» ref e reste COPA TA TETE EME ra > re ET j Quant à les préciser comme telles, à établir leurs rapports vis-à-vis des cellules nerveuses typiques, à indiquer la place qui leur revient parmi les nombreux et divers groupes de cellules nerveuses, tout cela doit être réservé pour des recherches ultérieures. Il ne peut donner pour le moment que cette unique conclusion, que les cellules des corps suprarénaux doivent être rangées le plus près possible des cellules nerveuses, sans pouvoir être avec certitude considérées comme telles ; et plus loin il émet l'opinion que les suprarénaux ne sont 6 ED. GRYNFELTT. peut-être autre chose que des ganglions sympathiques dont une partie des éléments présenterait une forme particulière permettant de les désigner sous le nom de « Chromaffine sympathicuszellen. > On voit que malgré les prudentes réserves dont Konx |p. 300] entoure l'expression de sa pensée il penche vers l'opinion de la nature nerveuse des corps suprarénaux. C’est là une manière de voir très spéciale et, on peut dire, un autre pôle de la question (1). A la vérité dans ces derniers temps, DIAMARE [02] a émis une idée qui pourrait concilier les deux opinions en apparence si contradic- toires. Il a fait remarquer que pour naître d’une ébauche commune avec un ganglion nerveux, les corps suprarénaux ne seraient pas forcément exclus de la liste des organes glandulaires ; il existe en effet certaines régions du névraxe primitif qui gardent une structure épithéliale simple et constituent en définitive des lames épithéliales (1) Cette introduction était écrite et le manuscrit de ma thèse était déposé, lorsque parut dans le n° du 3 juillet 1902 du Prager medicinische Wochenschrift un intéressant article de Konn. Ce nouveau travail n'apporte aucune modification à sa conception fondamentale de la cellule chromaffine, que l’auteur regarde toujours comme un élément particulier du système nerveux sympathique. Je pourrais donc m'abstenir de le citer ici, d'autant plus qu’il ne contient aucune nouvelle recherche sur les organes que j'étudie. Mais il m'a paru bon néanmoins de le mentionner, pour faire comprendre les idées actuelles de KoHN sur les organes constitués par les cellules chromaffines et qu'il a proposé antérieurement d'appeler des paraganglions. En dehors de ses recherches antérieures sur les suprarénaux des Sélaciens [99] et sur la glande carotidienne des Mammifères (1900), KoHN a pu utiliser les données récentes de divers auteurs et notamment une intéressante découverte de ZUCKERKANDL pour montrer l'importance des paraganglions et leur grande diffusion dans l'organisme des Vertébrés. En effet, il est arrivé à déterminer comme tel un petit corps globuleux, trouvé par ZUCKERKANDL au devant de l'aorte de l'Homme, et il a fait partager cette manière de voir à ZUCKERKANDL lui-même. Aussi, s'appuyant sur toutes ces observations, KoHN a été amené à cette conclusion, que la cellule chromaffine, dérivée -des ébauches du sympathique, est un élément histologique beaucoup plus répandu qu'on ne l'avait cru jusqu'alors; qu’elle forme des amas cellulaires répandus dans tout le domaine du système grand sympathique, tantôt perdus au milieu des éléments nerveux, tantôt isolées sous forme de nodules plus ou moins indépendants, (organe de ZUCKERKANDL et glande carotidienne des Mammifères, corps suprarénaux des Sélaciens). Il groupe toutes ces formations sous la dénomination commune de para- ganglions et considère la cellule chromaffine comme une nouvelle espèce histologique constituant leur élément spécifique. La substance médullaire des capsules surrénales des Mammifères n’est qu'un paraganglion volumineux entouré de substance corticale, On voit par ce résumé que les nouvelles données de KoHN augmentent l'intérêt que peut offrir l’étude des suprarénaux des Sélaciens en étendant le domaine des cellules spécifiques de ces organes. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES,. 7 sécrétantes (corps choroïdiens), tandis que les portions voisines du même névraxe primitif se sont transformées en centres nerveux. Il pourrait donc y avoir un vrai corps épithélial d’origine neurale. Mais cette apparence de conciliation ne peut pas suffir. Sans doute elle permet de comprendre à la fois et l’origine nerveuse et le rôle probablement sécrétoire des corps suprarénaux. Mais elle ne va pas au delà et ne nous apprend rien sur la structure intime de ces corps et par suite ne fournit pas d'arguments nouveaux pour ou contre les deux idées directrices autour desquelles gravitent maintenant nos connaissances sur ces organes. Cependant ces deux théories principales auraient eu besoin l’une et l’autre d’une base anatomique plus solide que celle offerte par les travaux de leurs promoteurs. SWALE VINCENT ne donne pas des notions bien complètes sur la structure des corps suprarénaux et son unique figure histologique, dans laquelle des cellules du supra- rénal sont représentées disséminées çà et là au sein d’une masse fondamentale fibrillaire, ne répond guère à l’idée qu’on se fait d’une glande vasculaire sanguine. De même, les dessins de Koxx laissent penser qu'il n’a pas étudié des organes parfaitement fixés et qu'il n'a pas remarqué les variations de structure des cellules chromaffines. Et pourtant quel intérêt n'y a-t-:l pas à bien connaître les détails de cette structure ? En effet, si les corps suprarénaux ne sont qu'une glande vasculaire sanguine particulière, nos connais- sances sur ces organes en général ne sont cependant pas tellement riches que l’on doive regarder comme inutile l’étude de l’un d'eux en particulier. Si, d'autre part, les corps suprarénaux constituent une forme particulière d’élément du grand sympathique, il est d'autant plus intéressant et d'autant plus utile de les étudier, quils forment, chez les Sélaciens, des masses infiniment plus considérables que les petits nids cellulaires répandus avec tant de parcimonie sur les rameaux du système sympathique des autres Vertébrés, qu'ils sont restés, pour ainsi dire, presque complètement inconnus ou plus exactement connus seulement d’un petit nombre d’histologistes, et qu'ils n'ont pas encore conquis droit de cité dans l’enseignement classique. Le but de ce travail est précisément de faire cette double étude. Mais avant d’aller plus loin, je dois dissiper un doute qui pourrait s'être élevé dans l'esprit de quelques lecteurs. Si vraiment, 8 | ED. GRYNFELIT. comme le dit Konx les corps suprarénaux sont formés par des variétés du tissu nerveux, jusqu’à quel point avons-nous le droit de faire entrer ces corps dans une étude consacrée aux organes surrénaux des Sélaciens ? La réponse est facile. Quelle que soit la nature des cellules chromaffines, et quel que soit leur rôle dans l'organe où on les rencontre, il n’en est pas moins vrai que ces cellules forment une partie de la substance médullaire des capsules surrénales des Vertébrés supérieurs, et KoaN reconnaît qu'on peut trouver toutes les transitions entre les cas où ces cellules sont simplement annexées aux ganglions du sympathique, comme chez les Sélaciens, et la capsule surrénale des Mammifères où, avec d’autres éléments sympathiques, elles entrent dans la constitution de la substance médullaire. AIcHEL dans un travail récent [1900] a admis une hypothèse nouvelle sur la nature des corps suprarénaux. Il pense que ces derniers, dérivés non pas des ganglions du sympathique, mais de certaines ébauches appartenant au corps de Wolff, n’ont rien de commun ni avec les capsules surrénales, ni avec les ganglions sympathiques, mais représentent des organes glandulaires aberrants situés, chez les Vertébrés supérieurs, au voisinage de l’épididyme ou du parovarium, et qu’il distingue aussi des capsules surrénales aberrantes (1). Le travail de AICHEL a déjà été l’objet de vives critiques (SWALE VINCENT [1900], DiamaRE [02]). Il n’y a pas lieu d'exposer ici ces dernières, il suffit de faire remarquer que l'étude d’ArcHez basée simplement sur des recherches embryolo- giques, ne paraît pas tenir compte de la cellule chromäffine, cet élément si particulier et si caractéristique, à la fois des corps supra- rénaux, de certaines formations annexées aux ganglions sympa- thiques, et de la substance médullaire des capsules surrénales des Vertlébrés supérieurs. Par conséquent il y a lieu d'attendre des recherches plus approfondies tenant compte de la nature de ces cellules, avant d’exclure ainsi que le fait ArcHez, les corps supra- rénaux des Sélaciens de l'appareil surrénal. D'autre part le corps interrénal est généralement considéré comme (1) On pourrait rapprocher des organes auxquels fait allusion AICHEL, diverses glandes de la zone génitale sur lesquelles LoisEL [02] a récemment attiré l’attention. Cet auteur décrit des glandes développées aux dépens d’une partie de l’épithélium germinatif et dont le mode de formation présenterait une certaine analogie avec celui des capsules surrénales. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 9 répondant à la couche corticale de la capsule surrénale des Vertébrés supérieurs. En réalité cette comparaison est encore bien insuffisamment étayée, car la structure de l’interrénal est infiniment plus simple que celle de la couche corticale des capsules. En effet l’interrénal ne présente jamais une partie comparable à la couche glomérulaire des capsules surrénales, couche si particulière, et qui a peut-être un rôle spécial dans la formation du reste de la capsule GorrscHAU [83]. Des rapprochements de quelque valeur ne pourront être faits qu'après une étude soignée, à la fois anatomique et cytologique des surrénales capsules chez les différents Vertébrés. Mais on peut néanmoins, en se basant sur l'opinion unanime, et faute de preuves ou simplement d'indications contraires, rapprocher l’interrénal des Sélaciens des organes surrénaux des Mammifères. Par conséquent nous étions parfaitement en droit de considérer les suprarénaux et les interrénaux des Sélaciens comme représentant des parties incontestables de l'écorce surrénale des animaux supérieurs, et le titre aussi bien que la division de notre travail se trouvent ainsi justifiés. Il convient d'envisager ces deux ordres d'organes à deux points de vue : 1° au point de vue anatomique ; 2° au point de vue histolo- gique. Au point de vue anatomique parce que je me suis convaincu à la lecture des travaux de mes devanciers qu’il y avait encore bien à dire sur le nombre et sur les connexions de ces corps. Au point de vue histologique parce que les figures publiées laissaient deviner certaines-incertitudes ou soupconner des erreurs d'interprétation, et que les textes eux-mêmes paraissaient appeler de nouvelles recherches. J'ai cru devoir étudier le plus grand nombre d'espèces que j'ai pu en ne prenant bien entendu que des sujets vivants ou frais, les individus de collection, conservés dans l'alcool, n'étant bons à rien pour ce genre de recherches, et j'ai été assez heureux pour réunir des espèces appartenant à presque toutes les familles des Squalés ou des Raies. Voici la liste des espèces que j'ai étudiées : Squales : Scyllium catulus, Cuv., Sc. canicula, Cuv.,Pristiurus melanostomus, C. Bp. ; Alopias vulpes, C. Bp.; Oxyrhina Spal- lanzanii C. Bp.; Mustelus vulgaris Müll. et Henl.; M. lœvis, 10 ED. GRYNFELTT. Riss. ; Galeus canis, Rondel.; Zygæna malleus, Valenc.; Car- charias glaucus, Rondel. ; Hexanchus griseus, Rafin.; Acanthias vulgaris, Riss.; A. Blainvillei, Riss.; Centrina vulpecula, Bel. ; Echinorhinus spinosus, Blainv. ; Squatina angelus, Riss. Raies: Torpedo marmorata, Riss.; Raja clavata, Rondel. ; BR. marginata, Müll. et Henl.; R. punctata, Riss.; R. mosaïca Lacep.; Myliobatis aquila, G. Dum. ; Trygon pastinaca, Müll. et Henl. Les matériaux de cette étude m'ont été fournis en grande partie par la station zoologique de Cette dont je remercie vivement le Directeur, M. le Professeu: SABATIER, correspondant de l'Institut. Il a mis une grande obligeance à me procurer les animaux dont j'avais besoin et il m'a permis d'utiliser largement les nombreuses ressources de la Station. Je ne saurais oublier non plus l'accueil aimable qu’il m'a toujours réservé, ni ce que je dois à ses savantes leçons. Je prie aussi MM. CaALveT sous-directeur et LADREYT préparateur-adjoint à la station, d’agréer mes remerciments pour leur obligeant concours. J'ai recueilli directement à Palavas un certain nombre d’espèces telles que Alopias vulpes, Carcharias glaucus, Oxyrhina Spallanzani, Zygæna malleus, que l'on peut se procurer à bord des bateaux qui font la pêche du Thon. J'y ai trouvé aussi un grand nombre de Torpilles. Toutes les recherches, aussi bien les dissections et les injections vasculaires que les coupes destinées à l’étude histologique, ont été faites dans le laboratoire d'histologie de la Faculté de Médecine dirigé par M. VIALLETON. Ce m'est un devoir bien doux d’adresser ici, avec mes remerciments, le témoignage de ma profonde reconnais- sance à cet excellent Maître, qui m'a inspiré ce travail et dont l'appui si bienveillant ne m'a jamais fait défaut pour mener à bien cette tâche difficile. ; M. le professeur Grarp, Membre de l'Institut, a bien voulu au cours de ce travail s'intéresser à mes recherches el me donner de précieuses indications: je le prie d’agréer l'hommage de ma respectueuse gratitude. Le plan de ce travail esttrès simple. Il est divisé en deux parties : la première est consacrée à l'étude des corps suprarénaux, la ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 15 seconde à la description des interrénaux. Chacune de ces parties est divisée en deux chapitres, l’un réservé à l’anatomie, l’autre à l'histologie. Pour éviter des redites, après cette introduction dans laquelle les grandes lignes de l'historique ont été indiquées, je n'ai pas cru devoir consacrer un chapitre à part à l’exposé de tout ce qui a été écrit sur ce sujet. Cet exposé a été fait déjà à plusieurs reprises et notamment dans les travaux français (CHEVREL [89] et Perrrr [96]). Il était donc inutile de recommencer. Mais ne voulant pas non plus laisser dans l'ombre aucun de ceux qui ont contribué à l'étude de cette question, j'ai mis à la fin de chaque chapitre un appendice bibliographique aussi exact que j'ai pu le faire et attribuant à chacun la part qui lui est due. Montpellier, 12° Juillet 1902. 12 ED. GRYNFELITT, PREMIÈRE PARTIE CHAPITRE PREMIER ANATOMIE DES CORPS SUPRARÉNAUX Ce premier chapitre est consacré à une description anatomique détaillée des corps suprarénaux, c'est-à-dire à la description de leur forme extérieure, de leur nombre, de la situation qu’ils occupent dans la cavité abdominale et de leurs connexions anatomiques. On pourrait penser que des organes découverts il y a un demi siècle sont parfaitement connus au point de vue macroscopique. Il n’en est rien cependant. La plupart des auteurs qui les ont étudiés se sont surtout préoccupés de leur constitution histologique, et après avoir jeté un coup d'œil superficiel sur leur nombre et sur leur situation chez quelques espèces, ils n’ont pas cherché à établir par des observations suffisamment étendues les lois générales de leur distribution. Il ne faudrait pas croire cependant que cette distribution ne présente que des variations insignifiantes. L'on sait déjà, surtout depuis les recherches de CHEvREzL [99, p.57] et de Perrir | 96, p.83] que le nombre et la position des corps suprarénaux sont bien différents chez les Raïes de ce qu'ils sont chez les Squales. C'est là une indication d'autant plus intéressante que cette différence peut nous éclairer sur la métamérie réelle de ces corps et sur les rapports qui existent entre leur nombre et celui des segments ou métamères composant la région à laquelle ils sont annexés. Or les auteurs ne se sont pas préoccupés de faire le dénombrement exact de ces parties et par suite n’ont pu donner que des renseignements vagues sur ces sujets intéressants. Je me suis efforcé de combler cette lacune en comptant soigneu- sement les corps suprarénaux dans un certain nombre d'espèces chez lesquelles je déterminais en même temps le nombre des méta- mères répondant à la cavité abdominale dans laquelle siègent exclusivement les corps en question. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 13 J’ai pu étudier sous ce rapport 13 espèces de Squales appartenant à 10 genres différents, et 7 espèces de Raiïes représentant 4 genres distincts. Ce sont, parmi les Squales: Pristiurus melanostomus, Scyllium catulus, Sc. canicula, Echinorhinus Spinosus, Mustelus lœvis, M. vulgaris, Galeus canis, Hexanchus griseus, Carcha- rias glaucus, Acanthias vulgaris, Ac. Blainvillei, Centrina vulpecula, Squatina angelus; parmi les Raïes: Raja clavata, R. marginata, R. mosaica, KR. punctata, Torpedo marmorata, Trygon pastinaca, Myliobatis aquila. Pour toutes ces espèces j'ai pu compter exactement le nombre des corps. Dans un certain nombre d’autres types, tels que Zygæna malleus, Oxyrhina Spallanzanii,. Alopias vulpes, je n’ai pu avoir que des portions de l'animal; par conséquent il m’a été impossible d’étudier l’ensemble du système chez ces animaux et j'ai réservé les pièces pour l'examen histologique. Technique. — Pour étudier la position et le nombre des suprarénaux il convient d'employer les procédés suivants: 1° la dissection après la coloration élective que prennent ces corps dans le bichromate (SEMPER [75, p. 228]); 2° les injections vasculaires. Celles-ci servent à la fois à montrer la situation des corps supra- rénaux par rapport aux vaisseaux sanguins et à les compter, parce que la disposition des vaisseaux à leur niveau, est tellement caracté- ristique, qu’en la voyant on peut affirmer indubitablement la présence d’un de ces corps, alors même que la substance propre de celui-ci est rendue invisible par le mode de montage de la prépa- ration ainsi obtenue. CHEVREL |89, p. 3] a proposé une autre technique pour découvrir ces corps. C’est une imprégnation rapide par l'acide osmique à un pour 100, lequel teint en noir les nerfs, les ganglions du sympa- thique et les corps suprarénaux qui leur sont adjacents. Mais cette méthode, excellente pour la recherche des rameaux du sympathique qui occupait surtout CHEVREL, est assez imparfaite pour la mise en évidence des suprarénaux proprement dits, parce que là où ces corps sont enfouis dans l'épaisseur du rein, l'acide osmique ne pénètre pas jusqu'à eux et par conséquent les laisse totalement ou en partie invisibles. C’est probablement pour cette raison que CHEVREL n’a pas trouvé les corps suprarénaux les plus postérieurs encastrés dans le rein et donne un nombre total de ces corps moindre que celui qui existe en réalité. 14 ED. GRYNFELTT. Dissection après la réaction chromaffine. — La réaction du bichromate de potasse et de l’acide chromique sur les corps supra- rénaux déjà signalée par SEMPER à une grande importance parce qu'on la retrouve dans certains éléments histologiques des capsules surrénales chez tous les Vertébrés, et Koxn [99, p. 302] a désigné les cellules qui la présentent sous le nom de cellules chromaffines. C’est une véritable réaction histo-chimique dans laquelle on peut avoir confiance pour caractériser ces éléments; elle permet de reconnaître à l'œil nu, ou à l’aide de la loupe, les organes qu’ils constituent par leur groupement. Pour faire cette réaction on prend les animaux vivants ou aussi frais que possible ; après avoir tranché la queue en arrière du cloaque, la tête au niveau de la dernière fente branchiale, on ouvre largement l'abdomen, et on suspend la pièce dans la liqueur de Müller en quantité suffisante et souvent renouvelée. Quelques heures après l'immersion dans ce liquide, les corps sont parfaitement visibles par leur couleur brun jaunâtre qui tranche nettement sur celle des tissus ambiants lesquels ne sont pas encore teints par le bichromate. Pour bien voir les corps et les dénombrer, on peut donc faire les dissections après quelques heures de séjour dans le bichromate. Mais comme ils sont toujours très reconnaissables par leur couleur foncée, alors même que les tissus voisins se sont teintés par le bichromate, on peut aussi attendre plusieurs jours et même des mois pour faire la dissection. Aussi, dans le cas où on voudrait rechercher sur des espèces exotiques la disposition anatomique de ces corps, il serait bon de réclamer des échantillons fixés en entier dans le liquide de Müller après ouverture de la paroi abdominale, préféra- blement à tout autre mode de conservation. En effet il est à peu près impossible de retrouver les corps postérieurs plus ou moins cachés par le rein sur les animaux conservés dans l’alcool ou même dans le formol, et cela est encore plus difficile s’il s'agit d'individus appartenant au groupe des Raies, dans lequel les corps suprarénaux sont parfois émiettés en tout petits nodules, à peine perceptibles à l'œil nu, lors même qu'ils sont fortement teintés par le bichromate, et quinaturellement seraient absolument invisibles en l'absence de cette coloration. La recherche de ces corps doit se faire à l’aide de dissections soignées dont j'indiquerai rapidement la technique. Lorsqu'il s'agit d'animaux ayant séjourné longtemps dans le liquide de Müller, il est bon de les soumettre préalablement à un ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 15 lavage prolongé à l’eau courante. Comme les corps antérieurs sont contenus dans les sinus de MoNro ou dans les veines cardinales, il faut, pour les découvrir, inciser la paroi ventrale de ces vaisseaux, après s'être débarrassé des organes voisins (æsophage, glandes génitales) qui pourraient gêner par leur présence. Pour la partie postérieure de la cavité abdominale, dans laquelle le rein cache les corps, il faut commencer la dissection par le bord externe de cet organe qu’on soulève, sans le détacher de ses insertions sur la ligne médiane, pour voir les corps placés à sa partie profonde, compter leur nombre et en même temps établir leurs rapports avec les segments vertébraux correspondants. Chez certains animaux les corps sont parfois émiettés en fragments très petits. Aussi est-il bon dans ce cas de ne pas se contenter simplement de l'examen à l'œil nu ou à la loupe, mais bien de détacher la paroi postérieure de la cavité abdominale avec les corps suprarénaux qui y sont attachés, avec l'aorte et les vaisseaux qui en partent, puis de monter dans le baume, après déshydratation et éclair- cissement, avec ou sans Coloration préalable, les larges lambeaux ainsi obtenus. Ces préparations sont très instructives : elles consti- tuent des documents indéfiniment conservables, à la fois anatomiques ethistologiques, car leur épaisseur ne s’oppose pas à ce qu’on puisse reconnaître au microscope leurs tissus constituants, et elles permet- tent seules de voir les plus petits corpuscules suprarénaux qui paraissent avoir échappé jusqu'ici à l'attention des observateurs. La connaissance de ces petits fragments aberrants a une réelle impor- tance pour la compréhension de la nature des organes en question. Injections vasculaires. — Elles ont été faites par deux procédés principaux, mais toujours à l'aide d’un appareil à pression continue dans lequel on savait à tous les instants de l'opération quelle était la pression développée. Les injections étaient poussées soit par l'aorte caudale (Squales) soit par l'artère cœæliaco-mésentérique (Raies). J'ai employé deux matières à injection différentes : 1° le bleu de Prusse à la gélatine et 2° le nitrate d'argent. Dans le bleu de Prusse gélatiné la proportion de la gélatine variait de 2 à 5 pour 100, en raison inverse de la température. La masse à injection étant préparée suivant les indications données par RANvVIER [89, p. 106], l'animal tué par hémorrhagie était réchauffé dans un bain d’eau tiède à la température maxima de 35", qui ne doit pas être dépassée. L’injection poussée, et sa réussite 16 ED. GRYNFELIT. constatée par la coloration bleue de la peau, l'animal était refroidi rapidement sous un courant d’eau. Puis, lorsque la gélatine était solidifiée, il était plongé dans le liquide de Müller ou dans le formol à 10 4, la cavité abdominale préalablement ouverte. Au bout de quelques jours l’animal était disséqué et la paroi abdominale posté- rieure avec les corps suprarénaux et les vaisseaux y compris l'aorte était enlevée et montée en préparation permanente dans le baume sans coloration. Sur ces préparations, les rapports vasculaires et la physionomie des différents réseaux capillaires intra-organiques se laissent admi- rablement voir. Pour suivre les détails de la vascularisation dans l'épaisseur d’un corps suprarénal où elle est particulièrement bien visible, on peut détacher ce dernier avec soin et en faire une prépa- ration permanente dans le baume en le conservant en entier, ou bien y faire des coupes, soit immédiatement sans inclusion préa- lable, soit après inclusion dans le collodion. Dans la partie posté- rieure de la cavité abdominale, où les corps sont plongés dans l'épaisseur du rein, on ne peut pas faire des préparations d'ensemble comme celles indiquées ci-dessus, il est nécessaire d'inclure au collodion et de faire des coupes en série un peu épaisses (1). Les injections au nitrate d'argent donnent d'excellents résultats. L'animal étant sacrifié comme précédemment reçoit par l'aorte caudale ou l'artère cœliaco-mésentérique une solution à 1 p. 300 de nitrate d'argent. L'injection est maintenue pendant quelques minutes pour qu’elle puisse bien fixer les parois vasculaires déployées, puis on ouvre la cavité abdominale, on lave rapidement à l’eau distillée et on plonge dans le formol à 10 p. 100. La réduction du nitrate se (1) Dans ce cas les inclusions au collodion sont préférables aux inclusions à la paraffine pour les raisons suivantes : 1° les pièces étant injectées à la gélatine souffrent beaucoup du passage dans la paraffine, forcément suivi d’une rétraction considérable de la masse gélatinée et de dislocations empêchant de saisir les rapports exacts des vaisseaux ; 2° dans ces pièces, de dimensions assez grandes et renfermant des parties de consistances très différentes, comme les muscles, la colonne vertébrale et les reins, il se produit des dislocations entre les diverses parties de la coupe. Le collodion, en maintenant tout en place, est tout indiqué pour la confection de ces préparations, destinées à résoudre des questions surtout topographiques. Quand on monte les coupes, il faut éviter de les éclaircir avec de l'essence de girofles, qui dissout le collodion et les porter du chloroforme qui les imbibe, dans le baume dissout dans le même réactif. Le baume pénètre ainsi facilement toute l'épaisseur de la coupe qu'il rend parfaitement transparente. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 17 fait ct les vaisseaux se marquent en brun ou en noir comme s'ils avaient élé injectés par des substances de cette couleur. Lorsqu'on les examine plus tard au microscope, on voit que le nitrate d'argent s'est réduit à leur niveau d’une façon régulière, imprégnant les contours des cellules endothéliales, sauf dans quelques points où la réduction est faite d’une manière massive, et a teint uniformément en noir le vaisseau. Cette méthode est très élégante et donne aussi des préparations fort instructives lorsqu'on à monté soit la paroi abdominale postérieure en entier (partie antérieure) soit des portions de celle paroi ou des corps suprarénaux isolés. Ces derniers se reconnaissent aisément le long des artères par le petit renflement que forment leurs capillaires propres autour du vaisseau. Leur substance n’est pas colorée, puisqu'on n’a pas fait la réaction chromaffine, et le trajet des capillaires à leur intérieur est d'autant plus facile à suivre. De telles préparations avec les vaisseaux leints en noir, tandis que la substance propre des organes disparait noyée dans la réfringence du baume, donnent des résultals très comparables par la netteté et le relief des réseaux vasculaires, à ceux que l’on pourrail oblenir par la méthode de la corrosion. Ces injections au nitrate d'argent, très faciles à faire et qui n’exigent pas le réchauffement préalable de l'animal, sont très recommandables et je ne saurais trop conseiller leur emploi. Je ferai remarquer aussi que toutes ces préparations épaisses, ces grands lambeaux de paroi abdominale avec tous les organes y adhérents maintenus à leur place respective, préparations faites suivant les méthodes histologiques, ne sont pas des préparations histologiques à proprement parler et qu’elles ne sauraient jamais remplacer ces dernières. Mais ce sont des préparations anatomiques permanentes, bien plus démonstralives et bien plus concluantes que la plupart des préparations anatomiques proprement dites, puisqu'elles permettent de voir simultanément les connexions anato- miques et suffisamment de détails histologiques pour affirmer la nature d'un organe. Il est inutile d'ajouter que ces préparations d'ensemble doivent être faites de préférence sur des animaux jeunes ou de petite taille. De semblables préparations peuvent rendre de réels services aux zoologistes, parce qu’elles sont à la fois des préparations d'ensemble et de détail. Elles sont fort employées au laboratoire d’histologie de la Faculté de Médecine ; M. VIALLETON 2 18 ED. GRYNFELTT. [99, p. 414] a déjà fait allusion à cette méthode dans son précis de technique. SITUATION DES CORPS SUPRARENAUX ; LEUR NOMBRE. Les corps suprarénaux sont localisés chez les Plagiostomes dans la cavité abdominale, sur la paroi postérieure de laquelle ils se rencontrent sur toute sa longueur depuis l'artère axillaire en avant, jusqu'à l'extrémité caudale du rein (fig. 1, PL. 1). Ils sont situés de chaque côté de la colonne vertébrale sur deux lignes parallèles ou plutôt très légèrement convergentes d'avant en arrière. Par rapport aux corps suprarénaux la cavité abdominale peut être divisée en deux régions: une antérieure dans laquelle les corps sont placés derrière les sinus de Monro ou les veines cardinales ; l’autre postérieure dans laquelle les corps sont plus ou moins cachés par le rein. La région antérieure est plus ou moins longue suivant le développement relatif du rein par rapport à la cavité abdominale. Elle est par conséquent très développée là où le rein est court (Scyllium, Pristiurus, Raja) ; elle est au contraire très courte dans les espèces à rein allongé (Galeus canis, Mustelus lævis et vulga- ris, Echinorhinus Spinosus, elc.). Dans ce dernier cas la partie antérieure du rein effilée passe en dehors des premiers corps et les laisse visibles sur une longueur variable, suivant les espèces et même suivant les individus. La paire suprarénale la plus antérieure offre toujours une physionomie particulière. Elle est formée par deux corps situës parfois sur l’artère axillaire, parfois à côté d'elle, mais toujours plus volumineux que ceux qui les suivent et paraissant résulter de la fusion d'un certain nombre de corps: deux d’après BaLzrour |78, p, 240], quatre ou cinq d’après CHEVREL |[89, p. 40], trois ou quatre d’après SWALE VINCENT [97, p. 52]. On peut les appeler les corps axillaires bien qu'ils ne soient pas toujours placés sur l'artère elle-même. Les corps suivants ont une disposition segmentaire, qui a été déjà signalée par presque tous les auteurs qui s’en sont occupés (LEYDIG [52, p. 16], SEMPER [75, p. 228], Bazrour [78, p. 237], CHEVREL [89, p. 12], Perrir [96, p. 82], Swaze VincENT [97, p. 52], Ko 199, p. 295]). Mais personne n’a complètement étudié la question de ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 19 la mélamérie des organes ‘et il suffil pour le prouver de citer les observalions de SwaLE VINCENT |97, p. 53] qui dans certains cas n’a Fi. 1. — Corps suprarénaux antérieurs (schéma). — A, Echinorhinus spinosus ; B, Galeus canis; C, Squatina angelus; D, Pristiurus melanostomus ; ao., aorte; a.ax., artère axillaire ; b.e.s., bord externe du sinus; c.ax., corps axillaire ; c.s., Corps Suprarénaux ; r., rein (ce dernier n’atteint pas la zône représentée chez Pristiurus). Les traits horizontaux superposés indiquent les limites des vertèbres. pas pu suivre les suprarénaux bien loin en arrière de l'extrémité antérieure de l'interrênal, chez Scyllium canicula, el qui par 20 ED. GRYNFELTT. conséquent, en oublie environ six paires en arrière. Toutefois celte mélamérie n’est pas toujours parfaite, el chez les Raies le nombre des corps, qui sont irrégulièrement disposés du reste, est loin de répondre exactement à celui des segments entrant dans la consti- lution de la cavité abdominale. Il m'a semblé utile de reprendre entièrement l'étude du nombre des corps suprarénaux, puis de comparer ce dernier à celui des segments abdominaux dans les espèces que j'ai citées plus haut. La numération des corps suprarénaux présente quelques difficultés qu'il est bon de signaler. En effet, la forme et le volume de ces organes sont souvent très différents, de sorte que l’on est embarrassé pour dire si certains corps plus volumineux résultent de la fusion de plusieurs corps primitivement distincts ou s'ils n’en représentent qu'un seul. De semblables fusions se sont toujours opérées au niveau du corps axillaire, ainsi qu’on l’a déjà vu plus haut. Mais elles peuvent se rencontrer ailleurs et il n’est pas rare de voir des corps en forme d'haltère qui doivent manifestement résulter de la fusion de deux suprarénaux conséculifs. Il existe aussi des cas où l'irrégularité est telle que tout en étant certain de l'existence de fusions on est incapable de préciser leur étendue et le nombre des corps qui y ont pris part; c’est le cas par exemple pour beaucoup de Raies. Néanmoins on verra plus loin que toutes ces modifications s'expliquent aisément et n’empêchent pas de formuler une règle générale que l’on pourrait appeler la loi de position de ces corps. Pour faire le dénombrement des organes suprarénaux j'ai toujours mis à part le corps axillaire que j'ai compté pour un. II résulte visiblement cependant de la fusion d’un cerlain nombre de corps qui chez quelques espèces se laissent encore assez aisément distinguer les unes des autres (Squatina angelus). Mais bien qu'on puisse délerminer avec assez de vraisemblance dans bien des cas le nombre des suprarénaux qui concourent à sa formation (nombre qui dans les espèces à suprarénaux bien mélamériques répond vraisemblablement à celui des mélamères antérieurs où 1l existe seul), il y a néanmoins trop de cas où cette détermination est smpossible pour qu'on puisse la tenter pour toules les espèces que j'ai étudiées. Aussi pour éviter des hypothèses difficiles à vérifier, je considérerai à part le corps axillaire et l’ensemble des corps de même nature situés en arrière de lui, ORGANES SURRÉNAUX DES. PLAGIOSTOMES. D Pour ces derniers, il peut se présenter encore certaines difficultés tenant à des fusions susceptibles de se produire dans diverses régions sans aucune régularité. Dans certains cas ces fusions sont tellement nettes qu'on ne peut douter de leur existence et du nombre de corps qui y ont pris part. Ainsi chez les Squales, on voit souvent dans la rangée régulière des suprarénaux métamériques un corps en haltère, dont la situation par rapport à ceux du côlé opposé qui sont restés individualisés, aux vertébres et aux vaisseaux, montre clairement qu'il résulte de la fusion de deux corps voisins. Dans d'autres cas au contraire, comme chez les Raïes, la forme extérieure et les dimensions de ces organes sont si irrégulières, il y a si peu de concordance entre leur nombre et celui des segments de la cavité abdominale, qu'il est fort difficile de dire si chacun d'eux répond à un corps unique ou bien à la fusion d’un nombre variable de corps. La difficulté est d'autant plus grande que le nombre de ces organes, aussi bien que leur situation par rapport à la colonne vertébrale diflérent le plus souvent à droite et à gauche chez le même animal. Dans ces cas, j'ai cru devoir compter pour un tout corps bien individualisé et distinct, alors même que son volume aurait été un peu supérieur à la moyenne, en m'aidant du reste pour celle détermination de la distribution des corps situés dans la moitié opposée. Si par exemple dans une certaine étendue de la cavité abdominale on trouve à droite un seul corps allongé, tandis qu’il en existe trois petits arrondis à gauche, on pourra penser que le premier résulte de la fusion de trois corps. Mais si au contraire il n’a en face de lui qu'un petit corps ovoïde, on ne pourra déterminer s’il est simple ou muluple, surtout si à l'examen des régions adjacentes on ne voit rien qui indique le transport des corps de ces régions et leur fusion avec lui. En présence de ces difficultés j'ai compté chez les Raïes le nombre maximum de corps que l’on pouvait obtenir en prenant pour base le côté où ils étaient le plus nombreux et en comptant aussi pour deux, ceux des corps dont la forme en haltère et leur position par rapport à leurs homologues du côté opposé parlaient manifestement en faveur de leur dualité. De cette façon on peut tout au plus craindre de donner un chiffre un peu plus fort que le chiffre réel. Mais on verra que la différence entre le nombre des corps ainsi complé est encore telle, chez les diverses espèces, qu'elle a une valeur incontestable et mérite d'attirer l'attention. 22 ED. GRYNFELTT. Si la numéralion des corps suprarénaux est difficile, 1l convient cependant d'indiquer ici que dans beaucoup de cas toute incertitude est levée par l'examen des injections vasculaires. Celles-ci, bien mieux que la forme extérieure permettent de saisir l'unité ou la pluralité d’un corps. L'étude attentive de la vascularisation m'a permis, comme on le verra plus loin, de préciser nettement l’indivi- dualité des corps suprarénaux, de comprendre comment s'effectue leur fusion et m'a fourni en somme pour les dénombrer un critérium bien plus sur que celui tiré simplement de leur forme extérieure et de leur volume. En même temps que les corps suprarëénaux J'ai compté les segments vertébraux répondant à la cavité abdominale et leur nombre est indiqué dans le tableau p. 29. Cette numération des vertèbres ou mieux des segments entrant dans la composition de la région abdominale donne lieu à quelques remarques préalables. Chez les Raies, une portion plus ou moins longue de la colonne vertébrale répondant à la partie antérieure de la cavité abdominale est formée d’une masse cartilagineuse continue et non divisible en vertèbres. Dans ce cas j'ai établi le nombre des segments par celui des paires rachidiennes. D'autre part la détermination que j'ai employée habituellement du nombre des métamères par celui des vertèbres demande une explication : on sait que les vertèbres ne répondent pas toujours exactement aux segments du corps et qu'il y a parfois deux corps vertébraux pour un seul segment (demi-vertèbres, diplospondylie). Mais cela ne se rencontre géné- ralement que dans la queue, et les demi-vertèbres cessent d'exister au niveau de la partie postérieure de la cavité abdominale (P. MAYER [86, p. 265]). Par conséquent il ne peut pas y avoir là une grande cause d'erreur. Et si dans quelques-unes des espèces que j'ai examinées j'ai compté comme segments une ou deux demi-vertèbres, l'erreur ne peut pas être très considérable. Squales. — Parmi les Squales, on remarque que pour la plupart des espèces le nombre des corps en dehors de l’axillaire est égal à celui des segments diminués de deux à cinq. Ainsi dans un Mustelus lævis dont la cavité abdominale comprenait 25 segments, on trouvait 22 corps, plus un axillaire. Chez un Scyllium canicula avec 29 segments, il en existait 24 en dehors de l’axillaire. Par conséquent, si l’on se souvient que le corps axillaire est toujours ORGANES SURREÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 23 manifestement le résultat de la fusion de plusieurs suprarénaux, on voit que chez ces Squales on peut considérer ces derniers comme égaux en nombre aux segments vertébraux, c'est-à-dire comme rigoureusement métamériques. Il y à du reste des variations individuelles dans le nombre des corps postérieurs à l’axillaire. Mais elles s'expliquent aisément parce qu’un nombre variable de corps peuvent se fusionner pour former le corps axillaire et il est tout naturel de penser que si ce dernier s'étend en arrière plus loin dans un cas, que dans un autre, on devra trouver, dans le premier cas un nombre total de corps moins considérable que dans le second. Comme l'étendue de la fusion des corps antérieurs en une masse unique (corps axillaire) varie non seulement suivant les divers individus, mais encore parfois chez le même individu dans les moitiés droite et gauche du corps, on comprend que le nombre des organes suprarénaux puisse être différent à droite et à gauche. Toutefois ces variations sont peu importantes et on peut dire d’une manière générale que dans les espèces suivantes le nombre des corps est sensiblement égal à celui des segments : Scyllium catulus, Sc. canicula, Mustelus lœvis, M. vulgaris, Galeus canis, Hexanchus griseus, Echinorhinus spinosus, Acanthiäs vulgaris, À. Blainvillei, Squalina angelus. Dans toutes ces espèces les corps sont à peu près métamériques et leur métamérie est tout à fait comparable par sa régularité et en même temps par les faibles oscillations qu'elle peut montrer, à celle d’autres organes des mêmes animaux, tels que les entonnoirs péritonéaux (GuiTEL [ 1900, p. XXXIIT |). Il semble donc que la répétition métamérique soit la loi qui régit la position de ces corps. Il existe pourtant chez les Squales quelques espèces qui font exception à cette règle, par exemple Pristiurus melanostomus, Centrina vulpecula et Carcharias glaucus. Chez le premier on trouve une différence assez forte entre le total des segments et celui des corps. Par exemple pour 28 vertèbres, on ne compte dans certains cas que 20 corps en arrière de l’axillaire. Ce nombre n’est du reste pas fixe, il peut monter à 22 et quelquefois à 23, mais 1l est presque toujours inégal pour les deux moitiés d’un même individu. SEMPER [75, p. 229] avait déjà observé cette discor- dance entre le nombre des segmerits et celui des suprarénaux, et il admettait même qu'elle était régulière, c'est-à-dire qu'il existait un corps pour deux segments ou si l'on veut qu'un segment pourvu 24 ED. GRYNFELTT. d'un corps allernait régulièrement avec un segment qui en manquait. Celle alternance élait intervertie pour chacune des moiliés du corps, an + ŒaAT,. -- CHE Ga CSA 3 À 18 Fi. 2. — Ensemble des corps suprarénaux (schéma). — A, Mustelus lœvis ; B, Centrina vulpecula ; ao., aorte ; a.ax., artère axillaire ; b.e.s., bord externe du sinus; c.ax., corps axill.; c.i., corps interrénal; c.s., corps suprarénaux ; r., réel. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 25 de sorte que l’on trouvait toujours pour chaque ségment un corps suprarénal, mais un seul, et que ce corps alternait dans deux segments consécutifs, étant placé pour l’un à droite et pour l’autre à gauche. Cette loi n'est pas vraie pour tous les cas, et si l'on peut constater une semblable alternance pour quelques segments consé- cutifs, elle ne se répète pas dans toute la longueur de la cavité, abdominale ; et au contraire, à partir de la moitié postérieure, les corps suprarénaux sont très régulièrement métamériques et pairs. Chez Centrina vulpecula la différence entre le nombre des segments et celui des corps est très grande. Elle l’est certainement beaucoup trop pour que l’on puisse considérer le corps axillaire comme la compensant. En effet on compte dans la cavité abdominale 41 segments, tandis qu’il n’y a que 26 corps, plus l’axillaire. Or l'axil- laire ne s'étend que sur une région très limitée comprenant environ quatre à cinq corps vertébraux et sa taille aussi bien que sa forme montrent qu'il résulte tout au plus de la fusion des quatre à cinq corps correspondants. Il n'y a donc plus une concordance aussi parfaite qu'auparavant entre la métamérie vertébrale et la mélamérie supra- rénale. Ce cas est représenté du reste par le schéma n° 2, B, lequel montre qu'il n’y a pas partoutune paire de corps suprarénaux correspondant à chaque vertèbre. Là aussi, au niveau d’un certain nombre de vertèbres consécutives, on pourrait trouver une alter- nance comme celle signalée plus haut chez Pristiurus. Mais il est aisé de voir aussi que ces alternances n’ont rien de régulier et qu'elles ne constituent pas la loi de position de ces organes. Chez Carcharias glaucus il y a aussi une grande différence entre le nombre des segments et celui des corps suprarénaux. Cette différence est la plus marquée que nous ayons rencontrée dans le groupe des Squales puisque le nombre des segments étant de 72, celui des corps suprarénaux ne s'élève qu'à 37. Comme l’axillaire comprend toujours plusieurs corps fusionnés, le nombre total de ces derniers est donc un peu supérieur à la moitié du nombre des segments. Raies. — Chez les Raies il existe partout une discordance assez marquée entre le nombre des corps et celui des segments vertébraux. Pour étudier la loi de position des organes suprarénaux dans ce groupe l'exemple fourni par Torpedo marmorala est particu- lièrement favorable, parce que les corps axillaires chez cetanimal 26 ED. GRYNFELIT. ne se fusionnent pas avec ceux qui les suivent el que par conséquent lors même qu'il existerait des unions secondaires entre des corps consécutifs à l’axillaire, celles-ci ne sont pas assez nombreuses pour modifier beaucoup le nombre de ces éléments. Or chez la Torpille on voit que, en dehors de l’axillaire, 1l y a seulement 14 paires de corps suprarénaux pour 24 vertèbres. Il y a donc là encore une discordance assez grande entre les deux mélaméries. On peut signaler aussi chez la Torpille une disposition assez singulière du corps axillaire, ainsi qu'il est facile de le constater sur le schéma n° 6 (voyez p. 35). Le corps axillaire est situé chez cet animal sur le tronc de l'artère de même nom qu'il entoure. Le corps suprarénal qui le suit appartient au segment suivant ou tout au plus au 2° segment après l'artère axillaire. Il semble donc qu'il y aurait dans ce cas une infraction à la règle posée plus haut, que l’axillaire résulte de la fusion des supra- rénaux apparlenant à plusieurs segments consécutifs. Mais il n’en est rien parce que le volume du corps axillaire est dû en majeure partie au développement du tissu nerveux qui entre dans sa consti- tution, et aussi à celui de l'artère qu'il enveloppe et autour de laquelle il forme un mince manchon, où la substance suprarénale proprement dite n’entre que pour une faible part. Dans le genre Raja la disposition est à peu près la même, etil y a une assez grande différence entre le nombre des segments verté- braux et celui des corps, comme on pourra s’en rendre compte dans le schéma ci-joint (fig. 3). C’estun exemple des difficultés que l’on peut rencontrer dans le dénombrement des corps. Les suprarénaux les plus antérieurs se sont fusionnés avec l’axillaire pour former un cordon continu s'étendant parfois sur une assez grande longueur, sur le tiers ou le quart de la cavité abdominale. Il n’en est pas moins vrai que sur ce schéma une discordance frappante existe entre la métamérie vertébrale et celle des suprarénaux, là où ceux-ci sont nodulaires et isolés, c’est-à-dire dans la partie postérieure du corps. On remarquera aussi dans cette région que les corps isolés ne sont pas toujours placés symétriquement à la même hauteur des deux côtés de la ligne médiane. Chez Trygon pastinaca la disposition est, d’une manière générale, la même que chez les types de Raies précédemment étudiées. Mais il y a encore une plus grande différence entre le nombre des vertèbres el celui, des corps puisqu'on ne trouve en dehors de ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 27 l’axillaire que 19 paires de corps, alors qu’il y à 64 vertèbres. Cette différence est la plus forte que j'ai observée, aussi ai-je tenu à ao CAD \ Es b.es fe ! / { 2 ’ CS. + « D rl 5 — - S. ls ct $ Ÿ is JR “4 À : / ù (] FiG. 3. — Raja clavata (schéma). — ao., aorte ; a.ax., artère axillaire ; b.e.s., bord externe du sinus ; c.ax., corps axill. : c.r., corps interrénal; c.s., corps suprarénal, 28 ED. GRYNFELIT. m'assurer autant que possible de son exactitude. Pour cela j'ai enlevé, sur une étendue correspondant à un nombre connu de vertèbres, la paroi abdominale postérieure avec les vaisseaux et les corps qu'elle renfermait et j'ai monté le tout en préparation permanente dans le baume. Or, sur une étendue de 25 vertèbres, il y avait seulement 10 corps, de grosseur irès inégale, placés à des hauteurs différentes, et présentant une forme très irrégulière et une tendance à se réduire en petits fragments visibles seulement à l’aide de grossissements moyens. Quelques-uns d’entre eux, allongés, paraissaient résulter de la fusion de deux corps voisins réunis par un petit pont de substance ; d'autres très grêles semblaient formés par l’élirement en longueur de la substance d’un seul corps. Chez Myliobatis aquila la disposition est à peu près la même que chez les autres Raies. Certains suprarénaux sont très petits el à peine visibles à l'œil nu. Ils sont groupés d’une façon asymétrique par rapport à la ligne médiane et sont beaucoup moins nombreux que les segments vertébraux. Le tableau ci-joint donne à la fois le nombre des corps supraré- naux et celui des segments de la région dans laquelle ils existent chez les Squales et les Raies que j'ai éludiés. Ce qui a été dit plus haut des variations individuelles suffit pour indiquer qu'il ne s’agit, pour la plupart des cas, que de chiffres moyens, obtenus d’après l'examen de plusieurs individus et que l’on peut toujours trouver des cas un peu différents de ceux qui ont été donnés ici. Les espèces ontété groupées sans tenir compte de leurs affinités naturelles et simplement d'après le nombre de leurs corps. suprarénaux, et si l'on peut ainsi parler, d'après le degré de métamérie de ces derniers (1). (1) Pendant l'impression et après que le tableau a été composé, j'ai eu l’occasion de faire ces numérations chez Zamna cornubica Cuv. Dans cette espece il y a 53 segments et 42 corps suprarénaux, y compris l’axillaire. La différence, est de 11. Par conséquent Lamna cornubiea doit prendre place dans notre tableau entre Pristiurus et C'entrina, et plus près de ce dernier. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 29 NOMBRE NOMBRE ESPÈCES des des corps |DIFFÉRENCE SEGMENTS SUPRARÉNAUX SQUALES: Squatina angelus....... 26 24 2 Mustelus lœvis. ..... REC 25 23 2 Mustelus vulgaris. ..... 29 26 3 Acanthias vulgaris... ... 34 al 3 Acanthias Blainvillei... 33 29 m1 Gueus can. Jane. 32 28 4 Hexanchus griseus ..... 30 32 4 Echinorhinus spinosus.. 32 28 4 Scyllium catulus ....... 33 29 4 Scyllium canicula...... 29 29 4 Pristiurus melanostomus 28 22 6 Centrina vulpecula..... Al 21 14 Carcharias glaucus . .... 72 37 3) Rares : Torpedo marmorata.... 24 15 9 Raja clavata. 1... 1... 94 4 17 Rajarpunctata...... .…. 39 13 20 REA MOREL, sel. 39 13 26 Raja marginata”..... 46 13 39 Myliobatis aquila....... Dÿ 20 3) Trygon pastinaca....... 64 20 44 Comment peut-on passer de la mêtamérie si nette de ces corps chez nombre de Squales à la disposition si différente qui se manifeste déja dans Centrina et qui arrive à son plus haut degré chez Trygon? Celle question se résout par l'étude du système artériel, laquelle montre que la disposition et le nombre des corps supraré- naux sont étroitement liés à la disposition et au nombre des artères segmentaires. Là où ces dernières sont mélamériques les corps le sont aussi, là où les artères sont moins nombreuses que les segments vertébraux et distribuées avec une certaine irrégularité, les corps suprarénaux le sont également. Etudions d’abord les rapports des corps suprarénaux avec le système artériel dans un certain nombre d'espèces. RAPPORTS DES CORPS SUPRARENAUX AVEC LE SYSTÈME ARTÉRIEL. Parmi les Squales, l’Acanthias rulçaris présente une disposition très régulière. En effet, à part le corps axillaire et trois pelits corps 30 ED, GRYNFELIT. irréguliers en arrière de celui-ci, tous les autres corps suprarénaux montrentune métamérie remarquablement nette jusqu'à la fin de la ----- AL, PACE ti 7] @ D'OTIL e 42 UE SUP AI : ‘ --TCS a - ANES 27e TT----.-- @ Mere --bm ll = à à d 71 h À dl 11 - ! Fi. 4. — Acanthias vulgaris (schéma). cavité abdominale. C'’est-à- dire que seuls les corps répon- dant aux sepl premiers seg- ments vertébraux (fig. 4 du texte) à partir de l'artère axillaire sont irréguliers. L'in- jection montre qu'immédiate- ment en arrière de l’axillaire les artères qui naissent sur l'aorte ne sont pas régulière- ment métamériques, tandis qu'à partir de la 6° ou de la 7° vertèbre l'aorte émet régu- lièrement une paire d’artères segmentaires ou intercostales jusqu’à la terminaison de la cavité générale. Il y a, à partir du point considéré environ 29 paires d’artères segmentaires. On remarquera que ces artères ne sont pas toutes égales en calibre et en impor- tance. Elles naissent régu- lièrement par paire à peu près au milieu du corps de la -vertèbre, mais les deux artères d’une paire ne sont pas toujours d’égal volume. L'une peut être beaucoup plus grosse que l’autre et les gros troncs succèdent ainsi aux Partie antérieure de l'aorte avec ses branches. — ao., aorte ; a.ax., artère axillaire ; d.d., branche dorsale ; b.m., branche musculaire ; b.v., branche ventrale d’une artère intercostale ; c.ax., Corps axillaire ; c.s., corps suprarénal; r.c.s., rameau pour le corps suprarénal; r.g., rameau pour les glomérules du rein; r.v., rameau vertébral. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 31 troncs grêles sans aucune régularité, soit qu'on les envisage par paire et bilatéralement, soit qu'on les considère d’un seul côté. Néanmoins, s’il n'y a pas une régularité absolue dans la succession de ces branches, on ne trouve jamais une longueur de plus de trois segments pourvue seulement d’artères grêles. Cela s'explique aisément de la manière suivante: les différences de calibre entre ces artères qui sont toutes segmentaires et par suite homodynames tiennent simplement à leur rôle respectif. En effet, les grosses artères fournissent toutes les branches habituelles des intercos- tales telles que nous ont appris à les connaître les travaux de HyrTL|58, p. 29], de PARKER [86, p.701 ] et de P. Mayer [88, p.314] tandis que les artères grêles ne fournissent qu’une partie de ces rameaux. Les grosses artères, à peu près au niveau de leur émergence, fournissent d’abord un petit rameau délicat pour les corps vertébraux (7. ©., fig. 4), qui pour plus de netteté n’a été représenté qu'une fois, puis un second rameau plus volumineux (7. €. s.) destiné au corps suprarénal correspondant. Après avoir émis ces deux collatérales, le tronc de l’intercostale arrivé à une distance variable de la ligne médiane se bifurque en deux branches une dorsale (b. d.) et une branche ventrale (b. &.). Ces deux branches nourrissent les muscles du segment auquelelles appartiennent et aussi une grande partie de ceux des segments suivants qui ne sont irrigués que par des artères grêles. Les artères grèles donnent un petit rameau vertébral comme les précédentes, puis elles traversent toujours un corps suprarénal dont elles fournissent les vaisseaux et se continuent au delà de ce dernier par un rameau délié qui va fournir aux glomérules du rein (7. g.). Dans toute la région où le système artériel présente cette métamérie régulière, les corps suprarénaux sont eux aussi rigoureusement mélamériques : ils sont situés sur le trajet même des artères grèles et traversés par elles ou bien sur la collatérale qui leur est propre. Comme cette dernière est généralement courte, ils sont plus ou moins étroitement accolés au tronc de l’intercostale dont il est assez difficile de les séparer par la vue lorsqu'on n’a pas fait l'injection histologique préalable qui délimite chaque territoire vasculaire particulier. En avant de celte région, c’est-à-dire dans la partie correspon- dante aux cinq ou six premières vertèbres après l’axillaire, la 32 ED. GRYNFELTT. métamérie des vaisseaux artériels n’est plus aussi nette et plusieurs intercostales manquent. Cela tient sans doule au voisinage des artères axillaires volumineuses, qui fournissent dans cette région des branches musculaires importantes remplissant iei le rôle des branches analogues des artères intercostales, devenues ici inutiles par suite de cette suppléance. Les corps suprarénaux antérieurs y compris l’axillaire, inégaux de grandeur, de forme et de position sont placés sur des artères longitudinales qui relient entre elles les quelques intercostales persistantes d’un même côté. Il en résulte des rapprochements de corps appartenant typiquement à des segments différents, mais qüi se sont fusionnés en une masse dans laquelle il est impossihle de distinguer les segments primitifs. Nous verrons du reste ailleurs cette fusion de différents corps suprarénaux en une seule masse irrégulière se faire pour ainsi dire sous nos yeux avec tous ses modes et loutes ses phases de transition. Ainsi dans le genre Scyllium, sur une longueur un peu plus grande que chez l'Acanthias, les corps suprarénaux antérieurs y compris l’axillaire sont assez irréguliers. Cette irrégularité peut se retrouver avec de nombreuses variations individuelles du reste, sur toute l'étendue des dix premiers segments à partir de l’axillaire. Dans toute celte zone antérieure on constate à l’aide des injections la disposilion suivante des intercostales : la portion périphérique de ces artères existe pour la plupart (p. p. fig. 5 du texte) mais dans un certain nombre d’entre elles leur segment interne, ou si l’on préfère leur origine aortique a avorté. Dans ce cas, une artère intercostale complète et typique émet une branche longitudinale parallèle à l'aorte qui vient s'anastomoser avec le segment périphérique de l'artère intercostale suivante manquant de bout central, et se continue avec lui. Il en résulte que deux artères segmentaires consécutives du même côté ont un tronc d’origine unique, ou qu'une intercostale type se branche en baïonnette pour fournir le rameau du métamère voisin. Cette sorte de suppléance des rameaux d'origine des artères segmentaires peut s’élendre à plusieurs segments conséculifs et on peut voir dans le schéma n°5 un tronc à trois branches. Dans ces conditions les corps suprarénaux, qui siègent toujours à l'intersection de la partie périphérique et de la partie centrale de l'intercostale, se trouvent naturellement au point d'arrivée de ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 33 Fanastomose longitudinale qui vient suppléer la partie interne d’une intercostale manquante. Et comme ces troncs anastomotiques ont une tendance marquée à se réduire en longueur, il arrive fréquemment que deux corps suprarénaux Voisins rappro- chés l’un de l’autre finissent par se fusionner, ainsi que l'a déjà vu CHEVREL [89, p. 22]. On trouve tous les intermé- diaires entre la simple juxta- position et la fusion complète. Cette fusion est portée à un plus haut degré dans la partie qui suit immédiatement l’ar- tère axillaire. À ce niveau il existe chez Scyllium une anastomose déjà vue par la plupart des auteurs entre l’axillaire et la première in- tercostale. Le long de cette anastomose se trouve une masse de substance supraré- nale (corps axillaire), répon- dant très probablement à un nombre de corps suprarénaux égal à celui des segments compris entre l'artère axil- laire et la première artère intercostale. Cette dernière peut varier de position, et être placée plus ou moins loin de l’artère axillaire, d’où une longueur variable de la E 4 TETE ) D ere > ù ÿ al mer D cs LU — Ê be, Sa 4 (NT P Re [ (le ar “et a Sr Co PE Er EI ae ÉD UE CPR : n -b.d” CAC bo bd FiG. 5. — Scyllium canicula (schéma). Partie antérieure de l'aorte avec ses branches, — ào., aorte; a.ax., artère axillaire; b.d., branche dorsale ; b.d’., branche dorsale passant en arrière du corps axillaire ; b.v., branche ventrale ; c.aæ., corps axillaire ; c.s., corps suprarénal; p.p., partie périphérique des premières intercostales. 3 34 ED. GRYNFELTT. masse suprarénale située sur l’anastomose. On comprend ainsi comment le corps axillaire peut dans une même espèce répondre à un nombre variable de suprarénaux. On rencontre aussi chez Scyllium une disposition du système artériel sur laquelle il faut insister, parce qu'on la retrouvera très développée dans le groupe des Raïes. C’est le fait que l'artère inter- costale ou segmentaire peut se dédoubler sur toute sa longueur, c'est-à-dire jusqu’à son origine sur l'aorte, en ses deux branches principales, branche ventrale et branche dorsale. Le corps supra- rénal est toujours situé sur la branche ventrale. Il peut arriver que l’une de ces deux branches existe seule pour un segment. C’est le cas qui s’est produit en b d’ dans la fig. 5 du texte, où l’on voit le rameau dorsal d’une intercostale, situé au niveau de la seconde vertèbre à partir de l’axillaire, passer en arrière de la masse supraré- nale correspondante, sans contracter avec elle aucune anastomose. Des injections faites chez Galeus canis, Mustelus lævis et Squatina angelus montrent que les choses sont fondamentalement les mêmes dans ces trois espèces et que les corps sont régulièrement segmentaires comme les artères elles-mêmes, à partir de la 5° ou 6° vertébre en arrière de l’axillaire. Il peut se produire dans la région postérieure quelque fusion de deux corps successifs, qui prennent ainsi la forme d’un sablier en se joignant par une partie amincie, mais cela n’altère pas la disposition générale qui reste au fond la même que dans les genres ci-dessus décrits. Parmi les Raies, la disposition des corps suprarénaux est beaucoup moins régulièrement segmentaire que chez les Squales. Cet arran- gement est d’ailleurs en rapport avec celui des vaisseaux sanguins. Chez Torpedo marmorta, la fig. 6 du texte montre que les inter- costales sont assez irrégulièérement distribuées. Les unes sont constiluées comme les intercostales typiques, c’est-à-dire présentent un tronc commun qui se divise en une branche dorsale (b.4.) et une branche ventrale (b.v.) sur le trajet de laquelle se trouve un corps suprarénal. D'autres, sont réduites simplement à leur branche dorsale qui n’a rien à faire avec l'irrigation du suprarénal. Si l'on ajoute à cette distribution particulière le fait qu’une artère segmentaire peut manquer dans deux métamères consécutifs, ou bien que l'artère du corps suprarénal peut faire défaut au niveau d’un segment muni seulement d’un rameau dorsal, on comprend aisément que les corps ne soient pas rigoureusement métamériques ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 39 et qu'ils ne soient pas placés non plus à Ja même hauteur à droite et à gauche, puisque assez fréquemment, les artères segmentaires si > à\ S LE # Nù Fr ’ S Cc.ar es EX =) u Bi DOEe a bd-y$-— Q-:----- cs (10) À | n Là Ê bo. 4 1 d L E L.4 br f A Vale GAL TR Fi. G. — Torpedo marmorata (schéma). Partie antérieure de l'aorte avec ses branches. — @.0., aorte ; a.ax., artère axillaire ; b.d.. branche dorsale ; b.v., branche ventrale ; c.aæ., corps axillaire ; c.s., corps suprarénal, 36 ED. GRYNFELIT. ne naissent pas par paires au même niveau, mais sont au contraire impaires et asymétriques. Des fusions peuvent aussi exister entre des corps voisins : elles sont tout particulièrement développées dans la partie antérieure de la cavité abdominale, notamment dans le genre Raja. Cette étude montre que les corps suprarénaux sont intimement liés aux vaisseaux, et que leur nombre dépend du nombre des artères intercostales de l'individu ou plus exactement des branches ventrales de ces dernières. Là où ces artères sont rigoureusement métamériques et en même nombre que les segments vertébraux, les corps sont eux aussi rigoureusement métamériques et au nombre d'une paire pour chaque vertèbre. Là au contraire où les artères segmentaires disparaissent, les corps manquent de même et leur nombre total est assez inférieur à celui des segments, si cette dispa- rilion des artères segmentaires se fait sur une grande étendue. Aïnsi chez Torpedo, où il existe en moyenne 24 segments vertébraux dans la cavité abdominale, il n’y a, en plus de l’axillaire, que 12 à 14 corps suprarénaux placés sur autant d’artères segmentaires ou mieux de branches ventrales de celles-ci. Certaines artères segmen- taires étant représentées seulement par leur branche dorsale, laquelle ne peut porter de corps suprarénal, le nombre total des artères segmentaires dépasse le nombre de ces corps. L'absence de certaines artères intercostales paraît être sous la dépendance du développement exagéré des vaisseaux homodynames voisins, et liée à ce fait que les vaisseaux plus développés confisquent à leur profit des territoires vasculaires qui primitivement ne dépendaient pas d'eux. Ainsi lorsqu'on considère l'axillaire, qui est une simple branche intercostale développée au delà des dimensions ordinaires, à cause de la présence de la nageoiïre pecto- rale qu'elle irrigue, on voit que cette artère fournit des rameaux aux muscles des deux ou trois premiers segments situés en arrière d'elle, qui devraient typiquement être vascularisées par les artères segmentaires correspondantes. Il est problable qu’à un moment donné du développement les réseaux capillaires des muscles de ces segments se sont mis en communication avec l'artère axillaire. Celle-ci devenant de plus en plus volumineuse a fourni à ces réseaux plus de sang que celui qui leur était apporté par leurs propres branches d’origine, et alors ces dernières se sont atrophiées peu à peu et ont cédé leur rôle nourricier à leur puissante voisine. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES, 3 17 | Cette conception du développement de certains territoires vascu- laires et du transfert de certains réseaux capillaires d’un tronc à un autre est appuyée par nombre de faits en embryologie. On peut voir en effet certaines branches d’un réseau vasculaire primitivement très régulier et formé de vaisseaux d’égal volume prendre une importance plus grande et devenir les troncs principaux d’un arbre vasculaire, différencié ainsi par simple accroissement local, au sein du réseau primitif. Telles sont les artères vitellines de l'embryon du Poulet, et il est facile de se rendre compte en consultant les belles illustrations de l'aire vasculaire données par MATHIAS Duvaz [89, PI. viet va] que, dans ce cas, c’est la direction du courant sanguin qui détermine la formation des rameaux princi- paux au sein de ce réseau primitivement si uniforme et crée ainsi, à la place d’un lacis à mailles toutes égales, des voies de distri- bution du sang particulières, ayant chacune un territoire propre. Des transitions permettant de saisir la transformation d’un réseau primitif en un vaisseau simple ont été données aussi par M. ViALLETON [92, p. 15]. En ce qui concerne les vaisseaux dont nous nous occupons, il faut remarquer que, à côté du développement exagéré d’une artère segmentaire, la présence de branches anasto- motiques longitudinales bien développées intervient comme cause d'atrophie de certaines artères segmentaires. Ces anastomoses puissantes, fournissant directement les réseaux capillaires des organes voisins, les intercostales, qui auraient été typiquement chargées de lesirriguer, ne se développent pas. Inutile d'ajouter que le principe de toutes ces modifications n’est autre que l'excitation fonctionnelle. FORME DES CORPS SUPRARENAUX ET LEURS RAPPORTS AVEC LE SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPATHIQUE La forme des corps suprarénaux est très simple (fig. 1. PI. I). Là où ils sont très régulièrement segmentaires ils consistent en de petits corps'sphériques aplatis, plus souvent ovoïdes avec une extré- mité amincie dirigée en dedans c’est-à-dire du côté où leur arrive l'artère. Souvent lorsque deux corps sont voisins ils tendent à se fusionner et prennent alors l'aspect d'une haltère. Les corps antérieurs pré- sentent à un haut degré la tendance à confluer entre eux et revêtent 38 ED. GRYNFELIT, souvent la forme de cordons allongés qui s'étendent parfois sur une grande longueur. Aïnsi chez Raja inarginata on voit tous les corps antérieurs réunis en un long cordon irrégulier moniliforme qui va depuis l'artère axillaire jusqu’à l'extrémité antérieure du rein, c'est-à-dire sur une longueur de 10 à 12 segments. Le plus antérieur des corps suprarénaux, en général plus volu- mineux que les autres, est très souvent situé sur l'artère axillaire elle-même, du moins il en est ainsi chez toutes les Raïes que j'ai étudiées (Raja, Torpedo, Trygon, Myliobatis). Dans ce cas, ou bien son grand axe est placé parallélement à celui de l'artère qu'il embrasse sur une certaine longueur (Torpedo), ou bien il est …b.e.s NORTON TROT ON POELE FR œ Fi. 7. — Corps suprarénaux antérieurs (schéma). — A, Myliobatis aquila ; B, Trygon pastinaca; ao., aorte; a.ax., artère axillaire; b.e.s., bord externe du sinus ; c.aæ., corps axillaire ; c.s., Corps suprarénal. parallèle à la ligne des suprarénaux et alors son extrémité antérieure est seule en rapport avec l'artère axillaire qu'elle croise (Raja), qu'elle embrasse à la façon d’un anneau /Trygon), ou autour de laquelle elle forme un prolongement interne semblable à la tête d’un marteau (Myliobatis) (voyez fig. 6, 7 et 8 du texte). Parmi les Squales, le corps axillaire n’est en rapport immédiat avec cetle artère que chez Pristiurus melanostomus, où il a une disposition qui rappelle celle des Raïes (fig. 1, D, 19). Dans les autres genres de Squales que j'ai étudiés, Le corps axillaire situé à quelque ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES, 39 distance en arrière de l’artère de même nom se présente sous la forme d’une masse allongée (Scyllium, Mustelus) traversée par une artériole émanée de l’axillaire, ou bien offre l'aspect d’une masse ovoide, plus ou moins lobée, donnant l'impression que l’on a affaire à un certain nombre de corps fusionnés (Squatina, Hexanchus, Zygæna, Car- charias). Lorsque les corps suprarénaux ont la forme de cordons allongés, leur contour est beaucoup moins net que lorsqu'ils sont sphériques, et si on les examine au microscope, on voit qu’il en part des irradiations irrégulières qui se terminent souvent en petites boules ou en grains de substance suprarénale invisible à l'œil nu. La fig. 8 du texte grossie deux fois,montre de ces petits corps suprarénaux acces- soires ; pour les rendre plus visibles, on a dû exagérer un peu leurs dimensions. Cette disposition est très fréquente, surtout parmi les Raies; et elle est importante, parce qu’elle indique que la forme de ces corps est moins bien limitée qu'il semble au premier abord, que les corps ont souvent une tendance à être en quelque sorte diffus, et que loin d’être toujours étroitement liés à la présence d'un ganglion nerveux, ils peuvent en ètre distincts et se rattacher au contraire à la. présence d’autres organes (vais- seaux). Nous verrons en effet, à propos de l'étude histologique, que ces petites irradiations de la substance suprarénale se font autour de vaisseaux capillaires analogues à ceux qui forment le réseau FiG. $. — Raja marginata (schéma). Rapports des corps suprarénaux avec les ganglions sympa- thiques. — «.ax., artère axillaire ; C.ax., corps axillaire ; c.s., Corps su- prarénal ; g., ganglion. propre de ces organes, mais qui, au lieu de rester limités dans une forme déterminée et régulière, envoient de petites fusées aber- Oo ? rantes que l’on retrouve constamment dans les genres Trygon, 40 ED. GRYNFELIT. Raja, Myliobatis. Il va sans dire que dans de tels cas, les corps suprarénaux qui émettent ces sortes de prolongements ne sont pas nettement individualisés par une capsule propre, mais ils sont plutôt diffus dans le tissu conjonctif autour de l'artère principale qui leur sert d’axe. On trouvera du reste à propos de la description histologique des détails plus précis sur la disposition de ces capillaires, détails qui feront bien comprendre toutes les variations de forme que peuvent présenter les corps suprarénaux. Quant aux rapports de ces corps avec les ganglions sympathiques ils ont été bien étudiés par CHEVREL [ 89, p. 29]. Il y a constamment un gros ganglion en rapport avec les suprarëénaux antérieurs et le corps axillaire est en réalité formé par l’union intime de ces supra- rénaux et du ganglion, disposition indiquée sur nos schémas où la substance suprarénale est figurée en noir, la substance nerveuse en gris. Aussi a-t-on pu dire avec raison qu'une moitié de l'organe est nerveuse et l’autre suprarénale (Bazrour|78,p.241 ]). Mais CHEVREL [89, p. 30] a fait remarquer que pour les petits corps suivants l'union était moins étroite et que les deux organes étaient simple- ment juxtaposés sans être compris sous une enveloppe commune. C'est là un point très important qui indique bien qu'il n'y a pas une liaison absolue entre les deux substances ganglionnaire et supra- rénale. D'ailleurs, pour le corps Fic. 9. — Hexanchus griseus (sché- axillaire, où l’union entre les deux wa). Corps suprarénaux anté- substances est la plus intime, on ss : . “a voit que sa forme est toujours externe du sinus; C.a4æ., COTps dominée par la disposition des axillaire; c.s., corps suprarénal vaisseaux, comme il est facile de s’en rendre compte en étudiant un certain nombre d'espèces. Dans quelques cas, comme chez Zygaena malleus, le corps axillaire et le gros ganglion adjacent forment une masse bien individualisée, arrondie, lobée, dans laquelle la substance suprarénale semble copier la forme globuleuse du ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 41 ganglion. Il en est encore un peu de même chez Squatina angelus et chez Hexanchus griseus (fig. 9 du texte). Mais dans la plupart des autres cas, le corps suprarénal axillaire s’allonge beaucoup de part et d'autre de la masse ganglionnaire, pliant ainsi sa forme à celle du vaisseau principal qui le traverse. Il en est ainsi chez Scyllium, Mustelus, Galeus, Echinorhinus, Pristiurus. Cette forme est liée à la présence d'un vaisseau longitudinal qui est en quelque sorte l’axe du corps et qui est, soit une anastomose entre l’axillaire et la première intercostale (Scyllium, Mustelus, Raiïes), soit une anastomose entre les premières intercostales n’atteignant pas l’axillaire (Acanthias vulgaris). Comme on le voit, l'influence de la distribution vasculaire se fait sentir jusque sur le premier corps suprarénal qui est pourtant le plus étroitement lié aux ganglions du sympathique. Pour les autres corps, qui ne sont qu’en contact avec ces ganglions, l'influence des vaisseaux est également prédominante. Ils sont ovoides ou sphériques là où leurs capillaires forment un masse globoïde à contours parfaitement réguliers ; ils sont acontraire allongés en radiants là où les capil- laires sont moins nettement agglomérés et plus diffus. Cette indépendance relative des ganglions est parfaitement indiquée par la fig. 8 se rapportant à Raja marginata et dans laquelle on voit que la longue bande continue de substance supraré- nale suit simplement la ligne des ganglions auxquels elle est accolée sans présenter aucun changement de forme en rapport avec la présence d’un ganglion. Pour toutes ces raisons, sans vouloir trancher la question de l'origine embryologique des corps suprarénaux, c’est-à-dire sans nier qu'ils puissent venir d'une ébauche commune avec les ganglions sympathiques, je ferai remarquer que dans leur état définitif, leur forme et aussi leur structure, comme on le verra plus loin par l'histologie, dépendent uniquement de la disposition des vaisseaux sanguins. RAPPORTS DES CORPS SUPRARÉNAUX AVEC LES ORGANES VOISINS ET AVEC LE SYSTÈME VEINEUX On a vu que les corps suprarénaux peuvent se diviser en deux groupes : 1° un groupe antérieur, comprenant les corps axillaires et les quelques corps suivants, que l’on peut voir dès que les 42 ED. GRYNFELTT. veines cardinales et les sinus de Monro sont ouverts ; 2° un groupe postérieur comprenant les corps cachés par le rein. Cette division topographique est aussi bien applicable aux Raies qu'aux Squales, mais l'importance de chaque groupe varie beaucoup suivant les espèces. Chez quelques Raïes on peut même apercevoir les corps jusqu'à l'extrémité postérieure du rein sans déplacer cet organe; mais pour les bien voir, il est préférable de faire une dissection préalable. Parmi les Squales, chez ceux dont le rein se prolonge fort en avant (Æchinorhinus, Hexanchus, Mustelus, (raleus, Acanthias, Centrina), le groupe antérieur est très réduit. Il est au contraire bien plus développé chez les animaux à reins courts comme Scyllium, Pristiurus. Il est très utile, pour bien comprendre les rapports des corps dans ces différentes régions, d'examiner des coupes transversales de l'animal. Sur ces coupes on voit que chez Scyllium, à la partie postérieure (fig. 4, PI. IT), les corps suprarénaux sont complètement enfouis dans la substance du rein dont ils ne sont séparés çà et là que par des espaces vides répondant à des veines ou à des lacunes veineuses. Ces connexions sont les mêmes pour tous les corps du groupe postérieur. Lorsqu'on avance vers la partie antérieure de la cavité abdo- minale et que l’on arrive au point où les corps suprarénaux, simplement tangents au bord interne du rein, sont visibles sans dissection préalable, ils présentent sur les coupes les rapports indiqués par la fig. 3, PI. II. Sur cette figure on voit que les corps sont placés dans une masse de tissu conjonctif comprise entre l'aorte et l'extrémité interne du rein, derrière les veines cardinales avec la paroi postérieure desquelles ils peuvent être en contact. Dans le tissu conjonctif qui les entoure on trouve autour d'eux des lacunes veineuses plus ou moins analogues à celles que nous avons décrites au niveau du rein. Enfin, plus en avant encore, et en particulier au niveau du renflement des sinus de Monro (fig. 2, PI. Il), les corps font une saillie plus ou moins prononcée dans la cavité de ce sinus, à la paroi dorsale desquels ils ne sont parfois reliés que par un pédicule extrêmement mince disposé en forme de méso (Scyllium catulus et Sc. canicula, Mustelus lævis et M. vulgaris, Galeus canis). D’autres fois tout en faisant saillie dans la cavité de la veine, les corps sont largement rattachés à sa paroi postérieure et il n'y a pas de ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 43 méso (Hexanchus griseus, Squatina angelus, Zygæna malleus, Centrina vulpecula). Quels que soient les détails de cette dispo- sition, on voit que les corps antérieurs sont situés, en lotalité ou partiellement, dans la cavité des sinus et baïignent ainsi plus ou moins complètement dans le sang de ces veines. Cetté description s'applique surtout au corps axillaire. Des suprarénaux en nombre variable suivant les différentes espèces présentent d’une façon plus ou moins marquée les mêmes rapports. Cette situation particulière a été décrite pour la première fois par B£rauD [49]; Perrir [96, p. 82] a fait ressortir son importance. Dans le tissu conjonctif qui entoure les corps suprarénaux, on trouve le plus souvent, sur le bord dorsal de la masse suprarénale, des amas lymphoïdes assez développés pour mériter le nom d’or- ganes lymphoiïdes. Il en existe un très net en arrière du corps axillaire de l'Hexanchus griseus. Ces organes répondent -ils aux corps phagocytaires qu'a décrits et figurés SCHNEIDER [97, fig. 1et 2, p. 395], mais qui ont été découverts longtemps avant lui par Frirz Meter |75, p. 44]? C’est fort probable, mais je ne saurais l’affirmer d’une manière absolument certaine, étant donné que des amas lymphoïdes se trouvent en assez grande abondance dans la paroi dorsale de l'abdomen et notamment dans la portion dorsale des reins, où ils sont juxtaposés avec les organes suprarénaux que l’on y trouve. Les rapports différents que présentent les organes suprarénaux suivant les diverses zones de la cavité abdominale, permettent de considérer parmi eux des groupes particuliers qui sont : {° un groupe antérieur, sensu strictiori, comprenant les corps qui font plus ou moins saillie dans la cavité des sinus de Monro ; 2° un groupe moyen pour les corps situës en dedans du bord interne du rein, et qui n’ont que des rapports de contiguité avec les veines cardinales ; 3° un groupe postérieur formé par les corps enfoncés dans la substance propre du rein (GRYNFELTT) [02 4, p. 145]. Le groupe antérieur comprend toujours le corps axillaire et un nombre, plus ou moins grand suivant les espèces, de corps placés immédiatement en arrière de lui. Le groupe moyen varie beaucoup, il peut même être formé d’un nombre inégal de corps dans la moilié droite et dans la moitié gauche d’un individu, lorsque le bord interne d’un rein s’avance plus que l’autre vers la ligne médiane et recouvre de ce côté un nombre plus considérable de corps. Aussi A4 ED. GRYNFELTT. pourrait-on se demander si la création d’un groupe moyen est véritablement bien justifiée. Il faut répondre affirmativement, et cette subdivision mérite d’être maintenue, malgré la variabilité de ses limites, parce qu’elle répond à une disposition tout à fait parti- culière du système veineux dans cette région, comme on va le voir. Il existe, en effet, dans la partie dorsale de la cavité abdominale, un système veineux important, relié aux corps suprarénaux et qui n’est qu'une partie du système porte rénal. Voici quelles sont les dispositions des veines dans cette région. On sait que la veine porte rénale naît de la bifurcation de la veine caudale en avant. Chacune des branches de bifurcation (veine de Jacobson) se porte sur le côté dorsal et externe du rein qu’elle suit sur toute sa longueur, et se prolonge en avant dans la même direction alors que la substance du rein a disparu. Chemin faisant, elle reçoit au niveau de chaque segment une veine intercostale. Comme l’a déjà montré S. JoURDAIN [59, p. 327], la veine de Jacobson n’est pas régulière, mais se rétrécit çà et là et peut même s’interrompre à certains endroits. Ailleurs elle est remplacée par un réseau à larges mailles longitu- dinales irrégulières. Dans la partie postérieure du rein, cette veine est le plus souvent au contact des corps suprarénaux qu'elle enveloppe, en partie au moins, sur leur face dorsale (fig. 4, PI. IT). Puis elle émet du côté ventral une série de capillaires irréguliers qui entourent le corps suprarénal, formant les petites lacunes veineuses que nous avons signalées plus haut, autour de ces derniers. Ces lacunes se continuent dans les capillaires du rein qui débouchent finalement dans la veine rénale impaire (veine interrénale de CHEVREL [89, p. 13]). On verra à propos de l’histologie des corps suprarénaux que leurs vaisseaux capillaires se jettent dans le lacis veineux qui les enveloppe. Dans le groupe moyen, la veine porte rénale envoie au niveau de chaque corps suprarénal un lacis de veines larges, aplaties, communiquant fréquemment entre elles et qui lui forment une enveloppe plus ou moins complète (fig. 5, P1. III.) De cette enveloppe partent des vaisseaux de deux ordres: les uns se jettent directement dans la veine cardinale (ils n’ont pas été représentés dans le dessin), les autres forment des branches veineuses (v.1.) dirigées transversalement, au nombre de deux en moyenne pour chaque corps. Ces veines passant dans le lissu conjonctif de la portion dorsale du corps viennent se jeter dans un vaisseau longitudinal placé sur le côté de l'aorte, qu'il suit sur une ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 45 très grande longueur. Ce vaisseau d'un calibre assez irrégulier, pouvant atteindre par places le tiers de celui de l'aorte, est pair. Il existe sur la plus grande longueur de la cavité abdominale, et se montre tantôt unique, tantôt formé de deux vaisseaux qui s'écartent pour se réunir de nouveau, comme on le voit dans la fig. 5 de la PI. II. On peut l'appeler à cause de ses connexions la veine juxta- aortique. Cette veine n’a pas été mentionnée jusqu'ici par les diffé- rents auteurs. Peut-être faut-il cependant regarder comme la repré- sentant, les vaisseaux placés sur les côtés de l'aorte et que P. MAYER [88, p. 320] a décrits sous le nom de vasa vasorum. Comme les tuniques aortiques sont peu épaisses, même chez les animaux adultes, et que les vaisseaux figurés par MAYER ont toujours un calibre assez fort, il semble bien plus naturel de considérer ces derniers comme répondant à nos veines juxta-aortiques, que comme des vasa vasorum, dont l’utilité n’est pas manifeste, étant donnée la faible épaisseur des parois vasculaires, et dont le développement serait en tout cas hors de proportion avec celui du vaisseau qu'ils auraient à nourrir (1). Les veines juxta-aortiques reçoivent ainsi une partie du sang veineux amené par la veine porte rénale et suprarénale. Mais ce ne sont pas là leurs seules voies d'apport, car elles communiquent (1) Des vaisseaux correspondant aux veines juxta-aortiques ont été signalés chez quelques Téléostéens. RAFFAELE [90, p. 326] a décrit dans les phases post-embryon- naires du développement d’Afherina deux veines qui courent parallèlement à l'aorte, le long de la queue et dans la cavité abdominale, Sans se prononcer sur la valeur morphologique de ces vaisseaux, RAFFAELE se contente d'indiquer leur présence, et il les compare aux vaisseaux longitudinaux décrits par P. MAYER chez les Sélaciens comme vasa vasorum aortiques. Ces veines répondent évidemment à nos veines juxta- aortiques et leur présence constatée chez les Téléostéens par RAFFAELE permet d'accorder à ces vaisseaux une certaine importance en montrant qu'ils sont assez répandus dans la classe des poissons. Lorsque j'ai fait la description ci-dessus des veines juxta-aortiques, le travail de RAFFAELE m'était inconnu, son titre ne faisant prévoir aucun fait se rapportant à mes recherches. J’ai été heureux d'y trouver une confirmation de ma manière de voir sur la nature de ces vaisseaux, c’est-à-dire de l’opinion que je soutiens, qu'il s’agit là de veines et non pas de vasa vasorum, Pendant l'impression de ce travail des données nouvelles ont paru qui ajoutent une certaine importance aux veines juxta-aortiques, en montrant qu’elles sont encore peut- être plus répandues qu’on ne pourrait le supposer d’après la note ci-dessus. En effet, M. VIALLETON[02b , p. 448] pense que les vaso-lymphes sous-vertébraux de JOURDAIN leur correspondent exactement. Comme ces vaisseaux ont été décrits chez Gadus morrhua, chez le Congre et chez l'Anguille, on voit que la présence des veines juxta-aortiques est assez généralisée chez les Poissons. 46 ED. GRYNFELTT. aussi avec un réseau veineux irrégulier,assez développé,placé dans le tissu conjonctif de la paroi abdominale postérieure et qui présente des caractères remarquables au point de vue de l’anatomie générale. En effet, les vaisseaux qui constituent ce réseauoffrent à un haut degré le caractère lacunaire que l’on a signalé depuis bien longtemps dans les veines des Elasmobranches. Ils n’ont d'autre paroi propre que leur endothélium et leur forme irrégulière, noueuse, rappelle celle des capillaires lymphatiques. M. VIALLETON [02 &, p. 249] qui a mis en relief cette disposition, suggère l’hypothèse que ces vais- seaux remplissent à la fois la fonction de veines et de lymphatiques et servent de voies émissaires pour les leucocytes nés dans les nombreux amas lymphoïdes de la paroi abdominale postérieure. Quoi qu'il en soit, les veines juxta-aortiques forment un petit système veineux particulier qui aboutit finalement dans les sinus de Monro, après avoir échangé, au voisinage de leur abouchement dans ces derniers, de nombreuses anastomoses avec les veines très développées de l’æsophage. Les corps du groupe antérieur, plongés dans la cavité du sinus (fig. 2, PL. IT), manquent de capsule veineuse périphérique décrite ci-dessus autour des corps du groupe moyen, et leurs vaisseaux s'ouvrent directement dans la cavité du sinus. Mais les veines juxta- aortiques et les veinules des parois dorsales qu'elles reçoivent existent encore à leur niveau, et lorsque les corps de cette région ne font qu'une saillie modérée dans le sinus et sont rattachés à sa paroi dorsale par une large bande, on trouve dans l'épaisseur de celle-ci les mêmes réseaux veineux qui existent pour tous les autres Corps. Cette disposition, sur laquelle j'ai déjà attiré l'attention dans une note antérieure (GRYNFELTT [02 &, p.145 |), mérite d’être examinée de plus près. On voit que les corps suprarénaux sont en somme entou- rés par des veines qui tirent directement leur origine de la veine porte rénale, ou bien du prolongement de cette dernière en avant du rein. Est-ce à dire pour cela que ces corps soient placés sur le trajet de la circulation porte rénale ? Evidemment non. Les veines de ce système ne pénètrent pas dans leur intérieur et ne leur appor- tent aucune goutte de sang. Eux-mêmes sont irrigués par une artère propre leur fournissant des capillaires qui se déversent dans les veines du système porte rénal, de sorte que le sang qui a baigné les corps suprarénaux est finalement ramené dans la circulation ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 47 générale, soit directement par les veines cardinales, soit indirec- tement par ces dernières en passant par le petit système des veines juxta-aortiques. Il n’y a donc pas de circulation porte suprarénale réelle. JourDAIN [59, p. 327] a cependant admis son existence chez les Elasmobranches, mais il a fait à ce sujet une confusion qu'il importe d’éclaircir. D’après sa description etses figures, on peut voir que ce qu’il appelle « corps surrénal > répond vraisemblablement à l’interrénal seul et par conséquent que ces corps n'ont rien à faire avec ceux qne nous étudions maintenant. En effet, les organes représentés par Jourpa chez la Raïe [fig. 1 et 2, PI. VI] sont situées à la face dorsale des reins, à la partie postérieure de ces derniers. Ils présentent bien l'aspect, les dimensions et les rapports de l'interrénal, et comme JourpaIN ne figure ni le corps axillaire ni les suivants, il est clair qu'il a considéré comme représentant la capsule surrénale, l'interrénal seul. On verra à propos de ce dernier que l'étude du système vasculaire fait rejeter également l'existence d'une circulation porte à son niveau. Par conséquent, l'hypothèse formulée par JourDpaIN, de la présence d’un système porte surrénal, n’est justifiée pour aucun des deux éléments (suprarénaux et interrénal) qui ont été considérés comme repré- sentant chez les Elasmobranches, les capsules surrénales des autres Vertébrés. APPENDICE BIBLIOGRAPHIQUE Les données anatomiques que nous venons d’exposer ci-dessus n'étaient pas toutes acquises par les travaux antérieurs. Un certain nombre des connexions mises en lumière plus haut étaient connues, mais les auteurs ne s'étaient guère préoccupés d'approfondir les questions que ces connexions soulevaient et notamment de déter- miner d’une manière précise le nombre des corps suprarénaux et de s'assurer de leur métamérie. Nous ne remonterons pas pour l’his- torique jusqu'aux premiers mémoires dans lesquels on peut trouver une mention des corps suprarénaux. CHEVREL [89] a fait ce travail avec beaucoup de soin et il a montré la part qui revient aux divers auteurs dans leur découverte. Il a eu le mérite de mettre de l’ordre dans cette question d'autant plus embrouillée que l’interrénal et le suprarénal des Elasmobranches ayant été regardés l'un et l’autre tantôt isolement, tantôt réunis, comme représentant la capsule 48 ED. GRYNFELITT. surrénale des Vertébrés supérieurs, il en résulte qu'il est fort difficile de se rendre compte à la lecture de certains auteurs duquel de ces organes ils veulent parler. Il suffira donc de résumer ici brièvement les données de CHEVREL pour la période préhistologique, c’est-à-dire celle qui s'étend depuis la découverte des corps suprarénaux (DuvERNOY) jusqu'au premier mémoire de Leypi@ [51]. On sait que DuverNoY, en préparant les matériaux pour les Leçons d’Anatomie comparée de Cuvier, découvrit (1809) sur l'artère axil- laire de Chimæra monstrosa une masse ovoïde entourant ce vais- seau sur une certaine étendue et formant comme un épaississement .de sa paroi, Il considéra ce renflement comme un organe pulsatile et lui donna le nom de cœur accessoire |[37, p.37]: c'est en réalité le corps axillaire. D'utres auteurs remarquèrent ce que l'on a appelé depuis le corps axillaire chez les Squales, mais comme il n’a pas la même situation que chez Chimæra, ils ne le rapprochèrent pas de l'organe déerit par DuverNoy, et lui donnèrent une autre signification. GiLTAY [35], REMAK [37], Srannius [49], BERAUD [49], Swan [35] et Srannius [54] considérèrent ces corps axillaires comme un ganglion sympathique. LeypiG [51, 52,] découvrit la nature de ces corps, c’est-à-dire les distingua à la fois du système vasculaire et du système sympathique. Il montra pour la première fois qu'il existait une série de corps comparables à ce dernier en arrière du prétendu cœur axillaire | 52, p. 15] et fit voir en même temps leurs connexions avec les vaisseaux et les ganglions nerveux. Il indiqua que ces corps étaient placés sur des vaisseaux sanguins émanés de l’aorte et il fit remarquer que chez certains Squales, comme Scyllium canicula le < cœur axillaire > n’est pas situé immédiatement sur l'artère de ce nom, mais seulement à côté d'elle. D’autre part, il fit ressortir les rapports étroits de ces organes avec les ganglions sympathiques, qui ont pris plus tard une si grande importance à la suite des découvertes de BaLrour. Toutefois LEYDIG ne s’est pas préoccupé de compter exacte- ment le nombre des corps suprarénaux dans les espèces qu'il a étu- diées (Torpedo Narke, Raja batis, Scyllium canicula, Scymnus lichia, Mustelus vulgaris, Squatina angelus). Mais Leypia doit bien être considéré comme le véritable auteur de la découverte des corps suprarénaux en arrière du cœur axillaire, puisqu'il a su distinguer ces corps et reconnaître leur individualité anatomique et histologique. Pourtant il est fort possible que d’autres les aient vus avant lui. Ainsi ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 49 que le fait observer CHEVREL | 89, p. 5-9], il est probable que REMAK, BERAUD, STANNIUS les ont aperçus, mais ils les ont confondus avec des ganglions nerveux, comme ils l'avaient fait pour le cœur axillaire. SEMPER [75] a insisté sur la disposition segmentaire des corps suprarénaux. L'irrégularité de leur arrangement dans la zone anté- rieure de la cavité abdominale ne lui a cependant pas échappé, mais il la rapporte soit à l'absence pure et simple de quelques-uns d’entre eux, soit à des fusions plus ou moins étendues entre des corps consécutifs (p. 228). Il n'a pas étudié d’une manière approfondie la distribution des corps dans la région postérieure de l'abdomen. Il admet en effet que ces organes, arrivés au niveau des lobes posté- rieurs des reins, se transforment en un corps blanc jaunâtre situé entre ceux-ci, contre la « veine caudale impaire » (p.228) et qui n’est autre chose que l'interrénal. SEMPER, en le faisant se continuer avec les corps suprarénaux, commet une erreur peut-être inspirée par les idées antérieures de LEypiG, qui dans son mémoire de 1853 rattache à un même organe (la capsule surrénale) ces deux sortes de corps. Cette prétendue continuité n'existe pas, et l'erreur commise par SEMPER est d'autant plus difficile à expliquer que cet auteur à employé pour rechercher les corps suprarénaux la réaction du bichromate de potasse qui permet de les distinguer si nettement. Ce procédé aurait dû lui faire voir que, là même où existe l’inter- rénal, on trouve sur ses côtés des corps suprarénaux parfaitement nets, indépendants les uns des autres et du corps interrénal lui- même. Inutile de dire après ces détails que SEMPER n’a pas relevé le nombre exact des corps suprarénaux dans les espèces qu'il a exa- minées. Il a représenté assez fidèlement leurs rapports avec les vaisseaux sanguins chez Scyllium canicula. BaLroUR [78], dans sa célèbre « Monographie sur le développe- ment des Elasmobranches >, ne s’est pas occupé du nombre des corps suprarénaux ni de leurs connexions avec les vaisseaux. Mais c'est là (p.245),qu'il asignalé pour la première fois la relation embryo- logique qui existe entre les corps suprarénaux et les ébauches des ganglions sympathiques. Cette donnée a une trop grande importance pour ne pas être mentionnée ici, bien qu’elle ne se rapporte direc- tement au sujet de ce chapitre. CHEVREL [89], dans de magnifiques figures, représente avec beaucoup d’exactitude les rapporls vasculaires et nerveux d'un 4 50 ED. GRYNFEL1T. certain nombre de corps suprarénaux chez Scyllium. Il indique (p. 23) que ceux-ci sont traversés par une artère issue directement de l’aorte, et que les plus antérieurs font saïllie dans la cavité du sinus de Monro, dans le sang duquel ils sont baiïgnés, ainsi que l'avait fait déjà remarquer BÉraup [49]. Il décrit exactement le méso surbaissé qui rattache chez Scyllium le corps axillaire à la paroi postérieure du sinus, et montre que ce corps est placé sur une branche anastomotique étendue entre l’axillaire et la première intercostale. Toutefois, chez les Raïes, il a méconnu les relations identiques qui existent entre les corps suprarénaux et les vaisseaux ; et trompé par l’absence de quelques artères intercostales, il a pu croire que les corps situés au niveau où ces artères manquaient ne présentaient pas les rapports habituels (p. 57). On a vu plus haut qu'il n’en était rien. Au point de vue des rapports avec le système nerveux, il résulte des recherches de CHEVREL | 89, p. 36] que l'union des corps supra- rénaux avec le sympathique n’est peut-être pas aussi étroite que l'avaient pensé Leyp1@ [52, p.16] et Bazrour | 78, p. 241]. Il a trouvé des corps suprarénaux dépourvus de ganglions ; il a rencontré aussi des ganglions qui n'étaient pas accompagnés de substance supra- rénale [fig. 1, PI. I]. Quant au nombre des corps suprarénaux, CHEVREL | 89, p. 54et57| a été moins heureux, et il n’a pas pu en fournir un compte exact. Cela tient sans doute au procédé qu’il a employé pour leur recherche et qui consistait dans une imprégnation rapide de la cavité abdominale par une solution d'acide osmique à 1 pour 100, qui a la propriété de teindre énergiquement en noir les nerfs et les corps suprarénaux. On sait que l'acide osmique est peu pénétrant. Aussi n’atteignit-il pas les corps suprarénaux de la région postérieure enfouis dans l'épaisseur du rein et la plupart de ceux-ci ont échappé à l’auteur qui en signale seulement de 14 à 20 paires chez les Squales, alors qu'il y en a bien davantage, ainsi qu’on peut s’en rendre compte par le tableau dressé plus haut. Pour les Raies, où les corps posté- rieurs sont moins profondément enfouis daus la substance rénale, ce procédé a permis à CHEVREL d'arriver à une approximation plus exacte du nombre des corps suprarëénaux, cependant quelques-uns de ceux-ci lui ont encore échappé, ce sont les plus petits, à peine visibles à l'œil nu. Les recherches de PEerTTiT [96, p. 82] confirment les résultats de ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 51 CHEVREL et donnent des points de repaire précis pour la dissection de ces organes. Cet auteur a eu le mérite d’insister notamment sur l'importance des rapports des corps suprarénaux avec les gros vaisseaux artériels et veineux de la cavité abdominale. Parmi les Squales il a étudié Scyllium canicula et Scyllium Stellare. Chez Torpedo Narke et T. nobiliana, contrairement à l'opinion de CHEVREL, il fait remarquer avec raison que les corps postérieurs à l’axillaire sont aussi situés sur le trajet d’une artère intercostale. Il ne compte que 18 à 20 paires de corps chez les Squales et 4 à 5 paires chez les Raies. SWALE VINCENT [97?, p. 52] n’ajoute pas grand’chose aux notions anatomiques antérieurement acquises. Il représente les rapports des corps suprarénaux avec les vaisseaux, et, pour ce qui concerne leurs relations avec les ganglions du sympathique, il se range à l'opinion de CHEVREL en donnant à l'intimité des connexions qu’on avait voulu antérieurement établir entre ces deux ordres de corps, une importance moindre qu’on ne l’avait fait depuis Bazrour. Il s'exprime fort catégoriquement à ce sujet. « On ne peut pas dire, écrit-il page 53, qu'ils constituent une partie intégrante du système nerveux sympathique, quelles que soient du reste leurs relations génétiques avec lui. > I1 déclare qu'on a donné trop d'importance aux relations qui existent entre les corps suprarénaux et le sympa- thique et que « leurs rapports avec le système vasculaire sont proba- blement beaucoup plus importants » (97 a, p. 41 et 97°, p. 68). On a vu plus haut que mes recherches faites par la méthode des injections m'ont conduit à des résultats très nets dans ce sens, et qui confirment celle prévision. SWALE VINCENT tout en parlant de la mêétamérie des corps suprarénaux, n'a pas cherché à préciser leur nombre et ne s'est pas rendu compte de leur présence absolument constante jusqu’à l'extrémité postérieure de la cavité abdominale. Aïnsi chez Scyllium canicula «il n’a pu, dit-l, [97, p. 53], les découvrir bien loin en arrière de l'extrémité antérieure de l’interrénal » alors qu’il en existe certainement plusieurs paires dans cette région. Je dois ajouter que dans un autre mémoire SWALE VINCENT [97°, p. 61] signare la préssnce des corps suprarénaux sur toute la longueur de la cavité abdominale. Mais il s’agit là d’une simple phrase ne com- portant nullement l’idée d’un dénombrement exact des corps. On peut donc penser que l’auteur s’est peu préoccupé de cette question et qu'il n’a pas tenu à y apporter une précision bien grande. 52 ED. GRYNFELIT. Koux [99] a surtout étudié l’histologie de ces organes. Il n’a pas porté son attention sur les questions anatomiques soulevées dans le présent chapitre, et ne donne aucun détail nouveau sur le nombre exact et sur la métamérie des corps qui nous occupent. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES, 3 CHAPITRE II. HISTOLOGIE DES CORPS SUPRARÉNAUX. Technique.— Pour l'étude de corps dont la structure est aussi délicate que celle des organes suprarénaux, il importe avant tout de s'adresser à un matériel absolument frais et en parfait état de conservation au moment où il est mis dans les réactifs. J'ai pu réaliser ce desideratum dans l'immense majorité des cas, soit en utilisant des animaux vivants qui m'étaient fournis par la Station maritime de Cette, soit en allant moi-même à l’arrivée des bateaux recueillir le matériel aussitôt que possible. Les animaux que j'ai pu obtenir ainsi pouvaient être considérés comme encore vivants, et je n'ai utilisé pour l'étude histologique que ceux dont le cœur battait encore. De plus, pour les genres Scyllium, Squatina, Centrina, Torpedo, Raja les organes ont toujours été recueillis sur des animaux vivants qui furent tués à cet effet. Il importe aussi d'employer des fixateurs énergiques. Il n’en manque pas à l'heure actuelle, mais chacun d’eux répond plus spécialement à certaines indications et on ne saurait sans incon- vénients s’en tenir à un seul. Il faut constamment employer un grand nombre de ces réactifs et examiner comparativement les pièces ainsi fixées. Parmi les différents fixateurs, le liquide de Zenker (bichro- mate de potasse? gr.s ; bichlorure de mercure 5 gr.; sulfate de soude 1gr.; acide acétique glacial 5 gr.; eau 100 gr.) donne de bons résultats. Il est assez pénétrant, il fixe bien et il conserve dans une certaine mesure la réaction chromaffine, caractéristique des corps suprarénaux. Aussi ai-je toujours fixé par ce procédé quelques-uns des corps dans chaque individu examiné. Les corps détachés et plongés en entier dans le liquide (ils sont assez petits pour n'avoir pas besoin d'être sectionnés) y séjournaient de 12 à 15 heures. Après un lavage soigneux à l’eau courante, ils étaient débarrassés de l'excès de sublimé par des lavages à l'alcool iodé, inclus dans la paraffine après imbibition par le chloroforme, débités en coupes minces sériées, et colorés de diverses façons. Le liquide de Flemming (acide chromique, sol. aqueuse à 10 °},, 15; acide osmique à 1 ‘/,, 80; acide acétique glacial 10; eau 54 ED. GRYNFELTT. distillée 95) donne aussi d'excellentes fixations. Il pénètre toutefois moins énergiquement que le liquide de Zenker. Mais malgré cela, son emploi est très recommandable et je n’ai eu qu'à m'en louer. Les pièces fixées par un séjour de 24 heures au moins, étaient lavées longuement à l’eau courante, puis déshydratées et incluses immédiatement dans la paraffine. D'une manière générale d’ailleurs, au cours de ces recherches, je n'ai guère conservé le matériel histologique longtemps après sa fixation. Celle-ci achevée, les pièces ont toujours été immédiatement incluses et débitées en coupes, ce qui est certainement préférable à une conservation même soignée. Le liquide de Bouin ou formol picrique (aldéhyde formique 10, solution aqueuse saturée d'acide picrique 30, acide acétique glacial 2) a été employé aussi avec succès. Les pièces fixées pendant un séjour de 6 heures environ dans ce liquide, étaient lavées à l'alcool à 70° très fréquemment renouvelé, puis à 9°, et incluses dans la paraffine après imbibition au chloroforme. Le liquide de Tellyesniczky (solution aqueuse de bichromate de potasse à 3°, 100 vol. ; acide acétique glacial, 5 vol.), qui favorise certaines différenciations nucléaires par les réactifs colorants, a été employé aussi dans nombre de cas. Les éléments des corps suprarénaux ayant été envisagés comme des cellules de glandes vasculaires sanguines, j'ai essayé de rechercher à l’aide des méthodes cytologiques actuelles la présence possible dans le cytoplasme de grains de sécrétion, et je me suis adressé pour cela au liquide J. de Laguesse, créé par cet auteur en vue de la recherche de ces grains, dans les cellules des glandes séreuses. Ce liquide (acide osmique à 2 ‘/, 4 cent. cubes, acide chromique à 1°}, 8 cent. cubes, acide acétique glacial I goutte) doit agir pendant 24 heures. Les pièces fixées sont ensuile soigneu- sement lavées, déshydratées et incluses immédiatement. La fixation est très bonne et à certains points de vue, plus parfaite que par le liquide de Flemming. Après la fixation par ces différents réactifs j'ai employé diverses méthodes de coloration. En première ligne il faut citer l’héma- toxyline ferrique de Heidenhain, qui, soit seule, soit complétée par une coloration de fond à l’éosine, est particulièrement recomman- dable et a été pratiquée dans tous les cas. L'hématéine suivie de la coloration par l’éosine peut être utilisée après le liquide de Zenker. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 99 Pour les préparations fixées par le liquide de Flemming, je me suis servi à côté de l’hématoxyline ferrique, de la triple coloration de Flemming à la safranine, violet de gentiane et orange, de la colora- tion de Benda à la safranine et au vert lumière. J’ai aussi employé la coloration à la safranine et au picro-indigo carmin, le bleu polychrome de Unna, le rouge Magenta suivi du picro-indigo carmin, du vert lumière ou de l'acide picrique. Enfin, bien qu'il s'agisse là d'une technique plus spécialement dévolue à la recherche de terminaisons nerveuses, qui seront traitées à part, 1l faut signaler comme un adjuvant précieux pour l'interprétation de la structure de ces corps, l'étude des préparations faites par la #6{hode de Golgi-Caral. En effet, lors même que les terminaisons nerveuses ne sont pas toujours mises en évidence d'une manière parfaite, les éléments cellulaires, bien fixés et présentant la réaction chromaffine, se voient parfaitement et on peut ainsi acquérir des notions claires sur la structure de ces organes, structure assez compliquée pour que l'emploi de toutes ces méthodes diverses ne soit pas de trop pour permettre de la comprendre. Comme il sera beaucoup question dans ce chapitre des vaisseaux sanguins, il est bon de rappeler ici les différents modes d’injections vasculaires (nitrate d'argent, bleu de Prusse) qui ont été indiqués précédemment. À la suite de ces injections, l'étude était faite soit sur des organes laissés en place avec leurs connexions et exa- minés en entier, soit sur des coupes en série après inclusion au collodion. STRUCTURE. Bien qu’elle ne soit pas facile à définir en peu de mots, la structure des corps suprarénaux est cependant assez spéciale pour ne plus pouvoir être oubliée lorsqu'on l’a vue une fois et pour permettre à un œil exercé de toujours reconnaitre un de ces corps. Ces organes, de petites dimensions, souvent accolés à un ganglion nerveux avec lequel ils font plus ou moins corps, se présentent sur les coupes avec des contours un peu différents suivant qu'ils font partie des groupes antérieur ou moyen, ou du groupe postérieur. Les corps antérieurs ou moyens sont, en effet, limités par une enveloppe connective et possèdent un contour régulier ét continu, 56 ED. GRYNFELTT. bien que présentant des festons peu marqués, indices d’une ébauche de lobulation (PI. II, fig. 2et3); ceux du groupe postérieur, plongés dans le rein, n’offrent pas de limites aussi neltes et envoient de courts prolongements de leur propre substance entre les tubes urinifères qui sont autour d'eux (PI. IL, fig. 4), de telle sorte qu'il est impossible de leur assigner un contour circulaire ou ovalaire régulier. L'enveloppe connective des corps suprarénaux est toujours mince. Elle est réduite souvent à un seul plan de fibres formant une lame très délicate tout autour de l'organe. Nombre d'auteurs ont décrit comme partant de cette membrane, à laquelle ils ont trop généreusement donné le nom de capsule fibreuse, des cloisons internes se dirigeant vers le centre de l'organe, et divisant ce dernier en une série de loges. Cette description est évidemment trop fidèlement calquée sur celle des enveloppes fibreuses classiques de l'anatomie humaine. En réalité il n’y a rien de pareil. Une enveloppe conjonctive et c’est tout ; et cette enveloppe n'offre pas de prolongements internes, n'émet aucun septum dans la substance de l'organe. Cela est très facile à voir, notamment sur les préparations colorées par la safranine et le vert lumière, lequel teint très énergiquement le tissu conjonclif, et permet de le suivre dans ses ramifications les plus déliées. Or, lorsqu'on observe la mince ligne verte qui dans ces préparations limite le contour du corps suprarénal, on n’en voit pas partir des traits rayonnant vers l'intérieur. Il y a plus: lorsque la substance propre des corps est nettement lobulée, comme cela s’observe très bien dans le Trygon pastinaca (fig. 7, PI. II) cette lobulation n’est pas due à des lames connectives qui isoleraient des amas de substance propre, mais plutôt à des vaisseaux courant entre ces amas et les séparant les uns des autres. On pouvait se demander si le développement de cette capsule et de ces septa, faibles chez des individus jeunes, n'était pas au contraire plus marquée à l’état adulte. Il ne paraît pas en être ainsi. Chez des Scyllium catulus de grande taille, l'enveloppe connective était aussi mince que chez les plus petits individus de la même espèce. Chez quelques grands Squales, Carcharias glaucus, Zygæna malleus, Oxyrhina Spallanzanii, l'observation ne décèle également qu'une enveloppe connective mince, sans septa internes bien marqués. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES,. 57 Le tissu conjonctif, peu abondant autour de l'organe, est au contraire assez bien représenté en son milieu, au voisinage de l'artère centrale. On sait en effet que chaque corps suprarénal est traversé par une artère d'assez fort calibre tout autour de laquelle sa substance propre est répandue. Des corps assez petits, tels que les corps postérieurs de Scyllium, sont traversés par une artère relati- vement volumineuse, puisque celle-ci n’est autre qu’une intercostale avant ses bifurcations, par suite un assez gros vaisseau. À fortiori, en est-il ainsi lorsque le corps suprarénal est situé autour de l’artère axillaire : dans ces cas l'artère est toujours entourée d’une gaine de tissu conjonctif dans laquelle prennent place des vaisseaux assez volumineux, comme on le verra plus loin. Mais cette espèce de centre connectf, situé au milieu même de l'organe, lui paraît en quelque sorte étranger, et il n’en part pas de cloisons rayon- nantes se dirigeant vers la périphérie pour s'unir à la capsule et diviser la substance propre en compartiments distincts. Tout au plus peut-on voir çà et là, autour d’un capillaire plus volumineux ou d’une veine, quelques fibres connectives, qui, parties de cette gaine périartérielle, accompagnent sur un certain trajet ce vaisseau dans l'intérieur du corps suprarénal. Mais ces fibres ne constituent jamais des lames importantes et ne contribuent aucunement à la lobulation du corps. Elles restent limitées au voisinage de quelques vaisseaux et ne pénètrent pas entre les cellules chromaffines. Cette description diffère assez de celle des auteurs. Il pourrait sembler peut-être hors de proportions d’insister autant sur un simple appareil de charpente. Mais j'ai tenu à le faire parce que la présence du tissu conjonctif entre les lobules de l'organe, telle qu'elle est admise par la plupart des auteurs, se rattache à une question fondamentale pour la connaissance de la structure de ces corps, c'est-à-dire la présence d’un stroma fibrillaire que beaucoup ont admis entre les cellules des corps suprarénaux et qui n’est rien moins que démontrée. On verra plus loin à quoi se réduit ce stroma fibrillaire, par quels éléments histologiques il est formé, et on comprendra combien il était utile de distinguer nettement la part que pouvait prendre le {issu conjonctif à la constitution de la charpente de l'organe. Entre l'enveloppe conjonctive et le centre occupé par l'artère munie de sa gaine, on trouve la substance propre avec un aspect le plus souvent lobulé, mais avec des différences de structure assez 8 ED. GRYNFELTT. profondes, suivant l’état des organes au moment où on les a fixés, et qui paraissent cependant avoir été méconnues par les auteurs. L'une des raisons, qui a certainement le plus contribué à dissi- muler aux observateurs ces variations de structure de la substance propre, c'est surtout le mélange plus ou moins intime de cette substance avec celle des ganglions nerveux juxtaposés. Cette juxta- position des ganglions et des corps suprarénaux s'observe principale- ment dans les corps les plus antérieurs, c’est-à-dire dans le corps axillaire. Là, en effet, comme il a été dit (page 40), corps et ganglion sont souvent réunis sous une enveloppe commune et forment une masse unique assez bien individualisée. Il semble que la plupart des auteurs ont, de préférence, étudié ce corps suprarénal plus volumineux que les autres. Or, c’est à son niveau que l’on trouve le mélange le plus intime de la substance propre du suprarénal et de celle du ganglion. Sur les coupes du corps axillaire d'Heæan- chus griseus par exemple, faites après le liquide de Müller, qui, grace à la réaction chromaffine, permet de distinguer aisément, dans ce complexe à la fois ganglionnaire et suprarénal très embrouillé, les moindres traces de la substance surrénale propre (c’est-à-dire de la substance chromaffine), on voit cette dernière se poursuivre sous la forme de petits îlots anguleux au sein même de la substance des ganglions. Ces petits îlots ainsi perdus au milieu des gros faisceaux nerveux ou entre les cellules gan- glionnaires, ne sont aisés à distinguer que lorsqu'ils offrent leur réaction chromaffine bien nette. Si au contraire on les examine après des fixateurs, excellents du reste, tels que le liquide de Flemming, lesquels ne donnent pas cette réaction caractéristique, on peut avoir de la peine à distinguer les deux substances, celle du ganglion et celle du corps suprarénal. Il y a donc de nombreuses difficultés dans l'interprétation des coupes que l’on a sous les yeux, et on peut être arrêté aussi bien par le mélange intime des deux substances, que par les variations de structure de l’une d’entre elles. L’attention doit donc être portée d’une manière particulière sur la recherche et l'identification, à travers les méthodes diverses, des éléments caractéristiques des corps suprarénaux, les éléments chromaffines. Dans l'interprétation de cette question difficile la connaissance exacte du mode de distribution des vaisseaux pouvait fournir un élément d'appréciation de premier ordre. L’examen des injections ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES 59 vasculaires, dans lesquelles (voyez p. 18 et suiv.) vaisseaux sont seuls mis en évidence, tandis que le reste des éléments paraît noyé dans la réfringence du baume, permet de reconnaitre les corps suprarénaux par le dessin d'ensemble de leurs vaisseaux propres. Et l'on voit ce dernier varier dans sa forme extérieure comme les corps varient eux-mêmes. En effet, les vaisseaux des corps supra- rénaux forment une sorte de nodule bien limité, arrondi ou ovoiïde, lorsqu'il s’agit de corps sphériques ou ovoïdes ; allongé au contraire, étiré, lorsqu'il s’agit de ces longs cordons de substance suprarénale, comme on en voit dans les Raïes (Trygon pastinaca, Myliobatis aquila, Raja marginata, R. punctatà, R. clavata, R. mosaica, Torpedo marmorata). I] paraît impossible de ne pas être frappé par la concordance qui existe entre l’arrangement des vaisseaux et la forme extérieure des corps eux-mêmes. Aussi, semble-t-il utile de faire connaître tout d'abord cette distribution vasculaire qui parait si nettement spécifique, avant de chercher à interpréter la disposition réelle de la substance propre. VAISSEAUX. Les vaisseaux des suprarénaux forment par leur ensemble, comme le montre la fig. 14, PI. V, une sorte de nodule bien limité, ayant la forme générale et les dimensions du corps suprarénal dans lequel il est placé, de telle sorte qu'ils dessinent par leur réunion une sorte d’ovoïde ou de sphère dans les corps globuleux, tandis qu'ils forment un tractus allongé lorsque la substance offre elle- même cette disposition. Ces vaisseaux capillaires tirent leur origine de l'artère qui traverse le corps suprarénal. Des branches nées sur cette artère (r.s. fig. 14) partent ces capillaires qui se répandent dans l'épaisseur de l'organe en suivant un trajet extrêmement flexueux à travers divers plans. Tous ces capillaires s’entrelacent les uns avec les autres sans contracter de nombreuses anastomoses, de telle sorte que leur ensemble offre bien plus l'aspect d’un glomérule énorme à boucles très contournées que celui d’un réseau vasculaire à mailles étroites. La richesse de ces capillaires est cependant telle que vus à un faible grossissement (fig. 16, PI. VI) ils paraissent former un réseau. Mais ce n’est qu'une apparence qui s'évanouit dès que l’on emploie des grossissements assez forts, permettant de suivre les capillaires dans les différents plans. On 60 ED. GRYNFELIT. peut alors voir que dans bien des cas, où à un faible grossissement, on croyait avoir affaire à une anastomose, il n’y a en réalité qu'une superposition ou un entrecroisement sans contact. Souvent, un des rameaux vasculaires propre au suprarénal naît sur l'artère qui porte ce dernier, un peu en avant ou un peu en arrière du corps lui-même. Il constitue alors une petite artériole, libre sur une certaine partie de son étendue, et qui se transforme bien vite en capillaire dès qu’elle aborde le corps suprarénal, comme on le voit dans la fig. 14, PI. V,7s (haut de la figure) où cette disposition existe sans être aussi marquée que d’autres fois. Les corps suprarénaux sont toujours placés, on l’a vu, sur une branche artérielle d’une certaine importance. Chez Scyllium catulus, Sc. canicula, Mustelus lævis, cette artère est en général une intercostale, par conséquent un tronc assez gros. D'autrefois c’estun vaisseau plus grêle. Il en est ainsi chez Acanthias vulgaris, même là où existent les grosses intercostales. La fig. 4 du texte montre en effet qu’à ce niveau le suprarénal est situé sur une branche de l'intercostale. Il en est de même dans les types où existentcomme chez Acanthias, de grosses intercostales ; et alors ces gros troncs arlériels émettent toujours une petite branche spéciale pour le corps, ce qui est très net chez Squatina angelus. Dans le cas où les corps siègent le long d’anastomoses longitudinales entre des intercostales successives, le tronc anastomotique qui les traverse est plus grêle qu'une intercostale. Au niveau du corps antérieur où il existe toujours, comme on le sait, un gros ganglion nerveux, l'artère est placé exactement à la limite entre les substances nerveuse et suprarénale (PI. VI, fig. 16, b) qui l'entourent chacune par moitié d’une manière plus ou moins égale, suivant les points considérés. Les vaisseaux capillaires des corps suprarénaux forment un ensemble parfaitement individualisé, limité à l'étendue du corps lui-même, et qui ne communique pas avec les réseaux capillaires des organes voisins. À cause même de sa disposition flexueuse, ce système vasculaire suprarénal se distingue aisément de celui des organes voisins. On vérifie pour lui cette ancienne loi anatomique d’après laquelle le système vasculaire d’un organe quelconque suffit à caractériser cet organe et permet de le reconnaître par sa seule inspection. La fig. 16 de la PI. VI qui représente à la fois les capil- laires du ganglion et ceux du corps suprarénal juxtaposés, montre bien la différence profonde qui existe entre le mode de distribution ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 61 el l'abondance dé ces vaisseaux dans les deux parties du corps axil- iaire. Les vaisseaux capillaires des corps suprarénaux se développent exclusivement dans les limites du corps auquel ils appartiennent, de telle manière qu'on peut tracer le contour de ce dernier, en suivant leur bord externe. Néanmoins il existe dans certains cas une limitation moins nette de la masse glomérulaire formée par ces vaisseaux, et l'on voit quelques anses capillaires sortir çà et là du contour de la figure dessinée par l’ensemble des vaisseaux, et se porter en irradiant à quelque distance du corps. Ces anses vasculaires isolées peuvent se rencontrer chez des espèces très diverses, mais on les trouve toujours au moins sur quelques corps suprarénaux, sinon sur tous, dans le groupe des Raies. Dans ces cas, si le corps suprarénal est moins nettement limité à sa périphérie que lorsqu'il offre une forme globuleuse, il n’en garde pas moins son individualité complète au point de vue vasculaire, et les petits vaisseaux qui s’éloignent de lui n’entrent pas pour cela en communication avec les capillaires des autres organes, mais restent toujours isolés. Ce sont du reste de véritables capillaires suprarénaux, car ils sont entourés de petites gaines de substance suprarénale qui les accompagnent et constituent autant de prolongements du corps (PL. IV, fig. 9). Souvent ces derniers aboutissent à un petit nodule de substance suprarénale qui est ainsi rattachée à la masse principale par un pont très mince. On a ainsi sous les yeux toutes les transi- tions possibles entre une simple expansion irradiante de substance suprénale autour du corps et l’émiettement de ce dernier en petits îlots à peine visibles à l’œil nu, disposition qui a été signalée déjà au cours de ce travail, à propos de la forme extérieure des corps (voyez p. 39). La constatation de ces anses vasculaires aberrantes a une réelle importance au point de vue de la compréhension de la valeur de la substance suprarénale. Elle montre en effet que la présence de cette substance est étroitement liée à celle des vaisseaux, et que, là où les cellules chromaffines existent même en nombre extrêmement limité, elles sont toujours placées autour d’un vaisseau capillaire émané du réseau d’un corps suprarénal le plus voisin. Le réseau capillaire de la substance suprarénale se continue dans des veines dont quelques-unes sont placées dans l'épaisseur même de 62 ED. GRYNFELTT. l'organe, mais dont la plupart se trouvent à la périphérie et forment les grandes lacunes veineuses dont il a été question plus haut. Là où les corps sont plongés dans la cavité des sinus de Monro, les veines manquent sur la portion de leur surface directement baignée dans le sang. Mais sur toute cette surface, il est facile de voir, sur les coupes, des capillaires de l'organe s’ouvrant directement dans la cavité du sinus (PI. IV, fig. 8). Sur les coupes, les vaisseaux du corps suprarénal se présentent avec des aspects très différents suivant l’état des corps. Tantôt, on les trouve béants et par suite bien distincts ; tantôt au contraire ils sont affaissés sur eux-mêmes, de sorte que leurs parois opposées se touchent et que leur lumière est devenue invisible. On les reconnaît toutefois alors à la présence des noyaux de leur endothélium (a, PL, IV fig. 8) qui ont une forme plus allongée que les noyaux des cellules voisines et qui se colorent beaucoup plus fortement que ces derniers. Par le nombre de ces noyaux endothéliaux, par les trainées qu'ils forment à travers la substance suprarénale on peut déjà se rendre compte de la richesse en vaisseaux de l'organe. Mais l'étude préalable des injections n’est pas inutile pour préparer à une inlerprétalion exacte des coupes et pour habituer l'esprit à la recherche de ce qui peut, dans ces coupes, déceler la présence d’un vaisseau. Au centre des corps, dans le tissu conjonctif qui entoure l'artère, se trouvent les veines qui ont été signalées plus haut. Elles sont parfois si développées qu'elles semblent former comme une gaîne vasculaire continue autour de l’artère. Dans ce cas, comme ces veines sont réduites à leur paroi endothéliale, elles pourraient faire penser à ces gaines lymphatiques que l’on trouve parfois autour des artères dans l'épaisseur des organes. Bien entendu il ne saurait être question ici de véritables gaines Ilymphatiques. Mais on pourrait se demander si cette couche veineuse périartérielle n’est pas placée là comme un isolant entre l'artère et la substance propre. La conception de certains auteurs, qui regardent comme des cellules nerveuses d’une espèce particulière les cellules chromaffines, semble parler en faveur de cette hypothèse, puisque l’on sait que des gaïînes périartérielles se trouvent principalement dans les centres nerveux. Mais ici il ne semble pas que telle soit la raison d'être de cette disposition. L'artériole qui traverse le corps suprarénal ne doit « e avoir que des battements bien légers à en juger par les faibles ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 63 oscillations que SCHOENLEIN et WILHELM [94, p. 451] ont rencontré dans l'aorte des Sélaciens. Par conséquent il n’est pas nécessaire qu'il y ait un dispositif spécial pour en atténuer les effets. 11 faut donc considérer les veines centrales uniquement comme une partie des voies efférentes, rassemblées autour de l'artère à cause de la présence du tissu conjonctif. En dehors de l'artère centrale des corps suprarénaux, il n'y a dans l’intérieur de ce dernier aucun vaisseau pourvu de muscles. Les branches qui partent de l'artère centrale, si elles ont une tunique musculaire au niveau de leur origine, ne tardent pas à la perdre, et l'ont perdue effectivement dès qu'elles abordent la la substance suprarénale proprement dite. Tous les vaisseaux compris dans l'épaisseur du corps, quelles que soient du reste leurs dimensions, ont leurs parois réduites à l'endothélium, et cela est vrai aussi pour les grandes veines qui entourent, comme une capsule vasculaire, le corps suprarénal. SUBSTANCE PROPRE Par substance propre des corps suprarénaux il faut entendre uniquement les cellules chroma/ffines qui en sont caractéristiques. On peut parfaitement les considérer comme spécifiques pour ces corps, alors même que plus tard on démontrerait qu’elles sont une forme particulière des éléments histologiques du système grand sympathique. En effet, ces cellules sont répandues chez les Sélaciens avec une telle abondance, les masses qu’elles forment sont si remarquables par leur taille, par leurs connexions avec les vaisseaux, et par leur développement, qu’il y a lieu de considérer ces amas comme des organes particuliers consistant essentielle- ment en cellules chromaffines. La disposition de ces cellules chromaffines est donc très impor- tante à connaître. Cependant, elle est encore bien incomplètement décrite par les auteurs. Si nous ouvrons le travail histologique le plus récent, et le plus étendu du reste, que nous possédions sur la question, c’est-à-dire celui de KoxN [99], nous verrons que cet auteur représente les cellules chromaffines comme disséminées çà et là, en quelque sorte sans ordre, au milieu de cellules ganglion- naires et d’autres éléments histologiques indéterminés (p. 297). Tel u'est pas l'arrangement de ces cellules ; mais le peu de précision 64 ED. GRYNFELIT. des données de KonN montrent combien l’on est peu fixé à ce sujet. La difficulté tient en grande partie à une raison dont je ne me suis rendu comple qu’assez longtemps après mes premières recherches : à savoir que la forme des cellules chromaffines varie beaucoup suivant certaines circonstances encore indéterminées, mais liées sans doute à leur fonctionnement. Il en résulte que ces cellules peuvent se présenter sous des aspects très divers el que certaines d’entre elles peuvent être méconnues et prises pour tout autre chose que ce qu’elles sont en réalité. Ajoutons aussi qu'au cours des modifications qu'elles subissent, ces cellules deviennent à certains moments extrêmement délicates et facilement vulnérables par les réactifs, de telle sorte qu’il faut employer les plus grandes précautions, les réactifs les plus sûrs et faire des inclusions excessi- vement soignées, pour avoir dans les préparations des éléments cellulaires bien conservés. Une autre raison explique les difficultés que l’on éprouve à bien comprendre le mode de groupement de ces cellules. C’est qu'à la suite de la fixation par divers réactifs, les liquides de Flemming, de Bouin, par exemple, la réaction chromaffine n’est pas réalisée et ne s’observe pas dans les coupes. Cela est vrai même pour le liquide de Zenker, car si ce dernier donne une très légère teinte brune aux corps suprarénaux, faible indication de la réaction chromaffine, cette teinte n’est pas assez vigoureuse pour être évidente dans les coupes extrêmement minces destinées à l'étude. Dès lors, on manque d’un élément d'appréciation important pour distinguer les cellules chromaffines d’autres cellules de forme plus ou moins rapprochée de la leur, appartenant aux ganglions sympa- thiques, et que l’on peut confondre avec elles là où la pénétration réciproque du corps suprarénal et du ganglion amène leurs propres substances à des contacts très intimes et multipliés. Un bon procédé pour reconnaitre les cellules chromaffines et leur distribution, consiste à employer des coupes minces faites à main levée, sans inclusion préalable dans la paraffine, de corps suprarénaux simplement fixés et durcis dans le liquide de Müller. A la suile de cette fixation, les inclusions à la paraffine sont à rejeter ; quelque soin que l’on mette à les faire, elles entraînent toujours des déformations cellulaires, des dislocations fâcheuses. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 65 Mais si l’on coupe sans inclusion les pièces ainsi fixées, on obtient au contraire des figures très fidèles, au moins quant aux contours cellulaires et à la distribution des éléments et qui sont précieuses si on ne leur demande que ce qu’elles peuvent donner, c’est-à-dire une coloration spécifique des cellules et un moyen de diagnostic infaillible de ces dernières. Quant aux détails sur la structure du protoplasme ou du noyau ils sont peu fidèlement conservés par le liquide de Müller. Les corps suprarénaux sont du reste d'assez petite taille pour qu'il soit facile d'y faire des coupes très minces en se servant lout simplement du microtome à main de Ranvier, dans lequel les pièces sont calées à la moelle de sureau, sans pression et sans aucun enrobage préalable, Les coupes reçues dans l'alcool à 70°, sont déshydratées progressivement, puis montées dans le baume sans aucune coloralion (la réaction chromaffine teignant suffisamment les cellules) ou bien elles sont colorées à l’hématéine et à l’éosine et montées au baume. La figure 7 de la PI. III a été faite d’après une semblable préparation. Sur cette figure, on voit d’abord à la partie inférieure la très mince enveloppe connective du corps suprarénal. Puis on aperçoit les cellules chromaffines groupées d’une manière irrégulière, mais formant néanmoins des amas bien limités, séparés les uns des autres par des intervalles plus ou moins larges. En un mot, la substance propre conslitue des lobules auxquels on ne peut assigner aucune forme régulière, soit en cordons, soit en nodules ; mais l’existence d’amas distincts les uns des autres n’est pas niable. Les intervalles qui séparent ces lobules sont le plus souvent occupés par des vaisseaux, et l’on reconnaît ces derniers soit à leur contenu, soit à leur endothélium très aisément visible. Il ne peut être question de lames connectives pour limiter ces lobules, et s’il existe quelques lamelles conjonctives internes en continuité avec la capsule, comme en «, la minceur même et le faible développement de ces lamelles montrent bien qu'elles ne peuvent avoir qu’une importance limitée ou même nulle dans la séparation des groupes cellulaires et dans la constitution d’une charpente. Les lobules de substance chromaffine sont donc séparés les uns des autres par des vaisseaux seulement. C’est justement à ce mode de cloisonnement très imparfait qu'il faut attribuer l'irrégularité de forme des lobules, irrégularité tenant avant tout à ce que la substance propre est en réalité continue avec elle-même par plusieurs e) 66 ED. GRYNFELTT. points, alors qu'elle est séparée ailleurs, et seulement sur de faibles étendues, par le passage de vaisseaux sanguins. La part que prennent les vaisseaux sanguins à la lobulation des corps suprarénaux est encore démontrée par ce fait que les vaisseaux compris dans la coupe ne séparent pas simplement les lobules les uns des autres, mais se rencontrent encore au milieu même de ces lobules. Seulement, et c’est là une distinction fort importante, les vaisseaux que l'on voit ainsi dans l'épaisseur d’un lobule, sont toujours en coupe transversale. Ceci permet de penser que la lobulation apparente du corps suprarénal, telle que nous la présente la figure en question, est bien réellement une lobulation purement vasculaire. Quand la coupe rencontre sur une certaine longueur la lumière d'un vaisseau capillaire, cette lumière forme l’espace qui sépare les cellules en deux lobules juxtaposés. Là au contraire où le vaisseau est coupé transversalement, ce dernier ne partage pas les cellules en lobules distincts ; il constitue simplement comme un trou à l’emporte-pièce au sein d’un îlot cellulaire massif. Par conséquent la substance propre du corps suprarénal est distri- buée sous la forme d’une masse cellulaire continue, parcourue par des vaisseaux capillaires, dont la paroi est en contact immédiat avec les cellules de cette substance propre. Sur les coupes les vaisseaux se montrent comme des espaces creux, ou mieux comme des fentes plus ou moins étroites, divisant le bloc des cellules chromaffines en îlots irréguliers communiquant plus ou moins les uns avec les autres. Mais ces fentes ou ces séparations étant limitées à l'étendue même des vaisseaux capillaires, sont beaucoup trop restreintes pour produire une lobulation vraie. Aussi, tels éléments paraissant séparés en deux ilots distincts au niveau d’un capillaire, vu en coupe longitudinale, sont de nouveau confondus au-dessous ou au-dessus de ce capillaire. Par conséquent 1l ne faut pas croire que la substance propre soit disposée sous la forme de lobules, d’ilots, ou même de cordons communiquant entre eux : c’est en réalité un amas de cellules serrées les unes contre les autres, parcouru par de nombreux vaisseaux qui, sur les coupes minces, paraissent isoler des groupes cellulaires plus ou moins considérables. Sur la fig. 7 de la PI. II il est facile de saisir la forme réelle des cellules chromaffines. En effet, la réaction du bichromate teint ces cellules avec une électivité remarquable. Leur noyau reste pâle et incolore, mais leur corps cellulaire, chargé de grains d’une substance ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 67 brune a pris une teinte qui permet aisément de le distinguer et de le suivre dans ses moindres prolongements. La réaction cesse du reste de se produire dans la couche superficielle de la cellule, de sorte que les limites de ces dernières sont parfaitement nettes et comme tracées par une ligne incolore. Il en résulte qu’il est facile de suivre, sur de semblables prépa- ralions, les contours cellulaires. Il n’en est pas tout à fait ainsi dans d’autres modes de préparations, ni même dans tous les corps traités par le liquide de Müller. En effet, il se développe souvent au sein des cellules des vacuoles claires, dont on trouve à peine les indi- cations dans la cellule 4, mais qui se multiplient parfois au point de gêner beaucoup l'observation, en déformant bon nombre de cellules et en les rendant plus ou moins méconnaissables. Mais on trouve fréquemment la disposition représentée dans la fig. 7, PI. IUT, qui paraît véritablement typique. On voit alors que les cellules chromaffines se présentent comme des corps polyédriques irréguliers, parfois de dimensions à peu près égales dans tous les sens, parfois aussi très allongés dans une direction déterminée. Dans ce cas, les cellules chromaffines peuvent présenter des angles aigus plus ou moins saillants, ou même plusieurs pointes, comme on le voit par exemple dans la cellule c, et qui s'étendent parfois assez loin du corps cellulaire. Ce sont des cellules avec de semblables prolongements, et cet aspect étoilé, qui ont été comparées par KouN [99, p. 300] à des cellules nerveuses. Inutile de dire qu’elles n’ont rien de ces cellules, que leur noyau diffère profondément de celui des éléments nerveux, et que leurs prolongements ne se poursuivent jamais assez loin pour être com- parés à de véritables prolongements nerveux dont ils ne possèdent du reste aucunement la structure. Lorsque de semblables prolon- gements sont vus en coupe, ils forment comme des lames irrégulières intercalées entre les cellules chromaffines voisines. On en trouve un grand nombre çà et là entre les cellules de la fig. 7, PL. IL. IL va sans dire que ces sortes de corps intercalaires, dépourvus de noyaux, et que l’on rencontre au milieu de cellules sensiblement régulières, ne contribuent pas à rendre plus claire, au premier aspect, la consti- tution du corps suprarénal. En étudiant les coupes on se rend compte, grâce à une série de transitions graduelles, que ces corps intercalaires ont bien l’origine indiquée. Dès lors, la nature des cellules chromaffines s’éclaireit un peu, et 68 ED. GRYNFELTT. la place qui leur revient dans les cadres histologiques s’indique d'elle-même. Ces cellules appartiennent sans conteste à la catégorie des épithéliums ; effectivement, ce sont des cellules toutes au contact, sans interposition entre elles d’une quantité de substance fonda- mentale appréciable, autre que celle qui, sous la forme d’un ciment intercellulaire, peut contribuer à les relier entre elles. Et ces cellules appartiennent d'autant plus à la catégorie des épithéliums qu'il ne pénètre jamais entre elles de lames, aussi minces que l’on voudra, de tissu conjonctif. Les seuls éléments qui s’insinuent entre elles sont des vaisseaux sanguins et des nerfs, se comportant alors comme ils le font dans d’autres organes dont la nature épithéliale n’est pas mise en doute, tels que les glandes vasculaires sanguines et même certains épithéliums vascularisés (épithélium olfactif, etc). La forme irrégulière des cellules chromaffines ne peut être invoquée contre leur nature épithéliale, car cette forme n’est jamais d’une irrégularité telle qu'il en résulte au sein du tissu des espaces vides ou des lacunes et que la continuité des éléments cellulaires par toutes leurs faces (caractère fondamental des épithéliums) ne soit pas respectée. En outre, si ces cellules sont irrégulières, cela peut tenir à des causes diverses. En effet, la forme des cellules est, on l’a dit depuis bien longtemps, en rapport au moins avec deux facteurs principaux: la place qu’elles occupent, leur fonction. Or ici, la place qu’occupent les cellules est forcément très inégale suivant les lieux où elles se rencontrent, suivant qu’elles sont placées dans la concavité formée par une anse capillaire ou bien en un autre point. Le facteur de lieu est donc ici très variable. Mais il n’est pas le seul. Il y a aussi celui qui dépend de la fonction. Il a déjà été signalé que des vacuoles se développent dans certaines cellules (PI. II, fig. 7 d), et cela paraît être un résultat de leur fonctionnement. Or ces vacuoles, souvent volumineuseset gonflées. déforment les cellules voisines. De plus elles peuvent se multiplier de façon à réduire le corps cellulaire à un mince réticulum protoplasmique, qui, une fois les vacuoles vidées de leur contenu, s’affaisse sur lui-même en entraînant une diminution notable du volume de la cellule chromaffine. Les cellules voisines peuvent avoir subi les mêmes modifications ou en être restées indemnes. Dans ce dernier cas leur corps, malléable, se modèle à nouveau pour remplir l’espace laissé libre par la rétraction des cellules voisines et y émet des prolongements lamellaires plus ou ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 69 moins développés qui vont s’insinuer dans les interstices laissés libres par ces mouvements de rétraction. Tous ces processus ne sont pas simplement imaginaires. Il est facile de constater leur existence sur presque tous les corps supra- rénaux bien fixés, lorsqu'on a une fois été éclairé sur la disposition des cellules chromaffines. Dans la fig. 8 de la PI. IV, qui représente un corps suprarénal de Scyllium canicula, fixé par le liquide de ‘Zenker et coloré par l’hématéine et l’éosine, on se rend compte que la masse des cellules se laisse parfaitement interpréter à l’aide des données qui viennent d’être énoncés ci-dessus. Tout d’abord, on voit qu’au sein d'une masse cellulaire dont les contours des éléments apparaissent avec assez de netteté en nombre de points pour qu’on ne puisse douter de sa nature épithéliale, il existe une série de vaisseaux capillaires coupés dans divers sens, les uns ouverts et bordés par des noyaux endothéliaux bien nets, reconnaissables à leur coloration foncée, les autres revenus sur eux-mêmes et fermés, de sorte qu'ils ne se trahissent plus que par les noyaux de l’endothélium, ou quelquefois par des lignes de séparation tracées dans la substance propre, telles que celle marquée en a et due à l’accolement des deux lames endo- théliales. L'un des capillaires s'ouvre librement à la surface du corps suprarénal dans le sinus. Les cellules propres du corps se présentent avec différents aspects. D'abord, à la périphérie, on en trouve une rangée continue, régu- lièrement disposée à la manière d’un épithélium et dont les contours cellulaires sont bien distincts. On remarque cependant que déjà dans quelques-unes de ces cellules (b), des vacuoles claires sont développées autour du noyau. En nombre de points, on retrouve les mêmes dispositions épithéliales bien indiquées par les contours nets de chaque cellule et la contiguité immédiate de ces dernières. Il est à ce point de vue un petit nodule particulier à signaler : c’est celui qui est placé à peu près au centre, au-dessous d’un vaisseau capil- laire (fig. 8, PL. IV, c). On voit très bien à son niveau que les cellules épithéliales sont en contact immédiat avec l’endothélium du capillaire, exactement de la même façon que le sont les cellules épithéliales d'une glande vasculaire sanguine. De plus, les diverses cellules de ce nodule présentent déjà des différences notables dans leur protoplasma. Les unes sont plus foncées : leur cytoplasma, 70 ED. GRYNFEL1IT. finement granuleux et absolument privé de vacuoles paraît plus sombre : il a pris davantage la matière colorante. Ces cellules sombres, fortement teintées par le réactif correspondent aux cellules richement pourvues de granulations chromaffines, telles qu'on les trouve dans la fig. 7. Mais elles sont mélangées à d’autres cellules plus claires dans le protoplasma desquelles des vacuoles nombreuses se sont développées, faisant disparaître la matière chromaffine d’une manière plus ou moins complète. On voit donc que, même dans une étendue très réduite et dans un groupe cellulaire très restreint ne comprenant pas plus de huit élé- ments, les cellules peuvent se trouver à des états très différents. Ceci permet de comprendre la raison de certaines dispositions que l’on peut rencontrer sur d’autres points de la même coupe, par exemple au-dessus et au-dessous du nodule considéré (c). Là, en effet, autour de noyaux, semblables il est vrai à ceux des cellules précédemment décrites, on ne trouve plus de limites cellulaires précises, bien qu'il en reste par places des traces assez évidentes ; et ces noyaux semblent plongés au sein d’une substance claire, parcourue de très fines fibrilles constituant parfois des réseaux incomplets et très déliés. En suivant avec attention les zones de transition entre les points pourvus de cellules à contours nets et ceux où toutes les limites cellulaires ont disparu, il est aisé de se rendre compte que la disparition des limites cellulaires s’est effectuée principalement sous l'influence de l’envahissement progressif du protoplasme par les vacuoles claires. Devant ces dernières, la substance chromaf- fine a disparu ne laissant plus que quelques travées protoplasmiques plus ou moins développées, qui donnent lieu à la fibrillation sus-indi- quée. La disparition de la substance chromaffine se traduit par la clarté du fond de la coupe, lequel n’a pas pris les matières colorantes comme les points où cette substance persisle. Lorsque la vacuolisation se produit dans des cellules fortement allongées, comme il en existe souvent, eten particulier à la périphérie des corps, les travées protoplasmiques restées entre les vacuoles sont dirigées dans le sens de la cellule et lui donnent un aspect fibrillaire quelquefois extrêmement marqué. Il est certain que de semblables modifications ont contribué pour beaucoup à faire admettre par certains auteurs la présence d’une substance fonda- mentale finement fibrillaire entre les cellules. Mais il est possible en employant de bons réactifs fixateurs, et notamment le liquide de ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 71 Zenker, de suivre pas à pas toutes les transitions entre cette substance prétendue fibrillaire et les cellules chromaffines allongées d’ailleurs parfaitement intactes. On peut aussi suivre la marche de la vacuolisation des cellules dans les préparations faites après fixation par le liquide de Bouin. Dans ce cas, le réticulum proto- plasmique qui persiste après la vacuolisation se colore facilement, et on peut suivre, grâce à cette coloration, toutes les mailles qu'il forme autour des vacuoles intracellulaires (pour la vacuolisation des cellules, voyez les fig. 19, PI. VI'et 20 PI., VII). Du reste la formation de vacuoles et la réduction corrélative du corps cellulaire ne sont pas les seules modifications que ce dernier puisse éprouver au sein des suprarénaux, et dans le cours de leur fonctionnement. Il faut signaler un autre changement de forme bien plus marqué encore et dont la connaissance n’a pas peu contribué à me faire comprendre la structure de cet organe. Je veux parler d’une sorte d’hypertrophie que peut subir le corps cellulaire, qui atteint parfois des proportions énormes (comparez la fig. 8, PI. IV ehlaig.12"PI. V). Déjà, en examinant des préparations à un faible grossissement on aperçoit fréquemment dans l’étendue d’une même coupe des parties où les noyaux sont très rapprochés les uns des autres et qui paraissent plus colorées, puis d’autres parties plus pâles, dans lesquelles les noyaux sont plus écartés les uns des autres. Ces diffé- rences d'aspect tiennent d'une part à ce que, dans les parties pâles, le cytoplasme s'étant beaucoup plus développé, les noyaux se sont écartés les uns des autres, et d'autre part à ce que le corps proto- plasmique ainsi gonflé se colore beaucoup moins énergiquement et par suite apparaît plus clair. Lorsqu'on examine ces mêmes points à un fort grossissement, on voit que les cellules y présentent la disposition suivante : elles sont beaucoup plus volumineuses, elles ont pris un aspect polyédrique régulier, et sont disposées entre les vaisseaux sous forme de travées comprenant une seule ou plusieurs rangées de cellules toutes au contact. Leur noyau s'est aussi beaucoup accru; il est devenu sphérique el, son contenu en chromatine n'ayant pas subi d'augmentation proportionnelle, il paraît beaucoup plus clair. Ce noyau, devenu ainsi vésiculeux et clair, n’est pas sans présenter quelque analogie avec celui des cellules nerveuses, et ilest parfai- tement possible que dans certains cas on ait pris quelques-unes de 72 ED. GRYNFELTT. ces cellules ainsi modifiées, pour des cellules nerveuses ou pour des formes de transition vers ces cellules, surtout lorsqu'on était préoc- cupé de rechercher des termes de passage entre les éléments du corps suprarénal et ceux du sympathique. Aussi est-il très important d'examiner avec le plus grand soin, en se servant de préparations bien fixées et à l’aide de bons objectifs à immersion, les points des coupes ainsi modifiées. On peut alors se convaincre que les cellules en question n'ont que leurs dimensions et celle de leur noyau qui les rapprochent un peu des cellules nerveuses. Tous leurs autres caractères les en éloignent. Elles n’ont pas de prolongements comme les cellules nerveuses, elles sont régulièrement polyédriques, et dans la plupart des cas ont leurs bords parfaitement nets et limités. On ne trouve pas à leur surface les noyaux plats qui appartiennent à l'enveloppe des cellules nerveuses ; leur protoplasma n'a pas cette fibrillation concentrique qu'il offre dans les cellules ganglionnaires, mais au contraire il possède un aspect homogène, comme vitreux, très remarquable, et que l’on ne peut méconnaître une fois qu'on l’a vu. Enfin, il est un caractère de la plus haute valeur qui distindie ces éléments. C’est que là où ils sont au contact avec des capillaires sanguins ils contractent avec ces derniers des rapports d'intimité tels qu’on n’en voit jamais au niveau des cellules nerveuses. Leur protoplasma est immédiatement accolé à l’endothélium vasculaire qui paraît faire corps avec lui, de telle sorte que les cellules hyper- trophiées ont avec les vaisseaux capillaires des rapports identiques à ceux que présentent les cellules du foie avec les capillaires de la veine porte, dans l'étendue du lobule hépatique. En d’autres termes, ces cellules ont avec les vaisseaux les rapports habituels des cellules sécrélantes dans les glandes endocrines. Tous ces caractères sont d'autant plus frappants et le diagnostic différentiel qu’ils permettent de faire avec les cellules nerveuses est d'autant plus facile que l’on peut observer dans une même coupe, à côté des cellules précédentes, des cellules nerveuses indubitables qui sont dans des conditions d'autant meilleures pour permettre d’élablir des différences ou des rapprochements avec elles, qu'elles ont été traitées par les mêmes réactifs. De plus si on ne se borne pas à étudier un même point, mais si on met en série un grand nombre d'observations, comme J'ai pu le faire gràce au nombreux matériel d’animaux vivants dont j'ai disposé, ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 73 on trouve des transilions graduelles conduisant par deux voies divergentes de la cellule chromaffine typique bourrée de ses granulations spécifiques à la cellule vacuolisée ou à la cellule hypertrophiée. Dans la cellule vacuolisée, le protoplasma est réduit à des travées fibrillaires, quelquefois revenues sur elles-mêmes, et la cellule tout entière est ratatinée. Dans la cellule hypertrophiée, les granulations ont disparu, le protoplasma à pris un aspect vitreux caractéristique ; le noyau agrandi est devenu vésiculeux et clair. Cette dernière forme peut parfois être très largement développée et s’étendre sur la presque totalité d’un corps suprarénal, ainsi que j'ai pu le voir chez un Scyllium canicula. Mais cet état est rare et le plus souvent on ne le trouve réalisé que dans une faible étendue des coupes. tandis que les parties voisines sont les unes à l’état vacuo- laire, les autres à l’état moyen. J'ai essayé de rechercher si cette transformation était en rapport avec une suractivité sécrétoire et si on pouvait la faire apparaître à coup sûr, en excitant par des substances appropriées les fonctions sécrétoires des individus en expérience. J'ai donc injecté à des animaux (Scyllèum canicula, Torpedo marmoralta) tenus en aqua- rium, des doses variées de solutions de pilocarpine, poussées soil dans les masses musculaires soit même dans le péritoine. J'ai sacri- fié ces animaux à des temps variables après l'injection. Les résultats n'ont pas répondu à mon attente; après ces injections je n’ai pas trouvé plus de cellules hypertrophiées qu'auparavant, et notamment que sur des animaux qui venaient d’être pèchés. Il paraît donc que les cellules du corps suprarénal ne sont pas modifiées par les injections de pilocarpine. Cela prouve tout simple- ment qu’elles ne sont pas dans les conditions ordinaires de la plupart des cellules sécrétantes, mais cela ne prouve pas qu’elles ne sécrètent rien et que les modifications de forme, de grandeur et de colorabilité que je leur ai décrites dans le cours de ce travail, ne soient pas en rapport avec leur fonctionnementhabituel. Quel est ce fonctionnement et dans quelles conditions les modifications que nous avons décrites se produisent-elles? C’est ce qu'il m'est impossible de dire pour le moment, bien que j'ai essayé de le déterminer comme je l'ai dit plus haut par l’expérimentation, et, comme on va le voir par des observations directes. En effet, sachant que certains auteurs ont constaté des modifications dans la structure des capsules surrénales pendant la geslation, chez les Mammifères (ALEZAIS [89]; GUIEYSSE 74 ED. GRYNFELTT. [01 ]),mais tout en me gardant de l’idée préconçue que les corps supra- rénaux répondaient au tout ou à une partie de la capsule surrénale de ces derniers, j'ai essayé de chercher si ces modifications structurales correspondaient à un état physiologique particulier. Chaque fois que je recevais un individu dont je fixais les corps Suprarénaux, je notais en même temps son état de gestation si c'élait une femelle vivipare, ou même s’il était en spermatogénèse lorsqu'il s'agissait d'un mâle. De sorte que je savais toujours en examinant une coupe, si l'individu dont elle provenait, était en état d'activité sexuelle ou non. Je n’ai pu observer rien de concluant à ce sujet, pas plus du reste qu'en me servant de certaines variations de chromaticité des noyaux que je me suis efforcé de rechercher, suivant les indications des auteurs récents qui se sont occupés de ces variations et de leur rôle dans la fonetion sécréloire. La nature épithéliale des cellules chromaffines étant nettement établie par tout ce qui vient d'être dit, il convient de préciser les rapports de ces cellules vis-à-vis des vaisseaux sanguins. Ces rapports différent un peu de ceux que présentent les éléments de certaines glandes vasculaires sanguines, comme par exemple la capsule surrénale des Mammifères, en ce que les cellules suprarénales ne sont pas aussi nettement ordonnées que les précédentes par rapport aux vaisseaux sanguins. Au lieu de former des travées régulières dont les éléments, présentant tous à peu près la même forme, sont rangés dans un ordre très remarquable le long des parois vasculaires, les cellules suprarénales sont enchevêtrées les unes dans les autres d’une manière très diverse et sont en rapport avec les vaisseaux tantôt par leur face la plus petite, tantôt au contraire par leur face la plus étendue. De là l’aspect irrégulier que présente l'épithélium suprarénal, de là aussi ce défaut d’individualisation de cet épithélium en travées ou en cordons bien nets. Cette disposition des éléments cellulaires par rapport aux vais- seaux qu'ils entourent peut être suivie avec beaucoup de fruit sur les petites irradiations de substance suprarénale que l’on trouve aulour des corps chez certains animaux. Ces irradiations sont formées par un capillaire sanguin autour duquel se groupent un certain nombre de cellules chromaffines pour lui former comme un manchon. La fig. 9, PI. IV représente, chez Myliobatis aquila, une de ces irradiations comprenant deux petits cordons de substance chromaf- fine qui partant d’un point commun se dirigent parallèlement l’un à ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 79 l'autre, en échangeant une petite anastomose transversale. Dans lun d'eux, les cellules chromaffines s'arrêtent bientôt et l’on voit se prolonger en dehors de lui le capillaire sanguin qui en forme l'axe. Il arrive souvent que le long de ces petites irradiations des corps suprarénaux, les cellules chromaffines manquent par places sur une certaine étendue pour reparaitre de nouveau plus loin. Ces irradia- tions sont presquetoujours formées de deux bandes parallèles, comme celles de la fig. 9, qui, à une certaine distance du corps d’où elles sont émanées, s’anastomosent l’une avec l’autre en formant une anse, disposition qui s'explique par la manière d’être des vaisseaux capillaires. Ceux-ci, ainsi que je l’ai dit plus haut, sont des boucles vasculaires appartenant au corps suprarénal. Les cellules chromaffines de ces sortes d’irradiations suprarénales forment comme un manchon autour du capillaire qu'elles suivent. Pour envelopper ce dernier elles s’étalent quelquefois et deviennent d’une extrême minceur. Sous cette forme, elles rappellent bien plus certains éléments granuleux disposés à la surface des vaisseaux, que des cellules épithéliales régulières, épaisses, rangées autour d’un capillaire d’une glande endocrine. Elles ressemblent parfois par l'irrégularité de leur forme aux cellules plasmastiques, qui consti- tuent dans certains cas comme des gaines autour des vaisseaux Sanguins. L'étude de ces portions aberrantes des corps suprarénaux permet de mieux comprendre la structure de ces corps eux-mêmes. Elle montre que les cellules sont primitivement disposées autour des vaisseaux sanguins auxquels elles forment des gaînes, tantôt minces, tantôt plus épaisses, et qu'il suffit pour avoir la disposition du corps suprarénal entier de rapprocher ces manchons périvas- culaires jusqu'au contact. On s'explique comment s’est produite cette masse compacte de cellules chromaffines traversée dans tous les sens par des capillaires ayant un parcours très flexueux. L'irrégularité dans la disposition des cellules, que l’on constate déjà dans les cordons suprarénaux les plus simples, rend aisément compte de celle que l’on observe dans le corps entier résultant de la juxtaposition et de la fusion de ces cordons. On ne saurait terminer la description de la substance propre des corps suprarénaux sans dire quelques mots d’une disposition parti- culière qu'elle peut présenter, et qui a attiré à diverses reprises l'attention des auteurs. Je veux parler de la présence à la péri- 76 ED. GRYNFELTT. phérie de certains corps d’une couche paraissant distincte, la couche corticale de BaLrouR [78, p. 240]. Cet auteur appelait ainsi une couche de cellules cylindriques hautes, ordonnées perpendicu- lairement à la surface, qui existe très souvent à la périphérie des corps et qui se distingue, par l’arrangement régulier de ses cellules, des parties plus profondes de l'organe où un semblable arrangement ne se montre plus. BALFOUR opposait ces parties internes des corps à la précédente sous le nom de substance médullaire. Cette distinction ne saurait être maintenue, car elle pourrait faire admettre entre les deux parties de l'organe une différence qui u’existe pas. Il n'est pas rare d'observer la couche corticale de Bazrour surtout dans les corps antérieurs baignant dans les sinus de Monro, chez lesquels elle existe en particulier sur la face convexe libre du corps, et non sur sa base d'insertion. Cette couche est constituée par une série de cellules cylindriques hautes, assez régulitrement rangées, que l'on pourrait désigner, uniquement à cause de leur aspect extérieur, sous le nom de cellules en palissade, On en voit une indication, peu accentuée il est vrai, dans la fig. 8, PI. IV. Mais ces cellules ne diffèrent en rien de celles qui sont plus profondément sitaées : ce sont des cellules chromaffines comme les autres et leur forme spéciale paraît due uniquement à leur situa- tion topographique, c’est-à-dire à ce fait qu'elles occupent une région du corps suprarénal limitée par une surface régulière (surface libre du corps baignant dans le sinus), et que par suite leur forme s’est régularisée à ce niveau, comme cela se produit dans tous les épithéliums vers la limite des surfaces simples. Du reste, cette zone palissadique n’est pas partout absolument régulière, et cela s'explique, parce que la surface libre des corps suprarénaux n’est pas elle-même régulière dans toute son étendue : nous avons vu qu'elle est légérement mamelonnée, bosselée, et interrompue par places par l'ouverture des vaisseaux sanguins qui se déversent dans le sinus. Il en résulte que la couche palissadique est quelque peu irrégulière et qu’elle peut même ne pas apparaître sur les coupes, lorsque celles-ci ne passent pas exactement par l'axe de ses cellules. Dès qu’une coupe est un peu oblique par rapport à ce dernier, l’arrangement régulier des cellules disparait pour faire place à un groupement cellulaire beaucoup plus confus et indistinct. Quelques auteurs ont pensé que la couche palissadique pourrait être le résultat de l’action des réactifs : tel CHEVREL [89, p. 26]. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. Ur | Cette opinion n'est pas entièrement justifiée. Il est clair que cette zone étant située à la périphérie est influencée par les réactifs un peu différemment des couches profondes : mais cela ne suffit pas à la faire apparaître. Elle existe réellement comme le montrent les coupes faites après les fixations les mieux réussies, mais elle ne constitue pas une partie distincte dans le corps suprarénal : elle tient uniquement à des conditions topographiques. CYTOLOGIE. Les cellules chromaffines ont déjà été partiellement décrites dans tout ce qui vient d'être dit. Mais il me semble utile de les considérer maintenant à part, en accordant une plus grande importance à l'examen de leur contenu, de leur protoplasma et de leur noyau. Jusqu'ici ces cellules ont élé étudiées surtout au point de vue de leurs connexions soit entre elles, soit avec les vaisseaux. Ce paragraphe sera consacré à leur examen détaillé en les envi- sageant à part et ens'eflorçant d'établir les détails de leur structure propre. La réaction chromaffine indique la présence dans ces cellules d'une substance spéciale qui se colore énergiquement sous l'in- fluence des sels de chrôme. On a déjà vu que dans les cellules fixées à l’aide de ces sels, les parties colorées sont représentées par de pelites granulations arrondies qui donnent à l’ensemble de la cellule sa teinte foncée. Ces granulations, que l’on pourrait appeler granu- lations ou grains chromaffines, paraissent donc être un produit absolument caractéristique de la cellule. Je me suis efforcé de rechercher leurs conditions de solubilité ou de fixation dans certains réactifs et leur manière de se comporter vis-à-vis des matières colo- rantes. Ces grains sont très fins, uniformes et uniformément répandus dansla cellule lorsque celle-ci ne présente pasde vacuoles. Ils existent à l’état frais. Pour les examiner dans ces conditions j'ai dilacéré des corps suprarénaux, pris Sur l'animal vivant, dans une goutte de la sérosité péritonéale du mème animal ou dans l’eau salée physiolo- gique. Cette dissociation est très pénible et ne donne pas lieu à la séparation de cordons ou de travées indiquant une disposition figurée de la substance propre, mais au contraire à des lambeaux irréguliers, déchiquetés, provenant bien plutôt d’une dislocation 78 ED. GRYNFELITT. mécanique, que du déroulement ou de la séparation de groupes cellu- laires préexistants. Sur les plus minces de ces lambeaux, on peut distinguer les cellules suprarénales à la présence d’un grand nombre de grains fins, peu réfringents, qui les bourrent et les font ressorlir très nettement. En effet les cellules chromaffines ontun aspect finement granuleux qui permet de les distinguer des cellules nerveuses à protoplasma pâle et à corps beaucoup plus volumineux. Pour observer plus aisément ces cellules, comme les dilacéra- lions ne donnaient que des lambeaux trop fragmentés, j'ai fait des coupes à main-levée sur des corps durcis par la congélation (chlorure d’éthyle). Les coupes faites avec le rasoir sec étaient reçues dans la sérosité péritonéale et examinées dans cette dernière avec un objectif à immersion homogène 1/18. Sur ces coupes minces on reconnaît de même la présence des grains à l'intérieur des cellules suprarénales. Ces grains sont très fins, pâles, beaucoup moins réfringents que la graisse, ils peuvent être mis en liberté, et on les voit flotter dans le liquide additionnel. Ils existent donc bien réellement dans la cellule vivante et ne sont pas un produit des réactifs. Si sur une coupe ainsi obtenue on fait arriver sous la lamelle quelques gouttes de bichromate de potasse à 5 pour 100, on voit la réaction se produire sous les yeux et les cellules chromaffines devenir brunes. Les grains chromaffines sont conservés par divers réactifs fixateurs, notamment par le liquide de Flemming, le liquide J. de Laguesse, le liquide de Zenker. Mais ces différents liquides ne leur donnent pas la teinte brune caractéristique de la réaction chro- maffine. Le liquide de Zenker seul produit une légère teinte jaunâtre voisine de celle donnée par le bichromate, mais beaucoup moins marquée. L’acide osmique colore très énergiquement et très rapidement les corps suprarénaux en noir. C’est sur cette réaction qu'est basé le procédé employé par CHEVREL | 89, p. 3] pour les mettre en évidence. Cette coloration est très rapide et très intense. Elle se fait beaucoup plus vite qu'au niveau de l'interrénal, qui renferme cependant d'une manière indubitable de grosses gouttelettes de graisse. En effet, si on prend à la fois un suprarénal tel que l’axillaire, et le corps interrénal d’un même animal, puis, si on les plonge tous deux dans l'acide osmique (solution à 1 pour 100), on voit que le suprarénal ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 79 devient immédiatement noir, tandis que l'interrénal ne se colore que beaucoup plus lentement et d’une façon beaucoup moins intense, sauf après un séjour assez long dans le réactif, à la suite duquel sa teinte devient aussi absolument noire. Il importe de rechercher sur quoi se fixe l’acide osmique. Si l'on fait des coupes dans un suprarénal qui vient de séjourner pendantune heure environ dans la solution d’acide osmique à 1 pour 100 et si l’on dilacère ces coupes, puis si on les examine dans l’eau, on voit que les grains chromaffines ont pris une teinte noire intense. Dans les points où la coupe est un peu épaisse et où la dissociation n’est pas bien réussie, le corps des cellules chromaffines paraît entièrement noir. Mais on trouve toujours un certain nombre de ces cellules mieux isolées, dans lesquelles on peut voir que les grains chromaffines seuls sont colorés en noir dans les cellules. Ces dernières ressemblent tout à fait par leur aspect aux cellules chromaffines dissociées après l’action du liquide de Müller et dont les grains sont colorés en brun. Ici la coloration des grains est noire, mais à part cela, la distribution de ces grains dans la cellule, leur grosseur, leur manière d’être vis-à-vis les uns des autres sont absolument iden- tiques dans les deux cas. Uniformes, serrés les uns contre les autres les grains remplissent toujours étroitement la cellule et manquent seulement dans une mince lame de cytoplasme qui forme la limite du corps cellulaire et qui constitue comme une sorte de petite écorce autour de l’élément. Les préparations ainsi faites peuvent se conserver en remplaçant l'eau par de la glycérine que l'on fait arriver lentement sous la lamelle. La structure n’est alors que plus visible. L’acide osmique colore donc en noir les granulations chromaffines. Ces dernières ne sont pourtant pas des granulations graisseuses. Elles n’en présentent pas la réfringence pendant la vie, et de plus elles en différent aussi par quelques caractères. Ainsi elles ne se colorent pas par le liquide de Flemming, ni par celui de Laguesse, même dans les couches les plus superficielles des corps suprarénaux que l'acide osmique de ces mélanges doit forcément atteindre. De plus elles ne se dissolvent pas dans les réactifs (essences) qui sont employés dans le cours des manipulations et qui amènent d'habitude la disparition des graisses. Ainsi certains mélanges osmiés ne colorent pas les corps supra- rénaux en noir. Tels sont le liquide de Flemming et le liquide J. de 80 ED. GRYNFELITT. Laguesse. Par contre, ainsi qu'on le verra plus loin ils noircissent énergiquement le contenu graisseux des cellules de l’interrénal. Les granulations chromaffines sont fixées et conservées par la plupart des liquides que nous avons employés, par le liquide J. de Laguesse, par le liquide de Flemming, le liquide de Zenker, l'acide osmique, le mélange de Telleysniczky et la liqueur de Müller. Après tous ces réactifs on les retrouve dans les cellules, là du moins où la vacuolisation ne les avait pas fait préalablement disparaître. L’alcool absolu dissout la substance chromaffine ; aussi après son action, les corps suprarénaux sont-ils rattatinés, et toutes leurs cellules, plus ou moins vidées d’une partie de leur contenu, sont-elles revenues sur elles-mêmes, chiffonnées et plissées. C’est pourquoi sur les coupes la prétendue substance fibrillaire se montre largement répandue si on fixe par l'alcool. Nous avons vu en effet que cette prétendue fibrillation est le fait des travées protoplasmiques persistant entre les vacuoles ou des parois cellulaires plissées. Les granulations chromaffines, lorsqu'elles sont conservées dans les préparations, après l’action des réactifs que nous avons indiqués, ont une affinité très marquée pour certaines matières colorantes. Parmi celles-ci il faut citer la safranine, le rouge Magenta, le violet de gentiane et l’hématoxyline au fer. Ces colorants teignent très énergiquement les granulations chromaffines, tandis que d’autres couleurs comme l’hématéine et l’éosine ne les colorent pas du tout. Dans les préparations fixées au liquide de Zenker et colorées par l'hématéine et l'éosine les granulations conservent une teinte gris jauvâtre peu marquée qui est celle qu'elles doivent au fixateur, etelles ne prennent ni le violet de l’'hématéine, ni le rouge de l'éosine, qui colore au contraire très fortement les limites cellulaires. Dans l'étendue d’une même préparation, les granulations des diverses cellules ne prennent pas toujours la coloration avec la même intensité, et il n’est pas rare de voir un certain nombre de cellules avec des granulations beaucoup plus fortement colorées que leurs voisines, parmi les quelles certaines ne renferment même que des granulations incolores ou simplement pourvues de la teinte qu’elles doivent au fixateur (liquide de Zenker). En dehors de ces variations, on peut donner comme fixe la règle ci-dessus, à savoir que les granulations chromaffines présentent surtout de l’affinité pour la safranine, pour l’hématoxyline au fer, pour le rouge Magenta et le violet de gentiane. La safranine leur ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTÔMES. 81 donne une coloration très intense qui permet souvent de retrouver une cellule suprarénale isolée dans le tissu nerveux du ganglion voisin. Cela se voit bien surtout au niveau du corps axillaire, où les deux substances suprarénale et nerveuse sont plus étroitement enchevêtrées que partout ailleurs ; et l'emploi de safranine est à cause de cela très recommandable pour la recherche de petits ilots de substance suprarénale dans la moitié nerveuse du corps. Lorsqu'on fait agir le violet de gentiane après la safranine, il chasse cette dernière et il se substitue à elle sur les grains. L'hématoxyline au fer teint les grains en noir uniforme, tantôt plus, tantôt moins foncé, allant d’un noir violacé semblable à celui de la chromatine des noyaux jusqu’à une teinte bistre, suivant les cas, et peut-être aussi suivant le degré de différenciation que l'on à recherché. Comme je l'ai déjà dit, en étndiant la forme générale des cellules, ces dernières ne sont pas toutes uniformément remplies de granulations chromaffines et l’on en trouve toujours quelques- unes qui renferment une ou deux grandes vacuoles claires, quelquefois aussi grandes que le noyau, quelquefois même plus grandes que lui. Lorsque ces vacuoles sont très développées, elles forment comme des bulles qui gonflent par places la cellule. Si cet état vacuolaire se produit dans plusieurs cellules voisines, l’ensemble de ces dernières prend un aspect tout parliculier : le cyloplasme se trouvant réduit par le développement des vacuoles à l’état de lames minces, le tout prend l'aspect d’une sorte de matière claire, cloisonnée par des éléments déliés ou par des lames de protoplasma remplies de substance chromaffine. Lorsque cet élat est réalisé, il est évident qu'on a de la peine à reconnaître le caractère épithélial primitif de la formation dans laquelle il s’est développé. Mais l'examen de nombreuses coupes, et la rencontre d’une foule d’états intermédiaires, permettent de saisir les modifica- tions graduelles qui ont conduit à la disposition vacuolaire irrégulière qui vient d’être décrite. La formation de ces vacuoles ne paraît pas être le fait des réactifs, puisqu'on l’observe toujours à des endroits différents et avec une intensité très variable, dans des suprarénaux pris et fixés dans des conditions identiques. S'il s'agissait d’une action des réactifs, on la verrait se produire toujours aux mêmes endroits, au centre des corps par exemple, si elle était due à une pénétration (0) 82 ED. GRYNFELTT. « insuffisante du réactif, ou à son changement de composition lorsqu'il atteint celte région, après avoir traversé la périphérie. Mais au contraire, cette vacuolisation est de siège très irrégulier, d’impor- tance très variable suivant les cas ; on peut en suivre tous les degrés et la voir apparaître notamment dans les pièces où l’action des réactifs peut et doit s'exercer avec une régularité absolue, je veux parler de ces petites irradiations de substance suprarénale que l’on trouve autour des corps chez les Raies. Là, les cellules chromaffines forment le plus souvent une couche unique autour du vaisseau capillaire, et pourtant, parmi ces cellules toutes touchées simulta- nément par le réactif, certaines sont plus ou moins vacuolaires tandis que les autres sont compactes et absolument bourrées de grains chromaffines. La vacuolisation des cellules et la disparition d’une partie de la substance chromaffine, à laquelle elle succède, indiquent done une variation régulière et physiologique dans la quantité de cette substance. Peut-être les variations que nous avons signalées p. 80 dans la colorabilité de ces cellules tiennent-elles à un changement de leur composition chimique précédant leur disparition. Il aurait été très intéressant d'établir le cycle du fonctionnement de ces cellules, et de déterminer comment, après avoir vu disparaitre une certaine partie de leur substance chromaffine, elles peuvent en refaire une nouvelle quantité, et redevenir, de cellules vacuolisées qu'elles étaient, des cellules bourrées de grains chromaffines. Malheu- reusement cela ne m'a pas été possible. Il ne s’agit pas ici en effet d'éléments dont le fonctionnement soit déjà connu et maintenu dans des règles bien déterminées, comme c’est le cas par exemple pour diverses glandes vraies, telles que les glandes salivaires ou les glandes de la muqueuse digestive. Là, les éléments sécrétants ont un fonctionnement cyclique, les mêmes phénomènes de repos et d'action se produisent tour à tour et l’on peut provoquer les uns ou les autres. Il est relativement facile, par suite, d'établir des points de départ précis pour étudier les changements intimes qui se sont succédés dans le cours du fonctionnement. On sait lorsqu'on peut avoir affaire à une cellule épuisée ou bien au contraire à une cellule au repos. Dans l'organe que j’étudie ici il n’y a rien de semblable. Et je n'ai pas pu dans les tentatives que j'ai faites pour provoquer des changements dans la constitution de ses cellules, obtenir des résultats positifs. Force m'est donc de décrire simplement la ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 83 structure des parties, en donnant le plus de détails possibles sur la constitution et sur les réactions histologiques de ces éléments, encore peu COnnus. Le cytoplasme des cellules chromaffines est assez réduit en quantité, à cause même de l'abondance des grains. On a vu cependant qu'il forme à la périphérie de ces cellules une mince couche qui lui sert en quelque sorte d’enveloppe et qui constitue comme une petite membrane mince. Cette couche se teint fortement par l’éosine, ou par l’orange G, ou encore par le vert lumière. Dans les cellules vacuolisées, le protoplasme compris entre les vacuoles est disposé sous forme de lames très minces, irrégulières, souvent déchiquetées (fig. 19, PI. VI). Ces cellules privées d’une partie de leur contenu reviennent sur elles-mêmes et dans nombre de cas elles paraissent contenir des fibrilles colorées qui les traversent dans le sens de leur longueur. Ces fibrilles ne sont autre chose quelacoupeoptique de cer- taines travées protoplasmiques, ou bien, que des plis de la membrane d’enveloppe. Ce dernier fait est facile à vérifier lorsqu'on voit celte membrane de face ou un peu obliquement. Alors, en effet, on s'aperçoit que ces prétendues fibrilles sont réunies les unes aux autres par une lame de substance légèrement colorée de la même teinte qu’elles, et qui n’est autre chose que la membrane cellulaire dont il a été question plus haut. Je n’ai jamais vu dans le protoplasme de ces cellules les formations périnucléaires plus ou moins filamenteuses qui ont été décrites par M. et P. Bou [99] et par GARNIER | 99 | sous le nom d’ergastoplasme. Le noyau des cellules chromaffines se montre sous deux aspects principaux. Tantôt ce sont de petits noyaux sphériques, renfermant un assez grand nombre de granulations chromatiques fines, disposées sur un réseau de linine assez serré, et répandues principalement à la surface, en dedans de la membrane nucléaire, contre laquelle elles s’étalent quelquefois sous forme de petits corps irréguliers ou de disques plus ou moins déformés (nucléoles). Quelquefois ces nucléoles prennent un développement considérable et offrent des formes extrêmement bizarres. Aïnsi ils constituent souvent comme une ceinture accolée à la face interne de la membrane nucléaire et qui entoure plus ou moins complètement le noyau. Cette sorte d’anneau ne reste pas toujours simple et ëmet des lobes ou des prolongements qui lui donnent un aspect très singulier. D’autrefois ces plaques 84 ED. GRYNFELTY. chromatiques forment simplement comme le chaton d’une bague (PI. VII, fig. 23 et 24), ou bien, en se fragmentant d'une manière irrégulière, ils donnent lieu à des nucléoles multiples et de formes tiop variables pour comporter une description générale (fig. 25 et 26). Tantôt ce sont des noyaux plus volumineux sphériques ou ovoïdes, à surface à peu près régulière et à coloration moins vive que celle des petits noyaux qui viennent d’être décrits. Ce dernier caractère lient à ce que la quantité de chromatine de ces noyaux ne paraît pas beaucoup plus considérable que celle qui existait dans les petits noyaux. Par suite les grains chromaliques sont plus élcignés les uns des autres, et l’ensemble paraît plus clair. Dans ces noyaux on trouve souvent un nucléole, appliqué en général à la face interne de la membrane nucléaire. Tous ces noyaux se colorent avec la safranine qui les teint toujours avec beaucoup d'énergie. L'hématéine au contraire paraît avoir beaucoup moins d’affinité pour eux, et il y a des cas où elle est même incapable de les colorer d’une manière suffisante. Mais si sur ces noyaux restés à peu près incolores sous l’action de l’héma- téine, on fait agir de la safranine, on voit que cette dernière substance les colore énergiquement. Dans ce cas du reste, toute la substance colorable du noyau n’est pas teinte uniformément par la safranine, et à côté de corpuscules safranophiles on en trouve quelques- uns qui sont colorés en violet par l’hématéine. Dans certains cas, les variations de chromaticité s'observent à peu près simultanément sur toutes les cellules d'un corps suprarénal à la fois. Ces variations dans la chromaticité, qui sont extrêmement diverses suivant les cas ne peuvent pas être étudiées plus longuement ici parce que je n'ai pu les mettre en relation d'une manière certaine avec telle ou telle constitution de la cellule. Mais je reviendrai sur elles à propos de l’interrénal, pour lequel j'ai observé des variations analogues dans la chromaticité des noyaux. Les noyaux du suprarénal ne présentent pas en général des formes irrégulières, c’est-à-dire que leur surface n’est ni lobée, ni incisée, comme cela se voit dans d’autres Cas. La plupart des cellules ne m'ont paru présenter qu'un seul noyau. Pour terminer l’histoire des cellules chromaffines, je ferai remar- quer que, par la présence des fines granulations qu'elles renferment, ces cellules se rapprochent un peu des cellules que LAGUESSE ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 85 [1900, p. 177] a décrites dans les îlots endocrines du pancréas de la Vipère et de la Couleuvre et qu’il a signalées aussi chez les autres Vertébrés. IL faut bien se garder de comparer trait pour trait les granulations chromaffines aux granulations des cellules endocrines du pancréas. Mais dans les deux cas on a des cellules à granu- lations fines conservées par certains réactifs et qui prennent la safranine ; de sorte que l’aspect, à un faible grossissement, d'un ilot de chromaffines bien fixé, rappelle assez bien celui d'un îlot endocrine. RELATIONS HISTOLOGIQUES DES CORPS SUPRARÉNAUX AVEC LE SYSTÈME NERVEUX GRAND SYMPHATIQUE Il yalieu d'examiner maintenant quelles sont les relations histolo- giques existant entre les corps suprarénaux et les éléments du système nerveux grand sympathique. Konn [99, p. 300 et 301] considère les cellules chromfafines comme une forme particulière d'éléments sympathiques, ainsi que l'indique le nom par lequel il les désigne (chromaffine Sympathicuszellen). Il pense que ces cellules représentent dans le système sympathique des Sélaciens, certaines formations signalées depuis longtemps dans le grand sympathique des autres Vertébrés et décrites par SiGMuND MAYER [72, p. 124] sous le nom de nids cellulaires {Zellennester). Ces nids cellulaires consistent en de petits amas de cellules réunies sous une Capsule conjonctive commune, appendus à des artères ou aux nerfs sympathiques, dans le voisinage des’ ganglions. Leur structure fine est encore assez mal connue et on les a rappro- chés de certains éléments de la substance médullaire des capsules surrénales des Vertébrés supérieurs. Fusarr notamment |[91, p. 17| ayant trouvé dans la moelle de la capsule surrénale du Lapin des cellules entourées d’un très fin réticulum nerveux, comparable à celui que SMIRNOW | 90, p. 416] a décrit dans les nids cellulaires du sympa- thique des Amphibiens, a considéré ces cellules médullaires comme représentant des cellules du sympathique et en particulier celles des nids cellulaires. Je n’entrerai pas dans l’étude approfondie des comparaisons histologiques entre tous ces ordres d'éléments, cellules chromaffines, nids cellulaires, cellules ganglionnaires et substance médullaire de la capsule surrénale chez tous les Vertébrés, ce serait un travail considérable. Je m'en tiendrai simplement à l'examen des corps suprarénaux des Sélaciens et je chercherai si dans ces 86 ED. GRYNFELTT. corps il existe des éléments comparables aux nids cellulaires et si ces derniers offrent des transitions entre les deux autres sortes de cellules, chromaffines et ganglionnaires. Il existe certainement dans le suprarénal des nids cellulaires formés d’un petit nombre d'éléments groupés en nodules, et distincts à la fois des cellules chromaffines et des cellules nerveuses. Sur des préparations destinées à la recherche des terminaisons nerveuses, j'ai trouvé de petits nodules cellulaires placés au voisi- nage des corps suprarénaux, soit le long des nerfs, soit le long des vaisseaux qui y aboutissent. Ces petits nids cellulaires reçoivent 1 ou ? filets nerveux très grêles qui se divisent dans leur intérieur et se ramifient sur les cellules arrondies ou ovoïdes qui les composent. Ces cellules se distinguent aisément de celles du suprarénal par l'absence de granulations chromaffines dans leur protoplasma, du reste peu abondant, et par leur noyau bien développé. Ces petits nids ressemblent beaucoup à ceux qui ont été décrits par SMIRNOW [90, p. 416]. Sur les coupes, on voit aussi des groupements de cellules d'aspect un peu particulier, intermédiaire entre celui des cellules nerveuses et des cellules chromaffines. Par les caractères de leur noyau volumineux, arrondi, pauvre en chromatine, aussi bien que par les caractères de leur cytoplasma, ces cellules serapprochent des cellules nerveuses dont elles différent profondément par leurs dimensions infiniment plus petites. Ces éléments ont été bien vus par DIAMARE [02, p. 423] qui discute longuement leur constitution et leurs rapports avec les éléments du sympathique, et qui finalement les considère comme attestant simplement « la parenté, l'origine commune entre le suprarénal et le ganglion. » Ces éléments se retrouvent du reste sur des dissociations faites sur le frais. On voit en effet dans ces préparations, en dehors des cellules suprarénales très reconnaissables à leurs fines granulations, à leur noyau petit et pale, et des cellules ganglionnaires, que leur taille seule suffit à distinguer, de petits éléments du volume des cellules chromaffines, de forme ovoïde, et quelquefois avec des faces planes, comme engendrées par pression, mais qui différent profon- dément des cellules chromaffines par les caractères de leur proto- plasma et de leur noyau. Le protoplasma, peu abondant, forme comme une sorte d'écorce autour du noyau sphérique, volumineux qui occupe le centre. Ce protoplasma est homogène, assez réfringent et se distingue bien par là de celui des cellules chromaffines. Sur certaines ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 87 de ces cellules, j'ai vu manifestement un prolongement cylindrique, régulier, assez long et rappelant tout à fait un prolongement de cellule nerveuse. Ces observations, faites sur le frais chez Torpedo marmo- rala à l’aide d’un objectif à immersion homogène 1/18°, sur des pièces dissociées dans le liquide péritonéal de l'animal, montrent donc que ces pelites cellules se rapprochent des cellules nerveuses vraies, et d’après la connaissance que l’on possède actuellement de la structure des corps suprarénaux, il paraît indubitable que ces petites cellules répondent à celles des nids dont nous venons de parler. En dehors de ces groupes de cellules intermédiaires ou nids cellulaires indubitables, il y a des cas où l’on pourrait prendre pour ces nids de véritables cellules suprarénales disposées d’une manière un peu particulière. Imaginons en effet un groupe de ces cellules, de forme longitudinale et étroite comme celles de la zone palissadique, dépourvues de plus, soit par un défaut de fixation, soit pour une raison fonctionnelle, de leurs grains chromaffines : si ces cellules sont coupées perpendiculairement à leur grand axe, leurs noyaux étant très rapprochés les uns des autres et leur protoplasma n'étant pas suffisamment caractérisé à cause de l'absence de grains chromaffines, on pourra prendre ce groupe de cellules pour un nid cellulaire ou encore pour des cellules de transition entre les nids cellulaires vrais et les cellules du suprarénal. IL est clair que ces formes de transitions sont purement artficielles et doivent être soigneusement distinguées des nids cellulaires vrais. Pour résumer, on peut dire qu'il existe dans les suprarénaux trois sortes d'éléments cellulaires que l'on peut regarder comme autonomes, bien qu'ils proviennent peut-être de la même source, ce sont : les cellules ganglionnaires, les nids cellulaires et les cellules suprarénales. Il est intéressant de comparer les rapports des cellules chromaf- fines avec les ganglions chez divers animaux. Depuis longtemps déjà on a fait remarquer la présence d'éléments chromaffines dans le système nerveux sympathique des Mammifères et sans reprendre ici entièrement cetle question, ce qui nous entrainerait trop loin de notre sujet, je rapporterai cependant une observation de STILLING [98 p. 232] qui offre un intérêt particulier. Sa description est accompagnée d’une figure montrant de petits corps brunâtres en connexion avec le sympathique, et dont les rapports avec ce dernier étudiés avec soin permettent des rapprochements intéressants avec la manière d’être des corps suprarénaux des Sélaciens vis-à-vis 88 ED. GRYNFELTT. des ganglions sympathiques. STILLING a montré que chez divers Mammifères on trouve sur les ganglions sympathiques ou dans leur voisinage de petits amas cellulaires dont les éléments se colorent fortement en brun par les sels de chrome. Il leur donnait le nom de « cellules chromoplhiles » et il proteste avec une certaine raison contre KosE [98] et Koxx [98 |, qui postérieurement à sa découverte ont voulu imposer à ces cellules le nom de chroma/ffines. Au point de vue des droits de priorité scientifique, STILLING a raison. Mais j'ai cépendant préféré la désignation de Ko à la sienne, parce qu’elle est peut-être moins banale. Le nom de chromophile est surtout employé comme synonyme de fortement colorable, et l’on sait combien d'éléments ont reçu cette épithète, tandis que celui de chromaffine indique une affinité spéciale pour les sels de chrome ou du moins peut, après explication, être considéré comme tel. Or l'affinité de tous ces éléments pour les sels de chrome est évi- demment le caractère qui les distingue le mieux et qui par conséquent doit être retenu avant tous les autres. Ces éléments chromaffines, si l’on en juge par Is données déjà anciennes de STILLING [90-92 | et par celles plus ré’entes de KoxN[99] et de DIAMARE [02], paraissent constituer une partie, sinon intégrante du sympa- thique, du moins habituellement étroitement liée avec lui. Ainsi que je l’ai déjà dit plus haut la figure donnée par STILLING [98, p. 232] présente une réelle importance pour la compréhension de ces rapports entre cellules chromaffines et ganglions sympathiques. Elle montre un gros ganglion ventral avec ses nerfs chez le Chat. On voit que les amas de substance chromaffine ne sont pas précisement unis au ganglion lui-même et contenus dans une même capsule, mais qu'ils siègent au contraire soit le long des gros troncs nerveux, soit en dehors de ceux-ci dans le tissu conjonctif, et entre les amas de graisse que l’on rencontre aulour du ganglion et de ses branches. De plus, la substance brune n’est pas groupée en un amas principal simple ou lobé placé au voisinage du ganglion, mais elle est très disséminée, de gros amas se rencontrant assez loin du ganglion, le long des branches nerveuses, d’autres étant rapprochés des ganglions eux-mêmes, d’autres enfin extrê- mement petits, étant placés çà et là dans le tissu conjonctif mterposé aux nerfs. Ces derniers petits groupes de substance, invisibles à l'œil nu, rappellent tout à fait par leur petitesse et leur dissémi- nation, les petits suprarénaux déjà signalés plus haut dans diverses ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 89 Raies (Raja, Trygon, Myliobatis) et comme chez ces dernières, ils peuvent être indépendants des ganglions. Ces corps sont donc iuxtaposés au ganglion mais non intimement unis avec lui. Et cela est particulièrement vrai pour les moins volumineux de ces amas. Or, ce sont là exactement les relations que l’on trouve chez les Sélaciens, où la substance suprarénale est adjacente à la substance ganglionnaire, mais non encapsulée comme l’a déjà dit CHEVREL [90, p. 30] avec elle, sauf dans le cas particulier du corps axillaire. Il faut remarquer en outre, que chez les Sélaciens, la substance chromaffine prend un développement hors de proportion avec celui qu’elle présente dans les autres animaux. En effet, depuis fort longtemps, cette substance et les masses qu’elle forme ont été reconnues en tant qu'organes distincts chez ces animaux, landis que chez les Mammifères, bien que l'étude du sympathique ait été poussée beaucoup plus loin et reprise un bien plus grand nombre de fois que chez les Sélaciens, la découverte de la substance chrmaffine est de date relativement récente. TERMINAISONS NERVEUSES Pour étudier les terminaisons nerveuses dans le corps suprarénal, j'ai employé deux méthodes distinctes : /« méthode de Golgi- Cajal et la méthode des colorations vitales au bleu de meéthy- lène. La méthode de Cajal a été appliquée en se servant du procédé des imprégnalions multiples. L'imprégnation directe ne réussit pas ou mal. Les imprégnations multiples donnent d’assez bons résultats, surtout lorsqu'on a soin de prendre avec le corps suprarénal une certaine quantité du tissu ambiant afin de tàcher de localiser sur ce dernier les précipités de surface. Mais même avec ces précau- tions, il se produit souvent à la périphérie du corps des précipités gènanis qui empêchent une étude aussi complète qu’on le désirerail. Néanmoins il est bon de pratiquer toujours quelques examens après l'emploi de cette méthode, ne serail-ce que pour contrôler les données fournies par d’autres procédés. La coloration vitale au bleu de méthylène est plus facile et donne des résultats plus satisfaisants. Les corps enlevés sur un animal vivant sont plongés de une à deux heures dans la solution de bleu, puis sont retirés et lavés à l’eau salée au contact de l'air 90 ED. GRYNFELTT. pendant le même temps. Il importe de ne pas plonger les corps dans l’eau salée, mais de les tenir constamment mouillés, afin de permettre l’accès de l’air dont l'oxygène fait apparaître le bleu sur les terminaisons nerveuses; lorsque la coloration paraît satisfaisante, ce dont on s'assure en examinant à un faible grossis- sement et sans recouvrir d'une lamelle, on fixe les pièces et la coloration elle-même en employant la méthode de Bethe. Je l'ai employée d’après les indications données in ViALLETON, | 99, p. 342]. La fixation obtenue, les pièces sont débitées en coupes et montées dans le baume. Il est indispensable d'examiner d’abord des pièces montées en entier pour se rendre compte des rapports de leurs nerfs avec les organes ambiants. C’est une préparation semblable qui a servi pour la figure 15 de la PI. V.Sur cette pièce on voit que le corps suprarénal est très richement innervé. Il recoit des nerfs de deux sources : 1° d'un gros nerf qui court parallèlement à son bord inférieur ; 2° d’un petit rameau nerveux grêle qui l’aborde obliquement par sa face convexe. Du reste, le mode de ramification et la distribution des ramuscules nerveux sont les mêmes dans les deux cas. Le gros nerf qui dans la figure est placé le long du bord inférieur du corps, élait accolé à un ganglion sympathique qui n’a pas été représenté pour ne pas compliquer l’image. Les nerfs arrivés à la surface de l'organe se divisent un grand nombre de fois et forment des rameaux très grèles, constituës par une seule fibre nerveuse qui court pendant un certain temps à la surface, puis s'enfonce dans l'épaisseur de l'organe en décrivantdes flexuosités très pronon- cées. Toutes ces fibres nerveuses, s’enlaçant les unes avec les autres, sans s’anastomoser jamais, forment un plexus extrêmement riche dont la figure donne une idée très exacte. On ne peut distinguer sur cette figure la terminaison des rameaux nerveux, le grossisse- ment employé étant trop faible pour cela. Les fibres placées dans l'épaisseur du corps suprarénal sont des cylindraxes nus. Elles présentent sur leur trajet les varicosités bien connues des arborisations terminales des nerfs et que J. RENAUT (9%, p. 213 et 97, p. 677] appelle les formations perlées. Pour se rendre un compte exact du mode de terminaison de ces nerfs, il faut employer des coupes que l’on examinera, soit sans colo- ralion préalable autre que celle des terminaisons nerveuses sous l'influence du bleu vital, soit après coloration au carmin aluné. La ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 91 fig. 11 de la PI. IV donne une idée générale de ces terminaisons. On voit que les fibrilles, passant entre les cellules ou les groupes de cellules, présentent un trajet flexueux très marqué et émettent sur ce parcours un certain nombre de branches collatérales qui changent bien vite de plan et sont par suite perdues de vue. Lorsqu'on peut suivre ces branches jusqu’à leur terminaison, on voit qu'après s’être effilées de plus en plus, elles se divisent en un bouquet terminal de fibrilles, qui, passant entre les cellules, se ramifient à leur surface et se terminent par des extrémités libres, parfois légèrement renflées en boules extrêmement petites. Ce sont là les caractères ordinaires des terminaisons nerveuses simples au niveau des épithéliums. Je n'ai pas constaté de bouquets terminaux de formes particulières, pas plus par le bleu de méthylène que par la méthode de Golgi. La terminaison représentée dans la fig. 11, PLIV, appartient à une branche grêle dont le cylindraxe ne présente que des varicosités insensibles. Dans d’autres cas au contraire ces varicosités sont bien plus marquées et forment parfois des renflements ovalaires, ou bien en croissants, ou en petits crochets. L'ensemble des nerfs considérés sur une coupe un peu épaisse ne donne pas de figure pouvant se rapporter à un groupement quelconque des éléments histologiques de l'organe. Lorsqu'on examine les terminaisons nerveuses dans une glande par exemple, elles rappellent toujours assez fidèlement la structure de la glande elle-même, indiquant par leur direction et par leur assemblage la forme des organes dans lesquels elles se terminent (tubes ou acini). Ici il n’y a rien de pareil. Partout les terminaisons se font sans un groupement spécial de rameaux ou de branches, et l'on peut dire que la distribution homogène des nerfs dans le corps suprarénal, à un faible grossissement, telle que la présente la fig. 15, PI. V, montre la distribution terminale des nerfs, lesquels se répandent partout indistinctement en branches orientées dans toutes les directions, et sans aucune distribution systématique en groupes quels qu'ils soient. RÉSUMÉ DE L'HISTOLOGIE Les corps suprarénaux présentent une enveloppe conjonetive très mince méritant à peine dans certains cas le nom de capsule propre. 92 ED. GRYNFELTT. On ne trouve dans leur épaisseur que des tractus extrêmement minces accompagnant les plus gros vaisseaux et ne divisant pas la substance propre en lobes distincts. La charpente conjonctive de l'organe est donc réduite à fort peu de chose. La substance propre est constituée par des cellules particulières, les cellules chromaffines, qui sont des éléments de forme polyé- drique, parfois régulière, et pouvant parfois présenter des prolon- gements assez étendus, mais toujours assez puissants et d’une forme géométrique (en prismes ou en lames), qui ne permet pas de les confondre avec des prolongements de cellules nerveuses. Ces cellules renferment d'habitude une substance qui se colore en brun foncé par les sels de chrôme et qui forme des granulations finesrépandues d’une manière égale au sein de l'élément. Ces cellules sont toutes au contact, sans interposition d'aucune substance étrangère et en particulier de fibrilles connectives comme l’ont cru certains auteurs. L'aspect fibrillaire décrit est dû à une transformation des cellules ordinaires par la présence de nombreuses vacuoles. Cette transfor- malion peut du reste être normale et correspondre à un certain état particulier de la cellule ou bien elle peut être causée par les réactifs, nolamment par ceux qui ne fixent pas la substance chromaffine, tels que l'alcool absolu. Les formes très variables que présentent les cellules des supra- rénaux sont dues en grande partie aux différences de la teneur en substance chromaffine qu’elles sont susceptibles de présenter. Les cellules bien remplies de cette substance prennent une forme géomé- trique nette, avec des dimensions assez considérables, tandis que les cellules vacuolisées s’affaissent sur elles-mêmes. Les formes cellulaires dépendent en partie aussi des changements de calibre des vaisseaux adjacents. En effet la substance propre formée par les cellules chromaffines est parcourue dans tous les sens par les vais- seaux capillaires sanguins qui sont en contact immédiat avec elle, c'est-à-dire avec les cellules qui la constituent, aux parois desquelles s’accole l’endothélium vasculaire sans aucune interposition d'autre tissu. On comprend, que suivant l’état de congestion ou de vacuité des vaisseaux, les cellules adjacentes à ces derniers seront comprimés ou au contraire dilatées à l'excès. Il résulte de tout cela que les cellules chromaffines doivent être considérées comme formant une #nasse épithéliale, continue dans toute l'étendue d'un corps suprarénal et traversée seulement par des ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 93 capillaires sanguins et par des fibres nerveuses terminales. Cette masse cellulaire épithéliale n’est pas divisible par les dissociations en cordons ou en nodules, et elle forme bien, comme il a été dit, un tout continu dont les aspects différents sur les coupes tiennent simplement à un état différent et momentané des cellules. Dans l'épaisseur de cet amas cellulaire, on trouve un grand nombre de fibres nerveuses terminales qui se divisent en rameaux très fins, appliqués à la surface des cellules, où ils se terminent librement, comme c’est le cas pour les terminaisons épithéliales ordinaires. Eñtre les cellules épithéliales on peut trouver çà et là quelques cellules ganglionnaires isolées qui n’offrent pas ici d’importance particulière, puisqu'on peut en rencontrer d’analogues dans tous les organes, A côté du corps suprarénal proprement dit se trouve le plus souvent un ganglion du sympathique qui lui est plus ou moins étroitement uni. Dans le corps axillaire cette union est très étroite et chez quelques animaux (Hexanchus griseus, Carcharias glaucus, Squatina angelus, Zygæna malleus), la pénétration réciproque des deux substances nerveuse et suprarénale est en certains endroits poussée extrêmement loin. Mais ce n’est pas là un caractère de structure ayant une valeur essentielle, car des corps suprarénaux de petite taille peuvent exister isolément en dehors de tout ganglion sympathique. La structure qui vient d'être indiquée rapproche sensiblement Les corps suprarénaux des glandes vasculaires sanguines, et quelle que soit leur origine embryologique, il est incontestable que tous les rapports histologiques qui ont été mentionnés ci-dessus les rangent parmi les organes glandulaires. La découverte de cellules chromaf- fines dans les ganglions sympathiques ne prévaut pas contre cette manière de voir; car, premièrement, ces corps sont plutôt voisins du sympathique que confondus avec lui (STILLING, [98, PI. I]) ; secon- dement, comme l'a indiqué DIAMARE [02, p. 428], il ne manque pas d'organes qui sont dérivés du névraxe primitif et qui peuvent cependant jouer un rôle glandulaire (plexus choroïdes etc). APPENDICE BIBLIOGRAPHIQUE LeyniG [51, 52] décrit les corps suprarënaux comme formés de vésicules closes renfermant des noyaux et une substance fonda- 94 , ED. GRYNFELTT. mentale granuleuse. Il signale l'abondance des vaisseaux sanguins au niveau de ces corps, et emploie le premier pour les désigner le nom de glande vasculaire sanguine [51, p. 258]. Mais il suffit de penser à la différence qui existe entre la conception actuelle de ces glandes et celle qu'on s’en faisait au temps de LEeypiG, pour comprendre que si sa conclusion est la même que la nôtre, la notion histologique qu'il avait de ces organes est cependant sensiblement différente de celle qui a été exposée plus haut ; l'existence de vési- cules closes notamment est à rejeter tout à fait. SEMPER |[79, p. 229] ne s’est pour ainsi dire pas occupé de la structure. Bazrour [78] a bien étudié les corps suprarénaux au point de vue histologique et a eu une notion plus nette de leur structure que quelques-uns des auteurs qui l'ont suivi. Il décrit autour d'eux une capsule fibreuse qui envoie dans leur intérieur des septa Les divisant en une série d’alvéoles ou de lobes. Entre ces lobes et accom- pagnant les septa existe un riche réseau capillaire (p. 240). Le plus souvent on distingue à la périphérie une couche particulière formant comme une « substance corticale > opposée à la substance centrale ou « médullaire ». La substance corticale est constituée par des cellules columnaires, un peu irrégulières et disposées en une rangée tout autour de la périphérie du corps. La substance médullaire esl plus ou moins divisée en alvéoles et formée de cellules polygonales. Toutefois BALFoUR ne veut pas établir de différences profondes entre les éléments de ces deux couches et il fait remarquer que « le carac- tère des cellules corticales et médullaires est à peu près le même et que les cellules des deux strates paraissent plutôt différer dans leur forme que dans aucun autre point essentiel > [78, p. 241]. IL a bien remarqué la différence qui existe entre le corps axillaire et les suivants au point de vue du développement des cellules ganglion- naires, qui est toujours beaucoup plus marquée dans le premier. Si on examine en même temps que cette description sa fig. 6 PI. XVIII, qui représente une coupe de suprarénal de Scyllium adulte durei dans l’acide chromique, on est frappé par la disposition nettement épithéliale qu'il donne aux éléments spécifiques de cet organe. Si donc on met de côté la question de la distinction des substances corticale et médullaire, qui n’est pas justifiée, on voit que la description de BALFOUR se rapproche plus que toules les autres de la réalité, d'autant mieux que l’auteur lui-même ne paraît pas attribuer ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 95 à sa couche corticale une bien grande valeur, puisqu'il assimile ses cellules à celles de la couche médullaire. Ce qui est le moins exact dans la description de BALFOUR, c’est certainement l'importance qu'il attribuait aux septa. CHEVREL [89] a, le premier, montré l'erreur de BALFOUR au sujet des septa conjonctifs : il a suivi sur des coupes sériées les prétendues cloisons et a fait voir que c’étaient en réalité de simples tractus isolés [p. 25]. Il a montré aussi qu'il n’y avait pas lieu de distinguer une substance corticale et une substance médullaire. Mais il n’a pas connu la véritable structure des corps et il a donné le premier cette notion inexacte que leurs cellules propres pouvaient être plongées dans un stroma fibrillaire, émané de la capsule et par conséquent de nature conjonctive. Et il limite si mal les corps cellulaires qu'il parle même à certains endroits de noyaux libres et nus (p. 28). A vrai dire le travail de CHEVREL n'avait pas pour but immédiat l'étude histologique de ces corps, et on comprend qu'il n’ait pas poussé aussi loin qu'il l’aurait fallu l’étude de leurs détails de structure. Rappe- lons toutefois qu’il est le premier à avoir fait des injections vascu- laires. Il a aussi indiqué la présence à la surface des organes supra- rénaux de rameaux nerveux très fins, sans du reste les suivre sur les coupes dans l'intérieur de l'organe. SWALE VINCENT [97 d | tombe dans les mêmes erreurs que CHEVREL et représente comme lui des cellules éparses au milieu d’une substance fondamentale fibrillaire plus ou moins abondante. La figure qu'il donne | fig. 41, PI. XIII] montre qu'il n’a dû avoir sous les yeux que des préparations défectueuses, et cela n’est pas étonnant puisqu'il a employé le liquide de Müller, qui, on l’a vu, ne donne pas une consistance suffisante aux pièces pour permettre d'employer sans désavantages les inclusions à la paraffine dont s’est servi l’auteur. VINCENT signale (p. 65) des différences dans la colorabilité et dans la dimension des noyaux des cellules suprarénales, ce qui est parfaitement exact. Konn [99] a donné le travail histologique le plus étendu que nous possédions encore sur ce sujet. Mais comme les deux auteurs précédents il n’a pas reconnu la constitution épithéliale des corps suprarénaux etilconsidère les cellules chromaffines comme disposées isolément au milieu d’autres éléments mal déterminées (p. 297), comme on le voit dans ses fig. 7,8 et {9 [PI XV]. Dans la dernière il représente nettement de grosses cellules chromaffines 96 ED. GRYNFELTT. munies de prolongements assez forts, plongées au sein d’un tissu fibrillaire vague et mélangées à d’autres cellules, dont il considère certaines comme des cellules nerveuses. Pourtant si l’on examine attentivement sa fig. 9 on voit que des quatre cellules ganglionnaires représentées en g, trois au moins sont cerlainement des cellules chromaffines ayant perdu leur coloration brunâtre (et l’on sait que cela se produit fréquemment), rangées d’une manière parfaitement régulière comme des cellules épithéliales. Il est certain que la substance fibrillaire interstitielle de Konn n'est autre chose que les points où les cellules chromaffines ont subi la vacuolisation déjà indiquée; revenues sur elles-mêmes, plissées en long el chiffonnées, elles ont pris un aspect fibrillaire. Toutefois dans certains points, Ko a observé la disposition régulière des cellules et notamment à la périphérie des corps (p. 297). Le plus grand intérêt de son travail consiste dans Ja comparaison qu'il a faite des cellules chromaffines avec les éléments du sympathique et dans la valeur que l'étendue de ses recherches a donnée à cette comparaison. Si d’autres auteurs avaient déjà signalé avant lui la présence de cellules chromaffines dans le sympathique, il n’en est pas moins vrai qu'il a eu le mérite de pousser plus loin que ses devanciers l'étude des cellules en question chez les Sélaciens. Quant aux vaisseaux, il ne s’en est pour ainsi dire pas occupé, et tout entier à sa conception de la nature nerveuse des corps il a négligé les autres côtés de la question et notamment ce qui rapproche ces corps des glandes vasculaires sanguines. 11 n’a pas cherché s’il existait des terminaisons nerveuses. GiacominI [98] pense, avec raison à notre avis, que les suprarénaux ne sont pas formés de cellules nerveuses, mais qu'il s’agit au contraire d'éléments épithéliaux et sécrétants dont les relations avec le sympathique méritent d’être élucidées. DIAMARE [02] a étudié longuement les cellules du sympathique et les nids cellulaires qui peuvent exister dans les coupes de supra- rénal. ILconsidère les cellules ganglionnaires, les cellules des nids et celles du suprarénal comme des formes pouvant provenir d’une même origine embryologique, mais non pas comme les phases différentes d’une évolution plus ou moins continue ou cyclique. Et, sans s'appuyer du reste sur l'étude détaillée des vaisseaux pour corroborer l’idée de la nature glandulaires de ces corps, il penche cependant en faveur de cette opinion. Il fait remarquer que leur ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 97 origine nerveusé ne serait pas un obstacle à cette manière de voir, puisque des épithéliums glandulaires (plexus choroïdes) peuvent venir manifestement d’une partie de l'ébauche nerveuse du névraxe. Il termine en considérant les corps suprarénaux comme des corps épithéliaux, d'origine neurale. 98 ED. GRYNFELIT. DEUXIEME PARTIE CHAPITRE PREMIER. ANATOMIE DES CORPS INTERRÉNAUX. On sait que BALFOUR a désigné, sous le nom de corps interrénal, un corps épithélial impair et médian, placé chez les Sélaciens, au devant de la colonne vertébrale, dansla partie postérieure de la cavité abdominale. Les données que l’on possède actuellement sur l’origine embryologique de ce corps, aussi bien que son étude comparative chez les différents Sélaciens, montrent que le cas observé par BALFOUR, et dans lequel l'organe est impair, ne représente pas la disposition typique et primitive de cet organe, qui est au contraire originellement composé de parties paires. Aussi vaut-il mieux, pour désignér ces parties, employer l'expression de « corps interrénaux », et je m'en suis servi en tête de ce chapitre. Toutefois, comme leur structure est absolument la même et que leur ensemble forme un tout très homo- gène, j'ai continué à me servir dans le cours du texte de l’une et de l'autre des désignations sus-indiquées et j'ai employé tantôt le mot de corps interrénal, tantôt celui de corps interrénaux. Les corps interrénaux se distinguent des suprarénaux par un certain nombre de caractères : 1° Ils sont représentés soit par un cordon allongé impair et médian (Squales), soit par divers nodules pairs asymétriquement placés (Raïes). Ces différents fragments sont dispersés d’une manière très variable dans le territoire réservé à l’interrénal, et ne se répètent jamais régulièrement ni métlamériquement comme le font les suprarénaux. 2° Leur couleur est d’un jaune clair, vif, qui permet de les recon- naître aisément sur le frais et d’en distinguer même les plus petits fragments d'avec la substance propre du rein voisin qui est toujours d'une couleur gris rosé. Contrairement aux suprarénaux ils ne se colorent pas par les sels de chrome et gardent leur couleur naturelle ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 99 chez les animaux qui ont séjourné quelque temps seulement dans le bichromate de potasse. 3° Ils sont limités à la moitié postérieure de la cavité abdominale, et ne la dépassent guère en avant, même dans les cas où ils sont très allongés. En tout cas ils ne s’avancent jamais jusqu’au niveau du groupe antérieur des suprarénaux et de l'artère axillaire. 4 Enfin, ils ne présentent pas de rapports constants avec les artères segmentaires, ni avec les ganglions sympathiques. Leur forme extérieure varie beaucoup. Chez certaines espèces ils constituent un long cordon, tour à tour renflé à la manière d’un fuseau et rétréci, jusqu'à prendre l’aspect d’un fil presque imperceptible. Ce cordon est situé à peu près sur la ligne médiane entre les deux reins (Squales). Dans d’autres espèces l'organe est plus court, plus ramassé et forme une masse allongée située vers la partie postérieure de la cavité abdominale et accolée à l’un des reins (Squatina angelus). D'autres fois encore il peut être double et pair, mais ses deux moitiés ne sont pas symétriquement placées par rapport à l’axe du corps (Raïes). La position du corps interrénal et sa forme extérieure ont élé bien étudiées, entre tous les auteurs récents, par V. DrAMARE [95, 96]. J'aurai cependant quelques détails à ajouter à ceux qu’ilnous a fait connaître, notamment à propos de la fragmentation quelquefois très prononcée de ce corps chez les Raies, et à propos de ses rapports avec les gros vaisseaux. Ces détails me paraissent d'autant plus utiles qu'il s’agit d’une question encore neuve et que l’on ne possède pas de notious bien précises sur ce sujet dont il est à peine fail mention dans les auteurs classiques d'anatomie comparée. CORPS INTERRÉNAUX CHEZ LES SQUALES Examinons d’abord la forme et la disposition de l’interrénal chez les Squales. Chez la plupart de ces animaux, le corps interrénal est impair et médian. Il forme un cordon allongé qui s'étend, en arrière à peu près jusqu'à l'extrémité postérieure du rein, mais sans l’atteindre, en avant, sur une longueur variable suivant les diverses espèces. Chez Scyllium canicula, par exemple, l’interrénal va en arrière jusqu'à 12 à 15 millimètres de l’extrémité postérieure des reins soudés l’un à l’autre. Au delà de son extrémité postérieure il 1060 ED. GRYNFELTT. existe toujours au moins une paire de corps suprarénaux. En avant, il se poursuit jusque vers la partie effilée du rein, c’est-à-dire jusqu’au FiG. 10. — Corps interrénal chez les Squales. — A, Mustelus lævis ; B, Centrina vulpecula ; ao., aorte ; a.ax., artère axillaire ; b.e.s., bord externe du sinus; c.ax., corps axillaire; c.i., corps interrénal; c.s., corps suprarénaux ; r., rein. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES,. 101 niveau du groupe moyen des suprarénaux, et en particulier jusque versle 10° segment à partir de l’axillaire, le nombre total des segments de la cavité abdominale étant de 29. Chez cette espèce, l’interrénal forme un long cordon présentant des renflements fusiformes, reliés entre eux par des filaments três grêles de la même substance. Il peut arriver que le cordon se rompe par places, donnant lieu à une fragmentation que nous trouverons très fréquente chez les Raies. Et dans ce cas, les différents fragments sont placés, ou bien dans la conti- nuité les uns des autres, ou bien les extrémités voisines de deux frag- ments peuvent chevaucher l’une sur l’autre. Lorsqu'il en est ainsi On a, sur une coupe transversale faite à ce niveau, deux interrénaux voisins, ce qui rappelle la disposition paire de ces organes chez certaines Raies, et aussi, il importe de s’en souvenir, la disposition embryonnaire de ces corps, qui sont primitivement pairs comme l’a indiqué VAN WUHE | 89, p. 500]. Chez Scyllium, eten général dans les espèces où les bords internes du rein se touchent sur la ligne médiane, la partie postérieure de l’interrénal disparaît, cachée sous la partie fusionnée des deux reins, et n’est pas immédiatement visible lorsqu'on examine les organes en place. On ne voit apparaître l'interrénal qu'à partir du point où les deux reins s’écartent l’un de l’autre, et encore faut-il souvent pour le distinguer sur le frais, ouvrir les veines cardinales derrière lesquelles il est placé, ou bien à la partie postérieure, la veine impaire qui les remplace (veine interrénale). Pour se rendre un compte exact des rapports anatomiques de cet organe, il est bon d'examiner des coupes transversales de la cavité abdominale faites en série. Au niveau de la partie postérieure de cette cavité, le corps interrénal siège dans une masse de tissu conjoncif située en arrière des reins, au-devant de l'aorte, et limitée de chaque côté par les veines de Jacobson. Ce rapport explique pourquoi, lorsqu'on détache les reins de la paroi abdominale en enlevant avec eux l'aorte, on voit immédiatement le corps interrénal très facilement reconnaissable à sa couleur jaune clair. Chez d’autres Squales au lieu d’être contenu dans le tissu conjonctif post-rénal et pré-aortique, l'interrénal s'enfonce au contraire entre les deux reins. Aussi lorsqu'on fait la préparation indiquée plus haut, c’est-à-dire lorsqu'on enlève les reins et l'aorte, et qu'on les examine par la face postérieure, l’interrénal est invi- 102 ED. GRYNFELTT. sible. Cette disposition est particulièrement nette chez Hexanchus griseus où pour trouver l’interrénal il faut inciser les reins suivant la ligne de leur fusion sur une épaisseur assez grande. En avant, lorsque les deux veines cardinales deviennent distinctes, l'interrénal se place non pas, comme on pourrait le penser dans l'épais- seurs même de la cloison qui les sépare l’une de l’autre, ou tout au moins au niveau de l'implantation de cette cloison au-devant de l'aorte c’est-à-dire en un mot sur la ligne médiane, mais il est toujours plus ou moins déjeté à droite ou à gauche, derrière l’une des deux cardi- nales (fig. 3, PL II). De là l'indication d’inciser la paroi antérieure ventrale de ces veines pour apercevoir le corps sur frais. La disposition de l’interrénal en cordon allongé est, comme l’a fait remarquer DIAMARE | 96, p. 6], la plus fréquente chez les Squales. Toutefois dans le genre Squatina, qui à ce point de vue peut être considéré comme une transition vers les Raies, le corps interrénal est beaucoup plus court, beaucoup plus ramassé, et présente une série de lobes extérieurs assez marqués. Il est situé non sur la ligne médiane, mais à droite ou à gauche, contre le rein corres- pondant. CORPS INTERRENAUX CHEZ LES RAIES. Chez les Raies, le corps interrénal ne présente jamais la forme d'un cordon allongé s'étendant sur une grande longueur de la cavité abdominale. Il est le plus souvent réduit à une masse de forme arrondie ou ovalaire qui siège d’un côté dela ligne médiane, contre le bord interne des reins (par exemple Trygon violaceus, fig. 26, PI. 1 in Diamare [96]. D’autrefois, ce corps est représenté par deux moitiés situées à droite et à gauche de la ligne médiane, le plus souvent à des hauteurs différentes, et qui peuvent s’unir parfois par un pont de substance interrénale de manière à prendre la forme d’une haltère qui coupe un peu obliquement l'axe de l'animal (Raja asterias, Myliobatisaquila in DiamMARE | 6, fig.22 et28, PI. 11). De son côté SWALE ViNCENT, [97, PI. x, fig. 6] a représenté un cas où le corps interrénal était formé de deux bandes situées de part et d’autre de la ligne médiane, mais inégalement développées en longueur, réunies l’une à l’autre par une bande transversale, de telle façon que l’ensemble du corps avait à peu près la forme d’un H irrégulier. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 103 D'après les recherches que j'ai faites, la dualité de l’interrénal est de beaucoup le cas le plus fréquent chez les Raïes, et si elle a échappé aux observa- teurs dans quelques espèces comme T7ygon pastinac«, Torpedo marmorata, c'est que les deux parties droite et gauche sont parfois d’une inégalité telle que l’atten- tion étant détournée par un corps unilatéral bien développé et très visible à l’œil nu, on laisse échapper de tous petits corps iden- tiques, quelquefois à peine visibles, qui sont placés de l’autre côté. En réalité, comme le montrent les AR FiG. 11. — Corps interrénaux chez Trygon schémas ci-joint, les corps pastinaca. — ci, corps interrénaux ; interrénaux peuvent être r., rein. représentés de la manière suivante chez les diverses Raies. Tantôt on distingue un gros corps interrénal unilatéral qui peut être placé soit à droite soit à gauche, et de l’autre côté, à une hauteur différente, un ou deux petits corps interrénaux arrondis. Il en est ainsi, par exemple, chez les Torpedo, Myliobatis et Trygon. D’autrefois, comme chez Raja puncltata el Raja clavata, les corps interrénaux sont représentés par une série de nodules irréguliers de forme, de volume et de nombre, qui sont placés à droite et à gauche sur le bord interne des reins corres- pondants. Dans tous les cas, aussi bien chez Raja que dans les autres genres, à côté des corps quiontété représentés dans les dessins, il en existe d’autres de même nature, mais de taille si petite qu'ils sont à peine visibles à l’œil nu et qui ne sauraient être représentés distinctement sur nos figures. J'ai observé comme SWALE VINCENT et DIAMARE l'union des corps interrénaux de droite et de gauche sur la ligne médiane chez Raja punctata. Mais parfois cette union n’est qu’appa- rente et ne consiste que dans la fusion des capsules connectives des deux corps. ex 104 ED. GRYNFELITT. Signalons aussi, que chez Lœviraja oæyrynchus, DIAMARE [96, p. 71 trouve que l’interrénal allongé en cordon constitue une Fi. 12. — Corps interrénaux chez les Raies (schéma). — A, Myliobatis aquila; B, Torpedo marmorata; C, Raja clavata; D, Raja punctata ; C.i., COrps interrénaux ; r., rein. forme de passage entre la disposition de cet organe chez les Raïes et celle qu'il présente chez les Squales. Il faut remarquer cependant ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 105 que sa fig. 27, PL IT représentant cette disposition n'est pas en faveur de sa manière de voir, si on la compare avec la fig. 19 de la même planche représentant l'interrénal de Scyllium canicula. Dans ce dernier cas en effet l’interrénal s'étend fort loin en avant même au niveau du point où les reins s’effilent et deviennent très grêles. Chez Lœviraja, au contraire, l'interrénal est très exactement limité à la portion postérieure des reins et ne s'étend pas sur plus du quart de la longueur de ces derniers, bien qu'eux-mêmes conservent sur toute cette longueur un développement assez considérable. RAPPORTS ET CONNEXIONS VASCULAIRES. Existe-t-il, comme le pense DIAMARE [96, p. 7], un rapport entre la forme des reins et celle de l’interrénal, ce dernier étant allongé dans le cas où le rein s'étend dans une grande longueur, ou bien au contraire globuleux et ramassé sur lui-même là où le rein est large et court. Cela paraît évident d’une manière générale. Mais il ne faudrait pas attribuer à ce rapprochement trop d'importance et il importe de se rappeler à ce sujet que chez Trygon et Torpedo le corps interrénal est court, ramassé placé principalement à la partie postérieure des reins, tandis que chez Raja asterias, il s'étend beaucoup plus en avant le long du bord interne des reins. La diffé- rence de forme du rein entre ces deux genres n’est pas telle que cette disposition différente des interrénaux en découle naturellement et 1l y a certainement quelque chose de plus que la forme extérieure du rein dans les raisons qui déterminent la disposition anatomique de l'interrénal. Il n’est pas aisé de voir quels sont les facteurs qui ont pu ici produire les dispositions particulières. On a vu à propos des suprarénaux comment la situation et le nombre de ces derniers ont élé influencés par la disposition des vaisseaux sanguins. Ici, en l’absence de connexions vasculaires aussi importantes que celles des suprarénaux, on ne peut proposer aucune hypothèse pour expliquer la disposition qui vient d’être indiquée. Toutefois si l’on se souvient des données embryologiques de VAN WUBE [89, p. 500] d’après lesquelles le corps interrénal proviendrait d'ébauches primitivement paires et métamériques, on voit que la disposition du corps interrénal chez les Raies, et en particulier celle qu'il offre chez Raja punctata, chez laquelle il est représenté par plusieurs petits corps situés à droile et à gauche de la 106 ED. GRYNFELTT. ligne médiane, à des hauteurs variables, il est vrai, et en nombre inégal pour les deux côtés, on voit dis-je, que dans ce cas la disposition paraît plus voisine de l’état primitif qu'elle ne l’est chez les autres Raies, et surtout chez les Squales. Nous avons dit que chez les Raïes le corps interrénal est en réalité représenté par un nombre variable de petits nodules distincts présentant tous la même structure et placés à droite et à gauche de la ligne médiane. La disposition qu'il offre chez les Squales, bien qu'apparemment très différente, semble cependant pouvoir être rapprochée elle aussi d’une disposition primitive paire. En effet, le corps interrénal de ces animaux, bien que paraissant constitué le plus souvent par un cordon continu impair et médian, est souvent aussi fragmenté en plusieurs segments. Il y a donc déjà dans ce cas des nodules interrénaux distincts. Mais il arrive aussi comme nous l'avons vu plus haut que les deux extrémités voisines de deux de ces segments consécutifs chevauchent l’une sur l'autre sur une plus ou moins grande longueur, et dans ce cas, sur une coupe transversale de l’animal faite à ce niveau, on rencontrerait deux corps interrénaux de part et d'autre de la ligne médiane, comme chez les Raies. Chez les Raïies, où l’interrénal est le plus souvent représenté par des corps pairs, il peut arriver qu’un de ces corps soit juxtaposé à un suprarénal du même côté. Mais ce n'est là qu'un accolement fortuit; il n’y a pas continuité des deux substances et jamais ces deux sortes d'organes ne passent l’un dans l’autre, contrairement à ce qu'a écrit SEMPER [75, p. 228]. Les interrénaux ne contractent non plus aucun rapport étroit avec les ganglions sympathiques, et si l'on peut observer dans certains cas un accolement entre ces deux sortes d'organes, ce rapport n'offre pas plus de signification que celui des corps suprarénaux rappelé ci-dessus. On sait que le sympathique peut envoyer à l’'interrénal de minces filets qui courent à sa surface et suivent les vaisseaux dans la profondeur de l’organe (DIAMARE [96, p. 10]). Les interrénaux ne sont pas comme les suprarénaux placés sur le trajet des artères segmentaires. Ils reçoivent leur vascularisation de diverses sources. Chez les Squales, où ils forment un long cordon impair, mince, on voit que ce dernier présente sur toute sa longueur une petite artériole extrêmement grêle placée sur un de ses bords ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 107 et qui court parallèlement à lui un peu en dehors de sa capsule connective. Cette artériole, qui existe même aux endroits où le corps interrénal est très effilé, résulte de la fusion dans le sens longitudinal des branches de petites artères placées latéralement el qui constituent les véritables origines de la vascularisation du corps. Ces branches artérielles d'origine sont peu nombreuses, même dans le cas où l'interrénal est très long, comme chez Scyllium, et leur nombre est toujours inférieur à celui des paires d’artères segmentaires correspon - dantes. Ces artères viennent de deux sources : les unes (7.c.i. de la fig. 13 du texte) naissent d’artères segmen- taires, un peu en dedans du point où est placé le suprarénal, puis elles se portent transversalement en dedans et arrivées sur le corps interrénal elles se bifurquent, de telle manière que leurs deux branches de bifurca- tion, placées dans le prolongement l’une de l’autre, forment comme la barre transversale d'un T dont l'artère d'origine constituerait la branche verticale. Ces deux branches de bifur- calion forment ainsi une partie plus ou moins étendue de l’artériole longi- tudinale dont nous avons parlé plus Fig. 13. — Vascularisation de haut. D’autres branches naissent d’une RE as Scyllium « , ps L canicutæ (SCheEMA). — 4a.m., __ mésentérique (am. fig. 18) et artère mésentérique donnant arrivées sur le corps interrénal se une branche pour le corps comportent comme les précédentes. interrénal; c.i., corps inter- - : ; « rénal; r.c.i., rameaux d IL arrive parfois qu'une artère venue A SU td. corps interrénal venant des d’une intercostale #borde l’interrénal ntercos Ales, d'un côté, tandis qu'une branche d'une mésentérique l'aborde de l’autre côté, sur l'extrémité opposée du même diamètre. Dans ce cas, ces deux branches se comportant suivant la règle énoncée plus haut, il en résulte qu'il y a deux 108 ED. GRYNFELTT, artérioles longitudinales parallèles au corps sur ce point (voyez la partie inférieure de la fig. 13 du texte). Dans les cas où l’interrénal est formé de masses globuleuses, simples ou multiples, mais non reliées entre elles par un cordon, comme c’est le cas chez les Raies (Torpedo marmorata, Trygon pastinaca), chacune de ces masses reçoit une artériole émanée de l’intercostale la plus voisine et qui pénètre dans l'intérieur du corps pour s’y capillariser aussitôt. Bien entendu il n'y a pas dans ce cas de petites artérioles satellites du corps. Il résulte de cette description que le nombre des artères desti- nées à l'interrénal est absolument irrégulier, que jamais deux artères paires ne se rencontrent à un même niveau pour fournir à l'inter- rénal, mais que tantôt il reçoit une branche d’une intercostale droite, puis, un peu plus en avant ou plus en arrière, une branche venue d'une intercostale gauche, enfin qu’il peut même être irrigué par des vaisseaux qui appartiennent à un tout autre système que celui des vaisseaux segmentaires (vaisseaux mésentériques). Par consé- quent l’interrénal se trouve au point de vue de sa vascularisation dans des conditions tout à fait différentes de celles qu'ont présenté les suprarénaux, puisque ses artères ne sont ni segmentaires ni en nombre exactement correspondant à celui des renflements qu'il offre, et que l’on pourrait considérer jusqu'à un certain point de vue comme les représentants des interrénaux isolés des Raies. On peut voir même chez Scyllium que très souvent les artères d’origine n'existent pas au niveau des renflements du corps, mais bien dans l'intervalle de ces derniers, au niveau de ses parties les plus rétrécies, réduites à un filament d’une minceur extrême. En somme, il n'y a là aucun des rapports essentiels et fonda- mentaux que nous avons trouvés à propos des suprarénaux entre les corps et les vaisseaux. L’interrénal, si vraiment il provient d’ébauches mélamériques nombreuses, a perdu à un bien plus haut degré que les suprarénaux toute trace de celte constitution primi- tive. L’interrénal ne présente pas non plus les rapports étroits qu'offrent les suprarénaux avec les veines cardinales. Lorsqu'il est plongé dans la substance du rein, comme chez Hexanchus griseus, il est évidemment entouré de toutes parts par les larges capillaires veineux de cet organe. Dans les autres cas il est siluë dans le tissu conjonclif placé en arrière des veines cardinales, et séparé de l’une ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 109 ou de l’autre de ces veines par une lame de tissu conjonclif qui peut être parfois extrêmement mince, comme on le voit sur des embryons déjà assez développés de Torpedo marimorata (embryons de 38 millimètres). Mais même dans ce cas, jamais l’interrénal ne fait saillie dans la veine cardinale correspondante, comme cela se rencontre pour les suprarénaux antérieurs, et les rapports avec les veines sont évidemment beaucoup moins étroits. L’interrénal ne possède pas non plus de capsule veineuse dépendant du système porte rénal, comme nous l'avons vu au contraire dans les suprarénaux. À propos de ces derniers, j'ai fait remarquer que JOURDAIN [59, p. 327] représente seulement le corps interrénal comme l'équivalent des capsules surrénales des Vertébrés supé- rieurs. Or sur sa fig. 2, PI. VI, il indique des branches veineuses qui, partant du rein, se ramifieraient dans l’interrénal pour en ressortir sur le côté opposé à l’état de veinules qui déboucheraient dans la veine cardinale correspondante. Il y aurait donc ainsi au niveau de ces corps une circulation veineuse porte constituant un petit système porte suprarénal d’après Jourpain [59, p. 328]. Les injec- tions que j'ai faites infirment cette manière de voir. Le sang qui traverse l’interrénal lui est apporté par les artères dont il a été question plus haut, et il n’en reçoit pas d’autres sources. Il n’y a donc pas de système porte interrénal à proprement parler et de plus il n’y a pas autour de l’interrénal cette enveloppe veineuse, dépendance du système porte rénal, qui existe au niveau des corps supra- rénaux. APPENDICE BIBLIOGRAPHIQUE Les données sur l'anatomie des corps interrénaux sont beaucoup moins nombreuses et beaucoup moins précises que celles ayant trait aux corps suprarénaux. La plupart des auteurs se sont contentés de signaler la présence de ces corps, mais ne se sont pas préoccupés de leurs connexions. On n’a pas recherché les sources de leur vascularisalion ni leurs rapports avec les grands vaisseaux veineux. Enfin à cause de l'emploi d’un même mot, celui de corps ou d'organes surrénaux, pour désigner l’interrénal et le suprarénal à la fois, il est résulté des confusions qui rendent très pénible la lecture de certains auteurs, notamment celle de Srannius que BaLrouR déclarait déjà peu compréhensible (not quite intelligible) et qui a paru si peu 110 ED. GRYNFELTT. clair à SWALE VINCENT que ce dernier considère l'expression de BALFOUR Comme un euphémisme. Le premier auteur qui ait fait mention de l’interrénal est RETzIUs. En 1819, il signale sa présence chez Squalus glaucus, Squalus acan- thias, Raja clavata, Raja fullonica et Raja batis. STaNNIUS | 39] découvrit, chez les Poissons osseux, des corps qu'il appela corps surrénaux et qu'il compara aux organes de même nom chez les Vertébrés supérieurs. Mais il ne s’occupa pas dans ce mémoire.des Sélaciens ; néanmoins comme il a pris une certaine part à la découverte des organes surrénaux chez les Poissons, y compris les Sélaciens, ainsi qu'on le verra à propos d’un de ses mémoires ultérieurs, il importe de citer dans l’ordre chronologique les différentes contributions qu'il a pu apporter à ce sujet, afin d'éviter des confusions qui ne manqueraient pas de se produire, qui se sont produites déjà du reste, rendant si difficile la lecture de l'historique de cette question dans certains âuteurs. Pour la même raison, je citerai aussi ECKkER |[47, p. 111 | qui a fait une étude des corps surrénaux chez les Poissons, mais seulement chez les Téléos- téens (Saumon et Brochet). Sranxius en 1846 décrivit les organes surrénaux chez les Poissons cartilagineux et chez les Poissons osseux. Mais il ne parle pour les premiers que de l’interrénal, les suprarénaux lui demeu- rérent encore inconnus. Ensuite parut le travail de LeypiG [51] qui signala pour la première fois les corps suprarénaux segmentaires et où il mentionna à peine l’interrénal (p. 264.) Mais il décrivit ultérieurement [52], avec plus de détails, le corps interrénal déjà connu depuis RETZIUS [19] et fit remarquer sa forme allongée chez Scymmus lichia, en opposition avec la forme plus arrondie chez Torpedo et morcelée chez Raja (p.71). Dans ce mémoire, LEYDIG, influencé surtout par l'abondance de la graisse dans l’interrénal, ne le considère pas commel’homologue dela capsule surrénale des Vertébrés supérieurs, mais plutôt comme celui du corps adipeux des Amphibiens ; pour lui, ce sont les corps pairs qu’il avait découverts l’année précédente (corps suprarénaux) qui représentaient la capsule surrénale des Sélaciens (p. 17). Dans un mémoire un peu postérieur [53], le même auteur revient sur cette opinion pour l’abandonner. Ayant vu chez les Amphibiens, les corps annexés aux ganglions du sympathique et comparables ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 111 aux suprarénaux des Sélaciens devenir plus volumineux au niveau des reins, et se continuer avec la bande jaune placée sur les reins (qui correspond à ce que l’on appelait jusqu'alors les capsules surré- nales), LEYDIG se convainquit que les bandes jaune ocre et les corps de même couleur des Raies et desSquales devaient être regardéescomme les capsules surrénales (p. 14). Comparant plus loin les capsules surrénales des Poissons cartilagineux et des Reptiles nus avec celles des Mammifères, il dit que les capsules surrénales jaune d’ocre des Poissons et des Amphibiens correspondent à la substance corticale des capsules surrénales des Mammifères, tandis que la substance médulaire des capsules de ces derniers est représentée par les vésicules qu’il a découvertes chez les Plagiostomes et chez les Reptiles, et quisont des parties du sympathique, se continuant dans la substance jaune déjà connue comme capsules surrénales (p. 104). STANNIUS [54], dans la 2° édition de son Manuel de Zootomie tenant compte de la découverte des corps pairs par LEYDbIG signale l'existence de ces derniers. Mais sa description est peu claire, comme on l’a vu plus haut. JourDAIN [59], dans une figure empruntée avec quelques modifi- cations à un album de CH. RoBix, représente le corps interrénal de Raja clavata vu par la face supérieure ou dorsale. C’est une des meilleures figures que nous possédions de cet organe. On voit que l'interrénal consiste en cinq fragments distincts, arrondis ou ovoïdes, les postérieurs plus courts, les antérieurs plus allongés, placés entre le bord interne du rein et la veine cardinale correspon- dante. Le plus antérieur de ces amas arrive à peu près en avant jusqu'à la moitié antérieure des reins (fig. 2, PI. VI). SEMPER |[75, p. 228] précise bien la situation de l’interrénal à la la portion postérieure des deux reins, entre la veine caudale impaire et l'aorte. On a vu d'autre part qu'il a faussement cru à une conti- nuité de substance entre l’interrénal et les suprarénaux. BALFOUR [78, p. 244] ne donne aucune indication nouvelle sur l'anatomie de l’interrénal dont il ne parle du reste que brièvement. CHEVREL |89 | représente très exactement la forme de l’interrénal chez un Scyllium | PI. I, fig. 2]. Il a noté la fragmentation possible de son extrémité antérieure en petits îlots distincts. Chez les Rayidés il signale la forme de l’interrénal en petites masses isolées, rejetées tantôt sur la face interne du rein droit, tantôt sur celle du rein gauche [p. 57]. 112 ED. GRYNFELITT. Les recherches de Perrir [96] sont venues confirmer et préciser les données précédemment acquises sur l'anatomie du corps inler- rénal (p. 83). DramaRE [96] a décrit avec beaucoup de détails la forme extérieure et la disposition de l’interrénal chez un assez grand nombre d'espèces. C’est lui qui le premier a accordé toute son importance au groupe- ment des différentes formes de l’interrénal en deux types principaux : 1° le type allongé et impair des Squales ; 2° le type globuleux et pair chez les Rajidés. Il a même noté des variations nombreuses de ces deux types, surtout du second, qu'il a représentées dans un certain nombre d'espèces (p.6 et7 et PI. IT). C’esten somme le travail le plus complet que l’on possède sur la question. SwALE VIiNcENT [97, p.53] et Koun [99, p. 291] ont donné une bonne description de la disposition générale de ces organes chez les Squales et les Raies, mais ils ont peu insisté sur leur anatomie et se sont surtout attachés à leur étude histologique. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 113 CHAPITRE IL HISTOLOGIE DES CORPS INTERRÉNAUX. Pour l'étude de l’interrénal comme pour celle des suprarénaux il importe de se servir de matériel aussi frais que possible, et de fixateurs énergiques. Ceux qui m'ont donné les meilleurs résultats sont en première ligne le liquide de Flemming et le liquide J. de Laguesse, puis les liqueurs de Zenker, de Tellyesniczki, de Bouin. Commele liquide de Müller ne fournit aucune réaction spécifique pour l'interrénal, je ne m'en suis pas servi. Le liquide de Flemming colore très énergiquement l’interrénal en noir. Il en est de même d’une manière générale pour les autres composés osmiques, bien que la substance qu'ils colorent en noir se comporte un peu différemment, après la fixation, dans le lavage par les essences. Ainsi, après le liquide de Cajal, il est très difficile de dissoudre par l'essence de girofles, de bergamotte, d’origan, etc., la substance colorée en noir pendant la fixation, ce qui n'arrive pas après la fixation au liquide de Flemming. Pour la fixation de l’interrénal le liquide de Flemming est tout particulièrement recommandable. Après son action, j'ai monté les coupes dans le baume, soit en conservant la matière teinte en noir, soit en la dissolvant au préalable par des essences. J'ai monté aussi un certain nombre de coupes dans la glycérine, afin de conserver d'une manière certaine la substance teinte en noir par l'osmium. Cette substance, bien que parfois très abondante, ne gène pas pour l'interprétation descoupes, lorsquecelles-cisontsuffisammentminces et aussi lorsqu'on peut contrôler les résultats qu’elles donnent à l’aide de coupes voisines de la série montées sur d’autres lames et dans lesquelles la substance noire a été dissoute. Les meilleures colorations après l'emploi du liquide de Flemming sont: 1° la safra- nine, le violet de gentiane et l'orange ; 2° la safranine et le vert lumière ; 3 la safranine différenciée par l'acide picrique en solution alcoolique très étendue, ce qui permet de conduire très graduel- lement la différenciation, que l’on arrête ensuite au point voulu par un lavage à l'alcool pur. Après le liquide de Zenker, on peut employer avec succès l'héma- (s) 114 ED. GRYNFELTI. téine et l’éosine, et surtout l’hématoxyline au fer qui donne aussi d'excellents résultats avec toutes les autres fixations, sauf le liquide de Flemming, à cause de la teinte noire accusée que présentent déjà les préparations. Le liquide de Tellyesniczki donne aussi d'assez bons résultats, et il permet notamment de faire ensuite la recherche des variations de chromaticité des noyaux, suivant la méthode de Rabl. STRUCTURE Les corps interrénaux présentent une capsule connective mince n’envoyant pas de septa ni de travées à l’intérieur du corps; puis une substance propre avec de nombreux vaisseaux capillaires sanguins, quelques nerfs et même quelques cellules nerveuses gan- glionnaires rares, sur lesquelles nous reviendrons. La capsule conjonctive est extrêmement mince là où le corps est libre et non accolé à un organe voisin. Dans ce dernier cas, en effet, sa capsule s’unissant à celle de l'organe en question, il est assez difficile de la limiter et de voir ce qui lui appartient en propre. Cette capsule n’émet absolument aucune travée connective ni aucune cloison dans l’intérieur du corps interrénal ; du moins en est-il ainsi cans la plupart des espèces de petite taille (Scyllium, Acanthias, Mustelus, etc." ) et à interrénal allongé en cordons. Ilen est de même aussi lorsque le corps est globuleux et ramassé sur lui-même, comme chez Squatina, Trygon, Torpedo, Myliobatis, etc. Pourtant chez quelques espèces de grande taille, telles que Car- charias glaucus, Zygæna malleus, le corps interrénal renferme dans son épaisseur une sorte d’axe connectif formé par une quantité variable de tissu fibreux entourant quelques vaisseaux assez volumineux et notamment des artères munies d’une tunique mus- culaire, autour desquelles se disposent des veines assez larges. Ces dernières toutefois ne possèdent pas de tunique musculaire. Quel- quefois des veines venues des organes voisins rampent à sa surface sur une certaine étendue ; mais ainsi que je l’ai dit plus haut elles ne lui forment jamais une capsule veineuse propre, comme nous l'avons vu pour les suprarénaux. En dehors de ces cas et de quelques autres analogues qu’on pourrait signaler dans d’autres espèces, l’interrénal ne renferme ni tissu conjonctif, ni vaisseaux artériels proprement dits. En effet ses ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 115 artères, qui lui arrivent par sa surface, se transforment, dès qu'elles abordent sa substance, en vaisseaux capillaires qui circulent entre les cordons d’éléments interrénaux. La substance propre est disposée en cordons allongés ou en îlots arrondis qui se continuent les uns avec les autres en formant un lacis inextricable, dans les mailles duquel circulent les vaisseaux capillaires sanguins (fig. 10, PI. IV); ces cordons sont constitués par des cellules épithéliales régulières, à bords nets et bien distincts, munies chacune d’un noyau. La disposition de ces cordons a été étudiée par DramMARE | 96, p.9] qui en distingue deux types principaux : les cordons vrais allongés (Squales) et les vésicules pleines (Raies). Cette division n’est pas absolument exacte et il faut tenir grand compte, pour apprécier la disposition des cellules épithéliales en cordon ou en vésicules, de l’état de vacuité ou de plénitude des vaisseaux. En effet, lorsque ces derniers sont dilatés, les groupes épithéliaux entre lesquels ils courent, beaucoup mieux isolés les uns des autres, prennent la forme de vésicules ou de nodules assez dis- tincts. Lorsque les vaisseaux sont au contraire vides et que leurs parois sont affaissées, l'aspect général est moins nodulaire et passe plus facilement à celui de rangées cellulaires ou de cordons. Examinons de plus près la constitution de ces cordons ou de ces travées de cellules épithéliales. Pour cela les préparations faites après le liquide de Flemming fournissent d'excellents objets d'étude. On voit que les cordons de cellules épithéliales sont limités par des lignes nettes, teintes en vert après le vert lumière, en jaune orange après l'orange, en rouge par l’éosine. On considère en général ces lignes comme répondant à l’endothélium des vaisseau x sanguins, et de fait cet endothélium s'applique si étroitement contre les travées cellulaires qu'il est difficile de voir si celles-ci possèdent véritable- mentune paroi prope. + En observant des coupes faites chez Centrina vulpecula après le liquide de Flemming, j'ai pu voir des figures qui ne laissent subsister aucun doute à ce sujet, et qui montrent clairement l'existence d’une membrane propre, en dehors de l’endothélium. En effet, si l’on examine les cordons cellulaires situés immédiatement en dedans de l’enveloppe connective de l'organe et en contact avec cette dernière, c’est-à-dire dans les points où ces cordons ne sont pas séparés de l'enveloppe par des vaisseaux sanguins, on peut voir par places et plus nettement encore au niveau des points où la rangée 116 ED. GRYNFELTT. des cellules a été partiellement détachée de la membrane sur laquelle elle repose, l'enveloppe connective doublée en dedans par une ligne très mince, réfrigente, se colorant d'une manière un peu plus forte que le tissu conjonctif, et qui n’est autre chose que la membrane d’enveloppe (fig. 18, PI. VI). Dans la coloration par la safranine et le vert lumière cette membrane se teint en vert olive très distinct du vert clair que prend le tissu conjonctif. On la voil parfois aussi détachée de la face interne de l'enveloppe connective, former une série de petits plis au niveau desquels son existence ne peut laisser de doute. Lorsqu'on l’a ainsi aperçue dans des points où elle ne peut être confondue avec l'endothélium vasculaire, puisque celui-ci n’existe pas, on sait aisément laretrouverailleurs, notamment dans les espèces où les cellules sont bien développées et où les cordons qu’elles forment sont assez volumineux comme chez Myliobatis, Centrina. Cette membrane propre forme par places des cloisons de refend qui pénètrent à une certaine profondeur dans les cordons cellulaires et les découpent plus où moins régulièrement, de telle façon que ces cordons semblent quelquefois dédoublés sur une partie de leur longueur et constituer des sortes d'U, qui peuvent se continuer à leurs deux extrémités avec d’autres U renversés et former ainsi des travées entrelacées en zigzag d’une façon très remarquable, comme cela se voit par exemple chez Centrina. On peut trouver aussi un amas de cellules épithéliales formant sur la coupe un cercle ou un ovale d'assez grande taille, entouré de toutes parts par la membrane propre doublée de l’endothélium vasculaire, el présentant en son milieu une ligne de refend n'’attei- gnant nulle part son contour. Cette disposition très fréquente chez le Myliobate (fig. 22, PL. VII) s'explique très aisément lorsqu'on connait ce mode de cloisonnement secondaire, tandis qu'il ne se comprend pas si l’on ne lient compte que des vaisseaux pour établir les limites des cordons. On verra du reste plus loin quel rôle jouent les vaisseaux, conjointement avec les cloisons de refend formées par la membrane propre, dans l'orientation des cordons épithéliaux. Les cellules épithéliales sont assez régulièrement rangées au sein des travées limitées par leurs membranes propres el par les vais- seaux. Lorsque ces travées sont peu épaisses, elles sont formées simplement par une double rangée de cellules, ou plus exactement par une couronne régulière de cellules disposées en rayonnant ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 117 autour de l’axe de la travée. Lorsqu'on voit cette dernière sur une coupe bien perpendiculaire à son axe, elle à la forme d’un cercle, et les cellules disposées radialement, ont leur sommet au centre de ce cercle, leur base à la périphérie. Dans ce cas il n’est pas rare de trouverexaclement au centre de la travée un petit espace vide formant une sorle de lumière glandulaire (?, fig. 22, PI. VII), limitée par les bords internes des cellules épithéliales convergeant vers elles. Il ne s’agit pas à proprement parler d’une lumière glandulaire, car elle ne se poursuit pas régulièrement sur toute la longueur dela travée ou du cordon dans lequel elle est située. Il faut plutôt la considérer comme un petit vide artificiellement produit par la rétraction due à l’action des réactifs, et qui apparaît seulement là où il yaun centre commun à un certain nombre de cellules régulièrement rangécs autour de lui. Dans ce cas, en effet, chaque cellule se rétractant d’une manière à peu près égale, il se produit une disloca- tion de ces cellules au niveau de leur point commun de convergence, qui donne lieu à la formation de celte pseudo-lumière. Si au lieu d’une convergence régulière autour d’un point il y a un entrelace- ment des extrémités des cellules, ou bien un mélange de parties cellulaires larges avec d’autres parties cellulaires effilées, la dislocation ne se fait plus de la même manière ni au même point, et il ne se forme pas de vide pouvant simuler une cavité glandulaire. En tout cas ces sortes de petites lumières au sein des cordons ne sont pas rares. On les constate régulièrement dans les travées coupées perpendiculairement à leur axe, dans les pièces bien fixées, et elles ont une certaine importance, en ce qu'elles indivi- dualisent en quelque sorte la travée cellulaire dans laquelle elles existent en indiquant son centre et en établissant ses parois épithé- liales. De plus, elles conduisent à la disposition qui existe dans les corps homologues des Téléostéens, par exemple chez l'Anguille, où, comme l’a montré PETTIT [96, p. 90], on trouve une sorte de cavité ou de lumière glandulaire au centre des éléments de la capsule surrénale. La forme des cellules varie naturellement d’après la situation qu'elles occupent au sein des cordons. Elle n’est pas la même suivant qu’elles appartiennent à la région moyenne d’un cordon de forme régulièrement cylindrique, ou bien qu’elles se trouvent aux points de passage des cordons les uns dans les autres, c’est-à-dire dans des sortes de carrefours épithéliaux occupés par un bien plus grand 118 ED. GRYNFELTT. | nombre de strates cellulaires. Dans certains cas, et notamment chez Acanthias vulgaris, les cordons cellulaires se suivent aisément sur une assez grande longueur. Si les coupes passent bien par leur axe, les cellules prismatiques ou mieux pyramidales hautes, ont leurs noyaux exactement à la même hauteur, de telle sorte qu'ils forment une rangée régulière en dedans du bord de la travée indiquée par l'endothélium vasculaire. Lorsque cette disposition existe, elle donne lieu à des figures très remarquables qui frappent de prime abord et que je devais signaler, d'autant qu’elles se rencontrent chez un animal qu'il est facile de se procurer. Chez Acanthias, en effet, les cordons cellulaires offrent l’aspect de travées régulières, formées de deux rangs de cellules, et limitées suivant leur plus grande longueur par des vaisseaux sanguins, c’est-à-dire présentent la disposition typique des glandes vasculaires sanguines. Les transitions, qui existent chez l’Acanthias entre les cellules régulières et d’autres cellules simplement polygonales, de forme variable, transitions qu’il est très aisé de suivre avec toutes leurs modalités intermédiaires, indiquent bien que l’on n’a des formes régulières, qu’autant que la coupe passe par l’axe d’un cordon également régulier, et qu'il ne faut pas s'attendre à trouver partout dans le corps interrénal des cellules avec la même forme. Mais à part ces variations de contour, le contenu de ces cellules est partout le même, au moins d'une manière générale. Par conséquent toutes les cellules de l’interrénal, quelle que soit leur forme extérieure qui s'adapte à la situation qu’elles occupent dans l’ensemble, sont de même espèce et de même valeur, lors même qu'elles ne sont pas toutes simultanément au même état fonc- tionnel. Il n'existe donc qu'une seule sorte de cellule interrénale. SwaLE VINCENT [97] a figuré (PI. XIII, fig. 43) parmi les cellules des cordons, quelques éléments de même forme, mais présentant un protoplasma plus serré et plus colorable par les réactifs. Il a voulu en faire des sortes de croissants de Gianuzzi, comparables à ceux des glandes muqueuses. Mais ces cellules n’ont rien à faire avec de telles formations, ainsi que l’a fort justement fait observer Koun [99, p. 292]. En effet, lors même que la différence de coloration indiquée par SWALE VINCENT [97, p. 67] aurait une valeur réelle, ce qui n’est pas, la comparaison des cordons glandulaires de l'interrénal avec l’épithélium secréteur d'une glande en grappe ne peut être soutenue. Mais en outre, la différence de colorabilité n’entraîne pas ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 119 une différence spécifique, car elle tient uniquement à la plus ou moins grande abondance d’une substance spéciale dans le proto- plasma. Nous allons décrire cette substance en même temps que certains détails de structure du cytuplasme et des noyaux des cellules de l’interrénal. Cette étude fera l'objet d'un paragraphe spécial. CYTOLOGIE On sait que LevniG [52, p. 72] a décrit, il y a longtemps, dans les cellules de l’interrénal une matière grasse assez abondante. BALFOUR [85, p. 612], qui vit aussi cette substance, ne la considéra pas comme de la graisse. CHEVREL [99, p. 33] parut se ranger à l'opinion de BaLrour et admit que l’acide osmique ne la noircissait pas. Cette réaction, quoique s’opérant d’une façon un peu lente, est cependant très manifeste et a été signalée par Koxn [99, p. 292] qui, comme LeYniG, trouva que les cellules de l’interrénal renfermaient de la graisse. C’est aussi l'opinion de DrAMARE [96, p. 10], qui fait fort Justement observer à ce sujet que les cellules qui renferment les gouttelettes graisseuses sont des éléments épithéliaux actifs et n'ayant pas subi la dégénérescence adipeuse. Comme on le voit, la question de la nature des gouttelettes incluses dans le protoplasma des cellules de l’interrénal a donné lieu à des controverses. Dans le but de la trancher, j'ai cru bon de ne pas m'en rapporter exclusivement aux réactions histochimiques, et j'ai tenu à avoir l'avis d’un chimiste sur ce sujet. M. VILLE, professeur de chimie médicale à l'Université de Montpellier, a bien voulu recher- cher la nature du contenu de ces cellules. Il résulte de ses analyses qu'il s’agit bien là, effectivement, d’une substance graisseuse (1). Je (1) Voici la note qui nous a été communiquée à ce sujet par M. Vice, et M. DERRIEN son préparateur. « Etant donné, la faible masse des organes mis en expérience, dont le poids à l’état frais ne représentait que quelques centigrammes nous avons opéré de la manière suivante: Ces organes ont été mis en digestion, pendant 24 heures, à la température de 37° à 38°, avec deux ou trois centimètres cubes de suc gastrique artificiel. Le produit de cette digestion a été agité dans une boule à décantation avec de l’éther pur. Après décantation, la liqueur éthérée a donné, par évaporation, un faible résidu que l’on a traité par un peu d'’éthylate de sodium pour saponifier les corps gras pouvant y exister. Le liquide résultant de cette opération, additionné de quelques centimètres 120 ED. GRYNFELTT. remercie vivement M. VILLE des résultats qu'il m'a communiqués et qui mettront fin aux incertitudes que les travaux des histologistes avaient laissé planer sur la question. Cette substance se présente dans le protoplasma cellulaire sous la forme de grains noirs, de dimensions très variables, depuis l’état de granulations extrêmement fines à peine visibles avec l’aide d’un objectif à immersion jusqu'à celui de goutteleties graisseuses pouvant atteindre et même dépasser le volume du noyau (fig. 21, PI. VII). Ces granulations siègent de préférence à la périphérie des cordons, de telle sorte que sur les coupes transversales ceux-ci paraissent limités par une écorce noire, tandis que leur centre, occupé par les noyaux qui s’y sont réfugiés, est en majeure partie clair, à cause de la présence de ces derniers et ne renferme que quelques granulations noires très fines. Cette substance ne se trouve pas toujours en aussi grande quantité au sein de l’interrénal. Il y a des cas où elle est fort peu abondante. On peut la trouver aussi plus ou moins répandue dans les différents cordons d’une même coupe et aussi dans les différentes cellules d’un même cordon. Lorsqu'on a fait disparaître cette substance par des lavages dans cubes d’eau distillée, a été chauffé au bain-marie bouillant, et la liqueur filtrée, fortement acidulée par de l'acide chlorhydrique, a donné un louche très net, faisant place après quelque temps à un précipité tres apparent ; ce précipité a disparu par agitation avec de l’éther pur, dans une boule à décantation. Nous avons alors séparé, par décantation, la partie éthérée et la partie aqueuse de manière à étudier séparément ces deux liqueurs. A. Liqueur éthérée. — La partie éthérée abandonnée à l’évaporation spontanée a donné un faible résidu formé, d’après l'examen microscopique, par de petites goutte- lettes huileuses (acide oléique), des aiguilles dont certaines réunies en touffes (acide palmitique), et quelques minces lamelles (acide stéarique ?) le tout soluble dans une solution étendue et chaude de potasse caustique. Les acides gras (o/éique, palmitique et stéarique) ainsi mis en évidence ne pouvaient provenir que de la saponification de corps gras contenus dans les organes en question. Cette saponification a du reste été également caractérisée par la présence d’une faible quantité de glycérine dans la partie aqueuse séparée par décantation de la partie éthérée. B. Ziqueur aqueuse. — En effet, cette partie aqueuse, évaporée dans l'air sec, au- dessus de l'acide sulfurique, a donné un faible résidu lequel chauffé avec du bisulfite de potassium, a laissé percevoir d'une manière très nette l'odeur caractéristique d’acroléine. D'après ces essais nous pouvons conclure à la présence de corps gras dans les organes mis en expérience ». ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 121 les essences, la place qu’elle occupait dans le protoplasma est représentée par des vacuoles vides au sein de ce dernier. Les cellules qui renferment beaucoup de graisse et offrent par suile beaucoup de vacuoles, sont pauvres en protoplasme, claires et peu colorées, tandis que les cellules plus pauvres en substance grais- seuse sont plus riches en protoplasme et plus colorables. C'est là ce qu'a vu SWwALE VINCENT [97, p.67], mais cette apparence ne peut pas faire conclure à l’existence de deux cellules spécifique- ment distinctes. Dans les cellules ainsi privées de leur graisse, j'ai vu quelquefois, et notamment chez Zygæna malleus, dans l'épaisseur des travées protoplasmiques séparant les vacuoles, de petits grains ou même de petites boules colorables par la safranine et en nombre variable (fig. 13, PI. V). Chacun de ces grains est placé au sein d’une vacuole claire, très peu développée. Leurs dimensions sont extrêmement variables et vont depuis celles d'une granulation protoplasmique à peine visible, jusqu'à celle de petites boules mesurant au moins 2 ou 3 d'épaisseur. Ces grains ou ces boules sont certainement des produits de sécrétion, Mais il m'a été impossible pour le moment de déterminer exactement leur rôle et leur valeur. Les noyaux des cellules de l’interrénal sont de forme régulière, arrondie, pourvus de fines granulations chromatiques et d'un nucléole arrondi placé un peu en dehors du centre. Ces noyaux présentent toutefois des différences assez considérables entre eux, suivant l’état de la cellule dans laquelle ils sont placés. Les noyaux régulièrement arrondis dont il a été parlé ci-dessus se rencontrent en général dans les cellules peu chargées de granulations graisseuses. Au contraire, dans les cellules qui renferment de la graisse les noyaux sont plus volumineux, à contours irréguliers comme lobés et même parfois pourvus d’incisures profondes qui paraissent devoir les diviser en deux. Ces modifications de la forme extérieure qui sont extrêmement remarquables sont-elles l'indice du rôle du noyau dans la production de la matière grasse sécrétée ? Cela est fort possible, et il se peut que ces incisures ou ces lobulations du noyau soient destinées à augmenter sa surface et à multiplier ainsi ses points de contact avec le protoplasma. Celte idée, au sujet d’une disposition connue il y a déjà longtemps (NicoLas [92, p. 5921), a été reprise depuis par divers auteurs et notamment par CL. REGAUD [01, p. 301] qui interprète de cette façon les incisures profondes 122 ED. GRYNFELTT. qu'il a observées sur le noyau des cellules de Sertoli dans le testicule. Simultanément avec ces changements de forme, on observe dans le noyau des variations marquées dans la chromaticité. Ainsi on peut remarquer que des noyaux qui prennent mal l'hématéine se colorent au contraire intensément par la safranine, en faisant agir cette coloration après la précédente (coloration de RABL) Toutefois dans certains cas cette variation de la chromaticité ne paraît pas correspondre à un simple stade de l'évolution des cellules pendant le cours de leur fonctionnement, car elle est beaucoup trop prononcée et trop uniformément répandue sur toute l'étendue de l’interrénal. Comme dans ce dernier il y a toujours un certain nombre de cellules à des états de charge divers, si le changement de chromaticité correspondait rigoureusement à un stade défini de la sécrétion, on devrait trouver des variations assez grandes à ce point de vue entre les divers noyaux d’une même coupe. Or il n’en est rien et c’est d’une manière générale que les noyaux se colorent tantôt par la safranine, tantôt par l’hématéine. Cette variation de chromaticité doit donc tenir à une cause générale agissant à la fois sur tout l’interrénal. Elle existe du reste réellement et n’est pas due à une faute de technique, car les organes voisins, qui sont compris dans la même section et qui ont subi comme l’interrénal l’action des mêmes réactifs, ne la présentent pas de la même manière. Ainsi dans le rein on trouve toujours des cellules à noyau hématéiphile en grande abondance, et disséminées entre elles, çà et là, quelques cellules à noyau safranophile, dont la chromatine se présente à des états très divers, jusqu’à former une masse diffuse donnant à toute l'étendue du noyau une coloration rouge, intense, uniforme. Dans ce cas, il est certain que cette variation individuelle du noyau des cellules peut correspondre à un état fonctionnel particulier, comme l'ont signalé, pour divers épithéliums glandulaires, plusieurs auteurs, parmi lesquels je me contenterai de citer HENRY [1900, p. 275] et ReGauD [02, p. 20]. Mais on comprend qu’il ne peut en être ainsi pour l’interrénal, et il faut rechercher sous quelle influence cette variation de chromaticité se produit. Dans ce but, j'ai dressé le tableau exact de l’état où se trouvaient les animaux dont j'ai examiné l’interrénal au point de vue de leur fonction sexuelle, ainsi que je l'avais fait pour le suprarénal, mais je n'ai pu arriver à établir aucune concordance entre l’état de la ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 123 chromaticité et celui de l’activité ou de repos des éléments sexuels. Il y a même lieu de remarquer que l’on trouve parfois dans une méme coupe un suprarénal dont tous les noyaux épithéliaux sont safranophiles, tandis que tous ceux de l’interrénal sont hématéi- philes et que ceux des tubes du rein placés au voisinage présentent à la fois et en proportions diverses ces deux états. Les expériences que j'ai tenté de faire avec la pilocarpine ne m'ont rien donné de particulier à ce point de vue. Je suis donc obligé de signaler simplement cette variation curieuse dans la composition du noyau sans l’interpréter. Il est à peine utile de faire remarquer qu’attachant une grande importance à la détermination précise de la cause de ces phénomènes nucléaires, je me suis mis pour les observer dans les meilleures conditions possibles, c'est-à-dire que les pièces ont été prises sur des animaux vivants, observés en aquarium et gardés dans les grands bacs de la station de Cette, après les injections de pilocarpine qui leur étaient faites. Les fixations étaient obtenues à l’aide du liquide de Zenker ou de Tellyesniezky, et, en même temps que les colorations destinées à montrer l’action de l’hématéine et celle de la safranine, j'ai toujours fait sur un certain nombre de coupes les colorations de contrôle avec les procédés indiqués plus haut (1). On trouve souvent deux ou quelquefois trois noyaux dans quelques cellules de l’interrénal. Ces noyaux dérivent-ils de divisions directes? C’est possible, car en outre des incisures qui ont été signalées plus haut, on aperçoit souvent sur certains noyaux une division en deux moiliés à peu près égales par une sorte de cloison formée par la membrane nucléaire, de telle sorte que l’on pourrait considérer ces figures comme représentant un stade de préparation à une division amitotique. Mais il peut exister des divisions indirectes par caryocinèse dans l'interrénal. J'en ai rencontré à diverses reprises quelques cas rares et isolés, c'est-à-dire représentés par une seule figure de division au milieu d’un cordon ; mais dans un autre cas, observé il (1) Les variations de chromaticité s’observent en réalité après la plupart des réactifs fixateurs et colorants, notamment après le liquide de Flemming et les colorations que l’on emploie d'habitude après l’action de ce fixateur. Mais le meilleur moyen de mettre ces variations en évidence est certainement la méthode de Ras. C’est pour cela que je ne fais allusion ici qu'à cette dernière. 124 ED. GRYNFELTT. est vrai à la suite d'injection de pilocarpine, les mitoses se sont montrées beaucoup plus fréquentes, et en différents points de la coupe on pouvait voir toutes les cellules d’un cordon à divers états de division indirecte et formant comme de petits nids de cellules en voie de reproduction par ce procédé. Cette multiplication est-elle produite à la suite de l’action de la pilocarpine ; c’est possible. Mais il ne faut pas oublier qu’on peut en rencontrer des exemples, beaucoup plus rares à la vérité, chez des individus parfaitement normaux. VAISSEAUX Le réseau vasculaire est extrêmement riche dans le corps interrénal et présente une disposition particulière, caractéristique de ce corps. Les artères lui arrivent par la périphérie et le pénètrent rarement comme telles, c’est-à-dire en gardant leur tunique musculaire dans l'épaisseur du corps. En effet, les cas où l’on trouve au centre de l'organe une ou plusieurs petites artères entourées de tissu conjonctif ne font pas exception à cette loi, en ce sens que celte masse centrale connectivo-vasculaire peut être considérée comme une introflexion de la capsule connective des corps, et dès que les vaisseaux pénètrent entre les éléments de la substance propre de l'organe, ils perdent leur tunique musculaire et se réduisent à l’état de capillaires. Il y a donc là une opposition assez marquée avec les corps suprarénaux, qui se développent toujours autour d'une artère parfaitement caractérisée. La fig. 17, PL. VI, qui représente un corps interrénal de Scyllium calulus injecté au bleu de Prusse, permet de se rendre compte de la disposition des vaisseaux. On voit le long du bord inférieur courir un pelit vaisseau longitudinal qui est une artériole &.i.r. et qui est masqué sur une partie de son trajet par un gros tronc veineux ©. Cette artériole émet des branches, qui pénètrent bientôt dans le corps en se ramifiant et en s’anastomosant à l'infini. Le réseau formé par les capillaires est un réseau serré, à mailles pelites, quadrilatères, avec les angles arrondis qui reflètent bien la forme des cordons épithéliaux de l'organe coupés en travers. De plus, il est facile de voir que certains capillaires poursuivent sur une certaine longueur un trajet principal bien distinct malgré les anastomoses contractéos à leur périphérie et dessinent ainsi des ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 125 figures allongées, répondant aux bords des cordons épithéliaux sur une grande partie de leur longueur. En un mot, on reconnaît par la disposition des vaisseaux l’indication de la distribution des cordons épithéliaux, qui se montrent, on le sait, longés sur leurs côtés par des vaisseaux capillaires qui les suivent sur une grande longueur. Sur leur trajet, ces vaisseaux émettent des branches anastomotiques transversales qui enserrent les cordons dans des cercles capillaires successifs formant des sortes de mailles quadrilatères ou mieux arrondies, que l’on voit en nombre de points. L'opposition est ici très grande entre ces vaisseaux et ceux des suprarénaux. Tandis que ces derniers sont flexueux, en S, el par- courent d'assez longs trajets sans s’anastomoser entre eux, les capillaires de l’interrénal ne présentent sur leur parcours, même lorsqu'ils ont une certaine longueur, que des ondulations peu marquées et s’'anastomosent très fréquemment. Cà et là, au sein du corps interrénal, on voit apparaître des capil- laires de dimension plus grande. Ce sont les voies éfférentes qui se constituent, ce sont les racines des veines. Ces dernières forment des troncs assez volumineux, placés en général au centre du cordon formé par l'interrénal et qu'ils suivent sur une certaine longueur. Puis de distance en distance le tronc veineux central s’infléchit, abandonne l’axe du corps etse dirige obliquement vers la périphérie (v, , fig. 17, PI. IV). Arrivé là il se jette rapidement, après un court trajet, dans la veine cardinale correspondante ; il n’y a jamais à la périphérie de l’interréral de capsule veineuse comparable à celle que l’on rencontre autour des suprarénaux. Par les injections au nitrate d'argent on voit très nettement l'endo- thélium vasculaire appliqué immédiatement contre les cordons épithéliaux. Les contours des cellules endothéliales sont très nettement marqués, au moins dans la plupart des points; et en multipliant les observations de façon à éliminer Les cas où 1l existe çà et là quelque irrégularités dans l’imprégnation, on se convainct aisément qu'il existe partout un endothélium vasculaire bien net. La forme des cellules endothéliales est en général celle d’un polygone allongé dans le sens de l’axe du vaisseau. Leurs contours peuvent être parfois festonnés, mais cela tient uniquement à la rétraclion que les cellules ont subi lorsque les parois du capillaire sont revenues sur elles-mêmes. 126 ED. GRYNFELTT. NERFS Les auteurs ont signalé la présence de quelques filels nerveux très grêles accompagnant les vaisseaux de l’interrénal (DIAMARE, 96, p. 10). J'ai trouvé également sur des coupes, au milieu des cor- dons épithéliaux de cet organe, quelques rares cellules ganglion- naires sympathiques disséminées. Ces cellules ganglionnaires, en petit nombre, sont volumineuses, bien distinctes, et entourées de leur enveloppe endothéliale très reconnaissable à ses noyaux. La présence de ces cellules n’a rien qui doive étonner; elle se rattache à une loi générale, et les éléments nerveux que nous venons de signaler sont tout simplement comparables aux élémentsde même nature que l’on rencontre disséminés sous la forme de tout petits ganglions microscopiques au sein des différents organes (ganglions interstitiels). Par conséquent les interrénaux ont avec le système nerveux des rapports moins étroits que les suprarénaux. Nous avons vu que ces derniers sont très souvent accolés à des ganglions du sympathique et que quelques-uns d’entre eux (ceux qui forment le corps axillaire) sont intimément mêlés à la substance du ganglion. Il n’y à jamais rien de pareil pour les interrénaux, dans la constitution desquels les éléments nerveux ne jouent qu’un rôle très faible et ne se rencontrent qu'à l’état disséminé. La recherche des terminaisons nerveuses dans l’interrénal est entourée de grandes difficultés. En effet, si on emploie la méthode de Golgi-Cajal, les cordons épithéliaux sont trop fortement colorés en noir par l’osmium pour qu'on puisse suivre des fibres nerveuses terminales à leur intérieur. A l’aide de cette méthode, j'ai vu souvent des filets nerveux partis de fibres superficielles issues elles- mêmes d’un ganglion sympathique voisin, pénétrer dans l’intérieur du corps interrénal. On peut suivre ces fibres sur une certaine longueur, tant qu’elles longent les vaisseaux qui apparaissent en plus clair au milieu des cordons foncés ; mais il est impossible de voir si elles pénètrent dans les cordons épithéliaux et comment elles se terminent. La méthode de Bethe donne des résultats meilleurs, bien que non entièrement satisfaisants cependant. En effet, pour une raison qui en est restée inconnue, peut-être à cause de la présence de la graisse, le bleu de méthylène pénètre mal dans le corps interrénal ORGANES SURRÉNAUX DES’ PLAGIOSTOMES. 127 et n’imprègne jamais que les fibres les plus superficielles, même dans les préparations où le corps suprarénal voisin, traité par la même méthode et dans la même pièce, offre un contraste marqué entre sa richesse en nerfs et la pauvreté de l’interrénal en fibres nerveuses. Néanmoins dans la partie la plus superficielle imprégnée par le bleu, on peut suivre des fibres nerveuses qui courent principa- lement le long des vaisseaux. Ce sont les fibres vasculaires qu’a signalées DIAMARE [96, p. 10]. On en voit partir à certains endroits des rameaux plus fins, très grêles, qui pénètrent dans l'épaisseur des cordons épithéliaux. Mais il m'a été impossible de les suivre jusqu’à leur terminaison, et je ne puis qu'affirmer leur présence indubitable au milieu des travées épithéliales, sans pouvoir dire comment ils se terminent. APPENDICE BIBLIOGRAPHIQUE Les premières notions histologiques sur l’interrénal sont dues à LeypiG [52]. Pour cet auteur ce corps présente la même structure chez les différents genres qu’il a étudiés (Scymnus, Torpedo, Raja) ; sa substance principale consiste en des molécules graisseuses qui lui donnent sa couleur blanche ou jaune d’ocre, et au milieu de cette substance on observe des noyaux clairs, vésiculeux, librement plongës dans son intérieur. Celte structure conduisit LEyDiG à comparer ces organes au corps graisseux des Amphibiens (p.72). Dans le mémoire paru l’année suivante, LEypiG [53] ne donne aucun détail histologique nouveau sur la structure de ces corps. BaLrour [78, p. 245] fait une description du corps interrénal bien supérieure à celle de LeypiG. Il lui décrit une capsule propre et épaisse qui envoie à l'intérieur .des septa divisant le corps en lobules. Ces lobules sont remplis de cellules polygonales qui forment le parenchyme. Les noyaux de ces cellules sont très granuleux et les septa sont parcourus par un très riche réseau capillaire. Les cellules de l'interrénal sont plus petites que celles des suprarénaux, mais leurs noyaux sont au contraire un peu plus grands. À la suite de ses premiers travaux, Bazrour [78, p. 245] avail adopté la première manière de voir de Leypi@ |52, p. 72|, c'est-à-dire que le corps jaune d’ocre (son interrénal) n’avait rien de 128 ED. GRYNFELTT. commun avec un organe surrénal. Mais plus tard [81, p. 138] il embrassa tout à fait la seconde manière de voir de LEeyp1G [55, p.14] et dans son Traité d'embryologie comparée {p. 6131 il admit que le corps impair d’origine mésoblastique (interrénal) des Elasmo- branches correspond à la portion corticale des capsules surrénales des Vertébrés supérieurs. On remarquera que BALroUR |78, p. 244] considérait le corps interrénal comme toujours impair chez les Elasmobranches, ce qui n’est pas absolument vrai (voy. p. 109) De plus, dans son Traité, parlant de la constitution histologique de l'interrénal, il fait mention de globules huileux qui remplissent les cellules à l’état frais et « disparaissent d’une manière complète par les méthodes ordinaires de durcissement ». Ces globules huileux répondent évidemment aux gouttelettes de graisse décriles par LeypiG [52, p. 72]. Mais BaLrour |[81, p. 612] ajoute en note, que ces globules ne sont probablement pas « formés de substance graisseuse proprement dite ». CHEVREL [89] ne parait pas avoir étudié l’interrénal, à l’aide de méthodes histologiques bien convenables, car il nie les contours cellulaires que BaLrour |[78, p. 245] avait décrits exactement el il attribue les lignes de contour des cellules au stroma conjonctif du corps (p. 34). S'appuyant sur cette notion erronée de la structure, il compare les cellules de l’interrénal avec celles des suprarénaux ; et la différence entre ces deux corps ne réside pour lui que dans la grandeur des noyaux, qui sont plus considérables dans l’interrénal, et dans l’absence de globules clairs dans le suprarénal. Ces globules clairs, qui donnent à l'interrénal sa teinte particulière ne sont pas non plus pour CHEVREL des globules de graisse, car : 1° ils n'en ont pas la réfringence ; 2° l'acide osmique ne les noircit pas; 3° l'éther ne les dissout pas (p. 33). On a vu plus haut, par l'analyse chimique, qu'il s’agit pourtant bien de graisse. DramaRE [96] a donné une bonne étude histologique de l'inter- rénal. I1 a bien vu que les cellules avaient des contours nets, qu’elles se réunissaient entre elles pour former des cordons ou des utricules pleines. Il a montré l'extrême importance des vaisseaux et il a justement attribué le prétendu réticulum connectif de CHEVREL à un défaut de fixation (p. 9). Il insiste du reste sur la nécessité d'examiner ces corps aussi frais que possible. Il a vu les granulations graisseuses des cellules, mais il indique qu'elles ne remplissent pas entièrement le corps de la cellule, lequel reste un ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 129 élément épithélial actif et n’est pas dégénéré en une cellule adipeuse (p. 10). SwALE VINCENT [97] décrit à l’interrénal une structure alvéolaire et un protoplasma granuleux. Les limites cellulaires sont souvent bien apparentes. Les alvéoles sont disposées dans certains cas comme des rayons autour de larges veines ou de sinus veineux. Dans certaines alvéoles il trouve des cellules qui lui paraissent rappeler les croissants en demi-lunes des glandes muqueuses des Mammifères. Ces cellules, on l’a vu, n'existent pas. Elles répondent simplement à des différences individuelles corrélatives à des états particuliers de fonctionnement. Les cellules sont assez volumi- neuses ; elles ont de 30 à 50 w (p. 66-68). Koxx [99] donne une bonne description de la structure de l'inter- rénal. Il décrit exactement la capsule conjonctive, il fait remarquer qu’elle est délicate, que les lobulisations n'existent pas à proprement parler, mais qu’il y a des encoches superficielles produites par du tissu conjonctif accompagnant les vaisseaux (p. 291). Il insiste sur le caractère franchement épithélial des cellules et nie l'existence des croissants de SWALE VINCENT. Il fail remarquer que les gouttelettes graisseuses sont fixées par les mélanges osmiques, mais qu'après d’autres réacüfs elles disparaissent laissant à leur place dans le protoplasma des vacuoles claires (p. 293). 130 ED. GRYNFELTT. RÉSUMÉ GÉNÉRAL ET CONCLUSIONS. Les organes surrénaux sont représentés chez les Plagiostomes par deux sortes de corps distincts : 1° des corps pairs, primilivement métamériques, siégeant sur les artères segmentaires et accolés aux ganglions sympathiques, les corps suprarénaux (BALFoUR) ; 2° des corps sans relations avec les artères segmentaires et les ganglions sympathiques, siégeant à peu près sur la ligne médiane en avant de l’aorte, souvent pairs, mais asymétriquement placés, d’autres fois réunis en un seul cordon impair et médian: ce sont là les corps interrénauz (corps interrénal de BALFoUR). Les corps suprarénaux se rencontrent dans toute la longueur de la cavité abdominale. D’après leur disposition chez les Squales on peut les considérer comme typiquement mélamériques, mais chez les différentes espèces leur nombre et leur position sont réglés par le nombre des artères segmentaires. Là où ces artères se répètent régulièrement dans chaque segment (Acanthias, Mustelus, Galeus), le nombre des corps suprarénaux est le plus élevé et il y en a autant de paires qu'il y a de segments dans la cavité abdominale. Si le nombre des paires de corps suprarénaux est un peu moindre que celui des segments, la règle ci-dessus n’est pas cependant infirmée, car le corps suprarénal axillaire, compté pour un seulement, est toujours formé par la fusion de plusieurs corps. Lorsque les artères de deux segments consécutifs naissent sur l'aorte d’uneseule branche, lescorps suprarënaux placés à leur niveau tendent à se fusionner et se fusionnent souvent. De là résulte une certaine irrégularité dans le nombre et dans la disposition de ces corps. Cette irrégularité est d'autant plus frappante parfois que la disposition des artères n’est pas toujours la même à droite et à gauche de la ligne médiane et que par suite il y a une asymétrie plus ou moins marquée entre des corps de la même paire (Centrina). Dans les espèces où les artères segmentaires sont peu nombreuses et irréguliérement distribuées (Raies), les corps suprarénaux sont eux-mêmes fort irréguliers et présentent des fusions parfois très étendués qui rendent difficile la détermination de leur nombre exact. Les corps suprarénaux sont constitués par une enveloppe conjone- tive très délicate, par une substance propre et par des vaisseaux. La ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 131 substance propre est formée de cellules spéciales, que l'on peut appeler cellules suprarénales, ou avec Konx cellules chromaffines en raison de la forte coloralion brune qu'elles prennent dans les sels de chrome. Ces cellules sont de nature épithéliale, c’est-à-dire que leur mode de groupement est absolument celui des épitheliums. Eu effet, les cellules sont toutes au contact les unes des autres, sans interposition d'aucune substance fibrillaire, contrairement à ce qu'ont cru la plupart des auteurs. Les groupements secondaires en lobules, que l’on a décrits dans les corps suprarénaux, sont déler- minés uniquement par la présence des vaisseaux capillaires qui, passant et repassant sans cesse dans l'épaisseur de la substance propre, partagent celle-ci en cordons ou en îlots se continuant du reste les uns avec les autres, mais qui ne sont nullement des lobules distincts isolables par la dissociation. Les cellules chromaffines qui constiluent la substance propre peuvent se présenter sous des aspects assez différents dans l'étendue d'une même coupe ; mais il est facile de voir que ces différences tiennent uniquement à des modifications temporaires des cellules qui peuvent passer par les stades suivants : {1° l’état de cellule chromaffine typique ; 2° l’état de cellule vacuolisée et dont le corps proloplasmique privé d’une partie de son contenu est plissé et revenu sur lui-même. Les cellules chromaffines typiques ont des formes multiples, tenant à leur situation dans l’ensemble du corps suprarénal, à l’état des cellules voisines, à la présence et à l’état de plénitude ou de vacuité des vaisseaux. Elles renferment des granulations très fines, pâles, peu réfringentes, qui existent sur le vivant, et que l'on peut mettre en liberté dans le liquide des préparations en dilacérant des corps suprarénaux frais. Ces granulations se colorent vivement par l'acide osmique et par les sels de chrome. Elles sont bien fixées par la plupart des réactifs et ainsi conservées dans les coupes, elles se colorent énergiquementpar certaines matières colorantes(voy. p. 78). À côté des callules chromaffines typiques on en trouve toujours qui renferment de grandes vacuoles claires. Lorsque ces dernières se multiplient, la substance chromaffine disparaît en entier et la cellule n'apparait plus formée que par un ensemble de travées protoplasmiques grèles lui donnant un aspect filamenteux. C’est cette disposition, exagérée parfois par l’action de mauvais fixateurs, qui a fait croire à la présence d'une 132 ED. GRYNFELTT. substance fondamentale fibrillaire disposée entre les cellules. Les nerfs qui pénètrent dans les corps suprarénaux se terminent sur les cellules chromaffines comme ils le font au niveau des cellules épithéliales glandulaires. Des cellules chromaffines ont été signalées par différents auteurs dans le voisinage immédiat du sympathique. Leur structure, les réactions de leurs granulations caractéristiques n’ont pas été très éludiées cytologiquement jusqu'ici et on n'a pas montré, comme je l'ai fait pour les Plagiostomes, leurs rapports essentiels avec les vaisseaux et leurs variations de structure. Il y aura lieu de poursuivre leur comparaison avec les cellules des corps suprarénaux (1). Les interrénaux ne sont pas en rapport immédiat avec les artères segmentaires et contrairement à ce qui arrive pour les suprarénaux, ils ne sont aucunement influencés par la distribution et par le nombre de ces dernières. Ils n'offrent pas non plus de rapports importants avec les ganglions sympathiques. D’après les recherches de van Wuxe, les interrénaux proviennent d'ébauches paires métamériques s'étendant aussi loin en avant que le mésonéphros. Leur disposition à l’état adulte, telle que nous l'avons décrite, montre qu'ils gardent beaucoup moins que les suprarénaux des traces de cette constitution primitive. Leur structure est beaucoup plus facile à étudier que celle des suprarénaux. Ils sont formés de cordons cellulaires pleins, anasto- mosés les uns avec les autres de mille manières, de façon à faire uu lout indissociable. Entre ces cordons circulent des vaisseaux capillaires sanguins très nombreux qui contractent des relations très étroites avec les cellules épithéliales. Ces dernières, de forme variable, mais plus régulières cependant que les cellules du supra- rénal, renferment de grosses gouttes d’une substance graisseuse, qui se teint en noir par l'acide osmique et par ses mélanges, mais qui ne résiste pas, en général, à l’action des différents réactifs employés pendant la confection des coupes et leur coloration. Ces gouttes disparaissent en laissant à leur place des vacuoles claires arrondies. (1) Ces conclusions étaient écrites avant l'apparition du mémoire de Koun [02]. On verra en se rapportant à la note p. 6, que ce travail répond en partie au désidératum formulé ici, en ce sens qu’il a examiné les cellules chromaffines dans nombre d'organes des Vertébrés supérieurs ; mais il n’a pas étudié la cytologie de ces cellules, n’a pas décrit les grains chromaffines comme je l'ai fait, et n'a fourni aucune contribution nouvelle à l'anatomie fine des suprarénaux des Sélaciens. ORGANES SURRÉNAUX DES PLAGIOSTOMES. 133 INDEX BIBLIOGRAPHIQUE. 1900. Arcne, O. — Vorläufige Mitteilung über die Nebennierenentwickelung der Sëuger. Anat. Anz., Bd. XVII, 1900. 19009. Arcnez,, O. — Vergleichende Entwickelungsgesch. u. Stammesgesch. der Nebenniere. Ueber ein neues normales Organ des Menschen u. der Saügethiere. Arch. f. mikr. Anat., Bd. LVI, 1900. 1900c. AIcHEL, O. — Eine Antwort auf die Angriffe des Herrn prof. Swale Vincent in London, Anat. Anz., Bd. XVIII, 1900. 98. 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Aigialosauridæ und Varanidæ haben gemeinsame (juras- sische) Ahnen, die als terrestrische Reptilien den Varaniden sehr ähnlich gebaut gewesen sein müssen. » II. — Si M. Nopcsa veut bien se reporter à mon mémoire de 1892 sur les Mosasauriens (3), —: qu'il ne cite pas, — il pourra se convaincre que ses résultats se trouvent déjà dans ma publication (1) F. Nopcsa. Veber die Varanus-artigen Lacerten Istriens. BRITRÂGE ZUR PALXON- TOLOGIE UND GEOLOGIE OESTERREICH-UNGARNS UND DES ORIENTS, 1903, vol. XV, plie (2) Ces italiques sont de moi (L. D.). (3) L. DoLLo. Nouvelle Note sur l'ostéologie des Mosasauriens, BULL. Soc. BELG. GÉOL. PaLéonT. Er Hypr. (Bruxelles), 1892, vol, VI, pp. 219-259, pl. III et IV. LÉPIDOSAURIENS 138 LOUIS DOLLO. 1. D'abord, sous cette forme (1) : MOSASAURIENS RHIPTOGLOSSES OPHIDIENS Dolichosauridæ be Aigialosauridæ DOLICHOSAURIENS Vie pélagique Vie arboricole Reptation Varanidæ DR RENNES LACERTILIENS (vivants et fossiles) RHYNCHOCÉPHALIENS 2. Et puis, encore autrement, dans une discussion de huit pages(?), dont je me bornerai à reproduire les passages ci-après : « Je crois donc que les Dolichosauriens à long cou (Dolichosau- ridæ, — Crétacé supérieur) sont des types spécialisés, qui se sont éteints sans subir aucune transformation ultérieure ; tandis que les (1) L. Dorro. Wouvelle Note, ete. p. 259. (2) L. DorLo. Wouvelle Note, ete. pp. 251-259. LES ANCÈTRES DES MÉSASAURIENS. 139 Dolichosauriens à cou normal (Aigialosauridæ, — Crétacé inférieur) ont, notamment, donné naissance aux Mosasauriens (Crétacé supérieur) (1). > « Et je ne considère même les Mosasauriens que comme descendant des Aigialosauridæ, les Dolichosauridæ ne consti- tuant qu’un rameau latéral sans aucune connexion génétique avec les gigantesques Lépidosauriens pélagiques (2). » II. — Je suis assurément charmé de voir M. Nopcsa arriver, aussi, à #nes conclusions, mais, puisque ce n’est que dix ans après moi, je ne saurais regarder son travail que comme une confir- mation du mien, — que le naturaliste hongrois aurait dû, par con- séquent, mentionner. IV.— J'ajouterai, en terminant, que je suis d'autant plus étonné de l’omission qui m'a fait prendre la plume, — que ma Nouvelle Note est contenue dans un recueil facilement accessible, — qu’un grand nombre de tirages à part en ont, de plus, été distribuës, — et qu'enfin, M. S. W. WiLLISTON, Professeur à l’Université de Chicago, la signale, et en donne un extrait, dans son ouvrage Mosasaurs (3), qui figure dans l'index bibliographique de M. Nopcsa (4). Rapprochant ces diverses circonstances, je ne puis m'empêcher de penser que M. le Baron a agi, en cette occasion, avec une certaine légèreté. Bruxelles, le 27 janvier 1903. (1) L. DorLo. Mouvelle Note, cte., p. 254. (2) L. DoLco. Wouvelle Note, etc., p. 255. (3) S. W. WILLISTON. Mosasaurs. THE UNIVERSITY GEOLOGICAL SURVEY OF KANSAS, 1898, vol. IV, pp. 98 et 99. (4) F. Nopcsa. Ucber die Varanus-artigen Lacerten, etc, p. 42. ] IQS: et Y SV CON ( AIX NS à PERS CÉGK K \f V7 AC de. CA | 7 & A À 5 2 À | S- nt ADF CL { À AL, FL ‘4 1 RÉ (72 a < LA RECHERCHES ANATOMIQUES SUR LES. GALLES DE TIGES" PLEUROCÉCIDIES PAR C. HOUARD, PRÉPARATEUR A LA FACULTÉ DES SCIENCES DE L'UNIVERSITÉ DE PARIS. INTRODUCTION « L'histoire pathologique d’une plante est inscrite dans ses tissus. La structure d’un arbre séculaire nous dit quelles influences pernicieuses il a subies à diverses époques ». P. VUILLEMIN. On désigne depuis fort longtemps sous le nom de galle toute excroissance produite par un parasite animal sur un végétal. Pour MaLPiGHi ce mot avait un sens très net et en même temps très général, Mais il fut pris par les savants, depuis RÉAUMUR jusqu’à LACcAZE-DUTHIERS, dans un sens trop restreint puisque ceux-ci désignèrent sous le nom de galles les productions parasitaires complètement closes et, sous le nom de galloïdes ou fausses galles, les excroissances ouvertes. De plus, aucun terme n'existait pour désigner les renflements déterminés par des champignons sur les végétaux. C’est pourquoi, il y a une trentaine d'années, Le professeur FRIEDRICH THoMaAs [73] *, envisageant seulement la réaction de * Les chiffres entre crochets renvoient à l’Index bibliographique, page 413. GALLES DE TIGES. 141 l'hôte dans cette sorte d'association parasitaire, créa le terme de cécidie, qu'il définit ainsi: éoute production végétale anormale, accompagnée de formation de tissu nouveau, déterminée par la réaction dé la plante à l’irritation parasilaire (1). Il en résulte que la cécidie est nettement caractérisée par l'appa- rilion de tissus végétaux nouveaux se produisant sous l'influence du parasite, et que, par suite, la plante doit être active dans l’asso- ciation, c’est-à-dire capable de réagir. Selon que le parasite est un animal ou un végélal, on distingue les cécidies en zoocécidies et en phytocécidies. + *X * L'étude des cécidies, tant au point de vue du parasite (animal ou végétal) qu'au point de vue de leur morphologie externe, a déjà fait l’objet de nombreux mémoires, surtout dans la dernière moitié du XIX* siècle. Je rappellerai seulement la grande part qu'y ont prise des savants tels que G. FRAUENFELD, FR. THoMAS, FR. Lüw, SCHLECHTENDAL, MIK, ADLER, J. GIRAUD, PERRIS, elc. De même, l'étude anatomique des déformations produites par les parasites sur leurs hôtes végétaux n’a pas été négligée et a donné lieu à de nombreux travaux. Je citerai ceux de WaxKkER et FENZLING concernant les Mycocécidies ; ceux de LAGAZE-DUTHIERS, PRILLIEUX, Courcxer sur les galles des Hyménoptères et des Pucerons ; le beau mémoire de BEUERINCK sur les premiers stades du développement des galles de Cynipides. D'autre part, MoLLIARD a étudié les cécidies florales, Fockeu quelques cécidies foliaires, et, enfin, HIERONYMUS, PASZLAVSKY, FRANK, MASSALONGO, KRUCH, APPEL, KÜSTER, WEISSE et GERBER ont publié quelques renseignements anatomiques peu étendus. * * * Une cécidie étant le résultat de la réaction de la plante hôte à l’action du parasite, j'ai cherché à mettre en évidence cette réaction (1) THomaAs s'exprime ainsi : « Ein Cecidium nenne ich jede durch einen Parasiten veranlasste Bildungsabweichung der Pflanze, Das Wort Bildung ist in dieser Erklärung zugleich im Sinne des Processes (also activ), nicht nur seines Resultates zu nehmen..... Zur Natur... gehürt die active Theilnahme der Pflanze, die Reaction derselben gegen den erfahrenen Reïz. » (p. 513-514). 142 C. HOUARD. dans les zoocécidies et, pour cela, j'ai choisi des déformations présentant un axe de symétrie ou un plan de symétrie bien net. Les galles des tiges chez lesquelles la cavité larvaire est située à l'intérieur de la moelle, c'est-à-dire à peu de chose près dans l’axe du cylindre central, me semblaient d'avance très avantageuses pour ce genre de recherches ; il en était de même pour les cécidies produisant une saillie latérale et qui, déjà à l'extérieur, présentent nettement un plan de symétrie. J'ai donc étendu mes investigations anatomiques à toutes les défor- mations dans lesquelles la longueur des entre-nœuds n'est pas altérée et qui constituent les galles latérales des tiges ou pleurocé- cidies caulinaires ; par contre, j'ai laissé de côté toutes celles qui, situés à l'extrémité des tiges, proviennent de la déformation du bourgeon terminal et du raccourcissement des premiers entre-nœuds et qu'on groupe sous le nom de galles terminales (les tiges ou acro- cécidies caulinaires. Dans cette étude, j'ai insisté tout particulièrement sur ce fait que la plupart des tissus gallaires dérivent de tissus normaux par hyper- trophie (simple augmentation de la taille des cellules) et hyperplasie (cloisonnement des cellules) ou bien proviennent du fonctionnement d'assises génératrices normales ; enfin, j'ai fait remarquer que certaines déformations peuvent accentuer les caractères normaux, par exemple ceux des pôles ligneux. J'ai eu l’occasion de rencontrer dans l'étude de ces galles de nombreuses productions de tissus cicatriciels autour des blessures, des piqûres, des cavités larvaires, etc. et d'ajouter à ce qu'on savait déjà sur ce sujet. Incidemment, mes recherches ont porté aussi sur quelques pétioles dont l'étude ne pouvait être séparée de celle de la tige: il était intéressant d'y suivre également l’action des parasites animaux. D'autre part, j'ai été conduit à étudier l'influence des galles sur la ramification, influence si considérable parfois que le port de la plante peut en être complètement modifié. Ce côté de la question m'a semblé particulièrement intéressant, et m'a paru comporter des conséquences pratiques importantes. Tels sont les problèmes que je me suis posé pour les cécidies caulinaires sur lesquelles nous ne possédons, à ces divers points de vue, aucun travail méthodique d'ensemble. Les quelques études anatomiques qui ont été publiées jusqu'à présent sont très peu GALLES DE TIGES. 143 détaillées et nullement reliées entre elles; j'ai eu grand soin, du reste, de les rappeler en tête de chaque chapitre. Il est tout naturel de penser, comme nous le démontrent sufli- samment les observations les plus simples de morphologie externe, que la forme de la cécidie est en relation avec la position de l'animal cécidogène par rapport aux tissus environnants et par rapport aussi à ceux qui entrent dans la constitution de la cécidie. C’est ce qui m’amène, dans cette étude des pleurocécidies cauli- naires, à envisager les différents cas où le parasite est situé à l'exté- rieur de la tige, dans l'écorce, dans l'anneau libéro-ligneux ou bien dans la moelle : d’où les quatre premiers chapitres de ce travail, qui sont suivis chacun des caractères généraux offerts par leurs céci- dies. Dans un cinquième chapitre, je résume l'influence de l’action parasitaire sur les différents tissus de la tige ; enfin, dans les Conclusions générales, je groupe les faits observés en insistant tout particulièrement sur les rapports qui existent entre la tige et la cécidie, sur la façon dont la nutrition du parasite est assurée et sur la cicatrisation de la blessure après le départ de l'animal ou la chute de la galle. Mon travail se divise par suite de la manière suivante : CHAPITRE ]. — Cécidies caulinäires latérales produiles par un parasile situé contre l’épiderme. CHAPITRE II. — Cécidies caulinaires latérales produites par un parasite situé dans l'écorce. CHAPITRE III. — Cécidies caulinaires latérales produites par un parasite situé dans les formations secondaires libéro-ligneuses. CHAPITRE IV. — Cécidies caulinaires produites par un parasite situé dans la moelle. CHAPITRE V. — Résumé général des modifications apportées par les galles aux tissus des tiges. CHAPITRE VI. — Résumé général des relations existant entre les tiges, les pleurocécidies caulinaires et les parasites. 144 C. HOUARD. Je n'ai étudié dans ce travail, au point de vue anatomique, qu'un nombre restreint de cécidies caulinaires. Mais j'espère cependant qu'il permettra d’entrevoir combien de faits intéressants seront mis à jour par l'étude plus complète des Zoocécidies. Il vient affirmer, en outre, comme l’a si bien dit M. ALFRED GIARD dans la Préface du Catalogue systématique des Zoocécidies de l’Europe et du Bassin méditerranéen, que « la Cécidologie est un grand chapitre de téra- tologie expérimentale, mais d’une tératologie qui se relie inti- mement à la morphologie normale, grâce à la constance des processus tératologiques déterminés par un même parasite céci- dogène ». Je me fais un devoir, en terminant cette Introduction, d'exprimer à mes chers Maîtres, MM. GASTON BONNIER et ALFRED GrARD, Professeurs à la Sorbonne, l'expression de toute ma reconnaissance pour leurs conseils si éclairés et pour l'excellent accueil qu'ils m'ont toujours fait au Laboratoire de Biologie végétale de Fontainebleau ou à la Station zoologique de Wimereux. Je ne veux pas oublier non plus de remercier le Conseil Municipal de Paris et le Conseil de l'Université de Paris dont les concours généreux m'ont grandement facilité la récolte des échantillons étudiés et permis les nombreuses figures de ce travail. Enfin, je dois ajouter que MM. MAssALONGO, PIERRE, TAVARES, H. pu BUYSsON, DarBoux, MoLLIARD, DELAGROIX et Bucner ont bien voulu me donner quelques pleurocécidies intéressantes recueillies en Italie, en Portugal ou dans les diverses régions de la France: que tous ces amis reçoivent iei mes meilleurs remer- ciements. Laboratoire de Botanique de la Faculté des Sciences de Paris. 15 janvier 1903. GALLES DE TIGES. 45 CHAPITRE PREMIER CÉCIDIES CAULINAIRES LATÉRALES PRODUITES PAR UN PARASITE SITUÉ CONTRE L'ÉPIDERME. Les exemples de déformations de tiges produites par des parasites animaux, en contact seulement avec l'épiderme, sont assez nombreux. Beaucoup de ces cécidies ont fait autrefois l’objet des travaux de systématique de Bosc p'Anric et de WAGxER et, plus récemment, de D. VON SCHLECHTENDAL, FR. THoMAs, MASSALONGO, P, MARCHAL, RÜBSAAMEN et KIEFFER. Il est bon de rappeler que l’altération de la tige sous l'influence d’un parasite externe est rarement localisée à l'épiderme, comme c'est le cas pour les pilosités produites par des Tarsonemus, par exemple ; le plus souvent, la plupart des tissus de la tige prennent part à la déformation. Ce sont ces dernières produclions qui feront l’objet de ce chapitre. La structure anatomique des cécidies produites par un parasite exlerne est peu connue : PRILLIEUX [53] a étudié le développement de la galle chevelue des tiges du Poa nemoralis Eur. que BENERINCK [85] a repris beaucoup plus tard et approfondi, surtout dans son paragraphe 4 « Anfang der Entwicklung der Poaegalle » (p. 321, PL II, fig. 12, 13, 14). Le premier Auteur a également cherché, dans deux autres Mémoires [75, 81], quelles sont les allérations que le Puceron lanigère (Myzoæylus laniger Haus.) produit dans le bois du Pommier. Les renflements fusiformes déter- minés par l’Asterolecanium Massalongoianuin Tarc.-Toz. sur les tiges et les pétioles du Lierre ont fait l’objet d’une courte des- cription anatomique de la part du savant zoologisie DE LACAZE- DUTHERS [53, p. 347-348], reprise plus tard par C. MassaLoNGo [93]. Enfin, tout dernièrement, l'abbé PIERRE [02] a donné quelques renseignements histologiques sur le renflement allongé qu'un autre Coccide produit sur la tige du Teucrium Scorodonia L. L'acarocécidie du Stipa pennata a été esquissée rapidement par MassaLoNGO [97] et WinkLer [78] à étudié en quelques lignes l'anatomie des galles de l'Épicea. 10 146 CG. HOUARD. Hedera Helix |. Cécidie produite par l’As/erolecanium Massalongoia- num TarG.-Toz. La cécidie déterminée par ce Coccide est surtout répandue en Italie et dans le midi de la France ; mes échantillons proviennent des environs de Ferrare. C’est sur le limbe de la feuille que se fixent le plus souvent les parasites, et ils y produisent de nombreuses bosselettes. Le pétiole réagit vivement lui aussi à l’action du parasite : il offre de petits renflements dont l'épaisseur atteint deux ou trois fois le diamètre normal et qui peuvent confluer. Enfin, la tige présente, mais plus rarement pourtant, de semblables renflements fusiformes, à la surface desquels se voient Les Coccides. Etudions les modifications anatomiques qu’entrainent ces défor- malions, et, pour cela, comparons les sections transversales faites sur une tige et un pétiole parasités aux sections correspondantes pratiquées sur les organes sains, ayant le même âge. 1° Galle de la tige. Structure de la tige normale. — La tige normale représentée en N (fig. 2) a sensiblement 2,2 mm. de diamètre. L'épiderme ép (en N, fig. 4) possède des parois épaisses. L’écorce est très large et occupe presque le tiers du rayon ; elle est différenciée dans sa partie externe en un périderme pér possédant trois ou quatre cloisons en moyenne, puis en un collenchyme épais co formé de cellules à parois peu épaisses (2 4), arrondies, serrées les unes contre les autres et dont les dimensions ne dépassent pas 35 uv. Plus à l'intérieur, l'écorce comprend un parenchyme chlorophyllien c/, fortement lacuneux. Les faisceaux libéro-ligneux sont réunis entre eux par du paren- chyme secondaire et constituent un anneau vasculaire continu ; le bois secondaire bs comprend une dizaine d’assises. Enfin, en face des faisceaux, la zone périmédullaire pm a fortement lignifié et épaissi ses cellules. La moelle et l'écorce contiennent de petits canaux sécréteurs cs un peu aplatis tangentiellement et dont le diamètre est de 50 y environ; les cellules de la moelle #2 sont irrégulières, GALLES DE TIGES. 147 de taille ne dépassant pas 75 u, à parois minces et à petits noyaux ; elles sont bourrées de gros grains d’amidon am. Structure de la tige anormale. — L'examen à un faible grossis- sement de la section transversale de la galle, pratiquée au milieu du renflement fusiforme dont le diamètre est 3,5 mm. (A, fig. 3), montre de suite de profonds changements dans la structure interne. La coupe présente deux moitiés bien dissemblables. Celle qui est située à l'opposé du parasite; c’est-à-dire en f7b, est parfaitement circulaire et régulière ; elle possède la structure normale avec des éléments plus nombreux et plus gros ; la régularité de ses faisceaux libéro-ligneux n’est pas altérée et leur dimension radiale est simplement le double de la dimension normale. FiG. 1 (E). — Vue extérieure de la galle de la tige de Lierre (gr. 1,3). FiG. 2 (N). — Schéma de la coupe transversale de la tige normale (gr. 15). FiG. 3 (A). — Schéma de la coupe transversale de la tige anormale (gr. 15). ftb, flb”, ftb””, faisceaux libéro-ligneux ; ds, bois secondaire ; rm, rayon médullaire ; ee, éc”, écorce ; 5», m’, moelle ; 3, Coccide. La moitié de la tige en contact avec le Coccide z a, au contraire, un contour irrégulier, une écorce éc” très développée et surtout des formations secondaires énormes (en /7b”); les faisceaux libéro- 148 C« HOUARD. ligneux de toute cette région sont encore groupés sensiblement en un demi-cercle, mais ils sont isolés les uns des autres et noyés dans le parenchyme ligneux qui a envahi une partie de la moelle et une partie de l'écorce. La région de raccord entre les deux moitiés de la ee est caracté- risée par de gros amas, allongés tangentiellement, de parenchyme ligneux secondaire régulier bs qui déborde sur le par enCtye ligneux altéré. En somme, la présence du parasite contre l’épiderme de la tige amène une hyperplasie considérable de tous les tissus environnants. Ces tissus ne peuvent se développer que du côté de l’animal, puisque la rêgion opposée, peu déformée et résistante, joue le rôle de point d'appui : il en résulte que les tissus gallaires se développent symé- triquement par rapport à un plan déterminé par la génératrice médiane de la région //b non déformée et par le parasite z ; ce plan passe aussi par l'axe de la tige. Il est facile de se rendre compte de la profonde modification apportée par les succions réitérées du Coccide à l’anneau vasculaire, en étudiant des déformations très jeunes. Ce sont les cellules corti- cales les plus proches du parasite qui sont les premières influencées ; elles s'allongent dans des directions radiales par rapport à l'animal et se cloisonnent ensuite perpendiculairement ; la propagation de ce cloisonnement se fait peu à peu de chaque côté du plan de symétrie et gagne enfin la région opposée. Au fur et à mesure qu'on s'éloigne de la région /{b” pour rejoindre celle marquée /{b on trouve les cellules cloisonnées de plus en plus espacées. Celte active multiplication cellulaire se fait sentir aussitôt dans la zone libéro-ligneuse siluée en face de l'animal et qu'il influence directement. Par le cloisonnement rapide et par l’hypertrophie de leurs cellules, les rayons médullaires rm s’élargissent tangentiel- lement et s'allongent radialement; leurs cellules épaississent et lignifient leurs parois qui sont munies de grandes ponctuations. En même lemps, l'excitation gagne la partie périphérique inférieure m° de la moelle, dont les cellules augmentent considérablement de diamètre et peuvent atteindre 140 w ; la plupart prennent des cloisons de direction tangentielle par rapport au parasite. Les noyaux de ces cellules médullaires sont devenus sphériques, volumineux (17 u) et ils sont entourés par de nombreux grains d'’amidon très petits GALLES DE TIGES. 149 (1 à 2u). Seules, les cellules médullaires situées au voisinage des se =] . N Fic. Fi. ons IIS PE ve a Jar es Me = 25 À 4 (N). — Partie de la coupe transversale représentée par la figure 2 (gr. 150). 5 (A). — Partie correspondante de la cécidie de la tige (gr. 150). pb, pôle ligneux ; b, bs, bois primaire et secondaire ; /, /s, liber primaire et secondaire ; bs”, bois secondaire anormal; cs, canal sécréteur ; co, collenchyme ; per, périderme ; ép, épiderme ; c/, tissu chlorophyllien ; lac, lacune ; pr, parenchyme ; pm, zone périmédullaire ; »m, moelle ; am, amidon. 150 | C. HOUARD. faisceaux possèdent des grains d’amidon ; elles en avaient toutes dans la tige normale. L'hyperplasie des rayons médullaires de la région //b” a non seulement détruit l’assise génératrice interne entre les faisceaux, mais encore empêché son fonctionnement normal dans les faisceaux. En même temps que celte assise produit du bois secondaire Os (en À, fig. 5) et un peu de liber secondaire, elle donne naissance, à l'extérieur de chaque faisceau libérien, à une couche continue de bois secondaire Ds” qui finit d’envelopper le liber. Les faisceaux libéro-ligneux deviennent ainsi cylindriques. Les altérations considérables que subissent l'écorce et surtout l'anneau libéro-ligneux au voisinage du parasite ont une certaine répercussion sur les autres tissus. C’est ainsi que les canaux sécré- teurs cs sont composés ici de cellules irrégulières, à parois épaisses, lignifiées et ponctuées, comme celles qui les entourent. Le tissu lacuneux chlorophyllien a disparu et les cellules du collenchyme anormal co ont acquis des parois très épaisses (jusqu’à 9 y), ainsi que de grands diamètres (115 parfois). Les formations subéro- phellodermiques anormales pér: possèdent un nombre beaucoup plus grand de cloisons et des files cellulaires de tailles variables. N A Fi. 6 (N). — Épiderme de la tige normale de Lierre (gr. 150). FiG. 7 (A). — Épiderme de la cécidie de la même plante (gr. 150). Enfin, l'épiderme ép lui-même est altéré : obligé de suivre l’ac- croissement en volume des tissus internes, il a élargi et cloisonné ses cellules, dont les contours sont devenus plus sinueux (comparer les figures 6 et 7). 2° Galle du pétiole. Les modifications que présente le pétiole attaqué par l’Asterole- canium Massalongoianum sont absolument indentiques à celles GALLES DE TIGES. 151 de la tige. Le Coccide se fixe le plus souvent à la face supérieure du pétiole, dans le sillon largement ouvert que limitent les deux petites ailes latérales ; ses piqûres et sa succion produisent bientôt une forte hyperplasie et l'apparition d’un renflement fusiforme de 3 mm. de diamètre (E4, fig. 8). CHE > N, FiG. 8 (E4). — Vue extérieure de la galle du pétiole de Lierre (gr. 1, 3). F1G. 9 (N1). — Coupe transversale schématique du pétiole sain (gr. 15). FiG. 10 (A1). — Coupe transversalé schématique du pétiole parasité (gr. 15). ftb, flb”, faisceaux libéro-ligneux ; cs, canal sécréteur ; fp, fibres péricy cliques ; z, Coccide. Une coupe transversale pratiquée au niveau de la larve (A,, fig. 10) possède un contour un peu irrégulier ; le sillon pétiolaire est moins net qüe dans l'organe sain, souvent même convexe en son milieu, ce qui indique une active multiplication cellulaire. En effet, à droite et à gauche de cette région, les cellules corticales pré- sentent des cloisonnements, d’abord très nombreux, mais qui vont en diminuant au fur et à mesure qu'on s'éloigne du parasite ; toujours ces cloisons sont perpendiculaires à la direction d’allon- gement des cellules, allongement qui s'est fait parallèlement au bord de la coupe, c’est-à-dire à peu près suivant une direction radiale par rapport à l'animal cécidogène. La même multiplication cellulaire s'observe à la partie supérieure du cercle formé par les faisceaux libéro-ligneux, entre les deux gros faisceaux //b” fortement hypertrophiés ; elle se propage ensuile dans le parenchyme central du pétiole dont les cellules s'allongent 152 C.. HOUARD. dans une direction radiale par rapport au parasite et se cloisonnent ensuile perpendiculairement. Quand tout le tissu central est ainsi cloisonné, la multiplication cellulaire envahit le paren- chyme situé entre les fais- ceaux et les écarte de plus en plus. La figure 11 repré- sente la marche du cloison- nement dans une cécidie jeune. Dans la galle âgée, toutes ces cellules en voie de mul- tiplication épaississent et lignifient leurs parois; la lignification débute dans la région voisine du Coccide, se propage ensuite de cha- que côté dans l'écorce, puis entre les faisceaux et occupe finalement toute la Fic. LL. me Marche du cloisonnement dans la région contra. Se On peut en conclure que teur ; ép, épiderme (gr. 33). l'action à distance exercée par le parasite se fait sentir dans le pétiole beaucoup plus facile- ment que dans la tige puisqu'une plus grande surface est lignifiée ; les faisceaux libéro-ligneux ne forment plus, comme aupara- vant, un anneau continu très résistant dont les éléments devaient être séparés les uns des autres pour permettre à l’action parasitaire de gagner la région centrale. Aussi les faisceaux libéro-ligneux du pétiole sont-ils beaucoup moins altérés que ceux de la tige: leurs vaisseaux ligneux D (en A;, fig. 13) restent alignés en files régulières, qui sont simplement écartées en éventail par l’hyper- trophie du parenchyme; les parois de ces vaisseaux restent minces. Seules, les fibres péricycliques /p sont fortement épaissies et lignifiées. Enfin, comme dans la tige, l'écorce et le faisceau libéro-ligneux médian //b (en A,, fig. 10) de la région opposée à celle où le parasite est fixé, conservant sensiblement leurs dimensions normales, jouent le rôle de point fixe ; les tissus gallaires, refoulés du côté du Coccide, GALLES DE TIGES. 153 s'élalent de chaque côté d'un plan de symétrie qui coïncide avec celui du péliole normal. KT ALES GTS ge =) OR R RT” | = LOL LS 5 A / ‘a AE ts Sa BTE ©. = @. L DO ….. % ” Fi. 12 (N1). — Faisceau libéro-ligneux du pétiole normal de Lierre (gr. 150). Fic. 13 (A4). — Faisceau libéro-ligneux anormal (gr. 150). b, bs, bois ; /s, Liber ; /p, fibres péricycliques ; cs, canal sécréteur. En résumé, sous l'influence de l’Asterolecanium Massalon- goianum, la üge de l'Hedera Helix présente les modifications suivantes : 4° L'action cécidogène se faisant sentir dans la région voisine du Coccide, il se forme une saillie latérale ayant un plan de symétrie ; 2 Il y a dissociation d’une partie de l'anneau libéro-ligneux dont les faisceaux isolés et arrondis sont noyés au milieu du parenchyme secondaire lignifié ; 3 La lignification s'étend à une partie de la moelle et de l'écorce. 154 CG. HOUARD. Potentilla hirta L. var. pedata Wii. Cécidie produite par un Coccide. C’est encore un Coccide qui produit, dans le Midi de la France, sur celte belle Potentille un renflement fusiforme (fig. 14), atleignant 25 mm. de longueur sur 5 mm. de diamètre transversal. Le parasite aune taille ne dépassant guère un demi-millimètre ; il est fixé latéra- lement dans une petite fossette et difficilement visible au milieu des longs poils qui couvrent la plante. Tous les tissus de la tige, situés aux environs du point où le Coccide est fixé, sont directement excités par les piqûres de son rostre : une hyperplasie considérable en résulte du côté du parasite, donnant lieu à des tissus gallaires qui se développent symétriquement par rapport à un plan déterminé par l'animal et la génératrice médiane de la région non déformée. Ce plan de symétrie contient l’axe de la tige (fig. 17). Fi. 1% (E). — Aspect de la galle de la tige de Potentilla hirta (gr. 1). FiG. 15 (L). — Coupe longitudinale de la tige anormale (gr. 1). FiG. 16 (N). — Coupe transversale schématique de la tige saine (gr. 15). . FiG. 17 (A). — Coupe transversale schématique de la tige parasitée (gr. 15). ép, épiderme ; éc, écorce ; /p, fibres péricycliques ; m, moelle ; 3, Goccide. Toul ce que nous avons dit précédemment sur la façon dont l'acti- vilé cellulaire se manifeste dans l'écorce, au voisinage du parasite, est GALLES DE TIGES. 155 encore visible ici. Les faisceaux libéro-ligneux de la région parasitée sont écartés les uns des autres et leur taille est considérablement Fig. 18 (N). — Partie de la coupe représentée par la figure 16 (gr. 150). Fi. 19 (A). — Portion corres- pondante de la cécidie de la tige (gr. 150). m, moelle ; pm, zone pé- rimédullaire ; pb, pôle li- gneux ; ##b, bois primaire ; bs, bois secondaire ; £s, li- ber secondaire ; !, liber primaire ; fp, fibres péricy- cliques ; end, endoderme ; co, collenchyme ; ép, épi- derme. A 2 ) FO: al (1 SU 2 CE CE D VE LA @ < SR de, 156 C. HOUARD. augmentée. À l'intérieur des faisceaux, les cellules périmédullaires pm (fig. 19) sont grandes et lignifiées ; la moelle elle-même est un peu élargie et souvent présente de grandes fissures. A l’extérieur des faisceaux, les fibres péricycliques /p ont des parois minces, mais leur taille peut atteindre quatre ou cinq fois celle des cellules normales (par exemple : 55 4 au lieu de 14 y); elles sont le plus souvent allongées radialement, peu lignifiées, et elles forment un anneau dont l'épaisseur atteint trois ou quatre fois l'épaisseur normale au voisinage du Coccide. En dehors de ces fibres, les cellules endodermiques, aplatiet et très grandes (110 y au lieu de 36 ), se cloisonnent tangentiel- lement. Quant aux cellules plus internes de l'écorce, elles sons hypertrophiées également, mais arrondies; elles remplacent les quelques rangées de petites cellules, à chloroleucites, peu serrées les unes contre les autres, qu’on rencontre dans la tige normale. Plus en dehors, les cellules de collenchyme co (fig. 19) forment plusieurs assises et sont surmontées par les cellules épidermiques ép, devenues très grandes et à parois cellulosiques, épaisses, munies de nombreuses ponctuations. Vues de face, ces cellules épidermiques anormales sont isodiamétriques (30 v), irrégulière- ment disposées et entremêlées de nombreux stomates (fig. 21), au lieu d’être régulières et très allongées comme c'est le cas dans la tige saine (fig. 20). Fi. 20 (N). — Épiderme normal de la tige de Potentilla hirta (gr. 150). FiG. 21 (A). — Epiderme anormal de la cécidie de la même plante (gr. 150). La plus grande modification anatomique qu’entraine la présence de la larve réside donc dans les faisceaux libéro-ligneux. Un faisceau anormal présente, en effet, des pôles ligneux pb (fig. 19) dont les cellules rayonnantes sont beaucoup plus accentuées que GALLES DE TIGES. 197 dans la tige normale; les vaisseaux de bois primaire qui y font suite sont écartés les uns des autres la multiplication et l'hyper- trophie des cellules du parenchyme ; les vaisseaux du métaxylème mb sont eux-mêmes beaucoup plus grands et à parois plus épaisses. Enfin, alors que dans la tige normale les formations secondaires débutent à peine (fig. 18), dans le faisceau hypertrophié elles consistent surtout en longues files de bois secondaire (bs, fig. 19), un peu irrégulier, à parois non lignifiées. En résumé, sous l’action d'un Coccide, la tige du Potentilla hirta présente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène se faisant sentir dans la région voisine du Coccide, il se forme une saillie latérale ayant un plan de symétrie ; 2 Les tissus gallaires résultent surtout du grand dévelop- pement que prennent les faisceaux libéro-ligneux : bois primaire hypertrophié, bois secondaire non lignifié très abondant, anneau péricyclique épaissi ; 3° L'épiderme et l'écorce sont considérablement hyperplasiés. Brachypodium silvaticum L. Cécidie produite par un Diptère. Cette nouvelle cécidie du Brachypodium silvaticum, très commune dans le Parc du Château de Fontainebleau, apparaît sur la tige dès le mois de juillet. Elle consiste, au-dessus d’un nœud, en deux bourrelets enveloppés par la gaine et qui font un peu saillie au dehors (fig. 22); entre la gaine et la tige, dans la petite dépression ovalaire limitée aux deux extrémités de son grand axe, c’est-à-dire en haut et en bas, par les deux bourrelets, se trouve une larve de Diptère, de 4 mm. de long, placée verticalement (fig. 23). Quelquefois deux larves vivent ensemble dans la même déformation. Le bourrelet supérieur a de 4 à 5 mm. de diamètre et l’inférieur est un peu plus petit; leur teinte est marron dès le début et va en s'accentuant au fur et à mesure que la galle vieillit, jusqu’à devenir presque noire en septembre. À ce moment, leur surface est bien 158 CG. HOUARD. plus fortement striée que quand la galle était jeune et le bourrelet supérieur est presque sphérique (fig. 24). Fi. 22 (F4). — Aspect de la diptérocécidie caulinaire du Brachypode (gr. 1). FiG. 23 (Ea). — Même échantillon, la gaine étant en partie enlevée (gr. 1). FiG. 24 (Es). — Cécidie âgée, recueillie en septembre (gr. 1). FiG. 25 (Es). — Bourrelet supérieur d’une cécidie jeune montrant les fines rayures vertes qui continuent celles de la tige (gr. 3). En somme, cette cécidie a l’aspect d'une selle minuscule et rappelle fort la galle en selle que le Clinodiplosis equestris WAGNER produit sur le chaume du Triticum satioum LaAmx. À l'endroit où la larve est en contact avec la tige, la surface est blanchâtre ; à l'opposé, suivant une génératrice verticale, la galle est presque plane et une dizaine de fines rayures vertes (fig. 25) continuent celles de la tige normale. Ceci permet de prévoir, comme dans les galles précédemment étudiées, que la portion de la tige la plus éloignée de la larve est peu hypertrophiée. L'étude anatomique des sections pratiquées dans un entre-nœud normal et dans les différentes régions de la galle va confirmer cette prévision. Structure de la tige normale . — La tige normale est cylindrique et son diamètre (pris en N, fig. 26) est de 1,2 mm. Elle possède deux cercles de faisceaux libéro-ligneux /7b et tb” (fig. 27 et fig. 33). Les faisceaux du cercle externe /2b” sont moins développés que les autres et plongés au milieu de fibres lignifiées sc/ ; entre les faisceaux et l’épiderme ép, dont les cellules sont également lignifiées, les fibres sont remplacées par des cellules de parenchyme cl ren- fermant de la chlorophylle : ce sont ces petites cellules recouvertes GALLES DE TIGES. 159 seulement par l’épiderme qui forment à l'extérieur les fines rayures vertes dont il a été parlé plus haut. En dedans de ce premier cerele de faisceaux se trouve un parenchyme pr formé de grandes cellules FiG. 26 (E3). — Schéma de la cécidie caulinaire du Brachypode (gr. 2). FiG. 27 (N). — Coupe transversale schématique de l’entre-nœud normal (gr. 15). F1G. 28 (A4). — Coupe transversale schématique de la tige anormale au-dessous du bourrelet inférieur (gr. 15). FiG. 29 (A2). — Schéma de la coupe transversale passant au milieu du bourre- let inférieur (gr. 15). FiG. 30 (A3). — Schéma de la coupe transversale de la tige au niveau de la larve (gr. 15). FiG. 31 (A3). — Schéma de la coupe transversale passant au milieu du bourrelet supérieur (gr. 15). flb, flb”, faisceau libéro-ligneux ; cl, tissu chlorophyllien ; /ac, lacune ; ñn, nœud ; 3, larve de diptère. à parois non encore lignifiées ; sa partie centrale est résorbée et forme une grande lacune /ac. Ce parenchyme renferme le deuxième cercle de faisceaux libéro-ligneux f{b, beaucoup plus grands que les premiers. Chaque faisceau est entouré d’une gaine continue de fibres f, à parois épaisses et lignifiées ; son liber est composé de larges tubes criblés mêlés à des cellules parenchymateuses plus petites, 160 CG. HOUARD. Le bois (b, v, fb, fig. 33) comprend d’abord un gros vaisseau spiralé b, silué dans le plan de symétrie du faisceau et vers l’intérieur ; ce vaisseau à est entouré de parenchyme non lignifié, à pelites cellules, et en contact avec un autre vaisseau ou bien avec une petite lacune du tissu parenchymateux. La partie la plus externe du bois comprend en outre, à droite et à gauche, deux gros vaisseaux ponctués © réunis entre eux par des vaisseaux réliculés fb, plus petits. Structure de la galle. — Une coupe pratiquée en A, (fig. 26 et 28), un peu au-dessus du nœud n, mais au-dessous du bourrelet inférieur de la cécidie, se montre parfaitement circulaire et ne possède encore qu’une très minine lacune. Le parenchyme sclérifié, si abondant plus bas entre les faisceaux, a presque complètement disparu ; seules, les gaînes continues de fibres à parois épaisses se sont lignifiées autour des faisceaux. Montons un peu plus haut. Au fur et à mesure que l’on s 'approche de la partie la plus large du bourrelet inférieur, la section devient ovale (A), fig. 29) : la partie étroite conserve la structure normale ; la partie la plus large montre un épiderme contourné et irrégulier, des faisceaux libéro-ligneux étirés vers le centre dans lesquels les petits vaisseaux réticulés médians (/b, de la coupe normale) s’al- longent et éloignent de plus en plus les pôles ligneux et libérien. En même temps, toutes les cellules du parenchyme compris entre les faisceaux augmentent de longueur dans une direction radiale, épaississent et lignifient leurs parois ; le parenchyme externe devient ainsi plus homogène et ne présente plus de cellules à chlorophylle. C’est cette région fortement lignifiée qui se trouve en contact avec l’extrémité inférieure de la larve. En somme, un plan de symétrie, déterminé par la larve et par la génératrice opposée de la tige, commence à se dessiner dans la section médiane du bourrelet inférieur de la cécidie. Ce plan est bien visible dans la figure 29. Etudions maintenant les coupes pratiquées plus haut. Au niveau même de la portion médiane du corps de la larve, en A, (fig. 26 et fig. 30), c’est-à-dire dans la partie la plus concave de la galle en forme de selle, la section transversale est presque circu- laire ; pourtant le plan de symétrie défini précédemment est encore un peu reconnaissable. La lignification du parenchyme GALLES DE TIGES. 161 interfasciculaire est presque générale et s'étend depuis la lacune centrale jusqu’à l’'épiderme fortement contourné. La diminution du diamètre de la cécidie que l’on constate ici au niveau de la larve se présente fréquemment dans les productions pathologiques. Le plus TT souvent, en eflet, les œ NL cellules qui sont en con- d wi E tact intime avec le para- se c) . pin « A ES site se sclérifient très Des ue vite et par suite ne peu- vent plus croître. Au contraire, celles qui sont situées à quelque dis- Le tance du parasite ne se sclérifient pas: elles peuvent s’hypertrophier d’abord, se cloisonner ensuite rapidement et donner naissance à ces bourrelets plus ou moins développés qui existent dans presque toutes les galles où le cécidozoaire est externe. C'est ce qui se produit au-dessus et au-dessous FiG. 32 (A3). — Moitié de la coupe transversale de la larve pour la tige passant au milieu du bourrelet supérieur de la cécidie caulinaire du Brachypode (gr. 40). os à né ue du Brachypodium;mais | le bourrelet supérieur est beaucoup plus développé que l’autre. De plus, la forme de sa section transversale est bien différente (A,, fig. 31): la portion de la coupe en contact avec la larve possède sur une grande étendue tous ses éléments fortement lignifiés et peu développés ; à l'opposé (c’est-à-dire en haut de la fig. 31), se trouve une autre zone très étroite dont les éléments, tous sclérifiés, conservent la taille qu'ils ont dans la tige normale. Un plan de symétrie passant par le milieu de ces deux zones existe ici comme dans le bourrelet inférieur de la galle. À droite et à gauche de ces deux régions lignifiées, les deux 11 162 C. HOUARD. parlies latérales de la section A, sont très hypertrophiées et font également saillie de chaque côté. Les faisceaux libéro-ligneux qu'elles contiennent sont seuls lignifiés et ont leurs contours irréguliers. La figure 32 représente au grossissement 40 la moitié de la coupe transversale pratiquée en A,, située à droite du plan de symétrie; l'anatomie plus complète des faisceaux est fournie à un grossissement supérieur par la figure 34. lac = de 6 (= ®, ‘à = (5 256 COQ Ô @ e, AS Il 1e A ON : FiG. 33 (N). — Portion de la coupe transversale représentée par la figure 27 (gr. 150). FiG. 34 (A5). — Portion de la coupe transversale représentée par la figure 31 gr. 150). ftb, flb”, faisceaux libéro-ligneux internes et externes ; ©, /b, b, bois; f, fibres; pr, parenchyme; cl, tissu chlorophyllien ; sel, sclérenchyme ; ép, épiderme ; lac, lacune. Si le contour d’un gros faisceau libéro-ligneux //b (fig. 34) appar- tenant au cercle interne est moins régulier que dans la tige normale, par contre son diamètre est double (210 w au lieu de 9,0). Les vaisceaux ponctuës © sont très grands et très allongés; ils sont GALLES DE TIGES. 163 réunis par des vaisseaux réticulés /b étirés radialement. Tout le parenchyme entourant les vaisseaux spiralés b est lignifié. Le liber l'est un peu plus réduit que dans le faisceau normal. Enfin les fibres f de la gaïîne sont allongées et étalées en éventail. Les petits faisceaux libéro-ligneux //b” du cercle externe ont une taille beaucoup supérieure à celle qu'ils avaient dans la tige saine; ils sont lignifiés et les fibres de leur gaine sont également allongées et élalées en éventail. Sous l’action du parasite, toutes les cellules de l'épiderme ép et du parenchyme pr compris entre les faisceaux se sont allongées perpendiculairement à la paroi de la galle. Les cellules épidermiques atteignent six ou sept fois leur épaisseur normale (73 w au lieu de 9 w); leur largeur est deux ou trois fois plusgrande ; vues de face (fig. 36), elles se montrent plus courtes et plus homogènes que les cellules épidermiques normales, ces dernières comprenant de très longues cellules (fig. 35) qui alternent avec d’autres très courtes. La paroi externe des cellules anormales est mince et non lignifiée. EE FiG. 35 (N). — Épiderme de la tige normale du Brachypode (gr. 150). FiG. 36 (A). — Épiderme du bourrelet supérieur de la cécidie de la même plante (gr. 150). La lignification ne s’est pas non plus effectuée dans les parois des cellules qui entourent les faisceaux et qui constituaient la couche sclér use (sc£, fig. 33) de la tige normale ; les cellules à chlorophylle ont aussi disparu; le parenchyme est devenu plus homogène et même plus régulier puisque ses cellules sont disposées à partir de l'épiderme en assises bien délimitées les unes des autres, comme le montre le dessin d'ensemble de la figure 32. L'allongement radial si marqué de toutes les cellules de l'épi- derme, du parenchyme, de la gaïîne des faisceaux libéro-ligneux eux-mêmes estencoreici, comme précédemment, une conséquence de l'action cécidogène du parasite. De plus, comme précédemment encore, la petite région de la tige opposée à la larve ayant conservé sa structure normale joue le rôle de point d'appui: elle développe une réaction qui fait saillir latéralement les tissus hyperplasiés et 164 C,y HOUARD. repousse en avant, mais toujours dans le plan de symétrie, la portion moins altérée de la tige qui se trouve en contact direct avec la : partie supérieure du corps de la larve. En résumé, sous l'influence de la larve d’un Diptère, la tige du Brachypodium silvaticum subit les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène se fait sentir dans la région voisine dè La larve et produit un double renflement en forme de selle présen- tant un plan de symétrie ; 20 Les faisceaux libéro-ligneux s'hypertrophient beaucoup ; les cellules épidermiques et celles du parenchyme interfasciculaire devenu homogène s’allongent énormément. Fraxinus excelsior JL. Cécidie produite par le Perrisia fraxini K1Err. Cette galle est l’une des plus communes parmi celles que l'on rencontre sur le Frène élevé. Le plus souvent, c’est sur la nervure médiane d’une foliole qu'elle prend naissance et elle y constitue un renflement en forme de poche allongée s’ouvrant par une longue fente à la face supérieure. Rarement elle existe sur le pétiole. C’est un exemplaire de galle pétiolaire recueilli dans la forêt de Fontainebleau qui servira à cette étude (fig. 37, E). Au printemps, la jeune larve de Perrisia, arrêtée à la face supé- rieure du pétiole entre les deux courtes ailes latérales, amène une hyperplasie considérable de ces deux ailes. La profondeur du sillon que ces deux ailes délimitent entre elles devient quatre ou cinq fois plus grande, de même que l'épaisseur de ces ailes passe de 0,16 mm. à 1,16 mm. Cette énorme hyperplasie oblige les deux ailes pétio- laires à se rapprocher et à s’imbriquer étroitement, mais sans se souder, sur une longueur un peu supérieure à celle de la larve, environ 10 à 12 mm. Une cavité larvaire close est ainsi constituée. En coupe transversale (fig. 39), la nervure médiane du pétiole parasité se montre peu modifiée (comparer les fig. 38 et 39) ; son diamètre reste sensiblement constant et, tout au plus, l'anneau péricyclique fp est-il un peu plus épaissi dans la moitié opposée à la GALLES DE TIGES. 165 cavité larvaire qu’il ne l’est normalement : là, il possède en plus une ou deux rangées de grandes cellules à parois épaisses. La partie Fic. 37 (E). — Aspect de la cécidie du pétiole de Frène (gr. 1). FiG. 38 (N). — Coupe transversale schématique du pétiole sain (gr. 15). FiG. 39 (A). — Coupe transversale schématique du pétiole parasité (gr. 15). flbs, flbs, faisceaux libéro-ligneux des ailes ; /p, anneau fibreux péricy- clique ; », moelle; sc, scla, bandes scléreuses ; chl, chambre larvaire ; 3, larve. ligneuse des faisceaux vasculaires comprend, comme dans la tige normale, des files de 4 ou 5gros vaisseaux primaires et un pareil nombre d'éléments secondaires. Il n’en est plus de même dans la région de la nervure médiane la plus proche de la larve: les vaisseaux du bois primaire sont très hypertrophiés et l’assise génératrice interne a produit dix à douze rangées de fibres ligneuses. En dehors de l'anneau vasculaire, les fibres péricycliques sont très agrandies (36 4 au lieu de 12 v) et fortement épaissies. C’est dans les ailes pétiolaires que réside tout l'intérêt de la galle, et leur structure est profondément altérée par l’active multiplication cellulaire dont elles sont le siège. Dans chaque aile normale (en N, fig. 38 et fig. 40), le système vasculaire est représenté par deux faisceaux libéro-ligneux, lun 166 C. HOUARD. lb, assez gros, l’autre f/b, plus petit, tous deux munis d’un arc de fibres péricycliques /p et d’un endoderme très net. Le parenchyme pa compris entre les faisceaux et l’épiderme supérieur éps a encore un peu les caractères du tissu palissadique de la feuille; celui qui est situé entre les faisceaux et l’épiderme inférieur épi est nettement lacuneux (en /a, fig. 40). L'aspect d’une aile hyperplasiée du pétiole est toute différente (A, fig. 39). Du côté de la cavité larvaire ch! se trouve une première bande scléreuse concave scl; peu épaisse du côté de la nervure médiane et reliée au cercle fibreux péricyclique fp; cette bande sc/, est de plus en plus développée au fur et à mesure qu’elle se rapproche de l’orifice de la cavité larvaire: là, les cellules scléreuses ont envahi le parenchyme jusqu'à l’épiderme; les cellules épidermiques elles-mêmes sont lignifiées, fortement épaissies et munies de longs prolongements obtus cutinisés, sortes de poils courts, qui pénètrent les uns entre les autres et ferment l'orifice de la chambre gallaire. Une deuxième bande scléreuse scl, beaucoup plus large que la première, occupe la partie centrale de l'aile du pétiole. Cette bande est aussi en relation par sa large base avec la zone fibreuse péricy- clique de la nervure médiane ; à son autre extrémité elle vient se juxtaposer aux fibres péricycliques du gros et du petit faisceau de l'aile (en /p, fig. 41). Les éléments de cette large bande scléreuse sont de deux à quatre fois plus grands et plus épais que ceux de la bande scléreuse la plus rapprochée de la cavité larvaire ; ils peuvent atteindre 160 de longueur ; leurs parois sont épaisses de 8 u et munies de nombreuses ponctuations rectilignes. La présence de ces deux bandes scléreuses est très importante. En été, la galle se dessèche, les ailes hypertrophiées s’écartent l’une de l'autre et les larves du Perrisia fraxini, alors suffisamment déve- loppées, gagnent le sol pour s’y métamorphoser. La cause de cette sorte de déhiscence, qui rappelle celle d’un follicule, est facile à trouver dans la structure des deux bandes lignifiées sc/, et scl,: les cellules de la large bande sc/, ont des parois beaucoup plus épaisses que celles de la petite bande scl,. Or on sait que «en se desséchant, les cellules se contractent d'autant plus que leurs parois sont plus épaisses >. (Cours de Botanique par MM. G.BoNNIER et LECLERC DU SABLON, p. 638 et fig. 1052). Les larges bandes sc/, GALLES DE TIGES. 167 se contractent donc davantage dans les ailes pétiolaires que les bandes étroites sc, et ces ailes ont tendance à se recourber vers Cr. À ea? TT ---Y € TO y ES | CRE? CT Fi. 40 (N). — Fragment de coupe transversale d'une aile normale de pétiole de Frène (gr. 150). FiG. 41 (A). — Partie cor- respondante de l'aile hyperplasiée du pé- tioleanormal (gr. 150). D = D.| AN ASLIDTE ED EE, F 88: ES flb, faisceau libéro- ligneux; fp, fibres péricycliques ; sc, scla, bandes sclé - reuses3; pérr, péri- derme anormal; (La, tissu lacuneux ; pa, tissu chlorophyllien ; éps, épi, épidermes supérieur et inférieur. 168 GC. HOUARD. l'extérieur. De plus, la dessication des tissus parenchymateux compris entre les deux bandes scléreuses ne peut qu'accentuer ce mouvement et tend à rapprocher les petites bandes scléreuses des autres, qui sont plus grosses el aussi plus résistantes. En outre des deux bandes scléreuses scl, et scl,, il y a encore dans l'aile pétiolaire hyperplasiée un abondant parenchyme non lignifié, formé de très nombreuses cellules. Le parenchyme compris entre la cavité larvaire et la bande scléreuse mince sc/, est formé de petites cellules de 36 & de diamètre, empilées en files perpendiculaires à l’épiderme. Chaque cellule sous-épi- dermique à produit, par un rapide cloisonnement, de quatre à six cellules à contenu protoplasmique abondant et à gros noyaux. L'aspect de ce tissu spécial rappelle un peu le tissu nourricier qu'on est habitué à rencontrer dans beaucoup de cécidies au voisinage du parasite. De plus, l’origine sous-épidermique de toutes les cellules de ces files parallèles permet de les assimiler aux cellules du péri- derme de la tige du Frène qui, comme on le sait, s'établit dans l’assise corticale la plus externe. Mais ici, les différentes cellules d’une file qui dérivent de la même cellule sous-épidermique ne peuvent être distinguées en subéreuses et phellodermiques. Les cellules les plus internes sont en contact avec la bande scléreuse mince scl,. Dans la zone comprise entre la large bande scléreuse scl, et l'épiderme inférieur de l'aile du pétiole, les cellules lacuneuses du tissu normal ont fait place à des files cellulaires perpendiculaires à la surface de l’épiderme inférieur épi et semblables à celles que nous venons de voir plus haut. Elles dérivent encore du cloisonne- ment actif des cellules sous-épidermiques et peuvent être assimilées à du tissu péridermique. Les plus internes d’entre elles sont en contact avec les cellules de la grosse bande scléreuse scl,, car le cloisonnement se manifeste très profondément. Leur taille est supérieure de beaucoup à celle des cellules du périderme situées près de la cavité larvaire ; elles atteignent 90 w de largeur; leur protoplasme est peu abondant. Enfin, dans la zone intermédiaire comprise entre les deux bandes scléreuses sc/, et scl,, le parenchyme contient encore des cellules cloisonnées jusqu'à cinq ou six fois, mais la présence des fibres et des faisceaux libéro-ligneux des ailes amène forcément une grande irrégularité dans leur disposition. GALLES DE TIGES. 169 En résumé, l'hyperplasie des ailes pétiolaires est surtout localisée dans les deux zones parenchymateuses en contact avec l'épiderme inférieur et avec l'épiderme supérieur. Sous l'action cécidogène engendrée par la larve logée entre les deux ailes, les cellules sous- épidermiques se sont allongées dans une direction rayonnante par rapport au parasite, puis se sont cloisonnées perpendiculairement, produisant ainsi des files radiales de cellules. Vers la nervure médiane, l'action cécidogène s’est également fait sentir, mais elle est restée loçalisée aux faisceaux libéro-ligneux les plus proches. La nervure médiane, fortement protégée par son enveloppe fibreuse péricyclique, a donc presque tout entière fait fonction de point d'appui et développé une réaction qui a refoulé les tissus hyperplasiés, fait saillir latéralement la galle et éloigné de plus en plus le parasite. La larve et la génératrice non déformée de la nervure déterminent un plan qui est à la fois plan de symêtrie pour la cécidie et pour le pétiole. Remarque. — La galle du pétiole est en tout semblable comme aspect à celle que les larves du même Perrisia produisent sur la foliole ; ses dimensions en largeur et en épaisseur sont seulement plus faibles. Il est, en effet, facile à comprendre que la nervure médiane de la foliole résiste plus difficilement à l’action du parasite et s’hyper- trophie beaucoup plus que celle du pétiole qui est plus grosse et protégée en outre par une forte gaine péricyclique. On retrouve dans la galle de la foliole deux grands arcs scléreux reliés au péricycle de la nervure médiane; ces arcs fibreux occupent encore la même situation par rapport à la cavité larvaire et par rapport aux premiers faisceaux Lbéro-ligneux du limbe ; ils sontaussi de taille inégale.Le cloisonnement des cellules sous-épider- miques se produit comme précédemment et fournit des files cellu- laires rayonnant autour du parasite, plus accentuées et plus faciles à mettre en évidence par des coupes transversales que dans la galle du pétiole. Il est encore intéressant de remarquer, au sujet de cette galle, que les phénomènes d'hyperplasie des tissus végétaux sous l'action du parasite et de réaction de la part de la plante se retrouvent aussi bien dans les feuilles que dans les pétioles et dans les tiges. Ces données sont, en effet, générales et s'appliquent également aux 170 C. HOUARD. galles affectant les autres parties de la plante (racines, bourgeons, fleurs, fruits, etc...). Elles permettent toujours de se rendre compte de la forme que prend l'organe parasité et même de la prévoir quand on tient compte de la position du parasite par rapport au végétal et de l’état de différenciation plus ou moins avancé des lissus qu'il affecte. En résumé, sous l’action du Perrisia fraxini, le pétiole du Fraxinus excelsior offre les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène se fait sentir principalement sur les ailes qui S'hyperplasient beaucoup et produisent un renflement latéral dont le plan de symétrie accentue celui du pétiole ; 2 L'hyperplasie des ailes résulte surtout d'un cloisonnement tangentiel répété des cellules sous-épidermiques ; 3 Dans chaque aile apparaissent deux bandes scléreuses dont la dessication favorise l’ouverture de la galle ; 4° L'anneau vasculaire de la nervure médiane est un peu hyper- trophié du côté du parasite. Picea excelsa LAMKx. Cécidie produite par le Chermes abielis L. La cécidie produite par cet Aphidien se rencontre sur la plupart des Épicéas (Picea alba Link, P. nigra 1, P. orientalis L., P. Morinda Link), mais c’est sur le Picea excelsa Lam. qu'elle est le plus fréquente. Les insectes parfaits hivernent dans les bourgeons. Au printemps, ils déposent leurs œufs, enveloppés d'une matière laineuse, à la base des jeunes pousses et les petits Chermes qui sortent de ces œufs se fixent à l’aisselle des jeunes feuilles. L'influence de leur succion se fait immédiatement sentir : les aiguilles s'arrêtent dans leur dévelop- pement et n'’atteignent pas leur longueur normale ; leurs bases s'hypertrophient fortement, s'épaississent et s’élargissent ainsi que la région correspondante de la tige. Puis les feuilles se soudent par leurs bords en enveloppant les petits pucerons dans des cavités qui restent en relation avec le dehors par de longues fentes GALLES DE TIGES. 171 transversales arquées, garnies de lèvres saillantes, serrées, teintées de rouge. L ensemble de la déformation atteint de 20 à 40 mm. de long et produit toujours une cécidie unilatérale, verte, en forme d’ananas, fixée à la base de la jeune pousse (fig. 42). En août ou en septembre, la dessica- tion de la galle se produit et amène la séparation des aiguilles hypertrophiées ; les insectes sortent à l’état de nymphes et la plupart d’entre eux (1) se fixent aux feuilles voisines pour se mélamorphoser, devenir insectes parfaits, gagner les bourgeons de l'arbre et y passer l'hiver. Le cycle évolutif si curieux de ce para- site étant rappelé, d’après les recherches d'EcKk$STEN et surtout de CHOLODKOWSKY, examinons successivement : Fig. 42. — Cécidie du Cher- mes abietis. 4 L'action de l'animal cécidogène sur la tige et la feuille pendant la première année ; 90 L'influence de la déformation sur la croissance ultérieure du rameau et sur la ramification. 1° Action du Chermes abietis sur la tige et la feuille ; anatomie de la galle. Les aiguilles du jeune rameau élant les organes les plus attaquês par les Chermes et les plus hypertrophiés, je commencerai par leur étude pour faire ensuite celle de la tige déformée et de là passer directement à l'étude de la ramification. Étude de la déformation de la feuille. — Les aiguilles normales du Picea excelsa sont télragones et reposent sur de gros coussinets ; leur surface est à peu près lisse et leurs stomates sont réparlis sur les deux faces en files constituant deux groupes symétriques. Sur (1) Les autres vont, en effet, se poser sur les aiguilles du Mélèze et leurs descendants y produisent une déformation au printemps suivant. 172 C. HOUARD. un très jeune rameau de l’année, les feuilles ont 16 mm. de longueur en moyenne ; en section transversale (N, fig. 44) leur largeur est environ moitié de leur épaisseur (largeur À = 0,7 mm. ; épaisseur e—"1;bimm.): | Aussitôt que les petits Chermes se fixent à l’aisselle d'une jeune feuille, on remarque que la base se renfle pendant que l'extrémité, ne s’accroissant plus, s'incline un peu, jaunit et se recouvre de courtes papilles. En même temps, la section de la feuille se modifie. Une coupe transversale faite vers l'extrémité supérieure (en A, fig. 43 et fig. 45) présente encore une section tétragone, mais la largeur est devenue sensiblement égale à l'épaisseur (1 — 0,9 mm. ; e — 0,8 mm.) et les contours moins nets n’offrent plus que quelques stomates (Comparer les figures d'ensemble 44 et 45). L’épiderme ép (en A,, fig. 50) conserve Les dimensions qu’il avait dans la feuille normale, mais ses parois sont plus épaissies (comparer les figures 49 et 50) ; il est en contact avec un hypoderme Lyp très irrégulier comme taille, ne présentant des cellules lignifiées que de place en place. Dans l'angle de la section, le canal sécréteur cs a une lumière beaucoup plus petite que celle du canal sain; ses cellules sécrétrices sont plus grosses, isodiamétriques et presque toutes cloisonnées ; les cellules de la gaîne sont également plus ramassées et souvent aussi divisées. Plus au centre, le parenchyme cortical est indifférencié et peu riche en chloroleucites. La nervure centrale conserve un diamètre sensiblement égal à celui qu'elle a dans la feuille normale; son endoderme end constitue un anneau irrégulier de cellules de tailles variées, plus grandes en général que les cellules endodermiques normales et non munies d'un cadre d’épaississement. Au centre, le faisceau libéro- ligneux est réduit et ne comporte plus, dans chaque moitié, que 4 à 6 vaisseaux de bois D au lieu de 16 à 18; la réduction porte également sur le liber /, sur l'aile à gros noyaux «/ et sur l’aile vasculaire ar dont les éléments sont plus grands, pourvus de noyaux plus gros ou de poncluations aréolées plus nombreuses. La modification dans la structure anatomique de la feuille, déjà très notable dans la pointe par suite de l'arrêt de la croissance, s’accentue au fur et à mesure qu'on se rapproche de la base hyperplasiée. L'épaisseur et la largeur mesurées sur les coupes GALLES DE TIGES. 173 transversales restent égales entre elles comme en A, el peuvent atteindre 1,5 mm. en À, (fig. 45), 2,4 mm. en A,;. En même temps, ainsi que le montre le dessin d’ensemble de la coupe A, (fig. 47), le Fi. 43 (E). — Coupe longitudinale schématique d’un rameau anormal d'Épicéa (gr. 1). Fi@. 44 (N). — Schéma de la coupe transversale d’une feuille normale (gr. 15). FiG. 45 (A4). — Feuille anormale : schéma de la coupe transversale pratiquée près de la pointe (gr. 15). FrG. 46 (A2). — Feuille anormale : schéma de la coupe transversale pratiquée vers le milieu (gr. 15). FiG. 47 (A3). — Feuille anormale : schéma de la coupe transversale pratiquée au niveau des parasites (gr. 15). Fr&. 48 (A3). — Schéma de la coupe transversale d’une feuille anormale âgée (gr. 15). flb, faisceau libéro-ligneux ; p, fibres ; sc/, selérenchyme ; pr, parenchyme cloisonné ; cs, canal sécréteur et cellules secrétrices ; end, endoderme ; 6p, épiderme; st, stomate; chl, chambre larvaire ; 3, Chermès. contour de la section se modifie au niveau de la cavité larvaire : il est fortement concave en haut et assez régulièrement convexe à la partie inférieure. À partir du niveau A), la plus grande partie des tissus gallaires est constituée par le parenchyme cortical hypertrophié pr dont les cellules n’ont plus de parois sinueuses. Les cellules de ce paren- 174 C. HOUARD. chyme, situées un peu au-dessus du faisceau libéro-ligneux, s’allongent souvent dans une direction rayonnante par rapport à la cavité larvaire et prennent une ou deux cloisons transversales ; ces cellules sont bourrées de grains d'amidon. Noyé au milieu de ce ar- nrmensres end end FiG. 49 (N). — Partie de la coupe transversale représentée par la figure 44 (gr. 150). FiG. 50 (A). — Partie de la coupe transversale représentée par la figure 45 (gr. 150). b, bois; /, liber ; ar, tissu aréolé; al, aile à gros noyaux ; end, endo- derme ; cs, canal sécréteur ; kyp, hypoderme ; ép, épiderme: parenchyme se trouve le faisceau libéro-ligneux /7b (en A3, fig. 47) dont la taille n’a pas varié. Il est entouré de quelques cellules polyédriques p, de 36 de diamètre en moyenne, à parois peu GALLES DE TIGES. 175 épaisses, non lignifiées, munies de nombreuses ponctualions réticulées irrégulières : ces cellules correspondent aux fibres nor- males. Le Ussu aréolé a disparu et l’endoderme n'est plus recon- naissable. C’est au bord de la feuille que la modification des tissus est la plus grande, car elle porte sur l’épiderme et l'appareil sécréteur. L’épiderme, tout autour du limbe, s’étire en longues papilles, de 50 à 75 4, souvent cloisonnées, à parois épaisses et lignifiées ép (en A3, fig. 51). Au bord des lèvres de la cavité larvaire ces papilles deviennent si grandes qu'elles constituent de véritables poils à parois FiG. 51 (A3). — Partie latérale de la coupe transversale représentée par la figure 47 (gr. 150). FiG. 52 (A’3). — Partie supé- rieure de la même coupe (gr. 150). ép, épiderme; cs, cellu- les sécrétrice ; n, noyau; am, amyloleucite; cAl, chambre larvaire. minces, cylindriques, de 350 4 de longueur parfois; le contenu de ces poils est le plus souvent coloré en rose. Vu de face, l'épiderme anormal se montre formé par des cellules irrégulières (en A, fig. 54), peu allongées, à parois épaisses, mais dont les sinuosités sont courtes ; les stomates ont disparu. Au contraire, comme le représente 176 GC. HOUARD. la figure 53 (en N), les stomates du tissu normal sont régulièrement espacés et reliés entre eux par de longues cellules à parois minces et fortement sinueuses. Fi@. 53 (N). — Épiderme de la feuille normale de l'Épicea (gr. 150). Fia. 54 (A). — Épiderme de la feuille anormale du même arbre (gr. 150). Au bord de la cavité larvaire (en A”3, fig. 52), les cellules épider- miques et sous-épidermiques, particulièrement influencées par la succion des larves de Chermes, sont allongées vers cette cavité, serrées les unes contre les autres et cloisonnées tangentiellement plusieurs fois. Leurs noyaux # sont volumineux, leur protoplasme très abondant et elles conservent des parois cellulosiques minces. Le canal sécréteur dela feuille normale est situé au niveau du faisceau et au bord du limbe dans la portion la plus large de la section (es, en N, fig. 49). Il n'existe plus dans la base hypertrophiée de l'aiguille et est remplacé par un véritable tissu sécréteur qui entoure le parenchyme. On trouve, en effet, autour de la section, un grand nombre de cellules fortement gonflées par la résine qu’elles contiennent et munies d’un gros noyau (cs, A3, fig. 51); ces cellules sécrétrices sont cloisonnées le plus souvent et groupées en amas assez irréguliers autour d’un petit canal rempli de résine : elles constituent ainsi, de place en place, des canaux sécréteurs. Il va sans dire que ces canaux se formant dans des tissus pathologiques n’affectent pas toujours la régularité du canal sécréteur normal de la feuille: en particulier, les cellules de la gaîne manquent souvent et, quand elles existent, elles ne sont pas très nettement différenciées. L'apparition de ce tissu sécréteur dans le parenchyme hyper- trophié de la feuille est sans contredit la plus grande et la plus GALLES DE TIGES. 177 curieuse modification qui se produise ici; elle prouve avec quelle intensité les parasites agissent sur les tissus de leur hôte, car on sait que le tissu sécréteur est rebelle, en général, aux modifications provoquées par les agents extérieurs. Vers la fin de l’année, la section transversale de l'aiguille hyper- trophiée est encore intéressante (A,, fig. 48) : les papilles de ses cellules épidermiques ont fortement cutinisé leurs épaisses mem- branes; les canaux sécréteurs cs sont devenus irréguliers, quelques-uns même sont énormes et présentent des sections de 250 à 300 v, visibles à l'œil nu. Un parenchyme scléreux sc/, à parois minces, forme un anneau très épais, un peu plus développé du côté de la cavité larvaire. Les dimensions du faisceau libéro- ligneux sont restées les mêmes; les fibres p, signalées plus haut, ont épaissi et lignifié leurs parois. Étude de la déformation de la tige. — Le jeune rameau parasité a été récolté le 25 mai. Il est facile de se rendre compte des modifi- cations apportées à sa structure en comparant une section pratiquée au travers de la région hyperplasiée à une autre section transver- sale faite, au même niveau, dans un rameau normal de même âge. La tige déformée (en A}, fig. 58) est deux fois plus large que la tige saine (en N;, fig. 57), ses ailes corticales sont beaucoup plus déve- loppées et le diamètre de son cylindre central est environ trois fois supérieur au diamètre normal (1,8 mm. au lieu de 0,6). La région de la tige opposée à l'endroit où les Chermes se sont fixés s’hyperplasie peu: les faisceaux libéro-ligneux qu'elle contient sont légèrement grossis et l'écorce est épaissie par suite de l’allon- gement radial des cellules corticales externes. Au contraire, du côté parasité, la tige subit dans toutes ses parties une hyperplasie considérable que montrent bien les figures d'ensemble 57 et 58, dessinées au même grossissement. Le détail des coupes est donné par les figures 59 et 60. Le dessin de A; (fig. 60), à cause de ses grandes dimensions, a été interrompu par places et indique seulement les régions les plus intéressantes depuis la moelle #2 jusqu’à la chambre larvaire cAl. Les faisceaux libéro-ligneux //b (en A, fig. 60) de la tige et les faisceaux foliaires /7b” sont tous beaucoup plus développés que les faisceaux normaux : leurs vaisseaux ont un diamètre presque double 12 178 C. HOUARD. du diamètre normal (29 & au lieu de 17 u) et des parois plus épaisses; leur liber secondaire comprend 15 à 20 assises de cellules compri- Fc. 55 (E). — Vue extérieure d'un jeune rameau normal d'Épicéa (gr. 5). FiG. 56 (L). — Coupe longitudinale schématique d’un rameau anormal (gr. 5). FiG. 57 (N3). — Schéma de la coupe transversale de la tige normale (gr. 15). Fic. 58 (A3). — Schéma de la coupe transversale de la cécidie (gr. 15). ftb, flb”, flb””, faisceaux libéro-ligneux ; cs, canal sécréteur; ép, épider- me ; », moelle ; e, c”, tissus en voie de cloisonnement ; chl, cavité larvaire ; z, Chermès. mées radialement les unes contre les autres, au lieu d'une dizaine. Vers l'extérieur, les cellules péricycliques p, très irrégulières mais très développées, sont suivies par d’autres cellules es”, à parois épaisses, à contours sinueux, situées dans la zone habituellement occupée par les canaux sécréteurs de la tige (cs, en N;, fig. 59) et dont on ne retrouve que des vestiges. GALLES DE TIGES. 179 Le faisceau foliaire //b” (fig. 60) est à une distance de la moelle deux ou trois fois plus grandequedanslatige normale, car il est re- | poussé vers l'extérieur par des cellules c al- longées radialement et cloisonnées tangen- tellement plusieurs p fois; le cloisonnement de toutes les cellules ne =) J SÈ OX DT 4 0 D se WW) 0: qui entourent le fais- HER) AS ceau est du reste assez | TER actif. HE ee re Au fur et à mesure 2 de EUX. qu’on se rapproche de PO Y ER / la cavité larvaire cl, LION ae une grande hypertro- LOS ae eva ÈRe CD) Pere hie des cellules corti- M0 :22-—- : x CD De cales se manifeste ; DOS Sonor: celles-ci s’allongent CITANT ie A PCA dans une direction AT Le centrifuge, atteignent ‘ms in parfois 250 y de lon- > gueur, et prennent jusqu'à quatre ou cinq cloisons tangentielles (comme au-dessous de c’); elles ont une paroi épaisse, bien distincte, cellulosique, et elles sont bourrées de gros amyloleucites. ; N Les cellules hypo- hyp 5 dermiques Ayp se é 1; comportentcommeles Fi. 59 nr in de la Re me autres cellules corti- représentée par la figure 57 : ftb, flb”, faisceaux ; à BE libéro-ligneux ; cs, canal sécréteur ; ép, épi- cales : = lieu d'être derme ; Ayp, hypoderme ; #, moelle (gr. 150). isodiamétriques et de C. HOUARD. 180 .60 (A3). — Partie de la coupe transversale représentée par la figure 58 0). ou Fi D q Le] ( GALLES DE TIGES. 181 n'avoir que 12 » de diamètre en moyenne, elles sont allongées (110 ) et cloisonnées transversalement une ou deux fois. L'action cécidogène a donc pour effet de faire apparaître un peu de périderme dans la partie la plus hvperplasiée de la tige. Les cellules de l’épiderme ép sont très agrandies dans tous les sens (50 y au lieu de 17) et fortement bombées vers la cavité larvaire ; leurs parois sont épaissies. Comme les cellules des assises précé- dentes, elles contiennent un abondant protoplasme et de gros noyaux hypertrophiés. À droite et à gauche des cavités occupées par les Chermes, les tissus hyperplasiés de la région corticale de la tige se fusionnent avec ceux de la base de la feuille et il n’est plus possible de distinguer ce qui appartient à la tige ou à la feuille. En résumé, ici, comme dans les autres cécidies étudiées précé- demment, l’action cécidogène des Chermes s’est traduite, tant dans la tige que dans la feuille à l’aisselle de laquelle ils sont fixés, par un allongement très accentué (surtout dans la lige) des cellules corticales dans une direction rayonnante par rapport aux parasites et par l'apparition de cloisons perpendiculaires à cette direction. De plus, la présence d’une région non déformée de la tige a développé une réaction végétale qui a refoulé les tissus hyperplasiés vers l'extérieur et fait naître un plan de symétrie. Ce plan passe par l'axe de la tige et le milieu de la chambre larvaire. 2° Influence de la galle sur la croissance ultérieure du rameau el sur la ramification. Première année. — Déjà, dès la première année, la galle modifie fortement la structure du rameau dont elle occupe et altère la partie basilaire. Ce rameau reste court et sa section, pratiquée au-dessus de la cécidie, est toujours plus petite qu'une section faite à travers un rameau normal du même âge ; son cylindre central, de diamètre également réduit, contient des faisceaux libéro-ligneux moins déve- loppés, des canaux sécréteurs moins réguliers, mais, par contre, des cellules péricycliques plus grandes. Deuxième année. — Souvent, au printemps de la deuxième année, le pelit rameau ne se développe plus: il a séché à l’automne 182 C. HOUARD. en même temps que la cécidie et a pris une teinte marron; ses feuilles sont desséchées ou tombées. Si le rameau ne meurt pas, il donne alors une nouvelle pousse pendant que la cécidie de l’année précédente et les aiguilles qu’elle porte continuent à se dessécher. Une section transversale de la galle et dela tige faite à ce moment (en À;, fig. 61) présente un bord encore cellulosique percé de grands trous irréguliers cs, qui sont d'anciens canaux sécréteurs,; à l’intérieur de la coupe, tous les tissus entourant les faisceaux libéro-ligneux /7b” et la cavité larvaire ont complètement sclérifié leurs cellules dès l'automne précédent. La tige, elle, est entourée par un anneau subéreux comprenant deux parties : une région interne lgc formée de liège cicatriciel qui sépare la tige des tissus desséchés de la galle et une région externe lgt, de structure normale, qui isole les coussinets foliaires, maintenant lignifiés. Le cylindre central possède, dans cette tige âgée d’un an et demi, un anneau continu de gros faisceaux libéro-ligneux /b ; les faisceaux situés du côté de la galle sont un peu plus développés que les autres et riches en vaisseaux à parois épaissies. Années suivantes. — La taille plus considérable que prennent les faisceaux situés du côté de la galle va s’accentuer de plus en plus, durant quelques années. Il faut, en effet, remarquer que, même pendant la deuxième et la troisième année, la cécidie fait toujours corps avec le rameau ; bien que desséchée, elle provoque encore du côté où elle est fixée un fonctionnement très actif de l’assise géné- ratrice interne qui produit des couches ligneuses beaucoup plus épaisses que dans l’autre moitié de la tige ; ces couches annuelles sont presque exclusivement composées de fibres, ce qui rend leur déli- mitation assez difficile. Une telle section, pratiquée au travers d’une tige de cinq ans et demi et représentée schématiquement en A, (fig. 65), est très instruc- tive à cet égard : on y voit fort bien encore le plan de symétrie qui s'était dessiné dès la première année, quand la galle était fraiche, et qui n’a fait que s’accentuer depuis. La zone d'insertion de la galle se distingue facilement par son irrégularité, car toute la région opposée offre un contour régulier, presque circulaire, limité par une couche de liège /gt. La figure 62 (en E) représente l'aspect extérieur de la galle encore GALLES DE TIGES. 183 soudée au rameau âgé de cinq ans et demi dont on vient de voir la structure ; la figure 63 (F) montre la petite surface /gc suivant laquelle la galle était fixée au rameau par sa partie inférieure: c’est au niveau de cette couche cicatricielle que la coupe A, (fig. 65) a été pratiquée. Enfin la figure 64 (G) représente la galle vue à l'intérieur. Fra Fi. . 61 (A6). — Coupe transversale schématique d'un rameau d'Épicéa indiquant les relations qui existent entre la tige et la cécidie pendant la seconde année (gr. 15). 62 (E). — Gécidie desséchée encore fixée au rameau âgé de cinq ans et demi (gr. 0,5). Fic. 63 (F). — Rameau débarrassé de la cécidie (gr. 0,5). FiG. 64 (G). — Gécidie desséchée montrant la petite surface l/gc par laquelle elle était encore fixée au rameau (gr. 0,5). FiG. 65 (A7). — Coupe transversale schématique du rameau âgé de cinq ans et demi (gr. 15). flb, flb”, faisceaux libéro-ligneux ; cs, canal sécréteur ; gt, liège de la tige ; /gc, liège cicatriciel. Pendant les années suivantes (septième, huitième et neuvième années, par exemple), quand la galle est tombée, la section du rameau redevient presque circulaire (avec un diamètre de 7 à 9 mm.) et les couches annuelles reprennent peu à peu leur régularité. 184 C. HOUARD. Cependant les choses ne se passent pas ainsi dans la plupart des cas. On remarque, en effet, que le rameau est, dès la fin de la première année, quand la galle se dessèche, incurvé du côté de la cécidie qu’il enserre de plus en plus (fig. 42). Les années suivantes, si on enlève la galle sèche, on voit alors dans la partie concave du Fi. 66 (E). — Rameau d'Epicéa âgé de cinq ans et demi et débarrassé de la cécidie (gr. 0,5). Fi. 67 (Ag). — Coupe transversale schématique indiquant les relations qui existent entre la tige et la cécidie pendant la troisième année (gr. 15). Fi. 68 (Ag). — Coupe transversale schématique du rameau âgé de cinq ans et demi (gr. 15). m, moelle ; s, sillon ; /gt, liège de la tige ; ge, liège cicatriciel. rameau un large sillon longitudinal s (en E, fig. 66), de 20 à 30 mm. de largeur, présentant en son milieu un petit bourrelet allongé recouvert de résine. Il arrive souvent, en effet, qu’à la fin de la première année une dessicalion brusque de la galle a lieu. Cette dessication détermine une ruplure transversale entre l’anneau vasculaire qui est très résistant et le tissu gallaire qui l'est moins; cette rupture ayant détruit l’assise génératrice interne empêche, du côté de la galle, toute nouvelle production de tissus secondaires les années suivantes : GALLES DE TIGES. 185 d'où l'apparition du sillon longitudinal s. L'activité de l'assise génératrice se manifeste alors vers l'extérieur, sur la face opposée de la tige, et produit d’épaisses assises de bois secondaire qui provoquent la courbure du rameau vers la galle. La figure 67 (A3) représente une tige de deux ans et demi où le phénomène se manifeste déjà depuis plus d’une année. L'autre dessin (A», fig. 68) donne l’aspect d’une tige pareillement déformée, mais plus âgée de trois ans : comme dans la figure précédente, on y voit Ri Re FiG. 69 (R1). — Rameau normal d'Epicéa âgé de deux ans et demi (gr. 0,5). FiG. 70 (R2). — Rameau anormal de même âge, déformé par une cécidie située à la base (gr. 0,5). les couches annuelles de bois secondaire, très épaisses vers l'extérieur dans le plan médian, aller en s’atténuant à leurs deux 136 C. HOUARD. extrémités proches du sillon s ; ces couches empiètent chaque année sur le sillon et finissent même par le combler. Le rétablissement d’un anneau ligneux continu est alors opéré. Modifications dans la ra- mification. — Sous l'influence des cécidies du Chermes abietis, les rameaux peuvent se raccourcir, changer leur orientation ou disparaître. a) Raccourcissement. — Par suite de la présence d’une ou plusieurs galles, les ra- meaux restent en général très R3 coute Les figures 69, 70 et 71 FiG. 71. (R3). — Rameau anormal de représentent un rameau nor- même âge que les précédents, mais mal (R;), âgé de deux ans et dont la croissance a été arrêtée par suite de la présence de deux cécidies demi, et deux rameaux du même âge portant l’un (R3) une seule galle, l’autre (R;) deux cécidies. R; est complètement déformé par la présence des galles ; il est très raccourci et n’atteint que la moitié de la taille du rameau normal R; (90 mm. au lieu de 210). b) Désorientation. — Nous avons vu plus haut que la présence de la galle à la base du rameau le courbe le plus souvent. Si une telle influence se fait sentir pendant plusieurs années, le rameau peut changer complètement son orientation et se diriger vers le tronc du Picea au lieu de s’étaler au dehors: tel est le cas représenté par la figure 72 (p. 187), en R;. Souvent, en se courbant ainsi, les rameaux attaqués quittent le plan horizontal déterminé par les autres rameaux restés sains et donnent aux branches un aspect buissonneux. (gr. 0,5). c) Disparition. — Enfin, une ramification très irrégulière résulte souvent de ce que les petits rameaux latéraux d’un an ou de deux ans, attaqués fortement, peuvent se dessécher et disparaîlre. C'est ce qui est arrivé au rameau R; (fig. 73, p. 187) qui ne s’est développé que d’un côté. Rs GALLES DE TIGES. 187 Fic. 72 (Ry). — Rameau anormal d'Épicéa, dont la partie gauche a été déso- rientée par suite de la présence d’une cécidie (gr. 0,2). FiG. 73 (R;3). — Branche âgée du même arbre, dont tous les rameaux de gauche ont été arrêtés dans leur développement (gr. 0,2). 188 C. HOUARD. Ces trois sortes de modifications se rencontrent à la fois sur les Picea excelsa attaqués par de nombreuses galles et leur ramification devient très compliquée. J'en ai vu de beaux échantillons dans le pare du Laboratoire de Fontainebleau pendant l’été de 1902. En résumé, sous l'influence du Chermes abietis, la tige et les feuilles du Picea eæcelsa subissent les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène se fait sentir sur la tige et la feuille qui s'hyperplasient et donnent une cécidie latérale dont le plan de symétrie coïncide avec celui de l'aiguille; 2° Les tissus gallaires resultent surtout de l'allongement radial des cellules corticales de la tige ou des cellules parenchymateuses de la feuille ét de leur cloisonnement perpendiculaire ; 3" Les canaux sécréteurs de la tige disparaissent du côté de la cavilé larvaire; par contre, il se produit un abondant tissu sécréleur dans la région hyperplasiée des aiguilles ; 4° Le rétablissement de la structure normale du rameau se fait lentement après la disparition de la cécidie et suivant deux procèdes ; o Les modifications que la galle entraîne dans la ramification sont caractérisées par le raccourcissement, la désorientation ou la disparilion des rameaux. RÉSUMÉ DU CHAPITRE Î, RELATIF AUX CÉCIDIES CAULINAIRES LATÉRALES PRODUITES PAR UN PARASITE EXTERNE. Cherchons maintenant quels sont les caractères communs et quelles sont les ressemblances que présentent les quatre cécidies dont nous venons de faire l'étude détaillée. Caractères communs. — Ce sont les suivants : l° Le parasite est extérieur à la tige et situé contre l’épi- derme ; 2° L'action cécidogène qu’il engendre se traduit dans la région avoisinante par l’hypertrophie de tous les tissus, GALLES DE TIGES. 189 particulièrement de l’écorce et de l’anneau vasculaire ; 3° Les tissus gallaires qui résultent de cette hypertrophie sont refoulés par la portion non déformée de la tige et produisent une saillie latérale ayant un plan de symétrie. Ce plan est déterminé par le parasite et par la génératrice opposée de la tige ; il passe par l’axe du rameau ; 4 J’action cécidogène s’étend parfois à la moelle. Les figures 75 et 76 représentent schématiquement une galle du premier chapitre en section longitudinale (L) et en section transver- sale (T). Le parasite z, placé extérieurement contre l’épiderme, MT ETAT TTL LUTTE UN … HI Il Ai S FiG. 74 à 76 (N, L, T). — Schémas indiquant les relations qui existent entre la tige et la cécidie, dans le cas où le parasite 3 est situé en dehors de l'écorce et fixé contre l’épiderme. b, bois ; {, Liber ; »m moelle ; éc, écorce ; x, action cécidogène ; p, réaction végétale ; x, plan de symétrie. développe dans toutes les directions une action cécidogène « qui agit surtout sur la moitié inférieure de la tige ; la moitié supérieure non modifiée produit une réaction végélale o. Enfin le plan de symétrie + est indiqué par un trait vertical interrompu. Ressemblances. — Les deux premiers parasites dont nous avons étudié les galles sont des Hémiptères assez petits et isolés; la réaction qu'ils déterminent est égale et opposée à leur action cécidogène et, par suite, faible ; ellese traduit par un simple renfle- ment fusiforme. Dans la troisième cécidie examinée, celle du Brachypodium, la larve est très grande par rapport aux précédentes puisqu'elle atteint 4 mm. de longueur sur 4 mm. de largeur ; aussi son action 190 CG. HOUARD. cécidogène est-elle autrement puissante et la réaction due au végétal produit-elle autour de la tige deux bourrelets très gros; l’un de ces bourrelets mesure même 5 mm. de diamètre. Dans les deux dernières galles étudiées (celle du Fraæinus et celle du Picea), les parasites sont nombreux : la réaction végétale est alors tellement intense que les bourrelets qui se forment autour des larves de Perrisia et de Chermes les entourent complètement ; 1l se constitue dans les deux cas une cavité larvaire qui reste en rapport avec le milieu extérieur par une ouverture étroite et allongée. GALLES DE TIGES. 191 CHAPITRE II. CÉCIDIES CAULINAIRES LATÉRALES PRODUITES PAR UN PARASITE SITUÉ DANS L'ÉCORCE. Il y a fort peu de zoocécidies produites par des animaux vivant dans le tissu cortical. On ne peut guère citer comme bien caracté- ristiques que les renflements des tiges du Pinus silvestris L. ou de l’'Obione pedunculata Moe., dus tous deux à l’action d'Eriophyides. M. MozziarD [99, 02] en a fait récemment l'étude anatomique ; aussi me contenterai-je de donner ici quelques détails complé- mentaires sur la première de ces galles. Pinus silvestris L. Cécidie produite par l’Zriophyes pini Naz. Depuis 1836, le célébre forestier allemand TH. HARTIG a signalé sur les branches du Pin silvestre, âgées de deux ou trois ans, des nodosités dont la taille varie de celle d’un pois à celle d’une noisette. Examinées jeunes, c’est-à-dire quelques mois après leur apparition, ces galles montrent très nettement en section une hypertrophie fort accusée du parenchyme cortical. Au centre de l’épaississement une cavité irrégulière contient les Eriophyides. L'action cécidogène se fait sentir jusqu’à une certaine distance, autour de la cavité larvaire, sur les cellules de l’écorce qui se cloisonnent activement. Elle s'étend aussi à la portion de l’anneau libéro-ligneux voisine des parasites: les éléments ligneux et libériens augmentent en nombre et l'épaisseur de cette zone peut devenir double de celle de la région vasculaire opposée. Cette dernière région ne se modifie pas et joue, ici comme dans les cas précédemment étudiés, le rôle de point d'appui; tous les tissus hypertrophiés par l’action cécidogène émanée des Eriophyides font saillie sur Le côté de la tige, au fur et à mesure qu’ils augmentent de volume, et produisent un renflement unilatéral. La galle possède ainsi un plan de symétrie déterminé par le centre de la cavité 192 C. HOUARD. larvaire et par la génératrice médiane de la région non modifiée de la tige. Ce plan est nettement visible dans la figure 79. FiG. 77 (E). — Aspect de la cécidie de la tige de Pin silvestre (gr. 1,5). FiG. 78 (N). — Schéma de la coupe transversale de la tige normale du même arbre (gr. 15). FiG. 79 (A). — Schéma de la coupe transversale de la tige anormale (gr. 15). b, bss, bsa, bois ; L, {s4, ls2, Liber ; fh1, fbs, fibres ligneuses ; es, cs”, canaux sécréteurs ; », moelle ; éc, écorce ; lgt, liège de la tige; ge, liège cica- triciel; /g, liège; ph, phelloderme; scl, tissu sclérifié; cAl, chambre larvaire. Les principales modifications que la présence des parasites apporte dans la structure de la tige sont les suivantes : a) Les cellules corticales se cloisonnent activement dans tous les sens, mais le contour des cellules primitives reste plus épais et plus visible que les cloisons secondaires ; ceci tient sans doute à ce que la différenciation de ces cellules était très avancée quand l'action à distance des Eriophyides s’est fait sentir sur elles ; b) Les canaux sécréteurs corticaux situës dans le tissu gallaire peuvent cloisonner les cellules de leur gaîne et même leurs cellules GALLES DE TIGES. 193 sécrétrices ; c'est le deuxième exemple que nous rencontrons d’une. modification intense de ce tissu ; c) Le phelloderne se cloisonne tangentiellement et peut offrir des files radiales composées de trois ou quatre cellules, au lieu d’une seule qu’elles comportent à l'état normal ; d) Le bois de la région hypertrophiée présente dans chaque couche annuelle plusieurs zones d'éléments à parois épaisses et à parois minces, ce qui ne permet plus de distinguer aussi facilement les couches d'automne et de printemps, d'ordinaire si nettes. Cicatrisation de la plaie. — Quand les parasites quittent la galle, avant que les cellules des tissus gallaires ne se dessèchent, une assise subéro-phellodermique (/g etph, en A, fig. 79) s'établit autour ee) | [JS ai FiG. 80. — Canal sécréteur cortical de la tige de Pin comblé par le liège cicatriciel (/g et ph) qui entoure la cavité larvaire chl ; g, cellule de la gaîne; cs, cellule sécrétrice ; ag, assise génératrice ; c, cellule corticale, de la chambre larvaire chl, un peu en arrière des cellules mortes scl dont les Eriophyides se nourrissaient. Cette assise cicatrise la plaie produite par Les parasites et protège ainsi l’axe de la tige ; c’est 15 194 CG. HOUARD. surtout son phelloderme qui se développe et il peut présenter des files de 8 à 15 cellules. CO Enfin, la couche cicatricielle s'établit aussi bien dans les tissus sécréteurs que dans les autres: la figure 80 représente un canal sécréteur très hypertrophié dans lequel les cellules sécrétrices cs, situées du côté de la cavité larvaire chl, ont été cloisonnées en cellules subéreuses /g lignifiées et en cellules phellodermiques ph à parois minces restées cellulosiques. Les cellules de la gaîne g subissent la même différenciation et les cellules corticales situées aux environs, en € par exemple, peuvent aussi présenter, en outre des cloisons qu'elles possédaient déjà, de nouvelles cloisons de phelloderme. Pendant les années qui suivent le départ des Acariens, le fonction- nement de l'assise génératrice interne se régularise peu à peu autour de l'anneau libéro-ligneux, et les nouvelles couches de bois qui prennent naissance ont partout la méme épaisseur. La coupe d'une tige âgée de six à huit ans, où un faible renflement révèle encore la présence d’une ancienne galle, accuse seulement dans sa partie centrale le plan de symétrie que possédait le tissu vasculaire pendant les deux ou trois premières années. Influence de la galle Sur le rameau. — Y] est encore intéressant de rechercher si la présence de la galle altère la portion de tige qui la surmonte. Des coupes transversales pratiquées au-dessus et au- dessous de la cécidie que porte un rameau de deux ans et demi montrent, dans les différentes couches ligneuses annuelles, le nombre suivant de cellules : PREMIÈRE ANNÉE DEUXIÈME ANNÉE SE ue Printemps Automne Printemps Automne Au-dessus de la galle.......... 13 14 D 9 Au-dessous de la galle......... 16 18 6 9 La présence de la galle entraîne aussi, pour la partie supérieure du rameau, un diamètre plus faible et un anneau ligneux moins épais. En résumé, sous l'influence de l’Eriophyes pini, la tige du Pinus silvestris présente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène détermine l'hyperplasie du tissu cortical et la production d'une saillie latérale ayant un plan de symétrie ; GALLES DE TIGES. 195 2% Les cellules corticales sont cloisonnées el leur contour pri- mitif reste distinct ; 3 Les canaux sécréteurs peuvent être modifiés ; 4° Le bois est plus développé d côté des parasiles, les zones de printemps et d'automne sont moins netles ; 50 Au-dessus de la galle, la Structure du rameau est altérée : 6° La cavité larvaire se cicatrise par un tissu subéro-phello- dermique à phelloderme très développe. RÉSUMÉ Du CHAPITRE Il, RELATIF AUX CÉCIDIES CAULINAIRES LATÉRALES PRODUITES PAR UN PARASITE SITUÉ DANS L'ÉCORCE Les faits les plus remarquables sont les suivants : 1° Le parasite est situé dans l’écorce ; 2° [L'action cécidogène qu’il engendre se traduit prinei- palement par l’hypertrophie du tissu cortical : 3° Le tissu gallaire produit est refoulé par la portion non déformée de la tige et donne une saillie latérale ayant un plan de symétrie. Ce plan est déterminé par le centre de la cavité larvaire et la génératrice opposée de la tige ; 1l passe également par l’axe du rameau ; 4 L'action cécidogène s’étend aussi, dans une certaine mesure, à l’anneau libéro-ligneux. FrG. 81. — Schéma indiquant les relations qui existent entre la tige et le parasite, quand celui-ci est situé dans l'écorce éc. b, bois; /, liber; #», moelle; «, action cécidogène ; p, réaction végétale ; x, plan de symétrie. La figure 81 représente schématiquement le mode de formation des galles corticales. 196 CG. HOUARD. CHAPITRE III. CÉCIDIES CAULINAIRES LATÉRALES PRODUITES PAR UN PARASITE SITUÉ DANS LES FORMATIONS SECONDAIRES LIBÉRO-LIGNEUSES Les Catalogues donnant la nomenclature des Cécidies énumèrent de nombreux cas de déformations caulinaires dans lesquelles la cavité larvaire est située au niveau de la région cambiale. Les larves trouvent là un excellent milieu pour se développer puisqu'elles sont à proximité d'abondants tissus dans lesquels circulent la sève brute et la sève élaborée; de plus, elles peuvent exciter l'assise généra- trice interne dont le fonctionnement exagéré leur procure des tissus riches en protoplasme, à parois tendres ne se lignifiant pas. Malgré les travaux de systématique très nombreux sur ce sujet et malgré l'intérêt tout particulier que ces galles présentent par suite de la position topographique du parasite, aucun mémoire n’a paru donnant l'anatomie de quelques-unes de ces productions et surtout indiquant de quelle façon les tissus gallaires prennent naissance. On trouve quelques renseignements anatomiques peu étendus, disséminés dans la deuxième édition des Maladies des Plantes de FRANK [96], concernant les cécidies caulinaires des Saules (p. 107- 109), des Ronces (p. 113 et 222). G. Hreronymus [90] a complété la description d'une dizaine de galles appartenant à ce chapitre par quelques courtes données anatomiques, non accompagnées de figures; ses meilleurs renseignements se rapportent aux cécidies produites par l'Andricus Sieboldi (n° 642 a), l'Andricus trilinea- lus (n° 643), le Diastrophus rubi (n° 736), l'Auwlax tragopoginis (n° 737), le Cecidonyia salicis (n° 515), le Diplosis tiliarum (n° 574), le Ceuthorrhynchus sulcicollis (n° 795), etc. Fockeu [90] et C. MassaLONGo [93a, n° 172] se sont occupés de galles produites par ce dernier parasite. GALLES DE TIGES. 197 Tilia silvestris Desr. Cécidie produite par le Contarinia tiliarum Kierr. Ce diptère produit des renflements verdâtres, ovoïdes, uni ou pluriloculaires sur presque toutes les parties des pousses et des inflorescences du Tilleul silvestre. Ces renflements atteignent jusqu'à 15 mm. de diamètre sur les jeunes rameaux de l’année ; ils ont 8 à 10 mm. tout au plus sur les pédoncules floraux et enfin ils sont toujours assez petits sur le pétiole des feuilles, sur la nervure du limbe ou sur la bractée de l'inflorescence. 1° Galle de la tige. La galle que j'ai étudiée a été récoltée au mois de juin; elle cons- titue une proéminence hémisphérique latérale de la tige et atteint 4,8 mm. d'épaisseur; la tige normale du même âge n’a que 2,3 mm. de diamètre. Structure de la tige normale. — La section transversale du jeune rameau comporte un anneau vasculaire continu comprenant un très grand nombre de faisceaux libéro-ligneux /?b (en N, fig. 83), pressés les uns contre les autres, et séparés par des rayons médul- laires rm (en N, fig. 87) composés d’une ou deux files de cellules riches en grains d’amidon. Chaque petit faisceau comporte un ou plusieurs pôles ligneux pb très nets, noyés au milieu des petites cellules de la zone périmédul- laire pm, et suivis de métaxylème 72b, puis de vaisseaux de bois secondaire bs, en petit nombre; dans le liber secondaire /s, des fibres libériennes lignifiées /? à parois minces apparaissent. En dehors, un paquet de 20 à 30 fibres péricycliques /p complète l’en- semble du faisceau. La moelle » (en N, fig. 83) est composée de grandes cellules remplies d'air groupées en rosette autour de cellules isolées plus petites, à contenu brunâtre ; dans sa zone externe elle possède 13 à 15 cellules gommeuses go, de tailles variées, mais pouvant atteindre 110 à 130 v de diamètre. L'écorce est épaisse ; elle comprend plusieurs assises de grosses cellules aplaties faisant suite à l’endoderme, puis des cellules plus 198 C. HOUARD. petites, arrondies, collenchymateuses co (en N, fig. 87). Elle possède aussi des cellules gommeuses go, un peu plus petites que celles de la moelle, mais en nombre double (25 à 30). Enfin l’épiderme ép a une paroi externe très épaisse et cutinisée. FiG. 82 (E). — Aspect de la cécidie caulinaire du Tilleul (gr. 1). Fic. 83 (N). — Coupe transversale schématique de la tige saine (gr. 15). Fic. 84 (A). — Coupe transversale schématique de la tige parasitée (gr. 15). flb, fl”, flb”’, anneau vasculaire ; ?, fibres libériennes ; /p, fibres péri- cycliques ; rm, rayon médullaire ; », #°, moelle; go, cellule gommeuse; co, collenchyme ; cr, cellules rayonnantes. Structure de la galle. — La section transversale passant par le milieu de la cécidie a la forme d’un ovale (en À, fig. 84) dont le petit bout contient l'anneau vasculaire à peu près circulaire. Cet anneau à un diamètre double de celui qu’il possède dans la tige normale ; ses faisceaux libéro-ligneux /7b, situés dans la partie de la tige qui a été peu altérée (petit bout de l'ovale), sont simplement écartés les uns des autres par l'hypertrophie des rayons médullaires et un peu allongés. Au contraire, les faisceaux //b”, flb7 de la région opposée sont beaucoup plus longs que les faisceaux normaux et très écartés les uns des autres par un parenchyme lignifié. GALLES DE TIGES. 199 La cavité larvaire, de contour irrégulier, est siluée au milieu d'une région non lignifiée, plongée dans la partie la plus épaisse [lb de l'anneau vasculaire. Elle est comprise entre deux zones fortement lignifiées, l’une interne #° située dans la moelle et composée de grandes cellules à parois épaisses, ponctuées, l’autre externe ce comprenant des cellules corticales allongées vers l'extérieur. De cet examen rapide, on peut conclure que l'excitation cécido- gène, produite par la larve de Contarinia située dans l’assise génératrice, a causé l’hyperplasie des tissus environnants et surtout l'allongement des cellules corticales dans une direction rayonnante par rapport au parasite. Cette action cécidogène diminuant au fur et à mesure qu'on s'écarte de la larve, il en résulte que la région de l’anneau vasculaire et de l'écorce la plus éloignée du parasite n'est pas modifiée ; cette région joue alors le rôle de point d’appui et oblige les tissus hyperplasiés à se développer du côté de la larve. Il se produit ainsi une saillie latérale munie d’un plan de symétrie (fig. 84). Ce plan est déterminé par le centre de la cavité larvaire et par la génératrice verticale de la région non déformée de la tige ; il passe par l'axe du rameau. Le dessin d'ensemble À (fig. S4) montre que, dans toutes les directions (dans l’écorce comme dans la moelle), l'action cécidogène se fait sentir jusqu’à Ja même distance de la larve. Le contour de la galle peut alors être considéré comme étant la courbe enveloppe de deux cercles : l’un d’eux (ce, fig. 85) représente la section normale de la tige ; l’autre ce” a son centre placé en un point z de l’assise génératrice interne agi de la tige et un rayon porportionnel à l'action cécidogène du parasite. Dans le cas présent. le rayon du cercle cécidogénétique est un peu supérieur au rayon de la tige et la courbe enveloppe a une forme ovalaire. Il est intéressant de remarquer en outre combien différent est l'effet de cette action cécidogène selon qu’elle s'exerce à l'intérieur de l’assise génératrice ou bien à l'extérieur. En dehors, l'influence parasitaire agit sur le tissu cortical interne qui est homogène et dont tous les éléments, subissant la même différenciation, s’étirent en longues cellules. En dedans de l’assise génératrice, les tissus sont plus variés ; ils sont aussi plus résistants en raison de leur forme et de leur facilité à se lignifier : c’est ainsi que le tissu ligneux comprend 200 C. HOUARD. des vaisseaux allongés suivant l'axe de la tige, qui peuvent difficile- ment s'élargir el qui augmentent peu en diamètre ; seuls les éléments courts parenchymateux s'hypertrophient considérablement. TI 1 1 il | 1 l I 1 mu | ! [ FiG. 85 (S4). — Schéma montrant que le contour de la cécidie caulinaire du Tilleul est la courbe enveloppe du cerele de la tige ce et du cercle cécidogénétique ce’. Fi&. 86 (S2). — Schéma de la moitié droite du cylindre central de la tige déformée. Mêmes lettres que précédemment ; agi, assise génératrice interne : end, endoderme ; pm, zone périmédullaire ; x, plan de symétrie ; 4, larve. Examinons maintenant d’un peu plus près comment se sont opérées toutes ces modifications et commençons par la région vasculaire, la plus importante, puisque c’est là que l’altération a débuté. Les faisceaux libéro-ligneux de la portion de la tige opposée à la cavité larvaire (en f7b, fig. 86) ont une taille double des faisceaux normaux, taille qui tient surtout au développement de leurs forma- tions secondaires (11 à 15 vaisseaux de bois secondaire par file au lieu de 5 ou 6). Au fur et à mesure qu’on se rapproche de la cavité larvaire, les formations secondaires augmentent encore en nombre, et c’est à une petite distance de la cavité, en //b”, que l’hypertrophie des éléments vasculaire est la plus grande. Là, les faisceaux s’allongent beaucoup et y acquièrent une taille trois ou quatre fois supérieure à celle qu’ils avaient normalement (0,54 mm. au lieu de 0,17 seulement). L'hypertrophie des rayons médullaires est très accentuée aussi, GALLES DE TIGES. 201 car leurs cellules peuvent non seulement se mulliplier, mais encore atteindre quatre ou cinq fois les dimensions normales. Il en résulte que les faisceaux sont écartés les uns des autres de 100 y (au lieu de 17 4) et constituent de longs fuseaux de deux files de vaisseaux tout au plus. L’un de ces faisceaux libéro-ligneux a été représenté en détail dans la figure 88 (en A), à côté d’un faisceau normal. Autour de chaque pôle ligneux pb, les cellules périmédullaires pm sont allongées fortement et accentuent la disposition étoilée qu'elles possèdent dans la tige normale ; il en est de même pour les cellules des rayons médullaires 7m comprises entre les vaisseaux primaires de deux faisceaux voisins. Toutes ces cellules, tant périmédullaires pm que conjonctives 772, sont également épaissies, fortement lignifiées et leurs parois munies de grandes ponctuations ovalaires de tailles variées. Le bois secondaire bs du faisceau est formé de gros vaisseaux à parois minces restées cellulosiques. Plus à l'extérieur, en dehors de l’assise génératrice interne agi, les fibres libériennes /? constituent un pelit amas allongé, serré entre les cellules des rayons médul- laires rm”: elles ont des parois épaisses et lignifiées. Enfin, au delà du liber primaire /, les fibres péricycliques fp ont augmenté leur taille (29 z au lieu de 124) et l'épaisseur de leurs parois, sans varier sensiblement en nombre. A partir de ce niveau //b” (fig. 86), où les faisceaux libéro-ligneux atteignent leur plus grande taille, on Les voit diminuer beaucoup en longueur au fur et à mesure qu’on se rapproche de la cavité larvaire ; leurs pôles ligneux se serrent de plus en plus les uns contre les autres tandis que la lignification des vaisseaux du bois primaire et des cellules périmédullaires s’accentue. Au contraire, à l'extrémité opposée des faisceaux, les pôles libériens s’écartent les uns des autres; les éléments libériens s’amincissent et se développent peu; les fibres libériennes apparaissent à peine et ne se lignifient pas ; les fibres péricycliques constituent de faibles amas peu lignifiés également, reliés entre eux par des cellules parenchymateuses très allongées. Après les deux ou trois faisceaux de la région f/b”” (en So, fig. 86 et À;, fig. 89), formés de quelques cellules à peine, on arrive à la portion /1b”” de l’assise génératrice qui a produit les tissus secon- daires dans lesquels la larve a établi sa cavité chl (en A, fig. 89). 202 CG. HOUARD. Tr er Ÿ Ve | EE cs RE FiG. 87 (N). — Fragment de la coupe transversale de la tige normale du Tilleul, représentée par la figure 83 (gr. 150). FiG. 88 (A). — Partie correspondante de la cécidie (gr. 150). GALLES DE TIGES. 203 Le bord de cetle cavité est garni de nombreuses et grandes cellules de bois non lignifié bs ; celles-ci sont entourées par les cellules bien développées également de l’assise génératrice agi et par quelques amas libériens / environnés de fibres péricycliques fp, épaisses et lignifiées. La larve a donc provoqué, à l'endroit où elle était située, une abondante production de bois secondaire qui n’a pas eu le temps dese lignifier et qui a fait saillie dans la moelle, comprimant à droite et à gauche du plan de symétrie les faisceaux libéro-ligneux courts f1b”. C’est un peu plus loin seulement, en f/b” (S:, fig. 86), que les faisceaux, moins comprimés ont pu prendre tout leur développement et répondre à l'action cécidogène par l'augmentation du nombre et de la taille de leurs éléments. Il faut remarquer encore que les faisceaux libéro-ligneux situés aux abords de la cavité larvaire (tels que /7b”) ont une zone péri- médullaire pm très développée dont les cellules se sclérifient plus tard et forment une première enveloppe dure autour de cette cavité. De même, les éléments médullaires en contact deviennent très grands, après avoir pris quelques cloisons, et ligni- fient fortement leurs parois. Au milieu de ce tissu sclérifié, les cellules à gomme (en A, fig. 84) sont deux ou trois fois plus grandes que celles de la tige normale (150 « de diamètre au lieu de &5 v). La figure 86 (S;) représente schématiquement la disposition des faisceaux libéro-ligneux de l'anneau vasculaire et résume ce que nous venons de dire. Les parties lignifiées ont été représentées par de gros traits noirs, de gros points noirs ou des hachures ; lout le reste est cellulosique. L'action du parasite ne se localise pas à l'anneau vasculaire, mais agit très fortement sur l'écorce, comme nous l'avons déjà dit plus haut et comme on peut le voir dans le dessin d'ensemble A (fig. 84). C'est même l’hypertrophie de cette région qui forme la plus grande partie des tissus gallaires, car son épaisseur peut atteindre sept ou huit fois l'épaisseur normale. Cette région corticale parasitée a une structure curieuse : elle est formée par de longues cellules à parois minces dont quelques-unes (cr en À;, fig. 89), situées dans le plan médian de la galle, atteignent une taille considérable, plus d’un millimètre. Ces cellules sont directement en contact, près de la cavité larvaire, avec les fibres péricycliques /p et souvent lignifiées comme elles : elles représentent SEE ENTRER RON CRT os C. HOUARD,. 204 F1G. 89 (A4). — Fragment de la coupe transversale de la cécidie éaulinaire du Tilleul, aux environs de la cavité larvaire chl (gr. 150). 90 (A2). — Tissu cortical de la même coupe (gr. 150). FiG. GALLES DE TIGES. 205 donc les cellules de l’endoderme et de l'écorce interne. À leur extrémité proximale, toutes les cellules allongées sont serrées les unes contre les autres ; à leur extrémité distale ce” (en A, fig. 90), elles sont au contraire contournées et en rapport avec d’autres cellules co”, contournées également, mais de plus en plus courtes au fur el à mesure qu'on se rapproche du bord de la galle. Elles se relient ainsi aux cellules de collenchyme co, qui sont toutes allongées langentiellement, et dont le cloisonnement intense a permis à la partie externe de l'écorce de suivre l'hypertrophie de la région interne. Enfin, pour continuer à couvrir la surface de la galle, l'épiderme ép a aussi multiplié le nombre de ses cellules: celles-ci sont un peu plus longues que les cellules normales, mais elles restent cellulosiques et leur paroi externe ne s’épaissit pas. Les poils épidermiques de la galle sont plus nombreux et moitié plus courts que ceux de la tige normale. Les longues cellules corticales radiales er (fig. 89) sont souvent lignifiées et munies de larges ponctuations comme les cellules du péricycle ; elles contiennent des grains d’amidon am et un gros noyau hypertrophié » dont le diamètre peut parfois atteindre 27 w.. Galle pluriloculaire. — La structure reste la même, mais l'hy- pertrophie de l'écorce se manifestant en face de toutes les cavités larvaires, la taille de la cécidie augmente dans une notable propor- lion et le contour de la section est presque circulaire. 29 Galles de l’inflorescence. Le Contarinia tiliarum peut déformer les différentes parties de l’inflorescence du Tilleul; nous en examinerons les cécidies sur un échantillon récolté dans la forêt de Montmorency en juin 1901. A. (alle située sur le pédoncule de la fleur. — Le pédoncule normal (en N3, fig. 91 et 9%) n’a que 0,7 mm. de diamètre; sa section est circulaire. Il y a dans le cylindre central de 30 à 34 faisceaux libéro-ligneux ne possédant chacun que 2 ou 3 vaisseaux de bois primaire b (en N;, fig. 94) et quelques formations secondaires ; la longueur totale d’un faisceau est de 55 à 60 u. Les fibres péricy- cliques /p ne sont pas lignifiées ; l’endoderme end est très net. 206 GC. HOUARD. L'écorce contient environ 15 grosses cellules gommeuses go presque contiguës. C7 FiG. 91 (E3). — Aspect de la cécidie de l'inflorescence du Tilleul (gr. 1). FiG. 92 (N3). — Coupe transversale schématique du pédoncule normal (gr. 15). FiG. 93 (A3). — Coupe transversale schématique du pédoneule anormal (gr. 15). flb, anneau vasculaire ; p, fp, péricycele ; #, moelle ; go, cellule gommeuse ; cr, cr’, cr”, cellules rayonnantes. La galle (en A3, fig. 91 et 93) est à peu près sphérique et son diamètre atteint 3 mm. En section, le cylindre central affecte nettement la forme d’un triangle curviligne, et c'est au milieu de l’un de ses côtés, dans les lissus dérivant du fonctionnement de l'assise génératrice interne, que se trouve la chambre larvaire cl. L'action cécidogène engendrée par la larve se fait sentir sur la région corticale voisine dont toutes les cellules cr sont allongées radialement et contournées ; mais cette action n’est pas limitée là et elle agit aussi, avec une intensité un peu moindre pourtant, sur les deux régions corticales (en er” et cr”) situées en face des deux autres côtés du triangle : leurs cellules s’allongent radialement. Entre ces deux dernières régions, l’action cécidogène ne se manifeste presque pas et le sommet supérieur du triangle vasculaire joue ainsi le rôle de point fixe: il en résulte que l’ensemble de la coupe offre un plan de symétrie, bien caractérisé, déter- miné par la génératrice de la région non déformée et par le centre de la cavité larvaire. Ce plan passe également par l’axe du pédon- cule floral. Tous les faisceaux libéro-ligneux du cylindre central sont altérés GALLES DE TIGES. 207 par l’action de la larve du Contarinia tiliaruin. Tout d’abord ils se son! allongés beaucoup (taille de 250 à 300%) sans augmenter le nombre de leurs éléments (en A3, fig. 95), car ils se montrent com- pr T .-0 o pd X} S TR n 2 8 É He On = bte er Se ; TT À; N, Fi. 9% (N3). — Portion de la coupe transversale représentée par la figure 92 (gr. 150). Fi. 95 (A3). — Portion correspondante de la figure 93 (gr. 150). pb, b, bs, bois; L, Liber; p, fp, péricycle; rm, rayon médullaire ; pm, zone périmédullaire ; #, moelle ; go, cellule gommeuse ; end, endoderme. posés de 3 à 6 petits vaisseaux de bois primaire b, lignifiés, suivis de quelques gros vaisseaux secondaires à paroi mince et non lignifiée ; leur liber / est peu développé. Puis, par suite de l’allon- gement tangentiel du rayon médullaire rin, les faisceaux ont été écartés les uns des autres. Cette séparation leur a donné à tous un aspect étoilé très curieux : les pôles libériens / sont réunis les uns aux autres par des cellules allongées tangentiellement ; il en est de même des pôles ligneux pb autour desquels les cellules des rayons médullaires et de la zone périmédullaire pm forment de véritables étoiles, accentuant ainsi l'aspect rayonnant des pôles normaux. Toutes les cellules entourant les pôles ligneux ont leurs parois munies de grandes ponctuations irrégulièrement allongées ; elles se 208 C. HOUARD. lignifient de bonne heure autour de la moelle, sauf aux environs immédiats de la cavité larvaire où ce sont les éléments péri- cycliques fp (en A3, fig. 93), situés un peu plus à l'extérieur, qui se sclérifient. Les cellules de la moelle # restent longtemps cellulosiques,; leurs parois sont épaisses et munies de grosses ponctuations. Comme elles contiennent un abondant protoplasme, une partie d’entre elles sert de nourriture à la larve qui étend ainsi sa cavité jusqu'au centre du pédoncule floral. B. Galle Située au point où l'axe de l'inflorescence se sépare de la bractée. — Très souvent la cécidie est située à cet endroit. Elle demeure alors petite, atteint à peine 4 mm. de diamètre (F,, fig. 97), FiG. 96 (Ey). — Aspect de la bractée normale du Tilleul (gr. 0,5). Fi. 97 (F1). — Aspect de la bractée anormale du même arbre (gr. 0,5). Fi. 98 (N3). — Schéma de la coupe transversale de la nervure médiane normale et du pédoncule normal à leur point de jonction (gr. 15). Fi&. 99 (A). — Schéma de la coupe correspondante pratiquée au travers de la cécidie (gr. 15). flb, flb”, faisceaux libéro-ligneux ; p, péricyele ; m, m”, moelle; er, er’, cellules rayonnantes ; éps, épi, épidermes supérieur et inférieur. -et fait fortement saillie à la face supérieure, landis que sur l’autre face elle reste plane (voir À,, fig. 99). GALLES DE TIGES. 209 A l'intérieur de la section, les faisceaux vasculaires sont répartis en deux groupes, beaucoup plus volumineux que dans l'organe sain. Le groupe de faisceaux libéro-ligneux //b” situé à la face inférieure est presque rectiligne : il représente le système vasculaire de la ner- vure médiane de la bractée. L'autre groupe f{b occupe la partie sphérique de la galle ; il est très développé, sensiblement circulaire, ©): \ [) [X) EX V1 < >) UN} FiG. 100 (A). — Portion de la coupe transversale représentée par la figure 99 (gr. 150). pb, pôle ligneux ; /, liber ; rn, rayon médul- laire ; p, péricycle ; end, endoderme ; pm, zone périmédullaire ; éc, écorce. et représente le sys- ième vasculaire de l'axe de l’inflores- cence. C'est dans l’assise génératrice de ce der- nier système vascu- laire, et dans la partie la plus rapprochée de flb”, que la cavité lar- vaire apparaît. L’ac- tion cécidogène du parasite se fait d’a- bord sentir sur le issu médullaire 72 qui se cloisonne et se ligni- fie en partie ; elle agit ensuite sur l'anneau libéro - ligneux f{b dont tousles faisceaux s’hypertrophient et s’écartent les uns des autres : il se produit, comme nous l'avons vu plus haut, un allon- gement très accentué des cellules reliant entre eux les pôles ligneux et libériens. C'est ce que représente la fig. 100 (A;) : les deux pôles ligneux pb de deux faisceaux voisins sont entourés par les cellules rayonnantes de la zone périmédullaire p# et les pôles libériens / sont réunis entre eux par les cellules péricycliques p très allongées ; presque 14 210 GC. HOUARD. toutes les parois de ces cellules sont munies d'énormes ponctuations elliptiques. L'action cécidogène se fait sentir, autour du cylindre central, sur l'écorce dont les cellules cr (en A;, fig. 99) s’allongent dans une direction rayonnante par rapport à la larve, avec une intensité d'autant plus grande qu’elles sont plus rapprochées du parasite. Ce qui fait que le grand axe horizontal de la galle passe par le centre de la cavité larvaire et non par le milieu de l'anneau libéro-ligneux ; d’où l’aspect aplati présenté par la cécidie. Vers la face inférieure, l’action cécidogène ne se traduit que par un allongement beaucoup plus faible des cellules corticales €r°: elles restent courtes, serrées les unes contre les autres, sans méats et ne peuvent s’allonger à cause de la résistance que leur oppose le long arc vasculaire aplati /7b” de la bractée. Cet arc possède tous ses faisceaux libéro-ligneux écartés les uns des autres par l'hypertrophie de ses rayons médullaires ; aussi sa longueur totale est-elle de 2 mm. environ au lieu de 0,75 mm. qu’il possède dans la bractée saine; il est de plus fortement recourbé à ses deux extrémités. L’arc résistant //b” joue dans la formation de la galle le rôle de point d’appui et tous les tissus gallaires qui prennent naissance dans la région vasculaire de l'axe d’inflorescence sont obligés de se développer vers la face supérieure, à droite et à gauche d’un plan de symétrie. Ce plan est déterminé par la génératrice médiane de la région plane de la galle et par le centre de la cavité larvaire ; il passe par l’axe du rameau d’inflorescence. C. Galle située sur la partie commune de l’axe d'inflorescence et de la nervure médiane de la bractée. — La section normale N; (fig. 103) faite dans cette région a 1 mm. d'épaisseur. La face supé- rieure est presque plane, l’autre est bombée ; enfin l'anneau vascu- laire /{b est un peu plus épais vers la face supérieure. La cécidie située dans la même région est sphérique et atteint 2,4 mm. de diamètre (en F;, fig. 102); elle fait un peu plus saillie à la face supérieure qu’à la face inférieure (en A;, fig. 104) parce que la cavité larvaire chl est située dans la partie supérieure de l'anneau libéro-ligneux /7b. Comme dans les cas précédemment éludiés, la région gallaire opposée à la cavilé larvaire est peu modi- GALLES DE TIGES. 211 fiée ct sert de point d'appui; avec le centre de celte cavité, elle détermine le plan de symétrie de la cécidie. FiG. 101 (Ez). — Aspect de la bractée normale du Tilleul (gr. 1). FiG. 102 (F3). — Aspect de la cécidie basilaire de la bractée anormale (gr. 1). FiG. 103 (N3). — Schéma de la coupe transversale du pétiole sain (gr. 15). F1G. 104 (A3). — Schéma de la coupe transversale du pétiole parasité (gr. 15). ftb, flb”, faisceaux libéro-ligneux ; fp, fibres péricycliques ; go, cellule gommeuse ; cr, cellules rayonnantes ; chl, chambre larvaire. Les modifications subies par l’écorce et l'anneau vasculaire sont identiques à celles que nous avons vues jusqu'à présent: allon- gement des cellules corticales cr en direction rayonnante par rapport à la larve; allongement tangentiel des cellules entre les pôles libériens ; fonctionnement actif de l'assise génératrice interne aux environs de la larve sans lignification des tissus formés ; épais- sissement et, plus tard, lignification des cellules médullaires. La région de l’anneau vasculaire, opposée à la cavité larvaire, et qui dans la section normale a une structure homogène, présente ici trois groupes bien distincts de faisceaux libéro-ligneux : 1° dans le plan de symétrie, un groupe d'une dizaine de faisceaux f4b comprenant de gros vaisseaux ligneux semblables à ceux de la partie supérieure de l’anneau vasculaire et qui joints à eux recons- tituent le cercle vasculaire de l'inflorescence ; les fibres péricy- cliques fp sont très développées en face tous ces faisceaux ; 2° à droite el à gauche de ce groupe médian, deux autres groupes vasculaires /7b”, composés chacun de 16 à 25 petits faisceaux, sans fibres péricycliques : ils correspondent au système vasculaire de la nervure médiane de la bractée. 212 C. HOUARD. Du reste, la dissociation de ces groupes, la soudure du groupe médian f{b avec la portion vasculaire supérieure, la soudure °0 D me Em S 7 Oo EF . > FiG. 105 (Es). — Inflorescence de Tilleul entièrement déformée (gr. 0,5). F1@. 106 (A6). — Coupe transversale schématique au niveau marqué Ag (gr. 15). entre eux des groupes //b” à la face inférieure sont nettement visibles dans quelques galles. On les distingue encore mieux quand toute la partie supérieure de l’inflorescence est transformée en une grosse galle pluriloculaire de 12 à 15 mm. de diamètre (Es, fig. 105) et que l'hypertrophie se fait sentir dans la région de soudure de l'axe d’inflorescence avec la bractée (A;, fig. 106). 3° Galle du pétiole. La structure du pétiole normal varie avec l'endroit où l'on pratique la coupe : près de la base, il y a sept faisceaux disposés en arc ouvert; au milieu, quatre petits faisceaux se soudent aux trois aulres ; enfin, près du limbe, les trois faisceaux qui restent se soudent entre eux par leurs péricycles. C’est au voisinage de cette dernière région que se trouvait la galle décrite ici. La section normale du pétiole, pratiquée dans un organe sain au niveau Correspondant exactement à celui occupé par la galle (E;, fig. 107), présente donc trois gros faisceaux en fer à cheval [tb, flb”, flb’”, comme le montre la figure 109 (N;): sa largeur est 2,5 mm. et son épaisseur de 1,5 mm. C’est dans l’assise génératrice, au bord de l’un des faisceaux supérieurs, près du plan de symétrie (en /{b, fig. 110), que la larve établit sa cavité. Il en résulte immédiatement l'hypertrophie de GALLES DE TIGES. PAS toutes les cellules de l'écorce er situées aux environs, hypertrophie qui fait disparaître le sillon de la face supérieure du pétiole F1G. 107 (E7). — Aspect du pétiole sain de la feuille de Tilleul (gr. 1). F1G. 108 (F7). — Aspect du pétiole parasité (gr. 1). Fi. 109 (N5). — Coupe transversale schématique du pétiole normal (gr. 15). Fi. 110 (A7). — Coupe transversale schématique de la cécidie (gr. 15). flb, flb”, flb7, faisceaux Lbéro-ligneux ; éc, écorce; go, cellule gommeuse; cr, cellules rayonnantes ; chl, chambre larvaire. et rend la cécidie à peu près sphérique; le centre de la section coïncide avec celui de la cavité larvaire chl. Les modifications subies par les faisceaux libéro-ligneux /#b, f1b”, les plus voisins de la cavité larvaire, et par la moelle sont absolument semblables à celles que nous avons vues jusqu’à présent : écartement et allongement des faisceaux, absence de lignification dans les tissus secondaires, sclérification de la moelle et du péri- cycle, etc. Le faisceau médian f7b” et l'écorce contiguë éc sont simplement un peu hypertrophiés : ils jouent dans le développement de la galle le rôle de point fixe et amènent la production d'un plan de symétrie qui accentue celui du pétiole normal. 214 CG. HOUARD. En résumé, sous l'influence du Contarinia tliliarum, la tige, le pétiole et l'axe d’inflorescence du Tilia silvestris présentent les caractères suivants : 1° L'action cécidogène excite en un point le fonctionnement de l’assise génératrice libéro-ligneuse qui produit beaucoup de tissus secondaires non lignifiés et détermine latéralement l'apparition d'une saillie hémisphérique ayant un plan de symétrie ; 20 L'écorce prend toujours une part active à la production des galles et allonge énormément ses cellules internes ; 3 La disposition rayonnante des cellules autour des pôles ligneux et libériens est accentuée. Populus Tremula l. Cécidie produite par l//armandia pelioli Kigrr. On rencontre fréquemment sur les tiges et les pétioles du Tremble de belles galles arrondies, rouges, munies d’un petit bec. Elles atteignent souvent 10 mm. de diamètre; elles sont uni ou plurilo- culaires et contiennent dans chaque loge une larve dont la méta- morphose à lieu en terre. 1° Galle de la tige. Cette cécidie a la forme d'un hémisphère appliqué contre la tige (E, fig. 111). Vers son pôle on aperçoit la trace de la piqûre, ce qui indique que la femelle a perforé horizontalement l'écorce pour déposer son œuf dans l’assise génératrice ; l’hypertrophie des tissus s’est produite ensuite régulièrement autour de cette piqûre (qui a constitué un canal horizontal en partie oblitéré par les tissus de cicatrisation) et 1l en est résulté la forme hémisphérique de la galle. De plus, la région opposée de la tige n’a pas été du tout déformée par la production de la cécidie; elle a servi de point d'appui et favorisé le développement d’un plan de symétrie vertical passant par le centre de la cavité larvaire et par la génératrice médiane de cette région non déformée. GALLES DE TIGESe 215 Nous aurons donc à envisager dans cette galle deux sortes d'accroissements : 1° Un accroissement en épaisseur, caractérisé par un plan de symétrie vertical ; 2 Un accroissement cicatriciel autour du canal de la piqûre, caractérisé par un axe de symétrie horizontal. Accroissement en épaisseur. — Afin de mieux comprendre la structure de la galle, voyons en quelques mots l'anatomie d’une LR À 1 Fr&. 111 (E). — Vue extérieure de la cécidie de la tige de Tremble (gr. 2). FrG. 112 (N). — Schéma de la coupe transversale de la tige normale (gr. 15.) FiG. 113 (A). — Schéma de la coupe transversale de la cécidie (gr. 15). flb, anneau vasculaire ; fp, fibres péricycliques ; pm, fpm, zone périmédul- laire; m, m', moelle; rm», rayon médullaire; s, sillon; chl, chambre larvaire. jeune tige normale, cueillie au commencement de juin, et dont l’âge correspond aussi exactement que possible à celui de la cécidie. Le diamètre de la section est 1,7 mm. et le contour est irrégulier (N, fig. 112). L'épiderme ép (en N, fig. 114) est suivi de quatre assises environ de cellules de collenchyme co et d’un tissu cortical lacuneux 216 … G+ HOUARD. éc limité vers le centre par un endoderme end à petites cellules S < es S \ e| D ste a pe e ] f? Q®, FiG. 114 (N). — Portion de la coupe transversale repré- sentée par la fig. 112(gr. 150). FiG. 115 (A). — Partie correspon- dante de la cécidie (gr. 150). pb, b, bs, bois ; L, s, liber ; agi, assise génératrice in- terne ; fp, fibres péricy- cliques ; pm, zone périmé- dullaire ; m, moelle ; end, en- doderme ; ec, écorce ; co, collenchyme ; ep, épiderme. GALLES DE TIGES. 214 contenant des grains d'amidon. Deux cercles irréguliers de petites fibres péricycliques /p et de petits arcs fibreux périmédullaires pm enferment complètement l’anneau vasculaire dans lequel les formations secondaires sont encore peu développées. Les cellules de la moelle » sont à parois minces et ont 40 à 50 & de diamètre. La section transversale de la galle est sensiblement ovale (A, fig. 113) : ses dimensions sont 5 mm. sur 4,4 mm. Le petit bout de l'ovale est occupé par une moitié peu modifiée du cylindre central dont les éléments restent normaux et sont en même temps plus nombreux. L'autre moitié du cylindre central est tout à fait déformée : elle n’est plus arrondie, mais comme déprimée en son milieu. La partie surbaissée est séparée de l'écorce par une zone irrégu- lière de fibres péricycliques /p très nombreuses et très agrandies (29 y au lieu de 7 uw). En dedans, les faisceaux libéro-ligneux //b sont écartés les uns des autres par suite de l’hypertrophie considérable des rayons médullaires rm. Ces faisceaux ont tous produit d’abondantes formations secondaires qui entourent la cavité larvaire irrégulière chl, située vers le milieu de la galle, en face la trace de la piqûre. Dans chaque faisceau, le bois secondaire formé (bs, en A, fig. 115) n’est pas lignifié ; le bois primaire b l’est quelque peu, mais ses vaisseaux sont écartés les uns des autres par l’hypertrophie du parenchyme et leur disposition devient très irrégulière. Les pôles ligneux pb sont entourés de longues cellules cloisonnées et, au pôle opposé de chaque faisceau, le liber Z est constitué par de grandes cellules non différenciées qui sont en contact avec les grosses fibres péricycliques /p. Au centre de la tige, les cellules de la zonc périmédullaire pm et de la moelle ;7 sont considérablement hyper- trophiées (80 à 100 de diamètre pour les cellules médullaires au lieu de 40 à 50»); elles épaississent et lignifient leurs parois après s'être cloisonnées tangentiellement. Dans la galle âgée, il se produit autour de la cavité larvaire, et à une certaine distance, un anneau scléreux très épais dont les éléments dérivent presque tous des parties lignifiées de la moelle ou du péricycle. 218 CG. HOUARD. Cas particulier. — Il arrive souvent que la cavité larvaire est établie dans la région corticale hypertrophiée ; l'anneau vasculaire de ce côté de la tige est aplati et ses faisceaux libéro-ligneux sont dissociés par l’hypertrophie des rayons médullaires (voir /1b, fig. 116, À;). Bien que la cavité larvaire chl soit située en dehors de W 00 Ed > OS == ER ee © et RSR EL ae TS PISTES ne 00e À, CAREEN PK e F 2e, \S A LC e F1iG. 116 (A4). — Coupe transversale schématique d’une cécidie caulinaire de Tremble dont la cavité larvaire chl est située dans l'écorce ec (gr. 15). FiG. 117 (A2). — Partie de la coupe précédente montrant le fonctionnement de l’assise génératrice interne agi dans le tissu cortical, en ag’ (gr. 150). flb, anneau vasculaire; pb, pôle ligneux ; pm, zone périmédullaire ; /p, fibres péricycliques ; s, sillon ; £e, tissu cicatriciel. Panneau ligneux, il n’en est pas moins vrai qu’elle est plongée au milieu de tissus secondaires provenant du fonctionnement actif d'une assise génératrice secondaire ag”: celte assise s’est élablie GALLES DE TIGES. 219 autour de la cavité larvaire et y a produit de nombreux petits faisceaux vasculaires. L’assise ag” émane de l’assise génératrice normale agi de la tige, comme le montre la figure 117 (A;), en un point où les fibres péri- cycliques /p ont été séparées par l’oviducte de la femelle avant leur lignification. La petite cavité s ainsi formée s’est allongée tangen- tiellement en même temps que l’hypertrophie des tissus environnants se produisait: son pourtour s’est garni de tissus de cicatrisation. Enfin, en son milieu, elle a été comblée par l’assise génératrice ag qui a pu gagner l'écorce et entourer la petite larve de nombreux tissus secondaires. Accroissement cicatriciel. — Si l’on coupe la galle perpendicu- lairement au canal de la ponte, c’est-à-dire parallèlement à l'axe de la tige, comme lindique la ligne verticale de la figure 118 (Lu), on obtient des sections circulaires (1», fig. 119). Le centre de chaque section est occupé par le canal irrégulier s, lui-même entouré de nombreuses cellules disposées en files rayonnantes et présentant d’abondantes cloisons tangentielles: c’est du éissu cicatriciel te qui s’est développé et qui a cicatrisé peu à peu la plaie en obstruant le canal. Autour de ce premier tissu se trouve un anneau de éissu vasculaire to composé d’un très grand nombre de petits faisceaux Hibéro-ligneux irrigateurs irr (fig. 120, L;); ces faisceaux ont une section irrégulière, beaucoup même sont coupés longitudinalement ou obliquement, car ils serpentent dans tous les sens au travers du tissu vasculaire. La portion médiane de la figure 120 montre quelques-uns des courts vaisseaux qui composent ces faisceaux secondaires : leurs parois lignifiées sont munies de fines ponctua- tions allongées qui permettent la nutrition des tissus hypertrophiés par un échange rapide de liquides nutrilifs. Tous ces petits faisceaux dérivent de la région libéro-ligneuse très élargie de la tige que nous avons vue plus haut. j Entre le tissu vasculaire { et l'épiderme ép, l'écorce éc comprend d’abord de pelites cellules arrondies, empilées en files rayonnantes, puis de grandes cellules à parois cellulosiques, cloisonnées radia- lement et tangentiellement, ce qui leur permet de suivre l'hyper- plasie de la partie centrale. Ces dernières cellules diminuent de taille aux abords de l’épiderme ép qui comporte lui-même des HOUARD, C. 220 ne mo PR À ve D = Le , ré \e 20 #) #7) as ee, 4 DIS LRO DEEE nas NY EX d Aù CGR ; Lo, tissu vasculure ; irr, faisceau d'irriga- derme ; m, moelle. tudinale de la cécidie de la tige de Tremble (gr. 4). ntielle de la cécidie du même arbre (gr. 4). coupe précédente (gr. 150). dt Q D Mt icatriciel s tuic s, sillon ; £c, tissu cic tion ; éc, écorce : ép, ép Fi. 118 (14). — Coupe long FiG. 119 (Lo). — Coupe tang Fic. 120 (L3). — Partie de l: GALLES DE TIGES. 221 cellules très petites (25 y de largeur en moyenne), à parois minces non lignifiées. 2° Galle du pétiole. C’est la plus commune; elle peut être située en n'importe quel point du pétiole depuis la base jusqu'au limbe. Elle est sphérique, d’un diamètre de 5 à 8 mm. (F3, fig. 122), velue ou non, charnue et colorée en rose ; sur le côté se voit la cicatrice indiquant l'endroit où la femelle a introduit l’œuf. ”@ Gi PR ue “(71 1 2 71 . 124 (A3). — Schéma de la coupe transversale du pétiole parasité (gr. 15). s, sillon ; ox, mâcles d’oxalate de calcium; @, b, c, d, e, f, faisceaux libéro-ligneux. La structure du pétiole de Tremble est différente selon les régions que l’on envisage et par suite influence l’anatomie des cécidies. Le développement de la galle reste le même dans tous les cas et je me contenterai de représenter ici la section d’une galle de l’année (A3, fig. 124) et la section correspondante pratiquée sur un pétiole sain (N3, fig. 123). 222 C. HOUARD. Le péliole sain présente six gros faisceaux libéro-ligneux &, b, €, d, e, f, régulièrement placés par rapport au plan de symétrie. C’est au voisinage des assises génératrices des faisceaux e et /, c'est-à-dire à gauche du plan de symétrie du pétiole, que l'œuf est déposé (fig. 124); l’action cécidogène se fait aussitôt sentir, après l’éclosion de la larve, sur les assises génératrices qui fonctionnent alors activement et produisent en grande abondance des tissus secondaire aux environs de la cavité larvaire, ainsi que des tissus cicatriciels autour de la blessure. Tous ces tissus hyperplasiés font saillie sur le côté gauche du pétiole, car la région située à droite du plan de symétrie n'ayant été que peu déformée joue le rôle de point d'appui et refoule les tissus gallaires. La nutrition de la zone hyperplasiée entourant la larve est assu- rée par les vaisseaux situés dans les parties latérales des faisceaux e et /, élalés en éventail. Tous les autres faisceaux &, b, c, d sont simplement hypertrophiés et ont leurs éléments un peu dissociés. Dans les tissus gallaires se trouvent de nombreuses mà- cles d’oxalate de calcium 0x ; il n’y en a pas dans la région non déformée située de l’autre côté du plan de symétrie. L’épiderme de la cécidie a des cellules plus grandes que les cellules normales et des parois plus minces. Plusieurs larves peuvent pic, 125. — Schéma de la coupe trans- concourir à la formation d'une versale d’une cécidie âgée et plurilocu- galle qui devient alors plurilo- laire du pétiole de Tremble (gr. 15). culaire; dans ce cas presque tous les faisceaux sont déformés et le plan de symétrie primitif du pétiole n’est plus reconnaissable. Enfin, peu à peu, au fur et à mesure que la galle vieillit, les cavités larvaires s'entourent d’une couche continue scléreuse pro- tectrice (fig. 125). Quand la cécidie se dessèche, les tissus de cicatrisation produits autour de la piqûre se contractent ainsi que les couches scléreuses GALLES DE TIGES. 223 des chambres larvaires : il se forme de cette façon un canal assez large par lequel les larves gagnent le sol pour s’y métamorphoser. En résumé, sous l'influence de l'Hurmandia petioli, la tige du Populus Tremula présente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène excite en un point le fonctionnement de l’assise génératrice libéro-ligneuse qui produil une grande quantité de tissus secondaires non lignifiés et détermine latérale- ment l'apparition d'une saillie hémisphérique ayant un plan de symétrie ; 2° L’écorce multiplie ses cellules autour de la piqure et donne un abondant tissu de cicatrisation, entouré d'un réseau vasculaire, symétrique par rapport à un axe. Le pétiole présente une déformation analogue qui n'intéresse le plus souvent que la moitié de ses tissus. Salix capræa L. Cécidie produite par le Æhabdophaga salicis ScHRANKk. Ce diptère produit sur les jeunes rameaux du Saule Marsault des renflements fusiformes ou sphériques atteignant au moins 10 mm. de diamètre ; leur surface verdâtre est bosselée. En général, les cécidies sont pluriloculaires et leurs cavités larvaires bien nettes. J'ai choisi pour cette étude l'extrémité d’une cécidie allongée afin que la coupe pratiquée au niveau À (en KE, fig. 126) ne rencontre qu'une seule chambre larvaire. La tige normale N (fig. 127) est cylindrique et a 2,3 mm. de diamètre ; son anneau libéro-ligneux /{b est très épais. La section de la galle est ovalaire (A, fig. 128), les dimensions de ses axes étant 2,5 mm. et 3,5 mm. C’est au niveau de l’assise géné- ratrice interne que la larve a établi sa cavité larvaire chl et complète- ment modifié la région avoisinante : les faisceaux libéro-ligneux /7b” les plus proches de cette cavité ont été éloignés les uns des autres par l'hypertrophie du parenchyme qui les séparait; ils se sont de 224 CG. HOUARD. plus fortement allongés par suite de la production d'abondants tissus secondaires. L'action cécidogène du parasite s’est fait sentir jusqu’à la même distance au- tour de la cavité larvaire. Ainsi, du côté de la moelle m, les cellules mé- dullaires les plus proches m” se sont allongées radiale- ment puis ont pris une ou deux cloi- sons tangentielles ; elles ont ensuite épaissi et lignifié leurs parois. Le rie Fe SAR TOR A ; . 126 (E). — Aspect de la cécidie de la tige de RÉME pIÉREMENENSS SAR Pr. (gr. 4). ; F1G. 127 (N). — Schéma de la coupe transversale de la s'est produit vers l'extérieur au ni- tige normale (gr. 15). veau desfibres péri- Fic. 128 (A). — Schéma de la coupe transversale de la cycliques /p et fina- PET CAEN) Renan tite ftb, fib”, anneau vasculaire ; fp, fibres péricy- 3 cliques ; m», m’, moelle; chl, chambre larvaire ; larvaire a étéentou- 3, larve. rée par une Zone scléreuse d’égale épaisseur. Le faible diamètre de cette zone scléreuse permet de considérer l’action cécidogène de la larve du Rhabdophaga salicis comme peu intense, et, si les galles produites par ce diptère peuvent atteindre la grosseur d’une noix, c’est qu'elles sont la résultante des actions cécidogènes combinées de plusieurs larves. L'absence de modifications dans la région de la tige opposée à la cavité larvaire fait naître, dans les tissus gallaires rejetés latérale- ment, un plan de symétrie déterminé par la génératrice médiane de la région non déformée et par le centre de la cavité larvaire. Ce plan passe par l’axe du rameau. GALLES DE TIGES. 295 En résumé, sous l'influence du Rhabdophaga salicis, la tige du Salix capræa présente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène excile en un point le fonctionnement de l'assise génératrice libéro-ligneuse et détermine l'apparition d'une saillie latérale ayant un plan de symétrie ; 20 La moelle et la région péricyclique forment une couche scléreuse continue ; 3 L'écorce est peu altérée. Sarothamnus scoparius Kocx. Cécidie produite par le Contarinia scoparii RüBs. Dès le mois de mai, les galles du Contarinia scoparii appa- raissent sur les jeunes rameaux de l’année, à l'aisselle des feuilles. Leur forme est globuleuse (en E, fig. 129) et leur taille ne dépasse pas beaucoup celle d’un grain de chènevis ; aussi sont-elles difficiles à distinguer. Chaque cécidie est constituée (E>, fig. 131) par une partié globu- leuse, presque sphérique, pédicellée, d’un vert jaunâtre, couverte de petits poils et présentant trois ou quatre côtes irrégulières peu saillantes. Ces côtes sont en relation à la partie supérieure de la galle avec deux petites feuilles /e, velues, peu ouvertes, comprenant entre elles un bourgeon terminal bg,entouré lui-même de deux autres feuilles plus réduites encore. Il est facile de voir qu'une telle cécidie correspond à un jeune rameau développé à l’aisselle d’une feuille, tel que celui représenté en E, (fig. 130) et qui a exactement le même âge. Pendant que les jeunes rameaux non parasités continuent à croître, le rameau anormal cesse d’allonger son premier entre-nœud qui s’épaissit et devient globuleux ; la petite cécidie formée n’a que 6 à 8 mm. de longueur. A l’intérieur de la partie globuleuse se trouve la larve du Conta- rinia qui agrandit de jour en jour sa cavité et finit par se constituer une chambre spacieuse à parois minces (L, fig. 132). Voyons maintenant la structure anatomique de celte curieuse déformation : comparons une coupe transversale faite au milieu de 15 2% C. HOUARD. la partie globuleuse de la galle (indiquée par la ligne A, en E, fig. 131) à une autre coupe pratiquée au travers du premier entre-nœud d’un jeune rameau ayant le même âge (indiquée par la ligne N, en E;, fig. 130). FiG. 129 (E). — Aspect de la diptérocécidie du Sarothamne (er. 1). FiG. 130 (F1). — Aspect d'un jeune rameau (gr. 6). FiG. 131-(E2). — Vue de la cécidie plus grossie (gr. 6). Fi@, 132 (L). — Coupe longitudinale de la cécidie (gr. 6). FiG. 133 (N). — Schéma de la coupe transversale du jeune rameau (gr. 15). FiG. 134 (A). — Schéma de la coupe transversale du court pédicelle de la cécidie (gr. 15). F1@. 135 (As). — Coupe transversale schématique pratiquée au milieu de la cécidie (gr. 15). ftb, flb”, anneau vasculaire ; fe, fe”, fc”, fc”, fibres corticales; fe, feuille ; bg, bourgeon ; chl, chambre larvaire ; 3, larve. La coupe transversale du jeune rameau normal n’a guère qu’un demi-millimètre de diamètre (N, fig. 133) ; elle est presque carrée et munie aux angles de quatre ailes arrondies. Son cylindre central comprend un anneau vasculaire encore peu développé dont les faisceaux ne possèdent que quelques vaisseaux de bois primaire b (en N, fig. 137) et un commencement de formations secondaires ag. L’endoderme end est bien différencié et présente dans chaque aile un diverticule qui entoure quelques fibres péricycliques /p non encore lignifiées. Déjà le petit pédicelle qui supporte la partie globuleuse de la galle n’a plus une section aussi régulière que la tige normale et ses ailes GALLES DE TIGES. 227 sont de tailles différentes, comme l'indique la figure 134 (A). Son cylindre central conserve les mêmes dimensions que dans le rameau normal, mais le bois primaire est plus développé, de gros vaisseaux de métaxylème apparaissent et l’assise génératrice fonctionne avec une certaine activité entre les faisceaux ; les fibres péricycliques sont beaucoup plus grandes et lignifiées. La coupe transversale de la partie globuleuse de la galle (A, fig. 135) présente une grande cavité larvaire chl, irrégulière, limitée par une paroi épaisse dont les cellules sont dévorées par la larve. É ja 2: L7 PU ÿ 4 Fi. 136 (A4). — Partie supérieure de la coupe transversale de la cécidie du Sarothamne, représentée par la figure 135 (gr. 150). flb, flb”, faisceaux libéro-ligneux ; pb, mb, b, bs, bois ; L, Liber; ag, assise génératrice interne ; /p, fibres péricycliques ; #, moelle; cAl, chambre larvaire. Trois des ailes corticales peu hypertrophiées et peu déformées fe, fc”, fe” sont rejetées d’un côté ; la quatrième ne se signale plus dans la paroi larvaire que par son amas /c’”” de fibres corticales, 298 C. HOUARD. siluë à l'opposé des trois précédents. Ce dernier amas, représenté dans la figure 138 (A), diffère sensiblemeni des trois autres par la taille très irrégulière de ses fibres et aussi en ce qu’il est séparé de. l’épiderme ép par cinq ou six assises de cellules à paroïs cellulo- siques. A l'opposé de la cavité larvaire, en f4b, (fig. 135), le cylindre central présente une structure normale. Cette région étant peu déformée joue le rôle de point d'appui et les tissus gallaires qui environnent la cavité larvaire se disposent à droite et à gauche d'un plan de symétrie: ce plan est déterminé par l'aile médiane fc" et par le centre de la cavité larvaire; il contient aussi l’axe du rameau. Quand on quitte cette région résistante /7b (en A,, fig. 136) pour se rapprocher de la cavité larvaire, les faisceaux libéro-ligneux deviennent de plus en plus grands et de plus en plus espacés ; leur assise génératrice interne ag fonctionne activement et donne du bois QE IS SR See © () @ ÈS S SG sen T) 1e, fp— e PE ep RE FiG. 137 (N). — Partie de la coupe transversale représentée par la figure 133 (gr. 150). Fic. 138 (A2). — Partie inférieure de la coupe représentée par la figure 135 Ë (gr. 150). ag, assise génératrice interne ; b, bois ; /, liber ; fp, fibres péricycliques ; fc, fibres corticales ; end, endoderme ; ép, épiderme. secondaire refoulé au dehors par le métaxylème #0 qui prend beaucoup d'importance. Les fibres péricycliques fp deviennent plus grandes et leurs parois se lignifient un peu, mais restent GALLES DE TIGES. 229 minces ; elles forment autour de l'anneau vasculaire une zone claire très visible. Enfin, tout près de la cavité larvaire, en //b”, les pôles ligneux pb et libériens / des faisceaux les plus proches sont très écartés par l’hypertrophie des éléments secondaires et en particulier par le bois non lignifié bs. L'orientation des faisceaux, leur taille de plus en plus grande au fur et à mesure qu’on se rapproche de la cavité larvaire, tout cela prouve bien qu’au début cette cavité a été creusée dans les tissus secondaires produits par l’assise génératrice ; ces tissus ont servi de nourriture au jeune parasite. Plus tard, quand la larve est devenue beaucoup plus grosse, elle a détruit le tissu secondaire sur toute son épaisseur et dévoré même une partie de la moelle. La galle, arrivée à cet état, a été représentée dans les figures 135 et 136. En résumé, sous l'influence du Contarinia scoparii, la tige du Sarothamimus scoparius présente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène excite en un point le fonctionnement de l’assise génératrice libéro-ligneuse et produit un renflement latéral ayant un plan de symétrie ; 2° Le tissu gallaire est formé surtout de bois secondaire non lignifié ; 3° L'écorce et la moelle sont fortement hypertrophices. Quercus coccifera L. Cécidie produite par le /lagiotrochus fusifexz Mar. Plusieurs Hyménoptères appartenant au genre Plagiotrochus produisent sur l’axe des chatons de divers Chênes méridionaux des renflements fort accusés. C’est ainsi que le Plagiotrochus amenti TAVARES contourne et renfle faiblement l’axe des chatons du Quer- cus Suber L., que le Plagiotrochus fusifex Mavr déforme les chatons du Quercus Ilex L. var. genuina CouT., ceux du Quercus coccifera L. et de quelques-unes de ses variétés (var. vera DC., var. imbricata DC.). 230 CG. HOUARD. Sur le Quercus coccifera 1, le renflement est fusiforme, glabre, vert à l'état frais ; plus tard ilse colore en rouge, puis en marron. Sa surface porte toujours quelques fleurs atrophiées (E, fig. 139) qui sont logées dans de petites anfractuosités. La longueur de la cécidie peut atteindre 20 mm.; sa section est irrégulièrement arrondie, pluriloculaire et d'un diamètre six à dix fois supérieur à celui de l'axe du chaton. C’est ainsi que l'échantillon choisi pour cette étude avait 3,5 mm. de diamètre, tandis que l'axe ne comptait que 0,6 mm. Structure de l'axe normal. — La section transversale de l'axe du chaton, pratiquée à quelque distance de la galle (N, fig. 141 et fig. 144), comprend d’abord un épiderme ép à petites cellules, très irrégulières de forme et de taille, serrées les unes contre les autres. Les cellules de l’écorce éc sont de même irrégulières, les plus Fig. 139 (E). — Aspect de la cécidie des chatons du Chêne à cochenille (gr. 2). Fig. 140 (L). — Coupe longitudinale de la cécidie (gr. 2). Fi@. 141 (N). — Schéma de la coupe transversale du chaton normal (gr. 15). Fig. 142 (A). — Schéma de la coupe transversale de la cécidie (gr. 15). flb, anneau vasculaire ; fp, fibres péricycliques ; », moelle; per, péri- derme ; chl, chambre larvaire. internes étant comprimées radialement et aplaties. Le cylindre central débute par un péricycle continu /p formé de cinq ou six épaisseurs de cellules irrégulières à parois minces et lignifiées ; il comprend ensuite un anneau vasculaire formé de 20 à 22 faisceaux GALLES DE TIGES. 231 libéro-ligneux, avec formations secondaires continues. Au centre, la moelle » n’est composée que de quelques cellules. Structure de l’axe anormal. — L'œuf est déposé par la femelle du Cynipide dans l’assise génératrice interne. Il en résulte la pro- duction d’abondants tissus secondaires qui enveloppent peu à peu la larve et désorganisent l'anneau libéro-ligneux ; le tissu gallaire fait saillie sur le côté, à droite et à gauche d’un plan de symétrie déterminé par la génératrice de la portion non déformée du chaton et par le centre de la cavité larvaire. Mais la galle est très souvent pluriloculaire (A, fig. 142): les saillies latérales que produisent les tissus hypertrophiés en face de chaque cavité larvaire confluent alors ; la section devient presque circulaire. Au voisinage de la cavité larvaire CA (fig. 143), l'anneau libéro- ligneux est brisé. Les faisceaux /7b, f1b” les plus proches sont Fig. 143. — Partie de la coupe transversale représentée par la figure 142, aux environs d'une cavité larvaire cl : flb, flb”, faisceaux libéro-ligneux écartés l’un de l’autre ; b, bs, bois ; Z, Liber ; p, péricycle ; cn, couche nourricière (gr. 150) beaucoup hypertrophiés, étalés en éventail et deux ou trois fois plus longs que les faisceaux normaux. Les vaisseaux du bois 232 C. HOUARD. primaire b sont plus gros et plus nombreux qu’à l’état sain, mais ils sont dissociés et écartés les uns des autres. Quant au bois secondaire bs il comprend des files de 8 à 12 cellules, non lignifiées pour la plupart, à parois minces, d’un diamètre transversal supérieur au diamètre normal. Les formations secondaires libériennes sont peu importantes, le liber primaire / est déformé et indifférencié et les éléments péricycliques p, non encore lignifiés, forment en face de chaque faisceau un amas irrégulier de petites cellules à parois épaisses. Enfin, la cavité larvaire chl est bordée par de nombreuses cellules allongées cn qui proviennent du fonctionnement de l’assise génératrice et qui se sont disposées en files rayonnantes autour de _cette cavité. Elles sont en général cloisonnées plusieurs fois et contiennent un protoplasme très dense et de gros noyaux hyper- trophiés, constituant ainsi pour la larve un véritable tissu nourricier. L'écorce de l'axe du chaton acquiert dans la galle un développe- ment considérable dû à l’hypertrophie de toutes ses parties. Les cellules les plus internes, y compris les cellules endodermiques, au ph NE (a 7 a. US ÉTAGES FiG. 144 (N). — Partie de la coupe transversale représentée par la figure 141 (gr. 150). Fi&. 145 (A). — Périderme anormal de la cécidie des chatons du-Chêne à coche- nille (gr. 150). b, bs, bois ; L, liber ; fp, fibres péricycliques ; pm, fibres périmédullaires ; m, moelle ; éc, écorce ; ép, épiderme ; pér, périderme ; /g, liège ; ph, phel- loderme ; mt, méat. sont très allongées radialement et cloisonnées plusieurs fois. Les cellules de l'écorce moyenne éc (en A, fig. 145), sont consi- GALLES DE TIGES. 233 dérablement agrandies et leurs méats 21 sont développés ; par suite des pressions qu'elles supportent, elles se contournent dans tous les sens en donnant un tissu sinueux et lacuneux assez sem- blable à celui que nous avons vu dans la galle du Contarinia tilia- rum (fig. 90). L’assise génératrice subéro-phellodermique fonctionne en outre dans l’assise corticale la plus externe: elle y produit de grandes cellules de périderme pér souvent déviées de la direction radiale par les pressions irrégulières qu'elles supportent. L'action parasi- taire à ainsi provoqué, dans la partie déformée de l’axe, l'apparition anticipée de liège et de phelloderme. L’épiderme ép comprend des cellules régulières et à parois minces, non lignifiées, beaucoup plus larges que les cellules normales (24 w au lieu de 9 u). En résumé, sous l'influence du Plagiotrochus fusifeæ, l'axe du chaton du Quercus coccifera subit les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène excite en un point le fonctionnement de l'assise génératrice interne et amène la production d'une saillie latérale ayant un plan de symétrie ; 2 L'anneau vasculaire est brisé et la moelle prend part à l’hypertrophie ; 3° L'écorce est hyperplasiée et comporte du tissu lacuneux sinueux ainsi que du périderme. Rubus fruticosus |. Cécidie produite par le Zasioplera rubi HeEGEr. Les cécidies produites par ce diptère sont parmi les plus communes et connues sur une dizaine d'espèces de Rubus ; elles déforment les tiges et les pétioles et consistent en renflements noueux ou allongés, souvent latéraux, à surface non bossuée, mais fendillée longitudi- nalement. Une section transversale y montre des cavités larvaires peu distinctes contenant des larves orangées qui se métamorphosent dans la cécidie pour en sortir l’année suivante. 234 C. HOUARD. 1° Galle de la tige. La galle que j'ai étudiée était jeune ; elle produisait sur le côté de la tige (E, fig. 146) une saillie latérale de 3,5 mm. d'épaisseur et de 16 mm. de longueur. 2 uit | nt 1 ( 2 bs Ni! RATE NI [ui HER Fi@. 146 (E). — Aspect de la cécidie de la tige de Ronce (gr. 1,5). FiG. 147 (N). — Coupe transversale schématique de la tige normale (gr. 15). Fig. 148 (A). — Coupe transversale schématique de la cécidie (gr. 15). flb, flb”, anneau vasculaire ; b, bs, bois; /, ls, Liber ; /p, fibres péricy- cliques ; pm, zone périmédullaire ; »#, moelle ; rm”, rayon médullaire ; agë, age, assises génératrices interne et externe; per, périderme ; ph, phello- derme ; /gc, liège cicatriciel ; s, craquelure. Structure de la tige normale. — Sa section a un diamètre de 4,2 mm. ; elle comprend une moelle »# (en N, fig. 147) très épaisse, GALLES DE TIGES. 2395 de 3 mm. environ de diamètre, dont les grandes cellules sont groupées en rosette autour des cellules du réseau tannifère. L'anneau vasculaire //b possède un très grand nombre de gros faisceaux libéro-ligneux à formations secondaires bien développées. Aux extrémités de chaque faisceau, la zone périmédullaire pr esl sclérifiée et les fibres péricycliques /p forment un arc résistant adossé à un périderme pér qui ne comprend encore que deux cloisons. Les cellules internes de l'écorce sont petites, arrondies et séparées par de grands méats; celles des trois assises les plus externes sont collenchymateuses (co, en N, fig. 149). Enfin, l’épiderme ép est formé de cellules de largeur variable. Structure de la galle. — Un coup d'œil jeté sur une coupe trans- versale pratiquée au milieu de la cécidie (en A, fig. 148) montre que l’action cécidogène développée par le parasite se fait sentir sur une partie de l’assise génératrice agi; il en résulte une active formation de tissus gallaires qui, ne pouvant se développer du côté de la moelle et de l’anneau vasculaire peu altérés tous les deux, constituent alors une saillie latérale ayant un plan de symétrie. Ce plan est déterminé par la génératrice médiane de la région non déformée de la tige et par le centre de la cavité larvaire; il passe également par l'axe de la tige. Dans la région de la coupe diamétralement opposée à celle où l'action du parasite se fait sentir, en /{b”, la moelle #2 n’est pas modifiée et les formations secondaires libéro-ligneuses sont un peu plus développées que dans la tige normale ; les arcs péricycliques fp sont un peu écartés les uns des autres. Enfin, l’assise génératrice externe per a fonctionné déjà et donné trois ou quatre cellules de phelloderme ph (en A4, fig. 150), contre une ou deux cellules de liège lg. L'écorce n’est pas du tout modifiée. Au fur et à mesure qu'on s'écarte à droite et à gauche de cette région peu modifiée pour gagner la zone parasitée, on trouve que l’assise génératrice interne agi (A, fig. 148) a fonctionné avec une intensité toujours croissante. Les faisceaux libéro-ligneux présentent des couches épaisses de bois secondaire et de liber secondaire et sont de plus en plus séparés les uns des autres par l'hypertrophie des rayons médullaires rm”. Le voisinage de la larve se signale, quand on dépasse la région médiane de la tige, par l'absence de lignification pour les dernières 236 GC. HOUARD. couches de bois secondaire bs; cette modification s’accentue P Fr Da Ep per = end -… == : An 2m e-« Î) 05 6p mures à D re, d 7 f r …— OR RERO] 7 EE ri Ée [I LA 2 )Z LS ep HET RT ÉPERRBES RCE < #4 RER . LEE an « Co {1 Fi. 149 (N). — Portion de la figure 147 (gr. 150). FiG. 150 (A4). — Partie supérieure de la figure ; 148 (gr. 150). SORTE FiG. 151 (A3). — Partie inférieure de la figure 148 montrant le grand développement du pé- riderme (ph, lg) en face de l’amas fibreux péricyclique /p (gr. 150): Co GALLES DE TIGES. 237 tellement autour de la cavité larvaire ch? qu'on ne trouve plus que quelques files très courtes de bois secondaire lignifié, disséminées dans les faisceaux libéro-ligneux /7b. Les vaisseaux ligneux les plus rapprochés de la moelle sont assez réguliers, lignifiès et par suite peu altérés, parce qu’ils avaient déjà atteint tout leur dévelop- pement quand la larve a commencé à agir sur la tige. C'est dans le tissu gallaire, à parois cellulosiques, à contenu cellulaire riche en protoplasme, que se trouve la cavité larvaire chl dont le contour est toujours irrégulier et dont la taille augmente considérablement au fur et à mesure que la galle avance en àge. L'action parasitaire est si intense, bien souvent, et l’hypertrophie des tissus secondaires si considérable que la zone périmédullaire pm se trouve aussi modifiée : une large plage de tissu très cloisonné et complètement cellulosique fait saillie dans la moelle, réduisant quelque peu son étendue. Pendant que l’assise génératrice interne agi fonctionne avec acli- vité autour de la larve et produit la plus grande partie des tissus gallaires, l’assise génératrice subéro-phellodermique age prend un certain développement: le nombre des cellules du périderme augmente, au fur et mesure qu’on s’éloigne de la portion de tige restée normale, pour arriver, au niveau de la cavité larvaire, à donner des files d’une trentaine de cellules. Ces files sont composées en grande partie de cellules phellodermiques qui rayonnent autour des amas de fibres péricycliques lignifiées, à parois épaisses. Quelques cellules se lignifient de place en place dans les files de phelloderme et constituent, en dehors du péricycle, de petites zones résistantes. Entre le liber primaire / et les fibres péricycliques, des files de 15 à 20 cellules rayonnent à partir du pôle libérien. La figure 151 (A) représente à un fort grossissement la portion de la tige déformée comprise entre le liber primaire / et l'épiderme ép, dans la région où l’assise génératrice externe age cesse de fonc- tionner régulièrement. Enfin, juste en face de la cavité larvaire, c’est-à-dire aux environs du plan de symétrie, l’assise génératrice externe, comme l’assise génératrice interne, ne fonctionne plus que d’une façon discontinue et ne produit de longues files rayonnantes de cellules qu’en face des ares péricycliques. 238 C. HOUARD. A l'extérieur de toutes ces productions secondaires anormales, l'écorce a acquis dans la région la plus hypertrophiée une épaisseur quatre à six fois aussi grande que celle de l'écorce normale; cet accroissement tient surtout à l'allongement radial (80 w au lieu de 15 y) et au cloisonnement perpendiculaire de toutes les cellules de la région moyenne (éc, fig. 151). Les cellules les plus internes du collenchyme co s’allongent aussi beaucoup radialement (50 y au lieu de 15 y), mais sans modifier leur largeur ; la couche externe seule conserve ses cellules intactes. L'épiderme ép a des cellules plus larges que dans la tige normale, mais à parois externes moins bombées. De place en place, l'écorce hyperplasiée n’a pu suivre l’accrois- sement de volume qui s’est manifesté dans le cylindre central : elle s’est alors fendue suivant des lignes longitudinales irrégulières. Ce sont ces craquelures que l’on aperçoit à la surfacede la galle (fig. 146) et qui lui donnent un aspect si différent de la cécidie produite par le Diastrophus rubi HarrTiG sur la même plante. Le grand dessin d'ensemble (A, fig. 148) montre que l'écorce s’est immédiatement protégée de ces fentes s par des arcs de liège cicatriciel /gc. 2° Galle du pétiole. La galle que j'ai étudiée (E, fig. 152) était presque sphérique et déjà de la grosseur d’une noisette ; son diamètre atteignait 12 mm., tandis que celui du pétiole n’arrivait pas à 2 mm.; sa surface était sillonnée de craquelures longitudinales et portait encore quelques petits aiguillons. Structure du pétiole normal. — En section transversale (N, fig. 153), celui-ci montre un gros faisceau libéro-ligneux médian fib et de chaque côté quatre ou cinq faisceaux plus petits /7b7. Ils sont tous isolés par des rayons médullaires 77 assez larges et adossés à des arcs fp de fibres péricycliques à parois épaisses ; leur bois secondaire est très développé. Enfin, au centre, la moelle #2 est presque circulaire et son diamètre est de 0,5 mm. Le détail de la partie interne de l’un des petits faisceaux est donné en N (fig. 155). GALLES DÉ TIGES. 239 Structure de la galle. — Un simple coup d'œil jeté sur la coupe de la cécidie permet de voir un extraordinaire enchevêtrement de faisceaux dissociés dont tous les débris rayonnent dans des directions variées (A, fig. 154). On peut cependant reconnaître presque au centre un amas de cellules claires #% correspondant à la moelle et dont les _ L 1 1 { . [l 1 -4 | CE | SL a ni] ct) 1 FiG. 152 (E). — Aspect de la cécidie du pétiole de Ronce (gr. 1). F1G. 153 (N). — Schéma de la coupe transversale du pétiole normal (gr. 15). FiG. 154 (A). — Schéma d’une partie de la coupe transversale médiane de la cécidie (gr. 15). fib, flb”, faisceaux libéro-ligneux ; agi, assise génératrice interne; fp, fibres péricycliques ; pm, zone périmédullaire ; "», moelle; rm, rayon médullaire ; éc, écorce ; age, assise génératrice externe ; chl, chl”, chambres larvaires primitive et définitive ; z, larve. dimensions ont peu varié ; on reconnaît également, dans la partie la plus hypertrophiée du pétiole, une cavité larvaire irrégulière cAl, chl’ située entre quelques faisceaux libéro-ligneux dissociés (tels que flb) et plongée au milieu d’un tissu cellulosique pm dont les nombreuses cellules sont alignées en longues files depuis la base des faisceaux jusqu’à la moelle. À l'extérieur de cette région, et surtout aux environs de la 240 C. HOUARD cavité larvaire, les faisceaux sont étalés en éventail ; leur assise génératrice libéro-ligneuse agi fonctionne activement et refoule vers l'extérieur les amas fibreux péricycliques /p qui eux-mêmes se scindent en plusieurs paquets. Enfin, derrière ce péricycle, de larges faisceaux étalés /7b” existent de place en place et repoussent l'écorce craquelée éc, limitée par l’assise subéreuse age. Ici, comme dans la galle de la tige, un plan de symétrie, déter- miné par le centre de la cavité larvaire et par la génératrice médiane de la portion la moins déformée du pétiole, tente de s’ébaucher ; mais la symétrie des tissus gallaires n’est pas aussi nette que dans l'exemple précédent parce que les faisceaux libéro-ligneux du pétiole, ne formant pas un anneau continu, ont été facilement éloignés les uns des autres par l'hypertrophie des rayons médullaires qui les séparaient. La déformation des faisceaux libéro-ligneux se produit là comme pour la tige : l'influence parasitaire ne s'étant fait sentir qu'un peu après la lignification du bois primaire et de quelques éléments secondaires, la base de ces faisceaux n’a pas été modifiée; au contraire, les formations secondaires les plus récentes se sont produites dans des conditions anormales et ont fourni de nombreuses cellules de bois secondaire aplaties radialement et lignifiées en partie. Il en a été de même pour les fibres péricycliques qui ont été séparées en petits paquets. Les formations secondaires rayonnantes qui les entourent ont pris dans la galle du pétiole une part presque aussi aclive à la formation des tissus gallaires que dans la cécidie de la tige. La plus grande partie du pêétiole hypertrophié est constituée par les tissus cellulosiques pr qui s'étendent autour de la moelle jusqu'aux faisceaux libéro-ligneux et dans lesquels la larve s’est établie (en ch’) quand elle eut atteint une certaine taille. Pour connaitre l’origine de ce tissu p/n, il faut s'adresser à une galle très jeune. On voit alors, autour de la moelle, le tissu périmédullaire fortement hyperplasié en face des faisceaux libéro-ligneux, mais surtout en face du gros faisceau médian. La figure 155 (N) représente les pôles ligneux pb d’un faisceau nor- mal et les rangées 1, 2,3 de cellules comprises entre ces pôles et la moelle #. Les cellules de la rangée numérotée 1 sont un peu allongées dans la galle jeune (en A,, fig. 156). Celles de la deuxième rangée (2) s'allongent radialement et se cloisonnent dans une GALLES DE TIGES. 241 direction perpendiculaire ; leurs paroïs et leurs cloisons sont beau- coup plus épaisses vers le faisceau qu’à leur autre extrémité, ce qui prouve que leur différenciation s’est faite dans la direction de la moelle ; la longueur de ces cellules passe de 74 à 85 .. Les cellules de la troisième assise (3) se cloisonnent de même et se différencient dans le même sens. ï EEE ci] ji Fi. 155 (N). — Zone périmédullaire d’un faisceau normal du pétiole de Ronce (gr. 150). F1G. 156 (A4). — La même zone dans un faisceau d’une jeune cécidie (gr. 150). Fi@. 157 (A2). — La même zone dans une cécidie plus âgée (gr. 150). pb, pôle ligneux ; b, bois ; rm, rayon médullaire ; #1, m”, moelle. À un élat un peu plus avancé, tel que le représente la figure 157 (A2), on distingue encore bien les deux assises 2 et 3 dont les cellules sont devenues très longues (230 & et 150 4) et ont conservé des parois épaisses facilement reconnaissables. Ces cellules, se sont de plus, divisées longitudinalement en même temps que transversalement et 16 242 C. HOUARD. toutes sont alors formées d’un nombre considérable de petites cellules assez régulièrement empilées. Quelques-unes même de ces petites cellules, voisines des pôles ligneux, ont lignifié et épaissi leurs parois. C'est le développement exagéré de ces assises 2 et 3 qui constitue le tissu central de la galle (en pr, fig. 154) autour de la cavité larvaire définitive ch”. | | En résumé, sous l'influence du ZLasioptera rubi, la tige et le pétiole du ÆRubus fruticosus présentent les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène excite en un point le fonctionnement de l'assise génératrice interne el détermine la production d'un ren- {lement latéral ayant un plan de symétrie ; 2 Les tissus gallaires produits consistent principalement en bois secondaire non lignifié; 3° L’assise génératrice externe de la tige fonctionne avec activité du côte de la larve et produit surtout du phelloderme ; 4% La galle du pétiole présente en outre une grande dissociation de tous les faisceaux libéro-ligneux et une hypertrophie énorme de leur zone périmédullaire ; » L’écorce s'hypertrophie et se crevasse longiludinalement. Brassica oleracea |. Cécidie produite par le Ceuthorrhynchus pleurostigma Mars. Les larves de ce Coléoptère produisent à la base de la tige des jeunes choux des cécidies hémisphériques ayant la taille d'une noisette et qui, par leur réunion, peuvent donner un renfiement de la grosseur du poing. L’échantillon que j'ai choisi pour cette étude (E, fig. 158) a une section ovalaire dont les dimensions sont 13 et 10 mm. (A, fig. 160). La partie la plus large de l’ovale constitue la galle proprement dite et contient la cavité larvaire ch! ; l'écorce et Le cylindre central de la portion étroite conservent à peu près les rapports qu'ils ont dans la tige normale, maistous leurs éléments sont un peu hypertrophiés : GALLES DE TIGES. 243 la longueur des faisceaux libéro-ligneux est de 27 mmn.au lieu 16mm., l'épaisseur de l'écorce atteint 0,8 mm. au lieu de 0,5. ds eco ee | RE A AL Tr ,271%-,471 SAN HD Urd F | ELA nn mn A À MAL Fig: 158 (E). — Aspect de la cécidie de la tige de Chou (gr. 1). FiG. 159 (N). — Coupe transversale schématique de la tige normale (gr. 15). FiG. 160. (A). — Coupe transversale schématique de la cécidie (gr. 15). lb, flb”, faisceaux libéro-ligneux ; agi, assise génératrice interne ; b, bs, bs”, bois ; /, {s, liber ; fp, fibres péricycliques ; pm, zone périmédullaire ; rm, rayon médullaire ; #7, moelle ; éc, écorce ; /gt, liège de la tige; cl, chambre larvaire. Comme dans tous les cas étudiés jusqu’à présent, l’action céci- dogène développée par le parasite s’est traduite du côté où il est situé 244 CG. HOUARD. par une abondante production de tissus secondaires. La partie opposée de la tige étant peu déformée joue le rôle de point d'appui. Les tissus gallaires sont repoussés latéralement dans le plan de symétrie déterminé par la génératrice médiane de la région non déformée de la tige et par le centre de la cavité larvaire; ce plan passe lui-même par l’axe de la tige. La cavité larvaire chl a 3,5 mm. de diamètre et contient la grosse larve blanche du Coléoptère. Elle est entourée par des tissus qui proviennent du fonctionnement de l’assise génératrice interne ; ces lissus sont eux-mêmes séparés du bord de la galle par les fibres péricycliques /p, disposées en amas fortement écartés les uns des autres, et par une écorce dont l'épaisseur reste à peu près constante autour de la cécidie. Les faisceaux libéro-ligneux situés de ce côté sont très modifiés. Les plus rapprochés du plan de symétrie (en /{b) sont beaucoup plus larges que les autres et plus espacés entre eux par l’hyperplasie des rayons médullaires 722. Leur parlie centrale, comprenant le bois primaire b, est simplement hypertrophiée et les vaisseaux y sont écartés les uns des autres. Plus à l'extérieur, le bois secondaire Ds des faisceaux est assez régulier sur une épaisseur d’une vingtaine de cellules environ et ressemble au bois secondaire normal : les cellules du parenchyme secondaire non lignifié, un peu plus allongées que les cellules normales (30 à 40 w au lieu de 18 w), entourent de place en place des amas de vaisseaux ligneux à parois épaisses et de fibres ligneuses disposées sans ordre. Le bois secondaire n’est plus composé au delà, en bs”, que de cellules irrégulières, mal alignées en files, très agrandies (100 ), allongées radialement et souvent munies de cloisons tangentielles ; il ne contient que de rares vaisseaux isolés. Enfin, près de la cavité larvaire, les cellules dans lesquelles fonctionne l’assise génératrice sont courtes, aplaties el souvent rejetées sur le coté. Cette distinction du bois secondaire en deux régions bs et bs”, l'une très peu modifiée, l’autre profondément altérée, tient à l’action de la larve. Quand celle-ci est jeunec'et que son action cécidogène commence seulement à se faire sentir, le bois secondaire est peu modifié : d'où bs. Plus tard, l’action parasitaire prend une intensité en rapport avec la taille de la larve, l’assise génératrice fonctionne d'une façon anormale et le bois secondaire ‘est complètement déformé : d'où Ds”. GALLES DE TIGES. 245 Au fur et à mesure qu'on s'éloigne du plan de symétrie pour se rapprocher de la région opposée de la tige, les faisceaux libéro- ligneux diminuent graduellement de longueur (en /b"). En même temps, la partie normale du bois secondaire se rétrécit ; les vaisseaux ligneux y augmentent en nombre et leur répartition s’uniformise comme dans la lige normale, ce qui indique un fonctionnement plus régulier de l’assise génératrice. La région libérienne subit la même réduction. Fic. 161 (N). — Zone périmédullaire normale de la tige de Chou (gr. 150 FiG. 162 (A). — La même zone dans la cécidie caulinaire (gr. 150). pb, b, bois : prn, zone périmédullaire ; #7, moelle. L'action cécidogène ne se localise pas à l'anneau vasculaire, mais s'élend aussi à la partie la plus rapprochée de la zone périmédullaire pm et de la moelle 77. En face des faisceaux modifiés, les cellules de la zone périmédullaire pr (en À, fig. 162) s'allongent dans des proportions énormes : celles qui sont les plus rapprochées 246 CG. HOUARD. des pôles ligneux pb ont une seule cloison tangentielle tandis que celles qui les suivent en ont deux ou trois ; au delà, vers le centre, les cellules en contact avec la moelle et les cellules médullaires elles-mêmes "» restent plus petites, se cloisonnent encore parfois, mais ne s’orientent plus radialement Nous voyons ici, comme nous l'avons déjà constaté plusieurs fois ailleurs, que le faisceau libéro-ligneux tout entier est modifié, aussi bien dans sa partie fondamentale autour des pôles ligneux et libé- riens que dans ses tissus secondaires. L En résumé, sous l’action du Ceuthorrhynchus pleurostigma, la tige du Brassica oleracea présente Les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène excite en un point le fonctionnement de l’assise génératrice libéro-ligneuse et amène la production d'une saillie latérale ayant un plan de symétrie ; 2 Le tissu gallaire est composé surtout de bois secondaire non lignifié et de liber secondaire ; 3 Du côté de la larve, la zone perimedullaire et les rayons médullaires sont fortement hypertrophies et cloisonnes. Glechoma hederacea IE Cécidie produite par l’Aulax Latreillei Kierr. On sait que le plus souvent les galles de cet Hyménoptère déforment les feuilles du Lierre terrestre; elles consistent en renflements sphériques, charnus, de la grosseur d’un pois à celle d'une noix, d'aspect rosé, abondamment couverts de poils, el ren- ferment une ou plusieurs loges à parois dures. La cécidie se trouve plus rarement sur la tige: elle fait alors saillie sur le côté (E, fig. 163). Structure de la tige norinale. — La section d'une tige normale est un carré de 1,2 mm. de côté (N, fig. 164 et fig. 166) dont les angles, arrondis et saillants, sont renforcés par de puissants cordons de collenchyme co. Les autres cellules corticales ée sont arrondies et séparées par de grands méats. La moelle #2 est très homogène et entourée par un anneau GALLES DE TIGES. 247 vasculaire qui comporte, en face des angles, quatre gros faisceaux libéro-ligneux /1b. Structure de la tige anormale, — C'est dans l'assise génératrice de l’un de ces gros faisceaux d'angle /7b (en À, fig. 165) que l'Awar Fi. 163 (E). — Aspect de la cécidie de la tige de Glechoma hederacea (gr. 1). FiG. 164 (N). — Coupe transversale schématique de la tige normale (gr. 15). Fic. 165 (A). — Coupe transversale schématique de la cécidie (gr. 15). flb, flb”, faisceaux libéro-ligneux ; wgi”, assise génératrice interne ; trr, tri”, faisceaux d'irrigation ; v”, faisceau accessoire ; #+, moelle ; ex, endo- derme; ec, écy, écorce; co, collenchyme; cp, couche protectrice; cn, couche nourricière ; cl, chambre larvaire, dépose son œuf ; l’action cécidogène qui s'exerce autour de la petite larve détermine une hypertrophie considérable de la partie ligneuse 248 C. HOUARD. du faisceau et un actif fonctionnement de l’assise génératrice. La région //b’ non déformée, comprenant les trois autres faisceaux, joue le rôle de point fixe: tous les tissus qui prennent naissance autour de la larve sont repoussés latéralement et constituent une énorme saillie ovoide, de 10 à 12 mm. de diamètre. Cette masse gallaire possède un plan de symétrie déterminé par la génératrice de l'un des angles de la tige (/1b”) et par le centre de la cavité larvaire chl. Ce plan passe également par le milieu du gros faisceau hypertrophié f{b et par l'axe de la tige. Le gros faisceau libéro-ligneux /7b est seul intéressé par le développement de la galle. Sa taille atteint presque dix fois celle d'un faisceau normal. Du côté du centre de la tige, il est séparé de la moelle #2 (en À, fig. 167) par une large zone périmédullaire pm à éléments hypertrophiés. Les vaisseaux annelés et spiralés de son bois primaire b sont beaucoup plus gros que dans la tige normale et disséminés au milieu du parenchyme pr ; la disposition rayonnante des cellules autour des pôles ligneux pb est fortement accentuée (comparer les figures 166 et 167). C’est exactement au milieu, dans le plan de syméirie, que le faisceau présente la plus grande modification (fig. 167) : les vaisseaux du bois primaire de la rangée ligneuse médiane sont plus écartés les uns des autres que partout ailleurs. Après le cinquième vaisseau, les cellules parenchymateuses pr” s’allongent énormément dans le plan de la coupe. Il en est de même des vaisseaux spiralés #s qui font suite et dont quelques-uns atteignent jusqu'à 280 % de longueur ; l'épaississement spiralé peut être double ou triple dans le même vaisseau. Souvent même l’un d'eux possède des orne- ments différents à ses deux extrémités: spirale à l'une, réticulations à l’autre; c’est justement cet aspect que présente le vaisseau vs. Ces longs vaisseaux spiralés peuvent être latéralement en contact avec de gros vaisseaux ponctuës vp constituant le bois secondaire. Entre les vaisseaux spiralés et la cavité larvaire, ce sont de grandes cellules à parois épaisses, un peu lignifiées, qui forment la partie principale du renflement gallaire. Il faut donc considérer celui-ci comme dérivant tout entier du fonctionnement exagéré de la petite portion d’assise génératrice exactement située dans le plan de symétrie du gros faisceau. GALLES DE TIGES,. 249 => GS 2? » CRE” \ A7 ore SSS (ZE Z, }) Fc. 166 (N). — Faisceau libéro-ligneux de la tige normale de Glechoma (gr. 150). Fi. 167 (A). — Partie de la coupe transversale représentée par la figure 165, montrant l’hyperplasie considérable du bois primaire (pb, b, vs) du faisceau libéro-ligneux (gr. 150). Fi. 168 (A1). — Fragment de la couche nourricière en et de la couche protec- trice cp, indiquant les relations qui existent entre leurs cellules (gr. 150). vs, vaisseau spiralé ; vp, vaisseau ponctué ; ds, bois secondaire. 250 CG. HOUARD. Les deux autres parties de l’assise génératrice du gros faisceau, restées en relation avec la région non déformée de la tige, sont brusquement recourbées (en À, fig. 165) et produisent deux boucles fermées par un endoderme très net end; dans l’intérieur de ces boucles, l’assise génératrice donne du liber qui vient s’adosser au liber des parties latérales du gros faisceau. Autour de la masse gallaire sphérique, se trouvent de petits faisceaux v” reliés entre eux par de longs éléments vasculaires. Chaque petit faisceau est très aplati et très allongé (en A), fig. 168); il comprend quelques vaisseaux de bois primaire v”, surmontés par du bois et du liber secondaires peu développés. A l’intérieur de cet anneau vasculaire agè” (en À, fig. 165), Le tissu de la galle est traversé par de petits faisceaux ir, à course irrégu- lière mais à direction rayonnante, qui vont irriguer la région larvaire et qui sont en relation avec un autre cercle de petits faisceaux ÿr7” à section circulaire. La partie ligneuse de ces petits faisceaux est enfin en rapport, plus au centre de la galle, avec une couche scléreuse protectrice cp formée de cellules ponctuées, à parois minces, ayant environ 90 de diamètre. Lorsque les cellules de l’assise protectrice sont très jeunes, elles se montrent alignées en files rayonnant du centre de la cavité larvaire et en relation directe avec les cellules plus internes de la couche nutritive cn. Ces der- nières cellules ont des parois minces, cellulo- siques et leur taille est de .60 à 70 &; elles contiennent un proto- plasme riche en matières F6. 168bis (A2). — Petit faisceau accessoire de la cécidie : »”, bs, bois ; /, Liber ; agi, assise génératrice interne ; éc4, écorce (gr. 150). grasses el un gros noyau hypertrophié de 18 4 de diamètre (A,, fig. 168) ; elles servent de nourriture à la larve. Notons enfin en passant que ce sont les petits faisceaux d'irrigation ir décrits plus haut qui forment dans la galle sèche les tractus ligneux tenant la coque scléreuse suspendue au centre de la cécidie. L'écorce de la galle éc, (en A, fig. 165) est trois ou quatre fois GALLES DE TIGES. 251 aussi épaisse que l'écorce de la tige ; elle comporte des cellules très allongées tangentiellement (jusqu’à 150 4). Elle est recouverte par les cellules épidermiques hypertrophiées. En résumé, sous l'influence de l'Aulax Latreillei, la tige du Glechoma hederacea présente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène, se faisant sentir sur une partie de l’assise génératrice du gros faisceau libéro-ligneux d'un angle, déterinine la production d'une forte Saillie lalérule ayant un plan de symétrie ; 2 Les tissus gallaires produits contiennent deux zones vasculaires circulaires, réunies par de pelils faisceaux qui irriquent, aulour de la cavilé larvaire, une couche protectrice scléreuse el une couche nourricière ; 3° L'écorce de la région déformeée est hypertrophice. Cytisus albus Lixk. Cécidie produite par l'Agromyza Kiefferi TAVARES. Description et évolution de la galle. La déformation produite par ce diptère consiste en un renflement unilatéral, légèrement fusiforme, des pousses du Cytise blanc (E, fig. 169). Ce renflement a de 20 à 25 mm. de longueur sur 6 à 8 mm. d'épaisseur et affecte quelquefois plusieurs entre-nœuds; sa surface est colorée en vert et garnie de sillons qui continuent ceux de la tige. Fi6. 169 (E). — Aspect de la cécidie de On ne sait pas encore dans la tige de Gytise blanc (gr. 1). quelles conditions éclôt l'œuf FiG. 170 (L). — Goupe longitudinale de La qe l'Agromyzine ; toujours cécidie caulinaire (gr. 1). Lil | léf , Fi. 171 (E4). — Aspect d'une cécidie Fe A a dé Onnaton âgée et éclose (gr. 1). apparait pendant les mois de septembre, octobre et no- vembre, sur les pousses de la première année et que l’adulte en 252 CG. HOUARD. sort l’année d’après, en mai ou juin. À ce moment, la galle est un peu desséchée, sa surface est sillonnée de nombreuses rides longitudinales irrégulières (E;,, fig. 171) et elle présente un trou d’éclosion circulaire, au sommet d’un léger mamelon. En coupe longitudinale (L, fig. 170), la cécidie montre une cavité allongée, étroite, terminée en pointe aux deux extrémités et garnie de parois épaisses ; si la nymphe se trouve encore à l'intérieur de la cavité larvaire, c’est-à-dire si l’éclosion n’a pas eu lieu, le conduit circulaire creusé par la larve pour la sortie de l’adulte est fermé par une fine membrane: c’est l'épiderme respecté par la larve et que l'adulte brisera pour quitter la cécidie. Mes échantillons proviennent des environs deS. Fiél, en Portugal. Anatomie de la galle. Premier exemple. — La cécidie choisie a été cueillie pendant la deuxième année, un peu avant la sortie de l'adulte. Une section transversale pratiquée en son milieu (en A,, fig. 174) est presque circulaire et de diamètre environ deux fois plus grand que celui de la tige normale (N, fig. 172); il atteint 2,4 mm. au lieu de 1,5. Une forte assise subéreuse a fonctionné autour de la galle dans la couche corticale externe et rendu le bord de la coupe plus régulier. De place en place, adossés à cette assise, se trouvent des amas fibreux fc (fig. 174), en forme de triangle isocèle à pointe tournée vers l’intérieur, qui représentent les cordons scléreux corticaux des ailes de la tige normale. Plus au centre, on distingue encore facilement un cercle presque régulier de petits amas de fibres péricycliques /p; ce cercle contient, d’une part, un tissu très abondant, assez homogène, formé de très nombreuses petites cellules au milieu desquelles se trouve la cavité larvaire irrégulière, et contient, d'autre part, la moelle 7 entourée des couches ligneuses. Tout cet ensemble présente nettement un plan de symétrie déterminé par le centre de la cavité larvaire ch! et par la généra- trice médiane de la région non déformée de l'écorce. Ce plan passe également par le milieu de la moelle, c'est-à-dire par l'axe de la tige. L'anneau vasculaire présente deux assises ligneuses, l'une de bois secondaire de première année bs,, l’autre de bois secondaire de deuxième année bs,; toutes deux s’épaississent au fur et à p4 GALLES DE TIGES. 253 mesure qu'on s'éloigne du plan de symétrie pour se rapprocher de la région centrale de la galle. Puis, brusquement, en face de la cavité Fi. 172 (N). — Schéma de la coupe transversale de la tige normale de Cytise blanc (gr. 15). Fi. 173 (A). — Coupe transversale schématique de la cécidie caulinaire prati- quée vers l'extrémité inférieure de la cavité larvaire chl (gr. 15). FiG. 174 (A1). — Coupe transversale schématique de la cécidie caulinaire prati- quée au milieu de la chambre larvaire. Fi. 175 (L). — Coupe longitudinale schématique de la même cécidie (gr. 15). bs1, bs2, bs’s, couches annuelles de bois: fp, fibres péricycliques; fe, fibres corticales : #2, moelle : s, sillon. larvaire, elles se modifient : la couche ligneuse de première année bs, est incomplète et interrompue nettement par une fente semi- circulaire s ; la couche ligneuse de seconde année Ds, ne dépasse pas les deux extrémités de cette fente. Pour se rendre compte ce qui s’est passé, 1l faut faire des coupes successives depuis ce niveau médian jusqu’à la base de la galle, là où la tige n’est plus modifiée. En A (fig. 173), un peu après la HOUARD. À (2 [7 GC. a \ai] ® . sa 254 [eb] SD 2 D. 1 m2 © _— Où à _ FA R198 2 GORE = © S Ben =: S = D re ME ie es Ed r cs) © ë F. ds SUR De Sa Der \ EC COLE SD AU Dame SE ES ER Rs Q — % S,S Se Sn NO ee en ee oc NT — D RTS La 205 AnL2 EE RS S AD ES D US VE d Sa LEX ee (=). Q = RTE nn E & ENS NON NON Dur Or Et Al OI EA n TO OO & d 0.0 © à Z À 1e p EAN ee Œ\ se Nan Es = \ ( ) 1] On 4 e re AT Nr à ue Tiulie b “1 ner TEST, ER ta (DTA ee ee A de @ À) (+2 S D Cytise, a cécidie (gr. 150). 6 (N). — Partie de la coupe transversale de la tige normale de représentée par la figure 172 (gr. 150). F1G. 177 (A). — Portion correspondante de la coupe de 1 FiG. 17 GALLES DE TIGES. 255 disparition de la cavité larvaire, la tige a presque repris sa taille normale. L’anneau vasculaire a retrouvé son contour circulaire, mais la fente $, qui limitait vers l'extérieur une partie du bois secon- daire de première année, subsiste encore et elle est en rapport avec des éléments lignifiés bs”, remplaçant le quadrant disparu. Le tissu qui compose cette région bs”, est assez différent du bois normal de deuxième année DS, situé de chaque côté. Il est, en effet, formé de grandes cellules irrégulières (bs”:, en À, fig. 177), allongées tangen- tiellement, alignées en longues files radiales et à cloisons minces. Vers la fente s, les cellules de ce tissu anormal ne sont pas du tout en continuité avec celles du bois de printemps de première année à ; elles épousent simplement la forme de la cavité dans laquelle elles sont fortement pressées et constituent un tissu de remplissage. Les cellules de la partie externe de ce quadrant modifié sont en relation avec l’assise génératrice agé qui produisait, au moment de la cueillette de la galle, le bois d'été de deuxième année bs,. Cette curieuse structure nous conduit à penser que, vers le milieu de la première année de végétation du jeune rameau, la larve étant au contact de l’assise génératrice interne en arrête le fonction- nement sur une petite surface verticale adossée au bois, à peu près aussi haute que large et dont la largeur nous est représentée sensi- blement par la fente s. La tige continue ensuite à s’accroître en longueur et en épaisseur. Son accroissement en épaisseur se fait par l'assise génératrice interne, dont les trois quarts environ fonctionnent normalement, produisant le bois d'automne de première année, puis le bois de printemps de seconde année. Autour de la larve, les deux extrémités de l’assise génératrice fonctionnent très activement et produisent un abondant tissu secondaire : les éléments de ce tissu resté cellulosique sont très riches en protoplasme et en noyaux volumineux, comme la plupart des lissus en active voie de division. La multiplication cellulaire gagne aussi les tissus libériens, les éléments péricycliques et se propage jusqu'à l’'épiderme. L'accroissement en longueur de la tige augmente beaucoup la dimension verticale de la région où l’assise génératrice a cessé de fonctionner sous l'influence de la larve, région qui conserve sensiblement la même largeur comme nous l’avons vu. Plusieurs mois après, celte région affecte une longueur voisine de deux œænti- 256 G. HOUARD. mètres puisqu'elle est un peu plus longue que la cavité larvaire. Le tissu secondaire, en contact avec elle à son extrémité supérieure, comme à son extrémité inférieure, est le bois irrégulier et lignifié bs’à qui a été décrit plus haut. Pendant ce temps, la larve a grandi et elle s'est peu à peu rapprochée du centre de la tige. Entre elle et le tissu ligneux de l’anneau vasculaire, un peu de parenchyme non lignifié forme la paroi de la cavité larvaire. La figure 175 (L) représente schématiquement la partie inférieure de la section longitudinale de la galle pratiquée suivant le plan de symétrie. La cavité larvaire cA/ est entourée, dans la partie la plus large, par le tissu gallaire qui dérive du fonctionnement de l’assise génératrice interne et, à sa partie inférieure, se termine par lesillon séparant le bois secondaire de première année bs, du bois secon- daire anormal de seconde année bs”, (tissu de remplissage). Les modifications anatomiques présentées par les tissus hyperpla- siés sont très accentuées ; je n’y insisterai pas, car il suffit pour s’en rendre compte de comparer les figures 176 (N) et 177 (A). La pre- mière figure représente une portion de tige normale depuis la moelle jusqu’à l’épiderme. La figure 177 montre la région correspon- dante prise au niveau A de la figure 173: on y voit la fentes du bois de première année, le tissu de remplissage de seconde année DS’, l'assise génératrice interne agi, l’hypertrophie de la région péricyclique fp, le cloisonnement dans deux directions perpendiculaires des cellules de l'écorce éc, enfin le cloisonnement très actif des cellules épidermiques ép et sous-épidermiques, en face de l’amas fibreux cortical fc. L'épiderme anormal a des cellules plus irrégulières que les cellules normales et se cloisonne activement. Deuxième exemple. — Souvent la galle présente un aspect un peu différent de celui que nous venons de voir : la section transver- sale pratiquée au-dessous de la cavité larvaire (en A, fig. 179) comprend comme précédemment un massif ligneux f/b composé de bois de première année Ds, et de bois de deuxième année bs,, occu- pant environ trois quadrants ; le quadrant qui manque se relrouve à l'opposé de la section, en /7b”, dans le plan de symétrie, et il possède GALLES DE TIGES. 257 aussi deux zones de bois secondaire bs,, bs, appartenant à deux années successives. > bo, CS D. be “A Me Su v/ ” 13 à (ILE TELE UTETTN Ci FiG. 178 (N2). — Schéma de la coupe transversale de la tige normale de Cytise blanc (gr. 15). FiG. 179 (A3). — Coupe transversale schématique de la cécidie caulinaire pratiquée vers l'extrémité inférieure de la cavité larvaire chl (gr. 15). Fic. 180 (A3). — Coupe transversale schématique de la cécidie caulinaire pratiquée au milieu de la chambre larvaire (gr. 15). Fi. 181 (La). — Coupe longitudinale schématique de la même cécidie (gr. 15). Mêmes lettres que précédemment; s, s”, sillons ; f{b, flb”, anneau vascu- laire dissocié ; agi, agi’, assises génératrices. Les deux massifs ligneux f{b, flb” sont séparés par un tissu non 17 258 C. HOUARD. lignifié, composé de nombreuses pelites cellules. Ce tissu est en relation de continuité très nette avec le bois de seconde année bs, au bord des deux massifs ligneux ; ses éléments viennent buter contre le bois de première année bs, et en épouser le contour tout en ménageant deux longs sillons s, s”, identiques à celui que nous avons vu plus haut entre le bois de première année et le tissu de remplissage de seconde année. La différence principale qui se manifeste 1c1 c'est que le tissu nouveau n'est pas lignifié. Au niveau de la cavité larvaire (en A;, fig. 180), on retrouve encore le gros massif ligneux primitif //b, mais le plus petit a presque complètement disparu. Les éléments de ce dernier ont élé écartés les uns des autres et disséminés au milieu du tissu gallaire ; on les reconnaît à leurs parois lignifiées. Il est facile de comprendre comment cette curieuse modification s’est produite. La jeune larve a interrompu, au milieu de la première année, le fonctionnement de l’assise génératrice suivant une petite surface verticale et, dès lors, aux environs de la cavité larvaire, tout se passe comme dans le premier cas examiné. Mais, dans la région de raccord entre la tige normale et la galle, l’assise génératrice n’a pas cessé de fonctionner, comme cela avait lieu dans l'exemple précédent; elle a été écartée latéralement et a continué à produire une épaisse couche de bois de première année, puis une couche de bois de deuxième année ; c’est l’ensemble de ces deux couches qui constitue le quadrant rejeté latéralement. Et comme, au fur et à mesure, la tige s’accroissait en longueur et la larve grossissait, 1l en est résulté un écartement de plus en plus grand des massifs ligneux pendant la fin de la première année et le commencement de la seconde. Au niveau À, (fig. 179), c’est-à-dire dans la région de raccord, l'intervalle compris entre les deux massifs ligneux se comble, à mesure qu'il se produit, par le fonctionnement très actif des deux assises génératrices agi, agi en dehors des faisceaux vascu- laires : les éléments secondaires bs”, qui prennent naissance s’appli- quent en longues files de 15 à 20 cellules chacune contre les vaisseaux de bois primaire bS,, mais sans se souder à eux, séparés qu'ils en sont par les deux sillons s et s”. Ces mêmes tissus secondaires bs”, marchent à la rencontre l’un de l’autre vers le centre, et se juxtaposent suivant un diamètre hori- zontal chl, qui représente l'extrémité de la chambre larvaire, GALLES DE TIGES. 259 La figure 182 (A,) donne le détail de ce qui se passe à l'extrémité droite du gros amas vasculaire primitif; l’assise génératrice agi à contourné le bois de première année bs, et produit le tissu gallaire bs”, dont on voit les longues files cellulaires. esse _ ÉREEQQ \AAEETS Re A Fi. 182 (A2). — Partie de la coupe transversale de la cécidie caulinaire du Cytise, représentée par la figure 179, montrant comment le tissu secon- daire anormal Ds’ comble l'intervalle s compris entre la cavité larvaire chl et le bois secondaire normal bs4 (gr. 150). Enfin, j'ai schématisé comme précédemment, en L, (fig. 181), la section longitudinale de la galle dans la région de raccord. Troisième exemple. — La division de l'anneau vasculaire de la tige en masses ligneuses peut être plus complet que dans le cas 260 C. HOUARD. qui précède et produire trois et même quatre amas ligneux plongés dans le tissu gallaire. Chacun d'eux comprend un arc de bois secondaire de première année entouré par le bois de seconde année. Toutes les assises génératrices partielles prennent part à la déformation et pro- duisent, en dehors des amas ligneux, des tissus secondaires qui marchent à la rencontre les uns des autres, sans toutefois Se Fig. 183 (A3). — Coupe transversale confondre. schématique d’une cécidie cauli- ; x naire de Cytise, dans laquelle L'exemple représenté DE la l'anneau vasculaire est dissocié en figure 183 (A;) comprend trois tr0:8 amas Mb NT00 HP SITE masses ligneuses f7b, f1b”, [lb : sillons ; chl, chambre larvaire on y voit nettement en outre les (gr. 15). lacunes de séparation des tissus gallaires et les sillons $, s”, 7”. En résumé, sous l'influence de l'Agromyza Kiefjeri, la tige du Cytisus albus présente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène excile en un point le fonctionnement de l’assise génératrice interne et détermine la production d’une saillie latérale ayant un plan de symétrie ; 20 Une partie du bois de première année est détruite ou refoulée vers l’exlérieur ; 3 L'hyperplasie porte aussi sur les éléments péricycliques et Cor licaux. Sarothamnus scoparius Koc. Cécidie produite par l'Agromyza pulicaria MEIGEN. La cécidie produite par cet autre Diptère est toute semblable comme aspect à celle que nous venons d'étudier, mais ses dimensions sont un peu plus grandes, car elle peut atteindre 30 et même 40 mm. de longueur sur 6 à 8 mm. de diamètre (E, fig. 184) ; les parois en sont épaisses et la cavité larvaire est très allongée (L, fig. 185). GALLES DE TIGES. 261 La galle est située latéralement au rameau sur lequel elle se développe; elle est plane entre les deux ailes de la tige qui ne sont pas déformées (/c, en À, fig. 187) et ailleurs presque réguliérement arrondie : les autres ailes, telles que /c”, ne font pas saillie. Une couche subéreuse /g{ entoure la région hyper- trophiée. NAS nn — & Fi. 184 (E). — Aspect de la cécidie caulinaire de la tige de Sarothamne (gr. 1). FiG. 185 (L). — Coupe longitudinale de la cécidie (gr. 1). FiG. 186 (N). — Schéma de la coupe transversale de la tige normale (gr. 15). FiG. 187 (A). — Schéma de la coupe transversale de la cécidie (gr. 15). bsy, bsa, bs3, couches annuelles de bois; fp, fe, fc’, fibres; pa, tissu palissadique ; ée, écorce ; ép, épiderme; /gt, liège de la tige ; /gc, liège cicatriciel ; chl, chambre larvaire. Comme dans la cécidie précédente, il y a un plan de symétrie très net, déterminé par le centre de la cavité larvaire et par la géné- trice médiane de la portion non altérée de la tige. L’anneau vasculaire se comporte comme dans le premier exemple de la galle du Cytisus albus : le bois de première année Ds a disparu en parlie et ce qui reste est en contact direct avec la cavité larvaire ch! ; le bois de seconde année Ds, ne s’est pas déve- loppé du côté du parasite. 262 CG. HOUARD. Il est bon de remarquer ici la grande part que prend l'écorce dans la production de la galle. Sur une coupe normale (en N, fig. 186), l'écorce ée contient cinq bandes de tissu palissadique pa séparées par les petits amas de fibres péricycliques /p et de fibres corticales /e qui renforcent les ailes. Dans la cécidie, seules les deux ailes non déformées /Ce (en A, fig. 187) conservent autour d'elles quelques lambeaux de tissu chlorophyllien pa. Le tissu cortical est abondamment cloisonné partout ailleurs et les fibres des ailes déformées de la tige sont éloignées les unes des autres. Quand l'adulte a quitté la cécidie, celle-ci présente une cavité larvaire grande et irrégulière, qui se cicatrise bientôt par une couche assez épaisse de liège cicatriciel /gc. À ce moment, au-dessus et au-dessous de la cavité larvaire, le rétablissement des couches annuelles commence à se faire, ce qui ne se produit qu'un peu plus tard dans la partie médiane de la galle. En résume, sous l'influence de l’Agromyza pulicaria, la tige du Sarothamnus scoparius subit des modificalions comparables à celles que présente la tige du Cytisus albus ; les régions péricy- clique et corticale s’hyperplasient un peu plus que dans l'exemple précédent. Quercus pedunculata Enr. Cécidie produite par l’Andricus Sieboldi HarriG. Évolution de la galle. Les cécidies que ce Cynipide produit à la base de la tige des jeunes Chênes de deux à cinq ans sont parmi les plus belles et les plus curieuses que l’on connaisse. Elles apparaissent en mai, au travers de l'écorce éclatée, isolées ou réunies, sous la forme de petits cônes oblus, teintés de rouge (en À,, fig. 188). A la fin de la deuxième année, elles forment sur la tige des saillies de 7 ou 8 mm. (en A;); à ce moment l'enveloppe charnue extérieure se dessèche et tombe, mettant alors à nu une cécidie interne, conique, très dure, haute de 5 ou 6 mm., ayant 4 ou o mm. de diamètre et qui présente des stries longitudinales allant de la base au sommet (en AÀ,). C’est seulement au mois de mars suivant GALLES DE TIGES. 263 (troisième année) que l'adulte sort de la galle par un petit trou rond latéral pour aller pondre ses œufs dans un bourgeon et produire ainsi sur les pétioles et les nervures des feuilles une nouvelle galle d’où sortira cette fois la forme sexuée appelée Andricus leslaceipes HARTIG. FiG. 188 (E). — Figure schématique indiquant l'aspect extérieur de la cécidie de la tige de Chêne, depuis son apparition jusqu'à sa chute (gr. 1). FiG. 189 (L). — Coupes longitudinales de la tige et des cécidies dessinées à divers D D âges (gr. 1). Anatomie de la galle jeune. Ce cycle évolutif étant rappelé, étudions l'anatomie de la galle en pratiquant une section transversale d’un rameau là où une petite bosselette nous révèle sous l'écorce une jeune cécidie en voie de développement (A,, en E, fig. 188). La tige a 5 mm. de diamètre et est âgée de trois ans ; elle possède une moelle légèrement sclérifiée, entourée par un épais anneau vasculaire dont les couches annuelles sont plus épaisses d’un côté ; les fibres péricycliques et corticales sont également plus développées au fur et à mesure qu'on se rapproche de celte région hypertrophiée. C’est là, en effet, que se trouve, au niveau de l’assise génératrice, un tissu très serré, nettement délimité par une lacune circulaire s (en A;, fig. 191) des fibres péricycliques /p et de l'écorce éc; au centre de cette petite masse, qui à 1. mm. de diamètre, existe une grande cavité larvaire cl dont le diamètre est d'un demi-millimètre. Les cellules du tissu gallaire sont disposées, autour de la cavité, en files 264 G. HOUARD. rayonnantes extrêmement longues à la base de la galle et en relation avec l’assise génératrice interne agi de la tige. N \N 7) ‘à DIT NS 7, == 7, / 4, N Fig. 490 (N). — Schéma de la coupe transversale de la tige normale de Chêne (gr. 15). Fig. 491 (A). — Schéma de la coupe transversale passant par le milieu d’une cécidie très jeune (gr. 15). bs, bois secondaire ; agi, assise génératrice interne ; /p, fc, fibres; ée, écorce ; », moelle; /gt, liège de la üge; s, sillon; ch, chambre larvaire. La forme qu'affecte à ce moment la petite cécidie est donc sensi- blement celle d’une demi-sphère appuyée par sa base à la base d’un cône dont la pointe est tournée vers le céntre de la tige. L'œuf, déposé par le Cynipide dans une petite cavité pratiquée aux envi- rons de l’assise génératrice, a été entouré par les tissus secondaires qui ne se sont pas fusionnés avec les couches corticales voisines, puisque le sillon s apparaît toujours très nettement. La cécidie de l’Andricus Sieboldi constitue une déformation latérale de tige et possède un plan de symétrie comme toutes les galles qui ont été précédemment étudiées. Ce plan est déterminé par le centre de la cavité larvaire et par la génératrice médiane de la région non déformée ; il passe aussi par l’axe de la tige. Mais, contenu dans ce plan de symétrie, la galle possède en outre un ae de symétrie déterminé par le centre de la cavité larvaire et par le sommet de la partie conique. Il est facile de vérifier que la cécidie possède un axe de symétrie en faisant des coupes longitudinales tangentielles, c’est-à-dire paral- lèles à la surface de la tige, en un point où une petite bosselette se fait remarquer : la section de la galle se montre parfaitement circu- GALLES DE TIGES. 265 laire et le tissu secondaire gallaire y est encore disposé en files radiales autour de la cavité larvaire. Les figures 192 et 195, qui représentent des cécidies un peu plus âgées que celle de lafigure 191, montrent d’une façon bien nette que les sections dé la galle pratiquées perpendiculairement à son axe de symétrie sont circulaires. us, 7) 14, hs) ae) QE (| ne LE ®. ne Q ï Fi. 192 (A2). — Schéma de la coupe transversale et de la coupe tangentielle d’une cécidie caulinaire de Chêne, un peu plus âgée que celle de la figure 191 et qui a fendu l'écorce (gr. 15). Fra. 193 (A°2). — Epiderme de la cécidie (gr. 150). Fig. 194 (A72). — Partie de la coupe tangentielle A2 (gr. 150). agi, assise génératrice interne de la tige; fp, fibres ; ée, écorce ; lg, liège de la tige ; /ge, liège cicatriciel ; /{b, faisceau libéro-ligneux de la cécidie ; ép, épiderme de la cécidie ; cn, couche nourricière ; chl, chambre larvaire. se, FE 266 C. HOUARD. La galle se développe très rapidement, ses parois deviennent plus épaisses, mais la chambre larvaire garde un diamètre à peu près constant. À ce moment la pression sur les tissus corticaux est assez forte pour les rompre et la cécidie apparaît au dehors(A,, enE et L, fig. 188 et 189) ; sa surface se teinte en rose. L'étude de la paroi de la galle est intéressante. La surface externe est recouverte par un véritable épiderme à stomates plongés au milieu de nombreuses petites cellules polyédriques irrégulière- ment allongées (A”,, fig. 193) ; les parois de ces cellules sont épaisses et munies de nombreuses ponctuations. Au-dessous, la paroi de la galle contient de petits faisceaux libéro-ligneux /{b (en A», fig. 192), au nombre de 13 à 15, composés chacun de 30 à 50 courts vaisseaux spiralés qui se lignifient de bonne heure. Enfin, près de la cavité larvaire (en A°”,, fig. 194), les cellules sont allongées vers cette cavité et munies de deux à cinq cloisons transversales ; elles contiennent un épais protoplasme, de gros noyaux et constituent pour la larve une véritable couche nourricière cn. L'origine interne de cette galle, la présence dans sa structure d’un épiderme à stomates et d’un cercle de faisceaux libéro-ligneux, permettent de la comparer aux petites branches adventives qui sortent des troncs des arbres à la suite de blessures ou de piqûres. L'excitation cécidogène aurait ici pour résultat la production d’une petile tige adventive dont la taille resterait courte et ne dépasserait pas 5 ou 6 mm. de longueur par suite de la présence du parasite. Anatomie de la galle ägée. A la fin de l'année, la galle fait fortement saillie au dehors (en A3, fig. 188) et est colorée en rouge groseille; elle est large à la base de 4 min. environ et terminée en pointe obtuse. Sa section (A, fig. 189) montre une grande cavité larvaire de 3 mm. de diamètre, entourée d’unc épaisse couche scléreuse. Cette couche débute au point d'insertion de la galle, en cp” (A3, fig. 195), et là ses cellules allongées, ligneuses, à parois ponctuées peu épaisses (en cp”, A7, fig. 197) sont disposées en longues files faisant suite aux files cellulaires du tissu nourricier en’. Il en est de même dans la partie terminale obtuse de la galle, en Cp (A3, fig. 195), où la couche scléreuse est également très déve- loppée el très épaisse. Le tissu nourricier cn (A, fig. 196), qui GALLES DE TIGES. 267 entoure la cavité larvaire dans cette région, comprend une épaisseur de 6 à 8 grosses cellules isodiamétriques, à épais proloplasme et . 7 À A a , RAT # Wie p D: u/! ile le rm Uni! / Ses tdruis FeeneAzS CT …Chl Fi. 195 (A3). — Schéma de la coupe transversale et de la coupe tangentielle d'une cécidie caulinaire de chêne, âgée et fortement sclérifiée (gr. 15). Fi. 196 (A73). — Détul des couches nourricière cn et protectrice cp, situées vers la pointe de la cécidie (gr. 150). FiG. 197 (A73). — Détail des mêmes couches c#’, cp’, situées à la base de la cécidie (gr. 150). bs, ls, anneau vasculaire de la tige ; /gt, liège de la tige ; D, faisceau libéro- ligneux de la cécidie ; ép, épiderme de la cécidie ; cl, chambre larvaire. à noyaux hypertrophiés: les cellules bordant la cavité larvaire 268 C. HOUARD. chl sont fortement convexes et y font saillie; au contraire, les cellules les plus externes du tissu nourricier sont aplaties et en relation directe avec les files cellulaires du tissu protecteur cp. Les cellules de cette dernière couche ont des parois épaisses, lignifiées et finement ponctuées ;elles alternent vers l'extérieur avec quelques éléments restés cellulosiques. L'extrémilé obtuse de la galle est donc constituée par de longues files cellulaires dont les éléments sont différenciés en une couche nutritive et en une couche protectrice ; ces files témoignent du fonctionnement actif d’une assise génératrice située entre les deux couches. Les relations de position qui existent entre la couche scléreuse et les petits faisceaux libéro-ligneux de la galle sont faciles à mettre en évidence par une coupe transversale semblable à celle qui a été représenté à la partie inférieure de la figure 195 (A3). On y voit la couche protectrice cp présenter une série de sillons concaves dans chacun desquels se loge un faisceau libéro-ligneux //b. Quand la galle se dessèche, ce qui a lieu à la fin de la deuxième année, les faisceaux et le tissu cortical situé plus en dehors se détachent de la galle et tombent : la paroi externe gallaire se montre striée longi- tudinalement et présente l'aspect dessiné en À, (E, fig. 188). Chute de la galle ; rétablissement de la structure normale de la tige. Enfin, l’année suivante, l'habitant de la galle éclôt et quitte sa demeure par un petit trou rond de la paroi latérale. La galle vide reste fixée à son support pendant plusieurs années, car elle est insérée par une large base, et c’est seulement lorsque la tige a atteint sept ou huit ans que la cécidie tombe en laissant une cicatrice circulaire, un peu concave, de 6 ou 7 mm. de diamètre (A;, fig. 188 189). Une coupe lransversale, pratiquée sur une tige de sept ans (A3, fig. 198), un peu avant la chute de la galle, montre que cette chute sera provoquée par l'apparition, sous la couche scléreuse gallaire cp, d’une couche de liège cicatriciel /ge, en relation avec celui de la tige gt. À l'abri de cette couche subéreuse, l'anneau vasculaire a travaillé, depuis plusieurs années déjà, à réparer le trouble que la présence de la galle avait apporté dans la structure de la tige. GALLES DE TIGES. 269 Dans loute cette région, à droite et à gauche du plan de symétrie, les couches annuelles de bois sont complètement altérées pendant les deuxième, troisième et quatrième années (bs:, bss, bs;); leur épaisseur est très variable. Si on suit ces couches vers le plan de symétrie, en allant ainsi de la région normale à la région anormale, on voit d'abord les gros vaisseaux de printemps disparaître, puis les rangées radiales de cellules ligneuses devenir sinueuses ; enfin, on arrive à un tissu de remplissage composé d'éléments secondaires ligneux complètement déformés. IE in il 1 il 1, 1) 1] À EU 77 4; EL 77 7 21; DEL de SSSR: ie ND S? Fic. 198 (A3). — Schéma de la coupe transversale de la tige de Chène et de la cécidie très âgée; les couches annuelles ligneuses les plus récentes bsç, 0s, bss ont repris une certaine régularité et une forte assise cicatricielle {ge isole complètement la tige de la cécidie (gr. 15). f», fibres ; gt, liège de la tige ; cn, cp, couches nourricière et protectrice ; chl, ancienne chambre larvaire. L'assise génératrice commence à fonclionner plus régulièrement à la fin de la cinquième année, dans l'échantillon que j'ai dessiné, el donne une couche de bois secondaire Ds;, peu épaisse, mais assez 270 C. HOUARD. homogène, contenant des cellules ligneuses et des vaisseaux ligneux à section normale ; celte assise fonctionne jusqu'au plan de symétrie et isole complètement la galle des tissus altérés et du tissu de remplissage. L’assise génératrice travaille d’une façon plus normale à partir de ce moment el fait peu à peu disparaître la concavité très accentuée qu'elle à présentée jusqu'alors en face de la galle. Enfin, pendant les années qui suivront, l'écorce elle-même régularisera son contour et rien n'indiquera plus, à l'extérieur, qu’une galle s’est formée là plusieurs années auparavant. En résumé, sous l'influence de l'Andricus Sieboldi, la tige du Quercus pedunculata présente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène excite en un point le fonctionnement de l’assise génératrice interne et détermine la production d'une saillie latérale hémisphérique ayant un plan de symétrie ; 2 La galle possède encore un axe de symétrie, un cercle de faisceau: libéro-ligneux et un épiderme à stomales : ces carac- tères sont ceux d'une petite tige adventive arrêlée dans son développement : 3 Une couche nourricière et une couche protectrice se forment autour de la cavité larvaire ; 4° La galle fait saillie hors de l'écorce et s'isole de la tige par une couche de liège ; 5° La structure normale de la tige ne se rétablit qu'après la chute de la galle. RÉSUMÉ DU CHAPITRE III, RELATIF AUX CÉCIDIES CAULINAIRES LATÉRALES PRODUITES PAR UN PARASITE SITUÉ DANS LES FORMATIONS SECONDAIRES LIBÉRO-LIGNEUSES. Après l'étude détaillée que nous venons de faire des onze cécidies précédentes, nous pouvons chercher les caractères communs qu’elles présentent et les ressemblances qu'elles peuvent avoir entre elles. GALLES DE TIGES. 271 Caractères communs. — Ce sont les suivants : 1° Le parasite est situé dans l’assise génératrice libéro- hgneuse ; 2° L'action cécidogène qu’il engendre excite le fonction- nement de cette assise en un point de l’anneau vasculaire de l’année qui est complètement déformé ; Le tissu quise produit en plus grande abondance et dans lequel la cavité larvaire s’'élablit en général est du bois secondaire non lignifié ; 3° Les tissus gallaires sont refoulés par la portion non déformée de la tige et produisent une saillie latérale ayant un plan de symétrie. Ce plan est déterminé par le centre de la cavité larvaire et la génératrice opposée de la tige ; 1l passe également par l’axe du rameau : 4° L'action cécidogène s’étend aussi, dans une certaine mesure, à l’écorce dont l’hypertrophie accentue la défor- mation. Fi. 199, — Schéma indi- , . : NOR La figure 199 schématise le mode de pro- quant les relations qui existent entre la duction des galles appartenant au troisième tige et le parasite, chapitre. quand celui-ci est situé dans les forma- ) iLitta tions secondaires . li- Ressemblances. — En général, l’action béro-ligneuses agi ; parasitaire ne dépasse pas, vers le centre, de, écorce; 24, moelle; 14 zone périmédullaire qui est en dépen- x, action cécidogène ; : j p, réaction végétale; dance étroite avec les pôles ligneux; la 7, plan de symétrie. moelle n’est donc pas altérée, le plus souvent. Dans les cécidies du Tilia silvestris, du Salix capræa et du Populus Tremula, l'action cécidogène de la larve s’étend à la moelle dont les cellules sont d’abord hypertrophiées, puis plus tard fortement lignifiées. I1 y a donc, pour ces cécidies, à ajouter l'hypertrophie centripète du tissu médullaire à l’hypertrophie centri- fuge commune à toutes les galles de ce chapitre. 272 C. HOUARD. La galle du Sarothamnnus scoparius (produite par la larve de Conturinia) et celle du Quercus coccifera ont leur anneau vascu- laire complètement brisé en un point, mais l'hypertrophie centrifuge est beaucoup plus accusée que celle de la moelle dont les éléments ne se lignifient pas. L'action du parasite dans ces cinq galles se fait sentir dès le printemps, alors que la tige toute jeune ne possède pas encore un anneau vasculaire résistant ; les différents faisceaux libéro-ligneux sont écartés par l’hypertrophie des rayons médullaires et l’action parasitaire peut gagner la moelle. Dans toutes les autres galles étudiées, l’hypertrophie s'effectue seulement dans une direction centrifuge par suite de la présence d’un anneau libéro-ligneux capable de résister lorsque le parasite commence à faire sentir son action. C’est ce que les figures d'ensemble 148 et 160 pour le Rubus fruticosus et le Brassica oleracea montrent déjà. Cependant leur anneau vasculaire n'offre pas une résistance complète : il est quelquefois brisé par places (c’est le cas pour le Rubus) et l'hyperplasie gagne encore la zone périmédullaire. La cécidie du Glechoma hederacea possède un gros faisceau vasculaire qui n’est détruit qu’en partie ; l’hyperplasie des tissus se fait alors toute en direction centrifuge, et elle se traduit par la production d’un tissu gallaire de taille énorme par rapport aux dimensions normales de la tige : c’est ainsi que le rayon de la galle devient cinq fois supérieur à celui de l’axe. Cette grande hyper- plasie entraîne la production de petits faisceaux d'irrigation. Enfin, les galles du Quercus pedunculata, du Cytisus albus et du Sarothamnus scoparius (cette dernière produite par une larve d’Agromyzide) ont pour caractère commun de présenter un anneau libéro-ligneux complètement lignifié, et par suite indéformable, au moment où l’action larvaire commence à se faire sentir. Dans ces conditions, l'hyperplasie ne peut être que centrifuge. De plus, dans la première de ces cécidies (celle produite par l'Andricus Sieboldi), le üissu gallaire dérive tout entier du fonctionnement de l’assise génératrice et est complètement distinct de l'écorce qu'il refoule ; dans les deux autres, au contraire, l'écorce prend part à la défor- mation et confond ses lissus hyperplasiés avec ceux qui dérivent de l’assise génératrice. GALLES DÉ TIGES. 973 Le tableau suivant résume ces ressemblances : Rapport du rayon de la galle au rayon de la tige. La moelle prend part à la déformation ; hyper- trophies centripète et centrifuge simultanément : Tilia silvestris (Contarinia tiliarum).......... 3 Populus Tremula (Harmandia petioli) ....... 2 Salix capræa (Rhabdophaga salicis)......... 2 Cécidies pro- Sarothamnus scoparius (Contarinia scoparii). 4 venant du fonc- Quercus coccifera (Plagiotrochus fusifex).... D CHR de | La moelle ne participe pas à la déformation ; à Rare hypertrophie centrifuge : rice interne ; f à 3 L l 7 Rubus fruticosus (Lasioptera rubi)........... LD anneau VasCu- . ; . ne Brassica oleracea (Ceuthorrh. pleurostigma).. laire de l’année CE E : : Glechoma hederacea (Aulax Latreillei)....... D est déformé en un point. La moelle et les couches ligneuses des années précédentes ne participent pas à la déformation ; hypertrophie centrifuge : Cytisus albus (Agromyza Kiefferi)....,....... 2,9 Sarothamnus scoparius (Agromyza pulicaria). 3 Quercus pedunculata (Andricus Sieboldi).... 2 Notons enfin, pour terminer, que les cécidies produites par les larves du Contarinia tiliarum, de l'Harmandia petioli et de l’'Andricus Sieboldi ont un axe de symétrie perpendiculaire à celui de la tige et contenu dans le plan de symétrie qu’elles possèdent également. 18 274 C. HOUARD. CHAPITRE 1V. CÉCIDIES CAULINAIRES PRODUITES PAR UN PARASITE SITUÉ DANS LA MOELLE. Depuis longtemps, FRiIEDRICH THomas, le célèbre cécidologue d'Obrdruf, a désigné sous le nom de Myélocécidies [87] les défor- mations des Liges dans lesquelles le parasite est situë à l’intérieur de la moelle. La position topographique de l’animal étant sensible- ment axiale il en résulte que l’action cécidogène se fait sentir dans toutes les directions avec la même intensité : les tissus de la tige s'hypertrophient uniformément et produisent un renflement fusiforme régulier ayant un axe de symétrie. Les cécidies appartenant à ce chapitre sont fort nombreuses, parce que les larves qui les produisent sont bien abritées et qu’elles peuvent se déplacer facilement dans un tissu où elles trouvent une nourriture abondante. La plupart des Lépidoptérocécidies appar- liennent à ce groupe. Toutes ces cécidies ont suscité de nombreux mémoires de systématique pure. Leur anatomie est moins avancée ; aussi n’a-t-on à signaler sur ce sujet que quelques études peu détaillées. M. W. BEI- JERINCK [82], dans son beau travail sur les premières phases du développement des galles de Cynipides, a indiqué comment se forme la cavité larvaire dans la cécidie de l'Aulaæ hieracii (page 45-58, PL I, fig. 1-11). La galle d’un autre Aulax déformant les inflores- cences du Picridium vulgare a étè étudiée par O. Krucx [91]. Enfin, de courts renseignements anatomiques existent encore dans les mémoires de HIERoNYMUS [90, n°5 621, 739, 794, 708, 799, etc. |, de Gaix [94], de l’abbé PrerRE [97], de SKrziPierz [00|, de Houarp [01, p. 40-42, fig. 28-31, Lépidoptérocécidie de Fagonia|], de VAYSSIÈRE et GERBER [02, p. 30-36, PI. II, fig. 14-16]. Sisymbrium (Arabis) Thalianum Gay. Cécidie produite par le Ceuthorrhynchus atomus Box. Dès le mois d'avril on trouve communément dans l’inflorescence de celte Crucifère, sur l'axe principal ou sur les rameaux latéraux, GALLES DE TIGES. 275 des renflements fusiformes allongés (E, fig. 200), le plus souvent courbés en arc. Ils déforment la tige sur une longueur de 15 à 20 mm., mais ne dépassent guère 4 mm. d'épaisseur. Une cavité larvaire allongée occupe la moelle (L, fig. 201). FiG. 200 (E). — Aspect de la cécidie de la tige de Sisymbrium Thalianum (gr. 1). FiG. 201 (L). — Coupe longitudinale de la cécidie (gr. 1). FiG. 202 (N). — Schéma de la coupe transversale de la tige normale (gr. 15). Fi. 203 (A). — Schéma de la coupe transversale de la cécidie (gr. 15). flb, flb”, ete., faisceaux libéro-ligneux ; p, péricyele ; #7, moelle; end, endoderme ; chl, chambre larvaire. Structure de la tige normale. — La section transversale de la tige pratiquée au-dessous de la galle possède 1,2 mm. de diamètre (N, fig. 202) ; elle comporte un épiderme ép (en N, fig. 204) à cuticule épaisse, une écorce lacuneuse éc dont les cellules contiennent de gros chloroleucites peu nombreux et dont l’endo- derme end est formé de cellules allongées tangentiellement. £Le cylindre central contient huit petits faisceaux libéro-ligneux ftb reliés entre eux par de nombreuses fibres à parois épaisses ; les formations secondaires sont peu développées. Les cellules du péricycle p sont grandes et à contours sinueux. Structure de la tige anormale. — La section transversale de la cécidie n’est pas circulaire (A, fig. 203), mais un peu aplatie ; ses 92976 GC. HOUARD. dimensions sont 2,4 mm. sur 3 mm. La cavité larvaire chl est située un peu de côté dans la moelle #. Il en résulte que l'action cécidogène du parasite s’est surtout fait sentir sur les faisceaux libéro-ligneux les plus rapprochés, tels que /7b”, lb”, qui se sont fortement hypertrophiés, et aussi sur une bonne partie de l'écorce située au voisinage de la cavité larvaire. Au contraire, la région opposée, en /1b””, est peu modifiée: les cellules épidermiques, l'écorce, les faisceaux libéro-ligneux etla moelle y conservent la taille normale. Cette région joue le rôle de point fixe dans le développement de la galle. À ®," { /} à GE) (XX) e + () a 7 FO feel LA PE F) FiG. 204 (N). — Portion de la ta -agr | coupe transversale repré- à sentée par la freure 202 (gr. 150). FiG. 205 (A). — Portion cor- respondante de la cécidie (gr. 150). P flb, flb”, faisceaux li- . béro-ligneux ; pb, pôle j ÿ ÿ 5 1 Ï OS ee ligneux ; agi, assise gé- nératrice interne ; D, À péricycle; #», moelle ; end, endoderme ; éc, écorce ; ép, épiderme. SEAS De cette disposition, qui rappelle beaucoup celle que nous avions rencontrée dans l'étude des cécidies appartenant aux trois premiers chapitres, il résulte que la galle du Sisymbrium Thalianum GALLES DE TIGES. 2714 présente un plan de symétrie. Ce plan est déterminé par le centre de la cavité larvaire et par la génératrice médiane de la portion non déformée de la tige. La position excentrique de la larve et l'hypertrophie considérable qu'elle entraîne pour une partie de la tige permet de comprendre la courbure des rameaux et des cécidies que nous avons signalée et figurée plus haut. La présence de la galle produit dans la structure de la tige des modifications anatomiques qui n’ont rien de bien remarquable, C'est dans les régions latérales, à droite et à gauche de la cavité larvaire, au voisinage du faisceau libéro-ligneux //b””, qu'on les observe le mieux. Les cellules épidermiques ép (en A, fig. 205) sont beaucoup plus larges que les cellules normales (50 # au lieu de 12 u), mais elles sont de moitié plus courtes, et plus irrégulières (comparer les figures 206 et 207) ; leurs stomates sont le plus souvent développés d’une façon incomplète. L’écorce éc (fig. 205) est devenue beaucoup plus épaisse (170 y au lieu de 50 y) et possède des cellules souvent étirées tangentiellement, contenant de très nombreux, mais très petits chloroleucites. Les cellules péricycliques p sont encore grandes et sinueuses. Fic. 206 (N). — Épiderme de la tige normale de Sisymbrium Thalianum(gr. 150). Fi. 207 (A). — Épiderme de la eécidie de la même plante (gr. 150). Quant aux faisceaux libéro-ligneux, leur taille devient énorme: ils sont plus larges et plus allongés que les faisceaux normaux ; leur assise génératrice agi a activement fonctionné et les vaisseaux du bois primaire sont écartés les uns des autres par l'hypertrophie du parenchyme. De plus, les fibres qui réunissent 278 G. HOUARD. les faisceaux entre eux sont de beaucoup plus nombreuses et plus grandes, mais leurs parois lignifiées restent minces. Legros faisceau libéro-ligneux f7b” (fig. 203), situé dans le plan de symétrie et très rapproché de la cavité larvaire, est le plus modifié ; sa région interne est en général dévorée par la larve. Les parties supérieure et inférieure de la cavité larvaire, dans lesquelles la larve ne se trouve plus par suite de l’allongement de la tige, sont comblées par les cellules du bord de la cavité, qui se sont transformées en gros poils contournés, atteignant parfois 290 y. En résume, sous l'influence du Ceuthorrhynchus atomus, la , tige du Sésymbrium Thalianum subit les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène se faisant sentir plus particulièrement sur une région de la tige, à cause de la position latérale de la larve, y détermine un renflement ayant un plan de symétrie ; 2 La tige se courbe en arc dans ce plan ; 9° La moelle est considérablement hypertrophiée ainsi que les faisceaux libèro-ligneux et l'écorce voisins de la cavité larvaire. Potentilla reptans |. Cécidie produite par le Æes/ophanes potentille VILLERS. Pendant l'été on rencontre en abondance sur les stolons et sur les pétioles de la Potentille rampante les chapelels de renflements que provoquent les larves de ce Cynipide. 1° Galle de la tige rampante. En juillet, ces renflements sont verts et petits (A,, en E,, fig. 208). Plus tard, en octobre ou en novembre, ils atteignent parfois 12 à 15 mm. de diamètre et 20 à 30 mm. de long (A;); leur surface est alors crevassée longitudinalement. Une section transversale pratiquée au travers montre plusieurs petites logettes, à paroi dure, renfermant chacune une grosse larve blanchätre qui y passera l'hiver et s'y métamorphosera au printemps suivant. GALLES DE TIGES. 279 al \ ni IE RU ; NA / Ÿ Ns RD SS RGO NOR SES RS KR Ve £ 4 LS CSC ES gt 7 4 ttes , re, Fi. 208 (E1). — Figure schématique donnant l'aspect extérieur de plusieurs cécidies de la tige de Potentilla reptans, à des âges variés (gr. 1). FiG. 209 (N1). — Coupe transversale schématique de la tige normale (gr. 15). FiG. 210 (A4). — Coupe transversale schématique d'une cécidie jeune (gr. 15). FiG. 211 (A3). — Coupe transversale schématique d'une cécidie âgée (gr. 15). flb, fl”, faisceaux libéro-ligneux ; fp, fibres péricycliques ; m, moelle ; éc, écorce ; ép, épiderme; pér, périderme; en, couche nourricière ; cp, couche protectrice ; irr, faisceau d'irrigation ; s, craquelure ; chl, chambre larvaire ; 3, larve. 280 C. HOUARD. Structure de la tige normale. La section est circulaire (N;,, fig. 209) et son diamètre atteint 1,2 mm.; en dedans d’un fort anneau de fibres péricycliques /p, son cylindre central contient cinq faisceaux libéro-ligneux /7b dont les formations secondaires sont peu développées (N;, fig. 212). Les cellules de la moelle #2 sont arrondies et ont 80 « de diamètre environ. Enfin, l'écorce éc est composée d'un endoderme end très net et de cinq ou six assises de petites cellules arrondies. Structure d'une galle jeune. Etudions d’abord la structure d'une galle jeune, uniloculaire, dont la section presque circulaire à 3,4mm. de diamètre (A;, fig. 210). A peu près au centre de la moelle # se trouve une grande cavité larvaire chl, irré- gulière, entourée par de nombreuses cellules cloi- sonnées dont le contenu est abondant et granuleux. Lesfaisceaux libéro-ligneux f1b, autour du cylindre central, sont plus nombreux que dans la tige normale et de taille deux ou trois fois supérieure. L'écorce éc est également beaucoup plus épaisse. ex Voyons maintenant Com- ment l’action du parasite a pu amener de telles modifi- cations dans la structure de la tige. FiG. 212 (N1). — Partie de la coupe transver- ù sale représentée par la figure 209 : #2, Sous l'influence de la moelle; pm, zone périmédullaire ; pb, petite larve de Xestophanes b, bois ; £, De agè La se Sun. interne ; bres péricycliques ; end située dans la moelle, les 2e 5; fps «RARES RerICYCEquesA k endoderme ; éc, écorce; ép, épiderme cellules de ce tissu se (gr. 150). cloisonnent d’abord dans deux directions perpendiculaires (M;, fig. 213); leur taille augmente ensuite rapidement en même temps que leur contour devient poly- GALLES DE TIGES. 281 gonal, avec côtés sinueux, et que leurs méats disparaissent (M, fig. 214). Puis les cellules dérivant de ces premiers cloisonnements perpeudiculaires se divisent à leur tour, dans tous les sens, par des cloisons secondaires très minces, et produisent parfois jusqu'à 30 et 40 petites cellules polygonales, très serrées les unes contre les autres (M3, fig. 215). Ces petits amas de cellules c sont toujours entourés par la paroi primitive c” de la cellule-mèêre qui s’est forte- ment épaissie tout en restant cellulosique. À ce moment la cellule- mère atteint un diamètre de 180 à 200 . Toutes les petites cellules c possèdent un protoplasme abondant, riche en matières grasses, et contiennent un gros noyau nucléolé de 10 y de diamètre; elles constituent autour de la chambre larvaire un riche tissu nutritif qui sert de nourriture au parasite. M; M; FiG. 213 (M1). — Cellules médullaires de la tige de Potentilla reptans commen- çant à se cloisonner (gr. 150). Fi. 214 (M2). — Deux cellules dans lesquelles le cloisonnement est un peu plus accentué (gr. 150). Fi. 215 (M3). — Cellule médullaire c’ très rapprochée du parasite et ayant donné naissance à 22 cellules filles e (gr. 150). FiG. 216 (M3). — Aspect d'une cellule médullaire périphérique (gr. 150). Les cellules périphériques de la moelle subissent moins fortement l'action cécidogène que les cellules centrales; aussi sont-elles beaucoup moins cloisonnées (M,, fig. 216) et donnent-elles naissance à 7 ou 8 petites cellules seulement dont le protoplasme est peu abondant et dont les noyaux, s’hypertrophiant peu, restent allongés. Ce fait que le contour des cellules primitives de la moelle est plus épais que les cloisons secondaires nouvellement apparues et reste longtemps distinct dans les tissus environnant la cavité larvaire, provient, sans doute, de la différenciation déjà très accentuée du tissu médullaire au moment où l’action parasitaire a commencé à se faire sentir. Du reste, on rencontre très souvent dans les zoocécidies cetle hyperplasie spéciale des cellules, et je l’ai déjà signalée plus 282 C. HOUARD. haut à propos des galles de l'£riophyes pini (page 192) et de l'Agromyza Kiefjeri (page 254, fig. 177). Cette active multiplication du tissu médullaire, accompagnée d’une grande accumulation de protoplasme et de matières nutri- tives dans les cellules, entraîne forcément : 1° Une modification spéciale des faisceaux libéro-ligneux en vue de nourrir le tissu hyperplasié ; 2° Une hypertrophie et une dissociation de ces faisceaux. L'hyperplasie de la moelle se propage, en effet, dans les rayons médullaires 7» (en AÀ;,, fig. 217) dont les cellules s’accroissent en diamètre, puis se cloisonnent. Il en résulte que les faisceaux libéro- ligneux f7b, f1b” sont écartés les uns des autres et que les assises généralrices in- ternes agi, agi” ne fonctionnent plus que très peu entre les fais - ceaux, ou même pas du tout si ceux-ci sont suf- fisamment éloi- gnés, et s’in- curvent vers la partie axiale de la coupe. Toutes les cellules du parenchyme et de la zone péri- médullaire pm, qui entourent la portion ligneuse 4 PARC 0 Ni ER AN EURE agi’ REA a Eu :-flb “es “ aq (\ ds Fig. 217 (A4). — Partie de la coupe transversale d’une galle très jeune de la tige de Potentilla reptans : les assisses génératrices internes agi, agi cessent de fonctionner entre les faisceaux /{b, flb” et s’établissent dans le rayon médullaire rm; m, moelle; pm, zone périmédullaire ; pb, b, bois. (gr. 150) b, pb des faisceaux, s'allongent énormément, deviennent quatre ou cinq fois plus grandes que dans la tige normale et prennent un grand nombre de cloisons parallèles ; dans toutes ces cellules, la GALLES DE TIGES. 283 membrane primitive reste beaucoup plus épaisse que les cloisons secondaires et la TENTE : disposition étoi- lée autour des pôles ligneux pb se trouve accen- tuée. À un état un peu plus avancé, représenté en À, (fig. 218), l’assise génératrice agi a produit dans le faisceau de nom- breux éléments secondaires : 0 po bois secondaire E g non lignifié bs et liber secondaire ag (s: les cellules périmédullaires LEA LE pm se sont forte- PeSÈLsE: ment allongées . D ci si LL tout en restant trésdistinctesles unes des autres et elles ont pris quelques eloi - sons de plus. mit Enfin, cette as- sise génératrice FiG. 218 (A3). — Portion de la coupe transversale d'une s’est établiedans cécidie encore jeune de la tige de Potentilla reptans : es cellules mé- l’assise génératrice agi a cloisonné toutes les cellules médullaires bordant la cavité larvaire chl et produit une abondante couche nourriciére cn, cn’ ; pm, zone Cloisonnées qui périmédullaire ; pb, b, bs, bois; /, {s, liber ; ftb, séparent le fais- faisceau vasculaire (gr. 150). (07 TI CID D œÙ os dullaires déjà ceau libéro - ligneux de la cavité larvaire ch: elle a entouré le faisceau et marché à la rencontre de l’autre moitié de l’assise génératrice du 284 C. HOUARD. même faisceau. Toutes les cellules médullaires, excitées par le fonctionnement de ces assises, s’allongent alors considérablement (jusqu'à 220 uw) dans une direction rayonnante par rapport au pôle ligneux du faisceau et se cloisonnent perpendiculairement un très grand nombre de fois. Les cellules les plus longues sont celles qui se trouvent dans le plan médian du faisceau, en cn; celles qui sont situées en cn”, dans la zone influencée par l’assise génératrice du faisceau voisin, sont aussi très longues, mais bien plus étroites, comprimées les unes contre les autres et courbées vers l’assise génératrice. Toutes ces petites cellules, qui dérivent du fonctionne- ment actif des assises génératrices des faisceaux libéro-ligneux autour de la cavité larvaire, contiennent un épais protoplasme, ainsi que de gros noyaux et de nombreuses malières grasses ; dès le début de la formation de la galle, elles constituent pour la jeune larve une couche alimentaire, un tissu nourricier très abondant. Le schéma $, (fig. 222) représente, dans une galle jeune, la formation de cette couche nourricière cr aux dépens des diverticules émanés des assises génératrices internes des faisceaux voisins. Une telle hypertrophie de la partie centrale de la tige a aussi un grand retentissement sur les faisceaux libéro-ligneux et sur l'écorce. Nous avons vu plus haut l'allongement considérable éprouvé par les cellules de la zone périmédullaire pm (en A), fig. 218). Les vaisseaux du bois primaire b, déjà différenciés au moment où l’action parasitaire commence à se faire sentir, conservent leur diamètre, et leurs files sont écartées les unes des autres par l'hyper- trophie du parenchyme. A l'extérieur du faisceau, les cellules péricycliques ne constituent plus, comme dans la tige normale, une zone fibreuse continue, mais forment un amas d’une cinquantaine de fibres, souvent même non lignifiées. En dehors de ces fibres, le périderme com- mence à se développer, alors qu'il n'a pas encore apparu dans la tige saine, et il comporte environ six couches de cellules ; il n'en possède que deux ou trois quand les fibres sont lignifiées. On peut donc admettre que ces amas fibreux lignifiés, différenciés de bonne heure, constituent des points résistants, insensibles à l’action cécidogène et l'empêchant même de se manifester plus loin. Et, en effet, en face d'eux, les cellules de l'écorce ne sont pas La GALLES DE TIGES. 285 munies de cloisons radiales et sont fort peu allongées tangentiel- lement. , L'épiderme cloisonne activement ses cellules dont la largeur augmente peu (A, fig. 220); elles deviennent isodiamétriques (45 u) el sinueuses, au lieu d'êtres longues de 100 4 et rectilignes comme dans la tige normale (N, fig. 219). L'amidon est surlout localisé entre les faisceaux libéro-ligneux et dans la région interne de l'écorce. N A FiG. 219 (N). — Épiderme de la tige normale de Potentilla reptans (gr. 150). Fra. 220 (A). — Épiderme de la cécidie de la même plante (gr. 150). En somme, l’action cécidogène développée par la petite larve se manifeste, à partir du centre de la moelle, avec une intensité sensi- blement égale dans toutes les directions et produit un renflement régulier dont l'axe de symétrie coïncide avec celui de la tige. Le rapide cloisonnement des cellules médullaires détermine un appel de matériaux nutritifs et entraîne le fonctionnement actif des assises génératrices internes des faisceaux vers la cavité larvaire. La présence de la larve empêche le plus souvent la lignification des fibres péricycliques, retarde celle des éléments du bois secon- daire et provoque l'apparition hâtive du périderme. Les nombreux cloisonnements que subissent l'écorce et l’épi- derme leur permettent de suivre l'hyperplasie des tissus plus internes. Structure d'une galle âgée. — Vers la fin de l’année, en octobre, les renflements de la tige rampante atteignent facilement 10 à 12 mm. de diamètre transversal et une longueur de 30 à 40 mm. (A3, en E, fig. 208) ; leur surface est de teinte marron et présente de grandes craquelures irrégulières. Ces grosses cécidies sont 286 C. HOUARD. toujours pluriloculaires et proviennent de la fusion de nombreuses petites galles. La figure 211 (A;) représente une section pratiquée dans la région terminale d’une grosse galle, là où il n’y a qu'une seule loge. La cavité larvaire chl y est grande; elle est entourée par le tissu nutritif cn (en A3, fig. 221) que nous avons vu naître dans la galle jeune. Les cellules internes de ce tissu sont maintenant isolées les unes des autres et possèdent un diamètre beaucoup plus grand (60 w); leur noyau hypertrophié x atteint presque 20 « et leur protoplasme abondant contient encore beaucoup de- gouttelettes huileuses !. Les plus externes de ces cellules nourricières sont toujours alignées en files radiales et en relation directe avec celles d’une forte couche protectrice cp. Les cellules scléreuses de cette dernière zone ont environ 40 w de diamètre et des parois épaisses, ponctuées ; elles sont disposées un peu irrégulièrement, mais proviennent en réalité du fonction- nement de l’assise génératrice située entre la cavité larvaire et le faisceau libéro-ligneux ; les cellules externes produites par cetle assise ont perdu leur disposition radiale ; elles se sont isolées les unes des autres et leur abondant protoplasme a servi à épaissir leurs parois qui se sont lignifiées. C’est à l'abri de cette couche scléreuse que la larve se métamorphose. Les cellules scléreuses se relient du reste directement à la partie ligneuse des petits faisceaux d'irrigation formés par les assises génératrices entre les gros faisceaux caulinaires et la cavité larvaire. De longs vaisseaux striés ont pris naissance à la base d’un petit faisceau d'irrigation et sont en contact avec les vaisseaux secondaires du gros faisceau ; puis, au fur et à mesure qu'on se rapproche de la couche scléreuse en agi”, ces vaisseaux lignifiés deviennent de plus en plus courts ; en &” ils ont encore 60 « de longueur et leurs ponctuations sont toujours allongées, mais moins serrées ; en ?”, dans la région de transition, beaucoup d’entre eux possèdent une moitié réticulée, l’autre moitié étant ponctuée; enfin, en ®, au contact de la couche protectrice cp, tous les vaisseaux sont largement ponctués et munis de parois encore assez minces. Le schéma S, (fig. 223) montre comment le petit faisceau d'irrigation &r est relié au gros faisceau libéro-ligneux caulinaire d'une part et, d'autre part, aux couches protectrice et nourricière. GALLES DE TIGES. 287 Comme le représente le dessin A; (fig. 221), le faisceau libéro- FiG. 221 (A3). — Portion de la coupe transversale d'une cécidie âgée de la tige de Potentilla reptans, indiquant les relations qui existent entre la partie ligneuse du faisceau d'irrigation agi” et la couche protectrice cp ; v, #””’, vaisseaux ponctués et striés ; #’, vaisseau intermédiaire — cn, couche nourricière ; A, gouttelette huileuse ; #, noyau — pb, b, bois ; pr, parenchyme ; chl, chambre larvaire, 288 G. HOUARDi ligneux de la tige a acquis une taille considérable dans la cécidie âgée: l'hypertrophie du parenchyme pr a écarté les files de vaisseaux primaires b les unes des autres ; autour des pôles ligneux pb, les cellules se sont allongées et sont devenues rayonnantes. De plus, l’assise génératrice interne a fonctionné très activement dans le faisceau et produit un abondant bois secondaire ne possédant que quelques vaisseaux lignifiés, disposés sans ordre, souvent isolés, en relation latéralement avec la partie ligneuse des petits faisceaux d'irrigation ; le liber secondaire est peu développé. ir Fi@. 222 (S1). — Cécidie jeune : schéma indiquant comment l’assise génératrice agi d'un faisceau (b, bs, L, ls) fonctionne vers la cavité larvaire chl et donne naissance aux couches nourricière en et protectrice cp. FiG. 223 (S2). — Schéma identique pour une cécidie âgée ; irr, faisceau d’irri- gation. La forme générale du faisceau varie beaucoup selon que le pelit amas fibreux péricyclique, situé en face de son pôle libérien, était ou non lignifié au moment où l’action cécidogène s’est fait sentir. Supposons qu'il y ait seulement des éléments péricycliques non lignifiés, en face du faisceau, comme c’est le cas pour /7b (en A3, fig. 211) : le faisceau est alors ovalaire, très étalé et en contact par sa large base avec un périderme bien développé pér, à files radiales comprenant jusqu'à douze cellules arrondies. Dans ce cas, l'écorce située vis-à-vis du faisceau est fortement épaissie, car elle a pu se cloisonner avec activité. Au contraire, si un petit amas lignifié existe en face du pôle libé- rien, et c’est le cas pour 7” (en Az, fig. 211), le faisceau est plus GALLES DE TIGES. 289 long que large ; assez étalé à son pôle ligneux, il est rétréci au pôle opposé et juste de la largeur de l’amas fibreux péricyclique /p. L'écorce contiguë ne s’est pas cloisonnée et a dù se briser par suite de l'hyperplasie latérale : une crevasse longitudinale s, visible à l'extérieur, a ainsi pris naissance. En résumé, la galle âgée est surtout caractérisée par l'hyper- trophie considérable des faisceaux libéro-ligneux, par le grand développement du périderme et par la haute différencialion des faisceaux d'irrigation. 2° Galle du pétiole. Le Cynipide pique le pétiole jeune sur la face supérieure dans le sillon péliolaire et y dépose plusieurs œufs : au bout de quelques \, FiG. 224 (E2). — Aspect de la cécidie du pétiole de Potentilla reptans (gr. 1). Fig. 225 (E3). — Pétiole avec deux cécidies très jeunes (gr. 1). FiG. 226 (Ns). — Coupe transversale schématique du pétiole normal (gr. 15). Fi@. 227 (A3). — Coupe transversale schématique de la cécidie (gr. 15}. flb, flb”, faisceaux hbéro-ligneux ; fp, fibres ; irr, faisceau d'irrigation ; chl, chambre larvaire. jours, apparaît dans ce sillon une série de minimes renflements hémisphériques (E3, fig. 225), présentant une tache brune en leur 19 290 GC. HOUARD. milieu. Plus tard, ces renflements forment de gros chapelets pouvant atteindre 10 mm. de diamètre (E;, fig. 224). Le pétiole normal possède deux ailes assez accentuées sur sa face supérieure (N;, fig. 226) et trois faisceaux libéro-ligneux /7b, ftb”", munis chacun d’un arc de fibres péricycliques lignifiées /p. La section d’une galle âgée a un contour très différent (A;, fig. 227), presque circulaire, ne présentant plus que deux ailes pétiolaires, très réduites, mais elle possède toujours le plan de symétrie du pétiole sain ; au centre se trouvent, en général, plusieurs cavités larvaires chl. Les principales modifications que nous avons rencontrées dans la tige parasitée se voient encore ici: . a) Le lissu compris entre les faisceaux cloisonne activement ses cellules dont les contours primitifs restent cellulosiques et longtemps visibles ; autour de la cavité larvaire, les cellules s'organisent en une couche nutritive et, plus tard, en une couche scléreuse externe ; b) Lesfaisceaux libéro- ligneux des ailes //b” et le faisceau médian //b s’hypertrophient consi - dérablement, par suite du fonctionnement actif de leurs assises généra- trices internes, et pro- duisent encore de pelits faisceaux #77 qui vont irriguer les environs de en : FiG. 228. — Formation de tissu cicatriciel te la cavité larvaire ; autour du sillon larvaire s (gr. 150). c) Les arcs péricy- cliques ne lignifient plus leurs cellules ou fort peu. Enfin, au milieu du tissu hyperplasié situé entre les faisceaux, on voit très souvent le petit sillon longitudinal (s, fig. 228) qu'a parcouru une larve avant de se fixer au point où la galle s’est GALLES DE TIGES. 291 développée; les cellules {6 bordant ce sillon ont dû s’allonger vers la cavité qu'elles ont comblée, puis se sont cloisonnées transversalement plusieurs fois. Nous avons déjà rencontré, au cours de cette étude, maints exemples d’une telle cicatrisation s’effectuant au sein de tissus anormaux. En résumé, sous l’action du Xestophanes potentillæ, la tige rampante du Potentilla reptans présente les modifications sui- vantes : 1° L'action cécidogène se fait sentir sur la moelle uniformément dans toutes les directions et produit un renflement fusiforme ayant un axe de symétrie ; 2% Les cellules médullaires se cloisonnent avec activité et leur membrane se distingue longtemps ; 3 Les faisceaux libéro-ligneux s'hypertrophient el envoient dans la moelle de petits faisceaux d'irrigation qui produisent autour de la cavité larvaire une couche nourricière et une couche protectrice scléreuse ; 4 Les fibres péricycliques se lignifient rarement: le péri- derme apparaît de bonne heure et se développe beaucoup ; 5 L'écorce suit l'hypertrophie de la partie centrale el se crevasse en face des amas péricycliques lignifiés. Hieracium umbellatum L. Cécidie produite par l’'Aulax hieracii Boucné. Les larves de l’Aulax hieracii produisent des galles sur un grand nombre d'espèces du genre ÆHieracium. La cécidie caulisaire de l’'Hieraciuin umbellatuin, que nous étudierons ici, est fusiforme, allongée, multiloculaire et peut atteindre 15 mm. de diamètre transversal. BENERINCK [82], dans son important travail sur les premiers stades du développement des galles de Cynipides, a montré comment S’opérait la ponte des œufs d'Awlazx près du point végétatif, 292 C. HOUARD: au sommet de la jeune tige, etcomment les larves s’établissaient dans de petiles chambres au sein du tissu médullaire hyperplasié (Gallplastem), après avoir quitté la cavité des œufs (Zihühle). Je m'occuperai surtout ici de la production des tissus gallaires durant les premiers stades du développement. Structure de la galle jeune. — Une coupe transversale pratiquée au-dessus de la cavité larvaire, dans une très jeune galle n’ayant encore que 2? mm. de diamètre (E, fig. 229), présente un contour un peu supérieur (A, fig. 231) à celui de la tige normale (N, fig. 230) et montre la cavité des œufs s, assez irrégulière. FiG. 229 (E). — Aspect d'une cécidie très jeune de la tige de l'Épervière (er 4): FiG. 230 (N). — Schéma de la coupe transversale de la tige normale (gr. 15). FiG. 231 (A). — Schéma de la coupe transversale de la cécidie, pratiquée un peu au-dessus de la cavité larvaire (gr. 15). m, moelle ; end, endoderme, tc, tissu cicatriciel ; s, cavité aux œufs. Cette cavité s (en À, fig. 232) est tapissée par de longues cellules rayonnantes {c, renflées, arrondies ou allongées en poils dans leur région proximale lignifiée; toutes ces cellules sont cloisonnées transversalement un grand nombre de fois et peuvent présenter jusqu’à une dizaine de cloisons. D’autres cellules {c”, en contact elles-mêmes avec les cellules médullaires plus externes {c”, présentent une seule cloison ou pas du tout. A la marche du cloi- sonnement, on reconnait là du tissu cicatriciel. Si l’on coupe ensuite transversalement une galle un peu plus âgée que la précédente et ayant 4,3 mm. de diamètre (en E;, à fig. 293), on obtient une section circulaire (A,, fig. 234). La GALLES DE TIGES. 293 cavité des œufs s est très allongée, mais toujours peu élargie ; elle est entourée par le tissu cicatriciel /c, très développé, FiG. 232 (A). — Partie de la coupe représentée par la figure précédente et montrant la production du tissu cicatriciel £e, te”, tc””, autour de la cavité aux œufs s ; /lb, faisceau vasculaire ; pb, pôle ligneux (gr. 150). qui occupe maintenant toute la moelle. Les cellules de ce tissu se sont activement cloisonnées et disposées en longues files rayon- nantes allant depuis la cavité des œufs s jusqu'aux faisceaux libéro-ligneux /7b. Le nombre des petites cellules ainsi formées est considérable, même pour une galle n’ayant encore que quelques millimètres de diamètre, comme celle qui est dessinée en A4, el cinquante à cent fois supérieur au nombre des cellules médullaires de la tige normale. Ces petites cellules {c (en A,, fig. 236) ont presque toutes la même taille et l'espacement des deux cloisons tangentielles qui \ 294 CG: HOUARD. limitent chacunes d'elles dépasse rarement 15 ÿ ; elles contiennent un abondant protoplasme et des noyaux un peu hypertrophiés, ovoides ou sphériques, de 7 y de diamètre. hi! NAN RS INA ANSE \ AAA À, Fic. 233 (En). — Aspect d'une cécidie caulinaire de l'Éperviére, un peu plus âgée que la précédente (gr. 1). FiG. 234 (A4). — Schéma de la coupe transversale médiane de la cécidie : le tissu cicatriciel {ce est sillonné de nombreux faisceaux d'irrigation irr, trr’; flb, faisceau vasculaire ; agi, assise génératrice interne ; end, endoderme ; éc, écorce ; 5, cavité aux œufs (gr. 150). C’est au milieu de ce tissu cicatriciel abondant que la petite larve élablit sa cavité larvaire (en À,, fig. 234) ; les cellules environnantes se gorgent aussitôt de matières de réserve. La nutrition d’un tel tissu est assurée par les faisceaux libéro- ligneux de la tige. Ceux-ci sont devenus très irréguliers dans leur forme et leur orientation ; leur taille a beaucoup augmenté. C’est Passise génératrice interne de ces faisceaux qui fonctionne active- ment dans les espaces interfasciculairês et qui donne naissance à de petits faisceaux d'irrigation ërr; ces derniers contournent la partie ligneuse des gros faisceaux de la tige et se dirigent au travérs du tissu cicatriciel vers la cavité larvaire. Ces petits faisceaux d'irrigation sont du reste très sinueux, parfois ramifiés, et serpentent dans toutes les directions; la coupe transversale de GALLES DE TIGES. 295 la galle en donne alors des sections transversales 5777 aussi bien que des sections longitudinales êr7. Dans les galles très jeunes, ces faisceaux d'irrigation sont composés surtout de longs éléments libériens cellulosiques ; les vaisseaux ligneux, à épaississements serrés et régulièrement espacés, apparaissent seulement dans les galles dont le diamètre atteint 6 à 8 mm. “ (een iAl te Ro EXOT7 À QUE LUTTE RON LT Meier _-—. mou: Cl HU our De ET ATTE ECS a OT L JL Q D << []) 2 Cr 7 es LE ea: ee, TS CS 2 de QY > OA [> 2e un — Rs 1 é a ee 16 RE e x (® ee | (_) ENTÉ Fic. 235 (N4). — Partie de la coupe transversale de la tige normale de l’Éper- vière (gr. 150). Fic. 236 (A1). — Portion de la figure 234 montrant comment l’assise génératrice interne agi produit un faisceau d'irrigation au milieu du tissu cicatriciel te de la cécidie (gr. 150). m, moelle ; pb, b, bois ; pr, parenchyme, fp, fibres péricycliques ; end, endoderme ; éc, écorce ; ép, épiderme. La figure 236 (A,) montre en érr l’assise génératrice libéro-li- gneuse agi commençant à fonctionner au milieu des cellules du tissu cicatriciel {c. 296 C. HOUARD. En F (fig. 237), j'ai représenté la section transversale d’un petit faisceau d'irrigation, cylin- drique, dans lequel le liber / occupe le centre et dont le bois ne possède encore qu'un vaisseau différencié b. Structure de la galle âgée. — Dans la galle âgée, la ca- vité larvaire, un peu agrandie, est entourée des deux couches nourricière et scléreuse que l'on rencontre habituellement dans touteslesgalles produites par les Cynipides. Comme pour la cécidie du Xeslo- 2 . AS | FiG. 237 (F). — Coupe transversale d'un faisceau d'irrigation ; b, bois; L, liber (gr. 150). . phanes potentillæ, ces deux zones sont en relation directe avec FiG. 238. — Fragment de coupe, prise au bord de la cavité larvaire cAl, montrant les relations qui existent entre les cellules de la couche nourricière en et celles de la couche protectrice cp (gr. 150). -chl quelques petits faisceaux irrigateurs. Toutes les cellules nutritives cn (fig. 238) et toutes les cellules protectrices cp ont un diamètre trans- versal de 50 à 55 uw; elles sont disposées en files rayonnantes con- vergeant vers la cavité larvaire chl et provien- nent de cellules primi- tives dont on reconnaît encore très facilement le contour, cellules qui se sont cloisonnées cinq ou six fois au maximum sous l'influence de l’as- sise génératrice des petits faisceaux d’irriga- lion. Souvent, les cellules les plus externes, dérivées d'une même cellule primitive, ont GALLES DE TIGES. 297 fortement épaissi et lignifié leurs parois (en cp) et appartiennent par suite à la zone protectrice, tandis que les plus internes, restées avec des parois minces, se sont bourrées de matières de réserve et font partie de la zone nutritive. En même temps que ces intenses modifications se produisent dans la moelle de la tige, les faisceaux libéro-ligneux s’hypertro- phient considérablement. Les vaisseaux ligneux primaires ne sont plus alignés en files radiales régulières, mais dispersés au milieu du parenchyme très hypertrophié lui-même; l’assise génératrice interne de chaque faisceau a activement fonctionné et son bois secondaire ne s’est pas lignifié, pas plus du reste que les éléments de l'arc fibreux péricyclique. L’assise externe du péricycle est toujours parenchymateuse et contient un réseau laticifère dont les cellules peuvent atteimdre 80 w et plus de diamètre. Enfin, l'écorce parasitée peut acquérir une épaisseur cinq ou six fois supérieure à celle de l'écorce saine. Ses cellules endodermiques, très reconnaissables à leurs plissements dans la tige normale âgée (end, en N;, fig. 235), sont complètement déformées. Les autres cellules plus externes augmentent peu en nombre : elles s’allongent surtout tangentiellement jusqu'à atteindre 210 y (au lieu de 30 v) et prennent quatre ou cinq cloisons radiales ; la membrane des cellules primitives est facile à reconnaître, car elle reste épaisse et cellulo- sique. En dehors, l’'épiderme se cloisonne aussi pour suivre l’augmen- tation en volume de la région centrale de la tige et fournit des cellules un peu plus longues que les cellules normales. En résumé, sous l'influence de l’Awlax hieracii, la tige de l’Iieracium umbellatum présente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène se fait sentir sur la moelle uniformément dans toutes les directions, et produit un renflement fusiforme ayant un axe de symétrie ; 2° La moelle se transforme tout entière en un énorme tissu cicatriciel rayonnant autour de la cavité des œufs; la larve s'établit dans ce tissu ; 3" De petits faisceaux d'irrigation assurent la nutrition du tissu cicatriciel el la production des couches nourricière et protectrice: 298 CG. HOUARD. 4 Les faisceaux libéro-ligneux de la tige sont hypertrophiés et déformées; leur réseau laticifère péricyclique est très déve- loppé ; D° L’écorce épaissie a ses cellules allongées tangentiellement. Hypochœæris radicata l. Cécidie produite par l’Awlax hypochærulis Kierr. J'ai récolté en abondance le 15 juillet 1898, dans le jardin de l'ancien Laboratoire de Wimereux, de beaux échantillons de cette cécidie qui déforme les pédoncules floraux de l’Xypochæris radicata et en arrête le développement. Les plus gros renflements pluriloculaires atteignaient 10 mm. de diamètre et 50 à 60 mm. de long. Structure du pédoncule normal. — Sa section est un polygone irrégulier (N, fig. 240), de 1,5 mm. de diamètre, dont les angles sont saillants et occupés par un peu de collenchyme. L'épiderme ép (en N, fig. 243) comprend des cellules régulières, à cuticule épaisse ; au-dessous de lui, les trois assises de cellules corticales ée con- tiennent de nombreux grains de chlorophylle et sont en relation avec les cellules de l’endoderme end. Le système vasculaire comprend une dizaine de faisceaux libéro- ligneux à gros vaisseaux ligneux primaires b et à formations secon- daires peu développées; en face de chacun des faisceaux, les fibres péricvcliques /p forment de petits amas reliés latéralement à l'anneau fibreux qui entoure le cylindre central. Au centre, la moelle 72 possède des cellules serrées les unes contre les autres, de tailles diverses, les plus grandes atteignant 100 de diamètre ; leur protoplasme est peu abondant et leurs noyaux n’ont guère que 64 de longueur. Structure d'une galle jeune. — Examinons d’abord une jeune cécidie uniloculaire, de 4,3 mm. de diamètre (A, en E, fig. 239) ; sa seclion est plus arrondie que celle de la tige normale. Un examen rapide de la coupe (en A, fig. 241) montre que la ceinture vasculaire comporte une quinzaine de faisceaux libéro-ligneux //b et qu'elle tÙ GALLES DE TIGES. 99 entoure une moclle 72 beaucoup plus développée que dans l'axe sain (3 mm. au lieu de 1 mm.). FrG. 239 (E). — Aspect de la cécidie de la tige de l’Hypochæris radicata (gr. 1). FiG. 240 (N). — Coupe transversale schématique de la tige normale (gr. 15). FiG. 241 (A). — Coupe transversale schématique de la cécidie jeune (gr. 15). FiG. 242 (A1). — Même coupe pour une cécidie âgée (gr. 15). m, moelle ; /{b, faisceau libéro-ligneux : éc, écorce ; irr, cellules irriga- trices ; cn, couche nourricière ; cp, couche protectrice ; chl, chambre larvaire. C'est dans ce tissu médullaire spongieux que la larve à creusé sa cavité chl, bientôt entourée d’une couronne de grosses cellules isodiamétriques cn, de 80 w de diamètre, dont l’ensemble tranche bien sur les cellules claires de la moelle périphérique. On reconnait facilement là une couche nutritive, car les noyaux volumineux » (en À, fig. 244) y atteignent parfois 29 y de diamètre et possèdent 300 C. HOUARD. de beaux nucléoles; de plus, le protoplasme très épais contient de nombreuses gouttelettes huileuses très réfringentes 2 qui lui donnent un aspect réticulé bien caractéristique. FiG. 243 (N). — Partie de la coupe transversale représentée par la fig. 240: m, moelle; pb, b, bs, bois ; /, liber ; fp, fibres péricycliques ; end, endoderme ; éc, - écorce ; ép, épiderme . (gr. 150). FiG. 244 (A). — Détail des cellules irrigatrices irr mettant en rapport le faisceau libéro-li- gneux pb, b avec les cellules de la couche nourricière cn; n, noyau h, gouttelettes d'huile ; »m, moelle ; pm, zone périmédullaire (gr. 150). Pour se rendre compte de la façon dont s’est formé ce tissu nour- ricier, il est nécessaire de pratiquer des coupes transversales dans de très jeunes galles: le diamètre de la moelle s’y montre peu supérieur au diamètre normal et comprend quelques cellules en GALLES DE TIGES. 301 plus. La larve se trouve dans une très petite cavité, à peu près au centre de la moelle. Autour d'elle, les cellules s’allongent radialement, puis se cloisonnent dans une direction perpendiculaire; leur protoplasme devient plus abondant que partout ailleurs et leurs noyaux, toujours ovoides, atteignent 12 « de longueur. Ensuite, le cloisonnement se manifeste de la même façon, mais un peu plus loin ; les matières nutritives s'accumulent dans les cellules, les noyaux deviennent plus volumineux et sphériques: le tissu nourricier est constilué. La présence de ce tissu riche en protoplasme et en réserves nutritives entraîne forcément des modifications dans la structure des faisceaux libéro-ligneux de la tige. Et, en effet, les faisceaux ligneux sont maintenant très élargis dans leur région centrale et leurs pôles ligneux pb (en À, fig. 244) sont écartés les uns des autres par suite de l'allongement tangentiel des cellules de parenchyme qui les séparent. En face de chaque pôle ligneux, les cellules de la zone péri- médullaire pm sont allongées vers le centre de la galle et contiennent de nombreux grains d’amidon. Enfin, plus au centre, les cellules irr de la moelle, comprises entre le tissu nourricier cn et la zone périmédullaire pm", sont très allongées radialement (250 4); leur protoplasme est devenu abondant et leurs noyaux sont intermédiaires comme taille et comme forme entre ceux de la moelle proprement dite (noyaux fusiformes de 6 w de longueur) et ceux du tissu nourricier (noyaux sphériques atteignant 30 » de diamètre). Ces cellules élancées, sveltes, pleines de vie et de sève, contrastent singulièrement avec les cellules polygonales, lourdes et obèses de la couche nourricière. Ce sont de véritables cellules d’irri- gation. En même temps que cette importante modification se produit dans le tissu médullaire, toute la région siluée en dehors des faisceaux ligneux s’hypertrophie ; les cellules corticales, toujours riches en chloroleucites, s’arrondissent et se séparent les unes des autres par de grands méats. Enfin, l'épiderme, qui ne possédait dans la tige normale (fig. 245) que des cellules allongées ayant 14 » de longueur , s'est cloisonné et se montre constitué par des cellules polygonales, irrégulières, isodiamétriques, de 40% de 302 C. HOUARD. largeur (fig. 246) ; ses stomates ont peu augmenté leur taille, mais ils sont très écartés les uns des autres. FiG. 245 (N). — Épiderme de la tige normale de l’Hypochæris radicata (gr. 150). Fi&. 246 (A). — Épiderme de la cécidie caulinaire de la même plante (gr. 150). Structure d'une galle âgée. — La section transversale d’une galle recueillie vers la fin de l’année, en novembre, est sensible- ment circulaire et possède 8 mm. de diamètre (A, fig. 242). L’écorce y est hypertrophiée, mais moins cependant que dans la moelle ; en face des gros faisceaux libéro-ligneux, ses cellules les plus internes sont transformées en de longs poils contournés (éc, en A, fig. 247). Les faisceaux libéro-ligneux sont aussi très allongés et leurs fibres péricycliques /p sont grandes, polygonales, à parois minces lignifiées. Le liber / est peu développé. Les vaisseaux du bois primaire b et du bois secondaire bs ne sont plus arrondis, comme dans la tige normale où ils avaient un diamètre moyen de 27 u ; ils s’'allongent, arrivent parfois à 120 4 et leurs files sont souvent dissociées par l'hypertrophie du parenchyme. Enfin, autour des pôles ligneux pb, les cellules peuvent atteindre 180 & de longueur au lieu des 10 y qu’elles ont normalement. C’est la région médullaire située autour de la cavité larvaire qui présente la plus grande hypertrophie. Dans cette région est apparu un large anneau cp de cellules à parois épaisses et cellulosiques. Ces cellules sont serrées les unes contre les autres, très allongées radialement, et ne laissent entre elles que de minuscules GALLES DE TIGES. 303 méats ; toutes se mulliplient activement et présentent des cloisons tangentielles. Celles du centre sont en relation directe avec les cellules nourricières; ce sont aussi les plus longues et les plus cloisonnées, car elles atteignent parfois 500 « et peuvent posséder A il ]\ | À D FiG. 247 (A1). — Partie de la coupe représentée par la figure 242: on y voit le cloisonnement très actif qui se manifeste dans les couches nourricière cn et protectrice cp, ainsi que le grand allongement radial du faisceau libéro- ligneux (pb, b, bs, l) et de l'écorce (éc”, éc) ; fp, fibres péricycliques ; ép, épiderme ; chl, chambre larvaire (gr. 60). jusqu’à 9 cloisons à peu près parallèles. Enfin, les cellules de la couche nourricière €x qui entourent la cavité larvaire sont encore riches en matières nutrilives, en protoplasme, et possèdent de gros 304 C. HOUARD. noyaux ainsi que des parois sinueuses : elles servent à l'entretien de la larve pendant l'hiver. Les cellules médullaires présentent de moins en moins de cloisons au fur et à mesure qu'on se rapproche des pointes ligneuses des faisceaux ; là, elles sont simplement allongées et par suite peu modifiées. Plus tard, toutes les cellules de la couche protectrice cp lignifient leurs parois, sans jamais cependant les épaissir beaucoup, et forment autour de la cavité larvaire une coque scléreuse peu résistante. Il faut bien remarquer que la production du tissu nourricier et de la couche protectrice, ainsi que leur irrigation, ne se font pas ici comme dans les autres tiges déformées par des Aulax. Nous avons vu, en effet, dans les cécidies du Potentilla reptans et de l'Hieracium umbellatum, les assises génératrices des faisceaux fonctionner très facilement en dehors d'eux et produire de petits faisceaux d'irrigation qui prennent une part aclive à la formation des couches nutritive et protectrice. Ici, dans le pédoncule floral de l’'Hypochæris, les formations secondaires sont peu abondantes, même à l’intérieur des faisceaux libéro-ligneux, et c'est tout à fait par exception, dans les galles très volumi- neuses, que l’on rencontre un ou deux petits faisceaux d'irrigation ; la nutrition des couches médullaires voisines de la larve est en général assurée par l'intermédiaire de longues cellules irrigatrices, situées en face des faisceaux. En résumé, sous l’action de l’Aulax hypochæridis, la tige de l'Hypochæris radicata présente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène se fait sentir sur la moelle avec la même intensité dans toutes les directions et détermine l'appa- rilion d'un renflement fusiforme ayant un àxe de symétrie ; 2° Les cellules médullaires se difjérencient de bonne heure autour de la cavilé larvaire en une couche nourricière, puis, plus tard, en une couche scléreuse externe ; 3 La nutrition de ces tissus est assurée par de longues cellules irrigatrices situées en face des faisceaux ; 4 Les faisceaux libéro-ligneux sont fortement hypertrophies ; les files ligneuses sont étirées et dissociées ; GALLES DE TIGES. 305 5° L'écorce est très épaissie ; ses cellules internes sont allongées et contourneées. Atriplex Halimus L. Cécidie produite par le Séefaniella Trinacrie STEFANI. En Sicile, en Algérie et dans le Midi de la France, ce Diptère produit de petits renflements fusiformes sur les tiges, les nervures médianes des feuilles et les bractées florales de l’Atriplex Halimus. J'étudierai ici avec quelques détails la galle des tiges que j'ai recueillie en grande abondance à Saint-Denis-du-Sig (Algérie). Les cécidies des tiges consistent en renflements fusiformes, assez réguliers quand ils ne contiennent qu'une larve (en E, fig. 248), et atteignent 5 à 7 mm. de diamètre, au contraire, si elles sont pluriloculaires (en E;, fig. 252), elles peuvent avoir 15 à 20 mm. de diamètre, mais elles sont plus irrégulières. Chaque larve blanche se creuse dans le tissu gallaire une cavité courbe bouchée par l’épiderme qu'elle respecte, puis se métamorphose dans sa loge. Examinons successivement les galles uniloculaires, les galles pluriloculaires, puis les déformations de l’infloresence. 1° Séructure d'une cécidie uniloculaire.—Une coupe transversale pratiquée dans la cécidie au niveau de la cavité larvaire (en À, fig.251) a un contour beaucoup plus arrondi que la coupe de la tige normale (en N, fig. 250) ; son diamètre est de 5 mm. au lieu de 1,3. La surface de la galle est couverte de poils abondants et l’épiderme ép (en A, fig. 251) possède des cellules polygonales irrégulières, bien plus larges que les cellules normales (34 4 au lieu de 104), mais plus courtes. L’écorce présente, de place en place, des amas de collenchyme co beaucoup plus étalés que dans la tige saine, puis de grandes cellules corticales irréguliéres éc, allongées un peu radia- lement et pouvant atteindre de deux à quatre fois la taille ordinaire. Les formations de l'assise génératrice péricyclique surnu- méraire agp sont les plus régulières, car elles constituent, en dedans de l'écorce, une couche presque circulaire d’un diamètre 20 306 C. HOUARD. cinq fois supérieur au diamètre normal. Par contre, l'épaisseur de cet anneau est beaucoup plus petite que dans la tige non parasitée et, au lieu d'y trouver de huit à dix assises de parenchyme secondaire, Fi. 248 (E). — Aspect de la cécidie caulinaire de l’Atriplez Halimus (gr. 1). Fi. 249 (L). — Coupe longitudinale de la mème cécidie (gr. 1). FiG. 250 (N). — Schéma de la coupe transversale de la tige normale (gr. 15). FiG. 251 (A). — Schéma de la sonne à transversale médiane d’une cécidie wnilo- culaire (gr. 15). m, moelle; ftb, flb’, faisceaux libéro-ligneux ; b, bois; agp, bsp, lsp, formations secondaires péricycliques ; pr, parenchyme ; co, collenchyme ; éc, écorce ; ép, épiderme ; irr, cellules irrigatrices ; cg, cr, cp, cn, couches génératrice, radiale, protectrice et nourricière ; chl, chambre larvaire. il n’est pas rare d'en rencontrer une ou deux. Le fonctionnement de l’assise génératrice péricyclique est un peu actif, en face des gros faisceaux primaires f{b, et tous les éléments produits sont à parois minces, faiblement lignifiées. De plus, les faisceaux libéro- ligneux primaires //b et les faisceaux secondaires péricycliques flb” sont très écartés les uns des autres et séparés par un paren- chyme régulier pr formé de cellules polygonales à parois minces, peu lignifiées. C'est autour de la cavité larvaire que les phénomènes les GALLES DE TIGES. 307 plus intéressants se passent. Les gros faisceaux primaires /7b sont élargis en éventail vers le centre de la galle: leurs vaisseaux de bois primaire b sont écartés les uns des autres et en rapport, par de longues cellules d'irrigation ir, avec d’autres cellules cg qui entourent la cavité larvaire ch7 et qui sont allongées tangentiel- lement. Les cellules de cette première zone ont des parois minces, d'abord cellulosiques, plus tard lignifiées légèrement et finement ponctuées ; elles sont en active voie de cloisonnement, tant que la larve ne se métamorphose pas, et produisent des files cellulaires radiales qui s'ajoutent aux cellules des assises plus internes: c’est la couche génératrice cg. On trouve, en se rapprochant de la cavité larvaire, une deuxième zone de longues cellules disposées en files radiales, atteignant 80 à 100 y de longueur : c’est la couche radiale cr. Ses cellules sont serrées les unes contre les autres et plus étroites à leur extrémité centrale ; leurs parois sont minces et ponctuées et elles se lignifient quand les cellules ont atteint leur plus grande taille. Plus au centre, se trouve une {froisième zone composée cette fois de cellules courtes, isodiamétriques, de 25 y de diamètre au maxi- mum, à parois épaisses de 4 u, fortement lignifiées et ponctuées : c'est une couche protectrice cp ou scléreuse. Chaque cellule de cette zone contient une grosse mâcle d’oxalate de calcium, comme les cellules des couches précédentes. Enfin, en dedans de cet anneau scléreux, une quatrième zone de petites cellules de 40 à 50 v de diamètre, à parois minces et non sclérifiées, borde la cavité larvaire cAl: c'est la couche nutritive cn dont toutes les cellules contiennent un protoplasme abondant qui sert de nourriture à la larve. En somme, autour de la chambre larvaire, on distingue très bien les quatre couches suivantes: couche nutritive en, couche protectrice cp, couche radiale er, couche génératrice cg. Les trois premières zones tirent leur origine de la couche généra- trice cg: les cellules scléreuses de la troisième zone, par exemple, ne sont autres que les cellules radiales les plus internes ayant épaissi et lignifié leurs parois. C’est dans la couche de cellules aplaties cg que débute le cloi- sonnement, et l’activité qui se manifeste à ce niveau explique pourquoi les gros faisceaux libéro-ligneux primaires et même beaucoup de faisceaux secondaires irriguent toule cette région. 308 C. HOUARD. Le même phénomène nous a du reste été présenté par la galle de l’'Hypochæœris radicata ; dans celte cécidie, le cloisonnement était beaucoup plus actif qu'ici, mais, par contre, les cellules scléreuses n'épaississaient pas autant leurs parois. En résumé, dans le cas d’une galle uniloculaire, c’est surtout la partie périphérique de la moelle qui subit l’action cécidogène et qui s'hyperplasie. 2 Structure d'une cécidie pluriloculaire. — Quand plusieurs larves occupent la moelle de la tige, l’hyperplasie est beaucoup plus forte et la galle atteint 10 mm. de diamètre (en E;, fig. 252). Autour de chaque cavité larvaire, le tissu médullaire 72 (en AÀ,, fig. 253) se différencie en couches nutritive, protectrice et génératrice comme il à été dit plus haut. La nutrition de ces nouveaux tissus FiG. 252 (F4). — Aspect d'une cécidie caulinaire âgée de l’Atripleæ Halimus (gr. 1). FiG. 253 (A1). — Schéma de la coupe transversale médiane d'une cécidie multi- loculaire : l'action parasitaire s'étend jusqu’à l'écorce interne éci (gr. 15). Les lettres ont la même signification que dans la figure précédente. est assurée par les faisceaux libéro-ligneux les plus proches, grâce à de longues cellules d'irrigation #7 disposées en éventail à la partie interne des faisceaux ; ces cellules contiennent de nombreuses mâcles. GALLES DE TIGES. 309 L'écorce est surtout influencée par l’action parasitaire. Elle devient très épaisse et comprend deux couches bien nettes, l’une externe restée mince, l’autre interne très développée. L'écorce externe éce est composée de petites cellules collenchymateuses tandisque l'écorce interne éci a allongé radialement ses cellules cr” et les a transformées en de longs poils contournés, serrés les uns contre les autres, attei- gnant parfois 500 v, c’est-à-dire un demi-millimètre. Les cellules les plus internes, proches des cellules endodermiques, sont modifiées comme les autres et contiennent de nombreuses mâcles; leurs noyaux sont volumineux (30 y); leurs parois, munies de quelques petites ponctuations irrégulières, se lignifient quand la galle est un peu âgée. C’est suivant la ligne de séparation des deux couches corticales, en cg”, que les cellules s’allongent, puis se cloisonnent perpendiculairement : les zones eg” et cr” sont ainsi les homologues des zones cg et cr qui prennent naissance dans le tissu médullaire. Il est intéressant de constater, dans le cas de la galle multilocu- laire, que la présence de quatre cavités larvaires au sein de la moelle se traduit par une hyperplasie très accusée des tissus situés en dehors du cylindre central; l’action cécidogène, plus puissante que dans la galle uniloculaire, a agi à une distance beaucoup plus grande. 3° Structure d'une galle de l’inflorescence. — Dans ce cas, la cécidie se développe presque toujours latéralement et porte à sa surface des fleurs ou des fruits; elle est uniloculaire le plus souvent. En coupe transversale, le cylindre central se montre peu modifié: la cavité larvaire occupe presque toute la moelle et est enserrée par les faisceaux libéro-ligneux qui n’ont pas besoin de s'étaler ni de s’allonger pour irriguer le tissu nourricier. Toute l'action parasitaire se reporte alors sur l'écorce dont les cellules externes, comme les cellules internes, s’allongent radialement ; celles avoisinant le cylindre central subissent l'hypertrophie la plus forte puisqu'elles sont moins éloignées du parasite que les autres. En résumé, sous l'influence du Stefaniella Trinacriæ, la tige de l’Afripler Halimus présente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène se fait sentir également dans toutes les 310 C. HOUARD. directions et détermine l'apparition d'un renflement qui possède un axe de symétrie ; 20 Cette action est d'autant plus intense que le nombre des parasiles est plus grand ; l'hyperplasie se produit à la périphérie de la moelle pour une cécidie uniloculaire et s'étend à l'écorce quand elle est pluriloculaire ; 3° Autour de chaque cavité larvaire, le tissu médullaire, irriqué directement par les faisceaux libéro-ligneux, se diffé- rencie en une couche nourricière et une couche scléreuse. Eryngium campestre L. Cécidie produite par le Zasioptera eryngii VALLoT. En 1828, VALLor a signalé les déformations que le ZLasioptera eryngii produit sur les tiges et les pétioles du Panicaut champêtre. Les renflements déterminés par ce diptère sont pluriloculaires en général et particulièrement gros sur les pétioles des feuilles où ils peuvent atteindre 25 à 30 mm. de diamétre. Les larves orangées qui vivent dans les petites loges s'y métamorphosent, mais auparavant creusent dans le tissu gallaire une galerie irrégulière séparée de l’extérieur par l’épiderme respecté. Cette cécidie était très abondante en juillet 1902 aux environs du Laboratoire de Biologie végétale de Fontainebleau. Examinons successivement les galles de la tige, des rameaux et du pétiole. 1° Galle de la tige. Structure de la tige normale. — Elle est cylindrique et a 6 mm. de diamètre (N;, fig. 255 et fig. 257). Sa moelle #2 est très développée et entourée par un cercle de faisceaux libéro- ligneux /7b de tailles variées, ayant tous des vaisseaux ligneux à très grande section (50 y), arrondis et peu serrês les uns contre les autres. Les faisceaux libéro-ligneux sont réunis par du tissu secon- GALLES DE TIGES. 311 daire et chacun d’eux est entouré par les cellules lignifiées de la zone périmédullaire pm. L'écorce éc comprend de place en place des amas de collenchyme séparés par un tissu lacuneux c/ dont les cellules sont bourrées de grains de chlorophylle ; ce sont les bandes de ce tissu vert qui donnent à la tige son aspect strié. Les cellules épidermiques sont isodiamétriques en coupe transversale. Enfin, des canaux N, FiG. 254 (E). — Aspect des diverses cécidies caulinaires du Panicaut (gr. 1). FiG. 255 (N1). — Coupe transversale schématique du rameau principal normal de la même plante (gr. 15). FiG. 256 (A1). — Coupe transversale schématique de sa cécidie (gr. 15). m, moelle ; lb, flb”, flb””, faisceaux vasculaires ; pm, zone périmédullaire lignifiée ; éc, écorce ; cs, cs”, canal sécréteur ; cl, tissu chlorophyllien C0, collenchyme ; chl, chambre larvaire ; s, s”, sillon larvaire. sécréteurs cs de grande taille (50 à 60%) existent en face des faisceaux dans la moelle et dans l'écorce ; de plus petits cs” (fig. 257) s’observent au voisinage du liber. 312 C. HOUARD. Struclure de la galle de la tige. — La galle que j'ai étudiée est uniloculaire et forme sur le côté de la tige (A,, en E, fig. 254) une petite saillie latérale produite par la position un peu excentrique de la cavité larvaire. Le plus grand diamètre de la section atteint 10 mm. Dans la région de la coupe située à l’opposé du parasite, la structure de la tige est peu modifiée et la plupart de ses tissus sont simplement hypertrophiés. Dans l’autre partie de la tige, la larve du ZLasioptera occupe une cavité irrégulière ch! (en A,, fig. 256), de 150 4 de longueur sur 70 y de largeur, et sa présence amène de nombreuses modifications dans l'écorce, dans l’anneau vasculaire et dans la moelle. L'écorce éc possède une épaisseur double de l'écorce normale. Elle est limitée, à l'extérieur, par un épiderme qui a considéra- blement élargi ses cellules (75 au lieu de 25 u) afin de suivre l'accroissement des tissus internes. Les cellules collenchymateuses co de l'écorce externe se sont elles-mêmes allongées tan- gentiellement (jusqu'à 250 z), sans accroître ni leur épaisseur ni leur diamètre transversal, et elles se sont divisées un grand nombre de fois par des cloisons radiales. Quant au tissu chlorophyllien c7 il est encore très développé, mais moins lacuneux. Enfin, les cellules les plus internes de l'écorce sont très irrégulières. Un certain désordre s’est produit dans les faisceaux libéro- ligneux //b”, flb7” qui avoisinent la cavité larvaire; ils sont modifiés en taille, en orientation et en espacement. Cette altération provient d'un diverticule s” de la chambre larvaire ch, dirigé à peu près suivant un rayon, qui traverse l’anneau libéro-ligneux et vient aboutir à une grande fente s, située contre la partie libérienne d’un gros faisceau raccourci f/b”. Autour de cette fente s (en À;, fig. 258), les cellules se sont allongées vers sa cavité et l'ont réduite ; puis elles se sont cloisonnées transversalement et ont produit ainsi un tissu cicatriciel abondant {c dont les cellules centrales sont lignifiées. Le développement pris par ce tissu cica- triciel a refoulé l’assise génératrice libéro-ligneuse vers la moelle et l'a incurvée. Il en est résulté pour le gros faisceau libéro-ligneux agi des formations secondaires peu développées et pressées les unes contre les autres; ses gros vaisseaux de bois primaire b, mb sont devenus polyédriques par compression. La fente s” est presque horizontale puisqu'elle est contenue GALLES DE TIGES. 313 tout entière dans deux ou trois coupes transversales rapprochées ; FiG. 257 (N1). — Partie de la coupe transversale normale représentée par la figure 25 : m», moelle ; #t, méat; pm, zone périmédullaire ; pb, b, mb, bs, bois; agi, assise génératrice interne ; {s, {, liber; cs, cs’, canal sécréteur (gr. 150). assez large à l’origine, elle a été peu à peu comblée par un cloi- sonnement très actif effectué dans les cellules des diverses couches qu'elle traverse et qui a produit du tissu cicatriciel. L'origine de la fente s au bord de l'anneau vasculaire est assez facile à trouver. Toutes les coupes pratiquées au-dessus de la cavité larvaire, dans la région qui la sépare du point d'insertion des rayons de l’ombelle, con- tiennent cette fente : elle repré- sente donc le trajet suivi dans la tige par la jeune larve. Celle-ci, éclose à l’aisselle des rayons de l'inflorescence, a voyagé dans la tige un certain temps, puis a traversé l'anneau vasculaire pour s'établir enfin dans la moelle. Il est bon de noter encore, en outre des modifications qui ont été signalées plus haut dans la tige, que les canaux sécréteurs médullaires ou corticaux, voisins de la cavité larvaire ou de la fente s, se sont peu développés ; leurs cellules sécrétrices, celoi- sonnées une ou plusieurs fois, les ont obstruës presque complè- tement. Deux canaux sécréteurs es” ainsi déformés sont visibles sur la figure 258. Enfin, la moelle, qui possède dans la tige normale des cellules arrondies, peu serrées les unes contre les autres et à grands méats A) sed ï { Res à 1e ve ®, è ‘ / 1 LL NY se \ D ù [I L ? à 0 (7 () D h 4h, or UY ue [] (1) r, [? 56 su “eu ne [} 1 1e! 4 Ne \) oi # ÉRÉT LS at CR D + ARE D) RARE TS ©, SONT ot Fr CEE VS er se, ‘æ res" A + CO FiG. 258 (A4). — Portion de la cécidie caulinaire du Panicaut correspondant à la figure 257 : environs du sillon larvaire s, s” et tissu cicatriciel £e (gr. 150). GALLES DE TIGES. 315 intercellulaires (22, rt, en N,, fig. 257), est formée, aux environs de la cavité larvaire (#, en A4, fig. 258), de grandes cellules irréguliè- rement arrondies, cloisonnées dans tous les sens, pressées les unes contre les autres et atteignant un diamètre de 110 y (au lieu de 60 w). Par l'hypertrophie et la multiplication de ses éléments, elle fournit ainsi la plus grande partie des tissus gallaires, en même temps qu'une nourriture abondante pour la larve 20 Galle du rameau axial. Structure du rameau axial normal. — La section transversale d'un rameau axial (en N, fig. 259) a la forme d’un triangle curviligne isocèle et présente par suite un plan de symétrie. Son diamèêtre est de 3 mm. environ. L'écorce éc est un peu moins développée que dans la tige normale et possède encore de nombreux amas de collenchyme, séparés par du tissu chlorophyllien. Les faisceaux libéro-ligneux //b sont allongés et isolés par des rayons médullaires peu lignifiès. Les vaisseaux du bois primaire D (en N), fig. 261) et du métaxylème #b sont presque tous de même taille (25 w environ de diamètre), arrondis et disposés sans ordre. Dans chaque faisceau l’assise génératrice interne fonctionne et produit des tissus secondaires bs et {s. Enfin, les canaux sécréteurs cs, cs” sont très réguliers, tous assez rapprochés du faisceau qu'ils entourent, et possèdent une grande section. Struclure du rameau axial anormal. — L'aspect du rameau axial parasité est tout autre. Le rameau est resté court (20 mm. au lieu de 60 mm.) et s’est épaissi en une grosse masse trapue ayant presque 10 mm. de diamètre (A,, en E, fig. 254). La section a un contour à peu près circulaire (A2, fig. 260) et possède encore le plan de symétrie du rameau normal. Au centre, la moelle s’est considérablement agrandie. Ses cellules hypertrophiées sont presque toutes cloisonnées et leur abondant protoplasme contient un gros noyau; dans le tissu sain elles n’ont qu'un protoplasme peu épais et un petit noyau. C'est au milieu de ces cellules que les larves du Lasioptera ont creusé leurs grandes et 316 C. HOUARD. irrégulières cavités ch! ; on en aperçoit toujours plusieurs sur une même coupe transversale. FiG. 259 (N2). — Coupe transversale schématique d’un rameau axial normal de Panicaut (gr. 15). F1G. 269 (A2). — Coupe correspondante de la cécidie (gr. 15). m, moelle ; lb, flb”, flb””, faisceaux vasculaires ; éc, écorce ; es, cs”, cs”, canaux sécréteurs ; cl, chambre larvaire ; s, sillon larvaire. De place en place dans la moelle, et souvent aussi près des fais- ceaux libéro-ligneux, se voient les petites galeries $ que ces mêmes larves ont dû creuser (parallèlement à l’axe du rameau) pour gagner le niveau où elles ont établi leur cavité définitive. Un abondant GALLES DE TIGES. 317 tissu de cicatrisation s’est formé autour de ces galeries abandonnées et les a obstruées en partie. L'énorme hypertrophie du rameau anormal a dissocié l'anneau vasculaire. Les faisceaux libéro-ligneux y sont beaucoup plus ECS + o larges. Leurs vaisseaux de bois primaire se sont isolés les uns des autres sans modifier leur diamètre ; leurs assises génératrices internes = F AREA ont très peu fonctionné ; ee … leurs libers primaires sont CRE ET EE étalés au lieu de former SU parue si è des amas très nets en demi- RCA TE re: cercle. AT mb Certains faisceaux sont com- ones D , plètement déformés (comme HE So fIb") et ne possèdent plus que quelques vaisseaux de bois ; sus) “ls d'autres perdent leur orien- CES ny tation radiale (comme /7b”’). Re ee Enfin, l’hyperplasie du pa- renchyme médullaire et du parenchyme cortical éloigne les canaux sécréteurs de leurs faisceaux libéro-ligneux correspondants. La figure262(A:) représente, Le 2 au même grossissement que la F1G. 261 (N2). — Partie de la coupe trans- versale normale représentée par la figure 259 : pm, zone périmédullaire ; pb, b, mb, bs, bois; [s, [, Hiber; cs, cs’, canaux sécréteurs (gr. 150). figure précédente, un faisceau libéro-ligneux anormal ayant conservé l'orientation radiale. Le canal sécréteur médullaire cs qui lui correspondest écarté de son pôle ligneux pb de 550 uw, alors que dans le rameau normal il est cinq fois moins éloigné (100 w) ; de plus il est arrêté dans son développement et en partie atrophié. La même chose a lieu pour le canal sécréteur cortical es” qui est beaucoup C. HOUARD. 318 : ] RÉ .. da Ca RAR RE IST) # ER PR OATEORN ES " LION RER AECRGAUS AR RE CRT | JE A eo, À a ; NN SR SALE au : BA:28220"0 | RARE RO ï va Ve \| ANT UNS cs, cs’ de la coupe transversale du rameau axial anormal de Panicaut ; pb, b, bois (gr. 150). CS LAT72 à 4 a 2 e. © © & à 2 © Ep É 2. SÉ © TD = o © is HA | ee Z\ 24 HAE Où LL LEA EL à I, Se 7 Fic. 299 (F4), 300 (F2), 301 (F3), 302 (F5), 303 (M1). — Partie gauche de la coupe transversale de la cécidie du Sédum, représentée par la figure 294 (gr. 150). GALLES DE TIGES. 339 avec beaucoup plus d’activité que l’autre et produit du tissu secon- daire bs, {s qui a enveloppé les vaisseaux déformés, aplatis ou à demi résorbés, du bois primaire b. Enfin, le plus souvent, l'hypertrophie isole de toutes petites portions de l’anneau vasculaire, réduites parfois à un seul faisceau lbéro-ligneux élémentaire, comme celles qui ont été représentées en F, et F, dans les figures 301 et 302. On y voit alors l’assise génératrice fonctionner activement à droite et à gauche de chaque petit faisceau isolé et constituer un amas à peu près concentrique de tissus secondaires. Les petits faisceaux ainsi formés sont entourés de cellules ct plus grandes que les autres et qui sont en relation avec les cellules péricycliques délimitant le cylindre central de l'écorce ; ces cellules contiennent du tanin. Dans la galle âgée, il se produit, après la sortie de l'adulte, une couche de liège cicatriciel autour de la cavité larvaire. En résumé, sous l'influence du Nanophyes telephii, la tige du Sedum Telephium présente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène se fait d'abord sentir sur la moelle qui s’hypertrophie dans toutes les directions et produit un renfite- ment fusiforme ayant un axe de symétrie ; 2" L'augmentation du volume de la moelle entraîne la disso- ciation de l'anneau libéro-ligneux en fragments de tailles variées que le fonctionnement des assises génératrices internes tend à transformer en faisceaux cylindriques ; 3° Les cellules de la moelle se cloisonnent avec activité et leur contour primitif reste distinct ; 4 Les cellules à tanin sont plus nombreuses. Atriplex Halimus L. Cécidie produite par le Coleophora Stefanii JoAnNis. La chenille de ce Lépidoptère, pénétrant dans la moelle des jeunes rameaux, y produit des renflements de 30 mm. de long sur 8 à 340 C. HOUARD. 10 mm. de diamètre (E, fig. 304) ; la cavité larvaire est allongée et spacieuse ; les parois sont épaisses (L, fig. 305). Mes échantillons proviennent de Saint-Denis-du-Sig (Algérie) où la cécidie est commune. Structure de la tige normale. — La section transversale de la tige jeune est circulaire (N, fig. 306) et possède 1,4 mm. de diamètre. L'épiderme ép (N, fig. 313) est formé de cellules isodiamétriques, à parois épaisses et cellulosiques, portant de place en place de longs poils renflés. Sous cet épiderme, l'écorce débute par une ou plusieurs assises de collenchyme co pour se continuer par des cellules irrégulières de forme, riches en mâcles d'oxalate de cal- cium 0%. à Autour du cylindre central, le péricycle est formé par une couche presque continue de deux ou trois assises de grosses fibres à parois épaisses /p et par des cellules allongées radialement p, lignifiées en partie, cloisonnées plusieurs fois dans leur région interne. Plus au centre se trouve un anneau continu de formations secondaires : l’assise génératrice surnuméraire agp, née ici dans le péricyele, comme chez la plupart des Chénopodiacées, a produit un cercle de faisceaux libéro-ligneux secondaires //b” (composés de bois secondaire péricyclique bsp et de liber secondaire péricyclique {sp}, Séparës par du parenchyme ligneux bsp” également secondaire qui s’épaissit et les englobe. Au centre, sont les faisceaux libéro-ligneux primaires chez lesquels l’assise génératrice normale fonctionne peu de temps. Structure d'une galle jeune. — Sa section n’a que 3 mm. de diamètre (A, fig. 307); l'épaisseur de la paroi est de 0, 5 mm. seulement, car la larve s’est creusé une grande cavité chl aux dépens de la moelle et des premiers cercles de faisceaux libéro- ligneux. L'épiderme de la cécidie ép est couvert de longs poils serrés les uns contre les autres et beaucoup plus abondants que sur la tige saine. Vues de face (en À, fig. 312), les cellules épidermiques sont irrégulières, presque isodiamétriques et non allongées comme les cellules normales ; leurs stomates sont nombreux et bien déve- loppés. | H'y a peu de chose à signaler pour les cellules corticales, sinon GALLES DE TIGES. 341 que leur taille est un peu plus grande et leurs parois plus épaisses. Les mâcles y sont abondantes. Fic. 304 (E). — Aspect extérieur de la lépidoptérocécidie de la tige de l’Afriplex Halimus (gr. 1). Fic. 305 (L). — Coupe longitudinale de la même cécidie (gr. 1). FiG. 306-(N). — Coupe transversale schématique de la tige normale (gr. 15). FiG. 307 (A). — Coupe. correspondante de la cécidie jeune (gr. 15). Fic. 308 (A4). — Coupe transversale schématique d’une cécidie âgée (gr. 15). m, moelle ; f{b, flb”, flb7, flb7”, faisceaux libéro-ligneux normaux et désorientés ; agi, assise génératrice interne ; agp, bsp”, formations secon- daires péricycliques ; p, péricycle ; ép, épiderme ; chl, chambre larvaire ; z, larve. On distingue nettement autour du cylindre central la zone péri- cyclique p (en A, fig. 307) dont les cellules sont irrégulières et lignifiées. En dedans de ces cellules, l’assise génératrice péricy- 342 C. HOUARD. clique n’a encore fonctionné que de place en place (en agp, par exemple) et pris des cloisons sinueuses; c’est surtout entre les faisceaux libéro-ligneux qu'elle agit le plus activement. Les faisceaux libéro-ligneux n'’offrent plus que rarement (/7b”, par exemple) l'orientation radiale qu'ils possédaient dans la tige normale ; la plupart ont pris une disposition tangentielle (exemple [tb"”); quelques-uns même sont renversés et possèdent leur liber en dedans du bois (comme //b”). Beaucoup de ces faisceaux ont leurs files ligneuses espacées. Enfin, ils sont eux-mêmes LS / ep 5e 24, Not Fi. 309 (F), 310 (F1). — Partie de la coupe transversale représentée par la figure 307, représentant deux faisceaux libéro-ligneux désorientés: agi, bs, Is, formations secondaires à l’intérieur du faisceau ; agi, bs”, ls”, formations . secondaires en dehors du faisceau, vers la cavité larvaire chl; agp, assise génératrice péricyclique ; éc, écorce ; ép, épiderme (gr. 150). très éloignés les uns des autres et séparés par un tissu cellulosique formé de petites cellules disposées en files radiales, aboutissant à la cavité larvaire. GALLES DE TIGES. 343 Les figures 309 et 310 représentent deux faisceaux libéro-ligneux voisins, déjà fortemement modifiés. Celui de gauche (F) ne comprend que trois vaisseaux de bois à parois épaisses et lignifiées. En face de ces vaisseaux, l’assise génératrice agé produit des files tangentielles de bois secondaire bs non encore lignifié et de liber secondaire {s. Puis cette assise fonctionne du côté de la cavité larvaire (en agi’) d’une façon plus irrégulière : elle y produit encore des tissus secondaires bs” et /s”, mais elle provoque en outre le cloisonnement des longues cellules radiales bordant la cavité larvaire et les transforme en une quantité énorme de petites cellules, riches en protoplasme, qui servent à la nourriture de la larve. Fic. 311 (N). — Épiderme de la tige normale de l’Atriplex Halimus (gr. 150). Fi. 312 (A). — Épiderme de la cécidie de la même plante (gr. 150). Le faisceau représenté en F, a été, au contraire, peu dévié de sa direction normale. Ses vaisseaux ligneux sont écartés les uns des autres. Son assise génératrice interne fonctionne activement sur la gauche du faisceau et produit du bois secondaire non lignifié et de petits amas libériens ; elle contourne ensuite le faisceau (en agi’) et l’enferme presque en entier. Structure d'une galle âgée. — Ce sont des phénomènes iden- tiques, mais plus exagérés encore, que l’on rencontre dans la galle plus âgée, lorsque le parasite est sur le point d’éclore. La cécidie a une paroi de plus d’un millimètre d'épaisseur (A,, fig. 308). Cette grande épaisseur tient d’abord à la taille des fibres péricycliques et 344 C. HOUARD. des cellules péricycliques lignifiées p. Elle tient ensuite à ce que, ee NUE D de x STÈS. Sue HA RER TA SRE Re (3 o) () di Æ) ue \X Ne ik S S ( RS Le CESR Sa ‘= T 2e à SES DE 04 EU (] EX RIT Q K 8 Fig. 313 (N).— Partie de la coupe transversale représentée par la fig. 306 (gr. 150). Fi. 314 (A4). — Portion correspondante de la coupe transversale d’une cécidie âgée (gr. 150). ftb’, ftb””, faisceaux libéro-ligneux normal et désorienté ; pb, pôle ligneux ; bsp, lsp, bsp”, agp, formations secondaires péricycliques ; p, fp, péricycle ; éc, écorce ; co, collenchyme ; ép, épiderme ; ox, mâcle. : GALLES DE TIGES. 345 autour des faisceaux /7b", f1b7, fl”, l'assise génératrice surnumé- raire péricyclique agp a régulièrement fonctionné, comme dans la tige normale, et produit un abondant parenchyme ligneux bsp”. En dedans de cette assise génératrice, les petits faisceaux libéro- ligneux de formation récente, tels que //b”, sont normalement orientés. Presque tous les autres faisceaux plus internes /7b”, [lb sont orientés d’une façon anormale comme ceux que nous avons vus dans la galle jeune. Mais il faut bien remarquer que les faisceaux de la galle jeune, représentés dans la figure 313 (N), sont internes par rapport à ceux de la cécidie âgée et qu'on doit les considérer ou comme dévorés par la larve ou encore comme occupant le bord de la cavité larvaire (/7b””, fig. 308). La figure 314 (A;) représente un faisceau surnuméraire péricy- clique dont l'orientation est tangentielle et dont l’assise génératrice, recourbée vers le centre de la galle, produit du liber secondaire interne et du bois secondaire externe. L'orientation inverse de la plupart des faisceaux libéro-ligneux péricycliques de la tige anormale est très avantageuse pour la larve: celle-ci trouve à sa portée de nombreux tissus libériens constituant pour elle un aliment riche en matières nutritives et pauvre en éléments lignifiés. En résumé, sous l’influence du Coleophora Stefani, la tige de l’Atriplexæ Halimus prèsente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène se faisant sentir également dans toutes les directions, il se produit un renflement fusiforme ayant un axe de symétrie ; 20 L'accroissement en épaisseur est dù surtout au fonctionne- ment actif de l’assise génératrice péricyclique et à l’hypertrophie des faisceaux libero-ligneux ; 3 L'orientation des faisceaux secondaires est le plus souvent allèrée et peut devenir inverse de l'orientation normale ; 4 Les assises génératrices des faisceaux produisent, du côté de la cavité larvaire, d'abondants tissus nourriciers pour le parasite. 346 C. HOUARD. Ulex europæus |. Cécidie produite par lApion sculellare KirBy. L'Apion scutellare détermine sur les jeunes tiges des Ulex euro- pœus L., nanus Smira et spartioides WEB. des renflements arrondis ou ovoides, de la grosseur d’un pois, uniloculaires, dont les parois ligneuses sont fort épaisses. Je décrirai seulement la structure d’une galle déjà âgée, de 5 mm. de diamètre, cueillie sur un rameau d’Ajonc d'Europe pendant la deuxième année de son développement (fig. 315, E); l’'Apion avait abandonné son gîte et la cécidie présentait une ouverture circulaire latérale (fig. 316, L). Au-dessous de la galle (en N,, fig. 317), le rameau a 1,4 mm. de diamètre; son contour est irrégulièrement caréné et montre sept grosses ailes soutenues chacune par un cordon de fibres à parois épaisses, encore peu lignifiées ; ces cordons f sont en relation avec les amas de fibres péricycliques p qui se trouvent en face des faisceaux libéro-ligneux /b. Ceux-ci sont en assez grand nombre et comportent des fibres ligneuses abondantes dans le bois secon- daire de deuxième annee. La zone périmédullaire et la moelle sont sclérifiées. La cécidie a en coupe un aspect tout différent (en A), fig. 318). Son contour est rendu circulaire par une couche péridermique /gt bien développée et située sous l’épiderme en face des amas fibreux f des ailes. L'écorce est devenue homogène, car elle ne contient plus de cellules à chlorophylle comme dans la tige; elle s'est élargie et épaissie et ses cellules présentent les unes des cloisons tangentielles, les autres des cloisons radiales qui lui ont permis de suivre l'accroissement en diamètre du cylindre central. L'anneau vasculaire de la tige n’est plus continu au niveau de la galle : les faisceaux /7b, lb” ont été peu à peu isolés les uns des autres par l'hypertrophie des rayons médullaires 7. L'assise génératrice ag de chacun de ces faisceaux y a d'abord produit d'abondants tissus secondaires, puis elle a fonctionné laté- GALLES DE TIGES. 347 ralement dans les intervalles qui les séparaient au fur et à mesure qu'ils s'écartaient les uns des autres. Il s’est ainsi formé un tissu secondaire comprenant du côté interne de grandes cellules ligneuses FiG. 315 (E). — Aspect extérieur de la cécidie caulinaire de l’Ajonc (gr. 2). FiG. 316 (L). — Coupe longitudinale de la même cécidie (gr. 2). FiG. 317 (Na). — Schéma de la coupe transversale de la tige normale (gr. 15). FiG. 318 (A2). — Même schéma pour une cécidie très âgée (gr. 15). Fi. 319 (A4). — Schéma de la coupe transversale d'une galle jeune (gr. 15). lb, flb”, faisceaux libéro-ligneux ; b, bs, bois ; ag, assise génératrice ; pm, zone périmédullaire ; rm, rayon médullaire ; p, péricycle ; f, fibres; éc, écorce ; {gt, liège de la tige ; ge, liège cicatriciel; s, sillon; cAl, chambre larvaire. ponctuées et lignifiées, entremêlées de fibres à parois très épaisses (voir bs” en C1, fig. 320). Enfin, en face du pôle ligneux D (dans le faisceau /7b seulement), l’assise génératrice a continué à s'établir dans la zone périmédullaire pin et a entouré le faisceau. Le plus souvent les choses ne se passent pas d’une façon aussi simple : pendant la première année la larve se creuse une cavilé large d'un millimètre environ et, comme la tigene possède à ce moment-là que 1,5 mm. de diamètre, il en résulte que toute la 348 C. HOUARD. moelle est détruite, ainsi que le bois primaire des faisceaux et une bonne partie du bois secondaire. La figure 319 (A;) représente la section d’une galle ainsi constituée. L'année suivante, pendant que les faisceaux s'’isolent et s’écartent les uns des autres comme nous venons de le voir, leurs assises génératrices fonctionnent activement dans les intervalles qui les séparent. Ces assises produisent du tissu secondaire qui fait alors saillie dans la cavité larvaire, dont il réduit un peu le diamètre, et qui vient aussi s'appuyer contre la partie mutilée des faisceaux ligneux. Fic. 320 (C4). — Partie de la figure 319, montrant le fonctionnement de l’assise génératrice ag du faisceau bs vers la chambre larvaire chl (gr. 150). Fic. 321 (C2). — Production de liège cicatriciel /gc autour de la cavité larvaire (gr. 150). bs”, ls”, tissus secondaires anormaux ; s, sillon. Dans le dessin d'ensemble donné plus haut (en A, fig. 318), la plupart des faisceaux libéro-ligneux sont dans ce cas (par exemple : GALLES DE TIGES. 349 flb’) et présentent à la base de leur bois secondaire une ligne irrégulière $, de direction tangentielle, qui indique la limite primitive de la cavité larvaire. Seul dans la coupe, le faisceau libéro-ligneux [lb a conservé intacts son bois primaire D et sa zone périmé- dullaire pm. La figure 320 (en C;) représente la portion interne d’un faisceau en partie dévoré l’année précédente par la larve de l’Apion et dont il ne subsiste que le bois secondaire Ds, au delà du sillon s ; l’assise génératrice ag enferme le faisceau libéro-ligneux. La large bande /s” de tissu secondaire cellulosique qui entoure la cavité larvaire est formée par un grand nombre de petites cellules de 14 à 28 uw d'épaisseur, alignées en longues files radiales. C'est dans les cellules les plus proches de la cavité larvaire, où elles font saillie (/s”,en C2, fig. 321), qu'une assise subéreuse circulaire s'établit et produit du liège cicatriciel /gc. Ainsi entourés du tissu secondaire qui les protège, les faisceaux libéro-ligneux peuvent fonctionner comme par le passé et irriguer convenablement la portion de tige qui surmonte la galle. De plus, l'accumulation considérable de grains d’amidon dans les tissus secondaires (bs” et {s”), à la partie interne des faisceaux, facilite souvent le développement hâtif des rameaux. J'ai eu l’occasion de constater maintes fois, au printemps, que les premiers rameaux utilisaient les réserves contenues dans un renflement gallaire situé à leur base. Influence de la galle sur la partie Supérieure de la tige. — La structure du rameau au-dessous de la galle se retrouve à peu près au-dessus. Seulement, comme la cécidie ralentit le plus souvent la croissance du rameau, celui-ci s’épaissit au-dessus de la galle et présente un diamètre de 2 mm. environ (au lieu de 1,4). L'écorce n’est pas modifiée ; l'hyperplasie porte principalement sur l'anneau libéro-ligneux et sur la moelle dont les cellules, plus nombreuses, acquièrent 120 à 130 w de diamètre au lieu de 70 à 80. En résumé, sous l'influence de l’'Apion scutellare, la tige de l'Ulex europæus présente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène se faisant sentir également dans toutes 390 C. HOUARD. les directions, il se produit un renflement fusiforme ayant un axe de symétrie ; 2 Pendant la première année, les faisceaux libéro-ligneux s’hypertrophient et s'isolent ; leur partie interne est détruite; 3 L'année Suivante, la cicatrisation de la cavité larvaire s'effectue par le fonctionnement actif de l'assise génératrice interne autour des faisceaux. Ephedra distachya L. Cécidie produite par un Cécidomyide. La larve d’un Cécidomyide non encore déterminé produit sur les jeunes rameaux latéraux de l'Ephedra distachya, au-dessus d’un nœud (E, fig. 322), des renflements fusiformes longs de 10 à 15 mm. et larges de 2,5 mm. ; la cavité larvaire est allongée, irrégulière et à parois épaisses (L, fig. 323). Structure de la tige normale. — La section d’un jeune rameau a 16 mm. de diamètre (N, fig. 324); son contour est presque circulaire et garni de nombreux sillons pourvus chacun d’une rangée de stomates. L’épiderme ép (en N, fig. 329) est formé de cellules régulières à cuticule très épaisse (17 à 20 u). Dans l'écorce, dont l'épaisseur est de 300 # environ, il y a trois sortes d'éléments : a) des fibres à parois très épaisses, les unes /c disposées en files radiales en face de chaque carène, les autres isolées, dispersées dans le tissu corlical ; b) des cellules à chlorophylle cl, réparties en une ou deux assises au fond des sillons de la tige et jouant le rôle d’organe assimilateur, puisque les feuilles consistent seulement à chaque nœud en deux petites écailles ; c) des cellules corticales éc dont les parois sont bourrées de cristaux d’oxalate de calcium. Le cylindre central est elliptique et possède un plan de symétrie correspondant au grand axe de l’ellipse. Il présente au centre uue moelle # à grandes cellules polyédriques contenant du tanin ct et, de chaque côté du plan de symétrie, quatre faisceaux libéro-ligneux, dont les deux médians ont une taille supérieure. L’assise géné- ratrice interne a produit dans tous ces faisceaux trois ou quatre GALLES DE TIGES. 351 assises de bois secondaire bs. Enfin, il existe le plus souvent en face des faisceaux quelques fibres périmédullaires et quelques fibres péricycliques /p. FiG. 322 (E). — Aspect d’une cécidie jeune et d’une cécidie âgée de la tige de l'Ephédra (gr. 1). FiG. 323 (L). — Coupe longitudinale d’une cécidie jeune (gr. 1). FiG. 324 (N). — Schéma de la coupe transversale de la tige normale (gr. 15). Fr&. 325 (A). — Schéma de la coupe transversale de la cécidie jeune (gr. 15). FiG. 326 (A1). — Gécidie âgée: coupe transversale dans la région de raccord avec la tige (gr. 15). Fi. 327 (A2). — Cécidie âgée : coupe transversale un peu plus rapprochée du milieu du renflement (gr. 15). m, moelle ; lb, faisceau hbéro-ligneux ; b, bs, bois; fp, fe, fibres péri- cycliques et corticales ; éc, écorce ; ép, épiderme ; ct, cellule à tanin; /ge, lac”, lgc”, lgc””, Liège cicatriciel ; chl, chambre larvaire. Structure de la galle jeune. — La larve établie dans la moelle d’un jeune rameau de l’année provoque l’hyperplasie de tous les tissus, comme le représente la figure 325 (A). Le contour de la section devient elliptique et ses dimensions sont 2, 4 mm. sur 2, 7. 392 C+ HOUARD. L’épiderme ép (en À, fig. 330) ne comporte plus maintenant que des carènes et des sillons très atténués. Ses cellules ont une forte cuticule et des parois très épaissies ; vues de face, elles sont moins allongées que les cellules normales, mais leurs stomates sont plus espacés. L'épaisseur de l'écorce a peu augmenté; cependant sa structure est grandement modifiée : les cellules chlorophylliennes qui formaient un véritable tissu en palissade n'existent plus; les fibres fe des rangées carénales sont disséminées et mêlées aux autres. L’écorce a donc tendance à devenir homogène. Le cylindre central montre lui aussi une modification considérable, car les faisceaux libéro-ligneux, jusque-là réunis par des formations secondaires en un anneau Continu, sont séparés nette- ment les uns des autres. Mais si l’assise génératrice interne n’a plus fonctionné entreles faisceaux, elle a par contre produit dans chacun d’eux d’épaisses forma- tions secondaires /s et 0s, comprenant vers l’intérieur de nombreux vais- Fig. 328 (A3). — Cécidie âgée: coupe schématique seaux de bois se- transversale faite au milieu du renflement; /{b, È à faisceau libéro-ligneux ; bs4, bs2, couches annuelles condaire. Du côté de bois secondaire ; /p, fibres péricycliques ; /ge, de la moelle, les anneaux de liège cicatriciel (gr. 15). vaisseaux du bois primaire b sont très espacés et constituent un long prolongement radial à la masse principale du faisceau; les plus internes sont atrophiés et leur section est très réduite ; ils sont de plus entourés par les cellules parenchymateuses pr, plusieurs fois cloisonnées, et par les cellules de la zone périmédullaire pm. Ces dernières cellules ont épaissi leurs parois; elles se sont allongées radiale- ment, puis munies de cloisons tangentielles ; riches en protoplasme GALLES DE TIGES. 393 et en gros noyaux hypertrophiés », elles constituent un tissu nutrilif qui s'étend jusqu’à la cavité larvaire chl. Toutes les cellules entourant la pointe ligneuse des faisceaux se lignifient fortement plus tard et forment une bande scléreuse autour de la cavité larvaire. Structure de la galle âgée. — L'écartement des faisceaux libéro- ligneux, leur isolement, leur taille à peu près uniforme et la lignification de toute la région centrale, influent sur la forme géné- rale de la galle qui se montre cylindrique. Une coupe pratiquée en A; (fig. 322), au milieu d'un renflement âgé d'un an et demi, a une section circulaire et un diamètre de 4 mm. (fig. 328). L'écorce n'est pas devenue beaucoup plus épaisse que dans la tige normale, mais elle contient des fibres plus grosses, groupées en amas au milieu des cellules corticales qui les réunissent et qui prennent un aspect étoilé. Les faisceaux libéro-ligneux f/b sont très développés maintenant et possèdent d’abondantes assises de bois de seconde année bs, débordant les couches de première année bs,. Dans les parties laté- rales du bois secondaire, on remarque toujours un grand nombre de vaisseaux courts (fig. 331), assez semblables aux vaisseaux à cloisons munies de larges ouvertures que possèdent seules les Gné- lacées parmi les Conifères. Au centre de la galle, une cavité allongée et étroite, bordée par des cellules lignifiées, rappelle l’ancien plan de symétrie de la cécidie. Chaque faisceau est entouré par une couche subéreuse /gc (fig. 328) dont la forme est celle d’un ovale à grand axe radial et à pointe tournée vers l’intérieur ; la partie large de l’ovale est en contact avec un arc de fibres péricycliques fp. L'assise subéreuse à 20 y d’épais- seur environ (/gc, fig. 331). L'isolement entre eux des faisceaux libéro-ligneux et la protection que leur assure la couche subéreuse font que, au-dessus de la galle, la croissance du rameau n’est pas modifiée, puisque sa nutrition est suffisamment assurée. C'est seulement vers le milieu de la galle que les faisceaux sont ainsi isolés les uns des autres par des couches subéreuses. En effet, si l’on pratique des coupes en se rapprochant de la région non altérée de la tige (en A, fig. 327), on voit plusieurs de ces anneaux subéreux se fondre en un seul /gc” qui enveloppe d’abord deux faisceaux, puis trois, etc. Ensuite, tous les faisceaux situés d’un même côté du plan 23 304 C. HOUARD. de symétrie sont entourés par une couche subéreuse continue et la ehLE EEE ES e Da Cr) FC € we TE à ee LE ee Der Ne) ie 2 So L A Ci 2 . Gé \) CL) en Sr ST \T 8 7 En Be LE] LS nee Des I CH ER cl aveu .… RE Le RE re SP RTE AS FrG. 329 (N).— Partie de la coupe transversale représentée par la figure 324 (gr. 150). Fi. 330 (A). — Région cor- respondante de la cécidie (gr. 150). m, moelle ; pm, zone périmédul- laire; pb,b,bs, bois; {s, liber;pr, parenchyme; end, endoderme; fp, fe, fibres; cl, cellules à chlorophylle ; ép, épiderme ; À ñn, noyau ; ch, chambre lar- vaire. GALLES DE TIGES. 399 section n'offre plus alors que deux anneaux de liège séparés par le plan de symétrie. Enfin, plus haut (en A,, fig. 326), les parties ex- ternes et les parties internes des deux enveloppes subé - reuses se soudent entre elles: les faisceaux libéro - ligneux sont alors isolésde l’extérieur par un anneau Si- nueux {ge qui les contourne et dont le diamètre est de 2,3 mm. environ; de la cavité cen- trale, ils sont sépa- er oe . rés par un autre Fi. 331 (A3). ce Cécidie cle: Te de l'Ephédra : nca lgc” dede aspect de l'aile secondaire latérale d’un faisceau É . libéro-ligneux (bs, /s) et d’une partie de l'anneau de Mêtre moindre et liège cicatriciel /gc qui l'entoure ; v, vaisseau strié de contour plus (gr. 150). régulier. C’est ce stade que nous avons déjà rencontré dans la galle de l’'Ulex europæus (comparer les figures 326 et 318). Souvent d’autres assises de liège se développent entre l'épiderme et le premier anneau subéreux, c’est-à-dire dans l'écorce (en Zgc’””, fig. 327) ou encore entre la cavité larvaire et le plus petit anneau (en Zgc”). En résumé, sous l'influence d’un Diptère, la tige de l'Ephedra distachya présente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène se fait sentir à peu près également dans toutes les directions et produit un renflement ayant un axe de symétrie ; 2" Les faisceaux libéro-ligneux S'isolent et l’écorce tend à devenir homogène ; 3° Dans la galle âgée, un anneau subéreux se forme autour de chaque faisceau vasculaire. 396 C. HOUARD. Epilobium montanum l. Cécidie produite par le #ompha decorella SrErx. Ce Lépidoptère provoque l'apparition, un peu au-dessus d’un entre- nœud, d’un bourrelet régulier de 4 à 6 mm. de diamètre (en E, fig. 332) el par suite peu saillant puisque la tige possède elle-même 2,7 mm. d'épaisseur. L'’échantillon que j'ai étudié a été récolté aux environs de Moulins, vers la fin de juin 1902. Comparons la structure de la galle à celle de la tige normale et, pour cela, pratiquons des sections transversales au milieu de la cécidie (en A) et, dans la tige, un peu au-dessus de la déformation (en N). TA FiG. 332 (E). — Aspect de la cécidie caulinaire de l'Epilobium montanum (Gr): FiG. 333 (L). — Coupe longitudinale de la même cécidie (gr. 1). Fié. 334 (N). — Schéma de la coupe transversale de la tige normale (gr. 15). FiG. 335 (A). — Schéma de la coupe transversale de la cécidie (gr. 15). m, moelle ; b, {, anneau vasculaire ; Li, liber interne; pér, périderme ; chl, chambre larvaire ; 4, larve. Épiderme. — Les cellules de l’épiderme anormal sont plus larges que dans la tige normale (50 « au lieu de 20 ; comparer ép dans les figures 336 et 337). GALLES DE TIGES. 397 Écorce. — L'écorce anormale (ée, en A, fig. 337) est presque trois fois aussi épaisse que l'écorce normale (210 y au lieu de 80 y). Le nom- bre de ses assises cellulaires reste cependant à peu près le même (7 à 9), mais les méats y sont beaucoup plus grands parce que les cellules ont tendance à s’arrondir et à s’isoler les unes des autres ; aussi les cellules anormales n’ont-elles pas l'aspect écrasé qu’elles présentent dans la tige saine. Les cellules de collenchyme et les cellules à chlorophylle de la zone externe de l'écorce sont plus grosses que les cellules normales correspondantes, mais ce sont surtout les cellules corticales internes qui se sont considérablement agrandies, tout en épaississant leurs parois. Les cellules de l’endoderme normal (end, en N, fig. 336) sont aplaties, plissées et ont 30 « de diamètre tangentiel. Leur aspect est tout différent dans la cécidie (end, en A, fig. 337) où elles sont très irrégulières et d’un diamètre de 100 à 1124; de plus, elles se cloisonnent dans deux directions perpendiculaires : tangentielle- ment et radialement. Les pelites cellules c auxquelles elles donnent naissance s’isolent et s’arrondissent avec facilité, car elles sont séparées les unes des autres par de petits méats #t très nets ; malgré cela, le contour de la cellule primitive, plus épais, reste distinct des cloisons secondaires, et l’on peut en conclure qu'au moment où le cloisonnement s’est opéré, la cellule de l'endoderme était déjà fortement différenciée. Nous allons retrouver ce phénomène encore plus accentué pour les tissus du cylindre central, auxquels nous arrivons. Péricycle. — Le péricycle mérite une mention toute particu- lière. Normalement il comprend une assise de cellules plus petites que les cellules endodermiques, avec, de place en place, quelques fibres à parois épaisses, mais non encore lignifiées. Dans la galle, ces fibres se sont beaucoup développées et ont lignifié leurs parois. Quant aux autres cellules péricycliques elles ont acquis un diamètre radial de 100 y (au lieu de 5 ): cet accroissement considérable provient de ce que l’assise génératrice externe age, qui, à l’état nor- mal, se forme dans le péricycle mais qui n’était pas encore apparue dans la tige saine, s’est établie dans ces cellules ; de nombreuses cloisons radiales et tangentielles fournissent un périderme per forte- ment cloisonné, composé de petites cellules irrégulières enveloppécs par la membrane épaissie des grandes cellules primitives. Toutes les G. HOUARD. HL) ta Y, œæ A Ba HR D f=: & CC] 1 = T4 à D0). 336 (N). — Partie de la coupe transversale représentée par la figure 334 (gr. 150). FiG. 337 (A). — Région correspondante de la cécidie (gr. 1 FLE Fire. GALLES DE TIGES. 399 petites cellules conservent leurs membranes à l'état de cellulose, et il est impossible de les grouper autrement que par leur position topographique, en une couche subéreuse et une couche phello- dermique. Anneau vasculaire. — Le diamètre de l’anneau libéro-ligneux anormal est un peu supérieur au diamètre normal (comparer les fig. 334 et 335) et son épaisseur est aussi légèrement plus grande ; mais il est devenu irrégulier au niveau de la larve et souvent son bois n'est pas lignifié aux environs de la cavité larvaire. L'assise géné- ratrice interne agi (en À, fig. 337) fonctionne activement dans la galle et donne un peu de liber secondaire /s, mais surtout beaucoup de bois secondaire bs: au lieu des 18 à 20 cellules normales composant une file, on en trouve 30 à 36 plus étroites, plus allongées et serrées les unes contre les autres. Les gros vaisseaux du métaxylème normal sont remplacés par des éléments moitié plus petits mb. Liber interne. — On sait que dans la tige normale il existe du liber interne autour de la moelle (/i, en N, fig. 336), en face des faisceaux libéro-ligneux, et qu'il y occupe une zone circulaire de 80 à 100 d'épaisseur. Cette zone prend un remarquable développement dans la cécidie, car elle acquiert une largeur de 300 à 400 . Ses cellules sont allongées radialement du côté de la cavité larvaire et sont cloisonnées perpendiculairement ; leurs parois sont épaisses, cellulosiques et faciles à reconnaître. Au milieu des petites cellules hbériennes /2 (fig. 337) se trouvent aussi de nombreuses fibres /?, à parois épaisses et ponctuées. Moelle. — Enfin, plus au centre, les cellules médullaires #2 accroissent peu leur taille ; elles sont polyédriques, serrées les unes contre les autres et à paroi cellulosique très épaisse. Elles présentent, comme toutes les cellules précédentes, de nombreuses cloisons secondaires minces, dirigées dans deux directions à peu près perpendiculaires et qui les subdivisent en un nombre souvent considérable (jusqu'à 30 ou 40) de petites cellules irrégulières. Les cellules les plus internes sont en contact avec la cavité larvaire ch; elles contiennent un épais protoplasme et servent de nourriture à la larve. 360 C. HOUARD. En résumé, sous l'influence du Mompha decorella, la tige de l'Epilobium montanum présente les modifications suivantes : 1° L'action cécidogène se faisant sentir également dans toutes les directions, il se produit un renflement ayant un axe de symé- trie ; 2 L'accroissement en épaisseur est dû surlout à l’assise géné- ratrice interne; l’assise génératrice externe péricyclique apparaît de place en place et fonctionne d'une façon irrégulière ; 3° Le liber interne se développe beaucoup ; 4 Les cellules médullaires se cloisonnent activement; leur contour primitif reste distinct, comme c’est le cas pour la plupart des autres cellules cloisonnées de la tige. Epilobium tetragonum L. Cécidie produite par le #Wompha decorella SrTerx. Sur cet Épilobe, la larve de Mompha decorella provoque la formation d’une cécidie allongée, d’un diamètre de 7 à9 mm. en son milieu. La tige est modifiée sur une longueur de 40 à 50 mm.{(en E, fig. 338), ce qui altère souvent la disposition des feuilles. L’échantillon que j'ai étudié provenait des environs de Moulins et avait été récolté à la fin de juin 1902. L'étude anatomique de la galle étant fort semblable à celle que Je viens de donner pour l'Epilobium montanuim, j ndiquerai seule- ment les quelques différences que l’on y rencontre. La section de la tige normale faite au-dessous du renflement gallaire est carrée (N, fig. 340); elle possède 2 mm. de côté et ses quatre angles sont fortement arrondis. Le liber interne /? est peu développé. Le système vasculaire forme une couche circulaire continue ; autour de lui, le périderme possède déjà deux cloisons et se trouve en contact avec un anneau presque ininterrompu de fibres péricycliques non lignifiées p. Au fur et à mesure qu’on se rapproche de la cavité larvaire, la tige accroît son diamètre surtout dans un sens et, par suite, s’aplatit ; un peu au-dessous du niveau d'insertion des feuilles (en À, fig. 338), GALLES DE TIGES. 361 la section présente 6,5 mm. de largeur sur 5 mm. d'épaisseur : ses quatre ailes occupent sensiblement les sommets d’un rectangle (A, fig. 341). Fig. 338 (E). — Aspect de la cécidie caulinaire de l’Epilobium tetragonum (gr. 1). Fig. 339 (L). — Section longitudinale de la même cécidie (gr. 1). Fi. 340 (N). — Coupe transversale schématique de la tige normale (gr. 15). Fic. 341 (A). — Coupe transversale schématique de la cécidie (gr. 15). m, moelle ; pm, zone périmédullare ; li, Liber interne ; f{b, flb”, anneau vasculaire dissocié ; p, péricycle ; per, périderme ; éc, écorce ; chl, chambre larvaire ; z, larve. L’anneau libéro-ligneux présente la modification la plus intéres- sante, car il se scinde en plusieurs tronçons f7b, flb” aux environs des faisceaux foliaires. Cette disposition spéciale tient à ce que la larve a établi sa cavité au niveau d’un nœud et par suite empêché le développement de deux entre-nœuds consécutifs. 362 CG. HOUARD. A l’intérieur de chaque gros arc vasculaire (f7b, par exemple), la zone périmédullaire pr a activement multiplié ses cellules qui se sont allongées radialement vers la cavité larvaire chl, grande et spacieuse, et cloisonnées jusqu’à sept ou huit fois ; les cellules libé- riennes se sont divisées de même dans tous les sens et ont donné un abondant liber interne li, sans éléments lignifiés. Les figures 342 (N) et 343 (A) représentent les zones périmédul- laires, normale et hyperplasiée, situées en face de quelques pôles ligneux pb, eten permettent la comparaison. FiG. 342 (N). — Liber interne et zone périmédullaire situés en face d'un faisceau normal de la tige de l'Epilobium tetragonum (gr. 150). FiG. 343 (A). — La même région dans la coupe transversale de la cécidie (gr. 150). m, moelle ; pm, zone périmédullaire : li, Lhber interne ; pb, b, bois. Enfin, il est bon de remarquer que l’assise génératrice subéro- phellodermique anormale donne un périderme pér (en À, fig. 341) assez développé. Celui-ci comprend 6 ou 7 assises de cellules qui ont tendance à se cloisonner obliquement, comme dans l’Æpèlobium montanum, et à en fournir d’autres plus nombreuses et plus petites. Les fibres péricycliques p sont très grandes et ne se lignifient pas. L'écorce est plus épaisse que dans la tige normale. L'épiderme a des P P q GALLES DE TIGES. 363 cellules deux ou trois fois plus courtes que les cellules non parasitées, mais elles conservent la même largeur et la même épaisseur ; ses stomates ont la taille normale. En résumé, la structure de la cécidie de l’Æpilobium tetragonum diffère de la précédente : 1° Par l'irrégqularilé et la dissociation de son anneau libéro- ligneux, conséquence de lu position nodale de la galle ; 2° Par l'allongement radial des cellules périmédullaires et par l’absence d'éléments lignifiès dans le liber interne. Populus alba LE Cécidie produite par le Gypsonoma aceriana Dur. Dès le mois d'avril, les jeunes pousses du Peuplier blanc présentent souvent de légers renflements (E, fig. 344) dus à une petite larve de Lépidoptère située dans la moelle. La même déformation se trouve parfois à la base des pétioles. En général, après l’éclosion du parasite quia lieu de très bonne heure, la partie hypertrophiée du jeune rameau se fend longitudi- nalement (fig. 344, au niveau de A1): les deux bords de la plaie s'écartent, mettent à nu la cavité larvaire, puis brunissent et se cicatrisent (F, fig. 345). Il arrive souvent aussi que l’action parasitaire se fait sentir dés le début du développement du jeune rameau : celui-ci reste alors très court et toutes ses feuilles partent à peu près du même point. l° Galle de la tige. Structure de la tige normale. — La coupe d'un entre-nœud normal, correspondant comme àge à celui qui est déformé par la galle, possède une section circulaire de 2 mm. de diamèétre (Ni, fig. 346). L'épiderme ep (N;, fig. 349), possède de très petites cellules isodiamétriques (7 à 9 w d'épaisseur); il est en contact avec un périderme continu pér formé d’une assise de liège et d'une assise de phelloderme. Presque toutes les autres cellules da 364 CG. HOUARD. l'écorce co ont des parois épaisses, cellulosiques et sont collenchy- mateuses. Le cylindre central comprend un tissu vasculaire épais et continu, de contour irrégulier, sensiblement pentagonal. Il renferme FiG. 344 (E). — Aspect de deux cécidies de la tige de Peuplier blanc, l’une jeune, l'autre un peu plus âgée et déjà fendue en long (gr. 1). FiG. 345 (F). — Aspect extérieur d'une cécidie âgée, fortement cicatrisée (gr. 1). Fi. 346 (N4). — Schéma de la coupe transversale d’un jeune rameau normal du même arbre (gr. 15). Fic. 347 (A). — Schéma de la coupe transversale de la cécidie jeune, déjà fendue, représentée en E (gr. 15). Fic. 348 (A2). — Cécidie âgée dessinée en F: schéma de la moitié de la coupe transversale (gr. 15). m, moelle; pm, zone périmédullaire ; f{b, flb”, fl”, faisceaux libéro- ligneux ; bs, bois secondaire ; /p, fibres péricycliques ; /gt, liège de la tige ; lge, lgc”, liège cicatriciel ; chl, chambre larvaire. cinq gros faisceaux libéro-ligneux, limités en dedans et en dehors par des arcs fibreux péricycliques /p et périmédullaires pm ; ces faisceaux sont réunis entre eux par d’abondantes formations GALLES DE TIGES. 369 secondaires. Enfin, au centre, la moelle # possède une rangée irré- gulière de très grosses cellules noyées au milieu des cellules ordinaires, plus petites. Structure d'une galle pendant la première année. La structure normale du jeune rameau est déjà altérée au-dessous de la galle:1le diamètre de la section est un peu supérieur au Fic. 349 (N1). — Partie de la coupe transversale repré- sentée par la figure 346 (gr. 150). diamètre normal ; l’anneau vasculaire est plus étroit et beaucoup plus con- tourné ; les amas fibreux péricycliques et périmédullaires sont plus petits, plus irréguliers et plus nombreux, écartés les uns des autres, faisant en quelque sorte pressentir le grand espacement anormal des faisceaux libéro-ligneux qui doit se produire au niveau de la cécidie ; enfin, la moelle présente de nombreuses fibres disséminées sans ordre. Dans la galle, au fur et à mesure qu'on s'approche de la partie médiane de la cavité larvaire, tous ces carac- tères s’accentuent, en même lemps que la lignification diminue. Une section transversale pratiquée dans une jeune galle de l’année, déjà fendue longitudinalement, a la forme d’un fer à cheval (A,, fig. 347); tous les tissus y sont cellulosiques, sauf ceux des cinq gros faisceaux //b et des arcs péricycliques fp. Entre les gros faisceaux, l’assise génératrice interne a produit un abondant tissu secon- daire bs. La larve a dévoré toute la région concave de la coupe, c’est-à- dire la moelle, la zone périmédullaire, une bonne part des faisceaux vasculaires et même la région la plus interne du tissu secondaire bs. Enfin, aux deux extrémités du fer à cheval, en /gc, il est apparu 366 CG. HOUARD. deux bandes de liège destinées à cicatricer la blessure produite par la fente longitudinale de la cécidie. Plus tard, à la fin de l’année, quand le rameau s’est encore un peu épaissi et que la tige est devenue presque plane (F, fig. 345) par suite de l'écartement de plus en plus grand des deux lèvres de la blessure, une énorme bande de liège cicatriciel /gc, gc” (en A» fig. 348) apparaît au travers des tissus secondaires, sur la face qui fut auparavant en contact avec la cavité larvaire. Voyons maintenant d’un peu plus près les points intéressants de l'évolution de cette galle qui sont: a) les modifications survenues dans les gros faisceaux libéro-ligneux ; b)les modifications apportées aux formations secondaires interfasciculäires ; c) la production du liège cicatriciel. a. Modifications dans les faisceaux libéro-ligneux. — Les faisceaux sont séparés les uns des autres et leur contour est très irrégulier. Ils possèdent un bois secondaire bs (A1, fig. 350, à droite) mieux développé que dans les faisceaux normaux, mais irrégulièrement lignifié. Leurs fibres péricycliques fp, fp”, fp” sont fort nombreuses et à parois épaisses. Enfin, dans la zone péri- médullaire, quand elle existe encore, les cellules sont allongées radialement. b. Modifications entre les faisceaux. — La figure 350 (A) représente une partie de la région interfasciculaire d’une galle déjà un peu âgée et fendue. Dans cette région, toutes les cellules ont été cloisonnées sous l'influence de l’assise génératrice interne. Or, on sait que dans la tige normale cette assise génératrice fonctionne très régulièrement et est refoulée vers l'extérieur d’une façon uniforme grâce au développement de plus en plus grand du bois secondaire des faisceaux et des espaces interfasciculaires. Il n’en est plus de même ici. Une première fois, l’assise généra- trice ag a fonctionné alors que les formations secondaires commençaient à se produire dans le faisceau : il en est résulté la production des longues cellules à parois épaisses et cellulosiques de la partie supérieure du dessin, au-dessus des fibres péricycliques fp, elles-mêmes très hypertrophiées ; ces cellules se sont active- ment cloisonnées ; quelques-unes d’entre elles ont même beaucoup épaissi leurs parois et se sont lignifiées. Toutes les cellules centrales, 367 GALLES DE TIGES. produites par l’assise génératrice ag, ont été dévorées par la larve. en même temps que la partie interne du faisceau. Ge . D ec. CS Sie ge FiG. 350 (A4). — Portion de la coupe transversale de la cécidie jeune de la ti de Peuplier : fonctionnement des assises génératrices ag, ag”, ag”, à gauche du faisceau Hbéro-ligneux b, bs ; fp, fp", fp”, fibres péricycliques ; éc, écorce ; ép, épiderme (gr. 150). Un peu après, l'assise génératrice s’est établie plus à l’exté- rieur, en ag”, et a amené un cloisonnement actif dans les cellules celles-ci sont moins allongées et moins divisées que les précédentes. Enfin, très souvent, comme on peut le voir externes : à la partie inférieure du dessin, en ag”, l’assise génératrice fonctionne en dehors des massifs péricycliques dissociés /p’ fo": et elle s'établit dans les cellules les plus externes de la zone interfasciculaire el y provoque un cloisonnement qui se propage 368 CG. HOUARD. jusque dans les cellules corticales. Ce cloisonnement n’est pas aussi régulier que dans la région centrale et s'opère dans toutes les direc- MN. res 7 le & ER L es JS ci N e) pa 20 TE UC T % | RSR REZ (1 DRE Ne NAS \( bs ca da) AE NONNS LANGE MES a À f ” î e FL". agi A ta RATE PRES DS meet , CEE n FiG. 351 (A2). — Portion de la coupe transversale de la cécidie âgée de la tige de Peuplier, montrant la formation du liège cicatriciel /ge du côté de l’ancienne cavité larvaire ; f{b”, faisceau libéro-lignenx ; b, bs, bois; fs, liber ; agi, assise génératrice interne ; fp, fibres péricycliques ; éc, écorce ; ép, épiderme ; pm, zone périmédullaire ; ag, assise génératrice (gr. 150). tions à l’intérieur des grosses cellules en produisant de nombreuses petites cellules irrégulières à parois très minces. Quelques cellules lignifiées, à cloisons épaisses et ponctuées, apparaissent encore ça el là disséminées. Donc, au fur et à mesure que les assises généralrices internes des faisceaux étaient refoulées vers l'extérieur par le bois secondaire qu'elles produisaient, un cloisonnement se manifestait entre les GALLES DE TIGES. 369 faisceaux libéro-ligneux et donnait de longues files radiales de bois secondaire, à cellules non lignifiées pour la plupart. c. Production du liège cicatriciel. — Dans la galle âgée, complètement ouverte et abandonnée depuis longtemps par la larve, il se forme tout le long de la cavité larvaire, et à quelque distance du bord, une bande très épaisse de liège cicatriciel /gc, /gc” (en A, fig. 348). Parfois ce liège est interrompu au niveau d'un faisceau (/1b”, par exemple) lorsque celui-ci a été en partie attaqué par la larve et que son bois secondaire est mis à nu. Partout ailleurs, la cicatrisation s'opère aux dépens des longues cellules non lignifiées du bois secondaire développé entre les faisceaux ou aux dépens des cellules hypertrophiées de la zone périmédullaire (comme en /7b”). Toutes les cellules de ce tissu cicatriciel sont disposées en longues files rayonnantes comprenant 8 à 15 cellules internes, à parois épaisses et cellulosiques, et 2 ou 3 cellules externes, à parois forte- ment lignifiées, mais très minces. Aux deux extrémités obtuses de la section, la production du liège lgc est très active et détermine la formation de gros bourrelets autour des faisceaux libéro-ligneux //b””. L'un d'eux a été représenté dans la figure 351 (A); on y voit le début de la couche subéreuse dans l’épiderme et l'écorce. Le -périderme normal /gt (en A2, fig. 348) apparaît de place en place sur la face externe de la coupe, mais il n’acquiert jamais un grand développement. Structure d'une galle pendant la deuxième année. L'étude que nous venons de faire nous a montré comment la paroi de la galle se fend longitudinalement, puis s'étale en une lame concave, contenant les cinq faisceaux libéro-ligneux ; nous avons vu aussi comment s'opère la cicatrisation du côté de la cavité larvaire. Il n’en est pas toujours ainsi. Etudions une galle âgée d’un an et demi. Sur une longueur de 2 centimètres environ, le rameau fendu a été transformé en une lame presque plane (E, fig. 352), dont les bords sont arrondis (A3, fig. 356) ; la largeur de la lame est de 8 mm. et son épaisseur atteint 2,4 mm. La coupe transversale A; montre qu'elle contient trois gros faisceaux libéro-ligneux /2b, tb”, [lb”, 24 370 C. HOUARD. noyés au milieu d’une masse ligneuse irrégulièrement lignifiée qui affecte la forme générale de la galle. Du côté convexe, l'écorce éc a une épaisseur régulière et presque normale. Elle est limitée, à l'extérieur, par un périderme peu développé gt, ayant cinq ou six assises subéreuses et une ou deux assises de phelloderme. Les fibres fc, fp de toute cette région sont fort nombreuses ; on en trouve de petits amas dans l'écorce et dans le liber secondaire et de très gros amas dans le péricycle. Le bois secondaire ds est régulièrement développé et comporte de nombreux vaisseaux à large section entourés de cellules ligneuses et de fibres ligneuses, séparées elles-mêmes par des rayons médullaires égale- ment espacés. En somme, sur toute cette face convexe, la struc- ture est à peu près normale, l’espacement seul des faisceaux étant beaucoup plus grand que dans la tige saine. La face concave, qui correspond à l’ancienne cavité larvaire, présente encore des tissus placés dans le même ordre que sur l’autre face, mais leur structure est différente. Tandis que sur la paroi externe de la tige, il n’y avait en dehors du périderme que les débris peu importants de l’épiderme, on trouve sur cette autre face de nombreux amas cellulaires irréguliers. Ces amas ont été isolés par un puissant liège cicatriciel /ge, à contour sinueux, d'épaisseur variable, possédant des files de 2 à 12 cellules subéreuses et des rangées de phelloderme ph pouvant comprendre jusqu'à 25 assises de cellules. Ces longues files phellodermiques sont en contact direct avec le liber secondaire. Vers le centre, la longue bande vasculaire concave est formée d'un bois secondaire bs”, assez irrégulier, composé surtout de fibres ligneuses, ne possédant que de rares vaisseaux et des rayons médullaires très espacés. Les files radiales de ce bois secondaire, non lignifiées au centre (en bs”), sont situées dans le prolongement des files radiales du bois secondaire bs de l’autre face. Enfin, chacur des gros faisceaux libéro-ligneux /7b, /{b”, flb’” est en contact avec un pelil îlot de cellules médullaires sclérifiées #2, m°, m7. Pour comprendre la structure bizarre de cette tige déformée, il faut étudier quelques coupes faites plus bas, en se rapprochant de la tige normale. GALLES DE TIGES. 371 LR ge 12 # fl lb » ES : fl fe Fi. 352 (K). — Aspect d’une cécidie âgée de la tige de Peuplier blane, présentant deux forts bourrelets cicatriciels (gr. 1). FiG. 353 (N3). — Schéma de la coupe transversale de la tige normale (gr. 15). F1G. 354 (A3). — Schéma de la coupe transversale de la cécidie, dans la région de raccord avec la tige (gr. 15). Fi@. 355 (A4). — Schéma de la coupe transversale pratiquée un peu plus haut (gr. 15). m,m,m”, m”° moelle; tb, flb”, flb”, flb”””, faisceaux libéro-ligneux ; agi, agi’, agi”, assises génératrices ; bs, bois secondaire ; vw, v’, vaisseaux de printemps ; fp, fp”, fibres ; éc, écorce ; {gt, liège de la üge, 3172 GC. HOUARD. La figure 355 (A,) représente une section transversale pratiquée au niveau où brusquement la tige s’élargit en une lame ligneuse. L'ensemble de la coupe à un peu l'aspect du chiffre 8. La boucle inférieure, beaucoup plus large que l’autre, a 4,6 mm. de diamètre ; elle est presque circulaire et contient une masse vasculaire, munie de trois gros faisceaux libéro-ligneux f/b, flb”, fib”, rappelant tout à fait par sa forme, mais avec des dimensions moindres, celle que nous venons d'étudier. La partie convexe de cette masse vasculaire est en contact avec une écorce régulière éc; elle est formée de bois secondaire normal et présente le long de son assise génératrice interne agi une rangée de gros vaisseaux de printemps v, assez rapprochés les uns des autres. Dans la région concave, au contraire, le bois secondaire est très irrégulier, ses rayons médullaires sont contournés et les vaisseaux du bois de printemps v” y sont peu nombreux el très espacés. La boucle supérieure est aplatie et contient un anneau de bois secondaire entourant un gros faisceau libéro-ligneux isolé /1b77. LÉ CPS PL : Se 77 4 F2 = M < 777 AdQ Na 74, À HI T WE x j Lier lETE -& CATAUTNTS in] 5 N KK rh PA # G HIT 1 ne AI & UE tnt, q NS Se // PARA fr À © SEA 1) f] FiG. 356 (A3). — Schéma de la coupe transversale médiane de la cécidie (gr. 15). Mèêmes lettres que dans la figure précédente ; bs”, bs”, bois secondaire anormal ; ph, phelloderme ; ge, liège cicatriciel ; 7e, fibres. Entre les deux masses vasculaires, c'est-à-dire entre les deux assises génératrices agi’, agi” appartenant à ces deux masses, le tissu qui les sépare contient de nombreux amas de fibres péricy- cliques fp’. C'est dans cetle région que l’assise génératrice externe lat, qui entoure toute la coupe, s'établit au niveau de À; et produit GALLES DE TIGES. 1 le large et sinueux liège cicatriciel signalé plus haut: le pelit amas vasculaire /b°7 alors isolé disparaît. En se rapprochant de la portion normale de la tige, en A; (fig. 354), la section devient presque circulaire et conserve à peu près le même diamètre. Les deux gros amas vasculaires sont réunis l’un à l’autre, tout au moins d’un côté, et entourés d'une assise génératrice interne agé presque circulaire; cette assise produit partout de gros vaisseaux de bois de printemps v, également espacés. ce qui indique un fonctionnement régulier. | La région transversale qui séparait les deux amas vasculaires est complètement modifiée: elle comprend un enchevêtrement de cellules très cour- tes et de longues cellules lignifiées qui lui donnent un aspect filamenteux rappelantla texture des roches appe- lées serpentines.Ce tissu spécial occupe toute la région comprise entre les portions de moelle sclérifiée 71, m, m7”, m7 qui exis- tent au dos des gros faisceaux libéro - hgneux (0,107, Fi. 357 (A3). Pare du tissu sinueux représenté dans [lb flb""” ; il est la figure 354: fb, cb, fibres et cellules ligneuses; ? à rm, cellules médullaires (gr. 150). com posé delongues fibres ligneuses de bois secondaire fb (en A;, fig. 357), allongées, pointues aux deux bouts, enveloppant des paquets de cellules médullaires 77 et de cellules ligneuses cb, courtes, à parois ponctuées et lignifiées. Comme du reste cette structure serpentineuse existe non seulement dans le plan perpendiculaire à l’axe de la tige, mais aussi dans l'espace, il en résulte que les coupes comportent des sections longitudinales, obliques et transversales de toutes ces fibres et de toutes ces cellules. Le diamètre des fibres est de 174 en moyenne. 374 CG. HOUARD. Si l’on suit ces fibres à droite et à gauche suivant le diamèêtre horizontal de la coupe (fig. 354), on les voit se réunir au bois secondaire normal qui enveloppe à l'extérieur les deux gros amas vasculaires. On doit donc admettre, pour comprendre la formation de ce sin- gulier tissu, que les rayons médullaires de l'anneau vasculaire de la tige, situés à l'extrémité d’un même diamètre, se sont hyperplasiés et que les assises génératrices internes s’y sont établies. Du fonctionnement de ces dernières est résulté un abondant bois secondaire sinueux, serpentineux, qui a occupé tout l’axe de la tige. La moelle s’est trouvée ainsi séparée en quatre tronçons adossés aux faisceaux vasculaires. Influence de la gàlle sur la ramification. Voyons d’abord quelle est l'influence de la galle sur la structure de la tige qui la porte et comparons pour cela deux coupes pratiquées en À et À, (Es, fig. 352). Au-dessous de la galle, la tige est fortement no er elle est raccourcie et épaissie; le bois secondaire, les fibres péricycliques et corticales, l'écorce sont plus développés qu’au-dessus de la céei- die; la moelle contient de nombreuses fibres arrondies. Il n’en est plus de même dans la moelle du rameau qui surmonte la galle, car on y trouve, comme dans la tige normale, de grandes cellules claires, alignées en files irrégulières et entourées d’autres cellules plus petites. L'influence de la galle peut se faire sentir sur la structure du rameau, non seulement dans ses environs immédiats, mais encore plus haut sur la ramificalion elle-même. Dans le cas de la galle de deux ans, nous avons vu disparaître un gros faisceau au niveau où la Lige s'étale en une lame. Cette disparition entraine une diminution notable dans l'irrigation de toute une face de la tige et les petits rameaux latéraux qui se développent de ce côté ne le font qu'avec peine. C’est ce que montrent les figures 358 (R,) el 359 (R:). Pour le rameau R,, la galle est fendue et ouverte à droite : loules les branches émises de ce côlé sont courtes et peu feuillues. Dans l'échantillon R,, placé à côté, la cavité larvaire a fendu le rameau en avant et en arrière : les petites branches latérales se sont seule- GALLES DE TIGES. 379 ment développées à droite et à gauche, le long des deux généra- trices opposées non brisées, et se sont disposées dans le ES médian séparant les deux blessures. Ri Ro FiG. 358 (R4). — Rameau de Peuplier blanc portant à la base une cécidie fendue en avant et en arrière ; la ramification a lieu dans un plan (gr. 0,2). FrG. 399 (R3). — Rameau du même arbre portant à la base une cécidie fendue à droite ; les branches de droite sont atrophiées (gr. 0.2). L'étude anatomique confirme ces dispositions de morphologie externe et les faisceaux libéro-ligneux se montrent toujours, dans les sections pratiquées très haut au-dessus de la cécidie, moins développés du côté où les petits rameaux sont restés courts. J'ai pu, du reste, reproduire expérimentalement des déformations semblables de la ramification en incisant de jeunes branches assez profondément pour détruire une partie de l'anneau vasculaire ; du côté incisé, les bourgeons n'ont fourni que de courts rameaux. 376 C. HOUARD. 2° Galle du pétiole. La structure du pétiole de Peuplier blanc est compliquée et de plus varie avec le niveau que l’on considère; aussi bien est-il nécessaire de comparer la coupe transversale de la cécidie faite à 2 mm. du point d'attache du pétiole (fig. 360, en A4) à une coupe identiquement placée dans le pétiole sain (fig. 360, en N3). 1 (HI À HUMAN ! Ab Ns. FiG. 360 (E). — Aspect de la cécidie du pétiole de Peuplier blanc (gr. 1). Fic. 361 (Ng). — Coupe transversale schématique du pétiole sain (gr. 15). FiG. 362 (Ag). — Coupe transversale schématique du pétiole parasité, pratiquée un peu latéralement par rapport à la chambre larvaire cl (gr. 15). P P PP 5 flb, flb”, faisceaux libéro-ligneux ; /ge, liège cicatriciel. La section du pétiole normal (N3, fig. 361) est irrégulière et un peu concave; elle comporte quatre bandes de tissu cortical lacuneux el, au centre, trois groupes de petits faisceaux libéro-ligneux disposés en cercle : deux groupes latéraux /7b” et un groupe médian f{b, plus développé que les autres. Le pétiole hypertrophie (A3, fig. 362) est beaucoup plus large que le pétiole normal (3,6 mm. au lieu de 1,8); le côté en contact avec la larve a été dévoré et la moitié quireste est convexe. On y distingue encore très bien trois groupes de faisceaux libéro-ligneux peu déformés correspondant aux moitiés inférieures des trois groupes du pétiole sain. Entre la cavité larvaire et ces faisceaux, il existe 371 DE TIGES. GALLES tout un tissu formé de longues files parallèles de cellules à parois cellulosiques,entremèlées de quelques éléments lignifiés.Ces cellules contournent les faisceaux libéro-ligneux et s'étendent dans les espaces interfasciculaires. A { | ANS * S \ TT) al Se) DEC 7 / à à me: AE 4 EE F.G. 363 (Ag). — Partie gauche d’un faisceau libéro-ligneux (bs, {s) de la cécidie pétiolaire du Peuplier blanc, montrant l'actif cloisonnement de la région interfasciculaire ; j gr. 150 épiderme ( 6p, 1 Les faisceaux restés réguliers se montrent simplement hyper- trophiés ; leurs assises génératrices internes produisent du tissu 378 C. HOUARD. secondaire, mais ne fonctionnent pas en dehors d'eux. L'origine des files cellulaires est donc dans les faisceaux qui ont servi de nourri- ture à la larve et qui, étant les plus rapprochés de la cavité larvaire, ont été soumis à une action cécidogène intense ; les assises géné- ratrices internes ont produit d’abondants tissus secondaires dans les faisceaux, puis elles ont provoqué le cloisonnement actif de toutes les cellules situées en dehors. La figure 363 (A3) représente le cloisonnement qui s'opère dans la région comprise entre un faisceau libéro-ligneux du groupe médian et le faisceau le plus rapproché du groupe latéral de droite. Les cellules de la partie supérieure du dessin ont tendance às’isoler les unes des autres; quelques-unes d’entre elles sont lignifiées et leurs parois épaissies sont ponctuées. Dans la région inférieure du dessin, près de l’épiderme ép, des mâcles nombreuses apparaissent dans les jeunes cellules en voie de division. Enfin, lorsque la larve a abandonné la galle, du tissu cicatriciel se développe en une large bande le long du tissu hyperplasié bordant la cavité larvaire. En résumé, sous l'influence du Gypsonoma aceriana, la tige du Populus alba présente les modifications suivantes: 1° L'action cécidogène se faisant sentir également dans toutes les directions détermine l'hyperplasie de la moelle et la production d'un renflement ayant un axe de symétrie ; 2 Les faisceaux libéro-ligneux sont très hypertrophies et séparés par un abondant tissu secondaire non lignifie ; 3° Apres le départ de la larve, la tige se fend et s'aplatit en une lame qui se cicatrise du côté de la cavité larvaire ; 49 51 l’atrophie de quelques faisceaux libèro-ligneux se prodait, il en résulte un arrêt de développement pour les rameaux quien dépendent. GALLES DE TIGES. 379 Pinus silvestris L. Cécidie produite par lÆvetria (Relinia) resinella L. Parmi les Microlépidoptères de la famille des Tortricides qui s'altaquent aux Pins, et surtout au Pinus silvestris, on peut signaler les espèces du genre Retinia. L'une d’entre elles, Retinia resinella L., est surtout intéressante parce qu’elle produit, un peu au-dessous d'un verticille de jeunes rameaux (E, fig. 364), un gros amas résineux, qui lui a valu de la part des auteurs allemands le nom de « Kiefernharzgallenwickler ». F FiG. 364 (E). — Aspect extérieur de la cécidie résineuse de la tige du Pin silvestre (gr. 0,5). FrG. 365 (F). — La même cécidie, vue sur l’autre face (gr. 0,5). FiG. 366 (L). — La même cécidie, la résine ayant été enlevée (gr. 0,5). FiG. 367 (T). — Schéma de la coupe transversale de la galle résineuse ; 3, larve (gr. 0,5). Frappé de la dénomination de Harzgalle donnée à cette abondante production de résine, je me suis demandé si la plante ne réagissait pas autrement et j'ai recherché la déformation. De nombreux exemplaires existaient l’année passée sur les branches des Pins de six à dix ans qui croissent dans le parc du Laboratoire de Biologie végélale de Fontainebleau. J'ai pu ainsi très vite me convaincre qu’au niveau de l’amas résineux la tige s'était énormément hyperplasiée (E, fig. 364) et qu'elle avait répondu à l’action cécidogène non seulement en sécrétant de la résine, mais encore en accroissant ses tissus. La déformation est donc bien une cécidie puisqu'il y a pro- 380 C. HOUARD. duction de tissu nouveau et par ce fait mérile de prendre rang dans les catalogues descriptifs. 5 ec Fi. 368 (N). — Coupe transversale schématique de la tige normale de Pin (gr. 15). F1G. 369 (A). — Coupe transversale schématique de la cécidie caulinaire de la même plante (gr. 15). m, moelle ; f{b, anneau vasculaire ; b, bs, bois ; {s, liber ; ec, écorce; cs, canal sécréteur ; ct, cellule à tanin ; /gé, liège de la tige; lge, liège cica- triciel ; chl, chambre larvaire. C'est en mai, ou plus rarement au commencement de juin, que la femelle dépose un œuf à la base d'un verticille ; la petite chenille qui en sort s'enfonce dans l'écorce, puis gagne la moelle et s'y établit. La tige, détruite sur une faible longueur, réagit alors, hyperplasié ses tissus etsécrète une abondante résine qui ferme la plaie. En automne la galle résineuse a la grosseur d’un pois ; l’année suivante elle atteint la taille d’une noix. Structure de la galle. — Une coupe transversale pratiquée dans la cécidie a la forme d’un fer à cheval (en T, fig. 367) ; dans la partie concave, la larve a dévoré toute la moelle et une partie du bois. L'épaisseur de la paroi gallaire est de 2,7 mm., alors que dans la tige normale l'écorce et l'anneau libéro-ligneux réunis n’atteignent en tout que 0,13 mm. L’écorce anormale éc (en À, fig. 369) est au moins deux fois plus épaisse que celle de la tige saine. Ses canaux sécréteurs cs acquièrent un diamètre double ; la résine est, en effet, fort abondante dans les GALLES DE TIGES. 381 cellules externes de l'écorce où elle se présente en gouttelettes arrondies au milieu des grains d’amidon. C'est aux deux extrémités de la coupe que les modifications les plus importantes se produisent dans l'écorce: une couche très épaisse de liège /ge, en relation avec le périderme sous-épidermique LOS ST (ma) 0 a Ô POS DB =wœe ri scans; BR te CN '--- De (®) > (æ) (e = Ls ape SCD Se E ==) SOLÛC Does LèE Pan ce lasm se ED ÉRSER FLE D'uS 2 OT | PE Sa SL Le el L - = SCD; dl ls DL ets HE A ==) rm 2 ae (En 2 Reese (mn) VE AS \ ES) ; A CC} ce AK Ces) He ï Ï) L (4 | D ee $ ©. | se. es EU . QAQ0 ”. VF » Q ue: … (fl CS 9 ] l) ni ï =@ K Fi. 370 (N). — Partie des for- mations secondaires de la tige normale de Pin (gr.150). || FiG. 371 (A). — Région corres- \ pondante de la cécidie cau- É ; linaire de la même plante D » = (gr. 450). K D = L : TE 5) IS | agi, assise génératrice in- ee ; on terne; bs, bois secondaire ; op) =). el ) , , À (Cas f = 2 \ 1] | - dt D ® 2 | 7 QG Ÿ NC Î ji “ T l, ls, liber; rm, rayon mé- ob dullaire ; cs, canal sécréteur. de la tige Zgt, vient cicatriser la blessure faite par la larve ; le bord irrégulier de la plaie est ainsi isolé par la couche subéreuse et ses cellules meurent après s'être teintées en marron. Aux environs du lissu cicatriciel il y à de gros amas de tanin ct formant une couche presque continue ; dans l’écorce proprement dile, on ne les trouve plus que de place en place. 382 GC. HOUARD. L'anneau vasculaire flb est très hypertrophié, comme le montrent les figures 370 (N) et 371 (A). En A, l’assise génératrice interne a fonctionné très activement et produit de nombreuses assises de bois secondaire bs dont les cellules sont un peu plus petites, mais en plus grand nombre et à parois plus épaisses que dans la tige normale ; les canaux sécrêteurs cs de ce tissu sont hypertrophiés (75 de diamètre au lieu de 45 y), plus réguliers et possèdent de grosses cellules sécrétrices gonflées de résine. Quant au liber secondaire /s de la tige anormale, il est très développé et atteint une épaisseur presque trois fois supérieure à l'épaisseur normale : il possède un grand nombre de tubes criblés qui sont entourés de petites cellules libériennes, à parois épaisses, plus irrégulièrement empilées que dans la tige normale, mais moins aplaties. En résumé, sous l'influence de l’Evetria resinella, la tige du Pinus silvestris présente les modifications suivantes : 1° Hyperplasie du tissu cortical ; 2 Fonctionnement exagéré de l'assise génératrice interne ; 3 Hypertrophie des canaux sécréteurs. RÉSUMÉ pu CHAPITRE IV, RELATIF AUX CÉCIDIES CAULINAIRES PRODUITES PAR UN PARASITE SITUÉ DANS LA MOELLE Caractères communs.— Les caractères communs que présentent les quinze cécidies étudiées dans ce chapitre sont les suivants : 1° Le parasite est situé dans la moelle ; 2° L'action cécidogène qu’il engendre excite la multipli- cation des cellules médullaires ; celles-ci se bourrent de matières de réserve et servent de nourriture au parasite ; 3° Le tissu gallaire formé se développe uniformément dans tous les sens, par suite de la situation axiale du parasite, et produit une cécidie fusiforme ayant un axe de symétrie confondu avec celui de la tige ; 4° L'action cécidogène s'étend aussi à l’anneau libéro- ligneux, qui est hypertrophié ou dissocié et à l’écorce. GALLES DE TIGES. 383 Le mode de formation des galles de ce chapitre est représenté schématiquement par la figure 372; l'action cécidogène « et la réaction végétale ? agissent suivant les mêmes directions. Ressemblances. — La cécidie de l'Arabis Thaliana se dislingue de toutes les autres parce qu'elle possède un plan de symélrie Fig. 572. — Schéma comme les galles des chapitres précédents : indiquant les rela- : : : : , - tions qui existent cela tient à la situation latérale de la cavité entre latige etle larvaire qui se trouve adossée à l'anneau parasite, quand yasçulaire. SPA M Mais cette symétrie est exceptionnelle. ée,écorce;« action L'hyperplasie qui se produit dans toutes les cécidogène ; », ré directions donne aux autres cécidies de ce no ete: chapitre l'aspect fusiforme que nous leur connaissons. C'est ce que nous présentent nettement les galles du Potentilla reptans, de l'Hieracium uinbellatum et de l'Hypochæris radicata, produites par des larves d’Auwlaæ. Ces trois hyménoptérocécidies, de même que presque toutes les galles de Cynipides, possèdent autour de leur cavité larvaire deux zones très nettes formées de tissu nourricier et de Lissu protecteur ; les deux premières galles présentent aussi des faisceaux d'irrigation très développés qui assurent la nutrition de ces tissus. La diptérocécidie de l’'Atriplex Halimus possède ces mêmes zones et en même temps de grandes ressemblances avec l’hymé- noptérocécidie de l'Hypochæris radicata; les deux galles se développent, en effet, sur les pédoncules floraux et, dans toutes les deux, l’assise génératrice interne fonctionne difficilement en dehors des faisceaux libéro-ligneux primaires: l'irrigation des tissus gallaires est alors assurée par l'allongement radial des éléments du bois primaire, des cellules périmédullaires et des cellules internes de la moelle. Ce sont encore des larves de diptères qui déforment les tiges de l'Eryngium campestre et les ombelles du Torilis Anthriscus. Les trois coléoptérocécidies étudiées ensuite sur le Sedum Tele- phium, VY'Atriplex Halinus etV Ulex europæus portent l'empreinte d’une puissante action cécidogène : non seulement leur moelle est fortement hyperplasiée, mais encore l’hypertrophie accentuée de . 384 C. HOUARD. leurs rayons médullaires amène la dissociation de l'anneau vascu- laire en petits tronçons. Nous avons vu que l'assise génératrice interne de ces portions vasculaires a tendance à fonctionner autour de la partie ligneuse et à former de petits faisceaux cylindriques isolés. C’est dans la galle du Seduin que ce phénomène se manifeste avec le plus d'intensité. L’isolement des faisceaux se retrouve encore dans la diptérocéci- die de l’'Ephedra distachya : les assises génératrices internes ne fonctionnent pas entre les faisceaux qui sont peu à peu entourés d’une couche subéreuse. Enfin, les quatre dernières galles étudiées dans ce chapitre sont produites par des Chenilles et leurs cavités larvaires sont vastes. Les cécidies de l'Epilobium montanum et de l'Epilobium tetra- gonum sont caractérisées par le grand développement que prend le liber interne de la tige; celles du Populus alba el du Pinus silvestris ont le caractère commun de se fendre longitudinalement et de présenter d’actives cicatrisations. Passage aux Acrocécidies. — Nous avons vu, dans ce quatrième chapitre, que la longueur de l'entre-nœud parasité n’est pas altérée en général ; les galles étudiées sont donc bien des Pleurocécidies, surtout si elles ne contiennent qu’une seule cavité larvaire. Mais il est facile de comprendre que dans les cécidies multiloculaires, où les parasiles sont parfois très nombreux, un raccourcissement de l'entre-nœud ou même de plusieurs peut se produire ; une galle qui est nettement une pleurocécidie quand elle est uniloculaire devient une acrocécidie si elle possède plusieurs loges. Une autre cause, tenant à la position des parasites plutôt qu'à leur nombre, peut encore amener un raccourcissement dans les entre-nœuds de la tige. L'action cécidogène émanée du ou des parasites situés dans la moelle s'exerce sur l’anneau libéro-ligneux tout entier et non sur une partie seulement comme nous l’avons vu dans les chapitres précédents ; les entre-nœuds qui surmontent la région parasitée reçoivent moins de nourriture, ne se développent pas autant qu'ils l’auraient fait à l'état normal et constituent alors des déformations ayant des caractères de cécidies terminales, c’est-à-dire d'acrocécidies. Il en est ainsi, par exemple, pour les rameaux de l’Atriplexæ Hali- nus munis de la grosse Coléoptérocécidie que nous avons décrite : GALLES DE TIGES. 389 la petite tige qui surmonte la galle reste courte tant que le parasite n’est pas éclos; elle croît ensuite. Les pédoncules florifères de l'Hypochæris radicata sont parfois complètement raccourcis par de gros renflements multiloculaires. De telles galles servent de transition entre les cécidies caulinaires latérales et les cécidies caulinaires terminales que nous étudierons dans un prochain travail. vV 386 CG. HOUARD. CHAPITRE V. RÉSUMÉ GÉNÉRAL DES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LES GALLES AUX TISSUS DES TIGES Dans les quatre chapitres qui précèdent, nous avons décrit avec quelques détails un certain nombre de cécidies caulinaires et nous en avons déduit les caractères généraux qu'elles présentent lorsqu'on les groupe ainsi. C’est seule la position du parasite, par rapport aux diverses régions de la tige, qui nous a guidé dans cette division en chapitres où nous avons réuni des cécidies offrant des caractères communs bien qu’elles fussent produites par des animaux souvent très diffé- rents comme nalure, comme taille et comme nombre. Ainsi, rappelons que dans le Chapitre IIT nous avons groupé ensemble des Diptérocécidies, des Hyménoptérocécidies et des Coléoptéro- cécidies. Il existe pourtant quelques ressemblances entre les galles produites par des animaux appartenant aux mêmes groupes z0olo- giques. C’est ainsi que: {1° les Lépidoptères (Coleophora, Mom- pha, ete.) ont toujours de grosses larves et forment des cécidies médullaires uniloculaires, munies d’une ample cavité larvaire ; 2" les Hémiptères (Asterolecanium, Chermes, etc.), ne pouvant pénétrer dans les tissus, sont tous des ectoparasites fixés contre l’épiderme. Mais, le plus souvent, des parasites appartenant à des genres peu éloignés ou constituant des espèces voisines ne produisent pas des cécidies identiques, c’est-à-dire ayant même origine : l’Awlaæ Latreillei et le Xestophanes potentillæ, qui appartiennent cepen- dant à deux genres très voisins, habitent des cécidies dérivant l’une de l’assise génératrice d'un faisceau libéro-ligneux, l’autre de la moelle; le Ceuthorrhynchus pleurostigna, étudié plus haut, GALLES DE TIGES. 307 produit l’hyperplasie du méristème vasculaire tandis que le Ceu- thorrhynchus atomus loge dans la moelle. Des différences analogues existent parmi les genres de Diptères gallogènes: les larves de Perrisia, dont nous avons suivi l’évolution dans ce travail, sont toujours externes et se laissent envelopper par les tissus hyperplasiés ; celles de ZLasioptera (p. ex. : Z,. eryngii) sont obligées de suivre un long parcours au travers des tissus corticaux pour gagner l'endroit de la moelle où elles s'arrêtent ; enfin, les autres larves de Diptères que nous avons vucs plus haut {Rhabdophaga, Contarinia, Agromyza) préfèrent pour évoluer les tissus de l’assise génératrice interne de la tige. Il n’était donc pas possible de songer à caractériser les cécidies caulinaires classées d’après la nature des parasites et à chercher des caractères communs pour les Diptérocécidies, les Hyménoptéro- cécidies, les Coléoptérocécidies, ete... C’est du reste un fait bien connu que, sur un végétal donné, le même parasite peut produire des cécidies très différentes, selon la région de la plante qu'il attaque. On sait que le Phylloxera vastatrix engendre sur la racine et la feuille du Vitis vinifera deux cécidies bien différentes; tous les Cécidologues ont présent à la mémoire les fameuses générations, dites alternantes, des Cynipides où l’animal sexué et sa larve produisent sur le même Chêne des galles complètement distinctes. Le développement et la forme de la cécidie dépendent donc surtout de la position du cécidozoaire par rapport aux issus de la tige : c’est ce qui nous a fait adopter la division en quatre chapitres admise dans cette étude anatomique. Il est utile maintenant que nous résumions en quelques pages les modifications apportées par les pleurocécidies caulinaires : 1° Aux tissus des tiges ; 2 Aux inflorescences ; 3" Aux pétioles. 388 CG. HOUARD. Modifications apportées par les Galles aux tissus des tiges. I. EPIDERME. Modifications dans les dimensions. Le plus souvent, les galles de la tige sont recouvertes complète- ment par l’épiderme ; parfois, leur surface est craquelée, comme c'est le cas pour les cécidies du Potentilla reptans, du Rubus fruti- cosus, du Cytisus albus, etc. Afin de recouvrir la surface de la tige parasitée, l’'épiderme doit suivre : 1° L’ACCROISSEMENT DU RAYON DE LA TIGE. — Rappelons que les cellules épidermiques normales sont comprimées les unes contre les autres et affectent la forme de parallélépipèdes rectangles : la face externe du prisme comporte la largeur (arête horizon- lale) et la longueur (arête verticale); une des faces horizontales comporte la largeur (arête langentielle) et l'épaisseur (arêle radiale). L'accroissement du rayon de la tige, amène dans les cellules épidermiques : a. L'augmentation de l'épaisseur, c'est-à-dire une simple hypertrophie radiale. Exemple : cécidies du Brecpoernus .34) et du Sisymbrium. 8. Le cloisonnement parallèle à la face externe. Nous n'avons rencontré cette hyperplasie régulière que dans les tiges parasitées des Papilionacées (Cytisus et Sarothamnus) où elle dénote sim- plement l’apparilion précoce du périderme normal (voir fig. 177). 2° L’ACCROISSEMENT DE LA CIRCONFÉRENCE DE LA TIGE. — Il peut y avoir : a. Augmentation de la largeur, c'est-à-dire simple hypertrophie langentielle, comme dans les cécidies du Sarothamnus (fig. 138), du Quercus coccifera (fig. 145), du Populus Trenula, de l'Eryn- gum, du Glechoma, du Sisymbrium, de l'Hieracium, etc. GALLES DE TIGES, 309 8. Cloisonnement parallèle à une face lalérale par une ou plusieurs cloisons radiales. C’est le cas le plus général et l’on peut citer les cécidies du Tilia (fig.90), de l'Hypochæris, de l'Atripleæ. Le plus souvent, l'épaisseur ne varie pas ; les cellules augmentent en nombre, mais conservent les dimensions des cellules normales. 3° L'ACCROISSEMENT EN LONGUEUR DES GÉNÉRATRICES DE LA TIGE.— Celle modification s’éludie en regardant l’épiderme de face ; il peut y avoir : a. Augmentation de la longueur, ce qui se présente assez rarement : galle du Tilia. 8. Augmentation dela longueur suivie de l'apparition d'une ow de plusieurs cloisons horizontales. Les cellules épidermiques produites retrouvent à peu près leurs dimensions primitives. Les exemples sont nombreux : cécidies du Potentilla hirta, du Cytisus, du Sisymbrium, du Potentilla reptans, etc. En résumé, toutes ces modifications font que les cellules épider- miques tendent à devenir polygonales, isodiamétriques et que leurs files longitudinales perdent de leur régularité. Modifications dans la structure. Cuticule. — La paroi externe des cellules épidermiques des cécidies devient très épaisse en général et ne se cutinise pas. Notons encore, qu'au contact du parasite, les cellules épider- miques accroissent peu leur taille et se lignifient très rapidement. Nous en avons vu un exemple dans la cécidie du Brachypodium silvaticum. Stomates. — En général, les stomates augmentent peu leurs dimensions et leur nombre, sauf dans les cécidies où le tissu chloro- phyllien devient très abondant ; ils sont écartés les uns des autres par l’hyperplasie des cellules épidermiques et leurs files perdent leur régularité. Poils. — Le plus souvent ils augmentent en nombre el en taille, comme dans la cécidie de l'A/riplex ; ils sont plus nombreux et plus courts à la surface de la galle du Tilia. 390 CG. HOUARD. II. Écorce. Modifications dans les dimensions. Obligée de suivre l'accroissement en volume du cylindre central de la tige, l'écorce peut parfois se crevasser ; c’est ce qui se produit dans la galle du Potentilla reptans, en face de petits amas fibreux péricycliques qui arrêtent l’action cécidogène et empêchent la mulliplication des cellules corticales (voir page 279, fig. 211). En général, l'écorce hyperplasie ses tissus ; elle subit un accrois- sement en épaisseur et un accroissement en largeur. 19 ACCROISSEMENT RADIAL DE L'ÉCORCE. —— Cet accroissement est peu important dans la plupart des cas ; aussi ne prend-il de l'intérêt que quand il s’'exagère. IL s'opère : a. Par Simple allongement. C’est ce que nous avons vu dans la cécidie du Brachypodium (fig. 34). 8. Par l'allongement des cellules corticales en longs poils. Le plus bel exemple à citer est celui de la galle du Tilia (fig. 90); on trouve encore une telle déformation dans la diptérocécidie de l'Atriplex (fig. 253), dans les galles de l’Hypochæris (fig. 247) et du Quercus coccifera. y. Par le fonctionnement d'un périderme cortical. Nous avons vu un périderme sous-épidermique apparaître dans les galles du Fraxinus (fig. 41), du Quercus coccifera (fig. 145), du Cytisus (fig. 177), etc., et y produire de longues files radiales un peu irré- gulières composées de grosses cellules hypertrophiées. 2° ACCROISSEMEMT TANGENTIEL DE L'ÉCORCE. — Dans loutes les cécidies caulinaires, les cellules corticales s’allongent tangentielle- ment et prennent de uue à huit cloisons radiales. Souvent, comme dans la cécidie de l’ÆHieraciuwm et surtout dans celle de l'Eryngium (fig. 258), les parois des cellules primitives deviennent très épaisses, restent cellulosiques et bien distinctes des cloisons secondaires. GALLES DE TIGES. 391 Modifications dans la structure. 1° L’ECORCE DEVIENT PLUS HOMOGÈNE. — Celle transformation se produit par : 4. Dispersion et isolement des fibres corticales, comme dans la galle de l'Ephedra (fig. 330) ; 6. Disparition du tissu chlorophyllien et du tissu lacuneux, comme dans les cécidies du Brachypodium (fig. 54) et de l'Æryn- qiumn ; y. Disparilion du collenchyme, vu dans la cécidie du Glechoma ; à. Cloisonnement des cellules corticales qui s'opère d’abord dans deux directions perpendiculaires, puis dans {ous les sens. Lorsque l’action parasitaire se fait sentir sur les cellules un peu àgées et déjà quelque peu différenciées, la paroi de la cellule primitive reste cellulosique et beaucoup plus épaisse que les cloisons secon- daires. Nous avons rencontré de pareils cloisonnements dans les cécidies du Cytisus (fig. 177), de l’'Epilobium montanum (fig. 337) et dans l’Eriophyidocécidie du Pinus silvestris (page 192) ; :. Altération des canaux sécréleurs. En général, les canaux sécréleurs résistent beaucoup à l’action parasitaire, comme du reste à tous les agents extérieurs. Aussi peuvent-ils conserver leur struc- ture normale et leur taille ordinaire au milieu du tissu hyperplasié qui constitue la galle. Nous en avons vu des exemples dans les cécidies du Pin (fig. 79) et du Lierre (fig. 5). Pourtant, si l’action parasitaire se fait sentir de bonne heure quand les canaux sont encore jeunes, peu différenciés, et qu'ils n'ont pas acquis leur taille définitive, il peut y avoir : Déformation des cellules de la qaîne qui modifient leur contour ou bien se cloisonnent, comme dans la cécidie du Pinus sulvestris (fig. 80, en g) ; Déformation des cellules sécrétrices qui parfois se cloison- nent activement et comblent la lumière du canal par un tissu compact. Nous en avons vu de beaux exemples dans les galles de l'Eryngium (fig. 266, 272) et surtout du Pinus (fig. 80, en cs). 2° CERTAINS TISSUS SE DÉVELOPPENT ÉNORMÉMENT. — Tels sont le tissu sécréteur, le tissu chlorophyllien, les cellules à tanin, le collenchyme, etc. 392 CG. HOUARD. 4. Tissu sécréteur. I peut y avoir : Augmentation considérable du diamètre des canaux sécréleurs normaux. Ainsi, dans la cécidie du Pinus, le diamètre des canaux sécréteurs devient double. Apparilion d'un tissu sécréleur, comme dans la cécidie du Chermes abielis (fig. 51), à la base des feuilles hyperplasiées. 8. Cellules à gomme, cellules à tanin. Pour les premières, il y a un énorme accroissement de taille et de nombre (Tia); quant aux autres, leur nombre est plus grand, mais leur disposition plus irrégulière (Sedurm). à. Tissu chlorophyllien. ILest très abondant dans les cécidies du Sarothamnus et du Torilis. . Collenchyme. Bien développé dans les galles de l'£ryngium, du Torilis, elc. III. FAISCEAUX LIBÉRO-LIGNEUX. Les faisceaux libéro-ligneux ont un ôle physiologique très important dans la galle, puisqu'ils assurent le développement des divers lissus hyperplasiés et par suite la nutrition de la larve ; nous détaillerons celte étude un peu plus loin, dans nos Conclusions générales, et nous n’insisterons ici que sur le rôle mécanique des faisceaux. Modifications apportées à l'anneau vasculaire. Toutes les tiges examinées dans ce travail possèdent un anneau vasculaire continu, composé de faisceaux libéro-ligneux réunis entre eux par des formations secondaires. L'action cécidogène agissant sur cet anneau y amène l'hyperplasie des rayons médullaires, quelle que soit la place occupée par le parasite ; dans ces conditions, l'anneau vasculaire peut rester continu ou être dissocié. 4° HYPERPLASIE FAIBLE DES RAYONS MÉDULLAIRES ; L'ANNEAU VASCULAIRE RESTE ENTIER. — Les faisceaux libéro-ligneux de la ge, situés du côté du parasite, augmentent beaucoup en taille et en nombre ; de plus, leur déformation est fonction de leur éloignement du cécidozoaire. GALLES DE TIGES. 393 Augmentation des dimensions du faisceau, provenant des causes suivantes : Fonctionnement plus actif que d'ordinaire de l'assise géné- ratrice interne et production de nombreux tissus secondaires, liber secondaire et bois secondaire, ce dernier non lignifié. C'est sans doute la présence du parasite et la production de nombreux tissus gallaires en voie de multiplication qui rendent nécessaire un appel de sève brute ou de sève élaborée et par suite l'augmentation des tissus secondaires. Dans toutes les cécidies éludiées nous avons assisté, au moins aux environs immédiats du parasite, à ce fonctionnement exagéré de l’assise génératrice interne, mais c’est surtout dans les cécidies du troisième chapitre qu’il a atteint son plus fort déve- loppement. Taille plus grande acquise par les éléments des tissus secon- daires ; se présente dans toutes les cécidies étudiées. Production plus abondante de fibres ligneuses ; nous en avons trouvé surtout dans la galle du Pinus silvestris (page 193), dans celle du Picea excelsa (fig. 65); ces fibres rendent moins distinctes les couches annuelles. Production plus abondante de fibres libériennes ; nous en avons vu dans la cécidie du Tilia (fig. 88). Hypertrophie du parenchyme ligneux, qui écarte les files de vaisseaux primaires les unes des autres et parfois détruit leur alignement; citons comme exemple la cécidie de l'Hieracium (fig. 236) et celle du Potentilla reptans (fig. 221). Hypertrophie et éloignement radial des vaisseaux ligneux primaires. Les vaisseaux primaires les plus anciens, élirés par suite de l'allongement de la tige, ont diminué de diamètre; ils se présentent, dans les cécidies, isolés des cellules du parenchyme qui sont convexes et saillantes de leur côté. Il y a là une accentuation très marquée de ce que l’on rencontre normalement et que montre bien la figure 19. Autour des pôles ligneux, allongement des cellules du parenchyme et des cellules de la zone périmédullaire. y a encore là accentuation du caractère normal, comme le montrent les cécidies du Tia (fig. 100), du Potentilla reptans (Gg. 221), de lEryngium, du Torilis (fig. 288), etc. 394 C. HOUARD. Allongement radial et cloisonnement des cellules périme- dullaires. Nous signalons à part cette forte hyperplasie rencontrée dans les cécidies du Brassica (fig. 162) et de l’Æpilobium tetra- gonum (fig. 343). Grand développement du liber interne, comme dans la cécidie de l’Epilobium montanum (fig. 337). 8. Augmentation du nombre des faisceaux. On la constate dans la généralité des galles étudiées. 7. La déformation des faisceaux est fonction de leur éloigne- ment de l'animal cécidogène. Les faisceaux situés au voisinage immédiat du parasite ne s’hypertrophient pas, car les vaisseaux ligneux augmentent peu leur taille, se lignifient de bonne heure et, de plus, l'assise génératrice interne ne fonctionne pas. C’est à une certaine distance du cécidozoaire que l'hypertrophie des faisceaux est la plus considérable. Enfin, loin du parasite, la défor- mation des faisceaux est faible ou nulle. Nous renvoyons pour cette déformation au schéma S, (fig. 86), se rapportant à la cécidie du Tilia. 2 HYPERPLASIE TRÈS ACCENTUÉE DES RAYONS MÉDULLAIRES ; L'ANNEAU VASCULAIRE EST DISSOCIE. — Le meilleur exemple à citer est celui du Sedum (fig. 293): l’action hyperplasiante part de la moelle pour se propager dans les rayons médullaires et isoler de gros et de petits amas vasculaires ; comme les assises génératrices fonctionnent ensuite en dehors des faisceaux, vers le parasite, les gros amas vasculaires s’incurvent en croissant et les petits amas s’arrondissent (Voir les figures 299 à 302). Les cécidies de l’Hedera (fig. 3), de l'Ulex (fig. 318) et de l’Ephedra (fig. 328) possèdent des faisceaux libéro-ligneux complètement isolés les uns des autres. Enfin, dans l1 coléoptérocécidie de l’Atripleæ (fig. 308), il peut y avoir désorientation complète des faisceaux. IV. PERICYCLE. Le péricycle de la tige joue un rôle très important dans la production des cécidies, à cause des fibres qu'il contient souvent et GALLES DE TIGES. 395 à cause des assises génératrices qui s’élablissent parfois à son niveau. 1° FIBRES PÉRICYGLIQUES. — En général, si les cellules péricy- cliques sont parenchymateuses, elles augmentent simplement de taille. Mais si elles sont à l’état de fibres dans la tige normale, deux cas se présentent : 4. Les cellules péricycliques ne sont pas encore lignifiées quand l’action parasitaire se fait sentir. Alors elles s’hypertrophient comme les autres cellules, leurs contours deviennent irréguliers, leurs parois restent minces et ne se lignifient pas lant que la galle est jeune. Rappelons la présence de ces fibres dans les cécidies du Sarothamnus (fig. 136), du Potentilla reptans (fig. 211). Quand la galle est plus âgée, ces fibres peuvent se lignifier et constituer un fort anneau scléreux à la périphérie du cylindre central, comme c’est le cas pour la cécidie du Potentilla hirta (fig. 17). | 8. Les cellules péricycliques sont lignifiées quand l’action parasilaire se fail sentir. Alors elles sont peu modifiées, mais les gros arcs qu'elles forment peuvent être dissociés en petits amas fibreux : tel est le cas de la galle du Populus alba (fig. 350). Nous avons vu, dans la cécidie du Potentilla reptans (fig. 211), ces petits amas scléreux empêcher l'hyperplasie de l'écorce qui se trouve en face et être la cause de craquelures longitudinales. 2 ASSISES GÉNÉRATRICES. — Le rôle de ces assises est de permettre au péricycle de suivre l'accroissement en diamètre de la région plus interne du cylindre central. x. Le périderme normal se développe d'une façon exagereée. Nous avons examiné le cas de la cécidie du Rubus (fig. 148): dans la partie non déformée de la tige, l’assise génératrice. externe possède 4 ou 5 assises cellulaires seulement, tandis qu'aux environs de la larve elle peut en avoir une trentaine. Dans la galle âgée du Potentilla reptans, les cellules du périderme ont tendance à s’arrondir et à s’isoler les unes des autres. 8. Le périderme apparaît dans la cécidie, alors qu'il ne s’est pas encore formé dans la tige normale. Citons, comme exemples, les galles jeunes du Potentilla, de l'Epilobium, etc. 396 G. HOUARD. +. Cloisonnement anormal des cellules du péricycle. Nous avons vu, dans la cécidie de l’Epilobium montanum (fig. 337), les cellules du périderme se cloisonner dans tous les sens, comme le font du reste celles de l'écorce et de la moelle ; la membrane primitive de la cellule péricyclique reste nettement visible. à. Fonctionnement tres actif de l'assise génératrice surnumeé- raire péricyclique. Nous en avons étudié la marche dans la Lépi- doptérocécidie de l'Atriplex (page 339). 3° CELLULES A TANIN ET RÉSEAU LACITIFERE. — Nous avons constaté leur grand développement dans la cécidie du Sedum (fig. 294) et dans celle de l’Hieracium. V. MOELLE. Dans toutes les galles où le parasile n’est pas situé dans la moelle (Chapitres I, If, IT), les cellules médullaires sont peu altérées. C’est seulement lorsque l'anneau vasculaire est rompu ou dissocié que l’action cécidogène gagne la moelle et produit la multiplication des cellules, puis, plus tard, l’épaississement et la lignification de leurs parois : telle la cécidie de l’Æedera (fig. 3). Les phénomènes sont, au contraire, beaucoup plus complexes lorsque le parasite est situé dans la moelle. Toutes les cécidies étudiées au chapitre IV de ce travail sont dans ce cas, et il nous suffira de résumer leurs caractères en quelques lignes : 1° CLOISONNEMENT DES CELLULES MÉDULLAIRES AUTOUR DE LA JEUNE LARVE. — Quand la larve est très jeune, elle produit le cloisonne- ment des cellules médullaires qui l'entourent, ainsi que nous l'avons signalé pour les cécidies du Sedum (fig. 297) et de l’Hypochæris dont nous avons pu avoir des échantillons peu âgés. L’hyperplasie se propage ensuite plus loin grâce à l'accroissement de taille du para- site, et c’est cette active multiplication qui élargit les rayons médul- laire et dissocie l’anneau vasculaire. 2° CLOISONNEMENT IRRÉGULIER DES CELLULES MÉDULLAIRES. — Le cloisonnement peut avoir lieu dans tous les sens, et, la membrane cellulaire reste beaucoup plus épaisse que les cloisons secondaires quand les cellules ont déjà acquis un certain degré de différencia- GALLES DE TIGES 397 tion normale. Exemple : cécidies du Sedum (fig. 303), de l'Æpilo- bium (fig. 337), du Potentilla (fig. 213-216). 3 ALLONGEMENT RADIAL DES CELLULES PÉRIPHÉRIQUES. — Vu dans la diptérocécidie de l’Atriplex (fig. 251). 4% PRODUCTION DE TISSU CICATRICIEL AUTOUR DES CAVITÉS CREUSÉES PAR LES LARVES. — Nous avons rencontré ce tissu dans la galle du Potentilla (fig. 228), dans celle de l’Ulex (fig. 318) et nous avons vu aussi l'importance qu’il prend autour de la cavité aux œufs dans la cécidie de l'Hieracium (fig. 232, 234 el 236). 5° CELLULES A GOMME ET CANAUX SÉCRÉTEURS. — Se modifient comme dans l'écorce (Voir plus haut, page 392). Modifications apportées par les Galles aux inflorescences. 1° MODIFICATIONS EXTERNES. — Ce sont les suivantes : 4. Apparition d'un renflement latéral ; 8. Raccourcissement des rayons des ombelles et des ombellules (T'orilis) ou des pédoncules floraux (Tilia); Y. Hypertrophie de ces mêmes organes ; à. Diminution du nombre des rayons des ombelles (Torilis) ; 2° MODIFICATIONS INTERNES. — Ce sont les suivantes : 4. Grande hypertrophie de la moelle {(Æryngium, Torilis, Hypo- CHOPAS Ve lC-)E 8. Nutrition des tissus gallaires assurée par de longues cellules irrigatrices (Hypochæris, Atriplex) ; . Accentuation du plan de symétrie {T'orilis) ; à. Accentuation de la dorsiventralité (rameaux latéraux du Torilis) ; . Disparition de la dorsiventralité (cécidie de lombellule du Torilis) ; su. Accentualion des pôles ligneux (Tilia) ; v. Déformation des faisceaux libéro-ligneux, des canaux sécré- teurs, etc. comme dans la tige. 398 G. HOUARD. Modifications apportées par les Galles aux pétioles. 1° Eu égard à l’action parasitaire, les pétioles se comportent sensiblement comme les tiges ; | 2° La dissociation des faisceaux libéro-ligneux est plus facile que dans la tige et l’aliération gagne aisément le centre du pétiole. C'est ce que nous avons vu dans les cécidies du Rubus (fig. 154) et de l’Xedera (fig. 11); 3° Le plan de symétrie de la galle accentue celui du pétiole sain. EN RÉSUMÉ, nous constatons que sous l'influence du parasite il peut y avoir dans les tiges : Hypertrophie des cellules ; Hyperplasie des cellules ; Fonctionnement exagéré des assises génératrices normales ; Apparilion d'assises génératrices normales ; Apparition d'assises génératrices nouvelles ; Formation de tissu cicatriciel ; Formation de tissu sécréteur ; Formation de tissu palissadique ;: Formation de tissu scléreux protecteur ; Formation de tissu nourricier ; Disparition de tissu lacuneux ; Disparition de tissu chlorophyllien ; Arrêt dans la lignification normale des tissus. D'une façon générale, sous l'influence parasitaire : 1° Tous les tissus peuvent être modifiés en eux-mêmes ou dans leur répartition, à condition qu'ils n'aient pas atteint leur diffé- renciation normale et soient encore susceptibles d'accroissement ; 2° Les tissus hétérogènes deviennent plus homogènes ; 3 Les tissus n'ont pas tous le même degré de résistance. GALLES DE TIGES. 399 CHAPITRE VI. RÉSUMÉ GÉNÉRAL DES RELATIONS EXISTANT ENTRE LES TIGES, LES PLEUROCÉCIDIES CAULINAIRES ET LES PARASITES Quelques Auteurs se sont occupés des cécidies caulinaires, mais n’ont guère produit que des travaux isolés. J’ai étudié, au contraire, dans ce travail un assez grand nombre de galles de tiges. Pour toutes, j'ai suivi leur mode de développement, approfondi leur anatomie ct cherché les modifications qu’elles peuvent apporter à la morphologie externe et à la structure des tiges ; puis, je les ai groupées selon leurs affinités en quatre chapitres. Enfin, dans le résumé général qui précède, j'ai montré comment les lissus normaux de la tige sont modifiés par les parasites et comment certains tissus anormaux ont pu se produire. Il me reste maintenant, dans ce dernier chapitre, à mettre en lumière les relations qui existent entre le parasite animal et son hôte et à résumer l'influence qu’exerce la cécidie sur la tige et sur la ramification. 1° ACTION CÉCIDOGÈNE. L'action que le parasite animal exerce sur la Lige a été constamment désignéesousle nom d'action cécidogène, et nous l'avons caractérisée par les modifications qu'elle apporte dans les cellules végétales. Nous avons vu qu'elle peut y déterminer un accroissement de taille ou hypertrophie (fig. 373, en b), mais que, le plus souvent, l’augmen- lation des dimensions est accompagnée du cloisonnement des cellules : il y a alors multiplication cellulaire ou hyperplasie (fig. 373, en d). Cette action cécidogène se fait sentir autour du parasite avec la même intensité dans loules les directions. C’est ce que nous vu pour les cécidies du chapitre IV : le cécidozoaire, placé au centre de la moelle, détermine un accroissement en épaisseur, identique dans 400 C. HOUARD. toutes les directions, et la production d'un renflement fusiforme dont l'axe de symétrie coïncide avec celui de la tige. Notons en terminant que les éléments > Ilulaires en contact direct avec le D ce b c9 parasite s’hypertrophient peu, mais épais- sissent leurs parois, et, s'ils sont .__. externes, se lignifient rapidement. C’est Fig. 373. — Schéma indi- À b a l 1 quant les phénomènes € que nous avons observé dans la gale d'hypertrophie (a, b) et du Brachypodiun (page 161 et fig. 32) d'hyperplasie É d) se et dans la plupart des galles à parasite se manifestent dans les nr : ; celtes autour du pars externe, étudiées au chapitre pee site z. Enfin, pour toutes les cécidies examinées, nous avons vu que c’est toujours dans les cellules situées à une certaine distance du parasite que se manifeste le maximum d'activité cécidogénétique. 20 RAYON D'ACTIVITÉ CÉCIDOGÉNÉTIQUE. Au fur et à mesure qu'on s’écarte du parasite, l’action cécidogène va en diminuant, puis ne se fait plus sentir à partir d’une certaine distance. Il existe donc un rayon d'activité cécidogénétique. Il faut bien remarquer que ce rayon détermine dans l’espace une sphère d'influence cécidogénétique, dont le centre est occupé par le parasite ; une coupe horizontale passant par ce centre donne le cercle équatorial ou cercle cécidogénétique. La longueur du rayon d'activité cécidogénétique dépend du para- site et du végétal. a. Influence du parasite. Le rayon d'activité cécidogénétique est proportionnel à la taille du parasile. Ainsi lAtripleæ nous a offert une diptérocécidie assez pelile, presque sphérique (5 mm. de diamètre), dont la larve à 3 mm. de long. Au contraire, la grosse chenille du Coleophora Stefani placée dans la moelle de la même plante, c’est-à-dire dans des conditions assez identiques à celles qui précèdent, détermine d’épais renflements pouvant atteindre 10 mm. de diamètre transversal et 30 mm. de longueur. GALLES DE TIGES. 401 D'une façon générale, les grosses larves des Lépidoptères et des Coléoptères engendrent des cécidies de dimensions beaucoup plus volumineuses que celles qui proviennent des petites larves des Diptères, des Hyménoptères ou des Hémiptères. Le rayon d'activité cécidogénétique est proportionnel au nombre des parasites. C’est un fait bien connu que les cécidies caulinaires pluriloculaires sont beaucoup plus grosses que les cécidies uniloculaires. De plus, nous avons vu, daus la galle du Sfefaniella Trinacriæ que la présence d’une seule cavité larvaire dans la moelle entraînait une hyperplasie localisée au tissu médullaire (en À, fig. 374) et que, au contraire, la présence de plusieurs larves au même niveau permettait à l’action cécidogène de s'étendre à l'écorce (B, fig. 375). À B C FiG. 374 (A). — Schéma de l’action cécidogénétique développée par un parasite situé dans la moelle de la tige. FiG. 375 (B). — Schéma identique dans le cas de quatre parasites. Fi@. 376 (C). — Schéma de l’action cécidogénétique développée par un grand nombre de parasites très petits. Souvent aussi, la faible taille des parasites peut être compensée par leur nombre (C, fig. 376) : ainsi la longueur des Eriophyides ne dépasse pas 300 v, et pourtant les galles déterminées sur les tiges par ces minuscules acariens (par exemple l’Eriophyes pini) sont souvent aussi volumineuses que celles produites par de grosses larves d'insectes. C'est qu'alors il y à un nombre considérable de petits parasites et que ceux-ci, s'insinuant dans les méats cellulaires, hypertrophient ou hyperplasient les cellules. 8. Influence du végétal. Ce qui modifie aussi très fortement le rayon d'activité cécidogé- nétique, c'est la résistance à l’action cécidogène que présente le 26 402 C. HOUARD. tissu végétal. Cette résistance dépend surtout de l’âge et de la structure du tissu. Nous avons vu, dans le chapitre précédent, que les tissus jeunes, susceptibles encore de croissance, étaient seuls modifiés par l'action cécidogène et que ceux, déjà lignifiés au moment où l’in- fluence parasitaire commençait à se faire sentir, étaient pour elle un obstacle presque infranchissable. 30 RÉACTION VÉGÊÉTALE ; FORME DE LA CÉCIDIE. L'action cécidogène développée par le parasite a donc pour effet de modifier la région de la tige environnante et d’en hypertrophier ou d'en hyperplasier les cellules et les tissus. Nous avons vu d'autre part que le rayon de cette surface modifiée (examinée en coupe transversale) était déterminée par certaines conditions tenant à la taille et au nombre des parasites ou bien à l’état des cellules végétales. T À B C Fi. 371 (A-B). — Schémas de cécidies caulinaires présentant un plan de symétrie x. FiG. 378 (C). — Schéma d’une cécidie caulinaire présentant un axe de symétrie. Mais, ainsi que nous l'avons mis en évidence dans le cours de ce travail, la région de la tige opposée au parasite ne subit pas en général l’action parasitaire ; elle ne se déforme pas et joue le rôle de point fixe. Tous les tissus gallaires sont alors refoulés du côté du parasite par une sorte de réaction végétale p (fig. 377), émanée du point d'appui; ils se développent uniformément à droite et à gauche du plan de symétrie + délerminé par la génératrice médiane de la région non déformée et par le parasite; ce plan contient toujours l'axe de la tige. GALLES DE TIGES. 403 Le plan de symétrie + se rencontre dans toutes les cécidies des trois premiers chapitres. Dans le chapitre IV, l'hypertrophie des tissus gallaires se produit dans toutes les directions avec une égale intensité et par suite les cécidies possèdent un axe de symétrie; action cécidogène « et la réaction + agissent dans le même sens (fig. 378). Forme de la galle. — La forme de la section transversale | médiane de la galle dépend de la section de la tige, du rayon d'activité cécidogénétique et de la position du parasite. Toutes ces conditions étant déterminées, le contour de la Section médiane de la galle se présente comme étant la courbe enveloppe de la circonférence de la tige et de la circonférence du cercle cécidogénétique. Les figures schématiques 379-383 représentent la N Il IE. I IV Fic. 379 (N). — Section transversale de la tige normale. FiG. 380 (I). — Courbe enveloppe d’une cécidie appartenant au chapitre I. Fic. 381, 382 (III, III). — Courbes enveloppes de cécidies appartenant au chapitre III. FiG. 383 (IV). — Section d’une cécidie appartenant au chapitre IV. ce, cercle de la tige ; ce”, cercle cécidogénétique ; 3, parasite ; agi, assise génératrice interne ; », moelle. section normale de la tige (N), puis les courbes enveloppes des cécidies appartenant aux trois derniers chapitres de ce travail (I, MSI, IV): 49 NUTRITION DES TISSUS GALLAIRES ET DU PARASITE. L'étude détaillée des cécidies nous a montré qu'aux environs du parasite il se produit d’abondants tissus hyperplasiés formés de cellules très grandes, riches en protoplasme, en matériaux nutritifs, et contenant de gros noyaux; la nutrition de ces tissus, ainsi 404 GC. HOUARD. que celle du parasite qui les consomme, ne peut être assurée que par les faisceaux libéro-ligneux, Voyons comment : a. Si le parasite est externe, les faisceaux libéro-ligneux les plus rapprochés sont fortement hypertrophiés (A, fig. 384); leur partie libérienne est bien développée et voisine de l’animal. E FiG. 384-391. — Schémas indiquant de quelle façon l'irrigation des tissus gallaires est assurée : 384 (A), dans le cas d’un parasite 3 situé contre l’épiderme ep : 389 (B), dans le cas d’un parasite situé dans l'écorce ; 386 (C), lorsque le parasite est logé dans les tissus secondaires libéro - ligneux (bs, /s) ; 37 (D), lorsque la tige possède du hber interne li ; 388 (E), lorsque le parasite est situé dans la moelle ; 389 (F), par un faisceau irrigateur irr, lorsque le parasite est logé dans la moelle ; 390 (G), lorsque le parasite est éloigné du faisceau ; 391 (H), dans le cas où il se produit des cellules irrigatrices irr’. b, 1, bois et liber primaires; agi, assise génératrice interne ; bs”, ls’, tissus secondaires d’un faisceau d'irrigation trr ; chl, chambre larvaire. Dh. Siles parasites sont situés dans l'écorce, comme c'est le cas pour GALLES DE TIGES. 405 la cécidie de l'Eriophyes pini, les cellules corticales cloisonnées qui leur servent de nourriture sont alimentées par la région libérienne de l’anneau vasculaire hypertrophié en cet endroit (B, fig. 385). c. La nutrition du parasite est facilement assurée lorsque celui-ci établit sa cavité larvaire dans les tissus provenant du fonctionnement exagéré de l’assise génératrice interne (C, fig. 386). La larve trouve là du liber secondaire à parois minces et du bois secondaire non lignifié. C’est cette disposition que présentent toutes les cécidies examinées dans le chapitre III, sauf celle du Glechoma hederacea, sur laquelle nous allons revenir plus loin. d. Dans le cas où la tige possède à la fois un parasite situé dans la moelle et du liber interne (fig. 387, D, schématisant la galle de l’Æpilobium montanum), c'est ce dernier tissu qui s'hyperplasie et permet la nutrition des tissus médullaires, excessivement cloison- nés comme on l’a vu. e. Mais, lorsque les tissus hyperplasiés qui entourent le parasite sont un peu éloignés du faisceau libéro-ligneux — et c'est le cas pour beaucoup de cécidies médullaires — il est nécessaire qu'ils restent en relation avec le faisceau afin de pouvoir continuer à se développer. En général, dans les cécidies qui présentent cette disposition, les faisceaux libéro-ligneux sont très écartés les uns des autres par le cloisonnement actif des rayons médullaires ; c'est alors l’assise génératrice interne de chaque faisceau qui fonctionne, en dehors de lui, dans le rayon médullaire hyperplasié et se dirige vers la cavité larvaire. J'ai schématisé en E (fig. 388), en prenant pour exemple la Coléoptérocécidie de l'Atripleæ Halimus, la façon dont fonctionne cette assise génératrice : le lissu libérien secondaire produit se trouve en rapport direct avec la cavité larvaire. Souvent, le faisceau tout entier est désorienté, parfois même renversé complètement : sa région libérienne est alors tournée vers le parasite. f. Enfin, si la cavité larvaire se trouve située à une très grande distance du faisceau libéro-ligneux, l’assise génératrice interne est obligée de fonctionner très activement el de produire un mince faisceau libéro-ligneux. Nous avons désigné ce dernier sous le nom de faisceau irrigateur, car il est chargé d'alimenter le pour- tour de la cavité larvaire. D'abord sa région libérienne appa- 406 G. HOUARD. raît et les vaisseaux ligneux ne se développent que beaucoup plus tard. La figure 389 (F) représente schématiquement cette dispo- sition que nous avons rencontrée, au cours de ce travail, dans les cécidies du Potentilla reptans et de l’Hieracium umbellatum (voir le schéma S,, fig. 222, et la figure 234). Nous retrouvons du reste ces faisceaux irrigateurs chaque fois que la chambre larvaire est très éloignée des faisceaux caulinaires. C’est ainsi que nous en avons signalé dans la cécidie du Glechoma hederacea (G, fig. 390) qui pourtant tire son origine de l’assise génératrice interne. Dans tous les exemples étudiés au cours de ce travail, les faisceaux d'irrigation ont produit et alimenté autour de la cavité larvaire la couche nourricière et la couche protectrice. On a pu voir que la zone nutritive est constituée par la réunion des parties libériennes des petits faisceaux irrigateurs et que la zone scléreuse comprend de courts vaisseaux secondaires ponctués. Du reste, nous avons trouvé tous les intermédiaires entre ces derniers vaisseaux ponctués et les vaisseaux spiralés ou à réticu- lations serrées des pelits faisceaux d'irrigation (en A3, fig. 221). g. Pour être complet, notons encore un autre mode de nutrition des tissus médullaires hyperplasiés, présenté par les cécidies de l’'Hypochæris et de l'Atriplex. Dans ces deux tiges parasitées, les assises génératrices des faisceaux vasculaires fonctionnent peu; ce sont les cellules médullaires, situés entre la cavité larvaire et l'extrémité des faisceaux, qui s’allongent radialement et assurent la nutrition des tissus entourant les larves. Nous avons désigné ces cellules sous le nom de cellules irrigatrices. La figure 391 (H) représente schématiquement cette disposition. 5° RELATION ENTRE LA STRUCTURE DE LA GALLE ET LA MÉTAMOR- PHOSE DU PARASITE. Tout ce que nous avons vu jusqu'à présent se rapporte au s{ade de vie active du parasite qui mange ou suce et grandit. Pendant ce temps, la plante réagit vigoureusement par l'hypertrophie et l'hyper- plasie de ses tissus, par le fonctionnement actif de ses assises géné- trices et par une irrigation abondante de ses différents tissus: c’est la période végétative ou de croissance de la cécidie. GALLES DE TIGES. 407 Puis, peu à peu, la larve ralentit ses mouvements et se mélarnor- phose. Les matériaux nutritifs accumulés autour de la cavité larvaire, dans des tissus bien irriguêés, servent à épaissir les parois de ces tissus qui se lignifient fortement et constituent bientôt une coque scléreuse : c’est l'état scléreux de la cécidie ; les ponctuations des parois cellulaires permettent les échanges gazeux ou liquides encore nécessaires au parasite. On rencontre de ces coques scléreuses dans la plupart des Dipté- rocécidies, mais ce sont surtout les cécidies des Cynipides qui nous en ont présenté de très résistantes, permettant aux larves de passer l'hiver dans la galle. Un état scléreux beaucoup plus simple se manifeste, au voisinage de l'animal, dans les galles âgées à parasile externe (Hémiptéro- cécidies et Diptérocécidies étudiées au chapitre 1). 6° CHUTE DE LA GALLE ET CICATRISATION DE LA PLAIE; RÉTA- BLISSEMENT DE LA STRUCTURE NORMALE DE LA TIGE. «x. Plante herbacee. Si la plante meurt à la fin de l’année, la galle se dessèche en même temps que la tige, mais un peu moins cependant en raison de ses réserves et de ses tissus lignifiés ; la larve peut y passer l'hiver et s’y métamorphoser à l'abri de sa coque larvaire ; après l'éclosion, la galle se détruit peu à peu. 6. Plante ligneuse. Pour les plantesligneuses, il y a deux cas à distinguer : la galle se détache du rameau et tombe ou bien elle fail corps avec lui et en suit l’évolution. a. La galle tombe. — Lorsque la galle fait fortement saillie hors de la tige et n’est reliée à elle que par une base assez étroite, elle tombe en général par suite de l'apparition d'une bande de liège cica- triciel /gc (en A, fig. 392), en relation avec le liège normal /g£. Comme dit PAUL VuILLEMIN [95, p. 144], « la plante neutralise les influences irritantes par le rejet définitif du corps étranger ou de ceux de ses propres organes qui ont subi l'influence pernicieuse ». Deux très beaux exemples de chute de galles nous ont été fournis : 1° par la cécidie du Cherimes abictis qui se dessèche etse détache peu 408 C. HOUARD. à peu du rameau du Picea eæcelsa, en y laissant une cicatrice allongée ; 2° par la cécidie de l’Andricus Sieboldi qui se dessèche et se détache en laissant sur la tige une dépression circulaire concave. Fi. 392 (A). — Schéma de la formation d’une couche cicatricielle dans le cas où la cécidie tombe. FiG. 393 (B). — Schéma de la formation d’un anneau subéreux autour de la chambre larvaire vide. FiG. 394 (C). — Schéma de la formation d’anneaux de liège autour des faisceaux libéro-ligneux. b, bois ; /, liber ; /gt, liège de la tige : /gc, liège cicatriciel ; chl, chambre larvaire. À l'abri de la couche de liège cicatriciel, l’assise génératrice interne fonctionne et rétablit la structure normale, comme nous l'avons vu pour les deux exemples cités plus haut. Plusieurs années après, rien ne vient plus à l'extérieur signaler qu'une galle a autrefois déformé la tige. Mais il n’en est pas de même si l’on examine avec soin une section transversale : l’irrégularité des couches ligneuses annuelles est toujours visible. b. La galle fait corps avec le rameau et produit un faible renflement.—Lorsque les parasites ont abandonné la cavité larvaire, une couche de liège cicatriciel {ge (en B, fig. 393) apparaît autour de cette cavité, qu’elle soit située dans l'écorce (galle de l’Eriophyes pini) ou dans les tissus hypertrophiés de l’assise génératrice interne (galles du Cytisus et du Sarothamnus) ou enfin dans la moelle (galles de l’Ulex, du Sedum, etc.). Le système vasculaire est alors protégé du milieu extérieur par le périderme normal /gt et de la cavité larvaire (qui communique aussi avec l'extérieur) par la couche de liège cicatriciel /gc. L’assise génératrice interne fonclionne à nouveau régulièrement et la croissance du rameau peut se conti- nuer les années suivantes (Ulexæ, Sarothamnus, etc.). GALLES DE TIGES. 409 Dans la partie concave de la galle du Populus alba que nous avons étudiée, l’assise subéreuse cicatricielle prend un dévelop- pement remarquable, car le milieu extérieur agit fortement par suite de là fente du rameau sur les tissus hyperplasiés. Il en est de même dans la Lépidoptérocécidie du Pinus silvestris: la couche cicatricielle est localisée aux deux bords de la fente et en rapport avec le périderme sous-épidermique de la tige ; autour de la cavité larvaire le tissu cicatriciel ne se produit pas à cause de la présence du bois secondaire lignifié. Enfin, dans le cas où tous les faisceaux sont complètement isolés les uns des autres, comme dans la galle de l'Ephedra (C, fig. 394), il se forme un anneau de liège cicatriciel autour de chacun d'eux. La protection si efficace des faisceaux et leur isolement des tissus gallaires qui se dessèchent assurent, ici encore, la croissance du rameau au-dessus de la galle. 7° INFLUENCE DE LA GALLE SUR LA TIGE ET SUR LA RAMIFICATION. «. Modifications dans la structure de la tige au-dessous el au- dessus de la galle. — La cécidie amène souvent de profondes modifications dans la structure de la portion de tige qui la surmonte ou dans celle qui la porte. Nous avons examiné ces différences de structure pour la Phytoptocécidie du Pinus silvestris (page 194) et pour la cécidie du Populus alba (page 365) ; nous avons trouvé, au-dessous de la galle, la tige toujours épaissie et raccourcie et son bois secondaire, ses fibres péricycliques, corticales ou médullaires plus développées que dans la tige normale ; au-dessus de la cécidie, les dimensions de la tige et de l’anneau vasculaire étaient très réduites. 8. Courbure du rameau. — La courbure est toujours la conséquence du développement plus considérable des tissus d’un même côté du rameau. Ou bien, comme pour la cécidie du Sisym- brium Thalianum, c’est la position excentrique de la larve dans la moelle qui amène une hyperplasie latérale de l'anneau vasculaire ; ou bien, c’est un arrêt dans le fonctionnement de l’assise généra- trice interne d’un côté de la tige qui provoque la courbure, ainsi que nous l’avons vu pour l’hémiptérocécidie du Picea excelsa (page 184, fig. 66 à 68). 410 CG. HOUARD. y. Désorientation complète du rameau.— La cécidie du Chermes abietis nous a encore montré comment la galle peut agir pendant plusieurs années sur le rameau et arriver à changer parfois complètement son orientation (voir la fig. 72). à. Raccourcissement du rameau. — Nous avons insisté plusieurs fois sur le raccourcisseinent qui résulte de la présence d'une cécidie vers la base du rameau et nous avons vu que la galle agit surtout en privant de nourriture la partie terminale. Les cécidies du Chermes abietis, de l'Harmandia petioli et du Contarina tiliarum empêchent la croissance des rameaux; mais ce sont surtout les cécidies médullaires de l’Aulax hypochæridis, de l'Aulax hieracii, du Coleophora Stefanii, etc. qui les raccourcissent le plus (voir plus haut, page 384). Souvent le raccourcissement et l'épaississement des rameaux se produit à distance, par exemple pour les rayons médians et latéraux des ombelles du Torilis Anthriscus (fig. 276). . Disparition du rameau. — En étudiant la cécidie du Picea exæcelsa (page 186), nous avons vu que la présence de la galle peut amener le dessèchement et, par suite, la disparition des petits rameaux parasités, ce qui modifie totalement la ramification (fig. 73). Dans les ombelles du Torilis Anthriscus, nous avons vu aussi disparaitre un rayon central sous l'influence parasitaire. » Modification dans la disposition des rameaux latéraux. — Si la présence de la cécidie entraîne l’atrophie d’un faisceau libéro- ligneux, tous les petits rameaux normalement irriguês par lui restent courts : un changement complet se produit dans la rami- fication. C’est ce que nous a présenté la galle du Populus alba (fig. 358 et 359). v. Apparition de racines adventives et de tiges adventives. — Les recherches de PRILLIEUX et de BELHERINCK, que nous avons rapportées dans le premier chapitre, ont prouvé que des racines adventives pouvaient naître au-dessus d'un nœud de la tige du Poa nemoralis et sous l'influence de l’'Hormomyia poæ. Y'ai montré, par l'étude détaillée de la cécidie de l'Andricus Sieboldi, que l'on devait la considérer comme une petite tige adventive, d'origine endogène, produite à la base du jeune Chêne, mais restée courte par suite de la présence du parasite en son centre. GALLES DE TIGES. 411 CONCLUSIONS GÉNÉRALES 1° Action cécidogène. Le parasite détermine une action cécidogène qui se traduit dans les tissus des tiges par des phénomènes d'hypertrophie et d'hyperplasie cellulaires. L'action cécidogène se fait sentir autour du parasite avec une égale intensité dans toutes les directions. Au contact du parasite, l’action cécidogène est presque nulle et les cellules s'hypertrophient peu; c'est à une certaine distance seulement qu’elle se manifeste avec le maximum d'intensité. 20 Rayon d'activité cécidogénétique. L'action cécidogène va en diminuant au fur et à mesure qu'on s'éloigne du parasite, d'où la notion du rayon d'activité cécidogé- nétique. Ce rayon dépend du facteur parasite et du facteur végétal; il est proportionnel à la taille des parasites et à leur nombre ; àl est fonction de l’âge et de la structure des tissus. 3° Réaction végétale ; forme de la cécidie. La partie non déformée de la tige développe une réaction végé- lale qui repousse les tissus gallaires. Sile parasite est situé au centre de la tige, la cécidie possède un axe de symétrie ; elle possède un plan de symétrie quand le parasite est extérieur, dans l'écorce ou dans la zone ligneuse. Le contour de la coupe transversale médiane de la galle est la courbe enveloppe de la section de la tige et du cercle cécidogé- nélique ; les dimensions de cette courbe enveloppe dépendent du rayon de la tige, du rayon d'activité cécidogénétique et de la position du parasite par rapport aux différentes zones de la tige. 4° Nutrition des tissus gallaires et du parasite. La nutrition des tissus hyperplasiés qui entourent le parasite est assurée surlout par la partie libérienne des faisceaux 412 G. HOUARD, vasculaires de la tige ; si le parasite est éloigné de ces faisceaux, leurs assises génératrices internes fonctionnent dans les rayons médullaires, se dirigent du côté du parasile el produisent de petits faisceaux d'irrigation dont la région libérienne est tournée du côté de la cavité larvaire. 9° Relation entre la structure de la galle et la métamorphose. Au stade de vie active du parasile correspond une période de croissance pour la cécidie; à celte période succède un éëlat scléreux ex relation avec la métamorphose de l'animal. 6” Chute de la galle; cicatrisation de la plaie ; rétablissement de la structure normale de la tige. Pour les plantes herbacees, la destruction de la galle se produit comme celle de la tige, mais un peu après. Pour les plantes ligneuses : a. La galle tombe par Suite de la production d’une couche de liège qui cicatrise la plaie ; le fonctionnement de l'assise généra- trice interne redevient peu à peu régulier : b. La galle se cicatrice, du côté de la cavilé larvaire aban- lonnée, par une couche de liège cicatriciel : c. La cicatrisation est surtout abondante pour les galles qui fendent les rameaux ; d. Dans la galle de l'Ephedra, chaque faisceau est enveloppe d'une couche de liège cicatriciel ; e. Si les faisceaux caulinaires sont protégées, la croissance de la tige peut se continuer au-dessus de la galle. 7 Influence de la galle sur la tige et sur la ramification. La présence de la galle peut entraîner pour la tige : la modifi- cation de sa structure au-dessus el au-dessous de la cécidie: sa courbure la première année et même sa désorientation complète les années suivantes ;: le raccourcissement de la portion qui surmonte la cécidie et souvent sa disparition ; l'apparition de racines adventives et de rameaux adventifs. GALLES DE TIGES. 413 INDEX BIBLIOGRAPHIQUE BEUERINCK, M.-W. 1882. — Beobachtungen über die ersten Entwicklungsphasen einiger Cynipidengallen. Natuurk. Verh. der Koninkl. Akademie, Deel, 22, p. 1-198, pl. I-VI. 1885. — Die Galle von Cecidomyia Poæ an Poa nemoralis. Entstehung normaler Wurzeln in Folge der Wirkung eines Gallenthieres. Botanische Zeitung, Leipzig, 43, p. 305-315, 321-332, pl. LIL. FOCKEU, H. 1890. — Observations sur la Galle du Sinapis arvensis déter- minée par le Ceuthorhynchus contractus Mars. Revue biol. du Nord de la France, Lille, 2, p. 261-269, fig. 1-3. FRANK, A.-B. 1896. — Die Krankheiïten der Pflanzen. Breslau, 3, zweite Auflage. GAIN, E. 1894. — Sur une galle de Chondrilla juncea. Bull. Soc. Bot. France, Paris, 1, p. 252-254. HIERONYMUS, G. 1890. — Beiträge zur Kenntniss der europäischen Zoocecidien und der Verbreitung derselben. Ergänzungsheft zum 68. Jahresbericht der Schlesischen Ge- sellschaft für vaterlandische Cultur, Breslau, p. 49-272. 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LETTRES COMMUNES A TOUTES LES FIGURES ag assise génératrice. age assise génératrice externe. agi assise génératrice interne. agp assise génératrice péricyclique. al aile libérienne à gros noyaux. am amidon. ar aile vasculaire de tissu aréolé. b bois. bg bourgeon. bs bois secondaire. bois secondaire péricyclique. c cellule, cloison. cb cellule ligneuse. ce "cercle. cg couche génératrice. chl chambre larvaire. cl cellule à chloroleucites. cn couche nourricière. co. collenchyme. cp couche protectrice. cr couche rayonnante. cs canal sécréteur. ct cellule à tanin. écorce. écorce externe. écorce interne. endoderme. épiderme. épiderme inférieur. épiderme supérieur. fibre: fibre ligneuse. fe feuille. ft _ fibre libérienne. faisceau libéro-ligneux. fibre péricyclique. fibre périmédullaire. g gaîne. cellule gommeuse. hyp hypoderme. irr faisceau irrigateur, tissu d’irriga- tion, cellules irrigatrices. liber. tissu lacuneux. lacune. liège. liège cicatriciel. liège de la tige. liber interne. liber secondaire. liber secondaire péricyclique. moelle. métaxylème. méat. noyau. mâcle d'oxalate de calcium. péricycle. tissu palissadique. pôle ligneux. périderme. phelloderme. zone périmédullaire. parenchyme. rayon médullaire. sillon, canal, fente, craquelure. sclérenchyme. stomate. tissu cicatriciel. tissu vasculaire. vaisseau. vaisseau spiralé. vaisseau ponctué. animal cécidogène, parasite. GALLES DE TIGES. 417 N Normal. «x action cécidogène développée par A Anormal. le parasite, E Vue extérieure. p réaction due au végétal, L Coupe longitudinale. x plan de symétrie, T Coupe transversale. R Rameau. Toutes les figures ont été dessinées à la chambre claire, au grossissement 15 pour les schémas d'ensemble et au grossissement 150 pour les coupes détaillées. 418 G. HOUARD. TABLE DES MATIÈRES. Pages INTRODUGTION eco een etes -teecct. crie Du 0 ‘140 CHAPITRE I. — Cécidies caulinaires latérales produites par un parasite situé contre l'épiderme. 2. echec EC Er Ce 145 Hedera Helix (Asterolecanium Massalongoïanum)................. 146 Potentilla hrrianar pedaal(Goccide) MERE PE Cort ee 154 Brachypodium silvaticum (Diptère)>../ Re... 157 Frasinus excelsior (Perrisia fraxinl)>.2-. 22... 00 164 Piceaexcelsa (CGhermes’ablotis). 15 7e na SR Re cer 170 RÉSUME; 2e Len rt srnuteeesecet seen pere C RL E 188 CHariTRE II. — Cécidies caulinaires latérales produites par un parasite situé dans l'éCOrCe..... 2-7 ces Ac mer cbr: ee 19 Pinus silvestris (Eriophyes pint)e-.-2.-....-...---.....--.--6 19 RÉSUMÉ. Zusssonesassess con: eee cet creccme DAC 195 CHAPITRE III. — Cécidies caulinaires latérales produites par un parasite situé dans les formations secondaires libéro-ligneuses................. + 196 Tilia silvestris (Contarimia iliarum).... 20.0... 200 ne 197 Populus Tremula (Harmandia petioli)............................ 214 Salix capræa (Rhabdophaga salicis).............................. 223 Sarothamnus scoparius (Gontarinia Scoparii)...................... 280 Quercus coccifera (Plagiotrochus fusifex)......................... 229 Rubus fruticosus (Lasioptera rubi)................................ 233 Brassica oleracea (Geuthorrhynchus pleurostigma)................ 242 Glechoma hederacea (Aulax Latreillei).......:................. 246 Cytisus albus (Agromyza Kiefferi)..............................e 251 Sarothamnus scoparius (Agromyza pulicaria)..................... 260 Quercus pedunculata (Andricus Sieboldi)......................... 262 RÉSUMÉ essence eee PO RESe OA TAC AVE AO 270 Cuapirre IV. — Cécidies caulinaires produites par un parasite situé dans la moslem rase. ASS TES LPPREES SÉRCMOTIAE PO ce on 274 Sisymbrium Thalianum (Ceuthorrhynchus atomus)................ 274 Potentilla reptans (Kestophanes potentillæ) ...................... 278 Hieracium umbellatum (Aulax hierach)......................... 291 GALLES DE TIGES. 419 Hypochæris radicata (Aulax hypochæridis). ....................., 298 Atriplex Halimus (Stefaniella Trinacriæ) ......................... 305 Eryngium campestre (Lasioptera eryngii)........................, 910 Torilis Anthriscus.(Lasioptera carophila)....5..................... 920 Sedum Telephium (Nanophyes telephii)..... Se LÉ T ar, ME 2 Atriplex Halimus (Coleophora Siefanii)........................... 339 Uleseuropæust(Apiontescutellare)".. "70-002, 346 Ephedra distachya(Gécidomyide)s 22. ee chassesseosrmros 390 Epilobium montanum (Mompha decorella)........................ 306 Epilobium tetragonum (Mompha decorella)...................,,.. 300 Populus alba (Gypsonomalaceriana)... Me ele a sos 303 Prnus stlvestrisi(Bvetria TOSINeMA). eee. HO) RÉSUMÉ 2: «censure mec an his lee ee eas 382 CHAPITRE V, — Résumé général des modifications apportées par les galles AMRISBUSIAESITITOS ce den iet dus. sem mer ee eve 380 CHaPiTRE VI. — Résumé général des relations existant entre les tiges, les pleurocécidies caulinaires et les parasites, . ......,.................... 399 CDACIUSIONSIGENERADES eee cesse ces eee ce 411 Imdexebibhagraphique RC tee 413 Pettres communes à toutes les figures. 2.2... nn... 416 CONTRIBUTION A L’ÉTUDE DE LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES JuLESs COTTE, DocTEUR EN MÉDECINE, PHARMACIEN DE l'E CLASSE, Ex-CHEF DES TRAVAUX PRATIQUES D'HISTOIRE NATURELLE A L'ÉCOLE DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE MARSEILLE, INTRODUCTION. Nous connaissons fort mal encore la biologie des animaux inférieurs, et cependant le champ d’études est bien vaste. Les Éponges n'échappent pas à cette règle; de plus la plupart des renseignements qui ont été fournis sur elles par les divers obser- vateurs sont restés isolés les uns des autres. J'ai cherché à condenser dans ces pages ce que l’on savait à ce jour sur la Nutrition chez les Spongiaires ; sur un grand nombre de points j'y ai ajouté l'exposé de mes recherches personnelles. Après quelques considérations sur le courant aquifère j'aurai à examiner l'ingestion des particules alimentaires, leur digestion. Puis viendra l'étude des sécrétions et des pigments, celle des matières de réserve; l’excrétion fera l’objet du dernier chapitre. Des raisons extra-scientifiques m'ont empêché d'étudier la respiration chez les Éponges et m'ont obligé à laisser provisoirement dans l’ombre tout un côté du problème que je m'étais attaché à résoudre. Mes recherches ont été poursuivies en, partie au Laboratoire de Physiologie de la Faculté des Sciences, les autres au Laboratoire LA NUTRITION CHBZ LES SPONGIAIRES. 421 de Zoologie marine d'Endoume, qui porte aujourd’hui le nom du Maître regretté par lequel mon esprit a été formé à l’étude de la zoologie. M. le Professeur Grarp a bien voulu me conseiller le choix de ce sujet de thèse, me donner des encouragements et enrichir mes notes de renseignements précieux : je le prie de croire à ma vive gratitude. Mon bien cher Maître, M. le Professeur JourRDAN, m'a fait entreprendre mes premières recherches sur les Éponges et je n'ai pas cessé depuis ce moment de travailler dans les laboratoires qu'il dirige. Il m'a fourni l'appui de ses conseils et d’une bienveillance qui ne s’est jamais démentie; il sait déjà combien je lui suis reconnaissant de ce qu’il a fait pour moi. Mon excellent collègue le docteur STEPHAN, chef des travaux d'histologie, m'a fait largement profiter de sa science de cytologiste et de technicien érudit. Je l'en remercie vivement. J'ai eu souvent recours, pendant ces recherches, aux conseils de MM. les Professeurs RiETscx et BERG, de notre École de Médecine, ou aux ressources de leurs laboratoires. M. CAULLERY, professeur de zoologie à la Faculté des Sciences, m’a donné de précieuses marques de bienveillance ; MM. ToPpsENT et LENDENFELD ont bien voulu me fournir le nom spécifique de quelques espèces de Spon- glaires. À tous je dis bien sincèrement merci. J’adresse un souvenir affectueux à mes Maitres de la Faculté des Sciences, MM. les Professeurs VASSEUR, PERDRIX, VAYSSIÈRE, HECKEL et JUMELLE. Il est impossible de fournir ici des détails sur les techniques que j'ai suivies : les méthodes de recherches ont été trop variées pour que la chose me soit possible. Ces renseignements seront donnés successivement au cours de ce travail. Dès maintenant cependant je puis indiquer que les pièces utilisées pour les recherches histologiques avaient subi l’action de fixateurs variés : alcool absolu, formol à 10 °/,, liquide de Bouin, liqueurs de ZENKER, de FLEMMING, de PÉRENYI, acide osmique en vapeurs, sublimé acétique, ete. L'alcool absolu ne m'a pas donné de bons résultats, la liqueur de PÉRÉNYI non plus. Le formol à 10°, fixe très bien les cellules sphéruleuses, médiocrement les autres 422 JULES COTTE. éléments mésogléiques (1); après son emploi les choanocytes souffrent beaucoup pendant le passage dans la paraffine. Les solutions osmiquées donnent régulièrement avec les tissus qui renferment des lipochromes des noircissements intenses, qui rendent nécessaires des traitements à l’essence de térébenthine. Les inclusions ont été rarement faites à la celloïdine, générale- ment à la paraffine ; le séjour dans les bains de paraffine à été très court, 3 à 5 minutes en moyenne. Comme décalcifiant je me suis servi de l'acide picrique toutes les fois que le fixateur employé n'était pas lui-même un décalcifiant; pour les recherches sur les Cliones j'ai employé quelquefois l'acide azotique en présence de la phloroglucine. Les méthodes de coloration ont été variées : couleurs d’aniline, bleu polychrome, hématoxyline ferrique. C’est surtout pour l’étude des cellules sphéruleuses que ces colorants ont été utiles. Chez un certain nombre de Monaxonides la coloration à la safranine-picro- nigrosine est réellement utile : le kératode qui unit les spicules se colore assez fortement en bleu par la nigrosine, ce qui fournit des préparations à la fois agréables à l’œil et faciles à interpréter. Les recherches ont porté, à des titres divers, sur les Spongiaires dont la liste suit. Ils ont tous été pêchés dans le golfe de Marseille, exception faite pour Spongilla lacustris que mon ami STEPHAN a bien voulu me faire parvenir de Niort. Ascelta coriacea HÆCKEL. Sycandra raphanus (GRAY) H#cKk. Sycandra compressa (GRAY) HÆCK. Sycandra elegans (Bow.) Hæ&ck. Sycandra ciliata (FABR.) HÆGK. Cydonium gigas (Scamibr) SOLLAS. Chondrosia reniformis NaRDbo. Cliona celata GRANT. Cliona vastifica Hancock. Cliona viridis (ScamiT) Gray: Suberiles domuncula (OLrvri) NaRbo. (1) J'emploierai indifféremment les mots de mésoglée et de mésoderme pour désigner l'assise intermédiaire qui existe chez les Éponges entre le revêtement extérieur et l’assise des choanocytes. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 423 Tethya lyncurium (LiNNÉ) LAMARCK. Spongilla lacustris LAMARCK. Chalinine (1). Reniera simulans JOHNSTON. Reniera fistulosa (BOWERB.) SCHMIDT. Esperella œgagropila (JoaxsrT.) ToPSENT. Dendoryx incrustans viscosa Tops. Myvilla voisine de M. banyulensis Tops. Bubaris vermiculata (Bow.) GRAY. Stelospongia sp. Spongelia pallescens fragilis tubulosa ScHULZE. Spongelia pallescens fragilis ramosa SCHULZE. Spongelia pallescens fragilis incrustans SCHULZE. Spongelia pallescens elastica massa SCHULZE. Spongelia pallescens elastica lobosa ScHULZE,. (1) Je désignerai sous ce nom une Chalinine qui me paraît nouvelle, et dont l'étude sera faite ailleurs. 424 JULES COTTE, CHAPITRE PREMIER. CONSIDÉRATIONS SUR LA CIRCULATION CHBZ LES SPONGIAIRES. Lorsque GRANT eut découvert quelle est la marche du courant aquifère dans le corps des Spongiaires, les recherches des physiologistes devinrent possibles. Les expériences de GRANT furent unanimement confirmées par tous ceux qui ont étudié les éponges ; on remarqua cependant que le courant aquifère peut accidentellement subir une direction inverse, l'ouverture osculaire pouvant se transformer en voie d'inhalation. Cette dernière observation a été faite par BowERrBANK (1) [56], par MixLucxo Maczay [68] et par HxckEeL [72]; je n'ai pas eu la bonne fortune de pouvoir la renouveler. Il nous faut cependant accepter les renseignements fournis par ces observateurs, tout en avouant ignorer complètement les raisons qui déterminent de telles anomalies. La structure anatomique des voies aquifères semble plaider contre la possibilité d'un renversement du courant ; VOSMAER et PEKELHARING [98] admettent que ce renversement n’est qu'apparent et ne gagné pas jusqu'aux chambres ciliées. Vingt-cinq ans après la découverte de GRANT, DoBIE (cité par HæckeL) et BowErBANK [52] observérent les cils vibratiles des choanocytes, et purent enfin comprendre par quel mécanisme l’eau parcourt le trajet plus ou moins compliqué qu'elle a à accomplir dans le corps des Spongiaires. BOWERBANK vit que le mouvement des choanocytes tend à pousser l’eau vers l’oscule et à assurer ainsi le renouvellement du liquide dans l’intérieur de l'éponge; il crut en outre reconnaître que ce mouvement n’est pas synchrone, chacun des éléments étant entièrement indépendant des autres. Cette observation, renouvelée par d’autres auteurs (VosMAER el PEKELHARING), est en désaccord avec ce que nous savons du mouvement des cils vibratiles et des flagella. Depuis des recherches (1) Les numéros qui suivent les noms d'auteurs sont formés par les deux derniers chiffres de l’année où a paru le travail auquel il est fait allusion. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 495 bien connues (VERWORN, etc.) nous avons appris que le mouvement des éléments vibratiles tend à se propager sous forme d'ondes à la surface des territoires cellulaires; chacun des flagella n'entre en fonction que lorsque le flagellum de la cellule précédente a déjà accompli une partie de son mouvement, et lui-même commande en quelque sorte le mouvement du flagellum de la cellule suivante. Il serait intéressant de constater chez les éponges une exception à cette règle ; malheureusement la preuve pour ou contre est difficile à faire. On ne peut pratiquer les examens microscopiques que sur des dissociations grossières, ou sur des coupes pratiquées à main levée sur l'animal vivant ; dans les deux cas il est impossible de ne pas produire de déchirures sur des tissus aussi mous que ceux des éponges, de ne pas déterminer de solution de continuité dans l’assise cellulaire qui forme la paroi des corbeilles vibratiles. Nous savons, depuis les recherches de VERWORN, que toute solution de continuité dans une bande vibratile détruit l'harmonie qui existait en avant et en arrière de la section. Nous pouvons nous attendre à retrouver chez les éponges des faits de même ordre. Lorsqu'on examine un fragment un peu volumineux pris dans une corbeille vibratile d'éponge calcaire, dont les dimensions se prêtent à de pareilles observations, on peut voir par places le mouvement des flagella se produire sous forme d'ondes, avec un rythme particulier au moment où se fait l'observation, mais qui à ce moment est le même pour tous les flagella d’un même territoire. Par contre, à côté de ces cellules à mouvement régulier, on en trouve d’autres qui ont une allure absolument désordonnée. L'examen de coupes grossières, faites sur des Sycandra raphanus vivants, ne m'a rien appris de plus. Comme il est bien difficile de faire la part du traumatisme dans ces phénomènes complexes, il m'a paru impossible de décider si les choanocytes doivent être rangés parmi les éléments épithéliaux à mouvements réguliers, ou doivent au contraire constituer un groupe spécial. BoWERBANK a remarqué que le mouvement des choanocytes peut s'arrêter ou se ralentir à certains moments; l’auteur anglais avait même voulu généraliser ces phénomènes et décrire deux temps alternatifs: un, de courte durée et pendant lequel les flagella seraient animés d'un battement rapide, aurait servi à la nutrition de l'individu; l’autre, de durée plus longue, caractérisé par un mouvement lent, devait correspondre à la période de respiration. 426 JULES COTTE. C’est une erreur. Il est parfaitement admissible que le besoin de nourriture doit accélérer le mouvement des flagella, et HÆCKEL dit avoir constaté que le courant augmente de rapidité quand on ajoute des matières alimentaires à l’eau qui renferme les éponges. Il est vraisemblable également qu'un animal saturé de nourriture, gavé à refus, sera principalement occupé à la digestion des substances ingérées et ne sera pas excité à faire battre énergiquement ses flagella ; il y aurait à ce moment un repos relatif. Mais il est erroné de croire que cette période de calme représente une phase respiratoire : l'osmose des substances gazeuses se produit constamment et n’est nullement en relation avec le changement de rythme des mouvements ciliaires. LENDENFELD, dans ses expériences d'alimentation artificielle et d'intoxication des éponges [89], a observé fréquemment l'occlusion des pores. Il s’agit alors d'un mouvement de défense qui amène une diminution momentanée dans l'intensité du courant aquifère. Puis, l’asphyxie gagnant l'éponge, les pores se rouvrent à nouveau et le courant reprend son allure normale. La rapidité de ce courant n’est pas constante en tous les points de son parcours; ce fait résulte de la forme même du système de canaux que traversent les liquides. Nous avons d’abord à l'entrée un point rétréci, constitué par le pore inhalant ou par le cône, dans lequel le courant est très rapide; on voit en effet que les particules solides en suspension dans l’eau de mer sont violemment entraînées en ce point vers l’intérieur de l'éponge. Puis se rencontre le système des canaux inhalants, où la circulation est relativement un peu plus lente ; à leur suite se place une dilatation, c’est la corbeille vibratile tapissée par les choanocytes. La conséquence de l’accroissement de diamètre qui se trouve en ce point est une brusque diminution dans la rapidité du courant. L’étroitesse des pores qui donnent accès dans les corbeilles détermine une augmentation notable de la rapidité du courant au niveau des prosopyles. Il est certain que cette disposition morphologique a pour résultat la formation d’un remous ou d'un tourbillon au point où l’eau pénètre dans la corbeille vibratile. Dans cette dernière les flagella, par leurs battements actifs, produisent un brassage énergique de l’eau et par conséquent des particules en suspension dans celle-ci. On trouve done ainsi réalisée de la façon la plus complète possible, dans les corbeilles vibratiles, l'agitation du liquide circulant que nous verrons être nécessaire pour l’ingestion LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 427 des particules alimentaires. Il y a en ce point diminution de la pression et de la rapidité du courant inhalant, mais par contre contact plus intime de l’eau et des aliments qu'elle renferme avec les choanocytes qui sont les organes de l’absorption. On ne comprend donc pas cette assertion de POLÉJAEFF [83] que dans les corbeilles de Sycon il existe au centre, suivant leur axe, un courant très actif qui entraîne toutes les particules alimentaires, alors que le courant est relativement lent contre les parois. Ce fait est vrai pour la circulation dans les capillaires de l’homme, où l'on remarque une couche inerte au contact de l’endothélium, mais les conditions sont essentiellement différentes dans les deux cas, et il est impossible de les comparer. Après la corbeille vibratile se trouvent les canaux exhalants, dans lesquels le courant reprend à nouveau une rapidité un peu plus grande. Généralement l’ensemble des canaux exhalants est d'un diamètre supérieur à celui des canaux inhalants. Topsexr signale que chez les Clionides la circulation de l'eau ne se fait pas suivant la marche normale : il y a abouchement direct des canaux inhalants dans le système exhalant, les corbeilles vibratiles seraient établies seulement en dérivation. Ce fait, que nie LENDENFELD, aurait des conséquences importantes au sujet de l’activité de la circulation chez ces animaux. En effet vivant enfouis à l’intérieur de corps solides, au moins pendant une certaine période de leur existence, ils ne peuvent pas avoir de rapports avec la mer par leur surface générale ; ces rapports ne peuvent s'établir que par les papilles qui se dressent de place en place. A cette première cause de gêne dans la circulation s'en ajouterait une deuxième due à la situation des chambres ; on conçoit en effet que placées ainsi en dérivation, en dehors du courant en quelque sorte, elles ne puissent produire qu’à grand’peine un effet utile. Ajoutons qu'un troisième obstacle à la circulation de ces animaux est représenté par leurs diaphragmes. L'examen de coupes d'un certain nombre d'individus de CZiones (CI. vastifica et CT. celata principalement) ne me permet guère d'accepter l'opinion de TopseENT. Pour la soutenir cet auteur s'appuyait sur ce fait que les corbeilles vibratiles ne communique- raient avec le système aquifère que par une seule ouverture, volumineuse. Ce dernier point semble inexact, ainsi que LENDENFELD [96] l’a déjà constaté. J'ai pu voir sur des coupes, avec la plus 498 JULES COTTE. grande netteté, les pores qui font communiquer les cavités inhalantes avec les corbeilles vibratiles ; ils sont rarement plus de deux sur la coupe d’une corbeille. Les canalicules dans lesquels ils donnent sont fréquemment étroits et paraissent constitués parfois par de simples lacunes du tissu fondamental ; dans ce dernier cas évidem- ment ils ne sont pas tapissés par des cellules plates. Nous aurions ainsi par places, chez les Cliones, une disposition rappelant la structure trabéculaire des Heæactinellides; ce serait entre de véritables trabécules que l’eau cheminerait pour aller des canaux aux prosopyles. Dans d’autres cas, je le répète, on constate nette- ment que les corbeilles sont situées entre deux canaux (1). La communication entre la corbeille et le canal exhalant se fait par une large ouverture. Je ne crois pas qu’il y ait lieu de séparer les Cliones des autres Spongiaires en ce qui concerne la structure de leurs corbeilles vibratiles. Les canalicules inhalants communiquent avec les exhalants par l'intermédiaire des chambres flagellées, qui peuvent ainsi travailler utilement à la production du courant aquifère. TopsENT fait remarquer que l’on voit sur les coupes trop peu de pores pour qu'ils puissent être considérés comme des formations normales. La raison en tient à l’amibicité extrème de toutes les cellules des Cliones, si sensibles aux excitations exté- rieures. Le simple fait de sortir une Clione de l’eau et de la projeter dans un liquide fixateur suffit à l’exciter et à lui faire contracter ses diaphragmes ; rien d'étonnant à ce qu’elle ferme en même temps les pores de ses corbeilles vibratiles. On sait qu'un grand nombre d'éponges, les Cliones comprises, peuvent aussi fermer les orifices exhalants de leurs corbeilles. Je ne m’arrêterais pas sur la cause de la progression de l’eau, sur le mouvement des flagella, tant l'accord semblait unanime chez tous ceux qui ont parlé des choanocytes, si dans leur Traité de Zoologie concrète DELAGE et HÉROUARD n'avaient pas fourni une interpréta- tion nouvelle de ce phénomène. D’après ces auteurs la cellule active imprimerait un mouvement de cireumduction très énergique à son flagellum primitivement contourné en hélice. La réaction de ce mouvement tendrait à faire tourner le choanocyte sur lui-même, en sens inverse de celui du flagellum ; comme le choanocyte est fixé, (1) Cette disposition se trouve figurée, par places, dans un dessin de TOPSENT (01, fig. 57). LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 429 c’est l’eau qui est attirée à la cellule par un mouvement hélicoïdal. La résultante de tous les petits courants élémentaires ainsi formés est représentée par le courant général de l'éponge. Cette explication est parfaitement acceptable au point de vue théorique en ce qui concerne les Choanoflagellés ; elle l’est beaucoup moins lorsqu'on considère les corbeilles vibratiles des Spongiaires. Remarquons en effet qu’une corbeille peut être schématiquement représentée par une sphère creuse percée d'un pore en deux points opposés. Lorsque tous les flagella entreront en mouvement, en admettant que les faits se passent conformément à la théorie précédente, l’eau contenue dans la corbeille sera attirée vers les choanocytes, contre la paroi de la corbeille, mais il n’y aura pas pour cela progression de liquide dans le système circulatoire. Les flèches par lesquelles on pourrait représenter la marche de l'eau seront normales à la surface de la sphère et neutraliseront leur effet, deux à deux, suivant les diamètres de la sphère. Il y aura simplement accroissement de pression dans l'intérieur de la corbeille. IL est à remarquer de plus que chez presque tous les Spongiaires l'ouverture qui met en rapport la corbeille et le canal exhalant (apopyle) est d’un diamètre supérieur à celle qui sert de débouché au canal inhalant. La conséquence de cette disposition est que le courant devrait se faire de l’apopyle au prosopyle, de l'oscule aux pores. L'observation directe permet d’ailleurs de se faire une tout autre idée de la marche des choses. Les auteurs sont unanimes à recon- naître que le mouvement des flagella est comparable à celui d’un fouet, à celui que VALENTIN a appelé #2otus undulatus. On comprend très bien pour quelle raison physiologique il ne peut pas être le même chez les Spongiaires et chez les Choanoflagellés. Chez ceux- ci il sert à la progression de l'animal ou au contraire à l’adduction de l’eau ambiante; il doit donc se produire autour d’un axe parallèle au grand axe de l'animal, ou mieux identique avec celui-ci. Tandis que chez les éponges le mouvement de l’eau résultant de l’action des flagella doit être, dans l’ensemble, perpendiculaire à l'axe des choanocytes. Des buts différents sont atteints par des procédés différents. Il y a lieu de tenir compte, il est vrai, de ce que les choanocytes ont un grand rôle à remplir, dont il sera question plus tard, celui de l'absorption des particules solides, ce qui nécessite que ces particules viennent à leur contact. Il n’est pas besoin pour 430 JULES COTTE. cela que le mouvement des flagella soit tel que l’ont imaginé DELAGE et HÉRoUARD. Nous avons été amenés à admettre l'existence d’un remous au débouché des canaux inhalants dans les corbeilles. De plus la grande longueur des flagella est éminemment favorable pour déterminer un brassage énergique de l’eau circulante. Chaque choanocyte travaille d’une façon que l’on pourrait appeler aveugle, car une grande partie des corpuscules que son flagellum met en mouvement sera perdue pour lui. Mais dans l’ensemble d’une chambre flagellée ces diverses actions sont utilisées, et lorsque le liquide circulant sort par l’apopyle la plus grande partie des particules alimentaires qu’il renfermait s’est trouvée en contact avec des choanocytes. Un organe énigmatique se rencontre chez un certain nombre d'espèces, c’est la cellule centrale des corbeilles. DELAGE, qui lui a donné ce nom, l’a observée [92] chez Æsperella sordida et chez. Reniera densa. Avant lui SoLLas [88] l'avait remarquée chez diverses Hevactinellides. J'ai pu la voir aussi chez Spongilla lacustris, Cliona vastifica et CI. celata. Ainsi que le fait observer DELAGE, il y a fréquemment de deux à trois cellules dans une même corbeille. Ce sont des cellules étoilées, à prolongements protoplasmiques très allongés, des cellules en araignée. Leur protoplasma est homogène, sans enclaves d'aucune sorte; les prolongements sont homogènes également, filiformes et vont se perdre entre les choanocytes. Dans un certain nombre de corbeilles quelques prolongements paraissent se fixer au bord de certaines collerettes, parfois même une seule collerette reçoit deux prolonge- ments, comme si la cellule centrale faisait effort pour maintenir ces collerettes largement ouvertes. Dans des corbeilles voisines, dont les collerettes se soudaient par leur bord en une membrane continue, il ne m'a pas été possible de savoir si les prolongements traversaient cette membrane. DELAGE a pu suivre ces filaments protoplas- miques jusqu'au niveau du corps des cellules flagellées ; je ne les ai pas vus. pénétrer aussi loin. Dans un certain nombre de cas les flagella eux-mêmes étaient soudés à la cellule centrale et ne pouvaient pas être distingués des prolongements; il est probable que certains de ces aspects sont des artifices de préparation. Le rôle des cellules centrales est extrêmement obscur. SOLLAS croyait avoir affaire à des cellules flagellées tombées dans la corbeille ; cette opinion n’est pas admissible à cause de la forme des LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 431 cellules centrales et de leur constance relative dans les corbeilles vibratiles d’un individu donné. Leur aspect n'est pas celui des cellules en dégénérescence; elles se colorent d'une façon très normale avec les divers colorants (hématoxyline ferrique, safranine- picro-nigrosine, bleu polychrome, etc.) ; elles possèdent une allure qui est toujours la même. S'il s'agissait réellement d'un choanocyte transformé, il faudrait admettre que chez certaines espèces les choanocytes subissent normalement une évolution spéciale en vue de remplir une mission encore mystérieuse. DELAGE avait émis tout d’abord l'hypothèse que la cellule centrale pourrait être chargée d’une fonction spéciale. IL était pénétré des idées de LENDENFELD, qui ne croyait pas à l'existence entre les choanocytes d’un espace libre, le peripheral space de DENDY, et admettait que cet espace est comblé par une substance gélatineuse ; aussi avait-il supposé que la cellule centrale pourrait être chargée de sécréter cette substance, qui pour lui serait cependant très ténue et très rare et laisserait subsister le peripheral space. I] paraît être revenu de cette opinion et se demande [99] si l'on ne se trouverait pas en présence d'éléments amiboïdes de la mésoglée venus à la recherche des aliments que le jeu des flagella ferait passer à leur portée. Il avait combattu lui-même cette hypothèse en 1892, en faisant remarquer que les choanocytes sont les agents normaux de l'absorption des aliments et ne semblent nullement avoir besoin d’être suppléés. Ces hésitations sont très légitimes, car les cellules centrales sont vraiment étranges. Mais je reprends volontiers pour mon compte l'argument de 189; du moment que ce sont les choanocytes qui ingèérent, quelle est la nécessité de ces cellules supplémentaires, qui ne peuvent que gêner le mouvement des flagella ? Je me suis demandé [02 b] si l’on n'avait pas affaire à des amibo- cytes ayant émigré sous l'influence des phénomènes asphyxiques. J'ai pu constater que, dans les stades préagonaux ou agonaux, les cellules amiboïdes et les ovules de Sycandra raphanus, attirés par la chimiotaxie positive de l'oxygène dissous dans l’eau que con- tiennent les chambres, subissent des phénomènes de migration qui peuvent les conduire jusque dans l’intérieur du système aquifère. IL se pourrait que ce soient des faits de même ordre qui déterminent l'apparition des cellules centrales : je me garderai bien de faire la moindre affirmation à ce sujet. Je le répète, les cellules centrales 433 JULES COTTE. n’ont pas du tout l'aspect des cellules en dégénérescence et elles semblent jouer un rôle réellement actif. La situation des cellules centrales ne nous apprend pas grand chose. Placées généralement vers le milieu des corbeilles, on les voit parfois au niveau de l’apopyle qu’elles semblent obstruer en partie. Je ne crois pas cependant qu'il y ait lieu de les considérer comme des éléments chargés de produire l’occlusion de l’apopyle et de régler ainsi le courant aquifère ; cette occlusion paraît être le fait des pinacocytes qui bordent l'ouverture exhalante des chambres chez un certain nombre d'espèces. D’autres fois la cellule centrale est rejetée au niveau des pores inhalants, entre les choanocytes. On peut dire qu'il est possible de la rencontrer en tous les points de la corbeille, bien que la position subcentrale soit la plus fréquente. Je viens de rappeler que l’occlusion des apopyles paraît être due aux contractions des pinacocytes qui les bordent, celle des proso- pyles me paraît être produite par le simple rapprochement des choanocytes. On sait que chez les Jeæactinellides les choanocytes sont réunis par un beau réseau protoplasmique; l'examen des coupes de Syc. raphanus permet de voir en certains points l’exis- tence de prolongements filiformes qui relient les choanocytesentre eux ou avec les cellules profondes. Ces prolongements sont bien plus nombreux et plus puissants chez les éponges siliceuses. Lorsque les connexions qui réunissent les choanocytes entre eux agissent seules et se contractent, les choanocytes sont rejetés vers le centre des corbeilles vibratiles, les prosopyles se ferment. Au contraire si ce sont les prolongements vers les cellules mésogléiques qui se meltent en jeu, les choanocytes s’écartent, les prosopyles s'ouvrent. On comprend que le jeu simultané de ces prolongements détermine la forme généralement sphérique ou ovoïde des corbeilles vibratiles, cette forme n'étant que le résultat des actions élémen- taires produites par les cellules les unes sur les autres, à l’aide de leurs connexions. Dans les dissociations de Silicisponges à petites corbeilles on trouve en abondance des corbeilles intactes, sphériques d'ordinaire, dans la cavité desquelles les flagella s'agitent avec rapidité. A côté de celles-ci on en trouve d’autres qui se sont retournées en doigt de gant et dont les flagella sont situés au dehors. Il est très logique d'admettre que ces dernières ont été LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 433 blessées par l'aiguille à dissociation qui a lacéré leur paroï sur une longueur plus ou moins grande et déchiré un certain nombre de connexions protoplasmiques, et ce sont les prolongements restés intacts qui ont déterminé le retournement de la corbeille, en continuant à agir pour leur compte et sans contrepoids. Dans les dissociations d’éponges calcaires il est três difficile de faire la part de ce qui revient aux contractions mésogléiques propre- ment dites dans le retournement des lambeaux de chambres flagellées. On sait qu'il est fréquent de voir dans les dissociations ces lambeaux avec leurs choanocytes groupés au centre, et leurs flagella qui s’agitent à l'extérieur. Par la méthode des imprégnations au nitrate d'argent (TOPSENT) on observe un certain nombre de lacunes entre les pinacocytes qui revêtent les canaux. Ces lacunes, ainsi qu'on peut s'en rendre compte sur des dissociations d'animal vivant, sont instables en un lieu donné et se forment ou disparaissent successivement, suivant le jeu des contractions des pinacocytes. Grâce à elles le milieu intérieur dans lequel sont baignées les cellules mésogléiques est en communication continuelle avec le liquide circulant. Par ces méats l’eau peut pénétrer dans les lacunes de la substance fondamentale, apportant avec elle les corps qu'elle tient en dissolution, gaz et aliments : c’est la continuation du courant inhalant en pleins tissus. On pourrait dire qu’il existe un courant lacunaire inhalant, chargé de fournir aux tissus profonds les substances nécessaires à leur respiration et partiellement à leur alimentation. Par ces méats encore est rejetée l'eau polluée, chargée d’acide carbonique et de produits de désassimilation; c’est alors un courant lacunaire exhalant qui suit une direction inverse du précédent. On comprend que je n’emploie ici le mot de courant que dans un sens très large. L’écartement des pinacocytes ou leur rapprochement détermine la formation ou la disparition des méats, aussi l’assise cellulaire qui borde les canaux nous apparaît-elle comme étant le régulateur de la circulation lacunaire. Il est vraisemblable que les pinacocytes, en réalité, ne règlent pas cette circulation au hasard de leurs contractions, maisque ces contractions elles-mêmes sontcommandées par les phénomènes qui se produisent dans les régions plus profondes. La composition chimique de celles-ci détermine, au moment et à l'endroit utile, la mise en jeu des forces physico-chimiques qui produisent les changements de forme des cellules revêtantes. 28 434 JULES COTTE. Dans les dissociations on ne voit que très lentement, en général, se modifier la forme de ces cellules. Quelques-unes, cependant, montrent à ce point de vue une activité égale à celle des phagocytes. Dans les dissociations de À. simulans j'ai remarqué à plusieurs reprises la présence de perforations à l’intéreur des pinacocytes. J'avais cru dans les débuts à des accidents de préparation, mais le fait m'est apparu trop fréquemment pour que je puisse mettre en doute son existence normale. On peut trouver des pinacocytes qui ont plusieurs perforations d’un diamètre très restreint, au plus égal à celui du noyau. Chez d'autres, les espaces vides peuvent être plus larges et atteindre même le diamètre d’une cellule normale. Dans ce cas on voit d’un côté le noyau avec la plus grande partie du corps cellulaire, de l’autre un filament protoplasmique plus ou moins mince qui limile la perforation. On pourrait aisément admettre que ces formations représentent des méats intracellulaires. Dans son essence le mécanime de leur apparition serait bien le même que pour celle des méats intercellulaires, mais il exigerait la mise en jeu d’une amibicité bien plus forte de la part des cellules actives et rappellerait ce que MINcHN a décrit au sujet des transformations des porocytes. On peut objecter que les pinacocytes que j'ai examinés et qui possédaient ces formes étranges avaient subi des changements de forme anormaux sous l'influence de leur séjour sur la platine du microscope. Telle n'a pas été mon impression, et je crois que chez l'espèce citée ci-dessus les communications entre les lacunes interslilielles et l’eau de mer peuvent s'établir entre les pinacocytes ou au travers de ceux-ci. TopsenT [87] figure des cellules contractiles de Cliona et de Reniera qui possèdent le même aspect perforé sur lequel je viens d'insister. On sait que les Hexactinellides ont une structure trabéculaire qu’'Isima a bien mise en relief. Chez les espèces de ce groupe il ne faut pas songer à chercher de courant lacunaire Imhalant ou exhalant, toute l'éponge étant en somme composée d’une masse de trabécules plongés dans l’eau de mer. Rapprochons ces trabécules, nous obliendrons le choanosome des éponges plus compactes, mais il restera, entre les cellules qui représentent les trabécules primor- diaux, les espaces lacunaires sur lesquels j'ai insisté plus haut el qui sont l’analogue des espaces intertrabéculaires. On objectera peut-être qu'il est hasardé d’admettre l'existence de courants lacunaires d’après quelques déformations de pinacocytes. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 439 Un argument de première valeur est fourni par les recherches histologiques de Topsenr [surtout 87 |, que j'ai rappelées plus haut, et qui démontrent l'existence des méats intercellulaires sur l'animal vivant. On trouvera cités dans le cours de ce travail un certain nombre de faits qui conduisent également à admettre l'existence des méats et des courants lacunaires. D'ailleurs l'examen de la substance fondamentale elle-même permet aussi de poser les mêmes conclusions. Je reproduis ici les dessins que j'ai pris en examinant au microscope un fragment de substance fondamentale de Subertiles. Fic. 1. — Substance fondamentale de S. domuncula. Dissociation. Grossis- sement 550 diam. D a été dessiné cinq minutes après a, c après cinq nou- velles minutes. On voit des sphérules éparses ; en un coin est un paquet de granulations rouges. Sur la platine du microscope celte substance possédait des mouve- ments assez actifs et se contractait avec une certaine rapidité. Il m'a même semblé qu'il n’était possible de l’apercevoir que lorsqu'elle se contractait. On remarquera qu'une partie du dessin primitif n’est pas reproduite dans les deux derniers croquis ; quels qu’aient été le diaphragme et l'éclairage employés, j'ai dû renoncer à peu près à distinguer cette région, devenue d’une réfringence égale à celle de l’eau de mer. Dans les parties qui étaient soumises à des contrac- 436 JULES COTE. tions, l'examen microscopique était au contraire des plus faciles. Je n’emploie les termes de mouvement et de contraction, bien entendu, que pour désigner les changements de forme d’une subs- tance inerte par elle-même, mais qui paraît jouer un grand rôle par sa struclure physique et par la facilité avec laquelle elle se prête aux déplacements des liquides et des corps solides. C’est dans les cavités, les vacuoles figurées dans les dessins ci-joints que je place le siège des courants lacunaires. A ARR LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 437 CHAPITRE IL. INGESTION DES ALIMENTS. Les recherches sur l'alimentation des Éponges et sur la manière dont elles utilisent les aliments ingérés sont extrêmement nom- breuses. Elles ont été faites suivant des procédés bien différents. On a placé des éponges dans de l’eau de mer renfermant des substances solides, colorées de préférence, et on a observé ensuite dans quelles cellules se trouvaient les particules ingérées. Ou bien on a mis des substances alibiles en contact direct avec les tissus des Spongiaires pour voir quelle serait leur destinée. Les éponges ont été parfois placées dans des solutions colorées ; on à ainsi cherché s’il y avait absorption des matières colorantes, et suivi leur évolution à l’aide de dissociations. A côté de toutes ces méthodes de recherches, qui sont nécessaire- ment employées sur les animaux vivants, 1l faut placer les études de chimie biologique sur les diastases qui rendent assimilables les aliments des éponges. Nous allons examiner successivement ces diverses faces de la question. Les recherches sur l'ingeslion des particules solides ont été faites avec des poudres inertes comme l'indigo, le carmin et le charbon, ou avec des corps réellement alimentaires comme l’amidon, le lait, les bactéries. Remärquons immédiatement que nous nous hasardons trop peut-être en regardant l'acide carminique comme un corps inerte; c'est un acide, jouissant par conséquent de propriétés chimiques suffisamment marquées pour pouvoir agir d’une façon appréciable sur les cellules vivantes. De plus, en présence des sels alcalins de l’eau de mer il subit une attaque sensible et entre partiel- lement en solution, si bien que les animaux en expérience se. trouvent en réalité plongés dans une solution faible de carminates alcalins, renfermant du carmin solide en suspension. Cependant bien que, de par sa constitution chimique, l’acide carminique nous apparaisse comme susceptible de subir une combustion partielle dans l'organisme animal et de devenir en fait un véritable aliment 438 JULES COTTE. occasionnel, il ne paraît pas en être ainsi en réalité. Je n'ai rien vu de semblable à ce qu'ont signalé certains auteurs, pour lesquels les grains de carmin rejetés par les éponges possèderaient un volume moindre et des angles moins vifs qu'avant leur ingestion. De telles observations sont extrêmement difficiles à vérifier ; elles ne prouvent pas d’ailleurs que le carmin est partiellement digéré par les éponges, car les grains de carmin peuvent diminuer de volume en formant des combinaisons solubles avec des substances alcalines, telles que les ammoniaques composées qui sont rejetées par les Spongiaires. Depuis GRANT, qui découvrit la circulation des éponges en les mettant dans de l’eau de mer tenant des particules solides en sus- pension, cette méthode de recherches a été employée bien souvent, et un fait a été constamment observé, c'est que les éponges se remplissent, se gavent rapidement des substances solides qui leur sont offertes. LiEBERKÜHN |56, 57] a constaté l'absorption du carmin chez la Spongille, mais ne se hasarde guère à préciser quelles sont les cellules actives. CARTER [56, 57, 70] a vu que chez la Spongille et chez Teichonella labyrinthica les choanocytes, seuls, ingèrent le carmin. BOWERBANK [64] admettait que la capture d’indige se ferait au niveau des canaux inhalants et de l’ectoderme. JAMES-CLARK | 66] a vu l’ingestion directe des corpuscules d’indigo par les cellules à collerette, ce qui l’a conduit à supposer que ces cellules sont pourvues d’une ouverture buccale permanente. HxckeL [72], dans ses recherches sur les éponges calcaires (carmin, indigo), admet que les choanocytes ingèrent : « sie essen und trinken ». KeLLER [78] admet que les cellules amiboïdes se chargent de la nourriture prise et assimilée par les cellules flagellées. METSCHNI- KOFF [79] a bien constaté l'absorption du carmin par les choanocytes des Calcisponges (Ascetta primordiulis), mais il admet un processus différent pour l'alimentation des Silicisponges (Spongilla, Reniera aquæductus, Siphonochalina coriacea, Halisarca Dujardini) qui se ferait par l'intermédiaire des amibocytes qui bordent les canaux. Il ne refuse cependant pas [82] aux choanocytes le pouvoir d’ingérer des corps étrangers. VosmaER [81], au contraire, rend aux choanocytes la fonction d'ingestion, LENDENFELD [83, 84] croit que chez Aplysina violaced les cellules plates ectodermiques absorbent la nourriture qui serait ensuite prise par les amibocytes où elle serait digérée, et les choano- LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 439 cytes excrèteraient les résidus. BALrOoUR [83] croit aussi que l'absorption peut se faire par les cellules qui tapissent les canaux inhalants jusqu'aux chambres ciliées; ScHuLzE l'a informé par lettre que les cellules à collerette ont une fonction respiratoire et que les cellules dérivées des cellules granuleuses sont chargées de la nutrition. HE1DER [86] a vu que chez Sycon raphanus el Osca- rella lobularis le charbon et le carmin sont ingérés par les cellules à collerette, chez les Reniera ces poudres ne feraient que traverser les plaques épithéliales de recouvrement et iraient s’'accumuler dans l’intérieur des cellules mésodermiques. Bipper [8S8, 95] a observé chez Leucosolenia aspera a capture du charbon par les choanocytes. Topsenr [87, 98, O1] admet que les cellules mésodermiques sont chargées de l'ingestionu (Cliona celata, Reniera rosea, autres Rentierinæ, diverses Monaïronides). LENDENFELD | 89] à la suite d'expériences très nombreuses effectuées avec du carmin, du charbon, du lait, conclut que c'est aux choano- cytes que doivent être attribuées les fonctions d'absorption des aliments solides. SoLLas [88] a vu que l’ingestion du carmin est faite par les choanocytes de la Spongille, celle des diatomées pourrait se faire par les cellules épithéliales. DELAGE [92] a observé l'ingestion du carmin par les choanocytes des Spongilles ; MASTERMANN [94] arrive: aux mêmes conclusions chez Grantia compressa (carmin, charbon); WELYTNER [96] également chez Ephy- datia fluviatilis (carmin). LoiseL [98] admet l’ingestion par les cellules mésodermiques de Spongilla fluviatilis et de Reniera Ingalli, el cependant il trouve également des enclaves dans les choanocytes. VOsMAER el PEKELHARING [98| ont vu ingérer les choanocytes de Spongilla lacustris et de Sycon ciliatum. ZemLrrscakA [00] arrive à des conclusions identiques après avoir immergé des individus de Syc. raphanus dans de l’eau de mer renfermant du carmin el du charbon. DENDY [01] ayant remarqué chez Leucosoleniaæ proxima un réseau mésodermique à l'intérieur des cavités gastrales (nous aurons à revenir sur ce point), a admis à priori qu'il s'agissait de cellules groupées pour faire l’ingestion de particules alimentaires. Ainsi qu'on peut le voir, les opinions des divers auteurs sont des plus variées. IL y a cependant un point à relever, c’est que, en ce qui concerne les Calcisponges, il y a avis à peu près unanime pour placer l'absorption au niveau des choanocytes. Pour les 440 JULES COTTE. autres éponges les avis diffèrent. Le plus grand nombre des auteurs cités ci-dessus s'accorde à faire encore des cellules flagellées les agents de l'absorption, et si nous exceptions du débat BoWERBANK et BALFOUR qui paraissent parler seulement en théoriciens, si nous omettons LIEBERKUHN dont l'opinion est assez hésitante et LEn- DENFELD (première manière) qui a rectifié sa manière de voir, il ne reste plus que les voix de METscHNIKOrr, de TopsenT et de LolsEL à opposer à celles du groupe compact des autres observateurs. Il est vrai que ces voix ne sont pas des moins autorisées. HEIDER et SoLLAs sont les seuls à accorder aux pinacocytes, dans certains cas, la faculté d’ingérer des particules alimentaires. Il n’y a pas lieu de s'étonner que l'accord ne soit pas parfait sur une pareille question, puisque la méthode employée est sujette à de nombreuses causes d'erreur. Lorsqu'on met des éponges dans de l’eau tenant des particules inertes en suspension, il y a d’abord absorption par l'éponge d'une grande quantité de particules dont le sort est variable : quand elles ne sont pas susceptibles de digestion, un certain nombre seront presque immédiatement rejetées par les cellules qui ont fait l'ingestion. D’autres, on le verra, seront transportées dans le corps de l'éponge par les cellules mésogléiques auxquelles on aura alors chance de rapporter la faculté d’ingestion ; elles seront enfin rejetées, et le point où se fera cette excrétion pourra aussi être pris pour un lieu d'absorption. C'est à des causes d'erreur de ce genre qu'il faut rapporter, à mon avis, le résultat contradictoire des recherches brièvement résumées plus haut. Aussi y a-t-il lieu de faire une place spéciale aux observations de VOsMAER et PEKELHARING, qui ont opéré avec les plus grandes précautions. Ils ont remarqué que, après une demi-heure à une heure de séjour dans l’eau de mer renfermant du carmin ou du lait, on trouve ces matières en abondance dans les cellules flagellées des Spongilles, très peu au contraire dans les cellules mésogléiques. Si l'expérience se prolonge 24 heures, il y a plus de carmin dans la mésoglée que dans les corbeilles vibratiles; en mettant ensuite les éponges dans de l’eau pure, on ne retrouve plus ou presque plus de carmin dans les choanocytes, alors que la mésoglée en renferme en abondance. ; Les dernières expériences de LENDENFELD [89], qui sont de beaucoup les plus importantes sur cette question (le mémoire de l'auteur occupe près de trois cents pages et est orné de 24 planches), LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 441 ont porté sur 18 espèces, représentant les principaux groupes d'éponges, les Hexactinellides exceptées. Elles ont été effectuées avec du carmin, de l’amidon et du lait (1). Voici les principales conclusions de l’auteur : 4° L’absorption des substances alimentaires se fait dans l'intérieur du corps de l'éponge ; 2 Ce sont les cellules à collerette qui prennent normalement les matériaux contenus dans l’eau qui circule ; 3 Celles-ci ne se transforment pas lorsqu'elles sont gorgées de nourriture et n'émigrent pas à l’intérieur de la mésoglée ; 4° Il est probable que les grains de carmin ne sont pas cédés par les choanocytes aux cellules migratrices ; 5° Les corpuscules gras du lait sont ingérés par les cellules à collerette et sont cédés aux cellules migratrices. L'auteur allemand a constaté aussi que l'espèce de bombardement déterminé contre l'éponge par le choc répété des corpuscules de carmin et d’amidon qui sont en suspension dans l’eau amène dans le début des expériences l’occlusion des pores de l'animal, que l’amidon a des grains trop volumineux pour être ingérés, que le lait est mal toléré par les Chondrosiées. J'ai répété ces expériences, et je me suis servi à cet effet de carmin, d’amidon, de lait, de charbon et de bactéries. J'aurais voulu opérer sur des diatomées, mais il me fallait pour ces recherches des espèces à très petites dimensions. On m'avait conseillé de m'adresser à la flore des aquariums, je n'ai malheu- reusement pas pu réussir mes cultures. C’est un point à recom- mencer. L’amidon employé a élé l’amidon de riz. LENDENFELD fait remarquer que celui dont il s’est servi avait des grains trop gros, qui n’arrivaient même pas à traverser les pores de l’ectoderme ; les grains plus petits, qui pouvaient pénétrer jusqu'à l'intérieur de l'éponge, élaient encore d’un diamètre trop considérable pour pouvoir être ingérés par les choanocytes. Le même auteur nous avertit que Nozx nourrit ses Spongilles, en aquarium, avec de (1) J'omets à dessein de citer ses expériences sur l’action des poisons (mor- phine, etc.) qui ne rentrent pas dans le cadre de ce travail. 442 JULES COITTE. l'amidon de riz, et ses expériences l’amënent à conclure que l'éponge ne doit pas se nourrir de la matière amylacée, mais bien du glucose que les microorganismes doivent produire aux dépens de cette substance. Avant d'employer l’amidon de riz, j'ai eu la précaution de le trilturer longuement pour détruire les amas de grains qui le com- posent en partie, et pour fragmenter les grains eux-mêmes. Ainsi préparé, l’amidon a été ajouté à de l'eau de mer où se trouvaient des Sycandra raphanus, le tout étant maintenu agité par un barbotage d’air filtré. Après un nombre d'heures variable, les animaux ont été fixés par les vapeurs d’acide osmique, décalcifiés à l’acide picrique, inclus dans la paraffine et débités en coupes. On peut ainsi voir aisément que les grains d’amidon les moins volu- mineux sont ingérés par les choanocytes; on constate même que ceux-ci peuvent absorber des corpuscules amylacés d’un volume égal au leur ou même supérieur (fig. 2). FiG. 2. — Sycandra raphanus nourri 3 heures à l’amidon de riz. Acide osmique en vapeurs, acide picrique. Hémat.-éosine. a, b, c, d, h, grains d'amidon partiellement englobés. En 4, g, h se voient des vésicules. J'ai déjà décrit [02 c] les vrais phénomènes de phagocytose qui se produisent à cette occasion. J'ai fait remarquer que l'on peut voir, accolées contre le corps étranger, des sortes de lames proto- plasmiques qui constituent de véritables pseudopodes. Quand il s’agit d’une proie trop volumineuse, dont l'ingestion est particu- lièrement longue et pénible, le protoplasma de la cellule ingérante se réduit à une sorte de membrane qui s’amincit graduellement pour envelopper la substance nutritive. J'ai comparé cet aspect à celui de la cupule qui entoure le jeune gland du chêne. On voit parfois dans le protoplasma une ou deux sphérules, que dans certains cas LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 443 l’éosine a vivement colorées en rouge, et dont la nature exacte m'est inconnue. Lorsque plusieurs grains d’amidon sont accolés ensemble, il est absolument impossible qu'un choanocyte arrive à englober un aliment d’un tel volume: on n’observe pas la formation de syncytium pour ingérer la masse alimentaire. Je le répète, les grains d'amidon étaient à l'intérieur des choanocytes ; pas un seul dans une cellule migratrice. Il y a attaque ultérieure de la matière amylacée: en traitant les coupes par de l’eau iodée, on constate que les corpuscules d'amidon qui sont contenus dans les canaux prennent une leinte d'un violet gris tirant parfois sur le jaune, prouvant que l’hydrate de carbone a été partiellement attaqué au cours des manipulations success.ves. Les grains d’amidon inclus dans le protoplasma cellulaire se colorent franchement en jaune : c’est la couleur que prennent les dextrines dans des conditions analogues. En même temps le grain a été fissuré ou a élargi son hile ; parfois il a perdu la vivacité de ses angles, il a émoussé ses arêtes, a fait apparaître plus vives ses stries concen- triques. Il n’y a place pour aucun doute: il a été très certainement sécrélé autour du corps alimentaire un suc digestif capable de le dissoudre. Chose à remarquer, je n’ai vu querarement des vacuoles autour des grains ingérés. Je crois que ce fait doit être attribué aux traitements subis par les préparations, à des séjours un peu trop prolongés dans les déshydratants. Pour les essais d'alimentation aux bactéries (1) j'ai employé une espèce un peu volumineuse, afin de pouvoir la reconnaître sûrement et la distinguer des enclaves, bactériformes parfois, que l’on trouve si nombreuses dans beaucoup de cellules d’éponges. J'ai employé le bacillus mesentericus, que son innocuité rend autrement maniable que le bacille du charbon. L'espèce choisie a été ensemencée dans un milieu artificiel composé de : GIUCOSE RE. AE. PÉDIONES der. Hande mer #7 100 gr. Neutraliser à la soude, stériliser à 120°. (1) Ces expériences et un certain nombre d’autres analogues ont été faites dans le laboratoire de bactériologie de l'Ecole de Médecine, que M. le Professeur RIETSCH dirige avec le plus complet dévouement. 444 JULES COTTE. Le développement de cette espèce n’a pas été toujours heureux ; il y avait parfois dans mes cultures prédominance de formes anor- males. Au moment des expériences les tubes de culture ont été versés avec de l’eau de mer dans des cristallisoirs renfermant les éponges employées (Syc. raphanus, une Sycone indéterminée, Reniera simulans). Après un temps variable, les animaux ont été fixés par l'acide osmique en vapeurs, ou par le mélange de Zenker, débités en coupes et colorés par la méthode de Gram au violet de gentiane- 4 & 6 à FiG. 3. — Choanocytes de S. raphanus renfermant des bactéries (b. mesen- tericus). Zenker. Gram au violet de gentiane-éosine. Gross. 800 d. J'ai pu observer de la sorte que les bactéries qui pénètrent dans l'intérieur des éponges calcaires sont ingérées par les cellules flagellées. A cause de sa longueur parfois relativement grande, le filament végétal peut n'être pris par le choanocyte, au début, que par une de ses extrémités ; puis le phénomène d’ingestion progresse, tandis que le bacille est digéré. Ainsi qu'on l’a souvent fait remarquer, le phénomène d’ingestion parait devoir se faire fréquemment par le pôle supérieur du choa- nocyte, entre la collerette et le flagellum ; le fait n’est cependant pas constant. Il est actuellement démontré pour moi que toute la surface du choanocyte possède des propriétés amiboïdes suffisantes pour englober les particules alimentaires. C'était d’ailleurs déjà l'opinion de HÆCKEL. Il y à un fait dont on ne se rendait pas compte chez les éponges nourries à l’amidon, c’est que les substances ingérées sont altirées chez Sycandra dans la partie profonde de la cellule, sous le noyau. Celui-ci est déplacé pour leur livrer passage, puis reprend sa place normale, au niveau du col du choanocyte. Il est vraisemblable que lorsqu'on trouve un corps étranger dans le col de la cellule, il a été saisi par le réactif fixateur au moment où il allait subir le mouvement de descente qui devait l’entraîner dans la partie inférieure de la cellule, Au total le choanocyte nous apparaît comme étant, au point LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 445 de vue physiologique, une sorte de phagocyte fixé. Il est capable d'ingérer par toute sa surface; cependant la présence de la collerette, à son pôle supérieur, dirige les substances alimentaires principa- lement vers le sommet du cône qu’elle forme, et c’est en ce point que la phagocytose paraît se faire avec le plus d'énergie. C’est là la seule explication scientifique que nous puissions donner actuellement du rôle de cette énigmatique collerette (1). Ce rôle est d'autant mieux rempli que les collerettes laissent moins échapper de particules alimentaires, et avec cette conception il apparaitrait que les corbeilles les plus parfaites sont celles qui possèdent une membrane de SozLas. L’accolement des collerettes en vue de la formation de cette membrane serait une manifestation de l’amibicité des cellules, dont le déterminisme serait strictement commandé par les besoins alimentaires de l'individu. Les bactéries ingérées par les Calcisponges perdent leur colora- bilité par la méthode de Gram à mesure que les sucs digestifs agissent sur elles. Elles finissent par ne plus garder le violet de gentiane et par se colorer à l’éosine avec une certaine intensité.C’est là un phénomène de bactériolyse. Je n'ai pas observé de digestion des bactéries très avancée, car les éponges plongées dans l’eau de mer additionnée de cultures mouraient assez rapidement. J'ai ainsi perdu les premiers individus que j'avais mis en expérience. J'ai alors opéré dans des temps plus courts, quatre à cinq heures au maximum. Dans quelques cas seulement il m’a été donné d’apercevoir la présence d’une vacuole autour des bactéries ingérées. Je ferai à ce sujet la même remarque que pour la digestion des granules amylacés, et rien ne prouve qu'avant l'emploi des réactifs une vacuole n'ait pas existé autour de chacun des bacilles inclus dans les cellules. Je n'ai pas observé de bactéries (B. mesentericus) dans les ami- bocytes des éponges calcaires sur lesquelles j'ai opéré. Avec À. simulans, après cinq heures de séjour dans de l’eau de mer additionnée de cultures de B. mesentericus, il ne m'a été possible d’apercevoir que quelques très rares bacilles dans des choanocytes, aucun dans les cellules mésogléiques. L'individu mis en expérience devait avoir une vitalité très affaiblie. L'examen (1) Je renvoie aux travaux de BIpper [92 4, 926, 95] ceux qui voudraient connaître la conception que se fait cet auteur du rôle des collerettes, 446 JULES COTTE. d'épongessiliceuses fixées au sortir de l’eau de mer, au retour de la pêche, a montré à plus d'un spongiologue et m'a montré à moi-même la présence de rares bacilles dans leurs phagocytes ; il permet également d’apercevoir des bacilles dans les choanocytes de S. raphanus examinés dans les mêmes conditions. Reste à savoir si les bacilles ainsi englobés dans les cellules mésogléiques sont des corps alimentaires, ou simplement des bactéries qui ont été phagocytées au moment où elles cherchaient à envahir les éponges. Les deux cas peuvent également se présenter. Les phénomènes de bactériolyse que j'ai obtenus in vitro avec les diastases de À. simulans s'accordent bien avec les observations précédentes pour montrer que les bactéries doivent pouvoir servir d’aliments aux éponges. Les expériences d'alimentation au lait, effectuées sur Syc.rapha- nus et Ren, simulans, ne n’ont rien appris de plus que ce que nous dit LENDENFELD à ce sujet. Je dois noter cependant que le lait employé, lait de vache préalablement stérilisé à l'autoclave et conservé dansdes tubes à essais jusqu’au moment de l'emploi, s’est montré réellement toxique pour les éponges. J’en ajoutais à l’eau de mer une quantité suffisante pour donner à celle-ci une opalescence sensible ; le séjour des éponges n’a pas pu être prolongé au delà de quelques heures. I y avait bientôt apparition de phénomènes morbides. Pour les essais au charbon j'ai employé du noir de fumée fin (noir de Paris des droguistes) que j'ai lavé à l’éther, puis à l'alcool et finalement à l’eau bouillante pour le débarrasser le plus possible des impuretés qu'il pouvait renfermer. Quant au carmin, ila été seulement broyé avec de l’eau de mer ; il s’en dissolvait une certaine quantité à la faveur des sels renfermés dans l’eau, et le liquide qui servait aux expériences était assez fortement coloré en rouge. J'ai opéré sur S.raphanus, R. simulans (1). Avec S. raphanus, de la façon la plus évidente, les choanocytes ingérent en quantité les corpuscules étrangers ; les cellules ne tardent pas à en être bourrées, bourrées à en perdre absolument leur forme normale. Quand elles sont fortement déformées on ne leur trouve : jamais de collerette ni de flagellum: ces deux organoïdes de la (1) Une unique expérience a été faite avec Sypongilla lacustris, fixée au mélange de Zenker après alimentation au carmin. Je n’ai vu que quelques rares grains de carmin dans des cellules mésogléiques et des choanocytes. Je ne tiendrai pas compte de cette expérience. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 447 cellule ont été évidemment rétractés pour permettre à celle-ci de se prêter à une plus grande distension. J'ai déjà indiqué [02 c]| que le terme de chimiotaxie ne peut guère s'appliquer à l’ingestion de particules inertes comme celles qui ont servi à ces expériences. Je comprends qu’on puisse encore se servir de ce mot dans le cas de l'ingestion du carmin, à cause des propriétés chimiques de ce corps ; 1l y aurait lieu cependant d'établir que le carmin possède une chimiotaxie positive à l'égard des choanocytes. Avec le charbon la question change. On peut encore, il est vrai, attri- buer un rôle chimiotactique à l'air renfermé dans les pores de cette substance ; mais dans certaines de mes expériences je me suis servi de charbon qui avait été pendant un certain temps immergé dans de l’eau, puis avait êté bouilli dans ce liquide avant d’être utilisé. Aussi je crois que le terme de thigmotaxie conviendrait mieux pour désigner le phénomène par lequel les cellules flagellées ingèrent les substances inertes qui passent à leur portée. Dans le plus grand nombre des cas cependant, dans la vie normale des individus, les produits ingérés sont vraisemblablement alimentaires et il s’agit d’une véritable chimiotaxie. Au sujet de la répartition des corps étrangers dans les chambres flagellées, ZEMLITSCHKA (après CARTER) à fait remarquer que l'ingestion du charbon est d’abord faite par les cellules qui bordent les pores; cette observation est exacte. L'auteur exagère un peu toutefois s’il admet que tout le charbon est d’abord ingéré au niveau des pores ; il en est ainsi pour la plus grande partie seulement. Il est facile de saisir la raison purement physique de ce fait: au niveau du débouchement des canaux inhalants dans les corbeilles vibratiles, au niveau des pores, j'ai signalé l'existence probable d’un remous qui à pour résultat de porter un très grand nombre de particules solides au contact des choanocytes les plus proches, mettant en jeu des phénomènes de chimiotaxie ou de thigmotaxie. Cependant toutes les substances ne sont pas ainsi absorbées ; un certain nombre d’entre elles ne viennent pas en contact avec les cellules qui bordent les pores et sont ingérées par des choanocytes plus éloignés. Il y a en fait une réelle exagération d'activité fonctionnelle de la part des cellules entre lesquelles débouchent les canaux inhalants, sans qu’il soit possible de saisir une différence entre ces cellules et celles qui les avoisinent au point de vue de la nature de leur contenu, de leur forme ou de leurs dimensions. 448 JULES COTTE. … Il est bon d'ajouter à ce sujet que j'ai vainement cherché à faire ingérer du carmin aux choanocytes de S. 7aphanus, dans des dissociations. J'espérais m'assurer ainsi expérimentalement si l'ingestion du carmin n’est possible qu’au centre de la collerette. Presque jamais les choanocytes, parfaitement actifs cependant, n’ont montré de carmin à leur intérieur. J'ai cru pouvoir conclure de ces résultats négatifs que, si l'agitation déterminée par les flagella est nécessaire pour que les aliments puissent être ingérés, elle ne produit un effet réellement utile qu’à l'intérieur des corbeilles vibratiles. Dans les dissociations les grains de carmin étaient déplacés par les flagella, mais ils ne venaient pas en contact intime avec la surface des cellules. Dans les corbeilles vibratiles, où l’on pourrait presque dire que les choanocytes se bombardent à coups de particules solides, les tactismes se manifestent avec infiniment plus d'activité. Les coupes de Sycandra montrent quelques grains de carmin ou de charbon englobés par des amibocytes ; c'est là, on peut le dire, une véritable exception. Sur des coupes de Reniera simulans qui étaient restées Lrois heures dans de l’eau de mer renfermant du carmin, on trouve en abondance des grains colorés dans les corbeilles vibraliles; un cerlain nombre de cellules flagellées en sont chargées, principa- lement, semble-t-i, au niveau des prosopyles. Les corpuscules ainsi ingérés sont rejetés par les choanocytes dans la substance fondamentale qu’elles recouvrent : on trouve de véritables amas de carmin derrière des cellules à collerette qui avaient dû être particulièrement actives. Les cellules amiboïdes s'emparent de ces corpuscules étrangers et les promènent à l’intérieur du corps de l'éponge : on voit des cellules migratrices ainsi chargées, soit au niveau des corbeilles vibratiles, soit dans des régions plus profondément situées. Des grains de carmin sont également libres, égarés entre les cellules de la couche mésogléique. Quelques-uns, rares, sont peut-être renfermés dans l’intérieur des pinacocytes qui bordent les canaux. En examinant des individus de À. simulans gorgès de carmin pendant 24 heures, puis restés 20 heures dans de l’eau de mer pure, on constate que le carmin a envahi toute la mésoglée. On en trouve toujours dans les chambres flagellées, car le barbotage d’air employé pour aérer l’eau des flacons en expérience a pour résultat de tenir LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. A49 en suspension le carmin rejeté par l'éponge et de Le faire ingérer à nouveau. Toutes les cellules mésogléiques en renferment: cellules fixes, cellules sphéruleuses, cellules amiboïdes. Après 72 heures de séjour dans l'eau de mer aérée l'éponge n’a pas encore perdu tout son carmin; il est vrai que dans les disso- ciations les cellules de l'animal n’accusent plus qu'une activité assez faible, les stades agonaux approchent. Un peu de carmin dans les cellules fixes et les amibocytes, un peu dans les chambres flagellées. L'alimentation au charbon fournit des résultats identiques. Après trois heures À. simulans possède des corpuscules noirs dans ses cellules flagellées, surtout au voisinage des prosopyles. Les grains de charbon sont cédés aux cellules amiboïdes voisines ou sont déversés dans la substance fondamentale. Quelques grains, à l'intérieur des choanocytes, sont entourés d'une auréole claire, vestige d’une vacuole. Quelques cellules fixes sont absolument bourrées de particules charbonneuses. Au niveau des pinacocytes des canaux se montrent des corpuscules de charbon; il est assez difficile de voir s'ils sont intracellulaires ou simplement accolés à une cellule, par un peu de mucosité par exemple. Quelques-uns cependant semblent être intracellulaires, mais ils ne sont pas entourés d’une auréole claire. Peut-être sont-ils à l’intérieur de ces méats intracellulaires dont il a été question dans le Chapitre I. Lorsque, après 3 heures de séjour dans de l’eau de mer renfermant du charbon, À. simulans est restée 15 heures dans de l’eau de mer pure, la mésoglée s’est en partie débarrassée de ses corps étrangers. Les cellules migratrices sont relativement pauvres en grains noirs; au Contraire quelques cellules fixes en sont entièrement bourrées. Parfois le charbon est intercellulaire. La plus grande quantté se trouve au niveau des chambres flagellées, extra- cellulaire ; 1l s’agit vraisemblablement de grains rejetés par les choanocytes ou excrétés par les canaux et qui se réunissent en amas, début de ces véritables bols fécaux sur lesquels je reviendrai. Après 45 heures de séjour dans l’eau pure les cellules fixes ne sont pas encore débarrassées de leurs corps étrangers. Ainsi qu il résulte de ces expériences, l’ingestion des particules solides qui parcourent les canaux des Spongiaires est dévolue aux choanocytles, tandis que le transport dans l’intérieur du corps des substances ingérées appartient aux cellules migratrices, 20 er 450 JULES COTTE. Le seul examen théorique de la question permet d’ailleurs, à priori, de supposer qu'il en soit ainsi, et montre qu'aucune autre partie du corps des éponges ne paraît se prêter mieux que les corbeilles vibratiles à l'alimentation de l'individu. Si nous considérons par exemple l’ectoderme, nous voyons que c’est une assise de protection, un épithélium plat, dont les cellules possèdent une amibicité assez forte, mais n’ont pas une forme convenable pour ingérer les substances alimentaires. IL faut, pour remplir ce rôle, des cellules ayant une forme plus ou moins massive, une longueur suffisante pour permettre l'absorption d’une quantité de nourriture appréciable. On peut appliquer le même raisonnement aux cellules qui bordent les canaux. C’est au niveau des corbeilles vibratiles seulement que se rencontre un épithélium dont la forme est théoriquement en rapport avec le but à atteindre. Dans les corbeilles vibratiles, ainsi que nous l'avons vu, l'agitation déterminée par les flagella favorise beaucoup l'ingestion des particules alimentaires, qui sont plus ou moins projetées contre les choanocytes, sur les parois des chambres. Au contraire dans les canaux le courant est beaucoup plus uniforme et sa marche plus rapide ; beaucoup trop de particules échapperaient à l'absorption si les cellules bordant les canaux en étaient chargées. Les auteurs qui refusent aux choanocytes la propriété de subvenir aux besoins alimentaires de la colonie, pour l’attribuer aux cellules amiboïdes, doivent admettre que celles-ci viennent puiser les aliments dans la cavité du système aquifère, ou bien que les substances nutritives pénètrent dans la substance fondamentale avec le courant lacunaire inhalant sur lequel je me suis déjà arrêté. Cette dernière hypothèse se vérifie certainement pour les corps dissous dans l’eau et pour un certain nombre de particules solides; la destinée de ces dernières n'est pas douteuse, elles sont ingérées par les amibocytes. Mais le système des lacunes intercellulaires est certainement trop instable, trop inconstant, trop variable pour qu’il puisse servir normalement de porte d'entrée aux aliments solides. Quant aux substances dissoutes dans l’eau, il n’est pas nécessaire de faire intervenir les cellules amiboïdes dans leur ingestion : tous les éléments de l'organisme peuvent s’en laisser imprégner. La première hypothèse n’est pas plus facilement acceptable que la seconde; on n’a signalé, à ma connaissance, en fait de cellules mésogléiques libres dans le système aquifère, que les porocytes de MiNCHIN (dans LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 451 cerlaines conditions), les cellules centrales des corbeilles, les cellules sphéruleuses en voie d'élimination dont l'étude sera faite plus loin et les cellules dont j'ai signalé les migrations dans les états préagonaux ou agonaux chez Syc. raphanus et que DENDY me parait avoir observées également chez Leucosolenia proxina. La destinée ultérieure des corps ingérés a été discutée. On verra plus loin quelles ont été les théories fournies par BIDDER, MASTER- MANN, elc. D’après l'examen des animaux que j'avais mis en expérience J'ai pu m’assurer, Je le répète, que les particules alimen- laires ou autres sont déversées par les choanocytes, chez les Incal- caria, dans la substance fondamentale. Les phagocytes s’en emparent ensuite pour les transporter dans l'organisme. Nous avons vu que toutes les cellules arrivent à être bourrées de corps étrangers. Aussi je ne m'explique pas que LENPENFELD, dont les recherches sur cette question ont porté sur un grand nombre d'individus, ait pu croire que les grains de carmin ne sont pas cédés aux cellules migratrices. Je suis obligé de me séparer aussi sur ce point de ZEMLITSCHKA, qui n’admet pas que les particules non alimentaires puissent parvenir aux amibocyles de S. raphanus ; je rappelle que j'ai observé quelques grains de carmin ou de charbon à l’intérieur des cellules amiboïdes de la même espèce. 2 2 A52 JULES COTE. CHAPITRE III DIGESTION DES ALIMENTS, DIASTASES. LOCALISATION DE LA FONCTION DIGESTIVE. KRUKENBERG, qui a si puissamment contribué au développement de nos connaissances en chimie biologique, a effectué aussi des recherches [80 &] pour voir où se produit la digestion des aliments chez les Éponges. A cet effet il plaçait de la fibrine crue à la surface des animaux ou au contraire à leur intérieur ; la fibrine était parfois mise dans de petits sacs (Mullsack). Il a constaté ainsi que la fibrine crue se digère à la surface de Suberiles domuncula et de S. massa ; chez celte dernière espèce la digestion se fait aussi à l'intérieur de l'éponge, chez la première non. La digestion se fait dans l’oscule de S. domuncula exactement comme à la surface. Elle se fait à la surface de Chondrosia reniformis, et non à l’intérieur ; elle ne se produit pas à la surface de Aircinia variabilis, Spongelia elegans, Euspongia adriatica. Mise dans un petit sac, la fibrine ne diminue pas de poids dans les cavités de la surface de Greodia gigas et son poids augmente au contraire quand on l’enferme dans l’intérieur de l'éponge. KRUKENBERG n’a pas osé ajouter de conclusions à la relation de ces expériences. Les résultats sont trop variables pour qu’on puisse en relirer le moindre enseignement. Le problème d’ailleurs n'était pas serré d'assez près, et les causes d'erreur étaient trop multiples. Lorsque la fibrine a élé digérée à la surface du corps d’une éponge, il faut en rendre responsables les infusoires, les autres animaux et les bactéries qui sont loin de manquer dans l’eau de mer; quand l’eau a été relativement stérile, la digestion n’a pas eu lieu. En vue de rechercher-quelle est la réaction dans les vacuoles diges- tives des éponges, j'ai essayé de reprendre ces expériences avec de la fibrine crue, de veau, lavée à l'alcool et à l’éther et conservée dans la glycérine. Avant l'usage cette fibrine était lavée plusieurs heures à l’eau largement renouvelée, puis employée directement ou LA NUTRITION CHEZ GES SPONGIAIRES. 493 trempée dans la teinture de tournesol et lavée à nouveau. Elle était ensuite placée à l’intérieur du corps de certaines éponges (Sub. domuncula, Syc. raphanus). Les résultats ont été constamment négatifs. Les individus examinés ont en quelque sorle commencé leur travail de cicatrisation au dessous du corps étranger. Ce résultat n’a rien qui puisse nous élonner ; 1l nous prouve que les cellules de l'éponge n'émeltent pas de ferments digestifs dans le liquide qui les baigne, que la digestion est intracellulaire chez les éponges. Dans quelles cellules se localise la fonction digestive ? Pour Hx&ckEL [72] la digestion se ferait à l'intérieur des cellules flagellées, « microscopiques laboratoires » où seraient décomposés et brûlés les produits carbonés. MErscaniKorr [79] se demande s'il n'y a pas chez Jalisarca Dujardini migration dans l’intérieur de l'animal des cellules endodermiques bourrées de nourriture. Il admet que chez la plupart des éponges ce sont les cellules mésoder- miques, les phagocytes qui ont le pouvoir de digérer. SoLLAs [88 | dit avoir constaté que les cellules épidermiques ingérent des diatomées, puis s’enfoncent dans le mésoderme. D’après LENDENFELD [89] les globules de lait seraient passés aux cellules migratrices par les choanocytes ; les aliments seraient normalement cédés plus ou moins assimilés aux cellules migratrices qui servent certainement de transport pour la nourriture. Pour MAsTERMANN [94] les choa- nocytes de Grantia compressa, bourrés de carmin, perdent leur flagellum et s'enfoncent dans les couches sous-jacentes où ils prennent la forme d'éléments migrateurs; ils seraient peut-être phagocytés par des amibocytes. Bibper [95] pense que la migration telle que se la représente MASTERMANN est un phénomène asphy- xique. Pour lui les cellules flagellées des Æeterocæla, et sans doute des Silicea, s'allongent après avoir fait la digestion des aliments et deviennent étroilement pressées les unes contre les autres ; dans la partie basale ou plinthe s'accumulent des sphérules, colorables in vivo par le brun Bismark et que l’auteur assimile aux substances de réserve, dans la partie distale ou colonne se trouve le noyau. La plinthe se détache et sert sans doute à nourrir les cellules ami- boïdes et les ovules ; les colonnes recommencent un nouveau cycle. J'ai montré [02 b] ce qu’il y a d’erroné dans l'opinion de BIpper ; la transformation des choanocytes en plinthes et en colonnes est un phénomène dégénératif que l’on peut produire à volonté en laissant 454 JULES COTTE. asphyxier les S. raphanus et qui ne se manifeste pas lorsque les éponges sont maintenues dans de l’eau aérée, même lorsqu'elles sont gorgées de nourriture à refus. LENDENFELD [89] à figuré également celte altération des cellules flagellées de S. raphanus. TopsenT [87] a signalé chez Amnorphina panicea une déformation des choanocytes “appelant 11 précédente ; le noyau serait encore porté dans la partie distale de la cellule. J'ai vu des aspects analogues chez Syc. ciliala et chez Cliona celata ; chez celle-ci le noyau reste dans la partie proximale de la cellule, dans la plinthe de Bipper. Pour $. rapha- nus j'ai observé sur des dissociations que les cellules ainsi déformées n’agilaient plus leur flagellum, d’ailleurs généralement disparu ; par contre les cellules voisines pouvaient avoir gardé une certaine activité de leur flagellum. Je retrouve un dessin qui me rappelle absolument mes prépara- tions de Syc. raphanus asphyxiés dans un travail de Denpy [91]. Cet auteur a vu un réseau syneylial, qu’il croit être de nature méso- dermique, dans les cavités gastrales de Leucosolenia proxima et a édifié sur cette disposition un type de structure d’Jomocæla, son type E. J'ai la conviction absolue que l’auteur a figuré des phéno- mènes dégénéralifs ayant atteint à la fois les choanocytes et un peu les cellules mésogléiques ; son dessin représente d'ailleurs des choanocytes déformés. Je me refuse à admettre avec lui qu'il ait eu affaire à un réseau mésodermique chargé d’absorber les particules alimentaires. Phénomène dégénératif aussi la migration décrite par MASTER- MAN\ ; les dessins fournis par l’auteur laissent d'ailleurs à penser que les éponges examinées par lui devaient être fortement altérées déjà ou qu’elles ont subi l’action de fixateurs réellement insuffisants. C'est vraisemblablement une erreur d'observation qu'a commise SoLLAS en attribuant aux cellules épidermiques la faculté de digérer des diatomées après les avoir englobées. Je crois qu'en réunissant les résultats de mes expériences avec ceux qu'ont obtenu un certain nombre d'auteurs, il est possibie de résoudre la question qui nous occupe. Il y a certainement, chez S. raphanus, digestion d’une partie au moins des aliments à l'intérieur des choanocytes. J'ai vu les grains d’amidon inclus dans les cellules flagellées de cette espèce modifier leur colorabilité par l'iode et subir des altérations diverses. J'ai pu constater également que les bactéries (b. 2esenlericus) ingérées par les choanocyles LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 455 perdent graduellement à l'intérieur de ces cellules la propriété de rester colorées par la méthode de Gram, qu'il y a bactériolyse. En est-il de même pour les Acalcaria? Je crois que les choano- cytes, chez ces espèces, conservent encore au moins partiellement la faculté de digérer. les aliments qu'ils sont chargés d’ingérer, mais celle fonction me paraît appartenir surtout aux cellules mésogléiques. Nous avons pu constater que chez les Acalcaria, à mesure qu'a diminué le volume des choanocytes, leur rôle semble avoir diminué d'importance. Ils repassent immédiatement aux cellules mésogléiques les particules solides qu'ils ont extraites de l'eau de circulation, leurs faibles dimensions leur interdisant d’accumuler des aliments dans leur intérieur. Il est certain que dans ces conditions le temps matériel manque absolument pour que les aliments puissent être sérieusement attaqués par des enzymes sécrélés par les choanocytes. Les cellules mésogléiques dans lesquelles on voit, à l'intérieur de vacuoles, des substances solides intentionnellement employées comme objets d'expériences, doivent vraisemblement pouvoir digérer les aliments. On sait d’ailleurs combien on trouve souvent, à l'intérieur des amibocytes des Acalcaria, des enclaves diversiformes de nature alimentaire évidente. Aussi j’approuve absolument l'idée de TopsexT lorsqu'il appliquait aux cellules mésogléiques le nom de « cellules digestives ». Il a reconnu lui-même que ce nom ne les désignait pas suffisamment, ne soulignait pas assez leurs diverses propriétés. Je le trouve défectueux aussi parce que chez les Calearia les cellules mésogléiques ne sont plus les cellules digestives, et qu'il est illogique de donner un nom différent aux cellules méso- gléiques des Calcaria et à celles des Incalcaria. J’ai constaté nettement, chez Spongelia pallescens elasticamassa, que les amibocytes peuvent se comporter comme des phagocytes des mieux déterminés. On sait que cet espèce vit communément en symbiose ou en commensalisme avec Oscillatorix Spongeliæ. En examinant au mois de septembre un individu de celte espèce, j'ai vu dans des dissociations qu’un certain nombre de cellules de l’algue étaient englobées par des cellules amiboïdes de l'éponge. Les éléments de lOscillaire étaient primilivement arrondis; leur pigment rouge brun se condensait par places, puis transsudait à travers la membrane et pénétrait dans le protoplasma de l’amibocyle où il se réunissait en sphérules. La cellule végétale était alors verte, 456 JULES COTTE. ct irrégulière généralement. La chlorophylle suivait ensuite le pigment rouge ; lamibocyte rénfermait alors à la fois des sphérules brunes et d’autres verdâtres. Le pigment vert élait cependant plutôt diffus dans le protoplasma de l’amibocyte. Certains macro- phages géants, el pourvus sans doute d’une activité exaltée, renfer- maient jusqu’à trois ou quatre cellules végétales. Les petits phagocytes, incapables d’englober les algues, se contentent de les perforer; par l’ouverlure faite ils pénètrent Fig. 4 — Spongelia pallescens elastica massa. Dissociation. Gross. 800 d, En a un phagocyte est encore renfermé à l'intérieur d'une membrane d’algue, dont il à dévoré le contenu. graduellement à l’intérieur de la cellule et en dévorent le contenu. On trouve aussi dans les dissociations des membranes d’algue vides, possédant une ouverture déchirée, irrégulièrement éloilée. Ces fails sont intéressants en ce qui concerne l’histoire des asso- cialions entre algues et éponges, et confirment bien ce que FamiNTzIN et LE DANTEC avaient déjà vu au sujet des rapports entre les Protozoaires et les algues symbiotes. 3ien que les notes que je vais ajouter n’aient que des rapports éloignés avec la question que j'étudie en ce moment, je vais les reproduire pour ne pas morceler les observations que j'ai pu faire sur ces dissociations de Spongelia. On trouvait par places, dans les préparations, des phagocytes géants, bourrés de particules incolores et verdâtres, brunes parfois, entourés d’une vérilable auréole, d’un LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 457 essaim de dix à vingt petits phagocytes. On voyait très manifeste- ment se former à leur périphérie des pseudopodes qui étaient ensuite rélractés ou dont la pointe s’élargissait en spatule, s’arron- dissait. Dans cette extrémité hyaline apparaissaient des granulations (fig. 4), groupées en une sphère, et la base du pseudopode se rompait: un jeune phagocyte venait de naître. Parfois ceux-ci _ émettaient bientôt des pseudopodes et émigraient; d’autres fois ils restaient groupés et en diaphragmant fortement on semblait deviner des stries fines, comme si une sorte de mucosité avait englué l’amas. Un fait dont le déterminisme m’échappe, c’est que certains de ces jeunes phagocytes étaient bientôt repris par un nouveau pseudopode de la cellule-mère, formé au même point que le précédent ; la petite sphère granuleuse, renfermant à la fois une partie des granulations incolores et des granulations colorées de la cellule-mère, faisait retour à celle-ci, mais ne tardait pas à être rejetée par le même mécanisme que la première fois. J’ai vu ainsi un jeune phagocyte qui a été successivement émis, puis repris trois fois de suite dans l’espace de dix minutes; il n’a dû sa liberté qu’à sa fuite, car il aurait été certainement repris une quatrième fois s’il ne s’était pas éloigné hors de portée des pseudopodes. On saisit mal la raison de ces hésitations cellulaires: les forces physico-chimiques qui ont produit l'émission d’une cellule-fille doivent rester les mêmes après que cette cellule a passé quelques secondes en liberté ; un nouveau pseudopode qui vient à la rencontrer devrait la respecter, semble-t- il. Y aurait-il eu, au moment de la rupture du pédoneule qui portait cette cellule-fille, rupture aussi de quelque sphérule alimentaire qui par chimiotaxie aurait déterminé un retour agressif du pseudopode? J’en doute, mais je ne me suis pas expliqué le pourquoi des faits que j'avais observés. Pour en revenir à la localisation de la fonction digestive chez les éponges, et pour résumer en quelques mots les pages qui précèdent, je me crois en droit de conclure que chez les Calcaria la fonction d'ingestion et celle de digestion pour la plus grande partie sont dévolues aux choanocytes ; chez les Incalcaria les choanocytes ingèrent, les amibocytes digèrent. La digestion est intracellu- laire. 458 JULES COTTE. EXPÉRIENCES AVEC LES MATIÈRES COLORANTES SOLUBLES. On a essayé, pour se rendre compte de la façon dont se fait l'absorption chez les éponges et pour voir l’évolution des substances absorbées, de plonger les animaux dans des solutions colorantes. METSCHNIKOFF | 79], par cette méthode, n’a pas observé de change- ment de coloration du tournesol ingéré par les Spongilles. LoisEL [98] a constaté, en opérant sur Ren. Ingalli et Spong. fluviatiles, que les matières colorantes solubles se retrouvent surtout dans les cellules digestives (mésogléiques) mais aussi dans les choano- cytes ; les cellules sphéruleuses absorbent difficilement, les spongoblastes plus difficilement encore. La couleur peut se trouver sous forme de vacuoles ou de vraies sphérules paraissant avoir une membrane propre. Le rouge Congo devient violet sombre chez R. Ingalli, brun presque noir chez Spongilla ; le tournesol devient rose à l’intérieur de la dernière espèce, toutefois les cellules ayant du tournesol rougi sont très rares ; l’alizarine sulfo-acide, l’orangé IT et la tropéline O0 ne donnent pas de résultats ; ceux-ci sont très inconstants avec le bleu de méthylène. La matière colorante du safran, le vert d’iode, l’orcanette ne sont pas absorbés, la nigrosine colore seulement la spongine du squelette, le rouge neutre et le bleu du Nil sont absorbés avec facilité. LoISEL a pu remarquer aussi que dans un mélange de colorants les éponges en prennent certains avec élection et que, mieux encore, la sélection se continue à l’intérieur des cellules, certaines enclaves cellulaires étant électivement colorées par une des couleurs du mélange, à côté d’autres enclaves différem- ment colorées. BippEr | 9%24 | avait mis dans de l’eau renfermant du carmin d'indigo des individus d’Ascetta clathrus et d'A. primordialis. Après quelques heures (vingt-huit pour la dernière espèce) il n'a retrouvé le colorant que dans ses « cellules de Metschnikoff > (porocytes de Mic) et dans les cellules ectodermiques. J'ai refait ces expériences, partiellement, chez Syc. raphanus. Avec l’alizarine sulfoconjuguée, en solution dans de l’eau de mer, les Sycandra avaient après 24 heures de séjour une teinte rose violacé identique à celle de l’eau de mer qui les baignait, un peu plus foncée cependant. Au microscope on pouvait voir à l’intérieur LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 459 des cellules, de nature diverse, de rares enclaves petites, rouges. Au total la coloration de l'individu paraissait plutôt due à la teinte prise en masse par les tissus qu'aux enclaves renfermées dans les cellules. Avec la tropéoline il n’y a pas eu généralement d'absorption, avec le rouge Congo non plus; aucun changement de coloration des individus. Avec le tournesol, après 24 heures de séjour, les individus de Sycandra ont pris dans l'ensemble une teinte violacée, plutôt rose. A la dissociation on peut voir que les cellules à collerette et les ami- bocytes renferment à la fois du tournesol bleu et du tournesol rose. À un faible grossissement les cellules apparaissent comme faible- ment roses et cependant, lorsqu'on emploie un objectif assez puissant, on conslate que les globules bleus sont d’une couleur plus intense que les roses. Il faut donc admettre, ou bien que le proto- plasma lui-même est coloré en rose, ou qu'il renferme une grande quantité d’enclaves, de dimensions extrêmement réduites, dans lesquelles le tournesol est devenu rouge. Cette dernière hypothèse est évidemment la plus acceptable. Il y a lieu de noter encore que les sphérules bleues sont plus irrégulières que les roses au point de vue de leur forme ; un très grand nombre ne sont pas régulièrement sphériques. De plus elles sont placées plutôt sur les bords de la cellule, les sphérules roses se trouvant plus près du centre. Dans un examen microscopique j'ai pu constater l'émission de deux de ces sphérules bleues, rejetées par deux choanocytes ; le phénomène s’est produit à l’mtérieur de la collerette de ces cellules. Le corps rejeté était piriforme dans un cas, sphérique dans l’autre, et ils renfermaient tous les deux à leur intérieur un point fortement coloré en bleu. Ils ont gardé dans l’eau de mer leur forme et la netteté de leurs contours. Cette recherche, refaite avec Suberites domuncula, n'a pas été bien probante. Après 24 heures de séjour dans l'eau de mer addi- tionnée d'une solution neutre de tournesol, il ne m'a été possible d'apercevoir que de rares enclaves bleuâtres, aucune rose. Il est vrai que les tissus de l’animal sont trop colorés pour se prêter à des recherches dans cette voie. L'ensemble de ces résultats ne me paraît pas permettre des con- clusions bien fermes. Le rouge Congo et le tournesol ont accusé une réaction acide à l’intérieur des cellules de R. Ingalli pour les 460 JULES COTTE. expériences de LolsEL ; le premier colorant ne m'a fourni aucun résultat chez Sycandra, le deuxième a indiqué une réaction plutôt acide à l’intérieur de la même espèce. L’alizarine sulfoconjuguée, par contre, aurait plutôt indiqué que les tissus de Sycandra possè- dent une réaction alcaline. Pour pouvoir interpréter ces résultats, il faudrait connaître exactement la nature des vacuoles qui renfer- maient les matières colorantes, étaient-elles digestives, étaient elles excrétices (1)? Il serait difficiie de le préciser. Nous ne savons pas non plus si nous n'avons pas sous les yeux des phénomènes pathologiques, dus à des excitations anormales. Cependant le fait que j'ai pu assister chez Sycandra à l'émission de sphérules bleues, renfermant un point fortement coloré en bleu, me paraît indiquer que chez cette espèce les enclaves bleues pourraient se trouver plutôt en rapport avec le phénomène de l’excrétion. On verra plus loin que chez les éponges l’excrétion des déchets azotés paraît s'effectuer, pour une partie au moins, sous forme d’ammoniaques composées possédant une réaction alcaline et dont un certain nombre de sels, à acides organiques, ont certainement la propriété de bleuir le tournesol. Il serait donc assez logique de supposer que chez l'espèce étudiée les enclaves colorées en rose par le tournesol seraient plutôt en relation avec les fonctions de digestion. Quant à vouloir saisir un rapport entre la présence des matières colorantes dans certaines cellules des éponges et les fonctions d’in- gestion et d'excrétion, il ne faut guère y songer; de l’absence de colorant dans certaines cellules il ne faut pas conclure que cette substance ne s’y trouve pas dissimulée, sous forme de dérivé inco- lore par exemple. Nous savons d’ailleurs avec quelle facilité un très grand nombre d'animaux aquatiques se laissent imprégner in vivo par des couleurs très variées, sans en paraître le moins du monde incommodés. Ce sont là des phénomènes d'imbibition, qui n'ont rien à voir avec l’ingestion des aliments. La manière même dont sont recouvertes toutes les parties du corps des Spongiaires qui sont en contact avec l’eau de mer indique que ces phénomènes d'imbibi- tion doivent s'effectuer chez eux avec la plus grande facilité. Nous ne voyons partout, sauf au niveau des chambres flagellées, que des (1) Il n’y a rien d'étonnant à ce que la formation d’un acide en un point de la cellule s'accompagne de l'apparition en un autre point de corps à réaction alcaline, et récipro- quement. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 461 cellules de recouvrement plates, laissant parfois entre elles des méats. Ce sont là des conditions qui favorisent de la manière la plus parfaite l'échange des liquides aussi bien que des gaz. La mince membrane vivante possède un pouvoir électif qui lui permet de s'opposer pour un temps au passage des substances dangereuses : elle se laisse traverser par d’autres avec la plus grande facilité. J'ai essayé de refaire d’une autre manière les expériences précé- dentes, en enfonçant dans les tissus des éponges des tubes capillaires fermés à une extrémité et renfermant de la gélatine additionnée de substances solides ou de matières colorantes. Une solution de gélatine à 20°/, dans de l’eau de mer, neutralisée à la soude, a été additionnée des substances suivantes: carmin finement trituré, en suspension dans de l’eau de mer, charbon (noir de fumée lavé à l’éther, à l'alcool, puis à l’eau bouillante), tropéoline, alizarine sulfoconjuguée, tournesol. Le mélange fut aspiré chaud dans des tubes capillaires, puis stérilisé pendant vingt minutes à 1100. Les tubes ainsi préparés étaient enfoncés à l’intérieur des éponges. Après un séjour uniforme de vingt-quatre heures ils étaient retirés et examinés au microscope. La chimiotaxie positive devait se mani- fester par une migration des phagocytes à l’intérieur des tubes. Les expériences ont porté sur Sub. domuncula, Tethya lyncurium, Reniera simulans, Spongelia pallescens elastica massa, Chali- nine. Ia été nécessaire de les reproduire un certain nombre de fois, car souvent l'extrémité du tube de verre se trouvait être dans la lumière d’un canal et dans ce cas la liquéfaction de la gélatine se produisait sans qu’il y eût en même temps pénétration des amibo- cyles. Ces expériences ont très mal réussi et le plus souvent les cellules amiboïdes ont plutôt paru fuir la nourriture qui était fournie à l'éponge. Il faut faire exception pour les tubes de gélatine renfer- mant du charbon; pour ceux-ci il y a eu avec la plus grande netteté, et dans la plupart des cas, pénétration des amibocytes en plus ou moins grand nombre : ils venaient se bourrer de corpuscules de charbon. Cette dernière substance n’exerçant sur eux aucune chimiotaxie, c’est à la gélatine qu'il faut attribuer l’origine de cette migration. En poursuivant pendant assez longtemps l'observation sur des tubes de verre ainsi préparés et examinés dans une goutte d'eau de mer, j'ai pu voir se faire avec la plus grande netteté cette absorption des particules charbonneuses. Une des cellules exami- 462 JULES COTTE. nées (S. domuncula) renfermait un grain de charbon contenu dans une véritable vésicule, et le corps étranger possédait une sorte de mouvement vibratoire, oscillatoire des plus nets ; il tournait parfois sur lui-même avec rapidité (1). Cette même cellule expulsa brusquement une sphérule incolore qui paraissait s'être formée presque instantanément et avait rapide- ment traversé la cellule. Par le même point de la surface sortirent ensuite, presque aussitôt après, trois sphérules ovoïdes ou piri- formes, se suivant comme les grains d’un chapelet et dont la genèse était identique à celle du premier. Quant au grain de charbon je ne pus pas assister à son expulsion, bien qu’à certains moments il fit saillie sur le bord de la cellule. L'émission des sphérules dont je viens de parler s’'accompagna d’une reprise d'activité de la part de la cellule qui avait paru être engourdie jusqu'à ce moment. Une autre cellule était tellement bourrée qu’elle ne formait plus qu'une masse noire, prise d’abord pour un amas de charbon ; elle possédait néanmoins de lents mouvements amiboïdes. Elle rejeta à plusieurs reprises des groupes de grains noirs ou des grains isolés, mais cinq à dix secondes plus tard elle reprit certains de ceux qui avaient été rejetés et les fit à nouveau circuler dans sa masse. Un des grains expulsés fut repris au point de jonction de deux pseudo- podes qui venaient de se former, et s’y jeta comme s'il avait êté aspiré. On assistait, semble-t-il, à une véritable incohérence de mouvements de la part de l’amibocyte, qu'ils fussent attribuables à des faits de chimiotaxie ou de thigmotaxie. On ne comprend pas très bien pourquoi un corps rejeté comme inutile, possédant par conséquent à la fois une chimiotaxie et une thigmotaxie négatives, peut être repris quelques secondes plus tard, ayant acquis la pro- priété d'exercer des tactismes de valeur inverse. Peut être arrive- rait-on à expliquer ces faits en admettant que, plongés dans une solution de gélatine, les grains de charbon expulsés en concen- traient immédiatement une certaine quantité dans leurs pores, si bien que leur masse, plus chargée en gélatine que le liquide envi- (1) Ces mouvements indiquent que le corps étranger était renfermé dans une vacuole pleine d’un liquide très fluide. KELLER a observé des mouvements analogues chez Chalinula fertilis, TOPSENT [87] chez Cliona celata. Xs sont à rapprocher de ceux que GARD avait vu présenter par les pigments des Ascidies, GiRoD et CARNOT par les corpuscules de mélanine, PIZON par les pigments des Botryllidés, et qu'HÉRUBEL vient aussi de signaler chez les Géphiriens. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 463 ronnant, devenait ainsi capable d'exercer une attraction suffisante sur le protoplasma de la cellule amiboïde. Pour les éponges qui avaient reçu de la gélatine colorée au carmin la phagocytose a été généralement assez faible; comme dans le cas précédent il y avait des grains de carmin à l'intérieur des phagocytes qui se trouvaient dans les tubes. Pour À. simulans j'ai pu observer qu'en dehors du tube de Pfeffer on trouvait aussi des amibocytes colorés au carmin. Les essais avec de la gélatine renfermant des colorants solubles ont fourni des résultats à peu près nuls au point de vue de la migration des cellules amiboïdes, et il ne m’a pas été possible de” saisir la moindre transformation des matières colorantes employées. Dans un essai fait sur Tethya lyncurium avec de la gélatine au tournesol, le tube renfermait quelques amibocytes à enclaves bleues. Les colorants dont je me suis servi paraissent douës de propriélés chimiotactiques plutôt négatives à l'égard des amibocytes; le carmin est à rapprocher d'eux à ce point de vue, car il a eu pour effet évident de gêner dans une certaine mesure la pénétration des phagocytes dans les tubes capillaires. Cette dernière influence paraît due, à mon avis, à la fonction acide du carmin qui a modifié certainement la réaction du mélange gélatiné. J'ai déjà insisté sur cetle propriété du carmin. DIASTASES. Leur étude, repose sur une méthode brutale, il faut le recon- naître, puisqu'elle oblige à broyer une éponge, puis à en extraire un suc qui ne représente aucun organe défini, ou pour parler plus exactement aucun groupe cellulaire spécialisé faisant fonction d'organe. Des diastases que l’on observera dans le liquide, lesquelles représenteront les sécrétions mésogléiques, lesquelles celles des choanocytes ? Malgré les critiques qu'on peut lui faire, cette méthode de travail s'impose d’une façon absolue. Elle a été suivie déjà par FRÉDÉRICQ [78], qui a cru trouver une trypsine chez des éponges indéter- minées ; l’auteur ayant opéré sur des animaux conservés depuis deux ans dans l'alcool el ne s'étant pas précautionné contre l'invasion des micro-organismes, ce sont évidemment ceux-ci qui ont sécrété la trypsine observée. 464 JULES COTTE. En 1878 également KRUKENBERG signale chez les éponges la présence de ferments digestifs dont il ne précise pas la nature. Il revient ensuite plusieurs fois sur cette question, et il apprend [80 a] que l’on peut extraire une pepsine de Geodia gigas, Sub. domun- cula, S. flavus, Hircinia variabilis, Chondrosia reniformis, Aplysina aerophoba, Ancorina verrucosa, Stenetta Wagneri, Tethya lyncurium (celle-ci très pauvre), une trypsine de Sub. lobatus, S. massa, Sycon raphanus, Reniera porosa, Tedanià digilata, une diastase (amylase) des espèces précédentes à l’excep- tion de Sub. domuncula, S. lobatus et massa qui ne figurent pas sur sa liste el d’'Aplysina aerophoba dont le suc serait trop foncé pour permettre une pareille recherche. GRiFrirxS en 1892 reprend cette étude et trouve que les éponges digèrent à l’aide d’une trypsine composée à la fois d’un ferment hydrolysant les albuminoïdes, d’une lipase et d’une amy- lase. Il ne spécifie pas sur quelles espèces il a opéré et n'indique pas la technique qu'il à suivie ; il y a tout lieu de croire cependant qu'il n'a pas dû se préoccuper beaucoup des actions bactériennes, car dans les pages suivantes de son travail il cite avec détails les expériences et le mode opératoire de FRÉDÉRICQ, criliqués plus haut, sans faire la moindre objection. J'ai opéré principalement sur deux espèces de Monaxonides, Sub. domuncula et Reniera simulans. La méthode employée a un peu varié dans les deux cas. Avec Suberiles je me suis servi des sucs obtenus par expression de l'animal, purifiés par décantation et conservés en présence de chloroforme ; j'ai employé parfois des extraits glycérinés. Au moment où je mettais la dernière main à ce travail j'ai pu arriver à préparer des extraits diastasiques de cette espèce, très impurs mais cependant d’un emploi commode. La principale difficulté qui m'avait arrêté dans cette voie consistait dans le noireissement du suc de l'éponge. Quand on essaie de précipiter par l'alcool le suc de Suberites préparé depuis quelques jours, le coagulum qui se forme est brun et devient rapidement d’un noir de jais par la dessication : il entraîne dans ses mailles de la tyrosine déjà oxydée et de la tyrosine qui s’oxyde pendant la dessication. Ce repos de quelques jours me paraissait nécessaire pour purifier par décantation les sucs d’éponge. Il vaut mieux opérer ainsi: décanter le suc de Suberites bientôt après sa prépa- ration, ajouter à la sorte de boue ainsi obténue une fois son volume LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 465 d'alcool, filtrer, ajouter deux nouveaux volumes d'alcool, filtrer à nouveau. Le dépôt qui reste sur le dernier filtre est mis dans de la glycérine ou de l’eau chloroformée ; une partie seulement se dissout. On filtre après quelques heures de macération. Pour À. simulans les individus étaient faiblement exprimés à la main, débités aux ciseaux, puis conservés pendant 24 heures en présence de chloroforme, afin de faciliter cette dialyse chlorofor- mique sur laquelle DASTRE a insisté. Les fragments étaient alors soumis à la presse, et le suc conservé en présence d’un excès de chloroforme. M'étant aperçu que le suc de cette espèce possède un pouvoir fermentaire très marqué, j'ai essayé d'en extraire les dias- tases. À cet effet, je l'ai additionné d’alcool à 90° en quantité suffisante pour amener le titre du mélange à être voisin de 45°. Après filtration une nouvelle quantité d’alcool est ajoutée et le titre porté à 70° environ. Le dépôt qui se forme dans cette dernière opé- ration, et qui est assez faible, est recueilli sur un papier filtre, puis rapidement séché entre des doubles de papier buvard et enfin à l'air libre. On obtient ainsi un dépôt violet (la liqueur alcoolique filtrée était d'un beau jaune), qui reste collé au filtre et qui est trop peu volumineux pour qu'il soit possible de songer à le recueillir. Aussi pour l'usage me suis-je contenté de mettre des bandelettes de ce papier, chargé de diastases, à macérer pendant quelques heures dans une solution de fluorure de sodium à 2°, ou dans de l’eau chloroformée ou éthérée. La solution des principes actifs était très rapidement obtenue, toutefois il restait en suspension dans le liquide des flocons hyalins dont on se débarrassait par la filtration. Les liqueurs ainsi préparées étaient d'un beau violet ; elles devaient cette coloration à une substance précipitable par l’alcoo!l fort, ainsi que je l’ai déjà dit, précipitable par le sulfate d’ammoniaque et le sulfate de zinc à saturation (avec décoloration en présence de ce dernier corps), non précipitable par le chlorure de sodium à satu- ration, non coagulable par la chaleur. Il m'a semblé que les solutions fluorées avaient une conservation beaucoup plus longue que les autres. On sait déjà que le chloro- forme n'est pas un bon agent de conservation pour les diastases. Pour un certain nombre d'éponges, principalement lorsque le matériel n’était pas en abondance, j'ai employé l'extrait glycériné ; il ne m'a pas été possible de noter de différences marquées entre les résultats obtenus par ce procédé et ceux que fournissent les sucs 30 466 JULES CÔTTE. chloroformiques obtenus par expression directe. Toutefois l'emploi de la glycérine a un inconvénient dû à ce qu’elle dissout partiel- lement un certain nombre de lipochromes, ce qui rend délicate l'appréciation de quelques réactions chimiques. Dans le cours de l’exposé qui va suivre, les actions diastasiques vont être citées dans l’ordre arbitraire que voici. D'abord une modi- fication d'ordre physique, en apparence au moins, la coagulation de la caséime; puis les actions chimiques, l’hydrolyse d’un certain nombre de substances alimentaires: hydrolyse des albuminoïdes, des graisses, des hydrates de carbone, les essais sur des substances diverses. À l'étude de l'attaque des albuminoïdes je joindrai celle de la bactériolyse. Ensuite seront examinées les oxydases ; ce sera une véritable digression, le sujet de ce chapitre étant la digestion des aliments, mais il m'a paru nécessaire de ne pas séparer la question des oxydases de celle des autres diastases. On verra d’ailleurs que les deux questions offrent de nombreux points de contact et ne peuvent pas être traitées séparément (1). PRÉSURE. La coagulation de la caséine est produite par le suc et les solutions de diastases de À. simulans, le suc de Sub. domuncula, la macé- ration glycérinée de Tethya lyncurium ; le suc de Cliona- viridis se montre extrêmement peu actif, le suc de Spongelia fragilis ramosa, celui de Cydonium gigas, le suc et l'extrait glycériné de Chondrosia reniformis se.sont montrés inactifs. La présure que sécrètent les spongiaires précédemment cités est oxyphile. Avec S. domuncula j'ai observé que l'addition de 340 mer. par litre de carbonate de soude à un mélange de 10 parties de lait pour 2 de suc d’éponge suffit à décupler le temps nécessaire à la coagulation du même mélange neutre. La coagulation finit cependant par se produire. Avec À. simulans j'ai obtenu un résultat analogue ; la présure de ces deux espèces serait strictement oxyphile, de faibles proportions d'alcali suffiraient pour arrêter son action. J'ai fait avec du lait de vache toutes les expériences qui ont porté sur la coagulation du lait (1) Pour la rédaction de ce qui a trait aux diastases je me suis largement servi du traité de DucLAUXx [99]. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 467 ou la digestion de la caséine. Ce liquide était préparé comme pour les recherches bactériologiques : chauffé, décanté, réparti par 10 cc dans des tubes à essais et stérilisé à 120°. Au moment voulu les liqueurs diastasifères lui étaient ajoutées en même temps qu’un antiseptique : chloroforme, êther, thymol. Je ne me suis pas servi de fluorure de sodium comme antiseptique : on sait en effet que les substances chimiques qui précipitent les sels de chaux jouent un rôle antidiastasique très marqué à l'égard de la présure, et de plus les recherches de LôRCHER nous ont appris que le fluorure de sodium semble avoir par lui-même un rôle particulièrement nocif. Mes expériences ont été faites à l’étuve à 34°. Les travaux de LüRCHER indiquent que les présures des ruminants possèdent une résistance assez marquée à l’action des alcalis. Le carbonate de soude, à la dose de 08-106 par litre de lait, rendrait le temps de coagulation 1,21 fois plus long ; il serait 1,43 fois plus long avec 08-212 de carbonate et 1,86 avec 02-464. 18-06 de carbonate arrêterait toute coagulation. La présure des deux espèces de Spongiaires que j'ai étudiées à ce point de vue se montre bien plus basophobe. Je viens de dire que 0£'-34 de carbonate décuplent le temps nécessaire à la coagulation par le suc de S. domuncula. Avec R. simulans je n'ai jamais eu de coagulation quand la proportion d’alcali a atteint 08:80 ; il est vrai qu'un nouveau phénomène venait se superposer à celui de la coagulation, ou mieux venait le combattre, c’est une digestion particulièrement active de la caséine. Au contraire les acides se montrent particulièrement adjuvants, comme pour les autres présures. ARTHUS a étudié cette action adjuvante pour l'acide chlorhydrique ; il s’est élevé jusqu'à des proportions de 08-33 environ d'acide par litre, et si l’on compare entre eux les résultats qu’il fournit, on voit que l’action de l'acide se montre régulièrement adjuvante à mesure que l'acidité va croissant ; l’action propre de l’acide comme agent de coagulation se superpose à l’action du ferment avec la plus grande régularité. Je ne suis pas arrivé à des courbes aussi nettes en ce qui concerne l'action des acides pour mes présures d’éponges. L'acide sulfurique s’est bien montré toujours adjuvant, d'autant plus que la dose en était plus forte, mais il n’y avait à proprement parler aucune proportionnalité à établir entre la quantité d'acide et la rapidité de la coagulation. Comme la richesse en caséase de mes préparations 468 JULES COTTE. diastasiques avait pour résultat de rendre mous les coagulums des tubes peu acides, il était impossible d'arriver à des évaluations de la rapidité de leur coagulation. Au sujet de l'intensité de cette action je puis dire qu'une solution dans l’eau chloroformée de diastases de À. simulans (un fragment de papier chargé de diastases et immergé dans 50%: de cette eau avait perdu 0:19 environ de substances solubles ou insolubles) a été ajouté à la dose de dix gouttes à 10%: de lait en présence de dix-huit gouttes d'acide sulfurique _. Après 4 h. 3/4 de séjour à l’étuve à 34°, la coagulation était poussée assez loin pour que le tube (tube à essais ordinaire) pût être maintenu renversé. Dans les essais moins chargés en acide, au mëme moment, le coagulum était mou ; il n’a fait que disparaître ultérieurement sous l’action de la caséase, sans prendre une consistance plus ferme. « En mettant dans une cave, à une température maxima de 14 à 15°, un tube de lait additionné d’une quantité de diastases de Rentera suffisante pour amener la coagulation en un temps maximum d’un quart d'heure, je n'ai vu apparaître qu'après 7 jours pleins un coagulum, extrêmement mou, de caséine déjà partiellement attaquée. Comme les autres diastases de coagulation, la présure des éponges est très nettement calciphile. À la dose de 4008. par litre, le chlorure de calcium a presque diminué de moitié le temps nécessaire à la coagulation du lait par le suc de S. domuncula. Pour À. simu- lans j'ai constaté également une action adjuvante des sels de calcium. Les solutions de pectine ne sont pas coagulées, même en présence de pelites quantités de sulfate de calcium, par les diastases de R. simulans. DIGESTION DE LA GÉLATINE. La gélatinolyse est produite par le suc et l'extrait glycériné de S. domuncula, par le suc et les solutions de diastases de R. simu- lans, l'extrait glycériné de Tethya lyncurium, de Cliona viridis, de Chondrosia reniformis, le suc de Spongelia elastica massa, LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 469 de Spongelia fragilis ramosa, de Chalinine; elle n’a pas eu lieu au contraire avec le suc de Cydonium gigas. On peut noter dès à présent que, toujours, la digestion de la gélatine à eu son maximum en milieu alcalin. Le mode opératoire a été variable. Dans mes premières recherches je me suis contenté d'ajouter à des tubes à essais renfermant une solution de gélatine coagulée un volume déterminé de liquide actif, additionné de quantités connues d’acide sulfurique décinormal ou de carbonate de soude décinormal. Pour empêcher l'intervention des microorganismes l'essai était recouvert d’une couche d’éther. En agitant fréquemment les tubes en expérience et en mesurant la hauteur de gélatine dissoute, il était possible de se rendre compte approximativement de l'intensité de la digestion. Comme À. simulans est particulièrement riche en enzymes, il m'a été possible de faire des expériences beaucoup plus précises, en opérant sur des solutions de diastases. J'ai eu alors recours au procédé qu'ont décrit ARTHUS et GAVELLE [02]. Une solution de gélatine à 20°/, dans l’eau de mer additionnée de fluorure de sodium à 1,5°/, après neutralisation à la soude, puis filtrée, a été répartie par 5% dans des tubes à essais, ensuite stérilisée par chauffage d’un quart d'heure à 115°. Au moment du besoin les mé- langes gélatinés étaient liquéfiés au bain-marie, puis additionnés d'une certaine quantité de solution de diastases, enfin d’un nombre de gouttes variable de solution acide ou alcaline. Le mélange plongé dans l’eau froide se coagulait immédiatement : l'expérience com- mençait, les tubes étaient portés à l’étuve à 34°. Il suffisait de voir le moment où les solutions de gélatine ne se prenaient plus en masse quand on les immergeait dans l'eau froide. Pour comparer les expériences entre elles, il était bon de noter la température de l'eau qui servait à cet usage, ainsi que le temps nécessaire pour arriver à la coagulation. Toutes les fois que ce temps a demandé plus d'une heure il a êté regardé comme indéfini. Il vaudrait mieux même prendre comme base une durée beaucoup plus courte ; une demi heure serait largement suffisante. Il est d’autant plus difficile, en effet, d'apprécier le temps de coagulation que ce temps est plus considérable, c'est-à-dire que l'attaque de la gélatine à été plus profonde. Il y a un état de demi-consistance qui dure pendant longtemps et qui ne peut fournir aucun point de repère. 470 JULES COTTE. Chaque observateur doit adopter un critérium qui lui permette de comparer ses expériences successives. Pour moi, j'estimais que la coagulation était obtenue lorsque, en mettant le tube horizontal, la gélatine ne coulait pas de plus d'un centimètre en une minute. La gélatinolyse, ai-je dit, se fait en milieu alcalin pour tous les sucs d'éponges qui la produisent. Je n'ai fait de déterminations précises qu'avec S. domuncula et R. simulans. Avec S. domuncula j'avais employé du suc ou de l'extrait glycé- riné versé sur de la gélatine solidifiée. L'action est alors irrégu- lière : plus intense au début, elle se ralentit rapidement à mesure que par peptonisation de la gélatine se produit une augmentation du volume de la partie liquide, que se produit par conséquent une dilution à la fois de la diastase et de l’alcali. Avec des doses d’alcali qui se sont élevées seulement à 2 # 612 par litre au début de l'expé- rience, le maximum de liquéfaction a correspondu régulièrement au maximum d’alcalinité. Une dose d'acide sulfurique égale à 500mer par litre diminuait dans de très fortes proportions l'attaque de la gélatine, sans l’annuler entièrement. Avec R. simulans j'ai opéré avec des solutions de diastases extrêmement diluées. La solution dont je me suis servi avait été préparée en plongeant dans une solution fluorée à 2°}, des bande- lettes de papier buvard imprégné de diastases, le tout filtré ensuite. Ces bandelettes n'avaient pas abandonné à l’eau, à l’état de disso- lution ou sous forme de produits arrêtés par le filtre, plus de 473m8r de substances par litre. La quantité employée a été de cinq à six gouttes de solution pour 5° de gélatine. Les doses d’acide et d’alcali ajoutées ont varié dans d’assez grandes proportions, de 08875 par litre pour l'acide sulfurique à 3487 par litre de carbonate de soude desséché. L’acide s'est montré régulié- rement retardant, l’alcali au contraire adjuvant. Expérience. Le 29 septembre 5cc de gélatine fluorée sont additionnés de cinq gouttes de solution fluorée de diastases et reçoivent en outre : A.... Oer.-875 d'acide °J BSD SG) » G.... O0, 898d'alcali je DEP DL) » ÉNS AOT20 » PARLONS NUVERS D Ep » Etuve à 34°. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 471 Après 24 heures, les tubes sont mis dans de l’eau courante à 16°; A, B sont pris après 4 m. 1/2, F après 5 m. 1/2, CG après 6 minutes, E après 15 minutes, D ne l'était pas après 1/2 heure. Le {er octobre, eau à 155 : A, B pris après 6 minutes, après {{ minutes F, C quelques secondes plus tard. Le 2 octobre, eau à 15°25. A pris après 6 m. 30, B après 7 une demi heure F et C sont seulement devenus plus consistants. Le 3 octobre eau à 16°2%5. A et B ne sont pas encore coagulés après une demi heure, mais la coagulation est proche. minutes. Après Autre expérience. — Le 30 septembre 5cc de gélatine fluorée sont additionnés de cinq gouttes de solution fluorée de diastase, et de plus de : A.... 28r.459 de carbonate de soude par litre. Ba A0 » » » CESR EENESS » » » D2227 4153 » » » Etuve à 34°, Le 1° octobre au matin, eau à 15%5. A, D pris après 7 minutes, G après 25 minutes, B demande 39 minutes. Le soir, 31 heures après le début de l'expérience, eau à 15°75. A se prend après 13 minutes, D après 14 ; C n’est pas pris après une demi-heure. Le 2 octobre, après 48 heures, eau à 15°%5. Ni A ni D ne sont pris après une demi-heure, mais A est plus pâteux que D. En même temps que les essais précédents est mis à l'étuve à 34° un tube de gélatine fluorée additionnée de dix gouttes de solution fluorée de diastases bouillie. Après huit jours le temps de coagu- lation, dans de l’eau à 15°, est encore de 1 à 2 minutes. DASTRE et FLORESCO [95] ont déjà montré que le fluorure de sodium attaque peu la gélatine. Il résulte de l'ensemble de mes expériences que la dose optima de carbonate de soude ne doit pas être éloignée de 4 grammes par litre pour la diastase de À. simulans. Il est intéressant de noter la résistance remarquable de cette diastase à l’action des acides ; si elle est nettement basophile, elle n'est pas extrêmement oxyphobe. Une dose de 875 mr d'acide sulfurique par litre n’a guère, au total, que quadruplé le temps qui est nécessaire pour la peptonisation de la gélatine en présence de la dose optima d’alcali. C’est réellement peu. Avec le suc de S.domun- cula j'étais arrivé à des résultats un peu différents, à ce point de vue. En présence de 500 "sr par litre d'acide sulfurique l'attaque de la gélatine était environ trente fois plus faible qu'avec le suc neutre, je ne parle pas du suc alcalin. La diastase de Suberites serait done 472 JULES COTTE, plus strictement basophile que celle de À. simulans, si l'on pouvait comparer des expériences faites dans des conditions différentes. La transformation subie par la gélatine paraît être dans son début une simple transformation physique : il y aurait simplement décoa- gulation, ainsi que paraît le montrer le fait suivant. Un mélange gélatiné solide, recouvert de suc de Suberites et d'éther, est mis à l’étuve à 20°. Après un certain nombre d'heures le mélange est sorti de l’étuve et plongé dans l’eau froide: tout se prend en masse, y compris la couche du liquide digestif. Dans un tube témoin possédant le même suc, mais bouilli, ce phénomène ne se produit pas. Il semble rationnel d'admettre qu’une certaine quantité de gélatine a été décoagulée, solubilisée par la diastase de Suberites, mais qu’elle a conservé néanmoins la faculté de se prendre en gelée si la tempé- rature ambiante vient à s’abaisser suffisamment. La molécule de la gélatine n’a pas été encore atteinte, car la gélification semble être une des propriétés qu’elle commence à perdre en premier lieu. Si l’on renouvelle ceite expérience après que le contact du liquide actif et de la gélatine a été plus prolongé, tout pouvoir de coagulation a été enlevé à la gélatine. Elle a été transformée en produits nouveaux résultant de son hydrolyse, en gélatoses, en peptones. Lorsque la digestion continue un temps suffisant on voit que le liquide, incoagulable par le froid, perd sa limpidité première, puis il se fait au fond du tube un léger dépôt floconneux de dyspeptones. Ne peut-on pas dépasser le terme même des peptones? Ainsi qu'on le verra, les diastases de À. simulans sont capables de produire de la leucine et de la tyrosine aux dépens d’un certain nombre de substances albuminoïdes. Avec la gélatine on ne peut pas espérer avoir de la tyrosine, mais on pourrait obtenir du glyco- colle ou tout au moins un corps de cette série. Il n’est pas aisé de s'en assurer. NEUMEISTER et MaLrITaNo mettent en garde contre l'emploi de l’acide phosphotungstique pour éliminer les peptones de gélatine, car ces derniers Corps ne sont pas entièrement précipités par le réactif. On ne peut pas songer non plus à utiliser directement sur les produits de digestion les réactions classiques du glycocolle, qui sont gènées par les corps en présence. | La coloration rouge avec le perchlorure de fer caractérise d’une manière générale les corps de la série acétique. Après d’autres LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 473 observateurs j'avais employé cette réaction [01 D], et j'avais conclu des résultats positifs qu’elle avait donnés à la formation de glyco- colle dans le mélange de suc de Suberites et de gélatine. Je me suis ultérieurement assuré que cette même réaction est fournie aussi par la gélatine employée, qui dans la circonstance se comporte comme un corps de la série acétique. Les lavages prolongés à l’eau froide ne lui ont pas fait perdre cette propriété. Comme le glycocolle, la gélatine lavée donne une coloration bleue en présence de phénol et d'hypochlorite de soude. Je me suis arrêté à la technique suivante. 50% environ de liquide provenant d’une digestion de la gélatine prolongée pendant des mois (2e. smulans) ont été saturés à chaud avec du sulfate d'ammo- niaque, filtrés, évaporés à siccilé. Le résidu a été lavé avec quelques centimètres cubes d'alcool à 50°, et cette liqueur additionnée de quelques centimètres cubes d’eau, puis de baryle caustique pour décomposer le sulfate d’ammoniaque. Un courant d'acide carbo- nique a neutralisé l'excès de baryte et le mélange a été évaporé au bain-marie. Le résidu repris à l'alcool à 50°, filtré et évaporé à nouveau, a laissé un dépôt déliquescent de peptones, renfermant des prismes clinorhombiques. Ceux-ci ont été isolés avec soin ; ils étaient solubles dans l’eau avec la plus grande facilité, et cette solution a servi à faire les deux réactions suivantes : 1° Coloration rouge en présence de perchlorure de fer, en liqueur neutre ; 2 Formation d’aiguilles bleues par l’addition de sulfate de cuivre, de potasse et enfin d’alcool absolu. Je me crois donc en droit de conclure qu'il se forme un corps appartenant au groupe du glycocolle dans la gélatinolyse produite par les diastases de À. simulans. Au point de vue de la rapidité de l'attaque de la gélatine on trouve de notables différences suivant la température à laquelle se fait la réaction. Il existe une température optima d'action pour les expériences in vitro. Expérience. — Le 30 septembre des mélanges contenant 56. du mélange fluoré et gélatiné habituel, cinq gouttes de la solution de diastases de 474 JULES COTTE, R. simulans et du carbonate de soude à la dose de 4 er: 024 °, sont ainsi placés : À est mis à l’étuve à 45°,5 B » » 34° C » » 180 D est mis dans une armoire (de 14°,5 à 16°, un jour à 1%, un jour à 18 ; température moyenne 15,5). Après 22h. 1/2, le 1° octobre, dans l'eau à 15,5 B est coagulé après 39 minutes, À après 94 minutes. Le 9 octobre C est partiellement liquéfié; en mettant le tube horizontal la masse progresse de {cm. en une demi-minute. Les restes écumeux, qui étaient collés contre la paroi interne de D et résultaient de l'agitation du tube pour . assurer le mélange au début de l'expérience, s’affaissent et descendent lentement le long du tube. Le 18 octobre D est pâteux; dans le tube horizontal la masse s’avance de 0 cm.9 en 4 minutes. C et D sont toujours parfaitement limpides. On voit qu’il faut plus de 18 jours, à une moyenne de 15°,5, pour produire le même effet que pendant 22 heures à 45°,5. Je n’ai pas eu les moyens de faire un essai comparatif en maintenant à la glacière les mélanges en expérience ; c’est évidemment par mois qu’il aurait alors fallu compter. Il ne viendra à l'esprit de personne de conclure de ces faits que les éponges ne peuvent pas digérer des corps analogues à la gélatine . lorsque la température de la mer vient à s’abaisser. On voit avec quelle lenteur s'opère déja l’hydrolyse de la gélatine. à la température de 15°, rarement atteinte par l’eau de mer, même à sa surface. Nous ne pouvons pas songer à comparer le chimisme des cellules vivantes aux grossières expériences de nos laboratoires. Ta chaleur, qui joue un rôle adjuvant si manifeste dans nos essais in vitro, peut être fournie, au sein du protoplasma vivant, par des réactions exothermiques concomitantes et doit même pouvoir être remplacée par d'autres agents (électriques, etc.) que nous ne sommes pas encore en état de soupçonner et auxquels serait empruntée l'énergie nécessaire aux transformations chimiques. Je n'ai pas disposé d’un outillage suffisant pour essayer de préciser, dans des conditions avantageuses et pratiques, l’optimum de température pour la gélatinolyse avec la diastase de À. simulans. D’après la forme de la courbe que donneraient l'expérience citée ci- dessus et d’autres analogues, il semble que la température optima doive être assez voisine de 45°. Pous les raisons que je viens d'exposer quelques lignes plus haut, il me semble d’ailleurs que cette question n'est pas d’une très grande importance. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES, 475 DIGESTION DE LA FIBRINE. Je me suis servi pour ces expériences de fibrine de veau, lavée à l’eau très longuement, puis à l'alcool et enfin à l’éther. Elle était conservée dans de la glycérine. Pour éviter toute intervention possible de diastases originellement entraînées par la fibrine, je me suis servi pour un grand nombre d'expériences d’un lot de fibrine qui avait été maintenu pendant deux heures à la température de 58", ainsi que l'indique Mesxiz [01]. C’est de cette dernière qu'il sera question toutes les fois qu’il sera parlé de fibrine chauffée. J'ai d’ailleurs essayé au point de vue de ses réactions la glycérine dans laquelle était plongée depuis deux ans la fibrine non chauffée : cette glycérine n’a rien donné à l’eau de brome, avec la tyrosinase elle a très légèrement bruni, par le sulfate de cuivre et la potasse elle s’est colorée en bleu. Comme la fibrine était chaque fois longuement lavée à l'eau distillée avant l'emploi, on voit qu'elle pouvait être regardée comme n'entrainant avec elle aucune diastase ni aucun produit résultant de son hydrolyse. Les solutions de diastases de À. simulans digèrent bien la fibrine. Celle-ci, au début ou quand on opère avec des solutions de diastase vieillies, est simplement dissoute, décoagulée. L'attaque est encore faible, les liqueurs filtrées précipitent abondamment par les acides, la réaction du biuret donne simplement une-‘couleur bleu violacé : nous sommes au stade des albumoses. Mais si l’action continue la solution ne précipite plus par l'addition de doses modérées d'acide azotique, elle se colore en beau rose par le biuret: elle renferme des peptones. Nous pouvons même dépasser le terme des peptones et arriver aux acides amidés. J'ai employé, pour m'assurer de ce fait, le précieux réactif physiologique que nous devons à BOURQUELOT et BERTRAND et dont HarLzayY [00] a fait l'application à l'étude des fermentations. La tyrosinase a la propriété de noircir les solutions de tyrosine: elle permettra donc de caractériser avec certitude la présence de la tyrosine (ou de corps analogues) dans les produits de digestion. Cette réaction se montre positive (1) avec les liqueurs provenant de (1) La solution de tyrosinase que j'ai employée est une macération glycérinée de Russules, que je dois à l’obligeance de M. le Professeur BOURQUELOT. Je l’en remercie vivement. 476 JULES COTTE, la fibrinolyse produite par À. simulans. D'ailleurs la simple évaporation au bain-marie d’une de ces liqueurs, suivie d’un examen au microscope, m'a montré de belles houppes de tyrosine accompagnées de cristaux de leucine. Dans les digestions obtenues avec des ferments du groupe de la trypsine et qui ont fait l’objet de recherches dans ces dernières années (HARLAY, MESNIL, MourTox) on a remarqué que la réaction positive à la tyrosinase était accompagnée par une réaction spéciale en présence d'eau de brome : c’est la réaction du éryptophane ou du protéinochrome. HArLAY l’a étudiée avec soin. Il est parfaitement reconnu que le corps qui précipite par l’eau de brome n’est pas la tyrosine, mais que c'est une substance à molécule plus complexe et se produisant en même temps que la tyrosine sous l'influence des diastases tryptiques. D'après KuRAIEFr le protéinochromogène dériverait des albumoses primaires et de l’albumose secondaire A, avant l'apparition de la deutéroalbumose B. Picx admet que parmi les albumoses primaires la protalbumose seule peut donner naissance à ce corps, aussi bien qu'à la tyrosine, tandis que l’hétéroalbumose ne fournit ni protéinochromogène, n1 tyrosine. Dans les digestions obtenues avec l’aide des diastases de Reniera la réaction est positive avec la tyrosinase, constamment négative avec l’eau de brome. L’addition de ce réactif en quantité suffisante produit un précipité blanchâtre, qui devient ensuite jaunâtre et rougetre lorsque le brome est en excès et colore le mélange par sa seule présence (1). La constatation de ce résultat a une certaine importance pour l'étude du corps que le brome précipite dans les digestions tryptiques. En tous cas elle donne la certitude que le protéinochro- mogène ne se sépare pas d'une façon fatale de la molécule des albuminoïdes ou des albumoses en même temps que la tyrosine. J’ajouterai que la réaction à l’eau de brome est absolument négative aussi avec les produits résultant de l’action de la gélatine. Ce dernier résultat n’a rien qui puisse nous surprendre puisqu'il est parfaitement admis que le protéinochromogène n’apparaît jamais qu'en compagnie de la tyrosine. Je viens d'indiquer qu'il (1) Des expériences de contrôle, faites simultanément avec de la pancréatine du commerce, m'ont donné nettement la réaction à l’eau de brome avec les digestions pancréatiques, LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 477 n'apparaît pas d’une façon constante en même temps que celle-ci. Tout comme la liquéfaction de la gélatine, l'attaque de la fibrine se produit surtout en milieu alcalin. J'ai mis O8: 30 de fibrine chauffée dans 5°%- de solution à 2°}, de fluorure de sodium, avec dix gouttes de solution fluorée de diastases de R. simulans, et des doses d'acide sulfurique s’élevant à 1 8: 276 par litre ou du carbonate de soude jusqu'à la dose de 108r- 1°. Etuve à 34°. L'action n'était pas conduite de façon identique dans tous les tubes ; dans les solutions acides la fibrine reste plutôt en flocons, dans les solutions alcalines elle est fragmentée à l'extrême, donnant par l’agitation un aspect laiteux aux mélanges. La réaction de la tyrosinase après neutralisation, avec appréciation de la couleur produite, m'a donné des résultats trop dissemblables pour que j'aie pu évaluer par ce moyen l'intensité de la digestion ; la réaction du biuret m'a paru supérieure pour ces recherches. L’acide se montre empêchant, l’alcali au contraire graduellement adjuvant jusqu’à la dose de 3 8: 4 à 385 par litre de carbonate, vers laquelle paraît se tenir la dose optima d’alcali. Dans certaines expé- riences la dose de 5 grammes s’est montrée à peu près aussi adjuvante que celle de 32: 4; dans d’autres elle a été réellement moins active. J'ai refait ces expériences en mettant de la fibrine chauffée avec des solutions de diastases de Reniera; après un séjour de dix à vingt minutes la fibrine est lavée abondamment à l’eau distillée et répartie dans des tubes renfermant une solution de fluorure de sodium à 2°, additionnée d'acide ou d’alcali. Dans ces recherches l'acide sulfurique s’est encore élevé à la dose de 18-276, le carbonate à 108: 10 par litre. Il y a eu dissolution lente de la fibrine, avec formation de peptones et de tyrosine. J'ai trouvé que le maximum d'action correspondait encore à une proportion d’alcali comprise entre 3%-4 et 5 grammes. Il est difficile de préciser davantage, car lorsqu'on opère dans des régions voisines du point optimum on ne trouve que peu de différences entre les divers essais, et les évaluations ne sont pas aisées. En opérant directement sur du suc de Reniera, en présence de chloroforme, avec des doses d'acide s'élevant à 183 par litre environ et d’alcali jusqu'à 28 par litre, le maximum d'attaque a correspondu au maximum d'alcalinité, le minimum au maximum d’acidité. Cependant la réaction du biuret était encore positive pour le tube le plus acide. 478 JULES COTTE. Pour m'’assurer que la fibrine chauffée employée dans mes essais ne subissait pas la digestion saline qui a été assez longuement étu- diée (LimBourc, DENYS et MARBAIx, DASTRE), j'ai mis cette fibrine à l’étuve à 34° avec une solution de fluorure de sodium à 2°/. Après six jours la fibrine est intacte en apparence, l’eau fournit très faible- ment la réaction du biuret. Les résultats ont été identiques en opérant avec une solution bouillie de diastase dans l’eau fluorée ; après vingt-quatre heures de séjour à l’étuve il ne s’est manifesté aucune attaque de la fibrine. Si nous comparons l’ensemble de ces résultats à ceux qu'a fournis l'étude des ferments digestifs précédemment connus, on voit que la proportion optima d’alcali pour la diastase de À. simulans corres- pond exactement à l’optimum pour la trypsine des Mammifères. Pour celle-ci la proportion optima de carbonate de soude est de trois à quatre millièmes ; au delà de dix millièmes l’action peptoni- sante diminue. Par contre la trypsine des Mammifères n’agit plus sensiblement lorsque la dose d'acide libre s'élève à 500 mr: par litre. Nous avons chez notre éponge une résistance beaucoup plus grande à l’action des acides ; si la diastase de À. simulans est très nettement basophile, elle est moins strictement oxyphobe que la trypsine. La courbe qui représente son action a son maximum dans la région alcaline, une de ses branches descend lentement dans la région acide et s’y abaisse graduellement, n’atteignant le zéro qu'assez loin de l’axe des y. Cette résistance aux acides est analogue à celle que l’on a prêtée au ferment que renferme le suc de figuier, et qui agirait aussi bien en milieu alcalin qu’en milieu acide; on ne peut songer cependant à assimiler les deux diastases, car le ferment du figuier ne fournit pas de tyrosine et parait se rapprocher beaucoup de la papaïne (Harzay). La recherche de ses préférences oxyphiles ou basophiles paraît à refaire. L’actinodiastase, dont MESNIL à fait une étude approfondie, est très nettement basophile. L'auteur a constaté que tout phénomène de digestion est arrêté lorsqu'on ajoute à l’eau de mer dans laquelle le ferment est dissous une solution d'acide chlorhydrique ou d'acide phosphorique en quantité telle que le mélange devienne acide au méthyl-orange. Ce ferment est donc presque strictement basophile et ne peut tolérer que des traces d’acide libre; il est plus oxyphobe que la trypsine des Mammifères. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 479 La diastase des Amibes, étudiée par Mourox [02], a des caractères analogues. Le réactif de BOURQUELOT nous permet encore, nous l'avons vu, de ranger la diastase de R. simulans à côté des ferments tryptiques et de l’actinodiastase. La réaction du protéinochrome éloignerait au contraire cet enzyme des deux derniers ferments cités, qui fournis- sent cette réaction, de la papaïne qui la donne aussi, quoique moins bien, pour le rapprocher de la pepsine avec laquelle la réaction ne se produit plus. Comme le protémochromogène est une substance encore mystérieuse, dont la nature nous est absolument inconnue, il est beaucoup plus logique d'accorder la préférence, pour le clas- sement, aux renseignements que nous fournit la tyrosinase et à la basophilie du ferment. Pour conclure, c’est donc à la trypsine que nous devons assimiler le ferment de Reniera en nous servant pour cette étude du réactif Russula. Il s'éloigne d’elle par l'absence de réaction à l’eau de brome. Il se rapproche encore d'elle par le titre d’alcali qui corres- pond à son maximum d'action ; il s’en éloigne par la dose d'acide empêchante qui est plus élevée pour lui. Avec le suc de Suberites domuncula je suis arrivé à des résultats un peu différents. La fibrine est très peu attaquée par le suc de l'éponge ; elle l’est cependant d'autant plus que la liqueur est plus acide. Si l’on immerge dans de l’eau distillée des flocons de fibrine impressionnés par un séjour dans du suc de Suberites, puis lavés avec le plus grand soin, l'attaque ultérieure est faible; elle aug- mente régulièrement si l’on ajoute de l'acide sulfurique ou du carbonate de soude à doses croissantes, l'attaque étant cependant plus énergique dans les mélanges alcalins que dans les acides. On peut pour ces expériences remplacer l’eau distillée par du suc d’éponge bouilli ; la digestion s’y fait aussi bien que dans l’eau, ce qui prouve que les substances empêchantes renfermêées dans le suc sont détruites par l’ébullition. Ce n’est pas à dire qu'il existe dans le suc des antidiastases de nature fermentaire ; beaucoup d’autres substances que les ferments peuvent voir disparaître leur action à 100° (1). (1) BouRQUELOT et HÉRISSEY [03] viennent précisément de mettre en lumière un fait extrêmement démonstratif à ce sujet : la chaux joue le rôle d’antidiastase à l'égard de l’invertine, bouillie préalablement avec un corps gras elle perd cette propriété. A80 JULES CÔTTE. En précipitant par l'alcool du suc récent de Suberites j'ai pu préparer, très impures, les diastases de ce Spongiaire. En solution glycérinée elles ont montré, elles aussi, un pouvoir fermentaire très peu marqué. La courbe représentant la marche de la digestion dans le suc de Suberites (entre les doses de 18960 d'acide et de 28-120 de carbo- nate de soude par litre) serait représentée par une ligne s’élevant régulièrement avec les doses croissantes d’acide. Pour la digestion dans l’eau de la fibrine impressionnée, entre les doses de 08-466 pour l'acide et de 086 pour l’alcali, il faut figurer un V dont la pointe est située au niveau de la neutralité et dont la branche qui s'élève dans la région alcaline à une ascension plus rapide que celle qui monte dans la zone acide. J'avais pris beaucoup de peine pour essayer de faire accorder entre eux ces résultats, et j'avais finalement conclu qu'il existe chez S. domunçcula un ferment basophile, accompagné par une substance empêchante, basophile elle aussi. Quant à la digestion de la fibrine impressionnée, obtenue dans l’eau distillée acide, j'avais cru pouvoir l'attribuer à l’action que l’acide lui-même exerçait sur une fibrine dont l'intégrité moléculaire avait été déjà atteinte. Je ne sais pas s’il ne faut pas rectifier cette dernière proposition et je crois qu'il y a lieu d'admettre l'existence simultanée chez Suberites d'un ferment tryptique et d’une pepsine. Par l’évaporation des produits de la digestion j'ai pu voir se former quelques houppes cristallines de tyrosine. En opérant avec le suc il est difficile d'obtenir cette dernière substance, car elle n’est produite qu'en très petite quantité. Elle paraît d’ailleurs être détruite en majeure partie, au fur et à mesure de son apparition, par une tyrosinase qui existe dans le suc et que j'étudierai avec les oxydases. En immergeant des flocons de fibrine dans du suc de Suberites, en les lavant à l'eau distillée et en les plongeant dans l’eau chloro- formée alcaline, je viens d'obtenir des liquides qui fournissent la réaction de la tyrosine avec le réactif Bourquelot. Il y aurait done dans le suc de S. domuncula un ferment à rapprocher des trypsines proprement dites, mais il s’éloignerait encore d'elles par l'absence de réaction à l’eau de brome. Le suc de Cydonium gigas se rapproche beaucoup de celui de S. domuncula au point de vue de son action sur la fibrine. L'attaque est beaucoup moins énergique, le suc semble être dilué d'eau de LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 481 mer. En faisant digérer de là fibrine par du suc de Cydonium chloroformé, puis en ajoutant après une semaine de contact à l’étuve à 34 de la tyrosinase de Russules à une partie du liquide, cette dernière partie a notablement foncé sa teinte brune. En mettant dans de l’eau chloroformée de la fibrine simplement impressionnée par un passage dans le suc de Cydonium, j'ai obtenu un liquide de digestion qui noircissait nettement par le réactif Russula et ne donnait pas avec l’eau de brome la réaction du protéinochrome. L’'extrait glycériné de Tethya lyncurium dissout peu la fibrine, la réaction semblerait indifférente à l'état alcalin ou acide du mélange. Le suc noircit par la tyrosinase qu'il renferme, comme ceux de S. domuncula ei de C'yd. gigas, ce qui indique bien que le ferment digestif de l'animal se rapproche de ceux que nous venons d'étudier. Le suc de Cliona viridis, l'extrait glycériné de la même espèce et de Chondrosia reniformis n'ont produit aucune attaque sur la fibrine ; celle-ci, mise ensuite dans de l'eau distillée, n’a subi aucune attaque ultérieure. Les sucs de Spongelia fragilis, de Sp. elastica massa et de Cha- linine digèrent assez bien la fibrine ; cette attaque est plus énergique pour les sucs alcalins (0540 environ de carbonate de soude par litre) que pour les sues acides (08 30 d'acide sulfurique). Le sue de Spongelia elastica massa acide n’a manifesté aucun pouvoir pepto- nisant. En lavant longuement à l’eau distillée de la fibrine impres- sionnée par le suc de ces mêmes espèces, puis en la plaçant dans de l’eau distillée recouverte d’éther, en présence d'acide ou d’alcali aux mêmes doses que ci-dessus, je n’ai eu aucune réaclion par l'essai au biuret, sauf pour la fibrine qui avait été impressionnée par le suc de Sp. fragilis et qui avait été mise ensuite dans de l’eau distillée alcaline. On voit que la nature des diastases des Spongiaires n’est pas constante dans l’ensemble de l’embranchement. Chez la plupart des espèces que j'ai étudiées il paraît exister un ferment voisin des trypsines sans être identique avec celles-ci. Je lui conserve le nom de subéripsine, sous lequel je l'avais provisoirement désigné. A ce ferment semble surajoutée une pepsine chez S. domuncula et Cyd. gigas, peut-être aussi chez Tethya lyncurium. 11 est à remarquer que KRUKENBERG à constaté l'existence d’une pepsine chez ces trois 31 482 JULES COTTE. espèces ; nos conclusions s'accorderaient partiellement sur ce point. Une chose m'a vivement étonné dans les résultats que fournit le chimiste d'Heidelberg, c'est que des espèces voisines puissent posséder des ferments aussi différents que le sont les trypsines et les pepsines. J'ai rappelé plus haut que KRUKENBERG à trouvé une pepsine chez S. domuncula,S. flavus, une trypsine chezS. lobatus, S. inassa. Nous ne sommes guère habitués à voir de telles diffé- rences dans le chimisme d’espèces aussi voisines. Il y a peut être lieu de se demander si les individus observés par l’auteur allemand n'avaient pas, au moment où ils ont été examinés, prédominance tantôt de l’une, tantôt de l’autre de deux diastases coexistantes, et si ce fait, ajouté à la présence possible de substances empêchantes, d’antidiastases, n’a pas pu amener KRUKENBERG à poser les conclu- sions auxquelles je viens de faire allusion. Il est vraisemblable que les deux ferments ne doivent pas exister ensemble dans les mêmes cellules, mais ils doivent se trouver séparés chez l'animal. D'après ce que nous savons déjà de la nutri- ion chez les Spongiaires, il est certain qu'une notable partie des diastases observées doit se trouver dans les phagocytes, dont le rôle dans la digestion est des plus importants chez les Incalcaria. Peut- être les choanocytes ont-ils aussi le pouvoir de sécréter une diastase, bien qu'ils paraissent être chez les Incalcaria chargés surtout des fonctions d'ingestion. { Mes essais au tournesol ne nous enseignent rien à ce sujet. J'ai indiqué que je n'avais pu observer, dans mes expériences, que de rares enclaves bleues dans les cellules migratrices de S. domun- cula et de Telhya lyncurium ; j'ai observé chez Syc. raphanus à la fois des enclaves bleues et des enclaves roses réunies dans les mêmes cellules, alors que KRUKENBERG à extrait une trypsine de celte espèce. Si nous comparons ces résultats à ceux que fournit LoisEL, 1l restera dans l'esprit que le tournesol n’a encore guère donné de renseignements sur les phénomènes de digestion qui se passent chez les Spongiaires. DIGESTION DE L'ALBUMINE ET DU GLUTEN. Ce que j'ai dit au sujet de la fibrine me permettra d’être très bref en ce qui concerne l'attaque de l’albumine. Les deux actions sont identiques et sont dues bien certainement à la même diastase. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 483 L'ovalbumine coagulée, traitée par les solutions de diastase de R. sünulans, y disparaît lentement, très lentement, avec production de peptones et de tyrosine. La réaction avec la tyrosinase est posi- tive, celle du protéinochrome est négative. L'alcalinité favorise l’action du ferment. L’extrait glycériné et le suc de Chondrosia reniformis sont sans action sur l’albumine cuite. Les sucs ou les extraits glycérinés de Cyd. gigas, de Tethya lyn- curiuim et de S. domuncula se comportent avec l’albumine comme avec la fibrine ; on ne réussit cependant pas à impressionner l’oval- bumine pour la faire ensuite digérer dans de l’eau chloroformée, car cette substance n’entraîne pas les ferments. Le gluten de blé est attaqué par la diastase de A. simulans, principalement en milieu alcalin. Il y à formation de tyrosine (réactif Russula); l’eau de brome ne donne pas la réaction du protémochrome. DIGESTION DE LA CASEINE La caséine est susceptible d’être digérée par les diastases des éponges, au même titre que les autres albuminoïdes. Généralement il y à d’abord action d’une présure, et c’est la caséine déjà coagulée qui subit l'attaque de la caséase ; dans d’autres conditions expéri- mentales la caséine est directement hydrolysée. J'ai fait remarquer, au sujet de À. simulans, que cette action liquéfiante sur la caséine était très gênante quand on voulait faire l'étude de la présure des éponges. Quand on opère en liqueur suffisamment acide (08: 50 d’acide sulfurique par litre) il y a formation d'un coagulum dur, mais à cette dose l'acide opère déjà pour son compte en provoquant la coagulation de la caséine. L’aci- dité est-elle faible ou nulle, le coagulum reste très mou, le tube dans lequel se fait l'essai ne peut être renversé à aucun moment. Comme il est impossible de séparer de l’action de la présure celle qui est due à l'acide lui-même et de démêler la part qui revient à chacun des agents dans la courbe représentant le phénomène, il ne m'a pas été possible d'étudier la marche d'action de la présure. On peut étudier plus facilement la caséase qui est surajoutée au ferment coagulant ; il suffit en effet d’alcaliniser les mélanges sur 484 JULES COTTE. lesquels on opère pour paralyser entièrement la coagulase et favo- riser au contraire l’action du ferment hydrolysant. Quand on ajoute du carbonate de soude à un mélange de lait et de diastase de À. sulans, ne se produit aucune coagulation ; au lieu de s’opacifier le mélange s'éclaireit. Il se fait une sorte de demi- transparence, qu'obscureit seul un précipité blanchâtre extrêmement léger ; celui-ci finit par se déposer parfois au fond du tube, si l’expé- rience est prolongée pendant des semaines, et la liqueur surnageante est alors parfaitement limpide. La caséine a été hydrolysée par le ferment digestif, avec formation d’un dépôt de dyspeptones et de composés nucléiniens. La désintégration de la molécule albuminoïde a été poussée très loin ; en acidifiant le mélange à l’acide acétique, puis saturant à la craie, il est facile d'obtenir avec la plus grande netteté le brunissement que produit la tyrosinase. En évaporant au bain-marie le liquide de digestion du lait par la même diastase, j'ai obtenu des aiguilles de tyrosine, des cristaux de leucine, et des cristaux en navette dont je n'ai pas compris la nature et qui sont peut-être dus aux acides gras du lait. L'eau de brome ne fournit encore pas la réaction du protéino- chrome. En même temps que se produisent ces phénomènes d’hydrolyse la liqueur jaunit, puis brunit. On a constaté depuis longtemps cette altération des laits qui servent aux expériences de digestion artifi- cielle ; elle parait due en grande partie à une sorte de caramélisation du lactose. Dans les tubes acides le coagulum primitivement formé sous l'action de la présure s’affaisse lentement; à la partie supérieure se dégage à mesure une couche liquide parfaitement limpide. Les corps insolubles qui prennent naissance pendant cette attaque de l’albu- minoïde ne sont plus en suspension dans le liquide : ils restent plus ou moins accolés au caillot. En même temps le liquide jaunit légè- rement, d'autant moins que la liqueur est plus acide. La caséase possède une assez grande résistance à l’action de l'acide sulfurique : une proportion de 0£" 80 par litre n’a pas arrêté son action, mais l'a fortement ralentie. Dans un tel mélange la caséine avait aux deux tiers disparu, après un mois de séjour à l'étuve à 34°. Quant à l’action adjuvante des alcalis, je l’ai trouvée régulièrement croissante avec le maximum d’alcalinité, sans trouver de dose oplima; il est vrai que je ne suis allé que jusqu’à une LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 485 quantité de carbonate de soude égale à 5 8: 066 par litre. On pourrait objecter que l’hydrolyse de la caséine est produite dans les mélanges acides par un ferment différent de celui qui agit en milieu alcalin. Cette hypothèse ne peut pas être acceptée ; l'examen de la marche des expériences montre que l'influence retardante des acides est aussi régulière que l'influence adjuvante des alcalis. D'ailleurs la présence de la tyrosine dans le liquide de digestion du mélange cité plus haut, acidifié à 0 8 80 d’acide sulfurique par litre, montre bien que la caséine y avait été hydrolysée par la même diastase qui l'attaque en présence des alcalis. Parmi les espèces qui digèrent la caséine je cite À. süunulans, S. domuncula. Tethya lyncuriwum, Cliona viridis qui coagulent le lait (cette dernière bien faiblement) n’ont pas redissous le coagulum formé. Le suc de Chondrosia reniformis, de Spongelia [ragilis et de Cydonium gigas n'ont pas attaqué la caséine. Je crois être en droit de conclure des résultats que je viens de fournir, et surtout de ceux que m'ont donnés les diastases de R. simulans, que la caséase est entièrement identique avec les autres ferments des albuminoïdes. C'est une seule et même diastase qui parait hydrolyser la gélatine, la fibrine et la caséine. Vouloir séparer de la subéripsine la caséase de À. snulans constituerait, je crois, une grossière erreur. Comparons en effet l’action produite sur les trois albuminoïdes cités plus haut; pour tous les trois l'attaque est maxima en milieu alcalin, minima en milieu acide. L'acidité n’est pas extrêmement empêchante : à la dose de 1 #3 par litre pour la fibrine, de 0 8875 pour la gélatine, de 0 #80 pour la caséime, l'acide sulfurique n’a pas empêché d’une façon absolue l'hydrolyse de se produire. La dose de carbonate de soude optima est de 385 environ pour la fibrine, de 4 grammes environ pour la gélatine ; nous venons de voir qu'elle est égale ou supérieure à » grammes pour la caséine. Nous pouvons regarder les deux premiers chiffres comme sensiblement égaux ; pour le dernier, remarquons que la caséine est une nucléoalbumine, renfermant par conséquent des nucléines à fonction acide. Il est très possible que cette différence de composition chimique soit en partie la cause de la légère diffé- rence dans les résultats que je viens de signaler. Nous pouvons comparer la fibrine et la caséine au point de vue des produitsauxquelsdonne naissance leur hydrolyse.Toutes les deux ont fourni de la tyrosine, sans protéinochromogène. Nous retrouvons 486 JULES COTTE. une telle identité d'action dans les divers cas qu’il est possible de conclure sans hésitation que la protéase agissant sur la gélatine, la trypsine qui digère la fibrine et la caséase de À. simulans sont en réalité un seul et même ferment, la subéripsine, dont les propriétés d’hydrolyse s'étendent à un assez grand nombre d’albuminoïdes. Nous pouvons également lui attribuer sans hésitations la digestion du gluten et celle de l'ovalbumine. Je serai moins absolu en ce qui concerne d’autres Spongiaires. Il y aurait une contradiction apparente à établir de pareilles analogies au sujet de Tethya, par exemple, dont les ferments digestifs hydro- lysent la fibrine et la gélatine et ne touchent pas à la caséine. Et cependant l'exemple de À. simulans me parait si typique, venant à l'appui de ce qu'ont déjà vu un certain nombre d'auteurs au sujet de ferments digestifs analogues, qu'il me paraît difficile de voir dans les caséases des éponges un ferment spécial. Tout au plus pourrait- on dire qu’un ferment donné a ou n’a pas des propriétés caséasiques. La diastase de S. domuncula m'a montré des propriétés caséasiques, je n’en ai pas reconnu à celle de Tethya lyncurium et de Cydo- nium gigas, dans les conditions où je me suis placé. Nous ne connaissons pas une seule diastase, exception faite des diastases inorganiques, nous ne connaissons que des actions diastasiques, et ce n’est pas au moment où s'ébauche l'étude des anticorps, des alexines, des Kkinases, elc. que nous pouvons être autorisés à attribuer à une substance nouvelle chaque nouvelle action diastasique. Je crois qu'il y a lieu aussi de souligner l'indépendance absolue qui existe entre la présure et le ferment hydrolysant chez les Éponges (1). On avait constaté déjà cette indépendance, et cepen- dant bien souvent les recherches sur les caséases ont porté sur des espèces animales ou végétales qui sécrètent à la fois un ferment coagulant et un ferment digestif. Nous avons encore chez les éponges association des deux ferments qui ont chacun leur entière autonomie. Sans chercher à insister sur ce que la fréquence de cette association chez les êtres organisés présente d’intéressant, je puis faire remarquer que l'addition de petites quantités d’alcali suffit pour annihiler l'action de la présure et laisser subsister seule l’ac- (1) J'avais déjà montré, pour le suc de S. domuncula, qu'un chauffage d’une heure à 70° détruit le pouvoir hydrolysant : il faut chauffer à une température supérieure comprise entre 10° et 80°) pour détruire le pouvoir coagulant. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 487 tion hydrolysante. D’après ce que nous avons vu précédemment, il faut admettre que les phénomènes digestifs se passent chez Æ. si- mulans en milieu alcalin ; c’est donc en milieu alcalin aussi, sans coagulation préalable, que se produit la digestion des nucléoalbu- mines que les hasards de l'alimentation viennent à offrir à ses cellules digestives. Quelle peut être pour cet animal l'utilité d’une coagulase strictement oxyphile ? BACTÉRIOLYSE. Mes expériences d'alimentation artificielle m'avaient indiqué que les bactéries (b. s2esentericus) peuvent servir de nourriture aux ‘éponges. J'ai tenu à m'assurer si les diastases possèdent la propriété de détruire les bactéries in vitro. Je me suis servi à cet effet d’une solution de diastases de À, smulans, faite dans le bouillon ordinaire qui sert de milieu de culture en bactériologie. Cette solution agit avec assez d'énergie sur le vibrion du choléra, qui a élé choisi à cause de la facilité avec laquelle 11 subit le phénomène de Pfeiffer. Il ne se produit pas d’agglulination en délayant une anse de platine de culture de choléra dans quelques gouttes de solution de diastase. Au début les bactéries conservent toute leur agililé, puis la vivacité de leurs mouvements diminue. Au bout d'une heure il est facile de constater que beaucoup d’entre elles sont immobiles, ont pris une forme beaucoup plus globuleuse. Après une heure et demie on trouve beaucoup d’aspects indiquant avec la dernière évidence la destruction des bactéries: formes bizarres, globuleuses ou vacuolaires, détritus mélangés aux restes des microorganismes et provenant de leur liquéfaction. Cette action ne s'exerce pas sur toutes les espèces de bactéries ; le fait est évident à priori puisqu'il est nécessaire d'ajouter des antisep- tiques aux sucs de Spongiaires pour en empêcher la putréfaction. Le développement des moisissures se fait aussi sur ces sucs avec la plus grande facilité. Venant à l'appui des expériences d'alimentation, ces essais de bactériolyse montrent d'une façon précise quel rôle doit jouer la flore bactérienne de l’eau dans l'alimentation des Spongiaires. La vraie nature des aïiments des éponges nous est toujours inconnue. Cependant nous pouvons, à la suite de ces recherches expéri- 488 JULES COTTE. mentales, admettre que les bactéries servent abondamment d'aliments aux éponges. Nous avons vu que les grains d’amidon sont ingérés par les choanocytes de Syc. raphanus et y subissent une attaque évidente; l'étude des diastases va nous conduire à constater chez les Spongiaires la présence d’une amylase. Il est donc probable qu'une foule de petits débris végétaux qui flottent dans les eaux doivent aussi concourir à la nutrition des Spongiaires. Il en est de même des détritus animaux. Ajoutons encore les substances solubles, provenant de la destruction des organismes aquatiques el dont le rôle doit être vraisemblablement très important au point de vue qui nous occupe. Un certain nombre d'auteurs ont cité les Infusoires comme pouvant servir de proie aux éponges ; il ne doit en être ainsi que chez les animaux intacts, car sur des dissociations de S. raphanus, de S. domuncula, de R. sinulans, ete., j'ai suivi bien des fois avec intérêt des infusoires qui venaient se jouer entre les cellules des éponges etse heurtaient impunément aux amibocytes et aux choanocytes qui encombraient la préparation. HYDROLYSE DE L'AMIDON. Le suc de $S. domuncula possède un pouvoir hydrolysant marqué sur l’amidon, cru ou cuit, et le transforme en sucres réduisant la liqueur de Fehling. Cette action est très nettement oxyphile; j'ai tronvé qu'à l’étuve à 37° la dose d’acide optima siège pour l'acide sulfurique aux environs de 0: 340 par litre. Le carbonate de soude se montre empêchant, comme pour les amylases en général. Les diastases de À. simulans attaquent faiblement l'amidon cuit, sont sans action sur l’amidon cru ; il en est de même pour l'extrait glycériné de Tethya lyncurium. Le suc de Cydonium gigas attaque bien l’amidon, cru et cuit; celui de Chondrosia reniformis n’a aucune action sur l’amidon, cru ou cuit. A l’époque de mes premières recherches sur ce sujet j'avais adopté l’idée des spongiologues qui croient pour la plupart à la présence de l’amidon chez les éponges, aussi avais-je trouvé tout naturel de déceler chez ces êtres l'existence d’une amylase chargée d'hydrolyser les substances de réserve. On verra plus loin que mon opinion est devenue tout autre ; ilne m'est plus possible d'accorder aux éponges la propriété d'élaborer des substances amylacées. Il ne LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 489 m'est pas difficile néanmoins de trouver la véritable raison d'être de l'amylase, les expériences d'alimentation m'ayant fait constater que les choanocytes de Syc. raphanus peuvent ingérer l'amidon de riz el l'attaquer ultérieurement. HYDROLYSE DES SUCRES. Les solutions de diastases de À. sûnulans atlaquent avec très peu d'énergie le saccharose et le raffinose ; il y aurait donc existence chez cette espèce, en très petite quantité d'après mes expériences, d'un ferment identique avec l’invertine. Les expériences toutes récentes de PorrEevix [03] nous ont montré en effet que le raffinose est hydrolysé par l’invertine en même temps que le saccharose ; nous retrouvons ici la même concordance. Comme l'action s'est montrée très faible, il ne m'a pas paru utile de me livrer à une étude sérieuse des conditions dans lesquelles se fait cette attaque. J'ai noté seulement qu’elle ne se produit pas en milieu alcalin. Le suc de Cyd. gigas dédouble le saccharose, l'extrait glycériné de Tethya lyncurium le laisse inaltéré. Le suc de $S. domuncula se montre plus actif. Il intervertit le sucre de canne et cette action est nettement oxyphile. J'ai observé que le maximum d'action, à l’étuve à 37°, se produit avec une acidité en acide sulfurique égale à 0£#:235 par litre environ. Par contre, avec une proportion de carbonate de soude égale à 08 252 par litre l'hydrolyse n’était pas arrêtée. Il y avait dans ce dernier as, après 22 heures de contact, une décomposition de moins de 4°/,du sucre offert au suc d’éponge ; elle était de 12,08 °/ dans Le premier cas. La solution de saccharose était à 5°/,. EXPÉRIENCES DIVERSES. La cellulose (papier filtre lavé aux acides, moelle de sureau soigneusement purifiée, coton lavé) n'est pas attaquée par les solutions de diastases de À. simulans ; la gélose (agar-agar) non plus. Pour ces recherches les mélanges sont restés six jours à l’étuve à 34°, en présence de chloroforme. L’amygdaline n’a subi qu'une trace d’atlaque après 17 heures de séjour à l’étuve à 34 en présence des mêmes diastases et de 490 JULES COTTE. chloroforme. Une attaque assez faible pour être marquée comme douteuse doit être regardée comme nulle. Une solution bouillie de gomme arabique à 5°/, après huit jours de contact à l'étuve avec les mêmes diastases, en présence d’éther, n'a possédé que des traces de pouvoir réducteur sur la liqueur de Fehling. Le salol n'est pas dédoublé par les diastases de la même éponge. SAPONIFICATION DES GRAISSES. Cette saponification peut être obtenue assez aisément avec les sucs de Sub. donuncula. En agitant ceux-ci avec des huiles (huile de ricin, huile d'olive) on remarque que rapidement la couche émulsionnée à la partie supérieure augmente d'épaisseur. La monobutyrine de la glycérine est hydrolysée avec facilité. R. simulans possède une lipase extrêmement faible; bien que l'état relatif de pureté dans lequel j'ai pu préparer les diastases de cette espèce rendit les dosages d'acides gras beaucoup plus faciles qu'avec S. domuncula, je n'ai pas pu étudier utilement l'action lipasique produite par Reniera. C'est à peine si, après plusieurs jours de séjour à l'étuve, on peut saisir une légère différence dans l'émulsionnement de l'huile (huile de ricin) qui a été ajoutée à des solutions de diastases bouillies ou normales. Quant à la monobuty- rine, elle subit également une attaque très faible; ses solutions légèrement alcalinisées au tournesol virent lentement aux tons roses. OXYDASES ET RÉDUCTASES. La seule mention de ferments de ce genre qui ait été faite chez les Éponges, à ma connaissance du moins, est celle que nous devons à LoiseL [98]. Cet auteur a remarqué que le suc de Spongilla flu- viatilis bleuit la teinture de gaïac, oxyde l’hydroquinone, colore mal ou ne colore pas du tout les solutions de gaïacol. J'ai essayé de refaire ces recherches sur À. simulans, S. domun- cula, Cyd. gigas et Tethya lyncurium. Pour À. simulans je me suis servi d’une solution dans de l'eau fluorée à 2 °}, des diastases dont j'ai décrit plus haut la préparation. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 491 ïetle solution a été additionnée de pyrogallol et d’hydroquinone. Le résultat a été nul ; il m'a fallu attendre 24 heures pour constater du brunissement pour le pyrogallol ; au bout de ce temps l’hydro- quinone n'avait pas été altérée. Cette observation n’a pas une très grande importance, car on sait combien les oxydases supportent mal la coagulation par l'alcool. Suberites domuncula. La pulpe et le suc de Suberiles n'ont montré aucune action sur la teinture chloroformique ou alcoolique récente de gaïac, sur le gaïacol, ont oxydé l'hydroquinone avec une très grande lenteur, ont bruni assez rapidement le pyrogallol et la pyrocatéchine. En présence d'eau oxygénée le suc de l'éponge à coloré en bleu la teinture de gaïac après un contact d’une quinzaine d'heures. Pour les essais avec les polyphénols le suc récent de l'éponge était préalablement amené à neutralisation au tournesol. Des expériences de contrôle faites avec du suc bouilli n’ont amené aucune oxydation du gaïac, du gaïacol et de l'hydroquinone ; le pyrogallolet la pyrocatéchine se sont très lentement et très faiblement oxydés dans les mêmes conditions. J’ai déjà rendu compte de ces ré- sultats et j'en avais conclu que, s’il existe une oxydase chezS.domun- cula, il faudrait la ranger «dans une catégorie spéciale, dans un groupe aussi éloigné de celui des laccases que ces dernièressont elles- mêmes éloignées de la tyrosinase ». Il y a lieu de remarquer que la teinte brune prise par les polyphénols est un mauvais critérium pour apprécier l’activité des liqueurs oxydantes ; ce qui me parait le plus digne de remarque, c’est que tous les réactifs de la laccase ne sont pas atteints par le suc de Suberiles. Je n'ose pas regarder comme prouvée d’une manière certaine l'existence chez cette espèce d’une oxydase des polyphénols, car les phénomènes d’oxydation ont été peu marqués et parce que BERTRAND nous à appris que les sels de manganèse à acide faible peuvent jouer le rôle de diastases inorganiques. Le manganèse existe chez S. domuncula, en quantité qui m'a paru un peu variable suivant Îles individus que j'ai examinés; l'unique dosage que j'aie fail m'a donné la proportion de 0#,0032 de manganèse p.°/, de matières sèches. Il serait très possible que ce métal existât sous forme de composés très dissociables et décomposables par la chaleur, et que l’action oxydante constatée fût attribuable uniquement à des composés de ce genre, à l'exclusion de toute diastase à proprement parler. 492 JULES COTTE. J'ai refait ces recherches sur les gemmules de S. domuncula, dont la teneur en manganèse est beaucoup plus marquée que celle des tissus adultes. Je rappelle que j'ai obtenu dans un dosage unique Or, 0200 de manganèse p. *, de gemmules sèches. L'expérience est assez peu agréable à faire, car il n’est pas aisé de décor- tiquer les Suberiles de leurs gemmules ; ces dernières, isolées le mieux possible, ont été triturées avec quelques gouttes d’eau distillée de manière à obtenir une pâte liquide qui a été ajoutée par souttes aux divers réactifs. La teinture chloroformique récente de gaiac s’est oxydée relativement bien ; il a fallu cependant une bonne heure pour que le phénomène commençàt à être appréciable. Il n’a pas été accéléré par la présence d’eau oxygénée. Le gaïacol a bruni, quoique avec une médiocre intensité, le pyrogallol s’est oxydé. Ici encore j'hésite un peu à attribuer définitivement ces actions oxydantes à une diastase ; elles ont été plus intenses avec les gem- mules qu'avec le reste de l'animal, en proportion, pourrait-on dire, de leur plus grande teneur en manganèse. C’est à ce métal seul que l'on pourrait peut-être attribuer les faibles oxydations que j'ai constatées, sans que de sa présence on soit obligé de conclure fatalement à celle d’oxydases. Rien ne nous prouve que le manga- nèse ne joue pas chez les êtres vivants d'autre rôle que celui d’ad- juvant des oxydases. Et cependant, même en examinant sa présence à ce seul point de vue, il serait possible de faire rentrer le cas des semmules dans la règle générale. En effet les gemmules, telles que nous les étudions d'ordinaire, sont des organes à l’état de vie ralen- lie, chez lesquels par conséquent la présence de diastases actives n'est provisoirement pas utile. Au moment où se produira la germi- nation des gemmules, apparaîtront peut-être des diastases 0xy- dantes en quantité notable, et la réserve de manganèse accumulée par l'organisme maternel trouverait alors son utilisation. Il est plus difficile de fournir une explication analogue pour les tissus adultes de Suberiles, chez lesquels la présence du manganèse est accom- pagnée d'un pouvoir oxydant bien peu marqué. Je crois pouvoir conclure de mes expériences qu'il paraît exister une oxydase faible chez S. domuncula, sans qu'il soit possible d'émettre à ce sujet aucune affirmation. J'ai recherché si le suc de Suberiles ne renfermerait pas de réduclase dont l’action propre neutraliserail celle de l'oxydase. J'ai employé à cet effet la réaction d'ABELOUS et GERARD, la réduction LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 493 des nitrates ; le résultat a été négatif, 1l n'y a pas eu apparition de nitriles dans les mélanges. En remplaçant le nitrate de potasse par l’arséniate de soude, j'ai eu une formation d’arsénite plus marquée avec le suc normal qu'avec le suc bouilli ; la décoloration du bleu de méthylène est plus rapide aussi dans le suc normal que dans le suc bouilli. Il ne m'est guère possible de conclure de ces résultats à l'existence d’une réductase. Le manque de netteté des divers résultats rapportés plus haut, qui se trouvent presque compris dans les limites où les causes d'erreur ont pu les produire à elles seules, ne permettait pas de fournir une explication à ce fait que le suc de Suberites S'oxyde au contact de l’air (1). J'avais remarqué que le suc de l'éponge ne s’altère pas quand on le conserve en flacons soigneusement bouchés, que en présence d'oxygène la partie supérieure du liquide prend une teinte brune qui gagne graduellement en épaisseur en se fonçant ; au niveau du ménisque supérieur finit même par se coller aux parois du flacon un anneau noir adhérent. En portant à l'étuve à 100° des tranches de Suberiles, on les retrouve régulièrement teintées de brun à leur surface, le centre est inaltéré. En précipitant par l’alcool du suc de Suberites qui avait été soumis à la décan- talion après un repos de 24 heures, le précipité jaunâtre qui s'était formé est devenu graduellement d’un beau noir en séchant sur le filtre. J'avais observé également que le suc bouilli brunit à l'air, quoiqu'avec bien moins de rapidité que le suc normal. N'ayant pas su expliquer ces faits, je m'étais contenté de les assimiler au peu que nous savions, il y a deux ans encore, sur le brunissement du sang des Insectes et sur certains faits analogues de mélanose. Les récentes acquisilions de la science en ce qui concerne les oxydases animales m'ont fait comprendre le mécanisme de ces phénomènes, très simple en réalité. Nous savons maintenant que le sang de certains Insectes, au contact de l'air, subit un noircis- sement dû à l’action d’une tyrosinase et dela tyrosine qu’il renferme (O. vox FÜRTH et H. SCHNEIDER). BIEDERMANN avait déjà montré que l'intestin moyen de Tenebrio molitor renferme de la tyrosinase. PRZIBRAM (in VON FÜRTH) et GESSARD nous ont appris que le noir de Seiche est également produit par l'action d’une tyrosinase sur 1) LOISEL avait remarqué écalement que le sue de Syongille brunit à sa surface à q 8 q pong quand il est maintenu au contact de l'air. 494 JULES COTTE. un corps analogue à la tyrosine. La découverte de ces tyrosinases a éclairé d’un jour tout à fait nouveau la genèse des mélanines et permis d'identifier la teinte noire que subissent les plaies des Insectes et celles des Champignons. En ajoutant de la tyrosine à du suc de Suberiles, au moment de son expression, On obtient rapidement un noircissement intense du mélange ; le suc bouilli est sans action : l'éponge renferme donc une lyrosinase. Elle ne possède pas de tyrosine; en détruisant les diastases du suc par une ébullition continuée pendant cinq minutes, le liquide ne brunit pas par l'addition de tyrosinase de Russules. L'expérience est plus élégante en opérant de la manière sui- vante : du suc est additionné de trois volumes d'alcool à 90°, le précipité jaunâtre qui se forme est recueilli sur un filtre, le liquide est évaporé à siccité. Le résidu de l’évaporation est repris à l’eau bouillante et la solution divisée en deux parties : à l’une d'elles est ajoutée de la tyrosinase de Russules, à l’autre une bande de papier filtre portant le précipité alcoolique. Aucune des deux ne noircit. Une autre bande du même filtre, placée dans une solution de tyrosine, produit assez rapidement un brunissement intense de la solution. Le suc normal ne se colore pas rapidement à l'air ; dans un tube à essais il faut bien attendre 24 heures pour apercevoir un change- ment de teinte à la partie supérieure du liquide. Une aération éner- gique hâte l’apparition du phénomène et augmente son intensité. Lors de mes premières recherches sur les éponges, j'avais dû renoncer à m'aider de l’aspiration à la trompe pour là filtration des sucs de Suberiles ; un des inconvénients de cette méthode consistait dans l’extrème intensité de la teinte prise ainsi par les sues. L’addi- tion de tyrosinase Bourquelot n'accélère pas l'apparition de la teinte brune dans le suc normal ; je crois même qu’elle la retarde légèrement. J'ai remarqué cette influence retardante dans deux expériences successives ; dans une troisième elle existait également, mais il m'est impossible d'en tenir compte, car les essais avaient reçu du thymol en quantité non déterminée. Par contre l'action oxydante, qui semble un peu plus lente à ses débuts en présence de la macération de Russules, serait ultérieurement activée : la teinte brune semble virer plus vite à des noirs plus francs. Rien de bien positif au total. Le séjour dans l’étuve à 34° accélère l'apparition de la teinte LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 495 brune, ainsi qu'on peut s’en rendre compte par la comparaison avec du suc témoin resté à l’air libre. Ces diverses expériences démontrent suffisamment que le chro- nogène ne préexiste pas dans le suc de l'éponge ; il prend naissance seulement in vitro. Je me crois en droit d'admettre que le brunisse- ment du suc est dû à l’action d’une tyrosinase sur de la tyrosine, ou sur un corps analogue (1), qui prend naissance par aulolyse du suc. L'influence accélératrice de la chaleur porte à la fois sur lhydro- lyse des albuminoïdes et sur l’oxydation de la tyrosine formée. Il m'a semblé que l'addition de fragments de fibrine au suc d'éponge a également pour résultat d'activer le brunissement; ce serait le résultat d’une formation plus intense de tyrosine. Et l’on arrive ainsi à comprendre certains faits dont l'explication m'était apparue comme insoluble jusqu’à ces derniers temps. Si l'alcool fait apparaître dans le suc purifié par décantation après repos, par conséquent partiellement autolysé, un coagulum jaunâtre qui devient noir sur le filtre, c’est que le coagulum comprend à la fois des albumines, des diastases et, emprisonnée dans ce caillot, de la tyrosine déjà partiellement oxydée et qui achève d'accomplir son cycle de colorations sous l'influence de l’aération à laquelle elle est soumise pendant la dessication du précipité. En opérant sur du suc au moment même où il vient d’être exprimé, en se résignant à recueillir sur le filtre, en même temps que les produits utiles, des débris de cellules, des spicules, des grains de sable, etc. dont une décantation seule pourrait débarrasser le suc, on peut obtenir un précipité qui ne subit aucune altération mélanique. Quand on porte à l’étuve à 100° des tranches de Suberites, celles- ci commencent à subir pendant J’opération de la section un début d’autolyse, qui se continue jusqu’à ce que la température des fragments ait dépassé la température mortelle pour le ferment hydrolysant. La tyrosine formée pendant toute cette période est oxydée, au contact de l'air, par la tyrosinase dont l’action se conli- nue pendant plus longtemps, car la température qui la détruit paraît être plus élevée que pour la plupart des diastases. J'ajoute que la tyrosine produite n’est pas toute oxydée dans ces conditions; en (1) Les recherches récentes d'EMERSON [02] ont établi que la tyrosine n'est pas le seul corps noircissant par la tyrosinase, mais qu'elle est seulement le représentant d’un groupe de substances qui fournissent la même réaction. Ce résultat était à prévoir. 496 JULES COTTE. reprenant par l’eau bouillante des fragments desséchés à l'étuve et en ajoutant de la tyrosinase Bourquelot à une moitié du liquide, celle moitié subit une oxydation faible, mais parfaitement visible. Dans mes premiers essais j'avais conslalé que le sue bouilli n’en subit pas moins une légère et lente altération au contact de l’oxy- gène. J'avais opéré sur du suc décanté après repos dans des flacons bien bouchés, non bruni par conséquent, et dans lequel s'était formée par autolyse une certaine quantité de chromogène. Une courte ébullition avait largement suffi pour détruire les diastases diges- lives, mais avait sans doute respecté quelques traces de la tyrosi- nase, plus résislante, qui avait pu jouer son rôle oxydant. Ayant l'explication de ces faits, j'ai pu m’assurer que du sue récent, bouilli pendant 5 minutes, ne subit plus aucune espèce de coloration. J'ai tenu à relever ces quelques points de détail pour ne pas être accusé d’avoir laissé sur ma route des faits que j'avais fournis moi- même et qui, insuffisamment expliqués, paraissaient constituer des exceptions aux lois des diastases. Tout s'accorde au contraire pour appuyer l'explication que j'ai donnée du noireissement du suc de S. domuncula. Dans une note où je consignais quelques-uns de ces résultats 03 a] j'avais fail remarquer que le thymol parait constituer une substance empêchante pour la tyrosinase de l'éponge. J’ai fait dans celte voie un essai superficiel en opérant sur des solutions de tyrosine à 0 20 °/, dans l’eau distillée, additionnées d'une macé- ralion glycérinée obtenue en immergeant dans de la glycérine des bandes du papier filtre imprégné de diastases de Suberites et dont il a été parlé plus haut. Le thymol agit bien comme agent empêchant à l’égard de la tyrosinase. Après huit jours de contact à l'étuve les mélanges thymolisés n’ont pas bruni, mais à leur partie supérieure le thymol s’est transformé en gouttelettes roses à aspect huileux. L’acide sulfurique et le carbonate de soude gênent le noircisse- ment de la tyrosine. En ajoutant aux mélanges de l'expérience précédente, sans thymol, des quantités d'acide sulfurique aux doses de 0833 et de 08: 63 par litre, et de carbonate de soude aux doses de Qër: 50 et de 08-90, après huit jours d’étuve à 34° je n’ai obtenu un faible brunissement que dans le tube le moins acide ; les autres essais n'avaient pas changé de teinte. GESSARD [01] nous a appris que l'apparition d'une teinte rose semble être seule caractéristique de l’action sur la tyrosine de la LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 497 tyrosinase des champignons ; la couleur noire quise forme ultérieu- rement peul être due à l’action des agents les plus divers. Je n'ai obtenu jamais que la teinte brune, directement ; il est vrai que la macération glycérinée que j'ai employée ne peut pas être citée comme un modèle de pureté. On se souvient en effet que le préci- pité alcoolique dont elle était une solution avait été obtenu en précipitant par l'alcool un suc qui venait à peine d’être extrait, et on comprend à quelle purée animale s'applique cette expression de suc. Je viens de faire un essai sur les gemmules de deux individus de Suberites. Elles ont été broyées avec de l’eau distillée, et la pâte liquide a été additionnée de tyrosine. Après 24 heures de contact en présence de chloroforme je n'ai pas observé le moindre brunisse- ment du mélange. Il ne m'a pas été encore possible de localiser en quel point des tissus de l’éponge se fait la sécrétion du ferment oxydant. Tout ce que j'ai dit précédemment au sujet des oxydases de S. domuncula permettra de traiter rapidement la même question en ce qui concerne les autres espèces étudiées. Tethya lyncurium. Les tissus et le suc de cette espèce ont une action nulle sur le gaïac, le gaïacol, la résorcine et l'hydroquinone, colorent lentement le pyrogallol. En octobre de l’année dernière des recherches, effectuées avec du suc de la même espèce, m'ont donné une action à peu près nulle sur l’hydroquinone après une demi-heure de contact, marquée sur le pyrogallol après le même temps ; l'oxydation du pyrogallol n’était pas plus intense que dans un essai comparatif fait avec le même suc bouilli. Un extrait glycé- riné s'était montré un peu plus actif: oxydation un peu plus forte pour le pyrogallol, lente et faible pour l'hydroquinone, assez rapide pour la pyrocatéchine. Je rappelle que Tethya renferme parfois du manganèse [03 D]. En reprenant les essais avec le suc de Tethya, en janvier de cette année, en présence d’eau oxygénée, j'ai obtenu un bleuisse- ment très lent de la teinture de gaïac (dix heures ont été nécessaires pour que la réaction ait toute la netteté désirable), action nulle sur le gaïacol en solution saturée. Je ne crois pas que l'étude des produits qui oxydent le gaïac en présence d’eau oxygénée ait un grand intérêt pour la science. Nous savons que les métaux colloï- 32 498 JULES COTTE. daux donnent la même réaction; celle-ci semble souvent caracté- riser plutôt l'état physique que les propriétés chimiques des substances qui la fournisseut. On a appelé ferments oxydants indirects ou peroxydases (1) les produits qui donnent cette réaction; je préfère de beaucoup le nom de corps oxydants indirects. Si Tethya ne possède pas de ferment comparable à la laccase, ni de corps oxydant indirect, elle sécrète une tyrosinase. Comme chez S. domuncula il y a brunissement lent du sue, brunissement rapide quand le suc est additionné de tyrosine. Même pouvoir accélérateur de la chaleur, même pouvoir empêchant du thymol. Le suc, cette fois encore, ne renferme pas de tyrosine au début de l'expérience, celle-ci prend naissance graduellement. J'ai cherché inutilement à localiser chez Tethya la sécrétion de la iyrosinase : j'ai fait macérer pendant une heure des tranches fines de l'animal dans de l'alcool absolu pour coaguler les diastases et fixer les tissus, puis ces fragments ont été mis pendant une quinzaine d'heures dans de l’eau de mer saturée de tyrosine, enfin conservés pendant plusieurs jours dans l'alcool à 90°. Les fragments ont bruni à leur surface : le microscope à montré une teinte diffuse, non localisée; le cortex était incolore. Des fragments d’un autre individu ont été placés dans de l’eau de mer tyrosinée pendant une heure, puis dans de l'alcool absolu : après plusieurs jours il n'y avait pas de changement dans la partie médullaire, le cortex avait pris une teinte bleue que je ne m'explique pas et qui n'était localisée dans aucune cellule. Cydonium gigas. La pulpe et le suc n'ont pas d'action sur le gaiac, la résorcine, l'hydroquinone ; ils ont une action très faible et très lente sur le pyrogallol et la pyrocatéchine. Les expériences avec le nitrate de potasse, l’arséniate de soude et le bleu de méthylène fournissent les mêmes résultats qu'avec S. domuncula. Cette espèce encore possède une tyrosinase : son suc noircit très rapidement les solutions de tyrosine. Il y a même plus ici, et le suc noircit seul assez rapidement à l’air, car 1l renferme à la fois de la tyrosinase et une faible quantité de tyrosine ou d’une substance (1) Je ne sais si la notion des peroxydases continnera à être conservée dans la science ; en tout cas ce nom montre bien combien il serait utile de codifier la termino- logie des diastases. Il suffit de eomparer les noms d’oxydase et de peroxÿdase pour montrer qu'il y a là une réforme à accomplir. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 499 analogue. Il suffit, pour s’en apercevoir, de comparer les divers lots d'un suc dont une partie est restée dans une capsule et dont le reste a été aussitôt après l'expression réparti dans des tubes à essais, soumis par conséquent à une bien moindre aération. Après une à - deux heures de repos j'ai évalué que le liquide contenu dans la capsule avait subi un hrunissement, c’est-à-dire une oxydation double de l’autre. En consultant mes notes je retrouve trace de ces faits. Lorsque J'avais voulu préparer du suc de Cydonium pour des expériences de digestion, mes doigts avaient manipulé la pulpe de l'éponge, et ils avaient gardé une couleur noirâtre qui pendant plusieurs jours avait résisté à tous les lavages. On peut démontrer d'une façon plus scientifique la coexistence chez Cydoniuin d'une tyrosinase et d’une substance analogue à la tyrosine ; le suc bouilli est oxydé, lentement et faiblement il est vrai, par la tyrosinase de Russules. En précipitant le suc par trois fois son volume d'alcool à 90°, aussitôt après son expression, on recueille un précipité gris qui oxyde à la fois les solutions de tyrosine et la solution obtenue en traitant par l’eau bouillante le résidu d'évaporation de la liqueur alcoolique précédente. L’individu qui avait fourni le suc sur lequel ont porté ces expériences venait d'être pêché et était parfaitement vivant, ainsi que me l'a montré une dissociation. On ne peut done pas songer à une autodigestion antérieure à l'arrivée au laboratoire ; il me paraît plus logique d'admettre que l’animal vivant renferme à la fois de la tyrosine et de la tyrosinase. La présence de faibles quantités d'alcali (carbonate à la dose de 0854 par litre environ) accélère le noircissement du suc, sans doute en favorisant l'attaque des albuminoïdes. L'acide sulfurique, à la dose de 08-24 par litre, s'est montré très fortement empêchant: après 18 heures c’est à peine s’il était possible de constater des traces de noircissement à la partie supérieure. Le thymol est empêchant, son action a été cependant moins marquée qu'avec S. domuncula. La teinte prise par le suc n’est pas la même qu'avec les deux autres espèces : avec S. domuncula on a des bruns un peu chauds, des noirs à reflets pourprés ; avec Tethya les tons sont dans les brun rougeâtre ; avec C. gigas on a un noir très franc avec, semble- t-il, des reflets violet bleu. 500 JULES COTTE. De même pour l’action sur la tyrosine. Cydonium donne un noir bleu, Suberiles un noir un peu rougeâtre, avec Tethya la teinte est bien plus rougeàtre encore. Cette question sera à étudier de plus près ; je me contente ici de signaler ces faits. Au sujet de la localisation de la tyrosinase chez Cydonium je n'ai obtenu qu'une expérience satisfaisante. Il s’agit de fragments de Cydonium vivants qui avaient êté plongés pendant une heure dans de l'alcool absolu pour coaguler les albuminoïdes et fixer légèrement les tissus, puis avaient séjourné pendant deux heures dans de l’eau de mer saturée de tyrosine. Un d'eux avait été ensuite placé dans de l'alcool à 9°, l'autre dans une solution de tyrosine additionnée de formol à la dose de 10°/. C’est ce dernier fragment qui a seul bruni. À l'examen microscopique il a été facile de constater que les cellules brunes étaient presque exclusivement les cellules sphéru- leuses; quelques cellules fixes, à aspect fortement granuleux, avaient également pris la même coloration. Le maximum de brunissement siégeait à la partie externe du choanosome, immédia- tement sous la couche corticale chargée de sterrasters. Depuis que mon attention a été attirée sur les tyrosinases des éponges j'ai cherché quelle pouvait être la diffusion de ce ferment. J'ai fait, sans le moindre succès, quelques essais sur des Hali- chondridés que je n’ai pas encore caractérisées ; pour le moment les trois espèces qui m'ont donné des résultats positifs sont trois espèces compactes. À. simulans n’oxyde pas la tyrosine. Ainsi qu'on le voit, les résultats de mes recherches sur les oxydases sont des plus variables ; le groupe des laccases proprement dites n'est peut-être pas représenté chez les éponges que j'ai examinées, les hypothétiques peroxydases non plus. La tyrosinase se rencontre chez des espèces très répandues. Nous ne connaissons pas encore le rôle physiologique exact des tyrosinases ; il est peut-être complexe. Dans le règne animal, autant qu'on peut le pressentir à l’heure actuelle, ces ferments joueraient un rôle des plus actifs pour la genèse de certaines mélanines, de certaines pigmentations. Chez les Spongiaires il n’en est pas de même: S. domuncula, T. lyncurium sont colorées par des lipochromes, C. gigas est presque incolore. Cependant Chondrosia reniformis et quelques espèces voisines possèdent des couleurs qui sont d’une remarquable stabilité à la lumière et d’une absolue résistance aux dissolvants, leur aspect n’est pas sans analogie avec LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 501 celui que présente la tyrosine oxydée. Il y aurait lieu de voir si ces espèces ne doivent pas leur pigmentation à des ferments appartenant au groupe des tyrosinases. On à attribué un rôle beaucoup plus important aux oxydases : elles nous apparaissent comme étant en rapport intime avec la nutrition des tissus, elles semblent être des ferments respiratoires. Il est impossible de ne pas être séduit par cette hypothèse après Les belles recherches de BERTRAND qui à pu produire in vitro de véritables respirations aux dépens de substances chimiques bien définies. Remarquons cependant que jusqu'ici les oxydases étudiées n'ont guère oxydé dans nos laboratoires que des composés phénoliques plus ou moins complexes, c’est-à-dire des substances entièrement comparables aux produits de désassimilation des organismes animaux. Il est probable qu’à l'intérieur des cellules vivantes les conditions se trouvent être autrement favorables pour l’action des oxydases que dans les tubes à essais de nos laboratoires, et que le travail accompli est autrement sérieux. Aussi ne faut-il pas attacher une bien grande importance à ce fait que le suc de toutes les espèces d’éponges n’oxyde pas la tyrosine; chez toutes les phénomènes biologiques se montreront certainement les mêmes dans leur essence quand nous pourrons pénétrer au fond des faits et quand notre arsenal chimique sera mieux pourvu. 202 JULES COTTE. CHAPITRE IV. SÉCRÉTIONS PIGMENTS La question de la nature des pigments des éponges en est toujours à peu près au point où l'ont amenée les multiples recherches de KRUKENBERG, aussi y a-t-il lieu de la revoir et de chercher à la mettre au courant des théories de la biologie moderne. Voici, d’après les recherches de KRUKENBERG, de MÉREIKOWSKY, de TopsenT, de Mac Mu, d’autres encore, comment on peut résumer ce que nous savons sur les matières colorantes sécrélées par les éponges. D'un côté on trouve le grand groupe des lipochromes, le plus abondamment représenté chez les Spongiaires. Les corps qui le composent appartiennent à la série æanthique (1), à la gamme chaude, variant comme ton du jaune au rouge le plus vif en passant par tous les tons intermédiaires, surtout dans la région de l'orangé. On sait que les pigments de la série cyanique ne semblent pas être toujours essentiellement différents des précédents ; un des caractères des lipochromes consiste en effet dans leurs changements de colo- ralion sous l'influence des acides concentrés, des alcalis, ete., les teintes prises par eux étant alors généralement bleues ou vertes. D'ailleurs chez les Crustacés (KRUKENBERG, MÉREJKOWSKY, NEWBI- GIN), chez les Velella et les Porpita (MÉREIKOWSKY), elc. on ren- contre les lipochromogènes bleus de KRUKENBERG, qui dans certaines conditions peuvent se tranformer en lipochromes appar- tenant à la gamme chaude. KRUKENBERG a appelé wranidines des pigments jaunes subissant la mélanose par absorption d'oxygène (avec intervention de ferments suivant l’auteur) et qui caractérisent Aplysina aerophoba el Aplysilla sulfurea. (1) Ce nom est malheureux ; il rappelle immédiatement à l'esprit la xanthine, avec laquelle il n’a qu’une parenté étymologique. Un nom tel que xanthoïque conviendrait mieux. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 503 Le même auteur a désigné du nom de floridines des pigments, de teintes comprises entre le violet et le rouge pourpre, solubles dans l'eau et la glycérine, insolubles dans les dissolvants organiques et bien proches parents de la phycoérythrine. Il est même entièrement vraisemblable que cette parenté va jusqu'à l'identité absolue, et je crois pouvoir admettre que l’auteur a opéré sur des éponges qui étaient parasitées par des algues à phycoérythrine. Un certain nombre de Spongeéliees et d'espèces voisines renferment une Oscil- laire (0. spongeliæ) colorée par un pigment dont le spectre est celui de la phycoérythrine ; j'ai rencontré un individu de Reniera simulans, accolé à une Spongelia et qui s'était laissé partiellement infecter par la même algue. On connaît d’autres Floridées parasites des éponges. (Voir LENDENFELD, 97). Les seules différences que KRUKENBERG ait trouvées entre la phycoérythrine des Floridées et ses floridines consiste dans une répartition un peu spéciale dans le spectre des bandes d'absorption et dans leur résistance, en solution aqueuse, au chauffage à 100°. On sait que ces deux caractères sont très variables avec la composition du milieu dans lequel on opère et avec la manière dont on conduit les expériences. Est soluble dans l’eau et insoluble dans l'alcool absolu le pigment rouge pourpre que MosEeLey (cité par KRUKENBERG) a extrait de Poliopogon amadou ; mêmes propriétés pour la subéritine que MÉREIKOWSKY [83] a obtenue des variétés violettes de S. domun- cula. Au sujet de cette dernière l’auteur fait remarquer avec juste raison qu'elle est également présente chez les Suberites les plus riches en pigment orangé. Il suffit de mettre des fragments de ceux- ci avec de l’eau chloroformée, dans un flacon bouché, pour voir l’eau se colorer lentement en bleu violacé. Je diffère un peu de MÉREIKOWSKY en ce qui concerne les réactions de cette substance colorée. J'ai trouvé que les acides chlorhydrique, sulfurique, azo- tique, acétique ne la précipitent pas en vert bleuâtre, mais qu'ils précipitent les albuminoïdes de la solution en blanc et font virer au bleu la couleur du liquide, avec décoloration plus ou moins rapide à l’ébullition. Dans ce dernier cas l’acide azotique donne, naturel- lement, une coloration jaune. La potasse ne la précipite pas en jaune, mais elle n'altère pas la couleur à froid, la détruit à chaud avec apparition d'une teinte jaunâtre banale. L'ammoniaque la rend plus rose, la décolore à l'ébullition. L'ébullition simple de la solution du pigment la fait aussi virer à des tons plus roses, On voit que ce 04 JULES COTTE. produit s'éloigne absolument des lipochromogènes de KRUKENBERG et diffère aussi des anthocyanes. NEWBIGIN [98] rapproche de celles- ci les pigments bleus d’un grand nombre d'animaux et fait remar- quer que ces pigments, comme les anthocyanes, donnent fréquem- ment une réaction voisine de celle du tournesol, bleuissant par les alcalis et rougissant par les acides. Ici le cas est absolument différent. La spongioporphyrine de Suberites Wilsoni (Mac Muxx, [00 |) est soluble dans l’eau et l’alcool acidifié, insoluble dans la plupart des dissolvants organiques ; elle est de couleur rouge pourpre en solution acide, bleue en liqueur alcaline. Voilà un pigment que l’on peut rapprocher du tournesol par ses propriétés et assimiler aux antho- cyanes. Chondrosia reniformis est teintée de noir violacé dans sa partie corticale. Le pigment que renferme cette espèce est insoluble dans les dissolvants usuels ; j’admettrais volontiers qu'il y aurait lieu de le comparer au noir de la seiche. J’ai en effet démontré chez d’autres éponges la présence de tyrosinase, tandis que leurs ferments diges- tifs produisent de la tyrosine. Il serait donc parfaitement possible que le pigment de Chondrosia et de quelques autres espèces fût dû à l'oxydation par une oxydase d’un corps analogue à la tyrosine. L'exposé précédent est incomplet ; il est inutile de chercher à le compléter. Un point est surtout à retenir, c’est que les lipochromes produisent presque entièrement la pigmentation des Spongiaires ; c’est d'eux que nous allons principalement nous occuper. LIPOCHROMES. On connaît leurs propriétés principales. Ce sont des corps inso- lubles dans l’eau, solubles au contraire dans un grand nombre de dissolvants organiques. On ne peut pas les obtenir sous l'état cristallisé (1) et à l’évaporation de leurs solutions ils se déposent sous forme de masses d'aspect butyreux. NEwB1GIN les divise en deux classes, suivant qu’ils se combinent ou non avec les alcalis caustiques; les animaux posséderaient des lipochromes des deux classes, les plantes n'auraient que ceux de la seconde. Le type de (1) Exception faite cependant pour les lutéines. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES, 505 celle-ci serait la carottine, qui pour CaRL EHRING serait une graisse de cholestérine; la première classe serait de nature chimique inconnue. Il y a là une erreur à rectifier. La carottine, ARNAUD l’a démontré, est un carbure d'hydrogène possédant la formule C?6H5$ et existant dans les carottes en même temps que de la cholestérine. La carottine cristallise (1). Bien qu'elle se rapproche des lipochromes par un grand nombre de ses propriétés, je crois qu'il faut la rayer délibérément du groupe des lipochromes. Il ne faut pas ranger sous cette rubrique tous les pigments solubles dans les dissolvants organiques et subissant des changements de coloration sous l'influence des acides concentrés. Il est bon d'établir des divisions fondamentales parmi ces pigments, dont les propriétés biologiques sont peut-être essentiellement diffé- rentes. À côté des carbures d'hydrogène colorés, dont le carotènce est l'unique représentant à ce jour, 1l faudra mettre les lipochromes proprement dits qu'il est actuellement difficile de définir convena- blement, mais que vraisemblablement on pourra classer avec fruit lorsque leurs rapports avec la cholestérine auront été suffisamment éclaireis. Actuellement nous les caractériserons seulement par leur propriété d’être plus ou moins saponifiables par les alcalis; c'est donc à la première classe de NEWBIGIN que je réserve le nom de lipochrome. Un certain nombre de lipochromes ont été réunis par MÉREJ- KowskY [83] sous le nom de zoonérythrine. Voici quels seraient les caractères de cette substance : elle aurait une couleur rouge orange, serait soluble en rouge carmin dans le sulfure de carbone, se colo- rerait en bleu par l'acide sulfurique, souvent aussi par l'acide chlorhydrique et l'acide azotique. En réalité le nom de zoonéry- thrine ne paraît pas s'appliquer à un lipochrome déterminé, mais (1) Pendant la correction des épreuves de ce travail j'ai pu me procurer la these de ExRriG. L'auteur admet que le pigment de la tomate (Tomatencarotin), qu'il n'a pas pu obtenir à l'état cristallisé, est un composé formé d'une cholestérine et d’un certain nombre d'acides gras dont il a préparé les sels barytiques. La teneur de ceux-ci en baryum lui a permis de reconnaître les acides stéarique, palmitique, margarique, pentadécylique. À ces composés serait surajouté un carbure d'hydrogène de la série du méthane. L'auteur nous apprend aussi que, postérieurement aux recherches d'ARNAUD et d'HANSEN, WIRTH à admis que le pigment de la fleur du souci est formé d’éthers cholestériques (acides laurique et myristique), et que en plus KIRCHNER a trouvé dans le même pigment les acides margarique, palmitique et pentadécylique. 506 JULES COTTE. bien à un groupe de lipochromes dans lequel KRUKENBERG à établi des variétés: rodophane, orangine, etc. ailleurs que chez les éponges. Ce groupe de pigments n’est pas nettement limité; les caractères fondamentaux peuvent manquer isolément, et MÉREIKOWSKY lui- même a été hésitant pour savoir s’il y avait lieu de donner à certains lipochromes (Actinia mesembryanthemum) le nom de zoonéry- thrine ou bien s’il convenait de les ranger ailleurs. Comme d’autre part il existe les analogies les plus grandes, la parenté la plus étroite entre les lipochromes que l’on a appelés zoonérythrine et d’autres, très voisins, qui se colorent d’une façon un peu différente sous l’action des acides, je crois que le terme de zoonérythrine ne peut pas rendre de bien grands services à la science. Il sera certainement supprimé lorsque nous connaïitrons mieux la constitution intime des lipochromes et que nous pourrons les classer d’une manière vraiment scientifique. Les objections de KRUKENBERG [82] avaient déjà rendu M£ÉREIKOWSKY lui-même hésitant sur la spécificité de sa zoonérythrine, et il propose d’ajouter dans son mémoire à la suite du mot de zoonérythrine, toutes les fois qu'il est employé: « ou une autre variété rouge du groupe des lipochromes ». DasTRE et FLORESCO [98] ont fait remarquer que la réaction bleue avec l'acide azotique pourrait ne pas être toujours due au pigment, altendu que l'alcool éthylique lui-même la donne parfaitement dans certaines conditions. Dans la pratique cependant cette cause d’erreur n’est guère à redouter si l’on a la précaution d'évaporer les extraits d'animaux jusqu'à ce qu'ils renferment trop peu d'alcool pour pouvoir fournir cette réaction. Celle-ci est aussi donnée par un certain nombre d'autres substances organiques qui sont colorables en bleu par les composés nitreux (1). Comme l'acide azotique donne des composés nitreux au contact de nombreuses matières organiques, je crois qu'il est prudent de ne pas considérer l'acide azotique comme un réactif des lipochromes, ou du moins de ne lui accorder qu'une confiance limitée. Par contre on pourrait ajouter à la liste des réactifs l'iode, sous forme d’eau iodée ou d'alcool iodé, car ce corps fournit parfois avec les lipochromes des réactions extrêmement nettes. (1) On peut consulter à ce sujet le travail de GAvARD [03]. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 507 Voici, au hasard de la plume, quelques réactions colorées que j'ai été à même de faire. Le pigment de Sub. domuncula (teinture chloroformique ou éthérée évaporée à chaud ou soumise à l’évaporation spontanée) bleuit par l'acide sulfurique, reste inaltéré en présence d'acide chlorhydrique, se colore par l'acide azotique en une teinte bleue extrêmement fugace qui passe immédiatement au vert et aussitôt à une couleur jaunâtre insignifiante. L'iode le colore, mais lentement, en une teinte bleue. Cès réactions peuvent se produire sur l'animal entier ou sur des dissociations ; il est très facile de voir sur celles- ci, au microscope, les virages de ton instantanés qui se produisent sous l’action de l'acide azotique. En mettant dans de l’eau iodée des tranches de Suberites on peut reproduire en bleu, avec la plus grande exactitude, la répartition du pigment rouge de l'animal. KRUKENBERG a pu faire bouillir impunément avec des lessives alca- lines le pigment de Suberites ; j'ai refait cette expérience avec un succès égal sur l'extrait éthéré de la même espèce. Cette résistance du pigment à la potasse cesse quand on emploie la potasse alcoo- lique qui atteint plus sûrement le lipochrome. La teinture chloro- formique de Suberites devient plus jaune quand elle est additionnée de potasse alcoolique ; à chaud la teinte devient jaune citron. Dans mon précédent travail sur S. domuncula, j'avais énuméré les principales modifications que peut présenter la couleur habi- tuelle de l'espèce. En traitant par le chloroforme des individus de couleur différente, le dissolvant a entraîné un pigment en tout semblable au lipochrome habituel, ayant le même aspect et les: mêmes réactions colorées. Les gemmules de S. domuncula semblent avoir un pigment beaucoup plus résistant à l’action des dissolvants que celui de l'animal adulte. En réalité il ne doit pas en être ainsi, et l'imper- méabilité relative de la sorte de coque qui emprisonne les gemmules doit être la cause qui s'oppose à leur décoloration. L’acide sulfurique colore les gemmules dissociées en bleu, l'acide chlorhydrique en brun acajou, l'acide azotique les jaunit sans qu'il y ait passage par la teinte bleue. Lorsque celle-ci apparaît, il est vraisemblable que quelques débris d'animal adulte étaient restés collés aux gemmules. La macération dans l'alcool iodé ou l’eau iodée ne produit aucun changement de teinte. Il arrive assez fréquemment que les gemmu- les ont une couleur différente de celle de l'animal ; elle est dans ce 508 JULES COTTE. cas plus voisine des tons brique, l'éponge adulte étant surtout teintée d'orangé. L'albinisme partiel que l’on voit parfois chez l'animal m'a paru n’exister jamais chez les gemmules. De même lorsque Suberites est coloré en bleu violacé ou en brun, les gemmules conservent quand même leur pigment habituel. La variation dans le chimisme cellulaire qui arrive à modifier la teinte du pigment semble ne pas avoir de répercussion dans les cellules destinées à assurer la continuité de l'individu. Il doit suffire de bien faibles modifications chimiques pour changer la teinte d’un lipo- chrome, rais encore doit-il falloir des modifications chimiques. Par sa situation profonde, par le ralentissement de la nutrition qui la caractérise nécessairement, par son rôle, la gemmule parait échapper dans une large mesure aux influences qui produisent ces modifi- cations. Le pigment (extrait chloroformique) de Tethya lyncurium est jaune orangé. Il se colore en bleu par l'acide sulfurique, sous l'influence de l'acide azotique il devient bleu, puis immédiatement vert, enfin il vire à un brun verdâtre insignifiant. L’acide chlorhy- drique ne l’altère pas à froid, à chaud il le détruit lentement sans apparition de couleur digne d’être notée ; l’eau iodée le verdit. Bubaris vermiculata colore le sulfure de carbone en un rouge assez voisin des tons carminés, la teinture chloroformique est plus rose qu'avec S. domuncula, l'extrait alcoolique est identique avec celui de cette dernière espèce. L'acide sulfurique colore l'extrait chloroformique en un rouge violet qui vire ensuite au bleu. L’acide chlorhydrique ne l'attaque pas, l'acide azotique le décolore immé- diatement. La potasse alcoolique décolore à froid la teinture chloro- formique de Bubaris. I s’agit d’un de ces lipochromes auxquels je faisais allusion plus haut, qui sont de la zoonérythrine (au sens de MÉREIKOwSKY) sans mériter cependant parfaitement ce nom. Il est bien certain que le pigment de Bubaris et celui de Suberites sont extrêmement voisins au point de vue de leur composition chimique, mais ils ne paraissent pas être vraiment identiques. Cliona vastifica possède un pigment que TopsenT [00] assimile à la zoonérythrine. Dans un seul essai que j'ai fait l'acide sulfurique et l'acide chlorhydrique, concentrés ou dilués, n’ont pas altéré le pigment, l’acide azotique l’a immédiatement décoloré, l'eau iodée l'a simplement bruni. Ici la différence serait beaucoup plus sensible. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 509 Reniera simulans abandonne à l’alcool-éther ou à l’éther un pigment jaune légèrement verdâtre qui verdit par l'acide sulfurique, l'acide chlorhydrique, l'acide azotique, la soude alcoolique, qui verdit faiblement par l’action d’une solution éthérée d’iode. L’extrait éthéré de cette espèce, évaporé à siccité avec de la soude alcoolique puis repris à l’eau bouillante, fournit une solution qui abandonne à l'éther un mélange de colorants. Ceux-ci se déposent plus ou moins vite pendant l’évaporation de l’éther, grimpent plus ou moins le long de la capsule dans laquelle se fait l’évaporation : vers la partie supérieure s’accumule par places un pigment orangé qui par sa couleur rappelle absolument celui de Suberites. En mélangeant ces divers lipochromes on obtient un extrait jaune verdâtre qui brunit simplement quand on l’additionne d'acide sulfurique, d'acide az0- tique ou d'acide chlorhydrique concentrés. | RAPPORTS DES LIPOCHROMES AVEC LA CHOLESTÉRINE. KRUKENBERG [80 D] avait fait une observation du plus haut intérêt : il avait remarqué que, lors de sa décoloration, l’extrait éthéré de S. domuncula se transforme en une masse cireuse dont les solutions chloroformiques ont les réactions de la cholestérine ; l'auteur rap- procherait plutôt cette substance de l’isocholestérine de SCHULZE. Ces remarques n’ont pas été appréciées comme elles y avaient droit : on à vu plus haut que NEwWBIGIN cite les expériences de EnRiNG au sujet des rapports entre la carottine et la cholestérine, sans rappeler celles de KRUKENBERG (1). Aussi la question m'a paru mériter d’être reprise et d’être examinée avec soin. La décoloration de l'extrait éthéré de S. domuncula se produit, ainsi que l’a démontré KRUKENBERG, sous l'influence de la lumière ou des oxydants (essence de térébenthine insolée) et la disparition de la substance orangée s'accompagne de la formation de cristaux groupés en épis ou en aiguilles. J'ai voulu m'assurer si le fait est exact, et mes résultats concordent absolument avec ceux de l’auteur allemand. (1) A. HANSEN [89] a obtenu dans le traitement de la chlorophylle par les alealis un pigment jaune, cristallisant en cristaux jaune orangé, identique sans doute avec l’éry- throphylle de BouGAREL, et qui se change à la lumière en cristaux incolores fournissant avec l'acide suliurique la réaction de la cholestérine. 510 JULES COTTE. En évaporant rapidement une teinture chloroformique ou éthérée de Suberites on obtient un extrait orangé d’aspect butyreux, à peu près amorphe, renfermant parfois cependant un petit piqueté. Vient- on à laisser à l'air un temps suffisant et à examiner ensuite le produit oblenu, on voit qu'il s’est formé une cristallisation en aiguilles, un peu confuse encore, les cristaux étant comme empâtés par une substance amorphe blanchâtre. Les aiguilles sont groupées en sphéro- cristaux, la cristallisation ayant évidemment divergé autour d'un point central. Celle-ci gagne graduellement et parait ronger à mesure le dépôt pigmentaire, ainsi qu'on le voit dans la fig. 5. Le résultat est plus net encore si, après avoir dissous le produit altéré dans dû chloroforme ou de l’éther, on laisse l’évaporation se faire spontané- ment. À la place de la matière butyreuse colorée du début on n'obtient plus que des aiguilles incolores bien formées. La lumière a une influence accélératrice manifeste sur la destruction du lipo- chrome ; en le maintenant à l'obscurité, l'extrait chloroformique de Suberites garde bien plus longtemps sa coloration. La réaction de SALKowsSKY, déjà employée par KRUKENBERG dans les recherches que j'ai rappelées plus haut, fournit des résultats des plus intéressants. On sait que pour caractériser la cholestérine à l’aide de cette réaction il suffit de verser de l'acide sulfurique con- centré dans une solution chloroformique de cholestérine : celle-ci se colore en rouge, puis en pourpre tandis que l'acide prend lui-même une teinte rouge, avec une fluorescence verte très intense. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 5 À: En appliquant cette réaction à une teinture chloroformique récente de Suberites on a un bleuissement très intense de la couche chloro- formique, tandis que l'acide devient fortement vert, d'un vert tirant assez sur le bleu, sans la moindre fluorescence, même en plein soleil. Laisse-t-on le mélange au repos pendant cinq à six heures, on trouve après ce lemps écoulé que le chloroforme est à peine coloré en jaune rougeâtre, tandis que l'acide a pris des tons allant du jaune au rouge pourpre, suivant la quantité de matière mise en expérience, avec une belle fluorescence. Il semble que le contact prolongé de l'acide sulfurique ait détruit une combinaison préexistante et mis en liberté de la cholestérine ou un corps de cette série. Ce dédouble- ment serait même instantané à chaud ; il suffit en effet de porter à la température d’ébullition du chloroforme le mélange, aussitôt qu'il vient d'être fait, pour voir disparaître immédiatement la couleur bleue du chloroforme et verte de l'acide sulfurique et les voir remplacer par les colorations de la réaction de SaLKkowsKkY (1). Dans le début de l'attaque par l'acide sulfurique froid le lipochrome n'a été encore que faiblement altéré : en décantant la couche chloro- formique bleue et en l’additionnant d'une goutte de lessive de potasse, la teinte bleue disparaît et devient très légèrement jaune. L'acide sulfurique ajouté à nouveau ne modifie pas cette couleur ; il faut chauffer pour voir l'acide se colorer en rose et devenir fluorescent. Le lipochrome semble avoir disparu sous l'action de la potasse, tandis que la cholestérine n’a pas encore été mise en liberté. Une teinture chroroformique récente de S. domuncula a ëtè divisée en deux parties égales ; une d'elles a êté conservée en tube clos, à l'obscurité, l’autre a été laissée à la lumière et à l’air libre. Après décoloration, du chloroforme a été versé dans le tube insolé de manière à rélablir le volume initial, et quantité égale d'acide sulfurique a été ajoutée dans les deux tubes. Dans la teinture normale le chloroforme se colore en bleu et l’acide en vert, dans le tube insolé le chloroforme se colore faiblement en rouge et l'acide en rouge, puis en brun avec fluorescence verte. La décoloration du lipochrome peut être obtenue plus rapidement, par exemple en maintenant sur une platine chauffante de l’extrait (1) MÉREJKOWSKY [83] nous dit que l'extrait de Gorgonia verrucosa, décoloré par l’action de la lumière ou de la térébenthine, ne se colore plus en bleu maïs en brun sous l'action de l'acide sulfurique, 512 JULES CÔTTE. chloroformique de Suberiles. Le résidu blanc, redissous dans le chloroforme et additionné à froid d’acide sulfurique, communique à celui-ci une coloration jaunâtre, avec faible fluorescence verte qui augmente fortement à chaud. En recommençant cette expérience et en dissolvant dans du chloroforme le résidu incolore, j'ai pu obtenir quelques aiguilles de cholestérine en évaporant la solution. Des fragments de Suberiles, desséchés longuement à l'étuve à 100° et débarrassés en apparence de leur lipochrome, ont été mis à macérer dans de l’éther de pétrole qui s’est coloré en jaune faible. Ce dissolvant a été évaporé; sur le résidu, repris par du chloro- forme, la réaction de Salkowsky s’est manifestée avec la plus grande intensité. En évaporant à siccité, avec précaution, un mélange de teinture chloroformique de Suberites et d'alcool à 70° iodé, la décoloration est très rapide. Le résidu est alors dissous dans du chloroforme et additionné d'acide. Le chloroforme est coloré en violet par l’iode, l'acide est jaune avec fluorescence verte. L'eau de chlore décolore presque instantanément la même teinture ; en enlevant avec du papier buvard l'excès d’eau de chlore el en ajoutant de l’acide sulfurique, on obtient à froid la réaction caractéristique. Il en est de même quand on opère sur de la temture quia bouilli avec de l'eau de chlore. L'eau de brome décolore immédiatement la teinture chlorofor- mique (deux gouttes d’eau pour 2% de teinture); par l'addition ultérieure d'acide sulfurique l'acide se colore en bleu vert, puis rapidement en brun avec fluorescence. Si la teinture a bouilli avec un excès d'eau de brome la réaction de Salkowsky ne se produit plus; d’ailleurs l'ébullition avec de l’eau de brome décolore la réaction de Salkowsky quand celle-ci a déjà été obtenue. Leau de Labarraque se comporte entièrement comme l'eau de chlore. L'eau oxygénée est sans action sur la même teinture de Suberites, qu'on l’emploie pure et par conséquent difficilement miscible au chloroforme, ou qu’on l’additionne préalablement d'éther. On peut faire bouillir un mélange de teinture, d’eau oxygénée et d'êther sans produire autre chose qu'un affaiblissement très léger de la couleur du mélange. Vient-on à ajouter de l'acide sulfurique, il se produit une vive effervescence avec élévation de température, le chloroforme prend une teinte bleue qui disparaît aussitôt et le LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. IE mélange devient absolument incolore. Après une vingtaine d'heures de contact il n'y a pas eu de changement ; en chauffant l'acide prend une teinte jaune brun avec fluorescence verte. Ainsi qu'on le voit, le lipochrome semble donner naissance à de la cholestérine quand il se détruit, ainsi que l'indique KRUKENBERG. On pourrait faire à toutes ces expériences, il est vrai, l'objeclion que la substance pigmentaire, tant qu'elle est intacte, aurait la propriété de masquer les réactions de la cholestérine ou de les empêcher de se produire, que celles-ci se manifesleraient seulement après destruction du lipochrome. La réaction qui se produit en présence de l’eau oxygénée ne permet pas d'accepter celte hypothèse, dont la fausseté est d’ailleurs facile à démontrer. Il suffit d'ajouter une trace de cholestérine cristallisée à une teinture chloroformique de Sube- riles: l'addition ultérieure d'acide sulfurique colore encore en bleu la couche chloroformique, il prend lui-même une teinte verte plus ou moins bleue (vert brun s’il y a davantage de cholestérine) avec fluorescence verte. La réaction de la cholestérine se superpose à celle du lipochrome, sans que l’une gêne l’autre. On est bien en droit de conclure que si la réaction de la cholestérine ne se manifeste que dans certaines conditions avec les extraits de Suberites, c’est parce que cette substance n’y apparait que dans cerlaines conditions. Nous avons vu que divers agents d’oxydation (lumière, chaleur, essence de térébenthine insolée, iode, chlore, liqueur de Labarraque, brome) déterminent l'apparition de corps ayant les réactions de la cholestérine ; le chauffage avec l'acide sulfurique concentré conduit au même résultat. Il n’en est pas de même en chauffant le pigment avec de l’eau ou des acides diluëés. En faisant bouillir avec de l'acide sulfurique au cinquième la teinture chloroformique de Suberiles jusqu'à ce que tout le chloroforme soit évaporé, le résidu garde sa couleur orangë normale; en ajoutant alors de l'acide sulfurique jusqu'à ce que sa concentration soit de 1/2 environ, il se fait une faible coloration bleue qui disparaît à chaud avec formation d’une fluorescence verte extrêmement faible. L'ébullilion de la teinture avec de l’eau jusqu’à ce que tout le chloroforme soit évaporé n'altère ni la couleur, ni les réactions du pigment. 1 de teinture de Suberiles est addilionné de quatre gouttes d'acide azotique quadrihydraté : couleur verte passant rapidement au jaune. Cette dernière teinte n’est plus altérée à la température d'ébullition du chloroforme. L’addition d'acide sulfurique décolore 929 o 14 JULES COTTE. le chloroforme qui passe sa couleur jaune à l'acide ; celle teinte ne se modifie pas à chaud, pas de fluorescence. Si la proportion d'acide azotique a été moindre et le contact peu prolongé, l'acide sulfu- rique peut remplacer la couleur jaune du mélange par les teintes de la réaction de Salkowsky. En remplacant dans l’expérience précédente l'acide azotique par la même quantité d'acide chlorhydrique ou par de l’alcool absolu chlorhydrique, ou par de l'acide acétique et en faisant bouillir, le lipochrome reste inaltéré. Par l'addition ultérieure d'acide sulfurique le pigment qui a subi l’action de l'acide acétique prend une teinte plus bleue qu’à l'ordinaire. En évaporant presque à siccité en présence de potasse alcoolique la teinture chloroformique de la même espèce et en reprenant par du chloroforme le résidu jaune, le dissolvant se colore également en jaune. Cette liqueur filtrée est addilionnée d’acide sulfurique, le chloroforme se colore faiblement en bleu, l'acide en vert passant rapidement au vert brun, puis après 2-3 min. au brun verdâtre avec fluorescence verte, enfin au jaune rougeâtre. La teinture chloroformique de Z'ethya lyncurium est d'un beau jaune d’or, évaporée elle abandonne un lipochrome jaune orangé entremêlé d’aiguilles de cholestérine. En ajoutant de l'acide sulfu- rique à la teinture, le chloroforme se colore en vert, puis en vert brun, tandis que l’acide se colore immédiatement en brun avec forte fluorescence verte. Cette réaction semble indiquer qu’il existe à la fois chez l'éponge vivante de la cholestérine et un lipochrome. Le pigment orangé que j'ai pu extraire de À. simulans se comporte comme celui de S. domuncula, avec cette différence toutefois qu’il présente une résistance beaucoup plus grande à la décoloration spontanée. Des expériences antérieures m’ayant appris que la cholestérine est beaucoup plus soluble dans l’éther que le pigment, j'ai lavé avec ce dissolvant, à trois reprises successives, une certaine quantité du pigment qui restait collé contre le fond et les parois d’une capsule. Le résidu, débarrassé de l'éther par évaporation, a élé dissous dans du chloroforme puis additionné d'acide sulfurique. Celui-ci a pris une teinte brun rouge foncé, qui à chaud est devenue plus rubis avec fluorescence verte. Bubaris vermiculata possède un lipochrome qui a de grandes analogies avec celui de S. domuncula, sans être cependant iden- LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 515 tique avec lui. La teinture chloroformique de cette espèce, additionnée d'acide sulfurique, se colore en rouge violet, puis en bleuâtre à peine visible et fugace, tandis que l'acide est à peine teinté de jaune. En chauffant, cette couleur jaune augmente d'intensité et la fluorescence apparait. Cette teinture chloroformique présente une sensibilité très grande à l'égard de la potasse alcoolique qui la décolore, même à froid. En évaporant le mélange presque à siccité et reprenant par le chloroforme, puis en ajoutant de l'acide sulfurique, l'acide se colore en jaune rougeàtre ; la fluorescence verte est très lente à apparaitre. L’acide azotique décolore cette même teinture à froid et à chaud ; si le contact a duré plus de quelques minutes la substance qui nous intéresse a été détruite, l'acide sulfurique n’agit plus. L'addition d'acide chlorhydrique (deux gouttes pour 1° de teinture) fait apparaître, comme celle d'acide azotique, un louche blanchâtre qui ne s'accompagne celte fois d'aucun changement de coloration. Après ébullition et refroidissement, puis addition d'acide sulfurique, on peut remarquer après 48 heures une coloration rose faible de l'acide, avec fluorescence très faible qui augmente notablement par le chauffage. L’acide acétique agit absolument comme l'acide chlorhydrique, à part la production du louche blanchâtre qui n’apparail pas ici; c’est dire que l'acide ne manifeste pas la moindre action. La teinture alcoolique de Bubaris à une teinte d’un bel orangé, à peu près identique avec celle des mêmes teintures de S. domuncula. En faisant évaporer cette teinture à l'étuve à 45°, le résidu à une couleur faiblement jaunâtre. Par addition d'acide sulfurique la partie supérieure est à peine rougeàtre, l'acide est jaune brun foncé et acquiert graduellement une fluorescence très marquée. Voici, en résumé, comment on peut grouper et interpréter les résultats énumérés plus haut. La réaction de la cholestérine ne se manifeste (T'ethya exceptée) que lorsque le pigment à été altéré. Il faut donc ou que les lipochromes étudiés possèdent un noyau de cholestérine ou se transforment en cholestérine, ou bien qu'un dérivé de la cholestérine accompagne le lipochrome et se détruise en même temps que lui. Cette dernière hypothèse est difficilement acceptable. Remarquons en effet que, sauf le cas de l'acide azotique et de l'eau de brome, qui détruisent parfois et pigment et cholesté- 516 JULES COTTE. rine, le lipochrome semble donner naissance à de la cholestérine toutes les fois qu’il se détruit, quel que soit l'agent que l’on emploie dans ce but, même quand on laisse la décoloration se faire spontané- ment à l’air libre. L'apparition graduelle de cristaux qui se fait dans ce dernier cas ne peut pas être expliquée par un phénomène de concentration moléculaire qui se produirait lentement aux dépens d’un corps préexistant. J'ai renfermé dans un tube de verre, scellé et plein d’une atmosphère d'acide carbonique, un extrait chloroformique de S. domuncula. Le tube à été placé au grand soleil, en dehors du laboratoire. Il y a actuellement un mois et demi que le pigment est insolé et il ne s’est pas encore décoloré. Il a pris par endroits une apparence spumeuse, granuleuse, quelques angles de cristaux commencent à se montrer. Je crois que l’on peut faire intervenir ici des phénomènes de concentration moléculaire, se produisant sur les particules de cholestérine qui avaient dû prendre naissance au moment de la préparation de l'extrait. Quel peut être le rapport entre la cholestérine et les lipochromes ? Il est très possible que ces derniers soient des éthers de la choles- térine ; 1l ne faut pas oublier toutefois que le pigment de Suberites montre, même à la température d'ébullition, une certaine résistance à l'acide sulfurique dilué, aux acides chlorhydrique et acétique et à la potasse alcoolique. Mais il existe à ce point de vue des différences qu'il est utile de souligner, car elles indiquent bien que les lipochromes ne sont pas identiques entre eux. Le lipochrome de Bubaris est extrèmement sensible à l’action de la potasse alcoo- lique, celui de Suberites est plus résistant, celui de À. simulans bien plus résistant encore. Il en est de même pour la décoloration spontanée des pigments. J'ai dans une capsule, depuis plusieurs mois, des traces de pigment de RÀ. simulans qui ne sont pas encore décolorées. MÉREJKOWSKY signale que le lipochrome de Gorgonia verrucosa s'altère avec la plus grande rapidité. L'action de l’eau oxygénée, qui décolore le pigment en présence d'acide sulfurique, sans mettre de la cholestérine en liberté mais en permettant à l'acide chauffé de donner encore les réactions de la cholestérine, semble indiquer qu'il y a dans le lipochrome un chromogène allié à la cholestérine et un auxochrome qui est, lui, touché par les oxydants. Le chromogène ne serait pas encore de la cholestérine, car après l’action de l'eau oxygénée qui à détruit LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. Fil, l’auxochrome la réaclion de la cholestérine ne se produit pas : pour la voir apparaitre il faut chauffer, comme avec le pigment. Certains agents semblent attaquer avec plus d'intensité les lipochromes étu- diés. C’est ainsi que l’action de la lumière en présence d'oxygène le chauffage à l'air et surtout le chauffage avec l’iode donnent des produits qui fournissent immédiatement la réaction de SALKOWSKY. Il y aurait à la fois attaque de l’auxochrome et du chromogène, avec mise en liberté du noyau de cholestérine. Avec l'acide sulfurique à chand, je l’ai répété bien souvent, l'attaque est instantanée. Il n’y a pas lieu d'admettre que l'oxygène agit en brûlant le lipochrome de manière à isoler son noyau de cholestérine. Il suffirait par exemple que l’éther cholestérique — en admettant que les lipochromes aient cetle composilion — possédât des acides facilement oxydables et donnant naissance à de nouveaux produits peu aptes à éthérifier la cholestérine. L’oxydation s’accompagnerait fatalement d’une disso- ciation du composé. . ARNAUD est arrivé à des conclusions bien différentes en ce qui concerne le pigment des carottes, que l'on a eité souvent comme étant le type des lipochromes. IL a fait cristalliser ce produit, qui est un carbure d'hydrogène. J'ai essayé plusieurs fois d'employer sur des Suberiles la méthode d'extraction qu’ARNAUD à utilisée pour sa caroltine, je ne suis pas arrivé à des résultats comparables aux siens ; le pigment est resté dissous dans le mélange de sulfure de carbone et d'alcool absolu. Et cependant le carotène présente de bien grandes analogies avec le lipochrome de Suberites : mêmes dissolvants, même sensibilité à l'égard des oxydants, même couleur carmin donnée au sulfure de carbone, même couleur bleue prise sous l’action de l'acide sulfurique. Le carotène existerait-il dans la molécule des lipochromes à litre de corps constituant ou sous forme de noyau d’un des constituants ? Je ne puis rien dire à ce sujet, puisque je n'ai puisolerlacholestérine qu'en détruisant le lipochrome. J'ai employé partout, dans les pages qui précèdent, l'expression de cholestérine dans le sens le plus large ; il faut lire partout: wne cholestérine. Il n’y aurait rien d'étonnant à ce que l’on eût simple- ment affaire à un isomère ou à un homologue de la cholestérine que l'on rencontre dans la bile de l’homme. En effet la réaction de SALKOWSKY ne donne pas des leintes identiques avec les pigments des éponges que j'ai étudiées et avec la cholestérine des Mammi- fères. Avec celle-ci le chloroforme est fortement coloré ; avec les 518 JULES COTTE. pigments des éponges on a seulement une coloration extrèmement faible du chloroforme, qui semble être souvent un reflel de la couleur de l'acide sulfurique. Celui-ci ne prend pas, avec les lipo- chromes, la teinte rouge pourpre qu'a signalée SALkowsKy ; il reste dans les tons roses ou bruns, suivant la concentration. J'ai obtenu seulement une coloration rouge pourpre en faisant la réaction de Scxirr, à l'acide chlorhydrique et au perchlorure de fer, sur les cristaux provenant de la décoloration à la lumière du lipo- chrome de S. domuncula. Je citerai aussi, comme différence entre le produit des lipochromes et la cholestérine humaine, la tendance beaucoup plus grande du premier à cristalliser en longues aiguilles. La cholestérine humaine cristallise plutôt en lamelles, au moins quand on évapore ses solu- tions chloroformiques. Avec les éponges j'ai eu rarement des lamelles à proprement parler ; la disposition normale est plutôt en aiguilles, groupées souvent en sphéro-crislaux. Par l’évaporation des solutions éthérées j'ai obtenu parfois de minces aiguilles qui avaient bien 1%: de longueur. LOCALISATION DU PIGMENT. La localisation du pigment chez les éponges est très variable. D'une façon générale le maximum de coloration se trouve à l’exté- rieur, mais celte règle est loin d’être constante. ChezS. domuncula, que j'ai assez longuement étudié à ce point de vue, la répartition du pigment est assez remarquable : il y a un maximum de pigmentation au niveau de la surface extérieure, puis affaiblissement graduel de la teinte orange à mesure que l’on examine des couches plus profondes. Au niveau du canal spiral, constituant la paroi de celui-ci, est une nouvelle zone pigmentée étroite, nettement délimitée vers l'intérieur et moins chargée en couleur que la partie extérieure. Autour des principaux canaux exhalants se trouve généralement une zone pigmentée identique à celle qui borde le canal spiral. Lorsque le pourtour de loscule est blanc, chez certains Suberites bruns, les canaux exhalants sont également bordès de blanc, alors que le canal spiral possède une enveloppe brune. Les gemmules constituent une nouvelle région fortement pigmentée. CARTER [70] pour les Siicea et HæckeL pour les Calcaria admettent que le pigment est presque uniquement contenu dans l'in- LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. »19 térieur des cellules flagellées, dans l'endoplasma de celles-ci. Cette proposition est exagérée. On trouve chez les éponges calcaires, peu pigmentées d'ailleurs en général, une forte réduction de leur méso- derme compensée par l'excès de développement des choanocytes, et il en résulte que ceux-ci son investis d’une importance très grande chez les individus et qu'ils sont chargés de rôles très complexes. Il n’est donc pas étonnant que chez les Calcaria les choanocytes renfermentune grande quantité de pigment. Il faut se garder decroire cependant que les cellules mésogléiques ne sont pas pigmentées, elles aussi. Chez les Zncalcaria c’est au contraire dans la mésoglée que se fait l'accumulation du pigment ; chez certaines espèces très colorées, comme S. domuncula, les cellules mésogléiques sont parfois litté- ralement bourrées de granulations rouge orangé de toutes dimen- sions et de toutes les formes. Bien que, lorsque nous avons affaire à des lipochromes, la forme sphérique des globules qui les consti- tuent semble devoir être la règle, il y a de très nombreuses exceptions et on peut dire qu'il n'existe aucune forme fixe. Il ya certainement identité absolue entre les amibocytes pigmentés des éponges, les chromatocytes, et ceux analogues que l’on rencontre chez d’autres animaux, tels que les amibocytes à échinochrome des Echinides. Comme ces derniers les amibocytes pigmentés des Spongiaires ne possèdent en général que des pseudopodes lobés ; celte règle n’a toutefois rien d’absolu. Si elle est vraie pour les cellules bourrées de pigment, dont les propriétés de motilité et l’activité physiologique semblent être fortement atténuées par les sphérules de pigment qui encombrent leur masse, 1l en est tout autrement pour les cellules qui sont encore pauvres en pigment. Autour de celles-ci on distingue tout aussi bien des pseudopodes filiformes que des pseudopodes lobés, ce qui indique de grandes facultés de déplacement et vraisemblablement une activité bien plus grande. L'existence de ces dernières cellules indique nettement que les cellules pigmentées dérivent chez les éponges des phagocytes ordinaires, graduellement spécialisés dans une fonction nouvelle. TopseNT et d'autres auteurs signalent que chez les Reniera et quelques espèces voisines le kératode d'union des spicules peut être aussi coloré. Chez R. simulans le fait se produit très fréquemment. On reconnaît à l'aspect extérieur les éponges qui présentent cette altération : elles possèdent par places une coloration jaune. Sur une 520 JULES COTTE. coupe ou une dissociation on voit que celle couleur est due à un pigment à allure de lipochrome renfermé, sous forme de sphérules de diamètre réduit, dans l'épaisseur du kératode. Aux endroits alteints le kératode a perdu son aspect hyalin, est devenu granu- leux et a augmenté irrégulièrement de volume. IL s'agit d’une dégénérescence spéciale. TopsenT [87] signale, d’après O. ScamipT, que les spicules de Cliona Johnsloni sont colorés en violet. RÔLE DES PIGMENTS CHEZ LES ÉPONGES. Essayer de résoudre cette question pour les éponges, c’est vouloir chercher à élucider un point des plus obscurs de la biologie générale. Sans vouloir apporter de solution à celte question toujours ouverte, je vais cependant comparer nos connaissances sur Îles pigments des éponges aux théories qui ont cours au sujet des pigments des autres animaux. Un mot d’abord au sujet de la classification des pigments. PouLrox [90] qui ne s’est occupé que des animaux, des insectes surtout, classe ainsi leurs colorations. I. Non-significant Colours. II. Significant Colours. 1. Colours of Direct Physiological Value. 2. Protective and Aggressive Resemblance. 3. Protective and Aggressive Mimicry. 4. Warning Colours. ». Colours displayed in Courtship. Cette classification est réellement insuffisante et prête à de nombreuses critiques. NEWBIGIN [98], qui traite la question à un point de vue plus général, donne la classification suivante : : 1. Pigments of direct physiological importance, as in Ë | respiration, etc. Native })s ie Ne Pi ee Derivatives of such pigments. PES | 3. Waste products or modifications of such. . 4. Reserve products or pigmentsassociated with reserves. o. Introduced pigments. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 521 Un fait frappe tout d’abord dans la classification de NEWBIGIN, c'est que l’auteur range dans son premier groupe des substances aussi différentes, au point de vue physiologique, que le sont la chlorophylle et l’'hémoglobine. C’est là bien certainement une erreur ; elle dérive tout naturellement de la conceplion ordinaire du pigment qui, à tout prendre, est un non-sens scientifique. Vouloir classer les substances que l’on rencontre chez les êtres vivants par leur couleur, par une sensation spéciale de notre rétine, c’est vouloir adopter un criterium extrêmement artificiel. Autant vaudrait grouper ces substances d’après leurs poids spéci- fiques. Que dirions-nous d’un chimiste qui séparerait les corps qu’il étudie en produits incolorés et en produits colorés? Nous en sommes cependant à ce point. On devrait réserver le nom de pigment aux seules substances pour lesquelles leur couleur est réellement une propriété physiologique fondamentale. L'hémoglobine n'est pas un pigment, c'est simplement une substance colorée ; elle est rouge, il est vrai, mais ce n’est pas par sa couleur qu'elle nous intéresse, c'est par sa constitution chimique, c'est par son rôle dans la respiration. Elle serait incolore que la vie normale des animaux ne serait pas changée: je ne puis pas la considérer comme un pigment. Et cependant elle joue parfois le rôle d'un pigment ; par le coloris qu'elle donne aux lèvres, aux pommettes, etc. dans l'espèce humaine elle fournit une arme appréciable dans la lutte sexuelle. Dans ce cas, dans d’autres encore que l’on pourrait rapprocher de celui-ci, elle devient réellement un pigment, elle acquiert la fonction pigment. Au contraire la chlorophylle me paraît être un pigment parfai- tement caractérisé, car sa couleur verte a une très grande impor- tance : elle nous fait connaître quelles sont les radiations lumineuses absorbées par ce transformateur d'énergie, et si nous arrivons par la pensée à changer cette couleur, nous changerons en même temps dans des proportions sensibles les manifestations vitales et les formes des végétaux à chlorophylle. Mais lorsque cette même chlorophylle aura imprégné cerlains organes d’un insecte, je ne songerai guère à voir dans cette substance un pigment à proprement parler : ce sera simplement un résidu alimentaire, la chlorophylle aura perdu la fonclion pigment. 522 JULES COTTE. Il me semble qu’à la notion du pigment, qui est bien souvent envi- sagée seule, on devrait substituer toujours la notion de la fonction pigment. On pourrait dire qu’il n'existe pas de pigment, mais une foule de substances peuvent devenir des pigments : cela dépend de nombreuses conditions contingentes, qui leur sont étrangères en quelque sorte. Que la tête du coq s’orne d’une crête richement vascularisée : voilà l’'hémoglobine devenue une substance pigmen- taire. Aussi me paraît-il bien difficile de classer convenablement les pigments. Je ne puis pas accepter la classification de NEWBIGIN, dont un des défauts est de réunir dans un même groupe des substances à rôles physiologiques essentiellement différents. Il est impossible d'autre part de grouper les pigments d’après leur com- position ou leurs affinités chimiques : nos connaissances sur ce point sont à peine ébauchées. Viendrions-nous à bout de les compléter suffisamment, nous ne pourrions pas quand même utiliser au point de vue qui nous occupe les renseignements qu'elles nous donneraient. Le jour où on connaîtra parfaitement la composition des lipo- chromes, pourrons-nous mettre dans le même groupe le lipochrome des gemmules de Suberites et ceux des plumes de certains oiseaux ? La composition chimique de ces substances doit être extrêmement voisine, mais dans le premier cas la couleur du lipochrome ne semble nous intéresser que pour la détermination des espèces, dans le deuxième elle possède une importance réelle, surtout à l’époque des livrées nuptiales. Aussi puisque la fonction pigment est une fonction physiologique, qui n’est pas étroitement asservie à la nature chimique des corps qui la possèdent, je crois que c’est au point de vue physiologique seul que doit être tentée une classification des pigments. Il y a d’abord une grande coupure à faire ; il faut, à l'exemple de PouLTon, séparer en deux grandes classes les pigments, au sens usuel du mot : les pigments proprement dits ou pigments essentiels, et les pseudo-pigments qui ne sont au total que des substances colo- rées, bien qu’ils puissent avoir les mêmes couleurs que les pigments essentiels et qu'ils puissent à l’occasion devenir des pigments essen- tiels. Dans cette dernière classe il n’y a pas de divisions à poser ; indiquons seulement que l’on rangera habituellement dans cette classe des composés comme l’hémoglobine, l'hémocyanine, les pigments biliaires et bien souvent les lipochromes. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 923 Dans la première classe il est possible d’élablir plusieurs subdi- VISIONS : 1° Les pigments qui ulilisent les radiations lumineuses, chloro- phylle, etc. On pourrait les appeler pigments photolabes (Azubave, je prends, j’absorbe) ; 2° Les pigments pigmentaires dont l'importance est très grande en tant que pigments, en tant que substances impressionnant la rétine de l’homme et des animaux. Les pigments des oiseaux, des ailes des papillons en sont le plus bel exemple; ils sont généra- lement en rapport étroit avec les fonctions génitales ; 3° Ce groupe pourrait bien être relié au précédent dont il n’est, à vrai dire, qu'une subdivision. Ce sont les pigments de défense : ils embrassent aussi bien certaines mélanines, comme le noir de la Seiche, que les pigments des animaux soumis au mimélisme. Les matières colorantes deviennent dans ce cas de véritables organes de défense; 4 Les pigments-écrans. C’est dans ce groupe qu'il y a lieu de ranger certaines pigmentations, comme celle dont CAMICHEL et MaxpouL ont fait l'étude et dont le rôle physiologique paraît être de protéger les tissus profonds contre les radiations solaires. Les groupes 3 el 4 constituent à proprement parler les couleurs protec- trices de certains auteurs. Il est possible que ce quatrième groupe lui-même doive disparaître de la liste des pigments essentiels : si les corps qui le composent agissent seulement par leur opacité, en arrêtant les radiations solaires par un phénomène purement méca- nique, je ne crois pas qu'il y ait lieu de leur conserver le nom de pigment. I. Pseudo-pigments ; Il. Pigments essentiels ou pigments proprement dits : 1° Pigments photolabes ; 2 Pigments pigmentaires ; 9 Pigments de défense ; 4% (?) Pigments-écrans. Avec cette classification les familles chimiques sont absolument démembrées: les lipochromes par exemple seront rangés tantôt 24 JULES COTTE. parmi les pseudo-pigments, tantôt parmi les divers groupes de pigments essentiels. Mais, je le répète, une classification des pigments ne peut pas reposer sur des bases chimiques. Je n'ai pas eu la prétention de grouper dans ce tableau toutes les fonctions des pigments ; mon intention a été simplement de tracer un cadre provisoire qu'il y aura lieu de compléter lorsque d’autres propriétés des pigments auront été scientifiquement démontrées. Ces bases ainsi posées, comment pouvons-nous comprendre les pigments des Spongiaires ? L'apparition de certains d’entre eux me paraît être sous l'influence directe de la lumière. Le fait semble particulièrement net pour Chondrosia reniformis, où un pigment violet noir se dépose à la partie supérieure, ainsi que NaRpo l'avait déjà constaté, sous forme de marbrures qui deviennent ensuite cohérentes et constituent une véritable nappe pigmentée ; la partie inférieure reste plus claire. D’autres espêces, comme Tethya lyn- curium, semblent avoir leur pigment également réparti sur toute leur surface. Chez les Reniéridées, chez un certain nombre d'espèces indéterminées que je n’ai pas étudiées dans ce travail, il ne m'a pas paru possible de reconnaître par la coloration un côté éclairé et un côté dans l'ombre. Aussi je ne crois pas que dans l’ensemble les pigments des éponges rentrent dans le groupe des pigments-écrans. Il y a une exception à faire peut-être pour des types spéciaux comme Chondrosia reniformis. Nous avons affaire ici à un pigment noirâtre, à une sorte de mélanine qu'il serait possible d’assimiler à la tyrosine oxydée. Le produit qui colore l'éponge joue peut-être plutôt un rôle mécanique qu’un rôle chimique à proprement parler, et je ne serais pas étonné qu’on eût à le classer parmi les pigments- écrans. Faut-il penser aux pigments photolabes ? La question est réelle- ment difficile à résoudre en l'absence de toute expérimentation directe. Remarquons que chez Tethya lyncurium la partie centrale est d'une couleur plus foncée que le cortex. Chez Cliona celata, CI. viridis massives les lipochromes se rencontrent en abondance dans les couches les plus profondes. Chez S. domuncula on trouve une bande pigmentée autour du canal spiral, autour des canaux exhalants les plus volumineux et les gemmules sont extrêmement pigmentées. Chez Cliona vastifica les gemmules sont beaucoup plus colorées que le reste de l'animal. Chez un grand nombre d'éponges cependant, il faut bien le reconnaître, le maximum de LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 525 pigmentation se trouve au contact de la lumière, à la surface de l'animal. Il ne m'est pas possible, en présence de toutes ces contradictions apparentes, de voir dans les pigments des éponges des corps qui utilisent les radiations lumineuses. KRUKENBERG a étudié avec beaucoup de soin les bandes d'absorption des produits colorés qu'il avait extraits des éponges, mais ces résultats n’ont qu'un intérêt très relalif: les pigments biliaires ont, eux aussi, leurs bandes d'absorption. On ne peut pas songer non plus à attribuer aux pigments des Spongiaires le rôle d'organes de défense ; tout au contraire les riches couleurs de certaines éponges devraient attirer sur elles l'attention des animaux carnassiers si leurs spicules, leurs excrela toxiques et peut-être d’autres sécrétions toxiques n’éloignaient pas d’eux Îles ennemis (1). Nous ne penserons pas davantage aux pigments de mon deuxième groupe, aux pigments pigmentaires. Aussi je crois qu'il y a lieu de ranger les pigments des éponges parmi ces produits que je propose d'appeler des pseudo-pigments. Ce n’est pas à titre de corps colorés que les pigments des éponges méritent de nous intéresser, nous chercherons ailleurs leur véritable ulilité. Je continue à parler surtout des lipochromes. GiaRD a émis une hypothèse très séduisante en admettant que la production du pigment peut être considérée comme un acle de défense contre les variations chimiques et physiques auxquelles sont exposés les êtres vivants. Cette opinion a été chaleureusement défendue par Bonx [01], Carnor [96] s’y était également rallié ; elle explique très bien l'apparition de certains pigments (pigment des éphélides, ceux qui sont causés par les vésicatoires, les érythèmes solaires, elc.). Pour discuter cette question en ce qui concerne les éponges, je suivrai l’ordre adopté par Bonn. 1° Défense contre l'acide carbonique. Nous avons vu que les substances colorées des éponges ne semblent nullement utiliser les radiations solaires pour décomposer l'acide carbonique. 20 Défense contre les poisons. Les pigments seraient chargés de saturer chimiquement cerlains poisons autochthones ou provenant du milieu exléricur; l'exemple typique serait fourni par les (1) 11 y a des exceptions. En aquarium les Blennies s’attaquent parfois à S. domuneula, 526 JULES COTTE. lipochromogènes des Crustacés dans lesquels un lipochrome est combiné à des produits volatils, toxiques vraisemblablement. Deux observations m'ont frappé au sujet de ce dernier cas: la première, c'est que la réaction de l’organisme contre le poison, qui fait entrer celui-ci dans une combinaison instable et soluble, donc dangereuse toujours, devrait continuer par l'expulsion de cette même combi- naison. La deuxième c’est que l'équation chimique représentant le phénomène est bien simple ; le chimisme cellulaire nous apparaît comme étant souvent beaucoup plus compliqué. Admettre que les lipochromes sont chargés de saturer les poisons, avec formation de composés qui s’accumuleront dans l'organisme, me paraît comparable au raisonnement que l'on ferait si l'on déclarait que l'organisme de beaucoup d'animaux sécrète de l'acide glycéro- phosphorique pour produire la saturation d’amines toxiques et arriver ainsi à la formation des lécithines. D'ailleurs l'existence d'un tel métabolisme pigmentaire n’a pas été encore constatée chez les éponges ; on ne leur connaît pas encore de lipochromogènes. 3 Défense contre l'oxygène. Nous retombons ici dans la discussion qui a eu lieu entre MÉREJIKOWSKY et KRUKENBERG au sujet des lipochromes. Le premier auteur admettait que ces pigments, physiologiquement analogues à l'hémoglobine, servent à la respi- “ation cutanée des animaux inférieurs (1); il se formerait une nouvelle quantité de pigment à mesure que l'oxydation en détruirait : ce serait un acte de respiration. Acte de nutrition, répondait KRUKENBERG, qui croyait aussi à la destruction du lipochrome chez S. domuncula sous l'influence combinée de la lumière et de l'ozone et admettait qu'il se forme ainsi des produits aussi utiles pour l’animal que les hydrates de carbone et les graisses le sont pour les végétaux. En réalité il s'agissait beaucoup d’une question de mots; la respiration n’est, au total, qu'une des fonctions de nutrition. L'opinion de KRUKENBERG et de MÉREIKOWSKY dérivait de cette observation que les lipochromes, in vitro, se détruisent au contact de l'oxygène, la lumière accélérant celte transformation. Mais les (1) Pour lui, si le Suberites a de la tétronérythrine, c’est parce qu’étant immobile il n’a pas toujours autour de lui de l’eau riche en oxygène, comme les animaux errants, et il a « besoin d’une substance spéciale destinée à augmenter la quantité d'oxygène absorbée par les tissus ». LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 3737] deux auteurs n'avaient pas considéré que les pigments .peuvent rencontrer dans le protoplasma cellulaire un milieu réducteur où leur oxydation soit impossible, de même que dans le sang de certains insectes de la tyrosine coexiste avec de la tyrosinase sans qu'il y ait brunissement. De plus la comparaison à élablir entre la fonction de l’hémoglo- bine et celle des lipochromes, telle que la supposaient les deux auteurs précédemment cités, ne peut pas être bien rigoureuse; l'hémoglobine joue un rôle des plus actifs pour le transport de l'oxygène, elle n’est pas détruile par l'oxygène et ne forme avec ce gaz qu'une faible combinaison, aisément dissociable. Ce n'’esl pas ce qui a été admis pour les lipochromes, immobiles et définitivement détruits par l'oxygène. Au sujet de la carottine ARNAUD [89] émet une hypothèse beaucoup plus rationnelle en supposant que dans la feuille vivante la carottine « subit des alternatives d’oxydation et de réduction, de telle sorte que sa proportion reste à peu près invariable pour un espace de temps limité. » Il y a une objection à faire à ces hypothèses. La teneur du sang en hémoglobine, chez une espèce donnée, est le témoin fidèle de Pactivité des phénomènes nutritifs, de l’état de santé de l’individu examiné. Nous ne pouvons pas en dire autant des lipochromes. Les Spongiaires atteints d’albinisme partiel n’en continuent pas moins à avoir un accroissement normal, et il n’est pas rare de rencontrer par exemple des S. domuncula faiblement colorés en jaune et d’un volume égal à celui des deux poings. L'hypopigmentalion semble avoir infiniment moins de retentissement sur la nutrition des Spongiaires que n'en a chez les Mammifères, par exemple, la diminution de-la teneur du sang en hémoglobine. Aussi nest-il pas démontré pour moi que les pseudo-pigments des éponges jouent un rôle respiratoire. J'ai voulu m’assurer par l'expérience s'ils ne sont pas capables de produire l'oxydation des réactifs des oxydases, ainsi que le font les sels de manganèse, en passant par un état instable d’oxydation, par un vérilable phéno- mène de catalyse. J'ai fait agir à cet eflet de la teinture chlorofor- mique de Suberites, riche en lipochrome, sur du gaïac, du gaïacol et de la pyrocatéchine. Le résultat a été entièrement négatif. On sait d'ailleurs que les lipochromes, tant qu'ils sont dissous, présentent une résistance assez grande à l’oxydation ; c'est seulement quand on cherche à les isoler que leur fragilité devient surtout évidente, 528 JULES COTTE. 4° Défense contre la lumière. J'ai déjà discuté cette question, je n'y reviendrai pas. Les propriétés physiques des lipochromes rapprochent ces substances des graisses, et celte analogie a amené quelques auteurs à assimiler les lipochromes aux substances de réserve. Cette hypo- thèse s’accorde avec un certain nombre de faits bien caractéristiques: présence de la luléine dans les œufs d'oiseaux, de lipochromes en quantité abondante dans les organes génitaux des échinoder- mes, etc. OLMER [01 | fait remarquer que le lipochrome et le pigment foncé de la cellule nerveuse « apparaissent avec la signification de substances de réserve, capables de contribuer pour une part impor- tante à la nutrition de la cellule ». Au cours de recherches que j'avais commencées sur la régénéra- tion des tissus chez S. domuncula j'ai observé que les cicatrices, chez celte espèce, conservent pendant assez longtemps une colo- ration bien plus faible que le reste de la surface de l'animal. Les cellules colorées y sont moins nombreuses qu'ailleurs et dans leur ensemble elles sont plus pauvres en lipochrome. Toutefois ces expériences ne nous apprennent pas si le lipochrome est peu abondant parce qu’il a joué un rôle actif dans les faits de régéné- ration, ou si la pauvreté de la cicatrice en pigment n'indique pas seulement que l'organisme emploie à la formation des cellules nouvelles toute l'énergie dont il dispose, avant de s'occuper à élaborer des lipochromes. En feuilletant mes notes je trouve y avoir marqué que des Sycandra raphanus exceptionnellement riches en pigment jaune d'or étaient en état d'élaboration sexuelle très active (mois de Janvier). Les gemmules de certaines éponges sont très fortement pigmentées, il en est de même pour un certain nombre de larves de Spongiaires. Tous ces faits se tiennent bien: gemmules et jeunes larves sont à comparer aux œufs des oiseaux, les Sycandra citès plut haut sont à comparer aux échinodermes et peut-être aux oiseaux, qui élaborent des lipochromes en plus grande quantité au moment où leur activité génitale se réveille. Il devient dès lors très logique de voir un rapport entre le pigment dont sont encombrés ces organes ou ces individus et la croissance rapide des uns et l’activité physio- logique des autres. S'il est vrai que le pigment se rencontre surtout au niveau des régions à croissance rapide, nous comprenons pourquoi il est surtout LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 529 accumulé au niveau de la surface d’un grand nombre d’éponges. C’est en ce point que se fait l'accroissement de l’animal ; c’est en ce point que se trouvent les lipochromes. Si chez certains d’entre eux la pigmentation paraît plus forte du côté éclairé, on pourrait très bien expliquer ce fait en admettant que l'éponge se développe davantage de ce côté, par une sorte de phototactisme. Au point utile il y aurait sécrélion du pigment et c’est ainsi que la lumière peut n'être qu'un facteur très secondaire dans la genèse du pigment, dans ces cas précisément où elle paraît être un facteur de première importance. Je reconnais toutefois que cette explication n'indique pas la raison qui fait colorer d’une façon presque constante les parois des principaux canaux exhalants et d’une façon constante le canal spiral chez S, domuncula. Reste encore à déterminer si les pseudo-pigments des éponges sont réellement utilisés directement par les tissus, au même titre que les substances de réserve proprement dites. En d’autres lermes, cèdent-ils immédiatement leur énergie potentielle ? Nous ne pouvons pas répondre à cette question et nous ne le pourrons que lorsque la nature exacte des lipochromes nous sera exactement connue. En tout cas s’il en est ainsi, si les lipochromes sont brûlés par l'organisme animal, la combustion doit porter seulement sur les groupements moléculaires qui sont combinés à la cholestérine et respecter celle-ci. La cholestérine en effet, malgré son poids moléculaire assez élevé, ne semble pas susceptible de subir une combustion plus complète dans l'organisme humain; aussi a-t-elle été classée de très bonne heure parmi les produits de désassimilation. On a fait en sa faveur d'heureux essais de réhabilitation. On a remarqué qu'elle existe surtout dans les tissus à vie intense (parties jeunes des végétaux et des animaux, cellules nerveuses, organes génilaux, corpuscules sanguins, etc.), et qu'elle semble être réellement dans ce cas un élément constitutif du protoplasma. Puisauix [97] a vu que la cholestérine joue le rôle d’un antivenin à l'égard du venin de Vipère. Tout récemment Hipeyo Nocucur|02] a montré qu'elle est capable d'agir comme antihémolylique en salurant certains poisons : agaricine, saponine, tétanolysine. Nous n'avons pas encore un ensemble de faits assez précis pour qu'il soit possible de définir le rôle exact de la cholestérine dans l'organisme; il serait sans doute plus exact de dire : les rôles de la cholestérine. 34 530 JULES COTTE. Dans les expériences de No&ucxi elle s’est comportée en apparence comme un corps capable de saturer et de neutraliser chimiquement les poisons hémolytiques étudiés. Ces divers résultats évoquent immédiatement à l'esprit le rôle de défense contre les poisons que l’école de M. GraRp attribue aux pigments. Il n’y aurait rien d'étonnant à ce que la cholestérine jouât d’une facon générale le rôle d’un excitant à l'égard du protoplasma cellulaire et en activât les échanges comme le font un groupe de substances chimiques quise montrent ses compagnons fidèles, je veux parler des lécithines. Bien que la choline qui entre dans la composition des lécithines soit classée parmi les produits de désassimilation, les lécithines ont hérité des propriétés de l'acide glycérophosphorique et constituent d’énergiques stimulants de la nutrition. Cette expression ne signifie pas grand’chose, mais pour le moment nous-ne pouvons pas la préciser davantage. On peut se demander si la cholestérine n’agit pas comme stimulant de la nutrition en saturant, en plein protoplasma et au moment de leur formation, les produits toxiques auxquels donnent naissance les phénomènes vitaux. La conclusion de cette étude sera que Les lipochromes, chez les Éponges, semblent se trouver principalement accumulées dans Les régions qui sont en voie d'accroissement rapide ou qui sont susceptibles de subir un rapide accroissement. Ils doivent y jouer un rôle à rapprocher de celui des substances de réserve; la cho- lestérine, qui fait partie de leur molécule et qui peut en être aisément libérée, doit jouer le rôle d’excitant de la nutrition et plus spécialement celui d'agent antitoxinique. Un mot encore à ce sujet, pour répondre à une phrase de Bon. Dans son ingénieuse étude sur l'Évolution du Pigment, cet auteur admet que les granules pigmentaires des éponges peuvent provenir d'une sorte d'infection parasitaire, par multiplication de granules primitivement phagocytés. Cette opinion n’a pas encore été soutenue par les spongiologues ; je ne crois pas qu'elle le soit jamais. Les pigments — au sens usuel du mot — nous apparaissent comme étant sécrétés par la cellule, au même titre que la graisse ou le mucus, et Bonn à plusieurs reprises s'appuie pour son argumen- tation, dans le cours de son travail, sur les recherches de BATAILLON qui voit dans le pigment le produit d'une sécrétion nucléaire. Rien ne me permet de faire une proposilion comparable à celle dernière, LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 531 au sujet des éponges, je me bornerai à dire que le pigment est sécrêté par les cellules. Je ne chercherai pas à démontrer le peu de solidité de l'opinion de cerlains auteurs qui ont fait des lipochromes des résidus alimen- taires. Nous pourrons admettre cette hypothèse quand on nous en aura montré scientifiquement l'exactitude. Je n'ai pas les éléments suffisants pour apprécier si les pigments ont primitivement constitué des produits d’excrétion, ultérieu- rement utilisés par les organismes au cours de l’évolution phylogé- nétique. Actuellement, je le répète, ils ont tous les caractères des substances sécrétées ; ce n’est pas au chapitre de l'excrétion que j'ai cru devoir faire leur étude. LÉCITHINES. Dans la plupart des organes qui la renferment la cholestérine est accompagnée par les lécithines: j'ai voulu vérifier, à titre acces- soire, si le fait se présente également pour les Spongiaires. Je me suis contenté pour celte recherche de la réaction au molybdate d’ammoniaque acide. L'extrait éthéré de À. sinulans, calciné avec de l’acide azotique el repris par une solution azolique bouillante de molybdate d'am- moniaque, fournit une liqueur très faiblement jaunâtre, d’une cou- leur presque douteuse. Avec S. domuncula la réaction est beaucoup plus nette: il y a une coloration jaune bien marquée et apparition d’un louche léger (?). Le peu d'intensité de cette réaction indique que, s’il existe réelle- ment des lécithines dans l'extrait éthéré de S. domuncula, ces corps n'y existent qu'à l’état de traces. Pour R. sünulans je ne puis pas fixer quel poids d'animal représentait l'extrait éthéré que j'ai employé; pour S. domuncula j'ai opéré sur l'extrait de 50 environ d'éponge vivante, mais composés seulement de la partie périphérique de l'animal, c’est-à-dire de la partie la plus riche en lipochrome. On verra d'autre part, au sujet de l’excrétion, que les bases choli- niques manquent dans les sucs de S. domuncula, Cydonium gigas, Chalinine ; pour les deux premières espèces j'ai opéré aussi bien sur les sucs concentrés par évaporation que sur les sucs normaux. 539 JULES COTTE. Aussi je ne puis pas préciser si les éponges renferment ou non des glycérophosphates complexes appartenant au groupe des lécithines; il faudrait vérifier pour cela si les colorations jaunes que j'ai obte- nues avec le mobybdate d'ammoniaque proviennent bien de composés phosphorés de ce genre. Le résultat que je cherchais est cependant atteint : il est prouvé que les lécithines ne se trouvent pas en abon- dance chez S. domuncula et R. simulans pour accompagner les lipochromes el la cholestérine, ainsi qu’elles le font dans l'œuf de poule, dans le cerveau, etc. MUCINE. Chalinine sécrète un produit visqueux qui sort en abondance quand on mel l'éponge en contact avec du chloroforme pour la pré- paration de son suc. Cette substance mucilagineuse est sécrétée en assez grande quantité en hiver ; il m’a semblé que pendant les mois de septembre et d'octobre la sécrétion était bien moins active et la mucosité bien moins soluble dans l’eau. En mettant dans de l’eau avec du chloroforme des individus de CAa- linine, on obtient une solution filante qui brunit à l'air, tandis que des amas de matières glaireuses, analogues à celles que sécrêtent les conduits respiratoires ou digestifs de l’homme, restent collées contre les parois du flacon ou se ramassent au fond d’un verre. L'examen microscopique est fait avantageusement dans une goutte d'eau iodée, car l’iode colore le produit de sécrétion en brun rougeâtre. Ce produit se montre au microscope sous forme de lames, de mem- branes, ou en un réseau filamenteux de structure granuleuse dont les points nodaux sont occupés par des cellules sphéruleuses ou par des sphérules libres. Les teintes données par la coloration à l’iodeexcluent toute idée d’amidon ou de glycogène. La solution dans l’eau chloroformée filtre avec une extrème lenteur ; elle louchit légèrement à l'ébullition mais reste néanmoins poisseuse, filante : le corps mucilagineux n'est donc pas coagulé à 100°. L’acide acétique graduellement ajouté détermine à froid l’apparilion d’un précipité filamenteux peu abondant, qu'un excès d'acide redissout aisément. L'ébullition prolongée avec de l’acide sulfurique dilué confère à la solution le pouvoir de réduire la hiqueur cupropotassique. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES, 533 Les matières glaireuses ramassées au fond du matras sont lente- ment et partiellement dissoutes par l’eau de chaux ou la potasse diluée. On le voit, les caractères précédents s'accordent pour faire ranger dans le groupe des mucines le corps sécrété par Chalinine. I en est certainement ainsi également pour un certain nombre d’autres Spongiaires qui donnent naissance à des produits visqueux ou mucilagineux. Cette mucine est à rapprocher de la mucine du tissu conjonctif embryonnaire et dela pseudo-mucine d'HAMMARSTEN qui sont solubles dans un excès d'acide acétique. La mucine (limacine) qu'ErcawaLD a extraite des escargots est au contraire insoluble dans un excès d'acide acélique, tout comme la mucine ordinaire des sécrétions humaines. CELLULES SPHÉRULEUSES ToPsENT à désigné sous ce nom et groupé d’une façon assez heu- reuse des éléments que l’on avait remarqués depuis longtemps déjà et auxquels on avait appliqué toute une série de noms bien faite pour jeter la confusion (Kürnchenballen, Knollenzellen, Rosettenzellen, Kugelzellen, cystencytes, chondrencytes, collencytes, thésocytes, joignons-y les chromatocytes). On n'avait pas accordé généralement une très grande importance à ces cellules, et c’est TOoPsENT qui a contribué à fixer nos connaissances à leur sujet, en montrant l’aide qu'elles peuvent fournir aux spongiologues pour la détermination des espèces. Ce sont des éléments de taille très variable (5 à 20 w en moyenne) dont le protoplasma est encombré de sphérules, en nombre assez considérable généralement. Les dimensions de celles-ci sont des plus diverses ; on trouve tous les termes de passage entre les simples granulations protoplasmiques, visibles seulement avec les objectifs à immersion les plus puissants, et les sphérules proprement dites que l'on peut apercevoir à d'assez faibles grossissements. TOoPSENT nous dit que chez Polymastia mamimillaris les sphérules peuvent altemdre 3 à 5 y de diamètre. Examinées sur des dissociations, in vivo, les cellules sphéruleuses se montrent douées de mouvements amiboïdes. Ceux-ci sont 534 JULES COTTE, généralement dus à des pseudopodes assez massifs, lobés, ne possédant pas d'ordinaire la complication de forme des pseudopodes de certainsamibocytes. Un certain nombre cependant sont filiformes. Dans la cellule au repos le protoplasma est invisible, la masse paraît uniquement composée par les sphérules dont l’ensemble a un aspect müriforme. Au moment des déplacements les pseudopodes hyalins apparaissent autour dela sphère, dont les déplacements semblent être bien moins actifs que ceux des amibocytes ordinaires. C'est là d’ailleurs une loi physiologique générale bien facile à comprendre et dont nous avons déjà vu l'application au sujet des cellules sphéru- leuses pigmentées, des chromatocytes. Parfois le noyau se devine au milieu des corpuscules réfringents qui l'entourent et le recouvrent ; d'ordinaire il ne peut être mis en évidence que par les réactifs colorants, et cette recherche est parti- lulièrement difficile dans la plupart des cas. Chez les Hexactinel- lides au contraire (Isrma) le noyau se discerne avec la plus grande facilité ; il est très aisément colorable et possède tous les caractères des noyaux des amibocytes. Ce dernier point, on le verra, est discuté en ce qui concerne les éponges des mers européennes. A l'inverse des amibocytes normaux les cellules sphéruleuses ne renferment pas de corps étrangers à leur intérieur. Cependant dans les expériences d'alimentation au carmin et au charbon j'ai pu retrouver ces poudres colorées dans l’intérieur des cellules sphéru- leuses de R. simulans, mais il y avait véritablement dans ce cas une hyperactivité fonctionnelle imposée à toutes les cellules migratrices. Je crois que dans la vie normale des Spongiaires les cellules sphéru- leuses ne sont pas chargées de transporter à travers la mésoglée des individus les aliments ingérés par les choanocytes. Nous savons que cette tâche est dévolue aux amibocytes. La nature des substances qui composent les sphérules doit être essentiellement variable. Il s'agit parfois de lipochromes (chromato- cytes) ; d’autres fois elles renfermeraient de l’amidon, des graisses, du carbonate de chaux {Stylinos colunella, Prosuberites longis- pina, d'après TopsexT), des albuminoïdes divers (Sor.Las, etc.). Je m'expliquerai plus tard sur la présence de l'amidon chez les éponges, que je conteste entièrement. L'action des dissolvants ne nous fournit pas beaucoup de rensei- gnements sur ces questions. Le chloroforme, le xylol que l'on emploie pour les inclusions à la paraffine dissolvent le contenu d’un LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES, 539 certain nombre de sphérules, presque uniquement de celles des chromatocytes. L'eau distillée fait éclater les sphérules (LoisEL) dont le contenu se répand en une masse granuleuse; ce n’est peut- être pas là une dissolution à proprement parler. L'acide acétique, les acides minéraux ne touchent pas aux sphérules. SCHULZE semble ne pas admettre que le contenu des cellules sphéruleuses puisse être du glycogène, de l’amidon ou de la graisse ; Lima est du même avis et se rattache à l'opinion de SoLLas, qui regarde le contenu comme étant de nature albuminoïde. C’est là évidemment la conclusion la plus logique. Chez les Hexactinellides Irma à remarqué que les sphérules des cellules sphéruleuses (ses thésocytes) possèdent un contenu mou, peut-être fluide ; elles sont colorées très faiblement à l’état frais, ou même ne le sont pas du tout, par l’éosine, la fuchsine acide, le bleu de Lyon ou le vert de méthyle; elles prennent avidement le bleu de méthyle. L'iode les brunit, l'acide osmique les noircit. Chez Acanthascus cactus, Rhabdocalyptus capillatus, ete., les sphérules se colorent avec intensité par la fuchsine acide, l'hématoxyline, l'éosine, etc., peu par le carmin boraté. Chez la première espèce, après durcissement, quelques cellules sphéruleuses sont entièrement rouges et d’autres entièrement bleues en combinant une double coloration avec la fuchsine acide-bleu de méthylène, ou hématoxy- line alunée-éosine, ou hémat. alunée-fuchsine acide. Au cours de ses travaux sur l’'embryologie des éponges DELAGE à fait des observations analogues, mais pour lesquelles il fournit une explication bien connue. Pour cet auteur les cellules amiboïdes chargées d’inclusions que l’on voit dans les larves de Sp. fluviatilis ne sont pas des cellules bourrées de grains vitellins, ainsi que l’admettaient GŒTTE et Maas, mais bien des amibocytes renfermant les noyaux des choanocytes qu'ils ont capturés. Parmi les raisons qu'il donne, DELAGE nous fait remarquer que ces sphérules « se colorent en rouge par les carmins à élection nucléaire et que le bleu de Lyon les respecte au point de se substituer au carmin dans le nucléole propre de la grosse cellule avant de tendre ces prétendues granulations vitellines. Le vert de méthyle les colore aussi plus fortement que le noyau central ». LoisEL,, en colorant au mélange d'Exrzica-BioNp1 des coupes de Reniera Ingalli fixées au sublimé ou au mélange de Flemming, avait obtenu un cerlain nombre de cellules sphéruleuses entière- 536 JULES COTTE. ment colorées en rouge alors que d’autres étaient d’un bleu verdàtre foncé. TopseNT fait remarquer que les cellules sphéruleuses de Cliona viridis, de Tuberella aaptos, etc. se colorent à l'éosine. On peut donc observer à la fois de l'oxyphilie, de la basophilie et de l'amphophilie. J'ai cherché à examiner de près quelques points de l’évolution des cellules sphéruleuses. J'ai opéré sur Reniera simulans, R. fistulosa, Chalinine, Cliona viridis, Bubaris vermiculata, Suberites domuncula,. fixées au Flemming, au sublimé acétique ou au formol. Ce dernier fixateur ne donne pas de mauvais résultats pour les cellules sphéruleuses. Sur des coupes de À. simulans colorées à l'hématoxyline ferrique après fixation au sublimé acétique, on dislingue avec la plus grande netteté les cellules sphéruleuses dont les sphérules sont colorées avec intensité. Au premier aspect il semble qu'un certain nombre de ces cellules possèdent une membrane d'enveloppe qui enverrait des prolongements entre les sphérules ; 1l s’agit évidem- ment du protoplasma de la cellule, durei par les réacüfs fixateurs, et dont on voit la trame entre les sphérules. ME ‘ex, . PA *® _o® . ®@ 0o 29. o 9 e eè 9% e 34, 4! see 60% 8 °& A Do ei 8 ep Gé ve, Je, Ÿ ee) o9 3e . a C FiG. 6. — a. Cellules sphéruleuses de R. simulans qui se détruisent dans la cavité d’un canal. Subl. acét., safranine-picro-nigrosine. Grossiss. 800 d. — b, c. Cellules sphéruleuses d’une papille de Cliona viridis. Formol. Safr.- pier.-nigros. Gr. 1380 d. Les cellules sphéruleuses présentent des aspects très variables ; les unes conservent une forme plus ou moins sphérique, d’autres ont un aspect étiré, étoilé : ailleurs se trouvent dans la substance fondamentale des sphérules isolées ou des amas de sphérules ; au niveau des canaux on voit des cellules sphéruleuses qui viennent LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 537 graduellement faire saillie entre les pinacocytes et se jettent dans l'intérieur du canal ou simplement y égrènent leurs sphérules. La fragmentation des cellules sphéruleuses en plein tissu rappelle absolument le phénomène que RANvIER a décrit sous le nom de clasmatose ; la cellule se détruit et il est vraisemblable que les produits élaborés à son intérieur sont utlisés pour la nutrition des éléments voisins. Cet aspect était connu chez les éponges et j'ai vu signalés plus d’une fois par TopseNT, dans le cours de ses travaux, les aspects anormaux <« chiffonnés, effilochés > présentés par les cellules sphéruleuses. Il est à noter que la grosseur des sphérules est d'ordinaire assez uniforme dans son ensemble, à l’intérieur d’une cellule donnée. On voit des cellules à sphérules plus grosses, d’autres où la taille de ces éléments est plus faible ; 1l n'y a cependant absolument rien de fixe à ce sujet et dans une même cellule les sphérules peuvent être de taille très variable. Pour examiner les sphérules de À. simulans à un fort grossis- sement il est bon de ne pas s'adresser aux cellules intactes, qui gardent avec une intensité gènante la coloration noire de l’héma- toxyline ferrique ; il vaut mieux s'adresser aux cellules partiel- lement décolorées. Cependant lorsque la décoloration a été conduite assez loin les cellules intactes fournissent aussi de précieux rensei- gnements. Les sphérules ne se montrent généralement plus alors comme homogènes, elles nous apparaissent comme des amas gri- sâtres, renfermant des points fortement colorés en noir. À côté de celles-ci on en trouve d’autres, qui présentent un aspect homogène et ont une teinte gris foncé, intermédiaire entre le noir des granu- lations que je viens de citer et le gris qui constitue le fond des autres sphérules. Ce sont des éléments dont la différenciation n’est pas encore terminée. Y a-t-il une membrane d’enveloppe propre autour des sphérules ? Je n'ai pas pu me faire d'opinion ferme à ce sujet ; il m’a été impossible de voir de membrane à proprement parler et cependant l’allure des sphérules, telles qu’on les voit dans les figures ci-jointes, évoque à l'esprit l'idée d’une membrane d’enveloppe à l'intérieur de laquelle seraient renfermées les granulations. Dans les cellules en voie d'élimination (fig. 7, b) on distingue des sphérules qui ont entièrement perdu la matière colorable en noir par l'hématoxyline ferrique ou qui n’en conservent plus que des particules à formes variables. 538 JULES COTTE. En examinant les cellules migratrices (fig. 7, €, d) on retrouve des aspects qui représentent bien la genèse des cellules sphéruleuses, telle qu'on peut se l’imaginer. Les cellules mésogléiques renferment des granulations dans leur protoplasma ; que ces granulations grossissent, elles se transformeront aisément en sphérules, et on peut FiG. 7. — a, Cellule sphéruleuse de R. simulans ; sublimé acétique, hématoxy- line ferrique. — b, id. id. La cellule fait saillie dans la lumière d’un canal. — c, d. Cellules migratrices de la même espèce, ébauches de sphérules. Sublimé acétique ; €, hémat. ferr. ; d, safr.-picr.-nigros. Grossissement pour toutes : 1860 d. voir déjà apparaitre, au cours de cette genèse, la structure hétéro- gène et granuleuse des sphérules. Dans ces jeunes sphérules il m'a semblé voir déja, à plus d’une reprise, la ligne noire d'une très mince membrane d'enveloppe. Il ne serait pas impossible que plusieurs granulations se réunissent pour constituer une seule sphérule. Les scléroblastes, qui ne sont que des cellules granuleuses spécialisées, peuvent renfermer des sphérules bien typiques. En colorant au Biondi-Heidenhain, les cellules sphéruleuses sont d’un vert brun intense, le noyau n’est pas visible au milieu des sphérules. Quelques rares cellules ont leurs sphérules colorées en un rouge de safranine, résultant de l'association de la fuchsine et de l'orange. Dans la substance fondamentale on trouve des sphé- rules libres vert brun, quelques-unes rares rougeàtres, quelques autres sont d’un vert bleu brillant. Les cellules migratrices ont des granulations qui ont pris la fuchsine ou à la fois la fuchsine et LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 539 l'orange ; ces granulations, en grossissant, arrivent à constituer de vraies sphérules qui gardent d’abord l’électivité pour les couleurs acides, puis prennent le vert avec une grande énergie. À ce moment les cellules méritent le nom de sphéruleuses ; on pourrait dire que leurs sphérules, manifestement hétérogènes, sont arrivées à malu- rité. Il est assez fréquent de voir chez des cellules migratrices des granulations, assez volumineuses pour constituer de vraies sphé- rules, mais colorées en rouge ; il est rare de rencontrer de ces cellules avec des sphérules vertes. Une d'elles possédait une sphérule d'un beau vert brillant. Les sphérules sont vertes même dans les parties de la préparation où le lavage à l'alcool a été poussé un peu trop loin et où les noyaux sont tous décolorés. Au bord des canaux les cellules en voie d'élimination sont de coloration très variable : rouge safranine, rouge violacé, vert bleu. La bleu polychrome d'UnNA ne colore pas également toutes les cellules sphéruleuses d'une même préparation. Les unes gardent avec une grande intensité le bleu, bleu un peu rougeâtre ; on peut parfois distinguer un noyau dans leur masse. D’autres sont incolores el ressemblent à des restes de paraffine qu’aurait oubliés les dissol- vants, leurs sphérules ont la forme de lentilles biconcaves, incolores el vides. Dans ces dernières cellules on peut parfois distinguer le noyau comme un point bleu, parfois comme une tache bleuâtre avec un piquelé bleu foncé. Pour certaines cellules le point bleu foncé représente seulement le nucléole d’un volumineux noyau incolore, identique à celui des amibocytes ; d’autres fois le noyau semble être compact. On trouve tous les intermédiaires entre les cellules sphéruleuses incolores ou colorées; on peut avoir des cellules très faiblement bleuàtres, ou dont les sphérules plus ou moins bleuâtres sont parsemées de taches bleues. Dans les cellules très foncées on trouve des sphérules incolores, et réciproquement. Cà et là se rencontrent de très rares cellules, sphériques ou en clas- matose, dont les sphérules sont colorées en superbe bleu azur. Les cellules mésogléiques renferment des granulations — ou des sphé- rules — d’un bleu identique à celui des noyaux et des sphérules normales ; aucune ne m'a paru posséder de granulations azurées. Un grand nombre des cellules qui ne se colorent plus par le bleu d’Unna sont manifestement en voie d'élimination au niveau des canaux ; quelques-unes bien colorées, rares, s'éliminent également. Dans la coloration double de Romaxovsky les sphérules restent 540 JULES COTTE, colorées en bleu en grand nombre; cependant toutes les cellules qui ne gardaient pas le bleu d'Unna ont pris l'éosine, et chez la plupart de celles-ci on peut voir le noyau comme un point bleu. Quelques-unes de ces dernières ont çà et là des sphérules bleues qui se détachent sur le fond rose. En employant simultanément (BENDA) ou successivement le bleu de méthylène et l’éosine les sphérules se colorent en bleu. Par la coloration à la safranine-picro-nigrosine on voit encore avec la plus grande netteté l'aspect hétérogène de certaines sphérules, dont la mem- brane ne se colore qu'en rose faible. Les cellules sphéruleuses sont rouges, ainsi que les granulations et les jeunes sphérules des cellules mésogléiques. La méthode de Benda à la safranine et au vert lumière fournit des résultats iden- tiques. On peut décolorer les noyaux avant de faire perdre aux sphérules leur colorant. On voit avec quelle cons- tance les colorants nu- cléaires se portent sur les cellules sphéruleuses de 2. simulans, au moins quand leurs sphérules sont adultes et n’ont pas encore dégé- RE » Fig. 8. — R. simulans. Sublimé acétique ; néré. Ces faits rappellent safranine-picro-nigrosine. Gross. 800 d. bien ce que l'on a signalé On voit des cellules sphéruleuses qui pour les granulations des s'éliminent ou qui égrènent leurs sphé- , : rules dans les canaux. En un point tout cellules mésodermiques Si P£ un amas de sphérules est expulsé par une d’un certain nombre d’ani- contraction locale, au niveau d’un pore maux, pour les clasmalo- transitoire. cyles, etc. Chez les Holo- thuries Jourpax [83] signale que les cellules muqueuses de SEMPER sont remplies de sphérules qui se colorent par l'hématoxyline, la LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 541 purpurine, le vert de méthyle. « La coloration verte, résultant de l'emploi de ce dernier réactif, persiste pendant longtemps, alors que les autres éléments se sont complètement décolorës ». Après fixation au sublimé acétique les cellules sphéruleuses de R. fistulosa se comportent comme celles de R. sémulans. Sub. domuncula, après fixation au formol, a ses cellules sphéruleuses éosinophiles (coloration à l’hématoxyline-éosine et au mélange de Benda au bleu de méthylène-éosine). Spongilla la- custris, fixée au Zenker, a dans ses cellules mésogléiques des sphérules retenant énergiquement la safranine. Bubaris vermicu- lata fixée au formol a ses cellules sphéruleuses éosinophiles. Chez la Chalinine que j'ai examinée à ce point de vue, après fixation au sublimé acétique, l’histoire des cellules sphéruleuses est identique à celle que nous avons vue chez R. simulans: même clasmatose, même élimination au niveau des canaux, etc. La safranine colore cependant les sphérules de cette espèce en un teinte un peu diffé- rente, en une sorte de ton groseille. Dans les papilles de C1. viridis fixées au formol on voit que les cellules sphéruleuses présentent de nombreux aspects de clasma- tose : chez cette espèce j'ai pu voir très nettement le protoplasma de ces cellules se colorer en bleu par la safranine-picro-nigrosine ; il paraît plus abondant autour des sphérules que dans les cellules sphéruleuses adultes de À. simulans. Ici encore les sphérules apparaissent comme hétérogènes. Elles prennent avec électivité la safranine, se colorent en bleu-verdâtre par le mélange d’'Ehrlich- Biondi, prennent l’éosine par les doubles colorations à l’hématéine- éosine et au bleu de méthylène-éosine. Je n’ai pas pu voir les noyaux de ces cellules sur des coupes de pièces fixées au formol ; mais sur des préparations de C7. viridis, mal fixées à l'alcool absolu et colorées à l'hématéine-éosine, il m'a été possible de voir les noyaux comme des points faiblement violets. Lima à bien vu l'aspect hétérogène que présentent fréquemment les sphérules ; ses «thésocytes > d'ÆEwplectella constituent d’ailleurs un très beau type de cellule sphéruleuse. L'auteur japonais fait remarquer que pendant la résorption des matières de réserve les sphérules se fragmentent en granules irréguliers qui disparaissent finalement... ; en disparaissant les sphérules laissent plus ou moins de matière en forme d’amas irréguliers, de conglomérats ou de granules. Faute de dessins spéciaux ou d’explications complé- 542 JULES COTTE. mentaires je ne sais s’il faut prendre au pied de la lettre la première proposition d’'Iima et s'il faut admettre un morcellement des sphérules, leur fragmentation en granules qui s’isoleraient ensuite, ou si le phénomène se passe comme l'indique sa deuxième propo- sition, Ce qui correspond alors parfaitement à ce que j'avais vu moi-même avant d’avoir eu connaissance du travail d’Isrma. Contrairement à la plupart des auteurs Topsenr [98] n’admet pas que les cellules sphéruleuses soient des cellules mésogléiques granu- leuses, modifiées en vue d’une fonction spéciale. Il se base sur ce qu'elles ont un noyau différent, sur ce qu’elles existent déjà chez l'embryon, sur ce qu’elles sont fréquemment de plusieurs formes chez une même espèce, ayant des rôles bien définis. J'ai cherché longuement à établir plus haut que les sphéruleuses dérivent des granuleuses ; je vais néanmoins m'’attacher à combattre l'opinion de TOPSENT. L'aspect du noyau n'indique pas grand'chose. Chez À. simulans colorée au bleu d'Unna on trouve à l’intérieur des cellules sphéru- leuses des noyaux volumineux, à chromatine condensée en un unique nucléole fortement coloré ; d’autres semblent réduits à leur seul nucléole, sont devenus compacis ; chez d’autres ce petit noyau lui-même ne se colore plus que comme un piqueté bleu, enfin il disparaît totalement. Dans les cellules en clasmatose on ne voit jamais le noyau, dans celles qui s’éliminent au niveau des canaux il n’est souvent plus visible. À partir du moment où la cellule mésogléique commence à subir la différenciation qui va la trans- former en sphéruleuse son noyau peut être considéré comme destiné à disparaître ; il le fera plus ou moins tôt suivant l'élément que l’on considère, mais la déchéance arrivera fatalement pour lui. Lorsque le noyau est devenu petit et compact, je ne sais pas si on ne doit pas le considérer comme étant déjà en dégénérescence. Sa formè n’est donc pas un argument en faveur de la spécificité des cellules sphéruleuses. Chez les Heæactinellides, je l'ai déjà dit d'après I91MA, le noyau des sphéruleuses est identique à celui des amibocytes. La présence de ces cellules chez l'embryon prouve seulement que les différenciations peuvent être très précoces. La pluralité de leurs formes chez une espèce donnée indique une variété plus grande des différenciations, comparable à celle que l’on étudie pour les leuco- cytes à granulations des Vertébrés. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 543 Pour pouvoir admettre l'opinion de TopseNT il faudrait aussi que fût démontrée pour les sphéruleuses la propriété de se diviser et de donner naissance à des éléments identiques à elles-mêmes. Or cette démonstration n’est pas faite. O. SCHMIDT à cru voir se produire la division des cellules sphéruleuses. Cette observation est restée isolée, je crois. Nous sommes de plus autorisés à nous demander si SCHMIDT n’a pas pris des phénomènes de clasmatose pour des formes de division. J'ai souligné à plus d'une reprise que l’on trouve avec assez d’abondance, sur les coupes, des cellules mésogléiques renfermant des granulations, accrues de volume et en voie de devenir de véri- tables sphérules. Dans cet état intermédiaire les gränulations n’ont pas toutes les réactions colorées des vraies sphérules ; si elles gardent la safranine elles ne se colorent pas par le mélange d'Ehrlich-Biondi. Nous savons par les recherches des hématolo- gistes que les réactions colorées des granulations semblent changer avec leur âge. Ce qui tranche d’ailleurs définitivement la question en faveur de la thèse que je soutiens, c’est la présence de vraies sphérules, isolées, à l’intérieur de certaines cellules migratrices. Nous sommes en présence d'éléments qui ont esquissé une différenciation hésitante et seulement partielle: au lieu d’encombrer leur protoplasma de sphérules ils n’en ont élaboré que quelques-unes. N'est-il pas rationnel d'admettre que ces éléments sont restés à demi cellules migratrices et sont devenus à demi cellules sphéruleuses ? Les phénomènes de clasmatose que j'ai signalés au sujet des cellules sphéruleuses de plusieurs éponges me paraissent ne pas pouvoir être mis en doute. On voit tous les intermédiaires entre les cellules sphériques ou ovoïdes, denses, et les sphérules dissociées dans la substance fondamentale. Je me suis demandé si ce dernier aspect ne peut pas être comparé aux changements de forme que CaRNoT [96] a constatés chez les chromoblastes de la Grenouille et aux phénomènes d'essaimage des granulations, avec retour à la cellule, que KLEIN et Joy [98] ont observés chez les leucocytes éosinophiles. Je crois qu'il n’en est rien. Toute cellule qui dissémine ses sphérules me paraît avoir terminé son cycle biologique. Les sphérules éparses dans la substance fondamentale servent à la nuirilion des tissus. Ensuite la substance fondamentale, par de lentes contractions de sa masse et surtout sous l’action des cellules 544 JULES COTTE. voisines, réunit en amas les sphérules usées et devenues inutiles, les restes de sphérules pourrait-on dire, et les expulse graduel- lement dans la cavité des vaisseaux par des pores qui s'ouvrent entre des pinacocytes. J'ai dessiné dans la fig. 8 l'expulsion d’un de ces amas. Sur les coupes on retrouve par places des bols fécaux entière- ment constitués par des sphérules fortement ou peu colorables. Ces amas sont entourés souvent par une sorte d’enveloppe muqueuse ou albumineuse que les colorants mettent en évidence. L'évolution des cellules sphéruleuses peut être résumée dans le schéma suivant : Cellule amiboïde. Cellule sphéruleuse. Elimination dans les canaux. Emnettement de la cellule. Sphérules libres dans la substance fondamentale. | Rejet des sphérules dans les canaux. Je crois qu'il y à tout lieu d’assimiler ces phénomènes à ce que 3oNNE [01] a observé chez le Bœuf où dans le voisinage des glandes en suractivité les leucocytes éosinophiles essaiment leurs granula- tions que l’on retrouve ensuite dans les acini des glandes. Lorsque l'éponge souffre, que sa nutrition est défectueuse, elle peut utiliser immédiatement le contenu de ses cellules sphéruleuses. En examinant des coupes de À. simnulans restée trois heures dans de l’eau de mer renfermant du charbon, puis dans de l’eau de mer pure, et fixée au Flemming, je n’ai plus vu qu’un petit nombre de cellules sphéruleuses. En employant la coloration à la safranine- picro-nigrosine on ne distinguait plus que quelques rares cellules encombrées de sphérules rouges, encore ces sphérules étaient-elles moins colorées qu’à l'ordinaire. Par contre un certain nombre de cellules opaques, plus fortement colorées en bleu que les cellules voisines, en état de dégénérescence évident, avaient la forme et l'allure des cellules sphéruleuses. Chez les unes le noyau ne se voyait plus que comme une tache rougeâtre, chez d’autres il était identique à celui des amibocytes, gros et à chromatine condensée ” LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 545 en un unique nucléole. Ces cellules dégénérées avaient un aspect vacuolaire et en examinant à un fort grossissement j'ai pu aperce- voir à l'intérieur de certaines de ces vacuoles des points fortement colorés en rouge, de forme irrégulière et représentant évidemment les résidus des sphérules. Cette éponge avait souffert, avait ingéré puis éliminé une quantité anormale de corps non alimentaires, elle avait été soumise dans le laboratoire à des conditions extrèmement défectueuses pour elle. Les cellules sphéruleuses qui existaient au moment de la mise en expérience avaient été activement utilisées, sans que l'éponge fût en état d’en élaborer de nouvelles. Il me semble que les diverses observations qui précèdent indi- quent suffisamment quel est le rôle de ces cellules chez les Spon- giaires. Ce sont des cellules glandulaires ; les sphérules sont des produits de sécrétion. Les substances qu'elles élaborent bent parfois un rôle de sécré- tion interslitielle, c’est le cas pour les cellules qui se clasmatosent ; mais elles ne sont pas toujours destinées à rester à l’intérieur des tissus pour servir à leur nutrition. Elles sont parfois rejetées au dehors : lel est le cas de la Chalinine et des éponges visqueuses, gluantes dont parle Topsenr. D’autres fois leur rôle est tout autre. J'ai indiqué [02 «] que chez Cliona vastifica les organes de la perforation sont des cellules sphéruleuses, à sphérules relativement FiG. 9. — Cliona vastifica. Zenker ; acide azotique-phloroglueine ; bleu d'Unna. Gross. 800 d. petites, et qui en réalité tiennent le milieu entre les sphéruleuses et les granuleuses par les dimensions de leurs enclaves. Je figure ici quelques-unes de ces cellules poussant des prolongements entre les 35) 546 JULES COTE. pinacocytes qui revêtent la paroi du corps de l'animal et s’insinuant dans la couche calcaire. Les sécrétions de ces cellules sont évi- demment un peu spéciales dans le cas actuel, elles doivent renfer- mer des corps à fonction acide dont l'action chimique me paraît nécessaire pour produire le creusement des galeries. TopsexT attribue d’autres rôles aux cellules sphéruleuses. D'abord un rôle conjonctif dont l'exemple est surtout pris chez ces Reniera dont les cellules sphéruleuses sécrètent des bâtonnets qui, soudés bout à bout, constituent les fibres de spongine. Les files de cellules sphéruleuses se détruisent quand elles ont donné naissance à une fibre. Ce rôle conjonctif est secondaire, car la cellule agit en réalité comme organe de sécrétion, le produit de celte sécrétion étant de nature squeletlique. Chez les autres espèces le rôle conjonctif semble plus secondaire encore. On a surtout insisté sur le rôle d'organes de réserve que l’on prête aux cellules sphéruleuses. Je ne m'occupe pas dans ces lignes des cellules qui composent les gemmules des éponges et dont le rôle d'organes de réserve est évident à priori, ni des chromalocytes au sujet desquels je me suis déjà expliqué. A l’intérieur des tissus adultes ce rôle est moins important, à mon avis, qu’on ne l’admet généralement, à moins d'étendre beaucoup la notion des substances de réserve et de comprendre sous ce nom tous les produits qui ne sont pas utilisés aussitôt après leur formation. J'ai rappelé plus haut l'opinion de Sozras et d’Iima, à laquelle je me rallie entière- ment, qui attribue au contenu des sphérules une nature albuminoïde. Dans ces conditions le rôle d’organe de réserve, au sens usuel du mot, est très douteux pour les cellules sphéruleuses proprement dites et je crois pour mon compte qu’on doit simplement les regarder comme des organes de sécrétion. En cherchant quelles peuvent être leurs analogies, on voit qu'il est aisé de leur trouver des éléments de comparaison dans la plupart des ordres de Métazoaires (voir CuEenoT, 97). J'ai déjà montré les analogies de forme et de colorabilité qui rattachent certaines d’entre elles aux cellules muqueuses basophiles des Holo- thuries ; on trouve chez les autres Echinodermes des cellules qui peuvent également leur être comparées. Chez les Vertébrés nous avons les leucocytes à granulations, si longuement étudiés, qui possèdent des formes multiples et une grande différenciation. Je ne cherchera pas à établir des analogies entre les cellules sphéru- LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 547 leuses des éponges et telle ou telle forme de leucocytes. Nous avons vu que certaines cellules sphéruleuses nous apparaissent comme oxyphiles, d'autres comme basophiles, ou comme amphophiles ; nos connaissances en histochimie sont encore trop dans l'enfance pour que ces renseignements puissent nous être d'une grande utilité. L'étude des préférences des granulations pour telle ou telle colo- ration ne nous a encore rien appris de bien important, aucune loi générale n’en est sortie. CUENOT fait remarquer cependant que les granulations sont d'ordinaire oxyphiles dans l’ensemble du règne animal ; il n’en existerait de basophiles que chez les Vertébrés et les Sipunculiens. En cherchant plutôt des analogies physiologiques que des ana- logies histochimiques, je crois qu’il y à lieu de comparer les cellules sphéruleuses aux Mastzellen et aux clasmatocytes. Je ne m'atiar- derai pas sur les Mastzellen dont les granulations possèdent une métachromatie qui m'a paru manquer entièrement aux cellules d'éponges que j'ai examinées, ct dont c'est là un des caractères fondamentaux. On sait que pour un certain nombre d’auleurs (DELAMARRE, etc.) les clasmatocytes dériveraient des Mastzellen ; pendant cette transformation les granulations cellulaires change- raient leur électivité pour les colorants et de métachromatiques deviendraient basophiles (1). Le nom même de Mastzelle évoque immédiatement à l'esprit nos cellules d'éponges, bourrées d’enclaves à en devenir mûriformes. On est revenu peu à peu de la conception primitive qui voyait dans les granulations des Mastzellen des produits de réserve. ROSENHEIM (in DELAMARRE) a observé que la multiplication de ces cellules est indépendante de la surnutrition de l'individu. On admet plus volon- tiers aujourd’hui que leurs granulations sont d’une façon générale des produits de sécrétion. Un détail physiologique me permet encore de comparer les cellules sphéruleuses aux clasmatocytes. J'ai signalé, au sujet de l'alimentation de Rentiera au carmin et au charbon,que l’on pouvait trouver des grains étrangers à l’intérieur de rares cellules sphéru- leuses. STASsANO et Haas [CO] ont observé que les clasmatocytes de l’épiploon d'animaux, dans le corps desquels on a injecté du (1) L'observation de BONNE, à laquelle j'ai fait allusion plus haut, semble indiquer que les autres cellules lymphatiques peuvent aussi se clasmatoser. 548 JULES COTTE. vermillon, peuvent être bourrés de ces particules solides. Ces faits sont bien certainement conrmmandés par une loi physiologique générale. Les cellules sphéruleuses qui ne sont pas encore entiè- rement mûres, les cellules lymphatiques qui ne sont pas encore entièrement transformées en clasmatocyles gardent une partie de leur sensibilité aux divers lactismes qui les faisaient mouvoir avant que leur différenciation fût commencée, et lorsqu'une excitation puissante, un danger pressant pour l'organisme viennent les réveiller, elles recouvrent momentanément un peu de leur ancienne ardeur et redeviennent actives pour le secours de la colonie. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 049 CHAPITRE Y. MATIÈRES DE RÉSERVE. AMIDON, UYDRATES DE CARBONE La question des hydrates de carbone est certainement complexe chez les éponges, ainsi que chez d’autres animaux. Un nombre d'espèces relativement élevé vit avec des algues en symbiose ou en commensalisme, ce qui peut modifier évidemment dans des propor- tions très notables la nature des substances chimiques qui se rencontrent dans leurs tissus. De plus, fait qui paraît étrange pour des corps aussi connus que les composés amylacés, l’imperfection d’un grand nombre de nos méthodes usuelles de chimie histologique et l'incertitude des résultats qu'elles nous fournissent trop souvent se font ici sentir à nouveau. Sur quelle réaction nous basons-nous en histologie pour déceler la présence de l’amidon dans un organe? sur une réaction, celle de l’iode. Lorsqu'il y a bleuissement d’une enclave cellulaire nous nous croyons autorisés à conclure à l’existence d’une matière amylacée. Il y a malheureusement des causes d'erreur; d’autres corps que l’amidon bleuissent par l’iode (lipochromes, acide cholalique). La forme des enclaves qui bleuissent est pour nous de nulle valeur. Nous ne pouvons guère utiliser dans la pratique courante la propriété qu'ont les matières amylacées de fournir par hydrolyse des sucres réduisant la liqueur de Fehling. Un certain nombre de corps bien différents de l’amidon, tels que les mucines, donnent aussi naissance à des produits qui réduisent la liqueur de Fehling quand on les hydrolyse par l'acide sulfurique. Il resterait l'emploi de l’amylase qui fournirait des sucres réducteurs par hydrolyse des amidons. Cette méthode n’est guère pratique dans les recherches ordinaires de laboratoire. Il m'a semblé que le procédé le plus commode à employer est encore celui qui est basé sur la formation d’iodure d'amidon, en p»0 JULES COTTE. ayant soin d'éviter le plus possible les causes d'erreur. Ce dont il faut surlout se méfier chez les Eponges, c’est des lipochromes. Comme ces produits sont solubles dans les dissolvants organiques : éther, chloroforme, alcool, etc., il suffira de faire macérer suffisam- ment longtemps dans ces liquides les pièces à examiner et de n’essayer l’action de l’iode que lorsque les lipochromes auront êté entièrement entraînés. L'emploi de l’éther et du chloroforme n’est cependant pas à conseiller sans réticences. Ces deux substances ne détruisent pas les amylases intracellulaires qui peuvent se trouver chez les éponges (elles déterminent au contraire la dialyse chloroformique de DasrRE) et qui pourraient détruire l’amidon. IL vaut mieux se servir d’un mélange d'alcool et d’éther avec lequel cette cause d'erreur n'existe plus, l'alcool détruisant les diastases. Les résultats changent beaucoup suivant que l’on emploie ou non ces précautions et j'ai constaté dans mes recherches bibliographiques que les auteurs, qui ont trouvé fréquemment de l’amidon chez les éponges examinées à l’état frais, n’en ont plus rencontré lorsque leurs recherches ont porté sur des animaux conservés dans l'alcool. Au sujet des gemmules de Ficulina ficus dans lesquelles CARTER avait vu des grains d’amidon grisàtres, ovales, avec hile en fente, TopsenT [00] dit : « Je n’ai pas reconnu ces grains d’amidon. Il est juste d'ajouter que je n'ai essayé l’action de l’iode que sur des gem- mules de spécimens conservés dans l'alcool ». Toutes les fois que dans des recherches biologiques est soulevée cette imporlante question de la présence de l’amidon chez les animaux, il serait à souhaiter que le manuel opératoire suivi par les auteurs fût minutieusement expliqué. Je n’ai pas eu la prétention de vouloir examiner à nouveau tous les types d’éponges chez lesquels la présence de l'amidon a été constatée ; cette recherche m'aurait entraîné trop loim. Moi-même j'ai signalé [01 b] la présence de l'amidon chez Sub. domuncula ; je n'avais plus obtenu les mêmes résultats après avoir rectifié ma méthode de recherches et employé seulement la réaction à l'iode après macération dans l’alcool-éther. Fidèle cependant à l'opinion communément admise que les éponges élaborent de l’amidon, j'avais émis l'hypothèse qu'il existe peut-être des variations saison- nières dans la teneur de Suberiles en amidon : il y avait simplement des variations de technique. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. bb Depuis que j'ai été amené à prendre les précautions sur lesquelles j'ai insisté plus haut, je n'ai plus trouvé d’amidon chez les éponges. J'ai expérimenté à ce sujet sur : Ascelta coriacea kReniera simulans Sycandra raphanus Chalinine Syc. compressa Stelospongia Sp. Cydonium gigas Bubaris vermiculata Suberites domuncula (1) Spongelia pallescens Tethya lyncurium (à) Spong. incrustans ot sur d’autres Monaxonides indéterminées. Chez une seule espèce, Spongelia pallescens, j'ai eu une fois apparition d’enclaves bleues chez quelques cellules; comme le nombre en a été très faible, j'ai noté la présence de l’amidon chez celte espèce comme douteuse. Il est possible que le lavage à l’alcool- éther n’ait pas été suffisant pour entrainer tout le pigment. D'ailleurs la présence de l’amidon chez cette espèce fût-elle démontrée, il n’y aurait pas encore lieu d'attribuer aux éponges le pouvoir d’amy- logenèse. On sait en effet que Sp. pallescens est toujours associée à Oscillatoria spongeliæ.et il est très possible que l’algue cède au spongiaire, normalement ou accidentellement, une partie des hydrates de carbone dont elle effectue la synthèse. J’ai déjà dit avoir observé la phagocytose de l’oscillaire par les cellules de l'éponge ; il n’y aurait rien d'étonnant à ce qu’un examen praliqué à ce moment montrât de l’amidon à l’intérieur des phagocytes de Spongelia. La conclusion de cette étude me paraît être qu'il n’y a pas lieu d'admettre la présence normale d’amidon chez les éponges. Il est vrai que je n'ai examiné qu'un nombre d'espèces très restreint, mais je crois que l’on peut facilement poser quand même des con- clusions générales sur des questions de cette importance. La for- mation de l’amidon est un fait d’une telle valeur en biologie géné- rale, elle indique un chimisme cellulaire si nettement spécialisé qu'il ne me parait pas vraisemblable que des genres voisins puissent différer à ce point de vue. (1) CARTER [63] avait trouvé chez cette espèce de l’amidon dans les œufs (gem- mules) ; TOPSENT [00] ne l'y avait pas revu. (2) Chez cette espèce TOPSENT [00] n'avait pas retrouvé l’amidon signalé par KELLER [78]. 52 JULES COTTE. Ce résultat concorde d'ailleurs avec ce que nous savons du reste du règne animal. À mesure que les techniques se sont perfec- tionnées, que les observations sont devenues plus précises, l'amidon animal est devenu de plus en plus problématique, ainsi que la chlorophylle animale. La fonction d'’amylogenèse paraît manquer au protoplasma animal. Je serai beaucoup moins affirmatif en ce qui concerne la présence du glycogène chez les éponges. KRUKENBERG [80 D] n'avait pas pu déceler ce corps chez S. domuncula, T. lyncurium, Myæilla fasciculata, Chondrosia reniformis. J'ai fait cette même recherche, avec le même insuccès, sur un certain nombre d'espèces, les mêmes que pour l’amidon (voir plus haut). Cependant À. simulans montrait à l’intérieur de ses cellules quelques enclaves rouges très rares. Chalinine, après un séjour de 24 heures dans de l'eau iodée, était abondamment recouverte d’un dépôt brun rouge qui se trouvait également en abondance au fond du récipient. Par l'examen micros- copique j'ai pu m’assurer que cette coloralion était due aux cellules sphéruleuses, aux sphérules libres et à la substance mucilagineuse sécrétée par l'éponge, dont l'étude a été faite plus haut. La couleur n’était pas celle que donne le glycogène dans les:mêmes conditions. Les éponges n'élaborent pas de l'amidon; on n'a pas encore décelé chez elles la présence du glycogène. GRAISSES SCHULZE avait fait remarquer qu'il existe dans l'intérieur des cellules sphéruleuses de Chondrosia reniformis une substance à éclat particulier, facilement soluble dans l’éther et l'alcool et qu'il avail comparée à la graisse. A sa suite un cerlain nombre d'auteurs ont également assimilé à la graisse le contenu des cellules sphéru- leuses de nombreux Spongiaires. KRUKENBERG | 80 D] a cherché à extraire des corps gras d’un certain nombre d’éponges en évaporant leurs extraits éthérés sur du papier buvard ; le papier doit rester transparent si l'extrait renferme des graisses. L'auteur n'a pas obtenu de transparence persistante du papier en opérant avec Chondrosia reniformis, Aplysina aero- phoba, Cydonium gigas, Suberites flavus, S. massa el lobalus ; la LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 93 réaction n’a pas été constamment positive avec S. domuncula, elle l'a été constamment avec Spongelia elegans. Le même auteur n’a pas pu déceler d'alcool cétylique chez les éponges. En employant un procédé analogue je n’ai pas pu reconnaître la présence de graisse chez S. domuncula. Pour À. simulans je me suis servi d’une méthode plus sensible et plus précise. J'ai traité par une solution alcoolique de soude 0 #r- 50 environ d'extrait éthéré de l'éponge. Le mélange est évaporé à siccité au bain-marie, puis repris à l’eau bouillante. Tout ne se dissout pas ; il reste un résidu d’un vert noir. Le liquide est lavé à l’éther ; la couche éthérée est jaune, la couche aqueuse verte. Puis celle-ci se fonce et brunit, à sa surface se forment des grumeaux de matière brune. Après une huitaine de lavages l’éther est toujours coloré. La liqueur savonneuse est alors additionnée d’acide chlorhy- drique et lessivée à l’êther ; l'acide décolore la liqueur et augmente le nombre des grumeaux bruns. L’éther de lavage, évaporé, abandonne un liquide huileux blanc jaunàtre sur lequel flottent quelques gouttelettes brun rougeàtre. Il est évident que la saponification n’a pas été complète, aussi le résidu est-il repris à la potasse alcoolique qui le fait immédiatement brunir; après évaporation au bain-marie le mélange est chauffé encore pendant une heure au bain-marie en présence d’eau distillée. Il se forme un produit brun, insoluble dans la liqueur savonneuse con- centrée, mais soluble instantanément dans l’eau distillée. Le tout, mélangé, est encore lavé à l’éther pendant plusieurs mois. La prise d’essai initiale a subi pendant ces opérations succes- sives le contact d’un litre et demi d’éther et ce dissolvant ne se lasse pas d'entraîner des lipochromes (jaune verdâtre et orangé). J'ai inu- tilement essayé, pour accélérer cette opéralion, de saturer de chlorure de sodium la couche aqueuse : le nombre des grumeaux bruns à augmenté, le liquide est resté coloré en rouge brun, et la marche de l'opération n’a pas été activée. La solution aqueuse saturée de chlorure de sodium a été filtrée, les grumeaux lavés sur le fillre avec une solution également saturée de chlorure de sodium, et le filtre a été projeté dans de l’alcoo! à 90° bouillant. La dissolution a été pénible. Cette solution a été filtrée, puis évaporée et le résidu, repris à l’eau bouillante, a été addition- né de quelques gouttes d'acide sulfurique. Le mélange ainsi obtenu, jaunâtre, a élé lavé à l'éther ct ce nouveau dissolvant évaporé. 554 JULES COTTÉ, On obtient ainsi un résidu qui doit renfermer, en même temps qu'un peu de lipochrome dont il n’a pas été possible de le débarrasser, les acides gras qui pouvaient exister dans l’extrait éthéré de À. simu- lans. La quantité de matière dont je disposais était trop faible pour se prêter à de nombreuses recherches ; je me suis borné à faire trois essais principaux. 1° Recherche des acides volatils. La masse butyreuse est chauffée avec de l’eau distillée et vingt gouttes d'acide phosphorique. Le distillat est additionné d’un peu d’eau de baryte et évaporé : il se forme quelques cristaux rappelant ceux du butyrate de baryum. L'odeur du distillat était également celle de l'acide butyrique. 2 Recherche de Pacide oléique. Le résidu de la distillation précédente est lavé à l’éther qui entraîne les corps gras et les abandonne de nouveau par évaporation. Le nouveau résidu est longuement bouilli avec un peu de litharge; l'emplâtre formé est séché, repris à l’éêther bouillant et le tout jeté sur le filtre. Le liquide qui traverse celui-ci est traité par de l'acide chlorhydrique qui détermine l'apparition d'un précipité blanc assez intense. Par évaporation il se dépose des gouttelettes jaunâtres qui se foncent un peu par un long chauffage au bain-marie, puis se décolorent à l'air. Nous sommes vraisemblablement en présence d’acide oléique. 3° Les composés plombiques insolubles dans l’éther bouillant et restés sur le filtre sont délayés dans de l’eau distillée, puis traités par un long courant d'hydrogène sulfuré. Le liquide est lavé à l'éther qui, à l'évaporation, abandonne une belle cristallisation de cholestérine. Mélangé à celle-ci, je n’ai vu aucun cristal qui ressemblât à ceux des acides stéarique et margarique. . Au total j'ai pu déceler, en décomposant par la potasse alcoolique l'extrait éthéré de À. simulans, l'existence à peu prés cerlaine d'acide butyrique et d'acide oléique, mais je n'y ai trouvé ni acide stéarique ni acide margarique. La cholestérine, qui semble être déjà intimement alliée aux lipochromes, entre peut-être dans la composition des corps gras de Reniera, comparables alors à la lanoline de LIEBREICH ; c’est là une simple hypothèse. Il m'a semblé bien difficile de rechercher la glycérine dans les résidus de l’analyse que j'ai reproduite plus haut. Nous ne savons pas encore s’il existe de véritables glycérides chez les éponges. Qt Qt (1 LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES, CHAPITRE VI. EXCRÉTION. Pris dans son sens le plus large, le mot d'excrétion s'applique à des substances bien différentes. Il faut appeler en effet du nom d’excrela aussi bien les produits non alimentaires qui sont rejetés par les oscules, après avoir traversé tout le système aquifère et subi peut-être un essai d'absorption au niveau des choanocytes, que les produits de désassimilation résultant du fonctionnement normal des cellules vivantes. Il faut y joindre aussi les cellules mortes, les débris de tissus que le courant exhalant entraîne avec lui. Un de ces produits de désassimilation est connu d'avance, il est gazeux : C’est l'acide carbonique. Il n’en sera pas question dans ce travail ; son élude doit être faite avec celle de cette branche des fonctions de nutrition que l'on appelle la respiration et que je n'ai pas abordée dans ces recherches. Je tiens à le rappeler cependant à cause d’une observation de LoisEL [98]. Cet auteur, au cours de ses recherches variées sur la physiologie des éponges, a constaté qu'une aiguille de fer mise au voisinage d’une éponge ne tardait pas à se rouiller, surtout du côté qui regardait l'animal. LolsEL avait cru pouvoir conclure de cette expérience à la sécrétion par l'éponge d’une substance oxydante, d'une oxydase. À mon avis il faut altribuer le phénomène constaté à l'action de l'acide carbonique exhalé par les éponges. Il faut admettre en effet qu'il y a un dégagement continuel d'acide carbonique par toute la périphérie de l'éponge. On ne peut accepter l'opinion de ces auteurs qui, séduits par l'importance des choanocytes dans la vie des Spongiaires, leur ont confié l'apanage presque exclusif de la plupart des fonctions de nutrition, respiration comprise. Certainement les choanocytes respirent, mais ils respirent pour leur compte, ils ne sont pas chargés d'extraire de l’eau de mer l'oxygène nécessaire aux autres cellules de l'animal. Chaque cellule de l'association absorbe pour son compte de loxygène et rejette autour d'elle de l'acide carbonique. Si au total la plus grande quantité de celui-ci est 596 JULES COTTE. dégagée au niveau de l’oscule, il y a néanmoins par toute la surface de l'éponge. exhalation d'acide carbonique provenant des cellules de revêtement et de celles qui leur sont immédiatement voisines. C'est là, selon toutes les apparences, l'origine de la réaction observée par LolIsEL. En examinant des coupes à main levée, faites sur des R. simulans gorgées de charbon pendant trois heures, puis mises dans de l’eau de mer pure pendant un temps variable, on constate la présence dans le système exhalant de véritables bols fécaux. Ce sont des amas plus ou moins volumineux de particules charbonneuses, agglutinées entre elles par une substance hyaline. On peut assister à leur forma- tion dès les chambres flagellées, où un certain nombre de choano- cyles rejettent les grains de charbon primitivement ingérés. La masse va croissant à mesure qu'elle progresse dans le système exhalant et elle épouse la forme des canaux qu’elle traverse. On retrouve les bols fécaux dans le cristallisoir qui renferme l'éponge ; ils offrent les plus grandes analogies avec certains cylindres uri- naires, les plus gros sont bien visibles à l'œil nu. Au microscope on peut constater que les corpuscules de charbon qui composent ces masses sont entremêlés de débris de tous genres, ayant fréquemment la dimension des sphé- rules de cellules sphé- ruleuses et sont en forme de bâtonnets ou polygonaux, va- guementarrondis,ete. On y trouve aussi des cellules sphéruleuses & entières, des pinaco- lévénérés. des Fig. 10. — Bols fécaux de ÆR. simulans après Gus CRÉAPRRREE l'alimentation au charbon. Le bol de gauche débris du kératode est très pauvre en charbon. Gross. 800 d. d'union des spicules, des spicules entiers ou brisés, des spicules d’autres éponges, des fragments entiers de l'animal, sans doute eschares dont la pro- duction est due aux traitements brutaux subis par l'éponge pendant et après la pêche. Des carapaces de diatomées s’y rencontrent éga- lement, ainsi que des fragments végétaux parfois très volumineux el une foule de débris impossibles à reconnaitre. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 557 Les bols fécaux se montent facilement dans la glycérine ; l'addi- ion d'acide acélique fait disparaître un certain nombre de débris, en même temps que se montrent des bulles de gaz, d'acide carbo- nique vraisemblablement. Chez certains débris plus volumineux l'acide acétique détermine une formation confuse en sphérocristaux. Sous l'influence du même acide la substance hyaline se transforme en un précipité fibrillaire qui englobe les corps étrangers el se diffuse hors des cylindres. Montés dans l'alcool, quelques-uns des fragments qui entrent dans la composition de ces masses prennent des aspects très nets en couches concentriques. L'alcool éosiné colore mal la substance hyaline, bien les débris de kératode, les résidus cellulaires (cellules sphéruleuses, pinacocytes) ainsi que des débris innommables. Cet examen superficiel décèle donc la présence parmi les excreta solides à la fois de corps qui ont simplement traversé le système aquifère et sans intérêt pour nous (débris végétaux, etc.), de substances qui ont été rejetées après avoir été ingérées, véritables résidus alimentaires (carmin, charbon, etc.) et de débris animaux provenant de l’éponge elle-même. Retenons surtout la présence de cellules sphéruleuses et de sphérules ; nous avons déjà étudié l’évo- lution des cellules sphéruleuses. Pour HxckEL [72] et LENDENFELD [83] les cellules excrétrices seraient les choanocytes. MErscaniKorr [79] a conslaté que les cellules mésodermiques d'Ascetta primordialis rejettent dans le liquide ambiant le carmin dont elles étaient bourrées. Je ne cite que pour mémoire MASTERMANN qui paraît avoir opéré sur des éponges en pleins phénomènes asphyxiques. Bipber [92] ayant traité par le carmin d’indigo un certain nombre d’éponges calcaires, a admis que les cellules qui sont bleues après quelques heures sont excrétrices ; il attribue cette fonction aux cellules ectodermiques, ses cellules flash shaped et aux cellules dites de Metschnikofr. Celles-ci seraient des choanocytes transformés ayant envoyé des prolongements dans toute l'épaisseur de l'éponge, de manière à relier l’ectoderme à l’endoderme ; ces cellules recueilleraient les produits de déchet des cellules digestives et les verseraient d’un côté ou de l’autre, par le moyen d'ouvertures spontanées à l’extré- mité de leurs prolongements. Les pores efférents résulteraient de la destruction partielle des cellules excrétrices primitives. Ces cellules de Metschnikoff avaient élé rangées par ToPSENT parmi ses 598 JULES COTTE. cellules sphéruleuses et regardées par lui comme organes de réserve ; MINCHIN en a fait ses porocyles. TopseNT avait admis depuis assez longtemps déjà que les produits d'excrétion doivent être rejetés par les ouvertures transitoires que ménageraient les contractions des pinacocytes. LoISEL à vu que les spongoblastes de À. Ingalli peuvent détacher brusquement des sphérules de leur périphérie; dans la substance intercellulaire ces sphérules gardent pendant un certain temps leur contour et leur aspect. Pour lui la substance fondamentale, physiologiquement comparable à la lymphe des animaux supérieurs, peut se débar- rasser elle-même des produits à rejeter qui seraient drainés par tout un système de fins canalicules et de lacunes essentiellement instable, puis poussés peu à peu vers les surfaces externe et interne par des contractions de la substance fondamentale aidées des contractions cellulaires. Le même auteur ayant fait ingérer à des éponges (R. Ingalli et Spong. fluviatilis) des substances colorantes dissoutes, n'admet pas que les cellules flagellées rejettent directe- ment la couleur ingérée : elles la feraient passer dans la substance fondamentale. Il accorde cependant ce mode d’excrétion aux cellules de revêtement. Je ne sais pas jusqu’à quel point les expériences avec les matières colorantes nous enseignent toujours d’une façon certaine quels sont les organes d’excrêétion d’un animal; il me suffit de rappeler les mémorables expériences de FLOURENS constatant la teinte rouge que prennent les os des animaux auxquels on fait manger de la garance. On peut cependant d'une manière générale accorder quelque con- fiance à cette méthode de recherches quand on a la précaution de varier beaucoup les substances employées. Il est bien difficile néanmoins de discuter les résultats oblenus avec les colorants dissous. Lorsque le colorant est sensiblement inoffensif pour l'éponge en expérience, il pénètre partout et on le trouve dans toutes les cellules; on ne peut pas fixer par quel point s’est faite l’absorption, on ne déterminera guère mieux quel sera le lieu de l'élimination. il n’y a pas eu absorption à proprement parler, il y a eu simple imprégnation ; il n'y aura pas d'élimination typique, il y aura désimprégnation si l’on peut ainsi dire. Que quelques cellules gardent la couleur plus longtemps que les autres, par suite d'une électivité spéciale par exemple, on ne devra pas accorder à celles-ci une fonction excrétrice. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 599 Je me demande également pourquoi Loisez refuse aux choano- cytes le pouvoir de rendre à l’eau ambiante la matière colorante par laquelle ils se sont laissé imprégner pour un temps; l'opinion contraire est beaucoup plus logique. J'ai d’ailleurs pu observer le rejet dans l’eau de mer, par des choanocytes de Syc. raphanus ayant absorbé du tournesol, de deux sphérules bleues renfermant chacune un point fortement bleu. Ces sphérules ont été émises par l’espace annulaire compris entre le flagellum et la collerette. On sait que c’est en ce point également que, suivant certains auteurs, se ferait l’excrétion chez les Choanoflagellés. On a discuté à plus d’une reprise pour savoir si les choanocytes possèdent ou non une vésicule pulsatile. Je ne crois pas qu'il en soil ainsi à proprement parler ; toulefois en surveillant assez longtemps des choanocytes, dans des dissociations de Syc. raphanus, j'ai pu constaler que certaines des vésicules qu'ils renferment peuvent augmenter de volume, ou se fragmenter, et cheminer dans le corps de la cellule. Les expériences d'alimentation avec les matières solides fournis- sent des résultats plus précis, et c’est à la suite de recherches dans celte direction que LENDENFELD a fait des choanocytes les organes de l’excrétion. J'ai pu voir aussi chez des éponges (R. simulans) nourries au Carmin ou au charbon, puis placées dans l’eau pure, formation dès les corbeilles vibratiles des bols fécaux que j'ai signalés. La substance hyaline qui agglutine les corpuscules solides indique vraisemblablement qu'il y a eu ingestion préalable par les choanocyles et que les choanocytes les ont ensuite abandonnés. Lorsqu'une substance n’est pas alimentaire elle est rejetée en certaine quantité par les cellules à collerette qui s’en étaient empa- rées, le reste est transporté par les amibocytes. Ces particules seront en plus ou moins grande abondance déversées directement dans la substance fondamentale, d’où elles seront expulsées vers les canaux ; une partie sera excrétée par les cellules sphéruleuses dont nous avons déjà suivi l’évolution. Un certain nombre de grains colorés restent assez longtemps dans l’intérieur des amibocytes qui parais- sent venir aussi les rejeter dans les canaux. On sait que chez les Echinodermes les amibocytes chargés de corps étrangers vont s'éliminer au dehors de l'animal ; ce mode d’excrétion me parait être d'importance très secondaire chez les éponges, et il ma semblé que chez celles-ci les amibocytes viennent plutôt 560 JULES COTTE. vider leur contenu dans les canaux que s’excrêter eux-mêmes. Ces expériences, malheureusement, ne nous mettent pas entiè- rement dans les conditions normales de vie des animaux. Leurs cellules mésogléiques n’ont pas à lutter d'ordinaire contre l'euva- hissement extrême de corps étrangers que nous obtenons dans les alimentations artificielles avec les poudres colorées, et il est possible que nous obtenions dans ces expériences des actions anormales, telles que l’excrétion par des amibocytes typiques, qui ne se pro- duisent peut-être pas au cours de la vie régulière de l'individu. Je préfère insister sur les observations suivantes. En relatant mes expériences d'alimentation avec des tubes de PrErFFER remplis de gélatine colorée au charbon, j'ai fait remarquer que l'ingestion des particules charbonneuses par les chambres pouvait'être constatée aussi bien que leur rejet. En voyant dans l’intérieur d’un tube une cellule amiboïde qui rejetait des grains de charbon pour les repren- dre quelques secondes plus tard, une autre qui rejetait des sphérules hyalines, on avait la sensation absolue que les faits doivent se passer de façon identique dans l’intérieur du corps de l'animal. Dans des dissociations de Syc. raphanus j'ai pu observer une cellule migra- trice qui a successivement rejeté trois sphérules à peu près sphé- riques (1). Il s'agissait évidemment de produits d’excrétion dont la cellule se débarrassait devant elle, au hasard. Après MerscaniKorFr et LoiseL, j'ai donc vu que les cellules méso gléiques émettent des sphérules ; je crois pouvoir admettre avec eux que la marche des faits est identique chez l'animal intact et que les cellules mésogléiques rejettent leurs excreta dans la substance interstitielle. Les expériences de MErscaniKorr et les miennes ne prouvent cependant pas définitivement que l'émission des sphérules ne se fait pas uniquement sur les parois des canaux, car il serait possible que l’eau de mer baignant les cellules dissociées produisit sur elles de fausses sensations, leur donnât l'illusion des canaux, (1) Ces sphérules ont conservé dans l’eau de mer à la fois leur forme et la netteté de leurs contours. Elles ont d'abord fait lentement saillie sur le bord de la ceïlule, puis ont été brusquement éjectées. Leur émission n’a eu aucun rapport avec les points de la circonférence où se formaient les pseudopodes. La cellule en question était très active. Au sujet de l’amibocyte de S. domuncula, observé dans un tube de PFEFFER renfermant de la gélatine au charbon et dont j'ai déjà raconté l’histoire, j'ai observé qu'après l'émission des sphérules la cellule, engourdie jusque-là, recouvra brusquement une grande activité de déplacement, LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 56L s'ilest permis d'employer de telles expressions pour désigner de simples influences physico-chimiques. L'observation de LoisEL n’est pas passible de la même critique, car on ne peut pas attribuer aux spongoblastes des facultés migratrices. D'ailleurs les faits de clasmatose, de désagrégation que subissent les cellules sphéruleuses en plein tissu de l'éponge viennent encore à l'appui de cette manière de voir. Si l'on veut envisager l’ensemble des voies excrétrices par lesquelles sont rejetés les excreta solides, il faut donc commencer au milieu de la masse mésogléique et chercher leur véritable origine dans les espaces intercellulaires. Ceux-ci ont naturellement une forme essentiellement variable ainsi qu'une existence transiloire en un point déterminé ; de même leur débouché entre les cellules de revêlement est variable également et réglé par les contractions des pinacocytes. Au point de vue physiologique le courant lacunaire exhalant n’en joue pas moins un rôle très important dans la vie du Spongiaire et l’on peut dire que le système excréteur des éponges prend son origine dans l’ensemble, remanié sans cesse, des espaces intercellulaires et se continue par les canaux exhalants. En résumé, je regarde comme suffisamment démontrées les pro- positions suivantes : Les cellules mésogléiques (amibocytes, spongoblastes, etc.) rejettent leurs produits de désassimilation, sous forme de sphe- rules, dans la substance interstitielle qui les expulse graduel- lement. . Les sphérules usées des cellules sphéruleuses clasmatosées sont exæpulsées par la substance fondamentale ; un certain nombre de sphéruleuses vont s'éliminer d’elles-1r1êmes au niveau des canaux. Les choanocytes excrètent directement dans les chambres. Après l’ingestion de produits inertes les choanocyles rejettent dans les chambres une grande quantilé de ceux-ci. Les cellules sphéruleuses entraînent dans leur élimination quelques-unes des particules qui ont été déversées dans la substance fondamentale. La plus grande quantité de celles-ci, après avoir élé transportée dans tout l'organisme par les amibocytes, est directement expulsée par la substance interstitielle ; quelques-unes sont transportées jusqu'aux canaux par les amibocytes qui les y rejettent. 30 ‘562 JULES COTTE. NATURE DES PRODUITS DE DEÉSASSIMILATION. Un point méritait d'être éclairei: c'est la nature des produits azotés de désassimilation. KRUKENBERG | 80 b] avait recherché en vain la présence de l'acide urique chez Myvilla fasciculata, Tethya lyncurium, Euspongia adriatica. Dans l'extrait aqueux de Sub. domuncula [88] il n’avait trouvé ni corps de la série acétique, ni indol, ni indican. A côté de ces expériences il faut citer quelques opinions théoriques: GriFriras admet que la manière dont les éponges corrompent l’eau où elles vivent indique l’excrétion d'une substance azotée. BippER [92] suppose que les grains jaunes sécrétés par les cellules de Metschnikoff etles cellules flash shaped des Calcaria appartiennent au groupe de la spongine ; cette excrétion serait utilisée par les éponges cornées qui la feraient servir à l’édi- fication de leur squelette. Je ne puis laisser passer sans protestation cette phrase de BIDDER. La spongine ne doit pas être considérée comme un produit d'excrétion des éponges ; à mon avis on ne peut la regarder que comme un produit de sécrétion. L'idée même d'excrétion s'associe dans notre esprit à celle de substances nuisibles ou simplement inutiles, qui doivent être éliminées. Les produits de désassimilation sont à molécule relativement peu complexe, la destruction des substances dont elles dérivent ayant fourni la quantité de calorique qu'exige le fonctionnement vital de l'organisme. Avec la spongine, au contraire, nous avons un composé à formule très compliquée, de composition assez voisine des albuminoïdes proprement dits qui composent le protoplasma vivant. La molécule de la spongine est plus lourde que celle des peptones ; elle a été constituée par syn- thèse, avec absorption de chaleur, aux dépens des peptones ou des corps plus simples encore qui résultent de l’action des sucs digestifs sur les aliments. Il s’agit donc d'un produit d'élaboration, résultat d'une sécrétion parfaitement caractérisée. Il me paraît impossible de faire de la spongine un produit d’excrétion, de désassimilation. J'ai essayé à de nombreuses reprises, et sans succès, de caracté- riser l’urée chez S. domuncula, R. simulans. Avec les sucs de ces deux éponges, déféqués au sous-acétate de plomb, on obtient bien le dégagement de quelques bulles gazeuses par l’hypobromite de soude, mais en évaporant les liquides au bain-marie, puis LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 963 reprenant par l'acide azotique je n'ai jamais eu formation d'un seul cristal rappelant ceux de l’azotate durée. Aussi est-il probable que le léger dégagement d'azote que j'ai signalé provenait de quelque composé azoté différent de l’urée. En évaporant au bain-marie du suc de Chalinine, en reprenant le résidu par un peu d’acide azotique et faisant évaporer, on obtient nn résidu jaune brun qui rougit fortement par l’ammoniaque. Le rouge n'est pas celui de la murexide: la teinte est à La fois plus orangée et plus brune, elle fonce par addition de potasse. Il ne s’agit donc pas d'acide urique, peut-être cependant de quelque corps de la même famille. N'oublions pas toutefois que les corps de la série urique ne sont pas les seuls à rougir par l’action successive de l'acide azotique chaud et de l’ammoniaque. Je n’ai pu trouver d'acide urique ni chez S. domuncula, ni chez R. simulans ; la réaction de la murexide s’est constamment montrée négative, l'évaporation en présence d'acide chlorhydrique n'a pas fourni les cristaux caractéristiques ; il est vrai que les cristaux de chlorure de sodium étaient très gènants pour cette recherche. Le liquide d’où j'avais précipité par l'alcool les diastases de R. simulans a été concentré, puis a servi aux réactions suivantes : 1° Par le nitroprussiate de soude et la soude caustique la colo- ralion violette que donne l’indol n'apparaît pas; il n’y a pas de bleuissement en ajoutant ultérieurement un acide; 2 En ajoutant à ce liquide du nitroprussiate de soude, de la soude, de l'acide acétique et en faisant bouillir, le mélange ne passe pas au violet comme dans le cas où il aurait renfermé du scatol; 3 Par l'hypochlorite de soude et l'acide chlorhydrique, avec addition de chloroforme, aucune coloration bleue, donc pas d’in- dican. 4 L’acide picrique en solution saturée, ajouté au liquide à parties égales, détermine l'apparition d'un précipité brun, plutôt granuleux que cristallin, renfermant cependant quelques rares aiguilles; 5° Bouillie avec de la potasse caustique, la liqueur dégage des vapeurs qui bleuissent le papier de tournesol. 564 JULES COTTE. Du suc de Sub. domuncula, longuement bouilli avec de l'acide chlorhydrique, puis neutralisé au carbonate de soude et additionné de perchlorure de fer, n'a fourni aucun précipité de benzoate. La liqueur primitive ne renfermait donc pas d'acide hippurique. Je dois signaler qu'en faisant cette réaction le sel de fer s’est coloré en rouge ; l'absence des corps de la série acétique chez cette espèce serait donc moins absolue que ne l’assure KRUKENBERG. J'avais déjà indiqué [01 b] que S. domuncula doit la plus grande partie de son odeur à des produits volatils, arrêtés par l'acide sulfurique et libérés par la potasse, possédant par conséquent des propriétés alcalines. Je n'avais employé à leur sujet le mot d'amines qu'avec des réticences, car les expériences n'avaient pas été surveillées d'assez près. Je les ai reprises. 1.650 gr. de S. domuncula vivants, soigneusement incisés, ont été additionnés de 2 litres d'eau distillée pour faire éclater leurs cellules et de 10 gr. d’acide tartrique pour retenir les bases vola- tiles. Le tout a été évaporé au bain-marie, puis placé dans l’étuve à 100°. Ensuite la masse, triturée au mortier, a été mise à macérer pendant 3 jours dans de l'alcool à 90°, puis traitée par de l'alcool dans un appareil à déplacement. Trois litres d'alcool ont été ainsi employés. Le liquide est évaporé au bain-marie, le résidu repris à l’eau bouillante. Cette nouvelle solution, renfermant les tartrates des bases volatiles, est additionnée de potasse caustique et distillée. Les vapeurs sont reçues dans de l'acide chlorydrique. En évaporant au bain-marie la liqueur chlorhydrique, j'ai obtenu dans la capsule un dépôt de chlorhydrates parmi lesquels celui d'ammoniaque en abondance. En reprenant par quelques centi- mètres cubes d'alcool absolu, j'ai pu éliminer la plus grande partie de ce dernier sel. Cette solution alcoolique a été encore évaporée, le résidu dissous dans un peu d’eau distillée et additionné de chlorure de platine. Les chloroplatinates ont été obtenus par l'évaporation dans un exsiccateur à acide sulfurique, ce sont des cristaux assez volumineux, dérivés de l’octaédre. Ils n'étaient pas assez abondants pour que leur analyse pût être faite. J'ai essayé la réaction de FLORENCE, qui sert à caractériser les bases choliniques, sur le suc de C'halinine, de S. domuncula et de Cydoniuim gigas, et sur le suc de ces deux dernières espèces forte- ment concentré par évaporation. Le résultat a été entièrement négalif. LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES, 969 CONCLUSIONS. Voici, brièvement résumées, les conclusions qui se dégagent des recherches précédentes. La digestion est intracellulaire chez les Eponges. La manière dont les choanocytes s'emparent des aliments permet de les regar- der comme étant des sortes de phagocytes fixés. En montrant expérimentalement que ces cellules ingèrent les grains d’amidon et les bactéries qui passent à leur portée, je pense avoir aidé à prouver que les éponges se nourrissent en grande partie de parti- cules solides en suspension dans l’eau. Chez les Calcaria la digestion se fait à l’intérieur des choano- cytes ; chez les Incalcaria il est vraisemblable que ce sont surtout les cellules mésogléiques qui digèrent. Cette digestion est effectuée par des diastases analogues à celles qui sont déjà connues. J'ai montré que les diastases d'un certain nombre d'éponges coagulent le lait ; je n’ai pas obtenu la coagula- tion de la pectine. Les albuminoïdes sont hydrolysés, chez toutes les espèces que j'ai examinées, par un ferment, la subéripsine, appartenant au groupe de la trypsine ; il y a production de tyrosine, sans trypto- phane. Quelques espèces paraissent avoir une pepsine surajoutée au ferment basophile. La bactériolyse peut être obtenue in vitro avec les diastases de À. simulans. Les hydrates de carbone (amidon, saccharose, raffinose), les corps gras sont hydrolysés par les sécrétions d’un certain nombre de Spongiaires. Le salol, l'amygdaline, la gomme arabique, la cellulose, la gélose n’ont pas été attaqués par les diastases de l’unique espèce que j'ai étudiée à ce point de vue. Les faibles réactions d'oxydation ne me permettent pas de conclure à la sécrétion de diastases oxydantes appartenant au groupe de la laccase; par contre un certain nombre d'espèces possèdent de la tyrosinase. Je rappelle que les gemmules de Sube- rites domuncula sont plus riches en manganèse et possèdent un pouvoir oxydant plus marqué que les tissus adultes de la même espèce ; elles ne semblent pas renfermer de la tyrosinase. 966 JULES COTTE. J'ai pu constater la sécrélion d'une mucine qui a de grandes analogies avec les mucines des autres animaux. L'étude des pigments nous à conduits à envisager de près la nature des lipochromes ; mes recherches confirment les observations de KRUKENBERG au sujet de la parenté qui existe entre les lipochromes et la choles- térine. Les lipochromes sont peut-être accompagnés de très faibles quantités de lécithines. L'étude des cellules sphéruleuses devait terminer l'examen des sécrélions des éponges ; ces corps nous apparaissent en effet comme jouant un véritable rôle glandulaire. Leur évolution a été suivie et nous avons assisté à leur naissance aux dépens des cellules migra- trices, puis à leur destruction, soit en pleins tissus par un processus analogue à celui de la clasmatose, soit au niveau des canaux aquifères. Ayant rayé l'amidon de la liste des substances de réserve des éponges, je n'ai pas pu déceler chez elles de glycogène. À. simulans semble renfermer de l'acide butyrique et de l’acide oléique. Au sujet de l’excrétion j'ai pu établir que l'azote résiduel de ces animaux s’élimine pour une notable partie sous forme d’ammonia- ques composées ; je n'ai pas observé de bases choliniques libres. Quant aux résidus alimentaires, ils sont excrélés de différentes manières: les choanocytes rejettent directement dans l’eau de circulation ceux qu'elles renferment. La plus grande partie de ceux qui sont dans la mésoglée est expulsée par la substance fondamen- tale ; un certain nombre sont portés aux canaux par les amibocyles, quelques-uns par les cellules sphéruleuses. En refusant d'accorder aux Eponges le pouvoir d'élaborer de l’amidon, je crois resserrer davantage les liens qui réunissent leurs processus biologiques à ceux du reste du règne animal. Leur digestion intracellulaire s'accorde avec toutes les données de l'anatomie pour faire ranger les Spongiaires vers le bas de l'échelle animale et pour marquer leur place à côté des Cœlentérés propre- ment dits. Leur simplicité d'organisation permet cependant une certaine complication dans le travail physiologique, et l'étude de leur nutrition nous a fait assister à des phénomènes de transport qui ne sont pas sans analogie avec ce qui se passe chez les animaux LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES. 567 supérieurs. Je me suis efforcé de mettre en lumière cette notion qu'avaient déjà fortement contribué à établir les travaux de TopsenT et de LoisEL. Nous avons vu quel rôle joue la substance fondamentale et l'importance des phénomènes dont elle est le siège. D'une extrême variabilité de forme, changeant constamment de consistance et d'aspect, sous le jeu des modifications physico-chimiques qui se passent à son intérieur, on peut admettre, je l'ai déjà indiqué, qu'un double courant la parcourt. D'abord un courant lacunaire inhalant, apportant avec lui l'eau de mer et les principes solubles qui viennent renouveler le milieu intérieur ; en deuxième lieu un courant lacunaire exhalant qui entraîne les déchets, les sphérules libres, etc. Ce double courant est inconstant en un lieu donné, et sa rapidité et sa force sont essentiellement variables. À certains moments 1l est comparable aux courants osmotiques et est réglé par de simples phénomènes de tension superficielle ; à d’autres il devient d’une réelle énergie lorsque sa force est augmentée par les contractions des cellules voisines. Ces courants représentent pour nous, sous la forme la plus élémentaire possible, les courants analogues qui parcourent chez les animaux supérieurs les systèmes lymphatique et chylifère et le système excréteur. Ils représentent en quelque sorte l’ébauche de ces systèmes et nous montrent comment, au point de vue phylogé- nétique, on peut passer des simples agrégats de cellules aux systèmes les mieux différenciés. Rendons permanents les courants qui traversent la substance fondamentale des Spongiaires, recouvrons de cellules les cavités qu'ils traversent, et nous aurons réalisé la disposition qui se montre chez les Cœlomates les plus évolués. 268 JULES COTTE. INDEX BIBLIOGRAPHIQUE. Biologie des Spongiaires. 1883. Bazrour, CG. — Traité d’embryologie et d'organogénie comparée, T. I. 1888. Binper, G. — Preliminary note on the Physiology of Sponges. Proc. Phil. Soc. Cambridge, T. VI. 1892a.Binper, G. — Note on Excretion in Sponges. Proc. Roy. Soc. 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INPRODUCMONS Re ee en ee a ces One 420 CHAPITRE I. — CONSIDÉRATIONS SUR LA CIRCULATION CHEZ LES SPONGIAIRES. 424 CAB IDRIENTR EINGESTION DES ALIMENTS. em ee crc etc AO CHAPITRE III. — DIGESTION DES ALIMENTS, DIASTASES. ................:. 152 Éocalisahon de Ta fonction disestive. 02 -..--- moccerse-sc ect 452 Expériences avec les matières colorantes solubles ................... ADS DS ts es RP MAS pee mA te mate us aire à 463 DEAR IPRIEMNE = ISÉCREMIONS AS Lu ve etre ce seconde ctbuses eee 002 PRE RES E eee Peters co nemremeuicecceu est 00e 002 GÉMIES SDRETHICUSES. LR ce remet dre teens eee euite ec | 000 CÉPAPIRRR EE NE MATIERES DE RÉSERMES 20e mecs eme mean OVAU) Anidons Hyirates (de CarDDne eh Mecs cet recrue 549 ÉTRETRIE RS RS DC ES ER NE EC OC 552 CÉLAPITRE VE XGRETIDNEE urnes norcecctem este 09) FONCBUSIONSE EU eme mnes Cane nr au on a nee ee ei on 569 END BIBLIOGRAPHIQUE Re duree an ace uteuees 568 VAN TT EUR bre MU Lies NT LME ART du pate 2 va en . Va . 7 è 1 Pa 5 a “ AL, x, * là LCD à) VILA = v pl LEA AR PNR SRE ER AN LL sh De où ï Er DANS |: AMIS à TL Ar RAR” 7.5 Fete M'A AIX 4 à MN AS Cr k FTP Res UT AT RER : ñ JE Au: t (TUE L'on EN , CUS HN SAT £ Qu dr ti MP Ho , , L'AMTAIL RU Lo s Fa NTONT: 4 | L "pl ni We À D . Ÿ ot ! « : Lo | ; LAN PET an ln L'ART ENT TRE ET A ANEMRES ET ur +0 { Û hall , : wi % n ï .“ ; | | s le à, , #° : . \ L " ‘ | ue f ‘| % ds 1% ‘ , 4 . "2 ñ . … D ee f Cu \ ARTS N! L 7} » 7 L _ ) at 7 . é C2 n AE de #, Fr@ + Ca A ” l Lu 1] 0 " CE PLANCHE 1]. Planche I. Fig. 1. — Scyllium catulus, femelle, grandeur naturelle. Les sinus et les veines cardinales ont été ouverts, et le rein gauche, détaché de la paroi abdominale posté- rieure, a été relevé el rejelé sur le rein droit pour montrer les corps suprarénaux les plus postérieurs. br., branchies ; c. aæ., corps axillaire ; c.s., corps suprarénaux ; 0d., oviducle ; æs., œsophage; 7.d. el r.9., rein droit et rein gauche. Dudlelin sctentifique. Tome XEWII ÿ PLANCHE JL. Price D -œs. = ZT. RER EES A = E Sour«æc. del. Lith.I.Combes, Moriveliier. Planche II. Coupes transversales de la paroï abdominale postérieure de Scyllium canicula, passant par les corps supraré- Daux. Fig. 2. — Coupe passant au niveau de la partie moyenne du sinus de Monro (groupe antérieur des corps suprarénaux). Fig. 3. — Coupe passant par la portion la plus reculée des sinus de Monro (groupe moyen des corps suprarénaux). Fig. 4. — Coupe passant par la partie postérieure des reins (groupe postérieur des corps suprarénaux). Grossissement pour les trois fig. : 26 D. Lettres communes à ces trois figures : 4.cæ. artère cœliaco mésentérique ; 40., aorte ; .i.r., corps interré- nal ; c.s., corps supranénal ; g., ganglion nerveux du grand sympathique ; 5n., mésentère ; ov., oviducte ; r., rein; sin., sinus de Monro ; ®., corps verlébral ; ü.J., veine de Jacobson ; ©.7.4., veine juxta-aortique. Pulletin sccentifique. Tome XXWIT. PLANCHE II. Æ Grynjelté, de. Litk. = ÿ PRESS) FT Combes. Mortpeuer. Planche III. Fig. 5. — Capsule veineuse d’un corps suprarénal de Scyllium catulus. Injection vasculaire au bleu de Prusse. Grossissement : 25 ?. ao., aorle; &.i., artère intercoslale; c.s., corps suprarénal; 7., rein; &.éi., veines intercostales ; v.]., veine de Jacobson ; &./.4., veine juxta-aortique ; v.{. veines transversales. Fig. 6. — Cellules chromaffines de Squatina angelus. Liq. de Zenker ; hématoxyline au fer, éosine. Grossissement : 1.500 ?. c.chr., cellules chromaffines ; g.chr., grains chro- maffines ; 2.e., noyaux endothéliaux. Fig. 7. — Coupe d'un corps suprarénal de Trygon pastinaca. Liq. de Müller ; coloration légère à l’hématéine. Grossisse- ment: 380 D. a., lamelle conjonctive interne ; €., prolongements éloilés de cellules chromaffines; c.chr., cellules chromaffines ; €. conj., capsule conjonctive ; d., cellule chromaffine vacuolisée ; v.v., vaisseaux. OT OT Bulletin scientifique. Tome UM PLANCHE I. Fig Et D __c.Cconÿ. Lit L'Comtes Montvellrer. 2 1 — JGouret & ÆEGrunjèltt, del. Planche IV. Fig. 8. — Coupe d'un corps suprarénal de Scyllium canicula. Liq. de Zenker; hématéine, éosine. Grossissement : 380 2. a., vaisseau revenu sur lui-même; ., cellule vacuolisée ; c., nodule de cellules à lim'tes nettes ; d., vaisseau. Fig. 9.— Irradiations de cellules chromaffines le long des vaisseaux chez Myliobatis aquila. Tiq. de Müller. Grossissement : 400 ?. c.chr., cellules chromaffines ; v., vaisseau. Fig. 10. — Coupe d'un corps interrénal de Scyllium canicula. Liq. de Flemming ; safranine, vert lumière. Grossis- sement : 180 P. C.COn)., capsule conjonctive ; c.e., cordons épithé- liaux ; ©., vaisseaux. Fig. 11. — Terminaisons nerveuses dans un corps suprarénal de Scyllium canicula. Méthode d'Ehrlich-Bethe. Colo- ralion en masse au carmin aluné. Coupe à la paraf- fine. Grossissement : 750 P. c.chr., cellule chromaffine ; f.t., fibre terminale ; n., fibre nerveuse. Pulletin scientifique. Tome XX. | " PLANCHE [V. Fxge 9. 2. Goujet & F Gronfelté, del. Iith.I.Combes, Montvedlier. Planche V. Fig. 12. — Cellules du corps suprarénal de Scyllium canicula. Liq. de Zenker; hématéine, éosine; Grossissement : 380 D. c.chr., cellules chromaffines ; #.e., noyaux endo- théliaux. Fig. 13. — Cellules du corps interrénal de Zygæna malleus, ren- fermant des boules safranophiles. Liq. de Flemming ; safranine, vert lumière. Grossissement : 1.500 ?. b.s., boules safranophiles ; vac., vacuoles occupées par de la graisse dissoute au cours des manipulations. Fig. 14. — Vascularisation d’un corps suprarénal de Scyllium cani- cula. Injection au nitrate d'argent à 1 p. 300. Grossis- sement: 46 ?. ; a.i., artère intercostale ; c.s., capillaires du supra- rénal ; r.s., rameaux artériels propres da suprarénal ; b.r., branche artérielle pour le rein. Fig. 15. — Vue d'ensemble de l’innervation d'un corps suprarénal chez Scyllaum canicula. Méthode d’Ebrlich-Bethe. Corps monté en entier après éclaircissement par l'essence de girofles. Grossissement : 60 P. nñ., nerf périphérique ; #.g., nerf placé entre le supra- rénal et un ganglion situé en dessous, non représenté ; C.S., COrps suprarénal. | PLANCHE V. 70e | 12 Pulletin scientifique. lome AXWMII. y é N-— CAE LR CS. EE à 2ellrer ORTDEULET 1 T Combes. 7 AZ 5 Le Planche VI. Fig. 16. — Vascularisation du corps axillaire et du ganglion ner- veux voisin chez Scyllium canicula. Injection au nitrate d'argent à 1 p. 300. Grossissement : 402. «., artère ; C4p.c.s., capillaires du corps suprarénal ; Cap.g., Capillaires du ganglion; c.s., Corps supra- rénal ; g., ganglion. Fig. 17. — Vascularisation du corps interrénal de Scyllium catulus. Injection au bleu de Prusse soluble.Grossissement:65 P, a.i.r., artère de l’interrénal ; 7.cap., réseau capil- laire ; &., veines. Fig. 18. — Cellules du corps interrénal de Centrina vulpecula. Liq. de Flemming ; safranine, violet, orange. Grossis- sement : 1500 P. c., cellule de l’interrénal ; c.conÿ., capsule conjone- tive ;22.p., membrane propre des cordons épithéliaux ; n.e., noyaux avec encoche; vac., vacuoles du cyto- plasme dues à la disparition de la graisse. Fig. 19. — Cellules chromaffines de Squatina angelus. Liq. de Zenker ; hématoxyline au fer, éosine. Grossissement : 1500 2. c. chr. p., cellule chromaffine pleine de grains ; c. chr. v., cellule chromaffine vacuolisée ; p., pointes de cellules chromaffines vacuolisées dont le noyau n'est pas compris dans la coupe. Pullelin sccentifique. Tome XXL , PLANCHE VI. FF 7 AS: CAR. C.S. CT ne. CT Cap. : 7 Gouret 6 E,Gryn Lei 1522 DA Rec Monimollrpz Lun.£.COTNCES, MOrTLEULCZ". Fig. Fig. Planche VII. 20. — Cellules palissadiques d’un corps suprarénal de Scyllium canicula. Liq. de Tellyesniczky ; hématéine, safra- nine. Grossissement : 1500 ?. c. Chr. p., cellule chromaffine pleine de grains; c. Chr. v., cellule chromaffine vacuolisée; n. e., noyaux endothéliaux. . RI. — Cellules du corps interrénal de Torpedo marmorata. Liq. de Flemming ; safranine, acide picrique. Prépa- ration montée dans la glycérine.Grossissement: 1500 ?, gr.,boules de graisse incluses dans le cytoplasme. 22. — Coupe d'un cordon de l’interrénal de Myliobatis aquila. Liq. de Zenker; safranine, vert lumière. Grossissement : 950 D. Dans la moitié droite de la fig. on voit en / une lumière créée par la rétraction des cellules; #2. p., membrane propre ; #. e., noyaux endothéliaux. . 23, 24, 25,26. — Noyaux de cellules chromaffines de Torpedo marmorata. Liq. J. de Laguesse; safranine, vert lumière. Grossissement : 1500 ?. n., nucléoles. . 27, 28, 29. — Noyaux des cellules de l’interrénal chez Scyllium canicula.1iq. de Flemming ; safranine, violet, orange. Grossissement : 1500 ?. PLANCHE VII. Bulletin scientifique. Tome XXII. Hi 26, —- 7€ eu (l 2 7. Cor: ui Lx ujel & . Go L :L +4} LUA.L Du 2. 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