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BULLETIN SCIENTIFIQUE DE LA FRANCE ET DE LA BELGIQUE.

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TOME XXX.

. Quatrième Série. Neuvième Volume.

18977:

BULLETIN SCIENTIFIQUE

DE LA FRANCE ET DE TANBEEGTOUR

PUBLIÉ PAR

ALFRED Cri AR D;

Professeur à la Sorbonne ( Faculté des Sciences).

LONDRES, PARIS, BERLIN, Laboratoire d'évolution des Etres organises, " DULAU & C?, 3. rue d'Ulm ; FRIEDLANDER & SOHN Soho-Square, 37. Georges CARRE, Rue Racine, 3, N.-W., Carlstrasse, 11.

Paul KLINCKSIECK, Rue des Écoles, 53.

TABLE

CARNOT (P.). Recherches sur le mécanisme de la Pigmen- tation (5fig. dans le texte et Planches l'et Il). ...........

Fable) de Mare RAA AR eee ee

CAULLERY (M.). Études sur la morphologie comparée et la phylogénie des espèces chez les

Spirorbes (en collaboration avec F. MES.)

(4 fig. dans le texte et Planches VII à X) ......,...........

Table. des-matiéres enr Ris iadiaet

COSTANTIN (J). Accommodation des plantes aux climats froide chaud: : 5,26 eee ar ae

CUENOT (L.). Sur le mécanisme de l'adaptation fonction- nelles (Réponse à M. LE DANTEC)............

FAUVEL (P.). Recherches sur les Ampharétiens, anné- lides polychètes sédentaires [morphologie ,

anatomie, histologie, physiologie ] (Planches

Tablé:des maires sn ent ME

FLORENTIN (R.). Rôle de l'enveloppe muqueuse des œuls de Grenouille RAR

FLORENTIN (R.). Quelques expériences sur les pigments.

Pages

185 238

489

213

ei 486

140 2271

TABLE.

LE DANTEC (F.). Le fonctionnement des tissus. ....... LÉGER (L.). Contribution à la connaissance des Sporo- zoaires des Échinodermes : Étude sur la Lithocystis Schneider (Planches XI a XI) ..... MESNIL (F.). Études de morphologie externe chez les Annélides (suite) : Il, Remarques complé- mentaires sur les Spionidiens. La famille nouvelle des Disomidiens. La place du genre Aonicles (Planche T0 PRE Ne RARE

Table des maAtIereS 2 L'ATTENTE ESS

NI. Formes intermédiaires entre les Maldaniens

et les Arénicoliens (4fig. dans le texte et Planche VI) .

Table des iMATETES, en nent ee

MESNIL (F.) Etudes sur la morphologie comparée et la phylogénie des espèces chez les Spirorbes

[en collaboration avec M. CauLLERY |

(4 fig. dans le texte et Planches VII à X)..................

Table'des MaHorase ki 0 dR Le UNSS CES NOUS NUET

PARMENTIER (P.). Recherches sur les Thalictrum de France: (Planches Nav MAURE "LIU FARM NRRRES

PERRIN (A.). Constitution du carpe des Anoures (Réponse au D’ C. Emery de Bologne) .................

RIBAUCOURT (E. de).

Notice physiologique sur les Lom-

bricidés d'Buroposs: rie ESP WILLEM (V.) Description de Pretswichia aquatica LUBBOCK (3 fig. dans le texte et Planche +1 RARE

Pages

177

240

83

144

Re

105

101

168

Le première partie du Tome XXX, du Bulletin scientifique, de la page 1 à la page 276, est sorti des presses le 24 Avril 1897 ; la deuxième partie, de la page

277 à la fin, le 24 Juillet 1897.

RECHERCHES SUR LE MÉCANISME DE LA PIGMENTATION,

PAR

PAUL CARNOT,

Licencié ès-sciences physiques et naturelles, Interne des hôpitaux de Paris, Préparateur du laboratoire de pathologie générale à la Faculté de Médecine.

Planches I-II.

INTRODUCTION

L'étude de la pigmentation a déjà suscité un nombre immense de travaux, dont quelques-uns sont de premier ordre ; et cependant, bien peu de points en sont complètement éclaircis. Gela tient à la difficulté du sujet et à la complexité des faits.

Si nous abordons, à notre tour, un sujet hérissé de tant d'obstacles, c'est qu'il nous a semblé trouver plusieurs méthodes capables de donner expérimentalement certains résultats.

Notre étude comprendra deux parties :

Une première partie est consacrée à l'anatomie : partant de l'élément anatomique le plus simple, le granule, nous étudions, ensuite, la cellule pigmentaire. Nous énumérons, alors, les princi- paux résultats histologiques auxquels nous ont amené nos recherches personnelles, tant par les méthodes déjà connues que par celles qui nous sont propres (greffes, injections, réactifs physiologiques des chromoblastes).

2 La deuxième partie, anatomo-physiologique, comprendra l'étude du mécanisme de la pigmentation. De même que, successive- ment, nous avions étudié le granule, la cellule pigmentaire, les nerfs colorateurs, de même étudierons-nous successivement :

x) L'influence du granule (et nous y parviendrons surtout par la technique nouvelle des injections de granules pigmentaires) ;

2 P. CARNOT.

6) L'influence de la cellule (et nous appliquerons à cette étude la méthode des greffes pigmentées, qui isole, pour ainsi dire, la cellule des autres facteurs si complexes de la pigmentation) :

7) Enfin, l'influence des nerfs, et, par la méthode de certains réacüfs physiologiques nouveaux du chromoblaste, nous pourrons dissocier deux sortes de nerfs chromatomoteurs : les constricteurs et les dilatateurs.

Nous eussions aimé faire un autre chapitre pour traiter de

l'influence des organes sur la pigmentation : nous avons pu recon-

naître, en effet, certaines influences : celles des capsules surrénales, du foie, des organes lymphoïdes.

Mais nos recherches, sur ce point, sont encore trop incomplètes pour nous permettre de les coordonner. Peut-être pourrons-nous reprendre, bientôt cette intéressante question.

Avant d'aborder notre sujet, qu'il nous soit permis d'adresser, en cette place, nos remerciements à deux savants qui, pour une large part, ont contribué à la genèse de ce travail :

M. Cu. Boucuarp, dont les études sur la pellagre et sur maint

autre sujet ont éclairé le rôle physiologique de la pigmentation,

à qui nous devons beaucoup, et dont nous sommes l'élève reconnais-

sant et dévoué.

M. GraRD, qui, lui aussi, s’est beaucoup occupé des questions de coloration et de mimétisme, qui a encouragé, de ses conseils, nos recherches à leur début et nous en a facilité l'exécution.

1

LE COLORANT.

L'étude de la chimie du pigment rencontre des difficultés consi-

dérables. Nous avons affaire à des corps complexes, souvent en ER évolution, et dont une infime proportion suffit à colorer un tissu

un liquide de nature essentiellement compliquée et variable.

Cette étude est encombrée d’une foule de travaux tendant, les uns à individualiser, les autres à identifier certains colorants. Pour l’un ou l'autre but, on manque de bases certaines. Nous ne nous attar-

derons donc guère à l'étude chimique de notre sujet, et nous n’en 2

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 3

dirons quelques mots que pour nous mettre en garde contre des entités ou des distinctions arbitraires.

Deux familles se distinguent nettement (1) : L'une est celle des pigments clairs, des lipochromes ; l'autre, celle des pigments foncés. Les lipochromes ont certains caractères nets : Deer Couleur claire, jaune en général, comprise entre le vert et le ; rouge. 2 Solubilite dans l’éther, l'alcool, le chloroforme, la benzine, les

matières grasses (solutions jaunes); dans le sulfure de carbone (solutions rouges).

Action des acides; ils transportent les tons vers la partie la plus réfrangible du spectre (l'acide sulfurique colore les solutions en bleu; l'acide nitrique colore les solutions en vert ; l’iode agit de même.

Décoloration progressive à la lumière.

Spectre remarquable par l'éclat du rouge, du jaune, et du vert ; les radiations les plus réfrangibles sont absorbées. Les solutions étendues donnent trois bandes dans le bleu, indigo, violet. Puis le a spectre s'illumine en laissant finalement deux bandes, l’une vers F, | l’autre entre Fet G. TupicHum a, du reste, noté les différences de positions de ces bandes, suivant le dissolvant.

4 Le type de la famille est la lutéine.

L'ovario-lutéine s’extrait des corps jaunes de la vache (How, Piccozo et LIEBEN, etc.), par le chloroforme ou l’éther.

16 Le jaune d'œuf contient une lutéine que l’on peut préparer par _ saponification de l'extrait éthéré.

Nous nous en sommes servis, préparée de la manière suivante, pour

#Ès l’injecter aux animaux : l’extrail éthéré étant toxique, quelle que - forte que soit la concentration, nous avons mélangé l'extrait éthéré É. à de la vaseline liquide et laissé évaporer l’éther. La vaseline se

(1) Cette classification est, évidemment, schématique et artificielle : elle est bonne, tout au plus, pour les pigments des animaux supérieurs. On trouve, chez les animaux inférieurs des synthèses extrêmement curieuses reproduisant des types chimiques très différents (derivés de l’aniline (Ap/ysia), etc.).

4 P. CARNOT.

colore progressivement en jaune en abandonnant un dépôt ; on filtre; on à ainsi un liquide clair, très beau, sans danger au point de vue des injections sous-cutanées. Notons que la vaseline, en contact direct avec le jaune d'œuf ne se colore pas; la dissolution est empêchée par une enveloppe, ou simplement une atmosphère graisseuse, que l'éther dissout.

Nous avons préparé de même, pour le même but, différentes lutéines extraites des graisses, des capsules surrénales, des corps Jaunes de la grenouille.

Le sérum contient un colorant jaune considéré par HAMMARSTEN chez le cheval comme de la bilirubine, par Mac Munx chez le mouton comme de la choleteline (ex. spectroscopique). Tupicum, Hoppe SEYLER en ont fait une lutéine (ex. spectroscopique). KRUKENBERG (87)* également (séparation par l'alcool amylique), le rapproche du

pigment cutané du Triton cristatus. De même du sérum de certains

oiseaux (HALLIBURTON). Les gouttes graisseuses de la rétine semblent s’y rattacher (CAPRANICA) ; elles se décolorent à la lumière, elles sont incolores chez les animaux à graisse incolore (lapin, KunNE) (83).

Peut-être le pourpre rétinien (qu’il dérive ou non de ces gouttes graisseuses), est-il à rapprocher des lipochromes ; il pousse à l'extrême un des caractères familiaux ; la décoloration à la lumière.

Enfin à la classe des lipochromes se rattachent différents corps ; la tétronérythrine de Wurm, extraite du liseré rouge des yeux du faisan) assimilée à la zoonérythrine de KRUKENBERG, corps très répandu dans les enveloppes et la peau d'animaux inférieurs. Elle aussi se décolore par oxydation à la lumière.

Le dichroïsme habituel aux lipochromes devient un caractère essentiel ; la couleur jaune sous certaines incidences devient bleue

sous certaines autres, les acides déplacent la coloration du jaune au bleu.

Inversement, la chaleur (écrevisse, homard) fait passer le pigment du bleu au rouge : la créosote agit de même (Poucxer) (122).

Nous citerons seulement les autres corps chimiques, plus ou moins

incertains, appartenant à la famille des lipochromes.

* Les chiffres en caractères gras etentre parenthèsesrenvoient à l'index bibliographique, page 74.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 6)

Pour KRUKENBERG et MEYER, les pigments des oiseaux dérivent tous de la fuscine (coriosulfurine) ; tels la psittacofulvine ; la combi- naison de ces couleurs constitue différentes teintes.

D’autres colorants sont à rapprocher de la carotine : tel le pigment de R. BLANCHARD (Déaptomus des Alpes) ; tel le pigment du Pyrrho- coris apterus (PHISALIX).

Une foule de pigments mal connus encombrent cette famille de noms (pelagéine, astroviolettine, astrogriséine, velleline, astroïdine, ophiurine, echinastrine, pentacrinnine, actinochromine, etc.).

La pucinine (murexæ, jantha purpura, limace rouge) provient d’un chromogène incolore contenu dans le mucus de la glande à pourpre et qui se colore sous l’influence des réducteurs (LETELIER).

L'autre grande classe est celle des pigments foncés ; elle paraît, du reste, également, assez peu homogène.

Ses caractères sont, surtout, des caractères négatifs d’inaltérabi- lité qui rendent difficile la purification de ces corps.

L'analyse spectrale ne peut donner aucun renseignement. De même, la présence du fer, qu'on a voulu ériger en caractère géné- rique, el qui, nous le démontrerons, n’a que peu de valeur.

La meélanine, pigment cutané et oculaire de l’homme et d’un grand nombre d'animaux, représente l'élément causal d’un certain nombre de colorations (le roux, le châtain, le brun, le noir sont constitués par le même pigment en proportions différentes).

Les analyses chimiques sont certainement inexactes; car, pour nous, la mélanine colore l'élément protoplasmique constituant du granule pigmentaire. Or les méthodes chimiques d'isolement nel’en séparent pas. HUNEFELD, GMELIN, DRESSLER, HEINTZ, RoBIN ont, du reste, trouvé des écarts considérables, surtout pour le chiffre d’Az (13,77 pour ScHEeRER, 3,89 et 8,29 pour Scxmipr, 13,24 pour DRESsLER et 7,10 pour HEINTZ).

L'action des réactifs (alcalis et acides _ donne également des résultats contradictoires.

Au point de vue qui nous concerne, nous devons surtout nous préoccuper de l’action des réactifs histo-chimiques sur la pigmen- tation.

Pour obtenir le blanchiment d’une pièce, on emploie l’eau de chlore (Mayer), le chlorate de potasse et l'acide chlorhydrique

6 P. CARNOT.

(solution saturée de chlorate à laquelle on ajoute quelques gouttes d'HCID) ; l’eau oxygénée ; l'acide nitrique ; le bichromate de potasse et l'acide sulfurique ; le peroxyde de sodium (CARAZZ1) ; l'acide sulfureux (GILSON).

Nous nous sommes nous-mêmes servis parfois avec succès de l'action successive du chlorhydrate d'aniline et de l'alcool. Mais, malgré l'énergie de ces agents, la dépigmentation est rarement complète.

L'action des dissolvants (potasse, carbonates alcalins, acides forts)

est décrite différemment par les auteurs, très probablement à cause

des différences de solubilité de l'élément protoplasmique constituant du granule. %

Le noir de seiche : mélaïne (Bizz1o, Hocarus) a élé individualisé parce qu'il est soluble dans les carbonates alcalins. Ce caractère nous paraît secondaire et des variations plus importantes existent

entre les auteurs pour un même pigment. Les analyses de Varioret

DEsrosses (162), celles de Girop (64) semblent rapppocher ce pig- ment du pigment choroïdien. Mais de grandes variations s’observent encore. PRoUT conclut à la richesse en fer des cendres : il note l’inso- lubilité dans SO* H?. GMELIN conclut, au contraire, qu'il y a peu de fer, et que la mélaïne se dissout dans l’acide sulfurique concentrée.

On trouve, en tous cas, dans la série animale (yeux surtout) un pigment noir, identifiable avec la mélanine.

Quels rapports y a-t-il entre la mélanine et les pigments patholo- giques ? Un pigment pathologique, celui des tumeurs mélaniques, paraît s’en rapprocher beaucoup. Lui aussi est profondément inatta-

quable ; il ne présente pas, non plus, les réactions du fer. Il ne <

présente aucune réaction avec le ferrocyanure ou le sulfhydrate d’ammoniaque, se dissout en totalité dans une solution concentrée de potasse, abondamment dans une solution d’ammoniaque. 4e

Nous devons ajouter pourtant que, sur des préparations de pigment provenant des tumeurs mélaniques d'un vieux cheval blanc, pièces que nous a très aimablement procurées M. Canor (d'Alfort), le ferrocyanure teintait en bleu quelques rares granules,

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. ÿ\

alors que l'immense majorité des granulations ne présentait pas cette coloration.

Nous verrons, du reste, ailleurs, ce même caractère évolutif du pigment, aboutissant à des composés sans fer, ou du moins le fer n’est plus décelable.

La grande analogie du pigment mélanique de cheval et du pigment choroïdien nous permettra de substituer l’un à l’autre, dans la pratique des injections massives de pigment.

Un autre pigment pathologique, celui de la maladie d’Addison se rapproche entièrement du pigment normal.

A côté de ces pigments, d’autres ont des caractères différentiels plus accentués.

Le plus curieux est le pigment ocre du diabète bronzé, pigment bien étudié par MM. AUSCHER et LAPICQUE (8). Il est très inaltérable, et se rattache pour ces auteurs à un hydrate ferrique Fe 20%, 2 H?0. Mais il présente des réactions assez paradoxales : le sulfhydrate d’ammoniaque, au lieu de donner la réaction noire immédiate du sulfure de fer, agit lentement et demande, pour l’effectuer, 20 à 30 minutes. Les acides, loin de dissoudre le pigment, le précipitent des solutions dans lesquelles il est en suspension. Il est bien probable que, encore, l’hydrate ferrique est le colorant d’une masse protoplasmique, très faible, constituant le granule et qui en masque les réactions (1).

Un autre pigment noir, plus rare, en solution dans la liqueur sodique, se fonce à l’air et perd une partie de l'intensité de sa colo- ration sous l'influence des réducteurs.

Le pigment des paludéens, comme un certain nombre de pigments d'origine manifestement sanguine (transformation d’ecchymoses, etc.), présente les réactions des sels de fer et une insolubilité complète dans la potasse.

(1) La partie insoluble dans l’acide chlorhydrique chaud est de ee (focons blan- châtres).

Ne 1 s La perte de poids subie par calcination est de 17,5°/, dont = pour l’eau si on

: , 4.5 % A : = adopte les chiffres des auteurs. D'où Too de matières organiques étrangères.

Ce qui est peu, mais l'hydrate ferrique est très lourd, par rapport à la matièreorga- nique. j

8 P. CARNOT,

Nous avons eu l’occasion récente d'examiner plusieurs foies mélaniques de moutons venant de Russie : leurs cellules hépatiques sont infiltrées de granulations pigmentaires ; ce pigment présente les réactions du fer (ferrocyanure, sulfocyanure). Mais il faut une certaine quantité de matières pour donner une réaction sensible. Il présentait, de plus, la propriété de se décolorer complètement à 100°.

Peut-on, se basant sur les réactions du fer et sur l’insolubilité dans la potasse, distinguer les pigments pathologiques (d'origine héma- tique, généralement) des pigments normaux ?

BRAULT (34) admet cette distinction ; mais certains faits ne nous permettent pas de nous ranger à cette opinion.

Dans le cycle de transformation de l’hémoglobine, l'hématine, pigment ferreux, se transforme en hématoporphyrine (pigment sans fer).

De même, d’après NEUMANN (116), ScHminT (146), le pigment ferreux perd son fer : On appelle hémosidérine (hémosiderose, UxNA) le pigment ferreux, mélanine, ce même pigment dépourvu de fer. B. Scamipr, introduisant, dans le sac lymphatique de la grenouille, des fragments de moelle de sureau imbibée de sang du même animal, étudiait les stades de transformation des globules rouges en pigment ; à un moment le pigment ferreux perd complètement tout le fer qu’il renferme. |

Nous avons vu que sur nos préparalions de pigment mélanique du cheval, quelques granules présentaient, de loin en loin, la coloration bleue par le ferrocyanure.

De même, étudiant, dans le tube digestif de la sangsue, la trans- formation du globule en granules pigmentaires, nous vimes d’abord la plupart des granules devenir bleus par le ferrocyanure et l'acide chlorhydrique ; progressivement, un certain nombre ne présentaient plus les réactions du fer ; ce nombre augmentait dans les réseaux pigmentaires de la sangsue, qui, très probablement, ne sont que des lymphatiques remplis de pigment.

Cette distinction, qui serait, en certains cas, si utile, ne peutnous donner que des indications relatives. Elle ne peut pas en tous cas, nous renseigner sur l’origine hématique ou autochtone du pigment. Peut-être des arguments hislo-physiologiques plaideront-ils mieux pour ou contre cette importante théorie.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 9

IT.

LE GRANULE PIGMENTAIRE.

Après avoir, très sommairement, étudié les colorants, nous commencerons l'étude des parties colorées par l'élément anatomique le plus simple : par la granulation.

Une première question se pose: la granulation est-elle un élément anatomique ? N'est-elle pas, plutôt, une cristallisation spéciale intra-cellulaire des matières colorantes ? L'étude de la forme, de la couleur, des dimensions de ces granules nous permettra de résoudre ce problème.

Les granulations pigmentaires constituent la forme générale sous laquelle se présente le pigment. Cette forme est commune aux pigments clairs (granulations jaunes constituant la sécrétion colorée de la limace, elc.) et aux pigments foncés (cellules épidermiques et dermiques pigmentées, cellules choroïdiennes ; cellules de tumeurs mélaniques, etc.).

On les 6btient, également, en dehors de la cellule : telle la trans- formation du globule sanguin en granules pigmentaires, dans le tube digestif de la sangsue.

Par contre, certaines pigmentations sont produites par la matière colorante, à l’état soluble. Telle la sécrétion pigmentaire jaune de l’arénicole ; telle la coloration jaune du tissu adipeux de certains mammifères, etc.

Néanmoins ces colorations méritent, à peine le nom de pigments, et l’on peut dire que, presque toujours, la pigmentation est jointe à la présence de granules pigmentés.

La forme du granule est déjà très remarquable. Elle est presque toujours et uniformément ronde, quelle que soit l’espèce animale, et quelle que soit la matière chimique colorante. Que l’on ait affaire à de la mélanine, comme dans la couche basale de Malpighi, à de la mélaïne, comme dans les cellules épithéliales de la poche du noir chez les céphalopodes, au pigment hématique du foie des paludéens, au pigment ocre (hydrate ferrique) des cirrhoses pigmentaires, on observe cette même forme ronde dont les dimensions seules sont

10 P. CARNOT.

variables. De même pour les pigments clairs: la sécrétion de la limace, le pigment des écailles et des poils de l’aile de papillon, etc. présentent cette même forme.

Inversement : étant donné un même animal, une même matière colorante, on peut trouver deux sortes de granules très différentes : chez l’homme, le pigment choroïdien se présente en granules ronds: le pigment rétinien en bâtonnets allongés et effilés à leur extrémité.

Chez le cobaye (fœtus et adulte) nous avons vu, de même, ces deux formes. Chez le lapin, nous n'avons constaté que des formes rondes. |

Ainsi donc, même forme dans les espèces animales très éloignées, et pour des colorants chimiques très différents ; formes différentes, dans un même organe, chez un même animal, avec une même substance colorante.

On ne comprendrait guère que ces ressemblances et ces diffé- rences fussent le fait de la cristallisation chimique.

Les dimensions sont généralement assez variables : ce caractère a, du reste, peu d'importance ; car on peut trouver, notamment dans

les tumeurs mélaniques, des granulations voisines de taille fort différente.

La couleur est également variable suivant les granulations envisagées. Nous ne reparlerons pas ici des variations chimiques très étendues de colorants pour une même forme. Mais dans un même organe, souvent dans une même cellule, certaines granula- tions paraissent claires, d’autres plus foncées; d’autres enfin complètement noires.

Cette différence de teinte est souvent très frappante. Nous l’avons bien souvent constatée, pour des granulations de mêmes dimensions, sur des préparations de pigment mélanique : bien souvent, sur des membranes tendues de grenouille, certaines cellules pigmentaires présentent un grand nombre de granulations pales, à côté d’autres

beaucoup plus noires. Souvent aussi une cellule entière contient des

granulations pâles ; une cellule voisine, dans un même état d’ex- tension, des granulations foncées.

L'interprétation toute naturelle de ces variations de teinte des granulalions semblables est que la granulation n’est pas tout

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 11

existe, dans le granule, plusieurs éléments constituants dont les proportions peuvent varier.

Une matière fondamentale, de nature inconnue et probablement complexe ;

Une matière colorante dissoute dans l’autre ou combinée, et surajoutée en proportions variables.

Enfin les caractères tirés de la composition chimique des granules fournissent un argument à l’appui de l’idée que nous soutenons. 5 PP Œ

Nous voyons des granules voisins présenter des réactions diffé- rentes : l’un contient du fer, et se colore par Le ferrocyanure : le voisin nese colore pas.

Le pigment d'AUSCHER et LAPICQUE (8), constitué par un hydrate ferrique présente des réactions qui différent de l’hydrate ferrique de synthèse : les acides ne le dissolvent plus : le sulfhydrate d'ammo- niaque le transforme difficilement en sulfure. Ces différences tiennent probablement à la matière fondamentale du granule.

Nous avons constaté de même l'insolubilité dans l'éther des granules jaunes sécrétés par la limace : or le colorant est un lipo- chrome soluble dans l’éther; c’est donc le protoplasma qui a fait obstacle à cette dissolution.

Forme, coloration, composition chimique, fournissent autant d'arguments pour nous prouver que le granule est chose complexe, qu'il entre en sa composition plnsieurs substances, que c'est en somme un Corps organisé, vivant ou cadavre.

Nous rejetons la théorie qui en fait une cristallisation de matières colorantes,quelque bizarres que paraissent, parfois, les cristallisations au sein de liquides organiques.

En cela, nous rapprochons le granule pigmentaire des grains colorés des végétaux.

Si la granulation nous apparaît comme une particule constituée, issue de la cellule, nous devons agiter la question de savoir si cette particule est vivante : le granule pigmentaire est-il un bioblaste ?

Lorsque, pour les premières fois, on examine des granulations pigmentaires, on est tout d’abord frappé de l'extrême vivacité de leurs mouvements. Ces mouvements semblent avoir une indépen- dance propre, et l’on écarte difficilement lidée d’une vitalité spéciale à ces petits éléments.

12 : P. CARNOT.

Pour éclaircir la question, nous avons examiné des liquides, tenant en Jiberté ces granulations, par le procédé de la goutte pendante dont se servent les bactériologistes : tout courant étant supprimé, les mouvements spontanés semblaient persister ; l'addition d’une goutte de chloroforme faisait cesser les mouvements; de même, celle d’une solution concentrée de sublimé.

Il semblait donc qu'il y eût un phénomème vital extrêmement

curieux.

Malheureusement, cette explicalion se heurta à des objections absolues, dont une seule suffit à faire rejeter l'hypothèse des mouvements spontanés: la solution, contenant des granules en suspension, fut mise à l’autoclave à 120° pendant un quart d'heure. Les mouvements ont persisté. De même, ces mouvements persistent après plusieurs mois.

De ce fait, nous conclurons donc que ces mouvements sont en réalité des mouvements browniens, mais il semble que, par leur nature ou par leur forme, les granules, mieux que tout corps connu, soient susceptibles de mobilité. Cette facilité d'évolution nous permettra de comprendre combien facilement se font les mouvements

des granules pigmentés à l’intérieur du protoplasma, dans les.

chromatoblastes de la grenouille nous les étudierons. Elle nous explique comment, à la suite de nos injections de pigment, nous retrouvons des granulations libres dans des endroits qui nous paraissent inaccessibles, loin des vaisseaux et des leucocy ss souvent entre des fibres conjonctives, etc.

Le fait que l’on peut réaliser in vitro la transformation du globule

rouge en granules pigmentaires, nous montre bien également que ce processus n’est pas un processus vital.

Poucxer (124) dit avoir suivi, sur un embryon d’éléphant conservé dans l’alcool, la transformation de la matière colorante du sang en pigment. Nous n’avons pas vérifié le même fait, mais nous avons essayé de suivre dans le tube digestif de la sangsue la transformation du sang en pigment, pensant que, peut-être, les stades progressifs de cette transformation nous fixeraient sur la genèse et sur la constitution exacte de la granulation.

Des sangsues jeûnant depuis plusieurs mois, ont été appliquées contre la veine auriculaire dénudée d’un lapin: on les détachait successivement, après quelques minutes de succion.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 13

Successivement, on ponctionne le tube digestif des différentes sangsues, au bout de deux heures, de quatre heures, le lendemain et huit jours après. On étale le sang et on le sèche rapidement.

Dès la deuxième heure,on voit quelques granulations pigmentaires. La plupart des globules sont peu altérés. Certains présentent, à leur intérieur, un aspect granulé, mais à granulations incolores. De place en place, on voit un granule, accolé au bord d'un globule, la plupart paraissent libres.

_ Sur les autres sangsues, nous voyons augmenter le nombre des granules. Mais la genèse de ce fait nous échappe presque complè- tement ; entre le premier et le dernier anneau de la chaîne, nous avons une lacune qui n’est pas encore comblée. Nous nous proposons du reste de poursuivre cette étude.

L'apparition du granule se fait donc assez brusquement soit dans une cellule qui le sécrèle, soit pendant la vie agonique d'un globule rouge (sangsue) soit peut-être même après la mort du globule (fait de Poucxer). La fragmentation du globule en granulations se fait pour ainsi dire mécaniquement, puisqu'elle se réalise, même après la mort.

Il semble que, brusquement, une granulation puisse se colorer ; peut-être cela se fait-il aux dépens d’une matière chromogène qui s’oxyde ? (1).

Mais il semble aussi, qu’il puisse exister, à l’origine de la pigmen- tation, une première phase d’imprégnation par des colorants solubles qui se fixent ultérieurement dans les granulations.

C’est cette transformation dont nous avons pu ébaucher l'étude sur des ovaires de grenouille verte, pendant les mois d'août et de septembre.

L’ovaire, au début de la maturation de l’œuf, nous présente une teinte blanchâtre uniforme.

Puis peu à peu. on voit les œufs se foncer; ils grossissent, en prenant uneteinte jaune légèrement brunâtre, uniforme. Si nous sacrifions des femelles un peu plus tard, nous voyons un des côtés de l'œuf foncé, l’autre clair; en même temps, apparaissent de place en place, et

K 2 (1) À l'appui de cette hypothèse nous noterons que nous avons constaté le riche -_ pouvoir oxydant de la rétine, au moyen du paraphénylene-diamine et de l’aldéhyde salycilique.

14 3 P, CARNOT.

surtout à la périphérie de l'ovaire, des grains très noirs, plus petits que les autres ovules, qui, à la loupe, ont une apparence irrégulière et anguleuse. Ces grains paraissent être des ovules arrêtés dans leur développement, déformés, et surchargés de pigment.

Tandis qu'au microscope, nous ne te dans les œufs bru- nissant légèrement aucune granulation pigmentaire, nous en trouvions au contraire abondamment un peu plus tard. encore le chaînon intermédiaire nous manque ; maisl'œuf était déjà coloré qu'il ne présentait pas encore de granulations. .

Quant au phénomène des grains noirs dégénérés, ces grains ont- ils fixé le pigment parce qu'ils étaient dégénéres ? Sont-ils au contraire, dégénérés par suite de la surcharge pigmentaire ? Cette hypothèse serait pour nous la bonne, car nous avons cherché à traumatiser, après laparotomie, des ovules de grenouille sans pouvoir déterminer à leur niveau aucune surcharge pigmentaire.

Il est probable que l’atrophie de l’ovule provient de la surcharge su pigmentaire ; l’ovule disparaît en temps qu'ovule et devient un magasin de pigment, peut-être utilisable pour les autres ovules.

Cherchant à déterminer les conditions d'origine du granule pigmentaire, nous avons abouti à des conclusions un peu incertaines; l'origine aux dépens du sang, suivie sur le tube digestif de la sangsue ; d'autre part l’origine autochtone observée sur les ovules de grenouille nous ont donné des renseignements, mais incomplets.

«

Si nous cherchons à déterminer les conditions de disparition du granule, nous nous heurtons à d’autres difficultés.

Nous avons vu, au point de vue chimique, la grande résistance du 13 granule aux agents les plus énergiques. Le chlore, l'acide sulfurique, l'eau oxygénée en viennent difficilement à bout.

Il semble bien qu'au point de vue biologique, la transformation soit également fort difficile, et le plus souvent, c’est grâce aux leucocytes que peut se faire la disparition du pigment. pe

Nous verrons que pour la peau, si le rôle d'apport du pigment par

les leucocytes est contestable, le départ par ce mécanisme est indé- niable. 1%

. . . . . L ù- ; É A la suite d’injections massives de pigment, nous verrons que la

plus grande partie de la résorption se fait par les leucocytes. Nous

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MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 15

verrons aussi qu'une partie semble rester libre et circuler facilement, charriée par les courants. Nous verrons des cas de fixation au niveau des capsules surrénales ; or, dans les leucocytes d’une part, dans les cellules capsulaires de l’autre, nous avons assisté à ce fait :

Les grains de pigment semblent devenir moins nets, leur teinte s’atténue peu à peu, et, généralement, il arrive, lorsqu'on ne s'est pas servi d’une injection massive, que, très rapidement, on ne retrouve plus le pigment injecté. Dans les capsules surrénales, il semble que l’on voit encore des restes de granulations noires, moins colorées et moins nettes, donnant l'impression d’une transfor- mation et d’une disparition.

De même, il nous est arrivé d’injecter sous la peau des doses massives de pigment, cette injection s’infectait et donnait naissance à un abcès. Or quelques jours après, on était obligé d’inciser cet abcëès ou de sacrifier l’animal ; le pus était à peine teinté; on ne retrouvait, au microscope que des restes de granules. Dans le reste du corps, on n’en voyait pas trace, et on se demandait ce qu’avaient bien pu devenir ces masses énormes de pigment; elles avaient été très probablement transformées et détruites, soit par les leucocytes accourus, soit par les agents de la suppuration.

Si le granule se transforme par une sorte de digestion cellulaire, fait intéressant si on le compare à l’inaltérabilité du granule par les agents chimiques, il s’élimine également tel quel, sans transformations, par l'intestin ou par les reins ; il se fixe enfin

tel quel dans certains organes.

D'où vient la forme granulée du pigment, quel est son rôle ? Nous n’en savons rien : peut-être est-ce sous cette forme qu'il est le plus mobile, peut-être absorbe-t-il mieux la lumière; peut-être aussi, étant ainsi insoluble est-il moins toxique pour la cellule. Car nous savons combien nocives sont généralement les matières colorantes intra-organiques.

16 P. CARNOT,.

III.

LA CELLULE PIGMENTAIRE.

a. Mammifères.

Nous aborderons, maintenant, un élément anatomique plus complexe : la cellule pigmentaire.

Deux systèmes anatomiques présentent, surtout, une localisation du pigment: la peau, avec ses phanères, et l'œil.

La peau est plus ou moins pigmentée : celle de l’homme blanc ne diffère de celle du nègre que par la quantité des granulations :

Les différentes parties en sont différemment pigmentées (scrotum. ligne blanche, aréole du sein, etc.).

Chez l'animal, nous avons étudié surtout la peau du cobaye, principalement aux zones limites des parties pigmentées.

Sur une coupe de peau, nous distinguons immédiatement : Une pigmentation épidermique ; R" Une pigmentation dermique.

Des formations spéciales dans l’épiderme, attribuées généralement aux cellules dermiques, marquent un trait d'union entre ces deux pigmentations.

Le pigment de l’épiderme, s’il est en minime quantité, se constate, uniquement, dans les cellules de la couche profonde génératrice. S'il est plus abondant, les cellules du corps muqueux en contiennent jusqu'au stratum lucidum.

Mais, d’une manière générale, la pigmentation est d'autant plus

rare qu’on s'éloigne davantage de la couche génératrice. Elle cesse, .

à peu près complètement, commence l’eleidine. UNN4 (159) a parfaitement raison de distinguer la pigmentation vraie de la couleur de la couche cornée (hornfarbe). Mais très certainement, on ren- contre du pigment vrai dans les couches épidermiques les plus superficielles (BLASCHKO) (20).

Ce pigment superficiel est peu abondant chez l’homme : nous en

avons cherché, en vain, dans les squames (scarlatine) qui, du reste

paraissent décolorées ; chez le cobaye, nous avons trouvé une pigmen-

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 17

tation beaucoup plus intense des couches cornées, surtout dans certains cas de rénovation rapide (greffes) ou dans cerlaines régions (peau de l'oreille) l’épiderme est presque accolé au cartilage, la circulation lymphatique et le transport leucocytaire étant _ restreints, la desquamation du pigment se fait, d’une façon, en quelque sorte, vicariante.

Quoi qu'il en soit, la couche génératrice est bourrée de pigment, et la quantité éliminée, tant par desquamation, que par résorption vers le derme, paraît en disproportion avec la grande quantité des granulations.

Quel siège occupent les granulations dans les cellules ? Elles se groupent, de préférence, autour du noyau, qu'elles masquent, parfois, complètement, mais se répartissent néanmoins dans tout le corps cellulaire.

AgBy (4) note la disposition en calottes, aux deux pôles de la cellule ; d'après NussBauMm, cette disposition précéderait la division cellulaire, puis le pigment viendrait se grouper autour de la plaque équatoriale : cette plaque compacte se ramollit ensuite et laisse apparaître la chromatine du noyau; le pigment revient à l’état diffus pendant le repos de la cellule.

A côté des cellules épidermiques pigmentées, on voit des figures étoilées, rameuses, signalées depuis longtemps. (G. Simon, 1841, embryon de cochon ; REMAK, embryon humain). Certains auteurs en font des cellules dermiques (Kopis, Jariscx (77), KROMAYER, AuDRY) (9).

I1 semble bien que tous ces cas ne soient pas comparables :

La juxtaposition des cellules épidermiques pigmentées profondes, vues à travers les interstices des cellules plus superficielles explique certaines de ces figures.

D’autres figures semblent se rattacher à une origine épithéliale.

D'autres, enfin, semblent être des cellules conjonctives, les unes situées sous la vitrée et envoyant des prolongements intercellulaires dans l’épiderme, les autres semblent avoir pénétré dans l’épiderme même (KüLLIKER (84), HALPERN (69), Caspary (3'7), EHRMANN (48), KarG (80), etc.).

Nous avons rencontré ces corps, avec une netteté parfaite, dans des coupes de nœvi pigmentaires. Ils ressemblent, absolument, à d’autres corps situés dans le derme et à vastes prolongements.

2

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18 P. CARNOT.

La question de savoir si l’on trouve dans l'épiderme des granu- lations libres nous paraït devoir rester en suspens.

Le derme présente, généralement, des cellules pigmentaires. Ces cellules ont, tantôt la forme de gros amas ayant à peine un aspect

cellulaire, tantôt celle de cellules conjonctives fixes étoilées, à fins F.

prolongements.

Aupry et LacroIx (9) assimilent certaines de ces cellules à des clasmatocytes, c’est-à-dire à des cellules migratrices fixées et

émiettées (RaANviEr). Il est certain que, suivant la remarque de

KroMAYER, elles ne présentent aucun caractère des éléments en

migration, et l'hypothèse de leur nature clasmatocytaire est fort séduisante.

Y at-il des éléments plus individualisés, répondant à de véritables chromatoblastes ? EHRMANN (49), RaymoNp (144) en ont émis l’ingénieuse hypothèse. Raymonp a même tenté d'expliquer lapigmen-

tation des Addisoniens par la paralysie de ces chromoblastes ; mais 4

cette pigmentation est également épidermique et: la paralysie des cellules dermiques n’en rendrait aucun compte. Il ne semble pas, du reste, se trouver, dans le derme, de cellules, mobiles sous

l'influence d’une excitation, comme l'implique toute définition

des chromatoblastes. Cette hypothèse ingénieuse demande une démonstration.

Enfin, il existe souvent, dans le derme, des granulations libres,

parfois en rangées linéaires, parfois en tout petits amas. Elles sont

généralement distribuées le long des faisceaux conjonctifs, parallè- lement aux vaisseaux. Souvent aussi, ce qu’on prend pour des granu-

lations libres n’est que la pigmentation des prolongements des

cellules dermiques étoilées.

Nous voyons donc du pigment, d’une part dans les cellules épidermiques, d'autre part dans les cellules fixes du derme. Certains éléments, de nature incertaine, semblent relier l’un à l’autre.

Quels rapports présentent, entre elles, les piémen ARpns épider- mique et dermique ? Pour les uns, le pigment épidermique est amené par les cellules ÿ mobiles : la pigmentation du derme est une Rene étape cet apport pigmentaire. |

Pour les autres, le pigment naît sur place : c’est une sécrétion des |

_

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 19

cellules épidermiques : la pigmentation du derme est secondaire : c’est la première étape de l'évacuation du pigment.

Enfin une théorie éclectique admet que le pigment épithélial est d’origine autochtone, que le pigment du derme naît également sur place dans les cellules fixes ; qu’il s’agit d’une sécrétion géné- rale ; à côté de ces formations indépendantes, il est des formes de transport, surtout de résorption. Nous développerons les arguments qui nous font préférer cette dernière hypothèse.

Y a-t-il une pigmentation épidermique sans pigmentation dermique ? Certainement: MERTSCHNG(101),RECKLINGHAUSEN (133), NEELSSEN, WALDEYER (169), Aupry (9) en ont cité des exemples. Nous en donnerons, plus loin, maint exemple personnel.

Y a-t-il une pigmentation dermique sans pigmentation épider- mique ? Certainement : nous avons eu l’occasion de voir un nœvus toute la pigmentation était dermique. Presque toutes nos greffes en résorption, n'avaient plus de pigment dans l’épiderme, mais par contre, en conservaient dans le derme. Nos greffes de pigment choroïdien donnaient uniquement des cellules pigmentées dermiques.

Donc, à côté d’une pigmentation uniquement épidermique, nous avons une pigmentation uniquement dermique.

Par commence la pigmentation ? Est-elle d'emblée épidermique ou dermique ?

RETTERER (139) a examiné l'extrémité digitale d’un fœtus d'âne de 8 cent. de long (3° mois de la gestation). Certaines cellules épithé- liales cubiques de la couche profonde, mais non toutes, présentaient quelques granulations pigmentaires : la première assise de cellules polyédriques présentait encore quelques granulations ; les couches superficielles n’en avaient aucune : le derme était lisse et ne montrait ni cellule ni granulation pigmentaire. De même sur un fœtus de cheval de 22 cent.

GARCIA (60) a fait les mêmes constatations.

Nous avons vérifié le fait sur un fœtus de cobaye. Des fœtus de lapin nous ont présenté une pigmentation localisée uniquement aux poils.

Nous avons employé, avec Melle CL. DEFLANDRE (35), deux autres méthodes qui nous ont conduits au même résultat. Elles nous ont permis, en outre, de comprendre comment la pigmentation pouvait

20 P. CARNOT.

devenir, ultérieurement, dermique, et comment aussi, dans certains cas, elle pourrait être dermique d'emblée.

La première méthode que nous avons employée, M°1° DEFLANDRE et moi, est celle des greffes pigmentées. Nous l’étudierons spécialement plus tard ; qu'il nous suffise de dire, ici, qu'un mince lambeau d’épiderme noir, greffé sur la peau blanche du cobaye, donne une greffe noire en extension rapide : le fait de la transplantation d'une cellule épidermique noire a donc suffi pour assurer la sécrétion pigmentaire.

Si nous examinons ces greffes au microscope, nous trouvons au début une pigmentation uniquement épidermique, localisée à la couche génératrice.

Une greffe plus âgée, nous montre une infiltration du côté des couches épidermiques superficielles.

Nous voyons de plus apparaître dans le derme, les cellules pigmentées : les poils deviennent noirs. Si nos greffes restent en extension, la double pigmentation se développe et persiste.

Si elles rétrocèdent, nous ne trouvons plus, au bout d’un certain temps, qu'une pigmentation dermique qui, finalement, disparaît elle aussi.

Enfin, dans deux cas, nous avons assisté à ce fait singulier, que des poils noirs se développaient sur la greffe en voie d’atrophie, et restaient bientôt l'unique partie pigmentée de l’ancienne greffe.

Par contre, les greffes cutanées que nous avons réalisées avec des cellules choroïdiennes, nous ont présenté, d'emblée, une pigmen- tation uniquement dermique.

La deuxième méthode, employée par nous, est l'examen des limites des zones pigmentées sur un animal bigarré. Cette limite nous présente, d’abord, une zone très noire, à pigmentation épider- mique et dermique, à poils noirs; puis une deuxième zone à pigmentation épidermique seule: les poils poussent blancs: le derme n'offre pas de pigment. Enfin les cellules épidermiques pigmentées sont de plus en plus rares, et disparaissent complè- tement.

Nous conclurons donc sur ce point :

Que la pigmentation épidermique est primitive et peut se rencontrer seule ou s'associer secondairement une pigmentation dermique ;

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 21

2 Que la pigmentation dermique peut être également primitive ; mais qu'alors, elle reste isolée et qu'une pigmentation épidermique * ne lui succède pas ;

3 Parfois la pigmentation épidermique primitive disparaît, elle peut disparaître, alors, avant la pigmentation dermique qui semble ainsi, à tort, isolée et primitive. L’inverse ne s’observe jamais.

De la théorie concernant les rapports pigmentaires du derme et de l’épiderme, dépend le sort d’une autre théorie, celle de l’origine autochtone ou de l'origine hématique du pigment. ,

Il est bien certain que, puisqu'on peut observer la naissance sur place des granulations pigmentaires, elles ne dérivent pas forcé- ment d’une transformation sanguine. A côté de cas très nets de pigments hématiques, il en est donc d’autres, non moins nets, de pigments cellulaires non dérivés directement du sang.

La pigmentation du poil nous offre les mêmes théories et les . mêmes considérations.

KôLuKER (84) distingue dans le poil un pigment granulé, et un pigment diffus. BoccaRpr et ARENA (19) pensent que le premier résulte de la déshydratation du second.

Nous trouvons : la théorie de l’origine épithéliale autochtone du pigment (WALDEYER (169), Posr (126), ScHWALBE (150), etc.) ; la théorie de l’origine mésodermique aux dépens des éléments de la papille (V. EBNER (46), Rieux (143), KarG (80), etc.).

RETTERER (139) a montré que la pigmentation des poils précédait la pigmentation dermique.

Nous avons examiné des fœtus de lapin, la pigmentation du poil existait seule, sans pigmentation, ni de l’épiderme ni du derme. Nous savons, du reste, que chez certains animaux se fait cette disso- ciation entre la couleur de la peau et celle des phanères: certains animaux à peau noire présentent des phanères blancs (cheval arabe, poule nègre, etc.), d’autres à peau blanche présentent des phanères colorés (homme, paon, faisan, etc.).

SCHWALBE (150), examinant le renouvellement du poil blanc d'hiver de l’hermine, Posr (126) Le renouvellement des cheveux et des cils du nouveau-né, ont montré que le nouveau poil se forme aux dépens d’un bourgeon épithélial de l’ancien poil; ce bourgeon possède seul du pigment.

2 P. CARNOT.

encore, la théorie de l’origine autochtone du pigment paraît hors de conteste.

Sans entrer dans le détail nous devons dire quelques mots du pigment de l'œil. Sans en avoir fait une étude spéciale, nous l’avons, en effet, utilisé plusieurs fois pour des injections ou des greffes.

Dans l’œil comme dans la peau, nous trouvons un pigment épithélial et un pigment conjonctif : nous avons les pigments rétinien et choroïdien, comme nous avons les pigments épidermique et dermique.

Le pigment rétinien tapisse la face intime de l’uvée : il appartient à la rétine. Comme cette couche reste adhérente à la choroïde, lorsqu'on arrache la rétine, on croyait autrefois qu’elle appartenait à cette membrane. Mais des prolongements fins, ciliés, que les cellules pigmentaires envoient entre les cônes et les bâtonnets, la relient à la rétine.

Dans ces prolongements sont les petits bâtonnets pigmentaires; au niveau des corps ciliaires, l’épithélium est plus fortement pigmenté : sur l'iris, les deux feuillets rétiniens sont infiltrés de pigment.

Ces cellules sont polygonales à cinq ou six côtés. Elles dessinent, dans leur ensemble, une mosaïque. Sur les coupes perpendiculaires à la surface de la rétine, on constate : une extrémité externe dépourvue de pigment ; un noyau aplati transversalement; autour de lui, un certain nombre de granules réfrigents (grains aleuronoïdes de BorL); une extrémité interne fortement pigmentée, se résolvant en une multitude de prolongements qui forment un écran aux bâtonnets et aux cônes.

Si la rétine est frappée de rayons lumineux, les granules des parties postérieures s’avancent dans les prolongements : pendant ce temps, les bâtonnets et les cônes subissent un raccourcissement (ANGELUCCI (10), KUHNE (83), RANVIER (132).

Les cellules choroïdiennes sont des cellules ramifiées, de nature conjonctive, contenant des granulations rondes.

Le pigment est-il primitivement épithélial ou conjonctif ?

J&GER, étudiant les kératites expérimentales, trouve du pigment, d’abord dans les cellules superficielles de la cornée, sans que l’épi- thélium en présentât , ultérieurement dans les deux ordres de cellules ; enfin, au bout d’un an; il n’en trouve que dans l’épithé- lium. |

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 23

L'étude de l’apparition du pigment dans les membranes de l'œil n’est pas d'accord avec ces faits.

REAL.-Y-BEYRO (138) a montré que le pigment apparaît d’abord dans les cellules épithéliales du feuillet proximal de la rétine.

Nos greftes cutanées de pigment choroïdien ne nous ont, d’autre part, jamais donné qu’une pigmentation des cellules conjonctives.

Il semble donc résulter de ces faits que les cellules épithéliales et conjonctives sont l’une et l’autre aptes à faire du pigment et qu’une filiation entre la pigmentation de ces deux sortes de cellules n’est pas indispensable.

B. Batraciens et Poissons

Les quelques mots que nous avons dits des cellules rétiniennes à granulations mobiles, peuvent servir de transition entre l'étude des cellules pigmentaires fixes des mammifères et celle des chromo- blastes mobiles des batraciens et des poissons.

Au point de vue du développement, EHRMANN (45) a noté les phases suivantes que nous avons vérifiées sur les larves de batraciens ;

Il trouve du pigment dans toutes les couches cellulaires de l’épiderme : le chorion est libre ;

Les couches épidermiques basales sont libres de pigment: les supérieures sont pigmentées ; entre les cellules pigmentées et apig- mentées, on voit des corps cellulaires à prolongements tournés vers l’extérieur : pendant ce stade, le pigment pénètre dans le chorion;

Puis les couches cellulaires de l’épiderme deviennent libres de pigment : le chorion en est infiltré.

Chez l'adulte, sur un tissu transparent (membrane interdigitale de la grenouille), on voit une couche superficielle de cellules, avec une faible répartition régulière de pigment. Au-dessous, apparaissent les cellules noires ramifiées : suivant le moment de l'examen, ces cellules sont pelotonnées en boules foncées légèrement anguleuses, ou au contraire,elles poussent des prolongements richement ramifiés, dont les extrémités s’emmêlent et teignent en noir toute la prépa- ration. À côté de ces cellules noires, d’autres cellules, à pigment clair, ramifiées abondamment, alternent avec elles: le jeu de la rétraction ou de l’expansion des cellules noires découvre ou couvre.

24 P. CARNOT.

le champ jaune des cellules claires. Suivant la jolie comparaison de Pauz BEerT, l'impression générale double, résultant du jeu de ces cellules, est comparable à celle d'une place publique couverte de parapluies jaunes et noirs qu'on ouvrirait et fermerait alternati- vement.

Sur une coupe de peau de grenouille, ces cellules sont sous l'épi- derme : elles poussent vers l'extérieur des prolongements, parfois ramifiés, qui passent entre les cellules superficielles.

Le noyau de ces cellules est assez difficile à mettre en évidence : chez la grenouille on n’en voit qu’un. Chez les poissons, SOLGER (155) en a vu un ou deux, et même bien davantage, jusqu'à 6 (bro- chet). Il compare cette abondance de noyaux à celle des leucocytes multinucléaires et des ostéoclastes.

ZIMMERMANN (180), étudiant l’archiplasma, le trouve plus développé que partout ailleurs : il décrit une sphère attractive, de la périphérie de laquelle rayonnent dans toutes les directions des fibrilles archiplasmatiques. Pourtant l’amas archiplasmatique central est allongé en « bâtonnet central chez Sargus annularis.

Chez Blennius trigloïdes, un réseau à larges mailles remplace le corps ou bâtonnet central : de partent les irradiations.

Chez Fierasfer acus, l'archiplasma central est encore réticulé mais le réseau est moins bien limité vis-à-vis du spongioplasma ambiant. Il n’en part pas de radiations.

Nous avons vu, chez la grenouille, que le protoplasma se ramifie à la périphérie, en constituant des prolongements multiples. Ces prolongements s'étendent fort loin, sur une cellule bien épanouie. Ils donnent parfois l'apparence trompeuse d’un réseau anastomotique.

Souvent aussi les prolongements sont fragmentés ; on voit des boyaux rectilignes, parfois bifurqués, ne paraissant se rattacher par quoi que ce soit au corps cellulaire. Ces grains pigmentaires, en boyaux ou en groupements isolés, éveillent ainsi l’idée d’une clasmatose : on pense à des cellules égrenant leur contenu dans le tissu ambiant. Mais cette vue théorique est inexacte.

Ces figures apparaissent surtout sur les membranes minces tendues (mésentère, etc.) de la grenouille.

Si on essaye de colorer par les réactifs usuels, le protoplasma de ces îlots, et de voir ainsi s'ils se rattachent au corps cellulaire, on n'y peut parvenir.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 25

Pour démontrer l'existence de ce protoplasma d'union, nous avons suivi, à l’état vivant, les transformations des chromoblastes : on peut, en provoquant des changements brusques dans la forme de ces cellules, suivre sous le microscope les phases de leur genèse et rattacher ces formes les unes aux autres.

Un certain nombre de réactifs physiques (lumière, chaleur) déter- minent le retrait des chromoblastes. Ils sont assez difficiles à employer sur la platine du microscope.

Nous nous sommes surtout servis de réactifs chimiques dont nous étudierons plus loin l’action en détail.

Nous avons constaté, par hasard, que le chlorhydrate d’aniline amenait assez rapidement le retrait des chromoblastes, et faisait apparaitre pour la grenouille, une teinte vert jaune accentuée. Une injection de quelques gouttes d’une solution à 5°/, de chlorhydrate d’aniline amène ce changement en trente minutes environ. La grenouille, abandonnée à elle-même reprend, en quelques heures, sa couleur normale.

On peut accélérer le retour à l’état d'extension en se servant d’un autre réactif : une grenouille qui respire quelques vapeurs de nitrite d'amyle ou qui en a reçu une injection de quelques gouttes dans le sac lymphatique dorsal devient rapidement foncée, en même temps que ses chromoblastes noirs s'étendent en multiples ramifications. Cette action s'exerce en un quart d'heure environ.

Telle est donc la technique que nous avons employée :

On tend sur une plaque de liège trouée une membrane interdi- gitale de grenouille vivante : on fixe un point facile à repérer. On fait alors, suivant que la grenouille est foncée ou claire, une injec- tion, dans le sac lymphatique dorsal, de chlorhydrate d’aniline ou de nitrite d’amyle : on suit, au microscope, la rétraction, l'expansion des prolongements pigmentés. Si c’est une grenouille foncée que l’on éclaircit par le chlorhydrate d’aniline, on assiste aux faitssuivants: la complexité presque inextricable des prolongements s’éclaircit rapidement ; au bout d’une demi-heure environ, les prolongements sont plus nets: en même temps, se font, de place en place, des interruptions brusques, sur lesquelles aucun auteur ne paraît avoir insisté. Ces interruptions sont de plus en plus considérables. On a alors l’aspect d’une cellule centrale, polygonale, mais tendant à rentrer ses angles. Puis, de place en place,sur le trajet de l’ancien

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26 P. CARNOT,

prolongement, se voient des tronçons pigmentaires paraissant entiè- rement détachés de la cellule. Plusieurs paquets granuleux sont ainsi

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PSMN ET 47 LPS

Fig. 1. Croquis successifs, à la chambre claire, d'un chromoblaste (membrane interdigitale de grenouille).

A2 h.50: Injection de chlorhydrate d’ aptine Rétraction. des” chromoblastes. s

À 4h. : Injection de nitrite d'amyle : Expansion des chromoblastes.

On peut voir la pseudo-segmentation des prolongements et. la marche centripète, puis contrfu fe des PEAU peer

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 27

égrenés. Rien ne paraît les rattacher les uns aux autres. Telle est la genèse des formes que nous avions décrites tout à l'heure.

Souvent, le phénomène s'arrête : l’effet du réactif est fini: peu à peu, les boyaux granuleux se rattachent les uns aux autres et au corps cellulaire central. Au bout de quelques heures, la cellule a repris son extension initiale.

Sila dose est plus forte, la fragmentation des prolongements continue : on assiste alors au phénomène suivant :

Un amas pigmentaire isolé semble diminuer de longueur ; en même temps, l’amas le plus voisin dans une direction centripète paraît augmenter d'autant. Quelques minutes après, cet amas, à son tour paraît diminuer et l’amas suivant augmenter d'autant. Les amas pigmentaires se passent leurs granulations par petits paquets jusqu'à ce qu'elles atteignent le corps central de la cellule.

A mesure que s’avance le processus, les amas pigmentaires s’éclaircissent et diminuent: certains disparaissent complètement : le corps même de la cellule augmente de dimensions, fonce beaucoup; arrondit ses angles. Puis, à un moment donné, les prolongements ne sont plus indiqués par leurs amas pigmentaires, on n’a plus qu'un corps cellulaire massif, très foncé, à dentelures grossières, et qui s’est parfois légèrement déplacé par rapport à la position initiale.

Si on attend le retour à l’état d'extension, ou si pour hâter le phénomène, on fait agir le nitrite d’amyle, on voit, de cette cellule presque sphérique, partir à nouveau des prolongements : généra- lement les dessins successifs de la cellule montrent que les nou- veaux prolongements occupent la place des anciens : par endroits, cependant, les formes sont différentes : à la place d’un prolonge- ment , il en naît deux ou trois. Peu à peu la cellule étend, de nouveau, ses prolongements, et la double transformation est terminée. ;

La dynamique cellulaire ainsi étudiée, nous permet de trancher certaines questions discutées par les différents auteurs.

Il est clair que, dans un premier stade, la partie protoplasmique persiste, puisqu'elle est indiquée par les jalons pigmentaires qu'elle a laissés en route. Elle persiste évidemment, puisqu'on assiste au

-transbordement progressif des granules, d’un amas à l'amas suivant.

Elle doit donc rester en place au moins jusqu’au départ du derniergra- nule pigmentaire. Et pourtant ces parties sont impossibles à colorer !

28 P. CARNOT.

I ne s'agit donc pas ici de rétraction de prolongements amœæ- boïdes, mais d’un transport de granules à l’intérieur de la cellule, etde cela, nous sommes certains, jusqu’au départ du dernier granule. Mais après ? les granules une fois évacués, les prolongements restent-ils en place, ou rentrent-ils à leur tour ? Un fait viendrait à l'appui de la deuxième hypothèse : nous avons pu observer plusieurs cas le prolongement nouveau ne partait pas absolument du même point que l’ancien, et mieux, plusieurs prolongements rempla- caient un seul ancien rentré dans la cellule.

Si donc, le plus souvent, les nouveaux prolongements sont superposables aux anciens, cela vient de ce que la voie est déjà frayée, la place libre et que le nouveau prolongement suit ainsi tout naturellement la route de l’ancien.

Des faits paraissent cependant en désaccord avec cette rétraction des prolongements, une fois vidés de leurs granules pigmentaires : telle l'imprégnation rapide des terminaisons nerveuses par la méthode GoL&Gr, RAMON-Y-CAJAT..

Ces nerfs ont été longtemps supposés, sans démonstration. Par la méthode de l'or, LeYDIG (92), EHRMANN (49), SCHŒBE, LODE, avaient trouvé que les nerfs pénétrent dans les chromoblastes.

RerTzius (145) et surtout BALLowITZ (12) sur les poissons, établissent le trajet terminal de ces nerfs.

BazLowirz montre, sur le brochet et la perche en particulier, que chaque chromoblaste reçoit des fibrilles en nombre variable, quelquefois un ou deux, parfois un nombre si considérable qu'on ne peut les déterminer.

Un nerf peut fournir successivement des rameaux, à une série de cellules : jamais on n’a observé d’amas ganglionnaire: les nerfs abordent les chromoblastes et se divisent dichotomiquement: un réseau s'applique ainsi sur chaque face de la cellule qui se trouve logée entre deux plexus s’envoyant des anastomoses au travers du corps cellulaire.

li existe des anastomoses entre certaines fibrilles : les extrémités sont toujours libres.

L'ensemble constitue avec le chromoblaste une véritable plaque nerveuse terminale. ;

Or quand les cellules sont rétractées, les fibrilles nerveuses restent en relation avec la partie protoplasmique des prolongements :

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 29

ces fibrilles sont probablement en rapport intime avec le proto- plasma, et même sont plongées dans son épaisseur, tout en restant indépendantes de lui.

EBERTH et BUNGE (185) sont arrivés à des résultats analogues.

On est, a priori, très surpris de pareils faits: la disproportion énorme entre la pauvreté et la richesse en fibrilles de deux cellules voisines ne s'explique pas logiquement, et peut-être la méthode n'est-elle pas parfaite.

En tous cas, si les terminaisons nerveuses pénètrent le proto- plasma et qu’elles restent en place, après retrait des granules pigmentés, cela semblerait prouver que, même après départ du dernier granule, le prolongement cellulaire reste épanoui.

Nous l’avons démontré pour la première phase de retrait. La deuxième phase reste pour nous encore incertaine.

Le fait du transport pigmentaire dans le protoplasma est un fait analogue à celui que se passe dans les cellules rétiniennes.

Peut-être même, les grains paraissant isolés de certaines cellules (cellules conjonctives, clasmatocytes), leur sont-ils rattachés par un prolongement protoplasmique, non colorable également.

30 P. CARNOT.

DEUXIÈME PARTIE.

INFLUENCE DE LA GRANULATION PIGMENTAIRE.

(INJECTIONS DE PIGMENTS).

Dans une première partie, anatomique, nous avons étudié l'élément de la coloration, sa forme, sa répartition. Allant du simple au composé, nous avonsétudié successivement le colorant, le granule, la cellule.

Nous aborderons, maintenant, une autre partie anatomo-physiolo- gique, nous nous efforcerons de préciser, par l’expérimentation, le rôle que jouent le colorant, le granule, la cellule ; l'influence du système nerveux et des divers organes. -

Le rôle que jouent le colorant et le granule sera étudié par la méthode des injections pigmentées: étant donné un organisme, qu'advient-il si on lui procure artificiellement tel dose de pigment ?

ce pigment se fixe-t-il, s’élimine-t-il, se décolore-t-il ?

Telles sont les questions que nous avons soulevées, sinon résolues. |

La technique de nos expériences est la suivante : on peut faire un extrait pigmenté de plusieurs manières : le pigment noir, employé par nous presque uniquement, ne peut être extrait de la peau. On peut, par contre, l’extraire de l'œil, des tumeurs mélaniques, ou de la poche du noir de la seiche. 4

Pour l’extraire de l'œil, on procède de la manière suivante: l'œil, étant retiré aussitôt après la mort de l’animal, est ouvert suivant l'équateur avec des ciseaux aseptiques: chaque calotte hémisphé- rique est alors raclée, dans un godet aseptique, avec une lame de platine flambée : de même de la face postérieure de l'iris. Avec des _ pinces, on enlève le cristallin et toutes les parcelles volumineuses, de

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 31

* l'humeur aqueuse, tenant en suspension le pigment, est aspirée dans une pipette stérile et injectée aussitôt dans le péritoine ou dans le tissu cellulaire sous-cutané ; l’émulsion n’est pas assez fine pour que l’on puisse se servir de la voie veineuse : on aurait certainement des embolies et des accidents rapides.

L’injection du pigment extrait de tumeurs mélaniques, offre, au point de vue pratique, de grands avantages : au point de vue théo- rique, cette technique prête le flanc à plusieurs objections : le pigment semble bien être de même nature que celle de l’œil ou de la peau. Mais l'extrait de la tumeur doit contenir des substances toxiques autres que les substances colorées.

De plus, il n’est pas cerlain que nous n’ayions pas affaire à une maladie parasitaire : la mélanose du vieux cheval blanc, dont nous nous sommes servis, a été, maintes fois, inoculée au porteur sans résultat. De même de l’inoculation faite par nous à d’autres animaux d'espèce différente (lapin, cobaye, chien).

D'autre part, les cultures que nous avons faites sur divers milieux, sont restées stériles. :

Pourtant JUERGENS (76) prétend avoir inoculé et même cultivé le parasite de certaines de ces tumeurs. Conténtons-nous donc de relater l'échec auquel nous avons abouti. Dans les injections de tumeurs, nous n'aurons à considérer que la pigmentation. N'ayant pas obtenu de tissu pathologique, nous n’aurons pas à invoquer l’inoculation du parasite supposé.

Du reste, l'extrait aqueux que nous en avons fait en coupant et broyant des fragments de tumeurs, n’a été que dans quelques cas employé sous cette forme. Pour le conserver, nous avons, d’une part, additionné la solution de substances antiseptiques (essence de cannelle, etc), d'autre part, nous avons fait passer d’autres extraits à l’autoclave à 120° pendant un quart d'heure.

Nous n'injections sûrement ainsi les granules qu’en tant que corps chimiques inertes.

Le noir de seiche peut se trouver dans le commerce, mais difficile- ment. Cette difficulté nous a empêché de nous en servir, jusqu'à présent, comme nous l’eussions désiré.

L’injection a été faite de diverses manières: par voie sous-cutanée ; par voie intrapéritonéale ; par injection intraveineuse.

32 P. CARNOT.

Nous nous sommes servis pour les deux premières voies de pigment choroïdien et de pigment de cheval mélanique.

I. Injection intraveineuse :

L’injection intraveineuse met immédiatement en circulation des masses considérables de pigment.

Le danger est la production de petites embolies, peut-être même de coagulations intravasculaires, qui peuvent modifier certains résultats.

Cette injection agit, d’une part comme agirait toute injection de particules extrêmement fines, d'autre part aussi par un facteur mal défini (chimiotactisme, affinités cellullaires spéciales) propre à la nature du granule pigmenté.

Les deux actions sont intéressantes à étudier.

Il serait en effet difficile de trouver un autre corps inerte aussi petit et aussi mobilisable, pour constater l'effet du transport et de la rétention de particules fines. Or il est intéressant, à plus d’un titre, de pouvoir noter la fixation de ces particules et de les comparer aux fixations de micro-organismes consécutives aux injections intravei- neuses de leurs cultures.

En tant que pigment, la brusque surcharge du sang, permet de saisir des voies d'élimination qui pourraient échapper si de faibles quantités de pigments étaient mises en jeu.

Nous relaterons deux faits typiques de ce genre:

EXPÉRIENCE I :

Le 4 mai 1896, un lapin gris, pesant 2 kil. 100, reçoit dans la veine auriculaire 40%, d’une solution venant d’être préparée par le broyage d’une tumeur fraîche de vieux cheval blanc mélanique. Cette solution est presque noire.

Le 6 mai, le même lapin reçoit 40% de cette même solution conservée aseptiquement.

On le sacrifie deux jours après.

L'autopsie montre un foie complètement noir, un poumon noir dans sa presque {otalité : les capsules surrénales paraissent un peu congestionnées ; les reins congestionnés, présentent des trainées vasculaires noires.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 33

EXPÉRIENCE II :

Lapin gris clair pesant 2 kil. 300.

Le 10 juillet, injection de 40° d’une solution de pigment mélanique provenant d’une tumeur de cheval.

Solution stérilisée à l’autoclave à 120°.

L'animal supporte très bien cette injection : au bout d'un mois, on est frappé de la teinte un peu plus foncée deses poils, surtout à leur extrémité. Mais ce n’est peut-être qu’une coïncidence.

Le 5 septembre, injection de 40 de la même solution. L'animal meurt, au bout de 15 heures environ,

Autopsie: poumons complètement noirs, par larges zones; de teinte bigarrée dans le reste de leur étendue.

Foie complètement noir.

Reins très congestionnés, paraissant malades.

L’urine contenue dans la vessie est brun-noirâtre.

L’intestin grêle a une teinte brun clair anormale : l’estomac et le gros intestin paraissent normaux.

Capsules surrénales un peu congestionnées, légèrement noires par places.

Cœur : les artères coronaires contiennent du sang coagulé ou des embolies.

Nous étudierons en même temps les lésions microscopiques de ces deux cas, très comparables on le voit.

Le foie noir sur la coupe (1), présente, à un faible grossissement, une disposition radiée du pigment dans les capillaires du lobule : partie des veines-portes la pigmentation converge vers .la veine sus - hépatique centro-lobulaire, La pigmentation paraît égale d’ailleurs au centre et à la périphérie du lobule ; la veine centro- lobulaire contient une grande quantité de pigment sur s2s bords.

Les granules sont contenus surtout dans les capillaires. Ils y forment : des amas pigmentaires compacts qui sont le phénomène saillant; en effet, le liquide injecté contenait des granules dissé- minés, ne constituant aucun amas. Or, dans le poumon, la rate etle foie, nous retrouvons ces vastes groupements qui ne sont pas d’ori- gine cellulaire, car on assiste, pour ainsi dire, a leur genèse : on en

(1) Voir la planche I, fig. 1.

34 P. CARNOT.

voit quelques-uns seulement acolés : puis, à côté, un amas est plus considérable. Enfin, on voit de gros boyaux, dépassant de beaucoup Ja taille d’une cellule et donnant l'impression plutôt d’un processus embolique. 11 semblerait qu’il y ait eu là, soit une petite coagulation, soit un agglutinement indéterminé.

Les cellules du foie contiennent assez fréquemment du pigment dans leur intérieur. Il semble souvent que ces granules aient une teinte beaucoup plus claire que ceux restés dans les capillaires. Il est rare pourtant que l’on assiste à une infiltration complète de la cellule hépatique, comme celle qui existait notamment dans le foie noir du cheval, d’où provenait notre tumeur mélanique.

Pourtant les cellules hépatiques de notre lapin semblent dégé- nérées : le noyau se colore mal et des vacuoles existent dans le protoplasma.

Du côté de la bile, nous avons cherché à décéler un élimination du pigment. Nous savons, en effet, d'après TarcHANOFF que le pigment biliaire injecté, s’élimine par la bile : d'après WERTHEIMER que le pigment biliaire d’un autre animal (mouton), que la chloro- phylle s’éliminent également par la bile. Mais nous n’avons trouvé dans la vésicule biliaire aucune granulation pigmentaire.

Le poumon présente à la coupe des travées, noires de pigment : une partie des granules est très certanement arrêtée dans les capil- laires dont ils dessinent la disposition anatomique le long des travées : encore, nous trouvons tous les intermédiaires entre les formes libres et les énormes amas agglutinés dont nous parlions tout à l'heure. Certains capillaires présentent des granules sur leurs bords ; d’autres sont entièrement obstrués.

Les cellules alvéolaires paraissent gonflées et moins aplaties : elles contiennent des granulations pigmentaires, peu abondantes. Quelques-unes, en train de desquamer, en contiennent également.

D'autres formes, sur l'interprétation desquelles, nous aurions quelques doutes, paraissent des leucocytes imprègnés de pigment.

Enfin les gros vaisseaux ont leur centre rempli de globules rouges, sans traces de granulations : sur leurs bords s’attardent quelques rares granulations.

Les reins sont très curieux à examiner: les gros vaisseaux paraissent libres : les capillaires sont infiltrés de pigment sur leurs bords : ils sont libres en leur centre. Mais le pigment qui infiltre

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MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 39

les petits vaisseaux et passe dans les mailles voisines de tissu conjoncüf, n’est jamais en amas, comme dans le foie, le poumon et la rate; toujours, les granulations sont libres et indépendantes. La réaction agglutinante, si nette ailleurs, manque totalement ici: chose en rapport avec l'élimination au niveau du rein. Nous retrou- verons le même fait au niveau de l'intestin.

Les glomérulessont véritablementinfiltrés de noir (1). On en trouve dans les capillaires, dans l’épithélium, dans la lumière capsulaire. Sur une coupe, le glomérule est coloré en noir. Il y a donc, à son niveau, une élimination très active. L'épithélium destubes contournés renferme quelques granulations.

Dans la lumière des tubes droits, se voient de nombreux granules.

Nous avons vu l'urine brune de pigments.

Il y a donc une élimination considérable de pigment, sans phéno- mène agglomératif par tout le rein, mais surtout au niveau des glomérules.

L'intestin présentait un contenu brunâtre : sur la coupe, on trouve une infiltration pigmentaire des parties voisines de la lumière centrale.

La rate est infiltrée de pigment: elle est noire sur une coupe histo- logique. encore, nous trouvons un état agglomératif spécial.

II. Injections intrapéritonéales.

L’inconvénient de ce mode d’injection est l’asepsie, souvent rela- live, des solutions injectées.

EXPÉRIENCE À :

Lapin albinos. En mai, injections dans le péritoine, au moyen d’une pipette stérilisée, d'extrait mélanique frais de choroïde dans l’humeur aqueuse. Ces injections ont été répétées tous Les deux ou trois jours : cinq fois en tout.

L'animal ne change pas de teinte. Il est sacrifié.

Autopsie : De larges zones noires apparaissent sur le péritoine pariétal et sur l’intestin. Le foie présente, seulement à la surface, des zones noires.

(1) Voir planche II, fig. 1.

36 P. CARNOT. Feb,

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De même du rein qui, à la coupe, paraît normal.

de

Les capsules surrénales paraissent macroscopiquement hypertro- ‘à phiées, mais peu malades. 4 5

EXPÉRIENCE B : 5186 ue i CL cie . Chien noir jeune (3 mois). Le 4 mai, il reçoit dans le péritoine D - 20cc d'extrait frais de tumeur mélanique. Il en reçoit 20 autres le 40 lendemain. 2008 2 Ù ; : | EE

Deux greffes, de tumeur mélanique, implantées sous la peau, 11980

déterminent un vaste abcès à pus fétide avec décollement considé- rable : on sacrifie alors l’animal, au bout de quatre jours.

Autopsie : Aucune trace de péritonite : les cultures du péritoine restent stériles. Le mésentère et le grand épiploon sont noirs par places.

La capsule surrénale gauche attire d’abord l'attention : elle est, en effet, complètement noire dans toute sa partie supérieure. Cette teinte va en se dégradant vers la partie inférieure, moins noire.

La capsule droite est hypertrophiée, légèrement congestionnée : elle ne présente pas d'infiltration noire.

Le rein présente à sa surface une plaque noire ; il paraît normal macroscopiquement.

Poumon normal.

EXPÉRIENCE C :

Cobaye albinos: injections plusieurs fois répétées d'extrait pigmen- taire choroïdien provenant d’yeux de lapin.

Autopsie après une survie de quinze jours.

Capsules surrénales très malades, des deux côtés, très ! conges- tionnées, à teinte brun sombre.

Poumons très légèrement congestionnés : intestin normal.

EXPÉRIENCE D :

Cobaye bigarré. Injection d'extrait de tumeur mélanique stéri-. lisé à 420°. 20c° dans le péritoine. Mort 10 jours après.

Capsules surrénales malades très congestionnées, surtoutla droite. Reins paraissant malades. Foie à peu près normal.

aid.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 37

EXPÉRIENCE E :

Lapin. Injection intrapéritonéale à plusieurs reprises d'extraits stérilisés de tumeurs mélaniques : capsules surrénales extrêmement congestionnées.

L'examen microscopique de ces différentes pièces a été fait géné- ralement après conservation dans l'alcool ou dans le formol. Il a donné les résultats suivants:

Capsules surrénales.

La capsule surrénale du chien (Exp. B.) est de beaucoup la plus intéressante : elle présente des lésions tellement considérales qu'elle est à peine comparable aux autres. La cause nous en échappe, du reste, complètement, de même que celle de l’unilatéralité de la lésion.

Sur les coupes (1), on distingue une partie, la partie supérieure, complètement noire. On n'y voit que quelques travées conjonctives recouvertes de granulations : pas une cellule n’est visible, ni cellules surrénales, ni leucocytes : on n’y voit que des granules pigmentaires disséminés partout.

Ils ne présentent pas de formes en amas.

A la limite de ces parties méconnaissables, on en trouve d’autres, très altérées également. Beaucoup de cellules glandulaires manquent. D’autres, gonflées et altérées, sont prêtes à se détacher; elles sont complètement infiltrées de granules. D’autres enfin sont moins malades. Mais leur noyau prend mal la coloration : le proto- plasme est vacuolé ; un certain nombre de granules pigmentaires se pressent autour du noyau qui se colore mal.

Ces cellules sont, du reste, rares, et tout autour se trouvent de jeunes cellules, à gros noyau vivement colorable, à protoplasma moins étalé ne contenant aucun grain pigmentaire, tassées les unes contre les autres et infiltrant par zones, l’ancien tissu démoli dont elles prennent la place.

Sur des points moins altérés encore, on trouve des cellules glan- dulaires de mieux en mieux conservées, mais infiltrées encore de pigment : les zones de nouvelles cellules sont plus réduites et se distinguent du reste moins bien.

(1) Voir planche II, fig. 2.

38 P. CARNOT.

On assiste ainsi de bas en haut à la progression suivie par la lésion :

La cellule glandulaire, d’abord infiltrée de pigment, mais encore vivante, s’altère ensuite, en se surchargeant de granulations. Son protoplasme s'étale, son noyau se colore moins. Enfin elle peut desquamer. Des amas de cellules jeunes se groupent et prennent la place des cellules altérées.

Enfin, on arrive à un point toute vie cellulaire est devenue impossible, les anciennes cellules sont mortes, les nouvelles n’ont pu se développer, les leucocytes même ne peuvent s’aven- turer, et les granules seuls remplissent, avec quelques travées conjonctives, le champ de la préparation.

Par contraste avec ces lésions, si avancées, l’autre capsule ne présente presque rien: la glande est augmentée de volume, les cellules dégénérées par places; on trouve, de loin en loin, des grains pigmentaires en voie de disparition dans quelques cellules.

Notre attention une fois éveillée par ce cas, nous avons soigneu- sement examiné les autres capsules surrénales, dont l’altération macroscopique était d’un tout autre ordre (hypertrophie et congestion), dont certaines, du reste, paraissaient à peine malades.

Les coupes de capsules surrénales de lapin (Exp. A), montrent une glande peu malade. On voit néanmoins quelques cellules infitrées de pigment : d’autres ont un aspect dégénéré : elles con- tiennent des vacuoles, leur noyau se colore mal. On voit, par places, une poussée d'éléments jeunes à noyau fortement coloré.

D’autres places montrent de petits îlots à cellules malades infiltrées de pigment.

L'expérience C (cobaye albinos), nous a montré au microscope des cellules très malades, dégénérées, à vacuoles, à desquamation active par places. Un certain nombre de cellules en desquamation sont pleines de pigment. D’autres restent en place, avec du pigment sur leur bord.

L'autre capsule est moins malade : à la zone externe, les cellules sout gonflées ; le noyau se colore pourtant.

La zone interne est très congestionnée : des vaisseaux sont énormes : le protoplasma à vacuoles, le noyau peu coloré. Très peu de granulations.

Par places, sur ces deux capsules, on voit dans le protoplasma

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MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 39

cellulaire, de petits granules, à peine visibles, passant d’abord inaperçus. Leur limite est peu dessinée : leur coloration est pâle, tranchant peu sur le reste. Ils donnent l'impression de granules en train de se décolorer.

Les capsules de l'expérience D présentent des cellules également très malades par places : on retrouve des nodules de petites cellules jeunes, non altérées.

Dans les cellules très malades, on retrouve, de même, de petits grains pigmentaires en train de dégénérer.

A côté de parties très malades à cellules desquamées ou dégé- nérées, de moins malades ne présentent plus de cellules jeunes. Il y a néanmoins des cellulles vacuoliformes à pigment.

Les capsules de l'expérience E (lapin) présentent également des cellules à granulations à peine pigmentées.

A côté donc d’un cas la capsule est tellement altérée par le pigment qu’elle est presque méconnaissable, nous trouvons d’autres capsules, infiniment moins malades, mais présentant le même processus à son début.

Nous croirions volontiers, d’après ces données, à un rôle fixateur et destructeur du pigment par les capsules surrénales (1). L'altération de la glande permettrait ainsi d'expliquer comment le pigment n’est plus détruit dans la maladie d’Addison à capsules malades ou para- lysées.

Nos faits s'accordent, d'une part avec le rôle antitoxique et destructeur des poisons que tendent à attribuer à la glande les recherches contemporaines (STILLING, ABELOUS et LANGLois (2), ALBANÈSE (5), CHARRIN (182), GOURFEIN (67), PETTIT (184), etc.); d'autre part avec les expériences de PILLIET (183) qui, injectant des substances globulicides dans le sang, notait une surcharge pigmne- taire des capsules surrénales.

Nos faits sont instructifs encore, en ce sens, qu’une seule fois,

. par un déterminisme expérimental qui nous échappe, nous avons

obtenu une capsule surrénale complètement transformée et noire de pigment. Les autres fois, la surcharge pigmentaire était peu appréciable à

(1) Les lapins à graisse incolore, qui reçoivent une injection sous-cutanée de lutéine (solution éthérée de jaune d'œuf, redissoute dans la vaseline), présentent une graisse, localement colorée au lieu d'injection ; leurs capsules surrénales sont teintées en jaune : l'alcool dans lequel on les met prend rapidement cette teinte. DUPAIGNE a fait, sur la souris, une constatation identique.

40 P. CARNOT,

l'œil nu, et même au microscope quelques cellules seulement étaient infiltrées de pigment, généralement en partie décoloré.

Les autres organes nous ont permis de retrouver les mêmes faits que les injections intra-veineuses.

Les reins du cobaye D présentaient, comme à la suite d’injections intra-veineuses, des glomérules chargés de pigment, en train de s'éliminer, et qu'on retrouvait dans la lumière capsulaire : une éli- mination moindre avait lieu au niveau des tubes.

Les reins du lapin A présentaient quelques te au niveau des glomérules et des tubes du rein.

Ceux du chien B présentaient également quelques granules dans la lumière capsulaire.

L'intestin du cobaye C est très intéressant à étudier. A la suite de l'injection intra-péritonéale, se sont faits des amas pigmentaires, étalés sur la surface de l'intestin : une coupe faite à ce niveau a montré l'infiltration du pigment, s'étendant très loin en profondeur.

A la partie séreuse, nous voyons des amas agglutinés de granules, puis des leucocytes chargés de pigment. Il est remarquable que certains granules, contenus dans les leucocytes semblent avoir perdu leur couleur en partie.

Le nombre des granules diminue de plus en plus dans les tuniques musculaires les granules sont libres, souvent en trainées.

Vers la muqueuse, le nombre des granulations libres augmente : on en trouve une certaine quantité vers la lumière du canal, sur le bord libre. L’élimination est nette microscopiquement, comme elle l'était macroscopiquement à la suite d’injections intra-veineuses grâce à la couleur du contenu intestinal.

Mêmes phénomènes et mêmes considérations pour le lapin albinos A: les granulations se retrouvent du côté de la lumière intestinale elles sont plus abondantes que dans la zone médiane musculaire.

Le poumon de cobaye C montre également un grand nombre de granulations pigmentaires : les unes dans les cellules pulmonaires, dont les plus malades desquament, les autres dans des leucocytes. Le foie de cobaye D présente de rares granulations de place en place, à l’intérieur des cellules hépatiques.

Un ganglion du lapin A montre, par places, un assez grand nombre de granules dans les cellules lymphatiques, granules qui encore semblent s’altérer et perdre l'intensité de leur couleur.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 41

III. Injections sous-cutanees.

Nous avons fait plusieurs expériences de ce genre: la plus curieuse est relative à un chien :

Une injection sous-cutanée est faite sous la peau du ventre (20° d'extrait de la mélanose du cheval, passé à l’autoclave). On donne le surlendemain une autre dose de 40°.

On sacrifie le chien quatre jours après.

À l’autopsie, on est surpris de trouver un épiploon noir (1), présentant uniformément sur toute son étendue, des traînées noires de pigment, en boules juxtaposées.

Rien sur le mésentère, rien sur le péritoine pariétal. Le lieu de l'injection sous-cutanée conserve une teinte noire, et ne présente aucune communication avec le péritoine, dont il est séparé par la

couche musculaire de l'abdomen. Le péritoine pariétal est sain. Aucune adhérence du grand épiploon avec le péritoine pariétal.

Dans l’aisselle, ganglion teinté en noir.

Organes paraissant sains microscopiquement, n'ayant pas été examinés au microscope.

Nous avons retrouvé sur le cobaye, dont le grand épiploon est du reste beaucoup moins développé, un cas analogue : à la suite d’une injection sows-cutanée de pigment, l’épiploon présentait des masses noires à son bord libre. On n’observait pas ici la disposition en trainées. R

Ce fait est des plus curieux : il semblerait indiquer une voie non soupconnée d'absorption pour les injections sous-cutanées. Nous faisons dans cette voie des expériences avec d’autres substances. II serait curieux de constater, en d’autres cas, cette traversée périto- néale et cette résorption par le grand épiploon.

Le grand épiploon peut, du reste, être assimilé, surtout depuis les mémorables recherches de RaNviEr(131),àaun ganglion lymphatique étalé ; le pigment s'y fixerait comme il se fixe dans les ganglions.

Un autre résultat des injections sous-cutanées, visible sur les coupes de peau, au-dessus de l'injection est le suivant :

Il peut y avoir dans le derme une accumulation considérable de pigment, des leucocytes qui le résorbent : on n’observe néanmoins

(1) Voir planche Ip 00

42 P. CARNOT.

aucune pigmentation des cellules épidermiques sus-jacentes, ni des poils. Ce fait vient encore à l’appui de la théorie de l’origine autochtone du pigment.

Les injections de pigment nous ont donc renseigné sur les points

suivants :

Le pigment s’élimine par les reins et par l'intestin ; Il se fixe dans le foie, la rate, le poumon ;

II semble se détruire, par une sorte de digestion intra-cellulaire, dans les cellules lymphatiques et les cellules surrénales.

Deux cas particulièrement nets, nous en montrent l’accumulation dans les capsules surrénales d’une part, dans les organes lympha- tiques (grand épiploon) de l’autre.

Enfin, nous n’avons jamais observé nettement, à la suite d’injec- tions massives de pigment, même sous la peau, de coloration de l’épiderme ni des phanères.

1U

INFLUENCE DE LA CELLULE SUR LA PIGMENTATION.

(GREFFES PIGMENTAIRES).

De même que les injections pigmentaires nous ont permis d'aborder expérimentalement l’étude de l'influence du granule sur la coloration, de même devons-nous, maintenant, aborder expérimentalement le rôle de la cellule même dans ce phénomène. È

Nous avons déjà donné certains arguments anatomiques qui pré- cisaient l’acte de la sécrétion cellulairé du pigment, le fait de son origine autochtone. Les arguments expérimentaux que nous allons aborder, nous imposeront les mêmes conclusions.

Expérimentalement, le rôle de la cellule dans la coloration peut être étudié de plusieurs manières.

Par exemple, on peut soumettre une place anatomique bien définie à telle ou telle influence, et comparer cette place aux endroits voisins soumis aux mêmes influences générales.

On peut, étudier les éphélides provoqués par les rayons solaires (DemigvizLe) (41) ; la pigmentation provoquée par un vésicatoire.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 43

On peut, à l'exemple de ScxwarBe (150), étudier l’hermine au moment de la variation de couleur périodique de ses poils.

Généralement, le problème reste complexe, le système nerveux, les glandes sont influencés et la solution manque de précision.

Une technique plus élégante et plus exacte, consiste à trans- planter une cellule dans telle ou telle condition déterminée ; on élimine ainsi tous les facteurs étrangers à la cellule elle-même.

En faisant varier les conditions d'existence de l'organisme auquel appartiennent, la cellule greffée d’une part, celles de l'organisme porte-greffe d'autre part, on met en conflit des facteurs connus, et on peut espérer aborder un certain nombre de problèmes propres, non seulement à la pigmentation, mais encore à la biologie et à l’énergitique cellulaire générale.

Ce problème beaucoup plus vaste, et que nous n'avons qu'ébauché, dépend, d’abord, de la solution du premier.

Lorsque nous connaîtrons en effet les lois concernant la greffe des cellules pigmentées, nous pourrons nous servir de la pigmen- tation comme d’un index colorimétrique nous permettant de retrouver la descendance de la cellule greffée et d’en suivre à l’œil nu le développement.

Le problème que nous abordons, indépendamment de l'intérêt qu'il présente, pour la théorie de la pigmentation, est donc la première pierre d’un édifice destiné à enregistrer les luttes intercel- Julaires et les conditions de vitalité (nous dirions volontiers de viru- lence) qui font triompher une cellule, et peut-être l'amènent à un développement anormal et pathologique.

La première question que nous devons résoudre est la suivante : une greffe épidermique pigmentée évolue-t-elle au milieu de cellules blanches ? Si cette greffe se résorbe, toute recherche en ce sens est impossible.

Plusieurs auteurs ont essayé de transplanter de la peau de nègre sur un sujet blanc, et inversement. MAUREL (104), dans un intéressant travail, relate de multiples essais faits sur diverses races humaines.

Il conclut que la greffe prend finalement la coloration du porteur.

BryaANT a suivi pendant quatre semaines seulement des greffes faites de nègre à blanc ; elles ont persisté, mais cette durée d’obser- vation est très insuffisante.

44 P. CARNOT,

Kar& (80), dont le travail est surtout connu, a fait des greffes de Thiersch de nègre à blanc et inversement. Il a étudié, au microscope. le très curieux phénomène de la résorption de ses greffes. Il en conclut que, tant pour l'apport que pour le départ du pigment, le rôle des cellules mobiles est prépondérant.

Mais comme le fait observer SCHWALBE, cette intervention de la phagocytose est un phénomène général,propre àtouteslesrésorptions de greffes ; il n’y a rien de spécial aux granules pigmentés; le résultat positif seul peut être interprété ; or toutes ces greffes se sont résorbées.

Nous avons repris le problème sans connaître les travaux anté- rieurs ; car leurs conclusions nous en auraient détourné, puisque la résorption, qu'ils ont observée, était contraire au but que nous nous proposions.

Nous avons fait ces recherches avec la collaboration de Me DEFLANDRE à qui nous adressons, ici, tous nos remerciements, et nous nous proposons de les poursuivre ensemble (1).

Nous avons eu la bonne fortune de faire nos premières greffes, sur le cobaye, animal généralement bigarré, le plus propre à cette étude, sur lequel nos greffes ont évolué.

Précisant ensuite les conditions du problème, nous vimes que chez l’albinos, nos greffes se résorbaient assez rapidement, et, rappro- chant l’homme blanc de l'animal albinos ou faiblement pigmenté, nous pûmes nous expliquer les résultats des auteurs cités.

Sur les animaux bigarrés, nos greffes noires s’étendaient rapi- dement sur fond blanc. Au bout d’un an, elles étaient encore en extension.

Le réactif, pour n'avoir pas une action tout à fait générale, n’en était pas moins utilisable et nous devions, dès lors, en étudier le déterminisme.

La technique des greffes pigmentées est simple: mais on doit redouter un grand nombre d’insuccès, tenant à l’indocilité de l'animal, qui, lui-même, arrache ses greffes.

Nous nous sommes bien trouvés de pratiquer au rasoir un lambeau épidermique, sur le porte-creffe ; ce lambeau recouvre la greffe et la protège contre la dessication.

(1) Ces récherches ont été commencées au laboratoire de mon cher maître, M. GILBERT, à l'hôpital Broussais ; il nous a donné d'excellents conseils.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 45

La greffe, sauf exception, doit, pour le but que nous nous proposons, comprendre le moins de cellules possibles et des cellules épithé- hales seulement. Elle doit être mince et petite.

Nous recouvrons généralement la grefie d’un carré de taffetas gommé. On peut doubler ce pansement d’une couche de stérésol ou de pâte d'Unna.

Généralement au bout de quelques jours, on aperçoit un point noir qui fonce et s'étend progressivement. La greffe en extension présente un centre noir, un contour dégradé qui marque la zone de croissance.

Nous avons soigneusement décalqué les limites de la tache ; les chiffres que nous indiquons sont pris dans deux directions perpendi- culaires.

Nous avons fait deux séries d'expériences :

Dans une première série, nous avons greffé sur peau blanche, de la peau noire, provenant du même animal ou d’un autre de même espèce.

Voici quelques exemples de la croissance de ces greffes.

EXPÉRIENCE :

Cobaye à tête noire, moyennement pigmenté. Le 13 septembre 1895, on prélève un lambeau d’épiderme noir au niveau de la tache noire postérieure. Ce lambeau est greflé sur le même animal au flanc gauche, au milieu d’une zone blanche.

Les mensurations n’ont été faites qu’à dater du 2 octobre.

Les dimensions de la tache noire étaient : er2 octobre: 1895 :"de 171 Sur PR

D 10/2225 9 CES US 14 42: = %8:5

28 43:75:56 17 novembre ....... 19 8 28 148 10 12 décembre........ 18.5 12.5 26 149 13 15 janvier 1896... 19 —: 16 16 19 16

46 P. CARNOT.

30 mars 1896... 20% sur 48 ADSAPUI EORE, ++ ANR D 30 septembre... 20 20 Le cobaye meurt de tuberculose généralisée le 1” octobre 1896. 2.X. 99 : ee _ po |

28. X CS XT

19, XII 26. X71 Hope 96 80.117

Fic. 2. Contours décalqués de la greffe noire aux différentes périodes de son évolution. La dégradation de teinte du contour n’est pas représentée.

Plusieurs fois, à partir du 28 novembre des fragments de grefle ont été prélevés et ont servi soit à d’autres Hess soit aux examens histologiques.

EXPÉRIENCE :

Le 6 novembre 1895 on greffe sur la peau blanche d’un cobaye, un lambeau noir provenant du même animal.

17. X1.05 Lo. XI 29. X7 25. X1 : DE 2

g.xm GX 12. XI

19 17.N

FiG. 3. Cette greffe a été prélevée aux dépens de la première : son cos est moins rapide. Les inégalités de contour entre deux fgures tiennent aux prélèvements successifs effectuës sur la greffe.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 47

Les dimensions sont : le 17 novembre 1895 de oum sur gum

20 PA EE ES 23 _— 3 ? 3 décembre .......... A2 3 6 D 83.5 42 _— 6.5 4 26 8 À.5 2 Janvier: 712 eue 8.5 5.2 DANIEL RU EURE 8 6 12 _— -9 7

AUTRE EXPÉRIENCE :

Cobaye mâle à aigrette. Greffe noire venant d’un autre cobaye

faite le 10 mai.

Dimensions à dater du 12 juin:

PAS ASP STIT OR 28 142 6.5

‘40 juillet .:. 14 :. 7 HOCtObre-2. 19 2e 27

3 novembre 15.5 9.5

Les greffes noires sur peau blanche évoluent donc progressivement et pendant longtemps, puisqu'elles sont encore en extension, faible il est vrai, au bout d'un an. Une bordure de teinte dégradée entoure la greffe et représente la zone d'extension de la peau colorée.

Les poils poussent d’abord blancs, puis des poils noirs apparaissent au centre, croissant plus vite et plus fort que les poils blancs ; la périphérie de la greffe donne implantation à des poils blancs.

Dans une deuxième série d'expériences, nous avons essayé de greffer l'épiderme blanc sur peau noire.

Nous avons échoué constamment et pourtant notre technique était la même.

Si par hasard, la greffe prend, elle rétrocède rapidement et dispa- raît. Si la greffe est de dimensions plus grandes, le centre reste blanc, mais le noir envahit progressivement la surface blanche, qui, bientôt, ne se distingue plus.

48 P. CARNOT.

Nous avons essayé ces greffes une trentaine de fois, avec un résultat négatif et jusqu'à nouvel ordre, nous considérons comme impossible l'extension d’une greffe blanche sur fond noir.

D'une part donc, évolution rapide et durable des greffes noires, :

de l’autre, atrophie ou coloration des greffes blanches. Quelles conclusions pouvons-nous tirer de ces deux ordres de faits ?

En transplantant une cellule noire, nous avons transplanté sa propriété chromogène ; si la cellule fabrique son pigment, toutes les cellules qui descendent de la cellule mère en fabriquent aussi ; l'extension de la tache marque exactement l'extension de cette descendance. La surface noire indique le terrain occupé par les cellules dérivées des cellules greffées.

Même en admettant que la cellule noire ne fabrique pas son pigment, on est alors forcé de dire qu’elle présente une affinité parliculière pour les granules pigmentés, qui lui sont apportés: cette affinité, propriété cellullaire transmissible à sa postérité, nous permet la même assimilation de la surface noire avec la descen- dance de la greffe. Si donc la tache noire augmente de dimensions, c'est que les cellules noires se multiplient plus activement que les blanches et prennent leur place. Dans la lutte vitale, intercellulaire, la cellule noire l'emporte sur la blanche.

Par contre, si la greffe blanche ne se développe pas, c’est que, encore, ses cellules sont plus faibles, et qu’elles ne peuvent faire disparaître les noires pour occuper leur place. Si une grande greffe blanche diminue progressivement d’étendue, c'est qu'il y a bataille aux confins de la tache et que progressivement les cellules noires avancent sur le terrain occupé par les blanches.

On ne peut invoquer une infiltration des cellules blanches par les granules pigmentaires ; car au moment une tache noire reste stationnaire, une limite fixe s'établit, sans infiltration progressive des cellules blanches voisines. De même des lignes limites qui séparent invariablement des zones blanches et noires.

Une cellule blanche peut donc rester au voisinage des noires sans s’infiltrer de pigment.

Bien plus, dans certains cas, les reffes noires rétrocèdent, et ce sont alors les cellules blanches qui prennent la place occupée par les noires. Que deviendrait alors l’infiltration pigmentaire dont nous parlons ? |

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 49

Une preuve de la lutte intercellaire, nous est fournie par le fait suivant. Si sur une limite fixe de greffe ou de territoire noir, on

traumatise, en un point, les cellules, les parties pigmentées, fixes jusque là, s’avan- cent de nouveau. Il a suffit de détruire ou d'affaiblir la cellule adverse pour reculer la limite du noir.

EXPÉRIENCE :

Le 19 juin, on brûle avec une baguette de verre plusieurs points, sur üne ligne limite séparant deux zones blanche et noire. Le 10 juillet, il y a une notable expansion du noir au niveau des points brûlés ; le 7 octobre les quatre brûlures sont marquées par quatre saillies noires.

Une autre expérience faite avec un badigeonnage à l'ammoniaque, a donné les mêmes résultats. (1)

Cette différence de vitalité entre cellules greffées et autochtones ne tient pas à la transplantation, comme on aurait pu le croire.

En effet la greffe blanche, après trans- plantation, est plus faible et disparaît devant des cellules noires autochtones.

Du reste, nous avons essayé, sur les conseils de M. GILBERT, de faire des greffes en série pour renforcer la viru-

F1G. 4. Décalque de limite

de peau noire et blanche : deux points sont brûlés avec une baguette de verre le 3 mars 1896. Ces points forment progressivement deux saillies le 25 avril.

lence de la cellule, comme le passage des microbes à travers un organisme en renforce la virulence. Or, la deuxième série croissait moins vite que la première ; la troisième, moins vite que la seconde ;

la quatrième n’a pas pu prendre.

C'est donc par le fait seul de sa pigmentation que la cellule noire a une énergie plus grande que la blanche. La différence de vitalité

(1) Si, sur la limite des zones noires, on résèque un large lambeau de peau et que l’on réunisse, par première intention, le centre de la tache noire au centre de la tache blanche, la pigmentation dépasse très rapidement la ligne de suture et s'étend sur

territoire blanc.

4

D 0 EMELUR UE ae)

50 P. CARNOT.

entre les deux cellules n’est, du reste, pas telle que, sous d'autres influences, les rôles ne puissent être renversés. IL suffit, par un moyen quelconque d'accroître la vitalité des cellules blanches, de diminuer la vitalité des noires. La greffe noire se résorbe alors: nous en avons eu de nombreux exemples.

5.11 15.71 EP//4 ve) $ /2.7/ 14.1 24/4 80.17 ÿ ÿ 2 Y Fig. 5. Les quatre figures de greffes que nous avons reproduites,

appartiennent à une greffe en série.

La greffe représentée figure 3 a été prise en un point de la greffe initiale représentée figure 2.

Les deux greffes de la figure 5 ont été prélevées, la supérieure sur la greffe de la figure 53, l'inférieure sur cette derniere.

On voit progressivement un développement de moins en moins rapide de la greffe.

Telle une greffe noire prise sur un cobaye très âgé et malade, transplantée sur une zone blanche chez un cobaye jeune et vigou- reux ; la greffe qui d’abord s'était développée, n'a pas tardé à rétrocéder jusqu’à disparition complète. #

La différence de vilalité entre cellules blanches et noires était moindre que la différence de vitalité, de sens contraire, entre cellules jeunes et vigoureuses et cellules vieilles et malades. |

C'est probablement, de même à la suite d’une exaltation de vita- ; lité, de cause inconnue que des plaques de dépigmentation appa- raissent et s'étendent rapidement ; les cellules blanches quoique blanches, sont devenues les plus fortes, à la suite d’excitations d'ordre local (frottement à un bandage herniaire ayant occasionné une plaque de dépigmentation, SaLMON, GAUCHER) ou d'ordre général (vitiligo, syphilides pigmentaires).

Nous avons réussi, une fois, une greffe de vitiligo sur peau pig- mentée ; cette greffe est restée décolorée ; la greffe inverse de peau pigmentée sur plaque de vitigilo n’a pas persisté.

C’est probablement aussi par un affaiblissement progressif des cellules noires dérivées de nos greffes, qu'à un moment, la tache reste stationnaire et que les cellules blanches et noires de la lisière se font équilibre.

Nous devons dire un mot également de la tendance à la forme cyclique que montrent généralement nos greffes. |

; ;

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 51

Nous ne pouvons faire intervenir ici, ni la vascularisation, ni l’innervation ; vaisseaux et nerfs n’ont été modifiés en rien: ce sont ceux dun territoire blanc ; la cellule seule est noire. On ne compren- drait donc pas leur intervention.

Nous serions tentés de rapprocher ce fait des formes rondes que prennent les lésions parasitaires (trichophyties, etc.) sous l'influence d’un rayonnement uniforme autour du point d'inoculation.

La forme ronde est une forme de défense, chaque cellule est protégée par sa voisine. Si, par contre, une cellule noire s’aventure en territoire blanc, elle est entourée d’ennemies. Elle peut le faire dans les premiers temps de la greffe, alors que la vitalité des cellules noires n'est pas affaiblie, et, de fait, dans les premiers temps, on trouve des inégalités de diamètre considérables et qui augmentent. Mais, à mesure que l'extension dela greffe se calme, les pointes ne peuvent plus prospérer, les diamètres tendent à s’égaliser, et, chose curieuse, il arrive que, tandis que le petit diamètre augmente, le grand tend à diminuer légérement.

Mais si on cautérise un point du cercle, à cet endroit se fait une ponte d’accroissement, grâce à l’affaiblissement des autres cellules ; puis la base d'implantation se renforce, les contours s’arrondissent, la pointe devient définitive.

Nous avons vu, jusqu'à présent, et presque exclusivement, se manifester dans le problème des greffes pigmentées une influence cellulaire. Nous allons voir se manifester une série d’autres influences.

Le premier de ces facteurs a trait à la pigmentation générale anté- rieure de l’animal. Les exemples cités appartiennent à des animaux de pigmentatation moyenne. Si nous faisons une greffe sur un animal fortement pigmenté, la vitesse d'évolution semble augmenter. Un animal coloré par moitié présenteune greffe dont les dimensions ont été : le 44 mars de 3°” sur 2°" le 11 avril.. 10 —5 le 25 avril. 12 7.5

qui par conséquent en 20 jours occupait une surface environ six fois

52 P. CARNOT.

plus considérable, en 40 jours une surface onze fois plus brand que la surface initiale.

Par contre les animaux faiblement pigmentés a al souvent une progression faible. Mais il y a des exceptions, tenant sans doute à la complexité du phénomène.

Enfin nous avons fait un grand nombre de greffes épidermiques noires sur des cobayes albinos. Beaucoup de ces greffes ont échoué ou n’ont pu être suivies ; un certain nombre se sont développées, puis se sont rapidement atrophiées. Ainsi une greffe d'épiderme noir sur cobaye albinos à longs poils, faite le 20 mars, croît d’abord, pie rétrocède, et n’est plus visible au bout d’un mois.

Une greffe de peau de grenouille faite le même jour paraît plus résistante ; elle a un faible développement ; on l’enlève le 20 mai pour l'examen histologique.

De même des greffes choroïdiennes :

Une greffe d’œil de cobaye faite le 25 février, pàlit le 9 mars, on ne la voit plus Le 30 mars.

Le 2? mars on fait une greffe d’œil de lapin à un cobaye albinos; elle est bien visible le 20 mars, augmente du 20 au 30 ; mais elle ne se voit presque plus le 24 avril.

De même d'une greffe d'œil de grenouille faite Le 30 avril, prise le 9 mai, grandissant le 12, et disparaissant progressivement à partir de cette date.

D'une façon générale donc, les greffes noires faites sur albinos ont une extension faible, puis une résorption rapide. On les retrouve sur coupes, non plus dans l’épiderme, mais dans le derme; elles peuvent y persister comme persiste un tatouage.

Est-ce par une résorption plus rapide chez l’albinos, par une acli- vité plus intense des cellules épithéliales ou des leucocytes ?

Pour éclaicir cette question de la vitalité des leucocytes, nous avons fait comparativement deux tatouages, l’un sur un animal bigarré, l’autre sur un albinos, avec une aiguille et de l’encre de Chine.

Ce tatouage fait le 16 août est, en partie seulement, effacé en novembre ; il paraît un peu moins effacé chez l’albinos.

Ce n’est donc pas à une activité spéciale des leucocytes résorbant la greffe et le pigment que nous devons demander l'explication du phénomène.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 93

Du reste, nous savons que l’albinisme est une dégénérescence, coïncidant avec une consanguinité trop prolongée, accompagnée souvent d’autres phénomènes dégénératifs (surdité chez les chats, Darwin). Souvent les albinos nous ont semblé moins résistants aux infections. M. Boucx4RDp nous a cité des cas analogues.

Ce n’est donc pas dans une suractivité cellulaire, mais au contraire dans une insuffisance de quelque chose, que nous serions portés à chercher une explication.

Est-ce la granulation ou la matière première de la granulation qui fait défaut ?

Nous avons essayé de retarder la résorption d’une greffe, par des injections sous-cutanées de pigment, sans aucun résultat. Mais nous agissions ainsi grossièrement. Il faudrait reprendre cette question, en injectant du sang d'animal bigarré; peut-être du reste, cette matière première est-elle élaborée par tel ou tel organe. Il faudrait suivre de nouvelles greffes, après cerlaines modifications que l’on peut faire subir aux secrétions, après injections de tel ou tel extrait (capsules surrénales ou foie). IL y a dans cette direction tout un programme que nous comptons reprendre prochainement.

D'autres influences ont une action certaine, tant sur le dévelop- pement de la greffe pigmentée, que sur l'augmentation de la vita- lité d’une cellule quelconque à qui la pigmentation sert d’index.

Cette étude n’est qu'amorcée et nous ne donnerons que quelques exemples :

Influence de l’âge. D'une manière générale, les cellules jeunes paraissent plus vigoureuses que les cellules âgées.

Une greffe venant d’un cobaye vieux, évolue lentement ou se résorbe, si le porte-greffe est jeune. Une greffe prise sur un cobaye jeune et faite le même jour sur le même animal, que la greffe de cellule vieïile, évolue bien plus vite et persiste.

Inversement une greffe jeune, sur un porte-greffe vieux, se déve- loppe rapidement.

Ce fait est à rapprocher de l’évolution, chez les gens âgés seuls, de la majorité des épithéliomas.

L'influence de l'état général du porte-greffe et du sujet greffé paraît également manifeste.

Deux greffes prises, l’une sur un cobaye tuberculeux, l'autre sur un cobaye normal sont transplantées le même jour sur un troisième

54 P. CARNOT.

cobaye ; la greffe du cobaye normal évolue; celle du sujet tuber- culeux cachectique, rétrocède au bout de 15 jours environ.

De même pour une greffe prise à un cobaye intoxiqué par le Pb.

La gestation ne nous à pas paru jusqu'ici influer sur la vitalité de la cellule.

De même nous n'avons pas noté de différences entre la greffe faite l’été et l'hiver.

L'influence de l'espèce est indéniable ; nous l'avons encore mal étudiée.

A côté d'animaux très voisins qui peuvent se grefler l’un sur l’autre (cobaye et lapin) d’autres, voisins aussi, ne peuvent le faire, alors que des greffes prennent sur des espèces très éloignées (cobaye el grenouille, homme et grenouille).

L'étude des greffes de grenouille est extrêmement curicuse, par lès modifications imprimées aux formes cellulaires, et nous nous proposons d’y revenir.

Mais toutes les conclusions que nous pourrions émettre se heurtent à une grosse objection.

Trois greffes prises et transplantées au porteur, à des époques différentes donnent trois évolutions différentes. Il y a des facteurs multiples, tels que, pour affirmer un résultat, il faudrait, pour chaque cas, apporter une longue série d'expériences, et faire une moyenne.

Nous ne le pouvons pas encore.

Parmi les influences diverses agissant sur la cellule, et se trans- : mettant par la cellule seule, un grand nombre en diminuent la vitalité (âge, maladies, intoxications, inoculations en séries, etc.).

Certaines influences, au contraire, paraissent en augmenter la vitalité. Ce sont elles surtout qui sont intéressantes, puisqu'elles permettraient peut-être d'aborder la question des néoplasmes ; ces influences sont malheureusement vagues et peu connues ; le jeune âge, les excitations mécaniques (frottements, etc.), chimiques (fric- tions faibles à l’alcool, à l’'ammoniaque), physiques (lumière, etc.) sont les seules connues. Nous pensons que la technique des greffes pigmentées permettra de suivre la variation d'évolution d'une cellule et de préciser les facteurs qui pourront déterminer une augmentation de virulence, allant jusqu’à une évolution pathologique.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 99

IT.

INFLUENCE DES NERFS.

Nous étudierons, maintenant, l'influence des nerfs sur la colora- tion. Elle est différente suivant les animaux. Les vertébrés supérieurs changent difficilement et lentement (influence des saisons, de la périodicité du rut, etc.). Il semble, de plus, que les changements de coloration se fassent, principalement, par renouvellement des cellules. ScHWALBE a montré que la couleur blanche de l'hermine, en hiver, provenait de la chute des poils colorés et de leur rempla- cement. Plus rarement, les changements de coloration sont brusques (décoloration des cheveux en quelques minutes, à la suite d’une émotion, cipaye blanchissant devant le conseil de guerre prononçant sa condamnation, etc.).

En tous cas, une modification brusque de la pigmentation se fait au niveau des cellules rétiniennes, principalement sous l'influence de la lumière et de l'obscurité.

Toute une série d'animaux présentent des modifications, de plus en plus rapides, des cellules pigmentaires. L'éducation joue dans ce phénomène un grand rôle, et l’hérédité peut conserver ce caractère ; témoin l'expérience si curieuse de POUcHET (122) qui, transportant plusieurs fois des turbots, d'un fond clair sur un fond sombre, arrive à raccourcir considérablement le temps nécessaire au changement de couleur.

On peut se demander si, par suite d'une éducation spéciale, les cellules pigmentaires des animaux supérieurs ne pourraient pas, elles aussi, changer rapidement de forme en entraînant une varia- tion de couleurs de l'animal: des expériences en cours, au moyen d'injections successives de chlorhydrate d’aniline et de nitrite d’amyle, ne nous ont encore donné aucun résultat.

C'est donc aux Crustacés (palémons), aux Poissons (tanches, turbots, etc.), aux Batraciens (grenouilles), aux Sauriens (camé- léon), que nous devons nous adresser. Les Céphalopodes présentent des organes un peu spéciaux ; leurs variations de teintes ont étè parfaitement étudiées et nous n’en parlerons pas.

56 P. CARNOT.

Ce phénomène était connu depuis longtemps ; ARiISroTE en parle et c’est, chez les pêcheurs, une donnée banale que les poissons prennent la couleur des fonds sur lesquels ils vivent.

Scientifiquement, MiLxE-Epwarps (1834) (103) fut le premier à s’en occuper. Puis vinrent les travaux de BRrucKE (33) sur le caméléon ; 1l vit l'expansion (état passif) et le retrait (état actif) des cellules pigmentaires : pour lui, la teinte foncée correspond à la paralysie des chromoblastes. Il reconnut l'influence des nerfs et conclut à un reflexe. Puis vinrent les travaux d'AxManx (1853) sur la grenouille, de VircHow (164), de Lornar MEYER (1854). Wirricu (177) (1854), sur la grenouille, montre que l'excitation électrique directe a une action plus marquée que l'excitation du nerf. À côté de l’action du système nerveux central, il admet un reflexe dans les ganglions sympathiques périphériques. LISTER (94) (1859) admet à peu près les mêmes conclusions. P. BERT (15) (1867), PELVET (1869), insistent sur la physiologie de la seiche. HERING (1869), GoLrz (DE HALLE) (66), étudient également l'influence des nerfs ; ils font jouer un rôle indirect à la circulation de la peau,

PoucEer (1871-76) (122) précise certains faits : sur le turbot, il

reconnaît l'influence du sympathique, le sectionne, sectionne le

trijumeau, en déterminant des zones sombres paralytiques.

Avant la publication de ces recherches, VuLpran (1873) (165) arrivait sur la grenouille à des conclusions analogues, etexcluait en partie l'influence vasculaire admise par HERING. Après tant d’autres, il conclut également à l’activité plus ou moins indépendante des ganglions sympathiques. \

P. Berr (1875) (14), sur le caméléon, par la section et l'excitation des centres (cerveau, moelle dorsale) conclut à l'indépendance des changements de couleur d'avec les organes nerveux centraux. De même, de KRUKENBERG (1880).

Nous citerons encore les travaux de LeyniG (1873) (92), de Lone (1876) (95), de BmmmEerManx (1878) (18) ; ceux, très intéressants de FRÉDÉRICQ (1878) (56), de KiEemsrewicz (1878) (90), de R. BLan- CHARD (24) (nature amæboïde des chromatophores des céphalopodes), de Prisazix (1894) (128) (nature musculaire de ces mêmes organes) ; BIEDERMANN (17), au mémoire de qui nous renvoyons pour la biblio- graphie détaillée, et tout récemment FiscneL (5°?) (juillet 1896) ont repris la question dans des travaux intéressants.

&

3 à 4 } +1

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. OMC: 7]

Si nous résumons cet historique en quelques mots, nous voyons que l'influence nerveuse est universellement admise ; les auteurs s'accordent même sur le rôle à attribuer au sympathique, et à certains reflexes, dont le plus important est en relation avec la vue.

Que si l’on cherche, dans les auteurs, des détails sur le méca- nisme de la rétraction et de l'extension cellulaires, nous voyons que. pour les uns, l’état de repos de la cellule est constitué par la forme sphérique et que l'excitation nerveuse amène l'état dilaté ou actif (BrucKE, GoLTz, etc.), pour les autres (VULPIAN, POUCHET, etc.), la paralysie est l’état dilaté ou rameux ; l’état actif est « la forme sous laquelle le corps présente la moindre surface ». Pour les uns, l'excitalion amène la rétraction, pour les autres, la dilatation. Mais tous les auteurs ne parlent d'action nerveuse que dans un sens, ne s’entendant pas, du reste, sur ce sens.

Or, tel n’est pas, selon nous, le mécanisme de l’action nerveuse. Nous n'avons trouvé nulle part (sauf pour les chromatophores musculaires des céphalopodes, Pxisazix (1) ), la notion propre des deux actions contraires commandées par des nerfs différents.

Or, tel est le principe général des actions nerveuses, et, de même que nous avons des nerfs vaso-constricteurs et vaso-dilatateurs, de même croyons-nous qu'il y a des nerfs chromato-constricteurs et des perfs chromato-dilatateurs, difficilement isolables anatomiquement, contenus en proportions diverses dans les mêmes nerfs, mais ayant des centres différents et dont l'influence peul être mieux encore dissociée par l'action de certains réactifs physiologiques.

C'est dans ce sens personnel que nous allons considérer l'influence des nerfs.

Nos recherches ont été faites, presque uniquement, sur la

Li

grenouille, animal facile à se procurer, et pouvant être suivi de longues heures sur la platine du microscope.

La grenouille verte (c’est un fait connu depuis longtemps) éclaircit

(1) Pisazix (128) a montré les rôle modérateur et inhibitoire des ganglions céré- broïdes, vis-à-vis des autres centres chromatophoriques sous-æsophagiens. Mais nous avons affaire à une action nerveuse sur un organe musculaire. Cette inhibition est donc beaucoup plus compréhensibie que celle dont nous voulons parler, agissant sur le protoplasma d’une cellule conjonctive, Les chromatophores des céphalopodes ne sont pas en cela comparables aux chromatoblastes des grenouilles.

58 P. CARNOT.

à la lumière et prend une teinte jaune vert. Au microscope, les chromoblastes sont alors en boule. Dans un aquarium sombre, la grenouille reprend une livrée foncée et ses chromoblastes s’étalent. Mais, si nous mettons à l'obscurité complète deux grenouilles, l’une claire, l’autre foncée, la première fonce lentement, l’autre éclaireit. Au bout de 24 heures, les deux grenouilles présentent la même teinte intermédiaire.

Nous avons fait plusieurs fois cette expérience avec le même succès. Parfois, néanmoins, la grenouille privée de sensations lumineuses, garde purement et simplement la teinte qu'elle avait avant.

Nous voyons donc que, d’une manière générale, en dehors de toute excitation, les chromoblastes prennent une position mixte d'équilibre ; le système nerveux modifiera, suivant l'excitation, leur situation dans un sens ou dans l’autre.

Cette action de la lumière est d’autant plus curieuse que, d’après HERMANN, les larves de grenouille (et nous avons pu vérifier le fait), d’après Fiscer, leslarves de salamandre, réagissent en sens mverse; la lumière qui contracte les chromoblastes adultes, fonce au contraire la couleur des larves.

La chaleur montre également un effet inverse sur la larve et sur l'adulte.

La lumière rouge est celle qui a le moins d'action, la lumière verte et bleue présente la même action que la lumière du Jour.

La chaleur. produit une action nette, chromato-constrictive. Mettons deux grenouilles, l’une foncée, l’autre claire, dans un cristallisoir chauffé progressivement à l’étuve jusqu’à 30°. Progressi- vement la grenouille claire éclaircit encore ; la grenouille foncée paraît se mettre un peu moins vite en train. Il y a dans l'excitation un temps perdu, notablement plus considérable que pour la grenouille à chromoblastes à moitié rétractés. Au microscope, la membrane interdigitale présente des chromoblastes en boule ; les vaisseaux sont très dilatés. La chaleur est un exemple de dissociation entre les excitations chromatomotrices et vasomotrices qui généra- lement s'associent.

Nous avons vu que FiscHeL a foncé par la chaleur les larves de salamandre, et que l’action est inverse chez la larve et chez l'adulte.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 59

Nous avons pu trouver un certain nombre de réactifs à action nette chromato-constrictive.

Un des plus nets est le chlorhydrate d’aniline, dont nous avons déjà parlé.

La dose doit être moindre de 1/2: environ d’une solution à 5°},. Nous avons en effet remarqué que les grenouilles profondément intoxiquées, et qui meurent après l'injection, ne pâlissent pas comme les autres. L'action est générale et manque bien rarement. Mais nous devons ajouter à ce sujet qu'il y a des différences indivi- duelles considérables : telle grenouille devient jaune à la suite d'une injection de quelques gouttes ; telle autre change à peine.

Nous faisions nos injections, soit dans le sac iymphatique dorsal, soit dans le péritoine : nous avons remarqué que la zone d'injection dans le sac dorsal conservait une couleur foncée d’autant plus frappante que l'animal éclaircissait davantage. Cette zone foncée disparaît en partie au moment l’injection est totalement résorbée, et la couleur de la peau devient uniformément claire.

L'action de cette substance est assez lente. L'éclaircissement commence au bout d’un quart d'heure et ne devient manifeste qu'au bout d’une demi-heure. Il faut compter environ quatre heures pour que les choses reviennent à l’état antérieur.

Cette action est plus rapide et plus nette l'été que l'hiver, et, d'une facon générale, à une température douce plutôt qu'au froid.

Nous avons étudié ailleurs les aspects microscopiques de chroma- toblastes aux diverses phases de celte action.

D’autres substances agissent de même : la nicotine, par exemple. Nous avons injecté quelques gouttes d’une solution à 0,5 p. 100 à deux grenouilles, l’une claire, l’autre foncée : la grenouille claire ne s'est pas modifiée ; la grenouille foncée a éclairci assez rapide- ment. Mais une autre grenouille, ayant reçu une dose trop forte, est morte au bout d’une demi-heure sans avoir éclaire.

L’ergotine a été essayée par nous à la suite d'une remarque concernant les rapports des substances vaso-constrictives et chro- mato-constrictives. L'effet à été conforme à nos prévisions : quelques gouttes d’ergotine ont éclairci rapidement une grenouille foncée ; au microscope, sur la membrane inter-digitale, les vaisseaux ont paru rétractés.

60 P. CARNOT.

Par contre, l'iodure de potassium, vaso-dilatateur, éclaircit très nettement la grenouille ; il présente donc une opposition de propriétés, étant vaso-ditatateur et chromato-constricteur. C’est, avec la chaleur, un deuxième exemple de cette dissociation.

La santonine éclaircit progressivement l’animal jusqu’à la teinte jaune pâle. On pouvait se demander si cette substance n’agis- sait pas par l'intermédiaire de la vue. La vision colorée en jaune, occasionnée par la santonine, est, chez l’homme au moins, un fait

*

bien connu. Peut-être la grenouille, à vision jaune, s'adaptailt-elle.

à la teinte de ce qu'elle voyait; peut-être ceite action n’était-elle qu'un phénomène de pseudo-mimétisme ? Nous avons répété l’expé- rience sur une grenouille aveuglée avec le même résultat. La santonine n'agit donc pas par réflexe oculaire.

L’oxyde de carbone, d'après BIEDERMANN (17), agit en éclaircis- sant, également.

En opposition avec ces substances, d’autres ont un effet préci- sément inverse et déterminent l'extension des chromatoblastes. Le type de ces substances chromato-dilatatrices, comme elle est le type des substances vaso-dilatatrices, est le nitrite d'amyle. C’est du reste, cette considération qui nous en a fait essayer l’action.

Le nitrite d'amyle s'emploie, soit en injection dans le sac lymphatique dorsal ou dans le péritoine, soit en vapeurs, en versant quelques gouttes sous une cloche. Si l’on dépasse la dose toxique, l'effet produit n’est plus aussi net et la grenouille meurt, foncée, mais moins que si la dose était moindre.

Cette action peut s'exercer rapidement sur une grenouille éclaircie par le chlorhydrate d’aniline, elle fonce alors rapidement et l'on peut suivre l’examen des chromoblastes sur la membrane inter-digitale.

Si on injecte à la fois + cc. de la solution de chlorhydrate d’aniline à deux grenouilles, et qu’aussitôt après, on injecte, à l’une des deux, quelques gouttes de nitrite d’amyle, la grenouille, qui a reçu les deux, reste longtemps stationnaire, alors que l’autre éclaircit rapidement. Les deux actions se contrarient et se détruisent. Il y a antagonisme physiologique.

Avec l’élher les résultats sont moins nets ; c’est pourtant une des

rares substances dont l’action soit notée par les auteurs. VULPIAN

remarque que les grenouilles éthérisées pour une opération, brunis-

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 61

sent. Nous avons obtenu ce résultat, mais d’une façon incomplète et inconstante.

Avec le chloral, résultats de même sens. Mais, encore, le voisi- nage des doses toxiques reste, sans effet.

Les carbonates agissent en fonçant la peau (BIEDERMANN) (17). D'après LisrER (94), l'huile de croton, la cantharide foncent localement la peau.

Un cristal de sel marin mis sur la peau fonce l’endroit avec lequel 1l est en contact.

Si on injecte une solution étendue, elle semble altérer le pigment. Une solution concentrée injectée dans le sac dorsal détermine une altération immédiate des couleurs, permanente ; la grenouille prend uue teinte gris sale, comme décomposée.

L'action de ces différentes substances est bien une action nerveuse, qu’elle soit centrale ou périphérique.

Détachons, en effet, deux lambeaux de peau, l’un clair, l’autre foncé, sur deux grenouilles vivantes et faisons-les plonger dans des solutions étendues, le foncé de chlorhydrate d’aniline, le clair, de nitrite d’amyle ; ces lambeaux encore vivants, et qui sont capables, sous l'influence d'un courant électrique de changer de teinte, conservent leur teinte antérieure. L'action de ces substances est donc une action à distance.

Pouvons-nous localiser les conducteurs de ces actions chromato- motrices et ces conducteurs sont-ils différents pour les excitations constrictrices et dilatalrices ? Si on sectionne le nerf sciatique de la grenouille, pour nombre d'auteurs (AxXMANN, HERING, GoLrz (66), Vuzprax (165), etc.), la patte énervée devient plus foncée.

Nous avons refait souvent cette expérience ; le résultat nous a paru inconstant et peu concluant. C'est, du reste, aussi l’avis de BIEDERMANN (17). Cet auteur met la grenouille à l'obscurité et à la lumière ; or la patte énervée, même plus foncée, subit les change- ments de coloration habituels.

Nous avons mis dans l’eau à 30° une grenouille à sciatique coupé: les variations des deux membres se sont effectuées parallèlement.

A la suite d'injections de chlorhydrate d’aniline, la patte énervée a pàli comme l’autre ; comme l’autre, elle est devenue plus foncée à la suite d'injections de nitrite d’amyle.

62 P. CARNOT.

Les variations quotidiennes spontanées, mal déterminées, de ces grenouilles présentaient un jour une coloration claire, le lendemain une coloration foncée. Or les deux pattes avaient toujours des variations de même sens.

Même lorsqu’au début, après la section, on avait noté de légères différences, ces différences s’atténuaient comme par l'établissement d’une voie complémentaire d’innervation.

Nous citerons le cas d'une grenouille à sciatique droit coupé. Le premier Jour, une injection de chlorhydrate d’aniline éclaircit beaucoup le côté normal. Au microscope la membrane interdigitale gauche présentait des chromoblastes en boule ; ils étaient étalés à droite.

L'expérience répétée quelques jours après, a montré dans les deux pattes le retrait égal des chromoblastes consécutivement à l'injection.

Pour démontrer d'une manière plus évidente encore le rôle du nerfsciatique dans la coloration, nous avons fait l'expérience inverse:

Au lieu de couper le nerf, nous avons tout coupé, sauf le nerf.

La jambe est entièrement sectionnée entre deux ligatures par- elles ; le nerf est conservé, et n’est par compris dans la ligature.

Nous injectons alors du chlorhydrate d’aniline une demi-heure après; la grenouille est pâle; chose curieuse, la patte rattachée seulement au corps par le nerf, a pàli plus vite et davantage que l'autre.

Nous procédons alors à l'expérience inverse: la grenouille est mise sous une cloche avec quelques vapeurs de nitrite d'amyle; - elle fonce presque aussitôt ; encore la patte sectionnée, mais non énervée, fonce plus vite et plus énergiquement que la patte saine.

Il semble donc que la conductibilité par le sciatique suffise à déterminer les changements de coloration dans les deux sens; le fait d'avoir retranché toute autre action, semble, de plus, avoir éliminé des ‘causes secondes qui contrariaient l’action propre chromato-motrice.

Nous pouvons conclure de cette expérience que le sciatique contient des fibres constrictices et dilatatrices, de même que, de l'expérience précédente (section du sciatique), nous pouvons con- clure que des fibres chromato-motrices existent en dehors du scia- tique.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 63

Ces fibres sont probablement contenues dans le réseau péri- artériel, comme semble le prouver l'expérience suivante :

On sectionne toute une patte, après avoir isolé l'artère; le membre inférieur n'est rattaché au tronc, que par l'artère; la circulation même est supprimée, probablement par la suppression des voies de retour; car au microscope on ne voit bientôt plus aucune circulation sanguine dans la membrane interdigitale.

On fait alors une injection de chlorhydrate d’aniline, les deux pattes semblent subir en même temps le même éclaircissement.

Nous ne pouvons admettre une excitation périphérique par le. réactif, puisque la circulation étant très rapidement interrompue, la patte ne peut recevoir aucune parcelle du réactif. La seule chose qui ait subsisté, reliant la patte au reste du corps se trouve le poison, est le réseau nerveux périvasculaire. Nous sommes donc en droit de dire que ce réseau contient des fibres chromato-motrices.

Rappelons enfin lexpériénce de BIMMERMANN(18),quenousn’avons pas reproduite du reste. On peut, par excitation du bout central du sciatique sectionné, déterminer une couleur pâle de toute la peau, sauf du territoire paralysé. ;

Nous conclurons donc: que le sciatique contient des fibres centripètes déterminant un réflexe chromato-moteur ; qu’il contient des fibres centrifuges, les unes chromato-dilatatrices, les autres chromalo-constrictices : que des nerfs de même nature sont égale- ment contenus dans la gaîne péri-artérielle et peuvent suppléer les premiers.

Si on cherche à suivre plus haut, la localisation des fibres chro- mato-motrices, on arrive également à la notion de voies multiples.

L'influence de la moelle, est reconnue par sa section.

Après section à la région dorsale, la grenouille subit les mêmes variations de teinte dans le train postérieur paraplégié et le reste du COTPS.

La chaleur, le chlorhydrate d’aniline et le nitrite d’amyle déterminent des variations uniformes.

VuLpiAN (165) note pourtant une paralysie plus ou moins complète des cellules pigmentaires dans les deux membres postérieurs, après section de la moelle, en avant de l’origine des nerfs lombaires.

I1 semble que là, comme dans la section du sciatique, on trouve de différences individuelles tenant à une répartition, variable, des

64 P. CARNOT.

fibres chromato-motrices dans les divers trajets intermédiaires, étendus entre les centres et la périphérie.

Après section médullaire au niveau du bulbe, la grenouille prend spontanément une teinte foncée. Néanmoins, la chaleur, la lumière, le chlorhydrate d’aniline peuvent déterminer des changements de coloration.

L'écrasement du cerveau ne paraît déterminer aucun trouble dans l’action de la chaleur, du nitrite d’amyle et du chlorhydrate d’aniline.

L'influence du sympathique est manifeste chez les poissons (Poucer) (122). VuLpiaN (165), par l'arrachement du ganglion sympathique cervical, obtient également une paralysie des chroma- toblastes chez la grenouille.

Nous avons sectionné le sympathique abdominal d’un côté, sans empêcher les réactions chromato-motrices conséculives à l’action de la chaleur, du nitrite d’amyle et du chlorhydrate d’aniline.

Il y a probablement aussi, plusieurs voies capables de sup- pléances.

Le plus souvent le changement de couleur spontané est le résultat d’un réflexe.

BIMMERMANN (18), nous l’avons vu, a montré le changement de coloration consécutif à l'excitation centripète du sciatique.

STEINACH (181) exposant une grenouille à la lumière, en garan- tissant des carrés de peau, a montré que ces carrés seuls, restaient foncés ; il y a donc un réflexe local cutané.

Mais le réflexe esl généralement à point de départ oculaire.

La teinte varie généralement avec la coloration du fond. JURINE (Lotes du lac Leman), DE LA BLANCHERE (16) (tanches), Poucaer (122) (turbot), STARK, RÉGNARD (136) ont constaté et étudié ces variations avec l'éclairage du fond.

Ce réflexe ne se produit plus après arrachement des yeux (PoucET) (125) ; d’autres expériences du laboratoire de STRICKER montrent que l’ablation des yeux est suivie de la dilatation perma- nente des chromatoblastes noirs.

Nous avons aveuglé une grenouille ; sa teinte est devenue rapidement très claire, sans variation suivant l'éclairage ; cependant - toutes les autres grenouilles de l'aquarium, dans l’eau froide, étaient très foncées.

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MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 65

Cet état a duré plusieurs jours ; le troisième jour, mise au grand soleil, elle fonce ; transportée à l'ombre, elle s'éclaircit au contraire ; alors qu’un témoin subit le changement inverse.

Plusieurs jours après (10 jours environ), la grenouille mise au soleil éclaircit légèrement, elle fonce à l'obscurité.

IL semble qu'après une période d’indifférence, l'éducation des nerfs de la peau aux impressions lumineuses se soit faite en partie; d’abord la lumière agit, mais à contre-sens ; puis, après cette période d'incertitude, la réaction devient normale, et la lumière agit par réflexe cutané, comme primitivement, elle agissait par réflexe oculaire.

De ces différentes recherches, il résulte :

Que l’action des substances chromato-dilatatrices et chromato- constrictices ne s'exerce pas directement, mais par l'intermédiaire du système nerveux.

Que le sciatique contient deux sortes de fibres chromato-motrices (fibres d’excitation et fibres d'arrêt) et, de plus, des fibres centripètes.

Que le réseau nerveux péri-artériel contient également ces deux sortes de fibres.

4 Ces deux voies se suppléent, et suivant l'individu, il semble y avoir une localisation plus spéciale dans l’une ou l’autre voie.

De même de la moelle et du sympathique qui semblent contenir chacun des fibres chromato-motrices, mais en proportions variables, et se suppléant largement.

Les centres sont mal définis (VuLPIAN (165), BIEDERMANN (117), partie supérieure de la moelle). Il est probable qu’ils sont multiples et étagés sur une grande surface.

Les réflexes cutanés et optiques sont une des grandes causes de changement de coloration.

Il semble que le fait de supprimer la vue, développe davantage la sensibilité cutanée à la lumière, et que les réflexes oculaires sont suppléés par l'éducation des réflexes cutanés.

IV.

Nous ne dirons que quelques mots des influences biologiques qui font varier la coloration, non plus que du but causal de cette colora- tion. Ce chapitre de la pigmentation est en effet encombré d’une

5

66 P. CARNOT.

multitude de travaux, et pourtant, la lumière est loin d’être faite.

Il semble, en effet, que le problème soit des plus complexes et que des causes inverses se contrarient constamment: nous n'en citerons que deux exemples :

La lumière a sur les cellules une action très nette: elle les sur- charge de pigment. C’est probablement un acte de défense contre le passage des rayons chimiques. La pigmentation protège les cellules et les terminaisons nerveuses. De’ viennent le halage, les éphélides, la pigmentation consécutive aux érythèmes solaires.

Cette action est remarquable sur l’homme: elle est également manifeste sur l'animal.

Par contre, une défense de animal d’un autre ordre, le mimé- tisme, défense très répandue, tend à identifier la couleur de l’animal avec celle du milieu. Plus donc le sol sera éclairé, plus l’animal tendra vers une teinte claire. Le soleil qui fonçait la peau pour la garantir contre les rayons chimiques, l'éclaireit indirectement pour garantir l’animal en le cachant à ses ennemis. Suivant les circons- tances, l’un ou l’autre facteur l’emportera et l’on trouvera des races qui foncent vers le Sud, d’autres races qui éclaircissent.

Nous donnerons un autre exemple se rapportant à l’action de la chaleur :

Une surface noire absorbe plus de chaleur qu’une surface blanche ; à mesure donc que l'animal aura besoin de se défendre contre la chaleur extérieure, il aura intérêt à éclaicir. Par contre le rayon- nement de chaleur venant du même animal est plus intense avec une surface noire : plus il sera foncé, plus donc il perdra de chaleur, et ce sera une défense contre la chaleur que cette même teinte noire qui pourtant l’absorbe davantage.

Il y aurait, du reste, grand intérêt à distinguer entre les animaux à peau découverte, à qui ces raisonnements peuvent être applicables, et ceux revêtus de phanères qui constituent une protection souvent efficace, et contre l’activité chimique des rayons solaires, et contre

Pabsorption de chaleur externe, et contre le rayonnement de la

chaleur animale. La pigmentation, en tant que défense, est alors complètement superflue, et les autres causes de pigmentation passent au premier rang (beauté et éclat de la parure du mâle pendant le rut, ayant une grande influence sur la sélection naturelle ; mimétisme servant à dissimuler l’animal, chasseur ou chassé, etc.).

RATS). à

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 67

Ce n’est donc que par un examen minutieux des faits, en prenant des animaux à peau nue, que l’on pourra dissocier les différents facteurs physiologiques de la pigmentation ; l’homme est certaine- ment l’animal le plus facile à étudier à ce point de vue. Or les causes de pigmentation peuvent se résumer en ceci: toutes les fois qu’une cellule épidermique est attaquée, elle réagit en produisant du pigment.

La peau est-elle exposée aux rayons chimiques ? à ceux du soleil comme à ceux de la lumière électrique, aux rayons solaires reflétés par la glace (BowLes) (31), etc., elle se défend en se pigmentant, et si elle ne le fait pas, si surtout cette peau est débile et mal nourrie (Pellagre) elle est attaquée par les rayons chimiques et il se fait un crythème (BoucHARD) (25): mécanisme très curieux car c’est en même temps un procédé de défense : la congestion de l’érythème laisse pour trace une pigmentation hématique d’un autre ordre qui supplée à la pigmentation autochtone débile et insuffisante.

La peau est-elle exposée à des actions chimiques irritantes ? elle se défend en faisant de la pigmentation : telles les traces de vési- catoires, de badigeonnages à la teinture diode, etc.

La peau est-elle exposée à des actions mécaniques ? elle se défend généralement en se pigmentant : telle la pigmentation consécutive aux frottements, à l'empreinte du corset, la pigmentation du mamelon, etc. Il est vrai que parfois un effet inverse se manifeste et donne lieu à une plaque de décoloration.

La peau est-elle exposée à l’humidité, et à la macération qui en résulte, elle se pigmente encore : telle la région des aisselles, des organes génitaux et de toutes les parties riches en glandes sudori- pares, ou soumises à des écoulements pathologiques.

Si l'organisme s'affaiblit, les cellules ont besoin d’être défendues plus énergiquement, et se pigmentent: telle la pigmentation de la grossesse, de la tuberculose, etc.

En résumé, à toutes les causes d'irritations, la cellule cutanée répond en créant du pigment : cette défense dont le but est un avan- tage contre la lumière, est devenue un processus général qui devient une réponse à toute excitation, réponse tombant parfois à faux.

Inversement, les causes de dégénérescence de la cellule lui enlèvent cette faculté procréatrice du pigment.

68 P. CARNOT.

L'albinos est un dégénéré : d’autres dégénérescences l’accompa- gnent (surdité chez le chat, DARwIN (40), résistance moindre aux infections, courte vitalité, etc.) ; généralement l’albinisme cest le fruit d’une trop longue consanguinité.

La cellule vieille et affaiblie ne fait plus de pigment (canitie de l'homme, plumes blanches des vieilles poules de Crèvecœur, etc., chevaux gris à proportion croissante de poils blancs).

Si donc nos greffes nous ont montré la vitalité plus grande des parties pigmentées, nous retrouvons en biologie générale des faits comparables : la pigmentation nous apparaît comme un signe de vitalité cellulaire, comme une défense générale de la cellule épidermique.

Mais inversement, nous devons dire un mot de l’action nocive du pigment.

Il est une règle se confirmant de plus en plus: les pigments sont toxiques : l'urine décolorée perd une partie de sa toxicité (BoucxarD), (26) de même de la bile.

À la suite d’injections pigmentaires, nous avons vu l'état de dégénérescence que présentaient, dans le foie, dans les capsules surrénales, les cellules surchargées de pigment.

Nous avons vu de même les ovules surchargés de pigment, se déformer et s'atrophier.

C'est peut-être en partie pour diminuer ou fixer cette toxicité que le pigment prend la forme granulée insoluble.

Comment concilier ces deux faits contradictoires ? D'une part, une énergie plus grande des cellules pigmentaires, d'autre part, une toxicité considérable du pigment vis-à-vis des cellules ?

Peut-être les granulations sont-elles toxiques surtout pour les organismes autres que ceux qui les ont sécrétées, comme il en est dans les cas de nos injections.

Peut-être aussi, les seules cellules capables de supporter une surcharge pigmentaire résistent-elles, les autres, plus faibles, disparaissant. Les cellules pigmentées seraient les plus vigoureuses, non pas parce qu'elles sont pigmentées, mais parce qu'elles seules étaient en état de résister à la pigmentation.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 69

CONCLUSIONS.

Le granule pigmentaire paraît n'être ni un bioblaste, ni la simple cristallisation d'un corps chimique colorant : il paraît être constitué d’une partie protoplasmique complexe, ayant fixé le colorant, géné- ralement à l’état de teinture.

Le passage du pigment de l’état soluble à l’état insoluble (œuf de grenouille, etc.), n’est donc pas au changement d’état d’un corps devenant insoluble, mais à un phénomène beaucoup plus vital, correspondant à la formation d'un granule protoplasmique.

L'origine du granule peut se faire à l’intérieur d’une cellule (cellule épidermique basale, etc.), ou, en dehors d'elle, par fragmen- tation d’un élément anatomique (globule rouge dans le tube digestif de la sangsue, dans les ecchymoses, peut-être aussi par l’action de certains réactifs : alcool, etc.).

La disparition du granule est très difficile à réaliser au point de

vue chimique. Il semble que, dans l'organisme, cette disparition

s'effectue assez simplement : les leucocytes d’une part et les cellules surrénales, probablement aussi d’autres éléments, paraissent parfois contenir des granulations plus pâles, en train de se décolorer et de disparaître.

Le pigment s’élimine, de plus, à l’état de granule (desquamation cutanée, reins, intestin).

IT. x. La cellule pigmentaire paraît sécréter elle-même sesgranules.

La pigmentation épidermique est autochtone.

La pigmentation dermique peut être, également, autochtone : elle peut, par contre, dériver de la transformation, en éléments fixes, des cellules mobiles servant à la résorption du pigment épidermique vers l’intérieur. |

Ces conclusions dérivent de l'examen de diverses pièces et surtout de l'examen histologique des greffes pigmentées.

Une cellule épidermique pigmentée transplantée sur un territoire non pigmenté, donne naissance à des cellules filles faisant du pigment : l’origine est donc bien autochtone.

Une cellule mésodermique pigmentée (cellule. choroïdienne), transplantée de la même manière, donne naissance à des cellules

70 P. CARNOT.

mésodermiques également pigmentées : l’origine est encore autoch- tone :

Si on suit l’évolution d’une greffe épidermique pigmentée, on voit que la pigmentation, d’abord épidermique, devient ensuite dermique. Si, même, la greffe se résorbe, la pigmentation devient à un certain moment, uniquement dermique : ceci prouve l'existence du pigment dermique par fixation dans le derme des cellules mobiles résorbant le pigment épidermique.

L'inverse ne s’observe jamais.

8. La cellule pigmentaire de la réline chez les mammifères, de la peau chez les animaux inférieurs, jouit d’une mobilité considérable de son pigment.

Nous avons étudié surtout le chromoblasie de la grenouille, et la mobilité de ses granules, au moyen de l’action du chlorhydrate d’aniline qui les réunit au centre, et du nitrite d’amyle qui les étale.

Si on suit la rétraction au microscope, on voit que les prolonge- ments, d’abord uniformément pigmentés, se fragmentent en îlots pigmentés qui paraissent libres et indépendants.

Le protoplasma de l’ancien prolongement n'est ni visible, ni colorable : cette figure éveillerait l’idée d’une clasmatose: mais on voit fort bien, par la suite, le transport des granulations en direction centripète, d’un amas à l’autre : le prolongement non visible existe donc encore.

Dans une deuxième phase, une fois tous les granules transportés au centre, peut-être les prolongements se rétractent-ils, puisque, parfois, à une nouvelle expansion, ils n’occupent pas la place qu'ils avaient auparavant.

Au début, au moins, c'est donc le granule qui se meut à l’intérieur du prolongement, comme dans la cellule rétinienne du mammifère.

IT. Au point de vue anatomo-physiologique, nous avons étudié l'influence de la granulation par la méthode des injections de pigment (pigment choroïdien, pigment de mélanose de cheval, elc.).

Les injections intra-veineuses massives nous ont donné une localisation élective du pigment, en amas agglutinés, dans le foie, la rate et les poumons.

Le pigment s’élimine, non agglutiné, par les reins, surtout au niveau du glomérule, et par l’intestin.

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. pal

Les injections locales (péritonéales et sous-cutanées), nous ont donné parfois une fixation considérable du pigment au niveau des capsules surrénales: en grande quantité, le pigment détruit la cellule et la fait disparaître : en moindre quantité il y a lutte: la cellule surrénale englobe des granulations, mais généralement desquame ; enfin, s’il y a moins de granulations, la cellule les englobe, paraît les décolorer et probablement les fait disparaitre. Ce mécanisme ne s’est pas uniformément montré aussi net. Générale- ment il y a peu de pigment, et le phénomène passe à peu près inaperçu.

Nous avons observé d’autres localisations curieuses: telle la localisation uniquement dans le grand épiploon, de pigment injecté sous la peau. Cette absorption d’une injection sous-cutanée à travers le péritoine avec fixation dans le grand épiploon, organe lymphoïde étalé, s’est reproduite deux fois.

Enfin jamais, à la suite d’injections même dermiques, on n’a observé d'infiltration épidermique de pigment.

IV. L'influence de la cellule a été, surtout, étudiée par la méthode des greffes pigmentées : une cellule noire greffée sur un territoire blanc donne naissance à une tache noire, en extension : la surface noire représente la descendance de la cellule greffée. Par contre, la greffe d’une cellule blanche sur territoire noir se résorbe. D’une manière générale, la vitalité de la cellule noire est plus considérable que celle de la blanche.

Mais par des modifications imprimées aux deux organismes four- nissant l’un la greffe, l’autre le porte-greffe, on peut intervertr ces rapports (vitiligo). L'index colorimétrique constitué par la tache pigmentée permet de mesurer la vitalité de la cellule greffée et ses variations suivant les conditions expérimentables on la place. On peut par cette méthode, étudier les influences qui atténuent ou renfoncent la vitalité d’une cellule : parmi les causes atténuantes, nous avons remarqué l’âge, les infections, les intoxications, etc. ; Une greffe venant d'animaux vieux ou malades se résorbe sur des animaux jeunes et sains: inversement, une greffe d'animaux sains se développe rapidement sur les animaux vieux ou malades. Le passage en série atténue la virulence de la cellule, etc. Par contre les excitations faibles, lumière, agents chimiques, etc., renforcent la vitalité de la cellule.

72 P. CARNOT.

Cette technique permettra d'aborder divers problèmes d'énergé- tique cellulaire : on peut même espérer, après étude des causes propres à renforcer la virulence de la cellule, faire dévier une cellule de son type normal et créer ainsi des éléments atypiques et pathologiques.

La greffe pigmentée n'évolue pas et se résorbe sur les animaux albinos : à côté donc de l'influence considérable de la cellule, il y a place pour une influence générale de l’organisme, influence s’exer- çant d'une façon probablement complexe et encore inconnue. Nous étudions actuellement le rôle des différentes sécrétions dans la résorption de ces greffes sur animaux albinos.

V. Nous avons ensuite étudié l'influence des nerfs sur la pigmen- tation : cette influence est surtout marquée sur les animaux à granulations pigmentaires mobiles.

Sur la grenouille, nous pouvons admettre deux sortes d’actions nerveuses : une action chromato-constrictrice, une action chromato- dilatatrice. Un certain nombre d’agents dissocient ces actions : telle la lumière, la chaleur, le chlorhydrate d'’aniline, la santonine, l'ergotine, l’iodure de potassium, etc., qui déterminent un mouve- ment centripète de la granulation : tel le froid, le nitrite d'amyle, le chloral, l’éther, et localement la térébenthine, etc., qui déter- minent un mouvement centrifuge.

Ces actions se produisent par l'intermédiaire des nerfs, sans qu'on puisse entrevoir le mécanisme direct de l’influx nerveux sur la marche du granule, ou sur le protoplasme ambiant. Elles ne se produisent pas sur un fragment de peau qui vient d’être détaché.

Le sciatique contient les deux ordres de fibres : de même du système nerveux péri-artériel : ces deux voies se suppléent l’une l’autre.

De même de la moelle et du grand sympathique qui paraissent tous deux contenir les deux ordres de fibres.

Les réflexes cutanés et oculaires sont les plus importants : le réflexe cutané peut par éducation sur une grenouille aveugle suppléer le réflexe à la lumière disparu.

VI. L'influence des différents organes est, à l'heure actuelle à peine entrevue.

La capsule surrénale, nous l’avons vu, paraît fixer et détruire en

+ GE

MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 73

partie le pigment : on connaît, du reste toutes les théories pathogé- niques de la maladie d’Addison.

Le foie joue certainement, dans nombre de cas un rôle prépon- dérant (paludisme, cirrhose pigmentaire, etc.). Nous avons pu faire disparaître avec M. GizBerT, un cas de vitiligo, par opothérapie hépatique, mais ce rôle est peu défini et probablement indirect.

Le éhymus, d'après ABeLous et BILLARD (3), jouerait un rôle dans la pigmentation : nous n'avons pu cependant, obtenir les mêmes résultats que ces auteurs.

Enfin les organes lymphoïdes paraissent, en partie détruire les granules pigmentaires, et comme tels, doivent avoir un rôle dans la pigmentation.

La pigmentation de l’acanthosis nigricans paraît accompagner généralement des néoplasmes touchant au péritoine.

Toutes ces influences sont encore vagues. Des expériences en cours seront ultérieurement publiées.

VII. Au point de vue physiologique, le problème est générale- ment très complexe et les causes éthologiques se contrarient. D'üne façon générale, on peut envisager la pigmentation comme une défense de la cellule contre les rayons lumineux, surtout chimiques. Cette réaction de défense est devenue générale contre toutes les excitations (mécaniques, chimiques, etc.) en déviant de sa signification primitive.

Au point de vue phylogénique, peut-être doit-on considérer avec M. GraRp, la localisation cutanée du pigment comme la fixation, pour cause d'utilité publique, des substances toxiques primitivement excrétées par cette voie, mais dont la rétention a modifié en mieux les conditions d'existence de l'individu.

Paris, 15 novembre 1896.

74

OU à W

P. CARNOT.

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MÉCANISME DE LA PIGMENTATION. 8l

EXPLICATION DES PLANCHES

Planche I.

Fig. 1. Foie de lapin, après injection de pigment mélanique dans la veine marginale de l'oreille.

Fig. 2. Grand épiploon de jeune chien: fixation du pigment à son niveau £ après injection sous-cutanée.

à Planche II.

Fig. 1. Rein de lapin, après injection intra-veineuse de pigment : élimination des granules au niveau des glomérules.

Fig. 2. Capsule surrénale de chien, après injection de pigment mélanique : fixation des granules dans les cellules surrénales.

82 P. CARNOT. :

TABLE DES MATIÈRES.

k Pages. INTRODUCTION. . ..... RS Li RE PR TE LCR ET PE PTT a ASS te EN ES d

Ire PARTIE ANATOMIQUE.

Chapitre [3 1e-C0l6 nant tn st, RSR NENE ETE RERRETREREE

Chapitre Il °Le-éranule piémentairs exists eL NRA ERSRRE ER 9 Chapitre TI. Ba cellule pismentaire reset M RE 16 a, Mammifères.......... He DANSE ES Ne ES 16. b; Batraciens Cr Poissons: Re Rae 23

Ile PARTIE ANATOMO-PHYSIOLOGIQUE

Chapitre I. Influence du granule (injections de pigment) ............ 30 Chapitre II. Influence de la cellule (greffes pigmentaires) ........... 42 Chapitre IIL. Influence des nerfs (nerfs chromato-moteurs).......... 55 Chapitre IV. Sur la physiologie de la pigmentation................. 6 DONCRURIONS AU 2e NE ALP AANOE SRE 0 Re RAS OS DÉRRRS INDEX APIRÉIOGRAPHIQUE 0 EUR SA EN LA RE EE 74

EXPLICATION DES PLANGHES 252002. Maur eranu-nerhee ee NE

A L e, à LP, È 4 # # à , 1: de Fe t di * # LUN i dnher Le de) Jr re

ÉTUDES DE MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES

PAR

FÉLIX MESNIL,

Agrégé, Docteur ès sciences naturelles.

IT.

REMARQUES COMPLÉMENTAIRES SUR LES SPIONIDIENS. LA FAMILLE NOUVELLE DES DISOMIDIENS. LA PLACE DES AONIDES (sensu TAUBER, LEVINSEN).

Planche III,

Je réunis ici les quelques documents nouveaux que j'ai recueillis sur les Spionidiens depuis la publication de mon mémoire dans ce Bulletin (tome XXIX, 1896, p. 110-288, pl. vrr-xv). Je dois la plupart d’entre eux à la grande complaisance de M. le D' LEVINSEN, conservateur au Musée zoologique de Copenhague, qui a mis à ma disposition les types de ce musée. M. le D' MICHAELSEN, de Hambourg, qui vient de publier un mémoire d'ensemble sur les Polychètes des mers allemandes (1), a bien voulu m'envoyer des Polydora quadrilobata Jac. de la baie de Kiel et un exemplaire

(1) MicHaELsEN. Die Polychæten fauna der deutschen Meere. Wissenschaftliche Meereuntersuch., herausg. von der Komm. :. Unters. der deutschen Meere in Kiel und der Biol. Anstalt auf Helgoland. Neue Folge. Bd II. H. I. 1897.

84 FÉLIX MESNIL.

entier de Disoma mullisetosuin ŒrsrT. J’exprime ici mes remercie- ments les plus cordiaux à mes savants confrères. Enfin, j'ai recueilli au cap de la Hague, aux mois de juillet et août 1896, quelques espèces que je n'avais pas encore rencontrées, entre autres une Polydore nouvelle. Je puis ainsi compléter sur quelques points mon premier mémoire, et surtout exposer la place que doivent occuper, dans le système des Annélides, Disoma ŒRSTEp et les deux espèces rangées dans le genre Aonides Crpp par TAUBER et LEVINSEN ; toutes ces formes sont classées à tort parmi les Spio- nidiens.

Pour tout ce qui regarde la bibliographie, je renvoie à mon mémoire précité.

I. COMPARAISON DE SPIO FILICORNIS (Faër., Œrsr.) MGR. et SPIO MARTINENSIS Mes. (pl. un, fig. 1-3).

Deux flacons de la collection de Copenhague renferment des Spio filicornis. J'ai pu examiner trois extrémités antérieures et plusieurs extrémités postérieures. J'ai vu, dans tous les cas, les soies encapu- chonnées commencer au 10° sétigère (LEVINSEN dit du 10 au 14°); l’un des exemplaires était pourtant de très grande taille ; il avait plus de 1°" 1/2 de large. Ces soies sont en général au nombre de à 6 par rame (au lieu de 8 ou9 chez S. Martinensis) ; mais l'exem- plaire de 1°" 5 de large en avait jusqu’à 9. Par leur forme, elles diffèrent peu de celles de Spio Martinensis : les pointes sont un peu plus aiguës, et la pointe externe plus fine (comparer les fig. let 3); mais les soies de l’exemplaire de 1°" 5 de large (fig. 2) étaient beaucoup plus voisines de celles de S. Martinensis. Je n'ai pu reconnaître la forme du prostomium.

Je persiste à croire que Spto filicor nrs, tel que le figure MALMGREN, et Sp. Marlinensis constituent deux espèces distinctes (voir MESNIL, 1. c., p. 130). Mais il existe peut-être des intermédiaires ; et il est possible qu’une étude comparative des Spio filicornis de différentes provenances (entre autres les types du Groënland, dont parle MaLM- GREN), amène à fondre les deux espèces en une seule qui présenterait alors une variabilité dans les caractères, aussi grande que celle que j'ai montrée exister chez Scolelepis fuliginosa Czpp (1. c., p. 156).

MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 89

II. LE GENRE MICROSPIO MEsnir

J'ai décrit, à la page 149 de mon mémoire cité, la larve d’un Spionidien et j'ai émis l'opinion qu'elle devait être rapportée, soit à. Scolelepis Girardi (QxG), soit à Microspio atlantica (LxXGHs), espèce qui n'avait encore été trouvée qu'à Madère. De nouveaux documents me font penser que ma seconde supposition est la vraie.

J'indiquais que la principale différence entre la larve décrite et M. atlantica est celle-ci: les soies encapuchonnées apparaissent constamment au 11° sétigère chez la larve, au chez M. atlantica. J'ai, en juillet dernier, pêché au filet fin, dans l’anse St-Martin, des larves de 11 à 16 sétigères l’apparition des soies encapuchon- nées se faisait au 10°. Le segment d'apparition est donc sujet à variation pendant le développement.

Chez ces larves et d'autres plus âgées, n'y a qu’un seul faisceau de soies au 1" sétigère ; or je ne connais, en dehors des Polydores, que deux Spionidiens présentant ce caractère : Nerinides longiros- tris (ST-J.), dont les soies encapuchonnées sont très différentes de celles de ma larve, et Microspio allantica.

Enfin j'ai trouvé M. atlantica dans le sable fin de l’anse de Vauville l’ouest du cap de la Hague).

* * *

IT. LE GENRE PYGOSPIO Cxpr.

En même temps que LEVINSEN m'envoyait des Spio selicornis ŒRST. {ypes, du musée de Copenhague, je recueillais cette espèce dans l’anse St-Martin, elle vit dans une boue identique à celle qui renferme Pygospio elegans var. minuta, à Wimereux. Comme Pyg. elegans, Spio seticornis habite des tubes de sable fin.

J'ai pu d’abord me convaincre que Spto seticornis était une Pygos-

pio et une espèce très voisine de Pyg. elegans. ŒRSTED en a

donné une bonne figure d'ensemble dans les Ann. Dan. Conspectus, et CUNNINGHAM et RAMAGE une description exacte. Je veux simplement préciser les différences entre les deux espèces du genre

Pygospro.

GONE d'à PR STATUS 1 BEL EPS AS EU EE

86 FÉLIX MESNIL.

La différence frappante est la présence, au sétigère de Pyg. selicornis, de branchies bien figurées par CUNNINGHAM et RAMAGE el qui manquent toujours chez P. elegans ; ces branchies sont nettement indépendantes de la lamelle dorsale. Elles paraissent très fragiles ; elles étaient en mauvais état chez ceux de mes exem- plaires ayant séjourné 24 heures dans un cristalisoir.

Les autres différences sont les suivantes. Les exemplaires de Pyg. selicornis sont plus grands que ceux de la Pygospio elegans deWime- reux; ils atteignent et dépassent 1 cent. ; le nombre de leurs segments est souvent 60 ; la teinte est plus pàle ; il existe un peu de pigment bleu verdàtre dans les segments antérieurs. Le lobe prostomial paraît plus atténué, plus allongé ; il est nettement divisé en deux à l'extré- mité, sans intercalation d’un lobe médian. Les soies encapuchonnées sont un peu différentes ; la tige n’est pas nettement renflée chez Pyg. seticornis (fig. 4). Tous les autres points concordent.

La diagnose du g. PyGospio que j'ai donnée, p. 119 de mon mémoire précité, devra porter : Branchies n’existant régulièrement qu'à partir du 11-12° sétigère.

Ce genre comprendra deux espèces :

Pygospio seticornis ŒRrsT. (nec FABRIGIUS), CUNNINGHAM et RAMAGE. Pygospio elegans Ciep., MEsniL Spio Rathbuni WEBsT. et BEN. (1).

* x *

IV. LE GENRE POLYDORA.

S 1. Description de l'extrémité antérieure d’une Polydora sp.? (Pl. 11, fig. 6-8).

Un tube du Musée de Copenhague étiquetté Spio filicornis renferme un fragment antérieur de Polydora de 25 sétigères ; ce fragment a 1°" 5 de large.

Le prostomium est fortement bifurqué en avant; il porte deux petits yeux, en forme de haricot allongé, qui représentent proba- blement la paire antérieure normale. Le premier sétigère porte des

(1) En examinant avec soin la description et les figures de la larve p. 72 et pl. vin, fig. 4-6 des Peobachtungen, je me suis convaincu que CLAPARÈDE avail eu sous les yeux la larve de ?yg. elegans dont je donne les caractères saillants, p. 178 de mon mémoire précité. |

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MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 87

soies dorsales.— Le sétigère a tous les faisceaux de soiesordinaires. Les soies anormales sont au nombre de onze fonctionnelles. Elles ressemblent à celles de P. cœca et P. flava, mais la partie distale est un peu élargie à l'endroit de la courbure, et la partie terminale est un peu plus courte (fig. 6 et 7). Les soies à capuchon apparaissent au sétigère et sont accompagnées de 1 ou 2 ventrales inférieures jusqu'au 12° exclusivement. Il y a cinq soies à capuchon par rame ; la pointe externe fait un angle assez faible avec l’interne et elle est particulièrement fine (fig. 8). Il y a un pharynx bien développé vers le 20° sétigère. Je n’ai rien pu noter sur les branchies.

Cette espèce est surtout voisine de P. cæca. Elle en diffère par la présence de deux yeux chez un exemplaire plus large que les cœca que j'ai examinées, par le nombre considérable (11) de soies anor- males du sétigère (ŒrsrTED, chez des exemplaires de 1 pouce 1/2 sur 3/4 de ligne, ne note que 6 ou 7 acicules), par quelques particu- larités de ces acicules et des soies encapuchonnées (le nombre plus grand de ces dernières, 5 au lieu de 3 ou rarement 4, peut s'expliquer par la plus grande largeur du corps). Il serait intéressant de savoir s’il existe des soies dorsales particulières aux derniers sétigères. Le nombre des soies aciculaires du sétigère est le même que chez Leucodorum ciliatum ŒRSTED ; mais c'est le seul caractère commun.

J'éprouve quelque scrupule à créer une espèce nouvelle pour un simple fragment ; pourtant je crois bien que c'en est une qui a sa place dans mon groupe I (1. c., page 241) entre P. socialis et P.7 CœCa.

* *

S 2. Remarques sur Polydora quadrilobata JAcoBt (PL 11, fig. 9-11).

M. MICHAELSEN a bien voulu m'envoyer deux exemplaires de cette espèce, et j'ai pu ainsi compléter la diagnose de Jacogr, que j'ai précédemment résumée dans mon tableau (1. c., p. 256).

Le prostomium est à peine bifurqué en avant (comme chez P.

cihata) ; en plus des quatre yeux normaux, j'en ai observé deux intermédiaires. Au 1" sétigère, la lamelle dorsale est très nette, et

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88 FÉLIX MESNIL.

je crois, sans en être sûr, qu'il y a des soies dorsales (JAGOBI ne signale qu'un faiscean à ce segment). Le sétigère porte 6 soies anormales (fig. 9 et 10); l'extrémité recourbée est creusée d’une cavité sont insérés des poils formant pinceau ; ces poils (tout à fait semblables à ceux qui terminent les soies &e P. polybranchia) sont plus ou moins nombreux suivant l'usure de la soie: les soies dorsales supérieures sont très développées, fortement limbées ; 4 n'y a pas de dorsales antérieures.

À partir du sétigère, soies encapuchonnées (fig. 14) normale- ment au nombre de 4 par rame ; il existe en même temps des dorsales inférieures capillaires. La lamelle dorsale m'a paru indépendante de la branchie. Aux derniers sétigères, il existe des soies dorsales en poinçon (comme celles de P. Caulleryi figurées en 16); dans chaque faisceau, ces soies divergent à partir de leur base et forment des cônes de 45° d'ouverture. Le pygidium est découpé en quatre lobes semblables à ceux de P. flava. JAcoBr, qui a éludiè l’'annélide par coupes, ne signale pas de pharynx ; s'il en existe un, il est très peu développé (1).

P. quadrilobata me paraît devoir être classée dans mon groupe II (armata-Langerhansi), plutôt à cause de ses caractères négatifs que des positifs ; elle a surtout une certaine ressemblance avec l'espèce suivante qui fait nettement partie du groupe.

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S 3. Description de Polydora Caulleryi n. Sp.

Un Platycarcinus pagurus, pêché le 23 août 1896, à la limite des basses mers, sous les rochers qui terminent le cap de la Hague, était couvert de tubes de Pomatoceros triqueter L. Certains de

(1) Je erois qu'il existe une région très musculaire, précédant immédiatement la partie glandulaire du tube digestif, chez toutes les Polydores. L'existence d’ un pharynx chez ces Annélides a été signalée pour la première fois par Mario et Bosrerzxy chez une espèce qu'ils ont rapportée à Polydora Agassisit Cxrn. Naples (?. ciliata Jonxsr) ; j'ai pô, grâce à des matériaux que M. Lécer a bien voulu m'envoyer, vérifier la justesse de leur détermination, et j'ai aussi constaté l'existence d’un tel pharynx chez des P. ciliata de la Manche. Mais chez cette espèce, il n’a jamais l'importance qu'il AVES chez les Polydores du type cæca (mon groupe I, p. 241).

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MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 89

ces tubes vides étaient remplis par les tubes de boue de diverses Polydores déjà connues (P. Giardi MEsx., P. cœca ŒRSsT. avec 4 yeux, P. flava Crop.) et d’une Polydore que je crois nouvelle.

J'ai eu deux exemplaires incomplets de cette dernière. L'un, presque entier, avait 8°" de long sur 1/2" de large (dimensions de P. Giardi) et une quarantaine de sétigères. Le prostomium est faible- ment échancré ; il ne porte pas d’yeux ; j'ai pourtant observé un peu de pigment diffus chez un exemplaire.

Le sétigère porte dorsalement 2 à 4 soies.

Au »° sétigere, il existe 3 ou 4 soies anormales fonctionnelles qui ont une forme bien caractéristique (fig. 12-14) ; elles sont fortement recourbées à l'extrémité et terminées par une pointe assez aigüe; cette extrémité est recouverte d'un manchon très large et irès grand, formé de fibres parallèles collées les unes aux autres. C’est le capuchon de P. Langerhansi développé avec exagération, et avec la structure des pinceaux de poils de P. quadrilobata. Le sétigère porte, en plus, un petit faisceau de dorsales supérieures, un fort faisceau de ventrales ; # n'a pas de dorsales antérieures (CE. P. armata ei P. quadrilobata).

Les branchies commencent au sétigère, ainsi que les soies encapuchonnées (fig. 15); le nombre normal de ces soies est 5; chez un exemplaire, il y en avait même quelquefois 6. Les 20 derniers sétigères ont des soies en poinçon (fig. 16), à structure lisse, [différence avec P. armata (1)] disposées en faisceau, avec un nombre égal de soies capillaires longues. Ce faisceau forme un cône ayant son sommet au point d'émergence des soies. Je n’ai pas vu de pharynx.

Les affinités de cette espèce avec P. Langerhansi et P. armata me paraissent indiscutables ; elle a divergé de la branche commune à tout mon groupe II (page 241,1. c.), à peu près en même temps que P. armata. P. quadribolata s'est peut-être séparée plus tôt, mais elle à suivi une marche parallèle à P. Caulleryi.

(1) Ces soies en poinçon sont brunes et à strulure rayée chez les ?. armata de Madère et de l’anse St-Martin ; d’après Carazzi, la structure est lisse chez les exemplaires de Naples ; j'ai observé le même fait chez un individu provenant du cap Horn.

90 FÉLIX MESNIL.

V. LE GENRE PRIONOSPIO Mer.

Je n’ai pu tirer que peu de parti des exemplaires de P. Sieens- trupü Muer. du Musée de Copenhague noircis et ayant perdu toute transparence. Mais, j'ai pu faire un examen assez approfondi des types de la collection LANGERHANS ( Wurmfauna von Madeira , Z. Wiss. Zool. T. 34, 1880). MALMGREx ne figure pas d’yeux chez son espèce et c’est sans doute un caractère très constant, puisqu'il l'indique spécialement dans la diagnose du genre. C'est une différence importante, à cause de la régularité que je lui suppose, entre l'espèce type de MaLmGren, et celle décrite sous le même nom par LANGERHANS. Néanmoins, je crois que LANGERHANS a eu raison d'identifier son espèce avec celle de MALMGREN. P. Steens- trupii MALMGREN me parait en effet avoir des soies dorsales à capuchon dans la région postérieure comme l'espèce de LANGERHANS ; ces soies sont en même nombre chez les exemplaires de LANGERHANS et chez ceux da Musée de Copenhague. La forme paraît être assez voisine ; sion compare ma fig. 5 (exemplaire de Copenhague) avec le dessin de LANGERHANS qui est très exact, on remarque simplement une différence dans la grosseur des pointes externes. Chez l'espèce de Madère, on reconnaît que les petites pointes externes, vues de face, sont toutes paires ; la forte pointe interne est seule impaire ; les premières paraissent des sortes d’arceaux allant, à parür d’un mamelon, extrémité terminale de la tige de la soie, rejoindre le capuchon de chaque côté. Je n'ai pu faire une semblable cons- tatation sur les exemplaires de Copenhague.

Il est fort possible que, comme le croit LEVINSEN, Pr. plumosus M. Sars (1) P. Steenstrupii. Peut-être en est-il de même de Pr. tenuis VERRILL (2). Pr. cirrifera WIREN (3) serait caracté- risée par l'existence de 5 ou 6 paires de branchies au ee de 4. Ces espèces auraient besoin d’être revues.

(1) G. O. Sars (d'après un manuscrit de M. Sars). Pidrag til Kundskaben on Christ. fjord. Fauna. 3, 1873.

(2) VERRILL. Proc. US. Nation. Mus. 2, 1880. (3) WIREN. Vega-Expeditionens Vetensk. inkttagelser. 2, 1883, p. 409.

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MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 91

P. Malmgreni Cirv., bien étudiée par CLAPARÈDE (1), puis par Marion et BoBRETZKY (2), est une espèce de plus petite taille que P. Sleenstrupii. Son prostomium est e//iptique en avant et non élargi ; ses yeux rappellent tout à fait ceux de Steenstrupa LNGns (la paire postérieure comprend de véritables yeux composés, cons- titués par 7 ou 8 yeux simples avec cristallin enchâssé dans du pigment brun). Les soies à capuchon sont nettement à 3 pointes, les deux externes tout à fait comparables à l’interne ; elles ne paraissent pas exister dorsalement (fig. 20 B de MarioN et BOBRETZKY).

La systématique du g. PRIONosprO est donc assez confuse. Deux espèces, Steenstrupii (avec la variété oculifére de LANGERHANS) et Malmgreni, sont assez bien différenciées et il sera peut-être même nécessaire d’en faire les types de deux genres différents (soies dorsales à capuchon ou non ; forme très différente de ces soies). Les autres espèces sont mal connues et leurs rapports avec les deux premières insuffisamment établis.

VI. LE GENRE SPIOPHANES Ge.

J'ai observé des exemplaires de Sprophanes Krüyeri GR. provenant du Musée de Copenhague et recueillis dans deux localités différentes.

Je n’ai rien à changer à la diagnose du genre, telle que je l'ai donnée page 120 des Spionidiens des côtes de la Manche ; j'y ajouterai que la présence de quelques soies ventrales plus grosses que les autres au sétigère est un caractère générique. Une étude plus attentive des organes en filière chez S. Krüyeri et Bombyx m'a montré qu'ils secrétaient des productions chitineuses de deux sortes : les organes des sétigères 5, 6, 7 et 8 produisent un grand nombre de très longs fils longeant l'organe glandulaire sur son bord antérieur (fig. 20); ces fils ont environ 1 & de diamètre; les organes des sétigères 9 à 14 inclus secrètent des soies courtes,

(1) CLAPAREDE. Mem. Soc. Phys. et Hist. Nat. (renève, 20, 1'e partie, 1869. (2) MarIoN et BOBRETZKY. Aun. Sc. Vat., Zool., série, 2, 1875.

92 FÉLIX MESNIL.

fines, d’un diamètre au moins égal à 2u à la base, allant en s’amincissant vers l'extrémité (fig. 21) ; ces soies forment un pinceau à l'extrémité externe de l'organe ; on en voit aussi quelques-unes disséminées à l'intérieur.

Le tableau suivant résume les caractères différentiels des deux

espèces Xrôyeri et Bombyx.

Krüyeri GRUBE. 17 mm. sur { mm. 90 sétigères et plus.

Prostomium un peu élargi en avant; pas d'yeux.

Les quatre premiers sétigères sont nettement reconnaissables dorsalement à cause de leurs rames notopodiales plus dorsales que celles des sétigères suivants.

Les organes en filière sont dévelop- pés dans le sens transversal ; les fils des sétigères 5 à 8 sont sensiblement droits (1).

Les soies encapuchonnées sont au nombre de 6-7 par rangée ; elles sont nettement à 3 pointes ; la pointe externe est double ; pas de capuchon. (fig. 18-19)

Grosse soie ventrale inférieure avant le 15° sétigère.

Pas de soies dorsales particulières aux derniers sétigères.

Au moins 4 cirres anaux.

Bombyx (CLAPAREDE). 00 mm. sur { mm 5. 180 sétigeres. Prostomium très élargi en avant avec 2 longues pointes latérales; 4 yeux ou0. Les rames notopodiales des quatre premierssétigeres sont à peine plus dor- sales que celles des sétigères suivants.

Les organes en filière des sétigères 5 à 8 sont limaçoïdes ; les fs sont enroulés en forme de 6 (2).

Les soies encapuchonnées sont au nombre de 11-13 par rangée (chez les eros exemplaires) ; elles sont à 2 poin- tes :ilexiste une troisième pointe externe tout à fait rudimentaire. Capuchon. (fig. 17).

Grosse soie ventrale partir du 15° sétigère.

Soies dorsales un peu particulières aux derniers sétigères.

2 Cirres anaux.

inférieure à

LEvinsex identifie avec doute Sp. cirrata Sars avec SP. KRÔYERI. Je ne vois pas de différence entre ces deux espèces. Sars figure bien les soies à crochet à 3 pointes.

Le genre Spiophanes comprend donc deux espèces différentes :

Krüyeri GR. (GRUBE, MALMGREN, LEVINSEN) cirrata SARS ;

Bombyx Cp (CLAPARÈDE, MESNIL) Verrillii WEBSTER (Spio) crenaticornis GIARD.

(1) Ces organes sont très développés aux sétigères 5, 6 et 7 ; ce sont des ellipses allongées allant de la surface du corps au tube digestif qu’elles compriment quelquefois. J'ai même observé qu’à un sétigère gauche, le sac se recourbait à angle droit et remontait jusqu'à la limite du et du sétigère. Les sacs sont très peu développés aux sétigères 8, 9 et 10, moyennement à 11, 12 et 13, peu à 14.

(2) Le développement subit pou de variations ; les organes des et 10° sétigères sont néanmoins plus petits que les autres.

MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES, 93

VIT. LES AONIDES DE TAUBER ET LEVINSEN (LEVINSENIA N. GEN.).

Dans mon mémoire sur les Spionidiens, j'ai émis la supposition (p.246) que ces deux espèces | Aonides gracilis TauBer (1) et f'ulgens LEVINSEN | devaient être voisines du genre Aonides CLPDE tel que j'ai cru devoir l'interprèter, et rentrer peut-être dans le genre Spionides WEgsT. et BEN.. Je croyais la détermination Spionidien certaine et je pensais que les tentacules avaient simplement disparu. J'ai pu examiner les exemplaires types du musée de Copenhague et me convaincre que ces Annélides ne sont pas des Spionidiens : à l'absence de palpes tentaculaires qui doit être réelle, s'ajoute ce fait que les soies courtes sont très différentes de celles si caracté- ristiques des Spionidiens.

LEVINSEN a décrit très exactement Aonides fulgens.Je me contente de représenter (fig. 23) une de ces soies courtes dont il dit qu'il en existe { ou 2 à chaque rame ventrale à partir du 46° sétigère environ. Aonides gracilis TAUBER a un faux air d’Aonides auricularis Czpo.,et je comprends fort bien que TAUBER ait rapporté son espèce au genre Aonides, alors mal connu. Mais, comme chez la précé- dente, Les sotes courtes sont de simples crochets (fig. 22) ressemblant à ceux des genres Audouinia et Cirratulus ; 1 y en a 4 à 5 par rame à partir du 20° sétigère environ. J'ai examiné avec beaucoup de soin les soies des deux espèces ; elles sont glabres. Les capillaires sont longues, très fines, légèrement limbées. Les branchies rappellent celles des Ariciens et de certains Spionidiens ; je n’ai pu, sur des exemplaires conservés, étudier les vaisseaux branchiaux (2).

Un nouveau genre doit être créé pour ces deux espèces. Je le dédie à M. le LEvVINSEN, le savant annélidologue de Copenhague. Une étude complète du genre ZLevinsenia est nécessaire pour préciser ses affinités.

Il a quelques caractères d’Aricien : forme du prostomium et des branchies ; mais il n’en a pas les soies annelées si caractéristiques

(1) TAUBER. Annulata Danica. Copenhague, 1879.

(2) J’ai recueilli, le 28 août 1896, dans le sable de l’anse de Vauville, près du cap de la Hague, un fragment vert sombre d’une Annélide qui est certainement Aonides fulgens. Je n'ai pu, étant à la veille de mon départ, me procurer d’autres exemplaires,

94 FÉLIX MESNIL.

Je crois qu'on devra surtout le rapprocher des Cirratuliens : la forme et la distribution des soies plaident en faveur de cette manière de voir. Il a, il est vrai, des branchies très courtes ; mais c’est là, je crois, une considération secondaire ; G.-A. HANSEN (Nordhavs Expeditionen) a d'ailleurs signalé un Cirratulien sans branchies. Si Levinsenia est un Cirratulien, il faudra le rapprocher du genre Cirrineris BLY.

Quoi qu'il en soit, c’est certainement un type très primitif de Polychète. La formation des premiers anneaux du métastomium serait intéressante à suivre, il serait important de savoir si la différenciation des trois premiers anneaux séligères, nette chez l'adulte, se produit tardivement et alors n’a pas de signification phylogénique (cf. région {horacique de Magelona, des Serpuliens, des Oligochètes), ou bien existe déjà chez l'embryon ; nous aurions dans ce cas une Annélide l’archipodium persisterait bien caractérisé chez l'adulte avec ses trois segments.

VIII. LA FAMILLE DES DISOMIDÆ.

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Le genre Disoma a été créé en 1844 par ŒRSTED pour une espèce dont il donne la diagnose et d'excellentes figures, mais en com- mettant l'erreur de prendre le dos pour le ventre. Depuis, Mœgius (Pommerania Exp. I, 1873), LEvinsEN, et surtout MICHAELSEN (Polychæten der deutschen Meere, 1. c., p. 41) ont précisé nos connaissances sur cette forme intéressante.

MIcHAELSEN confirme la description de ses prédécesseurs pour l'extrémité antérieure du corps; mais il fait connaître pour la première fois la structure complète de la région postérieure; il décrit lés branchies ventrales, les soies dorsales disposées en roue ; et il montre que c'est l'extrémité postérieure d'une Disoma que LEVINSEN a décrite sous un nom nouveau: Trochochæta Sarsi dans ses Nordiske Annulata, etc., p. 132, pl. n, fig. 6-7. MicHAELSEN émet quelques doutes sur l'identité de son espèce avec celle d'Œnrsrep. J'ai eu entre les mains les types des Musées de Copenhague et de Hambourg, et je puis certifier leur identité. C’est |

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MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES,. 95

aussi à Disoma multisetosum que l'on doit rapporter Thaumas- toma singulare W. et B., espèce décrite dans les Zncerlcæ sedis par WEBsTER et BENEDICT | U. S. comm. Fish and Fisheries (1881) 1884, p. 737, pl. 7, fig. 85-94] ; en lisant avec soin cette description et en la débarrassant de quelques erreurs (le 1” sétigère décrit corres- pond en réalité aux deux premiers), on se convaincra de la justesse de l'identification que je propose. L'examen de quelques exemplaires de Disoma me permet de faire les remarques suivantes :

Les rames sont très développées, surtout antérieurement. Le mamelon dorsal est peu proéminent ; mais le ventral est très déve- loppé, perpendiculairement à la surface du corps. Les soies dorsales, disposées en éventail, existent jusqu'au 12-17° sétigère inclusive- ment (1), et diminuent de nombre dans les derniers segments. Ces soies sont capillaires et limbées (fig. 25); le limbe est en général découpé assez finement. Plus en arrière, apparaissent les mamelons de soies aciculaires disposées en roue que LEVINSEN a très bien figurés (pl. 11, fig. 6).

Les soies ventrales, disposées en pinceau, sont en majorité analogues aux dorsales (fig. 25). Au sétigère, on a 3 ou 4 soies aciculaires assez grosses, à surface lisse ; au sétigère, mêmes soies aciculaires, mais d’une épaisseur double (fig. 27). Du au 12-17° sétigère, on a en général 1 ou 2 soies complètement adultes, et plusieurs à demi-adultes, ayant une forme assez particulière (fig. 24) ; elles portent des poils, très longs surtout à l'extrémité des soies ; cette extrémité porte une paire d’encoches latérales. Après le 12-17° sétigère, la rame ventrale se compose encore d’un mamelon assez allongé, conique, et d’un cirre bien net; elle porte deux soies assez grosses (fig. 26), et 1 ou 2 capillaires très fines. Puis, appa- raissent plus ventralement les branchies, bien figurées par LEVINSEN (PL. 11, fig. 7) et sur lesquelles MICHAELSEN a appelé l’attention

En 1844, on ne connaissait, parmi les Annélides, que chez les Spionidiens l'existence de deux longs cirres tentaculaires sur les

côtés du prostomium. Aussi ŒRsTED n’hésita pas à placer son nouveau genre dans cette famille. Tous les savants qui ont réétudié

_Disoma adoptent implicitement cette manière de voir. CLAPARÈDE (2)

(1) Je crois bien qu’il n'existe pas de dorsales au sétigère.

(2) CLAPARÈDE. Wém. Soc. Phys. et Hist. Nat. Genève, 20, 1'° partie, 1869,

96

FÉLIX MESNIL.

avait pourtant déclaré avec raison que la place de Disoma serait à préciser, et à fixer peut-être au voisinage des Chætoptériens. LEVINSEN à rapproché de Disoma le genre Pæcilochætus CLep. (voir ExLers, Zeütschr. f. wiss. z001., 25, 1875, p. 9, pl. 1, fig. 1). Je me range assez volontiers à son avis, sans avoir pourtant une conviction bien ferme.

D'abord, nous devons nous demander si Pæcilochætus fulgoris est l’adulte de la larve décrite p.77 des Beobachtungen. La différence principale réside dans la forme du prostomium. LEVINSEN, qui à observé des larves très âgées, a montré que les soies du premier séligère se relevaient pour entourer le prostomium et que les appendices de la partie antérieure devenaient de longs tentacules. CLAPARÈDE n'a pas observé ceux-ci chez Pœcilochætus. Je ne vois aucun inconvénient à admettre qu’ils ont été enlevés ; je les considère comme des palpes et non comme les cirres du premier, anneau du métastomium ; il y a parfaitement place pour eux sur le dessin de CLAPARÈDE.

Le prostomium dessiné par CLAPARÈDE était peut-être incomplet, comme le croit LEVINSEN ; mais il est possible aussi que chez l'adulte ïl soit aussi rudimentaire. Par son prostomium, Pœcilochætus serait à Disoma et à la larve des Beobachtungen comme, chez les Amphinomiens, par exemple, Æuphrosyne est à Eurythoë ; la larve reproduirait alors, dans l'ontogénie, la phase Disoma par a passer phylogénétiquement, Pæcrilochætus. Quoi qu'il en soit de ces considérations très hypothétiques, et en laissant de côté le prositomium, il me semble que les deux genres Pœcilochætus et Disoma doivent être maintenus. Leurs différences seraient, en laissant les caractères du prostomium de côté :

DisomaA

Cirres, ou bien tuyautés, ou bien courts et coniques. Branchies ventrales digitiformes dans la région postérieure du corps.

Mamelons sétigères dorsaux très allongés.

Pieds biramés dans les régions anté- rieure et postérieure ; la rame dorsale manque dans la région moyenne.

Soies en lancette (fig. 24) à la rame ventrale de la région antérieure ; les autres soies barbelées. Soies acicu- laires aux rames dorsales postérieures.

P&œCILOCHÆTUS

Cirres renflés à la base, puis atté- nués.

Mamelons sétigères peu saillants.

Pieds biramés jaque l'extrémité postérieure du corps (£):

Soies lisses dans la région antérieure du corps, barbelées dans la région mo- yenne; grosses soies épineuses dans la région postérieure.

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MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 97

Ces deux genres, par leur prostomium avec palpes tentaculaires très longs, rappellent les Spionidiens et certains Chætoptériens.

Mais il n’ont pas d’autres caractères communs avecles Spionidiens. Sans doute, ils ont aux 2°, et même (Pæcilochætus) sétigères des soies ventrales anormales qui rappellent celles des Polydores et des Chætoptériens, mais je ne vois qu’un caractère d'adaptation commun (1), et non de parenté.

Les deux genres s’éloignent des Chætoptériens, en ce qu’ils ne possèdent pas cette région abdominale si spéciale à ces derniers. Néanmoins les rames de Disoma rappellent un peu celles de la région antérieure des Chætoptériens.

Je suis amené à créer une famille nouvelle, celle des Disomipx. Ses caractères seront :

Prostomium très simple, avec 2 longs palpes lentaculaires ana- logques à ceux des Spionidiens. Pieds biramés, au moins dans la région antérieure, uniquement avec sotes simples. Soies de formes variées, particulièrement grosses soies épineuses, soies barbelees, grosses sotes en lancelle. Sotes aciculaires aux rames ventrales des setigères 2, 3, même 4. Jamais deux régions du corps nette- ment chstincies. Cirres ventraux et dorsaux, allongés ou tuyautes.

Quant à la place de cette famille, elle est entre les Spionidiens et les Chætoptériens, un peu plus voisine de ces derniers.

Peut-être les deux genres dont je m'occupe ont-ils des affinités avec les Aphroditiens et les Amphinomiens? La forme de leurs soies, et en particulier des grosses soies épineuses de Pæcilochætus ; le tentacule impair de ce genre (s’il existe); les deux longs palpes ; la tendance du premier sétigère à enserrer le prostomium, constituent un nombre de faits assez grands pour autoriser cette supposition.

Oserai-je faire entrer en ligne de compte ces sortes de verrues qui recouvrent le corps de Pæcilochætus et qui rappellent si bien

(1) Ce caractère d'adaptation existe au:si dans le g. Selerocheilus Gr. de la famille de Scalibregmidés. Les cirres tuyautés de Disoma (voir les fig. de MœBIUs) rappellent un peu les branchies de Sealibregma.

98 FÉLIX MESNIL.

par leur structure les aspérités des élytres ou des cirres des Aphro- ditiens ? J'hésite à croire, comme LEVINSEN, que ces productions, si nettement décrites et dessinées par CLAPARÈDE, élaient étrangères à l'Annélide.

Paris, 6 novembre 1896.

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MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 99

EXPLICATION DE LA PLANCHE III.

Microscope Leitz. Chambre claire.

Fig. 1. Soie encapuchonnée du 79° sétigère de Spio Martinensis MEsx. Ga = 40)

Fi. 2. Soie encapuchonnée d’un sétigère antérieur du gros exemplaire de Spio filicornis FaBr. G. 540.

Fig. 3. Soie encapuchonnée d'un sétigère postérieur de Sp. flicornis FABR. Gi =:540;

Fig. 4. Soie encapuchonnée de Pygospio seticornis (ŒRsT.) G. = 540.

Fig. 5. Soie encapuchonnée de Prionospio Steenstrupii MALMGR. (type du

Musée de Copenhague). G. 540. Fig. 6. Soie encapuchonnée de Polydora sp? G. 540.

Fig. 7. Soie anormale du sétigère de Polydora sp ? (5° soie à l'ancienneté), vue de profil. G. = 310.

Fig. 8. Soie anormale du sétigère du même (9 soie à l'ancienneté), vue de face. G. 310.

Fig. 9. Soie anormale du sétigère de Polydora quadrilobata JAc. (2° soie à l'ancienneté), vue de profil. G. 540.

Fig. 10. Soie anormale du sétigère du même (5° soie à l'ancienneté),

vue de profil. G. = 540. Fig. 11. Soie encapuchonnée de P. quadrilobata. G. = 540. Fig. 12. Soie du sétigère de Polydora Caulleryi n. sp., vue de 3/4. G=—= 540, Fig. 13. Soie du sétigère de Polydora Caulleryi, vue de face. G. 540. Fig. 14. Soie du sétigère de Polydora Caulleryi, vue de profil. G. = 540.

Fig. 15. Soie encapuchonnée de P. Caulleryi. G. = 540.

Fig. 16. Soie dorsale des derniers sétigères du même. G. = 540.

Fig. 17. Soie encapuchonnée de Spiophanes Bombyx (Czpp.) G. 540. Fig. 18. Soie encapuchonnée de Spiophanes Krôyeri GR., vue de profil : G. 540.

Fig. 19. Soie encapuchonnée du même, vue de 3/4. G. = 540.

Fig. 20. Organe en filière du sétigère de Sp. Bombyx. G. 80. Fig. 21. Organe en filière du 11° sétigère de Sp. Bombyx. G. 80.

Fig. 22. Soie courte ventrale de Levinsenia gracilis (TAUBER). G. 540. | Fig. 23. Soie courte ventrale de Levinsenia fulgens (Lev.) G. 540. : Fig. 24. Soie ventrale en lancette de Disoma multisetosum ŒRsT. G. 540. | Fig. 25. Soie capillaire fine de Disoma multisetosum. G. 540.

» D r È # ;

Fig. 26. Grosse soie ventrale de la région postérieure. G. 540. Fig. 27. Soie aciculaire du sétigère. G. 540.

100 FÉLIX MESNIL.

TABLE DES MATIÈRES.

Pages

I. Comparaison de Spio filicornis (FABRr., Œrst) MmGr. et Spio Mar- tinEnsis: MESNiv so SO dt loi la le ARR ee ne de PU Sels

Île le penre WMicrospio Mestre ete de L ADRER IT. Le genre Pygospio CLPDE .............:.,.......,.4 0. INRA Gérre POM/dOrIBOSCAE LEE EN CSE RER r PR SERRE RUES

S4.: Description désPolydoraisp Pet 0e CR CR S 2. Remarques sur P. quadrilobata Jac.................... S 3: Deseription:de PCeutlergr SD RER CORRE

Vi: Lesenre Prionospio Mar: ! 62e RTL NEC RIRES VI. Le genre Spiophanes GPS A MAP ES De ns OR EP AS 24 VIT. Les Aonides de TAUBER et LEVINSEN (Levinsenia n. g.) ..........

NII: asfamnle des Some RE RE ER IEEE RER RE

CONSTITUTION DU CARPE DES ANOURES, RÉPONSE AU Dr C. EMERY, DE BOLOGNE,

PAR

A. PERRIN, Professeur au Lycée Carnot.

A la suite de mon travail sur le Carpe des Anoures, qui a paru dans le Bulletin scientifique de 1895, M. C. Emery vient de pablier dans ce même recueil quelques observations auxquelles je répondrai brièvement.

Dans mon travail, je disais que M. C. Emery ne donnait pas la preuve de certains faits servant de base à sa théorie. En réponse à cette affirmalion M. Emery m'a écrit : « les preuves que vous n'avez pas trouvées dans ma communication préliminaire de 1890, vous les auriez trouvées dans un mémoire étendu avec figures et photogra- phies paru en 1894 (1) ». J'avoue que lors de mon travail je ne connaissais pas le mémoire qui, sauf erreur de ma part, n’a pas été cité dans l'Analomischer Anzeiger. Sur ce point, je donne toute satisfaction à M. Emery, et au lieu de dire qu'il n’a pas donné de preuves, je dirai que les preuves données ne me paraissent ni décisives, ni suffisantes ; elles ont en outre le tort grave de suivre de plusieurs années une théorie à laquelle elles auraient servir de base.

L'interprétation, que M. Emery donne de la main de l’Anoure, diffère de la mienne sur deux points, les seuls que je vais examiner en tenant compte des dernières publications du savant professeur de Bologne.

(1) Studi sulla morfologia dei membri degli Amfibi e sulla filogenia del chiropterigio (Richerche. laborat. Anat. Roma, vol. IV).

102 A. PERRIN.

Le doigt externe est considéré par EMERY comme un quatrième doigt, tandis que pour moi c'est un quatrième et cinquième doigts réunis.

Les os du carpe appelés par DuGES semi-lunaire et scaphoïde sont, d’après M. Emery : le premier /a réunion de l'intermédiaire, du radial et d'un central, le deuxième le carpien du præpollex. Il y aurait en outre un deuxième central soudé au carpien du troisième doigt. Me basant sur des résultats fournis par la myologie comparée, je considère le semi-lunaire de DuGEs comme un 2nterme- diaire et le scaphoïde comme un adial, ne préjugeant rien de la position du central dont ma méthode ne peut indiquer avec certitude la situation.

Sur le premier point, je ferai remarquer à M. EmErRY que ses observations ne portent que sur le cinquième carpien et non sur le doigt lui-même. De ce qu’il ne l’a pas vu se diviser, il ne résulte pas que cette division n’a pas eu lieu autrefois de façon à donner un quatrième et cinquième doigts homologues de ceux que l’on observe chez certains Batraciens fossiles, ou dans le pied des Batraciens actuels. Si je considère ce rayon comme un quatrième et cinquième doigts réunis, c’est qu’il possède des muscles caractéristiques de ces deux doigts mais particulièrement du cinquième. Ce qui caractérise le doigt ce sont les muscles, organes actifs du mouvement, plutôt que les os simples leviers passifs.

Avant de discuter le deuxième point sur lequel nous sommes en désaccord, je ferai une remarque à M. EmEry. Dans la réponse, qu'il m'adresse au sujet de mon travail, on peut lire : « Le mode de développement du « scaphoïde » montre qu'il est dès l’origine, détaché du radius dont il se rapproche secondairement : cela a été d’ailleurs suffisamment prouvé par Howes et Ripewoop. » Or on lit chez ces auteurs (1) (p. 159) ; « If we admit that the Pelobatoïd fore foot is the more primitive, we are forced to the conclusion that the naviculare belongs to {he proæimal series. > On voit qu'ils sont sur ce point très peu affirmatifs. En outre si on se rapporte aux coupes dessinées dans le dernier mémoire de M. EMERY, on voit (PI. I, fig. 1, b) que l’ébauche du scaphoïde est à peu près sur la même ligne que l’ulnaire et le radial. Quand il est devenu cartila-

(1) On the carpus and tarsus of the anura (Procéd. Zool. Soc. London, 1888).

D Ç 1 Er « #2 » A

LE CARPE DES ANOURES. ‘103

gineux on voit (PI. I, fig. 3, a) que sa partie proximale est au contact du radius au même titre que le cartilage appelé radial par cet auteur.

Le fait n’a pas d’ailleurs une grande importance. Le déplacement du scaphoïde est à la torsion de la main par rapport à l'avant-bras, torsion qui d’après Jorpan (1) a lieu dans les derniers stades qui précèdent l'émergence du membre. Il est donc fort possible que cet os ne se rapproche que secondairement du radius. Mais chez l'adulte il est certain que dans un très grand nombre de cas le scaphoïde s'articule avec l'os de l’avant-bras. C’est ce que BRÜHL a constaté chez la Rana pipiens, GEGENBAUR chez différentes espèces de Bufo, Howes et Rinewoop chez les genres Leptodactylus et Ceratophrys, et moi-même je l’ai observé chez le Bufo pantherinus. Dans d’autres genres le scaphoïde est au contact ou très rapproché du radius, mais ne s'articule pas avec lui, c'est ce que Howes et RIDEWOOD ont dessiné dans les genres Pelobates, Xenophrys, etc., et ce que j'ai observé dans les genres Rana et Discoglossus.

Comment admettre qu'un carpien, c’est-à-dire un os appartenant essentiellement au bord distal du carpe ait subi un tel déplacement ? Comment expliquer la grosseur exagérée de ce carpien destiné à

- supporter un doigt rudimentaire, absolument sans rôle fonctionnel,

alors que les carpiens vont en décroissant rapidement du bord ulnaire au bord radial du carpe, et que le carpien du doigt le plus voisin est presque invisible ? Quelle nécessité physiologique ou quelle raison phylogénétique pourrait-on invoquer pour expliquer, que ce carpien du prœpollex, qui a se former à l'extrême bord radial, ait pu traverser tout le carpe pour venir s’articuler avec le carpien du doigt externe ? Il serait impossible de trouver un fait analogue dans la série animale.

Ainsi sans parler de preuves tirées des insertions musculaires, une théorie, qui considère le scaphoïde comme l’homologue du carpien du prœpollex, me semble en contradiction avec tous les faits connus d’ostéologie comparée.

Cette théorie est également en opposition avec les conclusions que l’on peut tirer, au point de vue phylogénétique, des faits embryolo- giques. Chez les Urodèles, et M. EMERY en convient, le central, l'intermédiaire et l’ulnaire forment d'abord une masse unique, qui se subdivise secondairement. Comment concevoir alors que chez les

(1) Die Entwickelung der vorderen Enträmität der Anuren Batrachier, Leipzig, 1888.

104 A. PERRIN. & Anoures on puisse trouver au début du développement dans la rangée ï proximale un ulnaire, un central et un intermédiaire distincts, qui 33 se fusionneraient secondairement ? II me semble pourtant impossible Fr d'admettre que les Urodèles soient plus éloignés du type ancestral à

que les Anoures. Comment expliquer la présence de deux centraux, dont l’un se souderait avec la rangée proximale, l’autre avec la rangée distale? Que M. EmErYy me permelte de lui rappeler ses propres expressions: « Wir Künnen es als ein festes Resultat betrachten, dass das Centrale eine ursprüngliche centrale Stellung besessen haben muss und ferner, dass wo mehrere Centralia vorhan- den sind, dieselben eine zusammenhängende Gruppe bilden (1) ». Trouve-t-il que chez le Pelobates les deux centraux qu'il décrit forment un groupe ayant beaucoup de cohésion ?

Les auteurs, qui ont étudié cette question (JoORDAN, BoRN, HowWESs et Rinewoop) n’admettent pas cette division préalable du semi- lunaire, qu’ils se soient servi ou non de la méthode des coupes. Ma théorie concorde parfaitement avec l'interprétation de Borx et n’en diffère que par la nomenclature des doigts, car je considère comme 4 un prœpollex ce que Borx (2) désigne comme un premier doigt.

Quant à contrôler par l'observation directe les faits cités par .

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M. Emery, comme ce savant m’y engage, n'étant pas un embryolo- «a giste de carrière, je me refuse à essayer. Les erreurs dues aux se embryologistes d'occasion sont trop nombreuses pour que je m'expose #

à en augmenter la liste. 4

En résumé la division primitive du semi-lunaire et la désignation du scaphoïde comme carpalien du prœpollex, qui en est la consé- P* quence est en contradiclion avec de nombreux faits d'anatomie et | de d’embryologie comparées, elle repose sur des coupes faites sur quelques échantillons appartenant au seul genre Pelobales (le Bufo, le Bombinalor, Y Hyla ne se prètant pas à cette constatation et la Rana assez peu) et ces échantillons, au dire de M. Emery, étaient même en mauvais état (3), si bien qu'il n'a pu les colorer.

Dans ces conditions, je maintiens que la preuve n’est pas faite.

Paris, le 1°' juillet 1896. ri

(1) Zur morphologie des Hand-und Fuszskeletts (Anatom. Anseiger. Jahr V, 1890).

(2) Nachträge zu carpus and tarsus (orph. Jahrb., vol. VI, 1880).

(3) « Avendo a mia disposizione soltando esemplari in alcool, la cui conservazione, dal punto di vista istologico, non era perfetta, ho dovuto rinunziare a studi di minuta istologia e alle collorazioni che richiedono la fissazione in acido cromico ».

RECHERCHES

SUR LES THALICTRUM DE FRANCE,

PAR

PAUL PARMENTIER,

Docteur ès Sciences.

Planches IV et V.

PRÉFACE.

Les difficultés que l'on éprouve, même avecles meilleures Flores, dans la détermination des Thalictrium m'ont décidé à aborder l'étude anatomique de ce genre. J'ai passé successivement en revue tous les organes de la plante depuis la racine jusqu’au fruit inclusi- vement, m’efforçant surtout de dégager des effets de l'adaptation les caractères déterminatifs. Bien souvent ces caractères se sont trouvés masqués et difficiles à saisir. Je les ai surtout rencontrés dans les organes souterrains à évolution rapide et à l'abri, temporairement au moins, de l’action du milien ambiant. Les jeunes racines adven- lives m'en ont fourni plusieurs. J’ai eu à ma disposition de nombreux matériaux d’herbier la même plante se trouvait fréquemment représentée par des spécimens de provenances très diverses. Je les ai tous examinés dans le but de saisir le sens de l’évolution des différents caractères épharmoniques ainsi que leur importance taxinomique.

Certains botanistes ont daigné me mettre en garde contre les déterminations d’herbier qui très souvent sont erronées. D’autres ont essayé, je ne sais dans quel but, de me démontrer l’inanité de

106 PAUL PARMENTIER.

recherches entreprises dans le milieu retiré et obscur je réside. Ces considérations, si sérieuses de prime abord et bien de nature à décourager un travailleur de mauvaise trempe, ne m'ont point arrêté. Je n’accorde qu’une créance médiocre aux étiquettes d'herbier et j'en contrôle toujours les données. Enfin si le centre que j'habite ne m'offre aucune ressource matérielle, j'y remédie, dans la mesure du possible, en m’adressant, chaque fois que cela est nécessaire, aux botanistes éclairés et obligeants.

Un autre botaniste de grande valeur me faisait aussi remarquer, l'an dernier, que les tableaux généalogiques, tels qu'on les dresse, sont plutôt l'œuvre de l'imagination que l'expression exacte des faits. Cette réflexion est aussi celle de nombreux floristes el il est facile d'y répondre.

Pour écrire l’histoire d’un phylum naturel ou d’un groupe plus ou moins complexe de végétaux, il faut savoir interpréter tous les caractères, héréditaires ou non, phylétiques ou épharmoniques, fournis par la plante soumise aux diverses influences de milieux, avoir suivi, pas à pas, l’évolution de ces caractères chez le même individu, savoir reconnaître leur degré de fixité ainsi que leur valeur spécifique. La comparaison seule des donnés organographiques entre elles est insuffisante ; elle ne permet que d'établir des différences caractéristiques entre les divers individus, différences qui, si elles sont trop faibles ou instables, mènent fatalement au ÿordanisme voire même au gandogerisme |

Pourquoi n’aurais-je pas aussi bien le droit d'affirmer que telle plante est une espèce, une race ou une variété en spéculant judicieu- sement sur les caractères externes et internes, que tout autre botaniste qui, négligeant les données anatomiques, n'aurait recours qu'au facies et à l’organisation externe du végétal, c’est-à-dire à des caractères plus instables que ceux fournis par l’histologie ? L'étude est complète et scientifique de mon côté, il faut le reconnaître !

Plusieurs botanistes descripteursetdes plus compétentsontcompris, en y faisant appel, le rôle important et indispensable de l'anatomie dans la détermination et le classement des plantes et des genres critiques ou litigieux, ainsi que dans les réductions spécifiques. Si donc l'anatomie prête un appui siefficace dans les cas difficiles, combien cet appui est-il plus important dans les questions ordinaires ! La méthode naturelle de l’illustre DE JussiEu, admirable dans ses

PSS L-3

re, d Ed Sn

LES THALICTRUM DE FRANCE. 107

grandes bases, pourrait bien recevoir d'ici peu, de sérieuses modifica- tions, grâce encore au concours des caractères internes. Mais pour que ces derniers puissent donner des critériums infaillibles, il importe de les chercher patiemment, et sans parti pris, sur le plus grand nombre possible d'échantillons récoltés dans leurs stations naturelles et aussi dans les Jardins botaniques. Les affirmations de mon regretté et cher Maître, J. VESQUE, tirées de l’étude exclusive d’un lambeau de feuille. ne sont pas toutes à retenir ; quelques-unes sont entachées d'erreur. Cela devait fatalement arriver. étant donnée la hâte avec laquelle ce grand anatomiste tenait à faire pénétrer dans l'esprit des savants les avantages immenses que l’on pourrait tirer de l'anatomie des lissus au profit de la Botanique systématique. Les travaux de cet homme de génie n’en sont pas moins grandioses au triple point de vue évolutif, documentaire et méthodique ! Ils resteront, malgré la critique, avec ceux d’autres contemporains non moins remarquables, comme des guides sûrs et éclairés dans les absorbantes recherches taxinomiques.

Que ne peut-on espérer de l’anatomie en lisant encore les récentes et magnifiques communications de M. O. LiGNiIER (1).

Je ne veux pas entrer dans les détails au sujet de la marche que j'adopte pour écrire l’histoire généalogique d’un groupe naturel de plantes ; il suffit, pour comprendre ma méthode, de parcourir les travaux que j’ai déjà publiés sur cette branche de la science.

Une autre objection, plus sérieuse, est celle qui à trait à la distinction et au classement des hybrides dans ces mêmes tableaux généalogiques. On me permettra de faire remarquer tout d'abord que jamais un hybride ne saurait, anatomiquement parlant, être pris pour une espèce. Il n’a aucun des caractères qualitatifs qui permettent de l’élever à cette dignité et conséquemment retombe toujours au rang des formes secondaires, à évolution limitée, c’est-à-dire des races et variétés. S'il luiarrive cependant de donner naissance à des descendants, ceux-ci sont facilement reconnaissables par leurs affinités étroites ; ils ne peuvent nullement se fourvoir dans des séries étrangères. Mais les hybrides sont-ils bien aussi nombreux qu'on le pense et jouissent-ils vraiment du pouvoir

(1) O. Lier. Explication de la fleur des #umariées d'après son anatomie. Explication de la fleur des Crucifères d’après son anatomie. (In C. À. Acad. des Sciences, 9-16 mars 1896).

108 PAUL PARMENTIER.

d’engendrer desespèces nouvelles? J’en suis peu convaincu. En admet- | tant que ce phénomène s’accomplisse et que l’hybride devienne, par la suite, un nouveau type spécifique ayant une descendance, serait la difficulté de lui assigner son rang sériel dans un arbre , généalogique ? Je ne la vois pas davantage. Il pourrait très bien se | faire que je ne discerne plus son caractère d’hybride et que je le !

prenne pour une vraie et bonne espèce. L'erreur serait peu grave 5 puisque la place de l'individu serait déterminée. Evidemment il y es

aura toujours des hiatus dans les séries dérivées de groupes nodaux, È résultant de la disparition de formes paléontologiques, mais la oraduation de celles qui existent restera quand même naturelle et conforme aux faits de l’évolution.

En présence des formes considérables du genre Thalictrum, des 4 nombreuses affinités qu'elles ont entre elles et de leur instabilité, il y a lieu d'établir une graduation entre les espèces. Je distinguerai donc : l'espèce primordiale, improprement appelée /innéenne, qui est la forme ultime d’un même phylum, celle dont tous les représen- tants ne différent entre eux que par des caractères épharmoniques. Ex. Th. fœtidum L., individualisé complètement par la structure

de ses poils. Ces espèces sont assez isolées de leurs voisines ; elles 4 ont peu de liens communs et les caractères servant à les distinguer sont à l'abri des influences du milieu. Les espèces de second ordre, ; ou espèces 720rphologiques, qui sont assez bien différenciées par les

caractères externes, mais qui ont entre elles de nombreuses affinités « et admettent des formes de passage. Ces espèces ont une structure indécise et un facies général soumis aux phénomènes d'adaptation. 4

Elles sont facilement reconnaissables dans les milieux identiques, mais le sont beaucoup moins lorsque des influences nouvelles agissent sur leurs organes conslitutifs. Ex. Th. flavum L., lube- rosum L., Mmacrocarpum, etc... À ces types spécifiques j'ai rallaché respectivement les formes secondaires en ayant soin de préciser leur degré de parenté.

Ces formes secondaires ont élé groupées en séries et, dans chacune de celle-ci, disposées par degré hélio-xérophile ascendant ; c'est-à- dire que les premiers représentants de chaque série de dérivation, ceux dont les besoins physiologiques sont sensiblement les mêmes que ceux du groupe nodal, ont été placés les premiers.

Il m'a été impossible, avec les seules espèces françaises et malgré les 900 dessins que j'y ai puissés, de fournir des caractères anatomi-

LES THALICTRUM DE FRANCE. 109

ques distinctifs des formes secondaires. L'étude complète et appro- fondie du genre, sur le plus grand nombre possible d'échantillons, surtout frais, est absolument indispensable. J'entreprendrai ce travail aussitôt que j'aurai pu me procurer les matériaux nécessaires.

Mon but exculsif ici a été de circonscrire les types spécifiques de

: France : je crois y être arrivée et je ne pense pas qu'il soit possible

d'en élever le nombre. On me saura gré aussi d’avoir jeté les pre- miers jalons d’un classement des #icromorphes et d'y avoir intro- duit quelques réductions. Enfin je n’ai avancé que des faits exacts et

j'ai rejeté de ce premier mémoire tout ce qui pouvait prêter à la

critique ou induire les floristes en erreur.

J'avoue comprendre difficilement l'utilité de l'innovation apportée par MM. Rouy et Foucaup en ce qui concerne la forme. Pourquoi un sens nouveau à ce terme connu, qu'ils regardent maintenant comme équivalent de race ? Il eût été plus logique de laisser à l'expression forme sa signification collective, universellement admise par les botanistes, qui englobe les variétés et variations, et d’em- ployer indifféremment le mot race pour les plantes sauvages et les plantes cultivées. À mon point de vue, cette innovation ne fait qu'embrouiller les choses.

Je remercie sincèrement M. le Gizzor et M. OZANoN pour l’'empressement qu'ils ont mis à me communiquer leurs nombreux et magnifiques échantillons d’herbier, ainsi que M. CRÉPIN, le savant Directeur du Jardin botanique de l'Etat à Bruxelles, pour les rensei- gnements bibliographiques qu'il a bien voulu m'adresser.

Baume-les-Dames, 4 novembre 1896.

BIBLIOGRAPHIE.

Flore de France, par GRENIER et GoproN (1847-1850) ;

2 Flore de la Chaîne jurassique, par GRENIER, 1865 ;

3% Etude comparée des tiges aériennes et souterraines des Dicotylédones , par J. CostanTin (thèse de Doctorat, 1883) ;

Recherches sur la structure des Renonculacées, par P. MaRÉ (thèse de Doctorat, 1884) ;

110 PAUL PARMENTIER.

5 Monographie du genre Thalictrum, par J.-C. LEecoyYErR (Bull. Soc. roy. bot. Belgique, t. 24, p. 78, 1885) ;

G Le pétiole des Dicotylédones au point de vue de l'anatomie comparée et de la taxinomie, par L. Perir (1n. Bull. Soc. des Sc. phys. et natur. de Bordeaux, t. IIT, cahier, p. 217, 1887) ;

% Herborisation dans le Jura central, par le D' X. Gizor ; p. 24, 1891 ;

8 Observations sur les Renonculacées de la Flore de France, par M. GASTON BonniER (In Rev. génér. de botan, t. 1, 1889) ;

9% Recherches expérimentales sur l'adaptation des plantes au climat alpin, par M. GasToN BoNNIER (Ann. Sc. natur., Te série, p. 320) ;

10° Flore de France, par MM. G. BoNNIER et G. DE LAYENS, 1894 ; 11° Flore de France, par MM. Rouy et Foucaun, t. I, 1893-1894.

II. VALEUR TAXINOMIQUE DES CARACTÈRES ORGANOGRAPHIQUES.

Si l’on examine attentivement les divers représentants du genre ou même plusieurs individus d’un même type développés dans des conditions biologiques différentes, on est aussitôt frappé du peu de stabilité des caractères morphologiques. « Les caractères des Thalictrum, nous dit avec justesse M. G. BonNiER, sont d’une telle variabilité qu'on peut observer de grandes différences dans la germination des graines d’un même individu. J'en citerai l'exemple suivant :

« Des graines prises sur la même inflorescence d’un 7. minus L. ont été semées dans des conditions différentes soit de sol et d'humidité (terres calcaires, sableuses), soit de température (en pleine terre ou dans une serre), soit en des saisons différentes (printemps, été).

» Ces graines, en se développant, ont donné des jeunes plantes dont un certain nombre avaient des caractères notablement différents. Les unes avaient des cotylédons presque hypogés et la gemmule prenant tout son développement dès le début, l’axe hypocotylé restait court; les autres, plus nombreuses, avaient des cotylédons épigés se développant à une certaine distance au-dessus du sol avec un axe hypocotylé allongé. Certaines plantes avaient leurs premières feuilles étroites, comme des feuilles de jeunes T. flavum L. et les paires suivantes avaient des folioles élargies, tandis que la plupart avaient dès le début des feuilles à larges folioles (1) ».

(1) G. BoNNIER : Revue génér. de bot., t. I, p. 340.

PSN PAP REURE

LES THALICTRUM DE FRANCE. M1

Dans la racine « on trouve chez une même plante tous les inter- médiaires entre les rhizomes courts, renflés et les stolons grêles. Aussi ce caractère qu'on donne souvent comme distinctif entre les espèces principales de ce genre n'est-il pas meilleur que les autres (4) >. M. BonNIER cite à ce sujet les T. minus L. et fœtidum L. qui peuvent avoir des stolons ou en être dépourvus. M. VERLOT a aussi trouvé des racines tubéreuses sur certaines formes du 7, minus (2), et M. Doaussans (3) a reconnu le même caractère chez le T!. macrocarpum Gr.

La couleur, les stries et la taille de la tige sont également très variables. « Les feuilles des Thalictrum offrent beaucoup d’instabilité dans leurs formes et ne peuvent généralementfournir que des caractè- res accessoires pour la détermination des espèces européennes (4)».

L'existence des stipules à la base des pétioles serait un bon caractère si parfois on n’avait à en constater l'absence sur les formes d'une même espèce.

« L'altération des folioles, leur couleur, leur texture, l’enroulement de leurs bords, utilisés fréquemment dans la description des formes d’une région restreinte, ne possèdent qu'une valeur très accessoire au point de vue général (4) ».

Les caractères tirés de linflore scence, des diverses parties de la fleur et du sexe de cette dernière ne possèdent pas davantage une plus grande fixité.

On a donc élevé des plantes au rang d'espèces ou de sous-espèces en se basant sur des caractères essentiellement variables et par conséquent sans valeur sérieuse. Cette instabilité des données morphologiques a engendré les innombrables micromorphes que l’on connaît, tout en provoquant une spécification à outrance. Il est vrai que depuis quelque temps certains botanistes ont essayé de réagir contre ce fàächeux état de choses, en opérant des réductions. C’est ainsi que MM. Rouy et Foucaup ont déjà ramené à 11 les 16 espèces décrites dans la Flore de GRENIER et GODRON. Je montrerai plus loin comment cette réduction est insuffisante et la pousserai à ses justes limites en me basant sur la combinaison des caractères morpholo- giques el anatomiques.

(1) G. Bonnier. Loc. cit., t. I, p. 339.

(2) B. VERLOT. Zull. soc. bot. France, t. XXVII, p. 185, 1880.

) (3) E. Doassans. Loc. cit. (4) Lecoyer. Loc. cit.

112 PAUL PARMENTIER,

III. DE LA CONSTANCE DES CARACTÈRES ANATOMIQUES.

|" Poils. Les Thalictrum de la flore de France, ainsi que ceux de même nom récoltés à l'Étranger, portent sur la feuille deux espèces de poils. Ceux de la première sont 1-sériés et caractérisent exclusivement le T7. fæœtidum L. Placés sur un massif basilaire formé par l’épiderme el l’assise sous-jacente (fig. 1), ils sont longs, obtus à l'extrémité ou capités, à parois minces et à contenu jaunâtre peu abondant. Quelques poils 1-sériés, 2-3-cell., très rares, sont dépourvus de massif basilaire (fig. 3) (T. fœtidum L. et une de ses rarliétés).

Ceux rentrant dans la seconde espèce sont {-cell., courts, capités et à parois minces. Ils caractérisent tous les autres représentants du genre ; on les rencontre aussi, mais en minorité, chez le T. fœti- dum (fig. 2).

L'absence ou l'extrême rareté de ces poils est une allure éphar- monique remarquable. Il n’est pas rare de rencontrer une espèce munie de poils dans un milieu donné, alors que cette même espèce en est totalement dépourvue dans un autre. La recherche des poils est parfois difficile, et il est souvent nécessaire d'examiner plusieurs folioles avant d'en découvrir un seul. C’est pourquoi la glabréité d’une plante ne peut être affirmée qu'à la suite de recherches patientes. Il peut se faire qu'une espèce considérée soit glabre alors que ses formes sont poilues. Cette particularité ne tend pas à prouver

qu'une plante glabre ait la faculté de produire des poils; ce qui,

entre parenthèse, serait contraire à toutes les expériences tentées Jusqu'à ce jour; mais elle s'explique très bien par la propriété précitée, à savoir qu'une même espèce récoltée dans des milieux différents peut être glabre ou velue. D'ailleurs il peut se faire qu'aucune feuille ne possède de poils et que le fruit en soit hérissé. Donc les poils constituent un excellent caractère taxinomique.

Stomates. Ces petits appareils ont un développement constant dans le genre qu'ils caractérisent. Ils sont entourés de 4-5 cellules irrégulièrement disposées (type renonculace) (fig. 4). Quelquefois il n’y a que deux cellules annexes parallèles aux cellules stomatiques, rappelant le type rubiacé. Mais c’est l'exception,

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LES THALICTRUM DE FRANCE. 13

et la prédominance du premier mode de développement est toujours constatée. Les stomates manquent sur l’épiderme supérieur des folioles et leur abondance sur l’inférieur est un effet de l’altitude et de l’activité transpiratrice. Leurs dimensions et leur nombre peuvent aussi varier sur le même pied ; ils sont ordinairement plus nombreux sur les folioles larges que sur les folioles étroites (7. Jacquinianum Kocx., etc.....).

Les Thalictrum ne renferment aucun cristal ni aucun appareil sécréteur interne.

4 Épidermes foliaires. Les cellules épidermiques sont ordinairement à contours recticurvilignes, plus rarement subondu- leux ou même onduleux. Il peut se faire que l’épiderme supérieur soit recticurviligne alors que l’inférieur est onduleux ; la réciproque est très rare (T°. riparium Jorp.). Ces cellules sont généralement larges à la face supérieure de la feuille comme chez le T. alpinum L. (fig. 5), quelquefois très larges (T. tuberosum L.) (fig. 6), ou même comparativement petites (fig. 7) (T°. aquilegifolium L.). Celles de l’épiderme inférieur sont plus petites que celles du supérieur, et je n'ai Jamais rencontré d’échantillon le contraire ait lieu. Les dimensions des cellules épidermiques, prises dans les trois directions, ainsi que leurs formes, constituent un caractère assez bon pour la définition d’un grand nombre de formes du genre, mais qui serait insuffisant pour la distinction des espèces.

»’ Mésophylle. On ne saurait, contrairement à ce qui a lieu chez les espèces ligneuses ou arborescentes, placer la qualité du mésophylle (bifacial ou centrique) au rang des bons caractères spé- cifiques. Telle plante peut avoir une partie de ses folioles à méso- phylle bifacial et 12s autres à mésophylle subcentrique ou centrique. Cette constatation ne se réalise pas chez tous les représentants, mais il suffit qu’elle puisse être faite chez quelques-uns seulement, pour ramener, dans le cas actuel, ce caractère au second rang des données épharmoniques.

Le nombre des assises du mésophylle est assez constant chez un même type, mais il n’en est pas de même de leur épaisseur collective. Ainsi j'ai rencontré des échantillons de T. alpinuwm chez lesquels le mésophylle atteignait 116 & d'épaisseur, tandis qu’il retombait à 90u chez d’autres.

114 PAUL PARMENTIER.

Tous les Thalictrum possèdent des palissades, un seul fait excep- tion à cette règle générale, c’est le T. lucidum Coss. et GERM., que je n'ai pu étudier que sur un échantillon. M. Bonnr cite le T. alpinum comme ayant un mésophylle absolument homogène, lacuneuxetsans palissades (1). Frappé de cette remarque en désaccord avec le premier échantillon étudié par moi, j'ai passé successivement en revue les neuf autres de mon herbier. Partout, dans les échan- tillons des Alpes, j'ai reconnu l’existence de palissades parfaitement développées, 4-5 fois plus longues que larges (fig.8). Il n’y en a qu'un, provenant des Hautes-Pyrénées, chez lequel les cellules palissadiques n'étaient guère plus hautes que larges (environ deux fois). Néanmoins je n’hésite pas à considérer ces cellules comme de vraies palissades

(fig. 9).

6 Nervures principales des folioles.— Leur faisceau libéro- ligneux est simple et non immergé. L'existence de fibres mécaniques à ses faces supérieure et inférieure (fig. 10) (T'. alpinum L.) ou sur

l'une d'elles seulement (T. minus L.) ainsi que leur absence complète

(T. aquilegifoliwm), constituent un caractère taxmomique qui n'est pas à négliger. Le degré de développement des fibres mécaniques, ainsi que leur abondance, est en raison directe des dimensions des cellules épidermiques (supérieures surtout) de la feuille.

Pétiolule.— Il nes’agit ici que de celui de la foliole terminale, car il arrive fréquemment que les folioles latérales en sont dépour- vues. La caractéristique pétiolulaire, prise à la base du limbe, n’est pas constante, elle varie avec le polymorphisme foliaire. Néanmoins elle peut supporter la comparaison chez un grand nombre de formes dérivées et certaines espèces. Ainsi, chez le T. flavum L., le pétio- lule porte latéralement une saillie très accentuée, supérieurement deux ou trois autres moins fortes, et inférieurement il se termine en une seule crête très prolongée (fig. 11). Chez les autres espèces, la face supérieure est ordinairement curviligne, plus ou moins sillonnée; les ailes latérales et la pointe inférieure sont inconstantes et plus courtes ; il est des cas cependant la configuration pétiolulaire représente assez bien un cercle ou un ovale. Les faisceaux libéro- ligneux sont toujours distincts ; trois sont absolument constants, plus

(1) G. BoNNIER, Adaptation des plantes au climat alpin (Ann. Sc. natur., série, p. 322).

LES THALICTRUM DE FRANCE. 115

gros et normalement orientés ; ils sont disposés sur une demi-circon- férence en des points correspondant sensiblement aux extrémités de deux diamètres pérpendiculaires, l'un de ceux-ci élant disposé horizontalement (fig. 11). Entre chacun de ces trois faisceaux, il s’en

trouve souvent un plus petit. Enfin la demi-circonférence est fermée

supérieurement par une courbe très aplatie sur laquelle sont éche- lonnées 1-2-3-5 petits faisceaux renversés, c’est-à-dire à liber tourné vers le haut (fig. 12). Chezle 7. flavum L., ces faisceaux supérieurs varient de 3 à 5. Les T. alpinum L. et tuberosum L. (fig. 12), n’en ont qu'un ou point; le Th. aquilegifolium, 3 à 5; le T. fœtidum, 2 ou 3, et le T. macrocarpum GREN., 2 à 4. Comme on le voit, il n’y a rien de plus variable. Au pôle libérien de chacun de ces faisceaux, il existe ordinairement un massif de fibres mécaniques dont chaque extrémité tend à rejoindre celle correspondante du massif voisin, pour ne former qu'une Couronne mécanique continue. Je ne dirai rien du parenchyme cortical qui devient collenchymatoïde dans les saillies pétiolulaires, car il m’a été impossible d’en tirer un caractère de classification. En résumé, les caractéristiques pétiolu- laires présentent trop de variétés et d’inconstance pour qu'il soit possible de les décrire toutes ici, et il n’est possible de les faire entrer comme élément réel de détermination qu'autant que l’on a étudié tous les représentants du genre : c’est ce que j'ai fait pour ceux de France.

8’ Pétiole. Le pétiole général n'est d'aucun secours en systématique. Il définit cependant très bien le genre tout entier à cause de sa constante structure et de légale expression de ses tissus homologues. Seuls ses faisceaux libéro-ligneux, disposés sur une ou plusieurs courbes fermées, plus ou moins concentriques, sont en nombre très variable. On en compte tantôt une vingtaine au minimum, tantôt jusqu'à une quarantaire, à la face externe desquels existe un péricycle scéleux, fréquemment interrompu en regard des rayons de parenchyme interfasciculaire. Enfin la coupe transversale et basilaire affecte ordinairement une forme pentagonale ou heptago- nale à grand axe horizontal (fig. 13 et 14).

Tige. Je ne décrirai pas ici la structure de la tige aérienne des Thalictrum si curieuse par son système fibro-vasculaire, en tous points comparable à celui des Monocotylédones. La dissociation de

«

116 PAUL PARMENTIER.

l'appareil conducteur est évidemment un caractère d’hérédité, tenu en haleine dans le genre, grâce surtout aux aptitudes physiologiques de ses représentants et à l’action continue et prolongée des sols secs et arides. Cette particularité anatomique éveille dans mon esprit une remarque relative au groupement des familles végétales tel qu'il est admis aujourd’hui d'après la méthode naturelle. Ce groupement, je l'avoue sincèrement, ne me satisfait pas dans toutes ses parties, et j'espère que les savants se décideront un Jour à le remanier, en se basant sur la combinaison judicieuse des caractères anatomiques et morphologiques.

Les tiges de tous les représentants du genre offrent une analogie

frappante au point de vue des caractères qualitatifs. Elles ne diffèrent :

guère que par le nombre des cercles formés par les faisceaux libéro- ligneux. Tantôt il n’y en a qu’un (7. alpinum L., tuberosum L.), tantôt deux (T. aquilegifolium L., fœtidum L., Gallicum KR. et F., etc.) ; enfin on en compte 2 ou 3 chez les T. minus L., simplexæ L., flavum L., etc. Ce nombre essentiellement variable, ne saurait fournir un critérium irréfutable ; il est intimement lié au degré de développement de la tige.

L'existence de lacunes libériennes, ainsi que la plus ou moins grande sclérification du parenchyme interfasciculaire, ne sont pas meilleurs en systématique. Quant à la fistule médullaire, elle ne comporte aucune exception, et devient conséquemment un caractère générique.

10° Pédoncule floral. Structure générale constante ; ne présente d'intérêt que par ses caractères épharmoniques.

11° Fruit. Le fruit n’est réellement caractéristique que chez le T. aquilegifoliwm (fig. 15) on le rencontre muni de 2-6 ailes largement développées et chez le T. flavum il paraît, très souvent, assez exactement circulaire vu en coupe transversale. Partout ailleurs il est ordinairement aplati et biconvexe et à surface plus ou moins sillonnée. Ses parois renferment des faisceaux libéro-ligneux en nombre variable, à chacun desquels correspond une saillie externe. Le fruit des T. macrocarpum ei tuberosum,

porte 8 petites saillies ; celui du T. Alavum, 9 ; du T. aquilegifolium, :

3-4-6 ; du 7. minus, 10-11 ; du T. fœtidum, 10; du T. alpinum, 13-14. Il s’agit encore ici d’un caractère instable, auquel je n’atta- cherai guère d'importance.

LES THALICTRUM DE FRANCE. 117

12° Rhizome. Les faisceaux libéro-ligneux de cet organe sont disposés sur un seul cercle. Le parenchyme cortical est, en général, très caduc, excepté l’endoderme qui peut diviser ses cellules et devenir subéreux. Le péricycle peut rester mince ou se sclérifier d'une façon régulière et continue à sa périphérie, mais dans ce cas il existe encore, en dessous et au pôle libérien des faisceaux, des assises de parenchyme à parois minces. Le degré de lignification des faisceaux est assez remarquable chez les espèces diverses, sans offrir toutefois la valeur d’un caractère de premier ordre. Il est faible chez les T’. tuberosum et alpinum ; très avancé chez le 7. fœtidum. Les fibres ligneuses sont disposées en V ouvert extérieurement, entre les branches duquel sont placés les vaisseaux chez le 7. Bauchini CRrTz. ; ou bien la moitié interne du bois seule est complètement sclérifiée (T°. sämplex, angustifolium L., Jordani SCHOLTZ, Minus L., etc.) ; ou encore le parenchyme interfascicu- laire paraît seul s'être sclérifié (7. montanum WaLLr.). Chez le T. aquilegifolium une zone continue de fibres mécaniques, de

teinte jaune, sépare le bois primaire du secondaire. J'ajouterai

qu'à la partie externe de chacun de ces faisceaux existe un îlot mécanique plus ou moins développé et de couleur jaune.

13° Racine adventive. Présente des différences assez caractéristiques chez les diverses espèces. Je ne citerai également ici que les plus saillantes, c’est-à-dire celles que j'ai cru devoir retenir pour la détermination des espèces.

T. tuberosum L. Scléréides nombreux dans le parenchyme cortical. Moelle complètement sclérifiée (jeune racine). Couronne de scléréides à la périphérie du cylindre central (région moyenne du tubercule).

T. fœtidum L. Parenchyme cortical presque entièrement transformé en fibres mécaniques.

3 T, flavum. Parenchyme cortical avec îlots de fibres méca- niques (jeune racine). Parenchyme du cylindre central renfermant aussi de nombreux petits paquets de fibres scléreuses (racine plus âgée) (fig. 16).

4 T. macrocarpum GREN. Racine complètement enveloppée par de nombreuses assises subéreuses ; deux faisceaux ligneux avec

118 PAUL PARMENTIER.

îlot mécanique externe, alternant avec deux faisceaux libériens ; moelle très réduite.

T. alpinum L. Tissus mécaniques nuls dans le cylindre central, moelle nulle ou très réduite (jeune racine).

T. aquilegifolium L. Moelle sclérifiée; 4-5 faisceaux ligneux sans massif mécanique externe (jeune racine).

T. minus L. Moelle sclérifiée ou non. Paquets mécaniques en dehors du bois primaire (jeune racine). Fibres scléreuses dans le parenchyme cortical (racine plus âgée).

J'ai étudié la partie souterraine de ces diverses espèces sur d'assez nombreux échantillons différents, et j’aipu me convaincre de l’im- portance des caractères précités. Néanmoins je ne certifie pas que ces caractères ne seront jamais en défaut; et, pour cette raison, je ne les emploierai jamais seuls dans la détermination des types spécifiques.

IV. CARACTÈRES GÉNÉRIQUES.

A. Morphologiques. Racine principale disparaissant pendant la première année, remplacée par un rhizome sympodique, long ou court, simple, ramifié ou stolonifère, à racines adventives grêles, épaisses ou même subéreuses. Tige aérienne annuelle, petite ou grande, dressée ou plus ou moins coudée, ordinairement fistuleuse, simple ou rameuse et feuillée. Feuilles la plupart engaiînantes, les unes radicales, les autres caulinaires, alternes, très rarement subop- posées, 2-3-4-ternées ou 3-ternatiséquées ou encore 2-3-4-pennatisé- quées ; folioles grandes ou petites, ternées ou entières, 2-3-Iobées ou enfin 2-3-fides, rarement simples. Involucre nul ou représenté par deux bractèes. Fleurs hermaphrodites, souvent nombreuses ; calice ordinairement pétaloïde, composé de 4-7 sépales, très caducs; coroile nulle ; étamines peu ou très nombreuses, toutes fertiles, à filet fili- forme, dressé ou flexueux, claviforme ou à peine dilaté au sommet ; réceptacle non accrescent ; anthères extrorses, mutiques au mucro- nulées, adnées, à déhiscence marginale; style long ou court, surmonté d’un stigmate plus ou moins latéral et décurrent, papilleux, à contour entier ou plus ou moins anguleux ; carpelles plus ou moins

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LES THALICTRUM DE FRANCE. 119

nombreux (3-50), 1-locul. et libres, indéhiscents, monospermes, sessiles ou stipités, surmontés chacun d'un style plus ou moins accrescent, de forme et de disposition variables ; carpelles ovoïdes ou comprimés, à faces plus ou moins sillonnées de nervures simples ou anastomosées. Ovule anatrope ; embryon très petit.

B. Anatomiques. a) Racine. Parenchyme cortical plus ou moins persistant, avec ou sans assise pilifère (T’. tuberosum, fœti- dum) ou plus ou moins exfolié (T. alpinum, minus, etc.), dans ce cas remplacé par un endoderme subéreux puissant (T. macrocai-- pum) ou faible. Scléréides dansle parenchyme cortical{T.tuberosum) ou fibres mécaniques (T. fœtidum, minus, etc.). Péricycle sous- jacent générateur, en dedans seulement, d’un parenchyme secondaire plus ou moins puissant et quelque peu collenchymatoïde. Faisceaux ligneux primaires en nombre variable, alternant avec les faisceaux libériens. Les premiers pourvus à leur face externe d’un îlot méca- nique (T. tuberosum, fœtidum, flavum, etce.), ou sans îlot. Liber secondaire se développant à la face externe du liber primaire, et bois secondaire à la face interne de ce dernier. Parenchyme secondaire renfermant des scléréides (T°. tuberoswm) ou des fibres mécaniques (T. augustifolium, flavum, etc.), ou sans tissu mécanique. Moelle nulle (T. macrocarpum), sclérifiée (T. tuberosum, flavum) non.

b) Rhizome. Epiderme subérifié rarement persistant (T.aquilegi- folium) ; parenchyme cortical plus ou moins exfolié (7. simple) ; endoderme générateur et subéreux (T. mainus, etc.). Péricycle puissant, totalement ou partiellement sclérifié, ou renfermant seulement des îlots mécaniques en regard des faisceaux ligneux ; ceux-ci disposés sur un seul cercle. Fibres ligneuses n’existant que dans la moitié interne du bois (T°. minus, simpleæ, etc.), ou formant des plages irrégulièrement disposées dans toute l'étendue du bois (T. fœtidum),avec rayons interfasciculaires sclérifiés (T.montanum WaLLr., elc.), ou sans fibres mécaniques (7. alpinum). Moelle fistuleuse ou non.

c) Tige. Epiderme constant à cuticule plus ou moins épaisse, peu stomatique ; parenchyme cortical comprenant 2-3-4-5-6 assises de petites cellules plus ou moins ovales dirigées tangentiellement, collenchymatoïdes en regard des cannelures caulinaires. Cellules endodermiques à parois généralement peu épaissies. Péricycle

120 PAUL PARMENTIER.

formant toujours un anneau mécanique très puissant; faisceaux libéro-ligneux distincts disposés sur 1-2-3 cercles plus ou moins concentriques ; ceux du cercle externe, les plus petits, sont adossés à la face interne du péricycle ou même enfoncés dans ce tissu; ceux du second cercle sont rattachés à ce péricycle par des processus sciéreux à éléments généralement plus larges et à parois moins épaisses ; enfin ceux du cercle le plus interne sont ordinairement isolés de cet ensemble et portent seulement à leur pôle libérien un îlot mécanique. Rayons interfasciculaires toujours sclérifiés au moins dans leur moitié externe; moelle plus ou moins résorbée et remplacée par une vaste lacune centrale ou rarement persistante (T. Schultzii Jorp.). Vaisseaux du bois de deux calibres, les plus larges disposés en V ouvert extérieurement, entre les branches duquel il s’en trouve d’autres irrégulièrement répartis ; ces vaisseaux sont spiralés ou réticulés. Liber lacuneux ou non. Parenchyme endoxylaire à éléments petits, à parois ordinairement minces ou rarement sclérifiées, formant un massif aigu adossé à la face interne de chaque gros faisceau ligneux.

d) Feuille. —1° Pétiole. (Coupe faite à la base). Forme pentagonale ou heptagonale, creusé en gouttière à sa face supérieure. Epiderme à petites cellules recouvertes d’une cuticule peu épaisse ; parenchyme cortical comprenant 2-3 assises de petites cellules, collenchyma- toïdes dans les arêtes pétiolaires, terminé intérieurement par un endoderme ordinairement mince. Faisceaux libéro-ligneux distincts, en nombre très variable, enveloppés par un péricyele assez puissant entièrement ou partiellement sclérifiè. Liber lacuneux ou non ; parenchyme central à parois minces, sans sclérification, renfermant fréquemment une ou plusieurs lacunes.

2 Pétiolule (base du limbe de la foliole terminale). Forme variant avec la taille de la foliole. Epidermes à cellules petites, carrées ou ovales, à cuticules d'épaisseur variable ; parenchyme cortical plus ou moins collenchymateux dans les crêtes pétiolulaires, terminé intérieurement par un endoderme mince. Péricycle formé par 2-3 assises de cellules toujours sclérifiées au pôle libérien des faisceaux, rarement dans toute son étendue. Faisceaux libéro- ligneux de deux dimensions ; les plus gros, au nombre de trois, disposés en croissant ouvert en haut; les autres, petits, renversés et répartis sur une courbe qui ferme le croissant supérieurement,

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LES THALICTRUM DE FRANCE. 121

en nombre variant de 1 à 5. Fréquemment chacun des deux intervalles séparant les trois gros faisceaux renferme un petit faisceau. Enfin, ce système fibro-vasculaire circonscrit une moelle à cellules à parois minces et assez rarement lacuneuse.

Limbe. Epidermes à cellules recticurvilignes ou onduleuses, grandes ou petites, à cuticule ordinairement peu épaisse. Epiderme supérieur toujours dépourvu de stomates, à cellules assez rarement saillantes extérieurement; celle des l'inférieur l’étant presque toujours. Stomates entourés de plus de deux cellules irrégulièrement disposées, d’une longueur oscillant entre 25 et 41 uw. Hypoderme nul ; mésophylle ordinairement bifacial, parfois centrique ou subcentrique, revêtant assez souvent ces deux caractères sur le même échantillon. Parenchyme en palissades comprenant, sous l'épiderme supérieur, 1-2 assises, très rarement aucune, à cellules courtes ou allongées, quelquefois divisées chacune en plusieurs parties par des cloisons transversales ; parenchyme spongieux peu ou pas lacuneux. Cristaux et appareils sécréteurs internes nuls.

V. ESPÈCES DU GENRE.

La détermination des. types spécifiques basée exclusivement sur la morphologie est une erreur aussi grave que celle résultant des données tirées de l'anatomie. La combinaison des deux ordres de caractères constitue la seule et vraie méthode de la Botanique systé- matique ; car dans le cas l’une de ces deux branches de la science est insuffisante, l’autre lui offre toujours un concours satisfaisant. Enfin une espèce sur laquelle sont accumulés une dizaine de carac- tères distinctifs se reconnaît toujours aisément, lorsque ces caractères intéressent son organisation externe et interne, et ce, malgré la disparition, sous des causes multiples, de près de la moitié de ces données.

Je ferai remarquer que la valeur quantitative d'un caractère anatomique donné ne doit pas toujours tirer sa raison d’être de l'adaptation exclusive de la plante, mais qu’il y a encore lieu de tenir grand compte de la {endance héréditaire (allure épharmonique) et aussi de l’optimum de différenciation du caractère considéré.

122 PAUL PARMENTIER.

M. Bonnier.fdans ses remarquables recherches expérimentales sur l'adaptation des plantes au climat alpin, a très bien fait ressortir ces deux points biologiques.

L'étude attentive des caractères externes et internes des représen- tants du genre Thalictrum, ainsi que leur mode de végétation, m'a permis de reconnaître que le nombre des espèces françaises admises aujourd’hui est exagéré.

Il n'existe que deux espèces nodales caractérisées surtout par la structure des poils foliaires. La première possède, entre autres, de longs poils 1-sériés et implantés dans un massif basilaire. Le T. fœtidum L. représente sewl en France cette espèce. Dans la seconde, ces poils sont remplacés par d’autres beaucoup plus petits, capités et 1-cell., parmi lesquels on en remarque, très rarement, d’autres 1-sériés, 2-cell., mais toujours sans massif basilaire (carac- tère d’affinité). Ce caractère, tiré de l’organisation des poils, paraît très faible à priori; cela ne l'empêche pas d’être de premier ordre. Il faut avoir examiné, comme je l’ai fait, des centaines d'échantillons pour en être convaincu.

Dans le second type linnéen, représenté par l'espèce collective T. minus L., je fais entrer toutes les espèces morphologiques suivantes : 7°. macrocarpum Gr., T'. aquilegifolium L., T. alpinum L., T. flavum L. et T. tuberosum L. Ce qui, en somme, donne sept espèces pas davantage. Les 7, (allicum KR. et Fouc., stmplex L., Bauhini Crrz., exallatum Ganp., ne sont que des races ou des variétés plus ou moins stables du 7. minus L. On peut à la rigueur, considérer le 7. simplex L. comme une sous-espèce du T. minus L., étant donnés les caractères distinctifs assez stables de cette plante ; c'est ce que j'ai fait dans ce travail.

Le T. fœtidum possède en outre les petits poils caractéristiques du second type linnéen, et si à ce caractère J'ajoute les nombreux autres communs fournis par l'anatomie, j'en déduirai logiquement la commune origine des deux espèces primordiales, ainsi que leur étroite parenté.

Je prie le lecteur de se reporter à la fin de ce mémoire pour prendre connaissance de la description morpho-histologique des sept espèces précitées.

LES THALICTRUM DE FRANCE. 123

VI. HISTOIRE DES ESPÈCES ET FORMES DÉRIVÉES DÉDUITE DE LA COMBINAISON DES CARACTÈRES MORPHOLOGIQUES

ET ANATOMIQUES.

Je considère le 7. menus L. comme étant la première espèce morphologique dérivée de la seconde espèce linnéenne. Il constitue, par son polymorphisme général, un groupe nodal secondaire d’où dérivent tous les autres types spécifiques et leurs formes respectives. Mon appréciation peut paraître extraordinaire au premier coup d'œil, mais si l’on examine bien toutes les données, tant externes qu'’in- ternes, du 7. minus, on est frappé de leur plasticité et des nombreux caractères communs qui permettent de rapprocher cette plante de ses congénères. Sa racine peut avoir des stolons ou en être dépourvue, elle peut parfois devenir tubéreuse ; sa tige, d’une taille oscillant entre 4 et 12 décimètres, peut être simple ou rameuse, lisse ou sillonnée, glabre ou velue, feuillée partiellement ou totalement. Les feuilles sont de grandeur très variable, rapprochées ou distantes, apprimées ou étalées. Ses folioles, de dimensions très instables, peuvent être pétiolulées ou sessiles, glabres ou velueset ses akènes, sessiles ou stipités, dressés ou penchés et à nervures parfois très saillantes. Sa cuticule épidermique mince, ses stomates de dimensions moyennes, son mésophylle (dans l'espèce type) franchement bifacial et d'épaisseur variable ; les quelques fibres mécaniques qui existent à la face supérieure du faisceau libéro-ligneux des nervures princi-

pales; sa tige peu fistuleuse, ses caractéristiques pétiolulaires,

indiquent suffisamment que cette plante est tenue sans cesse en haleine par le milieu dans lequel on la rencontre, en un mot qu’elle cède très facilement aux conditions moyennes de végétation. Son étendue géographique est immense, aucun autre Pigamon n’en possède une pareille. On rencontre, en effet, le T. minus en Europe,

124 PAUL PARMENTIER.

en Asie, en Afrique et en Amérique. « Cette espèce, dit M. LECOYER, est aussi polymorphe dans ses diverses parties, que son aire de dispersion est étendue ». C’est bien, je le répète, sur le T. minus que viennent s’amorcer les autres espèces dérivées, car elles rencontrent en lui des éléments caractéristiques qui peuvent évoluer dans toutes les directions. Les unes se spécialisent par leur organe souterrain, d’autres par leur tige et leurs feuilles ; d’autres enfin par leur fruit. Mon point de départ me paraît donc logiquement établi, et il n’est pas possible de substituer au T. minus, qui a été désigné sous plus de cent noms différents, l’une quelconque des autres espèces.

Du T. minus dérivent séparément les cinq autres espèces morpho- logiques, dont l’individualité, je le répète, est rendue évidente par la majorité des caractères externes. L’anatomie se prête moins à ce morcellement, car les caractères internes ont été acquis antérieure- ment aux caractères morphologiques. Ils existaient, pour la plupart, qualitativement chez les représentants du groupe nodal et dès lors n'ont plus subi que des modifications quantitatives qui sont toujours insuffisantes pour définir l'espèce. L'évolution des formes du genre Thalictrum a donc jeté peu de trouble dans la structure intime de la plante ; elle s’est localisée principalement sur son facies ou sur le développement externe de ses divers organes.

Le T. flavum L. me paraît être sorti le premier du groupe minus dont il est très rapproché et dont il a gardé le polymorphisme. Sa tige varie entre 6 et 15 décimètres ; ses grandes feuilles peuvent être aussi larges que longues ou plus longues que larges ; il arrive aussi qu'elles sont souvent étroites vers la panicule, enfin ses fleurs sont petites, jaunâtres au lieu d’être vert-rougeàtre comme celles du T'. minus, el ses akènes dressés, d’un contour souvent circulaire (coupe transversale), sont un peu plus petits que ceux de la plante nodale. Le 7. flavuin est caractérisé par sa souche forte, épaisse, ses folioles, la couleur de ses fleurs, la caractéristique pétiolulaire à ailes latérales très évidentes, ses akènes ovoïdes et par l'existence de nombreux îlots de fibres mécaniques dans le parenchyme cortical du cylindre central des racines adventives. Au point de vue anato- mique, cette plante se rapproche du T. ninus par les dimensions de ses stomates et des cellules épidermiques foliaires, par l'existence de rares fibres mécaniques à la face supérieure des faisceaux libéro-

LES THALICTRUM DE FRANCE. 125

ligneux des nervures principales, enfin par le nombre des cercles de faisceaux fibro-vasculaires de la tige.

Une nouvelle série est ouverte par le T. alpinum L., petite plante de 5-15 centim., microphylle, à tige simple et rarement ramifiée. Ce Pigamon, un-des mieux caractérisés morphologique- ment, se distingue du T. minus par l’exiguité constante de sa tige qui ne renferme qu'un seul cercle de faisceaux libéro-ligneux, l'existence d’un paquet mécanique en dessus et en dessous du faisceau des nervures principales, sa caractéristique pétiolulaire, ses akènes renversés, enfin l’absence complète de tissu mécanique dans la racine. L'existence de cette plante alpine dans les lieux humides et fangeux implique des besoins physiologiques qui sont nettement exprimés par l’anatomie, et sa xérophilie, qui devrait être faible, est cependant plus accentuée que celle du T. snènus ; ceci s'explique par la résistance que cette plante doit opposer à la transpiration pendant les périodes de sécheresse.

La troisième série de dérivation est inaugurée par:le T. macro- Carpum ainsi appelé à cause de la grosseur de ses fruits qui peuvent atteindre jusqu’à un centimètre de longueur. Moins héliophile que le T. minus, on le rencontre dans les fentes des rochers calcaires du versant septentrional des Pyrénées. Quoique bien caractérisé spécifiquement, il offre de nombreuses affinités anatomiques avec le T. minus, soit par son mésophylle, son pétiolule ou sa tige, et s’en distingue aussi par ses cellules onduleuses épidermiques, le manque de fibres mécaniques dans les nervures, les rombreuses assises subéreuses périphériques et l’absence de moelle dans ses racines adventives. Cette plante possède bien un épais rhizome avec racines latérales, comme l'a reconnu M. BoNNIER (1) et non une racine pivotante rameuse, comme le croyait M. Doassans (2).

La quatrième série issue du groupe #7ninus est représentée en France par le T. tuberosum L., caractérisé surtout par ses racines tubéreuses. On le rencontre dans les lieux stériles et pierreux de nos départements pyrénéens. Il est peu héliophile ; le parenchyme cortical de sa jeune racine est riche en scléréides, ainsi que le cylindre central du tubercule. Les cellules épidermiques des folioles

(1) G. BONNIER. Revue génér. de botanique, t. I, 1, p. 339. (2) Doassans. Etude sur le Thalictrum macrocarpum, thèse, 1881.

126 PAUL PARMENTIER.

sont très larges et les stomates, de dimensions variables, peuvent atteindre jusqu'à 41 y de longueur. La tige ne possède qu'un seul cercle de faisceaux libéro-ligneux. La seule propriété que possèdent certaines formes du 7. minus, de donner des racines tubériformes, suffit à établir entre ce dernier et le tuberosuin le lien de parenté et de descendance mis à profit par moi. On peut, sans être taxé d'exagération, considérer le T. tuberosum comme résultant d'une ancienne forme tubéreuse du T. minus, forme qui, placée dans des conditions biologiques constantes, s’est fixée par le temps et a transmis à ses descendants des caractères devenus désormais héréditaires.

Enfin le T,aquilegifolium constitue la dernière série de dérivation. M. LeCOYER dit que cette plante est très polymorphe et que ses diverses formes peuvent constituer trois variétés principales, SaVOIr :

Var. a. À filets rougeâtres avec des folioles variables ; Var. b. A filets blancs

Var. c. A filets blancs, folioles petites et style allongé réfléchi (1).

Cette division est plus conventionnelle qu’effective, car l'on peut rencontrer des spécimens qui possèdent des caractères communs à deux de ces variétés, ce qui alors constituerait une quatrième variété : nous n’en finirions plus avec une telle pulvérisation !

Cette plante, mise en parallèle avec l'espèce minus, laisse voir de nombreux points communs qui, accentués par la plasticité des deux types, permettent de les rapprocher et de considérer l’un comme étant dérivé de l’autre. Néanmoins le 7. aguilegifolium possède un facies si caractéristique, que sa détermination spécifique est relative- ment facile à opérer. Les grandes fleurs blanches ou rougeàtres, ses akènes réfractés à 2-6 nervures ailées, ses folioles ordinairement grandes, la couronne scléreuse qui, dans le rhizome, sépare les faisceaux ligneux secondaires des primaires, ainsi que l'absence de fibres mécaniques dans les nervures, le distinguent deses congénères. Son hélio-xérophilie est plus faible que celle du T. minus.

(1) Lecoyer. Loc. cit., p. 151.

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LES THALICTRUM DE FRANCE. 127

Les caractères communs à ces diverses espèces peuvent être résumées dans le tableau suivant :

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Les nombreuses formes secondaires du genre Thalictrum se rattachent respectivement aux espèces 7. minus et flavum, ainsi qu'à la sous-espèce T!. simplex. Il en est qui relient intimément entre elles les espèces 2ninus et Jlavum ou simplex et flavum ou encore minus et simplex. Je serais presque porté à considérer ces formes mixtes comme de véritables hybrides; mais, malgré cette hypothèse, leur genéalogie se reconnait sans aucune difficulté.

1°" Série du 7. minus L. La première série du 7’. minus com- prend des races et des variétés à caractères externes très instables, mais affectionnant toutes la lumière et pouvant aussi supporter des milleux secs et arides. Leurs caractères anatomiques respectifs sont exprimés partout avec la même intensité ; elles ne différent guère que par l'inégale épaisseur des épidermes foliaires, la nature du mésophylle, la caractéristique péticlulaire de la foliole terminale plus ou moins circulaire ; l'abondance plus ou moins grande du revête- ment pileux et les dimensions des cellules de l’épiderme supérieur.

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128 PAUL, PARMENTIER.

La première variété est représentée par le T. depauperatum Dumorr. Je l'ai étudié sur des échantillons provenant de Petit-Lanaye (Belgique) il est rare. Il est très rapproché de l'espèce nodale, est aussi héliophile mais moins xérophile. Il ne faut pas le confondre avec les T. depauperatum Timer (inédit) et T, depauperatwm Ary. Touv. qui sont des variétés appartenant à une autre série se rappro- chant beaucoup des formes dérivées du T. flavum.

Un échantillon provenant de l’herbier de M. Ozanox et étiqueté «T. minus L. (Kocu) ; Auf Hügeln des Tertiärkalks bei Ingelheim» , n'est qu’une simple variation xérophile du T°. minus L. Je ne fais pas de différence entre celle plante et le T. Schullzü Jorn.

Le T. inajus JacQ. est une plante très plastique qui peut varier dans de larges proportions. J’ai sous les yeux des échantillons, provenant de Saône-et-Loire et de la Côte-d'Or, qui diffèrent énor- mément par leur mésophylle ; chez quelques-uns ce tissu est bifacial, chez les autres il est subcentrique et même centrique, c’est-à-dire complètement transformé en palissades. Malgré cela, le rapproche- ment de ces échantillons peut se faire à l’aide des épidermes, de la caractéristique pétiolulaire et de l'absence ou de la rareté des poils. Ce Pigamon ne saurait être une sous-espèce du T. minus ; il n’en est qu’une suuple race, variant encore avec le milieu. :

Je rapproche de cette race, à titre de variété, le T. majus G. et G. dont il ne diffère que par son épiderme supérieur subonduleux, à cellules plus larges et par ses palissades moins longues. Au point de vue morphologique le rapprochement a été fait par MM. Roux et Foucaup.

Vient ensuite le T. Savatieri Fouc., qui est une variété très xérophile du T°. minus, se rapprochant aussi par divers caractères anatomiques du 7’. majus JACQ.

Le T'. Jacquinianum Kocx est une plante très polymorphe qui peut avoir des affinités avec certaines espèces de la série suivante. Je la considère aussi comme une variété du T. minus.

Le T. montanum WALLR., également polymorphe, se rapproche beaucoup de l'espèce minus avec laquelle elle ‘se confond parfois ; à mes yeux elle n’en est qu’une simple variation.

Le T. porphyritæ P. Sonurrz peut se placer, en la même qualité, à côté du 7. montanum.

LES THALICTRUM DE FRANCE. 129

Quant au T. saxatile Scur.. (RcHB.), ce serait une nouvelle variété de l'espèce minus et non, comme le disent MM. Rouy et Foucaup, une forme (race) du 7. montanum WALLR.

Le T. sylvaticum Kocu., que j'ai étudié sur des échantillons provenant de la forêt de Fontainebleau et de la Bavière, est remar- quable par l’inégale épaisseur de ses épidermes foliaires et les grandes dimensions des cellules de l’épiderme supérieur ; c’est une race du 7. minus L.

Quant au T. pratense F. ScHuLrz, J'en fais une variété du T. sylvaticum, variété plus hélio-xérophile.

Le T. Delarbrei LAMOTTE se confond anatomiquement avec le T. pratense.

J'ai rencontré dans l'herbier de M. OzanoN un échantillon étiqueté : «T°. collinum? Gèdre (Hautes-Pyrénées})»>, qui n’est autre chose qu'une variété du 7. minus L.; elle se distingue anatomiquement par les grandes dimensions de ses stomates et les cellules des épidermes foliaires ; ses autres caractères appartiennent aussi au T. sylvaticum Kocx.

Enfin cette série se clôt par trois plantes également très hélio- philes et pourvues de poils, les T. collinum WaLLr., Laggeri Jo». et saxatile DC., qui ne représentent qu'une seule et même variété nouvelle du T. minus. Leur caractéristique pétiolaire (base de la feuille) est identiquement la même, ses faisceaux libéro-ligneux, au nombre de 26-33, sont disposés sur 1-2 lignes fermées, irrégulières ; leur mésophylle est centrique ou subcentrique, mais les cellules de l’épiderme supérieur du 7. collinum sont subonduleuses, tandis qu'elles sont franchement recticurvilignes chez les deux autres plantes.

Le T. saxatile DC. peut être considéré comme une variété du T. minus, sinon un hybride des T. minus et flavum. 11 ne diffère du 7. saxatile Scur. (Rcus.) que par des caractères très instables et une hélio-xérophilie un peu plus accentuée.

J'ai dit précédemment que l’on pouvait sans inconvénient consi- dérer le T. simplex L. comme une sous-espèce du 7. minus. Cette plante présente la plupart des caractères du #énus et n’en diffère guère que par ses folioles et sa panicule étroites. Au point de vue anatomique, les rapprochements sont encore plus nombreux. Formes et dimensions des stomates, épaisseur du mésophylle, caractéristique

9

130 PAUL PARMENTIER.

pétiolulaire, existence de fibres mécaniques à la face supérieure des faisceaux libéro-ligneux des nervures principales, dimensions des cellules épidermiques ; plan ligneux et parenchyme cortical de la tige, structure du pédoncule floral, sont autant de caractères communs. On confondrait facilement ces deux Pigamon si la caractéristique pétiolulaire et l'état des cellules épidermiques ne rapprochaient fréquemment aussi le T. simplex du T. flavum.

Le T. simplex a donné naissance aussi à des variétés assez nombreuses dont l’'énumération aurait été mieux placée à la suite de celles du T. minus, si pour des raisons spéciales tirées de l'hypothèse des phénomènes d’hybridation précités, je n'avais tenu à les intercaler ici. M. LECOYER nous fait aussi remarquer que « la polymorphie du 7. simplex et les nombreux caractères qui le rattachent par certaines formes, d’une part au 7. mènus et d'autre part au T. flavum,font de ce Thalictrum une espèce très secondaire dont la distinction exacte est parfois difficile » (1). R

Formes pu 7. Simplex. L. Le T. alpicolum Jorv., que je possède des Hautes-Alpes, se confond morphologiquement et anato- miquement avec le T’. simpleæ : ce sont les mêmes plantes.

Le T. Bauhini CrTz. est une variété du simplex ; il en possède tous les caractères anatomiques et n’en diffère guère que par l’inégale épaisseur des épidermes foliaires et une xérophilie un peu plus forte.

Très près de ce dernier se trouve le T. angustifolium L. que je possède du Doubs et du Jura. Cette plante est assez variable dans ses caractères ; il n’est pas possible de la considérer autrement que comme une variété du T’. simplex.

Le T. angustifolium, 6 laserpitioides ne se distingue pas de la plante type.

Quant au T. angustifolium, var. angustissimum CRTZ., qui me vient de la Hongrie centrale, il porte sur l’épiderme inférieur et le pétiolule de ses folioles, ainsi que sur la tige, de longs poils, assez nombreux, arrondis ou capités au sommet, simples, 1-cell. ou 1-sériés et 2-cell. qui rappellent parfois les poils 1-sériés du T. fœtidum moins leur massif basilaire. Cette particularité remarquable me

(1) Lecoyer. Loc. cit., p. 316.

1

PEU TION

i d

LES THALICTRUM DE FRANCE. 131

permet de considérer la variété angustissimum comme étant ou un hybride (sémplex et fœtidum) ou une forme affine de la série sëmplexæ avec le groupe fætidum. D'ailleurs ces poils se rencontrent chez quelques variétés du T. fœtiduin. Quant aux autres caractères de la forme angustissimum, ils rappellent en majorité ceux de la sous- espèce simpleæ ; le mésophylle a néanmoins ses palissades plus serrées et plus courtes, et son parenchyme spongieux sans lacunes.

Le T. NestleriF. SciTz. peut être considéré comme un 7”. angus- tifoliwm très xérophile ; il a aussi des affinités avec la série suivante du T. minus ainsi qu'avec la série flavum.

La dernière variété du T. simplexæ m'est fournie par le 7. galioides NESTL. que j'ai étudié sur des échantillons récoltés dans le Jura et dans la Hongrie centrale. Cette plante exprime partout les mêmes affections hélio-xérophiles très accentuées ; son mésophylle atteint l'énorme épaisseur de 126-140 w, il est complètement formé de cellules palissadiques, ses cellules épidermiques sont épaisses et recouvertes d’une épaisse cuticule. Il s’agit ici d’une race du 7. simpleæ, race qui accuse, sur certains échantillons, des rappro- chements avec la série flavum.

Série du T. minus L.— Je place le 7. Lucidum Coss. et GERM. dans une série spéciale à cause du caractère de son mésophylle qui est absolument dépourvu de palissades et de la faible épaisseur des cellules épidermiques, et je considère cette plante comme une variété héliophobe du 7’. minus. Je n’en ai eu qu’un seul échantillon à ma disposition et il paraît, d’après la plupart des floristes, qu'elle est assez complexe et polymorphe.

série du 7}. minus L. La série suivante du T. minus est caractérisée surtout par le pétiolule de la foliole terminale qui rappelle assez exactement celui du 7°. flavum et de ses formes déri- vées. Avant d'aborder l'examen des races et variétés de cette troisième série du 7°. minus, je ferai remarquer qu’elles appartien- nent presque toutes à la variété elatum créée par M. Lecoyer. Cette heureuse coïncidence me démontre que les caractères anatomiques ont ici encore leur éloquence et une valeur taxinomique au moins égale à celle des caractères externes. Dans le cas actuel seulement, la caractéristique pétiolulaire devient de premier ordre dans la série des caractères retenus. Il suffit, pour s’en convaincre, de passer en

132 PAUL PARMENTIER.

revue toutes les formes du 7’. flavum, l’on reconnaît la constance avec laquelle le pétiole conserve partout sa configuration particu- lière. Sice n'étaient les caractères morphologiques et organographi- ques qui ne laissent aucun doute sur les affinités des représentants de cette série avec le groupe nodal minus, on pourrait volontiers rattacher ces derniers au T. flawum ; c'est aussi ce qui me fait supposer qu'il peut s'agir très bien d’une série d'hybrides (minus et flavum et flavun et minus). Des expériences culturales pourraient seules justifier cette hypothèse.

Il est difficile d’attacher un nom spécial à chacune des variétés du T. minus, d'abord parce qu’elles diffèrent très peu les unes des autres, ensuite parce qu'elles sont très instables dans leurs caractères distinctifs et qu’elles restent entièrement sous la dépendance du milieu. Les variétés de la série suivante sont, je l'ai dit, toutes caractérisées par la coupe transversale pratiquée à la base du limbe de la foliole terminale. Là, le pétiolule est muni de deux ailes latérales très évidentes, ainsi que d’une crête inférieure parfois très prolongée (fig. 11).

En tête de la série je place les 7. paradomum Jorp., aurigeranum Bai. et TimB., depauperatum Timer. (inédit), depauperatum ARvVET-Touv., nutans DEsr. Ces cinq plantes constituent une seule et même variété du T. mainus. Leur épiderme supérieur est recticur- viligne, sensiblement de même épaisseur que l'inférieur dont les cellules sont, pour la plupart, très saillantes. Ces cinq Pigamons expriment les mêmes besoins de milieu ; ils sont également hélio- xérophiles.

Immédiatement à côté se placent, à titre de variétés plus xéro- philes, les T. Jordani Scarrz et nigricans JAcQ. Ces deux plantes ne différent des précédentes que par leur épiderme supérieur deux fois plus épais que l’inférieur ; toutes deux portent des poils en massue, mais ceux du 7. nigricans ont une longueur double de ceux du 7. Jordani et sont beaucoup plus abondants.

Viennent ensuite, dans la même série, quatre autres Pigamons, les T. Kochii FRIES, calcareum Jorv., brevepubens Jorp. et præcoæ JORD., qui, à mon sens, constituent collectivement la même variété. Ils sont caractérisés par leurs larges cellules de l’épiderme supérieur, recticurvilignes, égalant en épaisseur celles de l’épiderme inférieur et leur mésophylle centrique ou subcentrique. Ce sont des plantes

LES THALICTRUM DE FRANCE. 133

très hélio-xérophiles, adaptées à des milieux identiques ou très peu différents ; on pourrait considérer le 7. brevepubens Jorp. comme une variation pileuse du T’. calcareum Jo».

La série se termine par les T. expansum Jorb., odoratum G. et G. et saxatile Cnaix, très peu différents des précédents et très rapprochés entre eux. Leur mésophylle est aussi entièrement représenté par des cellules en palissades, mais les cellules de l’épiderme supérieur sont moitié moins grandes que dans les quatre Pigamons précédents. Ces trois plantes représentent la même variété pulosissima du T. minus et le T. saxatile CHarx se confond anatomiquement avec le T’. odoratum G. et G.

Le T. flavum possède aussi de nombreuses variétés toutes faciles à distinguer anatomiquement, grâce toujours à leur caracté- ristique pétiolulaire (fig. 11). Il suffit, je le répète encore, pour se convaincre de l'importance de ce caractère, de l’observer sur le plus grand nombre possible d'échantillons parfaitement déterminés. Partout il se retrouve avec une égale expression, et si l'on rapproche ensuite de l’espèce flavum toutes les formes représentant le même caractère, que l’on examine les caractères morphologiques respec- tifs de ces formes, l’on est frappé de la façon naturelle dont s’est effectué le groupement. 11 y a mieux, l'anatomie permet ici d’élucider quelques cas litigieux, en ce qui concerne notamment les T. medi- terraneuin Jorp., gallicum KR. et Fouc., néitidulum Jorp., spurium Timer., Costæ Tims.-Lacr. et une forme provenant de l'herbier du GILLOT (1).

ForMEs pu T°. flavuin L. La série des variétés du flavum est absolument simple et presque rectiligne. Tous ses représentants possèdent les mêmes caractères anatomiques qualifitatifs qui ne différent entre eux que par la quantité, résultant d'une affection de plus en plus grande pour la sécheresse et la lumière.

La variété la plus rapprochée de l'espèce est fournie par les T. medium (?) var. oblongum, princeps Dumorr. et medilerraneum Jorp. Leurs épidermes foliaires sont recticurvilignes, le supérieur est plus épais que l’inférieur, le mésophylle comprend 1-2 assises de palissades qui en remplissent la moitié de l'épaisseur.Le parenchyme

(1) Etiquetée : « 7, medium (?) var. oblongum ; La Tête-d'Or (Lyon).

134 PAUL PARMENTIER.

cortical de la tige est composé de cellules de mêmes dimensions, disposées sur un même nombre d'assises. Les poils épidermiques sont très rares ou nuls.

Le T. riparium Jorp. se place à côté et très près; il ne se distingue de la variété précédente que par ses cellules onduleuses et moins épaisses de l’épiderme supérieur, ainsi que par son absence de poils sur la feuille.

Vient ensuite le 7. Costæ TimB.-LaGR., variété très héliophile du 7. flavum; son mésophylle porte des palissades sur les deux faces et la caractéristique du pétiole général est munie, sur les bords de la gouttière supérieure, de deux arêtes plus ou moins membraneuses (fig. 14).

La série des variétés se termine par les 7. Gallicum Roux et Fouc., nitidulum Jon». et spuriwm TIMER., plantes assez complexes qui ont aussi quelques affinités avec les variétés extrèmes du T. simpleæ et qui s’hybrident sans doute avec ces dernières. Ces trois Pigamons constituent une même variété affectionnant les lieux arides et ensoleillés ; ils ont les épidermes foliaires également épaissis et puissants ; leur mésophylle peut être bifacial ou subcen- trique ; le faisceau de la nervure médiane est ordinairement surmonté de fibres mécaniques; enfin la tige offre les mêmes caractères anatomiques.

ForRMEs pu 7. fœtidum L. J'ai rencontré, dans l’herbier de

M. le D' Gizor, un échantillon étiqueté d’abord T. fœtidum, puis T.montanum et récolté en allant de Colmars à la cascade de Lans (Basses-Alpes).

L'étude de cette plante m’a permis de reconnaître qu’elle n’a aucun rapport avec le T. montanum, mais qu’elle est bien une variété du T. fœtidum. Ses poils longs, capités ou arrondis, sont fréquemment 1-sériés (2-cell.) et rappellent certains poils de l'espèce fœtidum ; ses deux épidermes foliaires sont onduleux et à grandes cellules, ses stomates peuvent être très longs (39 y au lieu de 25-26 4 comme chez l'espèce /œtidum) et son mésophylle comprend, à sa face supérieure, 2-3 assises de parenchyme dense, à cellules à peine deux fois plus longues que larges. Il s’agit évidemment d’une plante moins hélio- phile que l'espèce fœtidum. Les poils pourvus d’un massif basilaire y font défaut. Quant à ses caractères externes, ils sont plus conformes à la diagnose du fœtidum qu’à celle du montanum.

LES THALICTRUM DE FRANCE. 135

Enfin cette même espèce fœtidum peut encore avoir une variété glabrum G. et G. que j'ai rencontrée dans l’herbier de M. OzanoN. Les poils y font absolument défaut, mais les cellules des deux épi- dermes foliaires, surtout celles du supérieur, sontsisaillantes qu’elles deviennent comparables à des papilles piliformes. Cette variété es une preuve nouvelle en faveur de la commune origine des T’.fœtidum et minus, et, à mon avis, la plus ancienne des deux est la première. La réduction, si fréquente dans les phylums naturels, des poils 1-sériés qui peuvent devenir 1-cell., tout en perdant leur massif basi- laire, comme dans le cas présent, ou même être remplacés par des papilles piliformes, constituent des preuves sérieuses à l’appui de ma manière de voir.

L’anatomie joue un rôle important en classification, il n’en faut plus douter ; certaines de ses données y sont même prépondérantes, telles par exemple, que celles tirées de la structure des poils si remarquable dans les espèces du genre Thalictrum, et des formes cristallines, du plan ligneux des formations secondaires de la tige, etc., etc. Aussi je suis loin de partager l'opinion de MM. W.-J. KooKkER, Hooker f. et THOMSON qui considèrent le T. fœtidum L. comme une variété du 7. minus L.

J'ai démontré, avec preuves nombreuses, que les T. fœtidum et minus (espèce collective et très polymorphe) sont deux espèces nodales, ayant une origine commune et des affinités réciproques, et aussi que le T°. fœtidum a existé antérieurement à son congénère.

VII. DESCRIPTION SOMMAIRE DES ESPÈCES DU GENRE THALICTRUM.

T. fœtidum L. Rhizome courtavec racines adventives dont le parenchyme cortical est presque entièrement transformé en fibres mécaniques. Tige de 1-5 dm.,pubescentes-glandul. Feuilles exstipel- lées, 5-4-pennatiséquées. Folioles petites, 2-10 mm. de long sur 1-6 mm. de large. Poils 1-sériés (2-3 cell.) pourvus ordinairement d’un massif cellulaire à la base. Fleurs petites, d’un vert rougeûtre, hermaphrodites , pendantes. Anthères linéaires, mucronulées. Style

136 PAUL PARMENTIER.

court (1/2-1 mm.), stigmate dilaté, latéral, occupant toute la longueur du style. Akènes sessiles munis de 6-8 nervures simples (juillet-août).

Habitat : Lieux secs et rocailleux des régions subalpines.

T. minus [L. Souche cespiteuse ou formée d’un rhizome plus ou moins long pourvu de racines adventives à moelle sclérifiée ou non et avec paquets mécauiques en dehors du bois primaire (jeune racine) et fibres scléreuses dans le parenchyme cortical (racine plus âgée). Tige de 5-12 dm., simple ou rameuse, sillonnée ou lisse, glabre ou parfois velue, feuillée partiellememt ou entièrement. Feuilles de grandeurs très variables, rapprochées ou distantes, apprimées ou étalées, 3-4-pennées. Folioles de grandeurs variables (3-40 mm. sur 4-30 mm.), pétiolulées ou subsessiles, glabres ou velues. Poils simples, ordinairement courts, en massue et 1-cell. Fleurs petites, vert-rougeâtre, hermaphrodites, ordinairement pendantes. Etamines à filet filiforme ; anthères linéaires, mutiques ou mucro- nulées. Style court (1 mm.) ; stigmate occupant toute la longueur du style. Carpelles sessiles ou subsessiles, sabovoïdes, 3-4 mm. de long. sur 1-1 1/2 de large, ordinairement dressés et munis de 6 nervures latérales simples (mai-août).

Hab. Partout, mais surtout dans les collines herbeuses, les bois et lieux secs.

3 T. flavum L. Souche formée d’un rhizome court ou nul, forte, munie de racines adventives jaunâtres renfermant dans leur parenchyme cortical des îlots de fibres mécaniques (jeune racine) ainsi que dans leur cylindre central (racine plus âgée). Tige de 6-15 dm. dressée, ordinairement simple. Feuilles grandes, apprimées, distantes, d’un contour ovale, oblongues, 2-3-pennatiséquées, souvent stipellées. Folioles de grandeur variable (20-50 mm. de long sur 9-30 mm. de large), ordinairement obovales ou cunéiformes, sessiles ou pétiolulées, très variables sous le rapport des divisions du limbe, glabres ou pubescentes. Fleurs dressées, hermaphrodites, petites, jaunâtres, ordinairement rapprochées en glomérules denses; anthères mutiques ou submutiques ; style droit occupé sur toute sa longueur parlestigmate ; carpelles sessiles, courts, ovoïdesou arrondis, dressés, convexes, munis de 6 nervures non anastomosées (juin-août).

Hab. Lieux humides ; prairies, cours d’eau.

LES THALICTRUM DE FRANCE. 137

4 T.alpinum L.-—Rhizome grêle, dépourvu de tissus mécaniques dans le cylindre central. Tige petite (5-15 cm.). simple, rarement ramifiée, ne renfermant qu'un seul cercle de faisceaux libéro- ligneux. Feuilles exstipellées, 3-4-pennatiséq., ordinairement toutes radicales ; folioles petites 2-10 mm. de long sur 1-6 mm. de large). pourvues de paquets de fibres mécaniques en dessus et en dessous du faisceau libéro-ligneux des nervures principales. Fleurs petites, d'un rouge verdàtre, hermaphrodites, peu nombreuses. Stigmate occupant toute la longueur du style. Carpelles sessiles ou presque sessiles, glabres, pourvus de 6-8 nervures latérales, peu ou pas anastomosées, réfléchis (juin-juillet).

Hab. Lieux humides et fangeux des régions alpines (prairies).

T. macrocarpum GREN. Souche déterminée, formée par un gros rhizome pivotant, allongé et muni de racines adventives ; celles-ci entièrement enveloppées par de nombreuses assises subé- reuses. Tige de 4-6 cm., glabre ou velue, lisse ou peu striée. Feuilles à pétiole engaînant, simples ou 2-3-pennées ; folioles de 10-30 mm. de long., pétiolulées ou subsessiles, entières ou 3-lob. au sommet. Inflorescence souvent pauciflore ; fleurs grandes, hermaphrodites, jaunâtres ; carpelles comprimés, atteignant jusqu’à { cm. de longueur, à nervures proéminentes et anastomosées (juin-septembre).

Hab. Fentes des rochers des Pyrénées.

T. tuberosum L. Souche formée d’un rhizome court, déterminé, muni de racines adventives tuberculeuses à leur base et filiformes vers leur extrémité,renfermant de nombreux scléréides dansleparenchyme cortical, ainsi qu'une couronne d’autres scléréides à la périphérie du cylindre central (région moyenne du tubercule). Tige de 3-5 dm., ordinairement simple et dressée, ne renfermant qu'un cercle de faisceaux libéro-ligneux, portant 1-3 feuilles. Feuilles exstipellées, le plus grand nombre radicales, 2-3-pennatiséq. Folioles de 5-10 mm. de long sur 3-5 de large, généralement ovales ou subcunéiformes, petites, pétiolulées ou sessiles, entières ou 3-dentées. Fleurs grandes, d’un blanc jaunâtre, hermaphrodites, disposées en grappe corymbiforme, peu nombreuses, portées sur des pédicelles quelquefois assez longs ; sépales pétaloïdes, une fois plus longs que les étamines qui sont nombreuses. Carpelles sessiles

138 PAUL PARMENTIER.

ou substipités, gros (4-5 mm. de long sur 1-2 mm. de large ; subfusi- formes, munis de 6-8 nervures ordinairement non anastomosées, terminés par un bec court un peu incliné (juin-juillet).

Hab. Lieux stériles et pierreux (Aude, Hte-Garonne, et dépar- tements pyrénéens).

T. aquilegifolium L. Tige de 4-10 dm., souvent simple, robuste, lisse ou striée, glabre. Feuilles 2-3-ternées, stipellées ; folioles glabres, de dimensions variables (20-50 mm. de long sur 5-40 min. de large), ordinairement obovales, pétiolulées ou sessiles, 3-lob. ou 3-dentées au sommet. Inflorescence corymbiforme à fleurs grandes, blanches ou rougeàlres, hermaphrodites ; étamines à filets dilatés au sommet ; stigmate peu papilleux. Carpelles longuement stipités, pendants, ailés (fig. 15) (mai-juillet).

Hab.— Lieux couverts el montagnes boisées (Pyrénées, Auvergne, Alpes, Jura, etc.).

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Ms. épée dd dE ds

LES THALICTRUM DE FRANCE. 139

EXPLICATION DES PLANCHES.

m.b. Massif basilaire. épid. Epiderme.

p.p. Parenchyme en palissades. lac. Lacune.

f:m. Fibres mécaniques.

b, Bois.

b.p. Bois primaire.

b.sec. Bois secondaire.

hypod. coll. Hypoderme collenchy- matoide.

cour. méc. Couronne mécanique. p.méc. Paquet mécanique.

p.c. Parenchyme cortical.

hb. Liber. lib.pr. Liber primaire.

lib.sec. Liber secondaire.

p.coll. Parenchyme collenchyma- toide.

(Lt. Faisceau libéro-ligneux.

f.m. Fibres mécaniques.

p.scl. Parenchyme scléreux.

p.cl.m. Parenchyme clair et mince.

pér.scl. Péricycle scléreux.

p. Poils.

coll. Collenchyme.

m.scl. Moelle sclérifiée.

Planche IV.

fœtidum. Poil.

collinum WALBR. Stomates. id. alpinum. Epid. supér. tuberosum. Epid. sup. aquilegifolium. Epid. sup. alpinum. Mésophylle.

Fig. 1. Thalictrum fœtidum. Poil. Fig. 2. id. minus. Poil. Fig. 3. id.

Fig. 4. id.

Fig. 5.—

Fig. 6. id.

Fig. 7. id.

Fig. 8.— id.

Fig. 9. id.

alpinum. Mésophylle.

Planche V.

Fig. 10. T. alpinum. Nervure principale.

Fig. 11. T, flavum. Pétiolule (schéma).

Fig. 12. T. tuberosum. Pétiolule (schéma). Fig. 13. T. majus G. et G. Pétiole (schéma). Fig. 14. T. costæ Tims.-LaGr. Pétiole (schéma). Fig. 15. T. aquilegifolium. Fruit (schéma).

Fig. 16. T!. flavum. Racine.

(Dans cette dernière figure, il n’a été dessiné qu’une partie du parenchyme cortical et du cylindre central correspondant, ainsi que la moelle. Le reste est schématique).

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ROLES DE L'ENVELOPPE MUQUEUSE DES ŒUFS DE GRENOUILLE,

PAR

R. FLORENTIN,

Préparateur à la Faculté des Sciences de Nancy.

On sait que les œufs de Grenouille pondus sont entourés d’une épaisse couche de mucus transparent. On lui attribue des rôles multiples qui sont les suivants : rôle de protection ; rôle de nutrition ; rôle de flotteur ; rôle d’incubateur. Il en est de bien nets qui ne sont plus contestés ; aussi ne ferons-nous que les citer. Tandis que d'autres sont moins précis, en particulier le quatrième dont on a, à notre avis, exagéré l'importance el sur lequel nous nous étendrons un peu.

Abandonné à lui-même à la surface des eaux, le frai de Grenouille a besoin d'armes défensives contre les agents extérieurs pour mener à bien l’éclosion des œufs qu'il renferme. À ce point de vue, le revêtement muqueux est évidemment d'une grande utilité.

Tout d’abord il sert de protection contre les lésions pouvant provenir des chocs ou des pressions. De plus, cette ponte réunie en un seul paquet par un ciment mucilagineux, semble avoir mis en pratique le fameux proverbe « l'union fait la force ». Car succomberait probablement chaque œuf isolé, cette agglomération de volume parfois respectable peut au contraire lutter efficacement. On a remarqué, en effet, que les Oiseaux aquatiques ne peuvent s'emparer du frai de Grenouille à cause de sa viscosité, sauf cependant le Canard, qui, avec son bec si large, parvient à le morceler et à en faire sa nourriture.

STAHL (1) a le premier, en 1888, fail des expériences sur le rôle protecteur de lenveloppe muqueuse contre les Poissons et les

(1) STABL. Pflanzen und Schnecken. Jen. Zeitschrift für Naturw., \. 22, 1888, p. 639.

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ROLES DE L'ENVELOPPE MUQUEUSE DES ŒUFS DE GRENOUILLE. 141

Mollusques.]Ilaremarqué qu’un petit Poisson du paradis (Macropoda) mangeait avidement des œufs de Grenouille (Rana temporaria) débarrassés de leur mucus, et qu'après avoir saisi des œufs entourés de leur couche muqueuse, il les rejetait aussitôt. Ce même Poisson se montrait très avide de jeunes tétards qui étaient à sa portée. STAHL fit une autre expérience avec des Limnées. Dans un vase il plaça six œufs de Grenouille recouverts de leur mucus, et six œufs sans mucus. Quelques Limnées (LZimnea stagnalis L.) qui s'y trouvaient, mangtrent aussitôt les œufs mis à nu, tandis que les œufs enveloppés de mucus étaient encore intacts au bout de deux jours.

H. BERNARD et K. BrATuscHECK (1) ont fait des expériences semblables avec des Crustacés (Gammarus fluviatilis RŒSEL) qu'ils avaient privé de nourriture pendant un certain temps. Ces animaux firent de nombreuses tentatives contre les masses de frai qui restèrent intactes pendant plusieurs jours. Mais, fait à remarquer, ils ne purent non plus assouvir leur faim avec des œufs privés de leur enveloppe muqueuse et avec de jeunes tétards qui étaient à leur portée. Chaque fois que dans leurs recherches actives de nourriture ils venaient à rencontrer une de ces proies, ils la saisis- saient d’abord, mais la rejetaient bientôt comme s'ils lui trouvaient un goût désagréable.

Ces observateurs pensent que cette répugnance provient de certaines substances de désassimilation répandues sur les œufs et les tétards, leur servant ainsi de moyen de défense ; et il est probable, disent-ils, que ces matières à goût désagréable imprégnant le mucus viennent s'ajouter comme protection à la viscosité.

Remarquons que ces moyens de défense, comme d’ailleurs tous les autres, n’écartent pas tous les ennemis, mais seulement certains d’entre eux, puisque nous voyons les Canards vaincre la viscosité du frai, et le Macropode et les Limnées de SranL détruire les œufs dépourvus de leur mucus. Nous avons observé également que les Tritons et les Dytiques mangent les tétards vivants ; de plus les tètards prennent volontiers comme nourriture des tétards hachés de la même espèce. Ces prétendues substances de désassimilation répandues sur les œufs et les tétards ne sont done pas désagréables

(1) H. BERNARD et K. BRATUSCHECK. Der Nutzen der Schleimhüllen für die Froscheier. Biol. Centralb.. t. 11, 1891, p. 691.

142 R. FLORENTIN.

pour tous les animaux, el leur existence est tout au moins très problématique.

Comme on sait, le mucus joue aussi un rôle dans la nourriture des jeunes tétards. Après l’éclosion, ils s’attachent à leurs enveloppes abandonnées, et en font disparaître la plus grande partie ; mais ce mucus ne doit pas être très nutritif.

3" Grâce à la faible densité de la masse gélatineuse, le frai vient flotter librement à la surface de l’eau. Nous ne voyons pas trop quel avantage les œufs doivent retirer de cette situation, attendu qu'il ya bien des pontes d’autres animaux (Tritons, Limnées, etc.) qui restent fixées sur des supports quelconques au sein des eaux, et même dans les couches les plus profondes.

Il y a tout lieu de croire que cette différence de station est un simple effet du hasard, et que le rôle de flotteur n’a pas l'importance qu'on pourrait lui attribuer. Tout ce qu’on peut dire c’est que le frai flottant à la surface, est placé ainsi dans la couche d’eau la plus chaude, ce qui pourra hâter l’éclosion ; mais par contre il est exposé aux attaques des Oiseaux.

H. BERNARD et K. BRATUSCHECK admettent que cette protection mucilagineuse est aussi une sorte de réceptacle de la chaleur solaire, et possède un pouvoir absorbant spécial pour les rayons calorifiques, ce qui l’a fait comparer à une petite serre chaude venant hâter l'éclosion des œufs. Ils ont comparé expérimentalement l'absorption calorifique à travers une couche de mucus de Grenouille verte, et une couche d’eau de même épaisseur (0"”,2) à l’aide d’une pile thermo-électrique. Ils donnent comme conclusion deleursexpériences que le mucus, comparé à l’eau, retient plus que celle-ci les rayons de plus grande longueur d’onde, fait qui viendrait en effet confirmer le rôle de concentration calorifique rempli par l'enveloppe des œufs.

On peut remarquer que si pendant le jour le mucus absorbe de la chaleur, pendant la nuit il émettra une partie des radiations absor- bées pour se mettre en équilibre de température avec l’eau ambiante, et alors le bénéfice ne sera pas très notable. D'ailleurs est-ce que cette absorption de chaleur influe d’une façon appréciable sur la durée du développement, comme le prétendent BERNARD et BRATUSCHECK ? Pour résoudre la question, nous avons fait l'expé- rience suivante avec des œufs de Grenouille (Rana agilis Thomas) (1).

(1) Æana temporaria des auteurs,

ROLES DE L'ENVELOPPE MUQUEUSE DES ŒUFS DE GRENOUILLE. 143

Nous avons partagé une ponte de la nuit précédente en deux parties à peu près égales ; la première partie fut placée dans un grand vase en verre contenant de l’eau. Un autre vase semblable reçut les œufs provenant de la deuxième partie dela ponte, mais isolés et débarrassés de leur mucus, ce qui les fit tomber au fond du récipient. Les deux vases étaient placés l’un à côté de l’autre, à la même lumière diffuse etsoumisaux mêmes conditions de température parunrenouvellement constant de l’eau qu'ils contenaient, n’y occasionnant aucun courant appréciable. L'expérience a commencé le 22 mars. Les phases du développement ont toujours concordé exactementdansles deux vases, et nous n'avons Jamais aperçu de différence entre les œufs à mucus et les œufs isolés et mis à nu. Le 30 mars, huit jours après, des éclosions se sont produites dans les deux vases en nombre à peu près égal, et le développement ultérieur s’est effectué d’une façon identique dans les deux récipients.

Ce résultat nous montre donc que l'absorption des radiations calorifiques opérée par le mucus n’a pas d'effet appréciable sur la rapidité de l’éclosion des œufs de Grenouille.

En résumé, nous pensons que parmi les rôles du mucus de Grenouille il en est un qui prédomine, c’est son rôle de protection. Les autres sont de second ordre et nous paraissent presque insignifiants.

Nancy, le 20 janvier 1897.

ÉTUDES DE MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES,

PAR

FÉLIX MESNIL,

Agrégé, Docteur ès sciences naturelles.

III

FORMES INTERMÉDIAIRES ENTRE LES MALDANIENS ET LES ARÉNICOLIENS.

Planche VI.

INTRODUCTION

J'ai publié, en avril 1896 (1), une note je donnais une descrip- tion précise de Clymenides sulfureus CLpo. que je classais, comme CLAPARÈDE, parmi les Maldaniens, tout en indiquant ses grandes ressemblances avec les Arénicoliens, et particulièrement avec À. marina LINE. M. J.-T. CUNNINGHAM, de Plymouth, m'a fait remar- quer que ma description concordait avec celle que BENHAM a publiée en 1893 d'un prétendu stade post-larvaire d’'Arenicola marina.

Clymenides sulfureus CLrp. serait-il donc un stade ontogénique de l’Arénicole commune ? Si l’on en croit CUNNINGHAM et RAMAGE d'une part, EHLeRrs de l’autre, on ne sait encore rien sur l’embryo- génie de cette annélide ; les pontes que Max SCHULTZE et Horsr ont rapportées à cette espèce seraient celles de Scoloplos armiger O. F. M. La question ne peut donc être résolue que par la compa- raison soigneuse des caractères de Clymenides avec ceux des plus

(1) L'index bibliographique est à la fin du mémoire p. 165.

CS ERSEME FETE

POUR I Net TS) NV PPT SR) e

MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 145

jeunes Arénicoles du sable. Cet examen n’est pas concluant ; il m’a vite convaincu de la nécessité d'examiner des formes voisines de Clymenides sulfureus et j'ai eu l’heureuse chance d’en rencontrer de nouvelles. Je vais d’abord en faire la description qui occupera la première partie de ce mémoire.

Je me baserai ensuite sur les faits observés pour conclure dans la discussion soulevée par la note de BENHAM et la mienne.

Les caractères différentiels des Maldaniens et des Arénicoliens peuvent se résumer ainsi :

Un assez grand nombre de somites au métastomium (une quarantaine), tous assez courts. Branchies rameuses. Crochets ventraux sans barbules avec un faible renflement

MO er er c'enife datent Lee are dada an lait nie ed CU Arénicolien. Un petit nombre de somites au métastomium (18-30) ; ceux de

la région moyenne du corps très longs. Pas de branchies.

Crochets ventraux avec barbules sous-rostrales, et un renflement

SPORT O AS DO (Ne AS RM RI SEE cube At sans Rose ie ee da die o Maldanien. Je vais décrire successivement :

I. Une espèce nouvelle, dont je fais le type d’un genre nouveau Micromaldane qui diffère des Maldaniens typiques en ce que les barbules sous-rostrales des soies en crochet sont rudimentaires ; ces soies sont les mêmes d'un bout à l'autre du corps et existent dès le sétigère ; elles ressemblent aux crochets aviculaires de certains Sabelliens.

IT. Trois espèces, dont deux nouvelles, appartenant au g. Clyme- nides CLpp. Toutes ces formes n'ont pas de branchies ; le renfte- ment de la tige des soies en crochet est assez net (caractères Maldaniens) ; mais les barbules sous-rostrales sontrudimentaires ; les somites sont courts, et en revanche nombreux (caractères

- Arénicoliens).

Il. Branchiomaldane Vincent: LNGus, qui a des branchies très simples ; des crochets sans barbules sous-rostrales, avec un renfie- ment de la tige assez net ; des anneaux courts et nombreux.

Tous les matériaux de cette étude proviennent de l’anse St-Martin, près du cap de la Hague (Manche), sauf Clymenides sulfureus que

j'ai recueilli à Wimereux pendant mes séjours au laboratoire en 1892 et 1893.

(1) Je ne parle pas de la différenciation des soies ventrales des premiers somites, ni de la complication du pygidium ; ce ne sont pas des caractères absolument généraux.

10

146 FÉLIX MESNIL.

I. MICROMALDANE, NOV. GEN.

Description de Micromaldane ornithochæta n. sp. (PL. vi. fig. 1-4)

Cette espèce, de petite taille (4° sur 0 ””, 2), habite les anfractuo- sités des Lithothamnion polymorphum qui tapissent les mares de la zone littorale, dans l’anse St-Martin. On la trouve dans des tubes formés de grains de sable assez fins agglutinés par un mucus sécrété par l'animal.

L'annélide, assez lente, sort difficilement de son tube ; il faut beaucoup de patience si l’on veut arriver à obtenir un animal entier.

Le corps est incolore (voir, sur la fig. À ci- contre, la partie antérieure d’un exemplaire de

Fi. 1 (X 682). profil); aussi aperçoit-on facilement les longues soies dorsales et les crochets ventraux.

Le prostomium elliptique porte sur son bord latéral, du côté dorsal, 2 paires d'yeux de moyenne grosseur et paraissant posséder un cristallin ; deux fossettes longitudinales assez développées indi- quent la présence des organes nucaux (#, fig. 2 ci- contre). Ce prostomium paraît appartenir au type de Racovirza (17, pag. 229), sans palpode ni plaque céphalique (voir la fig. schématique ci-contre).

Le premier anneau du métastomium a une lon- gueur qui n’est guère que la moitié de sa largeur ; on y voit par transparence un trompe assez bien développée. A partir du anneau du métastomium, tous les segments portent dor- salement des soies capillaires, ventralement des crochets ; il y a 17 sétigères (1). Les somites, à partir du 1" sétigère, augmentent rapi- dement de longueur, et vers le ou le 9°, la longueur est le double de la largeur; mais les anneaux, ensuite, redeviennent rapidement courts. Le dernier segment du métastomium, le 19°, très court, est achète.

Fi. 2 (X 62).

(1) Je n'ai compté ce nombre que sur 2 exemplaires ; aussi ne puis-je affirmer sa généralité.

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4 3 3

MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 147

L’anus se trouve à l'extrémité d’un cône assez développé (fig. 4, «), qui me paraît homologue de l'appareil patelliforme qui termine le corps des Leiochone. Ce cône est entouré, dans mon espèce, par un pygidium (fig. 4, e) en forme d’entonnoir très peu évasé ; le bord est légèrement frangé et porte environ 14 incisures ; chaque dent ainsi limitée, est divisée en 2? par une ligne longitudinale. Ce pygidium rappelle tout à fait celui des Maldaniens typiques (g. Clymene, etc.).

Les soies capillaires, qui composent la rame dorsale, sont de deux sortes : des soies assez largement limbées (fig. 1) existant au nombre de une, ou très rarement deux, à tous les sétigères ; des soies coudées un peu plus fines que les précédentes (fig. 2) et présentant un étranglement au coude; la partie terminale est striée transversalement, la région striée étant du côté externe ; ces soies sont au nombre de deux par rame (1). Je n’en connais de semblables chez aucune autre Annélide. |

Les soies en crochet (fig. 3) qui composent les rames ventrales, existent dès le sétigère (2). Elles ont un vertex très développé : il porte eu effet cinq dents impaires, très nettes, en plus de la dent interne ; celle-ci est recourbée et fait un angle assez aigu avec la tige. Un peu au-dessous de cette dent, la tige présente une légère éminence d’où partent deux filaments ou deux lamelles très fines, rudiments des barbules sous-rostrales. Le renflement de la tige est très net et bien limité. À partir de là, au lieu de se continuer en ligne droite, comme c'est la règle chez les Maldaniens, elle se recourbe à angle droit; cette partie proximale est très fine relativement à la partie distale. En résumé, cette soie ressemble beaucoup plus à un crochet aviculaire de Sabellien qu’à un crochet à long manubrium de Clyménien ordinaire.

J'ai observé une seule fois un exemplaire avec des œufs gris.

Affinités. Le type que je viens de décrire est certainement un Maldanien ; il en a tous les caractères essentiels. La présence, aux premiers sétigères, de crochets ventraux, semblables à ceux des autres sétigères, rapproche cette forme des g. Axiothea MMGr (14)

(1) Ces soies existent certainement à partir du somite (5° sétigère) ; aux quatre premiers sétigères, il y a des soies voisines comme forme, sinon identiques.

(2) Voici le nombre de ces soies sur un de mes exemplaires entiers : 2 aux somites 2 à 4, 3 au et 6°, 2 au 7, 4 du au 11°, 3 au 12°, 2 du 13° au dernier,

148 FÉLIX MESNIL.

et Paraxiothea WEgsrT. (19), et en fait un type assez primitif dans la famille. L'existence de barbules sous-rostrales rudimentaires ne peut s'expliquer qu'en admettant la dérivation de Micromaldane d’un Maldanien typique à barbules sous-rostrales bien développées(1).

La forme de ses soies en crochet le rapproche du genre Rhodine, chez lequel aussi les barbules sous-rostrales sont nulles ou (?) rudi- mentaires [ni MALMGREN (14), ni EHLERS (5) n’en figurent]. Les crochets de Rhodine sima Eux. FLoripA, quoique très différents de ceux de Micromaldane, ont aussi une forme aviculaire. Par la forme de ses soies, Micromaldane ornühochæta indique une évolution d'un Maldanien dans le sens Sabellien ; et il est curieux de noter que cette évolution se présente chez un Maldanien le lobe céphalique est réduit à sa plus grande simplicité.

II. LE GENRE CLYMENIDES Cp. S 1. Description de CI. sulfureus Czpp. (3) (PI. vi, fig. 5-11).

Je me contente de reprendre la description que j'ai donnée dans les Comptes-rendus de la Société de Biologie, en avril 1896, en l’accompagnant de figures. Chemin faisant, je discuterai quelques points des descriptions de BENHAM (2) (1893) et de KYLE (12) (octobre 1896) de ce qu'ils appellent un stade post-larvaire d'Arenicola marina ; il suffit de lire la description de BENHAM pour s’assurer qu'il a bien eu entre les mains la même Annélide que celle que je décris ici.

Habitat. Assez fréquente dans les pêches au filet fin en Juin et Juillet 1892 et 1893, à Wimereux, entourée d’un mince tube de mucus transparent dont elle se débarrasse facilement. L’annélide, même entourée de son tube, est assez agile, et nage vivement en se tortil- lant. Je l’ai trouvée aussi, en compagnie de Pomatoceros triqueter L., sous les rochers, à Audresselles (côte du Boulonnais).

Description. De 3°" 5 à 8°" de long sur 0°" 5 à 0°" 75 de large (2). Le corps est à peine atténué antérieurement, mais le dernier tiers (région caudale achète, fig. 6) est nettement moins large

(1) D’après le dessin d'EHLERS, Clymene cinqulata Enr. Florida (5), aurait aussi des barbules rudimentaires ; mais il s’agit d’un Maldanien hautement différencié, très différent de notre type.

(2) Dans ma note précitée, j'ai par erreur indiqué des dimensions doubles, 1 em. 5 sur

1 MM.

1. [

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J

ex

MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 149

que les deux premiers. La teinte est jaune-verdàlre, surtout accen- tuée aux extrémités ; elle est due à la présence, dans l’épiderme, de glandules tout à fait semblables à celles de l’Arénicole (1). Pas d’appendices proéminents ; on voit seulement émerger les soies dorsales (fig. 5 et 6).

Le prostomium, nettement séparé du 1” anneau du métastomium par une rigole transversale, est très court et a une forme tronquée, comme c’est la règle chez les Clyméniens ; son extrémité antérieure est arrondie. Le plan coupé dorsal porte latéralement deux groupes de 2, 3 ou un plus grand nombre de taches oculaires.

Le metastomium comprend deux premiers somites achètes (2), 19 sétigères, et une longue partie achète de 1/4 de centimètre environ. Le métastomium, antérieurement, est plus développé ventralement que le prostomium, en sorte que la lèvre buccale inférieure est proéminente (fig. 9). :

Les 2? premiers somites du métlastomèum ont une longueur qui est au moins moitié de leur largeur, et sont nettement séparés par une cloison transversale. Le 1” porte dorsalement et en avant une paire d’ofocystes (0, fig. 5) ronds (3), contenant une dizaine d'otolithes de grosseur variable et à bords anguleux ; ces otocystes paraissent tout à fait semblables à ceux d'Arenicola marina L.

Tous les parapodes de la région sétigère sont construits sur le même type et portent les mêmes soies. Dorsalement, on a en général 4 soies: 2 très longues faisant fortement saillie à l'exté- rieur ; leur partie limbée est très longue, mais le limbe est très étroit (4) (fig. 7) ; 2 faisant faiblement saillie, à partie limbée courte,

(1) Ce pigment est soluble dans l'alcool. Sur les animaux conservés, on voit, dans l’épiderme, des cellules, rares et éparses dans la région sétigère, disposées en rangées transversales dans la région caudale, qui renferment des granules de pigment noir. Ces cellules rappellent celles à granulations brunes, dont je signalerai plus loin l’exis- tence dans la cavité du corps. Je suis convaincu que les cellules à pigment insoluble de l’épiderme proviennent de cellules cœlomiques qui, bourrées de matières d’excrétion, émigrent vers l'extérieur [voir à ce sujet les travaux de EisiG (8), RacovirzaA (16), ete].

(2) BENHAM signale 1 soie dorsale au somite. Je ne l'ai pas retrouvée; mais je crois volontiers son observation exacte : une telle soie existe chez (7. ecaudatus. Elle prouve que, comme chez les Clyméniens, le somite du métastomium est sétigère.

(3) Je ne comprends pas l'erreur de BENHAM et de KYLE qui placent les otocystes dans le prostomium.

(4) Cette partie n’est pas rigide ; l'animal infléchit fréquemment ces soies qui doivent lui être utiles pour la natation.

150 FÉLIX MESNIL.

mais à limbe très large (on voit très nettement la striation oblique de ce limbe, et il paraît même quelquefois découpé très finement) (fig. 8). Ventralement, on a une rangée de soies en crochet de Clyménien (fig. 9-11): la tige, assez longue, est renflée un peu avant son extrémité, ét elle se termine par des dents : une interne très développée, 3 rangées externes très fines (les 2 dernières rangées paraissent même souvent se confondre) ; immédiatement au-dessous du point prend naissance la dent interne, on distingue mal une légère saillie de la tige d’où part une fine lamelle parallèle à la dent ; c'est une barbule sous-rostale rudimentaire. Il y a 3 ou 4 soies à crochet au 1" sétigère ; puis le nombre augmente, il atteint 8 et même 9 au 11° sétigère ; il est de 6 ou 7 au dernier (1). Aux 2 ou 3 derniers sétigères, le corps, jusque-là assez exactement cylin- drique, s’atténue pour passer à la région postérieure achète qui est également cylindrique. Les derniers sétigères sont aussi bien développés que les précédents ; ils sont simplement beaucoup moins larges. I! n'existe jamais d'anneaux embryonnaires.

La région postérieure est sillonnée par une vingtaine de rigoles transversales qui limitent probablement autant de somites, comme on peut s’en assurer en observant les anses vasculaires.

Le pygidiuwm a la forme d’un tronc de cône constitué par 8 courtes papilles qui entourent l’anus à peu près terminal. Le pigment jaune verdâtre est particulièrement développé dans cette région.

L'appareil digestif commence par une trompe exsertile portant de nombreuses papilles (fig. ci-dessous). Puis vient un tube cylin- drique à parois lisses qui s’élargit peu à peu; on a le maximum de largeur aux et sétigères (1, fig. 5). Cette partie est en communication avec 2 diverticules dorsaux de la longueur d’un somite débouchant à la limite du et du sétigères (a, fig. 5). À partir du point s’insèrent ces 2 culs-de-sac, on a un tube digestif large et annelé ; c’est la région glandulaire (g, fig. 5). Le tube redevient lisse vers le 14° sétigère, et il est étroit et cylindrique dans toute la région achète (7, fig. 6).

Le système circulatoire comprend un organe propulseur dorsal, accolé au tube digestif, à peu près au point les diverticules y débouchent (c, fig. 5). Le sang circule par saccades dans le vaisseau dorsal postérieur ; le cœur se remplit, puis brusquement se vide dans

(1) Pour le détail du nombre des soies, voir la note de la page 160.

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MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 151

le vaisseau dorsal antérieur ; on compte environ 10 pulsations à la minute (1). Le vaisseau dorsal (fig. ci-contre) se bifurque à la hauteur des otocystes, et ses deux branches se suivent, nettement visibles, accolées à la trompe; elles reviennent en arrière ventralement et elles s'unissent dans le sétigère pour constituer le vais- seau ventral ; le sang circule sans mou- vements saccadés dans ce vaisseau. Les 2 vaisseaux ventral et dorsal sont unis dans tous les somites, même ceux de la région postérieure, par des an- neaux transversaux; c'est probable- ment par les anneaux de la région sétigère, à fleur de peau, que se fait l'hématose. Le sang est rouge sans éléments figurés (2). Fi. 3 (X 35)

Les organes segmentaires, construits sur le même type que ceux de l’Arénicole, s’observent dans les sétigères 5 (pavillons dans le 4°), 6, 7,8 et9; il y en a probablement aussi une paire dans le 4°.

La cavité du corps est remplie d’un liquide avec nombreux éléments figurés : ronds, fusiformes, elliptiques remplis de granula- tions brunes (ce sont probablement des matières d’excrétion ; elles paraissent semblables à celles des organes segmentaires et de certaines cellules qui entourent le vaisseau ventral).

Je n’ai jamais observé de produits génitaux.

Cette espèce présente une telle analogie d'aspect avec l'espèce de CLAPARÈDE que je crois devoir les identifier, malgré cette différence importante, d’ailleurs la seule, que CLAPARÈDE compte 22 anneaux sétigères au lieu de 19.

Je crois aussi que c’est cette espèce qu'EnLeRs (7) a obtenue par des pêches pélagiques et qu'il considère comme une larve d'A. marina. 11 indique 20 sétigères. Aurait-il vu la soie rudi-

(1) Kyze indique qu'il s'écoule 4 secondes 3 entre 2 pulsations ; il y aurait done 14 pulsations à la minute.

(2) BENHAM décrit et figure des branchies ; je n’ai rien observé de semblable, KYLE non plus. La coupe que BENHAM donne d’une branchie peut d’ailleurs fort bien se rapporter à celle d’un repli de la peau à l'endroit de l’anse vasculaire très superficielle.

152 FÉLIX MESNIL.

mentaire du 1” sétigère observée par BENHAM? Il déclare que les soies ressemblent à celles de l’Arénicole. C’est certainement inexact; quand même l’Annélide qu’il a observée serait la larve de l’Arénicole, elle devrait avoir des soies différentes de celles des adultes (voir plus loin la description des soies de jeunes Arénicoles).

S 2. Description de Clymenides ecaudatus n. sp.

(PL vi, fig. 12-14).

Habitat. J'ai recueilli, en juillet et août 1896, 9 exemplaires de cette espèce vivant dans les Zäthothammnion de l'anse St-Martin ; je ne leur ai jamais trouvé de tube propre.

Caractères. Le corps allongé, cylindrique, mesure de 5 à 10°" sur 0°" 4 à 0°" 5. Il est d’une teinte jaune verdâtre ou même vert foncé. Cela tient à ce que, dans l’épiderme, les cellules à pigment brun insoluble dans l'alcool, sont nombreuses, beaucoup plus que chez l'espèce précédente. La pigmentation est surtout intense sur le prostomium, les 2 ou 3 premiers somites du métastomium et le pygi- dium, qui paraissent enfumés.

L'aspect général est celui de l'espèce précédente ; maïs 2/ n'existe pas de partie caudale achète; le métastomium porte des soies jusqu’à l'extrémité postérieure du corps. Le nombre de somites varie de 40 à 54; les derniers sont très courts et embryonnaires ; il n’y à pas trace de branchies (1).

Le prostomium, bien séparé du métastomium, est plus nettement arrondi que chez CL. sulfureus et plus gros, mais il ne présente pas de pointe venirale antérieure. Sa longueur est de 0°" 25. Sur la partie dorsale du prostomium, on aperçoit nettement un certain nombre d'yeux.

Les deux premiers somites du metaslomiuwm, longs chacun de 0", 2 à 0°”, 25 paraissent, à première vue, achètes. Mais, en exami- nant l'animal avec soin, on trouve 1 soie capillaire extrêmement fine composant la rame dorsale du sétigère. Cette constatation est

(1) Les somites des régions antérieure et moyenne sont divisés par des rigoles transver- sales plus ou moins régulières et aussi par des rigoles longitudinales, ce qui donne à l’épiderme l'aspect chagriné si caractéristique des Arénicoles.

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MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. IA]

naturellement à rapprocher de celle de BENHAM (2) pour C1. sulfu- reus. Le 1” somite porte dorsalement et en avant une paire d’otocystes ; ce sont des vésicules rondes, renfermant à leur intérieur un gros otolithe unique, sphérique, de 9 à 10 w de diamètre. Ces otocystes sont donc tout à fait semblables à ceux d’Arericola antillensis Luerk. (EHLERS 6) et de certains Sabelliens (Orta, Chone, etc.).

À partir du segment métastomial, tous les somites sont armés dorsalement et ventralement ; les 2 premiers ont 0"" 2 de long, les suivants 0 ”” 29 ; au 12°, le diamètre est 0°" 41, puis va constamment en diminuant. Dorsalement, les soies sont capillaires et de deux sortes : les unes, plus courtes (fig. 12), sont assez largement limbées et ont ceci de particulier que la tige présente un rétrécisse- ment au commencement de la partie limbée; les autres plus longues, sont faiblement limbées ; elles rappellent les longues soies capillaires de CZ. sulfureus représentées fig. 7. On compte en général 1 soie ou 2 de chaque type par rame. A la rame dorsale d’un certain nombre de sétigères de la région postérieure (6 à 12), il existe une soie à crochet tout à fait semblable aux crochets ventraux, mais de tige un peu plus longue; aux 3 à 5 derniers sétigères, cette soie à crochet existe seule, mais aux précédents, elle est accompagnée d’une soie capillaire du 1" type.

_ Ventralement, les crochets (fig. 13-14), en rangée transversale (1), ressemblent beaucoup à ceux de C1. sulfureus, mais ils sont plus nombreux et plus grêles ; la tige présente aussi une courbure plus forte ; la distance entre le renflement de la tige et l'extrémité distale du crochet est relativement plus grande ; on ne voit pas de saillie de la tige, au point d’où partent les barbules sous-rostrales rudimentaires.

Le pygidium est à peu près cylindrique et très court ; il n’a pas la forme conique réalisée chez C1. sulfureus. Son bord postérieur est entier ventralement, divisé en 2 suivant la ligne médiane dorsale.

Le corps, peu transparent, laisse difficilement apercevoir les organes internes. Le tube digestif a une trompe bien garnie de

(1) Voici le nombre des soies chez un exemplaire de 46 somites métastomiaux : somite, 6 par rangée ; 4t et 5°, 7 ; du au 8e, 8 ; du 92 au 12, 9 ; du 12° au 22, 8 ; puis 7, 6; 5 aux 36 et 37° ; 4 aux 38°, 39° et 40° ; 3 aux 41 et 42° ; 2 au 43°; l au 44 et 45° et zéro au 46€.

154 FÉLIX MESNIL.

papilles ; il paraît bien avoir des diverticules dorsaux au somite comme C{. sulfureus. Les vaisseaux et les organes segmentaires ne sont pas pigmentés de brun. Le fait que l’épiderme contient une grande quantité de pigment insoluble indique que l’excrétion, chez cette espèce, se fait principalement par les globules migrateurs.

Je n’ai jamais observé de produits génitaux.

$S 5. Description de Clymenides incertus n. sp.

(PL. vi, fig. 15-16.

Je décris provisoirement comme espèce nouvelle du g. Clyme- nicles, 3 petits exemplaires sans produits génitaux qui ne peuvent être rapportés à aucune des deux espèces précédentes. Je les ai d'abord pris pour de jeunes Branchiomaldane Vincenti LNGus, mais je montrerai plus loin que cette opinion est probablement erronée.

Habitat. Is habitent les mares à Zathothammnion de l'anse St- Martin comme l'espèce précédente. J'en ai trouvé, en 1894, un exemplaire dans l'épaisseur du Lithothamnion et les deux autres dans le tube de boue, situé entre l’algue et le rocher, d’une Polydora flava Cipp. Je n'ai pu en retrouver les années suivantes.

Caractères. Le corps a 2°”,5 de long, est cylindrique et tout à fait transparent, sans aucune trace de pigment.

Le prostomium est ellipsoïdal, arrondi en avant, et porté, à sa partie postérieure, 3 paires d’yeux dorsaux; la paire la plusantérieure est la plus grosse et, dans pigment, est enchàssé un cristallin très net.

Le corps est assez large jusqu'au 13° somite et les segments ont une longueur qui est environ la moitié de leur largeur ; à partir du 13° somite jusqu’à l’anus, le corps n’a plus que les deux tiers de sa largeur primitive, et les segments sont très courts (1/3 de leur largeur). Les 3 exemplaires examinés avaient respeclivement 22, 24 et 25 somites au métastomium.

Je n’ai pas noté de soies sur les 2 premiers segments du métasto- mium ; mais j'ai fort bien pu ne pas voir la petite soie dorsale du 2°" somite, si elle existe. Je suis à peu près certain que le 1” somite ne porte pas d'otocyste.

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MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 155

À partir du somite, on a dorsalement 1 ou 2 soies limbées (fig. 15) avec étranglement de la tige comme chez C1. ecaudatus, et ventralement des crochéts au nombre de 2 aux 4 premiers sétigères et aux 3 précédant le dernier, de 3 ou rarement 4 à tous ceux (le la région moyenne du corps; le dernier sétigère n’a que 1 crochet. Il existe aussi dorsalement un crochet aux 6 derniers séligères, seul aux 2 derniers, accompagné d’une soie limbée aux 4 autres.

La forme de ces crochets (fig. 16), rappelle beaucoup celle des autres espèces du genre, surtout de C7. sulfureus : mème grosseur relalive, même proportion entre la largeur de la soie et la distance du renflement à l’extrémité distale. Les barbules sous-rostrales rudimentaires, partant d’une petite éminence de la tige, sont surtout nettes aux crochets dorsaux (fig. 15) ; on ne les trouve pas toujours aux crochets ventraux ; je crois même que les derniers formés n’en portent plus.

Le pygidium, assez court, ne porte pas d’appendices bien différenciés. Le tube digestif commence par une trompe, et est toujours peu pigmenté; sa largeur est le tiers de celle du corps dans les 6 premiers somites, les deux tiers du au 12° (probablement région glandulaire). Dans cette région du tube digestif, le système sanguin, rempli de liquide rouge, $e décompose nettement en un vaisseau dorsal et un ventral.

Il existe des organes segmentaires très nets en forme de boudins allongés, non pigmentés, dans les somites 7, 8 et 9; en arrière, jene les distingue plus.

La cavité du corps est remplie de nombreux éléments de grosseurs diverses, mais tous plus ou moins ronds.

L'absence d'otocystes, et surtout le nombre, la forme et la grosseur des soies à crochet montrent nettement que les exemplaires que je viens de.décrire ne peuvent être considérés comme de jeunes CL. ecaudatus.

$S 4. Diagnose du g. Clymenides CLPDE.

Intermédiaire entre les Clyméniens et les Arénicoliens. Corps de petite taille, cylindrique, sans appendices proéminents. Prostomium peu développé avec taches oculaires. Segments du métastomium

156 FÉLIX MESNIL.

nombreux, courts et serrés. 1” somite du métastomium achète, portant généralement des otocystes ; somite avec 1 soie dorsale rudimentaire ; tous les autres somites avec: dorsalement des soies limbées [exceptionnellement des crochets (1)]; ventralement, une rangée de crochets ressemblant à ceux des Clyméniens, mais avec barbules sous-rostrales rudimentaires ou même nulles.

Les 3 espèces du genre sont faciles à distinguer.

Longue partie caudale’achéte........... 116,00 sulfureus CLPp (3). : -02 somites au métastomium ; 7-8 soies Pas de partie 38 es au métastomiu : 7-8 soies HS en crôchet par rangée 1221004 ecaudatus MES. Sr RON 20-25 somites ; 3-4 soies............... incertus MEsx.

IT. LE GENRE BRANCHIOMALDANE INnGss.

Ce genre a été créé en 1881 par LANGERHANS (13) pour une espèce des Canaries, B. Vincent n. sp. Il le caractérisait brièvement : Telethusen mit einfachfadenfürmigen Kiemen.

J'ai trouvé un exemplaire de Branchiomaldane Vincenti dans les mares à Lithothamnion de l’anse St-Martin en juillet 1894. J'ai pris sur le vivant des notes assez complètes, mais malheureusement pas de dessins ; depuis, j'ai perdu cet exemplaire et je n'ai pu en retrou- ver de nouveaux.

Voici la description de cet animal ; j'ai pu la compléter par l'examen d’une préparation du Branchiomaldane type de Lan- GERHANS mise à ma disposition par M. DE MARENZELLER (2).

1,5 de long (LANGERHANS donne 1°") ; 47 somites au métasto- mium (L. indique 40 à 42 segments) ; couleur claire, grisâtre ; dans l’épiderme, petits granules gris noirâtres très fins.

Le prostomium elliptique se prolonge en arrière dorsalement plus que ventralement ; il porte 3 groupes d’yeux de chaque côté : un groupe de 6 en avant de la bouche, du côté ventral ; 10 ou 11 latéralement, à la limite avec le somite du métastomium ; 5 ou 4 dorsalement à la partie postérieure du prostomium. |

Les 2 premiers segments du métastomium m'ont paru achètes ; c'est sans doute par erreur que LANGERHANS déclare que le 1” sétigère est le segment du corps. Je suis à peu près certain qu'il n’y avait

(1) Cette disposition, réalisée chez C. ecaudatus et incertus, n'existe chez aucune espèce de Maldanien ni d'Arénicolien. (2) Les 3 dessins ci-dessous ont été faits d'après cette préparation.

se -nth, = sh

MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 157

pas d’otocystes au 1% somite. Les 21 premiers somites n’ont pas d’appendices proéminents ; mais au 22°, apparaissent de petitesbranchies cylindri- ques, annelées, qui augmentent de lon- gueur aux segments suivants et existent Jusqu'à l'extrémité postérieure du corps ; dans la région branchifère moyenne, les branchies sont bifurquées dès leur base. En tout point, mes observations sur les branchies concordent avec celles de LANGERHANS.

À partir du somite, 1l existe :

Dorsalement, des soies capillaires de deux sortes (fig. 1 et 2 ci-contre) ; comme on le voit, la différence entre ces deux sortes de soies n’est pas aussi considéra- ble que l’indiquent les dessins de Lan- GERHANS (13, PI. v, fig. 21 cet f); en réa- Bté, elles appartiennent au même type : partie limbée plus ou moins longue suivie d’une partie épineuse. On a deux soies intermédiaires entre la soie limbée des Clymenides et la soie épineuse des 4re- nicola. Le nombre total de ces soies, chez mon exemplaire, atteint 10 à un sétigère; mais il est généralement de 4 à 6 (2 + 2, ou 3 + 3).

Ventralement,une rangée de crochets: 2 aux premiers sétigères, puis le nombre augmente aux sétigères suivants Jusqu'à atteindre 7 (du 12° au 15" sétigère, c’est-à- dire du 14° au 17° somite), ensuite il dimi- nue, et n’est plus que ? aux derniers séti- gères. La forme (fig. 3 ci-contre) rappelle bien celle des crochets de Clymenides, surtout de C{. ecaudatus; il n’y a pas de barbules sous rostrales.

Le tube digestif commence par une Fic. 4 (X 865) trompe d’Arénicole richement vascularisée ; dans le somite, il

De >.)

158 FÉLIX MESNIL.

porte deux diverticules dorsaux dirigés en avant, tout à fait sembla- bles à ceux des Arénicoles et des Clymenides ; la partie glandulaire commence au 9 ou 40° somite, et paraît cesser vers Le 20°.

Les organes segmentaires existent, plus ou moins pigmentés de noir, dans les somites 7, 8, 9 et 10.

Le liquide de la cavité du corps renferme des cellules en forme de sphères, d’ellipses ou de fuseaux allongés ; d’autres remplies de pigment noir comme celui du vaisseau dorsal et des organes segmen- taires ; enfin des œufs peu nombreux, nageant librement.

Le pygidium est allongé, cylindrique, sans appendices. Je n’en ai pas de dessin; mais, d’après celui de LANGERHANS (fig. 21, c), je crois qu’il ressemble beaucoup au pygidium de CT. ecaudatus.

Remarques sur l'espèce. Cette espèce est incontestablement voisine des Clymenides, surtout d'ecaudatus et d'incertus.

J'ai d'abord pensé que C7. incertus était un jeune de Br. Vincenti:

J'ai trouvé dans le même fragment de Zéthothamnion, mon exemplaire unique de Br. Vincenti et un de mes trois exemplaires de Cl. incertus. Il y a une certaine concordance entre le nombre et la distribution des crochets.

Mais les soies dorsales sont très différentes : au lieu des soies simplement limbées à éfranglement de C{. incertus, on a, chez Br. Vincenti, deux sortes de soies dont la partie limbée est terminée par une lanière épineuse. LANGERHANS a vu des branchies chez des exemplaires de 30 segments ;or les Cl. incertus de 25 somites n'en ont pas trace. Enfin et surtout, il est impossible que les soies de ma fig. 16, PI. vi passent à celles figurées en 8, ci-contre; si on examine comparativement les deux sortes de crochets, on constate que ceux de Br. Vincenti ont l'extrémité moins large, le renflement de la tige moins développé, sa courbure moins régulière ; la diminution d'épaisseur de la tige quand on passe de la partie distale à la partie proximale se fait d’une façon plus insensible, Or toutes ces différences, sauf la seconde, ne peuvent être, à mon avis, interprétées comme des différences possibles entre la soie d’un jeune et celle d’un adulte.

Diagnose du genre. Corps de petite taille, cylindrique, sans autres appendices proéminents que des branchies simples ou bifurquées à un certain nombre d’anneaux postérieurs du corps. Soics dorsales dont l'extrémité se compose d’une partie limbée suivie

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Note

MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 159

d'une lanière épineuse. Crochets ventraux à long manubrium, sans barbules sous-rostrales. Le reste comme C/ymenides. Le genre Branchiomaldane est donc intermédiaire, par ses branchies, ses soies dorsales, ses crochets ventraux, entre Clymenides et Are- nicola.

IV. RELATIONS ENTRE CLYMENIDES ET ARENICOLA

Pour trancher d’une façon directe et indiscutable la question de savoir si CZ. sulfureus est un stade post-larvaire d'A. marina, il faudrait connaître les premiers stades du développement de l’Aréni- cole. Or il semble que l'on ne sache rien sur cette embryogénie. Max SCHULTZE (18), puis HorsT (10) ont décrit le développement d'œufs pondus dans des masses grises glaireuses, que l’on trouve abondamment à la surface du sable au printemps ; ils ont attribué ces pontes à l’Arénicole des pêcheurs. CUNNINGHAMetRAMAGE (4) d’abord, puis HORNELL (9) (1) et enfin EuLers (7) ont combattu cette manière de voir et pensent qu'il s’agit de pontes de Scoloplos armiger O.F. M., Aricien très commun dans les sables à Arénicoles. Ils se fondent surtout sur ce fait que le dernier stade observé ne paraît pasconduirce à Arenicola ; il faudrait admettre des métamorphoses assez complexes. Je crois, comme eux, ces métamorphoses improbables et ma raison est que, dans les embryogénies condensées comme celle que ces savants ont observée, il u’v a jamais de telles transformations.

On ne saurait donc rien sur l’embryogénie d’Arenicola marina ! EHLERS (7) suppose que les œufs sont pélagiques et se développent plus ou moins à la surface de la mer. Des pêches pélagiques exécu- tées par EHRENBAUM, du laboratoire d’Helgoland, ont donné de nombreuses Arénicoles mures. EHLERS pense donc que les Aréni- coles mènent, à un moment donné, une vie pélagique en rapport avec la dissémination des produits sexuels. EHRENBAUM a même

(1) HORNELL a décrit d’autres pontes comme celles d’'Arenicola marina ; mais der- nièrement (10th annual Report of the L’ool Mar. Biol. Committee, in 7rans. Lpool. Biol. Soc. 1896), il a déclaré que ces pontes étaient celles de Phyllodoce maculata.

160 FÉLIX MESNIL.

observé une modification de la couleur de l’Arénicole. Ainsi donc, serait expliquée la présence d’otocystes chez un animal du sable; et l’on aurait un nouvel exemple d’Annélides menant une vie pélagique au moment de la reproduction sexuelle. Quelque sédui- sante que soit l'hypothèse du savant zoologiste de Gôüttingue, elle ne me semble pas encore suffisamment étayée par les faits.

J'ai donc été réduit à examiner de jeunes Arénicoles du sable. La plus petite que j'aie trouvé mesurait 17°",5. Elle avait des branchies déjà bien développées et fortement ramifiées. Ses soies à crochet (fig. 17) sont nettement intermédiaires comme grosseur et comme forme entre celles de C!. sulfureus (fig. 9) et celles d’une Arénicole de 10% de long (fig. 18); elles le sont aussi comme nombre (1).

L’otocyste contient 10 à 12 pierres chez CL. sulfureus (quelle que soit d’ailleurs la taille), 21 chez la jeune Arénicole, plus de 60 chez l’Arénicole adulte (EHLERS, 6).

Mais il existe des différences importantes. Chez la jeune Arénicole, les faisceaux dorsaux sont formés d'une dizaine de soies capillaires, fines, épineuses à leur extrémité ; ce sont déjà les soies de l’adulte ; on ne trouve aucune trace des soies capillaires de Clymenides. Le mamelon dorsal, rudimentaire chez Clymenides, est très long chez la jeune Arénicole. Le pygidium, conique et nettement divisé en 8 appendices chez C1. sulfureus, est un très court bourrelet chez l’Arénicole de 17°" 1/2.

De ces faits, je crois devoir conclure que, s’il n’y à pas impossi- bilité à ce que CL. sulfureus soit un stade post-larvaire d'A. marina, cela me semble peu probable, étant donnés les changements qui devraient se produire entre la taille de 8°" et celle de 17°"5.

D’autres considérations me permettent de prendre parti.

Personne ne contestera, je pense, l'homogénéité du genre C/yme- nides, tel que je l’ai défini, pas plus qu’on ne conteste celle du genre

() Die sé.l2l31al5l6lr|eloliofnhlisliahsliehrhslro Jeune Arénicole | 8 |+[7{7161{10l9 [15l19l20l20/19[20l21l21l21l23l21l18 CL. sulfureus | 3 |alalslslelr{slslslolololols{nlrlsln

Chacun des nombres de la 1'* colonne est environ le double de ceux de la seconde ; pourtant on doit remarquer que le nombre maximum est atteint chez la jeune Arénicole au 17° sétigère, chez CZ. sulfureus du 11° au 142.

MORPHOLOCIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 161

Arenicola. Or, si CL. sulfureus est un stade post-larvaire d’À. marina, Cl. ecaudatus doit être un stade post-larvaire d'une autre Arénicole, et l’on ne peut songer qu'à À. branchialis Aub. et Epw. (1, p. 287, pL&, fig. 13) (— À. ecaudata Jonxsr et À. Grubei CLpp).

Cette espèce existe dans l’anse St-Martin, en compagnie d'A. marina, dans un gravier très grossier. De 6 exemplaires de belle taille que j'ai observés (de 25 à 30 cent. de long), 2 avaient 27 séti- otres, 2, 32 et les 2 derniers 37, c’est-à-dire un nombre moindre que tous mes Cl. ecaudatus.

Il n'existe donc pas d’Arénicole connue dont {/. ecaudatus puisse être le stade post-larvaire. Dans ces conditions, il me semble impos- sible d'admettre que CZ. sulfureus soit un stade ontogénique d’A. marina.

Mais il est certain que À. marina passe par un stade voisin de CI. sulfureus ; il en résulte donc qu'él eriste un stade phylogenique des Arénicoles voisin des Clymenides.

Je n’ai jamais rencontré de produits génitaux chez les Cl/ymenides. Je ne puis donc trancher la question de savoir si j'ai observé des adultes ou des individus en voie de transformation ; mais, ce qui me paraît certain, c’est que s'ils ont une évolution ultérieure, elle ne

se fait pas vers les Arénicoles ; on a une série parallèle à celle des Arénicoles.

V. CONCLUSIONS.

Des pages qui précèdent, résulte nettement qu'il existe une série continue de types allant des Maldaniens aux Arénicoliens. Etant donnée la structure des crochets de Micromaldane et de Clyme- nides, ces deux formes ont passer par un stade phylogénique plus voisin des Maldaniens typiques qu’elles ne le sont maintenant. Arenicola passe ontogénétiquement par un stade qui le rapproche de Clymenides et par conséquent des Maldaniens ; on peut en conclure que les Arénicoliens dérivent aussi d’une forme Maldanienne.

Des Maldaniens, voisins de la forme souche hypothétique Promal- dane, ont donné naissance, par une condensation de la longueur

11

162 FÉLIX MESNIL.

des somites et un accroissement de leur nombre au g. Clymenides ; mais, pour certains d'entre eux, l’évolution ne s’est pas arrêtée à ce terme ; elle est allée jusqu'à Branchiomaldane ; pour d’autres, un peu avant d'arriver à C/ymenides, l'évolution a marché dans une voie un peu différente, et a abouti au terme Arenicola.

Le schéma suivant traduit assez exactement ma pensée.

Branchiomaldane (1) Clymenides Fa k

MALDANIENS (s. s.) Ed renico

Micromaldane

Promaldane

Racovirza (17, p. 244) a nettement montré que les recherches d'EuLers (6) sur le prostomium des Arénicoliens, et les siennes sur celui des Maldaniens, prouvaient que ces deux familles représentent deux séries voisines et ayant évolué parallèlement. Je crois pouvoir introduire une troisième série, celle des Clymenides. Son parallélisme avec la série des Arénicoliens est surtout frappante. Je le résume dans le tableau suivant (2) :

1) Les lignes ponctuées qui aboutissent à Branchiomaldane indiquent ses relations Snes,P < q possibles ; je ne puis préciser laquelle des deux lignes est la vraie.

(2) Tous les renseignements sur les otocystes et le prostomium des Arénicoles sont tirés d'Enzers (6), ceux sur les crochets d’4. Claparedii et cristata de Horst (11).

hu bas D

MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 163

Arenicola marina L. |A. Claparedii Lev.|A. cristata ST. À. branclualis Aub. Ebw. antillensis LÜTk.| = ecaudata Jonnsr. glacialis Mur». | Grubei CLpo. Boecki RATHK. 19 sétigères. 19 sétigères. 17 sétigères. 32 à 38 et même plus de | sétigères.

Longue partie caudale| Longue partie cau-| Longue partie cau-| Partie caudale achète ru- achète. dale achète. dale achète. dimentaire.

Otocryptes avec nom-|Cryptes sans oto-|Otocystes avec un| Otocystes avec gros et breux otolithes irré-| lithes. grosotolithesphé-| petits otolithes sphé- guliers, d'origine rique. riques, d'origine sécré- externe. tee.

Prostomium avec pal-|Prostomium avec n Prostom. sans palpode. pode. palpode.

Soies à crochet assez|Soiesacrochetassez|Soiesacrochetassez| Soies à crochet longues courtes. longues et grèêles.| longues etgrèles.| et grèles (fig. 19).

* Clymenides sulfureus Crrp. CI. incertus n. CI. ecaudatus n. 19 sétigères. 20-25 sétigères. 38 à 52 sétigères.

Longue partie caudale achète Partie caudale achète | Partie caudale achète rudimen-

rudimentaire. taire

Otocryptes (?) avec nombreux | Pas d'otocystes. Otocystes avec un gros otolithe otolithes irréguliers, d'origine sphérique. externe. 4 | Na. Soles à crochet assez Sd ù

Soies à crochet assez courtes. Out Soies à crochetlongues et grêles.

Branchiomaldane Vincenti Les.

90 à 45 sétigères. Partie caudale achète rudimentaire. Pas d’otocystes. Soies à crochet assez grèles.

Le prostomium des Clymenides présenterait aussi, d’après un examen superficiel, des variations de même sens que chez Arenicola.

Comment établir une ligne de démarcation entre les Maldaniens et les Arénicoliens ? On pense d’abord à se servir des branchies ; mais alors on est amené à séparer Branchiomaldane de Clymenides, ce qui me paraît impossible. Le seul procédé pour conserver les

164 FÉLIX MESNIL.

deux anciennes familles consiste à placer Clymenides dans les Arénicoliens. On aura alors, comme seules différences :

Corps composé d’anneaux courts et assez nombreux : Arénicoliens

Corps composé d'anneaux longs et peu nombreux . : Maldaniens

Je crois que, en l’état actuel de nos connaissances, il est préférable, ou bien de faire trois familles correspondant aux trois séries dont je viens de parler [ MALDANIENS (au sens ancien) comprenant Micro- maldane, CLYMÉNIDIENS avec Clymenides et Branchiomaldane, et ARÉNICOLIENS (au sens ancien) |, ou bien de réunir tout l’ensemble en une seule famille, celle des ARÉNICOLO-MALDANIENS, caractérisée par :

un prostomium peu développé, sans appendices saillants ; un métastomiwm avec un nombre limité de somites (18 à 60) dont le premier est loujours achète, possédant aux autres, dorsalement des soies capillaires, ventralement une rangée de crochets à long manubrium non encapuchonnes ; jamais de cirres parapodiaux.

Paris, 6 novembre 1896.

© ®@ 4 ou

MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 165

INDEX BIBLIOGRAPHIQUE

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166 FÉLIX MESNIL.

EXPLICATION DE LA PLANCHE VI.

Tous les dessins ont été faits au microscope Leitz, oculaires 1 et 4, obj. 3, 7 et I. H 1/12 et à la chambre claire ; ils sont réduits aux A] par la photographie.

La lettre G indique le grossissement exact sur la planche.

MICROMALDANE ORNITHOCHŒTA n. sp. k

Fig. 1. Soie dorsale limbée. G. 865.

Fig. 2. Soic dorsale coudée. G. 865.

Fig. 3. Crochets ventraux ; à, face ; b, profil. G. = 865.

Fig. 4. Partie postérieure du corps, vue dorsalement. 4, anus ; e, entonnoir

pygidial. G. 100. CLYMENIDES SULFUREUS Cvr». Fig. 5. Partie antérieure du corps vue de profil. 0, otocyste ; #, vaisseau

dorsal ; c, cœur ; à, tube digestif ; «&, cœcum dorsal ; 4, partie glandu- laire du tube digestif (la compression a déplacé le système sanguin qui apparaît appliqué sur la face latérale du tube digestif, au lieu de la face dorsale). G. = 20.

Fig. 6. Partie postérieure du corps vue dorsalement. #, intestin ; v, vaisseau dorsal. G. = 20.

Fig. 7. Longue soie dorsale. G. 500.

Fig. 8. Courte soie dorsale. G. 500.

Fig. 9. Crochet ventral vu de profil. G. 865.

Fig. 10. Crochet ventral vu de face.-G. 865.

Fig. 11. Crochet ventral vu de profil et légèrement d'en haut. G. 865.

CLYMENIDES ECAUDATUS n. sp. À Fig. 12. Soie capillaire dorsale à étranglement. G. 865.

Fig. 13. Crochet ventral vu de face. G. 865. Fig. 14. Crochet ventral vu de profil. G. 865.

CLYMENIDES INCERTUS n. sp.

Fig. 15. Rame dorsale d’un des derniers sétigères. G. = 865. Fig. 16. Rame ventrale d'un des derniers sétigères. G. = 865.

MORPHOLOGIE EXTERNE CHEZ LES ANNÉLIDES. 167

ARENICOLA MARINA L.

Fig. 17. Crochet ventral d’un exemplaire de 17m, 5 de long ; a, vue de la partie supérieure du crochet. G. 865.

Fig. 18. Crochet ventral d’un exemplaire de 10cm de long. G. 290.

ARENICOLA BRANCHIALIS Au. et Enw.

Fig. 19. Crochet ventral d'un exemplaire de 25 à 30cm de long. G. 2%.

TABLE DES MATIÈRES

Pages

ENTRODUBIONL 21.1 6e de 0e craie te SRE CORAN D CUT so... 145 CT OISE EE ue ARR à A eur Te haine ee AUD RE En ie D al De ste 146 Description\de M. orrithochæta n: Sp... tre 146

II. Le genre Clymenides CLPD.......... ENS EE MEN CRE POCEr 148 Set oDésenphon de, CT,sulfureus GiBDaS lee rose Mende de 148 Se: id. Cliecandatus nn /Sp ss. SR as) DA Li So: id. CESANRGETIUS) ASSET RE APN EMA EM 154 ST DEC a ET LES ER SR PNR NL EN PR Ie PR 155 IIT. Le genre Branchiomaldane LNeus.................,.............. 156 IV. Relations entre Clymenides et Arenicola....:..................... 159 MARÉRDO ISO RE da hein «ne Mae à ed EU TM MO ENS Ua ES d 10 INDESSBIBLIO GRAPHIQUES aie ra are ie de ISERE NUE 2e AU ARE 0e 165

BXPTICA TION DES PLANCHES ess Rs NNe nier A ANA ER 2e At ere 166

NOTICE PHYSIOLOGIQUE

SUR LES LOMBRICIDES D'EUROPE,

E. de RIBAUCOURT,

Préparateur à la Faculté des Sciences.

Habitat. Mes récolles nombreuses de Lombricides en Suisse eten France m'ont amené à constater que les Lombricides d'Europe possèdent une variabilité de formes et de dimensions très remarqua- bles suivant les altitudes. Cette variabilité s’accentue encore lorsque les conditions de vie de l’animal changent. En effet, prenons comme exemple le Criodrilus lacuum Horrmeisrer. Cet animal vit dans les fanges sableuses des lacs et a une existence semi-aquatique. On sait que l’anatomie interne du Criodrilus est presque semblable à celui d’A//olobophora caliginosa, subspecies trapezoïides Duces. De plus, les organes génitaux sont absolument semblables ; ce qui différencie Criodrilus des autres Lombricides d'Europe, c’est l'absence de clitellum, de tubercula pubertatis et de pores dorsaux : me basant sur ces faits, je crois pouvoir conclure que Creodrilus est un Lombricide du genre AUolobophora que la vie semi-aqua- tique a petit à petit privé de clitellum, de tubercula pubertatis et de pores dorsaux.

Cette manière de voir sera évidente lorsqu'on aura considéré que le clitellum n’est qu'un appareil glandulaire annexe de copulation chez les Lombricides terrestres et qu’il a pour mission principale de

A ER US Ce 25 D nr 2

NOTICE PHYSIOLOGIQUE SUR LES LOMBRICIDES D'EUROPE. 169

lubréfier l'animal pendant l’accouplement, et peut-être lui sécréter un anneau nuptial. Or chacun sait que la majorité des animaux vivant exclusivement (1) dans l'eau sont très pauvres en glandes (1), l’eau rendant inutile la fonction physiologique de ces glandes ; c'est ce qui explique la disparition d’une partie du système glan- dulaire de ces Vers qui vivent dans la vase des lacs (clitellum, tubercula pubertatis, pores dorsaux, etc.).

Un second exemple est celui d’AZolobophora Hermanni que M. MICHAELSEN a trouvé dans la Forêt Noire et que j'ai récolté aux environs de Berne et de Paris. Ce Ver vit dans la fange maréca- geuse en compagnie de Zæmicoles. La vie semi-aquatique a eu pour résultat de rendre la forme du corps de A/!. Hermanni presque semblable à celle d'un Phraeoryctès. C’est un fait morphologique très important à constater, de sorte qu’il faut beaucoup d’attention pour ne pas confondre à première vue A7. Hermanni avec le Limicole en compagnie duquel il vit. De plus, comme je l’ai mentionné en 1895, le clitellum commence aussi à faire défaut chez cette espèce. Sur une centaine d'exemplaires résoltés en Suisse, je n’ai réussi à en trouver que trois possédant un clitellum bien développé. Cette proportion se passe de commentaires.

J’ai eu l’occasion de constater le même fait aux environs de Paris. De plus, l'avant du clitellum, lorsqu'il existe, est très mal dessiné, de sorte que les anneaux de la partie antérieure du clitellum ressem- blent beaucoup à des anneaux ordinaires. Les tubercula pubertatis n'occupent que les anneaux 29 et 30. Pour un animal qui possède un clitellum composé de dix anneaux, c’est très peu et cette pauvreté de tubercula ne peut s'expliquer que par une régression motivée par la vie aquat'que.

Dans le genre Lumbricus, nous avons aussi un exemple analogue quoique moins complet. Lurnbricus Michaelseni RiBAucouURT, que j'ai décrit en 1895, vit aussi dans la vase humide de marais. Son clitellum ne comprend que cinq anneaux. C’est le minimum dans le genre Zwmbricus. Les lubercula pubertatis ne comprennent que trois anneaux, fail unique dans ce genre Lumbricus, car dans ce genre, les tubercula sont situés sur quatre anneaux au moins. Je pourrais énumérer d’autres exemples, mais ceux que j'ai cités

(1) Excepté Gastiropodes, Lamellibranchus, ete., dont le rôle physiologique des glandes cutanées est différent de celui des Zombricides.

170 E. DE RIBAUCOURT.

sont assez probants et expliquent assez l'influence de la vie semi- aquatique sur Ja disparition progressive duclitellum des Lombricides.

Vers canalisateurs. Morphologie de la partie caudale. Il est à remarquer que la queue de Zombric présente divers aspects : (cylindrique, aplati, trapézoïde, tétraédrique, etc.). Il existe des intermédiaires entre ces diverses formes. Ces déformations constantes pour chaque espèce sont Le résultat du milieu extréieur.

Etudions les espèces à queue aplatie. Lumbricus herculeus HOrFMEISTER et AVolobophora terrestris SAviany, par exemple, vivent dans les terrains frais mais peu humides, parfois très pierreux. L'animal doit donc être roruste. Il creuse de nombreuses galeries dans le sol ; ces galeries, qui ont parfois 5 mètres de profondeur, peuvent rendre d'immenses services à l’agriculture ; c’est ainsi que dans une région à humus très maigre et pierreux (Clarens, Suisse), j'ai constaté des galeries nombreuses traversant les couches de terre glaise sous-jacentes ; ces galeries, dont la section peut atteindre D “/m SOnt autant de petites canalisations qui permettent à l’eau de s’infiltrer au travers les couches superficielles et imperméables de la terre et faciliteront l'absorption de l’eau. Cette absorption atténue certainement les inondations de culture, surtout dans les régions accidentées. Pour creuser leurs galeries, Lumbricus herculeus HoFFMEISTER et A/lolobophora terrestris SAviGNY sont pourvus d’une queue plate, parce que, de cette façon, la queue présente une surface d'appui plus considérable dans le sens trans- versal et par conséquent une puissance dynamique plus considérable dans le sens longitudinal. Cette queue pourra donc être, au point de vue mécanique, un levier puissant agissant sur l’avant du corps.

La forme de la partie antérieure est plutôt conique, ce qui facilitera le travail canalisateur du Ver; mais il ne faudrait pas conclure que le Ver avance dans ses galeries en écartant la terre à la manière d'un clou qu'en enfonce dans du bois. Non, il avance surtout en absorbant dans son tube digestif des quantités énormes de terre qu'il expulse lorsqu'il arrive dans des sortes de chambres de repos qu'il se construit lorsqu'il est trop éloigné de la surface du sol. En d’autres termes, il mange une bonne partie de son chemin.

Soies. Les soies de la partie caudale des Zombricides cana- lisateurs sont plus fortes, plus recourbées à la partie caudale qu’à l'avant. Elles sont de plus très geminées.

NOTICE PHYSIOLOGIQUE SUR LES LOMBRICIDES D'EUROPE. n71

Il y a deux rangées géminées qui sont situées ventralement ; les deux autres, aussi géminées, sont situées exactement sur les sommets de l’ovale. Cette disposition des poils augmentera encore la puissance de la queue.

Vers sédentaires. Chezles Vers que j'appellerai sédentaires, les soies ne sont généralement pas géminées ; aussi, le Ver ne quitte la surface du sol que pour hiverner (Dendrobæna putris HorrmeIs- TER, AUolobophora (Notogama) veneta SaAviewy, Allolobophora (Notogama) hortensis MIcHŒLSEN, Dendrobæna octoedra SAVIGNY, Octalosion profugum, Saviaxy (OERLEY), Octalosion studiosum MicHœLsen), etc.). Ces espèces à soies non gémiuées ont un autre rôle dans la nature que celui des vers canalisateurs que nous avons décrit plus haut. Ils ne sont pas du reste taillés pour cela.

Leur rôle consiste à nettoyer les allées des jardins, des pelouses, en absorbant, invariablement par le pétiole, les feuilles qui jonchent la terre. Ils ont un curieux mode de procéder : ils sortent de terre et attirent dans leur galerie les feuilles, mais toujours lentement par le pétiole. Ces galeries qui sont parfois ainsi obstruées ne doivent pas être confondues avec les galeries verticales que j'ai mentionnées en parlant des Vers canalisaleurs, galeries qui ne sont jamais obstruées et dont l’orifice de sortie débouche au centre de petites élévations. Au contraire, les galeries des Vers qui se nourrissent de feuilles sillonnent longitudinalement la surface du sol et débouchent n'importe où.

D’autres espèces (A//olobophora trapezoïdes Ducës, Allolobo- phora turgida Kisex, AlUlolobophora terrestris SAVIiGNY) vont se nourrir généralement, dans les couches profondes, de matières organiques en décomposition (cadavres, pourriture) et viennent rejeter leurs excréments à la surface du sol. C’est pourquoi les allées des cimetières qui sont sablées sont rapidement recouvertes d’humus ; les jardiniers des cimetières ont même été frappés de ce fait et l’appellent l'enterrement du sable.

D'autres Vers (Dendrobæna octoedra Savieny) vivent sur les montagnes sous la mousse. IIS ne se nourrissent pas de plantes cryptogamiques ou de leur pourriture comme on pourrait le croire, parce que les tissus cryptogamiques sont trop durs pour être absorbés, mais ces Dendrobæna octoedra se nourrissent : 1°d’humus: de feuilles d'arbres qui ont été chassées par Le vent et que ces Vers

172 E. DE RIBAUCOURT.

entraînent sous la mousse et vont rejeter leurs excréments près de la racine des mousses, ce qui va procurer aux mousses à de grandes altitudes les éléments essentiels à leur végétation. Le Ver, de son côté. vivra sous la mousse il aura de la fraîcheur et de l'humidité. Cette réciprocité de bons procédés est curieuse.

Vers des cours d’eau.— D’autres Vers, et en particulier tout le genre Alurus EIsEN, vit sous les racines d'herbes dans les petits cours d’eau ou dans la terre glaise silicatiée. Les racines dont je viens de parler sont toujours très chargées de carbonates de chaux et de siliée. Il faudra donc que le Ver soit robuste quoique court pour vaincre les pressions latérales exercées par les dépôts calcaires ou siliceux (1).

Ces dépôts sont parfois si compacts qu'Allurus y est enfermê comme dans une carapace (Alpes bernoises). On comprendra, alors, pourquoi la charpente du corps et les muscles longitudinaux d'Alurus sont si puissants qu’ils réussissent à conserver la paroi du corps exprimée et à donner à la coupe verticale du corps, surtout celle de la queue, une forme létraëdrique. Cette disposition offrira un maximum de résistance aux pressions latérales.

Les poils sont courts, mais très épais ; ils sont disposés sur le angles du tétraèdre.

Comme on le voit l'habitat à, ici, une influence curieuse et indis- cutable, non seulement sur la forme de la queue, mais aussi sur a disposition et la puissance des muscles longitudinaux.

La forme primitive de la partie caudale des Zombricides est cylindrique (A/lolobophara (Notogama) rosea Savigny, Allolo- bophora iclerica Savigny, etc.). Les déformations ne sont que le résultat au genre de vie du Ver.

La coupe de la queue du ZLumbricus rubellus HoFFMEISTER forme le passage entre celle du Lumbricus herculeus Horr- MEISTER et celle de l’A/Z. 2cterica.

Aussi le genre de vie de ZL. rubellus ressemble à la fois à celui de ZL. herculeus et à celui d'A. icterica. Il est curieux de constater ces coïncidences et d’en lirer des conclusions.

(1) M. Giarp a bien voulu me signaler le fait que les poils d’A//urus, vivant dans les cours d’eau, sont robustes et très recourbés, ce qui permet à l'animal de s’accrocher et de résister à la force du courant.

Dr

NOTICE PHYSIOLOGIQUE SUR LES LOMBRICIDES D'EUROPE. 173

Nutrition. Les feuilles les plus recherchées par les Lombri- cides sont celles d’accacia, de pommiers, de poiriers, de chêne malgré le tannin qu'elles renferment. J’ai même récolté près de Berne une collection de Vers dans un endroit Gn avait jeté de l'écorce de chêne ayant servi à la tannaison. Aux alentours de ce fumier qui était composé de ces restes d’écorces de chêne, il n'y avait aucun Ver; tous avaient émigré vers le tas d’écorce (Dendrobæna putris, AU. hortensis, AU. rubellus, AU. icterica).

Au commencement de ce travail, j'ai mentionné que les Lombri- cides d'Europe, à vie semi-aquatique, offraient une disparition progressive du clitellum et une pauvreté relative dans le système glandulaire. Le contraire a lieu chez les Vers qui vivent dans un milieu plus ou moins sec. C’est ainsi que dans les fumiers composés de feuilles exposées aux rayons du soleil, on est certain de récolter soit des A7. (Notogama) fœtida, soit des AU. (Notogama) rosea.Ces deux espèces sécrètent par leurs pores dorsaux, une rés grande quantité de mucus qui leur sert à lubréfier la peau et à humecter leur demeure. Il va sans dire que cette particularité physiologique est le résultat de l’absence d'humidité et répare dans la mesure du possible les inconvénients de cette absence intermittente.

Pigmentation. J’ai remarqué que certaines espèces (Allurus tetraedrus SAviGNy, Lumbricus Morelli RisaucourT, Dendrobæna octoedra, eic.), qui étaient dépourvues de pigment dans la plaine étaient invariablement colorées en violet très sombre à de grandes altitudes. J’en ai conclu que l'altitude avait quelque influence dans ce phénomène ; mais mais c'est une particularité spéciale, propre aux espèces que je viens de signaler, car 4/7. (Notogama) alpina Rosa, vivant à de grandes altitudes sont, au contraire, dépourvues de pigment.

Quant à la forme générale du corps, nous avons à signaler que les espèces vivant à de grandes altitudes, sont invariablement de petite taille ayant un diamètre relativement large, avec une coupe cylindrique.

Ces dispositions anatomiques les rendent certainement plus aptes à supporter les intempéries (/roid, gel, défaut d'humus), causés par l’altitude.

Copulation. M. EpMoNp PERRIER a décrit l’accouplement d'Al. (Notogama) fæœtida. Cette opération n’a pas lieu exacte-

174 E. DE RIBAUCOURT.

ment de la même facon chez tous les Zombricides. Celle de Lumbricus herculeus est presque semblable à celle d’A7. fœtida. Il y a pourtant quelques différences à mentionner. J'ai observé que l’accouplement avait lieu pour Lumbricus herculeus à heure fixe et non pendant la nuit, conne plusieurs auteurs l'ont prétendu, mais toujours à l'aube première. Les deux Vers on! les trois quarts du corps hors de la terre ; la partie postérieure de la queue reste dans le sol pendant que l'avant des deux Vers s'applique l’un contre l’autre par la face ventrale, en se renversant, de telle sorte que la tête de l’un des Vers est dirigée vers la queue de l’autre et que les orifices génitaux sont en contact avec la ceinture qui sécrète alors un anneau de mucosité qui maintient accolé les deux Vers pendant des heures. Les vignerons de Clarens en Suisse ont eu l’occasion de constater souvent ce fait.

Dans un Cas unique, j'ai trouvé deux Dendrobcæna putris accouplés non pas la tête de l’un dirigée vers la queue de l’autre, mais bien longitudinalement, avant contre avant et arrière contre arrière. Cette curieure disposition d’accouplement me paraît acci- dentelle, mais digne d’être mentionnée.

Clitellum-ventouse. A//olobophora Rosai, que j'ai décrit dans mon dernier mémoire sur la Faune lombricide de la Suisse, a une particularité remarquable : c'est de posséder uu clitellum très hautement voûté dont les lèvres latérales sont extraordinairement développées. C’est un exemple unique chez les ZLombricides d'Europe, dont le clitellum paraît avoir uniquement une fonction annexe de copulation. Chez A77. Rosaiï, la fonction glandulaire me paraît accompagnée d’une autre fonction, car lorsqu'on retourne les planches sous lesquelles ce Ver vit, on constate qu'il a la face ventrale tournée du côté de la planche, à laquelle il reste accolé par le clitellum.

Nous avans donc ici un commencement de transformation du clitellum en ventouse ventrale.

Mais cette transformation n’est pas analogue à celle que nous constatons chez les Lombricides exotiques du Sud de l’Afrique, qui vivent dans les marais et qui se transforment petit à petit en des formes de passage voisines des ÆHérudinées ; car chez nos Lombri- cides d'Europe la vie aquatique a pour résultat-de former des types de passage aux Limicoles. Ex.: All. Hermann, Criodrilus lacuwm, elc. La constatation de ce fait me semble digne de mention.

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NOTICE PHYSIOLOGIQUE SUR LES LOMBRICIDES D'EUROPE. 175

CONCLUSIONS

Les conclusions que nous tirerons de ce petit travail sont les suivantes : La vie aquatique chez les Lombricides d'Europe a pour résultat de faire disparaître le clitellum ; au point de vue physiologique, nos Vers peuvent se diviser :

À) en Vers canalsateurs, grands, forts, robustes, à queue plate, qui se nourrissent surtout d’humus et dont les galeries sont presque verticales ;

B) en Vers sédentaires, à queue cylindrique, courts, peu robustes, qui se nourrissent de feuilles tendres et dont les galeries sont plus ou moins horizontales à la surface du sol ;

C) en Vers des cours d'eau, petits, trapus, à queue tétraëédriques, à musculature puissante siluée sur les côtés du tétraèdre ;

Les Vers qui vivent dans les fumiers de feuilles pourries sont généralement pourvus d’un système glaudulaire considérable. Ils sécrètent par leur pores dorsaux une quantité de mucus leur servant à lubréfier la peau. Ce système glandulaire répare, dans la mesure du possible, les inconvénients de la sécheresse qui ne peut manquer d'exister dans un milieu exposé de tous côtés aux rayons du soleil.

La pigmentation de la peau des Zombricides est généralement en raison directe de l'altitude à laquelle vit le Ver.

La copulation de ZL. herculeus a lieu à l’aube première et, chez certaines espèces, cette copulation peut différer avec celle qui a été constatée jusqu’à ce jour.

Allolobophora Rosaï a un clitellum lui servant de ventouse, à sec; mais ce fait ne peut être considéré ni comme une analogie ni une homologie de l’évolution constatée chez les Vers du Sud de l'Afrique.

Le Ver de terre est un animal bienfaisant par excellence. Par les canalisations profondes, qui ne sont jamais obstruées, les couches profondes sont non seulement aérèes mais constamment humectées, ce qui évitera les inondations et facilitera l’oxygénation des composés multiples du carbone et de l'azote, etc., contenus dans le sol et causera ainsi une source de richesse pour la végétation.

176 E. DE RIBAUCOURT.

Par les canalisations horizontales, les Vers dégagent les racines végétales des substances qui leur sont inutiles et réalisent ainsi un travail précieux qu'aucun outil aratoire n’est parvenu à faire jusqu’à maintenant.

Par l'absorption des matières en pourriture, le Ver transforme en humus sain el supérieurement fertile, la source de bien des épidémies.

Cette transformation a une importance capitale pour la salubrité publique. Même sur les montagnes, les Dendrobæna octoedra permettent à la mousse de croître, en dégageant ses racines et en permettant ainsi à l'humidité de pénétrer facilement jusque là. De plus, ils fournissent à ces plantes l’humus indispensable à leur vie.

L'utilité de ces mousses est considérable, car, sans elles, la plupart des montagnes seraient ravagées par les torrents les jours d'orage.

IL est donc temps de rendre justice aux Vers, bienfaiteurs du sol, de l’agriculture en plaine et des mousses sur les montagnes.

Paris, novembre 1896.

ENT é SES SRE ERNST ET ep RE TER TA CT et

LE FONCTIONNEMENT DES TISSUS,

PAR

FÉLIX LE DANTEC,

Docteur ès-sciences.

Dans la Revue générale des Sciences du 15 octobre 1896, M. CuëNoT exécute sommairement la loi de l'assimilation fonction- nelle que j'ai essayé d'établir dans la « Théorie nouvelle de la Vie » (Bibliothèque scientifique internationale). Je crois qu’il est possible de répondre victorieusement à toutes ses objections et c'est ce que je me propose de faire ici en mettant en lumière le bien fondé d’un principe dont l'importance morphogénique est considérable.

« M. Le DanTEC oppose formellement, dit M. Cuënor, l’assimila- tion fonctionnelle aux lois formulées par CL. BERNARD, qui a divisé les phénomènes vitaux en deux ordres : phénomènes de destruc- tion vitale, correspondant à l’activité fonctionnelle des éléments ; phénomènes de création vitale, correspondant au repos fonc- tionnel et à la régénération des réserves épuisées. CL. BERNARD a voulu dire par là, et c'est ainsi que l'ont compris tous les biologistes modernes, que le travail physiologique d'une cellule est le résultat de décompositions chimiques qui se passent dans la cellule même, et qui transforment de l'énergie potentielle en force vive; pour beaucoup d'organes, on a pu préciser ce que n'avait pas fait CLAUDE BERNARD, la substance cellulaire sur laquelle porte la décomposition ; pour le muscle, par exemple, on sait que c’est le glycogène de reserve et le glycose du sang qui fournissent l'énergie représentée par le travail musculaire; quant aux substances protoplasmiques et nucléaires du muscle, on n’y constate pas de changement visible durant le travail. M. LE DanrTec ne diffère

12

178 k FÉLIX LE DANTEC.

donc de l'opinion courante qu’en affirmant que la dépense des réserves coïncide avec une augmentation forcée et proportionnelle de la quantité de protoplasma et de noyau dans la cellule ».

Le protoplasma et le noyau sont formés de substances plastiques que j'ai définies, chez les êtres unicellulaires, par la propriété qu'elles ont de réagir chimiquement en se multipliant au lieu de se détruire dans un milieu réalisant, pour le plastide considéré, la condition 1. Cette propriété d’assimilation manque aux corps ordinaires de la chimie qui se détruisent toujours, en tant que composés définis, quand ils réagissent chimiquement.

Mais toute activité chimique, en dehors de la condition 1, détruit les substances plastiques, comme les corps bruts ordinaires (condition 2).

Chaque fois, par conséquent, que nous constatons une activité chimique d’un plastide, nous devons nous demander laquelle des deux alternatives est réalisée, question qui ne se pose pas pour les corps autres que les plastides, lesquels réagissent toujours à la condition 2 (destruction en tant que composé défini).

Je ne crois pas que personne songe, dans l’état actuel de la science, à considérer comme un phénomène purement physique le fonctionnement d’un organe, la contraction d’une fibre musculaire par exemple, c’est-à-dire à assimiler la fibre musculaire à une machine qui, sans se modifier chimiquement elle-même, consom- merait du glycogène comme une locomotive consomme du charbon et de l’eau. Tous les phénomènes de la morphogénie sont pour prouver le contraire ; le protoplasma ne fonctionne pas comme une machine purement physique, mais les manifestations physiques de son activité sont les résultats de réactions chimiques auxquelles ol prend part.

Puisqu'il y a réaction, la question suivante se pose d’une manière incontestable : Cette réaction a-t-elle lieu à la condition 1 ou à la condition n°2? Son résultat est-il une augmentation ou une destruc- tion des substances plastiques du plastide considéré ?

Pour une fibre musculaire qui se contracte, on sait, dit M. CUÉNOT que «c’est le glycogène de réserve et le glycose du sang qui fournissent l'énergie représentée par le travail musculaire». Fort bien, mais ce travail musculaire est lui-même de nature chimique ;

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FONCTIONNEMENT DES TISSUS. 179

la substance propre du muscle (substances plastiques) en éprouve-t- elle une diminution ou un accroissement ? J'ai affirmé la seconde alternative en exposant la loi de l'assimilation fonctionnelle. En représentant par a l'ensemble des substances plastiques qui réagissent et par Q, l’ensemble des autres substances qui interviennent effecti- vement dans la réaction, on peut écrire de la manière suivante l'équation chimique du fonctionnement d’un élément histologique :

(1) a+Q—=2a+R À est un coefficient plus grand que l’unité.

Pour le muscle, par exemple, le terme Q comprend le glycogène dépensé par la contraction.

A la condition n°2 au contraire, les réactions se représenteraient par une équation de la forme :

(2) a+B=C

dans laquelle ne comprend que des substances différentes de celle du terme a, à condition, bien entendu, qu'on ait fait figurer dans l'équation (2), uniquement les quantités de substances qui ont effectivement pris part à la réaction.

J'ai été amené, par des considérations qu'ii serait trop long de rappeler ici, à affirmer que, chez les Métazoaires, la condition 1 répond à ce qu'on appelle le fonctionnement, la condition n°2 à ce qu'on appelle le repos des éléments histologiques.

« Si cette affirmation est vraie, dit M. CuENor, il en résulte qu'un organe qui travaille sans discontinuer doit aussi augmenter indéfini- ment de volume : eh bien ! est-ce que les fibres musculaires du cœur, du diaphragme, du thorax, les cellules vibratiles des branchies de Lamellibranches, de l’'épiderme des Planaires qui se contractent ou vibrent pendant toute la vie, augmentent indéfiniment leur quantum de substances protoplasmiques et nucléaires? ».

Voilà une objection très sérieuse, semble-t-il, mais je ne sache pas que, chez un seul animal, le cœur, par exemple, se contracte pendant toute la vie. Les fibres musculaires, contractées pendant la systole se détendent pendant la diastole. Le fonctionnement de cet organe se produit à des périodes régulières, mais n’est nullement continu. [1 y a, pour le muscle cardiaque, comme pour tous les muscles de l'organisme, des alternatives de fonctionnement et de

180 FÉLIX LE DANTEC.

repos, de condition 1 et de condition 2; c’est du balancement qui se produit entre l'assimilation pendant le fonctionnement et la destruction pendant le repos que résulte l’état adulte de l'organe ; le cœur n’est donc pas condamné par l'assimilation fonctionnelle, comme le dit M. CuËNoT, à un accroissement sans limite.

Bien plus, mon savant contradicteur le fait remarquer un peu plus loin, «les organes qui ont un fonctionnement exagéré (au-dessus d'un certain taux normal) augmentent notablement de volume (hypertrophie du cœur, du rein, etc.), tandis que ceux qui ne fonctionnent plus du tout s’atrophient plus ou moins ». Cela s'accorde merveilleusement avec la loi de l'assimilation fonctionnelle ; l’état adulte du cœur par exemple provient d’un rapport qui s'établit entre le fonctionnement (assimilation) et le repos (destruction plastique) ; qu’un obstacle à la circulation augmente l'importance du fonctionne- ment par rapport au repos et le cœur n’est plus adulte, il grossit.

C’est une des lois les plus générales de l'anatomie pathologique que, toutes les fois qu'un obstacle siège en un point d’un conduit musculo-membraneux, il se fait une hypertrophie (rétrohypertrophie de For&gr) des fibres musculairesde la partie située au-dessus de l'obstacle. BEAU a donné de ce phénomène une explication téléolo- gique amusante: « Lorsqu'il existe un rétrécissement d'orifice, l'ondée sanguine a de la difficulté à franchir le passage rétréci ; mais la nature prévoyante renforce et hypertrophie les parois cardiaques à un point suffisant pour que la force d'expulsion de l’ondée soit proportionnée à la grandeur de l'obstacle qu’elle doit vaincre ».

C’est précisément parce qu’elle dispense de recourir à des explica- tions de ce genre que la loi d’assimilation fonctionnelle a une grande importance morphogénique. Les objections à celte loi, que M. Cuënor tire de la considération des muscles à fonctionnement périodique régulier sont, nous venons de le voir, dénuées de fondement. Il en est de même de celles qu'il tire de l'étude des cellules épithéliales qui, en effet, se multiplient sans cesse, étant sans cesse à la condition 4:

Sans m'arrêter, pour le moment, à la définition délicate du fonctionnement des tissus en général, et en me bornant à la considé- ration du système musculaire pour lequel le fonctionnement est, sans conteste, la contraction, il m'est facile de montrer que l’on doit considérer la condition 1 comme correspondant au fonctionnement

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FONCTIONNEMENT DES TISSUS. 181

etnon au repos des éléments histologiques. Nous avons vu en effet qu'il n’y a que deux alternatives pour l’activité chimique d’un élément : condition { ou assimilation, condition 2 ou destruction plastique. Si le fonctionnement, la contraction est un phénomène de la condition 2, il est certain qu'un muscle qui se contractera souvent diminuera ; si le repos est un phénomène de la condition {, un muscle qui se reposera longtemps se développera d'autant. Or, c’est précisément le contraire qui a lieu, tout le monde le sait. Les forgerons ont de forts biceps, les gens qui marchent peu ont les mollets grêles,... etc.

Reste à définir le fonctionnement pour d’autres tissus que le tissu musculaire.

L'organisation adulte est un ensemble très complexe comprenant des organes compliqués formés de tissus divers. La vie de cet orga- nisme considéré comme individu unique comprend des phénomènes intéressant un nombre variable des éléments constitutifs du corps ; ces phénomènes sont les actes de la vie de l'individu ; un organe se compose des divers éléments qui agissent simultanément dans l’exé- cution d’un acte appelé fonctionnement de l'organe considéré. L'ensemble de ces divers fonctionnements d'organes a pour résultat la conservation de la coordination qui est la vie de l'individu.

On doit logiquement appeler fonctionnement d’un tissu faisant partie d’un organe donné, l’activité de ce tissu pendant le fonction- nement de l'organe correspondant, mais il n’est pas toujours facile, dans l’état actuel de la science, de définir le rôle de chaque tissu dans le fonctionnement général (1), sauf pour le tissu musculaire, le tissu glandulaire et le tissu nerveux, par exemple, dont nous connaissons parfaitement le rôle spécial.

Voici néanmoins un raisonnement général qui permet de concevoir le bien fondé de la loi d’assimilation fonctionnelle appliquée à tous les tissus quels qu'ils soient : Je considère un organe qui remplit une fonction déterminée dans un individu adulte. Cet organe comprend cinq groupes de tissus, par exemple, a, b, c, d, e, qui concourent tous par leur activité simultanée à l’exécution de l'acte,

(1) A plus forte raison, ne peut-on tirer d’argument dans l'étude de l'assimilation fonctionnelle, des éléments embryonnaires non encore assez différenciés pour qu'il soit possible de leur attribuer une fonction simple bien déterminée.

182 FÉLIX LE DANTEC.

de la fonction considérée. Je dis que l’activité de ces cinq groupes de tissus se produit à la condition 1 dans l’exécution de cette fonction. En effet, je suppose qu'il n’en soit pas ainsi, que a et b par exemple se trouvent à la condition 2 pendant que €, d et e sont à la condition 1. Il en résultera que, plus l'opération considérée sera répétée, plus la coordination d’où elle résulte se détruira, les éléments c, d, e, croissant d'autant pendant que a etb s’atrophient.….

Il faut donc admettre que les cinq éléments à, b, c, d, e, sont tous à la fois à la condition 1 ou à la condition 2. Mais si cette seconde hypothèse était vraie pendant le fonctionnement de l'organe considéré, il en résulterait que plus un organe travaillerait, plus il s’atrophierait, plus, par suite, son fonctionnement deviendrait diffi- cile ; or le contraire est bien connu, une opération, exécutée souvent, devient plus facile à accomplir (habitude) ; un organe qui travaille beaucoup s’hypertrophie.

J'ai établi ailleurs les raisons chimiques du balancement des organes ; la loi d’assimilation fonctionnelle explique pourquoi, par suite de ce balancement, il ne persiste dans un organisme adulte que les éléments histologiques qui sont actifs dans une des fonctions de la conservation de l'individu, autrement dit, que les éléments wtzles. C’est pour cela que les organes sont adaptés à leur fonction ; il n'y a pas de travail perdu.

Mais je suppose qu'à un moment donné de l'existence d’un indi- vidu adulte, des nécessités nouvelles surviennent qui l’obligent à exécuter des opérations nouvelles avec des organes habitués à d'autres opérations ; il y aura, au début, des troubles résultant de ce que certains éléments se trouveront à la condition n°? pendant le fonctionnement de l'organe et se détruiront petit à petit, tandis que d’autres, se trouvant plus longtemps à la condition 1, se dévelop- peront davantage jusqu'à ce que l'équilibre s’établisse, c’est-à-dire que l'organisme soit adapté à ce nouveau genre de vie.

Et ces modifications peuvent même n'être que temporaires si les obligations auxquelles est soumis l'organisme ne sont-que tempo- raires; le cœur s'hypertrophie pendant la grossesse par suite d'obstacles momentanés apportés à la circulation; il reprend son volume normal après l'accouchement ; etc., elc..…….

Il n’est pas nécessaire de savoir faire le détail des éléments histologiques qui interviennent dans l’accomplissement d’une

FONCTIONNEMENT DES TISSUS. 183

fonction pour se rendre compte du bien fondé de la loi d’assimilation fonctionnelle. J'en prends un exemple extrêmement complexe, celui de la lutte de notre organisme contre le froid. Les éléments dont l'activité détermine la victoire dans ce cas particulier se développent pendant l'hiver par un fonctionnement journalier ; nous supportons aisément en hiver une température qui, en été nous rendrait malades parce que les éléments en question se sont peu à peu atrophiés dans l'inactivité ; les personnes qui passent la plus grande partie de leur temps dans un appartement chauffé par un calorifère souffrent beaucoup plus du froid quand elles sortent, etc...

Pour beaucoup d'éléments histologiques, nous ne savons pas, je le répète, préciser la nature du fonctionnement. Il ne faut donc prendre d'exemples, lorsqu'on veut discuter la loi d’assimilation fonctionnelle, que dans les tissus dont le fonctionnement est évident. « Une cellule conjonctive qui se remplit de graisse, dit M. CuÉnor, a-t-elle plus de protoplasma et un plus gros noyau à la fin du travail (1) »? Je ne le crois pas et il me semble probable que c’est le contraire et que la dégénérescence graisseuse est un phénomène de la condition 2. Mais je n’oserais discuter sur ce fait qui ne me paraît pas assez connu pour le tissu conjonctif en général ; il me semble cependant que pour un muscle la chose est bien connue ; ce sont les muscles qui se reposent qui s’infiltrent de graisse.

« Pendant le repos fonctionnel, M. Le DanTec dit que les réactions détruisentles substances protoplasmiques etnucléaires créées pendant le travail pour en faire des substances de réserve (graisse, glycogène) de façon à revenir à peu près au s{atu quo ante. Mais pour le muscle en particulier, on sait expérimentalement que, pendant le repos, il retire du sang une quantité appréciable de glycose qui s’accumule dans son tissu sous forme de glycogène ; il serait bien extraordinaire de voir ce même muscle consommer aussi ses albuminoïdes pour fabriquer encore du glycogène, alors que la source de glycose du sang est pratiquement inépuisable ».

Cette objection, la dernière que me fasse M. CUÉNOT, n'avait guère de raison d’être. A la condition 2, le muscle réagit avec les

(1) Les globules rouges, dont parle aussi M. CUÉNOT, semblent être, au moins chez l’homme, des plastides incomplets incapables d’assimilation, c’est-à-dire, toujours à la condition 2,

184 FÉLIX LE DANTEC.

substances du milieu de manière à donner autre chose que du muscle (voir plus haut). Dans le cas considéré, la formule :

a+B=C

est précisément ce qui explique le phénomène relaté par M. CUÉNOT : le terme B comprend le glycose du sang, le terme C le glycogène produit, et l'expérience prouve qu'il faut très peu de substance musculaire & pour transformer, à la condition 2, en se détruisant elle-même, beaucoup de glycose ou glycogène, comme il faut très peu de levure de bière pour transformer à la condition 1 beaucoup de moût en bière.

Paris, le Janvier 1897.

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ÉTUDES SUR LA MORPHOLOGIE COMPARÉE ET LA PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES,

PAR

MAURICE GAULLERY er FÉLIX MESNIL,

Planches VII à X.

L'un de nous a déjà publié ici même des Ætudes de morphologie externe chez les Annélides (1). Le présent travail est conçu dans le même esprit : prendre un groupe de formes ayant une unité bien nette ; y préciser la séparation des espèces; rétablir, autant que possible, leur phylogénie par un examen critique de leurs caractères différentiels ; baser toute cette étude sur des données d'anatomie comparée ou d’embryogénie. L'application de cette méthode nous paraît un des moyens les plus sûrs, non seulement pour augmenter nos connaissances sur certains groupes spéciaux d'animaux, mais aussi pour pénétrer plus intimement le problème général du trans- formisme.

Dans un groupe restreint, le plan d'organisation est constant, les variations sont légères et c’est surtout sur les parties extérieures de l'organisme qu’elles sont sensibles. On est donc amené à étudier plus spécialement la #20rphologie externe, tandis que, dans des recherches portant sur des classes très étendues, ce sont plutôt

(1) Voir ce Bulletin tome XXIX, p. 110-288, pl. vu-xv ; tome XXX, p. 83, pl. 111; p- 144, pl. vi.

186 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

les organes internes qui sont au premier plan. Mais les modifications minimes que l’on enregistre dans le premier cas sont aussi intéressantes que les vastes transformations que l’on analyse dans le second. Leur étude est aussi philosophique parce que l’on perçoit nettement leur enchainement et que souvent on y saisit sur le vif l'empreinte laissée par les diverses adaptations.

Nous avons étudié avec cette préoccupation un petit rameau des Serpuliens. Notre intention est de faire de même pour d’autres parties de cette famille et de la considérer ensuite dans son ensemble.

En 1862, au début de son intéressant mémoire sur le développe- ment d’un Spirorbe de Cette, PAGENSTECHER (12) insistait sur l'utilité qu'aurait offerte une étude comparée des diverses espèces du genre Sprrorbis. Depuis cette époque, de nouvelles formes ont été décrites à côté des anciennes, mais la révision d'ensemble manque encore. Une tentative vers elle est cependant à signaler : celle de LEVINSEN (7), fondée sur les matériaux du Musée de Copenhague, et consacrée aux espèces du Nord. DE Sr-JosEpx (14) a essayé aussi un classe- ment des diverses espèces. Mais il n’en a observé personnellement que trois et a dû, pour les autres. se fonder sur les descriptions des auteurs : les lacunes et les erreurs de celles-ci l'on conduit à démembrer le genre Spirorbis en six autres (Spirorbis Daun.s.st., Janua, Circeis, Leodora, Mera, Pileolaria Crrp). Les matériaux que nous avons examinés nous conduisent à rejeter ces divisions. Nous en proposerons d’ailleurs d’autres.

Comme on le verra dans les pages suivantes, nous avons disposé de matériaux très variés. Les premiers, ceux-là mêmes qui nous ont conduits à entreprendre la présente revision, proviennent du voisi- nage du cap de la Hague (anse de St-Martin). Nous avons pu, sur six espèces, observer un très grand nombre d'individus vivants et acquérir ainsi une notion nette de la constance ou de la variabilité des divers caractères.

Au laboratoire de St-Vaast-la-Hougue, nous a aimablement accueillis M. EpMonNp PERRIER, nous avons observé quelques

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MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 187

espèces obtenues dans les dragages et, à ce propos, nous tenons à remercier de son obligeance M. MaLARD-DUMÉRIL, sous-directeur de la station.

Nous avons étendu beaucoup ces premières observations par l'étude des matériaux de divers Musées. M. EbM. PERRIER nous a ouvert, avec une parfaite libéralité, les collections du Muséum de Paris et notre ami M. FéLrx BERNARD nous y a facilité les recherches. Nous avons pu ainsi examiner les Spirorbes rapportés en 1882-1883 par l'Expédition Française au Cap Horn, et aussi ceux de diverses provenances que nous avons trouvés sur des substratums variés (Oursins, Mollusques).

M. LEVINSEN nous a très obligeamment communiqué les types du Musée de Copenhague qu’il a lui-même étudiés, et M. ne MARENZELLER nous a envoyé le Sp. granulatus LANGERHANS.

M. KœuLER a mis à notre disposition quelques formes rapportées par lui de la Méditerranée, et celles que nous avons trouvées dans les collections de la Faculté des Sciences de Lyon.

Enfin M. MarIoN nous a communiqué quelques indications sur Sp. Beneti Marion et un tube de cette espèce.

Nous adressons à tous nos meilleurs remerciments.

Dans un premier chapitre, nous discuterons les caractères à employer dans l’étude taxonomique des Spirorbes ; dans le second, nous passerons en revue les espèces ; dans le troisième, nous expo- serons quelques considérations qui résultent des faits et nous paraissent intéressantes pour la morphologie générale des Serpuliens; nous essaierons .en même temps de reconstituer la phylogénie des espèces.

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EXAMEN CRITIQUE DES CARACTÈRES TAXONOMIQUES.

Les descriptions d'espèces de Spirorbes peuvent être groupées en deux catégories : d'une part, celles qui sont basées, uniquement ou principalement, sur le tube calcaire, et de l’autre, celles qui sont fondées sur l'anatomie de l'Annélide. Les premières sont très peu utilisables. Dans les secondes, plus récentes en général, les auteurs ont cherché à identifier les types qu'ils observaient aux espèces déjà connues. Ces identifications ne laissent pas, à notre

188 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

sens, d’être parfois très douteuses. Néanmoins, il nous paraît quelque peu vain de vouloir les discuter davantage et, d’une façon générale, n'ayant pas vu les types originaux, nous les tiendrons pour définitives, én en laissant la responsabilité aux auteurs antérieurs. Passons d’abord en revue les caractères qui fournissent des éléments importants pour la détermination.

Tube. Le tube était calcaire dans toutes les espèces que nous avons observées. LEVINSEN a décrit certaines formes du Nord dont le test est vitreux et qu'il dit être Kalkedonagtigt (par opposition à Kalkagtigt). La translucidité de ces tubes est des plus nettes, mais tous font effervescence et sont entièrement dissous par l'acide chlorhydrique.

On s’est souvent servi du tube pour classer et définir les espèces. Or, dans une espèce donnée, il varie énormément. La forme de l’enroulement, les dimensions de l’ombilic dépendent largement du support ; pour une même espèce, le tube sera, tantôt absolument plan, tantôt héliçoïdal, tantôt relevé ou déroulé dans sa portion terminale.

Les ornements, tels que les crêtes longitudinales, ne sont pas plus constants. La variabilité apparaît surtout quand on étudie la même espèce sur des supports différents ; il nous a semblé en général que le tube devenait plus lisse, quand il était fixé sur un être vivant. IL faudrait donc, pour chaque espèce, décrire et figurer un grand nombre d'échantillons ; c’est dire que le tube ne peut être qu'un document accessoire. Sauf dans des cas exceptionnels, on ne peut guère fonder sur lui la distinction des formes,

Il y a pourtant un de ses caractères qui est fort important et auquel LEVINSEN, seul parmi les auteurs antérieurs, a accordé la valeur qu'il mérite ; c'est le sens de l’enroulement. Chez certaines espèces, la spire, considérée par la face libre, s'enroule dans le sens de la marche des aiguilles d’une montre (spire sénestre), chez les autres, dans le sens inverse (spire dextre) (1). Cette particularité est

(1) Le Spirorbe est placé, dans son tube, de telle sorte que sa face dorsale est du côté du tube appliqué contre le substratum, sa face ventrale du côté libre. 1 en résulte que, chez nos espèces dextres, le côté droit de l'animal est le côté concave ; en d’autres termes, l'animal s'enroule autour d’un axe situé à sa droite. Chez les espèces sénestres, c'est l'inverse. Notre manière de définir les espèces dextres et sénestres s'accorde avec celle des auteurs récents (MürCH, LEVINSEN, de Sr-JosEPH) ; mais est opposée à celle des auteurs anciens | MonTAGU (Zest. Brit.), FLemiNG (£d. Phil. Journ., XI, 1823.)]

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MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 189

rigoureusement constante chez une espèce, et nous verrons qu'il faut lui attribuer une grande valeur phylogénique.

Passons à l'animal lui-même. Les éléments les plus utiles à sa détermination sont : le nombre des rayons de la branchie, la forme de l’opercule, le mode d’incubation des embryons ; le nombre des anneaux thoraciques et abdominaux ; enfin la forme des soies.

Branchie. Elle se compose de rayons portant des barbules latérales disposées par paires. La forme de l'extrémité des rayons est assez caractéristique dans les diverses espèces. Leur nombre est aussi assez constant. CLAPARÈDE (3) en indique 5 dans Sp. lœris QTRFG, LEVINSEN (7) en donne 12 à Sp. verruca FABr. et VERRILL (16, p. 44), 16 à Sp. calidus VErR. La branchie n'arrive que très tard à son complet développement. Sur des individus de Sp. borealis Daup., en apparence adultes, nous avons vu se former une cinquième paire de rayons branchiaux. Les derniers produits sont les plus voisins de la ligne médiane ventrale.

Opercule. Nous comptons comme un rayon branchial la tige qui porte l’opercule, quoiqu'elle soit dépourvue de barbules et d’épithélium vibratile. Chez d’autres Serpuliens (Filigrana, Apoma- tus, Josephella) elle offre encore ces deux caractères de la branchie. Le rayon operculifère est toujours, à partir de la ligne médiane dorsale, le deuxième à droite, chez les espèces à enroulement dextre, le deuxième à gauche, chez les espèces sénestres. Il est ainsi toujours placé du côté de l'animal qui est appliqué contre la concavité du tube. Le sens de l’enroulement et l’organisation de l'animal varient donc corrélativement. Nous montrerons dans la dernière partie de ce lravail que cette corrélation est intime.

La forme de l’opercule est un élément d'importance capitale pour la spécification et qui a été trop souvent négligé. Dans un premier groupe d'espèces, l’opercule se compose d’une plaque calcaire termi- nale T concave, placée à l'extrémité du rayon operculifère ; du fond de cette plaque, part un talon 8 de forme variée, également calcaire (fig. A). C’est la forme fondamentale. Les choses restent en cet état chez les espèces les embryons sont incubés dans le tube calcaire du Spirorbe (1).

(1) Ils sont alors disposés en séries linéaires, à l'intérieur d'une gaîne muqueuse hyaline, appliquée tout le long du bord convexe de l'animal.

190 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

Exceptionnellement, les pointes terminales du talon font saillie sur les côtés de la tige operculaire (Sp. cornu-arietis, Sp. Beneli). [voir les figures de Marion (9 et 10)].

Quand l’incubation a lieu dans la tige operculaire, les parties calcaires présentent des modifications diverses.

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Fig. A Fig. B Fig. C Fig. D Spirorbis borealis Daur. Profil Face convexe Sp. pusillus ST-J. X 62 Sp. Bernardi n. sp. X 185 x 62 Fig. 4. Figures demi-schématiques d’extrémités de tiges operculaires.

Type 1. La plaque terminale est convexe au lieu d’être concave et le talon la continue, sur une partie de la périphérie de la tige operculifère, sous forme d’une surface cylindrique (voir fig. 25 « et 26, PI. x); ces surfaces calcaires et la paroi de la tige limitent une grande cavité incubatrice.

Type 2. Le talon se réduit plus ou moins et il se développe un sac incubateur s, de nouvelle formation, constitué par du calcaire poreux (voir fig. B. et C.).

Type 3 (voir fig. D.). A la base de l'élargissement du rayon operculaire, il se forme une plaque basilaire B, calcaire, limitant inférieurement la cavité incubatrice , et reliée à la plaque terminale généralement plane, par une surface cylindrique L, le plus souvent calcaire. Ces parties complémentaires B et L n'apparaissent qu'assez tard dans le développement. En général, le talon 8 se réduit progres- sivement, et disparaît même quelquefois ; quand il existe, il est creux.

Chez plusieurs espèces, on trouve une série d’opercules, composés des parties T et 9, emboîtés les uns dans les autres. On ne peut les interpréter que par un développement successif et un renouvellement

MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 191

périodique, [v. Sp. Kæhleri, n. Sp. Bernardi, (fig. B. et C.) n., Sp. Perrieri, n.] une sorte de mue répétée.

L’opercule est une pièce d'autant plus précieuse pour la systéma- tique qu'il reste très facile à observer sur les matériaux conservés. Nous l'avons souvent retrouvé, présent et intact, même quand le tube ne renfermait plus rien des parties molles de l’animal.

Nombre des anneaux. 11 y a généralement au thorax trois anneaux sétigères. Le premier ne porte que des soies dorsales ; les deux suivants ont en outre, de chaque côté, un tore uncinigère ventral. Le long de ces trois anneaux s'étendent la collerette et la membrane thoracique, cette dernière caractéristique des Serpulides, interrompue du côté dorsal, continue du côté ventral. LEVINSEN (7) a, le premier, signalé trois espèces dextres (Sp. cancellatus FaBr., Sp. violaceus Lev. et Sp. vitreus FaBr.) le thorax aurait quatre anneaux sétigères. Nous avons pu constater que, chez ces trois espèces, le quatrième anneau n’était représenté qu’à droële.

Nous avons trouvé, de notre côté, plusieurs espèces sénestres, l’une sur des coquilles draguéés dans la baie de St-Vaast-la-Hougue (Sp. Malardi, n. sp.),les autres provenant du cap Horn, un quatrième séligère thoracique existe et est indiqué par un tore uncinigère du côté gauche seulement. Nous revenons plus loin sur ces espèces qui ont, suivant noas, un grand intérêt morphologique.

Le nombre des anneaux sétigères abdominaux est compris, suivant les espèces, entre 8 et 40. Dans une espèce donnée, il paraît varier chez l'adulte entre des limites assez rapprochées.

Entre le thorax et l'abdomen, existe une longue région nue ; c’est surtout que se développent les œufs qui font; hernie du côté convexe de l’animal. Les spermatozoïdes se développent dans les segments sétigères abdominaux. L’hermaphrodisme est la règle.

Soles. Récemment, DE St-JosepH, dans ses excellents mémoires sur les «Annéli des Polychètes des Côtes de Dinard» ,mar- chant sur les traces de von MARENZELLER, a réussi à établir, pour plusieurs familles de Sédentaires, des tables dichotomiques fondées sur la forme des soies. Cet essai a été souvent très heureux. En ce qui concerne les Spirorbes, il n’en a exceptionnellement pas été

de même. N'ayant pas sous les yeux les espèces antérieurement

192 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

établies, mais seulement les descriptions des auteurs, DE ST-JosEPH (6) a démembré le genre Spirorbis d’après la présence ou l'absence de certaines soies spéciales. Nos matériaux ne nous conduisent pas à ratifier ce démembrement.

Le premier sétigère thoracique n’a que des soies dorsales. Elles sont simples, terminées par une serpe garnie d’un double système de stries transversales qui, vues de profil, ont l'aspect de dents. Cette serpe fait avec la hampe un angle variant de 120 à 150° environ. A l'extrémité de la hampe, se trouve, dans beaucoup d'espèces, un bourrelet sillonné par de fortes cannelures longitudinales, appelé aileron crénelé par les auteurs, et plus ou moins séparé de la serpe par un intervalle la soie est plus étroite. La présence ou l'absence de l’aileron crénelé, le degré de sa différenciation sont des caractères importants. Quand l'angle est voisin de 120° et que l’aileron n'existe pas, les soies sont dites géniculées. Ces soies alternent toujours régulièrement avec des soies capillaires beaucoup plus petites,

Le deuxième sétigère offre, à sa rame dorsale, uniquement des soies limbées ordinaires, peu différentes d’une espèce à l’autre. Elles se retrouvent au troisième sétigère ; mais là, elles sont, dans la plupart des formes, accompagnées par d’autres soies simples, dont l'extrémité est recourbée en une faucille garnie de fortes stries transversales sur sa face interne (apparence dentelée de profil). LANGERHANS appelle ces dernières : soies de Salmacine (elles ont été figurées pour la première fois par CLAPAREDE, & et 3). A la base de la faucille, la hampe de la soie de Salmacine est souvent aplatie et dilatée en un limbe. DE Sr-Josepx (14) attache une grande valeur à cette dernière particularité et distingue les soies qui la présentent sous le nom spécial de soies d'Apomatus [elles ont été figurées pour la première fois par Marion et BoBrEeTzKY (9, fig. 25, b) dans le genre Apomatus]. Or, on trouve tous les passages entre les soies de Salmacine proprement dites et les soies d’Apomatus. Nous consi- dérons donc cette distinction comme superflue. Dans les descriptions, nous désignons les unes et les autres sous le nom de soies en faucille strièe, ne voulant rien préjuger de leur comparaison avec celles d’autres genres. Néanmoins nous devons dire qu’elles rappellent surtout les soies typiques du genre Apomatus.

À l'abdomen, les soies ventrales sont en général du type géniculé. Leur extrémité est parfois recourbée en faucille. Il ne faut pas oublier que l'extrémité de ces diverses soies est assez

MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 193

flexible et que des pressions latérales. exercées par le glissement du couvre-objet, ou simplement par les mouvements de l'animal, peuvent exagérer ou atténuer la forme de faucille.

Les uncini enfin sont de même forme au thorax et à l’abdomen, mais de dimensions plus grandes dans la première de ces deux régions. Ce sont (fig. 25 c, pl. x) des plaques dont le bord libre est garni de nombreuses dents fines ; à l’extrémité tournée vers la tête de l'animal, la dent terminale est plus forte. La longueur et l'épaisseur de ces uneini sont variables chez Les diverses espèces, et en prenant les dimensions maxima au thorax, on a des caractères spécifiques souvent très utiles.

Telles sont les particularités sur lesquelles toute description doit être très explicite. D’autres caractères sont moins précis et plus variables. Telles sont les colorations (coloration de la branchie, de la membrane thoracique, du tube digestif, des embryons) (1). Certains pigments du tube digestif, par exemple celui de la région dite hépatique, nous ont paru, par contre, extrêmement constants. Les yeux, à la face dorsale du prostomium, ne sont constants dans aucune espèce (sauf peut-être chez Spirorbis armoricanus ST-J.).

Sur les exemplaires conservés, un certain nombre des caractères taxonomiques que nous venons de passer en revue ne peuvent être utilisés ; on doit se contenter de ceux tirés de l’opercule, des soies et des uncini.

IT. DESCRIPTION DES ESPÈCES.

Pour faciliter l'exposé des caractères spécifiques des nombreuses espèces de Spirorbes, nous donnons le tableau dichotomique suivant.

Nous y avons décomposé le genre Spirorbis en sous-genres ; nous nous réservons de justifier, dans la troisième partie de ce travail, la créalion de ces divisions, c’est-à-dire de montrer que les espèces d'un sous-genre ont une origine commune et commune à elles seules.

(1) Quand le thorax est fortement pigmenté en orangé (Sp. militaris, Sp. cornu-arietis), les soies à aileron crénelé du 1°" séligère sont teintées en jaune ; il nous a paru exister une cerlaine relation entre cette coloration des soies et la grosseur des dents de la serpe.

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MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 195

S1.— Sous-genre Paradexiospira (1).

Spirorbes dextres avec quatre sétigères thoraciques, le ne présentant une armature que du côté droit. Le tube est vitreux, translucide. La serpe des soies du 1” sétigère est toujours bien dentée ; au sétigère, soies dorsales présentant le type Apomatus exagéré : la partie striée est très réduite. Incubation des embryons dans le tube. Les trois espèces connues habitent l'Islande et le Groënland.

1. Spirorbis cancellatus Far. (Fig. 1, a-c).

Cette espèce a été bien caractérisée par LEvINSEN. Il a donné (7, PI. 1, fig. 17-18) d'excellents dessins du tube, dont les stries longitudinales profondes semblent constantes et a attiré l’attention sur la présence d’un sétigère thoracique avec soies dorsales ; mais ce séligère n'est représenté qu'à droite. L'opercule est ter- miné par une plaque en forme d’entonnoir, souvent prolongée en avant par un rebord très mince (fig. 1 à, e); le talon qui fait suite à l'entonnoir est court et fortement aplati; il est un peu oblique. Les soies du 1” sétigère comprennent des capillaires très fines et des soies à aileron crénelé (7 à droite, 8 à gauche): l’aileron est nettement séparé de la serpe dont les dents sont bien marquées (fig. 1 b et LEVINSEN, PI. n, fig. 8 d). Au sétigère, on compte dorsalement 10 à 11 soies limbées (le limbe est lisse, non strié) ; ventralement une rangée d’uncini qui atteignent 65 4 de longueur à droite, et seulement 37 4 à gauche, sur 3 uw d'épaisseur. Au séti- gère, il y a dorsalement une première rangée de 9 soies limbées, semblables à celles du sétigère et une deuxième de 5 soies en faucille striée (la partie limbée est très longue ; la partie striée très courte); ventralement il y a des uncini de mêmes dimensions res- pectives qu’au sétigère. Enfin le sétigère n’est représenté que

(1) De : napa, Gekioç onetpu, droit, spirale.

196 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL,

du côté droit: dorsalement, par 5 soies en faucille striée (fig. 1 c), semblables à celles du sétigère, ventralement par une rangée d’uncini. L’abdomen compte de 25 à 30 sétigères.

Habitat: « in Pectine islandico e Islandia et Groenlandia » (LEVINSEN).

Exemplaires communiqués par M. LEVINSEN.

2. Spirorbis vitreus FABR.

(Fig. 2, a-c).

Cette espèce est assez voisine de la précédente. LEVINSEN (7) a même émis quelques doutes sur son autonomie. Nous avons pu nous assurer qu'elle était bien distincte de Sp. cancellatus. Le tube, tantôt plan (LEVINSEN, PL. n1, fig. 11), tantôt scalariforme (ibid., fig. 12-13) n’a jamais de stries longitudinales. L’opercule, chez le jeune (fig. 2 a), rappelle celui de Sp. cancellatus ; mais, chez l'adulte, le talon a disparu et l’on à seulement un entonnoir à parois très minces (fig. 2 b). Au 1” sétigère, il y a 5 soies à aileron crénelé à droite, 6 à gauche (fig. 2 c); l’aileron est moins nettement séparé de la serpe que dans l’espèce précédente. Les soies dorsales des et3° sétigères rappellent celles de Sp. cancellatus. Il n’y en a pas au sétigère. Voici les nombres des uncini au thorax, comptés sur un individu :

sétigère..…. 50 à droite, 17 à gauche. sétigère..…. 65 à droite, 30 à gauche. sétigère..…. 47 à droite, 0 à gauche.

Ceux de droite ont 35 w de longueur et 4 w d'épaisseur ; ils sont donc nettement plus larges que ceux de Sp. cancellatus.

Nous n'avons pu compter le nombre des segments abdominaux.

Habitat: « In testaceis, rarius in Bryozois e Grœunlandia »

[LEVINSEN (?)] ; mer de Kara, sur Cellepora incrassata | LEVINSEN

(8). Exemplaires communiqués par M. LEviNsEN.

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MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 197

3. Spirorbis violaceus LEVINSEN (7).

(Fig. 3, a-e).

Le tube rappelle celui de Sp. cancellatus. Les dessins (PL 111, fig. 19), et la description de LEvINSEN mettent nettement en évi- dence les différences : 2 à 3 mm. au lieu de 5 à 4; dernier tour non anfractueux ; ombilic plus petit. L’opercule est assez voisin de celui de Sp. cancellatus ; le fond de la plaque terminale (fig. 3 a) est convexe et constitué par des bandes concentriques formant gradins. Cette plaque est entourée et surmontée par un bord conique (fig. 3 b).

Les soiïes du 1" sétigère (6 à gauche, 5 à droite) ont généralement la forme représentée par la fig. 3 c; l’aileron crénelé fait défaut, mais fréquemment, chez les plus anciennes (fig. 3 d), il est ébauché : les premières dents de la serpe sont plus courtes que les suivantes. Aux et sétigères, mêmes soies dorsales que chez Sp. cancel- latus, avec cette petite différence que les soies en faucille striée du ne sont striées que sur une faible longueur à l'extrémité {fig. 3 e) ; pas de soies dorsales au sétigère.

Nombre et dimensions des uncini thoraciques :

SéliSére rai se 99 (50 4) à droite ; 36 (34 y) à gauche. AA ren ule plus de 80 (55;u)- "14.7 88117) Sid LR SUCER 104(60:ù): "id82108720 id.

Epaisseur des uncini : 5 y. Ces uncini sont donc comparables comme dimensions à ceux de Sp. vitreus. On y compte de 25 à 35 rangées de dents.

L'’abdomen a de 20 à 30 sétigères. Le tube est revêtu intérieu- ment d'une gaîne noire (probablement violette sur le vivant), el tous les mamelons sétigères portent un peu du même pigment.

Habitat. « In Testaceis groenlandicis frequens » (LEVINSEN.)

LEVINSEN pense que celte espèce est le Sp. granulata de FaBRicius (différent de celui de LINNE).

Exemplaires communiqués par M. LEVINSEN.

198 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

$S 2. S.-genre Dexiospira.

La caractéristique de ce sous-genre se réduit à ceci: Spirorbes à tube dextre et à 3 sétigères thoraciques.

4. Spirorbis spirillum LiINNÉ.

(nec MonT., nec FLEMING, nec PAGENST). LS. lucidus MonTAGt (1 1), CUNNINGHAM et RAMAGE (4) PI. 45, fig. 58].

(Fig. 4, a-b.).

Nous avons trouvé cette espèce très communément sur des Hydraires (Sertularia abietina), dragués à St-Vaast-la-Hougue. Ce que Lanxé dit de Serpula spirillum (Systema Naturæ, Ed. X), tant pour les caractères du tube que pour l'habitat, se rapporte d’une manière très précise à l'espèce dextre que l'on trouve sur les Sertulaires. Dans beaucoup de mémoires cependant, elle est désignée sous le nom de Sp. lucidus Mont.

MonrTaGu (11) et FLEMING (Edinb. Phil. Journ. 12, 1825), ont désigné en effet, à tort selon nous, sous le nom de Sp. spirillum L.. une espèce senestre notre sens), voisine de Sp. borealis (ce n’en est même sans doute qu’une variété) ; ils ont adopter un nouveau nom, lucidus, pour l'espèce dextre des Hydraires. PAGENSTECHER (12) a appelé spirillum une espèce en réalité nouvelle que les auteurs désignent, depuis de QUATREFAGES, sous le nom de Pagens- techert.

Le tube est lisse, porcellané, résistant, généralement translucide. A St-Vaast, l’enroulement était toujours plan; mais parmi les exemplaires des collections du Muséum de Paris et de Copenhague, beaucoup sont déroulés [voir fig. 14, 15 et 16 de LEVINSEN (?7)|. L'opercule (fig. 4 a) se compose d’une plaque concave assez peu profonde et d’un talon plus ou moins développé: au maximum de complication, celui-ci comprend deux lames de directions sensi- blement perpendiculaires et dont l’une est découpée en dents par des incisures ; mais il peut être réduit à une simple tigelle.

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MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 199

Les soies du sétigère sont assez petites et dépourvues d’aileron crénelé (fig. 4 b). Il n'y a pas de soies en faucille au sétigère. Les uncini sont de petite taille; leur longueur, même à droite, ne dépasse jamais 30 ou 35 w.

L'abdomen r’offre pas plus de 16 anneaux sétigères.

Habitat : toutes les régions septentrionales.

9. Spirorbis armoricanus ST-JOSEPH. (Fig. 5, a-b).

L'espèce dont DE Sr-JosePx (14, p. 350, PI. x, fig. 387) donne une bonne description, sous le nom de C?rceis armoricana n., nous parait être le Spirorbis sinistrorsus, que MoxraGu (11) dit exister communément sur le Cancer gammarus et sur le homard.

Cette espèce est extrêmement voisine de la précédente. Voici les caractères différentiels. Elle est un peu plus grande, le tube est plus large, et surtout plus opaque et plus épais. Le nombre des anneaux abdominaux est plus considérable ; il varie de 16 à 20. Le talon de l'opercule (fig. 5 a) est généralement très réduit.

Aucune de ces différences n’est importante. De plus, des Spirorbes recueillis à Ray-Kyawick (Islande) par l'expédition de la « Manche » (1892), probablement sur des Fucus, nous ont paru intermédiaires entre les deux espèces : le tube est opaque, mais mince ; l'opercule est souvent réduit comme dans la fig. 5 &; mais nous en avons vu dont le talon était exactement celui représenté fig. 4 a. On doit donc considérer Sp. armoricanus comme une variété de Sp. sprrillum.

Chez S. armoricanus, les yeux sont à peu près constants; le pigment de la région hépatique est rouge ; la barbule terminale de chaque rayon branchial est courte. Il y a 7 branchies.

Habitat : sur les homards et Les langoustes de toutes les côtes de France, etc.

6. Spirorbis Mariomi n. sp. (Fig. 6).

Nous avons trouvé quelques individus de ce Spirorbe nouveau sur les piquants d’un Cidaris Thouarsi provenant de Panama et appartenant à la collection de la Faculté des Sciences de Lyon. Le tube est épais et résistant. La section extérieure est quadrangu-

200 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

laire ; on y distingue des stries d’accroissement fines et serrées ; son diamètre est de 1”/,, 5 environ. L’opercule (fig. 6) a une forme très particulière ; il rappelle beaucoup l’ensemble des ventricules dans le cœur d’un mammifère. Sa face supérieure est légèrement concave ; sur elle, se dresse une petite tige verticale. La surface latérale est évidée d’un côté.

Les soies du 1” sétigère ont un aileron crénelé et une serpe à dents bien développées ; au sétigère, il y a des soies en faucille striée. Les embryons sont incubés dans le tube.

Habitat : Panama.

7. Spirorbis corrugatus Moxr.

(Fig. 7, a-b).

Nous n'avons recueilli cette espèce que sur une algue rejetée dans l’anse St-Martin. Elle est identique à celle décrite par LANGERHANS (5, p. 124, fig. 43) qui a fait l'assimilation spécifique. Nous n'avons à peu près rien à ajouter à cette excellente description.

Le tube offre souvent, mais pas toujours, 3 crêtes longitudinales ; il arrive quelquefois qu'elles cessent avant la fin du dernier tour ; l'entrée du tube est alors circulaire. L'opercule se compose, chez les individus jeunes, d’une plaque terminale presque plane et portant un orifice excentriquement placé ; celui-ci n’estautre chose que la base du talon qui est une tige creuse. Chez l'adulte, on trouve en outre une plaque basale calcaire ; entre les deux plaques, se déve- loppe une surface cylindrique, formée d’un calcaire criblé de pores renfermant des bulles gazeuses (fig. 7 a); ce calcaire est disposé en bandes longitudinales rappelant, comme l'indique LANGERHANS, les douves d’un tonneau (Fassdauben) ; l'accroissement se fait de la plaque terminale vers la plaque basale (1). La pression du couvre- objet détermine souvent la rupture du calcaire, suivant les généra- trices séparant les douves. La cavité délimitée par ces parois calcaires sert à l'incubation des œufs: les embryons sont à peu près incolores. La barbule terminale des rayons branchiaux est longue et fine.

(1) Sauf ces particularités d'aspect, l’opercule est identique à celui de Sp. Pagenstecheri dont nous donnons une figure (fig. 8).

MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 201

Les soies du sétigère (fig. 7 D), bien figurées par LANGERHANS, n'ont pas d’aileron crénelé. Elles diffèrent de celles de Sp. sprrillum, en ce que la serpe se rétrécit moins vite et que les dents sont plus fortes. Il y a généralement cinq de ces ‘soies et deux d’entre elles sont nettement plus petites que les trois autres.Il n’y a pas de soie en faucille striée au sétigère. La région hépatique du tube digestif est pigmentée en rouge.

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L'abdomen ne compte que 8 à 10 sétigères avec soies ventrales bien développées (LANGERHANS, fig. 43, e).

Habitat : Manche, Madère, golfe de Naples (des exemplaires de cette espèce, sur algues, venant de ce golfe, ont été mis à notre disposition par M. pe ST-Josepx ; ils lui avaient été adressés sous le nom de Sp. Pagenstecheri).

8. Spirorbis Pagenstecheri QUATREFr. (13).

(Fig. 8, a-b).

Il est assez fréquent à la côte, sur les pierres, les Purpura, plus rare sur les algues et dans les Zathothamnion (cap de la Hague). C'est l'espèce qui, sous le nom inexact de Sp. spirillum a été étudiée par PAGENSTECHER (12). On en trouvera une excellente description dans LANGERHANS [5, p. 123, fig. 42]. Cet auteur l’a nettement différenciée de l'espèce précédente. Les crêtes longitudinales, existant généralement sur le tube, vont jusqu'à l'ouverture. L’opercule (fig. 8 a) est construit sur le même type que celui de Sp. corrugatus ; sa surface latérale reste transparente et très mince ; elle est formée d'une substance résistante, mais qui n’est certai- nement pas calcaire.

Les embryons, incubés dans l'opercule sont assez fortement colorés en orangé. La région hépatique du tube digestif est toujours colorée en violet. L'aileron crénelé des soies du 1" sétigère (fig. 8 b)est toujours très peu marqué ; l’'échancrure entre cet aileron et la serpe est souvent si petite qu'on a peine à distinguer les deux régions de la soie ; pourtant les dents de l’aileron sont moins fines que celles de la serpe qui le sont extrêmement.

Au sétigère, il y a des soies en faucille striée.

202 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

L’abdomen comprend de 8 à 12 sétigères ; les soies abdominales ventrales sont renflées à l’extrémité de la hampe.

Diamètre : 1 "/,, 1/2.

Habitat: Manche, Madère, Méditerranée [Cette, Naples, mer Noire]. Certains Spirorbes du golfe Persique nous ont paru devoir être rapportés à celte espèce ; mais leur mauvais état de conserva- tion ne nous a pas permis une certitude.

9. Spirorbis pusillus DE ST-JosEPH. (Fig. D, p.190).

M. DE StT-Josepx a décrit avec précision | Mera pusilla (14, p. 901, fig. 388-392)] cette espèce qu'il avait [trouvée sur des coquilles draguées (Arcachon, Dinard). Sa description ne laisse peut-être à désirer que sur deux points: l’opercule qui est trop rapidement étudié et les soies qu'il décrit et figure très nettement en faucille. Or, sur des préparations qu'il a eu l’obligeance de nous communiquer, les soies nous paraissent simplement géniculées.

De notre côté, à St-Vaast-la-Hougue , nous avons observé, sur des coquilles draguées, une petite espèce qui ne diffère pas de Mera pusilla.— D'après l'examen que nous en avons fait, elle nous paraît à peine distincte de Sp. Pagenstecheri ; ce n’en est peut-être qu’une variété. Sp. pusillus est plus petit (1°/, de diamètre au maximum). Le pigment hépatique est rouge au lieu d’être violet. La surface latérale de l’opercule entièrement développé paraît légèrement verruqueuse ; la surface supérieure est légèrement convexe et le centre, s’insère le talon, est plus opaque (fig. D, p. 190). Les embryons ne sont pas pigmentés. Les soies ne diffèrent pas de celles de Sp. Pagenstecheri.

III. $S.-genre Paralæospira (1).

Spirorbes sénestres à 4 sétigères thoraciques. Soies du 1°” sétigère à aileron crénelé ; nombreuses soies en faucille striée au 3°. Soies abdominales en cornet comprimé.

(1) De : rap, huloç, gauche, oxctpt, spirale.

MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 203

10. Spirorbis aggregatus n. sp. (Fig. 9, a-e).

Nous créons cette espèce pour des Spirorbes rapportés par l’expé- dition française au cap Horn en 1883. Lesindividus, au lieu d’être fixés isolément sur un support, sont agglutinés les uns aux autres, de façon à constituer de petits blocs pouvant atteindre plusieurs centimètres cubes. Dans un pareil amas, les tubes inférieurs sont généralement vides, les supérieurs renferment seuls des animaux. Le tube est à enroulement sénestre ; il est en général porcellané, lisse et d’un très petit calibre. L'enroulement n’est pas plan, mais scalariforme ; le dernier tour atteint un diamètre de 1 ”/,,5, mais il est quelquefois plus ou moins complètement déroulé.

L'animal est très long (1) et on compte jusqu’à 35 anneaux abdo- minaux. Il y a 7 rayons branchiaux. L'opercule (fig. 9 a)se compose d’une plaque terminale concave, à bords légèrement festonnés, et d’un talon cylindrique à peu près central. La surface externe de la plaque terminale, dans la partie elle se raccorde avec le talon, est généralement verruqueuse. Les embryons sont incubéès dans le tube.

Les soies du 1" sétigère ont un aileron crénelé bien développé (fig. 9 b); la serpe est à dents fines ; l'échancrure est peu nette. Les soies en faucille striée du sétigère sont très nombreuses ; nous en avons compté jusqu'à 11. Les uncini des trois rangées de gauche ont de 30 à 35 v sur 4 4 1/2; ceux des deux rangées de droite n'ont que 20 à 25 4; il y a de 25 à 50 uncini par tore à gauche, de 15 à 20 à droite.

Les soies abdominales (fig. 9 c) sont géniculées; un examen minutieux révèle une structure «en cornet comprimé » rappelant celle des soies abdominales des Pomatoceros. Les uncini abdomi- naux des premiers séligères ont 20 4 de long ; mais, plus en arrière, ils n’ont que 10 w.

Habitat : Côte de Patagonie.

(1) Un exemplaire avait 9 "/n, dont 1 "/n pour les branchies,

204 MAURICE GAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

11. Spirorbis Claparedei n. sp. (Fig. 10).

Celle petite espèce (1."/,, 5 de diamètre chez l'adulte en général, exceptionnellement 2 "/, et 2 "/n, 1/4) est fréquente sur diverses algues et aussi sur des Modiolarca fuegensis Mas. et Rocu. rapportées du cap Horn. Le tube très-mince est appliqué sur le substratum sans empâtement ; il n’a ni crêtes, ni aspérités ; l'ombilic est très grand. L'aspect général rappelle tout à fait celui du tube de Sp. borealis var. fucorum (v. infra). Fréquemment, la dernière partie du tube se relève.

L'opercule (fig. 10) rappelle celui de l'espèce précédente. Mais la plaque concave n'est pas cannelée; sa base n’est jamais verru- queuse (1); enfin le talon cylindrique s'insère toujours un peu obliquement ; il présente un léger étranglement à son insertion.

L'animal est très court et l'abdomen compte un petit nombre de sétigères. Il y a au sétigère 7 soies à aileron crénelé, très petites ; les dents de la serpe sont de moyenne grosseur ; il y a des soies en faucille striée au sétigère. Les uncini des et sétigères ont généralement 28 4 de longueur à gauche sur 2 & d'épaisseur (un exemplaire de 2 "/, avait des uncini de 45 w).

La particularité intéressante de l'espèce consiste en ce que les exemplaires de 1°/, et moins n’ont que deux rangées d'uncini au thorax, et pourtant on y trouve quelquefois des œufs déjà développés ; chez un individu de 1 "/,, 1/4, il n'y avait encore que 4 ou 5 uncini au sétigère; chez ceux de 1"/,,1/2 ou 2 "/n, (le tube renfermait des œufs pondus), le 4 sétigère acquiert son armature complète (environ 15 uncini de 18 y de long). Le tore diffère donc toujours des précédents par le nombre et la taille de ses uncini.

Une quinzaine de sétigères abdominaux.

Habitat : Côte de Patagonie.

(1) Souvent la membrane latérale du rayon operculifere, au voisinage de son insertion à la plaque terminale, est bourrée de petits bâtonnets cylindriques de 10 ou 15 y de long sur 2 y d'épaisseur.

MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 205

12. Spirorbis Malardi n. sp. (Fig. 11, a-b).

«

Nous avons trouvé cette espèce à St-Vaast-la-Hougue, sur des coquilles draguées et nous la dédions à M. E. MALARD, sous-directeur du Laboratoire.

Elle est de petite taille ; son diamètre atteint au maximum 1"/,. L’enroulement est sénestre, régulier et plan; l’'ombilic est petit ; le tube offre souvent des crêtes longitudinales ; il s'écrase facilement. Il y a 7 rayons branchiaux incolores, à barbule terminale longue et eflilée. L’opercule (fig. 11, &) a La forme d’un entonnoir très régulier à partie inférieure plane et large.

Le 1” sétigère porte de fortes soies (4 en général), à aileron crénelé (fig. 11 b), dont la serpe a des dents moyennes ; au séti- gère, il y a des soies en faucille striée. Les uncini, étroits, ont une longueur de 28 y à gauche au thorax ; la troisième rangée est tout à fait comparable aux deux précédentes, et comme nombre d'uncini et comme taille de ces uneini. Il y a environ 10 anneaux abdomi- naux.

Habitat : St-Vaast-la-Hougue (Manche).

13. Spirorbis patagonicus n. sp. (Fig. 12).

Nous avons trouvé des tubes de cette espèce sur des Nullipores récoltés par l'expédition du cap Horn, dans la baie Orange. Le tube est d’assez grande taille, irrégulièrement enroulé, souvent scalari- forme, à tours non contigus, et il présente des stries transversales bien nettes ; il y a généralement une strie longitudinale médiane plus ou moins marquée. Le dernier tour a 1°/,,, 1/2 à 2"/,, de diamètre. Cette espèce a une légère tendance à former des agrégats ; mais elle diffère nettement de Sp. aggregatus en ce que le calibre du tube est plus gros.

L'opercule de l’adulte (fig. 12) a un talon qui prolonge l’entonnoir terminal ; ce talon est un peu oblique ; il est relativement plus fin chez les jeunes exemplaires. On a une apparence qui rappelle l’opercule de Sp. Malardi. Mais il est impossible de confondre ces deux espèces, d’abord à cause de la différence de taille, et ensuite

206 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

à cause d’une grande disproportion dans les dimensions des soies du 1°” sétigère.

Chez un très jeune exemplaire de Sp. patagonicus, dont les uncini thoraciques ont 32 4 de longueur, et qui est comparable comme taille à un Sp. Malardi, les soies à aileron crénelé ont un calibre deux à trois fois plus petit que chez ce dernier ; et, à ce stade, il n’eæiste pas encore d'uncini au thoracique. Ces uncini atteignent chez l'adulte 60 y aux et3° sétigères gauches, et 48 y au 4°; l’épais- seur est de 2 uw, 5; les nombres respectifs sont 57, 90 et 50 ; le 3" tore uncinigère thoracique devient donc comparable aux deux précédents. Les exemplaires adultes ont au 1"sétigère des soies à peine aussi grosses que celles de Sp. Malardi. La forme de ces soies rappelle Sp. Malardi et Sp. Claparedei ; il y en a 6 ou 7 par rame.

Habitat : Côte de Patagonie.

14. Spirorbis Lebruni n. sp. (Fig. 13).

L'expédition du cap Horn a rapporté de nombreux exemplaires de cette espèce : sur des piquants de Goniocidaris canaliculata A. AG. , sur des Lamellibranches, sur des pierres. Nous la dédions à M. LEBRUN, le voyageur du Muséum qui a fait partie de l'expédition de la Romanche.

Les tubes sont assez gros, scalariformes, en calcaire très épais et très dur, le dernier tour mesure 1 ”/,, 5 à 2,5 d'ouverture; les jeunes individus sont plus nettement enroulés dans un plan. Il existe souvent une strie longitudinale, située du côté concave de la spire.

L'opercule (fig. 13) est tout à fait caractéristique ; la plaque termi- nale est toujours très épaisse ; le plus souvent même c’est un tronc de cône un cône complet, et elle ressemble alors à un pain de sucre. Le talon est constant et assez massif ; il se termine par 2 ou 3 lobes courts et arrondis, nettement séparés les uns des autres par des dépressions longitudinales. Les soies du 1" sétigère (11 à droite, 9 à gauche) sont à aileron crénelé ; l’aileron est peu développé; il est terminé par de petites dents ; l’'échancrure est très nette ; la serpe porte des dents assez fortes. Au sétigère, les soies sont dispo- sées, suivant la règle, en deux rangées transversales : une première d’une douzaine limbées ; une deuxième d’une douzaine en faucille striée ; la partie striée est assez courte.

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MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 207

Les uncini sont longs et étroits. Aux trois sétigères thoraciques, sur un exemplaire, ils avaient respectivement, du côté gauche, 100 y, 85 u et 65 u sur 3 u d'épaisseur, et portaient 20 à 30 dents. Nous n’avons pu avoir d'abdomen en bon état. Incubation des embryons dans le tube.

Habitat : Côte de Patagonie.

16. Spirorbis Levinseni n. Sp. (Fig. 14).

Nous n'avons eu que quelques exemplaires de cette espèce rencontrée, en compagnie de Sp. Lebruni, Sur une pierre venant de la baie Orange (Patagonie). Nous la dédions à M. LEVINSEN, qui, le premier, a fait connaître des Spirorbes à 4 sétigères thoraciques.

Nous n'avons trouvé aucun caractère différenciant le tube de ce spirorbe de celui du précédent, mais la distinction des deux espèces est facile grâce à l’opercule. Chez Sp. Levinseni, il se compose uniquement d’une plaque terminale, assez mince, sensible- ment plane, sur laquelle on distingue, plus ou moins excentriquement, une cicatrice qui correspond probablement à un talon ; celui-ci fait toujours défaut. L'incubation des embryons a lieu très vraisembla- blement dans le tube; pourtant, étant donnée la structure de l’opercule, il nous reste quelques doutes.

L'opercule manque souvent chez les exemplaires extraits des tubes, et il est nécessaire de bien préciser les autres différences avec Sp. Lebruni.

Les soies à aileron crénelé (7 à gauche, 9 à droite) ont les dents de la serpe à peu près de même grosseur que chez Sp. Lebrunt ; mais l’aileron est beaucoup plus net ; il porte, entre autres, deux paires de grosses dents très développées.

Les uncini, de même largeur que chez Sp. Lebruni, sont plus courts. Chez un exemplaire, au thorax, ils avaient respectivement, du côté gauche, 48, 50 et 40 & et de 10 à 15 dents; les uncini du sétigère droit avaient une longueur de 23 w.

Les soies de l'abdomen sont nettement en cornet comprimé. En résumé, cette espèce se rapproche surtout de Sp. Claparedei ; c’est un Sp. Claparedei de grande taille, ayant perdu le petit talon de l’opercule, avec3° tore uncinigère gauche constant et bien développé.

Habitat : Côte de Patagonie.

208 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

S IV. S.-genres Romanchella et Leodora.

16. Spirorbis (Romanchella) Perrieri n. sp. (Fig. 15, a-c, 16 a-b, 17).

Sous ce nom, nous groupons des Spirorbes du cap Horn dont on

serait tenté de faire plusieurs espèces. N'ayant pu trouver de. caractère fixe pour séparer les variétés ci-dessous énumérées, nous .

préférons les laisser réunies sous un nom collectif. La valeur du mot espèce est d’ailleurs subjective. Il suffit de préciser les affinités des groupements établis, quelle que soit la rubrique sous laquelle on les range.

Var. x. Nous l'avons rencontrée d’abord sur des oursins (Echinus margarilaceus, Goniocidaris sp.) dragués par 80 brasses, au Cap Blanco (Patagonie occidentale) et appartenant à la Faculté des Sciences de Lyon.Nous l’avonsobservée aussi parmiles matériaux de la mission du cap Horn, sur des piquants de Goniocidaris cana- liculata, À. Ag.

Le tube a de 1 à 2 "/, de diamètre ; il a une section assez régulière- ment circulaire, un enroulement plan ou légèrement scalariforme ; il y a quelquefois indication de crêtes longitudinales et généralement la bande inféro-externe de la spire est régulièrement ponctuée par une ligne d’anfractuosités.

L'opercule (fig. 17) se compose d’une plaque mince, elliptique, peu concave. Le talon est long, solide et aplati en une lame qui est fendue à l'extrémité, suivant son plan de symétrie ; elle porte sur ses bords latéraux des tubercules, dont une paire est plus développée. Le talon, chez les individus jeunes, a souvent une forme qui rappelle celui de la var. y dessiné fig. 16 b. Les soies du premier sétigère n’ont pas d’aileron crénelé ; au troisième sétigère, il y a des soies en faucille striée parfaitement nettes. L'abdomen se compose d’un assez petit nombre de segments. Les œufs sont pondus dans le tube.

Var. 6. Très abondante sur des algues draguées dans la baie Orange (Patagonie) ; quelques exemplaires isolés sur des Pecten, des Flustres, âes piquants de Goniocidaris canaliculata À. AG. de même provenance.

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MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 209

Le tube est très constant de forme et d'ornements. Il est plan, cmpâte le support ; son diamètre est de 1°/,, 5 à 2"/3, 5 : il présente quatre crèfes longitudinales séparées par des lignes d'anfractuosités. L'opercule (fig. 15, a-b) se distingue de celui de la variété « en ce que la plaque terminale, au lieu d’être mince, est épaisse et se décompose en une série de quatre ou cinq feuillets, qui ont l'aspect de lames de clivage et forment d’ailleurs un ensemble extrêmement cohérent. Le talon ne se distingue pas de celui de la variété «.

Les embryons sont incubés dans le tube.

Les soies du premier séligère (fig. 15 c) sont simplement limbées, de petite taille, et peu nombreuses (3-4 à gauche ; 5-6 à droite). Les rames dorsales des 2°et3° sétigères comprennent un bien plus grand nombre de soies ; au on en compte six en faucille striée. Sur un exemplaire adulte, nous notons, pour les uncini, les nombres et dimensions ci-dessous :

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Epaisseur : 2 pu à 2 u, 9. 12 segments abdominaux environ.

Var. 4. En grande abondance sur des Laminaires et des Modio- larca fuegensis Mas. et Rocx. rapportées par la Mission Française au cap Horn.

Tube de 2°/, de diamètre, à enroulement plan; offrant une crête bien développée et une ligne d’anfractuosités sur le bord externe de la spire. D’autres tubes atteignent 3 "/, et présentent 2 ou 3 crêtes. Les soies sont comme dans la variété 8, mais les uncini nous ont paru un peu plus épais (3 w-3 uw, d) pour une même hauteur.

L'opercule (fig. 16,a-b) a un talon voisin de celui des variétés z et 8 ; mais 1l est plus large et un peu plus court ; les tubérosités latérales paraissent aussi plus nombreuses; mais ce qui distingue cette variété, c'est qu'au lieu d’un opercule unique, on en observe quatre ou même cinq emboités l'un dans l'autre; les plaques terminales sont plus elliptiques et plus évasées que dans les cas précédents.

A côté de ces exemplaires, nous en trouvons qui atteignent respectivement 4"/, et5"/n, les premiers à tube très épais, dépourvus de crêtes longitudinales et à ombilic presque nul , les seconds avec deux crêtes du côté concave de la spire. L'opercule de ces gros échantillons est toujours unique (comme celui des #rès jeunes

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210 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

individus qu'on trouve à côté d'eux). Les uncini atteignent et dépassent la hauteur de 100 &.

Nous avions d'abord fait des trois variétés, , 8, y, trois espèces se distinguant par l’opercule. Mais les individus de grande taille et à opercule simple, que nous ne croyons pas devoir séparer de la variété y rendent cette distinction difficile. Nous considérons tous ces Spirorbes, qui proviennent d’une même région, qui, par leurs soies, le talon de l’opercule, etc., sont si uniformes, comme un ensemble se différencient peut-être des espèces encore mal caractérisées à l’époque actuelle. Des faits observés, il nous semble résulter qu’il y a une série de mues de l’opercule; mais ce phénomème paraît limité à la période moyenne de la vie des individus. Nous ne voulons pas trancher ces questions d’une façon plus absolue. Avec des matériaux plus abondants, observés vivants si possible, on pourra probablement les résoudre.

Quoiqu'il en soit, ces diverses formes ont en commun beaucoup de caractères et notamment l'absence d'aileron crénelé aux soû du premier séligère. Par elles s’isolent par rapport aux autre: Spirorbes sénestres. C’est ce qui nous détermine à créer pou elles un sous genre Romanchella (1).

Habitat : Côte de Patagonie.

17. Spirorbis verruca FaBr.

D’après la description de LEVINSEN, Sp. verruca paraît devoir se placer ici et par conséquent appartenir au s. g. Romanchella. Mais cette espèce n’est pas suffisamment connue pour qu'il soit possible de préciser. Les tubes que nous a adressés M. LEVINSEN étaient vides. Ils portaient, il est vrai, d’autres Spirorbes plus petits, de tube absolument identique, mais ayant des soies à aileron crénelé au 1” sétigère, et appartenant très probablement à une autre espèce (c’étaient des Sp. granulatus L. var. affinis Lev.).

Les gros tubes rappelaient ceux de 4°/, de la var. y de Sp. Perrieri, par l'absence de stries longitudinales. Mais l'espèce de FABRICIUS est certainement différente de Sp. Perrieri: elle a 12 branchies (LEVINSEN), tandis que les plus gros exemplaires de Sp. Perrierin'en ont que 7. Sp. verruca serait à réétudier pour qu'on pût dèter- miner si sa place est bien dans le s. g. Romanchella.

(1) La Romanche est le navire français qui porta la Mission au Cap Horn.

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MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 211

18. Spirorbis lœvis QTRFG.

Nous ne parlons de cette espèce que d’après CLARAPÈDE (3). Nous avons tiré de cet auteur les renseignements qui figurent dans le tableau général. L’opercule, dessiné déjà par DE QUATREFAGES (13, PI. xv, fig. 26), n’est pas décrit avec précision; il doit se rapprocher de celui de Sp. Pagenstecheri. Par les caractères de ses soies, Sp. lœævis se rapprocherait de Sp. verruca, et de Sp. Perrieri. Mais ce n’est probablement qu'une analogie accidentelle et cette forme paraît assez isolée. Elle ne fait vraisemblablement pas partie du s. g. Romanchella et si des études ultérieures conduisent à en faire le type d'un sous-genre, le nom de Zeodora, proposé par DE ST-JOSEPH, devra être choisi.

Habitat : Golfe de Gascogne (Guethary), golfe de Naples.

V.— S.-Genre Læospira.

Trois sétigères thoraciques. Soies du sétigère à aileron crénelé ; soies en faucille striée au sétigère. Test est opaque.

19. Spirorbis borealis Dupin. (Fig. 18, a-e).

Cette espèce est certainement contenue dans la Serpula spirorbis de Linné. C’est une des plus communes et des mieux identifiées par les auteurs. Elle est, de beaucoup, la plus abondante sur les algues (Fucus, Laminaria) à la côte. Sa synonymie et sa description complètes se trouvent dans DE ST-JosEPH (14, p. 345-350, fig. 381- 386). Nous avons constaté sur elle un certain polymorphisme, soit dans le tube, soit dans l’opercule. Les individus qui sont fixés sur les pierres ont un ombilic en général plus petit et l’enroulement est moins régulier que sur les exemplaires des algues (1). L'opercule a,

(1) Ces deux variétés de tubes offraient, d’ailleurs rarement, une strie longitudinale. Chez les exemplaires de Sp. granulatus Var. tridentatus Lev. du Musée de Copenhague, que nous avons reconnu être des Sy. borealis, il y a régulièrement 3 stries longitudinales.

212 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

sur ces derniers, le plus souvent, une forme rappelant de très près celle que nous avons figurée pour Sp. armoricanus (fig. 5 à), tandis que, chez les exemplaires fixés sur les pierres, le talon est plus développé et son extrémité inférieure est dilatée en une saillie, généralement munie d’une ou de plusieurs échancrures (fig. 18 a); cette dilatation est séparée de la lame terminale par une partie plus étroite ou gorge (fig. 18 b). Sur des individus jeunes, les deux parties qui comprennent la gorge sont souvent également développées et l’ensemble a la forme d’un bouton de manchette. 9 branchies chez les jeunes, 10 chez les adultes. La serpe des soies à aileron crénelé (fig. 18cetc’) du 1” sétigère a des dents très peu marquées; la forme est un peu variable. Il y a des soies en faucille striée au sétigère (fig. 18 d). Les uncini, à gauche, atteignent une longueur de 50 w. Le pigment du tube digestif, dans la région hépatique, est bleu indigo. L’abdomen compte de 20 à 35 sétigères. Les soies abdominales (fig. 18 e) sont nettement géniculées. Habitat : Atlantique, Manche, toutes les mers septentrionales.

20. Spirorbis mediterraneus n. sp. (Fig. 19, a-c).

Nous créons cette espèce pour quelques exemplaires de Spirorbes trouvés sur des tubes de Serpules qui nous ont été rapportés de la Ciotat par M. Kozxer. Le tube est de petite taille (1 "/, de dia- mètre) ; l'enroulement est plan ; l’ombilic petit ; il y a généralement des crêtes longitudinales sur la face supérieure de la spire et la face inférieure empâte le substratum. Le tube est assez fragile.

L’opercule (fig. 19 a) est formé d’une plaque concave se reliant oraduellement à un talon assez large et dilaté dans sa portion terminale, qui forme trois expansions mousses à 120° l’une de l’autre. Cet opercule n’est donc pas très différent de celui de Spirorbis borealis. Les soies du 1°” sétigère (fig. 19 D) ont un aïleron très accusé et une serpe garnie de stries profondes, ce qui n’est pas le cas chez les Sp. borealis. Au sétigère, il y a des soies en faucille striée. L’abdomen compte de 15 à 20 sétigères. L'espèce est proba- blement très pigmentée, car les soies du 1" sétigère, malgré leur séjour dans l'alcool, sont encore colorées en jaune. En résumé, Sp. medilerraneus est une forme vicariante de Sp. borealis.

Habitat : Méditerranée.

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MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 213

21. Spirorbis cornu-arietis (PxiLiPpi) Mar. et BOBRETZKI. (Fig. 20, a-b).

Cetle espèce est commune à la côte, dans la Manche, sur les pierres et sur les Zéhothamnion polymorphum. Marion et BoBreTzKY (9, p. 99, fig. 27)-ont donné d'elle une bonne description et d'excellentes figures ; nous y renvoyons. Notons seulement que, contrairement à l’assertion des deux auteurs, nous avons nettement trouvé, au sétigère thoracique, des soies en faucille striée. Les soies du 1” sétigère (fig. 20 D) ont un aileron crénelé et une serpe à stries très profondes. L’opercule (fig. 20 a)se compose d’une plaque terminale en entonnoir profond, et d’un talon rappelant un peu la forme d’une surface héliçcoïdale. Son pourtour dessine des dents obtuses, dont quelques-unes font saillie à l'extérieur le long de la tige de l’opercule (fig. 20 & et aussi MarioN et BoBRETZKY, fig. 27, AetB).La base de la branchie et la membrane thoracique sont souvent pigmentées en rouge. Les branchies, au nombre de 10, sont très exactement figurées par MaRION et BOBRETZKY.

Quand l’opercule est enlevé, il est presque impossible de distin- guer cette espèce de Sp. militaris CLPDE.

Habitat : Manche, Méditerranée.

22. Spirorbis Beneti Marion. (Fig. 21).

Mario a décrit (10, p. 29-31, fig. 8) cette espèce avec beaucoup de précision. Mais dans sa description, rien ne permet de décider si la spire est dextre ou sénestre. Nous avons vérifié qu’elle était sénestre, sur un individu que M. MarioN a eu l’amabilité de nous envoyer.

C’est une forme très voisine de Sp. cornu-arietis. Au sétigère, il y a des soies spéciales (MARION. fig. 8, d) qui ne seraient pas recour- bées en faucille; cela peut tenir à une flexion momentanée de l'extrémité. L’opercule (nous avons reproduit fig. 21 une des figures de Marion) est transparent et de forme très caractéristique ; le talon est une longue lame, pourvue sur sa ligne médiane d’une forte crête qui porte elle même trois dents longues et arquées.

Habitat : Cette espèce a été trouvée au large de Marseille sur les cirres d'Antedon phalangium MüLLER.

214 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

23. Spirorbis Kœhleri n. sp. (Fig. 23, a-d). ;

Trouvé sur des Bryozoaires dragués à la Ciotat par M. KœxLer. Le tube, sénestre et fragile, ne dépasse pas 1”/,,5 de diamètre ; il présente des crêtes longitudinales et quelques épines peu saillantes. L'ombilic est petit. L’opercule (fig. 23 a) est composé de deux ou trois opercules élémentaires superposés ; chacun d’eux est formé par une plaque terminale légèrement concave et un talon s’insérant à la périphérie de la plaque ; ce talon est renforcé suivant son axe de symétrie et plus mince de part et d'autre de l’axe ; il est d'autant plus développé que les plaques sont plus récentes. Chaque plaque (fig. 23, b,23 c) présente, à l'endroit d’où part l’axe du talon, une cavité en forme de boutonnière (0, fig. 23 b) vientse loger l’extrémité du talon de la plaque supérieure ; les divers opercules élémentaires sont donc assez solidement liés les uns aux autres. Sous la dernière plaque formée (la proximale), chez l'adulte, s’est développé un sac calcaire, dans lequel sont incubés les embryons. Nous n'avons malheureusement pas pu disposer d’un nombre suffisant d’exem- plaires, pour étudier cette disposition en détail ; nous pouvons cependant affirmer que l’incubation a lieu sous l’opercule.

Il y a 3 anneaux sétigères au thorax et environ 12 anneaux à l'abdomen. Au sétigère thoracique, les soies (fig. 23 d) offrent un aileron crénelé peu nettement séparé de la serpe; les stries de celle-ci sont fines. Il y a des soies en faucille striée au 3*sétigère.

Habitat : Méditerranée.

24. Spirorbis Bernardi n. sp. (Fig. 23).

Trouvé sur les piquants d’un Cidaris metularra Lam. (collection du Muséum). Origine probable : Océan Indien.

Cette espèce est voisine de la précédente; les soies des divers anneaux ont les mêmes caractères. Les différences sont dans l’oper- cule. Il est anssi composé (fig. 24 a) de 3 ou 4 plaques concaves superposées, munies chacune d’un talon ; mais elles ne s’articulent

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MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 219

pas les unes avec les autres, au moyen de boutonnières, comme dans l'espèce précédente ; elles sont seulement emboîtées. De plus, comme le montre la fig. 24 b, les opercules élémentaires ont une forme très nettement distincte ; chacun offre, dans la partie le talon se raccorde avec la plaque terminale, un bourrelet fortement saillant. Le talon est plus petit et est aplati. Au-dessous de cet opercule, il s’est formé un sac calcaire, assez volumineux, à paroi criblée de pores, dans lequel sont incubés les embryons (fig. 24a ets. fig. B. et C. page 190).

Les uncini thoraciques de gauche ont 45 w de longueur sur 2 y d'épaisseur.

25. Spirorbis militaris CLPDE. (Fig. 25, a-c).

Cette espèce, de grande taille, est assez commune dans la Manche, à la côte, sur les pierres et dans les Z2{hothamnion : son tube est alors souvent encroûté par l’algue calcaire ; on ne distingue que l’ouverture exactement circulaire. L'extrémité du tube est presque toujours redressée. Cette espèce est certainement identique à la Pileolaria militaris CLPDE (CLAPAREDE, 2, PI xv1, fig. 5).

L'animal est fortement pigmenté en rouge, même sur sa membrane thoracique et sa branchie. L’axe des rayons branchiaux est très gros (cf. S. cornu-arietis, PL. XII, fig. 27 de MaRION et BOBRETZKY) ; mais la barbule terminale est longue et fine. La forme de l’opercule (fig. 25 a) a été très justement comparée par CLAPARÈDE à un bonnet de police. La surface terminale convexe est garnie sur son pourtour de hautes crêtes dentées, découpées en dents élégantes, nombreuses surtout du côté dorsal ; on trouve même quelquefois, comme cela a lieu dans l’exemplaire figuré, une rangée de denticulations supplé- mentaires. Les faces latérales de l’opercule constituent un cylindre fortement évidé du côté dorsal et, au contraire, à paroi pleine du côté ventral. Ce cylindre n’est autre chose que le talon operculaire. Celui-ci formait déjà une surface concave vers l’intérieur du rayon operculifère chez Sp. Bernardi et Sp. Kœhleri; il devient ici un véritable cylindre. Sous la calotte formée par l’ensemble de l’oper- cule, a lieu l’incubation des embryons. La différenciation de l’oper- cule en sac incubateur se fait ici, sans adjonction de pièces nouvelles,

216 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNILe

par un processus distinct de celui que nous avons trouvé chez Sp. Pagenstecheri et les espèces voisines. Nous reverrons plus loin un cas très voisin de celui de Sp. mililaris chez Sp. granulatus.

SALENSKY (15), qui a étudié avec détails le développement de cette espèce, dit (p. 182) que, sur les larves venant de se fixer, l’opercule nouvellement formé «se constitue d’une tige et d’un couvercle ; seulement la plaque est concave au lieu d’être convexe ». Donc; à ce stade, l'opercule de Sp. militaris rentre dans le schéma général.

Les soies du 1” sétigère (fig. 25 b), uettement colorées en jaune, sont fortes et peu nombreuses (4 ou 5) ; leur aileron crénelé est bien développé et les stries de la serpe sont très profondes.

Il y a, au sétigère, 2 ou rarement 4 soies en faucille striée diffi- ciles à apercevoir. Les uncini du thorax (fig. 25 c) portent 10 à 15 dents relativement bien développées. Il y a une vingtaine d’anneaux abdominaux. Ils ont, du côté droit, de 40 à 50 de longueur.

L'espèce que LANGERHANS (5, p. 123, fig. 41) décrit sous le nom de Sp. granulatus (L.) Joaxsrox, et dont M. DE MARENZELLER nous a envoyé unê préparation, est voisine de Sp. militaris. Elle n’a pas de soies en faucille striée au sétigère : LANGERHANS, qui les con- maissait bien, ne.les a pas trouvées et nous n’avons pas été plus heureux sur les trois exemplaires que nous avons examinés. L’oper- cule est un peu différent ; le dôme terminal porte des aspérités moins nombreuses et moins pointues: nous n'avons pas pu nous rendre compte de la forme des parois latérales. Tous les autres détails d'organisation concordent si bien que nous n’hésitons pas à considérer l'espèce de LANGERHANS comme une simple variété de Sp. militaris. Nous réservons le nom spécifique granulalus pour l'espèce suivante, voisine, mais très nettement distincte de celle de CLAPAREDE et LANGERHANS.

Habitat : Manche, Madère, Naples.

(nec LANGERHANS). (nec FABRICIUS).

LS. granulatus ; S. carinatus ; S. affinis de LEVINSEN. | (Fig. 26).

26. Spirorbis granulatus LINNÉ

LEVINSEN (7, p. 209) avait d’abord séparé les trois espèces granulatus L.., carinatus Moxr. et affinis n. en se basant sur l'aspect du tube ; mais il émettait déja des doutes sur leur validité; en

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MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 2]7

1886 (8, p. 300), il a reconnu que S. affinis était une variété de Sp. carinatus ; et il a vu depuis (x litteris) que les trois espèces n'en faisaient qu'une. Nous nous rangeons à son avis (1).

L'espèce granulatus, telle que nous la concevons, a un tube de 2 à 3 "/n de diamètre, très variable comme striation (voir LEVINSEN, ‘?, pl. 3, fig. 7, 8 et 9). L'opercule incube les embryons; il ressemble beaucoup à celui de Sp. militaris CLPDE : la plaque terminale, est en forme de dûme convexe ; le talon est transformé en une surface cylin- drique courte d’un côté, très longue du côté opposé et légèrement fendue à son extrémité inférieure (fig. 26).

Au sétigère, il y a des soies à aileron crénelé semblables à celles de Sp. borealis: aileron bien développé, échancrure très forte, serpe à dents fines (LEVINSEN, ‘?, fig. 8); soies en faucille striée au 3 sétigère.

Les uncini thoraciques sont bien développés ; ils atteignent 70 u à droite, 45 w à gauche, sur 4 & d'épaisseur. Il y a une vingtaine d’an- neaux abdominaux.

Habitat: Groënland, Islande, Nouvelle-Zemble ; substratums variés.

Exemplaires communiqués par M. LEVINSEN.

27. Spirorbis Langerhansi n. sp. (Fig. 22).

Trouvé sur les piquants d’un Cidaris Thouarsi provenant de Panama (collection de la Faculté des Sciences de Lyon). Ce Spirorbe a un tube sénestre, à paroi assez épaisse, et de section plus ou moins quadrangulaire. [l'offre des stries d’accroissement fines et serrées et fréquemment des crêtes longitudinales. L'opercule, en calcaire extrêmement poreux, à la forme d’un cône assez régulier, dont la base, située à l'extrémité distale, est légèrement convexe (fig. 22). Les embryons sont incubés à l'intérieur de l’opercule. Dans les exemplaires que nous avons eus sous les yeux, nous n'avons pas trouvé race de talon: peut-être faut-il considérer cet opercule comme une formation secondaire comparable au sac incubateur de Sp. Bernardi, et précédée, dans l’ontogénie, par un opercule conforme au schéma général.

218 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

Les soies du 1” sétigère ont un aileron crénelé bien développé et une serpe bien dentée à la base. Au sétigère, les soies sont peu nombreuses et, parmi elles, il y a quelques soies en faucille striée.

Habitat : Panama.

28. Spirorbis Môrchi Lev.

La caractéristique que LEVINSEN (7, p. 208) a donnée de cette | espèce est insuffisante, car elle ne nous permet pas de la classer ni #4 de la différencier. Le Musée de Copenhague n’en possède que des : tubes vides et un exemplaire incomplet sans opercule. Par la forme et les dimensions du tube, les caractères et la coloration de l’animal, l'espèce paraît voisine de Sp. militaris et Sp. cornu-arietis ; elle est + néanmoins distincte, croyons-nous, les soies à aileron crénelé du 1* sétigère étant en nombre au moins double. L'étude de l’opercule Le s'impose. |

Habitat: « in Pectine islandico e Groenlandia et Islandia » $ (LEVINSEN). n 2

Exemplaires communiqués par M. LEVINSEN. Et. IT. CONSIDERATIONS GENERALES Fa

De l’étude des espèces, nous croyons pouvoir déduire un certain , 34

nombre de résultats d'ordre général.

$ 1. Position des Spirorbes dans les Serpuliens.

Il nous semble, et nous en développerons ailleurs les raisons, que, dans la famille des Serpulidæ, la région thoracique est d'autant plus réduile que l’évolution des formes a été poussée plus loin. Cette réduc- tion atteint son maximum dans le genre Spérorbis, le thorax n’a que 3 ou 4 anneaux sétigères. Le groupe des Spirorbes se trouve ainsi nettement isolé de tous les autres Serpuliens à tube calcaire : ceux-ci ont en effet généralement 7 sétigères thoraciques ; ce nombre

L- ‘4 < ‘à ; F. 2 s

# ù

MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 219

descend à 6 chez Hyalopomatus Mar. et Ditrupa BERrK. (1), à 5 dans des cas individuels, chez quelques espèces de Salmacines, et régulièrement chez Josephella Marenzelleri nobis (1).

Considérons maintenant des genres, tels que Serpula, le tube décrit des courbes irrégulières (2) ; nous y voyons, chez une même espèce, l’opercule porté par un rayon de la branchie situé, tantôt à droite, tantôt à gauche. Au contraire, chez Spirorbis, l'enroulement du tube en spirale devient régulier ; le sens de cet enroulement est fixe chez une espèce donnée et Loperenls a aussi une position fixe : il termine le rayon branchial, à droite chez les espèces dextres, à gauche chez les espèces sénestres. Il y a donc, chez Spirorbis, fixation d’une particularité ailleurs variable, ce qui est un caractère de différenciation plus complète. Nous voyons en même temps la position de l’opercule en relation avec le sens de l’enroulement du tube.

$ 2. Les Spirorbes sont asymétriques.

En examinant avec soin les diverses espèces, nous avons constaté que chez toutes, l'anatomie est profondément influencée par cette dernière donnée. Il y a, chez tous les Spirorbes, asymeétrie très marquée des anneaux, au thorax et à l'abdomen ; les uncini sont plus nombreux et plus grands du côté concave du corps (appliqué contre le bord interne de la spire). Un fait de cet ordre, et le plus saillant peut-être, est l'existence d’un anneau thoracique repré- senté, à gauche seulement, chez quelques espèces sénestres, à droite seulement, chez quelques espèces dextres ; c’est-à-dire dans tous les cas, seulement du côté concave du corps.

Un autre fait n’est pas moins net. Chez toutes les espèces nous avons pu étudier complètement l'abdomen, le nombre des rangées d’uncini est plus considérable du côté concave que du côté convexe. Donc, de ce côté, on trouve un plus grand nombre d’anneaux abdo- minaux représentés par des soies. Il faut se rappeler que chez

(1) Le genre Placostequs PHiL. appartient aux types à 7 sétigères thoraciques : le 19° a perdu ses soies.

(2) On trouve des cas où, sur un même individu, le tube s’enroule successivement dans le sens dextre et dans le sens sénestre.

220 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL. :

pare: une D èr

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Spirorbis, le thorax est séparé de l'abdomen par une région achète; c'est dans cette région, vers son extrémité postérieure, qu'il existe du côté concave du corps des rangées de soïes absentes du côté opposé. La différence entre les nombres de rangées des deux côtés monte quelquefois jusqu’à 4.

Mr 6

d'eet. LRt

Voici quelques nombres à l'appui de ces considérations (on en 4 trouvera beaucoup d’autres dans la partie taxonomique de ce travail): FR TA

Nu

cs x

Hauteur maxima, en y, des Nombre d’uncini aux

uncini thoraciques tores thoraciques : ge

Côté concave | Côté convexe

Côté concave | CO CON Vege | 2e sét. | 3e sèt. | 2e sét. | 3 sét.

S. Pagenstecheri 34 21 28 39 28 28 id. 27 36 18 29 S. aggregatus 29 20 17 34 15 13

Aïnsi tout l'appareil uncinigère est plus développé du côté du corps qui s'applique contre la face interne de la spire.

Or, observons un Spirorbis, au moment il sort de son tube ; c’est la face dorsale qui est tournée vers la partie du tube appliquée contre le support ; la face ventrale regarde le côté libre du tube. C’est en s'appuyant sur les uncini situés du côté interne de la spire que l’animal se déplace. Les parapodes situés de ce côté jouent donc un rôle plus actif dans la progression, et en conséquence ils se sont développés davantage ou ont été moins éprouvés par les régressions qui ont eu pour siège la région séparant le thorax de l'abdomen. La musculature est beaucoup plus développée tout le long du corps, du côté concave et pour la même raison. Au contraire, les soies du 1* sétigère sont toujours moins nombreuses du côté concave que du côté convexe (1 ou 2 en moins): ce sont évidemment pour l'animal des armes offensives et il est certain que, du côté convexe, leur action est moins gênée que du côté concave (1).

(1) Les viscères ont été rejetés du côté convexe ; cela est particulièrement net pour l'ovaire : les ovules, en voie de maturation, sont toujours de ce côté du corps. La partie du tube digestif appelée « estomac » fait également hernie du côté convexe.

:

MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 221

Nora. M. PERRIER a eu l’amabilité de présenter de notre part à l’Académie des Sciences, une note préliminaire nous résumions les résultats généraux de notre travail (CAULLERY et MESNIL: Sur les Spirorbes, asymétrie de ces Annélides et enchaînement phylo- génique des espèces du genre. G. R., T. cxxIv, 4 janvier 1897, p. 48-50). Il a développé à ce sujet quelques considérations (Ibid., p. 90-51) sur lesquelles nous croyons devoir nous expliquer ici ; les divergences qui semblent exister entre son opinion et la nôtre sont très légères, n'existent même peut-être pas au fond, et tiennent à la rédaction trop concise que nous avions adoptée. Nous pensons en effet, avec M. PERRIER, que l'enroulement spiral du tube chez les Spirorbes est la conséquence d’une asymétrie préexistante chez la larve et qu'elle est une manifestation plus accentuée de celle que l’on trouve dans d’autres Serpuliens (notre mémoire écrit en novembre dernier interprète ainsi la phylogénie des Spirorbes). Nous ne pouvons d’ailleurs préciser pour le moment quand ni pourquoi cette asymétrie a apparu. Est-ce, par exemple, une adaptation à des supports exigus qui a provoqué au début l’enroulement spiral du tube ? A-t-il surgi subitement des larves asymétriques, sécrétant en conséquence un tube spiral et formant la souche du genre Spérorbis ? On est presque toujours ramené à une alternative analogue et aussi peu accessible à l’investigation, dans les problèmes de phylogénie. Mais toutes les particularités d’asymétrie, que nous signalons ne relèvent pas de cette période que nous pouvons appeler primitive. Nous y rapporterions la forme du tube et peut-être la fixité de la position de l’opercule. Toutes les autres nous paraissent postérieures ; nous remarquons qu'elles ont pour résultat de faciliter les mouve- ments de l’animal ; la doctrine de LAMARCK nous semble fournir d'elles l'explication la plus plausible et en tout cas la plus tangible. Le genre Spirorbe s'étant formé avec son tube spiral, par suite des mouvements que l'animal devait exécuter dans ce tube, les organes directement ou indirectement liés à la locomotion se sont hypertro- phiés du côté concave. Ainsi se sont. réalisées des dispositions d'asymétrie d’une période secondaire; ce sont celles qui nous semblent les plus intéressantes au point de vue de la théorie de l’évolution, celles dont on peut le mieux connaître le déterminisme ; celles sur lesquelles nous avons voulu appeler surtout l'attention. Or c’est à une distinction analogue qu’arrive M. Ep». PERRIER. Nous ajouterons qu'en somme l'asymétrie des Pagures correspond tout

222 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

entière à la période secondaire de celle des Spirorbes, et qu’au contraire celle des Gastéropodes correspond à la période primitive. Si d’ailleurs Spirorbes et. Gastéropodes sont tous deux asymétriques et ont tous deux un test spiralé, il ne saurait être question entre eux, ainsi que M. PERRIER le fait remarquer, que de ressemblances par convergence.

S 3. Phylogénie des espèces.

Ainsi donc, l’anatomie des Spirorbes est très nettement modifiée par leur habitat dans un tube spiral. Cette circonstance a provoqué une adaptation spéciale de tout le corps ; l’asymétrie qui en résulte est un des traits dominants de l'organisation générale. Nous croyons donc très naturel de supposer que l'établissement de cette asymétrie a été un des stades initiaux dans la différenciation des espèces à l’intérieur du genre. Il a se former des séries, dextres et sénestres, parallèles, mais indépendantes. Si donc, nous cherchons à reconsti- tuer la filiation des espèces actuelles, nous séparerons d’abord les espèces dextres des espèces sénestres. Sans faire valoir les considéra- tions précédentes, LEVINSEN avait déjà pris ce caractère pour base de sa classification.

Avant d’aller plus loin dans l'étude de l’évolution des Spirorbes,

nous devons nous demander si la quatrième armature uncinigère thoracique qui existe du côté concave de l’animal, chez un certain nombre d'espèces, est le reste d’un quatrième anneau possédé par les ancêtres immédiats des formes actuelles, ou bien si c’est une acquisition nouvelle.

La place des Spirorbes, parmi les Serpuliens, indique nettement qu'ils dérivent de formes munies d’un plus grand nombre d’anneaux thoraciques sétigères ; il semble donc naturel d'admettre que la qua- trième armature thoracique est le reste de l’état qui a précédé celui réalisé chez la plupart des formes actuelles (3 sétigères thoraciques).

Nous pouvons donc imaginer un Prospirorbis à 4 sétigères thoraciques, chez lequel se manifestent simultanément deux tendances: réduction du nombre des anneaux thoraciques et

à

MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 223

asymétrie corrélative du sens de l’enroulement ; la première conduit à des formes n’ayant plus que trois sétigères thoraciques, la seconde à des formes chez lesquelles la quatrième armature persiste du côté concave (nous appellerons celles-ci formes Para pour abréger). L'arbre généalogique suivant exprime les affinités de nos sous-genres ainsi interprétés :

Spirorbes sénestres à 3 sétigères thoraciques

Paradexiospira

Paralæosprra

Dexiospira

Prospirorbis (4 Sétigères thoraciques complets)

Telle paraît être la manière la plus naturelle de les concevoir. Elle prête cependant à une objection sérieuse que nous allons exposer. Certaines espèces du genre Paralæospira acquièrent relativement tard les uncini du sétigère thoracique (nous avons

observé le fait avec la plus grande netteté chez Sp. patagonicus

n. sp.). Chez Sp. Claparedei n. sp., ces uncini n'apparaissent même que sur l'individu presque adulte; ils sont encore relativement peu développés et peu nombreux, alors que l’animal est génitalement mûr. Sils avaient la signification d'un anneau antérieurement existant, aujourd’hui incomplet et en voie de disparition, ils auraient dû, suivant les lois générales de l’'embryogénie, apparaître de bonne heure et non avec un retard très marqué sur les trois anneaux antérieurs. Leur manifestation tardive indique au contraire qu'il faut y voir une acquisition nouvelle. Et nous arrivons ainsi à la notion d'un Prospirorbis à 3 sétigères thoraciques.

224 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

Prospirorbis dérive certainement de formes qui possédaient plus de trois sétigères thoraciques. On pourrait done considérer la quatrième armature thoracique comme la réapparilion d’un carac- tère ancestral amenée par l’adaptalion à un tube spiral. Mais cette explication n’est pas non plus très satisfaisante. Nous admettons volontiers avec Dozzo que l’évolution n’est pas régressive. Une formation perdue ne se réacquiert pas ; c'est un crgane nouveau qui est créé par la fonction nouvelle. Si donc nous tenons compte du mode d'apparition du quatrième sétigère thoracique chez Sp. Cla- paredei, nous inclinons à y voir un anneau nouveau intercalaire. Et les Spirorbes nous offriraient un cas le déterminisme de l'apparition d’un {el anneau serait tout à fait tangible.

En résumé, les deux hypothèses possibles sur le nombre d’anneaux sétigères du thorax nous apparaissent avec un degré égal de probabilité, et nous avons tenu à en bien montrer le pour et le contre. En l’état actuel de nos connaissances, il nous paraît impossible de conclure en faveur de l’une ou de l’autre.

Pour pousser plus loin l'analyse et discuter les affinités des espèces, nous poserons les deux principes suivants :

Les soies simplement limbées ont précédé les soies à aileron crénelé ; de même les soies en faucille striée sont une acquisition secondaire. Dans l’ontogénie, ce sont d’ailleurs les soies limbées qui apparaissent les premières ;

Les opercules adaptés à l’incubation des embryons nl moins primitifs que ceux des formes les embryons se développent dans le tube. Partout aussi, à un certain stade ontogénique, l’opercule est formé par une plaque terminale et un talon ; les opercules incubants en dérivent ontogénétiquement. Appliquons eu ces principes à nos Sous-genres.

a. Paradexiospira. Sp. violaceus est une forme peu diffé- renciée en ce qu'elle n’a pas de soies à aileron crénelé. Sp. vitreus a un opercule {très modifié, dont le talon s’atrophie chez l’adulte ; l'examen des soies du sétigère conduit aussi à en faire une forme très différenciée. Le cas de Sp. cancellatus est plus

embarrassant, à cause des soies dorsales du sétigère droit, qui

nous ramènent à la question que nous venons de discuter longue- ment, sans faire aboutir à une conclusion. La présence de ces soies

MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 225

est aussi compatible avec l’une qu'avec l’autre des hypothèses : dans celle d’un Prospirorbis à 4 sétigères thoraciques, Sp. cancellatus serait, parmi les formes actuellement connues, celle qui aurait conservé le type le plus archaïque.

L'existence de l’aileron crénelé aux soies du sétigère fait de Sp. cancellatus un type assez différencié, au moins dans un certain sens.

Les affinités des trois espèces du sous-genre Paradexiospira sont indéniables et son homogénéité ne peut être mise en doute. Le test vitreux de ces espèces rappelle celui des Placostegus.

b. Dexiospira. Nous placerons à la base Sp. spirillum et Sp. armoricanus : ils n’ont pas d’aileron crénelé aux soies du 1% séti- gère, ni de soies en faucille striée au 3°. Certains Spirorbes, voisins de Sp. spirillum, ont acquis un opercule avec chambre incubatrice et ont donné l’espèce corrugatus ; l'évolution, dans le même sens, mais poussée plus loin par une modification des soies du 1* et du sétigères, a donné Sp. Pagenstecherti et Sp. pusillus. Sp. Marioni, qui provient d’ailleurs d’une région géographique très distincte, est difficile à replacer dans cet ensemble.

Des espèces du sous-genre Dexiospira, Sp. spirillum est certai- nement la plus voisine du sous-gènre Paradexiospira : tube vitreux, talon de l’opercule assez voisin de celui de cancellatus et de violaceus, soies du sétigère rappelant celles de Sp. violaceus. Les deux rameaux correspondant à nos deux sous-genres se réunis- sent donc par leurs bases et la création de notre s.-g. Dexiospira se trouve justifiée.

c. Paralæospira. Toutes les espèces ont des soies à aileron crénelé au 1” sétigère ; elles forment un tout très compact. Sp. Malardi, Sp. patagonicus et Sp. Claparedet sont probablement celles l’opercule est le plus primitif. Sp. aggregatus s’isole parune série de différences. Sp. Lebruni est caractérisé par une calcification intense de l’opercule ; Sp. Levinsenti a un opercule nettement modifié par la perte du talon. Notons aussi que chez ces deux dernières espèces, la serpe des soies du 1” sétigère a des dents plus fortes que chez les autres, ce qui est peut-être encore un caractère de différencia- tion.

46

226 MAURICE CAULLERY ET FELIX MESNIL.

d. Romanchella.— Toutes les espècesdus.-g. Læospira forment un ensemble bien homogène, caractérisé, entre autres, par des soîies à aileron crénelé au 1" sétigère. Il nous paraît donc certain que Sp. Perrieri, verruca etlæœvis sont sur des rameaux qui se sont séparés avant la différenciation du s.-g. Læospira. La connaissance impar- faite que nous possédons de Sp. verruca et Sp. lœvis nous empêche de pousser plus loin l’analyse de leur phylogénie. Mais nous démontrons la légitimité de la création d’un sous-genre particulier pour Sp. Perrieri. I y a plus; si l'hypothèse d'un Prosprrorbis à 5 sétigères thoraciques est exacte, le fait que toutes les espèces des sous-genres Paralæospira et Læospira ont des soies à aileron crénelé au sétigère, indique que la branche, qui conduit à Sp. Perrieri, s’est détachée avant la différenciation des deux rameaux des autres sous-genres d'espèces sénestres ; et, dans cette hypothèse, il devient nécessaire de créer le s.-g. Romanchella. Sp. Perrieri contient, comme nous l’avons dit, un ensemble de formes provenant toutes du cap Horn ; il y a formation de plusieurs espèces encore mal définies (au moins à nous en tenir à nos matériaux); la variété 8 seule paraît assez nettement délimitée.

e. Læospira.— Pour classer les nombreuses espèces de ce sous- genre, il nous semble nécessaire de donner à la dentition de la serpe des soies du 1” sétigère une importance phylogénique considérable. Des espèces incontestablement très voisines (Sp. militaris et Sp. cornu-arietis, Sp. Kæhleri et Sp. Bernardi) ont deux à deux des soies à aileron crénelé identiques ; l'opercule, dans ce groupe, parait plus susceptible de variations (Sp. borealis) chez une même espèce.

Nous prenons comme point de départ Sp. borealis ; Sp. medi- lerraneus dérive d’une forme très voisine de Sp. borealis et a été probablement le début d’une série qui comprend Sp. Beneti et Sp. cornu-arielis, puis Sp. militaris l'opercule est devenu incubateur. Nous voyons, d'autre part, que Sp. granulatus L. diffère peu de Sp. borealis ; il fait partie d’une série où, les soies de Sp. borealis n'étant pas modifiées, il y a eu transformation de l’opercule, en vue de l’incubation. Cette série aboutit à Sp. Kæhleri et Sp. Bernardi (acquisition d’un sac calcaire au-dessous de l’opercule, réduction du talon de ce dernier). Sp. Langerhansi, si nos observations sont

er, LUE

1

MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 227

exactes, se rattacherait aux espèces à sac incubateur; il est néanmoins très isolé, et il fait probablement partie d’une série indé- pendante, développée dans l'Océan Pacifique, mais dont nous n'avons entre les mains que ce seul type. Ces considérations peuvent se résumer dans l’arbre généalogique suivant, pour les diverses espèces du sous-genre Zæospira. Bernardi militaris

Koehleri cornu-arietis

Langerhansi pue

Beneti

mediterraneus

/

granulatus

borealis

S 4. Distribution géographique des Spirorbes.

- Les matériaux du cap Horn nous offrent des types nombreux, mais formant des groupes à peine représentés dans l'hémisphère boréal. Il y a tout un ensemble particulier et l’on y remarquera l’absence complète des espèces dextres. Rappelons cependant que Lessox (6) a figuré sous le nom de Sp. antarcticus une espèce dextre provenant des îles Malouines. Le sous-genre Læospira, si bien représenté dans nos mers, n’a pas de représentant au cap Horn. Les espèces de nos mers, à l'exception de Sp. Malardi et peut- être de Sp. lœvis QrG, rentrent toutes dans les sous-genres Para- dexiospira, Dexiospira et Læospira. Le premier d’entre eux paraît être localisé aux mers arctiques (Groënland, Islande, Nouvelle- Zemble), et il tient la place du sous-genre Dexiospira représenté seulement par l’espèce Sp. spirillum dont l'aire est très étendue.

228 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

Les genres Læospira et Dexiospira paraissent être représentés sur toutes les côtes d'Europe, à Madère et tout le long des Etats- Unis d'Amérique. D’une façon générale, nous pouvons dire que l'extension de ces formes est plus grande que celle des formes Para. La Méditerranée a la plupart de ses espèces en commun avec l'Atlantique : Sp. corrugatus, armoricanus, Pagenstecheri, militaris, cornu-arietis ; elle a jusqu'ici, enpropre, Sp. Beneti, Sp. Koehleri, et Sp. mediterraneus (qui n’est qu'une forme représen- tative de borealis).

Il est bien certain que nous sommes loin de connaître tous les Spirorbes. Nous ne possédons presque aucune forme du Pacifique ; et les deux types de Panama que nous avons décrits, se relient d’une façon si peu intime aux autres espèces des sous-genres res- pectifs Dexiospira et Læospira, qu'ils appartiennent peut-être à d’autres groupements ayant la valeur de sous-genres.

Quoi qu'il en soit, nous nous rendons compte de l'importance du groupe des Spirorbes, et nous pouvons dire que, de toutes les branches de la famille des Serpulidæ, c'est celle-là qui paraît s'être le mieux épanouie, et en être devenue le rameau le plus vigoureux. Cet épanouissement a-t-il acquis son entier développement ? Nous ne le pensons pas. S'il est en effet des espèces bien fixées, il en est d’autres qui présentent une grande variabilité dans les caractères| ex : Sp. borealis, granulatus (L.) et surtout Perrieri| et qui donneront certainement naissance à plusieurs nouvelles espèces. Il y a aussi des groupes d'espèces il nous a élé fort difficile de pratiquer des coupures spécifiques ; la différenciation ne date pas de loin, et il est certain qu'elle n’a pas atteint son dernier degré.

Aussi, concluons-nous en disant que, si le groupe des Spirorbes est déjà le rameau le plus florissant des Serpulidæ, il continuera encore à se développer. Il tient dans la famille des Serpuliens une place comparable à celles des Polydores dans les Spionidiens. Mais, dans cet ensemble des Spirorbes que nous décomposons en Spirorbes dextres et Spirorbes sénestres, le second de ces deux groupes paraît avoir une importance bien plus grande que le premier, et être en voie de différenciation beaucoup plus active.

6 décembre 1896.

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jrélsané

MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 229

15.

16.

MÉMOIRES CITÉS.

. CAULLERY et MESNIL. Note sur deux Serpuliens nouveaux. Zoo. Anseiger

519, 1896 et Berichtigung, ibid, 1, 1897, p. 16.

. CLAPAREDE. Les Annélides Chétopodes du golfe de Naples. Mém. Soc.

Sc. Phys. et Nat. de Genève, t. 19 et 20, 1868-69.

. CLAPARÈDE. Supplément aux Annélides du golfe de Naples, id. t. 20,

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. DE St-Josepx. Les Annélides des côtes de Dinard, partie. Ann. Sc.

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SALENSKY. Études sur le développement des Annélides. Arch. de Biologie, t. 4, 1883. VERRILL. Trans. Connect. Acad., 3, 1874, p. 44.

Nr NUE 06 47 Û FRERE 230 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL.

EXPLICATION DES PLANCHES.

Les dessins, faits tous à la chambre claire, ont été réduits aux 3/4 par la photogravure.

Planche VII

Fig. 1. Spirorbis cancellatus. 1 a, opercule ; e, entonnoir ; 6, talon. G. 46. 1 b, soie dorsale du sétigère. G. 810. 1 c, soie en faucille striée du sétigère. G. 810.

Fig. 2. Sp. vitreus. 2 a, opercule d'un jeune ; e, entonnoir ; o, talon. G. = 93 ; 2 b, opercule d'un adulte (1). G. %3; 2 c, soie dorsale du 1x sétigère. G. 810.

Fig. 3. Sp. violaceus. 3 a, opercule vu par la plaque terminale (on a enlevé la partie cylindrique qui la surmonte). G. = 105; 3 db, opercule entier vu de profil. G. 105;3cet3 d, soies du sétigère. G. = 810; 3 e, soie en faucille striée du sétigère. G. 810.

Fig. 4. Sp. spirillum. 4 a, overcule. G. 105 ; 4 b, soie du 1°' sétigère. Gb

Fig. 5. Sp. armoricanus. 5 a, opercule. G. 105 ; 5 b, soie du 1% sétigère. = 810;

Fig. 6. Sp. Marioni. opercule. G. 210.

Planche VIII.

Fig. 7. Sp. corrugatus.T a, pores des faces latérales de l’opercule. G. 450. 7 b, soie du sétigère. G. 810. Fig. 8. Sp. Pagenstecheri. 8 a, opercule. G. 105 ; 8 b, soie du sétigère.

Fig. 9. Sp. aggregatus.9 a, opercule. G. = 93 ; 9 b, soie du 1°r sétigère. G. 810 ; 9 c, soie abdominale. G. 810. g

Fig. 10. Sp. Claparedei. opercule. G. 93.

Fig. 11. Sp. Malardi. 11 a, opercule. G. 105; 11 b, soie du sétigère. G: 22810;

Fig. 12. © Sp. patagonicus. opercule. G. = 105.

Fig. 13. Sp. Lebruni. 13 a, opercule vu de profil. G.—105; 13 db, talon vu de face. G. = 105.

Fig. 14. Sp. Levinseni. soie du 1* sétigère. G. 810.

Fig. 15. Sp. Perrieri. var. 8. 15 a, opercule. G. 105; 15 db, talon de x 4) l'opercule vu de face. G. 105 ; 15 c, soie du 1°" sétigère. G. 810.

(1) L'opercule dessiné avait été comprimé par le couvre-objet. Dans la réalité sou orifice est circulaire.

MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 231

Planche IX.

Fig. 16. Sp. Perrieri. var. y. 16 a, opercule. G. 105; 16 b, talon de l’opercule vu de face. G. 105.

Fig. 17. Sp. Perrieri. var. «. Opercule. G. 105.

Fig. 18. Sp. borealis. 18 a, opercule (torme avec talon bien développé). G. = 105 ; 18 b, opercule vu de profil. G. 105 ; 18 c et c”, soies du sétigère. G. 810 ; 18 d, soie en faucille striée du sétigère. G. = 585 ; 18 e, soie abdominale. G. 585.

Fig. 19. Sp. mediterraneus. 19 a, opercule. G.— 290 ; 19 b, soie du sétigère. G. = 810 ; 19 c, soie abdominale. G. 585.

Fig. 20. Sp. cornu-arietis. 20 a, opercule. G. 93 ; 20 b, soie du {er sétigère. G:= 58.

Fig. 21. Sp. Beneti. Opercule (d’après MARION, 9, fig. 8).

Fig. 22. Sp. Langerhansi. Opercule. G. = 105.

Planche X.

Fig. 23. Sp. Kwhleri. 23 a, opercule in-toto vu de face. G. 105; 23 b, opercule in-toto vu de profil. G. = 105 ; 23 d, opercule élémentaire

supérieur. G. 105 ; 23 c, opercule élémentaire inférieur, o boutonnière logeant le talon de l'opercule supérieur. G. = 165; 23 e, soie du sétigère. G. 810.

Fig. 24. Sp. Bernardi. 24 a, opercule in toto avec le sac incubateur. G. = 210 ; 24 b, un des opercules élémentaires. G. 210.

Fig. 25. Sp. militaris. 25 a, opercule. G. 105 ; 25 b, soie du sétigere.

G. = 810 ; 25 c, uncinus thoracique. G. 810. Fig. 26. Sp. granulatus. Opercule. G. 105.

232 MAURICE CAULLERY ET FÉLIX MESNIL

TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION MEME Lee seen ruines ini berie ses

I. EXAMEN CRITIQUE DES CARACTÈRES TAXONOMIQUES

II. DESCRIPTION DES ESPÈCES . .......... NOR EPA ES TE Mare LE

8 1. Sous-genre Paradexiospira................................ . Sp. cancellatus Fabr.......... ........,..........sssssssss . Sp. vitreus Fabr..........................sssssesssse . Sp. violaceus Ley............................sss.ssss

. Sous-genre Dexiospira,:............,... essences . Sp. spirillum L........... ....,....use seossssisesssse Sp. armoricanus St-J..........................sssssssssss Sp. Marioni n......:.............essssesesssesesstsesess Sp. corrugatus Mont...................................s.... . Sp. Pagenstecheri Qfg............................s..

. Sp. pusillus St-J.............,. seen

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8 3. Sous-genre Paralæospira........:.....,............s.. 10. Sp. aggregatus n. .........4.....s.sessssssessessseesssee A1. Sp. Claparedei n.......................seseireesencee ; 42. Sp. Malardi n....... .-................ NRA PERRIER ES 43. Sp. patagonicus ND... .... ue. .esesesrsese sonseosssssosceves ve 44.:Sn. Lebrunt ne ue enr e ne Re reec remets ees 45. Sp. Levinseni n.....,.... eme tres etes ses les slot

S 4. Sous-genres Romanchella et Leodora...................... 16. Sp Perrierin.. usb ePoccepe evene Meeetes ces 17. Sp. verruca Fabr........,.:.........,. ses dosenes eee 48. :Sn.-lmœevis QfS nn robe enter e epenbectesessepe etre

$S 5. Sous-genre Læospira.......... ................sssssesss 19. Sp. borealis Daud...:........5.5.:... a enr semer ce 20. Sp. mediterraneus n..............................ssssssssss 21. Sp. cornu-arietis Ph... ....... dessertes esesenss 22: Sp: Beneti Mar... 1.4. ueeeoles dues séeslels ARR 23. Sp. Kæhlerin.......0.5 use ee ses ceeee mets esse se sets 24. Sp: Bernardin................., PR Un IR 20 25. Sp. militaris Clpd..... AE et NT PS Le 1: 26. Sp. granulatus L................. AO ÉR 27. Sp. Langerhanin. is urnes enorme st ati 28. Sp. Môrchi Lev.................s..sterseesressessessense

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MORPHOLOGIE ET PHYLOGÉNIE DES ESPÈCES CHEZ LES SPIRORBES. 233 Pages.

I CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES 7204000 de Tan, Le LR ES 218 $S 1. Position des Spirorbes dans les Serpuliens.................. 218

S$ 2. Les Spirorbes’sont- asymétriques 22... 1... 219 $:3..—.Phylogénie des" Spirorbess rt en A RE 2er

$ 4. Distribution géographique des Spirorbes................... 227 MÉMOIRES CITÉS EE En Le ET CR LR PRO ta core) 229 ÉXPEICATION DRS PLANCHES See d8 Dei 22e ee A AR AOL! 230

QUELQUES EXPÉRIENCES SUR LES PIGMENTS.

R. FLORENTIN,

Préparateur à la Faculté des Sciences de Nancy.

Les pigments sont des formations de couleurs très différentes et en même temps de compositions très diverses. Chez les animaux, ils se trouvent localisés en grande partie dans Les téguments du corps auxquels ils donnent les teintes les plus variées ; d’autres pigments se portent sur des organes internes exposés ou non à la lumière. On en rencontre par exemple sur les éléments sensibles de la rétine, dans le mésentère, sur les œufs, etc.

De deux choses l’une, ou les pigments tégumentaires sont appelés à remplir un rôle physiologique quelconque, à l'exemple de la chlorophÿlle, de lhémoglobine, du pigment rélinien, ou bien ils ne sont d'aucune utilité à l'animal qui les possède. L'expérience seule peut donner des indications à ce sujet.

Pour beaucoup de naturalistes, les pigments sont de purs produits d'excrétion accumulés dans la peau et ne pouvant y jouer aucun rôle utile. Par exemple : EisiG, dans son travail sur les Capitellides, montre que les pigments sont des substances de nature excrétrice, provenant des néphridies, transportées et fixées dans la peau de l'animal ; il fait remarquer, en outre, que chez Capitella et bien

d’autres Annélides, les pigments accumulés dans la cuticule sont

évacués par des mues. RAcoviTzA conclut aussi à la nature excrétrice des pigments chez Lesocephalus leiopygos GRUBE. GRAF à établi que chez les Hirudinées, les pigments tégumentaires proviennent aussi d’excrétions transportées dans la peau par certaines cellules excré-

QUELQUES EXPÉRIENCES SUR LES PIGMENTS. 235

trices (excrétophores), semblables aux cellules chloragogènes des Oligochètes. Chez Tubifex rivolurum L., CuëNoT a constaté que les amibocytes, chargés de granulations chloragogènes, émigrent dans l’épiderme et s’y transforment en cellules pigmentaires ramifiées. Enfin Hopkins a décrit les pigments des ailes des Piérides ; il conclut de son étude que les pigments blancs ne sont autre chose que de l'acide urique, et les pigments jaunes une substance très voisine, acide lépidotique, probablement identique au produit obtenu en chauffant l'acide urique avec de l’eau sous pression.

Mais je ferai remarquer que si même les pigments ont la composi- tion chimique et la valeur d’un produit d’excrétion, cela ne prouve pas qu'ils ne peuvent remplir aucune fonction utile dans l'organisme. Il se peut que cet organisme ait eu besoin de créer ces produits et les ait transportés nous les voyons en vue d’une fonction variant avec le pigment ou avec l'espèce pigréntée. Si les pigments ont un rôle, la première hypothèse qui vient à l'esprit est qu'ils doivent

absorber l'énergie lumineuse. En effet, on sait que les animaux des

cavernes et les parasites d'organes internes sont en général incolores. Quelle que soit la façon dont la coloration a disparu chez ces espèces, on est presque forcé d'admettre que les pigments jouent un rôle vis-à-vis de la lumière, puisque celle-ci supprimée, les pigments ne se développent pas. Bien plus, on sait que certains cavernicoles revenus à la lumière se repigmentent, par exemple le Protée.

Il est bien entendu qu'il ne s’agit ici que des pigments tégumen- taires. On ne pourrait pas attribuer un rôle absorbant semblable aux pigments qui imprègnent les coquilles des Mollusques, car ces coquilles sont absolument opaques et ne sont en relation avec l'animal que par des insertions musculaires.

Nous ne connaissons qu’une seule expérience faite en vue de montrer l'influence photochimique des pigments tégumentaires, c’est celle de Hem : « Des Crustacés (1), dont le céphalothorax et la partie supérieure des anneaux abdominaux sont recouverts d’un vernis opaque ne tardent pas à mourir, même placés dans des conditions hygiéniques excellentes et à côté d'animaux non vernissés et très vivaces. Mais si le vernis, bien qu'imperméable, est transparent, l'animal ne semble pas s’en porter plus mal pendant plusieurs

(1) Il s'agit de Crustacés décapodes.

236 R. FLORENTIN.

semaines ». HEIM conclut que ces simples expériences suffisent à prouver l'influence énorme de la lumière sur les phénomènes vitaux. Il explique comment les pigments de la carapace, à l’état de lutéo- gènes et de lutéines, peuvent accomplir tous les actes chimiques de la cellule vivante. D'après lui, l'énergie lumineuse est capable de déshydrater les lutéogènes en les faisant passer à l’état de lutéines. Cette déshydratation met en liberté de l’eau à l’état naissant, qui soumise à une certaine pression intra-cellulaire, doit avoir une tendance à se combiner aux éléments hydratables de la cellule. Par exemple, elle hydrate la molécule albuminoïde en donnant de l’urée, des corps gras, de l’acide lactique, même des hydrates de carbone et des graisses. Les lutéines formées repassent bientôt à l’état de lutéogènes, en jouant alors un rôle de déshydratant sur des hydro- carbures et des albuminoïdes.

A l’aide des pigments, les radiations lumineuses produisent donc, par de simples phénomènes d’hydratation et de déshydratation, les actes chimiques d’assimilation et de désassimilation corrélatifs de la vie.

Cependant, abstraction faite de cette théorie, l'expérience qui lui sert de base parait assez peu détaillée dans les résultats et la manière d'opérer. Il nous a semblé intéressant de rechercher, sur d’autres espèces colorées, si la lumière a une influence aussi marquée que sur les Crustacés de Hem. A cet effet nous avons entrepris quelques expériences sur des Carabes dorés (Carabus auratus L.) et sur des œufs de Grenouille (Rana agilis THomas).

1" Expérience : Elle a été faite à l'exemple de celle de HeIM.

Nous avons noirci les élytres et le pronotum de plusieurs Carabes recueillis dans le courant du mois de mai 1896, avec un enduit composé de baume de Canada dissous dans le toluène, mélangé à du noir de fumée. On les noircissait plusieurs jours de suite, afin d’être plus certain d’avoir une couche uniforme et parfaitement opaque. Des Carabes non noircis étaient placés à côté des premiers, comme eux dans un vase en verre, à la lumière diffuse du laboratoire. Ils recevaient tous la même nourriture. Nous n'avons observé rien d'anormal dans le genre de vie des Carabes noircis, comparé à celui des animaux intacis.

Le 4 juillet, un Carabe noirci est mort, tandis que le 28 Juillet, c'était un intact qui disparaissait. Les autres Carabes sont restés

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Lee” sde le Na

QUELQUES EXPÉRIENCES SUR LES PIGMENTS. 237

vivants jusqu'au commencement de septembre, époque déjà assez avancée. D'ailleurs à ce moment leur entretien fut un peu négligé, etils moururent les uns après les autres, noircis et non noircis indistinctement, sans qu'on ait pu observer de prédominance marquée d’un côté ou de l’autre.

A titre de remarque, c'est un Carabus cancellatus ILL1G. noirci qui a été le plus résistant, et cependant c’est celui qui nous a paru, pendant toute la durée de l'expérience, prendre le moins de nourriture.

Comme on le voit, cette tentative nous conduit, pour les Carabes, à des conclusions toutes différentes de celles de Her, puisque ses Crustacés vernis en noir n'ont pas tardé à mourir.

Expérience : Le 22 avril 1896, nous avons mis quatre Carabes (Carabus auratus L.) dans un vase en verre complètement entouré de papier noir et recouvert par un carton épais de même couleur, Ce vase était de plus placé au fond d’une armoire obscure. Ces animaux ont reçu la même nourriture que ceux de la première expérience, et sont morts à peu près à la même époque que les précédents, en septembre. Ils ont donc vécu tout près de cinq'mois dans l'obscurité la plus complète. Ils ont toujours été d’une extrême agilité, et nous paraissaient même avoir des teintes plus vives que les Carabes élevés en pleine lumière.

Expérience : Les pigments noirs mélaniques qui imprègnent le vitellus des œufs de Grenouille, semblent exister en vue d’absorber des radiations lumineuses leur apportant ainsi toute leur chaleur ; il doit donc résulter de la présence de ces pigments une éclosion plus rapide des œufs. Cependant les expériences faites jusqu'ici à ce sujet ne confirment pas cette idée. Nous devons mentionner les observations de HiGGINBoTToM, qui conclut que les œufs de Grenouille (Rana temporaria) placés à la lumière et ceux à l'obscurité se développent d’une façon semblable, pourvu qu'ils soient à la même température ; puis celles de YunG, qui dans ses expériences de 1877, plaça des œufs de Grenouille (Rana esculenta) dans des bocaux différemment colorés, à la lumière blanche et à l'obscurité. Il rapporte qu’il a eu des éclosions le même jour dans tous les vases.

Nous avons tenu à répéter l'expérience consistant à comparer l’éclosion des œufs de Grenouille à la lumière blanche et à l'obscurité,

238 R. FLORENTIN.

et nous avons constaté des développements absolument parallèles dans les deux cas.

Une ponte fraiche de Grenouille (Rana agilis THomas) a été partagée en deux : une moitié fut placéé dans l’eau contenue dans un grand vase en verre à la lumière diffuse ; l’autre moitié dans un vase semblable, maintenu à l'obscurité complète par un revêtement de papier noir bien opaque. Un couvercle noir venait achever d'intercepter d'une façon absolue tout rayon lumineux. Dans les deux récipients placés l’un à côté de l'autre au laboratoire, circulait un faible courant d’eau soumettant les œufs aux mêmes conditions de température. Un tube déverseur était placé de telle façon que le niveau de l’eau restait constant dans les deux vases peu près à 10m du fond). Nous ayons remarqué que les phases de la segmentation se sont produites en même temps dans les deux récipients, et que les éclosions sont aussi apparues en même temps.

Cette expérience montre que les pigments mélaniques du vitellus n'ont qu'un rôle inappréciable vis-à-vis de la lumière, puisque

l’éclosion n’est pas plus rapide à la lumière blanche qu’à l'obscurité.

En résumé, ces quelques observations nous permettent de dire que, pour les deux espèces prises comme exemples, les pigments tégumentaires des Carabes et les pigments vitellins des œufs de Grenouille ne paraissent pas jouer de rôle dans l’absorption de l'énergie lumineuse ; elles viennent de plus jeter un doute sur l'expérience de Hem et sur lutilité des pigments. Comme les pigments que j'ai étudiés ne peuvent jouer aucun rùle comme moyen de défense (homochromie) ni comme matières de réserve, il est impossible de leur attribuer jusqu'ici aucune fonction physiologique. Mes expériences me porteraient donc à partager l'opinion d’Eisi@, et à ne voir dans les pigments qu'un produit d’excrétion sans rôle défini.

Nancy, le 5 janvier 1897.

PT

QUELQUES EXPÉRIENCES SUR LES PIGMENTS. 239

AUTEURS CITÉS :

Cuénor. Études physiologiques sur les Olizochètes. Arch. de Biologie, t. 15, 1897, p. 91.

EisiG. Capitelliden. Fauna und Flora d. Golfes v. Neapel, 1887. Voir en particulier le Chapitre : « Ueber die Beziehungen zwischen Pigment und Excret », p. 765.

GRAF. Uber den Ursprung des Pigments und der Zeichnungheiden Hirudineen. Zool. Anseiger, 18 jahrg., 1895, p. 65.

Herm. Études sur le sang des Crustacés décapodes. Thèse, Paris, 1892.

HiGGiNBorToM. Additional observations and experiments on the influence on physical agents in the development of the Tadpole and the Frog. Ann. Mag. Nat. Hist., (3), vol. 9, 1862, p. 238.

Hopkins. The pigments of the Pieridæ. Phil. Transact. of the Roy. Soc. of London, vol. 186, part. II, 1896, p. 661.

RacovirzaA. Rôle des amibocytes chez les Annélides polychètes. Comp. Rend. Ac. Sc. Paris, t. 120, 189,5, p. 464.

YunG. Contributions à l’histoire de l'influence des milieux physiques sur les êtres vivants. Arch. de Zool. expér. (1), t. 7, 1878, p. 251.

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CONTRIBUTION A LA CONNAISSANCE DES SPOROZOAIRES PARASITES DES ÉCHINODERMES.

ÉTUDE SUR LE LITHOCYSTIS SCHNEIDERI PAR

LOUIS LÉGER:

Planches XI-XIII.

I

Les Grégarines chez les Echinodermes.

Les Sporozoaires observés jusqu'ici comme parasites des Echino- dermes appartiennent tous au groupe des Grégarines. Les Coccidies et les Myxosporidies n’y ont jamais été rencontrées.

Les Echinodermes d’ailleurs, sont loin d’être tous infestés par des Grégarines. Dans ce vaste embranchement, on ne connaît guère ces parasites que chez les Holothurides et les Spatangoïdes ;les Crinoïdes, les Astérides et les Echinides réguliers n’en ayant encore jamais présenté. Si l'on remarque que toutes les Grégarines des Echino- dermes sont des monocystidées effectuant, pour ainsi dire, tout leur développement dans la cavité générale, on est porté à penser que la composition du liquide cœlomique de l'hôte n'est peut-être pas étrangère à ce phénomène. Dans ces trois derniers groupes qui sont dépourvus de Grégarines, le liquide sanguin, d’après la disposition de l'appareil ambulacraire est, en effet, en relation beaucoup plus directe avec l’eau de mer, que chez les Holothurides la cavité générale est entièrement close et renferme, par conséquent, un liquide plus riche en éléments nutritifs favorables au développement des parasites.

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SPOROZOAIRES PARASITES DES ÉCHINODERMES. 241

Chez certains Spatangoïdes il est vrai, il existe dans la cavité générale, une curieuse monocystidée, le Zithocystis, qui fait préci- sément l’objet principal de ce travail, mais il faut assurément considérer cette espèce, comme un type exceptionnel qui n’a pu réussir à s'adapter à ce milieu déjà si voisin du milieu ambiant, qu’à la condition de se débarrasser, sous formes de productions cristal- lines, des éléments minéraux dont elle s'est chargée au cours de son évolution. À ce prix seulement, la Grégarine a réussi à vivre dans un milieu aussi fortement minéralisé et dont la composition est très voisine de celle de l’eau de mer, comme l’a montré l’ana- lyse de MM. MoursoN et SCHLAGDENHAUFFEN (1).

Chez les Holothurides, les Grégarines vivant dans un milieu beau- coup moins minéralisé, ne forment pas de cristaux, mais il arrive très fréquemment qu’elles suivent un développement ralenti, aberrant qui en fait des formes cœlomiques pures, c’est-à-dire évoluant en grande partie au sein des tissus, au lieu de passer directement dans la cavité générale pour y devenir un monocystis agile. Cette modification dans le développement est-elle due à la composition du liquide cælomique, ou à la difficulté qu'éprouve le Sporozoïte à traverser la paroi intestinale, ou encore à tout autre cause en rapport avec la nutrition du parasite, nous l'ignorons ; toujours est-il que cette tendance à revêtir la forme cœlomique paraît ici bien plus fréquente que chez les Grégarines des Annélides dans le cæœlome desquelles les monocystidées trouvant sans doute un milieu beaucoup plus favorable à leur développement direct, s'observent le plus souvent à l'état de monocystis parfaits.

Ainsi la plupart des Grégarines qu’on observe chez les Holo- thurides, effectuent la plus grande partie de leur période d’accrois- sement, soit dans la tunique intestinale (Urospora Synaptæ), soit dans les parois des lacunes sanguines (Urospora Holothuriæ) tout

(1) G. R. Ac. d. Se.,t. XCV, 1882. Sur la composition du liquide cavitaire des Oursins.

L'analyse de ces auteurs n’a porté, il est vrai, que sur le liquide cavitaire du Strongy- locentrotus lividus. Tout en pensant que la composition du liquide des Spatangoïdes à Grégarines est assez voisine de celle de l'Oursin comestible, il y a tout lieu de croire qu'il existe cependant une certaine différence, soit dans la teneur en éléments minéraux, soit dans la quantité de substances nutritives dissoutes ; différence qui permet aux Grégarines de vivre chez les premiers, tandis que chez les derniers et en général chez tous les Oursins réguliers on en observe jamais.

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16

242 LOUIS LÉGER.

en conservant néanmoins leur tendance à passer dans la cavité générale elles finissent par arriver tôt ou tard.

Dans cette traversée lente, le sporozoïte rencontrant au sein des tissus, des sucs nutritifs appropriés, grossit, perd ses caractères de monocystis actif, pour revêtir une forme globuleuse, coccidienne, état dégradé qui caractérise les formes cœlomiques. Quelquefois cependant, il arrive que la traversée de la paroi intestinale s’effectue plus rapidement et que le sporozoïte passe de suite dans la cavité générale il devient alors un monocystis normal et agile.

C'est ainsi que dans la Synapta inhœrens, M. CuENoT et moi avons rencontré l’Urospora à différents états de développement, dans la cavité générale et dans les tuniques intestinales ; la plupart du temps cette Grégarine est ovoïde ou piriforme sans stries épicytaires et à zone sarcocytique presque nulle, on l’observe alors à la surface externe du tube digestif ou dans la cavité générale ; d’autres fois, mais beaucoup plus rarement, on rencontre exclusivement dans le cœælome, des individus très gros de forme allongée, véritables monocystis à cuticule striée et myocyte, c'est la forme nématoïde.

Ces deux formes correspondent, je crois, à la rapidité plus ou moins grande avec laquelle le sporozoïte primitif a traversé la paroi intestinale. Dans le premier cas, il reste plus longtemps plongé au sein des tissus et revêt la forme coccidienne sous laquelle il arrive dans le cælôme ; dans le second cas, il arrive de suite, avec sa forme de sporozoïte, dans le cœlome, il n'a plus qu'à s’accroître en toutes proportions pour devenir le monocystis à forme néma- toïde.

L'Urospora Synaptæ n’est d’ailleurs pas la seule monocystidée qui puisse se présenter ainsi sous les deux formes cœlomique et normale ; on en connaît plusieurs autres exemples et je me conten- terai de citer ici celui de l'Urospora Sipunculi qui s'observe le plus souvent sous la forme de kystes cælomiques purs appendus au tube digestif, et, beaucoup plus rarement, à l'état de monocystis parfait dans la cavité générale (1).

(1) Bien que l'étude du développement et la forme des spores de cette Grégarine, en fassent un des types les plus parfaits du genre Zrospora, M. MINGAZZINI a cru devoir créer un genre nouveau, le genre Pachkysoma, pour cette espèce que BUETSGHLI et moi avons fait simplement rentrer dans le genre l/rospora.

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SPOROZOAIRES PARASITES DES ÉCHINODERMES. 243

Quoiqu'il en soit, chez les Holothurides, la forme nématoïde, c’est- à-dire le type monocyslis normal, est beaucoup plus rare que la forme cœlomique et si elle a été observée quelquefois dans la Synapte, je ne crois pas qu’on l'ait jamais observée chez les Holo- thuries ces parasites se présentent toujours sous la forme cœlo- mique pure. C'est cette dernière forme que M. MiNGazzini a décrit sous le nonr de Cystobia, créant ainsi un nouveau genre sur le simple fait d’une évolution cœlomique, ce qui n’est peut-être pas fort utile, comme le fait remarquer avec raison M. CUENOT.

Les formes cœlomiques en effet, n’ont aucun caractère morpholo- gique distinctif et l'habitat est absolument insuffisant pour caracté- riser un genre, comme je l’ai démontré ailleurs (1), la même espèce pouvant se rencontrer dans des hôtes différents.

Il faut alors s'adresser à d’autres caractères et je crois que ceux tirés de la forme des spores sont encore les plus convenables.

Je sais bien qu’une classification basée entièrement sur le mode d'évolution serait fort séduisante, mais placer les espèces qui évoluent tantôt selon le type cœlomique, tantôt selon le type de monocystis parfait ?

Voulons-nous baser une classification sur les caractères morpho- logiques de l'individu adulte? Le même embarras se présente, puisque voici un même #0n0cystis qui revêt tantôt la forme ovoïde, tantôt la forme nématoïde ; deux formes que je considère comme l'expression de tendance vers ces deux types de développement : le type cælomique pur et le type monocystis parfait.

Force nous est donc pour le moment, d'établir notre classification d’après les caractères tirés des spores, puisque ce sont les seuls qui nous apparaissent comme constants. En fait, ils ont au moins ceci de bon, qu’ils sont communs à un assez grand nombre d'espèces déjà reliées par des identités de forme ou d'évolution, ce qui permet de les grouper en un petit nombre de genres parfaitement définis.

Ce mode de classification il est vrai, nous oblige d’ajourner toute dénomination d’espèce dont on ne connaît pas les spores ; mais quel inconvénient y a-t-il à cela? On donnera la description. de l'espèce présumée nouvelle et on indiquera son habitat; on pourra même la placer provisoirement dans un des genres connus

(1) L. LÉGER. Nouvelles recherches sur les Polycystidées parasites des Arthropodes terrestres. Annales de la Faculté des Sciences de Marseille, 1896.

244 LOUIS LÉGER.

avec lesquels elle présente le plus de rapports ; ce sera tout aussi intéressant et on aura tout autant de mérite que si on l'avait, de plus, baptisée d’un nouveau nom destiné à encombrer plus tard la synonymie qui devient de plus en plus un véritable chaos.

D'ailleurs, il n’est pas besoin d’insister sur le peu d'intérêt que présente une Grégarine, surtout une monocystidée, dont on ne connaît pas le cycle évolutif. Toutes les formes adultes de monocystis parfaits se ressemblent ; ce sont toujours de petits sacs plus ou moins allongés et je ne vois pas trop quelle utilité il y a, pour le moment, à donner des noms de genre différents à tous ces petits sacs sous prétexte qu'il en existe un dans Synapta digitata, un autre dans Synapta inhœrens, un autre dans Holothuria, etc., etc.

En réalité, une forme ne présente réellement de l'intérêt que lorsque son évolution est connue, et je ne saurais trop recommander à ceux qui s'occupent de ces intéressants petits parasites, de s’attacher plutôt à suivre le cycle d’une espèce qu’à éventrer des quantités d'animaux différents sous prétexte de découvrir et de baptiser beaucoup d’espèces nouvelles. C’est seulement en travaillant ainsi, que nous pourrons espérer arriver à connaître bien des points encore obscurs de l’histoire de ces êtres, et non point en créant des quantités de genres pour des formes souvent à peine entrevues et dont la plupart n’ont pour caractères distinctifs que leur nom plus ou moins baroque et leur habitat.

Mais il est temps d'en revenir aux monocystidées des Échino- dermes.

Si les Grégarines des Holothurides se présentent, comme nous l’avons vu, tantôt sous la forme cœlomique pure (Holothurie), tantôt sous les deux états, forme cœlomique et monocystis parfait (Synaptes), il faut reconnaître que, chez les Spatangoïdes, on n’a pas jusqu’à présent observé de formes cœlomiques et que, chez ces Échinodermes, les recherches les plus récentes, ne nous ont jamais montré de formes coccidiennes, appendues ou en relation quelconque avec la paroi intestinale. Chez ces oursins, le sporozoïte semble donc évoluer toujours selon le type de monocystis parfait, ce qui est d’ailleurs démontré par ce fait, que j'ai rencontré dans la cavité générale des Echinocardium, de nombreux monocystis très agiles et de toutes tailles, depuis les plus petites à peine différentes d’un sporozoïte, jusqu'aux formes adultes, très grosses, et voisines de l'enkystement (V. PI. xi).

SPOROZOAIRES PARASITES DES ÉCHINODERMES. 245

En résumé, on voit d’après cet exposé, que les Grégarines appar- tenant aux Échinodermes sont toutes des Monocystidées.

Les unes évoluent suivant le type cœlomique pur (in Holothuries).

Les autres se présentent, tantôt sous la forme cœlomique tantôt sous la forme normale (in Synaptes).

Les autres enfin n’ont jamais été observées que sous la forme de monocyshs parfaits (in Æchinocardium, Spatangus).

Nous connaissons actuellement les spores de ces différentes mono- cystidées. Comme elles ont toutes une épispore pourvue d’un filament caudal (1) ces Grégarines appartiennent toutes à la famille des Urosporides.

Ce sont :

Urospora Synaptæ in Synapta inhœrens et digitata. Urospora(Cystobia MixGaz.) Holothuriæ in Holothuria tubulosa, impatiens et Poli. Lithocystis Schneideri in Echinocardium cordatum et flavescens et Spatangus purpureus.

Aussi bien, le Z2thocystis Schneider: devrait rentrer dans le genre Urospora, par la forme de ses spores; mais comme il présente de plus, dans le cours de son évolution, des productions cristallines carastéristiques et telles qu’on en a jamais observé d’analogues chez aucune autre espèce, il est au moins rationnel de le distinguer des précédentes et de lui conserver le nom caractéristique qui lui a été donné par M. GiARp qui l’a observé pour la première fois.

C'est précisément l'étude de l’évolution de cette singulière Grégarine, restée jusqu'ici assez obscure, que j'aurai en vue dans la suite de ce travail. Grâce à l'abondante quantité d’'Echinocardes que l’on trouve sur la plage de Wimereux, il m’a été possible de mener cette étude à bonne fin et je suis heureux de remercier ici M. le Professeur GARD, qui a bien voulu me faciliter la tâche en m'accordant une généreuse hospitalité dans son laboratoire de Wimereux-Ambleteuse.

(1) Y compris celles de la Grégarine de l’Holothurie ainsi que je viens de m'en convaincre par l’examen de spores parfaitement mûres de cette espèce, sur laquelle je reviendrai d’ailleurs dans un prochain travail.

246 LOUIS LÉGER.

Il Le Lithocystis Schneideri.

En 1876, M. Grarp découvrit dans la cavité générale des Echino- cardium cordatum recueillis à la plage de Wimereux, une produc- lion parasitaire d'apparence singulière (1). Ce sont des masses noi- râtres ou violacées, irrégulières, de taille très variable et appliquées contre la face interne du test de l’oursin, plus spécialement entre la bouche et le plastron sub-anal et contre la courbure actinale de l'intestin, du côté interne.

Examinées à la loupe, ces masses montrent en divers points, de petites vésicules hyalines parfaitement sphériques, de dimensions variées et renfermant en leur centre, un point blanc mat bien net. À un grossissement plus fort, les vésicules hyalines apparaissent comme des kystes pourvus d'une membrane anhiste et renfermant à leur intérieur des spores avec corpuscules falciformes. Ces spores paraissent situées chacune à l'extrémité de deux filaments tangentiels rayonnant autour d’un point central granuleux (2). Le point blanc mat observé dans chaque kyste est constitué par une quantité de petits cristaux clinorhombiques, disposés en sphérule. Quant aux masses noirâtres au sein desquelles se rencontrent les kystes, elles se présentent avec l'aspect de masses plasmodiales, chargées de granulations pigmentaires et renfermant une grande quantité d’amibes émettant des pseudopodes et agglutinant des grains de pigment.

Cet observateur n'ayant rien trouvé dans l'ensemble de cette production parasitaire qui ressemblât à des Grégarines, tend à rap- porter ce Sporozoaire plutôt des végétaux inférieurs, Myxomycètes ou Chytridinées que des Grégarines proprement dites.

Burscari (3) dans PRorozoa se basant sans doute sur la présence des prétendus filaments signalés de chaque côté de la spore, place

(1) Grarp. C. À. Ac. d. Se. Sur une nouvelle espèce de Psorospermie (Zifhocystis Schneideri) parasite de l'Æchinocardium cordatum. Mai 1816.

(2) En réalité ces filaments tangentiels ne sont que l'expression optique de la paroi d’une épispore très lâche et longuement prolongée en tube à la base, comme on le verra plus loin.

(3) BüTscHLI. Protozoa. Bronn's Thierreichs, bd. 1, 1880-89.

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ce Sporozoaire parmi les Myxosporidies. Enfin, plus récemment, M. Cuënor (1) a repris l'étude de ce parasite qu’il a rencontré en différents points des côtes de la Manche et de l'Océan. Ce dernier auteur, en examinant attentivement des coupes faites dans les masses noires renfermant les kystes de Zzthocystis, a rencontré une forme monocystidée montrant encore son noyau intact et reconnu par cela même, le premier, la véritable nature de cette production parasitaire (2). Se basant sur l’extrême rareté, au moins dans le cœælome, de cette forme grégarinienne, M. CuÉNoT pense que la phase grégarine se passe tout entière dans le tube digestif, et que, aussitôt après avoir traversé la paroi intestinale, la grégarine s’enkyste dans la cavité générale.

Cette hypothèse ne serait évidemment admissible, que dans la le cas le développement de la grégarine s’effectuerait, non point dans le tube digestif comme le pense M. CUÉNOT, mais dans sa paroi, au sein des tuniques intestinales ce qui nous ramènerait à une forme cœlomique pure. Il n’est guère possible d'admettre en effet, qu’un parasite, après avoir acquis une taille aussi considérable dans le tube digestif, puisse, au moment de l’enkystement, en traverser impuné- ment les parois pour venir sporuler dans la cavité générale.

D'autre part, sile Zz#hocyslis était réellement une forme cœlomique pure, c’est-à-dire à développement intra-pariétal avec direction cœælomique, on devrait trouver de temps à autre, des individus en voie de développement à la surface externe du tube digestif ou tout au moins en relation directe avec lui ; c'est ce que nous n’avons jamais

observé. Les kystes sont parfois voisins de la paroi intestinale, mais

toujours libres d’adhérence avec celui-ci ; et, dans la quantité consi- dérable de tubes digestifs d'Echinocardium que j'ai examinés, je n'ai jamais vu, à leur surface, de grégarines en voie de développe- ment et de migration, comme cela se voit si bien chez les Synaptes et les Holothuries. .

La grègarine n'effectue donc pas son développement, ni dans le tube digestif ni dans ses parois ; elle évolue comme une monocystidée

(1) CUÉNOT. Deurième note sur le Commensaux et Parasites des Echinodermes. Revue Biologique du Nord de la France, 1, Oct. 92.

(2) Je n'avais pas connaissance de la seconde note de M. CUÉNOT lorsque j’ai signalé les phases principales de l’évolution du Zithocystis dans une note aux C. R. Ac. d. Sc. ce qui fait que je n’ai pu citer cet auteur; je tiens à réparer ici mon omission bien invo- lontaire.

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nérmale en passant de très bonne heure, à l'état de sporozoïte, dans la cavité générale elle n'a plus qu'à grossir pour devenir un monocyslis typique.

Les recherches que j'ai entreprises sur le développement de ce para- site sont venues vérifier pleinement cette proposition en démontrant l'existence, dans la cavité générale de l’Oursin, de formes monocys- tidées à tous les états de développement, depuis les plus jeunes jusqu'aux formes adultes, solitaires ou bizarrement conjuguées qui conduisent à la formation des kystes connus.

Le Zithocystis est donc une monocystidée à évolution normale et je vais maintenant exposer les principaux faits de son évolution, au cours de laquelle on observe des phénomènes assez curieux qui font de cette grégarine une des plus intéressantes monocystidées.

Phase grégarinienne du Lithocystis.

Dans le but de rechercher les états jeunes et adultes du Zithocystis, j'ai examiné attentivement le contenu de la cavité générale d’un grand nombre d'Echinocardium. Ceux-ci étaient ouverts suivant une ligne équatoriale et le contenu cœlomique immédiatement versé dans un petit cristallisoir.

Après avoir examiné sans succès plus de vingt exemplaires, j'aperçus enfin dans le liquide cavitaire d’un de ces animaux, une quinzaine de petits êtres filiformes, d’un blanc mat et dont la plupart présentaient des mouvements si actifs, que l’idée ne me vint même pas de suite que j'avais affaire à des Grégarines. Ce n’est qu’en plaçant immédiatement quelques-uns de ces êtres sur le porte-ohjet, dans une goutte de liquide cavitaire, que je pus me convaincre de leur véritable nature. J'avais sous les yeux des monocystidées de toutes dimensions, les unes solitaires, les autres accouplées et animées de mouvements très vifs. Poursuivant mes recherches chez d’autres Echinocardes, j'ai pu observer les différentes phases de l’'enkystement et reconstituer ainsi, le cycle évolutif de cette espèce.

Il faut toutefois reconnaître que, si les kystes du Z2thocystis se rencontrent pour ainsi dire chez tous les Echinocardium, la phase grégarinienne est loin d’être aussi fréquente, car je n'ai rencontré cette dernière qu’une fois sur huit environ ; ce qui explique comment elle a pu jusqu'ici échapper aux investigations.

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Cette rareté de la Grégarine, comparée à l'abondance des kystes, paraît, au premier abord, assez surprenante ; mais il est facile de s'en rendre compte si l’on remarque que la forme grégarinienne n’est que passagère et, de plus, souvent difficile à apercevoir, tandis que le kyste est durable et persiste probablement dans l'hôte jusqu'à la mort. Il en résulte qu'un Oursin vieux renfermera toujours un assez grand nombre de kystes, représentant, en quelque sorte, la somme des Grégarines qui se seront développées chez lui au cours de son existence tout entière, mais pourra bien ne présenter aucune Grégarine libre, au moment on l’examinera. Les Echinocardium très jeunes et par conséquent tout petits, qu’on récolte facilement dans le port de Boulogne, ne montrent, en effet, jamais de kystes, tandis que ceux-ci sont d'autant plus nombreux que l'animal qui les héberge est plus gros, c’est-à-dire plus âgé.

Les états les plus jeunes qu’il m'ait été donné d'observer dans la cavité générale des Echinocardiuwm, ne diffèrent, à proprement parler, du corpuscule falciforme que par leur taille un peu plus grande et se meuvent activement dans le liquide viscéral (fig. 1 et 2, PI. x1). Les individus plus âgés et adultes conservent toujours la même forme générale qui est celle d’un Monocystis absolument typique (fig. 3 et 4).

L’individu adulte (fig. 4) est, à l’état de repos, cylindrique et atténué en pointe aux deux extrémités ou pôles. L'un des pôles, un peu plus renflé, présente un rostre court et pointu; c’est le pôle proximal, correspondant au rostre du sporozoïte ; l’autre s'atténue régulièrement en pointe jusqu’à son extrémité, c’est le pôle distal.

L'épicyte esi mince mais résistant et montre de très fines stries longitudinales (fig. 9, PL. x1).

Le sarcocyte est presque nul mais la couche striée contractile ou Mmyocyle se voit admirablement sous l’action du chlorure d’or et se montre composée de fibrilles annulaires ou spirales assez grosses, rapprochées les unes des autres, et situées presque immédiatement sous l’épicyte (fig. 10, PI. xi).

L'entocyte est très finement granuleux et opaque car les granula- | tions remplissent abondamment toute la cavité de l'animal. Il renferme un beau noyau sphérique ou sub-sphérique dont la position

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change constamment sous l'influence des contractions de l'animal. Le noyau qui montre une paroi bien nette prêsente généralement un seul nucléole assez gros et également sphérique.

Ce Monocystis qui est très agile à l'état normal, mesure, lorsqu'il a atleint son maximum de développement, un millimètre à un millimètre et demi de longueur ; il est donc bien visible à l'œil nu. Sa vitalité est considérable, car j'en ai conservé vivants, pendant plus de 18 heures dans du liquide cœlomique de l'Oursin ; au bout de ce temps, des individus conjugués montraient encore des mouve- ments aussi actifs qu’au début, mouvements qui cessèrent peu à peu par suite de la décomposition du liquide.

Les mouvements que présente cette Grégarine sont de deux sortes : mouvements de contraction latérale, en arc, au moyen desquels l'animal se replie parfois presque entièrement sur lui-même pour se redresser ensuite brusquement ; 2?’ mouvements de contrac- tion circulaire et ondulatoire, comme péristaltiques, par lesquels l'animal resserre et amincit une partie ou toute une extrémité de son corps, généralement une moitié, pendant que l’autre se dilate dans les mêmes proportions.

C’est surtout chez les individus conjugués, que ces mouvements prennent de l'importance et sont réellement intéressants à étudier.

Conjugaison.

Les individus conjugués se rencontrent plus fréquemment que les solitaires ; on en trouve de tout jeunes qui sont déjà accouplés. Cette conjugaison se fait suivant un mode jusqu'ici inconnu chez les Grégarines. En effet, les deux individus sont accolés, non point par leurs pôles de même nom ou de nom contraire, ni par le côté, comme

je l’ai signalé chez le Gonospora de la Glycère, mais par une faible portion de leur tégument, située à peu près à égale distance des deux pôles. C’est ce que j'appellerai la conjugaison en #.

Les deux individus (fig. 5, PI. x1) rappellent ainsi d’une manière frappante le curieux Diplozsoon paradoxzum et c'est en effet la comparaison qui est venue à l’idée des différents observaleurs à qui j'ai montré cet organisme. D’autres fois, les individus conjugués sont disposés en croix et entièrement rabattus d’un même côté du point de jonction. Le couple semble alors formé de quatre segments qui

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paraissent partir d’un même point et dans lesquels il est difficile de distinguer, au premier abord, ce qui revient à chacun des deux individus (fig. 7, PI. x1)}. Souvent aussi, les individus sont en quelque sorte accrochés l’un à l’autre en se recourbant chacun du côté opposé au point de contact (fig. 6). Toutes ces dispositions varient d’ailleurs incessamment avec les mouvements actifs des individus conjugués, mais le point d’accolement reste toujours fixe.

Les individus sont en effet solidement accolés et bien qu'il ne paraisse y avoir aucune substance spéciale pour déterminer l’adhé- rence, il est très difficile de les séparer, même en les agaçant avec une fine aiguille. Si par hasard on y arrive, les individus séparés ne tardent pas à perdre leur substance par le point primitivement accolé, ce qui montre bien qu’en ce point, la paroï avait déjà reçu quelque modification.

Le couple ainsi accolé, présente des mouvements extrêmement actifs et d’une remarquable régularité. Les uns sont les mouvements très vifs de contraction en arc et de contorsion en divers sens, qui font que les quatre segments se dirigent de tous côtés en décrivant parfois des spires compliquées (fig. 6, PI. x1) ; ainsi dans le couple représenté fig. 8, PI. x1 l'extrémité « d’un individu se déjette brus- quement en 4” puis revient ensuite en « et ainsi de suite; l’autre individu fait de même. Les autres, beaucoup plus réguliers et constants, sont les contractions circulaires ondulatoires et péristal- tiques que j'ai signalées plus haut. Sous leur influence, l'animal contracte et dilate alternativement une moitié de son corps, tandis que l’autre moitié se modifie exactement dans le sens opposé (ons; PL xu).

Dans les couples, ce mouvement est vraiment remarquable car il est parfaitement régulier et isochrone ; dans toutes les observations que j'ai faites, l'animal mettait deux secondes pour qu'une de ses moiliés passe de l’état de contraction à l’état de dilatation. Par conséquent, toutes les deux secondes, et avec la régularité d'un appareil d'horlogerie, chaque conjoint contracte et dilate successive- ment une moitié de son individu.

Ce mouvement qui est évidemment à la contraction des fibrilles circulaires, débute par un des pôles et se propage rapide- ment par ondulations inperceptibles jusqu'à un point situé un peu plus loin que le milieu du corps et par conséquent plus loin que le point de conjugaison (fig. 1, Pl. xu). Souvent, l'extrémité par

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laquelle a commencé la contraction, recommence à se dilater avant que le mouvement contractile ne soit complètement effectué, ce qui fait que souvent les individus présentent un renflement à l’un des pôles.

Pendant cette période de contraction, le noyau de la Grégarine qui est relativement gros, est chassé devant la diminution de calibre de l’animal et revient ensuite à sa position première avec la dilatation, effectuant ainsi un mouvement régulier de va-et-vient du pôle a il est situé normalement, à un point a”, limite de la contraction, qui est toujours situé un peu plus loin que la zone d’accolement (fig. 1, PI. xu). Ce voyage d’aller et retour du noyau, dure ainsi quatre secondes, puisqu'il en faut deux pour que la moitié de la Grègarine passe de l’état de dilatation à la phase de contraction.

Quelquefois, lors d’une contraction un peu plus intense que les autres, le noyau passe à l’autre pôle de l’animal et il continue, dans l’autre moitié de l'individu, son mouvement régulier de va-et-vient comme auparavant.

Peu à peu, les individus conjugués prennent une forme plus massive, plus ramassée (fig. 3, PI. xu); les mouvements en arc disparaissent progressivement, à mesure que les animaux deviennent plus globuleux, mais les mouvements péristaltiques continuent toujours, avec leur parfaite régularité, jusqu’à ce que la paroi du kyste soit constituée. On trouve ainsi des couples comme celui représenté dans la fig. 4 (PL. x), presque arrondis, chez lesquels l’enkystement est imminent et qui continuent néanmoins à présenter des contractions et dilatations allernatives, très atténuées il est vrai, mais encore parfaitement rythmiques.

Il est assez fréquent de rencontrer des individus solitaires gros et de forme ramassée, parfois voisins de la forme sphérique qui forme- ront sans doute des kystes à individu unique (fig 2, PI. xn).

Que le kyste futur soit le résultat de la conjugaison de deux indi- vidus ou qu'il soit constitué par un seul être, il se produit constam- ment, dans la période qui précède l’enkystement, deux ordres de phénomènes excessivement intéressants et qu'il importe dès main- tenant de faire connaître. Je veux parler de l'apparition des cristaux et de la formation des masses plasmodiales.

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Formation des cristaux.

Voici, d’après mes recherches, et autant qu’il m'a été possible de le suivre dans les différents individus que j'ai examinés, le processus de formation de ces cristaux qui apparaissent dans la Grégarine au moment de l’enkystement et se retrouvent toujours dans les kystes.

Lorsque la Grégarine commence à devenir massive et à présenter des mouvements beaucoup moins actifs, il apparaît, à l’intérieur de son entocyte, de nombreuses vacuoles sans paroi propre, réguliè- rement sphériques, de diamètre variable mais n’excédant pas 30 à 40 y ; les plus petits atteignant à peine 10 u.

Chez d’autres individus encore plus voisins de l’enkystement, on aperçoit, dans chaque vacuole, un tout petit cristal qui commence à se former, sous l'aspect d’une petite lame transparente. Enfin, chez d’autres individus encore plus avancés, chaque vacuole renferme un cristal dont la grosseur est ordinairement proportionnée à celle de la vacuole (fig. 2, 3 et 4, PI. xnr).

Plus tard, lorsque le kyste est complètement formé et que les divisions du noyau et du protoplasma commencent à individualiser les spores, les vacuoles cristallogènes se portent au centre du kyste, puis disparaissent, laissant en ce point leurs cristaux, sous forme de l’amas sphérique que l’on trouve toujours dans les kystes du Lithocystis (cr, fig. 5, PI. x).

Ces cristaux qui appartiennent au système clinorhombique, présentent des formes assez variées comme on le voit dans la fig. 7 (PI. xx) j'en ai représenté quelques-uns. L'analyse microchimique les montre constitués par l’oxalate de chaux.

La présence d’un sel de chaux dans la Grégarine, doit je crois s'expliquer par ce fait, qu’elle vit dans un milieu renfermant comme on le sait une certaine proportion de sulfate et de carbonate de calcium en dissolution. Quant à l’acide oxalique, il faut peut-être le considérer comme un produit de désassimilation fabriqué par le parasite aux dépens des albuminoïdes dont il se nourrit.

Quoiqu'il en soit, il est certain qu’au moment la Grégarine devra effectuer les divisions protoplasmiques qui assurent sa

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reproduction et sa multiplication, ces produits étrangers seront devenus inutiles sinon nuisibles car les sporozoïtes sont toujours formés d’un protoplasma pur. Il lui faudra donc s'en débarrasser à ce moment, et c’est ce qu’elle commence à faire lors de la formation des vacuoles, que je considère comme de véritables vacuoles excré- toires analogues à celles des autres Protozoaires. Le cristal se forme ensuite progressivement à mesure que se concentre le liquide de la vacuole, et, en dernier terme, chaque vacuole renferme un cristal dont la taille est proportionnée à sa grosseur et représentant ainsi un excreta de la Grégarine.

Ce n’est que lorsque l’entocyte est totalement débarrassé de ces produits d’excrétion que commencent les premiers phénomènes de la division dont le résultat ultime est la formation des spores et des corpuscules falciformes.

Des cristaux analogues se retrouvent dans les kystes des Gréga- rines qui vivent dans les autres Échinodermes à test calcaire (Spatangus purpureus, Echinocardium flavescens) ce qui tend bien à démontrer que ce produit est à la minéralisation du milieu dans lequel vivent ces parasites.

Formation des masses plasmodiales.

L'étude de la formation des masses plasmodiales pigmentées présente un vif intérêt, car elle nous fait assister à toutes les phases de la lutte entre l'organisme infesté et le parasite envahisseur et nous met ainsi sous les yeux un des exemples les plus démonstratifs de la belle théorie de METCHNIKOFF.

Pour rechercher l’origine de ces masses pigmentées, suivons pas à pas l’évolution de Grégarine depuis la conjugaison jusqu’à l'enkys- tement.

Lorsqu'une Grégarine solitaire ou deux Grégarines conjuguées sont sur le point de s’enkyster, comme l’indiquent leur forme plus globuleuse et le ralentissement de leurs mouvements, on remarque que ces parasites présentent un aspect échinulé des plus singuliers, à ce que leur surface est entièrement recouverte de petits prolongements coniques, hyalins ou très légèrement granuleux, terminés en pointe aiguë et rigide (fig. 2 et 3, PI. xn).

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Ces prolongements sont sensiblement d’égales dimensions, régulièrement disposés côte à côte, toujours immobiles et dirigés normalement à la surface du kyste ; de telle sorte que les individus arrondis et en imminence d’enkystement présentent l'aspect d’un énorme Cilié immobile, ou mieux d’une larve d’éponge dont les cils seraient rigides (fig. 4, PI. xn1).

A un plus fort grossissement, on peut voir que les prolongements, aigus à leur extrémité libre, deviennent de plus en plus larges à mesure qu'ils se rapprochent de la surface du kyste ils s'étalent et se confondent avec la base dilatée des prolongements voisins & (fig. 6, PL. xn). Dans cette portion basique dilatée,on observe souvent quelques granulations colorées et un espace clair qui correspond à un noyau, Comme nous le verrons bientôt.

L'interprétation d’un tel aspect paraît difficile au premier abord, mais si l’on place le parasite sur le porte-objet, dans une goutte de liquide cælomique en le recouvrant d’un mince couvre-objet, on ne tarde pas àse rendre compte de la véritable nature de ces productions périphériques.

Sous linfluence de la légère pression exercée par le couvre-objet, on voit en effet, l'enveloppe hérissée qui recouvre la Grégarine, modi- fier profondément son aspect. Un grand nombre de pointes (fig. 6, PI. xn) se renflent en leur milieu 6, puis s’épaississent à leur extré- mité y qui devient finement granuleuse. Bientôt, de cette dilatation terminale s’échappent de véritables expansions amiboïdes, de vrais pseudopodes 5, « et le corps périphérique devenu un véritable amibe, n’est plus relié à la surface du parasite, que par un mince pédicelle protoplasmique qui n’est lui-même qu’un pseudopode un peu plus long que les autres (<, À, fig. 6, PI. xn). Finalement, cet amibe improvisé se libère complètement du kyste, toute sa substance étant passée dans le renflement terminal ; en même lemps il s’anas- tomose par ses pseudopodes, avec ses voisins, ou avec ceux qui n’ont pas encore quitté la surface du parasite.

Au bout d’un quart d’heure environ, on voit dans le voisinage de la Grégarine un réseau élégant et compliqué formé par les corps amiboïdes, complètement détachés du parasite, reliés entre eux par de nombreux pseudopodes ainsi qu'à ceux qui sont encore fixés et déjà modifiés pour le départ (fig. 8, PI. xu). Tous ces amibes en effet ont une tendance manifeste à quitter le corps auquel ils sont fixés pour s’engager dans l’espace capillaire compris entre la lamelle

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et le couvre-objet, propriété bien connue des amibocytes en général.

La préparation étant placée dans la chambre humide pendant toute la nuit, le lendemain matin, la plupart des corps amiboïdes ont quitté le parasite et pris une forme sphérique en s’isolant les uns des autres. Le kyste lui-même a fini par se rompre, et les amibes restés à sa surface ont englobé de nombreuses granulations entocytiques.

Si l’on compare maintenant ces corps amiboïdes qui sont fixés sur les Grégarines, avec les amibocytes de l'Echinocardium on ne trouve aucune différence, ni dans la forme, ni dans la taille ou la manière d’être en général. Il est absolument impossible de distinguer un de ces amibes venant de quitter le parasite, d’un des nombreux amibocytes qui se trouvent dans le liquide cavitaire (fig. 5, 6, PI. x11). Dans l’un comme dans l’autre, le carmin acétique décèle immédiatement un beau noyau (fig. 5, a et fig. 6, n, PI. xur). Enfin il existe ou non, chez les uns comme Jes autres des granulations pigmentées en nombre variable (9, fig. 6 et b, fig. 5, PI. xu), ou bien de petites masses irrégulières brun d’acajou constituées par une graisse spéciale, l’échinochrome de Mic-MuNN, comme l'a démontré M. CuENoT (1).

La nature de ces corps amiboïdes à prolongements hyalins qui environnent les parasites, n’est donc plus douteuse. Ce sont les amibocytes de l’Oursin, qui luttent contre la grégarine envahissante, en s'appliquant étroitement et côte à côte à sa surface. Ils essaient ainsi, mais en vain le plus souvent, d'absorber cet hôte incommodani. Pas toujours cependant, car j'ai rencontré plusieurs fois de grosses Grégarines solitaires, mortes, déjà fortement altérées et dont la surface élait encore recouverte de phagocytes. Dans ce cas, ces derniers ne sont plus en cet état d'attaque, caractérisé par leur disposition radiée avec pseudopodes rigides comme ceux qui sont fixés sur les Grégarines vivantes ; ils sont simplement sphériques ou irréguliers, plus ou moins chaärgés de granulations et sans aucune activité.

Chez les Grégarines vivantes et sur le point de s’enkyster, la disposition radiée des phagocyles ne manque jamais. Ils sont fixés à la surface du parasite ils forment en s’anastomosant par de

(1) CuÉNOT. Étude sur le sang et les glandes lymphatiques. Archives de Zoologie expérimentale, série, T. IX, 1891.

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«

courts prolongements, un réseau à mailles étroites qui enveloppe complètement leur ennemi. On se rend bien compte de cette dispo- sition, en examinant la Grégarine en un point son contenu est transparent et permet par conséquent de voir les détails de sa surface ; au niveau du noyau par exemple.

On voit alors (fig. 7, PI. xn), que les amibocytes sont tous reliés les uns aux autres par des prolongements assez courts, mais ne sont jamais fusionnés en un seul plasmode. Le fait qu'ils prennent chacun la forme sphérique, après la rupture du kyste, le prouve d’ailleurs suffisamment, contrairement à l'opinion de M. GEDDESs (1) qui considère la fusion des amibocytes comme complète et formant un véritable plasmode, lorsque ceux-ci se prennent en masse dans le liquide viscéral extrait de l'organisme (2). |

Chaque amibocyte, ainsifixé surle parasite et reliéases semblables, présente, de plus, un prolongement hyalin, conique, libre et toujours dirigé normalement à la surface du kyste. Ce sont tous ces pseudo- podes qui donnent à la Grégarine l’aspect hérissé que j'ai décrit plus haut et représenté dans les fig. 2, 8 et 4 (PI. xn). J’ignore quel est exactement le rôle de ce singulier prolongement, mais je constate qu'il caractérise, en l'espèce, un état d'activité toute parti- culière du phagocyte.

IL est bien probable que cette disposition si particulière des amibocytes, en lutte contre le parasite, n’est pas spéciale aux Spatangoïdes ; en se reportant aux figures de LIEBERKÜEHN (3) dans lesquelles cet auteur représente des Grégarines échinulées trouvées dans le Lombric, on ne peut s'empêcher de remarquer que ces formes jusqu'ici énigmatiques, ressemblent singulièrement à celles que je viens de décrire et ne sont peut-être que des monocystis assiégés par les amibocytes du Lombric.

Pendant la jeunesse des Grégarines, et même pendant les débuts de la conjugaison, on n’observe jamais de phagocytes à leur surface, sans doute à cause des mouvements extrêmement vifs que présentent alors ces parasites, mouvements qui paraissent bien en effet avoir

(1) Geppes. Sur la lymphe des Oursins. Arch. de Zool. exp., t. VIII, 1879-80.

(2) Cette manière de voir est d’ailleurs combattue par M. A. MICHEL qui démontre que dans les prétendus plasmodes du Lombric, chaque cellule lymphatique conserve en réalité son individualité. C. 2. 4e. d. Se., 28 mai 1888.

(3) LIEBERKÜEN. Evolution des Grégarines, 1854, fig. 9 et 10, PI. VII.

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pour but d’éloigner les assiégeants. Ce n’est qu’à l'approche de l’enkystement, lorsque la Grégarine globuleuse ne présente plus que de faibles contractions, que ceux-ci réussissent enfin à prendre pied sur l'ennemi et à s’accoler étroitement à sa surface. Mais bientôt aussi, la Grégarine va s’enkyster définitivement en sécrétant une paroi résistante et inattaquable par les phagocytes.

Désormais, ces derniers n'auront plus d'action sur le parasite qui va continuer tranquillement son travail de sporulation renfermé dans sa forteresse inexpugnable. Aussi, à partir de ce moment, les phagocytes quittent-ils leur disposition de combat; ils ne sont plus groupés en rangs serrés avec les pseudopodes radiés, terminés en pointe hyabine. Déjà, un grand nombre, bourrés de granulations pigmentaires sont immobiles et agglutinés à la surface du kyste. Bientôt, la plupart vont succomber à la tâche et déformés, altérés, en voie de dégénérescence, ils vont former autour du kyste, ces masses noires, granuleuses irrégulières, au milieu desquelles rampent encore les derniers survivants.

Ainsi se constituent ces masses plasmodiales pigmentées qui envi- ronnent les kystes mûrs, dans la cavité générale de l’Échinoderme (cb, fig. 5, PI. xin).

Kystes.

Le kyste, comme je l'ai dit, peut résulter d’un seul individu ou de la conjugaison préalable de deux Grégaines. Dans ce dernier cas, il arrive parfois que les deux individus sporulent chacun pour leur propre compte, sans résorber leur cloison, et donnent ainsi un kyste géminé dont chaque loge présente une sphérule de cristaux. Ces deux loges se trouvent ensuite réunies dans une même gangue plas- modiale d’amibocytes dégénérés et pigmentés. Mais, le plus souvent, les deux individus conjugués confondent leur substance et se réunissent finalement en un kyste unique très gros, qui renfer- mera plus tard, une seule sphère cristalline en son centre.

Le travail de la sporulation commence dès que le parasite est enkysté et protégé des phagocytes par sa paroi propre pp. (fig. 5, PI. x). Pendant que les noyaux et le protoplasma actif se portent à la périphérie pour former les sporoblastes, les vacuoles cristallogènes disparaissent par diffusion, laissant à nu les cristaux qui se

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rassemblent vers le centre en une sphère régulière, se disposant ainsi exactement comme les granulations inutiles qui forment les pseudo-kystes des Stylorhynchides et des Dactylophorides.

Le liquide des vacuoles se répand alors dans l'intérieur du kyste, de telle sorte qu’à leur maturilé, les spores ne sont pas étroitement pressées dans celui-ci, comme chez les autres Grégarines ; elles peuvent ainsi modifier leur disposition primitive (fig. 1, PI. x), pour venir s’accoler par leurs capsules terminales et former d’élé- gantes rosettes disséminées dans le kyste mûr (s p, fig. 5, PI. xm).

A la maturité les kystes montrent donc (fig. 5, PI. x): une enveloppe externe, irrégulière, formée par les masses plasmodiales pigmentées c b; une paroi propre p p; un liquide intérieur issu des vacuoles et renfermant les spores disposées en bouquets s p ; »° le pseudo-kyste cristallin c 7.

C’est l’état sous lequel on Les rencontre, parfois en grand nombre, au milieu des masses pigmentées, dans les divers points signalés plus haut de la cavité générale des Spatangoïdes, ils paraissent avoir été entraînés, par la simple loi de la pesanteur.

Spores,

Comme toutes les spores des Grégarines, les spores du Z2{hocystis (PI. x), passent d’abord par l’état granuleux de sporoblaste ; à ce moment, l'épispore caractérisée par son long prolongement caudal tubuleux est déjà formée (fig. 3, a). Puis, le noyau du sporo- blaste se divise à son tour, et il se forme finalement huit corpuscules dans chaque spore. Ceux-ci sont diversement disposés, tantôt en spirale, pressés les uns contre les autres, tantôt placés régulière- ment autour d'un nucleus de reliquat, constitué par un seul gros ou plusieurs petits granules réfringents (fig. 1 à 4, PI. x). Une simple pression sur le couvre-objet les fait souvent sortir de la spore par un orifice qui se forme au sommet; ils montrent alors des mouvements assez actifs lorsqu'ils sont placés dans le liquide cavitaire de l'Oursin.

La spore présente deux parois distinctes : l’épispore assez intime- ment appliquée sur l’endospore sauf à la base elle se prolonge en un long appendice tubuleux et hyalin, très frêle, d’un diamètre un peu moindre que celui de la spore (ep, fig. 1,2 et 3). Ce prolongement

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tubuleux se termine en pointe à la base, tandis qu’au sommet de la spore il s’élargit en une petite cupule c (fig. 2). C’est précisément la coupe optique des parois de ce tube transparent, qu'on avait interprétée au début comme deux filaments s’attachant à l'équateur de la spore. Lorsqu'on met les spores en présence de l’eau de mer, cette épispore se gonfle ce qui permet d'étudier exactement sa disposition (fig. 3, b).

L'endospore ovoïde, à paroi plus épaisse que l’épispore et légèrement rétrécie au sommet elle présente un petit épaississe- ment réfringent situé sous la cupule. C’est à ce point que se forme l'orifice de déhiscence pour la sortie des sporozoïtes (fig. 6, 0).

Au début, les spores sont toutes réunies en bouquet par l'extrémité caudale de l’épispore (fig. 1) ; dans la suite, à cause de l'ampleur du kyste renfermant en même temps le liquide des vacuoles, elles se détachent et viennent s’accoler par leur cupule terminale qui sécrète probablement une substance agglutinante. En même temps le prolongement tubuleux de l'épispore se rétracte en s’entortillant en spirale, de facon à devenir une véritable queue filiforme, analogue à celle des urospores typiques (fig. 2). Ceci démontre bien, comme je l’ai déjà prouvé dans un précédent travail (1), que la queue des urospores est une dépendance de l’épispore.

Les spores ainsi accolées par leur cupule terminale, forment à l’intérieur du kyste, de gracieuses petites étoiles comprenant de 4 à 10 spores rarement plus, qui se détachent en teinte sombre sur les parties claires du kyste vu par transparence, et, au contraire en blanc, sur la partie sombre constituée par la sphère de cristaux (fig. 5).

Les spores sont de deux dimensions différentes : les unes, grosses, ou macrospores, les plus rares, fig. 2 droite), plus ventrues et renfermant de gros sporozoïtes, mesurent environ 29 uv grand axe sur 13 y petit axe. Les autres, spores normales, les plus fréquentes, ont à peu près la même longueur que les premières, mais sont beaucoup plus étroites (9 w seulement pour le petit axe) fig. 2 gauche). Elles renferment des sporozoïtes plus petits que ceux des macros- pores, mais les kystes à spores normales ne sont pas forcément plus petits que ceux qui contiennent des macrospores.

(1) L. LÉGER. Æecherches sur les Grégarines, Tab. Zoolog. Poitiers, 1892.

SPOROZOAIRES PARASITES DES ÉCHINODERMES. 261

Dans le Zathocystis du Spatangus purpureus que j'ai été à même d'étudier à la station zoologique d’'Endoume (Marseille) les spores sont de forme et de dimensions un peu différentes des précédentes. Les macrospores mesurent 22 u sur 12 uw. Les spores normales 14u X 8u. D'une façon générale, les spores normales sont plus

arrondies que celles du Zzthocystis de l’'Echinocardium ei la cupule

terminale est plus développée (fig. 4, PI. xm1); mais ces différences sont de trop minime importance pour qu’il y ait lieu d’en faire une espèce distincte du Zäthocystis Schneideri.

Evolution du parasite et Bactérie de l’intestin de l’Echinocardium.

À cause de leur situation dans la cavité générale de l’Oursin, les kystes et par conséquent les spores, ne sont mis en liberté qu’à la mort de l'hôte. Celle-ci paraît être favorisée, du moins en certaines localités, par une affection bactérienne particulière qui se développe dans la paroi intestinale, au voisinage du rectum, et produit en ce point, une désorganisation profonde de tissus, susceptible je crois, d'entraîner une perforation intestinale mortelle.

On voit en effet, dans un grand nombre d’Echinocardium recueillis à Wimereux, la portion terminale du tube digestif présenter un boursouflement de couleur noire qui contraste vivement avec la teinte jaune clair du reste, et au niveau duquel la paroi intestinale est extrêmement amincie, désorganisée et prête à se rompre.

En disséquant avec soin cette région, on trouve dans l'intestin, au niveau du boursouflement, une sorte de masse pàteuse, gris-noir semblable à de l’argile. Si on place alors un fragment de la paroi intestinale altérée, sous le microscope, on constate que l’épithélium esttotalement envahi et dissocié par des filaments bactériens extrême- ment longs, enchevêtrés, recourbés en tous sens et insinués entre les cellules. Ces filaments (fig. 8, PI. xur) qui montrent des mouvements propres assez actifs, renferment un contenu homogène et se colorent rapidement par le violet de gentiane. Quelques-uns se montrent à l'état de sporulation. Les spores sp de forme allongée se forment à l'intérieur du tube qui se plisse souvent en zig-zag au niveau des

262 LOUIS LÉGER.

espaces libres (fig. 8). Finalement les spores sont mises en liberté en sortant par la lumière du tube p (fig. 8) et se développent en nouvelles bactéries.

Celte bactérie dont l'étude mériterait d’être approfondie, est certainement une des plus grosses parmi les espèces pathogènes. On la distingue facilement aux plus faibles grossissements et même à l'œil nu comme un fin chevelu à la surface de l’épithélium atteint.

Les spores du Zithocystis, parvenues dans le milieu extérieur, sont avalées par un autre Æchinocardium avec sa nourriture. Sous l'influence des sucs digestifs de l’Oursin (1), elles s'ouvrent pour livrer passage aux sporozoïles qui, ne trouvant pas sans doute dans l'intestin toujours bourré de sable, un milieu propice à leur développe- ment, traversent de suite la paroi intestinale et arrivent dans la cavité générale ils deviennent les monocystis parfaits que j'ai décrits au début.

C’est d’ailleurs une règle générale dans l’évolution des Grégarines, que ces parasites passent de suite dans la cavité générale ou ses dépendances, chez les hôtes dont le tube digestif est toujours rempli de terre ou de gravier et n'offre pas, par conséquent, un milieu favorable au développement d'organismes aussi délicats.

Voilà pourquoi les Monocystidées parfaites ou cœlomiques sont les Grégarines qu’on observe le plus souvent chez les Vers et les Échinodermes.

Marseille, 15 février 1897.

(1) J'ai essayé de provoquer expérimentalement la déhiscence des spores en les plaçant dans du liquide digestif recueilli dans le cæcum gastrique. Au bout d’une demi-heure quelques-unes avait réellement livré passage aux sporozoïtes (fig. 6, PL. x); mais, d'une facon générale le résultat est loin d’être aussi parfait que chez les Stylorhyn- chides et les Dactylophorides toutes les spores sans exception se vident rapidement de leurs corpuscules.

Fig.

Fig.

SPOROZOAIRES PARASITES DES ÉCHINODERMES. 263

EXPLICATION DES PLANCHES.

Planche XI.

1. Très jeune individu du Zithocystis Schneideri ne diflérant du sporozoite que par sa taille un peu plus grande.

2 et 3. Individus un peu plus âgés.

4. Individu adulte.

9, 6 et 7. Différents aspects sous lesquels on rencontre les individus conjugués et doués de mouvements très vifs, dans le liquide cavitaire de l’Echinocardium.

8. Etat sous lequel on rencontre le plus fréquemment les individus conjugués.

a, «”, positions que prennent successivement chacune des moitiés des individus conjugués dans les mouvements réguliers de flexion et d'extension.

9. Montrant les sillons longitudinaux de l'épicyte, et le pôle proximal de la Grègarine correspondant au rostre du sporozoîïte.

10. Couche striée ou myocyte après l'action du chlorure d’or.

Tous les états représentés par ces figures, se rencontrent dans le liquide de la cavité générale de l'Echinocardium. et des Spatangus.

Planche XII.

:

1. Montrant les deux formes que prennent successivement les individus conjugués sous l'influence des contractions circulaires et ondu- latoires.

a et a”, positions extrèmes prises par le noyau dans ce mouve- ment. Le sens des flèches indique la direction que prend successi- vement le noyau dans son mouvement de va-et-vient.

2. Individu solitaire de forme déjà ramassée, et sur le point de s’en- kyster. Les amibocytes sont déjà fixés à sa surface et son contenu renferme d'abondantes vacuoles à cristaux.

3. Deux individus vers la fin de la conjugaison et sur le point de se renfermer dans un même kyste. Les mouvements considérablement ralentis ont permis aux amibocytes de se fixer à leur surface. Leur contenu montre les vacuoles cristallines.

4. Etat qui succède immédiatement à celui représenté dans la figure précédente et montrant les débuts de l’enkystement à deux. Les mouvements sont devenus presque nuls et les phagocytes sont solhdement fixés à la surface du kyste tout en conservant un pseudopode rigide, libre, dirigé normalement à cette surface. Les cristaux sont complètement formés dans les vacuoles.

264 LOUIS LÉGER.

Fig. 5. a, un amibocyte de l'Echinocardium examiné vivant dans le

liquide de la cavité générale. b,le mème montrant un beau noyau sous l’action du carmin acétique.

Fig. 6. Les phagocytes vus à un très fort vrossissement, fixés à la surface du kyste. Quelques-uns commencent déjà à quitter le kyste, sous l'action d’une pression modérée du couvre-objet.

a, fi, y, à, e, x, formes que prend successivement le pseudopode libre lorsque le phagocyte va quitter la surface du kyste.

ÿ, granulations colorées dans l’intérieur des phagocytes.

n, noyau difficile à voir sur le vivant.

Fig. 7. Phagocytes vus de face à la surface du kyste au niveau du noyau. Le cercle entier représente un des noyaux du kyste. En ce point, le contenu transparent permet de voir le réseau formé par les cellules amiboïdes à la surface du kyste.

Fig. 8. Réseau formé par les phagocytes dans les environs immédiats du kyste au bout de vingt minutes de compression modérée du couvre- objet.

Planche XIII.

Fig. 1. Bouquet de cinq spores réunies par l'extrémité de leur épispore telle qu’on les observe dans le kyste au commencement de la matu- ration des spores.

Fig. 2. Macrospore et microspore dessinées à la chambre claire pour montrer leurs dimensions relatives. c, cupule du sommet ; e p, épispore formant le filament caudal. Ce dernier est enroulé en spirale dans la microspore.

Fig. 3. a, spore encore à l'état granuleux avant la différenciation des sporozoites. b, spore mûre ; l’'épispore e p s'est gonflée sous l’action de l’eau de mer et montre nettement l’endospore en rentermant les sporozoites.

Fig. 4. Spore mûre du Lithocystis du Spatangus purpureus avec le prolon- gement de l'épispore f formant le filament caudal.

Fig. 5. Kyste mûr de Lithocystis du Spatangue, représentant l'état sous lequel on rencontre ordinairement ce parasite. cb, couche d’amibocytes dégénérés, granuleux et chargés de pigment. pp, paroi propre du kyste. sp, bouquet de spores mûrés réunies par leur cupule terminale. cr, amas sphérique de cristaux.

Fig. 6. Spore ouverte ; l'épispore est éclatée. L'endospore laisse sortir les sporozoiïtes s par l'orifice du sommet 0. Fig. 7. Différentes formes de cristaux du kyste de Lithocystis. Fig. 8. Bactérie se développant dans l'épithélium de la région postérieure de l'intestin elle produit de profondes altérations. sp, ses spores ; p, paroi du tube renfermant les spores.

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DESCRIPTION DE PRESTWICHIA AQUATICA LUBBOCK *

PAR

VICTOR WILLEM,

Chef des travaux pratiques de zoologie à l’Université de Gand.

Planche XIV.

En 1863, dans Transactions of the Linnean Society of London (1), J. Lussock signalail l'existence de deux formes d'Hyménoptères nageant sous l’eau : l'une, Polynema natans, au moyen de ses ailes ; l'autre, Preshwichia aqualica, gràce aux mouvements rapides de ses paltes. Depuis celte époque, Ganix (2) a étudié le développement embryonnaire dela première de ces deux espèces; elle a été retrouvée ensuite en Würtemberg (3); enfin F. Enock, en Angleterre, a rencontré de nombreux exemplaires de cet Hyménoptère qu'il identifie avec Caraphractus cinctus Harmay (4).

Découvert en 1862 par LuBBock qui n'avait trouvé que la forme femelle, Preshwichia aquatica n’a été revu qu’en 1896 par ENocx ; le mâle a été pris pour la première fois par ce naturaliste dans un fossé à Epping, en juin (5) ; moi-même, au mois d'août, j'ai eu l’occa-

* Travail au Laboratoire de Zoologie de l'Université de Gand.

(1) J. LusBock. On two aquatic Hymenoptera, one of which uses its wings in swimming. 7rans. Lin. Soc. London, vol. XXIV, p. 135, 1863.

(2) GANIN. Beiträge zur Erkenntniss der Entwickelungsgeschichte bei den Insecten. Zeitschrift f. wiss. Zoologie, Bd. 19, 1869.

(3) Vosseer. Einige Seltenheiten aus dem Insektenreiche. Jakreshefte Ver. Vatert. Naturk. Wärttbq. 52 jahrg., p. LXXX VI, 1896.

(4) FRED-ENocKk. An aquatic Hymenopterous Insect. Watwre, 30 may 1895. Aquatic Hymenoptera, /bid, 14 may 1896.

(5) Extomoloqieal Monthly Magazine ; (2\, vol. 7, aug. 1896, p. 183.

266 VICTOR WILLEM.

sion de capturer à Gand plusieurs exemplaires, mâles et femelles, de ce Chalcidien rare (1).

L'étude des échantillons recueillis (six femelles, trois mâles) m'a permis de préciser la description trop sommaire et quelquefois fau- tive donnée par LuBBocx de la forme femelle, et de décrire la forme mâle, que F. Exock n’a guère caractérisée (2). Je me suis efforcé de pousser cette étude difficile aussi loin que le permettaient l'extrême petitesse de l'animal, son opacité et le petit nombre de mes exem- plaires. J'y ai été engagé par cette considération que, jusqu’à présent, la morphologie du groupe d'Hyménoptères auquel appartient Prest- wichia a été fort négligée par les entomologistes spécificateurs, parce qu’elle exige une longue patience et souvent la « desiruction » de spécimens précieux.

+ *X *%

Le corps de la femelle mesure un peu moins d’un millimètre ; celui du mâle est long d'environ sept dixièmes de millimètre. La tête, le pronotum et l'abdomen sont bruns, le reste du corps et les appen- dices, de couleur fauve.

La tête, aplatie, porte deux gros yeux composés, saillants et trois ocelles. Les antennes, coudées, sont formées de sept segments; le premier long, le deuxième plus court et piriforme, les cinq derniers constituant une masse en forme de fuseau ; le sixième présente supérieurement une carène proéminente. LuBBock a donné de ces organes une description complètement inexacte : entre autres choses, il admet l'existence d’un petit segment entre le premier et le deuxième; de plus, le troisième, petit et cupuliforme, lui a échappé (3).

(1) Annales de la Société entomologique de Belgique, t. XL, 1896.

(2) « It is apterous, three quarters of millimetre long, ressembling in colour and appea- rence a poor starved flea, an as active when on the surface of the water, which it has some difficulty in entering ; though when on leg is through the film it appears to lever itself down and swims easily, using its second legs principally ».

(3) « The antennæ consist of six or seven segments ; the first is long, and near the apex shows a trace of division. Assuming, from the analogy of 7rschogramma evanescens, that this is a true joint, the second segment is short and round. The third is longer, and increases somewhat in size towards the apex ; the fourth is similar in shape, but smaller. The rest of the organ forms a club-like mass, which appears to be composed of three segments ; the last joint, however, is very indistinctly marked ». Zoco citato, p. 140. Quelques lignes plus haut, d’ailleurs, le même auteur déclare que l'antenne est « 10-jointed » et en décrit les dix segments.

DESCRIPTION DE PRESTWICHIA AQUATICA LUBBOCK. 267

La fig. 1 ci-contre, montre la tête, de face; la fig. 3 (PI. xiv), la mandibule gauche du mâle, vue par en-dessous ; la maxille ne porte pas de palpe développé ; la fig. 2 représente la bouche, vue inférieu- rement : faute de points de com- paraison avec les organes simi- laires d’autres Hyménoptères, je ne veux pas tenter actuellement d'homologuer les parties consli- tutives de la lèvre inférieure de Preshwichia.

Au thorax, le pronotum a la forme d’un pentagone allongé, le sommet médian étant dirigé Fic. 1. Pretswichia aquatica. Tête vers la tête ; il porte une paire de vue antérieurement, X 130. rot de accompagné . de cha- md, mandibule ; o , ocelle médian. que côté, d’une pièce quadrangulaire sur laquelle s’insère une soie. Le lobe médian du mesoscutum, pourvu d’une paire de soies, est flanqué de deux parapsides irrégulièrement triangulaires. Le mesoscutellum est étroit, le métanotum, trapézoïdal.

La femelle est pourvue de deux paires d'ailes que je ne veux pas décrire en détails : la fig. 2 (PI. xiv) en ? donne une idée suffisante. Chez le mâle, les \ ailes sont rudimentaires : celles de première paire, fortement gondolées, portent posté- rieurement trois longues soies ; celles de seconde paire présentent à la pointe deux soies beaucoup plus petites (fig. 4).

L’extrémité du tibia de la première paire de pattes porte inférieurement une épire

tridentée ; celui de la deuxième paire, une F6. 2. Preshoichia aquatica 6. Bouche,

we . . OET . épine . = celui de la troisième paire une face postérieure, X 260. grande épine, suivie, du côté interne, de mx”, première maxille six plus petites (fig. 5). gauche ; /, extrémité de

Les articles du tarse sont au nombre de HAINE

trois, el non de qualre, comme LuBBock l’admet par erreur (p. 141) : à peu près égaux aux pattes I et Il, ils diminuent de lon- gueur, à la paire III, du premier au dernier.

Le troisième article du tarse (fig. 6 et 7) porte deux ongles falci- formes, munis de deux pointes accessoires, et, au milieu de ces deux

268 VICTOR WILLEM.

productions, un organe curieux, d’une structure extrêmement compliquée et difficile à débrouiller à raison de sa petitesse. Sa forme générale est celle d'une cloche pédonculée (fig. 7) soutenue par une nervure dorsale médiane a et deux épaississements D croisant celle-ci à angle droit. Si on observe, sous le microscope, l'animal marchant sur une surface lisse et humide, on voit qu’il applique cet organe sur le sol, en étale le pourtour par compression, de façon à lui donner l'aspect dessiné fig. 8, et le fait fonctionner comme ventouse, pendant que les deux ongles inactifs reposent sur ie sol par leur bord convexe. Lorsque la patte se soulève, la ventouse se rétracte grâce à l’élasticité propre des épaississements de sa paroi, pour s’écraser de nouveau au pas suivant. Quand l'animal progresse sur une surface raboteuse, sèche, ce sont les ongles qui servent d'organes fixateurs et la ventouse se replie complètement de façon à prendre l'aspect représenté fig. 6 (1). Pour cela, la pointe p (fig. 8) revient vers le centre, le pourtour de la ventouse se resserre comme il est dessiné fig. 7; celle-ci se plie en deux transversalement, la moitié distale se rabattant sur la moitié basale; et l’ensemble se trouve abrité sous la pièce c qui se plie à son tour en deux, longitu- dinalement.

L'abdomen de la femelle présente huit tergites. Les deux derniers constituent par leur ensemble une gouttière ouverte vers le bas, élargie en avant, qui fonctionne comme gaine de la tarière et vraisemblablement comme pondoir (fig. 9). Ces deux tergites se sont fortement développés vers la partie antérieure de l'animal, disposi- tion qui a reporté en avant l’orifice génital et probablement aussi l'anus ; le premier est situé en g; je n’ai pu découvrir le second. La tarière elle-même, longue, effilée, est formée d’une pièce en gouttière, à ouverture supérieure ; elle se termine en pointe dentelée, les dents étant constituées par des ondulations de la lèvre gauche de la gouttière. Me fondant sur sa structure et sur sa position, je considère cette tarière comme formée par l'urite du huitième segment abdominal.

L'abdomen du mâle ne présente, facilement discernables, que sept tergites, dont le deruier porte de chaque côté deux protubérances garnies de soies (fig. 10). Ventralement, on compte sept urites, plus un organe, implanté au milieu de l’abdomen, pouvant se loger dans

(1) Comparer avec la fig. 15 du mémoire de LuBBOCGK.

DESCRIPTION DE PRESTWICHIA AQUATICA LUBBOCK. 269

une dépression médiane (fig. 10), ou se redresser vers l'avant de l'animal, comme il est représenté figure 1. Ce « pénis » qui, à première vue, paraît avoir la forme d’un cuilleron à surface inférieure creuse, est en réalité une pièce en gouttière, à concavité tournée vers le haut. Il est inséré immédiatement en avant de l’orifice génital (9, fig. 1) et doit être considéré comme l’urite du huitième segment abdominal et l'homologue, par conséquent, de la tarière de la femelle.

Tandis que LuBBock (1) affirme que Polynema natans est pourvu d'unsystème trachéen, —sans d’ailleurs en donner la moindre description, GANIN prétend qu’il n'existe de trachée ni chez la larve, ni chez l'insecte parfait (2). L'existence d’un appareil trachéen chez Presthwichia permet de considérer la première de ces deux opinions comme extrêmement probable.

Preshwichia possède une seule paire de stigmates, métathora- cique. Il en part un tronc court, qui, après avoir fourni deux petites branches, se divise en un rameau abdominal etun rameau antérieur ; celui-ci se distribue principalement aux pattes d'abord, puis à la tête, comme il est indi- qué sur la figure ci-con- tre. Je n'ai pas observé d’anastomose transver- sale entre les deux systè- mes droit et gauche. FiG. 3. —- Prestwichia aquatica. 9, vue de profil.

Le fait, déjà observé Système trachéen, X 60. par LuBBocx et Enocx, que l’'Hyménoptère peut rester plusieurs heures sous l’eau sans revenir à la surface et sans entraîner avec lui de bulle d'air, l’absence de sac aérien sur letrajet de son appareil trachéen , démontrent chez cet animal l'existence d’une respiration cutanée fort développée. La rudimentation du système trachéen est vraisemblablement en relation avec ce phénomène et l’exiguité du corps de l'Hyménoptère.

(1) LuBBock. Mémoire cité, p. 136. (2) GANIN. Mémoire cité, p. 427.

270 VICTOP WILLEM.

F, Exock range Preshvichia dans la famille des Mymarideæ ; s'il en est ainsi, cette forme ne rentre dans aucune des deux sous- familles établies par Howarp et AsHMEaD (1): les Mymarinæ, à 4 articles au tarse et les Gonalocerinæ, à 5 articles; les tarses de Preshwichia ne présentent en effet que trois segments: on ne peut considérer l’ensemble de la ventouse et de la pièce qui l'abrite comme un quatrième article, car le troisième portant les ongles constitue le segment terminal.

La structure des appareils génitaux mâle et femelle aiffère pro- fondément de celle des mêmes organes chez les Proctotrupiens, telle qu’on la trouve décrite dans le mémoire d'ASHMEAD (2). Si ces appareils sont construits chez tous les Mymaridcæ sur le même plan que ceux de Preshvichia, cette différence suffit pour séparer défini- livement, avec ASHMEAD, ces Hyménoptères des Proctotrupiens.

J'observai mes exemplaires de Preshvichia dans un aquarium avaient été déposées des tiges de Potamogeton recueillies dans un fossé des environs de Gand; ils y apparurent brusquement, à peu près en même temps que de très jeunes larves d’Agrion. Ce détail, l'absence dans l'aquarium d’autres formes d'Arthropodes, le fait constaté par GANIN que les œufs de Polynema natans sont pondus dans les œufs d’Agrion virgo, me portent à admettre que Preshoi- chia aussi est parasite des œufs d'une espèce du même genre : une ponte d’Agrion déposée sur Potamogeton et partiellement infestée par Preshwichia, aura introduit simultanément les deux formes dans mon aquarium d’eau douce.

L’Hyménoptère femelle progresse dans l'eau à la façon des Hydrachnes, en se servant de ses pattes comme rames ; on le voit aussi marcher, dans le sein du liquide, sur les plantes et les parois de l’aquarium, les aïles repliées sur le dos, comme LuBBock l'a représenté fig. 11 de son mémoire. L'animal peut aussi s'observer

(1) HowarD and AsHMEAD. On some reared parasitic hymenopterous Insects from Ceylon. Proceed. U. S. National Museum, vol. XVIII, 1896.

(2) ASHMEAD. Monograph of the North American Proctotrypidæ. Zulletin U. S. Mational Museum, 45, 1893.

DESCRIPTION DE PRESTWICHIA AQUATICA LUBBOCK. 271

marchant à la surface de l’eau ; lorsqu'il veut pénétrer dans le liquide, il baisse la tête, l'enfonce verticalement, se pousse par quelques mouvements rapides des pattes et se trouve bientôt marchant, dans une posture renversée, sur le plan de séparation de l’eau et de l'air. Quelques secousses le détachent de la surface et le rendent libre à l'intérieur du liquide.

LuBBoCK n’a pu réussir à faire voler ses spécimens de Polynema en les touchant avec la pointe d’une épingle et la question du vol des Hyménoptères aquatiques reste pour lui indécise. Je n'ai pas non plus observé le vol de Preshwichia femelle ; mais la structure des ailes (semblables à celles d’autres Chalcidiens, et analogues à celles des Thrips), la dispersion géographique de ces animaux et certaines de leurs allures me démontrent que le sexe femelle est capable de voler. J'ai remarqué un de mes échantillons, sorti de l’eau, se lissant les ailes mouillées au moyen des pattes postérieures, et continuant ce manège pendant plus d’une demi-heure ; de temps en temps, il s'interrompait pour relever les ailes et les faire rapidement vibrer, vraisemblablement dans le but de les sécher. Un faux mouvement l'ayant fait retomber dans l’eau, je n’ai pu vérifier si, ce que je crois probable, ce sont les opérations préliminaires au vol.

Le mâle a les mêmes allures aquatiques que la femelle; hors de l’eau, il m'a paru avoir les mouvements plus paresseux que celle-ci et je dois reconnaitre que la ressemblance que lui trouve F. Exock, avec une « pauvre puce affamée » rend bien, au point de vue pittoresque, l'impression misérable que fait cette créature à pattes longues et grêles, à ailes invisibles, à démarche embarrassée.

Gand, 1er février 1897

272 VICTOR WILLEM.

EXPLICATION DE LA PLANCHE XIV.

Prestwichia aquatica LusBocx. | Figures dessinées à la chambre claire. | Fig. 1. Le mâle, vu de profil, x 85.

g, orifice génital.

Fig. 2. La femelle, vue de profil, x 60. Fig. 3. Mandibule gauche (du mâle) vue par en-dessous, X 260. Fig. 4. Aïles droites du mâle, vues du côté externe, x 225.

4 Fig. 5. Extrémité du tibia de la patte 3 droite, vue du côté interne, x 260. Fig. 6. Patte de première paire : dernier article du tarse, vu de profil, côté interne, x 435. lil, article du tarse ; c, pièce cachant la ventouse repliée.

Fig. 7. Patte de première paire : dernier article du tarse, vu 3 inférieurement, x 1450. L t, 3 article du tarse; o,un ongle; a, nervure médiane +388

dorsale de la ventouse ; b, épaississement transversal dorsal ; c, pièce recouvrant la ventouse quand elle se replie ; p, pourtour de l’orifice, à demi-resserré, de la ventouse.

Fig. 8. Ventouse complètement étalée, appliquée sur une lame S de verre, vue inférieurement. Grossissement appro- à

_ximatif : 1000. ;

p, pointe interne du pourtour, correspondant au point p de la ‘4

fig. 7. ;

Fig. 9. Abdomen de la femelle, vu obliquement, x 160. 3

c3, coxa de la 3 patte ; g, orifice génital ; 3, 6, 7, 8, tergites

des segments abdominaux ; 4”, urite du segment ; 8”, urite de

du segment transformé en tarière. 5

A côté, un œuf, même grossissement. :

Fig. 10. Extrémité de l’abdomen du mâle, vue obliquement,

x 160. 8’, urite du 8 segment, transformé en « pénis ». A côté, je extrémité de ce pénis, vue dorsalement. à Fig. 11. Tête et thorax de la femelle, côté gauche vu oblique- 4 ment, x 130. 1, 2, 3, coxæ des pattes de 1re, 2e, paires ; s, stigmate; a, a”, implantations des ailes.

SUR LE MÉCANISME DE L'ADAPTATION FONCTIONNELLE,

RÉPONSE A M. LE DANTEC, PAR

L. CUÉNOT,

Professeur-adjoint à la Faculté des Sciences de Nancy.

On connaît le phénomène de l'adaptation fonctionnelle : tout organe a un taux de fonctionnement qu'on peut considérer comme normal, pendant lequel il conserve un volume constant ; lorsque le fonctionnement dépasse ce taux, pour une raison ou pour une autre, l'organe augmente notablement de volume et par suite de puissance (hypertrophie du cœur dans le cas d'insuffisance valvulaire, grossis- sement d'un muscle ou d’un centre nerveux à la suite d’un exercice répété, hypertrophie du rein ou du testicule dansle cas d’extirpation de l’autre organe); de même un organe qui fonctionne très en dessous de son taux normal s’atrophie plus ou moins (muscles d'un membre immobilisé). En d’autres termes, il y a dans tout organisme une auto-régulation telle qu’un organe a presque toujours un volume proportionné au travail que les circonstances le forcent à accomplir.

M. Le Danrec (1) pense avoir trouvé une explication très simple du mécanisme de l'adaptation fonctionnelle. Quand une cellule est plongée dans un milieu favorable (condition 1), les réactions qui se passent entre la cellule et le milieu peuvent être représentées par l'équation suivante :

a+Q—ia+R a étant la quantité de substances protoplasmiques et nucléaires qui existent au début de l'expérience, Q les matières retirées du

(1) Le DanrTec. Théorie nouvelle de la vie, Paris, Alcan, 1896.

274 L. CUÉNOT.

milieu pendant l'expérience, À un nombre plus grand que 1, et À les produits fabriqués par la cellule ou rejetés par elle durant l’expé- rience : ainsi 1 gramme de levure de bière + tant de grammes de liquide Pasteur donnent au bout d’un temps {, 2? grammes de levure + tant de grammes d'alcool, d'acide carbonique, etc. ; pour un muscle qui se contracte, Q représente le glycogène et le glycose dont l'énergie potentielle sera transformée en travail, À représente l'acide carbonique, l’eau, etc. On voit que M. Le DanrTec diffère de l'opinion courante (CL. BERNARD et biologistes modernes), en affirmant que la production du travail coïncide avec une augmentation forcée de la quantité de protoplasma et de noyau dans la cellule.

Le gain de substances plastiques se perd durant le repos fonctionnel (condition 2) ; le protoplasma et le noyau interviennent dans les réactions chimiques qui se produisent au repos, et qui donnent des réserves ou des déchets, suivant l'équation suivante :

a+B—=cC

Pour un muscle au repos, par exemple, B (substances retirées du milieu) représente le glycose du sang, C le glycogène de réserve, l'acide carbonique, etc.

Ceci admis, on conçoit très bien que si les périodes d’activité et de repos se balancent exactement, l'organe considéré gardera toujours le même volume ; si la période d'activité est plus grande que celle de repos, l’augmentation de protoplasma et de noyau l’emportera sur la destruction et l'organe grossira ; si le repos l'emporte sur l'activité, l'organe s’atrophiera.

J'espère avoir présenté cette loi de l'assimilation fonctionnelle d’une façon aussi exacte que possible. Pour ma part je ne suis pas du tout persuadé que les choses se passent avec cette simplicité et cette généralité ; le phénomène de l’adaptation fonctionnelle me paraît beaucoup plus obscur et surtout beaucoup plus compliqué. Mes arguments (1) n’ont pas convaincu M. LE Danrec, et les siens (2) ont eu le même effet sur moi ; cela arrive souvent dans les discussions tant soit peu théoriques, comme celle-ci, qui ne porte pas sur des faits expérimentaux, mais sur une Comparaison plus ou moins

(1) CuénoT. Analyse critique de la « Théorie nouvelle de la vie, par M. LE DANTEC » (Revue générale des Se. pures et appliquées, 19, 15 octobre 1896, p. 837).

(2) Le Danrec. Le fonctionnement des tissus (Zull. Scient. France et Belgique, tome XXX, 1897, p. 171).

SUR LE MÉCANISME DE L’ADAPTATION FONCTIONNELLE. 275

justifiable de la levure de bière avec des cellules de Métazoaires à fonctions différenciées. Remarquons tout d'abord qu'on ne peut discuter que sur quelques formes cellulaires, telles que le muscle, les cellules épithéliales non glandulaires, les neurones ; en effet, M. LE DANTEC pourra toujours me dire que les éléments glandulaires dont le protoplasma ou le noyau diminue visiblement de quantité durant le fonctionnement (1) ne sont pas des cellules à la condition 1, mais à la condition 2, c'est-à-dire qu’elles sont en voie de destruction lorsque nous disons qu'elles fonctionnent. Comme c’est affaire de définition du mot fonctionnement, il n’y aurait pas moyen de s'entendre.

Je me bornerai à présenter à M. LE DANTEC deux arguments bien précis :

Considérons un muscle qui s’hypertrophie en fonctionnant au-dessus de son taux normal, et qui est par conséquent en train d'augmenter sa quantité de substances protoplasmiques et nucléaires; à quel moment se fait cette augmentation ? M. Le DanTEC ne voit que deux réponses possibles : l'augmentation se fait pendant le repos ou pendant le fonctionnement; or, ce n’est pas pendant le repos, puisqu'un muscle au repos continuel s’atrophie ; c’est donc pendant le fonctionnement. Mais il me semble que la réponse n’est pas forcément un dilemme de cette forme ; l’augmentation des substances plastiques pourrait très bien suivre le fonctionnement, et être d'autant plus intense que l'élément a plus dépensé d'énergie, c’est-à- dire qu’elle pourrait se produire dans les premiers temps du repos fonctionnel, proportionnellement au travail effectué.

C’est tout aussi possible que l'hypothèse de M. Le DANTEc. Je puis d’ailleurs montrer par un exemple qu'à un certain âge de la cellule la synthèse des substances protoplasmiques et nucléaires est absolument indépendante du fonctionnement.

Chez les embryons âgés, les fibres musculaires et les cellules nerveuses sont indiscutablement dans un état de repos complet, comparativement aux muscles et aux neurones des adultes, et cependant, ces éléments augmentent leur quantité de protoplasma et de substance nucléaire, puisqu'ils grossissent sans discontinuer

(1) Par exemple, une cellule conjonctive qui commence à fabriquer de la graisse jusqu'à réplétion complète, un érythroblaste nucléé dont le protoplasma se charge d'hémoglobine, une cellule muqueuse dans laquelle le mucus apparaît, etc.

8 q q PP

276 L. CUÉNOT.

et que les noyaux (muscles striés) se multiplient. Pour me servir äes expressions de M. LE DAnNTEC, ces muscles et neurones différenciés sont donc à la condition 1, alors qu'ils sont en repos absolu ; pourquoi dans la cellule adulte cette condition 1 serait- elle forcément concomitante avec le fonctionnement ? Elle peut très bien être placée à un autre moment de la vie cellulaire, moment qu'il ne serait peut-être pas impossible de déceler par l'expérience.

2 Le gain des substances protoplasmiques et nucléaires, c'est-à- dire a (i 1), est forcément proportionnel au travail effectué. Or, même en laissant de côté les muscles cardiaques et respiratoires que j'avais pris auparavant comme exemples, on connaît des cellules qui effectuent un travail constant, absolument continu : ce sont les cellules vibratiles. Sur les branchies de Lamellibranches, par exemple, autant qu'on peut en juger au microscope, la vibration d’une même cellule ne subit pas d'interruption; ces cellules accroissent- elles constamment leur quantité de substances plastiques, comme le voudrait Ja théorie de M. LE DanTEc ? Pas du tout; d’abord on ne comprendrait pas qu’elles se multipliassent, la surface qu'elles recouvrent étant constante à l’état adulte ; ensuite, j'ai examiné cet épithélium vibratile avec quelque persévérance (coupes de branchies d'Unio batavus M. R.), et j'y n'y ai pas vu la moindre division mitotique ou amitotique. Ces cellules empruntent donc de l’énergie

potentielle (probablement au glycose du sang) et rendent du travail,

sans se multiplier pour cela.

L'adaptation fonctionnelle existe d’une façon plus ou moins générale : c’est un fait. Quant à son mécanisme intime, peut-être très simple, peut-être très compliqué et très varié, je ne vois pour l'instant que des hypothèses à émettre, et parmi celles-ci, la théorie

de M. Le Danrec, quelque séduisante qu’elle puisse être par sa

simplicité, ne me paraît pas la plus acceptable.

Nancy, le 16 février 1897.

DES

Lille imp. L.Dansl,

RECHERCHES SUR LES AMPHARETIENS,

ANNÉLIDES POLYCHÈTES SÉDENTAIRES, MORPHOLOGIE. ANATOMIE, HISTOLOGIE, PHYSIOLOGIE,

PAR

PIERRE FAUVEL,

Docteur ès-sciences naturelles, Préparateur à la Faculté des Sciences de Caen, Chef des Travaux au laboratoire maritime de Luc-sur-Mer.

Planches XV-XXV.

INTRODUCTION

La famille des Ampharetiens, assez homogène renferme des Annélides d’un type bien spécial. Malheureusement ces animaux appartiennent en général aux mers boréales. Ailleurs ils sont relativement très rares et il est difficile de s’en procurer.

.C’est ce qui explique pourquoi l'anatomie de celte famille est si peu connue.

C’est la rareté des documents anatomiques qui nous a engagé à étudier cette famille en détail.

Nous désirions aussi nous rendre compte de ses rapports avec les familles voisines des Amphicténiens et de Terebelliens entre lesquelles la plupart des auteurs classent les Ampharètiens.

L'abondance extraordinaire de l’'Ampharete Grubei à St-Vaast- la-Hougue depuis quelques années, nous assurait la possibilité d’avoir toujours les matériaux suffisants à notre disposition.

Nous avions eu également l'heureuse chance de recueillir dans la même localité un certain nombre d'Amphicteis Gunneri, autre tvpe très intéressant de cette même famille.

278 PIERRE FAUVEL.

Nous avons pu en outre nous procurer d’autres espèces. Nous adressons particulièrement nos remerciements à M. le Professeur A. WIREN, d'Upsaal, qui a eu l’amabilité de nous envoyer des exemplaires de Melinna cristala et d'Amphicleis Gunneri de Suède.

La Station zoologique de Naples nous a fourni des exemplaires d’'Amphicleis Gunneri, Ampharele gracilis, Samytha adspersa et Melinna palmata.

Nous remercions M. le D' ANTHoN Dore, M. le D’ Ersre et M. le D' Lo Branco du bienveillant accueil qu’ils nous ont fait à Naples l'an dernier.

La plus grande partie de ce travail a élé exécutée au laboratoire maritime de Tatihou où, grâce à la large hospitalité, si libérale de M. le Professeur E. PERRIER, nous avons pu séjourner de longs mois, pendant plusieurs étés.

Nous prions M. E. PERRIER d'agréer l'hommage de notre profonde gratitude pour l’aide, les conseils et l'intérêt qu'il n’a cessé de nous prodiguer.

Notre ami M. A.-E. MALaARp a droit aussi à notre reconnaissance, en particulier pour les nombreux envois d'animaux qu'il nous a faits avec dévouement.

Nous prions également notre ami M. Ch. GRAvIER et M. le baron DE ST-JOsEPH de recevoir nos remerciements pour l'aide et les conseils qu’ils nous ont si aimablement donnés.

Dans notre travail, nous avons d’abord étudié en détail l'anatomie de l’Ampharetle Gruberi, espèce que nous pouvions nous procurer en assez grande quantité. Nous avions ainsi la facilité d’avoir toujours des matériaux frais et la possibilité de faire de nombreuses observations sur des animaux vivants.

Après cette étude de lAmpharete Gruber, nous examinons som- mairement l'anatomie de l'Amphicteis Gunneri, de la Samytha adspersa et de la Melinna palmata et M. cristata.

L’Ampharete gracilis ne présentant avec l'Ampharete Gruber que des différences externes d'ordre purement systématique, nous n’en donnons pas d'étude spéciale.

Nous avons ensuite comparé entre eux les différents genres étudiés, puis nous avons examiné les rapports de la famille des Amphareliens avec celles des Amphicténiens et des Térébelliens.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 279

HISTORIQUE.

La famille des Ampharetiens est de création récente. Dans les anciens auteurs on ne trouve aucune espèce d’Annélide qui puisse être rapportée à cette famille.

L'Amphitrite Gunneri Sars, décrit par Sars (35) * en 1835, est le premier représentant de la famille dont nous ayons trouvé la trace. |

A cette époque le terme Asnphitrile avait une signification encore bien vague et s’appliquait à des animaux très différents.

De 1846 à 1851, M. Sars décrivit encore trois autres Ampharétiens nouveaux: Sabellides cristata (56), S. octocirrata (51) et S. sexcirrala (56).

Lorsque GRUBE (51) publia « Die Familien der Anneliden », il ne connaissait encore que l’Amphicteis Gunneri Sars et la Sabellides octocirrata Sars qu'il rangeait parmi les T'érébelliens.

M. Sars (53) décrivit encore un Sabellides borealis en 1853 et un Amphicteis Finmarcha (64).

L'Annélide décrite par Gosse (55) sous le nom de Crossostoma Midas n’est autre que l'Amphicteis Gunneri de Sars.

Quant à l’Zso/da pulchella de Fr. MÜLLER (58), ses caractères sont tellement étranges qu'il est difficile de savoir si on doit le comprendre dans la famille des Ampharétiens.

Nous en dirons autant du Scalis minax de GRUBE (46), que cet auteur a d’ailleurs rangé plus tard (70) parmi les Amphicténiens. Il n'a rien de commun avecles Ampharéliens. GRUBE (60) avait, en 1860, décrit une autre espèce nouvelle : l’'Amphicteis acutifrons (Ampharete Grubei).

SCHMARDA (61), l'année suivante, signala, un Sabellides oligocirra n. spc. qu'il avait découvert à la Jamaïque.

* Les chiffres en caractères gras reportent à l’Index bibliographique, page 195.

280 PIERRE FAUVEL.

ScHMARDA classait les Sabellides parmi les Térébelliens. I mettait Amplucteis et Scalis dans la même famille, à côté des Pectinaires.

Un peu plus tard CLAPARÈDE (36) rencontra à St-Vaast-la-Hougue une Annélide nouvelle à laquelle il donna le nom de Branchio- sabella zostericola.

Il reconnut bien la parenté de cette espèce avec le genre Sabellides, mais il paraît avoir ignoré l'existence des Amphicteis pourvus de palées.

Son B. zoslericola n'est très probablement que l'Ampharete Grubei MG6r., décrit trois ans plus tôt par GRUBE (60), sous le nom d'Amphicleis acutifrons et retrouvé par nous dans la même localité en 1895. Seulement CLAPARÈDE n’a eu entre les mains qu’un exemplaire unique et mutilé, ce qui explique en partie les caractères anormaux du genre créé par lui.

En résumé, si on excepte les genres aberrants Scalis et Isolda, qui ne peuvent être rapportés sûrement aux Ampharétiens, les représentants de cette famille connus antérieurement à 1865 peuvent se réduire à 8 espèces, comprises alors dans les deux genres Amphicleis el Sabellides.

Amphicleis Gunnerti SArs.

Amphicteis Finmarchia Sars.

Amplhicleis acutifrons GRUBE Ampharele Grubei Mer =": Branchiosabella zostericola Ce.

Sabellides octocirrata Sars.

Sabellides borealis Sars. j

Sabellides oligocirra SCHMARDA.

Sabellides crislata Sars Melinna cristata. Sabellides sexcirrata Sars Samytha seæcirratla.

C'est à celte époque que parut le remarquable travail de MALMGREN : « Nordisha Hafs annulater » (65).

Le savant auteur sépara les Ampharéliens des Térébelliens avec lesquels ils avaient été jusque-là confondus et en forma une famille spéciale dans laquelle il établit plusieurs coupures.

La Sabellides cristata, devenue Melinna cristata, fut désormais le type d'un groupe comprenant les Amphareliens à nombreux segments (plus de 70).

Le reste de la famille forma un autre groupe divisé lui-même en

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 281

deux sections comprenant, l’une, les Ampharéliens munis de palées, l’autre, les Ampharéliens dépourvus de palées.

MALMGREN ajouta de nombreuses espèces boréales aux espèces déjà connues et les répartit en 8 genres, dont 6 entièrement nouveaux.

Le travail de MALMGREN, avec ses diagnoses très précises et suffi- samment détaillées et ses figures si claires, est encore le travail de systématique le meilleur et le plus complet que nous ayons sur cette famille, en tant que travail d'ensemble.

On ne peut guère faire qu'une critique à MALMGREN, c’est d’avoir multiplié les genres à l'excès.

Jusqu'à cette époque, saufl’Amphicteis brevispinis et l'A. inva- hida GR. trouvés dans la mer Caspienne et décrite par GRUBE (60O)et la Sabellides oligocirra Scam. de la Jamaïque, tous les Ampha- réliens connus appartenaient aux mers boréales.

Le Branchiosabella zostericola trouvé par CLARAPÈDE à St-Vaast élait l'espèce la plus méridionale de ceux-ci.

Depuis, on a rencontré des Ampharétiens dans presque toutes les parties du monde, mais toujours en très petit nombre. Beaucoup d’espèces ont été établies sur un seul individu recueilli.

KINBERG (66) a décrit un Ampharete patagonica ; Aryandes gracris KBG et À. forficata KBG tous deux du Guayaquil et Ofanes americanus du Brésil.

Ces trois derniers genres sont aberranis et KiINBERG ne les rangeait pas parmi les Ampharéliens mais parmi les T'érébelliens.

Dans ses « Miltheilungen ueber St-Malo und Roscoff > (69), GRUBE signala à St-Malo la Melinna palmata GR. qui est le second représentant de la famille trouvé en France. Il n’en rencontra qu'un seul exemplaire.

L'année suivante CLARAPEDE (70) découvrit à Naples l'Amphicteis curvipalea.

C'était le second Ampharetien signalé dans la Méditerranée, GRUBE ayant déjà décrit un Sabellides adspersus de l'ile Lusin (64).

Cette même année, GRUSE (70) publia une revision des Ampha- rétiens. Il conserva les trois grandes divisions de MALMGREN, mais supprima plusieurs genres el en réduisit le nombre à six: Ampha- rele, Amphicleis, Sabellides, Samytha (Otanes ?) Melinna et Isolda.

282 PIERRE FAUVEL.

En 1875, Eurers (75) cite plusieurs Ampharéliens recueillis pendant l'expédition du « Porcupine ».

Nous y trouvons une espèce nouvelle : Sabellides fulxa Eur. Le même auteur a décrit (87) plusieurs Ampharétiens nouveaux de la Floride :

Auchenoplax crinila Eur.., Melinna parumdentata Enr., Amage tumida Eur.., Amphicteis procera Eur. et Ampharele nasuta Eux. Il en a donné des descriptions très complètes.

MARENZELLER (74) a décrit la Melinna adriatica de la Méditer- ranée et plus tard (84) il a retrouvé au Japon l'Amphicters angus- lifolia qui avait été décrit par GRUBE (78) sous le nom de Sabellides angustifolia des Philippines en même temps qu'une autre espèce de la même provenance : l’'Amphicteis philippinarum.

À Madère, LANGERHANS (79-80) a rencontré l’Ampharele minuta n. spc. et l’Amage adspersa GR.

Dans l'Amérique du Nord, E.-H. WEBSTER (81) a signalé la Melinna cristata Mer.

Un Amphicteis foliosa d'Australie a été décrit par HASWELL (82).

Enfin l'expédition du < Challenger » a rapporté de nombreux Ampharetiens de toutes les parties du monde. Nous citerons seule- ment parmi ceux-ci les genres nouveaux: Phyllocomus, Grubia- nella, Eusamytha, Samythopsis et Melinopsis dont Ja description a été faite par Mc’INrosH (86).

Parmi les nombreux auteurs qui se sont occupés des Annélides des mers boréales nous ne citerons plus que THÉEL et A. WIREN.

THéEL (78) ne conserve que quatre des genres de MALMGREN : Amphicteis, Sabellides, Samytha et Melinna. Il réduit les genres Ampharete, Amphicteis, Lysippe et Sosane au seul genre Amphic- leis et fait rentrer le genre Amasge dans le genre Sabellides.

Il a trouvé à la Nouvelle-Zemble une espèce nouvelle : Samytha pallescens THEL (1).

VERRILL (73) a créé le genre Samythella.

(1) LEVINSEN (83) a créé les genres Glyphanostomum et Anabothrus pour la Samytha pallescens et l'Ampharete gracilis. Le genre Anabothrus ne nous paraît pas devoir êlre maintenu, car l'A. graculis ne diffère de l'A. Grubei que par des caractères externes

insignifiants et intérieurement ces deux espèces ne présentent aucune différence carac- téristique.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 283

WIREN (85) cite plusieurs Ampharétiens nouveaux des côtes de Sibérie et du détroit de Behring parmi lesquels Amphicteis Wéga Wire et Sabellides Sibirica WIREN.

En résumé, l'aire de dispersion de la famille qui semblait d'abord restreinte aux mers boréales est considérablement étendue. On a maintenant trouvé des Ampharétiens dans presque toutes les régions du globe, dans les mers froides, dans les mers tièdes comme la Méditerranée, dans les mers chaudes comme le golfe du Mexique, au Brésil, aux Philippines, en Australie.

Mais il faut remarquer que ces Annélides se rencontrent presque toujours à une assez grande profondeur, le « Challenger » a même dragué lAmphicteis Gunneri dans l'Océan par un fond de 2.750 brasses. Or les espèces abyssales ont en général une aire de disper- sion très grande vu l’uniformité des conditions d'existence à une certaine profondeur.

Néanmoins les genres et les espèces de cette famille sontrelative- ment peu nombreux, et, en dehors des régions septentrionales, elle n'est représentée dans chaque pays que par un nombre restreint d'espèces assez rares.

Nous examinerons maintenant comment cette famille est repré- sentée sur les côtes de France.

Sur les côtes de l'Océan aucun Ampharetien n’a encore été signalé en France, à notre connaissance.

Sur les côtes de la Manche nous avons déjà mentionné le Bran- chiosabella zostericola Cip. À. Grubei, signalé par CLAPARÈDE (63) à St-Vaast-la-Hougue.

Quelques lignes de KINBERG (66) nous apprennent que la frégate « Eugenius » a dragué en route, devant Cherbourg, un Amphacters Gunneri Sars par un fond de 2 à 5 brasses.

Comme nous l'avons déjà dit, GRUBE (72) a trouvé un unique exemplaire de Melinna palmata GR. à St-Malo.

M. le Baron pe S1-Josep (94) a signalé en 1894 à Dinard l'Amphac- leis curvipalea C1p, dont il a trouvé un seul exemplaire sur la côte à la balise de Rochardien, dans les touffes de corallines.

La même année (août 1894) nous avons trouvé à St-Vaast-la- Hougue un unique exemplaire de l’'Amphicleis Gunneri dans la vase des herbiers de zostères qui s'étendent au S.-E. de l'île Tatihou.

En 1895 nous avons eu la chance de retrouver encore plusieurs individus de la même espèce dans ces mêmes zostères.

284 PIERRE FAUVEL,

Enfin le 22 avril 4895, dans la même localité, nous avons trouvé pour la première fois un autre Ampharélien nouveau pour la France : l'Ampharele Grubei Mcr.

Depuis cette époque nous n’avons cessé d’en trouver en grande abondance sur de nombreux bancs vaseux et dans toules les prairies de zostères qui avoisinent Tatihou, mais nous ne l’avons retrouvé nulle part ailleurs en dehors de la baie de St-Vaast.

Cette espèce a fait brusquement son apparition à Tatihou, car dans tous les endroits nous l’avons trouvée en si grande abondance, nous n’en avions jamais rencontré un seul exemplaire les années précédentes bien que nous les ayons souvent et soigneusement explorés à la recherche des Annélides.

Si nous passons maintenant aux côtes françaises de la Méditerranée nous voyons que MARION y a trouvé plusieurs Ampharétiens.

Il y a signalé (75) l’Amage Gallasii Mar. et l'Amphicteis inter- media Mar. à Marseille. Dans les dragages au large de ce port (79), il a trouvé Sabellides octocirrata SArs var. Mediterranea et, avec un Ampharetle spec., l’Amphicteis Gunneri Sars dans trois localités différentes (82) (83).

MARIN (75) restreint pour les Ampharetiens la classification de MALMGREN aux cinq genres : Ampharetle, Amplhaicteis, Sabellides, Amage et Melinna.

C’est en somme la classification proposée par THÉEL (78), ainsi qu'on l’a vu plus haut, avec le genre Ampharete en plus et le genre Amage au lieu du genre Samytha.

Dans cette rapide revue de l'histoire des Ampharéliens nous n’avons guère cité que des travaux de systématique.

Jusqu'ici ces Annélides ont été fort peu étudiées au point de vue de l’anatomie interne et de l’histologie. Les travaux traitant ce sujet sont rares et le plus souvent c’est à peine si l’on rencontre dans les auteurs quelques lignes sur cette famille intéressante.

CLAPAREDE (63) consacre seulementcinqlignes à l'anatomieinterne de son Branchiosabella zostericola. I décrit, par transparence, un estomac brunâtre faisant suite à l'œsophage et s'étendant du segment jusqu’à l'extrémité de la partie thoracique et s'ouvrant dans l'intestin. Il décrit et figure deux prétendues glandes tubipares s'ouvrant dans la bouche ou l’œsophage qu'il compare aux glandes cemenlaires des Protules, et c’est tout.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 285

Mc'Inrosx (75) dans son travail sur la chaîne nerveuse des Anné- lides, se borne à indiquer que chez l'Amphicteis Gunneri les nerfs se présentent, en section transversale, comme deux cordons séparés, enveloppés dans un névrilème commun, et enfoncés dans l’épaisse couche hypodermique de la région médio-ventrale.

MaArioN (79) donne quelques détails anatomiques sur la Sabellides octocirrata Sars.Il signale la circulation du liquide lymphatique dans les tentacules et mentionne, le premier, que le tube digestif semble engainé dans un sinus vasculaire. Il distingue en outre un vaisseau dorsal (c’est vraisemblablement le cœur) et quelques petites anses transverses. Il dit également quelques mots des organes segmen- taires et du corps cardiaque.

LANGERHANS (79) consacre également quelques lignes à la description du tube digestif et du cœur de l’Ampharele minula.

HaswELL (83), à la suite de sa description de l’Amplhacters foliata, ajoute quelques détails anatomiques sur le tube digestif de celte espèce et donne la figure d'une section de l'animal.

Ce n'est que dans le beau mémoire de WIREN (85), que nous trouvons pour la première fois une étude anatomique et histologique détaillée des organes circulatoires et digestifs de l'Amphicters Guuneri et de la Melinna cristata, accompagnés de nombreuses figures.

Ce travail et le mémoire de MEYER (8'7) sur la structure des Anné- lides, constituent les deux seuls documents importants que nous ayons sur l'anatomie de Ampharétiens.

MEYER a surlout étudié les organes segmentaires de la Melinna palmata, waisil a donné une bonne figure d'ensemble de l'anatomie de cette Annélide.

Depuis cette époque il n'a paru qu'une description des canaux neuraux des Ampharétiens par CUNNINGHAM (88).

En résumé l'anatomie de cette famille est fort mal connue. Trois espèces seulement: Amphicleis Gunneri, Melinna cristata et Melinna palmata ont été étudiées avec quelques détails au point de vue de la circulation, de la digestion, et des néphridies.

En ce qui concerne l'Ampharete Grubei, nous n'avons pu décou- vrir aucune description anatomique.

C’est ce qui nous a engagé à étudier spécialement l'anatomie et l'histologie de cette espèce. Son abondance, à St-Vaast, depuis

286 PIERRE FAUVEL.

quelque temps nous a permis d’avoir toujours des matériaux en quantité suffisante et nous avons pu faire une grande partie de nos observations sur des animaux vivants ou frais.

LE: TECHNIQUE.

Les animaux mous, comme les Annélides, et susceptibles de changer de forme et d'aspect dans les milieux conservateurs, doivent autant que possible être étudiés frais.

Au laboratoire de Tatihou il nous était facile de nous procurer des Anpharete vivants en quantité suffisante et au fur à mesure des besoins.

À Caen, grâce à l’obligeance de notre ami M. MALARD, qui nous faisait de temps en temps des envois d’Ampharete de Tatihou, nous en avons toujours eu de vivants à notre disposition.

Ces animaux vivent fort bien dans un cristallisoir dont le fond est garni d’une couche de sable fin, ou de vase, d’un ou deux centi- mètres d'épaisseur. La seule précaution à prendre consiste à meltre quelques Ulves dans l’eau de mer et à couvrir le cristallisoir avec un disque de verre.

Dans ces conditions l’aération de l’eau est suffisamment assurée, le disque de verre empêche l’évaporation et la souillure de l'eau par la poussière el les Annélides peuvent y vivre des mois sans qu'il soit nécessaire de la renouveler.

Nous avons étudié la plus grande partie de l'anatomie sur des animaux disséqués frais, sous l’eau de mer. Les tissus restent ainsi assez longtemps vivants et gardent leur aspect et leur coloration.

En disséquant ainsi sous la loupe ou le microscope, on peut facile- ment étudier la plus grande partie de l'anatomie de l'appareil diges- tif, de l'appareil circulatoire, des néphridies et de la musculature.

La morphologie externe, cela va sans dire, doit être étudiée sur des animaux vivants. Dans ces conditions seulement, il est possible de se rendre compte exactement de l'aspect, de la coloration et de la forme des organes.

Malheureusement, en ce quiconcerne Melinna et Samytha, nous n'avons pu procéder ainsi n'ayant eu à notre disposition que des animaux conservés.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 287

Pour observer certains détails anatomiques il est cependant plus commode de s'adresser à des animaux fixés.

Un procédé qui nous a réussi consiste à les colorer en masse par une teinture appropriée. Les divers organes se colorant différem- ment, l'étude en devient beaucoup plus aisée. Autrement lorsqu'on ouvre une Annélide fixée, les tissus étant presque tous également décolorés par le fixateur, les organes ne se détachent pas sur ce fond blanc uniforme et le travail à la loupe est très pénible.

Nous avons employé souvent avec succès l’éosine, la safranine, le bleu de Méthylène.

Sur les animaux ainsi colorés en masse par la safranine, puis déco- lorés dans l'alcool à 50°, les téguments sont colorés en rouge vif, ainsi que les glandes ventrales tandis que la musculature, à peine colorée en rose pâle se détache admirablement sur ce fond.

L’éosine au contraire colore fortement les muscles et très peu les téguments.

En variant et en combinant les colorants on arrive à faciliter grandement la dissection des organes.

Cette dissection directe est la meilleure manière de se rendre compte de la forme générale des organes et de leurs rapports. Elle ne doit jamais être négligée quand elle est possible, mais elle doit toujours être complétée par la méthode des coupes.

Cette dernière méthode remplace forcément la première lorsque l'animal, ou l'organe à éludier, est trop petit pour être disséqué directement. C’est l'anatomie fine.

L'étude complète d’un animal ne se borne pas à la morphologie de ses organes, mais comprend encore l'étude histologique des tissus qui les composent.

Cette dernière étude ne peut se faire que sur des coupes fines d'animaux préalablement fixés. |

Nous avons employé comme fixateurs : l'acide osmique à {°/,, le liquide chromo-acétique (Cr O3 à 1 °/, 100%, acide acétique 30°), le liquide de Flemming, le liquide de Fol, le formol à 5°/,, le sublimé acétique (1) et Le liquide de Perenyi.

(1) Solution concentrée de bichlorure de mercure dans l'eau de mer .......... 100 Arideraeétique eristallisable.;: 4h. st 2e ee at DT ao ot 20

288 PIERRE FAUVEL.

Les liquides contenant de l’acide osmique ou de l'acide chromique donnent de bons résultats pour certains cas spéciaux. Ils ont l'in- convénient de gèner les colorations et de ne pas se prêter à une longue conservation des matériaux.

Le sublimé acétique et le liquide de Perenyi sont les deux fixa- teurs qui nous ont donné les meilleurs résultats.

Les Annélides fixées de cette façon, rapidement lavées à l’eau distillée et conservées dans l'alcool à 70°, changé plusieurs fois dans les premiers jours qui suivent la fixation, se conservent admirable- ment et indéfiniment.

Au bout de quatre ans nous avons obtenu des préparations aussi belles qu'avec des animaux fraîchement fixés.

Pour les coupes en série nous avons adopté en général l’inclusion à la paraffine, précédée de la coloration en masse, soit par l'Héma- toxyline-Eosine, soit par la Safranine ou le bleu de Méthylène.

Nous avons employé aussi, soit en masse, soit en coloration sur la lame, le vert de Méthyle, le carmin aluné, le carmin boracique, le picro-carmin, le violet de gentiane, le violet de Méthyle, la fuschine acide, etc.

En général nous préférons la coloration en masse parce que les coupes ayant beaucoup moins de manipulations à subir, les {issus sont beaucoup mieux conservés.

Les rubans de coupes sont étalés sur des lames bien nettoyées, couvertes d’une mince couche d’eau tiède sur laquelle les coupes flottent et s’étalent.

L'eau est ensuite égouttée, puis lorsque la paraffine est bien sèche on la fait fondre sur une plaque chauffante pendant quelques instants. Après refroidissement la paraffine est enlevée par l'essence de pétrole du commerce. Les coupes rapidement éclaircies au xylol sont montées au baume suivant le procédé ordinaire.

Cette méthode inventée par J. MarTIN nous a toujours douné d'excellents résultats.

Elle a l'avantage de supprimer le milieu adhérent qui empâte les coupes et se colore.

Lorsque les lames sont bien propres, condition indispensable, l'adhérence des coupes au verre est assez grande pour permettre le passage aux alcools, les lavages et les teintures.

Un procédé excellent pour l'étude des petits animaux par transpa-

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 289

rence consiste à colorer l'animal en masse par une teinture appro- priée. Après déshydration par l'alcool absolu et éclaircissement par l'essence de cèdre, on peut monter l’animal au baume en entier ou par fragments.

Ce procédé donne d'excellents résultats pour l’étude des cellules glandulaires de l’épiderme.

Il.

DIAGNOSE. MORPHOLOGIE EXTERNE. Ampharete Grubei Mer.

Amphicteis acutifrons. GRUBE (60), p. 109 ; DE QUATREFAGES (65), p. 394.

? Branchiosabella zostericola. CraAPARÈDE (63), p. 34-36, pl. XIV, fig. 32-37.

Ampharete Grubei. MaLMGREN (65), p. 363, pl. XIX, fig. 44; GRUBE (70), p. {1 et 14; Môgius (71), p. 109 et (75) p. 163 ; MAL. (74), p. 95.

Amphicteis Grubei. TuéeL (78), p. 60 ; A. WIRE (85), p. 413.

Ampharete Grubei. J. HorneLL (92), p. 161; OLAr Binenkap (9,4), p. 33 et 123 ; P. Fauvez (95 2), p. 329-348 (95 b), (96 a), p. 143 (96 b), p. 68-78.

SE Diagnose.

Lobe céphalique distinct, portant deux sillons limitant un espace irrégulièrement pentagonal, sans sillon médian; 2 yeux ; segment buccal plus court que le lobe céphalique ; tentacules buccaux pennes; deuxième segment, court, nu; troisième segment, court, étroit, divisé par un sillon tranversal; un éventail de palées jaune d'or, dirigées en avant, implanté de chaque côté de la face dorsale du III" segment ; palées terminées en pointe fine, acuminée, droite ou légèrement recourbée ; 8 branchies, simples, subulées, rugueuses, crénelées, guère plus longues que la région antérieure du corps, implantées extérieurement sur la partie dorsale du ITT° et du IV° seg- ment ; {4 pieds à soies capillaires à partir du IV° segment, suivis de 12 segments abdominaux portant seulement des pinnules uncini- gères (ces dernières apparaissent dès le VI segment, sétigère) ; soies capillaires limbées, ensiformes ; plaques onciales à 6-9 dents ;

290 PIERRE FAUVEL.

environ 20 cirrhes anaux égalant à peu près la longueur du segment anal. Sang vert, dichroïque.

Coloration : 6 blanc verdâtre ; 9 saumon clair. On voit par trans- parence dans la région thoracique l'estomac brunâtre entouré d’un sinus verdâtre et les lobes antérieurs de l'estomac rouge brique.

Taille moyenne : de 15 à 35"/,.

Tube membraneux recouvert de sable RE

SALE Morphologie externe.

Le corps se divise comme chez toutes les Annélides en Prosto- mium ou lobe céphalique, Métastomiun et Pygidium, mais au point de vue purement descriptif on peut le diviser chez l'Ampharete en trois régions qui offrent immédiatement à l'œil des caractères distincts.

Région antérieure, comprenant le lobe céphalique, le segment buccal et le Il° segment, tous dépourvus de soies.

Région thoracique, dont tous les segments sont pourvus de parapodes à soies capillaires.

Région abdominale, dont tous les segments sont dépourvus de soies capillaires et ne portent que des pinnules uncinigères.

A. Région antérieure. Cette région comprend le lobe céphalique et les deux premiers segments du corps.

Le lobe céphalique forme une sorte de rostre à la partie antérieure dorsale de l’animal.

Sa forme varie beaucoup suivant que la bouche est fermée et les tentacules rentrés dans l’œsophage ou bien ouverte avec les ten- tacules sortis (PI. xv, fig. 6-7).

Dans Le premier cas le lobe céphalique, vu d’eu dessus, montre trois parties : une partie médiane ou frontale (PI. xv, fig. 9, Pa) et deux parties latérales (Seitenfelder de GRUBE (70), séparées de la partie frontale par un sillon.

La partie frontale ou palpode a la forme d’un pentagone allongé La base du pentagone est limitée en arrière par un petit sillon trans-

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 291

versal sous lequel s’enfoncent les fentes des organes nucaux, visibles seulement sur des coupes. Les deux parties latérales s’'écartent en divergeant légèrement et sont limitées par deux sillons longitudinaux du lobe céphalique. L'ensemble forme une sorte de rostre aigu qui surplombe l'ouverture buccale (PI. xv, fig. 8).

Le palpode, légèrement arqué, ne présente ni sillon médian, ni ornements d'aucune sorte. Sa coloration est vert blanchâtre.

Les deux parties latérales du lobe céphalique sont également nues, elles viennent insensiblement se raccorder avec les coins de la bouche.

Vu d'en dessous le lobe céphalique paraît beaucoup plus acuminé et offre un aspect nettement trilobé (PI. xv, fig. 7).

Il est facile de se rendre compte qu'il est formé par une lame assez mince, froncée. Les sillons visibles à la face supérieure sont deux plis longitudinaux. A la face ventrale ces deux plis sont encore plus nettement accusés et forment deux lobes latéraux arrondis qui se rejoignent en face de la lèvre inférieure simulant ainsi une sorte de lèvre supérieure, tandis qu'au-dessus d’eux la partie frontale forme une gouttière elliptique.

Lorsque la bouche est ouverte et les tentacules sortis cet aspect trifolié disparaît complètement ; les deux replis latéraux s’effacent par suite du développement du lobe céphalique qui s'ouvre comme une bourse et se dilate pour laisser sortür les tentacules et la lèvre supérieure.

Le lobe céphalique n'apparaît plus à la face inférieure que comme une lame demi circulaire, à bord arrondi, s’étalant en cornet autour de la partie supérieure de la bouche (PI. xv, fig. 6).

À la face dorsale les sillons s’atténuent également sans, toutefois, s’effacer complètement et le bord antérieur s’arrondit. La partie frontale perd son aspect pentagonal pour prendre la forme subqua- drangulaire, à bord antérieur tronqué et légèrement arqué, décrite et figurée par MALMGREN (65) (PI. x1x, fig. 44, à).

Ceci explique les différences entre la description de GRUBE (70) p 14 et celle de MALMGREN.

L’Amphicteis acutifrons, reconnu depuis synonyme d'Ampha- rele (rrubei ne difièrerait de ce dernier que par la forme acuminé de son lobe céphalique, forme qui lui avait valu son nom caractéristique d'acutifrons. La description de GRUBE s’appliquait à un animal fixé

292 PIERRE FAUVEL.

avec les tentacules en partie invaginés dans l’œsophage, tandis que la description de MALMGREN s’appliquait à un animal ayant la bouche ouverte et les tentacules sortis.

Sur les animaux fixés par différents réactifs, on trouve tous les intermédiaires entre les deux élats extrêmes avec une forme légère- ment différente du lobe céphalique pour chacun.

En arrière du palpode on remarque encore un petit espace rectangulaire légèrement en relief. Cet espace, dont la plus grande longueur n’excède pas celle de la base de la partie frontale du lobe céphalique, correspond à l’encéphale que l’on aperçoit par transpa- rence à travers les téguments. C’est une masse allongée transversa- lement, légèrement jaunâtre et entourée de vaisseaux dans lesquels circule le sang vert de l'animal.

On distingue sur le cerveau deux yeux, simples taches de pigment noirâtre, noyées dans la substance cérébrale (PI. xv, fig. 9, a).

Ces deux yeux sont très visibles chez les jeunes exemplaires. Chez les vieux, par suite sans doute de l'épaisseur et de l’opacité plus grandes des tissus qui les recouvrent ils sont beaucoup moins apparents. C’esi probablement pour cette raison que MALMGREN ne les signale pas.

Le premier segment est le segment buccal. A la face dorsale il se présente sous l’aspect d'un segment nu très court, simple bande transversale entre le lobe céphalique et le deuxième segment. Il ne présente ni sillons, ni soies (PI. xv, fig. 6-7-8-9, I).

A la face ventrale il limite la bouche qui est subterminale et surplombée seulement, en avant, par le lobe céphalique.

La lèvre inférieure, assez élevée, est légèrement arquée et plissée longitudinalement quand la bouche est fermée. Elle forme alors un bourrelet arrondi.

Le deuxième segment (PI. xv, fig. 6-7-8-9, IT) est deux fois plus long que le segment buccal. Il est également nu et dépourvu d'ornementations. À la face dorsale un léger sillon transversal le divise cependant en deux parties, simulant ainsi deux segments peu distincts. A la face ventrale ce sillon est moins visible encore.

L'ensemble du lobe céphalique, du segment buccal et du deuxième segment forme la région antérieure de l'animal. Cette partie anté- rieure, beaucoup moins large que les segments suivants, est sur- plombée par le troisième segment qui porte les palées et une partie

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 293

des branchies et elle est susceptible de s'invaginer pour ainsi dire sous ce segment à la façon d'un tube de lorgnette.

Sur des animaux fixés en état de contraction, on n'aperçoit plus que le lobe céphalique dépassant le segment branchial qui recouvre alors le reste de la région antérieure. Tout au plus, peut-on parfois distinguer le segment buccal et une partie du deuxième segment.

Ce n'est que sur un animal bien vivant que l’on peut se rendre exactement compte de la disposition de ces segments, quand il allonge sa région antérieure.

Ceci explique aisément les divergences dans les descriptions. GRUBE décrit le segment buccal de l’A. acutifrons comme pourvu à la face ventrale de deux sillons transversaux.

11 a pris pour une partie de l'anneau buccal le deuxième segment dont il n’apercevait pas la partie dorsale invaginée sous le troisième segment.

Sa description (70) p. 14 correspond exactement à l'aspect que présente l’Ampharele Grubei dont la partie antérieure est rétractée.

Les tentacules buccaux, pennés, sont ordinairement invaginés dans l’œsophage. Nous décrirons leur structure en détail en traitant du tube digestif, bien que leur anatomie nous démontre qu'ils appartiennent en réalité au lobe céphalique car ils jouent le principal rôle dans la recherche et la préhension des aliments.

L'exemplaire d'A. acutifrons de GRUBE n'avait plus que quelques tentacules courts et ne présentant pas nettement de pennation. Ces tentacules étaient sans doute en grande partie invaginés dans l’œso- phage et dans cet état ils sont raccourcis, contractés, fortement plissés transversalement et leur structure pennée est alors diffici- lement visible, surtout à la partie terminale.

Peut-être faut-il attribuer à cet état la cause des descriptions faites d’Ampharete à tentacules lisses.

Malgré ces légères différences GRUBE admettait l'identité de son espèce, dont il n'avait eu qu'un seul exemplaire, dépourvu de ses branchies, avec l'A. Grubei.

Nous pensons avoir suffisamment expliqué la cause de ces légères différences, purement apparentes, et dues à la fixation.

L'Amplucleis acutifrons GR. est bien exactement l’Ampharele Grubeide Malmgren,et GRUBE lui-même ayant admis ce dernier nom,

294 PIERRE FAUVEL.

nous avons tout lieu de l’adopter bien que le nom acutifrons ait la priorité.

On aperçoit par transparence le réseau de vaisseaux sanguins qui entoure l’œsophage etla masse cérébroïde, la pointe du cœur qui s'avance par moments jusqu'au bord postérieur du segment buccal et les vaisseaux afférents des branchies partant de l'extrémité anté- rieure du cœur et revenant en arrière sur eux-mêmes pour aller aux branchies.

B. Région thoracique. La région thoracique qui fait suite à la région antérieure comprend tous les segments porteurs de soies capillaires. Sa longueur atteint des deux tiers à la moitié de la longueur totale du corps suivant l'état d'extension.

C'est aussi la partie la plus volumineuse du corps et celle qui contient les organes principaux.

Elle comprend 15 segments : un segment branchial (1°) portant les éventails de palées et 14 segments porteurs de mamelons pédieux à soies capillaires. Les 12 derniers de ces segments portent en outre des pinnules uncinigères garnies de soies à crochet ou wncini pecti- niformes.

A la face dorsale la région thoracique ne présente presque aucune trace d'annulation. À peine y distingue-t-on quelques plissements et quelques stries transversales.

Les téguments sont minces, à peine colorés en jaune verdâtre chez les mâles, en rose saumon chez les femelles, et leur transpa- rence laisse apercevoir au-dessous les organes qui donnent au corps sa principale coloration (PI. xv, fig. 5).

On voit aussi par transparence une grosse masse allongée, jaune verdàtre sur laquelle des contractions successives font passer des ondes vertes. C’est l'estomac, qui remplit presque entièrement la cavité thoracique et qui est contenu dans un vaste sinus circule le sang vert de l'animal. Au niveau du segment sétigère la colo- ration change. Le sinus stomacal se termine brusquement et donne naissance au Cœur, masse sombre, presque noire, partant de la face dorsale de l’estomac et s'étendant en ligne un peu sinueuse Jus- qu'au deuxième segment. De chaque côté du cœur on aperçoit deux masses orangées, parfois mouchetées de blanc (PI. xv, fig.5, La) et parcourues par de fins vaisseaux verts. Ce sont les deux diverli-

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 295

cules, ou lobes antérieurs, de l'estomac qui s'étendent du IIT°(1" tho- racique) au ou VI segment.

A la face ventrale la couleur est plus accusée et la transparence beaucoup moins grande. Les mâles sont blanc-verdâtres, les femelles saumon Clair.

Sur la ligne médiane on-distingue seulement le vaisseau ventral vert.

Tous les segments thoraciques, sauf les deux derniers, portent des boucliers ventraux. Ces boucliers qui s'étendent d'un parapode à l’autre sur la ‘ace ventrale sont d’épais bourrelets de tissu épider- mique formant sur chaque anneau une sorte de tore. Il y a un bourrelet par segment, cependant le bouclier du premier segment thoracique est parfois divisé par un léger sillon transversal de sorte qu'il semble y en avoir deux dans ce segment. Ce premier bouclier forme un gros bourrelet faisant fortement saillie au-dessus des segments de la région antérieure (PI. xv, fig. 7-8).

De chaque côté de ce bourrelet on remarque un lobe arrondi, saillant, portant un éventail de palées. Ces palées sont de fortes soies jaune d'or, implantées au nombre de 10 à 12 sur chaque mamelon latéral. Au gré de l'animal elles peuvent s’accoler les unes aux autres ou s'ouvrir au contraire en divergeant, exactement comme les lames d’un éventail qui s'ouvre et se ferme. Elles ne sont pas implantées suivant une ligne droite dans le mamelon, mais sur une ligne recourbée dont la courbe s'’accentue de plus en plus jusqu'à revenir un peu sur elle-même à l'extrémité, de telle sorte que les palées ouvertes forment une sorte de demi-entonnoir (PI. xxi, fig. 94).

Les plus longues et les plus grosses soies se trouvent du côté interne, sur la partie la plus droite de la ligne d'implantation. Les palées vont en diminuant de taille vers le côté extérieur du mamelon

qui correspond à la partie la plus recourbée de la ligne d’implan- tation.

Le même segment semble encore porter extérieurement à sa partie dorsale, les trois premières paires de branchies.

Ces branchies sont simples, subulées, de longueur variable suivant que l’animal les contracte plus ou moins.

Cependant dans leur plus grande extension elles atteignent à peine

296 PIERRE FAUVEL.

le double de la plus grande largeur du corps. Rétractées, leur longueur égale sensiblement la largeur du corps.

Extérieurement ces branchies présentent une striation ou aunu- lation transversale assez variable. Chez de jeunes individus quand elles sont fortement contractées elles paraissent crénelées, tellement cette striation est accentuée.

On y remarque aussi des couronnes circulaires de cils vibratiles. Elles sont parcourues par deux vaisseaux simples communiquant en anse. L'un amène le sang du cœur et l’autre le ramène au vaisseau ventral.

Les trois premières paires de branchies semblent insérées sur le bord antérieur du segment porteur des palées, sur une seule ligne transversale. Il y a de chaque côté trois branchies. La plus externe (2°) qui est souvent un peu moins longue que les autres se trouve insérée à côté et un peu en arrière du mamelon porteur de palées (PL. xv, fig. 8-9, Br.). La première branchie (PI. xvi, fig. 12-15, Br), est au milieu et un peu en avant de ses deux voisines.

Les deux groupes de branchies laissent entre eux un espace libre au centre du segment branchial. Cet espace égal au quart, environ, de la largeur du segment est nu et divisé seulement transversa- lement par une légère dépression.

Le IV° segment, c’est-à-dire le deuxième de la région thoracique porte la quatrième paire de branchies. Nous avons vu que le segment précédent porte 3 paires de branchies rangées presque en ligne droite: 2-1-3 ; la branchie portée par le IV° segment est insérée exacte- ment derrière la branchie 1, c’est-à-dire derrière la branchie centrale du groupe précédent (PI. xv, fig. 9, Br; PI. xvi, fig. 12-13, Bri, Bra. Brs, Br;). Cette branchie a généralement la même longueur que les autres, parfois cependant elle est un peu plus courte.

Le IV‘ segment porte encore de chaque côté et presque dorsa- lement le premier pied à soies capillaires. Ces soies fines, à limbe strié et tordues légèrement sur elles-mêmes, sont insérées au nombre de 6 à 8 sur un mamelon cylindrique.

A la face ventrale ce segment, plus étroit que le précédent, porte un bouclier ventral, simple tore allant d’un pied à l'autre.

Le segment est semblable au précédent. Le pied est seulement un peu plus furt et s’écarte davantage de la face dorsale pour se rapprocher de la ligne latérale.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 297

Au VI° segment le mamelon pédieux est devenu franchement latéral. À ce segment apparaissent pour la première fois les pinnules uncinigères.

La pinnule uncinigère thoracique est un mamelon en forme d'entonnoir aplati, dirigé en arrière. Sur le bord antérieur de cet entonnoir sont insérées les soies à crochet ou plaques onciales (uncini) à 9 dents acérées recourbées (PL. xv, fig. 8 ; (PL. xvu, fig. 20 à 30). Ces uncini, au nombre de 40 à 50, forment une seule rangée tranvsersale rétrogressive.

Entre le mamelon sétigère et la pinnule uncinigère du VI segment, on remarque le pore externe de la deuxième paire de néphridies par se fait l'expulsion des produits sexuels.

Ce petit mamelon perforé n’est bien visible qu'au moment de la reproduction. Il se dilate alors considérablement (PL. xxnr, fig. 120).

Tous les autres segments thoraciques sont semblables entre eux et portent un mamelon sétigère et une pinnule uncinigère.

Les deux derniers cependant sont dépourvus de bouclier et à partir de cet endroit commence la profonde gouttière longitudinale qui s'étend sur toute la longueur de la face ventrale dans la région abdominale. Ce sillon rappelle tout à fait celui des Ophéliens.

C. Région abdominale. Cette région comprend les 12 derniers segments et le segment anal. Plus mince que la précédente et progressivement effilée, elle est principalement caractérisée par l'absence complète de pieds sétigères et par la présence à tous ses segments de pinnules uncinigères.

De plus la segmentation y est très apparente même à la face dorsale, tandis que ce caractère fait presque entièrement défaut dans la région thoracique.

A la face dorsale on aperçoit, par transparence, la partie posté- rieure de l'estomac qui s'étend encore dans le premier segment de celte région. À la sortie de l'estomac l'intestin décrit une anse remontante puis, se retrécissant brusquement, il revient en arrière et se continue en ligne droite jusqu'à l'anus. A chaque segment on aperçoit par transparence un élranglement du tube digestif et un dissépiment transversal correspondant à un élargissement.

Les pinnules des deux premiers segments de la région abdominale sont presque semblables à celles de la région thoracique, essuite

298 PIERRE FAUVEL.

elleschangent brusquement d'aspect. Elles s'aplatissent, s’élargissent en éventail tandis qu'un petit cirre pointu, dont les rudiments apparaissent dans les deux pinnules précédentes, se développe sur leur bord dorsal (PI. xvur, fig. 24-22-23, Ci).

On distingue par transparence les HR de soutien des plaques onciales. Le bord libre des pinnules est sinueux et légè- rement déchiqueté.

A la face ventrale les boucliers ont complètement disparu et les téguments, presque aussi transparents qu’à la face dorsale, laissent apercevoir l'intestin Jaunâtre, et le vaisseau ventral vert ainsi que les vaisseaux latéraux.

La sole ventrale est creusée d’une profonde gouttière longilu- dinale, très accentuée, surtout sur les animaux conservés.

De chaque côté de celte gouttière, les muscles longitudinaux forment un gros bourrelet qu’un sillon longitudinal sépare aussi de la face dorsale (PI. xx11, fig. 103). C’est Le long de ces bourrelets que s’insérent les pinnules. Sur des coupes de celte région du corps la section de ces bourrelets musculaires est presque cylindrique (PI. xxu, fig. 103).

L'anus est terminal, formé par une sorte de sphincter plissé et entouré d'une vinglaine de petits cirres, rarement plus longs que le segment anal (PI. xv, fig. 10 ; PI. xxu, fig. 108, 109).

RUE

HABITAT. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE.

$S I. Habitat.

L'Ampharete Grubei se rencontre autour de l’île Tatihou, pres partout il existe de la vase à zostères.

Nous l'avons rencontré pour la première fois, le 22 avril 1895, dans une petite prairie de zostières située à l'Est de l’île entre les rochers de granit qui s'étendent très loin en mer dans cette direclion.

Nous avons trouvé ce jour une quinzaine d'individus mesurant entre 15 et 25 "/, de longueur.

Ils habitent de petits tubes formés de vase agglutinée, doublés intérieurement d’une mince membrane transparente assez résistante,

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. Mar

rappelant à première vue celle qui double le tubo des Praxithea wrorala. Ces tubes s'enfoncent verticalement dans la vase à une profondeur de 4 à 8 centimètres.

Depuis nous avons retrouvé l'Ampharete assez communément dans toutes les prairies de zostères avoisinant Tatihou et St-Vaast, mais jamais nous ne l’avons rencontré en dehors de la baie de la Hougue.

I parait manquer totalement à Cherbourg, à Vauville, et sur les côtes du Calvados nous l’avons en vain cherché depuis Grandcamp jusqu'à Dives.

Au printemps de 1895 nous avons trouvé à St-Vaast la surface des bancs vaseux, dépourvus de zostères, couverte de fines vermi- culations entièrement composées de petits tubes de vase appliqués dessus.

Chacun de ces tubes contenait un très petit individu d'Am- pharele mesurant de 1 "/, à 5 "/, au plus de longueur.

Celte incroyable invasion qui a suivi l'hiver rigoureux de 1894-95 n’a pas duré et elle ne s’est pas reproduite en 1896 ni en 1897.

Au bout de quelques semaines cette inimense quantité de jeunes Ampharele, répandue à la surface des bancs de vase nue, a complè- tement disparu.

Dans la vase couverte de zostères, au contraire, ces animaux ont grandi et se sont développés.

Les adultes semblent aussi diminuer en nombre et en dimensions depuis deux ans.

Ils ont une tendance à se localiser dans certaines parties des herbiers de zostères.

Ils affectionnent particulièrement les endroits ja vase offre une certaine consistance, c’est-à-dire plutôt un sable fin, compact, légèrement vaseux, d’une teinte gris noirâtre, pas trop foncée, avec des zostères un peu clairsemés.

Dès que la vase est noire et exhale une odeur forte les Ampharete disparaissent. Il en est de même dans les endroits elle est mélangée de gravier grossier, ou de trop nombreux détritus végétaux, ainsi que dans les parties les zostères très développés forment une véritable prairie verte masquant le fond.

On commence à trouver l’'Ampharete à un niveau relativement

300 PIERRE FAUVEL.

élevé, découvrant par des marées de 75 de coefficient, c’est-à-dire même par de faibles marées de vives eaux.

À ce niveau les animaux sont assez abondants, mais de petite taille.

A mesure que l’on descend plus bas, jusqu’au niveau des plus basses marées d’équinoxe, on voit les Ampharele diminuer en nombre mais augmenter de taille.

Nous avons déjà vu que les exemplaires de grande taille décrits par MALMGREN (65) provenaient de profondeurs assez grandes ; de 40 à 250 basses.

Ceux recueillis par THÉEL (78), p. 60, dans la mer de Kara par de faibles profondeurs (depuis 7 mètres), étaient au contraire très petits, mesurant au plus 10 "/,, sauf un grand exemplaire de 32 ‘/m recueilli par 45 mètres.

Il semble done y avoir une relation entre la taille etla profondeur.

L'Ampharete doit exister dans la Manche à une certaine profon- deur. L'hiver de 1894-95 en modifiant brusquement ses conditions d'existence a sans doute déterminé sa soudaine venue à la côte. Sur l’innombrable quantité de jeunes qui sont ainsi arrivés à un niveau plus élevé, un certain nombre a pu trouver des conditions d'existence convenable et a survécu. Ce sont ces survivants et quelques-uns de leurs descendants que nous rencontrons encore, mais le nombre en diminue progressivement et dans quelques années ils auront sans doute disparu de nouveau de la côte.

Nous n'avons malheureusement pas encore réussi à trouver par des dragages, l'habitat normal de cette espèce, dans la Manche.

IT.

Un

Distribution géographique.

L'Ampharete Grubei est un animal des mers septentrionales.

Il a été rencontré au Spitzherg, au Groenland, en Islande, et plus rarement sur les côtes de Suède par MALMGREN (65) (67). GRUBE (60) en signale un exemplaire au Groenland, WIREN (85) l'a rencontré au Nord de la Sibérie et dans le détroit de Bebhring. TH£EL (78) l'a signalé sur les côtes de la Nouvelle-Zemble et dans

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 301

la mer de Kara. D'après LEVINSEN (83) il a été trouvé aussi sur les côtes de Norvège. Plus au Sud, J. HoRNELL (91) en a trouvé un unique individu dans la baie de Liverpool et Môügius le cite dans la baie de Kiel (73-75).

On peut dire que l’Océan glacial arctique, avec la mer de Kara, la mer de Behring et l'Atlantique Nord, forment sa véritable patrie. Il descend dans le Cattégat, la Baltique et la mer d'Islande. Nous l'avons enfin rencontré dans la Manche (95*), (95°), (96), mais nous pensons que St-Vaast-la-Hougue est le point le plus méridional il ait été signalé.

Comme nous l’avons déjà indiqué, c'est un animal vivant habi- tuellement à une assez grande profondeur. MALMGREN (65) indique qu'il a été trouvé à Whalerspoint et à Hornsund par 20-40 brasses, à Aukpadlartok par 250 brasses, à Godhavn par 10-15 brasses.

Dans les mers de la Nouvelle-Zemble et dans la mer de Kara nous avons vu que THÉEL (78) l’a recueilli à des profondeurs variant de 7 à 50 mètres.

L'unique exemplaire trouvé par HoRNELL (91), à 28 milles au S.-E. de l’île de Man, a été dragué entre 20 et 25 brasses.

Si le Branchiosabella zostericola de CLAPAREDE est bien, comme nous le pensons, l'Aripharele Grubei, ce serait, à notre connais- sance, le seul exemplaire recueilli, à mer basse, à la côte, en dehors de ceux que nous avons trouvés nous-mêmes en grande quantité à St-Vaast, précisément dans la même localité, et les mêmes herbiers de zostères.

Ar

FORMATION ET STRUCTURE DU TUBE. ce Formation du tube.

Nous avons vu que l’'Ampharele habite un tube enfoncé vertica- lement dans la vase.

Avant d'éludier la structure de ce tube, il faut d’abord examiner comment l'animal le construit, le répare et l’entretient; s'il est capable de le remplacer et d’en changer.

302 PIERRE FAUVEL.

Quand nous connaîtrons le mode de fabrication du tube, il nous sera beaucoup plus facile d'en comprendre la structure.

Dans un cristallisoir contenant une couche de sable fin, jaune brillant, de 2 cent. d'épaisseur environ et de l’eau de mer avec quelques Ulves, nous plaçons quatre Ampharete bien vivants. Ces animaux sont encore renfermés dans des fragments de tube, de la longueur de leur corps, formés de vase grise.

Arrivés au fond, nos Ampharete restent d'abord blottis dans leur fragment de tube, sans bouger. Au bout de quelques minutes ils se hasardent à sortir timidement la tête, le lobe céphalique allongé, les branchies rabatiues sur le dos, les palées couchées en arrière, puis, ne voyant rien d’anormal, ils s’enhardissent, sortent leurs tentacules et se mettent à palper le sable tout à l'entour de l'entrée de leur tube.

Après avoir procédé à cette première reconnaissance du terrain, les uns rentrent dans leur tube, les autres plus hardis enfoncent dans le sable leur museau et l'en retirent lout couvert de menues parlicules agglomérées par le mucus que leurs téguments sécrètent en abondance.

Quand ils se rétractent dans leur tube, cette sorte de gaine, arrêtée par les bords de celui-ci, glisse sur le corps de l'animal et forme une sorte d’anneau qui, s’accolant au tube primitif, vient l’allonger d'autant.

Les quatre Ampharele sont rangés parallèlement sur le sable, les deux premiers ayant la tête dirigée d’un côté, les deux suivants étant orientés en sens inverse des premiers.

Trois heures plus tard les tubes posés horizontalement sur le sable sont vides. Ils sont légèrement dérangés et tous les quatre se continuent par l'extrémité située du même côté avec un tube en galerie s’enfonçant dans le sable.

La portion de tube nouvellement formée est facile à distinguer de l’ancienne, cette dernière ayant la couleur gris-noirätre de la vase au sein de laquelle elle a été formée, tandis que la portion nouvelle a la coloralion jaune du sable. |

En tirant légèrement sur l'extrémité du tube on arrive à extraire du sable cette portion nouvelle dans laquelle est retiré l'animal.

Au bout de trois heures elle a déjà plus de deux centimètres de longueur, c'est-à-dire le double de la partie primitive extérieure.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 303

Elle va en se rétrécissant graduellement et en s’amincissant. Elle n'est plus formée, à la partie postérieure l'animal s’est réfugié, que d’une mince couche de mucus frais englobant un peu de sable.

Au début de l'expérience les tubes avaient été orientés en sens iuverse ; cependant tous s’enfoncent dans le sable par la même extrémité.

Il y a donc lieu de se demander si l'Ampharae peut s'enfoncer, tantôt la tête, tantôt au contraire la partie postérieure en avant, ainsi que le font les Branchiomimna et les Myxicoles d'après SOULIER (91).

On peut encore supposer, dans le cas actuel, que deux des Ampharete se sont retournés dans leur tube pour s'enfoncer la tète en avant.

Pour éclaircir ce point, nous prenons un Ampharele avec une portion de son tube et nous le couchons horizontaiement sur le sable, la face ventrale en haut.

L'animal, après être resté quelque temps immobile, sort la portion antérieure de son corps, dévagine ses tentacules et palpe soigneusement le sable à l'entrée du tube.

Il sort et rentre alternativement la tête et tourne lentement sur son axe longitudinal de façon à reposer sur la face*ventrale.

Puis il recommence à palper le sol avec ses tentacules, oriente ses branchies dans tous les sens et semble manifester de l'inquiétude.

Après avoir continué ce manège pendant quelques minutes, sans se décider à s’enfoncer, il disparaît brusquement dans son tube qui se gonfle soudain et s'agile, puis tout à coup on voit reparaitre la tête à l’autre extrémité, les branchies et les palées rabattues en arrière sur le dos.

L'animal allonge ses anneaux antérieurs, qui à l’état de repos étaient comme télescopés sous le segment branchifère, et avec l'aide de son lobe céphalique devenu pointu comme une sorte de rostre, il se met rapidement à fouir le sable. En une minute il est completement terré et la portion de son tube restée horizontale sur le sable est vide.

Cette expérience nous apprend que l'animal peut se retourner dans son lube, sans en sortir, en se repliant sur lui-mème. À cet effet, sa région abdominale se replie sur la face ventrale et chemine en avant pendant que la partie thoracique est ramenée en arrière

304 PIERRE FAUVEL.

par le jeu des pieds et des wncini jusqu’à complet retournement de l'animal par suite de ce double glissement. C’est au moment il est plié en deux dans son tube que se produit le gonflement passager de celui-ci.

Ce retournement de l'animal nous donne l’explication de ce qui s'était passé dans l'expérience précédente. Deux des Ampharete s'étaient retournés dans leur tube de manière à amener leur extré- milé céphalique dans la même direction que les autres.

Nous avons maintes fois répété ces expériences et {oujours nous avons vu l'Ampharete se terrer la tête la première, et quand le sol ne lui paraissait pas propice se retourner dans son lube pour aller s’'enfoncer à l’autre extrémité.

Dans les expériences précédentes l'animal était au début renferme dans un fragment de tube.

IL était intéressant de savoir si l'Ampharele, complètement dépouillé de son tube, est encore capable de s’en construire un entièrement nouveau.

Dans ce but, un Ampharete complètement dépouillé, est placé dans un cristallisoir contenant une couche de sable fin.

L'animal se met d’abord à nager d’un mouvement serpentiforme en allongeant sa région abdominale dont il se sert comme d'une godille pour progresser dans l’eau. Puis il ne tarde pas à se laisser tomber au fond. Aussitôt en contact avec le sable, il se roule à sa surface. Le mucus qui l'enveloppe enrobe le sable et lui forme rapidement un fourreau qui l'abrite provisoirement. Dès que ce tube recouvre une partie notable de son corps, l'Ampharete se met à fouir comme précédemment avec son lobe céphalique qu'il pousse dans le sable en s’aidant de ses parapodes.

Le mucus sécrété abondamment par toute la région antérieure du corps, surtout par le lobe céphalique et les boucliers ventraux, spé- cialement riches en cellules mucipares, ainsi que nous le verrons plus loin, agglomère le sable et sert de lubrifiant.

L'animal, glissant dans l’étui muqueux qu'il se sécrète à mesure, continue à s’enfoncer.

Dans un cristallisoir, vu le peu d'épaisseur de la couche de sable, ilarrive bientôt au contact du fond. Il continue alors sa galerie horizontalement. Dans la partie en contact avec le verre, le tube

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS, 305

n'ayant qu'une paroi muqueuse est transparent el on peut voir l'animal se mouvant à l’intérieur.

Dans les conditions naturelles la partie du tube enfouie dans la vase est toujours verticale. Jamais nous n'avons recueilli un Ampharete qui ne fut enfoui perpendiculairement dans le sol. Dans ces conditions il s'enfonce rarement à plus de 8 ou 10 cent. de pro- fondeur.

Le tube n’a qu'une seule ouverture et n’est pas coudé en U comme celui des Arénicoles, des Nerine, ni sinueux comme celui des Praxithea des Myæicola.

Sous ce rapport, il se rapproche plutôt du tube de certains Tere- belliens, de Lanice conchilega par exemple.

Lorsque l’animal a ainsi creusé sa galerie, la partie du tube, qui l’entourait primitivement, reste à l'extérieur couchée sur le sable. On peut se demander si cet appendice extérieur est utile à l'Ampharete ou si ordinairement l’orifice de la galerie est normale au sol et de niveau avec lui. |

Pour nous en rendre compte, nous avons détruit toutes les parties externes, libres, des tubes et bien uni la surface de la vase.

Le lendemain à l'entrée de chaque galerie s'élevait un tube dépassant la surface du sol de 5 à 8 "/,. Quelques-uns étaient presque horizontaux, mais la plupart étaient plus ou moins obliques, inclinés en général à 45° et légèrement arqués en voûte.

Cette partie libre du tube n’a pas la même structure que la portion enterrée. Elle est formée d’une couche muqueuse beaucoup plus épaisse, agglutinant des particules de sable et des fragments de coquilles relativement gros. Ces derniers sont souvent appliqués par leur bord, perpendiculairement à l'axe du tube, et non par leur face plane et donnant à celui-ci un aspect hérissé qui le fait ressembler, en miniature, à un tube de Lanice conchilega tel que WarTson l’a décrit (90).

L’extrémité libre du tube est taillée en biseau en sorte que l’ou- verlure se trouve dirigée horizontalement et recouverte par une espèce d’auvent. Souvent l'animal fixe au-dessus de l’ouverture un plus large fragment de coquille ou un débris d’Ulve formant clapet à l'entrée du tube.

La portion du tube enfoncée dans la vase est beaucoup moins soli- dement construite. C’est une simple galerie tapissée de mucus. Ce

306 PIERRE FAUVEL.

mucus en se durcissant agglutine la couche de sable ou de vase en contact avec lui. La portion externe est au contraire un véritable tube maçonné par l'animal.

Nous avons eu la bonne fortune de voir souvent l’Ampharete tra- vailler à cette construction.

Quand il s'est mis à l'abri en creusant sa galerie la tête en avant, il se retourne suivant le procédé que nous avons décrit et sa tête vient saillir à l'ouverture.

Au repos la région céphalique émerge à peine de la galerie, les 8 branchies vertes dirigées en avant s’agitent faiblement.

Si, au contraire, lAmpharele se dispose à travailler à son tube, il rejelte ses branchies en arrière sur son dos et dévagine ses nombreux tentacules buccaux qui s’allongent et se tordent en tous sens comme une chevelure de Méduse.

Dans cet état ils peuvent atteindre jusqu'à six ou sept fois la largeur du corps. Dès qu’ils viennent en contact avec une particule de sable ou un mince débris de coquille, que le mucus y fait adhérer aussitôt, ils se rétractent brusquement en se recourbant de façon à amener les matériaux recueillis dans le vestibule buccal ils s'accumulent.

Là, ces matériaux sont malaxés, retournés en tous sens et enrobés de mucus par le jeu des lèvres et des replis labiaux. Aussitôt qu’une certaine quantité est préparée, l'animal se retire brusquement en appliquant bien exactement sa face ventrale contre le bord du tube.

La masse de sable enduite de mucus vient alors buter contre ce rebord et s’y fixe pendant que le corps de l'animal lisse l'intérieur.

Dès que l’adhérence est obtenue, l'Ampharele sort de nouveau et recommence l'opération, en tournant sur son axe longitudinal, de façon à maçonner également son tube tout autour.

La portion ainsi fabriquée est une sorte de bétori assez épais.

De temps à autre l'animal sort toute sa région thoracique et la rentre brusquement en tournant sur lui-même, de façon à mettre ainsi en contacl toute la surface interne du tube avec ses boucliers thoraciques et à former des couches successives de mucus.

Pendant celte opération, les branchies sont étendues en avant, droites, rigides, parallèles et les palées sont développées en éventail, tandis que pendant que l Ampharete recueille les matériaux avecses

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 307

tentacules, les branchies sont au contraire rejetées en arrière sur le dos ainsi que les palées dont l'éventail se ferme.

Lorsqu'un Ampharete dépouillé de son tube est placé dans une cuvette d’eau de mer ne contenant pas de sable, il s’agite désespéré- ment et sort ses tentacules qui s’allongent jusqu'à égaler 1/3 de la largeur totale du corps.

Si on jelte alors dans l’eau une petite pincée de sable les tentacules aussitôt de s’agiter et de harponner les grains de sable, dont quelques- uns sont plus gros que le lobe céphalique de l'animal; puis se rétractant avec la rapidité d'une flèche ils portent ces particules dans l’entonnoir buccal il semble qu'elles soient goûtées ou palpées. Ils les retirent ensuite et les appliquent contre la face ventrale du corps, un amas de sable aggloméré par le mucus ne tarde pas à se former, constituant une ceinture autour de sa partie antérieure.

Il ne semble pas cependant que l’auimal soit capable, dans ces conditions, de se fabriquer un tube entier.

Si on lui donne davantage de sable, 1l se roule immédiatement dessus comme dans les expériences précédentes else constitue ainsi très rapidement un fourreau qui l’abrite entièrement.

Le travail des tentacules reprend ensuite pour allonger le tube antérieurement.

La région postérieure de l'animal faisant saillie hors de l'extrémité du tube, si on verse dessus, avec une pipette, un peu de sable fin, celui-ci n’est pas agglutiné par cette partie du corps, peu riche en cellules muqueuses, mais l'Ampharele sentant ce sable autour de lui, se retourne brusquement dans son tube et sortant la tête il rentre ses tentacules, rabat ses palées et ses branchies en arrière et allongeant son museau pointu il cherche à fouir dans le sable. Ce sable se colle tout autour de sa région céphalique, si riche en mucus, et de temps en temps l'animal se retire dans son tube et l'anneau ainsi formé vient buter contre le bord et s’y souder. Cependant quand l'Ampharete reconnait qu'il n’y a pas assez de sable pour lui permettre de s'y enfoncer, il cesse ses vains efforts et se retire dans son abri. Puis il ne tarde guère à remettre le nez à la fenêtre et à reprendre la construction plus lente et plus laborieuse au moyen des tentacules.

L’Ampharete se meut dans son tube au moyen de ses parapodes sétigères et de ses uncine.

308 PIERRE FAUVEL.

Pour en sortir, il s'élève par un mouvement ondulatoire de droite à gauche, fait saillir d’abord un pied dont les soies s'appuient sur le bord du tube, puis le pied opposé et les ramène en_arrière par un mouvement analogue à celui d’un rameur agissant sur ses avirons.

Pour rentrer, au contraire, il ramène ses pieds séligères en avant parallèlement au corps et se hale en arrière au moyen de ses pin- nules uncinigères dont les plaques onciales rétrogressives s’ancrent dans les parois du tube par leurs milliers de dents pointues.

L'Ampharele sort souvent spontanément de son abri et peut nager (ans l’eau ainsi que nous l’avons déjà dit.

Au lieu de rentrer dans le tube qu'il a abandonné, il s’en construit généralement un nouveau.

Si on place un nombre d’'Ampharete déterminé dans un cris- tallisoir avec du sable ou de la vase, on constate au bout de quelques jours que le nombre des tubes est supérieur au nombre des animaux.

SOULIER (91) a déjà mentionné chez la Myxicola et chez le Bran- chiomma cette faculté d'abandonner leur tube et de s’en sécréter un nouveau.

Les Serpulides, tels que Spirographis et Sabella, sont, dit-il, (p. 75) incapables de se construire un nouvel étui.

Il existe néanmoiïns une grande différence entre le Branchiomma et l’'Ampharete au point de vue de la fabrication du tube.

Le Branchiomma s'enfonce toujours par l'extrémité caudale tandis que l'Amnpharete S'enfouit toujours par l'extrémité céphalique.

L'anatomie de ces Annélides rend facilement compte de la dif- férence du procédé.

Le Branchiomma porte antérieurement un panache de branchies qui s’opposerait absolument à la pénétration de l’animal dans le sable par cette extrémité ; la partie postérieure de son corps est au contraire lisse et terminée en pointe.

Chez l’'Ampharele le lobe céphalique est accuminé, pourvu de deux robustes éventails de palées qui protègent la base des branchies et peuvent servir de peiles ou de fourches ainsi que chez les Pectinaires dont WaTsoN (94), p. 43) a décrit le mode de progres- sion dans le sable, la tête en avant, en s’aidant puissamment de leurs peignes de palées.

Les branchies filiformes se rabattent sur le dos et n’offrent pas d’obstacle à la progression dans le sable. L'extrémité caudale, au

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 309

contraire, avec son anus entouré de cirres nombreux et ses pinnules uncinigères orientées en arrière, offrirait au contraire une grande résistance à la progression dans ce sens.

ST:

Structure du tube.

Comme on la vu précédemment, il y a lieu de distinguer deux portions dans le tube de l'Ampharete :

La portion enterrée dans le sable ou la vase ;

La portion extérieure dépassant la surface du sol.

Au point de vue de Ja composition ces deux portions sont diffé- rentes.

La première, enfoncée dans le sol, est formée simplement d’une mince couche de mucus solidifié sur laquelle est agglutinée une mince couche de sable ou de vase composée d’une seule assise de petits grains.

L'animal a simplement creusé une galerie dans le sol en sécrétant du mucus autour de lui; ce mucus, en se solidifiant dans l’eau de mer, à englobé les grains de sable ou la vase en contact avec lui.

Cette partie est assez difficile à examiner au microscope. Son peu d'épaisseur et sa fragilité ne permettent pas facilement d'en détacher l’assise de grains de sable. Il faut simplement ouvrir délicatement le tube en le fendant en long et l’étendre sur une lame.

On distingue alors à la face interne la couche muqueuse présen- tant une structure grossièrement fibreuse, irrégulière. à

Les espèces de fibres de cette couche sont contournées au contact des grains de sable qu'elles enveloppent. Cette partie membraneuse se comporte différemment suivant les colorants employés.

Le picrocarmin ne la colore pas, l'éosine est presque sans action sur elle. Le bleu de méthylène donne une coloration intense en bleu violet, il en est de même du vert de méthyle et de l’hématoxyline de Delafield. La safranine colore d'une façon vigoureuse en rouge orangé.

310 PIERRE FAUVEL.

I faut remarquer que le bleu de méthylène, le vert de méthyle, l'hématoxyline et la safranine colorent énergiquement le mucus et les cellules glandulaires de l’épiderme et des glandes ventrales.

Dans celte partie du tube, la couche membraneuse, colorée au vert de méthyle présente par endroits un aspect particulier. On y distingue une foule de bàtonnets courts, très réfringents, disposés en trainées un peu irrégulières, réunis par une substance intersti- üelle amorphe.

Cet aspect rappelle tout à fait celui qu'Eisi (87, PI. xxxv1, fig. 2), a figuré pour le tube éphémère de Capitlella capitata, formé égale- ment de bàtonnets et d’une substance homogène.

Dans d’autres parties, les bàtonnets sont remplacés par des fibres irrégulières réunies encore par une substance amorphe. L'aspect qui en résulte correspond encore à une description d'ErsiG (PL. xxx vi, fig. 3) d'un tube éphémère de Capitella capitatu.

Nous savons que cette partie du tube de lAmpharete est fabriquée très rapidement par celui-ci au fur et à mesure qu'il s'enfonce dans le sable.

Les deux structures étudiées et figurées par EisiG, et que nous retrouvons ici, ont été rencontrées, justement par cet auteur, dans les tubes éphémères, rapidement sécrètes de la Capitella capitata. Il y a donc concordance entre nos observations.

Dans la partie libre du tube dépassant la surface du sable, la structure change un peu.

La couche externe se compose de plusieurs épaisseurs de grains de sable, de fines particules de vase, voire même de débris de coquilles et de fragments d'algues que l’animal ajoute peu à peu à l'aide de ses tentacules, ainsi que nous l’avons déjà décrit.

Chacun de ces fragments a été enrobé de mucus dans le vestibule buccal et forme avec les autres un béton dont ce mucus a été le ciment. Ce ciment présente une structure fibreuse très irrégulière, moulée sur les grains de sable et englobant une foule de particules étrangères.

Quant à la partie membraneuse, elle est dans cette région beau- coup plus épaisse et beaucoup plus résistante. Cependant cette épaisseur et celte résistance ne sont pas suffisantes pour qu'il soit possible d'y pratiquer des coupes.

Le seul procédé pratique pour l’étudier consiste à râcler d’abord

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 311

la couche vaseuse externe, puis à étaler sur une lame la couche membraneuse, à la colorer par la safranine, le vert de méthyle ou le bleu de méthylène et à la dissocier avec des aiguilles.

Si l’on a eu soin de prendre un tube formé depuis longtemps par l'animal, en toute tranquillité, on constate que cette partie menbra- neuse est formée de deux courbes principales : Une externe forte- ment et grossièrement fibreuse plissée transversalement, par rapport à l'axe du tube ; une couche interne pouvant se diviser en plusieurs couches très minces, concentriques, régulières, membraneuses, très finement striées. Ces stries se coupent à angle droit ou à 60° comme dans la cuticule dont la structure est presque identique.

A l’état naturel cette région membraneuse, composée de couches superposées comme BRUNOTTE (89, p. 9) l’a signalé chez le Bran- chiomma, présente seulement une légère coloration jaunâtre. On ne peut y retrouver les trois couches de structure si différente que Macé (82) a décrite dans le tube de la Sabelle.

Ici encore nous trouvons un nouveau fait à l'appui de la théorie d'ErsiG (87) sur la formation de la cuticule par la sécrétion lente du mucus des glandes épidermiques, pisque dans cette partie du tube lentement sécrétée par l'Ampharete la couche membraneuse, formée indubilablement par ce mucus solidifié, présente une struc- ture presque identique à celle de la cuticule.

En résumé : le tube de l'Ampharete est droit, enfoncé perpen- diculairement dans la vase et n’a qu'une seule ouverture.

Il se compose de deux régions : l’une externe, libre, plus résis- tante, construite par apport au moyen des tentacules; l'autre enfoncée dans le sol n’est qu’une galerie tapissée d’une couche de mucus solidifié.

L'Ampharete s'enfonce dans le sable la tête en avant, il se retourne ensuite dans sa galerie et construit la portion extérieure, avec ses tentacules.

La région céphalique et les boucliers ventraux thoraciques sont les principaux lieux de sécrétion du mucus servant à la fabrication du tube.

L'Ampharete peut spontanément quitler son tube et s’en cons- truire rapidement un nouveau.

La couche membraneuse du tube est formée de mucus solidifié, elle a les réactions du mucus.

312 PIERRE FAUVEL.

Dans la partie supérieure les membranes internes sont finement striées et ont une structure presque identique à celle de la cuticule

VI CUTICULE.

La cuticule des Annélides Polychètes est une fine membrane transparente appliquée immédiatement sur l’'épiderme et revêtant entièrement le corps.

Cette partie des téguments n’a pas attiré spécialement l'attention des auteurs anciens et ce n’est guère qu'avec le développement de la science histologique et les progrès de la micrographie qu'elle est devenue l’objet d'observations nombreuses.

EuLers (64, p. 17) décrit la cuticule comme une mince couche de substance chitineuse produite par une couche sous-cuticulaire, cellulaire ou granuleuse. Il y remarque une ornementation régulière sur la face libre et constate que la résistance de cette membrane aux alcalis est variable suivant l’âge des couches qui les composent.

DE QUATREFAGES (65, p. 28) ne dit que quelques mots de l’épiderme. I1 constate que la cuticule se laisse enlever facilement chez les espèces de grande taille, telles que la Marphyse sanguine et qu’elle est composée de fibres d’une lénuité extrême croisées à angle droit. Il attribue à cette disposition les irrisations si fréquentes chez les Annélides et y reconnait avec raison une aclion de réseaux.

DE QUATREFAGES a constaté de plus que « chez les petites espèces » ou sur les organes les plus délicats, l'épiderme ne présente que > l'aspect d'une membrane très mince, homogène, dans laquelle on > ne distingue même plus de structure ».

Nous verrons différents auteurs soutenir tour à tour la structure composée ou la structure anhiste de la cuticule. Cette structure varie en effet avec les espèces ainsi que l'avait fort bien reconnu DE

(JUATREFAGES. E

CLAPAREDE (73, p.60) généralisant davantage, attribue une cuticule épaisse, résistante, présentant deux systèmes de stries et des pores tubulaires, aux Oligochètles et à un grand nombre d’Annélides

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS, 313

Errantes, tandis qu'au contraire la plupart des Sédentaires seraient remarquables par le faible développement de la cuticule, qui serait toujours pour ainsi dire rudimentaire, même chez les espèces de grande taille. « Il est clair, ajoute-t-il, que dans ce cas là, il ne > saurait être question ni de système croisé de stries, ni de pores » tubulaires ».

Cette théorie est beaucoup trop générale, et, comme nous le verrons, beaucoup de Sédentaires, même de petite taille, ont une cuticule épaisse et pourvue de systèmes de stries.

CLAPARÈEDE s'était laissé entraîner trop loin par cette théorie, juste dans certaines Jimites, en vertu de laquelle il faisait remplir par le tube d'habitation des Sédentaires le rôle de la cuticule épaisse des Errantes.

Il avait cependant constaté l'épaisseur de la cuticule chez l'Audouinia filigera, une Sédentaire, pourtant.

La remarque qu'il avait faite du faible développement de la cuti- cule des Annélides abondamment pourvues de cils vibratiles, telles que le Chetoptère est pleine de justesse.

Mc'INTosa (78, p. 5) décrit, chez la Magelona papillicornis, une cuticule bien développée, particulièrement sur le lobe céphalique et à la partie antérieure du corps. Cette cuticule très régulièrement plissée et percée de trous assez difficiles à voir lui a paru une membrane anhiste.

Chez le Scoloplos armiger, encore une Sédentaire, Mau (82, p.14, fig. 11-12) mentionne une cuticule bien développée et présentant deux systèmes de stries se croisant à angle droit, comme chez les Oligochèles. Aux points de croisement des stries se trouvent de nombreux pores. Mau insiste sur la difficulté d'isoler la cuticule de l'hypoderme sur des matériaux frais.

STEEN (83, p. 18, fig. 7-8-9) a trouvé chezle Terebellides Stroœomi, une cuticule très mince «comme chez toutesles Tubicoles ». [reproduit ainsi l'opinion de CLAPAREDE. Cependant contrairement à la théorie du naturaliste génevois, il constate une fine striation. Il a reconnu deux ordres de stries se croisant à angle droit mais n’a pu constater l'apparence de deux couches sur des coupes transversales ainsi que VEJDosKkY l’a fait pour les Oligochèles.

Il déclare n’avoir pu y découvrir de pores même dans les parties les moins épaisses et en employant les plus forts grossissements.

314 PIERRE FAUVEL.

La Polynoe cirrata, d'après KALLEMBACH (83, p. 14) nous offre au contraire une cuticule très développée, 6 à 8 fois plus épaisse que chez Terebellides Stræmi. Elle se colore vivement par le picrocar- min et ne laisse apercevoir ni pores ni striation, mais, trailée par macération dans le bichromate de polasse, elle se sépare bien de l'hypoderme et laisse apercevoir une ornementation analogue à celle des frustules de diatomées. Les deux ordres de stries se croisent à angle obtus. Mais on ne peut isoler les fibres composant cette striation.

Contrairement à ce que Mc’Inrosx a constaté chez la Magelona, Jacont (84, p. 10, fig. 4, a) a trouvé chez les Polydora une cuticule présentant une structure nette. Il y a vu des stries longitudinales et transversales se croisant le plus souvent à angle droit, mais il n’a pu réussir à découvrir des pores aux points de croisement. Au- dessus des glandes hypodermiques la structure change. La cuticule présente de nombreux petits polygones à double contour. Dans les angles de ces polygones on voit très nettement des pores.

Comme les auteurs précédents JAcoBI n’a pu distinguer sur des coupes transversales deux couches fibreuses. En section, la cuticule paraît homogène.

W. FiscHer (84, p. 11, fig. 2) a retrouvé aussi chez la Capitella capitata les deux ordres de stries se croisant à angle droit et les pores de la cuticule.

Pour SCHRŒDER (89, p. 7, fig. 8) la cuticule de la Nereës diversi- color est une membrane incolore , sans structure cellulaire, pré- sentant également des stries se coupant à angle droit, formées de deux couches de fibres que l’on peut isoler par la dissociation avec des aiguilles. Les pores situés au point de croisement des fibres sont de deux sortes ; ce sont des macropores et des micropores correspondant aux cellules glandulaires de l’épiderme.

L'auteur émet l'opinion que la cuticule n'est pas une production chitineuse, car une solution de potasse la dissout facilement.

F. ScHacx (86, p. 19, fig. 12) conclut au contraire à la nature chitineuse de la cuticule de la Nephthys cœca vu la façon dont elle se comporte avec la potasse.

Il constate aussi la double striation de la cuticule et la présence de pores aux intersections des stries. Ces pores ont une forme spéciale. Ils sont limités par quatre lignes en croissant.

RECHERCHES SUR LES AMPHARETIENS. 5

M. Rrerscu (82, p. 9) décrit ainsila cuticule de Sternaspis : « La » cuticule est fortement striée aussi bien sur les coupes longitudi- » nales que sur les coupes transversales. Les stries sont parallèles » à la surface extérieure et ordinairement ondulées ; elles indiquent » une structure stratifiée. Après une très longue macération dans le »> bichromate de potasse, j'ai pu dissocier la cuticule en minces » fibrilles entrecroisées à angle droit ».

Jusqu'ici la plupart des auteurs que nous avons cités ont décrit une cuticule striée aussi bien chez les Sédentaires que chez les Errantes.

Chez l’Arenicola marina, malgré l'irrisation de la cuticule, Vocr et YUunG (88, p. 483) n'ont pu découvrir de striation.

WIREN (87, p. 7) a constaté le même fait. Il trouve la cuticule de l’Arenicola complètement anhiste, ainsi que celle de l’Æwmenia crassa, tandis qu’au contraire chez l'Ammotrypane aulogaster il a retrouvé la striation ordinaire à 70° et deux sortes de pores (PI. 1, fig. 13). Chez la Trophonia plumosa il signale en outre une faible striation verticale. Chez le Siphonostoma vaginiferum elle est anhiste.

D'après BRUNOTTE (88, p. 11) les stries en croix manquent éga- lement chez le Branchiomma.

Les pores et les stries ont été retrouvés dans la cuticule du Spirographis Spallanzanti par SouriER (91, p. 181) mais sur les coupes cette cuticule se présente comme une membrane homogène, transparente, n’absorbant que très faiblement les colorants.

Jusqu'ici, sauf de rares exceplions, nous avons retrouvé la struc- ture striée aussi bien chez les Sédentaires que chez les Ærranles.

Chez les Syllidiens, qui appartiennent cependant à ce dernier groupe, MALAQUIN (93, p. 82) a trouvé une cuticule peu développée, homogène, transparente, absolument dépourvue de striation. Il a conslaté que chez les espèces qui se sécrètent un tube muqueux telles qu'Zusyllis, Autolytus, etc., la cuticule est plus mince que chez Syllis, Trypanosyllis, eic., qui ne sécrètent pas de tube. Ceci vient encore à l'appui de l’idée de CLAPAREDE, tandis que l'absence de striation chez ces petites espèces répond à l'idée de QUATREFAGES.

Enfin, EisiG dans sa belle monographie des Capitellides (87, p. 19-20 et 305-307), a étudié très en détail la structure de la cuticule.

Chez les Capitellides, la structure striée est très nette et Ersra est

316 PIERRE FAUVEL.

arrivé à isoler les fibres qui produisent cette strialion. La cuticule est formée de deux courbes de fibres se croisant à angle droit et réunies entre elles par une substance interstilielle. De nombreux pores laissent passer à l'extérieur le contenu des glandes muci- pares. |

Suivant l'état de la substance interstitielle, la striation est plus ou moins apparente. La façon dont cette membrane se comporte vis-vis des solutions de potasse, la rapprocherait de l’'Onuphine, substance isolée par SCHMINDEBERG des tubes d'Onuphis tubicola et retrouvée dans les tubes du Spirographis. Celte substance est différente de la chitine.

Pour EisiG, la cuticule est formée par la sécrétion des cellules muqueuses de l'hypoderme. Quand cette sécrétion a lieu brus- quement sous l'influence d’une excitation étrangère, elle forme un tube muqueux ou une membrane éphémère composée de bâtonnets et de fibrilles disposés sans ordre el réunis par une matière cémentaire. Lorsque la sécrétion a lieu lentement, d'une façon ininterrompue et persistante, elle forme de longues fibres se fondant les unes avec les autres en deux couches superposées, régulières, donnant ainsi naissance à une cuticule. |

Ceci nous ramène à l’opinion de CLAPAREDE : la cuticule serait un tube adhérent à l'animal, le tube une cuticule plus épaisse, moins ordonnée et distincte de l’animal. Ce que nous avons rapporté plus haut de la structure du tube de l’Ampharele confirme absolument la théorie d'Ersic.

Cette opinion a été récemment combattue par PRuvoT et Racovirza (95, p. 365) qui, d'accord avec HarscHEK, pensent que la cuticule est sécrétée par les cellules de soutien. « Nous nous rallions provi- » soirement, disent-ils, à cette dernière opinion, autrement on ne » pourrait pas expliquer la présence de la cuticule dans les régions »où les cellules glandulaires manquent complètement, ni la » formation des mâchoires productions manifestement cuticulaires, > quand leur matière est entièrement formée de cellules qui » ressemblent beaucoup aux cellules de soutien ».

Nous verrons que ces deux opinions ne s’excluent pas. En résumé, la cuticule existe plus ou moins développée chez toutes les Anné- lides. Elle est strièe chez la plupart des Polychètes, tant Errantes que Sédentaires. Gette striation est la règle générale. Les Anné-

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 314

lides à cuticule complètement anhiste sont l'exception. Elles se rencontrent aussi bien chez les Ærrantes (lout le groupe des Syllidiens) que chez les Sedentaires (Arenicola, Eumenia).

Bien plus, dans la même famille nous voyons des espèces à cuti- cule striée : (Trophonia plumosa) et des espèces à cuticule anhiste (Siphonostoma vaginiferum).

Nous avons vu que le croisement des stries se fait le plus souvent à angle droit, parfois à 70°,

D’après ce que nous avons constaté nous-même sur de nombreuses espèces, le croisement se fait normalement à angle droit, mais si l’on vient à étirer les lambeaux de cuticule dans un sens plus que dans l'autre, on obtient presque tous les angles. La cuticule se comporte alors exactement comme un tissu, Comme une étoffe dont la chaîne et la trame cessent de se croiser à angle droit quand on la soumet à des tractions obliques.

Il est facile de comprendre que la cuticule douée d’une élasticité assez grande pour se prèter aux mouvements de l'animal et à l'extension de ses divers organes, se déforme facilement et presque nécessairement sous l’action des aiguilles à dissocier.

L'expérience est facile à faire et on constate aisément que l’on peut faire varier considérablement l'angle de croisement des fibres en touchant légèrement un lambeau de tégument sous le microscope avec des aiguilles fines.

La cuticule de l'Ampharete est une fine membrane d'épaisseur variable, s'étendant sur toute la surface du corps.

Ce revêtement, étroitement Li à l'épiderme, se retrouve également dans les cavités du corps en communication avec l'extérieur, telles que la bouche, l'anus, le canal excréteur des organes segmentaires. On le retrouve également à l'extrémité des parapodes entourant les faisceaux de soies et revêtant les sortes de cryptes dans lesquelles elles sont implantées. Ces cryptes n'étant qu'une invagination des téguments, la présence de la cuticule y est fort naturelle.

Sur l’animal vivant la cuticule est brillante, irrisée avec des reflets bleu d'acier. Cette irrisation est plus remarquable encore sur les animaux fixés à l'acide osmique et noircis par ce réactif.

L'épaisseur de la cuticule varie avec les régions du corps.

Elle atteint Au à la partie dorsale et seulement 1 à 24 dans certaines parties de la région abdominale. Son maximum d'épaisseur

318 PIERRE FAUVEL.

se rencontre dans le lobe céphalique et dans les segments de la région antérieure, à la base des branchies, sur les boucliers thora- ciques et dans les replis profonds des anneaux thoraciques ; c'est-à- dire précisément partout les cellules glandulaires sont très developpees.

Au-dessus du cerveau la couche épidermique manque complète- ment et la cuticule est un contact immédiat avec la couche corticale. C'est grâce à l'absence de l’épiderme et à la transparence de la cuticule que l’on aperçoit si nettement les deux yeux, simples taches pigmentaires noyées dans la masse cérébrale.

Dans les replis des téguments, la cuticule s’invagine et se prolonge à l'intérieur formant par accolement une lame unique s’enfonçant comme un coin entre les cellules sous-jacentes.

Sur certains organes délicats et riches en cellules vibratiles, comme les tentacules buccaux, la cuticule extrêmement mince n'apparaît plus sur les coupes que comme une simple ligne.

Son affinité pour les colorants est très faible. Beaucoup sont sans aucune action sur elle. Tels sont le picrocarmin, le carmin aluné, le carmin boracique, le vert de méthyle, l’éosine, le bleu de méthy- lène, la safranine.

L’'hématoxyline de Delafield la colore faiblement en bleu pâle. Mais sur des coupes colorées par ce réactif on remarque une mince couche externe, colorée en violet foncé. L'épaisseur de cette couche colorée peut atteindre 14. Elle est formée du mucus répandu uni- formément sur tout le corps de l’animal et elle en présente toutes les réactions : affinité très grande pour le vert de Méthyle, le bleu de Méthylène et la safranine.

Il faut aussi remarquer que les couches les plus externes de la cuticule sont celles qui se colorent le mieux.

Sur des animaux fixés au liquide de Flemming et conservés dans l'alcool la cuticule se détache facilement de l’épiderme. Il en est de même pour les animaux fixés à l'acide osmique, conservés dans l'alcool jusqu’à noircissement complet et macérés ensuite dans l’eau distillée ou l'alcool faible.

Sur des lambeaux de cuticule obtenus par la dilacération des téguments on distingue nettement la siriation avec un grossissement de 500 diamètres.

On y reconnaît aisément deux systèmes de stries se croisant à

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 319

angle droit. Il y a généralement un système de stries plus visible que l'autre. Avec l'immersion on peut distinguer trois couches dans la cuticule :

Une couche striée.

Une deuxième couche striée dont les fibres sont perpendicu- laires aux précédentes. |

3 Une couche inférieure à gros sillons.

On peut considérer comme une quatrième cuuche la couche de mucus solidifié.

Les sillons de la couche profonde croisent à 45° les stries des deux autres couches.

Sur des coupes tangentielles, colorées à l'hématoxyline-éosine, on distingue très nettement, sur des fragments de culicule, la double structure striée.

Cette striation est due à des fibres cylindriques à contour très net, réunies par une matière interstitielle légèrement colorée en violet. Sur les bords déchirès des fragments de cuticule on distingue nette- ment les fibres dissociées et parfois la préparation présente l'aspect d'un tissu effiloché dont on verrait la trame et la chaine ML RIxS fo. 62).

En faisant varier le point, il est facile de se rendre compte que l’on a affaire à deux couches fibreuses superposées.

La striation de la couche inférieure en contact avec l'épiderme n'est pas due à une structure fibreuse. C’est une sorte de gaufrage.

La cuticule est percée de nombreux pores distribués assez irrégu- lièrement. Ils servent de conduits excrèteurs aux cellules glandu- laires et muqueuses l'épiderme.

Sur des sections perpendiculaires aux téguments, et colorés par l'hématoxylène-éosine, on voit très nettement ces canalicules, grâce au mucus dont ils sont remplis et qui est fortement coloré en violet. On voit ainsi très bien la communication de la cellule à mueus avec l'extérieur (PI. x1x, fig. 61).

Nous avons constaté : que la cuticule est d’autant plus épaisse qu'elle recouvre une région plus riche en cellules à mucus ; 2 que la partie externe de la cuticule est celle qui se colore le plus faci- lement, la partie profonde restant presque incolore ; qu'elle est souvent recouverte d’une couche adhérente, mince et uniforme présentant toutes les réactions du mucus; que la membrane

320 PIERRE FAUVEL.

interne du tube sécrélé lentement par les boucliers thoraciques présente une structure identique à celle de la cuticule.

Nous verrons que chez les Melinna la cuticule offre sa plus grande épaisseur et sa striation la plus nette justement dans les replis des téguments le mucus peut s’accumuler.

Tous ces faits nous amènent à adopter l'opinion d’EisiG et à considérer la cuticule comme formée en grande partie par la sécrétion des cellules glandulaires de l’épiderme.

D'un autre côté, l’objection de Pruvor et RacovirzA à sa valeur, mais nous pensons que les deux opinions peuvent se concilier.

Nous regardons la couche profonde, sans structure fibreuse, comme formée par la sécrétion des fibro-cellules de soutien dont les plateaux se touchent, laissant seulement passer les pores des cellules glandulaires. |

Dans les régions ces cellules sont presque seules, il est à remarquer, du reste, qu'elles se rapprochent du type de la cellule épidermique universelle non complètement spécialisée. En ces régions la cuticule est en général très mince et sans structure, et ses réactions sont à peu près les mêmes que celles des fibro- cellules.

Par dessus cette couche profonde vient s'étendre une couche de mucus sécrété par les cellules glandulaires, et cette couche qui peut s'étendre même assez loin des régions d’où elle tire son origine, se solidifiant lentement, vient former les couches fibreuses exactement comme elle forme la membrane striée, interne, du tube.

Les parties les plus externes étant les plus jeunes présentent encore les réactions du mucus, puis à mesure qu'elles vieillissent et sont recouvertes par de nouvelles couches, elles cessent peu à peu de présenter ces caractères.

VII ÉPIDERME. L'épiderme des Annélides (derme, hypoderme, matrix culiculæ, etc. des auteurs) a d’abord été considéré comme une simple couche

finement granuleuse contenant quelques cellules disséminées çà et là. C'est l’idée que s’en faisaient EnLers (64) et DE QUATREFAGES (65).

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 321

CLAPAREDE (73) y reconnut un épithélium cylindrique, à cellules parfaitement distinctes, et décrivit cette structure comme alvéo- laire.

SOULIER (91), dans son mémoire sur l’épiderme des Annélides, a donné d’une façon très complète tout l'historique de cette question, ce qui nous dispensera d'y insister.

Il a démontré que l’épiderme des Annélides est formé par un réseau alvéolaire, c’est-à-dire par un réseau de fibro-cellules de soutien dont les mailles sont occupées par des cellules glandu- laires.

Celte conclusion est exacte, mais un peu trop absolue,car MALAQUIN (93) qui a étudié en détail l’épiderme des Syllidiens, tout en confir- mant les résultats de SOULIER, ajoute :

« Cependant, dans certains cas il n'y a pas à proprement parler > de réseau alvéolaire. Chez les Syllidiens il existe des points il > n’y a que des glandes muqueuses (alvéoles), disséminées dans la > masse des cellules épithéliales, et dans d’autres endroits l'épi- > derme se compose uniquement de cellules épithéliales ou fibro- » cellules à l'exclusion de tout élément glandulaire (épiderme de certains Syllis et épiderme sensitif spécialisé).

L'épiderme de l’Ampharele présente de très grandes différences d'épaisseur suivant la région du corps examinée.

Sur le lobe céphalique, l'anneau buccal, le segment nu qui lui fait suite, l'épiderme atteint une épaisseur considérable (100 u) sensi- blement la même à la face dorsale qu’à la face ventrale (fig. 89 à 93).

La base des branchies est également revêtue d’une épaisse couche épidermique ainsi que la face ventrale et les faces latérales des premiers segments thoraciques.

Tous les segments thoraciques, sauf les deux derniers portent à leur face ventrale un bouclier. ou épais bourrelet en forme de tore qui s'étend transversalement d’un parapode à l’autre (fig. 95-102).

Les 5 ou 6 premiers, surtout, sont très développés.

Dans la région abdominale et sur toute la partie dorsale de la région thoracique, l’épiderme, transparent, est très mince (fig. 103 el 106).

Son épaisseur totale, cuticule comprise, tombe à 4 ou 5 w (6 à 7 w avec la couche circulaire de fibres musculaires).

322 PIERRE FAUVEL,

Cependant à la jonction supérieure des pinnules avec la paroi abdominale règne un bourrelet épidermique assez épais, profon- dément découpé par des sillons longitudinaux (fig. 103).

Dans les tout derniers segments l’épiderme reprend une plus grande épaisseur, atteignant 40 à 50 & dans le segment anal. Il est alors à peu près également développé à la face dorsale et à la face ventrale et il forme de nombreux bourrelets longitudinaux creusés de profonds sillons (fig. 107 à 109).

Les cirres anaux sont formés par le EE de ces bour- relets qui sont également en continuité avec les replis de l’épithélium rectal. Cet épithélium n'est du reste qu'une invagination de l’épi- derme (PI. xxn, fig. 109).

Les wriles formés par le prolongement de ces bourrelets tant internes, qu'externes, sont pleins, ciliés à leur base seulement, à l'ouverture de l'anus, et contiennent de grosses cellules à mucus.

L'épiderme mince de la région abdominale et de la partie dorsale de la région thoracique est composé de fibro-cellules de soutien, larges, plates, à contenu clair et à noyau absorbant l'hématoxyline et de fibro-cellules à mucus, dont les unes se colorent faiblement par l’hématoxyline ou l'éosine. Mais ces cellules sont peu différenciées et constituent plutôt des cellules épidermiques universelles, suivant l'expression de Racovirza. De place en place, assez régulièrement espacées on trouve de grosses cellules à mucus, piriformes, qui absorbent énergiquement la safranine et le bleu de Méthylène (PI. xx, fig. 72, Clal, cle, cis.).

Les parois cellulaires des fibro-cellules sont assez difficiles à distin- guer sur les coupes.

Le meilleur procédé pour étudier cette partie de l’épiderme consiste à colorer un animal en masse par la safranine ou le bleu de Méthylène.

Après décoloration partielle et déshydratation par l'alcool absolu, un fragment de l’épiderme est éclairci par l'essence de cèdre et monté au baume.

On distingue alors très nettement à travers la cuticule l'aspect de mosaique produit par les cellules épithéliales (CZep.) et les cellules à mucus (C{gl.) se détachent vigoureusement en bleu ou en rouge orangé (PI. xx, fig. 73).

Il est alors facile de constater que l’épiderme dorsal est un épi-

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 323

thélium pavimenteux, à grandes cellules plates ou cubiques, mélangées de quelques cellules à mucus.

Ces dernières que l'on peut isoler par dissociation sont tantôt arrondies, tantôt allongées, le plus souvent en forme de fiole ou de larme batavique (PI. xix, fig. 67 et 73). Elles mesurent de 7 à 10 y sur 20 y à 40 . Elles se terminent généralement par un mince filament à leur extrémité effilée (connection basale). L’extrémité renflée est en contact avec la cuticule et leur contenu se déverse à travers celle-ci par un fin canalicule.

Dans toute la région que nous venons de décrire, la basale est très indistincte ou manque même complètement.

Dans le lobe céphalique cette membrane se laisse distinguer assez nettement ainsi que dans les lobes branchiaux, les bourrelets des parapodes et sur les côtés des segments porteurs de boucliers. Elle apparait alors comme une mince ligne claire entre l’épiderme et la couche des muscles circulaires.

Elle manque complètement dans les boucliers.

Dans toute la région antérieure l’épiderme atteint une grande épaisseur, ainsi que nous l'avons déjà dit, il se compose d’un épithélium alvéolaire les fibro-cellules de soutien alternent régu- lièrement avec les cellules à mucus. C’est l’'épiderme typique des Annélides, d'après les recherches de SOULIER.

Nous avons vu au contraire que l’épiderme dorsal s’écarte de cette structure pour se rapprocher de celle signalée par MALAQUIN chez les Syllidiens.

Les fibro-cellules de soutien sont (rès minces, très effilées (1 à 2uw sur 20 à 30 y), leur noyau parfois fortement étiré est seul coloré par l’hématoxyline, la cellule elle-même restant à peu près incolore, ou à peine temtée de rose par l’éosine. Aussi dans les coupes colorées à l'hématoxyline-éosine elles ne se trahissent guère que par leur noyau. Ceux-ci apparaissent comme semés au milieu d’un reticulum pâle (PI. x1x, fig. 65, 60, 61, 71, cés).

Les alvéoles que laissent entre elles ces fibro-cellules conjonctives, pour employer les dénominations de SOULIER, sont remplis par les cellules à mucus.

Celles-ci ont une forme subcylindrique allongée, etse terminent à leur partie inférieure par un prolongement effilé. Elles sont remplies de granulations sphériques quiabsorbent énergiquement les colorants

324 PIERRE FAUVEL.

et qui leur donnent avec l’hématoxyline-éosine une teinte variant du violet pâle au violet tache d’encre.

En certains points de l'épiderme, tels que le lobe céphalique, ces cellules occupent presque toute l'épaisseur de l’épiderme ; à leur base on aperçoit seulement de place en place d’autres cellules wüuqueuses de remplacement et des fibro-cellules conjonctives, mais ces diverses cellules ne sont pas assez nombreuses pour former une véritable couche sous-épidermique (PI. xix, fig. 71).

Le long des connectifs œsophagiens et des nerfs latéraux, des cellules nerveuses ganglionnaires sont intimement mélangées aux cellules épidermiques. On y rencontre des cellules nerveuses géantes et des cellules bipolaires, dont un prolongement va se terminer à la cuticule entre les cellules épithéliales, tandis que l’autre va se perdre dans le nerf. En certains points on ne peut tracer nettement de limite entre les cellules nerveuses et les cellules épithéliales (PL XI, 8200)

Dans la région antérieure du corps, entre les cellules à mucus colorées en violet, on rencontre quelques cellules glandulaires colorées en rouge par l’éosine, mais ces dernières sont beaucoup moins nombreuses (fig. 70, clgr).

Les boucliers thoraciques présentent un grand développement du tissu épidermique. Néanmoins, dans les trois premiers segments, l'épaisseur de l’épiderme est uniformément aussi grande que dans ces organes, et on peut considérer cet épiderme comme un bouclier continu faisant tout le tour des segments, ainsi que c’est le cas chez la Myxicola (fig. 93-94).

Les cinq premiers boucliers sont plus saillants et plus développés que les suivants ; cependant il ne faut pas attribuer entièrement cette saillie à l'épiderme, car en ces points les téguments sont plissés transversalement el une coupe sagitale nous y fait voir une série de goultières transversales tapissées par la couche des muscles circulaires (PI. x1x, fig. 57-58).

La chaîne nerveuse au centre, et les faisceaux des muscles longi- tudinaux, sur les côtés franchissent comme un pont ces gouttières et reposent seulement sur le sommet des plis (PL. xx, fig. 57-58).

Au point de contact, l'épaisseur de l’épiderme est réduite et à

«

partir du segment sétigère, à chaque repli la chaîne nerveuse

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 427

repose directement sur la cuticule, l’épiderme faisant complètement défaut en ce point.

Les six premiers boucliers présentent par endroits un dévelop- pement considérable de leur tissu qui vient faire hernie dans la cavité thoracique dont il occupe une partie notable.

Ces prolongements internes des boucliers constituent les glandes ventirales qui sont au nombre de six paires, une par segment.

En ouvrant un animal frais, on les aperçoit sous l’œsophage elles forment de petites masses arrondies ou plutôt ovoïdes, d'un blanc de lait opaque, reliées à l'épiderme par un mince pédicule passant entre la chaîne ventrale et les muscles longitudinaux (PI. xvi, xx, XX, fig. 11-13, 57-58-59, 100-102 110, Go).

Les deux premières paires, les plus développées, sont situées en avant des néphridies antérieures et séparées l’une de l’autre par les vaisseaux efférents de la deuxième paire de branchies et le dia- phragme. Elles appartiennent aux segments II et IV.

Les quatre autres paires situées en arrière vont en diminuant de volume. La sixième paire manque parfois.

Dans les coupes à l'hématoxyline-éosine ces glandes restent à peu près incolores. On distingue seulement une masse claire semblant criblée de grandes vacuoles et sur laquelle se détachent un grand nombre de petits noyaux violets.

Si l'on emploie la safranine, ou le bleu de Méthylène, l'aspect change complètement et les glandes se colorent violemment en rouge orangé ou en bleu violet.

Il est facile alors de se rendre compte que les soi-disant vacuoles sont de grosses cellules remplies de mucus, noyées dans un stroma de fines cellules conjonctives ou fibro-cellules de soutien (PL. x1x, fig. 59).

Ces grosses cellules sont du reste aisément isolables par dissocia- üon après traitement à l'acide osmique suivi de macération dans le sulfocyanure d’ammonium (PI. xix, fig. 68).

Ces énormes cellules, en forme de fiole à col très effilé, mesurent de 30 y à 40 y, de largeur sur 60 & à 80 4 de longueur. Leur contenu est tantôt clair et réticulé, tantôt composé de fines granulations sphériques fortement colorées. Le noyau sphérique, coloré en rouge sombre par la safranine, mesure 10 &. Son contenu semble, Le plus souvent homogène ; parfois on y distingue cependant un gros

326 PIERRE FAUVEL.

nucléole sombre ou des granulations fines. L’éosine le colore quelque- fois légèrement.

Les cellules conjonctives très pâles, à petit noyau violet, relient ces grosses cellules et les enchâssent (PI. x1x, fig. 59, {c.).

Les glandes ventrales sont revêtues par l’endothélium.

Leur pédicule aminci est en continuité avec le tissu des boucliers. Il passe entre les muscles longitudinaux et la chaîne ventrale et entre les fibres musculaires de la couche circulaire, qui s’écartent pour lui livrer passage et ne pénètrent jamais dans l’intérieur, pas plus que les vaisseaux.

Dans le pédicule on voit de longues et fines traînées fortement colorées et très serrées les unes contre les autres. Ce sont les extrémités effilées des grosses cellules, qui, s'épanouissant ensuite à droite et à gauche dans le tissu du bouclier, qu'elles traversent, vont déboucher à l'extérieur par les pores de la cuticule (PI. x1x, fig. 59).

Dans le bouclier la couche épidermique occupe à peu près les deux tiers de l'épaisseur totale. Elle est composée de fibro-cellules de soutien et de fibro-cellules à mucus violettes (C{gl.).

La couche sous-épidermique, relativement peu développée, se continue insensiblement avec la couche épidermique proprement dite. Elle est composée des mêmes éléments, seulement ceux-ci sont orientés dans tous les sens au lieu de l'être normalement à lacuticule.

La membrane basale semble manquer le plus souvent et, quand elle existe, elle est située entre la couche des muscles circulaires et toujours par conséquent à l'extérieur du bouclier, contrairement à ce qui a lieu chez le Spirographis | Souzier (94)] la basale vient séparer la couche sous-épidermique.

Chez l'Ampharete, ces deux couches intimement mélangées ne peuvent être séparées l’une de l’autre.

Le bouclier du Il segment présente une particularité. Il renferme une bande médiane, transversale, formée par 3 ou 4 rangs de grandes cellules dont le contenu est coloré en rouge vif par l'éosine. Ces cellules à mucus, de forme allongée, ont de50y à 75 y de longueur sur 6 y à 10 & de largeur. Elles sont remplies de granulations sphé- riques {rès réfringentes, rouge orange très vif. On n'y distingue pas de noyau (PI. x1x, fig. 61, C{sph).

Ces cellules ne se rencontrent que là.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 327

Il y à bien des cellules rouges dans les segments antérieurs mais leur contenu est homogène et elles sont beaucoup plus petites.

A partir du bouclier thoracique, les bourrelets épidermiques diminuent rapidement d'importance etils disparaissent complètement dans les deux derniers segments de cette région.

Il existe donc dans l’épiderme de l'Ampharele quatre espèces de cellules glandulaires :

Des cellules colorées en violet plus ou moins foncé par l’héma- toxyline et absorbant également la safranine et le,bleu de Méthylène ;

Des cellules à contenu homogène coloré en rouge par l'éosine;

9 Des cellules à grosses granulations sphériques colorées en rouge orangé par l'éosine ;

4 De grosses cellules dont le contenu n’est pas coloré par l'héma- toxyline, l'éosine et les colorants ordinaires, mais qui absorbent énergiquement la safranine et le bleu de Méthylène.

Quant aux fibro-cellules de soutien, on trouve tous les intermé- diaires entre la cellule universelle cubique, non spécialisée et la cellule conjonctive réduite à une mince fibre incolore à pelit noyau violet, étiré, d’une part, et la fibro-cellule à mucus, violette, d'autre part (PL. x1x, 63-64-65-67).

L'épithélium des tentacules buccaux et celui du pharynx n’est pas alvéolaire. Il ne renferme de cellules à mucus qu’en des points particuliers. Ses cellules, très petites, sont presque entièrement remplies par un noyau bien développé. Leurs parois, très minces, sont très peu nettes. Beaucoup sont vibratiles.

En résumé, l’épiderme de l'Ampharele présente la structure alvé- olaire, formée de fibro-cellules de soutien et de fibro-cellules à mucus.

Cependant, dans plusieurs régions du corps, cette structure alvéolaire n'existe plus, l’épiderme étant composé de cellules sem- blables.

Le tissu sous-épidermique, très pou développé, manque tota- lement dans l’épiderme dorsal et dans la région abdominale.

La basale n'existe nettement qu’en quelques points restreints, tels que le lobe céphalique ; ailleurs elle est peu visible et, en beaucoup de points, elle semble manquer totalement.

SOULIER (91) avait déjà remarqué qu'elle est fort peu visible chez les Térébellides.

328 PIERRE FAUVEL.

La basale manquant complètement dans les boucliers ventraux, on ne peut distinguer dans ceux-ci une partie ectodermique et une partie mésodermique.

Les glandes ventrales sont en continuité absolue avec l’épiderme dont elles sont une prolifération de la couche profonde.

Elles sont recouvertes par l’endothélium.

Il n’y pénètre ni vaisseaux, ni fibres musculaires. On ne peut donc attribuer leur origine au tissu conjonctif de la couche des muscles circulaires.

Nous adoptons complètement la manière de voir de SOULIER, qui considère comme identique le tissu conjonctif mésodermique et certaines fibro-cellules, ou cellules conjonctives de l’épidermeet de la couche sous-épidermique et nous souscrivons volontiers à sa

conclusion :

« De cette ressemblance il me semble que l’on peut conclure que le tissu conjonctif ne reconnait pas uniquement pour origine le > mésoderme, et que, dans certains cas, l’ectoderme lui-même peut » donner naissance à des éléments qui présentent des caractères > identiques à ceux du tissu conjonctif mésodermique » (91, p.275).

Il y a en effet identité complète entre les fibres conjonctives que l'on rencontre dans l'épiderme, dans la couche sous-épidermique, dans les glandes ventrales et dans les organes d'origine mésoder- mique (PL, xIX, fig. 63-65).

SALENSKY (83) p. 512-515, et MEYER (88) arrivent, par l'étude du développement, à attribuer au issu des boucliers une origine ecto- dermique. ;

E. PERRIER (9°) p. 1557, n’adopte pas cette opinion et considère que :

« C’est au développement du {issu conjonchf sous-dermique » qu'est due la saillie des boucliers. Cette couche sous-dermique > n'étant qu'une modification du tissu conjonctif de la couche > musculaire, il est naturel d'y rencontrer des arceaux musculaires » plus ou moins nombreux et aussi des vaisseaux qui ne traversent > pas la membrane basale et n'arrivent jamais par conséquent ni » dans la couche dermique, ni dans la couche épidermique ».

Les arguments de PERRIER contre les données de SALENSKY. Meyer et SOULIER reposent sur la position du tissu des boucliers

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 329

au-dessus de la basale, sur la structure de ce tissu et sa continuité avec le tissu conjonctif des couches musculaires.

Or, chez l'Ampharete, nous avons vu que les glandes ventrales ne sont pas séparées de l’épiderme par une basale, que cette membrane n'y existe pas et que dans les endroits du bouclier elle existe, elle est située au-dessus de celui-ci et non dans son intérieur. Il y a conti- nuité et identité entre le tissu des glandes ventrales et l’épiderme.

Le fait que nivaisseaux, nifibres musculaires n’y pénètrent, d’après PERRIER lui-même, nous prouve que ces glandes font bien partie de l’épiderme.

L'étude des boucliers de l’Amphicteis et de la Samytha nous prouvera encore plus clairement ce fait, en nous faisant voir le passage des boucliers ventraux aux glandes ventrales, par simple développement et prolifération du tissu épidermique.

Quant au rôle de la basale nous pensons qu'on l’a beaucoup exagéré depuis quelque temps.

‘La basale n’est pas une membrane véritable. C’est un réseau formé par le feutrage des prolongements fibreux des cellules épider- miques. Selon que ces prolongements sont plus ou moins longs et nombreux, plus ou moins enchevôtrés, ce réseau acquiert un dévelop- pement variable. Si les prolongements sont courts, peu nombreux ou nuls, comme c’est le cas dans la région dorsale de l’'Ampharete, la basale manque.

En tout cas ce simple réseau, qui manque à peu près entièrement dans des groupes importants d’Annélides tels que les Syllidiens, les Térébelliens, les Phyllodociens (GRAVIER, 96, p. 22), la Myxicole (MEYER, 88, p. 514) ne peut être considéré comme une ligne de démarcation tranchée, un mur infranchissable, car il ne forme pas une membrane continue et SOULIER a montré que la basale peut être traversée par des muscles et des vaisseaux aussi bien que par des cellules nerveuses et des cellules à mucus.

VE SOIES ET PARAPODES.

L'Ampharete est muni de trois sortes de soies: des palées ; des soies capillaires ; des plaques onciales ou wncini.

330 PIERRE FAUVEL.

Les palées sont de grosses soies jaunes, dorées, insérées en éventail de chaque côté du IT° segment.

Chaque palmule ou éventail comprend environ une dizaine de soies insérées dans un bulbe sétigère, en forme de lame recourbée, en relation avec des muscles.qui permettent à l’animal d'ouvrir et de fermer cet éventail et de l’incliner en avant, ou de le rabattre en arrière sur le dos à volonté (PI. xxi, fig. 95 à 97).

Grâce à l'insertion particulière de ces soies dans leur bulbe, l'éventail n’est pas plan mais engendre une surface gauche se rapprochant de celle d’un demi-tronc de cône. Les plus grosses soies sont situées du côté interne, c'est-à-dire vers la ligne médiane du corps et elles vont en diminuant progressivement de longueur et de grosseur du côté opposé.

Ces grosses soies se terminent en pointe effilée, parfois droite,

souvent plus ou moins recourbée (PI. xvu , fig. 25-26). Leur section est un peu elliptique.

Elles sont siriées dans le sens de leur longueur. Cette striation est due à une véritable structure fibrillaire et non à une ornementa- tion externe, ainsi qu'il est facile de s’en rendre compte sur certaines coupes et sur des soies brisées obliquement.

DE SainT-Josepx (94, p. 166), a déjà remarqué d’ailleurs cette structure chez les Annélides.

Ces soies représentent la rame dorsale du parapode du II seg- ment. Ce parapode est représenté seulement par le mamelon obtus d’où émergent les palées.

Les mamelons pédieux des deux segments suivants sont plus rapprochés de la face dorsale du corps que de la face latérale et ce n’est guère qu'à partir du VI‘ segment que le parapode est inséré latéralement.

Les pieds thoraciques sont uniquement composés d’un mamelon cylindroïde, à extrémité arrondie, d'où émergent les soies capillaires. Ils ne portent ni cirre, ni appendice d'aucune sorte.

Les soies capillaires insérées dans un bulbe de tissu conjonctif sur lequel s’insèrent les muscles destinés à les faire mouvoir en sens divers, sont disposées sur deux rangées parallèles en fer à cheval (PL xvu, fig. 32).

La rangée dorsale comprend de 4 à 8 soies assez fortes, l’autre

RECHRRCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 331

un nombre à peu près égal de soies plus fines, plus jeunes qui sont des soies de remplacement.

Les premières sortent parallèlement, en faisceau, du parapode, tandis que la pointe seule des soies de la deuxième rangée fait saillie à l'extérieur à la base des précédentes avec lesquelles elle fait un angle assez accentué (PI. xvu, fig. 20).

Les soies capillaires sont presque droites et présentent seulement une légère courbure au-dessous de leur portion limbée. En ce point, elles s’infléchissent brusquement et la partie limbée se recourbe légè- rement en glaive. Le limbe, un peu plus accentué vers l'extérieur de la courbe, est légèrement strié transversalement, tandis que la soie elle-même est striée longitudinalement (fig. 24).

La soie est terminée par une pointe très effilée un peu tordue sur elle-même.

Cette pointe, flexible, élastique, est susceptible de se recourber d'une façon très appréciable.

Les soies de remplacement présentent exactement la même struc- ture.

À partir du V[° segment, il existe une pinnule ventrale qui porte les uncini.

Dans toute la région thoracique les pinnules sont semblables. Elles ont la forme d’un bouton pédonculé, creusé d’une cavité à son extrémité et comparable à un entonnoir aplati dans le sens vertical (PI. xvur, fig. 20 à 22). Le bord antérieur de cet entonnoir porte une seule rangée transversale de plaques onciales insérées parallèlement entre elles, la pointe de leurs dents tournée en avant. Elles sont par conséquent rétrogressives. Ces wncini sont au nombre de 40 à 50 par pinnule, dans la région thoracique.

Au premier segment de la région abdominale la pinnule qui seule subsiste, car la rame dorsale et ses soies capillaires disparaissent brusquement, présente de légères modifications.

Elle est encore en forme de bouton à dépression terminale évasée, mais de son angle supérieur commence à se détacher un petit mamelon (PI. xvu, fig. 21).

Au segment suivant ce mamelon se développe davantage et forme un gros cirre court (fig. 22).

Au segment abdominal la configuration de la pinnule change brusquement (fig. 23).

332 PIERRE FAUVEL.

A la place du bouton arrondi, en cône renversé à section ovalaire et à dépression terminale, on ne trouve plus qu’une palette plate, mince, élargie en éventail, dont le bord postérieur sinueux porte les uncint insérés sur sa tranche. À l'angle supérieur de cette rame ventrale le cirre, rudimentaire dans les deux pinnules précédentes, est bien développé (PI. xvu, fig. 23).

Euzers (87) considère bien cet appendice comme un cirre. Pour d’autres auteurs c’est un parapode dorsal dépourvu de soies.

La façon dont il apparaît ici indique bien que c’est un cirre etnon un rudiment de parapodé.

D'ailleurs, chez l'Amphicteis, dont le parapode porte un cirre, nous verrons ce cirre survivre à la disparition du parapode dans la région abdominale, mais il occupe une autre place distincte de la pinnule qui porte aussi un petit cirre rudimentaire.

De ce point, jusqu'au dernier segment abdominal, l'aspect des pinnules varie peu. Elles s'élargissent et s’aplatissent seulement davantage, tandis que leur cirre augmente de longueur.

Les wncini alteignent alors le nombre de 90 à 100 par pinnule.

Ces plaques onciales différent un peu suivant la région du corps à laquelle elles appartiennent.

Dans les pinnules postérieures ce sont des plaques pectinées munies, d’un côté de dents acérées, recourbées, et d’un manubriwm arrondi. Le sommet opposé au vertex porte un faible ergot arrondi. - Sur cette apophyse s'insère la soie de soutien ou ligament. La partie inférieure du manubrium se recourbe en menton sous les dents et porte, sous la dernière dent, une apophyse obtuse. Les dents sont.au nombre de neuf, rarement dix, disposées sur deux rangées paral- lèles. La neuvième, très petite, est insérée au sommet du vertex. Les neuf dents ne sont visibles que de face. Elles apparaissent alors sous forme de petits mamelons arrondis (PI. xvi1, fig. 27-80).

De profil, on ne distingue en général que cinq dents parce qu'on ne voit guère qu'une rangée à la fois, celles-ci étant assez écartées. C'est sans doute ce qui à fait attribuer cinq dents seulement aux uncini postérieurs de l’'Ampharete.

EuLers (87) est probablement le premier à avoir constaté que les dents des wncini des Ampharétiens sont généralement disposées sur plusieurs rangs ; mais, comme nous le verrons, il y a des exceptions.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 333

Ces uncint mesurent de 27 y à 30 de longueur sur 20 y de largeur et 6 y d'épaisseur.

Ceux de la région moyenne du corps différent un peu de ceux de la région postérieure. La plaque est un peu plus allongée, l'apophyse supérieure moins marquée, le bas du manubrium un peu plus recourbé (PI. xvrr, fig. 28).

La principale différence provient surtout de ce que les deux rangées de dents sont plus rapprochées et alternes, ce qui permet de les apercevoir toutes à la fois de profil. Ces caractères s’accentuent encore dans les wncéni des pinnules antérieures (PI. xvur, fig. 29).

Les neuf dents sont alors facilement visibles.

Ces plaques striées transversalement mesurent environ 26 » x 50 vw.

A ce propos, nous ferons remarquer combien il est souvent difficile de compter, d'une manière exacte, le nombre des dents des uncini à cause de leur petitesse, souvent très grande, et de leur disposition sur plusieurs rangées parallèles.

Ainsi, chez l'Ampharete Grubei, tous les wncini sont pourvus de neuf dents, parfois dix, mais tandis que ce nombre est bien visible daus les plaques antérieures, il semble être de cinq seulement dans les postérieures.

Il ne faut donc attacher à ces nombres qu’une importance relative et il est imprudent de baser une espèce sur l'existence d’une dent de plus ou moins.

Ces différentes soies sont assez bien colorées par la safranine et le bleu de Méthylène, ce qui facilite beaucoup leur étude. Les préparations montées à la gélatine glycérinée, après traitement par la potasse. permettent de distinguer les plus petits détails. Le baume du Canada est au contraire un milieu détestable pour cette étude.

Dans les pinnules postérieures, on distingue très nettement, même par transparence, de longues et fines soies de soutien s’insérant sur l’apophyse supérieure des uncini. Dans ces pinnules, de fins muscles terminés par une partie tendineuse, s'inséèrent aussi à l’autre extrémité de la plaque sur le bord du manubrium.

Ces fines productions tendineuses qui mesurent environ 24 de diamètre, sont en relation avec des faisceaux musculaires qui se con- tinuent avec les muscles tégumentaires (PL. xvi, fig. 34, Mst et Mt).

334 PIERRE FAUVEL,.

CLAPAREDE (83) les avait prises, chez son Branchiosabella, pour des soies capillaires distinctes.

Dans les derniers segments, les plaques onciales sont en relation avec un muscle tendineux et une soie de soutien bien développée.

À mesure que l’on avance de l’abdomen vers la tête, on voit les soies de soutien se raccourcir au fur et à mesure que les muscles auxquels elles aboutissent augmentent d'importance. Dans la partie antérieure de la région thoracique, ces soies de soutien ont complètement disparu et les plaques onciales insérées sur un épais bourrelet cellulaire, épidermique, sont en relation directe avec de fins faisceaux musculaires qui s’attachent sur leur manubrium. On trouve tous les intermédiaires entre la soie de soutien chitinisée, le tendon et le muscle.

Chez le Chétoptère, Joyeux-LarFuIE (20) a décrit des plaques onciales en rapport avec un muscle moteur par chacune de leurs extrémités. Depuis, DE ST-Josepn (94) a considéré ces deux muscles comme des soies-tendons.

Les soies-tendons soutiennent les uncini, forment un squelette à la pinnule et non seulement donnent aux muscles moteurs un point d'appui, mais elles sont les prolongements même de ces muscles graduellement transformés en tendons chitinisés. Il y a quelque chose d'analogue aux tendons ossifiés des pattes des oiseaux.

Les plaques onciales sont rétrogressives, c’est-à-dire qu'elles sont implantées, les dents dirigées en avant.

En s'accrochant aux parois du tube, elles permettent à l'animal d'effectuer un brusque mouvement de retraite et elles offrent une résistance telle qu’il est souvent plus facile de rompre l'animal que de l’arracher de sa demeure à laquelle il se cramponne par ces milliers de pointes acérées.

Les soies sont insérées sur un bulbe sétigère formé d’un stroma de tissu conjonctif contenant de nombreux noyaux, très petits, fortement colorés par l’hématoxyline. C’est sur ce sac sétigère que s'insèrent les muscles moteurs du parapode (PI. xvin fig. 32, 45-46).

Les soies se forment aux dépens d’une grosse cellule unique, ainsi que l'ont fort bien décrit Jourpan (87) et Rierscu (82).

Sur des coupes passant par un parapode contenant de jeunes soies, on disingue encore la buse un peu épatée de celles-ci en rapport avec la grosse cellule qui leur a donné naissance. La base de la soie,

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 339

encore très transparente, ne se colore pas comme sa partie distale. La cellule-mère contient un gros noyau réfringent et son contenu est granuleux (PI. xvix, fig. 31).

Sur des soies plus âgées, on ne retrouve plus cette grosse cellule, mais on voit encore à la base de la soie une mince couche fortement colorée qui représente les restes de cette cellule.

On a longtemps discuté sur l’origine ectodermique mésoder- mique des soies.

EisiG (87) concilie les deux opinions, en admettant que la partie conjonctive du sac sétigère est d'origine mésodermique, tandis que les soies proviennent de l’invaginalion de l’épiderme.

Cette opinion nous semble la plus probable, car l’invagination de Pépiderme est un fait aisé à constater et les soies sont cerlainement des productions épidermiques.

Quant à l’origine mésodermique du bulbe sétigère, nous ne pouvons l’affirmer par expérience, n'ayant malheureusement pas pu suivre le développement, mais elle nous semble probable.

IX.

MUSCULATURE.

S I.

Anatomie.

La musculature générale se compose de trois principaux groupes de muscles :

1" Une couche de muscles cireulaires ;

Des faisceaux de muscles longitudinaux ;

Des muscles obliques.

En outre, les différents organes tels que parapodes, pinnules, branchies, tentacules, etc., ont leurs muscles propres.

Les muscles circulaires forment une couche continue entourant le corps, située immédiatement au-dessous de l'épiderme. Le déve- loppement de cette couche varie avec les régions du corps.

336 PIERRE FAUVEL.

Dans les premiers segments elle est surtout développée à la face dorsale et à la face ventrale, sauf à la hauteur du cerveau elle est plus épaisse sur les côtés.

Dans toute la longueur du corps cette couche varie d'épaisseur, mais en général elle reste relativement mince, et toujours beaucoup moins développée que la musculature longitudinale, sauf toutefois dans le segment anal elle prend la prédominence.

La musculature longitudinale, beaucoup plus importante, ne forme pas une couche continue mais se compose de plusieurs gros faisceaux répartis différemment suivant les régions.

En général ces muscles se décomposent chez les Annélides en quatre faisceaux : deux dorsaux et deux ventraux.

Cette disposition typique ne se retrouve que partiellement chez l'Ampharete.

Un peu en arrière du cerveau les deux faisceaux latéraux s’élargissent et viennent se fusionner à la face dorsale en demi-cercle (PI. xx1, fig. 94). À la face ventrale, les muscles longitudinaux manquent, le plancher inférieur de la bouche étant encore en conti- nuité avec les téguments pour former la lèvre inférieure.

En arrière de cette lèvre, la masse musculaire unique se divise en trois faisceaux (fig. 95-96) dont un impair, dorsal et deux latéraux qui tendent à se rapprocher de la face ventrale.

Au-dessus du cœur la masse dorsale impaire se divise en deux faisceaux dorsaux, à section concave, très développés, mais peu écartés l’un de l’autre (fig. 98).

La disposition typique est alors réalisée (fig. 99), mais elle ne tarde pas à s’altérer de nouveau et, en arrière de l’æsophage les deux faisceaux dorsaux sont réunis en un seul arc musculaire s'étendant d'un parapode à l’autre (PI. xx, fig. 102).

Les faisceaux ventraux, de plus en plus développés, font saillir les parois du corps en deux gros bourrelets longiludinaux qui détermi- nent entre eux une gouttière s'étendant au milieu de la face ventrale, depuis les deux derniers anneaux thoraciques jusqu’à l'extrémité postérieure du corps (fig. 103 et 106).

La musculature dorsale n’est plus qu’une couche assez mince (fig. 100 et 101).

Dans les derniers segments les bourrelets ventraux ont une section circulaire (fig. 103), puis ils S'atrophient brusquement et viennent

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 337

s'épanouir dans le segment anal domine la courbe circulaire (fig. 108).

Les muscles obliques s’insèrent sur la face ventrale des segments, au-dessus du vaisseau ventral, de chaque côté de la chaîne nerveuse. Ils aboutissent aux parois latérales à la hauteur des parapodes, dans la région thoracique et déterminent ainsi trois chambres dans la cavité générale : une chambre intestinale, médiane, et deux chambres néphridiennes, latérales (fig. 100-101-102).

Ces muscles forment des bandelettes plates au nombre de 5 ou 4 par segment (PI. xvui, fig. 37).

La musculature des parapodes se rattachant à celle des muscles obliques nous la décrirons ici.

On distingue deux groupes de muscles dans les parapodes : les protracteurs et les rétracteurs.

Les rétracteurs s'insèrent d’une part sur la couche des muscles tégumentaires longitudinaux et circulaires et de l’autre à l'extrémité antérieure du bulbe sétigère ; au contact de celui-ci avec l’épiderme (PI. xvi, fig. 45-46, Mr). En se contractant, ils retirent les soies en arrière et les parois du parapode entraînées dans ce mouve- ment s’invaginent (fig. 46).

Les protracteurs (Mp.) s'insèrent sur les parois du corps et à l'extrémité libre, interne, du bulbe sétigtre, fortement en saillie dans la cavité générale.

Ces bandelettes élargies en patte d’oie, au nombre de 6 à 8 par parapode, forment comme des haubans qui, par leurs contractions, font saillir les soies au dehors (fig. 37-45, Mpt).

Au sommet du cône déterminé par les muscles protracteurs, s’insère un autre muscle allant au milieu de la face ventrale. C'est en somme une des bandelettes musculaires obliques qui s’insère sur le sac sétigère au lieu de s'insérer sur la paroi du corps (fig. 37. Md). Nous l’appellerons le muscle pédieux droit par opposition au muscle pédieux oblique (Mop.), qui s'insère d’un côté à la partie antérieure du sac sétigère et de l’autre sur la face médio-ventrale en passant en biais sous les muscles obliques. Il s’insère dans le segment précédent à peu près au même point que le muscle pédieux droit de ce segment.

Il est aplati dans le sens vertical et forme un dissépiment rudimen- taire.

338 PIERRE FAUVEL.

Ce muscle pédieux oblique et le muscle pédieux droit servent à faire mouvoir le parapode en avant et en arrière.

S IL.

Structure histologique.

Les muscles circulaires sont formés de fibres assez fines à section arrondie ou ovalaire.

Les gros muscles longitudinaux sont formés de grosses fibres rubanées, aplaties, disposées sans ordre et formant un réseau assez lâche. Ces fibres rubanées sont reliées entre elles par de nombreuses anastomoses (PI. xvuI, fig. 38).

En section transversale, ces faisceaux musculaires ne présentent pas la structure pennée, si répandue chez les Sédentaires.

Les fibres sont disposées sans ordre, plus serrées et plus fines à la partie externe du faisceau, plus lâches et plus grosses à la partie interne qui est recouverte par l’endothélium de la cavité générale et pénétrée par de nombreux vaisseaux sanguins.

Sur des coupes transversales la structure des fibres paraît géné- ralement homogène. On n'y distingue ordinairement ni cavité centrale, ni substance granuleuse axiale, ni substance corticale formée de fibrilles radiales comme Robe (85) en a décrit.

Cependant dans quelques coupes transversales, les fibres présentent un contour coloré en rouge par l’éosine tandis que la partie centrale reste incolore, ou très légèrement rose. A côté on rencontre des fibres uniformément colorées.

Ces différences tiennent-elles à des accidents de préparation ou bien sont-elles dues à des modifications physiologiques ou patholo- giques des fibres ou à une différence d’âge ? Nous verrons qu'il existe bonnes raisons en faveur de cette dernière opinion.

CLAPARÈDE (73) avait déjà signalé chez les Annélides des fibres musculaires avec une substance granuleuse dans l’axe et d’autres parfaitement homogènes.

Il a de plus constaté successivement les deux états chez la même Annélide : Nereis Dumerilii, à l’état Néréidien et à l’état d'Hetoronerens.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 339

Sur les fibres musculaires on rencontre de nombreux noyaux colorés très neltement par l'hématoxyline. Ces noyaux sont ellip- tiques, tantôt arrondis, tantôt allongés. {ls sont remplis de granula- tions colorées mais ne renferment pas de nucléole distinct.

Entre les fibres musculaires on distingue très facilement sur les coupes transversales, et un peu moins nettement sur les coupes longitudinales, du tissu conjonctif assez développé.

Le tissu lâche composé de fibres, de membranes, de cellules étoilées (fig. 44) et de substance amorphe, renferme de nombreux noyaux elliptiques semblables à ceux que nous venons de décrire.

Ces noyaux appartiennent bien au tissu conjonctif, car on en voit beaucoup dans ce tissu, entre les fibres musculaires qu'ils ne touchent pas.

Ce tissu conjonctif intra-musculaire est surtout développé à la face interne des faisceaux longitudinaux.

On le retrouve aussi dans les muscles obliques. Dans la couche circulaire il est beaucoup moins abondant.

CLAPARÈDE (73) avait remarqué que ce «/{ssu connectif intra- musculaire > peut manquer complètement chez les petites espèces.

Si ces noyaux appartiennent au tissu conjonctif, d'autre part les noyaux intimement appliqués sur les fibres musculaires semblent bien appartenir à celles-ci.

JourDAN (8:72) décrit les fibres musculaires du Siphonostoma comme entourées de substance protoplasmique qui peut être limitée à l'entourage immédiat du noyau ou bien se prolonger au delà.

IL a constaté également la même structure chez l'£unice (8'72). Il ne fait pas mention du tissu conjonctif et attribue le noyau à la fibre musculaire.

Ersr@ (8'7) attribue également les noyaux aux fibres musculaires. Il figure en outre des noyaux à l’intérieur des fibres. Pour ceux- il ne peut y avoir de doute. Il considère aussi un certain nombre de noyaux comme appartenant à des fibres nerveuses.

Chez l'Ampharete nous avons constaté l'existence de noyaux à l'intérieur de fibres musculaires (fig. 43).

Cette disposition se rencontre presque uniquement dans les fibres médianes du large faisceau dorsal.

ROHDE (85) considère les noyaux comme appartenant {ous au tissu conjonctif.

340 PIERRE FAUVEL.

Il est vrai, ainsi que le fait remarquer BRUNOTTE (88)qu'il considère ce tissu conjonctif comme une production secondaire des cellules musculaires.

C'est un moyen de mettre lout le monde d'accord !

WIREN (87) cependant n’admet pas de noyaux pour les fibres musculaires.

Dans le cas le tissu conjonctif manque, les noyaux appar- tiennent à la fibre à la zone de perimysium qui l'entoure. Cette zone proloplasmique serait capable dans d’autres cas de se développer et de donner naissance secondairement au tissu intra-musculaire.

Chezl'Ampharete, il estimpossible de distinguer du tissu conjonctif la couche finement granuleuse qui entoure parfois le noyau sur les fibres, car cette couche est très difficile à voir.

En dissociant les muscles ventraux on obtient des fibres isolées. Ces fibres sont rubanées, apiaties, ondulées, plus épaisses d’un côté que de l’autre et finement striées longitudinalement. Leur bord même présente des crêtes et des dents qui proviennent tout simple- ment de la rupture des prolongements anastomotiques qui les relient aux fibres voisines, ainsi que BRUNOTTE l’a fort bien vu (fig. 38 à 42).

Ce ne sont pas des expansions protoplasmiques produites par la pression des éléments musculaires longitudinaux ainsi que le pensait JOURDAN, Car nous avons rencontré cette structure surtout dans les muscles longitudinaux et toutes leurs fibres la présentent.

BRUNOTTE avait déjà réfuté cette opinion de JoURDAN. Aussi bien par les coupes que par les dissociations, on peut constater que ces anastamoses sont bien formées par des parties de la fibre elle-même.

Après l’action de l'acide osmique ou du liquide de Fo, il est facile de dissocier les fibres musculaires. On les voit alors se réduire en une quantité de fines fibrilles parallèles de 1 4 de diamètre.

Certaines fibres présentent, sur une partie de leur longueur, des plissements obliques simulant une sorte de striation (fig. 40). Nous n’avons jamais rencontré chez les Ampharetiens de véritables fibres striées comme EmEry (87) en a signalé chez la Nephthys.

Cet auteur a étudié le développement des fibres musculaires des Annélides. D'après ses recherches, les jeunes fibres seraient formées de substance granuleuse avec noyau. La substance contractile se développe en deux lames, de chaque côté. Quand le développement est complet la substance contractile entoure le protoplasma qui

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 341

diminue. La substance granuleuse axiale et le noyau finissent par disparaître complètement.

Ceci correspond exactement aux divers états de la fibre muscu- laire que nous avons signalés plus haut et explique en outre les résultats obtenus par CLAPARÈDE sur la Nereis Dumerilii.

2.4

CAVITÉ GÉNÉRALE. ENDOTHELIUM. GLANDES LYMPHATIQUES.

SL Cavité générale.

La cavité thoracique est divisée en deux parties très inégales, séparées par un diaphragme situé à peu près entre le IIT° et le IV° segment.

Ce diaphragme, qui s’insère à la face ventrale entre la et la paire de glandes ventrales, en avant des néphridies antérieures, se prolonge en arrière en forme de cône embrassant l’œsophage sur lequel il s'insère à sa sortie de l'estomac.

Sur les flancs, il s’insère dans le IV° segment entre la base du parapode et le pore néphridien de ce segment, pore situé un peu en arrière du parapode.

Il réunit les deux néphridies antérieures dont le pavillon vibratile le traverse pour s'ouvrir dané la chambre thoracique antérieure.

C'est surtout cette situation entre l'ouverture interne de la néphri- die et son pore externe qui fixe réellement la place du diaphragme, car ses insertions sur les parois du corps sont assez variables et difficiles souvent à déterminer d’une façon exacte.

Ce diaphragme ne contient pas de fibres musculaires. Il est uniquement constitué par deux lames d’endothelium accolées, à larges cellules arondies ou polygonales, à noyau ovale.

Dans la chambre thoracique antérieure, un rudiment de septum s'étend entre le segment buccal et le Il‘ segment.

La chambre thoracique postérieure s'étend en arrière du dia- phragme jusqu’à l'extrémité de la région thoracique.

342 PIERRE FAUVEL.

Sa communication avec la chambre antérieure est très faible quand elle existe. Elle est due alors à de fines perforalions dans la partie supérieure du diaphragme qui a l'aspect d'une membrane fenestrée (PL xvin, fig. 56).

Dans la règion abdominale il n'existe pas de véritables diaphragmes mais à chaque segment des dissépiments musculaires, revêtus, sur leur deux faces par l’endothelium, relient le tube digestif aux parois du corps. Ces dissépiments sont de simples brides laissant communi- quer les segments entre eux et soutenant les vaisseaux transversaux.

Le liquide de la cavité générale et les produits qu’il renferme, œufs, spermatozoïdes, amibocytes peuvent librement circuler dans toute la longueur du corps, en arrière du diaphragme antérieur.

La chambre thoracique, ainsi que la cavité de la région abdominale est subdivisée en trois chambres par les muscles transversaux formant un plancher oblique de chaque côté de la chaîne nerveuse.

Au centre c’est la chambre intestinale, les deux autres plus petites situées sous les muscles obliques sont les chambres néphridiennes.

Elles communiquent avec la chambre intestinale, car les planchers musculaires qui les limitent sont formés de bandelettes musculaires assez espacées (PL. xvirr et xxi1, fig. 37-101-102-106).

Dans la chambre thoracique antérieure, le liquide cavitaire ren- ferme des amibocytes que l’on voit par transparence circuler dans la cavité centrale des branchies et des tentacules buccaux, en communication avec elle.

Chez l’Ampharete il ne semble jamais contenir d'éléments sexuels.

Dans le reste du corps, le liquide cavitaire ne contient guère que des éléments sexuels à divers états de développement, depuis la fin de septembre jusqu’au mois de mars.

Pendant le reste de l’année, c’est-à-dire en été, il renferme des globules clairs, transparents, réfringents, comme graisseux, des globules sphériques jaunâtres également réfringents (chlorago- gènes ?) et des amibocytes (lymphoïden Zellen) à contenu granu- leux, à contour circulaire, ovale ou dentelé plus ou moins irrégulier. Certains possèdent un gros noyau fortement coloré par l’éosine.

On y rencontre aussi souvent et parfois en nombre considérable des Infusoires et des Grégarines à divers états de développement.

La cavité générale est tapissée de tous côtés par le péritoine ou endothelium, ainsi que tous les organes qu’elle renferme.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 343

SII Endothelium.

L’endothelium est constitué par une très mince membrane à cellules plates, à contour polygonal ou arrondi, plus ou moins sinueux suivant les régions.

Quand le péritoine prolifie pour former des éléments sexuels, ses cellules s’épaississent et deviennent cubiques, ou globuleuses. A l'état ordinaire, au-dessus du tube digestif, ces cellules assez grandes, polygonales, à côtés arrondis ou légèrement sinueux contiennent un noyau elliptique coloré d’une façon uniforme (PI. xvin, fig. 55).

Sur les Néphridies cette sinuosité des côtés des cellules est encore plus accentuée. Les cellules sont plus petites (fig. 54).

Sur le vaisseau ventralles cellules endothéliales sont au contraire allongées, effilées par chaque extrémité et à contour non dentelé (PL. xvn, fig. 35). |

La structure cellulaire de l'endothelium est facile à mettre en évidence par les imprégnations à l’argent qui dessinent en noir les contours cellulaires.

L’endothelium de l’Ampharete ressemble tout à fait aux différents types décrits chez les Annélides par VIALLANES (85) et par JOURDAN (87).

La structure sinueuse est surtout accentuée sur l’endothelium des vaisseaux sanguins (PI. xvrr, fig. 36), les cellules sont petites, plates, à contour très découpé.

L’ensemble rappelle tout à fait l’endothelium des capillaires des vertébrés.

Sur des coupes transversales l’endothelium se présente comme une simple ligne mince. Les noyaux font fortement saillie à l'extérieur (PI. xvin, fig. 51-52-53).

Nous avons déjà donné la description du diaphragme formé de deux lames d’endothelium accolées. Il n’y a pas de membrane fine interposée entre ces deux lames, ainsi que cela existe chez l'Oligogna- thus, d'après SPENGEL (82). Les fibres musculaires y font également défaut.

Cet endothelium est en continuité avec celui qui tapisse la face interne de la cavité générale.

344 PIERRE FAUVEL.

Nous n’avons pas rencontré chez l’'Ampharetle d’endothélium à cellules ayant un contour aussi sinueux que celles figurées par ViALLANES pour l’Arenicola, mais la partie supérieure du diaphagme en lame fenestrée rappelle tout à fait sa fig. 4 du, dissépiment de l’Arénicole.

S III. Glandes lymphatiques.

Ces glandes sont situées sur les vaisseaux branchiaux à l'endroit ils passent de la cavité de la branchie dans la chambre thoracique antérieure.

Ces glandes, formées aux dépens du péritoine des vaisseaux, ressemblent beaucoup en cela, aux glandes génitales développées de la même façon. ;

Elles en différent par la nature de leurs cellules et l'absence d’une enveloppe folliculaire.

Les cellules, elliptiques, de 4 x à 6 & de diamètre, renferment un noyau de 3 x à 4 u. Elles sont colorées en rouge vif par l'éosine tandis que l’hématoxyline colore le noyau en violet.

Ces glandes répondent aux « pigmentirte Lymphdrüsen décrites par MEYER (8'7) chez la Melinna, précisément dans la même situation. Elles en différent en ce que les cellules qu’elles produisent se détachent et tombent dans le liquide périviscéral on les rencontre un grand nombre, surtout à l'intérieur des branchies et des tentacules. MEYER n'ayant jamais constaté ce fait chez la Melinna, suppose qu'elles élaborent un produit liquide qu'elles tirent du sang.

Le développement de ces glandes paraît varier beaucoup avec la saison et les individus. Elles sont souvent réduites au point d'être difficiles à déceler.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 345

XI

SYSTÈME NERVEUX. S I. Historique.

Aucune partie de l'anatomie des Annélides n’a fait l’objet d'autant de travaux que le système nerveux.

Indépendamment des nombreuses monographies d’Annélides dans lesquelles le système nerveux est traité, parfois avec de grands développements, un nombre assez considérable de mémoires a été consacré uniquement à l'étude anatomique ou histologique de ce système chez les Annélides.

Nous ne citerons que les plus importants de ces ouvrages.

Les mémoires de QUATREFAGES (44-50) ne traitent que la partie anatomique. La partie histologique, à peu près complètement laissée de côté dans ces mémoires, a été traitée pour la pr2mitre fois d’une façon remarquable pour l'époque, par FAIVRE (56) qui en a fait l’objet d'un travail assez considérable (Hirudinées et Polychètes).

LEYpIG (62) à repris cette étude histologique chez les Hirudinées, les Géphyriens et les Polychètes.

Le iravail le plus important est ensuite celui de Pruvor (85) qui traite surtout la partie anatomique ; la partie histologique y est un peu négligée.

Il a cru reconnaitre dans le segment céphalique la fusion de trois segments : stomatogastrique, antennaire antérieur, antennaire posté- rieur.

KÜCKENTHAL (87) a étudié très en détail le système nerveux des Opheliens.

La même année parut uu mémoire considérable de Robe (8'7) sur l'histologie du système nerveux des Polychètes.

Ce travail fut bientôt suivi d’un important ouvrage de BELA HALLER (89) sur la structure du système nerveux des Polychèles et des Oligochèles.

346 PIERRE FAUVEL,.

Enfin tout dernièrement RACOvITZ4 (96) a traité longuement du lobe céphalique et de l’encéphale des Polychètes.

Cet auteur reconnait trois centres dans l'encéphale : un cerveau antérieur, un cerveau moyen et un cerveau postérieur, corres- pondant à trois aires: l'aire palpaire, l'aire antennaire et l’aire nucale.

Pour l'historique et la bibliographie détaillée de la question, nous renvoyons à ces différents auteurs, on les trouvera traités d’une facon très complète.

Quant aux Amphareliens, tout ce que l’on sait jusqu'ici sur leur système nerveux se réduit à quelques lignes de Mc’INrosu (75) nous apprenant que chez l'Amphacteis Gunneri la chaîne ventrale se présente en section sous la forme de deux cordons distincis enveloppés dans un névrilème commun, le tout enfoncé dans l'épi- derme de la face ventrale au-dessous de la couche des muscles circulaires ; et à quelques mots de CuNNINGHAM (88) sur les canaux neuraux de la Melinna cristata.

SII Encéphale.

Chezl’Ampharete le système nerveux est d'une grande simplicité. Il se compose d’une chaîne ganglionnaire ventrale et d’une masse cérébroïde réduite à un bourrelet transversal de substance nerveuse, réunis par deux connectifs œsophagiens.

A. CERVEAU MOYEN. L’encéphale apparaît d’abord constitué simplement par une masse arrondie allongée transversalement au- dessus de la bouche (PI. xx1, fig. 92-93-105). A l'extérieur sa position est indiquée par les deux yeux que l’on aperçoit par transparence au milieu du lobe céphalique.

Sur une coupe sagittale (PI. xi1x, fig. 57-58) la section de l’encéphale est ovalaire. On y distingue deux parties : un noyau arrondi, de subs- tance ponctuée, situé à la face inférieure (P1. xx1v, fig. 145) et recou- vert par la couche corticale composée de cellules ganglionnaires. La partie supérieure de la couche corticale est située immédiatement au-dessus de la cuticule qui recouvre seule le milieu de l’encéphale.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS,. 347

De chaque côté on voit l’épiderme dont l'épaisseur diminue progres- sivement jusqu’à devenir nulle dans la partie médiane.

En section transversale l’encéphale a une forme grossièrement rectangulaire, les angles inférieurs se continuant avec les connec- tifs œsophagiens.

On retrouve encore la substance ponctuée à la face inférieure et la substance corticale à la partie supérieure. Celle-ci s'étend sur les connectifs.

C’est à peine sila répartition de la substance ponctuée et de la substance corticale indique deux ganglions accolés dans cette masse d'apparence homogène.

Il semble donc à première vue impossible d’y retrouver les trois centres de RACOVITZA.

B. CERVEAU ANTÉRIEUR. Cependant, si au lieu d'examiner une section sagittale médiane, nous examinons une coupe latérale passant par l'origine du connectif œsophagien, nous apercevons en avant, entre l’épiderme du lobe céphalique et sa musculature, un filet nerveux composé de fibres allant se perdre dans la substance ponctuée de l’encéphale. Ce filet nerveux est entouré de cellules glanglionnaires qui viennent se confondre avec celles de la couche corticale. L’épiderme du lobe céphalique renferme de nombreuses cellules nerveuses épidermiques dont le filament basal vient s’intri- quer dans le nerf. L'épiderme lui-même se modifie progressivement et il n’est pas possible de tracer de limites nettes entre l'épiderme et la substance corticale de l’encéphale.

JOURDAN (84) avait déjà remarqué les rapports intimes du cerveau des Annélides avec l’hypoderme.

RACOVITZA (96), a démontré que Le tissu nerveux n’est qu’une modification de l’épiderme.

Ici la transformation est des plus aisées à suivre.

L'épiderme composé surtout de cellules à mucus et de cellules de soutien dans la partie antérieure du lobe céphalique, renferme de nombreuses cellules nerveuses épidermiques au-dessus du nerf palpaire, et à mesure que celles-ci apparaissent, les cellules à mucus diminuent en nombre et en taille, les cellules de soutien s’amincissent. Au-dessus de l’encéphale la transformation est

complète.

348 PIERRE FAUVEL.

Les cellules de soutien sont transformées en filaments névrogliques qui vont se prolonger dans la substance ponctuée après avoir enve- loppé d’un réseau les cellules ganglionnaires. Elles forment des travées verticales colorées en rose par l’éosine, semblables à celles que JourDAN (8'7* ja décrites chez l'Eunice.

Les cellules nerveuses épidermiques passent insensiblement aux cellules ganglionnaires. Seules, quelques rares cellules à mucus semées çà et à la partie supérieure de l’encéphale, rappellent l'origine épidermique de cette région du cerveau que la cuticule recouvre directement.

En général, chez les Polychètes l'encéphale reste recouvert d’une couche épidermique peu au point modifiée.

À part une disposition semblable à celle que nous avons décrite, signalée par Rierscx (82) p. 32, chez le Slernaspis, nous ne connaissons pas d'autre exemple chez les Polychètes de cette transformation complète de l’épiderme en tissu nerveux.

L'effet de cette transformalion chez l'Ampharete est de rendre cette région transparente.

L'œil est noyé dans la substance cérébrale et c’est grâce à cette absence d’épiderme qu’on l’aperçoit aisément.

La place de l’œil au centre de la masse cérébrale principale en détermine immédiatement la nature.

Cette masse représente le cerveau moyen, ou centre antennaire, qui porte les yeux ainsi que RacoviTzA (96) l’a démontré.

Le nerf antérieur qui suit de chaque côté le sillon du lobe céphalique est le nerf palpaire. Il représente le cerveau antérieur très réduit, n’existant guère qu’à l’état d’aire palpaire, le ganglion faisant défaut.

La présence de ce nerf palpaire nous éclaire aussi sur la nature de la partie frontale, ou prolongement médian du lobe céphalique, espèce de museau pointu qui a valu jadis à cet animal le nom d’acutifrons.

Ce tubercule pointu est un véritable palpode analogue à celui des Ophéliens, des Cirratuliens, des Capitellides et des Maldaniens.

Les nerfs palpaires, après avoir suivi les sillons de chaque côté du palpode, vont se perdre à la base des tentacules buccaux qu’ils innervent vraisemblablement quoique la constatation soit difficile à faire à cause de l'extrême ténuité de leurs terminaisons.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 349

Chez les Terébellidés nous avons constaté que les tentacules céphaliques sont directement innervés par des nerfs nombreux partant du cerveau antérieur.

Ces organes sont donc bien des appendices du lobe céphalique et non du segment buccal. Ils sont absolument homologues chez les Ampharetiens et les Térebellides, ainsi que nous en aurons encore d’autres preuves.

Dans les deux cas ils dépendent du centre palpaire.

C. Cerveau postérieur. Le centre postérieur est représenté par l'organe nucal situé chez l’Ampharete de chaque côté du lobe céphalique et formé par une fente étroite et profonde disposée en arrière du cerveau, dans le prolongement d’une ligne idéale passant par le nerf palpaire et l'œil. Il se trouve au-dessus et un peu en arrière de la racine du connectif œsophagien.

Il appartient à la catégorie de Racovirza (96) p. 125, compre- nant les organes nucaux formés d'un pli en forme de fossette non dévaginable.

La face inférieure de la fente nucale est revêtue d’une cuticule assez épaisse recouvrant une couche de cellules nerveuses, offrant toutes les transitions entre les cellules nerveuses épithéliales et les cellules ganglionnaires du cerveau moyen, auxquelles elles passent insensiblement.

La face supérieure ou réfléchie, de l'organe nucal, revêtue d’une mince cuticule est composée de nombreuses cellules vibratiles. Une région composée de cellules de soutien ct de cellules à mucus relie progressivement l'organe nucal à l’épiderme, dont il n’est qu'une modification.

L'’organe se compose d’une seule couche de cellules reposant sur une basale peu développée, se continuant avec celle du cerveau moyen.

Nous avons un organe nucal bien évident dans lequel on retrouve les éléments indispensables : cellules nerveuses et cellules vibratiles et les éléments accessoires : cellules de soutien et cellules à mucus.

On retrouve donc bien chez l'Ampharete les trois centres ner- veux : cerveau antérieur, cerveau moyen, cerveau postérieur.

390 PIERRE FAUVEL.

Mais le cerveau moyen, ou centre oculaire, est seul représenté par des ganglions bien développés.

Le cerveau antérieur est réduit à une aire palpaire mais ne possède pas de véritable centre, car on ne peut donner ce nom au nerf palpaire.

De même le cerveau postérieur est représenté seulement par une aire nucale.

Il n'existe, à proprement parler, ni ganglion nucal, ni nerf nucal.

La substance corticale est constituée par des cellules nerveuses unipolaires, à gros noyau arrondi, contenant des granulutions sphériques disséminées régulièrement et de grosseur égale. Le contenu de ces cellules est finement granuleux.

A la périphérie on rencontre des cellules apolaires, petites et presque réduites à leur noyau, comme Jourpan (87) en a décrit chez l'Eunice.

Dans le milieu du ganglion on rencontre, mais en petit nombre, des cellules géantes atteignant environ une taille double des autres. Elles sont caractérisées surtout par leur noyau, pourvu d’un nucléole, et leur contenu granuleux.

Toutes ces cellules sont prises dans les mailles d’un réseau formé par des fibres de névroglie. Cette névroglie provient de la transforma- tion des cellules de soutien épithéliales, ainsi que l’a démontré RoHDE (87). 11 est facile de constater chez l'Ampharete le passage des cellules de soutien typiques aux cellules névrogliques et la continuité de la névroglie avec les prolongements des cellules de soutien.

La substance ponctuée est formée par le mélange et l'intrication de la névroglie et des prolongements des cellules nerveuses.

Nous n’avons jamais constaté la pénétration de la névroglie dans les cellules nerveuses, pénétration soutenue par ROHDE (95), mais qui n'a été admise presque par personne,

Sur les coupes colorées à l’hématoxyline-6osine, les fibres de névroglie forment un réseau coloré en rouge, tandis que la substance ponctnée formée par les prolongements et les terminaisons protoplasmiques des cellules nerveuses, est colorée en rose pâle.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 391

$ III. Veux:

Les yeux sont au nombre de deux seulement et paraissent être formés de deux masses de pigment noir foncé, noyées dans la masse du cerveau moyen.

Nous avons déjà vu qu'ils se trouvent sur les côtés du ganglion sincipital, dans un plan vertical passant par l'origine du nerf nucal et par celle du connectif œsophagien.

Sur des coupes minces il est facile de constater que l'œil se compose essentiellement d’une cellule géante recouverte d'une épaisse calotte de pigment noir (PI. xx1v. fig. 137).

Cette cellule mesure environ 15 de diamètre sur 30 4 de hauteur. Elle est piriforme. Son extrémité renflée dirigée en haut est recouverte par le pigment, son prolongement dirigé vers le bas va se perdre dans la substance pontuée sous-jacente. Le noyau sphé- rique mesure 10 y. Il contient un nucléole et des granulations plus fines.

Le protoplasma cellulaire se colore en rouge par l’éosine. Son aspect est granuleux autour du noyau, fibreux à la périphérie. Il semble exister un feutrage de fibres concentriques aux parois de la cellule. Au-dessous du noyau, à la base du prolongement, se trouve un espace clair, comme une vacuole, c'est le « paramitom» de RonpE (87).

Les cellules qui entourent l'œil sont des cellules nerveuses ordinaires, semblables à toutes celles de la région corticale dont elles font partie.

Nous ne pensons pas qu'on ait jamais signalé chez les Annélides des yeux simples présentant une structure semblable.

Les éléments simples des yeux composés de Polamailla, décrits par ANDREWS (91), s’en rapprochent un peu en ce sens qu'ils se composent d'une cellule épidermique à noyau assez volumineux, recouverte d'une couche de pigment. Mais ces cellules sont toujours en relation avec la cuticule par leur partie supérieure formée par une profonde invagination de la cuticule donnant naissance à un cristallin très développé et d’une forme toute spéciale.

392 PIERRE FAUVEL.

Chez l'Ampharete la cellule oculaire est bien si l’on veut une cellule épidermique, en ce sens que les cellules nerveuses ne sont que des éléments épidermiques transformés, mais elle ne conserve aucune relation avec la cuticule dont elle est séparée par plusieurs couches de cellules ganglionnaires et elle a tous les caractères des cellules géantes qui sont les plus différenciées de toutes les cellules nerveuses. Il n'existe aucune formation réfringente jouant le rôle d’un cristallin ou d’une cornée.

Ceci contredit aussi l'opinion de RacoviTzA (96)p. 116, qui prétend que les yeux simples et les taches oculaires peuvent se rencontrer partout, excepté dans le cerveau !

Nous verrons que chez Amphicteis, Melinna et Samytha il existe des yeux simples en assez grand nombre dans le cerveau moyen.

8 IV.

Connectifs œsophagiens.

Is naissent du cerveau moyen et décrivent chacun un demi-cercle en suivant les parois du segment buccal ; arrivés à la face ventrale de ce segment ils s’incurvent assez brusquement en arrière et marchent à la rencontre l’un de l’autre.

Ils s’accolent dans le IIT° segment pour former la chaîne ventrale. Un peu avant leur accolement ils sont réunis par une commissure transversale et ils donnent de chaque côté un nerf allant aux parois du Il° segment, affirmant ainsi son individualité et prouvant que ce n’est pas une simple division du segment buccal (PI. xxiv, fig. 141).

Les connectifs sont formés d’un assez gros faisceau de fibres nerveuses qui se glisse sous l’épiderme.

Ce faisceau est entouré de nombreuses cellules nerveuses inti- mement mélangées aux cellules épidermiques.

Plusieurs de ces cellules nerveuses sont bipolaires. Elles envoient entre les cellules muqueuses et les cellules de soutien de l’épiderme un gros prolongement qui se termine à la cuticule. Leur prolon- gement inférieur, filiforme, va se perdre dans le conneclif (PI. xix,

g. 60).

On rencontre des cellules unipolaires, bipolaires, multipolaires ; d'autres, presque réduites à leur noyau entouré d'une très mince couche protoplasmique, semblent apolaires.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 000

Ici encore nous retrouvons le mélange intime des éléments nerveux épidermiques et des cellules ganglionnaires.

S V. Chaîne ventrale.

La chaîne nerveuse s’étend du IIT° segment à la partie postérieure du corps. Elle atteint son plus grand développement dans les premiers anneaux de la région thoracique.

A partir des derniers boucliersthoraciques,elle diminue progressi- vement de grosseur au point qu'il est souvent difficile de la retrouver dans les derniers segments de la région abdominale.

Elle se compose de deux cordons à section arrondie ou sub-trian- gulaire, plus ou moins intimement accolés et légèrement renflés en ganglion au niveau de chaque segment (PI. xx1v, fig. 141). Les deux cordons sont enveloppés dans un névrilème commun.

A chaque segment, au niveau du ganglion, si l’on peut donner ce nom au léger renflement de la chaîne, il en part un nerf transversal qui se rend au pied correspondant.

Dans les segments IT, IV, V et VI, le nerf fournit en outre une branche assez considérable qui innerve la branchie.

Le système nerveux, aussi bien que l'appareil circulatoire nous prouve donc que chaque paire de branchies correspond à un segment distinct.

Les nerfs pédieux naissent de la chaîne ventrale par deux racines : une supérieure et une inférieure. En outre ces racines ne sont pas situées dans un même plan vertical et elles alternent ; ainsi la racine supérieure du neri gauche correspond à la racine inférieure du nerf droit et vice versa (PI. xx1v, fig. 142-143).

Pruvor(85)n'a pu observer les deux racines du nerf pédieux nette- ment séparées que chez les Nephthydiens. Il ne signale pas l'alter- nance des racines.

Nous avons retrouvé cette disposition chez la Lagis Koreni.

Dans la partie de la région thoracique qui porte les boucliers, nous avons vu que l’épiderme est fortement plissé et forme des séries de gouttières transversales tapissées par la couche des muscles circulaires.

354 PIERRE FAUVEL.

Dans cette région la chaîne nerveuse ne se conforme pas aux plissements de l’épiderme. Elle s'étend en ligne droite et passe au- dessus des gouttières transversales comme un pont, laissant au- dessous d’elle un vide notable. Elle ne repose que sur le sommet des plis (PI. x1x, fig. 57-58).

En ces points elle est en contact intime avec l’épiderme dans lequel elle est comme noyée. Dans la région thoracique, les cordons nerveux se composent de substance médullaire entourée à la face inférieure et sur les côtés par une couche corticale de cellules ganglionnaires. La même structure se retrouve dans les nerfs, au moins à leur origine.

La substance médullaire formée par les fibres nerveuses et les ramifications arborescentes des cellules est traversée par des mailles de névroglie reconnaissable à sa coloration rouge.

Les cellules ganglionnaires sont semblables à celles du cerveau, mais on rencontre en plus dans la région thoracique de nombreuses cellules géantes généralement situées à la face interne et inférieure du cordon nerveux.

Ces cellules, dont la taille est deux ou trois fois celle des cellules ordinaires s'en distinguent, par leur forme en fiole avec un gros prolongement partant du goulot, par leur contenu granuleux, et par leur noyau sphérique qui renferme toujours un nucléole distinct.

De plus leur protoplasma renferme des parties claires dont la structure semble homogène (Pl.xxrv, fig, 139, 140). Robe (8'7) qui a longuement décrit de semblables cellules appelle « Paramitom » la substance homogène, claire, et « Mitom » le protoplasme granuleux fibrillaire.

Le prolongement nerveux de la cellule part le plus souvent du < Miom » mais parfois aussi du « Paramitom >, comme c’est le cas pour la cellule géante de l’œil.

Dans la région thoracique, la chaîne nerveuse renferme des canaux neuraux, visibles en section transversale (PI. xxiv, fig. 136). Il en existe un à l’angle supérieur interne de chaque cordon nerveux.

Leur diamètre, assez variable, n’est cependant jamais bien grand chez l’'Ampharete (20 y). Ils ne se rencontrent que dans les 6 à 8 premiers segments thoraciques.

Il est facile de se rendre compte, tant sur les coupes transversales, que longitudinales, que ces canaux neuraux ne forment pas des

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 359

tubes continus. Leur longueur ne dépasse guère celle d’un ou deux segments.

Ceci explique pourquoi sur des séries de coupes on trouve tantôt, un, deux, trois canaux ou pas du tout, puis un peu plus loin on en voit reparaître deux.

Ces canaux neuraux (tubes géants, fibres géantes, fibres tubulaires colossales, neurocordes, etc. des auteurs) ont donné lieu à de nombreuses interprétations.

L'historique et la bibliographie de cette question ont été donnés d'une façon très complète par SPENGEL (82), Eisic (87) et BEra HALLER (89), p. 70.

CLAPAREDE (73) n'y voyait que des canaux, LEyDiG les a considérés comme des fibres nerveuses. SPENGEL (82) est le premier à les avoir rattachés aux cellules géantes.

Eisi& (87) admet égaiement que ce sont des fibres nerveuses dégénérées, bien qu'il n’ait pu, chez les Capitellidés, reconnaître leur communication directe avec les cellules.

Roupe (87) a démontré celte connexion, mais CUNNINGHAM (88) n’a

pu la retrouver. Il considère les canaux neuraux comme des organes de soutien.

On sait que KowaLesky les considère comme une neurocorde. VEJDovsKkY (81) les compare à la corde dorsale des vertébrés.

Chez l’'Ampharete, aussi bien que chez l'Amphicteis, nous avons pu voir très nettement les canaux neuraux se continuer avec les cellules géantes de la chaîne ventrale (PI. xx1v, fig. 149), aussi ne nous expliquons-nous pas bien comment CUNNINGHAM peut trouver : « étonnant, sinon absurde, de maintenir que les canaux neuraux, tels que ceux de Sabella et de Nerine sont des fibres colossales et que leur contenu forme une mœælle qui commence comme un prolongement d’une cellule ganglionnaire » (88, p. 267-276). Cet auteur considère les canaux neuraux comme des organes de soutien qui empêchent la chaîne nerveuse de se couder à angle trop aigu dans les mouvements du Ver, et il considère que ces canaux sont d’autant plus développés que la chaine nerveuse est en relation plus étroite avec l’épiderme.

Or, chez l’'Ampharete au contraire, les canaux neuraux ne sont développés que dans la région thoracique la chaîne nerveuse est

Y

Ÿ

C2

356 PIERRE FAUVEL.

par endroits complètement séparée des téguments et elle est protégée par d’épais boucliers.

Dans la région abdominale, au contraire, la chaîne nerveuse en contact direct avec la cuticule est fort peu protégée, les canaux neuraux font défaut. Et cependant cette région mince et effilée est plus exposée aux brusques mouvements et aux plis accentués.

Dans cette même région abdominale la chaîne nerveuse se réduit graduellement. Les cordons s’aplatissent et se confondent presque ensemble, les cellules ganglionnaires disparaissent progres- sivement, l’épiderme se réduit jusqu'à disparaître et la chaîne nerveuse finit par n'être plus qu'une mince bande, en contact direct avec la cuticule, difficile à distinguer au-dessous de la couche des muscles circulaires.

Ses bords se confondent insensiblement avec lépiderme, égale- ment très réduit dans cette région.

Nous considérons, comme LENHOsSsEK (92), les cellules ganglion- naires de la chaîne ventrale comme des cellules motrices qui se mettent en rapport par leurs prolongements avec les prolongements venant des cellules nerveuses épithéliales qui sont des cellules sensitives.

La relation de la chaîne nerveuse des Ampharéliens avec la cuticule, les place dans la catégorie de E. Wawrzick (93) à côté d'Hermione, d' Aphrodite et des Oligochètes.

XII APPAREIL DIGESTIF. S I

Historique.

Antérieurement au mémoire de WIREN (85), l'appareil digestif des Annélides a fait l’objet de peu de travaux spéciaux, surtout au point de vue histologique.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 8 5]

WIREN ayant fait l'historique de cette question, nous renvoyons à son travail pour les auteurs antérieurs, en faisant seulement remarquer que la plupart de ceux-ci, DE QUATREFAGES, WILLIAMS, EHLERS, GRABER (73) avaient bien distingué les trois couches fonda- mentales de l'intestin des Annélides, mais ils n'avaient pas su recon- naître la structure cellulaire de l’épithélium interne.

C'est CLAPARÈDE (73) qui a nettement démontré que cet épithélium est composé de cellules cylindriques à parois propres et non pas d'une couche granuleuse amorphe avec noyaux semés dans sa masse.

Les travaux de Mau (81), KALLENBACH (83), JAcoBr (83), FiscHER (84) traitent du tube digestif, surtout au point de vue morphologique, et donnent fort peu de détails histologiques.

WIREN (85) a démontré l'existence chez les Terebellides, les Ampharéètiens et les Araphicténiens d'un vaste sinus sanguin entourant le tube digestif.

Dans un second mémoire (87), le même auteur a étendu ces con- clusions aux Teélethusiens, Scalibregmidés, Ophéliens et Chloræ- miens.

Cette disposition était déjà connue chez les Serpuliens. Elle est probablement générale chez les Sédentaires.

WIREN divise le canal digestif en 4 parties :

1” Le Pharynx ; 2’ l'Œsophage, dépourvu de sinus périphérique entouré de deux couches musculaires, une circulaire et une longi- tudinale, pourvu d’un épithélium incolore riche en cellules à mucus; l'Estomac, coloré, riche en cellules glandulaires et qui, chez les Térebellidés, se subdivise en : estomac glandulaire, à deux couches musculaires et en estomac chitineux à fibres musculaires longitu- dinales seulement, à couche de tissu conjonctif alvéolaire très déve- loppé, dépourvu de cellules glandulaires et à cuticule épaisse, non ciliée ; 4 l'intestin proprement dit, à épithélium incolore, presque complètement dépourvu de cellules glandulaires et analogue pour le reste à l'estomac glandulaire.

Chez les Ampharétiens l'estomac ne se divise pas en estomac glandulaire et estomac chitineux.

DRASCHE (85:) a également constaté la présence d’un sinus péri- intestinal chez l'Orvenra : chez le Spinther (85?) il a décrit un intestin

358 PIERRE FAUVEL.

secondaire et fait remarquer le faible développement de la couche des muscles longitudinaux qui manque même par endroits.

Le travail de SCHRÔDER (86) à trait surtout à la morphologie du tube digestif de la Nereis diversicolor.

HASWELL (86) ne s’est occupé que du ventricule du Sylls, dontil a démontré la structure musculaire et non glandulaire. Plus tard (92) il a retrouvé le sinus péristomacal chez le S/ylarioides.

EisiG (87) a longuement étudié le tube digestif des Capitellides dans sa belle monographie et il décrit leur singulier « Nebendarm ».

JouRDAN (8'71, 87!) s'est occupé surtout de l’histologie du tube digestif chez le Siphonostoma diplochaitos et chez l'Eunice.

Il reconnaît dans l'intestin des Annélides trois couches fonda- mentales : le péritoine; une couche fibromusculaire ; l'épithé- lium interne, etille divise en trois régions: une antérieure ou œsophage ; 2?’ une région moyenne jouant le rôle du foie et de l'estomac ; une région terminale ou intestin proprement dit, à cellules de protection.

Dans l’œsophage du Siphonostoma on trouve la double couche musculaire en treillis, es éléments glandulaires font défaut dans l'épithélium, à n’y a pas de sinus.

La couche musculaire de l’estomac se compose de rares fibres musculaires très fines dirigées dans tous les sens. Le sinus est interrompu au milieu de la face ventrale l’épithélium est en contactavec une mince couche conjonctive à rares fibres musculaires longitudinales et circulaires.

De même que chez l’ÆFunice, l'estomac n’est pas cilié, sauf sur une gouttière vibratile ; les cils reparaissent dans l'intestin postérieur.

Nous retrouverons presque tous ces caractères chez l'Ampharete.

L'existence d'une semblable gouttière vibratile a déjà été constatée par RiTscx (82), chez les Sternaspis.

3RUNOTTE (88) n’a pas retrouvé dans l'intestin du Branchiomma les cellules glandulaires et caliciformes (Slemkürtlar et Bägarcell) décrites par WIREN.

Nous verrons que ces prétendues cellules glandulaires sont proba- blement des Grégarines.

Il a démontré que les prétendues glandes salivaires, décrites par CLAPARÈDE chez le Branchiomma, n'existent pas.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 399

De la description du tube digestif du Chétoptère, par Joyeux- LAFFUIE (90), nous ne retiendrons que les deux points suivants : dans la région moyenne les fibres musculaires sont disposées dans tous les sens et ne forment plus deux couches distinctes ; les cellules biliaires diminuent rapidement dansla région anale.

Depuis cette époque, nous ne connaisons guère que SOULIER (91) et MALAQUIN (93) qui aient étudié avec quelques détails l’histologie du tube digestif.

Les recherches de SouLieR ont porté surtout sur les Serpuliens, chez lesquels il a constaté que l'épithélium de l'œsophage renferme de nombreuses glandes unicellulaires sécrétant du mucus, ces cellules manquent dans l'estomac ct l'intestin et on ne les retrouve que dans la partie terminale du tube digestif, au voisinage de l'anus.

Dans toute la longueur du tube digestif l’épithélium est cilié. La région thoracique a surtout un rôle de sécrétion, la partie abdomi- nale un rôle d'absorption.

Cette dernière proposition à élé de nouveau soutenue par MALAQUIN (93), qui en a donné une démonstration expérimentale pour les Syllidiens.

L'intestin des Syllidiens se compose seulement de deux couches : l'épithélium interne et l'endothélium de la cavité générale qui le recouvre. La couche musculaire fait complètement défaut.

SCHIMKEWITSCH (94) a reconnu que l’épithélium de l'intestin moyen élabore un pigment coloré dans les granulalion® vacuolaires, et le rejette dans l'intestin.

En ce qui concerne spécialement les Ampharetiens la littérature est beaucoup plus pauvre.

MarioN (78) dit seulement de Sabellides oclocirrata que tout le tube digestif semble engaîné dans un sinus vasculaire (p. 24).

LANGERHANS (80, PI. vi, fig. 19°) nous apprend que l’Ampharete minuta n.spec. possède un pharynx exsertile incolore auquel fait suite une région hépatique rougeâtre qui s'étend jusqu’à l'extrémité du thorax. En cet endroit, il existe une anse à laquelle fait suite l'intestin. Le tube digestif, depuis l'extrémité du pharynx, est entouré d’un sinus sanguin d’où part un vaisseau dorsal qui envoie des rami-

360 PIERRE FAUVEL.

fication aux branchies. Un cœcum (corps cardiaque ?) se trouve au milieu de ce vaisseau.

HasweLL (83) décrit chez l'Amplucteris foliata un pharynx exsertile suivi d’un œæsophage à parois minces qui précède un court gésier à parois épaisses. Vient ensuite le gros intestin à cellules cylindriques allongées, à noyau bien marqué. Dans la région postérieure l'intestin devient très étroit et son revêtement épithélial très mince. Le tube digestif semble entouré d’un plexus vasculaire dans toute sa longueur.

La fig. 14 de sa PI. xur, représente une section d'A. foliata. Au- dessous de l’œsophage on y voit la coupe transversale d’un cœcum interne comme il en existe chez l'Amphicteis Gunneri, mais HAswELL n’en fait pas mention dans le texte.

Mc InTosu (86) à décrit plusieurs espèces nouvelles d'Armpharé- liens et, pour chacune, il indique le contenu intestinal composé en général, de diatomées, foraminifères, globigérines, etc., mais malheureusement il ne donne aucun détail sur le contenant.

Nous avons déjà cité le travail de WIREN (85), le plus considérable que nous ayons sur ce sujet. Il a étudié l’Amphicteis Gunneri, la Melinna cristala et il donne quelques brèves indications relatives à l'Ampharete gracilis. Nous aurons souvent à y revenir.

MEYER (87) a donné d'excellentes figures de l'organisation générale de la Melinna palmata ; malheureusement le texte ne traite pas du tube digestif.

C'est tout ce que nous connaissons sur le tube digestif des Ampha- réliens.

EnLers (87) a examiné si les tentacules insérés sur le lobe cépha- lique lui appartiennent, quoique rétractiles dans la bouche, etil conclut affirmativement tout en disant avec raison, que l’anatomie seule pourra établir si le feuillet plissé longitudinalement, en lèvre, qui se développe en arrière de ceux-ci dépend du lobe céphalique ou de la paroi de l’œsophage. Néanmoins il le rapporte au lobe cépha- lique et le compare à la région correspondante des Térébellides.

Nous avons vu que l'étude du système nerveux confirme absolu- ment cette manière de voir et cette assimilalion.

Le tube digestif de l'Ampharete se compose des quatre parties principales qui se retrouvent chez les Annélides :

41° Pharynx; œsophage; 3 estomac ou inteslin moyen: intestin proprement dit ou intestin terminal.

PTE Ve

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 361

SIL Pharynx.

A. Morphologie. —Le pharynx très court, n’est à proprement parler que la cavité buccale de l'animal; sa partie antérieure dorsale est seule exsertile.

Lorsque la bouche est fermée nous avons déjà vu que son ouver- ture limitée en bas par le rebord du segment buccal ou lèvre infé- rieure et en haut par les replis du lobe céphalique, offre un aspect trifolié.

Lorsque la bouche est ouverte, les tentacules, ordinairement rétractées dans l’œsophage, sont dévaginés, le lobe céphalique rejeté en arrière. Au-dessous des tentacules se développe une sorte de lèvre plissée longitudinalement et étalée en collerette demi-circu- laire.

Cette lèvre rappelle la grande lèvre qui existe chez certains T'ére- bellides, qui est bien développée chez la Lanice conchilega et en arrière de laquelle sont insérés les tentacules.

Cette lèvre de l’Ampharele est tout à fait l’homologue de celle des Téréebellides et n’est, comme chez ceux-ci, qu’une dépendance du lobe céphalique auquel appartiennent également les tentacules, bien que rétractiles dans l’œsophage.

Ces tentacules insérés entre le palpode et cette lèvre qui se trouve bien en avant d'eux, lorsque la bouche est ouverte, sont au nombre de 60 à 80 (PI. xv, fig. 6 et fig. 57).

En arrière, c'est-à-dire en réalité à sa face ventrale, cette lèvre est plissée longitudinalement. Ces replis se continuent insensi- blement avec ceux du pharynx.

Lorsque la bouche se ferme la lèvre supérieure bascule sur elle- mème, au-dessous du cerveau et se rabat contre la paroi supérieure du pharynx, les tentacules insérés à la base de sa face dorsale suivent le mème mouvement et viennent s’allonger dans le pharynx et dans l'æœsophage (PI. xix, fig. 58).

À la face ventrale la bouche est limitée par une lèvre transversale, légèrement ondulée et pourvue intérieurement de nombreux bour-

362 PIERRE FAUVEI.

relets longitudinaux formés par des plissements qui s’atténuent beaucoup lorsque la bouche est ouverte (PL. xv, fig. 7).

En arrière de celte lèvre, la cavité buccale présente une dépression ventrale, renfermant deux sortes de lèvres internes bilobées, formant quatre papilles charnues (PI. xix, fig. 57-58, PI. xx, 74, Là).

Ces lèvres sont formées d'une lame assez épaisse amincie en avant, et découpée en deux lobes arrondis. Elles sont situées l’une derrière l’autre et la lèvre postérieure recouvre en partie celle qui la précède.

Elles basculent légèrement en avant dans les mouvements d’extroversion du pharynx, si on peut appeler ainsi un mouvement qui n’intéresse guère que la lèvre supérieure et l'insertion des tenta- cules.

B. Histologie. Le revêtement épithélial de la lèvre infé- rieure est en continuité avec l’épithélium des parois du corps. Il offre sensiblement la même structure. Cependant les cellules sont plus petites, plus serrées, à contours moins distinct. Les grosses cellules à mucus y font défaut. Cet épithélium n’est pas cilié quoique ses cellules se rapprochent beaucoup par leur forme, des cellules vibra- tiles. Ce sont les épais bourrelets de cet épithélium plissé qui forment les replis de la lèvre.

Au-dessous on retrouve les couches musculaires longitudinales et circulaires en continuité avec celles des téguments (PI. xx, fig. 105).

La structure histologique des lèvres internes, ou papilles, est toute autre (PI. xx, fig. 80).

Au-dessous d’une mince couche épithéliale, non ciliée, les noyaux sont très abondants et les limites des cellules indistinctes, apparaît une masse puissante de tissu musculaire radié dont les fibres, assez làches au centre de l'organe, sont entremêlées de tissu con- jonctif dont les nombreux noyaux sont faciles à distinguer.

A la partie inférieure de l'organe, au-dessous des muscles radiés, se développe une couche musculaire longitudinale qui se rattache à celle des téguments par l'intermédiaire de celle de la lèvre infé- ricure.

L'épithélium des lèvres internes passe insensiblement à l'épi- thélium vibratile de l'œsophage avec lequel il se continue.

La lèvre supérieure est revêtue d’un épithélium semblable à celui

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS, 363

de la lèvre inférieure. En avant il se continue insensiblement avec celui du lobe céphalique, en arrière il passe sans démarcation bien nette à l’épithélium cilié de l’œsophage.

Lorsque le pharynx est dévaginé, la cavité du lobe céphalique et celle de la lèvre supérieure, qui n’en est qu’une dépendance, se continuent en ligne droite avec celle de la chambre thoracique antérieure, ainsi que la cavité centrale des tentacules.

Les muscles longitudinaux du lobe céphalique et de la lévre supé- rieure sont en continuité avec la musculatue longitudinale du corps.

La cavité de cette lèvre est tapissée par l’endothélium cœlomatique. A son extrémité on y trouve de nombreuses brides conjonctives entre lesquelles les vaisseaux de l'œsophage viennent former des anses.

C’est à cette abondance de vaisseaux qu’elle doit sa belle colo- ration verte quand elle est étalée (PI. xv, fig. 6).

Des muscles obliques insérés au-dessous et en arrière de l’encé- phale servent aux mouvements d’introversion et d’extroversion de cette lèvre et des tentacules.

S III

Tentacules.

Les tentacules sont insérées dans un repli des téguments, entre le lobe céphalique et la base de la lèvre supérieure.

Ce sont des filaments blancs, transparents, qui s’agitent en tous sens et sont susceptibles de s’allonger considérablement, jusqu’à égaler six ou sept fois la plus grande largeur du corps.

Ils ont une section demi-cylindrique, sauf à la base ils sont cylindriques (PI. xx, fig. 78).

Ils portent de chaque côté de leur face plane, ou ventrale une rangée de pinnules, tubercules allongés en massue et fortement ciliés ainsi que la gouitière qu'ils déterminent entre leurs deux rangées (fig. 76).

La face opposée aux pinnules est arrondie, fortement annelée, surtout lorsque les tentacules sont contractés, et porte sur la ligne

364 PIERRE FAUVEL.

longitudinale médiane une seule rangée de gros cils tactiles très espacés (PI. xx, fig. 77).

Il en est de même à l'extrémité du tentacule terminé en pointe mousse, trilobée, à la base de laquelle sont disposés de petits mamelons qui vont en grandissant à mesure que l’on s'éloigne de la pointe et qui deviennent des pinnules à partir du au rang.

Dans la région moyenne du tentacule les pinnules simulent, de chaque côté, deux rangées parallèles (fig. 76). Cela tient à ce que chaque pinnule n’est pas insérée immédiatement derrière celle qui la précède mais alterne un peu avec elle.

La base cylindrique du tentacule est dépourvue de tubercules. Ceux-ci naissent d’abord sur la ligne médiane ventrale, par un tubercule impair, ensuite il en existe deux rangées qui alternent et s'écartent progressivement. Au ou tubercule les deux rangées parallèles sont constituées et la gouttière formée.

Lorsque les tentacules sont contractés et rentrés dans l'œsophage leurs pinnules, serrées les unes contre les autres, deviennent peu distinctes. Peut-être faut-il attribuer à ce fait la description de ten- tacules lisses chez certains Ampharete.

Les tentacules sont creux et leur cavité est en rapport direct avec la chambre thoracique antérieure.

En plaçant sous le microscope un Ampharele vivant, les tenta- dévaginés, il est facile de voir circuler d’un bout à l'autre de ces organes de nombreux amibocytes contenus dans le liquide de la cavité générale.

Marion (78, p. 24), a fait une observation semblable sur les tentacules de Sabellides oclocirrata.

Sur les coupes on retrouve également ces corpuscules en grand nombre dans la cavité centrale de ces organes.

Cette cavité tapissée par l’endothélium est traversée par des tractus conjonctifs.

Au-dessous de l’endothélium, en allant de dedans en dehors, on trouve trois couches musculaires très nettes : une couche de fibres longitudinales et deux de fibres obliques. Chacune de ces couches est formée de minces fibres arrondies de 1 y à 1,5 « de diamètre el assez écartées les unes des autres, surtout dans les couches obliques

elles déterminent un treillis très régulier à mailles assez larges (fig. 76).

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 369

Ces couches obliques permettent l'extension des tentacules et leurs mouvements en tous sens. L'ensemble rappelle ces articula- tions formées de séries d’X dont les branches sont articulées ensemble et qui sont employées pour former des supports d’appliques extensibles.

Quand le tentacule est bien allongé, les deux couches obliques tendent à devenir parallèles, leur angle de croisement augmente au contraire quand le tentacule se contracte.

La musculature est recouverte d'un épithélium à cellules fusi- formes très petites (3 X 5 y) contenant un noyau presque aussi gros qu'elles (2,5 w x 5 y) pourvu de nombreuses granulations de chromatine absorbant fortement l'hématoxyline et dont une est un peu plus grosse que les autres. Les parois cellulaires, très délicates, sont très difficiles à voir et ne se distinguent guère que sur des coupes très minces de tentacules allongés. Par endroits les noyaux entourés seulement d’une mince couche protoplasmique granuleuse sont massés en grand nombre, présentant l'aspect si fréquent dans les tissus embryonnaires d'Annélides.

Cet épithélium contient des cellules vibratiles dans la gouttière ventrale, mais pas de cellules à mucus. Il n’a pas la structure alvéolaire. |

Les pinnules portent à leur extrémité de gros mouchets de cils vibratiles, plus forts que ceux de la gouttière.

Au milieu des nombreux noyaux dont est semé leur tissu, on remarque dans chacune deux grosses masses réfringentes qui, traitées par le bleu de Méthylène ou la safranine, se colorent vivement.

Chacune de ces masses est une grosse cellule à mucus formant une glande unicellulaire dont le canal excréteur débouche à l’extré- mité de la pinnule (PI. xx, fig. 77).

Ces grosses cellules àmucus, analogues à celles de l’épithélium et des boucliers, ne se rencontrent pas dans d’autres parties des tenta- cuies.

- Leur fonction est de déverser un abondant mucus dans la gouttière vibratile. Ce mucus englobe toutes les parties alimentaires qui viennent en contact avec les tentacules, sans cesse en mouvement.

Les cils vibraliles de la gouttière font circuler ces petiles masses tout le long du tentacule, puis elles sont agglomérées ensemble dans

366 PIERRE FAUVEL.

la cavité buccale et forment le bol alimentaire qui est ingéré par un mouvement de rétroversion de la portion supérieure du pharynx quand il a acquis un volume suffisant,

8 IV.

Œsophage.

L'œsophage fait suite au pharynx, avec lequel il se continue du reste insensiblement, il s’étend environ jusqu’au segment séligère. En cet endroit il se raccorde avec l’estomac entre les deux lobes antérieurs de celui-ci, au-dessous du cœur.

L'œsophage est presque incolore et transparent. Les parois n’ont pas une très grande épaisseur. Elles sont sillonnées de nombreux vaisseaux longitudinaux appliqués à leur surface, mais elles ne renferment pas de sinus sanguin.

L'œsophage s'étend en ligne droite : il a la forme d’un conduit légèrement évasé, en avant, lorsque le pharynx est extroversé. Quand les tentacules sont invaginés à l’intérieur il a plutôt une forme ovoide.

Il communique avec l'estomac par une ouverture circulaire, resserrée, bordée d’un épais bourrelet épithélial, formant une sorte de cardia à travers lequel passe parfois l'extrémité des tentacules venant ainsi faire saillie Jusque dans l'estomac.

Les parois de l’œsophage (fig. 81) sont constituées par un haut épithélium vibratile, à cellules cylindriques, très allongées, à contenu finement granuleux.

Dans la région antérieure de l’œsophage ces cellules ont un noyau arrondi de 5 w de diamètre à granulations à peu près égales. Ce noyau est situé environ à mi-hauteur de la cellule.

Dans la partie postérieure les cellules épithéliales deviennent de plus en plus hautes et leur noyau, localisé dans la moitié inférieure, est très allongé.

Au-dessus de cette couche de cellules, on en distingue une seconde les noyaux plus petits, plus arrondis, sont très nombreux mais les parois des cellules sont beaucoup moins nettes. C’est la couche sous-épitheliale se forment les cellules de remplacement.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS, 367

Entre les cellules que nous venons de décrire on distingue parfois, de place en place, des éléments très allongés, à base renflée dont le contenu granuleux est fortement coloré par l’hématoxyline, le bleu de Méthylène et la safranine. Le noyau assez gros se détache en clair, il est pourvu d’un nucléole foncé.

Ces éléments, que l’on pourrait être tenté de prendre pour des cellules glandulaires, sont des Grégarines.

L'œsophage de l’'Ampharete ne contient pas de cellules à mucus, contrairement à ce qui a lieu pour l’œsophage des Sédentaires, particulièrement de celles qui avalent du sable, comme l’Arenicola.

Ceci s'explique aisément.

Les cellules à mucus ont pour but de lubrifier les parois de l’œso- phage et d'enrober les particules rugueuses du sable et de la vase. Or, chez l'Ampharete la nourriture se compose surtout d’animalcules protoplasmiques, elle arrive dans l'æsophage agglomérée en boules par l’épais mucus des tentacuies qui rend inutile le développement de cellules glandulaires dans l'œsophage. Les cils vibratiles si développés dans cette région font progresser les bols alimentaires jusqu'à l'estomac.

Au-dessus de la couche épithéliale, l'œsophage est revêtu d’une couche de muscles circulaires et d’une couche de muscles longitu- dinaux.

Ces deux couches, bien développées, sont recouvertes par l’endo- thélium.

La couche des fibres circulaires est au contact de l’épiderme, la couche longitudinale se trouvant ainsi à l'extérieur.

Estomac.

L’estomac est renfermé dans la cavité thoracique dont il occupe la plus grande partie (PI. xvi, fig. 11, PI. xx, fig. 75).

Sa forme est celle d'un long sac, légèrement piriforme, présentant quelques replis transversaux ct antérieurement deux diverticules, ou lobes cordiformes.

Entre les derniers segments thoraciques et le premier segment

368 PIERRE FAUVEL.

abdominal, il se rétrécit brusquement, et donne une anse remontante ou anse duodénale, qui s'étend dans les deux premiers segments abdominaux et à laquelle fait suite l'intestin.

La région antérieure de l'estomac forme deux lobes ou diverticules antérieurs cordiformes, remontant de chaque côté de l’æsophage et qui se distinguent par leur couleur rougeâtre ou orangée du reste de l'organe qui est jaune verdâtre.

À la face inférieure de l'estomac on remarque une ligne longitu- dinale médiane, orangée (PI. xvi, fig. 19, Gs).

La couleur verdâtre de l'estomac est due au sang vert qui remplit le sinus péri-intestinal.

Ce sinus ne s’élend pas sur les lobes antérieurs à la surface desquels courent seulement quelques fins vaisseaux à nombreuses arborisations (fig. 15, Za-V).

Il n’entoure pas complètement l’estomac et s'arrête à la face ventrale de chaque côté de ligne médiane dont la coloration orangée est celle de l'estomac non modifiée par la couleur verte du sang.

Du sinus stomacal partent les vaisseaux transversaux et le cœur (fig. 11-15-19). Nous en donnerons la description détaillée en traitant de la circulation.

Les parois de l'estomac se composent essentiellement de deux couches : un épithélium sécréteur ; une couche de fibres muscu- laires circulaires. Cette dernière est recouverte par lendothélium. Le sinus sanguin sépare ces deux couches.

La structure histologique des lobes antérieurs diffère légèrement de celle de l'estomac.

L’épithélium, fortement plissé par endroits, est composé de hautes cellules columnaires à parois très distinctes, à noyau .arrondi pourvu d’un assez gros nucléole foncé (PI. xx, fig. 82).

Ce noyau est situé dans la moitié ou le tiers inférieur de la cellule. Le contenu de celle-ci absorbe peu les colorants, l’éosine lui communique seulement une légère teinte rose. Ce contenu est parfois granuleux à la base de la cellule, vacuolé, spumeux, à la partie supérieure.

Cet épithélium n’est pas cilié.

Il est surlout sécréteur el on remarque à sa surface de nombreuses boules claires, offrant à peu près le diamètre des cellules qui leur ont donné naissance.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 369

Ces boules jaunes, réfringentes, n’absorbent pas les colorants. Elles sont vraisemblablement de nature huileuse ou graisseuse, car elles noircissent fortement par l’action de l'acide osmique.

Dans la partie antérieure de l'estomac d’un animal à jeun ces boules se rencontrent en grand nombre, libres ou agglomérées en masse. Les cellules intestinales sont pleines de granulations jaunâtres analogues.

WIREN (87) a déjà signalé des productions semblables dans l'estomac de plusieurs Sédentaires, telles que Eumenia, Ammotry- pane, etc.

MALAQUIN (93) à constaté aussi la production de ces boules de sécrétion chez les Syllidiens, mais chez ces Annélides les cellules qui leur donnent naissance sont généralement ciliées, tandis que chez l'Ampharetle les cellules stomacales ne sont pas ciliées, au moins d’une façon appréciable, dans les lobes antérieurs.

Les Grégarines y sont rares.

On rencontre çà et quelques noyaux appartenant à des cellules de remplacement, mais ces cellules, situées entre les bases des cellules cylindriques, ne constituent pas une couche sous-épithéliale.

Il existe une mince basale et deux couches musculaires : l’une, la plus développée, formée de fibres circulaires, l’autre, celle des fibres longitudinales, beaucoup moins développée ne forme qu'un réseau oblique par rapport à la couche circulaire très lâche.

L'épaisseur totale des deux couches est beaucoup moindre que dans l’æsophage.

Dans l'estomac proprement dit la couche des fibres longitudinales disparaît et il ne subsiste que la couche des fibres circulaires en contact avec le péritoine et formant la paroi externe du sinus.

_ Cetle membrane musculo-péritonéale est reliée de place en place à la basale de la couche épithéliale par de rares et minces tractus conjonctfs ( PI. xx, fig. 83).

Les cellules de l’épithélium sont moins hautes que dans les lobes antérieurs et leur hauteur diminue en allant vers l'intestin à mesure que leur contenu se colore davantage.

Les Grégarines, semblables à celles que nous avons déjà signalées, y sont extrêmement abondantes chez certains individus (fig. 89).

I n’y a toujours qu’une seule couche de cellules épithéliales. On trouve seulement de place en place de rares cellules de rempla-

370 PIERRE FAUVEL.

cement (fig. 87) et, à la base des replis, des amas de noyaux (fig. 85) tels que JourpaN en a signalé chez Le Siphonostoma.

La face interne de l'épithélium est revêtue d’une mince cuticule qui s’épaissit à mesure que l’on se rapproche de l'intestin.

La basale, formée par l’enchevêtrement des prolongements basi- laires des cellules épithéliales, est un mince réseau plutôt qu’une véritable membrane.

Les cellules épithéliales se dissocient très facilement. En coupe tangentielle l’épithélium intestinal a l'aspect d’une mosaïque les noyaux sont bien visibles. Des grégarines y font par endroits des taches foncées (PI. x1x, fig. 69).

On rencontre parfois à la base des cellules épithéliales de grosses masses granuleuses, ou fibreuses, arrondies ou ovoïdes fortement colorées en rouge par l’éosine. Elles sont entourées d’une zone pellucide et ont bien l'aspect d’un élément enkysté dans la cellule. Elles sont souvent pourvues d’un noyau arrondi, nucléolé, situé excentriquement (PI. xx, fig. 86). WIREN (85) en a décrit de semblables chez l'Amphicteis sous le nom de « Slemkürtlar » et de « Bägarcells », cellules muqueuses, cellules caliciformes. Ces prétendues cellules glandulaires ne sont autres que des Grégarines.

On les rencontre parfois avec une abondance extrême chez certains individus tandis qu’elles manquent presque totalement chez d’autres. Peut-être sont-elles un stade jeune de celles que nous avons déjà décrites, car en général elles abondent quand les autres font défaut et vice versa. On rencontre rarement les deux états à la fois en quantité comparable.

Malgré leur apparence de Monocystides, ce sont probablement des Dicystidées étant donné leur habitat dans l’épithélium du tube digestif (1).

Nous en avons trouvé souvent de libres dans l’intérieur d'Ampha-

rele vivants, en compagnie de pseudo-navicelles d’autres parasites. Dans la cavité générale on rencontre aussi des kystes de Gréga- rines assez volumineux, surtout chez les animaux convervés long- temps en aquarium. Tout le long de la face ventrale de l’estomac, règne à l'intérieur

(1) L. Lecer, Recherches sur les Grégarines, Tablettes zoologiques vol. III, 1892. Poitiers. GRAVIER (%6), STEEN (83).

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉRIENS. 371

une gouttière assez profonde, formée par un repli de l'épithélium et correspondant à la gouttière orangée visible extérieurement (fig. 85).

Les deux côtés de la gouttière ne sont pas symétriques. D'un côté un gros pli se développe surplombant le fond et l’autre côté de la gouttière est alténué en pente douce.

Au fond de la gouttière les cellules épithéliales diminuent de hauteur au point de ne plus présenter que l'épaisseur du noyau.

A l'extérieur, les parois du sinus viennent mourir de chaque côté, et quelques minces et très rares fibres longitudinales existent seules sur cette ligne, entre la basale de l’épithélium et l’endothélium.

La gouttière intestinale constitue donc une ligne faible les parois de l’estomac n’ont plus qu'une épaisseur très réduite.

Chez le Terebellides Stroemi, il existe aussi une gouttière ciliée (WIREN, 85) et extérieurement le sinus s'arrête aussi de chaque côté de la ligne médio-ventrale qui lui correspond. Il en est de même chez la Terebella debilis.

Seulement chez ces deux espèces, un épais cordon de fibres muscu- laires longitudinales règne entre les deux bords du sinus déterminant au contraire une ligne saillante de renforcement.

La gouttière de l'Ampharete se rapprocherait plutôt de celle du Siphonostoma d'après Jourpan (87°).

Le coté en pente douce de la gouttière stomacale a une structure différente du reste de l’estomac. Il est formé de cellules ciliées à gros cils courts et raides comme les poils d’une brosse, dont on suit les prolongements dans la partie supérieure de la cellule à une certaine distance, ils forment une zone assez fortement colorée en rouge par l'éosine.

RacoviTzAa (96), a signalé dans les cellules vibratiles de l'organe nucal de l’£wphrosyne une disposition semblable ; seulement ici si la cuticule est également mince et la base des cils bien visible, ceux-ci sont gros, courts et peu nombreux au lieu d’être longs, minces et abondants.

L'autre côté de la gouttière n'est pas cilié d’une manière appré- ciable.

Ces caractères de la gouttière de l’Ampharete sont très constants.

L'estomac est relié aux parois du corps par des brides musculaires revêtues d’endothélium sur chaque face. Les fibres musculaires se

372 PIERRE FAUVEL.

continuent d’une part avec la couche circulaire des téguments, d'autre part avec celles de l'estomac.

Il n'existe pas un muscle parielo-inlestinalis supérieur en forme de lame continue, mais seulement une série de brides espacées.

À la face ventrale le parzelo-intestinalis inferior manque complè- tement dans toute la région stomacale.

S VI Intestin postérieur.

L'’anse duodénale située à la limite de la région thoracique et de la région abdominale termine l'estomac, qui se retrécit en une sorte de pylore, et elle établit le passage à l'intestin postérieur.

L’intestin s'étend en ligne droite de ce point jusqu'à l'anus. Son diamètre, assez uniforme, est beaucoup plus faible que celui de l'estomac.

Il est, comme celui-ci, contenu dans un sinus sanguin, mais ce sinus n’est pas interrompu sur la ligne médiane ventrale et il entoure complètement le tube digestif.

L’intestin est relié aux parois du corps par des brides musculaires dorsales, semblables à celles de l’estomac, mais il existe en outre à sa face ventrale des brides semblables qui vont s’insérer sur la muscu- lature circulaire.

Nous avons vu que ces brides manquent dans la région stomacale.

A chaque segment l'intestin est de plus maintenu par les dissé- piments transversaux Constilués par une lame musculaire revêlue d’endothélium sur chaque face

Ces dissépiments sont des diaphragmes incomplets laissant circuler librement dans toute la longueur de l'abdomen le liquide périviscéral et les produits sexuels.

À chaque dissépiment correspond un vaisseau latéral allant du sinus à la pinnule uncinigère.

Ces dissépiments déterminent dans l'intestin une série de dla tations et de rétrécissements donnant à cette partie du tube digestif un aspect moniliforme (fig. 5-11-75).

L’épithélium intestinal est plissé fortement et forme de nombreux bourrelets et sillons longitudinaux de plus en plus saillants en allant

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. J13

vers la partie postérieure et qui ne laissent plus entre eux, dans la région anale, qu’une mince cavité étoilée (PI. xxn, fig. 103-107-108- 109).

A mesure que l'on s'éloigne de l'estomac les cellules épithéliales diminuent de hauteur. Elles deviennent cubiques et leur noyau s'applique contre leur base (PI. xx, fig. 86-87).

Leur contenu devient de plus en plus coloré et on y remarque de nombreuses granulations jaunes très réfringentes, semblables à celles qui se retrouvent en abondance dans la cavité intestinale. Ces cellules absorbent davantage les colorants ainsi que leur noyau Leur cuticule s’épaissit et peu à peu elles redeviennent nettemen ciliées tandis que leurs parois paraissent moins neltes (fig. 84).

On ne trouve pas de Grégarines dans la portion postérieure de l'intestin.

A l'anus l’épithélium interne du tube digestif passe graduellement à l'épiderme dont il n’est du reste qu'une invagination.

Les cirres anaux ne sont que le prolongement des bourrelets épithéliaux et de l’épiderme.

L’anus est entouré de cils vibratiles.

Nous avons vu que l'estomac, sauf dans les lobes antérieurs, et le long de la gouttière stomacale, ne possède qu'une couche de fibres musculaires circulaires.

Dans lintestin on voit reparaitre progressivement les fibres longitudinales mais elles restent néanmoins un peu moins développées que les circulaires.

S VII. Physiologie.

L'Ampharete se nourrit de Diatomées, de Foraminifères, de Pro- tozoaires, d'Algues microscopiques ct de spores d'algues.

Pour capturer sa proie l'animal sort de son tube sa région anté- rieure. Les branchies dirigées en avant, il dévagine ses nombreux tentacules et ceux-ci, s'étendant considérablement, s’agitent en tous sens.

On les voit bientôt se charger de petites boules blanches qui roulent le long de la gouttière vibratile. Ces petites boules sont

374 | PIERRE FAUVEL.

formées des animalcules rencontrés par les tentacules et englnés par le mücus que sécrètent les glandes unicellulaires des pinnules. À chaque instant on voit les tentacules se recourber brusquement vers la bouche et il ne larde pas à se former à son entrée une masse formée par l'accumulation des petites boules déposées par les tentacules. Cette masse est constamment malaxée entre les lèvres.

Quand elle forme un bol alimentaire assez considérable l’animal l'engloutit par un brusque mouvement de rétroversion du pharynx, puis il sort de nouveau ses tentacules el recommence son manège.

Ce bol alimentaire composé en somme, pour la plus grande part , de matières protoplasmiques et enrobé par une quantité assez consi- dérable de mucus, glisse dans l’œsophage sous l’action combinée des puissants cils vibratiles et des contractions musculaires des parois jusqu'à l'estomac.

Ceci explique l'épaisseur relativement faible des parois œsopha- siennes et l’absence de cellules à mucus.

Chez les Sédentaires qui absorbent du sable ou de la vase en quantité on conçoit au contraire la nécessité d’un œæsophage à parois épaisses, à musculature puissante et à cellules à mucus très abon- dantes comme chez les Arenicola par exemple.

Les aliments se rencontrent rarement dans les diverticules anté- rieurs de l'estomac qui jouent surtout un rôle sécréteur, rôle qu'ils partagent d’ailleurs avec le reste de l'estomac.

Dans l'estomac les aliments se trouvent en contact avec la masse abondante de globules sécrélés sur toute sa surface par ses cellules et qui jouent probablement le plus grand rôle dans la digestion des aliments.

A la partie postérieure de l'estomac, et surtout dans l'intestin, on rencontre de nombreuses granulations très fines jaune-verdâtres, très réfringentes et qui sont des produits d’excrétion car on les ren- contre en abondance dans les déjections, et elles augmentent en nombre vers l'anus.

Leur aspect se rapproche d’ailleurs de celui des granulations pig- mentaires des néphridies.

La région postérieure de l'intestin joue donc un rôle urinaire ou excréteur, ainsi du reste que l'aspect de son épithélium Pindique ;

ts D

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 379

la région moyenne joue le rôle absorbant et la région antérieure de l'estomac le rôle sécréteur des ferments digestifs.

Le tube de l'Ampharete n'étant ouvert qu’à l'extrémité supérieure et l'animal étant dépourvu de toute disposition ressemblant à un sillon copragogue, on peut se demander comment il se fait que ce tube n'est pas rapidement souillé par les déjections de son habitant.

Nous avons souvent pu constater comment procède l'animal.

Il amène son anus à l'entrée du tube pour expulser ses déjections, mais pour cela 5l ne se retourne pas complètement dans son tube. Il se replie seulement sur lui-même et tandis que la tête et les branchies continuent à faire saillie à l'ouverture il ramène en avant sa région abdominale. L’anus vient effleurer le bord du tube, au- dessous de la tête, et d’un seul coup l'Arnpharete projette ses excré- ments au dehors à 6 ou 7"/, de l’entrée de son habitation, sous forme de petits boudins cylindriques de 4 à 5 "/, de longueur ét de 1/2"/, de diamètre environ.

La rapidité de la digestion doit être assez grande car nous avons vu, en une seule soirée, un petit Ampharete expulser de la sorte en irois ou quatre fois un boudin ayant plus que la longueur totale de son COrpS.

Ces déjections, examinées au microscope, montrent des frustules de diatomées, des spores d'algues digérées, des carapaces vides de Foraminifères, des spicules d'éponges et surtout une très grande quantité de ces sphérules jaunes, réfringentes que nous avons déjà signalées dans l'intestin et décrites comme des produits d'excrétion.

Les déjections, plus denses que l’eau de mer, tombent au fond.

XIIL.

CIRCULATION.

1e

(W/£

Anatomie.

Nous avons déjà cité le travail de WIREN (85). C’est ce qui existe de plus complet sur la circulation des Ampharétiens. Cet auteur a étudié l'appareil circulatoire de l'Amplhucteis Gunneri et de la

376 PIERRE FAUVEL.

Melinna cristata. Le manque de matériaux ne lui a pas permis d'étudier en détail celui de l’Ampharete gracilis.

Il a mis en lumière l'existence d'un vaste sinus enveloppant le tube digestif, comme chez les Térébeliens, et donnant naissance en avant à un cœur d’où le sang est chassé dans les branchies.

Ce sinus péri-intestinal avait déjà étè soupçonné par MA4R10N (78) chez Sabellides octocirrata et par LANGERHANS (80) chez l’'Ampha- rele minula.

Avec le travail de MEYER (8'7), dans lequel se trouvent de bonnes figures (83, fig. 2) de la Melinna palmata, l'appareil circulatoire est soigneusement figuré, c’est tout ce que nous connaissons sur la circulation des Ampharetiens.

La belle coloration verte du sang et la transparence des téguments permettent d'observer une grande partie de l'appareil circulatoire directement.

La dissection est néanmoins nécessaire pour arriver à la connais- sance exacte de la distribution et des rapports des vaisseaux allant du sinus intestinal aux parois du corps, des vaisseaux allant du vaisseau ventral aux branchies et en général de tous les vaisseaux situés profondément.

La méthode qui nous a le mieux réussi est celle de la dissection de l'animal vivant, dans l'eau de mer. Les tissus restent ainsi longtemps vivants, gardent leur élasticité et grâce à leur contractilité, le sang, qui conserve sa belle couleur verte, continue à circuler dans les vaisseaux.

Dans l’eau douce ou dans tout autre liquide que l’eau de mer, l'animal meurt rapidement, le sang se décolore et se masse dans les sinus ou dans certaines parties des gros vaisseaux et les vaisseaux vides deviennent complètement invisibles.

La méthode des coupes fournit peu de résultats pour la même raison : le sang coagulé est massé par endroits et il est presque impossible de retrouver les vaisseaux vides de sang dont les parois si délicates s’affaissent et s’accolent.

D'ailleurs, dans certaines régions, l’enchevêtrement des vaisseaux est trop compliqué pour que l’on puisse suivre leur parcours d’une façon certaine sur une série de coupes, lors même que leur section y resterait nette.

Chez l'Ampharete l'appareil circulatoire est clos. Le tube digestif

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 371

est entouré d’un vaste sinus péri-intestinal s'étendant de l'anus à la partie antérieure de l'estomac il se continue avec un cœur contractile envoyant le sang aux branchies.

Le sang est ramené des branchies au vaisseau ventral par quatre vaisseaux efférents.

Dans le sinus intestinal le sang circule d’arrière en avant, et dans le vaisseau ventral d'avant en arrière.

Du sinus intestinal part un vaisseau transversal ou dorsopédieux, à chaque segment à partir du VI° (3° sétigère). Il en est de même du vaisseau ventral, en sorte que chaque parapode communique avec le vaisseau ventral et le sinus intestinal.

À. Sinus intestinal. Comme nous venons de le dire, ce

sinus entoure complètement le tube digestif et s'étend sur toute la longueur de l'intestin et sur la plus grande partie de l'estomac.

Dans les derniers segments les replis longitudinaux très accen- tués, du rectum, remplis de sang, simulent des vaisseaux aboutissant à la base des cirres anaux.

Tout le long de l'intestin et de l'estomac on voit le sang, chassé en avant par les contractions péristalliques du tube digestif, progresser par ondées.

Les nombreux replis longitudinaux du tube digestif sont accusés par des lignes d’un vert plus sombre dues à l'accumulation du sang dans ces sillons.

À la hauteur de la base des lobes antérieurs cordiformes de l'estomac le sinus s'arrête brusquement (fig. 15).

_ Les deux lobes cordiformes (La) reçoivent de chaque côté trois ou quatre troncs vasculaires partant du bord antérieur du sinus (2) Ces troncs se ramifient en fines arborisations.

De cette limite antérieure du sinus stomacal si nettement tranchée, naissent les vaisseaux œæsophagiens.

Ces vaisseaux longitudinaux, appliqués sur l’œsophage se divisent en rameaux presque parallèles présentant quelques anastomoses. Les deux qui sont situés au milieu de la face supérieure de l'œso- phage sont un peu plus gros. Ils aboutissent à une sorte de sinus demi-circulaire en arrière du cerveau.

Les autres branches vont se ramifier finement dans le pharynx et à la base des tentacules.

378 PIERRE FAUVEL.

Le cœur naît du sinus à la face dorsale de l'estomac un peu en arrière de l'angle formé par la réunion des lobes antérieurs, au- dessus de la naissance de l'æsophage.

Cet organe s'étend au-dessus de lœsophage du VII segment (4° sétigère) jusqu’au II segment environ. Suivant les contractions de l'animal il peut se trouver reporté plus en avant ou plus en arrière et sa pointe peut dépasser beaucoup le IT segment, les vaisseaux branchiaux reviennent alors en arrière.

Le cœur est un gros vaisseau contractile de section circulaire ; sa forme générale est cylindro-conique. L’extrémité antérieure se termine en pointe obtuse arrondie.

A l'intérieur on voit par transparence un gros cordon brun verdâtre, très foncé. C’est le corps cardiaque qui s’insère par une racine bifurquée à la partie supérieure de l’estomac, à la naissance de l’æsophage (PI. xvi, fig. 15, c).

Cette grosse tige occupe la plus grande partie de la cavité du cœur elle est libre et complètement entourée par le sang. Elle s’attenue légèrement et se termine librement en pointe mousse à la partie antérieure du cœur.

Contrairement à ce qui existe chez d’autres Sédentaires, le corps cardiaque est dépourvu de cavité centrale en communication avec l'estomac.

Du cœur partent quatre paires d’artères branchiales.

La plus postérieure des quatre s’infléchit d'abord en arrière, décrit une longue courbe et revient en avant pour pénétrer dans la bran- chie (PI. xvi, fig. 12, VD,, Br) qui est également la plus postérieure et correspond au VI segment (3° séligère). En avant de ce vaisseau naît le vaisseau afférent de la ° branchie, la plus interne de la première rangée (Br). Le vaisseau afférent de la (V,) naît du cœur presqu'au même point que le précédent, son origine parait presque être la même. Ce vaisseau est beaucoup plus grêle que les trois autres et il faut une assez grande attention pour le voir. On ne le distingue bien nettement qu’au moment du passage de l'onde sanguine. Il correspond à la branchie, la plus externe de la première rangée el la moins développée de toutes. Elle correspond au IV° segment.

Enfin, un peu en arrière de la pointe du cœur naît un gros vaisseau qui va à la 1" branchie (Br, Vbhr), située au milieu de la première

,

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 379

rangée, un peu en avant des deux autres. Elle correspond au III° segment qui porte les palées.

Nous avons dit que du sinus intestinal partent des vaisseaux dorso-pédieux (V.segmentaires de WIREN) allant au parapode. Ces vaisseaux ne commencent qu'à la hauteur du pied sétigère. Le VI" segment est donc le premier à recevoir un de ces vaisseaux qui tirent leur origine de la face inférieure du sinus, de chaque côté de la gouttière stomacale marquée par un sillon jaunâtre (fig. 19).

WIREN (87, p. 44) a avancé, avec raison, qu’en règle générale le vaisseau ventral reçoit le sang du cœur dans les cinq premiers segments et dans les segments postérieurs, du sinus intestinal (1).

Chez les Ampharétiens nous voyons que le VI° segment reçoit le sang du sinus intestinal (fig. 11) mais en outre il en reçoit aussi du cœur, par l'intermédiaire de la branchie ; le cœur donnant quatre arlères branchiales contre trois chez les Térébellidés. Les segments se correspondent donc bien dans les deux familles, seule- ment le VI" des Ampharétiens, par exception, porte la paire de branchies, c'est pourquoi le cœur donne une branche à ce segment en plus de celle que lui envoie le sinus.

La branchie des Ampharéliens semblerait done être une pro- duction acquise secondairement. ;

D'après la figure de MEYER (87), chez la Melinna palmata le VI" segment recevrait seulement du sang de la branchie et non du sinus. Ce serait une exception unique, d'autant plus étonnante que M. cristata suit la règle commune.

Les huit segments suivants reçoivent chacun un vaisseau semblable mais aux trois derniers segments thoraciques (XV‘, XVI et XVII' segments) il se produit une modification. Le vaisseau dorso-pédieux au lieu de s'abo::cher avec le sinus stomacal par une racine unique se bifurque en Y dont les deux branches s'appliquent, l’une à la face dorsale du sinus, l’autre un peu plus bas sur le côté. Entre les deux branches il n'existe ni réseau, ni vaisseaux pectinés comme chez l'Amphicteis (fig. 11).

Dans la région abdominale le dorso-pédieux part de la partie supé- rieure du sinus, s’accole au dissépiment transversal et va aboutir à

(1) Wien dit : dans les six premiers segments, mais il compte le lobe céphalique dans ce nombre. Son VI* segment correspond à notre Ve.

380 . PIERRE FAUVEL.

la pinnule il s’anastomose par un réticulum assez compliqué, avec le ventro-pédieux venant du vaisseau ventral (fig. 11).

B. Vaisseau ventral. Je vaisseau ventral s'étend du segment anal à la partie antérieure du corps. Il repose sur la chaîre nerveuse dont il n’est séparé que par un repli de Pendothélium.

Le sang y circule d'avant en arrière.

A chaque segment le vaisseau ventral donne une branche latérale (vaisseau ventro-pédieux), allant à la base des pinnules uncinigères, dans la région abdominale, aux pinnules et aux parapodes dans la région thoracique.

A la hauteur du pied sétigère, VI" segment, le ventro-pédieux nait entre les glandes ventrales et va s’anastomoser à la base du pied avec le vaisseau latéral anastomotique que nous décrirons tout à l'heure.

Ce vaisseau anastomotique qui vient de recevoir le ventro-pédieux se rend à la branchie dont il est le tronc efférent (fig. 13, Vb;).

Cette branchie correspond donc bien au VI" segment, ainsi que nous l'avons avancé en parlant de son vaisseau efférent, bien qu'elle soit insérée extérieurement sur le IV° segment, ou plus exactement entre le IV° et le segment.

Au V' segment la branche ventro-pédieuse du vaisseau ventral est très forte. Elle suit d’abord la branche externe de la néphridie antérieure, correspondant au IV° segment et longeant en arrière le diaphragme inséré entre les segments IV et V à sa base, elle se rend à la branchie qui appartient au segment.

Le vaisseau efférent de la branchie est au contraire un fin vaisseau assez difficile à voir. Nous avons déjà constaté que le vaisseau afférent de cette même branchie, la moins développée des quatre, est également de faible calibre.

Ce vaisseau efférent naît du vaisseau ventral entre les deux premières paires de glandes ventrales.

En avant de ces glandes part de chaque côté, à angle droit avec le vaisseau ventral, la grosse branche efférente de la branchie : puis un peu plus en avant le vaisseau ventral se bifurque en Y et donne deux branches allant à l’œsophage, à la bouche, et au sinus cérébral elles s'anastomosent avec les ramifications œsopha- giennes venant du sinus intestinal (fig. 15).

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS, 381

En outre, des vaisseaux ventro-pédieux, au nombre d'une paire par segment, allant aux mamelons pédieux, le vaisseau ventral donne naissance à de nombreux vaisseaux très fins plus ou moins superficiels qui portent le sang aux couches musculaires tégumen- taires et qui sont surtout développés au-dessus des boucliers thora- ciques.

En ces points on compte de 5 à 7 vaisseaux transversaux, parallèles, qui finissent par aboutir au mamelon pédieux ils se ramifient (Pl. xvi, fig. 16, Vc). Parfois, certains d’entre eux après s'être anastomosés, vont à la pinnule. Ce sont en général les deux postérieurs, qui se réunissent alors en un seul à la base de la pinnule.

Généralement il y a trois vaisseaux assez gros alternant avec quatre plus fins. Dans la région abdominale, on retrouve encore deux de ces vaisseaux par segment dans les cinq ou six premiers segments. Puis ils disparaissent complèlement dans les sept à huit derniers segments abdominaux.

Ces vaisseaux clypéaux de la région abdominale naissent du vais- seau ventral chacun par une racine distincte. Dans les derniers segments de la région thoracique les vaisseaux clypéaux naissent d’une racine unique bifurquée, enfin dans la partie antérieure de cette même région ils naissent de deux ou trois troncs parallèles qui partent du vaisseau ventral.

Ces vaisseaux clypéaux donnent eux-mêmes naissance à une foule de petites arborisations anastomosées en fin réseau à la face ven- trale, mais il n'existe pas deux vaisseaux ventraux, latéraux, en zigzag comme chez l'Amplucteis (fig. 14, Vr:).

C. Vaisseaux latéraux anastomotiques. Nous avons vu que les parapdoes reçoivent : un vaisseau transversal provenant du sinus intestinal ou dorso-pédieux ; 2°un vaisseau ventro-pédieux provenant du vaisseau ventral; des vaisseaux clypéaux dont les uns arrivent à la pinnule, les autres au mamelon pédieux dans lequel ils se ramifient abondamment.

Une anastomose dorso-ventrale réunit les plexus du mamelon pédieux à ceux de la pinnule.

En outre, une forte anastomose longitudinale réunit les vaisseaux d'un mamelon pédieux à ceux du parapode suivant et du parapode précédent. L'ensemble de ces anastomoses constitue un gros vaisseau

382 PIERRE FAUVEL.

latéral sinueux, qui s'étend sur toute la longueur du corps de l'animal el qui aboutit antérieurement à la branchie, dont il forme le vaisseau cfférent en se réunissant au vaisseau ventro-pédieux du VI° segment (PI. xv1, fig. 13 et 16, Va).

Il existe également des anastomoses longitudinales reliant entre eux les vaisseaux des pinnules. Ces anastomoses forment un second vaisseau anastomotique parallèle au premier mais moins développé.

Dans les cinq ou six premiers segments de la région abdominale, malgré la disparition des pieds sétigères, ces deux vaisseaux existent encore tous les deux, mais ils tendent à se rapprocher et finissent par se fusionner en un seul vaisseau aboutissant au sinus périanal après avoir beaucoup diminué d'importance.

La rapidité des battements du cœur est assez variable. Chez des individus vigoureux et bien sains, les pulsations se suivent en moyenne toutes les deux ou trois secondes. Nous avons rarement constaté une pulsalion par seconde. Au contraire les battements tombent souvent à 1 par 4 ou 5 secondes chez les animauxqui ont souffert du transport.

D. Branchies. Les branchies sont au nombre de quatre paires. Ces organes, subulés, élastiques, mobiles et extensibles sont susceptibles de mouvements dans tous les sens.

Chaque branchie reçoit deux vaisseaux, un afférent et un eflérent, qui forment une anse simple à l’intérieur.

Extérieurement les branchies semblent insérées sur les segments IT et IV. Le IT segment, qui porte les palées semble porter aussi les trois premières paires de branchies rangées en une seule ligne transversale (fig. 9 et 12). En réalité, il n’y a qu’une apparence.

L'étude de l'appareil circulatoire démontre d’une façon très nette que les quatre paires de branchies correspondent à quatre segments distincts, qui sont les segments III, IV, V et VI (96).

Nous verrons chez l'Amphicteis cette disposition devenir appa- rente, même extérieurement, les branchies se répartissant mieux sur les segments auxquels elles appartiennent. Chez la Melinna, au contraire, la coalescence est poussée beaucoup plus loin que chez l’'Ampharele, bien que les branchies appartiennent également à quatre segments distincts.

Ce fait a nne très grande importance pour l'homologie des

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 383

segments antérieurs des Ampharèliens ainsi que nous l'avons démontré (96).

Les branchies sont couvertes de cils vibratiles qui ne sont pas répartis uniformément à leur surface mais disposés en couronnes ciliées régulièrement espacées.

Les parois des branchies sont composées : d'une mince cuticule ; d’une couche épidermique ; d’une mince couche de fibres musculaires circulaires ; d'une couche beaucoup plns épaisse de fibres longitudinales; d'un revètement endothélial interne (fig. 17).

L'épiderme renferme de minces fibrocellules de soutien, des cellules à plateau vibratile, des cellules à mucus violettes, assez abondantes, disposées en une seule couche limitée par une basale. H n'existe pas de lissu conjonctif sous-épithélial.

La structure de ces organes est la même que celle des téguments, dont ils ne sont qu'une évagination, conformément à la définition de Prüvor et RAcoviTzA (95, p. 342).

Les vaisseaux branchiaux sont accolés vis-a-vis l’un de l'autre aux parois opposées de la cavité de l'organe. L'endothélium qui tapisse cette cavité relie les vaisseaux à la paroi. Ceux-ci du reste sont formés d’une simple membrane endothéliale. Ils font saillie dans la cavité (fig. 17, V).

Juste en arrière d’un des deux vaisseaux se trouve un nerf impair plongé dans l’épiderme et recouvert par les couches musculaires qui le séparent du vaisseau. Ce nerf assez gros se rend au ganglion de la chaine ventrale correspondant au segment auquel appartient la branchie (fig. 17, N).

La cavité branchiale renferme des tractus conjonctifs formant une sorte de réseau très lâche entre les mailles duquel circulent les amibocytes du liquide de la cavité générale avec laquelle elle est en communication.

La structure musculaire, assez développée, de ces organes explique leur motilité et leurs variations de longueur.

STE Histologie.

À. Structure des vaisseaux. Nous avons déjà décrit la structure des paroiïs du sinus intestinal. Nous rappellerons seulement

384 PIERRE FAUVEL.

que ces parois se composent d’une faible couche de minces fibres circulaires, dans la région stomacale et en outre de fibres longitudi- nales formant avec les premières un réseau assez lâche, dans la région intestinale, le tout revêtu de l’endothélium.

Le cœur, qui n’est en somme qu'une différenciation de la partie antérieure de ce sinus, présente dans ses parois la même structure. Les deux couches musculaires, se croisant chliquement, y sont un peu plus développées et la membrane péritonéale plus épaisse.

Ces légères modifications sont en rapport avec le rôle de l'organe qui lance vigoureusement le sang dans les branchies par ses contrac- tions énergiques.

Tous les autres vaisseaux ont une structure excessivement simple, leur paroi étant uniquement constituée par une membrane endothé- liale, dont les noyaux sont facilement visibles sur les coupes (PL. xvin, fig. 51-52-53).

Ces vaisseaux ne sont nullement contractiles et le sang y circule par vs a lergo.

RIETSCH (82) avait déjà constaté que les vaisseaux des S{ernasprs sont constitués simplement par un endothélium et sont dépourvus de fibres musculaires.

JoURDAN (8'72) a décrit, chez le Siphonostana diplochaitos, une structure analogue des vaisseaux. Il considère leur paroi comme formée d’une mince membrane anhiste #nterne, recouverte par un périthélium dont il a fort bien figuré les parois cellulaires et les noyaux externes.

MEYER (87, p. 694), a trouvé les vaisseaux de Choelozone formés simplement par le péritoine.

Chez la plupart des Syllidiens, MALAQUIN (93, p. 267), a trouvé les vaisseaux formés d’une mince membrane en tout semblable à celle qui constitue le péritoine.

Chezl’Ampharete, les imprégnationsà l'argent donnent un résultat tout à fait semblable à celui obtenu par JourpaAx. Elles montrent des cellules plates à contour légèrement sinueux (PI. xvu, fig. 50).

Les méthodes ordinaires de coloration y font apparaitre des noyaux elliptiques ou fusiformes de 15 w à 26 vu.

Sur les coupes lransversales des vaisseaux ces noyaux appa- raissent en saillie sur la face externe de la membrane.

Jamais nous n'avons réussi à constater la présence d'une mem-

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 389

brane interne anhiste et nous avons loujours trouvé la paroi du vaisseau uniquement composée de la couche endothéliale.

Cette disposition n’est donc pas comme le pense JouRDAN, abso- lument l'inverse de ce qui existe dans les capillaires des Vertébrés. Ce n’est pas un endothélium extérieur au vaisseau, c'est l’endo- thélium interne qui constitue à lui seul la paroi, les couches muscu- laires externes faisant défaut.

Cette structure n’a rien d'étonnant si l’on réfléchit à la facon dont se différencient souvent les vaisseaux chez les Annélides.

WIREN (8?) a déjà démontré comment ces vaisseaux se forment aux dépens du sinus intestinal, d’abord par simple plissement du pérituine déterminant une gouttière qui finit ensuite par se fermer et isoler ainsi un vaisseau. Les parois du vaisseau sont alors constituées par ce même périloine ou endothélium.

Les vaisseaux branchiaux de l’Ampharele ont une origine semblable.

La structure du vaisseau ventral est un peu différente, ainsi que sa faible contractilité pouvait le faire supposer. Les cellules de l’endo- thélium sont allongés, fusiformes (fig 35). Faut-il voir dans ces cellu- lesallongéesdes cellules musculaires rudimentaires ainsi que GRAVIER (96) en a décrit chez les Phyllodociens 2

En outre, sur des sections transversales de ce vaisseau on voit des noyaux accolés à la face interne de ses parois et faisant saillie dans la lumière du vaisseau. Ces noyaux appartiennent à une couche endo- théliale interne.

Le vaisseau serait donc composé de deux couches endothéliales, l’une externe dont les cellules seraient contractiles, et l’autre interne à structure ordinaire.

CLAPAREDE (73) a décrit dans le vaisseau ventral de Spirographis une couche endothéliale interne à noyaux saillants. BRUNOTTE (88) a décrit aussi une structure analogue dans le vaisseau ventral du Branchiomma et a constaté également la saillie des noyaux de l'endothélium interne. Seulement, chez ces deux espèces, il existe entre les deux couches d’endothélium une couche de fibres muscu- laires qui manque totalement chez l’Ampharete.

B. Sang. Le sang es un liquide dichroïque d’une magnifique nuance vert émeraude par transparence, rouge foncé par réflexion et sous une certaine épaisseur.

386 PIERRE FAUVEL.

Ce liquide est parfaitement limpide et transparent. Sa coloration est due au plasma.

Au contact de l'eau douce le sang se décolore rapidement. Sous l'action de fixateurs tels que le liquide de Perenyi, le sublimé acé- tique, l'acide chromique, il se coagule en masses homogènes d'un brun foncé.

Son affinité pour l’éosine est alors assez grande ; cette teinture lui communique une couleur orangée caractéristique, qui trahit immédiatement sa présence dans les préparations.

Sa coloration verte est due sans doute à la chlorocruorine, pigment respiratoire vert, comparable à l’hémoglobine et à l'hémocyanine et qui a été trouvé dans le sang vert des Sabelles, des Serpules et des Chloræmiens.

La chlorocruorine, signalée d'abord par Ray LANKESTER (62) chez les Serpuliens, éludiée ensuite par Grirrirx (92) est un albuminoïde renfermant du fer. Suivant qu'il a ou non absorbé de l'oxygène, il se rencontre dans le sang à l’état d'oxychlorocruorine ou à l’état de chlorocruorine réduite. Traité par les acides et les alcalis il donne de l’hématine, une matière albuminoïde et des acides gras.

Le sang de l'Ampharete renferme des hématies en petit nombre. Ces hématies ovoïdes, à contour peu net, à noyau granuleux sans nucléole mesurent 7 à 84 et leur noyau 4 à 6u. Le noyau est assez vivement coloré en violet par l'hématoxyline, tandis que lecytoplasme reste à peu près incolore (PI. xxv, fig. 169).

Ces hématies sont asseznombreuses dansles vaisseaux branchiaux; on en rencontre peu dans le vaisseau ventral sauf quelques agglomé- “alions de place en place, et encore moins dans le sinus inteslinal.

Cette présence, d’ailleurs, peu abondante, d’hématies dans le sang vert de l’Ampharele ne nous convertit pas cependant à l'étrange théorie de CuENoT (91, p.438) d’après laquelle il existerait toujours des amibocytes chez les espèces à sang coloré tandis que le sang incolore des autres espèces en serait toujours dépourvu.

Malheureusement les faits ne rentrent pas dans la théorie. C’est ainsi que d’après MALAQUIN (93, p. 268), la Syllis hamata possède des amibocytes malgré son sang incolore.

D’après Rierscx (82), le sang du Sternaspis, quoique rouge, ne renferme aucun élément figuré.

D'ailleurs on ne voit pas trop pourquoi des amibocytes seraient

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 387

indispensables pour sécréter un pigment soluble comme la chloro- cruorine, par exemple. Des cellules spécialisées de l'intestin ou de certains vaisseaux peuvent parfaitement remplir ce rôle.

C. Corps cardiaque. Le corps cardiaque des Sédentaires a une histoire assez curieuse.

Cet organe énigmatique a d’abord attiré l'attention des naturalistes chez le Siphonostoma diplochaitos.

Il fut pris tour à tour pour un second œsophage par OTTo, pour un cœcum œsophagien par DELLE CHIAJE et pour un vaisseau sanguin par Cosra, Max MÜLLER (38) DUJARDIN, QUATREFAGES.

CLAPAREDE, (68) blämant ces derniers observateurs, revient à l'opinion d'Orro et de DELLE CHIAJE.

JACQUET (85) reconnaissant l’erreur de CLAPARÈDE, lui restitua son vrai rôle de vaisseau sanguin mais il attribuea la couleur sombre de cet organe à l'épaisseur glus grande du sang et à la pigmentation des parois. Il ne semble pas avoir soupçonné la présence de la portion solide centrale.

JoURDAN (8'7), dans son étude du Siphonostoma diplochaitos, reconnait dans cet organe une évagination de la paroi intestinale fonctionnant comme glande par sa partie interne et comme cœur par sa partie externe.

Ceci explique en partie les opinions précédentes et donne un peu raison aux deux théories à la fois.

Chez les Phérusiens cette structure est assez spéciale et ne ressemble que de loin à l'organe que l’on rencontre chez les Tére- belloïdes.

GRUBE avait bien signalé un organe semblable chez l'Audouinia filigera, mais c'est CLAPAREDE (68, p. 269) qui le mentionne le premier chez un Térébellidée : Terebella multisetosa.

Plus tard, le même auteur en donna une description plus complète (73) et assinila les granulations pigmentaires du cordon cardiaque au chloragogène des vaisseaux des Sabellides.

Il est étonnant qu’un organe aussi répandu chez les Térébellidés ait échappé si longtemps aux naturalistes et surtout à des observa- teurs comme MILNE-EbpwaRps (37), qui a si bien décrit la circulation des Teérébelles.

388 PIERRE FAUVEL.

STEEN (83) à décrit, chez le Terebellides Stræmi, un organe semblable composé d’une masse brune de tissu conjonctif percée d’un canal central et revêtue d’une mince membrane.

Il émet l’opinion que celte masse occupant la cavité cardiaque, sert à empêcher le sang chassé par la contraction des branchies de refluer dans le cœur.

Depuis, HorsT (85) a publié une étude de celte organe énigmatique chez les Chloræmides. Chez la Brada villosa le corps cardiaque est composé de plusieurs torons à section ovale, à cellules remplies de granulations brunes. A la périphérie, les parois cellulaires sont nettes, tandis qu’au centre la masse est sans structure et remplie de granulations brunes. Sur l'animal adultes les coupes montrent un réseau irrégulier de fibres avec des noyaux aux points d’intersection et des granulations réparties dans la masse interstitielle.

L'auteur fait ressortir l’analogie avec ce qui existe chez les Oligochètes. Chez l'Enchytrœus on considère le corps cardiaque comme un organe glandulaire naissant de l'intestin dont 1l est une évagination. Ses cellules seraient des cellules épithéliales modifiées remplissant une fonction hépatique.

Chez l'E. appendiculatus la communication avec l'intestin, d'abord nette, disparaitrait peu à peu à mesure que le corps cardiaque s’avance dans le cœur et on aurait alors la disposition de cet organe chez les Phérusiens.

Cette opinion a été critiquée par CUNNINGHAM (88). Cet auteur, se basant sur la description du développement du corps cardiaque de la larve de Terebella par SALENSKY, bien qu’il reconnaisse que cette description est peu claire, considère cet organe comme dérivant d’une invagination de la paroi du cœur et non de l'intestin.

Il se base sur le fait que chez la Trophonia adulte une série de coupes ne lui a montré aucune connexion entre l’épithélium intes- tinal et celui du corps cardiaque.

CUNNINGHAM a donné la description du corps cardiaque des Chlo- rœmidés, Térébellidés et Cirratuliens.

Chez la Trophonia plumosa le corps cardiaque est tubulaire. Ses cellules forment un épithélium d'aspect glandulaire à plusieurs rangs de cellules. Les plus proches de la basale sont solides, nuclées, et contiennent un grand nombre de granules bruns. Les cellules plus internes sont claires, vacuolées, à noyau généralement peu

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 389

visible, enfin les plus proches de la cavité centrale sont presque sphérique, saillantes comme les cellules que l’on voit sur les coupes de néphridies. La cavité renferme des débris de cellules. Pour l'auteur, cet organe est une glande, mais il n’a pu lui découvrir de canal excréteur.

CuNNINGHAM a encore étudié le corps cardiaque chez la Flabelli- gera affinis et chez différents Térébellidés : Amphitrite Johnstoni et Lanice conchilega.

Chez l’'Amphitrite Johnstoni il n'existe pas de cavité au centre de l'organe, les cellules sont petites à contours peu distincts, à noyau se colorant fortement, en sorte que ceux-ci sont très rapprochés les uns des autres.

La description qu'il donne du corps cardiaque du Cirratulus cirratus n’ajoute pas grand'chose à ce que nous connaissions sur les Crrraluliens, d'après les recherches de Meyer (87) sur la Chœtozone selosa.

Chez celle-ci le corps cardiaque, composé de trois longs torons, n’adhère pas au vaisseau. Ses cellules sont glandulaires, avec noyau sombre arrondi et protoplasma granuleux, renfermant un grand nombre de granules de pigment jaunâtre.

M£yer (87) émet l'idée que le corps cardiaque sert peut-être à la préparation du pigment qui se retrouve dans le liquide sanguin rouge, mais il n’est pas certain si les petits éléments incolores, assez peu nombreux dans le sang, prennent naissance dans cet organe ou ailleurs.

La description et les figures de SALENSKY (83, p. 256, fig. 18-20) auxquelles nous avons fait allusion, ne sont pas en effet absolument claires.

A un stade jeune, il décrit le corps cardiaque comme un tube attaché aux parois internes du vaisseau sanguin par quelques cellules allongées, traversant la cavité du vaisseau. « À ce stade, > dit-il, je n'ai encore pu constater dans la paroi du vaisseau »> sanguin la présence d’un orifice qui s’ouvrirait dans le corps > cardiaque.

> Sur des individus plus âges (fig. 20, Ter. Olr.) cet orifice se > distingue nettement. Il s'ouvre d’abord dans un petit tube très > étroit et se continue ensuite dans le corps cardiaque qui, à ce stade > du développement, représente un organe de forme cylindrique ».

390 PIERRE FAUVEL.

Plus loin, SALENSKY fait remarquer qu'aux jeunes stades du aëéveloppement, le corps cardiaque est constitué par des cellules cylindriques assez volumineuses, contenant un grand noyau à nucléoles brillants ; puis la structure cellulaire disparaîtrait.

« Chez les Térébella relativement plus âgées ces cellules ne sont » plus reconnaissables. Le corps cardiaque consiste en une masse > fondamentale dans laquelle sont disséminés de petits granules. > Ainsi se trouve réalisée sa structure définitive avec cette seule > différence que sa couleur n’est pas encore sombre ».

Nous noterons pour le moment cinq points dans cette descrip- tion :

I n'y a d’abord pas de communication entre la paroi du vaisseau sanguin et le corps cardiaque ;

La communication ne s'établit que plus tard ; Le corps cardiaque a d’abord une structure cellulaire ; Cette structure disparaît ensuite ;

La coloration foncée du corps cardiaque n'apparaît que tardi- vement.

Cuexor (91), dans son étude sur le sang, s’est occupé aussi du corps cardiaque.

Il décrit cet organe chez la Nicolea venustula et chez la Lepræa lapidaria comme formé « d'un fin stroma conjonctif bourré de cellules et de noyaux ». Il le considère comme une glande lympha- tique chargée en partie de la formation de l’albuminoïde respiratoire, qui n’a aucun rapport, pas plus que les cellules chloragogènes avec les organes excréteurs.

L'auteur n’admet pas, on le voit, l'opinion d'Eisic (87) qui lui attribue un rôle d’excrétion par rapport à l'appareil circulatoire.

Il déclare que cette glande ne dérive certainement pas de l'intes- tin et la regarde comme une formation plus probablement dérivée de la paroi du vaisseau dorsal.

Néanmoins nous ne voyons pas qu'il apporte des preuves contre la théorie de Horsr qu'il rejette, pas plus qu’en faveur de celle de SALENSKY qu'il adopte.

Chez l'Ampharele Grubei le corps cordiaque est une sorte de tige solide, d’un brun noirâtre très foncé, s'étendant en ligne droite ou légèrement ondulée dans presque toute la longueur du cœur. À sa

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. ; 391

base, le corps cardiaque est un peu élargi et bifurqué et il s’insère sur la face dorsale de l'estomac, un peu en arrière de l’angle formé par les bords internes des lobes antérieurs, à la naissance de l’œso- phage. Le cœur prend naissance du sinus sanguin au même endroit, à la limite de ce dernier. En sorte que le corps cardiaque est à peu près entièrement renfermé dans le cœur, au centre duquel il flotte librement entouré de tous côtés par le sang. Le diamètre de cette sorte de tige que l’on pourrait presque comparer à l'aiguille d'une lampe à modérateur, diminue graduellement et l'extrémité antérieure se termine en pointe mousse.

Pendant la diastole, les parois du cœur se gonflent brusquement et on voit passer une volumineuse onde sanguine qui est lancée dans les artères branchiales par la contraction de la tunique muscu- laire du cœur. Pendant la systole, le cœur se vide complètement et ses parois viennent s'appliquer exactement contre le corps cardiaque qu'elles moulent étroitement.

Les ouvertures des artères branchiales sont ainsi oblitérées et le sang lancé dans les branchies ne peut revenir en arrière. Il est obligé de passer dans les vaisseaux efférents qui le ramènent au vaisseau ventral et aux troncs latéraux anastomotiques.

Nous avons maintes fois observé ce fait sur des Ampharete vivants, aussi adoptons-nous comme l'expression d’un fait bien réel la suppo- sition de STEEN qui attribuait ce rôle au corps cardiaque du T'erebel- lides Stræmi.

L'étude histologique de cet organe nous fera voir qu'on peut lui attribuer encore un autre rôle et ce qu'il faut penser des autres théories émises à son sujet.

«

La section du corps cardiaque est presque circulaire ou légè- rement elliptique (PI. xvi, fig. 18).

On ne remarque pas de vide au centre, mais sur des coupes longi- tudinales passant par l'axe on remarque au centre une région plus claire.

Chez l’Ampharete la structure du corps cardiaque est assez difficile à étudier. La structure cellulaire n’apparaît qu'avec certains réactifs. Il faut donc employer plusieurs méthodes et en combiner les résultats pour se faire une idée exacte de cette structure.

Sur les coupes colorées à l’hématoxyline-éosine, qui donne de très belles préparations pour les autres tissus, on distingue dans le

392 PIERRE FAUVEL.

corps cardiaque de très nombreux noyaux arrondis ou elliptiques mesurant en moyenne de 7 v à 8 u sur 5 1.

Ces noyaux sont très clairs, avec un ou deux nucléoles de 1 y à 2 w fortement colorés en violet. On y distingue aussi quelques fines granulations et un léger recticulum.

Ces noyaux, en très grand nombre et très rapprochés les uns des autres, sont surtont nombreux à la périphérie et dans la partie moyenne de la section. Le centre est occupé par un tissu beaucoup plus clair les noyaux sont rares (fig. 18).

Cette région offre, à de très forts grossissements, l'aspect d’un réseau fibreux à mailles légèrement teintées en rose par l’éosine. Il n'existe pas de cavité centrale.

Cette région axiale se présente sur les coupes parallèles au grand axe comme une bande claire occupant du tiers au quart de l'organe.

C'est ce que nous appellerons la région centrale du corps cardiaque, réservant le nom de région corticale à celle qui l'entoure.

Dans la région corticale, on remarque, entre les noyaux, des trainées radiales de fines granulations jaunâtres assez réfringentes, mais on üe distingue pas de parois cellulaires.

Sur les coupes colorées au picro-carmin et montées à la gélatine glycérinée, on retrouve les mêmes noyaux peu colorés au milieu ae masses fusiformes de substance granuleuse, mais les limites cellulaires sont encore bien indécises.

Celles-ci ne s’aperçoivent nettement que sur les coupes fines au 450° ou 300° de millimètre, fortement colorées par le bleu de Méthy- lène ou par la Safranine, après fixation au liquide de Perenyi ou au sublimé acétique. Encore faut-il employer l'immersion pour bien se rendre compte de la structure cellulaire de cet organe.

Sur les coupes transversales ainsi colorées au bleu de Méthylène, les cellules apparaissent fortement colorées en bleu tandis que leur noyau se détache en clair.

Ces cellules sont très allongées, fusiformes et disposées radiale- ment. Le noyau qui se trouve au milieu ou au tiers de leur longueur, occupe presque toute la largeur de la cellule dont il distend même parfois les parois, la cellule se trouvant alors renflée à ce niveau (PL. xvin, fig. 48-49).

On ne saurait mieux comparer la structure du corps cardiaque qu'à celle d’un quartier d'orange dont les grains gonflés de liquide

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 393

représentent assez bien l’arrangement et l'aspect des cellules fusiformes.

Le contenu cellulaire est coloré en bleu et renferme d'innombra- bles granulations qui fixent le colorant d'une façon plus énergique encore. Ces cellules se terminent presque carrément ou en pointe très émoussée à la périphérie, tandis qu’elles se terminent par un prolongement délié vers iecentre de l'organe (PI. xvin, fig. 47). La région axiale est formée par l'enchevêtrement de ces fins prolon- gements des cellules de la région corticale.

La basale extrêmement réduile et difficile à apercevoir, qui limite extérieurement le corps cardiaque est formée par l'enchevé- trement des courts prolongements de l'extrémité large des cellules.

Sur des coupes tengentielles de l'organe on voit une sorte de mosaïque à cases claires alternant avec des cases foncées (fig. 49). Les cases claires sont formées par les noyaux rencontrés par la section. Les cellules sectionnées au-dessus et au-dessous de leur noyau donnent une case bleue (fig. 50).

La safranine donne à peu près les mêmes résultats que le bleu de Méthylène, cependant elle colore moins énergiquement le contenu cellulaire en sorte qu'on en distingue mieux les granulations. Sur certaines coupes tangentielles on voit des cellules à contour poly- gonal. Les granulations réfringentes sont massées dans certaines parties entre les parois de la cellule et le noyau.

Cette structure du corps cardiaque ressemble un peu à celle signalée par CUNNINGHAM, chez l'Amphitrile Johnston, mais diffère sensiblement de celle de cet organe chez les Chloræmiens, les Cirratuliens et Terebellides Strænu.

Si l’on enlève le corps cardiaque d’un animal vivant et qu'on le dissocie sous le microscope, les parois des cellules se rompent et le contenu de l'organe s’épanche au dehors. Au milieu d'une masse considérable de fins granules très réfringents, brun verdàtre foncé, de { y de diamètre et animés de mouvements browniens, on distingue de nombreux noyaux, mais pas trace de lissu conjontif.

Si la dissociation est faite dans un liquide contenant du bleu de Méthylène, les noyaux se colorent d'abord en bleu puis les granules absorbent peu à peu le colorant.

Avec la safranine les noyaux se colorent en rose pâle, tandis que les granulations prennent immédiatement une teinte rouge intense.

394 PIERRE FAUVEL.

En dissociant, après fixation au formol ou au sublimé acétique, on obtient isolées des celluies fusiformes renfermant leur noyau et leurs innombrables granulations et présentant tout à fait l’aspect obtenu avec les coupes colorées au blen de Méthylène (fig. 48).

Chez l'Ampharete, tout au moins, la structure cellulaire de cet organe est donc indéniable.

Il n'existe pas de stroma conjonctif bourré de noyaux et de granu- lations comme CuExoT en a décrit chez les T'érebellides.

Ce qui noas donne à penser que chez les autres Annélides le corps cardiaque ne renferme pas de tissu conjonctif, c’est d’abord que Cuexor et STEEN sont les seuls à signaler cette disposition tandis que tous les autres auteurs ont reconnu la structure cellulaire. SALENSKY cependant la reconnaît chez l’animal jeune mais ne la retrouve pas chez l'adulte.

Il y a lieu de considérer ensuite la grande difficulté de fixer ces cellules dans leur intégrité. La plupart du temps elles sont rétractées dans les préparations el leurs parois alors colorées en rose par l'éosine figurent un réticulum conjonctif qui peut induire en erreur. Le contrôle des autres coupes et les dissociations montrent qu'il n’y a qu'une apparence.

En examinant attentivement des séries de coupes, tant transver- sales que longitudinales et sagittales. on peut facilement se rendre compte sur toutes que le tissu du corps cardiaque se continue, par un point assez restreint, il est vrai, avec l'épithélium du tube digestif.

Comme nous l’avons déjà dit le corps cardiaque est inséré par deux racines. Si on examine attentivement les coupes passant par ces racines, on voit qu’elles s’insèrent de chaque côté sur l'œsophage à sa jonction avec l'estomac.

Tout autour du point d'insertion on remarque une aire les cellules de l’épithélium intestinal se modifient progressivement. Ces cellules sont petites, à contenu granuleux, à noyau arrondi. Ces caractères s’accusent de plus en plus jusqu’au point de contact elles sont identiques à celles du corps cardiaque dont le tissu se continue ainsi sans aucune interruption avec celui de l'œsophage. Ces deux racines remontent de chaque côté le long des parois des lobes antérieurs de l'estomac ; mais entre elles et les parois stoma-

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 395

cales on retrouve la couche musculaire et péritonéale des paroiïs du sinus sanguin.

Ces deux racines se réunissent à la partie antérieure de l'estomac, à la naissance du cœur, dans lequel s'engage le corps cardiaque formé par leur réunion.

Cette continuité du tissu du corps cardiaque avec l'épithélium de l’œsophage existe toujours chez l'Ampharete, aussi bien chez l'animal complètement adulte que chez l'animal très jeune.

Nous n'avons pu faire, malheureusement, l’'embryogénie de l’Am- pharete, néanmoins cette continuité des deux tissus nous semble démontrer d’une façon évidente que le corps cardiaque de cette espèce naît de l'intestin, ainsi que Horsr l’a avancé pour d’autres en se basant sur des analogies.

Cette opinion nous semble bien plus probable que celle soutenue par CUNNINGHAM et CUENOT qui s’appuient sur la description ambiguë de SALENSKY pour faire dériver cet organe de la paroi du vaisseau dorsal.

Ainsi que nous l'avons fait remarquer, SALENSKY n’a constaté la communication avec la paroi du vaisseau qu'à un stade avancé, cette communication manquant auparavant. De plus, SALENSKY ne nie pas la communication avec l'intestin. Il n’en parle pas et n'indique pas davantage avec quoi le corps cardiaque est d’abord en communi- cation par ses extrémités.

Enfin on ne peut généraliser d’après queiques faits isolés. Il se peut fort bien que le corps cardiaque, si différent chez le Siphonos- toma et chez la Terebella, ait une origine différente chez ces deux Annélides.

Aussi n’affirmons-nous ici que pour les Ampharétiens que nous avons étudiés et, si chez ces Annélides nous reconnaissons la relation directe du corps cardiaque avec l'intestin, nous devons ajouter qu'il est plein et s’insère sur l’œsophage par deux points extrêmement restreints et ne présente aucune cavité ni aucun conduit excréteur.

On ne peut donc ici le considérer comme une glande annexe du tube digestif remplissant une fonction plus ou moins hépatique.

Cet organe ne semble pas être un lieu de formation d’amibocytes car on n'eù rencontre jamais en relation inlime avec lui.

Il renferme une grande quantité de granulations pigmentaires et

396 PIERRE FAUVEL.

nous pensons que ces granulations sont précisément un produit d’excrétion.

La théorie brillamment soutenue par ErsiG (87), théorie dans laquelle les pigments sont considérés comme des matériaux de rebut de l’organisme, nous paraît beaucoup plus solidement établie que ne le pense CUENOT.

Nous admettons donc que dans le corps cardiaque s’amassent, sous forme de granulations pigmentaires, les déchels du sang qui ne peuvent s’éliminer autrement, ce liquide n’ayant pas de rapports directs avec d'autres organes d’excrélion, chez cette espèce.

Ce qui nous confirme dans ce fait c'est que le corps cardiaque renferme d'autant plus de granulations pigmentaires que l’animal est plus àgé.

SALENSKY nous apprend aussi que chez l’animal très jeune le corps cardiaque n’a pas encore pris la coloration foncée qu'il acquiert chez l'adulte. Si le pigment était un des éléments de la formation du sang, il devrait apparaître en même temps que ce liquide, tandis qu’au contraire il apparait tardivement quand le sang a déjà assez fonc- tionné pour se charger de matières de rebut.

Du reste, il est possible que ces déchets soient repris en partie et que le corps cardiaque, en outre de son rôle d’organe dépurateur, remplisse aussi une fonction sécrétrice. IL n'est pas impossible que chez l'Ampharete la chlorocruorine soit sécrétée par lui dans le sang à l’état de dissolution, mais ceci est une simple supposition.

En plus de ce rôle, le corps cardiaque sert encore à soutenir les parois du cœur et à empêcher sa déformation dans les mouvements brusques de l’animal, surtout au moment de l'introversion et de l’extroversion du pharynx, car à ce moment toute la partie anté- rieure du tube digestif auquel le cœur est relié est soumise à des modifications de forme et à des tractions assez considérables.

En résumé, le corps cardiaque remplit trois fonctions distinctes :

C’est un organe de soutien et de renforcement du cœur ;

Il règle le cours du sang et l'empêche de refluer en arrière en fermant l'orifice des artères branchiales pendant la systole ;

3 C’est un organe d'épuration du sang fixant sous forme de pigment les produits d’excrétion de celui-ci.

Enfin il sécrète peut-être la chlorocruorine.

Le corps cardiaque est en continuité de tissu avec les parois de l'œsophage.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 397

XIV: NÉPHRIDIES.

Les néphridies des Ampharétiens n’ont guère été étudiées jusqu'ici que chez la Melinna palmalta, par MEYER (87).

Dans son tableau, p. 634, le même auteur indique le nombre et l'emplacement des néphridies de la Samytha adspersa et de l'Am- phicteis curvipalea, mais il n’en donne aucune description.

CLAPAREDE (63) avait bien aperçu les néphridies antérieures du Branchiosabella, mais il les avait prises pour des glandes tubipares, s’ouvrant dans l’æœsophage ! {p. 35, PI. x1v, fig. 32).

Mario (78) a donné également une brève description de deux longs lubes jaunâtres aperçus par transparence chez la Sabellides octocüraa el qu'il considère comme les organes segmentaires.

Chez l'Ampharete Grubei, il n'existe que deux paires de néphri- dies, contrairement à ce qui existe chez les autres Ampharetiens qui en ont quatre ou même cinq.

Ces deux paires de néphridies différent profondément et par la forme et par le rôle physiologique.

La paire antérieure est uniquement excrétrice, tandis que la paire postérieure ne remplit guère que le rôle d’organe d'émission des produits sexuels.

Les néphridies antérieures se composent essentiellement d'un tube replié en V, dont les deux branches, très longues, sont intime- ment accolées l’une à l'autre sur la plus grande partie de leur longueur. L'une des branches, la branche interne, s'ouvre à l’inté- rieur de la chambre thoracique antérieure par un pavillon vibratile, tandis que la branche externe s'ouvre à l'extérieur par un pore situé un peu au-dessous et en arrière du 1"”.pied séligère (IV° segment). (PI. xxur, fig. 110).

Lorsqu'on ouvre un Ampharete, ces organes s'offrent immédia- tement aux regards sous la forme de deux boyaux jaune-verdâtres, s'étendant dans la chambre thoracique au-dessous de l'estomac, du deuxième segment séligère jusqu’à l'avant-dernier segment thora- cique environ. Ces deux boyaux sont insérés à la face ventrale et

398 PIERRE FAUVEL.

entre la deuxième et la troisième paire de glandes ventrales en arrière du diaphragme. Leur extrémité postérieure, flottant librement dans la cavité générale, s’enroule parfois autour du tube digestif et vient se placer entre le tégument et la face dorsale de ce dernier.

Chez les jeunes individus, grâce à leur couleur jaunâtre, ces boyaux s’observent facilement par transparence.

Ils sont insérés au-dessous de l’æsophage et reliés à ce dernier par un feuillet péritonéal, c'est ce qui a sans doute induit CLAPARÈDE en erreur.

Les deux branches qui composent ces gaînes sont de grosseur et de coloration différentes.

La branche externe est environ trois fois plus grosse que la branche interne. Cette dernière est d’une couleur jaune verdàtre très foncée, tandis que la première à grandes cellules claires est d’une teinte beaucoup plus pâle.

Dans leur portion libre les néphridies ont un diamètre sensible- ment constant. Au niveau de leur insertion entre les deuxième et troisième paires de glandes ventrales, elles viennent se rencontrer juste au-dessus du vaisseau ventral. Leurs branches internes foncées sont au contact l'une de l’autre.

En ce point la branche externe claire, s'élargit brusquement en même temps que l'organe se coude presque à angle droit (fig. 110). La grosse branche externe, après cet élargissement brusque se rétrécit de nouveau progressivement et, remontant contre la paroi latérale du corps, va s'ouvrir à l'extérieur par un pore très fin situé un peu en arrière du 1°” pied sétigère (IV° segment).

La branche foncée, interne, diminue de volume tout en restant accolée à la branche externe, puis traversant le diaphagme elle va s'ouvrir dans la chambre thoracique antérieure par un très petit pavillon vibratile.

Le pavillon s’ouvre donc dans le segment qui précède celui qui renferme le pore interne de la néphridie. C’est du reste la règle générale chez les Seédentaires.

La néphridie s’ouvrant dans la chambre thoracique antérieure qui ne contient jamais d'éléments sexuels ne peut servir à l'évacuation de ceux-ci.

Son rôle est purement excréteur.

»

En plaçant la néphridie enlevée à un animal vivant, sous le

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 399

microscope, il est facile d’apercevoir le mouvement des cils vibratiles qui tapissent abondamment son intérieur et qui y font circuler un liquide contenant de fines granulations jaunâtres. Les cils vibratiles y déterminent un double courant.

La structure histologique de l’entonnoir cilié est celle d'un épithélium vibratile à cellules cylindriques à contour peu distinct, et à noyau se colorant vivement par l'hématoxyline.

La lèvre inférieure du pavillon est repliée sur elle-même en forme de bourrelet, tandis que la lèvre supérieure se continue insensible- ment avec la paroi de l’endothélium péri!onéal qui revêt l'organe et le réunit aux téguments.

Les cellules qui composent la branche interne sont vibratiles, petites, cylindriques, complètement remplies par un contenu granuleux, jaunâtre, sans vacuoles. Le noyau qui occupe près de la moilié de la cellule est arrondi et pourvu d’un nucléole bien net (PI. xxuu, fig. 141-115). Les granulations jaunâtres ont la forme de sphérules fort petites, très réfringentes.

A la partie postérieure de l'organe, la branche interne se recourbe brusquement sur elle-même, s’élargit et forme en remontant la branche externe (fig. 118).

La structure histologique change aussitôt avec la coloration.

La branche externe est composée d'une assise de grosses cellules claires, cubiques ou ovales (fig. 113, 115, 118).

Dans la partie de la paroi qui est accolée à la branche imterne, ces cellules ne sont guère plus grosses que celle de cette branche, à peine le double.

Leur noyau montre déjà une tendance à émigrer contre la paroi de la cellule et le contenu de celle-ci commence à renfermer des vacuoles. Dans la paroi opposée, les cellules prennent un développe- ment beaucoup plus considérable. Elle sont, en général, creusées d'une grande vacuole tandis que le noyau est rejeté dans un angle el que le contenu granuleux très réduit tapisse irréguliérement les parois de la cellule.

Cette branche est moins fortement ciliée que l’autre. Si l’excrétion s’y fait encore, elle est beaucoup moins active que dans la branche interne.

JoyEux-LAFFuIE (90) a signalé une disposition analogue chez le Chétoptère. La partie du tube néphridien en rapport avec le

400 PIERRE FAUVEL.

pavillon vibratile est étroite, très pigmentée, et joue le principal rôle dans l’excrétion, tandis que la portion en rapport avec le pore externe est très élargie et ne joue plus aucun rôle excréteur.

Comme le fait remarquer l’auteur, c'est encore un argument contre la théorie étrange de Cosmovicr (79) qui voit dans les organes segmentairesla réunion de deux organes distincts, dont l’un, externe, qu'il appelle le Bojanus, jouerait un rôle urinaire, l’autre, interne à pavillon vibratile, l'organe segmentaire, serait purement un organe d'émission des éléments sexuels.

La néphridie antérieure de l'Ampharete offre une très grande ressemblance avec la néphridie antérieure de la Melinna palmata, mais tandis que chez cette Annélide les néphridies au nombre de quatre paires sont presque entièrement semblables, à la dimension près du pavillon vibratile, il en est tout autrement chez l'Ampharete.

D'abord il n'existe que deux paires de néphridies au lieu de quatre et elles ne sont pas situées dans des segments contigus.

La première, nous l'avons vu, appartient au IV° segment (1* sétigère), elle est bien l’homologue de la néphridie antérieure de la Melinna.

Mais la seconde appartient au VI° segment (3° sétigère), elle correspond donc à la troisième paire de la Melinna et le segment est dépourvu de néphridie.

En outre, cette dernière paire ne ressemble que de très loin à celle que nous venons de décrire. Elle se rapproche beaucoup plus des néphridies de l’'Amphicteis et des Terébellides. En sorte que l’'Ampharele a une néphridie antérieure de Melinna et une néphridie postérieure d’Amphicters.

Celle-ci s'ouvre dans la chambre thoracique postérieure et ne sert guère qu’à l'évacuation des produits sexuels.

C’est ce qui explique son extrême atrophie en dehors de l’époque de la maturité sexuelle. En été, alors que les animaux ne renferment plus de produits génitaux, cette atrophie est telle que l'organe échappe très facilement à l'observation et qu’il est même peu aisé à retrouver dans des séries de coupes.

En mars et avril au contraire, au moment de la ponte, ils atteignent une dimension relativement considérable et sont alors faciles à étudier.

Ces organes, de volume éminemment variable, sont situés de

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 401

chaque côté de la ligne médiane ventrale, sous les muscles obliques, dans les chambres néphridiennes en arrière et en dehors des glandes ventrales (PI. xx, fig. 110, P. N. 5).

La néphridie a l'aspect d’un sac ovoïde à parois minces el transparentes, divisé intérieurement en deux parties par une cloison longitudinale (fig. 117 et 114).

En réalité c'est un tube recourbé en V dont les branches sont élroilement accolées au point de ne plus se laisser distinguer extérieurement, surtout dans le voisinage du coude renflé démesu- rément.

Cette sorte de cornemuse donne deux branches (fig. 110-114) dont l’une, se rétrécissant graduellement, va s’ouvrir à l'extérieur par une papille arrondie située à la base et un peu en arrière du mamelon sétigère (VI® segment), tandis que l’autre s’épanouit en entonnoir cilié dirigé antérieurement et s'ouvrant dans le segment.

Le pore néphridien n'est visible que sur des coupes en temps ordi- naire (fig. 116) mais à l'époque de la reproduction il se gonfle et forme une papille arrondie facilement visible à la loupe sur l'animal vivant (fig. 120).

Cette papille est située entre la pinnule et le mamelon pédieux, un peu en dessous et en arrière de ce dernier.

L'ouverture de la papille est abondamment garnie de forts cils vibratiles ainsi que le conduit qui y aboulit.

Un court canal cilié réunit le pavillon vibratile à la portion ovoïde de l'organe (PI. xxu1, fig. 141).

L'entonnoir formé par le pavillon vibratile, quoique assez grand, est relativement peu évasé, sauf dans le sens vertical. Il est comme froncé et marqué de plis longitudinaux mais ne présente pas de digitations analogues à celles figurées par CuNNINGHAM (877) pour la Lanice conchilega.

La lèvre externe a un rebord épais et assez court, la lèvre interne plus développée se recourbe en arrière, embrassant dans sa courbe le vaisseau transversal du segment correspondant, contre lequel elle s'appuie (PI. xxun, fig. 114).

Les parois du pavillon vibratile ont la structure des tissus jeunes et des épitheliums vibratiles. C'est-à-dire qu’elles contiennent de nombreux noyaux arrondis, à nucléole peu distinct, très rapprochés les uns des autres. Les limites des cellules sont indistinctes.

402 PIERRE FAUVEL.

Cet aspect provient à la fois du rapide développement de l'organe et de sa ciliation particulièrement accentuée.

A mesure qu'on s'éloigne du pavillon vibratile les cellules de la paroi deviennent de plus en plus nettes. Les parois de la grande poche néphridienne sont composées d’une seule assise de cellules assez grandes, arrondies ou ovalaires, à vacuole centrale et à noyau rejeté à la périphérie. En somme l'aspect de ce tissu rappelle beaucoup celui de la branche externe des néphridies antérieures.

La portion inférieure de la poche située au-dessous de la cloison horizontale communique avec le pavillon vibratile, tandis que la portion supérieure est en rapport avec le conduit excréteur abou- tissant à la papille externe qui est fortement cilié.

Une coupe de la papille montre la paroi du conduit revêtue d’une assise cellulaire à éléments petits et aplatis (fig. 116). La couche des muscles circulaires des léguments, que traverse le conduit, forme autour une sorte de sphincter qui ferme l’orifice de la papille.

En résumé la néphridie antérieure, en rapport avec la chambre thoracique antérieure par un petit pavillon cilié, sert à l’excrétion. L'épuration de la lymphe a lieu dans le tissu dense de la branche interne et les produits liquides ou solides qui en résultent sont expulsés par la branche externe qui ne joue plus que le rôle d’un conduit évacuateur de ces produits.

La néphridie postérieure, très réduite en dehors de la période de maturité sexuelle, ne présente, dans aucune partie, de tissu fortement pigmenté analogue à celui de la branche interne de la néphridie antérieure.

Par contre elle est pourvue d’un pavillon vibratile relativement grand et d’un conduit externe assez large, fortement cilié, abou- tissant à une papille bien développée.

Elle sert à l'émission des produits solides, tels que les vieilles cellules lymphatiques.

A l’époque de la reproduction, les cellules lymphatiques dispa- raissent presque entièrement de la cavité générale qui est alors remplie d'œufs ou de spermatozoïdes.

La néphridie postérieure se développe alors davantage et sert d’organe évacuateur de ces produits.

Les œufs el les spermatozoïdes ne pénètrant jamais normalement dans la chambre thoracique antérieure, ne sont pas évacués par la

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 403

néphridie antérieure dont le rôle est exclusivement excréteur ou rénal.

Sur ce point nous sommes, en ce qui concerne l’Ampharele, complètement d'accord avec MEyER qui, le premier, a distingué les fonctions différentes des néphridies antérieures et des néphridies postérieures.

XV. REPRODUCTION.

SL

Ovogénèse.

Le développement des produits génitaux a lieu chez ’Ampharete pendant l'hiver.

Les œufs et les spermatozoïdes commencent à apparaître vers la fin de septembre. Ils se multiplient et se développent pendant la saison froide et ce n’est qu'au mois de mars qu’a lieu la ponte.

D'’avril à septembre, la cavité générale ne renferme plus aucune trace d'éléments sexuels.

Le cas de l'Ampharete est un nouveau démenti à l’assertion de CuENoT (91) qui prétend, en parlant des organes génitaux des Polychètes « qu'on n’en trouve nulle trace en hiver » et « qu'à la vérité il n’y a pas le moindre indice de tissu sexuel pendant la mauvaise saison » (p. 427).

Bon nombre d’Annélides, cependant, sont gonflées de produits sexuels pendant tout l’hiver.

De ce nombre, nous pouvons citer la ZLipephile cultrifera, que nous avons toujours rencontrée bourrée d'œufs ou de spermatozoïdes en décembre et en janvier.

En janvier nous l’avons vue pondre sous nos yeux à l’état atoke. En mai-juin elle est à l’état hétéronéréidien, tandis que sa proche parente la Praxithea irrorata ne revêt la forme épitoke qu’en septembre.

404 PIERRE FAUVEL.

Chez les Ampharétiens il existe aussi des différences dans des genres très voisins. Nous avons vu pondre l’Amphicteis en juin et nous en avons retrouvé en septembre ayant déjà des œufs.

Les ovules se développent chez l'Ampharete aux dépens du péri- toine des vaisseaux transversaux.

A l’époque de la reproduction les cellules péritonéales s’accrois- sent, s’épaississent et prolifèrent activement de façon à entourer le vaisseau qui les supporte d’une grosse grappe d’ovules à tous les états de développement (PI. xxux, tig. 119).

Les cellules du péritoine sont d’abord peu différenciées, elles gardent leur forme polygonale. Leur protoplasma incolore renferme un noyau arrondi très pale. À mesure que l'on s’éloigne du vaisseau on rencontre des cellules plus grosses qui commencent à s’arrondir. Le noyau subit une active division et la cellule semble ne renfermer qu'un contenu granuleux commençant à absorber fortement les colorants nucléaires. Puis on distingue de nouveau le noyau de la cellule, mais ses limites sont encore peu précises et le protoplasma de la cellule est aussi fortement coloré que le noyau.

Celui-ci cependant continue à se développer. Ses limites deviennent très nettes. Sa forme est circulaire et son diamètre égale les deux tiers de celui de l’ovule entier. 11 renferme un nucléole très foncé. Le protoplasma qui l'entoure est encore fortement coloré en violet par l’hématoxyline et présente un aspect homogène fine- ment granuleux.

A ce stade l’ovule, qui mesure environ 30 4 de diamètre, tombe dans la cavité générale il doit achever son évolution.

A ce stade l'œuf présente presque toujours une modification singulière : son noyau renferme un nucléole double ou deux nucléoles, rarement trois. On rencontre toutes les modifications : nucléole simple, nucléole étranglé par le milieu, deux nucléoles accolés et enfin deux nucléoles bien nettement séparés (fig. 132- 433-134). Ces nucléoles sont très fortement colorés par les réactifs.

Chez toutes les o d'Ampharele que nous avons examinées, nous avons retrouvé ces nucléoles doubles en grande quantité mais seulement à ce stade du développement. Nous n’en avons jamais rencontré deux dans l'œuf mûr, ni dans l’œuf non détaché de l'ovaire.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 405

Le second nucléole disparaît donc puisqu'on ne le retrouve pas dans l'œuf mûr ? Comment s'opère cette disparition ?

Nous pensons qu'il est simplement expulsé.

Nous avons rencontré une fois un ovule (fig. 133) dont le noyau venait toucher la paroi. Un nucléole se trouvait à l’intérieur du noyau contre le bord en contact avec la paroïi. Le second nucléole était à l'extérieur de l’ovule en contact avec lui, au même point que le noyau à l’intérieur. En ce point situé au-dessous du nucléole expulsé l’ovule était déprimé.

Nous avons également retrouvé deux nucléoles dans les ovules de l'Ampharele gracilis, de l'Amnphicteis Gunneri, de la Sanytha adspersa et de la Melinna.

De semblables nucléoles composés ont déjà été signalés chez les Polychètes par Vsspovsky (81) chez le S{ermaspis, par GrARD (81) chez le Spiophanes Bombyx et plus récemment par A. MicHEeL (96) chez la Nephthys et l'Hediste diversicolor.

Les ovules à deux nucléoles et ceux qui sont à peu près au même point de développement, mesurent environ la moitié ou le tiers de la taille de l'œuf mûr. Ils ne sont limités que par une mince membrane se présentant sur les coupes comme un simple trait. Le plasma homogène et finement granuleux absorbe vivement les colorants nucléaires. Le noyau présente un réticulum encore très foncé.

L'œuf à maturité (fig. 131 et 135) est entouré d’une membrane hyaline assez épaisse (3 4) très visible sur les coupes. Le protoplasma n’absorbe plus l'hématoxyline tandis que l’éosine colore en rouge vif les sphérules vitellines de 3 u à 124 qui s’y sont formées en quantité.

Le noyau (vésicule germinative), arrondi, occupe le centre de l’œuf. Il est clair et on y distingue plus qu'un léger réticulum coloré en violet par l'hématoxyline.

Le nucléole (tache germinative) a changé d'aspect aussi. Il est devenu circulaire et la nucléine fortement colorée s’est répartie à sa périphérie tandis que le centre reste clair. Il est situé à peu près au centre du noyau.

L'œuf mûr pondu est ovoide, il mesure environ 100% X 160 w. Sa couleur est d'un rouge saumon assez vif, la vésicule germina- üve, quireprésente environ un tiers du diamètre de l’œuf est incolore et transparente, en sorte que l'œuf a un aspect annulaire.

Quand l'œuf est pondu depuis quelque temps, son enveloppe se

406 PIERRE FAUVEL.

gonfle et il se forme un espace assez considérable entre elle et le vitellus.

En janvier et février les Ampharele sont tellement remplis d'œufs que ceux-ci, très élastiques, pressés les uns contre les autres, prennent des formes polyèdriques.

On voit par transparence les œufs circuler d’un bout du corps à l’autre. Cependant ils sont répartis surtout dans la région thoracique et dans les premiers segments de la région abdominale. Dans les derniers segments on n’en aperçoit plus que de rares, isolés, engagés à la base des pinnules.

Dans la région thoracique ils forment une couche continue, au-dessus de l'estomac, qu’il masquent entièrement jusqu’à la base de l'œsophage, mais ils ne peuvent franchir le diaphragme.

On en trouve d’engagés à l'intérieur des parapodes.

Il ne se produit aucune atrophie du tube digestif ou des muscles, comme GRAVIER (96) en a signalé une chez les Phyllodociens.

SE Spermatogénèse.

Les testicules se développent comme les ovaires aux dépens du péritoine des vaisseaux transversaux.

Les cellules péritonéales, prolifèrent et forment un follicule enveloppé d'une mince membrane et renfermant une foule de petites cellules rondes qui tombent librement dans la cavité générale quand elles ont atteint un diamètre de 1 uw à 5u (PI. xx, fig. 128-129).

Ce sont les spermatogonies (fig. 129).

Le noyau sphérique remplit presque entièrement l'intérieur de ces cellules. Il contient de fines granulations ayant une tendance à se grouper à sa périphérie et n’absorbant pas très énergiquement les colorants nucléaires, en sorte que sa teinte générale est assez pâle.

Dans la cavité générale les spermatogonies se développent ou proliférent, formant des amas muriformes (fig. 130).

Ces spermalogemmes, qui atteignent un diamètre de 40 y à 60 u, se composent de cellules filles groupées autour d’une masse centrale granuleuse, le cylophore (fig. 125-126). Ces cellules filles, à parois

L]

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 407

très minces, ont de 8 à 10% seulement, un noyau sphérique les remplit presque entièrement. Ce noyau est d’abord rempli de fines granulations de nucléine absorbant assez légèrement les colorants nucléaires (fig. 126-127).

Peu à peu, à mesure que le développement s’avance, les sperma- tocyles montrent de plus en plus d’affinité pour les colorants, les granulations deviennent plus grosses et plus foncées et chacune d'elles correspond enfin à une spermatide, nouvelle division du spermatocyte (fig. 184 et 125).

Chaque spermatide donne naissance à un spermatozoïde, mais les spermatides, issues des spermatocytes, ne se séparent pas et les spermatocytes qui leur ont donné naissance ne s'étant pas non plus séparés les uns des autres, il se forme finalement une masse de spermatozoïdes accolés par la tête avec leurs filaments dirigés vers l'extérieur (fig. 122).

Le centre de cette masse sphérique ou ovoïde de spermatozoïdes est creux et correspond au cylophore disparu.

Ces amas ont à peu près les dimensions des spermatogemmes qui leur ont donné naissance, c’est-à-dire de 50 y à 60 u.

Les filaments des spermatozoïdes qui le hérissent s’agitent en tous sens et font mouvoir la masse entière.

Arrivés à leur complet développement, les spermatozoïdes peuvent se séparer et nager librement dans la cavité générale, mais souvent ils sont évacués par les organes segmentaires encore aggrégés ensemble et ce n’est alors que dans l'eau de mer qu’ils se séparent pour nager rapidement en tous sens à la recherche des œufs.

A cet élat le spermatozoïde est formé d'une tête en forme de sphère régulière, très réfringente, de3 u à 4 u de diamètre, et d’un long filament caudal très délié pouvant atteindre jusqu'à 50 & ou 60 & (fig. 123).

La spermatogénèse de l’Ampharete est en somme très analogue à celle décrite par MaLAQuIN (93), chez les Syllidiens Elle diffère au contraire de celle décrite par GRAVIER (96), chez les Phyllodociens ; mais néanmoins il nous semble que les différences sont assez secon- daires et que les deux modes de formation des spermatozoïdes peuvent se réduire à un seul.

En effet, chez les Phyllodociens les spermatlogonies donnent naissance à un grand nombre de spermatocytes d’abord renfermés

408 PIERRE FAUVEL.

dans un kyste quise rompt et les met en liberté. Chaque spermato- cyte se divise ensuite en spermalides isolées qui se transforment individuellement en spermatozoïdes.

Chez les Ampharéliens la spermatogonie se divise aussi en nombreux spermatocyles . La seule différence c’est que ceux-ci ne se développent pas dans un kyste et qu'au lieu d’être mis ensuite en liberté ils restent agrégès autour du cytophore.

Chaque spermatlocyte se divise ensuite en nombreuses sperma- tides donnant naissance aussi chacune à un spermatozoïde comme chez les Phyllodociens ; seulement les spermatides restent accolées au lieu d’être mises en liberté.

En somme, dans les deux cas, les divisions successives sont les mêmes et chaque spermatide donne naissance à un seul sperma- tozoïde ; seulement tandis que chez les Ampharetiens tous les produits secondaires de la spermalogonie restent accolés jusqu’à la mise en liberté des spermatozoïdes, chez les Phyllodociens les éléments se séparent les uns des autres à chaque nouvelle division.

S IL.

Ponte.

La ponte de l’Ampharete a lieu dans les premiers Jours de mars.

A cette époque, les femelles bourrées d'œufs sont d’une vive couleur rose saumon due à la coloration même des œufs vus par transparence à travers les téguments. Les mâles, gonflés de sperme, sont d'un blanc laiteux très légèrement verdàtre.

À priori nous avions tout lieu de penser que la ponte se faisait par l'intermédiaire des néphridies postérieures.

Cependant beaucoup des animaux qui nous étaient alors envoyés de St-Vaast, par notre ami M. MaLaBp, arrivaient dégonfiés de leurs œufs, ayant pondu pendant le voyage. Ces animaux présentaient tous des ruptures des téguments.

Nous désirions donc beaucoup constater de visu comment les choses se passaient.

Nous avons eu la bonne fortune d'y arriver après de longues observations.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 409

Des individus © bien vigoureux étaient extraits de leur tube et placés dans une petite cuvette de glace contenant de l’eau de mer. Le tout porté sous un bon miscrocope de dissection, il ne restait plus qu’à regarder avec patience pendant de longues heures, pour suivre la marche de l'opération.

Dans ces conditions on voit aisément les œufs, brassés par les mouvements de l'animal, circuler dans toute la longueur du corps, depuis le diaphragme antérieur, jusqu'aux segments postérieurs.

Les deux pores néphridiens postérieurs, gonflés et faisant saillie en papille sont bien visibles un peu au-dessous et en arrière du pied sétigère (PI. xxx, fig. 120).

Parmi les œufs qui circulent dans la cavité générale nous ne tardons pas à en voir deux ou trois s'approcher de la base de la papille.

On ne peut distinguer les parois de la néphridie, trop minces et trop transparentes, mais les mouvements de rotation sur eux-mêmes des trois œufs nous indiquent qu’ils sont engagés dans le conduit externe de la néphridie et qu’ils y cheminent sous l’action des cils vibratiles.

Un des œufs arrive à la base de la papille, avance, puis recule et enfin finit par s’y engager.

On distingue à ce moment l'ouverture de la papille sous la forme d'unpetit cercle, au centre d’un bouton presque sphérique, et àtravers cette ouverture on aperçoit au-dessous l'œuf encore engagé dans le conduit il continue à avancer et à reculer alternativement en tournant sur lui-même (fig. 120). |

Enfin l'œuf s'engage dans l'ouverture qui se dilate légèrement tandis que l'œuf, très élastique, s’allonge pour franchir le col; un mouvement brusque de l'animal le rejette alors à l'extérieur.

Les œufs sont ainsi pondus un à un et rejetés au hasard dans la mer.

Ils ne sont pas agglomérés en pontes caractéristiques comme chez les Phyllodociens, les Arenicoles, les Ophelia, etc.

Ils ne sont pas accompagnés de mucus et ne s’agglulinent pas ensemble.

Il en est exactement de même chez l'Amphicteis.

Au bout de quelque temps de séjour dans l’eau de mer, la membrane externe de l'œuf se gonfle fortement et présente un

410 PIERRE FAUVEL.

aspect assez réfringent, strié, semblable à celui de la cuticule.

Les spermatozoïdes sont évacués de la même facon que les œufs, mais généralement par petites masses muriformes de 40 y à 60 y de diamètre, formées par les spermatozoïdes accolés par la tête. Il y a peu de spermatozoïdes libres.

Peu de temps après leur mise en liberté les spermatozoïdes se séparent les uns des autres et nagent isolément.

Ils se meuvent par mouvements rapides, saccadés, irréguliers. Leur filament caudal est alors impossible à apercevoir à cause de la rapidité de ses mouvements.

La tête est formée d’une sphère régulière très réfringente. Ce globule sphérique de 3 w à 4 u semble, en coupe optique, entouré d'une zone pellucide. C’est sans doute un effet de réfraction, son aspect au microscope étant comparable à celui d’une goutte d'huile.

Au bout d'une heure les œufs sont hérissés de centaines de spermatozoïdes. La tête butée contre la membrane externe de l'œuf ils agitent vigoureusement leur filament caudal.

Après un commencement de segmentation les œufs se sont décomposés et nous n'avons pu étudier le développement.

Il aurait fallu être sur place au bord de la mer.

Nous n'avons trouvé dans nos cristallisoirs les Ampharete éetQ élaient pourtant assez nombreux, qu'une seule larve, dont nous donnons la figure (fig. 121).

A la partie antérieure on distingue vaguement, un rudiment de lobe céphalique frangé d’une épaisse couronne antérieure de cils vibraliles, et quatre ou cinq anneaux assez bien marqués. La partie postérieure était déjà attaquée par une grande quantité d'infu- soires.

On voit par transparence l'ébauche du tube digestif.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 411

XVI.

Étude de Amphicteis Gunneri, SArs.

Amplhitrite Gunneri. SARS (35), p. 50, pl. XI, fig. 30.

Crossostoma Midas. Gosse, 5), p. 310, pl. VIIL fig. 7-12.

Amphicteis Groenlandica. GruBE (60), p. 109, pl. V, fig. 3 (70), p. 12 et 14).

Amphicteis Gunneri. MaLMGRrEN (65), p. 365, pl. XIX, fig. 46 (67), p. 214 ; KiNBERG (66), p. 343 ; DE QUATREFAGES (65) ; DANIELSEN (57-59) : KoREN (57) ; SARS 64b; GRUBE (10), p. 12; KuPPrer (73) ; MaLM (74); Mc'Inrosu (74,75, 86) ; Mogius (75); Marion (75, 82); MaARENZELLER (77); THkeL (78); HANSEN ARMAUER (82) ; W1ren (89) ; BibenKkAP (94) ; P. Fauvez (95-96).

Amphicteis curvipalea. CLAPAREDE (70), p. 132, pl. XIIL fig. 5 ; PANCERI (79) ; Lo Bianco (93), p. 63 ; DE SrT-Josepx (94), p. 163.

2

Morphologie.

Le corps, long de 20 à 40 ”/,, est blanc jaunâtre, rosé sous le ventre. On voit par transparence l'estomac rouge brun et les vaisseaux sanguins verts. Les branchies sont rendues vertes par le sang qui y circule, elles sont annelées de brun, de blanc et de jaune. La face inférieure des quatre premiers segments est semée de petits points blanchâtres et de larges taches brunes. La face supérieure du corps est mouchetée de taches blanches, le lobe céphalique est semé de taches brunes. On voit que la coloration concorde bien avec celle décrite pour l'A. curvipalea par CLAPAREDE (70, p.134), Lo BraANco (93, p. 63) et de Sr-JosePx (94, p. 164).

Le nombre des segments sétigères (région thoracique). est de dix-sept. Les pinnules uncinigères commencent au quatrième seg- ment sétigère (VII* segment). Le segment anal, achète, porte deux cirres filiformes de longueur assez variable.

Le lobe céphalique est presque carré et porte deux carènes saillantes, divergentes, dépassant légèrement le bord antérieur du

412 PIERRE FAUVEL.

lobe et formant deux sortes de cornes obtuses (PI. xxv, fig. 150). Ainsi que nous le verrons par l’étude du système nerveux, ces productions représentent des palpes rudimentaires qui viennent se réunir à la base de la partie frontale. De cette base partent deux autres bourrelets saillants, plus divergents, pigmentés, qui longent le bord antérieur du segment buccal.

Ce sont les bourrelels des organes nucaux appartenant à la quatrième catégorie de RacovirzA (96, p. 125). En avant et un peu en dessous de ces bourrelets se trouvent les yeux formant de chaque côté une petite bande elliptique de points noirs.

Les tentacules, au nombre d’une vingtaine, sont lisses, c'est-à-dire dépourvus de pinnules. Ils sont rétractiles dans la bouche. Ils sont assez fortement annelés, quoique moins cependant que chez l’'Am- pharete, et présentent deux bandes longitudinales brunâtres. Leur face antérieure, creusée en gouttière, est garnie de cils vibratiles.

Le segment buccal est plus court que le lobe céphalique. A la face ventrale il forme la lèvre inférieure de la bouche, saillante, lisse, demi-circulaire ; à la face dorsale il forme bourrelet sur le lobe céphalique.

Le deuxième segment est nu et assez court.

Ces deux premiers segments sont plus petits que le II" sous lequel ils peuvent rentrer en partie en se télescopant comme des tubes de lorgnette (fig. 151).

Ce IIT° segment plus large, forme donc bourrelet au-dessus du Il°, quoique beaucoup plus large il est moins long que ce dernier. Il porte de chaque côté, sur un mamelon arrondi, un éventail de 7 à 10 palées, soies jaunes, brillantes, simples et lisses.

Ces palées, chez les exemplaires de Naples et de Tatihou, ont la pointe un peu obtuse et légèrement recourbée, tandis que chez les exemplaires de Suède elles sont en général droites et terminées en pointe très effilée. Mais ces différences n’ont aucune valeur spéci- fique, car on trouve des Amphicteis de Suède ayant des palées plus ou moins recourbées (fig. 159, 161) et plus ou moins effilées, etsur des Amphicteis de Naples ou de Tatihou des palées presque droites et effilées (fig. 158 à 161).

En général elles sont effilées et droites chez les jeunes me courbées et obtuses chez les vieux.

Le IV' et le segment portent chacun un petit parapode norma-

RECHERCHES SUR LEa AMPHARÉTIENS. 413

lement constitué et pourvu d’un petit faisceau de soies capillaires, souples, subulées.

Ces mamelons sétigères sont insérés plutôt dorsalement que latéralement (fig. 150).

Les branchies paraissent extérieurement insérées sur les segments HI, IV et V. Sur certains individus, on peut cependant se rendre compte, même extérieurement, qu’elles appartiennent à quatre segments distincts (fig. 150).

La 1"° est insérée sur le IIT segment, elle empiète un peu sur le IV"; la est nettement sur le IV"; la empiète encore un peu su: le IV° mais appartient surtout au ; enfin la est insérée également sur ce segment mais elle empiète un peu en arrière sur le VI° et sa base est parfois en contact avec le mamelon pédieux de ce segment, ce qui indique qu'elle doit appartenir à celui-ci, ainsi que l'étude de l'appareil circulatoire et du système nerveux le démontrent par ailleurs.

Ces branchies simples, subulées en forme de gros aiguillons qui peuvent se recourber sur la tête en s’incurvant légèrement, forment deux groupes latéraux laissant entre eux un petit espace libre sur la ligne médiane dorsale.

Au VI segment le mamelon pédieux, plus développé, est situé latéralement. Sa forme est celle d’une éminence conique ou subcy- lindrique, pourvue du côté ventral d’un petit cirre en massue, signalé d’abord par CLAPAREDE (7O, PI. x, fig. 5, Aa), puis par Lo Braxco (93) et de Sanr-Josepx (94).

Il porte deux rangées de soies. Ces soies longues, fines, légère- ment incurvées, ont un limbe tantôt lisse et mince tantôt strié et plus large, sans que la provenance des exemplaires influe sur ces differences tout individuelles. Elles ressemblent en somme beaucoup à celles de l’'Ampharete. MALMGREN indique bien pour l'A. Gunneri un limbe lisse, mais Mc’Ixtosx (74, p. 422) a retrouvé chez l'A. Gunneri des Shetlands un limbe strié. CLAPAREDE (70, fig. 3°) a figuré un limbe strié chez l'A. curvipalea et les exemplaires de Tatihou ont le limbe tantôt lisse tantôt strié. IL en est de même pour les oexemplaires de Suède que nous devons à l’obligeance du Professeur A. WIREN. |

La seconde rangée de soies est composée de soies plus courtes,

414 PIERRE FAUVEL.

plus fines et à limbe proportionnellement un peu plus large ; elles croisent obliquement celles de la première rangée (fig. 156).

Au VII segment (4° sétigère) apparaissent les pinnules uncini- gères en forme de bouton aplati, assez longuement pédonculé, portant sur son bord antérieur une seule rangée d'environ 180 plaques onciales pectiniformes, rétrogressives (fig. 154, 155).

Ces plaques sont élargies au milieu et portent en arrière une sorte d’ergot sur lequel s’instre une longue soie tendon.

Elles portent 6 ou 7 dents pointues recourbées. La première, très pointue, est petite ; viennent ensuite 4 ou 5 longues dents acérées, recourbées, puis sous la ou la 6°, selon le cas, se dissimule une petite dent courte, obtuse, comprise entre le bord recourbé ou menton de la plaque et la dent précédente qui la cache en partie (fig. 154 et 155).

La petite dent semble avoir échappé à MALMGREN, c'est pourquoi sans doute il indique 5-6 dents au lieu de 6-7.

DE SAINT-JosEPx (94, p. 165), indique 7 dents pour les plaques de la région thoracique et 6 pour les uncini de la région abdominale.

Sur des exemplaires de diverses provenances nous avons rencontré tantôt 6, tantôt 7 dents. Parfois même les deux sortes d’uncini se rencontrent dans la même pinnule (fig. 154-155), ce qui prouve que ce caractère n’a aucune importance spécifique.

Il ne faut pas ajouter plus d'importance aux légères différences de forme des wncini signalées par Mc'Inrosa (74, p. 422, PI. x1v, fig. 14 et 86 ; PI. xxvi, fig. 27 à 29), pour les variétés : Af/antica, des Shetlands et du St-Laurent, aspects différents qui se trouvent souvent réunis sur un seul individu suivant les régions du corps considérées.

À la face dorsale de la région thoracique les segments sont à peine indiqués par de faibles sillons ; à la face ventrale ils portent d’épais bourrelets épidermiques, ou boucliers en forme de tores.

Le IV° segment, par exception, porte deux étroits bourrelets au lieu d’un seul gros.

À parlir du 15° segment thoracique, les boucliers s’atténuent brusquement au point de ne plus exister que sur les côtés du segment el, à partir de cel endroit commence la profonde gouttière ventrale qui s'étend dans toute la région abdominale et rappelle celle des Ophéliens.

Elle est surtout marquée sur les animaux fixés et contractés.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 415

Dans la région abdominale les mamelons sétigères disparaissent mais à leur place on retrouve un pelit cirre en massue représentant le cirre ventral du parapode disparu, dont il est le dernier vestige.

Ce cirre creux est en relation avec la cavité générale, un épais bourrelet épidermique et un rudiment de la museulature du para- pode. Il ne diffère en rien du cirre ventral du pied, seulement celui-ci a disparu avec les soies (fig. 152).

Les pinnules s’aplatissent un peu, mais pas au point de ne former qu'une rame en éventail comme chez l'Ampharele, leur face posté- rieure restant toujours un peu bombée, même dans les derniers segments.

Ces pinnules portent un petit cirre très réduit, simple prolonge- ment de leur angle supérieur (fig. 152). Ge cirre rudimentaire est bien l’homologue de celui qui existe plus développé, chez l’Ampharete au même endroit.

D'autre part nous voyons que le parapode dorsal est représenté par l’autre cirre inséré plus dorsalement au-dessus du bourrelet, nous pouvons donc en conclure que le cirre de la pinnule de l’Ampha- rete n’est pas un vestige du parapode dorsal et que celui-ci ne laisse aucune trace de son existence dans la région abdominale, tandis que chez l'Amphicteis il y est encore représenté par son cirre ventral qui persiste en dépit de la disparition du mamelon pédieux et des soies.

Les cirres anaux sont de longueur variable, tantôt longs et subulés, tantôt courts à extrémité renflée.

Nous réunissons l’A. curvipalea et Y'A. Gunneri. D'abord, nous basant sur la description de CLAPARÈDE, nous avions maintenu la distinction entre les deux espèces (95* et 95°). Mais depuis nous avons retrouvé un certain nombre d'Amphicleis à Tatihou, nous avons eu également une certaine quantité d’A.curvipaleadela Station zoologique de Naples et M. le professeur A. WIREN a eu l’obligeance de nous envoyer des exemplaires d'A. Gunneri de Väderoarne ; or, en comparant les exemplaires de ces trois localités si différentes, nous n'avons pu trouver entre eux aucune différence sérieuse.

D'après la description de CLAPARÈDE, au contraire, l'A. curvipalea présenterait avec l'A. Gunnerides différences appréciables dont les principales seraient l'absence d'un segment nu à la suite du segment buccal, la forme différente du segment céphalique et l'insertion des

416 PIERRE FAUVEL.

branchies sur deux segments au lieu de trois. Nous avons vu que la forme recourbée des palées n’a aucune importance.

Il suffit de jeter les yeux sur la figure de CLAPAREDE (70), repré- sentant la portion antérieure de l'A. curvipalea (PI. xui, fig. 5) pour se convaincre qu'elle est absolument fantaisiste.

Il n’a pas vu le Il" segment parce que les tentacules étaient déva- ginés ; ce segment est rentré sous le III° qui le masque. La même cause modifie la forme du lobe céphalique.

Ce n'est pas la première fois, malheureusement, que nous avons pu constater l’inexactitude fréquente des descriptions de cet auteur dont le texte et les figures sont à chaque instant en contradiction.

L’A. curvipalea de Naples a le lobe céphalique exactement sem- blable à celui de l'A. Gunneri du Nord. Il a, comme lui, un segment nu faisant suite au segment buccal et bien distinct de ce dernier.

DE ST-Josepx a vérifié aussi ces deux points sur un À. curvipalea trouvé par lui à Dinard et sur un exemplaire de Naples.

Or, comme il n’existe qu'une seule espèce d’Amphicteis à Naples, il n’y a pas de doute.

L'insertion des branchies semble souvent limitée aux segments III et IV, mais ce caractère est loin d’être fixe, aussi bien chez les exemplaires de Naples que chez ceux du Nord.

Tantôt l'insertion semble limitée à deux segments, tantôt à trois, parfois enfin on voit la paire insérée sur le VI° segment.

MaRioN (75, p. 15) réunit aussil’A. Gunneri Sars et l'A. curvi- palea Czr.

Nous pensons avoir démontré qu'aucune différence n’existe réelle- ment entre les deux espèces et que l'A. curvipalea doit disparaitre, ainsi que nous l’avons déjà déclaré (96).

S'ÉE

Distribution et Habitat.

L'Amphacteis Gunneri est, de tous les Ampharétiens, celui dont l'aire d'extension est la plus étendue.

Sa patrie semble être surtout dans les mers du Nord. Il a été signalé sur les côtes de Suède, de Norvège, de Finmark, au

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 417

Spitzberg et au Groenland par MALMGREN (65, p. 366), dans la mer de Kara et le détroit de Matotchkin par THÉEL (79, p.61), en Ecosse par Mc'Inrosu (74), en Angleterre par Gosse (55) ; KINBERG (66) l'a dragué dans la Manche. DE ST-Josepx (94) et nous-même (95) l'avons trouvé sur les côtes françaises de la Manche. IL existe également dans la Méditerranée, tant sur les côtes de France Marion (75 et 82), que sur celles d'Italie d’après CLAPARÈDE (TO) et Lo Branco (93). Enfin, d'après Mc'Inrosx (86, p. 428), le « Challenger » l'a rencontré, devant Gibraltar, sur les côtes du Canada et en plein Océan, entre l'Espagne et l'Amérique.

Cet animal vit en général à une grande profondeur : de 20 à 250 brasses, d’après MALMGREN (65, p. 366), de 20 à 120 mètres d’après TageL (79), de 5 à 40 mètres dans la Méditerranée d’après MARION et Lo Branco.

Dans l'expédition du « Challenger », il a été dragué par 2.750 brasses de fond ! (Mc’Ixrosx, 86, p. 428).

C'est la plus grande profondeur à laquelle jamais Ampharèétien ait été dragué et bien peu d’autres Polychètes atteignent ou dépas- sent cette profondeur.

Cependant il a été trouvé à la côte, à marée basse par DE ST-JosEpx et par nous à Tatihou, au niveau de très basses mers (95°, 95»). Dans cette dernière localité il a été aussi dragué par 25 mètres.

A Tatihou cette espèce vit dans la vase des prairies de zostères.

Presque partout du reste, il a été trouvé sur fond de vase ou de sable vaseux. C’est l'habitat ordinaire des Ampharétiens.

Tube. L'Amphicteis Gunneri habite un tube enfoncé verti- calement dans la vase et pourvu d’une seule ouverture.

Ce tube, plus résistant que celui de l’Ampharete, est revêtu extérieurement de vase, de petits graviers, de débris de coquilles et de fragments de zostères.

A l'intérieur il est tapissé par une membrane assez épaisse, résis- tante, parcheminée, jaunâtre, rappelant un peu celle du tube du Chétoptère ou de la Sabelle.

Elle est formée de couches membraneuses concentriques présen- tant les mêmes réactions et la même structure fondamentale que chez l’'Ampharete , seulement elles sont plus épaisses, plus résistantes. Les couches internes, moins anciennes, se colorent davantage par la

418 PIERRE FAUVEL.

safranine et le bleu de Méthylène ; les externes plus jaunâtres se colorent moins aisément.

Elles sont striées. On y rencontre des plaques onciales restées engagées et par places de grosses stries parallèles et courtes qui sont des égratignures produites par celles-ci, mais impossibles à confon- dre avec la striation de la membrane.

SIL

Cuticule et Soies.

La cuticule présente des stries se croisant en général à 90°. Ces stries sont très fines.

Les pores sont plus grands et plus nets que chez l’'Ampharete. En outre il existe des pores en écumoire comme WIREN (8'7, p. 9) ena figuré chez l'Eumenia crassa (PI. 1, fig. 10).

La cuticule atteint une grande épaisseur en certains points de la région abdominale (jusqu'à 8 4 et 10 w.) L’hématoxyline la colore en violet pàale. Elle est souvent recouverte d’une couche de mucus solidifié de 3 y d'épaisseur fortement colorée en violet noir.

Les soies naissent aux dépens d’une grosse cellule unique, comme chez l Ampharete.

Elles ont une structure fibreuse bien visible. Coupées transver- salement, elles ont un aspect ponctué et, à un fort grossissement, ressemblent à un rayon de miel.

A la périphérie se trouve une couche anhiste, sorte de membrane plus réfringente qui se colore davantage.

La rangée supérieure composée de soies plus âgées se colore plus que la rangée inférieure de soies jeunes.

Les soies sont formées d’un faisceau de fines fibrilles.

Cette structure fibrillaire se reconnaît également sur des coupes

obliques et dans les soies traitées par la potasse et rompues ensuite.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 419

S IV. Epiderme.

La structure de l'épiderme est à peu près la même que chez l'Ampharete.

Cependant la prédominance des cellules à mucus en fiole colorées en violet foncé par l'hématoxyline, y est remarquable ainsi que la taille proportionnellement plus grande de ces cellules.

Les cellules à sphérules orangées, que nous avons signalées dans le premier bouclier de l'Ampharete, sont ici très abondantes à la face inférieure et surtout sur les côtés du segment buccal.

La basale est assez nette dans la région céphalique. Aïlleurs elle est peu visible ou manque même complètement.

Les glandes ventrales, si développées chez l’Ampharete et chez la Melinna, font totalement défaut.

Les boucliers, en forme de tore, sont composés de longues fibro- cellules de soutien et de grosses cellules à mucus violettes, très allongées. Ces deux éléments forment surtout la partie superficielle. La partie profonde est constituée par de minces fibro-cellules d'aspect conjonctif qui semblent limiter des espaces vides incolores. En traitant par la safranine ou le bleu de Méthylène, on voit que cette région est formée de grosses cellules glandulaires tout à fait analogues à celles des glandes ventrales de l’Ampharete, et la structure du bouclier est identique à celle de ces organes. Seulement la couche des grosses cellules glandulaires, au lieu de faire hernie dans la cavité générale, reste dans l'épaisseur du bouclier.

Toutes ces cellules sont disposées parallèlement, normalement à la cuticule et le tout ne forme qu’une seule couche continue dont la région externe est constitué surtout par des fibro-cellules de soutien rouges, des cellules violettes, et les canaux excréteurs des grosses cellules glandulaires et dont la partie profonde est formée par ces grosses cellules et les cellules fibro-conjonclives qui les entourent.

Cette partie profonde du bouclier est l’homologue des glandes ventrales de l'Ampharete.

420 PIERRE FAUVEL.

Le tout est compris sous la couche des muscles circulaires, Entre celle-ci et l'épiderme la basale est bien peu visible.

S V.

Musculature. Cavité générale. Péritoine.

A. Musculature.

La musculature ne présente pas de différences sensibles avec celle de l’'Ampharete, pas plus au point de vue anatomique qu’au point de vue histologique.

B. Cavité générale.

Elle est divisée en chambre thoracique antérieure et chambre thoracique postérieure par un diaphragme (PI. xxv, fig. 157, P).

Le diaphragme est situé entre le et le VI"segment, et non entre le III‘ et le IV° ainsi que l'indique Meyer (87, p. 634) dans son tableau.

A la face dorsale il s’insère en arrière du pied sétigère (V° segment).

Lorsqu'il existe une cinquième paire de néphridies, cas assez fréquent, surtout dans les exemplaires de Suède, celle-ci est située dans le segment. Dans ce cas, un second diaphragme s'insère à la face ventrale entre le IV° et le segment, en avant de néphridie supplémentaire, et à sa partie supérieure il revient en arrière s’accoler au diaphragme, situé dans le segment suivant, au-dessous de l’œsophage.

Le diaphragme contient des fibres musculaires très fines comprises entre deux couches d’endothélium péritonéal.

Les fibres musculaires se rencontrent surtout sur les côtés et à la face supérieure du diaphragme. Elles manquent souvent dans la partie centrale.

Le diaphragme semble laisser communiquer les deux chambres thoraciques, car nous avons trouvé plusieurs fois les néphridies antérieures bourrées de spermatozoïdes.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 421

Un rudiment de diaphragme se rencontre entre le segment buccal et le Il° segment.

Les dissipéments de la région abdominale sont semblables à ceux de l’Ampharete.

L’endothélium péritonéal ne diffère pas de celui de cette dernière espèce.

Les amibocytes ne présentent rien de particulier.

Ils semblent parfois se développer abondamment aux dépens de l’endothélium de la région antérieure de l’estomac.

Les glandes lymphatiques sont semblables à celles de l'Ampharete et semblablement situées.

Elles donnent des cellules semblables qui se détachent égale- ment.

S VI.

Système Nerveux.

À. Encéphale.

L’encéphale se décompose nettement en trois centres : le cerveau antérieur, le cerveau moyen, le cerveau postérieur.

Cerveau antérieur. C'est le moins développé des trois. Il est représenté par les nerfs palpaires qui s’accolent au cerveau moyen en formant un ganglion rudimentaire et innervent les deux carènes, saillantes, divergentes, du lobe céphalique, que nous consi- dérons pour celte raison comme des palpes (PI. xxiv, fig. 144).

Dans l'aire palpaire l'épiderme est modifié et contient de nom- breuses cellules nerveuses.

Les nerfs palpaires vont se terminer à la base des tentacules qu'ils innervent.

Cerveau moyen. Il est ici caractérisé par les yeux qu'il contient.

Ce centre forme deux ganglions assez volumineux, réunis par une courte et épaisse commissure, en sorte qu'ils ne se distinguent pas très

422 PIERRE FAUVEL.

bien lun de l’autre autrement que par la répartition de la substance ponctuée et de la substance corticale. Les cellules géantes y sont peu nombreuses. En avant et en arrière, ainsi qu’au centre, on remarque de nombreuses travées verticales de fibres de névroglie. Dans la région oculaire, comme chez l'Ampharete l'épiderme est complètement modifié par l’abondance des cellules nerveuses et ne se différencie pas du reste de la masse cérébrale qui se trouve alors en contact direct avec la cuticule (fig. 144-146-147).

Les yeux, assez nombreux, 10 à 15 de chaque côté, sont composés de petites sphérules de 18 y de diamètre fortement pigmentées. Le centre creux est rempli par une substance assez granuleuse qui représente sans doute la place d’une cellule nerveuse atrophiée. Ces yeux sont donc encore beaucoup plus simples que ceux de l’Ampha- rele. Ils sont enfoncés dans la couche des cellules ganglionnaires, nullement modifiées autour d'eux.

Le cerveau est limité à sa face ventrale par une basale.

Cerveau postérieur. Le cerveau postérieur est représenté par les organes nucaux, qui sont icitrès développés. L’organe nucal est marqué à l'extérieur par deux bourrelets obliques, divergents en croissant, disposés sur le lobe céphalique en arrière des yeux (fig. 144-146-147).

L’épiderme de la face supérieure du bourrelet est semblable à

celui des autres régions du lobe céphalique, mais, à sa face inférieure,

il est complètement modifié et forme une épaisse couche de tissu nerveux en continuité avec les ganglions nucaux quisont eux-mêmes en relation étroite avec le cerveau moyen.

Le dessous de ces bourrelets est creusé de deux profonds sillons longitudinaux, garnis de cellules vibratiles (fig. 146-147).

Le sillon postérieur, très profond, et plissé longitudinalement, se prolonge en arrière en forme de poche, d’abord étroite, puis élargie en cul-de-sac dans le ganglion nucal, au-dessus et en arrière de l'insertion des connectifs œsophagiens sur le cerveau moyen.

Généralement une face du sillon est garnie de cellules vibratiles tandis que la face opposée est revêtueseulement de cellules nerveuses. Des cellules de soutien plus ou moins modifiées en fibres névrogliques sont mélangées aux deux autres sortes de cellules. Par contre les cellules à mucus y sont fort rares.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 423

B. Connectifs Ͼsophagiens.

Ils naissent de la face inférieure du cerveau moyen.

À leur naissance, on remarque un amas de cellules géantes situées entre eux et l’épiderme, avec lequel ces cellules unipolaires et mul- tipolaires se mélangent étroitement.

Avant de se réunir entre le Il° et le II segment, pour former la chaîne ventrale, les deux cordons donnent un nerf au Il° segment et s envoient une courte commissure transversale.

Le nerf du Il[° segment part de leur tiers inférieur.

C. Chaîne ganglionnaire ventrale.

Elle se compose de deux cordons accolés réunis par une couche de cellules ganglionnaires qui s’insère en coin entre eux et les entoure, sauf à la partie supérieure.

Le tout est enveloppé dans un névrilème commun.

La chaîne nerveuse se renfle légèrement en ganglion à chaque segment et envoie un nerf de chaque côté au pied et à la branchie dans les segments III, IV, V, VI.

Elle repose à la surface de l’épiderme des boucliers et forme un pont au-dessus des sillons transversaux qui séparent les boucliers les uns des autres. Peu à peu elle s'enfonce dans les téguments et, dans la région abdominale, finit par être en contact direct avec la cuticule. Les deux cordons s’accolent de plus en plus étroitement et ne sont plus séparés que par un mince coin de cellules nerveuses, peu nombreuses.

Les canaux neuraux n’apparaissent guère avant le VI‘ segment. Ils sont en général au nombre de deux, un sur le côté interne de chaque cordon.

Ils renferment un coagulum légèrement coloré et leur paroi, mince, est teintée en rouge par l’éosine.

On les rencontre non seulement dans la région thoracique, mais encore jusqu'à l'extrémité postérieure de la région abdominale.

Néanmoins ils ne forment pas deux canaux continus dans la longueur du corps. Le parcours de chacun d’eux est limité à quelques

424 PIERRE FAUVEL.

segments. C’est pourquoi, par endroits on n'en trouve qu'un seul, au lieu de trois.

Nous avons constaté qu'ils sont la continuation du prolongement des cellules géantes thoraciques.

De la base des centres palpaires naît de chaque côté un mince nerf stomatogastrique qui suit les téguments et va innerver la région pharyngienne.

S VII.

APPAREIL DIGESTIF.

Le tube digestif a déjà été étudié par WIREN (85), aussi nous le décrirons rapidement en insistant seulement sur quelques points non signalés par cet auteur.

Le tube digestif comprend, comme chez l’Ampharete : le Pharynx, l'Œsophage, l’Estom'ac et l’Intestin proprement dit. Le Pharynx n’a jamais été décrit en détail.

Il est très analogue à celui de l’Ampharete et le plancher inférieur de la bouche porte deux lèvres internes bilobées, charnues, à struc- ture musculaire radiée, presque exclusivement semblables à celles que nous avons décrites.

Les tentacules, moins nombreux que chez l’Ampharete, une ving- taine environ, sont proportionnellement plus gros.

Ils ne sont pas pourvus de pinnules mais leur face antérieure, ou ventrale est creusée d’une profonde gouttière vibratile.

On y retrouve une cavité centrale en communication avec celle du lobe céphalique et les deux couches de fibres musculaires longitu- dinales et obliques. La structure de l’épithélium est sensiblement la même que chez l'Ampharete, mais les cellules à mucus, au lieu d’être grosses et localisées de façon à former des glandes unicellulaires, sont petites, nombreuses, el réparties sans ordre sur les bords de la gouttière vibratile. |

En somme, les tenlacules des deux types sont absolument compa- rables ; seulement, chez l’Ampharete, les rebords de la gouttière vibratile se sont découpés en pinnules et les cellules à mucus localisées au nombre de deux dans chaque pinnule ont pris un grand développement.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS,. 425

Chez l’'Amphicteis les bords de la gouttière sont restés entiers et les éléments glandulaires s’y sont moins localisés.

Nous verrons que les tentacules de la Samytha forment la tran- sition entre ces deux types.

Les nerfs palpaires se terminent à leur base et y envoient de fins prolongements.

Malgré la façon dont ils sont généralement cachés dans Pœsophage, ces organes dépendent bien du lobe céphalique.

Œsophage. I est formé d’une double couche de fibres muscu- laires circulaires et longitudinales. Son épithélium ressemble à celui d'Ampharete, il est de même fortement cilié, à cellules hautes et minces à noyau allongé. La couche profonde sous-épithéliale, de cellules que Wire considère comme conjonctives, est beaucoup plus développée.

Nous n'y avons pas rencontré de cellules à mucus à contenu coloré fortement par le bleu de Méthylène ou la safranine.

Estomac. L'estomac qui s’étend dans presque toute la longueur de la chambre thoracique postérieure diffère de celui de l'Ampharete en ce qu'il est entièrement contenu dans le sinus péri-imtestinal.

Au lieu de se terminer antérieurement par deux lobes cordiformes, sur lesquels ne s'étend pas le sinus, il finit par une sorte de coupole arrondie du centre de laquelle naît l'œsophage, entouré à la jonction par l’anneau vasculaire.

De plus, cet estomac renferme un énorme cœcum interne ou sac aveugle qui remplit la plus grande partie de sa cavité (fig. 157).

Ce cœcum est formé par une invagination des parois de l'estomac, y compris le sinus. En coupe transversale sa section affecte la forme d’un polygone à faces rentrantes. Sa cavité interne communique avec la cavité générale par un pore assez étroit, qui débouche à la face ventrale et à la partie antérieure de l'estomac, en arrière de l'anneau vasculaire

Au point de vue histologique l’épithélium de ce cœcum présente tous les caractères de celui des lobes antérieurs glandulaires del’ Am- pharete, cellules plus hautes, plus claires à gros noyau, à nucléole distinct.

Le reste de l'estomac a la structure ordinaire. Les cellules sont proportionnellement un peu plus cubiques, leur contenu est moins vacuolaire finement, granuleux, et coloré en rouge par l’éosine dans

426 PIERRE FAUVEL.

le tiers inférieur, leur noyau ovale se colore d’une façon assez uni- forme et intense par l’hématoxyline.

Il existe une goultière stomacale ciliée au-dessous de laquelle manque également le sinus, la basale étant en ce point en contact avec quelques rares fibres musculaires longitudinales et l'endo- thélium. |

Le reste de l’estomac est très finement cilié.

La couche des muscles circulaires existe seule, ainsi que WIREN l’a déjà constaté.

Dans l’épithélium stomacal on trouve en grande quantité des Grégarines à divers états de développement.

Les cellules à mucus « s/emhürtlar », figurées par WIREN (85, PI. 1v, fig. 8, s), ne sont autre chose que de ces Grégarines.

Certaines Grégarines, d'aspect un peu différent, sont surtout abon- dantes dans l’épithélium de la partie postérieure du cæœcum interne.

Intestin. Le passage de l'estomac à l'intestin se fait par une anse duodénale remontante comme chez l’'Ampharete. La structure de l'intestin proprement dit est la même que chez cette dernière espèce.

Les deux cirres anaux ou wriles sont également le prolongement de l’épithélium, tani interne qu'externe, du segment anal. Leur base creuse, ou wrophore est en continuité avec la cavité générale. L’extrémité distale, ou wrostyle est pleine et terminée tantôt en pointe effilée, tantôt en massue.

S VIIL. Circulation

WIREN (85) a déjà décrit en grande partie l'appareil circulatoire.

Cet appareil ressemble à celui de l'Ampharete, il en diffère par quelques points.

Le sinus péri-intestinal enveloppe entièrement l'estomac sans laisser à découvert de lobes antérieurs. Il se termine en avant par un anneau vasculaire embrassant la naissance de l'æœsophage et duquel part le cœur à la face dorsale.

Le cœur donne en avant trois troncs branchiaux seulement, dont

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 427

le premier se divise ensuite en deux branches allant aux deux premières branchies.

Wire conclut de ce fait que les branchies appartiennent proba- blement à trois segments seulement et que la 4 paire de branchies est une formation secondaire provenant soit de la division, soit du dédoublement d’un des organes primitifs.

La présence de quatre vaisseaux efférents partant du vaisseau ventral chacun dans un segment distinct, et l’innervation des bran- chies démontrent au contraire que les quatre paires de branchies correspondent bien à quatre segments distincts comme chez l’Am- pharete et la Melinna, ainsi que nous l’avons déjà affirmé (96).

Tandis que chez l’'Ampharete les neuf premiers vaisseaux dorso- pédieux débouchent à la face ventrale du sinus intestinal par une ouverture simple, chez l’Amphicters les cinq premiers seulement de ces vaisseaux se comportent de cette façon, les suivants embrassant le sinus par un arc pourvu de nombreuses ramifications pectinées, et dans la région abdominale les vaisseaux de chaque côté s’anas- tomosent et forment au-dessus du sinus un arc en demi-cerele à nombreuses ramifications anastomosées et réunies ensemble par une membrane (WIREN, 85, PI. 1, fig. 4-5).

Le tronc anastomotique latéral est constitué comme chez l’Am- pharele et communique également avec le vaisseau efférent de la quatrième branchie.

Les vaisseaux clypéaux ne sont jamais qu'au nombre de deux, naissant du vaisseau ventral par une racine unique qui se bifurque bientôt (fig. 14, Vc). Après avoir longé les bords antérieur et posté- rieur des boucliers, ils vont s’anastomoser dans les pinnules et dans le pied avec les vaisseaux dorso-pédieux et anastomotiques.

A la face ventrale, on voit, de chaque côté du vaisseau ventral, de fines anastomoses en zigzag qui déterminent un vaisseau superficiel sinueux donnant de nombreuses branches latérales qui se ramifient dans les téguments (fig. 14, Vz).

Sang. Le sang est vert et contient des amibocytes un peu plus nombreux et plus nets que chez l'Ampharele. Is mesurent de6 à 10 y, ont un noyau elliptique de 3 uw x 5 x coloré uniformément en violet foncé par l’hématoxyline. Le cytoplasma est au contraire très peu coloré.

428 PIERRE FAUVEL.

Corps cardiaque. Il présente à peu près la même forme et Ja même structure que chez l’'Ampharete, seulement la structure radiale y est encore plus nette.

Les noyaux sont massés davantage à la périphérie et l'enchevé- trement des prolongements des cellules dans la région axiale est beaucoup plus lâche, en sorte qu'il existe une tendance à la forma- tion d’une lumière centrale.

Le corps cardiaque naît de deux grosses racines qui contournent la base de l’æsophage et se réunissent à la face inférieure, l'entou- rant comme d’un collier appliqué contre le bord antérieur de l’estomac et contenu dans l’anneau vasculaire.

Ces racines sont deux cordons sinueux, plissés, présentant sensi- blement la même structure histologique que le reste de l'organe. Leurs cellules sont seulement plus sérrées, plus petites et moins régulièrement ordonnées.

Ces cordons sont en continuité de tissu avec l'épithélium de cette partie de l'estomac et le passage des cellules de celui-ci aux cellules pigmentées est graduel et insensible.

Vaisseaux. Leur structure histologique est la même que chez l'Ampharete. Is ne renferment pas davantage de fibres muscu- laires.

Se Néphridies.

Les néphridies de l'Amphicleis sont généralement au nombre de quatre paires, mais ce nombre s'élève parfois à cinq.

Les quatre paires de néphridies sont presque exactement sembla- bles. Elles sont situées dans les segments VI, VII, VIIT et IX et débouchent à l'extérieur par un pore situé un peu en dessous et en arrière du mamelon pédieux correspondant (3°, 4°, et pieds séligères).

La néphridie antérieure s'ouvre dans la chambre thoracique antérieure, en avant du diaphragme situé entre le V' et le VF segment et non entre le IIl° et le IV° comme l'indique MEYER (87,

« 2 -

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 429

p. 634). Son pore externe s'ouvre à la base du pied, 1IX° segment, et quand il existe une cinquième paire de néphridies, cette paire est située entièrement dans la chambre thoracique antérieure en avant du diaphragme et correspond au segment (2° sétigère). Dans ce cas il existe deux paires de néphridies antérieures.

La dernière néphridie postérieure correspond {oujours au IX° segment, qu'il y ait quatre paires ou cinq.

En avant de la première paire antérieure, quand elle existe, on remarque un petit diaphragme supplémentaire s’insérant entre le IV' et le segment à la face inférieure et qui vient en arrière s’ac- colerau diaphragme principal, au-dessous de l’æsophage. La néphridie supplémentaire se trouve alors renfermée dans une petite chambre triangulaire limitée par ces deux diaphragmes. Son pavillon vibra- tile s'ouvre dans le IV° segment et son pore externe dans le V*.

Ces résultats sont en complet désaccord avec le tableau de MEYER, qui place le diaphragme entre le IIL° et le IV* segment, la néphridie antérieure dans le IV' et les trois paires postérieures dans les seg- ments V, Viet VII. Il a remarqué la présence accidentelle d'une cinquième paire, mais dans ce cas il la rapporte au VIII segment.

M£yer a être induit en erreur par un désir trop grand de généraliser et d'appliquer à priori à tous les Ampharetiens les données fournies par la Melinna.

Cette dernière espèce répond en effet très exactement au tableau qu'il donne.

Les néphridies de l’'Amphicteis (fig. 153) ressemblent un peu aux néphridies postérieures de l’Ampharete.

Elles ont l'aspect de vastes poches ovoïdes insérées de chaque côté du corps dans les chambres néphridiennes. Ces poches sont formées d'un court tube replié sur lui-même et très dilaté à l'endroit du repli.

La branche interne, la plus courte et la moins grosse, s’avance en avaut par un pavillon vibratile, aplati en fente verticale ou plutôt oblique. La branche externe, très large, diminue assez brusquement de diamètre et vient déboucher à l'extérieur par un conduit cylin- drique fortement cilié, à la base et un peu en arrière du mamelon pédieux correspondant.

La structure histologique est sensiblement la même que celle des néphridies postérieures de l’Ampharete. Dans la branche interne les

430 PIERRE FAUVEL.

cellules sont petites, pigmentées ; dans la branche externe elles sont grandes, claires et vacuolées.

Les néphridies antérieures ne seraient pas seulement excrétrices, mais serviraient également à l'évacuation des produits sexuels, car nous les avons trouvées plusieurs fois remplies de spermatozoïdes.

Peut-être ce fait est-il accidentel ?

sa Reproduction.

Les œufs et les spermatozoïdes se développent exactement comme chez l'Ampharete aux dépens de l’endothélium des vaisseaux transversaux et du sinus ivtestinal, surlout à sa partie antérieure.

L'ovogénèse et la spermatogènèse s’opèrent aussi identiquement de la même façon.

Les œufs à l’état jeune contiennent un double nucléole ou deux nucléoles distincts.

Le développement des produits génitaux est plus tardif.

Tandis que la ponte a lieu en mars chez l'Ampharete, nous avons vu un Amphicteis Q expulser ses œufs sous nos yeux à la fin de Juin.

Nous avons recueilli en septembre 1894 un exemplaire ayant déjà des œufs formés. Le développement de ceux-ci serait donc plus long que pour l’'Ampharete. Pendant tout l'hiver, l'Amphicters est bourré d'œufs ou de spermatozoïdes, aussi bien à Naples qu'à Tatihou, et il n’en est dépourvu qu'un été.

RÉCHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 431

XVII.

ETUDE DE

Samytha adspersa GRUBE.

S I. Diagnose.

Sabellides adspersus. Gruge (63), p. 97, pl. VI, fig. 2; DE QUATREFAGES (65). Samytha adspersa. GRUBE (10), p. 15.

Sabellides adspersus. PANCGERI (75).

Amage adspersa. Marion (75) ; LANGERHANS (84), p. 261, pl. XV, fig. 19. Samytha adspersa. Lo Bianco 93, p. (64), pl. IE, fig. 3.

Lobe céphalique quadrangulaire à partie frontale divisée par un sillon longitudinal. Tentacules lisses un peu renflés à l'extrémité. Pas de palées. Quatre paires de branchies insérées sur une ligne transver- sale sur le bord des IIL° et IV° segment. Dix-sept mamelons pédieux pourvus de soies capillaires. Pinnules uncinigères à partir du segment sétigère (VII® segment) et continuant jusqu'au segment préanal. 11 à 15 segments abdominaux pourvus seulement de pinnules. Deux cirres anaux filiformes. Soies capillaires un peu ensiformes, limbées ; uncini pectiniformes, renflés au milieu, à 3-5 dents recourbées.

Morphologie.

À. Région antérieure.

Le lobe céphalique est divisé en une partie médiane ou frontale et deux parties latérales. La partie frontale présente deux bourrelets divergents comme chez l’'Amplhacteis (PL xxv, fig. 162). Ce sont des palpes rudimentaires. Les organes mucaux forment deux petits bourrelets saillants en avant desquels sont deux groupes de petits yeux simples. Le segment buccal court est suivi d’un segment nu.

Toute la région antérieure est comme enchàssée dans le IIl° segment (fig. 162).

432 PIERRE FAUVEL.

B. Région thoracique.

Elle comprend le II° segment qui porte une partie des branchies et 17 segments pourvus de mamelons pédieux cylindriques à soies capillaires.

Le IIT° segment ne porte ni palées, ni soies; c’est à tort que Lo Branco (93) lui attribue les soies du premier pied. Ces soies appartiennent au segment suivant, très court il est vrai et, comme le pied est inséré tout contre le IIl° segment, il paraît lui appartenir mais il en est séparé par un sillon. MALMGREN (65) a très bien constaté et figuré cela pour la Samytha sexcirrata. Sars (p. 370, pl. XX, fig. 49; GRUBE (TO, p. 15) et LANGERHANS (84, p. 261) étaient déjà tombés dans la même erreur que Lo BIanco.

Les branchies sont au nombre de quatre 2e normalement, mais on rencontre très souvent des individus n'en ayant que trois paires. Pendant longtemps on a attribué ce dernier nombre à l'espèce (GRUBE, 70). C’est MaRION (75) qui a constaté le premier la présence fréquente de quatre paires et ceci a été confirmé depuis par LANGERHANS et Lo Branco.

Nous avons eu entre les mains des exemplaires à trois paires de branchies et d’autres à quatre paires; ce dernier nombre doit être le plus normal.

Chez un exemplaire à trois paires de branchies on voyait les cicatrices d’une quatrième paire.

Ces branchies sont insérées sur le III° et le IV° segment, mais parfois elles semblent toutes insérées au bord du III° sur une seule ligne, laissant entre les deux groupes un pelit espace libre au milieu du dos (fig. 162).

Les mamelons pédieux, commençant au IV° segment, sont cylin- driques et rappellent beaucoup ceux de l'Amphacteis. Ils sont égale- ment pourvus d’un petit cirre ventral, mais plus court et plus massif que chez l'Amphicters.

Les pinnules uncinigères commencent au IV° segment séligère (VII segment). Les trois premières méritent plutôt le nom de tores que de pinnules. Elles sont très larges, courtes et peu saillantes. Les suivantes se détachent davantage du corps et ressemblent beau- coup à celles de l'Amphacteis.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 433

Les uncini sont disposés sur leur bord antérieur sur une seule rangée rétrogressive.

Ces uncini sont élargis au milieu comme ceux de l’Amphicteis dont ils se rapprochent (fig. 165). Ils ont généralement quatre dents recourbées et leur manubrium est assez allongé. Les uncini sont plats et les dents sont disposées sur une seule rangée. D'après LANGERHANS, le nombre des dents varierait de 3 à 4 ; Lo BraNco leur en attribue 5. Nous en avons trouvé 3 et 4.

Les segments thoraciques portent des boucliers ventraux, sauf les deux derniers entre lesquels commence la gouttière abdominale.

Les soies capillaires sont très analogues à celles de l'Amphicters et de l'Ampharete, un peu plus ensiformes, légèrement recourbées, à limbe un peu plus large, très finement strié.

Elles sont implantées sur deux rangées dans le parapode, mais les jeunes soies de remplacement de la deuxième rangée sont parallèles aux soies de la première, au lieu de les croiser obliquement comme chez l’Ampharete etl Amphicters.

C. Région abdominale.

Cette région comprend un nombre variable de segments. Nous en avons compté de 11 à 13, LaNGERHANS en compte 11 et Lo Bianco 15.

Cette région ressemble étonnamment à celle de l'Amphicteis. On y retrouve un petit cirre en massue correspondant à la rame dorsale, relié à la pinnule ventrale par un bourrelet transversal (PI. xxv, fig. 164). Ce petit cirre dont GRUBE (70, p. 15), avait déjà deviné l'homologie, est finement pédonculé et renflé à son extrémité.

La pinnule elle-même porte à son angle supérieur un rudiment de cirre. Elle reste petite et épaisse.

La région abdominale, plus effilée que la région thoracique, est creusée à sa face ventrale d’une profonde gouttière longitudinale commençant à l’avant-dernier segment thoracique.

Le segment anal, assez long, porte deux cirres filiformes, subulés, à base un peu renflée, trois fois plus longs que lui.

D’après Lo Branco, l'animal est d'une couleur de chair assez foncée à la partie antérieure, jaunâtre ou orangée à la partie posté- rieure. La face ventrale est rose; les branchies verdâtres sont

434 PIERRE FAUVEL.

annelées de taches orangées. Les tentacules incolores ont une tache orangée à leur extrémité. La peau est irrisée.

Le tube décrit et figuré par le même auteur (p. 64, PI. 1x, fig. 3), est formé d’une membrane interne peu résistante et fermé à une extrémité; toute sa surface est couverte de fibres de Posidonia dépassant de tous côtés et donnant au tube un aspect hérissé. En outre de l'ouverture terminale il en existerait une seconde au milieu.

L'unique tube que nous ayons en notre possession diffère un peu de catte description. Il n’est pas clos, mais se termine par une portion composée seulement de la membrane interne, portion qui était vraisemblablement enfoncée dans la vase, tandis que la partie entourée de fibres de Posidonie correspondrait à sa partie externe libre. L'autre ouverture est à l'extrémité opposée.

L'animal vit dans la baie de Naples à une profondeur variant de 35 à 65 mètres.

Il n’a été rencontré en dehors de la Méditerranée qu'à Madère par LANGERHANS (84).

ST Téguments. Musculature.

La cuticule est du type décrit précédemment à deux systèmes de stries croisées à angle droit.

La structure de l’épiderme est plus nette que dans Îles autres espèces. Dans le lobe céphalique les cellules à mucus violettes, foncées, sont mélangées à des cellules à sphérules rouges et alternent avec de minces fibro-cellules. De grosses cellules à mucus sont dissé- minées dans l’épiderme dorsal dont la structure alvéolaire est très nette. Elles se retrouvent très abondantes sur le bord de la pinnule opposée aux unicini et à l'extrémité du mamelon pédieux, encouronne autour des soies.

Au-dessous du lobe céphatique, de grosses cellules régulières teintées en bleu clair par l’hématoxyline, simulent un épithélium cylindrique, mais en réalité elles sont séparées par des fibro-cellules tellement minces qu’on les prendrait d’abord pour les parois des cellules n’était leur noyau allongé, très petit et leur plateau élargi.

RECHERCHES SUR LES ANPHARÉTIENS. 435

Ailleurs, les cellules bleu-pâle sont mélangées à des cellules à sphérules rouges.

Les côtés des boucliers thoraciques sont principalement composés de grandes cellules non colorées par l’hématoxyline-éosine et de fibro-cellules très minces. A la face ventralce, la structure du bouclier est presque la même que chez l'Amphicleis, c'est-à-dire que l’on y rencontre de grandes cellules claires mélangées de fibro-cellules et de rares éléments violets étirés. Il y a plusieurs épaisseurs de cellules, mais elles sont intimement unies en une seule couche compacte.

Les glandes ventrales manquent complètement et sont représentées seulement par les grosses cellules claires des boucliers.

La basale, plus visible que sur les autres types, limite entièrement le bouclier dans lequel elle ne pénètre jamais. Klle le sépare de la couche des fibres musculaires circulaires.

La musculature n'offre rien de particulier.

SRE. Cavité Générale.

Le diaphragme qui la divise en chambre thoracique antérieure et chambre thoracique postérieure renferme des fibres musculaires, au moins sur ses côtés.

Le diaphragme s'insère latéralement un peu en arrière du pied sétigère. Il semble donc appartenir au segment. [Il sépare le pore externe de la première néphridie de la base du pied de ce segment. On peut donc le considérer comme intermédiaire entre le IV° et le segment, bien qu'il passe en arrière de la base de pied.

C'est à tort que Meyer (87, p. 634) l'indique entre le II° et le IV° segment; à moins que cet auteur ne considère le pied sétigère comme appartenant au Il° segment.

S-IV. Système nerveux.

L’encéphale est du type Amphicteis. Le cerveau antérieur est représenté seulement par une aire palpaire et deux nerfs palpaires

Le

436 PIERRE FAUVEL.

innervant les palpes rudimentaires en carènes saillantes du lobe céphalique et les tentacules. Le centre donne aussi naissance au stomatogastrique. 3

Le cerveau moyen porte des yeux petits, nombreux, simples et tout à fait semblables à ceux de l'Amphacteis.

Le cerveau postérieur est constitué par les organes nucaux et leurs ganglions rudimentaires. L'organe nucal, de la catégorie, renflé en bourrelet comme chez l’Amphicters a une structure un peu plus simple que chez celui-ci etse rapprochean peu de celui de l'Ampha- rete par ses fossettes profondément enfoncées en arrière dans les téguments.

La chaîne nerveuse a la constitution typique. Son névrilème formé de fibres névrogliques est en rapports encore plus étroits avec le tissu des boucliers. Les fibro-cellules conjonctives de ceux- ci se confondent absolument avec les fibres du névrilème.

S V. Appareil digestif.

Les tentacules ressemblent à ceux de l’Arnphicteis : leur muscu- lature est la même, mais les fibres obliques sont moins développées. Lagouttière vibratile est profonde. Les cellules à mucus, assez grosses sont localisées dans ses bords et distribuées par groupes, presque comme chez l’Ampharele. De plus les bords de la gouttière sont assez fortement dentelés par endroits et, dans certains tentacules, cette disposition est assez accusée pour déterminer presque la formation de pinnules. Ces tentacules sont renflés à l'extrémité. Ils sont tout à faitintermédiaires entre ceux de l’Amphicteis et ceux del’Ampharete et nous montrent comment des tentacules lisses du premier on passe graduellement aux tentacules pennés du second par un simple déchiquètement des bords de la gouttière vibratile entraînant la localisation des cellules à mucus (fig. 163).

Le plancher buccal porte deux lèvres internes charnues bilobées comme dans les autres genres.

L’œsophage droit, pénètre dans l’estomacquiressemble extérieure- ment tout à fait à celui de l’Amphicteis. Comme chez ce dernier il est

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 437

entièrement contenu dans le sinus et n’a pasdediverticules antérieurs. Il se termine antérieurement en coupole arrondie. Il existe un anneau vasculaire à la jonction de l'œsophage avec l'estomac.

L'estomac renferme un cœcum interne bilobé, un peu plus courtet moins volumineux que celui de lAmphicters. Il s'ouvre à l'extérieur sur la face ventrale de l'estomac, un peu en arrière de l'anneau vasculaire. Ce pore n'est pas circulaire, mais en forme de fente étroite allongée transversalement.

L’estomac possède une gouttière ventrale ciliée semblable à celle des autres genres. Au niveau du 10° pied sétigère environ, il présente une constriction annulaire assez marqaée, surtout intérieurement.

Le passage de l'estomac à l'intestin se fait par une anse duodénale remontante située dans le dernier segment thoracique.

L’inteslin' s'étend ensuite en ligne droite jusqu’à l’anus.

S VI Circulation.

L'appareil circulatoire ressemble en tout point à celui de l'Am- phicteris. Les cinq premiers vaisseaux dorso-pédieux naissent de la face ventrale du sinus intestinal. À partir du ils naissent du sinus

par un arc à ramifications nombreuses embrassant les flancs supé- rieurs de l'estomac.

Le cœur donne trois vaisseaux branchiaux dont le premier se bifurque assez loin du cœur.

Les branchies présentent la structure typique. Leur épiderme est formé d’un mélange de grosses cellules à mucus en fiole remplies de sphérules violettes ou rouges et de fibro-cellules,

Le corps cardiaque s’insère à la naissance de l’œsophage, mais il ne forme pas autour de la base de celui-ci un gros bourrelet circu- aire contenu dans l'anneau vasculaire comme chez l'Amphicteis. Il vient finir au contact de l'estomac. Sa structure est analogue à celle que nous avons décrite, seulement elle est plus compacte, leséléments y sont plus foncés et il existe au centre une grande accumulation

438 PIERRE FAUVEL,.

d'éléments pigmentés jaunâtres, réfringents. Il renferme en outre des éléments à sphérules rouges.

Le sang renferme des hématies semblables à celles des autres genres.

8 VII Néphridies. Reproduction.

Les néphridies sont au nombre de quatre paires, dont les deux paires postérieures très volumineuses et la néphridie antérieure très petite cachée par la suivante.

Elles sont du type Amphicteis mais plus globuleuses.

Le pore excréteur de la dernière paire débouche à la base du pied (VII segment); la paire appartient au VII segment (4° pied), la au VI' segment (3° pied) et la néphridie antérieure qui s'ouvre par son pavillon vibratile, dans la chambre thoracique anté- rieure à travers le diaphragme, correspond au segment (2° séti- gère). Son pore externe est situé un peu au-dessous et en arrière du pied dont il est séparé par le diaphragme.

Ici encore nous sommes en désaccord avec MEYER qui indique, pour la Samytha,quatre paires de néphridies appartenant au IV°,V°, VI'et VIT segments, et le diaphragme entre le Ill° et le IV° segment.

Il y a une assez grande ressemblance avec l’Amphicteis. Seule- ment, chez ce dernier, il y a souvent deux néphridies antérieures au lieu d’une seule chez la Samytha, et la dernière néphridie posté- rieure est dans le IX° segment au lieu d’être dans Le VIIF.

Les néphridies postérieures servent à l'évacuation des produits sexuels.

Les œufs à l’état jeune possèdent normalement un noyau à double nucléole ou à deux nucléoles.

À un stade plus avancé, l’un des deux nucléoles est plus pâle, puis on n'en retrouve plus qu'un seul dans l'œuf mûr qui ne semble pas différer de celui de l’'Ampharele ou de l'Amplucteis.

Nous n’avons pas eu d’exemplaire 6 entre les mains.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 439

XVIII.

Étude de Melinna. SEE Morphologie. Melinna MGr.

Segments nombreux, plus de 50, lobe céphalique lisse sans partie frontale bien saillante ; tentacules lisses, segment buccal en forme de lèvre à la face ventrale, égal en longueur au lobe céphalique ; pas de palées mais à la place une grosse soie unique en épine recourbée, placée en arrière de l'insertion des branchies; quatre paires de branchies filiformes.

Les segments IT, III, IV et V coalescents forment une sorte de gaîne ouverte en avant, soudée en arrière, entourant sur la face inférieure et les flancs la région orale et branchifère; au segment une crête dorsale membraneuse. Les segments II, IT et IV portent une rangée transversale de fines soies simples, le IV° porte en outre un faisceau de soies capillaires dorsal mais pas de mamelon pédieux, le segment porte le premier parapode complet, au VI° segment apparaissent les pinnules uncinigères qui continuent jusqu'au dernier segment. Il existe 16 segments pourvus de soies capillaires notopodiales et 15 seulement avec mamelon pédieux complet. Une petite papille subconique au-dessus de la pinnule dans les segments de la région abdominale dépourvus de soies capillaires. Soies capillaires légèrement recourbées, limbées ; wncini pectiniformes subtriangulaires à 4-5 dents.

Melinna cristata Sans.

Sabeilides cristata. M. Sars 61); Sars (56), p. 19-24, pl. II, fig. 1-7; DANIELSEN (57 et 59) ; SARsS, 64.

Melinna cristata. MaLMGREN (65), p. 371, pl. XX, fig. 50 ; GRUBE (70), p. 15; KupprER (73), p. 151; MaLu (74), p. 96; VerriLe (74) ; MôBius (T5), D 19 Mc’Inrosx (70) ; MARENZELLER (77), p. 35 ; Take (78), p. 63 ; WEBSTER, (81), p. 732 ; Wien (85), pl. I, fig. 12-15 ; ExLers (87), pl. 49, fig. 7-10; CUNNINGHAM, 88), p. 660, pl. XLII, fig. 22 ; BIDENKAP (94).

440 PIERRE FAUVEL.

Lobe céphalique à bord entier, segments abdominaux de 50 à 55 ; 4 paires de branchies réunies deux par deux à la base en fascicule. Uncini à quatre deuts; membrane thoracique à bord antérieur denticulé. Pas de cirres anaux.

Melinna palmata GRUBE.

Melinna palmata. GRuBE (69), p. 87 ; 72, p. 40 et 70, p. 15-16 ; MEYER (87) ;

Lo Branco (93), p. 65.

Lobe céphalique à bord antérieur légèrement trilobé. 4 paires de branchies réunies par une membrane jusqu’au tiers de leur longueur ; segments abdominaux 60 environ ; membrane thoracique du V‘segment à bord entier non dentelé. Uncini à quatre dents. Pas de cirres anaux.

Nous avons éludié surtout la Melinna palmata sur des exem- plaires provenant de la Station Zoologique de Naples, mais grâce à l'obligeance du professeur A. WIREN qui nous a envoyé plusieurs exemplaires de M. cristata, nous avons pu examiner aussi cette dernière espèce. ;

Les deux espèces ne différant que par des caractères d'ordre descriptif assez insignifiants, nous ne ferons qu'une seule description en mentionnant les différences quand nous les rencontrerons.

Région antérieure. Elle comprend seulement le lobe cépha-

lique et le segment buccal.

Le lobe céphalique est plus simple que dans les autres genres.

Chez la M. cristata il est coupé carrément en avant et n'est pas sensiblement lobè. Chez la M.palmata son bord antérieur est trilobé, mais il n'existe pas de portion frontale saïllante ni de champslatéraux.

Le lobe céphalique porte à sa face inférieure des tentacules non pennés, peunombreux, très longs etrelativement gros, presque autant que les branchies. Ils sont insérés au-dessus d’une lèvre demi-cylin- drique, visible seulement lorsque la bouche est ouverte et les tenta- cules dévaginés.

Cettelèvre est homologue à celle de l'Ampharelte et à la lèvre supérieure des T'érébellidés.

Le segment buccal forme à sa face inférieure la lèvre inférieure. Il ne porte aucune espèce de soies.

is :

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 44]

La région antérieure, sensiblement moins large que la suivante, est enchàässée dans cette dernière.

Région thoracique. On peut distinguer dans la région thoracique deux parties: la partie que CUNNINGHAM (88, p. 660) appelle branchiale et la partie thoracique proprement dite.

La partie branchiale est formée de quatre somites, ainsi que cet auteur l’a parfaitement reconnu alors que Sars et MALMGREN n’en comptaient que trois.

Ces quatre segments forment une sorte de gouttière dont les bords relevés et saillants dominent de chaque côté la région dorsale occupée par les branchies. A la face ventrale elle forme une demi collerette de laquelle émerge la région antérieure ou céphalique. En arrière elle se continue sans modification avec les autres segments de la région thoracique.

A la face supérieure les deux crêtes latérales viennent mourir sur les côtés du V°segment. En cet endroit la membrane thoracique s'étend d'un bord à l’autre en travers (PI. xxv, fig. 166). Elle est formée par un repli du tégument dorsal appartenant au VI° ou au VII° segment et s’avancant jusqu'au V°. Son bord antérieur entier chez la M. palmata est dentelé chez la M. cristata.

Les quatre segments ([L°, III‘, IV° et V°) de la partie branchiale sont sétigères.

Le IT° segment porte seulement de chaque côté une rangée unique de très fines soies simples, courtes, pointues, cylindriques, non limbées. CuNNINGHAM les considère comme représentant la rame ventrale (fig. 166, s.).

Le III° segment porte une rangée semblable de soies ventrales et une grosse soie jaune d’or en épine un peu recourbée en crochet. Cette soie, située un peu en arrière des branchies, représente le para- pode dorsal, elle est l’homologue des palées qui ne sont que des soies capillaires dorsales transformées (fig. 166, S).

Le IV° segment porte un faisceau capillaire de soies dorsales, mais celles-ci ne sont pas insérées sur un véritable mamelon pédieux mais sur un simple tubercule à peine saillant. La rangée de soies ventrales est semblable à celle du segment précédent.

Le segment porte un vrai parapode dorsal avec mamelon séti- gère et soies capillaires. Les soies simples ventrales manquent et il n'existe pas encore de pinnule.

442 PIERRE FAUVEL.

Les branchies sont insérées au fond de la dépression dorsale limi- tée sur les côtés par les crêtes longitudinales sétigères et en arrière par la membrane thoracique.

Elles paraissent insérées sur le IT° segment. Elles sont fasciculées la base et, chez la M. palmala , réunies ensemble par une mem- rane qui s'étend jusqu'au tiers de leur longueur et réunit également les deux groupes ensemble.

La région thoracique proprement dite comprend les 14 segments suivants, tous pourvus de mamelons pédieux à soies capillaires et de pinnules uncinigères. Il y a donc 15 segments pourvus de pieds séti- geres et 18 segments séligères en comptant les trois premiers dépourvus de vrais parapodes.

Comme chez les autres Ampharétiens la face dorsale ne présente pas trace de segmentation.

A Ja face ventrale au contraire cette segmentation est très nette. Chaque segment porte un bouclier thoracique, sauf l’avant-dernier. À cet endroit commence la gouttière ventrale.

Les soies sont du type général des Ampharetiens, légèrement incurvées et limbées, disposées sur deux rangées dont l’une plus courte formée de soies jeunes croisant un peu obliquement celles de la première rangée.

Le parapode est un simple tubercule cylindrique dépourvu de cirre ventral.

Les pinnules, du type ordinaire, portent sur leur bord antérieur une rangée de plaques onciales rétrogressives. Ces uncini portent quatre dents disposées sur une seule rangée comme chez l'Amphicteis et non sur deux comme chez l'Ampharete. Is se rapprochent de ceux de la Samytha (PI. xxv, fig. 167).

Région abdominale. Cette région comprend un nombre variable, mais toujours très grand, de segments ; de 42 à 60. Elle se rétrécit et s’aplatit progressivement.

Les pinnules s’aplatissent également mais ne s’élargissent pas en éventail, elles prennent plutôt une forme rectangulaire. Elles ne se prolongent pas en cirre à leur angle supérieur.

Au-dessus du bourrelet longitudinal formé par le faisceau muscu- laire, on remarque, correspondant à chaque pinnule, un petit tuber- cule en forme de bouton qui représente le parapode dorsal. Un

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 443

léger bourrelet transversal le relie à la base de la pinnule. Ce cirre diminue au point de disparaître à l'extrémité de la région abdomi- nale.

Les pinnules renferment des soies de soutien et des soies-tendons soutenant les uncini. À

La gouttière ventrale, qui commence à l’avant-dernier segment thoracique, est bien marquée.

L'anus est terminal et s'ouvre au fond d’un entonnoir dont le bord dorsal plus développé est légèrement plissé. Il rappelle un peu celui de Nerine cirratulus ou mieux celui de Terebellides Stræmi.

Il ne porte ni cirres ni appendices d'aucune sorte.

STE Téguments.

Cuticule. La cuticule, assez épaisse par endroits, prend une teinte d’un jaune foncé dans le fond des replis cutanés. En ces points sa structure fibreuse est très nette. Ailleurs, au contraire, la double striation à angle droit est très fine et difficile à voir.

Epiderme. La structure de l’épiderme diffère peu de celle des autres genres. Les cellules violettes à mucus y sont cependant beaucoup moins abondantes que chez l'Ampharele. On ne les ren- contre en certaine quantité que dans la région céphalique.

La région branchiale ne forme qu'uii vaste bouclier remontant sur les flancs. La structure de ce bouclier est analogue à celle des autres boucliers thoraciques, c'est-à-dire qu’ils sont composés de longues et fines fibro-cellules de soutien à noyau plus ou moins visible et toujours petit et étiré et de grosses cellules à mucus allongées, qui ne se colorent pas par l’éosine ou l’hématoxyline mais seulement par le bleu de Méthylène ou la safranine.

Les glandes ventrales très développées sont au nombre de plusieurs paires par segment. Elles sont à peu près localisées dans les seg- ments II à V. Leur struclure est presque identiquement la mème que chez l'Ampharete.

Leur développement semble variable. Parfois elle envahissent

444 PIERRE FAUVEL.

presque toule la cavité thoracique en cet endroit, collant l’œsophage et le cœur contre la paroi dorsale ; d’autres fois elles s'élèvent à peine au tiers de la hauteur des segments. Chez la M. cristata elles sont le plus souvent réduites à 6 paires comme chez l'Ampharete.

La basale est peu visible, sauf dans la région antérieure et dans la membrane thoracique elle est très nette.

Cette membrane (fig. 168) est constituée par un repli des tégu- ments. Sa structure rappelle beaucoup celle de la plaque céphalique de la Clymene lumbricoïdes figurée et décrite par RacoviTrzA (96, p. 113-116, PI. v, fig. 47).

Elle se compose de deux couches épidermiques séparées par une couche musculaire.

La couche épidermique supérieure, revêtue d’une cuticule assez épaisse, est composée d’une seule assise de cellules glandulaires en fiole séparées par des cellules de soutien peu colorées, à noyau allongé. La couche inférieure est formée de cellules de soutien incolore, nucléées, moins hautes que les précédentes, délimitant des alvéoles de cellules glandulaires peu colorées. Entre les deux s'étendent, d’une basale à l’autre, des faisceaux de fibres musculaires presque tendineuses, entre ces faisceaux passent les fibres de la couche musculaire circulaire qui les croisent à angle droit.

L’épiderme de la face dorsale renferme d'assez grosses cellules en fiole dispersées çà et là, comme chez l'Ampharete.

SI Musculature. Cavilté générale. Diaphragme.

La musculature n'offre rien de particulier.

La cavité générale est divisée en chambre thoracique antérieure et chambre thoracique postérieure par le diaphragme. En outre un petit diaphragme sépare le segment buccal du [T° segment.

Le diaphragme qui contient quelques fibres musculaires entre deux couches endothéliales, s’insère bien entre le IIl° et Le IV° seg- ment, ainsi que Meyer l’a décrit. Il se prolonge en arrière en long sac appliqué sur l'œsophage et dont la partie terminale renflée et à parois épaisses et musclées simule un diverticule œsophagien.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 445

Nous renvoyons pour plus de détails au texte et aux figures de MEYEr (87, p. 626, PI. xxv, fig. 25 à 50).

Les glandes lymphatiques sont situées à la base des vaisseaux branchiaux comme chez lAmpharete. Elles ont été décrites par MEyer (87, p.646), sous le nom de « prgmentirle Lymphdrüsen.

S IV. Système nerveux. : Encéphale. Un gros cordon nerveux transversal, légèrement

étranglé au centre et renflé aux extrémités, constitue le cerveau moyen ainsi divisé à peine en deux ganglions accolés. C’est le centre le plus volumineux (fig. 148). L'ensemble rappelle beaucoup l’encé- phale de PAmpharete. Il est peut-être encore moins différencié. La structure histologique et les rapports avec l’épiderme sont les mêmes. Les yeux, au nombre d’une douzaine de chaque côté, sont exactement semblables à ceux de l'Amphicteis.

Le cerveau antérieur est représenté seulement par l’aire palpaire donnant naissance au nerf palpaire et au stomato-gastrique.

Le cerveau postérieur est représenté par les organes nucaux, simples fentes étroites enfoncées dans des téguments en arrière du cerveau.

La face supérieure de la fossette est ciliée, l’inférieure est cons- tituée par du tissu nerveux à cellules en relation immédiate avec la partie postérieure du cerveau moyen.

La chaîne ventrale est formée par l’accolement des deux cordons longitudinaux, mais ici la fusion est très prononcée. Les deux cordons sont non seulement accolés mais réunis par une partie de leur face interne, au point de ne former par endroits qu'une bande unique aplatie.

Chez la Melinna palmata lescanaux neuraux sont peu développés. On n'en rencontre que dans la région thoracique, un, rarement deux, et leur trajet est court, car de place en place ils manquent souvent totalement.

Chez la M. cristata les canaux neuraux sont plus développés et au nombre de deux, ainsi que CUNNINGHAM (88, p. 274) l’a déjà signalé.

446 PIERRE FAUVEL.

Déjà, dans la partie thoracique, la chaîne ventrale est réduite à l'état de bandelette aussi mince que dans la région abdominale” de l’'Ampharete.

SV: Appareil digestif.

L'appareil digestif de la M. cristata a été étudié par WIREN (85), et celui de la M. palmata figuré, mais sans description par MEYER (87, pl. xx).

Le Pharynx porte à sa face inférieure les deux lèvres internes bilobées, musculaires, que nous avons signalées chez tous les autres Ampharétiens, et dont nous avons également constaté l'existence chez la Lanice conchilega et la Lagis Koreru.

Ces papilles charnues semblent avoir échappé jusqu'ici à tous les observateurs.

Les tentacules peu nombreux et relativement gros sont lisses. Leur structure se rapproche surtout de celle de ces organes chez l’'Amphicteis. Les cellules à mucus y sont très nombreuses, petites, et non localisées, mais réparties uniformément dans tout l'organe.

L’œæsophage est long et très mince, ses parois sont peu épaisses et revêtues de la double couche musculaire.

Son épithélium cilié ne diffère de celui des autres genres que par la hauteur moins grande de ses cellules.

WIREN (85) y a décrit et figuré un petit diverticule latéral (PI. 1, fig. 12 et 15) ; d'après MEYER (87) ce prétendu diverticule ne serait que l'extrémité postérieure d'un sac diaphragmatique.

Cette dernière vue estexacte mais il faut avouer que chez la M. cristata le développement de cet organe, l'épaisseur de ses parois, contrastant avec le reste du diaphragme, qui par endroits n’est qu'une mince menbrane péritonéale, et son union intime avec la paroi de l’'œsophage, le font paraître à première vueune dépendance de celui-ci.

Il faut un examen très attentif et l'étude patiente de bonnes coupes en série pour constater qu'il s’agit bien d'une dépendance du dia- phragme.

La face inférieure de cette poche se soude étroitement aux parois

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 447

de l'æsophage. A l'extrémité du sacles parois sont épaisses et la lumière très petite. Ses parois sont composées de deux couches de fibres musculaires se croisant à angle droit, comprises entre deux couches d’endothélium. ;

L’estomac, qui fait suite à l’œsophage, est fort peu différencié ; c'est un long tube légèrement étranglé à chaque segment, ce qui lui donne un aspect faiblement moniliforme. Il passe insensiblement à l'intestin en se rétrécissant graduellement. Il n'existe pas d’anse duodénale.

Son épithélium est très faiblement cilié, sauf dans la gouttière stomacale les cils vibratiles sont plus développés. Au-dessous de cette gouttière règne un cordon de fibres musculaires longitudinales.

En dehors de ces quelques fibres sous la gouttière stomacale, il n'existe qu'une couche de fibres circulaires mais elle est un peu plus fortement accusée que dans les autres genres.

A partir de l’œsophage tout le tube digestif est contenu dans le sinus péri-intestinal.

Dans l'intestin reparaissent les deux couches musculaires et la ciliation accentuée de l'épithélium.

L'anus terminal s’ouvre en entonnoir.

S VI Circulation.

La circulation a été étudiée par Wiren (85), chez la M. cristala ; MEYER (8°) dans son dessin d'ensemble (PI. 23, fig. 2) la figure en partie chez la M. palmala.

Comme chez les autres Ampharétiens, un vaste sinus sanguin entoure le tube digestif. À la naissance de l’œsophage le cœur naît d'un anneau vasculaire qui se prolonge à la face ventrale de l'estomac en deux gros vaisseaux situés de part et d'autre de la gouttière stomacale et formés par des replis de l’endothélium du sinus.

Le cœur donne en avant deux rameaux latéraux d’où naissent quatre artères branchiales. Elles ne naissent donc pas directement du cœur comme chez l'Ampharele (WIREN, 85, PL. 1, fig. 13).

La structure du corps cardiaque est identiquement la même que chez l’Amphicteis. Seulement le corps cardiaque s’insère à la partie

448 PIERRE FAUVEL.

antérieure de l'estomac comme chez l'Ampharele sans former de bourrelet circulaire à l’intérieur de l’anneau vasculaire.

Le vaisseau ventral donne dans les segments IIL, IV, V et VI des veines latérales, vaisseaux efférents des branchies. Il donne ensuite à chaque segment, à partir du VII, un vaisseau ventro-pédieux qui se ramifie et s'anastomose dans le pied avec le dorso-pédieux venant du sinus stomacal, sauf pour le VIT et le VIII segment dont le vaisseau dorso-pédieux naît de l'anneau vasculaire. Les suivants naissent du sinus par des arcs ramifiés.

Dans la région abdominale les dorso-pédieux naissent de Ja face ventrale du sinus intestinal par une racine simple.

D’après WIREN, le sang de la M. cristata estrouge. Nous ignorons si le sang de la M. palmata présente la même couleur, exceptionnelle chez les Ampharetiens, car nous n'avons eu entre les mains que des animaux fixés et Les descriptions sont muettes à cet égard.

Celle de GRUBE ferait cependant supposer qu'il est rouge.

S VIL Néphridies. Reproduction.

Elles ont été longement décrites par MEYER (87, PI. xxu, fig. 3, XXII, fig. 3, XXV, fig. 25-35).

Elles sont au nombre de quatre paires, à peu près semblables, situées dans les segments IV, V, VI et VII.

Elles ressemblent beaucoup aux néphridies antérieures de l'Am- pharete.

Cependant, chez la M.cristata leur tube en boyau est relativement beaucoup plus court que chez la M. palmata, et nous avons vu un exemplaire de M. cristata dont le tube des néphridies antérieures ne dépassait pas le VIII segment et dont les néphridies posté- rieures très courtes se rapprochaient beaucoup plus des néphridies du type Amphicteis que du type ordinaire de Melinna.

L’ovogénèse et la spermatogénèse sont semblables à celles des autres genres.

Les ovules jeunes ont normalement un pucléole double ou deux nucléoles.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 449

XIX.

COMPARAISON DES GENRES ENTRE EUX.

Les Ampharéeliens présentent un certain nombre de caractères commuss tels que la division du corps en trois régions. La région antérieure est comme enchâssée dans les premiers segments de la région thoracique. Celle-ci, toujours bien développée, porte des pieds à soies capillaires et des pinnules uncinigères. La segmentation n’est pas apparente à sa face dorsale.

La région abdominale plus effilée, est de longueur variable, mais toujours au moins égale à celle de la région thoracique. Elle ne porte plus de pieds mais seulement des pinnules uncinigères. Chez les Amphicteis, Samytha et Melinna, un cirre dorsal représente dans cette région le mamelon pédieux disparu. La pinnule possède généralement dans cette région un petit cirre à son angle supérieur. Ce cirre est surtout développé chez l’'Ampharete qui par contre manque de cirre dorsal. Il existe une gouttière ventrale. Le lobe céphalique semble entier chez la Melinna cristata, mais il est déjà trilobé chez la M. palmata. Chez l’Ampharete il porte un palpode unique impair, tandis que chez l’Amphicteis et la Samytha il existe deux palpes rudimentaires.

Les branchies sont le plus souvent au nombre de quatre paires, ce chiffre semble être Le chiffre normal.

Très fortement coalescentes à la base chez la Melinna, elles sont, au contraire, bien séparées chez l’Amphiclers et laissent alors deviner leur insertion sur quatre segments distincts. Elles sont simples, subulées, sauf chez quelques espèces exotiques qui présentent une tendance à la pennation.

450 PIERRE FAUVEL.

Les Ampharetiens habitent des tubes enfoncés verticalement dans la vase. Ils sont capables de quitter leur tube et de s’en construire un nouveau.

La cuticule est toujours formée de deux couches fibreuses, dont les stries se croisent à angle droit et d’une couche sous-jacente non striée. Elle est percée de pores.

L’épiderme présente le caractère commun d’être toujours très épais et très riche en cellules glandulaires dans la région antérieure il forme de vrais boucliers continus autour des segments.

Dans la région thoracique il est mince et transparent à la face dorsale. Des cellules à mucus en fiole y sont disséminées çà et au milieu de cellules universelles. À la face ventrale il forme d'épais boucliers thoraciques s'étendant jusqu’à l’avant-dernier segment de cette région.

Les glandes ventrales ne sont que l’exagération du développement de la couche profonde de ces boucliers. Elles ont la même structure. Elles existent chez la Melinna el l'Ampharete et manquent chez l’Amphicteis et la Saimnytha.

Les genres différent légèrement par la nature et la répartition des cellules à mucus.

Les soies capillaires n’ont rien de caractéristique. Non seulement elles se ressemblent beaucoup dans tous les genres mais encore elles sont d’un type répandu dans les groupes très différents, tels que les Spionidiens et les Térébellides, mais il n'existe jamais de soies pectinées ou composées comme chez ces derniers.

Les palées diffèrent peu. Elles manquent chez les Samytha et Sabellides et sont remplacées chez les Melinna par une grosse soie unique en crochet. Elles appartiennent toujours au II° segment.

Chez les Melinna seulement, il existe dans les segments II, IN, IV et V de fines soies neurales simples, peut-être homologues aux soies à crochet.

Les plaques onciales bien caractérisliques peuvent se ramener à deux types principaux : type Ampharete, uncini élargis en haut, dents nombreuses sur deux ou plusieurs rangées ; type Amphicteis, uncini élargis au milieu, dents moins nombreuses et sur un seul rang.

La musculature est sensiblement la même dans toute la famille.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 451

La cavité thoracique est toujours divisée en deux parties par un diaphragme antérieur, mais la place de celui-ei varie avec les genres. On ne peut en faire un trait caractéristique comme MEYeR le pensait.

Chez l’Ampharete et la Melinna il est situé entre le IIT° et le IV° segment, ou plus exactement dans le IV° segment; chez la Samytha, entre le IV' et le etenfin chez l'Amphicteis entre le et le VI", avec un second diaphragme entre le IV° et le quand il existe deux néphridies antérieures.

Le système nerveux est peu développé. Cependant on retrouve dans l'encéphale les trois centres principaux. Le cerveau moyen est seul bien développé. Le cerveau antérieur est représenté chez l'Ampharete et la Melinna par l'aire palpaire et les nerfs palpaires. Il ne forme pasde ganglions bien délimités. Chez l'Amplucteis et la Samytha cette région est plus développéeet il existe des ganglions rudimentaires.

Les organes nucaux sont de deux types ; ils sont formés par un bourrelet et une fossette chez les Amphicters et Samytha (3° caté- gorie de Racovirza) et seulement par une fosselte non dévaginable chez les Ampharete et Melinna (4 catégorie).

Les canaux neuraux sont généralement au nombre de deux. Ils sont surtout développés chez l'Amphicteis.

Les relations de la chaîne nerveuse avec les téguments sont très étroites, surtout dans la région abdominale elle est souvent en contact direct avec la cuticule.

Les yeux sont au nombre de deux seulement chez l'Ampharete ; au nombre de 10 à 12 de ehaque côté chez les Amphicteis, Samytha et Melinna. Ce sont de simples sphérules de pigment noyées dans la masse des cellules nerveuses du cerveau moyen.

Chez l'Ampharete ils sont formés d’une cellule géante recouverte d’une calotte de pigment. Le cerveau moyen est en contact direct avec la cuticule.

Les tentacules sont lisses chez les Melinna, Samytha et Amphic- leis et pennés chez les Ampharete et Sabellides. Les tentacules de la Samytha forment transition entre les tentacules simples et les tentacules pennés.

452 PIERRE FAUVEL.

Ils sont toujours rétractiles dans l’œsophage. Ils appartiennent au lobe céphalique et sont innervés par le centre palpaire.

Le pharynx est toujours pourvu à sa face inférieure de deux lèvres internes, bilobées, placées l’une derrière l’autre, à structure mus- culaire très prononcée.

L'œæsophage ne diffère guère d’un genre à l'autre. Il est revêtu d’une double couche de fibres musculaires circulaires et lon- gitudinales.

L'estomac présente sa structure la plus simple chezla Melinna, il y est dépourvu de lobes antérieurs, de cœcum interne et même d’anse duodénale et passe insensiblement à l'intestin.

Chez la Samytha et l'Amphicteis il existe un vaste diverticule au cœcum interne, qui manque chez l’Armpharete ; celui-ci est pourvu par contre de deux lobes antérieurs cordiformes sur lesquels le sinus péri-intestinal ne s’étend pas.

L'estomac, peu ou point cilié intérieurement, possède une gouttière vibratile longitudinale marquée extérieurement par quelques fibres musculaires longitudinales et par l'absence du sinus et de la couche de fibres musculaires circulaires, la seule qui existe dans le reste de l'estomac.

L’intestin est semblable dans tous les genres ; son épithélium est fortement plissé et cilié. Il possède deux couches musculaires.

Un sinus péri-intestinal entoure complètement l'estomac et l'in- testin, et ne manque que sur les lobes antérieurs de l’Ampharele.

Le cœur donne une seule branche de chaque côté, d'où naissent ensuite les quatre artères branchiales chez la Melinna.

Chez la Samytha et l'Amphicteis il donne trois artères dont la première se bifurque. Entin chez l'Ampharete les artères bran- chiales naissent du cœur par quatre troncs distincts.

Le corps cardiaque présente la même structure partout et naît de la face dorsale de l’œsophage à sa jonction avec l'estomac, mais chez l'Amphicteis ses deux racines entourent la base de l'œsophage d'un collier épais contenu dans l'anneau vasculaire.

Il est toujours en continuité de tissu avec l’épithélium intestinal. Le sang est vert, dichroïque, sauf chez la Melinna dont le sang est rouge. Il renferme des hématies.

-

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 453

Les néphridies sont de deux types : type Melinna à long boyau formé par l’accolement des deux longues branches du tube néphri- dien, type Amphicteis à néphridies courtes et globuleuses.

Elles sont au nombre de quatre paires semblables chez la Melinna. La Samytha en possède quatre paires du type Amphicteis. l'Amphicteis en a tantôt quatre, tantôt cinq paires. L’Ampharete a une paire antérieure du type Welinna et une seule paire postérieure du type Amphicteis, et elles ne sont pas situées dans deux segments contigus.

Elles se divisent en néphridies antérieures et néphridies posté- rieures. Les néphridies antérieures sont excrétrices; il y en aune paire, sauf chez l'Amphicteis qui en possède parfois deux paires. Les néphridies postérieures servent à l'évacuation des produits sexuels. Elles sont au nombre de trois paires, sauf chez l'Ampharete il n'en existe qu'une seule paire.

Les œufs et les spermatozoïdes se forment de la même façon aux dépens du péritoine des vaisseaux transversaux el de la partie antérieure du sinus intestinal.

Les ovules renferment normalement deux nucléoles à un certain stade.

La spermatogénèse se fait de ia même façon chez les différents genres.

Il existe trois groupes principaux d’Ampharetiens :

Les Ampharétiens à palées, les Amphareliens sans palées, les Ampharéliens à nombreux segments du type Melinna.

Dans les Ampharetiens à palées, il existe deux types bien différents malgré leurs ressemblances externes; le type Ampharete et le type Amphicters.

Ces deux types se retrouvent dans les Arpharètiens sans palées, qui forment une série parallèle à la première, et l’on pourrait définir Samytha un Amphicters sans paiées et Sabellides un Ampharete sans palées.

454

PIERRE FAUVEL.

Nous avons résumé ci-dessous les caractères des deux types.

Type Ampharete.

Un palpode.

Organe nucaux en fossette.

2 yeux simples.

Tentacules pennés (1).

4 paires de branchies.

Environ 14 pieds sétigères.

Pinnules à partir du VI* segment (3° sétigère).

Plaques onciales subquadrangulaires,

à dents assez nombreuses, sur 2 rangs.

Mamelon pédieux dorsal sans cirre.

Pas de cirre dans la région abdo- minale.

Pinnules abdominales à cirre dève- loppé.

Estomac sans diverticuleinterne mais à deux lobes antérieurs.

Des glandes ventrales.

Deux paires de néphridies dissem- blables :

Néphridie antérieure du type Me- linna.

Néphridie postérieure du type Am- phicteis.

Diaphragme entre le III° et le IVe segment.

4 artères branchiales distinctes.

(1 et 1) Ce caractère n’est pas absolu.

Type Amphicteis.

Deux palpes rudimentaires.

Organes nucaux en bourrelet.

2 groupes d'yeux simples.

Tentacules lisses (1).

4 paires de branchies.

Environ 17 pieds sétigères.

Pinnules à partir du VII segment (4° sétigère).

Plaques onciales subtriangulaires.

Dents peu nombreuses sur un seul rang.

Mamelon pédieux dorsal portant 1 cirre.

Un cirre dans la région abdominale.

Pinnules abdominales à cirre rudi- mentaire.

Estomac avec diverticule interne ; pas de lobes antérieurs.

Pas de glandes ventrales.

4 à 5 paires denéphridies semblables.

Diaphragme entre le IV® et le Ve segment ou même entre le Vtet le VIe.

3 artères dont la première bifurquée.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 455

Le troisième groupe des Ampharétiens est représenté par le

type Melinna, dont les caractères anatomiques peuvent se résumer ainsi :

Type Melinna.

«

Lobe céphalique à palpode rudimentaire. Organes nucaux en fossette (4° type). Deux groupes d’yeux simples. Tentacules lisses. Quatre paires de branchies fasciculées au moins à la base. Petites soies simples (neurales) sur les I°, II°, IV* segments. Une grosse soie en épine sur le ITT°. 15 pieds sétigères. Pinnules à partir du VI" segment. Plaques onciales à dents peu nombreuses sur une seule rangée. Mamelon pédieux portant un cirre rudimentaire qui persiste dans la région abdominale. Estomac sans diverticule passant insensiblement à l'intestin sans former d'anse duodénale. 4 paires de néphridies semblables à long tube, situées dans les segments IV, V, VI et VIT. Diaphragme entre le II[° et le IV° seg- ment. Glandes ventrales. Vaisseaux branchiaux naissant du cœur par deux branches ramifiées. Anus dépourvu de cirres.

N'ayant malheureusement pas pu nous procurer de Sabellides, nous ne pouvons nous baser en ce qui concerne ce genre, que sur les caractères externes. Cependant quelques détails et la figure de Marion du Sabellides octocirrata, nous font supposer que, les néphridies se rapprochent beaucoup de celles de l’'Ampharele. Nous avons résumé dans le tableau suivant les homologies des premier segments des cinq principaux genres.

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RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 457

XX.

COMPARAISON DES AMPHARÉTIENS AVEC LES AMPHICTEÉNIENS ET LES TÉRÉBELLIENS.

On classe ordinairement les Ampharétiens entre les Amphicte- niens et les Térébelliens. Ils semblent en effet à première vue avoir beaucoup d’affinités avec ces deux familles.

Cependant, si l’on vient à comparer soigneusement les Amphic- teniens et les Ampharetiens, on relève surtout des différences.

C’est d’abord la forme et la disposition du lobe céphalique modifié d'une façon si bizarre et si caractéristique chez les Amphicteéniens. Les Ampharétiens n'ont rien qui soit réellement comparable au voile céphalique, au limbe postérieur, aux quatre antennes ou cirres tentaculaires de cette famille. Les palées, bien que sortant au-dessus du lobe céphalique, appartiennent à un segment postérieur, mais il n'est pas prouvé que ce segmént corresponde à celui qui porte des soies semblables chez les Ampharétiens. Le voile céphalique ne peut être comparé à la lèvre supérieure des Ampharetiens, puis- qu'il est en arrière des tentacules, tandis que celle-ci est en avant des tentacules.

La figure 171 (PI. xxv) nous montre la différence de structure de ces tentacules. Chez la ZLagis Koreni ils renferment deux nerfs latéraux (Ne) bien distincts et un gros vaisseau (V) principal. La musculature longitudinale est très développée. Il n'existe pas de double couche de fibres obliques, mais seulement une très mince couche de fibres circulaires.

L’épithélium est mince et ne renferme pas de grosses cellules à mucus spécialisées.

Cette structure, on le voit, est bien différente de celle des tenta- cules des Ampharetiens et des Térébelliens (fig. 170).

Ces tentacules ne sont pas rétractiles dans l’æsophage.

Les Ampharéliens ont une région antérieure composée, du lobe céphalique et de un ou deux segments, bicr caractérisée par sa forme, la façon dont elle peut se rentrer en partie dans la région thoracique

458 PIERRE FAUVEL.

ou dans une gaîne branchiale comme chez les Melinna. Rien d'analogue chez les Amphictémiens.

Chez ceux-ci, la région thoracique constitue la plus grande partie du corps et la région abdominale très réduite et profondément modifiée forme la scaphe, qui ne ressemble plus en rien à la région abdominale des Ampharétiens.

Les soies capillaires différent complètement et les crochets avi- culaires des pinnules sont plus différents encore des uncini.

La gouttière véntrale, si uniformément développée chez les Ampharetiens, manque chez les Amphicténiens.

Les mœurs et le genre de vie sont encore plus différents. Les Ampharètiens habitent un tube, simple galerie creusée vertica- lement dans le sol et prolongée un peu extérieurement. Leur habi- tation est donc absolument fixée au sol, mais ils peuvent la quitter et s’en construire une autre aisément.

La Pectinaire habite un tube, qui est plutôt un étui soigneusement adapté au corps de l’animal, qu'il ne quitte jamais et qu’il promène partout avec lui comme un Dentale sa coquille. La Pectinaire est en effet très vagabonde, cheminant perpétuellement dans le sable qu'elle remue assez rapidement. Retirée de son tube elle est inca- pable de s’en construire un autre et ne tarde pas à périr.

Si nous passons aux téguments nous trouvons une cuticule à peu près semblable dans les deux familles, mais l’épiderme des Ampluc- léniens est beaucoup moins développé. Les boucliers et les glandes ventrales sont peu développés et limités aux premiers segments du corps et aux derniers qui précèdent la scaphe alors que chez les Ampharéetiens ils occupent presque toute la face ventrale de la région thoracique. Dans la plus grande partie de cette région, chez les Amphicteéniens les téguments sont réduits à une minceur extrême. L'ensemble de la cuticule de l’épiderme et de la couche circulaire atteignant à peine quelques millièmes de millimètres.

Les muscles longitudinaux ventraux forment deux bandelettes très écartées.

L'encéphale est encore plus réduit que chez les Ampharétiens bien qu’on y puisse encore retrouver les trois centres.

La chaîne ventrale est complètement isolée des téguments. au moins dans toute la partie antérieure du corps. Elle forme un cordon

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 459

compact à ganglions bien caractérisés et donne rois nerfs latéraux par segment.

Le tube digestif, avec ses nombreuses anses, diffère complètement de celui des Ampharétiens. On n'y retrouve ni estomac droit, renflé, ni cœcum interne, ni lobes antérieurs. Sa structure histologique varie également et ses rapports avec l'appareil circulatoire sont tout autres.

Ceci du reste se comprend aisément, car les Amphicténiens avalent du sable en nature comme les Arenicoles, tandis que les Ampha- réliens se nourrissent d'animaux microscopiques qu’ils capturent avec leurs tentacules.

L'appareil circulatoire ne diffère pas moins, tant au point de vue de la disposition et des rapports du sinus intestinal avec le tube digestif, qu’au point de vue de l’arrangement et de la distribution des vaisseaux, du cœur et des branchies. Ces dernières sont toujours pectinées et au nombre de deux paires seulement.

Les néphridies, assez variables comme nombre, semblent l’être aussi comme place suivant les espèces, si nous en croyons les diffé- rents auteurs.

En tous cas il n’existe chez les Ampharétiens rien de comparable aux glandes antérieures énigmatiques des Pectinarres.

Nous savons que l'emplacement du diaphragme est très variable chez les Ampharétiens et qu'on n’en peut pas tirer de caractère important comme le fait MEYER (87) dans son tableau.

Cet auteur fait remarquer qu'à Naples un Amphicténien est normalement hermaphrodite.

Nous ne connaissons pas de cas analogue chez les Ampharétiens.

La famille des Amphicteéniens est une famille très naturelle, très homogène, dont tous les genres se ressemblent étroitement et aucune espèce ne présente de termes de passage ni avec les Ampharétiens ni avec les Térébelliens.

Les Ampharétiens et les Amphiclténiens sont peut-être deux branches parallèles mais qui ne dérivent certainement pas l’une de l’autre.

Les liens sont plus étroits entre les Ampharétiens et les Tére- belliens.

Cette dernière famille, très nombreuse, présente des formes fort différentes.

460 PIERRE FAUVEL.

Nous trouvons des ressemblances assez grandes entre les deux familles.

La forme générale du corps est la même; quoique la région antérieure sont moins différenciée chez les Térebelliens ; il existe une région thoracique pourvue de boucliers thoraciques et de glandes ventrales, et une rêgion abdominale dépourvue de pieds séligères quoique portant des tores uncinigères.

On retrouve chez eux des soies ensiformes analogues à celles des Ampharétiens, et les crochets aviculaires se rapprochent beaucoup des plaques onciales chez les Terebella Danielseni, Nicolea arctica, Terebellides Stræmi, etc.

Le système nerveux est également très analogue et par la dispo- sition de l’encéphale avec ses organes nucaux et par les rapports de la chaîne ventrale avec l’épiderme.

Les tentacules ont la même structure fondamentale.

Chez la Lanice conchilega, par exemple, on y retrouve les trois couches musculaires dont une longitudinale et deux obliques, même absence de vaisseaux dans le tentacule et de nerfs caractérisés, même cavité centrale en communication avec la cavité générale et gouttière ciliée identique. Les tentacules des Terébelliens ne sont pas pennés mais ils renferment parfois des cellules glandulaires localisées. Chez la Lanice (fig. 170), on y trouve de grosses cellules à mucus violettes (Clgl.) localisées sur les bords de la gouttière vibratile et de petites cellules ovoïdes colorées en rouge vif par l’éosine (C/r.) sur les côtés du tentacule.

Dans les deux familles, ces tentacules sont innervées parles centres palpaires, et la lèvre supérieure des Ampharéliens est bien l'homo- logue de celle des Térébelliens.

Dans les deux familles on retrouve une paire de lèvres internes lobées à structure musculaire.

s'arrêtent les ressemblances.

L'appareil digestif des Térébelliens se divise aussi en pharynx, œsophage, estomac et intestin ; mais, de plus, l'estomac se divise en estomac glandulaire et en estomac chitineux qui ont des caractères bien spéciaux, décrits en détail par WIREN (85).

1! n'existe pas de divisions analogues de l'estomac chezles Ampha- réliens. Par contre lAmphicteis présente un cœcum interne sans analogue chez les Térébelliens.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 461

Dans cette dernièrefamilleles branchies varient dezéro à trois paires mais jamais plus. Elles sont le plus souvent arborescentes. Chez les Ampharétiens les branchies sont normalement au nombre de quatre paires appartenant à quatre segments distincts et les espèces qui n’en ont que trois paires, se rapprochent du type Amphacteis qui est le plus hautement différencié de ce groupe. Ce n’est donc pas une disposition primitive.

Euthelepus et Eupista (1) ont des branchies subulées comme celles des Ampharetiens mais au nombre de deux ou trois paires seulement et par tout le reste de leur organisation, autant du moins qu'on en peut juger d'après les descriptions de Mc'’Inrosn, ils différent fortement des Ampharetiens, entre autre par leurs uncini et par leur absence de vraies pinnules.

Les tentacules des Ampharéliens sont loujours capables de se rétracter dans l’œsophage, par rabatiement de la lèvre supérieure. Chez les Térébelliens à n'existe pas de disposition analogue.

EuLers (87), pense que s’il était démontré que le cirre dorsal de la région abdominale est l'homologue du parapode de la région thoracique et n’est pas une acquisition secondaire, ce serait un indice sérieux que les Ampharétiens ne dérivent pas des Térebelliens, mais qu'il faut leur chercher un ancêtre commun.

Nous pensons avoir démontré cette homologie et nous y voyons en effet une raison d'adopter la conclusion indiquée par EHLERS.

Meyer (87), indique des différences dans la position du diaphragme et dans celle des néphridies entre les Ampharétiens et les Térébel- liens ; mais nous avons vu que ces caractères sont trop variables chez les Amphareliens pour qu'on puisse leur attribuer de l'impor- lance.

Il faut convenir qu’on ne connait pas maintenant de véritables formes de passage entre les deux familles.

Si certaines espèces de Térebellidiens se rapprochent des Ampha- réliens par certains caractères, elles s’en éloignent bien davantage par les autres. ï

Les espèces dépourvues de palées, productions qui manquent complètement chez les Térébelliens, ne sont pas celles qui se rap- prochent le plus de cette famille.

(1) Mc'Inrosx (86), (p. 458 et 465).

462 PIERRE FAUVEL.

La Melinna, malgré la simplicité de son appareil digestif et ses nombreux segments, s’en écarte par sa gaîne de la région thoracique, ses soies en épine, ses soies fines neurales, ses branchies fasciculées, ses cirres abdominaux et la forme si spéciale de ses néphridies.

Quant au genre Auchenoplax, Eurers (87), si ses caractères le séparent des autres Ampharétiens, ils ne le rapprochent guère davantage des Teérébelliens.

En résumé, dans l’état actuel de nos connaissances, les Amphare- tiens se rapprochent plus des Terebelliens que des Amphicténiens, mais ils ne dérivent pas plus des uns que des autres.

Ces trois familles forment trois branches parallèles issues d’une souche qui nous est inconnue.

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RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 463

RÉSUMÉ

Habitat. Les Ampharétiens sont des Annélides vivant surtout dans les mers boréales ou à une profondeur assez considérable.

L'Ampharele Grubei n'avait jamais été signalé plus au Sud que la Baltique ; il était complètement inconnu en France.

Il existe en assez grande quantité dans la baie de St-Vaast-la- Hougue, il habite la vase des herbiers de zostères au niveau des basses mers.

Tube. Le tube est vertical, enfoncé dans la vase et composé de deux parties : une inférieure, simple puits creusé dans la vase, une supérieure construite lentement par l'animal au moyen de ses tentacules.

L'Ampharete peut quitter son tube ets’en construire un nouveau.

Il s'enterre dans le sol la tête en avant et se retourne ensuite dans son tube qui n’est ouvert qu’à l'extrémité supérieure.

Le tube est formé d’une couche extérieure de grains de sable et d’une couche interne composée de membranes présentant l'aspect, les réactions et les stries de la cuticule.

Ces membranes sont formées par la sécrétion muqueuse de la région antérieure et des boucliers thoraciques.

Cuticule. La cuticule est formée de trois couches : une couche profonde anhiste et deux couches superficielles fibreuses dont les fibres se croisent à angle droit. Elle est percée de pores.

La couche profonde, anhiste, est une production des fibro-cellules de soutien, les deux couches fibreuses sont sécrétées par les cellules à mucus et identiques aux membranes internes du tube également sécrétées par les éléments muqueux de l’épiderme.

Epiderme. L'épiderme est très épais dans la région anté- rieure il forme un bouclier circulaire continu.

464 PIERRE FAUVEL.

Il est mince à la face supérieure de la région thoracique et formé dans celte région de cellules épidermiques universelles, peu diffé- renciées, mélangées çà et de grosses cellules à mucus.

Sa structure n’est pas partout alvéolaire.

Elle l’est franchement au contraire dans les boucliers et les régions épaisses de l’épiderme.

On y trouve des cellules de soutien, des cellules à mucus de diverse nature, et des éléments intermédiaires entre ces deux types.

Les glandes ventrales sont composées de cellules à mucus géantes à réactions spéciales, entourées d’un réseau de fibro-cellules de soutien conjonctives.

Les glandes ventrales sont formées par le développement excessif de la couche profonde du bouclier.

Elles appartiennent entièrement à l'épiderme et sont par consé- quent d’origine ectodermique.

Les muscles et les vaisseaux ne pénètrent jamais dans les boucliers ni dans les glandes ventrales des Ampharétiens.

La basale, quand elle existe, est toujours située au-dessus des boucliers, entre eux et les fibres musculaires circulaires.

Elle ne pénètre jamais dans les boucliers ainsi que cela a lieu chez le Spirographis.

Les assises profondes et superficielles du bouclier sont intimement unies et mélangées en une seule couche.

Les glandes ventrales existent chez l Ampharete et la Melinna ; elles manquent chez l'Amphicleis etla Samytha, mais dans ce cas la structure de la couche profonde des boucliers est la même que celle des glandes ventrales des autres genres.

Soies. Les sois capillaires sont, chez les Ampharétiens, toutes construites sur un type très uniforme et peu caractéristique.

Leur structure est fibreuse.

Elles naissent d’une grosse cellule-mère unique.

Les palées sont homologues aux soies capillaires et la soie en épine des Melinna leur est homologue également.

Les wncini sont de deux types ; type Amplicteis, élargis au centre, subtriangulaires, à dents peu nombreuses, en général sur un seul rang (Samytha, Melinna) ; type Ampharele : uncini élargis au sommet, dents nombreuses souvent disposées sur plusieurs rangs.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 465

Il existe toujours des soies de soutien et des soies-tendons dans les pinnules abdominales.

Chez les Melinna, Samytha et Amphicteis un cirre dorsal plus ou moins développé représente dans la région abdominale le parapode dorsal disparu.

Ce cirre manque chez l'Ampharele.

Par contre, le cirre de l’angle supérieur de la pinnule abdominale, peu développé chez les trois premiers, est très accentuée chez l'Ampharete.

Musculature. La musculature ne présente qu’en quelques points du corps la répartition habituelle en quatre faisceaux dont deux dorsaux et deux ventraux. Il n'existe le plus souvent qu’un large faisceau dorsal et deux faisceaux ventraux arrondis et saillanis dans la région abdominale.

Les muscles obliques déterminent deux chambres néphridiennes.

Les parapodes sont mus par des muscles protracteurs, rétracteurs, pédieux droit et un pédieux oblique.

Le tissu conjonctif intra-musculaire est assez développé.

Les fibres musculaires sont aplaties, pourvues de nombreuses anastomoses. Elles se décomposent en fines fibrilles de 1 u.

On rencontre des noyaux à l’intérieur des fibres musculaires.

Il n'existe pas de fibres striées.

Cavité générale. Elle est divisée par un diaphragme en chambre thoracique antérieure et chambre thoracique postérieure.

La place du diaphragme est variable. Il est situé entre le IT et Le IV° segment chez l'Ampharete et la Melinna, entre le IV° et le chez la Samytha, enfin chez l’Amphicteis il est situé entre le et le VI segment ; mais parfois, quand il y a cinq paires de néphridies, il en existe un second entre le IV° et le V°.

Le diaphragme est souvent formé seulement par l’endothélium ; chez la Melinna et l'Amphicteis il renferme en outre des fibres musculaires.

La partie supérieure forme parfois une membrane fenestrée.

La cavité générale renferme des amibocytes pendant l'été, des produits sexuels pendant l'hiver.

Elle est entièrement tapissée par l’endothélium.

466 PIERRE FAUVEL.

Endothélium. Il est formé de cellules plates, à contours plus ou moins sinueux, suivant les régions considérées.

Glandes lymphatiques. Elles sont situées à la base des vaisseaux branchiaux. Leur développement est variable.

Système nerveux. On distingue trois centres dans l’encé- phale : le centre antérieur est représenté le plus souvent par une aire palpaire et les nerfs palpaires ; ses ganglions sont rudimentaires.

Le cerveau moyen est le centre le plus développé ; il est formé de deux ganglions étroitement accolés.

I! porte deux yeux simples chez l'Ampharete, deux groupes d'yeux simples dans les autres genres.

Le cerveau postérieur est formé par les organes nucaux, simples fossettes vibratiles chez l’'Ampharete et la Melinna, fossettes vibratiles et crêtes en bourrelet chez l’Amphicteis et la Samytha.

La partie frontale médiane est un palpode impair chez l Ampharete et la Melinna ; 11 existe deux palpes rudimentaires chez l’Amphicteis et la Samytha.

Les tentacules innervés par le centre palpaire appartiennent au lobe céphalique.

Yeux. Chez l'Ampharele l'œil est constitué par une cellule géante recouverte d’une calotte de pigment. [1 est complètement noyé au milieu des cellules ganglionnaires du cerveau moyen. Chez les Amphacters, Samytha, Melinna, les yeux simples également noyés dans la masse cérébrale sont de simples sphérules creuses de pigment, renfermant un contenu clair.

Il n'existe ni cristallin, ni cornée.

Le cerveau moyen est en contact direct avec la cuticule, l'épi- derme étant entièrement transformé en cellules nerveuses.

Connectifs. Ils naissent du cerveau moyen. Leurs cellules nerveuses sont intimement mélangées à celles de l’épiderme. On y trouve des cellules apolaires, unipolaires et bipolaires.

Chaîne ventrale. Elle est constituée par deux cordons étroi- tement accolés, à peine renflés en ganglions. Les deux cordons s'envoient une commissure transversale avant de se réunir.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 467

Les nerfs latéraux, au nombre d’un seul par segment, naissent du cordon par deux racines : une supérieure et une inférieure. La racine supérieure de droite alterne avec la racine inférieure de gauche et vice-versa.

Il existe en général deux canaux neuraux, non continus, formés par les prolongements des cellules géantes.

Le stomato-gastrique, peu développé se rattache au centre palpaire.

Appareil digestif. Il se divise en Pharynx, Œsophage, Estomac, Intestin. Le Pharynx porte à sa face inférieure deux lèvres internes bilobées à structure musculaire.

Les tentacules sont rétractiles dans l'œsophage. Ils renferment une couche musculaire longitudinale et deux couches obliques. Ils sont creusés d’une gouttière vibratile dont les bords sont découpés en pinnules qui renferment des cellules à mucus localisées et spécialisées chez l’'Ampharete. Chez l'Amphacteis et la Melinna les bords de la gouttière vibratile sont entiers, les cellules à mucus sont petites et réparties sans ordre. La Samytha a des tentacules formant la transition entre Les deux types.

Les tentacules ne renferment ni nerf spécialisé, ni vaisseaux. Ils se rapprochent beaucoup de ceux des Térébelliens et leur sont homologues. Ils diffèrent de ceux des Amphicteéniens.

L’æœspohage est cilié, ne renferme pas de cellules à mucus et est revêtu de fibres musculaires circulaires et longitudinales.

L’'estomac est renfermé dans un sinus. Chez la Melinna ilest simple, peu différencié. Chez l’Ampharete il présente deux lobesanté- rieurs non recouverts par le sinus. Chez la Samytha et l Amphicteis les lobes antérieurs manquent, mais il existe un diverticule interne.

Une gouttière ventrale vibratile règne le long de l’estomac.

A l'extérieur le sinus vient se terminer de chaque côté de cette ligne.

Il n'existe qu'une couche de fibres musculaires peu développées.

Les prétendues cellules à mucus sont des Grégarines.

Le muscle parieto intestinalis inférieur manque complètement dans la région stomacale.

L'estomac passe à l'intestin par une anse duodénale remontante, sauf chez la Melinna.

468 PIERE FAUVEL.

L'intestin est droit, plissé longitudinalement, cilié et possède des fibres musculaires circulaires et longitudinales.

La nourriture se compose de diatomées, foraminifères, elc., recueillis par les tentacules bucaux.

La région antérieure de l'estomac est glandulaire, la région postérieure absorbante, l'intestin postérieur joue un rôle urinaire.

Circulation. Le sinus peri-intestinal entoure l'estomac et l'intestin. Il donne des vaisseaux dorso-pédieux allant aux pieds et aux pinnules. Le cœur en naît en avant. Il donne quatre artères distinctes chez l’'Ampharete et trois, dont l'antérieure bifurquée, chez l’'Amphicteis et la Samytha ; un tronc ramifié de chaque côté chez la Melinna.

Le sang circule d’arrière en avant dans le sinus et d'avant en arrière dans le vaisseau ventral.

Il existe de chaque côté un vaisseau latéral anastomotique reliant les pieds entre eux.

Les quatre paires de branchies reçoivent leurs vaisseaux afférents et efférents de quatre segments distincts : IIL°, IV°, V°et VT°.

Il existe en outre des vaisseaux clypéaux ou tégumentaires et, chez l'Amphicteis, deux vaisseaux latéraux, ventraux, en zigzag.

Le sang est rouge chez la Melinna, vert dans les autres genres. IL renferme des hématies. |

La paroi des vaisseaux ne renferme pas de fibres musculaires, elle est uniquement constituée par une membrane endothéliale comparable à celle des capillaires des Vertébrés.

Le corps cardiaque est plein. Sa structure est cellulaire.

Il s'insère sur l’œsophage à la réunion de celui-ci avec l'estomac et il est en continuité de tissu avec l’épithélium intestinal. Chez l'Amphicteis ses deux racines forment un gros collier contenu dans l'anneau vasculaire.

C’est un organe de soutien et de renforcement. Il empêche le sang des artères branchiales de refluer en arrière, c'est aussi un organe d'épuration du sang. Il sécrète peut-être la chlorocruo-

rine.

Néphridies. Leur nombre varie de deux paires (Ampharete), à cinq paires (Amphicteis). Il existe une paire de néphridies anté-

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 469

rieures en rapport avec la chambre thoracique antérieure et jouant presque exclusivement un rôle excréteur. Chez lAmnphicteis il existe souvent deux paires de néphridies antérieures.

Elles sont de deux types principaux : type Melinna, à très long boyau formé par l’accolement des deux branches ; type Amphicteis, courtes, globuleuses. Chez l'Ampharete les néphridies antérieures sont du type Melinna et les postérieures du type Amphicters. Les néphridies postérieures servent à l'évacuation des œufs et des spermatozoïdes.

Les néphridies ne se rencontrent jamais plus en avant que le IV° segment ni plus en arrière que le IX*.

Reproduction. Les œufs et les spermatozoïdes se développent aux dépens du péritoine des vaisseaux latéraux et de la région antérieure du sinus stomacal.

Les ovules présentent toujours un nucléole double ou deux nucléoles à un stade de leur développement.

L'un des nucléoles est ensuite expulsé et l'œuf mûr n’en renferme jamais deux normalement.

La spermatogénèse a lieu de la même façon que chez la plupart des autres Annélides. Elle diffère de celle des Phyllodociens en ce que les produits des divisions secondaires restent accolés jusqu'à la mise en liberté finale des spermatozoïdes.

Les produits sexuels commencent à se former en septembre, se développent abondamment pendant tout l’hiver et la ponte a lieu de mars à juin suivant les espèces. Elle s'opère par les néphridies postérieures.

Il existe trois grands groupes d'Ampharétiens, dans lequels on retrouve trois types principaux.

Ces types sont, pour les deux premiers groupes: Amphicteis et Ampharete. Ils se retrouvent dans le groupe des Ampharétiens sans palées, formant ainsi deux séries parallèles dans les deux groupes.

On peut définir la Samytha un Amphicteis sans palées et le Sabellides un Ampharete sans palées.

La Melinna forme le type unique du groupe.

L’Auchenoplax pourrait former un groupe.

Les Ampharétiens n’ont avec les Amphicténiens que de faibles ressemblances externes. Tous les détails de leur anatomie éloignent

470 PIERRE FAUVEL.

ces deux familles l’une de l’autre. Il n'existe aucun type intermé- diaire.

Les Ampharéliens se rapprochent davantage des Térébelliens ; néanmoins, il existe encore beaucoup de différences importantes et l’absence de type intermédiaire ne semble pas permettre de les regarder autrement que comme deux rameaux parallèles issus sans doute, d’un tronc commun, mais qui nous est inconnu.

Caen, le 22 mars 1897.

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RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 471

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SS

478 PIERRE FAUVEL.

EXPLICATION DES PLANCHES. Lettres communes à toutes les figures.

A. Anus.

A.i. Anse intestinale. An. Anastomose.

Ba. Basale.

B.e. Branche externe. B.i. Branche interne.

Br. Branchie. B.s. Bulbe sétigère.

C. Cœur.

C.c. Corps cardiaque. Ce. Cerveau.

C.a. Cerveau antérieur. Ci. Cirre.

Ci.a. Cirre anal.

Cl.é. Cellule épithéliale. Cl.gl. Cellule glandulaire. Cl.m. Cellule mere.

Clin. Cellule nerveuse.

Cl.n.e. Cellule nerveuse épithéliale.

Cl.n.g. Cellule nerveuse géante. Cl.r. Cellule rouge.

Cl.s. Cellules de soutien. Cl.sph. Cellule à sphérules. C.m. Cerveau moyen. C.n. Canal neural.

Cnt. Connectif.

Cu. Cuticule.

C.v. Cils vibratiles.

Cy. Cytophore.

D. Diaphragme.

D.i. Diverticule interne. En. Endothélium.

Ep. Epiderme.

Es. Estomac.

G.g. Grégarine.

Gl.v. Glandes ventrales. G.s. Gouttière stomacale. In. Intestin.

L.a. Lobes antérieurs. L.c. Lobe céphalique. L.f. Lèvre inférieure. L.i. Lèvre interne.

L.s. Lèvre supérieure. M. Muscle. M.c. Muscles circulaires.

M.d. Muscle pédieux droit. Ml. Muscle longitudinal.

M.o. Muscle oblique. M.o.p. Muscle pédieux oblique. M.pt. Muscle protracteur. Mr. Muscle rétracteur. M.t. Muscle-tendon.

N. Noyau.

n. Nucléole.

N.a. Néphridie antérieure. Ne. Nerf.

Ne.p. Nerf palpaire.

N.p. Néphridie postérieure. O0. Œil.

Œ.— Œsophage.

O.n. Organe nucal.

Ov. Ovule.

Pa. Parapode.

Pg. Pigment.

Ph. Pharynx.

PI. Palées.

Pn. Pinnule. Po. Pore. Pp. Palpode.

Pr. Péritoine. P.v. Pavillon vibratile.

S. Soie.

S.n. Soies neurales.

Si. Sinus intestinal.

S.n.v. Chaîne nerveuse ventrale.

S.p. Substance ponctuée.

Sph. Sphérules de la sécrétion sto- macale.

S.s. Soies de soutien.

S.t. Soies-tendon.

Str. Siries.

T.c. Tissu conjonctif.

Tg. Téguments.

Tt. Tentacules.

Un. Uncini.

V. Vaisseau.

V.a. Vaisseau anastomotique.

V.b. Vaisseau branchial.

V.c. Vaisseau clypéal.

V.d.p. Vaisseau dorso-pédieux.

V.v.p. Vaisseau ventro-pédieux.

V.z. Vaisseau en Zigzag.

Z. Partie antérieure de la région branchiale de Melinna.

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TE

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 479

Planche XV. Ampharete Grubei.

Q vue ventrale la bouche ouverte. Q vue de dos. 6 vu de profil, tentacules dévaginés.

A

6 vu de profil, les branchies sont rejetées sur le dos, la bouche fermée.

Animal vu de dos. Gr. 5.

Région antéricure vue par la face ventrale. La bouche est ouverte, les tentacules sont dévaginés. Gr. 10.

Région antérieure vue parla face ventrale, la bouche fermée. Gr.—10.

Région antérieure vue de profil. Gr. 10. Région antérieure vue de dos. Gr. = 10. Extrémité postérieure du corps. Gr. = 10.

Planche X VI.

Toutes les figures se rapportent à l'Ampharete Grubei, sauf la figure 14 se rapportant à l’'Amphicteis Gunneri.

Fig.

11. Animal ouvert pour montrer le tube digestif et la circulation

12. 13. 14. 15.

16.

17. 18. 19;

ΠN D DR

re, Schéma de la circulation branchiale. Vaisseaux efférents des branchies. Circulation à la face ventrale de l'Amplhicteis. Partie antérieure du tube digestif avec ses vaisseaux.

Région moyenne de profil montrant la disposition des vaisseaux anastomotiques latéraux.

Section transversale d’une branchie. Section transversale du cœur et du corps cardiaque.

Face ventrale de l'estomac montrant la gouttière vibratile Gv. et les troncs dorso-pédieux.

Planche XVII. Ampharete Grubei.

Dernier parapode thoracique et pinnule. Gr. 60. Première pinpule abdominale. Gr. 69.

Deuxième pinnule abdominale. Gr. 60.

Pinnule abdominale postérieure. Gr. = 60.

+ jy At we 0 OS 08

Fig. Fig. Fig. Fig.

Fig.

Fig.

PIERRE FAUVEL.

24. Soie capillaire thoracique. Gr. 200. 25-26. Palées. Gr. 150.

21

28. 29. 30. 31.

Une plaque onciale de la région postérieure. Gr. 800.

Une plaque onciale de la région moyenne. Gr. 800.

Une plaque onciale de la région antérieure. Gr. 800.

Une plaque onciale de la région abdominale vue de face. Gr. 800. Base d'une soie capillaire avec cellule mère Clm. Gr. 350. Section transversale d'un parapode.

Section longitudinale d'une pinnule de la région thoracique. Gr.—75.

Section longitudinale d’une pinnule de la région abdominale. GE

Endothélium du vaisseau ventral. Gr. = 350. Endothélium d'un vaisseau imprégné à l'argent. Gr. 350.

Planche XVIII.

Ampharete Grubei.

Musculature de la région thoracique. Fibres musculaires anastomosées. Gr. 150. Fibre musculaire dissociée montrant les anastomoses rompues.

Gr 450!

Fibre musculaire dissociée montrant une fausse striation Sér. Gr. —= 150.

Fibres musculaires dissociées. Gr. = 150.

Section d'une fibre musculaire avec noyau interne. Gr. = 700.

Cellule conjonctive étoilée intra-musculaire. Gr. = 700.

Section d'un parapode, la contraction des muscles protracteurs fait saillir les soies. Gr. 60.

Section d'un parapode. Les muscles rétracteurs sont contractès et déterminent l'invagination du faisceau de soies. Gr. 60.

Cellules du corps cardiaque. Bleu de Méthylène. Gr. 700.

Cellules du corps cardiaque dissociées. Gr. 700.

Coupe tangentielle du corps cardiaque. Bleu de Méthylène.Gr.—700.

Coupe tangentielle du corps cardiaque au niveau des noyaux. CL—a7 00:

Vaisseau sanguin avec noyaux de l’endothélium. Gr. 200.

Section transversale d'un vaisseau sanguin. Gr. 200.

Un vaisseau sanguin. Gr. 200.

Endothélium recouvrant les néphridies. Imprégnation à l'argent. GT. —13p0.

Péritoine du tube digestif, Imprégnation à l'argent. Gr. = 350.

Portion supérieure du diaphragme antérieur montrant l'aspect fenestré de la membrane endothéliale. Gr. 350.

PF et TUE

él. à:

74.

To. 76. TT

78 79 80

.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 481

Planche XIX.

Ampharete Grubei.

Coupe sagittale médiane de la région antérieure, les tentacules invaginés. Gr. 30.

Coupe sagittale de la même région, les tentacules invaginés. CES 0! Section d'une glande ventrale et du bouclier thoracique. Gr. 150.

Epiderme, section transversale passant par le connectif æœsophagien. Hématoxyline-éosine. Gr. 350.

Coupe transversale du 1°" bouclier. Hémat.-éosine. Gr. 600.

Cuticule. Gr. 600.

Fibro-cellules conjonctives. Gr. 350.

Fibro-cellules de soutien de l’épiderme dissociées. Gr. 500.

Fibro-cellules de soutien de l’épiderme dissociées. Gr. 500.

Cellule glandulaire de la couche profonde des boucliers. Gr. = 350.

Cellules à mucus en fiole de l'épiderme dorsal. Dissociation. Gr = "900.

Cellules glandulaires géantes des glandes ventrales. Dissociation. Gr 250!

Epithélium stomacal. Coupe tangentielle. Bleu de Méthylène. Cr2—1850:

Epiderme de la région céphalique. Coupe tangentielle. Hémat.- éosine. Gr. 350.

Epiderme, coupe transversale. Hématoxyline-éosine. Gr. 350.

Epiderme dorsal, coupe transversale. Hématoxyline-éosine. Gr. = 500.

Epiderme dorsal. Safranine. Essence de cèdre. Gr. 350.

Planche XX.

Ampharete Grubei.

Plancher inférieur du pharynx fendu longitudinalement pour montrer les lèvres internes. Gr. 20.

Appareil digestif. Gr. 10.

Base d’un tentacule. Gr. 60.

Extrémité d'un tentacule vue de profil. Gr. = 60.

Section transversale d'un tentacule. Gr. 150.

Une pinnule de tentacule. Bleu de Méthylène. Gr. 500. Section longitudinale des lèvres internes. Gr. = 150.

482 PIERRE FAUVEL.

Fig. 81. Section de l'’œsophage. Hématoxyline-éosine. Gr. 600.

Fig. 82. Région glandulaire de l'estomac. Hématoxyline-éosine. Gr. 350.

Fig. 83. Estomac, coupe longitudinale. Hématoxyline-éosine. Gr. 350.

Fig. 84. Intestin. Section transversale. Hématoxyline-éosine. Gr. = 350.

Fig. 85. Coupe transversale de la gouttière stomacale. Hématoxyline- éosine. Gr. 350.

Fig. 86. Parois de l'intestin contenant des Grégarines Gg. Gr. 500.

Fig. 87. Section de la paroi intestinale montrant les cellules de rempla-

cement. Gr. 600.

Planche XXI.

Ampharete Grubei.

Fig. 88 à 93. Sections transversales dans le lobe céphalique d'un animal ayant la bouche ouverte et les tentacules dévaginés. Gr. = 30. Fig. 94 à 99. Sections transversales du segment buccal et du Il° segment

du même animal. Gr. = 30. Les figures de cette planche sont des reproductions un peu schématisées de photomicrographies.

Planche XXII.

Ampharete Grubei.

Fig. 100. Section passant par les lobes antérieurs de l'estomac. Gr. = 30. Fig. 101. Section passant par l'estomac. Gr. 30. Fig. 102. Section passant par l’œsophage. Tentacules invaginés. Gr. = 30.

Fig. 103. Section de la région abdominale. Gr. 80.

Fig. 104. Section du lobe céphalique, les tentacules invaginés. Gr. = 30. Fig. 105. Section passant par l’encéphale. Gr. 30.

Fig. 106. Section passant par la région postérieure de l'estomac. Gr. = 30. Fig. 107. Section de la région abdominale. Gr. = 80.

Fig. 108. Coupe du segment anal. Gr. 80.

Fig. 109. Coupe du segment anal à la naissance des cirres. Gr. 80.

Les figures de cette planche ont été exécutées d’après des photomicrographies et légèrement schématisées.

Planche XXII. Ampharete Grubei.

Fig. 110. Néphridies et glandes ventrales.

Fig. 111. Section de la partie postérieure de la néphridie antérieure. Gr.—150.

Fig. 112. Section longitudinale de la paroi de la branche interne de la néphridie postérieure. Gr. 350.

Fig. Fig.

Fig. Fig. Fig. Fig. Fig. Fig.

. 118. . 114. ie. 115. . AG. ie. 117. is. 118. . 419. o. 120.

121. . 122. . 123. 124,

(2125. 480;

2427:

. 128. . 129. . 130. . 131. g. 132. g. 138.

. 134. Hi

136. 137.

138. 139. 140. 141.

142 143

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 483

Section de la branche externe de la néphridie postérieure. Gr. = 350. Coupe longitudinale de la néphridie postérieure. Gr. 100. Néphridie antérieure, coupe longitudinale. Gr. 150.

Section du pore néphridien. Gr. 150.

Coupe transversale de la néphridie postérieure. Gr. = 50.

Partie postérieure de la néphridie antérieure. Gr. = 60.

Ovaire. Gr. 150.

Pore néphridien postérieur avec un œuf engagé dans son ouverture. Gr.

Larve d'Ampharete. Gr. = 80. Amas de spermatozoïdes. Gr. 350. Spermatozoïdes vivants. Gr. 600.

Spermatocytes contenant des spermatides. Hématoxyline-éosine. Gr. 600.

Spermatogemme à un stade avancé. Hématoxyline-éosine. Gr. —600.

Spermatogemme à un stade plus jeune. Hématoxyline-éosine. Gx.,— 600:

Spermatogemme montrant les parois cellulaires. Hématoxyline- éosine. Gr. 600.

Testicule. Gr. 150.

Spermatogonies. Gr. 600.

Spermatogemme frais. Gr. 350.

Aspect d'un œuf frais, non fixé. Gr. 60.

Ovule à double nucléole. Hématoxyline-éosine. Gr. 350.

Ovule à deux nucléoles dont l’un est expulsé. Hémat.-é60s. Gr. 300.

Ovule à deux nucléoles. Hématoxyline-éosine. Gr. = 350.

Œuf mûr à la même échelle. Hémat.-é0s. Gr. 350.

Planche XXIV.

Ampharete Grubei.

Section de la chaîne nerveuse. Gr. = 350.

Œiül noyé dans le cerveau et recouvert d'une calotte de pigment. Gr:— 600:

Section longitudinale du lobe céphalique et de l’encéphale. Gr.— 60. Cellule nerveuse géante. Gr. = 600.

Cellule nerveuse géante. Gr. 600.

Ensemble du système nerveux. Gr. 30.

Origine des nerfs latéraux dans la chaine ventrale. Gr. Origine des nerfs latéraux dans la chaîne ventrale. Gr.

88

484

PIERRE FAUVEL,.

Amplhicteis Gunneri.

Fig. 144. Coupe sagittale latérale de l’encéphale. Gr. 60. Ampharete Grubei. Fig. 145. Coupe sagittale de l'encéphale passant par l'organe nucal. Gr. = 150. Amphicteis Gunneri. Fig. 146. Section transversale passant par le cerveau antérieur. Gr. 95. Fig. 147. Section transversale passant par le cerveau moyen. Gr. = 25. Melinna palmata. Fig. 148. Section transversale passant par l’encéphale. On voit au-dessus le faisceau des branchies et de chaque côté la section des bords antérieurs de la gaîne de la région branchiale. Gr. = 25. Ampharete Grubei. Fig. 149. Section longitudinale de la chaîne ventrale montrant la relation d’un canal neural avec une cellule géante. Gr. 200. Planche XX V. Amphicteis Gunneri. Fig. 150. Région antérieure, vue dorsale, les branchies sont coupées. Gr. 10. Fig. 151. Région antérieure, vue ventrale. Gr. = 10. Fig. 452. Région moyenne du corps. Gr. = 5. Fig. 153. Néphridie. Gr. = 60. Fig. 154-155. Deux uncini pris dans une même pinnule. Gr. 350. Fig. 156. Pied sétigère avec son cirre et pinnule. Gr. 20. Fig. 157. Section sagittale, montre l’ensemble du tube digestif et la dispo- sition des 5 paires de néphridies. Gr. 10. Fig. 158. Palée d'A. Gunneri de Naples. Gr. 60. Fig. 159. Palée d'A. Gunneri de Suède. Gr. 60. Fig. 160. Palée d'A. Gunneri de Naples. Gr. 60. Fig. 161. Palée d'A. Gunneri de Suède. Gr. = 60. Samytha adspersa. Fig. 162. Région antérieure, vue dorsale, les branchies sont rabattues en arrière. Gr. 10. Fig. 163. Extrémité d'un tentacule. Bleu de Méthylène. Gr. 150.

. 164. g. 165.

. 166.

S 101:

g. 168.

- 169.

œ. 170.

g. 171.

RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 485

Région moyenne vue de profil. Gr. 10. Plaque onciale. Gr. 350.

Melinna palmata.

Région antérieure, vue dorsale. Les deux groupes de branchies ont été séparés etécartés pour laisser voir le lobe céphalique. Gr. 10.

Plaque onciale. Gr. = 350.

Section longitudinale de la membrane thoracique.

Ampharete Grubei.

Hématies. Gr. 600.

Lanice conchilega. Section d'un tentacule. Gr. 80. Lagis Koreni.

Section d’un tentacule. Gr. 80,

486 PIERRE FAUVEL.

TABLE DES MATIÈRES.

INTRODUCTIONSS Re tee

CHAPITRE I.

NB IOPIQUE nee -Damese se ere ere

CHAPITRE II.

LÉCRMQUE NC LE St Les uche des

CHAPITRE III.

Diagnose. Morphologie externe.......... ST Dan DER I MEURT NME S IL. Morphologie externe..............

A. Région antérieure. .... Dre B-Kesion horatique AE. ARE C Région abdominale. 25,404.

CHAPITRE IV.

Habitat. Distribution géographique.

SHEMEADI TA RESTE MR RL E CRE ELU S IT. Distribution géographique........

CHAPITRE v. Formation et structure du tube.

SL Formation duimbes:. 2 ee Re S'ILS tæucture. du Eube Ho EL OC

CHAPITRE VI.

CATICULO TS PTE SL Ne LE ea

CHAPITRE VII.

LEE an PR PR OO PE D TR

CHAPITRE VIII.

DOLON OL PATADOUOR ER STE ES

CHAPITRE IX. Musculature.

S L'ANAIDIIE. ei Sons te ra TIRE S IL. Structure histologique...........,

CHAPITRE X.

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RECHERCHES SUR LES AMPHARÉTIENS. 487

CHAPITRE XI. Système nerveux.

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CHAPITRE XII. Appareil digestif.

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CHAPITRE XVI. Etude de l’'Amphicteis Gunneri Sars. SE MOEDROIOMEe me Aude te ee sinistre Al SSP BITIDUMOR OU RAA ER A Tee dose etSean mena ee stone 416 ÉD UE ATEN LEA TT CC I TR M IC ET PU 418

488 PIERRE FAUVEL.

S IV. Epidérme,. 5002.00 TO ET 419 S V. Musculature. Cavité générale. Péritoine....... fnistdre ae 420 À. Museulatüre 2e 2 RENTRER Corne ie ce U Se DIR Ce LIRE 420 B., Cavité. générales 5e 4 M NE TR ee PAT 420 S VI. Système nerveux. À. Encéphale 554 tesseenenbheeers tee CD DONNEES 421 B., Connectifs flat ce Re ee 0e ARRET ER ERREERE 423 C. Chaïne ganglionnaire ventrale.... ....,.44....:..2.. 00-40 423 8 VIL. Appareil digeatif.. 5.0. tai mener to TRS 424 S'NIILS Girculation se ae tee des ananas ce MADONONE do CPR 426 SAR, INGDRTIIOR 6 us nues Sera ee super TION ent DE 428 ES ARODrOAUCHIOM es vers sens eren mise teetiii eve RE 430

CHAPITRE XVII. Etude de la Samytha adspersa GRUBE.

SL Morpholome PR Sen At COrche on ee CCE 431 À. RéPION ANTÉTIQUTE versa s cos someone Dee PRET 431 Bi Répion hoTACIQUeMER en rene emes Re OCR 432 C:Féaonahdomimale.. ts use Pa dont se seoc ea ee PC EE 4133 SI: Téguments: Masculatures.. 421, eee ttes es 434 SIL Caviiéemenémle Lu rrsves sets ocmmeeetr sr 2 RANCE 435 S'TV.MSYBTÈME DETVOUX se 4 ave 2e sonne ee ess Scores 0e ET UE 435 SV Appareil DS ee eee rien eines ss OUR 436 SVT RCITOLAM ON ME ee es raie ee ee ee CO ET CE EEE 437 SN Néphridies: Reproductions. 472450 R CESR 438 CHAPITRE X VIIL. Etude de la Melinna Mer. | SL MOrpholn nie, 2 rer dehors Eee LAC CUITE SIL -Trpnrente sat nn eo toner Men REC res cn MN EREES S III. Musculature. Cavité générale. Diaphragme.....:.............. S IVe SYsemME EVER... LR current Ce RSR SE NuApparel tinentifss sense EM OMIS PRAIRIE CS SANT CITATION ALI SN LI ST SI SIT RIRE AT PER CRE S'VMIL: Néphridies. Reproduction: :s::45us343485 MT RAR CHAPITRE XIX. Comparaison des genres entré eux. 152200 ee ARR AT RENNES

CHAPITRE XX.

Comparaison des Ampharétiens avec les Amphicténiens et les Téré- LIT OS PERANPRR RER TP RL ©

RÉSDME une PSS RL RE SET SSL IN IN ER SSSR PR ARTE REES INDEX BIBLIOGRAPHIQUE 6. eu nee etes ae Me EN Ce en Re Ce EXPLICATION:DES PLANCHES... Mesa semestre A CNRS

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ACCOMMODATION

DES PLANTES AUX CLIMATS FROID ET CHAUD

PAR

J. COSTANTIN,

Maître de conférences à l'École normale supérieure.

Le transformisme, imaginé il y a un siècle par LaMaARCK, a été une théorie féconde car il a suscité des débats, posé des problèmes et donné un grand essor aux recherches. Non seulement il guide le savant en quête de connaissances nouvelles, mais il est un fil con- ducteur précieux pour le professeur qui expose la science. Il offre, au point de vue pédagogique, des avantages indiscutables, car, gràce à lui, les détails s'enchaïinent, s’éclairent et s'expliquent : il permet donc, en faisant la synthèse d'un rombre considérable de faits, de les rendre intéressants et par cela même plus facilement fixables par la mémoire.

Malgré ces résultats que personne ne peut contester, et bien que l'ère des vives controverses soit close, on peut se demander si les adversaires du transformisme sont définitivement réduits au silence. Bien que le nombre des naturalistes ralliés plus ou moins ouverte- ment à la théorie de l’évolution ait été en croissant d'une manière lente mais régulière, il n’en reste pas moins, à l'heure actuelle, un groupe important de savants qui évitent de se prononcer sur le point débattu. Ce n’est pas la hardiesse de l'hypothèse de LamaRcK et de DaRWIN qui fait reculer la plupart d’entre eux, mais ils attendent que, pour fixer définitivement leur opinion, les preuves

490 J. COSTANTIN.

expérimentales qui manquent encore; ils croient même qu'elles ne pourront être données, si elles doivent l'être, que dans quelques milliers d'années. « Dès lors, en l'absence de toute solution expéri- > mentale, l'hypothèse du transformisme ne peut être ni réfutée ni > prouvée. Les savants dont l'esprit est habitué aux démonstrations » rigoureuses se désintéressent de pareilles questions : pour eux, elles n’ont rien de scientifique »; « pour eux limmutabilité et » Ja variabilité de l'espèce rentrent dans le domaine des questions » insolubles ». C’est en ces termes qu’en 1874, M. Marey (1) précisait l'état de la question.

Depuis cette époque, le transformisme incontestablement est entré dans la voie expérimentale, des travaux importants ont fait progresser le débat, cependant, M. DELAGE, un avocat de la théorie évolutionniste,.n’en écrivait pas moins tout récemment « qu'aucun » fait ne démontre formellement que la variation ait jamais donné > naissance à une véritable espèce (2) ».

Faut-il admettre définitivement les opinions précédentes ? Doit-on renoncer à tout jamais à l'espoir de donner des preuves palpables du transformisme de même ordre que celles que GALILÉE COPERNIC donnaient des mouvements de notre planète ? Faut-il affirmer que l’homme ne retrouvera jamais le chemin suivi autrefois par les êtres vivants ?

Je vais essayer d'examiner par l’étude d’un cas très précis si l’on ne pourrait pas arriver à une manière de voir différente. En limitant l'objet de mon étude, l'argumentation gagnera, je crois, en force. Peut-être pensera-t-on que l’ensemble des faits bien établis, qui vont être rapportés, forme un faisceau assez solidement lié pour que leur examen entraîne, pour esprits épris de rigueur scientifique, la conviction que la théorie de l’évolution serre de très près les observations et les expériences les plus sérieuses et est actuellement seule capable de les expliquer.

L'exemple qui va me servir d'appui est tiré de l'étude de la flore arctique et de sa comparaison à la flore tropicale.

(1) MAREY. Rev. scientif., 18714. (2) DeLAGe. De l'Hérédité, p. 287.

ACCOMMODATION DES PLANTES AUX CLIMATS FROID ET CHAUD. 491

I. Si on cherche à résumer en quelques mots les caractères des plantes polaires on peutles rattacher à trois points principaux: Dans la zone arctique, les plantes sont presque toutes #vaces. Les plantes annuelles peuvent y être citées (Kænigia Islandica, Gentiana nivalis) ainsi que les espèces bisannuelles (Draba crassi- folia). Ce fait a été depuis longtemps signalé par les botanistes, BRAUN, DE CANDOLLE, mais MM. BonNiER et FLAHAULT (1) l'ont surtout nettement mis en lumière. Les espèces des régions froides fleurissent dès que le printemps arrive, ce sont presque toujours des végétaux printaniers (2). Leur forme extérieure est également caractéristique, ils paraissent rabougris par le froid, ils sont nains; les plantes herbacées ont des aspects de Mousses, souvent leurs feuilles forment des rosettes sur le sol; les plantes ligneuses sont tordues, couchées en espalier, comme des plantes rampantes (Betula nana, Salix repens, etc.) (3). Les caractères précédents se retrouvent dans les prairies alpines des hautes mon- tagnes.

IT. Sans entrer dans le détail des faits qui frappent l'observateur en présence de la flore tropicale, on peut dire que là, l'humidité est suffisante, règnent les forêls vierges avec leurs lianes et leurs plantes épiphytes, les plantes arborescentes avec leur fewrllage toujours vert et l'épanouissement indéfiniment répété de leurs fleurs.

Pour arriver à expliquer ces différences, je porterai surtout mon attention sur plusieurs points ayant trait à la durée des végélaux et à leur floraison. Je dirai un mot sans insister sur les lianes et les plantes épiphytes.

(1) BRAUN. Verjungung, 1851. DE CANDOLLE. Geog. bot., 1855.. p. 309. BoNNIER et FLAHAUT (Ann. se. nat. Bot, série, t. 1, p. 102).

(2) WaARMING. Œkolog. Pflanzengeogr., p. 24 et 221.

(3) Je n'insisterai pas sur le xanisme des plantes polaires et montagnardes. Ce caractere est expliqué d’une manière saisissante par les remarquables expériences àe M. G. BoNNiIER dans les cultures de plantes de plaines transportées sur les hauteurs des Alpes et des Pyrénées. Quant à la prédominance des arbres couchés et des plantes rampantes, à l'absence de plantes grimpantes, il est vraisemblablement en rapport avec le hermotropisme résultant du grand échauffement du sol dans les hautes altitudes.

492 J COSTANTIN.

La durée de la vie chez les végétaux présente les plus grandes variations. Une Algue peut vivre quelques jours ou même quelques heures et certains arbres peuvent vivre 6.000 ans (1). On conçoit que les végétaux qui sont susceptibles d'atteindre un âge avancé doivent présenter des caractères très différents de ceux dont la vie est beaucoup plus courte. Si donc la chaleur est capable de modifier la longueur de la vie végétale, elle doit amener des changements notables dans la plante.

Avant d'aborder l'étude de ces variations, je rappellerai que l'on divise les végétaux au point de vue de la durée en cinq catégories : les espèces annuelles ; les espèces bisannuelles ; les espèces pluriannuelles (dans ces trois cas, la plante ne fleurit qu'une fois, elle est monocarpique); les espèces herbacées vivaces ; les espèces ligneuses arborescentes (dans ces deux derniers cas, la plante fleurit plusieurs fois, elle est polycarpique).

I. Végétation arborescente, ses variations. Pour que la vie arborescente se manifeste avec intensité, il faut en général une température assez élevée. Si les conditions du climat ne sont pas favorables la plante ne deviendra pas ligneuse, elle restera herbacée ; n'ayant pas eu le temps d'acquérir assez de vigueur après une végétation annuelle, elle périra et cette mort sera due aux froids de l'hiver. C’est ce qui arrive pour le Ricin qui, dans nos contrées, est une plante herbacée annuelle. Si on le cultive, au contraire, dans les régions chaudes du globe, dans l'Inde, au Brésil. dans le sud de l'Afrique, son développement est plus rapide, ses tissus se lignifient et il se transforme en un arbre; les froids ne surviennent pas pour amener sa mort, sa végétation n'est pas interrompue et il donne des fleurs à plusieurs reprises. La plante annuelle herbacée et monocarpique s’est transformée en une espèce

(1) Wiesner. Biologie d. Pflanzen, p. 117 (Dracæna). BaAiLLon. Dict. de bot., Art. Age, p.11 (Sequoia). KERNER. Pflanzenlehen, I, p. 679.

ACCOMMODATION DES PLANTES AUX CGLIMATS FROID ET CHAUD. 493

arborescente, ligneuse et polycarpique. Il est difficile d'imaginer un changement plus complet et plus profond d’un végétal. Cette transformation est bien établie, elle a été vérifiée à plusieurs reprises par des observateurs dignes de foi (1).

Une modification de même ordre a été obtenue pour les Maraudia, les Caiophora, plantes polycarpiques dans leur patrie et annuelles sous notre climat.

Des changements semblables se produisent accidentellement en Europe, quand les conditions climatériques d’une année sont anor- males. Ceci se manifeste souvent pour les espèces cultivées (le Digitalis purpurea, V' Anchusa officinalis, etc.), une Digitale bisannuelle peut-être transformée en une plante à plusieurs florai- sons (2).

D'une façon générale, toute cause qui ménage ou qui renouvelle l'activité de la plante contribue à allonger sa vie. L’horticulteur le sait bien quand il transforme le Reseda odorata annuel en une plante vivace (3) en coupant la fleur avant la formation du fruit : la plante, qui ne consacre pas son activité à la production de ses graines, peut lignifier sa tige.

BRAUN (4) a cité un fait, très singulier au premier aspect, mais qui s'explique de même. Deux espèces annuelles ou bisannuelles de Verbascum donnent en se croisant un hybride vivace : par suite de l'hybridité, la fructification avortant, l’activité de l'hybride est consacrée à l'allongement de la vie de la plante.

Si dans une région le climat est uniforme (surtout assez chaud et humide), la plante engendre indéfiniment de nouvelles feuilles, les produits de l'assimilation du carbone sont employés à consolider la tige et à donner de nouvelles fleurs. Un tel climat est réalisé pour la végétation des iles voisines de l'équateur : aux îles Sandwich, par exempie, sur 939 végétaux, il y en a 296 ligneux et cette vie arborescente se rencontre dans des genres et des familles on ne l'observe pas sur les continents. Des faits analogues ont été signalés

(1) Ce fait a été indiqué par DARWIN. Vérifié par BRANDIS (Sitzungsb. der Naturh. Ver. d. preuss. Rhein. Westfal, 1889, p. 38) et FriTz MuLLER (Ængler's Bot. Jahrb. Fi Systemalik, II, 182, p. 391).

(2) HABERLANDT (£ngler's Bot. Jahrb., IV, 1883, p. 1).

(3) DUCHARTRE (Soc. Bot., 1884, p. 381).

(4) BRAUN. Vergung., p. 46.

494 J. COSTANTIN.

pour l’île Ste-Hélène, pour Madère et les expériences de cultures comparées faites par M. HiILDEBRANDT (1), en Allemagne et à Madère confirment ces résullats et les expliquent.

C’est également au climat uniformément chaud et surlout humide qu’il faut attribuer la persistance des feuilles dans les règions tropi- cales, c'est pour cela que dans ces contrées la végétation est toujours verte. La variation d’un caractère que tout le monde considère comme absolument fixe et héréditaire, la caducité des feuilles, met ce résultat en évidence. Quand on va vers le midi de l'Europe on voit que les arbres perdent leurs feuilles de plus en plus tard. Le Hôtre, à Madère, ne perd ses feuilles que 149 jours, le Chêne 110 à une température se rapprochant de l’êté de l'Europe (2). Le Chataignier aux environs de Naples, près des Solfatares, peut grâce à l'humidité garder ses feuilles toute l’année (3). Le Drospyros kaki, un arbre du Japon, perd dans sa patrie ses feuilles au mois d'octobre et ne se couvre d'un nouveau feuillage qu'au printemps ; à Java, l'arbre n’est chauve que pendant deux semaines (4). Le Platane peut présenter un feuillage toujours vert en Grèce et le Lilas sur les côtes de la Mer Noire (5). Le Cerisier cultivé à Ceylan y est un arbre à feuilles persistantes (6). On peut multiplier les exemples pour les arbres fruitiers : le Pôcher est toute l’année en fleurs à Java (7), son feuil- lage n’est plus caduc dans les oasis du nord de l'Afrique (8). La Vigne se comporte de même à Cucuma d’après HumBoLpr et selon CHarnier à Chartum (9). On a signalé dans la Nouvelle-Zélande un certain nombre d'espèces présentant suivant les localités et les climats qui y règnent soit des feuilles caduques, soit des feuilles persistantes (Plagianthus betulinus et divaricatus, Malvacées ; Olearia Hectori, Composée ; Aloysia citriodora, Verbenacée) (10).

(1) HiceBRANDT (Ængler's Bot. Jahrb., II, 1882, p. 90).

(2) Drung. Manuel de Geog. bot. (trad. PoucauLr), p. 21.

(3) KERNER. Pflanzenleben, I, p. 381.

(4) MassarT. Un botaniste en Malaisie (Soc. bof. roy. de Belgique, XXXIV, 1895, p- 249.

(5) KERNER, lot. cit.

(6) GARDNER dans HOOKkER, Bot. Magas, 1848. p. 13. De CANDOLLE. Geog. bot., II, 1079.

(7) JunGauxn (voir HILDEBRANDT, loc. cit., p. 121). HOFFMANN (Bof. Zeit., 1890).

(8) KERNER, loc. cit., 331.

(9) Linnser. Die period. Erschein. der Pflanz., p. 80.

19) RurLaAnD (7rans. N. Zeal., XXI, 1888, p. 110).

ACCOMMODATION DES PLANTES AUX CLIMATS FROID ET CHAUD. 495

La chaleur ne suffit pas seule à amener la persistance des feuilles, l'humidité de l'atmosphère ou du sol intervient d’une manière nette : dans le nord de l'Inde le Chêne perd ses feuilles, tandis qu'il les garde aux environs de Madras règne une grande humidité. Une Anacardiacée, l’'Odinia Wodier, se comporte de même dans ces deux régions de la presqu'île indoue (1).

En somme, la chute des feuilles dans les climats froids est un moyen qui met l'arbre à l'abri d'un excès de transpiration pendant l'hiver (2). Le même processus est d’ailleurs employé une saison sèche alterne avec une période de pluie et l'arbre devient chauve

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pendant la première saison (3).

II. Végétation grimpante et épiphyte.— Mon intention n'est pas d’insister sur ces deux types de végétation qui prédominent dans les forêts vierges tropicales et qui ont été l’objet de travaux si remarquables de M. ScHENCK (4), et de M: ScxIMPER (5). Je dirai seulement que la forêt équatoriale une fois née un certain nombre de graines des plantes des parties découvertes voisines y ont été transportées accidentellement. Les unes sont tombées sur le sol, les autres sur les arbres. Les premières dans l'ombre de la forêt se sont étiolées et elles ont eu besoin de supports; les expériences de NoLL (6), montrent que les plantes étiolées présentent des phé-

(1) RRanpis. Loc. cit.

(2) ScHiMPER (Monatsber. d, Konigl. Akab. al. Wiss. zu Berlin, 1890, 1045). Voir aussi BORBAS (Természuttudomanyi K6zlôny. Buda-Pest., 1890, XXII, 123).

(3) Un fait de géographie botanique semble bien en rapport avec les précédents. La pointe méridionale de l'Amérique du Sud est couverte de forêts qui sont les homo- logues de celles qui couvrent notre pays les arbres à feuilles caduques prédominent. Par suite de l'humidité très grande qui domine dans cette région américaine, les Hêtres qu'on y trouve sont à feuilles persistantes. A la vérité, quelques espèces y perdent leurs feuilles, mais pendant un temps très court. L'existence de quelques arbres à feuilles persistantes dans nos climats tient vraisemblablement à ce que ces végétaux (Pin, Buis, etc.), ont des moyens de protéger leur feuillage contre 12 froid et surtout contre l'excès de transpiration pendant l'hiver.

(4) SCHENGK. Lianen (Bot. Mitth. aus den Tropen, IV),

(5) ScHiMPER. Die epiphytische Veget. Amerikas (Id., 11).

(6) Norz (Bot. Zeit., 1885).

496 J. COSTANTIN.

nomènes de circummutation accusée, elles se sont enroulées autour des arbres et sont devenues des plantes grimpantes. L'expérience justifie cette hypothèse : le Convolvus arvensis est une plante ram- pante dans les endroits découverts ; à l'ombre dans les champs de blé, il s’enroule autour des chaumes.

Ce caractère de la volubilité est susceptible de se fixer car les horticulteurs ont obtenu des races de Haricots très grimpants, lés Haricots de gaules, tandis que les Haricots nains ont perdu cette propriété.

La vie épiphyte a se développer et se perfectionner par des processus analogues.

IT. Végétation herbacée. Le point sur lequel je désire m'entendre un peu plus longuement est celui qui a trait à la trans- formation des plantes annuelles en plantes bisannuelles et vivaces.

Variations. Quand on s’avance vers le nord la durée de la végétation diminue (1). Cette réduction de la période d'activité végétale a pour conséquence de rendre la floraison précoce ou souvent difficile à la fin de la première année, de sorte que les plantes doivent rester vivantes la deuxième année sans quoi elles ne pourraient plus se reproduire. On a donc forcément des passages de la vie annuelle à la vie bisannuelle et à la vie persistante. On voit, en effet, la proportion de plantes vivaces augmenter régulièrement quand on se rapproche du pôle, comme l'ont établi MM. BonNIER et FLAHAULT (2).

Souvent ce changement de la durée d'un végétal se manifeste quand on s'élève en altitude. M. GRISEBACR (3) mentionne que le Gentiana campestris est annuel dans la plaine et bisannuel sur une montagne. M. BoNNIER (4), a mis ce résultat en pleine lumière par des exemples nombreux.

(1) Huzr d'après FLAHAULT (Soc. bot. de Fr., 1880, 59).

(2) BonNNIER et FLAHAULT (Ann. se. nat, t. 7, 1878, 102).

(3) GriseBACH : Die Pflanzen decke der. Erde, p. 167. Voir aussi DE CANDOLLE Geog. bot., I, 309.

(4) BONNIER (Soc. bot., 1884, p. 381).

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ACCOMMODATION DES PLANTES AUX CLIMATS FROID ET CHAUD. 497

L'Arenaria serpyllifolia a, dans les Pyrénées, un rhizome péné- trant profondément en terre. Le Pou annua, dont le nom spécifique est assez significatif, est vivace au Pic d’Ardiden (Hautes-Pyrénées). Le Linaria alpina vit longtemps sur les Hautes-Alpes par suite de la persistance de sa racine qui a jusqu'à huit couches annuelles de bois ; annuel dans les basses altitudes, il devient bisannuel dans les altitudes moyennes et vivace aux altitudes les plus élevées.

L’allongement de la vie peut se produire par le maintien d'une plante sous la neige, c’est ce qui a été observé pour un Ranunculus glacialis (en 1870) par M. BoNNIER (1).

M. HILDEBRANDT (2), a montré expérimentalement qu'en semant de très bonne heure une plante bisannuelle on pouvait la faire fleurir

‘dans l’année et la transformer ainsi en une plante annuelle (Œno thena biennis, Reseda alba, etc.). Inversement quand of sème le blé à l'automne, en même temps que cette Céréale, se développent un cerlain nombre de plantes (Lycopsis arvensis, Lithospermum arvense, Centaurea Cyanus) qui d’annuelles peuvent devenir bisannuelles.

Fixation de ces variations. [1 vient d’être établi par des preuves irréfutables que les caractères tirés de la durée de la vie, qui permettent de distinguer une plante annuelle d'une espèce à rhizome ou à racine vivace, présentent de nombreuses variations. On a cependant l'habitude de considérer ces caractères comme ayant une grande fixité, il faut donc voir si la varialion ainsi produite est stable. Cette stabilité peut se justifier expérimentalement car lorsqu'une variation s'est produite sous l'influence d’un changement de chaleur ou de climat, si les conditions de vie demeurent alors fixes, la variation peut devenir héréditaire.

Pour établir ce point très important, les plantes de grande culture offrent à l'heure actuelle des données très nettes. L'expérience suivante a été faite par M. SCHÜBELER (3) avec des Céréales. En 1852, l’une de ces plantes fut récoltée à Hohenheim près de

(1) Loc. cit. (B. et FLAH.).

(2) Loc. cit.

(3) ScHÜBELER. Die Pflanzenwelt Norwegens. Christiania, 1875. Viridarium norwegieum. Norges vextrige. Et Bidrag til Nord Europa Natur og Culturhistorie Chris- tania 1885. PETERMANN (Mem. couronnés Acad. roy. de Belg., 1877, XXVIII). Mürrricx. Ueber phœnologische Beobacht. (HumBoLpr, VIII, 1889, p. 129 et 173).

498 J. COSTANTIN.

Stuttgart la végétation offrait une durée de 120 jours ; ce savant sema ces graines dans le nord de la presqu'île scandinave et, au bout de 120 jours, il faisait la récolte ; mais la durée de la végétation s’abaissa pour les générations suivantes et, en 1855, il obtint la récolte en 70 jours. Pendant ce temps, des graines de la même variété semées à Breslau n'y mürissaient qu’en 122 jours. En cinq années, une plante s'était donc accommodée au climat et était succeptible d'y mürir 50 jours plus tôt.

À ces premiers faits, M. SCHÜBELER en a ajouté beaucoup d’autres confirmés depuis par divers expérimentateurs. On peut formuler ces résultats de la façon suivante : Si l’on sème dans les pays septentrionaux ou sur les montagnes des graines de Céréales pro- venant de pays de faible latitude ou de basse altitude, elles peuvent arriver à frâctification en un temps plus court et pour une tempé- rature moyenne plus basse que précédemment. Si au bout de quelques années, ces graines sont rapportées dans leur patrie d'origine elles y fructifient plus rapidement que les plantes issues de graines récoltées dans le pays. Les graines deviennent plus lourdes dans le nord et ce caractère est également héréditaire.

Si au lieu de transporter le blé dans le nord, comme dans l’expé- rience précédente, on lui fait subir le froid de l'hiver sans changer de localité, il se modifie de même. Si l’on sème en automne un blé de mars, la première année un petit nombre d'individus seulement résistent au froid et donnent des graines ; si on sème ces dernières à la deuxième génération on récolte beaucoup plus de grains ; à la fin de la troisième année, on s'aperçoit que le blé de mars est complète- ment transformé en un blé d'automne. Cette expérience a été faite par MONNIER (1).

Le Maïs transporté d'Amérique en Europe s’est de même méta- morphosé, d’après METZGER (2), en un petit nombre de générations : 3 et 4 mois suffisent alors à sa maturation, au lieu de 6 ou 7 ; sa taille est plus faible ; ses caryopses sont jaunes, au lieu d’être blancs.

(1) DARWIN. Domest., I, 393.

(2) MerTzGEr. Getreide Arten., p. 18-206. HOoDGET dans l'Amérique du Nord a raccourci également la vie du Maïs de 6 semaines. On connaît des races de Maïs à vie très courte (GRISEBACH, loc. cit., II, 587).

er

ACCOMMODATION DES PLANTES AUX CLIMATS FROID ET CHAUD. 499

M. DE VILMORIN a réussi par un procédé de sélection à mettre hors de doute l’origine des Carottes cultivées en montrant qu'on pouvait les faire dériver des Carottes sauvages ; il échoua tant qu'il se borna à choisir avec soin les porte-graines et à multiplier les soins de l'élevage. Il obtint la transformation en faisant garder l'hiver quelques individus tardifs, dont il prolongeait ainsi l’exis- tence, et qu'il fit repiquer au printemps suivant. En quatre géné- rations la transformation était faite (1).

Les Brassica napus et rapa ont également des races annuelles et bisannuelles.

On pourrait objecter aux expériences précédentes qu’elles s’appli- quent surtout aux plantes cultivées et que de tels faits ne s’observent pas chez les plantes sauvages. Je ferai remarquer d’abord que dans ces essais le point de départ est souvent une plante spontanée (Carotte, Radis) ; en second lieu, on peut observer des résultats analogues pour les arbres des forêts (2) et aussi pour des espèces herbacées qui ne sont pas cultivées, telles que les Gentianes, les Euphraises. Je reviendrai sur ce point plus loin (3) et je me conten- terai d'indiquer que, d’après M. MuRBEGK (4), le Gentiana cam- pestris et le G. amarella sont deux espèces de second ordre, ou races qui partent d’un même type primitif et elles se distinguent, entre autres caractères, parce que l'une est annuelle et l’autre bisannuelle. Cette race est née évidemment par une adaptation à la vie montagnarde.

En résumé, la variation de chaleur et le changement de climat produisent des modifications dans la durée de la vie de la plante qui peuvent devenir héréditaires et donner naissance à des races ou petites espèces.

(1) QUATREFAGES, Darwin et ses préc. fr., p. 311. M. CARRIERE a transformé de même en cinq ans le radis sauvage. Les pieds primitifs présentaient une racine non mangeable pesant 22 gr., elle s’est métamorphosée en un légume excellent pesant 300 à 600 gr.

(2) Kiæxnrrz. Ueber die Formen und Abarten heimischer Waldbaeume, 1879.

(3) WETTSTEIN (Zerich. d. deutsch. bot. (Gesells., 1895, 303). On peut rappro- cher d’ailleurs des résultats précédents ceux qui ressortent des essais de MM. NAUDIN et RADLKOFER qui n'ont pas été poursuivis malheureusement (Aux. se. nat., série, IV, 1876), dont l'interprétation a été bien donnée par DE CANDOLLE (Arck. se. phys. et nat. de Genève, LXI, 1878). Voir aussi DE CANDOLLE (C. Rendus de l'Acad. sc., t. 80, 1875, p. 1369).

(4) Murseck. Studien über Gentianen aus Gruppe d. Endotricha (Acta horti Berq., II, 3).

500 J. COSTANTIN.

IV. Floraison. L'étude de l’époque de la floraison va me fournir des résultats qui confirment et étendent ceux que je viens d'établir.

En général, la durée de floraison, la saison de l’année elle s’observe sont des caractères assez fixes ; la succession des fleurs et des feuilles se produit également dans un ordre normalement toujours le même.

I. On peut diviser, au premier point de vue, les végétaux en trois groupes (1) : les euchrones sont ceux dont les fleurs apparaissent dans une période courte (Muguet); les polychrones qui, par l'apparition indéfinie de nouvelles pousses, sont très longtemps en fleurs (plantes tropicales) ; les achrones qui sont en fleurs toute - année parce qu'ils donnent plusieurs générations en une année (Séneçon).

II. L'époque de floraison permet de distinguer des végétaux fleurissant au printemps (Saule, Coudrier, Perce-neige), en été (Calluna vulgaris), en automne (Colchique).

IT. Au troisième point de vue mentionné plus haut, on reconnait que les fleurs peuvent apparaître avant les feuilles (Coudrier, Cor- nusmas, Tussilage), en même temps (Pommier) ou après et, dans ce cas, certaines espèces (Vigne, Clématite), ne montrent leurs fleurs que plusieurs semaines après l'apparition de leur feuillage.

Les fleurs, dans ce dernier Cas, n’ont pas seulement besoin d’un peu de chaleur pour s'épanouir, comme cela arrive pour les espèces de printemps du premier type, il leur faut de la lumière, et c'est grâce au carbone de l'atmosphère qu'elles deviennent capables le plus souvent de fleurir régulièrement (2).

Variations. Les caractères précédents qui sont d'ordinaire stables dans les cas normaux, sont susceptibles des plus grandes variations que l’étude de la phénologie révèle.

(1) ToMASCHER (Verkandl. naturf. Gesells, Brünn, XIX, 1880). (2) SAcHS a montré que certaines fleurs pourvues de réserves ou dont les feuilles sont à la lumière peuvent se former à l’obscurité cependant,

ACCOMMODATION DES PLANTES AUX CLIMATS FROID ET CHAUD. 50]

L'époque de l'apparition du printemps est de plus en plus tardive à mesure qu'on s'élève vers le nord ou vers l’est de l'Europe (1). Les cartes phénologiques ont rendu ces résultats très apparents (2).

Les retards très accusés pour le début de la saison deviennent de plus en plus faibles à mesure que l’année avance. M. ARNELL (3), a montré qu'en Scanie un déplacement de en latitude amène un retard de floraison variable : en avril, de 4 jours 3; en mai, de 2 jours 3 ; en juin, de 1 jour 5 ; en juillet, de 0,5.

Les mêmes phénomènes se produisent sur les hautes montagnes et il peut arriver, pour les fleurs d'été, un changement inverse : certaines espèces fleurissent en août dans la plaine et en juillet sur les hauteurs.

Il y a donc des plantes qui, dans les climats chauds, fleurissent plus tard que dans les climats froids ; on dit dans ce cas que le sérotinisme est négatif (4) (Aconitum Napellus, Aster Amellus, etc.). Pour d’autres espèces c’est l'inverse qui se produit, elles fleu- rissent plus tôt dans les climats chauds que dans les paysfroids ; on dit dans ce cas que le sérotinisme est positif. Certaines plantes, enfin, présentent un sérotinisme variable : dans le nord de l'Europe, le sérotisme pourra être positif pour devenir négatif dans le midi, c’est ce qui arrive pour le Lierre. Dans ce cas, quand on se dirige vers le sud d’abord la plante semble bénéficier d’un excès de chaleur pour hâter sa floraison, mais, après avoir traversé une région neutre, la chaleur ajoutée n’est plus utile et retarde plutôt la période florale.

L'action de tous les facteurs qui interviennent dans la vie de la plante est réglée par ce que l’on a appelé la loi du minimum (5). Au printemps, la chaleur est au minimum ; pendant l'été, surtout dans le midi de l’Europe, c’est l'humidité de l’air ou du sol. Au début de l’année, la température étant basse, on peut fournir à la plante de

(1) CANDOLLE (Arch. se. phys. et nat. de Genève, LIT, LIV). KERNER, loc. cit., I, p. 528.

(2) Inxe (Pot. Centrabl., XXI). HOFFMANN (Petermann's Geog. Mitth., 1887, p. 27).

(3) FLAHAULT (Soc. bot., 1880, p. 59).

(4) KRaAsaAN (Zngler's Bot. Jahresb., IT, p. 15).

(5) TscHapcowirz. Unters. über die Einwirk. d. Wärme und anderen Formen der Naturkräfte auf die Vegetations erscheinungen (Leipzig, 1882).

502 J. COSTANTIN.

grandes quantités d'humidité sans qu’elle ait un effet utile. Pendant l'été, l'eau est au minimum, la plante a beau être exposée à des températures élevées, elle n'en profite pas pour cela.

Dans les régions tropicales la nature prodigue à la plante chaleur, lumière et humidité, la végétation est puissante de sorte que quand une nouvelle floraison se produit les fruits des fleurs précédentes sont à peine mürs. C’est ce qui arrive à Java le Pècher est en fleurs toute l’année tandis qu'il ne fleurit qu’au printemps en France, c'est ce qu'on observe aussi pour la Vigne dans les régions tropicales. Dans l'Europe centrale, un climat analogue à celui des régions chaudes ne règne que pendant une courte saison, de deux ou trois mois, et c'est dans cette période que s'observent les plantes poly- chrones telles queles Bleuets.

Dans le midi de PEurope, il n’est pas rare de voir certaines plantes refleurir en novembre, même lorsqu'elles n’ont plus de feuilles. Accidentellement, par un automne doux, on voit quelquefois, aux environs de Paris, certains arbres refleurir en octobre (Marronniers, arbres fruitiers). Ces plantes peuvent se trouver épuisées par cette floraison anormale, et rester stériles quand arrive le printemps suivant. Si le fait précédent qui était une anomalie devenait régulier, la plante qui fleurissait au printemps tendrait à se trans- former en une espèce automnale.

La conception précédente n’est pas purement hypothétique, elle est justifiée d'une part à l’aide des plantes d'automne qui peuvent accidentellement fleurir au printemps, aussi bien que par l'examen des plantes de printemps qui peuvent fleurir en automne.

La Colchique d'automne fleurit normalement en septembre et octobre ; dans le midi de l'Europe, c’est toujours le cas, parce que la plante a toujours assez de chaleur pour sa floraison ; mais, à mesure que l’on s’avance vers le nord, les individus en retard deviennent plus nombreux et, sur vingt-quatre années à Giessen en Allemagne, la Colchique a fleuri quatre fois au printemps (1).

Les changements ne se manifestent pas seulement dans la saison de floraison, ils peuvent se traduire par une inversion dans la suc-

(1) HOFFMANN. Phœnolog. Beob. in Giessen (XV Ber. des Oberhess. Gesells f. Nat. und Hetlkunde in Giessen, 1816).

ACCOMMODATION DES PLANTES AUX CLIMATS FROID ET CHAUD. 503

cession des organes foliaires et floraux. Dans nos climats, les fleurs du Robinier apparaissent après les feuilles ; on les voit se montrer avant dans le nord de l'Italie (1).

L'époque de floraison ne dépend pas seulement de la chaleur printanière ou automnale, elle est quelquefois déterminée, en puis- sance, pourrait-on dire, dans la graine. Si des graines sont exposées à de grands froids, elles fleuriront plus tôt. On a remarqué à Saint- Pétersbourg que les graines de Maïs qui gelaient fournissaient dans ce pays des plantes allant jusqu’à la fructification dans une région le Maïs ne fleurit pas d'ordinaire. Des faits de même ordre ont été observés par divers savants (2).

On conçoit, d’après ce qui précède, combien la question de l’époque de floraison des végétaux est complexe et de quelles conditions variées elle dépend.

On ne sera plus étonné d'apprendre ces faits si singuliers qui se manifestent dans l’acclimatation des végétaux dans des pays tout à fait différents de leur patrie d’origine. L’Agave, qui fleurit au bout de cinq années au Mexique, exige dix ans aux Canaries et cent en Europe pour achever sa floraison (3). Le blé au Mexique ne peut pas fleurir, mais son feuillage acquiert un grand développement et sert à la nourriture du bétail (4). Le Pêcher transporté à Melbourne et au Cap fleurit en août et en septembre (5).

Quelquefois le dépaysement des plantes est si grand qu'elles paraissent comme affolées. Rien n’est plus caractéristique, à ce propos, que le fait suivant rapporté par M. MassarT (6). Il y a au Jardin de Tjibodas, dépendant du laboratoire de Buitenzorg (Java), deux Diospyros kaki, arbre du Japon, pays les saisons sont très marquées. Dans sa patrie, cette plante se couvre de feuilles au printemps, porte ses fruits en août et septembre et perd son feuillage en octobre. À Java, les deux arbres, qui ont été plantés en même

(1) KERNER. Loc. cit.. I, 525.

(2) Cela résulte des recherches de MÜLLER-TURGAU, WITTMARCK, KIENITZ, SCHÜ- BELER, HABERLANDT et KNYy.

(3) DRuDE. Manuel de Geog. bot. (trad. franc.), p. 28.

(4) Fait observé par HumBozpT. Voir aussi EpwaRps et COLIN (Ann. se. nat. 2e série, t. V).

(5) HorFMANN (Bot. Zeit., 1890).

(6) MAssaRT (Extrait du Pull. de la Soc. Roy. de bot. de Belg., XX XIV, p. 249).

504 J. COSTANTIN.

temps, se comportent de façons différentes : l’un fructifie en avril et perd ses feuilles en juillet; l'autre fructifie en octobre et se dépouille en janvier. Ils paraissent cependant garder un souvenir de leur patrie d'origine, car ils ne fructifient que tous les douze mois, conti- nuant ainsi à suivre le rythme de végétation de leurs ancêtres.

Hérédité. Dans certains cas, l’action produite par le changement de climat se manifeste d’une manière lente et progressive avec une régularité tout à fait remarquable. M. Branpis (1) a mis en lumière la lente variation de l' Acacia dealbata qui a été importé il y a une cinquantaine d'années dans l’Inde et qui depuis cette époque n'a cessé de changer peu à peu le moment de sa floraison. De 4845 à 1850 il a continué à fleurir en octobre, comme en Aus- tralie, sa patrie ; un peu plus tard, en septembre ; vers 1870, en août ; à partir de 1878, en juillet ; vers 1882, en juin.

Les expériences qui portent sur une durée d’un demi-siècle sont encore très rares en biologie, ce qui ne doit pas étonner car cette science est très récente. Il paraît donc juste de mettre en relief le résultat précédent, afin d'attirer sur lui l'attention des observateurs, de provoquer des vérifications et des essais nouveaux dans la même direction.

Cette fixation progressive des caractères des végétaux m'amène à parler des races qui se distinguent les unes des autres par leur floraison précoce ou tardive. Cette hâtivité de la floraison peut être dans certains cas le seul signe par lequel s'accuse une variété, tel est le cas du fameux Marronnier du 20 mars qui ne se distingue au point de vue de la chute de sas feuilles par rien de particulier de ses congénères (2). Pour d'autres espèces, la variation dans l’époque de la floraison est accompagnée d’autres modifications dans les carac- tères extérieurs qui ont été relevés par Horrmanx (3). Le Lilas blanc fleurit, d’après les observations faites pendant huit années, en moyenne six jours plus tôt que la forme à fleur violacé. Le Radis à fleurs blanches fleurit le 24 mai (moyenne de douze années d’obser- vations), les pieds à fleurs jaunes en moyenne le 9 juin. L'étude du

(1) BRAnNDIS. Loc. cit.

(2) De CANDOLLE (Bull. Soc. bot., 1877, 189). DUCHARTRE (C. AÆendus de l'Acad. des Se., 1880, XCI., 22).

(3) HOFFMANN (ot. Zeit. 1881).

ACCOMMODATION DES PLANTES AUX CLIMATS FROID ET CHAUD. 509

Crocus vernus conduit à des résultats semblables : la variété blanche fleurit le 15 mars (moyenne de cinq années), la variété bleue le 19 mars.

Ces changements de teinte paraissent souvent sous la dépendance de la chaleur. La coloration blanche des Lilas est obtenue par les horticulteurs grâce à l’action d’une température de 30 à 35° (1).

Certains faits semblent indiquer comment ces variétés diversement colorées peuvent prendre naissance. Le Papaver alpinum a une variété à fleurs jaunes que l’on observe dans les régions cireumpo- laires tandis que la variété blanche a été signalée en Suisse (2). Est- ce la chaleur qui produit ces changements dans ce cas ? C’est ce qu’il est difficile d'affirmer avec certitude. Les expériences de SCHÜBELER (3) et de M. Boxier (4) ont établi que dans les rêgions élevées et dans les pays froids la couleur des fleurs devient plus foncée mais sans changement de teinte, les couleurs très vives des fleurs alpines et polaires seraient dues à la lumière. Il se pourrait que la déco- loration signalée précédemment ait été due l’origine) à la chaleur et que caractère soit devenu héréditaire. Si l’on sème les formes blanches elles conservent leur teinte, et il en est de même des formes jaunes ; la couleur de la fleur est maintenant un caractère stable.

On connaît d’autres variétés précoces ou tardives qui paraissent avoir pris naissance, les premières dans les montagnes et les secondes dans la plaine. L'Allium ochroleucuin présente, sur les Alpes, une variété alpina et, au pied des montagnes, une variété ericelorum ; elles diffèrent par l’époque de floraison ; ces variétés sont d’ailleurs très stables.

De même l'Odontites verna est la forme primitive de deux variétés (serotina et Kochü), la première tardive, la deuxième précoce ; l’une prédominant dans le nord, l’autre dans le midi.

(1) HERINCQ (Journ. de bot., T, p. 77). M. DucuARTRE (J. de la Soc. d'hortieult., VI, 1860, 152. C. X. de l'Acad des Se., 1863, LVI, 939. Journ du bot., 1, 92) dit qu'il a pu obtenir la coloration blanche à 15°. 11 semble cependant, d’après les faits cités par M. HERRINCQ que 15° à 20° ne suffisent pas pour obtenir à coup sûr ce résultat.

(2) HorFMANN (Bot. Zeil., 1882).

(3) Loc. cit.

(4) BONNIER (Ann. se. nat., série, t, XX).

506 J. COSTANTIN.

Les faits de dimorphisme saisonnier qui ont été récemment mis évidence pour les Euphraises, les Gentianes les A/ectrophorus, les Chlora par M. WETTSTEN (1) plaident dans le même sens. L'Eu- phrasia montana est une variété précoce, l'£. Rostkoviana est une variété tardive ; la première a les entre-nœuds plus longs, des feuilles plus petites et une ramification moins riche. Il est assez remarquable d'observer que les mêmes changements de port accompagnent les mêmes variations de précocité dans des espèces différentes appar- tenant à des genres éloignés (Æuphrasia, Gentiana). Des cultures faites pendant trois années à Prague ont convaincu M. WETTSTEIN que les caractères de ces formes se maintiennent constants.

En résumé, la variation des caractères floraux s'élend à la duree, à la saison, à la succession des feuilles et des fleurs.

Le climat froid provoque l’apparilion de races stables à floraison précoce. Gette dernière conclusion permet l'explication de la floraison printanière des plantes arctiques.

Que sont ces races ainsi produites dont les caractères offrent une fixité si remarquable ? Ce sont ce que l’on peut appeler de petites espèces ; elles sont tout à fait analogues, dans certains cas iden- tiques à celles que les botanistes appellent, avec un certain dédain, les espèces jordaniennes. Lorsque M. Jorpax (2), à la suite d’une critique sévère de l’espèce de LINNÉ, montra que le grand botaniste suédois avait souvent fait reculer la science (3), il suscita de grandes colères ; quand il exprima comme conclusion de ses études que le Draba verna devait être divisé en 200 espèces, il ne rencontra que la plus parfaite incrédulité. Son système allait contre la tendance à la simplification ; il rendait la vulgarisation presque impossible en

(1) WETTSTEIN (Zerichte d. deutsch. Bot. Ges., 1895, 8038).

(2) Jorpan. De l'origine des diverses variétés ou espèces d'arbres fruitiers. Paris, 1873. JORDAN. Remarques sur le fait de l'existence en société, à l’état sauvage des espèces affines et sur d’autres faits relatifs à la question de l'espèce. Lyon, 1874.

(3) RicHARD DE BELLEVAL, le fondateur du Jardin des plantes de Montpellier sut, au commencement du XVIIe siècle, distinguer, parmi les Fritillaires d'Europe. plusieurs espèces que LiNNÉ confondit ensuite plus tard sous le nom de #ritillaria meleagris.

ACCOMMODATION DES PLANTES AUX CLIMATS FROID ET CHAUD. 907

embrouillant les questions considérées comme très simples. La tendance à la pulverisation des espèces a été combattue avec la plus grande énergie par tous les botanistes judicieux et, il semble, avec le plus grand succès.

Cependant le problème posé par M. JorpaN n'en existe pas moins et on tend à oublier que ce savant modeste a été un excellent observateur, un esprit original et précis et que son œuvre ne périra pas. Il ne faut pas le confondre avec ses émules qui représentent souvent le collectionneur, le créateur d'espèces ou le piqueur de papillons avec ses défauts les plus ridicules; c’est par trente années de recherches consciencieuses, de cultures patiemment suivies qu'il a établi ses résultats. Un grand nombre de faits avancés par lui ont été contrôlés par des observateurs exacts et surtout par deux savants dont personne ne contestera la haute autorité, MM. THuURET et BorNer. « Sept ans de suite, dit M. BoRNET, nous avons semé » 14 espèces d’'Æroplila (Draba). Elles n’ont présenté ni variations, » ni hybrides, quoique les pots fussent rangés les uns à côté des » autres. Pendant quatre ans, nous avons semé 5 ou 6 des formes de > Papatver dubium que M. Jorpan a décrites (P. modestum, > vaguin, depressum, Lecoquii). Les caractères, principalement > ceux de la capsule, se sont montrés les mêmes dans toutes les » générations (1) ».

Que pouvaient répondre les botanistes quand M. JorDAN disait que l’invariabilité des formes à travers un nombre indéterminé de générations est le seul criterium de l'espèce.

« Rejeter ce criterium, ajoutait-il, c'est s'ôter toute possibilité > d'établir des distinctions solides, c’est tout réduire à de simples » hypothèses, à l'arbitraire, à la fantaisie des appréciations indivi- > duelles ; c'est, en un mot, donner pour fondement à la science le > scepticisme, ce qui revient à la détruire ».

Pour lui, si l'on soutenait que ses espèces sont des races d’un type commun, on pourrait bien admettre qu’un type linnéen quel- conque à pu être démembré d’un type plus large et ainsi de suite Jusqu'à l'identité originelle de toutes choses, ce qui revient à donner pleinement raison aux transformistes. Or, il a toujours combattu cette théorie avec la plus grande énergie.

(1) PLANCHON (Æevue des Deux-Mondes, 1874, t. 5, 388).

508 J. COSTANTIN.

Ce qu'il n’a pas vu et ce que l’on commence à entrevoir c’est que ses petites espèces peuvent être créées par l’action du milieu ambiant. Cela résulte de tout ce qui précède.

1” Au début, par suite des changements de climats, sous l'influence des facteurs cosmiques, il se produit des variations qui ne sont pas nécessairement faibles, qui peuvent même être dès la première année considérables, mais ces variations sont instables.

2’ Le milieu continuant d'agir il se produit des races qui transmettent leurs caractères à leur descendance. Ceci est vrai pour les plantes cultivées comme pour les plantes sauvages, quand l’homme fait la sélection ou quand il laisse la nature agir seule. Dans les deux cas d’ailleurs, ce sont toujours les mêmes forces qui agissent : chaleur, lumière, pesanteur, électricité, eau, etc.

Il est donc bien établi que des races naissent dans ces conditions. Cette conclusion peut d’ailleurs être acceptée par les partisans les plus résolus de la fixité de l’espèce quiadmettent sans aucune difficullé le variabilité limitée mais qui ne croient pas que l’on ait aucun argument sérieux pour prouver la variabilité illimitée ; aucun fait, selon eux, ne démontre que l’on puisse créer des espèces, au sens linnéen du mot.

C'est ici que l'exemple choisi précédemment va m'être d’un grand secours, Car il me permet d'assister pour ainsi dire à la genèse des caractères primordiaux de la flore polaire et de la flore tropicale.

Sous l'influence du froid, la durée de la végétation annuelle

diminue dans les régions arctiques ; à la fin de la première année la plante fleurit très tôt ou ne peut pas fleurir et elle devient bisannuelle ; quand arrive le printemps suivant, sa fleur est toute prête, elle s’'épanouit aussitôt et a le temps, grâce à cette floraison précoce, de faire mürir ses graines; mais elle a créé pour devenir bisannuelle des forces qui se trouvent en excès, gràce aux réserves trop abondantes accumulées dans sa tige et sa racine, elle ne meurt pas au bout de la deuxième année, elle devient alors vivace. Ce caractère est d’abord instable, mais il se fixe bientôt et d’abord faiblement. La petite espèce de Jorpan, la race est née. Mais si pendant 50, 100, 1.000 ans l'action du milieu se maintient toujours la même les caractères héréditaires qui évoluent lentement se conso- lident, deviennent de plus en plus stables. Si on agit sur les petites espèces on peut leur faire rebrousser chemin parce que l'espèce n’est

ACGCOMMODATION DES PLANTES AUX CLIMATS FROID ET CHAUD. 509

fixée que depuis peu d'années. Il n’en est plus de même pour les espèces linnéennes parce qu’elles sont trop anciennement fixées. Nous pouvons bien les faire varier mais nous ne pouvons pas sûrement retrouver le chemin qu'elles ont suivi: nous les engageons le plus souvent dans une voie nouvelle.

Pour la flore tropicale, on sait maintenant comment leur climat uniforme allonge la vie de la plante, comment une plante herbacée et annuelle tend à devenir ligneuse et même arborescente. On a vu également comment le feuillage cadue tend à devenir persistant, comment la floraison tend à se répéter indéfiniment, comment enfin la saison prend les caractères d’un éternel été. L'évolution des caractères est lente, progressive et on ne sait souvent, ainsi que le prouve un cas curieux, si au bout d’un demi-siècle la plante a trouvé sa position d'équilibre.

Ainsi donc le climat a une influence énorme sur les végétaux et on peut se demander comment un botaniste aussi éminent que M. NauDNN, et partisan du transformisme, a pu écrire qu’ « on s’est > beaucoup exagéré les influences du milieu et en particulier du > climat, auquel on a voulu faire jouer le principal rôle dans la » modification des êtres vivants; mais je soutiens que le climat » compte pour fort peu de chose sous ce rapport, et que, quand les > espèces varient, elles le font en vertu d’une propriété intrinsèque » et née qui n’est qu’un reste de la plasticité primordiale » (1).

J'insiste sur cet argument parce qu'en sommeilest celui qui a été repris dans ces derniers temps par NarGerr, M. KERNER et M. WEIsMANN. L'exemple que j'ai choisi, il me semble, renverse d’une manière sûre cette théorie de l’intervention d'un principe interne, caché et mystérieux (2). Certes personne ne prétend que ce n’est pas l'être qui réagit en vertu de ses « propriétés intrinsèques et inneées », mais cette réaction ne se manifeste que lorsque des conditions déterminées sont réalisées dans le monde extérieur. C’est l’éternelle question du déterminisme qui a été cependant assez définitivement élucidée par l'illustre CLAUDE BERNARD. Dans le cas actuel, 7e considère l'action du milieu comme prouvée parce que dans la flore polaire toutes les espèces présentent le même

(1) -NauDiN (Soc. bot., 1874, 240).

(2) Je n’entends pas insinuer par qu'il n'y a pas d’autres causes de variations, par exemple celle résultant du mélange de deux protoplasmas différents dans l'œuf,

910 J. COSTANTIN.

caractère, toutes les espèces sont vivaces. Get argument me paraît avoir une portée qui n’échappera pas aux esprits rigoureux. Si c'était en vertu de propriétés individuelles que la variation s’est faite, nous ne retrouverions pas un seul et même caractère dans une flore s'étendant sur un immense territoire, flore composée des familles les plus diverses.

Or ce caractère que nous retrouvons avec une constance si absolue nous le voyons naître sous nos yeux : /4 variation instable produite experimentalement est « parallèle > à celle qui amène la formation de races stables, cette dernière est « parallèle > à celle qui amène la formation d'espèces linneéennes.Je dirai plus, les variations sont de même ordre de grandeur et lorsque M. JorpaN soutient que les races sont des espèces son opinion est défendable. On peut d’ailleurs quelquefois lire l’histoire d’un genre en voyant comment se groupent les espèces quile composent. Le genre Zsatis est formé surtout d'espèces annuelles ou bisannuelles ; une seule espèce est vivace, l’JZsatis alpina ; c'est une espèce qui a évidemment émigré sur les hauteurs ou qui y est restée.

L'effet du climat ne se manifeste pas seulement quand il agit à son maximum d'intensité, son action progressive se révèle lorsqu'on se déplace en latitude et en altitude. C'est un résultat surtout mis en lumière par M. Bonnier dans les Alpes et par MM. BonNIER et FLAHAULT en Suède (1).

Je ne conçois qu'une objection aux preuves précédentes : ce caractère tiré de la longueur de la vie a-t-il une valeur spécifique ? On définit d'ordinaire les espèces par la fleur, pourquoi faire intervenir pour délimiter leur type les organes végétatifs qui ne peuvent rien donner de précis. Je crois que si on invoquait uu pareil argument, on saperait bien plus profondément encore les bases de la théorie de la fixité, car on arriverait à cette conclusion qu'entre une herbe et un arbre, il n’y a qu’une différence négligeable.

D'ailleurs ces fameux caractères floraux sont-ils plus stables que les autres ? M. DE VRIES a montré dans un travail remarquable qu’il

(1) Environs de Paris 45 °}, de plantes annuelles et bisannuelles ; Christiana 30 °/, ; Listad 61° 40” de latitude 26 ©. De 200 à 600, 60 °/, d'espèces annuelles et bisan- nuelles ; de 600 à 1800, 33 0, ; de 1800" à la neige 6 0h.

ACCOMMODATION DES PLANTES AUX CLIMATS FROID ET CHAUD. Dll

n’en était rien et que, sous l'influence de la sélection et de la nutri- tion on modifiait le nombre des pétales d’un Ranunculus bulbosus et cela d'une manière progressive et stable (1).

On sait également qu'en six générations on a pu rendre fixe et héréditaire une monstruosité d’un Coquelicot dans lequel plusieurs étamines étaient métamorphosées accidentellement en carpelles.

Ainsi donc, la fleur n'échappe pas plus que le reste à la loi géné- rale qui veut que tout varie.

L'étude qui vient d’être faite permet de tirer une autre consé- quence, elle met en vedette l'influence du milieu que DARwIN avait cru devoir laisser dans l'ombre. C’est le climat qui nous permet de comprendre comment les transformations s’opèrent. Quant à la sélection naturelle, c’est le climat qui la réalise ; quand des froids intenses surviennent dans les ‘régions polaires les graines sont gelées, celles qui ne sont pas détruites peuvent fleurir et amener leurs graines à maturité. La sélection naturelle est donc, dans ce cas, l'adaptation progressive aux conditions de milieu.

J'ai longuement insisté sur la preuve précédente que je regarde comme directe car elle me paraît avoir une grande portée s’appli- quant à toute la flore polaire.

Il me paraît de la plus haute importance pour l’avenir de la science d'être fixé sur la question de l’évolution des espèces. L'étude de la classification n’en sera pas seule modifiée et grandement éclairée, l’anatomie, la physiologie et la pathologie des êtres vivants en seront transformées et s’orienteront définitivement dans une voie nouvelle et féconde.

Le jour, qui me paraît prochain, la théorie de LAMARCK sera définitivement admise, les passions qui s’agitaient autour de cette question s’apaiseront, car la science donne à tout ce qu'elle touche le calme et la sérénité qui résident en elle.

Paris, le 29 mars 1897.

(1) DE VRIES (Zer. d. deutsch. bot. Ges.. 1894, p. 199).

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