eu tant d'Influence fur „ l'Efprit & fur la Conduite de plufieurs „ Perfonnes, Dans ce Deffein, on rappel- A a 4 le, M 3) 372 Bibliothèque Britannique, M le, en peu de mots, ce qui s'eft paf- „ fé fous les Règnes de Jaques I, „ Charles I, Charles II, & J a- ,, que s II. De plus, comme la Situation ,, où fe trouvent les Affaires étrangères ré- „ pand fou vent un grand Jour fur ce qui ,, le pane dans l'Intérieur du Roïaume , „ on n'a pas négligé de s'y étendre , quand 3, on l'a jugé néceflaire. Enfin , on termi- 5, nera l'Ouvrage par un Abrégé de toute ,, l'Hiftoire d'Angleterre, depuis l'Invafion 5, de Jules C^esar, juiqu'a lJ Avène- ment de George II au Throne. En un mot, on n'a rien négligé de w tout ce qui pouvoit rendre cet Ouvrage 3, d'une Utilité générale; & l'Auteur efpère ,, s'y être montré impartial, par fon conf- 3, tant Attachement à la Vérité , qu'il a „ tâché de fuivre fans Détours & fans Dé- 3, guifemens. Ce fera au Public à juger s'il 3, aréiiflï, & s'il a agi avec l'Impartialité qu'il s'eft propofée. ,, Comme la Nature de ce Journal ne nous permet pas de donner un Fxtrait fuivi d'ua auflî gros Ouvrage que cette Continuation y nous ferons obligés de nous borner à quel- ques Endroits particuliers , qui fuffiront néantmoins pour faire connoitre une Partie du Mérite de cette Hiftoire, Et , d'abord , nous croyons devoir nous arrêter à Y Intro- duction > qui , félon les Vues de fon Auteur, répand beaucoup de Tour fur cette Partie de VHiftoire d'Angleterre qu'il a entrepris d'é- crire. îl •3 juillet, Août, et Septembre. 373 Il s'éleva, fous le Règne de Jaques I, trois différens Partis dans le Royaume. Le premier , à la tcte du quel fe trouvoit le Roi, foutenoit, que le Gouvernement Mo- narchique, & la Succeflion en Ligne direc- te, étoient d'Inftitution Divine, &par con- séquent facrez & inviolables: que les Per- sonnes , de même que la Puiflance , des Rois étoient ordonnées de Dieu: que le Roi efl l'unique Source, d'où émane tout Pouvoir; & que les Libercez & les Privi- lèges du Peuple ne font que des Concer- tions de fa Part, ou des Chofes extorquées à la Couronne : que le Serment du Roi , à ion Avènement au Thrône , ne le lie point envers fes Sujets , mais feulement envers Dieu, devant qui feul il eft refponfable de fes Actions : enfin , que , quand le Roi vio- le les Loix du Royaume, les Sujets ne font point en Droit de Vy oppofer par la Force \ mais, que leur Devoir alors efl de fe fou- mettre à fa Volonté. Mr. Tindal ne fe contente pas d'af- furer, qu'il y a voit des Perfonnes, quicroï- oient ce qu'on vient de lire: il fait plus: il le prouve , dans les Notes , par le premier Difcours du Roi à fon Parlement, & par quelques autres; par un Livre du Dr. C'o» ivel, imprimé en 1609, avec Privilège du Roi,- &par les Opinions, que divers Prédi- cateurs, fur-tout ceux de la Cour, por- toient fréquemment en Chaire. 11 enufe de même dans la fuite, navançant jamais rien fens Preuves. Aa 5 Lq 3/4 Bibliothèque Britannique, Le fécond Parci foutenoic un Sentiment directement oppofé au premier. Il croïoit bien , que toute Puiffance venait de Dieu ; mais, il nioit, que Ja Divinité eut établi le Gou- vernement Monarchique, préférablemcnt à tout autre. Bien loin que la SuccelTiun en Ligne diredte foie de Droit divin, il pré- tendoit , que le Peuple peut , quand il le ju- ge néceflaire pour fa Sûreté, transférer la Couronne, non feulement d'une Branche, d'une Famille, dans une autre, mais même dans une Famille étrangère. Il ajoutoit, que la Nation Angloife a des Loix aufli anciennes que la Royauté, félon lesquelles le Roi eft obligé de gouverner: & qu'auf- fi long-tems qu'il les obferve, on doit fe foumettre à fon Autorité; mais que, quand il les viole , on eft , non feulement en Droit de lui réfifter, mais encore de le dé- pofer. 11 y avoit un troifieme Parti , qui, quoi- que confondu en apparence avec le fé- cond, ne laiiïbit pas d'avoir des Sentimens différens. Il préféroit le Gouvernement Républicain au Monarchique, quelque li- mité que fût le Pouvoir du Roi. Ceux, qui formoient ce Parti , étoient des Gens, qui, durant la Perfécution que la Reine Ma- rie excita contre les Réformez de fon Royaume , s'étoient retirez en Hollande, en Allemagne, & en Sui(fe; &, y ayant fucés des Principes Républicains , les avoient por- tez dans leur Patrie, lorfqu'ils y retournè- rent fous le Règne d'ELizABETH. Com- me Juillet, Août, et Septembre. 375 nie ils n'approuvoient , ni ie Culce , ni la Dif- cipline, de l'Eglife Anglicane, & qu'ils au- roienc voulu quelque - choie de plus pur à cet Egard, on les appella Puritains. Ceux, qui porcoient ce Nom , furent enfuite divi- fes en deux Gaffes , relativement aux Ob- jets de leurs Opinions. Ceux, qui avoient des Idées différentes de l'Eglife Anglicane dans ce qui concerne la Religion, furent appeliez Puritains a" Egli[c\ & ce font ceux , qu'on a nommé dans la fuite Non-Cvnf or- mi jles. Ceux, qui s'éloignoient des Idées du Roi dans les Chofes qui regardoient le Gou- vernement, & qui formoient le fécond ou le troifieme Parti, reçurent le Nom de Pu- ritains d'Etat , qu'ils ont enfuite changé pour celui de Whigs\ tandis qu'on a nom- mé Tories ceux qui tenoient pour les Opi- nions de ceux du premier Parti. Le Roi Charles I monta fur leThrô- ne, imbu des mêmes Principes de Gouver- nement que fon Père. Il mît tous fes Soins à les réduire en Pratique. Les premières Années de fon Règne , il afTembla trois Par- lemens, qui furent auiîî tôt diflbus, parce- quils formoient des Griefs, & vouloient fai- re rendre Compte aux Miniftres. Le Roi traita les Membres de la Chambre Bafle du dernier avec beaucoup d'Aigreur: les ac- cufant de tenir une Conduite féditieufe & desobéiffante ; mais, que ces Langues de Vi- père dévoient s'attendre aux juftes Réconv penfes qu'ils méritoient. Aufli en fit-il em- prifonner quelques-uns & mettre les autres r à l'A- %?6 Bibliothèque Britannique, à l'Amende. Depuis ceTems-ià, le Roi ne fit aflembler aucun Parlement durant l'Ef- pace de douze Ans. Mais, comme il avoit J3efoin d'Argent, il s'empara du Droit, que les Communes feules ont d'en lever. On exigea les Impots & les Taxes, qu'il avoit mis, avec la dernière Rigueur; & les Juges du Royaume prononcèrent, que tout cela étoit conforme aux Loix; & les Prédica- teurs foutenoient en Chaire, que la Con- fcience obligeoit les Sujets à les payer. Le Parti des Puritains d'Etat s'accrut beaucoup par cette mauvaife Conduite du Roi; & il foupiroit après une Occafion fa- vorable de remettre la Nation en Liberté, îorfque Charles I la fit naitre lui-mê- me. Il vouloit établir en Ecojfe la Difcipli- ne & la Liturgie Anglicane; ce que les E- cqffois ne voulant pas fouffrir , ils prirent les Armes. Le Roi, qui ne fe fentoit pas aflezfort, fut obligé d'en venir à un Trai- té avec eux, & d 'aflembler un Parlement pour en tirer des Subfides. Mais, comme il ne voulut en accorder aucun , qu'on n'eut premièrement redreffé les Griefs de la Na- tion , le Roi le cafla incontinent. Il n'en fut pas de même de la Convocations qui con- tinua fes Séances par Ordre du Roi , & for- ma des Canons , qui établirent le Droit divin des Rois , & VObéïJJance pajjîve des Sujets. Ce- pendant , la Guerre recommença avec VE- cojje , & le Roi continua à lever çle l'Ar- gent par des Voyes illégitimes; mais, ayant été battu par les EcoJJois, qui prirent New- caftle. Juillet, Août, et Septembre. 377 caflky il fut obligé de traiter une féconde fois avec eux, & d'afïembler un Parle- ment. La plus grande Partie des Membres, qui le compofoient, étoient Puritains d'E- tat, ou Whigs ; parmi lesquels cependant: il fe trouva un petit Nombre de Gens , qui, non contens de réformer les Abus, vouloient en ôter la Caufe, en aboliflanc la Royaucé & TEpifcopac : mais, ils n'ô- foient pas paroitre à découvert, affe&ant les mêmes Principes que les autres. Charles, qui avoit Befoin du Parle- ment, redreiTa tous fes Griefs, & lui Iaif- fa la Liberté de relier aflémblé aufli long- tems qu'il voudrait. Après cela, il alla en EcoJJe , où il fe racommoda aufli avec ks Sujets de ce Royaume, leur accordant touc ce qu'ils fouhaitoient. Pendant l'Abfence du Roi, le Parlement d'Angleterre jugea que les Suretez, qu'on venoit de lui accorder, n'étoient pas fuffi- fantes, & qu'il falloit demander quelque- chofe de plus. On convint donc, à la Plu- ralité de neuf Voix feulement, de préfen- ter cette fameufe Remontrance , qui con- tenoit tout ce que le Roi avoit fait de con- traire aux Loix depuis Ion Avènement à la Couronne. La Chambre Bafle porta aufli un Bill , pour oter le Suffrage des Evé- ques dans le Parlement, & pour priver le Clergé de tout Emploi Politique. Les Sei- gneurs l'approuvèrent, & le Roi lui donna ion Contentement , par l'Avis de la Rein? Après cela, le Parlement pafla un Bii* 378 Bibliothèque Britannique, pour tirer l'Armée des Mains du Roi , & la mettre pour un tems entre celles de la Nation. Charles refufa de lui donner Ton Confentement ; ce qui occafionna la Rupture entre lui & le Parlement, & alluma la Guerre Civile. Dès lors, la Nation fe trouva divifée en deux Partis , fous les Noms de Royalijles , & de Parlementaires. Le premier étoit compofé de ceux qui étoient pour YObéiffance paflive \fav o\r > d'une bonne Partie du Clergé; de ceux, qui vouloient qu'on mit des Bornes à la Prérogative Roy- ale, mais qui trouvoient que le Parlement pouflbit les Chofes trop loin; &, enfin, des Catholiques -Romains, Les Parlementaires n'étoient pas tous du môme Sentiment. Le plus grand Nombre , s'imaginantque le Roi agilToit de Mauvaife-Foi, étoit perfuadé, que, fi on ne mettoit pas des Bornes étroites à fon Pouvoir , il reprendroit Tes anciens Principes, puniroit ceux qui s'étoient op- pofés à lui durant cette Séance , & révo- queroit tout ce qu'il venoit d'accorder. Le Refte de ce Parti étoit compofé des Enne- mis de l'Epifcopat, & de tous les Républi- cains à. Indépendant. Ces Principes pofez , Mr. Tindal fe trouve en Etat de répondre à une Queftiqn fur laquelle on s'eft fort échauffé mal-à- propos en Angleterre, „ On demande, qui „ a commencé la Guerre? Efl-ce le Roi , „ ou le Parlement? Tous ceux, répond-il, *, qui croyent que les Concédions du Roi „ étoient une Barrière fuffifante pour l'em- Juillet, Août, Et Septembre. 379 „ pécher d'envahir les Libertez de la Na* „ tion , & que Sa Majefté écoic réelle- „ ment dans le Deflein de gouverner à l'a- ,, venir fuivant les Loix, doivent condam* „ ner le Parlement, & regarder les deux „ Chambres comme les Auteurs delà Guer- „ re. D'un autre côté, ceux, qui font dans „ l'Idée , que le Roi n'avoit confenti aux „ Aftes qui bornoient fon Autorité, que „ malgré lui, & qu'il les auroit révoqué „ dès qu'il en auroit eu le Pouvoir, doi- „ vent rejetter la Caufe de la Guerre fur le 3, Roi , qui ne voulut pas confentir à ce 3, qu'on limitât davantage la Prérogative „ Royale, du moins pour un tems (a). Les deux Partis en étant venus à une Guerre ouverte, le Roi appella les Irlandais à Ton Secours ; & les Parlementaires fe liè- rent étroitement avec les Ecojjois. Cependant, il fe fit une grande Révolu- tion dans les Sentimens de ceux qui com- pofoient l'Armée du Parlement. Crœmvel9 qui avoit l'Efprit Républicain , infpira les mêmes Idées aux Gens de Guerre ,* & c'eft par ce Moyen, que ce Parti pTit le Deflus. Le Roi, "ayant été défait par les Parle- mentaires . fe jetta entre les Mains des E- coffois. Ceux-ci tâchèrent de moy.ener un Accommodement entre lui & les Anglois. Mais, leurs Suins ayant été inutiles, parce que le Roi ne vouloit pas accorder tout ce qu'on lui demandoit, ils livrèrent cet in- for* ( * ) Voyez Intro.l. p. 9, No. 2, 380 Bibliothèque Britannique, fortuné Monarque entre les Mains du Par- lemeut, & fe retirèrent chés eux. Le Roi , fe voyant Prifonnier , offrit d'accorder tout ce qu'on lui avoit d'abord demandé ; mais, l'Armée s'étant emparée de l'Autorité, le Parlement fut obligé d'a- gir félon les Vues des Chefs, qui étoient entièrement dans des Principes Républi- cains; &, bien loin d'accepter ces Of- fres, il fut réfolu, qu'on lui feroit fon Pro- cès. Si l'on avoit agi de Bonne-Foi, l'Occa- ilon étoit des plus favorables, pour établir les Privilèges & la Liberté de la Nation fur des Fondemens folides & durables. Le Roi confentant à tout ce que le Parlement pouvoit defirer, il étoit facile de prendre de bonnes Précautions, pour empêcher, que lui, ou fes Succefieun, ne puflent renver- fer ce qui auroit été établi alors. On fit la mê- me Faute, lors du Rétabliflementde Char- les II. Ce Prince auroit confenti à tout ce qu'on auroit voulu , pour rentrer en Pof- feflîon du Royaume de fes Pères. Mais ceux , qui contribuèrent à fon Retour , négli- gèrent de prendre une Précaution il avan- tageufe à leur Patrie. Bien loin de là: la Convention, qui rétablit la Monarchie, & par laquelle il fut rappelle , déclara, que la Couronne lui appartenoit par le Droit de Jh NaiJJance , & que le Parlement n'avoir au- cun Pouvoir de Coercition fur les Rois. Le Parlement, qui fût convoqué après le Re- tour de Charles II, ftatua , non feu- lement Juillet, Août, et Septembre. 381 lement , que jamais on n'avoic le Droit de réûfterau Roi; mais, de plus, il fit jurer à tous les Ordres du Royaume de croire, qu'il étoit illégitime de prendre les Armes contre le Roi, ou contre ceux qui auroient reçu leurs Commiffions de lui. Il décida encore, que l'Armée dépendoit uniquement du Roi, & non du Parlement: Queftion, qui avoit occafionné la Guerre Civile, fous le Règne précédent. Il elt aile de voir , par ce que je viens de dire , quels étoient les Principes des Membres du Parlement. Entièrement dé- vouez au Roi, ils ne négligeoient rien pour élever ion Autorité fur les Ruines de celle du Peuple. Charles II crut devoir profiter de ces Circonftances, pour établir le Pouvoir arbitraire dans fon Royaume , &, au moyen de cette Autorité, le Papifme. Mais, quand le Parlement s'apperçut de ces criminels DefTeins , il chercha à en préve- nir l'Exécution, par diverlès Loix, quipaf- férem malgré l'Oppofition de Partifans de la Cour, qui faifoient le plus grand Nom- bre dans la Chambre des Pairs. Il feroit allé plus loin,fi le Roi ne l'avoit cafTé. Il en convoqua trois autres, qui furent in- continent diflbus , parce qu'ils prefloient qu'on pafïat un Bill pour donner l'Exclu- fion à la Couronne à tout Sujet P api fie. Et comme cela regardoit le Duc d'York, que le Roi vouloit établir fon Succefleur , ce Monarque mit tout en Ufage , pour aflem- bler un Parlement, qui voulût entrer dans Tome XXIII. Part. IL Bb fes : Bibliothèque Britannique, fes Vues. Il y aaruit, peut-être, réiiiTi , en ruinant la Liberté des Elections, fi la More ne l'eut furpris dans le Tems qu'il étoic oc- cupé à enlever les Privilèges des Corps qui ont le Droit d'envoyer des Députez à cette Aflemblép. Av l'Avènement de Jaques II à la Couionne , il n'y avoir que deux Partis ckfl* 1$ Royaume, les Tories , & les Wbigs. Le premier étoit le plus puiflant; & le Roi eut i'A-Jreiîe de comporter le premier Par- lemera qu'il aflembla de Gens de ce Parti. Il fit de magnifiques Promenés à la Nation, dans (on Oifcours aux deux Chambres: & comme fi on avoit été fur qu'elles feroient infailliblement exécutées, on lui accorda près de trois Millions de Livres Sterling* pour fon Revenu annuel. Il changea bien de Langage, après la Mort du Duc de Monmouth. Les grofles Sommes, qu'on lui avoit accordées, le mettoient en Etat de tenir une Armée fur Pied. 11 don- na, contre les Loix du Royaume, les Corn- millions d'Officiers à des Papilles ,* & n'eut point de Honte d'en faire l'Aveu en plein Parlement, & de demander de nouveaux Subfides pour l'Entretien de cette Armée. Cela fit ouvrir les Yeux à plufieurs Mem- bres de cette AfTemblée. On lui accorda les Subiides demandez, & on permit aux Officiers Papilles de garder leurs Commif- iions ; mais, en Echange, on éxigeoit, que le Roi maintint les Loix, & fur- tout le Teft* Piûcôc que d'accorder cela, Jaq.ues II aima Juillet, Août, et xSeptfmbre. 383 aima mieux fe priver de ce Subfide : & il cafla d'abord le Parlement. Pourfuivant toujours Ion Projet , il fît déclarer parles Juges de Royaume, que le Pouvoir de dijpenjer des Loix Pénales étoit un Droit injeparable de la Couronne. En ver- tu de cette Décifion , il fit divers Règlement pour favorifer le Papifme , tous contrai- res aux Loix du Royaume. En particulier, il fit entrer le Père Peter , fon Confefleur , dans le Confeil privé, où ce Jéfuite eut dès lors la principale Autorité: il mit le Gou- vernement des Provinces, & les hauts Em- plois Militaires, entre les Mains des Papif- tes : il fit campe une Armée de quinze mille Hommes à dix Miles de Londres-, en- fin, il employa toutes fortes de Moyens il- légitimes, pour faire élire des Membres • pour le Parlement qu'il vouloit convoquer, qui ne s'oppofaflent pas à fes mauvais Def- feins. Les Chofes fe trouvant dans cette Situa- tion, il crût être afiez puiflant, pour ne de- voir garder plus de Mefures. Il fit donc une nouvelle Déclaration en faveur des Catholiques Romains , qu'il ordonna aux E- vèques de faire lire dans toutes les Eglifer» de leurs Diocefes Quelques-uns ayant faits des Repréfentations Jà-deflus , furent en- voyés à la Tour , d'où ils fortirent bien-tôt après aux Acclamations du Peuple, & de l'Armée même ; ce qui étonna beaucoup Jaques II. Ce fut pendant que les Evê- Bb a ques 334 Bibliothèque Britannique, ques étoient en Prifon, qu'on publia, quels Reine avoit accouché d'un Fils. La Conduite du Roi apporta de grands Changemens dans les Idées des différens Partis. Les Tories & le haut Clergé, qui s'étoient déclarez avec tant de Zélé pour YObéïffance pajfive , lorfque le Roi faifoit Ufage en leur Faveur du Pouvoir qu'elle lui donnoit, & leur permettoit de dominer fur les Wbig$& les Non- Conformijles leurs Ad- verfaires, changèrent de Principes, quand ils virent, que le Roi en abufoit pour intro- duire dans le Royaume le Papifme & le Pou- voir arbitraire. Dès-lors , on vit leur Zélé fe rallentir; & ils ne prefTérent plus, ni dans leurs Ecrits , ni dans les Chaires , la Nécefllté de l'ObéïiTance pafïïve. On fut généralement perfuadé alors , qu'on ne de- voit pas obéir fans Reftriclion, ni au Roi , ni àfes Officiers; mais, que leur Pouvoir étoit borné par les Loix. En un mot, les To- ries étoient devenus Whigs au Point de croire , qu'on peut légitimement réfifter à un Prince qui tâche de ruiner la Religion & la Liberté de l'Etat; & qu'on cft en Droit de réduire Ton Pouvoir dans de jufles Bornes. Mais, files JVbigs avoient gagné de ce Côcé , ils avoient beaucoup perdu d'un autre. Les Non-Confor?nijîes9 qui, depuis longtems , avoient adhères à leur Parti , tombant dans le Piège que la Cour leur a- voit tendu , l'abandonnèrent. La Liberté de Confcience,& l'Exemption des Loix pé- nales. Juillet, Août, et Septembre. 385 nales, accordées par le Roi, leur fut fi a- gréable,que, fans faire Attention, que ces Concernons étoient contraires aux Loix , ils élevèrent dans leurs AdreiTes la Préro- gative Royale à un Degré aufll haut que les 7on«;*&, de cette manière, devinrent les Fauteurs d'un Pouvoir illégitime. Mais, s'appercevant bien-tôt de leur Erreur , ils le réunirent à leurs anciens Amis,- &, de concert avec les IVbigs , ils s'oppoférent au Pouvoir arbitraire. Enfin , les Tories, convaincus, que la Religion & la Liberté étoient dans un Danger évident; & que le Papifme &l'Efclavage s'avançoient à grands Pas, crûrent qu'il étoit tems de pourvoir à la Sûreté de la Religion & de l'Etat. Cet- te Perfuafion les porta à travailler de con- cert avec les Wbigs\ en forte que toute la Nation fembloit avoir les mêmes Idées fur l'Article de la Réfiftance à la Volonté du Roi, dans une Circonilanceaufïidefefpérée que celle où la Nation fe trouvoit. Elle eut Recours au Prince d'Orange , qui , aidé du Secours des Hollandois,lui promit fon Afliftance. Tout cela fe ménageoit ce- pendant avec tant de Secret , que le Roi Jaques en eut la première Nouvelle par le Roi de France, Quelque grand que fût le Danger , il refufa néantmoins les Trou- pes que Louis XIV lui offroit, & fem- bla mettre une entière Confiance dans fes Sujets. Mais, pour gagner leur Affe&ion > il révoqua en peu de jours tout ce qu'il ayoit fait, pendant près de quatre Ans, en Bb 3 ft« 386 Bibliothèque Britannique, faveur du Papifme. Il parue bien tôt, qu'il n'avoit pas agi fincérement : car , la Nouvel- le étant venue, que la Flotte Hoilandoife avoit cfluïé une Tempête, qui la metioit hors d'Etat de remettre en Mer avant Je Printems , il reprit fon ancienne Condui- te, & révoqua une Partie des Chofes que la Crainte venoit de lui faire accorder; ce qui lui fit perdre plufieurs de fes Amis. Le Prince d'Orange débarqua cependant en Angleterre le y«. Novembre , & fut reçu avec Joye par la Nation. Le Roi , par l'Avis de fesConfeillers, réfolut d'aflembler un Par- lement pour le 5e. Janvier; & donna Or- dre , qu'on en expédiât les Lettres de Convo- cation. Après cela, il envoya des Commif- faires au Prince, pour favoir ce qu'il deman- doit de lui. Il répondit, qu'il n'exigeoit quel'Eloignement des Papijles,& un Parle- ment libre. Cependant, la Reine, par l'A- vis de fes Prêtres , fe retira en France avec fon Fils, & toutes les Perfonnes qui l'avoient affiliée dans fes Couches, & dont on n'a ja- mais entendu parler depuis. Elle fit pro- mettre au Roi, qu'il la fuivroit dans peu; ce qu'il exécuta deux Jours après , aban- donnant fon Royaume, laiflant fon Peuple à la Merci d'une Armée qu'il avoit ordon- né de licentier fans la payer, révoquant les Ordres donnez pour la Convocation d'un Parlement, jettant le grand Sceau dans la Tamife, & n'établifiant perfonne pour gou- verner pendant fon Abfence. Mais, il fut arrêté dans fa Fuite, conduit à Feverfham, & de Juillet, Août, et Septembre. 387 & de-là à Londres, où le Prince lui infji.ua de fe retirer à Rochefter. JouïfTant d'une entiè- re Liberté dans cette Ville, il en profita, après y avoir refléune Semaine, pour paf- fer en France. Mr. Tindal nous donne, dans une Note, la Relation de la Manière dont le Roi fut arrêté & gardé à Feverf- bam , tirée d'une Lettre manuferite, en- voyée à Londres par une Perfonne qui fe trouvoic auprès du Roi, quand il fut pris. Comme elle renferme diverfes Part culari- tez curieufes, on fera bien aife d'en trou- ver ici l'Extrait. Ce fut la Nuit du 1 1 '. Décembre 1688 , vers les onze Heures, qu'il fut pris dans une Barque, par environ cinquante Matelots, à la tête desquels étoient Guillaume Ames & John Hunt. Le Roi, qui s-'étoit dégi ne fut point reconnu cette Nuit , 6c ftit traité avec toute la Groiïiereré imaginable par les Matelots qui le gardoient. L'an difoit,que c'étoit le Père ïeter , qu'il lecort- noijfoit à fa Maigreur. L'autre ajoutait , qu'à fa Aline hypocrite , on voyo:t bien , que c'étoit un vieux R Ailier de Jefuite. Un txoifîeme juroit , que c' . Fripûn, qui depuis l hpems fni- foit le Métier de Scélérat. En tenant ces Dif- cours & d'autres femblables, ils p&fTérent la Nuit dans la même Chambre, lui en- nt des Torrens de Fumée de Tabac fois le Né, l'Odeur du auel le Roi ne pou- voit prefque pasfupponer. Le Lendemain, on le conduifit à Feverfham , oh il arriva fur le Midi. Iln'avoit pas été un quart voyant que tout cela étoit inutile , il s'oc- cupa à régler la Manière dont ils dévoient faire la Garde auprès de fa Ferfonne , leur défendant de s'approcher trop près de lui; ce qui les mit dans une telle Fureur, que quelques-uns en perdirent tout Refpeft. Ils fe muent à crier, qu'ils mour oient plû-tôt , que de le faijfer échapper-, ce qui fut fuivi de grandes Huées. Ils doublèrent enfuite la Garde , ne laiflérent entrer que des Gens de leur ConnoifTance, chargèrent leurs Fufils; & proteftérent, qu'ils feroient Feu fur qui- conque voudroit s'oppofer à leurs Defleins, Tout cela intimida extrêmement le Roi , qui, dès-lors, eut l'Oeil fur tous leurs Mou- vemens , & ne voulut plus refter fcul dans là Chambre. Le Comte de lirinchelfea arriva fur le Soir, & obtint des plus honnêtes d'en- tre ces Matelots, qu'on feroit pafTer le Roi de l'Auberge dans une Maifon Bourgeoife : mais, les autres n'ayant par voulu yconfen= tir, ils l'arrêtèrent fur l'Efcalier. Plus de vingt d'entr'eux mirent alors l'Epée à la Main , avec Menaces de le tuer , s'il vouloir paflfer outre. On convint enfin, qu'il auroic la Liberté d'aller dans une autre Maifon, pourvu que la Garde de fa Perfonne conti- nua à leur être confiée. Tout cela étant réglé, il fut conduit, à pied, par une Rue remplie de Boue,& au milieu d'une Popu- lace infolente , jufqu'à la Maifon qui lui étoit deftinée. Il n'y eut pas refté long-tems, qu'il com- Bb 5 men- 390 Bibliothèque Britannique, mença à. fe remettre , & pana beaucoup, Ses Difcours ter.doiem principalement à le juftifier des Crimes dont on le chargeoit. 11 entretint auiïi ceux qui étoient avec lui de Ste.lPenefride9 & leur recita tout ce que 3a Légende en difoit. Il fe mit après cela à lamenter la Perte qu'il avoit faite d'une Croix de Bois , qui avoit appartenu à Edouard le Confejfeur, & dans laquelle il V avoit un Morceau du Bois de la vraye Croix. Il fouhaitoit quelques-fois d'être a- vec la Reine ,& remercioitDieu de ce qu'el- le , fon Fils, & le Père Peter, étoient en Lieu de Sûreté. Il paroiflbit faire un fort grand Cas de ce Jéfuite. Le Lendemain 13, il arriva à Feversbam environ deux cens Gentils-Hommes, quife déclarèrent pour le Prince d'Orange, en préfence même du Roi. Sur le Soir, le Ca- pitaine Crayford, & un autre, vinrent de Scheernefs; déclarant, qu'ils étoient dans le Deflein de livrer le Fort & la Rade au Prin- ce. Quoique toutes ces Nouvelles l'affli- geaffent beaucoup, il dit cependant, qu'il confentiroit à tout , pour éviter PEfFufion du Sang de fes Sujets. SaTriftefle s'accrut néantmoins jufqu'à répandre de tems en tcms des Larmes. Auffi faut- il avouer, que les Matelots qui le gardoient en ufoient fort mal avec lui. Us le pourfuivoient de Chambre en Chambre , & ne lui lai (Toi en t pas le Tems de vaquer à fes Dévotions, ni de fatisfaire en particulier auxNéceflltezde la Nature. Il eîiuya toutes ceslncommodi- teza Juillet, Août, et Septembre. 30$ tez, & à chaque Inftant de nouvelles Info- lences, de ia parc de Tes Gardes; jufqu'au 15, qu'on le remit à ceux qui écoient envoyés de Londres pour le prendre. Après que le Roi Jaques eut quitté fon Royaume, le Prince à.' Orange aflembla une Convention , compofée de prefque tous les Membres qui dévoient former le Par- lement, pour lequel ce Monarque avQit déjà expédié deux fois les Lettres de Con- vocation. Cette Aflemblée décida, que le Roi Jaques avoit violé le Omtracl qu'il y a entre le Roi &? le Peuple , qu'il avoit abdiqué le Gouvernement ; & que le Throne étoit va- cant. Sur quoi on réfolut de le remplir, en appellant à la < 'ouronne le Prince & la Princeffe d'Orange, qui furent proclamez Roi & Reine (ï Angleterre. Il paroit, par ce qui fe pafla dans la Con- vention fur ce Sujet, que les différens Partis avoient changé de Conduite. Nous avons vu, que toute la Nation s'étoit réunie pour appeller le Prince d'Orange, & fembloît être animée des mêmes Principes. Mais , le Roi Jaques n'eut pas plutôt quitté fes Ro- yaumes , qu'ils fe diviférent en différens Partis. Les Tories retournèrent à leur Prin- cipe fondamenral , que le Droit des Rois eft divin , inaliénable, inhérent, hérédi- taire, & que leThn5ne ne peut jamais être vacant Ils prétendoient , que , tandis qu'un Roi eft en Vie , on ne fauroit lui donner de SuccelTeur malgré lu''; & que tout ce qu'on peut faire, c'eft d'établir un Régent-, pour 392 Bibliothèque Britannique, Î>our gouverner en Ton Abfence. C'étoit à les Idées de prefquc la Moitié des Sei- gneurs, d'un Tiers des Communes, & du Clergé en général. Parmi ceux de ce Parti , il y en avoit un petit Nombre, qui ne fouhaitoient un Ré- gent 9 que pour gagner du Tems prouver le Moyen & les Occafions Le rétablir le Roi Jaques: de -forte que, quand le Prince d'Orange fat déclaré Roi, non feulement ils deiaprouvérent la Conduite de ceux qui l'avoient établi , mais de plus ils refu- ferent de lui prêter Serment de F délité. Ceux de ce Parti , qu'on appelle les Non- Jureurs > avoient à leur tête Sancrtft, Ar- chevêque de Canterbuv) /, & plufieurs au- tres Seigneurs tant Spirituels que Tempo- rels Quoique îe Refle des Tories tint pour le Droit héréditaire & un Régent , il ne laifla pas de prêter Serment au Prince d'Orange, lorfqu'il eut été proclamé Roi. Ils fe fau- voient au moyen de la DiftincT:ion entre Roi de Droit, & Roi de Fait; & prétendoient , qu'on eft obligé à prêter Serment de Fidéli- té à un Roi de fait , dans le même tems qu'on en reconnoit un autre qui eft Roi de Droit. Ils autorifoient leur Conduite par un Statut de Henri VII, qui deffend de recher- cher Perfonne, pour avoir adhéré au Par- ti de celui qui feroit Roi de Fait. Mais , ceux-ci fe parrageoient encore en deuxClafles. Les unscroyoient, que le Roi 4e Fait étant une fois établi , fans qu'ils y eui Juillet, Août, et Septembre. 393 euflfent contribué , ils'étoient obligés d'a- vancer fes Intérêts aux Dépens même du Roi de Droit. C'étoit le Cas du Comte de NoU îingham & de plufieurs autres , qui furent élevez à de grands Emplois parle RoiGuiL- laume. Les autres prétendoient , que leur Serment de Fidélité au Roi de Fait ne les empéchoit pas de travailler à fa Ruine, en procurant le RétablifTement du Roi de DroiU C'eft ainfi que ces Tories rigides abufoient du Serment qu'ils avoient prêté d'être fidèles au nouveau Roi. Les Wbigs n'étoient pas tous non plus du même Sentiment. Ils avoient bien tous con- couru àreconnoitre l'Abdication de jAQUts, & à prendre de nouvelles Mefures , mais dans différentes Vues. Les uns vouloient prendre cette Occafion, pour diminuer l'Au- torité du Roi,& élever celle du Peuple fur fes Ruines. Ils empêchèrent, qu'on n'exami- nât la Naiflance du prétendu Prince de Galles : parce qu'ils avoient Deflein de fai- re envifager la Couronne comme élective, & qu'ils n'étoient pas fâché de laifler cette Queftion indécife ; pour tenir leur Roi dans la Crainte, & les obliger à gouverner fuivant les Loix Ceux de ce Parti , qui n'étoit pas fort nombreux, portoientleNomde Wbigs Républicains. Les autres étoient dans l'Idée, qu'on avoit eu Raifon de prendre un autre Roi à la place de J a que s : mais, ils croy oient, que, dans le Choix d'un Succefleur, il ne falloit pas s'éloigner, fans de bonnes Raifons , de la Famil* 394 Bibliothèque Britannique, Famille Royale ; bien moins encore renver- fer la Monarchie, & élever fur les Ruines un Gouvernement populaire. Tout ce qu'ils vouloient, c'eit qu'on faifit cetce Occafion démettre des Bornes à la Prérogative roya- le , & qu'on affermit les Droits & la Liberté de la Nation. La plupart des Eccléfiaftiques étoient dans les Principes des Jones. Ils admet- toient, comme eux , la Diihn&ion entre Roi de Droit & Roi ae Fait; & les uns prêtè- rent Serment de Fidélité au Roi Guillau- me , tandis que les autres fe rangèrent du côté des Non-Jureurs. Un grand Nombre cependant n'étant pas fatisfait de cette fubtile Diftinclion , peu propre à mettre la Confidence en repos , avoit Recours à un autre Subterfuge, auflî mal -fondé que le précédent. Ih difoient,que le Prince d'O- range avoit eu Raifonde faire la Guerre au Roi Jaques. Or, dans une jufte Guerre, riflue doit être regardée comme la Déci- fîon du Ciel. Donc, les Succès du Prince lui donnoient un Droit de Conquête fur le Roi Jaques, & un Tire à la Pofieffion de tout ce qui avoit appartenu à ce Monar- que. ,. Telétoit,, , dit Mr. Tind^l, „ l'Etat „ des Partis à la Révolution; ce tel étoit 3, le Partage des Opinions fur les Matie- „ res de Politique dans la Nation & lePar- „ lement, lorfque le Roi Guillaume par- 3, vint à la Couronne C'eft-là la Clé des ,, piaffantes Oppofitions que ce Monarque v rem Juillet, Août, et Septembre. 395 „ rencontra bien - tôt après , de la Parc „ même de ceux qui avoient pris ilncére* ,, ment ion Parti . "jufqu'à la Fuite du Roi „ Jaqjùes. A P-u-ie de ce même Principe , ,, on rcàd aufiîRaifon de ce grand Nombre 3, de DirHculuz, d'embarras , de Complots, ., & de Confpirauons , qui troublèrent Ton „ Règne, & le firent plus d'une fois for- „ mer la Réfolution d'abandonner fon Ro- „ yaume pour fe retirer en Hollande* „ ARTICLE X. The Female Spectator. London, printed and published by T. Gardner, at Cowleys Head , oppofit St. Clemenfs Church , in the Sir and. Cejl - à - dire , La Spectatrice: à Londres , chez T. Gardner. &c. C'efl un in $vo , donc il paroit tous les Mois une Brochure de 6o à 80 pagg. &dont îa première pa- rut fur !e milieu d'Jvril 1744. L'Auteur de cet Ouvrage a beaucoup hazardé de fe produire fous un Titre , ou; réveille d'abord l'Idée d'un excellent Livre , dont il écoit à craindre que laCom- paraifon ne fût defavaotagcufcaufien. Pour fou- 396 Bibliothèque Britannique, foutenir le Caractère de Spectatrice, & ce point des onorer le Speftateur, dont on fe dit la Sœur , il faut des Talens peu communs. Sans cela , il eft à craindre, qu'un Ecrivain, qui s'eft aquis , à fi jufte Titre , tant de Réputation, ne renie le Pa- rentage , & ne fafle palier cette prétendue Sœur" pour un Enfant fuppofô, qui ne fut jamais de fa Famille. La facilité, avec la- quelle ces Réflexions fe préfentent à l'Ef- pnt, ne nous permet pas de douter que la Spectatrice ne les ait faites,* & qu'elle n'ait fenti combien fon Entreprife étoit pé- rilleufe. Mais , fi cela eft , il faut que , remplie d'une noble Confiance , elle ait crû pouvoir foutenir un fi grand Nom , quand il fut tems de fe retirer, elle fuivit la Perfonne qu'elle prenoit pour fon Mari : elle monta avec lui dans un Carofle, qui les conduifit à un Cabaret, où elle fut fort furpnfe de fe trouver avec un Etranger, qui lui tenoit ces Difcours auxquels elle n'étoit Juillet, Août, et Septembre. 413 c'étoit point accoutumée. Elle appelloic du monde, lorfque Ton Mari furvinc, qui lui repréfenta les mauvaifes Conféquences qu'aurou eu cette Avanture, û elle lui é- toit arrivée avec une autre Perfonne que celle de Ton Ami. Il ajouta, qu'il avoit re- marqué tout ce petit Manège, & qu'il Jes avoit fui vi, dans le Defïein de cirer Vangean* ce de l'Affront, qu'on lui faifoit,- mais que, puifque fon Ami ne l'avoit point connue, & qu'à fon Attachement pour lui, il l'avoit prifc pour tout autre que ce qu'elle étoit, il n'avoit aucun lieu de fe plaindre de lui. Cet Artific:' produillc fon effet: & la fem- me, qui a ignore que c'etoit un jeu, are- nonce pour toujours aux Mafcarades. 11 ne faut pas s'imaginer, que la reflem- blance des Habits n'ait réellement jamais rien occafionné de femblable dans ces Af- femblées. La Spectatrice en rapporte deux Exemples bien funeftes. L'un d'une Dame , qui , ayant reconnu fon Mari dans une Mafcarade , le crue- amoureux d'une femme avec qui il s'entretenoit. Lajalou- iie, qu'elle en conçut , la fit réfoudre à ne point le perdre de vue, & à le fuivre quand il fortiruit. Maiheureufement pour elle, il fe trouva un Maique habillé de même: le prenant pour fon Mari, elle le fuivit dans la Maifon où il entra Quand elle eut re- connu fon erreur, elle voulut fe retirer; mais , les manières engageantes de cet Hom- me, l'envie de Jui demander des Nouvel- les de fon Mari , & fa Jaloufie , la firent Tm. XXI 11. Part. II. Dd relier* 414 Bibliothèque Britannique,' refter; $ l'Amour de la Vangeance la per- dit. Sod Mari fut inftruit de tout dès le Lendemain. Le Ton , fur lequel il lui en par- la , la tk retirer chés les l^arens,- qui, dés 10 j , le brouillèrent pour toujours avec luic 11 fallut trfuite fe battre contre le Galîant de Ta femme ; & tous deux furent dan- gereulement bleifés. Enfin, après être gué- ri d* feu bieffures, le Gailant alla en .Fra/z- ce , 011 fa MaicrelTe le fuivit bien-tôt après. L'autre Exemple eft celui d'un Frère & d'une Sœur, qui fe trouvoient dans cette Ailemblée pour la première fois Celle-ci, prenant une autre Perfonne pour fon fice, le pna de vouloir la remmener au Logis. Sans lui répondre, il s'avance avec elle du côté de la porte, la fait monter en Carof- fe , & la conduit chés lui; ou, après en avoir criminellement abufé, il la renvoyé, en prenant des précautions pour que fa Maifon ne fut point reconnue. Cette jeu- ne Demoifelle, qui devoit fe marier avec un Gentil-homme de fa Province, conçut tant de honte du malheur qui lui étoit ar- rivé, qu'elle ne voulut plus le voir , & eft allée palier fes jours dans la retraite. t'aux-Hall n'efi: pas tout à fait fi dange- reux que le Balmafqaé; mais, il ne îaifle pa< de l'être beaucoup. La Mufîque, les délicieux Bofquets, les Endroits écartés, & la facilité qu'un Amant a d'entretenir fa Maitrefle , font de dangereux ennemis de l'Honneur. Un certain Homme, dont la Counoiilance n'eft pas fort honorable pour Juillet, Août, et Septembre. 4 rj pour les jeunes Dames, s'eft vanté plu- sieurs fois ,que l^aux-Hall écoit le Temple de Flora, donc, depuis long - tems , il avoit été établi Grand- Prêtre. Il eft allez à crain- dre, que la Chofe ne foit que trop vraye. L'on trouve, à la fuite de ces Réflexions, une petite Hiftoriette, dans la quelle ce prétendu Grand-Prêre joue un aflez vilain Rolle. Il avoit cherché à féduire une jeune Fille, pour la faire. fervir aux plaifirs d'un Seigneur. Déjà la Mère étoit gagnée , & elle promettoit de rendre bon compte de fa fille : déjà il en avoit fait fête à ce Sei- gneur, au nom du quel il agilîbit, lorfquc la jeune Fille , préférant fon honneur à tout aurre chofe, quitta la Maifon de fa Mère, & fe retira chez un Curé pour en être pro- tégée. Celui-ci , ne voyant guéres de jour à pouvoir la garder chez lui "contre la Vo- lonté de fa Mère, lui propofa de l'épou- fer; ce qu'elle accepta avec joye. Telle eft, en gros, la Nature de l'Ou- vrage que nous annonçons. Il n'eft pas aifé d'en donner une Idée bien jufte dans un Extrait. Il faudroit pouvoir en repréfen- ter la beauté du ftile, la vivacité des pen- fées, la juftefie des raifonnemens, & la fi- celle des réflexions: mais, pour cela, il feroit néceffaire de s'arrêter prefque fut tout; & ce ne (èroit plus un Extrait, mais une Traduction. Il faut efpérer, que quel- qu'un en donnera bientôt une, qui mettra le Public en état de jup:er du mérite de Dd x la 416 Bibliothèque Britannique, la SpFCTATRich *. Son Ouvrage femblede* venir de jour en jour plus parfait,* & Ton s'apperçou , que , bien loin de tomber , com- me la plupart des Ecrivains périodiques , les dernières parties ont quelque fupériorké fur les précédente^. ARTICLE XL LETTRE fur un Article des Mémoires de Trévoux contre feu Mr. Burnet, Evêque de Salisburi f. MONSIEUR, JE fai que vous ne lifez pas les Memb- res de Trévoux. Vous m'avez chargé de faire cette Ledture pour tous deux; c'eil - à - dire , que vous avez exigé des moi, que je vous en rendifïe Raifon de tems en tems. Je l'ai déjà fait quelquefois, & je vai continuer aujourd'hui. Comme vous m'avez laifle le Choix des Articles dont je dois vous entretenir, je me déterminerai pour ceux qui m'ont le plus frapé. En voici donc un de ce genre, mais qui n'eft pas * Cet Ouvrage s'unjriue à la Haye , chez P. De Juillet, Août, et Septembre. 417 pas fort nouveau, parce que nos Librai- res reçoivent ce journal un peu tard. J'en fuis feulement au 1. Volume de l'Année 1745- J'y ai trouvé une violente Satire contre le célèbre Gilbert Burneî , E' êque de Salisburi. Le Sujet m'a paru intérellant, & je n ai pas héfité un moment à en faire la Matière de ma Lettre. Sa Mou fut aiïii- rément une Perte pour la République des Lettres, & fur -tout pour le Parti Protef- tant. £n voilà afiez pour mériter notre Efti- me; mais, j'ai des Raifons particulières de m'intérefler à fa Mémoire , que je vous ex- pliquerai tout à l'heure. Un Auteur , en pariant de feu Mr. Burnet, a dit que c'eft un de ces Hommes fur qui on n'a point fu garder de Milieu. Il a éré admiré par les uns jufqu'à l'Excès, & mal- traité par les autres d'une Manière injuite. D'un côté, bien des Eloges, & de l'autre bien des Injures. Il a été croifé , & même perfécuté, pendant fa Vie. Long-tems après fa Mort, il y a des Gens qui fe plaifent en- core à le décrier, & à le rendre méprifa- ble. La Société des Jéfuites s'efl diftinguée parmi ces derniers. Leurs Jourualiftes vien- nent d'exhaler contre ce Prélat leur Ai- greur & leur Animofité, d'une manière a ne garder plus aucune Mefure. On favoit bien que la Société ne l'aimoit pas. Mais, on au- roitcrû, que, trente ^ns aprè« fa Mort , ils auroient commencée Poubîier. Cependant, en vient de lt$ voir fe jerr.er fur lui avec au- Dd 3 taD* 4i 8 Bibliothèque Britannique , tant d'Acharnement que jamais. 11 faut vous dire à quelle Occafion. Leurs Journaliltes donnoient l'Extrait d'un Nouvel /Jbrégé Chronologique de Vhifioire de France , par Mr. le Préfiaent Hénaut, Cet Auteur , pour donner le Caractère de Char» les II, Roi d'Angleterre, eft allé malheu- reufement citer ce qu'en avoit dit Mr. Bur- net dans Tes Mémoires . Au feul Nom de Bur- net , voilà nos Journaliftes aux champs. Ils 13e le polTédent plus : &, oubliant leur Au- teur principal , ils fe jettent à Corps perdu fur celui qui étoit Amplement cité, & rem- plirent à peu près une Feuille des plus vio- lentes Injures contre lui. Ils en veulent, & à fa Perfonne,& à fes Ecrits. Son Hijloire delà Réformation eft ce- lui de fes Ouvrages qui eft le plus connu. Je ne m'arrêterai pas à vous le louer. Jefai que vous l'avez lu ; & on ne fauroit le connoître, fans l'eftimer infiniment: mais peut être ne favez vous pas, que le Parle- ment en Corps l'en remercia à peu près com- me il a remercié dans la fuite le Duc de Marlboroug pour les Services rendus à la Nation. Vous trouverez cette Particularité dans un Eloge de ce Prélat, inféré dans le Journal Literaire de la Haie *„ Celui de Trévoux n'a qu'un mot fur cet Ouvrage. Ce que l'on en dit n'eft qu'une forte de Début pour paffer à un autre. ?> Nous ne parlons point ici de fonHiftoi- ? foyrn, Liter, Tvm, VI. />. zo%. Juillet, Août, et Septembre. 4Î9 „ re de la Religion Anglicane» difent ces Journalises: ,, les Fauilétez , qui y régnent, „ font un Objet de Controverse. C'ellde ce „ qu'il appelle lui - même YHifloire de Ion „ Tems. Nous avons crû, qu'il étoit dePïn- „ térêt d'un Public, peu en garde contre le „ Faux qui règne dans ce Livre , qu'on le „ mît à portée de le lire avec les Précau- ,, tions qu'exigent le Caradtere perfonel „ d'un Auteur toujours décrié pour fâ oau- „ vaife-Foi , chez tou^ ceux que l'ont con- „ nu. Sa Hardieflfe à altérer les Evénemens „ vafouvent jufqu'àl'Impofture. . . Quand „ il eft queftion de noircir ceux qui n'é- „ toient pas de Ton Parti, ou cie décrier „ l'iiglife Romaine , les Fables les plus ab- „ furdes deviennent entre les Mains des „ Faits réels, comme un Propos des Ha- „ les, le Savetier du Coin, ou la Comé- „ re du Quartier, font pour lui des Garans „ furs, & des Autorités graves. . . On y „ trouve une Ignorance groffiere des Faits „ les plus répétez dans les Gazettes. , . . „ Ils ne fauroient fe ré foudre à t-acer le „ Précis de toutes les Abfurditez dont la v ftupide Oftentation, l'Ignorance, la Paf= „ fion, & la Mauvaife-Foi de l'Auteur ont „ farci fon Ouvrage. ... Ils font duSen- ,, timent d'un Critique, qui, l'aiant comparé „ à certains Egards à Éucbauan , reconnoit, ,, qu'il l'emporte fur lui en Fan/feté, en Fu „ reur, &en Rancune* . ♦ . Enfin, ajoutent „ ils, on reconnoit à tout ce que Burmt „ dit de lui, & à fes Maximes, un Efpri» D 4 „ li. 420 Bibliothèque Britannique , „ vré à l'Intrigue & à ]a Cabale, un Pre^bité? 5, rien décidé , un Républicain féditieux , ,, un Fauteur ou Tolér.antilme le plui u:ji- „ verfel en Matière de Religion , une Liai? „ Ton intime avec tous les Eiprits brouil- „ îons & rebelles, qui ont pendant plus de „ quarante Ans mis leTroubie dans ici lies „ Britanniques &c. ,, Apres cette longue Kirielle d'Injures , tLnt j'ai fupprimé une Partie , on nous avertit dans une Note , que Burnet avait ordonné par (on lefïament de ne laïffer voir le Jour à [on Hifloire , qu'un Tenu fort long après fa Mort , afin que la Géné- ration vivante ne pût pas lui aonntt unanime- ment le Démenti ; mais , que la Cupidité de fes Héritiers a frujîré Jon Attente. Dès que cette Satire fut arrivée dans no- tre Ville , on la lut dans une de nos Socé- tez de Gens de Lettres. Un de nos Meilleurs interrompit ici la Lecture , & eHàïa de tenvoier la plupart de ces Traits injurieux d'ob ils éroient venus. Voici à peu près comment il apoftropha les RR. PP. „ Vous dites, mes Pères , que l'Ouvra- „ ge de Mr. Burnet eft mal intitulé* Hif> ,, toire de Jon 7hns, qu'il falloir changer le 5, Ture en celui-ci , Mémoires de Gilbert î, Burnet , où Von trouvera un Pavégirique ' „ continuel de l 'Auteur , de fa Famille, de fes ?) 4 mis . &c é? une Satire amere & violente de „ tous ceux qui ont eu le Malheur de lui dêplai- „ re Fort-bien; mais, changez donc aufîî le jj Titre de votre Journal, & fubftituez lui ii Celui - ci : Mémoires de ta Compagnie de Jé\ Juillet, Août, et Septembre. 4%% ,, Jus, où l'on trouvera des Eloges continuels de% „ Savans de cette Société , er et mordantes Sa- ,, tires de Vais ceux qui ne penjent pas comme „ eux. On reconnoïc dans l'Ouvrage de „ Burnet, dires -vous & dans les Maxi- „ mes , un Et frit liuré à l'Intrigue cf à la „ Cabale. Hé! mes h 'ères , ne connoïflez- „ vous que lui à qui ce Portrait convîen- „ ne ? Si Burnet avoit ordonné, qu'on n'impri- „ mat ces Mémoires que long-tems après fa „ Mort,c'eft afin, dites vous encore, qu'on „ ne pût pas fi facilement le convaincre de ,, A^7?/ oflge Mais, ne feroit ce point aufli „ par cette Raifon, que vous avez attenduà ,, le noircir , plus de trente Ans après fa „ Mon ? Perfonne ne pénètre mieux les ,, mauvaifes Intentions des autres, que ceux „ qui en trouvent de femblabîes dans le „ Fond de leur Cœur. Les Fables les plus „ abfurdes deviennent entre [es Mains des Faits „ réels. Un Propos des Haies , ajoutez vous „ fort élégamment, le Savetier du Ccin^ la „ Commère du Qjtartier ,jbnt fes Garans. Vous „ épelés trop lavamment ces Sources -là, 3, pour n'y avoir jamais été. Vos Portraits „ font aufli de pure Imagination, & noa „ d'après Nature. C'eft un Presbitérien déci- „ dé , un Fauteur du foiérantîfme le plus uni- „ verfel en Matière de Rei'gion Partifan des „ Fanatiques, &c Mais, la Paflion vous aveu- „ gle t-elle allez, pour ne pas vous aperce- „ voir, que vous dites des Chofes contra- ,, diétoires? On ne conçoit pas comment » un même Homme poorroic être, d'un cd- Dd 5 » t* 422 Bibliothèque Britannique, „ té un Presbitér.en décidé £p Avà des Fana- „ tiques y & de l'autre un Tolérant univer „fel, c'eft-à-dre, mdifeunt pour toute „ Sedte; car, c'e(tainfi que vou.s l'entendez „ par-tout, & non au Sens du Suport que ,, la Charité doit aux Errans , & qui efl une „ Vertu. „ Il me femble , Monsieur, que cette faillie peut déjà vous aider à juger de cette Satire. Mais , vous attendez fans doute quel- que-chofe de plus. Voïons donc quelques unes des prétendues Impoftures répandues dans les Mémoires du Doftear Burnet. Il a ofé dire, que le fameux Livre de Mr. de M eaux n'étoit pas un Portrait fidèle des Sentimens de fon Eglife. ,, L'Expofition de la Ifei „ difent les Journalifles, „cet Ouvrage fi fo- „ lide, fi judicieux , (i aprouvé dans toutes „ les Parties de PEglife Catholique , &oïi „ fa Créance efl mife dans un Jour aufîi „ vrai qu'il efl beau , n'efl repréfenté par ^ le Docteur Burnet, que comme un Livre „ oh YEvêque de Meaux couvre de Fard , avec 3, la dernière Propreté , tout ce que l' Eglife Ro- „ maine a de Laideur. „ N'êtes -vous pas furpris , qu'on ofe nous donner YExpofition pour un Ouvrage oh les Sentimens de l'Eglife Romaine ont été mis dans leur vrai Jour ; & qu'on ait la Témérité d'avancer, que ce Livre a été fort aprouvé dans toutes les Parties de V Eglife Catholi* quel Ce qu'il y a de fingulier, c'eft que les téfuites eux-mêmes font ceux qui l'ont le plus blâmé. On fait allez, que s'ils n'ont pas Juillet, Août, et Septembre. 423 pas éclaté contre ce Livre, c'eft qu'ils ont été retenus par la Politique. Leur Perç Maimbonrg a allez fait connoître leurs Sen- timens là-deflus, quoiqu'il n'ait déûgné Mr. BoiTuet que fous un Nom emprunté. Son Hjîoire du Lathéranifme parut peu de tems après VExpofition. 11 y parle du Cardinal Contarini, qui l'an 154 1. fit une Expofition de Foi, qui nefatisfit, ni les Catholiques, ni les Luthériens; & voici ce qu'il dit de la Tentative de ce Légat du Pape. ,, On a vu ,, de tout tems, que tous ces prétendus Ac- „ comraodemens & Ménagemens de Reli- „ gions qu'on a voulu faire pour réunir les ,, Hérétiques avec les Catholiques dans ces „ prétendues Expofitiom de Foi; qui,fupri- „ mant, ou diftimulant, ou n'exprimant „ qu'en Termes ambigus , ou trop radou- „ cis , une partie de la Doctrine de l'Egli- „ fe, ne fatisfont ni les uns ni les autres, „ qui fe plaignent également de ce qu'où „ biaifedans une Chofe auflî délicate que la 3, Foi. * „ Avouez, Monsieur, qu'on reconnoit beaucoup plus aiiëment Mr. Boffuet dans ce Portrait , que TEglife Romaine dans fon Ex- pofition. Voici dans quel Sens on peut dire, que cet Ouvrage a été aprouvé dans toutes les Parties de VEglife Catholique. Les Evêques , dont l'Aprobation paroit dans le LivPe , é- toient des Janféniftes, qui penfoient e-ffecti- vement de cette Manière. Pour les Aproba- tions * Hift. duLutWranilme.r^w. /. t, jSï. 424 Bibliothèque Britannique, tions des Cardinaux & du Pape lui-même, en fait aflèz, qu'elles ont été données par pure Politique. Tout ie monde fait, que le Deflein de cet Ouvrage fut un \rtifice, pour ramener les Proteftans de France. Si le Frontifpice du Livre eft décoré du Nom d'In- nocent XI, e'eft que ie Prélat fit fentir à Rome , que c'çtoit- là une pieufe Fraude, pro- pre à faire rentrer dans le Sein de l'Eglife un grand Nombre de Réformez. Malgré cet- te Raifon éblouïiîan te , le Saint Père fe fit folliciter trois Ans entiers, avant que de con- fentir à donner à cet Ouvrage i'Aprobation fimulée qu'on lui demandoit. Mr. Burnet n'a donc rien avancé fur ce Livre captieux, qui ne foit de Notoriété pu- blique. Mr. de Meaux a été généralement regardé comme un habi le Peintre , qui excel- loit fur-tout dans le Coloris, & qui, pour nous faire époufer une Femme fort laide, fut, dans le Portrait qu'jl en fit, déguifer fes Traits les plus choquans. Aufîi il réufficà féduire beaucoup de nos Proteftans de France. Mais, après tout, ce Fard ne trom- pa que ceux qui cherchoient à fe fa-re II- lufion , & à qui leurs Parlions cachoient l'Erreur couverte du Voile dont l'artificieux Prélat i'avoitenvelopée. Preuve que, pour donner dans le Piège, il faloit être détermi- né par l'Intérêt temporel , c'eft que ce Li- vre eut un Sort tout diférent en Angleter- re. On effara d'en faire Ufage fous ie Roi Jaques, peu de tems après la Révocation de ïEdit de Nantes ; mais , l'Artifice ne réiiflit pas, Juillet , Août , et Septembre. 425* pas. Les Tillotfon, les Stillingfleet , & quel- ques autres fa vans Prélats, paiTérent fi bien 1 Eponge furie Vernis, ou plutôt fur le Fard, qu'on a\oic mis fur les Sentimens de l'Egli- fe Romaine, qu'elle parut dans fon Etat na- turel, c'eit à-dire fous une Figure à ne fé- dune plus perfonne. Mr. Burnet dit dans Tes Mémoires , que , dans un é e à têce, qu'il eut à Paris avec le Pert Boitrualoue, ce Jéfuite eut laFranchifc de lui avouer, qu'il n'étoit pas de cesCatho- lioues rigides , qui envoïoient tous les Pro- teitans en Enfer. Nos Journaliftes n'en veu- lenc rien croire, parce que hors de VEglifeil n'y a point de Salut. Que cous les Hugue- nots aillent infailliblement en Enfer, c'eitlà le ' ugement du Savetier du Co-in, & un Propos digne des H.des. Une Sentence auiîi témé- raire ne devroit être que dans la Bouche de la plus vile Populace. Cependant, à la Hon- te de l'Eglife Romaine, c'eft chéseux le Sentiment du plus grand Nombre: mais, il y aulTi quelques honêtes Gens plus fages & plus modérés fur cet Article; & c'eft faire Honneur à ce célèbre Prédicateur, que de lavoir mis dans cette Clafle. Ces Articles ne font pas d'une grande Importance; mais, en voici un d'une toute aune Narure. On aceufe le Dofteur Burnet d'avoir corrompu la Morale dans un Point eflentieî , & d'avoir débité des Maximes fort contraires au Chriftianifme. Le Cas eil des plus graves. Vous fériés - vous attendu, MûNiiEUR, que cette Accufation fûtvenue d'une ±20 Bibliothèque Britannique, d'une Société aufîî décriée par ces Endroits- là, que l'eit celle des Journalises; d'une Société, qui a efluié les Attaques les plus vi. vesiur le Relâchement de fes Cafuïfte>. ? La Prudence voudroit, ce femble , qu'on ne Couchât pas cette Corde. Cependant, jere- connois de bonne-foi, que fî Mr. Burnet avoic enfeigné ce qu'on lui impute , nos Journaliftes ne laifferoient pas d'érre fondez à lui en faire de vifs Reproches. Voici i'Ac- cufation. 9, Burnet, dans l'Efpérance de s'infinuër „ dans la Faveur de Charles II, fit une Ac* „ tion , qui mérite d'être connue par-touc 3, 011 fon Livre peut être lu. Elle fert à ca* „ raftéiïfer le Génie de l'Auteur. Ce Prin- ,, ce étoit fâché de voir, que Catherine de Portugal fa Femme fûtftérile. Les Cour- tifans raifonnoient beaucoup fur les Moiens qu'on pouvoit mettre en Ufage „ pour l'en confoler. Les uns propofoient >, le Divorce, les autres la Poligamie. Le „ Duc de Lauderdale en demanda fon Sen- „ timent au Docteur Burnet. Celui-ci don* >, na par écrit fa Décidon raifonnée fur les n deux Objets propofez: &, pour concilier ,, tous les Projets , établit, que, dans le Cas „ de Stérilité, le Divorce & la Poligamie „ font également licites. ,, Mr. Burnet, dans fon Hifioire, dit préci- férnent le Contraire. Confultéfur ce Point, il répondit, que le Divorce & la Poligamie étoient fi décriés, quVs étoient rejettez par toutes les Sociétés Chrétiennes. l\ ajouta , que 5) Juillet, Août, et Septembre. 4a? que de femblables Ouvertures jeiteroient l'Etat dans des Co?ivuUî»ns , &f caujeroient de longues Guerres y s'il naijfoit des Enfans d'un Mariais fondé là-dejjus. Monfr. de la Chapelle a raporté dans fa Bibliothèque rfngloijg cotte prétendue Déci- fïon raifonnée du Do&eur Burnet , où Ton peut la voir tout au long. Elle finit de cet- te Manie e. Je conclus donc en déclarant , que je ne wi> rien de Ji fort contre laPoligamie qui pwffe remporter Jur la Confédération du grand £? éminent Danger qui menace mfiblement tant de mdiers de Perjïnnes Ji elle n'ejl pas permi- fe *. Remarquez, je vous prie, Monsieur, que ce CaPuïfte conclut à permettre la Poliga- mie à Charles 11 , en Confidération des Dan- gers que court le Roïaume , fi Ton n'a pas cette Complaifance pour le Prince; & que Mr# Burnet condamne toutes les Proportions de cetre Nature, à caufe qu'elles tendent à produire une longue Succeflîon de Guerres civiles. Deux Conclufions fi contradictoi- res peuvent - elles venir du môme Hom- me? Cet Auteur Anonime , quel qu'il foit, ne compofa cette petite Pièce en faveur du Divorce & de la Poligamie, que pour faire Pa Cour au Souverain : & il ne faut pas douter, qu'elle ne lui fut portée fecret- tement. SupoPons pour un moment qu'elle fût du Docteur Burnet > il faudra encore acor* * Bibliot, Angloife, Tcm. XII. p. 35-4. 428 Bibliothèque Britannique, acorder cette Décidera relâchée avec une Lettre fur un Ton bien d-férent, qu'il avoit écrite au Roi il n'y avoit pas iong-tems. On voit dans le Tome il de fes Mémoires â jgu'il écrivit à Charles il une Lettre afiës forte fur les Galanteries. „I1 y peignoitau 3J Roi tes Déréglemens, les mauvais triées 3i qus cela farfoit fur ia Nation* 11 Jui re- 3i préfentoic , bmbarras de fon Re- »> gne étoient ces Jugemens d'une Provi- „ dence qui le chanoit. Il alloît jufqn'à di« „ re, cjue ce p éto i [à qu'une foible Partie „ des Peines qu'il avoit à craindre, li lui M dîlbît en propres fermes: // /akî re/or- «,, mer votre Coeur 3 ebaffor d'auprès de vous 3, toutes les Fer ormes qui y font des. Occafions 3) ie l*écbéA & commencer par vos MaitreJJes. 33 i\ ajoute 3 quej'es mauvais Exemples attirent „ bien des Gens dans le même De/ordre^qu il eft „ cau.ep.ir là que le Vice marche là Tête levée» ,3 II fini {Voit fa Lettre, en conjurant ce Prin- „ ce, par les plus preffans Motifs, dechan- „ ger de Vie. *,, Le Roi fut très bien de qui venoiC cette Lettre 5 & il en fut ex- trêmement piqué. Supoionspréfemrment, Monsieur, que l'Auteur de cet ajoute Mr. de la Chapelle , nous ferions tous bien à plain- dre, fi l'on s'avifoit, après notre Mort , de nous attribuer quantité de ce\ Pièces fugitives, que nous tranferivons quelquefois , ou pour V Ujage de nos Amis , ou pour le nôtre ! Cette Imputation , faite à Mr. Bumet , eft tirée d'un Auteur Anglois, nommé Higgons y qui fît imprimer en 1725 des Remarques Hiftoriques £f Critiques fur l'HiJloire de VE- vé^BuRNET. Les Journalifles nous le donnent pour un Gentilhomme Anglois d'u- ne Probité reconnue, parfaitement inftruit de l'Hiftoire ancienne & moderne d'Angle- terre, qui a fini fà Critique des Mémoires de Bumet par cette Conclufion : qu'il y a dans cet Ouvrage autant de Menfonges > que V Auteur dans fa Con/cience connoiffoit comme tels y que de Pages sc'eji- à- dire 846. Les Jour- na- Juillet, Août, et Septembre. 431 naliftes ajoutent, qu'en relevant ces Fauffe- tez,le Critique Anglois a pouffé fa Réfutation jufqu'à la Démonftration. Ecoutons préfentement Mr. de la Chapel- le. „ Le Moïen général & prefque univer- „ Tel, dit-il, que l'on a mis en Oeuvre juf- „ qu'ici , pour décrier l'Hiftoire du défunt „ Evêque de Salisburi , a été de le rendre 5, odieux , & de décrier fa Perfonne. Ses ,, Amis ont eu beau repréfenter , que ce „ Procédé, très vilain en lui-même, prou- „ voit moins l'Infidélité de l'Hiftoire, que ,, la Vérité de fes Narrations, puis qu'il n'y „ a guère que cette Vérité qui chagrine „ leslntéreftés. Ces Repréfentations n'ont „ pu arrêter le Torrent des Injures: &quan- „ tité de Gens font venus , les uns à la file „ des autres , avertir le Public de leur im- „ puiflante Colère. Mais, le plus imperti- ,, nent de tous les Ouvrages de ce Genre 5) eft. celui de Mr. Higgons. Comptez, que ,, Mr. Burnet n'y eft jamais réfuté, que par „ les plus infâmes Lieux-communs que la ,, Haine peut fuggérer. Ce Critique s'ima- ,, gine avoir fait Merveille , quand à des „ Faits bien circonftanciés il oppofe quel- „ que Coup de Dent,quclque Raisonnement ,, vague, quelque Probabilité, qui puiffe „ rendre l'Auteur qu'il combat, oufufpecl:, „ ou ridicule *. „ Ceft ce dont Mr. de la Chapelle donne divers Exemples. „ Si ceux, qui • Eiàltec. Angloife, T. XL p. j/î, Ee 2 432 Bibliothèque Britannique, „ qui ont inféré dans le Di&ionaire de ., Mureri l'Article de Burnet,, , difenc les Journaliftes , „ avoient lu l'Ouvrage de Mr. Higgons, ils auroient évité d'y mettre , qu'il avoit encouru la Difgrace de Charles II, pour avoir refufé un Eve- ché. 11 ne dut fa Difgrace, qu'à fes Intri- gues, àfesLiaifons avec le Duc deMon- mouth, & les autres Chefs de la Révol- te. C'étoit un Ennemi mortel de Charles & de Jaques. Sa Haine alloit julqu'à l'Emportement & à la Fureur contre les Princes de la Maifon de Stuart. Il s'éioit *, fl peu ménagé à cet Egard, que, pour le „ mettre à l'abri de l'Orage dont il étoit „ menacé , il s'abfenta , & vint en Frauce. „ Je vous prie , Monsieur, d'obferver , que cet Article touche immédiatement ce- lui ou l'on nous donne le Docteur Burnet pour un lâche Flateur,pour un indigne Pré- varicateur, qui, pour faire fa Cour à Char- les, lui préfente un Mémoire en faveur du Divorce & de la Poligamie. Cela eft de la même Juftefie,que quand on nous a dépeint Mr. Burnet comme un Presbitérien écbaufé , & un Tolérant univerfel. Pour revenir au Dicî maire de Moréri, il eft confiant, que le Roi voulut attacher à lui Mr. Burnet. Pour l'engager à entrer dans fes Vues & à les favorifer, il lui of- frit un Evéché,- mais, notre Dodteur avoit trop de Délicatefie , pour accepter le Béné- fice à cette Condition. l\ comprit bien à quoi il s'engageoit, en promettant d'entrer dans Juillet, Août, et Septembre. 433 dans les Intérêts du Prince. Ce Refus fut une des principales Caufes de fa Difgrace. La Manière, dont Mr. Burnet a parlé de Louis XIV, eft un des principaux Griefs des Journaliftes. Selon lui , difeuc-ils , ce Prin- ce n'étuit point fidèle à tenir fa Traités: on devoit bien prendre fe s Mefures avec lui; &f il ajoute bien d'autres Traits pour deshonorer ce Monarque. Ces autres Traits, qu'ils ont en vue , font aparemment quelques Anecdotes inférées dans ces Mémoires , pour rendre un peu fufpecte la Bravoure du Roi. Pour vous montrer, Monsieur, mon Impartialité, je vous avouerai, que je fuis de ceux qui ont trouvé Mr. Burnet un peu trop vif contre ce Prince. Mais , il faut re- marquer, que, malheureufement, il s'étoit trouvé en France dans le Fort de la Perfécu- tion contre les Proteftans. S'il a dit, que Louis XIV n'étoit pas fort exact à tenir fes Traités , il y a bien apparence, qu'il avoit en vue la Révocation de VEiit de Nan- tes , & les Scènes tragiques qui fuivirenc l'Infraction de ce Traité. On ne doit pas oublier, que l'Angleterre a été fouvent en Guerre avec la France; & quec'efl dans un Teins de Rupture, qu'il mettoit dans fes Mé- moires ces Endroits un peu trop forts. En- fin , remarquons, qu'il s'y pique d'une fi gran- de Franchife, qu'il n'a pas épargné le Roi G u 1 l l a u m e , qui avoit été fon Héros. Il a relevé bien des Défauts de ce Prince, & touché certains Articles, qui font beaucoup de Tort à fa Mémoire. Ee 3 Mais 434 Bibliothèque Britannique, Mais, voici un Fait, que je tiens de fa pro- pre Bouche , & que je croi qui fera ici à fa place. L'Hirtorien le Vaffor^ fortant de Fran- ce , logea pendant une Année chez l'Evoque de Salisburi. Il y compofa les deux pre- miers Volumes de Ton Hiftoirede Louis XIII. Il en lut quelques Endroits à fon Hôte, qui attaquoient Louis ¥±IV\ & c'étoient ceux qu'il choififToit par préférence. L'Evêquc lui marqua , qu'il ne pouvoit que defaprou- ver ces Traits fatiriques , qu'ils feroient beaucoup de Tort à cette Hiftoire,& l'en- gagea à en retrancher les plus vifs: & il a déclaré plufieurs fois dans la fuite , qu'il en étoit encore refté beaucoup , qu'il defaprou- voit entièrement. Il paroit même, que le Prélat ne fe foucia pas qu'un Ecrivain fi violent logeât plus longtems chés lui. Mr. Burnet reconnoit dans fes Mémoires, qu'il avoit reçu beaucoup de PolitefTes à Verfailles ; qu'un Caroffe du Roi fe trouvoit prêt pour lui ; que le Roi ordonna , que tout ce qui Venvironnoit le traitât avec égard ; qiC ef- fectivement il fut comblé de Marques particu- lières de R e s jp e c t. Je foupçonne , que le Mot Angîois , rendu par celui de Refpetl , n'a pas autant de Force qu'en François, & qu'il en eft comme du Refpeêtus des Latins, qui dit bien moins aflurément. On fe feroit attendu, que nos journaliftes fe feroient ré- criés ici à l'Ingratitude contre le Doéteur Burnet^ qui, aiant reçu tant de PolitefTes à la Cour de France , n'avoit pas lailTé de maltraiter Louis XIV dans fes Mémoires. Mais Juillet, Août, et Septembre 435 Mais, ils ont pris un autre Tour: c'eft de rendre lufpeft tout ce Narré , & de le traiter cavalièrement de pure Fanfaronade. La Cour de fer/ailles, & Louïs XLV^ inti- mement unis avec Charles II £f avec le Duc d'York , donnent , s'il en faut croire les Mé- moires, des Marques de Confidération^qui au- roient flatté un Prince étranger , à un Pédant > Ennemi mortel de Charles , de Jaques , ff de la France ; à un Pédant , qui n'avoit d'Etat 6? de Qualité dans le Monde , que celle de Chapelain de Mr. Grimftone Gentilhomme Angloïs. Nous avons vu pourquoi Mr. Burnet n'é- toit alors que fimple Chapelain. Il avoit refufé un Evéché , que le Roi lui offroit à des Conditions que la Confcience ne pou- voit pas accepter. Mais , que dites-vous, M o n s 1 e u r , du Titre de Pédant , dont il fe trouve ici décoré à divcrfes Reprifes ? Je vous ai déjà dit, que cette mauvaife Satire fut lue dans une Société de Gens de Lettres. Quand nous en fumes à cet Endroit, nous nous regardâmes tous avec un Air de Surpri- fe, que je ne faurois vous exprimer. Qu'un Officier ignorant & brutal , que quelque Pe • tit-Maitre fort étourdi , eut traité de Pédant un Savant du Genre du Docteur Burnet , on conçoit que la Chofeeft poffible. Mais, ce qui étonne , c'eft que ce foient des Gens de Lettres, qui lui donnent ce Nom injurieux. Et de quelle Sorte font ces Gens de Let- tres? D'une Soicété, dont la ProfefUon eft d'enfeigner la Jeunefle, & de manier la Fé- rule. f.e 4 11 436 Bibliothèque Britannique, Il nous vint dans l'Efprit, qu'aparemment tes Jcurnaliit.es n'atcachoient pas à ce Mot de Pédant la même Idée que nous. Pour nous en aflurer, nous primes incelTamment ieur Diàwnaire de Trévoux , pour y chercher la Signification de ce Mot; & voici ce que nous y trouvâmes. Pédant, Jiégent , Maî- tre d'Ecole, Homme de Collège , qui a Sein d'injiruire & de gouverner la Jeuneffe. On trouve bien dans la Vie de Mr Bur- tî^î, qu'il a enfeigné. Il fut pendant quelque Tems Profeffeur de Théologie ; mais , il l'en- feignoit en véritable Savant. Il fiât l'épurer de toute la Crailé de l'Ecole. On peut en juger par fon Expçjuion de h Confejfion de Foi de t-Eglife Anglicane. Ne diiTimulons rien. Je trouve encore dans fa Vie, qu'il fit pendant quelques Années la Fonction de Pré- cepteur, & qu'il enfeigna le Latin à un jeu- ne Homme. Mais , favez vous , Monsieur , quiétoit cet Ecolier? L'Héritier préfomptif de la Couronne d'Angleterre , le jeune Prince de Giocefler. Àiais, croiez-vous , que ceux , qui régentent dans le Collège de la Rue St. Jaques à Paris, eufiént bonne grâce cftîppeller Pédans, un Hu'ët , un Boffuèï , un ténelon , & un Cardinal de Fleuri , parce que ces Prélats ont enfeigné le Latin à de jeunes Princes. Suivant le Diéiionaire de Trévoux , c'eft encore Péda?rterie, que de relever des Cbofes baffes £? petites , de déchirer outrageufemenl ceux qui ne font pas de notre Sentiment fur l'E- thnologie d'un Mot , fur V Intelligence d'un Paf- fig' Juillet, Août, et Septembre. 437 J'age de Suétone ou (T Horace. L'Evëque de >uri étoit d'un Caractère diamétrale- ment oppoié. 11 ne pouvoit fbuiirir, que lesSavans le querellafrent fur des Minucies. Je l'ouïs un jour pouffer vivement un Cri- tique un peu trop mordant, qui avoit eu une D il pute for é chaulée avec «vir. D acier fur le Sens de quelques Endroits d'Horace. Il nous donne d'excellentes Leçons furl'Honè- teté & la Politellé que les Savans devroienc toujours obier ver entre eux. On fait encore entrer, dans l'Idée du Pé- dant y des Manières gênées, un Air ernba- rafle, tri fie, & chagrin , une Mine rébarba- tive. Notre Evêque n avoit rien moins que l'Air & les Manières pédantcfques. Il ctoit d'une Taille des plus avantageufes. On re* marquoit beaucoup de Dignité , & même d'A- grément , dans toute fa Perfonne. Il avoit fOeil brillant, le Teint fort vif. Je le vis la dernière Année de fa Vie , avec des Cheveux gris , mais encore beaux & bien garnis , qui ibutenoient cet Air vénérable , cet Air qui feul défignoit un Prélat diftingué. / Ses Manières étoient également polies & aifées. Il fe diflinguoit fur-tout par fon Affa- bilité. II n'avoit pas de plus grand Plaifir, que de donner des Marques de Bonté aux Etrangers. Il difoitfouvenc, qu'on lui avoit fait tant d'Accueil dans fes Voïages, qu'il fe croïoit engagé d'une manière particulière à bien recevoir les Voïageurs. Pour peu qu'ils lui fuffent recommandés , ou qu'ils fuflent recommandables , ils retournoient £e 5 chez 438 Bibliothèque Britannique. chez eux pénétrez de ReconnoiiTance de Tes Honnêtetés, je me fuis trouvé dans le Cas: je veux dire , que j'ai été de ceux , qui , lui é- tant recommandez , ont éprouvé la plus obli- geante Réception. Je ne dois pas oublier, qu'à fa Table, où je me fuis trouvé fort fouvent, rien n'écoit plus vif, & plus en- joué, que fa Converfation. A tous ces Traits , vous voies , Monsieur, que l'Evêque de Salisburi étoit précifément l'Antipode de la Pédanterie. Nos Journaliftes ne pouvoient donc pas apliquer plus mal leur Titre de Pédant. Ils n'auroient fu choifir aucun Terme injurieux , qui lui convint moins , & qui rejaillît plus naturellement fur eux mêmes. Je vous demande Pardon de la Longueur de ma Lettre ,* mais , je me flate que vous me palTerés cette Effufîon de Cœur, en faveur de ce digne Prélat fi injuf- tement maltraité. Je fuis &c. Ce i. Décembre 1745. F I N. AVIS AVIS P U b" L I C. Pde HONDT, Libraire à la Haye, vient de 0 publier un des ocaux Ouvrago que la Hoilan- de air vu naître, fçavoir: Les Principales A- vantures de l'adm rable Don Quichotte, repréfen- tees en Figures, par Coypel , Picart le Romain, & autres habiles Maîtres , avec les Explications des XXXI. Planches de cette magnifique Collection, ti- réeb de rOriginal Efpagnol de Miguel de Cervan- res: in Quarto. NB: on en x aujjî imprimé un très petit nombre in Folio. Le même Libraire a imprimé le Thresor des Antiquitez. de la Couronne df France, repré- fente'es en Figures d'après leurs Originaux, foit en Pierre dans les Batimens Ancùn* ; foit en Or , Argent, Cuivre, ou autre Métal ou Matière, dans les Palais des Rois & d« Grands - Seigneurs , ou dans les Cabines des Sivans 3c des Curieux ; foit en Peinture, Gravure, Sculpture, ôc autres Arts dependans du Deflein j foie enfin en telle autre Matière, ou Manière, que ce puifle être; Collection très importante de plus de trois cent Planches; & de très grande Utilité pour l'Intelligence parfaite de l'Hiftoirc de France ; z vol. Fol, Dont on u'a imprimé que îif. Exemplaires en petit, & autant in grand Papier. On trouve chez le fufJir Libraire le Grand Theatue Sacke' du D-CHbJ de B aband ; con- tenant la Dcfcriprion de lE^iifc Métropolitaine É| Mail AVIS au PUBLIC. Malincs, & de toutes les autres Egiiles Cathédrales* Collégiales, & Paroiflialcs 5 des Abb.;yo , Prcvô- tez, Prieurez, & Ce>uvens,tant l'Homm-s <^ue de Femmes ; les Vies des Evcques, la Suite des Pré- vôts , Doyens, Archidiacres, Abbez , AbbJles, Prieurs, & Prieures $ avec les Tombes , Cabi- et$ d'Armes , Epicaphes , & Infcriptions fepulchraies des Archevêques, Evëques, Durs, Princes, Mar- quis, Comtes, Barons, & autres Hommes duf- ires, 4vol. avec quantité de Figures. .\B; // n'en refit de toute l'Edition que 30. Exemplaires. Le même Libraire débite les Délices du PaÏs de Liège, ou Deicription Topographicjuc des Monumens Sacrez & Prophanes de ce^ Evêché- Principauté i Ouvrage orné d'une Carte générale, & de quantité de Planches en Taide- douce, conte- nant les Vues de toutes les Viles, Eglifes, Mona£ teres, Edifices Publics, Châteaux , ôc Maifons de Campagne, de ce Pais. 6 Tom. 3 vol. Fol. Jo. Molleri Cimbria Licerata , iive, Sciiptorum Ducatûs utriufque Slefvicenfis & HolCtici , quibus & alii vicïni quidam acccnlentur , H:ftoria Literaria tripartita. Tomus I. comprehendit bcnptores uni- verfos Indigenas , hifque immifros complures , quorum Patria explorari needum potuk. Tomus II. Adoptivos,five Exteros,complecl:itur, in eifdtm Dueatibus Urbibufque, vel Officiis fundros Pubîicis, vel diurius commoratos. Tom. III. exhibet quadra- ginta fex infignium Scriprorum, partim Indigena- rum, parcim Adoptivorum , Hiltonas multo ion- giores: quae , ob ingenem de iis dicendorum Co- piam, Tomis precedentibus (in quibus tamen bre- virer iidem celebrati funt ) inferi non potuerunr. Opus mngno quadraginta Annorum labore ck Studio confectum , diuque deiiderarum : Hiiloriae Eccleila- iHcac Ce Civilis, im6 omnium Diioplinarum , Stu- diclis uriliffimumj ctim Prarfatione Joan. Grammii, >iec non Indice necefiario. uafn'u 1744. 3 vt>^ fol.